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Version finale

32nd Legislature, 3rd Session
(November 9, 1981 au March 10, 1983)

Tuesday, April 27, 1982 - Vol. 26 N° 81

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Ministère de la Justice


Journal des débats

 

(Dix heures vingt minutes)

Le Président (M. Desbiens): Mesdames, messieurs, la commission élue permanente de la justice s'est réunie pour procéder à l'étude des crédits budgétaires de 1982-1983 de ce ministère.

Les membres de la commission sont M. Beaumier (Nicolet), M. Bédard (Chicoutimi), M. Boucher (Rivière-du-Loup), Mme Lachapelle (Dorion), qui remplace M. Brouillet (Chauveau), M. Charbonneau (Verchères), M. Dauphin (Marquette), Mme Juneau (Johnson), M. Kehoe (Chapleau), M. Lafrenière (Ungava), M. Marx (D'Arcy McGee), M. Paradis (Brome-Missisquoi).

Les intervenants sont M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Blank (Saint-Louis), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Dussault (Châteauguay), M. Martel (Richelieu), M. Pagé (Portneuf).

Il serait maintenant dans l'ordre de procéder à la nomination d'un rapporteur, s'il vous plaît.

Mme Lachapelle: Le député Lafrenière.

Le Président (M. Desbiens): Alors, M. le député de l'Ungava. C'est accepté. M. Lafrenière (Ungava) agira comme rapporteur de la commission. Avant de procéder à l'étude des programmes, est-ce que vous avez des remarques préliminaires, M. le ministre?

Exposés préliminaires M. Marc-André Bédard

M. Bédard: M. le Président, chers collègues, avant de faire état du travail et des réalisations du ministère de la Justice, j'aimerais vous présenter, tel que c'est la coutume, les membres de l'équipe de direction qui m'assistent dans l'administration des différents programmes du ministère. Me Daniel Jacoby, sous-ministre et sous-procureur général, Me Alain Bisson, sous-ministre associé aux affaires législatives, Me Rémy Bouchard, sous-ministre associé aux affaires criminelles, Me Paul-A. Gendreau, sous-ministre associé aux affaires civiles et pénales, M. Germain Halley, sous-ministre associé à l'administration, Me Jacques Lachapelle, sous-ministre associé aux services judiciaires, M. Clément Ménard, sous-ministre associé au personnel, Me Pierre Verdon, sous-ministre associé à la sécurité publique et sous-ministre associé par intérim à la probation et aux établissements de détention, M. Jean-Claude Dubois, directeur du budget, M. Jean-Pierre Barrette, secrétaire du Conseil de la magistrature, M. le juge Guy Dorion, président du Tribunal de l'expropriation, M. Maurice Gauthier, président de la Commission québécoise des libérations conditionnelles, M. le juge Roger Gosselin, président de la Commission de police du Québec, Me Ghislain K. Laflamme, président de la Régie des permis d'alcool, Me Roch Rioux, président de la Commission de refonte des lois et règlements et M. Jacques Tellier, président du Comité de la protection de la jeunesse; quelques autres qui ne sont pas ici viendront nous rejoindre au cours de l'après-midi, à savoir Me Yves Lafontaine, président de la Commission des services juridiques, Me Yves Lauzon, secrétaire et directeur général du fonds d'aide aux recours collectifs et M Jacques Beaudoin, directeur général de la Sûreté du Québec.

M. le Président, au cours de l'année financière qui vient de se terminer, le ministère de la Justice a poursuivi les efforts qu'il avait entrepris au cours de l'année précédente en vue d'humaniser l'administration de la justice et de rendre ses services plus accessibles à l'ensemble des citoyens.

Une attention particulière a été portée aux attitudes et aux comportements du personnel du ministère à l'égard des justiciables. Nous avons sensibilisé le personnel à encore mieux les servir. Des mesures concrètes ont été appliquées pour accueillir et informer la clientèle dans nos différents points de services. Je reparlerai de façon plus détaillée de ces mesures au cours du présent exposé.

D'autre part, la gestion des ressources s'effectuant dans une période économique difficile, le ministère de la Justice n'est pas épargné par les compressions budgétaires et la réduction du personnel. Avec mes collaborateurs, j'ai donc tenté de rendre positive cette période de restrictions en demandant aux employés de réfléchir sur leur travail et sur leurs méthodes de fonctionnement en vue d'améliorer la productivité. C'est dans cette optique qu'il s'est réalisé un travail important dans le développement d'outils de gestion et dans la

formation et le perfectionnement des employés en vue d'améliorer la performance du ministère.

Mon exposé sur les activités du ministère sera donc axé sur ces deux thèmes: l'humanisation des services et la gestion des ressources. Ils se refléteront dans chacun des sujets plus spécifiques que j'ai l'intention de développer. Ces sujets sont la législation, les services à la clientèle, les conditions de détention, la criminalité et les ressources humaines et financières.

Au plan législatif, le ministère s'est d'abord attardé à consolider la réforme du droit de la famille établie par le projet de loi no 89 en réalisant un programme d'information sur les principales modifications qui y étaient contenues. Le ministère a conçu et distribué au public une documentation écrite et visuelle. Le ministère a également commencé une série de rencontres avec des personnes-ressources. De plus, des représentants du ministère ont été appelés à participer à divers colloques et conférences ainsi qu'à plusieurs interventions dans les médias sur ce sujet. Des milliers de personnes ont pu ainsi être rejointes par ces moyens de communication.

Afin de compléter cette réforme, comme on le sait, j'ai présenté le projet de loi no 18, Loi assurant l'application de la réforme du droit de la famille et modifiant le Code de procédure civile, qui a pour objet de permettre une application harmonieuse de la réforme en ajustant l'ensemble des procédures en matière familiale et en complétant les dispositions relatives à l'adoption. Ce projet est, comme vous le savez, rendu à l'étape de la prise en considération par l'Assemblée nationale du rapport de la commission parlementaire de la justice, qui a procédé a l'étude article par article du projet de loi.

En plus de ces travaux, le ministère a entrepris l'étude des recommandations du groupe de travail sur le Tribunal de la famille. En raison des implications sur les services sociaux, les consultations se poursuivent avec le ministère des Affaires sociales. Le Conseil consultatif de la justice est également saisi du dossier.

J'aimerais également vous souligner que, si la réforme du droit de la famille constituait la première base de l'action du ministère dans l'ensemble de la réforme du Code civil, le ministère s'est engagé, depuis 1981, dans la préparation de la deuxième phase, à savoir la réforme du droit des personnes, des successions et des biens. Il s'agit d'une importante opération législative qui vise en partie à compléter la réforme entreprise en matière familiale. Le projet effectuera une mise à jour des diverses institutions juridiques qui assurent l'exercice des droits civils des personnes et une révision importante des régimes de protection des mineurs et des majeurs incapables et du régime de l'état civil. Sera également effectuée une mise à jour des règles successorales afin de favoriser une liquidation efficace, correcte et rapide des biens transmis par décès. Enfin, au chapitre du droit des biens, la réforme opérera un rajeunissement de plusieurs droits de propriété, réglementera la fiducie et la copropriété divise ou indivise et établira des règles nouvelles en matière d'administration des biens.

Une autre pièce législative d'importance que nous aurons l'occasion d'examiner prochainement est la Charte des droits et libertés de la personne. Après la tenue de la commission parlementaire, le ministère s'est penché sur l'ensemble des recommandations qui ont été présentées aux membres de la commission. Je compte donc déposer un projet de loi amendant substantiellement notre Charte des droits et libertés de la personne d'ici la fin de la session. Ces amendements, je tiens à le dire, tiendront compte de toutes les recommandations qui nous ont été faites par les groupes qui ont été entendus en commission parlementaire et également devront tenir compte de l'ensemble du problème constitutionnel que nous avons à vivre présentement. De plus, concernant les droits et libertés de la personne, j'aimerais vous souligner que le Québec a été l'hôte, l'automne dernier, du congrès de l'Institut international de droit d'expression française. Ce congrès, qui s'est tenu à Montréal, a porté sur les mécanismes juridiques de protection des droits de la personne. Les communications qui y ont été présentées seront publiées par l'institut et constitueront le premier recueil de droit comparé sur les droits de la personne rédigé en français. (10 h 30)

Le ministère a également été le maître d'oeuvre des projets suivants:

Le projet de loi 17, Loi modifiant certaines lois relatives à l'administration de la justice, sanctionnée le 18 juin 1981. Ce projet, comme on le sait, a amendé notamment la Loi sur les fabriques, la Loi sur la probation et sur les établissements de détention et le Code de procédure civile.

Le projet de loi 28, Loi modifiant certaines dispositions législatives, sanctionnée le 19 décembre 1981. Par ce projet, des modifications ont, entre autres, été apportées au Régime de rentes du Québec, à la Loi électorale et à la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées.

Le projet de loi 43, Loi sur un renvoi à la cour d'appel, sanctionnée le 8 décembre 1981.

Le projet de loi 45, Loi favorisant l'exercice des recours découlant de l'utilisation de la mousse d'urée formaldéhyde comme isolant, sanctionnée le 19 décembre

1981. Ce projet visait à protéger les victimes de la mousse d'urée formaldéhyde en prolongeant le délai pour intenter un recours.

Au plan de l'accessibilité aux lois et aux règlements, le ministère a examiné attentivement les recommandations que le barreau a formulées en septembre dernier à l'occasion de la présentation de son premier rapport sur la législation et la réglementation. J'ai, d'ailleurs, rencontré les représentants du barreau pour échanger avec eux sur leurs observations. Pour beaucoup des aspects mentionnés, le ministère a déjà entrepris les actions appropriées. Ainsi, la mise à jour des lois refondues au 31 décembre 1981 sera prête incessamment. Il s'agit là d'un délai inférieur à six mois. Compte tenu des diverses étapes de production pour la publication des lois refondues, ce délai est remarquablement court et saura, je l'espère, satisfaire les attentes de la communauté juridique. Quant aux travaux entourant la refonte des règlements au 31 décembre 1981, ils sont terminés. Nous en sommes à l'étape de l'impression et déjà les volumes 1 et 2, édition française et anglaise, sont imprimés. Les travaux d'impression se poursuivent et nous comptons en faire la distribution durant le mois de juin 1982. Pour la refonte des règlements, on constatera également que le délai de production est inférieur à six mois.

Le ministère poursuit activement ses travaux sur les autres sujets faisant l'objet du rapport du Barreau du Québec, soit la banque de données informatisées, l'index des lois et le traitement informatisé des lois.

Enfin et pour terminer sur la législation, le ministère est en train d'établir les modalités d'application d'un mécanisme permanent de déréglementation. Nous avions déjà effectué un exercice de rationalisation et de simplification de la réglementation du ministère et des organismes qui relèvent du ministère de la Justice. Il nous est donc apparu important de continuer l'effort entrepris. De concert avec les autres ministères et organismes du gouvernement, nous effectuerons périodiquement une revue de la réglementation. Ces opérations seront importantes pour les administrés, car elles permettront d'évaluer l'état de désuétude de la réglementation et, le cas échéant, de la remplacer ou de l'abroger.

Concernant les services à la clientèle, le ministère de la Justice, comme toute entreprise de services, doit satisfaire les besoins de sa clientèle. Cette clientèle est triple: d'abord, le justiciable, ensuite, ce que j'appellerais la clientèle spécialisée, c'est-à-dire les professionnels de la communauté juridique, et, enfin, les ministères et organismes de la fonction publique. Un sondage que le ministère a commandé sur les perceptions et les attentes des justiciables nous a confirmé, dans les orientations que nous avions prises, d'humaniser l'administration de la justice. Bien sûr, le ministère retire des résultats du sondage, des renseignements précieux qui guideront les actions à venir. Nous nous attaquerons - cela est d'ailleurs déjà entrepris - aux sources d'insatisfaction des justiciables. Diverses activités visant à améliorer les services ont été mises sur pied. À titre d'exemple, mentionnons la mise sur pied de services d'accueil dans les palais de justice, l'installation de présentoirs avec des dépliants d'information, l'identification des employés, l'amélioration de la signalisation dans les édifices, la formation de comités régionaux des intervenants judiciaires et la diffusion d'information sur les nouveaux services, tels les actes de l'état civil et la perception des pensions alimentaires.

Il est à noter - cela est très heureux -que beaucoup d'initiatives viennent du personnel impliqué dans le processus judiciaire. Une autre préoccupation du ministère, au cours de la dernière année, a été le sort fait aux victimes et aux témoins. Nous sommes à mettre la dernière main à un système visant à favoriser une meilleure information aux victimes d'actes criminels au cours des différentes étapes de l'enquête policière et des procédures judiciaires. De plus, le ministère a publié une brochure destinée aux personnes qui sont appelées comme jurés et qui les informe de leurs droits et obligations.

Toujours en matière de services judiciaires, le ministère de la Justice - je pense que c'est une expérience extrêmement importante parce qu'elle pourra peut-être s'étendre à l'ensemble du Québec - a instauré à Montréal une procédure de médiation à la division des petites créances de la Cour provinciale. Le médiateur rencontre les parties afin de voir si une entente peut intervenir avant que le juge ne soit saisi de la demande. Cette procédure permet donc aux parties de se rencontrer en présence d'un tiers pour échanger sur leur différend. Ce projet expérimental est déjà très bien perçu de la part des justiciables. Cette expérience s'avérant positive, le ministère a l'intention de procéder à l'établissement d'un tel service dans un autre district judiciaire.

De plus, dans le secteur policier, des efforts importants ont été déployés en vue de mieux accueillir et renseigner les citoyens. Les nombreux contacts des policiers avec la population font que l'image que le citoyen se fera de l'administration de la justice sera souvent fonction de la qualité de leurs interventions et ils en sont très conscients. Aussi, la Sûreté du Québec a-t-elle sensibilisé ses membres à apporter de l'aide aux personnes qui se présentent dans les différents points de service.

À ce sujet, j'ai eu l'occasion de participer à la remise de certificats en gestion policière à l'Université du Québec à Trois-Rivières, samedi dernier. 24 policiers ont complété avec succès des études poussées en finance et système budgétaire, en administration, en management, en processus décisionnel et en relations humaines.

C'est par l'amélioration constante des connaissances, par une meilleure gestion des ressources et, bien sûr, par la détermination et le professionnalisme de chaque policier que le rendement et l'efficacité de ce service public sauront mieux répondre aux exigences légitimes de la population.

Si les services peuvent être améliorés par des mesures touchant directement les justiciables, je suis d'avis que, par une augmentation de la productivité du ministère et la revue des méthodes de travail, une meilleure adéquation des services et des coûts pourra être réalisée.

Dans cette optique, le ministère s'est livré depuis 1979 à des évaluations sur la productivité de certains secteurs. Des travaux entourant la division des petites créances de la Cour provinciale et le secteur pénal sont déjà terminés. Ont débuté, en 1981, les études sur les services financiers ainsi que sur les services judiciaires du Tribunal de la jeunesse. Ces études, menées selon des techniques scientifiques d'évaluation du travail, ont permis d'établir des normes objectives d'efficience et d'efficacité pour les services judiciaires. C'est avec ce même objectif d'augmentation de la productivité du personnel que le ministère a abordé, avec la magistrature, la question des services de soutien. Une rationalisation de ces services a pu être réalisée en coordonnant leurs actions avec celles des services judiciaires. Je tiens à souligner d'ailleurs la collaboration importante de la magistrature dans la réussite de ce dossier.

Le ministère a également poursuivi le programme d'informatisation des services judiciaires. Les greffes de Montréal, Saint-Jérôme, Québec, Longueuil et, plus récemment, ceux de Joliette et Rivière-du-Loup sont, au moment où l'on se parle, informatisés. La prochaine phase de ce programme consistera à informatiser les services judiciaires des capitales régionales. Est-il nécessaire de rappeler que l'informatique permet d'accélérer le service aux citoyens. Le développement des systèmes informatiques s'est également poursuivi dans les bureaux d'enregistrement. Les bureaux de Montréal et de Laval ont vu certains de leurs registres, notamment l'index aux immeubles, l'historique des lots, le cardex des lots et le registre des adresses, devenir accessibles sur écran de visualisation.

De plus, le ministère a examiné la situation des points de services des bureaux d'enregistrement et de la division des petites créances. En ce qui concerne ces derniers, certains points de services ont été fermés alors que d'autres ont fait place à des services itinérants, cela en fonction du volume de dossiers traités et de leur situation géographique. Pour les bureaux d'enregistrement, nous nous sommes basés sur les mêmes facteurs et nous sommes à compléter les dernières données. Je présenterai sous peu un programme de regroupement de points de services. Il ne s'agit évidemment pas de décisions faciles, mais elles sont dictées par un souci d'une meilleure rationalisation de nos ressources et un désir d'accroître la productivité du personnel.

Dans la recherche de solutions aux problèmes rencontrés par le ministère, les groupes professionnels sont, dans la mesure du possible, mis à contribution. Par exemple, le ministère poursuit ses échanges avec la Chambre des notaires sur la réforme du Code civil et sur la pratique notariale en regard des activités concernant les bureaux d'enregistrement. De plus, des représentants du Barreau du Québec et du ministère se réunissent régulièrement sur des questions d'intérêt commun. Ainsi, au niveau de l'important dossier que constitue celui des délais d'audition devant nos cours de justice, il nous est apparu important, avant de mettre en oeuvre de nouvelles procédures administratives ou législatives, de s'assurer de leur efficacité et du consensus des intervenants. Il convenait aussi, dès le départ, de bien cerner le problème. Celui-ci ne se situe pas au niveau de tous les tribunaux - il faudrait en être bien conscient. Je serai en mesure de donner des statistiques là-dessus qui démontrent une amélioration importante - et de tous les districts judiciaires, mais est davantage concentré en matière civile à la Cour supérieure de Montréal.

Plusieurs comités ont fait valoir leur point de vue. Un comité du barreau, comme on le sait, a déposé un rapport en avril 1981. Ce rapport contenait quelque 25 recommandations dont plusieurs ont déjà été mises en application. Le Conseil consultatif de la justice a également été saisi de cette question. Divers comités regroupant des membres de la magistrature du Barreau du Québec et du ministère de la Justice ont été chargés de mettre en application les recommandations du rapport du Barreau de Montréal. De plus, à Montréal, les juges de la Cour supérieure ont été sensibilisés de façon particulière aux problèmes des délais et reçoivent mensuellement du maître des rôles un communiqué les informant de l'état des rôles. Parmi les mesures additionnelles envisagées pour réduire encore plus les délais, mentionnons l'augmentation de la juridiction de la Cour provinciale,

l'augmentation de la juridiction de la division des petites créances, l'élaboration de délais standards d'audience pour chacune des juridictions, l'augmentation du taux légal d'intérêt et une meilleure utilisation de la procédure de la conférence préparatoire de manière à n'inscrire que les causes vraiment prêtes à être entendues.

Déjà, le ministère distribue régulièrement aux principaux intervenants la liste des délais d'audition des districts judiciaires et l'analyse des écarts en vue de prendre les actions correctives appropriées dans les meilleurs délais. Enfin, je vous signale que je proposerai des modifications à la procédure d'appel en vue de réduire les délais d'audition à ce niveau.

Je crois que les mesures qui résulteront des travaux en cours seront de nature à diminuer sensiblement les délais d'audition des causes. Il s'agit là pour le ministère d'une priorité.

En terminant, sur ce volet des services à la clientèle, j'aimerais souligner que le ministère rend également des services aux autres ministères et aux organismes de la fonction publique. Notre réseau de services juridiques et les services législatifs du ministère doivent répondre aux besoins de la fonction publique. Nous consacrons des efforts importants dans le perfectionnement des ressources humaines de ces deux secteurs d'activités pour que les services rendus soient de la meilleure qualité possible. À titre d'instrument de perfectionnement, mentionnons la tenue de plusieurs sessions de perfectionnement dans différents domaines du droit, notamment en droit constitutionnel, en droit du travail, en rédaction des lois et des règlements, ainsi que la publication en 1981 de deux numéros du bulletin de rédaction des lois et des règlements.

M. le Président, j'aborderai un autre sujet que j'ai évoqué tout à l'heure, à savoir la situation des établissements de détention. Je ne vous surprendrai certainement pas en vous parlant maintenant d'un secteur qui a attiré l'attention au cours de la dernière année, soit celui des services correctionnels. Sans entrer dans tous les détails - ce que nous pourrons faire lors de l'étude des crédits du programme - j'aimerais faire le point sur un certain nombre d'éléments.

Depuis quelques années déjà, les établissements de détention connaissent un problème de surpopulation. Nous avons dû mettre en oeuvre diverses mesures pour tenter de remédier à cette situation, à savoir: recours élargi aux ressources communautaires d'hébergement, utilisation accrue du mécanisme des absences temporaires, transferts de détenus d'un établissement à un autre où il y avait des places disponibles. Le ministère suit de très près ce phénomène de surpopulation et tente d'y apporter les correctifs appropriés. Ainsi, le ministère a fait connaître de façon claire qu'il favorisait les mesures alternatives à l'emprisonnement plutôt que le développement d'aménagements et de ressources carcérales pour faire face à la situation. À titre d'exemple, il convient peut-être de mentionner ici les efforts consacrés à trouver des solutions au problème de l'emprisonnement à défaut de paiement d'amende. Un groupe de travail sur le sujet ayant comme mandat d'articuler les éléments de solutions avait été mis sur pied au ministère. Le rapport produit par ce groupe a fait l'objet, durant la dernière année, de nombreuses consultations. Encore là, il nous est apparu essentiel de consulter les instances concernées avant de mettre en application les mesures préconisées. Les juges en chef des différents tribunaux, la Conférence des juges, le Conseil consultatif de la justice ont tous été consultés. Dans l'ensemble, ils se sont montrés favorables aux recommandations du rapport du groupe de travail. Ceci nous a permis d'enclencher d'autres étapes pour la concrétisation des diverses recommandations. Ainsi, nous procédons actuellement à l'élaboration des modifications législatives appropriées. (10 h 45)

J'aimerais, cependant, apporter une précision importante: contrairement à une opinion avancée et qui a été rapportée dans certains médias d'information, cette mesure ne diminuera pas de 50% la population carcérale. Il nous faut distinguer entre le taux d'admission dans les établissements de détention et leur taux d'occupation. Si le taux d'admission pour non-paiement d'amendes s'établit à environ 45% de la population carcérale, le taux d'occupation, qui est bien différent, lui, se situe à environ 8%. Cette situation est attribuable au fait que la durée moyenne des sentences pour défaut de paiement d'amende est relativement faible, c'est-à-dire entre douze et quinze jours. Il me semble important d'apporter cet éclaircissement pour bien situer le débat.

Néanmoins, la mise en application de cette mesure réduirait la population carcérale, éliminerait l'incarcération comme moyen de sanction pour des peines mineures et aurait des incidences, à la baisse, sur les coûts. Par ailleurs, le ministère a consacré énormément d'efforts à repenser sa philosophie et son approche en matière carcérale. Le ministère termine une réflexion en profondeur sur ses orientations et je compte bien être en mesure, d'ici à quelques semaines, d'élaborer davantage à cet égard. Je peux préciser tout de suite que la réforme misera largement sur la capacité de la personne détenue d'assumer davantage ses responsabilités et de mieux se préparer à la reprise d'une vie normale dans la collectivité.

Cette approche se reflétera évidemment dans l'aménagement et le concept architectural des centres de détention. Le ministère est à élaborer un cadre général de ses aménagements physiques qui devrait permettre d'humaniser le séjour des personnes en détention et de rationaliser les opérations des établissements de détention dans tout le Québec. Je puis par ailleurs vous assurer que la formule que nous allons proposer va diminuer sensiblement le coût d'aménagement en misant sur le recyclage des bâtiments existants et sur la sécurité périphérique plutôt que sur la sécurité interne des établissements de détention.

Entre-temps, en 1981, le programme de modernisation des équipements s'est poursuivi. En décembre 1981, l'ouverture d'un nouvel établissement de détention à Amos a permis de fermer l'établissement utilisé auparavant. De plus, à la suite de la présentation des esquisses préliminaires par les architectes concepteurs, les projets de construction de nouveaux établissements à Trois-Rivières et à Sherbrooke ont fait l'objet d'études complémentaires par le ministère à la lumière de la nouvelle approche à laquelle j'ai fait référence. Il est clair que des établissements doivent être construits à ces endroits.

Aussi, un complexe a été acheté à LaSalle et des travaux de rénovation et d'aménagement seront exécutés en 1982 pour permettre l'utilisation de ce nouvel établissement de détention.

Le projet à la ville de LaSalle sera l'exemple type du genre de nouveau centre de détention que je désire voir s'implanter au Québec au cours des prochaines années. De plus, il est important de rappeler que le ministère a favorisé au cours des dernières années les mesures de réinsertion sociale des détenus. Le programme d'activités rémunérées, celui des travaux communautaires, le développement de programmes pour les communautés autochtones, l'utilisation de centres résidentiels communautaires et la multiplication de ces centres, l'adoption d'un règlement relatif aux établissements de détention et sa distribution aux détenus ainsi que la création de la Commission québécoise des libérations conditionnelles sont autant d'exemples qui démontrent notre désir de voir s'améliorer les conditions des détenus. En continuité avec les démarches entreprises l'année dernière, le ministère des Affaires sociales et le ministère de la Justice ont signé en avril 1981 un protocole d'entente qui établit de façon claire le partage de responsabilités en matière de services de santé pour les personnes incarcérées. Différentes démarches ont aussi été entreprises auprès des ressources des différentes régions en vue d'établir des contrats de services. Des contrats de services ont été signés avec le Centre local des services communautaires de Hull et celui de Paspébiac et d'autres sont en voie d'être conclus.

J'aborderai maintenant un autre sujet, à savoir la criminalité. J'ai eu l'occasion la semaine dernière, M. le Président, de participer au colloque de la Chambre de commerce du Québec dont le thème était la prévention du crime dans l'entreprise. J'y ai prononcé une allocution qui exposait les buts du ministère sur la prévention de la criminalité et son implication dans ce domaine. À cette occasion, j'ai exposé, entre autres, de quelle façon le ministère s'acquitte de la tâche ardue que représente la prévention du crime. Je crois d'ailleurs important au départ de situer le Québec en regard des autres provinces en ce qui concerne le taux de criminalité. On véhicule, je crois, trop souvent l'idée que le Québec détient le championnat de la criminalité. Or, un simple examen des données rendues disponibles par Statistique Canada nous révèle que la réalité est toute différente.

Cet organisme divise le Canada en douze régions, soit les dix provinces auxquelles s'ajoutent le Yukon et les territoires du Nord-Ouest. Le Québec se situe au 8e rang en ce qui concerne l'importance du taux de criminalité. Seules les provinces des Maritimes ont un taux de criminalité plus faible, ce qui ne veut pas dire par là qu'il n'y a pas énormément de travail à faire en termes d'amélioration de la situation.

J'aimerais d'ailleurs souligner que le ministère de la Justice a publié cette année son premier rapport sur l'état de la criminalité et l'application des règlements de la circulation au Québec pour l'année 1980. Afin de mieux jouer son rôle au niveau de la prévention du crime, le ministère a également constitué un comité consultatif sur la prévention du crime. Ceci permet d'assurer une cohésion adéquate entre le contenu des politiques et des programmes et les diverses initiatives de prévention qui proviennent notamment des services policiers. Cette structure est complétée par un secrétariat permanent qui est, entre autres, chargé de faire l'inventaire des activités, programmes et initiatives en matière de prévention. Ce secrétariat rend également disponibles aux divers intervenants documents et outils susceptibles de soutenir des programmes de prévention.

Par ailleurs, jusqu'à présent, le ministère a favorisé les interventions à l'échelle régionale, en matière de prévention. Concrètement, il a voulu contribuer au maintien et au développement de comités régionaux de prévention du crime en leur apportant un support sur le plan de l'expertise professionnelle et en leur rendant disponibles certains outils susceptibles de

favoriser leurs objectifs. Ces comités régionaux, que je crois très importants dans le domaine, nous apparaissent comme des modules dynamiques de concertation. Vous me permettrez également de souligner que le ministère est en voie, de concert avec le comité consultatif, de compléter un programme de prévention contre le vol, à l'intention de certains établissements commerciaux. Un tel programme impliquera la vérification sécuritaire des établissements commerciaux par les policiers et aussi, ce qui est très important, une sensibilisation des marchands sur la façon de se prémunir contre les différents délits dont ils constituent souvent la cible.

La Sûreté du Québec a continué de jouer un rôle important en matière de prévention du crime. Grâce à leur présence active sur le territoire, les agents de la Sûreté ont pu participer à la mise en oeuvre de mesures de prévention concrètes tel l'établissement de comités de quartier et de comités de surveillance du voisinage ainsi qu'au suivi de ces mesures. Au cours des prochaines années, la Sûreté mettra encore plus d'emphase sur ces programmes. De plus, le ministère a mis sur pied à Montréal une équipe de substituts du Procureur général particulièrement chargée des dossiers des vols à main armée. Cette équipe est à l'oeuvre depuis le début de 1981. Aucune analyse globale n'a encore été effectuée sur les résultats obtenus à la suite de la mise sur pied de cette équipe spéciale. Cependant, nous pouvons observer à Montréal, en plus d'une baisse sensible des vols à main armée commis dans les banques, une réduction notable du nombre de causes reliées à ce genre de délits.

Le ministère a également assuré le suivi des colloques sur la violence. À cet égard, le ministère a analysé les recommandations qui le concernent directement en vue de mettre en application celles qui requièrent des actions concrètes. Nous préparons un document-synthèse sur cette question. De plus, le ministère de la Justice proposera diverses utilisations du matériel produit et recueilli à la suite de son programme de subventions. C'est d'ailleurs à la suite de ces colloques que le ministère, en collaboration avec le Conseil du statut de la femme et la Corporation professionnelle des médecins du Québec, a élaboré un protocole médical type dans le but de faciliter la preuve des constatations médicales lors des procès pour viol. Ce protocole permettra de favoriser un traitement plus approprié des victimes de ce type d'agression. Le ministère a également instauré un projet pilote concernant l'intervention policière en cette matière. La Sûreté du Québec a engagé une technicienne en réadaptation sociale chargée d'établir des rapports étroits avec les organismes aptes à apporter toute l'aide physique et psychologique nécessaire aux victimes de violence. Cette expérience maintenant terminée fait l'objet d'une évaluation et nous examinerons la possibilité de l'étendre sur une base permanente, peut-être sur l'ensemble du territoire du Québec.

Comme dernier sujet, M. le Président, j'aborderai la question des ressources humaines et financières pour donner quelques actions du ministère en cette matière.

Au niveau de l'organisation, nous avons poursuivi la révision de notre plan d'organisation administratif supérieur. L'an dernier, les plans d'organisation de la Direction générale des services judiciaires, de la Direction générale du personnel, de la Direction générale des bureaux d'enregistrement, ainsi que de la Régie des permis d'alcool du Québec et du Comité de la protection de la jeunesse ont été révisés, approuvés par le Conseil du trésor et mis en application.

Dans un souci de rationalisation, de coordination et d'efficacité administrative, le ministère procède actuellement à un examen global de sa structure administrative supérieure. De plus, l'évaluation des programmes s'est poursuivie. Ainsi celle de l'aide juridique s'est terminée au cours de 1981-1982. L'évaluation du programme de la Sûreté du Québec et de celui de la Direction générale de la probation et des établissements de détention vient de débuter. Il est à noter que cet outil de gestion, en plus de fournir des données sur le fonctionnement des programmes, nous permet d'établir des indicateurs de performance pour mieux atteindre les objectifs de l'organisation.

Dans cette perspective d'accroître notre efficacité et notre efficience, nous avons accéléré la révision de nos méthodes de travail et de nos outils de gestion. Cela nous permettra de mieux suivre l'évolution du budget et des activités du ministère. C'est aussi dans le sens de l'acquisition de meilleures connaissances de gestion que nous avons orienté nos programmes de formation et de perfectionnement du personnel.

En matière d'égalité des chances en emploi pour les femmes, l'année 1981 a été particulièrement consacrée à la réalisation des objectifs du plan d'action élaboré en 1980 en ce qui a trait à la présence des femmes au ministère, à leur formation et perfectionnement, à leur incitation à poser leur candidature à des postes supérieurs, à la planification des carrières et à la composition des comités de sélection.

De plus, en cours d'année, la politique d'égalité des chances en emploi pour les personnes handicapées a été mise en oeuvre. Des sessions de sensibilisation à la situation de la personne handicapée en milieu de travail ont été tenues et une étude sur la

situation des personnes handicapées au ministère a été réalisée. En outre, le plan d'action précisant des zones d'interventions et des objectifs précis à atteindre pour l'ensemble des directions générales et des organismes relevant du ministère de la Justice est en voie d'élaboration. Enfin, dans le cadre de l'année internationale de la personne handicapée, le ministère a eu la responsabilité de coordonner les activités d'une table thématique en vue de la préparation du sommet qui a eu lieu l'automne dernier et de l'élaboration d'une politique d'ensemble d'intégration en milieu de travail de la personne handicapée.

Concernant le budget - je terminerai là-dessus - pour l'année 1982-1983, le total des crédits du ministère de la Justice s'établit à 616 608 000 $. Si on compare ces chiffres au budget des dépenses pour l'année 1981-1982, on constate une augmentation de 49 076 400 $, soit une augmentation de 8,6%.

Ces crédits se répartissent entre sept secteurs et dix-sept programmes. La majorité du budget soit 81,6% sera affectée à cinq programmes du ministère dont 265 608 900 $ à la Sûreté du Québec, 96 234 400 $ à la garde des détenus et à la réinsertion sociale des délinquants, 68 020 000 $ au soutien administratif à l'activité judiciaire, 47 685 800 $ à l'aide aux justiciables et 25 545 800 $ à la formulation de jugements.

Sur les crédits additionnels de 49 076 400 $, une somme de 41 777 100 $ servira à défrayer le coût des révisions de traitement faisant suite à la mise en application des différents contrats de travail. Le reste de l'augmentation, soit 7 199 300 $ consiste essentiellement en des montants pour le développement des systèmes informatisés, le développement des centres résidentiels communautaires, les programmes d'information et l'amélioration du système de télécommunications de la Sûreté du Québec. (11 heures)

Au niveau de l'effectif, celui du ministère de la Justice s'établit au 1er avril 1982 à 13 164 employés permanents et à 596 employés occasionnels, soit un total de 13 760 employés. L'effectif total du ministère au 1er avril 1981 était de 14 069, dont 13 440 employés permanents et 629 occasionnels. La diminution totale de l'effectif du 1er avril 1981 au 1er avril 1982 a donc été de 309 postes résultant d'une diminution de 276 postes permanents et de 33 postes occasionnels.

Cette diminution s'explique ainsi: en ce qui concerne les permanents, du 1er avril 1981 au 31 décembre 1981, l'effectif a été porté de 13 440 employés à 13 224 comme l'indique le livre officiel des crédits qui est entre vos mains, soit une diminution de 216 postes. Depuis le 31 décembre 1981, il y a eu une diminution de 60 postes pour une diminution totale durant l'année de 276 postes permanents. Ce chiffre de 276 postes permanents provient du nombre de postes supprimés aux fins de la compression des effectifs, soit 334, duquel il faut soustraire les postes nouveaux ou qui ont été transférés au ministère, qui représentent un nombre de 58 postes. Ces postes nouveaux ou transférés au ministère l'ont été pour les activités suivantes: d'abord, augmentation de postes à la direction générale de la probation et des établissements de détention, 30; augmentation de postes à la direction générale des affaires criminelles, 12; transferts de postes entre ministères, 16. Pour ce qui est des employés occasionnels, on constatera que ceux-ci sont passés de 629 à 596 pour une réduction de 33.

M. le Président, j'ai voulu par cet exposé présenter aux membres de la commission parlementaire de la justice un portrait des grandes orientations des actions du ministère, des réalisations administratives de ses différents secteurs d'activités et également vous faire part des crédits que nous soumettons à votre analyse et à votre approbation. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Herbert Marx

M. Marx: Merci, M. le Président. Premièrement, j'aimerais remercier les fonctionnaires qui sont présents aujourd'hui, les sous-ministres, les présidents des commissions, les directeurs des programmes et d'autres membres du personnel du ministère.

Ceci est peut-être la seule occasion durant l'année pour le citoyen qui n'est pas au pouvoir de poser des questions au ministre de la Justice, aux élus qui sont au pouvoir. Je vais vous dire tout de suite que c'est peut-être plus facile de répondre aux questions que de trouver de bonnes questions à poser au ministre. Vous savez que le ministre a 14 000 employés pour répondre aux questions. Ils ont toutes sortes de documents, toutes sortes d'études, toutes sortes de rapports auxquels nous n'avons pas accès. Donc, je crois que trouver une bonne question, c'est plus difficile que de répondre à cette question.

J'aimerais, à ce moment-ci, faire une critique des grandes actions et orientations du ministère de la Justice. L'an dernier, à l'occasion de l'étude des crédits, le ministre de la Justice a précisé que les grandes actions et les orientations du ministère de la Justice visaient surtout à humaniser l'administration de la justice et à rendre la justice plus accessible aux citoyens. Au cours de l'année passée, j'ai rendu publiques des

études concernant l'administration de la justice au Québec. Il me semble que le bilan du travail du ministre est plutôt décevant et qu'il n'a pas atteint les objectifs qu'il s'était fixés.

Mes études ont porté sur le plan de la qualité, du coût et de l'efficacité de l'administration de la justice. Sur ces trois plans, la performance du ministère sous la gouverne du ministre actuel laisse beaucoup à désirer.

Par exemple, concernant la qualité de l'administration de la justice, le système carcéral reste encore inhumain, par la faute du ministre qui refuse de prendre des mesures correctives. Les chiffres démontrent que les coûts des services de police au Québec et dans la Communauté urbaine de Montréal sont beaucoup trop élevés. Enfin, l'efficacité de l'administration de la justice n'est pas non plus assurée; par exemple, certains palais de justice ont trop de juges alors que d'autres n'en ont pas assez.

Mes critiques à l'endroit des grandes actions et orientations du ministère de la Justice se résument en quatre points précis: la révision du Code civil, les services de la police, les conditions et les coûts de la détention et la protection des droits et libertés de la personne. 1. La révision du Code civil. Le Code civil a été adopté en 1866, c'est-à-dire avant même la Confédération. Dans la loi constitutive du Canada - l'Acte de l'Amérique du Nord britannique de 1867 -l'article 94 prévoit l'uniformisation des lois provinciales des provinces de "common law". Le Québec est exclu parce que depuis toujours on a reconnu sa spécificité dans ce domaine.

Le Code civil englobe le droit qui régit les rapports juridiques entre les Québécois. Ce code est un des éléments qui font du Québec une société distincte dans le Canada.

L'Office de révision du Code civil a travaillé pendant 25 ans à refaire notre Code civil. Il a déposé un rapport qui constituait une excellente base de révision pour notre droit civil. Cependant, peu de réformes ont été traduites en lois. L'exception importante est la loi 89 qui a été adoptée avant les élections provinciales de 1981.

Il semble que le gouvernement du Québec ait l'intention de réformer le Code civil d'une façon parcellaire. Quand on fait une telle réforme à la pièce, il y a des contradictions, des erreurs et des lacunes qui se glissent dans les articles. Qui en souffre? Le citoyen bien sûr, dont les rapports juridiques sont régis par un Code civil peu harmonisé. De plus, en faisant la réforme à la pièce, certains chapitres seront déjà désuets lors de l'entrée en vigueur d'autres chapitres.

Nous avons demandé au ministre de la Justice, à maintes reprises, de présenter à la population un échéancier pour l'adoption de tout le Code civil. Par exemple, l'adoption du nouveau Code civil pourrait être faite au complet d'ici à 1985. Il pourrait alors compter sur la coopération complète de l'Opposition. Mais nous attendons toujours la réponse du ministre à ce sujet.

En fait, si je me souviens bien, le ministre a promis de déposer les chapitres sur les personnes et les successions au printemps. C'est maintenant reporté à l'automne. Espérons encore que ces projets de loi ne seront pas reportés à une saison ultérieure.

De plus, étant donné les deux codes civils qui existent au Québec aujourd'hui, il n'est guère possible de parler de l'accès au code pour le simple citoyen. Même les avocats se retrouvent avec peine dans notre droit civil. Je m'explique.

Savez-vous, M. le Président, qu'il existe au Québec deux codes civils? Il y a le Code civil de 1866 qui est officiellement le Code civil du Bas-Canada. Il y a aussi le Code civil du Québec qui a été institué par la loi 89 en 1980. Des articles qui portent les mêmes numéros se trouvent dans les deux codes quoiqu'ils visent des matières différentes. Par exemple, l'article 407 traite du mariage dans un code et de la propriété dans l'autre. C'est très compliqué pour les avocats et les notaires qui n'ont pas tous, dans leurs recherches, l'appui du ministre de la Justice. Le simple citoyen n'a, quant à lui, guère d'accès à ce corps de droit fondamental. 2. Les services de police. Dans mon étude sur La police au Québec: son contrôle et son coût, rendue publique en novembre 1981, j'ai remarqué que l'inefficacité des services de police dans la Communauté urbaine de Montréal et au Québec en général est attribuable, avant tout, à la faiblesse et à l'incohérence des structures policières et au manque de mécanismes de contrôle. Ceci est dû, en grande partie, à la négligence du gouvernement actuel et plus spéficiquement à celle du ministre de la Justice qui n'a pas assumé son rôle principal de planificateur dans le domaine policier.

Cette inefficacité est flagrante quand on compare le taux d'encadrement policier et les coûts des services en Ontario et au Québec. Le gouvernement se compare toujours à notre province voisine, étant donné que les deux provinces ont sensiblement les mêmes problèmes. Mais cette comparaison est devenue aujourd'hui ridicule dans l'état où se trouve l'administration de notre justice.

Au premier janvier 1981, il y avait, pour assurer le maintien de l'ordre et de la sécurité sur le territoire québécois, 13 790 policiers relevant soit de la Sûreté du Québec, soit des corps policiers municipaux. Alors que l'effectif de la Sûreté du Québec

se chiffrait à 4585 policiers, les 9205 policiers municipaux étaient répartis dans 190 corps policiers municipaux et 4820 comptaient pour le seul service de police de la Communauté urbaine de Montréal.

À la même date, en Ontario, on retrouvait 16 893 policiers dont 4055 appartenaient à la police provinciale de l'Ontario. Cependant, le taux d'encadrement policier en Ontario, c'est-à-dire le nombre de policiers par 1000 de population - et c'est ce chiffre qu'il faut retenir comme important -n'était que de 1,90 comparativement à 2,17 au Québec.

Je me pose alors la question: Pourquoi avons-nous, au Québec, plus de policiers par habitant?

Examinons les coûts de ces services. Le coût de maintien des forces policières du Québec s'est chiffré, en 1980, à 545 297 725 $, dont 205 859 200 $ pour la Sûreté du Québec et 199 940 750 $ pour le service de police de la CUM. En répartissant le coût du maintien de la Sûreté du Québec sur la population du Québec, on remarque que, pour chaque citoyen québécois, il en coûtait, en 1980, une somme de 32,41 $; de leur côté, les citoyens demeurant sur le territoire de la CUM devaient de plus assumer en 1980 un montant de 110,77 $ per capita pour leur protection policière. Cela ne comprend pas le coût du service de la police parallèle qu'on trouve dans la plupart des villes de la CUM. Pendant ce temps, en Ontario, le coût per capita de la police provinciale se chiffrait à 20,82 $ alors que les résidents de l'agglomération de Toronto devaient payer une somme de 95,70 $ per capita pour la protection policière assumée par leur service de police. (11 h 15)

Les coûts des services de police au Québec ont beaucoup augmenté depuis 1976. De fait, le coût de la Sûreté du Québec a augmenté plus rapidement que celui du service de police de la Communauté urbaine de Montréal, ces dernières années. De 1976 à 1981, le coût de la Sûreté du Québec est passé de 126 292 000 $ à 205 850 200 $, soit une augmentation de 63% en quatre ans, alors que celui du service de police de la CUM est passé, pour la même période, de 155 357 840 $ à 199 940 750 $, pour une augmentation de 28,69%. Les contribuables à la CUM se demandent pourquoi ils paient 20% de plus pour leur service de police que leurs homologues de l'agglomération de Toronto. Concernant cet aspect de l'administration de la justice, je voudrais savoir si le ministre a un projet en tête pour réduire le coût de nos services de police. 3. Les conditions et les coûts de la détention. J'ai eu l'occasion de visiter les plus grands centres de détention et de prévention au Québec, entre septembre et décembre 1981. J'ai trouvé que, dans certains centres, les conditions de vie étaient déplorables, voire intolérables. J'ai été surpris d'apprendre que 50% des admissions sont le résultat du non-paiement de l'amende. Il faut noter que la plupart des infractions, selon les lois du Québec et les règlements municipaux, sont punissables par amende plutôt que par emprisonnement. Il est évident que l'emprisonnement pour le non-paiement d'amende ne répond pas à un besoin de protection de la société et que, étant donné son coût, il devrait être aboli. À l'appui de cette conclusion, j'aimerais souligner qu'en 1978, le ministère de la Justice avait déboursé environ 5 000 000 $ pour héberger des personnes qui ont fait défaut de paiement d'amende d'environ 1 000 000 $, y compris les frais.

Il arrive souvent que, à cause du non-paiement d'une amende d'une centaine de dollars, une personne se retrouve en prison pour dix jours. Il en coûtera 100 $ à 250 $ par jour pour garder cette personne en prison. Donc, il en coûtera à l'État de 1000 $ à 2500 $ pour héberger cette personne en prison pour le non-paiement d'une amende de 100 $. En effet, on punit le contribuable et non celui qui a commis l'infraction.

À la lumière de ces faits, j'ai proposé que l'emprisonnement pour non-paiement d'amende soit aboli. Cette suggestion a trouvé un très grand appui dans la presse écrite et parlée de même qu'auprès de la population. Deux semaines après la parution de mon étude sur la question, l'attaché de presse du ministre de la Justice a fait savoir aux Québécois que le ministre présenterait au printemps une loi visant à abolir l'emprisonnement pour le non-paiement d'amende. Le printemps est déjà arrivé, on attend toujours le projet de loi du ministre. Le ministre tiendra-t-il sa promesse?

De plus, j'ai fait les recommandations suivantes concernant les problèmes de la détention. Le Centre de prévention de Montréal (Parthenais) doit être fermé. Le ministre de la Justice s'est engagé, dans une lettre écrite en 1977, à le fermer, après avoir constaté lui-même les mauvaises conditions qui y régnaient.

Le ministre devrait fermer les prisons à Trois-Rivières et à Sherbrooke. Ces prisons sont moyenâgeuses, en décrépitude et il y a manque d'hygiène et de salubrité dans ces lieux. Quand j'ai visité ces prisons, il y avait 33 détenus à Trois-Rivières et 52 à Sherbrooke. Le ministre vient d'annoncer aujourd'hui qu'on construira deux nouvelles prisons dans ces endroits. Je me demande si on a besoin de deux nouvelles prisons de 200 cellules chacune dans ces villes.

Le ministre doit prévoir aussi une amélioration substantielle des conditions de vie des détenus dans les prisons de Bordeaux et Hull, à la maison Tanguay et au Centre

de détention d'Orsainville, et l'élaboration de programmes de réinsertion sociale plus adéquats.

L'entière responsabilité des soins de santé dans les prisons du Québec doit être remise aux CLSC. Je suis très heureux d'apprendre, aujourd'hui, que le ministre a déjà donné suite à mes recommandations et que le ministère de la Justice a signé des contrats avec le ministère des Affaires sociales pour que les CLSC s'occupent des détenus dans certaines régions.

Enfin, le ministre doit prendre des mesures pour réduire les coûts excessifs d'exploitation des prisons québécoises. Il en a coûté en moyenne, pour chaque détenu au Québec, 77,16 $ par jour en 1979-1980, tandis que, pour le détenu ontarien, cette moyenne, pour la même année, était de 55,08 $. Le coût est plus élevé de 40% au Québec qu'en Ontario. Qu'est-ce que le ministre a l'intention de faire dans ce dossier? 4. La protection des droits et libertés de la personne. Le ministre a une responsabilité spéciale en ce qui concerne la Charte des droits et libertés de la personne du Québec. La charte prévoit à l'article 91 que "Le ministre de la Justice est chargé de l'application de la présente charte".

Au mois d'octobre dernier, la présente commission a siégé afin d'entendre des mémoires concernant les modifications à apporter à la Charte des droits et libertés de la personne du Québec. Le ministre a promis de déposer un projet de loi afin d'affermir les droits et libertés des Québécois. Ce projet de loi n'a pas encore été déposé. Le ministre nous a dit aujourd'hui qu'il sera déposé avant la fin de la session et j'espère qu'il tiendra sa promesse.

Le temps presse, l'Assemblée nationale doit faire des modifications à cette charte adoptée par le gouvernement libéral précédent. Par exemple, l'article 90 permet une certaine discrimination contre les femmes. Cet article devait supposément demeurer en vigueur pendant un temps assez limité. Nous demandons au gouvernement depuis 1977 de l'abroger. Rien n'a été fait et la discrimination contre les femmes continue à être permise par notre charte.

En marge de cette question, il convient de rappeler ici que le ministre a déjà dit que l'enchâssement dans la constitution de l'égalité des femmes protégera moins bien leurs droits et libertés que les dispositions de la charte québécoise qui n'est, en effet, qu'une loi statutaire. Il va sans dire que l'enchâssement de la garantie de l'égalité des femmes permet également à l'Assemblée nationale d'offrir des protections au-delà de celles enchâssées dans la constitution. Il semble que le ministre ait placé ses sentiments constitutionnels avant la justice au lieu de faire l'inverse.

J'aimerais demander au ministre si son ministère a fourni un guide sur la charte québécoise aux procureurs de la couronne. Quelle position juridique doivent prendre ces procureurs face à une action fondée sur la charte contre l'État ou un organisme de l'État? Doivent-ils défendre des interprétations libérales de la charte ou doivent-ils défendre des interprétations conservatrices de la charte?

Prenons l'exemple suivant: dans l'affaire Johnson, décidée par la Cour supérieure à Gaspé, il s'agissait de la contestation d'une disposition de la Loi de l'aide sociale telle que modifiée en 1978. La disposition en litige enlevait le droit à l'aide sociale à une personne impliquée dans un arrêt de travail de même qu'à sa famille. Johnson a invoqué la Charte des droits et libertés de la personne afin de faire valoir son argument que la famille avait droit à l'aide sociale. Fait ironique, le procureur du ministère, s'appuyant sur les arrêts Lavell et Bliss, a plaidé la jurisprudence la plus conservatrice de la Cour suprême du Canada afin de restreindre la portée de la charte québécoise.

Le ministre a-t-il défini une politique juridique pour ces procureurs en ce qui concerne l'interprétation et la portée de la Charte des droits et libertés de la personne du Québec? Leur a-t-il demandé de réduire la charte à sa plus stricte expression?

De plus, l'article 67, paragraphe d, de la charte édicte que la Commission des droits de la personne doit "procéder à l'analyse des lois du Québec antérieures à la présente charte et qui lui seraient contraires et faire au gouvernement les recommandations appropriées". Le ministre a-t-il reçu des recommandations en vertu de cet article? A-t-il donné suite aux recommandations, le cas échéant? Est-ce que le travail de la commission est complété en vertu de cet article?

Finalement, il faut noter que le ministre a donné plus de responsabilités à la commission au fil des années, mais moins de ressources pour accomplir ses devoirs. À l'heure actuelle, il y a des délais de plusieurs mois et même d'années avant que la commission puisse commencer une étude à la suite d'une plainte ayant trait à une discrimination. Espérons que le ministre prendra les mesures nécessaires qui s'imposent dans ce dossier.

Le bilan que je viens de brosser des quatre dossiers mentionnés ci-haut est plutôt négatif. Il semblerait que la qualité de l'administration de la justice en général a baissé depuis l'arrivée au pouvoir du gouvernement péquiste. De plus, les coûts sont trop élevés dans certains programmes. Nous ferons d'autres critiques à l'étude des programmes spécifiques. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): Merci. M. le ministre.

Réplique du ministre

M. Bédard: M. le Président, très rapidement, parce que nous aurons l'occasion d'approfondir tant les remarques préliminaires que j'ai faites que celles de l'Opposition à l'occasion de l'étude des différents programmes qui sont concernés.

Au début de son exposé, le député de D'Arcy McGee s'est plaint qu'il était très difficile pour lui de trouver des questions. Il a affirmé que c'était beaucoup plus difficile pour lui de trouver des questions que pour moi de donner des réponses. Je n'ai pas la prétention d'avoir tout fait dans le domaine de la justice; je pense que jamais aucun ministre de la Justice ne pourra prétendre avoir fait tout ce qui est nécessaire parce que l'évolution existe et les problèmes changent dans ce domaine comme dans les autres. La difficulté du député de D'Arcy McGee de trouver des questions réside peut-être aussi dans le fait qu'il est à même de constater non seulement aujourd'hui, mais tout au cours de l'année, que nous avons travaillé très fort au ministère de la Justice. Si tout n'a pas été fait, de nombreuses réalisations - on peut parler de nombreuses réalisations - nous permettent de nous comparer - en tout cas, je le dis comme je le pense - avantageusement aux administrations qui nous ont précédés.

Le député de D'Arcy McGee a beaucoup de mérite - je le reconnais -lorsqu'il parle, entre autres, d'un sujet sur lequel il a déposé un rapport en ce qui a trait à la détention, à l'ensemble du système correctionnel au Québec. Mais il ne faudrait quand même pas charrier. Il ne faudrait pas qu'il s'attribue plus de mérite qu'il n'en a concernant les recommandations dont nous avons eu l'occasion de prendre connaissance. (11 h 30)

Lorsque le député de D'Arcy McGee dit, à la page 9, qu'il pense que c'est à la suite d'une de ses recommandations que nous avons mis au point une entente avec les services de santé du Québec au niveau de l'ensemble du système correctionnel, je me demande où il prend ce fondement puisque ça faisait au-delà d'un an que les négociations étaient commencées, c'est-à-dire bien avant son rapport, et que l'entente a été conclue.

M. Marx: Toujours des négociations et des études, jamais d'action.

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bédard: Au contraire, vous êtes mal placé pour le dire dans ce cas-là puisque l'entente a été signée et vous vous en êtes réjoui. Je dois honnêtement dire que cela n'a aucune relation avec les conclusions de votre rapport. Également, lorsque le député de D'Arcy McGee pense que c'est son rapport qui a donné suite à la décision gouvernementale de présenter une loi pour essayer de régler le problème des sentences faute de paiement d'amende, encore là, je suis obligé de dire qu'il s'illusionne, pas seulement en ce qui a trait au travail que j'ai pu faire, mais simplement par respect pour le travail qui a été fait par de nombreux organismes durant les deux années qui viennent de s'écouler, donc, bien avant le rapport.

Je pense d'abord à cette idée d'une loi pour essayer de faire disparaître le plus possible la prison, faute de paiement d'amende, qui a pris naissance à un groupe de travail, au niveau du ministère de la Justice, il y a deux ans. Ces conclusions, comme je l'ai dit, ont été orientées - et tout cela bien avant le rapport de mon honorable collègue - au niveau du Conseil consultatif de la justice et de toutes les consultations qui étaient nécessaires auprès des juges, procureurs, etc. Il est clair que cette orientation - tant mieux si le député de D'Arcy McGee est d'accord - avait été prise bien avant le rapport dont il fait état.

En ce qui a trait aux coûts de l'ensemble de notre système correctionnel, entre autres de ce que coûte à l'État chaque jour de prison d'un citoyen, nous avons déjà dit, bien avant aujourd'hui, que cela représentait un coût très élevé et qu'il fallait trouver le moyen de mettre au point une nouvelle politique, globale cette fois-là, qui puisse permettre de rationaliser l'ensemble de l'administration de nos institutions correctionnelles, de diminuer les coûts d'opération. C'est justement avec cette préoccupation que j'ai depuis un an que nous avons travaillé d'arrache-pied pour être en mesure de pouvoir dire aujourd'hui que, d'ici à quelques semaines, je serai justement en mesure de faire connaître à la population une politique globale concernant l'ensemble du système correctionnel en ce qui a trait à une nouvelle philosophie et, également, une nouvelle approche et une rationalisation des coûts d'opération et des coûts de construction qui, je peux le dire d'avance, sera de nature à diminuer grandement ces coûts et à améliorer et humaniser le système, et ce, pour le meilleur bénéfice non seulement des détenus mais de la population.

Concernant le Code civil, mon collègue parle de 1985 comme pouvant être une date raisonnable, un délai raisonnable qui permettrait l'adoption de l'ensemble de la réforme du Code civil. On sait jusqu'à quel point les travaux de la commission ont été longs, 25 ans. Nous nous sommes résolument attaqués à la tâche; je pense que le député

de D'Arcy McGee sera d'accord pour dire que ce n'est pas une mince tâche. La réforme du droit de la famille est déjà faite. Je pense que le délai de 1985 est raisonnable - peut-être à un an de différence - avec le concours de l'Opposition et étant donné l'avancement des travaux faits au ministère, travaux qui vont se poursuivre sur les autres chapitres de l'ensemble du Code civil. Je tiens à dire au député de D'Arcy McGee que nous nous rejoignons presque sur le délai; il semble raisonnable et il sera d'autant moins long selon la collaboration de l'Opposition, comme nous l'avons eue, d'ailleurs, lorsqu'il s'est agit d'adopter la réforme du droit de la famille.

Je puis dire que, tel que nous en avions convenu, nous aurions été en mesure de déposer, dès le printemps un avant-projet de loi concernant la réforme du Code civil en ce qui a trait au chapitre des personnes. Nous croyons cependant utile de nous donner un petit délai additionnel, qui ne retardera rien en termes d'adoption de cette réforme, aux fins de parfaire et de compléter des consultations qui, comme vous le savez, sont extrêmement importantes dans ce genre de travail avec le barreau, la magistrature et la Chambre des notaires, de manière, pour autant que ce soit possible, que nous puissions déposer un projet de loi par lequel nous pourrons régler plusieurs problèmes, tout en étant conscient qu'on ne s'entendra peut-être pas sur tous les éléments. Plus nous trouverons le moyen de régler les problèmes avant le dépôt de la loi, plus cela contribuera effectivement à un meilleur avant-projet de loi et peut-être, en fin de compte, à une adoption plus rapide.

Il y a naturellement tous les impacts financiers de la réforme. Inutile de dire que dans le contexte actuel, c'est très important. Nous aurons l'occasion d'en reparler lorsque nous aborderons ce sujet dans un programme.

Le député de D'Arcy McGee parle des coûts de la police et il y va de comparaison avec l'Ontario. Au départ, il faudrait quand même être prudent. Je me rappelle que dans son rapport sur les coûts du système correctionnel, le député de D'Arcy McGee avait fait certaines erreurs assez importantes. Il avait laissé entendre que le taux d'occupation des prisons, faute de paiement d'amende, était de 50% alors que c'est le taux d'admission.

M. Marx: Question de privilège, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Marx: Question de privilège.

M. Bédard: Vous aurez l'occasion d'en reparler tout à l'heure.

M. Marx: Question de privilège.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de D'Arcy McGee, il n'y a pas de question de privilège en commission parlementaire.

M. Marx: Question de règlement.

Le Président (M. Desbiens): Sur une question de règlement, M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Question de règlement. Voici mon communiqué de presse sur cette question, auquel le ministre a fait allusion; c'est clairement indiqué que 50% des admissions étaient pour le non-paiement d'amende. C'est ça que j'ai donné aux journalistes. C'est écrit clairement. J'ai dit: - si le ministre veut... - "Se basant sur de nombreuses études selon lesquelles plus de 50% des admissions sont dues au non-paiement d'amende." C'est clair, dans mon communiqué de presse. Si un journaliste a mal compris cela, c'est peut-être ma faute, mais ce n'est pas ce que j'ai dit. J'ai dit 50% des admissions. Je veux insister sur ça.

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.

M. Bédard: J'étais très heureux de voir que, dans son communiqué de presse, le député de D'Arcy McGee avait corrigé son erreur qu'il a réalisée rapidement. Mais je ne crois pas que le journaliste avait fait une erreur parce que ce n'est pas le communiqué de presse qui l'a intéressé, mais plutôt le rapport même du député qui disait ceci, à la page 3 - non pas le pourcentage des admissions - "Cette mesure, à elle seule, diminuerait de près de 50% la population carcérale et éliminerait du même coup l'engorgement du système correctionnel", ce qui montre...

M. Marx: Dans le sens des admissions. C'est clair si on lit cela avec le communiqué de presse.

M. Bédard: L'attitude du député de D'Arcy McGee me convainc maintenant qu'il réalise jusqu'à quel point il s'était mal exprimé dans son rapport, puisque, tant mieux, il a corrigé très rapidement quand le ministère de la Justice a fait les mises en garde qu'il fallait.

D'abord, concernant la police, le député de D'Arcy McGee compare le coût de la police, de la Sûreté du Québec à celui de la sûreté de l'Ontario, de la police provinciale de l'Ontario. Il oublie cependant une chose très importante. C'est que la Sûreté du Québec a une action beaucoup plus étendue que la sûreté ou encore la police provinciale

en Ontario. La Sûreté du Québec, comme on le sait, prête assistance à de nombreux corps policiers municipaux; également, elle couvre plusieurs parties du territoire où il n'y a pas de corps policiers municipaux. La Sûreté du Québec a un secteur d'activités - je pense, entre autres, aux crimes économiques - qui est beaucoup plus étendu que le champ d'action couvert par la police provinciale de l'Ontario. Je le dis au député de D'Arcy McGee pour que nous puissions faire les nuances appropriées.

Au moment où on se parle, je pense que le député de D'Arcy McGee le sait, beaucoup d'enquêtes criminelles qui auparavant étaient faites par les corps municipaux sont remises à la responsabilité de la Sûreté du Québec, ce qui augmente d'autant son travail et ce transfert de travail se fait à la demande même des corps de police municipaux. Je crois que le député de D'Arcy McGee devrait en tenir compte. Pour ce qui est du coût des corps de police municipaux, je pense qu'on doit rappeler que, quand même, la responsabilité des corps municipaux, quand on parle de l'administration, des coûts d'opération, relève des autorités municipales au premier chef. D'ailleurs, vous serez à même de constater dans la loi 46 concernant la Communauté urbaine de Montréal que nous avons là une législation qui a tendance à remettre - à leur demande, d'ailleurs - aux autorités de la Communauté urbaine de Montréal encore plus de responsabilités concernant... (11 h 45)

M. Marx: Oui, mais...

M. Bédard: ... l'administration des corps municipaux.

M. Marx: Je m'excuse, M. le ministre, seulement pour vous aider, pour compléter votre réponse, c'est aussi la question des structures des services de police à Montréal et ailleurs, et pourquoi tant de corps policiers au Québec par rapport à l'Ontario? Il y a peut-être aussi au Québec trop de corps policiers. J'ai fait aussi des recommandations dans ce rapport sur les services de police. Je vous en enverrai peut-être une copie une autre fois.

M. Bédard: C'est clair qu'il y a plus de gros corps de police en Ontario étant donné certaines régionalisations qui ont été faites, mais il ne faut pas partir de là pour essayer de conclure que ceci a nécessairement une incidence aussi importante sur les coûts comme essaie de le laisser croire le député de D'Arcy McGee. Je crois que toute cette situation des coûts de la police doit, comme dans le système correctionnel, s'évaluer avec des nuances qu'il faut faire quand on se compare à d'autres. Par exemple, on peut bien dire que les frais du système correctionnel au niveau de l'Ontario coûtent moins cher qu'ici au Québec, sauf qu'on oublie que, quand nous comptabilisons les frais de l'ensemble du système correctionnel au Québec, nous y insérons tous les frais d'administration, ce qui n'est pas le cas en Ontario. Cela représente des millions de dollars. Ce sont des éléments dont il faut tenir compte.

Discussion générale

M. Marx: M. le ministre, seulement pour votre information, j'ai relevé ces chiffres et ces comparaisons sur des documents du gouvernement fédéral qui s'alimente de chiffres qui viennent de votre ministère et du ministère de l'Ontario. S'il y a des...

M. Bédard: Oui, mais les statistiques fédérales. Vous en conviendrez...

M. Marx: Je n'ai pas tronqué...

M. Bédard: Non, non, je ne veux pas dire que vous avez tronqué des chiffres ou tout cela.

M. Marx: Non, je n'ai pas tronqué. J'ai pris les chiffres. Si vous avez mal...

M. Bédard: J'espère qu'on se comprend. Ce que je veux faire, c'est vous inciter à la prudence; les statistiques fédérales ne donnent que des chiffres, mais, derrière les chiffres, il y a des réalités qui existent dont il faut être conscient. C'est clair que, si tout le coût de l'administration du système carcéral est comptabilisé dans ce que coûte un détenu par jour à l'État du Québec, c'est différent du cas où l'ensemble de cette administration n'est pas comptabilisé. Prenez, par exemple, en Ontario également...

M. Marx: Puis-je vous demander de me rendre un service, M. le ministre? Si c'est le cas - et, comme je vous l'ai dit au début, c'est plus difficile de poser la question que de fournir la réponse - vous avez 14 000 employés, demandez à un qui est bon - et vous en avez beaucoup qui sont bons - de fournir une réponse à mon rapport sur les coûts des services de police. S'il veut bien me faire un mémo de cinq pages pour m'expliquer tout cela, je vais m'excuser auprès de vous à la prochaine étude des crédits. Mais seulement de me dire toutes sortes de choses au bout de la table...

M. Bédard: Non, non, nous sommes bien prêts à faire tout ce que nous pouvons pour aider le député de D'Arcy McGee à faire ses classes, mais...

M. Marx: Mais non, cela...

M. Bédard: ... il est clair que lorsque je lui dis que...

M. Marx: Ce n'est pas sérieux cela. C'est politique.

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bédard: Ce que je viens de lui dire, c'est clair que c'est parce que c'est à la suite des remarques et des observations qui me sont faites justement par les fonctionnaires. Il est d'ailleurs à même de constater qu'à mesure que j'ajoute des éléments dont il faut tenir compte au niveau des nuances c'est à la suite de remarques qui me sont faites par des fonctionnaires en qui le député de D'Arcy McGee semble avoir une très bonne confiance, ce dont je le félicite.

M. Marx: Ce sont seulement des remarques au bout de la table. J'aimerais avoir cela sur papier pour comparer, pour voir si vous avez vraiment raison.

M. Bédard: Les mêmes fonctionnaires auxquels vous référez, quand il s'agit d'évaluer l'ensemble du coût du système correctionnel, me disent qu'en Ontario, quand ils parlent des coûts de leur système correctionnel ils ne comptabilisent pas les frais de transport des détenus d'une institution à l'autre, soit les frais de transport lorsque...

M. Marx: Les frais de transport au Québec? Le gaspillage ici? On va parler de cela demain.

M. Bédard: ... par exemple, il y a des procès, etc. Je pense que je n'ai pas besoin de faire un dessin au député de D'Arcy McGee. Or, ces frais de transport représentent un montant très important. Je pourrais y aller d'autres remarques. On aura l'occasion, on les fera... On pourra ajouter quand nous serons rendus au programme en question. On me fait remarquer également qu'en Ontario, les établissements sont beaucoup plus grands, donc 100 personnes et plus. C'est là une donnée importante. Vous serez en mesure de constater que j'en ai tenu compte dans ce qu'on peut appeler l'élaboration d'une nouvelle politique, d'une nouvelle philosophie carcérale, d'une nouvelle politique au niveau de l'aménagement des institutions de détention. Je tiens à dire que, dans le nouveau plan que nous ferons connaître, il n'est pas question d'augmenter le nombre de places de détention, mais, comme je l'ai dit, d'essayer de promouvoir le plus possible des mesures d'option à la prison et des mesures de réinsertion sociale.

M. Marx: À Sherbrooke et à Trois-Rivières. Ce serait des...

M. Bédard: Nous allons y revenir aux programmes. Je vous répondrai pièce à pièce.

M. Marx: C'est juste que cela va me permettre de me préparer davantage. Combien de cellules allez-vous prévoir dans chacune des prisons de Sherbrooke et de Trois-Rivières?

M. Bédard: Lorsque je ferai connaître l'ensemble de la politique...

M. Marx: Mais les plans sont déjà prêts.

M. Bédard: ... du ministère. Ce que je vous ai dit, si vous voulez prendre la peine de relire les notes que j'ai lues au début des travaux de cette commission, j'ai bien mentionné que tous les concepts architecturaux qui ont été faits jusqu'à maintenant sont revus à la lumière d'une nouvelle politique que nous ferons connaître. Il est clair que, dans ces deux endroits, à Sherbrooke et Trois-Rivières, on se doit d'y aller de la mise en place de nouveaux établissements étant donné les conditions qui existent et l'état de vétusté des édifices qui existent présentement.

En ce qui a trait à toutes les questions posées par le député de D'Arcy McGee concernant l'attitude du gouvernement face à la charte constitutionnelle que nous connaissons, toutes ces questions trouveront une réponse dans une législation qui sera déposée très rapidement et qui sera peut-être annoncée dès aujourd'hui dans les avis à la Chambre. On sera en mesure à ce moment d'avoir la discussion que nous nous devons d'avoir sur, d'une part, l'attitude gouvernementale face à la charte constitutionnelle et également la discussion que nous devons avoir sur l'ensemble des amendements qui seront apportés à la Charte des droits et libertés du Québec qui est à l'avant-garde des chartes des droits et libertés au niveau de l'ensemble du Canada. Ces amendements, je l'ai exprimé tout à l'heure, tiendront compte non seulement des représentations faites par les groupes à la commission parlementaire, mais également tiendront compte du nouveau contexte constitutionnel auquel nous sommes confrontés.

Je pourrais faire beaucoup d'autres remarques, M. le Président, mais je me limiterai à celles-ci en disant, comme le député de D'Arcy McGee, que nous aurons l'occasion d'approfondir ces choses lors de l'étude de chacun des programmes.

M. Marx: Vous avez...

Le Président (M. Desbiens): Je m'excuse, une petite seconde!

M. Marx: C'est juste que...

Le Président (M. Desbiens): II est midi.

M. Marx: On va continuer jusqu'à 12 h 30 aujourd'hui. Je pense que c'était prévu jusqu'à...

Le Président (M. Desbiens): L'Assemblée commence à 14 heures aujourd'hui. Alors 12 h 30?

M. Marx: Est-ce que c'est jusqu'à 12 h 30 aujourd'hui ou... C'est comme... Sur l'horaire, c'est écrit 12 h 30.

Le Président (M. Desbiens): 12 h 30.

M. Marx: 12 h 30. L'Assemblée nationale siège aujourd'hui à 14 h 30.

Le Président (M. Desbiens): J'appelle l'article... M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Juste avant d'appeler le premier programme, j'aimerais, non pas faire une critique de la critique que le ministre a faite de ma présentation, je n'aimerais pas non plus faire une critique de sa présentation. Tout ce qu'il a fait, c'est un bilan des activités du ministère et ce sont des faits. J'aimerais seulement dire que je suis heureux d'apprendre aujourd'hui que mes études sur l'administration de la justice au Québec ont un certain impact sur le ministère et surtout sur le ministre; j'aimerais l'assurer que d'autres études viendront bientôt et peut-être que cela va vous aider à bouger sur le plan politique.

M. Bédard: Vous me consolez avec vos appréciations. Je vous ai dit que j'étais heureux que vous soyez d'accord avec nos orientations.

M. Marx: Pour prendre l'exemple de l'abolition de l'emprisonnement pour le non-paiement d'amende, ce n'est pas une question... Si on prend cela dans l'ordre chronologique, ce n'est pas le ministre... Oui?

M. Bédard: Si le député de D'Arcy McGee me permet une question.

M. Marx: Oui.

M. Bédard: Peut-être que le député de D'Arcy McGee, qui parle beaucoup de son rapport, devrait souligner la collaboration du ministère de la Justice qui a été très ouvert, d'ailleurs à ma demande, pour lui fournir tous les éléments dont il avait besoin pour faire un travail sérieux.

M. Marx: Tout ce que le ministère m'a permis de faire, c'est d'entrer dans les prisons. Pour le reste...

M. Bédard: Et d'en ressortir.

M. Marx: Je ne suis pas certain que le ministre ait donné cet ordre.

M. Bédard: Tout au moins que vous soyez bien traité le temps que vous y étiez.

M. Marx: On va revenir aux statistiques, je crois.

M. Bédard: Je pense que les fonctionnaires ont été très aimables à votre endroit.

M. Marx: Les fonctionnaires, oui.

M. Bédard: Le ministre l'est continuellement avec vous.

M. Marx: Très gentil.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Je vais revenir sur cette question, M. le ministre, avec plaisir, de la coopération que j'ai eue de vos fonctionnaires et de votre ministère. Souvent les gens me reçoivent aussi pour se plaindre de ce qui se passe au ministère, mais c'est une autre question.

Prenons, par exemple, l'abolition de l'emprisonnement pour le non-paiement d'amende. Si on prend cela dans l'ordre chronologique, ce n'est pas le ministre qui a proposé cela le premier; c'est moi, et c'est le ministre qui y a donné suite par une intervention de son attaché de presse; il était trop occupé à d'autres choses, mais peu importe.

M. Bédard: En décembre.

M. Marx: Je ne veux pas avoir le crédit...

M. Bédard: Je l'avais mentionné en décembre.

M. Marx: Je ne veux pas avoir le crédit...

M. Bédard: Avant même votre rapport.

M. Marx: Je ne veux pas avoir le crédit de cette réforme que le ministre a annoncée parce que, en fin de compte, ce sont les Québécois qui vont bénéficier de toutes ces réformes et de ces améliorations

de l'administration de la justice au Québec.

M. Bédard: Je peux vous dire là-dessus...

M. Marx: J'aimerais terminer. Je perds le fil de...

M. Bédard: Oui, mais cela va régler le débat là-dessus. Tout ce que je peux vous dire, c'est que j'avais commandé cette étude depuis un an et demi au ministère. Il me semble que cela est clair.

M. Marx: Le ministre vient de dire qu'il a commandé une étude au ministère, c'est cela. Je suis prêt à accepter cela. Je suis sûr et certain que vous avez des études, et que vous avez commandé des études sur tout ce qui est possible. Vous avez les meilleurs fonctionnaires au Canada; ce n'est pas là le problème. Le problème, c'est que vous ne donnez pas suite à ces études, à ces recommandations. Vous n'avez pas la volonté politique de faire quoi que ce soit. C'est là le problème. Le problème, ce ne sont pas vos fonctionnaires. Je ne peux pas vous poser une question maintenant et attendre que les fonctionnaires se défendent; ce n'est pas là le problème. Le problème, c'est que vous n'avez pas la volonté politique de donner suite aux recommandations qu'on peut trouver dans votre ministère.

M. Bédard: Comment pouvez-vous dire cela? Je viens de vous annoncer qu'on y donne suite, et je l'ai annoncé avant.

M. Marx: C'est vrai que le ministre va donner suite à cette politique d'abolir l'emprisonnement pour le non-paiement d'amende, mais non pas parce qu'il avait la volonté politique, mais parce qu'au Québec, par le biais des médias, s'est créé un certain climat et les gens trouvent que c'est bon, c'est rationnel, c'est le temps de faire cela; il y a la pression politique qui fait en sorte que le ministre va, d'une façon peut-être hésitante, donner suite à cette recommandation et à d'autres. (12 heures)

Lorsque je vois, dans les journaux de Trois-Rivières, que même le député Vaugeois est d'accord avec moi pour fermer la prison de Trois-Rivières, je comprends qu'il y ait une certaine pression sur le ministre de la Justice pour humaniser les conditions de détention à Trois-Rivières. Ce n'est pas une question de blâmer les fonctionnaires ou qui que ce soit. C'est le ministre qui est le patron, le "boss" de tout son ministère. C'est à lui à donner la direction. C'est à lui d'avoir la volonté politique. Vous savez et tout le monde sait que dans beaucoup de dossiers vous n'avez pas la volonté politique de faire les changements qui s'imposent.

Juste un dernier point sur la coopération que j'ai déjà eue des fonctionnaires de votre ministère. J'admets qu'ils sont très ouverts et qu'ils me fournissent des documents qui ne sont pas secrets...

M. Bédard: Ils l'ont été à ma demande, je peux vous le dire.

M. Marx: Oui, à votre demande. Est-ce que c'était une directive écrite?

M. Bédard: Tous ceux qui travaillent pour l'amélioration de la justice, je ne peux que les aider.

M. Marx: Ah bon! Si c'est à votre demande, M. le ministre, j'aimerais que vous demandiez à celui qui est dépositaire de documents ou de rapports sur l'efficacité de l'administration de la justice de m'envoyer une copie, parce que je comprends qu'il y a un document...

M, Bédard: Pourvu que vous me promettiez d'en faire des bonnes interprétations.

M. Marx: Je comprends qu'il y a un document dans votre ministère, entre autres, qui a été préparé par une compagnie privée, qui fait état de l'inefficacité ou de l'efficacité de l'administration de la justice, des palais de justice, et tout cela. Entre-temps, vous pouvez demander à ceux qui ont ces documents de m'envoyer des copies des documents, des rapports que les directeurs des palais de justice ont envoyés au ministère. Chaque palais de justice envoie chaque année ou quelques fois par année un rapport au ministère de la Justice. J'aimerais bien analyser ces documents pour vous, parce que vous ne pouvez peut-être...

M. Bédard: D'ailleurs, le sous-ministre...

M. Marx: ... pas trouver parmi vos 14 000 fonctionnaires quelqu'un qui a le temps de faire cette étude. Je suis prêt à le faire pour vous.

M. Bédard: Je vous rassure tout de suite. Nous n'avons pas de documents du genre de ceux que vous mentionnez. Il y a certaines études internes, c'est normal, qui se font au niveau de l'efficacité de l'administration de la justice. C'est normal qu'il en soit ainsi et que cela serve pour les fins internes afin d'orienter nos efforts pour l'amélioration...

M. Marx: Pouvez-vous me donner des documents des palais de justice qui parlent du nombre...

M. Bédard: Quand vous avez fait votre travail, le sous-ministre au greffe a été d'une collaboration vraiment spéciale pour vous aider à voir la situation.

M. Marx: Je vous demande des documents précis. Si votre ministère est tellement transparent, peut-être pouvez-vous me donner les documents qu'on vous prépare dans les palais de justice sur l'utilisation des salles, sur le nombre d'heures que les juges travaillent par semaine, sur toutes sortes de choses. Le sous-ministre en titre a sûrement reçu ces documents ou des photocopies de ces documents, si tout est ouvert. Je peux vous aider pour améliorer l'administration de la justice, mais donnez-moi des copies. C'est cela la réponse.

M. Bédard: Le député de D'Arcy McGee est ineffable. Je voudrais, lorsqu'il parle de la volonté politique, qu'on clarifie une fois pour toutes la situation concernant en fait l'ensemble de l'amélioration du domaine correctionnel. D'abord - ce sont les faits, les gestes qui ont été posés - nous avons fait adopter des lois par l'Assemblée nationale avant que vous n'y soyez, alors que j'y étais comme ministre de la Justice. Entre autres, toute la législation concernant le travail rémunéré dans les institutions de détention, qui, vous le savez, a des effets très importants...

M. Marx: Pas mauvais!

M. Bédard: ... au niveau de la réhabilitation. J'ai également mis en place la Commission des libérations conditionnelles du Québec qui représente un élément important lorsqu'on parle de la réhabilitation des détenus. Ce sont tous des gestes qui ont été posés, des lois qui ont été adoptées au moment où on se parle. Quand vous parlez de volonté politique, il faut quand même qu'il y ait un cheminement de manière que cette volonté politique s'exprime dans le sens qu'elle débouche sur des solutions qui corrigent vraiment les situations à déplorer. Il y a un an et demi, j'avais constaté de visu qu'il y avait beaucoup trop de gens, de personnes qui étaient en prison faute de paiement de l'amende. Lorsqu'on voit le coût que représente, par jour, un détenu, je pense que cela a un impact économique important. Mais il n'y a pas seulement cet aspect-là, il y a aussi simplement l'aspect justice, en termes de réinsertion sociale. Je ne trouvais pas qu'une philosophie carcérale qui mérite vraiment ce nom pouvait s'accommoder longtemps du fait que des gens étaient incarcérés faute de paiement d'amende, même si ça peut être nécessaire dans certains cas exceptionnels.

M. Marx: Mais...

M. Bédard: Laissez-moi terminer. C'est à ce moment-là, à partir de cette constatation, il y a un an et demi, que j'ai demandé à un groupe de travail au niveau du ministère de faire les études nécessaires pour essayer de corriger cette situation. Je vous ai indiqué tout le cheminement qui avait été nécessaire au niveau, d'abord, du travail fait par le groupe, l'analyse de la situation...

M. Marx: Sur cette question, j'ai commencé mes études il y a déjà dix ans.

M. Bédard: ... dont vous avez pu prendre connaissance. Il y a, également... Vous voyez, il y a dix ans.

M. Marx: C'est ça. J'ai attendu pour que vous...

M. Bédard: Cela vous a pris dix ans à accoucher de certaines recommandations que j'avais déjà mises de l'avant; moi, ça m'a pris seulement un an ou un an et demi.

M. Marx: Vous êtes vite, vous êtes vite!

M. Bédard: Je fais mon possible. M. Marx: Vite, très vite!

M. Bédard: Une chose est certaine, c'est que...

M. Marx: Le ministre...

M. Bédard: Je tiens à le dire, ici, en commission, à partir du moment où, effectivement, on peut exprimer une volonté politique au niveau du ministère de la Justice, je peux compter - c'est le cas de le dire - sur des fonctionnaires qui sont vraiment très efficaces et qui ne ménagent pas les efforts pour essayer de donner suite, le plus rapidement possible, à toutes les analyses qui sont nécessaires que pour les volontés politiques exprimées se matérialisent.

Le Président (M. Desbiens): J'appelle le programme 1.

M. Marx: Oui, c'est bon. On va continuer.

Formulation de jugements

Le Président (M. Desbiens): Programme 1, élément 1. Est-ce que l'élément 1 est adopté?

M. Bédard: Je comprends qu'il y a déjà des choses, des documents que j'ai fait parvenir aux membres de l'Opposition. Est-ce que, pour le journal des Débats, vous croyez

qu'il y a lieu, peut-être, de faire état de ces remarques concernant surtout les ressources humaines et financières?

M. Marx: Cela peut être utile.

M. Bédard: Cela peut être utile, je crois. Alors, M. le Président, au niveau du programme 1, les ressources financières requises à ce programme s'établissent à 25 545 800 $ pour l'exercice 1982-1983. Ce budget se répartit comme suit: la magistrature, 25 061 900 $; le Conseil de la magistrature - parce que je suis heureux de le souligner, mon collègue parlait tout à l'heure de volonté politique avec des gestes très précis, je pense qu'on peut se réjouir du fait que non seulement j'ai présenté mais j'ai fait adopter une loi concernant les tribunaux. Cette loi a donné comme résultat la création du Conseil de la magistrature qui était demandé depuis des années et des années et même, également, la constitution d'un code de déontologie des juges pour donner suite à qui était contenu dans la législation présentée à ce moment-là.

Au niveau du Conseil de la magistrature: le secrétariat: 125 900 $; le perfectionnement de juges: 358 000 $. L'effectif autorisé de ce programme est de 262 postes, soit trois postes au Conseil de la magistrature et 259 postes de juge. Cet effectif de 259 postes de juge est affecté comme suit: à la Cour provinciale: 127; à la Cour des sessions de la paix: 69; au Tribunal de la jeunesse: 43; au Tribunal du travail: 11; au Tribunal des transports: 3; au Tribunal minier: 1, et au Tribunal de l'expropriation: 5. Les autres postes de juge autorisés par la Loi sur les tribunaux judiciaires sont affectés à titre de président ou de membre aux différentes commissions et régies.

Les crédits de l'élément 2: déontologie judiciaire et perfectionnement des juges, sont composés d'une somme de 125 900 $ au titre du budget de fonctionnement du secrétariat et d'une somme de 358 000 $ au titre du perfectionnement des juges.

Je porte également à votre attention que les crédits de ce programme sont des crédits permanents en vertu de la Loi sur les tribunaux judiciaires, à l'exception de la contribution du ministère au régime de retraite et de pension des juges, au montant de 7 144 100 $.

Il y a des crédits additionnels estimés à 2 989 900 $, qui sont prévus à ce poste budgétaire; ceci est pour financer l'augmentation des dépenses reliées aux facteurs suivants: d'abord une partie des crédits additionnels estimés à cette catégorie de dépenses sera utilisée pour financer le coût des dépenses prévues relatives au traitement des juges, la contribution de l'employeur au régime de retraite et de pension des juges et l'augmentation du nombre de juges affectés aux tribunaux judiciaires.

Est-ce qu'il y a d'autres détails dont vous auriez besoin?

M. Marx: Vous n'allez pas assez vite. On aimerait poser quelques questions au ministre pour...

M. Bédard: ... concernant les délais aussi. Je crois que, l'an passé, on en avait parlé. Je suis en mesure de vous répondre.

M. Marx: Je suis d'accord. Je vais rendre public un rapport sur ces questions bientôt, M. le ministre: "Les lenteurs de la justice et l'injustice". Cela va venir dans une dizaine de jours...

M. Bédard: Comme d'habitude, on aura présenté le nôtre avant.

M. Marx: ... afin de vous informer de ce qui arrive dans votre ministère.

M. Bédard: Cela ne nous prendra pas dix ans, nous! Cela va être fait vite.

M. Marx: Non, non je vais produire cela bientôt.

M. Bédard: ... Vous m'en avez parlé l'an passé.

M. Marx: Je vais vous en envoyer une copie, cela va vous apprendre ce qui se passe dans votre ministère.

M. Bédard: Vous êtes sérieux et je vous estime beaucoup.

M. Marx: Je vous ai demandé premièrement si c'est vrai qu'il y a un rapport qui a été préparé par une compagnie privée sur l'efficacité de la justice au Québec et que vous donnez suite actuellement à certaines des recommandations qui se trouvent dans ce rapport ou d'autres rapports de compagnies privées.

M. Bédard: II n'y a pas de rapport dans ce sens.

M. le Président, je vais demander à mon sous-ministre en titre peut-être de répondre.

M. Marx: II met son siège en jeu.

M. Bédard: II arrive à l'occasion que nous fassions appel aux services de firmes privées pour améliorer l'efficacité de l'administration de la justice. Notamment, en matière d'informatisation de système, on fait appel à des firmes privées pour nous présenter des conceptions administratives de

certains programmes informatisés. On va le faire en matière de traitement informatisé des lois. Une étude est en cours actuellement pour le "bill processing" parce que nous ne disposons pas dans tous les domaines des ressources nécessaires au ministère. Cela arrive à l'occasion, mais il n'y a pas d'étude globale faite par des firmes privées sur l'efficacité de l'administration de la justice au Québec.

M. Marx: Est-ce que ces études sont rendues publiques ou si ce sont des études internes?

M. Bédard: Ce sont des études internes. (12 h 15)

M. Marx: Je ne m'intéresse pas à l'informatisation, mais à d'autres études sur l'administration de la justice. Est-ce qu'il y a des secrets? Est-ce que ce sont des secrets de polichinelle? C'est quoi?

M. Bédard: II y a des études qui sont faites concernant l'efficacité de l'ensemble de l'administration au niveau des tribunaux, etc., mais ce sont des études internes qui nous permettent...

M. Marx: Ce sont des études interdites à l'Opposition.

M. Bédard: Non, je n'emploierais par cette expression, ce sont des études tout ' à fait normales qui nous aident à orienter le plus efficacement possible nos efforts pour l'amélioration.

M. Marx: C'est ce que je voulais dire. Cela rend mon travail difficile pour savoir, par exemple, quelle est l'utilité...

M. Bédard: J'ai déjà été dans l'Opposition et je comprenais que certaines études qui sont entre les mains du ministère, pourvu qu'elles soient utilisées pour l'administration...

M. Marx: Mon but n'est pas de vous critiquer, mais de vous aider...

M. Bédard: Je sais. C'est très bien, je note cette phrase.

M. Marx: ... et de mettre un peu de pression politique sur vous, d'affermir votre volonté politique.

M. Bédard: Je pourrais ajouter que nous avons retenu les services d'une firme privée récemment pour essayer de faire une évaluation de l'amélioration de la productivité en termes de temps et de mouvement.

M. Marx: De temps et mouvement de qui?

M. Bédard: De l'ensemble des services judiciaires.

M. Marx: Des juges? Non?

M. Bédard: De l'ensemble des services judiciaires.

M. Marx: L'ensemble.

M. Bédard: Différents services judiciaires, fonctionnement du Tribunal de la jeunesse.

M. Marx: Fonctionnement du Tribunal de la jeunesse. L'information qui m'intéresse, par exemple, c'est l'utilisation des salles dans les palais de justice. Est-ce que ces salles sont sous-utilisées, surutilisées? Est-ce qu'on a assez de salles, pas assez de salles? Pourquoi ne siège-t-on pas l'été? Pourquoi siège-t-on le soir dans certains palais de justice et dans d'autres, non, tout cela? J'espère que vous êtes en train de faire ces études. Si vous avez ces études, j'aimerais les voir ou j'aimerais avoir des précisions sur ces questions. Les études existent.

M. Bédard: Tout ce qu'on fait à l'heure actuelle - et c'est normal - c'est compiler beaucoup de données, mais il n'y a pas d'étude formelle. Ces données nous permettent de...

M. Marx: Vous avez des données qui ne sont pas compilées.

M. Bédard: Ces données sont internes, au niveau du ministère. Elles sont réajustées, évaluées constamment pour essayer d'orienter notre action.

M. Marx: Est-ce que c'est un secret ou si, disons, dans un palais de justice il y a une surutilisation des salles? Par exemple, prenons le palais de justice à Hull; quelle est l'utilisation des salles? Est-ce que vous avez des chiffres, est-ce que vous avez étudié le rapport. Est-ce que cela a été compilé, est-ce que cela a été comparé avec d'autres palais de justice? Qu'est-ce que vous faites?

M. Bédard: Comme vous parlez d'un cas très précis, à savoir le palais de justice de Hull, je demanderais à monsieur...

M. Marx: Je prends cela parce que c'est un exemple non contentieux, M. le ministre. Je commence avec l'exemple le plus facile pour vous.

M. Bédard: Soyez gentil. Sur le taux d'utilisation des salles d'audiences, c'est publié dans nos rapports annuels, dans celui

de la Direction générale des services judiciaires. D'ailleurs, je pense qu'à Montréal on a communiqué à des gens qui sont venus nous rencontrer ces informations. On les a communiquées également pour Longueuil. À mesure que les informations nous sont demandées, nous les communiquons.

M. Marx: Quels sont les taux d'utilisation à Montréal?

M. Bédard: II faut faire des distinctions suivant les salles d'audiences. Si on parle, par exemple, des salles d'audiences - je vous cite cela de mémoire - de la famille où c'est beaucoup plus facile de planifier l'utilisation parce que des causes durent un quart d'heure, vingt minutes en matière de défaut, c'est probablement 100%. Si on allait au niveau des audiences, par exemple, aux sessions de la paix, à Montréal, c'était de l'ordre de 70% récemment. Ce sont des taux d'utilisation qui sont fort acceptables au niveau des sessions de la paix.

M. Marx: Ces chiffres sont dans le rapport annuel du ministère.

M. Bédard: Ces chiffres ne sont pas dans le rapport annuel du ministère, mais dans le rapport annuel de la Direction générale des services judiciaires.

M. Marx: Qui est rendu public.

M. Bédard: Qui est à la disposition du public. Il n'est pas publié comme tel chez l'Éditeur officiel. Il peut toujours être accessible.

M. Marx: Le ministre peut-il prendre note de m'en envoyer une copie? Oui, merci.

M. Bédard: Je ne voudrais quand même pas faire tout le travail de l'Opposition. Je vous le dis, c'est disponible au niveau du ministère, tous ces rapports de direction. Vous pourriez peut-être faire le petit effort...

M. Marx: Je demande une copie maintenant pour avoir la preuve que j'ai fait la demande.

M. Bédard: On peut faire un contrat: vous pouvez faire le petit effort de le demander et on l'analysera ensemble pour être sûrs que vous ne vous trompiez pas.

M. Marx: Votre sous-ministre va m'en envoyer une copie, d'accord!

M. Bédard: D'accord.

M. Marx: Sur cette question, vous avez des études qui sont plus ou moins privées ou plus ou moins publiques. Quels sont les problèmes dans les palais de justice, quels sont les grands problèmes, quelles sont les orientations d'un ministre? Peut-être qu'il n'y a pas de problèmes, donc, pas d'orientations, mais j'aimerais savoir quels sont les problèmes dans les palais de justice. Est-ce que le problème c'est que dans certains palais il y a trop de juges, dans d'autres il n'y en a pas assez? Est-ce que c'est la faute du fédéral qui n'a pas nommé assez de juges à la Cour supérieure? Est-ce qu'on a besoin de plus de juges des cours provinciales. Est-ce que les juges à la Cour provinciale ont assez de travail ces jours-ci? Parce que vous savez qu'il y a beaucoup de litiges qui se trouvent devant la Régie du logement ces jours-ci. J'aimerais savoir quels sont les problèmes.

M. Bédard: Je pense que le premier problème auquel nous sommes confrontés, c'est la question des délais. D'ailleurs, il y a eu un rapport du Barreau de Montréal - je l'ai mentionné tout à l'heure - qui faisait état de l'ensemble des difficultés ou des problèmes auxquels il fallait trouver des solutions. On a donné suite à plusieurs de ces recommandations. Certaines solutions sont en voie d'application parce que c'est nécessaire dans ces cas, avec une consultation et un travail constant entre, d'une part, le ministère de la Justice, les juges en chef, l'ensemble de l'appareil judiciaire et même le barreau, les avocats. Dans ce domaine, pour trouver toutes les solutions, il faut la collaboration de l'ensemble des intervenants du point de vue judiciaire. Alors, en ce qui a trait...

M. Marx: Disons que pour les délais, M. le ministre...

M. Bédard: ... aux délais, par exemple, on en avait parlé l'an passé.

M. Marx: Oui, mais des délais...

M. Bédard: Est-ce que cela vous intéresserait de savoir...

M. Marx: Non, mais je ne veux pas savoir les mois...

M. Bédard: ... qu'il y a eu beaucoup d'amélioration?

M. Marx: Non, mais je ne veux pas savoir les mois et les jours. Ici, c'est trois jours...

M. Bédard: Permettez-moi juste une phrase au moins.

M. Marx: Oui, d'accord.

M. Bédard: Vous en aviez parlé beaucoup l'an passé et je tiens à vous dire qu'il y a eu - je suis en mesure de vous le démontrer - beaucoup d'amélioration au niveau de la chambre criminelle, des procès criminels, des délais dans ce domaine. Je pense qu'on a une situation vraiment très intéressante concernant les délais en ce qui a trait à toutes les cours: de magistrat, la Cour des sessions de la paix. Le problème, comme je l'ai dit tout à l'heure, se situe au niveau de la Cour supérieure du district de Montréal. Là-dessus...

M. Marx: Disons, pour améliorer...

M. Bédard: Nous comptons sur une collaboration qui existe et qui va s'intensifier. Avec les intervenants judiciaires, cela va nous permettre d'améliorer là aussi.

M. Marx: Mais je sais que depuis l'an dernier, quand le député de Chapleau a fait une intervention ici en ce qui concerne les délais au palais de justice de Hull, il y a eu des améliorations. Même à Hull, on dit que, depuis l'intervention du député de Chapleau, on a apporté des améliorations. J'aimerais savoir de quelle façon vous entendez régler les problèmes de délais. Nommer plus de juges, construire d'autres palais de justice? Quelles sont les mesures que vous allez prendre pour améliorer encore la situation?

M. Bédard: Je l'ai déjà mentionné et, d'ailleurs, le rapport du Barreau de Montréal le mentionnait, la solution n'est pas nécessairement dans la nomination de plus de juges. La meilleure preuve en est que...

M. Marx: C'est cela.

M. Bédard: ... on n'en a presque pas nommé. On n'a presque pas fait de nominations additionnelles au cours de l'année qui vient de se terminer et, pourtant, les délais se sont améliorés.

M. Marx: Oui, mais il manque de juges dans certains palais, dans certaines cours.

M. Bédard: À la suite de collaborations que j'ai évoquées dans mon introduction préliminaire des crédits qui ont donné des résultats intéressants... Au niveau de la chambre criminelle, la Cour supérieure, les délais sont pratiquement inexistants puisqu'on peut faire entendre un procès par jury dans les quelques mois qui suivent l'ouverture du terme. Au niveau de la chambre civile, les délais pour le district de Montréal demeurent encore importants et je vous l'ai dit d'ailleurs. On connaît, par exemple, des délais importants au niveau des causes de deux jours. Toutefois, si on fait une moyenne des délais à Montréal par rapport à l'an passé, à partir du certificat d'état de la cause, ce délai était de 26,7 mois en 1980 et il est passé maintenant à 18,5 mois en 1981. Je pense que c'est une amélioration tangible.

Par exemple, à Roberval, on connaissait de longs délais. Ceux-ci sont passés à 15,8 mois en février 1982, ce qui est encore une amélioration. On a connu également des réductions de délais à Sherbrooke et à Hull à la suite de l'action concertée de l'administration des services judiciaires, de la magistrature et du barreau. Il faut que les gens collaborent parce que dans n'importe quel système, quand des gens essaient de le bloquer, c'est évident que...

M. Marx: Le ministre a choisi ces chiffres...

Le Président (M. Desbiens): M. le député de D'Arcy McGee, à l'ordre, s'il vous plaît!

M. Marx: ... je vais choisir une autre cause de nature ordinaire devant la...

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît, M. le député de D'Arcy McGee!

M. Marx: Oui.

Le Président (M. Desbiens): Votre collègue a demandé la parole.

M. Marx: D'accord.

M. Kehoe: Je veux simplement poser une question. Outre la question de collaboration entre les magistrats et les avocats, est-ce qu'il y a eu d'autres facteurs qui ont fait en sorte depuis l'année passée qu'il y a une amélioration nette et précise? Je sais que dans le district judiciaire de Hull il y a une amélioration très nette. D'après ce que vous dites, la même chose se produit partout dans la province, sauf le problème à Montréal, peut-être.

M. Bédard: C'est-à-dire qu'il y a une amélioration à Montréal, mais elle n'est pas encore satisfaisante.

M. Kehoe: Sauf la question de collaboration avec les magistrats et les avocats, est-ce la seule raison pour laquelle on se trouve aujourd'hui avec le rôle où il en est? Pourquoi est-ce que cela ne pouvait pas se faire avant? Depuis des années des avocats et des juges crient que ça peut prendre jusqu'à 24 mois, 30 mois ou 36 mois et depuis l'année dernière...

M. Bédard: Des fois il y a des

messages qui sont... Le problème des délais -soyons de bon compte - n'existe pas depuis que nous sommes là. Depuis cinq ou six ans il a toujours existé. J'ai déjà...

M. Kehoe: Je pense que cela a toujours existé, mais c'est la question que je pose...

M. Bédard: ... suffisamment fait de la pratique pour avoir été à même de le constater. Au moment où on se parle il y a une amélioration parce que je crois qu'on a vraiment réussi à faire naître la véritable collaboration nécessaire entre le barreau, la magistrature et le ministère de la Justice pour trouver des solutions.

M. Kehoe: Quels moyens avez-vous pris pour faire ça? Là où je veux en venir...

M. Bédard: Beaucoup de rencontres.

M. Kehoe: Depuis 20 ans que je suis avocat j'entends...

M. Bédard: Comme vous le dites, cela existe depuis 20 ans.

M. Kehoe: Oui.

M. Bédard: Ne me demandez pas pourquoi, à un moment donné, cela débouche et pourquoi tout le monde a l'air de vouloir...

M. Kehoe: Remarquez bien que ce n'est pas une critique que je fais.

M. Bédard: Non, je sais.

M. Kehoe: C'est une louange que je vous fais. Par contre, il reste que la situation, d'un coup sec, s'est nettement améliorée depuis un an à cause de la collaboration qui n'existait pas il faut le croire auparavant.

M. Bédard: Cette collaboration n'était peut-être pas établie sur des bases aussi fonctionnelles que celles que nous avons maintenant. Nous avons maintenant, d'une façon très fonctionnelle, des rencontres...

M. Kehoe: Est-ce que vous donnez des directives bien spécifiques aux juges, aux avocats ou aux deux? Vous les faites se rencontrer continuellement?

M. Bédard: Je pense que le député sait très bien que cela ne se fait pas par des directives, mais par la sensibilisation de l'ensemble des intervenants. On a discuté des délais lors de l'ouverture des tribunaux et même avant; tout de suite après l'étude des crédits de l'an passé j'ai essayé, chaque fois que j'en ai eu l'occasion, de faire des rencontres avec les intervenants pour les sensibiliser à la nécessité d'améliorer la situation.

M. Kehoe: Je trouve surprenant que dans un délai d'une année, comme cela, tous ont compris qu'il fallait collaborer ensemble contrairement à ce qui se passait auparavant, semble-t-il, si on compare avec les précédents résultats. Je me souviens que l'année passée, quand j'ai posé des questions, la situation était tout autre. D'un coup sec, aujourd'hui, c'est changé. Je vous en félicite, mais je me demande à quoi est attribuable ce changement radical dans l'attitude de la plupart des magistrats ou des avocats qui sont impliqués dans l'administration de la justice. (12 h 30)

M. Bédard: Je vous remercie de vos félicitations, mais je ne m'accorderai pas plus de crédits que je n'en ai droit. Je voyais que c'était une préoccupation de l'Opposition. C'était aussi une préoccupation que j'avais, en fonction des services que les citoyens ont le droit d'avoir à ce que les délais soient le moins longs possible. Je n'ai pas manqué une seule occasion d'essayer de le rappeler aux différents intervenants, que ce soit l'ouverture des tribunaux, que ce soient les rencontres personnelles, que ce soit une institutionnalisation un peu plus rigide des rencontres entre ministère, barreau et représentants des juges. Je crois que c'est peut-être un peu - vous parlez beaucoup d'humanisation de la justice - le résultat d'un changement de mentalité qui arrive, à un moment donné, à la suite d'efforts et de la compréhension de l'ensemble des secteurs concernés.

M. Kehoe: Si je peux comprendre, c'est qu'il n'y aura pas plus de juges cette année, il n'y aura pas plus de salles de justice à la disposition du public. Enfin, il n'y a rien en plus. C'est la même situation, excepté que c'est un changement d'attitude.

M. Bédard: Je le crois. Principalement, c'est sûrement un changement d'attitude et, je dirais, de mentalité. Je vous le disais dans l'introduction. Depuis un an, j'ai vraiment insisté, à toutes les occasions possibles, auprès des fonctionnaires, de ceux qui en ont la responsabilité, j'ai essayé d'avoir les relations les plus harmonieuses possible avec chacun des intervenants, de provoquer des rencontres et de provoquer la réflexion, ce qui fait qu'à un moment donné, ça débouche. Tout le monde en est heureux.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce qu'il y a une dernière question avant l'ajournement?

M. Marx: Une dernière question. M. le

Président, je ne suis pas prêt, à ce moment-ci, à féliciter le ministre pour son travail. On va voir. Je vais rendre publique bientôt une étude intitulée: Les lenteurs de la justice et l'injustice; le rapport n'est pas prêt aujourd'hui, mais je peux en tirer quelques chiffres. Je suis d'accord qu'à Hull...

M. Bédard: Le rapport va peut-être être dépassé, à un moment donné.

M. Marx: Ce ne sera pas dépassé quand vous allez voir...

M. Bédard: Non, parce qu'il y a encore des améliorations à faire à Montréal.

M. Marx: Cela va sortir dans deux semaines. À Hull, c'est vrai qu'il y avait des améliorations après l'intervention du député de Chapleau ici, l'an dernier. On a fait une crise. Et je ne sais pas ce que le ministre a fait pour améliorer la situation, mais cela s'est beaucoup amélioré. Mettons que le ministre a pigé dans ces chiffres pour sortir des chiffres...

M. Bédard: À Hull, à Roberval, à Sherbrooke...

M. Marx: Une minute. On va terminer. Je vais piger dans mes chiffres pour en prendre un aussi. Une cause de nature ordinaire de deux jours, à la chambre civile du district de Montréal, délai d'audition, décembre 1981, 65 mois. Disons que ce n'est pas tellement bon. Je ne vais pas féliciter le ministre pour son travail en ce qui concerne le palais de justice à Montréal. Mes chiffres ne sont pas tous compilés.

M. Bédard: Les fonctionnaires me disent que c'est rendu maintenant à 52 mois.

M. Marx: 52 mois. Moi, j'ai les chiffres de janvier 1982, c'était 63. Peut-être que c'est rendu à 50. Cela monte, ça diminue. Il n'y a pas de lien direct. Cela peut monter...

M. Bédard: II faudrait être sérieux quand même là-dessus.

M. Marx: C'était à 62 mois en janvier 1980. Après ça, c'est monté à 65 mois en décembre. Cela varie.

M. Bédard: Je ne vous ai pas dit que c'est parfait. Je vous ai dit qu'il y avait eu des améliorations tangibles au point où certains de vos collègues ont au moins l'objectivité de le reconnaître. Je vous ai dit aussi que je n'en prenais pas tout le crédit, si c'est ça qui vous inquiète. Au contraire, j'en donnais le crédit à tout l'ensemble de l'appareil administratif, à tous les intervenants, le barreau, le Conseil de la magistrature, le ministère de la Justice. Mais je sais une chose, par exemple, c'est que, depuis un an, j'ai parlé constamment de l'humanisation de la justice, j'ai parlé constamment du problème des délais à l'ouverture même des tribunaux; cela a été une partie de mon intervention. J'ai fait ce qu'un ministre de la Justice doit faire, c'est-à-dire essayer de sensibiliser tous les intervenants, étant bien conscient que, si les gens ne changent pas de mentalité, ne collaborent pas, ces efforts de sensibilisation vont demeurer sans résultat. Or, il arrive que nous avons des résultats. Tout ce que je peux vous dire, c'est que j'en suis très fier, mais pas au point de m'asseoir et de penser qu'il n'y a pas encore d'autres améliorations à faire. On va continuer nos efforts.

M. Marx: Sûrement pas.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'élément 1 est adopté?

M. Marx: Non. On va y revenir.

Le Président (M. Desbiens): La commission élue permanente de la justice ajourne ses travaux sine die.

(Suspension de la séance à 12 h 35)

(Reprise de la séance à 20 h 38)

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, mesdames et messieurs. La commission élue permanente de la justice est réunie pour étudier les crédits budgétaires de l'année 1982-1983.

Les membres de la commission sont: MM. Beaumier (Nicolet), Bédard (Chicoutimi), Boucher (Rivière-du-Loup), Brouillet

(Chauveau), Charbonneau (Verchères), Dauphin (Marquette), Mme Juneau (Johnson), MM. Kehoe (Chapleau), Lafrenière (Ungava), Marx (D'Arcy McGee), Lalonde (Marguerite-Bourgeoys) à la place de M. Paradis (Brome-Missisquoi).

Les intervenants sont: MM. Bisaillon (Sainte-Marie), Bissonnet (Jeanne-Mance), Blank (Saint-Louis), Brassard (Lac-Saint-Jean), Ciaccia (Mont-Royal), Dussault (Châteauguay), Mme Lachapelle (Dorion), MM. Martel (Richelieu) et Pagé (Portneuf).

Je m'excuse, comme membre, il faudrait dire Mme Lachapelle (Dorion) à la place de M. Brouillet (Chauveau).

Nous étions au programme 1, élément 1, et M. le député de D'Arcy McGee avait demandé la parole.

M. Marx: Je pense qu'on avait terminé avec une question. Est-ce que j'ai raison de dire qu'on avait terminé avec une question

ou est-ce qu'on avait terminé avec une réponse? Quoique je n'aie pas eu beaucoup de réponses...

M. Bédard: L'important serait peut-être de recommencer comme le veut le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: J'ai quelques petites questions, peut-être...

Le Président (M. Desbiens): Vous avez dit en terminant que vous aviez d'autres questions.

M. Marx: Le ministre a dit dans sa présentation, ce matin, qu'on avait augmenté le taux légal. Cela a été fait quand, récemment ou en 1978?

M. Bédard: Ce que je puis dire au député de D'Arcy McGee, c'est que je n'ai pas dit dans mon texte d'introduction que nous avions augmenté le taux de l'intérêt légal mais que c'était une mesure additionnelle à envisager, avec toutes les autres que j'ai énumérées à ce moment-là, pour essayer de diminuer encore les délais de cour. Il est évident que si, par exemple, on augmentait le taux légal, par le fait même, on diminuerait peut-être l'intérêt que peuvent avoir des mieux nantis à faire traîner des conflits juridiques sachant qu'en fin de compte, si l'issue est malheureuse, ils sont quand même regagnants, étant donné le taux qui est présentement en vigueur. J'ai ajouté aussi l'augmentation parmi les moyens que nous envisageons à l'heure actuelle pour diminuer les délais; en plus des moyens que nous avons mis en oeuvre, je parlais de l'augmentation de la juridiction de la Cour provinciale, parce que c'est au niveau de la Cour supérieure de Montréal, comme vous le savez, que se situe l'essentiel de nos problèmes, en termes de délais. Je parlais de l'augmentation de la juridiction de la division des petites créances, qui font l'objet d'analyses, de l'élaboration de délais standards d'audience pour chacune des juridictions, de l'augmentation du taux légal et peut-être d'une meilleure utilisation des conférences préparatoires, de manière à n'inscrire que les causes qu'il est vraiment impossible de régler autrement que par des plaidoiries.

M. Marx: En matière délictuelle, le juge peut déjà accorder plus que le taux légal, mais on attend; avec l'inflation qu'on a, je pense que cela ne prendrait pas tellement d'études pour savoir quoi faire. On a déjà cela en matière délictuelle; avoir cela en matière contractuelle, cela ne prendrait pas trop d'études. Je pense que c'est tellement évident.

M. Bédard: Cela ne prend tellement pas d'études du point de vue contractuel vu que c'est déjà appliqué. On essaie de voir...

M. Marx: Cela fait...

M. Bédard: Quand j'ai parlé du taux légal - je pense que le député de D'Arcy McGee le reconnaîtra avec moi - cela se situait à l'intérieur d'un ensemble de mesures que j'ai évoquées.

M. Marx: Oui, mais nous sommes en 1982, maintenant.

M. Bédard: Je ne peux pas tout faire dans un an, M. le Président.

M. Marx: Non, mais il y a...

M. Bédard: On a vu qu'il y avait eu quand même une très belle performance. Tant mieux si elle est allée dans la bonne voie.

M. Marx: Qui a dit cela, M. le ministre? Vous-même, vous-même!

M. Bédard: Votre collègue. Votre collègue même me l'a dit.

M. Marx: Mon collègue a dit cela pour le district de Hull, parce que de plus en plus...

M. Bédard: II l'aurait dit pour d'autres districts, que ce soit Sherbrooke, que ce soit Roberval, parce que les chiffres sont là.

M. Marx: Fantastique!

M. Bédard: Cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas lieu à de l'amélioration, comme je l'ai dit.

M. Marx: C'est fantastique! C'est fantastique, ce que vous faites. Donc, concernant le taux légal, en matière contractuelle, vous pensez déposer un projet de loi d'ici quelle saison? Au printemps, à l'automne, l'an prochain? Quand? Il ne faut pas oublier que l'inflation continue, même si vous n'êtes pas capable de déposer un projet de loi. (20 h 45)

M. Bédard: Le député de D'Arcy McGee comprendra que le ministre de la Justice, ce n'est pas tout le gouvernement non plus. Il y a quand même des lois, comme on le sait, d'une extrême importance qui sont présentement mises de l'avant du point de vue gouvernemental. Mais je peux rappeler au député de D'Arcy McGee que, sur presque l'ensemble des éléments que j'ai mentionnés tantôt et faisant censément l'objet d'une réflexion, on pourrait presque dire que la

réflexion est terminée et qu'avant même la fin de la présente session, j'aurai probablement acheminé déjà un mémoire au Conseil des ministres avec des recommandations bien précises, ce qui nous permettrait de déboucher probablement, au niveau de la législation, à l'automne.

M. Marx: À l'automne.

M. Bédard: Je crois que c'est le rythme le plus rapide qu'on pouvait s'imposer.

M. Marx: Je pense que les réformes proposées ne sont pas des réformes énormes, ce sont des réformes normales; on peut mettre cela dans un projet omnibus. Le ministre, lorsqu'il est poussé et pressé chaque année, trouve la possibilité de mettre pas mal de choses dans ces projets de loi omnibus.

M. Bédard: Cette année encore, il va y avoir pas mal de choses dans un projet de loi omnibus à partir du moment où on peut le déposer et le faire adopter avec la collaboration de l'Opposition.

M. Marx: Toujours.

M. Bédard: Pour autant que cela se situe dans l'ensemble du cadre des priorités gouvernementales dont - le député de D'Arcy McGee en conviendra - il faut tenir compte.

M. Marx: Je trouve que le ministre est une couple d'années en retard avec ces réformes; c'est tout ce que je veux dire. Le ministre est là depuis 1976 et nous sommes en 1982 maintenant; on a fait un ajustement en ce qui concerne la Cour des petites créances et la Cour provinciale, je pense qu'on a fait cela en 1978 avec l'inflation de 10%, 15% par année, je pense qu'il faut...

M. Bédard: Pas en 1968. M. Marx: En 1978.

M. Bédard: En 1978 déjà, j'ai présenté...

M. Marx: Donc, c'est quatre ans en arrière.

M. Bédard: ... des lois pour augmenter la juridiction de la Cour provinciale. Lorsque je l'ai fait, cela aurait dû être fait depuis longtemps, cela aurait peut-être aidé. Quand même, je pense qu'on va à un rythme, si je me compte... Quand on se regarde, on peut se désoler, mais je vous jure que lorsqu'on se compare, on se console sans se convaincre, par exemple, je tiens à le dire, qu'il n'y a pas d'amélioration supplémentaire à apporter, parce que le problème des délais, votre collègue et vous-même le disiez tantôt, c'est un problème qui remonte à dix, quinze ans et personne n'a trouvé des solutions miracles. Pour une fois, enfin, on a au moins des résultats encourageants et on va continuer dans le même sens.

M. Marx: J'ai une autre question. J'aimerais savoir si, comment dirais-je, tout bref en matière civile... On a parlé des ordinateurs, on a des ordinateurs à Québec, tout est informatisé à Québec et à Montréal, est-ce que tout bref d'introduction d'instance...

M. Bédard: ... d'informatisation.

M. Marx: Est-ce que tout bref d'introduction d'instance se trouve dans la banque de l'ordinateur?

M. Bédard: Sur ce point technique, vous me permettrez de demander peut-être... On a les grades informatisés, ceux qu'on a mentionnés justement dans le discours du ministre, Montréal, Saint-Jérôme, Québec, Rivière-du-Loup et Joliette sont informatisés, c'est-à-dire qu'ils font partie des banques de données.

M. Marx: Chaque bref se trouve quelque part; est-ce qu'il se trouve sur la banque de l'ordinateur?

M. Bédard: La banque de données, oui.

M. Marx: II n'y a jamais de bref d'introduction d'instance qui passent à côté?

M. Bédard: Non, parce qu'il faut leur assigner un numéro. Or, la seule façon, c'est qu'ils soient traités par l'ordinateur.

M. Marx: Cela est sûr et certain.

M. Bédard: Oui. Il peut bien y avoir des erreurs, c'est évident, mais...

M. Marx: Des erreurs.

M. Bédard: La règle, c'est celle-là, et je ne vois pas comment il pourrait avoir un numéro, s'il ne passe pas par le système d'ordinateur. Il me semble que s'il manquait un numéro à un moment donné, je me permets de le dire, on pourrait tout au moins corriger l'erreur à la main. On en émet 100 000 par année, vous savez, c'est bien possible.

M. Marx: M. le ministre, vous êtes lié par sa réponse; c'est cela? D'accord. C'est cela. Donc, tout se trouve toujours dans la banque de l'ordinateur.

M. Bédard: Comme vient de le dire

mon sous-ministre responsable de ce secteur, il peut y avoir des erreurs, mais il est clair que, justement à cause de l'informatisation, ces erreurs peuvent être corrigées très rapidement.

M. Marx: D'accord.

Le Président (M. Desbiens): L'élément 1 est-il adopté?

M. Marx: Non, pas encore.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Est-ce qu'on va aborder le dossier des bureaux d'enregistrement? Est-ce que c'est de la compétence...

M.. Bédard: C'est au programme 7.

M,. Marx: C'est au programme 7. Je vais marquer 7 ici. On ne veut pas l'oublier.

M. Bédard: D'ailleurs, je peux m'engager à vous y faire penser. Cela m'intéresse que vous abordiez ce sujet.

M. Marx: D'accord. On aimerait avoir une réponse claire sur la fermeture des bureaux d'enregistrement. Il y a des gens qui ne sont pas sûrs...

Le Président (M. Desbiens): C'est au programme 7, cela.

M. Bédard: J'essaierai d'être aussi clair qu'il m'est permis de l'être au moment où on s'en parlera.

Palais de justice

M. Marx: D'accord, parfait. En ce qui concerne les palais de justice, est-ce que le ministre a des projets, des plans? Peut-il nous donner une idée? Quelles sont les réformes qu'il va entreprendre cette année, ou si tout fonctionne bien et qu'il n'y a pas de réforme à entreprendre?

M. Bédard: J'aimerais bien que... Une question générale comme celle-là peut aller dans toutes les directions...

M. Marx: Prenez n'importe quelle direction.

M. Bédard: Je n'aime pas tellement prendre n'importe quelle direction. Je veux savoir exactement dans quelle direction je vais ou veut aller mon vis-à-vis. J'aimerais bien qu'il me pose une question plus précise et je vais essayer d'y répondre. Les palais de justice sont là. Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise?

M. Marx: Cela va continuer...

M. Bédard: Les juges essaient de faire leur travail le mieux possible. Nous avons trouvé le moyen, dans un but d'humanisation de la justice, de faire en sorte que nos palais de justice soient mieux organisés au niveau de la réception de la clientèle, mieux informés. Il y a également une série de moyens qui ne coûtent rien, mais qui, humainement, permettent d'une façon générale - en tout cas, c'est notre préoccupation - de faire en sorte que le citoyen soit de moins en moins traumatisé par sa visite au palais de justice, qu'il sente très clairement qu'un palais de justice, c'est une maison qui lui appartient, qui est capable de lui rendre des services autres que ceux reliés uniquement à des conflits juridiques. On essaie de faire en sorte que soient disponibles le plus possible dans les palais de justice les renseignements auxquels les citoyens pourraient être intéressés.

M. Marx: Si je comprends bien, le ministre voit deux problèmes dans les palais de justice. Le premier problème, c'est qu'il n'y a plus de comptoir avec des brochures, des bulletins pour les citoyens. C'est un problème qu'il nous dit avoir déjà réglé. L'autre problème qu'il voit, c'est le problème des délais. Il nous a proposé un certain nombre de solutions, le cas échéant. N'y a-t-il pas d'autres problèmes dans les palais de justice?

M. Bédard: D'une façon ou de l'autre, le député de D'Arcy McGee me permet d'aller dans toutes les directions, mais, tout en espérant aller dans celle qui l'intéresse, quand on parle de palais de justice, on peut parler de construction de palais de justice.

M. Marx: Avez-vous l'intention de construire de nouveaux palais de justice quelque part au Québec?

M. Bédard: Si le député de D'Arcy McGee a l'occasion de faire le tour du Québec, comme il l'a fait dans un autre secteur, il sera à même de constater que beaucoup d'argent a été investi dans les différents secteurs, que ce soit le correctionnel, que ce soit au niveau de la construction de palais de justice, de la construction de postes de la Sûreté du Québec, au niveau de l'ensemble des équipements de justice. Si on parle des palais de justice d'une façon spéciale, comme vous le savez, il y a présentement en construction le palais de justice de Québec, également le palais de justice d'Alma, au Saguenay-Lac-Saint-Jean. Il est presque terminé au moment où on se parle. Il y a également Shawinigan où les travaux sont commencés. Il y a eu beaucoup d'investissements. Si vous me le

permettez, très rapidement, peut-être un petit peu par comparaison, je pourrais vous donner une idée assez précise.

M. Marx: Est-ce que le ministre a l'intention de construire un palais de justice à Longueuil cette année? Cela a déjà été promis par le premier ministre lui-même.

M. Bédard: Ce qui a été...

M. Marx: Donc, cela va passer vite au Conseil des ministres. À Longueuil, à Sherbrooke.

M. Bédard: À Longueuil, vous êtes au courant qu'il y a déjà eu des améliorations. Des sommes ont été consacrées à l'amélioration de ce qui existe déjà. Il y a également un programme de besoins qui a été transmis, au moment où on se parle, au ministère des Travaux publics et de l'Approvisionnement. C'est la même chose concernant Sherbrooke. Je peux même aller plus loin. Dans le cas de Sherbrooke, le programme de besoins est accepté. Alors, comme on peut le voir, concernant la construction des palais de justice, cela bouge dans l'ensemble du territoire du Québec.

M. Marx: Mais...

M. Bédard: Une seconde. Je voudrais avoir...

M. Marx: Parfait.

M. Bédard: Le règlement des plans d'aménagement d'importance qui sont pensés pour... On n'est pas en train de passer au feu, mais c'est l'inondation ici. Il y a des plans d'aménagement également pour Roberval, Saint-Jean et...

M. Marx: La circonscription du ministre ou la voisine.

M. Bédard: Non, Rivière-du-Loup, ce n'est pas dans mon comté.

M. Marx: Non. D'accord.

M. Bédard: Je ne peux pas être partout à la fois. Il y a Roberval, Saint-Jean. Il y en a eu également à Chicoutimi et qui sont d'importance, à Rivière-du-Loup. Maintenant, si vous me le permettez, je vais vous...

M. Marx: J'aimerais savoir si c'est pour cette année à Longueuil et Sherbrooke. Est-ce que c'est pour cette année ou si ce n'est pas pour cette année?

M. Bédard: Si vous me demandez si cela va être complètement construit, si cela va être...

M. Marx: Est-ce que cela va être commencé cette année?

M. Bédard: Tout ce que je peux dire, c'est que, pour Sherbrooke, les professionnels sont engagés, mais je ne peux pas m'avancer plus présentement. Une chose est certaine: on va essayer d'y mettre la pression la plus forte possible, en tenant compte du contexte que vous connaissez autant que moi.

Si on parle des immobilisations, disons que, depuis 1976-1977, donc depuis que je suis là, le ministère a investi 84 500 000 $ pour des constructions nouvelles, soit des palais de justice, des établissements de détention, des postes de la Sûreté du Québec. De plus, des investissements de l'ordre de 20 000 000 $ en réaménagement ont été faits dans les trois réseaux.

Lorsque nous sommes arrivés en 1976 -je le dis sans faire de politique - il a fallu établir des priorités parce que, honnêtement, il y avait un abandon, je dirais, presque total de ce que j'appellerais l'amélioration des équipements de l'ensemble du secteur de la justice, que ce soit à la Sûreté du Québec, dans les palais de justice ou dans les établissements de détention. Alors, on a établi des priorités. On a commencé par les édifices où le grand public est appelé à circuler quotidiennement, soit les palais de justice; 35 000 000 $ ont été investis à ce jour et une quarantaine d'autres millions de dollars seront investis pour terminer le palais de justice de Québec et réaliser également celui de Sherbrooke.

À titre de comparaison - cela vous intéresse et cela ne vous implique pas, M. le député de D'Arcy McGee, vous n'étiez pas là - dans la même période, alors que nous avons, durant quatre à cinq ans, investi au moins 35 000 000 $, le gouvernement du Parti libéral n'avait investi que 14 000 000 $ entre 1972 et 1976.

Dans le domaine de la construction de prisons, 7 000 000 $ ont été investis. Je dirais que - Trois-Rivières, je ne le mets pas dans l'addition - c'est clair que, à Trois-Rivières et Sherbrooke, il va falloir que cela se fasse. Cela peut représenter à peu près 25 000 000 $. (21 heures)

M. Marx: Oui, mais la détention, c'est dans un autre programme. Je ne veux pas mêler les programmes.

M. Bédard: Je vous donne l'ensemble des investissements.

M. Marx: Je ne veux pas mêler les programmes. On va arriver aux prisons.

M. Bédard: Très rapidement, il y a eu 7 000 000 $ dans la construction des prisons. À titre de comparaison, le gouvernement du Parti libéral a investi

2 500 000 $ entre 1972 et 1976. On peut facilement soutenir la comparaison.

M. Marx: De 1970 à 1976, est-ce que ça change quelque chose?

M. Bédard: De 1972 à 1976, je prends la même période.

M. Marx: Supposons de 1970 à...

M. Bédard: II ne faut pas remonter 20 ans en arrière. Je mettrais la même période.

M. Marx: De 1970 à 1976. Pourquoi 1972? Commençons en 1970.

M. Bédard: Parce que c'est sur une période à peu près.

M. Marx: C'est parce qu'en 1970, on a construit Parthenais?

M. Bédard: C'est parce que je fais des comparaisons sur une même période pour les postes de la Sûreté du Québec. Il y a environ 40 000 000 $ qui ont été investis pour reconstruire des postes de la Sûreté du Québec qui étaient dans un état plus que lamentable.

M. Marx: Vous êtes au pouvoir depuis déjà six ans. On va commencer en 1970-1976.

M. Bédard: À titre de comparaison... Non, c'est déjà fait cela. Je ne vous parle pas des autres investissements que je viens d'évoquer tout à l'heure. J'en ai évoqué pour plusieurs dizaines de millions. Au niveau de la Sûreté du Québec, 40 000 000 $ qui ont été investis pour construire, non pas des projets, mais pour construire.

À titre de comparaison, le gouvernement du Parti libéral n'avait investi que 3 000 000 $ entre 1972 et 1976. Dans le domaine des investissements, je peux vous dire honnêtement, tel que je le pense et tel que je l'ai constaté, qu'il n'y avait pratiquement pas d'investissements qui se faisaient pour améliorer les équipements du secteur de la justice. Je crois pouvoir dire que, par comparaison, nous y avons mis les bouchées doubles et triples dans certains domaines.

M. Marx: C'est parfait. Vous avez l'occasion de vous féliciter.

M. Bédard: Bien! Je ne nous félicite pas, je vous fais des comparaisons.

M. Marx: Oui. Si vous faites des comparaisons...

M. Bédard: Ce n'est pas ma faute si elles sont avantageuses, je sais que vous allez m'en trouver suffisamment qui ne seront pas avantageuses.

M. Marx: Si vous voulez faire une comparaison, en toute logique, vous êtes ministre depuis 1976 jusqu'à maintenant. Cela fait six ans. Donc, si vous voulez faire une comparaison, faites une comparaison de 1970 à 1976.

M. Bédard: J'ai déjà une petite correction dans vos chiffres, parce que vous avez tendance vraiment à ne pas voir les nuances. 1976, je crois que c'est au mois de novembre 1976. Il restait un mois, et j'ai été nommé à ce poste.

M. Marx: Novembre. D'accord.

M. Bédard: ... à peu près 15 jours après.

M. Marx: Faites des comparaisons...

M. Bédard: ... si je me rappelle bien, ne me demandez pas de comptabiliser 1976.

M. Marx: ... vous faites des comparaisons de trois ans et demi à cinq ans et demi. De toute façon, on ne va pas...

M. Bédard: De toute façon, on voit qu'il y a de l'ordre!

M. Marx: Est-ce que le ministre ne voit pas d'autres problèmes que l'information et des délais au palais de justice? Est-ce que c'est ça, parce que je vais vous dire tout de suite que j'ai l'intention de faire une tournée des palais de justice au Québec, je vais commencer bientôt et je sais que vous n'avez pas le temps de faire ça.

M. Bédard: Je vais en informer le réseau et ça va peut-être l'aider.

M. Marx: C'est ça, informez le réseau pour que j'aie la collaboration habituelle des fonctionnaires...

M. Bédard: ... comme vous l'avez eue pour votre rapport.

M. Marx: ... et que le moins possible soit caché. C'est ça. J'aimerais que le ministre me dise s'il ne voit pas d'autres problèmes. Si c'est seulement l'information et des délais, je me demande si cela vaut la peine de visiter les palais de justice s'il n'y a pas d'autres problèmes.

M. Bédard: On l'a dit et je l'ai dit tout à l'heure. Dans certains cas, il y a des constructions qui sont nécessaires. Dans d'autres cas, il y a des réaménagements qui

sont nécessaires.

M. Marx: Des problèmes structurels dans les palais de justice.

M. Bédard: Je vous en ai mentionné.

M. Marx: L'efficacité. Est-ce que c'est efficace au Québec? Est-ce que c'est plus efficace que dans l'Ontario? Moins efficace? Vous avez fait des études. Ce matin, votre sous-ministre a dit que...

M. Bédard: On réfléchit. Dès que vous entendez le mot "étude", vous pensez tout de suite qu'il y a des grandes écritures et tout ce que vous voudrez. On réfléchit au ministère de la Justice.

M. Marx: Le sous-ministre a dit ce matin qu'on a fait des études sur la productivité. J'aimerais savoir ce que cela a donné. Est-ce que c'est plus productif ici qu'ailleurs, ou moins? Est-ce qu'on est dans la moyenne canadienne ou quoi? Pourquoi fait-on ces études sur la productivité?

M. Bédard: C'est normal. C'est comme si vous demandiez si les fonctionnaires continuent et si le ministre continue à réfléchir, si j'ai des améliorations à apporter à l'ensemble du domaine de l'administration de la justice. Je vais vous dire: Oui, c'est évident, on y réfléchit tous les jours, je dirais à toutes les heures de la journée.

M. Marx: Quelles sont les améliorations que vous pensez qui sont évoquées, étant donné vos études sur la productivité?

M. Bédard: Je vous ai donné dans mon texte d'introduction, vous l'avez vous-même mentionné, une série de réalisations qui ont été faites au cours de l'année. C'est sûr qu'il y a peut-être d'autres problèmes qui peuvent exister dans le sens de la question que vous nous posez en ce qui a trait à la productivité. C'est que tous nos efforts sont orientés dans le sens d'essayer d'augmenter la qualité de la justice, la productivité de tous les intervenants, les juges, les fonctionnaires, etc.

M. Marx: Mais...

M. Bédard: ... malgré les compressions budgétaires et même...

M. Marx: Productivité des juges, qu'est-ce que vous entendez faire?

M. Bédard: Je dirais même...

M. Marx: Est-ce que les juges vont siéger l'été, est-ce qu'ils vont rendre plus de jugements sur le banc? Qu'est-ce que vous entendez faire?

M. Bédard: Malgré les compressions budgétaires que nous avons exercées comme tous les autres ministères, je pense pouvoir dire que nous n'avons pas diminué la qualité des services rendus à la population. La conséquence de tout cela est sûrement une augmentation de la productivité des gens qui sont concernés. On l'a vu dans le domaine des délais, en fait dans le domaine des réalisations, que ce soit au niveau de l'informatisation, au niveau des constructions, etc. Nos efforts vont continuer dans ce sens.

Aussi, une autre préoccupation que nous avons, c'est une meilleure répartition peut-être des effectifs sur l'ensemble du territoire, de manière à pouvoir parler de justice la plus égale possible pour tous les citoyens.

M. Marx: Je peux vous donner beaucoup d'exemples, M. le ministre, où il y a trop de juges dans un palais de justice et pas assez dans un autre. Dans un palais, les juges attendent les causes, dans l'autre, ils ont trop de causes mais je vais vous faire part de cela dans environ deux semaines.

M. Bédard: Mais cela, n'importe quel temps...

M. Marx: Cela, ce n'est pas important.

M. Bédard: Mais non, je ne vous ai pas dit que ce n'était pas important; au contraire, je vous ai dit que si vous vouliez faire une tournée, on vous aiderait comme on l'a fait pour votre rapport sur la détention. Cela me fait plaisir; tout ce qui peut améliorer l'administration de la justice, tant mieux.

M. Marx: Mais sur la...

M. Bédard: Si vous avez des exemples précis, c'est peut-être de nous les fournir. Je vais essayer de vous donner peut-être, à ce moment, plus d'explications sur...

M. Marx: D'accord, je vais les fournir dans dix jours parce que je ne peux pas les fournir maintenant.

M. Bédard: Si tout est conditionné par votre rapport, moi, l'administration de la justice, c'est à tous les jours. Alors, quand il y a en plus des problèmes...

M. Marx: Cela a attendu déjà six ans, cela peut attendre dix jours de plus.

M. Bédard: Non, non mais...

M. Marx: Mais vous avez soulevé le problème de...

M. Bédard: ... tous les jours, quand il y a un problème qui est soulevé...

M. Marx: ... la productivité des juges. J'imagine que l'étude que le...

M. Bédard: Pas seulement des juges, des fonctionnaires aussi et du ministre. Il faut les mettre tous ensemble, étant donné le contexte dans lequel on vit, les restrictions budgétaires, tout cela, il faut mettre les bouchées doubles. C'est le message que j'ai donné à tout le monde.

M. Marx: Laissez-moi poser la question avant de répondre.

M. Bédard: D'accord.

M. Marx: Avant que vous me répondiez, j'aimerais poser la question. Sur la productivité des juges, vous avez fait des études sur la productivité au palais de justice y compris les juges, les fonctionnaires et ainsi de suite. Qu'est-ce que vous avez l'intention de faire pour rendre les juges plus productifs? Est-ce que vous avez des projets, est-ce que vous avez des plans?

M. Bédard: Vous devez savoir, étant donné quand même les responsabilités très précises des juges en chef que, quand on parle de la productivité des juges, on parle d'une responsabilité qui, vous le savez, est assumée en très grande partie par le travail des juges en chef. C'est évident, comme nous avons une bonne collaboration de la part des juges en chef, quand nous avons des situations qui nous semblent devoir exiger des renseignements, des explications, nous nous faisons un devoir de demander les informations nécessaires auprès des juges en chef qui ont une bonne responsabilité.

M, Marx: Je peux vous poser une question plus précise, si elle n'était pas assez précise.

Par exemple, allez-vous donner suite à certaines recommandations qu'on trouve dans le rapport Deschênes? Le juge en chef Deschênes a fait un rapport intitulé: "Maîtres chez nous". C'est Lesage, je pense, que c'est le même titre. Quel est le titre de ce rapport, le sous-ministre doit être au courant? "Maîtres chez nous"? "Maîtres chez eux", je m'excuse. Est-ce que le ministre a l'intention de donner suite à certaines recommandations qui se trouvent dans ce rapport?

M. Bédard: II est examiné à l'heure actuelle.

M. Marx: Mais le rapport date déjà d'un an et demi; on va l'examiner jusqu'à quand?

M. Bédard: L'autonomie administrative des juges, puis-je vous rappeler que cela fait peut-être 20 ou 25 ans que c'est un sujet qui est évoqué? Je voudrais, par exemple, vous rappeler une chose, c'est qu'avant même, et je pense que c'est la meilleure preuve de l'intérêt que nous avions concernant ce sujet... Il faudrait toujours se rappeler qu'avant que ne commence le travail de M. le juge en chef Deschênes, le travail était commencé au niveau du ministère de la Justice. Il y avait même un comité qui avait été mis sur pied pour analyser l'ensemble du problème de l'autonomie administrative des juges. Ce qui veut dire que nous avions cette préoccupation avant même que le fédéral...

M. Marx: Je suis heureux d'apprendre que vos fonctionnaires ont eu cette préoccupation avant les juges. Mais est-ce que ce comité a produit un rapport ou étaient-ce juste des discussions?

M. Bédard: C'est-à-dire qu'à partir du moment où il y a eu, comme on le sait, le travail entrepris par M. le juge en chef Deschênes, je pense que vous conviendrez avec moi qu'il était opportun de diminuer d'intensité en attendant le résultat de cette étude; toutefois, M. le sous-ministre me dit qu'il y a un rapport qui a été produit par le ministère et déposé au comité des juges.

M. Marx: Est-ce que l'Opposition a droit aussi à une copie? Est-ce que le sous-ministre peut m'envoyer une copie? Pouvez-vous le lui demander, M. le ministre?

M. Bédard: C'est un rapport qui expose la problématique et qui fait l'objet de discussions avec les juges en chef, et je pense que cela doit se situer à ce niveau-là au moment où on se parle.

M. Marx: Je peux être assermenté selon quoi je ne vais pas divulguer de secrets le cas échéant.

M. Bédard: Je ne voudrais jamais me faire accuser d'empêcher mon critique de l'Opposition de parler par des engagements qu'il prendrait qui seraient irréfléchis.

M. Marx: Donc, je ne peux pas avoir copie de ce rapport.

M. Bédard: À l'heure actuelle, cela fait, je crois, l'objet de discussions au niveau où cela doit être fait.

M. Marx: Cela a été préparé en quelle année?

M. Bédard: L'année passée. Cela est sorti d'ailleurs avant le rapport Deschênes.

M. Marx: C'est sorti, cela veut dire que cela a été envoyé...

M. Bédard: Cela a été remis au juge en chef avant le...

M. Marx: Est-ce que le juge en chef en a reçu une copie?

M. Bédard: Le 26 juin, pour être plus précis. Alors, cela vous montre que c'est un sujet de préoccupation chez nous.

M. Marx: Est-ce que le juge en chef en a reçu une copie avant qu'il ait publié son rapport?

M. Bédard: Oui.

M. Marx: Le juge en chef en a reçu une copie.

M. Bédard: Normalement, puisque... Je voudrais que cela soit clair, quand on parle des juges en chef, cela comprend non seulement les juges en chef nommés par le Québec, mais également les juges en chef de la Cour supérieure et de la Cour d'appel. D'ailleurs, nous avons, j'en ai parlé dans mon exposé préliminaire, une excellente collaboration de la part de M. le juge en chef de la Cour d'appel, qui est également préoccupé par la question des délais. Je dois dire que la collaboration a donné comme résultat la possibilité d'y aller d'amendements législatifs qui, à mon sens, seraient susceptibles d'améliorer encore la situation.

M. Marx: Donc, si je comprends bien tout cela, pour résumer, l'autonomie administrative des juges, c'est quelque chose qui est sous étude depuis un an, un an et demi...

M. Bédard: C'est-à-dire que cela fait l'objet de discussions à l'heure actuelle entre le ministère de la Justice et le comité des juges.

M. Marx: Si vous pensez...

M. Bédard: Le comité des juges en chef.

M. Marx: Est-ce que j'ai raison de dire que vous trouvez qu'il y a un problème d'administration dans les palais de justice que vous pensez peut-être régler en donnant l'autonomie administrative aux juges, ou par une autre amélioration ou une autre grande réforme? (21 h 15)

M. Bédard: Je ne voudrais pas conclure avant que l'ensemble des discussions ne soit terminé, mais selon ce qu'on me dit au niveau de ce comité du ministère de la Justice, le comité du support administratif aux tribunaux va entrer vraiment dans le coeur du sujet à partir de la prochaine réunion.

M. Marx: J'espère qu'un jour, tout cela va sortir.

M. Bédard: Je dirais: J'espère qu'un jour tout cela va aboutir et...

M. Marx: Oui, mais il faut que cela sorte avant d'aboutir.

M. Bédard: Pas nécessairement. M. Marx: Non, bon!

M. Bédard: Dans le sens de toutes mes législations, cela n'a jamais sorti, mais cela a abouti.

M. Marx: Dans certains palais de justice, il y a même un problème au niveau du secrétariat; les juges doivent se partager les secrétaires. Il y a toutes sortes de problèmes en ce moment dans les palais de justice qui empêchent vraiment souvent les juges de travailler d'une façon efficace.

M. Bédard: Comme vous le savez, chacun des ministères est astreint à une compression au niveau du personnel. Pour ce qui est des secrétaires des juges, je dois dire que nous avons fait beaucoup de chemin.

M. Marx: Dans quel sens?

M. Bédard: J'ai été en mesure de vous dire ce matin que, en fait, l'ensemble de la collaboration qu'il y a eue entre les juges en chef et le ministère de la Justice débouche sur un résultat, je crois, intéressant, dans ce domaine, puisque l'on en est venu à une meilleure rationalisation de l'utilisation du personnel. Ce dossier, comme vous pouvez le deviner, est quand même assez délicat et a été traité avec beaucoup de tact par mon sous-ministre en titre, M. Jacoby, qui pourrait peut-être ajouter quelques observations.

C'est une des raisons pour lesquelles, en passant, on n'a pas pu aborder et compléter nos réflexions et nos études sur la décentralisation possible, sur le plan administratif, de l'autonomie des tribunaux. C'est un dossier concernant tout le problème des effectifs des services judiciaires qui seront rattachés directement aux officiers de justice ou à la magistrature. Il y avait des questions d'augmentation de la productivité, d'une meilleure intégration des services, d'une meilleure coordination des services; tout ceci a débouché après plusieurs mois de discussions sur un protocole d'entente

intervenu entre tous les juges en chef du Québec et le ministère de la Justice quant à une meilleure répartition des tâches à l'intérieur des services judiciaires dans les palais de justice, ce qui fait que, dans l'ensemble, cela s'est traduit par une augmentation de la productivité du personnel des greffes. Les secrétaires des juges, même si elles sont rattachées de facto directement aux juges, font partie du personnel des greffes. Je pense que tout s'est fait sur une base volontaire, sans mettre en péril le principe de l'indépendance de la magistrature. Il est certain que, dans les petits districts judiciaires, certains juges doivent se partager les services des secrétaires. Il y a un certain pool, mais c'est vraiment exceptionnel.

M. Marx: Pas à Montréal?

M. Bédard: Non, pas à Montréal.

M. Marx: Pas à Montréal.

M. Bédard: Pas à Montréal, absolument pas. Dans l'ensemble, c'est sûr que cela a provoqué certains changements dans les habitudes de travail, mais dans l'ensemble, tout le monde est satisfait et je pense que c'est de bon augure, cette collaboration entre la magistrature et le ministère de la Justice. Je pense qu'il n'y a plus de problème, sauf peut-être des problèmes ponctuels à court terme, mais des cas spéciaux, il y en a toujours.

Je remercie M. Jacoby. Je sais qu'il reste toujours quelques problèmes, mais on les règle à mesure qu'ils se présentent.

M. Marx: J'aimerais lui poser d'autres questions, mais je n'ose pas.

M. Bédard: Osez, je vous en prie.

M. Marx: Cela pourrait être embarrassant pour moi et pour vous, peut-être.

Je vois qu'il y a maintenant trois problèmes.

M. Bédard: Vous comprendrez que je ne comprends pas ce que vous voulez dire, alors...

M. Marx: II y a maintenant trois problèmes dans les palais de justice: l'information, les délais et, maintenant, toute la question de l'administration, de la productivité...

M. Bédard: Vous êtes en train de faire le canevas de votre prochain rapport.

M. Marx: ... où le sous-ministre a dit qu'on a fait des améliorations, mais qu'il y a encore place pour beaucoup d'autres améliorations.

M. Bédard: Je l'ai dit à plusieurs reprises.

M. Marx: Oui, mais est-ce que vous pouvez me donner, comment dirais-je? des améliorations précises que vous entendez faire?

M. Bédard: Des indications pour vos réflexions en fonction de votre rapport. Cela me ferait plaisir.

M. Marx: C'est cela. Non, mais je pense que la population serait heureuse d'apprendre...

M. Bédard: Je pense avoir fait pas mal le tour, avoir fait le portrait de l'ensemble des préoccupations que nous avons.

M. Marx: Je pense qu'il y a un problème de productivité et vous ne m'avez pas donné de réponse.

M. Bédard: Mais oui, je vous...

M. Marx: On travaille bien ensemble ça et là, je pense qu'il y a tellement de choses qui marchent mal dans les palais de justice, c'est incroyable.

M. Bédard: Mais oui...

M. Marx: Allez parler aux gens qui travaillent dans les palais de justice, vos fonctionnaires, c'est incroyable, les problèmes à Montréal, c'est incroyable, M. le ministre.

M. Bédard: Non, vous poussez.

M. Marx: C'est incroyable. Allez parler aux fonctionnaires qui font le travail chaque jour, les problèmes...

M. Bédard: Là, vous me faites penser à un potineux qui se promène dans les corridors, qui ramasse tout ce qu'il y a de rumeurs et tout ce que... C'est cela, c'est exactement ce que vous faites, je vous demande d'être plus attentif à ce que je vous dis. On est ici pour vous répondre, avec tous mes fonctionnaires ici présents, les principaux; si vous avez des cas, dites-les donc; si vous avez des situations, explicitez-les et cela va me faire plaisir d'essayer de vous dire que vous avez raison dans certains cas, que vous avez tort dans d'autres cas, que peut-être il faudra apporter des nuances dans d'autres cas ou encore des nuances à ce que vous avancez, mais avancez quelque chose, arrêtez de potiner.

M. Marx: Les questions, M. le ministre,

ne sont pas adressées à vos fonctionnaires.

M. Bédard: Non, elles me sont adressées à moi.

M. Marx: Elles vous sont adressées à vous.

M. Bédard: Ce que je vous dis...

M. Marx: Je n'ai pas à demander aux fonctionnaires de défendre leurs politiques, peut-être ont-ils de bonnes politiques administratives auxquelles vous ne donnez jamais de suite politique; c'est cela le problème.

M. Bédard: Cela fait six ans que je suis au ministère de la Justice, et, j'en conviens, j'ai une équipe formidable qui m'entoure, j'essaie de l'améliorer chaque année...

M. Marx: Cela est impossible.

M. Bédard: ... par des additions, lorsque cela est nécessaire. Il y en a nécessairement qui doivent partir pour occuper d'autres responsabilités; je vois justement en face de moi M. Gauthier, qui était sous-ministre à la détention; il est parti pour occuper un autre poste qu'il remplit avec beaucoup de professionnalisme. C'est évident qu'à ce moment-là il y a remplacement par des énergies très valables. Entre autres dans le temps, c'était M... Enfin, je ne commencerai pas à faire des personnalités plus que ce n'est besoin.

Je peux vous dire que je travaille avec cette équipe-là, qui est dynamique, qui est progressive. Si vos prétentions que le ministre est toujours réfractaire à ce qui peut lui être proposé avaient le moindre fondement, vous savez très bien que cela ferait longtemps qu'il y aurait eu des éclats au niveau du ministère de la Justice. Ceci ne s'est pas produit, depuis six ans, parce que, dès le départ, j'ai accepté de travailler en collaboration avec l'ensemble des hauts fonctionnaires. J'ai tenu pour acquis que je n'étais pas un expert dans tous les domaines de l'administration de la justice et vous auriez peut-être avantage à en faire autant à certains moments. Cette collaboration-là...

M. Marx: Ce n'est pas difficile.

M. Bédard: ... est très ouverte, elle est basée sur la confiance mutuelle, avec une même préoccupation qui est l'amélioration de la justice le plus possible, tout en étant conscient qu'on ne fait pas toujours tout ce qu'on veut. Je crois que cela a donné des résultats intéressants à tous les points de vue, tant sur le plan législatif qu'administratif. C'est tout.

M. Marx: Merci, M. le ministre, je n'ai pas appris beaucoup, mais...

M. Bédard: Vous avez appris une chose, c'est que je travaille solidairement...

M. Marx: ... vous avez évité de...

M. Bédard: ... avec l'ensemble de mes fonctionnaires, et je pense qu'on est sur la même longueur d'onde au niveau de notre désir d'amener des améliorations. Lorsque vous me dites en potinant, etc., toutes sortes de choses, je vous demande juste d'être sérieux; présentez-moi des situations très précises et je vais m'empresser de vous répondre.

M. Marx: II y a toutes sortes de situations que je veux vous apporter.

M. Bédard: Gardez cela pour votre volume et pour votre rapport...

M. Marx: Allez parler...

M. Bédard: ... sur la correctionnelle, on vous corrigera tout de suite au niveau de l'interprétation des...

M. Marx: Après cela, vous allez dire que c'est votre idée.

M. Bédard: C'est clair, vous le savez à part cela.

M. Marx: Je vous ai posé un problème, je n'ai pas...

M. Bédard: Vous pouvez bien rougir lorsque vous le dites.

M. Marx: J'ai dit que, dans certains palais de justice, il y a trop de juges et qu'il en manque dans d'autres...

M. Bédard: Je viens juste de vous dire que c'est un des champs de réflexion qu'on a au niveau de l'administration. On est conscient que...

M. Marx: Avez-vous déjà pensé à faire siéger certaines cours le soir? Vous n'avez jamais pensé à cela? Avez-vous déjà pensé à faire siéger les cours durant le mois de juillet? Les palais de justice sont climatisés ces jours-ci.

M. Bédard: On a déjà pensé à faire siéger... On a déjà évoqué l'idée...

M. Marx: Le ministre Choquette avait pensé à cela pour la Cour des petites créances.

M. Bédard: Oui, il y a pensé, mais il

ne l'a pas fait. Après cela, j'ai l'impression...

M. Marx: II vous a laissé les réformes. C'est cela, le problème. Avez-vous des idées, M. le ministre...

M. Bédard: Non, on s'en est rendu compte. À la Cour des petites créances, à l'heure actuelle, si on regarde l'ensemble de la situation des délais dans l'ensemble du Québec, c'est très bon. Les délais sont vraiment plus que raisonnables. Vous êtes en train de me demander... Je voudrais bien que ce soit ainsi, une justice qui fait que le jour même tout est réglé. Je vous demande d'être un peu sérieux.

M. Marx: Je sais qu'il y a des problèmes.

M. Bédard: À la Cour des petites créances, les gens sont très satisfaits.

M. Marx: J'essaie de voir quelles sont vos intentions.

M. Bédard: Je vous ai parlé au début des travaux de la commission, d'une initiative que nous avons prise à Montréal en faisant en sorte qu'un médiateur trouve le moyen de rencontrer les parties avant que ces mêmes parties s'engagent dans un procès. Les résultats sont très encourageants, je vous l'ai dit ce matin. Quand on aura fini l'analyse de cette initiative, peut-être faudra-t-il penser à l'étendre à l'ensemble du territoire du Québec. C'est ce que nous avions fait avec un projet pilote, mais c'est dans un autre domaine, concernant le secteur correctionnel. On y viendra en temps et lieu. Si vous avez des suggestions, formulez-en une, peut-être que cela pourrait aider.

Crédits périmés

M. Marx: Je vois qu'il y a des crédits périmés au programme 1. Est-ce qu'on peut nous expliquer pourquoi? Cela fait 300 000 $ de crédits périmés.

M. Bédard: Concernant les crédits périmés, je vais attendre que mon collègue soit...

M. Marx: Je vous écoute; oui, je suis prêt.

M. Bédard: Pour l'ensemble des crédits périmés, pour l'année 1980-1981, les crédits votés par l'Assemblée nationale étaient de 453 143 000 $, tandis que les dépenses s'établissaient à 447 072 000 $, soit un écart de 6 071 000 $ qui constituaient des crédits périmés au 31 mars 1981. Je vais donner l'explication générale pour l'ensemble de ces crédits périmés.

M. Marx: Je vais vous suivre... Mme Lachapelle: Je vais aller voir...

M. Bédard: L'ensemble des crédits périmés résulte des faits suivants. On pourra peut-être donner des explications pour chacun des programmes, si vous le voulez.

M. Marx: Pouvez-vous me dire dans quel cahier? J'ai tellement de cahiers ici. (21 h 30)

M. Bédard: Aux pages 20 et 21 que je vous ai fait parvenir à votre demande. Pour les fins du journal des Débats, ces crédits périmés résultent des faits suivants: premièrement, les crédits votés pour la Commission de contrôle des permis d'alcool du Québec au montant de 3 294 000 $ sont considérés comme périmés, compte tenu du fait que les dépenses de la Régie des permis d'alcool du Québec, qui a remplacé la commission de contrôle, ont été imputées au fonds consolidé du revenu en vertu de la loi.

M. Marx: C'était cela le montant.

M. Bédard: Cela en explique une bonne partie. Une partie de ces crédits périmés résulte des gels de crédits décrétés par le Conseil du trésor au montant de 1 388 000 $.

M. Marx: Quel était ce gel? Etait-ce un gel sur toutes les dépenses, sur certaines dépenses? Sur quelles dépenses?

M. Bédard: C'était un gel d'un montant précis, global décrété par le Conseil du trésor, mais la discrétion demeurait au ministère.

M. Marx: C'est pour tout le ministère. M. Bédard: Oui, c'est cela.

M. Marx: Y compris toutes les commissions, les régies et tout.

M. Bédard: C'est cela. C'était laissé à la discrétion du ministère.

M. Marx: C'est cela, c'est pour tout le ministère.

M. Bédard: Ensuite, cela représente déjà ce que je viens de vous dire, au-delà...

II reste 1 389 000 $. Il s'agit d'engagements non liquidés qui sont devenus périmés à la fin de l'année. Ces crédits n'ont pas été utilisés parce que les services ou la marchandise n'a pas été livrée ou que les dépenses n'ont pas été effectuées.

M. Marx: Dans le programme 1, il s'agit de 290 000 $.

M. Bédard: Par rapport particulièrement au programme 1.01. Quand les juges prennent leur retraite, les postes ne sont pas comblés immédiatement. Les juges n'étant pas remplacés immédiatement, il y a des sommes, par la force des choses, qui ne sont pas utilisées.

M. Marx: C'est aux pages 21 et 22.

M. Bédard: C'est cela. Vous avez tout le détail.

M. Marx: C'est cela. La raison, c'est qu'on n'a pas remplacé certains juges qui ont pris leur retraite.

M. Bédard: Au dernier élément, les dépenses non effectuées, il faut se rappeler que le budget du ministère quant aux traitements s'élève à au-delà de 80%. Donc, normalement, au niveau de tous les programmes, les postes qui sont laissés vacants d'une manière ou d'une autre ne sont pas comblés immédiatement. D'une manière générale, c'est sur les traitements que les crédits sont périmés à ce titre.

M. Marx: D'accord. Je n'ai pas d'autres questions.

Le Président (M. Desbiens): L'élément 1 est adopté?

M. Bédard: Adopté.

Soutien administratif à l'activité judiciaire

Le Président (M. Desbiens): Élément 1, adopté. Élément 2?

M. Bédard: Je n'ai pas d'autres remarques à faire. Je crois qu'on peut l'adopter.

M. Marx: Le ministre n'a-t-il pas une présentation à faire?

M. Bédard: Je l'ai faite d'une façon générale ce matin. On a discuté toute la journée des éléments 1 et 2. On a essayé d'être le moins formel possible. Je crois que cela aide la discussion.

M. Marx: II s'agit ici des tribunaux administratifs aussi. Je ne sais pas si on va revenir sur les tribunaux administratifs. Quels sont les délais dans les tribunaux administratifs? Par exemple, au Tribunal de l'expropriation, pour prendre un tribunal administratif, est-ce que les délais sont normaux?

M. Bédard: J'ai ici présent M. le juge Dorion qui, comme vous le savez, est président du Tribunal de l'expropriation. Concernant les délais, je pense qu'il peut nous dire que cela n'a pas augmenté.

Les délais sont des délais normaux et même, ils ont diminué depuis un an. Il y a eu un retard à un moment donné l'année dernière, parce qu'un des membres a décidé de prendre sa retraite sans avertissement et avant qu'on puisse le remplacer, cela a pris un certain temps. Non seulement cela, mais quand il est parti il a laissé derrière lui 35 ou 40 délibérés que les autres membres ont été obligés de se partager en plus de leur travail habituel et cela a occasionné un certain retard dans le district de Montréal. C'est à cause de cela. C'est maintenant sous contrôle et c'est revenu à la normale.

À Québec, une cause peut être inscrite et passée dans les deux mois suivants. À Montréal, c'est un peu plus long. Cela peut prendre six mois et même un peu plus à cause du volume.

M. Marx: Dans l'Outaouais, à Hull par exemple?

M. Bédard: À Hull il y a eu un certain retard mais actuellement, on est en train de reprendre le dessus. On siège beaucoup plus souvent qu'on siégeait à Hull. Au lieu d'y aller une fois par mois, on y va jusqu'à quatre fois par mois maintenant.

M. Marx: J'ai peut-être une autre question. Est-ce que je peux poser une autre question à Me Dorion ou au ministre?

M. Bédard: Vous pouvez peut-être me la poser et je verrai s'il y a lieu de la transférer.

M. Marx: C'est le Tribunal de l'expropriation. Combien de juges?

M. Bédard: Cinq juges au Tribunal de l'expropriation et cinq membres non juges.

M. Marx: Cinq juges siègent au Tribunal de l'expropriation plus cinq membres non juges, ça fait dix membres.

M. Bédard: C'est ça, avec un quorum de deux.

M. Marx: Avec un quorum de deux. Combien de causes le tribunal entend-il chaque année à peu près?

M. Bédard: L'an dernier on a rendu 240 ou 250 ordonnances définitives, mais il y a bien d'autres causes qui ont commencé et qui ne se sont pas terminées parce que les parties ont décidé de régler en cours de route. Est-ce que ça va?

M. Marx: Oui, merci.

La Présidente (Mme Lachapelle): Est-ce qu'il y a d'autres questions sur le programme no 2?

M. Marx: Un instant! On va examiner ça.

C'est le soutien à tous les tribunaux administratifs dans ce programme. C'est ça? Cela fait à peu près combien, une quinzaine? Combien de tribunaux administratifs y a-t-il à peu près? Quinze?

M. Bédard: II n'y en a pas quinze.

M. Marx: Cela veut dire les tribunaux administratifs véritables, pas la Commission des droits de la personne, par exemple; cela est à exclure.

M. Bédard: II n'y a pas autant que quinze véritables tribunaux administratifs. On pourrait peut-être vous fournir la liste parce que je ne voudrais pas perdre de temps non plus pour faire l'addition.

M. Marx: J'ai une autre question en tête parce que je ne vois pas la liste des tribunaux. Est-ce que ces organismes demandent des études à l'extérieur des ministères?

M. Bédard: Pour ce qui relève de nous, il y a expropriation, travail et mines.

M. Marx: Expropriation...

M. Bédard: Travail et mines. Le Tribunal des mines.

M. Marx: Est-ce que ces organismes demandent des études à l'extérieur, est-ce qu'ils engagent des consultants, des contractuels pour faire des études?

M. Bédard: Non.

M. Marx: Non? Généralement, non?

M. Bédard: Généralement, non.

M. Marx: Ce n'est pas comme la Commission des droits de la personne ou d'autres commissions?

M. Bédard: Non, ce n'est pas la même chose.

M. Marx: Donc, cela, c'est vraiment administratif: les secrétaires, la fourniture... Bon, parfait.

La Présidente (Mme Lachapelle): Y a-t-il d'autres questions sur le programme 2?

M. Marx: Je vais voir. Non.

Enquêtes et expertises scientifiques pour fins judiciaires

La Présidente (Mme Lachapelle):

Programme no 2, adopté. Programme no 3.

M. Bédard: J'ai fait parvenir certains renseignements à mon collègue, tel que demandé, avant l'étude des crédits. Pour les fins du journal des Débats, le programme 3 est composé de trois éléments: les enquêtes sur les décès et les incendies, les expertises médico-légales, les expertises scientifiques. Les éléments 1 et 2 sont sous la responsabilité de la direction générale des affaires criminelles. L'élément no 3, les expertises scientifiques, relève de la direction générale de la sécurité publique.

À l'intérieur de l'élément 1, on retrouve toutes les ressources requises pour faire les enquêtes sur la mort des personnes dont le décès ne paraît pas dû à une cause naturelle ou purement accidentelle. Le réseau des commissaires enquêteurs sur les incendies est chargé de déterminer les causes des incendies et des explosions qui sont de nature criminelle.

En ce qui a trait à l'élément 2 concernant les expertises médico-légales, le laboratoire de médecine légale est constitué principalement de pathologis tes et est chargé d'examiner certains faits susceptibles d'être reliés à des actes criminels.

Pour ce qui est de l'élément 3 qui concerne les expertises scientifiques, le laboratoire de police a pour fonction de renseigner les divers agents de l'administration de la justice sur certains actes susceptibles d'être de nature criminelle en procédant à des expertises scientifiques servant à l'analyse et à l'interprétation des indices laissés par les auteurs de tels actes. Ces expertises couvrent les six domaines suivants: balistique, biologie, examen de documents, détermination des causes d'incendie et d'explosion, chimie, toxicologie. C'est ce que recouvre l'ensemble de ce programme, Mme la Présidente.

M. Marx: Je ne sais pas si cette loi tombe dans ce problème, mais il y a la Loi sur les coroners...

M. Bédard: Oui, normalement.

M. Marx: Normalement, c'est là. J'ai voulu faire une étude sur cette loi parce que je trouve que c'est une loi à refaire. Je demande au ministre s'il a un projet dans ce sens. A-t-il un projet, une étude, un comité de constitué au niveau du ministère pour préparer un document qu'on ne verra jamais?

M. Bédard: On a une étude complète qui a été faite au niveau du ministère de la Justice.

M. Marx: En quelle année? (21 h 45)

M. Bédard: Fin 1980. Et elle fait l'objet d'une analyse par le conseil consultatif de la justice. Comme vous le dites, en plus d'être une loi extrêmement complexe, il est clair que c'est une loi qui a besoin d'être rajeunie et améliorée.

M. Marx: Qu'est-ce que le ministre voit comme lacune? Quelles sont les grandes lacunes qu'il voit dans la loi actuelle?

M. Bédard: C'est l'ensemble de la structure, je crois, qui doit être examinée.

M. Marx: Les structures? Dans quel sens?

M. Bédard: On l'a dit, c'est une loi qui mérite d'être rajeunie. Donc, des choses évoluent et doivent être rajustées à de nouvelles réalités. Au niveau de la structure, il serait peut-être nécessaire que les coroners chefs aient une responsabilité plus générale, cela n'existe pas au moment où on se parle. Chacun essaie de faire son travail le plus valablement possible, mais les études ont porté sur l'organisation administrative, les pouvoirs et les devoirs des coroners et sur les droits des personnes à l'occasion des enquêtes du coroner. Je pense que ce sont déjà trois sujets de préoccupation qui, mon collègue en conviendra, sont suffisamment larges pour justifier le travail qui a été fait. Quand le conseil consultatif aura approfondi ce qui a déjà été mis au point par le ministère, à ce moment-là, ce sera le temps de voir quelles décisions il y aura à prendre.

M. Marx: Si je comprends bien maintenant, c'est que le ministère a fait une étude qui a été rendue publique auprès des sous-ministres du ministère en 1980. Après, cela a été acheminé au conseil consultatif de la justice. Donc, cela fait déjà plus d'une année, peut-être un an et demi, que l'on fait l'étude de ce mémoire. - Est-ce un mémoire? - Un an et demi, c'est long, M. le ministre. Il y a des gens qui subissent des préjudices entre-temps, il y a toutes sortes d'études sur la Loi sur les coroners. Il y avait...

M. Bédard: ...

M. Marx: Un instant, M. le ministre! On a rajeuni ces lois dans d'autres provinces il y a longtemps et il y a des gens qui se demandent vraiment ce que le ministre entend faire avec cette loi, qui, comme vous l'avez admis, mérite d'être rajeunie, si je peux le dire comme cela.

M. Bédard: Je crois que le processus qu'on a engagé va nous permettre de proposer ce que nous croirons être les amendements appropriés, les améliorations appropriées, proposer tout cela pour probablement l'automne 1982.

M. Marx: L'automne 1982, c'est cette année. Vous avez la volonté politique, vous me dites que...

M. Bédard: ... la volonté, vous le voyez...

M. Marx: La volonté administrative, je sais, mais la volonté politique!

M. Bédard: Vous vous amusez beaucoup avec la question des délais et la question des études. Vous savez très bien que, dans le domaine judiciaire, vous ne renversez pas tout du jour au lendemain, quand vous parlez de lois qui sont très complexes...

M. Marx: Quand vous me dites...

M. Bédard: C'est normal que vous donniez le temps d'aller au fond des choses de manière que, quand vous vous orientez vers une réforme, eh bien, ce ne soit pas une réforme qui dure le temps de le dire et qui mérite d'être changée à nouveau.

M. Marx: Oui, mais...

M. Bédard: C'est pour répondre le mieux possible aux attentes de la population.

M. Marx: Je pense que cela prendra plus que des amendements pour refaire cette loi. Je pense que cela prendrait une nouvelle loi.

M. Bédard: Quand je parle d'amendements...

M. Marx: Au complet.

M. Bédard: Quand je parle d'amendements, ce sont assurément des amendements très substantiels.

M. Marx: Je pense que c'est nécessaire de "scraper" cette loi, comme on dit, et de la refaire. Je pense que ce n'est pas une loi qu'on peut retoucher ici et là.

M. Bédard: C'est une manière de parler, vous pouvez la "scraper" toute, mais, de toute façon, étant donné le secteur de responsabilité qui lui est dévolu par son application, vous allez, quelle que soit la réforme, y retrouver quand même des éléments très importants de base plus des amendements substantiels qui sont de nature à améliorer la situation.

M. Marx: Le ministre nous a dit il y a

quelques minutes qu'il y avait un problème au niveau des structures, au niveau de l'organisation, au niveau des pouvoirs, au niveau des devoirs et en ce qui concerne le droit des personnes. Donc, il y a beaucoup à modifier, beaucoup à améliorer et je m'étonne que le rapport ait été terminé en 1980 et que en 1982, plus de 18 mois après, il n'y ait rien. On n'est pas au niveau du projet de loi maintenant.

M. Bédard: C'est soumis. Je l'ai dit, c'est soumis au conseil consultatif; au niveau des projets de loi, je vous demanderais, toute comparaison étant bonne à faire, de regarder le volume de lois faites par le ministère de la Justice, la plupart du temps sans bruit peut-être, mais très importantes en ce qui a trait à des améliorations à apporter au système judiciaire. Regardez le volume législatif du ministère de la Justice depuis six ans et je crois que vous allez avoir des surprises, si vous l'évaluez par comparaison au rythme et au nombre des lois faites par des administrations précédentes. Je ne peux pas refaire tout l'ensemble du système judiciaire tous les ans pour simplement me péter les bretelles en disant que j'ai beaucoup de projets de loi. Franchement! Ce que je vous dis... Je pourrais bien vous dire qu'il n'y a pas de problème au niveau de la Loi sur les coroners, que malgré certaines difficultés, cela fonctionne quand même relativement bien. Je préfère vous répondre à la question que vous me posez que, effectivement, je crois en effet qu'il y a lieu de faire des améliorations majeures dans ce domaine. C'est pour cela que des commandes ont été données au niveau administratif. Je vous l'ai dit, l'étude est terminée et nous avons fait une référence au conseil consultatif. Dès qu'il nous donnera son appréciation, eh bien, cela nous permettra de déboucher. C'est une loi qui remonte au XVIIIe siècle.

M. Marx: C'est cela.

M. Bédard: Je ne peux pas vous dire combien il y a eu d'amendements depuis ce temps, mais...

M. Marx: II y a eu beaucoup d'amendements, mais il y a un problème peut-être aussi...

M. Bédard: II y a l'évaluation des coûts aussi.

M. Marx: II y a peut-être un problème de juridiction aussi, une fois qu'on va toucher cette loi.

M. Bédard: Je pense que vous êtes conscient que ce n'est pas une petite loi, la Loi sur les coroners.

M. Marx: Non, je suis conscient que cela prend trop de temps.

M. Bédard: Vous êtes conscient que cela prend trop de temps, mais je ne vous vois pas aller là-dessus.

M. Marx: Je trouve que c'est maintenant le temps à l'Assemblée nationale de déposer des projets de loi parce qu'on n'a rien à faire de l'autre côté.

M. Bédard: Entre vous et moi, la Loi sur les coroners...

M. Marx: Cela va passer vite.

M. Bédard: Oui, mais depuis...depuis...

M. Marx: Oui, mais depuis! depuis! Vous êtes en fonction depuis six ans. Depuis! Depuis six ans!

M. Bédard: Je peux vous dire que même avant que je sois dans l'Opposition, j'étais avocat, j'ai pratiqué durant dix ans le droit criminel et j'ai parlé des améliorations qu'il fallait apporter à...

M. Marx: ... en opposition à...

Bédard: ... la Loi sur les coroners. Tout ce que je vous dis, c'est que, dès qu'on a été au ministère, on a fait des commandes...

M. Marx: En 1976.

M. Bédard: ... dans le sens d'études qui s'imposent et on va procéder comme on a procédé dans d'autres domaines.

M. Marx: Avez-vous quelque chose à ajouter? Non. Puis-je avoir une copie de ce rapport de 1880 ou est-ce que c'est secret?

M. Bédard: Pas 1880, 1980.

M. Marx: 1980, oui. De temps en temps, il me semble que le ministre...

M. Bédard: Je crois que cela suit...

M. Marx: ... cent ans déjà et il fait le... Puis-je avoir une copie de ce rapport?

M. Bédard: Je crois que cela suit une filière normale...

M. Marx: Oui ou non?

M. Bédard: ... dans les circonstances. Devinez-la ma réponse à travers ce que je vous dis, je crois que cela suit la filière normale...

M. Marx: Je ne sais pas, c'est un

gouvernement transparent qui va déposer une loi sur l'accès à l'information.

M. Bédard: ... qui fait que, comme pour beaucoup d'autres lois, à un moment donné, nous allons déboucher sur une loi.

M. Marx: II doit y avoir beaucoup de copies qui circulent au ministère, qui circulent au conseil consultatif de la justice. Chaque fois que je veux un document d'un ministre, dois-je faire en sorte qu'il y ait une fuite quelque part? Est-ce qu'il y a des secrets? C'est juste une étude, ce ne sont pas des politiques, c'est une étude juridique. Pourquoi est-ce qu'on ne peut pas rendre cela public pour qu'il y ait d'autres gens qui en prennent connaissance, comme, par exemple, la ligue des droits? Pourquoi empêcher la ligue des droits et libertés de prendre connaissance...

M. Bédard: Oui, mais, à un moment donné...

M. Marx: ... d'un tel document? Elle est impliquée dans cela.

M. Bédard: À un moment donné, nous allons déboucher sur des décisions et vous serez en mesure d'analyser le bien-fondé ou pas des décisions que nous aurons prises.

M. Marx: Mais...

M. Bédard: Pour le moment, cela suit la filière normale.

M. Marx: Oui, c'est cela. Est-ce que c'est une étude juridique ou est-ce que c'est une étude avec des connotations politiques?

M. Bédard: Juridique et administrative.

M. Marx: Donc, il n'y a pas de secret politique dans cela. Pourquoi ne pas rendre cela...

M. Bédard: Quand je vous réponds comme cela, mon...

M. Marx: L'accès à l'information, vous êtes pour cela.

M. Bédard: ... critère n'est pas le fait qu'il y ait des secrets politiques ou pas, il y a une filière normale. Des discussions ont lieu à des niveaux que vous connaissez, et ces discussions-là se poursuivent.

M. Marx: Quelle est la raison pour ne pas m'en donner une copie? Je ne comprends pas. Honnêtement, je ne comprends pas. Honnêtement; Pourquoi? C'est une étude juridique administrative. So what? On fait ça à la tonne au Québec. Voilà, il y en a une autre. Cela va même aider les députés à l'Assemblée nationale une fois que le projet de loi sera déposé à mieux comprendre le projet de loi. Je ne vois pas pourquoi tout est secret. C'est la quinzième fois...

M. Bédard: Je vais vous dire...

M. Marx: ... la seizième fois aujourd'hui...

M. Bédard: Quand les décisions sont prises, qu'un projet de loi est déposé, il peut y avoir la possibilité de donner toute l'information nécessaire. Il s'agit que l'information soit donnée au bon moment. Entre-temps, si vous avez des suggestions, vous pourriez les faire.

M. Marx: Oui, mais on n'est pas... Moi, je trouve que ce sont les contribuables qui paient cela. Il y a des commissions qui siègent, qui...

M. Bédard: Non.

M. Marx: On en a au Québec, il y a des commissions qui donnent...

M. Bédard: II y a des gens qui travaillent.

M. Marx: ... des commandites de 1 000 000 $ par année et tout est caché, rien n'est rendu public. On va arriver à cela, mais il y des...

M. Bédard: Ce n'est pas caché dans des tiroirs.

M. Marx: II y a des offices... c'est caché dans les tiroirs.

M. Bédard: Toutes ces études, ces réflexions sont remises entre les mains des fonctionnaires qui sont payés par l'État et qui font leur travail en en tenant compte.

M. Marx: Le peuple paie leur salaire. M. Bédard: Je pense que c'est logique.

M. Marx: II paie votre salaire, mon salaire. Je pense qu'on a droit à l'information, à l'accès à l'information. Si c'est une étude, comme vous venez de le dire, juridique et administrative, il n'y a pas de secret dans cela. Moi, je trouve que ce serait normal que ce soit rendu public. Je ne sais pas, si cela prend la décision du Conseil des ministres chaque fois qu'on veut qu'un rapport soit rendu public, je ne comprends pas comment ce gouvernement fonctionne ou pourquoi ce gouvernement se dit prêt à déposer un projet de loi sur...

M. Bédard: Si vous voulez...

M. Marx: ... l'accès à l'information. C'est quoi, l'information?

M. Bédard: Justement, si vous avez lu le rapport Paré, puisque vous vous y référez, le rapport Paré donne son opinion dans le sens que ces études doivent rester confidentielles tant que le projet de loi n'est pas déposé. Je vous demanderais de lire le rapport de la commission Paré. (22 heures)

M. Marx: Est-ce que vous allez adopter le rapport Paré tel quel? C'est une chose qu'on a apprise aujourd'hui. Je pense que...

M. Bédard: Quand vous parlez d'accès à l'information, je n'ai pas à me prononcer sur ce qui arrivera, mais je crois qu'il y a une volonté gouvernementale qui a été clairement exprimée dans ce sens. Une chose est sûre, elle a toutes les chances d'aller plus loin que la volonté fédérale qui a été exprimée et qui n'a connu absolument aucune concrétisation. Vous vous le rappelez? Le projet de loi a tout simplement été abandonné.

M. Marx: J'y reviens pour la dernière fois. C'est une étude juridique et administrative faite d'une façon, comment dirais-je, objective...

M. Bédard: Quand le projet de loi sera... Quand un projet de loi...

M. Marx: Si je comprends, c'est une étude objective. C'est comme une thèse de maîtrise. Pourquoi ne pas laisser les autres prendre connaissance de cette étude? Pourquoi? On donne ça au conseil consultatif de la justice. On peut donner ça à d'autres.

M. Bédard: Quand le projet de loi sera déposé, vous pourrez me faire la même demande. Il sera peut-être très opportun, à ce moment, qu'une décision autre soit prise.

M. Marx: Franchement, M. le ministre, je ne comprends pas votre attitude, mais je n'ai pas le choix, je ne le verrai pas, je n'aurai jamais ce rapport. Cela ne va pas vous faire...

M. Bédard: Si je vous écoutais, je rendrais tout public.

M. Marx: Non, pas tout public. C'est une étude juridique et administrative, une étude objective. Il n'y a rien dedans qui va embarrasser...

M. Bédard: II y a une réflexion qui se fait à ce sujet et quand cette réflexion sera terminée...

M. Marx: Laissez tout le monde faire la réflexion, toute la population québécoise.

M. Bédard: ... et débouchera sur un projet de loi, à ce moment, toute l'information nécessaire devra être donnée et l'information sera donnée.

M. Marx: Combien d'enquêtes et d'études d'experts ont été faites en vertu de ce programme? Est-ce qu'on a une idée? Je veux juste avoir une idée.

M. Bédard: Pour 1981, les cas d'enquête, 246, les cas de recherche, 4867, pour un grand total de 5113.

M. Marx: Cela est toujours fait par des recherchistes et des enquêteurs qui sont à l'emploi du ministère.

M. Bédard: C'est fait par les coroners.

M. Marx: C'est toujours à l'intérieur du ministère.

M. Bédard: Non, ce sont les coroners, les coroners ad hoc...

M. Marx: D'accord.

M. Bédard: ... les six coroners permanents, etc.

M. Marx: Les recherches scientifiques, ce sont des expertises. Ce sont des gens...

M. Bédard: Non, mais je voudrais que vous soyez précis dans vos questions. Parlez-vous du travail fait par les coroners ou du travail fait par le laboratoire de médecine légale? Ce ne seront pas les mêmes chiffres. Ce n'est pas pareil.

M. Marx: Les enquêtes, c'est 246. Ce sont des coroners. C'est ça?

M. Bédard: Lorsqu'un coroner fait une enquête, il fait soit un cas de recherche ou encore une enquête publique. Je viens de vous donner les chiffres.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que le programme 3 est adopté? Je dois constater qu'il est 22 heures et, pour les fins du journal des Débats particulièrement, est-ce qu'il y a une entente?

M. Bédard: Oui, nous avons une entente pour aller jusqu'à 23 heures au moins, peut-être plus.

M. Marx: Au moins.

Le Président (M. Desbiens): Alors, il y a une entente jusqu'à 23 heures.

M. Bédard: On peut aller jusqu'à minuit.

Le Président (M. Desbiens): Consentement pour poursuivre les travaux de la commission jusqu'à 23 h 30.

M. Bédard: C'est ça.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Cela va.

Le Président (M. Desbiens): Le programme 3 est adopté?

M. Bédard: Adopté.

Protection des droits et libertés de la personne

Le Président (M. Desbiens): Programme 4, éléments 1 et 2. Est-ce qu'on discute de l'ensemble du programme?

M. Marx: Le programme 4, est-ce qu'on peut le suspendre? La présidente de la commission...

Une voix: Elle est là.

M. Marx: Ah, elle est là! Un instant.

M. Bédard: Je demanderais à Mme la présidente de la Commission des droits de la personne de même qu'à M. Jacques Tellier, président du Comité de la protection de la jeunesse de s'approcher de nous. On retrouve, à l'intérieur de ce programme, deux organismes, soit le Comité de la protection de la jeunesse, qui est sous la responsabilité de M. Jacques Tellier, et la Commission des droits de la personne, dont la présidence est assumée par Mme Francine Fournier.

La Commission des droits de la personne a été créée en 1975 par la Charte des droits et libertés de la personne et a pour mandat de promouvoir par toutes les mesures appropriées les principes contenus dans la Charte des droits et libertés de la personne, d'exercer les pouvoirs et d'exécuter les devoirs prescrits par celle-ci. De plus, la commission reçoit et étudie les demandes du public touchant les droits de la personne et fait ensuite au gouvernement les recommandations qu'elle juge appropriées.

Comme vous le savez, le Comité de la protection de la jeunesse a été créé en 1975 par la loi concernant la protection des enfants soumis à des mauvais traitements et a été investi d'un rôle plus large en 1977 par la nouvelle Loi sur la protection de la jeunesse. Le comité est en quelque sorte le protecteur des jeunes en difficulté de moins de 18 ans. En tant qu'organisme chargé de la surveillance et de l'application de la loi, il enquête sur toute situation où il a des raisons de croire que les droits d'un enfant ont été lésés et prend les moyens légaux pour corriger la situation. De plus, le comité a la responsabilité de promouvoir les droits de l'enfant en difficulté et de faire connaître la protection que lui assure la loi par l'élaboration de programmes d'information s'adressant au public et en particulier aux jeunes eux-mêmes. Il peut, en tout temps, faire au ministre des Affaires sociales ou au ministre de la Justice les recommandations qu'il juge appropriées.

Comme vous le savez, en ce qui concerne la Charte des droits et libertés de la personne, du point de vue gouvernemental, nous nous sommes engagés à déposer un projet de loi avant la fin de la présente session, ce qui sera fait, effectivement, au cours de l'année. Comme les membres de la commission le savent, nous avons procédé à l'audition de nombreux groupes qui sont venus faire des représentations, des suggestions sur des amendements possibles au niveau de l'amélioration de notre Charte des droits et libertés de la personne, qui est une des plus avancées, je pense, au Canada.

En ce qui concerne le Comité de la protection de la jeunesse, la loi 24, il y a présentement un comité de l'Assemblée nationale, un "select committee", qui a déjà commencé ses travaux, qui sera en mesure de nous faire certaines recommandations avant la fin de juin sur des parties précises de la loi où il nous semble qu'il y aurait avantage que des amendements soient apportés. Je crois que ça résume un peu non pas l'activité de la Commission des droits de la personne, parce que nous avons ici avec nous Mme la présidente. Je pense que plusieurs questions peuvent lui être posées ainsi qu'au président du Comité de la protection de la jeunesse.

M. Marx: Je commence à faire le total des projets de loi que vous allez déposer d'ici à l'automne, il y a déjà une longue liste.

M. Bédard: Depuis six ans, regardez le volume de législations. Je vous ai dit que nous étions productifs!

M. Marx: Loi sur les coroners, Code civil, Charte des droits et libertés de la personne. C'est l'année où vous serez le plus occupé.

M. Bédard: Oui, tout sera fait. On travaille de façon ardue, on travaille d'une façon tenace.

M. Marx: Ce sera la première année. M. Bédard: Non, mais effectivement,

quand on regarde la somme des lois...

M. Marx: La charte sera déposée, le projet de loi sera déposé d'ici la fin de la session. C'est ça?

M. Bédard: Oui.

M. Marx: D'ici le 19 juin.

M. Bédard: Oui.

M. Marx: Cela, c'est sûr. On va étudier cela durant l'été et on l'adoptera à l'automne. C'est cela?

M. Bédard: Normalement.

M. Marx: Normalement, d'accord.

M. Bédard: Je vous ai dit que le projet de loi que nous allons déposer tiendra compte, naturellement, de toutes les suggestions et recommandations qui ont pu nous être faites par des groupes, mais il tiendra compte aussi du contexte constitutionnel que vous connaissez.

M. Marx: Est-ce que vous êtes déjà au niveau de la rédaction du projet de loi au ministère?

M. Bédard: C'est un peu ça.

M. Marx: On me dit que vous êtes encore au niveau des discussions.

M. Bédard: Nous en sommes à la rédaction.

M. Marx: Vous en êtes déjà à la rédaction.

M. Bédard: Si vous aimez mieux, des discussions sur la rédaction; franchement, je trouve que vous...

M. Marx: Non, mais je veux juste savoir où vous en êtes; c'est une question normale.

M. Bédard: Où je suis n'est pas tellement important; ce qui est important, c'est le résultat.

M. Marx: Vous ne savez pas où vous êtes.

M. Bédard: Je vous dis qu'avant la fin de la présente session, un projet de loi sera déposé concernant les amendements à la charte.

M. Marx: D'accord, parfait. Est-ce que vous allez consulter la Commission des droits de la personne sur l'avant-projet de loi ou sur le projet de loi?

M. Bédard: Nous avons des discussions avec...

M. Marx: Avec qui?

M. Bédard: Vous oubliez une chose, c'est que la Commission des droits de la personne s'est fait entendre lors des auditions que nous avons tenues et je crois qu'elle a produit un rapport très substantiel à cette occasion.

M. Marx: Je veux savoir si vous allez envoyer une copie du projet de loi...

M. Bédard: Nous allons nécessairement en tenir compte.

M. Marx: ... et consulter la commission sur l'avant-projet de loi ou sur le projet de loi en question.

M. Bédard: Sûrement.

M. Marx: Sûrement, d'accord.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Je voudrais savoir si le ministre est en mesure de nous dire actuellement quels seront les chapitres principaux qui seront couverts par le projet de loi, quels seront les sujets principaux, les thèmes. (22 h 15)

M. Bédard: C'est l'ensemble des sujets qui ont été traités lors de la commission parlementaire. On se doit de tenir compte de tous les mémoires qui ont été présentés à l'occasion de ces auditions. Il est clair que les programmes d'action positive, les avantages sociaux ont été mentionnés; la question de la prépondérance de la charte a été soulevée également. Enfin, je pourrais peut-être vous faire l'énumération de tous les sujets; ils sont parmi les plus importants. Il y en a d'autres aussi qui ont été soulevés à l'occasion de ces auditions et qui font l'objet d'une analyse particulière.

M. Lalonde: Le ministre peut-il nous donner une énumération simplement pour qu'on ait une idée de l'ampleur de ce projet? Évidemment, je ne lui demande pas quelles seront les propositions...

M. Bédard: Je comprends.

M. Lalonde: ... contenues dans le projet de loi, mais quels sont les problèmes auxquels il s'attaque. Comme ministre de la

Justice, il a sûrement à coeur un certain nombre de changements puisqu'il s'est donné la peine de faire préparer ce projet de loi. Je lui demanderais seulement d'informer la population et la commission.

M. Bédard: Beaucoup de mémoires nous ont été présentés sur le problème du harcèlement sexuel. Alors, c'est clair que cela fait l'objet d'une préoccupation particulière. La question des avantages sociaux, les programmes d'action positive aussi. Je dirais que les programmes d'action positive sont un des sujets sur lesquels j'ai été assez explicite, même au niveau des travaux de la commission. Je crois vraiment qu'il faut faire quelque chose de significatif. D'ailleurs, j'avais déjà, comme vous le savez, déposé un projet qui ne concernait que ce sujet. Ensuite, plutôt que d'y aller simplement pièce par pièce, nous avons décidé de tenir des auditions sur l'ensemble de la charte de manière à essayer de couvrir le plus adéquatement possible l'ensemble des préoccupations des groupes et des individus sur les améliorations à apporter.

Un sujet très important a été soulevé, soit les pouvoirs d'enquête de la commission. Il y a également eu la question de la prescription pendant l'enquête.

M. Lalonde: D'accord.

M. Bédard: Je vous parle des principaux. Il y en a d'autres aussi peut-être tout aussi importants, mais...

M. Lalonde: Peut-être que la présidente a l'intention d'expliciter sa pensée.

M. Bédard: Oui, sûrement, avec plaisir. Il y a également l'âge qui a été un sujet très discuté.

M. Lalonde: ... de l'âge.

M. Bédard: Concernant l'âge. Cela a été un sujet très présent, continuellement, dans les préoccupations des groupes qui se sont fait entendre.

M. Marx: Les droits légaux, est-ce que vous avez l'intention d'y toucher?

M. Bédard: Les droits judiciaires?

M. Marx: Les droits judiciaires, si vous voulez.

M. Bédard: En termes d'élargissement du pouvoir d'enquête peut-être?

J'ai parlé d'élargissement du pouvoir d'enquête et dit que c'était un des sujets qui faisaient l'objet d'une analyse.

M. Marx: Sur la prépondérance de la charte, qu'est-ce que le ministre envisage de faire? Est-ce que ce sera laissé tel quel? Vous savez qu'il y a une clause nonobstant qui a été utilisée déjà onze fois par le gouvernement. Est-ce qu'une charte qui peut être contournée sera contournée? Est-ce que le ministre...

M. Bédard: Là-dessus, vous connaissez le processus.

M. Marx: ... a l'intention d'enchâsser la charte d'une façon ou d'une autre?

M. Bédard: II y aura des recommandations que je ferai au Conseil des ministres. Les décisions appropriées seront prises. Je ne crois pas... Au moment où je vous parle, je vous dis qu'il va y avoir... Je vous demande juste de patienter...

M. Marx: Est-ce que cela va arriver avant ou après votre...

M. Bédard: ... quelques semaines et vous aurez le résultat de l'ensemble des décisions prises au niveau de la législation.

M. Marx: Le ministre a déjà dit ou c'est le premier ministre qui a dit qu'on va adopter une loi quelconque pour rendre non applicable le plus possible la charte fédérale. Est-ce que les amendements à la charte provinciale vont venir après ou avant cet autre projet de loi?

M. Bédard: Dans un très court délai, je crois que c'est en avis aujourd'hui, un projet de loi sera déposé qui va expliciter l'attitude gouvernementale en ce qui a trait à l'ensemble...

M. Marx: Si vous voulez expliquer la position du gouvernement, faites une déclaration ministérielle.

M. Bédard: ... de la charte constitutionnelle. Pardon?

M. Marx: Si vous voulez expliquer la position du gouvernement, faites une déclaration ministérielle.

M. Bédard: On va faire plus qu'une déclaration ministérielle. Dans un délai très court, nous allons déposer un projet de loi qui explicitera l'attitude tant du point de vue juridique que constitutionnel qu'entend prendre le gouvernement face à la charte constitutionnelle.

M. Marx: Est-ce que le gouvernement va dire, par exemple, que la liberté de religion qui se trouve dans la charte constitutionnelle ne s'applique pas aux lois du Québec? Est-ce que ce sera un tel genre

de...

M. Bédard: Nous l'avons déjà dans notre charte.

M. Marx: Oh non! Ce n'est pas la même chose, M. le ministre. Dans la charte québécoise, la liberté de religion n'a pas prépondérance sur toute loi du Québec.

M. Bédard: M. le Président, mon collègue sait très bien que je n'avancerai pas...

M. Marx: Non, je ne sais rien, je pose des questions.

M. Bédard: ... plus loin dans le domaine. Je lui dis que, dans un délai très court, c'est déjà en avis au feuilleton, un projet de loi sera présenté et, à ce moment-là, ce sera le temps de faire la discussion.

M. Marx: Donc, ce projet de loi sera présenté avant qu'on ne présente des amendements à la Charte des droits et libertés de la personne. C'est ça?

M. Bédard: Oui, dans un délai très court. Plus tard, mais avant la fin de la session, il y aura, comme je l'ai dit, un projet de loi concernant les amendements à la charte qui va tenir compte non seulement des représentations faites par les groupes qui se sont fait entendre, mais aussi du contexte constitutionnel.

M. Marx: II y a un an ou un an et demi, on a eu un débat ici même au salon rouge où vous-même, ou le ministre des Affaires intergouvernementales ou le premier ministre lui-même, avez dit que le gouvernement était pour l'enchâssement des droits fondamentaux, c'est-à-dire la liberté de presse, la liberté de religion, etc. Est-ce que le gouvernement a maintenant l'intention de faire en sorte que ces droits fondamentaux dans la constitution canadienne ne s'appliquent pas dans les lois québécoises? Est-ce l'intention du gouvernement?

M. Bédard: Je crois que vous aurez votre réponse lorsque le projet de loi sera déposé.

M. Marx: On ne peut pas nous donner une indication aujourd'hui?

M. Bédard: Une chose est certaine, c'est que ce sera un projet de loi d'affirmation des pouvoirs de l'Assemblée nationale dans ce domaine comme dans d'autres domaines.

M. Marx: Oui, mais l'article qui enchâsse les droits fondamentaux n'enlève pas de pouvoirs à l'Assemblée nationale, parce que celle-ci peut toujours passer outre le cas échéant. Est-ce que vous voulez me dire que la volonté politique du gouvernement, c'est de passer outre à ces droits fondamentaux?

M. Bédard: Je vous ai dit ce que je peux vous dire au moment où on se parle, c'est que, dans un délai très court, vous aurez un projet de loi qui sera déposé et qui donnera l'attitude gouvernementale, fort probablement dès cette semaine. Il y a certaines discussions qui doivent être complétées au Conseil des ministres.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: L'étude des crédits, c'est le moment privilégié pour les députés pour entendre ceux et celles qui sont appelés à travailler tous les jours pour l'application des lois. Est-ce que je peux demander à Mme la présidente de la commission, dans ce cadre-là, avec la permission du ministre, naturellement, je pense que c'est dans l'ordre des choses, de nous indiquer, parce qu'on n'a pas encore le dernier rapport annuel, quels sont les secteurs d'activités principaux où les fonds publics qui lui ont été confiés ont été consacrés. Quelles sont les difficultés particulières qui se sont présentées à la commission dans le dernier exercice? Ceci dans un cadre très large, si le ministre me le permet.

M. Bédard: Avec plaisir. Justement, comme nous avons l'avantage d'avoir avec nous Mme la présidente de la Commission des droits de la personne, ce sera avec plaisir, et pour le bénéfice des membres de la commission, que nous allons l'entendre nous faire, dans un cadre très général, toutes les représentations qu'elle croira opportun de nous faire.

Le Président (M. Desbiens): Mme la présidente, au nom du ministre.

M. Bédard: Merci. Il y a une partie importante de nos activités qui porte sur le secteur des enquêtes, des plaintes que nous recevons à la commission et des enquêtes que nous faisons. Nous faisons environ 1100 -peut-être plus que cela - enquêtes par année. Il y a environ 2000 dossiers d'enquête en cours. C'est énorme par rapport aux ressources que nous avons. Nous recevons beaucoup de plaintes ou de demandes au niveau de l'accueil qui ne sont pas nécessairement des plaintes formelles au niveau de la discrimination, mais des questions ou des interrogations qui se posent

au niveau des droits fondamentaux en général ou au niveau d'un article ou l'autre de la Charte des droits et libertés de la personne. C'est une partie importante de notre travail.

Il y a aussi une partie, comme vous le savez sûrement, qui concerne l'analyse des lois antérieures à la charte ainsi que l'analyse des projets de loi qui sont déposés à l'Assemblée nationale. Nous faisons cette analyse en fonction des articles de la charte qui sont prépondérants aux autres lois, mais aussi en fonction de l'ensemble des articles de la charte.

Plus spécifiquement, par exemple, nous avons fait, durant cette année 1981, une analyse des lois administrées par le ministère de la Justice sous l'angle des antécédents judiciaires ou de discriminations sur la base de la condition sociale. Nous avons aussi des activités d'éducation, nous avons un très large mandat d'éducation aux droits et libertés et ceci nous amène à rencontrer énormément de groupes, que ce soit dans le secteur du travail ou dans celui de l'éducation ou dans le secteur du logement pour tenter d'expliquer la charte et pour veiller à ce que les principes de la charte passent au niveau de la population en général.

Les difficultés que nous avons, je crois, sont de deux ordres. D'une part, très généralement, une des difficultés peut être reliée à l'arrivée de notions parfois nouvelles par rapport à des habitudes prises par un ensemble de personnes mais qui est aussi certainement liée au niveau des ressources, qui sont limitées par rapport à un mandat qui est, encore une fois, très large et très riche.

Une activité que nous avons eue durant cette année 1981 a été effectivement de faire une analyse en profondeur de la charte elle-même et des limites qu'elle pouvait avoir, analyse que nous avons faite à partir de l'expérience que nous avons eue, à partir de ces cinq années de vie de la Commission des droits et libertés de la personne ainsi qu'à l'aide d'analyses comparatives avec d'autres lois ou d'autres expériences, ce qui a donné lieu au mémoire que nous avons effectivement déposé en commission parlementaire, que nous avons d'ailleurs continué à approfondir à la suite d'enseignements que nous avons aussi tirés des mémoires qui ont été déposés en commission parlementaire, de même que d'autres groupes qui ont pu faire valoir leur position face à la commission. (22 h 30)

Le dossier particulier des programmes d'accès à l'égalité a retenu beaucoup de notre temps, d'une part pour prendre une position de commission qui nous satisfasse, de manière à pouvoir faire face à la discrimination systémique et non pas seulement faire face à la discrimination cas par cas, dans une intervention très individuelle, mais aussi d'une façon plus large. Nous avons donc fait beaucoup de travaux pour assurer notre position, mais aussi dans notre mandat d'éducation à l'information, de manière à faire valoir notre position auprès des groupes principalement intéressés. Nous avons fait la même chose dans d'autres secteurs, par exemple, le secteur de l'âge, l'âge obligatoire de la retraite, la question des avantages sociaux, nous y avons travaillé d'une façon très soutenue sur les deux plans, à la fois au niveau de l'étude et au niveau d'audition de ce que les groupes ou les personnes avaient à revendiquer.

M. Lalonde: Je vous remercie, madame. Si vous me permettez, M. le Président...

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Je vois dans les crédits, au programme 4, élément 1, qui couvre la Commission des droits de la personne, une augmentation de crédits de 1 977 800 $ en 1980-1981 à 2 308 200 $ en 1981-1982, ce qui est une augmentation de 330 000 $. Est-ce que vous avez perçu, de l'année dernière à l'année qui s'est terminée en fait le 31 mars, une augmentation suffisante de ressources pour faire face à la demande?

M. Bédard: Non. M. Lalonde: Non?

M. Bédard: Non, je pense que c'est assez évident. Je pense qu'on a besoin de plus de ressources que ça. Une partie de l'augmentation des ressources a permis de faire face à l'augmentation en termes de convention collective. Cela part vite, vous savez.

M. Lalonde: Si je comprends bien, il n'y a pas eu au point de vue des effectifs une augmentation de 1980-1981 à 1981-1982. Il n'y en aura pas non plus, si je comprends bien, avec 1981-1982 et 1982-1983, parce que vous augmentez de 2 308 000 $ à 2 852 000 $, à peu près 550 000 $ sur 2 300 000 $. Encore là, c'est peut-être pour faire face surtout aux augmentations de la rémunération d'après les conventions collectives?

M. Bédard: En gros, oui. Il y a eu quelques ajustements, cependant, au niveau des occasionnels qu'on a réussi à aller chercher et qui nous ont permis de flotter, si vous voulez, d'une année à l'autre.

M. Lalonde: Vous avez dit, madame...

M. Bédard: À la suite de Mme la présidente, je dois dire qu'il se peut qu'il y ait des changements dans ce domaine au niveau des ressources financières. Le tout doit être évalué en relation avec l'ensemble des amendements que nous allons apporter à la charte. Il est clair que notre intention n'est pas de diminuer, mais d'apporter des amendements en fonction d'assurer plus de protection aux droits et libertés de la personne. Nous sommes conscients que ceci va générer nécessairement un travail plus considérable pour la commission. Je crois qu'à ce moment, il nous faudra avoir la logique normale qui s'imposera dans les circonstances.

M. Lalonde: Je vous remercie. Maintenant, vous avez dit, par exemple, que vous avez à peu près 2000 dossiers en cours. Est-ce que vous pouvez nous dire s'il y a une courbe depuis cinq ans? En fait je ne parle pas seulement de votre présence à la commission, mais y a-t-il une courbe ascendante qui vous permet de conclure que les ressources qui vous sont consacrées en termes d'effectifs et aussi de ressources financières vous permettront soit de conserver un niveau acceptable de dossiers en cours, soit de faire un certain rattrapage ou si vous prévoyez devoir souffrir un recul?

M. Bédard: Cela dépend des ressources qu'on nous ajoutera, bien sûr.

M. Lalonde: Si vous me permettez, je ne veux pas vous interrompre, c'est que le ministre vient de dire que si on vous confie une charge plus grande, il est juste, et je pense que c'est tout à fait acceptable, qu'on vous confie les ressources nécessaires pour y faire face. Mais, en dehors de cette hypothèse, compte tenu de la courbe depuis deux ou trois ans et compte tenu des montants qui vous sont alloués actuellement par le livre des crédits, est-ce que vous prévoyez pouvoir rattraper un peu des 2000 dossiers ou si vous prévoyez, d'après l'augmentation de la demande et en tenant compte de la loi telle qu'elle existe - pour le reste, on est un peu dans le domaine de l'hypothèse - est-ce que vous pensez pouvoir faire du rattrapage ou si vous vous attendez que la situation devienne plus difficile?

M. Bédard: II est sûr que notre évaluation de la situation à l'heure actuelle par rapport au mandat que nous avons avons, aux plaintes que nous recevons et aux enquêtes que nous faisons etc., et par rapport aux ressources que nous avons est une inadéquation comme telle. Si c'est permis d'émettre un souhait, au moment où on réfléchira aux amendements à la charte pour ajouter des ressources, on pourra peut-être réfléchir à l'ensemble des besoins de la commission et voir cela un peu plus largement. Effectivement, actuellement, on n'arrive pas.

M. Marx: D'ailleurs, Mme la présidente...

Le Président (M. Desbiens): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Je voudrais poser seulement une question.

M. Lalonde: M. le Président, vous permettez? C'est-à-dire qu'avec les ressources que vous avez actuellement, vous ne pouvez pas faire face à une nouvelle charge - je comprends cela - et votre souhait, c'est qu'on vous confie non seulement une charge nouvelle, mais aussi des ressources nouvelles. Je pense qu'on peut le présumer, mais en fonction de ce qui existe, pourriez-vous faire une rattrapage avec les ressources que vous avez ou si vous allez continuer à avoir plusieurs milliers de dossiers? La charge augmentera-t-elle? Le recul augmentera-t-il? L'inadéquation, c'est ce que vous voulez dire?

M. Bédard: Je pense que même si on n'avait pas d'amendements à la charte, si on en restait à ce qu'on a en ce moment, on n'arriverait pas plus. Remarquez qu'on a fait des efforts très sérieux aux termes de la rationalisation de l'accueil, de la réception des plaintes, du traitement des enquêtes de manière à économiser tout le temps possible, à être vraiment très économe au niveau de nos ressources, mais, cela dit, on n'arrive pas.

Je voudrais dire à Mme la présidente de la commission que nous profiterons sûrement des amendements qui sont apportés à la charte non seulement pour obtenir les ressources qui seraient nécessaires par l'adjonction de nouvelles responsabilités, mais, avec l'aide et l'appui de la Commission des droits de la personne, pour essayer aussi de faire les pressions nécessaires pour permettre le rattrapage.

M. Lalonde: Je vais terminer là-dessus, M. le Président. Je ne veux absolument pas créer d'embarras à Mme la présidente. Je suis convaincu qu'elle saura présenter un plan d'effectifs suffisants pour faire face à la nouvelle demande. Je veux simplement dire au ministre qu'il trouvera chez l'Opposition l'appui le plus total pour toute demande visant à permettre à la commission de fonctionner le plus efficacement possible, étant donné qu'on parle de 2 000 000 $ ou 3 000 000 $ sur un budget d'environ 20 000 000 000 $ et que la commission est effectivement le lieu et souvent le dernier recours pour savoir où aller réellement,

quand on ne sait pas où se jeter. Ce n'est pas seulement le Protecteur du citoyen qui a l'État devant lui. C'est pour à peu près tous les cas. Je sais comme député - pas tous les jours, mais régulièrement - que, dans nos bureaux de comté, on aime savoir que la commission est là. On aimerait savoir si elle est en mesure de répondre à ces demandes, car on ne sait pas où donner de la tête.

M. Bédard: Je me ferai un plaisir et un devoir de mentionner l'avis de l'Opposition dans les demandes au Conseil du trésor, non seulement au niveau des ressources nécessaires pour l'adjonction de nouvelles responsabilités, mais, comme le disait madame, des ressources qui permettraient un rattrapage certain.

M. Marx: Si je comprends bien, le ministre ne peut plus blâmer maintenant le gouvernement précédent, parce que le gouvernement précédent a fait adopter la loi.

M. Lalonde: Je n'ai pas fait de politique, moi.

M. Marx: Non, non. Le gouvernement libéral précédent a adopté la loi et c'est le ministre actuel qui l'administre depuis ce temps. Si je comprends bien la réponse de Mme la présidente, au fil des années, la commission a eu de nouvelles charges, mais moins de ressources pour faire face à ces nouvelles charges. Je pense, par exemple, que chaque fois qu'on a amendé la charte, lorsqu'on a ajouté l'orientation sexuelle ou les handicapés, la commission n'a jamais eu de ressources supplémentaires pour faire face à ces nouvelles responsabilités. Donc, aujourd'hui, la commission se trouve dans une situation dite d'inadéquation. Est-ce que c'est ça la conclusion?

M. Bédard: II y a aussi le fait qu'on accomplit un très bon travail d'information et d'éducation, ce qui fait que les gens commencent à connaître la commission et se plaignent de plus en plus à la commission. Enfin, c'est l'ensemble de la situation. Mais, effectivement, le fait d'avoir ajouté les personnes handicapées et l'orientation sexuelle, est important. La discrimination des personnes handicapées est un sujet important.

Il faut trouver le moyen de faire globalement le point là-dessus.

M. Marx: Pour que tout le monde comprenne, pour les fins du journal des Débats, comment cela se traduit-il en pratique? Si je comprends bien, maintenant, quelqu'un va déposer une plainte devant la commission et ça prendra des mois pour que la commission entende l'enquête, peut-être même des années. Est-ce que le ministre entend faire quelque chose? Il veut humaniser la justice, il nous le dit depuis six ans, mais c'est déshumaniser la justice que de laisser les choses traîner comme ça.

M. Bédard: Nous allons faire, je dois vous le dire, les mêmes efforts que nous avons faits au niveau des tribunaux judiciaires, ce qui nous a permis de constater, comme vous l'avez vu, la diminution dans les délais d'audition. Je crois que, avec de la ténacité, nous serons capables d'obtenir les mêmes résultats.

M. Marx: Je m'excuse, M. le Président, mais ça me fait rire. Depuis six ans, on recule; maintenant, on va se rattraper.

M. Bédard: Au contraire.

M. Marx: Est-ce que vous avez un programme de rattrapage ou si ce sont seulement des voeux pieux?

M. Bédard: Je viens de vous l'expliquer.

M. Marx: Expliquez-moi ce que vous allez faire pour raccourcir les délais à la

Commission des droits de la personne. Cela prend déjà des années. Savez-vous...

M. Bédard: Par des ressources... M. Marx: Un instant.

M. Bédard: Vous me le demandez, je vous le dis, c'est par des...

M. Marx: Non, un instant, je vais vous donner un exemple concret.

M. Bédard: Si vous ne me donnez pas d'exemple, ma réponse sera la même. Je vous l'ai dit, c'est par des ressources additionnelles. Puisque vous me demandez de dévoiler ma stratégie, je crois que le moment le plus indiqué pour faire le point une fois pour toutes sur ce sujet sera à l'occasion des amendements qui seront apportés à la charte. Cela représentera sûrement de nouvelles responsabilités, de nouveaux droits. Avec ce dossier, non seulement nous apporterons les ressources nécessaires pour l'augmentation du volume et des responsabilités, mais, également - je vous l'ai dit et je le répète - nous essaierons d'obtenir des ressources additionnelles pour permettre le rattrapage dont a parlé Mme la présidente.

M. Marx: Dans les crédits...

M. Bédard: Là-dessus, concernant le rattrapage, le dossier est prêt. Je ne peux pas vous en dire plus pour le moment.

M. Marx: Ce n'est pas nécessaire de nous en dire plus parce que, dans les crédits prévus pour l'an prochain, on ne fera pas beaucoup de rattrapage. On a déjà publié des crédits, on ne voit pas de rattrapage. Maintenant, vous allez donner plus de responsabilités à la commission et vous avez un plan de rattrapage.

M. Bédard: Les crédits sont préparés presque un an d'avance et les amendements n'étaient pas prêts. Je vous l'ai dit, nous allons faire le point et sur les amendements et sur les problèmes de rattrapage, l'ensemble des ressources financières nécessaires au niveau de la commission à cette occasion.

M. Marx: Les crédits sont préparés un an d'avance.

M. Bédard: Probablement que, comme pour les délais judiciaires, vous n'aurez qu'à me féliciter l'année prochaine pour le travail accompli et les améliorations apportées.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Chapleau. (22 h 45)

M. Kehoe: Mme la présidente, vous avez dit qu'une des activités de la commission, c'est l'analyse de tous les projets de loi surtout ceux soumis sans doute par le ministre de la Justice. Quels sont les résultats de ces analyses? Qu'est-ce que vous faites de ces analyses? Est-ce que vous faites des recommandations au ministre? Quand le projet de loi soumis par le ministre de la Justice vient à l'encontre de la charte, quelle est l'expérience vécue à ce jour?

M. Bédard: Les analyses de ces projets de loi que nous faisons ne portent pas précisément ou ne portent pas plus sur les projets de loi qui sont déposés par le ministre de la Justice, mais sur tous les projets de loi. Enfin, nous examinons tous les projets qui sont déposés. Il y a certaines années où il y en a plusieurs qui concernent la Charte des droits et libertés de la personne. Il y a d'autres années - je ne sais pas exactement pourquoi - où les projets semblent moins impliquer la charte ou peut-être est-on moins attentif... Non, ce n'est pas cela.

En fait, ce que nous faisons, c'est que nous envoyons nos analyses au président de l'Assemblée nationale, au ministre concerné et au ministre de la Justice. Maintenant, c'est variable. Il y a parfois des recommandations que nous faisons qui sont des recommandations aux termes de l'esprit de la charte ou de ce que nous croyons être la meilleure façon de répondre au principe de la charte. Je devrais pouvoir vous répondre plus précisément. Mais cela dépend. Il y a certaines recommandations que nous faisons qui sont reconnues ou acceptées et d'autres qui ne semblent pas...

M. Kehoe: Quand vous faites une recommandation, vous dites que c'est évident que cela va à l'encontre de la charte elle-même. Est-ce que, dans la plupart des cas, la loi est changée ou si le ministre change... Je ne me le rappelle pas, mais je pense qu'il y a plusieurs exemples.

M. Marx: Cette année, il n'a pas changé. La Loi sur la sécurité routière n'a pas été modifiée malgré l'avis de la commission.

M. Kehoe: Oui, justement.

M. Marx: II n'a pas donné suite à beaucoup de recommandations de la commission cette année ou l'an dernier.

M. Bédard: Cette année, vous allez remettre le rapport. Nous avons donné suite à plusieurs recommandations de la commission concernant tous les cas de discrimination qui pouvaient exister et qui concernaient le droit de la famille entre autre et, dans la loi no 18, nous faisons disparaître toute une série de cas de discrimination que nous sommes en train d'étudier d'ailleurs.

M. Marx: Vous n'avez pas donné suite à la recommandation de la commission pour qu'il y ait un procès ouvert, des auditions.

M. Bédard: Nous avons eu effectivement une discussion ici - je pense que tout le monde se le rappelle - et elle va se continuer à l'Assemblée nationale, sur une des recommandations de la commission, à savoir qu'en matière familiale, les procès devaient être publics, sauf exception. J'ai exprimé très clairement ma conviction que, dans ce domaine, nous croyons que, quand il s'agit de matière familiale, d'affaires strictement privées - c'est ce que nous avons proposé et ce que nous continuons de défendre - la règle générale devrait être le huis clos, sauf exception, à savoir qu'il y ait des audiences publiques lorsque la demande est faite par les personnes qui sont concernées par le règlement de leurs affaires privées et que le juge jugera bon qu'il en soit ainsi dans le meilleur intérêt de la justice. Alors, je crois que ce débat, nous allons continuer de l'avoir en Chambre au cours de la présente semaine.

M. Marx: C'est le débat qu'on va avoir jeudi après-midi...

M. Bédard: C'est ma conviction.

M. Marx: ... et je vais vous prouver qu'avec votre...

M. Bédard: Avec tout le respect que j'ai...

M. Marx: ... politique, l'encombrement à la Cour supérieure de Montréal sera encore pire. On ne va pas discuter. C'est jeudi après-midi.

M. Bédard: Vous arrivez avec des sujets qui sont complètement à part.

M. Marx: Je peux vous expliquer cela maintenant, si vous le voulez. Mais si vous voulez attendre jusqu'à jeudi après-midi...

M. Bédard: Si vous voulez mêler les pommes et les oranges, les délais et les problèmes de la commission...

M. Marx: C'est vous qui avez commencé.

M. Bédard: Sur le sujet qui concerne d'une façon précise Mme la présidente de la Commission des droits de la personne, effectivement, la position gouvernementale est que, quand il s'agit de matière familiale, comme on en a décidé à l'unanimité, à un moment donné, en ce qui a trait à la Loi sur la protection de la jeunesse, quand il s'agissait des jeunes, nous croyons qu'il y a lieu d'établir le huis clos comme règle générale, tout en permettant, lorsque demande en est faite, qu'il y ait audiences publiques si le juge croit qu'il y va de l'intérêt public, et je le dis, tout en respectant et l'idée qui a été émise par l'Opposition et la recommandation faite par la Commission des droits de la personne, je pense que c'est vraiment une philosophie ou une manière de voir les choses.

M. Marx: Mais notre position, M. le ministre, c'est qu'une des parties pourrait demander le huis clos et que ce devrait être accordé sur demande par le juge.

M. Bédard: Oui, je sais. Vous avez d'ailleurs déposé un amendement dans ce sens-là à l'Assemblée nationale.

M. Marx: C'est ça, nous avons déposé un amendement et nous allons le discuter jeudi après-midi. Maintenant, la commission fait l'analyse des projets de loi. On a discuté de ça et vous avez donné suite à très peu de recommandations. Vous n'avez pas donné suite aux recommandations de cette année de la commission pour des raisons...

M. Bédard: Écoutez, n'essayez pas de laisser une impression qui ne reflète pas la réalité. Il arrive très rarement, en fait, qu'il y ait des projets de loi où il y a un "nonobstant la charte." Très rarement.

M. Marx: Mais, onze fois depuis 1977, je trouve que c'est beaucoup.

M. Bédard: À certaines occasions...

M. Marx: La Saskatchewan a la même clause et elle n'a jamais été utilisée.

M. Bédard: ... c'est fait à l'unanimité de l'Assemblée nationale, comme dans le cas de la protection de la jeunesse.

M. Marx: Oui, mais on ne peut pas bloquer un projet de loi parce que...

M. Bédard: Je pourrais vous donner d'autres exemples également dans le cas du projet de loi concernant le travail rémunéré dans les établissements de détention où, à l'unanimité de l'Assemblée nationale, nous avons également dû avoir une clause "nonobstant." Il ne faut quand même pas essayer de tirer des conclusions qui ne seraient pas correctes.

M. Lalonde: M. le Président, je pense...

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: ... que le ministre ne fait pas justice à l'histoire. Lorsqu'il dit qu'à l'unanimité, c'est-à-dire avec le consentement de l'Opposition, permission a été donnée au gouvernement de faire un accroc ou de suspendre l'application de la charte, il devrait, en toute justice, dire que l'Opposition, dans ces cas-là, est appelée à déterminer son vote sur l'ensemble du projet de loi. Elle peut voter pour un projet de loi, même s'il contient cet accroc, à cause de la prépondérance des autres mesures que l'Opposition supporte ou appuie.

M. Bédard: À cause de tout le projet de loi. D'accord.

M. Lalonde: Mais je pense qu'on doit répéter ici le souhait de l'Opposition, à savoir qu'une expression d'opinion de la commission, en ce qui concerne l'application de la charte à un projet de loi ou l'exception que le gouvernement veut apporter, devrait en principe, comme présomption presque juris et de jure, avoir la force, la puissance la plus totale à l'égard d'un gouvernement. C'est le souhait que l'Opposition fait.

M. Bédard: Je partage cette manière de voir exprimée par le député de Marguerite-Bourgeoys. Je suis prêt à convenir, comme il l'a dit, que, dans certains projets de loi,

étant donné l'ensemble des mesures, l'Opposition peut, à certains moments, voter pour le projet de loi sans nécessairement avoir été d'accord sur le "nonobstant", comme il est arrivé dans certaines situations que l'Opposition, lors de l'étude - cela a pu arriver à l'Opposition présente comme à l'Opposition lorsque nous y étions - après analyse de la situation, ait également été d'accord sur l'opportunité d'y aller d'une clause "nonobstant". Cela a été le cas, par exemple, concernant la Loi sur la protection de la jeunesse où tout le monde même là-dessus était d'accord; également, je me le rappelle pour l'avoir défendu, dans la loi concernant le travail rémunéré où on avait eu une discussion assez large d'un problème assez complexe. Mais, comme le dit le député de Marguerite-Bourgeoys, c'est clair qu'il y a des situations où l'Opposition présente, comme lorsque nous étions dans l'Opposition, vote pour l'ensemble d'un projet de loi sans nécessairement voter pour une clause "nonobstant" qui y est contenue.

M. Lalonde: Si le ministre me le permet, je voudrais prendre la parole. Ce n'est pas pour clore le débat, ce n'est pas à moi de le clore mais, en ce qui me concerne, ce serait ma dernière intervention là-dessus. Si le ministre se souvient bien, la loi 1, qui est devenue la loi 101, dans son projet, contenait justement cette exception et nous l'avons combattue. Nous avons eu l'appui de nombreux organismes comme les syndicats, par exemple, et, en définitive, cette clause a été retirée.

L'application de la charte n'a pas empêché l'application très large de la loi 101 avec tous les effets bénéfiques que le gouvernement y voyait comme, par exemple, la francisation des entreprises. Je pense que le pari que le gouvernement devrait faire chaque fois est de laisser à la Charte des droits et libertés de la personne sa pleine force quitte, éventuellement, à l'expérience, à réviser sa position.

M. Bédard: En termes de position, comme ministre de la Justice, les "nonobstant" doivent être des cas très exceptionnels. Une politique générale doit être nécessairement dans le sens du respect de la Charte des droits et libertés de la personne. Le député de Marguerite-Bourgeoys conviendra également avec moi qu'il arrive que nos légistes et nos experts, en termes de législation, ne partagent pas nécessairement -j'entends du point de vue juridique l'analyse juridique qui est faite par la commission; avec tout le respect que j'ai pour les membres de la commission et leur expertise, il existe aussi, on le sait, d'autres expertises. Quand on évolue dans le secteur juridique, à un moment donné, des choix doivent être faits tout en étant respectueux du professionnalisme de chacun.

M. Lalonde: Enfin, pour revenir là-dessus, j'aimerais exprimer, à l'égard de Mme la présidente de la commission, une certaine gêne. Nous sommes appelés, une fois par année, à étudier les crédits des ministères et des organismes qui relèvent de ces ministères. Vous, avec le personnel que vous dirigez - j'allais dire 24 heures par jour, mais c'est sûrement non loin de 24 heures par jour dans les préoccupations - 52 semaines par année, faites face à toutes sortes de problèmes pour appliquer de la manière la plus efficace possible le mandat que vous avez reçu.

Je suis gêné, d'une année à l'autre, de ne consacrer que quelques minutes à ce que vous avez probablement à nous dire, mais j'ai trouvé un truc. J'aimerais vous demander ce que vous auriez l'intention de nous dire, que vous ne nous avez pas dit encore, que vous pourriez vous reprocher de ne pas avoir dit si jamais vous aviez un problème à l'esprit et au sujet duquel vous vous dites: II est tard et on n'a que quelques heures à consacrer au budget; la fonction que j'exerce est beaucoup plus importante que ces quelques minutes. Auriez-vous des inquiétudes à exprimer? C'est notre devoir de vous donner cette ouverture et, si vous me le permettez, c'est aussi votre droit, de nous en informer. (23 heures)

M. Bédard: Si je résume, ce n'est peut-être pas très original, mais cela se situe vraiment au niveau de l'amélioration de la charte et ceci par rapport aux amendements qu'on a déjà demandés. Je pense qu'on les a réfléchis et, comme je le disais tout à l'heure, on les a vraiment approfondis, je crois, à partir de notre expérience et des analyses qu'on a pu faire. Avoir les ressources nécessaires - je sais que je me répète un peu - pour donner suite à ce mandat qui est très large, très noble, très valable, c'est très important. Mais, effectivement, c'est frustrant d'avoir un mandat de cette nature et d'avoir l'impression parfois de ne pas pouvoir vraiment le remplir d'une façon aussi adéquate qu'on le voudrait. Les préoccupations dont je pourrais vous faire part sont des préoccupations globales, au niveau de la société, en termes de l'importance de faire passer ou de promouvoir les droits et libertés au niveau de l'ensemble de la société. Nous vivons dans une société pluraliste, de plus en plus hétérogène, de plus en plus riche. C'est très valable, c'est très intéressant. Il faut s'assurer que ces transformations sociales se font de la façon la plus respectueuse possible des droits individuels, mais des droits collectifs en même temps. C'est un équilibre très difficile, je pense, mais à la fois très

enthousiasmant comme idéal, d'arriver à avoir le respect de l'ensemble des droits collectifs dans le respect aussi des droits individuels de chacun.

C'est bien comme ça que nous percevons, que nous avons vu, entre autres, l'importance de cet acquis par rapport aux inégalités ou à la discrimination non pas seulement au cas par cas, mais à partir d'instruments qui soient capables de contrer la discrimination systémique et institutionnelle, si on veut. C'est ça.

M. Lalonde: Je ne veux pas conclure pour l'Opposition, le porte-parole pourra le faire, mais, en ce qui me concerne, j'aimerais vous remercier de la franchise avec laquelle vous nous avez informés de vos travaux, de vos préoccupations et j'aimerais que vous partiez d'ici avec la conviction que vous avez l'appui de la très modeste représentation que l'Opposition peut faire. C'est-à-dire que, dans le cadre de cette représentation des citoyens, vous avez l'appui, dans tout ce que vous faites pour promouvoir les droits individuels, des députés de l'Opposition et souvent nous pensons à vous, à la commission. Nous souhaitons que vous puissiez avoir et aussi que le gouvernement - ceci dit sans partisanerie -vous donne les moyens de poursuivre votre mandat et de promouvoir les libertés individuelles au Québec.

M. Marx: M. le Président, j'aimerais revenir sur quelques questions qui ont été soulevées par le député de Marguerite-Bourgeoys. Premièrement, en ce qui concerne l'utilisation de la clause "nonobstant", je n'ai pas vérifié avec toutes les provinces, dans les lois de toutes les provinces ou dans les lois d'autres pays, mais je sais que la Saskatchewan a une clause "nonobstant". Elle n'a jamais été utilisée. Au Québec, elle a été utilisée onze fois depuis que ce ministre de la Justice est au pouvoir. Je sais aussi qu'elle est souvent utilisée sans raison comme dans la Loi sur les jurés, je me demande pourquoi elle est utilisée. Si on veut qu'on ait une charte qui ait la primauté sur toute autre loi, c'est ce qu'il faut faire, c'est-à-dire laisser les juges décider si une loi enfreint la charte oui ou non et, si c'est nécessaire - c'est comme le député de Marguerite-Bourgeoys l'a dit - on peut revenir après avec une clause "nonobstant", le cas échéant.

Je pense qu'il faut faire le pari qu'on veut que la charte ait préséance sur toute loi et qu'il ne faut pas utiliser la clause "nonobstant" parce que c'est un précédent assez dangereux à utiliser. La première fois, c'est un peu difficile. La deuxième fois, moins difficile. Rendu à la douzième fois, c'est l'habitude. Le ministre a pris une mauvaise habitude. Il a peut-être été mal conseillé par ses légistes. De toute façon, ce ne sont pas les légistes qui mènent la boîte, j'espère. J'espère que c'est le ministre qui décide de la politique qu'on va suivre au Québec et d'utiliser une clause "nonobstant" ou de ne pas l'utiliser. C'est là une politique du ministère. Ce n'est pas une décision administrative, d'un légiste ou d'un étudiant en droit qui a fait un travail pour le ministère. C'est sa responsabilité de décider de ces questions. J'espère qu'à l'avenir, il va plutôt donner l'orientation lui-même que de nous dire ici: Mes légistes m'ont dit qu'il faut utiliser la clause "nonobstant".

M. Bédard: M. le Président, je ne relèverai pas les exagérations du député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Relevez-en une, s'il vous plaît!

M. Bédard: Chaque fois que des clauses "nonobstant" ont été introduites dans les lois, cela a fait l'objet d'une discussion très élaborée. Je l'ai dit tout à l'heure. Parfois, après analyse, même les membres de l'Opposition pouvaient être d'accord. Par ailleurs, non. D'autres occasions se sont présentées alors que l'analyse juridique faite par ceux qui ont justement comme fonction de me conseiller représentait une évaluation qui était différente de celle de la commission. Je crois que, dans le domaine juridique, il faut quand même convenir qu'il peut y avoir des équipes d'experts qui peuvent arriver à des conclusions différentes après analyse, tout en étant très respectueux les uns des autres. Dans ces cas, des décisions doivent se prendre et je les prends dans le sens de mes responsabilités. Il est clair qu'en ce qui me regarde, je crois effectivement - je l'ai dit et il n'est pas nécessaire de le redire - que les avis de la commission sont de toute première importance. Le respect et la protection des droits et libertés individuelles sont de toute première importance dans une société. Comme l'a dit Mme la présidente tout à l'heure, il y a toujours ce difficile travail qui consiste à concilier les libertés collectives, celles-ci s'exerçant dans le plus profond respect des libertés individuelles, mais il y a un travail...

M. Marx: Le ministre n'a pas compris...

M. Bédard: Je vous ai laissé parler, voulez-vous me laisser parler?

M. Marx: Vous parlez pour ne rien dire maintenant. Commencez à...

M. Bédard: S'il fallait...

M. Marx: Non, non, parce que ce n'est

pas la question que j'ai posée.

M. Bédard: ... vous arrêter toutes les fois que vous parlez pour ne rien dire, j'ai l'impression que les crédits dureraient environ une demi-heure.

M. le Président, comme l'a dit Mme la présidente, si je parlais pour ne rien dire, au moment où m'interrompait le député de D'Arcy McGee...

M. Marx: Ce n'est pas pour ne rien dire, mais vous ne répondez pas à ma question.

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre!

M. Bédard: ... je devrai en conclure que Mme la présidente parlait pour ne rien dire aussi. C'est le jugement du député de D'Arcy McGee...

M. Marx: Ce n'est pas ma question.

M. Bédard: ... puisque, effectivement, je me référais à ce qu'a dit Mme la présidente de la Commission des droits de la personne, il y a toujours un travail extrêmement difficile de conciliation de ce qu'on appelle les libertés collectives et également le respect des libertés individuelles, concernant la nécessité de ressources additionnelles, non seulement pour faire face à de nouvelles responsabilités qui peuvent être dévolues à la commission, mais pour faire du rattrapage par rapport à l'ensemble du travail qui augmente à la commission. Je crois que c'est un bon signe que le travail augmente, parce que, comme l'a dit Mme la présidente, il y a un travail d'information beaucoup plus grand qui se fait auprès de la population, donc, effectivement, des libertés nouvelles aussi qui ont été ajoutées, c'est-à-dire des amendements qui ont été apportés à la charte, par le présent gouvernement, qui augmentent, encore une fois, les protections des droits et libertés individuels dans certains secteurs concernant certains groupes. Sur le point particulier des ressources additionnelles pour le rattrapage, tel que je vous l'ai dit tout à l'heure, Mme la présidente, à l'occasion des amendements à la charte, nous allons trouver le moyen de constituer un dossier complet après avoir fait toutes les consultations normales entre la commission et le ministère sur ce sujet précis des ressources, de manière à pouvoir améliorer, je dirais presque d'une façon définitive, du moins très sensiblement la situation. Je vous remercie de votre présence ici, de votre disponibilité et de votre amabilité - je suis sûr d'exprimer la perception des membres de la commission -à répondre à toutes les questions qui vous ont été posées.

M. Marx: Peut-être le ministre a-t-il terminé l'étude de ce programme, mais l'Opposition n'a pas terminé.

M. Bédard: Je voudrais remercier Mme la présidente.

M. Marx: Elle va rester encore avec nous? Oui?

M. Bédard: Si vous avez d'autres questions. Votre collègue a semblé faire le tour de la situation. Vous-même, on a eu l'impression que vous y alliez d'une...

M. Marx: II a fait le tour pour lui-même, mais j'ai beaucoup de questions, M. le ministre, si ça ne vous dérange pas.

M. Bédard: Si vous avez d'autres questions...

Le Président (M. Desbiens): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Premièrement...

M. Bédard: ... est-ce que ce sont des questions adressées à Mme la présidente? C'est ça que je voulais dire.

M. Marx: Souvent, je vous pose des questions et c'est la présidente de la commission qui y répond.

M. Bédard: Je pense que nous avons fait entendre Mme la présidente à la demande même du député de Marguerite-Bourgeoys et j'en étais très heureux. Tout ce que je me permets de vous demander, c'est si vos questions s'adressent plutôt au ministre.

M. Marx: Aux deux. D'accord?

M. Bédard: Si elles s'adressent aux deux, je vais demander à Mme la présidente de demeurer disponible.

M. Marx: Pour revenir à la question que j'ai posée avant que le ministre présente ses remarques générales, souvent, on met "nonobstant" dans un projet de loi alors que ce n'est pas nécessaire. C'est-à-dire qu'abstraction faite de ce "nonobstant", c'est bien possible que les cours de justice décident que l'article n'enfreint pas la charte. Dans votre programme politique, il y a un article qui prévoit qu'un jour, au Québec, on va avoir une charte enchâssée dans la constitution. Donc, votre parti politique ne pense pas toujours à mettre "nonobstant" dans les projets de loi et dans les lois. C'est la même chose. Souvent, on écrit "nonobstant" dans les projets de loi alors que ce n'est pas nécessaire. Il faut

toujours laisser les juges décider si la loi enfreint ou n'enfreint pas la charte. Je pense que c'est ça le problème. On a fait ça dans d'autres juridictions, notamment en Saskatchewan, et ils n'y a pas eu de difficulté.

Je vais passer à une autre question que j'ai déjà abordée. Quand on parle des ressources à la commission, ça veut dire quoi en pratique? Un délai de quelques mois ou de quelques années? Aujourd'hui, quelqu'un qui va déposer une plainte à la commission va probablement recevoir une lettre, d'ici quelques semaines ou quelques mois, pour lui dire que l'enquête va commencer dans quelques mois et que, s'il ne peut pas attendre, il peut s'adresser aux cours de justice. Je pense que ce n'est pas une façon d'humaniser la justice, si votre but est d'humaniser la justice, de faire en sorte, depuis des années, que la commission ne puisse pas répondre aux demandes de la population. C'est déshumaniser la justice au Québec.

M. Bédard: Si vous voulez répéter votre sempiternel discours pour les fins du journal des Débats, allez-y.

M. Marx: C'est la vérité.

M. Bédard: Quelqu'un qui veut comprendre comprend vite et je pense que le député de Marguerite-Bourgeoys a compris très vite.

M. Marx: Je veux que le ministre comprenne que tout cela se traduit dans les faits. Les citoyens du Québec reçoivent des lettres de la Commission des droits de la personne disant: Votre enquête va commencer dans quelques mois et, entre-temps, si vous voulez, vous pouvez vous adresser aux cours de justice.

M. Bédard: Je le sais très bien et c'est dans ce sens que j'ai fait les représentations que je vous ai dites tout à l'heure. Si le besoin n'était pas présent ou si je croyais que le besoin n'est pas présent, je ne vous aurais pas fait les représentations que je vous ai faites tout à l'heure. Je ne vous le répéterai pas dix fois pour les fins du journal des Débats.

M. Marx: On verra l'an prochain, lors de l'étude des crédits. Vous pouvez demander à vos fonctionnaires de commencer à préparer les crédits de l'an prochain parce que cela commence un an d'avance.

M. Bédard: Attendez l'année prochaine, peut-être aurez-vous à me féliciter comme vous avez été en mesure de le faire concernant la réduction des délais de cour. (23 h 15)

M. Marx: J'ai une autre question. Mme la présidente a parlé de l'analyse des projets de loi. On a discuté cela. Elle a parlé aussi de l'analyse des lois antérieures à la charte. Je pense que la commission a déjà envoyé quelques études au ministre en ce qui concerne ces lois qui ont été adoptées avant la charte. Qu'est-ce que le ministre a fait de ces études? C'est une longue discussion entre le ministre, la présidente et le sous-ministre pour trouver la réponse à une brève question.

M. Bédard: J'étais distrait. Je ne vous écoutais pas.

M. Marx: II doit savoir ce qu'il a fait de ces rapports. Est-ce qu'il y a donné suite ou s'il n'y a pas donné suite? Est-ce qu'il les a lus?

M. Bédard: Je l'ai dit tout à l'heure. Je ne vais quand même pas me répéter. C'est évident qu'on n'a pas donné suite à toutes les recommandations faites par la commission. Je vous ai dit que, dans bien des lois...

M. Marx: Non, ce n'est pas...

M. Bédard: ... vous êtes à même de le constater... Dans la loi 18, nous avons fait disparaître beaucoup de discrimination.

M. Marx: Non, ce n'est pas cela ma question. Ce sont les lois...

M. Bédard: Concernant les lois antérieures...

M. Marx: C'est cela.

M. Bédard: ... il y a, à l'heure actuelle, un comité des affaires sociales et nous espérons que cela va déboucher sur des résultats concrets.

M. Marx: J'ai déjà reçu des études de la Commission des droits de la personne sur les lois adoptées avant la charte. D'accord? Est-ce que le ministre a reçu ces études et qu'est-ce qu'il en a fait?

M. Bédard: On a à corriger une foule de lois antérieures, de dispositions antérieures qui étaient discriminatoires. Vous le savez, vous avez étudié le projet de loi no 18 avec nous.

M. Marx: Mais cela ne vient pas d'une étude faite par la commission.

M. Bédard: Non, mais je veux dire au niveau de la...

M. Marx: Mme la présidente...

M. Bédard: Voyons donc! Concernant le droit de la famille, je pense qu'il y a des...

M. Marx: M. le ministre, vous ne suivez pas ce que je veux dire. La présidente a dit: On a fait l'analyse des lois antérieures.

M. Bédard: De certaines lois.

M. Marx: Une qui porte sur les antécédents judiciaires et l'autre sur la condition sociale. Ce sont les deux études que...

M. Bédard: Effectivement, c'est la même étude.

M. Marx: C'est la même étude.

M. Bédard: Effectivement, sur les antécédents judiciaires, nous n'y avons pas encore donné suite. Tout n'est pas fait.

M. Marx: C'est évident.

M. Bédard: Concernant les affaires sociales, il y a un comité, à l'heure actuelle, qui est sur pied et qui discute avec la commission.

M. Marx: L'étude sur les antécédents judiciaires, en quelle année a-t-elle été rendue publique?

M. Bédard: En 1981, au mois de juin.

M. Marx: Est-ce que c'est la seule étude que...

M. Bédard: Franchement, comme vous voyez, ce n'est pas un délai...

M. Marx: ... la commission a rendue publique?

M. Bédard: Durant 1981?

M. Marx: Non, depuis l'existence de la commission, sur cette question des lois adoptées avant la charte.

M. Bédard: Des études globales, il y a eu l'étude des lois relevant du ministère des Affaires sociales. C'était le premier bloc que nous avions fait et soumis. Effectivement, il y a eu un comité interne au ministère des Affaires sociales qui a été mis sur pied. Il y a eu des progrès qui ont été faits dernièrement, en particulier sur... Nous avons fait des recommandations spécifiques aussi sur la loi concernant les malades mentaux et les institutions psychiatriques. Ceci est aussi à l'étude.

M. Marx: Est-ce que le ministre a donné suite à quelques-unes de ces études?

M. Bédard: Un comité formel a été mis là-dessus, mais il n'y a pas eu de...

Mme la présidente elle-même dit qu'il y a des progrès qui ont été faits. Vous n'écoutez même pas les réponses.

Les amendements ne sont pas apportés encore.

Vous n'écoutez même pas les réponses. Comme vous avez pu le constater, peut-être pour les fins du journal des Débats où vous laissez l'impression que cela traînait très longtemps, c'est quand même le rapport du 19 juin 1981 et, à ce moment-là, nous étions, je crois, déjà... En fait, nous avions déjà réfléchi dans le sens qu'il y aurait des audiences plutôt que de procéder pièce à pièce au niveau d'amendements à la charte, qu'il y aurait lieu d'ouvrir l'ensemble de la charte avec des auditions de groupes afin d'essayer d'apporter toutes les améliorations possibles non seulement en fonction des lois à venir, mais, autant que ce sera possible, concernant aussi des lois antérieures. Dans les lois antérieures, il y a plusieurs représentations qui avaient été faites par la Commission des droits de la personne sur toutes les discriminations qui existaient dans le droit familial.

Je crois que nous sommes en mesure de dire que nous avons corrigé, effacé, fait disparaître une multitude de discriminations qui existaient, ce qui nous permet de parler, en tout cas en ce qui a trait au droit familial, de l'égalité juridique, non seulement de l'homme et de la femme, mais également au niveau de la direction morale et matérielle du foyer, et également des discriminations qui existaient aussi en ce qui a trait aux enfants. On se rappelle le système qui existait jusqu'à maintenant. Vous ne l'avez pas corrigé et pourtant ça existait depuis des années et des années. C'est impensable qu'une société n'ait pas fait plus vite cette correction concernant l'illégalité des enfants.

Rappelez-vous toutes les notions qui existaient et qui n'existeront plus dès que nous aurons terminé notre travail avec le projet de loi no 18 qui est présentement devant l'Assemblée nationale. Enfin va disparaître cette notion d'illégitimité, je pourrais dire plutôt d'illégalité des enfants à leur naissance, qui existait auparavant et qui n'existera plus maintenant.

Ce sont des améliorations sensibles, je pense, très importantes au niveau de l'administration de la justice et de l'humanisation de la justice. S'il y a quelque chose qui rejoint l'humain, c'est bien de faire en sorte que des lois placent les enfants sur un pied d'égalité à leur naissance, placent l'homme et la femme sur un pied d'égalité lorsqu'il s'agit de la direction morale et matérielle d'une famille et d'un foyer. S'il y a quelque chose qui rejoint l'humain, c'est bien ce secteur-là.

Le député de D'Arcy McGee pourra peut-être dire qu'il y a un retard à donner suite à certaines dispositions, mais il devra convenir qu'un travail fantastique a été fait au niveau de l'humanisation de la justice dans les domaines dont je viens de parler.

M. Marx: J'ai déjà dit que vous n'avez pas fait un travail fantastique.

M. Bédard: Je ne vous le demanderai pas, je n'attends pas que vous le disiez.

M. Marx: L'administration de la justice a pris un recul depuis que vous êtes en fonction.

M. Bédard: Vous le dites, mais vous n'êtes jamais capable de le prouver.

M. Marx: Ne me faites pas un procès d'intention.

M. Bédard: S'il y en a un qui fait un procès d'intention, c'est bien vous.

M. Marx: Le ministre a voulu faire son petit discours de fin de soirée, mais la question que je pose...

M. Bédard: M. le Président, il faudrait quand même se comprendre. Le député de D'Arcy McGee croit qu'il a le droit d'y aller de toutes les affirmations et de poser des questions. Lorsque vient le temps de répondre pour nous, il nous fait toujours le reproche que nous faisons un discours alors que nous essayons de répondre le mieux possible à ses interrogations.

Lui-même nous a dit, au début des travaux de cette commission, qu'il avait de la difficulté à trouver des questions, qu'il pensait que c'était beaucoup plus facile de répondre aux questions que de les poser.

M. Marx: Je vois que c'est l'inverse maintenant.

M. Bédard: II faisait la meilleure preuve de son inefficacité et, jusqu'à maintenant, peut-être moins dans le programme qui nous concerne présentement, mais, dans les autres programmes que nous venons d'étudier, tout ce que nous entendons jusqu'à maintenant, c'est du potinage, sauf dans le programme où il a évoqué, je crois, des choses sérieuses, des inquiétudes sérieuses concernant l'ensemble des droits et libertés. D'accord, mais, à part ce programme-là, vous avez été le potineur en chef.

M. Marx: Puis-je poser ma question? Le ministre ne répond pas à ma question, il donne une réponse tellement générale qu'il est en train de noyer le poisson.

M. Bédard: Je vous ai dit...

M. Marx: Ma question est très simple et très précise. Puis-je la poser? La commission a un droit spécifique, en vertu de l'article 67, paragraphe d) de la charte, qui dit que la Commission des droits de la personne doit "procéder à l'analyse des lois du Québec antérieures à la présente charte et qui lui seraient contraires et faire au gouvernement les recommandations appropriées." La question que j'ai posée est simple. J'aimerais savoir - Mme la présidente a répondu à cette question - quelles recommandations la commission a faites en vertu du paragraphe d) de l'article 67.

M. Bédard: Mme la présidente vous l'a dit concernant les antécédents judiciaires et dans le domaine des affaires sociales.

M. Marx: Oui, mais maintenant...

M. Bédard: Cela fait à peu près dix fois qu'elle vous le dit. Je vous ai dit que, jusqu'à maintenant, nous n'avions pas donné suite aux recommandations faites par la commission dans le domaine concernant les antécédents judiciaires. Je vous le dis très simplement.

M. Marx: Si vous lisez le paragraphe d) de l'article 67, vous allez voir qu'il est bien écrit "à l'analyse des lois du Québec", donc, toutes les lois du Québec. J'aimerais savoir si la commission, avec les ressources dont elle bénéficie, peut faire tout ce travail. Cela fait déjà six ans et la commission, si je comprends bien, n'avait les ressources que pour étudier deux ou trois lois et quelques règlements. J'aimerais savoir s'il sera possible, étant donné les ressources de la commission, d'accomplir ce devoir qui est prévu au paragraphe d) de l'article 67.

M. Bédard: Vous ne voulez vraiment pas comprendre. Je ne sais pas si vous pensez qu'en vous répétant continuellement dans le journal des Débats ce sera plus clair. Vous l'avez demandé et j'ai très bien compris le message de Mme la présidente, si vous ne l'avez pas compris. Il y a un manque de ressources à la commission qui, s'il était comblé, permettrait d'offrir plus de services aux citoyens, qui permettrait, entre autres, un rattrapage qui a été évoqué par Mme la présidente, qui permettrait sans doute d'accorder encore plus d'efforts et plus de temps à l'analyse des lois antérieures. Le message de Mme la présidente est très clair. J'ai assuré Mme la présidente qu'à l'occasion des amendements qui seront apportés à l'ensemble de la Charte des droits et libertés de la personne nous essaierions non seulement de faire en sorte qu'il y ait les ressources nécessaires aux nouvelles

responsabilités, mais qu'on puisse également aller en chercher. Là-dessus, j'ai l'appui de l'Opposition ou, en tout cas, celui de votre collègue, le député de Marguerite-Bourgeoys, qui est beaucoup plus pratique, et sûrement celui de la présidente et des membres de la Commission des droits de la personne pour qu'on essaie de régler ou d'améliorer la situation et pour permettre du rattrapage. C'est ce que nous allons faire.

M. Marx: Mais les devoirs de l'article 67, paragraphe d), ne dépendent pas des amendements à la charte, pourquoi n'avez-vous pas pensé à cela il y a quelques mois?

M. Bédard: Mme la présidente vous l'a dit tout à l'heure. Même si vous le dites dix fois, on manque...

M. Marx: Mais pourquoi n'avez-vous pas pensé à cela avant aujourd'hui?

M. Bédard: Mme la présidente vous a dit qu'il y a un manque de ressources; je vous ai dit, tout à l'heure, dans quel sens nous...

M. Marx: Mais pourquoi attendre à aujourd'hui pour penser à cela?

M. Bédard: Si vous parlez tout le temps... Je vous ai dit, tout à l'heure, dans quel sens nos représentations seront faites. En ce qui me concerne, cela clôt cette discussion. Si vous voulez continuer, continuez.

M. Marx: Vous dites que le fait d'augmenter les ressources va dépendre des amendements que vous allez apporter. C'est déjà dans la charte de 1975, pourquoi ne pas avoir pensé à donner plus de ressources à la commission pour qu'elle puisse compléter son travail?

M. Bédard: Vous m'amenez à faire des considérations que je me refuse à faire. Lorsque cette commission a été mise sur pied, elle devait normalement avoir... Vous ne manquez pas une seule raison de rappeler...

M. Marx: C'est la faute de qui?

M. Bédard: ... et c'est très heureux qu'elle ait été mise sur pied par l'administration que vous évoquez. Tout ce travail, dont vous parlez et qui était à faire, était présent au moment où la commission a été mise sur pied. Même au départ, on n'avait peut-être pas les ressources nécessaires pour faire tout le travail qui était dévolu à la commission.

M. Marx: Les libéraux ont fait adopter la charte et tout de suite après, ils ont perdu les élections.

M. Bédard: Je n'en ferai pas une question purement politique.

M. Marx: J'ai une autre question, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): Une dernière question, puisqu'il est 23 h 29.

M. Bédard: Une dernière répétition. Allez-y. (23 h 30)

M. Marx: J'ai quelques questions. Non, ce ne sont pas des répétitions. À la fin du compte, j'ai compris que le ministre n'a pas voulu donner de ressources additionnelles à la commission avant qu'il ne dépose ses amendements.

M. Bédard: Vous avez mal compris, encore une fois. On n'obtient pas toujours ce qu'on veut.

M. Marx: Je peux poser ma question sur la commission. Est-ce que la commission a une procédure précise en ce qui concerne les gens qui viennent devant elle?

M. Bédard: Procédure d'enquête?

M. Marx: Procédure d'enquête, procédure d'audition. Est-ce que c'est une procédure précise, établie? Est-ce que cela varie d'une cause à l'autre? Est-ce que c'est publié?

M. Bédard: Ce n'est pas publié. Nous avons une proposition, justement, de publication de ces procédures d'enquête qui est devant un comité de règles de pratique à l'intérieur de la commission. Nous avons effectivement, à partir d'expériences, ajusté et, si vous voulez, amélioré nos procédures d'enquête en cours d'année. Nous avons fonctionné à partir de deux types de procédures d'enquête: l'une inquisitoire. Pendant les premières années de la commission, cela a été fait surtout à partir de procédures inquisitoires. Maintenant, nous fonctionnons de plus en plus à partir de méthodes d'enquête de type contradictoire. Les procédures, encore une fois, seront rendues publiques incessamment. Elles sont devant un comité de règles de pratique.

M. Marx: Des procédures contradictoires, cela veut dire que les personnes sont en présence...

M. Bédard: Les deux parties sont en présence.

M. Marx: ... avec leurs avocats, le cas

échéant.

M. Bédard: Si elles ont des avocats, oui. Ce n'est pas obligatoire.

M. Marx: C'est devant... M. Bédard: Un enquêteur.

M. Marx: ... un enquêteur de la commission.

M. Bédard: Ou une enquêtrice.

M. Marx: Une enquêtrice, oui, devant la commission. Quand c'est contradictoire, est-ce à huis clos ou est-ce que la partie qui a déposé la plainte peut être présente?

M. Bédard: Oui, c'est ça. La méthode contradictoire est la méthode où les parties en cause sont en présence l'une de l'autre. Là, je ne sais pas si vous voulez le détail de nos procédures qui sont, encore une fois, à l'étude en ce moment en termes de raffinement. Normalement, les témoins peuvent être présents durant l'ensemble des débats, mais il arrive fréquemment que, pour toutes sortes de considérations, les personnes en présence sont uniquement le ou la mise en cause ou le ou la plaignante et les témoins viennent témoigner devant les deux parties et la personne qui fait l'enquête.

M. Marx: J'aimerais juste poser une autre question à la présidente de la commission. Je pense que cela cause, je ne dirais pas un certain préjudice, mais des problèmes aux gens qui se présentent devant la commission parce qu'ils ne connaissent pas la procédure de la commission et, donc, ils ne savent pas comment l'enquête va se dérouler.

M. Bédard: C'est-à-dire que, bien sûr, au niveau de l'accueil, ils se font expliquer la procédure d'enquête et la procédure d'accueil. Mais je suis tout à fait d'accord avec vous: ce sera de beaucoup préférable quand toutes ces procédures seront publiées et disponibles.

M. Marx: L'accueil, ce n'est pas la mise en cause. Ce n'est pas la personne qui est l'objet de la plainte.

M. Bédard: Au niveau de l'enquête aussi, évidemment, des explications sont données.

M. Marx: C'est ça, oui. Est-ce que vous avez l'intention de publier la procédure, disons, d'ici à quelques mois?

M. Bédard: Oui.

M. Marx: Oui.

M. Bédard: Comme je vous le dis, c'est devant...

M. Marx: Ce sera un règlement interne? Ce sera un règlement de la commission qui sera, comment dirais-je? adopté par le lieutenant-gouverneur en conseil ou est-ce que ce sera un règlement interne de la commission?

M. Bédard: Cela pourrait être l'un ou l'autre, en l'occurrence. Ce n'est pas obligatoire que ce soit l'un ou l'autre.

M. Marx: Oui, cela peut être l'un ou l'autre.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'élément 1 est adopté?

M. Marx: Non.

Le Président (M. Desbiens): La commission élue permanente de la justice ajourne ses travaux à demain matin, 10 heures, au salon rouge.

M. Marx: Est-ce que vous serez ici demain matin? Oui.

(Fin de la séance à 23 h 35)

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