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Version finale

32nd Legislature, 3rd Session
(November 9, 1981 au March 10, 1983)

Tuesday, June 8, 1982 - Vol. 26 N° 146

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude du projet de loi no 62 - Loi concernant la Loi constitutionnelle de 1982


Journal des débats

 

(Quinze heures quatorze minutes)

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, messieurs: La commission élue permanente de la justice se réunit pour l'étude article par article du projet de loi no 62, Loi concernant la Loi constitutionnelle de 1982.

Les membres de la commission sont: MM. Beaumier (Nicolet), Bédard (Chicoutimi), Brouillet (Chauveau), Charbonneau (Verchères), Dauphin (Marquette), Juneau (Johnson), Kehoe (Chapleau), Mme Lachapelle (Dorion), MM. Lafrenière (Ungava), Marx (D'Arcy McGee), Paradis (Brome-Missisquoi).

Les intervenants sont: MM. Bisaillon (Sainte-Marie), Bissonnet (Jeanne-Mance), Blank (Saint-Louis), Boucher (Rivière-du-Loup), Brassard (Lac-Saint-Jean), Ciaccia (Mont-Royal), Dussault (Châteauguay), Martel (Richelieu) et Pagé (Portneuf).

Une motion serait dans l'ordre pour la nomination d'un rapporteur ou d'une rapporteuse.

Mme Lachapelle: Puis-je proposer le député d'Ungava comme rapporteur de la commission?

Le Président (M. Desbiens): Y a-t-il consentement?

Des voix: Unanimement.

Le Président (M. Desbiens): Ce sera donc le député d'Ungava qui agira comme rapporteur.

M. le ministre, avez-vous des remarques préliminaires? (15 h 15)

M. Bédard: M. le Président, comme nous en sommes à l'étude du projet de loi article par article, ce n'est pas notre intention de recommencer le débat de deuxième lecture. Tout le monde a été à même de constater qu'il y avait des manières différentes de voir les choses et le présent projet de loi en est la meilleure illustration. J'ai déjà informé mon collègue qu'il y aurait un amendement qui serait apporté qui ne change en aucune façon la nature ou le principe du projet de loi. Il s'agit, tout simplement, d'un amendement qui a pour objet de couvrir les projets qui avaient été déposés avant le 17 avril sans la clause "nonobstant" ou ceux qui pourraient être adoptés incessamment sans avoir la clause en question. La raison en est très simple; c'est que, je pense, il était normal que nous ne mettions pas ces clauses avant que le débat de fond ait lieu sur la loi 62 et qu'elle soit adoptée. Naturellement, il y a certains projets de loi qui comportent ces clauses "nonobstant", parce qu'il était assez évident que ces lois seraient adoptées une fois le projet de loi no 62 adopté. C'est le seul but de l'amendement qui est purement technique.

Au niveau de l'article 1, M. le Président...

Le Président (M. Desbiens): On devrait en rester aux remarques préliminaires.

M. Bédard: Oui, bon.

Remarques préliminaires M. Herbert Marx

M. Marx: Bon, j'ai des remarques préliminaires à faire. Je ne veux pas reprendre tout le débat qu'on a eu en deuxième lecture, mais j'aimerais donner notre position d'une façon concise et précise.

Le projet de loi no 62 soustrait les lois québécoises à la protection relative aux libertés fondamentales, au droit à l'égalité et aux garanties juridiques inscrites dans la constitution canadienne et exige l'accord de l'Assemblée nationale pour l'adoption du critère relatif à la langue maternelle comme condition d'admission à l'école anglaise.

À notre avis, le projet de loi no 62 diminue les droits des Québécois et affaiblit la protection de leurs libertés fondamentales. Notre opposition porte essentiellement sur ce premier aspect de la loi, lequel indique bien le refus du gouvernement péquiste d'assurer aux Québécois la protection constitutionnelle de leurs libertés fondamentales, essentiellement, de la liberté de conscience, de religion, de pensée, de croyance, d'opinion, de presse, de communication, de réunion pacifique et d'association. Voir l'article 2 de la charte constitutionnelle.

Il faut noter que la Charte québécoise des droits et libertés de la personne, sanctionnée le 27 juin 1975, n'assure aucune protection de ces libertés fondamentales. Voir, par exemple, les articles 1 à 8 inclusivement et aussi les articles 52 et 87 de la charte.

En effet, l'article 3 de la charte québécoise, qui traite de ces libertés, est de

caractère déclaratoire et ne peut de ce fait donner lieu à une sanction légale. Je cite l'article 3: "Toute personne est titulaire des libertés fondamentales telles la liberté de conscience, la liberté de religion, la liberté d'opinion, la liberté d'expression, la liberté de réunion pacifique et la liberté d'association". Mais, comme je viens de le dire, il n'y a pas de sanction et toute loi québécoise a préséance sur cet article 3. En d'autres mots, s'il y a une contradiction entre cet article 3 et un autre article dans une loi québécoise, c'est la loi ordinaire qui a préséance. Sur ce point, la charte fédérale aurait donc pu renforcer considérablement la protection des Québécois contre toute atteinte à leur liberté fondamentale. Il faut dire aussi que s'il y a un règlement d'une ville qui va à l'encontre de l'article 3 de la charte québécoise, c'est le règlement de la ville qui aurait préséance parce que l'article 3 de la charte n'a pas préséance sur des lois ou des règlements. Il faut également noter que la charte québécoise des droits ne s'applique qu'aux lois qui ont suivi son adoption en juin 1975. La charte fédérale a, quant à elle, un effet rétroactif sur toutes les lois existantes de Législature provinciale et du Parlement fédéral. On peut ajouter aussi: sur les règlements municipaux et d'autres règlements et ordres en conseil.

De plus, les garanties de la loi québécoise peuvent être écartées sans limite dans le temps dans toute loi québécoise comme le prévoit l'article 52 de la charte québécoise. Il faut noter aussi que la charte fédérale permet certaines dérogations pour cinq ans. Depuis 1976 et sur la base de l'article 52 de la charte québécoise, le gouvernement a soustrait au moins neuf lois à l'application de la charte québécoise. Enfin, la charte québécoise actuelle peut être modifiée comme toute autre loi ordinaire votée par l'Assemblée nationale et selon les mêmes règles. C'est une loi statutaire par opposition à une loi constitutionnelle. J'aimerais ajouter tout de suite que la charte québécoise était déjà modifiée; au lieu d'utiliser la clause "malgré" dans la charte québécoise, on a modifié directement la charte québécoise pour qu'il n'y ait pas contradiction entre une loi et la charte.

J'ai dit que la charte québécoise est une loi statutaire par opposition à la charte fédérale qui est une charte constitutionnelle. Il y a sûrement une différence entre ces deux chartes. Par exemple, dans l'arrêt Curr c. la reine 1972, rapport de la Cour suprême à la page 899, le juge Laskin a écrit en ce qui concerne la déclaration canadienne des droits qui est aussi une loi ordinaire: "À supposer que grâce à la disposition qui se trouve dans la déclaration canadienne des droits ne s'en voit privé que par l'application régulière de la loi, il est possible de contrôler le fonds de la législation fédérale, question qui n'a pas directement été soulevée dans l'affaire Régina contre Drybones, il faudrait avancer des raisons convaincantes pour que la cour soit fondée à exercer en l'espèce une compétence conférée par la loi, par opposition à une compétence conférée par la constitution pour enlever tout effet à une disposition de fond dûment adoptée par un Parlement compétent à cet égard en vertu de la constitution et exerçant ses pouvoirs conformément aux principes du gouvernement responsable, lequel constitue le fondement de l'exercice du pouvoir législatif en vertu de l'acte de l'Amérique du Nord britannique".

C'est-à-dire que le juge Laskin dans cet arrêt - il parlait pour la Cour suprême du Canada - a dit clairement qu'une charte constitutionnelle a plus de poids qu'une charte qui est une loi ordinaire telle que la charte québécoise. Pour cette raison, et si on prend seulement cette raison, il va de soi qu'une charte constitutionnelle sera plus protectrice des droits et des libertés des Québécois qu'une charte comme la charte québécoise qui est une loi ordinaire.

En somme, la charte québécoise des droits adoptée sous un gouvernement libéral, bien que donnant une protection très efficace contre la discrimination pour cause de race, sexe, âge, déficience mentale ou physique, etc., souffre, sur cette question des libertés fondamentales, de certains handicaps par rapport à la charte fédérale. Il faut ajouter que, bien sûr, nous avons une Commission des droits de la personne devant laquelle on peut déposer une plainte concernant la discrimination. C'était très efficace depuis quelques années. C'est moins effice, parce que maintenant, si on dépose une plainte à la Commission des droits de la personne, il y a une attente de quelques mois jusqu'à un an avant que la commission fasse enquête. Je trouve que c'est au ministre de prendre ses responsabilités et de faire en sorte qu'il n'y ait pas de lenteur de cet ordre. Comme je le lui ai dit déjà, "justice delayed is justice denied", et je pense que cela a pas mal été le cas ces jours-ci devant la Commission des droits de la personne.

J'aimerais dire au ministre que ce n'est pas la même chose de déposer une plainte devant la commission et de déposer la même plainte devant les tribunaux. Lorsqu'on dépose une plainte devant la Commission des droits de la personne, la commission a le pouvoir de faire une enquête. Si on porte cette plainte devant la Cour supérieure, le juge n'a pas le pouvoir de faire enquête et il n'y a pas le même recours. Quand la commission des droits écrit aux gens que cela prendra quelques mois avant qu'on puisse entendre leur requête, qu'ils peuvent déposer leur plainte à la Cour supérieure, cela n'est pas le même recours. C'est

pourquoi il est essentiel qu'on fasse quelque chose pour que les enquêtes soient instituées assez vite devant la Commission des droits de la personne. J'ai dit qu'il y a quatre handicaps en ce qui concerne la charte québécoise par rapport à la charte fédérale. Ces handicaps sont les suivants: la charte québécoise n'est qu'une déclaration de principe et ne comporte aucune sanction; elle a le statut d'une loi ordinaire qui peut être modifiée n'importe quand; elle ne s'applique qu'aux lois postérieures à juin 1975 et finalement elle permet des dérogations définitives qui n'ont pas de limite dans le temps.

Le projet de loi 62 refuse donc aux Québécois un renforcement de leurs droits fondamentaux. Il signifie en fait une diminution et une protection moins solide de ces droits. Le projet de loi 62 met en évidence le refus, par le gouvernement péquiste, du pays canadien et de toute mise en commun de valeurs fondamentales essentielles et partagées par tous les Canadiens. En marge, on peut noter que les pays européens qui sont dans le Marché commun ont signé une convention des droits de la personne, ce que le Québec se refuse à faire avec ses provinces voisines qui se trouvent dans le même pays.

Il s'agit pour le gouvernement péquiste d'un refus global du Canada et d'une opposition de principe. À preuve, il y a le caractère global et universel du projet de loi 62. Toutes les lois du Québec antérieures au 17 avril 1982 sont amendées pour être exclues de l'application des articles 2 et 7 à 15 de la charte fédérale. Or, ce recours à la clause nonobstant de la charte fédérale, a dit le chef de l'Opposition, "ne devrait être exercé qu'en cas de nécessité solidement établie et l'on devrait éviter à cet égard de verser dans une ligne de conduite purement négative". (15 h 30)

Le projet de loi 62 demande aux membres de l'Assemblée nationale de se prononcer sur une exclusion globale sans en connaître ni les effets réels ni la nécessité. Aucun relevé précis n'est fait des lois visées par l'exclusion et le gouvernement procède techniquement par une refonte complète des lois du Québec. Si je me souviens bien, c'est la troisième en autant d'années. Ceci est d'autant moins acceptable que les droits définis dans les deux chartes sont essentiellement les mêmes. On peut comparer l'article 2 de la charte fédérale avec l'article 3 de la charte québécoise qui traite des mêmes matières, c'est-à-dire les droits fondamentaux.

Ceci signifie que le gouvernement péquiste n'a pas d'autre raison de s'opposer que le refus d'un pays canadien et du renforcement partout au Canada des droits des Canadiens. Il s'agit d'une obstruction systématique du gouvernement péquiste qui est compréhensible étant donné son option indépendantiste. Mais il reste que cette obstruction laisse les Québécois moins protégés que d'autres Canadiens sur le plan des libertés publiques.

Le refus de la Charte canadienne des droits, tel qu'exprimé par le projet de loi no 62, signifie également qu'une même infraction pourrait donner ouverture au Québec à deux protections différentes des droits. Ainsi, poursuivi en vertu du Code criminel en cas de délit de fuite, un Québécois pourrait invoquer la charte fédérale des droits, alors que, poursuivi pour la même infraction en vertu du Code de la sécurité routière, il ne pourrait le faire. Il arrive souvent, pour un délit de fuite, que c'est le policier qui décide si la personne sera poursuivie en vertu du Code criminel ou en vertu du Code de la sécurité routière. Si le policier décide d'une façon, la personne aura la possibilité d'invoquer la charte fédérale, s'il procède en vertu d'une autre loi, d'une loi québécoise, la personne n'aura pas la possibilité d'invoquer la charte fédérale.

Le ministre a voulu m'interrompre pour me dire, si j'ai bien compris, que c'est le procureur qui décide. Vous pourrez me corriger à la fin, si vous avez des corrections à faire.

M. Bédard: Ne me faites pas dire des choses, si vous ne voulez pas que je parle.

M. Marx: Peut-être que ce n'est pas le ministre, mais il y a des gens qui disent que c'est le procureur qui décide en vertu de quelle loi la personne sera poursuivie.

M. Bédard: Je vous corrigerai tantôt.

M. Marx: Selon mon expérience, c'est souvent, à Montréal surtout, le policier ou les policiers qui décident en vertu de quelle loi une personne sera poursuivie et c'est tout à fait discrétionnaire. Peut-être que le ministre aimerait relire l'arrêt Regina contre Smythe de la Cour suprême du Canada, pour bien comprendre ce que je veux dire quand je dis que c'est complètement discrétionnaire. C'est le procureur, le policier ou qui que ce soit qui décide si on va poursuivre une personne en vertu de cette loi ou en vertu d'une autre. Selon la décision du procureur ou du policier, il sera possible ou non pour cette personne d'invoquer la charte fédérale ou non.

Ceci nous amène à examiner l'argument de fond que nous servira le gouvernement, à savoir que la charte fédérale empiète sur les pouvoirs de l'Assemblée nationale et que surtout, l'ayant appuyée en ce sens à l'occasion de la motion d'octobre 1981, notre attitude connaîtra maintenant un revirement.

En réalité, les articles 2 et 7 à 15 de la charte fédérale visés par le projet de loi no 62 n'empiètent justement pas sur les pouvoirs de l'Assemblée nationale puisque celle-ci peut choisir de s'y soustraire. Le projet de loi no 62 pose donc la question sur le fond et sur l'occasion, pour l'Assemblée nationale, de choisir ou de renoncer, ce que fait le gouvernement péquiste, à la protection au Québec des libertés fondamentales décrites dans les articles 2 et 7 à 15 de la charte fédérale.

Je répète: Étant donné que l'Assemblée nationale peut se soustraire de l'application de ces articles dans la charte fédérale, la charte fédérale n'empiète pas sur les compétences de l'Assemblée nationale. Donc, notre proposition d'octobre 1980 et notre position d'aujourd'hui sont parfaitement en accord. Or, la position du Parti libéral du Québec sur cette question a toujours été claire. Nous sommes pour une charte canadienne des droits, notre programme politique en propose une et le projet de loi no 62 nous permet d'indiquer clairement à l'Assemblée nationale, sur notre propre terrain de compétence législative, la raison pour laquelle nous voterons contre le projet de loi no 62, en toute conformité avec nos positions antérieures. Nous avons déjà voté contre en deuxième lecture. Notre choix, du côté libéral, s'oriente plutôt vers la recherche d'améliorations de fond à apporter à la charte et nous ne croyons pas que les querelles de clocher fassent avancer cette cause.

Enfin, le projet de loi no 62 nous amènerait à rappeler le refus du gouvernement de modifier la loi 101 pour y admettre la clause Canada comme critère d'admission à l'école anglaise au Québec. Notre position sur cette question demeure la même. Nous acceptons le critère de la clause Canada qui permet aux enfants dont les parents ont fait leurs études primaires en anglais au Canada d'avoir accès à l'école anglaise. Voir l'article 23 de la charte fédérale. Nous acceptons également le critère de la fratrie, également à l'article 23, qui permet à l'enfant canadien qui a déjà commencé des études en anglais au Canada et à ses frères et soeurs de les continuer en anglais au Québec. Dans les deux cas, il s'agit pour nous de faciliter la mobilité entre Canadiens et de respecter la cellule familiale et, surtout, de renoncer à des politiques tatillonnes qui ont peu d'effets positifs sur la balance démographique.

Je pense aussi que c'est une question de justice. Le gouvernement péquiste a déjà dit qu'il serait prêt à accepter la réciprocité en matière d'enseignement dans la langue des parents. C'est évident que cette réciprocité existe en fait dans la charte canadienne. Je vois mal le raisonnement du gouvernement de refuser d'accepter l'article 23 de la charte en ce qui concerne la clause Canada. Nous demandons aussi au gouvernement d'accepter cette clause Canada et d'entreprendre des ententes, d'entreprendre des négociations, de faire des ententes de réciprocité avec d'autres provinces pour la mise en application au Québec et dans d'autres provinces de cet article 23 de la charte fédérale, parce qu'il faut peut-être avoir des ententes sur le plan administratif. Quels seront les certificats qu'on va reconnaître au Québec et ainsi de suite?

Pour toutes ces raisons, nous sommes contre le projet de loi no 62 et nous votons contre.

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.

M. Marc-André Bédard

M. Bédard: M. le Président, comme vous avez pu le constater, mon collègue m'oblige à répondre à plusieurs des affirmations qu'il a faites et qui me semblent erronées. Essentiellement, il a repris son discours de deuxième lecture. Je ne croyais pas devoir le faire moi-même, étant donné que le débat sur le principe du projet de loi s'est fait à l'Assemblée nationale à l'occasion de la deuxième lecture. Ce qu'il est intéressant peut-être de remarquer, c'est que, pour une fois, le critique de l'Opposition a lui-même admis que les droits définis sont essentiellement les mêmes dans la charte constitutionnelle et dans la Charte des droits et libertés du Québec. Il oublie, cependant - et il serait bon de le souligner - qu'il y a un nombre considérable de droits et libertés qui ne sont pas protégés par la loi constitutionnelle et qui le sont par la Charte des droits et libertés du Québec. Qu'il suffise de citer le droit au secours, le droit à la sauvegarde de la réputation, le droit au respect de la vie privée et de la demeure, le droit à la non-discrimination fondée sur la langue, la condition sociale, les convictions politiques, un handicap, l'orientation sexuelle, l'état civil, le droit d'un détenu d'être soumis à un régime distinct approprié à son sexe, son âge et sa condition physique ou mentale. Tous des droits qui sont dans la Charte des droits et libertés du Québec et qui ne se retrouvent pas dans la charte constitutionnelle fut-elle enchâssée. Il y a également le droit d'une personne arrêtée de prévenir ses proches, le droit de l'enfant à la protection, à la sécurité et à l'attention, le droit à l'instruction publique gratuite, le droit à l'information, le droit des conditions de travail justes et raisonnables. Ce sont tous des droits qui sont dans la Charte des droits et libertés du Québec et qu'on ne retrouve pas dans la charte constitutionnelle. Je pourrais en ajouter: le droit de toute

personne âgée ou handicapée - ce n'est pas de n'importe qui qu'on parle, on parle des plus démunis, souvent des plus mal pris -d'être protégée contre toute forme d'exploitation. Le droit des minorités ethniques - mon collègue devrait y être sensible - de maintenir et faire progresser leur vie culturelle.

M. le Président, en résumé, le projet de loi donne tout simplement priorité à la charte québécoise, qui offre aux Québécois une protection infiniment - contrairement à ce qu'a dit le député de D'Arcy McGee -plus étendue que celle qu'offre la loi constitutionnelle et une meilleure protection. J'aime bien les savantes analyses de mon collègue de D'Arcy McGee qui, comme on le sait, est un professeur de droit constitutionnel, mais les savantes analyses peuvent devenir rapidement théoriques et même erronées. Par exemple, je me rappelle très bien, d'ailleurs j'ai un article de presse à cet égard...

M. Marx: Un professeur...

M. Bédard: ... je me rappelle très bien que, contrairement à ce que j'affirmais et ce qu'affirmait même le ministre Chrétien... Le député de D'Arcy McGee avait laissé entendre que les droits de l'Assemblée nationale n'étaient pas limités par la charte constitutionnelle, ce qui s'est révélé complètement faux. Si vous voulez vous corriger...

M. Marx: J'ai parlé des articles 2, 7 à 15, c'est ce que j'ai dit.

M. Bédard: Vous avez déjà parlé, vous corrigerez après.

M. Marx: II ne faut pas mettre dans ma bouche des mots que je n'ai pas dits. Je ne permettrai pas cela. J'ai dit que les articles 2, 7 à 15 n'empiètent pas sur les compétences de l'Assemblée nationale. Prouvez-moi le contraire, au lieu de m'accuser d'être théorique.

M. Bédard: C'est facile à prouver. La meilleure preuve que vous étiez dans l'erreur, lorsque vous affirmez cela - vous aimez bien les jugements de constitutionnaliste, professeur, etc. - c'est le jugement même de la Cour suprême, peut-être un des meilleurs professeurs qui a dit très clairement...

M. Marx: ... le jugement...

M. Bédard: ... je vous ai laissé parler. Vous corrigerez après. Il y a tellement d'erreurs que vous avez dites tout à l'heure, je ne vous ai pas corrigé à mesure. Laissez-moi le temps de vous reprendre.

M. Marx: Maintenant...

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Marx: Soit que vous ne comprenez pas, soit que ce sont des faussetés.

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît! Vous aurez l'occasion de répliquer, M. le député de D'Arcy McGee, si vous le jugez nécessaire.

M. le ministre.

M. Bédard: M. le Président, le jugement même de la Cour suprême a été très clair, indiquant que cela pouvait empiéter sur les pouvoirs des Assemblées nationales...

M. Marx: Nonobstant n'était pas même dans la loi quand on a rendu le jugement.

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Marx: Ce sont des stupidités...

M. Bédard: Je vous dirai tout à l'heure que c'est le fouillis que vous êtes en train de nous proposer. Laissez-moi y arriver, on va répondre à toutes vos questions.

M. Marx: Oui, mais avec...

M. Bédard: Vous proposez la même chose que le chef de l'Opposition. Un fouillis...

M. Marx: Ici, il y a des...

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Marx: ... variétés maintenant, il y a des textes...

M. Bédard: ... indescriptible de lois avec des nonobstant, des lois avec deux nonobstant si c'est nécessaire, concernant les deux chartes.

M. Marx: Ce n'est pas la question de dire n'importe quoi, il y a des textes.

M. Bédard: M. le Président...

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît: Chacun des députés a un droit de parole, vous avez un droit de 20 minutes pour répliquer si vous le désirez sur un sujet. Alors, vous avez eu le droit d'utiliser votre droit de parole tantôt. La parole est au ministre. (15 h 45)

M. Bédard: Le ministre Chrétien est un peu plus réaliste que vous, parce que lui, au

moins, savait que le projet de charte pouvait entraîner la révision d'un certain nombre de lois, tant fédérales que provinciales, admettant qu'à ce moment il y avait nécessairement empiétement sur les pouvoirs de l'Assemblée nationale. La Cour suprême a été très claire dans le même sens, quoi qu'en dise le député de D'Arcy McGee. Des études qui ont été faites... Le député de D'Arcy McGee se réfère souvent à des études faites par des juges ou d'ex-juges. Il devrait relire tout simplement... Quand il affirme que l'article 2, les articles dont on parle ne peuvent pas empiéter sur les pouvoirs ou attaquer les pouvoirs de l'Assemblée nationale, je l'inviterais...

M. Marx: Est-ce que ce serait...

M. Bédard: ... tout simplement à relire des analyses qui ont été faites, entre autres, par l'ex-juge Pratte, qui disait qu'il est vraisemblable de croire... Je vais vous le lire, vous faites des affirmations gratuites. C'est le juge Pratte - ce n'est pas moi, le ministre de la Justice - qui le disait; c'est le juge Pratte, justement concernant l'article 2 dont vous parlez, qui disait qu'il est vraisemblable de croire que l'article 2 de la charte aurait pour effet, si on l'appliquait, de modifier la règle de l'article 1053 du Code civil en ce qui a trait à la diffamation des hommes publics par la presse et par les autres moyens de communication; qu'il aurait pour effet de réduire le pouvoir des tribunaux de condamner pour outrage au tribunal sous l'autorité de l'article 50 du Code de procédure civile; de rendre inopérante la Loi sur les journaux et autres publications, qui édicte que nul ne doit imprimer, publier ou faire publier ou imprimer au Québec un journal ou pamphlet à moins qu'une déclaration sous serment n'ait été faite et produite à bureau du greffier de la paix indiquant, entre autres, les nom, titre, qualité et domicile de l'imprimeur. L'article 2 pourrait avoir pour effet de rendre inopérantes un certain nombre de dispositions législatives - c'est cela le pouvoir de l'Assemblée nationale permettant la tenue d'audition à huis clos par les tribunaux - on a eu un débat là-dessus - les organismes disciplinaires ou administratifs, la Loi sur les coroners, la Loi concernant les enquêtes sur les incendies, la Loi sur la protection de la jeunesse, la Loi de police, la Charte des droits et libertés de la personne. Il pourrait également avoir pour effet de rendre inopérants les articles 257 et 258 de la Loi sur les cités et villes qui prohibent l'utilisation de drapeaux ou le port d'insignes de nature politique pendant la durée d'une élection municipale. Bon, enfin, je pourrais vous donner...

Tout ce à quoi je vous invite, c'est d'être sérieux. Relisez donc l'opinion qui a été donnée aux membres de l'Assemblée nationale - et que j'ai rendue publique - par l'ex-juge Pratte et ceux qui travaillaient avec lui. Vous serez à même de constater rapidement, M. le Président, que les savantes analyses du député de D'Arcy McGee, il faut les prendre avec un grain de sel. Alors qu'il affirme, et il le fait encore maintenant, on ne peut pas mal le citer, que l'application de ces articles ne peut pas être une attaque aux pouvoirs de l'Assemblée nationale, on a toute une série de preuves et de témoignages qui vont dans le sens contraire.

Je considère que le projet de loi no 62 est tout simplement un refus global de se voir imposer, contre notre assentiment, un système juridique qui peut être de nature à diminuer les pouvoirs de l'Assemblée nationale. Vous aurez beau l'interpréter comme vous voudrez, comme bon vous semble, vous paraissez oublier qu'il y a eu un contexte constitutionnel, des négociations à l'issue desquelles le Québec, contre son consentement, s'est vu imposer des choses très précises du point de vue constitutionnel. Quand on a, comme député de l'Assemblée nationale du Québec, à coeur de défendre les droits et pouvoirs de l'Assemblée nationale -c'est un devoir primordial - l'on peut difficilement comprendre l'argumentation ou la logique de l'argumentation du député de D'Arcy McGee qui a voté pour une motion à l'Assemblée nationale disant que celle-ci ne consentirait en aucune façon à voir diminuer ses pouvoirs sans son assentiment. C'est tout simplement la suite logique de cette motion que vous avez votée presque unanimement, en tout cas à l'unanimité des partis, que nous avons votée à l'unanimité des partis au niveau de l'Assemblée nationale. C'est d'autant plus facile de le faire que, nous le disons et le répétons, au Québec il y a une Charte des droits et libertés de la personne qui existe et qui protège un nombre encore plus considérable de droits que ceux qui ne sont protégés que par la charte constitutionnelle.

Le député de D'Arcy McGee fait un long débat - là-dessus nous ne sommes pas d'accord - sur les valeurs de notre charte comme étant une loi statutaire par rapport à l'enchâssement, il prétend - comme d'autres, et je respecte leur opinion - que l'enchâssement constitutionnel des droits est nécessaire à la sauvagarde des libertés individuelles et des droits démocratiques, mais il doit convenir avec moi que cette sécurité juridique invoquée peut facilement devenir théorique; la meilleure preuve en est que la constitution de l'URSS prévoit une charte complète des droits et libertés, c'est peut-être une des plus complètes, mais ce n'est sûrement pas un exemple qu'on peut imiter en matière de protection des droits et libertés, ce qui nous fait dire que le vrai fondement - tout en respectant les idées des

autres sur l'aspect juridique - du respect des droits et libertés au niveau d'une collectivité prend sa base dans la volonté même des gens, de la population, de vouloir respecter les droits et libertés de chacun. Sous cet angle, sur ce terrain, je pense que le Québec n'a pas de leçon à recevoir de qui que ce soit comme collectivité; il a toujours donné l'exemple non seulement de la tolérance mais d'un profond respect des droits et libertés, ce qui nous permet de dire - tout en pensant qu'il y a toujours possibilité d'amélioration -que s'il y a une place où les droits et libertés sont respectés, c'est bien au Québec, et on peut facilement soutenir la comparaison avec quelque province que ce soit et avec quel que pays que ce soit.

Pourtant, notre charte n'est pas enchâssée, ce qui veut dire que l'enchâssement n'est pas la garantie de la protection des droits et libertés, c'est essentiellement la volonté d'une population de vouloir protéger ces droits et libertés, et le Québec en a donné un exemple assez évident, assez éloquent jusqu'à maintenant pour qu'on arrête, à partir de discussions théoriques sur l'enchâssement ou le non-enchâssement de douter - ce que fait le député de D'Arcy McGee - de la volonté de la population du Québec de continuer à respecter les droits et libertés qui sont dans la charte, dans notre charte au Québec, et qui se retrouvent essentiellement dans la charte constitutionnelle, car il y en a même plus dans la charte du Québec. On n'a pas à douter de cette volonté en fonction de l'avenir, au contraire, je l'ai annoncé déjà, il y aura dans l'avenir le plus rapide possible des amendements qui seront apportés à notre charte et qui en étendront encore le champ d'application, qui prévoiront d'autres droits qui seront protégés par la Charte des droits et libertés de la personne du Québec, et qui ne sont même pas évoqués, au moment où on se parle, lorsqu'il a été question de mettre en place la charte constitutionnelle prévue dans la loi constitutionnelle du fédéral.

Il y a peut-être de petits points pour empêcher de faire de la démagogie et sur lesquels je pourrais apporter une lumière, entre autres l'exemple qui a été apporté par le député de D'Arcy McGee concernant les délits de fuite. Il sait très bien que d'abord ce sont les procureurs de la couronne qui prennent la décision. Deuxièmement, les poursuites qui sont prises l'ont toujours été en fonction du Code criminel. Or, le Code criminel relève du gouvernement fédéral, il est une loi fédérale et, on le sait, la charte constitutionnelle s'applique selon les lois fédérales. Or, la loi que nous présentons présentement s'applique en ce qui a trait aux lois provinciales.

Essentiellement, ce projet de loi, encore une fois, je sais que je n'en convaincrai pas mon collègue, mon vis-à-vis de l'Opposition, est tout simplement la suite logique à une motion votée à l'unanimité des partis par l'Assemblée nationale à l'effet que l'Assemblée nationale n'acceptera jamais, c'est ce qu'elle a dit, que ses pouvoirs ou ses droits soient touchés sans son consentement. Or, ils ont été touchés sans son consentement et c'est dans ce sens que s'explique la loi no 62 comme étant un refus global de cette attitude d'agression constitutionnelle de la part du fédéral en ce qui a trait aux droits et pouvoirs de l'Assemblée nationale. Il y a peut-être d'autres points.

Le député de D'Arcy McGee a beau nous faire de savantes analyses, encore une fois, sur l'enchâssement préférable au non-enchâssement. Tout ce que je lui dis, c'est une constatation c'est qu'on n'avait pas d'enchâssement au Québec. Cela ne nous a pas empêchés d'être une des sociétés à l'avant-garde dans le domaine de la protection des droits et libertés. L'enchâssement est un moyen, pas une fin. Je ne veux pas dire que je ne respecte pas l'argumentation du député de D'Arcy McGee mais, de là à faire de l'enchâssement un dogme, nous n'y souscrivons en aucune façon. Nous avons de bonnes raisons pour ne pas le faire, puisque nous n'en n'avons pas d'enchâssement ici au Québec et pourtant nous sommes à l'avant-garde dans le domaine de la protection des droits et libertés.

Je sais que le député de D'Arcy McGee s'est réclamé de certaines déclarations faites par le juge Laskin. On pourrait étendre à n'en plus finir la discussion.

M. Marx: La mémoire...

M. Bédard: Je vous invite simplement à lire des déclarations qui ont été faites par l'ex-juge de la Cour suprême, le juge Pigeon...

M. Marx: II n'a jamais...

M. Bédard: ... qui est loin de voir seulement des avantages à l'enchâssement. Allez donc...

M. Marx: II a donc confirmé ce qu'elle a dit.

M. Bédard: Le juge Martland, ancien juge de la Cour suprême, va dans le même sens. Écoutez! Que vous ayez vos convictions, je ne dirais pas, constitutionnelles, mais vos convictions professorales sur la nécessité de l'enchâssement, je n'ai rien contre cela et je respecte cela, mais la réalité des choses vous donne tort. Il y a des preuves patentes de pays où il y a enchâssement et où, pourtant, les droits sont violés. Il y a des endroits, il y a des sociétés où il n'y a pas

d'enchâssement, et le Québec fait partie de ceux-là, où les droits sont mieux respectés.

Je serais prêt à passer à l'étude du projet de loi, article par article.

Discussion générale

Le Président (M. Desbiens): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: M. le Président, j'ai une remarque à faire.

Je me suis retenu pendant ces dix minutes. Ce n'était pas facile. C'était bien difficile, je vous le dis, parce que ce que le ministre a dit...

M. Bédard: Si mon collègue me permet...

M. Marx: ... c'est complètement faux et je vais le prouver.

M. Bédard: ... peut-être, sur un autre élément plus sérieux dont il a parlé: c'est concernant les articles 1 à 8. Je voudrais simplement lui rappeler - effectivement, il a expliqué le mécanisme qui existe dans la charte québécoise - par exemple, que, lorsqu'on parle du droit d'expression - il a cité tous les droits, entre autres, le droit d'expression - les juges, même avec la charte telle que nous l'avons, la charte québécoise, sur ces droits fondamentaux, se sont même prononcés par le biais de l'interprétation de l'article 10. Vous le savez très bien, il y a eu un jugement, il n'y a pas si longtemps, concernant le droit d'expression, qui, j'imagine fera son chemin et est de nature à nous apporter certaines lumières. L'ensemble du Code de sécurité routière auquel vous vous êtes référé est soumis à la charte québécoise. Ce sont essentiellement les mêmes droits qui y sont définis. (16 heures)

M. Marx: Comme je viens de le dire, je me suis retenu pour dix minutes, parce que ce que le ministre a dit est faux. Aux articles 2 et 7 à 15, il n'y a pas d'empiétement sur les compétences de l'Assemblée nationale. Il s'agit de ces articles dans le projet de loi 62. Le ministre a cité des opinions des juristes, mais il a oublié de dire que ces opinions étaient écrites avant qu'il y ait un nonobstant dans la charte fédérale. Donc, ce n'est pas la même chose. Parce que, quand ils ont émis ces opinions, il n'y avait pas de nonobstant dans la charte fédérale; donc, c'était évident que c'était un empiétement direct. Quand la Cour suprême a décidé, il n'y avait pas d'article nonobstant; mais ici, nous sommes en face d'une charte fédérale où il y a un nonobstant. On peut se soustraire à l'article 2 et aux articles 7 à 15. Étant donné qu'on peut se soustraire à l'application de ces articles, on ne peut pas parler de l'empiétement sur les compétences de l'Assemblée nationale. On peut s'en soustraire pour cinq ans à la fois; donc, si on peut s'en soustraire, où est l'empiétement? Le ministre a pris un mauvais discours, parce que c'est un discours qui date déjà de quelques mois. Ce n'est pas à jour.

M. Bédard: Non.

M. Marx: Prenez un de vos mémoires qui est à jour, pas n'importe quel mémoire. Cela, c'est un mémoire qui touche...

M. Bédard: Ce sont vos affirmations. C'est bien malheureux. Depuis quand c'est la vérité parce que le député de D'Arcy McGee l'a dit?

M. Marx: C'est la vérité, parce que quand Pratt a écrit cette opinion, il n'y avait pas un nonobstant sur la charte fédérale; maintenant, il y en a un. Est-ce que cela fait une différence?

M. Bédard: Vous êtes en train de nous proposer tout simplement le fouillis. C'est ce que je vous ai dit tout à l'heure. On parle de droits et libertés. Est-ce que c'est la Charte des droits et libertés ou la charte des droits et pouvoirs de l'Assemblée nationale, la charte des droits et pouvoirs du fédéral par rapport aux Assemblées nationales? Ce que vous êtes en train de nous proposer, votre raisonnement est spécieux parce que, s'il fallait que je suive le genre de suggestion que vous faites, qui est en fait la seule critique à la loi 62, cela voudrait dire qu'il y aurait des lois québécoises sans clause dérogatoire et auxquelles la charte fédérale s'appliquerait, d'autres lois québécoises avec clauses dérogatoires générales et auxquelles la charte fédérale ne s'appliquerait pas et la charte québécoise s'appliquerait. Il y aurait d'autres lois avec des clauses dérogatoires qui ne s'appliqueraient qu'à un seul article, d'autres avec des clauses dérogatoires partielles et ainsi de suite. Ce que vous nous proposez, c'est le fouillis. Autrement dit, de procéder pièce par pièce.

Sur cet argument que vous apportez, je l'ai déjà dit, la seule manière intelligente de fonctionner, c'est d'une façon globale et non pas pièce par pièce...

M. Marx: D'accord.

M. Bédard: ... d'autant plus qu'il faut toujours se souvenir que toutes ces clauses devront être réadoptées après cinq ans. S'il fallait procéder pièce par pièce, l'Assemblée nationale serait alors amenée à étudier à la

pièce des centaines de dispositions de lois à des dates différentes. Une telle confusion entraînerait nécessairement une grande insécurité juridique qui n'est pas souhaitable et ce serait effectivement le paradis des conflits juridiques. Or, comme ministre de la Justice, je crois qu'un de mes premiers devoirs, c'est non pas de multiplier les conflits juridiques, mais de faire en sorte qu'ils soient le moins nombreux possible parce qu'au bout de la ligne, c'est toujours le citoyen qui est obligé de payer et d'accepter l'application de deux chartes en même temps, alors que nous en avons une qui va encore plus loin que la constitutionnelle. Ce ne serait, à mon sens, pas très responsable, puisque ce serait la porte ouverte à une série de conflits juridiques dont les citoyens seraient obligés de faire les frais.

M. Marx: Je vais continuer. Le ministre s'est glissé d'un argument à un autre parce que je maintiens qu'il n'a pas réfuté qu'étant donné qu'on peut se soustraire de l'article 2 et des articles 7 à 15, on ne peut pas parler de l'empiétement sur les compétences de l'Assemblée nationale. On peut se soustraire; donc, on n'empiète pas. Mais, le ministre a cité des opinions et des jugements qui étaient rendus avant que la clause nonobstant n'ait été mise dans la charte fédérale.

En ce qui concerne son argument que la charte provinciale, la charte du Québec protège mieux parce que, par exemple, l'article 10 de la charte québécoise prévoit qu'une discrimination fondée sur les convictions politiques d'une personne est illégale. Mais le ministre ne semble pas comprendre que les deux chartes ont une, comment dirais-je, fonction différente. La charte québécoise vise surtout la discrimination, la charte québécoise est essentiellement une loi contre la discrimination, quoique la charte constitutionnelle vise à protéger les droits fondamentaux et d'autres droits d'une façon plus sûre. Une charte constitutionnelle n'empêche pas qu'on ait une charte québécoise. Je dirais même que c'est essentiel, comme aux États-Unis. L'État de la Californie est lié par la charte fédérale mais l'État de la Californie a sa charte étatique, si vous voulez, et je n'ai jamais compris comment le ministre pouvait parler de conflits entre chartes. J'aimerais demander au ministre plus tard de me donner un exemple d'un conflit possible entre la charte fédérale et la charte provinciale. Si on parle d'un conflit, cela veut dire que la charte fédérale rendra inopérante une clause dans la charte provinciale. J'aimerais que le ministre me donne un exemple d'un conflit.

Le ministre a dit que l'enchâssement n'était pas si important que cela et ainsi de suite. Ce n'est pas moi qui ai dit cela, c'est le juge Laskin qui a dit qu'une charte constitutionnelle enchâssée dans la constitution a plus de poids qu'une loi ordinaire...

M. Bédard: Je m'excuse, question de règlement, M. le Président.

M. Marx: ... comme la charte québécoise. Le juge Pigeon...

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Marx: II n'y a pas de question de règlement ici.

Le Président (M. Desbiens): Des questions de règlement, oui.

M. Bédard: Oui, des questions de règlement.

Le Président (M. Desbiens): II n'y a pas de question de privilège.

M. Marx: Vous m'avez dit un autre...

Le Président (M. Desbiens): Mais il y a des questions de règlement.

M. Marx: Allez-y.

M. Bédard: Je veux juste corriger. Je n'ai pas dit que ce n'était pas important...

Le Président (M. Desbiens): C'est une...

M. Bédard: J'ai dit que c'était un moyen qui pouvait se comparer à un autre qui n'est pas l'enchâssement, c'est tout.

Le Président (M. Desbiens): Alors, M. le ministre, ce n'est pas une question de règlement.

M. Marx: J'accepte cela comme une question de règlement; c'est une précision et je ne veux pas faire de procès d'intention au ministre.

Le Président (M. Desbiens): D'accord, alors, M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: C'est drôle parce que dans le programme du Parti québécois il y a un article qui prévoit que le Parti québécois est pour l'enchâssement constitutionnel d'une charte des droits. Il est pour dans son programme mais contre dans les faits. C'est le juge Laskin qui a dit qu'une charte constitutionnelle avait plus de poids qu'une charte qui n'est pas constitutionnalisée et le juge Pigeon était tout à fait d'accord avec lui, parce que lui-même l'avait dit avant, pas comme cela, mais en d'autres mots dans

l'arrêt Drybones, et je suis sûr qu'il serait d'accord avec moi. C'est drôle que le ministre commence à comparer les droits d'ici avec les droits en Union soviétique. Le ministre des Finances autrefois comparait le Québec à l'Ontario; maintenant il est en train de comparer le Québec avec le Nouveau-Brunswick. Autrefois, on comparait les droits et les libertés du Québec avec les États-Unis; maintenant, on est en train de faire les comparaisons avec l'Union soviétique. Je pense que le PQ...

M. Bédard: Soyez sans crainte, je ne vous comparerez avec personne.

M. Marx: Je trouve bien drôle qu'on soit en train de changer de pays pour faire les comparaisons. Peut-être qu'il y a là une politique quelque part.

La charte constitutionnelle, ce n'est pas la fin du monde; ce n'est pas une panacée, je suis tout à fait d'accord. Je suis tout à fait d'accord avec le ministre quand il dit qu'il y a aussi la volonté des gens et j'ai bien exprimé cela l'autre jour, je pense, quand j'ai cité Harold Laski qui a bien dit que les libertés publiques dépendent en fin de compte du peuple qui est prêt à lutter pour elles.

Mais il ne faut pas oublier qu'une charte constitutionnelle ne s'appliquerait pas seulement aux lois du Québec, ce qui est importante, mais une charte constitutionnelle s'appliquerait aussi aux règlements municipaux, aux règlements des organismes du Québec. Souvent, c'est là qu'on trouve de la discrimination et c'est là que l'on brime les droits des Québécois. Il n'est pas nécessaire que ce soit dans une loi votée à l'Assemblée nationale. La discrimination et le non-respect des libertés publiques se trouvent souvent dans la réglementation qui n'est pas contrôlée vraiment par l'Assemblée nationale.

J'aimerais juste poser ces deux questions au ministre. J'aimerais qu'il me donne un exemple où il y a la possibilité d'un conflit entre la charte fédérale et la charte québécoise. Deuxièmement, le ministre a déjà dit que la clause dans la charte fédérale qui prévoit l'égalité homme-femme va diminuer en quelque sorte les droits des femmes au Québec. J'aimerais que le ministre m'explique ces deux points. Premièrement, qu'il me donne l'exemple d'un conflit possible ou probable entre la charte fédérale et la charte québécoise où la charte fédérale aurait préséance sur la charte québécoise et, deuxièmement, qu'il m'explique comment les droits des femmes au Québec sont diminués à cause de l'article de la charte fédérale, qui lie le Québec maintenant, qui prévoit l'égalité homme-femme.

M. Bédard: M. le Président, je ne recommencerai pas le débat.

M. Marx: Parce que vous n'avez pas de réponse.

M. Bédard: Avez-vous terminé? Pour ce qui est des difficultés juridiques que peut poser l'application de deux chartes, je réfère simplement le député à toute l'analyse qui a été faite par l'honorable juge Pratte et par ceux qui l'ont aidé.

M. Marx: C'est théorique.

M. Bédard: C'est théorique, ce doit être un peu comme vos exposés.

M. Marx: Donnez-moi un exemple. Peut-on suspendre pour cinq minutes?

M. Bédard: M. le Président peut-on demander de l'ordre un peu?

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît! J'allais dire, juste avant cette intervention, qu'évidemment le règlement qui s'applique le plus souvent en commission parlementaire, c'est celui du consentement unanime des partis, mais, règle générale, il y a une tradition qui veut que, lorsqu'il y a un tour de table qui est fait de la part du ministre ordinairement concerné et de l'Opposition, on en vient à l'étude article par article des projets de loi. Je crois qu'on pourrait peut-être l'entreprendre.

M. Marx: On va terminer sur ce point. Cela va nous faire gagner du temps après.

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre, en terminant les remarques générales.

M. Bédard: Je ne recommencerai pas le débat. Je réfère simplement le député de D'Arcy McGee à toutes les études, analyses qui ont été faites et qui concluent à l'insécurité juridique qui peut durer des années. Entre autres, un juge de la Cour suprême a même parlé d'une dizaine d'années avant que soit très bien clarifiée l'interprétation des véritables contenus et des conséquences de la charte fédérale. À ce moment-là, je ne recommencerai pas le débat.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que je peux...

M. Bédard: Pour ce qui est des droits des femmes, je pense que, s'il y a une charte, avec les améliorations qu'on se propose d'y apporter... Entre autres, l'accès à l'égalité, ce sera un fait acquis avec les amendements qui s'en viennent où on permettra les programmes d'accès à l'égalité.

Je crois qu'à ce moment-là cela répondra au désir déjà exprimé par plusieurs associations de femmes du Québec, je dirais, d'une façon générale, par les femmes du Québec.

M. Marx: Je n'ai pas compris la réponse du ministre et j'aimerais avoir une précision pour m'aider parce que je n'ai pas accès à tous les documents auxquels vous avez accès.

M. Bédard: Pourquoi ne nous parlez-vous pas un peu des droits à l'égalité dans la charte constitutionnelle qui vont être en application seulement dans trois ans? Cela ne semble pas vous fatiguer. Pourtant, ce sont des droits fondamentaux. Regardez donc la charte québécoise, cela s'applique dès maintenant pour la plupart de ces droits-là.

M. Marx: Si le ministre est prêt à demander au fédéral et aux autres provinces que l'article 15 soit mis en vigueur tout de suite, on va l'appuyer. (16 h 15)

M. Bédard: Le fédéral a fait son lit, à ce que je sache, sans demander le concours du Québec, sans demander l'assentiment du Québec. Soyez donc sérieux un peu quand vous parlez de droits et de libertés. Je vous vois en train de déblatérer contre la Charte des droits et libertés du Québec et essayer de nous vanter les mérites de l'enchâssement de la charte constitutionnelle, alors que vous savez très bien que concernant des droits fondamentaux, à savoir l'égalité des citoyens devant la loi, le fédéral a décidé que tout cela sera en application dans trois ans. Pourtant, vous savez que cela rejoint des droits fondamentaux. Nous avons la Charte des droits et libertés du Québec qui, pour l'essentiel, protège ces droits et continuera de les protéger. C'est dans ce sens que je vous dis que la Charte des droits et libertés du Québec protège mieux et plus, en termes de nombre de droits, que la charte constitutionnelle. Vous savez très bien que j'ai raison, à part cela.

M. Marx: J'ai essayé d'expliquer au ministre que les deux chartes ont des fonctions différentes. Je pense que la charte québécoise est essentielle, la Commission des droits de la personne est essentielle au Québec.

M. Bédard: Non seulement est-elle essentielle, elle est meilleure. C'est notre opinion.

M. Marx: II n'est pas question de savoir si l'une est meilleure que l'autre, ce n'est pas là la question. On ne peut pas dire que la déclaration américaine des droits est meilleure que la loi contre la discrimination de l'État de New York, c'est complètement à côté de la question. Les deux chartes ont des fonctions différentes et le ministre ne veut pas le comprendre, c'est son droit.

J'aimerais avoir une précision sur deux questions. Premièrement, le ministre a clairement dit cet après-midi qu'il pourrait y avoir des conflits entre la charte fédérale et la charte québécoise. J'aimerais que le ministre me donne un exemple d'un conflit possible.

M. Bédard: S'il y en a un qui est passé maître dans les interprétations, c'est bien le député de D'Arcy McGee. Je lui dis tout simplement qu'en termes d'interprétation - et je le réfère à toutes les études qui ont pu être faites - nous nous orienterions...

M. Marx: C'est impossible. Donnez-moi un exemple de vos études.

M. Bédard: Vous en avez, elles ont été déposées à l'Assemblée nationale.

M. Marx: J'ai lu des études trois fois et je n'ai pas trouvé un exemple de conflit.

M. Bédard: Relisez-les une quatrième fois, peut-être que vous en verrez.

M. Marx: Le ministre n'a pas d'exemple, c'est cela, la conclusion.

M. Bédard: C'est dans les faits que cela va se matérialiser et vous le savez très bien.

M. Marx: Deuxième précision. J'ai de l'aide, le chef de l'Opposition vient m'assister dans ce débat.

M. Bédard: Oui, vous avez besoin d'aide.

Une voix: II entendait les bruits.

M. Bédard: II était tanné de vous entendre déblatérer contre la Charte des droits et libertés du Québec.

M. Marx: Je n'ai pas déblatéré contre la charte des droits.

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Marx: Ne faites pas le "cheap" avec moi cet après-midi. Je vous pose des questions sérieuses. Si vous voulez jouer, si vous voulez faire de la démagogie, continuez, ce sera clair dans les débats.

M. Bédard: C'est vous qui faites de la démagogie.

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre!

M. Marx: Vous êtes tellement irresponsable cet après-midi que vous vous permettez de dire n'importe quoi.

M. Bédard: C'est vous qui faites de la démagogie.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que vous avez terminé?

M. Bédard: Vous ne nous parlez que de la grandeur de la charte constitutionnelle.

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Marx: Ma deuxième... M. le Président, j'ai la parole.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: J'ai le droit de parole, ici. Sur la première précision, il ne m'a pas donné le cas d'un conflit possible ou probable entre la charte fédérale et la charte québécoise. Ma deuxième concerne ce que le ministre a dit - c'était dans tous les journaux, cela a fait la manchette - que la clause d'égalité homme-femme dans la charte fédérale va diminuer les droits des femmes du Québec. Qu'il me donne un exemple.

M. Bédard: Vous en avez des exemples. Puisque vous voulez absolument un exemple, prenez seulement les programmes d'accès à l'égalité. Il y a le principe général, tant au niveau de la charte constitutionnelle qu'au niveau de la charte québécoise, mais, au niveau des programmes d'application ou peut-être des réglementations qui en découleront, il peut y avoir toute une différence de conception de ce que doit être un programme d'accès à l'égalité entre la charte fédérale, et la charte québécoise, la perception ou le désir que peut avoir, par exemple, la Commission des droits de la personne du Québec. C'est un exemple de l'interprétation et de la portée de chacune des chartes qui peut, à un moment donné, nous amener, tel que je vous l'ai dit, non seulement à une insécurité juridique, mais peut-être à la négation même de certains droits que nous voudrions donner aux femmes du Québec par des programmes d'accès à l'égalité. L'interprétation de la charte constitutionnelle ne donnerait pas ou les tribunaux n'arriveraient pas à la même conclusion en termes d'étendue des droits aux femmes du Québec.

M. Marx: C'est impossible. De toute façon, l'article 15...

M. Bédard: Même chose dans le cas des avantages sociaux. Il n'y a rien qui dise qu'en Ontario, au niveau des avantages sociaux accordés aux femmes, les juges ne les interpréteront pas à leur manière et peut-être d'une façon beaucoup plus restreinte en termes de droits au niveau de la portée que nous voudrions que cela ait en réalité. L'avantage que nous avons, avec la Charte des droits et libertés du Québec, et le fait qu'elle ne soit pas constitutionnalisée, c'est que nous savons que lorsqu'il y a une interprétation qui pourrait éventuellement être donnée par des tribunaux à certains droits, qui ne va pas dans le sens de ce que voulait manifestement l'Assemblée nationale, le mécanisme n'est pas compliqué, on revient devant l'Assemblée nationale et on peut faire les corrections appropriées. Or, ce n'est pas le cas avec une charte constitutionnelle. C'est un processus beaucoup plus lourd, vous le savez, par lequel il faut qu'un certain nombre de provinces soient d'accord avant qu'un amendement ou qu'une correction ne soient apportés à la charte. Le meilleur exemple que vous pouvez avoir, c'est le droit à l'égalité des femmes aux États-Unis. Je pense qu'il y a un amendement à leur charte des droits et libertés...

M. Marx: Vous mêlez...

M. Bédard: ... qui voudrait voir reconnaître... ça fait des années, ce n'est pas encore une chose faite. Pourquoi? À cause du lourd processus d'amendement.

M. Marx: II ne faut pas confondre tout ça, M. le ministre. Vous confondez trois chartes. Maintenant vous êtes vraiment loin de la réalité, de la vérité.

M. Bédard: Pas besoin d'être borné seulement à une, comme le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: L'article 15, paragraphe 2 de la charte fédérale prévoit la possibilité des programmes d'action positive donc, il n'y a pas de problème. Le ministre a parlé longuement, mais il ne m'a pas donné d'exemple et je laisse ça parce que je vois qu'il n'a pas d'exemple.

M. Bédard: Je vous en ai donné un.

M. Marx: Donnez-moi un exemple. Un exemple, cela veut dire...

M. Bédard: Je viens de vous en donner un concernant les. programmes d'accès à l'égalité en fonction de l'avenir. Vous verrez jusqu'à quel point les deux chartes vont se heurter.

M. Marx: Où est le conflit?

M. Bédard: Attendez, vous le verrez.

Vous allez voir quelle est la portée...

M. Marx: Mais comment les chartes peuvent-elles se heurter si vous pouviez soustraire l'Assemblée nationale de la charte fédérale? Ce serait quand même...

M. Bédard: C'est pour ça qu'on le fait. Vous êtes en train de faire la démonstration.

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre! À l'ordre!

M. Marx: Je vous ai donné un exemple où...

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bédard: Le député de D'Arcy McGee devrait s'arrêter. Vous êtes en train de faire la démonstration justement de l'opportunité de faire ce qu'on a à faire pour éviter des différences d'interprétation.

M. Marx: Ce n'est pas ce que j'ai dit.

M. Bédard: La meilleure preuve qu'il y a empiétement ou qu'il peut y avoir empiétement sur les droits de l'Assemblée nationale, c'est que vous nous dites qu'il n'y a qu'à utiliser le nonobstant. Vous avez fait encore là la meilleure preuve qu'effectivement il peut y avoir des dangers d'empiétement sur les pouvoirs de l'Assemblée nationale. Or, nous, plutôt que de procéder à la pièce... on peut avoir chacun son idée et je la respecte. Le chef de l'Opposition a déjà donné sa manière de voir les choses que je respecte tant au niveau de l'enchâssement, des valeurs de l'enchâssement qu'à la manière de procéder législativement, malheureusement, je ne partage pas la même opinion. Je crois qu'on ne peut pas y aller à la pièce, c'est mieux d'y aller globalement de manière justement à éviter l'insécurité juridique. Pensez seulement une seconde à la tradition d'interprétation restrictive des tribunaux par rapport à la tradition d'interprétation de notre Commission des droits de la personne, vous le savez très bien, qui peut être portée à donner beaucoup plus de portée et ce, pour l'avantage des citoyens, à certaines libertés.

Je pense que ça pourrait être un des meilleurs exemples. On a l'interprétation de notre Commission des droits de la personne qui est beaucoup plus libérale que l'interprétation restrictive des tribunaux. Je ne condamne pas les tribunaux quand je dis cela.

M. Marx: La question d'interprétation dans tout ça...

M. Bédard: Ce sont seulement des constatations. À partir du moment où il y aura des interprétations différentes, il va falloir corriger le tir. Or, on pourra, dans le domaine de notre compétence, corriger le tir alors que ce ne serait pas possible de le faire autrement.

Le Président (M. Desbiens): M. le chef de l'Opposition.

M. Ryan: Je pense que le ministre conviendra qu'avec le projet de loi no 62, les libertés des citoyens sont diminuées.

M. Bédard: Je m'excuse, je ne suis pas d'accord, mais allez-y.

M. Ryan: On va prendre le temps de développer cela. Je pense que le ministre va finir par comprendre.

M. Marx: Cela n'est pas sûr.

M. Ryan: Avec la charte constitutionnelle...

M. Bédard: Si vous voulez me promettre de comprendre vous autres aussi.

M. Ryan: On va faire notre possible. M. Bédard: D'accord.

M. Ryan: Avec la charte constitutionnelle des droits, il y avait des articles auxquels le gouvernement veut soustraire le Québec, en particulier, l'article qui traite des libertés fondamentales. Nous traitons surtout de celui-ci pour commencer, mais il y a aussi le chapitre qui traite des droits légaux et l'autre des droits à l'égalité. La charte est en vigueur à travers le Canada. La protection qu'elle accorde s'applique à tous les citoyens du Canada, sauf dans les provinces où le gouvernement a fait adopter une loi soustrayant les provinces aux dispositions de la charte.

Vous dites, au gouvernement: Nous vous offrons en retour une charte qui est la meilleure de tout le Canada. À un moment donné, le pétage de bretelles, c'est excellent pour les exercices intérieurs, mais quand il s'agit des libertés des citoyens, il faut qu'ils soient capables de faire la démonstration de sa validité. Or, nous vous disons que la Charte des droits et libertés de la personne du Québec, dans ses articles qui traitent des mêmes sujets, n'a pas la même force d'application que la charte canadienne des droits. En conséquence, en soustrayant le Québec à ces chapitres de la charte, pour l'instant qui suit l'adoption de la loi, les citoyens du Québec vont être moins solidement protégés au point de vue de leurs libertés fondamentales, de leurs droits légaux et de leurs droits à l'égalité que ceux des

autres provinces. Par un effet de votre politique dans ces matières, que je ne qualifierai d'aucune manière pour l'instant, il va résulter une diminution efficace des droits.

L'autre jour, je crois que le ministre des Affaires intergouvernementales a laissé entendre, et vous-même l'avez laissé entendre à un moment donné, M. le ministre, que le gouvernement, tôt ou tard, à une date qui reste indéterminée pour l'instant, présenterait une législation qui verrait à corriger ces lacunes. Il y a d'autres lacunes également, dans ces articles de la charte québécoise, que vous connaissez comme moi. En particulier, elle n'a pas de force d'antériorité, ni par rapport à des lois antérieures ni par rapport à des lois postérieures. C'est énorme.

Vous avez dit: On va présenter une loi qui va corriger cela. On ne sait pas quelles sont vos intentions de ce côté, comment vous entendez le faire. Est-ce que vous entendez, éventuellement, faire en sorte que des droits comme ceux-là soient garantis dans une espèce de constitution du Québec à l'intérieur d'un Canada fédéral? Il n'y a rien qui interdit au Québec de se doter de sa constitution, pourvu que cette constitution ne soit pas incompatible avec la consitution canadienne. Vous pourriez très bien dire, par exemple: Nous proposons à l'Assemblée nationale de décréter, par proclamation légale, que les grandes libertés fondamentales seront garanties, sauf des changements qui devront requérir, par exemple, l'adhésion des deux tiers des membres de l'Assemblée nationale. C'est une manière d'enchâsser provincialement qui serait beaucoup plus forte - vous en conviendrez avec moi - que la charte actuelle, qui est une loi statutaire d'application extrêmement réduite, même dans ses dispositions générales et à plus forte raison dans les dispositions dont nous discutons en relation avec la charte canadienne.

C'est le problème auquel vous faites face. Nous allons être obligés, pour notre plus grand malheur, de vous accuser d'avoir, par une loi d'inspiration nationaliste à courte vue, effectivement d'avoir diminué la protection à laquelle avaient accès d'ores et déjà les citoyens du Québec en raison de la charte constitutionnelle canadienne des droits. Je ne sais pas si vous êtes capable de répondre à cela directement.

M. Bédard: J'y ai déjà répondu tout à l'heure, M. le chef de l'Opposition. Je ne partage en aucune façon votre affirmation que cela diminue les pouvoirs des citoyens du Québec. Vous semblez oublier un article très important, l'article 15. Au contraire, l'article 15 de la charte constitutionnelle, qui parle de droits très importants, les droits à l'égalité, ne sera en application que dans trois ans. Pourquoi ne nous parle-t-on pas de ces droits? Je vais lire l'article: La loi ne fait exception de personne et s'applique également à tous, et tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimination, notamment des discriminations - c'est fondamental cela dans une société - fondées sur la race, l'origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l'âge ou les différences mentales ou physiques. Ce qu'on oublie de dire, par exemple, ce que vous oubliez de mentionner, c'est que tout ça, ce sont des libertés fondamentales, des droits fondamentaux, et que ce sera appliqué seulement dans trois ans. (16 h 30)

Non seulement nous ne diminuons pas les pouvoirs des Québécois, je serais porté à vous dire que nous assurons la continuité de la protection des droits et libertés des citoyens du Québec avec l'application de la Charte des droits et libertés du Québec. Il n'y a pas de discontinuité. C'est quand même un élément très important. On peut parler des carences de la Charte des droits et libertés du Québec, comme parler des carences de la charte constitutionnelle. Il reste cependant que, malgré toutes ces carences, cela n'a pas empêché le Québec de se dire à l'avant-garde de la protection des droits et libertés, non seulement au niveau du Canada, mais en comparaison avec bien d'autres pays. C'est dans ce sens que je disais qu'on peut peut-être avoir chacun ses opinions sur les mécanismes et les moyens juridiques d'assurer les droits et libertés, mais il faut toujours être conscient que la base des droits et libertés, c'est toujours la volonté des citoyens d'une collectivité de respecter les droits et libertés. Ce n'est pas, parce qu'il y a une charte constitutionnelle maintenant, qu'on a raison de commencer à douter de cette volonté toujours fortement exprimée, au niveau de la tolérance et au niveau du désir de respect des droits et libertés qu'a manifestée le Québec en tant que société.

Le Président (M. Desbiens): M. le chef de l'Opposition.

M. Ryan: Si vous me permettez, M. le Président, j'ai écouté le ministre avec attention. Je constate qu'il y a dix articles de la Charte canadienne des droits et libertés qui sont visés par le projet de loi no 62; dix articles: 2 et 7 à 15; cela fait dix, n'est-ce pas? On sait donc compter jusqu'à dix, des deux côtés. Le ministre a évoqué un article, l'article 15, il a dit: celui-là s'applique seulement dans trois ans, par conséquent, vous ne pouvez pas faire état d'une diminution des droits qui interviendrait pour les citoyens du Québec, à la suite de l'adoption du projet de loi no 62. J'en

conviens, j'en conviens dans l'immédiat.

M. Bédard: Mais les autres, le député de D'Arcy McGee l'a reconnu, sont essentiellement dans notre charte des droits. Ce sont les mêmes droits dans les deux chartes.

M. Ryan: Le ministre n'a pas beaucoup de défauts, parce que c'est l'un de mes bons amis, mais il a celui d'interrompre l'autre quand il parle.

M. Bédard: J'ai appris cela du député de D'Arcy McGee.

M. Ryan: Je lui dis que, sur les neuf autres articles, nous avons un argument qu'il ne peut pas réfuter: ces droits ne sont pas garantis de la même manière, avec la même efficacité et le même impact dans la Charte des droits et libertés de la personne du Québec, pour des raisons que je lui ai explicitement énumérées. Je voudrais avoir une réponse sur ce point, au complet, parce que c'est le coeur du débat. Nous avons voté en deuxième lecture contre le projet et nous continuons de le combattre, justement à cause de cela, parce qu'il en découle... On peut avoir des raisons supérieures, des raisons d'État, des raisons nationalistes, des raisons d'évolution progressive vers la souveraineté qui expliquent des choses comme cela, mais il faut qu'on admette bien clairement - et si on ne veut pas l'admettre, nous allons le dire quand même, à défaut de réfutation solide évidemment - qu'il découle de ceci, hic et nunc, ici et maintenant, à compter de maintenant, à compter de l'adoption en troisième lecture et de la proclamation, une diminution effective des droits et libertés dont jouissaient, avant l'adoption de ce texte, les citoyens du Québec, en raison de la Charte canadienne des droits et libertés. Cela, sans remettre en cause, évidemment, tout le débat qui a eu lieu sur le bien-fondé de la méthode retenue par le gouvernement fédéral pour imposer cette charte. Là-dessus, il y a des points sur lesquels nous nous entendions très bien, mais, une fois cette étape franchie, nous sommes dans un ordre nouveau. Là, j'ai bien hâte de connaître la réponse du ministre et de ses conseillers...

M. Bédard: Tout simplement...

M. Ryan: Vous pouvez prendre tout le temps voulu pour vous consulter, parce que je sais que c'est une question embarassante pour vous autres.

M. Bédard: Non, mais les articles 7, 8 et 9, est-ce que ce sont ceux-là auxquels vous vous référez? De 7 à 14, ils sont dans la charte québécoise.

M. Ryan: Oui, mais...

M. Bédard: ...avec prédominance. Il y a l'article 2...

M. Marx: Ils ne sont pas tous dans la charte québécoise.

M. Bédard: II y a l'article 2. Écoutez! Je l'ai pris, essentiellement, si vous voulez faire ce petit jeu...

M. Marx: Non, mais juste une précision.

M. Bédard: Non, mais le jeu des additions. Vous l'avez dit vous-même que ce sont les... J'ai pris votre affirmation du début...

M. Marx: L'article 12 n'est pas dans la charte québécoise.

M. Bédard: Bon. Voulez-vous me laisser parler ou...

M. Marx: Bien, c'est cela, juste une précision.

M. Bédard: Vous-même avez dit que les droits définis étaient essentiellement les mêmes dans les deux chartes. Vous l'avez dit vous-même tout à l'heure. Bon, je pourrais ajouter qu'il y a énormément d'autres droits dans la charte québécoise qui ne se retrouvent aucunement dans la charte constitutionnelle et qui font que notre charte, au niveau du nombre de droits protégés, est beaucoup plus complète que la charte constitutionnelle, mais les droits qui sont exprimés dans les articles 7 à 14 se retrouvent dans notre charte avec prédominance via l'article 2. Maintenant, au niveau de l'article 2, j'ai expliqué tout à l'heure que les tribunaux, même si vous proposez des améliorations qu'on étudiera au niveau de la charte québécoise concernant les articles 1 à 9, les tribunaux, malgré les dispositions de la charte québécoise telle qu'on la connaît, se prononcent déjà sur ces libertés qui y sont exprimées. Je faisais référence, entre autres, à un jugement rendu tout dernièrement concernant la liberté d'expression, les tribunaux se sont prononcés sur ces libertés par le biais de l'interprétation de l'article 10.

M. Marx: Ce n'est pas la même chose parce...

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Marx: ... qu'il faut qu'il y ait discrimination; ce n'est pas la même chose.

M. Bédard: Je préfère de beaucoup

parler avec le chef de l'Opposition.

M. Marx: Je vais vous expliquer la différence.

M. Bédard: Est-ce que, mécaniquement, il y a des améliorations à apporter? Nous-mêmes, au niveau du gouvernement du Québec, il y a de cela un an tout le monde était conscient qu'il y avait des améliorations à apporter à la Charte des droits et libertés du Québec. C'est pour cela que nous avons tenu une commission parlementaire où au-delà d'une soixantaine de groupes ont été entendus et au moment où je vous parle, il y a un mémoire qui est acheminé au Conseil des ministres. Nous travaillons très fort pour en arriver, tel que nous l'avions promis, à pouvoir déposer un projet de loi avant la fin des travaux de cette partie de la session.

Le Président (M. Desbiens): M. le chef de l'Opposition.

M. Ryan: Plus j'écoute le ministre, plus j'ai l'impression que substantiellement il est en train de reconnaître notre point de vue. Nous autres, encore une fois - et ensuite je vais passer à un deuxième volet de la même question - nous soutenons que dans l'état actuel des lois du Québec l'adoption immédiate du projet de loi no 62 entraîne une diminution effective des libertés et droits dont jouissent de facto jusqu'à l'adoption de ce texte-ci les citoyens du Québec au titre de la Charte canadienne des droits et libertés et tout ce qu'a dit le ministre a confirmé ceci, même s'il le fait sinueusement. Je le comprends aussi de procéder...

M. Bédard: Je vais vous interrompre, parce que je n'ai rien dit qui soit de nature à confirmer votre affirmation, à l'effet que la loi no 62 diminue les pouvoirs des Québécois.

M. Ryan: Je l'ai établie solidement, mon affirmation et comme elle n'a pas été réfutée, je suis bien obligé de convenir que...

M. Bédard: Si vous êtes juge et partie, que voulez-vous? On n'y peut rien.

M. Ryan: Dans ce cas-ci, j'attends l'argument. Maintenant, si vous me permettez de continuer là-dessus, je prends cela pour un fait à moins qu'on m'apporte les arguments véritables, pas des choses qui tournent autour.

Deuxième point qui me préoccupe. Supposez que le gouvernement renforce la charte québécoise des droits de la personne de manière à combler ce vacuum qui va exister tant qu'il ne l'aura pas fait, résultant en une diminution des droits et libertés des citoyens du Québec. En procédant comme le ministre envisage de le faire - je connais mon point de vue implicitement, c'est cela que je voulais dire tantôt - vous allez être obligé de légiférer parce qu'il y a un vacuum qui existe en matière de protection fondamentale des droits. Dans la mesure même où vous procéderez d'une façon qui garantira ou visera à garantir une protection efficace des mêmes libertés fondamentales, à ce moment-là vous allez devoir reconnaître que les dispositions de la charte québécoise devront entraîner la possibilité d'un recours devant les tribunaux, surtout pour les libertés fondamentales. Il me semble qu'on ne laissera pas cela à une commission administrative quelque part dans les airs.

M. Bédard: À l'heure actuelle, les tribunaux se prononcent déjà sur ces droits et libertés; je ne comprends pas...

M. Ryan: Mais, après qu'une commission administrative a fait le tamisage; ça prend une autre procédure, à ce moment-là.

M. Bédard: Oui, mais vous êtes d'accord avec moi que les tribunaux se prononcent déjà, ça répond au moins à votre inquiétude et la Commission des droits de la personne règle presque 95% des cas par la conciliation. C'est ce qui me faisait dire que je préférais de beaucoup cette manière de procéder ou d'application à la seule qui pourrait nous être suggérée par la constitutionnalisation qui est la voie des tribunaux. Même s'il y a des délais devant la Commission des droits de la personne, il y en a de solides aussi devant les tribunaux, on le sait. Et également au niveau du processus d'amendement, je crois que notre processus d'amendement est préférable au processus d'amendement constitutionnel parce que cela permet à une Assemblée nationale de se coller beaucoup plus rapidement aux réalités sociales qui évoluent parfois très rapidement. Cela lui permet parfois de corriger très rapidement des situations, ce qui ne serait pas le cas avec le lourd processus constitutionnel qui est prévu au niveau canadien. Je pense, entre autres, si le chef de l'Opposition me permet un exemple: Prenez des problèmes... Nous avons à vivre certains problèmes en ce qui concerne le ministère de l'Environnement en ce qui a trait à des programmes d'accès à l'égalité qui ont été mis en place aux fins de promouvoir l'avancement d'un groupe en particulier: les femmes. Avec notre processus législatif, on va pouvoir rapidement corriger la situation, je prends cet exemple parmi d'autres. Cela pourrait être énormément difficile concernant d'autres droits et libertés s'il faut s'en tenir au respect et il faudra s'en tenir au respect du processus

constitutionnel. Il me semble qu'il y a une série d'avantages, il n'y a jamais de situation parfaite. Il reste que la Charte des droits et libertés du Québec, avec les améliorations qu'on peut y apporter, a fait ses preuves jusqu'à maintenant. S'il y a une place, il ne faut tout de même pas se péter les bretelles comme vous le dites, mais je crois que lorsqu'on parle de protection des droits et libertés des citoyens, le Québec n'est pas à l'arrière-garde dans ce domaine, loin de là.

Le Président (M. Desbiens): M. le chef de l'Opposition.

M. Ryan: Je voudrais compléter le deuxième volet de ma question. Si le gouvernement présente éventuellement à l'Assemblée nationale un projet de loi en vertu duquel il renforcerait les dispositions de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne touchant les grandes libertés fondamentales et les droits juridiques, il n'y aura pas beaucoup de différences, à ce moment avec la charte canadienne au point de vue de la formulation. On a fait une étude comparative des deux et il y a peut-être quelques points, mais, dans l'ensemble, il n'y a pas énormément de différences.

Supposons que vous garantissiez de manière forte, dans la Charte québécoise des droits et libertés de la personne, la liberté d'association, la . liberté d'expression, la liberté de presse et que là une cause s'institue. Elle s'en va devant les tribunaux et quand elle s'en va devant les tribunaux, cela veut dire qu'elle pourra possiblement aller jusqu'à la Cour suprême. Là, si vous avez - c'est cela qui est ma difficulté de fond en plus de la première que j'ai mentionnée cela c'est la deuxième - le même texte à toutes fins utiles dans la charte québécoise et dans la charte canadienne, qu'est-ce qu'on va gagner avec toute cette chicane. Au bout de la ligne, cela va être la même interprétation judiciaire, même si on définit la liberté d'association, la liberté d'expression dans la charte canadienne ou dans la charte québécoise, ce sont des grandes libertés avec lesquelles on ne joue pas du tout. On est arrivé aujourd'hui, surtout pour ces grandes libertés, oublions les autres qui, à mon point de vue n'ont pas la même importance au point de vue de qualité de la vie politique... Ces grandes libertés sont définies à l'article 2 et à l'article 3 de notre charte à nous.

Je me demande si vous me permettez juste de compléter ma question, je voudrais la poser le plus clairement possible. Cela s'en va d'un côté comme de l'autre, il y en a un qui peut instituer une action en Ontario au titre de la Charte canadienne des droits et libertés, un autre va en instituer une au Québec au titre de la Charte québécoise des droits et libertés de la personne; cela s'en va dans l'entonnoir judiciaire, cela va sortir à la Cour suprême au bout de la ligne. Pensez-vous qu'ils vont donner une interprétation différente de la liberté d'expression, de la liberté de parole parce que c'est dans la charte québécoise plutôt que dans la charte canadienne? Il me semble que c'est la même chose. Je ne vois pas la raison objective et substantielle qui nous justifie de conduire une lutte à ce niveau parce qu'au bout de la ligne si nous sommes tous de bonne foi dans la promotion des libertés et des droits fondamentaux, et je le crois, je ne prête aucune mauvaise intention au gouvernement sur cela. Si nous sommes tous de bonne foi, il me semble qu'on s'en va vers le même résultat, quelles que soient les querelles théologiques ou légalistes qui sont instituées en cours de route. C'est cela que je voudrais que vous examiniez avec moi. (16 h 45)

M. Bédard: Le chef de l'Opposition admettra qu'il y a un vacuum qu'il faut combler concernant l'article 15. Le fédéral dit, concernant les droits à l'égalité qui sont des droits fondamentaux, l'application de sa disposition ne viendra que dans trois ans. Entre vous et moi, ce n'est pas... En tout cas, cela donne un peu l'appréciation du souci du fédéral concernant les droits et libertés. Il faut assurer la continuité et même l'augmentation des pouvoirs et protections concernant les droits et libertés des Québécois. Par rapport à toute l'argumentation que vient de faire le chef de l'Opposition, il y a tout simplement le principe même du projet de loi 62 qui est le droit de l'Assemblée nationale du Québec de décider. Il me semble qu'on a, au niveau des partis politiques... Je l'ai dit à plusieurs reprises, la loi 62, c'est le refus global du gouvernement du Québec de voir diminuer les droits et pouvoirs de l'Assemblée nationale sans son consentement. Il me semble que c'est le principe fondamental. Au niveau des partis, nous étions d'accord. Je comprends qu'il y a eu certaines abstentions ou certaines défections mais, au niveau des partis, nous étions d'accord à l'Assemblée nationale.

Or, la preuve a été faite que les articles 2 et 7 à 15, la Cour suprême elle-même l'a dit, pouvaient être de nature à diminuer les pouvoirs de l'Assemblée nationale. Donc, la conclusion est très simple: comme nous n'avons pas donné notre consentement, comme on s'est passé de notre consententement au niveau de la loi constitutionnelle, nous avons l'attitude responsable, adoptée par l'Assemblée nationale, qui est de ne pas vouloir se faire imposer un système juridique si ce n'est par la volonté même de l'Assemblée nationale.

M. Ryan: Si je comprends bien, vous faites passer les droits de l'Assemblée nationale avant les droits des citoyens.

M. Bédard: Non, vous le savez bien, M. le chef de l'Opposition, on ne fait pas passer les droits de l'Assemblée nationale avant les droits des citoyens et - en tout cas, je le prétends - nous ne diminuons pas la protection des droits et libertés des citoyens du Québec parce que nous avons une charte des droits et libertés qui va continuer de s'appliquer. On peut mettre en doute certains de ses mécanismes. Cela, c'est une question de discussion mais il reste quand même que ce moyen, joint à la volonté des Québécois comme communauté de respecter les droits et libertés, a fait que jusqu'à maintenant on peut dire que le Québec est à l'avant-garde de la protection des droits et libertés.

Le Président (M. Desbiens): M. le chef de l'Opposition.

M. Ryan: Je n'en reviens pas...

M. Bédard: Ce n'est pas un si mauvais système.

M. Ryan: ...il y a quelque chose qui me surprend à l'Assemblée nationale. Je pense que j'aurai toujours de la misère à m'habituer à cela. C'est qu'on peut faire une démonstration parfaite d'une chose, même au plan des chiffres à certains moments, et six mois après on entend un gars du gouvernement répéter la même leçon qu'avant, comme si on n'en avait pas discuté. Et cela, c'est une chose désarmante. Je ne vous blâme pas en particulier, M. le ministre, mais c'est quelque chose que je ne comprends pas. Dans les secteurs où j'ai évolué longtemps, à un moment donné, quand on avait fait une démonstration, le gars était assez intelligent, il disait: Très bien, celle-là est faite, on passe à autre chose. Mais ici on revient. On a discuté des accords fiscaux il y a quelque temps. On a fait une démonstration solide que le coût des changements de politique, c'est à peu près 300 000 000 $. De l'autre côté, tout le monde répète encore, il y en a encore qui sont perdus dans les 600 000 000 $. Il y en a qui sont descendus à 500 000 000 $. Jamais personne n'a répondu à l'argument mais ils répètent tous leur thèse comme des ...je n'emploie pas d'autre expression.

M. Bédard: Je pense que le chef de l'Opposition sait comme moi que c'est difficile de mettre tout le monde d'accord.

M. Ryan: Ce n'est pas cela que je demande. Cela ne me fait rien qu'on ne soit pas d'accord.

M. Bédard: Même avec les meilleures démonstrations, tout le monde y va de ses convictions...

M. Ryan: Je sais bien, mais, une fois qu'une démonstration a été faite clairement, il me semble qu'un esprit logique dit: Eh bien! dans ma position, il y a quelque chose qui ne marche pas. Je vais essayer autre chose, je ne reviendrai pas avec la même chose. Quand vous me dites que vous êtes à l'avant-garde des droits, je dis que ce n'est plus vrai objectivement parce qu'il y a une charte canadienne qui est beaucoup plus avancée que la charte provinciale des droits et, malgré les mérites de ses auteurs qui ont été de bons libéraux dans le temps, vous autres, vous y avez peut-être fait exception à une dizaine de reprises, dans l'ensemble, vous l'avez maintenue quand même, mais elle n'a pas la même portée et la même force que la charte canadienne des droits et vous-mêmes, vous êtes bien embarrassés pour faire la démonstration du contraire, vous n'en êtes pas capables, tout simplement.

M. Bédard: Vous en êtes sur le côté technique, cela, on le sait, on ne partage pas tout à fait...

M. Ryan: C'est vrai.

M. Bédard: ...la même opinion concernant l'enchâssement ou pas.

M. Ryan: Ma question, si vous me permettez, je vais la formuler, parce que je veux la formuler clairement, je ne l'ai pas formulée encore. Ce qui m'intéresse le plus dans la charte canadienne, c'est l'article 2. Les autres, ce sont de bons articles aussi et je suis bien content qu'ils soient là, mais qu'ils soient dans une charte les garantit solidement, j'aurais mieux aimé que le gouvernement du Québec et l'Assemblée embarquent dans ce processus plutôt que de se mettre en travers. Je n'aimerais pas qu'ils le fassent unilatéralement non plus, c'est une position délicate, mais je la pense solide.

Ce que je trouve, c'est que ces grandes libertés, quand même on les tripoterait tant qu'on veut dans des débats de ceci, de cela, de compétence et de juridiction et tout, elles sont là et vous les trouvez dans la Charte des droits de l'homme des Nations Unies, vous les trouvez dans la charte de tel et tel pays. M. Trudeau n'a pas fait de merveilles à Ottawa, il a pris des textes un petit peu partout, il les a fait affiner, il les a fait retravailler pour qu'ils correspondent à la réalité canadienne. Je dis que, dans l'ensemble, ce texte-là est un bon texte, on peut en discuter tel ou tel paragraphe, mais, dans l'ensemble, c'est un bon texte et je me demande, à force de nous casser les méninges comme vous nous invitez à le faire

au cours des prochains mois, à quoi de mieux on va arriver qu'à ce simple petit paragraphe qui nous dit: Chacun a les libertés fondamentales suivantes: la liberté de conscience et de religion. Quand même vous inviteriez quelqu'un à lire tous les articles du chanoine Groulx, toute la littérature nationaliste et toute l'histoire du Québec, la liberté de conscience et de religion, on ne peut pas simplifier cela plus que ça. La liberté de pensée et de croyance, d'opinion et d'expression, y compris la liberté de la presse et des autres moyens de communications, cela, c'est nouveau et c'est peut-être un peu discutable, c'est plus délicat, à mon point de vue. En tout cas, on l'y a mise et je n'ai pas d'objection, parce que j'en ai joui trop longtemps pour avoir peur de cela. La liberté de réunion pacifique, il me semble qu'il faudrait avoir une drôle de timidité pour avoir peur de cela; pour la liberté d'association, c'est la même chose.

Ce que je ne comprends pas, c'est à quoi de mieux on va arriver avec une affaire seulement à nous. J'aimerais savoir quel danger on court en ayant cela pour l'ensemble du Canada. C'est cela que je ne suis pas capable de comprendre.

M. Bédard: Je pourrais dire que je n'en reviens pas...

M. Ryan: Et de ... du principe que vous avez...

M. Bédard: ...de votre obstination à ce que ce soit enchâssé et que ces choses-là nous soient nécessairement dites par le fédéral, si on veut qu'elles soient bonnes à entendre.

M. Ryan: Vous m'avez interrompu.

M. Bédard: Vous retrouvez tout cela dans...

M. Ryan: Voulez-vous me permettre juste de compléter mon argument, ce n'est pas grand-chose.

M. Bédard: Non, je m'excuse de vous interrompre, mais on ne sait jamais quand vous avez fini.

M. Ryan: Oui, c'est vrai que, quelquefois, il y a des pauses. J'allais ajouter ceci. Lorsqu'avaient commencé les négociations constitutionnelles avec Ottawa, j'insiste parce que c'est une question à laquelle je tiens profondément et que j'ai inscrite à la base du travail que je fais avec mon parti, en tous les cas, que je faisais même avant d'être en politique, je vous avais demandé une fois en commission parlementaire, vous vous souvenez de cela sans doute, s'il y aurait certaines libertés fondamentales que vous seriez prêts à partager avec les autres en mettant toutes les garanties de votre côté et j'avais cru comprendre que vous aviez répondu que certaines grandes libertés de fond, le gouvernement était prêt à envisager cela et je crois qu'un autre ministre avait dit la même chose. Je ne sais pas si c'était le ministre des Affaires intergouvernementales d'aujourd'hui ou celui d'hier, un des deux avait dit la même chose. Je me disais: Si on avait au moins ce noyau-là, un noyau commun, il me semble que cela ne compromettrait en rien les objectifs de votre parti pour l'avenir, que cela ne compromettrait personne en rien mais il me semble que cela établit une base plus substantielle, en tout cas, pour la primauté des droits des citoyens sur toute autre source d'autorité dans notre système politique, y compris les droits de l'Assemblée nationale, les droits du Parlement canadien, tout, le pouvoir judiciaire étant au service de ces droits pour les interpréter de toute évidence à l'avantage des citoyens, c'est pour cela qu'il existe. Je pense que personne ne soupçonnerait le pouvoir judiciaire d'être à la solde du pouvoir politique dans notre pays, autant au niveau du Québec qu'au niveau fédéral.

Cela, c'est la question, je ne vois pas à quel raffinement on va pouvoir arriver et je ne vois pas pourquoi vous semblez avoir changé d'opinion au cours des deux années qui se sont écoulées depuis le temps qu'on avait abordé cette question en commission parlementaire?

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.

M. Bédard: Mais la réponse au chef de l'Opposition se retrouve dans la Charte même des droits et libertés du Québec. Cet article 2 auquel il se réfère, à mon tour je le réfère simplement à l'article 3 de la Charte des droits et libertés qui, à mon sens, est la meilleure expression d'intention. On n'a pas de procès d'intention à se faire. Je suis d'accord avec le chef de l'Opposition que, de ce côté-là, il n'y a pas politicaillerie à faire ni de partisanerie. La Charte des droits et libertés du Québec dit textuellement: Toute personne est titulaire des libertés fondamentales, telles la liberté de conscience, la liberté de religion, la liberté d'opinion, la liberté d'expression, la liberté de réunion pacifique et la liberté d'association. Je pense qu'il n'y a personne au Québec qui veut aller à l'encontre de cela. Là-dessus, le chef de l'Opposition et moi-même sommes d'accord. Si on lit d'autres articles de notre charte des droits et libertés, il y a bien d'autres droits qui y sont ajoutés, qui sont tout aussi intéressants ou importants et qu'on ne retrouve même

pas dans la charte constitutionnelle.

À l'égard des droits et libertés qu'on ne retrouve pas dans la charte constitutionnelle, même si vous n'êtes pas d'accord avec la méthode ou le moyen, la prépondérance ou encore la question de l'enchâssement il reste que tous ces droits additionnels qu'on retrouve dans la Charte des droits et libertés, ces libertés additionnelles qu'on retrouve au Québec et qu'on ne retrouve pas dans la loi constitutionnelle, sont très importantes aussi. Ce que je ne comprends pas, c'est l'obstination. Je ne devrais pas dire que je ne le comprends pas, je pense qu'on diffère tout simplement d'opinion. Vous donnez, à mon sens, des mérites à l'enchâssement que je ne suis pas prêt à lui reconnaître, parce que la preuve est faite qu'il y a des pays où il y a enchâssement et où, pourtant, des droits et libertés sont violés. Il y a des pays où il n'y a pas enchâssement, même pas prépondérance, et pourtant ces pays peuvent être à l'avant-garde sur le plan de la protection des droits et libertés.

En fait, on est au niveau d'une discussion technique, mais il reste la question de principe, par contre, de ce projet de loi 62, à savoir le refus de se faire imposer, de faire imposer à l'Assemblée nationale du Québec, c'est-à-dire le refus global de voir diminuer les pouvoirs et droits de l'Assemblée nationale en fonction de ces droits et libertés que l'Assemblée nationale, quel que soit le parti au pouvoir, a quand même bien protégés. Je suis convaincu, quel que soit le gouvernement au pouvoir au niveau du gouvernement du Québec, que l'Assemblée nationale aura toujours pour objectif non pas de diminuer, mais d'augmenter encore les pouvoirs ou les droits qui pourraient être couverts dans la Charte des droits et libertés du Québec. D'ailleurs, vous serez à même de constater, par certains amendements que nous y apporterons, que d'autres droits et libertés y seront protégés, des droits et libertés qui n'ont même pas fait l'objet de discussion ou de préoccupation au niveau fédéral.

Tout cela pour m'amener à une conviction, quel que soit le moyen qu'on prenne, les amendements qu'on apporte ou les changements qu'on opère, au niveau de la Charte des droits et libertés, tout cela pour m'amener à la conclusion, très humblement que je soumets, que la véritable force au niveau de la protection des droits et libertés réside dans la volonté des citoyens d'une communauté de vouloir voir ses droits respectés. Ce désir, cette volonté, je pense qu'ils ont été exprimés avec force par la population du Québec. Il n'y a rien qui puisse nous permettre de douter d'une diminution de cette volonté, de la part de la collectivité québécoise.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de D'Arcy McGee, rapidement, pour donner une chance au député de Chauveau. (17 heures)

M. Marx: J'ai déjà dit que la charte fédérale et la charte québécoise ont des fonctions différentes. Je ne veux pas trop insister sur cette question, mais il ne faut pas oublier que la charte constitutionnelle n'empêche pas le Québec de protéger les droits des Québécois, au-delà des protections qui se trouvent dans la charte fédérale. Avoir une charte fédérale ne veut pas dire qu'on n'a pas besoin d'une charte québécoise. Comme je l'ai déjà dit, les deux sont importantes. C'est important aussi d'avoir une Commission des droits de la personne; on le voit au niveau fédéral. Il y a une charte constitutionnelle, mais il y a aussi une loi fédérale contre la discrimination. Il y a aussi une commission fédérale des droits. C'est la même chose pour l'Ontario, pour la Saskatchewan et ainsi de suite. Il ne faut pas que le ministre donne l'impression que la charte constitutionnelle va empêcher le Québec de protéger davantage les droits et les libertés des Québécois. C'est toujours possible et c'est toujours souhaitable, mais la différence essentielle entre la charte fédérale et la charte québécoise, c'est que la charte fédérale est constitutionnelle et, comme je l'ai dit, cela va avoir et cela a effectivement plus de poids que la charte québécoise.

J'aimerais ajouter un autre petit point. Le ministre a dit que la charte québécoise protège la liberté d'expression. C'est vrai et ce n'est pas vrai. La charte québécoise ne protège pas la liberté d'expression au même degré que la charte fédérale. Par exemple, s'il y a un règlement municipal qui empêche tout le monde de s'exprimer en public, liberté d'expression pure, la charte québécoise n'aurait pas préséance sur ce règlement municipal parce que l'article 3, dans la charte québécoise, n'a pas préséance sur une loi québécoise ou sur un règlement municipal. Ce n'est pas théorique, M. le ministre...

M. Bédard: Je vous répondrai tout à l'heure.

M. Marx: ... cela, si la charte avait prépondérance, préséance sur un règlement municipal qui empêche les gens de s'exprimer en public. Cependant, s'il y a un règlement municipal qui empêche quelqu'un d'utiliser son droit d'expression par rapport à des opinions politiques précises ou par rapport à ses opinions religieuses, ce serait couvert par l'article 10 de la charte québécoise. Je vois que le conseiller juridique du ministre est d'accord avec moi, donc, le ministre sera d'accord aussi. Il y a donc une mince différence, mais très importante, entre la

protection de la charte québécoise et la protection de la charte constitutionnelle en ce qui concerne les libertés publiques.

En terminant, je dis qu'une charte n'en exclut pas une autre. Les deux sont importantes. Il ne faut pas oublier que le Québec peut toujours aller au-delà d'une charte constitutionnelle et protéger davantage les droits et les libertés des Québécois. La charte fédérale n'enlèverait jamais des droits aux Québécois, c'est sûr.

M. Bédard: Tout ce que vous essayez de nous faire partager, c'est votre conviction sur la valeur, la grandeur et la nécessité de l'enchâssement pour la protection des droits. Nous ne sommes pas sur la même longueur d'onde là-dessus, je vous l'ai dit.

M. Marx: La commission...

M. Bédard: Je ne vous ai pas interrompu. La meilleure preuve en est qu'on n'a pas une charte enchâssée. Je peux vous prédire qu'au Québec, les droits et les libertés seront aussi bien respectés sinon mieux respectés, en fonction de l'avenir et sur les points particuliers, que dans le reste du Canada avec la charte constitutionnelle. Prenez donc, le défi. Le défi ne se prend pas à partir de moyens techniques de protection des droits et libertés, il se prend à partir de la volonté d'une population de vouloir respecter les droits et libertés. Ce défi, je suis prêt à le prendre n'importe quel temps, parce que je sais que la population québécoise a toujours été très tolérante, a toujours été très respectueuse des droits et libertés et elle va continuer de l'être, enchâssement ou pas. Il n'y avait pas d'enchâssement avant et cela ne nous a pas empêchés de nous donner une des chartes des droits et libertés, au niveau du nombre de droits, des plus évoluées; je pense que le chef de l'Opposition en conviendra avec moi. Même dans la charte constitutionnelle de 1981, les libertés fondamentales ne sont pas des libertés absolues. Elles sont conditionnées par l'application de l'article 1. J'espère que vous êtes d'accord avec moi là-dessus.

M. Marx: L'article 1, c'est une autre question.

M. Bédard: Comme si l'article 1 n'était pas important.

M. Marx: Je suis prêt à discuter de l'article 1.

Dispositions relatives à l'article 33 de la Loi constitutionnelle de 1982

M. Bédard: M. le député de D'Arcy McGee, l'article 1 conditionne d'une certaine façon tous les autres articles qui sont dans cette charte. Ne venez pas nous dire que ce n'est pas important. C'est une soupape qui est prévue...

M. Marx: C'est important, mais il faut savoir la portée de cet article

M. Bédard: ... et c'est assez normal qu'elle le soit. Même dans la loi constitutionnelle, ce ne sont pas des libertés absolues. J'ai hâte de voir en fonction de l'avenir - vous me permettez - la progression des droits et libertés dans les provinces qui acceptent la constitutionnalisation par rapport au Québec qui ne l'accepte pas. En tout cas, je suis convaincu que ce ne sera pas difficile de souffrir la comparaison, surtout quand on a entendu dernièrement les autorités fédérales, au Parlement fédéral même, soutenir que, d'après elles, la loi des mesures de guerre, à laquelle on n'a apporté aucun amendement, se justifiait. Pensez-y deux minutes, là. Cela a été fait en Chambre, cette affirmation. Au Parlement fédéral, avec leur loi constitutionnelle, ils croient que la loi des mesures de guerre telle qu'on la connaît peut se justifier dans une société libre et démocratique.

M. Marx: II y a une grande différence aujourd'hui, M. le ministre.

M. Bédard: Je dois vous dire que ce n'est pas très rassurant de la part d'un gouvernement. Heureusement, je suis convaincu que les tribunaux vont probablement, dans ce sens-là, être un chien de garde nécessaire.

M. Marx: II y a une petite différence.

Le Président (M. Desbiens): Je brise la règle d'alternance parce que le député...

M. Bédard: Je termine sur une phrase, M. le Président. Le chef de l'Opposition conviendra qu'il y a toujours l'article 15 qui regarde les droits très importants, le droit à l'égalité, la disparition des discriminations. Si on s'en remettait seulement à la loi constitutionnelle, il n'y aurait pas de protection au moment où on se parle.

M. Ryan: Pour trois ans.

M. Bédard: Pour trois ans! Des droits et libertés fondamentales pour trois ans! Il me semble que ce n'est pas une question de longueur de temps; c'est une question de principe.

Le Président (M. Desbiens): Le député de Chauveau attend depuis un bon bout de temps pour exercer son droit d'expression. Je lui donne le droit de parole, s'il vous plaît. M. le député de Chauveau.

M. Marx: Un amendement tout de suite.

M. Bédard: Voulez-vous que, pour dix ans, on dise qu'il n'y a pas d'élections?

M. Brouillet: M. le Président, j'aimerais intervenir brièvement. Je pense qu'il y a des postulats ou des présupposés à toute cette argumentation qui font que les deux logiques ne se rencontrent pas. C'est évident que, du point de vue du gouvernement, un des présupposés à toute cette discussion et à sa prise de position concernant la loi 62 versus la loi constitutionnelle, c'est d'abord et avant tout le caractère primordial des droits de l'Assemblée nationale. Je crois que c'est cela que nous mettons comme donnée fondamentale; nous voulons absolument protéger l'intégrité des droits de l'Assemblée nationale. C'est un postulat de base. De l'autre côté, je crois que toute la prise de position s'appuie sur la primauté de l'entente avec le Canada. Ce qui est d'abord important, c'est d'arriver à s'entendre avec le Canada fût-ce au détriment des droits de l'Assemblée nationale. Il y a une priorité accordée à l'entente avec le Canada, tellement que l'on dit ceci: Écoutez, même si dans la Loi constitutionnelle de 1982, il y a des passages où certains droits ne seront reconnus et en vigueur que dans trois ans, bon, que voulez-vous, attendons trois ans, car ce qu'il y a d'important, c'est d'être en accord avec le Canada, de ne pas être en désaccord avec le Canada.

On a fait valoir aussi le fait que le gouvernement ferait primer les droits de l'Assemblée nationale sur les droits des citoyens. C'est évident, que voulez-vous? Je trouve, moi, que c'est un argument qui peut se renverser complètement. En définitive, qui va protéger les droits des citoyens? Ce sera un Parlement quel qu'il soit. Que ce soit le Parlement du Canada ou le Parlement du Québec, c'est toujours un Parlement. Il n'y a pas d'opposition entre l'un et l'autre. Si nous voulons que les droits des citoyens du Québec soient d'abord protégés par l'Assemblée nationale, dans les pouvoirs qui lui sont actuellement reconnus, ce n'est pas parce que c'est le fédéral qui va protéger ces droits qu'ils seront mieux protégés. Que ce soit un gouvernement ou l'autre, il n'y a pas de garantie que les droits des citoyens vont être mieux protégés parce que c'est le gouvernement fédéral plutôt que le gouvernement du Québec qui va les garantir.

Je pense que c'est une opposition qui ne tient pas du tout. Dans l'hypothèse où, actuellement, la Charte des droits et libertés du Québec serait de valeur moindre que la loi constitutionnelle, la solution n'est pas de dire: Écoutez, acceptons tout de suite la charte de la loi constitutionnelle, alors qu'elle diminue les droits du Québec. La solution serait, dans la mesure où on privilégie les droits de l'Assemblée nationale, d'améliorer notre propre charte, c'est la solution. C'est évident que si on fait d'abord primer l'accord avec le Canada, on va dire: Rangeons-nous d'emblée du côté de la loi constitutionnelle.

Je trouve que le fond du débat est là. Est-ce que nous voulons accorder la priorité aux droits, à l'intégrité des droits de l'Assemblée nationale? Si c'est cela, on ne peut pas accepter de se faire imposer une charte, même si elle correspond dans ses parties à la nôtre, même si dans ses parties elle est peut-être meilleure que la nôtre, même si sur certains points elle a peut-être plus de force. À ce moment-là, je crois que la solution est d'améliorer notre charte, s'il y a lieu, pour protéger les droits de l'Assemblée nationale.

Le Président (M. Desbiens): Vous avez terminé?

M. Brouillet: Oui.

Le Président (M. Desbiens): M. le chef de l'Opposition.

M. Ryan: II y a un certain nombre de points importants. Le ministre disait tantôt: Quel que soit le régime qu'on choisisse, finalement, c'est l'opinion publique qui va être la meilleure garante de la qualité des libertés ou de la qualité de la protection et de la volonté politique des citoyens. Aux États-Unis, si on avait retenu seulement ce critère, on serait peut-être encore à l'époque du transport séparé en autobus pour les enfants de race blanche et ceux de race noire. Les politiciens, l'opinion publique, la presse, les élites, les "establishments" auraient continué de penser longtemps que c'était beaucoup mieux comme cela, "equal but separate", égaux mais séparés. À un moment donné, la Cour suprême a dit - cela a été un jugement historique, un "milestone" comme on dit, une étape décisive "separate means unequal" - elle a dit: II faut que cela se fasse ensemble. À ce moment-là, cela a entraîné une série de conséquences administratives; c'est là la force d'un système d'enchâssement. Il permet, par l'intervention d'un pouvoir statutairement, indépendant du processus électoral et des préjugés populaires, de franchir des étapes, de briser des murs qui, autrement, pourraient rester érigés longtemps. C'est un exemple qui plaide en faveur de l'autre.

Il y a une chose à laquelle je crois que...

M. Bédard: Prenez...

M. Ryan: Je m'excuse, est-ce que je peux continuer?

M. Bédard: Je voulais vous poser une question.

M. Ryan: C'est parce que je ne veux pas perdre de vue l'autre raisonnement non plus, si vous me permettez. Je crois comprendre aussi, toujours dans la même voie, que c'est encore dans le programme du Parti québécois d'enchâsser éventuellement les droits fondamentaux des citoyens dans une constitution du Québec. Je n'ai pas eu connaissance que le ministre ait fait campagne au nom des arguments qu'il invoque à l'encontre de la charte fédérale. Si c'est bon d'enchâsser pour une république souveraine du Québec éventuelle, on a bien le droit de penser que cela peut être bon pour une société fédérale canadienne. Il me semble qu'on ne peut pas jouer sur les deux tableaux. (17 h 15)

Le député de Chauveau mentionnait que nous faisons passer l'entente à tout prix avec le Canada avant les droits de l'Assemblée nationale. Je crois que c'est faux et que ce n'est pas du tout notre perspective. Notre perspective est double. D'abord, nous croyons que les citoyens du Québec sont autant citoyens du Canada que citoyens du Québec. Ils sont citoyens du Canada sous certains chefs de juridiction et ils sont citoyens sous certains chefs de juridiction. Ces libertés fondamentales dont nous parlons sont nécessaires pour l'exercice de leur qualité de citoyen aux deux niveaux. La liberté d'association, c'est aussi important pour être un bon citoyen. au palier fédéral que pour être un bon citoyen au palier québécois. La liberté d'expression, c'est la même chose. Voilà pourquoi on se dit: Puisque ces libertés sont tellement fondamentales, garantissons-les d'un même coup au deux niveaux. Cela va être bon pour les deux. Là, ce qu'il s'agit de faire, ce n'est pas d'aller quêter la protection d'un Parlement pour la défense des droits des citoyens, c'est de protéger les citoyens contre l'intervention possiblement arbitraire des législateurs, des administrateurs publics, des administrateurs privés, de tous ceux qui peuvent avoir la tentation de se fourrer le nez dans les affaires des citoyens. C'est pour cela qu'on veut que ce soit là. Ce n'est pas pour faire plaisir à M. Trudeau et à l'entité canadienne abstraite; pas du tout. C'est le régime qu'on a choisi. C'est le régime dans lequel nous vivons. Nous trouvons que c'est beaucoup plus fort objectivement et indépendamment de M. Trudeau, cela, c'est une autre affaire. Ce n'est pas parce que nous mettons l'entente canadienne avant à tout prix. C'est parce que nous croyons qu'au point de vue de la qualité politique, c'est mieux comme cela. Je respecte l'autre opinion, mais je crois que c'est mon droit et mon devoir de faire valoir la nôtre et surtout d'éviter qu'elle soit mal interprétée.

M. Bédard: C'est peut-être...

M. Brouillet: Seulement un point pour bien préciser votre pensée, pour qu'on l'interprète très bien. Pour vous, c'est le fait de l'enchâssement qui garantit ce supplément de protection, c'est cela que vous voulez dire finalement. Alors, vous devriez travailler pour avoir plutôt un enchâssement dans une constitution québécoise nonobstant le...

Une voix: ... quel sera le...

M. Brouillet: Quant à moi, ce que la loi fédérale présente dans son entité, on n'a pas demandé au Québec de signer tel ou tel article, c'était l'ensemble. L'ensemble de la loi constitutionnelle, d'après l'avis des tribunaux, vient limiter et enlever des pouvoirs qui jusqu'à aujourd'hui ont été reconnus à l'Assemblée nationale. Je pars de cela. S'il n'y avait eu aucune atteinte aux pouvoirs de l'Assemblée nationale, je pense que l'attitude du gouvernement aurait été différente. C'est parce qu'ils ont vu dans cette loi constitutionnelle, telle qu'elle existait, des atteintes aux pouvoirs de l'Assemblée nationale. Je pense qu'il est important de considérer cela.

Le Président (M. Desbiens): Je dois vous rappeler que cela tourne de plus en plus au dialogue, ce qui n'est pas habituellement la tradition, mais... M. le chef de l'Opposition...

M. Bédard: Je tiens pour acquis que... M. le Président, est-ce que vous me permettez une question de règlement?

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que cela répond aux mêmes choses?

M. Bédard: On tient pour acquis que l'on s'est donné de quinze à dix-huit heures pour adopter le projet de loi

Le Président (M. Desbiens): Dix-sept heures quarante...

M. Marx: ... vous avez gagné.

M. Bédard: ... pour l'étude article par article. Je comprends que, comme le projet de loi est uniquement technique, il s'agit d'une minute ou deux pour l'adopter, tout en sachant que l'Opposition sera en désaccord, comme elle l'a déjà exprimé, ce qui permet peut-être de discuter un peu plus sur le fond. Entre autres, avec votre permission...

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que vous complétez? M. le chef de l'Opposition a demandé la parole.

M. Bédard: M. le chef de l'Opposition parlait tout à l'heure, en se référant à un exemple précis aux États-Unis, des avantages de l'enchâssement. À partir des États-Unis, on pourrait amener d'autres exemples qui font en sorte que l'enchâssement constitue plutôt un obstacle à la reconnaissance d'un droit fondamental, entre autres le droit à l'égalité des hommes et des femmes. Vous le savez, aux États-Unis, à cause du lourd processus d'amendement qui existe depuis des années, on essaie d'enchâsser une fois pour toutes le principe de l'égalité des hommes et des femmes. Ce n'est pas encore fait. À cause du lourd processus d'amendement, ils n'obtiennent pas le nombre requis par la constitution pour que ce principe soit enchâssé, pourtant c'est un principe fondamental; ce qui veut dire que, dans n'importe quel système, enchâssement ou non, il y des désavantages et des avantages. C'est dans ce sens que je me dis que quand même, à la fin du compte, il reste que c'est la volonté d'une population de vouloir respecter des droits et libertés qui constituent presque toujours la meilleure sauvegarde pour qu'aucun excès ne se produise. Je suis convaincu quant à moi qu'avant qu'un gouvernement du Québec, quel que soit le parti qu'il représente, ne s'aventure à vouloir retirer l'une des libertés qui sont consacrées dans la charte, ce gouvernement aurait des comptes à rendre en temps et lieu. Il n'y a aucun gouvernement du Québec, quel qu'il soit, qui va s'aventurer à enlever des libertés. Au contraire, tous les efforts sont dans le sens d'essayer d'en ajouter, comme nous le ferons, comme des gouvernements l'ont fait avant nous, comme nous l'avons fait déjà par certains amendements, et nous continuerons de le faire avec d'autres amendements qui vont constituer des améliorations pour les citoyens au niveau de la reconnaissance de nouveaux droits et de nouvelles libertés protégés par la Charte des droits et libertés du Québec.

Le Président (M. Desbiens): M. le chef de l'Opposition.

M. Ryan: Je voulais répondre au député de Chauveau. Ces libertés fondamentales ne sont pas la propriété exclusive de l'Assemblée nationale du Québec. La liberté de conscience, la liberté de croyance, la liberté de pensée, la liberté de parole, il me semble que ce sont des libertés qui dépassent d'emblée la juridiction...

M. Bédard: Je crois que ce que voulais dire le député de Chauveau, c'est sa confiance qu'un gouvernement va respecter ce que pensent les citoyens.

M. Marx: Ce n'est pas la question du gouvernement; ce sont les municipalités, les organismes administratifs, c'est tout cela. Je m'excuse...

M. Ryan: Ce n'est pas vous qui m'avez interrompu. Il me semble qu'il y a une différence de perception fondamentale. Nous, nous croyons que ces libertés sont l'apanage fondamental du citoyen individuel et libre, lequel est membre autant de la société fédérale que de la société québécoise et lequel a autant besoin de ces poumons-là pour fonctionner à un niveau qu'à l'autre. C'est pour cela que nous voudrions que si c'est dans la constitution, ça le protège, ça lui permette de fonctionner avec toute l'ampleur de liberté dont il est capable aux deux niveaux à l'échelle de l'ensemble du pays.

N'oubliez pas que si nous faisons partie de la société canadienne, ce citoyen va être appelé à voter au niveau fédéral. Il va être appelé à faire des représentations contre les bureaucrates fédéraux dans l'application de bien des lois. Par exemple, pour se présenter devant les tribunaux, s'il a cette arme dans les mains, ça va l'aider; la même chose s'il a l'arme dans ses mains pour se défendre contre les intrusions des bureaucrates et des politiciens provinciaux. M. le député de Chauveau, vous me dites: Si vous êtes intéressé à cela, venez le faire au Québec. Je n'ai pas d'objection à le faire au Québec. Si vous vouliez mettre dans une charte québécoise les mêmes libertés, à condition qu'il n'y ait pas cette espèce de retrait, mais qu'on dise plutôt: Les deux se rencontrent et convergent pour un renforcement des libertés des citoyens, je serais le plus heureux des hommes. Je ne voudrais pas du tout que Québec se pense complètement empêché ou qu'on le lui interdise d'agir dans ce domaine parce qu'on aurait une garantie constitutionnelle. Il me semble qu'il n'y a pas de contradiction entre les deux, d'autant moins que même dans la formulation, en vous torturant les méninges autant que vous allez essayer de le faire au cours des prochains mois pour nous arriver avec des propositions, vous ne pourrez pas trouver tellement mieux - peut-être un adjectif - parce que cela est le fruit de 50 ans de recherche. Cela n'est pas la création de M. Trudeau ni de M. Chrétien, c'est un héritage commun des hommes civilisés.

M. Bédard: Comme notre Charte des droits et libertés de la personne.

M. Ryan: On l'a eu dans notre charte avant même qu'ils l'aient eu, c'est entendu, au point de vue de la nomenclature, comme l'a dit le ministre tantôt, pas au point de vue de la force d'application. C'est la perspective que nous avons. Je ne veux pas prolonger le débat davantage. Je voulais avoir un bon échange de vues là-dessus; ça

m'apparaît important au moment où on va poser un geste qui va laisser des traces dans toutes les lois du Québec. C'est cela que je trouve extrêmement désagréable. On est en train de discuter du projet de loi no 72 en haut, puis il y a un petit article à la fin, cette petite clause de nonobstant, comme dans toutes les lois qu'on va adopter tout le temps qu'on va être ici, je trouve cela formidable. Cela me fait de la peine mais il me semble qu'on est capable d'être plus fort, plus positif que cela.

M. Bédard: M. le Président, je ne voudrais pas d'un autre côté que le chef de l'Opposition, sans mettre des contradictions entre sa position ou ses convictions et les nôtres concernant le fait... Enfin, je tiens à dire que nous sommes sur la même longueur d'onde en ce qui a trait à notre conviction que les droits et libertés ça appartient aux citoyens et non pas au gouvernement, au singulier ou au pluriel. Les gouvernements ne sont là que pour les reconnaître et avoir la sagesse de les reconnaître le plus rapidement possible et de la façon la plus juridique possible en fonction du respect de ces droits et libertés. Là-dessus, je voudrais que ce soit bien clair que nous sommes sur la même longueur d'onde.

Maintenant, quel gouvernement doit traduire juridiquement, etc., ces droits et libertés qui appartiennent aux citoyens? Nous, nous croyons que l'Assemblée nationale du Québec - et une motion a été votée en ce sens - est capable de protéger ces droits et libertés tout autant que quelque autre gouvernement que ce soit. La preuve en est qu'on peut dire, sans pétage de bretelles, pour employer l'expression du chef de l'Opposition, que jusqu'à maintenant l'Assemblée nationale du Québec a protégé ces droits et libertés tout autant, sinon mieux, que l'ensemble des autres gouvernements existant au Canada ou ailleurs. Notre conviction est que cela va continuer dans ce sens, sauf qu'il y a une question de principe dans le projet de loi no 62: c'est que nous refusons globalement d'adopter une situation qui nous est imposée par le fédéral et qui représente, au bout du compte, une diminution des pouvoirs et des droits de l'Assemblée nationale.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Juste une petite intervention. J'ai déjà dit ce que je vais répéter, mais je pense que le ministre n'a pas compris. La Cour suprême du Canada, par le biais du juge Laskin qui a parlé pour la cour, non pas pour lui-même, a dit clairement qu'une charte constitutionnelle offre une meilleure protection qu'une charte statutaire comme la charte québécoise. C'est la Cour suprême qui va interpréter les deux chartes. Vous n'avez jamais cité un autre juge pour dire le contraire du juge Laskin. Comme je l'ai bien dit, même le juge Pigeon était de l'avis du juge Laskin.

En terminant, car je ne pense pas que ce serait utile de refaire le débat et de tourner en rond pour faire encore dix pages dans le journal des Débats, sur le plan des libertés publiques, il y a une distinction et une différence entre le Parti québécois et le peuple québécois. Le Parti québécois et le ministre, pour des raisons politiques et non pas pour des raisons de logique, sont contre une charte enchâssée dans la constitution canadienne quoique le peuple québécois - on a vu cela dans les derniers sondages - soit à peu près à 85% pour la charte canadienne. Maintenant, on va voter un projet qui fait l'affaire du Parti québécois et non pas un projet de loi qui fait l'affaire du peuple québécois. Je pense que c'est cela, le fond de l'affaire. Le ministre a ses raisons politiques qu'il essaie de mettre dans un emballage logique et juridique qui ne se tient pas. Malheureusement, il y a une division entre le peuple québécois sur cette question et le Parti québécois. Le Parti québécois étant un parti qui a toujours marché sur les sondages, pourquoi ne pas accepter le sondage du peuple québécois sur la charte?

M. Bédard: Vous n'êtes pas sérieux parce que je pourrais vous dire que 100% des Québécois et des Québécoises sont pour la meilleure protection des droits et libertés, 100%.

M. Marx: Je suis prêt à l'étudier article par article.

M. Bédard: Quand on en est rendu à... M. Marx: Article par article.

M. Bédard: Oui, c'est cela, vous voulez avoir le dernier mot pour le plaisir de l'avoir, mais je voudrais au moins corriger votre erreur. Arrêtez de faire dire des choses aux sondages qu'ils ne disent pas. C'est évident que tout le monde est pour la protection des droits et libertés. Concernant la technique pour assurer la meilleure protection des droits et libertés, là, vous le savez très bien, les idées sont partagées.

M. Marx: Est-ce que vous pensez que...

M. Bédard: Je le dis dans le respect de ce que vous nous avez dit, de vos convictions concernant la nécessité de l'enchâssement. Je ne partage pas ces convictions, je vous l'ai dit. Je pense en avoir donné des raisons qui sont assez éloquentes.

Le Président (M. Desbiens): Alors, j'appelle l'article 1. (17 h 30)

M. Marx: Ma dernière question sera assez courte. Est-ce que le ministre veut soutenir qu'une charte statutaire, une loi ordinaire comme la charte québécoise donne plus de protection aux citoyens qu'une charte constitutionnelle en supposant, pour les fins de l'argument, que les deux chartes incorporent exactement les mêmes garanties?

M. Bédard: Je ne reprendrai pas le débat que nous avons déjà eu.

M. Marx: C'est le fond de l'affaire.

M. Bédard: Les savantes analyses professorales du député de D'Arcy McGee, je les respecte mais...

M. Marx: ... un prof, c'est un prof, et vous avez des profs tout autour de vous.

M. Bédard: Avez-vous fini?

M. Marx: Pourquoi des insultes sur les théoriciens qui font des recherches pour vous?

M. Bédard: Franchement, le député de D'Arcy McGee est incompréhensible. J'espère que je ne l'ai pas insulté en lui rappelant ses grandes qualités...

M. Marx: Non, mais je ne veux pas que vous insultiez vos fonctionnaires.

M. Bédard: ... comme docteur, comme constitutionnaliste. Tout ce que je lui dis, j'ai prouvé que c'est souvent théorique, ces analyses...

M. Marx: Ce n'est pas théorique.

M. Bédard: ... ces mécanismes sont souvent théoriques.

M. Marx: ... c'est pratique?

M. Bédard: La preuve est faite qu'il y a des chartes constitutionnalisées dans certains pays où les droits sont violés chaque jour; dans d'autres pays, où les chartes ne sont pas constitutionnalisées, les droits et libertés sont quand même respectés convenablement. C'est le cas du Québec et de bien d'autres sociétés. En théorie, vous pouvez vous donner raison à chaque heure de la journée, si cela vous fait plaisir. Tout ce que je vous dis, c'est qu'en pratique vous n'avez pas réglé les problèmes.

C'est dans ce sens que j'ai toujours parlé de ma confiance dans la volonté avant tout, primordialement, d'une collectivité de respecter les droits et libertés. Elle existe, cette confiance, cette réalité au niveau du peuple québécois. Je n'ai aucune raison de croire, quel que soit le mode technique qu'on emploie, que cela ira en diminuant. Au contraire, je crois que cela ira en augmentant. La meilleure preuve en est -vous avez participé comme nous aux séances de la commission parlementaire sur la Charte des droits et libertés - que nous avons entendu des groupes de citoyens qui ne demandent pas moins de libertés, qui demandent encore plus de reconnaissance des droits et libertés dans notre charte et, sur bien des points, nous allons leur donner raison ensemble, unanimement, à l'Assemblée nationale. Je crois qu'elle est là, la meilleure garantie en fonction de l'avenir.

M. Marx: Je laisse le dernier mot au ministre parce qu'il n'a pas amélioré son argument d'il y a trois heures.

M. Bédard: Vous ne voulez pas le comprendre, ce n'est pas ma faute si je suis obligé de le répéter.

M. Brouillet: M. le Président, le problème, tel que l'a posé le député de D'Arcy McGee, reflète une conception un peu statique des droits et de l'évolution des droits. Il dit: Si vous prenez, à un moment précis, le même nombre de droits, une nomenclature dans une charte statutaire absolument identique à une autre dans une charte constitutionnelle, laquelle va avoir le plus de force de droit? Théoriquement, c'est évident que celle qui est enchâssée dans une constitution va être beaucoup plus rigide, plus stable parce que cela va prendre des procédures autrement plus difficiles pour l'amender. D'un point de vue statique, d'accord, mais d'un point de vue dynamique, il faut avoir une conception d'une charte des droits qui est appelée à évoluer, à se transformer parce que la reconnaissance des droits des citoyens, c'est une chose qui a un caractère historique. Cela évolue, oui, cela évolue. Il y a beaucoup de droits. L'ensemble des citoyens est prêt à reconnaître aujourd'hui qu'il y a 50 ou 100 ans, ce n'était pas à l'ordre du jour et que ces droits n'étaient pas reconnus. Toute personne va admettre ce fait.

Dans une perspective où la reconnaissance des droits des citoyens évolue, se transforme, progresse selon les situations, le développement social, ces droits à reconnaître, ce droit qui évolue va être davantage protégé par une charte qui aura moins de rigidité et qui permettra de l'adapter plus rapidement et plus facilement à l'évolution historique. D'ailleurs, on parle d'opinions de juges, il y a l'opinion du juge Martland qui dit en ces termes: My own feeling is that it is better to allow Legislatures to pass specific enactments

which will protect certain features of life for the disabled in the specific terms owing to specific problems and difficulties.

Ce caractère de plus grande flexibilité d'une charte statutaire permet d'être beaucoup plus à l'écoute de la population, de l'évolution des situations et qui permet de s'ajuster et de reconnaître les droits, de faire évoluer le droit d'une façon plus rapide. Alors, il y a autant d'avantages d'un côté que de l'autre, selon qu'on se place dans une perspective, je dirais...

Le Président (M. Desbiens): M. le chef de l'Opposition.

M. Ryan: Juste un point très bref. Je serais d'accord avec le député de D'Arcy McGee pour prendre le projet article par article. S'il fallait que ce que vous venez de dire s'applique aux États-Unis, on en verrait de belles depuis le changement de régime qu'ils ont eu depuis deux ans. Parce que l'opinion publique évolue d'un extrême à l'autre souvent et puis, s'il fallait que les droits fondamentaux garantis par la constitution américaine soient soumis à toutes ces oscillations, l'opinion publique, surtout celle qu'elle a connue par une espèce de revirement vers la droite au cours des dernières années, il y a bien des droits qui en prendraient pour leur rhume aux États-Unis, vous savez. Heureusement, ils ne peuvent pas y toucher parce qu'il y a des procédures d'amendement très sévères qui permettent à ces droits d'évoluer d'une manière plus stable, plus solide, sous la pression de facteurs autres que la seule volonté des législateurs. L'expérience américaine parle nettement contre ce que vous dites. Je respecte bien l'opinion du juge Martland qui n'était pas très favorable à une charte mais de toute façon, pour le cas des...

M. Bédard: Oui. Le juge Martland. Il y avait aussi le juge Pigeon qui, on le sait, a parlé de l'enchâssement comme étant un danger de figer des droits et de manquer de souplesse en fonction de l'adaptation.

M. Marx: Mais, dans votre programme péquiste, vous êtes pour une charte enchâssée.

M. Bédard: Non, mais par un gouvernement. Oui, mais revenez à la loi 62, on parle...

Le Président (M. Desbiens): M. le chef de l'Opposition, est-ce que vous aviez terminé?

M. Bédard: ... des pouvoirs et droits de l'Assemblée nationale.

Le Président (M. Desbiens): Bon, alors, on revient à l'article 1.

M. Bédard: Si on décide de la constitutionnaliser, on le fera ensemble.

M. Marx: Article 1, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'article 1 est adopté?

M. Bédard: M. le Président, cet article a pour objet de permettre que toutes les lois du Québec adoptées avant le 17 avril 1982 continuent d'avoir effet malgré les articles 2 et 7 à 15 de la Loi constitutionnelle de 1982. Je pourrais donner bien des explications sur le côté technique, mais la technique que nous avons employée, je peux le dire au chef de l'Opposition et au député de D'Arcy McGee, a été prouvée puisque c'est celle que nous avons employée lorsqu'il s'est agi de faire certains changements à la suite du jugement de la Cour suprême concernant la loi 101. D'ailleurs, je parle de technique éprouvée parce qu'elle a subi l'épreuve de la Cour supérieure, à ce moment-là. Alors, l'ensemble du projet de loi, je peux peut-être donner bien des explications techniques si on me le demande.

M. Marx: M. le Président.

M. Bédard: II y a un amendement aussi dont j'ai parlé tout à l'heure qui est...

Le Président (M. Desbiens): Un ajout. M. Bédard: ... un ajout qui...

M. Marx: Oui. Sur l'ajout, j'ai juste un point technique.

Le Président (M. Desbiens): Mais, on va faire l'article 1 d'abord.

M. Marx: Oui, oui, d'accord.

Le Président (M. Desbiens): C'est parce que cela va être renuméroté plus tard, cela deviendra l'article 2 sans doute.

M. Bédard: C'est parce que, M. le Président, on pourrait peut-être régler...

M. Marx: Ce sont des ajouts, ce n'est pas nécessaire de les lire, on peut les donner au secrétaire. Mais sur...

M. Bédard: Mon collègue a peut-être des remarques concernant l'amendement...

M. Marx: Sur la technique.

M. Bédard: Le reste du projet de loi, on a fait les amendements nécessaires pour

faire la concordance.

M. Marx: Oui, d'accord.

Le Président (M. Desbiens): On s'en tient à l'article 1 pour l'instant qui est dans le texte.

M. Marx: Dans l'article 1, on est d'accord.

Le Président (M. Desbiens): Alors, adopté?

M. Marx: Mais il sera adopté sur division.

Le Président (M. Desbiens): Sur division. M. Marx: Oui.

Le Président (M. Desbiens): Article 1.1, l'amendement.

M. Marx: Ma question porte sur l'amendement au point de vue technique. On prévoit ici chacune des lois adoptées entre le 17 avril 1982 et (insérer la date de la sanction du projet de loi no 62)... mais on a ou on va adopter des lois, avant le projet de loi no 62, qui comportent déjà cette clause nonobstant. Donc, on va avoir deux clauses nonobstant dans certaines lois si vous n'avez pas d'objection d'en avoir deux. Cela va renforcer votre position philosophique.

M. Bédard: Cela va se fondre en une.

M. Marx: Et le député de Chauveau sera très heureux.

M. Bédard: Cela va se fondre en une seule. J'espère qu'il n'y a pas de dessin à faire pour que le député de D'Arcy McGee comprenne.

Le Président (M. Desbiens): Alors, l'article 1.1 est adopté?

M. Marx: Sur division.

Le Président (M. Desbiens): Évidemment lorsqu'il y aura une nouvelle numérotation, il deviendra l'article 2.

M. Bédard: D'ailleurs le chef de l'Opposition le comprendra, nous avons fait cet amendement qui était nécessaire parce je pense qu'il aurait été difficilement acceptable, avant même que soit discuté le projet de loi no 62, que nous fassions des débats sur des clauses de nonobstant, alors que le fond du projet de loi no 62 n'est pas adopté.

M. Ryan: À part ça il faut protéger la loi 70, au cas où elle serait adoptée avant.

M. Bédard: C'est ça! Le sourire du chef de l'Opposition en dit long.

Le Président (M. Desbiens): L'article 1.1 est adopté sur division. J'appelle l'article 2. Il y a un amendement également, il y a un ajout dans le paragraphe.

M. Marx: Adopté sur division.

Le Président (M. Desbiens): Le nouvel article 2, tel qu'amendé, est adopté également sur division. C'est bien ça?

L'article 3 est-il adopté?

Disposition relative à l'article

59 de la Loi constitutionnelle

de 1982

M. Bédard: Adopté sur division également, j'imagine, M. le Président.

M. Ryan: L'article 3 est adopté sur discussion, sans division.

M. Marx: Sans division, oui, M. le Président, adopté.

Le Président (M. Desbiens): L'article 3 est adopté.

M. Marx: C'est ça.

M. Ryan: Parfaitement d'accord.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'article 4...

M. Ryan: On l'aurait adopté à l'unanimité si ça avait... à la Chambre. Cela aurait été bon.

M. Bédard: On a cru rendre service au chef de l'Opposition en ne faisant pas un projet distinct, parce que ça aurait pu amener des complications...

M. Ryan: Votre sollicitude dépasse toutes les bornes.

M. Bédard: Cela aurait pu amener des complications au niveau de son caucus!

Dispositions finales

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que l'article 4 est adopté?

M. Marx: Sur division.

Le Président (M. Desbiens): Adopté sur division. À l'article 5 il y a également un amendement.

M. Marx: Adopté sur division aussi.

Le Président (M. Desbiens): L'amendement est adopté sur division et l'article 5 tel qu'amendé est adopté sur division.

L'article 6 est-il adopté? Pardon, il y a un nouvel article 6. Est-il adopté?

M. Marx: Sur division, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): Adopté sur division. Le projet de loi no 62 est-il adopté, tel qu'amendé, avec ses titres, sous-titres et la rénumérotation nécessaire?

M. Bédard: Adopté. M. Marx: Sur division.

Le Président (M. Desbiens): Adopté sur division. Je remercie les participants et je demanderai au rapporteur de faire rapport à l'Assemblée nationale.

La commission élue permanente de la justice suspend ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 17 h 43)

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