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Version finale

30th Legislature, 2nd Session
(March 14, 1974 au December 28, 1974)

Tuesday, October 8, 1974 - Vol. 15 N° 154

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du rapport Gauvin


Journal des débats

 

Commission permanente des institutions financières,

compagnies et coopératives

Etude du rapport Gauvin

Séance du mardi 8 octobre 1974

(Dix heures dix-sept minutes)

M. KENNEDY (président de la commission permanente des institutions financières, compagnies et coopératives): A l'ordre, messieurs! La commission des institutions financières, compagnies et coopératives est maintenant prête à étudier le rapport du comité d'étude sur l'assu-rance-automobile, plus communément connu sous le nom de rapport Gauvin. Avant que nous procédions, je voudrais que l'on nomme un rapporteur pour faire rapport à la Chambre des délibérations de la commission.

M. TETLEY: Je suggère le distingué député de Charlesbourg.

LE PRESIDENT (M. Kennedy): Le député de Charlesbourg, d'accord. M. le ministre, la parole est maintenant à vous.

Remarques préliminaires

M. TETLEY: M. le Président, mes chers amis, je tiens à remercier M. Gauvin et les commissaires d'avoir accepté l'invitation que je leur ai faite, — après avoir reçu leur rapport d'étude — de venir défendre eux-mêmes, leurs principales recommandations directement ou devant les gens oeuvrant dans le secteur de l'assurance-automobile.

Je profite de l'occasion pour féliciter et remercier les commissaires de la commission Gauvin pour le travail exceptionnel qu'ils ont fait. Leur rapport d'étude, ainsi que leurs recommandations témoignent de la grande qualité intellectuelle de leurs travaux, mais aussi de l'ouverture d'esprit qui semble avoir dominé l'ensemble du travail et, en particulier, des recommandations.

Pour ma part, je ne prends pas de position au sujet de ces recommandations avant que le public se soit prononcé. Je ne veux pas rendre la sentence et, après, faire le procès. J'ai toujours pensé, M. le Président, que la commission parlementaire pouvait se révéler le point de rencontre le plus adéquat entre le gouvernement et les groupes d'intérêts pour discuter des affaires publiques et, en particulier, des projets de loi. De plus, cette façon de procéder permettra et favorisera même l'expression de l'opinion publique qui voudra, sans aucun doute, faire connaître son point de vue au gouvernement.

Avant que le gouvernement s'engage dans une réforme dont l'esprit et la volonté de changement sont pour le moins radicaux, il devra s'assurer que le succès de celle-ci, tant du point de vue de l'efficacité que de la réduction de coûts, ne soit pas remis en question par la résistance de groupes mécontents. Cependant, dans le cas de la protection du consommateur et en particulier dans le domaine de l'assurance-automobile, il devenait urgent, croyons-nous, que le gouvernement intervienne. La première étape est maintenant terminée.

C'est ainsi que nous avons confié à un groupe d'experts le soin d'étudier en profondeur tout le domaine de l'assurance-automobile, la possibilité de réduire les causes d'accidents d'automobile et le coût, pour la société, des pertes qui en résultent et, enfin, de formuler des recommandations pour réduire le coût des pertes résultant d'accidents d'automobile et accorder une compensation équitable aux victimes.

Ayant constamment à l'esprit la protection du public et la nécessité de contrôler les coûts dans ce secteur, le gouvernement a décidé d'agir et de prendre les mesures qui s'imposeront. Nous voulons que les coûts de l'assurance-automobile au Québec qui semblent trop élevés soient réduits par tous les moyens possibles, de manière que le public québécois puisse bénéficier de taux d'assurance-automobile plus justes et équitables.

Déjà, depuis la création de la commission Gauvin en 1971, nous avons, de concert avec d'autres ministères, pris un certain nombre de décisions propres à agir sur certaines causes d'accidents, telle la vitesse. Ainsi le système de démérite que j'ai largement appuyé a contribué à réduire le nombre d'accidents. Enfin, la question fondamentale est de savoir si le gouvernement, l'industrie, les professions et le public, tous ensemble, ne peuvent réduire les coûts de l'assurance-automobile au Québec.

Again, Mr Gauvin, Mr Rankin and the other commissioners, Belleau, M. Bouchard que je ne vois pas ici, thank you for coming and thank you for, I think, this excellent report, which shows such a broad general knowledge of the subject in a very particular knowledge as well and a very broad understanding of the problems.

Merci, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Lafontaine.

M. LEGER: M. le Président, je voudrais remercier l'équipe ainsi que son président, M. Gauvin, qui nous a présenté un volumineux rapport qui représente des tonnes de chiffres, de vérifications et d'études et qui a semblé se préoccuper d'abord de trois aspects bien particuliers qui sont ceux de la sécurité routière, de l'indemnisation des victimes d'accidents d'automobile et, finalement, de l'organisation, de l'administration d'un régime d'assurance-automobile préconisé.

Le Parti québécois préconise, depuis sa fondation, l'établissement d'un régime public complet et obligatoire d'assurance-automobile.

Cette prise de position votée en congrès, par nos membres, fait partie de notre programme politique et, chaque fois que nous avons eu l'occasion, nous avons fait pression pour en hâter l'avènement.

Nous avons donc été très heureux de constater que la commission Gauvin, après avoir étudié sérieusement tout le problème, en avoir comparé les différentes solutions, en est venue à la conclusion que le régime actuel, basé sur la réparation de faute, c'est-à-dire l'assurance-responsabilité, était désuet et qu'il fallait le remplacer par un régime nouveau, axé sur la compensation du dommage, qu'on appelle assurance-accidents.

Nous avons été heureux également que la commission Gauvin ait constaté que le nouveau régime serait plus économique s'il était administré par un monopole de l'Etat plutôt que par l'entreprise privée.

En somme, nous voyons dans le rapport Gauvin la confirmation de positions que nous avons défendues depuis plusieurs années.

Bien sûr, on m'objectera que les conclusions du rapport Gauvin ne recommandent pas l'établissement d'un régime public. A cet égard, je crois qu'il convient de citer les deux derniers paragraphes du rapport Gauvin, qui montrent bien dans quel esprit il faut envisager les réformes qui s'imposent et je cite: "Le comité s'empresse d'ajouter que si les réformes décrites dans les sections I et II précédentes ne sont pas intégralement mises en application et si les mesures de garanties ci-dessus énumérées ne sont pas toutes imposées, l'écart de coût entre l'entreprise privée et le monopole d'Etat sera plus grand, donc inacceptable, et que, dans ces conditions, il n'y a pas d'autre choix que l'étatisation complète de l'assurance-automobile au Québec. Car il faut bien comprendre que la recommandation du comité se présente dans ces termes: La réforme intégrale de l'entreprise privée selon le schéma établi ci-dessus ou la création d'un monopole d'Etat. Si le plan de réforme n'est pas intégralement adopté, le monopole constitue la seule autre solution. "La création d'un monopole étatique, qui apparaît ici comme la solution ultime, pourrait devenir prioritaire en raison de considérations socio-politiques poursuivies par le gouvernement. Ce genre de choix n'est pas de la compétence du comité et appartient au gouvernement".

M. le Président, il est bien vrai que c'est une décision qui relève du gouvernement. L'étude est faite. Les recommandations sont présentées. Il s'agit maintenant, pour les membres de la commission, d'entendre ce que le comité Gauvin va nous expliciter, nous donner comme détails, comme réponses à des préoccupations de ceux qui auront lu le rapport Gauvin.

C'est quand même une décision politique qu'un gouvernement doit prendre. A ce moment-là, le gouvernement doit tenir compte du fait qu'il y a quelque temps j'avais proposé au ministère des Institutions financières, lors d'un débat sur une motion qui avait été déposée en Chambre, "que cette Assemblée est d'avis que les taux actuels d'assurance-automobile doivent être gelés jusqu'à ce que la commission permanente des Institutions financières ait fait rapport à ce sujet après avoir entendu les compagnies et personnes intéressées."

Autrement dit, pendant la période où on discute du rapport Gauvin, il est nécessaire qu'on ne laisse pas aller dans toutes les directions les compagnies qui pourraient exiger des augmentations de coût qui ne seraient pas nécessairement justifiées. La preuve, c'est qu'il y a eu une augmentation d'environ 10 p.c, je pense, au mois d'août, et que là, on parle d'une augmentation possible de 15 p.c. au mois de janvier. C'est donc dire que dans les quelques mois qui ont suivi la motion que j'ai présentée en Chambre il est possible qu'il y ait une augmentation du quart des primes d'assurance. Cela démontre l'importance d'un choix politique.

Je pense que le rapport Gauvin dénote que les compagnies d'assurance doivent absolument accepter une réforme globale, immédiate, totale de leur façon de fonctionner pour continuer d'être acceptées dans le régime actuel. C'est un dernier appel qui est fait aux compagnies d'assurance de s'ajuster aux besoins sociaux du Québec. Dans cette circonstance, il est important de noter que le choix politique relève du gouvernement.

Quant à nous, du Parti québécois, la création d'un régime d'Etat n'est pas qu'une solution ultime, c'est une solution qui s'impose d'urgence. Nous incitons le gouvernement à s'y engager immédiatement, sans passer par une demi-réforme qui continuerait d'être insatisfaisante et qu'il faudrait recommencer au bout de quelques années.

Merci, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Kennedy): Le député de Beauce-Sud.

M. ROY: M. le Président, à mon tour, je veux remercier les membres de la commission Gauvin pour le rapport qu'ils nous ont fourni. Je dois dire, à ce moment-ci, que nous sommes heureux que la commission parlementaire siège enfin, de façon que nous puissions interroger les commissaires et de façon, également, que nous puissions interroger les autres organismes qui ont quelque chose à dire dans ce domaine.

M. le Président, mes observations vont être très brèves parce que nous sommes venus ici pour entendre les commissaires; nous sommes venus ici pour les interroger et je me réserve le privilège de faire d'autres observations ou d'au-

très commentaires soit lors de prochaines séances ou encore à la fin des travaux de la commission.

M. le Président, j'ai entendu tout à l'heure le ministre parler de monopole étatique, il a parlé de réorganisation dans le service de l'assurance-automobile. Il ne fait aucun doute que la population attend quelque chose, attend des modifications, attend des réformes dans ce domaine, de façon à pouvoir moderniser le système. Mais je dis que ce qui est important de regarder à ce moment-ci, et le point sur lequel nous allons nous baser, en ce qui nous concerne, ce n'est pas la façon de regarder un monopole étatique, c'est à partir du principe que l'assurance-automobile et le service d'assurance-automobile, le service qui sera mis sur pied, le service qui sera réformé, sera le meilleur service possible et au meilleur coût possible pour les usagers ou les contribuables, pour la population du Québec.

Je pense que ce sont les critères qui doivent nous guider, à savoir, le meilleur service au meilleur coût possible. Je pense que nous diriger dès maintenant vers un monopole étatique, c'est faire abstraction à ce principe qui doit nous guider dans nos travaux parlementaires; nous ne devrions pas nous laisser aveugler par des buts idéologiques, par des objectifs purement politiques. Notre intérêt commande et notre mandat, comme parlementaires, comme députés, commande que nous soyons au service d'une population et que nous devions travailler dans son meilleur intérêt.

M. le Président, ceci résume les courtes remarques que j'avais à faire à ce moment-ci. Je vais, en ce qui me concerne, écouter les remarques et les commentaires que les commissaires pourront nous faire. Nous aurons également des questions à poser. Comme je l'ai dit au début, si nous le jugeons à propos, nous ferons d'autres remarques qui s'imposeront au cours de nos travaux.

M. TETLEY: Peut-être qu'on pourrait écouter M. Gauvin.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Est-ce qu'on pourrait écouter M. Gauvin? Il pourrait faire ses commentaires personnels avant d'engager le débat.

M. GAUVIN: Tout d'abord, j'aimerais souligner que le comité d'étude a été convoqué par le secrétaire associé des commissions. Le comité comme tel n'existe plus, puisque son mandat a pris fin le 31 mars dernier tel que prévu aux différents arrêtés en conseil touchant sa formation. Immédiatement après cette date, d'ailleurs, le personnel du comité a été libéré et toute la documentation accumulée au cours de presque trois ans de travaux, de même que l'ensemble des études des recherchistes ou en commandite ont été remis au secrétaire du

Conseil exécutif tel que le prévoit un arrêté en conseil touchant les documents d'une commission d'enquête.

Le comité comme tel, d'après moi, ne peut être entendu et n'a d'ailleurs pas demandé à l'être.

Les membres individuellement et compte tenu de certaines occupations découlant de leurs activités professionnelles sont prêts à dialoguer avec les membres de cette commission dans le but d'expliquer le sens du rapport ou de fournir des explications additionnelles sur les recommandations découlant de la recherche entreprise.

Quant aux membres du comité, sur base individuelle, je suis convaincu qu'ils entendent respecter leur mandat qui prévoyait avant tout d'établir un régime juste et équitable, tenant compte en premier lieu de la protection du consommateur.

Depuis la parution du rapport, de nombreuses critiques ont été portées sur le rapport et la chose est tout à fait normale. Il ne faudrait pas oublier cependant que plusieurs de ces critiques ont, d'abord, pour but de protéger des intérêts particuliers et, souvent, sous le couvert d'une protection du bien général, ce que l'on cherche à défendre, c'est en réalité le bien personnel de chaque groupe.

J'espère que cette commission pourra entendre non seulement les parties directement intéressées dans l'administration du régime, mais qu'elle aura également l'occasion d'entendre les victimes elles-mêmes donner, en fait, l'explication du traitement qu'elles reçoivent.

Ce matin, deux membres ont pu se joindre à moi pour répondre à vos questions. J'aimerais vous présenter M. Ewen Rankin, économiste, de même que Me Claude Belleau, professeur de droit à Laval. Quant à Me Jean-Marie Bouchard, un engagement professionnel l'empêche d'être ici, mais il sera à votre disposition en temps et lieu, si vous le jugez opportun.

Ceci termine mon bref exposé. Comme je l'ai déjà mentionné, le rapport du comité est unanime; les commentaires que nous avions à faire y sont contenus. Nous demeurons disponibles pour répondre aux questions, mais nous n'avons pas l'intention de nous engager dans un débat politique de quelque nature que ce soit. Merci.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Merci, M. Gauvin. M. le ministre.

M. TETLEY: M. le Président, je remercie M. Gauvin, ainsi que M. Belleau et M. Rankin. La procédure à suivre, que je voudrais suggérer aux députés présents, ce serait de commencer avec les recommandations, première partie, sécurité routière, et de les passer une par une, s'il y a des questions sur chaque recommandation. Les recommandations se trouvent à la page 97.

Après avoir terminé ces recommandations, je suggère que nous procédions aux recommandations concernant l'indemnisation des victimes, à la page 343, et finalement, vers la fin de la journée, aux recommandations, à la page 379, sur l'administration. Ce sont les trois grandes sections du rapport.

Est-ce que cela vous convient? Je pose cette question au député de Lafontaine et au député de Beauce-Sud.

M. LEGER: Moi, je n'ai pas d'objection à ce qu'on suive cet ordre mais il peut arriver qu'une réponse amène une constatation ou une implication dans les parties II et III; on pourrait quand même chevaucher, tout en essayant de rester dans les trois parties.

Prolongation du mandat

M. ROY: Auparavant, j'aurais eu peut-être des questions à poser soit au ministre ou à M. Gauvin. Je n'ai pas d'objection à la procédure suggérée par le ministre, quitte à nous y adapter ou à faire les modifications qui s'imposeront, dans l'intérêt même de la commission...

M. TETLEY: II faut une flexibilité complète.

M. ROY: ... en cours de route, qu'il y ait une certaine flexibilité.

La question que j'aurais eue à poser à M. Gauvin est la suivante : On sait que le mandat de la commission a été prolongé à trois reprises. Il a été prolongé le 3 mai 1972, à nouveau le 7 mai 1973 et il a été prolongé le 9 mai 1974.

J'aimerais savoir de M. Gauvin si ce mandat a été prolongé à la demande des commissaires — à la demande de la commission — ou si le mandat a été prolongé à la demande du gouvernement.

M. GAUVIN: Pour répondre à votre question, le mandat a été prolongé à la demande des commissaires exclusivement.

J'aimerais profiter de l'occasion pour rappeler que le comité, durant toute son existence, s'est abstenu de déclarations publiques sur ses travaux, sauf à l'occasion des auditions publiques qui ont été tenues à Québec et à Montréal. Il n'a pas fait de commentaires, non plus, publiquement, sur la durée de ses travaux. Mais, dès le départ, nous avions souligné aux autorités que l'envergure du mandat qui nous était confié nécessitait des travaux dont la durée devrait varier de 24 à 36 mois. Les travaux ont été effectués en 36 mois.

Lorsqu'on parle de prolongation, je n'aime pas tellement le terme parce qu'en réalité c'est à l'intérieur du schème d'activités du comité qu'il s'était donné dès le point de départ. Les mandats des commissions d'enquête, ou du comité, ont toujours été accordés pour initialement une période de douze mois et, après, pour une période de quatre mois, mais c'était déjà prévu.

M. ROY: Le mandat qui vous a été confié par le gouvernement, est-ce qu'il vous a paru suffisant ou s'il aurait été préférable — disons que je peux admettre au départ que c'est une question peut-être un peu embêtante mais c'est une question qui est bien importante pour nous — selon vous, de façon à faire un travail encore plus complet, que le mandat soit élargi?

M. GAUVIN: Le mandat était suffisamment large; même il était tellement large que les membres ont dû, à certains égards, le restreindre. Si vous prenez le mandat, on parle, à un moment donné, de la perte pour la société. Nous aurions pu, en fait, consacrer des mois et des mois de recherche pour déterminer véritablement quelle est la perte pour la société québécoise, et quant au résultat, la certitude ou la crédibilité qu'on aurait pu leur accorder aurait été relativement minime.

Le problème de l'indemnisation des victimes ou plutôt de la perte que la société québécoise subit chaque année par suite de près de 2,000 décès et des millions de dommage matériel ne peut se comptabiliser strictement en termes de primes d'assurance-automobile. Il faudrait y ajouter toute la perte de productivité qui en résulte, tous les soins hospitaliers que l'Etat doit encourir dans l'immédiat et dans le futur pour les victimes. Il faudrait également y ajouter, en fait, toutes les prestations d'aide sociale que l'Etat doit verser éventuellement à ces victimes. La comptabilisation de ces sommes n'était, à toutes fins pratiques, pas possible, selon les données facilement disponibles à un coût acceptable.

Je ne pense pas qu'il aurait été avantageux d'élargir le mandat du comité et je vais terminer ma réponse en disant qu'après trois ans de réflexion sur le problème, je ne vois pas ce qu'on aurait pu ajouter aux termes du mandat qui comportait, en fait, l'aspect de la sécurité routière, donc le mal lui-même, et si on peut appeler guérison l'indemnisation, — parce que ce n'est pas une guérison, — en fait, et finalement l'administration du régime. Je pense que le mandat était suffisamment large pour effectuer les travaux dans l'ensemble du secteur.

M ROY: Je vous remercie.

M. TETLEY: Permettez-moi d'ajouter un fait. Je crois que c'est vrai, M. Gauvin, que je ne suis pas intervenu, d'aucune manière, dans vos travaux depuis votre nomination. Je n'ai pas fait de suggestion, vous m'avez présenté le rapport qui a été imprimé sans changer une seule virgule. Je crois que c'est vrai.

M. GAUVIN: Est-ce que je suis obligé de répondre?

M. TETLEY: Non, non, ce sont des constatations.

M. ROY: On aimerait connaître votre réponse quand même, M. Gauvin.

M. TETLEY: Vous êtes certainement invité à répondre.

M. GAUVIN: Alors...

M. ROY: Pour changer les virgules, ce n'est pas... ce sont les phrases qui sont plus sérieuses.

M. GAUVIN: C'est avec humour que j'ai dit: Je suis obligé de répondre. J'aimerais signaler que le comité a obtenu de la part du gouvernement et du ministre Tetley, de même que des fonctionnaires avec lesquels il est entré en contact, toute la collaboration requise, tant sur le choix des recherchistes, sur le choix des commandites de l'extérieur; aucune interférence de quelque nature n'est venue du ministère des Institutions financières ou d'autres ministères avec lesquels nous sommes entrés en contact. Je pense que le comité était absolument indépendant; il s'est permis des critiques et a fait la recherche avec ses propres moyens, sans se fier à qui que ce soit, autre qu'à des gens responsables directement au comité. Quant au texte lui-même, il été déposé à la fin de mars et personne, en dehors des membres du comité et d'une équipe de recherche extrêmement restreinte à ce moment-là, n'avait vu ce que contenait le rapport du comité.

Sécurité routière

M. TETLEY: Cela veut dire que je n'ai même pas changé une des phrases du député de Beauce-Sud, non plus.

J'ai une question d'ordre général: Vous avez trois sections importantes, trois grandes sections dans votre rapport; la sécurité routière est la première section. Si je comprends bien, est-il vrai qu'il y a plus d'argent à économiser ou plus de pourcentage à épargner par vos recommandations sur la sécurité routière que par les recommandations dans les autres secteurs? On m'a même dit — pas vous mais d'autres experts — que la ceinture de sécurité obligatoire économiserait plus d'argent que peut-être toute autre recommandation. Et je note que c'est une de vos recommandations les plus fortes. Quelle est votre opinion, M. Gauvin?

M. GAUVIN: En fait, vous remarquerez que dans la partie où le comité avait des chiffres, il les a publiés. En ce qui touche la deuxième partie, l'indemnisation des victimes et l'administration du régime, il était en fait possible d'évaluer l'effet des recommandations et le comité l'a fait. Sur l'indemnisation des victimes, il a publié un rapport en annexe, traitant du coût du régime proposé. En ce qui concerne la sécurité routière, le plus grand problème consiste à déterminer le coût-bénéfice de différentes mesures que l'on peut prendre. Et le comité s'est vite rendu compte des difficultés énormes d'évaluer l'effet d'une mesure sur la sécurité routière et il a préféré ne pas chercher à estimer l'effet.

D'autres gens prétendent que certaines mesures résulteraient en des réductions de 20 p.c. dans les primes. Je regrette de ne pouvoir me prononcer sur la validité de telles assertions. J'aimerais cependant que ces membres retiennent en mémoire une question, c'est de demander à ces personnes d'amener des preuves à l'appui selon lesquelles l'adoption de ces mesures réduira les primes de 20 p.c.

Au niveau de la sécurité routière, le principal problème réside dans l'absence d'une situation statique qui permet d'évaluer l'effet de différentes mesures. Nous sommes en face d'un véritable inconnu, dans certains cas. De plus, lorsqu'on parle d'une réduction de primes, il faudrait ne pas oublier les déboursés que l'Etat devra faire pour que ces mesures soient mises en place.

C'est relativement simple et même simpliste de dire qu'on va tripler la force policière, mais à quel coût et à quel effet? Si on parle simplement de l'effet mais qu'on oublie le coût, je pense qu'on n'a pas donné une véritable image du problème.

Ceci étant dit, il n'en demeure pas moins que si on recherche des économies, à long terme, simplement en divisant la masse des primes d'assurance-automobile... Où j'aime mieux parler des pertes que l'économie québécoise subit, c'est dans le secteur en fait d'une réduction des véritables pertes que les plus grandes économies peuvent être réalisées. En somme, si on réduit les accidents, il y a moins de pertes et la masse du dollar-prime va non pas à l'administration du régime mais aux pertes. Donc, il y a plus de jeu, il y a plus d'argent à économiser de ce côté, mais probablement avec beaucoup plus de difficulté.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Dorion.

M. BOSSE: M. Gauvin, comme probablement beaucoup de mes collègues, les autres membres de la commission, je n'ai pas eu l'occasion de lire tout le rapport. Quel est, à votre avis, le facteur le plus important, le facteur prédominant qui peut amener une réduction importante des primes?

M. GAUVIN: Dans l'immédiat, à mon avis, le facteur qui pourrait réduire les primes est un changement dans le mode d'indemnisation des victimes afin de réduire les frais requis pour indemniser les victimes et également pour l'administration du régime lui-même. A long terme, il faut en réduire les pertes, mais il n'existe à mon sens, sauf pour le cas de la ceinture de sécurité, pas de mesure qui permettrait, demain matin, de réduire les accidents de 20 p.c.

Ceux qui croient ça, je regrette, c'est peu réaliste d'après moi.

M. BOSSE: Je veux bien croire que le port de la ceinture, l'absorption d'alcool, tout ça, sont des causes, mais voulez-vous expliciter un peu plus les modes d'indemnisation? Qu'est-ce que vous entendez?

M. GAUVIN: Ecoutez, ...

M. BONNIER: II y avait une suggestion, de la part du ministre, qu'on prenne la première partie d'abord. Il me semble que si on se concentrait là-dessus, on verrait un peu plus clair, parce que là, on va probablement chevaucher, je ne sais pas, c'est mon point de vue.

M. LEGER: M. le Président, c'est juste. Je pense que les commissions parlementaires fonctionnent avec les questions du ministre, suivies des questions de l'Opposition et par la suite de celles des députés.

J'ai vu au départ que le député de Beauce-Sud a posé des questions de prérequis. C'est la raison pour laquelle je l'ai laissé parler avant qu'on ait des questions à poser de notre côté. Maintenant qu'on a accepté de parler en général, du moins de la première section — je sais qu'on a peut-être beaucoup plus de questions sur d'autres aspects du rapport — et qu'on doit passer par la sécurité routière, c'était quand même une entente unanime, je pense qu'on devrait commencer par là et que c'est à l'Opposition à commencer les questions sur ce domaine.

M. le Président, la question première que je voulais poser soit à M. Gauvin...

M. TETLEY: Un instant.

M. LEGER: Pardon, sur un point de règlement?

M. BOSSE: Un instant, à l'ordre s'il vous plaît! Un instant.

M. TETLEY: Peut-être qu'on peut commencer à la page 97, c'est votre intention?

M. LEGER: C'est ça, parfait.

M. BOSSE: Moi, ça ne me fait rien qu'on suive, M. le Président. D'ailleurs, on a attendu assez longtemps le PQ et les autres membres de l'Opposition. Pour une fois, là, on a la parole facile du côté du PQ, surtout lorsqu'on est absent. On l'a attendu assez longtemps pour qu'on puisse s'exprimer. Je veux bien respecter aussi le fait que le ministre a une sorte de priorité en matière de questions. Par contre, je pense qu'on représente aussi des populations et qu'on est aussi intéressé en matière d'assurance-automobile, parce qu'on y goûte "itou", à l'occasion.

C'est pourquoi, quand je pose ma question, elle fait suite à une question du ministre concernant une des mesures, c'est-à-dire le port de la ceinture de sécurité. Je pose la question à savoir la raison la plus importante qui peut amener une réduction substantielle de ces primes, parce que ça coûte cher aux consommateurs.

M. LEGER: J'invoque le règlement, M. le Président...

M. BOSSE: Le PQ n'aime pas ça quand on pose des questions, évidemment, puis qu'on démontre...

M. LEGER: M. le Président, j'invoque le règlement. M. le Président, j'invoque le règlement...

M. BOSSE: ...qu'on est intéressé aux consommateurs. Il pense qu'il est tout seul à protéger les consommateurs.

M. LEGER: Est-ce que le président est sourd? Est-ce que le président est sourd?

LE PRESIDENT (M. Cornellier): A l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît!

M. BOSSE: Le système des enveloppes...

M. LEGER: M. le Président, j'invoque le règlement.

M. BOSSE: ... on va en parler là!

M. LEGER: M. le Président, est-ce que j'ai la parole, sur une question de règlement?

LE PRESIDENT (M. Cornellier): J'avais donné précédemment la parole au député de Dorion.

M. BOSSE: Maintenant, je suis prêt à parler par étapes.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Sur une question de règlement, la parole est au député de Lafontaine.

M. LEGER: Je viens de dire tantôt — et je voudrais que vous statuiez là-dessus comme vous l'avez bien gentiment fait pour le bon fonctionnement de la commission parlementaire, la semaine dernière — qu'il y a eu les questions de prérequis au départ et, que, par la suite, le ministre a commencé à poser ses questions selon l'ordre que nous avions accepté ici.

Je comprends que le député de Dorion est arrivé à l'heure cette fois-ci parce qu'ils avaient des nouveaux fauteuils qu'il voulait être certain d'avoir. En effet, les députés libéraux ont des fauteuils spéciaux ce matin et l'Opposition a

des anciens fauteuils. C'est seulement pour cela qu'il est arrivé à l'heure. C'est pour essayer les nouveaux fauteuils. Pour revenir...

LE PRESIDENT (M. Cornellier): A l'ordre, s'il vous plaît !

M. LEGER: ... à la question de règlement...

M. BOSSE: M. le Président, question de règlement.

M. LEGER: ... j'ai simplement demandé que vous statuiez sur le fait...

M. BOSSE: Question de règlement.

M. LEGER: ... que l'ordre normal d'intervention à la commission parlementaire était d'abord le ministre, s'il avait des questions à poser, et que, par la suite, c'était le parti de l'Opposition officielle qui avait ce rôle. Les députés, incluant le député de Dorion, pourront poser leurs questions par la suite. Si le député de Dorion n'a qu'une question à poser, je n'ai pas d'objection à le laisser aller, mais, s'il veut parler de tout le projet, c'est le rôle de l'Opposition officielle de parler après le ministre et ce n'est pas le député de Dorion qui va changer cela.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Ceci étant dit, je voudrais qu'on...

M. BOSSE: Question de règlement...

LE PRESIDENT (M. Cornellier): ... établisse un ordre.

M. BOSSE: ... pour rétablir les faits. D'abord, concernant le député de Lafontaine...

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Sur la question de règlement.

M. BOSSE: ... en ce qui a trait aux fauteuils, je sais que cela leur fait mal au coeur...

M. LEGER: Vous, cela vous fait du bien ailleurs.

M. BOSSE: ... de ne pas avoir ces fauteuils, premièrement. Deuxièmement, je suis prêt à changer de fauteuil avec lui, si cela lui fait mal au coeur, mais pas le fauteuil de Dorion. Bon.

UNE VOIX: II n'en a pas.

M. LEGER: M. le Président, est-ce que le député de Dorion veut poser une question? Je n'ai pas d'objection à ce qu'il en pose une, mais l'ordre normal, c'est le parti de l'Opposition officielle et vous n'avez pas de raison de changer les règlements. Ce n'est pas parce que vous êtes arrivés en double aujourd'hui de votre représentation officielle que vous allez changer les règles du jeu.

Je demande au président de statuer sur une tradition de la commission parlementaire et non pas de perdre du temps à des chinoiseries, à des politicailleries d'un député qui a presque toujours été absent durant la première session.

M. BOSSE: S'il y a quelqu'un qui a des chinoiseries à dire et à faire, en fait, c'est un parti qui donne des exemples...

M. LEGER: M. le Président, je vous demande de statuer sur les situations traditionnelles des commissions parlementaires.

M. BOSSE: ... dans les journaux au sujet de chinoiseries internes.

M. LEGER: M. le Président, c'est à vous de statuer.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Une fois de plus, à l'ordre !

M. BOSSE: Si le député de Lafontaine qualifie ma question de chinoiserie, je le prierais de répéter cela devant la population, quand je pose la question à M. Gauvin, à savoir quel est le facteur déterminant, par exemple, qui va réduire les primes pour le consommateur?

M. LEGER: M. le Président, j'invoque le règlement.

M. BOSSE: Et le député de Lafontaine qualifie cela de chinoiserie?

M. LEGER: M. le Président, j'invoque le règlement.

M. BOSSE: II fait preuve de partisanerie, de politicaillerie.

M. LEGER: M. le Président, j'invoque le règlement.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): A l'ordre!

M. LEGER: Le député de Dorion a encore mal compris. Je ne sais pas pour quelle raison.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Vous m'avez demandé de...

M. LEGER: J'ai parlé de chinoiseries concernant les procédures parlementaires. J'ai dit que, s'il avait une question à ce stade-ci, je n'ai pas d'objection à lui laisser l'occasion de poser sa question. Je n'ai parlé de chinoiseries... S'il a eu sa réponse, je pense qu'on doit procéder...

M. BOSSE: Je n'ai pas eu ma réponse.

M. LEGER: ... normalement, selon le fonctionnement de la commission parlementaire.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): J'ai bien compris votre point de vue...

M. LEGER: M. le Président, je voudrais que vous statuiez là-dessus.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): ... et je suis prêt à statuer. Cependant, je voudrais reprendre les remarques du député de Lafontaine lorsqu'il spécifie l'ordre dans lequel doivent procéder les droits de parole et les débats. Il y a eu, au tout début, des commentaires généraux de la part du ministre et des représentants des partis de l'Opposition et, par la suite, sur des prérequis, comme le dit si bien le député de Lafontaine, le député de Beauce-Sud a pris la parole et il a engagé le débat en posant des questions directes.

Comme il n'y avait eu aucune objection à ce stade, j'ai cru bon de donner la parole, par la suite, au premier député qui m'a signalé qu'il voulait prendre la parole.

Maintenant, pour le bon ordre de la commission, afin que les travaux puissent avancer normalement, nous allons suivre le processus que nous suivons ordinairement aux commissions parlementaires. Le ministre aura un premier droit de parole, s'il désire l'utiliser. Le député de Lafontaine aura le deuxième droit de parole à la condition, cependant, qu'il ne prenne pas toute la journée à lui seul et le député de Beauce-Sud suivra. Par la suite, tous les autres membres de la commission, en demandant la parole au président, auront aussi le droit de parole.

Je cède immédiatement la parole au ministre des Institutions financières, Compagnies et Coopératives.

M. TETLEY: M. Gauvin, à la page 97, recommandation no 1 vous avez parlé de la nécessité de la coordination des efforts des autorités, etc. A qui voulez-vous conférer cette coordination? Qui doit faire la coordination?

M. GAUVIN: En fait, la coordination se fait certainement, normalement, à l'intérieur du gouvernement lorsque différents ministères sont impliqués dans un même problème. Nous avons noté, effectivement, qu'au niveau de la sécurité routière il y avait présentement plusieurs ministères qui étaient impliqués. Ce que nous souhaitons, c'est qu'il y ait une plus grande coordination des efforts des différents ministères pour attaquer le problème dans son ensemble.

Si on tient compte que, par exemple, le ministère de la Justice est touché, le ministère de la Justice par le truchement soit de l'administration des tribunaux soit de la force policière, le ministère des Affaires sociales, par le truchement soit de l'assurance-maladie, de Pas-surance-hospitalisation ou des prestations d'aide sociale, le ministère des Institutions financières, au niveau du régime d'indemnisation et au niveau des assureurs qui ont un rôle à jouer, de même que plusieurs autres ministères et, même plus, de plusieurs autorités tant provinciales, fédérales que municipales qui touchent tout le problème de la sécurité routière, il faut, en fait, que ces organismes puissent coordonner leurs efforts afin que, lorsque le bras gauche agit, le bras droit n'oublie pas ce que le bras gauche a fait. Vous me demandez qui doit le faire. Je pense que ça se fait normalement, mais pas d'une...

M. TETLEY: A la recommandation 18, vous avez proposé un organisme chargé de toute la sécurité routière. J'ai compris que c'était l'organisme que vous aviez en vue.

M. GAUVIN: C'est l'organisme qui pourrait faire la coordination des efforts des différents ministères mais le Conseil de la sécurité routière, dans l'esprit, en fait, des membres du comité, a principalement pour but d'effectuer la recherche nécessaire et de montrer les lacunes existant dans le système et de mettre de l'avant des mesures appropriées en tenant compte de toutes les parties, de tous les ministères intéressés. Dans ce sens-là, le conseil pourrait le faire mais je pense que c'est au législateur, finalement, de faire la coordination des efforts de chacune des lois qu'il met en application.

M. TETLEY: Bon, merci.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable député de Lafontaine.

M. LEGER: M. le Président, justement, quand vous parlez de coordination, c'est parce qu'il y avait un manque de coordination, que vous avez décelé, avant d'arriver à cette conclusion. Est-ce que vous pourriez nous donner des exemples concrets où plusieurs ministères sont concernés en même temps? Quand vous parlez du bras gauche et du bras droit qui fonctionnent différemment, est-ce que vous avez des exemples précis de fonctionnement actuel?

M. GAUVIN: Disons que l'exemple qui me vient à l'esprit — j'aimerais pouvoir revenir sur votre question ultérieurement — est la présence au Québec de juridictions fédérales sur certains terrains où on peut adopter des règles de circulation qui ne sont pas nécessairement en conformité avec les règles que le ministère des Transports adopte sur le code de la route. C'en est un exemple, en fait. Vous pouvez avoir une limite de vitesse différente dans certains parcs qu'en fait le code de la route prévoit et cela crée une certaine confusion.

J'aimerais en profiter, lorsque vous posez cette question, pour souligner que les membres devant vous sont obligés de demander, d'une certaine manière, votre indulgence puisqu'ils

n'ont aucune équipe de recherche pour trouver les documents permettant de répondre à certaines questions. Je pense que les membres auraient pu et auraient été en droit de refuser de venir devant cette commission, devant l'absence des moyens qu'ils ont. Si on tient compte, en fait, des moyens que d'autres groupes ont à leur disposition, c'est nous placer dans une situation extrêmement délicate et, sur certains points, je serai obligé de refuser de répondre.

M. LEGER: De toute façon, vous m'avez quand même donné un exemple que nous connaissons. En parlant de juridiction d'abord fédérale, est-ce que vous avez remarqué des difficultés de concordance ou de situation difficile provenant du fait, disons, d'un exemple de juridiction fédérale: les voies ferrées, les trains qui fonctionnent selon les lois fédérales et qui coupent les routes sous juridiction provinciale, c'est-à-dire, sous une autre juridiction.

Est-ce que vous avez eu, dans cet aspect de relations de juridictions différentes, des problèmes de ce côté? Avez-vous décelé des problèmes de ce côté?

M. GAUVIN: Dans l'exemple précis que vous citez, ma réponse est que je ne peux me souvenir d'avoir trouvé quelque problème que ce soit. C'est un problème plus général ou, en fait, tant à tous les niveaux, que ce soit municipal, provincial, fédéral ou même international, le problème de la sécurité routière dépasse, d'après moi, les limites d'une frontière, c'est un problème mondial. Le manque de coordination est assez évident que l'OTAN est en train d'effectuer une étude pour déterminer de quelle manière on peut réduire les causes d'accidents. L'étude en question s'applique à plusieurs pays et n'est pas limitée à une seule région en particulier.

M. LEGER: Je donne un exemple, maintenant, de différentes lois qui régissent... Je prends l'exemple d'Ottawa et de Hull. Des citoyens qui vivent à Hull vont travailler à Ottawa, où il y a une loi différente, par exemple, on peut tourner à droite sur un feu rouge. Au Québec, on ne peut pas le faire. Est-ce qu'il y a eu des différences comme ça, entre les municipalités, aux frontières de deux provinces qui ont des lois différentes?

M. GAUVIN: C'est un exemple certainement trop particulier. Le mandat du comité n'était pas d'examiner, en fait, des territoires bien précis pour voir quel était le problème dans un endroit; c'était un mandat plus général pour voir comment on pouvait résoudre le problème. On n'est pas allé — les membres se sont promenés quelque peu, apparemment, comme toute commission d'enquête qui se respecte — à Hull ou à Ottawa.

M. LEGER: Je vous donnais un exemple de lois différentes où un citoyen peut tourner à droite sur un feu rouge, il s'en vient au Québec et puis, il y a des lois différentes pour la circulation dans les villes de Hull et Ottawa.

UNE VOIX: ... on peut tourner à droite sur un feu rouge...

M. LEGER: Un exemple encore plus précis, vous mentionnez à la recommandation 2 que les compétences déléguées aux ministères, organismes, commissions, cités, villes et municipalités soient mises à jour; vous avez quand même dénoté, dans les différentes municipalités, des lois différentes qui ne concordent pas. Les quatre premières recommandations incluses, qui touchent pratiquement l'organisation de la sécurité routière, comment la voyez-vous? Avez-vous quelque chose de précis dans ce domaine ou simplement une recommandation générale? Si vous avez donné cette recommandation générale, ça provient quand même de préoccupations ou de constats que vous avez faits dans votre étude. Est-ce que vous pensez que la sécurité routière peut s'organiser d'une façon différente? D'abord, est-ce que c'est réalisable? Comment voyez-vous que cela peut se réaliser, ce changement? Et dans quel délai cela peut se faire?

M. GAUVIN: En fait, sur la première partie, je peux essayer de répondre à votre question, pourquoi on a mis ces quatre recommandations. A ce moment, est-ce qu'on a objection à ce que je lise les pages 52 à 80 du rapport? L'explication, en fait, du cheminement que le comité a fait, y paraît. Nous avons dit que nous avons dénoté un manque de coordination des efforts. Nous avons noté des lois qui sont dépassées. Depuis de nombreuses années, on propose une refonte du code de la route au Québec. C'est remis, c'est toujours remis. Ce sont des constatations que nous avons faites. Les constatations sont à l'intérieur du rapport avant chaque recommandation. Je pense qu'il faudrait... Si vous voulez, je vais lire les pages 52 à 80...

M. LEGER: Non, je pensais que vous auriez pu trouver des exemples qui illustrent la recommandation comme telle, des cas précis, parce que, pour arriver à ces recommandations, il a fallu que vous soyez mis en face de cas précis qui vous ont amenés à déduire des recommandations, comme celles-là. Nous, on est en face des recommandations, avec des explications générales, d'accord, mais je pensais que vous aviez des cas précis d'exemples évidents pour arriver à cela.

Alors, je vais reformuler ma question d'une façon différente et vous allez peut-être la résumer. Les recommandations, les quatre premières surtout qui touchent la sécurité routière, est-ce que vous en faites un prérequis aux

changements dans l'assurance ou le changement d'administration de l'assurance, le changement de l'indemnisation des personnes qui subissent des pertes par accident, est-ce que c'est un prérequis, le changement de la sécurité routière, ou si le changement peut se faire sans cela?

M. GAUVIN: En fait, il n'y a aucun rapport, effectivement, entre l'assurance et ces recommandations. Pour nous, le problème se traite...

M. LEGER: ...un des plus hauts taux d'accidents que le Québec a, comparativement à d'autres, relève quand même de causes que vous avez décelées. Alors, vous amenez dans votre recommandation des points qui touchent la sécurité routière ainsi que les autres aspects. Ma question, c'est: Est-ce qu'il faut absolument que ce soit changé? Si vous changez uniquement les deux autres têtes de chapitre, qui sont l'indemnisation des victimes et l'administration d'un régime d'assurance, est-ce que c'est suffisant s'il n'y a pas de correction dans la sécurité routière? Est-ce que ce n'est pas une dimension qui est un prérequis, un ensemble qui doit être fait et que, si l'un n'est pas fait, on ne peut pas changer l'assurance non plus?

M. GAUVIN: Je ne partage pas votre point de vue. Je pense que...

M. LEGER: C'est une question que je pose.

M. GAUVIN: Oui. Est-ce que je peux donner la réponse?

M. LEGER: Oui.

M. GAUVIN: Je peux? En fait, pour nous, il importe de modifier tout le système de sécurité routière au Québec. Et ce n'est pas un prérequis; c'est, d'après nous, comme on dit en anglais, un "must". On doit le faire, indépendamment de ce qu'on fait dans le régime d'indemnisation, mais de la même manière, on doit changer le régime d'indemnisation, indépendamment de ce qu'on fait dans le secteur de la sécurité routière.

Si vous me demandez lequel des trois est le prérequis, les trois doivent être refaits. On doit attaquer le problème de front, on doit cesser, comme certaines gens ont fait dans le passé, de dire: Touchez seulement ce secteur-là. Pour nous, on doit toucher les trois secteurs à la fois.

Et, pour répondre à votre question, ce n'est pas un prérequis, pas plus l'un que l'autre.

M. LEGER: De toute façon, vous répondez dans l'affirmative que, même si ce n'est pas un prérequis, cela doit être fait. Autrement dit, si ce n'est pas fait, rien ne sert de changer l'assurance, cela ne réglera pas le problème. Le problème est dans les trois aspects; c'est cela?

M. GAUVIN: Je m'excuse, si je peux repren- dre. Peut-être que je n'ai pas le droit, mais si j'ai bien saisi, vous dites: Si on ne fait pas cela, on ne règle pas l'autre. Ce n'est pas ce que j'ai dit. J'ai dit qu'il faut régler les trois à la fois.

M. LEGER: Non, ce n'est pas ce que j'ai dit. J'ai dit que le résultat que vous voulez obtenir par la totalité des recommandations que vous faites... Le problème ne sera pas réglé si les trois aspects ne sont pas pris en considération. C'est ce que je veux dire. Je pense que vous m'avez répondu dans l'affirmative et que nous sommes tous les deux sur la même longueur d'onde. Soyez bien à l'aise, on se comprend très bien.

Maintenant, l'autre question que je voulais vous poser, c'est que, tantôt, je vous ai demandé si c'était réalisable, dans quels délais vous voyiez cela. Parce que, comme vous venez de le dire, il est essentiel que cela soit fait, c'est un "must", comme vous l'avez dit. Dans l'étude de la situation, vous avez réalisé que vos recommandations peuvent être réalisables dans combien de temps? Est-ce qu'il y a des difficultés majeures?

Vous avez parlé de la refonte du code de la route qui est absolument essentielle. Cela fait longtemps qu'on en parle et cela ne se fait pas. Mais vous, vous êtes allé à l'intérieur des situations, vous êtes allé voir sur place. Est-ce que vous calculez que cela peut être réalisé dans un délai quelconque? Dans quel délai pensez-vous que cela devrait être réalisé? Est-ce que c'est possible dans un court délai ou si cela peut prendre du temps?

M. GAUVIN: Pour ce qui est des recommandations traitant de la sécurité routière, puisque c'est le secteur qu'on discute, je pense que l'ensemble des recommandations qui sont là peuvent être adoptées dans un temps relativement court. Mais j'ai l'impression que vous vous adressez à la mauvaise personne. Il me semble que ce sont les parlementaires et le gouvernement qui peuvent répondre des délais. Cela dépend des priorités des gens.

M. LEGER: Je suis d'accord... Je sais que c'est un choix politique et que vous ne voulez pas embarquer dans ce domaine-là. Je ne vous pose pas une question politique. Je vous pose une question pratique, parce que les choix politiques ne sont pas nécessairement des choix pratiques pour la population. On le sait. Il y a d'autres priorités parfois. Mais moi, je vous pose la question pratique. S'il n'y avait pas de choix politique à faire — oublions l'aspect politique — est-ce que ce sont des choses réalisables dans un délai raisonnable?

Il y a des lois qui pourraient être adoptées demain sur certaines choses, mais, pratiquement, il y a des choses à faire avant d'adopter cette loi. Maintenant, dans votre cas à vous, dans le cas précis de la sécurité routière, est-ce que vous calculez que cela peut prendre beaucoup de temps à se faire? Je ne parle pas du

temps où le gouvernement se décidera, je parle de l'aspect pratique, technique, de la réalisation des recommandations que vous avez là; vous avez certainement touché à cela.

M. GAUVIN: Les recommandations sur la sécurité routière sont d'une nature très générale. Je ne vois pas comment elles ne pourraient pas être... Il y en a même, on peut dire, qui sont plutôt des voeux qu'autre chose. Je ne vois pas comment elles ne pourraient pas être mises en pratique très rapidement. Incidemment, depuis la parution de notre rapport, il y a déjà des mouvements qui ont été faits — il ne faut pas penser qu'il n'y a rien qui a été fait — par exemple, nous avions suggéré que soit adoptée une réglementation du service ambulancier.

Cela a déjà été fait. C'est en marche. Je ne sais pas si le texte de la réglementation est suffisamment sévère, s'il répond aux objections que nous avions mais il y a déjà un mouvement en marche.

Je pense qu'il est extrêmement difficile de répondre précisément. Est-ce que cela va être fait pour le 14 décembre 1974 ou le 18 octobre 1975? Je pense que je ne peux pas répondre à une telle question.

M. LEGER: M. le Président, vous dites, à la recommandation 4: Que soit uniformisées et contrôlées les normes de construction et d'entretien des routes de la province. Qu'est-ce que vous avez remarqué, comme exemple frappant ou exemple qui s'est répété, dans vos recherches, de conséquences de normes de construction? Avez-vous décelé des choses particulières là-dedans?

M. GAUVIN: En fait, c'est un ensemble de cas particuliers qui ont été présentés par des consultants au comité où certaines anomalies existaient. Encore une fois, il y a beaucoup qui a été fait dans le secteur de la construction des routes. Les routes, au Québec, s'améliorent mais il reste beaucoup à faire.

Dans certains cas, les normes de construction, même si elles existent, ne sont pas toujours mises en pratique. Un exemple pratique que je pourrais citer — et je n'aime pas en citer outre mesure — c'est que le bout des barrières de sécurité est censé être enterré, d'après une norme reconnue. Mais, pendant que le ministère semble dire que c'est exact, il y a des chemins qui se construisent, il y a des barrières de sécurité qui s'installent, et on ne le fait pas. Si vous voulez un exemple particulier, en voici un. Ce que j'entends, dans la barrière de sécurité, c'est le bout de la barrière qui commence, qui est censé être enterré dans le sol pour ne pas que l'auto entre dedans pour tout défoncer mais monte dessus. C'est reconnu depuis plusieurs années et cela se fait au Québec. Malheureusement, cela ne se fait pas partout. Il y a des gens qui en installent, à des endroits, qui en réparent et qui ne le font pas.

C'est un exemple particulier et c'est le seul qui me vient à l'esprit, avec le recul du temps, depuis plusieurs mois que le rapport est remis.

M. LEGER: C'est un bon exemple. Je pensais que vous auriez parlé d'exemples, je ne sais pas si vous avez eu des cas, de la mauvaise qualité de la route provenant d'entrepreneurs qui ne mettraient pas la qualité voulue et que c'est continuellement en...

M. HARVEY (Charlesbourg): Question de règlement, M. le Président. Question de règlement!

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Charlesbourg, sur une question de règlement.

M. HARVEY (Charlesbourg): M. le Président, sur une question de règlement. Peut-être que ma question va être antiréglementaire, mais je voudrais demander à M. Gauvin s'il a l'intention de passer l'hiver ici, si on peut compter sur lui pour l'hiver. Vous allez être à la chaleur, vous allez être très bien.

M. LEGER: M. le Président...

M. HARVEY (Charlesbourg): Parce qu'au rythme où l'on va, M. le Président — sur la question de règlement — je voudrais qu'au moins...

M. LEGER: Vous parlez du règlement, c'est ça.

M. HARVEY (Charlesbourg): ... vous ayez la décence de permettre à vos collègues et aussi aux députés ministériels de discuter sur la question de sécurité routière. Vous êtes rendu maintenant dans la construction de routes. Il y a des spécialistes, qui sont élus par le peuple, qui peuvent parler longuement sur le sujet, avec quelqu'un qui apporte des documents probants, je pense, dans son rapport Gauvin.

Alors, si vous voulez être gentil, s'il vous plaît — s'il vous plaît, être gentil — permettez donc à vos collègues d'adresser aussi des questions au président. Si on touche la sécurité routière, je pense tout de suite à Pierre Mercier, qui est député de Bellechasse — un brillant député — qui a occupé lui-même le poste de directeur de la sécurité routière au ministère des Transports et Communications du Québec. Peut-être qu'il a des questions qui touchent cela. Vous êtes rendu dans les travaux routiers!

Ecoutez, M. le Président, s'il vous plaft, si vous voulez permettre à tout le monde de parler — le député de Beauce-Sud a demandé la parole — qu'on procède par étapes et qu'on soit équitable pour tout le monde. Autrement, on va monopoliser le président ici uniquement pour... Si vous voulez, M. Léger, prenez une entrevue avec lui.

M. LEGER: M. le Président...

M. HARVEY (Charlesbourg): Je pense qu'on est en commission parlementaire, ici, pour permettre à tout le monde de discuter.

M. LEGER: M. le Président, sur la question de règlement.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): A l'ordre, s'il vous plaît !

M. LEGER: Sur la question de règlement, M. le Président; je pense que le député de Charlesbourg n'a pas très bien compris.

M. HARVEY (Charlesbourg): Je comprends très bien que vous monopolisez la commission parlementaire. Je comprends très bien cela.

M. LEGER: La commission Gauvin, selon le programme même du ministre — je pense que le député de Charlesbourg n'est pas au courant — est ici avec nous toute la journée. Alors, ne soyez pas impatient. Vous allez avoir votre tour pour poser vos questions.

On s'est entendu, tantôt...

M. HARVEY (Charlesbourg): ... les sujets, M. le Président, après avoir accepté que vous discutiez...

M. LEGER: M. le Président, est-ce que j'ai la parole?

LE PRESIDENT (M. Cornellier): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. HARVEY (Charlesbourg): ... article par article?

M. LEGER: Ce n'est pas cela du tout dont il a été question parce que je pense bien que je n'ai pas des questions sur chaque point des recommandations sur la sécurité routière...

M. HARVEY (Charlesbourg): Cela me surprendrait de vous, d'ailleurs.

M. LEGER: ... et vous-même, vous n'en avez pas non plus.

M. HARVEY (Charlesbourg): Cela me surprendrait de vous, d'ailleurs.

M. LEGER: On a — chaque député — des préoccupations sur peut-être une série de questions, dans les 18 premières, et on ne touchera pas nécessairement — chaque intervenant — les 18 questions. Mais la sécurité routière comprend 18 recommandations. Si on a cinq ou six questions dans les 18 ou cinq ou six recommandations à discuter, c'est à notre tour de le faire. Quand viendra le tour du député de Charlesbourg, s'il a quatre ou cinq questions sur l'ensemble des 18 points touchant la sécurité routière, il pourra les poser.

Je ne pense pas que... On s'est entendu...

LE PRESIDENT (M. Cornellier): A l'ordre, s'il vous plaît! Revenons-en...

M. LEGER: ... à savoir, que tout le monde parlait sur la première question.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Revenons-en au débat lui-même et une question...

M. HARVEY (Charlesbourg): Je ne crois pas que ç'ait été le consensus, M. le Président, je regrette infiniment.

M. LEGER: C'était la sécurité routière d'abord.

M. HARVEY (Charlesbourg): Alors, parlez de sécurité routière.

M. LEGER: Et après ça les indemnités aux personnes et, troisièmement, l'administration du régime. Là nous sommes sur la sécurité routière où il y a 18 recommandations. Si on a quatre ou cinq points sur lesquels nous avons des questions à poser, c'est le moment, à l'occasion des questions à ce stade-ci.

M. HARVEY (Charlesbourg): ... que vous avez déjà accepté, d'emblée, la création d'un comité de sécurité routière, vous ne voulez plus rien savoir sur...

M. LEGER: ... tous les députés... la recommandation no 1.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. LEGER: Voyons donc!

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Qu'on revienne au débat lui-même et...

UNE VOIX: C'est ça.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): ... la question de règlement est close.

M. LEGER: Alors, M. le Président, j'étais en train de dire que les problèmes de sécurité routière peuvent provenir de la qualité de la route qui est mal construite, qui n'est pas encore réparée parce que ça prend un certain temps avant que les décisions soient prises pour donner un contrat de réparation. Est-ce qu'il y a, de ce côté-là, dans votre recommandation no 4, les normes de construction, que ce soient les mêmes partout dans le Québec parce qu'il y a des endroits où on ne respecte pas les normes de la qualité de la construction des routes?

M. GAUVIN: Ce sont plutôt, en fait, je pense, des problèmes de normes. Nous n'avons pas entrepris une analyse systématique du réseau routier de la province de Québec et de la construction, des contrats qui ont été accordés pour savoir si on avait tenu les contrats, si les matériaux utilisés avaient été les bons. C'est plutôt au niveau des normes de construction, d'après nous. Vous me demandez des exemples précis. Je dois répondre qu'ici, ce matin, je n'en ai pas.

M. LEGER: Je sais bien que le député de Charlesbourg a hâte de s'en aller chez lui, sa journée de travail est peut-être terminée mais...

M. HARVEY (Charlesbourg): Voyons, voyons, un peu de sérieux là!

LE PRESIDENT (M. Cornellier): A l'ordre! M. LEGER: M. le Président, vous avez...

M. HARVEY (Charlesbourg): Laissez-le aller.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): A l'ordre!

M. HARVEY (Charlesbourg): Sa crédibilité est déjà effritée passablement.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. LEGER: Alors, à la recommandation no 8, on parle d'une politique d'inspection sélective obligatoire des véhicules automobiles...

M. TETLEY: ... une question.

M. LEGER: Oui, M. le ministre. Vous êtes tellement gentilhomme qu'on ne peut pas vous refuser ça.

M. TETLEY: Je me demande vraiment quelle est la procédure. J'ai posé une question au sujet de la recommandation no 1. Je voulais laisser la parole et je vois que le député de Beauce-Sud a toutes sortes de questions à poser. Cela ne me fait rien si vous posez des questions au sujet de la recommandation no 7, mais vous êtes passé à la recommandation no 8 et j'ai déjà une question au sujet du no 7.

Est-ce que ce serait possible de fixer une procédure, je ne sais pas comment, peut-être que je pose une question...

M. HARVEY (Charlesbourg): Le député de Lafontaine aurait dû lire le rapport Gauvin d'abord...

M. LEGER: ... c'est une question que le ministre est en train de me poser, je l'écoute.

M. TETLEY: Peut-être que voici une solu- tion à nos problèmes: je pose une question, vous posez une question, le député de Beauce-Sud pose une question, et peut-être, parce que tous ces gentils députés ministériels sont venus de loin, qu'ils posent disons deux questions, on revient, on fait le tour de la table.

M. LEGER: Alors, la question que vous me posez, c'est que vous suggérez qu'on passe recommandation par recommandation.

M. TETLEY: Ou question par question. Parce que les gens...

M. LEGER: Je n'ai pas d'objection, M. le Président, moi ce que j'avais cru comprendre dans votre proposition, c'était que sur le "package deal", je dirais, de la sécurité routière qui comprend 18 recommandations...

UNE VOIX: Les effets du bill 22.

M. LEGER: ... il se peut qu'on ait trois ou quatre points dont on veut discuter. Si on passe les recommandations une par une, on n'est pas là pour les adopter. Chaque député, à son tour, posera les questions qu'il veut poser à la recommandation qu'il veut. Moi, je pensais que ce serait beaucoup plus court. Il me reste encore deux autres points et j'aurais pratiquement terminé, à moins que la brillante intervention d'un autre député suscite une autre question.

M. TETLEY: Je n'ai pas...

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Trois-Rivière, une question additionnelle.

M. BACON: Est-ce que je pourrais faire une suggestion qui pourrait apporter un peu de souplesse à la procédure et rendre le débat un peu plus agréable. Je ne sais pas si le député de Lafontaine serait d'accord. Je comprends toute sa série de questions, mais si, à l'intérieur de ça, on pouvait faire un tour de table et vider toutes les questions de chacun, je pense que ça rendrait le débat plus agréable pour tout le monde et il y aurait une meilleure participation.

Je pense que le député de Lafontaine a d'excellentes questions mais on pourrait peut-être en avoir de chaque côté de la table, d'excellentes questions. Le député de Beauce-Sud n'a pas encore fait part de ses questions. Je pense que ça rendrait le débat, avec une meilleur participation, beaucoup plus intéressant, si on avait un peu plus de souplesse. Je comprends les avancés du député de Lafontaine.

M. TETLEY: S'il n'a que deux autres questions, peut-être qu'il peut terminer.

M. BACON: M. le Président, M. le ministre, faites attention; ne vous faites pas prendre par

les deux questions, il a dit deux points. Il n'a pas dit deux questions, il a dit deux points.

M. TETLEY: Le député de Beauce-Sud... UNE VOIX: C'est une question...

M. HARVEY (Charlesbourg): ... vous invite à la prudence.

M. BOSSE: II a l'habitude des étapes longues.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable député de Beauce-Sud, sur le même sujet.

M. ROY: Oui, ça fait plusieurs fois que je demande la parole, M. le Président. J'aurais une suggestion à faire. Je pense qu'il y aurait peut-être lieu de regrouper les questions. Tout à l'heure, j'avais une question à poser qui concernait l'article 1 et je me demande si la question que je pourrais poser, une fois que toutes les questions auront été discutées, par la suite, si on va reprendre le débat sur le même sujet. Pour éviter la duplication et les pertes de temps inutiles, je pense et je fais la suggestion qu'on regroupe les questions. Les questions 1, 2 et 3 regardent la question de la sécurité routière au niveau de la réglementation entre les autres juridictions, soit municipales, la Loi des cités et villes, le fédéral et autres. Alors, qu'on vide cette question. Lorsqu'on veut parler des routes, par exemple, c'est un autre sujet.

Si on parle du problème de la sécurité routière et si on veut discuter de toutes les questions qui touchent la sécurité routière, chacun d'entre nous pourrait en avoir pour une journée à lui seul. Alors, de façon que chacun puisse jouer son rôle et poser des questions pertinentes pour éclairer les membres de la commission, je suggère qu'on regroupe les questions 1, 2 et 3 par groupe de sujets. Je ne veux pas offrir une formule trop rigide, mais par groupe de sujets. Si on veut parler de sécurité routière, au niveau de la construction des routes, c'est un autre sujet. La réglementation municipale, c'en est un autre. Les mesures de sécurité en ce qui a trait à la signalisation et à l'affichage, c'est un autre sujet également. Il y a différents autres sujets. Je vois que la question 9, par exemple, touche les questions du commerce des automobiles, les automobiles usagées, les cimetières d'automobiles et autres. C'est encore un autre sujet à discuter, mais qui fait partie des recommandations générales sur la sécurité routière.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): C'est une bonne suggestion de la part du député de Beauce-Sud. Maintenant, j'aimerais...

M. LEGER: Est-ce que le président pourrait me dire...

LE PRESIDENT (M. Cornellier): ... aussi rappeler qu'en vertu des règlements, il est possible de réduire le droit de parole à 20 minutes par opinant. Alors, pour une bonne efficacité de la commission ce matin, je pense que les suggestions qui ont été émises pourraient être mises en pratique, tout le monde pourrait participer et les membres de la commission pourraient obtenir ainsi un meilleur éclairage du rapport Gauvin.

M. LEGER: M. le Président, sur le point de règlement. Je suis d'accord sur l'idée du député de Beauce-Sud. Cependant, la division des recommandations n'a pas été faite par des sujets très détaillés comme les routes, les automobiles, la vente d'automobiles, la sécurité, la coordination des différents ministères ou des organismes; c'est fait par trois groupes et ce n'est pas divisé comme tel. C'est pour ça que je trouverais beaucoup plus logique et beaucoup moins long, si les députés avaient eu un peu plus de patience, que chacun arrive avec des questions sur la sécurité routière, qu'il y ait quatre ou cinq points qui l'intéressent, soulever ces points et les autres reviennent avec les points qui les intéressent. Je ne pense pas que, si un député calcule que la question no 1 n'a pas été complètement vidée à sa satisfaction, ça l'empêche de revenir sur ce sujet. Même une question d'un député peut soulever une autre question chez un autre député, sur le même sujet. Je trouve qu'il serait beaucoup plus court si on ne parlait, à notre tour de parole — que vous voulez limiter à 20 minutes, je n'ai pas d'objection — que sur l'ensemble de la sécurité routière, d'abord; après ça, sur les autres recommandations concernant l'indemnisation des victimes ainsi que l'adoption du régime. Ce sont trois groupes bien précis, bien divisés d'ailleurs dans l'esprit même du rapport Gauvin. C'est pour ça que je pense qu'on devrait vider la question de la sécurité routière par chaque intervenant, que ça touche la première, la sixième ou la neuvième recommandation.

M. TETLEY: Avant...

M. LEGER: Comme je vous dis, ce n'est pas tellement long, j'ai encore deux points seulement, peut-être trois ou quatre questions et ça va être terminé. Après cela, les autres députés prendront le temps qu'il faut pour les questions qui les préoccupent.

M. TETLEY: Je suis prêt à attendre...

M. ROY: M. le Président, je n'ai pas du tout le goût de faire un débat de procédure ce matin. Je pense tout simplement qu'on a perdu passablement de temps jusqu'à maintenant sur des questions purement de procédurite. Alors, que le Parti québécois pose toutes les questions qu'il a à poser; si le Parti libéral veut les poser... Et je poserai les miennes après. Qu'on ne fasse pas de débat de procédure.

M. TETLEY: Parfait.

LE PRESIDENT (M. Comellier): Ce que nous devons rechercher...

M. ROY: II faut quand même être raisonnable.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Ce que nous devons rechercher, c'est justement l'efficacité des travaux de la commission. Je demanderai à tous les membres de la commission qui auront la parole de respecter les droits et privilèges de leurs collègues et d'utiliser leur droit de parole pour environ 20 minutes chacun. De cette façon, il y aura une participation plus générale des membres de la commission et je crois que les travaux de la commission avanceront avec beaucoup plus d'efficacité. Je donne la parole de nouveau au député de Lafontaine.

M. LEGER: M. le Président, la question que j'avais posée tantôt à M. Gauvin — je vais la lui répéter — concerne l'inspection sélective obligatoire des véhicules automobiles. Comment voyez-vous l'application pratique de cela? Une personne qui s'en va avec son automobile, qui est choisie par je ne sais quel organisme de surveillance, à qui on dit: C'est ton automobile qu'on prend, on va voir si elle est en bon état, quelles sont les implications pour elle? Pour les personnes qui peuvent être pressées, qui doivent aller quelque part comment fonctionnerait justement, sans nuire trop au public, la vérification sélective des automobiles?

M. GAUVIN: Moi, j'ai l'impression qu'on va passer l'hiver ici si vous voulez en fait qu'on détaille les différentes méthodes pratiques d'une politique d'inspection sélective. J'aimerais dire tout de suite que ce n'est pas mon intention de passer l'hiver ici. Mon intention est de répondre aux questions. Le comité s'est rendu compte qu'il y avait un problème au Québec: il y a trop d'accidents. Nous avons fait le tour des ministères, nous avons engagé du personnel pour voir quels étaient les principaux problèmes, comment on pouvait les résoudre et nous sommes arrivés en fait, avec une recommandation majeure qui est l'instauration d'un conseil de sécurité routière pour prendre charge de tout le dossier des accidents et arriver à de véritables recommandations.

Quant aux autres, ce sont des recommandations qui peuvent être mises en pratique plus immédiatement. Sur votre question particulière, je pense qu'il y aurait peut-être dix moyens pratiques d'y arriver. Nous avions à ce moment-là des gens à notre emploi. Je ne pense pas qu'il serait normal pour moi de commencer à détailler comment un système de personnes choisies au hasard devrait être établi, de quelle façon. Vous avez en fait différents systèmes qui sont en vigueur. Il y en a qui existent dans les provinces canadiennes, qui sont tous différents les uns des autres. Je regrette, je pense qu'on recommence tout le débat que nous avions fait et, parlant en mon nom personnel, je puis dire que je ne suis pas prêt à recommencer tout le débat, nonobstant le respect que je dois aux députés.

Comme on dit dans un certain langage, "back to square one", et pour moi ce n'est pas "back to square one". Ce que nous avions à faire est fait; les recommandations sont là. Quant à l'application pratique, en détail, à savoir quel est le format du rapport que l'inspecteur devra faire, ce n'était pas à nous de faire ce travail.

M. LEGER: M. le Président, je voudrais quand même dire à M. Gauvin, avec tout le respect que j'ai pour lui, qu'il a été engagé par le gouvernement pour faire un travail. Il nous a donné un rapport et les députés ici présents... Je pense que, puisque vous avez accepté de venir à la commission parlementaire pour expliquer votre rapport à ceux qui auront à adopter des lois dans ce domaine, il est normal — et c'est la continuation logique de votre mandat — de venir donner aux députés qui en ont besoin des explications sur vos conclusions, des renseignements là-dessus.

Je pense, avec tout le respect que j'ai pour vous, comme vous en avez pour les députés, que nous avons chacun un rôle à jouer et je pense que le vôtre n'est pas terminé, puisque vous êtes arrivé avec ces conclusions. Les députés ne doivent pas dire: L'affaire est là, on a le rapport puis on se démêle avec ça.

Je pense qu'il est normal qu'on vous pose des questions. Si vous calculez que vous êtes arrivé à ces recommandations, c'est parce que vous avez passé... Il ne s'agit pas de retourner au but no 1 pour recommencer à partir du début, mais simplement de nous dire de quelle façon vous êtes arrivé à ces conclusions pour que nous sachions que vos recommandations reposent sur des cas précis, concrets. Par la suite, il nous sera possible de parler, quand il s'agira d'adopter la loi, avec connaissance de la situation que vous, payé par le gouvernement, avez été mandaté à étudié pour apporter ces recommandations.

Je pense donc qu'il est absolument normal qu'on vous pose des questions là-dessus aujourd'hui, pour qu'on joue notre rôle.

M. BONNIER: M. le Président, j'invoque le règlement. J'ai l'impression qu'on n'utilisera pas très bien notre journée, 'parce que des trois parties du rapport, d'après les contacts qu'on a eus, le domaine de la sécurité routière n'est pas celui qui est surtout mis en question, ce sont les deux autres. Cependant, si on ne se fixe pas une limite de temps et si on n'adopte pas une bonne procédure, on risque de perdre notre temps. Il me semble que l'objectif qu'avait le ministre en suggérant la présence ici aujourd'hui de M. Gauvin n'est pas de nous obliger tous ensemble

à relire le rapport avec M. Gauvin. Ce n'est pas à mon avis le rôle de M. Gauvin non plus de relire son rapport comme il l'a dit à deux ou trois reprises, mais beaucoup plus d'apporter des points de clarification. Pas plus que ça. S'il y a un terme qu'on ne comprend pas, ou des choses comme ça, très bien.

Mais il y a des réponses qui sont dans le rapport et je pense qu'il faut avoir lu le rapport. C'est aussi simple que cela.

M. TETLEY: Puis-je demander au député de Lafontaine de continuer à poser ses questions? Après, parce que le député... S'il vous plaft! Il y a tellement de règlements à faire sur l'assu-rance-automobile.

M. BOSSE: Oui, mais le rapport Gauvin n'est pas le rapport Morin. Ce n'est pas le rapport à Claude Morin.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): A l'ordre, s'il vous plaît, M. le député de Dorion!

M. TETLEY: Puis-je demander au député de Lafontaine de continuer à poser ses questions? Après, le député de Beauce-Sud a des questions importantes. Je n'ai pas fini de poser toutes mes questions et je voudrais terminer ce matin la sécurité routière. Incidemment, M. le député de Taschereau, on m'a dit, presque sur la bible, que la section la plus importante était la sécurité routière. L'autre est beaucoup plus difficile. D'accord?

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Lafontaine.

M. LEGER: Deux courtes questions et je verrai, par la suite, si cela clarifie. Vous arrivez à la recommandation numéro 15, selon laquelle le système de points de démérite soit repensé. Alors, si on est arrivé avec cette recommandation, quelles sont les déficiences que vous avez remarquées dans le système de points de démérite pour conclure cela?

M. HARVEY (Charlesbourg): Page 85.

M. GAUVIN: Je vais répondre à votre question de la façon suivante. Sur le système de points de démérite, le comité a mis une équipe de recherchistes qui ont analysé plusieurs dizaines de systèmes de points de démérite, le bien-fondé, la pondération qui y est apportée. Nous en sommes venus à la conclusion que le système avait des lacunes. Il y a des exemples qui ont été donnés dans le rapport. Quant au texte lui-même, il a été déposé au gouvernement. Je n'aimerais pas que mon intervention précédente soit mal prise. Je n'ai aucune objection à expliquer le rapport. Ce que j'ai voulu dire est que chacune de ces recommandations a été appuyé d'un dossier. Je ne possède pas le dossier, et, comme professionnel, je ne discute- rai que lorsque j'aurai le dossier en ma possession et une équipe pour recommencer l'étude. C'est dans ce sens que j'ai répondu à votre question.

La recommandation d'un système de points de démérite, comme la recommandation d'un système d'inspection, s'appuie sur une analyse d'une équipe de recherche à l'intérieur du comité. Cela n'a pas été tiré en l'air et c'était sérieux, et je refuse d'entrer dans le débat, simplement sur l'idée: Comment vous souvenez-vous que telle chose s'est faite? Chacune de ces recommandations a été étayée d'une documentation, d'une analyse de différentes possibilités pour en arriver à ce texte.

Pour répondre à votre question, il y a des lacunes. On en a donné des exemples. Je peux revenir et vous en citer quelques-unes. Il y en a plusieurs autres. Dans le système de points de démérite, je pense que le comité a analysé au-delà de 20 systèmes de points de démérite, celui de l'Ontario pour n'en nommer qu'un, de d'autres provinces canadiennes, et des Etats américains. Tous ont des particularités et le système du Québec est déjà mieux que ce qu'il était avant et cela pourrait être encore mieux. Ce sont des choses qui nous apparaissent... On en a cité dans le rapport. Je vais essayer de le retrouver si vous voulez et puis...

M. LEGER: Je comprends mal. J'ai lu le rapport Gauvin moi aussi. Ce que je voulais avoir de vous, c'était la dernière conclusion qui vous a amené à apporter comme solution que le système de points de démérite doit être repensé.

Je suis capable moi aussi d'aller à la page 85. Ce n'est pas ce que je vous demande. Si vous êtes ici, ce n'est pas pour nous donner les pages de votre rapport. On l'a lu. C'est pour que vous expliquiez les raisons qui vous ont amené à cela. Que vous n'ayez pas avec vous vos spécialistes, je pensais qu'une personne qui a dirigé... Il y a peut-être d'autres membres de votre comité qui ont été plus particulièrement intéressés à un aspect de votre rapport. Me Belleau pourrait peut-être nous répondre. Je ne sais pas. Mais nous posons des questions aujourd'hui. Si vous n'avez pas le personnel de recherche à côté de vous, vous avez quand même en mémoire, parce que vous avez travaillé à ce rapport tellement longtemps, les raisons majeures qui vous ont amené à ces conclusions.

M. GAUVIN: Je pensais vouloir vous donner les raisons majeures. Je ne veux pas entrer dans un débat inutilement et je reviendrai peut-être sur le fait que si je suis obligé de répondre ou non. En fait, je suis prêt à collaborer entièrement. J'ai dit que le comité a pris un recherchis-te ou deux dans un dossier en particulier et nous avons examiné au-delà de 20 systèmes de points de démérite. Quant au système du Québec, il en ressortait certaines lacunes. Nous avons dit: II faut le repenser. Nous en avons

donné quelques-unes. Vous me demandez: Effectivement, quelles sont-elles? Je pense que, pour moi, elles sont dans le rapport ou elles sont dans le dossier qui a été déposé dans les archives. Je pense que le gouvernement nous a donné un mandat et que nous l'avons rempli.

Mais le gouvernement a également des experts, maintenant, à son emploi pour dire si c'était justifié ou non. Nous, nous croyons l'avoir justifié dans le texte du rapport et dans les documents que nous avons déposés. Je suis prêt, en fait, à reprendre les documents. Que le député reprenne l'analyse pour savoir pourquoi on croit que le système de démérite n'est pas assez sévère et que son application — c'est un ensemble de facteurs — n'est pas assez généralisée dans la province.

M. TETLEY: Si je comprends bien — au sujet du système de démérite, M. Gauvin, je crois que votre rapport est très explicatif et très bien — le système de démérite est une espèce de code pénal qui n'a pas pour but final la prévention des accidents; c'est ce que j'ai retenu du rapport. Croyez-vous que c'est une bonne constatation de ma part?

M. GAUVIN: En fait, c'est un des éléments de la sécurité routière, un bon système de démérite, mais, si vous avez une loi qui est mal appliquée ou qui n'est pas appliquée suffisamment il est bien certain, en fait, que ça n'aura pas les effets...

M. TETLEY: C'est en application.

M. GAUVIN: Dans le système de démérite, si vous le permettez, il y a effectivement un autre point qui a une importance, c'est que ce système a été mis en vigueur, mais qu'on a conservé les amendes dans d'autres endroits. On a noté, de la part de certaines personnes...

M. TETLEY: La ville de Québec, par exemple.

M. GAUVIN: Même le code de la route où les gens se disent : Je suis pénalisé une fois pour avoir fait un excès de vitesse et je suis pénalisé une deuxième fois. Est-ce que réellement, quand on crée un nouveau système, on ne doit pas prendre tout en considération et en créer un seul, plutôt que d'avoir une amende de la ville XYZ, une autre condamnation pour une autre chose et, finalement, un système de démérite? On ne vient pas chapeauter, en fait, toutes sortes de choses. Est-ce qu'on ne devrait pas avoir un système qui prend soin de tout ça, au lieu d'avoir à la fois une condamnation avec une amende et la perte de points? Je pense que le public croit qu'il est condamné deux fois. Cela, c'est un des aspects.

M. TETLEY: Est-ce qu'il y a un endroit au monde où il y en a un seul?

M. GAUVIN: En Colombie-Britannique... M. TETLEY: Oui, très bien.

M. GAUVIN: ... où on a effectivement comprimé le tout. On a abandonné, quand on a eu un système de démérite, les amendes afin que ce soit un ensemble.

M. TETLEY: Merci.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable député de Lafontaine. Une dernière question.

M. LEGER: Ma dernière question, M. le Président; je ne sais pas si M. Gauvin va être capable de répondre à celle-là. C'est à la recommandation 17, quand vous dites qu'en matière de sécurité routière il devrait y avoir une surveillance constante et vigilante des routes par un corps de policiers qualifiés et qu'ils aient tous les pouvoirs nécessaires, est-ce que, actuellement, ils manquent réellement de pouvoirs? Est-ce qu'ils n'ont pas les pouvoirs sans les utiliser à fond? Est-ce qu'il leur manque réellement des pouvoirs?

M. GAUVIN: Je pense que certains corps de police ont des pouvoirs différents d'autres. Un, en fait, soit les policiers de la Sûreté du Québec, se plaint d'avoir moins de privilèges, de pouvoirs que d'autres corps municipaux. C'est peut-être le point que nous avons voulu souligner. Fondamentalement, en fait, il va falloir que le gouvernement reconnaisse comme prioritaire une surveillance des routes et qu'on donne les instructions requises pour qu'il s'en fasse plus. Nous, on croit qu'il ne s'en fait pas assez.

Maintenant, cela n'a pas été l'intention du comité de blâmer les policiers, loin de là; je pense que les policiers vont faire ce qu'on leur dit de faire. Je pense que c'est aux gouvernants, si on veut cesser le carnage sur les routes, d'exiger qu'il y ait plus de surveillance sur les routes. Moi, je regrette, mais quand on me dit qu'il y en a suffisamment au Québec, je pense que tout le monde est en mesure de constater qu'il n'y en a pas suffisamment.

M. LEGER: Je vous remercie. C'était une réponse précise à ma question et je l'ai bien appréciée, celle-là.

M. GAUVIN: J'aimerais souligner que, quand j'ai la réponse, ça me fait plaisir de la donner; quand je ne l'ai pas, c'est quand même très difficile, dans les conditions où nous travaillons.

LE PRESIDENT (M. Kennedy): Le député de Beauce-Sud.

M. ROY: M. le Président, je reviens à la recommandation no 1 : " Qu'il y ait coordina-

tion des efforts des autorités ayant juridiction, compétence ou quelque intérêt en matière de sécurité routière". Pour que vous ayez indiqué cette recommandation, vous avez dû certainement faire quelques constatations. Moi, j'aimerais que vous puissiez nous dire — c'est important pour nous de le savoir — quelle a été la plus grande faiblesse ou la plus grande lacune qu'il vous a été permis de découvrir pendant l'enquête que vous avez menée. Vous avez certainement un point ou deux, en particulier, qui ont dû attirer votre attention d'une façon spéciale. J'aimerais avoir un peu plus de détails là-dessus.

M. GAUVIN: En fait, le rapport du comité élabore longuement les différentes juridictions qui ont des pouvoirs dans tout ce secteur de sécurité routière. Il mentionne, comme j'ai dit tout à l'heure, que le fédéral, le provincial et le municipal en ont. Au niveau fédéral et provincial, différents ministères en ont. Vous nous demandez quelle est la plus grande lacune? C'est un ensemble de faits indiquant que des lois contiennent des choses contradictoires, jusqu'à un certain point. Je ne peux pas, ce matin, vous donner d'exemples précis, autres que ceux qui sont contenus au rapport ou dans une loi; on prévoit une certaine norme quelconque qui affecte le conducteur, puis, dans une autre loi, on en prévoit une autre.

J'ai donné un exemple tout à l'heure, en fait, de parcs où la limite de vitesse est fixée par un organisme qui ne consulte pas l'autre organisme, dans la province de Québec. C'est un exemple. En fait, ce n'est pas la plus grande lacune, c'est une série de lacunes.

M. ROY: Une série de lacunes. M. GAUVIN: Oui.

M. ROY: Est-ce que vous avez ça également à l'intérieur même d'un ministère? Prenons un exemple, le ministère des Transports, aux entrées de village sur une route donnée. Vous avez des entrées de village qui sont limitées à 45 milles à l'heure et le village voisin, sur la même route numérotée, elle est à 30 milles.

M. GAUVIN: En fait, c'est probablement un exemple de manque de coordination entre les municipalités et le provincial.

M. ROY: Ce ne sont pas les municipalités à ce moment, je ne le sais pas. Je pense qu'il y aurait un travail à faire à ce niveau, mais pour que vous en ayez fait votre première recommandation, j'aurais cru qu'il y avait certainement quelque chose en particulier, un fait qui a attiré votre attention d'une façon spéciale, d'une façon particulière.

Quant à la recommandation numéro 9: "Que les recommandations suivantes, déjà formulées par le Canadian Automobile Theft Bureau et la Commission Prévost soient mises en pratique":

On dit ici: "Que le gouvernement du Québec exige une licence provinciale avant d'autoriser qui que ce soit à exploiter un commerce de vente ou de réparation d'automobiles neuves ou usagées, de vente de pièces usagées, de démolition ou de reconstruction de voitures. Le règlement devra également couvrir les cimetières d'automobiles". "Que le ministère des Transports émette un registre détaillé à l'intention de tous ceux qui sollicitent la permission de faire le commerce des automobiles et des pièces usagées. Le ministère devra effectuer une vérification régulière de ce registre et sévira contre ceux qui négligeraient de se conformer à l'exigence d'une inscription complète de toutes les transactions". "Les entreprises de démolition et de mise en pièces de véhicules devront être soumises à l'obligation de faire un rapport individuel au Bureau des véhicules automobiles pour chaque véhicule détruit, démoli ou démantelé et elles auront soin de mentionner le nom de l'ancien propriétaire du véhicule, la description du véhicule et les raisons de la mise en pièces. De plus, avec ce rapport, elles devront expédier, si cela n'a déjà été fait, les plaques d'immatriculation du véhicule ainsi que la plaque contenant le numéro d'identification du véhicule".

Il y a trois grands paragraphes dans cette recommandation. Pour ma part, je voudrais avoir des explications. Pourquoi avez-vous cru nécessaire d'inclure ces trois recommandations dans le règlement de la circulation routière, alors que les cimetières d'automobiles, je ne vois pas, en ce qui me concerne, au point de vue sécurité routière, ce que peut avoir à faire là-dedans le fait d'entrer dans un registre ou non les pièces détaillées, les pièces usagées? J'aimerais, pour ma bonne gouverne, avoir plus d'explications et plus de détails que ceux qui sont inclus au rapport. Cette recommandation me paraît un peu superflue.

M. GAUVIN: II faudrait peut-être poser la question aux assureurs qui paient de nombreuses indemnités pour des vols d'automobiles également qui sont intéressés par cela. Quand on parle de la sécurité routière, le comité a essayé de disséquer le problème en trois parties, mais il faut admettre, qu'à certains moments, il y a des parties pour lesquelles on se demande où elles vont exactement. Ce secteur aurait pu aller dans une autre partie qui s'appelait, par exemple, l'indemnisation pour les vols. Mais il nous a paru, puisqu'on parlait de toutes les lois régissant la sécurité routière, que c'était la place appropriée. O-i peut le prendre et l'envoyer ailleurs, si c'est simplement le problème qui n'est pas à la bonne place dans le rapport. C'est un jugement que les membres ont fait. Je pense qu'on croit que c'est là qu'il va.

Quand vous vous demandez ce que font ces choses relativement à la sécurité routière, ma réponse est qu'il y a quand même des véhicules

au Québec, au niveau des vols. Les vols de véhicules sont plus nombreux que dans d'autres provinces. Ce n'est peut-être pas rattaché à la sécurité routière, mais je vais vous donner l'explication que nous avions. Le taux de recouvrement n'est certainement pas des plus hauts dans toutes les provinces.

La commission Prévost s'était penchée sur le problème et avait fait une série de recommandations visant à éviter certains abus, comme des véhicules qui sont démolis entièrement; on se sert effectivement des numéros d'immatriculation des véhicules pour un commerce illicite.

Ces recommandations, d'ailleurs, ont déjà été mises en pratique dans d'autres provinces avec succès. C'est dans ce sens-là qu'elles ont été réincorporées ici. La commission Prévost elle-même les avait retenues; nous les avons examinées et nous croyons que cela permettrait d'abord de réduire les vols de véhicules dans la province de Québec et, également, cela permettrait de contrôler un peu mieux, en fait, le commerce des pièces usagées où, apparemment, certains abus se pratiquent.

M. ROY: Plus de question, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Kennedy): Le député de l'Assomption. Le député de Charlesbourg.

M. HARVEY (Charlesbourg): M. le Président, au départ, je pense que l'unanimité semble se faire vis-à-vis des différentes recommandations quant à l'objectif de la protection du consommateur. C'est à cet égard, je pense, que je vais plutôt diriger ma question, à savoir: dans l'ordre des priorités, vous avez quelques recommandations, no un, deux, trois, qui semblent se regrouper, mais il y en a d'autres également qui suivent, notamment le port de la ceinture de sécurité.

Mais dans toutes ces recommandations, quelle est celle qui devrait avoir une priorité absolue? Vous disiez tout à l'heure qu'il s'agissait d'une action dont le gouvernement peut lui-même établir l'échéancier, mais quel est, d'après vous, la mesure, du point de vue de la sécurité, qui devrait être la priorité du gouvernement, en matière de sécurité?

M. GAUVIN: En fait, c'est la recommandation 18 qui devrait être la priorité, où on crée un organisme de sécurité routière qui pourra, en fait, chevaucher et examiner le problème et mettre de l'avant les mesures qui sont véritablement appropriées au Québec et non pas, assez souvent, des mesures qui sont importées d'ailleurs et qui ne fonctionnent peut-être pas au Québec. Lorsqu'on veut guérir la maladie, il faut réellement en connaître les causes, et les causes des acci- dents de la route au Québec, les véritables causes, il y a très peu de gens qui les connaissent.

M. HARVEY (Charlesbourg): J'ai remarqué, dans vos tableaux comparatifs, également, que vous insistez fortement sur l'exemple de l'Ontario. C'est une province qui ressemble un peu plus au Québec, au point de vue de la population, du nombre d'automobiles. Mais lorsque vous établissez, par exemple, un régime ou que vous proposez un régime qui serait dirigé par ce conseil de la sécurité en incluant le "no fault" et la réglementation comme coordination avec les municipalités ou les différents corps intermédiaires qui existent, est-ce que vous ne donnez pas... Enfin, j'apprécierais que vous donniez plus de précisions quant au régime qui existe en Nouvelle-Ecosse, vis-à-vis le "no fault" et vis-à-vis également des normes de sécurité qui sont...

M. TETLEY: ... cet après-midi, peut-être.

M. HARVEY (Charlesbourg): D'accord, mais vis-à-vis des points de démérite et de la sécurité routière en général.

M. GAUVIN: En fait, d'abord sur la question du "no fault", le conseil de sécurité routière, l'organisme que nous demandons, il n'y a pas, en fait, de relation entre lui et le "no fault".

M. HARVEY (Charlesbourg): C'est une coquille. Je voulais plutôt parler des points de démérite.

M. GAUVIN: Ce conseil-là devrait, tel que nous l'avons dit dans le rapport, examiner l'ensemble du dossier de la sécurité routière. Au niveau du conseil de démérite, il ne fait pas de doute qu'il aurait repris l'analyse que le comité a faite lui-même, il aurait pu examiner les effets à long terme du système, en fait les effets du système tel qu'il a été appliqué.

Tout à l'heure, on disait que l'introduction du système de démérite au Québec a abaissé le nombre d'accidents; moi, je ne le sais pas. Je ne suis pas capable de faire cette affirmation, il faut avoir des spécialistes, des gens dont le métier est d'examiner le problème, savoir quel est l'effet de certaines mesures en particulier.

Très souvent, au point de vue de la sécurité routière, on agit un peu à l'aveuglette. On établit un programme sans savoir véritablement quels vont être les effets, et même sans savoir quels vont être les véritables coûts. Le coût, tant pour le consommateur, tant pour le gouvernement que toutes les parties intéressées.

Le conseil, en fait, est un organisme de

recherche, un organisme d'information pour le public qui va regarder, effectivement, tout le problème des accidents de la route, tout le secteur que nous avions nous-mêmes envisagé, avec les moyens que nous avons, pour en arriver aux recommandations les plus appropriées.

En fait, il y a à peu près une demi-page de texte qui définit le rôle du conseil et c'est quand même passablement explicite. C'est à la fois un organisme de recherche, d'information, de mise de l'avant de mesures qui devraient être adoptées par le gouvernement.

M. HARVEY (Charlesbourg): Vous partez du principe, enfin avec l'étude de ce qui existe déjà. Il y a effectivement, au gouvernement du Québec, un service de la sécurité routière, service provincial, qui lui-même travaille avec des groupes interministériels et coordonne les efforts, de qui relève, par exemple, le Bureau des véhicules automobiles, de qui relève la promotion sur la sécurité routière, de qui relève la formation des moniteurs ou des instructeurs qui oeuvrent dans le monde des écoles de conduite. Vous touchez tout cela dans votre rapport. Ne croyez-vous pas que la formule actuelle, sans y aller complètement dans une nouvelle structure juridique, peut elle-même, soit par un assouplissement quelconque ou une coordination davantage axée vers la communion des services plutôt que chaque ministère fasse son bonhomme de chemin, tout seul, en matière de sécurité, en matière de protection du public, de contrôle ou la justice, par ses points de démérite, tout le monde, enfin, chapeauter cela par un seul organisme? C'est à la lumière de ce que vous avez vu, de l'existence réelle du dossier.

M. GAUVIN: En fait, nous avons, comme je l'ai mentionné, fait le tour des ministères. Vous mentionnez l'existence du service de sécurité routière. Il ne s'occupe, d'après nous, que d'un aspect du problème. Or, le problème concerne à la fois d'autres ministères auxquels ce service ne peut directement s'impliquer.

Nous, nous croyons que l'organisme de recherche devrait regarder le problème non pas seulement du point de vue d'un ministère, mais du point de vue de l'ensemble du dossier. Cela va même plus loin, du point de vue du rôle des municipalités et, même plus loin, du rôle de tout ce qui touche le secteur, dans le gouvernement fédéral. Ce chapeau aura pour objectif de mettre de l'avant des mesures qui, là, devront être appliquées à l'intérieur de différents ministères ou même de différentes municipalités.

M. HARVEY (Charlesbourg): Merci, M. Gau-vin.

LE PRESIDENT (M. Kennedy): Le député de Rouyn-Noranda.

M. SAMSON: M. le Président, je voudrais demander à M. Gauvin, en ce qui concerne la recommandation no 8 — "que soit instaurée dans la province une politique d'inspection sélective obligatoire des véhicules automobiles", etc. — est-ce qu'il a été porté à l'attention de la commission — si oui, cela expliquerait peut-être aussi pourquoi vous en arrivez à cette recommandation — le fait qu'une autre province, je donne à titre d'exemple l'Ontario, qui a une politique d'inspection des véhicules — lorsque certains véhicules sont retirés de la route avec exigence de faire certaines réparations qui coûtent passablement plus cher que la valeur de l'automobile, dans certains cas — que certains de ces véhicules pourraient avoir été remis sur la route au Québec, vendus par des vendeurs d'automobiles du Québec?

M. GAUVIN: Cela a été porté à notre considération. D'ailleurs, il y a probablement des véhicules qui se ramassent dans d'autres endroits. Je peux vous donner un exemple qui me vient à là mémoire. En Colombie-Britannique, ils ont un système et ils prétendent que tous leurs véhicules se ramassent en Saskatchewan, tous les véhicules dont ils ne veulent pas.

Alors, je pense que c'est un problème global; aussi, une juridiction, comme je l'ai mentionné, qui dépassent les territoires ou ce qu'on fait à un endroit, peut avoir une "dysfunction" ailleurs et nuire à un autre endroit.

Maintenant, cela rejoint, je pense, la question du député de Lafontaine, mais, encore une fois, nous avons examiné différents systèmes d'inspection. Lesquels? Présentement, je ne m'en souviens pas, à moins de retourner au dossier. Je sais très bien que ceux de l'Ontario, du Nouveau-Brunswick, du Massachusetts et de la Californie — on n'est pas allé en Californie — ont été examinés, mais, dans tout cela, il faut déterminer, au point de départ, quels sont les objectifs. Nous, notre objectif, c'était la sécurité routière. Si votre objectif est strictement la sécurité routière, vous allez probablement avoir un système d'inspection bien différent de celui d'un organisme qui aurait pour objectif la protection du consommateur.

En fait, on l'a mentionné dans le mémoire au point de vue de la sécurité routière, il n'y a que quelques points qui valent réellement la peine, économiquement, d'être inspectés. Il y a un retour décroissant, en fait, si on va vérifier le 42e boulon, je ne sais pas où; ça cause tellement peu d'accidents que le coût pour aller vérifier dépasse largement tous les avantages qu'on veut obtenir. Ce que nous avons dit dans la recommandation, c'est qu'on devrait, au niveau de la sécurité routière, en tenir compte. Par exemple, ça ne donne rien d'inspecter les véhicules sous tous les aspects. Au niveau de la sécurité routière, une analyse "cost-benefit" dit que c'est simplement quatre ou cinq points qui devraient être inspectés. Si ma mémoire est bonne — et ce que je n'aime pas, en fait, c'est que je dois me fier simplement à ma mémoire — on a mis de l'avant que le système de Californie

a été, au point de vue des coûts-bénéfices, le plus avantageux. Ce système ne vérifie au hasard qu'un pourcentage des véhicules et non pas après accident. En fait, qu'est-ce que ça donne de vérifier après? Au point de vue de la sécurité routière, dans certains régimes, vous allez vérifier après l'accident si le véhicule est en bon état. Ma foi du tonnerre, pour la sécurité routière, c'est avant qu'il aurait fallu le faire, pas après.

Cela assure que le véhicule est en état d'être remis sur la route, mais ça ne règle pas l'ensemble du problème. Il peut redevenir en mauvais état avant d'avoir un autre accident.

M. SAMSON: Est-ce que vous n'avez pas, à un moment donné, envisagé l'inspection obligatoire de tous les véhicules sur une base, disons, de quelques points à être vérifiés, les points qui sont les plus importants en ce qui concerne la sécurité routière? Quand je note l'inspection sélective obligatoire, évidemment, ça pourrait vouloir dire qu'on va sélectionner certaines catégories. Est-ce que ça voudrait dire qu'on inspecterait, par exemple, des véhicules qui sont âgés de quatre ans ou plus?

M. GAUVIN: C'est une possibilité ou certains véhicules qui ont plus de tant de milles d'usure. Il y a différentes possibilités. Il s'agit, en fait, de déterminer quelle est la nature du programme, quels sont les fonds qu'on a pour le faire. Une fois cela fait, on peut également arriver avec différentes solutions. Il n'y a pas un seul régime d'inspection; il y en a probablement plus qu'un qui peut être mis en vigueur. Il s'agit, pour nous, de déterminer lequel rapporte le plus au moindre coût.

M. SAMSON: Est-ce que vous considérez qu'un système d'inspection, pour être le plus valable possible, devrait presque nécessairement ressembler à certains des systèmes d'inspection qui existent dans les provinces voisines pour éviter ce transfert de voitures d'une province à l'autre? Je m'explique: il y a, je pense que vous le savez, des voitures qui, en Ontario, sont retirées de la route et qui sont effectivement revendues au Québec sans avoir subi les réparations que l'Ontario exigeait.

Est-ce qu'à ce moment-là notre système d'inspection n'aurait pas avantage à être uniformisé, disons, dans toutes les provinces canadiennes, quoi?

M. GAUVIN: II n'y aurait pas nécessairement avantage parce que les gens du ministère des Transports qui sont directement impliqués et qui ont examiné le problème ont mis de l'avant un régime avec certains objectifs. Ils ont examiné ces régimes-là et les avaient rejetés. Ils ont rejeté, eux, le système de l'Ontario. Il y a des gens qui disent qu'il n'est pas aussi bon qu'il en a l'air.

Il y a aussi d'autres provinces voisines qui en ont, mais je pense que ces régimes-là ne sont pas nécessairement les plus efficaces. Il ne faudrait pas nécessairement les adopter parce qu'ils sont là.

M. SAMSON: En ce qui concerne la recommandation no 10 sur le port obligatoire de la ceinture de sécurité, est-ce que, dans vos consultations, tous les organismes consultés sont en faveur du port de la ceinture de sécurité obligatoire ou s'il y en a d'autres qui se posent des questions? Est-ce qu'on peut en arriver à la conclusion que c'est absolument une chose qui empêche les accidents, ou si le port de la ceinture de sécurité dans certains cas ne serait pas peut-être une cause de blessures plutôt qu'une sécurité?

M. GAUVIN: Le port de la ceinture est un sujet très débattu. Mais présentement il y a plusieurs Etats et plusieurs endroits où on a décidé de le rendre obligatoire.

Même en France, il est en vigueur sur une base sélective. Vous l'avez, en fait, à Porto-Rico. C'est, effectivement, la seule mesure, d'après l'ensemble des spécialistes consultés, qui peut réellement amener une réduction substantielle des blessures et même du nombre des décès. Les preuves ont été faites. Il est possible que dans des cas particuliers, ça puisse avoir un effet contraire; je n'oserais pas me prononcer dans ce sens. Mais il faut regarder, en fait, l'ensemble, le résultat global de la mesure. Et, dans un endroit où elle a été mise en vigueur, on a noté une réduction extrêmement sensible, non seulement du nombre de décès mais du nombre de blessés graves au cours d'une période. Les preuves sont faites. Je pense que c'est un élément qui permettrait de réduire passablement le nombre de décès sur les routes au Québec.

M. SAMSON: Est-ce que le port de la ceinture de sécurité, sur une catégorie de routes donnée plutôt que sur l'ensemble, ne serait pas une solution à envisager?

M. GAUVIN: Cela a été envisagé dans certaines régions. Maintenant, il ne faudrait pas oublier qu'un pourcentage très considérable des décès surviennent à l'intérieur de limites géographiques très restreintes de l'endroit où habite un particulier. Donc, peut-être qu'on ne le résoudrait pas. Mais je n'oserais pas me prononcer.

M.SAMSON: En ce qui concerne —c'est là ma dernière question — la recommandation no 11: Que les classes ou catégories de permis soient redéfinies en fonction du type de véhicule que ces permis autorisent à conduire, que les examens soient aménagés en conséquence. Dois-je comprendre par là qu'il a été porté à votre attention que des gens, possédant, par exemple, un permis de chauf-

feur, qui, au sens de la loi, veut dire pouvoir conduire tout genre de véhicule, sauf l'autobus, ne peuvent, effectivement, conduire tous les genres de véhicules, sauf l'autobus?

M. GAUVIN: Oui, il y a des exemples, en fait, où c'est beaucoup trop libéral dans le bon sens du mot, où on devrait restreindre le permis à certaines situations particulières. On a donné l'exemple du fait que les gens trament une remorque; il y a une technique pour tramer une remorque puis, on ne demande pas aux gens s'ils sont capables de la tramer ou non. On a donné l'exemple des gens qui peuvent prendre une motocyclette, sans démontrer qu'ils sont capables de le faire alors que c'est un art particulier. Ce sont des exemples qui me viennent à l'esprit.

M. SAMSON: Cela pourrait s'appliquer aussi aux camions, par exemple? Si je comprends bien le but visé...

M. GAUVIN: C'est ça.

M. SAMSON: ... c'est de faire en sorte que la personne, qui possède un permis, devrait le posséder pour une catégorie en particulier ou pour de multiples catégories, selon ses capacités, selon les examens qu'elle a subis.

M. GAUVIN: C'est exact. M. SAMSON: D'accord, merci. M. MERCIER: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Kennedy): Le député de Bellechasse.

M. MERCIER: ... j'aimerais revenir sur la recommandation no 7 et, par la suite, la recommandation no 17, et demander à M. Gauvin, d'une part, s'il pourrait nous fournir des commentaires additionnels relativement à sa recommandation no 7, concernant une loi du bon Samaritain? S'il peut nous donner quelques détails sur ce qu'il a à l'esprit. Et, d'autre part, relativement à la question 17, sans vouloir extrapoler davantage l'esprit de sa recommandation, si les membres du comité ont eu à l'esprit de recommander davantage une patrouille routière autonome, distincte de celle du corps policier de la Sûreté du Québec, identique, par exemple, au "highway patrol" qu'on peut rencontrer dans les Etats américains.

M. GAUVIN: Sur la recommandation no 7, c'est une loi qui existe, en fait, dans plusieurs juridictions. On a porté à notre attention qu'il serait bon qu'elle soit adoptée au Québec également. C'est une loi qui n'a pas autant de conséquences pratiques quand on peut l'appliquer, mais ça aide le climat lorsque, lors d'un accident, les gens qui aident des accidentés, ne peuvent pas être poursuivis s'ils ont commis une erreur en voulant aider les autres. Il y a du pour et du contre; nous avons cru qu'il serait préférable de l'avoir.

Sur la recommandation no 17, déterminer, en fait, si au Québec il devrait y avoir une patrouille distincte est une tâche monumentale.

Il ne faudrait pas oublier les considérations géographiques du Québec et également les différents corps policiers qui existent. Seule une étude exhaustive le dirait. Je pense que les gens du ministère de la Justice se sont certainement penchés sur le problème.

Ce que nous voulons, ce n'est pas nécessairement une patrouille distincte, c'est une augmentation de la surveillance sur les routes. Elle pourrait être très bien faite à l'intérieur des corps existants, si on leur donne les moyens physiques de le faire, si on leur donne également cela comme étant une priorité, comme étant très important. Je ne voudrais certainement pas dire qu'au Québec on est mieux avec un système qu'avec l'autre, parce qu'encore une fois, si vous adoptez un système comme aux Etats-Unis, il pourrait très bien ne pas fonctionner ici, parce que les situations sont complètement différentes.

M. MERCIER: Est-ce que dans l'exercice de votre mandat, en tant que membre de la commission, vous avez eu le loisir de faire des études comparatives entre l'efficacité des patrouilles routières sur les autoroutes et les résultats obtenus, comparativement, par exemple, à la patrouille routière ou au facteur temps consacré par les policiers du Québec de la patrouille routière?

M. GAUVIN: Non; d'abord je pense que la comparaison serait à certains égards boiteuse, parce que les deux n'ont pas les mêmes mandats. Un est limité à un champ d'activité, il ne fait que cela, tandis que l'autre a à appliquer différentes lois. A ce moment-là, quand vous comparez les deux, il faudrait effectivement prendre simplement la portion de celui qui applique plusieurs lois, la portion de son temps qu'il fait dans la patrouille de la route, pour voir s'il est aussi efficace. Il n'y a probablement pas de raison qu'il le soit moins, sauf que pour lui il y a également d'autres lois à appliquer qui peuvent prendre une partie de son temps.

Là-dessus la Sûreté du Québec a elle-même des patrouilles, à ma connaissance, qui ne s'occupent que de ça, dans des régions où effectivement le besoin le demande; peut-être qu'il devrait y en avoir plus.

M. MERCIER: Vous a-t-il été donné d'obtenir les données statistiques du nombre d'heures-

hommes consacrées à la patrouille routière par la Sûreté du Québec?

M. GAUVIN: Non. A ma connaissance, le système d'information comme tel n'existait pas au moment où nous avons fait nos analyses et je ne sais pas s'il en existe présentement où on peut dire quel est le temps consacré. D'ailleurs c'est quand même très difficile; si vous avez un policier à la campagne qui se promène sur une route et qui est appelé pour trois choses différentes, comment divisez-vous son temps?

M. MERCIER: A tout événement c'est ce qui vous a amenés, les membres de la commission, à recommander d'accentuer la patrouille routière?

M. GAUVIN: Ce qui nous a amenés effectivement à l'ensemble des recommandations, c'est la constatation que la situation des accidents au Québec est intolérable. Il y en a trop. On a beaucoup plus d'accidents de la route qu'en Ontario. On a 40 p.c. ou à peu près de plus de morts sur nos routes par 100,000 de population.

On s'inquiète de la survie du fait français au Québec, de la dénatalité. On devrait peut-être, au lieu de parler de dénatalité, essayer de conserver les vivants un peu plus et puis essayer de réduire notre expérience non pas au niveau d'endroits où on a mis énormément de contraintes, mais au moins comme en Ontario. Je ne peux pas concevoir, moi, comment il se fait qu'on ne peut pas en arriver à avoir une expérience semblable à celle de l'Ontario. Les différences, il y en a, mais, si au Québec la situation est moins bonne, ça veut dire qu'il va falloir faire un peu plus d'efforts. Mais pourquoi, pour conserver les gens, pour économiser des vies et réduire les dépenses de l'Etat, ne pas assurer en fait une meilleure protection du public?

Ce qui nous a frappés au point de départ, c'est qu'on parle de taux d'assurances trop élevés, mais ce n'est pas surprenant, les accidents sont beaucoup plus élevés. Pourquoi au Québec ne peut-on pas organiser notre société pour avoir le moins d'accidents possible? Pourquoi serions-nous pires que ceux qui sont de l'autre côté d'une frontière, existante ou non?

M. MERCIER: Au cours de vos recherches, est-ce qu'il vous a été donné de faire des études comparatives sur le comportement du conducteur québécois, comparativement à celui de l'Ontario ou de la Colombie canadienne?

M. GAUVIN: Vous demandez là une tâche monumentale qui requiert des moyens dont le comité ne disposait pas. Il y a même une étude américaine qui a été faite.

On a dépensé $3 millions pour découvrir, effectivement, le portrait type du conducteur ayant un accident et, assez curieusement, après toutes ces dépenses d'argent, il me ressemblait autant qu'il vous ressemble. Alors, quelles sont les conclusions qu'on peut en tirer? Très peu de conclusions.

Pour répondre à votre question: Les Québécois qui s'en vont dans un endroit où c'est plus surveillé n'ont-ils pas tendance à faire plus attention?

Et, assez curieusement, vous avez des gens d'autres juridictions qui viennent au Québec et, sachant qu'il y a moins de surveillance au Québec, ils se comportent, assez souvent, comme des Québécois.

M. MERCIER: Dernière question, M. le Président, relativement au système ambulancier. Est-ce qu'il vous a été donné de recueillir des statistiques, par exemple, sur les pertes de vie attribuables aux déficiences du système ambulancier, suite à un accident, les délais, etc, occasionnés pour l'obtention des premiers soins ou des services d'urgence?

M. GAUVIN: Pas exactement comme tel. Il y a certaines analyses qui ont été faites, dont une au Royal Victoria à Montréal, sur tout le système ambulancier et le nombre de vies qu'on pourrait sauver avec une amélioration. Ce que nous avons trouvé est aberrant. Cela fait possiblement quinze ans qu'on demande une meilleure coordination de ce système et cela a pris quinze ans pour l'atteindre. Et, même encore, on ne l'a pas atteinte, semble-t-il.

Il ne faut pas se surprendre qu'il y ait des accidents, qu'il y ait des décès sur la route si on a une situation de laisser-aller dans certains secteurs. J'ai dit cela tout à l'heure; il y a une réglementation qui a été adoptée et, d'après ce qu'on mentionne, elle va certainement améliorer la situation. Est-ce la meilleure solution? C'est bien difficile d'y répondre.

Encore une fois, le comité a reçu dans un de ses mémoires une recommandation assez farfelue d'avoir je ne me souviens plus combien d'ambulances, combien de médecins sur la route... C'est tout un problème de déterminer quel est le coût qu'impliquent ces recommandations et quels en sont les avantages. Il y a un certain équilibre à atteindre, et qui peut être atteint. On peut certainement améliorer le système. En effet, si tout est parfait au Québec, je voudrais qu'on me dise pourquoi nous avons plus d'accidents qu'ailleurs. Si tout va si bien, pourquoi s'interroge-t-on?

M. MERCIER: Merci, M. Gauvin.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Taschereau.

M. BONNIER: M. le Président, deux courtes questions. Premièrement, je constate dans les recommandations que vous ne faites aucune recommandation quant à un système d'éducation obligatoire dans les écoles secondaires, en

particulier, pour apprendre aux élèves comment conduire. Est-ce parce que vous trouvez que cela n'est pas tellement important en soi ou bien trouvez-vous qu'il y aurait avantage à en établir un, comme dans certaines provinces, certains Etats américains, ne serait-ce que pour démontrer les conséquences et l'importance de cette question chez les jeunes et créer une espèce de psychologie?

M. GAUVIN: Effectivement, si nous avions réglé tous les problèmes qu'on mentionne ici, il n'y aurait pas eu besoin d'avoir le Conseil de la sécurité routière. Le premier problème que nous avons eu en examinant les accidents de la route fut de déterminer quelles sont les mesures les plus appropriées pour le Québec. Précisément parce que le comité n'a pu déterminer toutes ces mesures et comment elles devraient être appliquées dans leurs modalités, nous avons dit: II faudrait avoir un organisme qui ne ferait que cela et dont ce serait la seule priorité, qui n'aurait pas à administrer des lois, qui ne ferait que regarder le problème.

Nous avons discuté longuement pour savoir s'il devrait y en avoir ou non, mais je pense que le comité ne pouvait arriver avec une conclusion ferme sur ce problème en particulier dans les temps qui lui ont été alloués et avec le budget qui lui a été alloué.

M. BONNIER: Merci. Maintenant, relativement au conseil — et c'est ma dernière question — vous mentionnez qu'il doit être financé à même 1 p.c. des primes d'assurance. Par ailleurs, vous soulignez dans le rapport qu'il doit être représentatif de différents éléments de la société. Dans vos recommandations, est-ce que vous situez ce conseil près d'un ministère ou en dehors d'un ministère? Est-ce que vous croyez qu'il serait avantageux, par exemple, qu'il dépende de l'ensemble des assureurs et que les assureurs — c'est la question que je pose — soient obligés d'y contribuer financièrement, comme ils le font pour le fonds d'indemnisation, par exemple?

M. GAUVIN: Tenir pour acquis que, parce que les assureurs y contribuent ils devraient le contrôler, cela voudrait dire que, puisque les assureurs contribuent, en fait, à une somme assez formidable de réparations dans les garages, ils devraient peut-être contrôler les garages également. Loin de nous l'idée d'avoir le contrôle du conseil par les assureurs; ils seront certainement intéressés, ils pourraient être représentés. Le comité n'a pas voulu entrer dans le débat, à savoir où il devrait se situer au niveau du gouvernement. Nous avons voulu lui assurer plutôt un mode de financement qui lui accorderait des fonds suffisants pour faire la tâche monumentale qu'il y a à faire.

Il nous a semblé que, grâce aux économies qu'on réaliserait dans l'amélioration de l'administration du système d'assurance, il serait assurément acceptable de se servir d'une partie de ces économies pour financer le conseil. D'autres modes peuvent être utilisés. Ce qui est intéressant ici, c'est que ce n'est pas le budget du gouvernement qui est affecté pour autant; ça vient d'une nouvelle source et non pas des fonds existants.

M. BONNIER: Merci.

LE PRESIDENT (M. Kennedy): Le député de Beauce-Sud.

M. ROY: Nord.

LE PRESIDENT (M. Kennedy): Beauce-Nord, excusez.

M. HARVEY (Charlesbourg): C'est très important, M. le Président.

UNE VOIX: Ne perdez pas le nord, M. le Président.

UNE VOIX: C'est parce qu'il n'est pas habitué.

M. SYLVAIN: M. Gauvin, c'est peut-être une question d'ordre général. Vous avez dit que vous aviez accordé autant d'importance à l'un ou l'autre des chapitres de la sécurité routière, de l'indemnisation et de l'administration, et que la solution idéale pouvait se trouver en réglant les trois facettes que vous nous avez données dans votre rapport.

Pouvez-vous me dire si votre comité a accordé une importance spéciale et particulière au chapitre de la sécurité routière? Je vous pose cette question-là partant du fait suivant: il semble que le nombre, la fréquence et la gravité des accidents au Québec sont peut-être le facteur le plus influent. C'est une vérité de La Palice. Il me semble qu'attacher une importance particulière au secteur de la sécurité routière serait un moyen de régler peut-être 30 p.c., 40 p.c. ou 50 p.c. des problèmes de l'indemnisation et des problèmes de l'administration.

En partant du fait — du moins c'est mon opinion personnelle — de la non-observance des règlements de circulation, des lois, c'est surtout l'aspect punitif qui est souvent négligé dans le système qu'on a à l'heure actuelle. Il me semble que traiter de la sécurité routière sous toutes ses facettes serait peut-être apporter une partie de la solution au problème de l'assurance-automobile à l'heure actuelle. Tantôt, vous avez dit: On va régler les trois en même temps. Est-ce que vous accordez plus d'importance au chapitre de la sécurité routière qu'aux autres chapitres déposés dans votre rapport?

M. GAUVIN: Essentiellement, le rapport

porte sur l'assurance-automobile. La sécurité routière y a été insérée, je devrais dire, à la demande même des gens qui avaient été approchés pour examiner le problème. Chaque fois que vous discutez d'assurance-automobile, on fait le raisonnement suivant: il n'y a pas de problème en assurance-automobile, il n'y a qu'un problème en sécurité routière. Réglez ça et tout va se régler. Nous disons que ce n'est pas exact. Le rapport du comité, comme le titre l'indique, est un rapport dont la grande partie traite de l'assurance-automobile.

Nous avons parlé de la sécurité routière et nous lui avons accordé toute la priorité que nos moyens et nos disponibilités nous permettaient mais, essentiellement, c'est un rapport qui traite de l'indemnisation des victimes. Ceci étant dit, lorsqu'on parle de sécurité routière, il est exact que c'est la plus grande part du dollar-prime qui va pour l'indemnisation des victimes.

M. SYLVAIN: II restera toujours que, même avec toutes les normes, même dans leur meilleure application et avec le meilleur système, on aura à vivre dans un système et à essayer d'instaurer un système idéal d'assurance-automobile par rapport à l'indemnisation des victimes et à l'administration du système. Pour nous, il faut rechercher d'abord la protection du consommateur ou la protection du public québécois. Il y a des statistiques qui ont été données, par exemple, depuis qu'on a mis, aux Etats-Unis, les limites de vitesse à 55 milles à l'heure depuis la crise énergétique. Selon des statistiques, par exemple, au mois de juillet, sur quatre fins de semaine, il y a eu 33 1/3 p.c. de diminution d'accidents d'automobile.

C'est pour ça que je suis amené à dire: Oui, il faut vivre dans un meilleur système d'indemnisation des victimes et une meilleure administration du système. Je suis porté à penser en premier, par exemple, à la sécurité routière où on devrait mettre l'accent à 100 p.c, d'après nous.

M. GAUVIN: En fait, c'est un choix que vous avez à faire, pas nous. Nous, en fait, nous avions à examiner l'ensemble du problème et à déterminer où il y avait des lacunes. Ce que nous disons dans le rapport au niveau de l'assurance-automobile, c'est qu'il est inefficace, le système. Diminuez les accidents, il va rester inefficace. Avec la sécurité routière, il y a trop d'accidents. Ne réduisez pas les accidents, vous n'abaisserez pas réellement les pertes pour la société. Enfin, il faudrait quand même qu'on cesse, à un moment donné, de dire: Ce n'est pas dû à l'un, c'est dû à l'autre. On se renvoie la balle. Certaines gens ont dit : Ne touchons pas à l'administration du régime, règlons ça. Nous, on dit: Cela règle une partie du problème mais ça ne règle pas le problème dans son entier. C'est ce que nous disons dans le rapport. Nous croyons, en fait, que l'endroit où on obtient le plus difficilement des résultats est le secteur de la sécurité routière.

LE PRESIDENT (M. Kennedy): Le député de Trois-Rivières.

M. BACON: En fait, ça précise la question que mon collègue de l'une des deux Beauce vient de poser. Il y aurait quand même un certain synchronisme à... On se trompe moins quand on dit : L'une des deux Beauce.

Il y aurait quand même un certain synchronisme... Je comprends que la sécurité routière est quand même la base fondamentale de tout le système, mais est-ce que vous recommanderiez un certain synchronisme avec un laps de temps avant la mise en application? Je comprends que vous voulez y aller de front et globalement, mais est-ce que vous laisseriez des laps de temps, à un moment donné, quitte à apporter des corrections dans certaines recommandations, ou à renforcer certaines recommandations, plutôt que d'y aller, en mettant tout le paquet à la fois?

M. GAUVIN: Je pense que le problème évolue avec le temps et qu'il faudra apporter des correctifs. Pour moi, j'espère qu'on va attaquer le problème le plus rapidement possible, dans tous les secteurs à la fois, pas simplement dans un secteur. Parce que c'est un peu utopique de dire: On corrige à un endroit, on ne corrige pas à l'autre. En fait, je pense qu'il faut prendre le problème de front. Il faut adopter les solutions qui paraissent les plus appropriées et les mettre de l'avant. Nécessairement, ces solutions, quelque temps après, il faudra probablement les modifier, parce que la société évolue avec le temps et les besoins, et les problèmes changent.

LE PRESIDENT (M. Kennedy): M. le ministre.

M. TETLEY: M. le Président, je suis venu ici, ce matin, avec dix pages de questions dactylographiées d'avance. Mes collègues ministériels et de l'Opposition ont posé toutes mes questions, sauf deux. En conséquence, je crois que c'est peut-être un très bon moyen de procéder. Au moins, c'est démocratique. Je crois que le ministre est ici pour apprendre des choses plutôt que donner des leçons, etc.

Je voudrais faire des constatations, M. Gau-vin. Si je comprends bien votre section au sujet de la sécurité routière, votre recommandation 18 est très importante; concernant la création d'un organisme chargé de toute la sécurité routière, et c'était en réponse à deux questions des députés ministériels. Si je comprends bien, c'est parce que le nombre des accidents au Québec est très élevé et que le coût de ces accidents est aussi très élevé. Je note aussi avec

grand intérêt votre recommandation 8 au sujet de l'instauration dans la province d'une politique d'inspection sélective obligatoire, disant que c'est important. Aussi la recommandation 10: Que soit adoptée une loi rendant obligatoire le port de la ceinture de sécurité. J'ai devant moi ici un document — qui est sorti après votre rapport — du Club Automobile de Québec, dernière édition, c'est-à-dire l'édition d'août, je crois, où on dit que ça peut réduire énormément, suivant ses chiffres, le coût des accidents et même le résultat de ces accidents. Il n'y a que 1/2 de 1 p.c. des cas où la ceinture a augmenté apparemment, suivant le rapport, le coût des accidents.

Je note votre recommandation 15. Il faut changer, modifier notre système de démérite. Je trouve ces recommandations à part les autres, très intéressantes et importantes.

Mais j'ai une dernière constatation parce que d'autres ministères sont impliqués. Je note les représentants du ministère de la Justice, du ministère des Transports et de la Voirie, qui aujourd'hui se trouvent ensemble dans le ministère des Travaux publics. Je vois une grande importance qu'ils agissent et c'est pourquoi, peut-être, votre recommandation 18 est si importante; il faut un seul comité en charge.

Mais les deux questions que j'ai sont au sujet de l'ivresse et la limite de vitesse. Je sais qu'il est très difficile de trouver les chiffres au sujet du nombre d'accidents causés par l'ivresse. Avez-vous des observations d'ordre général au sujet de l'ivresse? Je sais qu'un professeur Thompson est venu me voir et je crois qu'il a témoigné devant votre comité, le professeur Thompson de McGill. Il a expliqué que, dans certains Etats des Etats-Unis, on a constaté que dans 50 p.c. des accidents où il y avait une mortalité il y avait un cas d'ivresse.

Avez-vous des observations? Ou peut-être d'autres membres de votre comité, M. Rankin et Me Belleau, ont-ils des observations à ce sujet qui n'ont pas été faites ce matin?

M. GAUVIN: Peut-être M. Rankin le pourrait-il? Je peux simplement dire que les chiffres que M. Thompson cite. M. Thompson a été un des consultants en sécurité routière et il est professeur de mechanical engineering à McGill. Il s'occupe depuis plusieurs années de recherche en sécurité routière et il a été un des consultants retenus par le comité. Les chiffres américains semblent être valables au Québec si on se fie aux données des coroners qui ont examiné les gens qui sont morts dans des accidents; il y a à peu près ce que vous signalez.

C'est la seule observation que je peux faire maintenant, l'ivresse au volant, c'est un problème social sûrement pas facile à régler.

M. TETLEY: Mr Rankin, have you anything to add?

MR RANKIN: The only thing I could say is that this is a good illustration of the problems that we are facing, the necessity for this council. You could spend the whole budget of our committee, just investigating that one problem and what measures we have to take. We are not alone having trucks and drivers on the roads, they exist all over United States.

Just an example: The Department of Transports spend $14 millions a year on trying to find out the causes of automobile accidents and what to do about it.

M. TETLEY: Which department of...

MR RANKIN: US Department of Transports.

M. TETLEY: On m'a dit, MM. Gauvin, Belleau et Rankin, qu'en Angleterre on avait imposé une loi et des examens par ivressomètre.

Depuis quelques mois, peut-être six mois, il y avait une baisse remarquable dans le nombre d'accidents, mais après que les gens ont vu qu'ils pouvaient quand même conduire en état d'ivresse, le chiffre d'accidents a augmenté. On m'a dit que le seul moyen de contrôler la conduite des ivrognes, ce sont des inspections, presque injustes ou non démocratiques, irrégulières, après les heures de lunch, autour de la Place Ville-Marie ou du Parlement ou je ne sais pas où, et d'arrêter tout le monde, sans mandat, avec un mandat général, d'adopter une loi selon laquelle le service de la sécurité routière peut arrêter n'importe qui et l'examiner, le tester. Quelles sont vos observations à cet effet?

M. GAUVIN: La seule observation que je voudrais faire, c'est que, si on veut résoudre non pas seulement l'ivresse, la limite de vitesse, l'ensemble des problèmes reliés aux accidents d'automobiles, il va falloir prendre des mesures assez draconiennes, assez, je dirais même, radicales.

Est-ce que la population est prête à les accepter? Mais si la population ne veut pas les accepter, il ne faudrait pas qu'elle se plaigne, après cela, que ses primes d'assurance sont trop élevées.

M. TETLEY: Apparemment, en Angleterre, la population était tellement démocratique, ou aimait tellement prendre un petit coup après le travail, qu'elle n'a pas accepté ce système. Elle n'a pas voulu l'accepter.

Une autre question, la deuxième et dernière question que j'ai, c'est la limite de vitesse. Aux Etats-Unis, comme nous le savons tous, on a réduit la limite, à cause de la pénurie de pétrole, de 70 milles à l'heure à 55 milles à l'heure.

J'ai devant moi un rapport du National Underwriter, le 9 août 1974 — encore après votre rapport — un rapport du National Safety Council, où on a noté que la vitesse imposée de 55 milles à l'heure a coupé en grande partie ou en bonne partie, de 23 p.c, le nombre d'acci-

dents mortels. En effet, le titre est: "Traffic deaths down 23 p.c. in first half, for six months, per mile fatalities at record low". J'aimerais, si possible, avoir vos observations au sujet de la vitesse comme cause d'accidents et mortalités au Québec.

M. GAUVIN: En fait, les études qui existent indiquent bien qu'il y a un rapport entre les deux. On oublie alors l'état de la route. Cela peut varier énormément. C'est tout ce que je peux dire sur ce sujet.

Alors, ce n'est pas simplement une variable qu'il faut regarder, mais il faut regarder l'ensemble des variables. Je n'ai pas vu l'analyse dont vous parlez, mais j'aimerais vous signaler qu'une autre analyse, faite par un autre organisme, disait que, d'accord, les décès, aux Etats-Unis, ont diminué, mais ce n'est pas exclusivement dû aux limites de vitesse. C'est dû également au fait qu'en même temps, le nombre de milles parcourus a diminué d'une manière assez fantastique.

Je pense, moi, que, là-dedans, il y a beaucoup de gens qui parlent de sécurité routière sans réellement savoir — et je ne voudrais pas impliquer que c'est ça — tout l'ensemble du problème. On dit: On baisse les vitesses. Mais, en même temps, effectivement, il y a moins de milles parcourus. Lequel est la cause?

Il peut y avoir d'autres facteurs. C'est un ensemble de causes qui a résulté en une réduction; et quant à moi, je ne me prononcerai pas à savoir si c'est l'une plutôt que l'autre.

M. TETLEY: Je vous remercie, M. Gauvin.

LE PRESIDENT (M.Kennedy): Le député de Trois-Rivières.

M. BACON: Une dernière question. Dans toutes ces choses que vous avez pu observer, vis-à-vis de la sécurité routière, est-ce que les contraintes, les défenses, tout ce qui est limitatif, est-ce que vous avez pu vous faire une opinion à savoir si à moyen et à long termes ça donne plus de résultat que de...?

En fait, qu'est-ce qui donne le plus de résultat globalement, vis-à-vis de la sécurité routière sur...? Vous ne le savez pas.

M. GAUVIN: En fait, ce sont des mesures beaucoup plus sévères que celles que nous avons au Québec.

M. BACON: Est-ce que l'éducation, à la base, ou... on a fait la remarque là-dessus tantôt...

M. GAUVIN: Oui...

M. BACON: Est-ce que les campagnes d'éducation... Si à un moment donné, au départ, le conducteur, avant même de pou- voir obtenir un permis, était plus soucieux ou savait mieux ce qu'il a dans les mains quand il est assis dans un véhicule automobile et tout ce qui peut arriver, ou quelle est sa responsabilité, question d'éducation, ça ne serait pas...? Il me semble que vous n'avez pas tellement appuyé vis-à-vis de la sécurité routière, sur l'éducation.

M. GAUVIN: C'est peut-être parce que les coûts-bénéfices d'un tel système sont relativement disproportionnés. Vous mentionnez, en fait, l'éducation. Je pense que les membres en tant que tels et les consultants croient à l'éducation, mais si vous commencez aujourd'hui à la prématernelle à éduquer les gens, dans combien d'années allez-vous avoir des résultats?

Egalement, si vous éduquez ces derniers, mais que les autres ne sont pas changés, les autres vont être des victimes, ils vont devenir pareils. Une expérience a été faite dans une province canadienne où on a pris deux groupes d'étudiants choisi au hasard. A un groupe, on a donné des cours spéciaux de conduite, très avancés, et à l'autre on n'a rien donné. On a suivi l'expérience pendant quelques années et, après quelques années, ça ne paraissait plus qu'on avait donné des cours. Cela a paru dans l'immédiat et la conclusion de cette enquête, quand même assez sérieuse, indiquait que dans l'immédiat, ils se souvenaient de tout, mais éventuellement, ils embarquaient, en fait, avec les autres et prenaient les mêmes habitudes.

Alors, l'éducation du public, j'y crois, mais à très long terme et avec des coûts très élevés.

M. TREMBLAY: M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Kennedy): Le député d'Iberville.

M.TREMBLAY: M. le Président, j'aimerais demander à M. Gauvin s'il a jeté un regard attentif sur le phénomène de la nouvelle mode des chemins de ceinture entourant certaines municipalités de la province et des chemins de contournement pour corriger, naturellement, certaines routes qui sont désuètes sur le plan de la sinuosité, et le reste? J'aurais deux exemples à soumettre pour illustrer probablement un problème qui existe un peu partout.

Alors, ma première question. Avez-vous étudié ce phénomène des chemins de ceinture qui entourent une ville — construits par le gouvernement du Québec — qui, nécessairement, arrivent à des intersections de rues desdites municipalités et des chemins de contournement pour corriger des courbes ou passer en dehors d'un village, etc? Après cela...

M. GAUVIN: En fait, c'est un problème

quand même de nature particulière, à l'intérieur du mandat du comité.

Je suis obligé de dire simplement que nous n'avons pas commencé à analyser tout le système routier pour savoir où sont les problèmes. On nous en a soumis et le comité n'a pas cru que c'était son mandat d'aller voir physiquement à quelle place sont tous les problèmes. Alors, je suis obligé de vous dire qu'on nous en a signalé à l'occasion de certaines discussions et que le comité n'est pas allé plus loin que simplement en prendre note.

M. TREMBLAY: Alors, sur le phénomène particulier des chemins de ceinture autour des villes, ça ne s'est pas fait concrètement par des commissaires qui ont examiné la situation?

M. GAUVIN: Pas plus que cela ne s'est fait concrètement, en fait, pour d'autres problèmes bien précis. C'est en fait, un examen global du système et non pas à l'intérieur de points bien particuliers pour voir si tel article est fait comme il faut.

M. TREMBLAY: Est-ce qu'il vous a été donné d'examiner de plus près, par exemple, à la lumière peut-être de ce que le député de Bellechasse a mentionné tout à l'heure, le processus d'études et d'analyses des fonctionnaires du ministère des Transports, de la date de l'ouverture d'un chemin de ceinture ou d'un chemin de contournement à la date où ils décident d'implanter un système d'éclairage ou de feux de signalisation? Je peux dire facilement, moi, qu'il s'écoule entre douze mois et deux ans.

M. GAUVIN: Le fait qu'il s'écoule beaucoup de temps ne veut pas dire que c'est nécessairement fait de la meilleure façon.

M. TREMBLAY: C'est une cause d'accidents fréquents et, personnellement, j'ai un exemple. Je ne veux pas accabler la commission avec cela, mais c'est pour illustrer la pensée de plusieurs citoyens. A Farnham, il y a un chemin de contournement qui a été construit il y a peut-être cinq ou six années, qui a été ouvert à la circulation lorsque le nouveau député du comté d'Iberville a été élu...

UNE VOIX: Nommez-le.

M. TREMBLAY: ... juste avant le 29 octobre. Mais, à toutes fins utiles, ce chemin a été construit et il n'avait pas été ouvert officiellement à la circulation depuis trois ans pour des raisons qu'on ignore. On l'a finalement ouvert et ça fera un an bientôt. Les signaux lumineux ont été demandés à grand renfort de publicité par des journaux régionaux et de suppliques de la part du député et du maire de la municipalité et le reste. Ces gens n'ont pas été entendus. J'ai même fait produire un rapport de police de la ville de Farnham démontrant qu'en l'espace de six mois, avec statistiques à l'appui et vérification de registres, il y avait eu quinze accidents assez graves à une intersection en particulier, rue Jacques-Cartier et chemin de ceinture; j'ai produit ce rapport au ministère des Transports, ça fait peut-être quatre ou cinq mois. Dimanche soir, j'étais à Farnham. Cela le faisait exprès, j'allais assister à des événements où mes électeurs m'attendaient, j'ai passé à l'intersection de la rue Jacques-Cartier où venait de se produire un accident déplorable. Je voyais le policier qui transportait une dame dans ses bras, enfin tout le scénario dramatique d'un accident d'automobile.

A deux coins de rue plus loin, à l'angle d'une autre rue, toujours à l'intersection du chemin de ceinture, un autre accident déplorable. Alors imaginez, avec le minimum de sens des responsabilités d'un représentant du peuple, ce qui nous passe dans l'esprit à ce moment-là. Hier, lundi, je me mets au téléphone et j'appelle les responsables au ministère des Transports. C'est regrettable que M. Mercier n'y soit plus, peut-être que diligence aurait été faite avant. J'ai été obligé presque de me battre avec ces gens-là, et on m'a toujours répondu que l'analyse et l'étude étaient en cours. J'ai dit: Vous allez changer d'idée, messieurs, parce que lundi prochain, si je n'ai pas de nouvelles précises, on va faire une bataille à Montréal, à 255 Crémazie. Je vais te rappeler lundi prochain, le...

LE PRESIDENT (M. Kennedy): La question s'il vous plaft.

M. TREMBLAY: Je remarque que vous n'avez pas apporté d'attention particulière à ça, je ne vous blâme pas, parce que vous avez fait un tour d'horizon, mais les accidents d'automobile, c'est tout ça. C'est la responsabilité des gens. Hélas! ce ne sont pas les gens élus qui sont toujours responsables de ça, c'est dommage. Mes remarques sont terminées, M. le Président.

M. MERCIER: M. le Président, à la question soulevée par le député de Trois-Rivières, tout à l'heure, relativement à l'éducation dans le domaine de la sécurité routière, je ne voudrais pas vous avoir mal compris. Est-ce que vous pourriez préciser si vous êtes favorables à l'implantation de programmes d'éducation aux niveaux primaire et secondaire? D'après le rapport que vous avez cité en ce qui a trait aux cours de conduite au niveau secondaire, vous avez semblé attacher plus ou moins d'importance à l'efficacité ou aux résultats obtenus suite à ces cours.

M. GAUVIN: Ce que j'ai voulu dire, et je pense que le message n'a pas été compris, c'est que nous n'avons pas analysé de programmes complètement particuliers. J'y crois au système, enfin une éducation continuelle de la population, les membres y croyaient. Le problème,

c'est quel programme. Ce n'était certainement pas le rôle du comité d'aller déterminer des programmes absolument précis, la tâche est trop monumentale. Ce que je peux dire cependant, c'est qu'il ne s'en fait pas assez. Je pense que vous allez être d'accord pour dire que le budget du service de sécurité routière est insuffisant, les fonctionnaires me l'ont dit et certains fonctionnaires qui ne sont plus fonctionnaires nous l'ont même mentionné à ce moment-là.

Alors je pense, effectivement, qu'aller déterminer si tel ou tel programme devrait être implanté, ce n'était pas le but du comité. Le comité n'est pas entré dans cette...

M. MERCIER: Vous êtes favorable à l'implantation de programmes d'éducation à partir de la maternelle?

M. GAUVIN: Nous sommes favorables à toute mesure qui réduirait les accidents au Québec.

LE PRESIDENT (M. Kennedy): Merci, messieurs, la commission suspend ses travaux à quinze heures.

(Suspension de la séance à 12 h 43)

Reprise de la séance à 15 h 11

M. CORNELLIER (président de la commission permanente des institutions financières, compagnies et coopératives): A l'ordre, messieurs !

La commission des institutions financières, compagnies et coopératives reprend l'étude du rapport Gauvin. Tel qu'il a été entendu ce matin, nous procéderons à l'étude du deuxième secteur ou du deuxième chapitre ou de la deuxième partie qui traite des recommandations sur l'indemnisation des victimes d'accidents d'automobile.

Je cède la parole au ministre des Institutions financières, compagnies et coopératives.

Indemnisation des victimes d'accidents

M. TETLEY: M. le Président, je vous remercie. Nous sommes rendus à la page 343, les recommandations du rapport Gauvin sur l'indemnisation des victimes d'accidents d'automobile. Je remarque la présence de Me Bouchard, pas Louis-Philippe Bouchard, mais plutôt son frère, Jean-Marie Bouchard, commissaire ou membre du comité. Je vous souhaite la bienvenue. C'est peut-être opportun que vous soyez ici parce que ma première question est au sujet de votre recommandation 19 et je la cite: "Que soit aboli complètement le droit de recours en vertu du régime de la faute pour toutes les pertes découlant de blessures corporelles subies dans un accident d'automobile".

J'ai évidemment lu votre rapport que je trouve très important et surtout à la page 175 et suivantes où vous avez parlé exactement de cette question. Pourriez-vous, messieurs les membres du comité Gauvin, si c'est possible — si ce n'est pas possible, tant pis — faire un sommaire des reproches principaux que vous formulez à l'encontre du système actuel d'indemnisation? Les grandes lignes, en effet. Est-ce possible? Je trouve que le rapport a été assez clair mais je crois que, pour le bénéfice de notre commission et pour la discussion d'aujourd'hui, une telle réponse serait très utile pour tout le monde présent.

M. GAUVIN: J'aimerais, avant de parler de cette question, resoulever un point qui, à cause de la chaleur du débat ce matin, est peut-être passé inaperçu. Le comité a eu un mandat du gouvernement. La description du mandat apparaît au tout début du rapport. Le comité comme tel croit avoir rempli son mandat en présentant au gouvernement une série de recommandations, lesquelles sont toutes décrites et sont toutes explicitées à l'intérieur du rapport. Je pense que le comité, nonobstant la valeur de la commission, n'a pas à venir défendre son rapport.

Les membres, comme tels, acceptent de venir expliquer, chacun pour autant que ses

activités professionnelles lui permettent de le faire, le sens de certaines recommandations qui pourraient n'être pas claires. Je ne pense pas que ce soit l'obligation des membres de venir défendre le rapport puisque le rapport a été déposé et c'est au gouvernement de le juger, c'est à vous de le juger. C'est à vous d'avoir, s'il le faut, des experts pour reprendre les conclusions ou reprendre les recommandations. C'est dans ce sens-là que ce matin j'ai souligné que, s'il fallait reprendre chacune des recommandations et aller refaire la démonstration de la raison de cette recommandation-là, on imposerait aux membres, aux ex-membres, puisque le comité n'existe pas, un fardeau que les membres ne peuvent supporter.

J'aimerais souligner qu'il est exact que les membres ont reçu une rémunération. Ils ont cependant produit un rapport dans les termes de leur mandat. Quant à moi, le mandat, il se terminait après la parution du rapport.

Cela dit, je suis certainement prêt, et je pense que mes collègues le sont, dans la mesure du possible, à donner certaines explications sur le rapport. La troisième partie comporte une critique du régime actuel d'indemnisation non seulement dans son fondement juridique, mais également dans l'administration du système actuel. Le comité croit que toute l'argumentation qu'il avait à présenter est contenue à l'intérieur de son rapport et les pièces justifiant ses conclusions ont été remises au Conseil exécutif.

Vous demandez: Pourquoi l'abandon du système de la faute? Je pense que, partout dans le monde, on s'interroge et partout dans le monde on entend les mêmes sons de cloche de gens qui ne veulent pas modifier le système. Fondamentalement, le système actuel nous paraît désuet et dépassé. Il n'indemnise pas véritablement de manière juste et équitable et à un coût — ce qui est important — raisonnable l'ensemble des victimes d'accidents d'automobile.

Si on se réfère au mandat du comité, il était clair que le comité devait, en premier lieu, s'interroger sur le comportement du système dans lequel les personnes doivent vivre, lorsqu'elles sont victimes d'un accident d'automobile. Le comité croit que le système actuel doit être modifié de fond en comble pour donner place à un système plus juste et équitable pour l'ensemble des victimes.

M. TETLEY: M. Bouchard, avez-vous quelque chose à ajouter de votre expérience, de votre connaissance?

M. BOUCHARD: M. le Président, MM. les membres, sans vouloir reprendre l'argumentation qui est élaborée au long dans le rapport, je voudrais peut-être insister sur une petite phrase qui est insérée, qui est lourde de conséquences, dans l'introduction même du rapport. Nous étions fort conscients qu'en abordant d'une part, l'étude du problème de l'indemnisation des victimes d'accidents d'automobile et, d'autre part, l'étude des causes d'accidents d'automobile un problème majeur que nous aurions à étudier était indubitablement le problème de la faute.

C'est pourquoi je vous réfère à l'introduction du rapport où l'on dit ceci: Le comité a abordé l'étude de cette question, y compris celle de la faute, sans aucune idée préconçue et la notion de faute n'a pas été écartée a priori comme devant être un acquis.

C'est donc dire que le cheminement du comité est parti d'un état de fait, une étude objective de la situation telle qu'on la connaît et telle qu'on la vit, tous les jours, chez les victimes, chez les assureurs, devant le tribunal, ainsi de suite.

Il n'y a donc pas eu de rejet systématique de la faute, mais le cheminement de notre étude nous a conduits à la conclusion qui était, remarquez, celle que nous avions constatée, d'une part, dans les autres études qui ont été rédigées et que nous avons consultées et qui a été, également, constatée par l'expérience de d'autres endroits, plus particulièrement aux Etats-Unis et en Europe. Nous avons constaté une chose qui était fondamentale, qui est une notion sociologique inéluctable contre laquelle nous n'y pouvons rien. C'est que le phénomène de l'automobile est devenu un risque social.

Partant, étant un risque social, cela entraîne comme conséquence que les notions traditionnelles, qui étaient élaborées par le législateur pour rencontrer une situation donnée, n'étaient plus adéquates, parce que précisément les notions de base que nous rencontrons dans le code civil, ce ne sont pas des notions de théorie de risque social, tel que maintenant nous la connaissons. Je me réfère à ce propos à la notion fondamentale de la faute, l'article 1053 et suivants du code civil, qui a fondé tout le système depuis l'émergence du phénomène automobile dans le contexte non seulement québécois, mais dans le monde entier, qui était le seul recours qui existait pour justifier une indemnisation.

Ce que nous disons fondamentalement — et là, il serait assez long de vous faire la synthèse du cheminement que nous avons fait — c'est qu'il résultait de cette étude que le système d'indemnisation que nous connaissions, étant essentiellement basé sur la faute, parce que notre système cherche un coupable, exige un coupable pour avoir une indemnisation, alors cherchons un coupable. Il faut donc que dans tous les accidents, dans toutes les circonstances, il faut l'indemnisation, il faut donc trouver quelqu'un qui, en définitive, doit être considéré comme l'agent causant de cet accident.

Mais avec le développement de la société, est-il si certain que moi, individu, citoyen de la société, qui conduis une automobile, je sois le seul et unique responsable d'un accident que je cause? La question se pose. La

question n'est pas théorique, la question a été soulevée ailleurs et, je vous le dis, partout dans le monde. On a dit: Ce n'est pas si sûr. L'individu qui conduit est un individu conditionné, un individu dont une foule de facteurs vient influer sur le comportement, d'une part, et, d'autre part, il y a toute l'infrastructure matérielle de cet individu, à partir de son véhicule jusqu'aux routes sur lesquelles il circule et toutes les circonstances physiques dans lesquelles il est plongé. Qu'est-ce qui nous dit que l'agent véritable, la cause véritable est uniquement l'individu au volant de son automobile?

La résultante des conclusions fait que les Etats-Unis ont dépensé des millions en recherche pour déterminer quelles étaient les causes véritables des accidents d'automobile. La plupart de ces universités — vous les avez, ces rapports; tous les résultats d'enquêtes ont été déposés au gouvernement, cela n'a pas été pigé en l'air, c'est déposé et c'est scientifique — concluent qu'il n'est pas beaucoup possible, dans les circonstances actuelles, compte tenu, précisément, du contexte sociologique dans lequel nous sommes plongés, qui est de plus en plus un contexte difficile, lourd pour tout le monde et dont l'être humain ne ressort pas toujours comme étant un homme libre...

Or, le phénomène de la faute conçoit l'individu comme étant l'homme idéal, ce bon père de famille qui, en toute circonstance, est capable de mesurer les conséquences de son acte et dont il répond constamment des conséquences, l'homme libéré, cet homme capable de porter un jugement et cet homme qui, en toute circonstance, aura un jugement juste et adéquat. C'est tout cela qui est mis en cause dans la base même de la notion de faute.

S'ajoutent à cela, évidemment, ce qu'on a appelé les critiques du système, sur lesquelles vous avez plusieurs considérations: lenteur du système, mauvaise indemnisation, et ainsi de suite. Mais fondamentalement, M. le ministre, la question que vous me posiez, ce pourquoi nous considérions que la notion de faute, comme telle, ne devait plus servir comme fondement de l'indemnisation, c'est un peu cela, en synthèse, d'une façon vulgarisée.

M. TETLEY: M. Rankin, avez-vous quelque chose à ajouter, peut-être?

M. RANKIN: Tout le rapport dit très clairement les lacunes dans le système. S'il y a une explication sur quelques nuances, on est bien conscient que le rapport est très dense, forcément.

Sans cela on aurait écrit une brique que personne n'aurait été capable de lire. Ici, c'est une question de lenteur. C'est une question d'indemnisation, une question de détermination plutôt arbitraire, et tous les autres défauts.

C'est une question de victimes non indemnisées. J'ai l'impression qu'on va essayer de les classer.

M. TETLEY: Merci. J'ai d'autres questions, mais vu le temps, voulez-vous procéder? Comment voulez-vous procéder?

M. LEGER: Comme ce matin.

M. TETLEY: J'ai une dernière question donc. Au sujet de l'assurance obligatoire, je retourne à la page 343. La recommandation 20 parle d'une assurance obligatoire qui couvre les pertes découlant de blessures corporelles. Et la recommandation 28 dit: Que l'assurance des dommages aux véhicules soit obligatoire.

Certaines gens ont dit qu'ils étaient d'accord sur la recommandation 20 — je parle de reportages dans les journaux, etc. — d'autres se sont posé des questions sur la recommandation 28: assurance obligatoire des dommages aux véhicules. Avez-vous des commentaires à ce sujet? Je note votre explication dans le rapport encore qui est...

M. GAUVIN: Quand on parle d'assurance obligatoire, je pense que depuis longtemps tout le monde est d'accord que l'assurance devrait être obligatoire. Dans une partie du rapport où l'on traite des différents aménagements qu'on veut inclure à l'intérieur du système actuel, on dit bien, en fait, que l'assurance obligatoire réglerait certains problèmes qui existent actuellement, mais que cela ne réglerait pas les problèmes fondamentaux. En fait, si l'on établit l'assurance obligatoire dans le système actuel, vous allez réduire les besoins de fonds du fonds d'indemnisation des victimes d'accidents d'automobile, mais vous ne les éliminerez pas parce que, dans toutes les juridictions où l'assurance obligatoire, dans le système de la faute tel qu'on le connaît, a été établie, ces juridictions voient un certain nombre de personnes qui, même avec l'assurance obligatoire, réussissent à conduire sans avoir de l'assurance, soit que les contrôles ne sont pas suffisants ou encore pour diverses raisons.

Dans le sens de la recommandation du comité, d'avoir l'assurance obligatoire au niveau des blessures corporelles, il faut bien se rendre compte que le comité recommande fondamentalement un régime d'assurance-accidents où l'on veut remplacer le droit de poursuivre une tierce personne par un droit à l'indemnisation. Si l'on veut s'assurer que ce droit existe, il faut absolument qu'on en vienne à avoir l'assurance obligatoire. C'est dans ce sens qu'elle est absolument indispensable au niveau des blessures corporelles.

Quant aux dommages matériels, diverses parties ont dit qu'il n'y avait aucune nécessité de forcer les gens à s'assurer compte tenu du faible niveau des dommages impliqués dans certains cas. Ce qu'il ne faudrait pas oublier, c'est que dans un système où le recours contre

un tiers est enlevé, il faut s'assurer que ces gens-lè ont quand même droit à une certaine indemnisation dans des événements précis où ils jugeraient effectivement qu'il est inacceptable de n'être pas indemnisés.

Si vous abolissez le recours contre les tiers et qu'une personne ne s'assure pas, c'est après un accident, comme être heurté lorsque son véhicule est stationné, qu'elle va probablement découvrir qu'elle n'a aucun recours et, à ce moment-là, les gens vont réellement s'opposer à un tel changement. En insistant pour qu'il y ait au moins une couverture minimum lorsqu'on remplace en somme le droit d'un recours contre les tiers par un droit à une indemnisation. C'est ce qu'il ne fait pas oublier.

M. TETLEY: Me Bouchard, avez-vous d'autres choses à ajouter?

M. BOUCHARD: Non, sauf peut-être pour attirer de nouveau l'attention des membres de la commission sur le genre d'assurance qui est proposé, comme M. Gauvin l'a expliqué. C'est une notion complètement différente; c'est un peu, si vous voulez faire un parallèle, une espèce d'assurance-risques, de telle sorte que, lorsque l'on parle d'indemnité pour blessures corporelles, l'indemnité couvre — c'est l'assurance sur la famille — véritablement les individus et leurs dépendants. Et cela, c'est important parce que, à mon avis, c'est un risque social. Il faut précisément penser aux conséquences et c'est une autre chose qui a été oubliée dans l'ancien système, l'ancienne notion. L'individu qui est responsable, qui supporte tout, est-ce que l'on doit aller jusqu'à le considérer comme étant responsable de l'état de fait d'un père de famille qui est alcoolique, qui cause un accident et devient impotent? Est-ce que la famille doit nécessairement répondre des actes du père?

Par ailleurs, si l'on dit oui, qu'est-ce qu'il arrive en pratique? C'est l'Etat qui en répond par son système d'assurance, de sécurité sociale.

Alors, en ce qui concerne les dommages corporels, on a fondu l'ensemble dans un tout cohérent, étant une assurance-responsabilité purement et simplement. En ce qui concerne les dommages matériels, bien, on dit: Ecoutez, il s'agit d'un bien physique. Le maximum qui peut être en cause pour un individu, c'est tout de même de la valeur, de la tôle qui représente l'automobile. Que l'automobile soit importante ou pas, il reste tout de même qu'il y a une valeur maximale qui est celle de l'achat ou du coût de remplacement de l'automobile. Alors, on ne peut pas plus, en ce qui concerne ce bien qui fait partie du patrimoine de Pierre, Jean, Jacques, exiger que cet individu-là prenne une assurance, pour cette forme de biens, d'actifs, dans son patrimoine, alors qu'il y en a tant d'autres dans son patrimoine pour lesquels on n'exige pas d'assurance. Alors on dit: Minimum de protection. L'assurance sera obligatoire avec différentes options et dont une est à peu près équivalente à celle qui existe actuellement, c'est-à-dire une qui couvre des cas, des cas que, dans la réalité de tous les jours, les assureurs ont considérés comme étant des cas évidents de responsabilité.

Alors on a dit: Dans ces cas-là, tout comme vous seriez indemnisé dans le système actuel, on prévoit la continuation pour ces cas évidents. Le système B, c'est un pas en avant, c'est déjà plus parfait, c'est déjà mieux. L'individu s'assure davantage, le système de cas automatiques prévus est amplifié et c'est davantage un pas vers la protection complète, intégrale, idéale, qui est la formule C, le plan C qui, lui, prévoit une assurance complète, intégrale sur les vies.

M. TETLEY: Peut-être, M. Rankin, avez-vous...

M. RANKIN: La seule chose que j'ai à ajouter, c'est que à la suite des remarques de mes collègues, je peux expliquer un peu les démarches qu'on a faites. Si on n'a pas insisté pour que ce soit obligatoire, c'est qu'on a profité de l'expérience du Massachusetts. En Floride, je ne sais pas si vous êtes tous au courant, mais il y a un appel et c'est le "no fault", quand les dommages matériels ont été annulés, après la constitution, tout ça, mais je me demande si vraiment ce ne sont pas les intérêts qui étaient derrière tout cela.

En tout cas, on est allé voir les gens qui sont impliqués dans l'application de ces lois. On est aussi allé voir les présidents des compagnies et tout ça, et les agents de réclamation, pour savoir quelles sont les lacunes dans leur affaire.

Dans leur affaire, ils ont eu trois options. Là, vous pouvez avoir une couverture qui corresponde à notre vision, une autre, à b) qui corresponde à une autre option c'est-à-dire qui correspond plus ou moins à ce qui existe aujourd'hui. Il y en a une troisième où on est absolument couvert contre les "out-of-state drivers", les responsabilités qui existent en dehors des situations, c'est-à-dire que vous avez eu l'option... Comme M. Gauvin l'a dit, cela a été la plus grande cause de problèmes dans l'application de la loi parce que les gens ne savent pas, avant d'avoir eu leur accident, qu'ils n'étaient pas couverts. La seule chose dont ils étaient au courant était qu'on avait changé toutes les affaires, mais, là, ils ont eu une option qui donne une prime minime mais on ne leur a pas expliqué les conséquences d'avoir pris cette option. Alors, du point de vue pratique, c'est essentiel qu'un tel système soit obligatoire.

M. TETLEY: Merci.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Lafontaine.

M. LEGER: J'ai bien aimé la présentation, dans votre volume, de l'aspect social de la

responsabilité et spécialement le fait que, dans une société, un individu est quand même responsable de ses actes, d'une part. Dans la loi, on est allé jusqu'à dire: Puisque tu es responsable, tu dois indemniser ceux à qui tu as causé préjudice. Mais dans le domaine de l'automobile, qui est devenue maintenant un phénomène social ou un risque social, comme le disait M. Bouchard tantôt, il faut tenir compte de ceci pour chaque citoyen. Si on veut diminuer sa responsabilité d'indemniser, on ne peut quand même pas lui enlever sa responsabilité de contribuer à un fonds qui établira une justice ou un équilibre d'indemnisation pour tous ceux qui en subissent les conséquences.

C'est donc une des raisons pour lesquelles nous sommes très heureux de voir cette proposition du "no fault" parce que tous les individus auront à contribuer. Maintenant, vous êtes arrivé quand même à la conclusion de cela par déduction. Est-ce que vous avez aussi étudié la quantité de personnes qui, actuellement, ne sont pas assurées dans le but d'évaluer la qualité de risque que ces gens vont amener dans le barème du coût d'assurance?

Je m'explique. A la page 258, vous évaluez uniquement — parce que cela a été impossible, pour votre comité, d'évaluer exactement la quantité de gens qui ne sont pas assurés — la quantité de gens qui ont eu des accidents et qui représentent un pourcentage de 14.9 parmi ceux qui ne sont pas assurés.

Est-ce que vous avez une idée générale, même si elle n'est pas précise? Cela amène le problème suivant: Si, en général, les gens non assurés sont plus prudents, parce que cela peut leur coûter quelque chose, à ce moment, les 14.9 p.c. ne représentent pas la même proportion de gens dans une société qui sont assurés ou qui ne le sont pas.

Si c'est le contraire et qu'une personne qui n'a pas la préoccupation sociale de s'assurer a le même comportement comme chauffeur, parce qu'elle n'a pas de responsabilité, elle se fout de cela, le chiffre de 14.9 p.c. peut être plus bas.

Alors, comment avez-vous évalué l'implication d'inclure tous ceux qui ne sont pas assurés et qui seraient obligés de l'être, pour évaluer les revenus possibles globaux dans un régime d'assurance "no fault"?

M. GAUVIN: Tout d'abord, j'aimerais souligner que, lorsque vous dites qu'on n'a pas évalué le nombre de véhicules non assurés, exactement. Nous avons bien dit, dans le rapport, qu'en l'absence de données plus précises nous avons dû utiliser le pourcentage des véhicules impliqués dans des accidents qui n'étaient pas assurés. Ceci dit, ça ne veut pas dire que les victimes de ces accidents ne sont pas indemnisées dans le système actuel. Il y en a qui sont indemnisées par le truchement du fonds d'indemnisation. Ceux-là sont à la charge, en fait, du système d'assurance qui existe présentement. C'est quand même malheureux — et on l'a mentionné dans notre critique du financement du fonds d'indemnisation — on a dit, en fait, que ceux qui sont assurés paient pour ceux qui ne le sont pas.

Pour répondre à votre question, en l'absence de données plus précises, il n'était pas possible d'évaluer exactement quelle était la qualité de conduite de ceux qui ne sont pas assurés. Les indicateurs sont qu'en général ce sont ceux qui sont plus fréquemment impliqués que moins fréquemment impliqués. S'ils le sont plus fréquemment, nécessairement ça va augmenter la masse monétaire lorsqu'ils devront s'assurer parce qu'ils vont payer quand même plus cher que la moyenne; mais, tant et aussi longtemps qu'on n'a pas ces gens-là dans le système, il est très difficile d'évaluer exactement quel va être leur impact.

M. LEGER: D'accord. Maintenant, les recommandations 24 et 20 touchent l'assurance de base et l'assurance supplémentaire. Est-ce que vous pourriez nous dire, dans une assurance de base obligatoire, quel serait, selon vous, le plafond de cette assurance? Actuellement, je pense, il y a quand même une étape de $35,000. Est-ce qu'il y a un plafond différent que vous prévoyez comme plafond de cette assurance-là?

M. GAUVIN: En fait, le plafond en question paraît à l'intérieur du rapport. Nous avons dit qu'au niveau des blessures corporelles — je vais trouver la page en question — nous voulions l'indemnisation de la perte que nous avons appelée la perte économique ou ce qui aurait dû s'appeler le préjudice matériel des personnes, apparemment, jusqu'à concurrence d'un revenu de $200 par semaine. Si vous essayer de comparer ce chiffre avec les limites actuelles de $35,000, il faudrait tenir compte des compositions de famille, de l'âge de la personne. Il faut bien situer la recommandation du comité: Nous voulons que chaque personne soit assurée selon les besoins qu'elle a mais avec un régime obligatoire pour tout le monde qui s'appliquerait jusqu'à concurrence d'un revenu de $200 par semaine.

Maintenant, si nous prenons une personne qui aurait un revenu de $200 par semaine, avec une dépendance de famille et totalement invalide, la valeur présente ou la limite d'assurance si on peut dire, ce qui représenterait le capital qui pourrait lui être payé ou l'équivalent, peut facilement, tout dépendant de sa distribution d'âge, aller chercher jusqu'à $80,000 ou même $100,000 dans le cas d'une personne qui est totalement invalide. C'est bien difficile de comparer les deux parce que, premièrement, dans le moment la limite de $35,000, il y a

quand même une forte proportion de la population qui ne l'utilise pas, qui prend des limites supérieures et, également, parce que dans notre régime chacun assure son risque, tout dépendant de sa situation, pour savoir quel sera le montant réel d'assurance qu'il aura. Ce n'est pas un régime à indemnisation fixe, standard et prédéterminée, c'est un régime qui prend chaque cas particulier et selon la perte véritable de revenu, indemnise sur cette base.

M. LEGER: Maintenant, à l'article 24, vous dites "que soit rendue disponible une assurance supplémentaire facultative..." Alors, qui va être responsable du remboursement des victimes qui dépasseraient la protection de base? Il n'y aurait pas de fonds d'indemnisation dans le nouveau système. S'il n'est pas assuré, s'il ne l'a pas prise — elle est facultative — qui va le rembourser, selon vous, dans ça?

M. GAUVIN: En fait, c'est l'assureur. Nous avons dit que l'assurance de base devrait suivre le véhicule comme étant le moyen le plus facile d'avoir un rapport entre l'assureur et les victimes, mais quant à l'assurance additionnelle, dont le but est de protéger ceux qui ont un risque beaucoup plus élevé que la majorité de la population, c'est à eux de décider, oui ou non, s'ils doivent s'assurer pour des montants additionnels. Dans ce cas, nous avons dit qu'on voulait couvrir non seulement l'individu, mais les membres de sa famille et il recevra des indemnités selon, en fait, ce que lui-même ou son conseiller en assurance aurait déterminé comme étant le besoin d'assurance qu'il a pour son cas particulier.

Je m'explique. Si quelqu'un a un revenu de $20,000 par année, le régime préconisé par le comité couvrirait les premiers $10,000, montant qui devrait être appelé à être modifié pour tenir compte des augmentations de revenu dans le temps, mais pour cet individu qui a un revenu supérieur, ce serait à lui de déterminer si, oui ou non, compte tenu de ses autres protections d'assurance, il a besoin d'une protection additionnelle lorsqu'il est impliqué dans un accident d'automobile. Parce qu'il faut situer le problème tel qu'il doit être. Lorsqu'il y a un accident, le besoin d'indemnisation est absolument indépendant du fait qu'une personne est impliquée comme conducteur, comme passager ou comme quoi que ce soit. Si une personne a besoin d'une indemnisation, ce besoin existe, qu'elle soit, en fait, ce qu'on appelle en faute ou qu'elle ne soit pas en faute. Notre régime dit: Si vous avez besoin d'indemnisation, lorsqu'un événement fortuit qu'est un accident d'autonomile arrive, vous vous protégez pour les excédents du régime standard qui s'applique à la grande majorité de la population. A ce moment, vous remplacez une incertitude, une indemnisation s'il y a un assureur, si vous n'êtes pas en faute etc., etc., par un régime qui vous indemnise par le simple fait qu'il y a un accident.

M. LEGER: Maintenant, à la page 312 de votre volume, vous parlez entre autres — ça correspond aux recommandations 22 e 23 — d'un barème préétabli pour indemniser les victimes et aussi d'un concept économique. Est-ce que le barème est la base et que le concept économique vient en surplus d'un barème de base? Je donne un exemple. Supposons qu'on établit un barème qui — un exemple bien évident pour qualifier l'affaire — donne $500 pour la perte d'un doigt. Le barème est de $500, mais une personne peut perdre un doigt et n'avoir pas besoin de ce doigt comme tel pour gagner sa vie, et l'autre est un pianiste qui peut perdre son doigt et pour qui ça va être une perte économique. Est-ce que cela veut dire, dans votre rapport, que le barème est une base pour tout le monde et que la perte économique est en surplus de la base?

M. GAUVIN: En fait, la base est en surplus de la perte économique. Ce que nous avons dit dans le rapport, c'est que prioritairement nous voulons remplacer la perte pécuniaire, la perte à gagner d'une victime d'accident d'automobile. Conséquemment, le doigt d'un pianiste ou le doigt d'un actuaire n'ont pas la même valeur. Pour l'un, ça ne change rien et pour l'autre ça peut le rendre totalement invalide.

M. BOSSE: Le doigt d'un actuaire, c'est dispendieux.

M. GAUVIN: Ce n'est peut-être pas le doigt qui est dispendieux. Sauf quand il écrit ses comptes. Et cela, c'est toujours relatif. Effectivement, pour revenir à ce que je disais avant l'interruption, tout de même avec un sens de l'humour, le régime préconisé veut remplacer complètement le manque à gagner d'un individu, jusqu'à concurrence de $200 par semaine et, s'il le juge à propos, selon ses besoins, pour l'excédent.

Dans ce cas, si une personne devient totalement invalide simplement par la perte d'un doigt, elle serait indemnisée à 100 p.c. Tandis que l'autre, qui n'est pas invalide, ne serait pas indemnisée parce que cela ne représente pas une perte pécuniaire, le fait qu'elle ait perdu son doigt. Cependant, pour une perte économique, en plus de cela, le comité a réalisé qu'outre la perte de revenus, il y a d'autres pertes qui sont très difficilement quantifia-bles, pertes qui sont réelles, pertes de jouissance de la vie, etc.

Nous avonr, dit: Ces pertes-là, il n'y a pas de mesures, dans bien des cas, pour établir ce qu'elles valent. Nous avons, à l'intérieur de certains critères, déterminé une échelle qui ne s'appliquerait qu'à ces pertes-là, qui ne sont pas des pertes pécuniaires, mais qui sont, en fait, simplement, comme je l'ai mentionné, jouissance de la vie, etc., et c'est à celles-là que s'applique une limite qui atteint $12,500 maximum, selon un barème prééta-

bli, que le comité n'a pas jugé opportun d'établir dans tous les détails parce qu'il en existe, en fait, de multiples exemples.

M. LEGER: Mais selon vous, d'après ce que vous venez de dire, je ne sais pas si j'ai bien compris, les 100 p.c. du barème préétabli, c'est l'indemnité maximum qui peut être payée, et non pas un barème de base pour tout le monde, et un maximum, par la suite, selon la perte économique ou de la jouissance de la vie. Le barème est le maximum, si j'ai bien compris?

M. GAUVIN: Peut-être ai-je mal expliqué. Disons que nous avons subdivisé la perte pour une victime d'accident d'automobile, en deux parties. Il y a d'abord ce que nous avons appelé la perte économique et il y a, en plus, des pertes que nous avons appelées non économiques. En ce qui concerne la perte économique, nous avons dit: C'est selon la perte véritable de chacun, mais avec un plafond, une couverture d'un salaire de $10,000 par année.

Dans le deuxième cas, c'est un barème préétabli pour compenser des pertes qui n'ont pas un caractère de perte financière, de perte d'argent pour l'individu, mais qui sont plutôt des pertes à caractère de diminution de la personne, sans affecter son gain, son potentiel de gain.

Il faut bien réaliser que cela, c'est le régime qui s'applique à tout le monde. En plus, une personne peut s'assurer pour des montants supplémentaires si les besoins sont là.

M. LEGER: Alors, M. Gauvin, à la page 211 de votre mémoire, vous parlez d'ententes qui se produisent entre des assureurs de ne pas se poursuivre mutuellement en dessous de certains montants. Est-ce que vous avez aussi examiné ce qui se produit lorsque le responsable et la victime sont assurés par le même assureur, dans le régime actuel?

N'y a-t-il pas un préjudice pour les victimes du fait que l'assureur va offrir moins qu'il n'aurait demandé à une autre compagnie?

M. GAUVIN: II ne faudrait quand même pas oublier qu'on parle de deux choses: notre régime ou la situation actuelle. Dans la situation actuelle, même lorsque c'est le même assureur qui est au dossier, la victime a les mêmes recours. Si c'est le même assureur qui est pris pour avoir la partie qu'on trouve responsable et l'autre partie qu'on trouve non responsable, chacune des deux parties a tous les recours possibles que lui permet la loi pour faire valoir ses droits.

Les données que nous avons ramassées indiquent des variations d'un assureur à l'autre, dans son mode de traitement, surtout dans les délais mais quant à savoir, à l'intérieur, si, lorsque c'est un même assureur qui a à traiter les deux parties, il les traite mieux ou moins bien, c'est bien difficile à dire.

M. LEGER: Je vous remercie beaucoup. Je pense que ce chapitre a une importance primordiale dans l'établissement d'un futur régime d'assurance-automobile. Je pense qu'il correspond pas mal à la réalité. Je dois vous féliciter là-dessus pour que vous réalisiez qu'on apprécie beaucoup le travail que vous avez fait, malgré les questions, qui sont pour nous éclairer, que j'ai posées ce matin.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable député de Rouyn-Noranda.

M. SAMSON: M. le Président, M. Gauvin, lorsque vous parlez d'une assurance obligatoire, est-ce que vous avez une formule à suggérer pour qu'une assurance obligatoire soit réellement une assurance obligatoire, dans le sens qu'on ne retrouve pas sur la route des gens qui auront quand même pu contourner le système et se retrouver sans assurance?

M. GAUVIN: En fait, nous avons bien dit que même avec les meilleurs contrôles au monde, vous allez toujours avoir des gens qui vont trouver le moyen de les contrôler. L'humain est fait de telle façon qu'il cherche continuellement à trouver un truc pour contourner la loi si cela peut faire son bonheur.

Enfin, dans l'Etat de New York — j'hésite beaucoup à citer des chiffres qui sont publiés mais quand même — on a l'assurance obligatoire et on se rend compte qu'il y a un certain pourcentage de gens qui contournent cette loi, même si on a mis des mécanismes assez coûteux pour contrôler.

Un élément absolument majeur pour forcer les gens à s'assurer consiste, d'après moi, à leur enlever tout recours lorsqu'ils ne sont pas assurés. Pour bien situer, dans notre régime, la personne, qui n'assure pas son véhicule, n'a pas de recours contre les autres. C'est certainement un élément assez fort pour inciter les gens à s'assurer.

Maintenant, encore une fois, comme je l'ai dit ce matin, on peut très bien mettre en place des mécanismes avec beaucoup de technocrates, une grosse bureaucratie afin de vérifier si à tout moment, tout le monde est assuré au Québec, mais, finalement, cela va coûter combien par rapport aux avantages d'un tel système?

En Colombie-Britannique, si ma mémoire est fidèle, on ne s'est pas tracassé outre mesure. On a mis une amende très considérable et, de temps en temps — je parle d'il y a quelques années — on a simplement établi des barrages routiers et là, on a effectivement vérifié si les gens étaient assurés.

En même temps ils ont vérifié si le véhicule était bien enregistré, etc. Ils mentionnent qu'avec cela ils ont eu un bon succès, mais peut-être que cela a été fait dans une circons-

tance particulière qui ne s'appliquerait pas au Québec. Il ne faudrait pas en déduire que cela est possible ici.

M. SAMSON: Advenant que dans le système il y ait des gens qui continuent quand même à se promener sans assurance, qu'est-ce qui est prévu pour le cas des passagers d'un conducteur qui se promène sans assurance?

M. GAUVIN: Encore une fois, c'est prévu dans le rapport, dans le texte même du rapport du comité. Nous avons dit qu'il faudrait maintenir un fonds d'indemnisation dans le cas des blessures corporelles. Nous avons dit que, dans le cas des dommages matériels, cela ne devrait pas s'appliquer puisqu'à l'individu ayant décidé de ne pas s'assurer on dit: C'est bien dommage, tu n'as pas voulu t'assurer, arrange-toi avec tes problèmes.

M. SAMSON: Est-ce que vous suggérez qu'un certain contrôle puisse se faire au niveau de l'émission des permis d'immatriculation? C'est ce que je vois, d'accord. C'est ce que vous suggérez.

M. GAUVIN: En fait, nous avons suggéré un certain contrôle avec des pénalités, avec une amende à ceux qui ne sont pas assurés.

M. SAMSON: Un peu le genre de l'Ontario.

M. GAUVIN: Non. En Ontario, effectivement, ce n'est pas tout à fait la même chose. La personne qui n'est pas assurée paie une prime au moment de retirer ses plaques d'immatriculation. Cela présuppose, en fait, tout un mécanisme de vérification, l'émission de certaines cartes, etc. Il y a d'autres systèmes qui ont été essayés; tout en étant aussi efficaces, à un coût beaucoup moindre, ils nous apparaissent préférables.

M.SAMSON: La recommandation 27: Que le droit de poursuite soit cependant conservé dans les deux cas suivants: a) contre la personne qui a causé intentionnellement des dommages. Est-ce que vous pourriez préciser ce que vous voulez dire par intentionnellement? Cela couvrirait quel genre d'intention?

M. GAUVIN: II y a toutes sortes de choses qui sont dites contre les régimes, ceux que l'on appelle très souvent, à tort, sans égard à la responsabilité. Par exemple, on dit: Cela va augmenter les accidents. Comme si, parce qu'il y a un nouveau régime d'assurance, les gens vont se promener sur la rue et vont aller se tuer. On a mentionné, à ce sujet, que certaines personnes pourraient faire intentionnellement des dommages parce qu'elles savent que leur assureur n'est pas responsable. On a même donné l'exemple suivant: Le lendemain de l'introduction d'une loi qui n'est pas véritable- ment sans égard à la responsabilité, mais qu'on appelle comme cela aux Etats-Unis, il y a un accident. Une des victimes qui est descendue de voiture dit: Regarde, c'est toi qui es passé sur la "lumière" rouge, mais c'est un système "no fault". Elle est remontée dans son auto et est entrée dans l'autre pour lui faire autant de dommages qu'elle avait subis.

Ce serait un exemple de "intentionnellement". Si la chose se produit, si les gens sont assez — excusez l'expression — mais en sont rendus, en fait, à créer des dommages aux autres, simplement pour le plaisir de le faire...

M. SAMSON: Est-ce que cela peut vouloir dire que vous visez par là aussi l'ivresse dans le sens qu'un type qui est en boisson est beaucoup moins peureux? S'il a des intentions, il va aller prendre un coup avant.

M. GAUVIN: Oui, mais intentionnellement, est-ce que quelqu'un qui est ivre mort le fait intentionnellement? Je ne suis pas capable de répondre à la question, si quelqu'un qui est ivre mort fait une chose intentionnellement ou non.

M. SAMSON: Evidemment.

M. GAUVIN: Pour moi, c'est une question de fait. Il appartient même aux cours de justice de déterminer si oui ou non le dommage a été fait intentionnellement. Ce n'est pas aussi simple que cela.

M. SAMSON: C'est un recours que vous conservez, mais il reste que cela sera à prouver qu'il y a eu intention.

M. GAUVIN: Mais dans le système actuel, si quelqu'un recule dans votre véhicule intentionnellement, vous avez quand même un recours contre cet individu. C'est beaucoup plus pour éviter certains abus. On a dit qu'il était possible que d'autres choses...

M. SAMSON: A 35. Que l'assureur qui, sans raison valable, ne paie pas l'indemnité à laquelle il est tenu, dans les 30 jours de la preuve de perte, soit obligé de verser un intérêt sur les montant dus.

Est-ce que vous avez aussi considéré la possibilité de fixer un délai de paiement obligatoire? Disons non pas 30 jours, mais bien qu'il y ait un intérêt à payer après 30 jours, pour éviter — je ne sais pas s'il y en a — des abus de ce côté. Je pose une question, je ne fais pas une déclaration. Est-ce que, d'abord, cela a été porté à votre attention que certaines réclamations retardaient beaucoup trop et est-ce qu'il n'y aurait pas lieu d'envisager un délai maximum de règlement?

M. GAUVIN: Ecoutez...

M. TETLEY: C'est la recommandation 35.

M. SAMSON: Non, non, mais là c'est 30 jours. Après 30 jours, on exige l'intérêt; cela ne veut pas dire que c'est un délai obligatoire de paiement.

M. GAUVIN: A toutes fins pratiques, ça revient à un délai maximum. Il n'y a pas un assureur, il n'y a pas un organisme, que ce soit un assureur étatique, que ce soit n'importe quel, qui soit intéressé à payer plus en intérêt qu'il ne peut gagner lui-même. Cela revient un peu au même quand vous mettez un délai comme ça.

D'ailleurs, il est assez intéressant de noter...

M. SAMSON: Je m'excuse, peut-être que je ne vous comprends pas bien. Je suis peut-être d'accord avec vous quand vous dites que personne n'est intéressé à créer des délais pour payer de l'intérêt. Par contre, dans le système actuel, quand un paiement est retardé, vous savez qu'il y a des victimes d'accident qui préfèrent un paiement hâtif, quand elles sont dans le besoin, qu'un retard qui pourrait peut-être leur rapporter plus d'argent. Cela devient, en quelque sorte, un moyen de pression sur certaines victimes d'accident pour signer le "release". C'est dans ce sens que je me demande si on ne devrait pas... C'est en vertu du bill 22 que j'ai pu qualifier cela de "release", d'ailleurs.

M. BOSSE: La libération.

M. SAMSON: C'est parce que dans le domaine de l'assurance...

M. BACON: Faites attention, le ministre de la langue est en avant de vous.

M. SAMSON: Dans le domaine de l'assurance, on appelle ça un "release".

M. BOSSE: Le ministre des langues.

M. GAUVIN: II est bien certain que dans le système actuel il y a des délais. D'ailleurs, on a fait une étude des délais qui paraît à la partie critique du rapport. Nous croyons en fait que le régime préconisé va régler une partie, en fait une bonne partie du problème de certains délais. Maintenant, il ne faudrait pas s'imaginer qu'il n'existera plus de délais. Il y a quand même tous les problèmes de quantifier la perte, surtout au niveau des dommages à la personne. Cela présente quand même, dans certains cas, certaines difficultés.

Au niveau des dommages matériels, les difficultés sont moindres et les délais devraient être plus courts. Maintenant, j'aimerais simplement expliquer que cette recommandation... Dans certains Etats américains, les assureurs se sont opposés fortement à un délai de 30 jours et à payer de l'intérêt après 30 jours. Si on lit la recommandation, c'est dans les 30 jours de la preuve de perte. Mais est-ce qu'on peut imaginer qu'un assureur qui se dit efficace peut prendre 30 jours pour émettre un chèque? Pour moi, c'était totalement inacceptable. Cela devrait même se faire à l'intérieur de ça. Mais il est intéressant de noter que, dans une juridiction où cela a été fait, il y a des assureurs qui ont mentionné qu'ils n'avaient pas payé de pénalité d'intérêt du tout. Mais les mêmes assureurs, lorsque cela a été présenté, se sont opposés fortement à avoir une clause semblable.

M. SAMSON: Quand vous parlez d'intérêt, est-ce que dans votre optique on prévoit un montant d'intérêt qui est équivalent au montant du marché?

M. GAUVIN: Le double du taux d'intérêt. Je pense que c'est clairement indiqué dans la recommandation...

M. SAMSON: Mais je ne parle pas seulement après 30 jours. Est-ce que vous prévoyez, après un autre délai, un montant différent d'intérêt?

M. GAUVIN: Non, non. M. SAMSON: Non? M. GAUVIN: Non.

M. SAMSON: Ce sont peut-être des questions incitatives mais je ne voudrais pas que vous pensiez qu'on veut vous mettre en boitte, au contraire. C'est parce qu'on essaie d'obtenir un maximum de renseignements. On aura tantôt d'autres gens qui viendront devant la commission et qui défendront d'autres points de vue. Alors, il faudrait qu'on ait de ces gens-là aussi peut-être des renseignements qui ne paraîtront pas clairement.

M. BOSSE: Ils vous ont déjà rencontré.

M. SAMSON: Non, je ne suis pas allé les rencontrer, pour votre information. Mes portes sont ouvertes.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable député de Charlesbourg.

M. HARVEY (Charlesbourg): M. le Président, dans cette deuxième partie de la section, je me pose la question ou, enfin, je vous pose la question.

Si on tient compte de l'étude exhaustive qu'on a faite ce matin relativement aux 18 ou 19 recommandations ayant trait à la sécurité routière — lorsqu'on lit le rapport, je pense qu'il n'y a pas aucun endroit où on accuse qui que ce

soit d'être exploité soit par les assureurs, soit par les courtiers, soit par les agents, au niveau des coûts — c'est évident que le but principal qui est visé dans votre étude et dans vos recommandations, c'est d'en arriver à assouplir, à amoindrir en quelque sorte les coûts que l'on considère comme prohibitifs de nos jours, quand même, des taux d'assurance.

Alors, si on part du principe que l'existence de la Loi de l'indemnisation des victimes d'accidents d'automobile est en quelque sorte une loi qui camoufle un peu l'assurance obligatoire, qu'on le veuille ou non... Je pense citer à peu près textuellement le directeur général du BVA, lors de l'étude des crédits du ministère des Transports, alors qu'il disait, lors de l'adoption de cette loi, que c'était en fait passer par la bande pour en arriver un jour, en tout cas, dans une étape, à obtenir éventuellement l'assurance que la plupart des citoyens québécois qui utilisent des véhicules automobiles soient munis d'une assurance.

Je pense que, jusque-là, le raisonnement se suit, puisque la volonté de votre étude, c'est d'en arriver à faire des résolutions et même des propositions pour tenter d'obtenir des coûts plus bas pour le consommateur. Alors, est-ce que vous ne pensez pas que chambarder tout le système des assurances en un tour de main, ça puisse... En 1970, 1971, 1972, 1973 et les autres années on a par expérience parfois, chambardé tout un système et des expériences ont déjà fait en sorte qu'il a fallu, soit par voie de règlement ou soit par nouvelle législation, corriger vite un mouvement qui a pu être fait.

Alors, si on met en application d'une façon radicale les 18 ou 19 recommandations au chapitre de la sécurité routière et si, en plus, on installe un régime qui serait sans égard à la faute, mais seulement au niveau, par exemple, des dommages matériels, et si évidemment l'assurance devenait obligatoire pour tous par décret ou par une loi générale, est-ce que vous ne croyez pas qu'il y aurait moyen par ces mesures, tout simplement dans un premier geste, de créer d'abord un climat où il reste encore une certaine liberté à l'individu de choisir l'endroit où il va aller, c'est-à-dire de choisir son courtier ou son agent ou enfin de sa compagnie, sans chambarder tout le système pour en arriver à des recommandations qui pourraient amener l'assurance obligatoire pour tous, tenir compte des résolutions que vous nous proposez relativement à la sécurité routière et, de ce fait, demander des taux qui, à mon point de vue, pourraient être moindres que ceux qui sont offerts aujourd'hui? Est-ce que vous ne croyez pas cela possible dans un premier jet?

M. GAUVIN: En fait, c'est encore la même question que vous avez posée ce matin, si ma mémoire est fidèle.

M. HARVEY (Charlesbourg): Non, parce que ce matin...

M. GAUVIN: Oui, vous la reposerez une troisième fois; c'est votre droit, je ne le nie pas.

M. HARVEY (Charlesbourg): Oui, d'accord.

M. GAUVIN: II y a toutes sortes de choses dans ce que vous avez dit. Vous avez parlé d'assurance obligatoire. Alors, j'aimerais vous référer strictement aux pages 257 à 262 du rapport où nous traitons longuement de l'assurance non obligatoire et de ses effets.

Nous avons clairement dit, lorsqu'on a adopté la Loi de l'indemnisation des victimes: C'est un palliatif à l'assuranc obligatoire. On a dit que l'assurance obligatoire aurait été préférable. Nous l'avons dit.

M. HARVEY (Charlesbourg): D'accord.

M. GAUVIN: Vous mentionnez également la liberté. Jusqu'à ce que l'on me prouve que le régime proposé, administré par l'entreprise privée, enlève des libertés à la population, je vous répondrai, en fait, que notre régime va donner plus de liberté de choix à la population que le régime actuel. Quant à la sécurité routière, pour y revenir, nous n'avons pas quantifié et je vous défie vous-même de quantifier quels seront les effets de mesures que vous pouvez préconiser.

Quant à nous, si l'on veut avoir une réduction de la prime d'assurance-automobile immédiatement, c'est au niveau du droit à l'indemnisation et à l'administration du régime qu'il faut s'attaquer, tout en n'oubliant pas que la sécurité routière est une facette importante et que les uns ne vont pas sans les autres.

Je l'ai dit ce matin et je vais le répéter: Un régime inefficace de distribution de pertes demeure tout aussi inefficace lorsqu'on réduit les pertes qu'il doit distribuer.

M. HARVEY (Charlesbourg): Lorsque vous en arrivez, par exemple, dans le régime proposé, relatif à l'assurance automobile, à un maximum, par exemple, de $200 par semaine ou... Prenons le cas, par exemple, d'un accident où l'épouse décéderait; vous établissez la compensation aux environs de $2,500. Il s'agit de dommages à la personne. Il s'agit de mortalité dans ce cas. Je crois que l'établissement d'un système calculé sur des normes, qui m'apparaissent marginales en regard de l'ensemble des réclamations qui sont faites à l'assurance, crée un préjudice et quasiment une injustice si on établit qu'un enfant, c'est $500, et que la mère, c'est $2,500. J'ai, devant moi, un jugement qui a été rendu par la cour Supérieure du Québec, cette année même; l'époux a pu obtenir, à la suite de réclamations en justice, $50,000 pour le décès de son épouse au cours d'un accident. Vous allez me dire: C'est marginal. C'est un exemple, c'est clair, mais je voudrais savoir ceci: Est-ce que vous avez un pourcentage quant aux dommages matériels et aux dommages à la personne? Je pense qu'on doit attacher beau-

coup plus d'importance aux dommages à la personne. Il est vrai que les dommages matériels, en soi, impliquent qu'il y a peut-être plus de danger de dommages à la personne. Plus il y a d'accidents, plus il y a de bris de ferraille, plus il y a de dangers de dommages corporels. Mais je crois que, quant aux dommages corporels, les Québécois auraient tout à gagner à avoir un régime "no fault" sur les dommages matériels seulement.

Quant aux dommages à la personne, je pense que, là, il doit toujours exister le système juridique, comme l'a indiqué tout à l'heure, Me Bouchard, dans son exposé. Si, au lieu d'établir un taux fixe pour une personne, vous établissiez qu'il y a des droits de poursuite.

M. GAUVIN: Je pense qu'il faudrait revenir sur tout le chapitre de l'indemnité. On donne un exemple. Je vais vous en citer un autre et nous serons jugés sur ce que nous avons dit. Le même cas où c'est le mari qui n'est pas assuré en vertu du chapitre b. Dans le régime actuel, s'il est trouvé coupable, il ne reçoit rien. En fait, il faudrait peut-être mettre le poids et savoir où on doit mettre la priorité dans l'indemnisation. Dans tout régime d'assurance, si on veut donner $50,000 aux enfants, on peut le faire. Il faudrait quand même y mettre un coût. Il y a toutes sortes de régimes qui sont préconisés, mais on mentionne rarement, véritablement, quels seront les coûts.

Il est assez curieux quand même que, dans le régime actuel, qui prétend accorder une réparation complète aux victimes, une analyse de plusieurs centaines de victimes, mais non pas simplement un cas tiré au hasard, sans prétendre qu'il est délibérément choisi, il est quand même curieux de prendre 1,700 victimes de blessures corporelles, des victimes qui ont droit, d'après le système actuel, à une réparation intégrale, de comptabiliser la perte de ces victimes et d'aller additionner également la compensation, compensation qui n'est pas complète puisque la victime, très souvent, doit encourir des frais à même cette compensation, et d'en arriver à la conclusion suivante: II y a simplement 61 p.c. de la perte économique qui est compensée dans le système actuel — page 194 du rapport. Plus la perte est élevée, moins le rapport de la compensation de la perte est haut.

Pour les personnes qui perdent plus de $10,000, c'est à peine 40 p.c. de leur perte économique, ce qui ne compte pas les pertes non économiques.

Cela ne répond peut-être pas à votre question.

Moi, je prétends que les membres — j'ai dit que le comité n'existe plus — comme ils étaient libres de dire ce qu'ils voulaient dans le rapport, peuvent exprimer leur opinion, ce sont nos opinions personnelles. Ces membres l'ont examiné, ils n'ont pas rejeté le système de la faute simplement pour le plaisir de le rejeter. Peut- être que dans un système idéal on pourrait déterminer la faute véritable de toutes les parties concernées: constructeurs de routes, constructeurs de véhicules, conducteurs, l'Etat, la famille, l'éducation, etc. Porter, en fait, chacun sa part de responsabilités, ce serait un système d'anges. Ma question: A quel coût?

On pourrait même, comme ça a été préconisé, dire: Dorénavant, toutes les victimes vont passer devant les tribunaux pour avoir droit à leur indemnisation. Ma question, à ce moment-là: A quel coût économique, finalement? Il ne faudrait quand même pas oublier que ce qu'on cherche c'est une meilleure indemnisation à un meilleur coût pour la collectivité. Si on encourt une foule de frais — et, dans certains cas, les frais sont très considérables — pour refuser une indemnisation à une victime et qu'à ce moment-là la victime se retourne vers d'autres secteurs de la société pour avoir une certaine compensation, ce sont des énergies absolument inutiles qu'on a dépensées.

Dans le cas de l'exemple que je vous cite contre le vote, on va refuser l'indemnisation, dans le système actuel, au père d'une famille parce qu'il est trouvé coupable — même pas coupable, je n'aime pas le mot coupable, il est trouvé...

UNE VOIX: Responsable.

M. GAUVIN: ... responsable. A ce moment-là, ses dépendants devront se retourner vers l'aide sociale pour avoir la subsistance requise.

M. HARVEY (Charlesbourg): M. le Président, c'est ma dernière question. Je me place un peu comme le citoyen de la rue qui n'a pas à légiférer. Par mon expérience personnelle je vous disais tout à l'heure que les deux systèmes, soit le système étatique, si vous voulez, l'étatisation vs l'entreprise privée, quand on demande à ceux qui sont dans l'entreprise privée: Avez-vous des problèmes dans ce domaine-là? Je pense que vous avez énormément consulté et c'est plus qu'un document de travail. Il y a des recommandations sérieuses.

C'est vrai que ça ne fait pas encore partie de la politique du gouvernement comme tel mais je pense que c'est l'endroit pour en discuter. Je me place, comme profane, dans le monde des assurances et je pense que vous l'avez compris avant que je vous le dise. Indépendamment de ça, lorsqu'on doit s'adresser à quelqu'un dans le domaine de l'assurance vs quelqu'un qui doit avoir affaire à une régie, gouvernementale — je donne encore cet autre exemple — c'est pas mal loin, l'affaire. Quant au point de vue du contact humain, d'une part, quant au point de vue du règlement d'un problème et au moment, en particulier, de dommages à la personne, c'est pas mal compliqué. Souventefois quand on prend en main ou qu'on décide de plonger dans un système d'étatisation — je pense qu'on n'a pas besoin de mentionner l'exemple de l'électri-

cité ou d'autres domaines — ça doit coûter moins cher mais, par expérience, ça coûte deux fois et trois fois le prix; c'est comme ça tout le temps.

Dans le domaine de l'assurance, honnêtement, si vous me demandez, à moi, si j'ai des problèmes dans le domaine de l'assurance-automobile, je vous réponds tout de suite: Non. J'ai l'impression que chacun de ceux qui sont autour de la table, personnellement, au point de vue de l'automobile, n'en ont pas. Si on vise, évidemment, des coûts moindres, de les diminuer, je suis d'accord parce que je pense qu'on protège le public et c'est notre devoir de le faire, de viser à ça. Mais, M. Gauvin, je serais difficile à convaincre si, du revers de la main, on remplaçait une entreprise privée qui a besoin, elle aussi, dans bien des secteurs d'être remise en place, d'être aidée aussi et d'être critiquée objectivement. Comme je vous dis, il n'y a pas eu de critique acerbe, que vous ayez faite, vis-à-vis de ces entreprises privées. Il y a peut-être moyen d'améliorer la situation. C'est là qu'est toute ma question, améliorer la situation sans tout chambarder.

M. GAUVIN: Je m'excuse mais vous m'avez perdu totalement.

M. HARVEY (Charlesbourg): Non, mais...

M. GAUVIN: Excusez-moi. J'aimerais quand même...

M. HARVEY (Charlesbourg): Cela va peut-être un peu plus loin.

M. GAUVIN: On parle ici d'indemnisation, vous embarquez la sécurité routière, vous embarquez la régie d'Etat...

M. HARVEY (Charlesbourg): On a parlé du coût des primes, on a parlé de ci et de ça. Je m'excuse, peut-être que je suis un peu plus loin que, normalement, on devrait être.

M. GAUVIN: Si vous n'avez aucun problème...

M. HARVEY (Charlesbourg): J'entends en tant qu'expérience.

M. GAUVIN: Est-ce que je pourrais terminer?

M. HARVEY (Charlesbourg): Je vous en prie.

M. GAUVIN: Si vous n'avez aucun problème, je me demande ce que je fous ici. Deuxièmement, si vous n'en avez aucun, à travers le monde on s'interroge, monsieur. Il faudrait quand même lire, il faudrait quand même regarder ce qui se passe.

M. HARVEY (Charlesbourg): Oui, d'accord.

M. GAUVIN: Le comité a reçu une trentaine de mémoires. Vous allez entendre des gens qui ne sont pas d'accord, mais dire qu'il n'y a aucun problème.

M. HARVEY (Charlesbourg): Je ne dis pas qu'il n'y a aucun problème, M. Gauvin, mais, comme profane, en matière d'assurance, on parlait de plan d'assurance.

M. GAUVIN: En matière de plan d'assurance, le comité, sans idées préconçues, a analysé le système et nous en sommes arrivés aux conclusions suivantes: II indemnise mal, il est trop lent, il laisse des victimes sans aucune indemnisation et il coûte extrêmement cher. Si vous n'y voyez aucun problème, monsieur, c'est votre responsabilité, les membres ont pris la leur.

M. HARVEY (Charlesbourg): Mais quand vous parlez de longueur de temps, je ne vois pas en quoi vous allez remplacer par une formule qui prendrait moins de temps, si vous parlez en formule étatique.

M. GAUVIN: C'est un autre problème. Le problème...

M. HARVEY (Charlesbourg): C'est le "no fault", c'est sûr, on y reviendra sûrement.

M. GAUVIN: La modification du droit à l'indemnisation n'a rien à voir avec l'étatisation, absolument rien à voir. Parlez-en aux victimes qui attendent des mois pour avoir l'indemnisation présentement s'ils sont satisfaits du système actuel.

M. HARVEY (Charlesbourg): Pour la question d'assurance à 30 jours, c'est une autre question qui a été soulevée tout à l'heure, la question de paiement à 30 jours des assurances ou des taux devant être exigés ou des intérêts. C'est le député de Rouyn-Noranda qui a soulevé la question. Est-ce que vous ne pensez pas qu'à l'heure actuelle, même au niveau du remboursement par une personne qui est protégée elle-même, qui sent le besoin de se protéger et qui l'est effectivement, il n'y a pas l'établissement de certaines modalités de remboursement qui excèdent 30 jours. Peut-être que vous en voyez un problème, évidemment.

M. GAUVIN: S'il n'y a aucun problème dans la lenteur généralisée de l'indemnisation des victimes, auriez-vous l'amabilité de m'expliquer les délais qui paraissent aux pages 203 de notre rapport, qui ne sont pas basés sur l'expérience d'un cas, ou de mon expérience personnelle, mais qui sont basés sur des milliers de dossiers qui ont été analysés? Si vous pouvez y répondre... moi, je dis qu'il y en a des délais.

M. HARVEY (Charlesbourg): Je parle au niveau du paiement de la prime par le consommateur, je ne parle pas au niveau...

M. GAUVIN: C'est tout à fait un autre problème.

M. HARVEY (Charlesbourg): Mais ce n'est pas à moi de répondre aujourd'hui aux statistiques que vous avez données. Si je parle au niveau du paiement d'une prime...

M. GAUVIN: Excusez-moi, je croyais qu'on parlait encore du droit à l'indemnisation, et, en troisième partie, de l'administration du régime.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): ... on s'en tient à...

M. HARVEY (Charlesbourg): D'accord.

M. GAUVIN: Les paiements de prime, ça n'a rien à voir avec...

LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable député de Dorion.

M. BOSSE: M. le Président, M. Gauvin, M. Bouchard, sans sous-estimer les autres parties de votre rapport, je pense qu'on peut dire ici que cet aspect des recommandations est certes le noeud de votre rapport; c'est le noeud, c'est-à-dire c'est la partie la plus importante où vous vous incriminez pleinement dans le sens d'une prise de position sociale, puisqu'il y a des opinions très divergentes basées peut-être sur des conflits d'intérêts. C'est net. Socialement parlant, selon les propositions que vous faites, si on prend la proposition 19, je pense que vous êtes conscients que vous allez affecter, toucher beaucoup d'individus. C'est évident.

J'écoutais à la télévision, par exemple, les commentaires de certains avocats et j'entendais: On devra mettre la clé dans la porte de notre bureau. Je pense que vous êtes conscients de ça. Dans ce sens, je n'ai que des félicitations à vous faire d'avoir eu le courage de faire ces recommandations. Socialement parlant, vous êtes placés dans le sens de l'économie de notre société qui, elle, tend à éviter de faire porter le fardeau trop lourd sur un seul individu.

Ce serait facile ici de comparer peut-être l'accidenté au malade, par exemple, avant l'assurance-hospitalisation, jusqu'à un certain point. On se rappelle combien il était difficile quelquefois pour un malade, souvent ce n'était pas sa faute, il pouvait être alcoolique, mais quand même il portait tout le poids, tout le fardeau de l'argent qu'il devait payer aux institutions.

Je ne voudrais pas m'arrêter dans les modalités, parce que je pense que vos recommandations ici sont complémentaires jusqu'à un certain point. Si je prends 20 et les suivants immédiats complètent, vont compléter.

En ce qui a trait à l'assurance obligatoire, il me semble que c'est évident que c'est la même règle. Si on veut faire une réforme réelle dans le domaine de l'assurance-automobile — et je pense que c'est ce genre d'étude que vous avez fait en toute bonne foi et avec énormément de compétence et de courage, à mon avis — c'est la même règle qui doit s'appliquer, l'universalité, c'est-à-dire que cela doit s'appliquer obligatoirement à l'ensemble et faire porter le poids d'une responsabilité sur l'ensemble de ceux qui sont appelés à utiliser les voitures. L'automobile, quand même, ou tout type de véhicule est aujourd'hui entré dans notre société, qu'on le veuille ou non. Cela fait partie de nos moeurs, de nos habitudes et on n'est pas ici, quand même, dans un pays sous-développé. C'est un élément qui fait partie de la vie de presque chacun de nous, qu'on ait une voiture de l'année, une "caddy" ou une minoune, resque que chacun, à peu près, a sa voiture.

Sur la question de l'assurance obligatoire, c'est bien évident que moi, je le comprends dans le sens de vos recommandations, à savoir qu'encore une fois, c'est d'une portée sociale évidente et extrêmement importante. J'ai déjà eu d'ailleurs l'occasion de m'exprimer là-dessus. Je n'ai pas toujours été écouté, je diffère d'opinion... C'est cela, le sens de la démocratie et de la liberté. Je diffère d'opinion avec certains de mes collègues sur ce sujet et sur d'autres.

Je voudrais vous poser une question avant que de vous citer, moi, mes expériences personnelles qui n'ont rien de commun avec mon collègue de l'autre côté de la table — dont je respecte l'opinion, bien sûr — ou plutôt, de-vrais-je citer l'exemple et vous poser la question par la suite.

J'ai eu à effectuer des recours contre mon protecteur, l'assureur, et à le forcer à me défendre dans des causes. Vous allez me dire que c'est un cas personnel; non, c'est un cas fréquent. On doit prendre, à l'occasion et très fréquemment, des avocats pour forcer l'assureur à nous défendre parce que lui se fait à la fois protecteur, défenseur et arbitre à la fois.

Dans des cas, je pourrais en citer, des cas...

M. GIASSON: ... réclamations de dommages personnels.

M. BOSSE: Oui, réclamations de dommages en cas d'accident d'automobile, par exemple, que la compagnie, le courtier ou l'enquêteur prétendent de la responsabilité de l'assuré. Quoi qu'il en soit, je voudrais vous poser une question sur ce type d'assurance que vous suggérez qui comporte des éléments de non-responsabilité personnelle. Pourriez-vous nous citer — parce que, tout à l'heure, quelques-uns de mes collègues semblaient ne pas savoir où cela s'appliquait présentement, j'entends les provinces, les Etats — où cela s'applique présentement, où cela a déjà fait l'objet d'une expérience?

M. GAUVIN: A la fin du rapport, il y a une annexe ou un appendice assez volumineux qui compare certaines propositions. Vous avez une liste d'endroits où des régimes sans égard à la responsabilité ont été mis en vigueur.

Le régime qui s'apparente le plus aux recommandations du comité existe en Nouvelle-Zélande.

M. BOSSE: En Nouvelle-Zélande?

M. GAUVIN: Oui. Il en existe au Michigan, il en existe au Massachusetts, il en existe en Floride et il y a au-delà de 30 ou 40 projets de loi qui ont été présentés dans autant d'Etats américains pour effectuer des changements. Cela existe dans d'autres pays. Partout, en fait, on remet en question le régime traditionnel et les solutions que nous avons préconisées sont également préconisées dans d'autres endroits.

M. BOSSE: Quels sont les résultats obtenus, tenant compte d'une comparaison, par exemple, entre le régime que nous avons ici présentement et les régimes qui ont été appliqués dans ces divers Etats ou pays?

M. GAUVIN: C'est toujours extrêmement difficile de faire des comparaisons, parce que, effectivement, les lois sont différentes.

Dans certains endroits, on a obtenu des réductions de primes substantielles, mais dues exclusivement à des modalités qui ne s'appliquaient qu'à cet endroit.

Pour nous, il est très difficile, au niveau du régime d'indemnisation, strictement d'extrapoler à partir de ce qui s'est passé à un endroit pour dire: Cela va être la même chose au Québec. Nous avons effectivement évalué quel serait le coût du régime. Le document a été publié. Nous avons dit: Avec les données pertinentes au Québec, le régime proposé coûterait à peu près la même chose en indemnisations qu'il coûte présentement. Cela, ce sont les données qui ont été recueillies, qui ont été analysées et qui ont, effectivement, fait l'objet d'une publication du comité. Le comité a évalué quel était le coût de l'indemnisation en vertu du régime proposé.

Maintenant, ce que je voulais vous signaler, c'est que, dans les Etats américains, on ne peut pas, à mon sens, dire: Parce qu'il y a eu une réduction de tel pourcentage à tel endroit, la même chose va se produire ici. Cela peut être beaucoup plus; cela peut être beaucoup moins, selon, en fait, le point de départ où l'on est.

M. BOSSE: Me plaçant ici du point de vue du consommateur, en plus des avantages que moi je présume — je sais que cela peut blesser quelques-uns de mes confrères, quoi qu'il en soit — est-ce qu'à votre avis cela représente un avantage substantiel ou susceptible de le devenir?

M. GAUVIN: Je pense que le régime proposé représente un avantage substantiel par rapport à ce qui existe présentement, avec des indemnisations en moyenne plus généreuses, plus rapides et, finalement, avec un coût moindre non pas pour les indemnités elles-mêmes, mais pour les répartir entre la population.

M. BOSSE: Je vous remercie des réponses et je suis certain que vous vous êtes fait de nombreux amis dans le Barreau!

LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable député de Taschereau.

M. BONNIER: M. le Président, j'aurais simplement une couple de questions ou d'éclaircissements. En ce qui regarde la recommandation 28, dans l'option A, on souligne évidemment qu'il va falloir, encore une fois, déterminer qui est en faute. On dit: "Dans la proportion où l'assuré n'est pas en faute". On a souligné précédemment, je pense, dans des interventions, que le problème, c'est que, si on a trois options, il y en a qui se croient assurés alors qu'ils ne le sont pas, dans certaines circonstances. Ne serait-il pas préférable, à toutes fins pratiques, qu'il n'y ait qu'une seule option?

Maintenant, vous avez suggéré trois options. Est-ce parce que vous entrevoyez que les gens ne sont pas prêts à accepter l'option C immédiatement?

M. GAUVIN: Effectivement, nous avons explicité dans le rapport pourquoi nous voulons trois options. J'ai bien dit, tout à l'heure, qu'il ne fallait pas prendre l'expérience d'un autre endroit et dire: On l'applique au Québec. Je vais vous donner une illustration. Dans certaines provinces de l'Ouest, on a changé assez radicalement au moins l'administration du régime, mais on n'a pas donné de choix d'options véritablement. Mais, dans ces endroits, la population était assurée d'une manière différente de celle du Québec. Il y avait beaucoup plus de gens qui avaient, par exemple, l'assurance-collision qu'il n'y en a ici. Alors, pour eux, c'était beaucoup plus facile de faire un changement complet, de dire aux gens: Vous allez tous devoir assurer vos dommages matériels.

Je pense qu'on peut se poser sérieusement la question à savoir si un régime est justifié de forcer les gens à assurer les dommages matériels contre tous les risques. Nous avons dit, dans le rapport, que cela nous paraissait non justifié et non économique.

Par exemple, l'individu qui a un véhicule de faible valeur, pourquoi le forcer à s'assurer contre tous les risques, alors que lui, la prime, il va la payer à un prix peut-être extrêmement élevé par rapport aux risques qu'il a et qu'il assume.

C'est en fait un problème de laisser, quand même, le libre choix. Maintenant, il faut bien situer l'option A. L'option A, ef-

fectivement, maintient, si on l'analyse comme il le faut, le système actuel, sauf qu'elle force l'assuré à faire affaires avec son assureur.

Si on décortique, si on analyse l'option, c'est fondamentalement le système actuel pour permettre à la population, véritablement, de s'habituer au système, parce que l'expérience, à ce niveau-là, de certains endroits aux Etats-Unis où on a fait la transformation — comme je l'ai dit et comme, je crois, mon collègue Ewin Rankin l'a mentionné — est qu'assez souvent, quand on fait une transformation radicale, c'est simplement lorsqu'un accident se produit que les gens comprennent le sens de la transformation, et on doute qu'il soit acceptable que des gens puissent n'avoir aucun recours après un accident du fait qu'ils ne le découvriraient qu'à ce moment-là. C'est pour cela que nous avons préféré, pour les diverses raisons que j'ai données rapidement, conserver différentes options, un peu pour le libre choix du consommateur.

Il est évident qu'il est bien facile pour un monopole ou pour l'Etat d'imposer certaines choses, mais contrairement à ce qu'on a laissé sous-entendre, le régime proposé, l'ensemble du régime proposé laisse énormément de place au libre choix de l'individu.

M. BONNIER: Mais cela va supposer également qu'il y ait une information extrêmement bien faite parce qu'il y a peut-être des gens qui vont croire qu'une fois que ce régime est établi par hypothèse, ils sont tous assurés et assurés pour tout.

M. GAUVIN: Je pense que c'est le problème de l'information dans tout changement, quel qu'il soit. Les gens sont souvent mal informés. Pour quelle raison? Peut-être que les mécanismes d'information ne sont pas aussi raffinés ou ne rejoignent pas autant de gens qu'on le voudrait ou peut-être parce qu'il y a beaucoup de gens qui ne veulent pas, en fait, s'informer.

M. BONNIER: Une dernière question, M. le Président. Dans le régime proposé, M. Gauvin, qu'est-ce qui arrive du système de la "Facilité"? Vous semblez dire qu'il fonctionne assez bien, mais je ne retrouve pas une recommandation précise à l'effet qu'il doit être maintenu comme tel ou qu'il doit disparaître.

M. GAUVIN: Je pense que vous devriez poser la question aux assureurs. C'est une recommandation sur l'administration du régime...

M. BONNIER: A la troisième partie.

M. GAUVIN: ... et je pense qu'elle est extrêmement claire.

M. BONNIER: Très bien.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Ne chevauchons pas. Est-ce que vous avez terminé?

M. BONNIER: Oui.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Maskinongé.

M. PICOTTE: M. Gauvin, avez-vous songé à la possibilité d'une assurance obligatoire sur la base du conducteur? C'est-à-dire que chaque individu, au Québec, qui demande un permis de conduire doit obligatoirement, pour obtenir ce permis de conduire, être assuré ou avoir une police d'assurance garantie. Conducteur au lieu de propriétaire. Peut-être qu'à ce moment cela aiderait le gars à aiguiser son sens des responsabilités et en plus cela diminuerait peut-être les accidents.

M. GAUVIN: Encore une fois, le rapport fait bien mention qu'il y a trois possibilités pour le facteur de rattachement de l'assurance. A la page 314, on parle de lier l'assurance au conducteur, on parle de lier l'assurance au véhicule, de lier l'assurance à la famille. Le document analysant les trois possibilités a été déposé. Je peux, si vous le voulez, lire ce que le rapport en dit. Nous avons dit: II y a des avantages à l'assurance conducteur, mais il y a des désavantages et, quand on additionne l'ensemble, nous croyons que les désavantages sont plus importants que les avantages, page 314.

M. PICOTTE: D'accord.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Trois-Rivières.

M. BACON: M. le Président, ma question s'adresserait surtout à Me Bouchard. Considérant l'abolition du droit de recours en vertu du régime de la faute, est-ce que dans ce nouveau système, on ne peut pas faire des comparaisons avec l'indemnisation ou le système actuel d'indemnisation des accidentés de travail au Québec?

M. BOUCHARD: Bien sûr, le parallèle est très facile. C'est, dans une certaine mesure, comparable, mais seulement pour fins de compréhension, parce que, dans les deux cas, vous avez vraiment une assurance-risque ou une assurance-accident. C'est-à-dire tout comme lorsque vous vous assurez — je prends un exemple dans un autre secteur — dans le cas d'une assurance-vie, que le fait de votre décès donne droit à une indemnité.

L'assurance-accident, le fait de l'arrivée d'un événement prévu dans le contrat d'assurance, dans les circonstances prévues, donne droit à une indemnité. D'une certaine façon, c'est vrai. Mais ce sont justement les remarques et les critiques que nous avons enten-

dues, disant que c'était la continuation d'une trouée dans le système de la responsabilité. On a commencé par les accidents du travail, on continue dans l'assurance-automobile et où arrêterons-nous? Je ne sais pas où on va s'arrêter; il faudrait peut-être poser la question. L'évolution de la société, où est-ce qu'elle ira? C'est une question fondamentale et, encore une fois, lorsqu'on étudie les critiques du régime, il ne faut jamais, à mon humble point de vue, oublier que c'est vraiment le régime auquel nous nous attaquons. Et on ne répond pas à une critique d'un régime par des cas d'espèce. En effet, dans la plupart des lois adoptées par le législateur, il serait facile de vous dire que, dans certains cas, il crée des injustices. C'est bien sûr, parce qu'une loi est toujours faite pour le bien commun, pour l'ensemble, pour une majorité.

Que le rapport abolisse totalement ce système pour centrer l'indemnisation sur cette notion d'accident, lequel accident donne automatiquement ouverture à une indemnité d'un individu qui fait partie de la société, parce que la société, suivant ses concepts sociaux et moraux qui évoluent constamment et qui se modifient, considère que le fait de vivre dans une société moderne donne ouverture à ce genre de compensation... Pourquoi? Parce que, précisément, l'ancienne notion qui cherche, encore une fois, à rattacher un responsable à tout prix pour une indemnisation s'attache trop à la possibilité presque illimitée de la liberté humaine de l'individu. A l'état pur, cela demeure vrai. Et je vous dis que, si vous étiez capable, vous comme moi, de rétablir une magnifique société agraire où les gens pourraient véritablement avoir un tempo différent et un rythme, une civilisation différente de celle que nous avons, il est possible que le système de la faute, qui n'a pas été conçu pour ça mais qui est un système de base, puisse continuer à s'appliquer.

Mais je voudrais également, à l'occasion — si vous me permettez une parenthèse — répondre non pas aux critiques, mais souligner que cette notion de faute, de responsabilité, qui est ancrée dans le coeur de l'homme et qui, apparemment, répond à des aspirations si fondamentales et si viscérales que l'homme en serait perturbé... Un instant! Il y en a d'autres. Vous savez, je pense qu'il ne faut pas trop s'aventurer dans ce secteur et admettre quand même que ce n'est pas parce que l'on conçoit et que l'on met sur pied un système d'indemnisation juste, adéquat, bien établi et à un coût moindre, mieux administré que le système actuel, que la population, pour une notion de responsabilité à laquelle elle croirait comme à ses yeux, s'y refuserait. Ce serait aller à l'encontre, à notre avis, d'à peu près toutes les études, encore une fois, qui ont été faites et qui convergent toutes dans le même sens.

M. GAUVIN: Est-ce que je peux me permettre une observation? Le parallèle que vous avez fait effectivement entre les accidents de travail...

M. BACON: Je n'ai pas fait un parallèle; j'ai demandé si on pouvait faire un parallèle.

M. GAUVIN: Ah! si on pouvait faire un parallèle. Il a été fait dans un rapport qui a été déposé au Sénat américain et j'encourage les membres à en prendre connaissance. Je ferai parvenir au secrétaire, ultérieurement, le titre de ce rapport. Il y en a plusieurs au Sénat américain, mais celui-là traite du processus inévitable dans lequel on est, où la notion historique de la faute a été abandonnée dans le cas des accidents de travail et e.ït abandonnée de plus en plus dans d'autres secteurs.

Il y a également un autre rapport que nous avons utilisé, qui est le rapport d'une commission de Nouvelle-Zélande, qui en traite très longuement. Je pense que vous n'avez qu'à consulter tout ce qui se dit pour voir, en fait, que nous évoluons vers ce niveau, dans le sens d'un régime de plus en plus d'indemnisation directe. Il est bien entendu que les gens dont les intérêts sont menacés vont utiliser toutes sortes d'arguments pour défendre leurs intérêts ou en éviter l'application.

Il est également intéressant de noter que les arguments de ceux qui s'y opposent sont exactement les mêmes un peu partout.

M. BACON: Votre commission s'est-elle livrée à des travaux pour comparer peut-être les montants d'indemnisation sous les deux régimes, sans faute et avec faute?

M. GAUVIN: En fait, j'aimerais bien vous situer. On parle assez souvent du régime sans égard à la responsabilité. Le droit à l'indemnisation est une chose; la détermination des montants qu'on veut y apporter en est une autre. Si la population est prête à payer plus en prime, il est bien évident qu'on peut doubler les indemnités prévues. Il faut tout le temps faire le partage entre, d'une part, ce dont les victimes ont besoin pour avoir une compensation juste et équitable et également ce que la population est prête à payer pour ce même régime.

On peut avoir un régime qui va donner des indemnités astronomiques. Maintenant, il va falloir que quelqu'un les paye. Ce n'est quand même pas un citron qu'on peut presser à l'infini.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Montmagny-L'Islet.

M. GIASSON: M. Gauvin, dans les recommandations sur l'indemnisation des victimes d'accidents d'automobile, au paragraphe 19, vous recommandez d'abolir complètement le

droit de recours en vertu du régime de la faute pour toutes les pertes découlant de blessures corporelles. Or, au paragraphe 26, vous maintenez ce droit de recours lorsqu'il s'agit de dommages matériels. Quelle est la base? Ce n'est pas ça?

M. GAUVIN: Je m'excuse, c'est aboli dans les deux.

M. GIASSON: C'est aboli, oui, excusez. Très bien. J'avais cru comprendre qu'on maintenait le droit de recours en indemnisation dans le cas de dommages matériels et qu'on l'abolissait dans le cas des blessures corporelles. Maintenant, en acceptant le principe de l'application d'un système "no fault", vous avez certainement considéré, à l'intérieur de ce principe et des autres recommandations touchant la sécurité routière, la possibilité de maintenir une compétition très valable dans le commerce de l'assurance; soit que l'Etat intervienne en créant une société ou en acquérant une compagnie existante et, à côté de ça, maintenir des équipes d'assureurs qui procèdent par le système du courtage, toujours en révisant en profondeur les méthodes de calcul de la rémunération des courtiers, soit par une plus grande mécanisation, soit par une concentration des bureaux des courtiers pour utiliser au maximum l'électronique, tout en maintenant également un troisième secteur qui serait composé de ceux qui transigent de l'assurance directement avec le public, non par l'intermédiaire de courtiers, mais par des commis payés sur une base salariale, de façon à laisser la possibilité aux automobilistes du Québec d'avoir un choix véritable entre une entreprise étatique, une entreprise privée fonctionnant par le système traditionnel du courtage et appliquant certaines recommandations que vous avez faites dans votre rapport sur les méthodes de rémunération tout en laissant également le troisième champ d'activité qui est celui du "direct writer", comme on l'appelle communément.

Est-ce que cette possibilité, vous l'avez examinée et, si vous l'avez écartée, quelles sont les raisons pour lesquelles vous avez écarté cette possibilité de fonctionnement dans un système compétitif; entreprise privée, Etat, entreprise privée avec deux systèmes possibles?

M. GAUVIN: C'est du chevauchement. Vous m'excuserez, mais c'est enfin un problème d'administration. Je croyais qu'on discutait d'indemnisation. Je n'ai pas d'objection...

M. GIASSON: On pourra revoir ça... M. GAUVIN: ... à y revenir en fait.

M. GIASSON: ... à d'autres chapitres de votre rapport.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Lafontaine.

M. LEGER: Juste une simple question que j'avais oubliée tantôt, concernant une prise de position que nous avons vue et que vous avez probablement vue, je présume, au rapport du Barreau, qui parle d'un impact négatif que le système "no fault" ou sans responsabilité peut avoir sur le comportement des automobilistes. Je ne dis pas que je souscris à cela, mais j'aimerais avoir votre prise de position et une explication que vous donneriez étant donné que vous ne serez peut-être pas là demain ou quand le Barreau va venir. J'aimerais avoir votre réponse à cette prise de position du Barreau.

M. GAUVIN: Quant à moi, je préférerais attendre, pour répondre à cette question, ce que messieurs les avocats ont à dire dans leur mémoire.

M. LEGER: Vous n'avez pas lu le mémoire?

M. GAUVIN: Si c'est le désir des membres de cette commission, je pourrais toujours trouver le temps de revenir à la fin pour vous faire savoir ce que j'en pense.

M. LEGER: De toute façon, même si vous nous laissez suspendus à vos lèvres, vous avez quand même prévu dans votre rapport une réponse à cette chose. Vous avez quand même évalué. Je suis d'accord avec vous, dans votre rapport, que cela ne peut pas avoir une conséquence négative sur l'automobiliste. Je l'affirme, vous l'affirmez, mais les raisons derrière cela, vous l'avez évalué pour affirmer cela. D'accord.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Nous terminons ce chapitre sur l'indemnisation. Nous étudierons maintenant les recommandations sur l'administration du régime proposé. Je donne la parole au ministre des Institutions financières, Compagnies et Coopératives.

Administration du régime proposé

M. TETLEY: M. le Président, dans ma dernière section, quelqu'un avait parlé des avocats qui pourraient peut-être perdre une bonne partie de leur commerce ou de leur profession. J'ai l'honneur d'être l'orateur, en novembre, devant les avocats de la province à la réunion annuelle, et ils soulèveront sans doute la question.

Aussi, dans la section "Recommandations

sur l'administration du régime proposé", à la recommandation 53 vous proposez que le rôle du courtier soit changé en celui de conseiller. Voici deux groupes dont la vie serait certainement changée, les avocats et les courtiers d'assurance-automobile. Certaines compagnies d'assurance subiraient certainement de grands changements en vertu des recommandations sur l'administration.

Est-ce possible, parce que vous n'avez pas parlé vraiment d'échéancier ou de l'implantation, de procéder par étapes? Et une question corollaire: On m'a informé que dans une certaine province il y a un système de fonds d'indemnisation pour ceux qui ont perdu certaines sommes d'argent. Je crois que c'est vous, M. Rankin, qui m'aviez parlé de cela autrefois. Il y a certaines provinces où il y a un fonds ou un système pour le nombre d'années au moins pendant lesquelles l'Etat ou la province subventionne certaines personnes qui ont perdu des revenus en vertu de l'implantation d'un système d'assurance-automobile, pas exactement comme vous l'avez proposé, mais un système autre.

En avez-vous entendu parler ou avez-vous des idées sur un tel fonds ou avez-vous des idées au sujet d'une implantation par étapes?

M. GAUVIN: II est bien certain qu'une mise en vigueur des recommandations du régime va toucher durement plusieurs personnes. Il est bien certain que les groupes que vous avez nommés seront touchés. Il faudrait quand même revenir au mandat du comité...

M. TETLEY: C'est une question hors de votre mandat.

M. GAUVIN: On n'a jamais demandé au comité de protéger les intérêts des intermédiaires. Le gouvernement a demandé au comité de protéger avant tout les victimes, le consommateur, et c'est dans cet esprit que les membres ont rempli leur mandat.

La question qu'on peut se poser est la suivante: Le régime actuel est-il inefficace? Si nous voulons le rendre plus efficace, il faut réduire les coûts. Si on réduit les coûts, cela touchera certainement des personnes. A ce moment, est-ce qu'on veut conserver un régime inefficace pour conserver, prétendument, les droits acquis pour certains individus ou ne veut-on pas effectivement établir un régime qui soit réellement efficace pour l'ensemble de la population? Je pense que M. Rankin aimerait répondre à votre question.

M. TETLEY: Permettez-moi de dire: Voici votre mandat et la réponse est claire. Je crois que je peux accepter votre réponse et je partage votre opinion en bonne partie. Mais avec votre expérience et l'étude pendant trois ans des autres régimes, la Nouvelle-Zélande qui se rapproche beaucoup de votre système, etc., a-t-on changé complètement le système par une seule loi, par exemple, en Nouvelle-Zélande?

M. GAUVIN: En Nouvelle-Zélande, on a été extrêmement loin puisqu'on a établi le régime, en premier, pour les victimes d'accidents du travail et les victimes d'accidents de la route. A peine environ douze mois après l'implantation du régime, il a été étendu pour couvrir l'ensemble des victimes d'accidents, quelle qu'en soit la cause.

Partout où on a fait des changements, on a fait des changements à un moment donné avec, possiblement, certains ajustements par la suite. Mais pour procéder par étapes, est-ce qu'on va abolir à moitié une chose? Si la chose n'est pas bonne, je pense qu'il faudrait quand même l'abolir dans son entier.

M. TETLEY: Même à votre recommandation 28 ou à une autre, il y a des cas où vous procédez pour cinq ans. Pardon, ce n'est pas 28, mais il y a certaines étapes, même dans votre recommandation. Il est important, évidemment, pour le gouvernement et pour la population entière, de savoir s'il faut procéder en une seule fois, d'un seul coup ou si c'est possible ou même recommandable de procéder par étapes. Peut-être que M. Rankin ou Me Bouchard ont des suggestions suivant leur expérience.

M. BOUCHARD: Tout dépend de ce que vous envisagez. Si vous considérez la partie du rapport qui concerne la sécurité routière, c'est une section; si vous considérez les critiques fondamentales dont nous sommes conscients... Remarquez bien que pour ma part, membre du Barreau moi aussi, j'étais certainement conscient que mes confrères du Barreau ne partageraient pas mon point de vue. Le rapport du Barreau ne m'a pas surpris, mais j'avais une responsabilité, comme membre du comité, et on l'a assumée. Si vous envisagez la réforme fondamentale, qui se tient entre, d'une part, le droit à l'indemnité et, d'autre part, l'administration du régime, nous n'avons eu aucun exemple que nous pourrions vous citer où l'on a procédé par étapes, c'est-à-dire où on a scindé ce genre d'opérations.

L'administration du régime est un tout extrêmement complexe. Vous avez pu vous en rendre compte par le rapport qui est très dense, entre autres dans cette section, et nous avons été dans l'obligation même de vous dire, en étant conscients des conclusions auxquelles nous en venions, que lorsque nous nous sommes attaqués à un régime d'entreprise privée comme celui que nous connaissons — et, entre parenthèses, nous avons souligné qu'il n'est pas si privé que ça parce qu'il est probablement très souvent en ternies monopolistiques — lorsque nous avons évalué les ramifications de ce régime, nous avons conclu en la valeur irremplaçable d'une saine et véritable concurrence, mais à la condition qu'elle soit saine et qu'elle soit véritable.

C'est parce que nous y avons cru que nous avons dit: D'accord, nous croyons que la chance doit être donnée à l'entreprise de se

réformer, de se réadapter en fonction des critères nouveaux qui sont ceux qu'un peuple se donne, ceux que nous avons élaborés dans notre rapport et qui sont des concepts fondamentaux, sociaux, globaux. Si l'entreprise veut le faire, M. le ministre, pour ma part, je crois qu'il est impensable que vous puissiez vous attaquer à la réforme de l'entreprise privée par étapes. Nous en étions tellement convaincus que nous avons dit: Les réformes forment un tout et si toutes les réformes sont intégralement — le mot "intégralement" y est — appliquées nous sommes d'avis que le gouvernement peut confier à l'entreprise privée l'administration du régime. Mais "si toutes les réformes", dans l'ensemble... Sinon, autre option, l'étatisation.

M. TETLEY: Vous parlez de toutes les réformes...

M. BOUCHARD: ... de l'administration.

M. TETLEY: ... de l'administration, de la recommandation 37 à la fin.

M. BOUCHARD: C'est ça.

M. TETLEY: Parce qu'il faut préciser ça, j'ai noté qu'un journal s'est trompé. Quand vous dites toutes les réformes, ce sont les recommandations 37 à la fin. M. Rankin, est-ce que j'ai tort, durant plusieurs rencontres, lunch, etc., n'est-ce pas vous qui m'avez parlé, je crois, du Manitoba, non?

M. RANKIN: Sur la question des conversations...

M. TETLEY: C'est ça, pour certains groupements.

M. RANKIN: Je ne sais pas, peut-être que j'ai mentionné le cas du Manitoba, mais je l'aurais mentionné pour expliquer exactement ce que M. Gauvin a dit: Pourquoi ne pas se pencher sur ce problème? On parle de ça, mais ce ne sont pas seulement les avocats qui vont être touchés, où est-ce qu'on va s'arrêter?

M. TETLEY: Excusez-moi, c'est une question...

M. RANKIN: Cela a existé. Ils ont établi un fonds pour recyclage, si vous voulez. Pourquoi ne pas faire la même chose pour les avocats, pourquoi ne pas faire la même chose pour un garagiste qui ne peut pas tricher?

M. TETLEY: Je crois que le Manitoba a refusé les demandes des avocats.

M. RANKIN: A propos de ça, je peux citer une remarque d'un de mes amis quand nous sommes allés dîner avec lui, Jean-Louis et moi. Il a un ami qui était courtier à Winnipeg et qui était si écoeuré des changements dans le régime d'étatisation qu'il pliait bagage; il est allé à Victoria.

M. TETLEY: A Victoria. Parce qu'il faut ajouter que le Manitoba n'a pas aboli les courtiers.

M. RANKIN: Non, il n'a pas...

M. TETLEY: Bon, je vais laisser à mes collègues d'autres questions. J'espère que vous allez soulever la question ou peut-être la faciliter... Peut-être que je peux mentionner que je trouve importants tous les articles et recommandations mais principalement 53 et 56, "Que le financement des primes d'assurance-automobile ne puisse plus être effectué par les courtiers..." Evidemment ça aide aussi au système obligatoire. Un homme peut arriver avec un certificat mais il n'aura payé que pour un mois, etc. Après, il faut rechercher l'homme qui n'est assuré en effet que pour un mois.

L'article 57, que l'évaluation des dommages matériels soit effectuée par des centres d'évaluation; c'est très important, je crois.

Je laisse la parole au député de Lafontaine.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable député de Lafontaine.

M. LEGER: M. le Président, cette troisième partie... Vous voulez poser une question?

M. GAUVIN: Je m'excuse, je veux mentionner que certains membres ont des engagements professionnels à remplir, ils ont des responsabilités; ils en avaient, ils les ont remplies, ils en ont d'autres. Me Bouchard doit être excusé.

M. LEGER: C'est malheureux,

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Nous remercions Me Bouchard de sa participation cet après-midi.

M. BOUCHARD: Merci, M. le Président.

M. LEGER: M. le Président, je crois que cette troisième partie est une des parties des plus importantes, c'est-à-dire ce sont des conclusions pratiques à la suite de toute l'étude que vous avez faite. Je pense que votre recommandation, à la fin, a causé un réveil tardif, mais un réveil des compagnies d'assurance. Cette recommandation, qui est quasi un ultimatum, a créé chez elles le désir de réellement être les défenseurs du "no fault" et de vouloir faire des réformes.

Mais prenons la page 376, de votre mémoire, où vous dites que le comité a consacré des ressources considérables à l'étude de cet aspect de la question, et le résultat de ces études est clair. L'écart des coûts d'administration entre un monopole étatique et une entreprise privée

réformée est de l'ordre de 3 p.c. — je souligne le mot "réformée". Après avoir affirmé cela, vous arrivez par la suite avec une conclusion qui, selon moi, je vais vous poser la question après — n'est pas autre chose qu'une décision ou un choix que le comité a fait et moi, je la voyais comme un choix politique.

Cependant, ce matin, vous avez affirmé que ce n'était pas au comité de faire un choix politique, que c'était au gouvernement. Alors, si ce n'est pas un choix politique, quelles ont été les raisons qui vous ont amenés à conclure que c'était une meilleure solution d'avoir une réforme complète avec l'entreprise privée, alors qu'il y a le critère majeur d'un meilleur coût de la facture totale des Québécois, qui est de 3 p.c, et qui équivaut à l'heure actuelle, je pense entre $12 millions et $15 millions par année, puisque les primes d'assurance doivent se chiffrer par $400 millions, étant donné qu'il y a un an et demi, elles étaient dans les $380 millions?

C'est donc dire qu'il y a une épargne de $12 millions à $15 millions pour les Québécois. Alors, s'il y a une épargne... je voudrais que ce soit bien clair, qu'on se rende bien compte que devant une situation, le choix ne dépend pas d'une idéologie. Ce n'est pas une question de dire: Ce sont les méchants capitalistes qui pensent ou ce sont les méchants socialistes qui pensent; c'est une question simplement de savoir si c'est plus rentable pour l'Etat de le faire par une entreprise étatique, ou si c'est plus rentable de le faire par une entreprise privée.

Donc, c'est un choix qui n'est pas basé sur une idéologie, mais sur un choix bien pratique. Alors, au départ, il y a une question de rentabilité. L'Etat ne doit pas nationaliser ou étatiser tous les systèmes qui existent dans tous les domaines de la société. Il ne doit le faire que si c'est plus rentable et que cela apporte des meilleurs avantages aux citoyens. C'est cela qui est la considération première. Il n'est pas question de dire: C'est du capitalisme ou du socialisme. Ce n'est pas cela. Il est question de savoir ce qui est le plus rentable pour les citoyens.

Alors, si vous arrivez à la conclusion qu'avec une concurrence rétablie, cela donne un meilleur coût, d'une part; deuxièmement, vous affirmez à la page précédente qu'avec un régime étatique, cela amène une façon plus rapide d'effectuer des réformes, deuxième raison majeure; troisièmement, vous affirmez que... c'est-à-dire, vous n'affirmez pas, mais il est sous-entendu dans votre rapport que les investissements possibles par les compagnies d'assurance actuellement qui font des profits normaux, mais qui font des profits du rendement de l'ordre de 15.7 p.c. — je pense que vous avez cela à la page 237 — pour un Etat qui a souvent besoin de liquidité et qui est obligé d'emprunter à court terme, les sommes de $400 millions se placent rapidement avec un revenu qui rapporterait beaucoup à l'Etat aussi; quatrièmement, pour qu'un Etat soit capable de réaliser plus facile- ment sa politique dans ce domaine-là, est-ce que ce n'est pas plus facile pour lui, quand il a lui-même le système en main par l'assurance étatique?

Alors, pour quelle raison, en ramenant les quatres points, les quatre conclusions de l'avantage d'un régime étatique, comparativement à un régime de concurrence réétabli, comment se fait-il que vous arriviez à la conclusion contraire, soit de donner un ultimatum pour dire: II faut que toutes les conditions qu'on présente soient acceptées? Quels sont les inconvénients majeurs que vous n'avez peut-être pas dits, mais qu'on peut lire dans votre dernière phrase, à la page 376:"L'écart de 3 p.c. ne peut, à lui seul, justifier une recommandation en faveur de la création d'un monopole"?

Alors, toute la présentation de votre rapport, sur lequel nous sommes d'accord, nous trouvons que c'était une étude courageuse et réaliste, vous arrivez avec une conclusion. Et cette dernière phrase ne nous explique pas pourquoi vous n'arrivez pas avec l'autre conclusion. Quels sont les inconvénients majeurs que vous avez vus au système étatique?

M. TETLEY: ... 377

M. GAUVIN: Aux pages 372 et 373, nous avons une partie du rapport qui s'appelle "Les avantages de la véritable concurrence". On aurait certainement pu, après cela, marquer les désavantages de la véritable concurrence pour prendre les avantages de l'Etat, les incorporer là.

A la suite de cela, parler des avantages de l'étatisation et des désavantages de l'étatisation, en reprenant ce qu'étaient les avantages de l'un, qui deviennent les désavantages de l'autre. Cela aurait quand même rallongé le rapport, je ne sais pas si cela aurait amené beaucoup plus d'explications.

En fait, la première réponse que je pourrais peut-être apporter aux nombreux arguments que vous avez amenés, c'est que vous avez parlé d'un meilleur coût. Mais l'établissement d'un monopole, soit privé ou soit d'Etat, comporte de nombreux désavantages.

Parmi ces désavantages — on peut bien les reprendre — il y a l'effet sur le coût du produit. Quant à nous — quant à moi, en fait — quel que soit le monopole, on perd alors tout élément de comparaison entre les coûts de ce monopole et d'un autre monopole. Si vous établissez un monopole dans quelque secteur que ce soit, comment allez-vous, à l'avenir, savoir si le produit que le monopole met sur le marché est au meilleur coût possible?

Il ne faut pas oublier que le monopole a un désavantage majeur et je dis bien qu'il soit privé — parce qu'il y en a, des monopoles privés — ou qu'il soit d'Etat. C'est qu'alors, le consommateur n'a pas le choix. Le monopole peut repasser ses coûts au consommateur sans que celui-ci puisse véritablement s'en défendre.

C'est un désavantage qui nous paraît très important.

Deuxièmement, au niveau du prix du produit, nous avons dit que la tarification du régime devrait évoluer plus qu'elle ne l'a fait dans le passé. Dans un régime de véritable concurrence, pour aller chercher des clients, les gens qui sont en concurrence les uns avec les autres vont chercher, pour un groupe donné, à leur produire ou à leur vendre un produit au meilleur coût possible et le fait que l'assuré ou le consommateur puisse diriger sa clientèle vers une autre personne ou un autre organisme est un élément majeur pour forcer les gens en concurrence à être à la fine pointe d'un juste prix.

Dans le cas d'un monopole, vous imposez quelque chose. Vous pouvez bien exiger deux fois plus à l'un que le risque qu'il représente et également deux fois moins à l'autre. Vous avez toute liberté et cela, cette liberté du monopole, elle peut jouer défavorablement pour certaines personnes.

Dans son rapport, la commission a dit que ce n'était pas le rôle de la tarification de l'assurance d'aller régler les problèmes de pauvreté. Ce n'est pas son rôle. Ce n'est pas non plus à l'assurance d'aller subventionner les gens qui n'ont pas les moyens de s'assurer parce qu'ils n'ont pas de revenus. Ce n'est pas son rôle. Dans un monopole, on peut très bien lui donner ce rôle, mais est-ce que c'est véritablement le rôle d'un régime d'assurance ou si ce n'est pas le rôle d'un régime de taxation?

Finalement, un facteur assez important, c'est la qualité des services. Quand vous avez deux endroits où vous pouvez vous adresser, vous en avez même plus que deux, vous en avez dix ou vingt, si la qualité des services à un endroit n'est pas selon ce que vous voulez, vous pouvez toujours vous adresser ailleurs. Mais moi, j'ai essayé de téléphoner, tout à l'heure. Je n'ai pas eu grand choix. La ligne que j'appelais — l'interurbain — était occupée parce qu'ils n'ont pas assez de téléphonistes. Eh bien, s'il y avait un peu plus de concurrence, peut-être que j'aurais eu un meilleur service.

Pour nous, il est exact que, dans notre évaluation, on pourrait économiser en créant un gros monopole. Qu'il soit privé ou d'Etat, l'économie serait là, si on parle strictement de l'économie. Mais n'oublions pas les désavantages qu'on amène. Quand on les balance, pour ma part, je suis loin d'être certain que la population du Québec — et c'est à vous de répondre à cela — n'accepterait pas de payer un peu plus pour conserver le libre choix.

Cela a l'air très important, 3 p.c. Allons donc voir, dans la prime moyenne, qu'est-ce que cela représente. Cela représente $5.

M. LEGER: $250.

M. GAUVIN: Est-ce que, pour conserver les avantages de pouvoir dire à quelqu'un: Moi, je ne suis pas satisfait et je peux m'en aller ailleurs, cela ne vaut pas quelque chose? Quel est le prix qu'on met à cela?

Deuxièmement, vous avez parlé des investissements. Encore une fois, dans le rapport, on en traite. On a mentionné qu'on peut vouloir étatiser pour s'accaparer la part de prime que les assureurs conservent en fiducie pour le public, mais il ne faudrait quand même pas oublier qu'il y en a une partie qui est déjà investie dans la province. Cet argent l'est. Il y a peut-être un problème d'investissement des organismes financiers. On n'avait pas le mandat de l'examiner, mais il ne faudrait quand même pas aller étatiser pour régler ce problème, problème qui pourrait être réglé par des modifications appropriées aux lois. Si on veut imposer certaines choses au niveau des investissements, que le gouvernement regarde le problème, il n'y a pas de doute qu'il le fait, qu'il détermine une politique d'investissement des organismes financiers et qu'il le dise ouvertement.

Pour nous, en fait, on ne va pas, encore une fois, simplement étatiser un secteur d'activité pour aller chercher, si c'est $400 millions, $400 millions. Cela peut se faire autrement, mais encore plus, on n'ira pas chercher ce montant, on va aller chercher ce qui ne serait pas investi au Québec. Quel est-il? Nous ne croyons pas être qualifiés pour répondre à cela. On aimerait bien que les experts dont s'entourne M. Tetley nous donnent les explications.

Ce qui nous a surpris, c'est que chaque fois qu'on parle de l'Etat, immédiatement on parle d'inefficacité. C'est ce qui nous a drôlement surpris. Quand on regarde les régimes étatiques qui existent et qu'on accepte les critères qui nous sont donnés pour déterminer ce qu'était l'efficacité, ces régimes prennent une part beaucoup moins importante du dollar-prime pour s'administrer. Mais attention! on peut réaliser des économies à l'intérieur de l'entreprise privée. C'est dans cette optique que nous avons préparé un schème de modifications du système actuel d'administration pour en arriver à donner, au lieu de $0.60 du dollar-prime, aux victimes, en donner $0.80. On va dire: On peut le faire par l'étatisation, alors on va faire les mêmes réformes que celles qui sont préconisées. Pourquoi ne pas les faire dans un régime qui coûte, quant à nous, très peu plus cher, d'après Les estimés que nous avons faits, mais qui conservent à la population du Québec un libre choix, qui ne le met pas en face d'un monopole, comme certains ont prétendu.

M. LEGER: Je voudrais quand même vous faire remarquer que vous affirmez que dans un monopole, ou d'Etat ou privé, le monopole comme tel n'assure pas une concurrence. Il y a quand même un point qu'il faut

admettre, c'est que dans la concurrence où il n'y a pas de monopole, dans la concurrence privée, l'appât ou l'appétit c'est la possibilité de profit. L'Etat n'a pas cet appétit de profit sauf peut-être le profit électoral. C'est donc dire que l'intérêt qu'il aurait, c'est de demander le moins cher possible de façon que ses électeurs sachent bien que la décision a été bien prise et que cela leur coûte moins cher. Il y a quand même l'intérêt d'un gouvernement de ne pas faire payer inutilement cher puisqu'il n'a pas l'intérêt du profit comme tel. C'est une personne morale. Donc, il n'a pas d'appétit du côté du profit.

Je reviens sur deux affirmations que vous avez faites, au paragraphe suivant de la page 376: "Une saine et véritable concurrence rétablie par suite d'une intervention vigoureuse du gouvernement compenserait ou, à tout le moins, minimiserait l'écart des coûts d'administration entre les deux types de régime." Donc, vous affirmez que même la concurrence rétablie, cela va coûter quand même meilleur marché, l'Etat ayant installé un régime étatique. Là, vous dites: "Elle favoriserait aussi une juste et équitable répartition des coûts pour chaque groupe d'assurés, selon la nature des risques qu'ils représentent pour l'ensemble des assurés." De quelle façon le régime étatique ne peut-il pas faire la même chose que le groupe des intérêts privés concernant la répartition des coûts pour chaque groupe d'assurés selon la nature des risques qu'ils représentent pour l'ensemble des assurés?

Est-ce que vous affirmez que l'Etat ne peut pas avoir cette préoccupation aussi?

M. GAUVIN: L'Etat peut l'avoir, mais en fait c'est beaucoup plus facile pour l'Etat de mettre de côté cette préoccupation. Dans un système de véritable concurrence, cette préoccupation existe nécessairement tandis que dans un système monopolistique, en fait, on n'a pas cette préoccupation parce qu'on peut imposer aux gens le prix du produit qu'ils achètent. Dans un système de concurrence, on ne peut pas le leur imposer; si on leur demande trop cher par rapport au véritable risque qu'ils représentent, le compétiteur va le découvrir avec ses analyses, va effectivement réduire le prix et, normalement, l'assuré ira vers les gens qui exigent les prix moindres, compte tenu nécessairement de la qualité des services qu'ils reçoit.

M. LEGER: Vous avez réalisé quand même, je pense, que l'assuré ne peut pas, dans le système actuel — et je me demande s'il le pourra dans le nouveau système à concurrence réelle— vérifier et faire le "shopping", comme disait si bien le ministre des Institutions financières. La majorité des assurés ne connaissent pas toutes les particularités, les implications de chacune des polices offertes par différentes compagnies. Quand vous dites plus loin, au troisième point de votre paragraphe, "en assurant une qualité de services", est-ce que l'Etat ne peut pas assurer la même qualité de services? J'ajoute à cette question: Avez-vous des expériences dans les trois autres provinces ou dans les autres Etats où la qualité des services aurait été moindre, où l'ensemble des risques n'aurait pas été réparti équitablement sur l'ensemble des assurés, dans les autres provinces ou les Etats américains qui ont une assurance étatique? Avez-vous des expériences qui prouveraient que ça n'a pas donné et la qualité des services et une meilleure répartition des coûts aux assurés?

M. GAUVIN: En fait, le mandat du comité n'était pas de faire une commission d'enquête sur le régime de la Saskatchewan, du Manitoba ou de la Colombie-Britannique, qui n'existait pas. On nous a même reproché de ne pas l'avoir examiné. Il n'existait pas quand on était là. C'est curieux de nous reprocher une chose comme cela. Je pense que si on examine quand même ces régimes — il y a des gens qui nous imputent maintenant à peu près tous les maux — tout ce qu'on peut dire, c'est que si on va voir sérieusement ces régimes, on va se rendre compte que dans certains secteurs, ça laisse à désirer. Et la plus belle illustration, c'est de comparer l'évolution des régimes comme tels. Il y a au-delà de 25, même maintenant 27 ans, un régime a été mis en vigueur — sans le nommer — et si on regarde en fait l'évolution de ce régime, on se rend compte qu'il a été stagnant, que ce n'est que lorsqu'un autre régime est arrivé que les gens ont dit: II faut changer le nôtre. En fait, c'était une forme de concurrence; il y avait quelqu'un maintenant pour comparer. Pendant toute cette période, il y avait très peu de comparaison et on est resté avec le régime qu'on avait. Il ne faudrait quand même pas oublier, lorsqu'on compare l'un et l'autre, le danger qu'un régime monopolistique n'est pas sujet en fait à un changement, à une évolution aussi rapide que des gens qui doivent fournir, au meilleur coût possible, le meilleur service et évoluer constamment pour satisfaire les besoins du consommateur.

Cela ne veut pas dire que ce n'est pas réalisable, mais l'expérience passée indique, quant à moi, que c'est plus difficile.

M. LEGER: Maintenant, à la page 367 de votre rapport, vous dites qu'une tarification dans un régime compromettrait l'équité individuelle. Que voulez-vous dire par là? Les deuxième et troisième paragraphes de la page 367, l'équité individuelle.

M. GAUVIN: En fait, quand on parle de distribution du risque, un régime monopolistique pourrait très bien dire — et cela a été mis de l'avant —: Demain matin, ça coûte $450 millions au Québec pour votre régime; il y a deux

millions d'assurés, ça fait $225 par tête, point final, à la ligne. Et c'est une possibilité. Nous, ce que nous disons, c'est qu'à ce moment-là on ignore totalement qu'à l'intérieur de la population il y a des groupes qui présentent un risque différent, il y a des groupes qui ont des habitudes de conduire très différentes et qu'on s'éloigne aussi de l'équité individuelle.

M. LEGER: Dans...

M. GAUVIN: J'ai donné un exemple extrême, mais même à l'intérieur d'une tarification qui semble raffinée, il peut y avoir des injustices.

M. LEGER: Maintenant, à la page 373, vous parlez, au paragraphe 3, des effets sur le marché de la réparation des véhicules. Vous semblez dire qu'un assureur unique encouragera moins l'esprit d'innovation dans les techniques de réparation d'automobiles. Est-ce que vous avez des documents qui vous ont été présentés qui démontrent que des améliorations favorables aux consommateurs ont été apportées dans les garages, dans le régime actuel, sous l'impulsion des compagnies d'assurance entre autres?

M. GAUVIN: Je pense que les compagnies d'assurance, le problème c'est qu'elles essaient toujours de minimiser leurs coûts de sinistres. Alors que, dans un régime monopolistique, minimiser ces coûts est moins important, puisqu'on peut toujours les repasser aux consommateurs. Simplement par déduction logique on peut en arriver, sans faire de démonstration de cas actuels, qu'une personne qui a la possibilité de repasser certains coûts de fonctionnement est moins tentée de les minimiser.

Alors c'est dans ce sens que je peux y répondre immédiatement. Maintenant, quant aux autres réponses, il faudrait se référer aux travaux qui ont été faits par le comité.

M. LEGER: Aux pages 370 et 371, vous avez des tableaux qui indiquent de quelle façon la réduction de 20 p.c. du coût peut être faite, et vous partez avec le coût de régime actuel à 36.6 p.c. Il avait été question que la ristourne aux assurés provenant des primes était de l'ordre de 60 p.c. seulement et qu'avec les 20 p.c. que vous allez corriger, les 5.1 p.c. du tableau 1 et les 11.5 p.c. du tableau 2, ça faisait une réduction de 20 p.c. Alors les 36.6 p.c. que vous avez à cette page, avec les 40 p.c. que je m'attendrais d'y voir, est-ce qu'il y a 3.4 p.c. de différence, est-ce que c'est le profit qui est la différence?

M. GAUVIN: II y a deux facteurs. Il y a en fait les coûts estimés de l'obtention des indemnités par les victimes. Cela est expliqué dans le rapport encore une fois; premièrement, à la note 1 de la page 370 et également, si on revient avant, nous avons parlé longuement du coût en capital. Nous disions que même dans une régie d'Etat, contrairement à ce qu'on peut penser, il y a un capital qui existe et qui doit être rémunéré.

Alors nous avons cherché à comparer des choses absolument comparables et à ce moment-là on a dit: On n'a pas à en tenir compte. Alors les 36.6 p.c. par rapport aux 40 p.c, ça exclut deux postes qui sont explicités, clairement.

M. LEGER: Maintenant, vous parlez d'une diminution, c'est-à-dire vous parlez de 20 p.c. maximum de frais permissibles à l'entreprise privée, dans lequel seraient inclus les 5 p.c. pour les intermédiaires. Dans les 5 p.c. pour les intermédiaires, si on retourne à la page 371, dans les intermédiaires, est-ce que vous calculez et les courtiers et le règlement des sinistres par les ajusteurs? On voit ici la mise en marché, à la page 371, troisième tableau, 6 p.c; règlement des sinistres, 7 p.c. C'est sûr qu'il va rester encore des mises en marché à faire, qu'il va rester encore des règlements de sinistres à faire, mais les 13 p.c. de ces deux articles, c'est ça que vous réduisez à 5 p.c ou si ça inclut aussi, les 5 p.c, des profits des compagnies?

M. GAUVIN: Comme je le disais, ça ne peut pas inclure les profits parce qu'on ne les a pas mis au point de départ.

M. LEGER: Uniquement les intermédiaires qui sont les experts et les courtiers.

M. GAUVIN: Uniquement les intermédiaires pour la mise en marché; les experts n'ont rien à voir avec une mise en marché.

M. LEGER: Maintenant dans les 20 p.c. totaux il y a 5 p.c. pour les intermédiaires; il reste 15 p.c. Est-ce que c'est dans les 15 p.c que serait situé le profit des compagnies?

M. GAUVIN: Non, il est en plus. Mais encore une fois, pour revenir au rapport, il dit que le profit, même dans une régie d'Etat, est nécessaire. C'est ce que nous avons dit, alors je voudrais vous renvoyer à ça. Il n'est pas à l'intérieur des 20 p.c. et il n'est pas à l'intérieur des 17 p.c, parce que dans les deux cas nous prétendons qu'il y a un capital de risque qui est sous-jacent, même dans l'établissement d'un monopole privé ou d'Etat, et qu'il doit être rémunéré.

Donc, on n'a pas à le considérer, il n'est pas à l'intérieur de ça.

M. LEGER: Est-ce que votre pourcentage de rémunération à payer aux courtiers d'assurance dans les 5 p.c, ça provient d'une étude du coût des services des courtiers, ou si c'est tout simplement une marge raisonnable de profit ou bien dont si ce pourcentage est établi par simple comparaison avec la rémunération payée ailleurs?

M. GAUVIN: C'est un ensemble des points que vous avez soulevés.

M. LEGER: C'est tout cela? M. GAUVIN: Oui.

M. LEGER: Maintenant, la proportion dans les profits d'un courtier d'assurance qui est portée sur le financement des primes que l'assuré, souvent, fait en retard au courtier, est-ce que vous l'avez incluse dans le profit de 5 p.c?

M. GAUVIN: Non. Puisqu'on dit au courtier qu'il n'en fait plus de financement.

M. LEGER: D'accord.

M. GAUVIN: Donc, s'il n'en fait plus, il ne peut pas faire de profit dessus.

M. LEGER: D'accord. Vous avez la recommandation. Il ne peut pas faire de profit. Mais les 5 p.c. seront en dehors...

M. GAUVIN: Le courtier a droit à un profit juste et raisonnable. Ne mêlons pas les choses. Je m'excuse. On a dit qu'il ne faisait plus de financement, donc il ne peut pas faire de profit. Si vous ne faites plus de vente, vous ne faites plus de profit.

M. LEGER: D'accord. A la suite de toute l'étude, vous êtes rendu à la fin de votre rapport et vous allez être heureux de retourner. Mais avant de nous laisser, est-ce que vous croyez réellement qu'il est possible que l'entreprise privée puisse s'ajuster pour réaliser non seulement les six conditions de la page 381, mais toutes les conditions de 39 à 60? Par cet ultimatum que vous leur donnez pour réformer le système — qui a besoin d'être réformé, nous sommes d'accord avec vous — pensez-vous que c'est possible que les compagnies d'assurance puissent s'ajuster à toutes ces recommandations?

M. GAUVIN: Tout d'abord, vous dites: Avant de retourner. Cela fait plusieurs mois que ce travail est déposé. Cela fait plusieurs mois que je suis retourné à l'endroit où vous vouliez que je sois. Si les membres ne l'avaient pas cru, c'est un rapport unanime, il n'y a eu aucune dissidence, et je ne vois pas pourquoi les membres ne l'auraient pas fait. Quant à moi, ce qui est dit dans le rapport est dit. Nous l'avons signé, conscients de nos responsabilités, et croyez-moi, si nous n'y avions pas cru, nous ne l'aurions pas écrit. Cela aurait été beaucoup plus simple, de dire: Allons à l'Etat immédiatement, sans faire, en fait, toute la recherche des solutions que nous avons mises de l'avant.

M. LEGER: Je termine, non pas en vous posant une question, parce que vous avez fait un travail sérieux, très intéressant et qui donne une foule de renseignements absolument essentiels à des législateurs, et je dois donner le crédit à votre comité et à vous-même. Maintenant, nous, comme représentants d'un parti politique, nous ne pouvons faire autrement, à la suite de l'ensemble des données qui ressortent de votre rapport, que conclure, en ce qui nous concerne, que l'important est que le citoyen ait à payer le meilleur coût possible pour une meilleure protection possible. Tous les citoyens doivent par leur prime participer au financement d'une assurance d'Etat générale absolument complète et sans responsabilité comme obligation juridique. De plus, cela coûterait meilleur marché d'avoir un système étatique. Mais le gouvernement a quand même besoin autant que l'entreprise privée, dans ce domaine, des possibilités, des investissements à court terme ou même à plus long terme parce qu'il y a des profits à faire là-dedans — vous l'avez dit vous-même tantôt — qui sont de l'ordre de 15.7 p.c. de rendement pour l'entreprise privée. C'est le moyen peut-être le plus rapide, tel que vous l'affirmez, pour effectuer ces réformes et le choix politique de l'Etat, c'est justement de voir si cela peut donner à l'Etat du Québec un meilleur régime d'assurance. C'est la solution vers laquelle le gouvernement doit aller, c'est-à-dire un choix politique qui est dans l'intérêt immédiat et à long terme de l'assuré et de toutes les personnes qui doivent être protégées dans un régime d'assurance de l'Etat.

LE PRESIDENT (M. Kennedy): Le député de Beauce-Sud.

M. ROY: ... important, M. le Président. Lorsque je regardais la recommandation no 60, je me demandais, au début, si j'allais me risquer à poser des questions parce qu'il me semble que c'est assez radical. "Que, si les réformes et les mesures ci-dessus ne sont pas intégralement adoptées et suivies, l'administration du régime soit confiée à une régie d'Etat". Il semble qu'il n'y a pas tellement de discussions à faire de ce côté puisque la recommandation 60 est assez claire.

Cela me surprend même qu'une commission mandatée par le gouvernement puisse faire une recommandation à la Chambre aussi catégorique que celle-là. Lorsque vous dites, dans cette recommandation 60, que l'administration du régime...

M. TETLEY: Elle était mandatée pour faire un rapport; elle n'était pas mandatée pour faire ce rapport.

M. ROY: Ils n'étaient pas mandatés pour écrire la disposition de l'article 60.

M. TETLEY: Ils étaient mandatés pour écrire ce qu'ils voulaient écrire.

M. ROY: Ce qu'ils voulaient écrire. Mais ils avaient quand même reçu un mandat du gouvernement. Je tiens à le dire parce que, lorsqu'on regarde une recommandation aussi radicale à la fin d'un rapport, je pense qu'on sous-estime un peu le rôle que les parlementaires pourraient et devraient jouer dans des prises de position ou encore dans des décisions qui, en somme, sont leur responsabilité, relèvent de leur compétence.

Vous dites: Que "l'administration du régime soit confiée à une régie d'Etat." Dans les pages qui précèdent, vous parlez des fameux 3 p.c. de différence. Les 3 p.c. que vous avez établis, est-ce une certitude ou une probabilité, selon vous?

M. GAUVIN: Qu'est-ce qu'une certitude? Qu'est-ce qu'une probabilité? Une certitude, c'est une probabilité à 100 p.c. Pourriez-vous me faire la distinction?

M. ROY: Est-ce que votre certitude est à 100 p.c? C'est parce que je suis...

M. GAUVIN: Si les réformes — excusez-moi, je vais répondre à votre question — sont intégralement adoptées dans l'un ou dans l'autre cas, la réponse sera oui. Intégralement adoptées; il y a intégralement.

M. ROY: Parce que vous vous êtes basés, à ce moment-là, sur des données que vous avez pu recueillir sur l'administration d'autres régimes d'assurance, soit en Saskatchewan au Manitoba ou ailleurs.

M. GAUVIN: C'est exact.

M. ROY: Mais si on fait un parallèle entre d'autres administrations de régimes publics dans ces provinces et d'autres régimes publics de la province de Québec, on ne peut pas faire autrement qu'admettre que l'administration au Québec est plus dispendieuse que dans les autres provinces. On a quelques domaines. D'ailleurs, des rapports ont été publiés dans les journaux à ce sujet-là.

M. GAUVIN: J'aimerais que vous me donniez les rapports. Maintenant, il faut faire bien attention. On dit que c'est plus dispendieux, pourquoi? Les salaires sont plus élevés. Ici, on parle en fonction du pourcentage de la prime. La masse monétaire impliquée au Québec est de beaucoup plus considérable que dans ces régions-là. Même s'il y a des coûts additionnels — d'ailleurs, nous l'avons souligné dans le rapport; je pourrais vous le rappeler, je vais trouver la place — il y a suffisamment de marge pour prévoir ce que vous pourriez appeler l'inefficacité inhérente — et, ça, on n'en a pas découvert, nous autres — entre une régie gouvernementale du Québec et une régie gouvernementale d'une autre région.

M. ROY: Là, on parle d'une régie gouvernementale, mais...

M. GAUVIN: N'oubliez pas une chose, c'est que la régie gouvernementale — une des régies qui ont fait l'objet de l'étude du comité — existe depuis vingt-cinq ans. Ils ont pu accumuler des toiles d'araignée ou de l'inefficacité en cours de route. Il y en a déjà, de l'inefficacité, dans ces pourcentages où eux réussissent à fonctionner. Maintenant, ils le font pour diverses raisons, comme nous l'avons mentionné; parce que les lois qui régissent l'indemnisation sont différentes, parce que le mode — en fait, ça revient à ça — d'indemnisation est différent, parce que l'administration est différente.

M. ROY: Ce doit être assez difficile d'établir des coûts par comparaison. Si on parle d'un monopole gouvernemental, on ne peut pas le comparer à l'entreprise privée puisqu'il y a un monopole gouvernemental. C'est assez difficile. D'ailleurs, vous l'avez dit tout à l'heure en répondant à nos questions: Lorsqu'on parle d'un monopole, il devient de plus en plus difficile de faire des comparaisons parce qu'il n'y a pas de comparaisons possibles.

M. GAUVIN: Nous avons comparé, en fait, le coût global du régime actuel au Québec avec le coût global d'autres régimes. En faisant les ajustements qui ont été faits à l'intérieur du rapport, il est possible d'effectuer une comparaison en tenant compte des différences entre le droit à l'indemnisation et les modes administratifs. C'est grâce à cette étude-là que nous en sommes arrivés à dire que, si on se plaçait ici dans une situation identique, il y aurait un écart très peu considérable.

M. ROY: Lorsqu'on a parlé de monopole, tout à l'heure, évidemment, j'ai bien écouté, et on a discuté de part et d'autre que le monopole serait plus avantageux pour l'institution. Mais le régime d'assurance-automobile ne doit pas exister pour l'institution, il doit exister pour les assurés, pour la population. Alors, il faut penser, à ce moment, en premier lieu, non pas au bien-être de l'institution, mais plutôt au bien-être de la population, au bien-être des personnes concernées dans ce domaine. Parce que lorsqu'on parle de monopole, d'ailleurs la question de monopole privé est inacceptable. Je dis trois fois non à un monopole privé, quand je dis un monopole, une seule compagnie privée qui couvrirait tout le secteur de l'assurance-automobile dans la province de Québec, mais je dis également trois fois non à un régime monopolistique d'Etat d'assurance automobile dans la province, parce qu'il n'est pas prouvé, même si on parle de 3 p.c. et qu'il y a eu des études de faites, que l'administration publique coûte moins cher que l'administration privée dans le même domaine, dans un secteur particulier, dans un secteur donné. Il n'est pas prouvé du tout mais ce serait, je pense, qu'à la lumière

de tout ce qu'on peut savoir à ce jour, que ce serait un précédent que l'administration publique, l'administration gouvernementale coûterait moins cher que l'administration privée, en tenant compte des mêmes facteurs.

M. GAUVIN: Vous avez bien dit...

M. ROY: II s'agit de regarder, quand on parle de services à la population, je ne peux pas faire autrement que de faire un certain rapprochement avec la Commission des accidents de travail, on en a un beau monopole gouvernemental, puis on sait qu'est-ce que ça donne à la population. C'est pour ça que je dis trois fois non à un régime monopolistique étatique dans le régime de l'assurance automobile. Maintenant, ceci ne veut pas dire que le système ne pourrait pas être amélioré, ne peut pas et ne doit pas être amélioré.

Après ce court commentaire, M. le Président, j'aurais quelques questions ici. Je vais commencer par la recommandation no 40: Que les compagnies d'assurance soient tenues par la loi d'accepter toutes les demandes d'assurance. Il en a été discuté tout à l'heure, on sait qu'à l'heure actuelle, les compagnies d'assurance refusent dans certains cas d'assurer des risques, des risques indésirables. Est-ce que cela veut dire que selon vos recommandations, vous voulez que toutes les demandes de contrats d'assurance soient assurées sans exception, indésirables ou non?

M. GAUVIN: Exactement. C'est exactement ce qui est dit, mais je pense que vous prenez une recommandation. Nous avons dit qu'il fallait prendre l'ensemble des recommandations. Le danger c'est de dire: On ne prend pas celle-là. Il faudrait penser en fait que si on dit aux compagnies maintenant: Vous pouvez refuser des demandes d'assurance quel doit être l'effet? Quels doivent être les coûts additionnels qui vont être encourus pour faire ce qu'on a appelé, nous, ici, la sélection des risques? Je pense qu'il faut faire attention en discutant simplement une recommandation et en disant: Est-ce que cela est réaliste ou non? Je pense que ça s'insère dans un tout qui n'avait qu'un but, c'est de rendre le système actuel de distributions des pertes beaucoup plus efficace qu'il est. Parce que nous nous sommes rendus compte qu'il y a énormément d'énergies qui sont dépensées pour des fins qui nous paraissent discutables.

Le danger de discuter recommandation par recommandation, je n'ai pas d'objection, mais il faut faire très attention. Vous dites: On va forcer les assureurs à prendre tous les risques. On force bien les assurés à s'assurer. Est-ce que ce n'est pas une espèce de parallèle de dire à la population: Vous vous assurez. Pourquoi ne dirait-on pas aux autres: Vous voulez le faire ce commerce, vous allez prendre tous les gens qui doivent s'assurer, selon nous.

M. ROY: C'est à partir de ce principe, mais vous n'excluez pas et vous n'avez pas exclu dans l'ensemble de vos recommandations le fait qu'il y a quand même des risques qui ne peuvent pas être considérés, pris, protégés, justement dans l'intérêt des autres, dans l'intérêt de la population. C'est le principe. Je vois que mon collègue de Taschereau, M. Bonnier, a peut-être une question à poser à la suite de celle-là.

M. BONNIER: Si vous me le permettez, est-ce qu'il ne faudrait pas également insister sur le fait que les assureurs aient des bureaux régionaux? Parce qu'un assureur qui ne veut qu'assurer les bons risques aura peut-être des bureaux dans Québec, dans Montréal et il va se ficher pas mal des gens du Lac-Saint-Jean, de la Gaspésie et de l'Abitibi.

M. GAUVIN: Je ne crois pas que l'on puisse définir les gens...

M. BONNIER: Est-ce que vous n'avez pas touché...

M. GAUVIN: On y a touché dans un certain sens, mais pas dans ce sens-là. Je ne crois pas qu'on puisse dire qu'il y a des mauvais risques à Québec ou qu'il n'y a pas de mauvais risques à Québec, effectivement. Ce que vous appelez, en fait, des mauvais risques, il y en a partout.

M. GIASSON: La loi des moyennes.

M. BONNIER: Non, moi, je pense qu'il faut être un peu plus réaliste que cela. Ceux qui connaissent un peu le domaine savent qu'il y a des entreprises qui n'assurent pas en dehors de certains grands centres.

M. GAUVIN: II faudrait savoir quelles sont les raisons pour lesquelles ils n'assurent pas en dehors des grands centres.

M. BONNIER: Parce que cela coûte plus cher à faire fonctionner, bien souvent.

M. GAUVIN: C'est une des raisons. Peut-être parce que leur mode de mise en marché ou leur mode d'administration fait que ce n'est pas économique d'aller dans ces régions-là. Maintenant, si vous forcez ces gens-là à aller dans toutes les régions, vous allez possiblement augmenter leurs frais qu'ils devront répartir pour l'ensemble des assurés et cela vient à l'encontre d'un autre des critères que s'est donné le comité, celui de rendre le régime plus efficace.

M. BONNIER: Oui, je m'excuse, mais ce serait plus juste pour l'ensemble des entreprises, parce qu'à ce moment-là les mauvais risques seraient mieux distribués.

M. GAUVIN: Je ne pense pas que ce soit un problème de mauvais risques.

M. BONNIER: J'aimerais cela que vous puissiez pousser vos études dans ce domaine-là.

M. ROY: Si on me le permet, M. le Président, une autre question concernant la recommandation no 41. Vous dites: "Que soit aboli le mécanisme de la "Facilité". J'ai examiné les pages 353, 354 et 355 dans lesquelles vous parlez un peu de ce mécanisme de la "Facilité". J'aimerais avoir un peu plus d'explications que ce que vous avez inscrit dans votre rapport. Quels seraient les avantages réels, les avantages marqués pour l'ensemble de la collectivité d'abolir ce mécanisme, puisque ce mécanisme de la "Facilité" semble avoir favorisé certaines personnes à certains moments?

M. GAUVIN: II peut avoir favorisé certaines personnes à certains moments, mais — nous l'avons également dit dans le rapport — au détriment d'autres personnes. Nous avons examiné, en fait, le système de la "Facilité" tel qu'il existe et il y a d'énormes questions qu'on peut se poser. Il y a le fait que dans la "Facilité", on retrouve peut-être ce que vous avez appelé des risques aggravés ou des risques anormaux, quel que soit le terme, mais on en rencontre — et les chiffres sont là — une proportion assez considérable qui devraient être considérés comme étant des risques réguliers.

Nous avons analysé différentes façons de régler le problème et nous en sommes venus à la conclusion que les avantages de la "Facilité" ne valaient pas les désavantages qu'on y notait.

J'aimerais retrouver la page et vous la donner. Il est certain que vous allez avoir l'occasion d'entendre les assureurs se prononcer là-dessus.

M. ROY: D'ailleurs, nous nous proposons bien de questionner, justement, sur ces points.

M. GAUVIN: Alors, étant donné qu'eux prétendent avoir toutes les réponses, ils vont probablement pouvoir vous les donner.

M. ROY: C'était votre réponse que je voulais connaître.

M. GAUVIN: Est-ce que je pourrais avoir l'occasion de vous la donner après messieurs les assureurs? Comme on dit: "Tirez les premiers, messieurs les Anglais."

M. ROY: Devant la commission, après? Si on le juge à propos, certainement.

M. GAUVIN: Si vous le jugez à propos.

M. ROY: Si on le juge à propos, certainement.

M. GAUVIN: Si vous le jugez à propos — je n'ai pas l'intention de revenir — mais si vous le jugez à propos...

M. ROY: Cela veut dire que vous seriez disposé à revenir devant la commission?

M. GAUVIN: Possiblement.

M. ROY: Bon. J'espère que le ministre l'a noté. M. Gauvin est prêt à revenir après que nous aurons entendu les mémoires des autres personnes.

M. TETLEY: J'ai invité par écrit M. Gauvin et il a déjà accepté.

M. ROY: A revenir après. Bon.

LE PRESIDENT (M. Kennedy): Le député de Montmagny-L'Islet.

M. GIASSON: Votre recommandation 40 dit: "Que les compagnies d'assurance soient tenues, par la loi, d'accepter toutes les demandes d'assurance." Cela suppose l'élimination totale de la sélection des risques.

A l'intérieur de cela, la fonction de courtier devient celle de conseiller. Est-ce que votre vision de l'application pratique est que ce conseiller place des risques dans une seule compagnie ou les répartisse encore entre plusieurs compagnies?

M. GAUVIN: On élargit, en fait, le rôle du courtier pour devenir, en fait, exactement ce que la publicité de l'Association des courtiers mentionne quand elle fait la comparaison entre un agent qui n'a qu'une petite pancarte et le courtier qui a une grosse pancarte, où on dit que le courtier peut placer chez 299 compagnies. Je n'ai pas compté 299. J'aimerais qu'on me les compte.

Effectivement, dans notre régime, le conseiller en assurance peut placer ses risques auprès de toutes les compagnies et non pas auprès d'une compagnie en particulier. Il devient, d'après nous, un véritable conseiller. Il n'est pas limité...

M. GIASSON: Ce qui veut dire, somme toute, que si le courtier n'est pas objectif, il peut faire une certaine sélection des compagnies où il place ses risques.

M. GAUVIN: Quel est, effectivement, son avantage à faire cette sélection contre certaines compagnies? Il ne faudrait quand même pas oublier que les assureurs — et on oublie peut-être cela — doivent accepter tous les risques, mais ce sont tous les risques qui répondent aux normes. Il ne faudrait pas oublier, effectivement ce qui est dit un peu plus loin : les assurés qui répondent à toutes les normes que l'assureur a voulu établir, des normes objectives au lieu de normes subjectives. A ce moment-là, l'assureur peut certainement se prémunir de ce que vous mentionnez en changeant, en fait, ses normes objectives de sélection.

M. GIASSON: Somme toute, avec le système de facilité, on tendait à répartir les risques douteux ou aggravés parmi les différents assureurs qu'il y avait au Québec, mais là, si on laisse le conseiller...

M. GAUVIN: Excusez-moi immédiatement, mais c'est parmi les assurés. Ce sont les assurés qui paient cela, ce ne sont pas les assureurs.

M. GIASSON: Pardon?

M. GAUVIN: En définitive, ce sont les assurés qui paient cela.

M. GIASSON: Mais vous savez fort bien que quand un assureur dit à un courtier: J'ai pris le maximum que je pouvais prendre, des risques que tu nous soumets, c'était fermé et on cherchait un autre assureur pour accepter des risques de facilité.

M. GAUVIN: Mais c'est ce qu'on veut régler, en fait. On veut que le conseiller en assurance puisse placer tous les risques vis-à-vis de l'assureur qu'il juge le plus approprié pour le client qu'il sert.

M. ROY: M. le Président, à la recommandation no 44: Que les changements à une police d'assurance qui se traduisent par une augmentation ou une diminution de prime ne puissent être consentis que lors du renouvellement ou à l'expiration de la police, s'ils affectent des facteurs comme l'âge, l'état civil ou le lieu de résidence. Vous avez fait cette recommandation. Est-ce que vous voulez en venir, en quelque sorte, à l'abolition complète des zones dans la province de Québec? On sait très bien que, dans telle région, les tarifs diffèrent par rapport à une autre région, compte tenu des risques. On tient compte du nombre d'accidents qui sont survenus. Lorsque des gens déménagent d'une région rurale du Québec considérée comme étant la région qui a le plus grand nombre d'accidents, par rapport à la population et par rapport au nombre de risques assurés, vers un grand centre où ils pourraient bénéficier du plus bas taux dans la province de Québec, on leur refuserait le droit d'avoir une diminution de leur prime d'assurance au cours de l'année?

M. GAUVIN: Vous parlez effectivement d'une diminution. Il y a également des augmentations.

M. ROY: Oui, mais c'est rare que l'inverse se produise. Cela se produit surtout en allant vers la centralisation, vers les grands centres. Après qu'on aura fait l'étude du pourcentage, on sera en mesure de découvrir un bon 20/80 ou un bon 25/75.

M. GAUVIN: Les grands centres ne sont pas les endroits qui ont nécessairement les tarifs les plus élevés.

M. ROY: Pendant le temps de vos études, est-ce que vous avez examiné ce côté, au niveau des accidents par région dans la province; au niveau des risques et des différences de primes qu'on retrouve d'une région à l'autre?

M. GAUVIN: On s'est certainement intéressé au système de tarification. D'ailleurs on en parle pendant plusieurs pages. On parle de certaines lacunes qui existent. Je ne vois pas du tout en quoi la recommandation qui est là amènerait l'abolition des zones dont vous faites mention. Ce que nous avons voulu...

M. ROY: Ce n'était pas votre intention.

M. GAUVIN: Est-ce que je peux terminer, s'il vous plaît?

M. ROY: Oui.

M. GAUVIN: Ce que nous avons eu comme objectif, c'est de réduire les frais du régime, les frais également des intermédiaires. On peut se poser la question suivante: Lorsqu'il y a un changement dans un contrat, quels sont tous les coûts qui se rapportent à ce changement? On peut se rendre compte facilement que ce n'est pas tellement économique de les effectuer. C'est bien beau de faire un changement pour une prime de tant de dollars.

Mais sur ce que ça coûte, finalement, pour aller faire ce changement à l'ensemble du système, à la correspondance qui est échangée, à l'intervention des intermédiaires, aux assureurs qui doivent ouvrir, en fait, des tiroirs de dossiers et faire les modifications nécessaires, nous nous sommes interrogés et nous avons dit: II y a certains changements entre les anniversaires qui n'en valent pas la peine et on devrait en fait les éliminer pour réduire toutes les énergies qui sont consacrées à l'administration du régime. Il y avait un seul but dans tout cela, qui a été dit, c'était d'en arriver à un régime qui dépense le moins possible du dollar-prime pour s'administrer et le plus possible en indemnisation. On peut bien aller à l'autre extrême: il peut y avoir un régime qui va tenir compte de tous les cas particuliers possibles. Ma question, et je n'ai pas de réponse: Mais à quel coût? On pourrait bien avoir un régime qui aurait une tarification tellement sophistiquée qu'on tiendrait compte de toutes les variables dont les actuaires ou d'autres statisticiens peuvent rêver, et finalement ça va coûter combien? Vous pouvez prévoir, en fait, le changement d'adresse d'un coin de rue à l'autre si jamais ça changeait le risque, mais ça va coûter quoi à l'administration du régime?

Ce qu'on a réalisé, et c'est là qu'il faut considérer le rapport en regardant les critères que nous nous sommes donnés, c'est que le régime actuel est inefficace. Mais, ma foi, si on veut le garder inefficace et qu'en fait on décide de le continuer d'une manière inefficace, nous disons: Ce n'est pas acceptable et on devrait le

changer. C'est dans ce sens qu'on a fait certaines recommandations visant à réduire le travail, toute la paperasse. On parle parfois de bureaucratie, tout ce que vous voulez. Bien, il y en a une certaine part là-dedans. On veut réduire ce travail pour retourner plus aux victimes qui sont et qui ont été la grande priorité des préoccupations du comité.

M. ROY: Dernière question.

M. GIASSON: II faut admettre tout de même qu'il y a certains changements qui vont être essentiels.

M. GAUVIN: On l'a reconnu.

M. GIASSON: Si le gars change de véhicule, je ne vois pas comment on peut s'empêcher d'émettre un avenant ou d'apporter une modification à la description.

M. GAUVIN: Oui.

M. GIASSON: Si un assuré amène des chauffeurs additionnels chez les jeunes, nécessairement, vous devez aller chercher la prime en fonction du changement de risque que vous avez entre les mains.

M. GAUVIN: C'est...

M. GIASSON: II y a certains changements, je suis d'accord, qu'il vaudrait mieux ne pas compléter parce que le coût que ça représente n'est aucunement proportionnel avec la modification qu'il peut y avoir à la prime; une compagnie fait mieux de ne pas toucher une surprime de $3 ou de $5 et d'accepter le changement automatiquement, ou de ne pas "ristourner" à l'assuré une autre fraction de prime qui serait minime. Parce que le coût de l'administration pour ces changements comportant des surprimes ou des ristournes très minimes, je pense qu'il est plus élevé que ce qu'on remet à l'assuré ou ce qu'on va demander à l'assuré.

M. GAUVIN: Ce n'était pas une question?

M. GIASSON: Non, ce n'était pas une question, mais je vous demandais si certains changements vous apparaissaient absolument nécessaires?

M. GAUVIN: C'est exactement ce qui est dit à la recommandation 44. On a dit: On est en face d'un système où il y a tant d'argent, puis on ne peut pas en sortir, de toute cette masse, plus qu'il en entre. Plus on se sert de l'argent qui entre pour l'administration, moins il en reste pour l'indemnisation. Je voulais juste poser la question: Est-ce que pour faire telle chose, ça coûte plus cher que ce que ça vaut? On a dit: II y a certains changements d'ailleurs qui sont peut-être assez fréquents, que ça ne changera rien en ligne de compte de les prévoir dans le système, sans augmenter en fait le coût d'administration.

M. ROY: J'aurais une dernière question, M. le Président, concernant la recommandation no 56, soit que le financement des primes d'assurance-automobile ne puisse plus être effectué par le courtier ou les assureurs.

On sait que les courtiers offrent ce service-là à leurs assurés depuis bien longtemps, que c'est un service qu'ils ont rendu, qui, je pense bien, a économisé bien des dollars à bien des gens. Maintenant, au niveau du financement des primes, est-ce que dans certains cas, ça veut dire que les assurés seront obligés de payer leurs primes d'assurance au comptant dès l'achat de la prime?

M. GAUVIN: Pas question. Non, parce que vous pouvez avoir deux modes de financement qui sont un peu plus efficaces. Il y a un problème, encore une fois. Certaines gens ont regardé le comité, ils ont dit "intégralement", quelle sorte d'oiseau est allé écrire ça? Bien, il ne faut pas oublier que, lorsque vous faites du financement par certains systèmes qui existent, on donne la police en garantie puis on peut l'annuler. Quel est l'effet de ça dans un système d'assurance obligatoire où on veut surveiller? Cela veut dire que si jamais quelqu'un a un contrat annulé parce qu'il n'a pas payé le financement, il faudrait aviser le technocrate que monsieur n'a plus d'assurance obligatoire, que lui va courir après l'autre individu pour l'arrêter.

Il faut regarder en fait l'ensemble du problème, mais ne pas s'arrêter strictement sur un point et dire que ça va coûter... les gens devront trouver des sources de financement; la question, s'il y en a, peut-être, d'après nous, il y en a qui seront, dans l'ensemble, plus économique que le système actuel.

M. ROY: Cela veut dire qu'évidemment il y a bien des gens qui vont être obligés d'avoir recours à une compagnie de finance. Il n'y a pas un danger à ce moment-là? Je vais m'adresser un peu, je ne sais pas... c'est sans malice envers les courtiers, mais étant donné qu'on veut que les courtiers deviennent en quelque sorte des salariés à plus ou moins brève échéance, il n'y a pas de danger — à plus ou moins brève échéance, j'ai bien dit — parce que lorsque les commissions ne sont pas suffisantes pour payer un salaire, vous savez ce qui arrive.

Il ne faut quand même pas rêver en couleur non plus. Les gens vont s'en aller et il faudra que quelqu'un serve d'intermédiaire entre la compagnie d'assurance dont le bureau est à Montréal et l'individu qui demeure dans une petite municipalité à 250 milles de Montréal.

Alors, si personne n'est intéressé, parce que

le système de commission ne permet pas de vivre, il faudra des gens à salaire. C'est pour cela que je dis "à plus ou moins brève échéance". N'y a-t-il pas un danger que les bureaux de courtiers deviennent des agences de financement de prime d'assurance?

M. GAUVIN: Un réseau de financement de primes peut se développer. Il n'y a rien qui empêche cela.

M. ROY: Si ceci coûte 5 p.c. de plus et que cela n'est pas inclus dans les coûts qu'on paie à l'heure actuelle, ça se trouve à être un service donné sans frais additionnels. Mais par le fait qu'on instaure un système parallèle du côté du financement, c'est un point important, et que cela coûte de 4 p.c. à 5 p.c. additionnels, on vient tout simplement de passer à côté du problème et à côté de la solution. On revient exactement au même point qu'avant. Parce qu'il faut bien tenir compte d'une chose que j'aurais aimé voir davantage dans le rapport. J'aurais aimé d'abord avoir eu le temps d'étudier davantage votre rapport. Je l'avoue bien humblement, mais après avoir fait un examen sommaire et assez condensé, j'aurais quand même aimé voir l'évolution des taux, des coûts d'administration, par secteur d'administration, dans l'administration de l'assurance-automobile, et également, voir l'évolution de l'augmentation des bénéfices, soit des frais d'hospitalisation, soit des indemnités qui sont accordées pour des blessures, des indemnités qui sont accordées en cas de décès. S'il y avait eu des tableaux dans le rapport, cela aurait permis de faire une analyse, une analyse sommaire, mais qui nous aurait donné quand même les grandes lignes, les tendances qui se sont manifestées depuis une vingtaine d'années ou depuis une dizaine d'années seulement.

Je pense que cela nous éclairerait énormément ici, au niveau des membres de la commission parlementaire sur l'à-propos de chacune des recommandations qui sont faites, surtout en ce qui a trait à la proposition faite dans le nouveau régime d'assurance-automobile. Mais nous n'avons pas ces choses. On sait très bien, pour citer un domaine en particulier, que le coût de l'hospitalisation au Québec n'est plus le même qu'il y a une quinzaine d'années. On sait très bien que les indemnités qui sont versées en guise de compensation de salaire ne sont pas les mêmes qu'elles ne l'étaient il y a une quinzaine d'années. Les coûts de réparation d'automobile ne sont plus les mêmes non plus, le coût des automobiles n'est plus le même. Il y a eu des augmentations constantes partout qui ont nécessité, évidemment, une augmentation constante de primes.

Il aurait fallu — et ç'aurait été très important pour les membres de la commission — avoir des détails de ce côté-là pour être capable de faire une analyse, une synthèse la plus complète possible.

M. GAUVIN: Alors, on recommence. Nous avons fait, de la page 270 à la page 273, une comparaison de dix ans. Vous en voulez une de vingt ans; elle est possiblement dans les dossiers que le comité a déposés au gouvernement. Les frais d'administration y sont comparés. Effectivement, qu'est-ce que vous voulez exactement? Je pense que le gouvernement devra mettre à votre disposition — puisque vous voulez recommencer — les techniciens pour refaire les études que nous avons faites. Si c'est ce que vous voulez, vous êtes absolument libre.

Je regrette, vous avez mentionné que vous n'avez pas étudié le rapport, mais il y a quand même là, effectivement, un tableau à la page 273 qui répond, en partie, à votre question. Maintenant, le comité a reçu des mémoires. Il n'en a pas eu du parti dont vous êtes membre, il n'en a eu d'aucun parti. On aurait peut-être pu nous faire connaître ce que vous vouliez, ç'aurait été plus facile de répondre à vos questions.

M. ROY: Voici...

M. GAUVTN: Maintenant, je vais répondre à la deuxième partie. Vous parlez du financement. Vous en avez parlé longuement. J'aimerais avoir l'occasion de regarder ce que certaines gens ont dit sur le financement. On dit que ça coûte 5 p.c. de plus. Il ne faudrait pas oublier deux choses. Vis-à-vis des courtiers, il y a un coût pour le financement qu'ils font. Si les courtiers disparaissent, ce coût-là, également, disparaît. Il ne faudrait pas l'oublier. En plus de ça, les assureurs reçoivent la prime avec un certain délai. Avec le mode proposé, le délai sera réduit, ce qui permettra aux assureurs d'investir ces sommes plus rapidement et, également, par ricochet, de réduire le coût pour le consommateur. Il faudrait regarder l'ensemble du problème.

Quant à nous, au comité, nous l'avons fait. Je m'excuse de ma remarque, mais s'il avait fallu annexer au rapport les 40 ou 50 boîtes de documentation qu'on a remises au gouvernement, il y aurait eu un rapport qui aurait été passablement volumineux. Les membres ont jugé opportun de publier un rapport dans les termes qui sont là, c'était leur responsabilité. Quant à la ventilation que vous faites, dans certains des travaux que le comité a faits, ces études y sont possiblement. Je ne pense pas qu'il était nécessaire d'incorporer ces études, études qui ont été faites non seulement par le comité lui-même, mais à l'aide d'experts comptables qui ont été retenus pour ces fins.

M. ROY: Ce n'était peut-être pas à vous de nous le fournir, je peux en convenir très bien, mais je dis que ce seraient — à ce moment-ci de nos travaux et avant que les lois soient votées à l'Assemblée nationale — des documents que nous devrions avoir entre les mains.

Pour ce qui a trait à notre désir et aux

chiffres que nous voulions avoir, je dois vous dire — et je le dis sans malice à l'intention du ministre — que le ministre ne nous a pas consultés et ne nous a pas demandé ce que nous voulions quand on vous a donné votre mandat. Je tiens à le dire, je tiens à le préciser. Le ministre ne nous a pas consultés; ce n'est pas de votre faute.

Maintenant, vous avez dit que je n'avais pas étudié le rapport. Je n'ai pas dit que je n'avais pas étudié le rapport tantôt; j'ai dit que je n'avais pas pu l'étudier dans tous ses moindres détails. Je l'avais étudié sommairement, le rapport, et j'ai vu les deux tableaux aux pages 272 et 273. Cela ne répond que très partiellement aux questions que j'avais posées tout à l'heure, parce qu'il s'agit des frais d'exploitation du régime par rapport au montant du contrat. Dans les demandes que j'ai faites tout à l'heure, j'ai parlé des détails par secteur, par service d'administration ou encore par différents risques ou différentes formes de compensation qui sont accordées aux bénéficiaires, ce que nous n'avons pas.

M. GAUVIN: Je peux clairement identifier que vous ne l'aurez pas avec moi également. Je ne suis pas ici pour faire des calculs pour les membres de la commission; je suis ici pour expliquer ce qui est dans le rapport.

M. ROY: Non, mais on peut quand même vous poser des questions — c'est notre rôle et c'est la raison pour laquelle on vous a fait venir — pour voir si vous aviez examiné ces points.

M. GAUVIN: Je vous dis que nous les avons examinés et que nous les avons déposés au gouvernement.

M. ROY: C'est pour ça que j'ai posé la question.

M. GAUVIN: Je vous ai donné la réponse.

LE PRESIDENT (M. Kennedy): Le député de Trois-Rivières.

M. ROY: En ce qui me concerne, je ne suis pas tellement intéressé à continuer à interroger les membres de la commission Gauvin.

LE PRESIDENT (M. Kennedy): Le député de Montmagny-L'Islet.

M. GIASSON: M. le Président, cette transformation du rôle de courtier en conseiller, dans la vision du rôle effectivement joué par le conseiller, ça va être quoi dans la pratique? Quelle est votre perception de cette fonction-là?

M. GAUVIN: C'est de conseiller le public sur la protection la plus appropriée pour ses besoins, compte tenu du régime.

M. GIASSON: Cela se termine là.

M. GAUVIN: Non. Egalement l'assureur le plus approprié pour ses besoins.

M. GIASSON: Pardon?

M. GAUVIN: L'assureur qui répond aux besoins de cette personne-là.

M. GIASSON: Au niveau des réclamations dans votre vision de la fonction du conseiller, est-ce qu'il est complètement éliminé du portrait, c'est-à-dire que le réclamant s'adresse directement à son assureur au siège social?

M. GAUVIN: L'assuré devrait s'adresser directement à l'assureur.

M. GIASSON: Cela se résume, somme toute, d'après les commentaires que vous avez faits, à la fonction du conseiller à recevoir le client, à le diriger vers une compagnie, à faire émettre une police qui peut être adressée directement par la compagnie à l'assuré?

M. GAUVIN: C'est cela.

M. GIASSON : C'est aussi simple que cela?

M. GAUVIN: Oui, mais c'est un rôle de conseiller véritable. C'est le rôle d'expliquer les couvertures...

M. GIASSON: ... d'expliquer les couvertures...

M. GAUVIN: ... d'expliquer les quantums.

M. GIASSON: ... les quantums qu'il peut retirer devant une telle éventualité d'accident, dommages matériels, blessures, etc.

M. GAUVIN: Oui.

LE PRESIDENT (M. Kennedy): Le ministre des Institutions financières.

M. TETLEY: M. le Président, j'ai des questions, je vous demande pardon. Tout d'abord, M. Gauvin et M. Rankin, les compagnies québécoises qui sont en affaires, suivant votre système ou votre régime, auront certaines modifications à apporter à leur administration, c'est clair, ainsi que les compagnies canadiennes qui font affaires par tout le Canada.

Ne voyez-vous pas un avantage pour les compagnies québécoises? C'est ma première question. Parce que, pour elles, c'est facile de changer. Les compagnies canadiennes doivent suivre des régimes dans d'autres provinces,

peut-être, c'est une question que je vous pose suivant d'autres lois.

M. GAUVIN: Le mandat du comité, je l'ai déjà dit, ne comportait pas spécifiquement d'examiner ce qu'on peut faire pour favoriser les compagnies québécoises.

M. TETLEY: Non, non.

M. GAUVIN: Alors, moi, je préfère m'en tenir au texte du rapport.

M. TETLEY: M. Rankin, voulez-vous répondre?

M. RANKIN: Je vais répondre à la question que vous avez posée. Les changements qui sont faits pour les compagnies québécoises, assez souvent, c'est évident, ne sont faits qu'au Québec. Par contre, quelqu'un qui transige dans les autres juridictions doit posséder deux systèmes concurrentiels qui...

M. TETLEY: Contradictoires, différents.

M. RANKIN: Alors, cela ne pose pas tellement plus de problèmes que pour une compagnie qui est aux Etats-Unis où il y a un système légèrement différent dans chacun des 48 Etats ou 53, cela change presque tous les ans. Mais quand même, au Canada, c'est évident qu'il peut y avoir certaines compagnies qui font peut-être très peu d'affaires ici, qui ont moins de $10 millions de chiffres d'affaires.

Est-ce qu'elle vont continuer à faire affaires à Québec, étant donné que toutes les règles du jeu sont différentes des autres $300 millions du chiffre d'affaires. Il se peut qu'une compagnie très avertie va dire: Bon, on va avoir à Québec un laboratoire où on va avoir les systèmes les plus avancés... Même si cela coûte un peu plus cher, cela vaut la peine de participer pour être capable de juger le bien-fondé des différentes réformes sur place.

M. TETLEY: Donc, il y a peut-être un avantage, pour ces compagnies canadiennes ou même d'outre-mer — Lloyd's et Royal, etc. — de continuer de faire affaires au Québec parce que cela pourrait être une expérience remarquable et fructueuse pour eux.

M. RANKIN: Je trouve que c'est une question que l'on n'a pas soulevée, mais quand on a été en Saskatchewan et même au Manitoba, c'était un peu drôle. Ils reçoivent, presque à toutes les semaines, une délégation. Ils nous ont reçus avec courtoisie et on nous a consacré un temps absolument incroyable. Je ne sais pas, peut-être était-ce parce qu'ils pensaient que c'était une étude très sérieuse. En tout cas, eux, ils ont des délégations. La première fois que nous sommes allés à Régina, il y avait une délégation de Japonais, peut-être de la Loui- siane ensuite. Ils poussent sur un bouton et il y a un type, là, qui s'occupe des étrangers. Il fait faire le tour de la maison: Donnez-leur le traitement no 1, no 3 ou no 4. Nous avons eu le traitement AAA, j'imagine.

Si la Saskatchewan, qui n'a pas changé beaucoup depuis 27 ans, est considérée comme cela, si le Québec installe un système qui, à notre avis — et nous sommes prêts à le défendre — serait à l'avant-garde, peut-être que vous seriez obligés d'avoir un système similaire ici: Donnez-lui le traitement 3.

M. TETLEY: Donc, vous croyez que c'est possible que la Saskatchewan puisse suivre votre système?

M. RANKIN: Ils ont déjà une base. A cause de nos études, ils ont déjà pris certaines mesures.

M. TETLEY: M. Rankin, au sujet des courtiers — c'est le député de Montmagny-L'Islet qui a soulevé la question — c'est que le pourcentage ou la commission d'un courtier est coupé de 12.5 p.c. jusqu'à 5 p.c, au maximum.

Croyez-vous qu'un courtier au Québec peut exister avec 5 p.c. de commission surtout lorsque dans le rapport, il y aurait, ce qu'on appelle en anglais du "direct writing"? Est-il possible que les courtiers puissent exister ou s'ils peuvent couper tellement leur administration, etc?

M. RANKIN: Je crois que M. Gauvin a déjà répondu que ces 5 p.c. ont été décidés et non pas tirés des nuages. On a examiné une situation. C'est une fonction des trois questions que le député a soulevées. D'après l'expérience qu'on a eu au Manitoba où on a passé par un système à peu près pareil, ceux qui sont restés en affaires ont gagné autant d'argent ou plus, mais c'est évident que cela demande un plus gros chiffre d'affaires. Ceux qui assurent maintenant, disons, 1,000 véhicules, par la même mathématique, il doit y en avoir 2,500, mais moins... Il y a une économie dans les frais d'administration. Ils n'ont plus besoin de toucher... On ne veut pas entrer dans tous les détails, mais une des raisons pour laquelle il ne faut pas faire le financement, c'est que vous éliminez presque complètement la comptabilité pour un courtier. Alors, vous avez des économies. Ce qui arrive, c'est que vous n'avez pas de comptable, vous n'avez pas besoin de beaucoup de paperasserie qu'on appelle "paper shopping".

M. TETLEY: Mais en Saskatchewan, il n'y a qu'un assureur, c'est l'Etat, à un certain niveau, mais on a gardé quand même les courtiers. Ils sont payés combien au Manitoba?

M. RANKIN: Je n'ai pas cela en tête, mais la situation de la Saskatchewan est bien différente parce que l'Etat s'occupe aussi d'assurance

générale. Alors, même s'il donne moins au courtier sur l'assurance-automobile, ils ont plus de l'autre partie de la couverture. On a fait cette étude, on a tous les détails. Si vous avez une question un peu moins spécifique, on peut... D'ailleurs, les études sont déposées au gouvernement.

Les deux systèmes sont différents; en Saskatchewan, d'ailleurs, non seulement l'automobile, mais l'automobile supplémentaire est traitée par les courtiers. Alors, vous ne pouvez pas faire une comparaison facilement.

M. TETLEY: Merci, M. Rankin.

M. GIASSON: M. Gauvin, je vous avais posé une question au mauvais moment; on était au chapitre de l'indemnité et ça se rapportait à l'administration du nouveau régime. Est-ce que vous voyez très bien l'existence d'une compagnie d'Etat à côté des compagnies privées, avec les formes de vente ou de courtage à l'intérieur des nouvelles conceptions?

M. GAUVIN: Là, encore une fois, ça revient à un problème — je vais le soulever encore — que j'ai soulevé ce matin. Je pense que le député d'une des deux Beauce l'a peut-être oublié dans ses questions. Ces problèmes ont tous été analysés par le comité. Or — je dois encore le répéter parce qu'on semble dans certains cas l'oublier et on ne vous en tient pas rigueur — les documents de base, ce n'était pas aux membres; les études que nous avons demandées en commandite à d'autres firmes de consultants sur certains de ces problèmes ont été déposées au gouvernement comme pièces justifiant le rapport. Je pense, moi, en fait, qu'on adresse certaines questions présentement aux mauvaises personnes. D'accord, nous les avons eus mais, en fait, nous ne les avons plus, ces documents-là.

M. GIASSON: Vous n'avez aucun commentaire sur l'hypothèse que j'ai posée? Les documents sont déposés et, c'est au ministère ou à l'Etat.

M. TETLEY: Bibliothèque nationale.

M. GAUVIN: Sur votre point, je peux, par exemple, faire de mémoire... Excusez-moi. On a demandé une ventilation selon un certain modèle. On en a fait des douzaines et des douzaines de ventilations qui sont, en fait, déposées auprès du Conseil exécutif. Je ne sais pas dans quel état elles sont maintenant, du tout.

M. GIASSON: D'accord.

M. GAUVIN: Nous avons certainement considéré différentes alternatives. Vous dites corporation d'Etat en compétition. Bien, c'est une des nombreuses possibilités; il faut, encore une fois, s'interroger sur les avantages et s'interroger également sur les désavantages. A moins d'imposer aux assureurs les mêmes conditions de fonctionnement que cette compagnie, vous allez peut-être lui imposer des difficultés administratives très considérables. Par exemple, même s'il n'y a qu'un assuré dans une petite place quelque part, elle devra, parce qu'elle est un organisme émanant de l'Etat, y être présente. Je vous donne effectivement un exemple. Tandis que l'assureur, lui, avec lequel votre compagnie est en compétition, s'il n'agit pas avec les mêmes contraintes, va probablement démontrer des meilleurs résultats. Mais ça ne prouvera pas nécessairement ce à quoi on s'attend. C'est un exemple.

M. GIASSON: Je vous pose la question, parce que je suis dans l'assurance depuis quelques années. Au cours des ans, j'ai appris à croire profondément à la concurrence. Je dis que ma meilleur alliée, depuis que je suis dans l'assurance, ç'a été la concurrence, parce que ça m'a obligé constamment à faire davantage, à me surpasser, à donner un meilleur service, et ça je l'ai fait parce qu'il y avait de la concurrence autour de moi. Si je n'avais pas eu cela, je suis à peu près certain que j'aurais peut-être été un peu plus négligent, j'aurais moins surveillé.

Et je me dis, moi, que si on tentait l'expérience de mettre une compagnie étatique à côté d'entreprises privées qui veulent jouer le jeu fondamentalement, on pourrait, après un certain nombre d'années, prouver que ça peut s'équilibrer assez bien, ces deux choses.

M. GAUVIN: Mais si vous pouvez en fait, établir un régime de concurrence pure sans avoir ce mécanisme-là, il sert effectivement à pas grand-chose.

M. GIASSON: Vous mettez la concurrence entre les assurances privées.

M. GAUVIN: Oui, mettez la concurrence entre les assureurs privés, vous allez l'atteindre, votre but. D'ailleurs il ne faudrait quand même pas oublier...

M. GIASSON: C'est peut être plus difficile. M. GAUVIN: Cela a été fait.

M. GIASSON: Cela a été fait et ç'a été pratiqué ailleurs.

M. GAUVIN: II faudrait regarder l'expérience américaine. Dans certains endroits, on avait une surveillance très poussée des tarifs, par exemple, et on a abandonné ce système pour venir à un système où on force les assureurs à être véritablement en concurrence les uns avec les autres.

M. GIASSON: C'est déjà votre recommanda-

tion. J'imagine que, même à l'intérieur d'une association, que les membres ne soient pas tenus à un tarif uniforme.

M. GAUVIN: Si vous êtes intéressés, il y a une analyse, par le département des assurances de New York, sur, je ne me souviens pas du titre exact, mais sur tout ce problème de la concurrence, analyse qui est très intéressante en tant qu'assureur et le gouvernement est fortement intéressé. La référence, je pourrais la retrouver quelque part.

M. GIASSON: C'est dans le rapport?

M. GAUVIN: Oui, où effectivement eux, à New York, ont fait certaines recommandations et ont abandonné certains contrôles absolument rigides en faveur d'un système où la concurrence s'exerce le plus. Maintenant il faudrait bien se situer, il y a une certaine concurrence dans le moment. Nous avons dit qu'il n'y en avait pas assez, qu'on devrait en fait, l'améliorer.

M. GIASSON: Mais la concurrence s'est faite surtout au niveau de la qualité du service que les compagnies ont voulu donner, lorsqu'il y avait des réclamations. C'est très facile, comme assureur, d'accorder une réduction de $10 dans la prime, si tu vas la rattraper au moment où tu as un service à donner au client. C'est très facile. Vous savez ça, d'ailleurs.

M. GAUVIN: Voyez-vous, c'est d'autant plus facile dans le système actuel, souvent les assureurs font affaires avec un non-assuré qui est leur victime.

Ils peuvent, donc, sur le dos de ce non-assuré, qui n'est pas l'un de leurs assurés, agir différemment qu'ils le devraient s'ils le faisaient avec leurs propres assurés.

Si on regarde les comparaisons que nous avons faites dans les délais, on pourrait dire qu'en assurance-responsabilité, étant donné que c'est envers un tiers, on devrait choisir l'assureur qui prend le plus de temps pour payer parce que ce sont toujours les autres, cela nous importe peu, ils devraient avoir des tarifs à meilleur compte. Pour son assurance directe, il devrait prendre l'assureur qui paie le plus vite parce que là, c'est lui que ça touche.

M. GIASSON: Non seulement il y a le facteur de payer vite, il y a aussi le facteur de payer sa réclamation à sa valeur réelle.

M. GAUVIN: Justement, oui.

M. GIASSON: C'est très intéressant, comme agent de réclamation, de dire: Je passe, je fais l'évaluation, je te fais un chèque. C'est une petite réclamation, on signe le chèque tout de suite, on le donne au réclamant. Mais quand il passe au garage, il réalise qu'il lui manque $50 ou $100 pour faire réparer son véhicule. Il a été payé vite, le gars, mais il n'a pas été payé suffisamment.

LE PRESIDENT (M. Kennedy): Ceci termine la première séance de la commission des institutions financières, compagnies et coopératives. Je veux remercier les membres de la commission Gauvin de s'être pliés de bonne grâce aux questions des membres de la commission.

Est-ce que le ministre voudrait dire quelques mots?

M. TETLEY: Je vous remercie, M. Gauvin, M. Rankin ainsi que M. Belleau et Me Bouchard, de votre présence. Nous espérons vous revoir peut-être à la fin.

M. LEGER: Moi pareillement, M. le Président, je remercie M. Gauvin et son équipe. Je prends bonne note qu'il a dit qu'il était pour répondre plus tard aux différentes affirmations des futurs comparants à cette commission, entre autres la question que je lui ai posée sur le Barreau, les préoccupations. Probablement que d'autres personnes vont venir affirmer des choses ici et j'espère que M. Gauvin ou son équipe viendra donner sa perception des affirmations des autres.

LE PRESIDENT (M. Kennedy): Merci. La commission ajourne ses travaux à demain, dix heures.

(Fin de la séance à 18 h 28)

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