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Version finale

32nd Legislature, 3rd Session
(November 9, 1981 au March 10, 1983)

Friday, December 17, 1982 - Vol. 26 N° 232

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude du projet de loi no 86 - Loi modifiant la Charte des droits et libertés de la personne


Journal des débats

 

(Midi onze minutes)

Le Président (M. Boucher): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission de la justice est réunie ce matin pour étudier le projet de loi no 86, Loi modifiant la Charte des droits et libertés de la personne. S'il vous plaîti À l'ordrel

Les membres de la commission sont M. Bédard (Chicoutimi), Mme Marois (La Peltrie), M. Charbonneau (Verchères), M. Dauphin (Marquette), Mme Juneau (Johnson), M. Kehoe (Chapleau), Mme Lachapelle (Dorion), M. Lafrenière (Ungava), M. Leduc (Saint-Laurent), M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes), M. Marx (D'Arcy McGee).

Les intervenants sont M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Blank (Saint-Louis), M. Dussault (Châteauguay), M. Fallu (Groulx), M. Guay (Taschereau), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Marquis (Matapédia), M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Saintonge (Laprairie).

À l'ajournement d'hier soir, nous en étions à l'article 5. J'appelle donc l'article 5.

Droit à l'égalité dans la reconnaissance et

l'exercice des droits et libertés (suite)

M. de Bellefeuille: Adopté.

Le Président (M. Boucher): II y a des amendements à proposer, M. le ministre.

M. Bédard: M. le Président, je pense qu'on pourrait accorder deux ou trois minutes au député de D'Arcy McGee pour lui permettre de mettre de l'ordre dans ses papiers. 11 m'avait informé qu'il serait quelques minutes en retard pour des raisons très justifiées.

M. Marx: Mes papiers sont maintenant en ordre. En deuxième lieu, je vais mettre mes idées en ordre.

M. Bédard: Je n'osais pas le dire.

M. Marx: Tout est fait. Est-ce que je peux vous demander une copie de l'amendement à l'article 2?

M. Bédard: À l'article 5, il y aurait un amendement qui est surtout de concordance. Remplacer, à la deuxième ligne de l'article 5 du projet de loi, les mots "du suivant" par les mots "des suivants".

Ajouter, à la fin de l'article 18.1 de la charte, les mots "ou à l'application d'un programme d'accès à l'égalité".

Supprimer, à la fin de l'article 18.1 de la charte, le guillemet et le point.

Comme on peut le voir, la modification à l'article 18.1 de la charte est de concordance avec l'article 19 du projet de loi. Cet article prévoit l'interdiction de demander, dans un formulaire de demande d'emploi ou lors d'une entrevue, des renseignements concernant l'un des motifs illicites de discrimination, à moins qu'il ne s'agisse de renseignements utiles pour l'emploi. Cet article répond à plusieurs représentations qui nous ont été faites par les différents groupes que nous avons eu l'occasion d'entendre en commission parlementaire sur ce projet.

Le Président (M. Boucher): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Est-ce que le ministre propose seulement cet amendement à l'article 18.1 ou s'il propose aussi, en même temps, l'article 18.2?

M. Bédard: Non, tout à l'heure.

M. Marx: Tout à l'heure. Sur l'article 18.1, j'ai trouvé d'autres formules, par exemple, les formules des caisses de dépôt, où on demande l'origine ethnique des personnes qui veulent ouvrir un compte de banque. J'ai déjà écrit à la Commission des droits de la personne parce que quelqu'un a déposé une plainte en ce qui concerne ces formulaires et je vois que cela n'est pas couvert par l'article 18.1. Est-ce que c'est couvert par un autre article?

M. Bédard: L'article 18.1 couvre... M. Marx: L'emploi.

M. Bédard: ... l'emploi, les demandes d'emploi, formulaires, les renseignements, en fait, requis à l'occasion de la demande d'emploi et vise à ce qu'on ne puisse pas, par des motifs, faire de la discrimination.

M. Marx: À l'article 12 de la charte... M. Bédard: L'amendement fait que c'est

possible lorsqu'il s'agit de l'application d'un programme d'accès à l'égalité.

M. Marx: Je comprends bien, M. le ministre. Je suis tout à fait d'accord que c'est un amendement qui se tient et qui est sûrement nécessaire. Je vois qu'à l'article 12 la discrimination dans la formation d'un acte juridique est interdite. J'aimerais lire l'article 12 de la charte qui se lit comme suit: "Nul ne peut, par discrimination, refuser de conclure un acte juridique ayant pour objet des biens ou des services ordinairement offerts au public." On ne peut pas faire de la discrimination en ce qui concerne la formation d'un acte juridique, mais on peut demander toutes sortes de renseignements qui ne sont pas nécessaires, chose qui maintenant serait interdite en vertu de l'article 18.1. Pour d'autres actes et dans d'autres situations, ce serait possible.

Quand c'est porté à l'attention de la commission, la commission écrit, par exemple aux caisses populaires, pour dire: Si quelqu'un veut ouvrir un compte de banque, ce n'est pas nécessaire de lui demander son origine ethnique, nationale, sa religion et ainsi de suite. Je ne veux pas dire que les caisses populaires font de la discrimination, ce n'est pas là la question. La question, c'est: Pourquoi demandent-elles cette information qui n'est pas nécessaire en ce qui concerne l'ouverture d'un compte de banque? Je vois que cette situation pourrait continuer dans le sens où on n'a pas trouvé une formule pour faire à l'article 12 ce qu'on fait à l'article 18.1.

M. Bédard: Dans un premier temps, il est tout à fait normal que la préoccupation se situe au niveau de l'emploi, de l'embauche.

M. Marx: Je soulève le problème.

M. Bédard: II y a déjà la Commission des droits qui pose des gestes dans de telles circonstances, en espérant que cela donne le résultat escompté.

M. Marx: Maintenant, quelqu'un m'a dit qu'un employeur peut dire en fonction de cet article: J'ai besoin de cette information parce que je songe à établir un programme d'accès à l'égalité. Je soulève cela comme possibilité. L'employeur va dire: Je songe à cela. On a un programme d'accès à l'égalité dans notre entreprise, donc, je vous pose ces questions et, comme il va y avoir sûrement des programmes d'accès à l'égalité dans beaucoup d'entreprises québécoises, cela laisse une porte ouverte à certaines personnes pour poser des questions non pertinentes.

M. Bédard: Cela ne constitue sûrement pas une grande ouverture.

M. Marx: Le ministre... M. Bédard: Une seconde!

Mme Marois: La question est intéressante. Vous dites dans votre affirmation: Un employeur qui y songe ne pourrait pas le faire. Il s'agit d'un employeur qui dit: J'applique un programme d'accès à l'égalité et, en fonction du fait que j'applique un programme d'accès à l'égalité, il m'est nécessaire d'avoir telle et telle information. À partir du moment où il y a la notion du "je songe à appliquer", il ne pourrait pas poser ce genre de question.

M. Marx: Oui, peut-être. Je ne le conteste pas. C'est possible.

M. Bédard: Oui, et je pense qu'il serait peut-être facile de faire la preuve qu'un employeur qui refuse de se conformer à une telle disposition n'est pas, normalement, l'employeur qui a la facilité de faire la preuve de sa bonne foi concernant ses intentions sur l'application d'un programme d'accès à l'égalité.

M. Marx: Oui, c'est une interprétation possible que la ministre a donnée. À l'article 18.1, on interdit les questions qui touchent les motifs prévus à l'article 10. Donc, on convient bien que l'employeur éventuel ne peut pas poser des questions sur le sexe de la personne, la religion et ainsi de suite, mais on convient...

M. Bédard: À moins qu'il ne s'agisse d'un renseignement qui soit utile pour l'emploi au niveau de l'article...

M. Marx: Oui, mais la religion peut être...

M. Bédard: Pardon?

M. Marx: ... pour utiliser les mots...

M. Bédard: II faudrait qu'il prouve que c'est utile pour l'emploi au sens de l'article 20.

M. Marx: II y a eu des cas à Montréal où des personnes qui travaillaient dans une entreprise étaient membres de l'Église universelle de Dieu - je pense que c'est le nom de l'Église - et elles ont exigé d'être exemptées de travailler le vendredi comment dirais-je? - quand le soleil se couchait, après le coucher du soleil. Elles ont demandé d'être exemptées. Elles ont demandé d'être exemptées le samedi aussi. Donc, cela pourrait être nécessaire pour un employeur de savoir si ces personnes seront

disponibles pour travailler le vendredi après-midi et le samedi durant l'hiver, oui ou non. Donc, je vois qu'il serait impossible pour l'employeur de poser ces questions. Normalement, il serait impossible pour l'employeur de poser ces questions lors de l'entrevue ou de prévoir ces questions sur un formulaire, mais une fois engagé...

M. Bédard: Toujours avec la nuance suivante: à moins que ce ne soit utile pour l'emploi. C'est à lui d'en faire la démonstration dans le cadre de l'article 20.

M. Marx: On convient qu'une fois que la personne est engagée...

M. Bédard: D'autres articles s'appliquent à ce moment-là.

M. Marx: ... l'employeur pourrait poser ces questions pour des fins d'assurance-maladie, de régime de retraite et ainsi de suite.

M. Bédard: II a toujours à se conformer, encore là, à la loi, au fait que les renseignements qu'il demande sont utiles ou nécessaires.

Le Président (M. Boucher): Les amendements à l'article 5 sont-ils adoptés?

M. de Bellefeuille: M. le Président...

Le Président (M. Boucher): M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: ... à propos de l'article 18.2...

M. Bédard: Non, une seconde!

M. de Bellefeuille: Ah! On n'est pas encore rendu à l'article 18.2.

M. Bédard: Si vous me le permettez, M. le député de Deux-Montagnes, nous allons y venir tout de suite après.

M. de Bellefeuille: Bon! Le député de D'Arcy McGee n'a pas encore trouvé le fil.

M. Marx: Pardon?

M. Bédard: Je conçois qu'il y a eu confusion pour le député de Deux-Montagnes parce que l'amendement à l'article 18.2 était...

M. de Bellefeuille: II fait partie de l'article 5, sauf que je veux bien que...

M. Marx: Je n'ai pas d'autre remarque à l'article 18.1. Je vois un certain nombre de problèmes possibles et je voulais les soulever, mais je trouve que l'article 18.1 est drôlement nécessaire pour qu'on évite vraiment d'avoir des cas de discrimination. C'est surtout pour les agences d'emploi qui ont des formules.

Le Président (M. Boucher): Est-ce que les amendements à l'article 5 sont adoptés?

M. Bédard: Permettez, M. le Président...

Le Président (M. Boucher): Si j'ai bien compris, on a commencé par parler des amendements et maintenant on parle de l'article 5.

M. Bédard: Oui, on en a parlé.

Le Président (M. Boucher): Est-ce qu'on pourrait revenir aux amendements? Avant d'adopter l'article 18, il faut qu'on adopte les amendements.

M. Bédard: D'accord. C'est que nous aurions peut-être une petite correction sur l'amendement.

M. de Bellefeuille: L'article 5 comporte l'insertion de l'article 18.2.

M. Bédard: Non, tout à l'heure.

M. de Bellefeuille: II ne le comporte pas?

M. Bédard: II le comporte, mais c'est que nous voulons terminer la discussion, si vous n'avez pas d'objection, M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: Je n'ai pas d'objection, mais le député de D'Arcy McGee nous a indiqué qu'il n'avait rien à dire sur l'article 18.2 et le président nous a demandé si nous adoptions l'article 5.

Le Président (M. Boucher): J'ai demandé si on adoptait les amendements.

M. Bédard: M. le Président, pour ce qui est des amendements, il y aurait peut-être un ajout, à la suite des remarques qui ont pu être faites, pour éviter toute ambiguïté. Ce serait d'ajouter, à la fin de l'article 18.1 de la charte, les mots: "ou à l'application d'un programme d'accès à l'égalité existant au moment de la demande." Cela évitera à des employeurs d'essayer de se défendre en prétextant des intentions plus ou moins confuses de vouloir mettre une programme en application. D'accord? Il s'agit de l'incorporer à celui déjà déposé. Cela évite les problèmes d'interprétation. Puisque nous sommes d'accord, je proposerais de procéder à l'adoption de ces amendements.

Le Président (M. Boucher): Voulez-vous les adopter un par un ou si vous voulez les adopter en bloc?

M. Bédard: En bloc, nous les avons discutés.

Le Président (M. Boucher): En bloc? Le député de Deux-Montagnes avait des questions sur l'article 18.2.

M. Bédard: Oui, une seconde, j'aurais un autre amendement. Insérer, après l'article 18.1 de la charte, le suivant: "Nul ne peut congédier, refuser d'embaucher ou autrement pénaliser dans le cadre de son emploi une personne du seul fait qu'elle a été reconnue coupable ou s'est avouée coupable d'une infraction pénale ou criminelle, si cette infraction n'a aucun lien avec l'emploi et s'il s'est écoulé cinq ans depuis la condamnation, ou si cette personne en a obtenu le pardon." Le libellé même nous indique qu'il s'agit d'un amendement visant a interdire la discrimination basée sur les antécédents judiciaires dans le domaine de l'emploi. Tant la Commission des droits de la personne que des députés qui sont intervenus lors de la deuxième lecture de ce projet de loi, entre autres, le député de Deux-Montagnes, nous ont demandé que cette disposition soit incluse dans la charte. Nous en venons à la conclusion que cette suggestion est très positive. (12 h 30)

Le Président (M. Boucher): M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: Merci, M. le Président. Je suis très heureux que le ministre nous présente un amendement dans le sens général de cette recommandation qui nous a été faite en particulier par la Commmission des droits de la personne, mais je me demande s'il serait opportun de tenir compte de la gravité du délit. Je ne sais pas comment on pourrait le faire. Je ne suis pas juriste, mais je vois que là on fixe un délai de cinq ans depuis la condamnation, sans aucune allusion à la gravité du délit. Le délai de cinq ans s'applique, qu'il y ait ou non un lien avec l'emploi, puisque c'est la conjonction "et" qui est là: "si cette infraction n'a aucun lien avec l'emploi et s'il s'est écoulé cinq ans depuis la condamnation." Il me semble que, s'il n'y a aucun lien avec l'emploi, le délai pourrait être plus court. Par ailleurs, je répète que je me demande comment on pourrait tenir compte de la gravité du délit. Qu'est-ce que c'est le pénal et le criminel? Voler trois pommes dans un étalage d'épicier, c'est...

M. Marx: Le pénal, c'est le droit pénal provincial. Cela veut dire qu'une infraction en vertu du Code de la route, c'est une infraction pénale.

M. Bédard: Ou criminelle.

M. Marx: Pardon?

M. Bédard: Pénale ou criminelle.

M. Marx: Mais il y a criminel et pénal. Pénal réfère au droit pénal provincial et criminel au droit criminel fédéral.

M. Bédard: Oui, oui, provincial.

M. de Bellefeuille: Le monsieur qui aurait été trouvé coupable d'un très léger délit serait soumis aux mêmes règles que quelqu'un qui aurait fraudé pour 10 000 000 $ ou assassiné son associé?

M. Bédard: Bien, je dirais au député de Deux-Montagnes que la rédaction, le contenu de cet article se retrouve déjà dans le projet de loi no 74, Loi modifiant diverses lois fiscales, du ministère du Revenu. Il y avait eu des consultations avec la Commission des droits de la personne et celle-ci s'était dite complètement d'accord avec la formulation telle que nous la retrouvons présentement et qui rejoint essentiellement la formulation contenue dans la loi no 74 du ministère du Revenu.

M. Marx: Dans les chartes des autres provinces, je pense qu'on a aussi une telle clause. Est-ce que c'est rédigé de la même façon?

M. Bédard: La clause ontarienne va beaucoup moins loin que la nôtre puisqu'elle ne vise que les cas de pardon.

M. Marx: Elle ne vise que les cas de pardon?

M. Bédard: C'est cela.

M. Marx: Parce qu'un pardon, en ce qui concerne, comment dirais-je...

M. Bédard: Une offense au criminel? M. Marx: ... une infraction...

M. Bédard: II doit s'écouler un délai de cinq ans.

M. Marx: ... sommaire, c'est après trois ans.

M. Bédard: J'ai regardé d'autres clauses dans d'autres chartes et je suis en mesure de vous dire que nous sommes nettement à l'avant-garde avec ce texte. Évidemment, il y avait une nécessité de mettre des balises. Les balises en question, tel que je vous l'ai

dit tout à l'heure, sont dans un article de même nature que dans une loi du ministère du Revenu, lequel a fait l'objet de consultations avec la Commission des droits de la personne qui s'est dite d'accord sur la nécessité qu'il y ait des balises. On innove un peu. On va un peu plus loin que...

M. de Bellefeuille: M. le Président...

M. Bédard: ... ce qui est déjà contenu dans d'autres chartes, avec une prudence normale.

M. de Bellefeuille: Je reconnais qu'il faut baliser la chose. Il n'y a pas de désaccord là-dessus parce que, si on ne la balise pas, cela peut nuire à l'exercice d'autres droits d'autres personnes. Mais je me demande si on ne pourrait pas remplacer la conjonction "et", à laquelle j'ai fait allusion, par la conjonction "ou". Dans les trois dernières lignes, cela se lirait: "si cette infraction n'a aucun lien avec l'emploi ou s'il s'est écoulé cinq ans depuis la condamnation, ou si cette personne en a obtenu le pardon."

M. Bédard: Je crois ne pas me tromper en disant qu'il n'y a pas de telles dispositions dans la Charte canadienne des droits et libertés.

M. Marx: Peut-être que cela existe dans la loi canadienne sur les droits et les libertés.

M. Bédard: Oui, mais, à l'heure actuelle, on sait jusqu'à quel point la prépondérance est maintenant à la charte.

M. Marx: II ne faut pas oublier que la charte canadienne ne s'applique pas aux actes juridiques passés entre individus. La charte canadienne s'applique seulement aux lois et aux règlements.

M. Bédard: Oui, d'accord.

M. Marx: Ce n'est pas la même chose que cet article. En ce qui concerne les actes juridiques, entre personnes, c'est la loi canadienne sur les droits de la personne.

M. Bédard: D'accord. Je ne veux pas faire un débat, je ne faisais que l'évoquer.

M. Marx: Non, non.

M. Bédard: Je n'en suis pas à faire des comparaisons pour le plaisir de les faire...

M. Marx: D'accord.

M. Bédard: ... mais je pense que le député de D'Arcy McGee reconnaîtra que cette disposition ne s'y retrouve pas.

Maintenant, pour des explications additionnelles au député de Deux-Montagnes en ce qui concerne le remplacement de "et" par "ou", cela aurait pour effet d'élargir l'application de l'article proposé dans le sens suivant. Prenons l'hypothèse d'une personne qui aurait commis un crime économique, un détournement de fonds, et qui se présente, à une certaine époque après avoir été condamnée, dans une institution financière pour postuler un emploi de caissier ou autre chose. Si on met "ou", on risque d'être obligé d'engager cette personne.

M. de Bellefeuille: M. le Président, je crains que le ministre ne se trompe. En fait, ce n'est pas le ministre, c'est le sous-ministre. Mais, évidemment, vu nos règles désuètes, cela passera au nom du ministre.

M. Marx: II parle au nom du ministre.

M. de Bellefeuille: II parle de quelqu'un qui aurait commis un crime économique et qui se présenterait pour postuler un emploi dans une caisse populaire. Il est clair que les mots "si cette infraction n'a aucun lien avec l'emploi" ne s'appliqueraient pas à ce cas-là parce qu'il y a un lien avec l'emploi. Il y a clairement un lien avec l'emploi. Donc, on pourrait refuser sa demande sans que ce soit discriminatoire, même avec la conjonction "ou".

Ce qui me semble gênant avec la conjonction "et", c'est qu'on met tout le monde dans le même panier. Il y a au moins un avantage avec la conjonction "ou": c'est que, s'il n'y a pas de lien avec l'emploi, on permet à la personne de postuler le poste. Il me semble que c'est ce qu'on devrait viser, s'il n'y a pas de lien avec l'emploi.

M. Bédard: Les remarques du député de Deux-Montagnes sont très constructives. On pourrait peut-être, même si on est en mesure de dire qu'on serait à l'avant-garde avec un tel article dans notre charte par rapport à d'autres, quand même suspendre temporairement l'article pour apporter des exemples plus convaincants ou en arriver à un amendement, si on en vient à la conclusion que cela ne pose pas de problème majeur.

M. Marx: Si on change le "et" pour "ou", ce serait possible pour quelqu'un qui a un pardon d'avoir l'emploi même si l'infraction a un lien avec l'emploi.

M. Bédard: Un lien avec l'emploi, c'est cela qui...

M. Marx: C'est le problème.

M. Bédard: C'est ce que j'ai essayé...

M. de Bellefeuille: M. le Président, je m'excuse, mais c'est déjà le cas. Il y a un "ou" avant les mots "si cette personne en a obtenu le pardon". Si la personne a obtenu le pardon, l'autre condition ne s'applique pas. C'est déjà le cas.

M. Marx: Alors, le député de Deux-Montagnes, sans être avocat, a l'oeil d'un avocat. Peut-on le suspendre?

M. Bédard: Suspendons-le, si vous voulez.

M. Marx: Mais j'ai une autre question sur cette article, je m'excuse. J'ai une autre question qui touche un autre petit point concernant cet article. On sait qu'il y a de la discrimination en ce qui concerne l'embauche des ex-détenus. Mais il y a aussi un problème dans les lois du Québec en ce sens que l'ex-détenu n'a pas accès à certaines professions. Quand la commission a siégé en 1981, nous avons eu le cas d'un étudiant en droit qui ne pouvait pas devenir avocat, parce que la Loi sur le Barreau ne permet pas à un ex-détenu de devenir avocat. Je vous souligne, M. le ministre, qu'il y a d'autres lois où l'accès à un certain emploi ou à une certaine vocation est interdit aux ex-détenus. Quoique l'article 18.2 soit le bienvenu, il y a d'autres trous à remplir.

M. Bédard: Je crois que c'est une préoccupation que les légistes auront présente à l'esprit dans le cadre de l'examen de toutes les lois antérieures à partir du moment où cette disposition sera incluse dans la charte.

M. Marx: Je ne veux pas que le ministre s'engage formellement à quoi que ce soit; je sais que...

M. Bédard: Non, je ne m'engage pas, mais...

M. Marx: ... ce n'est pas son style.

M. Bédard: ... il est évident qu'à partir du moment où nous adoptons cet article il sera présent à l'esprit de ceux qui auront à analyser le cadre de toutes nos lois antérieures dans le délai qui est imparti par la charte.

M. Marx: Oui, mais la Loi sur le Barreau ne contrevient pas à cet article, parce que c'est l'accès à la profession d'avocat; ce n'est pas l'embauche et le congédiement. Le cas se présente ou se présentera bientôt. L'étudiant en droit, exdétenu, qui veut être admis au barreau, qu'est-ce qu'on lui donnera? Est-ce que le ministre est prêt à dire: On adoptera une loi privée pour faire admettre cet étudiant? Comment procédera-t-on? Cet étudiant a déposé un mémoire à la commission permanente de la justice l'an dernier pour traiter ce problème.

M. Bédard: C'est clair qu'à mon humble avis il n'existe pas de disposition à l'heure actuelle dans nos lois permettant de régler le problème. On ne l'aura pas.

M. Marx: On va le régler d'une façon ad hoc, cas par cas, le cas échéant. C'est cela?

M. Bédard: Pour le moment, ce serait la seule issue possible.

M. Marx: Est-ce que le ministre serait prêt, dans le cas d'un étudiant ex-détenu qui aimerait accéder à la profession d'avocat, à procéder par un projet de loi privé pour faire exception à la Loi sur le Barreau le cas échéant?

M. Bédard: Je ferai comme à l'habitude. Si un tel projet de loi privé est présenté, nous l'étudierons ensemble au niveau de la commission. Je ne crois pas que je doive me prononcer d'avance sur une hypothèse.

M. Marx: Moi, je suis prêt à me prononcer. Je suis plus favorable que défavorable à un tel processus.

M. Bédard: Quand on a à se prononcer sur un projet de loi précis, ce n'est pas dans le sens d'être plus ou moins favorable; c'est oui ou non. Je pense que non seulement l'élémentaire prudence, mais l'élémentaire comportement est d'attendre. Si un tel projet de loi nous était présenté, on en fera l'étude d'une façon très sérieuse. (12 h 45)

M. Marx: Mais, dans des cas semblables, je pense que ce serait, peut-être pas au ministre, mais à l'Assemblée nationale de faire une exception aux lois, parce que maintenant les lois au Québec interdisent, comme j'ai dit, l'accès à certaines professions. Franchement, je ne sais pas pourquoi on a de telles interdictions dans certaines lois. Souvent, cela n'a pas de bon sens.

Le ministre peut-il prendre l'engagement...

M. Bédard: II faut qu'il y en ait.

M. Marx: ... de nous fournir, d'ici quelques mois, un mémoire dans lequel on va relever toutes ces lois québécoises où se trouvent de telles dispositions empêchant les ex-détenus d'accéder à un certain nombre de professions? Après avoir obtenu l'information,

peut-être que ce sera plus facile d'agir.

M. Bédard: Dans le cadre de l'examen de nos lois et règlements, tel que prévu dans la charte, en ce qui regarde les lois antérieures, on sait que c'est un travail énorme qui ne se fait pas en l'espace de deux ou trois mois ou de cinq ou six mois; c'est pour cela que nous avons prévu un délai de trois ans. D'ailleurs, c'est un peu le même cas.

M. Marx: Oui, mais c'est une autre question.

M. Bédard: Non, non. Ce que je veux dire, c'est qu'en même temps ce sera sûrement l'occasion de faire le grand ménage dans l'examen de nos lois qui prévoient des permis.

M. Marx: Concernant le problème que j'ai soulevé, le ministre peut-il s'engager à ce que cette petite étude soit faite au ministère et non par la commission qui est tellement débordée? De toute façon, la commission n'a pas ce mandat.

M. Bédard: Je peux vous dire que cela va être étudié au ministère. Je crois que c'est plutôt à l'Office des professions que la demande ou le mandat pourrait être donné.

M. Marx: Oui, mais il y a, je ne veux pas dire des professions, mais des lois qui ne tombent pas sous le contrôle de l'Office des professions. Bon, je laisse cela au ministre. J'ai fait mon devoir. J'ai soulevé le point. Le ministre a la responsabilité sur cette question.

M. Bédard: Tel que je vous l'ai dit, nous allons sûrement procéder à une étude.

Le Président (M. Boucher): Alors, l'article 5 est suspendu. Article 6? Il y a un amendement, M. le ministre?

M. Bédard: À l'article 6, il y aura un amendement. Insérer, dans la première ligne du dernier alinéa de l'article 20 de la charte, édicté par le deuxième paragraphe de l'article 6 du projet de loi, après le mot "assurance", les mots "ou de rente". Il s'agit tout simplement d'une modification de concordance afin que les contrats de rente soient également visés par cet article.

M. de Bellefeuille: Et non pas seulement les régimes de rentes?

M. Bédard: Est-ce que nous adoptons l'amendement, M. le Président?

Le Président (M. Boucher): Est-ce que l'amendement est adopté?

Des voix: Adopté.

M. Bédard: Adopté, mais on n'adopte pas l'article.

Le Président (M. Boucher): On va adopter l'amendement, d'abord.

M. Bédard: Oui. Quelques commentaires sur l'ensemble de l'article. À l'article 6, l'ensemble de ces modifications a pour objet, premièrement, de faire en sorte que les qualités exigées pour un emploi soient réellement requises pour cet emploi.

Le Président (M. Boucher): M. le ministre, j'ai demandé si l'amendement était adopté d'abord, avant de discuter l'article.

M. Marx: Vous voulez dire les mots "ou de rente"?

Le Président (M. Boucher): Oui. M. Marx: Oui, adopté.

Le Président (M. Boucher): Adopté. Article 6? M. le ministre.

M. Bédard: Les modifications prévues à cet article ont pour objet, premièrement, de faire en sorte que les qualités exigées pour un emploi soient réellement requises pour cet emploi et de rendre l'application de l'article 20 plus objective. Deuxièmement, elles ont pour objet de réputer non discriminatoires, dans un régime d'avantages sociaux et dans des contrats de rente et d'assurance, les distinctions, exclusions ou préférences fondées sur des facteurs de détermination de risques. En effet, l'article 90 de la charte, qui, actuellement, n'interdit pas la discrimination pour certains motifs dans le domaine, est abrogé de sorte que le principe de base devient la non-discrimination.

Toutefois, considérant certaines pratiques actuarielles équitables et afin de ne pas augmenter radicalement les coûts dans les domaines des rentes et de l'assurance, le gouvernement fixera par règlement les facteurs de détermination de risques qui ne constituent pas de la discrimination par le biais d'un mécanisme auquel on a déjà fait allusion, soit que ce règlement devra être étudié par la commission parlementaire de la justice avant que l'on puisse procéder de quelque façon que ce soit à sa mise en application.

Le Président (M. Boucher): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Est-ce que le ministre a reçu le mémoire du Bureau d'assurance du Canada? C'est une lettre datée du 7 décembre 1982.

M. Bédard: Oui, j'ai reçu cette communication. Nous avons pris la décision non pas d'aller dans le sens de la suggestion qui nous est faite, à savoir de s'en remettre à des règlements sectoriels, mais de procéder par un règlement en bonne et due forme de la charte où il est prévu un mécanisme de sécurité, un mécanisme plus rigoureux qui est l'obligation que ce règlement soit discuté en commission parlementaire de la justice. Je pense aussi que cela permettra aux citoyens et aux citoyennes de considérer la charte comme un tout; la loi et très clairement les règlements qui découlent de cette loi et qui seront en annexe formeront un tout. Si cela se retrouvait dans des réglementations sectorielles, je pense que ce ne serait pas à l'avantage des citoyens et des citoyennes. D'autant plus qu'on prévoit un mécanisme beaucoup plus rigoureux.

M. Marx: Je pense que le mémoire du Bureau d'assurance du Canada suggérait qu'on biffe les mots "par règlement" et qu'on ajoute les mots "par le Surintendant des assurances". Ils veulent, si je comprends bien, que ce soit le surintendant qui prévoie les règles et que ce ne soit pas l'Assemblée nationale par le truchement de sa commission de la justice.

M. Bédard: C'est exact et, comme je vous l'ai dit tout à l'heure, notre décision ne va pas dans le même sens. Avec tout le respect qu'on peut avoir pour le Surintendant des assurances, je crois que l'Assemblée nationale est très bien placée, surtout quand on parle de la Charte des droits et libertés et de ses règlements, pour prendre les décisions qui s'imposent en tenant compte, naturellement, des considérations qui peuvent être faites par le Surintendant des assurances.

M. Marx: Je vais le répéter pour les fins du journal des Débats: Nous avons voulu que les règlements soient déposés, en vertu de cet article et d'autres articles qu'on étudiera plus tard aujourd'hui, avant l'étude du projet de loi.

M. Bédard: M. le Président...

M. Marx: Juste un autre petit point. Quand la commission permanente de la justice siégera concernant les règlements proposés en vertu de l'article 20, est-ce qu'on va inviter les personnes concernées à venir nous expliquer leur point de vue?

M. Bédard: Évidemment, nous allons nous faire un devoir de le faire.

M. Marx: On va siéger en commission comme on siège pour l'étude d'un projet de loi. Les personnes seront les bienvenues pour nous expliquer...

M. Bédard: Avec possibilité d'entendre des personnes ou des groupes qui pourraient avoir des représentations à faire. Autrement dit, on va se donner toute la sécurité nécessaire, toute la consultation nécessaire, pour s'assurer que ces règlements vont bien répondre au pouvoir habilitant qui est dans la loi et répondre aux critères que nous nous fixons dans la Charte des droits et libertés de la personne.

M. Marx: Si je me souviens bien...

M. Bédard: C'est pour cela que cette formule est de beaucoup - le député de D'Arcy McGee en conviendra peut-être -supérieure à la suggestion de remettre l'ensemble de cette appréciation entre les mains du Surintendant des assurances.

M. Marx: Si je me souviens bien pour les règlements touchant les programmes d'accès à l'égalité, c'est prévu dans le projet de loi qu'il sera nécessaire de passer par la commission permanente de la justice.

M. Bédard: De la justice, avec le même processus dont je viens de vous parler.

M. Marx: Oui, le même processus. Mais c'est prévu expressément dans le projet de loi.

M. Bédard: C'est cela.

M. Marx: En ce qui concerne l'article 6, le processus n'est pas expressément détaillé.

M. Bédard: L'article 86.10 s'applique à tous les règlements. "Le gouvernement, après consultation de la commission, publie le projet de règlement à la Gazette officielle du Québec." On parle des règlements qui sont édictés à l'article 86.9.

M. Marx: Quel article?

M. Bédard: L'article 86.9. On spécifie les règlements, à savoir deux règlements: un pour "déterminer les données actuarielles et les facteurs de détermination de risque qui ne constituent pas de la discrimination dans les contrats d'assurance, les régimes d'avantages sociaux, de retraite, de rentes ou d'assurance ou dans les régimes universels de rentes ou d'assurance". Il y a un autre règlement "pour fixer les critères, normes, barèmes, conditions ou modalités concernant l'élaboration, l'implantation ou l'application de programmes d'accès à l'égalité, en établir les limites...

M. Marx: D'accord.

M. Bédard: ... et déterminer toute mesure nécessaire ou utile à ces fins". À l'article 86.10, vous voyez là un mécanisme très original.

M. Marx: Adopté.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: On joue un peu à saute-mouton. On est rendu à l'article 19. À propos de l'article 19 qui comporte l'article 86.10 dont le ministre vient de parler, il y a un projet de réforme parlementaire qu'on trouve principalement dans la loi no 90 qui est devant la Chambre à l'heure actuelle, d'une part, et, d'autre part, dans une proposition gouvernementale qui est à l'étude devant une sous-commission de l'Assemblée nationale. Dans cette proposition gouvernementale, il est prévu que les commissions élues permanentes, réparties selon les ministères, seront remplacées par d'autres commissions. Je ne pense pas que ce soit le lieu pour s'étendre sur la description des autres commissions, mais les mots qu'on trouve à l'article 86.10 risquent de devenir caducs d'ici quelques mois, puisqu'on y parle de "la commission parlementaire élue de la justice". Si le projet gouvernemental de réforme parlementaire est adopté, cette commission n'existera plus. Alors, je me demande si, à ce moment-là, on ne pourrait pas parler de la commission parlementaire compétente ou de quelque chose du genre.

M. Bédard: Je crois qu'il faut être plus précis, quitte à ce que nous fassions les concordances nécessaires...

M. de Bellefeuille: Au moment où...

M. Bédard: ... en temps et lieu, lorsque les décisions auront été prises. Je pense que le député de Deux-Montagnes comprend qu'on ne peut pas anticiper plus qu'il ne faut ces décisions. (13 heures)

M. de Bellefeuille: Je comprends, M. le Président, qu'on fait de façon assez automatique les concordances quand il s'agit de l'adoption d'une loi. Là, les propositions dont je parle devant la sous-commission de l'Assemblée nationale n'aboutiront pas à des lois; elles vont aboutir à des modifications au règlement de l'Assemblée nationale. Je ne sais pas s'il y a le même genre de mécanisme automatique pour apporter des modifications de concordance aux lois en fonction de changements apportés au règlement de l'Assemblée nationale.

M. Bédard: Comme le député de Deux-Montagnes le sait, nous travaillons présentement à une réforme globale dans ce domaine. Je ne voudrais pas anticiper ou présumer des décisions à prendre. Une chose est certaine: s'il y a lieu de faire des concordances, cela ne présente pas de difficulté.

M. de Bellefeuille: Peut-on le faire à partir de modifications au règlement de l'Assemblée?

M. Bédard: Je ne veux pas présumer du mécanisme que va arrêter l'Assemblée nationale. C'est pour cela qu'il nous est nécessaire d'avoir un mécanisme très précis, quitte à devancer, d'une certaine façon, certaines conclusions de la réforme. Nous nous devons d'être précis, quitte à ajuster tout cela en fonction de la réforme globale qui s'en vient. Cela va?

Le Président (M. Boucher): L'article 6 est adopté tel qu'amendé.

La commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 h 02)

(Reprise de la séance à 15 h 11)

Le Président (M. Rochefort): À l'ordre, s'il vous plaîtî La commission permanente de la justice reprend ses travaux aux fins d'étudier article par article le projet de loi no 86, Loi modifiant la Charte des droits et libertés de la personne. À la suspension de nos travaux, nous en étions à l'article 7. M. le ministre.

M. Bédard: M. le Président, je pense que nous avions laissé un article ouvert.

Le Président (M. Rochefort): Oui, l'article 5 était en suspens.

M. Bédard: L'article 5.

Le Président (M. Rochefort): On peut y revenir maintenant.

M. Bédard: J'aurais un amendement qui, je pense, pourrait satisfaire tout le monde et nous permettrait de terminer l'article.

Le Président (M. Rochefort): Vous en avez des copies, M. le ministre?

M. Bédard: Oui.

Le Président (M. Rochefort): Oui, merci.

M. Bédard: Alors, l'amendement aurait pour effet d'insérer, après l'article 18.1 de la charte, le suivant: "Nul ne peut congédier, refuser d'embaucher ou autrement pénaliser

dans le cadre de son emploi une personne du seul fait qu'elle a été reconnue coupable ou s'est avouée coupable d'une infraction pénale ou criminelle, si cette infraction n'a aucun lien avec l'emploi ou si cette personne en a obtenu le pardon." Je pense, à partir de ce moment-là, qu'on couvre tout.

M. Marx: Donc, on enlève...

M. Bédard: On enlève l'idée de délai...

M. Marx: ...le délai de cinq ans.

M. Bédard: ... en retenant plutôt l'idée de pardon et, naturellement, l'idée importante concernant le lien avec l'emploi.

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que cet amendement est adopté?

M. Marx: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. Article 18.2? L'amendement proposé ce matin au même article est-il aussi adopté? La première partie de l'article 18.1 aussi?

M. Bédard: La première partie, oui.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. Est-ce que l'article 5, tel qu'amendé, est adopté?

Des voix: Adopté. M. Bédard: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. Article 7?

M. Bédard: L'article 6 a été adopté?

Le Président (M. Rochefort): Oui, l'article 6 a été adopté ce matin, M. le ministre.

M. Bédard: Cela va. Alors, l'article 7. Ce nouvel article prévoit une protection contre les saisies, perquisitions ou fouilles qui, même si elles sont légales, peuvent être abusives. Avec l'article 7, nous entreprenons une série d'ajouts concernant les droits judiciaires...

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que l'article 7 est adopté?

M. Bédard: ... en fonction de droits nettement reconnus.

Le Président (M. Rochefort): M. le député de Saint-Laurent.

M. Leduc (Saint-Laurent): Qu'est-ce que cela pourrait être "abusives"? C'est large, "abusives". C'est très subjectif.

M. Marx: Cela peut être les fouilles qu'on a déjà pratiquées dans le corps d'une personne, dans certains cas...

M. Bédard: Non.

M. Marx: ... qui ont fait jurisprudence par exemple.

M. Bédard: C'est qu'une saisie peut, à un moment donné, avoir été pratiquée après avoir obtenu toutes les autorisations légales, mais se révéler par la suite très abusive. Par exemple, une fouille qui brise tout.

M. Leduc (Saint-Laurent): Ce serait dans ce sens-là.

M. Bédard: C'est cela. D'ailleurs, cela rejoint... Je ne sais pas, le député de D'Arcy McGee doit...

M. Marx: Allez-y, M. le ministre.

M. Leduc (Saint-Laurent): Mais ce n'est pas plus clair dans la charte canadienne, quand on parle d'"abusives".

M. Bédard: Non, rapidement une jurisprudence va s'établir là-dessus et la notion d'abus, même à partir d'une autorisation légale, me semble être carrément la notion de base. Je pense qu'aucun des membres de cette commission n'est pour qu'un abus se fasse.

M. Leduc (Saint-Laurent): Si la Sûreté du Québec pénètre à l'intérieur d'une maison et fouille de fond en comble, est-ce que c'est abusif?

M. Bédard: Tout est question de preuve. C'est à partir de faits précis, de la connaissance de l'objet de l'exécution d'un mandat qu'on est en mesure de voir s'il y a eu abus ou pas par rapport à l'objectif qui devait être atteint.

M. Leduc (Saint-Laurent): II a un mandat.

M. Bédard: C'est cas par cas. On ne peut pas dire que les critères de l'abus seront les suivants. Je pense que c'est à partir de l'évaluation de chacune des situations qu'on peut conclure s'il n'y a eu que l'exécution normale d'un ordre de perquisition ou si des gens ont profité de cet ordre délivré légalement pour abuser dans son exécution.

M. Leduc (Saint-Laurent): Ce serait simplement si on brisait certains équipements, certains matériels. Mais le fait

de faire une fouille de A à Z, ce n'est pas abusif nécessairement.

M. Bédard: Cela peut être d'autres cas aussi. Un mandat de perquisition aux fins de saisir un objet bien précis si la preuve est faite que dès l'entrée dans la propriété il y avait possibilité de mettre la main sur l'objet en question et qu'une fois ce travail fait on a profité de la situation pour procéder à du harcèlement, à une fouille complète.

M. Leduc (Saint-Laurent): Pour fins fiscales où on apporte tout.

M. Bédard: Non, là par exemple... Je pense que les exemples que vous apportez ne font que confirmer que c'est cas par cas que peut se faire l'évaluation. Il ne peut pas y avoir de règles générales qui règlent tous les cas. On peut fort bien avoir un mandat aux fins d'aller chercher des documents et qu'il n'y ait aucun abus à ce que tous les documents soient réquisitionnés d'une certaine façon. Il peut s'agir d'un mandat pour obtenir un document en particulier. Si la preuve est faite que, dès la demande, le document en question leur a été remis et qu'on en a profité après pour se livrer à d'autres manoeuvres de harcèlement, c'est cas par cas qu'on peut l'évaluer.

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est plutôt relié aux dommages qui pourraient être causés à la suite de ces fouilles. D'accord.

M. Bédard: Je dirais que le critère, c'est le critère de raisonnabilité dont on a fait preuve dans l'exécution d'un ordre légalement donné. Quand cela dépasse manifestement la raisonnabilité...

M. Leduc (Saint-Laurent): Cela dépasse toujours la raisonnabilité normalement quand il y a une fouille.

M. Bédard: Écoutez. On peut avoir chacun notre opinion là-dessus. Je ne pense pas qu'on soit en mesure de passer des jugements sur des cas particuliers quand on ne les a pas devant nous.

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est bien sûr.

M. Bédard: Les tribunaux sont là pour cela.

M. Leduc (Saint-Laurent): Ce sont des agents qui outrepassent bien des fois leur mandat.

M. Marx: M. le Président, j'aimerais poser une ou deux questions au ministre. Premièrement, cela va de soi que c'est la charte canadienne qui doit s'appliquer au Code criminel. Le plus grand nombre de saisies, perquisitions ou fouilles abusives sont faites en fonction du droit criminel; donc, la Charte des droits et libertés du Québec ne s'applique pas. Maintenant, j'aimerais demander au ministre pourquoi on n'a pas rédigé cet article comme celui qui se trouve dans la charte canadienne et qui se lit comme suit: "Chacun a droit à la protection contre les fouilles, les perquisitions ou les saisies abusives? L'article que vous avez rédigé et qu'on étudie maintenant se lit: "Nul ne peut faire l'objet de saisies, perquisitions ou fouilles abusives." J'aurais pensé qu'on rédigerait un article semblable ou exactement comme celui qui est dans la charte fédérale parce que, de cette façon, la jurisprudence serait de la même portée.

M. Bédard: On dit la même chose en meilleur français.

M. Marx: Vous pensez que c'est un meilleur français, c'est la raison.

M. Bédard: "Chacun a droit à la protection contre". La protection de qui?

M. Marx: C'est une question de français, si je comprends bien. Ce serait utile pour les gens qui lisent le journal de comprendre que la différence tient à la langue.

M. Bédard: En fait, vous êtes à même de constater, sans y aller nécessairement de comparaisons, que la formulation est plus claire nettement.

M. Marx: Je voulais juste savoir. Parfait. Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. Article 8?

M. Bédard: Article 8. Cette modification est la confirmation législative d'un droit reconnu par la jurisprudence qui veut qu'un accusé soit informé sans délai de l'infraction qu'on lui reproche.

M. Marx: Je vais juste faire remarquer ceci: "Tout accusé a le droit d'être promptement informé de l'infraction particulière qu'on lui reproche." Est-ce que le ministre a demandé à ses fonctionnaires de faire une étude sur le mot "promptement"? Quelle est la portée de "promptement" dans la jurisprudence?

M. Bédard: Pardon?

M. Marx: Quelle est la portée ou la signification de "promptement" dans la jurisprudence? Dans la charte canadienne, on

dit: Sans délai anormal. Est-ce à cause de la langue, encore là, ou si vous avez une raison plus...

M. Bédard: Écoutez, dans la charte, c'est "sans délai anormal". Moi, je préfère l'expression "promptement" parce que notre charte prévoit déjà des comportements.

M. Marx: II y a toujours un délai, cela prend du temps.

M. Bédard: "Promptement", cela inclut nécessairement la notion de délai. Ce n'est pas indiqué "sans délai". C'est pour garder une uniformité de terminologie, puisque le terme "promptement" se retrouve dans d'autres articles de notre charte, entre autres, à l'article 28, à l'article 30.

M. Marx: Un instant, je vais vérifier notre traduction anglaise pour voir ce que cela veut dire. "Promptly", cela n'aide pas beaucoup.

M. Bédard: Cela se ressemble.

Le Président (M. Rochefort): Adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. Article 9?

M. Bédard: Cette modification a pour objet d'affirmer avec plus de force qu'à défaut d'être promptement conduite devant le tribunal compétent la personne arrêtée ou détenue doit être relâchée.

M. Marx: Cette charte est modifiée par l'addition... Un instant!

M. Bédard: M. le Président... M. Marx: J'aimerais savoir...

M. Bédard: Une seconde! Il y a peut-être une erreur.

Le Président (M. Rochefort): M. le ministre.

M. Bédard: Est-ce qu'on était à l'article 10?

Le Président (M. Rochefort): Article 9, M. le ministre.

M. Bédard: Bon. L'article 9 concerne le droit d'être informé promptement de ses droits. Alors, cela confirme le droit pour une personne arrêtée ou détenue de prévenir ses proches et de recourir aux services d'un avocat. Maintenant, cette pratique risque d'être illusoire si la personne n'est pas informée promptement de l'existence de ces droits. C'est donc l'objet de cette modification que de prévoir l'obligation d'informer la personne arrêtée ou détenue de ses droits.

M. Marx: Mais j'aimerais faire part de la recommandation du barreau sur cet article. Le barreau a suggéré qu'on adopte la formulation suivante: "Toute personne arrêtée ou détenue a droit, sans délai, d'en prévenir ses proches et de recourir à l'assistance d'un avocat. Elle doit être promptement informée de ses droits."

Les commentaires du barreau sont les suivants: Bien que le principe ajouté à l'article 29 de la charte soit excellent, on peut s'interroger sur la capacité qu'aurait le détenu d'exercer les droits qui y sont énoncés. Par ailleurs, quant au mot "services" utilisé à l'article 29, nous suggérons de le remplacer par le mot "assistance" ce concept étant plus vaste. Il permettrait, en effet, à la personne détenue de parler à un avocat sans être obligée de retenir ses services. C'est subtil, mais je pense que le barreau a une vaste expérience dans ces matières. Je pense qu'il est bon de faire part de ses recommandations pour que le ministre se prononce d'un côté ou de l'autre.

M. Bédard: Remarquez que je crois que les deux formulations nous donnent le même résultat. Je n'ai pas d'objection à changer le mot "services" pour le mot "assistance" si le député de D'Arcy McGee le préfère. Je ne voudrais pas faire de papillon pour rien. Je crois qu'on peut recourir aux services d'un avocat ou à l'assistance d'un avocat sans nécessairement retenir ses services. Mais plutôt que de faire une longue argumentation...

M. Marx: On ne veut pas faire de longue argumentation.

M. Bédard: ... je peux vous dire que je suis très disposé...

M. Marx: Cela peut être une amélioration.

M. Bédard: Le barreau reconnaît que l'article est excellent.

M. Marx: Oui.

M. Bédard: Je ne crois pas qu'il deviendra "très excellent", il demeurera excellent.

M. Marx: Bien, on essaie de faire la meilleure charte possible et pas seulement une bonne charte si le ministre est d'accord.

M. Bédard: Oui, oui, je n'ai pas d'objection. Nous proposons de biffer les mots "aux services" et de les remplacer par "à l'assistance".

Le Président (M. Rochefort): À l'article 9?

Une voix: C'est cela. M. Marx: C'est dans l'article...

Une voix: C'est ajouté à la fin.

Une voix: C'est ajouté à l'article 29.

Le Président (M. Rochefort): Ah bon!

Je n'ai pas l'article 29. Vous m'excuserez, mais je n'ai pas l'article 29.

M. Bédard: "...et de recourir à l'assistance d'un avocat."

M. Marx: Bon. On biffe les mots "aux services". (15 h 30)

M. Bédard: Nous les remplaçons par les mots "à l'assistance". L'article se lirait donc comme suit: "Toute personne arrêtée ou détenue a le droit, sans délai, d'en prévenir ses proches et de recourir à l'assistance d'un avocat."

Le Président (M. Rochefort): L'amendement est-il adopté?

M. Marx: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): L'article 9, tel qu'amendé, est-il adopté?

M. Marx: Non, j'ai une autre question à poser au ministre. Supposons que ce droit n'est pas respecté, quel sera le recours du prévenu? Peut-être devrais-je poser la question préalable: Quelles instructions le ministre entend-il donner à la Sûreté du Québec et aux autres corps policiers en ce qui concerne cette exigence? C'est bien de le mettre dans la charte, mais je pense que le ministre doit avoir une politique qui sera diffusée et qui sera suivie.

M. Bédard: C'est plus qu'une politique qui sera suivie. Il y aura des cours de formation adéquats tenant compte des nouvelles dispositions que contient la charte. De toute façon, ils sont déjà prévenus du fait que, comme on l'a dit tout à l'heure, la charte canadienne s'applique lorsqu'il s'agit des dispositions concernant le Code criminel.

M. Marx: Oui, mais il y a souvent des arrestations et le policier décide après s'il va poursuivre en vertu d'une loi provinciale ou d'une loi fédérale. Souvent, ils arrêtent quelqu'un pour délit de fuite. C'est seulement après qu'ils décident si ce sera en vertu du Code de la route ou du Code criminel.

M. Bédard: Cela règle le problème parce que, dans l'une comme dans l'autre, la disposition sera effectivement la même.

M. Marx: Oui, mais je veux seulement être sûr que le ministre prendra les mesures nécessaires pour développer une politique, pour que ce soit diffusé et que les corps policiers soient...

M. Bédard: Même si vous me le dites trois fois, il n'y...

M. Marx: ... informés.

M. Bédard: ... aura pas plus de mesures que celles que je viens d'évoquer qui, à mon sens, répondent à la situation. Avant même qu'on nous en fasse la demande, nous avons prévu des cours de formation pour que les policiers soient bien en mesure de connaître et d'appliquer les nouvelles dispositions de la charte qui peuvent les concerner dans leur travail.

M. Marx: Ma deuxième question est: Quel sera le recours d'un prévenu qui ne sera pas promptement informé de ses droits? Le ministre envisage-t-il un recours quelconque?

M. Bédard: Lorsqu'il y a atteinte aux droits fondamentaux, les recours prévus sont l'injonction, le recours aux dommages et intérêts.

M. Marx: Ce n'est pas tellement fort comme recours.

M. Bédard: Que voulez-vous qu'il y ait de plus?

M. Marx: Je voudrais vous expliquer pourquoi je trouve que cela n'est pas tellement fort.

M. Bédard: Non, non. Je suis prêt à accepter des suggestions, si vous en avez.

M. Marx: Je vous donnerai ma suggestion en 33 secondes. Le recours en dommages et intérêts est souvent théorique dans le sens que cela prend des années et, pour que le policier ne subisse pas des dommages lui-même, c'est la ville ou le gouvernement qui paye. Ce n'est pas facile, lorsqu'on est en prison, d'aller chercher une injonction et, de toute façon, c'est trop tard parce qu'il n'a pas été informé. L'injonction ne peut pas avoir un effet curatif. Mais, je vois dans la...

M. Béclard: Les plaintes...

M. Marx: Le ministre va-t-il me permettre de terminer?

M. Bédard: Oui, oui, vous pouvez terminer.

M. Marx: Je vois dans la charte canadienne, à l'article 24, paragraphe 2, qu'on prévoit ceci: "Lorsque, dans une instance visée au paragraphe 1 - c'est-à-dire la violation ou la négation des droits et libertés qui lui sont garantis par la présente charte -le tribunal a conclu que les éléments de preuve ont été obtenus dans des conditions qui portent atteinte aux droits ou libertés garantis par la présente charte, ces éléments de preuve sont écartés s'il est établi, eu égard aux circonstances, que leur utilisation est susceptible de déconsidérer l'administration de la justice." Cela veut dire que, dans la charte fédérale, le policier qui pose un acte qui va à l'encontre de la charte...

M. Bédard: II ne faudrait pas mêler -je vous le dis tout de suite - la commission d'un acte criminel avec le problème de l'obtention d'une preuve. C'est quand même différent.

M. Marx: Je pense à l'arrêt décidé par la Cour suprême, à l'arrêt Hogan, par exemple. Hogan a demandé les services et l'assistance d'un avocat, cela a été refusé. Il s'est soumis au test de l'ivressomètre sans avoir la possibilité de discuter l'affaire avec son avocat. Mais, avec la nouvelle charte canadienne, ce serait possible pour la Cour d'exclure la preuve obtenue d'une façon illégale. Cela irait aussi pour des infractions provinciales, le cas le échéant, parce que la preuve peut être obtenue d'une façon illégale en vertu des lois provinciales comme en vertu des lois fédérales.

M. Bédard: Je crois qu'il y a avantage à garder l'article tel qu'il est libellé, sachant très bien que les tribunaux en feront une interprétation.

M. Marx: Mais le recours n'est pas donné ici comme dans la charte canadienne.

M. Bédard: Pour ce qui est du recours, ce sont ceux que je vous ai exprimés tout a l'heure. C'est le choix que nous avons fait par rapport...

M. Marx: Est-ce que le ministre serait d'accord...

M. Bédard: ... au recours qui est prévu dans la charte canadienne qu'évoque le député de D'Arcy McGee. Maintenant, je lui rappelle que l'article 24, qui concerne les recours à la suite d'atteintes faites aux droits et libertés, stipule que "toute personne victime de violation ou de négation des droits et libertés qui lui sont garantis par la présente charte peut s'adresser à un tribunal compétent pour obtenir la réparation que le tribunal estime convenable et juste eu égard aux circonstances." Toute la latitude nécessaire est laissée, à ce moment-là, au tribunal.

M. Marx: Cela, c'est la charte fédérale. Vous avez seulement lu l'article dans la charte canadienne.

M. Bédard: Permettez-moi de terminer. Ce sont des amendements; il faut lire la charte dans son ensemble. À l'article 49 de notre charte qui traite de la réparation de préjudices pour atteinte illicite à un droit, on peut lire le libellé suivant: "Une atteinte illicite à un droit ou à une liberté reconnu par la présente charte confère à la victime le droit d'obtenir la cessation de cette atteinte et la réparation du préjudice moral ou matériel qui en résulte. En cas d'atteinte illicite et intentionnelle, le tribunal peut, en outre, condamner son auteur à des dommages exemplaires." Ce sont des dommages et intérêts.

M. Marx: II n'y a pas de réparation possible une fois que le gars est en prison. L'idée ici, c'est d'exclure la preuve illégalement obtenue.

M. Bédard: Je vous l'ai dit que sur la question de la preuve, cela n'est pas pareil, c'est vrai.

M. Marx: Je vais vous donner mon opinion, M. le ministre. Il y a deux points sur cela. Premièrement, cela donne un recours au prévenu et, deuxièmement, cela a un effet dissuasif sur les policiers de poser des actes illégaux, parce que le policier qui pose un acte illégal va savoir que la preuve obtenue d'une façon illégale ne peut pas être utilisée devant les tribunaux. En conclusion, j'aimerais dire que les garanties de protection des droits légaux dans la charte canadienne sont plus fortes que les garanties que nous sommes en train d'encadrer dans la charte québécoise. Les Canadiens dans les autres provinces auront une meilleure protection face à leurs lois provinciales, face à leurs règlements municipaux, que les Québécois.

M. Bédard: Je ne le crois pas, parce que...

M. Marx: C'est un fait, ce n'est pas une opinion.

M. Bédard: ... dans le texte - vous n'allez jamais jusqu'au bout - cela n'est pas clair que ces éléments de preuve sont écartés. Ce n'est cela dans la charte. La charte canadienne le dit bien, à l'article 24, paragraphe 2, que "ces éléments de preuves sont écartés - il y a une soupape - s'il est établi - c'est très général - eu égard aux circonstances, que leur utilisation est susceptible de déconsidérer l'administration de la justice." Qu'est-ce que cela va vouloir dire dans l'interprétation des tribunaux? Je pense qu'on sera en mesure de le voir. Je crois que, dans un premier temps, contrairement peut-être à ce que vous avez dit, à savoir qu'il n'y avait pas de recours civil, il y a effectivement des recours civils pour une personne dont les droits auraient été atteints en vertu de l'article que nous étudions. Il y a aussi la possibilité pour le tribunal - il a toute la latitude possible - de prendre les autres décisions qui peuvent s'imposer dans le meilleur intérêt de l'administration de la justice.

M. Marx: En vertu de quel article?

M. Bédard: C'est pour cela que les tribunaux sont là.

M. Marx: En vertu de quel article de notre charte?

M. Bédard: Bien oui, mais je vous l'ai dit tout à l'heure.

M. Marx: L'article 49?

M. Bédard: Je vous l'ai donné. Je vous ai tout donné. Je peux bien répéter. Vous avez l'article 49. J'ai cité également...

M. Marx: Oui, mais l'article 49 n'a pas la même...

M. Bédard: Non, non, mais je vous parle des dommages civils. Franchement!

M. Marx: Mais ce n'est pas la même chose, M. le ministre. Vous devez savoir cela. Vous avez pratiqué assez longtemps le droit criminel.

M. Bédard: Bien oui, mais vous-même! Écoutez, vous ne m'apprendrez pas qu'il y a une différence entre les dommages civils et d'autres dommages comme ce que vous évoquez par rapport à la charte canadienne.

M. Marx: Je vais vous donner l'exemple suivant: il y a des policiers au Québec qui ont déjà cherché un évadé et ils ont défoncé la porte de la maison. Ils n'ont pas trouvé le type, il n'était pas là. Sa femme a déposé une plainte au ministère de la Justice contre le corps policier impliqué. Les policiers ont dit: "Pas de problème! Envoyez une facture pour cette porte. On va faire les réparations ou payer pour les réparations." Un recours civil n'est pas la même chose que le recours que je propose qui va avoir un effet dissuasif. Les policiers ne vont pas défoncer des portes s'ils savent que la preuve qu'ils pourraient obtenir de façon illégale ne sera pas utilisée. Si le ministre veut vraiment faire une amélioration...

M. Bédard: Est-ce que vous voulez dire que, s'il était clair qu'une preuve, si elle pouvait être produite, aurait pour l'effet d'amener la condamnation d'une personne qui aurait commis un meurtre, parce que cette preuve n'aurait pas été obtenue selon tous les critères de la légalité, on en arriverait à la conséquence que la preuve produite ne serait pas acceptée et que la personne serait purement et simplement libérée?

M. Marx: Aux États-Unis, c'est la jurisprudence. Si les policiers ne peuvent pas se prévaloir d'une preuve particulière, cela ne veut pas dire qu'ils n'ont pas d'autres preuves pour faire en sorte que la personne soit condamnée. Cela veut dire que la preuve qui est illégalement obtenue ne serait pas utile, mais d'autres preuves le seraient.

M. Bédard: Je pense que ceci peut amener à des abus. Tel que je viens de vous le dire, c'est une question d'appréciation. Je crois que le paragraphe 2 de l'article 24 de la charte canadienne...

M. Marx: Canadienne.

M. Bédard: ... quand on regarde sa formulation, cela ne protège pas plus.

M. Marx: Mais il y a plus. Le paragraphe 2 de l'article 24 ne veut rien dire.

M. Bédard: Écoutez, lisez-les! M. Marx: Oui.

M. Bédard: On dit: "Ces éléments de preuve sont écartés s'il est établi, eu égard aux circonstances..." Je vous citais un cas tout à l'heure.

M. Marx: D'accord.

M. Bédard: Je voudrais bien savoir quelle serait la décision d'un tribunal qui aurait manifestement à décider s'il écarte une preuve et que cela constitue la preuve principale qui peut amener la condamnation d'une personne accusée de meurtre. S'il écarte cette preuve et que cela veut dire l'acquittement pour le seul motif que vous

évoquez, je serais curieux de voir quelle serait la jurisprudence. De toute façon, la formulation du paragraphe 2 de l'article 24 de la charte canadienne parle de circonstances et explicite aussi que les éléments de preuve ne sont écartés que s'il est établi que "leur utilisation est susceptible de déconsidérer l'administration de la justice. Ma conclusion est très simple. C'est que nos tribunaux, avec les moyens qu'ils ont, si une action tendait à déconsidérer l'administration de la justice, prendraient les décisions qui s'imposeraient. Enfin, c'est une manière différente de voir les choses. (15 h 45)

M. Marx: Mon point de vue est que -je pense que c'est une appréciation objective de l'article 24 de la charte canadienne - cet article offre une meilleure protection que les recours que l'on trouve dans la charte québécoise. Parce que le Québec s'est exempté de la charte canadienne, les garanties des Québécois seront, par conséquent, affaiblies.

M. Bédard: Vous pouvez le prétendre. Vous pouvez même le répéter dix fois. Ce n'est pas vrai que c'est un fait, parce que vous ne lisez dans l'article de la charte canadienne...

M. Marx: C'est un fait. Demandez-le à n'importe quel juriste.

M. Bédard: ... que ce qui vous va, sans les nuances qui y sont contenues. Et vous oubliez une chose fondamentale, c'est qu'il y a des tribunaux qui sont là et qui ont, tant au Québec qu'ailleurs, à entendre des causes et à toujours tenir compte de la considération ou de la déconsidération de l'administration de la justice.

M. Marx: Je suis prêt à proposer un amendement, si le ministre est prêt à faire de la charte québécoise vraiment la meilleure charte possible, c'est-à-dire que toute preuve illégalement obtenue serait inadmissible devant les tribunaux.

M. Bédard: Vous admettriez...

M. Marx: Une preuve illégalement obtenue, c'est-à-dire une preuve qui est obtenue à l'encontre des garanties et droits légaux de la charte, serait inadmissible devant les tribunaux.

M. Bédard: Vous voudriez me faire accepter qu'une personne qui, manifestement, serait condamnée parce qu'elle a commis un meurtre pourrait...

M. Marx: Ce n'est pas de notre compétence.

M. Bédard: On ne commencera pas à faire des différences selon les plaintes. Ce sont des principes généraux ou ce n'en sont pas.

M. Marx: Ce n'est pas pour le meurtre, c'est pour...

M. Bédard: Une fraude fiscale? M. Marx: Oui, c'est cela.

M. Bédard: Vous voudriez que j'accepte que, parce qu'il aurait pu y avoir une illégalité technique - cela peut être technique - dans l'obtention d'une preuve, quelqu'un qui pourrait être condamné a payer 1 000 000 $, par exemple, à la suite d'une fraude fiscale, puisse être carrément acquitté à partir du moment où ce serait la seule preuve qu'on pourrait offrir contre lui? Honnêtement, je ne suis pas capable d'accepter cela.

M. Marx: C'est cela la jurisprudence aux États-Unis.

M. Bédard: Quand cela fait votre affaire, vous vous en allez aux États-Unis; quand cela fait votre affaire, vous vous référez à la charte canadienne. La seule chose que je remarque, c'est que vous n'êtes jamais capable d'insister sur les points où la charte québécoise des droits et libertés est en avance sur toutes les autres chartes au monde. Elle est plus progressiste. On voit que vous en faites l'étude d'une façon partisane, ce que je n'accepte pas.

M. Marx: En ce qui concerne ces recours, je pense que, dans la hiérarchie des recours, le recours américain serait le meilleur, la charte canadienne serait en deuxième place et la charte québécoise en troisième place.

M. Bédard: C'est votre appréciation. Vous partez d'un fait et vous tirez des conclusions générales, alors que vous savez très bien qu'il s'agit d'aller dans les conférences constitutionnelles, les rencontres interprovinciales concernant les droits et libertés pour se rendre compte - et on se le fait dire par toutes les autres provinces et même par le fédéral - jusqu'à quel point la charte des droits et libertés du Québec est en avance par rapport aux autres, par rapport à leur propre charte.

M. Marx: M. le Président, je pense qu'on a déjà adopté l'article.

Le Président (M. Rochefort): Non, pas encore, M. le député de D'Arcy McGee.

M. Bédard: Le député de D'Arcy McGee

accepte vite quand les propos ne font pas son affaire.

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que l'article 9, tel qu'amendé, est adopté?

Mme Marois: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. Article 10?

M. Bédard: Cette modification a pour objet d'affirmer avec plus de force qu'à défaut d'être promptement conduite devant le tribunal compétent la personne arrêtée ou détenue doit être relâchée. C'est un principe qu'on doit inclure, qui empêche des détentions prolongées.

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que l'article 10 est adopté? Adopté. Article 11?

M. Bédard: Cet article prévoit le droit pour un accusé d'être jugé dans un délai raisonnable.

Le Président (M. Rochefort): Adopté? Adopté. Article 12?

M. Bédard: Cette modification inscrit dans notre charte un principe connu depuis longtemps par la jurisprudence qui veut que nul ne soit tenu de s'incriminer lui-même.

Le Président (M. Rochefort): Adopté? M. Marx: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. Article 13?

M. Bédard: Cette modification a pour objet de permettre l'assistance gratuite d'un interprète lorsque l'accusé est atteint de surdité.

Le Président (M. Rochefort): Adopté?

M. Bédard: La gratuité est en avant de tout ce qui existe ailleurs.

Le Président (M. Rochefort): Adopté? M. Marx: D'accord.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. Article 14?

M. Marx: On a ajouté la surdité. Malheureusement, on n'avait pas d'interprète pour...

Le Président (M. Rochefort): Article 14?

M. Bédard: Je pensais que vous vouliez dire qu'on était en avance sur tout le monde sur ce point.

M. Marx: Sur la question de surdité, oui, M. le ministre, surtout ce gouvernement.

M. Bédard: Cela montre encore une fois votre partisanerie.

Le Président (M. Rochefort): J'ai appelé l'article 14.

M. Bédard: La modification à l'article 14 prévoit qu'une personne ne peut être jugée de nouveau pour une infraction dont elle a été déclarée coupable ou acquittée en vertu d'un jugement ayant force de chose jugée. Ici encore, il s'agit de la codification d'une règle reconnue par la jurisprudence.

Le Président (M. Rochefort): Adopté? M. Marx: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. Article 15?

M. Marx: Cela veut dire que l'article 14, c'est pour faire la concordance avec la charte canadienne étant donné que le Québec s'est exempté de la charte. C'est ce qu'on fait.

Le Président (M. Rochefort): Article 15?

M. Bédard: Pas une concordance. C'est la charte québécoise des droits et libertés. Ce n'est pas de concordance, cela.

M. Marx: Vous savez que, lorsque les libéraux seront au pouvoir bientôt, on va faire appliquer la charte canadienne au Québec intégralement.

M. Bédard: Vous ferez ce que vous voudrez. J'ai bien hâte de voir cette charte libérale. Je suis convaincu qu'elle n'est pas à l'avant-garde comme celle que nous allons avoir avec les amendements que nous proposons.

M. Marx: II ne faut pas faire de politique comme vous faites avec les droits et libertés des personnes.

Le Président (M. Rochefort): Cela va bien?

M. Bédard: Article 14 adopté, M. le Président?

Le Président (M. Rochefort): Oui, article 14, adopté. Article 15?

M. Bédard: Je vois le député de D'Arcy

McGee sourire.

Le Président (M. Rochefort): Article 15?

M. Bédard: L'article 15. En vertu de l'article 38 actuel, la règle voulant qu'un témoignage ne puisse servir à incriminer son auteur, sauf le cas de parjure, et s'appliquera que si le témoin a requis du tribunal la protection de la loi. Par notre modification, la règle s'appliquera, que le témoin ait ou non demandé cette protection.

M. Marx: C'est l'article...

Le Président (M. Rochefort): 15.

M. Marx: ... 15. Je vois que vraiment on a ajouté les deux mots qui se trouvent maintenant dans la charte canadienne.

Le Président (M. Rochefort): Adopté?

M. Bédard: Bon, si c'est le seul commentaire que vous avez à faire à tous les articles, on pourrait le faire par répétition.

M. Marx: C'est cela que j'ai trouvé. Le Président (M. Rochefort): Adopté.

M. Marx: Si le ministre n'est pas d'accord, qu'il nous explique que j'ai eu tort.

M. Bédard: Non, vous avez fait une magnifique étude de la charte.

M. Marx: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. Article 16?

M. Marx: Avant...

M. Bédard: Article 16...

M. Marx: ... d'aborder l'article 16, M. le Président, puis-je poser une question au ministre? Peut-être que j'aurai un amendement à faire. Je vais tâter le terrain.

Le Président (M. Rochefort): À quel endroit?

M. Marx: Entre 15 et 16.

Le Président (M. Rochefort): Vous voulez proposer un nouvel article? Est-ce que vous avez une copie de votre proposition d'amendement?

M. Bédard: Est-ce que cela concerne 16?

M. Marx: Non, cela concerne l'article 43. Si le ministre se souvient, dans mon discours de deuxième lecture, j'ai parlé de l'article 43 qui dit: "Les personnes appartenant à des minorités ethniques ont le droit de maintenir et de faire progresser leur propre vie culturelle avec les autres membres de leur groupe." Dans mon discours de deuxième lecture - je ne veux pas reprendre tout le discours - j'ai fait remarquer que le Québec a déjà signé une entente internationale ou a donné son consentement pour que le Canada signe cette entente internationale...

M. Bédard: J'ai remarqué que dans... Voulez-vous terminer?

M. Marx: Je cherche le titre de cette entente internationale que le Québec a signée. C'est le pacte international relatif aux droits civils et politiques. Dans ce pacte, on trouve un article 27 qui se lit comme suit: "Dans les États où il existe des minorités ethniques, religieuses ou linguistiques, les personnes appartenant à ces minorités ne peuvent être privées du droit d'avoir en commun avec les autres membres de leur groupe, leur propre vie culturelle, de professer et de pratiquer leur propre religion ou d'employer leur propre langue." J'aimerais savoir si le ministre est prêt à substituer cet article 27 dans le pacte international auquel le Québec a donné son consentement à l'article 43 qui se trouve dans la charte québécoise actuelle. Si on est d'accord avec le pacte international auquel on a donné notre accord, je pense que ce serait tout à fait logique de remplacer l'article 43 de la charte québécoise actuelle par cet article 27 du pacte international.

M. Bédard: M. le Président, je me rappelle que, dans son discours, tant en français qu'en anglais, le député de D'Arcy McGee a très bien dit à l'Assemblée nationale que le Québec était à l'avant-garde de toutes les autres communautés concernant la protection des minorités. Je pense le citer presque au texte. Il a également affirmé que le Québec n'avait de leçon à recevoir de personne dans ce domaine.

M. Marx: Dans mon discours, j'ai dit que les Québécois n'ont rien à apprendre des autres en ce qui concerne la protection des libertés publiques, mais que le Parti québécois a beaucoup à apprendre des Québécois. C'est cela que j'ai dit.

M. Bédard: Cela est votre opinion, vous y avez droit. Mais je pense avoir cité correctement l'essentiel, c'est-à-dire le côté raisonnable de votre intervention. Je pense que cela répond.

M. Marx: Mais, je me demande comment...

Le Président (M. Rochefort): Sur une motion d'amendement, M. le député?

M. Marx: Oui, mais je veux juste aborder cette question. Si le ministre est contre le principe, je ne vois pas la nécessité de...

Le Président (M. Rochefort): Oui, j'en conviens facilement avec vous, peut-être que, pour faciliter le déroulement de nos travaux, vous pouvez vérifier cela au départ pendant quelques minutes, mais il faudrait qu'on en vienne à discuter d'un amendement ou pas. Actuellement, on discute de rien, d'aucun article.

M. Marx: Oui.

Le Président (M. Rochefort): Non, non. Je n'ai aucun article devant moi. Vous avez refusé...

M. Marx: Oui, mais c'est la substitution que je propose à l'article 43.

Le Président (M. Rochefort): Ah! Donc, vous avez un amendement.

M. Marx: Cela peut être sous forme d'amendement, mais si le ministre est carrément contre, je ne vais pas le proposer. Avant de proposer l'amendement formellement, j'aimerais savoir si le ministre est favorable à ce principe.

M. Bédard: Ce n'est pas que je suis contre. D'abord, j'ai rappelé des propos tenus par le député de D'Arcy McGee lui-même mentionnant que le Québec n'avait de leçon à recevoir de personne sur le plan de la protection des minorités. Deuxièmement, je n'ai rien contre l'énoncé de principe du député de D'Arcy McGee, mais je ne crois pas qu'on doive y aller d'un amendement pour la bonne et simple raison que ce qu'il dit est déjà contenu dans l'article 43 de notre charte où on dit: "Les personnes appartenant à des minorités ethniques ont le droit de maintenir et de faire progresser leur propre vie culturelle avec les autres membres de leur groupe." Je pense que tout est là.

M. Marx: Mais je pense que les garanties dans l'article 27 du pacte international sont, à la face même de l'article, plus fortes parce que l'article 27 dans le pacte international protège les droits des groupes minoritaires; cela n'est pas fait dans l'article 43 de la charte actuelle. Si le Québec est d'accord avec l'article 27 du pacte international, pourquoi ne pas le mettre dans notre charte québécoise, en toute logique?

M. Bédard: On n'est pas obligé de copier mot à mot tout ce qu'il y a dans une charte.

M. Marx: Mais on était d'accord.

M. Bédard: On a le droit de s'exprimer. Je vous ai dit qu'à l'article 43 il y avait tout ce qu'il fallait pour rejoindre la préoccupation que vous avez exprimée. Vous-même avez ajouté que, sur le plan des gestes et des actions, le Québec n'avait de leçon à recevoir de personne jusqu'à maintenant.

M. Marx: Si on dit cela, on n'a pas besoin de charte du tout. Mais est-ce que le ministre est d'accord avec l'article 27 qui se trouve dans le pacte international?

M. Bédard: Vous retrouvez l'essentiel de cet article à l'article 43.

M. Marx: Les deux articles sont différents. Le ministre n'est pas d'accord pour amender et substituer l'article 27 à l'article 43?

M. Bédard: Ce n'est pas ce que je vous dis. On n'est pas ici nécessairement pour copier. Peut-être que le député de D'Arcy McGee aimerait cela.

M. Marx: J'aimerais savoir ce que vous voulez faire: le substituer ou non, mais ne pas patiner partout autour. (16 heures)

M. Bédard: Nous avons déjà un article concernant les minorités. Je pense qu'il englobe l'ensemble des préoccupations qui sont évoquées par le député de D'Arcy McGee.

Le Président (M. Rochefort): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Je conclus qu'il serait inutile pour moi de faire un amendement formel parce que le ministre ne l'acceptera pas.

M. Bédard: Ne vous méprenez pas. Ce n'est pas parce qu'on est contre; c'est parce que c'est déjà contenu dans l'article 43.

Le Président (M. Rochefort): Article 16?

M. Marx: Si c'est déjà contenu...

Le Président (M. Rochefort): M. le député, avez-vous une proposition d'amendement formelle à faire?

M. Marx: Puis-je avoir le consentement pour parler quelques minutes de plus sur cet article, M. le Président?

M. Bédard: Je n'ai pas d'objection, M. le Président.

Le Président (M. Rochefort): Y a-t-il consentement unanime pour entamer une discussion qui n'est pas prévue à l'étude article par article du projet de loi? Je n'ai pas de proposition d'amendement.

M. Marx: Le ministre a dit qu'il était d'accord que l'on en discute deux ou trois minutes.

M. Bédard: Non, mais votre dernière...

Le Président (M. Rochefort): M. le député, je pose la question aux membres de la Commission.

M. Marx: Parce que si on m'empêche de parler, faute de consentement unanime ici, il y aura beaucoup de problèmes, au salon bleu.

M. Bédard: M. le Président, jusqu'à maintenant...

Le Président (M. Rochefort): La demande de consentement se fait sans débat, M. le député de D'Arcy McGee.

M. Bédard: ... on discute de la Charte des droits et libertés. On s'est dit dès le départ - et nous avons tenu parole - que tout le monde aurait le temps de s'exprimer et je pense que nous devons continuer dans cette voie. Alors, si le député de D'Arcy McGee veut ajouter quelque chose.

M. Marx: Le consentement unanime, c'est un jeu dangereux de temps à autre.

Le Président (M. Rochefort): M. le député, je vous ferai remarquer que ce n'est pas une question de jeu pour moi; c'est une question d'appliquer notre règlement. Vous avez la parole.

M. Marx: Oui, oui. Pour moi, c'est une question de règlement et de jeu.

Le Président (M. Rochefort): Pourvu que cala ne s'adresse pas à la présidence de la commission.

M. Marx: Non, non, pas du tout. Le Président (M. Rochefort): Merci.

M. Marx: Si les deux articles ont la même portée, ce dont je ne suis pas convaincu, pourquoi ne pas faire la substitution?

M. Bédard: Moi, j'en suis convaincu; à partir de ce moment-là, pourquoi ferais-je un amendement pour ajouter un autre article qui a le même contenu que celui qui est déjà là? Franchement, il y a une logique là-dedans.

M. Marx: Je laisse le soin aux lecteurs du journal des Débats de voir où se trouve la logique.

M. Bédard: La logique, c'est qu'on ne fait pas un amendement pour dire la même chose.

M. Marx: Ils n'ont pas la même portée.

M. Bédard: Vous avez votre conviction et je la respecte, mais la logique, c'est par rapport à ma conviction, à savoir que...

M. Marx: Laissons cela aux lecteurs du journal des Débats.

M. Bédard: ... le contenu s'y retrouve. M. Marx: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Rochefort): Article 16?

M. Bédard: Cela me surprend que le député de D'Arcy McGee ne m'ait pas rappelé l'article 27 de la charte canadienne qui dit: "Toute interprétation de la présente charte doit concorder avec l'objectif de promouvoir le maintien et la valorisation du patrimoine multiculturel des Canadiens? Je vous jure que, lorsqu'on a cela et qu'on regarde celui qu'on a dans notre charte, c'est le jour et la nuit. Le député de D'Arcy McGee avait raison de dire qu'on n'a de leçon à recevoir de personne.

M. Marx: M. le ministre, je suis prêt à faire une critique de la charte canadienne le cas échéant. Il y a beaucoup d'articles, il y a beaucoup de dispositions avec lesquelles je ne suis pas d'accord. Je me suis déjà prononcé sur la place publique sur cette question.

M. Bédard: Si vous ne voulez pas que je vous en parle, arrêtez de m'en parler, de la charte canadienne.

Le Président (M. Rochefort): J'ai appelé l'article 16.

M. Marx: Je ne vous parle jamais; je parle au président.

Le Président (M. Rochefort): Je vous écoute attentivement. J'ai appelé l'article

16.

M. Bédard: J'ai bien parlé au député de D'Arcy McGee. L'article 16, M. le Président.

Le Président (M. Rochefort): Oui.

M. Bédard: Actuellement, seuls les articles 1 à 38 de la charte sont prépondérants sur les lois postérieures à son adoption, c'est-à-dire adoptées après 1975. La modification proposée a pour objet de rendre les articles 9 à 38 prépondérants sur les lois antérieures à la charte; de rendre également prépondérants les articles 1 à 8 et ce, tant sur les lois antérieures que sur les lois postérieures à la charte, en tenant compte, cependant, de certains délais qui sont indiqués en ce qui a trait aux lois antérieures - on verra un peu plus tard, je pense, que cela se justifie - puisqu'il faut effectuer un travail de recherche et d'étude nécessaire avant que cela puisse être en application par rapport aux lois antérieures. Le député de D'Arcy McGee conviendra avec moi, sans être d'accord avec tout l'article ou avec tout mon raisonnement, que ceci représente une amélioration très importante de notre Charte des droits et libertés de la personne.

M. Marx: Sur la question des délais, parce qu'on ne parle pas de délais dans cet article...

M. Bédard: On pourra en parler plus tard.

M. Marx: On discutera de cela à la fin. Dans la charte, les articles 1 à 38 auraient préséance sur toute loi du Québec et tout règlement; je suis tout à fait d'accord avec cela. Je pense que cela est une nette amélioration. Je me demande pourquoi cela n'a pas été fait en 1975 quand on a adopté la charte pour la première fois. J'ai toujours pensé qu'on aurait dû faire cela à cette époque. Au sujet de la clause "malgré" dans l'article 52 de la charte, est-ce que le ministre ne pense pas que cette clause "malgré" est assez forte par rapport à la clause "nonobstant" qu'on trouve dans la charte canadienne? Dans la charte canadienne, la clause "nonobstant" est limitée dans le temps, il faut renouveler à tous les cinq ans. Ici, c'est pour toujours. Une fois qu'on met "malgré" dans une loi, c'est pour toujours. Dans la charte canadienne, on prévoit une limitation dans le temps. C'est-à-dire que, si on veut adopter une loi, nonobstant la charte canadienne, il y a une limitation dans le temps de cinq ans. Il faut que la loi revienne à tous les cinq ans devant le Parlement pour que cela soit renouvelé, dans le sens qu'on renouvelle le "nonobstant".

M. Bédard: Je crois que nous avons une formule d'amendement - on en conviendra -beaucoup plus souple de notre Charte des droits et libertés qu'il n'en existe une au niveau de la charte constitutionnelle. Cela permet non seulement de faire en sorte que la discussion puisse se refaire après cinq ans, mais, dans certains cas, qu'elle puisse se refaire même avant ce délai.

M. Marx: Supposons que maintenant, à l'Assemblée nationale, on adopte une dizaine ou une douzaine de lois où on a mis "malgré la charte" pour une raison ou une autre. D'ailleurs, je pense que, dans certaines lois où on a mis la clause "malgré", cela n'était pas nécessaire, mais, par une prudence mal placée, cela a été jugé nécessaire. Une fois qu'on a adopté une loi malgré la charte, c'est pour toujours, pour 50 ans, 75 ans, cela n'est pas nécessaire de revoir la loi et d'étudier pourquoi on a mis la clause "malgré". Dans la charte fédérale, il y a un renouvellement nécessaire à tous les cinq ans.

M. Bédard: C'est sur cela que nous différons d'interprétation. Si, comme le dit le député de D'Arcy McGee, lorsque nous adoptons une loi ou une disposition d'une loi avec la mention "malgré la charte" ou "nonobstant la charte", c'était pour toujours et ne pouvait être changé, je serais d'accord avec le député de D'Arcy McGee. Mais, au contraire, notre processus d'amendement nous permet même d'enlever le "malgré" ou le "nonobstant" avant cinq ans si on le juge à propos. Il s'agit que l'Assemblée nationale en décide ainsi.

M. Marx: Au fédéral aussi.

M. Bédard: On peut toujours faire un amendement constitutionnel.

M. Marx: Au fédéral aussi, on peut amender la loi et faire en sorte que le "nonobstant" ne joue pas. Mais, au moins, au fédéral, il y a un rappel qu'à tous les cinq ans le Parlement va se pencher sur la nécessité d'adopter une loi malgré la charte canadienne. Cela s'appliquera à toutes les provinces qui ont accepté que la charte canadienne s'applique à leurs lois. Donc, je pense que, en ce qui concerne les lois provinciales des autres provinces, on va avoir un rappel à tous les cinq ans. On va se poser la question: Est-ce que c'était nécessaire d'adopter cette loi malgré la charte? On portera aussi à l'attention du public qu'on a procédé de cette façon. Je pose la question au ministre. Cela va de soi que c'est au ministre de décider. Moi, je le ferais.

M. Bédard: Oui, je comprends le député

de D'Arcy McGee. Ce sont deux manières différentes de voir les choses. Lorsqu'il y a un "nonobstant" concernant nos lois par rapport à notre Charte des droits et libertés, cela pourrait être théoriquement pour toujours, comme cela peut être pour très peu de temps. Cela implique qu'il y avantage à ce qu'il y ait une surveillance continuelle de nos lois de manière que lorsqu'un "nonobstant" ou un "malgré la charte" n'est plus nécessaire, on fasse les démarches indiquées auprès de l'Assemblée nationale pour que ce "nonobstant" ou ce "malgré la charte" disparaisse.

Le Président (M. Rochefort): Adopté?

M. Marx: Non, j'ai une autre question qui touche aussi cet article. On n'a pas enchâssé la charte par la loi, disons, pour prévoir qu'un changement prendrait une majorité des deux tiers à l'Assemblée nationale. Je me souviens que l'actuel vice-premier ministre du Québec et ministre des Affaires intergouvernementales, quand il était professeur de droit à l'Université de Montréal, a proposé que le Québec adopte une charte et que le Québec enchâsse cette charte par le biais de la procédure. Est-ce que le ministre est favorable à un tel enchâssement ou est-ce que cela a été refusé par le Conseil des ministres?

M. Bédard: Non, le Conseil des ministres a toujours la même opinion qu'il avait, lorsque nous avons eu le débat concernant la loi constitutionnelle et la loi no 62, en juin dernier, concernant les avantages ou les désavantages de l'enchâssement d'une charte par rapport à la situation qui existe en ce qui a trait à notre Charte des droits et libertés qui n'est pas enchâssée et qui comporte donc une capacité de l'amender plus facilement que ce n'est le cas pour une charte constitutionnelle ou une charte enchâssée. Le Conseil des ministres n'a pas changé d'idée là-dessus. Il y a des avantages et des désavantages dans les deux formules. À un moment donné, il faut...

M. Marx: Cela m'a beaucoup surpris et beaucoup déçu, cette décision du Conseil des ministres dans le sens que, lors d'une de nos commissions sur les droits et libertés de la personne, l'ancien ministre des Affaires intergouvernementales, M. Claude Morin, et même l'actuel ministre des Affaires intergouvernementales étaient d'accord pour enchâsser les droits fondamentaux dans la constitution canadienne. Ils ont dit: Si c'est cela, nous serons d'accord. Je me souviens de ce que le ministre de la Justice a dit à l'époque.

M. Bédard: Je pense que le député de D'Arcy McGee se rappelle - je ne voudrais pas le reprendre ici nécessairement - le long débat que nous avons eu en commission parlementaire, lors de l'adoption de la loi no 62, où nous avions eu à échanger au cours de l'argumentation à l'appui d'une et de l'autre des thèses avec le député de D'Arcy McGee et le député d'Argenteuil qui était à ce moment-là chef de l'Opposition. (16 h 15)

M. Marx: Est-ce que le ministre...

M. Bédard: Je ne sais pas si le député de D'Arcy McGee veut qu'on reprenne toute cette discussion. Je n'ai pas d'objection.

M. Marx: Non, pas du tout.

M. Bédard: Je pense que ce sont deux manières de voir les choses. Chaque manière a son mérite. Je pense que la vérité n'est pas seulement d'un bord quand on discute de ce sujet. Si c'est le désir du député de D'Arcy McGee, on peut reprendre la discussion.

M. Marx: Non, non, je ne veux pas reprendre la discussion. Tout ce que j'aimerais suggérer, c'est que, si le ministre n'est pas prêt à enchâsser toute la charte -je conviens qu'il pourrait avoir de bonnes raisons pour ne pas le faire - pourquoi ne pas enchâsser seulement les droits fondamentaux dans la charte québécoise par le biais de la procédure qu'il faudrait un vote des deux tiers des députés pour modifier ou passer outre aux droits fondamentaux inscrits dans la charte? Moi, je pense que c'est une faiblesse de la charte canadienne de ne pas avoir enchâssé ce qu'on appelle dans la charte canadienne les libertés fondamentales. Je ne vois aucune raison de ne pas enchâsser ces droits et de laisser soit le gouvernement fédéral, soit les gouvernements provinciaux s'exempter de ces libertés fondamentales.

M. Bédard: Remarquez que lorsque les gouvernements s'en exemptent, ils ont à en porter la responsabilité. Si on regarde le nombre de "nonobstant" ou de "malgré la charte" qui existent dans nos lois, il est très limité.

M. Marx: 11 au Québec, rien en Saskatchewan.

M. Bédard: Là, vous allez prendre l'exemple d'une place.

M. Marx: II n'y en a pas d'autres.

M. Bédard: Entre vous et moi, la charte des droits et libertés de la Saskatchewan et celle du Québec, je vous demanderais d'en faire l'analyse objective.

M. Marx: Ce n'est pas la même chose. M. Bédard: Non.

M. Marx: Non, je ne blâme personne, je ne blâme personne.

M. Bédard: Je sais que que vous ne le faites pas comme une critique. J'essaie de répondre sérieusement.

M. Marx: Ce n'est pas une critique. Ce n'est pas une critique.

M. Bédard: Le député de D'Arcy McGee sait que, sur ces onze "nonobstant" ou "malgré la charte" depuis l'adoption de la charte des droits et libertés, la plupart, au moins dix sur onze, ont été adoptés à l'unanimité de l'Assemblée nationale.

M. Marx: Mon dernier point, c'est qu'on va adopter ce projet de loi à l'unanimité, mais je vous assure que je ne serai pas d'accord avec chacun des articles.

M. Bédard: Cela se comprend.

M. Marx: Ce n'est pas assez de lire le vote en troisième lecture et de dire que tout le monde était d'accord; il faut lire le journal des Débats et le président a déjà enregistré un vote dissident. Je comprends la position du ministre; passons.

Le Président (M. Rochefort): Article 16, adopté? Adopté.

M. Marx: Oui.

M. Bédard: Article 17. Étant donné que la charte deviendra prépondérante sur les lois antérieures à son adoption et à l'adoption du présent projet, les ministères et organismes seront chargés de réviser les lois dont ils ont l'administration afin de vérifier leur conformité avec la charte. Dès lors, il paraissait nécessaire d'étendre le rôle-conseil de la commission sur la conformité des lois avec la charte à toute la législation et non seulement à la législation antérieure à l'entrée en vigueur de la charte, tel que prévu par l'article 67 actuellement.

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que cet article est adopté?

M. Marx: Un instant. Tout ce que j'ai à dire en ce qui concerne l'article qui se trouve dans la charte actuelle, c'est que la commission avait les mêmes devoirs et je pense que, depuis sept ans, la commission n'a pas fait beaucoup de rapports au gouvernement, faute de ressources et à cause d'un travail énorme. Peut-être que je pourrais suggérer au ministre de penser à demander à un institut de recherche - disons à l'Université de Montréal qui a un excellent centre de recherche en droit public - de faire le travail. Si on veut vraiment que le travail soit fait, le laisser à la Commission des droits de la personne, c'est le remettre aux calendes grecques.

M. Bédard: Disons que la commission a le pouvoir de faire des recommandations. Maintenant, le travail sera assumé sous la direction du ministère de la Justice en coordination avec tous les autres ministères. Je puis assurer le député de D'Arcy McGee que la décision est déjà prise de mettre tout en oeuvre pour qu'effectivement l'analyse des lois du Québec soit faite.

Le Président (M. Rochefort): M. le député.

M. Marx: Je suis très pessimiste parce que, depuis sept ans, il n'y a pas grand-chose qui a été fait. Souhaitons qu'on discutera de cela l'an prochain comme on en discute chaque année.

Le Président (M. Rochefort): Article 18?

M. Bédard: Article 18. L'objet de cette modification, M. le Président, est de permettre que soit suspendue la prescription de tout recours civil relatif à une demande d'enquête à la commission jusqu'à ce que celle-ci ait rendu sa décision sur l'enquête, ou pour un an au maximum, selon le plus court de ces délais. Cette suspension évitera que des recours ne soient perdus à cause des délais d'enquête ou que des actions ne soient prises inutilement en Cour supérieure seulement afin d'interrompre une prescription.

M. Marx: J'ai une remarque.

M. Bédard: C'était une demande faite par la commission et agréée par tous les groupes qui se sont fait entendre devant nous.

M. Marx: Bien, nous savons que, maintenant, il y a des plaintes devant la commission qui traînent depuis deux ou trois ans. Ici, une fois qu'une demande d'enquête est faite, la prescription est suspendue. C'est cela?

M. Bédard: Oui.

M. Marx: Donc, si je fais la demande aujourd'hui, la prescription sera suspendue pour un an. C'est cela le problème que le Congrès juif canadien et B'nai B'rith ont soulevé dans leur mémoire. C'est un point technique, mais il faut maintenant plus d'un

an pour que la commission fasse vraiment enquête. Cela prend un an et demi ou deux ans et il y a déjà des causes qui traînent depuis trois ans. On se demande si une prescription d'une année sera suffisante. J'aimerais que le ministre se penche sur cette question technique. Peut-être peut-il le demander à ses fonctionnaires.

M. Bédard: II faut bien remarquer que c'est un an, plus la prescription qui peut être prévue par nos lois. Par exemple, si une prescription de deux ans est déjà prévue, l'année en question qu'on accorde s'ajoute aux deux années du délai de prescription qui peut déjà être prévu par nos lois ordinaires. Ce que nous dit le député de D'Arcy McGee, c'est qu'effectivement il y a engorgement des plaintes qui peuvent être portées auprès de la Commission des droits de la personne. Cela peut prendre plus d'un an avant que celles-ci soient entendues ou qu'un jugement soit rendu. Vous voudriez qu'on pense à allonger encore ce délai d'un an?

M. Marx: Je pose cette question parce que, supposons que quelqu'un dépose une plainte devant la commission, la prescription sera suspendue pour un an. Supposons que cette même personne, qui en a bien le droit, dépose une action en cour, ce sera suspendu jusqu'à la fin de l'action. Je conviens que le ministre a un bon point quand il dit qu'il y a la prescription normale et par la suite celle d'une année. Mais supposons que la prescription est de deux ans. Souvent, la personne va arriver à la commission, disons, après 19 mois; donc, il ne resterait que 5 mois de la prescription normale plus un an. Je ne veux pas prolonger la prescription, si ce n'est pas nécessaire. Mais est-ce que le ministre a une étude de la Commission des droits de la personne sur cette question? Est-ce que la Commission des droits de la personne a demandé une prescription d'un an ou est-ce que la commission, en fonction de son expérience, a demandé une prescription plus longue?

M. Bédard: Je peux dire au député de û'Arcy McGee que la commission est satisfaite du délai d'un an prévu dans cet article.

M. Marx: Je voudrais juste voir le mémoire de la commission sur cette question.

M. Bédard: D'accord.

M. Marx: Le mémoire de la commission.

M. Bédard: Pourquoi avez-vous des lunettes?

M. Marx: Je ne veux pas être pris pour changer, non plus. Je lis qu'effectivement le ministre a raison. À la page 34 du mémoire de la Commission des droits de la personne, c'est écrit: "La commission est satisfaite du libellé de l'article 18 du projet sur la suspension de la prescription." Je pense que, si c'est nécessaire, on va revenir à un autre moment.

M. Bédard: Le député de D'Arcy McGee devrait nous faire confiance plus souvent.

Le Président (M. Rochefort): L'article 19? Excusez-moi. Il y a des propositions d'ajout d'articles, M. le ministre. 18.1 pour commencer, ensuite on fera 18.2.

M. Bédard: Est-ce que vous voulez que je le lise?

Le Président (M. Rochefort): Ce n'est pas nécessaire. Tout le monde en a une copie. Vous pouvez en faire la présentation, toutefois.

M. Bédard: Tout le monde en a une copie. Il s'agit d'insérer, après l'article 18 du projet de loi, un amendement, c'est-à-dire deux articles, 18.1 et 18.2. Pour ce qui est de 18.1, j'aurais le commentaire suivant à faire: Les articles 83.1 et 83.2 ont pour but de permettre qu'une injonction soit prise pour empêcher que des représailles ne soient exercées contre une personne qui aurait, par exemple, demandé à la commission de faire enquête. Présentement, ce recours en injonction est prévu à l'article 87.1 édicté par l'article 21 du projet de loi. Il apparaît toutefois préférable de déplacer à l'article 83.1 ce recours afin de bien séparer à l'intérieur de la charte les recours civils des recours pénaux. Quant aux modifications à l'article 84, elles ont pour but de permettre à la victime, en plus d'exercer personnellement son recours, de le joindre à celui exercé par la commission. Elle lui permet également de poursuivre elle-même en appel un recours entrepris par la commission. L'article 87.1 pouvait être considéré comme un accroc à la présomption d'innocence, d'où la nécessité de séparer les recours civils et pénaux.

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que cet amendement est adopté?

M. Bédard: C'était une recommandation du barreau. Nous y avons donné suite parce que, étant donné l'endroit où nous avions placé le contenu de cet article, cela pouvait être considéré comme un accroc à la présomption d'innocence, nous avait fait remarquer le barreau. Nous avons fait la séparation entre civil et pénal pour que ce soit clair et qu'il n'y ait pas confusion. Si

vous voulez prendre une ou deux minutes pour l'examiner. (16 h 30)

M. Marx: Sur la capacité de la commission d'ester en justice, la commission a la capacité d'ester en justice dans la mesure prévue dans la charte, parce que la commission n'a pas le statut d'une corporation. Donc, elle n'a pas le droit d'accès en justice, sauf si c'est prévu expressément dans la charte. C'est cela?

M. Bédard: Le député n'a pas fait ses devoirs?

Le Président (M. Rochefort): Adopté? M. Bédard: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Article 18.2?

M. Bédard: Article 18.2.

Le Président (M. Rochefort): Est-ce adopté aussi? Adopté. Article 19?

M. Bédard: L'article 19 a pour objet de permettre l'adoption de programmes d'accès à l'égalité pour corriger la situation de personnes faisant partie de groupes victimes de discrimination, que ce soit dans l'emploi, l'éducation ou dans un service offert au public et de les réputer - ces programmes -non discriminatoires du moment qu'ils sont conformes à la charte.

M. Marx: M. le Président, je m'excuse. Peut-on suspendre pour cinq minutes, parce que la députée de L'Acadie aimerait participer à ce débat?

Le Président (M. Rochefort): Ne pourrait-on pas passer plutôt à l'article 20 maintenant?

Réglementation M. Marx: Oui, mais c'est une...

M. Bédard: D'accord. On pourrait peut-être terminer. Il nous resterait cela.

M. Marx: Tout ce qui a trait aux programmes d'accès à l'égalité. On est prêt à adopter l'article 20 sans discussion.

M. Bédard: 20, sans discussion.

Le Président (M. Rochefort): L'article 20 est adopté. Article 21?

Mme Marois: D'accord. Vous n'avez pas de commentaires, M. le député?

M. Marx: Sur l'article 20...

Mme Marois: Aucun?

M. Marx: ... sauf s'il y a une faute d'orthographe que je n'aurais pas vue.

M. Bédard: Vous comprendrez que je n'avais pas de commentaires à faire sur cet article.

Le Président (M. Rochefort): Article 21, proposition d'amendement.

M. Bédard: Oui, M. le Président, il y a un amendement. Remplacer l'article 21 du projet de loi par le suivant: "21. L'article 87 de cette charte est modifié, premièrement, par le remplacement du paragraphe a) par le suivant: "a) quiconque contrevient aux articles 10 à 19 et 83.1; deuxièmement, par la suppression des paragraphes d) et e)."

Il s'agit, tout simplement, d'une modification de concordance avec l'article 18.1 du projet de loi que nous venons d'adopter.

Le Président (M. Rochefort): L'amendement est-il adopté?

M. Bédard: C'est la séparation du civil et du pénal.

Le Président (M. Rochefort): Adopté? M. Marx: Oui.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. Article 22?

M. Marx: Non, c'est l'amendement qui est adopté, mais pas l'article en entier...

Le Président (M. Rochefort): Excusez-moi. Vous avez raison.

M. Marx: ... parce que j'aimerais...

M. Bédard: L'amendement est adopté, M. le Président.

Le Président (M. Rochefort): Je comprends à demi, parce que l'amendement vise à remplacer totalement l'article. Alors, si on adopte l'amendement...

M. Bédard: Enfin!

M. Marx: Oui, oui, d'accord.

Le Président (M. Rochefort): Dans ce cas, cela va. J'essaie de suivre.

M. Bédard: Adoptons-le, quitte à le rouvrir si les questions du député de D'Arcy McGee ne trouvent pas réponse.

M. Marx: D'accord.

Le Président (M. Rochefort): L'article 21, tel qu'amendé, est-il adopté?

M. Marx: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Article 22?

M. Marx: J'ai vu, dans le mémoire du barreau, que celui-ci demande la suppression de l'article 87.1.

Le Président (M. Rochefort): II y a une confusion, mais je prends ce que je lis. C'est bien ce que j'ai compris.

M. Bédard: Vous avez raison, M. le Président.

Le Président (M. Rochefort): Vous voyez que je suis attentif! Article 22?

M. Marx: On n'a pas terminé l'article 21.

Le Président (M. Rochefort): Je suis prêt à vous écouter, sauf que...

M. Bédard: On avait dit qu'on l'adoptait, mais vous aviez des questions à poser et c'est normal.

M. Marx: Parfait.

Le Président (M. Rochefort): Donc, l'article 21, tel qu'amendé, est adopté. M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Oui, à l'article 21, le barreau a demandé la suppression de cet article et j'aimerais citer un extrait de son mémoire: "Seule la Cour supérieure détient un pouvoir relativement à l'outrage au tribunal commis ex facie. Le comité ne voit pas de raison de privilégier la Commission des droits de la personne en lui donnant un semblable pouvoir; pourquoi, par exemple, le Tribunal du travail ne devrait pas avoir un pouvoir d'obtenir une injonction contre des personnes qui exercent des représailles au même titre que celles qui sont mentionnées aux paragraphe d) et e) de l'article 87. Ce pouvoir risquait de devenir, dans certains cas, un instrument de chantage à l'égard des personnes qui font l'objet d'une plainte à la commission. Dans notre droit, la victime de représailles peut toujours s'adresser à la Cour supérieure qui corrige, le cas échéant, la situation. Enfin, on voit mal en vertu de quel principe la commission pourrait exercer un tel recours au nom d'autrui contre la personne qui fait l'objet d'une plainte ou d'une enquête, avant même de décider de la recevabilité de la plainte ou avant même de statuer sur le bien-fondé d'une telle plainte."

Je pense que c'est un argument sérieux qui mérite peut-être d'être étudié ou commenté.

Le Président (M. Rochefort): M. le ministre.

M. Bédard: On me fait remarquer que l'ensemble de l'article 21 a été adopté à l'article 18.1 qui avait pour effet de remplacer l'article 21.

M. Marx: Donc, les commentaires du comité du barreau s'appliquent.

M. Bédard: Oui, c'est simplement du point de vue technique, pour notre président.

M. Marx: Oui, d'accord, mais j'ai remarqué cela parce que le mémoire a été écrit avant qu'on ait fait les amendements d'aujourd'hui. D'accord. Est-ce que le ministre a des commentaires?

M. Bédard: Je dois honnêtement dire au député de D'Arcy McGee que, pendant qu'il faisait son petit exposé, nous étions en train de nous poser des questions sur l'aspect technique de l'adoption de l'article 18.1 par rapport à l'article 21, ce qui fait que j'ai été distrait. Est-ce que le député de D'Arcy McGee pourrait reprendre?

M. Marx: Si le ministre veut bien se référer à la page 29 du mémoire du barreau.

M. Bédard: M. le Président, avec votre permission, je demanderais, vu l'aspect très technique de la procédure, à M. Gilles Létourneau, sous-ministre...

M. Marx: Est-ce que M. Létourneau a été promu, il y a une seconde ou deux? Parce qu'on est prêt à l'adopter! Ce serait unanime.

M. Bédard: Vous savez, c'est le temps des fêtes!

Une voix: On ne sait jamais ce qui peut arriver.

M. Marx: Ce serait unanime.

M. Bédard: Je demanderais au directeur général adjoint, M. Létourneau, de nous faire quelques commentaires en fonction des remarques qui nous avaient été faites par le barreau sur ce sujet.

Alors, M. le député, le pouvoir n'est pas accordé à la commission. On comprendra que ce que la commission obtient ici n'est pas un pouvoir d'émettre des injonctions, mais plutôt un pouvoir de demander à la Cour supérieure l'émission d'une injonction dans les situations visées là. C'est une première correction ou une nuance à

apporter par rapport aux commentaires du barreau.

Ensuite, que ce soit la commission qui ait ce pouvoir, cela se situe dans la ligne des pouvoirs qui sont déjà conférés dans la charte, aux articles 83 et suivants, où un choix avait déjà été fait, dans la Charte des droits et libertés de la personne du Québec, de faciliter le recours de la victime en accordant à la commission le pouvoir de le faire pour la victime, avec son consentement. C'est un peu dans cette ligne que cela se situe. En ce sens, cela vient faciliter l'exercice du recours par la victime qui, souvent, dans ces domaines, se trouve démunie. Elle pourra à ce moment-là se faire représenter par la commission.

M. Marx: Le comité du barreau a dit que dans notre droit, la victime de représailles peut toujours s'adresser à la Cour supérieure qui corrige, le cas échéant, la situation. Donc, qu'est-ce qu'on ajoute ici? C'est que la commission peut le faire au nom...

M. Bédard: C'est tout simplement qu'on donne à cette personne le soutien de la commission pour requérir l'injonction devant le tribunal.

M. Marx: Est-ce que d'autres commissions ont ce pouvoir, disons le Tribunal du travail ou la commission du travail?

M. Bédard: Non. M. Marx: Non.

M. Bédard: Parce que ce sont des organismes quasi judiciaires.

M. Marx: La Commission des droits de la personne est purement administrative?

M. Bédard: Non, non, elle possède un pouvoir de recommandation et de conciliation.

M. Marx: Ce n'est pas quasi judiciaire?

M. Bédard: Ce n'est pas un organisme quasi judiciaire.

M. Marx: Les cours n'ont pas décidé de trancher...

M. Bédard: Vous en conviendrez avec moi.

M. Marx: ... cette question encore.

M. Bédard: Bon, on ira en cour.

M. Marx: Est-ce que les cours ont tranché cette question, à savoir si la commission est un organisme quasi judiciaire ou purement administratif?

M. Bédard: Non et je ne crois pas qu'elles aient à trancher ce qui n'est pas un litige parce que, à la face même de la loi, ce n'est pas un organisme quasi judiciaire.

M. Marx: Le ministre comprend bien que quelqu'un va soulever cela dans un litige, étant donné que la commission fait des enquêtes publiques.

M. Bédard: S'il y a un tel...

M. Marx: La commission va tenir des enquêtes publiques au mois de janvier, avec le droit d'émettre des subpoenas, etc. Comment dire que ce n'est pas quasi judiciaire?

M. Bédard: Elle n'a pas de pouvoir d'adjudication. Écoutez, je vous livre notre conviction par rapport à la question que vous posez.

M. Marx: Le droit d'adjudication n'est pas nécessaire pour qu'un organisme soit désigné organisme quasi judiciaire.

M. Bédard: Je pense vous avoir répondu sans nuance. Si des litiges doivent s'inscrire, on verra jusqu'à quel point notre opinion se vérifie.

M. Marx: Non, on ne fera pas cette discussion, mais il n'y a pas d'autres commissions qui ont ce pouvoir. C'est une innovation. C'est ce qui a fait craindre le barreau.

M. Bédard: Oui, mais c'est que cette demande - et le député de D'Arcy McGee se le rappelle sûrement, je pense - nous a été faite par de nombreux groupes qui se sont fait entendre à la commission parlementaire. Ils évoquaient la situation des gens qui sont démunis, qui ont besoin d'une assistance pour faire valoir leurs droits et user de tous les moyens de droit qui sont à leur disposition, entre autres l'injonction.

M. Marx: Adopté. M. Bédard: Cela va?

Le Président (M. Rochefort): Article 22, adopté?

M. Marx: Nous sommes à l'article 22?

M. Bédard: À l'article 22, il y aura un amendement.

Le Président (M. Rochefort): Oui,

excusez-moi, il y a un amendement.

M. Bédard: Ajouter à la première ligne de l'article 89 de la charte, après le mot "poursuite", le mot "pénale". C'est tout simplement une précision qui est destinée à éviter toute ambiguïté sur la nature des poursuites dont il est question à cet article.

Le Président (M. Rochefort): L'amendement est-il adopté?

M. Marx: Oui. (16 h 45)

M. Bédard: L'ensemble de l'article a pour objet de permettre à la commission de prendre, elle aussi, des poursuites pénales pour des infractions à la charte. Actuellement, comme on le sait, seul le Procureur général peut le faire. Non seulement tous les groupes, mais également le barreau avaient demandé un...

M. Marx: C'est cela. Je pense que le barreau a proposé cet amendement.

Le Président (M. Rochefort): L'article 22, tel qu'amendé, est-il adopté?

M. Marx: Un instant! M. le Président.

M. Bédard: Est-ce que cela va pour l'article 22, M. le Président?

M. Marx: Oui, je pense. Je vois que la modification...

M. Bédard: C'est dans la lignée de certaines représentations que nous avons faites tout à l'heure.

M. Marx: Dans le mémoire du barreau, je vois que le comité du barreau aurait préféré qu'on ajoute, à l'article 89, le paragraphe suivant: "Les poursuites sont prises suivant la Loi sur les poursuites sommaires (chapitre P-15) et la partie II de ladite loi s'y applique." Cela est dans la charte actuelle et cela existait avant. Pourquoi a-t-on enlevé ce paragraphe? C'est M. Jacoby, sous-ministre...

M. Bédard: Le barreau n'a pas vu que la Loi sur les poursuites sommaires avait été amendée à une certaine époque pour prévoir que la partie II c'est-à-dire la peine, s'appliquait nécessairement à toutes les décisions rendues en vertu de la Loi sur les poursuites sommaires. Donc, la demande du barreau est superfétatoire à ce sujet.

M. Marx: ... superfétatoire.

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que l'article 22, tel qu'amendé, est adopté?

M. Marx: Je porterai cette observation à la connaissance du comité du barreau.

M. Bédard: Et vous l'endosserez, j'imagine?

M. Marx: Pardon?

M. Bédard: Et vous l'endosserez parce que c'est l'évidence même.

M. Marx: Bon, si...

M. Bédard: C'est dit gentiment.

M. Marx: Je prends la parole du sous-ministre. D'accord.

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que l'article 22, tel qu'amendé, est adopté?

M. Bédard: L'article 22 est adopté.

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que cela va, M. le député de D'Arcy McGee?

M. Marx: Oui.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. Article 23?

M. Marx: L'article 23 est adopté. C'est nous qui avons proposé cela depuis cinq ans maintenant.

Le Président (M Rochefort): Article 24?

M. Bédard: Le député me fait sourire.

Le Président (M. Rochefort): Article 24?

M. Bédard: On est en train de corriger ce qui aurait dû être fait il y a cinq ans par un gouvernement qui nous a précédés.

M. Marx: C'est l'abrogation de l'article 90 de la charte.

M. Bédard: On corrige les coquilles des autres.

Le Président (M. Rochefort): Avant d'adopter l'article 24, il y a une proposition pour ajouter deux nouveaux articles, 23.1 et 23.2.

M. Bédard: II reste que ce serait peut-être utile, ne serait-ce que pour le journal des Débats et ceux qui ont à le lire, qui ont à s'interroger quelquefois sur le fait de certains articles. Dans ce cas, c'est un article très important puisqu'il met fin à des pratiques discriminatoires que l'on fait disparaître naturellement par l'abrogation de l'article 90. Par exemple, concernant l'âge, c'est la disparition d'un âge maximal pour

être admis à participer à un régime de retraite ou pour continuer à participer à un régime d'assurance-maladie. En ce qui a trait au sexe, cette abrogation comporte la disparition de l'exigence pour les femmes d'un plus grand nombre d'années de service pour participer à un régime de retraite. Il y a aussi la disparition de la non-accessibilité des femmes mariées à des régimes d'assurance-accident et d'assurance-maladie. Ce que nous venons de faire fait en sorte que la grossesse ne soit plus exclue des régimes d'assurance-accident et d'assurance-maladie et permet de légaliser la pratique voulant que, dans les régimes à prestation déterminée, l'employeur paie plus pour une employée femme que pour un employé masculin. Également, l'effet de l'abrogration de l'article 90 a des conséquences sur l'état civil. Cela représente la disparition de la pratique voulant que le versement d'une rente à un conjoint soit interrompu en raison de son remariage. Cela représente également la disparition de la pratique voulant que seuls les enfants d'un employé marié puissent bénéficier de la rente à l'enfant survivant. Ce sont quelques exemples, on pourrait en ajouter d'autres. Je n'irai pas plus loin.

M. Marx: L'histoire législative et politique de cet article démontrera que le gouvernement aura abrogé cet article il y a quatre ou cinq ans.

M. Bédard: M. le Président, l'histoire pourrait démontrer aussi qu'il n'aurait peut-être jamais dû y être...

M. Marx: C'est admis...

M. Bédard: ... lorsque la charte a été faite, a été adoptée. D'ailleurs je me rappelle - nous étions dans l'Opposition à ce moment-là - que nous nous étions opposés à cet article tel que libellé dans la charte qui nous avait été présentée par le gouvernement qui nous avait précédés. Nous corrigeons ce qui aurait dû...

M. Marx: Le ministre a fait un aveu. Si le ministre était opposé à cet article quand il était dans l'Opposition, comment se fait-il que cela ait pris six ans pour l'abroger?

M. Bédard: Pas seulement... C'est qu'à ce moment-là on avait plusieurs groupes de travail - vous vous rappelez les groupes de travail qui avaient été mis sur pied, je pense à la commission Boutin - et à partir du moment où ces groupes étaient en place, il fallait quand même attendre le résultat de leurs travaux. À la suite des travaux que la commission Boutin a faits, nous avons formé un comité interministériel qui a procédé à l'analyse de tout ce rapport, étant donné toutes les implications que cela pouvait représenter. Ce qui veut dire que nous avons procédé avec toute la célérité nécessaire et toute la prudence nécessaire dans les circonstances.

M. Marx: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. Nouveaux articles 23.1 et 23.2.

M. Bédard: Merci d'applaudir. M. le Président...

M. Marx: J'ai dit ce que j'avais à dire.

Le Président (M. Rochefort): Nouveaux articles 23.1 et 23.2.

M. Bédard: Insérer, après l'article 23 de la charte, les articles suivants: "23.1 La loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées (L.R.Q., chapitre E-20.1) est modifié par l'insertion, après l'article 72, du suivant: 72.1 Les articles 63 à 63.3 s'appliquent malgré la Charte des droits et libertés de la personne (L.R.Q., chapitre C-12). "23.2 L'article 68.1 de la Loi sur la fonction publique (L.R.Q., chapitre F-3.1), édicté par l'article 100 du chapitre 32 des lois de 1982, est abrogé."

Ces articles sont des articles de concordance découlant des dispositions de la charte relatives aux programmes d'accès à l'égalité.

M. Marx: Ce sont des articles pour permettre les programmes d'accès à l'égalité des personnes handicapées et des fonctionnaires.

Le Président (M. Rochefort): Adopté? M. Marx: Oui.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. Article 24. Il y a un amendement.

M. Marx: Je pense que cela touche des programmes d'accès à l'égalité...

M. Bédard: Oui, qui sont prévus dans la loi...

Mme Marois: ... de la fonction publique et la loi sur les handicapés.

M. Marx: Non, non. L'article 24, je veux dire...

M. Bédard: Pour l'article 23 il va falloir mettre un "malgré la charte", naturellement, qui se retrouvera dans la loi sur les handicapés.

Mme Marois: La loi sur les personnes

handicapées.

M. Marx: C'est nécessaire parce qu'on n'a pas adopté les amendements à la charte à ce moment-ci. Ce sera superflu...

Mme Marois: C'est cela. C'est exactement cela.

M. Marx: ... une fois qu'ils auront été adoptés.

M. Bédard: Vous voulez dire superfétatoire, c'est cela?

M. Marx: Oui, c'est cela que j'ai voulu dire.

Le Président (M. Rochefort): Article 24. Il y a un amendement.

M. Marx: L'article 24 touche les programmes d'accès à l'égalité. Non, cela ne touche pas les programmes d'accès à l'égalité?

M. Bédard: Un instant. M. le Président, peut-être qu'en lisant une petite note supplémentaire concernant l'article 23.1, cela pourrait aider à la compréhension des autres articles.

L'article 23.1, relatif à la loi assurant l'exercice des droits des handicapés, a pour objet d'éviter un problème entre les plans d'embauchage prévus par cette loi et les programmes d'accès à l'égalité prévus par la charte. En effet, les règles applicables aux plans d'embauchage diffèrent légèrement de celles applicables aux programmes de la charte. Ainsi, les plans pour les personnes handicapées sont obligatoires pour toute entreprise de 50 employés et plus, qu'il y ait discrimination systémique prouvée ou pas. Un programme d'accès à l'égalité suivant la charte doit se faire par suite d'une preuve de discrimination systémique, à moins qu'il ne soit volontaire. De plus, ce programme doit être approuvé par la Commission des droits de la personne alors que les plans pour handicapés doivent être approuvés par l'Office des personnes handicapées du Québec.

Le problème posé par la discrimination envers les handicapés nécessitait une loi particulière avec une philosophie et des principes différents, un handicapé ayant besoin d'une plus grande protection, étant moins formé de façon générale que les autres groupes victimes de discrimination, et les plans d'embauchage, naturellement, reflétant cette préoccupation. Ils nécessitent beaucoup de négociations, déjà entamées d'ailleurs avec les employeurs, car ils peuvent signifier des changements importants dans la structure d'une entreprise. Une modification de concordance était donc nécessaire.

Puisqu'il y a un "malgré" dans la charte, je pense qu'il est important d'en expliquer le pourquoi et cela s'impose. C'est très positif.

M. Marx: II n'y a rien de négatif. C'est très positif.

Mme Marois: C'est un plus.

M. Marx: C'est un plus, je suis d'accord.

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que c'est adopté?

M. Marx: Oui, c'est adopté, mais juste une petite remarque. En ce qui concerne les programmes d'accès à l'égalité des handicapés, la loi a été adoptée en 1978 par l'Assemblée nationale mais les programmes ne sont pas encore en vigueur. C'est-à-dire, cela fait plus de quatre ans qu'on attend; on attend, on attend.

M. Bédard: Je sais que Mme la ministre qui siège au Conseil du Trésor a toujours suivi ce dossier avec intérêt et je lui laisserai la parole.

Mme Marois: Ce qu'il faut bien comprendre, c'est que tout cet article exigeait que des plans soient prévus avec les entreprises sur l'embauchage et il y a tout un travail préalable qui est fait, qui est prêt. Je peux vous le dire, j'ai vu ces plans, j'ai vu ces règlements, les contrats possibles à passer avec les entreprises. Ce qui est intéressant, c'est que, au moment où l'article va entrer en vigueur - et je puis vous dire que ce sera dans les quelques semaines à venir, cela a même failli être la semaine dernière - les plans vont commencer à être mis en application. Il n'y aura donc pas de délai entre la mise en vigueur de l'article et sa mise en application, ce qui est intéressant. Avant d'appliquer l'article nous avons donc fait tout le travail de concertation, tout le travail de préparation et d'analyse de telle sorte que dès que l'article sera prêt, il sera mis en application. On verra donc les résultats dans six mois ou dans un an, alors que des entreprises auront commencé à embaucher des personnes handicapées.

M. Marx: Cela fait plus de quatre ans. Peut-être que cela va prendre jusqu'à cinq ans. Je signale que c'est un fait et non pas une opinion.

Une voix: ...

M. Marx: Oui, oui. La loi a été adoptée en 1978. J'ai vérifié il y a quelques semaines

et j'ai vérifié il y a une semaine.

M. Bédard: ... la complexité. Je pense que madame...

M. Marx: Si l'article était proclamé en vigueur... ce n'était pas fait encore. Mais, comme Mme la ministre l'a dit, ce sera fait bientôt, espérons-le.

Mme Marois: Avec les instruments prêts.

M. Marx: J'espère que pour les programmes d'accès à l'égalité, en vertu de la charte, on n'attendra pas quatre ou cinq ans.

Mme Marois: Je serai d'une vigilance...

Le Président (M. Rochefort): L'amendement à l'article 24 est-il adopté?

M. Bédard: Je puis vous assurer que dans des délais raisonnables la commission parlementaire de la justice aura à se réunir pour étudier les projets de réglementation qui sont prévus à la charte.

M. Marx: La promesse du ministre, en 1977, de fermer la prison sur la rue Parthenais...

M. Bédard: ...

M. Marx: Ses promesses ne m'impressionnent pas.

M. Bédard: Sauf que chaque fois que j'ai un programme pour fermer Parthenais vous êtes toujours contre. Entre autres, vous êtes contre l'institution de la ville de LaSalle...

M. Marx: Chaque fois que vous faites une promesse vous avez les manchettes.

M. Bédard: ... qui me permettrait de fermer Parthenais... Il faudrait que vous vous décidiez.

Le Président (M. Rochefort): À l'ordre, s'il vous plaîtl Est-ce que l'amendement à l'article 24 est adopté?

M. Bédard: 24, c'est de concordance. C'est un article de droit transitoire.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. Est-ce que l'article tel qu'amendé est adopté? (17 heures)

M. Bédard: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Article 25, il y a un amendement.

M. Bédard: Article 25, il y a un amendement: Insérer, dans la troisième ligne de l'article 25 du projet de loi, après le mot "assurance", les mots "ou de rente".

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que cet amendement est adopté?

M. Marx: "Les contrats d'assurance ou de rente." C'est cela?

M. Bédard: C'est la même modification que celle que j'ai apportée déjà à d'autres articles, entre autres à l'article 6 qui a été adopté.

Le Président (M. Rochefort): L'amendement est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Article 25 tel qu'amendé, adopté?

M. Bédard: C'est également un article de droit transitoire. Il prévoit que le gouvernement a deux ans, à compter de l'entrée en vigueur du règlement concernant les facteurs de détermination de risque, pour apporter les modifications législatives nécessaires à la mise en application du principe de non-discrimination dans les régimes et contrats de rente ou d'assurance y compris les régimes universels.

M. Marx: Si cela ne se fait pas, la sanction sera politique.

M. Bédard: Donc, cela se fera. M. Marx: Espérons.

Le Président (M. Rochefort): Article 26?

M. Bédard: À l'article 26, il s'agit aussi d'une disposition transitoire prévoyant qu'un programme d'accès à l'égalité existant lors de l'entrée en vigueur de la présente loi et nécessitant l'approbation de la commission sera présumé valide jusqu'à ce que la commission se soit prononcée sur cette demande d'approbation.

M. Marx: Est-ce qu'il y a un tel programme au Québec?

M. Bédard: ...

Mme Marois: II y en a dans la fonction publique.

M. Marx: Un instant, cet article ne s'applique pas à la fonction publique.

Mme Marois: Cet article ne s'applique

pas à la fonction publique. On verra qu'il y a cependant un certain nombre de correctifs qu'on songe à apporter à la commission, tout à l'heure, à cet effet. Il y en a dans la fonction publique. Je sais qu'il y a eu certaines expériences dans des entreprises sur des projets très particuliers qui, s'ils avaient été remis en cause, auraient pu être déclarés non possibles, étant donné que la charte ne prévoyait pas la possibilité de mettre en place des programmes d'accès à l'égalité. Cela permettra de les reconnaître.

M. Marx: II y avait des programmes d'accès à l'égalité qui étaient illégaux en vertu de la charte.

Mme Marois: Ils sont légaux tant que personne ne les conteste pas. À partir du moment où il n'y avait pas de contestation, ces programmes ont pu faire l'objet de certaines expériences. Ils deviennent légaux maintenant et cela permet qu'il y ait un délai pour tous les objets de la charte.

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que cet article est adopté?

M. Bédard: Article 27...

Le Président (M. Rochefort): Non, M. le ministre, ce n'est pas adopté encore.

M. Marx: Article 26. Est-ce qu'il serait possible pour la commission de se prononcer maintenant? Non, cela prendra la réglementation avant que la commission puisse se prononcer.

Mme Marois: Je vais donner un autre exemple au député de D'Arcy McGee. Actuellement dans les discussions qu'il y a eu avec les syndicats, il y a un certain nombre de programmes qui vont être mis en oeuvre dans certains organismes du parapublic. Ces programmes ne pourraient pas être mis en oeuvre si on n'avait pas un tel article transitoire.

M. Marx: D'accord. Article 27. On peut l'adopter.

Le Président (M. Rochefort): Article 26, adopté. Article 27, adopté.

M. Marx: À l'article 27, j'ai juste une question à poser. Est-ce qu'il va rester de l'argent dans le fonds consolidé du gouvernement?

M. Bédard: C'est la même question que...

M. Marx: La prévision des sommes.

Le Président (M. Rochefort): Article adopté?

M. Bédard: C'est une question que je débattrai avec le Conseil du trésor.

M. Marx: J'espère que le ministre va gagner.

Le Président (M. Rochefort): Article 28?

M. Bédard: D'habitude...

M. Marx: En ce qui concerne les sommes...

M. Bédard: ... on s'entend.

M. Marx: Cet article se lit comme suit: "Les sommes requises pour l'application de la présente loi au cours de l'année financière 1982-1983 et 1983-1984 sont prises sur le fonds consolidé du revenu."

J'imagine qu'il va rester quelques sous.

M. Bédard: On va faire les négociations nécessaires. Je peux dire au député de D'Arcy McGee que je peux compter sur l'appui d'une alliée de toute première valeur en la personne de Mme Marois qui est membre du Conseil du trésor.

M. Marx: À l'article 27, est-ce que le ministre connaît maintenant le budget de la Commission des droits de la personne? À peu près.

M. Bédard: Je m'excuse. Je ne savais pas qu'on étudierait les crédits aujourd'hui en même temps.

M. Marx: Parce que j'ai posé cette question en deuxième lecture.

M. Bédard: Je vais garder la question du député de D'Arcy McGee en mémoire, quitte à lui donner l'information.

M. Marx: Oui. Ma deuxième question est la suivante: Est-ce que cela va coûter beaucoup plus d'argent pour appliquer les amendements qu'on est en train d'adopter à la charte? Ces amendements vont-ils nécessiter des dépenses additionnelles substantielles?

M. Bédard: Nous sommes présentement à faire les estimations au ministère de la Justice. J'en ai discuté, il y a quelques jours, avec mon sous-ministre en titre. Je pense que ce serait un peu prématuré d'y aller d'un montant précis, mais, très rapidement, nous allons être en mesure de savoir quels montants additionnels cela peut comporter.

M. Marx: J'ai déjà signalé au ministre hier - mais je ne me souviens pas si c'était en commission ou en dehors de la commission - qu'en Ontario 70% des plaintes sont pour des motifs de harcèlement sexuel. On ajoute le harcèlement sexuel dans notre charte. Cela va engendrer beaucoup plus de plaintes à la Commission des droits de la personne et cela va prendre beaucoup plus de ressources. C'est très facile pour l'Assemblée nationale d'adopter des lois qui ne seront jamais appliquées. Je ne veux pas faire le procès de qui que ce soit, mais c'est souvent fait ici. On adopte des lois. C'est bien. Ce sont de belles lois, mais elles ne sont jamais appliquées. Pour que les plaintes de harcèlement sexuel - parce que je pense que c'est cela, le problème - soient vraiment traitées d'une façon efficace, il faut prévoir des ressources additionnelles ou prévoir un mécanisme. La commission est présentement surchargée et débordée, comme le ministre le sait bien. Si la commission reçoit beaucoup plus de plaintes l'an prochain que cette année, tout sera bloqué. Ce sera pire qu'aujourd'hui.

M. Bédard: II est évident qu'une fois ce projet de loi adopté, nous nous devrons de faire l'évaluation approximative de l'augmentation du volume de travail que cela peut représenter pour la commission et de déterminer les ressources humaines nécessaires en conséquence. Je suis conscient des éléments soulevés par le député de D'Arcy McGee. Le budget actuel est de l'ordre de 3 000 000 $. Nous serons en mesure de déterminer les montants additionnels qui seront requis.

M. Marx: Mais 3 000 000 $, cela veut dire que c'est une commission qui coûte vraiment cher, si on fait la comparaison avec d'autres provinces. Boni J'espère que le ministre va prévoir des ressources.

M. Bédard: Je prends note des propos du député de D'Arcy McGee qui est...

M. Marx: Parce que maintenant...

M. Bédard: ... un défenseur des droits et libertés, ce qui n'empêche pas qu'on doive dans cette commission, comme ailleurs dans tous les autres organismes, faire un inventaire le plus scrupuleux possible de ce qui est nécessaire, en termes de ressources humaines, pour répondre à la demande et au travail demandé.

M. Marx: Je veux signaler au ministre un élément que je trouve très important. Parce que la commission est débordée, supposons que quelqu'un dépose une plainte pour le motif de harcèlement sexuel. La commission est tellement débordée qu'elle va dire à cette personne: Si vous voulez attendre, on va instituer une enquête d'ici quelques mois ou, si vous voulez, vous pouvez vous adresser directement aux tribunaux. La commission écrit de telles lettres aux personnes qui déposent des plaintes. Mais déposer des plaintes à la commission, c'est une chose. La commission a des pouvoirs d'enquête. La commission peut bien faire une enquête. Si on dépose une plainte devant les tribunaux, les tribunaux n'ont pas le pouvoir de faire des enquêtes et ils n'ont pas les mêmes recours. Je pense que c'est très sérieux. Je ne veux pas qu'on adopte certaines protections et qu'on dise à tout le monde qu'on est en train de faire telle et telle chose, mais que les recours sont inexistants. C'est une mise en garde au ministre.

M. Bédard: Oui. Je dois dire au député de D'Arcy McGee que, lorsque nous adoptons des lois, en ce qui a trait au ministère de la Justice, elles sont mises en vigueur le plus promptement possible. Lorsque des délais sont prévus concernant la mise en vigueur, c'est parce qu'il y a des raisons très précises de nécessité d'information du public ou d'autres raisons qui peuvent justifier que les lois n'entrent pas en vigueur immédiatement.

Le Président (M. Rochefort): L'article 27 est-il adopté?

M. Marx: Oui.

Le Président (M. Rochefort): Article 28?

M. Marx: L'article 28 est l'article qui exclut cette loi de l'application de la charte canadienne et on va l'adopter sur division.

Le Président (M. Rochefort): Adopté sur division. Article 29?

M. Bédard: Ce qui montre qu'on peut adopter une loi et encore plus une charte des droits plus progressistes que d'autres, même en en mettant une de côté.

Le Président (M. Rochefort): Article 29?

M. Marx: Je pense que...

M. Bédard: Cet article prévoit que la...

M. Marx: M. le ministre, avant d'adopter les articles 29, 30 et 31... Ce sont trois articles qui touchent la mise en vigueur de la charte. Voulez-vous les adopter maintenant, quitte à...

Le Président (M. Rochefort): Ce serait préférable, on a suspendu des articles et on

terminerait avec l'article 19, qui a été suspendu.

M. Marx: D'accord, c'est parfait.

Le Président (M. Rochefort): L'article 29 est-il adopté?

M. Bédard: Adopté. M. Marx: Un instant...

M. Bédard: Cet article prévoit que l'abrogation de l'article 90 et l'entrée en vigueur du deuxième alinéa de l'article 20 de la charte concernant l'application du principe de non-discrimination dans les régimes et contrats de rente et d'assurance se feront lors de l'entrée en vigueur du règlement sur les facteurs de détermination de risque dans les régimes et contrats de rente et d'assurance.

M. Marx: On n'aura pas d'autre choix que de l'adopter, mais nous avons déjà demandé que toute la réglementation, en ce qui concerne les programmes d'accès à l'égalité, soit déposée avec le projet de loi qui amende la charte. Cela n'a pas été fait.

M. Bédard: M. le Président, je dois dire que ces règlements sont en train de se préparer et que nous serons en mesure, dans un délai raisonnable, de les proposer à l'attention de nos collègues de l'Assemblée nationale, à l'attention de la commission parlementaire de la justice. Je crois, au contraire, qu'il était beaucoup plus opportun d'avoir à fixer le cadre de ces programmes d'accès à l'égalité concernant les avantages sociaux et de déterminer un cadre juridique très précis, ce que nous faisons avec la charte. Ensuite, plutôt que de mêler les discussions et risquer de mêler tout le monde, il y aura un débat, comme il se doit, sur les règlements et tout le monde sera en mesure de voir jusqu'à quel point ils respectent le cadre que nous avons décidé ensemble de mettre au point, législativement parlant.

Le Président (M. Rochefort): Cet article est-il adopté?

M. Bédard: Adopté.

M. Marx: J'accepte les excuses du ministre.

M. Bédard: Non, ce ne sont pas des excuses...

M. Marx: Ce n'est pas un raisonnement non plus.

M. Bédard: ... même si je les avais complètement préparés, je crois que, pour ne pas rendre le débat confus, il est bon, dans un premier temps, de fixer le cadre, ensuite, dans un deuxième temps, de procéder à l'adoption des règlements avec toutes les remarques qu'on pourra avoir à faire à ce moment-là.

M. Marx: On accepte les excuses du ministre.

Le Président (M. Rochefort): Article 29, adopté. Article 30?

M. Bédard: Alors, je ne répéterai pas.

Cet article prévoit le mode d'entrée en vigueur de la prépondérance des articles 1 à 38 de la charte. Il faut d'abord souligner que la préséance des articles 9 à 38 sur les lois postérieures à l'entrée en vigueur de la Charte des droits et libertés de la personne, soit le 27 juin 1975, continuera à s'appliquer.

Quant à la préséance des articles 1 à 8 sur les lois postérieures, elle entrera en vigueur sur proclamation, laquelle devrait suivre d'assez près la sanction du présent projet de loi.

Enfin, la préséance des articles 1 à 8 sur les lois antérieures à la date de cette proclamation ainsi que la préséance des articles 9 à 38 sur les lois antérieures au 27 juin 1975 entreront en vigueur par d'autres proclamations ou au plus tard le 1er janvier 1986. Comme je l'ai dit, ceci est nécessaire parce qu'il y a tout un travail d'analyse, d'études qui se doit d'être mené à terme concernant l'ensemble de nos lois, travail qui est énorme avec un délai qui me semble raisonnable dans les circonstances.

M. Marx: C'est à l'article 30?

Le Président (M. Rochefort): Oui. (17 h 15)

M. Marx: Je trouve que l'article 30, avec l'article qui traite de la clause restrictive, est l'article le plus décevant du projet de loi. C'est-à-dire qu'aujourd'hui, la protection des droits fondamentaux de la charte canadienne ne s'applique pas au Québec et la protection des droits fondamentaux qui se trouve dans la charte québécoise ne s'applique pas aux lois québécoises. J'aimerais citer le mémoire du barreau en ce qui concerne cet article et j'aimerais faire miens les propos du barreau: "Le comité du barreau soulève avec inquiétude l'existence d'un vacuum juridique en ce qui concerne la primauté des droits fondamentaux énumérés aux articles 1 à 8 de la charte. En effet, si la proclamation des gouvernements visés au présent article tarde, l'article 52 de la charte, tel que proposé par le présent projet de loi, n'aurait aucun effet pendant ce temps et les droits fondamentaux énumérés aux articles 1 à 8 ne se seront

aucunement garantis ni les articles équivalents de la charte constitutionnelle et ce, à cause de l'existence de la loi concernant la loi constitutionnelle de 1982."

Autrement dit, cette loi no 62 empêche l'application de certains articles de la charte constitutionnelle au Québec. Tant que l'article 52 n'aura pas été promulgé, toutes les lois québécoises pourront contrevenir aux articles 1 à 8 de la charte québécoise. C'est-à-dire qu'au Québec, pendant au moins quelques années, nous n'aurons pas de protection en ce qui concerne nos droits fondamentaux que les citoyens d'autres provinces auront. Je trouve totalement inacceptable de laisser un tel vacuum. Je ne veux pas faire tout le débat en ce qui concerne les distinctions et les différences entre la charte québécoise et la charte canadienne, qui est une charte constitutionnelle, donc il y a de meilleures garanties dans une charte constitutionnelle. Ici, dans l'article 30, le ministre laisse un vacuum pour quelques années. Je trouve cela totalement injustifié. J'aimerais au moins demander au ministre de faire en sorte que les articles 1 à 8 de la charte aient préséance sur toute loi et tout règlement québécois, dès aujourd'hui ou dès demain, lorsqu'on adoptera la loi.

M. Bédard: M. le Président, c'est en tenant compte de ces représentations, lorsqu'on parle de vacuum, il existait déjà parce que 1 à 8 n'étaient pas prépondérants. Ils le deviendront sur les lois postérieures dès la proclamation de ce projet de loi. Il y avait déjà un vacuum qui existait en quelque sorte; l'interprétation est très légaliste. De toute façon, c'est pour cela que j'ai dit que la sanction de ce projet de loi devrait suivre d'assez près l'adoption du présent projet de loi.

M. Marx: Est-ce que le ministre a d'autres commentaires à faire?

M. Bédard: Je l'ai fait pendant que vous étiez parti.

M. Marx: Ah non! Je n'étais pas parti. J'ai entendu chacun des mots. J'ai pensé que...

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que l'article 30 est adopté?

M. Marx: Un instant!

M. Bédard: Ce que vous oubliez... Une seconde!

M. Marx: Je ne vois pas de difficulté...

M. Bédard: Mais non! Mais attendez que je termine.

M. Marx: Bien je vous l'ai demandé et vous avez dit oui.

Le Président (M. Rochefort): M. le ministre.

M. Marx: D'accord. Allez-y.

M. Bédard: Non, mais je voulais ajouter quelque chose. Je vous ai dit que dans un délai très rapide, le plus rapide possible, il y aura la sanction, la proclamation ou la mise en vigueur. Il y a lieu de dire que la protection concernant la discrimination accordée par notre charte s'applique immédiatement. Elle s'applique depuis 1975 alors que les mêmes dispositions qui sont dans la charte canadienne ne s'appliqueront pas avant trois ans, après l'entrée en vigueur du présent article, tel que stipulé au paragraphe 2 de l'article 32 de la charte canadienne concernant l'application.

M. Marx: Croyez-vous que celui qui va lire le journal des Débats va comprendre tout cela? Parce que, aujourd'hui, en vertu de la charte canadienne, les droits fondamentaux ont préséance...

M. Bédard: Je ne vous dis pas... Une seconde! Je ne vous dis pas que vous n'avez pas raison de dire qu'il y a un vide juridique. Je vous l'ai dit tout à l'heure. Je vous ai même dit que ce vide juridique, au moment où l'on parle, existe déjà, puisque les articles 1 à 38 ne sont pas prépondérants. Donc, je vous l'ai dit même avant que vous m'en fassiez la demande. J'ai vu tout de suite la nécessité, je l'ai donc énoncée à l'étape du discours de deuxième lecture. Je le redis présentement, cette nécessité de faire en sorte que la mise en vigueur de ce que nous adoptons aujourd'hui, que la prépondérance des articles 1 à 38 se fasse le plus rapidement possible.

M. Marx: Aujourd'hui même? Est-ce que le ministre est prêt à accepter...

M. Bédard: Je vous dis le plus rapidement possible.

M. Marx: Oui, c'est cela. Je comprends. Le plus rapidement possible...

M. Bédard: Vous serez en mesure de voir si c'est un délai raisonnable.

M. Marx: Non, mais le ministre dit: le plus rapidement possible, cela veut dire d'ici le 1er janvier 1986. Je suis prêt à combler le vide juridique tout de suite et à dire que les articles 1 à 38 auront préséance dès l'adoption de la loi.

M. Bédard: J'ai fait allusion à la charte

canadienne et, comme vous vous y référez tellement souvent, je veux vous dire qu'il y a aussi tout un vide juridique concernant la charte canadienne. Quant à notre charte, entre autres, l'article 10 concernant la discrimination s'applique depuis 1975, alors que la charte canadienne ne fait entrer en vigueur que dans trois ans les articles concernant la discrimination. Je cromprends qu'il peut y avoir des vides juridiques.

M. Marx: Supposons qu'il n'y ait pas de vide juridique...

M. Bédard: Vous ne trouvez pas cela si extraordinaire que cela...

M. Marx: ... en ce qui concerne l'égalité au Québec, tant mieuxl Maintenant, quant à la préséance des articles 1 à 8 sur toutes les lois du Québec, nous sommes prêts à l'accepter.

M. Bédard: Je vous ai dit qu'il y avait un vide juridique des deux côtés, tant au niveau de la charte canadienne que de la charte québécoise, et que nous allons...

M. Marx: Cela fonctionne mal en Ontario et cela ne me rend pas heureux...

M. Bédard: Je ne vous dis pas que cela fonctionne mal en Ontario.

M. Marx: ... je ne veux pas que cela fonctionne mal au Québec.

M. Bédard: Non, mais je ne vous dis pas que cela fonctionne mal en Ontario, nécessairement. Peut-être qu'il y a des vides juridiques qui sont nécessaires, à un moment donné. Ce que je vous dis, je pense que c'est en termes de responsabilité qu'il faut le dire. Conscients de cette réalité, nous allons faire en sorte que la proclamation de la mise en vigueur se fasse le plus rapidement possible concernant ces articles.

Le Président (M. Rochefort): Article 30?

M. Marx: Puis-je demander, M. le Président, d'inscrire la députée de L'Acadie à la place du député de Marquette?

Le Président (M. Rochefort): Vous proposez que nous substituions le nom de Mme Lavoie-Roux (L'Acadie) à celui de M. Dauphin (Marquette) comme membre de la commission?

M. Marx: Parce que M. Dauphin (Marquette) a le droit de vote; c'est cela?

Le Président (M. Rochefort): Est-ce qu'il y a consentement unanime?

Des voix: Oui.

Le Président (M. Rochefort): Il y a consentement.

Mme Lavoie-Roux: ...

Le Président (M. Rochefort): Alors, cela va pour le changement à la liste des membres de la commission. Est-ce que l'article 30 est adopté?

M. Marx: Je demande le vote enregistré.

Le Président (M. Rochefort): Vote enregistré. J'appelle donc le vote sur l'article 30.

M. Bédard: Est-ce que vous faites un amendement? C'est un vote enregistré sur quoi?

Le Président (M. Rochefort): Sur l'article 30. J'appelle donc le vote sur l'article 30.

M. Bédard (Chicoutimi)?

M. Bédard: Pour, M. le Président. M. Marx: Contre.

Le Président (M. Rochefort): Mme

Marois (La Peltrie)?

Mme Marois: Pour.

Le Président (M. Rochefort): M.

Charbonneau (Verchères)? Mme Lavoie-Roux (L'Acadie)?

Mme Lavoie-Roux: Contre.

Le Président (M. Rochefort): Mme

Juneau (Johnson)?

M. Bédard: Elle vient juste d'arriver.

Mme Lavoie-Roux: Non, non, cela fait un petit bout de temps, mais vous ne m'aviez pas vue...

Le Président (M. Rochefort): II faut le dire.

Mme Juneau: Je l'ai dit, je m'excuse. Je n'étais pas vis-à-vis d'un micro.

Le Président (M. Rochefort): D'accord, excusez-moi!

M. Marx: ... de la commission depuis quelques heures maintenant.

M. Bédard: Franchement!

Le Président (M. Rochefort): M. Kehoe (Chapleau)? Mme Lachapelle (Dorion)?

Mme Lachapelle: Pour.

M. Marx: Elle était ici pour la discussion de cet article.

Le Président (M. Rochefort): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lafrenière (Ungava)?

M. Lafrenière: Pour.

Le Président (M. Rochefort): M. Leduc (Saint-Laurent)?...

M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes)?... M. Marx (D'Arcy McGee)?...

M. Marx: Contre.

Le Président (M. Rochefort): L'article 30 est adopté: 5 pour, 3 contre. J'appelle l'article 31.

M. Marx: L'article 31 prévoit que le ministre présentera l'article 31?

M. Bédard: II s'agit de l'article de l'entrée en vigueur de toutes les autres dispositions du présent projet de loi.

M. Marx: Je n'aime pas l'article 31 et je vous dirai pourquoi, M. le Président.

Le Président (M. Rochefort): Vous ne l'avez pas?

M. Marx: Non, je ne ne l'aime pas.

Le Président (M. Rochefort): Excusez-moi.

M. Marx: Je l'ai et je ne l'aime pas. Je vais vous dire pourquoi. J'ai déjà fait un discours en deuxième lecture sur cette question. Cela permet au gouvernement de mettre la loi en vigueur disposition par disposition, article par article. Je trouve que c'est une délégation trop large au gouvernement. L'article 31 tel que rédigé devient une clause, disent-ils, dans nos lois. J'ai trouvé cet article dans un grand nombre de lois cette session-ci et je trouve que c'est une délégation exorbitante. Si le ministre le veut, je peux lui citer des exemples où une loi a prévu, dans le paragraphe d'un article, une infraction et, dans un autre, une défense, et où le gouvernement concerné a mis en vigueur l'infraction mais pas toute la défense. Je trouve que c'est une délégation trop large. Même si je ne veux pas faire tout un plat de cette disposition, je trouve que c'est un peu exagéré.

Je ne sais pas d'où vient cette conception d'adopter de tels articles, mais j'imagine que cela vient des fonctionnaires qui trouvent que ce serait une façon plus efficace de mettre en vigueur des lois. Les ministres sont influencés par leurs fonctionnaires, pas seulement dans votre ministère, mais dans d'autres, parce qu'ils disent que l'on trouve cette clause dans toutes les lois ces jours-ci.

M. Bédard: J'espère que le député de D'Arcy McGee a bien lu le même projet de loi que nous. Ce projet que nous adoptons présentement n'est pas une invention des fonctionnaires. C'est tout simplement une nécessité. Il est à même de constater qu'il y a certains articles qui ne peuvent pas entrer en vigueur dès maintenant, qui ne peuvent entrer en vigueur que sur proclamation du gouvernement.

M. Marx: Énumérez-les.

M. Bédard: Tous les articles qui impliquent que des règlements soient faits et adoptés par la commission parlementaire de la justice ne peuvent être mis en vigueur maintenant.

M. Marx: Énumérez-les. Cela s'est fait déjà dans des projets de loi.

M. Bédard: M. le Président, je crois qu'à partir d'un cas particulier que nous ramène régulièrement le député de D'Arcy McGee, il en tire des conclusions générales qui, à mon sens, résistent mal à l'analyse parce que je crois qu'on est en mesure de dire que le gouvernement a toujours fait en sorte qu'entrent en vigueur le plus rapidement possible les lois qu'il vote, les dispositions de ces lois. Dans certains cas il y a des délais nécessaires. Prenez, par exemple, le droit de la famille. Lorsque nous l'avons adopté, nous avons adopté tout le droit de la famille de même que tout ce qui concernait le Code de procédure. Dès ce moment-là j'avais indiqué qu'il ne serait en vigueur que vers le mois de décembre 1982 puisque c'était nécessaire d'avoir une période d'information. (17 h 30)

II y a des ajustements techniques, pas au niveau des lois mais simplement du point de vue pratique, qui sont nécessaires. L'information du public, par exemple, pour que tout au moins les praticiens du droit aient une certaine connaissance, même soient un peu familiers avec la loi. Cela s'explique. Le député de D'Arcy McGee en a fait état lors de l'adoption de la loi no 67 concernant les mesures alternatives à l'emprisonnement, faute de paiement d'amendes. À ce moment, j'avais dit que ces dispositions s'appliqueraient au mois de janvier puisqu'il fallait mettre en place les mécanismes

administratifs nécessaires pour son application. On ne peut quand même pas mettre ces mécanismes-là en place avant que la loi ne soit adoptée sans savoir exactement ce que sera le contenu final d'une loi qu'on propose à l'Assemblée nationale. Il arrive qu'on propose des lois à l'Assemblée nationale et qu'elles soient modifiées. Il arrive même qu'elles soient retirées. La logique et le réalisme font que certaines lois sont adoptées et ne peuvent logiquement être mises en application qu'après un certain délai.

M. Marx: On peut dresser une liste des articles et prévoir quand les articles seront en vigueur ou prévoir que tel et tel article pourraient être proclamés en vigueur. Je trouve...

M. Bédard: Je dis qu'on est mieux... J'admets qu'on doit y apporter une attention particulière. Je peux vous dire que comme président du comité de législation depuis seulement quelque temps, je vais employer tous mes efforts à apporter le plus d'améliorations possible, tout en étant conscient...

M. Marx: Vous trouvez que c'est une amélioration...

M. Bédard: ... que d'une façon réaliste...

M. Marx: Est-ce que le ministre accepte que c'est une délégation assez large de l'Assemblée nationale au gouvernement qui permettra - je ne veux pas faire un procès d'intention - à un gouvernement de frustrer l'intention des députés qui ont adopté une loi à l'Assemblée nationale. C'est très simple...

M. Bédard: Non, ce n'est jamais...

M. Marx: ... il y a toute une jurisprudence sur cette question.

M. Bédard: Voyons donc, ce n'est jamais arrivé jusqu'à maintenant.

M. Marx: C'est déjà arrivé.

M. Bédard: Quand une loi représente des avantages pour les citoyens, il n'y a pas un gouvernement qui n'a pas avantage à ce que cette loi-là s'applique le plus possible. Il y a quand même une logique de bon sens.

M. Marx: Mais lisez...

M. Bédard: Quand il y a, à un moment donné, un excès par rapport à un cas particulier, je pense qu'il y a aussi une sanction politique qui peut se faire par des représentations qui peuvent être faites par les instances concernées, que ce soit un député, que ce soit l'Opposition. On ne peut pas régler tous les cas.

M. Marx: Dans la jurisprudence de la Cour suprême du Canada on a d'excellents exemples: l'arrêt sur l'ivressomètre. Vous allez voir qu'une telle clause a permis qu'une injustice légale se produise.

M. Bédard: Sauf erreur, c'est le gouvernement fédéral qui a fait cette loi.

M. Marx: Vous êtes en train de copier les mauvaises habitudes du gouvernement fédéral.

M. Bédard: Non. Ce n'est pas cela. On sait que depuis quelque temps, vous vous servez de ce libellé pour essayer de laisser croire qu'il y a des excès commis par le gouvernement concernant les délais de mise en vigueur des lois ou des dispositions alors que ce n'est pas vrai.

M. Marx: Je l'ai prouvé une fois...

M. Bédard: Vous n'avez rien prouvé.

C'est cela. Le député de D'Arcy McGee prend un cas et généralise. Je préfère prendre...

M. Marx: Je vais prendre...

M. Bédard: Ne vous en faites pas. C'est ce cas-là qu'il nous a ramené... En passant, vous n'avez pas besoin de vous parler, tous les membres de l'Opposition, c'est toujours de ce cas-là dont vous parlez. Ne vous en faites pas.

M. Marx: Adopté.

Mme Lavoie-Roux: II y en a aussi dans la loi no 77 sur l'Office des services de garde.

M. Marx: C'est cela. La Loi sur le commerce extérieur...

Mme Marois: C'est vrai, mais les articles majeurs...

Mme Lavoie-Roux: Moi, je vous dis cela spontanément. Imaginez-vous si je les examinais, j'en trouverais beaucoup.

Le Président (M. Rochefort): L'article 31 est-il adopté?

M. Marx: Adopté, malgré nos interventions, malgré les droits des députés qui deviennent des machines à voter.

Le Président (M. Rochefort): Avant... À

l'ordre, s'il vous plaît! Avant de revenir aux articles suspendus...

M. Bédard: On ne recommencera pas la discussion quand...

Le Président (M. Rochefort): À l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît! Avant de revenir aux articles suspendus, il y a une proposition d'amendement aux articles 19 et 26 dans la version anglaise. M. le ministre pouvez-vous nous...

M. Bédard: Nos collègues... Est-ce que vous voulez qu'on procède? Les articles 19 et 26. Dans la version anglaise des articles 19 et 26 du projet de loi, remplacer, chaque fois qu'ils y apparaissent, les mots "equal opportunity programs" par les mots "affirmative action programs".

M. Marx: Oui, c'est la Commission des droits et libertés de la personne qui a proposé cette modification.

M. Bédard: C'est correct?

M. Marx: C'est correct.

M. Bédard: Vous êtes content?

M. Marx: Je suis content parce que la commission a trouvé la raison d'être de cette correction de texte français dans les définitions de l'Office de la langue française.

Le Président (M. Rochefort): Finalement...

M. Bédard: Bravo pour l'Office de la langue française.

M. Marx: Pour protéger la langue anglaise dans nos statuts.

Le Président (M. Rochefort): Finalement, il y a la motion...

M. Bédard: Elle protège les deux langues. Il y a également un amendement aux articles...

Les programmes d'accès à l'égalité

Le Président (M- Rochefort): Pour faire l'amendement relatif à la nouvelle numérotation, il faudrait peut-être revenir à l'article qui est concerné par cela. Donc, on revient à l'article 19 dont nous avions suspendu l'étude pour permettre à la députée de L'Acadie de se joindre à nous.

M. Bédard: On est capable de terminer cela avant le dîner.

Le Président (M. Rochefort): Alors, l'article 19, M. le ministre.

M. Bédard: J'ai quelques amendements, mais ce sont des amendements techniques, je peux le dire à Mme la députée de L'Acadie. D'ailleurs, ces amendements ont été signalés à l'attention des membres de l'Opposition depuis quelques jours.

Alors, l'article 19. Cet article a pour objet, je l'ai déjà dit, de permettre l'adoption de programmes d'accès à l'égalité pour corriger la situation de personnes faisant partie de groupes victimes de discrimination, que ce soit dans l'emploi, l'éducation ou dans un service offert au public et de faire en sorte que ces programmes d'accès à l'égalité soient réputés non discriminatoires du moment qu'ils sont conformes à la charte et aux règlements. D'accord sur le principe, M. le Président?

Mme Lavoie-Roux: M. le Président.

La Présidente (Mme Lachapelle): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: II est plutôt question de renseignement que je veux avoir. C'est strictement relié à l'emploi que la discrimination ou la non-discrimination s'applique?

M. Bédard: Non.

Mme Lavoie-Roux: Non.

Mme Marois: Mme la Présidente, si vous lisez l'article 86.1, "... la situation de personnes faisant partie de groupes victimes de discrimination dans l'emploi, ainsi que dans les secteurs de l'éducation ou de la santé et dans tout autre service ordinairement offert au public."

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que...

M. Bédard: Mais, c'est toujours dans l'emploi.

Mme Lavoie-Roux: Mais, c'est toujours dans l'emploi.

M. Bédard: Oui.

Mme Lavoie-Roux: Parce que, par exemple...

M. Bédard: Cela concerne toujours l'emploi.

Mme Marois: Non.

M. Bédard: Non, pas nécessairement?

Mme Marois: Non. Imaginons, dans le

secteur de l'éducation...

Mme Lavoie-Roux: Bien, justement, la discrimination quant à l'accès à certains programmes de formation. Est-ce que ceci va être touché?

Mme Marois: Voilà, c'est cela. À partir du moment où on a "ainsi que dans les secteurs - parce qu'il faut bien dire dans l'emploi - de l'éducation ou de la santé et dans tout autre service ordinairement offert au public."

Mme Lavoie-Roux: Alors, ce n'est pas relié strictement à l'emploi. Je veux être bien certaine de cela et que ce soit enregistré.

Mme Marois: Oui. Pour moi, il a toujours été très clair que cet article couvrait d'autres secteurs que l'emploi. On peut donner des exemples. Que l'on pense à la formation professionnelle où il y a eu de longs débats sur cette question. Cela pourrait s'appliquer à la formation professionnelle, c'est dans le secteur de l'éducation.

M. Marx: Si on a rédigé cet article en prévoyant "dans l'emploi, ainsi que dans les secteurs de l'éducation ou de la santé et dans tout autre service ordinairement offert au public", pourquoi pas partout?

Mme Marois: On aurait pu dire partout. Est-ce que cela aurait nécessairement rendu l'article plus clair? Je n'en suis pas tellement certaine. Cela aurait sûrement prêté à interprétation beaucoup plus qu'autre chose.

M. Marx: "Dans l'emploi, ainsi que dans les secteurs de l'éducation ou de la santé et dans tout autre service ordinairement offert au public". Parce que, une fois qu'on fait une liste, il y a des exclusions. Est-ce qu'on est sûr que...

Mme Marois: II pourrait y avoir des exclusions.

M. Marx: Mais, est-ce qu'en faisant cette liste on exclut certains domaines? Quel était l'objectif?

Mme Marois: L'objectif n'était pas d'exclure certains domaines, mais de s'assurer des domaines principalement visés: l'emploi comprenant le secteur travail, ensuite les secteurs de l'éducation et de la santé et la notion de services publics. À ce moment-là, cela nous apparaissait suffisamment large pour couvrir les situations qu'on voulait couvrir.

M. Bédard: D'ailleurs, le libellé de l'article le dit. Ce n'est pas restrictif. Quand on parle du secteur de l'éducation, etc., on dit: "Un programme d'accès à l'égalité a pour objet de corriger - c'est cela le principe - la situation de personnes faisant partie de groupes victimes de discrimination dans l'emploi ainsi que dans..." Cela aurait pu être "notamment". Ce n'est pas uniquement dans les secteurs...

M. Marx: C'est cela, j'ai voulu suggérer "notamment".

M. Bédard: Ce n'est pas uniquement de...

C'est la même chose.

Mme Lavoie-Roux: Si vous dites "notamment", cela se réfère juste à l'emploi.

Mme Marois: C'est très différent. Voilà, c'est justement cela. C'est très différent. Si on avait mis "notamment", cela aurait été: L'emploi, notamment, dans les secteurs de... Au contraire, je ne pense pas qu'il faille mettre "notamment", parce que cela devient beaucoup plus restrictif.

M. Marx: Mais "notamment" avant le mot "emploi", cela devient plus large parce que ce sont des exemples. Ici, c'est compréhensible; si on met "notamment" avant l'emploi, c'est plus large, parce qu'on donne des exemples.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président...

M. Bédard: II me semble que...

Le Président (M. Rochefort): Je crois qu'on va fonctionner en donnant la parole, parce qu'on va se perdre.

M. le ministre.

M. Bédard: Je vais y aller et je reviendrai à ce que vous disiez tout à l'heure. Lisons-le attentivement. Le principe: "Un programme d'accès à l'égalité a pour objet de corriger la situation de personnes faisant partie de groupes victimes de discrimination dans l'emploi". On pourrait arrêter là. On ajoute "ainsi que". On ne dit pas seulement dans tel ou tel secteur, il est là: "Ainsi que dans les secteurs de l'éducation ou de la santé et dans tout autre service ordinairement offert au public."

Le Président (M. Rochefort): Vous êtes ma prochaine. Cela va?

Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Si vraiment l'objectif est ceci, comme ce n'est pas mon habitude de rédiger des textes juridiques... Est-ce que cela n'aurait pas été plus clair ou est-ce qu'on ne serait pas plus certain de

couvrir ce qu'on dit vouloir couvrir si on avait mis "ainsi que dans toutes les activités du secteur de l'éducation et de la santé"? Je ne suis pas sûre à savoir comment cela sera interprété. Je ne suis pas sûre que vous ne laissez pas... Vous dites: "de groupes victimes de discrimination dans l'emploi..." Je pense que cela peut porter à ambiguïté.

M. Bédard: Je crois que l'expression "secteur de l'éducation" est plus large que "secteur d'activités de l'éducation". C'est vraiment plus général.

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

M. Marx: Je pense qu'après les explications et l'échange, les craintes que j'avais n'étaient pas tellement bien fondées.

Le Président (M. Rochefort): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'on pourrait me dire à quoi se réfère - je pense que c'est un adverbe - "le mot "ordinairement" dans la phrase "et dans tout autre service ordinairement offert au public"?

On doit avoir dans l'esprit d'en exclure quelques-uns, j'imagine.

Le Président (M. Rochefort): Mme la ministre déléguée à la Condition féminine.

Mme Marois: Je dois dire que je n'ai pas eu à l'esprit d'en exclure mais, au contraire, d'en couvrir le plus possible. Par exemple, les services financiers dans les institutions financières sont des services habituellement offerts au public. Je pourrais même prendre des services gouvernementaux. Prenons des bureaux d'aide sociale - je ne sais pas si mon exemple serait bon - or un ensemble de services du même ordre offerts au public.

Quand on a travaillé, avec le ministre de la Justice, sur cet article-là, l'idée était de couvrir, au contraire, le plus largement possible, et, d'autre part, de faire en sorte qu'il y ait quand même certaines balises. Je pense que la notion de "tout autre service ordinairement offert au public" est cette balise.

M. Bédard: On nous signale aussi que c'est par uniformité de vocabulaire avec d'autres articles, entre autres, l'article 12. (17 h 45)

Mme Lavoie-Roux: À l'article 86.1, j'accepte vos explications. Je pense que cela permet de clarifier. Il reste que cela exclut - et ceci vous avait été signalé par au moins, je pense, la Commission des droits de la personne et le Conseil du statut de la femme - les organismes gouvernementaux qui ne feraient pas, si je puis dire, directement affaire avec la population, par exemple, certaines régies, certains offices. Est-ce que ces organismes se trouvent exclus? Ils ne sont pas cités.

M. Bédard: On pourra peut-être faire la discussion à 86.8, si vous n'avez pas d'objection.

Mme Lavoie-Roux: D'accord. Si vous voulez...

Mme Marois: Parce qu'ils sont couverts par cela.

Mme Lavoie-Roux: Non, je n'ai pas d'objection.

M. Bédard: Vous n'avez pas d'objection. Article 86.2, est-ce que cela va?

Mme Lavoie-Roux: Oui. 86.1.

M. Leduc (Saint-Laurent): Pourquoi n'aurait-on pas mis: Faisant partie de groupes victimes de discrimination aux termes de la présente loi? Cela couvre tout.

M. Bédard: On veut que ce soit spécifique. L'autre c'est trop large. On veut que ce soit spécifiquement dans le domaine de l'emploi.

M. Leduc (Saint-Laurent): Vous dites que ce n'est pas cela.

Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas cela.

M. Leduc (Saint-Laurent): On veut savoir si c'est seulement l'emploi.

M. Bédard: Pardon?

M. Leduc (Saint-Laurent): On veut savoir si c'est seulement l'emploi. Vous dites que c'est seulement l'emploi...

Mme Lavoie-Roux: Vous venez de dire que ce n'est pas cela.

M. Bédard: Le secteur public par rapport au secteur privé.

Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas là-dessus qu'on fait la différence.

M. Bédard: Peut-être que j'ai mal compris votre question.

M. Leduc (Saint-Laurent): Je dis: On veut une clause générale sans exclusion. Pourquoi ne dit-on pas: Faisant partie de groupes victimes de discrimination aux termes de la présente loi? À ce moment, on couvre tout.

Mme Marois: Cela va, M. le Président? La notion de discrimination se retrouve définie, tout compte fait, à l'article 10, si je ne me trompe pas. À partir du moment où on s'entend sur ce que couvre la notion de discrimination, cela peut rendre l'interprétation de l'article très large. Si vous revenez à l'article 10...

M. Leduc (Saint-Laurent): Aux termes de l'article 10, peut-être. Il faudrait se référer à l'article 10.

M. Bédard: J'ai des hésitations à ce qu'on change le libellé sur le bord de la table. Je voudrais, par exemple, être en mesure de donner toutes les explications que vous êtes en droit de demander, si vous permettez.

Mme Lavoie-Roux: Moi je voudrais savoir du ministre de la Justice, parce que là il semble qu'il y ait eu une petite ambiguïté, vous n'avez pas l'air d'être tout à fait d'accord, cela ne couvre pas uniquement...

M. Bédard: Ce n'est pas que nous ne sommes pas d'accord.

Mme Lavoie-Roux: Quand je dis pas d'accord, écoutez...

M. Bédard: C'est que je crois que j'avais mal compris la question du député de Saint-Laurent.

Le Président (M. Rochefort): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Cela n'est pas uniquement une discrimination à l'égard de l'emploi, M. le ministre de la Justice. C'est vous qui êtes le ministre de la Justice.

M. Bédard: Non, c'est clair. Ce n'est pas seulement concernant le domaine de l'emploi.

Mme Lavoie-Roux: C'est tout type de programme offert par le gouvernement.

M. Bédard: Ayant pour but de corriger des discriminations.

Mme Lavoie-Roux: Et dans tous les aspects de ces programmes.

M. Bédard: Oui, tout l'aspect de l'activité.

Mme Marois: Des activités qui vont avec de l'emploi, du travail, des activités pouvant être l'utilisation de services, des activités pouvant être d'ordre éducatif, entre autres; je pense à certains programmes à l'université, dans les collèges, la formation professionnelle.

Mme Lavoie-Roux: Je le sais, mais je veux être bien sûre que c'est cela que le ministre pense parce que c'est quand même le ministre de la Justice qui a la responsabilité.

M. Bédard: Non, je sais que vous n'essayez pas de nous mettre en contradiction, mais simplement d'avoir les explications nécessaires. Je puis vous confirmer que cela ne doit pas être interprété comme étant simplement restrictif à l'emploi.

Mme Lavoie-Roux: Restrictif à l'emploi. M. Bédard: C'est général. Mme Lavoie-Roux: D'accord.

M. Leduc (Saint-Laurent): Pourquoi tenez-vous à ce moment à limiter? Oui, vous parlez de l'éducation ou de la santé.

M. Bédard: Comme cela arrive dans bien des lois. À un moment donné, on sent le besoin, parce que peut-être dans ces secteurs des questions peuvent se poser particulièrement, de les mentionner.

M. Leduc (Saint-Laurent): Est-ce que vous voyez des exclusions?

M. Bédard: Encore une fois, ce n'est pas d'une façon restrictive selon les termes qui sont employés dans l'article.

M. Leduc (Saint-Laurent): Est-ce que vous pensez à certaines exclusions, non?

Mme Lavoie-Roux: Parce qu'à ce moment vous auriez pu mettre...

M. Leduc (Saint-Laurent): Bien oui, mettre une clause générale. Cela règle le problème.

Mme Lavoie-Roux: Ainsi que dans tous les secteurs d'activités gouvernementales; vous auriez pu mettre cela.

Mme Marois: Cela est couvert par un autre article cependant. Là je pense qu'il faut se référer à 86.8.

Mme Lavoie-Roux: Oui, mais pourquoi le restreindre ici? Je ne veux pas faire de longs débats. Je ne veux pas me chicaner sur les mots.

M. Bédard: Je vous le dis honnêtement. On ne le restreint pas.

Mme Marois: D'ailleurs, j'aimerais revenir...

M. Leduc (Saint-Laurent): C'est-à-dire que le texte ne dit pas...

Mme Marois: Je pense qu'il faut... Évidemment, chacun des articles s'interprète en fonction des articles qu'il y a déjà dans la charte aussi. Il faut bien s'entendre. La notion de discrimination, on l'interprète en fonction de l'article 10. Cela va? Si on revient à l'article 10, on se rend compte que c'est quand même très large, les réalités que cela peut couvrir et par la suite, on l'accole à la notion de secteurs d'activités, d'emplois et de services publics ou des services offerts généralement au public, ce qui est beaucoup plus large, d'ailleurs, que les services publics, parce que les services offerts généralement au public... Je prends toujours l'exemple des institutions financières que j'ai utilisé tout à l'heure, alors que si on disait seulement les services publics ici, ce seraient les services offerts par un État ou un gouvernement.

Le Président (M. Rochefort): L'article 86.1 est-il adopté?

Mme Lavoie-Roux: Un instant; Je vais vous donner un exemple. Par exemple, dans le bureau du Vérificateur général, qui est un service offert au public d'une façon bien indirecte - c'est en fait un service offert au gouvernement qui vérifie les comptes des différents ministères - cela pourrait-il être exclu? parce que si vous référez à la notion des services offerts généralement au public, je ne crois pas qu'on puisse strictement parler des services offerts au public, peut-être indirectement, mais...

Mme Marois: Cela dépend, à ce moment-là, en fonction de quoi on demanderait au vérificateur d'offrir des programmes d'accès à l'égalité. Si c'est en fonction de l'emploi, à ce moment-là, mon interprétation, c'est d'aller à l'article 86.8 et de le considérer comme un organisme du gouvernement. Si c'est en vertu de l'accès à des services qu'offre le vérificateur, cela se pose différemment, je pense.

Mme Lavoie-Roux: Oui, mais dans votre article 86.8, vous n'en faites plus une obligation. Vous en faites une possibilité.

Mme Marois: C'est là que j'avais suggéré un amendement...

Mme Lavoie-Roux: Là, c'est...

Mme Marois: ... pour que cette notion d'obligation vienne aussi toucher les organismes.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que cela va être "doit", dans votre amendement?

M. Bédard: Oui.

Mme Marois: Un des amendements sera "doit".

M. Bédard: Je dois vous dire que Mme...

Mme Lavoie-Roux: Si c'est "doit", à ce moment-là, je suis d'accord avec vous que cela s'appliquera si c'est un organisme au service du gouvernement. Il est quelque part ici, mais je ne l'ai pas vu.

M. Bédard: ... la ministre a fait les représentations nécessaires au Conseil des ministres et obtenu...

Mme Lavoie-Roux: Bon!

Le Président (M. Rochefort): L'article 86.1 est-il adopté?

Mme Lavoie-Roux: Adopté.

M. Bédard: ... l'assentiment du Conseil des ministres pour procéder à un amendement...

Le Président (M. Rochefort): Article 86.2.

M. Bédard: ... qui sera sûrement bien accepté.

Mme Lavoie-Roux: Bon! D'accord. M. Bédard: Adopté? Mme Lavoie-Roux: Un instant! M. Bédard: À l'article 86.3...

Le Président (M. Rochefort): Juste un moment, M. le ministre! Cela va, pour 86.2?

Mme Lavoie-Roux: Je pourrai en discuter à l'article à... Oui, d'accord, d'accord.

Le Président (M. Rochefort): Adopté?

M. Bédard: Je pense qu'on pourrait tenir pour acquis, Mme la députée, qu'on ne se limitera pas. On n'est pas ici pour être très techniques et légalistes...

Mme Lavoie-Roux: Mais pourrait-on faire des retours en arrière s'il y avait des...

M. Bédard: Pour l'ensemble du programme, à quelque article que ce soit concernant les programmes d'accès à

l'égalité...

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Bédard: ... on s'entend qu'on peut poser n'importe quand les questions qu'on a à l'esprit...

Mme Lavoie-Roux: Mais une fois qu'on a adopté les articles, on ne peut pas...

M. Bédard: ... si on a adopté les articles et qu'on juge opportun de les rouvrir...

Mme Lavoie-Roux: D'accord, alors. M. Bédard: ... soyez convaincue... Mme Lavoie-Roux: Parfait.

M. Bédard: ... que vous aurez notre collaboration.

Le Président (M. Rochefort): À l'article 86.3, il y a une proposition d'amendement.

M. Bédard: II y a un amendement à savoir de supprimer à la dernière ligne du premier alinéa de l'article 86.3 de la charte les mots "qu'elle a élaboré conformément à la charte"; deuxièmement, remplacer au deuxième alinéa de l'article 86.3 de la charte par le suivant: "La commission peut, lorsque sa recommandation n'a pas été suivie, s'adresser au tribunal et, sur preuve d'une situation visée dans l'article 86.1, obtenir dans le délai fixé par le tribunal, l'élaboration et l'implantation d'un programme. Le programme ainsi élaboré est déposé devant le tribunal qui peut, en conformité avec la charte, y apporter les modifications qu'il juge adéquates." M. le Président, en vertu de la première modification, la commission n'aura plus à élaborer elle-même les programmes dont elle recommande l'implantation, ce qui pouvait s'avérer, en pratique, difficile de réalisation pour la commission. La deuxième modification est de concordance.

Mme Lavoie-Roux: Bon!

Le Président (M. Rochefort): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, si je ne m'abuse, c'est probablement dans cet article que l'on se réfère à l'entreprise privée ou enfin aux entreprises non gouvernementales.

Mme Marois: Oui.

Mme Lavoie-Roux: Mais, si je comprends bien, dans les modifications qui sont apportées à la charte, il n'y a pas de disposition qui prévoit d'étendre d'une façon obligatoire au secteur privé ce qui est un devoir pour le secteur public. Ce n'est qu'à la suite d'une plainte que la commission peut intervenir et peut même obliger à implanter des programmes d'égalité des chances. Qu'est-ce qui a motivé le gouvernement à agir de cette façon? La raison pour laquelle je pose la question, c'est que vous savez que ce sont des démarches extrêmement difficiles à faire pour des individus, cela prend des gens - on en a vu à l'occasion d'une commission, j'oublie laquelle, c'était peut-être à celle qu'on a eue l'automne dernier -qui, je pense, venaient de chez Pratt & Whitney...

Mme Marois: De Pratt & Whitney et aussi le CN.

Mme Lavoie-Roux: Oui, mais cela prend du monde décidé. Alors, quelle est la motivation pour faire cette différence entre les deux? Vous l'avez peut-être dit en deuxième lecture, M. le ministre, mais je ne vous ai pas écouté ou je n'y étais pas.

Mme Marois: M. le Président.

Le Président (M. Rochefort): Mme la ministre.

Mme Marois: C'est vrai que cela aurait pu être envisagé comme cela, à savoir qu'il y ait une notion d'obligation pour toutes les entreprises. Il faut bien se rendre compte cependant qu'on avance sur un terrain neuf à certains égards. Il y a des expériences dans d'autres pays, il y a des expériences à d'autres niveaux et je pense qu'il est important d'acquérir progressivement l'expérience en se disant... Il y a au moins deux éléments qui permettent d'intervenir de façon peut-être plus importante: sur preuve de discrimination et, d'autre part, dans l'appareil public et parapublic. On s'oblige et on voit qu'il y a quand même un grand nombre d'entreprises qui pourront être touchées. Par contre, cela n'empêche aucune entreprise de le faire, aucune entreprise qui, sur une base volontaire, voudrait ou souhaiterait implanter des programmes en collaboration avec la commission.

Dans cette perspective, ce que j'imagine, dans les quelques mois et années qui viennent - parce qu'on sait que cela prend un certain temps à bâtir ces programmes - c'est de faire en sorte qu'on puisse travailler avec des entreprises d'une grande importance ou d'une taille relativement importante, travailler avec ces entreprises, sur une base volontaire, pour voir à en implanter, et que ces entreprises servent de projet pilote ou de témoin, de telle sorte qu'on puisse par la suite voir, s'il

y a lieu, en venir à la notion d'obligation pour le secteur privé aussi, avec peut-être un certain nombre de règles qui feraient en sorte qu'on dise: Les entreprises de 100 employés et plus, par exemple.

Le Président (M. Rochefort): M. le ministre.

M. Bédard: Dans le sens de ce qu'a dit ma collègue, je référerais la députée de L'Acadie à l'article 73 de la charte, qui stipule très clairement que la commission -c'est un droit général - peut faire enquête de sa propre initiative. Cet article demeure, donc cela consacre très clairement la réalité qui fait que, sur une plainte ou encore sur l'initiative de la commission, certaines situations discriminatoires ayant été constatées, on peut à ce moment enclencher le mécanisme qui est prévu dans tous les programmes d'accès à l'égalité.

Mme Lavoie-Roux: Le ministre conviendra que les chances ou les risques -cela dépend à quel point de vue on se place - ne sont pas très grandes ou grands que la commission puisse, à moins d'un événement majeur qui est signalé dans les journaux, etc., faire enquête, compte tenu de ses ressources, à moins que quelqu'un ne porte plainte ou que...

M. Bédard: II y a des personnes qui peuvent porter plainte très officiellement, de telle façon que n'importe qui est en mesure de savoir qui a porté plainte. Dans d'autres cas, il y a certaines informations qui ne sont pas identifiées proprement à des plaintes en bonne et due forme, qui peuvent être acheminées à la commission et qui permettent à la commission d'agir de sa propre initiative. (18 heures)

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, c'est le choix que le gouvernement a fait. C'est peut-être sage, dans un premier temps, mais il ne faut quand même pas se leurrer. Je vous parlerai, par exemple, d'une profession où les femmes ont beaucoup de difficulté à se placer lorsqu'elles demandent un emploi dans le secteur public: ce sont les ingénieurs, particulièrement dans un contexte économique difficile où justement on sait que, du côté des ingénieurs, il y a peut-être de plus en plus des difficultés particulières. C'est peut-être le domaine, enfin, c'est le domaine que je connais le plus; je ne devrais pas dire le domaine où c'est le plus... Ce serait tout à fait injuste de dire cela, il faudrait que j'ai des données plus précises. Je ne suis pas sûre que... Vous savez, c'est difficile à prouver. Quand quelqu'un fait le choix d'un employé, il y a toutes sortes de facteurs qu'on peut invoquer pour dire: Non, c'est le candidat A, même si le candidat B a porté plainte. Je pense que, s'il n'y a pas une espèce d'incitation un peu plus vigoureuse à dire: Écoutez, il faut que la discrimination disparaisse... En tout cas, c'est peut-être ce que vous avez choisi de faire, dans un premier temps...

Le Président (M. Rochefort): M. le ministre.

Mme Lavoie-Roux: ... mais je pense qu'à la longue, ce ne sera pas satisfaisant.

Le Président (M. Rochefort): Juste un moment, s'il vous plaît! M. le ministre.

M. Bédard: Sauf que les cas individuels continuent toujours d'être protégés par la commission. On est en train de parler des groupes.

Le Président (M. Rochefort): II est 18 heures.

M. Bédard: Je pense qu'il y a une distinction. D'autre part, je pense que, dans une première étape, vous l'avez peut-être laissé entendre, il serait peut-être sage de procéder en présumant de la bonne foi des personnes et des entreprises qui peuvent être visées. Comme l'a dit Mme la ministre tout à l'heure, si ceci ne devait pas s'avérer efficace, je pense qu'il nous faudrait réévaluer la situation tous ensemble.

Mme Marais: II y a peut-être deux autres éléments... Oui.

Le Président (M. Rochefort): Je prends acte qu'il y a consentement pour que nous poursuivions nos travaux.

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Bédard: Oui, oui. C'est fait

Mme Lavoie-Roux: M. Mon patron, est-ce qu'il y a consentement?

Le Président (M. Rochefort):

Consentement.

M. Marx: Jusqu'à la fin de nos travaux. Mme Lavoie-Roux: Oui, d'accord.

Mme Marois: II y a deux autres éléments que je voudrais ajouter. Le premier, c'est, entre autres, la négociation patronale-syndicale où, là aussi, à partir du moment où l'on mettrait une notion d'obligation, est-ce qu'on n'enlèverait pas de l'ordre de la négociation ce type de programme, alors que déjà certains groupes ont commencé à négocier ces programmes avec leur employeur? D'accord? L'autre élément auquel

je pensais, c'est, pour revenir à l'article 73, que la commission a déjà un certain nombres de dossiers sur des entreprises qui, notoirement, ont un certain nombre de pratiques discriminatoires d'ordre systémique, ce qui, évidemment, est différent de la pratique discriminatoire individuelle. À partir de ces dossiers, en vertu de l'article 73, je pense qu'on pourrait faire un certain nombre de tests intéressants avec peut-être quatre, cinq, six entreprises de différente taille, de telle sorte qu'on accumule une expérience à ce niveau pour conclure, par exemple, que: Oui, il faut que cette loi ait plus de dents et donc on oblige l'entreprise privée, ou dire: Non, on finit par y arriver avec les moyens qu'on s'est donnés. Moi aussi, je partage cette crainte - je l'ai dit d'ailleurs lors du débat de la deuxième lecture - sur cette question. Je pense que c'est un premier pas dans la bonne direction. L'évaluation de ce premier pas nous amènera à corriger dans un sens ou dans l'autre.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je remercie Mme la ministre, mais il ne faut pas se faire d'illusion. Dans le moment, dans mon esprit, je me référais surtout à l'égalité de l'emploi pour les femmes, mais il y a aussi la question des personnes handicapées, la question des groupes minoritaires. C'est peut-être encore plus facile à l'endroit de ces groupes de trouver un prétexte à la discrimination. Je ne veux pas retarder le débat, j'accepte les explications qui ont été données. Je ne voudrais quand même pas qu'on s'illusionne. Je dois vous dire que j'ai eu...

M. Bédard: Soyez convaincue qu'on ne s'illusionne pas de ce côté.

Mme Lavoie-Roux: L'an dernier, à la fonction publique - je pense que c'est important qu'on le dise - il y avait une circulaire - que j'ai à mon bureau - un formulaire qu'on faisait circuler à l'intérieur de la fonction publique demandant à chaque chef de service ou de bureau... C'était même très discriminatoire à l'endroit des personnes handicapées de dire le nombre de personnes qui étaient handicapées. Finalement, cela devenait quelque chose de très subjectif, la définition du handicap par le chef de service ou le chef de bureau. On risquait même de créer des handicapés avec des personnes qui n'en étaient pas, parce qu'on veut aussi augmenter les statistiques. Peut-être que, si j'ai un doigt ou une jambe croche ou je ne sais trop, on considère qu'on a donné un emploi à un handicapé et c'était le chef de service qui faisait cette tâche. Je ne sais pas si elle est arrêtée, parce que je n'ai pas dit cette chose publiquement.

Mme Marois: II faudrait que je pose la question moi-même à la ministre de la Fonction publique, à savoir si c'est arrêté. Mais le domaine que vous soulevez, vous le savez, est très subjectif. On sait qu'il n'est pas facile actuellement de s'entendre sur un certain nombre de critères qui définissent la lourdeur du handicap. D'ailleurs, ce problème est posé dans l'emploi, mais il est aussi posé dans le domaine des services sociaux et des services de santé. Par exemple, quant à la classification des centres d'accueil, on sait que ce problème se pose chaque fois. Il n'est pas nécessairement facile de trouver des solutions.

On s'entend pour dire qu'un certain nombre de critères sont établis. On fonctionne à partir de ces grilles. S'il arrive que ces grilles ne sont pas adéquates, on les modifie au fur et à mesure de l'expérience. Je pense que c'est l'expérience accumulée qui permet de raffiner les instruments, d'arriver à quelque chose de plus cohérent et de répondre davantage aux besoins des personnes concernées.

Mme Lavoie-Roux: À l'endroit des groupes minoritaires, c'est la même chose. L'été dernier, une personne a été refusée pour un emploi d'été sous prétexte qu'elle n'écrivait pas suffisamment bien son français. Alors que l'emploi qu'elle avait était celui de commis de bureau qui faisait du fichage. Il a fallu intervenir pour que, finalement... Alors, on peut utiliser différents prétextes, même si on parle d'égalité.

Mme Marois: Soit dit en passant, avec les correctifs qu'on apporte aux textes de loi actuellement, on va corriger ces notions d'exigences à l'emploi, entre autres.

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que l'amendement à l'article 86.3 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. Est-ce que l'article 86.3 tel qu'amendé est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. Article 86.4?

M. Bédard: L'article 86.4 permet à la commission de surveiller l'application des programmes d'accès à l'égalité et de faire les enquêtes nécessaires. Lorsqu'elle constate qu'un programme n'est pas implanté ou observé, l'article 86.5 lui permet, s'il s'agit d'un programme qu'elle a approuvé, de retirer son approbation, rendant ainsi le programme illégal, ou encore d'aller devant

le tribunal, s'il s'agit d'un programme dont elle a recommandé l'imposition, conformément à l'article 86.3.

Le Président (M. Rochefort): Alors, l'article 86.4...

M. Bédard: Comme vous le voyez, nous sommes dans la mécanique.

Le Président (M. Rochefort): L'article 86.4 est-il adopté?

M. Marx: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Article 86.5?

M. Bédard: L'article 86.5, je viens d'en parler, M. le Président.

Le Président (M. Rochefort): L'article 86.5, c'est la même chose?

M. Bédard: Bien oui.

Mme Lavoie-Roux: Pendant que vous appeliez l'article 86.4, il nous lisait l'article 86.5.

Le Président (M. Rochefort): Ah bon! M. Bédard: Non, c'était l'article 84...

Mme Lavoie-Roux: Non, non, c'est le Président qui est en retard sur vous.

M. Bédard: D'accord. C'est parce que les deux articles s'étudient l'un en relation avec l'autre.

Le Président (M. Rochefort): Donc, l'article 86.5, adopté? Permettez-moi de reprendre mon retard. Est-ce que l'article 86.5 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. À l'article 86.6, il y a un amendement?

M. Bédard: C'est cela, il y a un amendement. Dans le troisième alinéa de l'article 86.6 de la charte, l'amendement est à l'effet de...

M. Marx: Est-ce qu'on a reçu une copie de cet amendement?

Des voix: Oui.

M. Bédard: L'amendement est à l'effet de retrancher les mots "et qu'il détermine le délai après lequel le programme initial ou modifié devra être appliqué". La modification à cet article élimine une partie de cet article qui n'était pas nécessaire et qui, de plus, risquait de créer une certaine confusion avec l'article 86.3. En effet, le tribunal aurait pu se trouver à rendre obligatoire, dans certains cas, un programme recommandé par la commission sans qu'une preuve de discrimination ait été faite.

Le Président (M. Rochefort): Cet amendement est-il adopté?

Mme Lavoie-Roux: Excusez-moi, M. le Président.

Le Président (M. Rochefort): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Si je comprends bien, il restera à la commission à déterminer le délai? Est-ce bien ce que le ministre a dit? M. le ministre, est-ce que cela resterait à la commission de déterminer le délai puisque cela ne sera plus le tribunal? Est-ce cela que je dois comprendre?

M. Bédard: C'est le tribunal.

Mme Lavoie-Roux: Mais là, vous le lui enlevez. "Et qu'il détermine le délai". Est-ce que cela resterait à la commission?

M. Bédard: Une seconde, s'il vous plaît; C'est le tribunal qui décidera. Dans une telle situation, il peut décider de reporter le programme à plus tard. C'était inutile.

Le Président (M. Rochefort): L'amendement à 86.6 est-il adopté?

Mme Lavoie-Roux: Non, c'est enlevé, c'est retranché. L'amendement consiste a retrancher cela.

M. Marx: M. Létourneau.

M. Bédard: Gilles Létourneau, directeur général adjoint des affaires législatives. Cette partie du troisième alinéa était inutile, parce que le tribunal étant saisi d'une demande d'annulation, de modification ou de report du programme, adjugera pleinement sur la question, à savoir si le programme doit être reporté et, si oui, pour quelle durée. Si on laissait cet alinéa relativement au délai d'un programme initial qui devenait modifié, on laissait entendre que ce programme pouvait être implanté sans qu'on ait eu besoin finalement de faire la preuve de la discrimination systémique telle que requise dans le deuxième alinéa de l'article 86.3.

Cela nous reportait à une possibilité d'interprétation voulant que le tribunal pouvait ordonner, dans un délai déterminé, l'implantation d'un programme initial sans qu'on ait eu besoin de passer par l'article

86.3, deuxième alinéa.

Cette ambiguïté nous avait été soulignée par des gens et c'est la raison pour laquelle nous avons proposé le retrait de ce membre de phrase qui était ambigu.

Le Président (M. Rochefort): Adopté? M. Marx: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): L'amendement à 86.6 est adopté. L'article 86.6 tel qu'amendé est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. Il y a un amendement à l'article 86.7.

M. Bédard: Dans le but de supprimer l'article 86.7 de la charte. Comme les décisions du tribunal prises en vertu des articles 86.3, 86.5 et 86.6 sont de la même nature qu'une injonction, l'article 86.7 devient superflu.

Mme Marois: Superfétatoire.

M. Bédard: Certains diraient superfétatoire.

M. Marx: Au moins, le ministre a appris quelque chose aujourd'hui.

M. Bédard: D'où sa suppression...

M. Marx: Est-ce que vous faites cet amendement pour la première fois aujourd'hui?

M. Bédard: Je pensais que c'était le député de D'Arcy McGee qui avait appris quelque chose.

M. Marx: Est-ce que vous faites cet amendement pour la première fois aujourd'hui?

M. Bédard: Non, il était dans vos amendements.

Le Président (M. Rochefort): L'article 86.7 tel qu'amendé est-il adopté?

M. Bédard: C'est une demande de la Commission des droits de la personne. Je ne suis pas sûr que le député de D'Arcy McGee ait fait ses devoirs.

M. Marx: Le ministre m'a donné une liste d'amendements dans laquelle il en manque. C'est l'efficacité du gouvernement.

M. Bédard: Pouvez-vous nous dire si vous avez eu cet amendement?

M. Marx: Non, pas moi, mais d'autres membres de la commission...

M. Bédard: Franchementl

Mme Lavoie-Roux: Je vais regarder si je l'ai eu.

M. Bédard: Si on peut se défendre en se disant que c'est un autre dans l'Opposition, c'est fort. Mme la députée de L'Acadie l'a eu.

Mme Lavoie-Roux: Je pense que c'est de la discrimination contre le député de D'Arcy McGee, à l'endroit du député de D'Arcy McGee.

Mme Marois: II pourra porter plainte.

M. Marx: Je demande un programme d'accès à l'égalité à l'Assemblée nationale.

M. Bédard: Nous l'avions fait parvenir à la personne qui était susceptible de comprendre le plus rapidement.

Le Président (M. Rochefort): Boni L'article 86.7 est-il adopté?

Mme Lavoie-Roux: C'est de l'injure. Une voix: Adopté tel qu'amendé.

M. Bédard: M. le Président, nous aurions...

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que l'amendement est adopté?

Mme Lavoie-Roux: Lequel? 86.7? Le Président (M. Rochefort): Oui. Mme Lavoie-Roux: Oui.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. J'appelle l'article 86.8.

M. Bédard: Je voudrais apporter un amendement à l'article 86.8, à l'effet...

Mme Lavoie-Roux: Celui-là, on ne l'a pas reçu.

Le Président (M. Rochefort): Vous en avez des copies, M. le ministre?

M. Bédard: Non.

M. Marx: On ne l'a pas reçu. En voilà un autre.

Mme Lavoie-Roux: Discrimination généralisée. (18 h 15)

M. Bédard: On sait que ce sera unanime.

Mme Lavoie-Roux: D'accord. Mme Marois: M. le Président...

M. Bédard: Mme la ministre déposera un amendement qui a été...

Mme Lavoie-Roux: Elle est la marraine. M. Bédard: Oui, elle est la marraine-Mine Marois: Je pense qu'on a travaillé...

M. Bédard: Je peux dire qu'elle a plaidé...

Le Président (M. Rochefort): Mme la ministre.

M. Bédard: ... merveilleusement bien pour celles qu'elle a représentées.

Mme Lavoie-Roux: Cela nous épargne du temps. Une chance qu'elle a fait le plaidoyer.

Mme Marois: Je pense qu'on va bonifier l'article 86.8 avec les deux amendements qui viennent. Je vais en déposer un, M. le Président, qui remplacerait les premier et deuxième alinéas de l'article proposé à 86.8 et qui se lirait comme suit: "Le gouvernement doit exiger de ses ministères et organismes l'implantation de programmes d'accès à l'égalité dans le délai qu'il fixe." Il y a eu beaucoup de représentations, dont la mienne en premier lieu, à savoir qu'on était peut-être trop prudent à certains égards, compte tenu qu'on n'incluait pas les organismes, qu'on n'obligeait pas les organismes.

Avec la formulation que nous privilégions par la proposition d'amendement qui est sur la table, nous nous donnons deux moyens, en fait. Le premier, c'est la notion d'obligation qui est comprise dans l'amendement et le deuxième élément, qui n'est pas négligeable, c'est l'exigence: "doit exiger". La seule notion d'obligation comportait souvent pour le gouvernement des discussions longues avec certains organismes pour les amener à implanter certains programmes d'accès à l'égalité, tandis qu'en modifiant l'article comme il l'est maintenant - il le serait par cet amendement - on se donne des moyens d'intervention puisqu'on se donne l'obligation et l'exigence vis-à-vis de nos organismes comme de nos ministères.

Le Président (M. Rochefort): Cet amendement est-il adopté?

M. Marx: En ce qui concerne les programmes d'accès à l'égalité au gouvernement, avec ou sans amendement, c'est une illusion parce que rien ne se fait. On parle de cela pendant des années, on publie "II y a autant de façons d'être Québécois" etc., c'est du "sloganeering", pas autre chose. Chaque fois que j'envoie des femmes anglophones qualifiées au gouvernement, elles reçoivent toujours la réponse d'aller à une autre personne, à un autre ministère, à la Fonction publique, à la Justice, etc., et rien ne se fait. D'une façon ou d'une autre, ce n'est pas l'amendement qui va changer quelque chose, c'est la volonté de ce gouvernement et la volonté n'existe pas ou, si cela existe, elle est bloquée par la situation économique. Comment peut-on avoir des programmes d'accès à l'égalité quand il n'y a pas de postes ouverts au gouvernement?

Le Président (M. Rochefort): Mme la ministre.

Mme Marois: M. le Président, je trouve que le député de D'Arcy McGee réduit énormément, par son interprétation, la portée des articles qui concernent les programmes d'accès à l'égalité. On a l'air de se dire entre nous - il faut bien s'en rendre compte - que les programmes d'accès à l'égalité ne s'appliquent qu'au processus d'embauche. On réduit la notion de programme d'accès à l'égalité à cette seule réalité, alors que cette notion de programme d'accès est au contraire très large, peut englober et englobe l'embauche et tous les processus de promotion, les processus de formation et les processus de recyclage.

M. Marx: Pour les femmes anglophones, il n'y a pas de promotion possible, elles ne sont pas là.

Mme Marois: II y a des mesures préventives, des mesures correctives et des mesures de promotion.

Pensons à des mesures préventives; entre autres l'implantation de services de garderie en milieux gouvernementaux ou ailleurs. Ce sont des mesures préventives pouvant fort bien s'inscrire dans un programme d'accès à l'égalité. Des mesures reliées à la formation, on en a vu des exemples au ministère de l'Environnement qui n'ont pas été très heureux, compte tenu qu'on ne pouvait pas le faire, mais cela s'est corrigé par la suite. Là encore, on ne parle pas d'embauche, on parle de formation à l'intérieur de certaines unités de travail, permettant à des groupes, que ce soient des groupes de femmes ou des groupes venant de communautés ethniques ou présentant certaines autres formes de discrimination systémique, c'est-à-dire s'étant trouvées dans

d'autres formes de discrimination systémique, d'avoir accès à un certain nombre de promotions ou d'implications dans l'appareil gouvernemental ou ailleurs. Je trouve cela réducteur quand le député de D'Arcy McGee semble dire qu'étant donné qu'il n'y a plus d'embauche... En plus, je dois dire que cela est faux. C'est faux parce qu'il y a ce phénomème d'attrition qui fait en sorte que la fonction publique réduit un certain nombre d'effectifs par des départs normaux, mais il y a en même temps l'implantation de nouveaux programmes. On sait fort bien qu'en adoptant cette loi aujourd'hui - entre autres, le député de D'Arcy McGee lui-même l'a souligné - il faudrait de nouveaux crédits à la Commission des droits de la personne pour faire en sorte qu'elle assume mieux les nouvelles responsabilités. À ce moment-là, cela impliquera sûrement l'ajout de personnel nouveau, donc la possibilité qu'à l'embauche, en plus des autres lieux possibles d'intervention par des programmes d'accès à l'égalité, on applique la Charte des droits et libertés telle qu'amendée.

Le Président (M. Rochefort): Mme la député de L'Acadie.

M. Marx: Je vais juste terminer. La ministre a bien répondu, mais pas à ma question. Qu'est-ce qui arrive à mes femmes anglophones bilingues qui aimeraient se trouver une place au gouvernement, dans les organismes du gouvernement? Pour elles, toutes ces belles paroles sont des illusions suivies par la désillusion. Cela veut dire que ce sont peut-être de belles paroles et qu'il sera intéressant de lire cela dans' le journal des Débats, mais, dans les faits, sur le terrain, qu'est-ce que vous avez fait? Qu'est-ce que vous allez faire? Chaque fois que j'envoie quelqu'un poser sa candidature, c'est une fin de non-recevoir. Qu'est-ce que je vais leur dire? Je vais leur donner une copie de votre discours, cela n'aidera rien. Je pense que tout cela, au gouvernement, les programmes d'accès à l'égalité, c'est souvent de la propagande plutôt que la réalité. Nous avons eu en commission parlementaire le président du syndicat des fonctionnaires. Savez-vous ce qu'il a dit? C'est impossible tout cela. Il n'y a pas de postes. Vous avez parlé de nouveaux programmes. Je ne crois pas à cela.

Mme Marois: Si vous me le permettez, M. le Président, je trouve encore une fois injustes les propos du député de D'Arcy McGee. Injustes parce que ces programmes d'accès à l'égalité sont rendus possibles à peine depuis quelques mois. Encore faudrait-il se donner les moyens de mettre en place des programmes d'accès à l'égalité avant de dire qu'ils ne fonctionnent pas. Ils ne sont pas en place.

M. Marx: On parle de cela depuis des années.

Mme Marois: D'autre part, il y a eu un effort incroyable fait par ce gouvernement, par le ministre des Communautés culturelles entre autres, pour faire en sorte qu'au niveau des nominations - on peut les reprendre et je fais la même chose du côté des femmes d'ailleurs - nous appliquions nos propres programmes maisons d'accès à l'égalité pour que de plus en plus de personnes, venant de communautés culturelles ou des femmes, soient nommées à différents secteurs, à différents postes clés ou à différents lieux de responsabilité dans l'ensemble de notre appareil. Je trouve cela injuste quand le député de D'Arcy McGee dit que ce ne sont que de belles paroles, qu'il n'y a pas d'efforts faits dans ce sens-là. Donnons-nous les moyens à tout le moins de les rendre possibles - c'est ce qu'on fait en discutant aujourd'hui - et regardons au moins les efforts qui ont déjà été faits.

M. Marx: J'aimerais donner un exemple à la ministre; après cela, je ne pense pas que je puisse la convaincre.

M. Bédard: Je vous promets que vous allez parler le dernier.

M. Marx: Vous avez parlé des nominations. Il y a eu, il y a un an ou 18 mois, 19 nominations à la Commission de la santé et de la sécurité du travail. Savez-vous que ces 19 personnes nommées à cette commission étaient des Canadiens français, donc pas membres des communautés culturelles? Je n'aime pas l'expression "communautés culturelles", mais c'est monnaie courante ces jours-ci. En plus, ce que j'ai trouvé pire, ils ont nommé 19 hommes à cette commission. Il y a toutes sortes d'excuses. Le ministre Pierre Marois m'a écrit et m'a expliqué. C'étaient des explications comme celles qu'on a données autrefois au palier fédéral pour ne pas avoir nommé des francophones pour siéger aux commission. Comprenez-vous? Autrefois, les explications qu'on a données, au fédéral, pour l'absence des francophones dans la fonction publique fédérale, dans les organismes fédéraux, on les sert maintenant à Québec. Voilà!

Mme Marois: Alors, M. le Président, j'aimerais bien aussi, comme le député de D'Arcy McGee, finir ce débat. Je pense qu'on s'entend sur le fond. Encore une fois, je ne trouve pas cela correct de prendre un organisme alors qu'on sait fort bien, la preuve en a été faite, qu'il y avait eu des efforts de faits de ce côté-là, et qu'au contraire on avait augmenté la représentation des personnes provenant de différentes

communautés ethniques dans l'ensemble des nominations faites.

M. Marx: Vous avez des exemples, des statistiques?

Mme Marois: Je ne les ai pas avec moi à ce moment-ci, mais le ministre des Communautés culturelles les a. Je pourrai souligner au député de D'Arcy McGee qu'il peut se référer au débat qu'on a eu à l'Assemblée nationale sur cette question, où le ministre lui-même a apporté des données statistiques. D'autre part, je pense qu'il y a eu - je ne voudrais pas faire erreur - la nomination d'une femme à la Commmission de la santé et de la sécurité du travail, il y a à peine quelques semaines. Première percée de ce côté-là.

M. Marx: À cause de mes interventions.

Mme Marois: II y en aura sûrement d'autres à cause des interventions du député de D'Arcy McGee, de celles de certains membres du gouvernement et de la ministre déléguée à la Condition féminine.

M. Bédard: Vous êtes indispensable dans l'Opposition.

Mme Lavoie-Roux: Je voudrais appuyer les remarques de mon collègue de D'Arcy McGee. Mais je vais commencer par dire que le fait qu'on inclut ceci dans la Charte des droits et libertés de la personne m'apparaît être un progrès. En tout cas, cela donne un recours de plus. Dans ce sens-là, je suis tout à fait d'accord avec la ministre déléguée à la Condition féminine. Mais, je me souviens très bien - et je pourrais peut-être tirer l'information du journal des Débats - qu'à chaque année, j'ai fait la révision à toutes les études des crédits où j'allais. Je faisais quelques ministères, pas tous évidemment, il y en a 26. Je demandais l'évolution dans le nombre de femmes et d'hommes et je pense que ce n'est pas plus tard que l'an dernier -non, l'année précédente - aux crédits de l'Environnement, le nombre de femmes avait diminué dans les postes-cadres. C'est pourtant après que, chaque année, je faisais le tour. J'ai commencé, d'abord, la première année, à parler des membres dans les cabinets des ministres. Cela c'est amélioré, je dois dire. C'était quelque chose. Il y avait Claude Morin, qui était le meilleur, mais les autres, je vous assure que ce n'était pas fort, en particulier le ministre de l'Éducation.

Une voix: ...

Mme Lavoie-Roux: Pardon? Qu'est-ce qu'il dit?

Le Président (M. Rochefort): M. le ministre.

M. Bédard: II en avait trop.

Mme Lavoie-Roux: II y avait trop de femmes dans le cabinet du ministre? Bon, d'accord. Après cela, je faisais le tour des organismes ou des commissions qui avaient été nommés. Là, je puis simplement vous les citer de mémoire. La Commission des normes du travail, qui avait été créée en 1979 ou 1980, n'avait aucune femme. Aucune femme. Et c'est toujours ce rappel, ce rappel constant. Là, je suis prête à admettre que la ministre déléguée fait des efforts et là on vient de nous dire qu'on vient de corriger la situation de la Commission de la santé et de la sécurité du travail. Écoutez, même si on énonce beaucoup de grands principes et qu'on fait beaucoup de grands discours, il reste que c'est une surveillance comme celle qu'on donne à nos enfants de moins de cinq ans quand ils traversent la rue. C'est un rappel constant et, si nous n'avions pas eu cette vigilance à le rappeler constamment, à le faire à chaque ministère... Je vous assure que ce n'est pas facile. Je ne sais pas à qui la faute, mais il y a un endroit où le gouvernement n'a aucune excuse, c'est dans ses propres organismes.

M. Bédard: Là-dessus, je veux bien ne pas minimiser les efforts de l'Opposition, mais je me sens obligé de dire que, s'il y a une amélioration, je pense, et Mme la députée de L'Acadie en conviendra aussi, que c'est sûrement à cause du travail de surveillance - c'est une expression que vous avez employée - constante de la part de la ministre déléguée à la Condition féminine. Je peux vous le dire... (18 h 30)

Mme Lavoie-Roux: Elle est arrivée en 1981, votre ministre déléguée à la Condition féminine.

M. Bédard: Non, mais elle a été précédée d'une autre...

Mme Lavoie-Roux: La précédente... En tout cas, on ne fera pas le procès des absents parce que ce n'est pas correct.

M. Bédard: C'est cela. On ne fera pas le procès des absentes. Je pourrais bien être plus réservé quant à la précédente par rapport à ce qu'elle a dit de moi. Je suis obligé de dire, M. le Président...

M. Marx: Qu'a-t-elle dit de vous, M. le ministre?

M. Bédard: Je suis obligé en toute honnêteté de dire qu'au niveau du Conseil des ministres, les ministres déléguées à la

condition féminine qui se sont succédé les unes aux autres - je pense qu'on peut le dire sans minimiser les rites de l'Opposition - ont été d'une attention soutenue, continuelle pour qu'une amélioration soit apportée dans ce secteur.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, le ministre m'a interrompue. C'était de bonne guerre. C'était pour vanter des mérites. Il n'y a personne du côté du gouvernement qui peut pavoiser. Est-ce qu'il ne minimise pas les efforts que la ministre déléguée à la Condition féminine fait présentement? Ce n'est pas cela que je veux minimiser d'aucune façon. Ce que j'essaie de démontrer... D'abord, Mme la ministre est arrivée en 1981. Il faut bien se le dire. L'autre chose, c'est... Enfin, je ne suis pas pour faire toute l'histoire parce qu'on aurait presque sept ans d'histoire à faire maintenant. Quand on regarde sept ans, du côté justement de la promotion de l'égalité quant aux femmes, aux personnes handicapées et aux minorités culturelles, je vous assure que je ne sais pas si on est parti. On est à peine parti. Moi, j'appuie le député de D'Arcy McGee. La ministre nous dit: Écoutez, ce n'est pas seulement à l'embauche. C'est à la promotion et au recyclage. Encore faut-il que vous en ayez à promouvoir et à recycler, que ce soient des gens des groupes culturels, que ce soient des personnes handicapées.

Il faut bien se rappeler que, chaque année, et étrangement cela coïncidait avec la journée de la femme, le 12 mars, là on avait toujours droit à une publicité bien orchestrée. Je me souviens, en 1979, qu'on avait de beaux panneaux-réclame - ce n'est pas français - des affiches où il y avait: II y a une place pour toi. C'était pour dire aux femmes qu'il y avait une place dans la fonction publique. L'année d'après: L'égalité pour toi. La première en 1969, la deuxième en 1980. C'est vous qui avez fait... C'est pour dire que c'est extrêmement difficile et c'est plus qu'une vigilance. La vigilance, évidemment, cela ramène les gens à l'ordre un peu et on essaie d'éviter le pire. Ce qu'il faut, c'est une volonté politique. Ma seule question, M. le Président, en terminant, c'est: Quel est le délai que le gouvernement se fixe et que l'on voit dans l'article 86.8? J'ai fini, je retourne à l'article.

M. Bédard: Je vous assure que vous avez fait un long détour pour arriver à cette question qui est fort à propos.

Mme Lavoie-Roux: C'était pour appuyer mon collègue de D'Arcy McGee que vous avez malmené.

M. Bédard: Mme la députée de L'Acadie, je pense que nous serons en mesure de faire le point d'une façon plus précise sur la question des délais lorsque nous aurons la discussion en commission parlementaire de la justice sur l'ensemble des règlements. Je crois qu'à ce moment, si vous n'avez pas d'objection, c'est à ce moment, en tout cas, que je pense être le plus en mesure de répondre à votre question plutôt que d'y répondre d'une façon vague, ce qui serait le cas pour le moment.

Le Président (M. Rochefort): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Peut-être le ministre l'a-t-il dit tout à l'heure, mais quand prévoit-il que ces règlements seront présentés en commission parlementaire? Ou sont-ils déjà...

M. Bédard: Déjà, Mme la députée de L'Acadie, nous sommes à travailler à l'élaboration de ces règlements et je compte, dans des délais très raisonnables, convoquer la commission parlementaire de la justice pour procéder à leur étude.

Le Président (M. Rochefort): Un dernier mot.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous parlez, par exemple, du printemps?

M. Marx: Pour ne pas vous demander l'année.

M. Bédard: Oui. Cela n'ira pas plus loin que cela.

Mme Lavoie-Roux: Cela devrait être adopté avant le printemps, c'est-à-dire avant juin ou juillet.

M. Bédard: Oui, assurément.

Le Président (M. Rochefort): Le dernier mot, M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Avant de terminer l'étude de cet article, j'aimerais féliciter le ministre de la Justice parce qu'à chaque année, à l'étude des crédits, je lui pose la question: Pourquoi ne nommez-vous pas une femme sous-ministre? Et félicitations, M. le ministre, je comprends que vous avez finalement nommé une femme sous-ministre adjointe. Applaudissements.

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que l'amendement à l'article 86.8...

M. Bédard: Je dois dire qu'elle ne doit absolument rien au député de D'Arcy McGee. Si je l'ai nommée, c'est qu'elle avait la compétence nécessaire pour occuper ce poste.

M. Marx: M. le ministre...

Le Président (M. Rochefort): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Marx: ... ce n'est pas nécessaire d'arrêter à une.

Le Président (M. Rochefort): L'amendement à l'article 86.8 est-il adopté?

M. Marx: Adopté. Mme Marois: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): L'article 86.8, tel qu'amendé, est-il...

Mme Marois: Non, il y a un autre amendement à proposer.

Le Président (M. Rochefort): Ah! Il y a un autre amendement?

M. Bédard: II y a...

M. Marx: Qui est-il, le sous-ministre adjoint?

M. Bédard: M. le Président, à l'article 86.8, j'aurais un amendement à ajouter.

Le Président (M. Rochefort): On en fait la distribution. Voulez-vous en faire la présentation, pendant ce temps?

M. Bédard: Cet amendement aurait pour effet d'ajouter, à la fin de l'article 86.8 de la charte, la phrase suivante: "Ceux-ci doivent toutefois faire l'objet d'une consultation auprès de la commission avant d'être implantés."

Le Président (M. Rochefort): Cet amendement est-il adopté?

Mme Lavoie-Roux: Un instant! Je ne l'ai pas lu, M. le Président.

Le Président (M. Rochefort): Excusez-moi. Adopté?

M. Bédard: Je pense bien que cela va faire l'unanimité, M. le Président.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. L'article 86.8 tel qu'amendé est-il adopté?

M. Marx: Un instant! Cela veut-il dire que le gouvernement doit consulter la Commission des droits de la personne avant d'implanter un programme d'accès à l'égalité?

M. Bédard: C'est exactement ce qui est écrit dans l'amendement.

M. Marx: C'est un changement de...

M. Bédard: Bah! Consulter... Je crois que, de toute façon, la commission aura à donner son...

M. Marx: D'accord. Adopté.

M. Bédard: ... opinion. Alors, aussi bien inclure le fait qu'elle doit être consultée. C'est plus systématique.

Le Président (M. Rochefort): L'article 86.8, tel qu'amendé, est-il adopté?

M. Bédard: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. Article 86.9. Il y a un amendement.

Réglementation (suite)

Mme Marois: On l'a déjà adopté tout à l'heure.

Une voix: Oui.

Le Président (M. Rochefort): Pas celui que j'ai devant moi.

M. Bédard: M. le Président, il y aurait un amendement, à savoir de remplacer le paragraphe a de l'article 86.9 de la charte par le suivant: "a) Déterminer les données actuarielles et les facteurs de détermination de risque qui ne constituent pas de la discrimination dans les contrats d'assurance ou de rente, les régimes d'avantages sociaux, de retraite, de rente ou d'assurance ou dans les régimes universels de rente ou d'assurance, établir dans quels cas et selon quel type de contrat ou de régime ces données et facteurs sont réputés non discriminatoires et prévoir, aux fins de ces contrats et régimes, toute disposition incidente à l'application du principe de non-discrimination et les règles relatives à la notion de conjoint". C'est tout simplement une modification qui a pour but de mieux préciser le pouvoir réglementaire du gouvernement...

Le Président (M. Rochefort): Cet amendement est-il adopté?

M. Marx: ... et de s'assurer que tout le pouvoir reste au gouvernement.

Le Président (M. Rochefort): Cet amendement est-il adopté?

M. Marx: Oui.

Le Président (M. Rochefort): Adopté. L'article 86.9, tel qu'amendé, est-il adopté?

M. Bédard: Adopté. M. Marx: Mais...

Le Président (M. Rochefort): Adopté. Article 86.10.

M. Marx: ... l'article 86.9 a deux paragraphes. Il n'y a pas d'amendement au paragraphe b)?

M. Bédard: Non.

M. Marx: Non? D'accord. Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Article 86.10.

M. Bédard: L'article 86.10, M. le Président, prévoit qu'un projet de règlement doit, avant d'être adopté et après consultation de la commission, être publié à la Gazette officielle et déposé devant la commission parlementaire élue de la justice. Il pourra être adopté après les 30 jours suivant le dépôt du rapport de cette commission devant l'Assemblée nationale. Cette procédure permet au gouvernement et à l'Assemblée nationale, aux parlementaires d'obtenir les vues et opinions de la population et de porter la discussion du projet de règlement devant une commission élue de l'Assemblée nationale. L'article 86.11...

M. Marx: M. le ministre a oublié de lire le deuxième paragraphe de l'article 86.10. C'est intéressant.

M. Bédard: Non, mais cela va...

M. Marx: C'est un lapsus intéressant.

M. Bédard: Oui, mais si, après avoir entendu la commission...

M. Marx: Le deuxième paragraphe se lit comme suit: "Le gouvernement peut modifier le projet de règlement avant de l'adopter sans avoir à donner un nouvel avis."

M. Bédard: Oui, mais disons, M. le Président, qu'on a, à un moment donné, des discussions en commission parlementaire et qu'il y a des amendements à faire de quelque nature que ce soit, j'espère que le député de D'Arcy McGee ne voudrait pas qu'on recommence tout le processus des auditions des personnes et qu'on recommence les discussions. À un moment donné, après qu'une discussion a eu lieu... Cette discussion - on le voit - sera très large. Elle permettra à des organismes d'être entendus. Elle permettra à tous les parlementaires d'aller au fond des choses concernant l'à-propos du règlement, son contenu, etc. Il faut bien qu'à un moment donné, le processus se termine, que des décisions se prennent.

M. Marx: Oui, je comprends cela, ce n'est pas mon point; c'est qu'en vertu du deuxième paragraphe, est-ce que c'est nécessaire pour le gouvernement de passer par la commission ou est-ce que le gouvernement peut faire des amendements sans passer par la commission?

M. Bédard: Déjà on a parlé de consultation, c'est moi-même qui ai apporté l'amendement. Je conçois difficilement...

M. Marx: Quel amendement? Il n'y a pas d'amendement à l'article 86.10.

M. Bédard: On vient de l'insérer: la consultation de la commission concernant les programmes.

M. Marx: Ce n'est pas la même chose, le ministre...

M. Bédard: Non, mais on parle du projet de règlement.

M. Marx: On parle de l'article 86.10.

M. Bédard: Oui, article 86.10, deuxième paragraphe, qui fait état du projet de règlement et de la possibilité pour le gouvernement de l'adopter sans avoir à donner un nouvel avis et de le modifier, si nécessaire. Alors, on a déjà inclus l'idée de consultation de la commission avant l'implantation de programmes. À ce moment-là...

M. Marx: Non, mais ce n'était pas seulement pour les programmes d'accès à l'égalité du gouvernement, c'est la réglementation générale.

M. Bédard: Oui, d'accord.

M. Marx: Je pense que vous n'avez pas saisi le point que j'ai fait, c'est-à-dire qu'en vertu du premier paragraphe de l'article 86.10, il faut que ce soit la commission permanente de la justice qui se penche sur la réglementation. Mais en vertu du deuxième paragraphe, le gouvernement peut faire des amendements sans, semble-t-il, passer par la commission. Est-ce que j'ai tort de dire cela ou est-ce que j'ai raison de dire cela?

M. Bédard: Non, de ce côté, vous avez raison.

M. Marx: J'ai raison?

M. Bédard: Oui, mais il ne peut, on l'a dit tout à l'heure...

M. Marx: Donc le gouvernement peut modifier le règlement sans passer par la commission permanente de la justice.

M. Bédard: Oui, mais c'est un cercle vicieux. Si on ne met pas cette disposition, cela pourrait être la meilleure manière pour un gouvernement de retarder parce que, avant de mettre d'accord tout le monde qui pourrait être entendu sur un projet de règlement, cela peut prendre énormément de temps. Je crois que cela s'impose que ce soit là.

M. Marx: Mais la commission peut siéger et être d'accord sur un projet de règlement qui serait changé avant que ce soit adopté. Comprenez-vous ce que je veux dire, M. le ministre?

M. Bédard: Pardon?

M. Marx: C'est-à-dire que la commission peut siéger...

M. Bédard: Excusez-moi, on en est à la fin de nos travaux et on jase un peu autour de moi. Enfin, allez-y.

Le Président (M. Rochefort): Oui, à l'ordre tout le monde, cela va nous permettre de mieux nous comprendre. M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: Merci, M. le Président. La commission permanente de la justice pourrait étudier un projet de règlement et être d'accord pour adopter un certain projet de règlement; mais avant que le règlement soit adopté, il va passer par le biais du gouvernement qui pourrait modifier ce règlement à son gré. Donc, je me demande quelle serait l'utilité de dire que c'est la commission permanente de la justice qui vraiment va étudier le projet de règlement. Je pense que le but de faire siéger...

M. Bédard: Ce n'est pas adopté par la commission, on se comprend bien.

M. Marx: Non, mais si la commission adopte un règlement...

M. Bédard: Elle ne l'adopte pas, elle...

M. Marx: Non, mais si la commission se penche sur un projet de règlement et que ce soit adopté en commission, je ne vois pas la nécessité que le gouvernement ait le dernier mot après que la commission se soit penchée sur la question; que le gouvernement ait non seulement le dernier mot, mais le pouvoir de modifier le règlement à son gré. Qu'est-ce que c'est le...

M. Bédard: Proposez-moi une autre logique. Il faut quand même que, après auditions, il y ait une décision qui soit prise. Peut-être que le député de D'Arcy McGee voudrait - on s'interrogeait là-dessus - qu'il y ait plus de publicité qu'il n'est prévu sur le deuxième paragraphe. On avait pensé à un amendement qui aurait pu se lire comme suit... (18 h 45)

M. Marx: Oui.

M. Bédard: ... et qui aurait peut-être rejoint les préoccupations que nous avons tous, ici autour de la table. L'amendement aurait pu se lire comme suit: "Le gouvernement peut, par la suite - cela aurait pour effet de remplacer le deuxième alinéa -

M. Marx: Oui, oui, je comprends.

M. Bédard: ... modifier le projet de règlement. Il doit alors, dans ce cas, publier le projet modifié à la Gazette officielle du Québec avec un avis indiquant qu'il sera adopté sans modification à l'expiration des 30 jours suivant cette publication."

Peut-être que cela permettrait encore à des groupes de pouvoir s'exprimer, mais à un moment donné il faut que cela arrête si on veut que les programmes s'implantent.

M. Marx: Oui, je suis tout à fait d'accord avec le ministre. Mais supposons le cas suivant: Que le ministre ait un projet de règlement qu'il dépose devant la Commission permanente de la justice.

Je répète parce que je vois que le ministre est distrait.

M. Bédard: Non, non, je ne suis pas distrait.

M. Marx: Vous n'êtes pas distrait?

M. Bédard: Vous voyez très bien que je fais autre chose. Franchement, ne trompez pas tout le monde. Allez-y!

M. Marx: Le ministre fait autre chose que d'écouter les membres de la commission... Il n'en a pas assez.

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que l'article 86.10 est adopté?

M. Marx: Non. Le ministre a un projet de règlement qu'il dépose devant la commission permanente de la justice. À un moment donné, la commission va se réunir. On va se pencher sur le projet de règlement. À la fin des travaux de la commission, on aura une décision et un projet de règlement qui sera adopté par la commission?

M. Bédard: Non, il y aura un rapport

parce u'il se peut fort bien, avec la bonne foi de tout le monde, qu'on ne puisse pas se mettre d'accord sur tous les points.

M. Marx: Oui, mais ici, je pense que...

M. Bédard: Est-ce que vous auriez peut-être quelque chose à suggérer? On peut l'étudier.

M. Marx: Non, mais je pense que le processus suggéré à l'article 86.10 est innovateur.

M. Bédard: Oui.

M. Marx: Je ne pense pas qu'il y ait d'autres règlements qui sont...

M. Bédard: C'est exact.

M. Marx: ... discutés en commission parlementaire.

M. Bédard: C'est exact.

M. Marx: Si vous êtes prêt à accepter que c'est une innovation, je suis d'accord. Maintenant, pourquoi a-t-on innové? Parce qu'on a trouvé qu'une telle réglementation a une très grande importance et on a voulu que ce soit discuté en public comme un projet de loi. Lorsque l'Assemblée nationale fait l'étude d'un projet de loi en commission, celle-ci fait un rapport et, après cela, c'est adopté à l'Assemblée nationale.

Normalement, il n'y a pas d'amendement. Je propose au ministre de biffer le deuxième paragraphe de l'article 86.10, s'il veut vraiment innover et ne pas seulement donner l'impression d'avoir innové.

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que cet amendement est adopté?

M. Bédard: Autrement dit, vous êtes contre le principe de la séparation des pouvoirs. La réglementation, on le sait, appartient au gouvernement et si, demain, vous avez à assumer ces responsabilités je ne pense pas que vous en décidiez autrement; cela va de soi.

M. Marx: Non, la réglementation appartient au gouvernement parce qu'on veut procéder de cette façon. Mais, ici, j'ai pensé que le ministre voulait vraiment innover.

M. Bédard: Si on n'adoptait pas le deuxième paragraphe, on ne pourrait pas adopter le règlement.

M. Marx: Oui, parce que le gouvernement... Non, le deuxième paragraphe... qui sera fait; nuancel

M. Marx: C'est cela.

M. Bédard: II y aura un rapport fait par la commission.

M. Marx: C'est cela. Mais la commission va faire un rapport et la commission...

M. Bédard: II ne sera pas nécessairement unanime...

M. Marx: ... pas nécessairement unanime, mais au moins tout aura été discuté devant la commission...

M. Bédard: C'est cela.

M. Marx: On va essayer d'être unanime dans la mesure du possible, mais si on ne l'est pas, au moins tout le monde aura eu l'occasion de s'exprimer.

M. Bédard: D'accord.

M. Marx: Ensuite, en vertu du paragraphe 2 de cet article, le rapport est acheminé au gouvernement et le gouvernement peut en faire ce qu'il veut et adopter un projet de règlement qui peut être totalement différent du projet de règlement qui a fait un certain consensus à la commission permanente de la justice. Donc, la commission permanente de la justice, dans ce cas, serait une "debating society", une société de débat.

M. Bédard: Là, je vous trouve moins sérieux, M. le député de D'Arcy McGee. Je sais que, théoriquement, il peut sûrement -théoriquement - il pourrait sûrement y avoir une discussion et même en venir à la conclusion d'unanimité sur ce que devrait contenir le règlement de la part de la commission parlementaire et le gouvernement pourrait aller complètement dans le sens contraire. Mais, entre vous et moi, c'est de la théorie.

À partir du moment où une discussion a eu lieu, qu'une commission parlementaire est allée au fond des choses, a même entendu des groupes, la suite logique, pour le gouvernement, est d'essayer de tenir compte le plus possible de toutes ces représentations. Si une unanimité s'est dégagée, à plus forte raison devra-t-il tenir à se rapprocher ou même à être complètement d'accord, sur tous les points, avec le rapport de la commission permanente de la justice. Mais, au bout de ce processus, il faut bien, à un moment donné, si on veut que les programmes soient mis en application, qu'il y ait une décision qui soit prise. Sinon, on risque de tourner en rond avec ce processus

M. Bédard: Adopter le règlement dans le sens d'avoir la possibilité de faire des modifications. C'est présumer qu'on en arrive à un règlement avec lequel absolument tout le monde est d'accord, sur tous les points. Il faut quand même être réaliste.

M. Marx: On peut changer le deuxième paragraphe pour dire: Le gouvernement adopte le règlement prévu au premier paragraphe, si c'est cela.

M. Bédard: C'est cela que je vous dis. Je pense avoir donné l'explication.

M. Marx: C'est qu'on donne l'impression j'ai eu cette impression moi-même, faussement, comme je le vois maintenant -que ce sera à la commission permanente de la justice de déterminer le contenu du règlement en question. Maintenant, je vois qu'il est vrai qu'on en discutera en commission, mais le dernier mot viendra du gouvernement, même à la dernière minute, pour faire des changements.

M. Bédard: Oui, mais, même si vous décidiez que c'est un autre forum qui doit adopter le règlement, ce serait quand même le gouvernement qui le proposerait, avec les modifications. Il faut que le processus aboutisse, finisse, pour en arriver à implanter des programmes. En tout cas...

M. Marx: Non, mais ce n'est pas le problème.

M. Bédard: ... on pourrait continuer plus longuement la discussion, mais je ne vois pas comment le député de D'Arcy McGee peut raisonnablement imposer carrément au gouvernement l'obligation d'adopter, sans aucune modification, après des audiences publiques où les gens ne seront pas nécessairement tous d'accord, tout simplement le rapport de la commission. La commission n'adopte pas, elle fait rapport; elle fait état d'une unanimité ou de la diversité des opinions ou de l'ensemble des recommandations qui ont pu être faites et elle souligne les points d'accord.

M. Marx: Non. J'imagine que le ministre déposera un projet de règlement à la commission permanente de la justice. On entendra des personnes. Lors de l'étude de ce projet de règlement, on peut voter sur les articles...

M. Bédard: Je vous le redis, je ne pense pas que cela nécessite une longue argumentation: la commission n'adopte pas le règlement, mais le règlement est adopté par le gouvernement. Bien oui, c'est cela.

M. Marx: Le ministre ne veut pas me comprendre...

M. Bédard: Mais non...

Le Président (M. Rochefort): Est-ce que...?

M. Marx: Le ministre a proposé un projet de modification à l'article 86.10 qu'il m'a remis...

M. Bédard: Qui pourrait peut-être représenter une préoccupation d'information additionnelle parce qu'à un moment donné une décision doit être prise. C'est pour cela que j'ai proposé l'amendement qui pourrait se lire comme suit et qui pourrait être préférable à ce qui existe déjà. Je cite: "Le gouvernement peut, par la suite, modifier le projet de règlement. Il doit alors, dans ce cas, publier le projet modifié à la Gazette officielle du Québec après un avis indiquant qu'il sera adopté sans modification à l'expiration des 30 jours suivant cette publication." Cela permettrait à ce moment une deuxième information du public. Si le gouvernement allait carrément à l'encontre de toutes les recommandations qui lui sont faites, cela permettrait à des groupes de s'exprimer à nouveau et de faire valoir leur point de vue dans cette période de 30 jours dans certains cas, s'il fallait que ce soit cela, mais ce ne sera pas cela.

M. Marx: J'accepte l'amendement quoique ce ne soit pas ce que j'aurais aimé voir...

M. Bédard: C'est mieux.

M. Marx: ... mais c'est mieux que rien.

Le Président (M. Rochefort): L'amendement...

M. Marx: Mais, quand on n'a pas le choix, on l'accepte.

Le Président (M. Rochefort): ... à l'article 86.10 est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): L'article 86.10 tel qu'amendé est-il adopté?

M. Bédard: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Article 86.11.

M. Bédard: L'article 86.11 prévoit qu'un règlement entre en vigueur à la date de sa publication à la Gazette officielle ou à une date ultérieure qui y est fixée.

Le Président (M. Rochefort): Cet article est-il adopté?

M. Bédard: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): L'article 19 tel qu'amendé est-il adopté?

M. Bédard: Adopté.

Mme Marois: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Adopté.

M. Bédard: Est-ce terminé?

Le Président (M. Rochefort): Non. Seulement un instant. Finalement, M. le ministre, il y l'amendement aux articles 19, 24, 25 et 29 de la renumérotation des articles de la charte. Est-ce cela?

M. Bédard: C'est cela. Aux articles 19, 24 et 25...

Le Président (M. Rochefort): Et 29.

M. Bédard: Et 29. Il y a un amendement; aux articles 19, 24, 25 et 29 du projet de loi, effectuer les concordances quant à la renumérotation des articles 86.8 à 86.11 de la charte, étant donné la supression de l'article 86.7 de la charte.

Le Président (M. Rochefort): Cet amendement est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Président (M. Rochefort):

Renumérotation de la charte.

M. Bédard: Et une motion de renumérotation usuelle.

Mme Marois: Je n'ai pas d'objection. Je n'ai pas de question.

Le Président (M. Rochefort): La motion de renumérotation du projet de loi est-elle adoptée aussi? Le titre du projet de loi est-il adopté?

M. Bédard: Adopté.

Le Président (M. Rochefort): Le projet de loi no 86, Loi modifiant la Charte des droits et libertés de la personne, est-il adopté tel qu'amendé?

M. Bédard: Adopté.

M. le Président, je tiens à remercier tous les collègues de la commission ainsi que mes collègues de l'Opposition, qui ont fournit un travail positif au niveau des travaux que nous avons eu à mener à terme.

M. Marx: J'aimerais à mon tour remercier le ministre, qui m'a toujours entendu mais qui ne m'a pas toujours compris. J'aimerais aussi remercier le président pour le travail qu'il a fait, ainsi que les autres collègues, y compris la ministre déléguée à la Condition féminine.

Mme Marois: Merci.

Le Président (M. Rochefort): Sur ce, la commission ajourne ses travaux sine die.

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