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Version finale

30th Legislature, 2nd Session
(March 14, 1974 au December 28, 1974)

Tuesday, October 15, 1974 - Vol. 15 N° 157

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du rapport Gauvin


Journal des débats

 

Commission permanente des institutions financières,

compagnies et coopératives

Etude du rapport Gauvin

Séance du mardi 15 octobre 1974

(Dix heures vingt-quatre minutes)

M. CORNELLIER (président de la commission permanente des institutions financières, compagnies et coopératives): A l'ordre, messieurs! La commission reprend ce matin ses travaux pour l'étude du rapport du comité d'étude sur l'assurance-automobile, communément appelé le rapport Gauvin. Aujourd'hui, la commission entendra des mémoires de trois organismes dans l'ordre suivant: premièrement, l'Association des policiers provinciaux du Québec, deuxièmement, le Bureau d'assurance du Canada et, troisièmement les Prévoyants du Canada.

Dans la liste des membres réguliers de la commission, il y a un changement ce matin, M. Pagé, député de Portneuf, remplace M. Beaure-gard, député de Gouin. J'inviterais maintenant le représentant de l'Association des policiers provinciaux du Québec à donner lecture de son mémoire. J'inviterais le porte-parole officiel à se présenter et à nous présenter ses collaborateurs immédiats. Vous pouvez procéder.

Association des policiers provinciaux du Québec

M. MAGNAN: M. le Président, MM. les membres élus du peuple, particulièrement M. le ministre Tetley et Me Choquette, notre ministre de la Justice, l'Association des policiers provinciaux est représentée par moi-même, Guy Ma-gnan, président, ainsi que par M. Gilles Dubé, vice-président, à ma gauche, M. Tom Lambert, secrétaire et, à ma droite, M. Luc Richard, secrétaire-trésorier.

Nous sommes ici pour vous présenter un mémoire succinct, il va sans dire, sur le rapport Gauvin du comité d'étude sur l'assurance-automobile et dans lequel, il y a un chapitre très particulier où on parle de la sécurité routière et également de la police en général. Comme nous sommes un organisme dûment reconnu par tous les hautes autorités gouvernementales, nous sommes ici à ce titre. Nous espérons que le mémoire que nous vous lirons et les réponses que nous vous donnerons, suite aux questions que vous aurez à nous poser, seront comme nous l'espérons, une discussion constructive qui ne fera qu'améliorer le service que nous nous devons de donner à la population du Québec. Je commencerai donc la lecture de notre mémoire et, s'il y a des questions, nous sommes tous disposés à y répondre au meilleur de nous-même.

Introduction. Nous remercions grandement les autorités gouvernementales par l'entremise de son ministre, M. William Tetley d'avoir eu l'heureuse initiative de former une commission parlementaire afin que les personnes intéressées ou les organismes touchés directement ou indirectement par le rapport Gauvin sur l'assurance-automobile puissent se faire entendre et exprimer des opinions contraires ou différentes de ce qui a pu être élaboré dans ce document.

En premier lieu, nous tenons à féliciter les personnes membres du comité d'étude qui ont effectué un travail positif et ont eu la force de caractère d'émettre une série de suggestions qui," tout en étant positives, ne sont pas sans attaquer certains organismes, gouvernementaux dans leur efficacité, et jusqu'à un certain point, dans le bien-fondé de leur existence.

Par contre, l'Association des policiers provinciaux du Québec n'entend pas faire des représentations sur tout le contenu de ce document, mais exprimera des opinions différentes et parfois contraires à ce qui est contenu dans le chapitre II de la première partie qui parle de la sécurité routière et des causes d'accidents.

Considérations générales. Nous lisons au chapitre II qui s'intitule "La sécurité routière" que les causes des accidents sont nombreuses et ne peuvent être uniques et que pour en déterminer les conséquences, seule une enquête scientifique peut être établie. De plus, que le Québec en plus de posséder un dossier d'accidents routiers peu enviable ne fait aucun effort sérieux pour en rechercher les causes.

Dans un schéma qui fait partie du même rapport, nous constatons que le degré de surveillance, la signalisation et l'état des routes ne sont pas les facteurs importants à ce chapitre, car dans 6 p.c. des accidents, ces facteurs ont joué un rôle positif et que seulement dans 14 p.c. des accidents, ils auraient pu être un des facteurs énumérés ci-haut.

Lorsqu'on parle de sécurité routière, on dit que c'est l'art de prévenir les accidents et minimiser les conséquences de ceux qui se produisent, et ce, au coût le plus bas possible pour la société.

Mais ceci n'a pas encore été fait, si ce n'est le rapport Gauvin qui en fait état, mais d'une façon sommaire. Un travail de cette envergure demande des spécialistes dans le domaine ainsi qu'une somme d'argent tellement importante qu'on n'a pas jugé bon encore, à ce jour, d'en entreprendre une étude sérieuse et positive.

L'on discute également des juridictions des gouvernements fédéral et provincial dans le domaine de la sécurité routière. Un fait à remarquer est que le code criminel et le code de la route du Québec n'ont pas le même esprit lorsqu'il s'agit de punition ou de sanction attribuables à un manquement à une loi concernant les usagers de la route.

Il est évident que les deux paliers de juridiction fédérale et provinciale doivent à tout prix coordonner leurs efforts, réunir leurs spécialis-

tes, consulter les organismes qui sont de près ou de loin rattachés à la question de sécurité routière, afin que les lois imposées par les législateurs soient révisées et uniformisées pour une meilleure compréhension et application.

Au niveau de la province de Québec, il y a une foule d'organismes chargés de faire des lois, de formuler des opinions, d'établir des restrictions sans qu'il y ait coordination entre ces différents ministères.

Qu'il nous suffise de les énumérer: le ministère des Transports avec ses lois et ses pouvoirs, le Bureau des véhicules automobiles, la Commission des transports du Québec, l'Office des autoroutes, le ministère de la Justice, le Tribunal des transports, la Loi des cités et villes, le code municipal, le code de la route, la Loi de la voirie et la Loi des rues publiques. L'on a permis à tout le monde de faire des lois et on lance aux policiers le devoir de les appliquer sans leur permettre de se servir de leur jugement.

Si on considère que tous ces organismes et, par voie de conséquence, toutes les personnes travaillant pour ces organismes, ont un but commun qui est la sécurité routière, on se demande, nous, l'Association des policiers provinciaux du Québec, si ce n'est pas là où est le problème no 1 de l'inefficacité des lois appliquées par les policiers et, par conséquent, de l'inefficacité policière criée sur tous les toits par n'importe qui.

Il est grand temps que le gouvernement du Québec fusionne, intègre, coordonne ce fouillis indescriptible de lois, qui est la conséquence directe de l'inaction des organismes policiers ou parapoliciers dans le travail concret de l'application de ces lois.

La police et son organisation. Inutile de vous dire, membres de la présente commission, que le premier paragraphe du sous-paragraphe C contenu à la page 88 dudit rapport est réfuté en son entier, car jamais nous n'avons constaté que les corps policiers laissent délibérément les automobilistes enfreindre la loi. C'est une assertion gratuite, sans fondement, vile et vide de sens qui a été exprimée dans le mémoire présenté par le Bureau d'assurance du Canada, en janvier 1972.

Il est malheureux que le comité n'ait pas eu à étudier dans toute sa profondeur la signification d'un tel énoncé, car les policiers, individuellement ou collectivement, auraient certainement pu exprimer, eux aussi, des opinions sur les procédures de cours de justice qui entendent les causes. Si des policiers omettent de donner des billets d'infraction, la raison réelle est peut-être celle qu'il y a pénurie de juges compétents dans ce domaine.

Lorsqu'on parle de surveillance routière et que l'on exprime avec des statistiques à l'appui que plus il y a de billets d'infractions de distribués, moins d'accidents il y a dans la province, il est évident que l'on attribue au travail policier la notion punitive ou de matra- quage. L'on affirme que si les infractions rapportées étaient plus nombreuses, la logique démontrerait que les accidents seraient moins nombreux. Un tableau portant le no 3 tente à démontrer que la province de Québec est la plus basse dans les billets d'infraction émis pour les années 1969, 1970 et 1971 et que, par conséquent, les accidents y sont plus nombreux. L'on attribue à l'insuffisance de la surveillance routière cet état de choses, ce qui revient à dire que l'on accuse directement le policier parce qu'il y a des accidents sans recommander ou étudier les causes de cet effet, ce qui est, à notre sens, de l'illogisme.

Il est évident que le ministère de la Justice peut être accusé de tous les péchés du monde comme le policier, qui lui, répond directement au ministère de la Justice et est le bouc émissaire de toute la calamité routière. On reproche à la Sûreté du Québec de s'occuper des infractions qui sont les causes directes des accidents, alors qu'on reproche aux policiers municipaux de rédiger des infractions payantes même si elles ne sont pas causes d'accidents. On blâme la Sûreté du Québec de ne pas être également un corps policier provincial spécialisé sur la surveillance routière. On affirme que les policiers municipaux se fichent éperdument de la surveillance routière et que par contre, s'ils le font, ce sont de véritables traquenards tendus aux automobilistes.

Il faut donc, si l'on prend le contenu de ces opinions, que le policier soit pratiquement présent partout, sur toutes les routes de la province, en nombre suffisant, qu'il rédige des rapports d'infraction à toute personne manquant à la loi, qu'il fasse tout son possible pour être vu par tous, mais en même temps être assez invisible et capable de prendre en flagrant délit tout délinquant, sans que pour cela l'automobiliste ait à rouspéter sur la façon dont le policier a effectué son travail.

La population du Québec est consciente que sur les routes du Québec il y a plus de liberté et que les abus semblent être la conséquence d'un défoulement social par une agressivité démontrée dans la conduite automobile.

De conséquence, il est véridique de constater, comme le décrit le rapport Gauvin, que la vétusté du code de la route est à l'origine de cet état de choses et implique une refonte complète établie par des personnes compétentes, en considération du contexte social dans lequel nous vivons au Québec. Aussi devrait-il y avoir revalorisation de l'esprit de cette loi dans nos tribunaux.

L'APPQ est amplement d'accord lorsque dans ce rapport du comité sur les assurances-automobiles il est fait mention de l'état actuel selon lequel les policiers municipaux et les officiers du ministère des Transports et Communications ont des prérogatives qui ne sont pas permises aux membres de la Sûreté du Québec.

D'ailleurs, l'APPQ a présenté un mémoire au

ministre de la Justice, suite au livre blanc sur la police et la sécurité du citoyen, dans lequel mémoire nous avons fait état du manque de coordination entre les forces policières, de la multiplicité des corps policiers ou soit disant parapoliciers, de l'insécurité que subissent les membres de corps policiers municipaux qui ne possèdent pas les moyens de se défendre contre les attaques répétées qu'ils subissent de la part de politiciens locaux qui désirent conserver leur police municipale au service de certains individus en autorité.

L'équipement des corps policiers est désuet et ne correspond en aucune façon aux besoins actuels du travail policier.

Prenons, par exemple, la surveillance aérienne, laquelle a prouvé qu'un seul appareil accomplissait le même travail que douze autos-patrouille. Les autorités, sur ce point, ont toujours considéré le coût prohibitif de ces appareils et ne semblent pas croire que la modernisation de l'équipement est un facteur important dans l'efficacité du travail policier.

Il est nécessaire pour nous d'ajouter que les autorités des différents corps policiers laissent les patrouilleurs à leur initiative quant à l'application des différentes lois routières. Cependant, pour ceux qui connaissent un tant soit peu le travail policiers, ils devront admettre, tout comme nous, que même si une loi demeure toujours obligatoire dans son application, souvent cette même loi n'est pas respectée parce qu'elle est désuète et pratiquement inapplicable aux yeux du public.

Nous vous joignons, à ce présent chapitre, le mémoire que nous avons présenté à Me Cho-quette sur l'organisation de la police, la régionalisation des corps policiers et sur la prolifération des corps policiers.

Nous croyons que les recommandations et suggestions qui y sont contenues répondraient d'une façon positive à ce que le rapport Gauvin soulève, en ce qui concerne l'efficacité des corps policiers sur les routes du Québec et que le tout résoudrait une foule de problèmes qui n'ont pas été solutionnés, vu que toutes les suggestions présentées sont tombées dans l'oreille de sourds.

Chaque association policière est à même de participer à une refonte des lois et à une réorganisation interne des corps policiers, afin que cesse la multiplicité des organismes policiers et parapoliciers et que la fausse économie que l'on semble vouloir élaborer soit désavouée devant le public qui est toujours celui qui paie la note finale.

Nous faisons des recommandations qui se trouvent à la page 14 et qui pourraient se lire comme suit:

Recommandation no 1: A la page 99 du rapport du comité d'étude sur l'assurance-automobile, la recommandation 17 doit être revisée dans son entier et devrait se lire comme suit: Que la sécurité routière et une surveillance constante et vigilante des routes de la province soit reconnue par les corps policiers qui sont dûment qualifiés pour répondre aux besoins de la population".

Recommandation no 2. Que les corps policiers actuels soient équipés et aient tous les pouvoirs nécessaires pour l'exercice de leurs fonctions.

Recommandation no 3. Que le 1 p.c. des primes d'assurance-automobile vendues dans la province qui est contenu dans la recommandation 18, soit versé dans un programme d'éducation et de sensibilisation du public, vis-à-vis de la sécurité routière.

Recommandation no 4. Que les écoles de conduite et les programmes d'enseignement dans ces écoles soient contrôlés par l'Etat et comprennent des cours théoriques sur la sécurité du conducteur d'un véhicule automobile.

Recommandation no 5. Qu'une révision complète soit faite par le Bureau des véhicules automobiles afin que les permis de conducteur et chauffeur soient octroyés périodiquement.

Recommandation no 6. Que le système de points de démérite soit conçu de façon à encourager le conducteur à observer la loi, et que cette formule devienne une de mérite qui doit refléter dans le taux des primes d'assurance à payer.

Recommandation no 7. Que les corps policiers des autoroutes et des transports et communications soient sous l'autorité directe de la Sûreté du Québec et que soit reconnu dans notre province un corps policier qualifié pour la surveillance routière en général.

Conclusion. L'Association des policiers provinciaux du Québec croit nécessaire que les remarques qui ont été décrites dans les pages précédentes soient prises en très sérieuse considération par les autorités gouvernementales et autres.

De la confusion dans la juridiction des différents paliers gouvernementaux, de la confusion de l'autorité exercée par une série de corps policiers, de la confusion de la ligne d'autorité attachée à chaque organisme gouvernemental naît une incompréhension du public vis-à-vis de la sécurité routière et engendre un désintéressement qui ne peut qu'avoir pour effet direct des coûts élevés des primes d'assurance, qui elles sont sujettes aux conséquences ci-haut mentionnées.

L'Association des policiers provinciaux du Québec.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Je vous remercie bien, M. Magnan. J'inviterais maintenant le ministre de la Justice à faire ses commentaires.

M. CHOQUETTE: M. le Président, je voudrais, tout d'abord, remercier l'Association des policiers provinciaux du Québec de s'être présentée devant la commission pour nous faire

part de son point de vue sur les recommandations du rapport du comité d'étude sur l'assurance-automobile, au chapitre de la sécurité routière.

Je crois qu'on peut dire, malgré que l'Association des policiers provinciaux du Québec exprime certaines réserves quant aux conclusions contenues dans le rapport Gauvin, quant aux recommandations du rapport Gauvin, que, néanmoins, l'Association des policiers provinciaux du Québec est pleinement d'accord sur cette idée centrale qui doit faire l'unanimité qui veut que la route, les accidents de la route et la sécurité routière sont des matières qui doivent nous intéresser et nous préoccuper au plus haut point. La meilleure loi, le meilleur règlement de circulation, une application plus suivie et plus intense des dispositions législatives par les corps de police ainsi que par d'autres organismes qui peuvent avoir des responsabilités dans ce domaine s'imposent de façon à réduire, dans la mesure du possible, le nombre d'accidents sur nos routes avec toutes les conséquences humaines et sociales que ces accidents comportent.

Alors, je crois bien que, malgré que l'Association des policiers provinciaux du Québec se défende de certaines allégations ou même de certaines accusations de laxisme à l'égard des policiers et des corps policiers, malgré tout, l'Association des policiers provinciaux du Québec est fondamentalement d'accord pour dire qu'une police de la route plus efficace est nécessaire si l'on veut réduire le nombre d'accidents routiers.

M. MAGNAN: Entièrement d'accord, M. le ministre.

M. CHOQUETTE: Tout est dans la façon de le faire. Là, il peut y avoir des divergences, il peut y avoir des points de vue légèrement différents qui sont exprimés par le groupe qui est ici aujourd'hui et les recommandations du rapport Gauvin.

Je crois que l'on conviendra que la sécurité routière, cela n'est pas non plus exclusivement une matière de police. Il faut constater que la police ne peut pas, à elle seule, discipliner une population de six millions d'habitants pour la faire se conformer à certaines normes légales ou réglementaires. La police doit prendre la société dans laquelle elle vit avec la part de fautes et la part d'erreurs qui se commettent assez traditionnellement. Je pense qu'il faut admettre qu'au Québec, au point de vue de la sécurité routière, notre population ne s'avère pas particulièrement disciplinée comparativement à d'autres populations. Je pense qu'on aurait tort de rejeter entièrement sur les corps policiers et sur les policiers tout le fardeau de la responsabilité de cet état de choses.

Je pense que la situation s'est améliorée dans les dernières années au point de vue de l'action de la police. Je crois que celle-ci est en nette progression. Je crois que les statistiques révèlent que la Sûreté du Québec est de plus en plus agissante sur les routes du Québec et contrôle les infractions de façon plus stricte et plus sévère qu'elle ne le faisait autrefois. Donc, c'est quand même un progrès qu'il faut marquer, même si la situation, dans son ensemble, ne mérite pas qu'on se tape dans le dos en se déclarant satisfait de la situation actuelle.

Parmi les mesures qui s'en viennent et qui pourraient peut-être améliorer les choses, il y a celle d'un règlement uniforme de la circulation applicable à toutes les municipalités et qui pourra, soit être adopté sous forme d'un règlement, ou soit sous forme de loi. C'est une matière sur laquelle le ministère des Transports et le ministère de la Justice se penchent actuellement. Nous avons l'intention de préconiser l'adoption d'un tel règlement qui uniformisera les conditions de la circulation et qui fera qu'on ne se trouvera pas, dans les différentes municipalités, devant des inégalités dans les textes, au moins. Peut-être y aura-t-il toujours des inégalités dans l'application, compte tenu de la différence entre l'importance des différents corps de police, de la façon d'appliquer les lois, mais, au moins, nous aurons un départ, dans ce sens que nous aurons une réglementation ou une législation uniforme en matière de circulation. Nous aurons également des formules uniformes pour les contraventions au code de la route ainsi que pour les contraventions au futur règlement municipal uniformisé dans tout le territoire québécois.

Ce n'est certainement pas une réponse à tous les problèmes de la circulation. Il y a, sans aucun doute, d'autres aspects qui méritent qu'on s'en préoccupe. Je dirais que la question des effectifs de la Sûreté est une question primordiale. Moi-même, je me suis plaint à de nombreuses occasions, en circulant sur les routes du Québec, d'avoir vu, en beaucoup de circonstances, des automobilistes, faire des vitesses assez vertigineuses et pendant des parcours de centaines de milles et de n'avoir observé aucune automobile ou aucun policier provincial, pour au moins, indiquer par leur présence la nécessité du respect de la loi, sinon, aussi, agir à l'égard des contrevenants, ce qui est certainement nécessaire.

Mais la Sûreté du Québec a des effectifs de 4,000 hommes environ et elle a des tâches très considérables, en plus de surveiller la circulation sur nos routes, ce qui fait que nous n'avons peut-être pas tous les effectifs voulus pour contrôler adéquatement la circulation partout. On aurait bien tort de rejeter sur la Sûreté du Québec, sur le policier individuellement, une responsabilité qui, je pense, se situe à un autre niveau, c'est-à-dire l'allocation des ressources dans le domaine de la police. Combien la société est-elle prête à consacrer de budget au domaine de la police, en particulier au domaine de la surveillance des routes? C'est une question à laquelle on peut répondre, chacun d'entre nous, comme député, au moment où on

vote le budget de la province. C'est une question sur laquelle il faut s'interroger comme contribuable: Quelle part de notre revenu sommes-nous prêts à donner à l'impôt pour qu'on accroisse les effectifs policiers?

Sans vouloir faire dévier le débat sur une matière qui fait actuellement l'objet d'une controverse entre le gouvernement du Québec et le gouvernement fédéral — parce qu'ici ne serait peut-être pas la place — il faut bien, je pense, souligner le fait que si le gouvernement fédéral donnait justice au Québec en nous remettant l'équivalent de ce qu'il donne en subsides déguisés dans les autres provinces, que ceci accroîtrait nos budgets disponibles pour des fins policières et nous permettrait possiblement d'intensifier la surveillance des routes avec les conséquences qui devraient normalement en dériver, c'est-à-dire, une meilleure observance des lois et une réduction du nombre d'accidents.

Je souligne cet aspect pour dire qu'au ministère de la Justice, nous prenons les budgets que nous avons, dans l'état actuel des choses et notre recrutement est limité par ces budgets-là. La même chose s'applique dans les corps de police municipaux ou au niveau de la Communauté urbaine de Montréal.

On sait, à ce propos-là, jusqu'à quel point les budgets croissants de la Communauté urbaine de Montréal sont tellement considérables qu'il y a tout lieu de croire que les contribuables de l'île de Montréal devront faire face à des augmentations de taxe foncière assez importantes en raison des besoins actuels.

Je dis donc ceci: Quand on regarde le montant total consacré à la police, soit au niveau provincial ou au niveau municipal au Québec, on arrive à un chiffre d'environ $300 millions. Si on compare ce chiffre avec le montant total des dépenses publiques au niveau provincial et au niveau municipal, on se rendra compte que la part qui est faite à la police est infime. Le budget du Québec seul est de $5 milliards ou $6 milliards, ajoutez à cela les budgets municipaux, combien de milliards de plus?

M. LEGER: $1 milliard de plus.

M. CHOQUETTE: Mettons $1 milliard de plus. Vous avez tout de suite un montant de dépenses publiques de $7 milliards de dollars et vous n'avez que $300 millions qui sont consacrés à la police.

Alors qu'on ne s'imagine pas que la police, dans ces conditions-là, puisse faire des miracles et que le ministère de la Justice puisse aussi intensifier la surveillance des routes et ainsi arriver à des meilleurs résultats. Je sais bien que nous avons eu d'autres priorités historiques qui ont accaparé les budgets publics; l'éducation en est un, les affaires sociales — là, il y avait des besoins extrêmement criants qui demandaient l'attention des autorités au point de vue des dépenses — mais je crois que le temps est venu de faire l'apport normal à la police. Moi, je dis que si le gouvernement fédéral, en fait, voulait poser les gestes qui s'imposent à l'heure actuelle et qui me paraissent réclamés à grands cris, autant au niveau du gouvernement du Québec qu'au niveau de la Communauté urbaine de Montréal comme d'autres municipalités, nous pourrions à ce moment-là, sans faire assumer un fardeau fiscal additionnel aux citoyens, quand même accroître nos effectifs et la surveillance policière en général, comme la surveillance routière.

Vous avez également, dans vos commentaires, M. Magnan, mentionné l'intérêt qu'il y aurait pour le gouvernement de ne pas permettre une prolifération des corps chargés de la surveillance des routes.

Je suis de votre avis qu'en principe la surveillance des routes doit être une matière qui appartienne prioritairement à la Sûreté du Québec. La Sûreté du Québec est largement une police de la route et je crois qu'elle doit continuer à exercer cette fonction.

D'autre part, il ne faut quand même pas prendre une attitude ultraradicale dans ce domaine. D'autres groupes spécialisés peuvent avoir une fonction à jouer dans le domaine, je ne dis pas routier proprement dit — parce que je ne crois même pas qu'au ministère des Transports les inspecteurs qui s'y trouvent fassent à proprement parler de la police de la route, je crois qu'ils font de la police quant à la pesanteur des camions, ils font la police pour la commission des transports, dans le sens qu'ils vérifient les permis et tout cela — mais je ne crois pas qu'aux Transports, on en soit rendu au point de supplanter le rôle traditionnel de la Sûreté du Québec en matière de surveillance des routes québécoises.

M. MAGNAN: Si vous me permettez, M. le ministre, sur cette question, il est entendu que, dans la loi, le ministère des Transports a son corps policier ou de surveillance routière qui se rattache directement au transport public, comme les autobus, les camions, les taxis, etc.

Cependant, dans cette même loi, on dit également "ou tout autre travail connexe", ce qui fait qu'actuellement nous avons des preuves selon lesquelles les policiers des Transports n'appliquent pas seulement les lois qui se rattachent au transport public. Il y a eu des infractions données à des personnes dans le public de simples citoyens qui pouvaient avoir un phare brûlé à leur voiture ou qui ont commis une autre infraction au code de la route.

M. CHOQUETTE: Evidemment, je ne crois pas que nous devons nous situer dans une philosophie de bâtir des empires, que ce soit au niveau de la Sûreté du Québec ou que ce soit au niveau du ministère des Transports. Moi, je conçois très bien que le ministère des Trans-

ports ait besoin d'inspecteurs ou d'officiers particulièrement chargés de certains aspects qui intéressent ce ministère dans le transport public, par exemple, et je ne crois pas que le ministère des Transports doive se lancer dans l'organisation d'un corps parallèle qui viendrait faire une police de la route en plus de celle de la Sûreté du Québec. Je crois qu'il faudra probablement démarquer d'une façon plus claire les responsabilités respectives des inspecteurs des Transports par rapport aux responsabilités de la Sûreté du Québec.

Je ne sais pas si ma réponse est assez claire sur cela. Je vous suis sur le plan des principes, mais je vous dis que, d'un autre côté, il faudra quand même admettre qu'il y a certains domaines de l'activité sociale qui méritent qu'il y ait des groupes qui soient formés pour vérifier certains aspects très spécialisés. Par exemple, j'ai mentionné le poids des véhicules. Cela peut être d'autres aspects qui intéressent le transport public en général. Je ne crois pas, comme vous, qu'on devrait créer un "highway patrol" qui viendrait doubler les fonctions de la Sûreté du Québec.

Vous avez mentionné aussi, M. Magnan, le fait qu'il y aurait tout intérêt pour le gouvernement de donner suite à certaines politiques en matière de régionalisation de corps de police municipaux. C'est d'ailleurs la politique énoncée dans le livre blanc. La police et la sécurité des citoyens.

Mais je vous dirai ceci: Comme ministre de la Justice, je n'entrevois aucune possibilité de procéder à l'intégration de corps de police municipaux pour les intégrer au sein d'une police régionale, à moins que le gouvernement ait une politique financière pour appuyer une telle intégration de corps de police municipaux sur une base régionale, quoique l'expérience vécue à Montréal soit suffisamment claire pour inciter le gouvernement à la prudence dans ce domaine. Nos idées, je crois bien, étaient valables. Au départ, il fallait intégrer la police de l'île de Montréal. Je ne le regrette pas, il fallait le faire. C'était écrit, en somme. C'était un développement tout à fait normal: 25 ou 27 corps de police sur un territoire aussi restreint que celui de l'île de Montréal ne devaient pas coexister avec tous les problèmes de frontière que cela soulève. Je crois qu'en fait la population montréalaise, elle, retirera les bénéfices de l'intégration à plus ou moins long terme par une meilleure organisation de la police sur l'île.

Force nous est de reconnaître que cette intégration entraîne des coûts additionnels dans la période initiale du processus d'intégration, avec des conséquences fiscales assez dramatiques sur les citoyens. Je ne suis pas prêt à procéder à une autre expérience similaire, dans aucune région du Québec, tant que la régionalisation des corps de police ou la politique de régionalisation des corps de police ne sera pas doublée d'une politique de subventions à l'égard des corps de police régionaux intégrés.

Ceci, je pense, est tout à fait légitime quand on prend en considération le point de vue du contribuable foncier qui est obligé de payer des taxes municipales, qui est obligé de payer certaines taxes à des communautés urbaines et qui est obligé de payer des taxes scolaires avec toutes les autres dépenses qui s'accroissent au niveau de la propriété.

Alors, je vous dis donc que nous ne renonçons d'aucune façon à la politique d'intégration sur le plan régional des corps de police municipaux. Même dans le livre blanc — la police est la sécurité des citoyens — jamais, nous n'avons dit que ce sont des mesures qu'il va falloir mettre en vigueur dans une période de deux, trois ou quatre ans. En fait, c'était plutôt une esquisse d'une politique à long terme de dix ans, quinze ans et même peut-être vingt ans, parce que toutes les régions du Québec ne requièrent pas l'intégration sur une base régionale, les problèmes de la criminalité pour certaines régions étant assez simples et ne devant pas faire encourir des dépenses additionnelles. Par contre, il faut bien admettre qu'il y a des régions où on pourrait, à l'heure actuelle, dire que l'intégration serait une bonne chose. Je pourrais citer des régions où la criminalité est assez forte et où on pourrait, en principe, dire: II faudrait procéder à une intégration des corps de police sur une base régionale. Mais je ne voudrais pas le faire à l'heure actuelle parce que je crains trop les conséquences financières d'un tel geste et, tant que je n'aurai pas une politique de subventions qui soit établie par le Parlement et qui permette de verser des subventions aux organismes qui contrôleront ces corps de police régionaux intégrés, tels que Conseil de sécurité, communauté urbaine, je crois qu'il serait vraiment présomptueux, compte tenu de l'expérience montréalaise, d'y procéder.

M. Magnan, ce sont les points de vue que je voulais vous exprimer. Evidemment, il y aurait beaucoup à dire sur les propositions que vous nous avez faites. Vous pouvez être sûr que nous allons les analyser de très près.

Je ne peux pas vous donner de réponse précise ce matin, au moment où nous nous rencontrons et où je prends connaissance de votre mémoire pour la première fois. Vous pouvez être assuré que nous allons prendre en considération, très sérieusement, vos énoncés, vos recommandations, les recommandations qui sont contenues dans votre mémoire.

M. MAGNAN: Merci, M. le ministre. Maintenant, si vous me permettez, M. le Président, l'Association des policiers provinciaux est bien d'accord avec votre demande au fédéral. Ce n'est qu'une question de justice Ce n'est pas une question de dire qu'on veut plus ou que la province de Québec voudrait plus que les autres provinces. Si le ministre de la Justice fédéral étudie de très près votre demande, il ne fera qu'accepter éventuellement. C'est une question, probablement, comme on disait tantôt, à long

terme, mais qui sera rétroactive. Cependant, pour la question de la formation des corps policiers régionaux, nous la voyons de bonne part, parce que cette formation de police régionale ou communauté urbaine servirait à uniformiser l'action policière et uniformiser aussi, ce que le travail policier peut représenter au niveau du public, parce que c'est le public qui attaque habituellement le policier. Lorsqu'il arrive un problème, c'est la police qui n'a pas fait son travail. Lorsqu'il y a un problème, c'est la police qui est là qui crée le problème. Ce qui fait qu'à ce moment, on est un peu le bouc émissaire des problèmes qui se multiplient.

Mais la régionalisation pourrait peut-être enlever la pression individuelle sur les corps policiers municipaux composés de cinq, six policiers, qui eux, sont peut-être soumis, au point de vue de l'emploi, à la pression interne, politique ou locale. Parce qu'on sait que les corps de police municipaux de cinq, six membres sont passablement sujets à la pression politique locale. A ce moment, le policier ne peut vraiment pas agir positivement, en laissant de côté, justement, la question de pression politique et aussi, agir comme un vrai policier doit agir, c'est-à-dire, oublier ses problèmes personnels.

M. CHOQUETTE: M. Magnan, là, je vous trouve un peu moins solide que tout à l'heure pour deux raisons: premièrement, vous semblez dire que les gens mettent trop de responsabilités du côté de la police. Moi, je crois au contraire, que la police au Québec — je ne dis pas qu'elle est universellement bien vue — mais je crois, en fait, que le public québécois apprécie ses corps de police à l'heure actuelle.

Or, vous n'avez pas de bonne raison d'avoir un complexe d'infériorité. Je ne pense pas que le public s'en prenne systématiquement à la police. Je sais qu'on a eu des incidents, des problèmes à certaines époques, mais ce n'est pas un état de chose permanent, et la situation actuelle est plutôt, enfin, avantageuse au point de vue des policiers.

M. MAGNAN: Lorsque vous voyez une recommandation dans un rapport comme le rapport sur le comité d'assurance, dans lequel on dit que les policiers laissent délibérément les infractions se commettre, vous ne serez pas sans admettre que les 13,000 policiers que nous sommes au Québec ne pourraient pas tous se lever debout et dire, à un certain moment: Prouvez-le! Parce que nous, quand on accuse quelqu'un, on tente de le prouver, autant que possible.

M. CHOQUETTE: Cela, vous pouvez être sûr que je ne souscris pas à cette affirmation. D'ailleurs, je ne vois pas sur quoi on pourrait la fonder. Enfin, cela m'a l'air d'être le genre d'affirmation qui est plutôt de portée générale et qui, par conséquent, est faible à ce point de vue.

Maintenant, vous avez parlé aussi des raisons pour une politique d'intégration régionale des corps de police municipaux. Il y a toute une série de raisons, je pense bien. Parmi ces raisons, il y a peut-être celles que vous avez mentionnées, malgré que je ne suis pas prêt à dire que c'est une situation généralisée que les policiers ne peuvent pas agir à cause d'interventions indues au niveau des conseils municipaux.

Je ne suis pas prêt à admettre que les maires et les conseillers municipaux interviennent systématiquement au Québec, dans le travail de la police. Je sais qu'il y a des incidents de ce genre. Il y a peut-être aussi des municipalités où c'est plus grave qu'à d'autres endroits, mais je ne pense pas qu'on puisse affirmer d'une façon aussi catégorique que la police soit empêchée d'accomplir ses fonctions à cause d'attitudes systématiques des maires et des conseils municipaux dans tout le territoire.

M. MAGNAN: Je ne dirais pas systématique. Cependant, lorsqu'on fait un rapport d'infraction à un citoyen et que ce rapport est porté à la filière numéro 13, qu'on appelle la poubelle, lorsque le policier s'en est fait passer cinq ou six, il manque un peu de motivation pour en faire d'autres.

C'est à ce moment qu'il peut y avoir une ingérence politique à l'intérieur du travail policier, parce que, si on reconnaît que ce sont nos juges qui doivent juger, je pense qu'on devrait leur laisser leur travail.

M. CHOQUETTE: De toute façon, cela ne se passe pas comme cela à la Sûreté du Québec.

M. MAGNAN: Non, monsieur.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Lafontaine.

M. LEGER: M. le Président, je voudrais féliciter l'Association des policiers provinciaux du Québec de s'être préoccupée de soulever certains points bien précis, à savoir des préoccupations de ceux qui veulent corriger la situation de la sécurité routière. Avant de vous poser quelques questions sur votre mémoire, puisque le ministre de la Justice a ouvert le débat dans cette direction, je voudrais en profiter pour lui demander si, dans sa bataille avec le ministre fédéral de la Justice pour obtenir un retour...

M. HARVEY (Charlesbourg): Question de règlement, M. le Président.

M. LEGER: ... des sommes qui sont dues au Québec...

M. HARVEY (Charlesbourg): Le ministre était hors d'ordre à ce moment!

M. LEGER: ... est-ce que le ministre de la Justice pourrait nous dire s'il recevait les $300 millions ou plus qui sont dus, selon un dossier qui semble très bien préparé, il pourrait attribuer ces sommes d'abord au Conseil de sécurité de la Communauté urbaine? Cela résoudrait pas mal de problèmes à Montréal et cela empêchera l'augmentation de taxes. D'un autre côté, sur la sécurité routière, que ferait-il avec ces sommes dans l'immédiat?

M. CHOQUETTE: Vous me demandez de distribuer les fonds avant de les avoir reçus. Je trouve que vous me précédez pas mal.

M. LEGER: C'est pour savoir jusqu'à quel point vous vous préoccupez de ces problèmes.

M. CHOQUETTE: Je suis très préoccupé de ces problèmes, mais je ne suis pas en mesure de prendre d'engagement ce matin. On comprend que les problèmes de la Communauté urbaine de Montréal impliquent non seulement la police, mais aussi le transport ainsi que d'autres activités. Je crois que le ministre des Finances, le premier ministre et le ministre des Affaires municipales auraient tous, enfin, des points de vue très valables à exprimer pour déterminer dans quelle mesure il nous serait possible de venir en aide aux citoyens de Montréal par le truchement de la Communauté urbaine.

Alors, je ne peux pas vous donner de réponse. Mais il y a une chose qu'on peut quand même noter. C'est que la police de la Communauté urbaine de Montréal ne joue pas seulement un rôle de police municipale. Elle surveille quand même le territoire le plus densément peuplé du Québec où il y a probablement le plus d'activités criminelles qui intéressent non seulement la vie municipale, mais qui intéressent la vie du Québec, dans son ensemble.

Par conséquent, une politique de subvention à l'égard de la police de la Communauté urbaine de Montréal serait tout à fait défendable sur le plan des principes, parce que le gouvernement dirait: II faut venir en aide aux citoyens de l'île de Montréal pour la fonction que joue leur corps de police et qui a des répercussions sur le maintien de l'ordre public en général, dans tout le Québec, et ceci comprend des activités dans le domaine de la subversion, du crime organisé, de toutes sortes de systèmes de criminalité économiques qui intéressent non seulement les citoyens de Montréal comme citoyens d'une ville, mais qui les intéressent comme citoyens du Québec. Il est sûr et certain que c'est un problème qui me préoccupe beaucoup et qui préoccupe beaucoup le gouvernement.

M. LEGER: Je ne voudrais pas engendrer un grand débat là-dessus. Je suis d'accord sur sa bataille. Je voudrais seulement lui faire remarquer, à titre de boutade, qu'à l'arrivée au pouvoir des libéraux en 1970, le premier ministre Bourassa avait bien dit que les futures négociations seraient efficaces et qu'ils auraient des dossiers bien préparés et c'est un exemple d'un dossier bien préparé, bien étoffé.

Ce n'est pas là-dessus, je pense, que les décisions vont se prendre; c'est beaucoup plus derrière des problèmes politiques entre le fédéral et le provincial que vous allez pouvoir gagner, par un dossier bien préparé pour lequel je dois féliciter le ministre.

M. CHOQUETTE: II y a quand même des dossiers que nous avons réglés avec avantage pour le Québec, avec les autorités fédérales actuelles. Je ne crois pas qu'il faille être pessimiste dans l'état actuel des choses. Ces questions ne se résolvent pas instantanément et, personnellement, j'ai confiance d'arriver à un résultat favorable.

M. LEGER: En tout cas, on vous le souhaite. M. CHOQUETTE: Merci.

M. LEGER: M. le Président, je voudrais demander à M. Magnan, concernant les recommandations, à la page 11 de votre rapport... Vous parlez de la surveillance autre que les autos-patrouilles, et tout spécialement, la surveillance aérienne, hélicoptères, etc. Vous dites: La surveillance aérienne a prouvé qu'un seul appareil accomplissait le même travail que douze autos-patrouilles. Pour affirmer cela, est-ce que vous vous êtes basés sur des enquêtes particulières précises qui ont évalué que c'était plus efficace par hélicoptère, pour arriver à dire que cela équivaut à douze patrouilles? Est-ce que vous avez fait une enquête?

M. MAGNAN: C'est-à-dire qu'il y a de la surveillance routière aérienne qui se fait dans les autres Etats et il y a des rapports. Je n'ai pas apporté de copies de ces rapports ici, mais c'est prouvé qu'un avion ou un hélicoptère, du haut des airs, a une surveillance, au point de vue générique, que douze autos-patrouilles pourraient avoir en circulant sur les routes. Par le fait même, lorsqu'il arrive un problème majeur, il peut apporter le secours nécessaire beaucoup plus rapidement que de faire appeler une auto-police par un simple citoyen qui court un téléphone, parce qu'on n'en a pas au bord de la 20, comme on n'en a pas sur le bord d'autres routes provinciales.

M. MARCHAND: M. le Président, sur le même sujet, est-ce que je pourrais demander combien de jours...

M. LEGER: Certainement, M. le député.

M. MARCHAND: ... par année un hélicoptère peut travailler comparativement à une auto-patrouille?

M. MAGNAN: C'est bien difficile. A mon

sens, un hélicoptère peut travailler 24 heures par jour, pour autant que les pilotes...

M. MARCHAND: Combien de jours par année, à cause de la température? Eh hiver, est-ce qu'il peut fonctionner quand même?

M. MAGNAN: Certainement. M. MARCHAND: Merci.

M. LEGER: Est-ce que vous avez eu une réponse, du ministère de la Justice, à cette demande pour avoir un peu plus d'équipement, entre autres dans le domaine des hélicoptères?

M. MAGNAN: II y a eu, l'an dernier, l'achat de trois hélicoptères à la Sûreté du Québec, ou deux, je ne sais trop. Je pense que c'est trois, et on est appelé à en avoir d'autres, pour autant que le budget va le permettre, semble-t-il.

M. LEGER: Dans votre deuxième recommandation, à la page 14, vous dites: "Que les corps policiers actuels soient équipés et aient tous les pouvoirs nécessaires pour l'exercice de leurs fonctions". Pouvez-vous définir quels sont les pouvoirs supplémentaires dont vous avez réellement besoin pour bien fonctionner?

M. MAGNAN: Au point de vue municipal, la Sûreté du Québec n'a pas les pouvoirs d'appliquer les lois municipales. C'est réservé aux policiers municipaux. Lorsque la Sûreté du Québec peut appliquer les lois municipales, c'est lorsqu'il y a un état d'urgence décrété par le ministre de la Justice ou le lieutenant-gouverneur. La Sûreté du Québec peut alors appliquer les lois. A part cela, la Sûreté du Québec n'est pas apte à appliquer les lois municipales. Cela devient un problème.

M. LEGER: Est-ce que c'est seulement cela ou si c'est seulement l'uniformisation qui serait la solution?

M. MAGNAN: C'est un des exemples, parce que le ministère des Transports a aussi ses pouvoirs par sa police.

M. LEGER: Concernant la recommandation 14: Uniformiser dans la province les règlements concernant la circulation dans les cités et villes, je pense que le rapport Gauvin propose cela. Qu'est-ce que vous pensez des endroits des municipalités que l'on appelle aujourd'hui — et les citoyens du Québec le vivent assez souvent — des "speed-traps"? J'ai essayé de trouver une expression française à cela, mais cela caractérise bien l'endroit où les citoyens arrivent dans une municipalité. Les règlements sont différents et le citoyen se sent, non pas surveillé par des policiers qui veulent la sécurité routière, mais qui sont plutôt poussés par une meilleure rentabilité des revenus des municipalités.

En d'autres termes, je voulais vous donner mon opinion et vous me donnerez la vôtre sur ça, j'ai l'impression que les municipalités, qui ont des corps de police bien à eux et qui ont des règlements municipaux, poursuivent la plupart du temps en vertu des règlements municipaux plutôt qu'en vertu du code de la route. Si c'est en vertu du code de la route, les revenus vont au gouvernement provincial, tandis que si la poursuite a lieu en vertu des règlements municipaux, les revenus vont à la municipalité. Ce qui crée, chez les municipalités, un certain appétit et une certaine pression pour que les policiers soient en mesure de rapporter suffisamment de revenus. A ce moment-là, le citoyen, qui passe dans cette municipalité, n'est pas arrêté en fonction de la sécurité routière mais beaucoup plus en fonction des revenus supplémentaires pour la municipalité. Est-ce que vous ne jugez pas que ça devrait être appliqué selon le code de la route de façon à ce que ce soit fait en fonction de la sécurité routière et non pas d'un appétit de revenu municipal pour être remis, par la suite, au policier en disant : Vous apportez suffisamment de revenu, on peut vous donner un meilleur équipement.

M. MAGNAN: Evidemment, votre opinion est la nôtre, c'est que l'application du code de la route devrait être provinciale et les municipalités ne devraient pas chercher un revenu pour que leur police soit rentable. Parce que la police n'est pas une question de rentabilité, de revenus et dépenses, c'est une question de service et de dépenses. Est-ce que le service qu'on donne répond aux dépenses que le peuple fait ou que les élus du peuple ont à défrayer pour donner le service à la population locale ou provinciale? Lorsqu'on applique nécessairement le code de la route, en prenant en considération les revenus que peuvent rapporter les infractions, on arrive à des questions, comme on disait tout à l'heure, dans notre rapport, ce sont des traquenards. On place habituellement le policier à un bon endroit pour que tout le monde qui passe se fasse prendre pour une infraction quelconque, mais payante. C'est-à-dire en vertu d'un règlement municipal, lorsque le revenu revient au conseil de ville. A ce moment-là, on a comme réaction que les taxes municipales peuvent être tout simplement abaissées ou ne pas être augmentées. Je ne crois pas que ce soit une bonne philosophie de l'application du code de la route, parce que la sécurité routière est une question de sécurité pour le public et non celle de tenter de prendre ou de "poigner" le public.

M. LEGER: Je voudrais demander au ministre de la Justice ce qu'il pense de cette existence de traquenards comme les appelle M. Magnan? Dans cette uniformisation des règlements de la route, que ce soit pour les municipalités ou les policiers, qui poursuivent en fonction du code de la route, de façon qu'il

n'y ait pas ce genre de conflit d'intérêts qui crée la situation où le citoyen se sent beaucoup plus comme un type qui arrive avec $20 de plus pour la municipalité, on l'arrête — on a vu ça dans les Etats des Etats-Unis, on arrête les automobilistes par dizaines, sur le bord de la route et quand ils sont arrêtés, on les amène ensemble devant le juge et on dit: Payez immédiatement ou vous allez passer la fin de semaine ici — est-ce que le ministre a l'intention de faire une correction en ce sens pour enlever cet appétit municipal, quitte à le remplacer par une autre forme de financement mais que ce soit plutôt par un objectif de sécurité routière plutôt que par l'appât de revenu?

M. CHOQUETTE: II faut faire certaines distinctions dans ce domaine. Une première que je fais, et que le gouvernement a déjà faite par un amendement qu'il a apporté au code de la route: il a interdit aux municipalités l'usage des appareils de radar, de photographie parce que c'était une manière abusive d'appliquer les règlements municipaux ou le code de la route. Qu'est-ce qui se produisait? On installait un appareil à un carrefour quelconque et on prenait toutes les voitures qui passaient sans qu'il n'y ait aucun processus d'arrestation de l'automobiliste. L'automobiliste pouvait recevoir un avis plusieurs semaines ou plusieurs mois après, ne pas se rappeler du tout de l'incident dont il s'agissait et être appelé à se' défendre et à dire qu'il n'avait pas conduit à 45 milles à l'heure à une intersection où la limite de vitesse était de 30 milles à l'heure. C'était nier à l'automobiliste ou au citoyen sont droit à une défense pleine et entière. Je crois que ce principe est bien établi dans notre droit, que lorsqu'on accuse quelqu'un de la commission d'un crime ou d'une infraction, il faut lui donner l'occasion de se défendre d'une façon complète.

Si vous accusez quelqu'un d'avoir commis une infraction, mettons le 31 juillet, d'être passé à tel endroit à telle vitesse; maintenant que nous sommes au 15 octobre, comment voulez-vous qu'il puisse faire une défense à une telle accusation? Il ne pourra pas, il ne se souviendra pas s'il est passé à cette intersection, il ne se souviendra pas des témoins qui ont pu être avec lui à ce moment-là et, par conséquent, c'était un peu lui nier le droit à une défense pleine et entière. C'est la raison pour laquelle nous avons défendu ce genre de constatation d'infraction automatique, en quelque sorte, de façon à éviter le genre de traquenard auquel vous faites allusion.

Par contre, ceci ne veut pas dire qu'il faille que les forces de police municipale ou provinciale appliquent la loi mollement. Une certaine sévérité dans ce domaine-là s'impose. Je pense qu'il est bien, dans les pages éditoriales du journal Le Jour, de dire qu'on devrait appliquer la loi au nom d'objectifs sociaux, vous savez... je veux dire au nom de la sécurité routière et tout cela. C'est peut-être assez noble de la part de certaines personnes qui pourraient vouloir écrire au nom de ces principes-là, en disant que la loi, au fond, devrait s'appliquer d'une façon assez douce, assez aimable et que cela ferait plaisir à tout le monde; mais malheureusement, la loi n'est pas faite de cette façon-là. La loi a toujours une certaine dureté et cette dureté fait partie du système, elle fait partie de l'application efficace de la loi. C'est la raison pour laquelle je ne reprocherais pas à des policiers de la Sûreté du Québec ou à ceux des municipalités d'exercer un contrôle sévère sur la circulation.

Je crois, mon cher collègue, qu'il faut faire attention de ne pas verser dans une espèce de philosophie pseudo-humaniste qui nie à la loi son efficacité réelle. L'efficacité vient du fait que l'automobiliste qui est arrêté est obligé de payer $20, $40 ou $50 et, s'il sait qu'il est obligé de payer ainsi, c'est censé le ramener à la raison de façon à circuler à l'intérieur des normes fixées par la loi.

M. LEGER: M. le Président, le ministre a compris une partie de mon intervention. Si on se reporte à la page 11 du mémoire de l'Association des policiers provinciaux on y dit, dans le premier paragraphe, vers la fin: ... "l'insécurité que subissent les membres des corps policiers municipaux qui ne possèdent pas les moyens de se défendre contre les attaques répétées qu'ils subissent de la part des politiciens locaux qui désirent conserver leur police municipale au service de certains individus en autorité".

Je suis d'accord avec le ministre concernant l'utilisation abusive du radar qui ne permet pas au citoyen de pouvoir avoir une défense complète et entière du fait qu'il n'a pas été arrêté au moment précis où il a commis son infraction et qu'il soit en mesure, après cela, de s'attendre à recevoir un avis et se rappeller soit qu'il avait été fautif ou non. Le radar ne permettait pas cela, puisque cela se passait tellement plus tard. Mais ce n'est pas là-dessus, c'est sur ['"incentive" ou l'appétit de certaines municipalités.

Si, à l'opposé de ce qui se passe actuellement, les municipalités ou les policiers municipaux poursuivaient — je ne sais pas si c'est eux qui poursuivent comme tels — ou, du moins, l'organisme qui poursuit devant une infraction du code de la route à l'intérieur d'une municipalité, si c'était fait en fonction ou selon le code de la route, les revenus de cette amende iraient à la province. Si c'est fait en fonction des règlement municipaux, les revenus sont remis à la municipalité.

Alors, il y a quand même un certain conflit d'intérêts possible, en ce sens qu'on peut dire aux policiers: Ecoutez, vous n'avez pas rempli votre quota à ce jour, vous n'êtes pas bons surveillants, vous n'avez pas rapporté assez à la municipalité. Le rôle du policier est beaucoup plus de voir à la sécurité à l'intérieur de la

municipalité plutôt que d'apporter un certain nombre de billets, parce que cela rapporte à la municipalité.

Si cela rapportait à la province pourvu qu'il y ait une ristourne pour les municipalités, le policier ne serait pas devant un certain conflit d'intérêts. C'est dans ce sens-là que je voulais poser ma question.

M. CHOQUETTE: Les municipalités, dans l'état actuel des choses, doivent faire remise d'une part des amendes perçues. Au moment où je réponds à votre question, je ne suis pas en mesure de vous dire les proportions exactes des remises qui doivent être faites par les municipalités lorsqu'il s'agit de l'application du code de la route ou lorsqu'il s'agit de l'application de règlements municipaux.

Mais une chose est certaine, c'est qu'il y a de nombreux règlements municipaux qui recoupent le code de la route, qui incorporent au règlement municipal certaines dispositions qui existent déjà dans le code de la route.

Dans certaines municipalités, au lieu de porter une accusation qu'on pourrait porter en vertu du code de la route, de certaines dispositions précises du code de la route, on la porte en vertu du règlement municipal, d'une disposition qui est au même effet que le code de la route et ceci, de façon à retirer plus de bénéfices au point de vue du produit des amendes. C'est une situation qu'il va falloir changer. Je suis parfaitement de cet avis. Je crois que le règlement uniforme de la circulation va permettre de dire que, pour ce qui est du règlement de la circulation, il ne reproduira pas intégralement les dispositions du code de la route, de telle sorte qu'il faudra porter des accusations soit en vertu du code de la route, soit en vertu du règlement municipal. Donc, vous avez, en partie, raison de souligner ce problème.

Il y a un deuxième aspect, c'est: Jusqu'à quel point les municipalités font-elles remise au gouvernement de la part qui revient au gouvernement dans tout cela? C'est une question à laquelle on pourrait répondre si on envoyait des vérificateurs dans toutes les municipalités pour savoir quel est le montant qu'elles perçoivent et quelle est la part qu'elles envoient au gouvernement, soit la part qui doit revenir au gouvernement suivant les dispositions actuelles. Donc je ne suis pas en mesure de vous dire que nous obtenons intégralement remise de la part des municipalités.

Par contre, je dois ajouter ceci: Dans les cas où on nous a signalé que des corps de police municipaux abusaient et installaient des traquenards ou des trappes pour prendre les automobilistes d'une façon systématique, — d'une façon vous savez, qui était tellement évidente que c'était pour produire du revenu — ces cas ont été référés à la Commission de police qui a fait enquête sur les activités de ces corps de police, de façon à éviter qu'on poursuive ce genre de politique au niveau municipal, et avec certains résultats assez heureux, parce que j'ai reçu assez peu de plaintes récemment d'une action vraiment critiquable de la part des corps de police dans le genre de celle que vous avez soulevée.

M. LEGER: Etant donné qu'il y a beaucoup de subtilité dans votre affirmation, est-ce qu'on pourrait conclure que vous êtes complètement d'accord ou que vous êtes partiellement en désaccord sur la recommandation 14 du rapport Gauvin qui dit: "Que soient uniformisés dans la province les règlements concernant la circulation dans les cités, villes et municipalités, et que les amendes perçues pour les infractions à ces règlements soient la propriété de la province, à charge pour cette dernière d'en faire la redistribution, s'il y a lieu, parmi les corporations municipales?

M. CHOQUETTE: Je suis pleinement d'accord sur la première partie de la recommandation, mais je ne suis pas prêt à dire que je suis d'accord sur la deuxième partie de la recommandation. Je crois qu'il y aurait un système de répartition de l'amende à être effectuée entre le gouvernement et les municipalités en question.

D'ailleurs, dans le livre blanc, qui est en préparation, sur l'administration de la justice, nous allons proposer une formule de répartition qui nous paraît juste entre les municipalités et le gouvernement.

M. LEGER: M. le Président, ie veux revenir à M. Magnan et son équipe. A la page 15, vous recommandez que 1 p.c. des primes d'assurance-automobile vendues dans la province, qui est contenu dans la recommandation 18, soit versé dans un programme d'éducation et de sensibilisation du public. Est-ce que cela veut dire que vous êtes contre la recommandation qui veut que cette somme représentant 1 p.c. soit remise à un organisme? Dans un programme, j'ai l'impression que cela devrait être dirigé, que cela fonctionne par un organisme qui en a la direction. Pour quelle raison ne voudriez-vous pas que ce soit versé à un organisme plutôt qu'à un programme? Est-ce que, nécessairement, il n'y a pas un organisme qui doit faire appliquer le programme?

M. MAGNAN: De la façon que c'est exprimé, on croit que ce n'est pas le fait de donner 1 p.c. à un organisme qui se chargerait d'éduquer le public ou de le sensibiliser à certaines questions routières; c'est que le 1 p.c, on le voit versé à une organisation qui serait chargée de la surveillance routière. Or, on le voit comme étant une autre force de police à créer ou une autre sorte de force parapolicière qui pourrait, encore une fois, se promener sur les routes de la province et dire : Nous autres, on est de tel corps de police et on s'occupe d'appliquer telle loi.

A ce moment, le public voit la Sûreté du Québec, le ministère des Transports, cette

nouvelle police. Il s'en va sur les autoroutes, il rencontre une autre sorte de police et il dit: Dans quelle sorte de province suis-je? Est-ce qu'il y a un corps de police, cinq ou dix?

A un certain moment, on croit que ce serait préférable d'éduquer, de sensibiliser, d'intéresser le public à la sécurité routière et non pas à former d'autres organismes qui coûteraient encore beaucoup plus cher, parce que cela ne réglerait pas le problème à multiplier les polices.

Mercredi dernier, on est venu à la commission parlementaire, et on a entendu dire que les Québécois, lorsqu'ils sortent de l'Ontario, ils "pèsent sur le gaz", et, lorsqu'ils s'en vont en Ontario, ils "lâchent le gaz". De deux choses l'une, ce sont des peureux ou la loi de l'Ontario est appliquée jusqu'au bout. On sait que, quand on va en Ontario, et qu'on se fait arrêter, on paie et il n'y a pas de discussion possible, on paie ou on reste là. Ici, au Québec, il semblerait qu'on peut se promener un peu plus vite sans trop payer et s'en retourner chez soi bien tranquillement. Pour le policier, c'est pas mal frustrant, une situation semblable. C'est dans ce sens que nous disons que nous devrions éduquer notre public, peut-être que, d'autre part, cela aiderait aux autres provinces, soit à ceux qui viennent des autres provinces, à suivre les lois au même titre que les Québécois les suivent quand ils vont dans d'autres provinces.

M. LEGER: Je pense que c'est fondamental dans le fonctionnement de la police au Québec. Est-ce que vous avez étudié l'expérience britannique qui a des corps policiers différents, comme Scotland Yard, qui s'occupe d'enquêtes criminelles, les Bobbies qui s'occupent de la sécurité à l'intérieur des municipalités et autres, et les Traffic Warrant qui s'occupent, eux, uniquement de la circulation et de la sécurité routière? Est-ce qu'au Québec, vous pensez que cela devrait être un organisme spécialisé, relevant de la Sûreté provinciale ou du ministère de la Justice, je ne sais pas, qui devrait s'occuper, en étant bien entraîné, de la circulation et que les gens qui s'occupent des enquêtes criminelles soient un autre groupe, ou si vous pensez que les deux fonctions peuvent relever du même corps de police?

M. MAGNAN: Les deux fonctions doivent relever du même corps de police parce qu'il doit y avoir une unité d'action et il doit y avoir un échange d'informations. Le patrouilleur, ce n'est pas seulement une auto-patrouille qui se promène avec deux gars à bord, et que, s'il y en a un qui va vite, on l'arrête, et s'il ne va pas vite, on ne l'arrête pas. C'est aussi la surveillance en général quant aux actes criminels. Lorsqu'on a des policiers qui collaborent, on peut avoir une meilleure efficacité policière, autant sur la route que sur les actes criminels. L'expérience acquise à la Sûreté du Québec depuis les années soixante le prouve; car, avant les années soixante, la Sûreté du Québec était divisée par des spécialistes qui ne se regardaient pas, qui ne s'entendaient pas et qui ne se parlaient pas. Alors, on avait des polices de la route, et quand il y avait un acte criminel, on disait: Faites venir le détective. Le détective était peut-être en congé cette journée-là. Alors, on n'avait pas de détective. Tandis qu'aujourd'hui, la police porte action.

M. CHOQUETTE: Est-ce que je pourrais ajouter quelque chose, M. Magnan, à votre réponse? En Angleterre, il n'y a pas de séparation entre la police judiciaire et les autres activités de la police. Scotland Yard, en fait, n'est qu'une partie de la police métropolitaine de Londres, où il y a des spécialistes en enquêtes criminelles qui sont dépêchés peut-être un peu partout en Angleterre, suivant les besoins. Scotland Yard n'est pas une unité complètement distincte des corps de police régionaux qui existent en Angleterre. Tandis que le modèle au point de vue de la police, dans les pays européens, est assez différent dans la plupart des endroits. Là, il y a une gendarmerie qui s'occupe de la police de la route, qui s'occupe du maintien de l'ordre public, d'interventions d'urgence de toute nature. Il y a une police distincte qui s'appelle la police judiciaire qui, le plus souvent, est sous l'autorité des juges d'instruction et qui fait des enquêtes sur des crimes spécifiques.

M. LEGER: M. le Président, à la recommandation no 4, je pense que je suis complètement d'accord avec vous que les écoles qui donnent des programmes d'enseignement et d'entraînement de conduite doivent être suivies et contrôlées par le gouvernement. Je pense que c'est une façon d'assurer la qualité de la future conduite des gens qui apprennent à conduire et que cela soit fait d'une façon sécuritaire et seul un Etat peut le faire. Je pense que c'est une bonne recommandation.

Si on arrive à la recommandation suivante, vous voudriez qu'une révision complète soit faite par le bureau des véhicules automobiles, afin que les permis des conducteurs et chauffeurs soient octroyés périodiquement. A chaque renouvellement de permis, vous pensez ou... Quels sont les examens qui devraient être faits et à quelle fréquence voyez-vous cela? Est-ce que cela ne serait pas onéreux?

M. MAGNAN: C'est-à-dire que cela pourrait être onéreux à un certain moment, mais si on veut baisser le taux de mortalité ou si on veut donner un meilleur service, il y a peut-être lieu de mettre quelques dollars ailleurs pour s'assurer que les conducteurs d'automobile aient toutes les qualités nécessaires pour conduire une automobile. Trop de fois, en tant que policiers, on rencontre ou on intercepte des personnes qui ont des handicaps physiques, soit l'âge, et qui ont leur permis de conduire depuis des années. A ce moment-là, il n'y avait peut-être même pas d'examen de conduite et on a appris à conduire. Aujourd'hui, on lui remet

son permis de conduire, même s'il a 85 ans, il est à moitié aveugle, ou ses réflexes ne sont pas aiguisés.

Je peux vous dire qu'il y a des exemples. Cependant, nous, on croit que le fait de remettre le permis de conduire afin que ce permis soit octroyé périodiquement, qu'il y ait des examens. On ne veut pas dire qu'à toutes les fois qu'un type va renouveler son permis de conduire, il faut qu'il ait un examen complet. On pourrait peut-être penser à dix ans ou à en venir à cinq ans. Ce sera certainement une bonne affaire, parce que c'est une question de santé physique et parfois aussi psychologique.

M. LEGER: Vous voyez cela peut-être à tous les dix ans ou cinq ans, de façon à être capable de vérifier si la personne le mérite, qu'il n'y a pas eu une dégradation...

M. MAGNAN: C'est exactement...

M. LEGER: ... de ses facultés, qu'elles soient visuelles ou physiques.

M. MAGNAN: C'est exactement notre position.

M. LEGER: Maintenant, une dernière question: A la page 16, vous parlez du système de démérite auquel on devrait greffer un système de mérite. Je vois que c'est une bonne préoccupation de la police de ne pas toujours être un organisme punitif, mais qui a aussi des préoccupations de motivation et non pas uniquement une pénalité. Comment la voyez-vous, pour que ce ne soit pas seulement un voeu, mais qu'elle devienne une de mérite, quand vous dites qu'elle doit refléter dans le taux des primes d'assurance à payer? Est-ce que vous voulez dire par là qu'il y a actuellement quelqu'un qui est pris en défaut, qui va perdre deux, trois ou quatre points de démérite? Mais pour qu'il y ait une réduction des assurances, est-ce que vous voyez par là qu'il y aurait des points de donnés au départ — je ne sais pas — et que si, au bout d'une année ou de deux années, il n'y a aucun accident, il serait susceptible d'avoir une ristourne des assurances. Comment voyez-vous que cela fonctionnerait?

M. MAGNAN: Exactement. Ce serait dans le sens que vous avez exprimé, le dernier, où, lorsqu'un type conduit une automobile depuis X années, qu'il ait une réduction de prime, parce qu'il n'a pas eu d'accident. Ce serait une façon de lui donner un sentiment de responsabilité, d'abord à lui-même; et deuxièmement, ceci tombe dans son portefeuille. On touche toujours le monde par la piastre. A ce moment, les polices d'assurance ou les compagnies d'assurance auraient un avantage marqué à promouvoir la sécurité routière et à encourager le public, en général, à porter attention aux règlements et aussi à éviter des accidents, parce que — on le sait pertinemment — parfois il y a certains individus qui pourraient peut-être avoir intérêt à faire des petits accidents qui couvrent un accrochage précédent. A ce moment, si on accorde un système de mérite attaché au système de démérite, il y aurait lieu, pour les compagnies d'assurance, à ce titre, d'encourager les automobilistes à avoir le système de mérite.

M. LEGER: Je pense que votre idée est très bonne et valable. J'ai hâte de voir ce que les compagnies d'assurance vont nous dire cet après-midi. J'ai bien l'impression qu'actuellement, du moins, les primes d'assurance sont basées sur des gens qui n'ont pas d'accident et c'est seulement quand ils en ont qu'ils voient leurs assurances augmenter. Alors, s'ils n'en ont pas et qu'ils doivent avoir une ristourne de prime d'assurance, cela voudrait dire que le taux actuariel des compagnies d'assurance devrait être modifié, puisque, à ce moment, dans les revenus possibles qu'elles ont, elles s'attendent d'avoir des revenus provenant de gens qui n'ont pas d'accident. Si elles s'aperçoivent qu'elles doivent donner une ristourne, il va falloir qu'elles revoient leurs barèmes, je pense.

M. MAGNAN : Evidemment, il va falloir qu 'il y ait un rajustement de taux actuariels, parce que. si les compagnies d'assurance ont comme base un pourcentage donné de types qui n'auront pas d'accident et qu'elles reçoivent automatiquement une prime qu'elles n'auront pas à rembourser, à ce moment, si la prime baisse par les années qui s'accumulent et que les types n'ont pas d'accident, les revenus vont être moindres. Il faudrait qu'elles se reprennent sur ceux qui ont eu des accidents.

M. LEGER: Je vous remercie de votre mémoire et spécialement, pour cette proposition. Nous allons voir, cet après-midi, leur réaction là-dessus, mais je pense que c'est quelque chose qui va de l'avant.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Beauce-Sud.

M. ROY: M. le Président, je vous remercie. Je veux en profiter également, à mon tour, pour remercier l'Association des policiers provinciaux du Québec pour la qualité de son mémoire et pour la franchise et l'objectivité dont elle a fait preuve.

Je tiens également à souligner le fait qu'elle a fait sept recommandations dans son mémoire, qui méritent d'être étudiées, et je pense que ces recommandations méritent que les membres de la commission y portent une attention toute particulière.

J'aimerais attirer l'attention du ministre des Institutions financières, Compagnies et Coopératives qui est responsable des travaux de cette commission ici, qu'il y a eu quand même une chose que je dois regretter ce matin, non pas

comme un accident, mais comme un incident.

Immédiatement après que les policiers provinciaux eurent fait connaître leurs observations, le ministre de la Justice s'est empressé de faire connaître le point de vue de son ministère et des décisions qu'il entendait prendre, etc., ou encore les positions qu'il n'entendait pas modifier. J'estime que les buts des travaux de la commission parlementaire sont d'interroger les représentants des organismes qui se présentent devant nous de façon qu'on ne les place pas dans des situations pénibles, difficiles et qu'ils ne se sentent pas gênés par le ministre responsable. Il y a d'autres ministres qui viendront à l'occasion des travaux de la commission et j'estime qu'il est de la plus haute importance qu'on attache la priorité aux représentants des organismes qui se présentent devant nous de façon à laisser toute la latitude possible à tous les membres de la commission parlementaire d'interroger nos invités et s'il y a lieu — et je pense que cela serait tout à fait normal qu'on le fasse — lorsqu'un organisme aura terminé et que les questions seront terminées, qu'on demande au ministre, suite aux recommandations qui ont été faites...

Je prendrai un exemple, M. le ministre. Si, par exemple, à la suite d'une recommandation ou d'une question qui a été soulignée, ce matin, par l'Association des policiers provinciaux du Québec, le ministre a fait part d'une décision du ministère de la Justice, il est assez difficile pour un député, de quelque côté que ce soit, de la commission, de revenir sur cette question et d'interroger davantage les représentants de l'organisme.

Je le dis sans malice, mais je pense qu'il est important que nous tirions le maximum de renseignements pour l'étude de ces travaux en commission.

M. TETLEY: Permettez-moi tout simplement une mise au point. Tout d'abord, je n'ai pas trouvé de témoin gêné, en commençant pas M. Gauvin, etc., jusqu'à M. Magnan.

De plus, j'ai trouvé certaines remarques ou les remarques des ministres, même pour moi, très intéressantes. Lorsqu'un gouvernement peut discuter ouvertement, je crois que vous avez vraiment la démocratie. Pour ma part, j'ai bien aimé la présentation du ministre de la Justice, ce matin, et celle du ministre des Transports, l'autre jour; parfois, les choses passent au public et ne passent pas au conseil des ministres. Pour moi, c'est intéressant aussi et vous participez aux décisions. Voici la démocratie !

M. ROY: On ne participe pas aux décisions, justement. Nous aimerions peut-être y participer davantage. Je veux quand même apporter une nuance.

M. TETLEY: Gagnez vos élections!

M. ROY: Au niveau des décisions, au niveau des recommandations, on sait que la commission parlementaire n'a pas de pouvoir de décision. Son rôle est de faire des recommandations. J'ai remarqué, par exemple, contrairement à notre collègue, le ministre de la Justice ce matin, que le ministre des Transports a attendu à la fin.

M. TETLEY: Parfait.

M. ROY: II est évident que dans le rapport Gauvin, les premières recommandations qui ont été faites, le premier travail qui a été fait par la commission a été d'étudier le dossier de la sécurité routière.

A ce niveau, évidemment, parmi les sept recommandations que vous avez faites, j'aimerais revenir à la recommandation numéro 5, sur laquelle mon collègue vient de vous interroger. "Qu'une révision complète soit faite par le Bureau des véhicules automobiles afin que les permis des conducteurs et chauffeurs soient octroyés périodiquement."

On se rappellera, qu'il y a quelques années, l'émission des permis se faisait annuellement et qu'il était possible de renouveler nos permis dans les bureaux d'assurance régionaux des différentes régions de la province.

Aujourd'hui, les permis de conduire se renouvellent par période de deux ans.

Je ne parle pas de revenir à des bureaux régionaux parce qu'il est quand même important qu'il y ait un meilleur contrôle d'exercé au niveau de l'émission des permis de conduire. Mais, en supposant qu'on garde le bureau central comme point d'émission des permis, du contrôle des permis, est-ce que vous estimez qu'il est préférable de revenir à la formule annuelle de façon à pouvoir s'assurer d'un meilleur examen annuel, plutôt que de continuer la formule de deux ans telle que pratiquée actuellement?

M. MAGNAN: Non, au contraire, je crois que la formule de deux ans est excellente, même cela pourrait aller à trois ans ou quatre ans, selon la question administrative que cela pourrait soulever.

Actuellement, on octroie des permis automatiquement par la poste. Le premier, on l'a eu avec un examen à 20 ans et, si on a 60 ans aujourd'hui, on va recevoir le même permis, soit 40 ans après, et on n'aura pas posé d'autres questions. Si on n'a pas eu d'accident, s'il n'y a absolument rien qui est survenu... Je peux même être un handicapé et recevoir mon permis de conduire, pour autant que je fais les déclarations écrites en conséquence. Il faut s'en remettre à l'honnêteté de chaque individu.

Ce que nous proposons, c'est une question obligatoire, aviser les détenteurs de permis de conduire depuis 10 ans, et les inviter à revenir devant un examinateur au bureau des véhicules-automobiles pour vérifier de nouveau la situation physique, pour savoir s'ils sont encore aptes à répondre aux besoins d'un conducteur

d'automobile. A la question d'un an ou deux ans, cela nous importe peu.

M. ROY: Le problème ne serait pas là, selon vous. J'aimerais vous poser quelques questions sur quelques recommandations qui ont été faites dans le rapport Gauvin pour connaître votre opinion. Je vais les prendre à tour de rôle et non pas par ordre d'importance. Je vais prendre la recommandation no 7 qui dit: "Que soit implantée au Québec une "loi de bon Samaritain" protégeant les personnes qui portent secours aux victimes d'accidents d'automobile." J'aimerais avoir l'opinion des policiers provinciaux à ce sujet et avoir votre opinion également sur ce que devrait comprendre une loi de bon Samaritain. Selon vous.

M. MAGNAN: La loi du bon Samaritain, pour nous, se présente comme étant une question positive parce que, trop de fois, on a eu l'expérience, dans des accidents, que le citoyen ou l'automobiliste qui arrive à la suite d'un accident ne touche à personne parce qu'il peut y avoir des procédures contre lui par la suite. Il est prouvé que, de fait, il y en a qui en ont eu parce qu'ils ont bougé quelqu'un qui était accidenté. La loi du bon Samaritain pourrait être une chose positive actuellement, dans le contexte social, mais devrait comprendre aussi des points bien spécifiques voulant que celui qui portera action ne soit pas poursuivi en justice parce qu'il aura commis un acte de bon Samaritain. Il faudra le protéger, celui-là aussi, si par hasard, il pouvait y avoir des poursuites civiles ou autres. Qu'il bénéficie alors d'un service public qui lui demande de servir un automobiliste blessé ou accidenté.

M. ROY: Est-ce qu'à la lumière de votre expérience, le fait que cette loi n'existait pas et, à cause du danger de poursuite, il y aurait des vies et des souffrances qui auraient pu être épargnées si cette loi avait existé dans la province...

M. MAGNAN: C'est un point sur lequel il est assez délicat de répondre. Il faudrait que je sois médecin et que j'aie vu chaque victime, mais il reste que l'expérience nous a prouvé que plusieurs personnes laissent les automobilistes accidentés sur le bord de la route sans les toucher. On dit: Ne touchez pas parce que vous allez avoir des problèmes. On attend la police. La police, elle, fait son possible. Si le bon Samaritain était là, peut-être que cela éviterait des blessures plus graves; les vies, là, c'est un autre problème.

M. ROY: La question no 8: "Que soit instaurée dans la province une politique d'inspection sélective obligatoire des véhicules-automobiles, politique qui tienne compte des coûts impliqués par rapport aux bénéfices escomptés", II y a quand même, actuellement, une inspection qui peut se faire sommairement.

M. MAGNAN: Sommairement.

M. ROY: Quelle serait votre position là-dessus et de quelle façon, selon vous, cette politique devrait-elle être organisée?

M. MAGNAN : Dans ce cas, on verrait certainement les policiers du ministère des Transports faire un excellent travail sur la question de la vérification des "minounes" qui se promènent sur les routes de la province. Parce qu'on peut avoir une auto de 1940 et avoir les mêmes possibilités de se promener qu'avec une auto de 1975. Cependant, l'état de l'automobile est beaucoup moins sûr. Il devrait y avoir des inspections automobiles obligatoires dans la province de Québec et ceci devrait être une politique générale dans la province, par le ministère des Transports.

M. ROY: Si cela ne se fait pas davantage actuellement, est-ce que c'est à cause d'un manque d'effectifs, un manque d'équipement au niveau de la Sûreté du Québec?

M. MAGNAN: La Sûreté du Québec fait des inspections de routine. Elle n'est pas équipée pour faire une inspection complète d'un véhicule automobile. Lorsqu'on dit complète, on parle d'alignement, on parle de l'état du véhicule.

On fait une inspection sommaire, les freins, des phares, enfin tout le système qui peut être constaté de visu, sans pour cela avoir des machines à notre disposition. C'est pour ça qu'on verrait des centres d'inspection dans la province pour vérifier l'état général d'un véhicule.

M. ROY: Selon vous, ça s'impose de toute urgence?

M. MAGNAN: De toute urgence.

M. ROY: Relativement à la recommandation no 10 concernant le port obligatoire de la ceinture de sécurité dans les véhicules, est-ce que vous estimez que cette mesure devrait être obligatoire?

M. MAGNAN: Non, parce que je ne vois pas pourquoi on mettrait en vigueur une loi qu'on ne serait pas capable d'appliquer. Il est très difficile pour un policier de constater si un automobiliste n'a pas sa ceinture de sécurité, il faudrait pratiquement qu'il y ait un feu rouge allumé sur le toit lorsqu'il ne l'a pas, ou qu'il soit éteint lorsqu'il l'a. Encore là, on aurait des problèmes à savoir si la lampe est brûlée ou non. Je crois que c'est une question d'éducation, tel que le ministère des Transports est en train de faire, soit sensibiliser le public à se servir de sa ceinture de sécurité. Si l'automobiliste ne s'en sert pas, s'il a des problèmes par la suite, ce sera son problème personnel. On ne peut vraiment pas forcer quelqu'un à ne pas se

tuer. On peut le conseiller de ne pas le faire, mais s'il croit que ce n'est pas nécessaire, je ne pense pas qu'une loi vienne corriger le problème.

M. ROY: En somme, vous estimez que ce ne serait pas une bonne chose d'avoir une loi obligatoire dans ce sens?

M. MAGNAN: Non, parce qu'il y aurait aussi la question de poursuite civile, tous les moyens pourraient être bons. Prenons comme exemple un type qui prendrait son véhicule pour aller chercher un paquet de cigarettes et il ne met pas sa ceinture de sécurité; il se fait heurter par un type qui a les facultés affaiblies en haut de 0.08 et il y aurait encore le problème, suite à une procédure civile intentée, parce qu'il n'aurait pas sa ceinture de sécurité. Dans le fond, on sait pertinemment que ce n'est pas celui qui n'a pas sa ceinture qui serait en tort, alors que l'autre pourrait être poursuivi pour beaucoup et bénéficierait de la clémence du tribunal.

M. ROY: Est-ce que, selon vous, la ceinture de sécurité, constitue une sécurité absolue en cas d'accident dans les véhicules automobiles?

M. MAGNAN: Ce n'est pas absolu, c'est relatif.

M. ROY: C'est relatif.

M. MAGNAN: Parce qu'on a déjà vu des morts attachés.

M. ROY: Je vais vous poser une question d'opinion personnelle, mais j'estime qu'il n'y a personne qui est mieux placé que les gens de la Sûreté du Québec pour y répondre. Est-ce arrivé parfois qu'à cause de la ceinture de sécurité, il y aurait eu des morts, si les passagers n'avaient pas été attachés? Je fais allusion à une collision dans laquelle il y a un incendie immédiat?

M. MAGNAN: Je n'ai pas d'exemple personnel montrant que le fait d'avoir été attaché a provoqué la mort parce que le conducteur n'a pu se détacher.

M. ROY: Vous n'avez aucun...

M. MAGNAN: On n'a pas d'exemple.

M. ROY: ... exemple. La recommandation no 17, "Que soit reconnue comme une priorité en matière de sécurité routière, une surveillance constante et vigilante des routes de la province par un corps policier qualifié". On en a discuté tout à l'heure, le ministre de la Justice en a parlé, vous avez émis des opinions là-dessus. Quels seraient les effectifs nécessaires, selon vous, au niveau de la Sûreté du Québec, pour être en mesure — je ne parle pas de donner une sécurité absolue, c'est une chose impensable — de donner un maximum de sécurité qui serait souhaitable dans la province actuellement? Quels seraient les effectifs nécessaires à la Sûreté du Québec par voie de comparaison par rapport à la population de l'Ontario? J'aimerais avoir des chiffres. On a parlé tout à l'heure de l'Ontario, quel est le nombre de policiers provinciaux, on a parlé de la question de juridiction fédérale, les subventions avec le fédéral, j'aurais des observations à faire là-dessus, mais ce n'est pas là-dessus...

M. CHOQUETTE: Vous savez que M. Réal Caouette m'appuie.

M. ROY: Je n'ai pas posé la question et je n'ai pas dit le contraire.

M. CHOQUETTE: Mais moi, je tiens à vous le dire. Réal Caouette est plus coopératif que le député de Beauce.

M. ROY: Un instant, je vous appuie là-dessus, M. le ministre. Je vous appuie là-dessus. D'ailleurs, j'estime — je pense que c'est bien important que ce soit dit — que le Québec ait tous les pouvoirs nécessaires pour assumer ses responsabilités et qu'il y ait un partage équitable en toute justice entre les deniers qui sont consacrés à cette fin. Le ministre a dû recevoir des mémoires et des lettres qui m'ont été envoyés par les conseils municipaux et les conseils de mon comté indiquant que j'ai appuyé fortement la position du ministre à ce sujet de façon qu'il ait un bon dossier pour aller à Ottawa et de façon à se faire entendre.

M. CHOQUETTE: Je l'apprécie. Je l'apprécie.

M. ROY: Je pense que le ministre devrait corriger les propos qu'il vient de tenir lorsqu'il disait que je n'étais pas un bon collaborateur.

M. CHOQUETTE: Vous êtes un pas mal bon collaborateur, quand vous voulez.

M. ROY: Je remercie le ministre de la Justice. Pour en revenir à la question — et c'est une dernière question que je pose — Quels seraient les effectifs nécessaires pour avoir à peu près l'équivalent, au niveau de la sécurité routière, de façon que vous puissiez faire un travail — je n'aime pas beaucoup la comparaison que je vais faire, mais je pense que, dans les circonstances, elle s'impose — en comparaison avec l'Ontario, comme tel?

M. MAGNAN: Si on prend l'exemple de l'Ontario, ils sont environ 4,000 policiers provinciaux eux aussi. Cependant, ils ont d'autres organismes, qui s'apparentent avec le ministère des Transports, où ils sont environ 2,000. Nous, au Québec... Au ministère des Transports, il y a

125 inspecteurs, je crois, sur les routes et nous, nous sommes environ 4,000, ou un peu plus.

Si on doublait la patrouille à la Sûreté du Québec, il faudrait pratiquement penser à 1,000 membres de plus, au départ. Il y a 172 unités qui travaillent dans la Sûreté du Québec sans compter qu'il y a 1,300 véhicules. C'est toujours relatif, une réponse à une question semblable, parce que tout dépend aussi du service qu'on veut. Il y a des régions de la province, notamment en Gaspésie, où mettre deux véhicules automobiles dans un rayon de 60 milles serait peut-être trop. Qu'il y en ait un au départ, c'est déjà suffisant, parce que le nombre d'incidents ou d'accidents n'est pas élevé.

Si on prend le boulevard Métropolitain, alors qu'il y a six automobiles en patrouille, on peut se poser des questions. Si on veut améliorer le service, il faudra peut-être en mettre douze, tout dépend un peu du but que l'on poursuit. Les 1,000 peuvent devenir 1,500, remarquez bien. Mais plus nous serons, meilleur sera le service.

M. ROY: Maintenant, comment expliquez-vous le fait, si vous avez à peu près les mêmes effectifs que l'Ontario — je fais abstraction, par exemple, des effectifs qui sont mis à leur disposition par le ministère des Transports — je reviens au tableau 3 de la page 89 du rapport Gauvin, que le Québec se situe au plus bas niveau, ou presque — c'est Terre-Neuve qui est au plus bas, mais c'est assez difficile de faire des comparaisons entre Québec et Terre-Neuve, puisque le contexte n'est pas le même du tout — comment expliquez-vous le fait que c'est le Québec qui est le plus bas au niveau des infractions routières?

M. MAGNAN: C'est un ensemble de faits. Il y a une question sociale d'abord, parce qu'au Québec, ce sont des Québécois, ce ne sont pas des types qui demeurent dans d'autres provinces. Comme on le disait tantôt, il y a peut-être un défoulement social qui se fait lorsqu'on arrive sur les routes du Québec. On se défoule, on appuie sur l'accélérateur.

Maintenant, des policiers, on n'en trouve pas à tous les coins de rue pour les arrêter. Il ne peut pas y en avoir à tous les coins de rue ou à tous les milles. Si on dit que les statistiques démontrent qu'il y a plus d'accidents, on peut dire aussi que les statistiques démontrent qu'il y a eu plus de rapports d'infraction.

Mais lorsqu'on regarde l'Ontario, on prend toutes les fins de semaine les statistiques. Le Québec n'est jamais bon premier dans les accidents de la route, c'est toujours l'Ontario, du moins dans ces années-ci. Or, on peut dire qu'on a gagné du chemin, même si nous sommes proches de la tête. C'est un avantage, il faut descendre au lieu de monter; c'est contraire à ce qu'on doit faire normalement. Normalement, on cherche la tête, mais là, il faut chercher le plus bas possible.

Maintenant, nous étions peut-être dans les pires auparavant, dans les années 1969, 1970, 1971, tel que nous le décrit le rapport, mais si on refaisait les statistiques 1972, 1973 et 1974, on pourrait peut-être dire que le rapport n'est plus à jour.

M. ROY: C'est vrai, on doit quand même admettre qu'il s'agit d'un rapport qui a été publié et qui donne les chiffres de 1969, 1970 et 1971. Alors, vous pouvez nous certifier ce matin qu'il y a eu une forte amélioration de ce côté-là.

M. MAGNAN: Evidemment...

M. ROY: Lorsque je dis amélioration, c'est une amélioration au niveau de la surveillance.

M. MAGNAN: Amélioration au niveau de la surveillance, amélioration au niveau de l'effectif, parce qu'on était 3,000 policiers en 1969.

M. CHOQUETTE: Puis-je m'interposer dans cette discussion, M. le député, avec votre permission?

M. ROY: Oui.

M. CHOQUETTE: Ajoutez peut-être un élément à vos connaissances. Je regarde ce tableau-là et je le trouve extrêmement dangereux au point de vue de l'interprétation. Voici ce qu'on voit. Tableau 3: Taux d'infractions à la circulation prévues au code criminel par 100,000 habitants âgés de 16 ans et plus, 1969, 1970, 1971.

Or, c'est simplement des infractions prévues au code criminel. Quelles sont-elles les infractions prévues au code criminel dans le domaine de la route? C'est conduite en état d'ivresse, conduite dangereuse, si je me rappelle, M. Magnan...

M. MAGNAN: Conduite...

M. CHOQUETTE: Facultés affaiblies.

M. MAGNAN: Facultés affaiblies, conduite dangereuse ou délits de fuite...

M. CHOQUETTE: Délits de fuite.

M. MAGNAN: Cela ressemble passablement à cela, cela revient à cela.

M. CHOQUETTE: Or, M. le député, savez-vous qu'un certain nombre de ces infractions contenues au code criminel sont d'ailleurs contenues au code de la route et qu'il arrive très fréquemment que la police, au lieu de porter des accusations en vertu du code criminel, porte la même accusation en vertu du code de la route, par exemple: délit de fuite, facultés affaiblies, conduite en état d'ivresse.

Vous n'avez pas toute l'image ici des accusations portées par la police pour un certain nombre d'infractions au code de la route, c'est-à-dire des infractions en matière routière, en vertu du code criminel.

Moi, je dis que ce tableau est extrêmement suspect au point de vue des conclusions qu'on peut en dégager. C'est pour cela que je n'y ai pas tellement donné d'importance quand j'ai interrogé M. Magnan au début. Moi, je voudrais vérifier pour savoir quelle est l'image totale par rapport aux accusations portées en vertu du code de la route qui devraient s'ajouter à celles qui sont prévues à ce tableau. Il n'est pas convaincant pour moi, du moins à prime abord.

M. ROY: Est-ce que le ministre veut dire, à ce moment, que le rapport Gauvin aurait dû faire un tableau plus complet pour nous donner une image complète?

M. CHOQUETTE: C'est évident, parce qu'on parle seulement des infractions en vertu du code criminel, mais je connais beaucoup de policiers qui, pour ne pas, en fait, entacher le dossier d'une personne qui est accusée, ne porteront pas d'accusation en vertu du code criminel, mais vont porter la même accusation en vertu du code de la route et la personne qui est condamnée ou qui plaide coupable aura une condamnation pour le même montant d'argent ou pour un terme de prison, si le juge l'impose, mais elle n'aura pas de dossier judiciaire. Tandis que si l'accusation est portée en vertu du code criminel, il y a un dossier judiciaire qui s'ensuit et il y a beaucoup de gens qui commettent des infractions au code criminel en matière routière qui ne sont pas des criminels comme tels et qui ne méritent pas qu'ils soient affublés d'un dossier judiciaire pour une période de cinq ans, jusqu'à ce qu'il s'efface par l'effet de la Loi des casiers judiciaires.

Moi, je dis de ne pas prendre plus au sérieux qu'il ne le faut ce tableau. Je pense qu'il faudrait vérifier les chiffres et aligner ce qui s'est fait au point de vue du code de la route et on pourrait peut-être avoir une image totale.

M. ROY: Je pense que la distinction que le ministre vient de nous apporter s'imposait, mais je pense quand même, puisque ce serait important pour les membres de la commission et pour tout le monde, qu'il y aurait peut-être lieu, si c'est possible — et je m'adresse au ministre à ce moment — qu'on nous fournisse des statistiques à ce sujet.

M. CHOQUETTE: Je vais faire tout mon possible pour obtenir les statistiques dans le domaine des infractions constatées en vertu du code de la route ou du code criminel pour qu'on ait une image totale de la situation pour les deux dernières années.

M. ROY: Cela va être encore relatif, parce que le ministre ne peut pas nous fournir les chiffres des autres provinces.

M. CHOQUETTE: Non, je ne pourrai probablement pas avoir les chiffres des autres provinces, quoique...

M. ROY: Cela va être assez difficile de faire des comparaisons quand même.

M. CHOQUETTE: Oui, cela peut être assez difficile de faire des comparaisons. Mais, en fait, je vais essayer d'avoir des documents un peu plus complets que ce qu'on fournit ici, comme tableau 3, dans le rapport.

M. ROY: En guise de conclusion, M. Magnan, j'aurais une question peut-être d'appréciation ou d'opinion personnelle à vous demander. Avec une meilleure sécurité routière, selon les objectifs ou les buts que vous poursuivez et les effectifs que vous voulez avoir, le système que vous aimeriez implanter, est-ce que vous avez fait une étude sommaire ou un genre de projection, si vous voulez, sur les réductions éventuelles du nombre d'accidents dans la province de Québec, compte tenu de ce qui pourrait et de ce qui devrait être corrigé, sans avoir le système parfait, mais, autrement dit, en appliquant certaines mesures qu'on estime importantes et urgentes?

M. MAGNAN: On n'a fait aucune étude dans ce sens. D'ailleurs, cela relève beaucoup plus du ministère de la Justice, étant donné les moyens qu'il peut disposer éventuellement, parce que c'est toujours une question monétaire, l'engagement des hommes en regard des véhicules automobiles et de l'équipement général.

On sait pertinement que s'il y avait plus de vérification ou plus de présence policière sur les routes du Québec, il y aurait certainement lieu de croire pour nous que le public pourrait profiter de la situation dans le sens qu'il pourrait peut-être suivre les lois un peu plus.

Je ne dis que c'est au nombre de véhicules de police que le public va automatiquement observer les lois.

M. ROY: En somme, il y aurait possibilité de réduire le nombre d'accidents et, de ce fait, en réduisant le nombre d'accidents, évidemment, une diminution du coût de l'assurance-automobile au Québec.

M. MAGNAN: C'est possible.

M. ROY: Je vous remercie, M. Magnan.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Portneuf.

M. PAGE: Seulement une brève question, M. le Président. Vous avez parlé, M. Magnan, beaucoup d'équipement, de présence policière

sur nos routes. Est-ce que vous avez fait l'étude, à savoir combien vous avez de véhicules de la police pour la patrouille de la surveillance comme telle, par mille de route, ou par nombre de véhicules québécois, comparativement à d'autres provinces?

M. MAGNAN: Non, on n'a pas ces études. D'ailleurs, la Sûreté du Québec non plus, je ne crois pas qu'elle ait fait d'études semblables. Si elle en a fait, je ne le sais pas. On n'a aucune statistique qui peut démontrer combien on a de véhicules en service, prenant en considération le nombre de milles à patrouiller ou le nombre de membres en service, prenant en considération la population à servir. Maintenant, il n'y a pas de proportion là-dessus encore d'établie.

M. PAGE: Est-ce que cela pourrait physiquement être donné, est-ce que cela pourrait être fait?

M. MAGNAN: Cela pourrait se faire en prenant les statistiques de la Sûreté du Québec.

M. PAGE: M. le ministre ne pourrait pas nous les fournir non plus?

M. CHOQUETTE: Les statistiques? ... J'étais distrait.

M. PAGE: Je vous comprends. Il reste le député de Beauce, vous pensiez au gouvernement fédéral.

M. CHOQUETTE: Les statistiques.

M. PAGE: Le nombre de véhicules de la Sûreté du Québec par mille de route au Québec ou par nombre de conducteurs québécois.

M. TETLEY: En comparaison avec les autres...

M. CHOQUETTE: Oui, je peux essayer d'avoir les chiffres.

M. MAGNAN: II y a environ 2.5 millions de véhicules au Québec.

M. PAGE: De véhicules automobiles au Québec.

M. MAGNAN: II y a 44,000 milles de route. Alors c'est fait.

M. PAGE: Vous avez parlé tout à l'heure, vous n'êtes pas le seul à en parler, d'une constatation, à savoir que lorsque les gens arrivent soit dans le Maine ou en Ontario, ils ont un comportement bien différent de leur comportement sur les routes québécoises, ici. Vous en avez parlé, mais en tant que policier, qui êtes continuellement avec le conducteur, c'est vous qui avez à le rencontrer, comment expliquez-vous ce fait? Est-ce parce qu'on n'est pas soucieux du règlement, ou si on n'est pas soucieux de la loi? Est-ce que les policiers ont la bonne renommée d'être trop gentilshommes, ou quoi?

M. MAGNAN: II y a peut-être aussi, comme je le disais tantôt, la question que lorsqu'on est au Québec, les causes de la route passent assez facilement en cour. Les rôles sont chargés, les juges ont beaucoup de travail. Alors, la question route, accusé de 70 milles à l'heure, 80 milles à l'heure, d'accord, amende minimum, et cela passe. Peut-être que le sérieux de l'application du code de la route serait à réévaluer; tandis que si on va dans d'autres provinces, on sait que si on se fait arrêter, on y passe.

M. PAGE: Vous avez glissé un mot aussi dans votre mémoire, si je ne me trompe pas, au sujet de la pénurie des juges, est-ce que ce serait encore à l'heure...

M. MAGNAN: Pardon?

M. PAGE: Vous avez mentionné la pénurie des juges, où le juge n'était pas...

M. MAGNAN: Oui, c'est cela. Cela va en relation directe avec la question de l'application du code de la route.

M. PAGE: Est-ce que vous préconiseriez un tribunal spécifique et particulier, ou qu'on laisse cela aux Sessions de la paix?

M. MAGNAN: Pour ce qui nous concerne, on aimerait bien avoir des juges disponibles qui s'occuperaient des questions de la route d'une façon permanente.

M. PAGE: C'est bien de le soumettre au ministre de la Justice.

M. CHOQUETTE: ... il n'a pas dix ans de pratique.

M. PAGE: Pas encore.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Trois-Rivières.

M. BACON: M. Magnan a répondu déjà à ma question. C'était justement sur la précision de son mémoire à la page 2, soit la revalorisation du code de la route dans les tribunaux. C'est ce que vous vouliez mentionner, j'imagine?

M. MAGNAN: C'est exactement cela. M. BACON: Merci.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Bellechasse.

M. MERCIER: M. le Président, j'aimerais tout d'abord peut-être apporter des précisions, suite aux commentaires de M. Magnan, lorsqu'il a fait état tout à l'heure de l'émission des permis de conduire et du rappel des détenteurs de permis. Je pense qu'il y aurait lieu de préciser que maintenant toute personne âgée de 70 ans et plus est rappelée automatiquement pour un nouvel examen, un examen de contrôle, ainsi que tous les chauffeurs affectés au transport public, autobus d'écoliers, chauffeurs de taxi et d'autres. Egalement, les personnes qui possèdent, au Bureau des véhicules automobiles, un dossier médical sont appelées pour un nouvel examen. J'endosse cependant son commentaire, soit peut-être d'amplifier cette action d'examen périodique; mais il est bon que la population sache tout de même qu'il y a des catégories de chauffeurs qui sont rappelés périodiquement pour des examens de contrôle. Je voudrais également mentionner, suite aux statistiques qui sont rapportées, particulièrement au cours des années antérieures, au niveau des dix provinces canadiennes. Si on fait une comparaison avec l'Ontario, jusqu'à il y a deux ans, si ma mémoire est fidèle, l'Ontario rapportait au bureau fédéral de la statistique tous les accidents aec dommages matériels de plus de $200, alors que le Québec rapportait les accidents de $100. et plus.

Cela pouvait faire également une distinction appréciable sur le nombre d'accidents qu'on avait à déplorer au Québec, comparativement à l'Ontario. Je ne veux pas atténuer par là les tragédies routières du Québec, loin de là. Sauf que je pense que cela fait tout de même un pourcentage appréciable, comparativement aux statistiques de l'Ontario sur le nombre d'accidents survenus dans notre province, comparativement à ceux survenus dans la province de l'Ontario. Je pense que maintenant, les rapports sont corrigés et que le Québec rapporte maintenant uniquement les accidents de $200 et plus au bureau fédéral de la statistique. Cela peut faire toute une différence sur le nombre de tragédies ou d'accidents routiers au Québec.

M. le Président, j'aimerais revenir sur une question qui a été discutée avec M. Magnan par mes collègues, mais à laquelle nous avons fait allusion aussi la semaine dernière, concernant la patrouille routière. Je suis d'avis, comme l'a exprimé M. Magnan, qu'il y aurait place pour des effectifs additionnels au niveau de la Sûreté pour accentuer la patrouille routière.

La question est à savoir si, dans le cadre actuel des opérations policières de la Sûreté du Québec, il y aurait possibilité d'améliorer immédiatement la patrouille routière à l'intérieur même, actuellement, des effectifs de la Sûreté. On m'a rapporté dans le passé que depuis les modifications de structures à la Sûreté du Québec, suite, je pense, au rapport Ducharme, le policier est appelé à faire, évidemment, toutes sortes de choses, du judiciaire et de la patrouille routière, un peu de tout. Cela a pour effet également que dans un poste de la Sûreté du Québec, dans une région donnée, si vous avez un effectif de 24 policiers qui travaillent sur trois équipes, donc cela veut dire huit policiers par équipe, et qu'il arrive, à un certain moment, que deux ou trois policiers soient retenus en cour pour aller témoigner, qu'un tombe malade et que l'autre soit retenu au poste pour l'administration, cela a pour effet de créer la situation que, pendant X heures ou X jours, il peut y avoir la proportion d'un policier, un policier et demi qui va faire de la patrouille routière dans un secteur. Ce n'est pas évidemment la faute des policiers. Ce n'est pas la faute, non plus, des dirigeants, mais c'est une situation de fait qui occasionne justement ce que l'on déplore tous ce matin, l'absence de patrouilles routières au Québec.

On a entendu le ministre de la Justice dire tout à l'heure qu'il ne voyait pas le bien-fondé ou la nécessité d'un "Highway Patrol" indépendant de la Sûreté. Vous avez apporté le commentaire que pour une plus grande efficacité policière, vous verriez d'un bon oeil, évidemment, un corps policier ou une action policière unifiée, incluant la patrouille routière. Mais est-ce que vous êtes d'avis que s'il y avait — sans revenir avant les années soixante, à une police provinciale, à une police de la route comme telle — possibilité de créer une unité affectée, disons, particulièrement à la patrouille routière, en ayant des provisions, des coordonnées qui pourraient permettre une relation peut-être plus étroite avec les autres factions du corps policier, pour une plus grande efficacité opérationnelle. Cette unité se spécialiserait dans une surveillance routière au sein même des effectifs de la Sûreté, pour non seulement assurer la présence de patrouilleurs routiers sur les routes du Québec, mais aussi, à titre de service pour tout le tourisme étranger, que ce soit également pour les indications ou pour les premiers soins à accorder aux blessés lorsqu'un accident survient.

M. MAGNAN: La question pourrait évidemment être réétudiée au point de vue de la régie interne ou de l'application du travail policier au niveau de la Sûreté du Québec. Cependant, j'admets, comme vous, que la question de subpoena, d'exécution de mandat d'arrestation, le fait d'aller à la cour durant de longues journées et souvent c'est remis au lendemain... Ce sont toutes des questions qui viennent sur le tapis au point de vue de la régie interne. De fait, le policier, lorsqu'il est à cet endroit, n'est pas à l'autre endroit. Mais cependant, de là à former, à l'intérieur de la Sûreté du Québec, un genre de division qui dirait: Ce sont des polices de la route, ce sont des enquêteurs ou des détectives, nous, on est très restreint sur cette question.

On aimerait mieux que le policier de la Sûreté du Québec coopère lorsqu'un poste, un détachement donné, que cela soit la Sûreté du Québec, avec les policiers de la route, mais au

point de vue interne, réviser certaines questions comme, par exemple, lorsqu'il y a des subpoenas à faire livrer, qu'un le fasse et non pas qu'on dégarnisse la route pour le faire. Lorsqu'un type est appelé à aller à la cour, qu'on le remplace, mais qu'on mette les priorités sur la patrouille. Si parfois le patrouilleur est appelé à la cour, on délaisse un peu la route.

M. MERCIER: C'est une situation de fait, actuellement?

M. MAGNAN: Actuellement.

M. MERCIER: Certaines zones sont complètement dépourvues de patrouilleur routier.

M. MAGNAN: Oui. Mais ce n'est pas la question. Ce n'est pas la faute du ministère de la Justice.

M. MERCIER: Non, d'accord.

M. MAGNAN: C'est une question de régie interne, d'application d'un règlement interne. A ce moment, c'est une nouvelle philosophie qu'il faudrait que la Sûreté du Québec emploie, c'est-à-dire: Sur la route, cela prend X patrouilleurs au minimum et il faut s'assurer qu'ils y soient. Si les patrouilleurs attitrés sont appelés, il faudrait les remplacer par d'autres, ce qu'on ne fait pas actuellement vu le manque d'effectifs.

M. MERCIER: A combien estimez-vous la nécessité d'augmenter les effectifs pour assurer, justement, une patrouille routière efficace?

M. MAGNAN: Lorsqu'on considère qu'il se fait aux environs de $6 millions à $7 millions de temps supplémentaire par année aux membres de la Sûreté du Québec, il faut croire qu'il en manque.

M.MERCIER: Quel est le nombre d'heures de travail du policier?

M. MAGNAN: 2,080 heures par année.

M. MERCIER: Hebdomadairement?

M. MAGNAN: 40 heures.

M. MERCIER: 40 heures.

M. MAGNAN: Cinq jours de huit heures.

M.MERCIER: Est-ce qu'il a été question que le policier puisse être exempté d'aller en cour pour des causes de la route?

M. MAGNAN: Actuellement, il y a une grosse amélioration sur ce point. Les policiers ne sont plus appelés à aller témoigner sur les causes de la route, pour un feu rouge brûlé, etc.

M. CHOQUETTE: Oui. Actuellement, s'il y a une infraction au code de la route qui est reprochée, le rapport du policier fait preuve, à moins que l'avocat de la défense insiste pour la comparution du policier. Alors, ceci nous a permis de réduire considérablement le nombre de présences de la police en cour et donc, laisser plus de temps disponible pour faire le travail de la police. C'est un amendement qui a été apporté au code de la route il y a environ deux ans et demi.

M. MAGNAN: Cela a amélioré énormément le travail du policier à ce point de vue parce que des infractions au code de la route, il y en a.

M. MERCIER: J'aurais une dernière question relativement au système de points de démérite. J'aimerais demander à M. Magnan si, par l'entremise de ses membres, il a constaté, depuis l'avènement du système de points de démérite dans toute la province, depuis sa mise en application, une amélioration du comportement du conducteur québécois sur les routes du Québec.

M. MAGNAN: Malheureusement, cela n'a pas été une amélioration. Lorsqu'un individu a un bon véhicule, il court le risque de déguerpir au lieu d'avoir quatre points à perdre. C'est arrivé. A ce moment, il faut qu'il y ait une interception, une identification possible, positive et cela devient un problème.

Cependant, peut-être que d'autres ont réagi autrement, mais ce que nous constatons, c'est qu'il y a des individus qui vont se servir de la vitesse pour éviter les quatre points.

M. MERCIER: Est-ce que vous avez déjà considéré la possibilité de recommander, éventuellement.. J'aimerais avoir votre opinion là-dessus. Est-ce que vous seriez enclins à imiter certains Etats américains qui obligent l'automobiliste qui commet une infraction au règlement de la circulation à payer immédiatement, sur le champ, les amendes prescrites par la loi?

M. MAGNAN: Au Québec, on aimerait avoir la même application que lorsqu'on va dans d'autres provinces et qu'on se fait appliquer ce règlement.

M. MERCIER: Je vous remercie M. Magnan.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le ministre des Institutions financières, Compagnies et Coopératives.

M. TETLEY: J'ai bien aimé votre intervention lorsque vous avez parlé de nouvelle philosophie pour les conducteurs. Tout le monde croit que c'est un droit de conduire sur nos routes. C'est plutôt un privilège. Ce n'est pas un droit de conduire à toutes les vitesses sur nos routes.

J'ai une lettre ici que j'ai reçue très récemment, datée du 7 octobre, de quelqu'un de l'est de Montréal qui me dit qu'il a perdu son permis à cause de trois infractions. Il se croit lésé. Il croit qu'il a perdu ses droits. A mon avis, il n'avait aucun droit. C'est un privilège de conduire sur nos routes.

Je vais lire cette lettre pour le dossier. "M. Tetley, je suis représentant des ventes pour la compagnie X depuis deux ans. — Je ne donne pas le nom de la compagnie — A la suite de trois infractions au code de la route (vitesse indue), j'ai été avisé que mon permis de conduire était suspendu depuis le 20 septembre 1974 jusqu'au 20 décembre 1974. Cette suspension résulte de la perte de douze points de démérite. Avec la perte du privilège de conduire ma voiture, je ne peux plus continuer à gagner ma vie. Après avoir discuté avec mon patron de cette situation, il m'a accordé trois semaines pour rétablir ma situation, sinon il serait dans l'obligation de demander ma démission. Etant un homme travaillant, qui ne veut pas — si je peux lire l'original — vivre aux crochets de la société ou de l'assurance-chômage à cause de cette situation, n'y aurait-il pas possibilité de m'aider afin que je puisse continuer à travailler? Je vous remercie à l'avance et j'espère que ma situation pourra se rétablir à temps".

Ma question est la suivante: Qu'est-ce que je devrais faire si j'avais le pouvoir de régler ce cas?

M. MAGNAN: Premièrement, je suis convaincu d'une chose, s'il s'est fait prendre trois fois, il a manqué au règlement plus de trois fois. Il est encore chanceux de ne pas avoir perdu 24 points ou 36 points, parce qu'il aurait pu le perdre avant, son permis de conduire.

M. CHOQUETTE: C'est votre subconscient de policier qui parle.

M. MAGNAN: C'est regrettable. D'ailleurs, c'est une question qui revient sur la table tous les jours, je crois bien, pour vous, d'avoir des demandes semblables. C'est comme quelqu'un qui a un accident, il ne veut jamais l'avoir, mais lorsqu'on va chercher ses plaques et son permis de conduire, nous, les policiers, nous avons la même demande: Etes-vous capables de m'arran-ger cela? C'est bien dommage, les douze points sont perdus, l'accident a eu lieu, vous n'aviez pas d'assurance, la loi est là, on l'applique. Ce serait bon d'être bon envers tout le monde, mais il faudrait jeter de côté toutes les lois et juger au mérite. Vu qu'on n'a pas tous le même jugement, je pense que tout le monde aurait raison.

M. TETLEY: Merci. Je vous remercie, au nom de tous les députés, de votre présence.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable...

M. TETLEY: Au nom du ministre des Transports.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): ... du ministère des Transports.

M. BERTHIAUME: Etant donné que le ministère des Transports est mis en cause assez fréquemment dans cette partie du rapport Gauvin, et j'imagine aussi par les intervenants, j'aimerais apporter quelques brefs commentaires. Après l'analyse du rapport Gauvin, quant à ses constatations au sujet des lacunes au Québec en sécurité routière et après avoir lu ces 18 recommandations, il y a lieu de se demander ce que nous, aux Transports, nous devons faire dans l'immédiat. La partie traitant de la sécurité routière, quoiqu'elle ait des conséquences sur le coût de l'assurance-automobile, n'est en rien reliée au régime d'assurance-automobile comme tel que le gouvernement pourrait choisir d'instaurer. Le triste diagnostic posé au domaine de la sécurité routière exige que nous agissions rapidement. En conséquence, le ministère des Transports a commencé à faire un inventaire des différents règlements qui pourraient être adoptés pour essayer de pallier cette situation. Nous sommes actuellement à essayer d'en établir le coût-bénéfice.

J'aimerais, pour l'information des députés qui ont posé des questions sur le sujet, au moins vous donner la liste des choses que nous sommes à considérer. Des règlements pourraient être formulés ou reformulés sur les sujets suivants: la bicyclette, la minimoto et la motocyclette. Comme vous le savez, on a déjà fait quelque chose dans ce domaine et je pense bien que, là-dessus, le Québec est à l'avant-garde. Mais nous sommes quand même prêts à reconsidérer et à reformuler la loi que nous avons adoptée dans ce domaine.

Egalement, les écoles de conduite, les pièces de remplacement, les garagistes... je reviens à une des questions, lorsqu'on a parlé d'inspection périodique des voitures, sur le plan de l'administration d'un tel programme, il faut reconnaître les énormes difficultés administratives. Parce qu'il faut avoir un très grand nombre de centres d'inspection dans la province pour ne pas demander à l'automobiliste d'être obligé de faire 50, 60, ou même dans certains coins de la province, 150 milles pour faire inspecter sa voiture, annuellement ou tous les deux ans. Pour cette raison, nous sommes à considérer la certification des garages, garages du coin. Vous pouvez imaginer assez facilement la difficulté qu'on peut avoir à faire cette certification parce qu'on tombe dans le domaine du travail et ça demanderait un rapport du ministère du Travail pour certifier non seulement les garages, mais les garagistes et les mécaniciens. On peut se poser la question à savoir jusqu'à quel point il y a un nombre suffisant de mécaniciens compétents et bien répartis sur le territoire pour

vraiment mettre en application un système comme celui-là.

Je ne dis pas ces choses pour éviter la question, mais pour en illustrer la difficulté sur le plan de l'administration. Parce qu'on a beau adopter une loi, comme je l'ai déjà dit à une autre occasion, il faut pouvoir appliquer cette loi. On peut résoudre un problème politique au niveau de l'opinion publique en disant qu'on a voté une loi, mais si cette loi n'a pas les effets désirés, on n'a pas réglé le problème. Quant aux commerçants d'automobiles également, j'ai parlé de la conformité mécanique des véhicules, modification au système de points de démérite afin de le rendre plus efficace, réglementation des ambulances, ceinture de sécurité, contrôle des distributeurs des pièces d'automobile...

Je dois dire que cette liste n'est pas exhaustive, il y en a d'autres, mais les domaines que je viens de nommer sont ceux où on peut agir d'une façon immédiate.

Un autre commentaire concernant le rapport Gauvin, soit une des choses frappantes dans ce rapport, aux yeux du ministère des Transports, c'est cette constatation que 89 p.c. et plus des accidents sont considérés, selon les membres de la commission Gauvin, comme étant dûs au chauffeur lui-même. Je ne dis pas ces choses parce qu'il faut négliger l'automobile ou les réparations ou l'inspection, mais cette constatation de la commission Gauvin est vérifiée par la constatation d'autres recherches qui ont été faites dans le domaine, notamment en Grande-Bretagne et en Australie, je crois, ou encore dans différents pays d'Europe. On est porté à croire que le problème en Amérique est semblable à celui des pays d'Europe. Nous croyons qu'à moyen terme et à long terme, ce qui importe le plus, c'est d'intensifier l'éducation de l'automobiliste lui-même. Mon opinion personnelle, c'est qu'il faudrait le faire en bas âge, soit à l'âge de 5 ans, 6 ans, 7 ans ou 8 ans où on développe vraiment la mentalité de l'éventuel chauffeur d'automobile. On a parlé beaucoup du tempérament latin au Québec comme étant la cause de notre façon de conduire, de nos mauvaises habitudes; c'est une excuse qui est peut-être convenable et qui est peut-être même vraie, je ne le sais pas. Par contre, si on veut agir d'une façon des plus efficaces et non pas d'une façon strictement politique, je pense qu'il faut considérer une action assez dynamique dans le domaine de l'éducation. Je verrais ça au niveau de la maternelle et de l'école primaire.

On a parlé également de la ceinture de sécurité. Le député de Beauce-Sud s'est demandé quel pourcentage des cas d'accidents pouvaient être aggravés par le port de la ceinture de sécurité. Or, les statistiques que nous avons là-dessus nous démontrent que c'est moins de 0.5 p.c. Ce sont des cas vraiment exceptionnels. De toute façon, cette grande question de la ceinture de sécurité a été discutée récemment et je sais que le député de Charlevoix, mon collègue, en a parlé ici la semaine dernière. Encore une fois, nous considérons qu'il est quand même essentiel, peu importe quelle législation on pourrait présenter éventuellement, pour le succès d'une telle opération — M. Magnan a souligné la difficulté d'application — qu'il y ait un appui populaire. Il faut que les gens soient sensibilisés à la question, il faut que les gens y croient, à la ceinture de sécurité. C'est pour cette raison que nous avons amorcé ce programme d'information, dont on connaît la teneur.

Enfin, je tiens à mentionner qu'en ce qui concerne un nouvel examen périodique des chauffeurs, nous sommes à considérer cette chose-là aussi et, encore là, il y a des questions administratives qu'il faut régler. Nous sommes quand même à étudier cette question et nous espérons bien que, dans tout le programme que nous avons de revalorisation de cette fonction de la sécurité routière, avant longtemps, nous pourrons dire quelque chose d'officiel là-dessus.

C'est à peu près ce que je voulais dire, M. le Président, à cause des questions qui ont été soulevées.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Je remercie M. Magnan et ses collaborateurs de l'Association des policiers provinciaux du Québec et j'inviterais maintenant le représentant du Bureau d'assurance du Canada.

M. TETLEY: M. le Président, je voudrais noter, au sujet de la demande que j'ai reçue concernant le permis d'un jeune homme dans l'est de Montréal, que je n'ai pas appuyé sa demande. Tout simplement pour le journal des Débats. J'en ai reçu de l'ouest, même de mon comté.

M. BERTHIAUME: Je peux assurer le député de Lafontaine que nous en recevons un très grand nombre au ministère des Transports également et je suis assuré que le ministre de la Justice en reçoit également. Il doit en avoir des dizaines par semaine, des lettres semblables. La meilleure réponse que nous pouvons donner, je crois, à une lettre comme celle-là, c'est de demander à l'individu pourquoi il n'a pas pensé à la prudence, lorsqu'il était rendu à huit points. Pourquoi s'est-il rendu à douze? Surtout si son permis de conduire est important pour son travail. Il aurait dû normalement redoubler de prudence rendu à quatre ou à huit points. Il y a une certaine irresponsabilité, du moins en apparence, dans ce genre de demande.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Messieurs, nous allons entendre le mémoire du Bureau d'assurance du Canada; à la suite de la présentation du mémoire, nous nous arrêterons pour le lunch et nous aurons, par la suite, la partie du dialogue ou des questions qui peuvent être posées aux représentants du Bureau d'assurance du Canada. M. Moreau, je vous cède la parole.

Bureau d'assurance du Canada

M. MOREAU: M. le Président, honorables membres de cette commission parlementaire, je m'appelle Charles Moreau, je suis directeur du Bureau d'assurance du Canada pour le Québec et j'ai également l'honneur de présider le comité consultatif qui dirige nos activités au Québec.

Les membres de ce comité consultatif sont des dirigeants de compagnies d'assurance qui souscrivent une part importante de l'assurance-automobile au Québec. A ce sujet, j'aimerais tout de suite corriger, si vous le permettez, une erreur qui s'est glissée dans notre mémoire. En effet, nous avons omis de mentionner le nom de deux membres de ce comité. Il s'agit de M. Sébastien Allard, qui est vice-président senior du Groupe d'assurance Royal, et de M. Conrad Leblanc, qui est directeur général du groupe La Laurentienne de Québec.

Je prie donc ces deux collaborateurs de m'excuser de cette erreur et j'en profite pour les remercier de leur précieuse collaboration aux activités du BAC.

J'ai maintenant le plaisir de vous présenter ceux qui, avec moi, auront l'occasion de vous donner, au nom du bureau, les renseignements que vous jugerez à propos de nous demander au cours de cette audition.

A mon extrême gauche, M. Merlin Donald, qui, jusqu'à tout récemment, était président du conseil de Robert Hampson & Son Limited de Montréal; M. Camille Lang, président de la compagnie d'assurance La Prévoyance; M. Doug Nicholson, de la compagnie Travelers du Canada. A mon extrême droite, M. Sébastien Allard, vice-président senior du groupe Royal, et M. Guy Saint-Germain, vice-président et directeur général du groupe Commerce.

Le Bureau d'assurance du Canada, aussi connu sous le nom de BAC, est un organisme qui groupe la presque totalité des assureurs qui exercent en matière d'assurance IARD, c'est-à-dire incendie, accident et risques divers.

Puisque nous allons parler d'assurance-automobile, il serait sans doute à propos de souligner ici la double fonction que le BAC exerce dans ce domaine. En effet, le BAC est d'abord un organisme privé ayant pour but d'agir au nom de ses membres dans le domaine juridique ainsi que dans ceux de la recherche, des relations publiques et de la statistique.

En matière de statistiques d'assurance-automobile, le BAC, en vertu d'un mandat qui lui est confié par l'Association des surintendants provinciaux des assurances, a aussi pour fonction de corriger les résultats de tous les assureurs qui exercent au Canada et de produire, une fois l'an, un volumineux rapport qui est mieux connu sous le nom de livre vert. C'est précisément ce rapport, préparé conformément aux directives des surintendants provinciaux et sous leur surveillance, qui permet, d'une part, aux assureurs d'établir leur tarif et, d'autre part, aux surintendants des provinces d'en vérifier le bien-fondé.

Le BAC, étant généralement reconnu comme le porte-parole des assureurs IARD, il est normal que nous ayons apporté aux activités du comité d'étude sur l'assurance-automobile non seulement une attention particulière, mais aussi une collaboration étroite et soutenue. En fait, nous avons d'abord présenté au comité Gauvin un mémoire touchant l'ensemble du problème des accidents d'automobiles et de l'assurance-automobile.

Nous avons, par la suite, et durant tout le terme du mandat du comité, collaboré avec celui-ci en lui fournissant les renseignements et les données dont nous disposions et qui nous paraissaient devoir lui être utiles. Nous avons également procédé à certains travaux de recherche qui nous ont été demandés par le comité et qui semblaient le préoccuper d'une façon particulière.

Nous n'avons pas hésité non plus à lui transmettre les données techniques provenant d'une étude considérable que nous avons faite au sujet de l'assurance, sans égard à la responsabilité, pour finalement lui présenter notre projet d'un nouveau régime d'assurance-automobile que nous appelons assurance-auto BAC lequel, à notre avis, représente le moyen le plus efficace pour servir les automobilistes québécois.

Nous sommes heureux d'avoir pu accorder au comité Gauvin cette étroite collaboration que son président a d'ailleurs reconnue à maintes reprises.

M. le Président, nous avons été fort impressionnés par l'ampleur et la qualité des travaux du comité Gauvin. De toute évidence, les recommandations qui en ont résulté dénotent un courage et une sagesse que l'on a rarement observés dans les groupes d'étude qui se sont attaqués au problème complexe des accidents d'automobiles, ailleurs dans le monde.

A notre avis, ce rapport ne manquera pas d'influencer fortement la recherche qui se fait présentement dans les autres provinces canadiennes, aux Etats-Unis et ailleurs. Nous sommes particulièrement heureux du fait que cet excellent travail a été accompli au Québec et si, dans notre mémoire et au cours des discussions qui vont suivre, il nous arrivait de différer d'opinion avec le comité Gauvin sur certains points particuliers, cela ne diminuerait en rien l'opinion généralement très favorable que nous avons sur ce rapport.

M. le Président, nous avons formulé nos observations sur le rapport Gauvin dans un mémoire relativement court, en nous limitant à dessein aux grands principes qui ont guidé le comité ainsi qu'aux recommandations qu'il contient, tout cela dans le but d'éviter une lecture trop longue aux membres de votre commission. Dans les circonstances, nous apprécions particulièrement l'occasion qui nous est donnée aujourd'hui de résumer l'esprit qui motive notre mémoire, d'élaborer quelque peu certains points pour ensuite répondre, si vous le jugez à propos, aux questions qu'il vous plaira de nous poser.

Vous nous permettrez, j'espère, ou vous me permettrez, j'espère, de faire appel dans chaque cas aux spécialistes qui m'accompagnent et qui sont tous qualifiés pour éclairer la commission.

La partie de notre mémoire, qui traite de la sécurité routière, exige peu d'explications, puisque nous partageons généralement l'avis du comité Gauvin dans ce domaine. Nous nous sommes donc contentés d'exprimer notre accord sur les recommandations, tout en soulignant les quelques cas où nous avons dû nuancer notre approbation.

M. le Président, mardi dernier, lorsque nos amis les courtiers ont discuté la recommandation du comité Gauvin au sujet de l'émission des polices et du règlement des sinistres, ils ont fait un parallèle entre le comportement de l'assureur et celui de la femme qui conçoit dans la joie et qui enfante dans la douleur. Il faut bien l'admettre que la comparaison est assez près de la vérité. Dans les circonstances, nous comprenons mal l'opposition plus que violente de nos amis à cette recommandation. Nous avions plutôt cru qu'elle était de nature à leur plaire puisqu'elle leur réserve un rôle particulièrement glorieux au moment de la conception, tout en les dispensant de participer aux douleurs de la gestation et de l'accouchement.

Quant à nous, nous n'hésitons pas à souscrire d'emblée aux recommandations touchant à la sécurité routière, puisqu'en définitive elles auront, à notre point de vue, pour effet de limiter les naissances. Très sérieusement, nous avons été fort impressionnés par l'importance que le comité Gauvin a attachée au domaine de la sécurité routière, comme d'ailleurs par le souci de votre commission, qu'elle apporte à discuter les modalités d'application de cette sécurité routière. Nous formulons le voeu que l'intérêt si évident que vous portez, se transmettra en temps et lieu à tous les paliers du gouvernement, afin que la loi, qui en résultera, apporte une solution vraiment efficace aux problèmes des accidents d'automobiles au Québec.

Le BAC ne se reconnaît aucune autorité particulière en matière de sécurité routière. En fait, nous savons que certains membres de cette commission sont beaucoup mieux qualifiés que nous dans ce domaine. Nous pensons en particulier au député de Bellechasse, dont la compétence dans le domaine est bien connue. Nous ne pouvons donc pour le moment que réaffirmer ce que nous avons dit dans notre mémoire de janvier 1972, soit qu'un effort sincère du gouvernement, en collaboration avec les assureurs, pourrait porter des fruits très rapidement. Nous souhaitons que les discussions que nos gouvernants auront prochainement au sujet du régime d'assurance, ne relégueront pas au second rang cet aspect si important du problème qu'est la sécurité routière. Dans la deuxième partie de notre mémoire, qui est complétée par l'annexe B, nous avons essayé d'exprimer le plus clairement possible les motifs qui nous ont guidés dans la préparation du régime d'assurance Auto BAC, que nous recommandons d'adopter.

Nous y avons résumé la raison d'être du régime que nous proposons, et nous y avons expliqué le raisonnement qui nous a conduits à favoriser ce nouveau concept d'indemnisation plutôt que le régime actuel basé sur la responsabilité.

Il est assez significatif que les recherches faites de part et d'autre, par le comité Gauvin et par le BAC, aient conduit à des résultats aussi rapprochés. Nous nous permettons d'y voir une justification fort évidente de la conclusion à laquelle le comité Gauvin est arrivé, c'est-à-dire que le système actuel est désuet et qu'il doit être modifié en fonction des conditions particulières de notre époque.

Je me contenterai donc de souligner non pas les variantes qui peuvent exister au niveau des modalités d'application des deux systèmes, mais plutôt les différences fondamentales qui sont à la base même du régime proposé.

Le comité Gauvin recommande la suppression totale du droit de recours et son remplacement, d'une part, par le droit à une indemnisation d'unité, et d'autre part, par la disponibilité d'une assurance familiale que chacun devrait souscrire volontairement à titre supplémentaire.

A notre connaissance, un seul Etat, la Nouvelle-Zélande, a complètement aboli le droit de recours, pour le remplacer par des indemnités préétablies. Partout ailleurs, on a résolu le problème de base en disposant efficacement de la masse des sinistres, dont la valeur n'excède pas un certain niveau, et on a laissé aux tribunaux le soin de déterminer une juste compensation dans les cas d'exceptions.

Les Québécois jouissent présentement de dispositions juridiques particulières qui contribuent à faire de notre système de compensation celui qui est sans doute le plus libéral en Amérique du Nord. Je pense, en particulier, à la responsabilité à l'égard des passagers et à la présomption de faute en faveur des piétons.

Nous ne croyons pas qu'il soit sage d'imposer aux Québécois un changement aussi radical que l'abandon total du droit de recours tel que recommandé par le comité Gauvin. Dans le même ordre d'idées, nous comprenons difficilement que dans un régime comme celui que préconise le comité Gauvin, où le droit de recours est censé être entièrement supprimé, l'on conserve ce droit en matière de dommages matériels dans les circonstances aussi particulières que les dommages causés volontairement et les dommages causés aux véhicules par les garagistes.

Les recommandations du comité Gauvin, à l'effet de laisser l'individu lui-même compenser la suppression totale de son droit de recours par une assurance familiale ou individuelle, ne nous apparaissent pas réalistes, du moins à certains points de vue. Nous pensons, par exemple, aux

visiteurs qui subiraient, dans notre province, un préjudice grave à l'occasion d'un accident causé par la négligence d'un automobiliste et qui, dans son propre pays, n'aurait eu aucune raison de se munir d'une assurance excédentaire. On pourrait, à la rigueur, admettre que l'automobiliste, père de famille, soit assez prévoyant pour maintenir, à l'intention des siens, une assurance excédentaire applicable en cas de mort ou de blessures graves.

Mais dans la société évoluée dans laquelle nous vivons, où l'unité familiale est si souvent brisée, qu'arrivera-t-il aux piétons qui n'ont pas d'automobile, aux vieillards, aux personnes seules, séparées, divorcées ou simplement éloignées de la famille?

Est-il raisonnable de les obliger à acheter une assurance personnelle supplémentaire pour le cas où un automobiliste négligent les blesserait gravement?

Au cours des recherches faites par notre comité spécial, celui-ci en était arrivé d'abord à une conclusion semblable à celle du comité Gauvin. Ce n'est qu'après avoir mûrement réfléchi aux implications d'un changement aussi radical que nous avons opté pour une solution plus modérée.

Nous avons proposé un système que nous situons, présomptueusement peut-être, au juste milieu entre le système actuel basé entièrement sur la responsabilité et l'assurance sans égard à la responsabilité. Le régime que nous proposons permettra, à notre avis, de disposer rapidement, de façon efficace et économique, d'environ 85 p.c. des sinistres, au moyen d'indemnités payables, sans égard à la faute.

Quant aux autres sinistres, comportant un préjudice si grave qu'il ne puisse entièrement être compensé au moyen de barèmes déterminés, nous offrons d'abord à la victime les indemnités prévues par notre régime de base afin de compenser de façon partielle, mais substantielle, les préjudices subis, tout en lui laissant la liberté de s'adresser aux tribunaux pour obtenir de l'automobiliste négligent des indemnités plus importantes.

Au chapitre de l'assurance contre les dommages aux véhicules, les régimes préconisés et par le comité d'étude et par le BAC sont sensiblement les mêmes, comme le démontre le parallèle qui fait le sujet de l'annexe C.

Il est donc évident qu'une étude qui serait faite conjointement par les spécialistes du gouvernement et par les assureurs pourrait rapidement conduire à un compromis idéal pour le consommateur.

Nous différons d'opinion avec ceux qui préconisent l'indemnisation, sans égard à la faute, dans le cas des dommages matériels, sans l'appliquer en même temps aux dommages corporels.

Quant à l'assurance obligatoire des dommages au véhicule de l'assuré, préconisée par le comité Gauvin, nous ne croyons pas raisonnable que le BAC y souscrive, vu l'intérêt évident des assureurs dans ce domaine. Nous ne voyons, cependant, aucune objection si le gouvernement juge à propos de l'imposer.

La troisième partie de notre mémoire touche l'administration du système d'assurance que notre gouvernement doit choisir.

Nous avons essayé à cette occasion d'apprécier les recommandations du comité Gauvin et de vous en exprimer honnêtement notre opinion.

Actuellement, la souscription des assurances-automobiles s'effectue selon trois modalités qui visent toutes à satisfaire les besoins des automobilistes. Certains assureurs invitent le public à traiter directement avec eux. D'autres ont des agents qui les représentent exclusivement et à qui ils versent des commissions.

Mais la grande majorité ne traite qu'avec des courtiers qui représentent les assurés, même si leur commission est payée par les assureurs. Il nous semble que, dans un système basé sur la concurrence, le choix qui est ainsi offert est d'une importance capitale en ce qu'il permet à chacun d'exercer l'option qui lui convient. D'ailleurs, l'expérience est là pour démontrer que la situation actuelle répond bien aux besoins du consommateur. Nous ne voyons donc pas d'avantage à la modifier.

Nous ne doutons pas, M. le Président, que les restrictions qu'imposent aux activités des courtiers et des assureurs les recommandations 55, qui touche le règlement des sinistres, et 56, qui touche le financement des primes soient motivées par un désir de réduire les coûts que doit supporter l'automobiliste. Il reste qu'il importerait d'en déterminer le montant par rapport à la nature des services rendus et en fonction des exigences du public. Serait-il raisonnable que la rémunération du courtier soit fonction des forces du marché, c'est-à-dire de la concurrence entre les assureurs? Y aurait-il avantage à ce que cette rémunération soit déterminée par le gouvernement lui-même, par décret, comme la chose se pratique en France, par exemple? Le courtier devrait-il plutôt être rémunéré directement, au moyen d'honoraires déterminés par sa corporation professionnelle? Autant de questions, M. le Président, qui préoccupent actuellement les parties intéressées et pour lesquelles il n'existe aucune réponse claire jusqu'ici. Les assureurs ne s'opposent pas à distribuer leur produit sur base de prime pure, le courtier étant rémunéré par l'assuré, mais il faut bien reconnaître que toute cette question est et sera toujours la prérogative, comme d'ailleurs la responsabilité, du législateur.

Certaines des recommandations du comité Gauvin comportent des éléments tout à fait nouveaux et radicalement différents de la pratique courante. Pour les apprécier à leur juste valeur et dans le but d'éviter des erreurs et des injustices, il faudra, à notre avis, procéder à des travaux de recherche considérables pour lesquels le BAC offre au gouvernement sa pleine et entière collaboration.

L'industrie privée des assurances a traversé, au cours des années, des difficultés de toutes sortes. Mais elle est toujours demeurée un facteur de progrès économique important dans notre société, grâce à son dynamisme et à la sagesse des gouvernements. Nous ne doutons pas qu'elle puisse continuer à jouer son rôle au Québec et cela dans les meilleurs conditions possibles pour toutes les parties intéressées. Voilà, M. le Président, les quelques remarques que j'avais à vous faire dans le but de résumer l'esprit de notre mémoire, nous sommes maintenant, mes collègues et moi, à votre disposition au moment où ça vous conviendra.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Merci bien, M. Moreau. Comme je l'ai mentionné avant votre présentation, nous reporterons à cet après-midi, après le lunch...

M. ROY: M. le Président, j'aurais une question, en cette circonstance, est-ce qu'il y aurait possibilité d'avoir une photocopie des notes que vient de vous lire M. Moreau? Parce que j'ai regardé pour suivre dans le mémoire et j'ai constaté que c'étaient des notes séparées que vous aviez. Etant donné que nous n'aurons pas la transcription du journal des Débats à temps, je pense que ce serait dans l'intérêt de chacun des membres de la commission de pouvoir avoir une copie de ces notes avant la reprise de cet après-midi et aussi, vous avez fait référence, à quelques endroits, à l'annexe C de votre mémoire. Nous n'avons pas l'annexe C, j'ai les annexes A et B mais en ce qui me concerne, je dois dire que je n'ai pas l'annexe C. Peut-être que les autres membres de la commission l'ont eue. En tout cas si c'est seulement moi qui ne l'ai pas eue, je retire mes propos et je m'adresserai à la commission.

M. MOREAU: L'annexe C fait partie du mémoire, c'est la dernière partie du mémoire qui commence par une en-tête du Bureau d'assurance du Canada.

M. ROY: D'accord.

UNE VOIX: Après la page 22.

M. MOREAU: C'est le parallèle entre les deux régimes d'assurance.

M. ROY: D'accord, c'est parce que je pensais que vous aviez une autre annexe qui s'ajoutait séparément à la suite des deux autres, sur les annexes A et B.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): M. Moreau, croyez-vous pouvoir soumettre une photocopie des textes que vous avez lus ou si c'est le résumé de votre mémoire?

M. MOREAU: Je le ferai avec plaisir, M. le Président. Je dois vous dire toutefois que j'ai dû à la toute dernière minute y faire beaucoup de modifications selon les circonstances. Peut-être que pendant l'heure du lunch, il y aurait moyen de faire réécrire ces quelques notes au propre et en remettre immédiatement des photocopies aux membres de la commission, comme M. le député le veut.

Je pense qu'il y a moyen d'y arriver.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Je pense que vous obtiendrez la collaboration du personnel du secrétariat de la commission, si nécessaire.

M. MOREAU: Vous êtes bien aimable, merci, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): La commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 heures)

Reprise de la séance à 15 h 13

M. CORNELLIER (président de la commission permanente des institutions financières compagnies et coopératives): A l'ordre, messieurs!

La commission des Institutions financières, compagnies et coopératives reprend ses travaux cet après-midi à la suite de la présentation du mémoire du Bureau d'assurance du Canada. Nous en étions à la période des questions que nous pourrions aussi appeler le dialogue entre nos visiteurs et les membres de la commission.

Je cède maintenant la parole au ministre des Institutions financières, M. Tetley.

M. TETLEY: M. le Président, messieurs du Bureau d'assurance du Canada, je vous souhaite la bienvenue à Québec et au Québec. Je vous remercie de vos documents très importants. Votre présentation est très importante, parce qu'en effet vous venez de présenter un choix sur le plan administratif et sur le plan d'un régime d'indemnisation.

Vous avez plusieurs mémoires ici. Votre mémoire, à la page 6, premier paragraphe, mentionne qu'en rendant obligatoires les vérifications des véhicules à moteur, l'Ile-du-Prince-Edouard et le Nouveau-Brunswick ont réduit le nombre des accidents de 12 p.c. et 8.7 p.c. respectivement, dès la deuxième année et la Nouvelle-Ecosse, de 19 p.c, au cours des trois dernières années.

Que représentent effectivement ces pourcentages? Est-ce la réduction à l'intérieur d'une seule année par rapport à une année de base considérée, ou le total de réductions des deux ou trois dernières années par rapport à une année donnée? Ces chiffres sont assez remarquables.

M. MOREAU: Dans le cas de l'Ile-du-Prince-Edouard et du Nouveau-Brunswick... c'est 12 p.c. pour l'Ile-du-Prince-Edouard et 8.7 p.c. pour le Nouveau-Brunswick, pour deux années. C'est une réduction à l'intérieur d'une période de deux ans. Dans le cas de la Nouvelle-Ecosse, on parle d'une période de trois années, où la réduction globale, pour les trois ans est de 19.05 p.c.

M. TETLEY: Deuxième question. De quelle façon sont effectuées ces vérifications obligatoires, par l'Etat, par un échantillonnage ou par les véhicules plus usagés seulement?

M. MOREAU: La méthode diffère selon les provinces. Nous savons, par exemple, qu'en Colombie-Britannique, c'est le gouvernement qui administre les centres d'examen des véhicules et qu'on fait l'examen deux fois par année, mais la lacune, c'est que cela se fait dans le district de Vancouver seulement et non pas dans les parties éloignées de la province.

On a parlé tout à l'heure de la Nouvelle-

Ecosse, de l'Ile-du-Prince-Edouard et du Nouveau-Brunswick. On nous dit que, dans ces trois provinces, ce sont des garagistes indépendants qui sont sous contrat avec l'Etat et qui sont mandatés pour faire ce travail d'examen des véhicules. Ce ne sont pas des établissements opérés par l'Etat ou par le Bureau des véhicules automobiles même.

M. TETLEY: A la page 12, paragraphe c), vous mentionnez que vous pouvez déjà conclure que les coûts de l'assurance AutoBAC — cela est votre système AutoBAC — jointe à l'assurance-responsabilité civile RC complémentaire que vous préconisez, seront sensiblement inférieurs à ceux du régime du comité Gauvin, aux assurances individuelles complémentaires qui y sont prévues. Ma question est la suivante: Quand l'analyse des coûts sera-t-elle terminée, parce que vous avez fait une constatation, mais vous n'avez pas encore, si je comprends bien, les chiffres?

M. MOREAU: Nous n'avons pas les chiffres définitifs pour plusieurs raisons. D'abord, au moment où nous avons fait l'enquête concernant le système sans égard à la responsabilité, le comité Gauvin était en plein travail, en pleine gestation, si je peux me permettre le terme.

Alors nous n'avons pas voulu y arriver avec des chiffres qui auraient peut-être contredit ce qui se faisait. Maintenant, vous allez peut-être dire que c'est une raison futile. Je pense que la meilleure raison, c'est tout simplement que nous n'avons aucune idée dans le moment de la date ou de l'époque à laquelle le gouvernement du Québec serait intéressé à mettre en vigueur un système semblable. Or, on sait que de six mois en six mois, à cause de l'inflation, l'augmentation des coûts change tellement qu'il serait absolument imprudent, même si nous pouvions le faire cet après-midi, de vous donner un coût, puisque le système ne sera peut-être pas en vigueur avant six mois, un an, un an et demi ou deux ans peut-être.

Ce que nous aimerions, c'est que le gouvernement du Québec nous dise: Nous aimerions avoir le coût de votre système en tenant pour acquis qu'il entrerait en vigueur, pour fins de discussion, à telle date. Maintenant, nous aimerions également que vous nous donniez votre appréciation des bénéfices que contient notre système, et surtout des limites d'assurance. Nous avons, par exemple, projeté une limite de $20,000 dans le cas des frais médicaux et des frais de réhabilitation, de rééducation. II est impossible que le gouvernement décide que $15,000 seraient suffisants ou plutôt que cela devrait prendre $25,000 ou $30,000. Alors tout cela change évidemment le coût. Si on nous donnait, M. le ministre, une idée à peu près de l'ordre de grandeur du système qui pourrait intéresser le Québec en principe, nous pourrions assez rapidement, maintenant vous fournir des coûts précis.

M. TETLEY: Depuis longtemps, cela fait presque deux ans, j'ai reçu des lettres que je peux sortir, où on m'a promis des coûts et ce n'est pas encore final, et des conférences de presse à Toronto, etc. Il faut un bon jour que vous décidiez d'une date, aujourd'hui ou la date du rapport Gauvin, et que vous avisiez le gouvernement et la population des coûts selon votre système, ou suivant les alternatives proposées, si vous avez des alternatives à proposer au gouvernement, parce que c'est très difficile, pour moi, du moins, de considérer votre système sans les chiffres. Vous avez même promis des chiffres pour Gauvin et pour moi depuis longtemps, depuis plusieurs années. En tout cas, je vous suggère de nous les présenter sans délai, en prenant une date, parce que tout le monde est affecté par l'inflation. Il y a certaines alternatives, mais donnez les coûts correspondant au régime que vous trouvez le meilleur, et présentez-les.

M. MOREAU: Je pense que votre demande est tout à fait à propos, M. le ministre. Nous allons prendre les dispositions pour vous donner le coût exact du système tel que nous le proposons dans les limites que nous proposons...

M. TETLEY: Oui.

M. MOREAU: ... et dans un avenir très rapproché; ce qui veut dire à peine quelques semaines.

M. TETLEY: Question supplémentaire à ma question précédente. Lorsque vous mentionnez que vous pouvez déjà conclure que les coûts du régime que vous proposez et que ces coûts seront inférieurs à ceux du comité Gauvin. A quel ordre de grandeur de différence de coûts doit-on s'attendre?

M. MOREAU: J'hésite beaucoup à vous donner un pourcentage, mais il est évident que le coût d'AutoBAC devrait être inférieur au coût du système Gauvin, parce que la comparaison qu'on fait des deux régimes démontre que le régime Gauvin, en fait, est plus généreux que le régime AutoBAC, sous plusieurs aspects. Alors, il faut nécessairement qu'AutoBAC coûte moins cher. Mais de combien? Cela pourrait être de 10 p.c, de 15 p.c, de 20 p.c. M. le ministre, mais je n'ose pas vous donner de pourcentages qui pourraient vous décevoir d'une façon ou d'une autre.

M. TETLEY: Parfait!

M. MOREAU: Logiquement, il faut qu'il soit à meilleur marché.

M. TETLEY: Merci!

A la page 13 de votre mémoire, paragraphe a): Dans ce paragraphe, on mentionne que la limitation des indemnités hebdomadaires d'in- capacité recommandée par le comité Gauvin est basée sur des revenus bruts maximaux de $200 contre $250 pour l'assurance AutoBAC.

Il était également mentionné, un peu plus loin dans ce même paragraphe, que les montants plus élevés de l'assurance AutoBAC ont pour objet d'éviter une trop forte pression sur la tarification de l'assurance complémentaire.

Que voulez-vous dire par "trop forte pression sur la tarification"?

M. MOREAU: Ce que nous voulons dire, M. le ministre, c'est que, dès que vous diminuez le montant de l'indemnité hebdomadaire, nécessairement les indemnités qui devront être payées en vertu de la responsabilité civile résiduelle devront être plus élevées.

Dès que l'on diminue les indemnités de base, ce qui reste sur le système de la responsabilité doit nécessairement être plus élevé. C'est ce que nous voulons dire. Cela augmenterait le coût. Dès qu'on diminue le système de base, le coût diminue, mais en contrepartie, le coût de la responsabilité résiduelle augmente.

En somme, le coût qu'on enlève d'un côté, retombe sur l'autre. C'est que nous avons voulu dire.

M. TETLEY: Et pourquoi limitez-vous la période des paiements des rentes à trois ans? Pourquoi avez-vous choisi trois ans?

M. MOREAU: A cause d'une question de coût, parce qu'il y a une différence énorme dans le coût entre une rente de trois ans et une rente à vie. C'est la seule raison. Pour limiter le coût à un montant raisonnable.

M. TETLEY: Merci pour la réponse. A la page 13 encore, au paragraphe c). Dans ce paragraphe, vous mentionnez qu'il est possible que l'application inconditionnelle d'un délai de carence de sept jours pour la perte de revenus préconisée par le comité Gauvin empêche l'exagération des dommages, mais qu'à votre avis, cette restriction est arbitraire. L'assurance AutoBAC n'applique ce délai qu'aux incapacités de sept jours ou moins. Voici ma question: Ne croyez-vous pas que cela est plus susceptible d'inciter les gens à faire en sorte que leur période d'incapacité excède ce délai de carence de sept jours?

M. MOREAU: Ce que nous avons voulu dire est ceci: Si une personne est incapable pour une période de six jours, par exemple, elle n'a qu'à augmenter son incapacité d'une journée pour pouvoir, en vertu du système de M. Gauvin, percevoir l'indemnité.

M. TETLEY: Oui, mais...

M. MOREAU: C'est ce qui peut la porter à exagérer volontairement son incapacité dans les...

M. TETLEY: A la page 22, dernier paragraphe, il est stipulé que, et je cite: "II est donc primordial que le surintendant soit chargé d'examiner de très près les méthodes des assureurs sans qu'il y ait imposition d'un contrôle de la tarification qui risquerait de déformer celle-ci et de restreindre le marché".

Ma question est la suivante: Comment, d'après vous, le contrôle de la tarification peut-il déformer celle-ci et restreindre le marché?

M. MORE AU: Ce que nous avons voulu dire, c'est qu'il serait mauvais que les taux soient effectivement imposés par le surintendant. Nous ne voyons pas d'objection à ce qu'il y ait soumission des barèmes de taux au surintendant pour fins d'approbation après usage ou avant, mais — je ne sais pas si on s'est exprimé clairement — ce à quoi on s'oppose, c'est justement que les taux soient préparés par le surintendant et imposés aux assureurs. Il pourrait alors y avoir exagération, cela devient de plus en plus difficile pour les assureurs de faire corriger ce qu'on considère comme des choses inexactes et cela restreint le marché si les assureurs jugent que le taux n'est pas suffisant pour accepter les risques qu'on leur présente.

M. TETLEY: Votre système AutoBAC n'est pas en vigueur dans une autre province du Canada.

M. MOREAU: Pas encore, M. le ministre.

M. TETLEY: Je vous félicite de votre travail. Vous avez pris combien de temps pour la préparation de votre système?

M. MOREAU: Le comité spécial, qui a fait ce travail, a été formé en décembre 1972, ce qui veut dire que cela a pris un peu moins de deux ans.

M. TETLEY: Et vous avez engagé des experts d'ici et là, même des Etats-Unis, si je comprends bien?

M. MOREAU: Nous avons engagé une firme d'actuaires, Woodward and Fondiller, pour faire le travail actuariel, avec nos propres actuaires évidemment.

M. TETLEY: Est-ce que tous les membres ont accepté le système?

M. MOREAU: Tous les membres du BAC, qui sont membres actuellement du BAC, sont d'accord sur le système. La totalité des membres a contribué, par sa coopération dans l'étude, le sondage que nous avons fait, à établir le système. Nous avons fait un sondage qui a duré près de six mois, 37 des plus grosses compagnies y ont contribué.

Nous avons examiné 22,000 accidents, ce qui a nécessité la préparation d'au-delà de 90,000 formulaires. Ce sont les données qui ont été enregistrées sur ces formulaires, à l'examen de ces 22,000 dossiers, qui ont été remises à nos actuaires et qui ont formé la base de notre système AutoBAC. C'est là que nous avons vu quelles étaient les indemnités qui étaient nécessaires dans chaque plan des accidents au Québec, de façon à en arriver à un système moyen qui compense pour une bonne partie des accidents. C'est pour ça que je disais plus tôt que notre système AutoBAC n'est pas un système, sans égard à la responsabilité, complet. Mais les bénéfices des indemnités qu'on y donne tiennent compte d'au moins 85 p.c. des accidents. C'est ce qui nous fait dire que ça règle au moins 85 p.c. des problèmes, quitte, aux cas d'exception, de 10 p.c. à 15 p.c, à laisser cela à l'appréciation des tribunaux.

M. TETLEY: Quels sont les 15 p.c, les cas d'exception? Donnez des exemples.

M. MOREAU: Ce sont les cas de mort d'abord, de préjudice esthétique grave et les cas d'incapacité totale se prolongeant au-delà de six mois. En général, ce sont les trois cas. Théoriquement, ce sont tous les cas où le préjudice matériel ou la perte économique, dans le cas des frais médicaux et de rééducation, excède $20,000, ou les cas où la perte mensuelle excède $250 par semaine. Cela représente vraiment au-delà de 85 p.c. des cas.

M. TETLEY: Si je comprends bien, pour 85 p.c. des cas, il y aura un système d'assurance sans égard à la responsabilité et, pour les autres 15 p.c. les gens auront le droit de prendre action en cour.

M. MOREAU: C'est exact, 85 p.c. des cas recevront l'indemnité sans discussion, rapidement, selon la formule "no fault" qu'on appelle, tandis que les autres où il y a incapacité grave, où il y a mort ou préjudice esthétique grave, ces gens profitent également du système de base AutoBAC, ce qui leur permet quand même de percevoir $20,000 en bénéfices de toutes sortes, ce qui leur permet d'obtenir un remboursement de leur indemnité hebdomadaire pendant trois ans et, par le fait même, ils peuvent poursuivre pour l'excédent de ces sommes. C'est l'avantage du système.

Actuellement, vu que le système total de responsabilité, dès qu'une personne croit avoir droit à des indemnités élevées, dès qu'elle pense à s'adresser aux tribunaux, elle va être obligée de refuser toute indemnité, sauf peut-être la petite section b qui existe présentement dans le contrat automobile.

Tandis qu'avec le nôtre, les personnes pourront accepter les $20,000, tout ce qui est compris dans les $20,000 et également l'indem-

nité hebdomadaire jusqu'à $250 pendant trois ans, ce qui leur donne amplement le temps de préparer leurs causes et de décider vraiment si elles ont raison de demander plus.

M. TETLEY: Encore deux questions. Puis-je vous demander combien — si vous êtes capable de répondre — votre étude, depuis 1972, vous a coûté? L'estimation... sans doute que quelqu'un a payé, ce n'est pas moi qui ai payé.

M. MOREAU: C'est le Bureau d'assurance du Canada. Ce sont les membres du Bureau d'assurance du Canada qui ont payé. Je crois que cela peut se chiffrer par $300,000, $400,000 ou $450,000. En y incluant tous les frais pendant une période de deux ans, y compris les honoraires des...

M. TETLEY: La raison pour laquelle je vous pose cette question, c'est qu'on m'avait dit la semaine dernière que votre étude avait coûté beaucoup plus que cela, c'est pour cela que je voulais savoir.

M. MOREAU: Plus que cela?

M. TETLEY: Oui. Mais ce n'est pas vous qui m'avez dit cela.

M. MOREAU: H est possible que je fasse erreur, M. le ministre, me permettez-vous de consulter notre actuaire, qui est certainement au courant?

M. TETLEY: Ou votre comptable.

M. MOREAU: II est possible, M. le ministre que les coûts s'élèvent jusqu'à $500,000 lorsque tous les frais auront vraiment été payés.

M. TETLEY: Y compris les frais intérieurs, les frais peut-être d'une compagnie ou une autre qui a fait des études à ses frais, qui ne sont pas inclus? Est-ce que ce sont...

M. MOREAU: Oui, c'est cela, je crois que ce sont tous les frais. Nous avons essayé d'imputer à l'enquête, sans égard à la responsabilité, tous les frais que nous avons encourus, nous au BAC, également des compagnies.

M. TETLEY: My last question, Mr Moreau, I am going to ask it in English, because there are some ladies here, not from my riding but from Côte Saint-Luc, but whom I met in the hall, who said that they were as interested in automobile insurance as anybody. I would like to know this: You compared your plan with the Gauvin plan. You compared the insurance companies plan called AutoBAC with the Gauvin commission plan. I would like to know, as compared with the actual cost today of insurance, would your plan cost less to the public, to the ladies present, and to all of us, less that the premiums that we presently pay?

M. MOREAU: I can assure you that it would definitely reduce the cost of the present system, but it is not possible to say how much, Mr Tetley. But it will definitely be lower than what the cost of the present system is, at the present time.

M. TETLEY: Je vous remercie, M. Moreau.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable député de Lafontaine.

M. LEGER: M. le Président, je voudrais d'abord féliciter l'organisme qui a présenté le mémoire très étoffé, avec beaucoup de statistiques et de détails. Vous touchez à plusieurs sujets. Maintenant, je dois dire, au départ, que c'est sûr que dans le système qu'il va falloir établir au Québec, il faut tenir compte d'une certaine réalité.

C'est-à-dire que dans les différents organismes qui sont touchés dans le rapport Gauvin, c'est sûr que des changements amènent toujours des refus ou des changements de systèmes ou de certains privilèges que le système actuel amenait et que les organismes qui sont touchés viennent ici normalement. Il est absolument sain de venir défendre leurs intérêts.

Je pense que nous devons avoir une certaine ouverture d'esprit pour être capables de comprendre que dans le système proposé il faut tenir compte de ces intérêts et que ces intérêts doivent aussi tenir compte de l'intérêt général. C'est la raison pour laquelle, aujourd'hui, les questions que je pourrais vous poser sont beaucoup plus pour nous éclairer sur votre réaction devant le rapport Gauvin et aussi pourquoi vous êtes arrivés à des conclusions peut-être contraires sur certains aspects.

La première question, je vais plutôt la poser au ministre des Institutions financières avant d'aborder précisément le sujet avec nos invités. Ce matin le ministre d'Etat aux Transports nous disait qu'il était pas mal difficile d'avoir un service d'inspection des véhicules et une des raisons majeures, c'était la question de la difficulté d'avoir suffisamment de mécaniciens compétents en quantité voulue pour un système général situé géographiquement dans toutes les régions du Québec pour que ce soit réellement efficace. Est-ce que, pour le ministre des Institutions financières qui a déjà parlé d'une réforme souhaitable concernant la vente des automobiles usagées — et vous avez même dit que vous vouliez arriver avec une solution là-dedans — les difficultés mises de l'avant par le ministre d'Etat aux Transports peuvent vouloir dire que, jusqu'à maintenant, vous êtes dans l'impossibilité de présenter, dans le bill 45, la Loi de la protection du consommateur, des réformes que vous souhaitiez? Est-ce que c'est

encore possible? Avez-vous trouvé des solutions pour corriger cette difficulté dont le ministre d'Etat aux Transports parlait ce matin?

M. TETLEY: J'espère, dans la réforme du bill 45, la Loi de la protection du consommateur, introduit un concept nouveau, un certificat de garantie de vente par le vendeur d'une automobile usagée garantissant au moins en partie le véhicule. Quant à l'inspection, je regrette, cela ne relève pas de mon ministère, mais une chose que j'apprécie du rapport Gau-vin, c'est la conclusion de la recommandation 18, à la fin de la première partie, qui veut qu'on mette tout sous le même toit. Le gouvernement doit agir sur l'ensemble. C'est une conclusion que j'ai acceptée depuis longtemps.

Lorsque j'ai été nommé ministre, le 1er octobre 1970, du ministère des Institutions financières, parce que j'étais ministre du Revenu avant, je voyais qu'il y avait un problème et, à ce moment, c'est un secret de polichinelle que je voulais convaincre la population, l'industrie, les députés et les ministres, les compagnies, tout le monde, même l'Opposition, de son importance. J'ai eu immédiatement un comité privé qui a fait un rapport que j'ai déposé le 29 janvier. Depuis ce temps, les ministres, la population, même l'Opposition sont de plus en plus convaincus de l'importance de l'assurance-automobile qui préoccupe la population plus que Medicare, qui est elle-même très importante.

Je vous donne un exemple: Au premier projet du système de points de démérite, il fallait tuer deux personnes avant de perdre son permis, c'est vrai.

Deux condamnations à la cour pour "manslaughter" avant d'avoir assez de points de démérite. C'était présenté par...

M. LEGER: II fallait que ça devienne une habitude.

M. TETLEY: Oui, c'est cela. Ce matin, nous avons vu au moins trois cas de vitesse. Gauvin a stipulé clairement que ce n'est pas assez sévère. Voici une évolution. Votre question, je l'accepte dans ce contexte. Il y a une grande évolution. Ce qui était impossible il y a six mois ou trois ans, est peut-être possible aujourd'hui ou sera possible d'ici six mois. Un des moyens de forcer ces possibilités, c'est par la présente commission parlementaire ici. C'est pourquoi je reçois avec plaisir toute critique possible contre moi ou n'importe qui ou toute suggestion qui est même plus positive. En réponse à votre question, je crois que tout est possible, mais le gros problème, évidemment, c'est le budget. Je peux être un héros si ce n'est pas mon ministère qui est impliqué, parce que trouver l'argent au Conseil du trésor est parfois difficile, parce que la population ne veut pas d'augmentation de taxes. Elle se croit trop taxée, ce qui est très vrai parfois. Je crois que tout est possible. En tout cas, avec l'esprit ouvert, nous allons trouver des solutions à nos problèmes. J'ai été surpris par vos chiffres, c'est pourquoi je vous ai posé les questions au sujet du Nouveau-Brunswick et de l'Ile-du-Prince Edouard. Suivant les chiffres que j'ai vus, une des grandes causes, c'est la vitesse; une autre, c'est l'ivresse; une autre, les gens qui ne portent pas de ceinture de sécurité.

M. LEGER: M. le ministre, je dois quand même dire que vous n'avez répondu que très partiellement à ma question. Très partiellement. Je pense que vous n'êtes rendu qu'au premier chapitre ou à l'avant-propos de ma question. Vous avez parlé, il y a quelques années, de l'importance d'avoir une inspection ou un certificat d'inspection pour les automobiles usagées avant qu'un vendeur les mettent sur la route. Alors, je vous demande: Devant le problème que vient de soulever le ministre d'Etat aux Transports ce matin, c'est-à-dire la difficulté d'avoir des garages et des mécaniciens suffisamment compétents pour avoir le droit de faire ce travail d'inspection pour le gouvernement, est-ce que c'était une blague ou si vous étiez réellement sérieux? Si vous étiez réellement sérieux, qu'est-ce que le gouvernement va faire pour se sortir de la difficulté, devant l'affirmation que vous avez faite? Est-ce que vous allez prendre contact avec le ministère de l'Education et le ministère du Travail pour qu'ils voient à avoir de meilleurs mécaniciens, plus de mécaniciens qualifiés, à donner plus de cours de façon qu'on en qualifie davantage? Comment allez-vous résoudre l'obstacle que vient de poser le ministre des Transports et votre affirmation suivant laquelle il faut que les gens qui achètent des automobiles usagées soient protégés?

M. TETLEY: Je me demande si j'ai déjà fait cette déclaration. J'ai dit qu'il faut des certificats pour la vente de toute automobile. Comment agir? Par les interventions ici et par la bonne foi. N'oubliez pas qu'en Nouvelle-Ecosse — parce que j'ai fait une enquête sur place — je crois que le coût exigé par les garages, est $3 pour une inspection. Est-ce une vraie inspection? Nous avons fait enquête ici. Les garagistes ont exigé $80. Lorsque j'étais là, en Nouvelle-Ecosse, en janvier, je crois, le ministre m'a dit qu'il y avait pression pour que la somme payée au garage soit de $8, lui parlait de $6; il voulait régler pour $7.

Mais dans ces conditions, ce n'est pas difficile de faire une vérification, et apparemment, cela a été efficace. Mais c'était en Nouvelle-Ecosse! M. Moreau, peut-être avez-vous des chiffres que je n'ai pas.

M. MOREAU: Je n'ai pas de chiffres précis, M. le ministre, sauf que, d'après les renseignements que nous possédons, le système en

Nouvelle-Ecosse est ce qu'on appelle "self-supporting". Il paie ses propres frais.

M. TETLEY: Ah oui!

M. MORE AU: Chaque automobiliste paie et le système ne coûte absolument rien à la province. Ce sont les renseignements qu'on nous donne.

Pardon?

UNE VOIX: ... combien?

M. MOREAU: Je ne pourrais pas vous dire combien. Je n'ai pas les taux qu'on demande en Nouvelle-Ecosse. On insiste pour dire qu'il est "self-supporting".

M. TETLEY: Oui, mais il a dit que $3 ou $6 ne sont pas suffisants. Mais le garagiste doit signer le certificat, s'il accepte d'être garagiste autorisé et, de plus, c'est son devoir de trouver des déficiences, des défauts dans l'automobile. Et à ce moment, il peut estimer les réparations.

M. BACON: Y pensez-vous, M. le ministre, à $3, c'est à peine s'il va vérifier l'huile...

M. TETLEY: En tout cas, la Nouvelle-Ecosse était très satisfaite. C'est pourquoi j'ai posé la question aujourd'hui parce que vous parlez de 19 p.c. dans votre mémoire. J'ai été grandement surpris d'une baisse de 19 p.c. dans le nombre d'accidents. Moi, je suis surpris, mais agréablement surpris.

M. MOREAU: Ce sont les chiffres qui nous ont été communiqués par le Conseil canadien de la sécurité qui a vérifié lui-même, sur place, au gouvernement. Comme je vous ai dit, c'est la période de trois années combinées dans le cas de la Nouvelle-Ecosse.

M. LEGER: Bien, M. le Président, en continuant, je veux maintenant retourner au Bureau d'assurance du Canada. Les questions que je vais poser ne sont pas nécessairement par ordre d'importance, mais plutôt par ordre où elles viennent dans votre mémoire.

A la page 8, vous affirmez, dans les généralités, au troisième paragraphe, que l'établissement d'un organisme chargé de toute la sécurité routière, mais vous ne voyez pas pourquoi le budget de cet organisme devrait être fonction du montant des primes d'assurance-automobile.

Moi, j'ai l'impression — je fais peut-être erreur de ce côté — que le fonds de cet organisme était plutôt basé sur un équivalent, et n'a pas été basé uniquement sur les primes comme telles et n'était pas fourni à même les primes. Ce n'était pas une taxe. Peut-être que M. Rankin pourra rectifier quand il reviendra, mais j'ai l'impression que c'est beaucoup plus pris à même le fonds consolidé du Québec auquel tous les Québécois seraient à même de fournir et non pas uniquement les usagers d'automobiles, et cette somme équivaut à 1 p.c. des primes. Je pense que, dans la recommandation 18, c'est bien dit: "Que soit créé un organisme chargé de toute la sécurité routière et disposant de fonds annuels équivalents à 1 p.c. des primes d'assurance-automobile", et non pas 1 p.c. des primes automobiles qui va aller dans ce fonds. Cela provient tout simplement, je pense, du fonds consolidé du gouvernement du Québec, donc en provenance de tous les citoyens, tous les payeurs de taxes, qui équivaut à 1 p.c. des primes.

Est-ce que c'est de cette façon que vous l'aviez conçu?

M. MOREAU: C'est exact, M. le Président. C'est de cette façon que nous l'avons compris, et c'est justement ce que nous nions.

Nous ne prétendons pas qu'il s'agit d'une taxe. Gauvin a été très clair dans sa recommandation 18. Mais il mentionne 20 p.c. des primes d'assurance-automobile comme étant un ordre de grandeur du budget de cet organisme-là. Nous, nous disons: C'est peut-être une façon de le faire, mais on ne veut pas rapprocher le budget de cet organisme nécessairement au montant des primes d'assurance-automobile.

Cela peut par coincidence arriver ainsi, mais il nous semble qu'il n'y a pas de relation directe entre les deux, que cela doive venir du fonds consolidé de la province, comme vous venez de le dire, et que cela doive être en fonction des problèmes de sécurité routière qui existent au Québec, mais pas nécessairement en fonction de l'importance des primes d'assurance-automobile; parce que si cela l'était, cela serait assez curieux que si les primes d'assurance diminuent, on devrait diminuer le budget de la sécurité routière. Je pense que cela serait un mauvais principe.

M. LEGER: Est-ce que vous avez évalué que 1 p.c. était trop ou pas assez?

M. MOREAU: Nous n'avons porté aucun jugement dans ce sens.

M. LEGER: Mais, est-ce que...

M. MOREAU: Nous ne sommes pas en mesure de dire si 1 p.c, qui voudrait dire, en somme, $4 millions, si on considère que $400 millions représentent les primes... Nous ne sommes pas qualifiés, présentement, pour dire si $4 millions sont suffisants ou trop.

M. ROY: J'aurais une autre question, si le député me le permet, pour compléter. Cela nous éviterait de revenir tout à l'heure. En ce qui concerne la question du 1 p.c. ou d'un fonds spécial qui pourrait être créé, est-ce que vous avez étudié la possibilité que cela soit rattaché à ce que coûte le permis de conduire ou

à ce que pourrait coûter, éventuellement, le permis de conduire qui toucherait tous les conducteurs de véhicules automobile? Est-ce que vous avez examiné cette possibilité?

M. MOREAU: D'une façon générale, oui. Mais, même là, on ne croit pas que cela devrait être rattaché au permis de conduire. Nous pensons que la sécurité routière est un problème qui intéresse l'ensemble des citoyens, non seulement les automobilistes, mais les piétons qui n'ont pas de voiture, les enfants, enfin, c'est l'ensemble... comme l'assurance-maladie et l'assurance-hospitalisation et nous ne voyons pas — non pas qu'on s'y oppose fortement — la nécessité de faire une relation directe, soit avec le nombre de voitures, soit avec le montant des totaux des primes d'assurance-automobile, soit avec le nombre de permis de conduire, par exemple. A notre avis, il n'y a pas de relation entre ces choses.

M. ROY: Mais plutôt que de le prendre comme le suggère la commission Gauvin, soit 1 p.c. sur la masse des primes payées — je parle d'un moindre mal ou d'une formule qui pourrait être plus équitable — ne trouvez-vous pas que cela serait plus équitable de le prendre au niveau du permis de conduire plutôt que de le prendre sur la masse des primes d'assurance payées? Parce qu'à ce moment, on réduit quand même le nombre. Il y a bien des conducteurs qui ont des permis de conduire et qui ne sont pas propriétaires de véhicule et qui ne paient pas d'assurance comme telle.

M. MOREAU: C'est bien possible. C'est possible que cette base soit plus juste; c'est fort discutable, mais c'est possible.

M. LEGER: Je voudrais toucher un des points centraux de votre argumentation qui touche la suppression du droit de recours. Je pense que c'est une des bases sur lesquelles vous n'êtes pas d'accord sur le rapport Gauvin.

Je vais tout simplement vous donner ma façon de concevoir et d'approuver le rapport Gauvin et j'aimerais que vous nous disiez pourquoi vous n'êtes pas d'accord là-dessus.

Entre autres, le rapport Gauvin exprime le fait qu'une personne doit être responsable de ses actes, c'est une chose normale et saine. D'un autre côté, le droit d'indemnisation des personnes à qui un tort a été causé ne doit pas reposer uniquement sur la personne qui a posé le geste, parce qu'il y a des facteurs qui sont en dehors de son contrôle, même si le chauffeur est la plupart du temps responsable, soit indirectement ou directement. Il y a le fait social, la quantité d'automobiles, la circulation, la fatigue, un ensemble de causes qui font que c'est un fait social que les accidents, qu'on le veuille ou non, d'ailleurs, le mot le dit "accident", c'est parce que cela n'est pas arrivé ou voulu, à moins de cas spéciaux... D'ailleurs, le rapport Gauvin fait une distinction entre un accident qui est causé, qui n'est pas un accident, mais qui est voulu... Je pense que le droit de recours peut être complètement enlevé du fait que... Les arguments que vous apportez ne me convainquent pas en disant que les gens sont habitués au droit de recours, qu'ils veulent le conserver.

Je pense que ce que les gens veulent avoir est beaucoup plus l'occasion de se faire indemniser et d'être assurés qu'ils ne subiront pas des préjudices que le droit de recours. Actuellement, le moyen est le droit de recours, mais une assurance sans responsabilité personnelle amènerait une indemnisation et, du fait même, permettrait au citoyen d'être protégé.

Quand on compare les recours aux tribunaux comparativement à un système complet de non-responsabilité, on s'aperçoit que les désavantages du droit de recours sont pas mal plus forts. Je vous en cite. Le fait, d'abord, que c'est long quand on va devant la cour. Cela peut prendre du temps. Deuxièmement, c'est insatisfaisant. La preuve, vous l'avez à la page 197; les gens vont plus souvent devant les tribunaux quand les sommes sont plus élevées. On le voit dans le tableau 4 de la page 197. Poursuite avec jugement: la perte moyenne est de $13,000 comparativement aux autres, qui sont: victime seule, $788; victime avec avocat, $3,400; poursuite sans jugement, $8,800 et poursuite avec jugement, $13,800. Là on voit que le pourcentage du rapport de compensation est très bas, 39 p.c. Autrement dit, le citoyen recourt aux tribunaux mais, en plus des inconvénients d'attendre longtemps, il y a le jugement aléatoire, il s'en va à la loterie. Il n'est pas certain d'avoir le montant précis dont il a besoin. La preuve, c'est qu'on n'a qu'à 39 p.c. des réponses-compensations. On reçoit beaucoup moins qu'on a demandé. Je me dis qu'avec un système préétabli avec des barèmes définis le citoyen est sûr de son montant. Même si cela peut être un peu arbitraire, cela peut se corriger d'une année à l'autre avec l'expérience. Même si c'est un peu arbitraire, il y a l'avantage que c'est efficace, c'est simple, c'est rapide, c'est certain. Même si ce n'est pas complètement la somme dont il a besoin, il est sûr de ce montant et il ne subit pas la crainte de dire: J'espère qu'on va passer bientôt, j'espère qu'ils vont m'accorder ce que j'ai demandé. Cela oblige les avocats à demander deux fois plus pour avoir moins. Cela crée tout un système qui fait que le citoyen est réellement mal placé devant la cour parce qu'il n'est pas certain d'avoir le montant auquel il a droit, alors que l'autre système est sûr, c'est inscrit, c'est tel barème. Il a subi tel préjudice, il sait que selon les barèmes préétablis il va voir tel montant.

Vous me direz votre point de vue là-dessus, mais je ne vois pas pourquoi, dans le cas d'un père de famille qui a un accident, qui peut blesser ou même tuer quelqu'un, ses enfants, ses dépendants, sa femme et autres en subiraient les préjudices par la suite. L'acte qu'il a fait, à moins qu'il soit fait d'une façon consciente et

voulue — c'est pris dans le rapport Gauvin — pourquoi la famille devrait-elle en subir les conséquences? Je pense que le système "no fault" au complet, autant le régime de base que le régime supplémentaire, permettrait l'assurance que le citoyen va être dédommagé d'une façon rapide, efficace, simple et assurée tandis que selon l'autre système — on le voit par les chiffres — c'est 39 p.c. des sommes réclamées qu'il reçoit, avec toutes les pertes.

Comment pouvez-vous arriver avec une conclusion différente du rapport Gauvin là-dessus?

M. MOREAU: Notre raisonnement est celui-ci. Nous vivons présentement sous un système basé sur la responsabilité complète. Le rapport Gauvin préconise un système sans égard à la responsabilité totale. Il nous parait que c'est un changement trop brusque à effectuer. Ce que nous proposons c'est un système qui va régler 85 p.c. des problèmes sur une base sans égard à la responsabilité, c'est-à-dire des barèmes préétablis, rapidement, efficacement, sans discussion.

Je vous ferai remarquer que dans le tableau no 4 on parle de pertes moyennes de $3,400, $8,800, $13,827. Toutes les pertes qui apparaissent dans ce tableau seraient compensées par notre système sans égard à la responsabilité. Ce ne sont que les cas où les frais médicaux et les frais de rééducation excèdent $20,000 qui pourraient aller devant les tribunaux ou les cas où il y a mort ou préjudice esthétique grave ou incapacité qui se prolonge au-delà de six mois. En somme, ce sont les cas d'exception. Mais, sur le principe de l'indemnisation sans égard à la responsabilité, nous sommes tout à fait d'accord. D'ailleurs, c'est la base même de notre système.

Seulement, on dit ceci: Dans le cas d'un accident de $1,000, $2,000, $5,000, $10,000 ou $12,000, les gens sont très heureux d'obtenir des indemnités sans discussion, mais, quand il s'agit de mort, quand il s'agit d'une perte très grave comme préjudice ou d'une incapacité complète pendant plus de six mois, nous pensons qu'il peut y avoir des désappointements du fait d'avoir perdu ce droit du jour au lendemain. C'est peut-être, en somme, inconsciemment, une période d'adaptation qu'il nous faudrait. Rien ne nous dit que, dans 20 ans, un système total ne serait pas applicable au Québec. Mais partir d'une extrémité pour aller à l'autre dans une seule étape, il nous semble que c'est trop fort.

M. LEGER: Autrement dit, vous acceptez d'être brusqué à 85 p.c. et de vous adapter à 15 p.c.

M. MOREAU: C'est à peu près ça.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): M. Saint-Germain.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Je pense que c'est un point très important que vous soulevez, M. Léger. La question est très complexe; on a mis du temps à l'étudier, le comité Gauvin aussi. Je participais un peu et, si mes collègues ont quelque chose à ajouter, je les prie de bien vouloir aller de l'avant. Premièrement, dans ce que vous avez dit, vous mentionnez que les délais sont longs. C'est vrai que les délais sont longs. Ils ne sont pas nécessairement longs à cause du système de responsabilité basé sur la faute. Il y a eu des défauts dans l'administration des tribunaux que certains juges, apparemment, se font fort de réformer très rapidement. Tellement qu'il y a des avocats qui représentent des victimes qui commencent à s'alarmer parce que, dans le domaine des blessures corporelles, les délais de règlement d'un sinistre, contrairement à ce qu'on peut croire, ne vont pas à l'encontre de l'intérêt de la victime, mais jouent, la plupart du temps, dans l'intérêt de la victime. Vous savez que ça prend du temps avant de se développer, avant que les spécialistes aient le temps de l'examiner. Du point de vue pratique, en général, un avocat qui fait bien sou boulot ne se presse pas pour régler un sinistre. Quand ils se pressent, c'est parce qu'il y a lieu de croire que c'est un cas qui peut empirer, jusqu'à la mort et ils vont essayer d'obtenir le gros lot immédiatement. C'est un côté pratique de l'histoire. Il y a un fait aussi — c'est un des arguments majeurs qu'on peut invoquer contre le régime AutoBAC — que le comité Gauvin souligne suite à son examen des sinistres auquel les assureurs ont collaboré et que nous n'avons pas pu vérifier. On aurait aimé, suite au travail considérable que nous avons fait, avoir les données de façon à vérifier les conclusions du comité Gauvin. On a beaucoup de respect pour ses membres, mais ils peuvent se tromper comme d'autres experts. On n'a pas eu l'occasion de réviser ces données. Il y a certaines choses qui nous frappent dans ce tableau, qu'on peut soulever. Quand on parle de sous-compensation dans les blessures corporelles importantes, on a examiné dans les dossiers quelle était la compensation accordée par les tribunaux. Nous disons que, si les tribunaux accordent des montants de compensation inadéquats, ce n'est pas la faute au système en soi. Peut-être que les juges et ceux qui aiment faire des réformes, encore une fois, pourraient s'attarder sur ce problème de façon à uniformiser un peu les barèmes qu'eux-mêmes respectent pour arriver à indemniser les victimes.

Je vais vous donner un exemple de cela. C'est un fait bien connu que, dans une compagnie comme la nôtre, on réussit à régler les réclamations de blessures corporelles quand elles sont entre les mains des avocats et dans les cas où elles vont devant les tribunaux. Les montants que les tribunaux acceptent en indemnité équivalent à 25 p.c. des montants qui sont réclamés à l'origine par les victimes. Il y a

tout un processus de soufflage, etc. On dit: Si c'est insatisfaisant, et si Gauvin a raison, même après qu'on a soulevé des doutes sur la valeur de ces données, procédons, si on le désire, à changer les façons d'arriver à établir ces compensations plutôt que de rêver d'un système qui va tout régler.

J'en arrive à cela. Ce n'est pas parce que le rapport Gauvin dit que tout le monde sera indemnisé tout le temps qu'on peut imaginer qu'en pratique, cela fonctionnera.

Ce que M. Gauvin dit, c'est qu'on va avoir un "no fault" de base, pour une couverture de base. Il reconnaît lui-même que cela ne saurait répondre aux besoins de tout le monde. Il procède ensuite pour dire que les unités familiales, le propriétaire d'un véhicule pourra ajouter des couvertures additionnelles à sa police de base.

Nous, on dit que cela ne peut pas marcher. Si on pense que tout le monde va être indemnisé de cette façon-là, ce n'est pas vrai, parce que dans notre société, on ne peut pas rattacher d'une façon constante les victimes d'accidents d'automobiles au propriétaire d'un véhicule avec un revenu donné.

Pour m'expliquer, on a souligné dans la présentation, je pense, que des touristes qui viennent ici, au Québec, ne seraient pas couverts par cela. Vous allez dire: II y a quelques touristes, on pourrait prévoir un petit plan pour eux. D'accord. Mais dans notre société également. Vous avez des amis qui partent ensemble, vous avez peut-être, à un moment donné, huit ou neuf couples qui vont quelque part en fin de semaine, faire du "ski-doo" quelque part, ils se promènent dans deux automobiles. Ils sont de conditions différentes parce qu'ils ont des revenus différents et ils vont voyager dans les véhicules les uns des autres. Il y en a peut-être là-dedans, il y en a certainement, qui n'ont pas de véhicule.

Alors, vous avez un bonhomme qui va gagner $13,000 ou $14,000 par année qui va se retrouver dans un véhicule conduit par un individu qui gagne $8,000, qui n'a pas daigné se prendre une protection additionnelle, et ce bonhomme-là ne sera pas indemnisé. Tout ce qu'il recevra, c'est la couverture de base.

Ce qu'on dit, c'est que c'est impossible d'imaginer que tous les citoyens vont pouvoir s'acheter une couverture additionnelle, vont être conscients de cela et vont s'en acheter une qui va les protéger. On est d'accord avec une couverture de base; mais le moyen de procurer une protection à tous ceux qui vont se situer au-dessus de la couverture de base, les 15 p.c. en question, le moyen le plus facile de le rejoindre directement, c'est en ayant une assurance-responsabilité obligatoire résiduelle établie selon le détenteur du véhicule, le propriétaire du véhicule.

C'est la raison pratique de notre opposition fondamentale à cela. Il me fera plaisir d'expliquer, s'il y a quelque chose que vous ne comprenez pas; ce n'est peut-être pas clair.

M. LEGER: Justement, sur ce point-là, vous avez amené deux idées. La première, c'est le fait que les tribunaux, c'était long. Ce n'est pas nécessairement à cause de la faute. Cela veut dire que souvent les délais sont à l'avantage de la personne, pour qu'elle puisse évaluer réellement ses dommages. Mais cela peut se faire la même chose avec un barème, réévaluer le barème où elle peut se situer, étant donné les dommages qu'elle a eus.

L'autre façon, c'est que si on cherche — et je pense que c'est l'objectif de votre côté comme du nôtre — à faire disparaître l'arbitraire, l'aléatoire, il faut un système nécessairement objectif. Le système le plus objectif n'est pas celui qui essaie de prouver qui est fautif, mais celui qui prévoit la valeur, l'étendue du dommage. C'est cela qui est important.

Devant le juge, il ne s'agit pas de prouver qui est le plus en faute, mais surtout prouver la quantité de dommages que la personne a eus. Vis-à-vis des tribunaux, il n'y a pas que les délais qui sont mauvais. Les tribunaux, souvent, apprécient les dommages d'une façon très aléatoire et il y a des injustices relatives qui sont faites.

Moi, j'aimerais aller plus loin en disant que si on veut régler chaque cas d'une façon individuelle, ce sont les tribunaux. Mais si on veut être objectif et penser à l'ensemble de tout un pays, il faut nécessairement entrer dans le domaine des normes. Les normes, nous n'avons pas besoin des tribunaux pour cela. Si les normes sont là et si l'assurance prévoit une protection qui équivaut à tel degré d'indemnisation devant tel degré d'accident qu'il a pu y avoir, ce sont les normes qui peuvent le faire. C'est la raison pour laquelle je suis encore à la même conclusion que tantôt, c'est que si on veut réellement être objectif devant l'ensemble des citoyens et éviter chaque cas particulier — parce que chaque cas particulier, à ce moment-là, va amener de l'aléatoire devant le juge — je pense que ce sont les normes qui doivent faire cela et on n'a pas besoin de droit de recours à ce moment.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): J'ai voulu dire deux choses. C'est que vous avez beau avoir les plus belles normes possible, dans le système qui est proposé par M. Gauvin, dans tous les cas où il n'y a pas de relation entre les membres d'une unité familiale et le propriétaire d'un véhicule, vos normes ne s'appliqueront pas, c'est aussi simple que cela. Voilà pour les normes. Pour ce qui est des aléas des tribunaux et tout cela, c'est évident qu'il y a des aléas dans les tribunaux, mais ils ne viennent pas nécessairement du fait que les tribunaux errent tellement dans leur définition des quanta. Il y a des centaines de gens au Québec qui sont occupés à négocier des réclamations pour blessures corporelles. Dans la plupart des cas, quand le dossier est ouvert et qu'on a suffisamment d'information, ces gars sont parfaitement au courant de la jurisprudence. Ils vont mettre un montant en réserve pour

le cas, qui, généralement, même s'il se passe deux, trois ou quatre ans, est pas mal près, à 10 p.c. près, du montant qui va finalement être accordé par les tribunaux. Mais ce qui complique le portrait, comme je le disais tantôt, c'est que les expectatives des tierces parties sont soufflées.

Quand on vous dit que les montants finalement accordés par les tribunaux, statistiquement, équivalent à 25 p.c. des montants qui sont demandés à l'origine, il faut bien croire que forcément vous avez raison, qu'il y a beaucoup de gens qui, au cours d'un, deux ou trois ans doivent faire un long voyage pour se ramener au niveau du réel.

M. LEGER: Cela n'empêche quand même pas le fait qu'une personne qui s'assure pour une assurance de base, ce qui équivaut, je pense, à 85 p.c. des cas, peut s'assurer d'une façon supplémentaire pour avoir, comme compensation-indemnité, ce qui équivaut à son cas particulier. Je parle d'un pianiste. On a donné l'exemple, la semaine dernière, d'un pianiste qui se fait arracher un doigt dans un accident. C'est sûr qu'il y a un barème pour un doigt sur une base normale. Il va avoir un montant X dans l'assurance de base du fait que pour une personne qui perd un doigt, cela coûte tant. Mais pour lui, le pianiste, ses doigts valent plus parce qu'il gagne sa vie avec ses doigts. Il peut s'assurer avec un régime supplémentaire qui équivaudra à ce qu'il juge être la valeur normale qu'il devrait recevoir en indemnité s'il était accidenté. Cela ne l'oblige pas à aller devant les tribunaux. Il peut facilement avoir une assurance supplémentaire. Il réclame à son assurance exactement la somme qui est prévue dans son contrat.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): L'exemple du pianiste est un cas extrême. Pour prendre un exemple qui est peut-être plus près de la réalité, disons qu'on prend un étudiant en génie. Le bonhomme a 24 ou 25 ans, c'est un bon candidat, son affaire va numéro 1, il n'a pas d'auto et il ne reste pas chez ses parents. M. Gauvin dit : S'il se promène dans la voiture d'un bonhomme qui est un de ses amis qui gagne $8,000, $9,000 ou $10,000 par année, parce qu'il va se promener avec un gars qui a cela, qui a seulement la couverture de base, lui, mon étudiant en génie, n'aura pas le droit d'avoir plus que cela, à moins qu'il ait pensé que, comme étudiant en génie, il était susceptible de se promener en automobile un jour ou l'autre et aura désiré s'acheter une couverture excédentaire. Ce qu'on dit, c'est que cela ne marchera pas en pratique. Vous ne pouvez pas demander à la totalité des citoyens du Québec de penser à leur affaire dans le domaine des accidents et de s'acheter des petites couvertures selon leurs besoins personnels. On dit, si on veut couvrir cette possibilité, que le moyen le plus sûr et le plus économique est de construire une couverture excédentaire à un régime de base qui est du genre de celui de M. Gauvin pour tous ces cas et de le construire sur le propriétaire du véhicule-automobile. M. Gauvin l'a reconnu, parce qu'il n'a pas tenté de rattacher l'assurance-automobile au détenteur d'un permis. Il a reconnu que le plus sûr moyen est de la rattacher au propriétaire d'un véhicule.

C'est dans ce but qu'on dit cela. Cela n'empêche pas qu'il reste toujours un trou là-dedans, parce que l'auteur qui serait responsable de dommages qu'il causerait, de dommages importants, n'obtiendrait rien pour eux en excédant du régime de base.

Je pense bien que les assureurs n'auraient aucune objection à vendre une couverture additionnelle pour les cas où une personne serait l'auteur de ses propres dommages et qui en voudrait en excédent de la couverture de base d'AutoBAC.

M. MARCHAND: M. le Président, avec la permission du député de Lafontaine...

M. LEGER: Certainement.

M. MARCHAND: ... je voudrais poser une question additionnelle là-dessus, parce que vous parlez de baisser les taux, cela va épargner de l'argent aux consommateurs, et vous parlez continuellement de couvertures additionnelles. Est-ce que cette couverture additionnelle ne reviendra pas au même taux qu'auparavant et avec les mêmes frais d'avocats parce qu'il faudra aller en cour pour le même problème, parce que celui qui ne sera pas protégé, ne sera pas payé selon les dommages qu'il aura subis et s'il n'a pas de couverture additionnelle... Vous avez parlé de l'étudiant en génie, qui, par exemple, a eu un accident grave, ne peut pas exercer sa profession, et demain matin, il a exactement ce que vous donnez. S'il n'a pas pris le surplus, il est fini pour le reste de ses jours. Cela va donner quoi, votre affaire? Je me pose la question. Devant vos explications, vous allumez des lumières, et je me pose des questions graves, parce que je pense qu'au lieu d'avancer on recule.

M. GIASSON: ... le fonds de consolidation devrait demeurer en vigueur afin de pallier pour celui qui est responsable d'un accident et qui n'aurait pas cette couverture excédentaire.

M. SAINT-GERMAIN: Si mes collègues veulent bien m'aider, il y a peut-être quelque chose que j'explique mal, je ne sais pas. Je laisserais de côté la question du fonds d'indemnisation, mais...

M. MARCHAND: Dans vos livres, c'est assez clair. Je trouve que le consommateur est encore pas mal organisé.

M. SAINT-GERMAIN: Je ne pense pas. Je pense que c'est le régime AutoBAC qui est une amélioration très grande par rapport à ce qui existe...

M. MARCHAND: En plus de cela, on n'aura pas notre agent en qui on a confiance, et sur qui on se fie et qui nous défend. Parfois, les grosses compagnies d'assurance, pour sauver l'avocat, oublient de nous défendre, puis elles paient plutôt que de payer les droits d'avocats. Celui qui est coupable est payé et celui qui est responsable est mieux que celui qui n'est pas responsable.

M. MOREAU: Si vous me permettez, il n'y a pas de relation entre le service de... et le système d'indemnisation.

M. MARCHAND: II n'est pas question de relation, il est question de défendre le public dans la loi actuellement.

M. MOREAU: Je vous comprends votre question de tout à l'heure. Vous vous dites: On donne plus d'indemnité, on paie plus de gens, et cela va coûter moins cher. Il y a quelque chose qui ne marche pas là-dedans. L'explication est assez simple: C'est que dans 85 p.c. des cas, vous éliminez l'expert en sinistres. Dans 85 p.c. des cas, vous éliminez l'enquête. Dans 85 p.c. des cas, vous éliminez l'avocat. Le voici, votre gain qui va nous permettre, d'une part, d'indemniser les gens plus rapidement, plus généreusement, et plus de gens...

M. MARCHAND: A quel taux?

M. MOREAU: Ce sont les actuaires qui font les calculs. Vous avez seulement des actuaires et précisément cela va coûter moins cher. Je ne peux pas justifier...

M. MARCHAND: Cela va coûter moins cher en général, mais celui qui sera vraiment pénalisé, ce ne sera pas toujours le coupable. Il faut penser à cela aussi.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): M. le Président, si vous me permettez, c'est un point très important que M. Léger a soulevé. C'est important à comprendre. Cela n'a rien à voir avec le système actuel de mise en marché. On est à s'adresser une question, à savoir si le consommateur, si le Québécois sera bien indemnisé en vertu du nouveau régime suggéré par Gauvin ou du régime suggéré par le Bureau d'assurance du Canada.

M. MARCHAND: Le plan Gauvin procure effectivement un très bon niveau de compensation, mais il repose sur l'obligation, la nécessité qu'auraient tous les Québécois, qu'ils soient propriétaires d'une automobile ou pas, de repenser leur propre programme d'assurance vis- à-vis des accidents qui sont susceptibles d'arriver en cas d'accidents d'automobile. Ce qu'on dit sur cela, c'est que c'est difficile d'imaginer que tout le monde, propriétaire ou non d'une voiture au Québec, va faire cette opération-là. Pour éviter que les gens reçoivent moins dans les cas pénibles que dans le système actuel, on suggère de garder et d'introduire un "no fault" pour 85 p.c. des cas, qui devrait apporter tout autant, sinon plus qu'actuellement, et, pour l'excédent, de conserver l'assurance-responsabilité obligatoire pour les 15 p.c. des cas qui ne seraient pas couverts par la couverture de base, alors que Gauvin, lui, dit que, dans les cas des 15 p.c. en question — je ne sais pas, dans son cas, si c'est 15 p.c. ou 20 p.c. ou 25 p.c. ou 5 p.c. ou 10 p.c. — dans ces cas, on va faire une obligation au Québécois de penser à son affaire et de s'acheter la couverture qu'il veut.

M. BONNIER: Est-ce que le député de Lafontaine... Je voudrais seulement demander une précision.

M. LEGER: Allez-y, allez-y.

M. BONNIER: Qu'est-ce que vous voule. dire par obligatoire, à ce moment? Ce serait aussi obligatoire que la base.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Actuellement, on a un système de responsabilité civile obligatoire. Non, ce n'est pas tout à fait obligatoire. C'est en vertu de la Loi d'indemnisation, de solvabilité. Il y a des suggestions qui sont faites, je pense, quant à l'assurance obligatoire. Mais si on a un système de responsabilité civile obligatoire, cela couvrira tous ces cas.

M. LEGER: M. le Président, je vais reprendre, pour ne pas faire de préjudice au député de Beauce-Sud.

M. MOREAU: ... et l'assurance de responsabilité civile résiduelle. Les deux vont de pair.

M. ROY: Le député de Beauce-Sud n'est pas susceptible.

M. MOREAU: Tandis que, sous le régime Gauvin, l'assurance de base est partie obligatoirement, mais chacun doit décider, chez lui, s'il doit s'acheter une assurance personnelle ou familiale au cas où...

LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable député de Lafontaine.

M. LEGER: Pour ne pas, quand même, enlever le droit de parole au député de Beauce-Sud, qui a des questions certainement pertinentes à poser, je voulais simplement vous demander: Etant donné que tantôt, M. Moreau, vous avez dit au ministre que, basé sur la page 12 de votre rapport, paragraphe c): "Même si nous n'avons pas encore terminé notre analyse des

coûts respectifs des deux systèmes, nous pouvons déjà en conclure que ceux de l'assurance AutoBAC jointe à l'assurance-responsabilité civile complémentaire que nous préconisons seront sensiblement inférieurs à ceux du régime du comité..."

Est-ce que vous pourriez nous dire quel est l'ordre de grandeur du coût de l'assurance-responsabilité civile? Mettons l'exemple d'une prime de $400 qui inclurait le coût de l'assurance de base et la responsabilité civile? Quel serait l'ordre de grandeur du coût de la responsabilité civile dans votre projet?

M. MOREAU: C'est sûrement minime, M. Léger, mais je ne sais pas si nos actuaires peuvent nous répondre présentement là-dessus. Mais vous dites... Si je comprends bien, vous avez pris l'exemple d'une prime de $40...

M. LEGER: C'est $400.

M. MOREAU: ... $400. Je n'ai pas l'impression que l'assurance de responsabilité résiduelle coûtera plus que 5 p.c. de cela, peut-être entre 5 p.c. et 10 p.c. C'est un...

M. LEGER: Cela voudrait dire: $380-$20. Quelque chose comme cela?

M. MOREAU: Probablement à peu près cela. C'est minime, justement parce que la responsabilité résiduelle va prévoir les cas d'exception seulement, au lieu de prévoir tous les cas comme aujourd'hui. Ce sont seulement les cas qui excèdent $20,000, qui excèdent $250 par semaine. C'est minime comme protection. C'est pour cela qu'on ne se gêne pas pour suggérer qu'elle soit obligatoire. Il n'y a pas d'exception, que tout le monde soit protégé.

M. LEGER: Maintenant...

LE PRESIDENT (M. Cornellier): M. Saint-Germain.

M. LEGER: Je n'ai pas terminé, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député me mentionne qu'il n'a pas terminé sa question.

M. LEGER: Excusez-moi. Vous vouliez rajouter, sur la même question?

M. SAINT-GERMAIN: Oui, c'est cela. M. LEGER: Allez-y.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): On ne peut pas vous répondre exactement sur cela. C'est qu'il y a une myriade de plans auxquels on peut penser, mais on a toutes les statistiques. Si on nous demandait, à un certain moment... Vous avez raison. Vous mettez le doigt sur des questions de principe pour une bonne part et une question d'organisation du système de compensation. Mais comme cela implique des principes, une fois que cela sera nettoyé, nous, on peut faire le coût de différents systèmes. Actuellement, nous demander cela, on ne peut pas vous dire: On a toutes les statistiques. On peut vous dire combien il y en a qui dépassent $35,000 par exemple. Mais jugez de la difficulté pour nous de faire le coût de différents systèmes auxquels on a pu penser et auxquels Gauvin fait allusion, etc.

M. LEGER: Je vais maintenant toucher à l'aspect de la facilité.

Selon le rapport Gauvin, aux recommandations 42 et 46, il est dit que le surintendant des assurances ait le pouvoir de fixer un tarif maximum pour certains risques et répartir sur l'ensemble des assureurs la somme des différences entre le taux maximum et les primes exigées par les assureurs en sus du maximum.

Autrement dit, vous semblez dire dans votre rapport qu'il ne faut pas enlever l'aspect de la "Facilité" parce que cela vous permet d'accrof-tre la concurrence. Le rapport Gauvin dit que, si on enlève ce système de "Facilité" qu'on appelle pour ceux qui ne sont pas assurables ou très peu assurables, il va aller voir la compagnie qui a le taux le plus bas et la prime devra normalement être chargée à cette personne et on va lui demander le taux le plus bas quand même et cela sera l'ensemble des compagnies qui vont avoir à assumer la différence et donc, c'est égal pour toutes les compagnies.

Est-ce que vous êtes réellement contre cette recommandation parce qu'à la page 17, vous semblez dire que vous n'êtes pas d'accord là-dessus, sur l'abolition de la "Facilité"?

M. MOREAU: Nous ne sommes pas contre, mais je dois vous dire qu'il y a un doute dans notre esprit quant à la signification exacte ou la portée exacte de la recommandation 42. Le rapport Gauvin dit que soit aboli le mécanisme du "Facilité". Mais rendu à la recommandation 42, il semble revenir avec un mécanisme qui lui ressemble drôlement, mais qui n'est pas le même.

Nous disons qu'au lieu d'empêcher la concurrence, la "Facilité" favorise la concurrence. Cela permet à tous les assureurs d'accepter les mauvais risques, qu'on appelle des risques défavorables dans l'industrie, à un taux raisonnable et de le refiler par voie de réassurance de la "Facilité" à l'ensemble des assureurs. C'est ce qui est le but de la "Facilité". La "Facilité" avait été mise sur pied il y a plusieurs années dans le but de procurer un marché complet. A ce moment, il y avait des problèmes de marché. Avec la "Facilité", tout le monde se trouve de l'assurance. Il n'y a pas de problème de marché au Québec dans le moment. Il n'y a jamais

personne qui a de la difficulté à se trouver de l'assurance et, s'il y en a, cela ne dure pas longtemps.

Je peux vous dire qu'au Bureau d'assurance du Canada, on a un bureau d'information où, comme le disait M. Edmonston il y a quelques jours, on répond à 5,000 ou à 6,000 demandes de renseignements par année et quelques plaintes, mais nous n'avons à peu près jamais de plaintes de marché et, dès que nous en recevons une, quand quelqu'un nous dit: Je ne peux pas m'assurer, je n'ai pas trouvé de couverture, en quelques heures, nous lui trouvons une protection, sans aucun problème particulier.

Alors, la "Facilité" a été faite pour cela. Si on ne l'appelle pas "Facilité", il faudra lui trouver un autre nom, mais il faut un dispositif quelconque de façon à ne pas imposer à un assureur ce qu'il y a de plus mauvais comme risque parce qu'il y en a des mauvais risques, vous savez.

Quand les assureurs ont mis sur pied la "Facilité", on a dit aux différents gouvernements provinciaux: Très bien. Nous prenons cela. Cela va devenir notre problème de procurer un marché aux automobilistes, mais de votre côté, soyez justes et donnez-nous un bureau de révision des permis de façon que nous, les assureurs — qui sommes en situation pour voir les mauvais risques, pour constater les conducteurs qui ne devraient pas être sur la route — puissions soumettre ces cas à ce bureau, bureau qui serait formé de personnes indépendantes et qui aurait le pouvoir d'éliminer ces gens de la route. Cela ne s'est jamais matérialisé.

Nous, les assureurs, avons rempli notre part du marché, mais les gouvernements provinciaux n'ont pas rempli leur part du marché en nous procurant, justement, ce bureau de révision, avec le résultat que les assureurs sont forcés d'assurer des risques que je qualifierais d'épouvantables, des gens dont le permis devrait être annulé depuis longtemps, des gens qui sont une menace sur la route, mais pour des raisons quelconques... Je ne blâme pas nécessairement le Bureau des véhicules automobiles; il y a des cours de justice aussi qui sont très généreuses et qui sont très douces dans les condamnations.

Alors, la "Facilité" est nécessaire ou un organisme semblable.

M. LEGER: Dans le rapport Gauvin, quand même, on a affirmé que les compagnies utilisaient trop la "Facilité" pour les risques et je ne sais pas — vous me corrigerez — mais j'ai l'impression que si les compagnies vont obtenir des primes des personnes qui sont des mauvais risques et, pour les avoir, elles doivent avoir le tarif le plus bas, elles n'auront pas à subir le coût qui sera réparti sur toutes les compagnies, de la différence qu'elles devraient exiger et le taux qu'elles exigent.

Est-ce que ce n'est pas une occasion, pour les compagnies, de vouloir avoir les taux les plus bas pour avoir le plus de primes possible et la différence de primes qui manquent, ce sont toutes les compagnies qui vont l'assumer. Je pense que cela amène une meilleure concurrence. Cela va inciter les compagnies à vouloir avoir les primes les plus basses pour être celles qui vont être choisies puisqu'elles n'auront pas à subir les conséquences du mauvais risque, puisque c'est divisé entre toutes les compagnies.

Deuxièmement, est-ce qu'actuellement les taux des compagnies d'assurance ne sont pas basés en incluant aussi, je ne dirais pas tous les mauvais risques, mais le danger de mauvais risques possibles? Ce qui fait qu'on est obligé de mettre des taux plus élevés, parce qu'on dit: II faut tenir compte des mauvais risques aussi, tandis que dans le cas présenté par le rapport Gauvin, cela permet seulement de ne pas se préoccuper de ces mauvais risques puisqu'ils vont être divisés parmi tous les autres. Et ceux qui auront la prime, — donc un revenu supplémentaire permettant d'avoir beaucoup plus de fonds de roulement pour faire des investissements, etc., — seront ceux qui auront les tarifs les plus bas. Est-ce que ce n'est pas une occasion d'amener une meilleure concurrence pour que chacun ait les tarifs les plus bas?

M. MOREAU: Je vous avoue, M. Léger, M. le Président, qu'il y a un élément qui me manque dans la suggestion de M. Gauvin. Je ne dis pas que sa suggestion n'est pas bonne ou fait défaut, mais je ne la comprends pas à 100 p.c. Il y a quelque chose qui nous manque dans cela. Peut-être que votre raisonnement, comme vous le faites, est exact, mais personnellement je ne peux pas comprendre qu'il y ait là une solution telle qu'il le suggère. Je ne sais pas si mes confrères, si mes collègues peuvent expliquer le raisonnement de M. Gauvin, mais moi je ne comprends pas, je ne vois pas que ce soit une solution. Il y a des éléments qui nous manquent, ils ne nous ont pas été expliqués.

M. LEGER: D'après ce que je peux voir, il n'y a personne qui semble vouloir vous aider. Ils semblent avoir la même compréhension ou la même incompréhension. M. Rankin ou M. Gauvin pourrait expliquer cela.

M. TETLEY: Même M. Rankin, de très bon gré, consent à venir, si vous êtes d'accord, peut-être ce soir ou à la fin, afin de donner quelques explications. N'oubliez pas toutefois que le comité Gauvin reviendra d'ici quelques semaines.

M. LEGER: Je suis d'accord que les représentants du rapport Gauvin ou M. Rankin puissent répondre. Je suis d'accord là-dessus.

A la page 376, au quatrième paragraphe, parce qu'il croit en ces avantages, le comité Gauvin fait la recommandation suivante: "Si toutes les réformes proposées et décrites ci-haut sont appliquées, l'administration du nouveau régime peut être confiée à l'entreprise privée". C'est, selon le rapport Gauvin, le "last chance call".

Est-ce que, d'après vous, quant aux recommandations de 39 à 60, ou spécialement la recommandation 59, savoir "Que les mesures suivantes soient adoptées afin de réaliser les économies escomptées" vous êtes en mesure de nous dire, aujourd'hui, si elles sont réalisables par des compagnies d'assurance dans l'entreprise privée?

M. MOREAU: Ce que je peux répondre ici, c'est qu'il faut faire certaines réserves. Parce que M. Gauvin, dans ses recommandations, nous arrive avec des éléments complètement nouveaux, des choses qui n'ont jamais été expérimentées; mais malgré tout cela, malgré les réserves normales qu'il faudrait faire, je n'hésite pas à dire que l'entreprise privée peut fonctionner dans ces conditions tout aussi bien ou peut-être mieux qu'une entreprise gouvernementale.

M. LEGER: Alors, vous seriez capables de réaliser toutes les recommandations, du moins à l'article 59, de a) à f ).

M. MORE AU: Je le crois. M. LEGER: D'accord.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Je pense qu'il est important d'introduire une distinction. Vous savez que là-dedans il y a beaucoup de choses qui ne peuvent pas être réalisées sans que le législateur décide d'organiser notre champ d'activité commercial d'une façon autre que ce qui est organisé actuellement. Peut-être que le législateur, dans sa sagesse, décidera qu'il y a beaucoup de ces recommandations qui sont réalisables, mais ne sont peut-être pas désirables. Selon ce que le législateur décidera quant au degré de désirabilité de ces suggestions, il nous fera plaisir, comme on l'a toujours fait par le passé, d'appliquer le système en question.

M. LEGER: Autrement dit, ce sera un choix politique du gouvernement de choisir ce qu'il calcule devant être immédiatement réalisé, mais que vous, vous êtes prêts à accepter. Vous calculez être capables de les réaliser si le législateur décide que toutes ces recommandations doivent être mises en pratique.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Comme citoyen du Québec, on aimerait penser que dans une question aussi importante que celle-là, la politique soit exclue.

M. LEGER: Quand je parle de choix politique, je veux dire une décision politique.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Qu'on se penche plutôt sur les moyens de donner aux Québécois le meilleur système possible au meilleur coût possible.

M. LEGER: Cela, c'est une décision politique. Le rapport Gauvin, deux paragraphes plus haut, dit: "L'écart des coûts d'administration entre un monopole étatique et une entreprise privée réformée est de l'ordre de 3 p.c". Est-ce que vos études, jusqu'à maintenant, les chiffres que vous avez, vous permettent de corroborer la déclaration du rapport Gauvin à ce chapitre?

M. MOREAU: Nous n'avons pas fait les calculs sur la même base que M. Gauvin. Comme question de fait, il y a des points de vue inconnus pour les faits donnés dans le rapport de M. Gauvin. Mais à notre avis, l'écart, entre l'entreprise privée et l'entreprise d'état, n'est même pas de 3 p.c. Nous ne sommes pas convaincus que les chiffres que M. Gauvin nous a donnés, concernant les frais de fonctionnement des systèmes étatiques, sont exacts. Ce n'est pas une critique que je fais mais il y a plusieurs façons de voir ces choses, il y a plusieurs points de vue où on peut se placer. A notre avis, à tout prendre, il n'est pas exagéré de dire qu'un système d'entreprise privée ne devrait pas coûter plus cher qu'un système étatique. Il ne devrait même pas y avoir une différence de 3 p.c.

M. LEGER: Vous n'avez pas de chiffres, vous affirmez seulement que c'est moins de 3 p.c.

M. MOREAU: Non, parce que nous n'avons pas eu tellement de chance, nous connaissons nos frais d'administration, mais les entreprises privées n'ont jamais été gâtées par les systèmes étatiques au point de vue de renseignements. On n'a jamais pu obtenir de la Saskatchewan les frais véritables, tous les renseignements de base qu'on aurait aimé avoir pour apprécier ce système, on n'a jamais donné ça. On n'obtient même pas de statistiques sur les accidents en Saskatchewan. Vous pouvez, par le livre vert qui représente tous les résultats de tous les assureurs, juger de chacune des classes, dans tout le Canada, dans chaque territoire, sauf la Saskatchewan, car elle ne souscrit pas à ce genre de renseignements. Il n'y a pas moyen de savoir de la Saskatchewan si une classe subventionne l'autre ou si un territoire subventionne l'autre. Ces chiffres ne sont pas publiés. Cela revient à dire ce que je disais, on n'a pas été gâté par les renseignements et on ne nous aide pas beaucoup à établir des chiffres dans ce sens. On ne demanderait pas mieux que de le faire, M. le Président.

M. LEGER: Est-ce que vous pourriez me dire si les profits de la plupart des compagnies d'assurance qui sont bien établies, solides... Est-ce que la proportion des profits proviennent davantage de ces 3 p.c. ou 2 p.c. sur les primes par rapport aux dépenses d'administration que les profits venant des investissements des som-

mes que les compagnies ont comme roulement pendant l'année présente? Est-ce que les sommes de profit sont plus fortes venant des profits sur les primes que sur les profits venant d'investissements?

M. MOREAU: Je pense que M. Saint-Germain serait plus qualifié que moi pour répondre à cette question.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Je ne suis pas mieux qualifié mais je vais essayer de répondre. C'est une réalité avec laquelle je vis peut-être plus étroitement que M. Moreau. Le rapport Gauvin, à ce chapitre, à notre sens, apporte une grande contribution au débat. Parce que tant et aussi longtemps qu'on attaque le niveau élevé des primes d'assurance-automobile en soupçonnant les compagnies d'assurance et en l'affirmant, de faire des profits absolument abracadabrants, ça nous préoccupe comme assureur. Mais après le rapport Gauvin, avec le degré d'objectivité et le degré de compétence professionnelle qui est mis dans le chapitre 6, à la partie 3, il serait impossible de prétendre que les compagnies d'assurance font des profits exorbitants. En fait, je me contenterai que tout ce qui est là est de la plus haute compétence professionnelle. Tous les éléments pour apprécier la seule notion, qui prévaut dans notre domaine comme dans tous les autres et qui est le rendement sur le capital investi, est bien mise à nu avec toutes ses composantes. En fin d'analyse, on retrouve que le profit des assureurs d'automobiles est évalué à 15.7 p.c. avant impôt, en général on parle d'un taux d'imposition de 40 p.c. à 50 p.c.

Et c'est moins que les fabricants de véhicules automobiles qui ont 21.8 p.c. Vous pouvez peut-être imaginer, si vous aimez spéculer, qu'étant donné que les assureurs d'automobiles sont des grands acheteurs de pièces d'automobiles et de nouveaux véhicules, dans le niveau des primes d'assurance-automobile se reflète une partie des profits des fabricants de véhicules automobiles.

A 15.7 p.c. avant impôt, Gauvin dit bien que c'est raisonnable et quand on tient compte, en plus de cela, des éléments de risque qu'on peut analyser très facilement, c'est effectivement ce qu'il y a de plus raisonnable.

Alors pour répondre plus spécifiquement à votre question, il est un fait qu'une partie du profit qui provient du profit de souscription, s'il y a un excédent entre la prime et le montant de réclamation et les frais d'administration qu'on débourse, il y a aussi une partie de notre profit qui provient de notre revenu d'investissement des montants dont on a la jouissance pendant un certain temps.

Les deux combinés, vous les rapportez au capital investi et vous trouvez le rendement de 15.7 p.c. avant impôt, qui est moins que les banques et moins que d'autres secteurs d'activités financières ou commerciales.

M. LEGER: Mais la plus grosse partie, c'est quoi? Ce sont les investissements ou les primes?

M. SAINT-GERMAIN (Guy): D'une façon générale, par les temps qui courent, le revenu de placement est supérieur aux profits de souscription.

M. LEGER: Maintenant, est-ce que vous êtes d'accord — étant donné que M. Moreau a parlé tantôt que les entreprises étatiques sont avares de renseignements sur les coûts de fonctionnement — avec la recommandation de l'APA qui demandait justement un débat public sur les tarifs et disait: Le Québec devrait instituer des audiences publiques sur les tarifs avant d'accorder des augmentations aux compagnies et, de là, devrait permettre à un maximum de citoyens de se faire entendre et un avocat devrait être commis d'office pour représenter la cause des consommateurs? Est-ce que vous êtes d'accord aussi, avant d'avoir une augmentation de tarifs, de passer par un débat public, comme vous semblez demander que ce soit la même chose pour l'entreprise d'Etat?

M. MOREAU: C'est une chose à laquelle on ne pourrait pas s'opposer, si le gouvernement le décidait, mais nous, nous disons que ce n'est absolument pas nécessaire. Dans les conditions actuelles, même la loi ne prévoit pas de contrôle par le surintendant. Le surintendant n'a pas d'autorité, en principe, sur les taux. Or, en fait, ce qui arrive, c'est que chaque année, les assureurs vont soumettre leur barème de tarification, du moins quand ils ont l'intention de les changer. Et le surintendant a l'occasion, à ce moment-là, de les apprécier. Alors, cela pourrait être fait d'une façon un peu mieux prévue, un peu plus catégorique que cela. Mais qu'il y ait des audiences publiques pour apprécier les taux d'assurance-automobile, cela représente certains dangers et, à notre avis, cela ne comporte pas d'avantages réels.

M. LEGER: Je dis cela parce qu'étant donné que nous sommes dans la recommandation de M. Gauvin qui dit, comme je l'appelais tantôt le "last chance call", c'est quand même, avant d'arriver à des conclusions de l'assurance étatique, une occasion de vérifier réellement si c'est normal des augmentations qui peuvent survenir sans que tous les citoyens le sachent étant donné que cela va être une obligation pour les citoyens de s'assurer maintenant, qu'ils sachent qu'ils s'assurent au meilleur taux.

M. MOREAU: Dans les recommandations Gauvin, vous avez remarqué que M. Gauvin fait des recommandations précises quant à l'autorité du surintendant et son contrôle sur la tarification. C'est beaucoup plus serré que ce qui se produit dans le moment. Les assureurs n'ont aucune objection à cela, aucune objection du

tout. Si le gouvernement juge à propos que c'est la façon de le faire, les assureurs vont coopérer. Ils sont habitués à des contrôles, les assureurs. C'est l'industrie la plus contrôlée par les gouvernements. D'une part, elle est contrôlée du côté de l'impôt et, d'autre part, elle est contrôlée du côté de la solvabilité. Deux points de vue absolument différents.

M. LEGER: Ce matin, l'Association des policiers provinciaux a amené une suggestion qui proposait qu'il y ait aussi des points de mérite, en plus des points de démérite et que ces points de mérite amèneraient des réductions des taux d'assurance pour ceux qui sont de bons assurés, ceux qui ne vous causent pas trop de problèmes. Est-ce que les compagnies d'assurance ont déjà étudié cette éventualité et est-ce que cela dérangerait tout votre barème actuel de tarification?

M. MOREAU: Non, actuellement, il y a le système de points de démérite dans chacune des provinces. Celui du Québec, à notre avis, est à peu près le plus avancé de toutes les provinces. Nous nous apprêtons prochainement à recommander un système uniforme dans toutes les provinces du Canada, de façon qu'une personne qui voyage de l'une à l'autre des provinces n'ait pas de problème à ce point de vue-là.

Le système dont on parlait ce matin qui donnerait des points de mérite peut être une façon de voir les choses. Nous ne nous sommes pas rendus à ce détail. Mais, ce qui est certain, c'est qu'avec la venue de l'assurance sans égard à la responsabilité, toute la base de la tarification va nécessairement changer, peut-être pas brusquement du jour au lendemain, mais au cours d'une période de deux, trois, quatre ou cinq ans; parce que, à ce moment, on ne peut plus tenir compte de la responsabilité du conducteur dans les accidents ou, du moins, beaucoup moins. Il est fort possible qu'une des bases de tarification soit le système de démérite ou le système de mérite selon le cas. Il est fort possible que cela devienne un des éléments de la tarification pour déterminer si le risque vaut plus qu'un autre.

M. LEGER: D'accord, je vous remercie. Je vais laisser la parole à mon confrère qui doit avoir des choses à vous demander.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Beauce-Sud, qui attend patiemment son tour depuis longtemps.

M. ROY: Merci, M. le Président. Il y a des questions qui ont été posées. Evidemment, nous n'aurons pas besoin de revenir sur le même sujet.

Je veux remercier M. Moreau qui a bien voulu se rendre à la demande que j'avais faite, à midi, de nous remettre une copie des notes qu'il avait lues devant la commission parlementaire en attendant que nous puissions prendre connaissance de la transcription du journal des Débats.

M. Saint-Germain a énoncé un principe tout à l'heure sur lequel nous sommes entièrement d'accord, soit que l'objectif visé est d'offrir le meilleur service possible au meilleur marché possible. Comme nous sommes à étudier les buts de la commission, qui sont éventuellement de trouver des moyens afin de permettre une réduction de primes s'il y a lieu, tout en offrant le maximum de services, autrement dit un service d'assurance de la meilleure qualité possible. J'aimerais toucher un point qui n'a pas été abordé aujourd'hui, à savoir les revenus des compagnies d'assurance.

Nous en avons discuté avec M. Gauvin lorsqu'il a comparu devant la commission parlementaire. Evidemment, il n'y avait pas eu d'étude faite dans le rapport Gauvin à ce sujet. J'aimerais, si c'est possible, qu'on me donne certains chiffres, à savoir, quelle est la proportion des revenus qui sont perçus par l'ensemble des compagnies d'assurance en ce qui a trait aux revenus de placements, d'une part, par rapport aux revenus de primes. Je pense que ce sont les deux seuls secteurs de revenus que perçoivent l'ensemble des compagnies d'assurance. Si les revenus de placements sont supérieurs, il est évident qu'au niveau de la perception des primes, au niveau du changement des tarifs des primes, il peut y avoir une influence directe. Comme on ne semble pas en avoir tellement parlé, j'aimerais avoir des précisions à ce sujet, j'aimerais avoir le maximum d'information.

M. MOREAU: J'ai l'impression que le comité Gauvin a examiné très attentivement ce point de vue, soit les profits d'investissement vis-à-vis des profits techniques, mais il n'en a pas donné de tableau avec des cycles. C'est probablement, comme il l'a dit lui-même plusieurs fois, dans les documents qu'il a remis au ministère. Il est évident que les profits d'investissements à long terme rapportent un peu plus que les profits techniques, mais la grosse différence, c'est que les profits techniques sont très cycliques, en ce sens qu'ils montent et descendent continuellement. Il y a des cycles très favorables et des cycles très défavorables.

Quant aux profits de placements, ils ne sont pas influencés par les mêmes éléments. Ils sont beaucoup plus stables.

M. ROY: Quelle est la proportion des revenus de placements dans leur ensemble par rapport au niveau de perception de primes pour les compagnies d'assurance?

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Pour ce qui est de la réponse, malheureusement, nous ne l'avons pas pour le Québec, mais le Bureau d'assurance du Canada conduit une étude,

chaque année, précisément sur ces questions. Il me semble, à moins que ma mémoire ne soit pas bonne, que le surintendant des assurances en reçoit également une copie dans toutes les provinces.

Pour l'année 1973, le dernier chiffre que j'ai évidemment, dans l'automobile, la perte de souscriptions au Canada équivalait à 5.3 p.c. des primes nettes.

M. ROY: Qu'est-ce que vous entendez par la perte de souscriptions?

M. SAINT-GERMAIN (Guy): On a déboursé plus de réclamations qu'on a perçu de primes.

M. ROY: Dans la proportion de 5.3 p.c, dans l'ensemble du Canada.

M. SAINT-GERMAIN: De 5.3 p.c. dans l'ensemble du Canada pour l'année 1973, alors que le revenu de placements, pour sa part, se situait à 4.7 p.c. de la prime nette laissant un déficit de .6 p.c.

M. ROY: Ce sont les chiffres les plus complets que vous pouvez nous donner. Maintenant, je remarque une chose, M. le Président, et j'en fais part à la commission. Ce n'est pas la première fois que le Bureau d'assurance du Canada nous fait connaître des chiffres semblables selon lesquels ils sont toujours en déficit. J'aimerais qu'on m'explique comment il se fait que les compagnies d'assurance réussissent à tenir le coup, si elles sont toujours en déficit. Je pense que la question mérite d'être posée parce que cela fait longtemps qu'on entend dire ces choses. Je suis un peu surpris, parce que j'ai l'impression d'être devant un phénomène un peu extraordinaire.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Vous avez parfaitement raison. Je pense que tous les membres ici sont particulièrement heureux que vous souleviez la question, parce qu'on n'a pas l'intention de passer pour autre que ce qu'on est. On n'est quand même pas des samaritains à ce point. On est en affaires et il faut faire un profit. C'est comme dans toutes les autres activités commerciales ou financières, il y a des années de profit et il y a des années de perte. Actuellement, dans les compagnies de trust, par exemple, je ne pense pas qu'il y ait grand monde qui soit très heureux de la tournure des événements, que ce soit la Société de fiducie du Québec ou les autres. Dans l'assurance-automobile, l'année dernière n'a pas été tellement profitable. Cette année non plus, cela ne va pas très bien. On est frappé nous aussi par l'inflation. Si vous regardez sur une période de dix ans, on atteint à un niveau de profitabilité que M. Gauvin a bien souligné comme étant raisonnable à 15.7 p.c. avant impôt, sur la période de 1965 à 1970 qu'il a retenue. Contrairement à ce qu'on pourrait penser, le marché de l'assurance, le nombre de compagnies n'est pas rigide. Il y a effectivement des compagnies qui plient bagages, en plus grand nombre que vous pensez. Il y en a qui s'en vont, il y en a qui viennent, etc. Cela ne paraît pas toujours, mais c'est un fait. Je n'ai pas les chiffres exacts, mais on pourrait sortir cela. Il y en a plusieurs dizaines qui viennent et qui vont comme cela, parce qu'elles ne trouvent pas leur profit.

M. ROY: Justement, je voulais revenir sur ce point, parce que tout à l'heure, j'avais bien compris qu'on parlait d'un profit moyen, de 15.7 p.c. avant impôt. C'est cela qu'on nous a dit tout à l'heure. A la suite des chiffres que je vous ai demandés, on arrive avec un déficit de .6 p.c.

M. MOREAU: D'accord.

M. ROY: Vous parlez sur une période de dix ans, d'accord. Est-ce que cela veut dire...

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Je peux vous dire que j'ai les chiffres ici, pour 1972.

M. GIASSON: Quand vous parlez d'un profit de 15.7 p.c, est-ce que c'est pour l'ensemble de toutes les activités d'assurance générale ou vous vous limitez à l'automobile?

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Quand M. Gauvin parle d'un rendement sur le capital investi de 15.9 p.c. avant impôt, il parle pour la période 1965 à 1970 pour l'ensemble des compagnies oeuvrant, je pense, au Québec.

M. GIASSON: Exclusivement l'automobile ou les autres ventes, en général?

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Taux de rendement, c'est exclusivement dans ce cas pour l'assurance-automobile.

M. GIASSON: Cela va.

M. MOREAU: La base n'est pas la même. Quand on parle de 4 p.c. ou 5.3 p.c, c'est 5.3 p.c. sur les ventes. Tandis que les 15.7 p.c. sont un profit sur les investissements des actionnaires des compagnies d'assurance. Ce n'est pas du tout la même vente.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Oui, je m'excuse. J'ai répondu à votre question, parce que vous nous orientiez sur la base des primes. Vous vouliez savoir par rapport aux primes. Ce que M. Moreau dit, c'est ce que Gauvin dit.

M. ROY: Ce profit de 15.7 p.c. n'est pas un profit sur le chiffre d'affaires global. C'est un rendement au niveau du capital-actions.

M. MOREAU: Investi par les actionnaires... M. ROY: Investi par les actionnaires.

M. MOREAU: ... de la compagnie d'assurances.

M. ROY: C'est complètement différent.

M. MOREAU: S'il investi $1, cela lui a rapporté $0.157 sur son investissement.

M. ROY: Et non sur le chiffre d'affaires.

M. MOREAU: Et non sur le chiffre d'affaires.

M. ROY: C'est complètement différent.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Peut-être pour vous fournir une pièce additionnelle au casse-tête, dans le rapport Gauvin, on exprime bien qu'une des notions importantes pour apprécier le taux de rendement, c'est le rapport qui existe entre le capital et le volume d'affaires qui est souscrit par une compagnie, en vertu des lois fédérales actuelles qui sont plus rigides, plus exigeantes que les lois provinciales. Les lois provinciales tentent d'arriver à cela, semble-t-il. On tient pour acquis qu'avec $1 de capital, on peut souscrire $2 de prime d'assurance-automobile. Cela peut être un ratio qui est différent d'une façon générale "the rule of the thumb", comme on dit, c'est deux pour un.

M. ROY: C'est deux pour un. Ce qui veut dire que les 15.9 p.c, au niveau du rendement du capital, pourraient se situer au niveau d'environ 8 p.c, entre 7 p.c. et 8 p.c, au niveau du volume d'affaires, du montant total souscrit, si on prend cette base de calcul.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): C'est une façon...

M. ROY: Je pose la question, parce que je veux être sûr d'avoir bien compris.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): C'est une façon de voir les choses. D'ailleurs, M. Gauvin, à un certain moment, là-dedans... Je n'ai pas lu cela, parce que cela critiquait les assureurs, mais je peux le lire maintenant, si cela vous intéresse. On dit, en conclusion, à la page 242, que nous constatons, cependant, de la part de l'industrie de l'assurance, un manque de dynamisme qui joue au détriment de l'intérêt des assurés.

Ce à quoi il fait allusion là-dedans, c'est qu'il dit qu'il n'y a pas suffisamment de recherches qui ont été faites pour savoir si les normes de solvabilité qui sont imposées par le fédéral sont adéquates ou non. Si elles sont trop rigides, il est évident qu'avec un capital donné, un assureur ne pourra pas souscrire autant d'affaires que si les règles sont plus libérales. Mais les assureurs, ce qui est important pour eux, c'est de savoir qu'ils peuvent, à tout moment donné, honorer leurs obligations. Si vous prenez les temps qu'on vit actuellement, avec la chute des cours boursiers et la chute des cours des obligations, même des compagnies qui sont très solides financièrement, qui écrivaient moins qu'en proportion de deux pour un, ne sont pas loin d'être coincées. Or, cela ne règle pas le problème du public quand les cours boursiers ou les cours des obligations tombent parce qu'il y a des mouvements dans les politiques monétaires, dans les taux d'intérêt. C'est important que l'assuré ou la tierce partie qui détient une créance sur la compagnie d'assurance, elle, puisse se dire: Peu importe ce qui arrive, moi, je serai remboursée quand le jugement sera rendu ou quand je devrai exiger ma réclamation de la compagnie.

M. ROY: A cause de la solvabilité de ladite compagnie.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Oui. On rejette, nous, les accusations de manque de dynamisme de M. Gauvin.

M. ROY: Au niveau de la ventilation des revenus, est-ce qu'il y a eu accroissement de la rentabilité du capital par rapport au montant global des primes perçues depuis quelques années? On sait que, depuis au moins deux ou trois ans surtout, il y a eu un taux d'accroissement extraordinaire dans les revenus de placements pour les institutions financières, à cause de la hausse des taux d'intérêt. Est-ce qu'à ce niveau, vous êtes en mesure de nous donner quelques indications?

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Pour vous répondre de façon bien précise, il faut faire entrer une autre notion. Celle-là, c'est celle du gain réalisé ou de la perte réalisée sur les investissements. Or, dans la même proportion que les taux d'intérêt ont augmenté, vous savez que cela entraîne une perte sur le capital. Selon que vous allez tenir compte des pertes de capital réalisées ou non réalisées, vous pouvez arriver à des taux de rendement différents. La réponse à votre question, cependant, c'est que, si vous isolez ce phénomène, il est évident qu'avec des taux d'intérêt plus élevés, le montant d'argent qui va échoir aux compagnies d'assurance va être aussi plus grand. C'est probablement la raison fondamentale pour laquelle le marché, du point de vue de l'assureur, est si concurrentiel au niveau des taux. Peut-être que, s'il y avait moins de revenus de placements, il y aurait un peu plus de profits de souscription.

Alors, les assureurs, globalement, ne voient peut-être pas d'avantages économiques à avoir un gros profit de fonctionnement, puisqu'ils ont des revenus de placement qui, pour le moment, contrebalancent. Je peux vous dire que la partie est serrée en diable au niveau des coûts sur le marché.

M. ROY: Quand les compagnies d'assurance

font des calculs actuariels pour les primes d'assurance, est-ce qu'on tient compte uniquement des primes perçues, établir les tarifs en fonction du montant global des primes perçues, ou si on tient compte également d'autres revenus que la compagnie d'assurance peut avoir?

M. SAINT-GERMAIN (Guy): On tient compte des autres revenus aussi. La preuve qu'on en tient compte, c'est qu'on n'a pas des rendements sur le capital investi supérieurs à cela. Le rendement sur le capital investi, tel que défini là, c'est le meilleur barème sur lequel on peut se baser pour apprécier cela. Après cela, on peut compliquer le tableau. Mais Gauvin, d'une façon indépendante, sans que les assureurs aient un mot à dire là-dedans, avec ses propres "consultants", est arrivé à cela, pour une période de cinq ans, et puis, on l'a examiné. On a nos propres chiffres. On peut vous dire que cela corrobore ce que, nous, on sait de notre réalité à nous.

M. ROY: Au niveau des dépenses, est-ce que vous avez une certaine ventilation, par exemple, de l'évolution des coûts par chacun des secteurs? Par exemple, au niveau du remboursement des indemnités sur les pertes de salaires ou les infirmités, les coûts de réparations, les coûts de l'hospitalisation? Parce qu'on sait que les compagnies d'assurance doivent rembourser le régime d'assurance-hospitalisation lorsque les gens sont hospitalisés à la suite d'un accident. Est-ce que c'est exact? Vous devez rembourser au complet?

M. MOREAU: Absolument!

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Oui, je ne sais pas si...

M. ROY: C'est d'après les renseignements que j'avais, mais j'aimerais quand même les faire confirmer, parce que nous avons des gens d'autorité ici.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Oui, on peut vous dire que les assureurs remboursent effectivement toutes les réclamations de la régie des soins médicaux et des soins hospitaliers pour toutes les dépenses qu'elles encourent pour les victimes d'accidents d'automobile. Je dis toutes avec une qualification, cependant, parce que, dans les cas les plus importants, elles n'ont pas adopté comme politique d'aller rechercher entièrement le montant qui leur est dû à même les indemnités qui sont versées aux victimes.

Je vais vous donner un cas récent. Par exemple, une indemnité globale, qui va chercher $100,000, avec une limite d'assurance de $100,000 —je parle d'une petite fille de trois ans qui a une incapacité à vie — les deux régies avaient un compte qui dépassait $40,000. Dans ce cas, elles ont comme politique de ne pas aller rechercher les $40,000 chez l'auteur responsa- ble du dommage parce que, dans la plupart des cas, il n'y a pas grand monde qui est capable de payer ces montants. A l'exception de ces montants qui demeurent des exceptions, j'imagine, tous les frais sont remboursés aux deux régies.

M. ROY: Est-ce qu'il y a une négociation entre les compagnies d'assurance-automobile et le gouvernement à ce niveau pour les frais d'hospitalisation comme pour les frais médicaux?

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Cela fait plusieurs années que nous demandons, effectivement, que la méthode de perception... On ne reconnaît pas que c'est notre droit de nous opposer à payer ces sommes d'argent, encore qu'on trouve cela fort en diable, parce que tous les automobilistes, à notre sens, contribuent à ces deux régies et il nous semble inacceptable que les automobilistes assurés fassent les frais de ces réclamations. C'est une autre paire de manches. C'est le législateur qui doit intervenir pour changer les règles du jeu s'il le désire.

M. ROY: Ce que je veux savoir surtout et je vais poser une question plus précise... On sait que, lorsqu'une personne est hospitalisée, elle doit signer un document au moment de quitter l'hôpital sur lequel on inscrit 12, 18, 15, 20, 25 jours d'hospitalisation à $89.73, pour prendre un chiffre très arbitraire. Il y a une facture qui est envoyée à la Régie de l'assurance-hospitalisa-tion. Est-ce que ces montants, qui sont effectivement exigés ou qui figurent sur les documents qu'on fait signer par les personnes hospitalisées, doivent être payés intégralement par les compagnies d'assurance? Parce que vous savez que les taux varient d'un hôpital à un autre. A ce moment, est-ce que vous avez négocié le taux global ou est-ce que vous tenez compte de l'hospitalisation et de l'endroit où la personne a été hospitalisée?

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Je vais vous répondre en deux temps. Vous dites, premièrement, que votre montant de $89.73 est arbitraire. Il est largement en deça de la réalité, parce qu'à l'Hôtel-Dieu à Montréal, le per diem est de $112 — et je les nomme par ordre — $141, $102, $119, $122; le Montreal Children: $184 pour une augmentation de 204 p.c. à partir de 1968. Tous ces montants sont remboursés, à moins que je ne me trompe — et il y a des bonshommes de sinistres derrière moi, ils peuvent me corriger — sur une base de coût selon l'hôpital qui traite la victime.

M. ROY: Selon vous, est-ce que c'est le secteur qui a connu la plus forte augmentation depuis 1968 au niveau des dépenses que doivent encourir les compagnies d'assurance?

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Oui. C'est le secteur. Celui-là avec le niveau d'indemnités qui

sont retenues par les tribunaux et sur lesquelles on ne peut pas porter de jugement parce que les tribunaux peuvent l'apprécier. Egalement aussi sur le coût de la main-d'oeuvre dans les garages où vous avez, entre autres, pour les derniers 20 mois, une augmentation moyenne au Québec de 28.9 p.c, avec un maximum de 40 p.c. dans les derniers 20 mois au Lac-Saint-Jean et, après cela, les gens du Lac-Saint-Jean viennent se plaindre que leurs primes augmentent.

M. ROY: Je m'excuse.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Le taux horaire des garagistes concessionnaires, au Québec, en moyenne, dans les derniers 20 mois, a augmenté de 28.8 p.c. ou de 28.9 p.c. et cela représente une moyenne. Il y en a qui sont moins que cela et il y en a qui sont plus. Au Lac-Saint-Jean, c'est 40 p.c.

M. ROY: A la suite de ce que vous venez de dire, cela m'amènerait à vous poser une question particulière à ce niveau et, à ce moment, je me réfère à l'annexe A du mémoire que vous avez présenté en janvier 1972, mémoire qui comprend quelque 160 pages. A la page 99, vous dites, au paragraphe 5, que le système de la Saskatchewan a l'avantage d'avoir simplifié le nombre de catégories de conducteurs utilisées pour fins de tarification. Cette simplification s'est faite au détriment des meilleures classes de conducteurs de sorte que, dans l'ensemble, les conducteurs d'âge mûr ou ayant un dossier d'accident intact subventionnent indiscutablement les jeunes conducteurs qui, on le sait, causent plus que leur part des accidents d'automobile.

Et vous ajoutez ceci: "La même situation se retrouve dans la question des territoires de tarification où il est évident que les territoires ruraux subventionnent les automobilistes des districts urbains". Est-ce que votre remarque ici s'adresse uniquement à la Saskatchewan ou si cette remarque s'adresse également au territoire du Québec?

M. MOREAU: Non. Cela s'applique exclusivement en Saskatchewan. Dans les provinces où l'industrie privée administre l'assurance, les taux sont en fonction de chaque territoire et de l'expérience de chaque territoire. C'est pour cela que justement, à la page 99 dont vous parlez, nous critiquons cette pratique de l'assurance d'Etat de la Saskatchewan en vertu de laquelle il y a subvention des bons territoires, là où il y a moins d'accidents, envers les territoires où il y en a plus, où elle coûte plus cher. Mais dans les autres provinces comme le Québec, l'Ontario, ou l'industrie privée administre le système, chaque territoire porte sa propre expérience par lui-même et il y a de nouvelles classes et de nouveaux territoires dès que l'expérience semble se situer dans un niveau particulier dans un territoire, pour autant qu'au point de vue actuariel il y ait un nombre suffisant de véhicules d'assurés dans ce territoire pour que ce soit constant. C'est tout à fait le contraire de ce qui se passe en Saskatchewan. Nous ne disons rien. Cela a l'avantage de simplifier le système. C'est bien évident que si on disait que les primes à Montréal sont les mêmes qu'à Gaspé ou à Hull, c'est beaucoup plus simple au point de vue de l'administration des compagnies, mais il y a une injustice pour les conducteurs des territoires où l'expérience est meilleure.

M. ROY: En somme, au Québec, chaque territoire est administré séparément au niveau des primes à payer. Il n'y a pas un territoire qui en subventionne un autre.

M. MOREAU: Sauf si on fait exception du niveau supérieur, des très grosses réclamations, les réclamations dont le montant dépasse le montant de responsabilité minimum de la province, c'est-à-dire $35,000. Quand une réclamation excède $35,000 — M. Boudreau qui est un expert va me corriger si j'ai tort — disons une réclamation de $60,000, le montant de $25,000 qui excède n'est pas imputé au territoire, mais plutôt à l'ensemble de la province. C'est la seule exception. Mais cela, il n'y en a pas beaucoup. Il y en a très peu.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Si vous me permettez, M. le Président, pour donner une idée de l'écart, ce que nous disons, c'est qu'au Québec, par exemple, un cultivateur peut obtenir une réduction de l'ordre de 40 p.c. à 45 p.c. sur le taux courant. Si vous avez un habitant de Saint-Georges-de-Beauce, il va payer 45 p.c. de plus qu'un cultivateur qui est dans le rang de Honfleur, quelque part dans ce coin et cet écart que vous avez ici, vous ne le retrouverez pas en Saskatchewan. Les cultivateurs là-bas ne sont pas traités de cette façon.

M. ROY: Autrement dit, ils paient des taux uniformes à toutes les catégories d'assurés.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Ils versent des subsides aux résidants des centres urbains parce que c'est trop compliqué à administrer.

M. ROY: Puisque nous parlons de la Saskatchewan, j'aurais une dernière question à poser sur ce sujet. J'aurai d'autres questions, M. le Président, par exemple, à la page 99 dans le paragraphe 4, en parlant du système de la Saskatchewan où il est dit que le système en vigueur n'en est pas un sans égard à la responsabilité, alors qu'on parle beaucoup actuellement au Québec du système sans responsabilité, j'aimerais avoir plus de précisions à ce sujet.

M. MOREAU: Excusez-moi. Vous référez à la page 99?

M. ROY: Page 99, paragraphe 4, dans le haut de la page. "Les prétentions voulant que le système de la Saskatchewan soit foncièrement un programme d'indemnité sans égard à la responsabilité sont injustifiées puisqu'en définitive la proportion de ces indemnités est minime en Saskatchewan, si on la compare à ce qui se paie dans les autres provinces du Canada".

M. MOREAU: Ce que nous voulons dire, c'est que le système de la Saskatchewan, lorsqu'il a été mis sur pied en 1946, était foncièrement basé sur des indemnités sans égard à la faute, mais elles étaient prédéterminées. Or, comme quelqu'un l'a mentionné il y a quelques jours —je pense que c'est M. Gauvin lui-même — les indemnités prévues par le système de la Saskatchewan n'ont pas changé pendant quelque 20 ans. Ce n'est qu'en 1970, quand le Manitoba a décidé de mettre sur pied son propre système qu'on s'est réveillé en Saskatchewan en disant: Nos indemnités ne tiennent plus debout, c'est même ridicule comme niveau d'indemnité. Alors, on les a haussées à ce moment-là.

M. ROY: M. le Président, on a dit tout à l'heure que le système qui voulait qu'un avocat, un procureur n'étant pas pressé de régler une cause avantageait la victime. J'aimerais bien avoir plus de détails là-dessus parce que les arguments qu'on a donnés tout à l'heure ne nous ont pas convaincus. Surtout que j'ai ici un dossier, choisi parmi tant d'autres, je vais le citer à titre d'exemple, M. le Président, si on me le permet; c'est le cas d'une personne qui a été victime d'un accident le 26 septembre 1970, qu'on remarque bien la date. Sa requête a été accueillie le 22 septembre 1972. Le jugement a été rendu le 3 mai 1974 et j'ai justement ici un extrait paru dans un journal, "Blessée dans un accident, une dame touchera une compensation de $41,451." C'est le jugement qui a été rendu le 3 mai 1974 suite à l'accident du 26 septembre 1970, soit près de quatre ans après; les personnes qui ont été jugées responsables de l'accident étaient éventuellement assurées et la compagnie d'assurance avec les procureurs, a recommandé que la cause aille en appel. Ce qui veut dire que nous sommes à la fin de 1974 et qu'il est probable, si on se fie sur la jurisprudence traditionnelle qui nous permet de nous guider concernant la lenteur des procédures judiciaires...

M. TETLEY: Je ne suis plus avocat en l'occurrence.

M. ROY: Je n'accuse pas le ministre.

M. TETLEY: Vous m'accusez, vous me regardez.

M. ROY: Je me demande un peu pourquoi le ministre se sent obligé de se mettre sur la défensive immédiatement, alors qu'en aucune façon, je ne veux le tenir responsable.

Mais je vous souligner ce fait parce qu'il est plus que probable qu'à la fin de 1975, ce ne sera pas encore réglé. Cela veut dire, de la part d'une personne victime d'un accident d'automobile, une attente d'au moins cinq ans sans avoir perçu un seul sou. Je me demande, à partir de ce moment, s'il n'y a pas quelque chose qui devrait être fait. Je m'explique mal les raisonnements que M. Saint-Germain a donnés tout à l'heure selon lesquels ça pouvait avantager la victime.

J'ai un autre dossier. Le cas inverse s'est produit, à cause d'un vice de procédure, à l'occasion de la préparation de tous les documents relatifs à un procès. Je ne suis pas avocat, je ne peux pas donner tous les termes qui s'imposent, mais la cause a été rejetée et la personne a été obligée de se reprendre. En 1970, deux personnes, dans un cas comme dans l'autre, sont complètement invalides, elles n'ont rien reçu. Je me demande si au niveau des revenus de placements des compagnies, les compagnies n'auraient pas intérêt —j'aimerais qu'on me l'explique — à ce que ce genre de choses se perpétuent, par le fait que l'argent étant placé rapporte des sommes aux compagnies d'assurance, alors que les personnes qui ont été victimes d'accident d'automobile ne peuvent pas, lorsqu'il s'agit de montants importants, percevoir un seul sou avant des années et des années. Il y en a qui ont eu le temps de mourir. Si les personnes mouraient dix fois, il y en a qui seraient mortes dix fois et enterrées dix fois.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Si vous me permettez, M. le Président...

M. MOREAU: Ce que j'allais dire, c'est que théoriquement vous avez raison. Cela devrait rapporter des bénéfices aux assureurs de placer les réserves au lieu de les payer. En fait, c'est ce qui arrive. Mais, c'est un argument que beaucoup de gens emploient parce qu'on ne connaît pas la portée de tout ce qui se passe en assurance. Il est exact que les réserves qu'on ne paie pas rapportent des intérêts courants de 5 p.c, 6 p.c, 7 p.c. ou 8 p.c. Mais depuis au moins 20 ans, depuis qu'on connaît le phénomène de l'inflation, on sait qu'une réclamation pour laquelle une compagnie a une réserve de $5,000 aujourd'hui, après 12 mois, si elle n'est pas réglée, à ce moment-là, elle se règle et, plus souvent qu'autrement, elle va se régler pour $7,500, $8,000 ou $9,000 à cause du phénomène de l'inflation. Les compagnies, depuis une vingtaine d'années en tout cas, n'ont jamais eu avantage à retarder le paiement des réclamations pour en tirer des intérêts sur les placements. Est-ce que vous êtes d'accord, M. Saint-Germain?

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Non seule-

ment ça, mais dans tous les cas de jugements, le juge intervient pour allouer un montant d'intérêt à la victime, non seulement l'intérêt légal, mais en vertu d'une législation — je ne sais pas quel gouvernement a introduit ça, peut-être M. Tetley lui-même — les tribunaux ont maintenant la liberté d'allouer jusqu'à 8 p.c. d'intérêt, ce qui représente plus, soit dit en passant si ma mémoire est fidèle, que le taux d'intérêt que le gouvernement daigne bien verser à ses contribuables sur ces remboursements d'impôt.

M. TETLEY: Ce n'est pas vrai, c'est le même taux. Le Québec donne 8 p.c. et demande 8 p.c.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Bravo!

M. TETLEY: Merci. C'est notre gouvernement qui a...

M. ROY: ... parfaitement raison, cela ne fait pas tellement longtemps.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Pour continuer la réponse, c'est 8 p.c. qui sont remboursés, les assureurs n'ont pas d'intérêt de ce côté-là. Maintenant, ce sont des délais qui, à notre sens, peuvent être jugés inacceptables et je pense que oui, personnellement. On me dit qu'actuellement, à la cour Supérieure, les délais sont maintenant d'un an et demi entre le moment de la requête et l'audition.

Alors si le juge prend deux, trois mois, un an ou deux ans avant de rendre son jugement, ce n'est pas la faute des assureurs. Les juges qui aiment faire des réformes pourraient peut-être, encore une fois, s'intéresser à ce morceau-là.

C'est inacceptable, mais, même si c'est inacceptable, cela joue rarement au détriment de la victime. Pour les raisons d'inflation que M. Moreau vous donne, pour les raisons d'intérêt et aussi pour les raisons de possibilité d'aggravation du cas, en cours de route, mais c'est aux tribunaux de juger si c'est inacceptable ou pas, de nommer suffisamment d'avocats comme juges pour accélérer les procédures. Je suis certain qu'il y en a plusieurs qui voudraient l'être. Si le "no fault" est introduit, ils n'en auront plus besoin. C'est un cercle vicieux.

M. ROY: Mais lorsque vous dites que cela joue rarement ou pratiquement jamais à l'encontre de l'intérêt des victimes, j'ai cité deux cas, j'aurais pu en citer plusieurs. Je n'en ai pas vu un seul qui se soit trouvé réellement avantagé pendant la période d'attente. Ils sont obligés d'avoir recours au régime de bien-être social — tout le monde sait que c'est un régime de pauvreté garanti, permanent, je n'ai rien à ajouter là-dessus — et c'est la dépossession complète et quasi totale en attendant de pouvoir bénéficier des primes...

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Ce que j'allais ajouter, c'est que...

M. ROY: ... de pouvoir bénéficier de la compensation à laquelle ces personnes-là ont droit.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Ce que j'allais ajouter, M. le Président, c'est qu'il y a un grand nombre de membres du Bureau d'assurance du Canada qui, dans des cas comme ceux-là, font des paiements anticipés. D'ailleurs, reconnaissant cela et les paiements anticipés dans les cas où la responsabilité n'est pas claire, cela ne règle pas le problème. C'est une des raisons pour lesquelles le Bureau d'assurance du Canada désirerait avoir un "no fault" partiel.

M. MOREAU: Voilà. Justement, pour la personne qui a eu son jugement de $41,000, qui a attendu en mai 1974, en vertu de notre système AutoBAC, elle aurait eu jusqu'à $20,000 dès 1970, pour les frais médicaux, les frais de rééducation et tous les autres frais, et elle aurait retiré jusqu'à $250 par semaine pendant trois ans.

Alors, vous voyez l'avantage de cela. Si l'addition de tous ces bénéfices qu'elle aurait eus en vertu d'Auto BAC ne montent pas au niveau de ce qu'elle croit être sa véritable perte, elle aurait encore le privilège de porter la cause devant les tribunaux, mais pour l'excédent. Mais, dans l'intervalle, elle avait des indemnités convenables.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Nous pouvons ajouter aussi que les assureurs, reconnaissant aussi cela, ont introduit sur le marché, il y a deux ou trois ans, une couverture d'assurance individuelle qui faisait exactement cela également. Malgré que nous ayons demandé que cette couverture soit obligatoire —si ma mémoire est bonne, elle est obligatoire en Ontario...

M. MOREAU: Elle l'est, oui.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Au Québec, elle n'est jamais devenue obligatoire.

M. ROY: II y aurait peut-être des questions qu'on pourrait poser à notre gouvernement. Vous parlez de votre système AutoBAC. C'est un système que vous venez tout juste de proposer, suite à la publication du rapport Gauvin.

M. MOREAU: Excusez-moi, ce système-là a été proposé et communiqué au comité Gauvin il y a plus d'un an et demi.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Au mois d'avril 1970.

M. MOREAU: Peut-être pas les chiffres, mais le système a été proposé dans tous ses détails, ce document-là, ici...

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Au mois d'avril 1970, et le coût était de $9.00.

M. TETLEY: Au cours de quel mois avez-vous soumis tous les détails?

M. MOREAU: Un an, un an et demi. De toute façon, très longtemps avant la publication du rapport Gauvin.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Avril 1970.

M. TETLEY: J'ai tellement de lettres de vous, tellement de promesses. Je ne veux pas tellement défendre Gauvin ou le vanter, mais nous attendions depuis longtemps les chiffres. Présenter un plan sans chiffres, c'est une autre paire de manches.

M. MOREAU: Je comprends facilement votre impatience, M. le ministre, mais je peux vous dire à ce sujet-là qu'en plus des raisons que je vous ai données plus tôt, nous avons éprouvé certains désappointements de la part de nos actuaires qui ont fait le travail pour nous.

M. TETLEY: Pour une fois, on ne blâme pas les avocats.

M. MOREAU: Et nous aurions espéré avoir les résultats beaucoup plus tôt.

M. ROY: M. le Président, le ministre dit que nous sommes en face d'un plan, mais vous n'avez aucun chiffre jusqu'ici qui peut nous permettre de nous donner une quasi-certitude par rapport au système actuel. L'autre jour, on m'a répondu qu'une certitude, c'était 100 p.c. des probabilités, je ne voudrais pas avoir la même réponse. On n'a pas le coût du rapport Gauvin, non plus.

Le rapport Gauvin fait une proposition d'assurance, mais, quand même, on n'a pas de coût là-dessus, on n'a pas de chiffre non plus. On nous a donné quelques probabilités. On est en face de deux options devant nous où nous voulons assurer aux assurés du Québec, à tous les Québécois la meilleure protection possible au meilleur prix possible, et nous sommes en face de deux systèmes qui nous sont proposés, un par le rapport Gauvin qui préconise, à toutes fins pratiques, ce régime étatique et nous avons les Assureurs du Canada qui nous proposent le régime AutoBAC. Nous n'avons pas de prix, nous n'avons pas les coûts par rapport au système actuel. C'est assez difficile pour nous d'être en mesure de se faire une opinion la plus objective possible.

Je verrais très mal le conseil d'administration d'une entreprise sérieuse qui serait en face d'une décision alors que les personnes-ressources auraient l'obligation de leur faire des rapports et leur fournir des rapports les plus complets possible et n'auraient pas en main des données aussi importantes, avant de prendre une décision. C'est le cas dans lequel se trouve la commission parlementaire à ce moment-ci.

M. MOREAU: Je comprends votre inquiétude. Tout ce que je peux affirmer pour le moment, c'est que le système AutoBAC va certainement coûter moins cher que le système actuel. De combien? C'est cela qu'on ne peut pas vous dire, c'est inutile...

UNE VOIX: Je pense que...

M. MOREAU: Deuxièmement, il va coûter moins cher que le système Gauvin, c'est sûr et certain.

M. ROY: Une minute, je m'excuse, je ne voudrais pas...

M. MARCHAND: C'est sur la même chose.

M. ROY: Moi aussi.

M. MARCHAND: En supplémentaire.

M. ROY: Je voulais savoir sur quoi on se basait pour nous dire que cela allait coûter moins cher?

M. MOREAU: ... les résultats initiaux de nos actuaires, justement sur le coût du système AutoBAC.

M. ROY: Vous en avez eu des coûts.

M. BACON: Vous en avez des coûts, vous venez de dire que vous n'en avez pas.

M. MOREAU: Nous en avons, mais ils sont partiels, ils sont incomplets, mais ils sont suffisamment indicatifs pour nous montrer que le coût va être moindre. D'ailleurs, c'est la logique. Qu'est-ce que vous voulez? On économise sur les frais de fonctionnement, on économise sur les frais de règlement des sinistres, sur les frais d'avocats, il faut nécessairement que cela paraisse quelque part.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Si vous me permettez, M. le Président, je pense qu'on pourrait aller...

M. MARCHAND: Sur la même question, moi, je commence à être passablement inquiet, parce que vous allez retirer 15 p.c. de profit sur une police d'assurance-automobile quand, auparavant, c'était 36 p.c. Est-ce que ce sont à peu près les chiffres? C'était quoi auparavant?

M. MOREAU: II y a confusion dans les chiffres. Les 15 p.c. de profits sont sur l'investissement d'un actionnaire dans une compagnie d'assurance.

M. MARCHAND: Oui.

M. MOREAU: Autrement dit, si un actionnaire est propriétaire d'une compagnie et que son capital investi représente tant, dans les

conditions actuelles, il retire un profit d'investissement de 15 p.c., cela lui rapporte 15 p.c. sur ce qu'il a investi, cela n'a rien à voir avec le coût d'une police d'assurance.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Si vous me permettez, M. le...

M. MARCHAND: Vous baissez les coûts et vous allez donner le même service qu'auparavant et davantage?

M. MOREAU: Oui. Justement, l'explication est dans...

M. MARCHAND: Moi, je ne comprends pas...

M. MOREAU: ... la simplicité du système

M. MARCHAND: ... comment vous pouvez faire cela. Vous avez fait des...

M. MOREAU: Prenez l'exemple d'un accident où deux voitures se frappent. Immédiatement les deux assurés rapportent la chose à leur propre assureur et chacun nomme un expert en sinistres qui va aller faire...

M. MARCHAND: ... vous le payez.

M. MOREAU: ... qui lui va aller constater les circonstances de l'accident.

M. MARCHAND: Les deux experts sont payés?

M. MOREAU: Oui.

M. MARCHAND: D'accord, au lieu d'un agent d'assurance, c'est un expert!

M. MOREAU: On va également nommer un expert pour les dommages au véhicule. L'enquête va se continuer pour déterminer lequel des deux est responsable. Parfois cela n'est pas long, parfois cela prend des années pour y arriver. En vertu du système AutoBAC, dans tout sinistre qui n'accepte pas le plan de base, c'est-à-dire $20,000 et $250 de perte par semaine, vous n'avez absolument aucun déboursé. Chaque assuré va voir son assureur et lui dit: J'ai eu un accident à telle date. Il n'est plus question de savoir dans quelle circonstance, s'il allait vite ou s'il n'allait pas vite ou si l'autre est en tort, il est tout simplement question de lui dire: Vous avez droit à tel et tel bénéfice.

M. MARCHAND: Vous venez de dire, justement auparavant: On va voir lequel est coupable.

M. MOREAU: Imaginez ce qu'on sauve... Oui.

M. MARCHAND: Vous venez de dire juste avant... Là vous venez de dire que vous ne vous occupez pas si tel ou tel est coupable ou pas coupable.

M. GIASSON: Quand il parle de coupable, c'est dans le système actuel, quand...

M. MARCHAND: Non, pardon. Monsieur vient de dire qu'on va déterminer lequel est coupable. Après cela il dit qu'on ne s'occupe pas de savoir si tel ou tel est coupable ou non. Je ne comprends pas.

M. MOREAU: En vertu du système actuel, on doit déterminer qui est coupable pour décider lequel des deux assureurs va payer. En vertu du "no fault", c'est-à-dire de notre système AutoBAC, cela n'entre plus en ligne de compte dans les cas ordinaires, les 85 p.c. Chaque assuré va voir son assureur. Il n'est plus question de savoir s'il allait trop vite, s'il a passé un "stop", ou s'il a passé un feu rouge. Tout ce qu'il fait, c'est que son assureur lui dit: Voici ce à quoi tu as droit, tant par semaine, tant pour les... Alors vous économisez tous les frais d'enquête qu'on a dans le moment.

M. MARCHAND: Les "stop" on ne s'occupe plus de cela, parce qu'on est sûr d'être payé.

M. GIASSON: Couverture de base.

M. MOREAU: Votre réaction n'est pas mal vraiment, parce que ce n'est pas la première réaction qu'on a. Quand on commence à étudier le système sans égard à la responsabilité, on se dit: Si ce système est mis en marche, les gens vont se foutre tout simplement des lois de la circulation. En fait, cela n'arrive pas. Les gens ne sont pas aussi bêtes que cela. Ce n'est pas arrivé aux Etats-Unis, où on a fait des systèmes "no fault". Cela ne s'est pas matérialisé.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Messieurs, si vous me permettez, la parole était au député de Beauce-Sud. On ne voudrait pas le priver de son droit de parole pour lequel il a attendu si longtemps. Cependant...

M. BACON: Voyez-vous comment nous allons attendre pour la nôtre?

LE PRESIDENT (M. Cornellier): ... M. Saint-Germain voulait compléter une réponse à une question du député de Beauce-Sud.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Je vais compléter, si vous me permettez. Evidemment, les assureurs ont beaucoup de réticences à révéler les coûts, parce que, dans l'analyse statistique que nous avons faite des sinistres, il y a eu des choses qui nous ont surpris énormément pour le Québec. On est en mesure de vous dire à ce

moment que le régime AutoBAC peut être livré, d'après nous, pourvu que vous acceptiez un point d'interrogation pour une diminution moyenne. Cela veut dire qu'il y a des gens qui en auront plus, et d'autres qui en auront moins, par rapport au niveau actuel de primes. Si l'inflation continuait, si le coût des taux horaires dans les garages, les hôpitaux de l'Etat continue à augmenter, forcément, cela ne sera pas cela. Par rapport au niveau du taux d'assurance-automobile, au moment où on se parle, le régime AutoBAC implique une diminution de l'ordre de 10 p.c. Cela peut sembler fort, M. le député Marchand, je pense. Les sources d'économie proviennent en grande partie du fait que, dans le régime AutoBAC, les pertes, les indemnités versées pour souffrances et douleurs, c'est un genre d'activités et de couvertures qu'il est très difficile de contrôler. Vous avez tous les gens qui se promènent avec des collets, etc. Les médecins ne peuvent pas arriver à...

Alors, cela est éliminé dans le régime d'Auto-BAC pour la couverture de base. Mais on conserve le droit de recours intégral en cas de préjudice esthétique grave ou quatre mois d'incapacité grave pour souffrance et douleur — vous me corrigerez si je ne suis pas précis. Donc, une réduction de 10 p.c. Il y a 25 p.c. de la réduction qui proviennent des couvertures actuelles sur les blessures corporelles, suite à l'élimination des pertes pour souffrance et douleur. 4 p.c. proviendraient des frais de règlement pour les sinistres, les cas de dommages matériels, par l'introduction du "no fault" dans les couvertures de dommages matériels. Alors, c'est 10 p.c. On est à peu près certain qu'on peut livrer le produit à ce prix. Malheureusement, comme on a fait allusion tantôt, on a eu des pépins nous aussi. Nos actuaires — on a pris ce qu'il y avait de mieux au monde — n'ont pas pu livrer dans les délais prévus. On sait qu'à la commission Gauvin cela s'est reproduit très souvent aussi, c'est pour cela qu'ils ont pris tant de temps. On a juste pris un peu plus de temps, nous autres.

M. TETLEY: Mais votre rapport date, vous m'avez dit, de 1970, et ce n'est pas terminé encore. Au moins, Gauvin a terminé son rapport. Sans trop vous critiquer, Gauvin n'est pas ici pour se défendre et pour dire...

M. SAINT-GERMAIN (Guy): On connaît leur efficacité, M. le Président.

M. TETLEY: C'est cela. L'efficacité des deux groupes peut-être.

M. GIASSON: Vous avez commencé à disséquer les 10 p.c. Il y a 25 p.c. qui proviendraient d'aucun paiement vis-à-vis de l'incapacité totale ou partielle ou douleurs subies; 4 p.c. de ces 10 p.c. concernent les frais de règlement. Voulez-vous continuer à disséquer, s'il vous plaît?

M. SAINT-GERMAIN (Guy): II faudrait que je fasse venir mes actuaires, si vous voulez, parce qu'on entre dans quelque chose de très technique. Si je vous disais, par exemple, que 25 p.c, ce n'est pas ce que vous avez en tête, mais c'est 25 p.c. de la prime pure actuelle qui va pour les blessures corporelles.

M. GIASSON: C'est 25 p.c. de la prime pure.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): ... du montant total, si vous voulez, des indemnités pour blessures corporelles, actuellement. On commence à compliquer le tableau. Je me demande si cela aiderait beaucoup si on allait de ce côté.

M. ROY: M. le Président, je ne veux pas abuser non plus de mon temps de parole, mais j'aimerais quand même toucher quelques recommandations qu'il y a dans le rapport Gauvin. Ma question fait suite un peu à celle que mon collègue de Lafontaine avait posée tout à l'heure, relativement à la recommandation no 58 qui paraît en page 381. "Que si toutes les réformes proposées ci-dessus sont appliquées et que les mesures décrites dans le paragraphe suivant sont mises en vigueur, l'administration du régime soit confiée à l'entreprise privée".

J'ai vu tout à l'heure que M. Moreau avait répondu par l'affirmative que l'entreprise privée pourrait accepter toutes les recommandations qui sont faites dans le rapport, de façon à pouvoir donner satisfaction ou donner suite et accepter les recommandations globales de la commission Gauvin. Est-ce que c'est exact?

M. MOREAU: C'est exact.

M. ROY: Est-ce que cela veut dire, à ce moment, que vous acceptez la recommandation no 53 voulant que le rôle du courtier soit changé en celui de conseiller et que vous acceptez également la recommandation no 50, voulant que la mise en marché de l'assurance-automobile soit conçue de façon telle que l'assuré vienne en relation directe avec l'assureur?

M. MOREAU: Nous ne sommes pas d'accord avec le comité Gauvin à l'effet que ce soit la chose à faire, que ces recommandations soient dans les meilleurs intérêts du consommateur.

Ce que nous disons, c'est que si le gouvernement, dans sa sagesse, décide que c'est ce qui va se passer, si c'est le rôle qu'on va donner au courtier, les assureurs se conformeront aux décisions du gouvernement. Mais nous ne sommes pas d'accord pour dire que c'est ce qu'il y a de mieux pour le consommateur dans le moment. Nous ne nions pas qu'il puisse y avoir là un avantage, mais il nous manque des éléments, des études. Je pense qu'on a rejeté le rôle du courtier un peu vite, enfin, à mon point de vue.

Mais peut-être que M. Gauvin a des renseignements qui ne paraissent pas dans le rapport. Mais quant à nous, nous sommes prêts à nous conformer à la décision du gouvernement et à fonctionner de la façon qu'il recommande, mais, pour le moment, nous ne sommes pas convaincus que c'est vraiment ce qu'il faut. Nous ne sommes pas convaincus que c'est dans l'intérêt du consommateur. Nous ne sommes pas convaincus qu'il n'y a pas des injustices, et pour le consommateur et pour les courtiers.

M. ROY: Maintenant, une opinion concernant la recommandation 56, voulant que le financement des primes d'assurance ne puisse plus être effectué par les courtiers ou les assureurs.

Avec l'expérience que vous avez, quels sont vos commentaires, ou encore quelle est votre opinion suite à cette recommandation?

M. MOREAU: Quant aux courtiers, je vous avoue que nous n'avons pas la compétence pour dire si le courtier réalise un profit avec le financement ou si c'est une charge pour lui. Je pense que les courtiers pourraient répondre mieux que nous à ce sujet.

Quant aux assureurs, la plupart des assureurs ont, à un moment quelconque, établi leur propre plan de financement pour en faire bénéficier leurs assurés. D'une façon générale, je ne dois pas me tromper en disant que ces plans de financement ne sont pas très populaires. Est-ce que c'est exact, monsieur...

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Je pourrais peut-être ajouter quelques données pour vous permettre de juger, parce qu'il y a des choses qui ont été dites ici concernant le financement des primes où on a agité, à mon sens, des épouvantails à corneilles. Donnons des faits dans l'ordre: Premièrement, en Colombie-Britannique, où il y a un monopole d'Etat, pour la première année, la régie d'Etat a conclu un plan de financement de primes avec la Banque royale du Canada pour ceux qui ne pourraient pas payer leurs primes comptant. Le taux exigé par la Banque royale était de 18 p.c. Les renseignements que nous avons sont que 76,000 citoyens de la Colombie-Britannique sur 1,300,000 se sont prévalus du plan de la Banque royale. Il paraît que la Banque Royale perd sa chemise, et on va procéder, de concert avec ICBIC, qui est le sigle pour la corporation là-bas, à reviser le plan de financement de primes. Au Québec...

M. ROY: Vous dites que la Banque royale perd sa chemise. Qu'est-ce que vous voulez dire?

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Si elle a financé 76,000 personnes qui sont incapables de payer, je lui souhaite bonne chance, parce que dans ce champ-là... Les courtiers vont vous dire ce que c'est que de faire de la perception, je pense bien. Cela ne veut pas dire que ce sont eux qui devraient continuer à le faire. Le marché, actuellement, fait que c'est une fonction qui est dévolue aux courtiers. On peut se poser des questions.

Dans les faits qu'on doit prendre en considération, on a dit, d'une façon quelconque, que parce que les courtiers d'assurance faisaient le financement de primes, il n'y avait de coût pour personne.

Cela n'est pas tout à fait exact. On a fait une enquête auprès de nos membres et la plupart des courtiers d'assurance doivent remettre à leur compagnie les sommes qu'ils perçoivent des assurés sur la base de 60 jours. Ils ont 60 jours après la date d'entrée en vigueur, normalement.

En pratique, cela produit des délais de l'ordre de 70 à 80 jours. Cela procure une masse d'argent qui peut être mise au service des détenteurs de police, des assurés pour joindre les deux bouts pendant une certaine période. Mais cela a pour effet de priver les compagnies d'assurance d'un revenu de placement dont on pourrait tenir compte par la suite pour abaisser la prime, même si c'est un tantinet, compte tenu des chiffres que nous avons vus tantôt. De toute façon, les compagnies d'assurance, plusieurs de nos membres, ont des programmes de financement de primes. Il y en a, par exemple, qui ont cela à un coût, pour une prime de $150, de 14.3 p.c. sur le marché, actuellement, qui est moins que les 18 p.c. qui sont prévus en Colombie-Britannique.

Cependant, il y a des assureurs qui ont dû retirer leur plan de financement de primes parce qu'il n'y avait pas suffisamment de gens qui le désiraient. Il y en a d'autres qui, avec des taux de 14.3 p.c. ou en moyenne, aux alentours de 14.3 p.c, n'ont pas tellement de succès. Il y en a d'autres qui sont sur le marché, dont les organismes indépendants qui ne sont pas des compagnies d'assurance, avec des taux, pour $150 de prime, de 25 p.c. et qui, eux, apparemment, font des affaires considérables.

On peut se poser des questions. Pourquoi est-ce ainsi? Mais ce qu'on veut dire par cela, c'est que si, comme M. Gauvin semble recommander, à un certain moment, je pense, l'assurance obligatoire, dans ce contexte, pour avoir de l'assurance obligatoire, la prime au comptant est probablement nécessaire. Si cela devait être ainsi, les compagnies d'assurance ne s'y opposeraient aucunement. Mais, s'il devait en résulter un revenu d'intérêts, il n'y a pas de doute que la compétition ferait qu'on en donnerait crédit aux assurés.

Alors, ce qu'on voulait dire, c'est qu'actuellement, dans le système, il y a des coûts qui sont impliqués dans le financement des primes, mais qui ne paraissent pas, qui sont dissimulés dans le système. C'est important de les avoir à l'esprit parce que, si la régie d'Etat en Colombie-Britannique exige 18 p.c, il est évident

qu'ici — on peut faire mieux, pour des raisons concurrentielles; c'est la raison pour laquelle on a 14 p.c, plusieurs de nos membres — il y a un coût d'attaché à cela. Est-ce que ça répond?

M. MARCHAND: Est-ce que vous croyez à la prime au comptant?

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Si on laisse le marché tel qu'il est actuellement, cela a l'avantage de répondre aux exigences des consommateurs. Encore une fois, si le législateur veut intervenir et est mécontent de la façon dont les choses se passent...

M. MARCHAND: N'est-ce pas rêver en couleur que de croire à la prime au comptant?

M. SAINT-GERMAIN (Guy): C'est mentionné dans le rapport Gauvin. Si vous pensez que M. Gauvin rêve en couleur !

M. MARCHAND: Qui aura le comptant? C'est beau de penser qu'on va l'avoir, mais qui l'aura, le comptant? Il faut penser qu'on a affaire aux consommateurs en général. Venez vivre dans le comté de Laurier; vous allez voir...

M. SAINT-GERMAIN (Guy): C'est cela, mais le consommateur...

M. MARCHAND: ... que vous ne l'aurez peut-être pas dans 80 p.c. des cas. Il faut donner une chance à ces gens aussi.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Ce qu'on a jugé...

M. MARCHAND: II ne faut pas croire à cela. Il ne faut pas rêver en couleur. Nous ne sommes pas ici pour cela. Une prime au comptant, voyons donc !

M. SAINT-GERMAIN (Guy): ... nécessaire, c'est de porter à votre attention qu'à partir du moment où un assuré n'a pas le montant d'argent pour financer sa prime, qu'il l'emprunte en dehors du circuit actuel ou qu'il le trouve à l'intérieur du circuit actuel, il y a quelqu'un qui paie pour. Dans le système actuel, ce sont les gens...

M. MARCHAND: 1 1/2 p.c.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): ... qui paient leur assurance au comptant qui financent les gens qui n'ont pas d'argent pour payer comptant. C'est à vous de vous pencher sur l'à-propos de maintenir cela.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Beauce-Sud.

M. ROY: M. le Président, dernier point. Vous avez semblé accorder beaucoup d'impor- tance à la sécurité routière. Est-ce qu'à titre de représentant des assureurs vous attachez une grande importance à la vérification obligatoire des véhicules en vue de réduire le nombre des accidents dans la province de Québec?

M. MOREAU: Oui, beaucoup.

M. ROY: Est-ce que vous souhaitez qu'une loi soit adoptée le plus rapidement possible dans ce sens?

M. MOREAU: Sans aucune hésitation. Ce sont les renseignements, d'ailleurs, que j'ai donnés au ministre tout à l'heure. Nous sommes en faveur d'une inspection obligatoire périodique. Evidemment, il faut être pratique. Il ne faut pas s'imaginer que, du jour au lendemain, on va vérifier les 3 millions de véhicules qui circulent au Québec. Mais, par une loi appropriée, nous pourrions en venir à faire des vérifications périodiques.

Nous demandons, au moins pour commencer, qu'on vérifie les véhicules qui passent d'un propriétaire à un autre, au moment d'une vente commerciale ou d'une vente privée. Cela serait déjà un bon commencement, mais il n'y a pas de doute que la défectuosité mécanique est une cause importante des accidents. Nous ne disons pas que c'est la plus importante. L'élément humain est beaucoup plus important que cela, mais c'est quand même un facteur.

M. ROY: Au niveau de la législation, il y aurait quelque chose à faire, selon vous, quant à la sécurité routière. En ce qui a trait à l'administration en général des primes d'assurance, est-ce qu'il y aurait des lois que le gouvernement pourrait apporter qui vous permettraient de diminuer sensiblement, de façon substantielle les primes d'assurance? On a discuté tout à l'heure de la question de "no fault", je comprends que ce sont des points qui ont été discutés; mais en plus de cela, est-ce qu'il y a d'autres points, selon vous, sur le plan législatif, sur lesquels le gouvernement aurait quelque chose à faire davantage et qui vous permettraient de réduire vos frais d'administration dans les compagnies d'assurance?

M. MOREAU: II y a probablement plusieurs facteurs, mais je vous avoue, malheureusement que je ne suis pas préparé à vous les énumérer. Il y a beaucoup de facteurs sur lesquels on pourrait économiser. Relativement à une loi, M. Saint-Germain mentionnait tout à l'heure que nous avons demandé depuis plusieurs années qu'on rende obligatoire cette petite partie de la police automobile actuelle, qu'on appelle l'assurance individuelle qui, en fait, donne des bénéfices sans égard à la responsabilité, mais de façon mitigée. Cette loi aurait pu simplifier le problème, elle aurait pu aider et le consommateur et les assureurs. Il y en a probablement beaucoup. Je n'y pense pas en ce moment, je ne

sais pas si M. Saint-Germain a des commentaires à faire là-dessus.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Si M. le Président me le permet, vous avez touché, dans la première partie de votre question les mesures de sécurité routière. Quelqu'un d'entre vous a soulevé la question la semaine dernière à savoir si le Québec jouissait de la même fréquence d'accidents qu'en Ontario, ce qui ne nous semblerait pas, à nous, un but trop difficile à atteindre, les conditions sont à peu près semblables. On parle uniquement de fréquence et on ne parle pas de coût moyen des sinistres, parce que vous savez que le coût moyen d'un sinistre au Québec est supérieur à celui de l'Ontario.

M. ROY: De combien?

M. SAINT-GERMAIN (Guy): De mémoire... on va me le dire tout à l'heure. Je parle donc uniquement de fréquence. Si on ramenait la fréquence au Québec à la fréquence ontarienne, vous auriez une réduction du taux d'assurance-responsabilité en blessures corporelles et dommages matériels actuels de 19 p.c. et vous auriez une réduction du taux d'assurance collision de 29 p.c. immédiatement. Cela répond à la première partie de votre question. La deuxième partie, c'est plus difficile d'y répondre.

Je vais vous donner un exemple selon lequel elle est assez difficile aussi. On nous cite souvent l'exemple de la Saskatchewan et du Manitoba. L'un d'entre vous a soulevé la question savoir que de temps à autre on trace un parallèle entre l'Ontario et le Québec, et, de temps à autre on trace un parallèle entre le Manitoba et le Québec. On a affaire à des situations largement différentes. On a affaire à des façons de procéder aussi différentes. Si vous lisez attentivement le rapport Gauvin, dans certains secteurs, on prend bien soin de dire que les situations sont différentes.

Je vais vous donner un exemple de cela dans les coûts d'administration. On pourrait penser, par exemple, que l'introduction de ce qu'on appelle des centres d'évaluation et de règlement des sinistres — c'est bien à la mode, — va régler tous les problèmes avec cela. Nous sommes allés enquêter sur place en Colombie-Britannique, à Régina et à Winnipeg pour voir ce que cela donne. On dit là-bas qu'ils fonctionnent à 17 p.c. Entre autres choses, 17 p.c, cela nécessite la création de centres d'évaluation et de règlement.

En Colombie-Britannique, on est en train d'investir, selon nos informations, environ $30 millions dans des bâtisses qui — on serait prêt à le croire — seront peut-être désuètes dans dix ou quinze ans quand on tient compte de l'expansion des villes, du rôle de l'automobile, de l'utilisation dans notre société, etc.; $30 millions consacrés à ça alors qu'il y a peut-être des dépenses prioritaires.

Ces systèmes ne fonctionnent que dans l'hypothèse où tout le monde accepte, tous les réclamants, autant la tierce partie que l'assuré, de se rendre au Centre de règlement des sinistres. Il ne s'agit pas d'envoyer sa secrétaire, si on est député ou si on est président d'entreprise ou d'autre chose, il faut que le chauffeur du véhicule, au moment de l'accident, se présente lui-même au Drive-in Claim Center. Cela n'apparaft nulle part. Cela ferme à cinq heures. Là, à Régina, ils viennent de penser qu'ils pourraient peut-être prolonger les heures, après 26 ou 30 ans; ils vont étirer ça, le samedi matin, ils vont donner deux petites heures. C'est au point où, à Winnipeg, quand on pose la question: Comment les gens font-ils pour accepter l'obligation de se rendre là? Ils nous disent: Si ça ne marche pas, on amende la loi. Grand frère devient présent. Grand frère régit ces histoires. Grand frère va dire: Si vous ne voulez pas y aller, on va vous enlever votre permis. C'est ce qu'ils font. Il faut qu'ils y aillent, il faut qu'ils demandent à leur patron de s'absenter, derrière le moulin, il faut qu'ils s'absentent du tribunal ou autre chose pour aller se présenter là. Cela n'apparaît pas, c'est un coup indirect, nous le prétendons. L'analogie qu'on pourrait tracer, on pourrait dire: Les réparateurs de télévision sont des gars qui coûtent cher l'heure, on va les mettre en état optimum d'efficacité, on va les installer dans un "drive-in" et dorénavant, les gars, vous viendrez porter vos télévisions au lieu d'envoyer les réparateurs chez vous. C'est un peu ce qui se passe.

Quand on dit 17 p.c. d'administration au Manitoba, on a des doutes à cause de ça, entre autres. Dans notre système actuel, c'est vrai qu'il coûte plus cher à administrer, c'est vrai qu'on envoie des agents de réclamation et des estimateurs sur les lieux. C'est étonnant de voir avec quelle flexibilité cela se fait, en dedans de deux jours ou de trois jours dans la région de Montréal, ça me surprend toujours. Un estimateur va dire: Je sais que le gars travaille à Canadair, je lui ai demandé où il place son auto, il le sait: dixième rangée, à gauche, auto bleue, avec un devant massacré. Sans que le gars s'absente du travail, l'évaluation se fait. Le processus est en marche. Ce qu'on dit, c'est que l'entreprise privée, ne nous demandez pas de consacrer $100 millions demain matin au Québec pour créer des Drive-in Claim Centers, je pense qu'on n'en a pas. On va étudier des possibilités d'améliorer ça mais on est capable de garder la flexibilité. C'est ça qu'on peut faire.

M. ROY: Je vous remercie.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Trois-Rivières. Sans vouloir brimer les membres de la commission qui ont demandé le droit de parole, je signalais l'heure avancée...

M. BACON: Nous ferons notre possible.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): ... afin d'abréger les questions et les résumer le plus possible.

M. TETLEY: N'oubliez pas qu'afin de donner plus de chance aux députés ministériels, j'ai posé des questions pendant 12 minutes, malgré que j'aie une foule de questions ici. Les deux députés de l'Opposition, qui représentent une certaine partie de la population mais pas la majorité, ont pris 2 heures et 30 minutes. Peut-être demain faudra-t-il établir des règles plus précises, M. le Président. Aussi, il faut décider de la procédure à suivre demain. Procédez, mon collègue de Trois-Rivières.

M. LEGER: Un autre bâillon.

M. TETLEY: Je ne veux pas imposer un bâillon aux députés ministériels et là, si vous voulez parler de bâillon, cela fait quatre ans que l'Opposition a systématiquement posé un bâillon et vous pouvez le constater.

M. ROY: Je m'excuse, M. le ministre, question de règlement.

M. BACON: II ne reste pas assez de temps pour dire, M. le Président, à l'ordre! Vous m'avez donné la parole.

M. TETLEY: Cet après-midi, c'est un bel exemple.

M. ROY: M. le Président, question de règlement. Je ne veux pas du tout. Jusqu'ici, les travaux de la commission parlementaire des institutions financières, compagnies et coopératives se sont déroulés dans l'ordre. Les questions que nous avons posées sont celles que nous avions jugées pertinentes et qui devaient être posées. Si on veut limiter notre temps, qu'on nous le dise, M. le Président. J'ai été très patient, je n'ai jamais, en ce qui me concerne, empêché un seul de mes collègues, du côté ministériel, de poser des questions et il n'est pas dans mon intention non plus de faire des interventions pour les empêcher de poser des questions. Qu'on prenne le temps nécessaire à cette question de l'assurance-automobile, qui est une question très importante, nécessaire, de façon à examiner toutes les questions; si le ministre s'aperçoit à un moment donné qu'une question que nous posons est impertinente, n'est pas à propos, que le ministre invoque le règlement et qu'il nous le dise immédiatement.

M. LEGER: M. le Président, sur cette question de règlement...

M. TETLEY: On a invoqué le règlement tout l'après-midi.

M. LEGER: Si vous ne voulez pas laisser le ministre donner une fausse impression, je pense que, dans le régime dans lequel nous vivons, que nous soyons dans l'Opposition à six, à huit, à 25 ou à 30, nous avons chacun un rôle à jouer et dans les commissions parlementaires, les députés de l'Opposition doivent faire valoir les points de vue de l'Opposition; le ministre lui-même, quand c'est lui qui défend un dossier ou qu'il a convoqué cette commission, peut faire valoir le point de vue du gouvernement; par la suite les députés, ce sont des points de vue, non pas du gouvernement, mais des points de vue personnels, individuels sur des questions qu'ils ont à défendre.

Ce n'est pas nécessairement le même temps qu'un député peut avoir pour des questions personnelles selon que c'est la position du gouvernement et la position de l'Opposition. Je pense qu'il y a une nuance à mettre et je pense que jusqu'à présent, j'ai même permis à mon ami, le député de Laurier, de m'interrompre pour embarquer dans son projet, même chose pour le député de Montmagny-l'Islet, etc. Je ne pense pas que ce soit une façon d'alléger les débats et je pense que la déclaration du ministre va seulement mettre un peu d'huile sur le feu. Cela aurait été préférable qu'il ne la mette pas de l'avant et que les députés posent leurs questions, je pense.

M. BACON: M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable député de Trois-Rivières.

M. BACON: Un peu plus et j'avais seulement à proposer l'ajournement. M. Moreau, à l'article 59 du rapport Gauvin, page 381, on dit que pour une période transitoire, on limite à ce moment-là un taux maximum de frais d'exploitation du régime à 20 p.c. Compte tenu qu'on a parlé d'une échelle de profits de 15 p.c, est-ce que vous trouvez que la différence entre les deux est suffisante pour avoir une mise en marché adéquate et desservir un peu dans toutes les régions de façon adéquate, la population, les consommateurs?

M. MOREAU: Je m'excuse, je pense qu'on mêle encore les chiffres. Quand on parle de 15 p.c. de profits, on parle de profits des investissements des actionnaires de la compagnie d'assurance. Tandis qu'ici on parle de 20 p.c. du montant de la prime par les assurances. Ce sont deux ordres de chiffres qui ne se comparent pas.

M. BACON: A toutes fins utiles, compte tenu de ces 20 p.c., est-ce que vous considérez que vous avez assez de marge pour votre mise en marché et servir à tous les besoins de la province.

M. MOREAU: Si on accepte nos recommandations dans le système AutoBAC, si on prend tous les moyens pour nous éviter des frais, si on

suit ce qu'on demande dans AutoBAC par exemple, soit que l'assurance-hospitalisation n'ait pas de recours contre les assureurs et par le fait même contre les assurés, si on suit toutes ces recommandations-là, nous pensons que nous pouvons fonctionner dans les limites de ces chiffres-là.

M. TETLEY: Un autre.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Taschereau.

M. BONNIER: M. le Président, je voudrais avoir une clarification de la part de M. Saint-Germain. Dans votre système AutoBAC, il y a 85 p.c., comme je vous dis, des cas qui seraient automatiquement réglés et, pour les autres 15 p.c, il faudrait que les gens aillent devant les tribunaux. Par ailleurs, dans l'argumentation de M. Saint-Germain, il me semble que j'ai compris que vous recommandiez plutôt une espèce d'assurance obligatoire pour ces 15 p.c. Est-ce que c'est exact?

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Ce qu'on voulait dire, c'est que l'assurance de responsabilité civile demeurerait et s'appliquerait en excédent de l'assurance de base qui est AutoBAC, la couverture obligatoire? Elle serait obligatoire et elle permettrait l'accès aux tribunaux? Cela ne veut pas dire que tous les cas seraient plaidés, pas plus que dans le système actuel.

M. BONNIER: II y aurait seulement une possibilité dans certains cas.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Oui, enfin nos chiffres démontrent que c'est moins que 1 p.c. qui vont devant les tribunaux.

M. BONNIER: D'accord. Supposons qu'il y ait un système au Québec qui n'utilise pas les courtiers comme à l'heure actuelle, sinon comme conseillers en relation avec les recommandations de la Commission Gauvin, est-ce que cela causerait des problèmes aux compagnies canadiennes qui font affaires dans les différentes provinces ou si elles pourraient s'ajuster facilement?

M. MOREAU: Je ne crois pas que l'influence d'un système semblable soit différente, que ce soit une compagnie canadienne, britannique ou provinciale.

M. BONNIER: Cela ne causerait pas de problème?

M. MOREAU: Non, je pense que le principe peut s'appliquer à n'importe quelle compagnie.

M. BONNIER: Est-ce que les compagnies qui sont membres chez vous seraient d'accord dans cette hypothèse d'ouvrir des bureaux régionaux, sinon parfois locaux? Est-ce que vous avez pensé au coût de fonctionnement?

M. MOREAU: II est évident que cela suppose une organisation assez compliquée et peut-être une liste de fond. Je doute que tous les assureurs soient capables de le faire, mais M. Gauvin, dans sa recommandation, ne dit pas que tous les assureurs devront faire des affaires dans tous les districts et écrire toutes les catégories de risques. Ce que M. Gauvin dit, c'est que les assureurs publieront leur manuel de taux, ils publieront les livres dans lesquels ils donnent leurs normes d'acceptation et ils diront: Nous, nous faisons affaires dans cinq districts, nous acceptons, en général, douze catégories de risques et voici nos barèmes de primes pour ces catégories.

A compter de ce moment, M. Gauvin dit: Tous les risques qui iront dans ces normes doivent être acceptés lorsque celles-ci sont soumises soit par le public, soit par un courtier.

Je reviens à dire ceci, sur votre question, je ne pense pas que toutes les compagnies aient des bureaux dans tous les districts du Québec.

M. BONNIER: C'est parce que je voyais une faiblesse dans le rapport Gauvin à ce sujet. Je trouvais qu'il n'allait pas assez loin dans ses recommandations. Je trouve qu'il faudrait imposer aux compagnies, celles qui veulent faire affaires au Québec, d'avoir des bureaux décentralisés. Autrement, il y a des gens qui vont être mal servis.

UNE VOIX: Notre conseiller est là.

M. BONNIER: Si le conseiller est là, d'accord.

M. MOREAU: II ne faut pas oublier qu'en vertu de ce système, le conseiller, le courtier, aura à sa disposition tous les renseignements de tous les assureurs, non pas seulement son groupe d'assureurs d'aujourd'hui, mais de tous les assureurs avec tous leurs barèmes de taux. Il sera parfaitement au courant du marché. Remarquez, je ne suis pas en train de vendre ce système. Je vous explique la façon dont je conçois la suggestion de M. Gauvin.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): M. le Président, si vous me permettez, nous avons bien dit que les recommandations du rapport Gauvin sont réalisables. On peut penser à quantité d'autres qui seraient réalisables aussi. Voici la question que nous posons: Est-ce que c'est désirable? Le rôle du courtier dans le système actuel a reçu l'appui de la population. Même dans une régie d'Etat comme en Colombie-Britannique, pendant la première année d'activités, les courtiers d'assurances ont transigé 94 p.c. de toutes les polices d'assurance-auto-

mobile. Le public avait le choix entre aller au Bureau des véhicules automobiles ou transiger par les courtiers. Il a choisi à 94 p.c. les courtiers.

M. TETLEY: Ou le "direct writing". Par exemple, chez vous, est-ce que je peux acheter directement de votre compagnie?

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Non.

M. TETLEY: Mais c'est cela, que préconise le rapport Gauvin. Il y a une distinction. Le rapport Gauvin insisterait pour que votre compagnie soit obligée à me vendre directement, n'est-ce pas?

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Oui, mais les assurés qui veulent faire affaires avec un assureur aujourd'hui peuvent aller voir un assureur directement. Il y en a sur le marché. Il n'est pas dit que si, pour répondre à M. Bonnier, un assureur qui travaille actuellement pour le système de courtiers était obligé de décentraliser ses opérations, d'ouvrir des bureaux dans des sous-régions, etc., ce serait moins coûteux. La population a un service par le courtier aujourd'hui. Elle semble le désirer. A quel niveau de rémunération, c'est peut-être un autre aspect.

M. TETLEY: Oui, parce que votre mémoire, quelque part, stipule que vous favorisez le système de courtiers, d'agents captifs et le "direct writing" à tout le monde, le droit de tout citoyen d'aller à n'importe quelle compagnie et d'acheter directement, s'il veut, sans le bénéfice du courtier. Mais cela, c'est une grande différence avec le système actuel.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Mais il n'y a rien qui empêche une compagnie, actuellement, qui fonctionne par le système de courtiers, de faire de l'assurance directe si elle le désire. Et si, dans le système actuel, une compagnie ne le fait pas, c'est parce qu'elle pense qu'elle ne rendra pas service à ses assurés.

M. TETLEY: Ou peut-être qu'elle pense qu'elle n'aurait pas de "business" des courtiers, parce que, moi, M. Saint-Germain, je vous suis très sympathique à vous et à votre compagnie. Vous connaissez ce qui est arrivé l'an dernier lorsque certaines compagnies ont coupé, auprès des jeunes, leurs primes et les commissions aussi. Il y avait un boycottage de ces compagnies. Vous connaissez...

M. SAINT-GERMAIN (Guy): II y a des difficultés en cours de route dans n'importe quelle aventure d'une société commerciale, de même que dans l'histoire des partis politiques, cela va de soi.

M. TETLEY: Ah oui! On a des problèmes chez nous, mais nous en aurons toujours, et tout parti politique en aura. Je suis aussi sympathique que possible, mais n'oubliez pas que le système Gauvin est tout à fait différent, et vous serez obligé de me vendre directement de l'assurance. Suivant votre rapport, à la page 19, on m'a avisé que vous avez accepté ce système. En tout cas, je demande pardon au député de...

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Le point que nous faisons valoir, je pense, M. le Président, c'est que les forces du marché, laissées à elles-mêmes aujourd'hui, semblent avoir favorisé très nettement le courtier d'assurance, parce qu'il y a 86 p.c. — je pense que les courtiers d'assurance ont mentionné le chiffre de 86 p.c. — des affaires qui sont souscrites par les courtiers d'assurance, avec la possibilité pour les Québécois, d'aller ailleurs s'ils le désirent. Peut-être que dans dix ans, quinze ans, vingt ans, ce sera différent. Les forces du marché sont toujours actives, mais pour le moment, c'est cela.

M. TETLEY: Les courtiers sont même forts à l'Assemblée nationale.

M. BONNIER: Simplement une dernière question, M. le Président, on a beaucoup parlé de placements. J'aimerais savoir si vous avez le renseignement, si les compagnies qui font partie de votre groupe ont tendance à investir au Québec, à peu près dans la même proportion qu'elles récupèrent des primes du Québec même.

M. MOREAU: C'est une question extrêmement intéressante, parce que M. Gauvin a touché à ce point quand il a parlé des cotisations.

Il vous a dit qu'il ne faudrait pas s'imaginer qu'une entreprise étatique va faire un gros changement dans les investissements de la province. Ils vont prendre des investissements qui sont au Québec et ils vont les placer au Québec. Ce n'est pas plus compliqué que cela.

Les assureurs ont coopéré il y a trois ans, en décembre 1970, je pense, avec le ministère des Institutions financières, Compagnies et Coopératives pour révéler toute la nature de leurs placements. C'était une enquête assez poussée et nous avons donné tous ces renseignements au ministère des Institutions financières, Compagnies et Coopératives. Le ministère n'a pas jugé à propos de les publier encore mais je pense que cela a révélé que les assureurs placent, de façon générale, autant qu'ils reçoivent au Québec et quelquefois, plus. Je pense qu'il n'est pas exagéré de dire cela.

M. GIASSON: M. Moreau, dans le même ordre d'idées, se peut-il que le plus important souscripteur d'assurance-automobile au Québec n'investisse pas un seul cent dans la province?

M. MOREAU: N'investisse pas...?

M. GIASSON: ... aucun argent dans le Québec.

M. MOREAU: Oh! Je ne pense pas que cela soit possible.

M. LEGER: Est-ce que vous avez des chiffres sur les investissements qui sont faits au Québec, la proportion? Vous avez affirmé quelque chose, mais avez-vous des chiffres pour justifier cela?

M. MOREAU: Nous avons des chiffres qui proviennent justement du ministère. Ce dernier a eu l'amabilité, à ma demande, de me communiquer le résultat de cette enquête que nous avions faite ensemble en décembre 1970. Je les ai à mon bureau. Je ne les ai pas ici. Je n'en dispose pas...

M. LEGER: Parce que le ministre semblait sursauter comme moi à votre affirmation. Alors, s'il vous a fourni les chiffres, je ne sais pas si vous deux avez les mêmes conclusions.

M. MOREAU: Si j'ai fait erreur, on peut toujours me corriger.

M. GIASSON: ... le plus fort souscripteur de primes au Québec? Avez-vous l'impression que Lloyd's of London, qui tout de même souscrit passablement de primes dans l'automobile et dans les autres assurances générales investit passablement au Québec?

M. MOREAU: J'imagine qu'ils doivent investir en fonction de leur volume d'affaires. La Loi des assurances fédérale qui les régit les oblige à avoir un fonds d'investissement canadien proportionnel à leurs engagements. Alors, je ne pense pas qu'ils fassent exception à la règle dans ce domaine. Je ne crois pas.

M. GIASSON: Cela serait à vérifier. M. MOREAU: Peut-être.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Bellechasse.

M. TETLEY: Pardon! C'est une question du député de Lafontaine, en Chambre, à laquelle je vais répondre aussitôt que j'aurai tous les chiffres. C'est une question difficile, mais peut-être avez-vous d'autres chiffres. 1970, ce n'est pas de l'actualité.

M. MOREAU: II n'y a pas eu d'autre enquête depuis ce temps. Votre ministère est au courant que c'est un travail très compliqué à faire parce qu'il s'agissait d'établir, dans l'investissement d'une compagnie, si une action du

Canadien Pacifique était une action placée au Québec, à 10 p.c, à 20 p.c, à 30 p.c, à 40 p.c, à 80 p.c.

Il a fallu établir tout un barème pour en arriver à quelque chose de passable. C'est une enquête qui a été assez longue. Il n'y en a pas eu d'autres de faites depuis ce temps-là, M. le ministre, à ma connaissance.

M. ROY: Sur le même sujet, est-ce que le ministre pourrait nous dire s'il a l'intention, éventuellement, d'obliger les compagnies d'assurance-automobile à publier des bilans séparés pour les affaires qu'elles font au Québec? Actuellement, je pense, que les compagnies nationales publient un bilan global de leurs opérations.

M. TETLEY: Oui. Au sujet des investissements, l'article 269 du bill 7, déjà déposé, impose l'obligation d'investir au Québec une certaine part de vos réserves, de votre chiffre d'affaires. Au sujet d'un rapport sur leurs affaires, profits et pertes, paiements aux avocats, etc., cela est évidemment difficile surtout parce que ce sont les compagnies qui font le travail, travail qui est énorme. Vous avez votre livre vert qui n'est pas par province. Mais, évidemment, j'aimerais un tel système. Qu'est-ce que vous en pensez, M. Moreau?

M. MOREAU: M. Roy parle d'un bilan par province. Je ne sais pas si vous voulez vraiment dire un bilan, mais les compagnies font des rapports par territoire, par province sur les revenus qu'elles en tirent, les sinistres qu'elles paient et les frais qu'elles encourent. Elles font au surintendant des rapports sur une base provinciale.

M. ROY: Lorsque j'ai parlé d'un bilan, évidemment, je faisais surtout référence à l'ensemble des opérations qui peuvent se faire dans un territoire donné, en incluant la partie investissement. Parce que l'investissement comme tel, on ne le retrouve pas dans l'état des revenus et des dépenses. On le retrouve dans le bilan. C'est pour cela que j'avais employé le terme bilan.

M. GIASSON: Toujours au chapitre des investissements...

M. TETLEY: Par bilan.

M. GIASSON: ... on a entendu quelqu'un devant cette commission faire une déclaration globale. Parmi les turpitudes qu'il reconnaissait dans le système de commercialisation de l'assu-rance-automobile, il déclarait formellement que, dans le système actuel, les placements des compagnies qui transigent de l'assurance-automobile, ne se faisaient pas au Québec, mais que, s'il s'agissait d'une société étatique, tout cet argent serait

placé au Québec. J'aimerais savoir, si vous avez des données là-dessus, parmi toutes les compagnies qui transigent de l'assurance-automobile dans notre province, quel est le pourcentage de placement disponible dans ces compagnies qui est fait au Québec par rapport à ce qui est fait à l'extérieur du Québec.

M. MOREAU: Cela revient un peu à vous parler de l'enquête que j'ai mentionnée tout à l'heure, qui a été faite en 1970. Le résultat, grosso modo, c'est que les assureurs placent au Québec, autant, sinon un peu plus, que le montant des primes qu'ils perçoivent. Il y a tout avantage à le faire. Une compagnie qui place...

M. GIASSON: Autant, sinon un peu plus, que les primes perçues pour l'assurance-automobile, $450 millions?

M. MOREAU: Oui, certainement. M. GIASSON: Vous affirmez ça?

M. MOREAU: Oui, certainement. Les assureurs n'ont aucun avantage à vendre de l'assurance au Québec, retirer des primes et aller investir ailleurs. Le Québec est un endroit fort intéressant pour investir. On n'a pas besoin de tordre le bras à un assureur pour le faire investir au Québec. Cela se fait tout naturellement.

M. GIASSON: J'ai des réserves.

M. MOREAU: Je ne dis pas que tous les assureurs ont le même pourcentage, mais, pour l'industrie en général, c'est sûrement conforme au montant des revenus qui existent dans la province. Il peut y avoir des assureurs qui font plus, d'autres moins, mais, en général, l'industrie investit tout autant, sinon plus, qu'elle reçoit de primes dans la province. Je n'ai aucun doute là-dessus. Vous avez l'air d'en douter?

M. GIASSON: J'ai des doutes. Même si votre affirmation est formelle.

M. MERCIER: C'est malheureux que...

M. NICHOLSON: Les investissements des compagnies, en réalité, sont régis par le rendement qu'elles peuvent recevoir. C'est un fait que les taux d'intérêt dans la province de Québec sont toujours les meilleurs, c'est un autre aspect qui force un peu les compagnies à placer ici plutôt qu'ailleurs.

M. MOREAU: C'est un mouvement naturel de placer au Québec. Il n'y a pas de raison sérieuse pour qu'elles ne le fassent pas.

M. GIASSON: Si vous me permettez, je vais poser une question qui va avoir un cachet très personnel. Nous avons ici un directeur général d'une compagnie québécoise, essentiellement. Est-ce qu'il peut nous déclarer qu'il fait 100 p.c. de ses placements dans la province de Québec? M. Saint-Germain.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): Je me suis bien promis de ne pas parler à titre de représentant de la compagnie en question parce que je n'ai pas le...

M. GIASSON: Je vous pose la question comme directeur général du groupe Commerce.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): ... mandat de mon conseil d'administration d'apparaître ici, mais, comme membre de la délégation du BAC, le groupe Commerce est un membre de ça, je peux vous dire que 100 p.c. de nos opérations financières sont faites sur le marché de Montréal. Cela intéresse certainement M. le ministre. Nos conseillers financiers sont à Montréal. Nos courtiers sont à Montréal. De là à vous dire que 100 p.c. de nos actifs sont placés sur des valeurs québécoises, la réponse est non. Le seul critère que, comme directeur général, mon conseil d'administration accepterait... Je pense que le député Bacon a mis le doigt sur ça quand il a parlé, en référence, la semaine dernière, de la Caisse de dépôt. Il a parlé de l'équilibre des marchés financiers. On commence à toucher une grosse question.

La compagnie que je représente, sa capacité d'assumer ses obligations sur le marché vis-à-vis de ses clients, de même que sa capacité d'assurer une expansion, pour les raisons que je vous ai expliquées, on a besoin de capitaux. Il faut réinvestir constamment. On ne peut pas se permettre de se contenter de moins que le rendement maximum sur nos investissements.

Si on avait voulu, par exemple, encourager à 100 p.c. la SGF, le groupe Commerce ne serait plus en affaires aujourd'hui. Si on avait placé entièrement dans la SGF, si on avait placé entièrement nos portefeuilles...

M. BONNIER: ... pas entièrement, non.

M. SAINT-GERMAIN (Guy): ... dans des valeurs obligataires du Québec, si vous connaissez vos chiffres, vous savez qu'elles rapportent plus en intérêt mais qu'elles se sont également dévaluées davantage que bien d'autres. Mon test de solvabilité dépend de la valeur de mes actifs à tout moment donné.

Alors, il est évident que, dans l'ensemble, il y a un pourcentage de nos affaires qui vont être placées dans des valeurs québécoises, mais le critère qu'on retient, jusqu'à ce que le législateur décide que cela ne doit plus se passer comme cela pour les compagnies d'assurance, les banques, même les portefeuilles individuels des invididus — si on est rendu là — et les fonds de pension des individus... Je pense que si, comme directeur général, j'étais appelé à expliquer à tous ceux qui détiennent pour $50 mil-

lions de créance sur le groupe Commerce que c'est dommage, je ne peux pas les rembourser, les $50 millions, parce que j'ai placé cela dans des valeurs dont le cours s'est effrité, je serais mal placé et vous me le reprocheriez, à juste titre.

Pour vous compliquer un peu plus le tableau, dans les moments qu'on traverse actuellement, où les marchés financiers sont très difficiles, une compagnie comme la mienne va tenter d'avoir le maximum de ses actifs en liquidité. Je veux dire que 55 p.c. de nos portefeuilles sont placés sur des titres à court terme.

Parce qu'une compagnie d'assurance-automobile, d'assurance générale, ce n'est pas une compagnie d'assurance-vie. Ce n'est pas un véhicule d'épargne. C'est un véhicule de redistribution de l'argent qu'on prend d'une main et qu'on remet aux assurés de l'autre, ou aux tierces parties.

Alors, on a 55 p.c. qui sont en liquidité. On place cela où? Sur des billets à 90 jours pour une bonne part, etc., mais encore une fois on ne peut pas placer X millions au Trust général du Canada ou à la BCN, parce que c'est dangereux. Toutes choses égales, par ailleurs, à même rendement, on va effectuer une certaine diversification. Si vous allez dans ce sens-là, comment allez-vous faire pour vous assurer que les $15 millions que j'ai placés comme cela, à court terme, vous allez les suivre et vous allez demander à la Banque Royale ou à la BCN si elles ont placé cela, à leur tour, au Québec? Je pense qu'elles doivent respecter les mêmes critères que nous, qui en est un de rentabilité maximum des actifs.

En fait, je dirais que si les titres du Québec reflètent une situation fondamentalement saine, ils vont être très bons sur le marché; ils vont être courus et les assureurs vont se faire un plaisir de les acheter.

S'ils sont fondamentalement mauvais ou relativement moins bons que les autres, il y a une tendance nettement dans notre système, en vertu du critère que je vous donne bien ouvertement, à placer d'une autre façon. Si vous voulez interférer avec cela, c'est une autre paire de manches, comme M. Bacon le disait.

M. BONNIER: Merci.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Bellechasse.

M. MERCIER: M. le Président, j'aurais aimé, si le temps nous l'avait permis, qu'on revienne sur ce langage un peu technique auquel a fait allusion tout à l'heure M. Moreau concernant les déficits techniques, les déficits réels des compagnies d'assurance suite aux questions soulevées par le député de Beauce-Sud; mais je m'en tiendrai à un point sur lequel j'aurais aimé avoir les commentaires du Bureau des assureurs du Canada relativement à cette absence d'un "incentive" par rapport aux propriétaires d'un véhicule dans la tarification du coût d'une police d'assurance-automobile.

Je crois comprendre, évidemment, que le plan AutoBAC pourrait contribuer à réduire sensiblement le coût d'une police d'assurance-automobile. Mais si l'on tient compte justement d'un commentaire, dans certains milieux, dans le passé, alors qu'on déplorait que les bons payaient pour les méchants, à la suite d'une question du député de Beauce-Sud tout à l'heure, vous avez répondu — cela confirmait évidemment la règle — que dans le passé les primes d'assurance étaient établies par rapport à l'expérience d'une région donnée relativement aux accidents qui survenaient dans telle région ou aux coûts des dommages réclamés. Je pense que si l'on considère que la sécurité routière, c'est la responsabilité de chaque individu et que, dans 80 p.c. des cas, la faute est imputable au facteur humain, ne croyez-vous pas qu'il serait juste ou qu'il y aurait lieu de penser à une formule qui inciterait l'automobiliste à un meilleur comportement ou à un meilleur respect des règlements de la circulation lorsqu'il est au volant de son véhicule? Même si, par cette formule que vous proposez, l'on peut escompter une réduction du coût de la prime d'assurance-automobile, personnellement, je déplore cette absence d'un "incentive" à l'automobiliste d'améliorer son comportement au volant, de respecter davantage les règlements de la circulation. Par cette formule comme dans l'autre, la prime d'assurance de base serait la même pour tout le monde, et, je pense que l'on sera tous d'accord pour dire que l'argent, c'est le nerf de la guerre et peut inciter aussi, dans bon nombre de cas les automobilistes à être un peu plus respectueux des lois si l'on savait qu'à l'autre bout il y a une possibilité de réduction des primes d'assurance dans leur cas. Ce qui m'amène à parler d'un dossier du chauffeur, du détenteur d'un permis de conduire, d'un dossier cumulatif par rapport à son expérience et à sa bonne conduite au volant.

Je sais que dans le passé, le Bureau des assureurs du Canada a contribué à mettre de l'avant certaines initiatives, relativement à l'encouragement pour l'enseignement de la conduite automobile ou la diffusion des cours de conduite-automobile pour les élèves des "high schools" ou de niveau secondaire, en accordant une prime, une réduction, un pourcentage de réduction sur le coût des primes d'assurance. C'est la même chose aussi dans le cas de certaines compagnies qui ont accordé une réduction de primes d'assurance-automobile pour les automobilistes qui avaient suivi des cours de conduite préventive dans certaines provinces canadiennes.

Personnellement, je suis d'avis qu'il faudrait penser à une formule qui permettrait de conserver cette réduction possible de prime pour le chauffeur ou le détenteur d'un permis de

conduire qui aurait, évidemment, un dossier intact au fil des années, et qui pourrait déboucher sur une réduction de sa prime, indépendamment de son expérience comme automobiliste. Qu'est-ce que vous en pensez?

M. MOREAU: Je pense que votre suggestion est très intéressante parce que c'est, effectivement, une lacune dans le système actuel. Non pas que le système actuel ne reconnaisse pas les qualités des bons conducteurs. Il le fait. Nous avons ce qu'on appelle le "merit system" qui accorde à un assuré, après un an sans accident, je crois que c'est 15 p.c, deux ans, 25 p.c, trois ans, 40 p.c. et cinq ans, 45 p.c. ou 50 p.c. de réduction. Cela se fait dans le moment. Malheureusement, à cause de la façon dont le "marketing" est fait — et c'est notre faute à nous, les assureurs — la façon dont la prime est indiquée sur le document, sur la police, l'assuré ne s'en rend pas compte. On peut peut-être dire "mea culpa", nous les assureurs, de ne pas avoir fait suffisamment d'efforts dans le passé pour informer le consommateur ou l'assuré du coût de sa prime et des rabais dont il bénéficie comme bon conducteur. J'espère et je note votre suggestion, vous avez tout à fait raison de la faire à ce moment, j'espère qu'à l'occasion de la mise en place d'un nouveau système — parce que j'espère qu'il va arriver le nouveau système — on va tenir compte de cela dans la tarification. Il va falloir établir de nouveaux barèmes, de nouvelles bases de tarification. Comme j'ai dit tout à l'heure, peut-être qu'une des bases, ce sera le système de points de démérite ou de mérite. Alors, il peut y avoir beaucoup d'autres facteurs qui incitent, comme vous le disiez, le conducteur à être plus prudent. Je pense que ce peut être pour nous une très bonne occasion de faire quelque chose qui va faire que le consommateur se rende compte, beaucoup plus, que ses actes paraissent dans sa prime. Merci.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Portneuf.

M. PAGE: Je serai bref, seulement quelques questions. D'une part, vous parlez dans le plan que vous proposez, l'AutoBAC, d'un plan de base où il y aurait une indemnité, un genre d'indemnité minimale, pouvant aller jusqu'à $250 par semaine, et jusqu'à $20,000. La question est la suivante: Sur quoi allez-vous vous fonder pour allouer ledit montant et quels seront les recours à ce moment, si l'assuré n'est pas satisfait de la prestation versée?

M. MOREAU: Vous parlez toujours d'indemnité hebdomadaire.

M. PAGE: Oui.

M. MOREAU: Alors, il s'agit de se rendre compte si la personne blessée gagnait effective- ment un salaire au moment de l'accident. Si oui, quel est-il? Et à ce moment, il a droit au remboursement de ce salaire, son salaire brut, moins 20 p.c. pour l'impôt, à moins qu'il nous démontre que ses impôts se chiffraient par moins de 20 p.c; c'est l'indemnité qu'il va recevoir, jusqu'à un maximum de $250.

M. PAGE: Oui, mais en ce qui concerne le montant de $20,000, qu'est-ce qui vous guidera pour que tel dommage, c'est tel montant?

M. MOREAU: Dans les $20,000, vous avez d'abord les frais médicaux...

M. PAGE: Est-ce que l'assureur a les moyens de les contester?

M. MOREAU: ... et de rééducation. Là, il faut s'en remettre à la profession médicale pour déterminer si oui ou non il y a lieu de payer; enfin, les services médicaux ou de rééducation, ce qu'on appelle la réadaptation, indiquent si c'est nécessaire. Ce n'est plus l'assureur qui est juge alors, mais c'est la profession médicale.

M. PAGE: Ce serait quand même une décision qu'on pourrait peut-être qualifier d'unilatérale, étant donné que l'assuré n'aura pas d'autre recours que d'accepter la décision du médecin.

M. MOREAU: Oh non! Pardon! C'est unilatéral au début. Notre plan prévoit un dispositif d'appel dans le cas où l'assuré jugerait que l'indemnité qu'on lui a payée n'est pas conforme à ses besoins, c'est-à-dire n'est pas conforme au barème établi. S'il interprète le barème de façon différente de l'assureur, il y aura un tribunal d'appel, comme d'ailleurs dans le plan Gauvin, M. Gauvin recommande la même chose.

M. PAGE: S'il y a un mécanisme d'appel, cela répond à ma question.

La deuxième est la suivante. Vous avez parlé du rôle du courtier qui, selon le rapport, deviendrait un conseiller. Pour ce qui vous concerne, est-ce que vous préférez ou jugez-vous valable que le courtier demeure l'intermédiaire entre la compagnie ou que son rôle se limite à être un conseiller?

M. MOREAU: Comme je l'ai dit tout à l'heure, nous sommes satisfaits de ce qui se passe dans le moment. Nous avons des preuves... Il est évident pour nous que le courtier remplit un rôle nécessaire aujourd'hui. On revient toujours à cet argument. Ce n'est pas pour rien que 86 p.c. de la population s'adresse à lui. Il y a une raison pour cela. Nous, nous sommes satisfaits de cela. M. Gauvin semble penser qu'il y a des raisons de croire le contraire. Nous n'en discutons pas. Tout ce que nous disons, c'est que cela prendrait des études vraiment plus poussées sur la valeur du service donné par le courtier.

M. PAGE: Etant donné...

M. MOREAU: II faudrait être prudent.

M. PAGE: ... que vous êtes satisfait de ce qui prévaut actuellement, qu'est-ce qui vous incite à proposer, dans votre programme, que le courtier soit rémunéré directement par l'assuré? Est-ce que c'est un motif...

M. MOREAU: Je m'excuse. Nous ne le proposons pas. Nous disons simplement que si l'Etat, dans sa sagesse, décidait que c'est la façon dont les choses doivent se passer, nous sommes prêts à nous y conformer, mais nous ne le proposons pas.

M. PAGE: Mais vous accepteriez que...

M. MOREAU: Nous accepterions, évidemment, de procéder sur cette base si l'Etat jugeait que c'est la façon appropriée.

M. PAGE: D'accord. Vous avez fait un mea culpa au niveau de la tarification, etc. Vous avez dit: Avec le nouveau programme, ce sera le temps d'instaurer de nouveaux barèmes avec le système de mérite ou de démérite, selon le cas. Ne pensez-vous pas que cela serait peut-être le meilleur moyen pour que nos compagnies d'assurance aient un rôle social accru à partir du nouveau programme qui pourrait être éventuellement instauré? Ici, je fais allusion à des cours de sécurité routière, à une publicité sur les différents programmes offerts, etc., comme certaines petites compagnies d'assurance le font actuellement.

M. MOREAU: Probablement que les assureurs devraient profiter de l'occasion pour s'intégrer un peu plus socialement qu'ils ne le font aujourd'hui, ou du moins pour le montrer un peu plus qu'ils ne le montrent aujourd'hui. Vous savez, les assureurs sont intégrés à la société du Québec dans une mesure beaucoup plus forte qu'on ne le pense. Mais nous avons le défaut de ne pas toujours dire les bons coups que nous faisons. Le député de Bellechasse disait tout à l'heure que les assureurs paient, par exemple, des sommes assez fortes pour l'éducation des conducteurs. A ce sujet, le Bureau d'assurance du Canada est le plus gros souscripteur du Conseil canadien de la sécurité routière, y compris de tous les gouvernements, c'est le Bureau d'assurance du Canada qui est le plus gros souscripteur et, en plus d'une souscription fixe importante, nous payons le coût d'entraîn nement des moniteurs de cours dans tout le Canada.

M. PAGE: Les assurés ne le savent pas, bien souvent, malheureusement.

M. MOREAU: Les assurés ne le savent pas.

Et, comme je le disais tout à l'heure, nous devons dire notre mea culpa parce que nous devrions être un peu plus "verbal", comme on dit en anglais.

M. PAGE: Vous êtes comme les politiciens. On parle seulement de vos mauvais coups!

M. MOREAU: On est tellement occupé à servir nos assurés qu'on...

M. PAGE: Une dernière question maintenant. Dans le souci que vous avez de rechercher un service égal au consommateur québécois avec un coût moindre — la question sera bien directe — est-ce qu'il a fallu la commission Gauvin pour faire en sorte que vous pensiez à un nouveau programme? Pourquoi cela n'aurait-il pas pu se produire avant?

M. MOREAU: Non. Je suis bien prêt à admettre que l'existence de la commission Gauvin nous a donné une certaine injection. C'est tout à fait humain, mais nos travaux sur l'assurance sans égard à la responsabilité datent de beaucoup plus loin que cela. Les premières études et les premières discussions remontent, je pense, à 1940. Alors, ce n'est pas nécessairement la commission Gauvin qui nous a mis en marche là-dessus.

M. PAGE: C'est bien louable, mais disons...

M. MOREAU: Comme je vous dis, l'industrie n'a jamais été gâtée dans le passé par les réactions des gouvernements et je ne critique pas le gouvernement du Québec, tous les autres.

Je vous ai dit tout à l'heure que, dans la police actuelle au Québec, il y a la section B qu'on appelle l'assurance individuelle. Ce sont des bénéfices sans égard à la responsabilité, mais très limités. Il a fallu treize ans pour convaincre les gouvernements de nous laisser vendre cela sur une police d'assurance-automobile.

M. PAGE: Si je comprends bien, c'est ce qui fait que dans le cas d'un accident d'automobile, en ce qui concerne les frais aux passagers, au conducteur, c'est chacune des compagnies d'assurance qui les paie. Est-ce que c'est un "agreement" comme cela?

M. MOREAU: Je n'ai pas saisi votre question.

M. PAGE: La section B de votre contrat, exactement, est-ce que ce sont les provisions pour prévoir la responsabilité des passagers et du conducteur?

M. MOREAU: Cela prévoit les blessures subies et par les passagers dans le véhicule et par les piétons. Il y a un montant pour la mort qui est très limité. Il y a également une indemnité

hebdomadaire, mais en somme ce sont des montants très bas.

M. PAGE: Une dernière question tandis qu'on touche au contrat. Si le Québec était dans un système de "common law" plutôt que de venir du droit français, pensez-vous que cela pourrait influencer sur le coût de la prime, parce que ce sont quand même des contrats différents qui existent à ce moment-là?

M. MOREAU: Vous dites si le régime...

M. PAGE: Si on avait un régime de droit, si nos assurances sur la responsabilité comme telle étaient fondées sur le régime de la "common law" plutôt que fondées sur le droit civil, pensez-vous que cela pourrait influencer dans le coût de la prime, parce que la responsabilité est quand même plus limitée?

M. MOREAU: Si nous vivions sous un régime de "common law" comme dans les autres provinces, évidemment, cela influencerait. C'est une chose qui est extrêmement intéressante à dire. La responsabilité de l'assureur, de l'automobiliste d'abord et de l'assureur au Québec est beaucoup plus étendue que dans les autres provinces. C'est une des raisons de l'excédent de primes au Québec.

M. PAGE: Je comprends que vous n'avez pas eu beaucoup de chiffres aujourd'hui, mais est-ce que vous avez fait des études qui démontrent quelle pourrait être éventuellement la différence entre les deux?

M. MOREAU: Peut-être pas pour vous donner satisfaction, mais je sais que nous avons fait une étude particulière au Québec il y a plusieurs années — M. Rankin se souviendra peut-être de cela — où la responsabilité envers les passagers, la négligence ordinaire, coûtait au Québec, à un moment donné, 22 p.c. de plus sur la partie des dommages corporels de la prime, pas des dommages matériels, évidemment. Je me souviens de ce chiffre. C'est une étude que nous avions faite à la commission d'enquête en Colombie-Britannique en 1966. C'était une partie, il y en a d'autres évidemment.

M. PAGE: D'accord. Pour terminer, je vous remercie beaucoup. Tantôt, lorsque j'ai posé la question à savoir s'il a fallu le rapport Gauvin pour vous inciter à faire votre étude, je vous félicite. Cela date de 1940. Cependant, je considère que, si cela fait tant de temps, c'est quand même curieux que vous n'ayez pas plus de chiffres que cela là-dessus. C'est un dernier commentaire. Merci.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député d'Iberville.

M. TREMBLAY: M. le Président, deux questions assez rapides. Est-ce que vous avez, M. Moreau, des statistiques récentes sur le pourcentage des accidents causant des morts, des dommages matériels, le pourcentage combiné, pour des conducteurs en état d'ébriété avancée ou pas?

M. MOREAU: II n'y a pas de statistiques valables à ce sujet, malheureusement, parce qu'il est trop difficile d'établir la situation du conducteur au moment d'un accident. Nous savons, c'est, tous les ans, le rapport du pathologiste de la province de Québec qui nous le dit, dans les cas d'accidents mortels, plus de 50 p.c, entre 50 p.c. et 53 p.c. des conducteurs tués au volant de leur voiture, avaient plus de 0.08 p.c. d'alcool dans le sang. On peut le vérifier à ce moment-là parce qu'il y a une autopsie faite. Mais dans le cas des blessés, dans le cas de celui qui meurt deux semaines après, dans le cas de la multitude de chauffeurs blessés et de passagers blessés à cause de l'alcool consommé par le conducteur, c'est très aléatoire. Il n'y a pas moyen de le savoir.

M. TREMBLAY: N'y aurait-il pas lieu de saisir cette occasion qui vous est fournie par l'émission du rapport Gauvin — on fait un peu un petit examen de conscience au niveau des compagnies qui assurent — de préciser un peu plus dans vos livres et dans vos esprits, ce fléau qui ravage nos routes et qui est la cause des surprimes épouvantables que nous, la majorité des conducteurs, avons à payer pour ceux qui négligent de se tenir solides au volant à cause de la boisson?

M. TETLEY: Peut-être en donnant le bon exemple et en ne buvant pas au lunch?

M. TREMBLAY: D'accord, M. le ministre, mais je pense qu'on plane souvent et plus souvent qu'à notre tour.

M. BACON: C'est cela qui avance la cause.

M. TREMBLAY: Peu importent les commerciaux de télévision de la "50" et de la grande joie de vivre de nos brasseurs québécois et canadiens, rien n'empêche que ça tue beaucoup de monde.

M. MOREAU: Nous sommes tout à fait d'accord avec vous, M. le député. En fait, nous avons consacré à notre mémoire de janvier 1972 un chapitre particulier qui s'appelle "L'alcool", où on donne à peu près tous les renseignements qui sont connus dans ce domaine et où on incite le gouvernement à prendre les mesures nécessaires pour éliminer de la route, les conducteurs en état d'ivresse. Cela pourrait se faire assez facilement, on le fait dans d'autres provinces.

M. TREMBLAY: Maintenant, au sujet des

surprimes que vous exigez de clients qui ont un dossier d'accidents antérieurs causés par leur état d'ébriété, il doit arriver que vous ayez des clients qui souscrivent des assurances chez vous et qui paient des surprimes passablement élevées pour couvrir ce risque additionnel qu'ils représentent, à savoir qu'ils prennent un coup plus souvent qu'à leur tour...

M. MOREAU: Des cas où il y a surprimes dans la prime d'assurance, ce sont les cas où il y a eu suspension de permis, soit par le directeur du bureau des véhicules automobiles, soit par un juge, mais il faut qu'il y ait suspension officielle du permis.

A ce moment-là, il y a des surprimes, des pourcentages de surprimes de prévus dans les barèmes de "Facilité" dont on parlait tout à l'heure.

M. TREMBLAY: Les enquêtes que vous commandez sur les individus à l'occasion de souscriptions d'assurance, qu'on appelle "Retail Credit", ne couvrent pas seulement la solvabilité des gens, elles comprennent également leur comportement moral. Ecoutez, je ne veux pas paraître ici comme un prédicateur de retraite, mais c'est un aspect tellement important dans notre société, aujourd'hui. Je remarque que trop de monde s'en soucie peu, sauf, évidemment ceux qui ont à payer les pots cassés, qui sont surtout les familles.

M. MOREAU: Ce que nous regrettons, c'est de constater que le législateur lui, ne s'en préoccupe pas beaucoup dans l'octroi des permis. L'enquête dont vous parlez, cela existe encore, dans les compagnies, j'imagine. Mais jamais une compagnie va dire: Parce que l'enquête révèle que ce gars-là boit, nous allons lui réclamer une surprime, cela ne se fait pas ainsi. Le seul cas où il y a vraiment surprime à cause de la boisson, c'est quand il y a eu suspension du permis, quand il y a eu décision par une autorité autre que l'assureur, soit le juge, soit le directeur du bureau des véhicules automobiles. Nous ne prenons jamais sur nous, les assureurs, de décider que M. Untel boit trop. Je pense que ce serait une liberté qui pourrait conduire assez loin.

M. TREMBLAY: Mais un mauvais risque, je pense bien que vous allez le refuser?

M. MOREAU: Non, l'industrie a convenu — je l'ai dit tout à l'heure — d'assurer tous les risques à qui le gouvernement aura accordé des permis de conduire. Des ivrognes, on pourrait vous en donner, nous en avons donné une liste à la commission Gauvin, savoir des cas extraordinaires qui, d'après nous, n'auraient jamais dû avoir de permis de conduire ou, du moins, à qui on aurait dû les enlever. Nous avons donné une liste de ces cas-là au comité Gauvin et il a fait enquête, j'imagine, là-dessus...

M. TREMBLAY: ... "lobbying" auprès du ministère des Institutions financières, ce serait peut-être bon d'inclure ce point-là. J'ai l'impression que vous allez avoir à faire du "lobbying" constamment maintenant auprès du gouvernement, pour être capable d'influencer le législateur, parce que finalement, les influences que nous...

M. BACON: C'est l'argument du ministre.

M. MOREAU: Je n'aime peut-être pas le mot "lobbying", mais si vous nous dites qu'on devrait peut-être...

M. BACON: C'est l'ancien député fédéral...

M. MOREAU: ... être plus communicatif envers le ministère...

M. TREMBLAY: Envers la population, envers le ministère, c'est cela.

M. MOREAU: ... à tous ces facteurs, je suis d'accord avec vous.

M. TREMBLAY: II faudrait restructurer votre service de "public relation," de "lobbying" justement, de gens qui sont capables de venir parler à nos ministres.

M. TETLEY: Ils sont très capables, ils sont très compétents.

M. TREMBLAY: Non pas toujours avec des réserves et toujours avec la machine à additionner dans les poches. Il faut être objectif, aussi.

M. TETLEY: En tout cas, ils ne m'ont jamais invité à un vin d'honneur, à un cocktail.

M. ROY: Le cocktail du ministre lui fait défaut.

M. TETLEY: Je trouve que leur exemple est un bon exemple.

M. TREMBLAY: C'est sur le plan humain surtout.

M. ROY: A ce moment, c'est peut-être le "lobbying" du ministre qui fait défaut.

M. TETLEY: Non, je crois que le "lobbying" doit être direct, des appels par téléphone ou visites. Je reçois tout groupement, non pas simplement le Bureau d'assurance du Canada.

M. TREMBLAY: II y aurait peut-être lieu aussi, dans le cas de nos gens qui conduisent en état d'ébriété, d'influencer le ministère de la Justice, le ministère des Transports. Ce sont des permis.

M. MOREAU: Nous essayons surtout maintenant d'influencer le public lui-même dans nos campagnes de publicité de façon que le public s'émeuve justement de cette situation des ivrognes au volant et qu'il demande à nos gouvernants de sévir. C'est la façon dont nous essayons de régler le problème dans le moment.

M. TREMBLAY: Je n'ai que faire des railleries de mes collègues.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Le député de Montmagny-l'Islet.

M. GIASSON: M. Moreau, à la page 370 du rapport Gauvin, on dit en résumé que le coût du régime actuel s'établirait à 36.6 p.c. Partant de là, on croit que des réductions dans l'administration du régime pourraient s'appliquer dans une proportion de 5.1 p.c. par l'application du système "No-Hold", 7.5 p.c. par la réduction de commissions payées aux courtiers, 3.5 p.c. au niveau de la souscription des risques et 5.5 p.c. d'administration générale. Vous avez certainement analysé assez à fond les chiffres qui sont produits. Est-ce que vous croyez que la commission Gauvin a été très objective dans la réduction des coûts d'administration, surtout vis-à-vis des pourcentages appliqués sur chaque chapitre?

M. MOREAU: Nous n'avons pas fait l'étude que le comité Gauvin a faite évidemment, parce qu'il s'est dirigé dans ce sens d'une façon directe, mais ces chiffres nous paraissent tout à fait réalistes et à l'intérieur de la vérité. Il n'y a aucune hésitation.

M. TREMBLAY: Si on appliquait le régime proposé, on arriverait à ces chiffres.

M. MOREAU: Oui, à ces chiffres...

M. SAINT-GERMAIN (Guy): ... c'est que le rapport Gauvin est un tout qui est très logique. Toutes les parties s'agencent. Si vous enlevez une partie, vous commencez à être obligé d'apporter des conclusions différentes. C'est pour cela qu'on disait que tout cela est réaliste. Est-ce que c'est désirable? C'est une autre paire de manches. Je vous donne juste un exemple. C'est évident que, si on met l'obligation pour l'assuré de payer sa prime au comptant, on enlève toutes les activités de perception des courtiers d'assurance. On simplifie beaucoup la comptabilité et des compagnies et des courtiers d'assurance, jusqu'à un certain point. On facilite l'assurance obligatoire si on rend obligatoire le fait pour un courtier de souscrire toutes les polices qui lui sont présentées, etc. C'est un tout absolument logique. Alors, c'est pour cela que c'est difficile pour nous. Si le marché est laissé à lui-même dans le contexte actuel, il a trouvé le "pattern" qui lui convenait. Si on intervient de l'extérieur, ce qu'on dit, c'est qu'il faudrait être bien certain qu'on le fait en toute connaissance de cause, après étude, afin de couper quelque chose qui est superflu plutôt que de couper quelque chose que le public s'attend à recevoir et à acheter comme service.

M. GIASSON: M. Moreau, suite à une remarque qui avait été formulée, une boutade plutôt, formulée par la Fédération des courtiers, à savoir qu'en assurance-automobile, la conception se faisait dans la joie et l'enfantement dans la douleur, vous avez cru que l'application du rapport Gauvin éliminait la douleur. Je ne sais pas si vous avez réalisé la véritable dimension, pour autant que le courtier est concerné. C'est que, somme toute, ce n'est pas le courtier qui enfantait dans la douleur. Il agissait, dans beaucoup de dossiers, comme sage-femme. Mon expérience personnelle m'a appris que, sur certains dossiers, il fallait même faire des césariennes pour en arriver à un règlement convenable pour l'assuré.

M. MARCHAND: II ne sentait pas la douleur qu'était...

M. GIASSON: Toujours dans le contexte du nouveau rôle qu'on veut assigner au courtier d'assurance, vous n'avez pas l'impression que les taux de rémunération qui seraient appliqués, selon les recommandations, vont amener nécessairement une concentration de bureaux de courtiers, de manière que celui qui accepte de continuer à transiger des automobiles devra le faire dans un contexte un peu différent, c'est-à-dire avec des volumes d'activité plus grands que ce qu'il a connu dans le passé?

M. MOREAU: II est bien possible que ce soit le cas, mais je décline toute compétence pour donner une opinion dans ce domaine. Je pense que l'Association des courtiers et la Fédération des courtiers sont sûrement plus qualifiées que je peux l'être ou que nous pouvons l'être en général, nous, les assureurs, pour en arriver à une conclusion là-dessus. Vraiment, je ne peux pas exprimer d'opinion sur ce facteur.

M. GIASSON: Mais le public qui est habitué d'obtenir tel ou tel service de son courtier, si vous le placez dans le contexte nouveau, où on élimine pas mal des opérations, où on voudrait les éliminer du moins, des opérations qui étaient siennes, vous n'êtes pas d'avis que le public habitué à recevoir ses services va continuer de les demander à son conseiller?

M. MOREAU: C'est fort possible. C'est pour cela que j'ai insisté à plusieurs reprises pour dire que si nous sommes disposés à accepter le système préconisé par M. Gauvin, nous n'admettons pas, dans le moment, que ce soit le meilleur système pour le consommateur. Nous n'en sommes pas convaincus, parce que nous

avons la conviction que le courtier joue un rôle important dans le moment.

Alors, nous ne sommes pas convaincus qu'il y ait lieu de le reléguer, comme cela, au rang de conseiller au moment de la conception, comme vous avez dit. Il est possible que M. Gauvin ait raison. Il a peut-être fait des études plus poussées que nous là-dessus, mais je pense qu'il serait normal que les renseignements là-dessus viennent des courtiers eux-mêmes, qui sont beaucoup plus qualifiés que nous pour apprécier la valeur de leurs services. Nous sommes satisfaits des services des courtiers. Nous sommes satisfaits du système actuel, qui marche des trois façons, mais qui marche à 86 p.c. par les courtiers. Si M. Gauvin a une prétention à l'effet contraire, je pense qu'il serait normal que ce soient les courtiers, soit par leur fédération, soit par leur association, qui démontrent, par des preuves à l'appui — ils vont peut-être le faire, les courtiers — la valeur de leurs services, et démontrent que M. Gauvin n'a peut-être pas raison de les éloigner, que le consommateur a besoin d'eux beaucoup plus que M. Gauvin le prétend.

M. GIASSON: Mais dans les autres provinces où on a étatisé l'assurance-automobile, avez-vous décelé un changement dans le rôle traditionnel du courtier?

M. MOREAU: D'après les renseignements que nous avons, le public a continué de favoriser les courtiers. Le revenu des courtiers a diminué, si je comprends bien, mais il semble que la tendance est restée la même, c'était d'obtenir son assurance-automobile par les courtiers.

M. GIASSON: Avez-vous examiné le mode de rémunération là-bas, les pourcentages de commissions ou d'autres modes nouveaux qui ont pu être instaurés?

M. MOREAU: Non, monsieur, non. Nous n'avons pas fait cela.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): L'honorable ministre des Institutions financières.

M. TETLEY: Merci, M. le Président. J'avais plusieurs questions, surtout parce que vous avez présenté une autre proposition, votre propre proposition, que je trouve très importante et très intéressante. Vous n'avez pas répondu au rapport Gauvin, en effet. Vous avez répondu par un autre rapport.

Mais je vais laisser ces questions peut-être pour l'avenir, surtout parce que nous n'avons pas vos chiffres. Il est difficile de parler des courtiers, par exemple combien allez-vous payer aux courtiers? C'est une question à laquelle il ne semble pas facile de répondre. Il est intéressant de parler du rapport Gauvin qui a suggéré de couper les frais administratifs de 36 p.c. à 20 p.c. Quelle est votre solution en chiffres, etc?

L'importance de votre mémoire et de votre documentation est prouvée par le nombre de questions. Tout le monde veut vous poser des questions et j'apprécie surtout la franchise de vos réponses, les vôtres, M. Saint-Germain, et celles d'autres personnes de votre groupement. Nous attendons vos chiffres avec un vif intérêt. Au nom du gouvernement et des députés ministériels, ainsi qu'au nom de l'Opposition, je vous remercie d'être venus.

M. MOREAU: Merci, M. le ministre. Merci, M. le Président.

M. TETLEY: M. le Président, il y a aussi M. Marcellin Tremblay qui a la patience d'un saint; malgré qu'il soit président d'une importante compagnie d'assurance, les Prévoyants du Canada, il est encore ici. Je viens de parler brièvement avec M. Tremblay qui veut bien coopérer. Il accepte de venir demain ou un autre jour. Je préfère qu'on garde le bon vin pour la fin, peut-être. Pas demain, en tout cas, parce que nous avons tellement de personnes à entendre et, que je crois que ses observations sont importantes pour la commission.

M. Tremblay, si cela vous convient, pourriez-vous revenir lorsque le secrétaire vous fixera une date. Nous allons vous mettre "on top of the list, number one", certain, la prochaine fois, c'est garanti.

Merci, M. Tremblay.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): En effet, le programme de demain a prévu trois organismes: Le Conseil du patronat du Québec, la Fédération des avocats du Québec et le Fonds d'indemnisation des victimes d'accidents d'automobiles.

M. TETLEY: Un instant. Je note aussi que M. Rankin est encore ici. Il est membre de la commission Gauvin. Il voulait faire une mise au point, mais peut-être aurons-nous le temps demain. Il brûle d'une fièvre de répondre à certaines remarques et j'aimerais qu'il ait ce droit.

M. ROY: J'aurai peut-être demain, à la suite de nos délibérations, d'autres remarques à formuler qui pourront s'étudier en même temps.

M. TETLEY: C'est cela, parfait.

LE PRESIDENT (M. Cornellier): Espérons que demain nous aurons le temps d'entendre ces trois organismes que j'ai mentionnés tantôt.

Alors, M. Moreau, ainsi que vos collaborateurs, je vous remercie bien sincèrement et la commission ajourne ses travaux à demain matin, 10 heures.

M. LEGER: Vous aurez le plaisir d'avoir le député de Saguenay à la place du député de Lafontaine, demain.

(Fin de la séance à 18 h 47)

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