To use the Calendar, Javascript must be activated in your browser.
For more information

Home > Parliamentary Proceedings > Committee Proceedings > Journal des débats (Hansard) of the Comité mixte de l'Assemblée législative et du Conseil législatif

Advanced search in the Parliamentary Proceedings section

Start date must precede end date.

Skip Navigation LinksJournal des débats (Hansard) of the Comité mixte de l'Assemblée législative et du Conseil législatif

Version finale

27th Legislature, 6th Session
(January 25, 1966 au April 18, 1966)

Wednesday, March 30, 1966 - Vol. 4

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

L'assurance-maladie


Journal des débats

 

L'ASSURANCE-MALADIE

(Dix heures et cinquante-trois de l'avant-midi)

M. MARLER (Président du comité de l'assurance-maladie): A l'ordre, messieurs! Nous allons commencer, ce matin, par la présentation de M. Séguin. On me dit que M. Séguin a mal aux jambes, alors nous allons le laisser exposer son affaire assis, comme il est actuellement.

M. SEGUIN: M. le Président, MM. les membres du comité, j'ai le plaisir de vous présenter ce mémoire, malgré que vous l'ayez devant vous, je ne pense pas malgré tout qu'il soit nécessaire d'en faire une lecture.

M. LE PRESIDENT: Il s'agit de nous donner une sorte de résumé.

M. SEGUIN: C'est un résumé de projection générale de la sécurité sociale, évidemment en tant qu'ancien administrateur de la sécurité sociale en France.

Tout d'abord le contexte de la sécurité sociale au Canada, et en particulier au Québec, est bien différent évidemment de l'ensemble de la sécurité sociale du territoire français, en général. Il n'en reste pas moins vrai que si la province de Québec demande à obtenir soit une sécurité sociale complète, dans le sens international du terme, ou des comités connexes ou indépendants ou continués par des régimes de rentes indépendants du complexe général qu'est la sécurité sociale, il faut s'entendre au départ pour savoir si le Québec est prêt actuellement à prendre l'ensemble d'une sécurité sociale afin d'en discuter les modalités sur les termes internationaux, comme il existe dans tous les pays, dans la majorité des pays. Au point de vue importance, vous avez certainement lu, sur le mémoire que j'ai remis, qu'environ 30 millions de personnes en bénéficient actuellement tant chez les salariés que pour leurs familles; les prestations représentent 35% des salaires. Je n'ai pas besoin évidemment de revenir sur les détails de tous les paragraphes de ce mémoire que vous avez entre les mains.

Au point de vue organisation, vous voyez évidemment que ça couvre l'ensemble de tous les problèmes qui existent actuellement en particulier dans le Québec — je reviens toujours dans le Québec, parce que c'est ce qui m'intéresse — il en est de même que pour le groupe des travailleurs indépendants, professions libérales, commerçants industriels et autres.

Evidemment, il y aurait toute une organisation territoriale à penser de manière à ce qu'une répartition juste soit faite à travers toute la province de Québec.

La sécurité sociale ou les allocations familiales coiffent l'ensemble, comme je le disais au début, de tous les organismes qui s'occupent de près ou de loin d'un régime-maladie. Cela couvre l'individu depuis sa naissance, depuis la prénaissance jusqu'au moment du décès, y compris les retraits de vieillesse. Les prestations familiales sont elles-mêmes très intéressantes étant donné qu'il y a une allocation de salaire unique pour la maman qui reste au foyer et qui joue son rôle d'éducatrice à plein temps. A ce moment-là, elle reçoit en quelque sorte un genre de salaire pour élever ses enfants en restant chez elle, jusqu'à l'allocation au décès évidemment et par l'action sanitaire et sociale. Cette action sanitaire et sociale est très vaste. D'ailleurs, l'ensemble de tout ce travail, c'est un programme à long terme, qui demande une coopération générale aussi bien du gouvernement que des personnes qui représentent les corps médicaux ou les collèges des docteurs, des médecins, des dentistes, etc., de manière à obtenir des plans non plus conjoints vis-à-vis d'une action par le fédéral, par les provinces, étant donné qu'actuellement, je pense que tout le monde le sait, chaque province peut organiser sa propre sécurité sociale ou son propre plan général d'aide sociale à tous les échelons.

Dans le domaine de la recherche, évidemment, je pense que ce sont $500 millions qu'il y a eu d'alloués ou qui sont alloués, enfin, qui sont prêts à être alloués, de toute façon pour obtenir des recherches sur les plans de formation de techniciens dans la médecine en général ou en plus, pour construire soit des hôpitaux ou des cliniques ou pour former des corps éducatifs spécialisés dans le sens social en général.

J'ai reçu, comme vous, les onze volumes qui m'ont été envoyés comme à chacun d'entre nous par le comité de recherches que je tiens à féliciter pour son travail, étant donné que c'est un travail de longue haleine qui est très clair et on voit tous les aspects, évidemment, chacun d'entre nous peut voir les aspects qui existent à travers le monde, enfin à travers les principales nations du monde en ce qui concerne, en ce qui a trait à la sécurité sociale. Et ici, en particulier pour le Québec, je n'ai pas eu le temps, en quinze jours, d'analyser tous les aspects constitutionnels ou les relations qui existent entre le fédéral et le provincial au point de vue de la législa-

tion. C'est très complexe, mais réellement c'est un travail explicite d'un très haut degré et qui peut justement amener le comité conjoint à avoir des bases réellement concrètes et spécialisées en toute clarté, de manière à pouvoir construire quelque chose qui soit viable et social au point de vue familial dans la province de Québec.

Maintenant si quelques membres du comité ont des observations ou des demandes à faire au sujet de ce mémoire que vous avez entre les mains...

M. TREPANIER: M. Séguin, vous mentionnez au bas de la page 3 et au haut de la page 4 de votre mémoire que l'administration des caisses est contrôlée régulièrement par des experts inspecteurs de l'Etat.

M. SEGUIN: Oui.

M. TREPANIER: Est-ce qu'il s'agit là des inspecteurs de l'inspection générale de la sécurité sociale ?

M. SEGUIN: Exactement, ils sont formés par une école spécialisée à Paris qui forme justement des cadres d'inspection, de contrôle et de formation de présidents.

M. TREPANIER: Pourriez-vous justement nous décrire plus spécifiquement peut-être, la composition et le rôle de cet organisme d'inspection?

M. SEGUIN: De cette école? M. TREPANIER: De l'inspection en général.

M. .SEGUIN: De l'inspection, c'est très important, c'est pour contrôler la finance et la gestion des caisses, des périodes qui ne sont jamais prévues à l'avance et qui sont inopinées.

M. TREPANIER: Mais quelle est la composition. ..

M. SEGUIN: La composition, ce serait justement des personnes q ui sont spécialisées, premièrement, dans la comptabilité administratice; deuxièmement qui ont été elles-mêmes, soit des directeurs ou des présidents de caisses de sécurité sociale ou d'allocations familiales ou régionales, de manière à pouvoir contrôler l'ensemble du territoire par des visites inopinées, comme je vous le disais actuellement. Ils sont formés à double sens, c'est-à-dire que, premièrement, il y a une double formation: la première est la comptabilité, et la seconde, la gestion en relations coopératices, en quelque sorte avec la caisse primaire, ou la caisse régionale, ou la caisse-mère, à Paris. Est-ce que cela répond à votre question?

M. TREPANIER: Oui.

M. COLLARD: M. Séguin, je vois sur la page frontispice, que vous êtes technicien en recherches industrielles.

M. SEGUIN: Oui, Monsieur.

M. COLLARD: Et que vous être Français?

M. SEGUIN: Je suis Canadien actuellement.

M. COLLARD: Canadien. Est-ce que l'on pourrait savoir, pour fins de discussions, s'il y a longtemps que vous êtes Canadien?

M. SEGUIN: Il y a sept ans.

M. COLLARD: Ce qui veut dire...

M. SEGUIN: Il y a quinze ans que je suis au pays.

M. COLLARD: Alors, ce qui veut dire que, lors de l'établissement des régimes de sécurité sociale en France, qui date, je pense, de 1945, vous avez connu ces régimes...

M. SEGUIN: J'ai connu surtout le «début, très difficile, de l'implantation de la sécurité sociale incorporant d'anciens groupes de sécurité sociale indépendante ou privée. En les englobant, en les coiffant, en les supervisant, en quelque sorte.

M. ROY: M. Séguin, quel était votre rôle à la caisse d'allocations familiales?

M. SEGUIN: Administrateur, c'est-à-dire, au point de vue des positions à prendre vis-à-vis de la famille, en tant que représentants familiaux. Je dois vous dire en passant, que chaque administrateur qui est au sein des conseils d'administration des caisses sociales ou de sécurité sociale, ou d'allocations familiales, est obligatoirement père de famille au minimum de deux enfants. De manière à ce qu'ils aient l'esprit familial.

M. CLOUTIER: M. Séguin, à la recommandation numéro 1, vous parlez de la division du

territoire de l'Etat du Québec en régions administratives.

M. SEGUIN: Certainement.

M. CLOUTIER: Est-ce que vous avez pris connaissance de la division qu'on vient de rendre publique, il y a quelques semaines, la division en dix grandes régions administratives ici dans la province?

M. SEGUIN: A l'époque. Cela correspond justement, approximativement...

M. CLOUTIER: Est-ce que cela correspond au désir que vous exprimez?

M. SEGUIN: Certainement, étant donné qu'il faut se référer au futur, c'est-à-dire avoir un caractère prévisionnel pour l'ensemble d'une projection future pour un territoire déterminé, c'est-à-dire, le considérer non seulement à l'heure actuelle, mais dans le futur, dans un futur de 20 ans, de 30 ans, de manière à ce qu'il n'y ait pas de confusion au moment où il y aura une scission ou une coordination à faire au sein de cette même région, ou une coopération de région à région. Est-ce que cela correspond à...

M. CLOUTIER: C'est ça. Est-ce que, selon vous, la création d'un conseil supérieur de la santé serait de nature à nuire ou empêcher les débats publics sur l'assurance-maladie?

M. SEGUIN: Absolument indispensable, de manière à ce que vous ayez la coopération, justement au sein de ce comité, de représentants de tous les collèges, des docteurs, des pharmaciens ou des dentistes, ou d'autres collèges professionnels, pour éliminer avant qu'il y ait n'importe quelle loi ou quelque proposition officielle déterminée, ces grandes discussions ou cette élaboration publique d'une loi en ce qui concerne son application.

M. CLOUTIER: Alors, selon vous...

M. SEGUIN: C'est absolument indispensable!

M. CLOUTIER: C'est: indispensable pour que les débats soient...

M. SEGUIN: C'est absolument indispensable pour que vous ayez la coopération de toutes ces personnes-là qui représentent ce qu'est la question sociale au sein d'une société.

M. CLOUTIER: Et où situez-vous, dans l'ordre chronologique, l'instauration de ce conseil supérieur de la santé, une fois que les débats sur l'assurance-maladie sont...

M. SEGUIN: Il faut absolument que tout démarre à la fois. C'est là justement la complexité du travail. Il faut absolument qu'au départ d'une organisation de sécurité sociale dans une nation, dans un pays, dans une région ou autre, enfin même dans cette province qui est en quelque sorte un Etat, il y ait immédiatement ces comités conjoints non seulement conjoints vis-à-vis du fédéral vers le provincial, mais des comités conjoints entre chaque corps représentatif de la société; c'est la société en général qui profite, en quelque sorte, de la sécurité sociale. Est-ce que ça correspond à votre...

M. COITEUX (DUPLESSIS): M. Séguin, vous nous avez présenté un mémoire qui traite de la sécurité sociale en général.

M. SEGUIN: Oui.

M. COITEUX (Duplessis); Vous présentez un plan d'ensemble et, comme vous le savez, nous sommes surtout ici pour discuter de la possibilité de l'installation d'un régime d'assurance-maladie dans le Québec. Comme vous le savez, dépendamment des puissances économiques ou de la capacité économique d'une province ou d'un pays, ces choses-là ne peuvent venir en même temps. Par ordre de priorité, où classez-vous l'assurance-maladie?

M. SEGUIN: L'assurance-maladie revient exactement dans le même projet que lorsque vous avez à prévoir la vie d'un individu depuis sa naissance jusqu'à son décès, c'est-à-dire que, normalement, elle devrait démarrer au départ.

M. COITEUX (Duplessis): Bien, je comprends, là vous me donnez une réponse très théorique, et je vous demande de vous placer dans le contexte québécois.

M. SEGUIN: Actuellement, dans le Québec? M. COITEUX: Oui.

M. SEGUIN: Tout ça, évidemment, dépend de l'organisation qui existe à priori jusqu'à présent pour commencer quelque chose au point de vue, par exemple, du comité consultatif, en tant que régime sur la maladie ou sur les rentes de vieillesse ou quelque chose comme ça.

Mais dans l'ensemble, il faudrait que toutes ces choses-là soient vues dans le même temps, c'est-à-dire, qu'on peut les échelonner. Et si vous demandez justement où je le situe actuellement, c'est peut-être au numéro deux, aussitôt après le prénatal. Il y aura d'abord le prénatal à prévoir et aussitôt après ça, la maladie, étant donné que le prénatal prévoit justement la naissance et lorsque vous avez la naissance, vous avez seulement la maladie...

M. COITEUX (Duplessis): C'est la raison...

M. SEGUIN: ... parce que toute personne qui naît, je m'excuse une seconde, toute personne naissante est un futur malade fonctionnel, automatiquement.

M. COITEUX (Duplessis): C'est ça. La raison pour laquelle je pose cette question-là, c'est que vous êtes certainement un grand économiste très compétent, seulement, ce qui arrive souvent dans ces grandes théories-là, c'est qu'on a une tendance à oublier le côté des possibilités économiques. Alors, s'il faut établir des priorités, c'est la raison pour laquelle je vous demande où situez-vous, si on ne peut pas tout faire en même temps économiquement — théoriquement ce serait l'idéal, mais pratiquement ce serait impossible, ça tout le monde le sait...

M. SEGUIN: Je vous réponds immédiatement, au numéro deux, aussitôt après le prénatal.

M. COITEUX (Duplessis): Merci. M. SEGUIN: Bienvenue. M. COLLARD: Pas avant! M. BERTRAND: M. Séguin... M. SEGUIN: Oui.

M. BERTRAND: ... en tant qu'administrateur d'une caisse d'allocations en France, vous avez nécessairement connu le système français de sécurité sociale, sous tous ses aspects...

M. SEGUIN: Certainement.

M. BERTRAND: ... et en profondeur.

M. SEGUIN: Certainement.

M. BERTRAND: Vous êtes ici dans le Québec depuis quinze ans.

M. SEGUIN: Pas dans le Québec, je fus d'abord en Nouvelle-Ecosse, pendant sept ans.

M. BERTRAND: Bon, dans le Canada depuis quinze ans...

M. SEGUIN: Exactement.

M. BERTRAND: ... et puis naturalisé depuis sept ans.

M. SEGUIN: Exactement.

M.. BERTRAND: Vous avez eu l'occasion de considérer nos lois de sécurité sociale, dans le Québec, tant au palier provincial qu'au palier fédéral. Est-ce que, d'après vous, et dans votre opinion, nos lois de sécurité sociale sont inférieures, égales ou supérieures dans leur ensemble à ce qui existe en France à l'heure actuelle?

M. SEGUIN: Elles sont inférieures, je vous le dis immédiatement. Elles sont inférieures, étant donné qu'elles sont plutôt impalpables. Elles visent, elles englobent des choses en général, en ne spécifiant pas justement les rôles particuliers à apporter quant à des points de vue de comité ou d'organisation ou de personnes supposées compétentes à s'occuper d'organismes comme ça. C'est toujours privé. La sécurité sociale, en quelque sorte, existe en tant que loi, mais en tant que fonction, je pense qu'elle est plutôt privée pour 50%.

M. BERTRAND: Mais aucune de vos lois de sécurité sociale en France, ou du moins plusieurs ne sont pas sur un plan universel.

M. SEGUIN: Pour en revenir au plan universel, justement, qu'appelez-vous un plan universel? Vous appelez un plan universel dans le Canada, interprovincial?

M. BERTRAND: Non, non, je veux dire qu'en France vous avez des cotisations ou des plans de sécurité sociale où l'employé et l'employeur sont appelés à souscrire.

M. SEGUIN: Où l'employé et l'employeur, je ne vous suis pas là.

M. BERTRAND: Oui, où les primes sont payées par l'employeur et par l'employé.

M. SEGUIN: Oui. Certainement oui.

M. BERTRAND: Mais quel est le rôle de l'Etat et qu'est-ce que l'Etat fournit dans tout cela?

M. SEGUIN: Cela forme une caisse de compensation pour les régions qui sont moins aptes à obtenir leur cotisation sur un plan normal ou logique. C'est justement le rôle des compensations et coopératives qui existent au sein des caisses principales qui existent à Paris au point de vue de sécurité sociale ou d'allocation familiale. Elles compensent entre elles, au point de vue financier, pour des régions qui n'ont pas suffisamment d'entrées de cotisations. Mais, pour en revenir au régime universel, je vous répète que le régime universel, je ne sais pas dans le sens que vous le considérez ici au Canada, mais est-ce que c'est dans les sens interprovincial parce que le terme « universel » veut dire « dans le monde ».

M. BERTRAND: Oui, mais vous avez toujours une pension de sécurité de vieillesse.

M. SEGUIN: Non je parle ici, au Canada; on emploie à beaucoup d'endroits ici, entre le volume numéro 1 et le volume 10 par exemple, le terme « universel ».

M. TREPANIER: C'est relatif.

M. SEGUIN: C'est « interprovincial ». Le terme veut dire « interprovincial »; ce n'est pas « universel » parce que le terme « universel » est international.

M. LE PRESIDENT: « Universel » veut dire que c'est accessible à tout le monde dans le district dont il s'agit.

M. COLLARD: Dans le Québec. M. SEGUIN: Au Canada.

M. LE PRESIDENT: Non, non pas nécessairement au Canada. Universel dans le Québec, sans que les gens de Nouvelle-Ecosse aient droit aux mêmes avantages.

M. TREPANIER: C'est une caractéristique du régime.

M. SEGUIN: Oui, mais le terme « universel » n'est pas vu de cette façon-là.

M. LE PRESIDENT: Non, mais c'est employé dans un sens que tout le monde comprend, n'est-ce pas.

M. SEGUIN: Moi, je ne le comprenais pas dans ce sens-là.

M. LE PRESIDENT: Vous faites exception.

M. SEGUIN: Je vous remercie. Parce que le terme « universel », personnellement, on peut toujours regarder dans le dictionnaire, n'importe lequel, regardez le terme « universel », le terme « universel » indique l'univers, c'est-à-dire international.

M. LE PRESIDENT: Cela veut dire le monde, c'est cela. Il faut dire que le monde, c'est Québec.

M. SEGUIN: Très bien si le monde, c'est Québec, c'est parfait. Je vous approuve d'ailleurs. C'est mon monde à moi maintenant.

M. TARDIF: Alors quel mot suggérez-vous pour remplacer universel?

M. SEGUIN: Provincial ou interprovincial. Selon les régimes.

M. BRISSON: On peut avoir des échanges avec d'autres pays aussi,,

M. SEGUIN: Parce que le terme « universel », réellement il est caduc à mon sens.

M. COLLARD: M. Séguin, je pense que lorsque l'on emploie le terme « universel », cela veut dire universel pour tous les Québécois de la province de Québec. Cela veut dire qu'il s'applique à tous.

M. SEGUIN: C'est certain, mais pour une personne qui lit « universel » pour la première fois, vous avez justement... C'est ce terme « universel » qui indique... que si vous utilisez le terme « universel », c'est l'univers.

M. TREPANIER: Non, non.

M. SEGUIN: Alors si c'est indiqué justement « universel » dans la province de Québec, ou « interprovincial », le terme est plus juste...

M. BERTRAND: Nécessairement, si vous avez été ici pendant 15 ans, quand le gouvernement fédéral a institué son plan d'assistance, de sécurité de vieillesse à 70 ans, c'est le mot qui a été employé.

M. SEGUIN: C'est bien, il n'est pas meilleur pour cela.

M. BERTRAND: Non, il n'est peut-être pas

meilleur, mais en tant qu'on est concerné au Canada ou dans le Québec...

M. SEGUIN: Certainement.

M. BERTRAND: ... on le comprend et on l'accepte.

M. SEGUIN: Certainement, mais de toute façon, étant donné que les termes doivent être logiques lorsqu'il s'agit de sécurité sociale ou de plans qui sont supervisés aux points de vue internationaux dans des comités ou dans des débats internationaux, il y aura une certaine confusion lorsque vous emploierez le terme « universel ».

M. RENAUD: M. Séguin, je ne voudrais pas prolonger le débat sur cela mais, puisque la question a été soulevée, Quillet, c'est français cela?

M. SEGUIN: Comment?

M. RENAUD: C'est un bon dictionnaire, Quillet?

M. SEGUIN: Ah oui!

M. RENAUD: C'est parfait cela... définition des mots.

M. SEGUIN: Tous les dictionnaires sont bons.

M. KENNEDY: C'est français à part cela.

M. RENAUD: Universel: général. Alors cela pourrait être un plan général dans la province de Québec. On peut donc l'appeler universel.

M. SEGUIN: Oui, en indiquant le terme « de la province », je suis parfaitement d'accord avec vous.

M. RENAUD: Qui s'étend en tout et partout.

M. SEGUIN: Oui, je suis absolument d'accord avec vous du moment qu'on emploie le terme de la province ou « interprovincial » selon la compétence de l'assurance.

M. LE PRESIDENT: Je pense que nous sommes universellement convaincus que le mot « universel » a une portée que tout le monde comprend. Est-ce que nous pouvons passer maintenant à des questions encore plus sérieuses?

M. SEGUIN: Je suis à la disposition de ces messieurs.

M. KENNEDY: M. Séguin, évidemment vous savez que, dans l'instauration d'un plan d'assurance-santé, cela présume immédiatement une certaine somme d'argent qui s'en va vers les biens de consommation.

M. SEGUIN: Oui.

M. KENNEDY: Est-ce que vous avez des idées arrêtées sur l'étape à suivre en ce sens? Quels doivent être les montants dont on peut disposer pour la consommation? Les montants qu'on prend pour la consommation, on ne les a pas pour l'investissement permanent et fixe.

Alors, est-ce que vous pouvez nous donner certaines idées sur la proportion que l'on doit peut-être garder? Ici, on parle de l'instauration d'un système d'assurance-santé universel à l'intérieur de la province, ça va? Maintenant quelle doit être l'étape par laquelle on doit passer? Est-ce que l'on doit passer à un régime complet immédiatement, ou devrait-on procéder par étapes à la lumière des conditions économiques et des besoins d'investissement de la province?

M. SEGUIN: Certainement qu'il faut procéder par étape, en échelonnant le pourcentage sur une année ou deux années, selon les diverses applications que vous aurez à produire. Et, pour en revenir à la répartition de sommes investies ou du retour de certaines sommes dans la vie économique, par exemple, de la province de Québec, automatiquement, étant donné que cette somme-là revient dans la répartition des familles en général depuis la prénaissance jusqu'au moment du décès, ces sommes-là reviennent automatiquement aux citoyens qui vivent au sein de la communauté dans le Québec.

M. KENNEDY: Evidemment, c'est une péréquation qui se fait à ce moment, les sommes qui sont redistribuées à la famille...

M. SEGUIN: Indirectement...

M. KENNEDY: ... sous différentes formes...

M. SEGUIN: ... par prestations...

M. KENNEDY: ... par prestations...

M. SEGUIN: ... diverses, oui?

M. KENNEDY: ... ce sont des sommes qui

sont prises dans des montants qui seraient probablement passés à des investissements. Alors, je vous demande si vous pouvez nous donner, par exemple,"l'étape à suivre.

M. SEGUIN: Eh bien! pour ce qui existe en France en sécurité sociale, les plus-values des sommes disponibles sont placées à la caisse de dépôt et consignation que vous connaissez, ou dans des grandes banques telles que la Banque de France ou des choses comme celle-là. Mais, de toute façon, la caisse de dépôt et de consignation est le principal organisme qui est en relation directe avec la sécurité sociale en France, de manière à faire des investissements intéressants pour la sécurité sociale nationale en général.

Cela répond à votre demande?

M. TREPANIER; A la page 6 de votre rapport, M. Séguin...

M. SEGUIN: Oui?

M. TREPANIER: ... vous énoncez certains genres de prestations familiales.

M. SEGUIN: Oui.

M. TREPANIER: ... Et au paragraphe D, vous parlez de l'allocation de salaires uniques...

M. SEGUIN: Oui.

M. TREPANIER: ... ce qui, si je comprends bien, constitue l'allocation familiale exposée au paragraphe C.

M. SEGUIN: Non, non, non, non! Cela devient au-dessus, c'est supplémentaire!

M. TREPANIER: C'est supplémentaire? M. SEGUIN: Oui, oui, oui, oui!

M. TREPANIER: Alors, donc, il y a l'allocation familiale de 80 NF...

M. SEGUIN: Qui est une chose...

M. TREPANIER: ... qui est une chose,...

M. SEGUIN: ... plus le salaire unique qui en est une autre!

M. TREPANIER: ... plus 150 NF, ce qui fait 230 NF!

M. SEGUIN: Exactement,ce qui fait que la mère qui est au foyer est réellement l'éducatrice de la famille.

M. TREPANIER: Bon. Justement, j'en viens à ma question.

M. SEGUIN: Oui?

M. TREPANIER: S'agit-il là d'une allocation du genre de celle que l'on mentionne ici comme mère nécessiteuse?

M. SEGUIN: Non, absolument pas!

M. TREPANIER: Alors, à ce moment-là, l'allocation de salaire unique est versée à toute mère de famille qui est au foyer, peu importe que son mari travaille ou non,...

M. SEGUIN: Absolument pas!

M. TREPANIER: ... peu importe que son mari soit un travailleur autonome ou salarié?

M. SEGUIN: Absolument pas! Et si, par exemple, le salaire unique tombe dans des familles qui ne dépendent pas de ce salaire unique ou des allocations familiales, et il ne manque pas, par exemple, d'industriels ou de grosses entreprises qui n'en dépendent absolument pas! C'est reversé, par exemple, à des comités d'entreprises au sein des mêmes compagnies. C'est autre chose, c'est à eux de juger s'ils en ont besoin ou pas, et au point de vue social...

M. TREPANIER: C'est justement...

M. SEGUIN: ... de reverser cette somme à des personnes qui en ont beaucoup plus besoin qu'eux.

M. TREPANIER: C'est justement ce que je demandais.

M. SEGUIN: Elles sont versées automatiquement, cette allocation est versée automatiquement .

M. TREPANIER: A un secteur seulement de la population?

M. SEGUIN: Pas à un secteur de la population, à toutes les personnes, du moment que la mère reste au foyer.

M. TREPANIER: Est-ce que l'épouse du président de la France qui aurait des enfants, en

supposant qu'il y aurait un Président assez jeune, bénéficierait de cette allocation?

M. SEGUIN: Sa femme ou lui-même prennent le chèque, ou alors, je vous l'indique, ils versent ce chèque à une organisation sociale indépendante.

M. TREPANIER: Qu'est-ce que vous voulez dire par là?

M. SEGUIN: Eh bien! ils acceptent le chèque mais le reversent à une autre association, ça ne les intéresse pas! Mais ils font oeuvre en quelque sorte sociale en reversant ce chèque qui ne les intéresse pas à une autre oeuvre indépendante. C'est une question de personnalité, de jugement personnel.

M. TREPANIER: Y en a-t-il beaucoup qui le retournent ou qui le reversent?

M. SEGUIN: J'en connaissais pas mal!

M. KENNEDY: M. Séguin, est-ce que, selon vous, dans un plan d'assurance-santé — et je me limite à cela ici — est-ce qu'il doit y avoir une participation du bénéficiaire éventuel?

M. SEGUIN: Certainement!

M. KENNEDY: Est-ce que vous croyez que les charges doivent être réparties entre trois secteurs, par exemple, le bénéficiaire éventuel, l'employeur et l'Etat?

M. SEGUIN: C'est exactement ainsi.

M. LE PRESIDENT: Messieurs du comité, avez-vous d'autres questions à poser à M. Séguin?

M. KENNEDY: M. Séguin, est-ce que vous êtes pour l'inclusion des médicaments dans un plan d'assurance-maladie?

M. SEGUIN: Certainement. Je tiens à votre disposition, si cela peut vous intéresser — enfin, je ne sais s'il y a des représentants par exemple, de pharmaciens ou de docteurs, ici — je tiens à leur disposition, de toute façon, des photocopies de ce qui existe au point de vue maladie, de sécurité sociale, au point de vue intervention chirurgicale ou autre. Si vous êtes Intéressés, je puis vous les communiquer.

M. LE PRESIDENT: Alors, s'il n'y a pas d'autres questions, je veux remercier M. Sé- guin d'être venu, du mémoire que vous avez présenté et de la façon agréable avec laquelle vous avez répondu aux questions provenant des membres du comité. Je pense qu'universellement nous sommes très contents de votre visite.

M. SEGUIN: Je vous remercie également de votre bon accueil, premièrement, et deuxièmement, je réitère mes félicitations aux membres du comité conjoint et du comité de recherches, pour son beau travail dans la présentation des onze volumes que nous avons eus. La rédaction en est très claire et encore une fois, félicitations.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que M. Larue est présent? M. Larue a été convoqué pour midi moins quart.

A l'ordre messieurs, s'il vous plaît. M. Larue, voulez-vous faire un résumé du mémoire que vous avez présenté au comité? Comme les membres du comité ont déjà pu prendre connaissance de votre mémoire, il n'est pas nécessaire que vous en fassiez la lecture. Voulez-vous alors nous donner un sommaire des recommandations que vous voulez faire au comité?

M. LARUE: D'abord, je dois vous apprendre que je suis ici dans des circonstances très tristes, ayant perdu mon épouse dont le service avait lieu jeudi dernier. Ce qui veut dire que je n'ai pas eu grand temps de prendre des notes, mais cependant si vous désirez me poser toutes questions relativement à mon plan, je suis prêt à répondre.

M. TREPANIER: M. Larue, à la page 3, vous mentionnez que le système que vous proposez serait contributoire et obligatoire pour toute la population du Canada et vous ajoutez que la contribution hebdomadaire serait de $1 par semaine pour chaque citoyen de notre pays...

M. LARUE: Oui.

M. TREPANIER: Sur quoi vous basez-vous pour établir que cette cotisation devrait être de $1 par citoyen, par semaine?

M. LARUE: Il y a au Canada en moyenne 3.7 personnes par famille, ce qui veut dire que ça coûterait $3.70 par semaine pour chaque famille et célibataire, alors ça revient bien à $1 par semaine par citoyen du Canada.

M. TREPANIER: Oui, mais en fait pourquoi $1 par semaine? C'est suivant une estimation du coût total du système que vous divisez par le nombre de citoyens?

M. LARUE: Sans doute. Je vous donne le montant des ressources, des dépenses et ça correspond à ça.

M. HARVEY: M. Lame, dans votre mémoire à la page 3, vous établissez un montant total de $364 millions pour le Canada et, selon les estimations du comité de recherche sur l'assurance-santé pour le Québec, il en coûterait $308 millions en 1967 pour les soins médicaux et les médicaments, à l'exclusion de l'hospitalisation. Comment êtes-vous arrivé à ce chiffre de $364 millions?

M. LARUE: Est-ce que vous voulez dire que ce serait provincial ou national?

M. HARVEY: Non, non. Voici, dans votre mémoire, à la page 3, vous établissez que les déboursés par année seraient de l'ordre de $364 millions, alors que nous autres, nous avons des chiffres en main qui nous sont fournis par le comité de recherches sur l'assurance-santé pour le Québec et les experts établissent le coût à $308 millions en 1967 pour les soins médicaux et les médicaments, toujours ceci à l'ex- clusion de l'hospitalisation. Comment vous, êtes-vous arrivé à des chiffres de $364 millions par année pour le Canada?

M. LARUE: Mais vous avez le tableau que j'ai fait. Ce sont des calculs que j'ai faits.

M. HARVEY: On n'a pas de tableau pour vos calculs de déboursés. Les déboursés par année seraient de l'ordre suivant: médecins, spécialistes, opérations, hospitalisations...

M. LARUE: C'est ça.

M. HARVEY: ... médicaments, etc., $364 millions. Mais vos tableaux...

M. LARUE: En supplément, $146 millions et $29 millions pour l'administration.

M. HARVEY: Mais vos $364 millions, comment vous êtes-vous pris pour les sortir? Les experts nous donnent $308 millions, nous autres, en 1967, pour les soins médicaux, les médicaments, toujours à l'exclusion de l'hospitalisation. C'est ça qu'on voudrait. Moi, j'aimerais bien ça vous entendre sur vos $364 mil- lions comparativement aux $308 millions que l'on a de la main des experts.

M. LE PRESIDENT: M. Larue, vous pouvez vous asseoir, il n'y a aucune objection.

M. LARUE: Non, j'aime autant rester debout. Comme je l'ai dit tout à l'heure, d'après les revenus et les déboursés, c'est basé surtout sur mon expérience. Moi, j'ai administré un plan d'assurance-santé pendant trois ans. Je me suis inspiré de mon expérience pour faire mon plan. Maintenant ça, des chiffres, j'en ai énormément, mais cela arrive bien à ça.

Ceux qui ont fait des recherches, s'ils n'ont pas l'expérience que j'ai, je me demande sur quoi ils se basent.

M. HARVEY: Voici, M. Larue. Ma question est bien celle-ci. Lorsque vous établissez le revenu national des contributions, vous vous basez sur une contribution familiale repartie...

M. LARUE: Oui.

M. HARVEY: ... à tant de dollars par semaine, cela fait tant par mois, ça fait tant par année.

M. LARUE: C'est ça.

M. HARVEY: Maintenant quand vous arrivez à vos déboursés, dans votre mémoire on a toute une colonne qui nous dit: médecins, spécialistes, opérations, hospitalisations, médicaments, $364,000 millions...

M. LARUE: Oui.

M. HARVEY: ... et moi, comme membre du comité, j'ai en main des documents en provenance des experts du comité de recherches sur l'assurance-santé qui, eux, nous disent où ils ont puisé leurs chiffres pour établir un coût total de $308 millions en 1967 pour les soins médicaux, les médicaments, à l'exclusion de l'hospitalisation pour le Québec. Mais vous là, si je comprends bien votre réponse, vos chiffres sont basés sur votre expérience acquise en dirigeant vous-même un plan...

M. LARUE: C'est ça.

M. HARVEY: ... d'assurance-santé pendant trois ans. Cela couvrait combien de personnes ça, votre plan d'assurance-santé que vous avez opéré, que vous avez dirigé?

M. LARUE: Je le note ici, 18,020,000.

M. HARVEY: Le plan que vous avez administré couvrait 18,020,000...

M. LARUE: Oh non! ce que j'ai administré? J'ai commencé à zéro.

M. HARVEY: Je voudrais savoir, moi, M. Larue, le plan de santé que vous avez administré...

M. LARUE: Oui.

M. HARVEY: ... vous, où vous avez puisé votre expérience...

M. LARUE: Oui.

M. HARVEY: ... cela couvrait combien de personnes?

M. LARUE: Quand j'ai quitté, quand j'ai discontinué, je donne les raisons d'ailleurs f avais dans le temps environ 4,000 assurés.

M. HARVEY; Vous aviez 4,000 assurés?

M. COLLARD: Vous avez déterminé que 4,000 assurés...

M. LARUE: Environ.

M. COLLARD: ... cela devait coûter tant, alors c'est la multiplication pour le nombre de personnes au Canada et puis c'est de là que proviennent vos chiffres.

M. LARUE: C'est ça.

M. COLLARD: ... de $368 millions.

M. LARUE: C'est ça.

M. COLLARD: Est-ce que vous avez consulté des comptables, ou des économistes?

M. LARUE: Bien, comme je le dis, j'avais soumis mon travail à des experts, hommes d'affaires en vue, médecins et ensuite des auditeurs...

M. HARVEY: C'est basé sur vos 4,000 personnes que vous avez administrées.

M. LARUE: Oui.

M. HARVEY: Je vous remercie beaucoup, M. Larue.

M. LARUE: Entre autres, M. T.-T. Smythe, qui était gérant général de la Banque d'épargne, qui a pris trois semaines pour examiner mon plan, les détails que...

M. RENAUD: A la page 3, M. Larue, vous dites que le taux de maladie maximum est de 2% de la population.

M. LARUE: C'est ça.

M. RENAUD: J'aimerais bien, pour mon renseignement, savoir, comment vous arrivez à ce chiffre de 2%?

M. LARUE: Je vais vous donner une preuve de ce qui s'est passé à l'Alliance catholique des professeurs de Montréal. J'avais donné une conférence là, et j'avais affirmé que 2% était le taux maximum pour la maladie. Alors, j'ai été convoqué au comité de régie de cette association, et là il y avait un monsieur Lafrance, qui était le frère du surintendant des assurances, qui avait remplacé M. Dugal. Alors, lui, il m'a demandé, il m'a dit: « Moi, j'ai fait des recherches, je suis allé en Europe, j'ai fait des études, je ne peux pas comprendre que vous puissiez affirmer que 2% soit le maximum pour la maladie ». Alors, j'ai dit: « Monsieur, je vais vous en donner la preuve ». J'ai demandé au secrétaire, M. Alain, j'ai dit: « Voulez-vous me dire, monsieur, combien vous avez de suppléants actuellement, ce qui correspondait aux professeurs malades ». Il dit: « il y en a 34 ». Alors, j'ai demandé à M. Lafrance: « Combien êtes-vous de professeurs »? 1,800. Alors, j'ai dit: « M. Lafrance, voulez-vous me donner le taux de 2% de 1,800 ». Alors, il dit: « C'est 36 ». Alors, là, bien ça a été des applaudissements. Je pense que je ne le note pas dans mon plan, et puis, M. Lafrance s'est retiré: « Vous avez raison, M. Larue ».

M. RENAUD: Alors, c'est sur ça... M. LARUE: Absolument.

M. RENAUD: ... que vous vous basez pour donner les chiffres.

M. LARUE: Cela, je puis soumettre ça à tous les experts, actuaires, si vous le voulez.

M. RENAUD: Merci, monsieur.

M. LARUE: J'ai des preuves là-dessus.

M. BERTRAND: M. Larue, à cause de l'expérience que vous avez, vous avez été dans ces

plans d'assurance-là, vous les avez étudiés. D'ailleurs vous avez un mémoire qui est un travail de bénédictin dans lequel vous apportez une grande série de considérations, de commentaires et d'observations. Et je comprends, si je me réfère à la page 14 de votre mémoire, que vous êtes en faveur d'un plan d'assurance-santé mais sur une base contributoire et obligatoire, comme c'est le cas de l'assurance-chômage.

M. LARUE: Justement. M. BERTRAND: C'est ça.

M. CLOUTIER: M. Larue, vous dites qu'aucune entreprise ne pourrait évoluer plus efficacement et plus sûrement que sous l'égide du ministère national de la Santé...

M. LARUE: C'est ça.

M. CLOUTIER: Alors, vous recommandez un régime d'assurance sur une base nationale, c'est-à-dire sous l'autorité du gouvernement fédéral.

M. LARUE: Oui.

M. CLOUTIER: Croyez-vous qu'à la suite de cette recommandation, un plan provincial pourrait s'appliquer? Un plan d'assurance-maladie, parce que l'assurance-maladie et la santé sont de la juridiction des provinces. Est-ce qu'un régime provincial pourrait s'appliquer? Est-ce que votre plan pourrait convenir à un régime provincial à la province de Québec?

M. LARUE: Est-ce que vous avez pris connaissance de ma note que le fédéral ferait la perception des contributions et que ces contributions-là seraient distribuées au prorata de la population de chaque province?

M. CLOUTIER: Mais, une juridiction ferait donc la perception et l'autre...

M. LARUE: Oui, mais maintenant, ce serait administré par chaque province, parce que je comprends, je le note à quelque part ici, que l'assurance-maladie ou l'assurance-santé est du domaine exclusivement provincial.

M. CLOUTIER: Alors, comment pouvez-vous concilier avec les principes, la pratique de la perception des impôts par un gouvernement et la dépense de ces mêmes impôts par un autre gouvernement?

M. LARUE: Je le note ici, à la page 14: « Il est connu depuis longtemps que la santé publique et les services d'hygiène sont des questions qui relèvent des gouvernements provinciaux ».

Mais maintenant, je le lis ici. « Il y aurait, suivant l'Acte de l'Amérique Britannique du Nord ». Maintenant, ici, je dis, qu'il n'y aurait donc rien de changé à ces dispositions par le fait de l'institution d'un régime national qui consisterait à apporter l'uniformité de ce régime au niveau de toutes les provinces qui conserveraient leur entière autonomie dans l'administration intégrale réservée et garantie à chaque province.

M. TARDIF: Pourquoi insisteriez-vous pour que ce soit le fédéral qui ait la perception de tout ça? On semblerait un peu, nous autres les provinces, comme quelqu'un qui donne sa montre puis qui demande l'heure ensuite.

M. LARUE: C'est bien simple. C'est que plus il y a des gens qui vont contribuer, comme dans toute chose, ce qui va apporter une prime moindre et infiniment plus de revenus, sur 19 millions que nous sommes actuellement, près de 20 millions au Canada, si tous contribuent, c'est infiniment préférable que s'il n'y avait que la province de Québec. Ensuite, le taux de membres par famille du Canada, c'est 3.7 et pour la province de Québec, c'est 4.25.

M. COLLARD: A ce compte-là, M. Larue, il y aurait avantage à proposer un régime qui soit collé au régime américain, avec les Etats-Unis.

M. LARUE: Bien, il y a des régimes, dans certains Etats, mais seulement, ils n'ont pas l'assurance-santé aux Etats-Unis, comme il n'y en a pas non plus en Afrique du sud et comme au Canada aussi.

M. RENAUD: M. Larue, dans l'institution d'un organisme national, comme vous dites, là, vous préconisez la disparition complète de tous les systèmes...

M. LARUE: Absolument, absolument. Parce que le gouvernement se substituerait aux sociétés d'assurance-maladie pour recevoir ces contributions. Alors, aujourd'hui, il y a environ 2 millions de personnes qui sont assurés dans la Croix Bleue, le Service de santé de Québec. Maintenant, ils donnent un service partiel.

Dois-je vous dire que, présentement, j'administre le plan d'assurance-maladie de Canada Life de Toronto et puis j'en connais quelque chose parce que tous les jours, vous savez...

M. RENAUD: Alors, ça veut dire que, le plan que vous préconisez couvrirait tous les actes médicaux, tous les médicaments...

M. LARUE: Absolument, absolument. Ce serait complet.

M. RENAUD: ... tout ce qui touche la médecine et ...

M. LARUE: Les médicaments, l'hospitalisation.

M. RENAUD: ... les soins para-médicaux, la chirurgie, etc...

M. LARUE: Services chirurgicaux. C'est complet.

M. RENAUD: Et, avec ça, vous arrivez à $364 millions par année pour le Canada? Avec tout ce que vous dites de ...

M. LARUE: $919 millions. M. RENAUD: $919 millions.

M. LARUE: Oui, aujourd'hui ce serait $1 milliard.

M. LE PRESIDENT: Messieurs, y a-t-il d'autres questions que vous voulez posez à M. Larue?

M. RENAUD: Non.

M. LE PRESIDENT: Alors, dans les circonstances, M. Larue, je vous remercie d'être venu devant le comité, de la façon que vous avez répondu aux questions posées par les différents membres.

M. LARUE : Je vous remercie beaucoup.

M. LE PRESIDENT: Le comité doit continuer sa séance à huis clos, alors je demanderais au public de se retirer.

Reprise de la séance à 3 h 23 p.m.

M. ROY (Président du comité de l'assurance-maladie): A l'ordre, messieurs.

Je demanderais à M. Dupré, Président de l'Association des techniciens dentaires de la province de Québec, de nous faire un bref exposé du contenu du mémoire présenté par l'association. M. Dupré.

M. DUPRE: Messieurs, je vous remercie. D'abord, je dois vous présenter mes confrères, ici, M. Hubert Bélisle, qui est le secrétaire de l'Association des techniciens dentaires, et M. Léo Morissette, de la Beauce, qui est un directeur de l'association.

M. le Président, messieurs du comité, je dois d'abord vous remercier d'avoir bien voulu prendre connaissance de notre mémoire et du temps que vous nous accordez. Etant du groupe para-médical, nous avons cru bon de vous faire quelques suggestions à travers notre mémoire, que vous connaissez déjà. Depuis quelques années l'association a travaillé énormément pour l'avancement du technicien dentaire dans la province, à un tel point que, depuis quatre ou cinq ans, nous avons réussi à accroître le nombre de nos membres de 12%.

Je crois que c'est déjà un bon progrès de ce côté-là. D'un autre côté, avec l'aide du ministère de l'Education, nous espérons en septembre prochain avoir une école administrée par le ministère qui encore là fera beaucoup pour produire une qualité supérieure dans l'intérêt du public. Les gens qui auront besoin de nos services auront certainement un meilleur service avec des gens mieux éduqués aux points de vue général et de la technologie dentaire. En même temps, ceci contribuerait à rapatrier les quelques millions qui s'en vont dans d'autres provinces et qui normalement devraient rester dans la nôtre et qui devraient être gagnés par nos techniciens dentaires.

Par le fait même nous croyons faire notre part dans l'organisme de l'assurance-santé. On dit que le Québec est en marche. Les techniciens dentaires sont du Québec et nous voulons aussi être en marche avec vous, alors comme nous sommes de la province, le Québec en marche c'est réellement vrai. Maintenant s'il y a quelques questions, — je ne veux pas m'étendre plus longtemps, — je m'efforcerai d'y répondre le mieux possible avec l'aide de mes confrères si c'est nécessaire. Merci, messieurs.

M. VAILLANCOURT: J'aurais une question à vous poser. Dans votre mémoire, à la page 3,

paragraphe 4, Vous dites, compte tenu du fait que le cours de médecine, y compris l'internat, dure cinq ans. Votre association croit-elle qu'il est absolument nécessaire de prendre cinq ans pour former un technicien dentaire?

M. DUPRE: Nous le croyons, Monsieur. Nous avions cinq ans, parce que nous avions seulement des cours du soir. Tandis qu'avec l'école qui sera administrée par le ministère de l'Education, nour pourrons le faire en trois ans. Nous relevons par le fait même le côté éducationnel, c'est-à-dire que nous ajoutons les douzième, treizième et quatorzième années tout en insérant dans ces trois années le cours complet de technologie dentaire.

M. VAILLANCOURT: Actuellement, combien d'heures de cours par année reçoivent les étudiants pendant ces cinq années?

M. DUPRE: Actuellement nous avons vingt cours par année de deux heures. Ce qui est nettement insuffisant. J'ajouterai à ça que, pour ne pas creuser de vide entre le temps où nous aurons formé des étudiants dans notre nouvelle école, nous allons continuer l'ancien cours pour ces gens-là qui ne seront pas qualifiés pour entrer à l'institut parce qu'ils n'auront pas le niveau nécessaire, parce qu'à l'institut nous demandons une onzième scientifique tandis qu'actuellement nous acceptons les candidats de onzième générale.

M. COLLARD: Je vois que votre association a été légalement reconnue en 1944.

M. DUPRE: C'est juste.

M. COLLARD: Combien de membres y a-t-il dans votre association?

M. DUPRE: Approximativement 385, plus 125 étudiants dans le moment.

M. DUPRE (membre du comité): Tous les techniciens qui pratiquent dans la province de Québec font partie de votre association?

M. DUPRE: Oui, ceux qui sont reconnus comme techniciens. Il faut ajouter à ça, que malheureusement nous avons des techniciens — moi je les appelerai pas des techniciens ceux-là mais les mécaniciens — qui ne sont pas membres de l'association mais qui touchent à la dentition.

M. COITEUX (Duplessis): Ce sont les « squatters » de la profession.

M. DUPRE: Ce sont des charlatans.

M. BARIBEAU: M. Dupré à la page 6 de votre mémoire, paragraphe 6, vous dites: « L'assurance-santé devrait payer le coût de la prothèse buccale directement aux techniciens dentaires sur présentation des pièces législatives jugées nécessaires.»

Je m'imagine que je me rends chez le dentiste pour des soins dentaires. Son diagnostic est qu'il me faut des prothèses. Le dentiste demande alors au technicien dentaire d'exécuter ces prescriptions.

M. DUPRE: C'est juste.

M. BARIBEAU: Voici ma question: Qui sera responsable, si cela ne va pas bien, si les prothèses sont mal ajustées ou si je ne puis les endurer, le dentiste ou le technicien?

M. DUPRE: Il faut que je vous dise, monsieur que le dentiste a certainement plus de responsabilités parce que c'est lui qui les ajuste dans la bouche. Seulement, nous travaillons sur prescription du dentiste et nous fabriquons l'appareil sur sa prescription.

M. BARIBEAU: Est-ce que le dentiste ne peut pas me répondre dans ce cas-là: Allez rencontrer le technicien dentiste, vous l'avez payé?

M. DUPRE: Non monsieur, c'est illégal, monsieur.

M. BARIBEAU: Alors le dentiste conserve sa responsabilité entière vis-â-vis de son client?

M. DUPRE: Exactement.

M. THEBERGE: M. Dupré, comment pouvez-vous demander que l'assurance-maladie paie le technicien directement quand vous mentionnez — d'ailleurs, c'est la loi — que votre seul acheteur est le dentiste ou le médecin?

M. DUPRE: Exactement.

M. THEBERGE: Alors il me semble que c'est incompatible, ça.

M. DUPRE: Nous avions pensé, monsieur, que si nous avions un système de quatre prescriptions, comme nous avons des prescriptions pour faire notre travail, une demeurerait aux techniciens dentaires, une demeurerait aux dentistes, une à l'assurance-santé, c'est-à-dire

deux aux dentistes parce qu'il faut en retrouver une nous autres aux dentistes, alors ça voudrait dire qu'il en aurait deux chez le technicien, une que nous lui retournons, une que nous gardons, une pour l'assurance-santé et une pour le dentiste.

M. THEBERGE: Oui, mais ça ne change rien, ça.

M. DUPRE: Cela veut dire qu'il y aurait un contrôle là-dessus.

M. THEBERGE: Oui, mais ce n'est pas une question de contrôle. C'est que vous dites vous même, ici — d'ailleurs vous avez raison, la loi vous le dites à l'article 17, je pense. Vous dites vous-mêmes que les techniciens n'ont par la loi qu'un seul acheteur qui est le dentiste.

M. DUPRE: Exactement.

M. THEBERGE: Actuellement, si la Commission des accidents du travail, par exemple, fait faire un travail par un dentiste, c'est un peu comme l'assurance-maladie, mais qui vous paie?

M. DUPRE: C'est le dentiste.

M. THEBERGE: C'est le dentiste, c'est évident.

M. DUPRE: C'est sûr.

M. THEBERGE: Alors vous demandez quelque chose, vous proposez quelque chose qui est absolument illégale.

M. DUPRE: Je pourrais peut-être vous éclairer un peu plus là-dessus. Je ne crois pas que ce soit illégal, seulement, nous avons pensé qu'avec nos faibles moyens nous sommes obligés de porter des comptes qui sont énormes.

M. COITEUX (Duplessis): Les dentistes ne paient pas?

M. THEBERGE: Bien, pas mon technicien à moi toujours.

M. DUPRE: Ah! vous êtes dentiste, vous. Alors je ne veux pas dire que c'est tout le monde mais nous portons des comptes qui sont énormes. De cette façon-là, étant payés directement par le gouvernement, nous serions au moins sûrs d'être payés.

M. THEBERGE: Cela évidemment je ne peux pas en discuter. Seulement si vous voulez prendre des arrangements avec mon technicien, je pense qu'il est payé à tous les mois. Mais de toute façon cela ne change absolument rien. Vous demandez d'être payé par l'assurance-maladie.

M. DUPRE: Avec des pièces justificatives.

M. THEBERGE: Non, non, ce n'est pas légal. Ce n'est pas légal d'après votre propre loi, alors vous ne pouvez pas demander ça.

M. COLLARD: Je comprends que c'est difficile pour le député de Témiscamingue de poser la question, mais est-ce que je pourrais vous demander si vous avez des chiffres, des statistiques concernant les comptes que les techniciens doivent supporter de la part des dentistes?

M. DUPRE: Nous en avons. Je pourrais vous donner mes propres statistiques, parce que je suis un propriétaire de laboratoire...

M. TARDIF: ... les dentistes en arrachent.

M. DUPRE: Ils arrachent des dents sûrement. Alors, c'est notre seul but, monsieur, essayer de diminuer nos comptes, que nous ne soyons pas obligés de porter des comptes si hauts, pendant si longtemps. C'est la seule raison.

M. BRISSON: Mais la moyenne ça peut se monter à combien par client?

M. DUPRE: Bien je pourrais vous dire par exemple que dans ma propre organisation, j'ai par exemple, un compte qui est à $1,500, à $1,600. Quand j'ai dit à mon client que j'aurais besoin d'argent eh bien, mon Dieu! il va m'envoyé $200. Je reste toujours avec un $1,200 et puis $1,000 en arrière. Je n'ai jamais rien perdu, je vous le ferai remarquer, seulement ça prend du temps pour recevoir...

M. THEBERGE: Merci pour le compliment.

M» COLLARD: On peut supposer que le dentiste également supporte le compte.

M. DUPRE: Oui je peux le supposer.

M. THEBERGE: Oui, supposons.

M. BRISSON: Maintenant tout à l'heure vous

parliez de la prothèse sur prescription, mais quel pourcentage y a-t-il de fait sans prescription, disons illégalement?

M. DUPRE: Bien vous voulez dire en dehors de nos cadres?

M. BRESSON: Par des techniciens dentaires?

M. DUPRE: Oui, oui, je le mentionnais tout à l'heure. Le pourcentage qui peut être fait en dehors est très élevé. Seulement ça ne vient pas tout de nos techniciens dentaires que de gens qui ne sont pas techniciens dentaires, mais des charlatans, comme je vous le disais tout à l'heure. Alors, je dirais que ça irait même à ce moment-là jusqu'à 75%.

M. COLLARD: Est-ce qu'il y a des dentistes qui font affaire avec les charlatans?

M. DUPRE: Non, monsieur!

M. COLLARD: Non.

M. DUPRE: Je ne crois pas du moins.

M. COITEUX: Comment expliquer qu'on envoie faire des prothèses en Ontario? Est-ce qu'en Ontario leurs prix seraient plus bas ou est-ce qu'ils sont mieux équipés? Est-ce qu'ils prennent moins de temps? Est-ce que la réponse est plus adéquate que chez le dentiste? Il doit avoir une raison à ça.

M. DUPRE: C'est qu'actuellement, monsieur, j'attribuerais ça peut-être à un peu de snobisme et un peu à la question de langue. Parce que je vous ferai remarquer que les travaux qui s'en vont dans l'Ontario sont envoyés généralement par les dentistes anglais ou juifs.

M. COITEUX (Duplessis): Mais ça ne change rien. Un gars n'a pas plus de facilités à parler anglais s'il fait faire son dentier en Ontario.

M. DUPRE: Ah! absolument pas! Seulement il y en a qui préfèrent envoyer ça, par exemple, à « Dupre » au lieu de l'envoyer à Dupré.

M. COITEUX (Duplessis): Voici à la page 5, la recommandation 3 parle d'un mode de financement assurant les soins dentaires. Est-ce que cela implique un mode de financement pour les soins dentaires différent de celui qui serait utilisé pour les soins médicaux?

M. DUPRE: Là, vous me posez une question assez embêtante. Voulez-vous me répéter votre question s'il vous plaît?

M. COITEUX (Duplessis): Bien ma question est la suivante: Est-ce que cela implique à la recommandation 3, à la page 5, un mode de financement pour les soins dentaires différents de celui qui serait utilisé pour les soins médicaux?

M. DUPRE: Je ne crois pas, monsieur. Ce que nous voulons dire par là, c'est que les gens c'est plus facile, c'est-à-dire le public en général s'il a une douleur ou un mal quelconque va voir un médecin. Tandis que les dents, s'il lui manque des dents, il va attendre d'avoir de l'argent pour y aller. C'est la différence que je vois.

M. COITEUX (Duplessis): Est-ce que vous voudriez mettre très clair pour le comité, la façon dont vous envisagez, dans votre optique, le financement recommandé? Qu'est-ce que c'est exactement que vous recommandez?

M. DUPRE: Nous aimerions que nos prothèses... actuellement quand on dit: ça coûte, cher les prothèses, il faut remarquer que vous avez deux professions, deux corps à payer. Les honoraires professionnels du dentiste et la prothèse. Le dentiste naturellement la paie sa prothèse aussi. Alors nous aimerions — je ne sais pas de quelle façon vous pouvez organiser ça — mais nous suggérons que le dentiste soit payé pour ses honoraires et que nous nous soyons payés pour nos prothèses.

M. TREPANIER: Est-ce qu'il y a des frais intermédiaires? Qu'est-ce que vous voulez dire par là? Est-ce que le dentiste fait un profit sur le coût qu'il paie?

M. DUPRE: Ah! certainement.

M. TREPANIER: ... les prothèses?

M. DUPRE: Ah! certainement.

M. TREPANIER: Est-ce que vous pourriez nous donner un pourcentage approximatif?

M. DUPRE: Normalement le dentiste, en général, dit qu'il doit charger trois fois ce que ça coûte de laboratoire.

M. MARTIN: Maintenant, il doit y avoir une différence de qualité.

M. DUPRE: Oui, il y a différentes qualités.

M. MARTIN: Comment voyez-vous la qualité avec l'assurance-santé? toujours la qualité supérieure ou si...

M. DUPRE: Je ne crois pas. Je suppose qu'avec l'assurance-santé vous allez établir des normes qui, peut-être, demanderont une certaine qualité de travail. On va dire un dentier en lucitone caractérisé, peut-être que l'assurance-santé ne paiera pas ça. Elle va allouer un montant, mais le patient, lui il va aller chez son dentiste, il va probablement demander au dentiste: Est-ce que vous avez quelque chose de mieux? Je paierais la différence. Je ne parle pas des indigents là, je parle des gens qui peuvent payer leur prothèse.

M. COLLARD: Vous disiez tout à l'heure que vos clients sont seulement des dentistes.

M. DUPRE: Exact, monsieur.

M. COLLARD: Est-ce que, dans certaines régions excentriques, il y a encore des médecins qui font affaire avec...

M. DUPRE: Ah! très très peu. M. COLLARD: Il y en a encore.

M. DUPRE: Il y en a quelques-uns. J'ai eu l'occasion de faire des travaux pour un médecin, moi.

M. THEBERGE: C'est parce qu'il n'a pas le temps, parce qu'il le ferait.

M. DUPRE: Il y en a très peu. Vous êtes d'accord avec moi?

M. THEBERGE: Oui. Ce n'est pas un problème ça, le problème n'est pas là.

M. DUPRE: Celui que je connaissais est décédé. Je n'en connais pas d'autres.

M. THEBERGE: Maintenant, M. Dupré,vous mentionnez qu'il y a deux millions de chiffres d'affaires, de prothèses faites en dehors de la province. Mais si, par exemple, la suggestion que vous faites ici était acceptée, ce serait une arme à deux tranchants. Il y en a beaucoup de techniciens du Québec comme vous autres qui faites des travaux pour l'Ontario?

M. DUPRE: Il y en a pas beaucoup. Il y en a peu.

M. THEBERGE: Bien, il y en a sur les frontières toujours. Il n'y en a peut-être pas à Montréal.

M. DUPRE: Je suppose qu'à ce moment-là, le technicien commencera par servir sa province et puis ensuite comme ça se fait...

M. THEBERGE: Il ne refusera pas de travail, s'il a le temps de le faire. Il ne refusera pas de travail, c'est normal.

M. DUPRE: Bien ça dépend, s'il n'est pas capable de le faire ou s'il accorde un temps. Si vous demandez une prothèse vous et que vous accordez une semaine et que l'on peut seulement vous la donner dans trois semaines, ce n'est pas tellement intéressant, ni pour le patient, ni pour le dentiste.

M. THEBERGE: Mais vous admettez quand même, que si cette suggestion était acceptée, évidemment, les autres provinces adopteront la même chose. Alors, ça fait une loi...

M. DUPRE: Fort possible, fort possible, mais cela ne nous nuirait pas, docteur.

M. THEBERGE: Bien, au point de vue dentaire peut-être pas, mais au point de vue provincial, ça n'aiderait peut-être pas. Au point de vue de l'entente interprovinciale...

M. DUPRE: Si je comprends bien le gouvernement s'efforce d'acheter au Québec, alors je ne vois pas pourquoi dans cette profession-là on ne ferait pas la même chose.

M. THEBERGE: Ah! je comprends votre idée, seulement j'aimerais vous rappeler que c'est un peu dangereux tout de même. Je ne sais pas si le gouvernement serait prêt...

M. COITEUX (Duplessis): Prenez par exemple la ville de Hull. Vous avez certainement des dentistes qui pratiquent là, vous avez certainement des techniciens qui pratiquent là aussi...

M. DUPRE: Oui, nous avons des techniciens.

M. COITEUX (Duplessis): ... alors je crois que là l'échange devrait être proportionné à la population, qu'un dentiste d'Ottawa peut bien avoir un technicien de Hull et vice-versa, alors déterminer une ligne de démarquation entre Hull et Ottawa, c'est un exemple peut-être excentrique, mais l'idée est très proche...

M. RENAUD: Je crois bien que c'est ce qui

arrive. Parce qu'il y a des dentistes de Hull qui retiennent des techniciens d'Ottawa, il y a des techniciens de Hull qui travaillent pour des dentistes d'Ottawa. Est-ce que ça arrive?

M, DUPRE: C'est très limité. Il peut y en avoir, mais c'est très limité...

M. TARDIF: Est-ce qu'il y a des femmes qui sont techniciens dentistes?

M. DUPRE: Nous en avons une qui pratique comme technicienne, dans la région de Sherbrooke, et je crois que nous en avons deux ou trois, ou peut-être quatre actuellement, comme étudiantes.

M. ALLARD: Célibataire?

M. DUPRE: II y en a une qui est mariée. Celle qui pratique est mariée.

M. TARDIF: Ne donnez pas d'adresse.

M. BRISSON: M. Dupré, à ma question de tout à l'heure vous avez sauté un peu vite. Le pourcentage m'a frappé, vous dites qu'il y a à peu près 75% des dentiers qui sont faits par des techniciens dentaires ou des mécaniciens dentistes. Comment expliquez-vous cette situation-là. Normalement, c'est le dentiste qui devrait faire le dentier.

M. DUPRE: Exact.

M. BRISSON: Mais, comment expliquez-vous ça?

M. DUPRE: Moi, j'attribuerais ça, par exemple, au fait que ce sont des gens qui ont commencé la technologie dentaire dans les laboratoires, qu'ils n'aimaient pas trop ça. Ils ont appris comme le plâtre se mélangeait, comment certains travaux préliminaires se faisaient, mais ces gens-là d'habitude apprennent beaucoup plus vite à prendre une impression qu'à faire quoi que ce soit. Ensuite de ça, je ne vous dirais pas que ces travaux-là sont nécessairement bons pour le public. Alors, je crois, qu'actuellement nous avons des amendements à notre loi que le gouvernement va étudier très prochainement. C'est toujours dans le même but, celui d'améliorer la technologie dentaire et la collaboration entre le collège et l'association et l'assurance-santé, enfin tout ce qui s'en vient. Avec notre école, je crois qu'on va relever le standard du technicien, ensuite peut-être le collège et l'association, pourrons-nous... (illisible)

M. BRISSON: Mais comment expliquez-vous qu'aujourd'hui ils ne soient pas combattus puisqu'il y en a 75%...

M. DUPRE: Us le sont. Us le sont, mais c'est très difficile, ça prend une collaboration très étroite et puis par des moyens... Si par exemple le collège pouvait travailler de pair avec l'association, je suis certain que le pourcentage que je vous mentionnais, de 75%, diminuerait énormément parce que ce n'est pas tellement chez nos membres que nous avons ces charlatans en question.

M. BRISSON: Moi-même j'ai entendu dire, une fois à Montréal, qu'il y a un chauffeur de taxi...

M. DUPRE: C'est juste. Vous avez des pompiers, vous avez de la police, vous avez des concierges dans des buildings, vous avez des chauffeurs de taxi, toutes sortes de gens qui touchent aux dents. Alors, ça ne devrait pas exister.

M. BRISSON: Mais pensez-vous, que c'est devenu normal ou acceptable la coutume chez les Québécois, de faire faire leur dentier par des techniciens dentaires comme ça qui s'annoncent, plutôt que par le dentiste?

M. DUPRE: Qu'est-ce que vous entendez par acceptable?

M. BRISSON: Disons, est-ce que c'est devenu une coutume?

M. DUPRE: C'est reconnu.

M. BRISSON: C'est reconnu puis c'est accepté par le public.

M. DUPRE: Non, je ne dirais pas que c'est accepté par le public. Il y a beaucoup de gens qui sont pour ça parce qu'il y a toujours une question de dollars dans ça.

M. RENAUD: Cela coûte meilleur marché. M. DUPRE: C'est meilleur marché.

M. MARTIN: La différence est-elle très prononcée?

M. DUPRE: Dans certains cas, oui, dans d'autres moins. Mais il y a certainement une différence.

M. BRISSON: Parce que 75% c'est tout de même un...

M. DUPRE: C'est énorme.

M. COLLARD: Si vous voulez référer à vos recommandations à la page 5,2: « La protection de l'assurance-santé devrait couvrir toute la gamme des services médicaux et dentaires, dont le diagnostic, le traitement, la réadaptation et le prévention, y compris les prothèses bucales... » Est-ce que vous voulez dire que l'intégration au régime de l'assurance-santé devrait se faire immédiatement, dès l'établissement, ou bien par étapes?

M. DUPRE: Ce n'est pas que nous voulons dire: immédiatement. Ce que nous voulons dire ce serait par étapes et, en plus de ça, c'est que tous les genres de prothèses. Parce que vous avez des dentiers, des partiels, des couronnes et des ponts, différents types de couronnes. Tous ces travaux devraient être acceptés par l'assurance-santé, différents genres de travaux.

M. COLLARD: Et puis par étapes. Qu'est-ce que vous voulez dire par étapes?

M. DUPRE: Eh bien, je suppose que vous allez commencer par les indigents, par le dentier ordinaire, par ceux qui n'ont pas d'argent, ensuite graduellement, ça ira...

M. CLOUTIER: En supposant que tout soit couvert en une seule étape, à combien estimez-vous les déboursés de l'assurance- maladie, dans ce domaine-là?

M. DUPRE: Je n'ai pas fait de calcul là-dessus, monsieur, seulement je sais qu'actuellement, comme je vous disais tantôt, nous avons un projet de loi, des amendements à notre loi qui vont être étudiés très prochainement, et nous avons demandé pour le technicien dentaire une liste de prix minimum qui a été basée sur un taux, je crois de $6.40 l'heure. Alors les prix, si le bill est accepté... Nous demandons les pouvoirs de le faire, et s'il est accepté, ça ira dans la Gazette officielle et ensuite il sera lu devant le lieutenant-gouverneur. Mais la liste est déjà faite et c'est une étude que nous avons fait préparer par une compagnie d'économistes.

M. COLLARD: Est-ce que vous avez le chiffre d'affaires que font tous les techniciens de la province de Québec?

M. DUPRE: Nous avons fait faire une enquête par cette même compagnie d'économistes, malheureusement nous avons eu seulement 20% de réponses chez nos membres. Les économis- tes m'ont dit que c'était à peu près normal dans toutes les enquêtes qu'ils faisaient, ils n'avaient jamais beaucoup plus que ça.

M. COLLARD: Quelle est la réponse à 20%? Cela nous donnera peut-être un moyen de trouver un cent pour cent.

M. DUPRE: Je ne l'ai pas en main. Un instant, je pense que monsieur l'a ici à côté de moi.

M. COLLARD: On va multiplier par cinq.

M. BRISSON: En attendant, croyez-vous que l'assurance-santé ou l'assurance-maladie va améliorer la dentition des individus, ou la bouche des individus?

M. DUPRE: Cela, c'est une très bonne question. Je le crois sincèrement, parce que je vous ai mentionné tantôt tout ce que nous avons fait au point de vue avancement pour le technicien. Quand on parle d'avancement pour le technicien, ce n'est pas seulement pour le technicien lui-même, mais bien le public qui va en jouir de ça, par un meilleur technicien, un chiffre grossi de techniciens qui pourra produire plus avec une meilleure qualité et une protection contre la pratique illégale qui sera nécessairement restreinte par tous ces moyens.

M. BRISSON: Croyez-vous qu'il peut y avoir abus de la part du public, il peut y avoir abus si c 'est gratuit...

M. DUPRE: Je ne crois pas, parce que comme je vous le disais tantôt, je suppose que l'assurance-santé ne paiera pas de choses luxueuses en dentisterie, mais paiera bien deux appareils dont le type a besoin. Si celui-ci veut avoir du luxe, je suppose qu'à ce moment-là, il paiera de sa poche la différence. C'est comme ça que je le vois. Je ne sais pas si c'est comme ça que ça ira. Il me semble que ce serait logique.

M. COLLARD: Est-ce que vous avez la réponse du 20%?

M. MORISSETTE: Le 20% est de $660,000, alors en multipliant par cinq, cela donne $3,301,250. Maintenant si on ajoute à ça, si vous regardez à la page de votre mémoire...

M. BLANK: Quelle année?

M. MORISSETTE: En 1964. Maintenant, si vous regardez à la page 6 de votre mémoire,

lorsque le revenu du patient s'accroît, le nombre de visites chez le dentiste augmente. Vous arrivez à trois fois ce montant-là, ce qui représenterait près de $10 millions.

M. BRISSON: Autrement -dit, il y a $2 millions d'ouvrage qui part du Québec et qui s'en va en Ontario.

M. MORISSETTE: Oui.

M. BRISSON: Ce qui veut dire les quatre cinquièmes.

M. THEBERGE: Comment pouvez-vous vérifier vos $2 millions? Ce n'est pas vous qui faites le travail, c'est une idée approximative.

M. MORISSETTE: Ce n'est pas juste, juste.

M. TREPANIER: Est-ce que vous comprenez là-dedans ce que font les mécaniciens dentistes?

M. MORISSETTE: Non.

M. TRE PANIER: Est-ce que vous pouvez évaluer le travail...

M. MORISSETTE: Disons s'ils en font 75%... M. TREPANIER: Parce qu'à ce moment-là... M. MORISSETTE: Oui.

M. TREPANIER: ... évidemment, si les frais de prothèse buccale sont payés par l'assurance-hospitalisation, en autant qu'il faudrait qu'elle soit faite par l'association légalement reconnue, alors ça augmenterait passablement. Je ne veux pas dire par là que ça augmenterait vos revenus, mais ça augmenterait les dépenses. On ne peut pas se fier à ce chiffre-là.

M. DUPRE: Non, mais il y a une chose qu'il faut noter, monsieur, c'est que le travail qui est fait par le charlatan, comme vous dites, est exclusivement le dentier. Il y a beaucoup d'autres travaux que les dentistes font dans la bouche, comme les ponts, les couronnes, les pièces, les couronnes en porcelaine, enfin il y a quantité de travaux que le technicien ne touche d'aucune façon, même illégalement. L'illégal se fait exclusivement sur le dentier.

M. MORISSETTE: Si vous me permettez d'ajouter quelque chose... Dans le $3,301,250 vous avez beaucoup d'ouvrage spécialisé qui, certainement en assurance-santé, ne serait pas payé par le plan. Je vois très mal un gars qui se paie une belle pièce de métal coulé haut et bas, qui coûte dans les $175 et que le ministère de la Santé irait payer ces deux pièces-là.

M. COLLARD: Quelle serait à peu près la proportion de ces choses-là qui ne seraient pas défrayées par le plan?

M. MORISSETTE: Au moins 25%. M. THEBERGE: Avez-vous entendu?

UNE VOIX: Cela fait vingt ans que je suis dans la ligne.

M. BRISSON: Quelle différence y a -t-il entre le technicien dentaire, disons le denturiste comme on peut l'appeler et le dentiste?

M. DUPRE: Ah, c'est que le technicien dentaire et le denturiste..,, D'abord le denturiste n'existe pas dans le moment, c'est un nom qu'on donne, ça.

M. BRISSON: Cela existe ailleurs. M. DUPRE: Dans l'Ouest canadien. M. BRISSON: Dans l'Ouest canadien.

M» DUPRE: Alors, ce type-là fait du dentier exclusivement, il ne fait pas de pont, il n'extrait pas de dents, il ne fait pas de traitements de canaux, il ne fait aucune partie chirurgicale.

M. BRISSON: Directement avec le public.

M» DUPRE: Oui, il le fait je crois, je ne suis pas sûr, je ne suis pas tellement familier avec cette loi dans l'Ouest canadien, mais je crois que le dentiste après avoir fait l'extraction, examine la bouche et décide qu'elle est prête à recevoir les appareils, donne une prescription au patient qui s'en va à ce moment-là chez le denturiste en question.

M. RENAUD: M. Dupré, je voudrais reprendre une question qui a été posée par le docteur Théberge tout à l'heure, relativement au paiement de vos travaux de prothèse. Vous suggérez que l'assurance-hospitalisation vous paie directement, alors qu'actuellement vous êtes payés par les dentistes, et vous dites que si c'est un système d'assurance-hospitalisation, vous allez être payés plus vite. Est-ce que c'est la seule raison, d'abord?

M. DUPRE: Exactement, M. Renaud.

M. RENAUD: Et s'il y a un système pour l'assurance-hospitalisation, il est possible que le dentiste soit payé plus vite aussi.

M. DUPRE: Exact.

M. RENAUD: Alors, si c'est vrai, c'est votre objection, est-ce que vous y tenez toujours?

M. DUPRE: Oui, j'y tiens quand même, parce que je vous ferai remarquer que le dentiste actuellement est payé passablement vite, beaucoup plus vite que le technicien. Je suis d'accord avec le docteur qui mentionnait tout à l'heure qu'ils étaient obligés de tenir des comptes, mais ils en tiennent beaucoup moins que nous.

M. RENAUD: ... mais des travaux de prothèse qui entreraient dans le cadre d'un système d'assurance-maladie le dentiste va être payé. S'il est payé, vous allez être payés.

M. DUPRE: Ah ça, c'est moins sûr. Parce que habituellement le dentiste est payé, je ne suis pas prêt à dire que tous les gens vont se faire faire des appareils et qu'ils ne les paient pas, seulement je peux vous dire que dans un laboratoire dentaire, nous ne voyons jamais, au grand jamais, d'argent. Ce sont toujours des prescriptions et des factures. Nous sommes chanceux quand nous pouvons collecter un compte à la fin du mois. Je ne vous dirai pas que c'est à cent pour cent, mais je dirai que c'est à 75%.

M. COITEUX: Est-ce que ce serait dangereux que vous adoptiez une politique de « cash and carry »?

M. DUPRE: Ce serait extrêmement difficile, ce serait très malcommode pour nous et pour le dentiste. Seulement, si au moins le dentiste nous payait son compte à tous les mois, nous serions fort heureux.

M. RENAUD: On pourrait demander au dentiste de nous donner des explications sur ce que vous venez de nous dire.

M. DUPRE: Certainement, et puis je pense que les dentistes — nous avons un comité de relations professionnelles — sont d'accord avec ce que je viens de vous dire.

M. RENAUD: Maintenant, est-ce qu'il y a une bonne coopération entre le collège et votre association?

M. DUPRE: Oui, Monsieur, et j'ajouterai que nous avons eu récemment une assemblée à laquelle le Président du collège, le registraire et un autre dentiste de langue anglaise étaient présents. Ils se sont même rendus à nos bureaux, dans notre salle de délibérations et nous avons discuté amicalement. En plus de ça, j'ajouterai — et je pense M. Renaud, que vous êtes au courant un petit peu — que notre projet de loi qui va être présenté. Le collège est d'accord, alors vous n'aurez pas d'objection du collège, cette fois-ci.

M. RENAUD: Quant à moi je n'en connais pas le premier mot, parce que j'ai voulu m'abstenir d'être...

M. DUPRE: Non, mais je pense que vous connaissez un peu ce qui se passait autrefois, alors ça ne se passera plus,

M. COLLARD: Alors, les relations entre les techniciens et les dentistes, on peut dire que c'est à peu près la même chose qu'entre les optométristes et les ophtalmologistes.

M. DUPRE: Je ne suis pas renseigné sur cette profession.

M. THEBERGE: Les opticiens et optométristes.

M. Dupré, je suis à faire un petit calcul, d'après vos chiffres. Vous faites $3,300,000 approximativement de travaux, maintenant vous prétendez que ça ne couvre que 25%, autrement dit, vous avez dit qu'il y avait 75% des dentiers faits en dehors.

M. DUPRE: Oui, je parle du dentier exclusivement.

M. THEBERGE: Oui, mais c'est de la prothèse quand même.

M. DUPRE: Oui.

M. THEBERGE: Alors, ça veut dire que si vous ajoutez 100%, ça vous fait $13 millions. Bon, alors $13 millions plus les deux millions qui sont faits en Ontario, ça fait $15 millions. Maintenant, toujours d'après vos chiffres, vous dites que le dentiste charge trois fois ce que vous payez, ça veut dire qu'on est rendu à $45 millions, mettons $50 millions, mettons $45 millions. Cela veut dire que, pour l'assurance-

maladie, si elle acceptait d'inclure les soins dentaires, on serait rendu à $45 millions rien que pour la prothèse.

M. DUPRE: Je ne crois pas, monsieur. Quand je dis que le dentiste charge trois fois le prix de ce qu'il paie chez le technicien, à ce moment-là il a ses honoraires professionnels qui sont chargés en même temps.

M. THEBERGE: Ah oui, je comprends, mais si l'assurance-maladie comprend les soins dentaires. Ils viennent chez le dentiste, ils vienvent chez nous par exemple, pour faire un dentier, alors je leur charge le prix qui est d'après vous trois fois le prix que vous chargez, mais on arrive toujours au même montant, à $45 millions.

M. DUPRE: Mais, si par exemple...

M. THEBERGE: Ce n'est rien que pour la prothèse...

M. DUPRE: Mais si vous avez chargé trois fois le prix, docteur, c'est le montant total, ce sont vos séances, vos honoraires professionnels sont chargés en même temps.

M. THEBERGE: Oui, c'est normal.

M. DUPRE: Si l'assurance-santé paie le dentiste, elle va payer ses honoraires professionnels, mais elle ne paiera pas la prothèse à ce moment-là.

M. THEBERGE: Ah! c'est Ce que vous pensez.

M. DUPRE: Je ne sais pas, je le suppose.

M. THEBERGE: Bien, j'ai l'impression qu'ils vont payer le dentiste, parce que ce qu'on discute là, c'est la loi. Mais ça ne changé absolument rien. Votre question d'être payés comptant... Je sais qu'il y a des dentistes qui ont - c'est enregistré ça - alors je sais malheureusement qu'il y en a qui se laissent traîner les pieds, seulement moi je serais bien d'avis avec vous pour que, dans une loi, vous mettiez un article demandant que les dentistes vous paient par exemple dans un mois, ou charger de l'intérêt. Mettez-le dans votre loi, il n'y a pas de raison que vous ne le fassiez pas.

M. DUPRE: Je pense que c'est assez difficile de forcer...

M. THEBERGE: Faites une entente avec le collège, seulement le collège non plus ne veut pas forcer...

M. DUPRE: C'est là le problème. C'est pour ça que nous avons attaqué ce sujet-là, au point de vue de l'assurance-santé. C'est la seule objection que nous ayons.

M. DUPRE (membre du comité): A part ça c'est concurrenciel.

M. BRISSON: Croyez-vous que le public serait mieux servi avec des techniciens qui deviendraient soit denturistes, qu'avec des dentistes?

M. DUPRE: Au point de vue des prothèses, toujours? Actuellement, je ne crois pas que, dans la province de Québec, les techniciens soient prêts à organiser un plan semblable. Ils ne pourraient pas le servir actuellement. Je ne dis pas que, dans les années à venir, je ne sais pas. Peut-être à la demande des dentistes eux-mêmes. Quand nous formerons des technologistes d'un institut technologique de Montréal, nous aurons des hommes qualifiés qui seront même prêts à faire des dentistes. D'après les économistes, les prévisions d'augmentation de la population et tout ce qui s'en vient, peut-être que le collège à ce moment-là demandera de l'aide chez les techniciens dentaires. Ils seront à ce moment-là des gens qualifiés, mais non pas des gens de troisième année, qui ne savent pas lire ni écrire. Je le vois comme ça, c'est une possibilité, je vois ça encore assez loin, mais je le vois.

M. BRISSON: Ce qui veut dire que maintenant, la majorité de vos membres ne sont pas prêts à traiter directement avec le public.

M. DUPRE: Absolument pas, nous ne sommes absolument pas prêts à faire ça.

M. DUPRE (membre du comité): M. Dupré, dans les différents prix des prothèses, évidemment, il y a la qualité, la sécurité et le contrôle.

M. DUPRE: Exactement.

M. DUPRE (membre du comité): Entre un prix de différente qualité, inférieure moyenne ou supérieure, est-ce qu'il y a un risque au point de vue de la santé ou si c'est seulement une question de confort?

M. DUPRE: Il n'y a pas de risque au point de vue de la santé, si l'appareil est bien fait.

M. DUPRE (membre du comité): Alors il n'y a aucune raison...

M. DUPRE: Absolument pas.

M. DUPRE (membre du comité): ... comme vous disiez tantôt que l'assurance-santé paie la prothèse la plus chère.

M. DUPRE: Je ne vois pas du tout.

M. DUPRE (membre du comité): Parce qu'il faudrait tout de même faire une différence. Moi, j'ai remarqué trois choses: qualité, sécurité et confort. Ce que j'entends par sécurité, c'est la santé. Vous dites...

M. DUPRE: Absolument pas.

M. DUPRE (membre du comité): Et puis, au point de vue confort, c'est la même chose.

M. DUPRE: Il y a peut-être... — je pense que le docteur sera d'accord avec moi — par exemple on va prendre un partiel, on mettra des petits crochets faits à la broche et puis l'autre serait un crochet coulé, bien là il y aurait une différence, mais la différence n'est pas tellement énorme à ce moment-là, n'est-ce pas docteur?

UNE VOIX: Bien.

M. DUPRE: Ce serait àpeuprèsle seul cas, n'est-ce pas docteur Théberge?

M. THEBERGE: J'admets bien, même dans les différents matériaux de...

M. DUPRE: Je n'y crois pas.

M. THEBERGE: Moi, je dis à mes patients, celui-là est peut-être moins cassant, mais je je le sais pas.

M. DUPRE: La différence de prix, parce que la marchandise est meilleur marché.

M. THEBERGE: Je ne suis pas vendeur.

M. RENAUD: Advenant l'établissement d'un système d'assurance-maladie, vous considérez qu'il y aura une grosse augmentation de vos travaux de prothèse?

M. DUPRE: Ah oui. C'est pour ça que nous nous sommes préparés en prévision de ça, pour former des bons techniciens.

M. RENAUD: Est-ce que des études ont été faites en ce sens-là?

M. DUPRE: Oui, nous avons des chiffres dans un rapport, je ne sais pas si nous les avons ici, à la page 6...

M. RENAUD: A quel endroit?

M. MORISSETTE: C'est-à-dire que ce ne sont pas des chiffres. On compare les visites chez le médecin et les visites chez le dentiste. Dans la première colonne, vous avez les visites chez le dentiste, la deuxième les visites chez le médecin par mille de population. Alors pour les revenus faibles, vous avez 163 visites tandis que lorsque vous arrivez à des revenus supérieurs, vous avez 542 visites. Faites la comparaison chez le médecin et vous allez voir ce que ça peut représenter. Alors, moi, je calcule qu'avec l'assurance-santé, au moins trois fois plus de gens se prévaudraient du service que le gouvernement leur donnerait.

M. RENAUD: En d'autres termes, vous voulez dire que les travaux de prothèse que vous faites seraient multipliés par trois, advenant l'établissement d'un système d'assurance-maladie. C'est ça que vous voulez dire?

M. MORISSETTE: C'est à peu près ça.

M. RENAUD: Actuellement, ça représente combien d'argent?

M. MORISSETTE: Ceux qui sont faits présentement par les vrais techniciens dentaires, je ne dis pas les charlatans ou les faux dentistes, appelez-les comme vous le voulez...

M. RENAUD: Oui.

M. MORISSETTE: ... cela se chiffre à $3,300,000 anuellement.

M. RENAUD: Dans ça, je comprends qu'il y a des travaux dispendieux...

M. MORISSETTE: Justement.

M. RENAUD: ... et puis il y en a qui le sont moins.

M. MORISSETTE: A peu près 25% des travaux sont très dispendieux.

M. RENAUD: Merci.

M. LE PRESIDENT: D'autres questions messieurs? Je vous remercie...

M. THERRIEN: M. le Président, est-ce que je pourrais ajouter quelques mots pour clarifier certains points qui ont été avancés?

M. LE PRESIDENT: Vous représentez quel groupe?

M. THERRIEN: Je représente l'Association professionnelle des propriétaires de laboratoires de la province de Québec.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que vous avez demandé d'être entendu par le comité?

M. THERRIEN: Non. Je n'avais pas obtenu le mémoire auparavant, alors on n'a pas pu se mettre au courant du mémoire. En ce qui regarde le mémoire de prime abord personnellement, je n'y vois pas d'objection majeure, mais dans ce qui a été dit... C'est simplement pour l'information du comité.

M. DUPRE: Je remarque, messieurs, que M. Therrien n'est pas technicien dentaire, mais comptable.

M. THERRIEN: Il n'est pas question de faire le procès des techniciens dentaires ou des dendistes. Ce sont des informations que je veux donner au comité. Maintenant si...

M. LE PRESIDENT: M. Therrien, je pense qu'il serait préférable que vous soumettiez peut-être vos remarques par écrit au comité et le comité jugera à propos s'il doit prendre en condération les remarques et les conseils.

M. THERRIEN: Les voici.

M. LE PRESIDENT: M. Dupré, je vous remercie infiniment de nous avoir fourni les renseignements et d'avoir répondu aux questions qui vous ont été posées par les membres du comité.

M. DUPRE: Je vous remercie, messieurs. Alors de toute façon, si vous avez besoin de renseignements additionnels, le secrétariat de l'association est toujours là pour donner tous les renseignements voulus.

M. THEBERGE: Prions ensemble pour que ça soit accepté par l'assurance-maladie; ça va être le meilleur moyen pour éviter la pratique illégale.

M. DUPRE: Merci.

M. LE PRESIDENT: Mademoiselle Beaudoin, voulez-vous continuer votre exposé sur les effectifs? Alors, vous avez la parole.

MLLE BEAUDOIN: Alors, si ma mémoire est bonne, nous avions laissé l'étude du volume 10, à la fin du chapitre 2, page 27...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs.

MLLE BEAUDOIN: Alors, pour récapituler rapidement, il y avait trois modèles que nous utilisions pour faire une évaluation des effectifs médicaux dans la province de Québec. Le troisième modèle qui est un modèle proprement économique, a trait à l'évolution relative des revenus des médecins par rapport aux revenus d'autres groupes professionnels. Pour essayer de faire un résumé rapide du modèle théorique que je ne voudrais pas expliquer en détails. Le fonctionnement à la base, ce sont les mécanismes de marché. Lorsqu'un bien devient rare, c'est-à-dire que la demande pour ce bien est importante et que l'offre pour ce même bien est nettement insuffisante, il se produit alors le phénomène suivant, c'est que le prix pour ce bien a tendance à monter.

Le mécanisme, lorsqu'on parle par exemple de professions ou de travailleurs, joue de la même façon. Dans le cas d'un marché du travail, c'est le salaire qui constitue le prix que les gens paient pour s'assurer les services de ces personnes ou de ces groupes de travailleurs. Si, pour une période de temps donné, les revenus de certaines classes de travailleurs ou de groupes professionnels augmentent plus rapidement que les revenus de d'autres groupes qui sont comparables, alors on dit que pour le premier groupe il y aurait une pénurie relative. Une façon de constater le fonctionnement de ce mécanisme est le suivant: dans une situation où un bien ou les services d'un groupe de professionnels deviennent plus rares et plus difficiles à obtenir et plus coûteux par le fait même, on utilise des biens moins coûteux qu'on appelle des substituts.

Il est évident que dans ce cas le service rendu va être de qualité moins élevée mais également à moindre coût. C'est à peu près le shéma théorique dans lequel s'inscrit le chapitre 3. C'est ce modèle qu'on a appliqué à la profession

médicale. On a considéré les groupes de travailleurs suivants: les médecins et chirurgiens, les dentistes, les avocats et notaires, les ingénieurs et architectes.

Pour la période l946-1963,on a étudié l'évolution des revenus de ces professionnels. Il faut dire que les statistiques elles-mêmes posent des problèmes. On a utilisé les statistiques fiscales qui sont plus ou moins parfaites, mais comme on les utilise sur une période de temps donné, les difficultés qu'on rencontre à les utiliser deviennent relativement moins importantes. Une déficience de ces statistiques en particulier, c'est le fait que les médedins et chirurgiens soient compris dans la même catégorie, de même que pour les avocats et notaires et pour les ingénieurs et architectes. Pour ces groupes, il s'agit des revenus des professionnels non salariés et pour chaque catégorie, la proportion de salariés ou non salariés est passablement différente. Les salariés sont certainement beaucoup plus nombreux dans la catégorie ingénieurs et architectes, ce qui signifie que les données qu'on a utilisées pour cette catégorie de travailleurs sont probablement moins représentatives de l'ensemble du groupe.

Si on regarde au tableau 8, où on a donné les statistiques de revenu pour ces quatre groupes, on a groupé cette période en trois groupes de cinq années, 1946-1951, 1951-1956, 1958-1963. Et pour être à même de regarder l'évolution des revenus, on a construit un indice sur la base de 100 pour la période 1946-1951, auquel on a mis l'augmentation pour les deux périodes suivantes et ensuite on a reconstitué l'indice pour les années 1951-1956 sur la base de 100 auquel on a comparé l'augmentation 1958-1963.

M. CLOUTIER: Mlle Beaudoin, dans l'analyse que vous faites de l'offre et de la demande, il faut tenir compte évidemment, je pense, d'un facteur, c'est que les prix sont fixés dans les cas des médecins par le Collège des médecins, alors à ce moment-là l'offre ou la demande joue peut-être moins dans le revenu pour dire qu'il y a eu pénurie ou...

MLLE BEAUDOIN: Dans les quatre professions considérées, les corporations en cause suggéraient probablement certains tarifs. Mais de toute façon il est probable que les tarifs suggérés par ces corporations tiennent eux-mêmes compte de l'offre et de la demande.

M. CLOUTIER: Dans l'établissement des tarifs, parce qu'il y a certaines...

MLLE BEAUDOIN: Dans l'établissement des tarifs. Maintenant il n'existe pas, comme pour le Collège des médecins, de tarif pour les médecins...

M. CLOUTIER: ... parce qu'il y a certaines professions qui prennent un certain nombre d'années avant de toucher à leur tarif. Je pense que dans le cas des notaires, il y a eu un ajustement de tarif, il y a deux ou trois ans...

MLLE BEAUDOIN: Tout collège ou corporation qui suggère ou établit des tarifs va tenir compte de ces facteurs. En plus, il peut peut-être y avoir un certain laps de temps qui joue, mais comme on considère une période qui est quand même assez importante, 1946-1963, je pense qu'on a tenu compte de ces facteurs pour la période considérée.

M. CLOUTIER: Merci.

MLLE BEAUDOIN: Les données telles qu'elles sont inscrites au tableau, remontent à 1962. Les statistiques fiscales pour l'année 1963 sont publiées. Je peux vous les donner, si ça vous intéresse.

M. TREPANIER: S'il vous plaît.

MLLE BEAUDOIN: Pour 1963, les médecins et chirurgiens, le montant est de $17,320; pour les dentistes de $10,751; pour les avocats et notaires $15,246; et pour les ingénieurs et architectes $17,462.

M. COLLARD: Cela, c'est pour la période 1963...

MLLE BEAUDOIN: C'est pour l'année 1963. J'ai refait les calculs pour la période 1959-1964, au lieu de 1958-1963, et ça donne à peu près, c'est-à-dire que l'indice augmente évidemment, mais la position relative de chaque groupe ne change pas en ajoutant l'année 1963. Alors l'analyse au niveau du texte est demeurée la mime.

M. LE PRESIDENT: Mlle Beaudoin, dans le tableau vous mentionnez trois périodes de cinq années. Il y a 1946-1951, 1951-1956, 1958-1963. Y a-t-il une raison pourquoi la dernière période ne ferait pas partie de l'année 1956 à 1961?

MLLE BEAUDOIN: Non, il n'y a pas de raison précise, mais simplement le fait de regrouper les années, c'était pour empêcher les fluctuations trop considérables d'une année à l'autre. Alors c'est simplement la première et la

dernière année. On aurait pu prendre probablement des périodes de trois ans, ça aurait donné...

M. TREPANIER: Mais pour les deux ans 1956 à 1958.

MLLE BEAUDOIN: Il n'y a pas de raison. C'était pour faire trois périodes, on aurait pu faire quatre périodes de quatre ans par exemple.

M. LE PRESIDENT: Cela fait sûrement changer les pourcentages, lorsque vous parlez d'indice. Quand vous parlez de l'indice de 1946 à 1951 à comparer avec l'année 1951-1956 puis après ça 1958 à 1963.

MLLE BEAUDOIN: Oui, l'indice en soi serait changé, c'est-à-dire le chiffre. Maintenant ce qui nous intéresse, c'est l'évolution d'un groupe par rapport à l'autre. Alors, à ce moment-là ça n'influence pas. Si on prend l'évolution de l'indice entre le premier groupe d'années et le dernier, on s'aperçoit que le revenu des médecins et des dentistes, des ingénieurs et architectes ont évolué sensiblement de la même façon. Par contre, l'évolution des revenus des avocats et notaires a été nettement mois rapide, pour l'ensemble de la période, que celle enregistrée pour les trois autres groupes. Nos données sembleraient donc suggérer que pour l'ensemble de la période, il a pu se développer un surplus relatif d'avocats et de notaires, mais elles ne permettent guère de conclure quoi que ce soit en ce qui a trait aux médecins.

M. VAILLANCOURT: La raison, c'est parce qu'il y a plus de notaires et d'avocats pour répartir le travail qu'ils ont à faire.

MLLE BEAUDOIN: Si le modèle est bon, c'est ce que ça veut dire. Par contre, si nous prenons chacune des deux sous-périodes que nous avons isolées, les indications deviennent un peu plus nuancées. Pour la période 1946-1951 à 1951-1956, l'évolution des revenus des ingénieurs et architectes est nettement plus rapide que pour les autres professions étudiées. En fait, à la fin de la guerre, on a énormément parlé de la pénurie des ingénieurs. Une analyse faite du marché des ingénieurs conclut que, de 1951 à 1957, le marché global des ingénieurs au Canada était caractérisé par un certain déficit. Les revenus des médecins, pour leur part, ont évolué au cours de cette période de façon parallèle à ceux des dentistes. Et les avocats et notaires ont connu une évolution de leur revenu inférieure à celle de toutes les autres professions. Pour ce qui est de cette sous-période, il n'est guère possible de déduire quoi que ce soit sur la profession médicale. Les données cependant permettent de poser l'hypothèse de surplus relatif d'avocats et de notaires et d'une pénurie relative d'ingénieuri et d'architectes.

Si l'on considère la seconde sous-période 1958-1963, la situation est passablement différente. Vers 1955, les universités du Québec ont commencé à former des ingénieurs en plus grand nombre et il semble que la pénurie relative que l'on avait observée à la fin de la guerre ait été rapidement comblée. Lalande affirme dans son étude qu'à partir de 1957, le marché des ingénieurs s'est caractérisé par un surplus assez important. En fait, pour la sous-période que nous examinons ici, l'augmentation des revenus des ingénieurs et architectes a été presque exactement la même que celle des avocats et notaires pour lesquels il ne semble pas y avoir de pénurie.

Les revenus des médecins, de 1951-1956 à 1958-1963, se sont accrus beaucoup plus que ceux des autres professions. Ces données sembleraient donc indiquer qu'une pénurie relative de médecins se serait développée, au cours des dix ou douze dernières années. C'est la conclusion à laquelle on en arrive, lorsque l'on considère seulement l'évolution relative des revenus de ces quatre groupes de professionnels.

Pour en revenir à ce qu'on disait sur la possibilité d'utiliser des produits, dans le jargon économique qu'on appelle produits substituts, et qui sont moins coûteux, dans une étude qui a été faite aux Etats-Unis sur la profession médicale, un chercheur avait lui aussi conclut qu'il existait aux Etats-Unis une certaine pénurie de médecins et que ceci avait eu pour effet de diriger la demande pour les soins médicaux vers des substituts.

Dans le domaine médical, les substituts ont été le personnel médical formé à l'étranger, c'est-à-dire à l'extérieur de l'Amérique du Nord, et dont la formation et l'habileté sont en général inférieures à celles des médecins formés dans les universités américaines ou canadiennes. Quand on examine le tableau 9, on s'aperçoit que, pour les dix années considérées 1950-1960, le nombre d'internes et de résidents étrangers par rapport au nombre total d'internes et de résidents a été en augmentant. Alors, en 1950, il y avait environ 10% des internes et résidents qui étaient des étrangers et, en 1960, cette proportion passe à 26%.

Maintenant, si on veut faire la même comparaison pour le Québec, on s'aperçoit que l'utilisation des internes et résidents étrangers au Québec est encore plus importante que celle

qui a été faite aux Etats-Unis. Au tableau 10, le chiffre qui correspond à notre 26% de tantôt, c'est l'avant dernier chiffre des deux colonnes, internes et résidents étrangers en pourcentage total des internes et résidents, c'était de 25% pour les Etats-Unis et le chiffre est de 42% pour le Québec.

Alors, les observations qui avaient été faites aux Etats-Unis par ce chercheur sur l'utilisation de produits substituts de qualité inférieure, pour suppléer au manque de médecins, semble valoir encore davantage pour le Québec que pour les Etats-Unis. En conclusion, il nous semble logique de supposer, sur la base de cette troisième approche, que l'apport massif d'internes et de résidents étrangers a probablement contribué au Québec à atténuer les effets d'une certaine pénurie relative de médecins qui se serait développée au cours des dernières années.

Au chapitre 4, on a essayé de faire une projection du nombre de médecins pour voir dans quel sens évoluerait la situation des effectifs médicaux. Pour cette évaluation, on en est revenu au rapport médecin-population qu'on avait déjà utilisé au début. Si on prend le tableau Il, où on inscrit à la première colonne les nouveaux médecins, c'est-à-dire les gradués de Laval, Montréal et McGill; maintenant vous apercevez qu'en 1971, 1972, et 1973 le nombre des gradués change et va en augmentant parce qu'en 1966 les premiers gradués de la faculté de médecine de l'Université de Sherbrooke sortiront. On a tenu compte...

M. MARLER: Est-ce que cela va ajouter seulement 13 médecins par année?

MLLE BEAUDOIN: Pour la première année, il y a 13 médecins.

M. CASTONGUAY: Cela va venir, à peu près 40 à 50 par année de plus.

M. MARLER: D'après le tableau, le nombre reste à 404, ce qui est assez surprenant.

M. CASTONGUAY: Mais à partir de 353, c'est donc dire qu'ils vont produire chaque année environ 50 médecins après la période de transition initiale. Voyez la formation...

MLLE BEAUDOIN: C'est ça.

M. CASTONGUAY: ... en nombre est de 350, elle va s'établir après à 404.

MLLE BEAUDOIN: 400...

M. CASTONGUAY: Alors, leur nombre de gradués annuels, après une période de transition, va être d'environ 50 par année.

MLLE BEAUDOIN: C'est ça. L'université ouvre ses portes, en septembre et, pour la première année, ils n'admettent que 16 étudiants. Et, la seconde ou la troisième année, le nombre va aller en augmentant jusqu'à un maximum d'une cinquantaine d'étudiants.

M. CASTONGUAY: C'est ça. M. VAILLANCOURT: A Sherbrooke ça?

MLLE BEAUDOIN: Oui. Alors, à la deuxième colonne, on est parti du nombre actuel de médecins auquel on ajoute le nombre de nouveaux gradués, moins, un taux de pertes c'est-à dire le nombre de médecins qui se retirent ou qui meurent au cours de chaque année. Alors, cette troisième colonne, c'est la population estimée, projection de population pour la province de Québec, et la dernière colonne c'est le nombre de personnes par médecins. Alors, on s'aperçoit, que le rapport, s'améliore entre 1966, 1971, 1976 et 1981.

Maintenant, quelque part entre les années 1981 et 1986, il y a une diminution. C'est-à-dire qu'en 1981, on a 758 personnes par médecin et le rapport monte à 760 pour l'année 1986.

Maintenant, ces projections sont loin d'être très raffinées. Elles donnent plutôt une indication des effectifs médicaux pour les vingt prochaines années.

M. MARLER: Mlle Beaudoin, est-ce qu'il y a un certain rapport entre le tableau 11 où je vois, pour l'année 1966, qu'il y a 813 personnes par médecin dans le Québec, et le tableau 2, où je vois que, pour l'année 1965, le nombre de personnes par médecin est de 841?

M. CASTONGUAY: Cela vient de la même étude, M. le Président. Il y a évidemment une petite différence. On peut vous fournir la réponse. On retrouve, d'ailleurs, ce genre de différence à certains autres endroits. Il y a des fois que les médecins qui sont à la retraite ne sont pas inclus, et, d'autres fois, ils le sont. Il y aurait peut-être lieu d'expliciter davantage.

M. MARLER: Je pense réellement que c'est un facteur important, à cause de l'attitude de certains organismes devant le comité, lorsqu'ils ont prétendu qu'il y avait une insuffisance en personnel, en équipement. Alors, je pense que

c'est un point auquel il faudra attacher passablement d'importance lorsqu'il s'agira de faire un rapport.

M. TREPANIER: Il y a un autre fait que je ne comprends pas dans le tableau 11. En 1967, on a 769 personnes par médecin pour une population de 7,116,000. J'imagine que la population, vous la faites progresser géométriquement, sur une base continue, sans fluctuation, et on baisse à 758, alors que la formation des médecins est à 404 régulièrement. Alors, dans ces cinq ans-là, on baisse à 758 personnes par médecin et puis alors qu'on continue exactement avec la même production de médecins, si je puis m'ex-primer ainsi, et la même augmentation de population, on augmente de deux médecins dans les cinq ans suivants. Comment expliquer ce fait?

M. CASTONGUAY: On n'augmente pas de deux médecins.

M. TREPANIER: De deux personnes. M. CASTONGUAY: Oui.

M. TREPANIER: Alors qu'en fait, cela devrait continuer à descendre.

M. CASTONGUAY: Pas nécessairement. Là, on a, d'une part, un nouveau nombre uniforme de nouveaux médecins; 404. Alors, on voit que pendant une certaine période vous avez une augmentation des médecins qui est en ligne droite,

M. TREPANIER: Oui,

M. CASTONGUAY: La population augmente toujours en ligne courbe. Si vous additionnez des médecins dont le nombre progresse en ligne droite vous gagnez du terrains jusqu'à un certain moment, soit jusqu'au point ou votre ligne vient rattraper la courbe de la population. La population se reproduit toujours. Une personne qui nait, vingt ans plus tard, ou vingt-cinq ans plus tard, peut donner naissance à deux autres personnes, alors c'est une espèce de progression géométrique; tandis que vous avez ici une progression linéaire tout simplement, pour les médecins. On le voit clairement dans la première colonne.

Alors, il y a une courbe qui vient croiser l'autre...

M. CLOUTIER: Vous basez votre tableau, M. Castonguay, sur l'étude de M. Henripin et M. Martin, une étude qui part des années 1961 jusqu'à 1981...

MLLE BEAUDOIN: Oui.

M. CLOUTIER: Alors, si je comprends bien, en 1986, vous avez projeté, le comité lui-même a fait une projection de la population à 8,500,000 Parce que l'étude n'allait pas jusque là...

MLLE BEAUDOIN: Oui, c'est ça.

M. CLOUTIER: ... cela arrête en 1981.

M. CASTONGUAY: Mais nous avions déjà fait, pour à peu près des fins identiques, des projections de population qui dépassait 1981 pour le régime de rentes, par exemple. On voit qu'à un moment donné, dans vingt ans dans l'avenir, il y a tellement de facteurs qui interviennent dont on ne peut plus tenir compte, qu'on peut projeter pour cinq ans au moyen d'une courbe sur un graphique. Aller beaucoup plus loin sans plus de raffinement, cela n'a plus de signification au point de vue pratique, c'est simplement l'ordre de grandeur qui importe. Vous ne savez pas par exemple quelle sera l'immigration, l'émigration.

M. CLOUTIER: D'ailleurs, les études sur le sujet ne dépassent pas vingt ans, la plupart du temps.

M. CASTONGUAY: Pas tellement.

MLLE BEAUDOIN: Les projections de population peuvent être faites de façon assez certaine. Maintenant du côté des médecins, c'est clair qu'on a projeté en tenant compte seulement de la situation actuelle, c'est-à-dire situation actuelle inchangée sauf pour le cas de l'université de Sherbrooke. Alors, si le nombre de facultés de médecine change, si l'immigration ou l'émigration des médecins augmente ce sont des facteurs qui jouent un rôle sur l'évolution future du nombre de praticiens.

M. CLOUTIER: Il y a d'ailleurs d'avantage dans ce tableau. Il y a une note qui mentionne; fécondité faible, émigration faible. Alors, vous l'avez considéré dans les circonstances actuelles.

MLLE BEAUDOIN: Cela, c'est pour les projections de population. Quand MM. Henripin et Martin ont fait leurs projections de population, ils avaient fait trois estimations avec des taux d'immigration forts, faibles, il y avait trois catégories et que c'étaient des projections de 1961 à 1981. Entre 1961 et 1965, on a réalisé quelle hypothèse avait joué dans les trois qu'ils

avaient choisies, c'est celle-là qu'on a appliqué pour le reste de la période.

Ce qui ressort de ces projections de population, c'est quand même une amélioration du rapport médecin-population au cours des prochaines années.

M. TREPANIER: ... augmenté le nombre de personnes. A un moment donné il y en a 404, on est limité à ça.

MLLE BEAUDOIN: Oui. C'est ce que je disais justement, c'est vraiment en tenant compte des conditions actuelles...

M. TREPANIER: Oui, oui.

MLLE BEAUDOIN: ... maintenant il y a certainement des facteurs qui vont jouer.

M. TREPANIER: D'autres facultés de médecine en 1986.

MLLE BEAUDOIN: Maintenant, en conclusion, nous avons abordé l'étude des effectifs médicaux du Québec...

M. LE PRESIDENT; Mademoiselle, voulez-vous arrêter pour quelques minutes?

MLLE BEAUDOIN: D'accord.

M. LE PRESIDENT: Il faut suspendre la séance pour quelques minutes.

MLLE BEAUDOIN: Alors, je pense que nous en sommes à la conclusion du volume dix qui résume en même temps le volume lui-même. Nous avons abordé l'étude des effectifs médicaux du Québec en utilisant trois approches différentes. Les résultats de l'application de chacune de ces approches à la situation québécoise semble indiquer l'existence d'une certaine pression sur les effectifs médicaux. Cette pression est plus ou moins forte selon que l'on considère le Québec dans son ensemble, une région spécifique, ou selon qu'il s'agit de la consommation médicale actuelle ou de cette même consommation dans le cadre d'un régime d'assurance-maladie complet et universel. Par contre, nos estimations indiquent une certaine amélioration du rapport médecin-population au cours des vingt prochaines années. Il n'a pas été possible d'analyser tous les facteurs qui nous auraient permis d'arriver à une conclusion plus certaine.

Du côté de la quantité de soins qui serait demandée dans le cadre d'un régime d'assu- rance-maladie, il faut rappeler que notre estimation a été basée sur celle du régime de la Saskatchewan qui a un peu plus de trois années d'existence. On peut facilement croire que cette consommation n'a probablement pas atteint son niveau maximum et qu'il devra s'écouler un certain nombre d'années avant d'y arriver. Les habitudes de consommation des individus dans ce domaine évoluent lentement. Vraisemblablement, la quantité de soins médicaux demandés continuera de croître.

Quant à la quantité de soins offerte, on peut se demander si l'effort en terme d'heures et de semaine de travail que l'on demande à la population médicale peut se soutenir pendant toute la vie active du médecin sans entraîner de conséquences. Par contre, nous savons que la productivité du médecin a grandement augmenté depuis les quarante dernières années. Des auteurs américains ont d'ailleurs mesuré cette augmentation de la productivité et il n'est pas exclu qu'elle puisse continuer d'augmenter dans l'avenir. Pour le médecin québécois, il serait peut-être possible d'accroître davantage sa productivité par l'utilisation de personnel para-médical et d'assistants, par une organisation différente de la pratique. Ceci produirait un allégement du fardeau du travail et permettrait de répondre à une demande accrue.

Dans les quatre tableaux de la fin nous avons confiné un certain nombre de données que nous avions sur la profession médicale. Le tableau 12 répartit les médecins du Québec selon leur activité professionnelle principale, c'est-à-dire qu'ils soient en pratique générale, résidents ou moniteurs en administration en médecine, en pratique de la médecine spécialisée, en enseignement ou en recherche.

On voit les activités professionnelles les plus importantes, soit 30% pour la pratique générale, 17% de résidents ou moniteurs et 38% de pratique spécialisée. Enfin, c'est un peu plus que 38%.

Le tableau 13 donne la répartition des 3,500 certificats de spécialistes.

M. TREPANIER: Mlle Beaudoin, juste un instant, par résidents ou moniteurs, vous entendez par là les médecins d'hôpitaux? Résidents ou moniteurs?

MLLE BEAUDOIN: Les résidents étudiant en spécialité.

M. TREPANIER: Ah bon!

MLLE BEAUDOIN: Maintenant, au tableau 13 — les certificats de spécialistes que l'on a

réparti, — on voit que les pourcentages les plus importants sont les certificats en chirurgie générale et en médecine interne.

Maintenant, au tableau 14, c'est le pourcentage de spécialistes pour chaque province canadienne et pour le Canada.

On s'aperçoit que le Québec est au deuxième rang en terme de pourcentage de spécialistes par rapport au total des médecins, le Nouveau-Brunswick venant en tête de liste. Les données datent de 1961. En 1965, pour le Québec, le pourcentage s'élève à 44%. Alors, il y a une augmentation, et cette augmentation va probablement continuer de se faire sentir si l'on considère depuis deux ou trois ans, le nombre de finissants de cinquième année de médecine qui continuent à se spécialiser. Si ma mémoire est bonne, je pense que l'an dernier c'est quelque chose comme autour de 70%. Ce qui fait que si la tendance continue comme ça d'année en année, le pourcentage de spécialistes va continuer d'augmenter.

M. BRISSON: Combien y en a-t-il environ?

MLLE BEAUDOIN: Le nombre de finissants qui se spécialisent? Bien, qu'est-ce qu'on avait, 350 finissants, 70%?

M. FORTIER: Mlle Beaudoin, est-ce que, pour la pratique générale, dans Québec maintenant, est-ce qu'on donne des diplômes de spécialistes en pratique générale?

MLLE BEAUDOIN: Non. M. FORTIER: Pas ici.

MLLE BEAUDOIN: Non, pas en autant que je sache.

M. FORTIER: Je sais qu'il y a des cours spéciaux, pour les gradués en médecine générale, mais il n'y a pas de diplômes de pratique générale?

MLLE BEAUDOIN: Non.

M. FORTIER: Est-ce qu'il y en a dans les autres provinces?

M. CASTONGUAY: Possiblement!

M. FORTIER: C'est une question excessivement importante pour le médecin qui veut s'en aller par exemple faire de la pratique générale dans un centre rural. Il veut bien avoir la même qualification, le même diplôme qu'un spécialis- te. Alors s'il y a une pratique médicale, qu'il a eu un entraînement pendant un an spécialement, et puis qu'il a tant d'années d'expérience, je crois que ça aiderait énormément si on nous donnait un diplôme ou une certification de spécialiste en pratique générale parce que là il serait considéré au même niveau que n'importe quel spécialiste et cela lui permettrait de faire sa pratique dans un... Il me semble que cela a déjà été mentionné...

M. CASTONGUAY: Ah! cela a été mentionné?

M. FORTIER: Cela a été mentionné!

MLLE BEAUDOIN: Je ne crois pas que ce soit...

M. FORTIER: Non, je m'informe parce que je crois que ce serait bien important. Je sais que les jeunes, pour exercer dans les centres ruraux, veulent avoir le même standard, le même statut ou la même qualification qu'un spécialiste pour n'importe quelle spécialité. Alors cela leur permettrait d'aller s'installer...

M. COLLARD: Cela serait peut-être important de poser la question au Collège des médecins.

UNE VOIX: Ce serait important!

M. COLLARD: Evidemment oui! S'il a suivi tant d'années de post-gradué.

M. LE PRESIDENT: M. Castonguay, la question des effectifs médicaux, il me semble, est très intéressante, et lorsqu'on fait la comparaison entre le nombre de la population par médecin dans les différentes provinces. Mais je me demande s'il n'y a pas un autre facteur qui entre en ligne de compte. Si vous avez une population qui est très vieille, à première vue, il me semble que le besoin des médecins doit être beaucoup plus fort, beaucoup plus considérable que si vous avez une jeune population. Maintenant, est-ce que les médecins qui font partie du comité peuvent dire relativement si les enfants en bas de quinze ans, par exemple, demandent beaucoup de soins médicaux ou est-ce que c'est chez les gens âgés de 70 ans ou plus, en somme, que se trouve le gros du volume des patients dans une population quelconque?

M. FORTIER: En pratique générale?

M. LE PRESIDENT: Je suppose qu'il faut

dire lorsqu'on pense plutôt à la question de besoins de soins médicaux, est-ce que ce sont nécessairement les vieillards qui ont la priorité sur les jeunes?

M. FORTIER: A partir de zéro à quinze ans, je crois que c'est là qu'on a la grosse pratique.

M. COLLARD: Mais actuellement, l'assurance-santé, est-ce que... ou bien si c'est une constatation présentement?

M. CASTONGUAY: Il y a une étude statistique, M. le Président, qui a été faite par le Fédéral sur cette question. Par exemple, pour le Québec par rapport à la Saskatchewan, dû à la structure âge-sexe — ceci compte à cause des maternités chez les femmes en particulier — l'on a conclu dans cette étude que la demande de soins, disons, toutes choses étant égales, s'il y avait suffisamment de médecins des deux côtés, la demande de soins dans le Québec serait d'environ 2% plus faible au Québec qu'en Saskatchewan. Les résultats varieraient d'une province à l'autre par rapport toujours à la Saskatchewan qui était le point de repère. L'écart varie entre 2 1/2 en moins, jusqu'à peu près 3% en plus. Ce ne sont donc pas des différences marquées. Je pense que l'endroit où le problème est le plus aigu c'est dans la question de la distribution géographique et de la répartition des médecins selon les spécialités. Vous pouvez avoir, par exemple, un rapport très intéressant de médecin population mais s'il y a pénurie dans une spécialité très nécessaire, il en résulte un problème. Si vous n'avez pas suffisamment d'omnipraticiens, ceci peut créer un problème. Donc, si pour l'ensemble de la population le facteur âge-sexe ne peut donner lieu qu'à des différences de 2 ou 3%, je pense que c'est beaucoup plus l'aspect géographique, la distribution par spécialité, le rapport spécialistes-omnipraticiens qui importent.

M. TARDIF: Est-ce que le climat ne peut pas intervenir aussi dans l'état de santé général d'une population, d'une province à l'autre, par exemple en Saskatchewan ou en Alberta? Je connais des gens qui étaient des asthmatiques et qui prétendaient qu'ils étaient moins malades lorsqu'ils habitaient un climat plus sec, etc. Je ne sais pas...

M. CASTONGUAY: Il y a définitivement, encore là, des facteurs significatifs. Par exemple, ici, dans la province de Québec, je pense qu'il est évident que l'état, disons le niveau de vie, a eu une importance assez considérable sur l'état de santé de la population. La nutrition, disons pour une part...

M. RENAUD: Beaucoup.

M. CASTONGUAY: Le climat a certainement aussi une certaine importance. Maintenant, je ne sais pas si entre des provinces comme la Saskatchewan et le Québec, cette différence est significative. Mais, par exemple, avec les régions tropicales, la différence est joliment marquée. On le voit dans les tables de mortalités de population. Maintenant, pour les pays nordiques, d'après ce que l'on peut constater selon les tables de mortalités, les études démographiques, il y a des variantes, mais elles sont beaucoup plus marquées selon le standard de vie dans ces pays que selon des conditions comme le degré d'humidité ou la température. Ces conditions vont affecter, j'imagine, certaines personnes souffrant d'une affection donnée, comme l'asthme. Mais, pour l'ensemble, c'est beaucoup plus le niveau de vie, disons dans les pays nordiques, qui influence que ces autres facteurs.

M. FORTIER: M. le Président, ça change. Voici une comparaison: chez nous, nous n'avions pas de pédiatres, et puis, à ce moment, il est arrivé un pédiatre très qualifié. Alors il y a eu une avalanche d'enfants, on a même été obligé d'ouvrir une salle complète de pédiatrie où il y a maintenant 50 lits pour les enfants. Avant ça, on pouvait en soigner. Là, ils viennent voir le pédiatre. Il pensait ne pas en avoir assez, mais bientôt, il va falloir qu'il y en ait un autre. Parce qu'à un moment, il y a une concentration de malades qui viennent le voir. Le moindrement que l'enfant ou le bébé a une colique ou quelque chose... Evidemment, il y aune affluence de malades, parce qu'ils vont aller voir le spécialiste.

M. LE PRESIDENT: Est-ce surtout de la médecine préventive?

M. FORTIER: Les deux se font. Curative et préventive. Il y a une relation maintenant entre l'obstétricien et le pédiatre, tous les enfants qui viennent au monde sont examinés par le pédiatre qui voit à l'alimentation, ainsi de suite. Mais, quand l'enfant est malade, on vient voir le pédiatre, alors, il y a une affluence de malades. S'il y a d'autres spécialistes qui viennent dans une région rurale, évidemment, le nombre de patients qui vont être traités par celui-là va augmenter.

M. COLLARD: Est-ce la même chose, lorsqu'il s'agit d'un médecin?

M. FORTIER: Il n'y a pas de médecin, les gens ne se font pratiquement pas traiter. Aussitôt que le médecin arrive, il y a également une avalanche. On est d'accord, que lorsqu'il n'y a pas de médecin, les gens ne feront pas 75 ou 100 milles pour...

M. CASTONGUAY: Si vous me permettez une remarque, M. le Président, sur la question de la suffisance des effectifs médicaux, je crois qu'il n'y a pas moyen de dire, à un certain moment, qu'il y a suffisamment de médecins pour établir un régime; ou de dire: « A partir de la situation actuelle, on devrait se rendre à tel point exactement pour établir un régime. Pour illustrer cette affirmation, le docteur Horowitz, qui est avec le ministère de la Santé et du Bien-Etre à Ottawa et qui a pratiqué en Pologne me disait que lorsqu'ils ont établi l'assurance-maladie en Pologne, en 1920 il y avait un médecin, je crois, par 3,000 de population. Les gens se sont questionnés longtemps à savoir s'ils pouvaient établir un régime d'assurance-maladie, si les effectifs médicaux étaient suffisants. Le docteur m'a dit que finalement le régime a été établi et que plusieurs croyaient que ce serait une calamité. Et, finalement, le régime a fonctionné. Et, il me disait qu'il y avait environ, si ma mémoire est bonne, 1 médecin par 3,000 habitants. C'est une question d'appréciation. Aujourd'hui, on a un médecin par 850, disons. Il y a 25 ans, il y en avait un par 975, ou 1 par 1,000. Dans 10 ans, qu'est-ce que ça sera exactement, c'est difficile à dire. Nous avons des projections, mais il y a un facteur qui est très important, c'est que les modes de traitement changent et les médicaments deviennent de plus en plus efficaces. Les gens demandent plus si c'est disponible, mais ceci ne veut pas dire que, si certains genres de soins ne sont pas donnés, soit des soins que l'on peut qualifier de soins de luxe, que les gens vont nécessairement en souffrir. Une telle analyse ne peut pas être résumée, je crois, en une simple question de chiffres. Il y a une décision à prendre, à un moment donné, et on ne peut pas baser uniquement cette décision sur des chiffres.

M. MARLER: Est-ce que la commission Hall s'est prononcée sur cette relation médecin-population?

M. CASTONGUAY: Elle est étudiée. Il y a des données qui sont présentées.

MLLE BEAUDOIN: La commission Hall a effectué un certain nombre de calculs, entre autres, le rapport médecin-population., mais elle a été très prudente dans ses conclusions. En d'autres termes, il n'y a pas d'évaluation de faite à partir de ça. Elle s'est contentée de donner des chiffres.

M. MARLER: Je pose la question, parce que, évidemment, c'est une espèce de réconfort pour le comité, si la commission Hall disait: « A condition que le nombre de population par médecin ne dépasse pas, disons, 900 ». Cela serait bien satisfaisant pour le comité d'avoir une déclaration provenant de la commission.

M. CASTONGUAY: M. le Président, si vous regardez dans le tableau de la page 9, vous voyez que l'Alberta a 922 personnes par médecin. Vous avez la Saskatchewan qui en a 976. En Saskatchewan, à toute fin pratique, toute la population est couverte. En Alberta, vous avez à peu près 85% de la population qui est couverte,, Les deux régimes sont de nature différente, mais il reste que le nombre de personnes assurées est beaucoup plus élevé que dans la province de Québec, et nous avons un rapport plus favorable que dans ces provinces. Les distances à parcourir sont aussi grandes qu'ici, la population est dispersée de la même façon. On nous a dit dans ces deux provinces que les médecins travaillaient beaucoup mais l'on ne nous a pas dit que le point critique où des personnes pouvaient manquer de soins nécessaires étaient atteints. On nous a dit que les médecins avaient beaucoup de travail. C'est évident.

M. BRISSON: Est-ce que le projet d'assurance-santé en France a eu pour effet d'augmenter le nombre de médecins, en proportion?

M. CASTONGUAY: Ils travaillent plus fort. Ce sont des hommes en bonne santé.

MLLE BEAUDOIN: En Saskatchewan, ç'a augmenté. C'est-à-dire, il y a deux choses, la tendance générale en Saskatchewan était à l'augmentation du nombre de médecins, déjà. Et, en plus, depuis 1962, il y a également eu augmentation.

M. CASTONGUAY: Maintenant les adversaires d'un régime du type de celui de la Saskatchewan disent: Il faudrait voir la quantité des médecins qui ont quitté et puis il y a un plus grand nombre de médecins...

M. TREPANIER: Qui a dit ça?

M. CASTONGUAY: ... ceux qui défendent le régime en Saskatchewan disent que ce sont de bons médecins qui sont venus s'établir.

M. BRISSON: La qualité des soins est au moins la même qu'avant le régime?

M. TREPANIER: Un médecin, c'est un médecin.

M. CASTONGUAY: Les gens semblent...

M. BRISSON: Parce que ça arrive que la qualité professionnelle...

M. TREPANIER: C'est la même chose, un médecin c'est un médecin, peu importe le régime.

M. FORTIER: Quand il passe un an dans un hôpital...

M. TARDIF: M. Castonguay, je ne me rappelle pas, est-ce qu'il a été dit qu'il y avait une différence énorme dans l'âge des résidents des divers pays ou des diverses provinces? Est-ce qu'il y a une différence énorme dans l'âge moyen de la population, par exemple en Angleterre, en France, comparé avec le Canada et le Canada, d'une province à l'autre? Est-ce que ça a été établi? Cela m'a échappé.

M. CASTONGUAY: Le Canada a certainement une population plus jeune qu'un bon nombre de pays. Prenez par exemple la Suède où la population depuis cinquante ans est à peu près au même niveau, comparativement à l'augmentation de la population au Canada. L'immigration est un facteur de rajeunissement pour le Canada et de vieillissement pour les pays d'où les immigrants viennent, parce que les personnes qui immigrent sont âgées de 40 ans ou moins et comptent beaucoup plus d'enfants. Alors la population du Canada ou de la province de Québec est plus jeune que la population de la plupart des pays européens.

M. TARDIF: Evidemment, cela a une influence sur les soins médicaux requis, probable.

M. CASTONGUAY: Oui, d'un autre côté, comme il était mentionné tantôt, il y a deux groupes de personnes dans la population qui requièrent plus de soins, ce sont les groupes aux deux extrémités de l'échelle des âges. Maintenant, comment exactement, chaque groupe en requiert proportionnellement, c'est difficile à établir.

M. FORTIER: On dit qu'il faudrait avoir un médecin par mille de population, mais si vous prenez un praticien général qui s'en irait dans un petit village de mille habitants, il n'aurait pas assez d'ouvrage.

M. DALLAIRE: Ah non.

M. FORTIER: Et il ne pourrait pas vivre avec cela.

M. CASTONGUAY: Bien là...

M. FORTIER: Bien on dit en général qu'un praticien général va aller s'installer dans un centre de 2,400. Avec ça, il va avoir de l'ouvrage. Probablement que M. Dallaire va confirmer ça, avec 2,400 de population il va avoir assez d'ouvrage pour être occupé et au point de vue financier, ça va être bien. Mais moins que ça, il n'aura pas assez...

M. CASTONGUAY: D'ailleurs, c'est à peu près le barème suivi en Angleterre pour déterminer si dans une région il y a suffisamment de praticiens. Mais pour passer de 2,400 à un chiffre inférieur, l'on tient alors compte des diverses spécialités.

M. FORTIER: Les hôpitaux, etc.

M. TARDIF: Dans les villages, dans les paroisses où il y a une population de 2,000, s'il y en a au cours de l'année 200 ou 300 malades qui passent par les hôpitaux, ça diminue le travail du médecin local, et il reste que les soins médicaux pour ces gens-là sont quand même requis.

M. CASTONGUAY: Exactement.

M. TARDIF: Il faut qu'ils les obtiennent d'une part ou de l'autre.

M. DUPRE: Tout à l'heure on parlait des pédiatres. Je le sais par expérience, les gens qui en ont les moyens, évidemment, consultent ces pédiatres, puis les autres de la population, les plus pauvres, vont à ce qu'on appelle « La goutte de lait » où il y a un médecin. Il est reconnu à Montréal que les jeunes mères de famille, même après deux, trois, quatre enfants, quelques jours après la naissance de l'enfant vont voir ces médecins-là pour se faire donner un régime. C'est excellent au point de vue préventif. Maintenant à ce moment, il se trouve à y avoir deux qualités de citoyens: les personnes qui ne peuvent pas voir les spécialistes, à cause des prix.

M. FORTIER: C'est la ville de Montréal.

M. DUPRE: Maintenant, qu'est-ce qui va arriver? Est-ce que ces services de la ville vons être discontinués avec le plan d'assurance-santé?

M. CASTONGUAY: Pas nécessairement, c'est une des choses que nous avons mentionnées au début du volume deux de notre étude. Tous ces services soit bénévoles, soit publics ou semi-publics qui existent présentement, vont nécessiter certains arrangements à la suite de l'établissement d'un régime d'assurance-maladie, mais dans l'ensemble ils vont continuer d'être requis pour traiter plutôt les problèmes plus particuliers. Il demeure que ces organismes jouent aussi un rôle d'éducation.

M. TREPANIER: Quand même, à ce moment-là, les dames qui allaient là parce que ça ne leur coûtait rien, dirons avec l'assurance-maladie: On va aller voir un meilleur, on va aller chez le pédiatre.

M. CASTONGUAY: Tout dépend de ce qu'on leur offre aussi dans ces endroits. Est-ce qu'on leur donne aussi de l'aide pour l'achat du lait en poudre avec des formules spéciales, des conseils sur la façon de traiter l'enfant, de laver le bébé, etc... Il y a d'autres formes d'aide que les soins médicaux; en fait, assez souvent, ces centres deviennent des centres de conseillers, c'est du service social autant que des soins médicaux qui est dispensé dans ces centres et il n'y a aucun doute qu'ils vont demeurer nécessaires.

M. DUPRE: Je pense qu'à ce moment-là les gens à revenus modestes étant couverts par l'assurance-santé vont aller chez le pédiatre plutôt que d'aller à « La goutte de lait ».

M. CASTONGUAY: Si le bébé est malade.

M. DUPRE: C'est dû à l'aspect social de la loi.

M. CASTONGUAY: Exactement.

M. LE PRESIDENT: D'autres questions? Je vous remercie Mademoiselle Beaudoin ainsi que Monsieur Castonguay, pour les informations que vous nous avez données sur les effectifs. La séance est ajournée à mardi, trois heures trente, et nous recevrons les doyens de la faculté de médecine, c'est le numéro 29. Le soir, le comité d'étude des termes de médecine, numé- ro 28. Le docteur Gilbert, numéro 34. Et nous essayerons aussi peut-être d'en placer un autre, dans la soirée.

M. TARDIF: C'est conforme au programme que nous avons eu?

M. LE PRESIDENT: Actuellement c'est conforme, mais nous essayerons d'en ajouter un autre pour le cours de la soirée.

M. MARLER: Je pense que c'est essentiel, parce que j'ai regardé le mémoire pour la terminologie et puis je ne sais pas de quelle façon nous pourrons passer beaucoup de temps utilement là-dessus.

Séance du 29 mars

(Quatre heures de l'après-midi)

M. MARLER (Président): Nous avons maintenant quorum. Je demanderais au comité de revenir à l'ordre. Je comprends, M. Coutu, que c'est vous qui allez présenter le mémoire des doyens des facultés de médecine.

M. COUTU: Oui, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Voulez-vous d'abord nous présenter les membres de votre délégation?

M. COUTU: Oui. J'ai ici à ma droite, le Dr Gingras, doyen de la faculté de médecine de Laval; le Dr Lasalle, doyen de la faculté de médecine de Sherbrooke, et le Dr Beauregard, vice-doyen de la faculté de médecine de Sherbrooke. A ma gauche, le Dr Robillard, vice-doyen de la faculté de médecine de Montréal; le Dr Guy Joron, vice-doyen de la faculté de médecine de McGill, et le Dr Bergeron, vice-doyen de la faculté de médecine de Laval.

M. LE PRESIDENT: Alors, commencez la lecture. Je suppose que vous allez nous donner une espèce de résumé du mémoire, parce que je crois que les membres du comité ont déjà pris connaissance du document que vous avez déposé.

M. COUTU: Exactement. M. le Président, Messieurs, les doyens des quatre facultés de médecine du Québec ont voulu présenter un mémoire au comité des deux Chambres, étant donné les implications nombreuses d'un régime d'assurance-santé sur l'éducation médicale.

On peut immédiatement prévoir que dans un système d'assurance-santé généralisé, le rendement des soins de santé dépendra très étroitement de celui des facultés de médecine. Ce sont en effet les facultés de médecine qui forment les effectifs médicaux et qui dirigent l'éducation du personnel des disciplines paramédicales. Les facultés de médecine collaborent aussi à l'instruction des membres des autres professions du domaine de la santé. En maintenant les plus hauts standards de soins médicaux dans leurs institutions, elles donnent le ton de l'excellence pour toute la pratique professionnelle. Elles apportent enfin à la communauté des ressources plus efficaces dans le domaine de la santé, ressources qui résultent des découvertes scientifiques qui s'effectuent dans leurs laboratoires.

Il faut donc réaliser pleinement que, plus que maintenant encore, dans l'éventualité d'un système d'assurance-santé généralisé, l'efficacité des soins de santé dépendra très étroitement du rendement des facultés de médecine et que cette interdépendance se manifestera beaucoup plus rapidement que maintenant et d'une façon beaucoup plus étendue. Nous entrevoyons que plusieurs avantages résulteront d'une collaboration très étroite entre les organismes distributeurs de soins médicaux et les institutions d'éducation médicale.

Dans ce mémoire, nous avons traité de l'enseignement dans les facultés de médecine, de la recherche médicale, des soins médicaux donnés dans les hôpitaux affiliés et de tous les groupes d'étudiants auxquels les facultés de médecine doivent prodiguer leur enseignement. Ce mémoire, même s'il touche à plusieurs aspects de l'éducation médicale en regard de l'assurance-santé, n'a pas la prétention d'être complet ni d'apporter des solutions à tous les problèmes qui résulteront de l'instauration d'un tel système. C'est pourquoi, nous recommandons que l'on prévoie un mécanisme de communications entre les facultés de médecine et l'organisation responsable de l'assurance-santé pour assurer la permanence d'une collaboration étroite entre ces organismes et résoudre les problèmes qui se présenteront.

Les facultés de médecine, depuis plusieurs années, se sont efforcées à ne choisir que les étudiants qui présentent des qualités intellectuelles et morales les rendant aptes à réussir dans leurs études et dans leur avenir. Cela leur a permis d'atteindre un niveau d'excellence de rendement que l'on a parfois malheureusement confondu avec une limitation du nombre d'étudiants.

Dans les situations actuelles, elles ne sau- raient d'ailleurs augmenter leur nombre de candidats, étant donné le manque de facilité en espace, personnel et budget, il est à noter de plus que le nombre de candidats présentant des aptitudes d'intelligence et de caractère ainsi qu'une très grande motivation pour les études médicales est assez restreint et va même en décroissant. Il est admis d'une façon générale que, pour permettre une excellente sélection au sein d'une faculté de médecine, il faut que cette dernière ait au moins deux fois plus de candidats qui font une demande d'admission que de places disponibles en première année.

Dans les universités de langue française, du moins, la situation est quelque peu alarmante, si l'on considère que depuis 1960 le pourcentage des bacheliers ès arts qui optent pour la médecine va en décroissant. A l'université de Montréal, par exemple, ce pourcentage était de 15.4% en 1960 et il n'était que de 8.6% en 1965. Ceci veut dire qu'étant donné qu'un grand nombre de professions s'ouvrent aux bacheliers, ils optent non seulement pour la médecine, mais également pour d'autres professions. Et c'est un fait que le pourcentage des demandes, diminue.

M. LE PRESIDENT: Sans que le nombre d'étudiants en médecine ne diminue,,

M. COUTU: Non, cela ne change pas. Mais seulement nous avons moins de choix en somme. C'est pourquoi nous recommandons que, dans l'établissement d'un système d'assurance-santé, un souci particulier soit apporté à l'attrait de l'exercice de la profession médicale, afin qu'elle puisse recruter des candidats doués des plus hautes qualités intellectuelles et morales.

Actuellement, l'enseignement clinique se fait dans un certain nombre d'hôpitaux qui détiennent des contrats d'affiliation avec la faculté de médecine. Deux groupes de professeurs cliniques se partagent l'enseignement aux étudiants de troisième et de quatrième années. Les uns travaillent à plein temps géographique, c'est-à-dire qu'ils ont un bureau en somme à l'hôpital, tout se passe à l'intérieur, voient des malades, et vous allez le voir par le texte qui va suivre, sont dans la classification également. Ils reçoivent un revenu provenant partiellement de l'université, partiellement des services d'assurance-hospitalisation et complété par des honoraires provenant d'une pratique professionnelle limitée et exercée dans les murs de l'hôpital. Les autres, qui représentent en nombre la majorité du corps professoral, contribuent à l'enseignement sur une base bénévole.

Les professeurs cliniques consacrent auprès des malades pour l'enseignement aux étudiants un temps beaucoup plus considérable que le traitement seul nécessiterait. Ils n'ont pas le loisir durant ces périodes d'enseignement de s'adonner à leur pratique privée. De plus dans les hôpitaux d'enseignement, un certain nombre de professeurs se groupent en équipes pour présenter devant les étudiants divers aspects des problèmes cliniques. Ce travail en équipe est d'ailleurs souvent nécessaire pour le soin des malades dans les hôpitaux affiliés.

C'est pourquoi nous recommandons, premièrement, que l'assurance-santé tienne compte des impératifs de l'enseignement médical, admettre une distinction entre le service aux malades et l'enseignement et laisse aux facultés de médecine la responsabilité de déterminer les modalités de l'enseignement et de la rétribution des professuers.

Deuxièmement, que l'assurance-santé sauvegarde la possibilité d'utiliser les services bénévoles d'un grand nombre de professeurs de cliniques et n'établissent pas de conditions qui empêchent de rétribuer ces professeurs d'une façon réaliste.

Troisièmement, que l'on accepte la nécessité de la présence de professeurs engagés sur une base de plein temps géographique dans les hôpitaux d'enseignement.

Quatrièmement, que l'on admette le travail d'équipe et des consultations pour le diagnostic et le traitement, et cela particulièrement dans les hôpitaux d'enseignement.

Depuis l'avènement de l'assurance-hospitalisation, plusieurs éducateurs médicaux ont exprimé des craintes au sujet du peu de patients de salles que les hôpitaux peuvent mettre à la disposition des étudiants. Cette situation s'est avérée plus grave particulièrement pour l'entraînement en chirurgie. Il est certain que le malade tire grand avantage à contribuer à l'éducation médicale en même temps qu'il rend un service précieux à la communauté. C'est pourquoi nous recommandons que, dans les hôpitaux d'enseignement, tous les patients soient susceptibles de servir pour les fins de l'enseignement et qu'une éducation du public soit faite, pour faire accepter les avantages de cette condition.

Comme les étudiants en médecine passent une grande partie de leur formation médicale dans les hôpitaux affiliés, il va sans dire que des facilités spéciales doivent être prévues dans ces institutions pour les étudiants et les professeurs; matériel d'enseignement, espace, bibliothèque, laboratoire etc. L'hôpital qui accepte de servir dans de tels programmes d'en- seignement supporte des dépenses plus considérables que les autres hôpitaux. Il doit parfois soustraire un certain nombre de lits pour fournir des espaces d'enseignement et de recherche. La durée d'hospitalisation dans les hôpitaux d'enseignement est d'une façon générale un peu plus longue que dans les hôpitaux communautaires, vu le genre de malades référés a ces institutions et vu la nécessité de prolonger l'hospitalisation dans certains cas d'un malade pour fin de recherche.

Les nominations et les promotions des professeurs dans les divers hôpitaux affiliés sont faites conjointement par l'université et par l'hôpital concerné. Les chefs de cliniques sont également choisis sur une base conjointe et ont pour rôle de voir dans leurs secteurs propres à la direction des soins aux malades, à la recherche et à l'enseignement.

Il nous apparaît donc logique de recommander premièrement que l'on admette les dépenses administratives et d'opération inhérentes à l'enseignement donné dans les hôpitaux d'enseignement et que la responsabilité de ces dépenses soit clairement définie de façon à ce que les facultés sachent où en obtenir les disponibilités nécessaires.

Deuxièmement, que dans les hôpitaux d'enseignement des espaces suffisants soient consentis pour l'enseignement et la recherche et que les facultés aient la possibilité de suggérer au ministère de la Santé les nécessités de l'enseignement dans les programmes de réaménagement ou de construction pour les hôpitaux d'enseignement.

Troisièmement, que dans les hôpitaux d'enseignement on permette une prolongation raisonnable de l'hospitalisation de certains patients jugée nécessaire par des personnes compétentes pour la poursuite d'une recherche valable.

Quatrièmement, que dans les hôpitaux affiliés l'exécutif du bureau médical soit constitué en majorité de chefs de service.

Dans l'état actuel des choses, l'enseignement des sciences fondamentales se donne sur le campus universitaire et celui des sciences cliniques dans les hôpitaux autonomes et en général situés à une bonne distance de l'université.

Cette situation ne favorise pas les rencontres, pourtant nécessaires, entre fondamentalistes et cliniciens. De plus, la bibliothèque médicale de l'université devient très peu accessible aux étudiants dans les hôpitaux et également au personnel enseignant. Aucune vie facultaire n'est possible ni aucune véritable intégration des sciences cliniques et des sciences fondamentales. C'est pourquoi nous recomman-

dons que les autorités gouvernementales contribuent à ce que les facultés de médecine de l'université de Montréal, de Sherbrooke et de l'université Laval opèrent dans le cadre d'un centre médical groupant les départements de sciences fondamentales et de sciences cliniques dans un tout intégré situé le plus près possible du campus universitaire. Ces centres médicaux deviendront le noyau de futurs centres groupant toutes les facultés et écoles du domaine de la santé et leur création sera un bienfait pour la population du Québec.

M. le Président, je vous remercie.

M. LE PRESIDENT: M. Coutu, je ne sais pas si d'autres membres de votre délégation désirent adresser la parole.

M. COUTU: Peut-être pas pour le moment. Si vous nous le permettez, lors des questions, peut-être qu'une personne serait plus préparée que moi à répondre selon...

M. LE PRESIDENT: Sûrement!

M. COUTU: Je vous remercie, M. le Président.

M. BLANK: Docteur, une question-clé pour commencer. Pensez-vous, dans l'opinion des facultés, qu'il y ait assez de médecins en ce moment à Québec?

M. COUTU: Je pense qu'on peut répondre via le Collège des médecins qui a fait une étude dans ce sens-là et qui a prouvé, en fait, qu'il manquait de médecins dans la province de Québec, et qui a prouvé...

M. BLANK: Et qu'est-ce que vous faites pour élargir vos admissions, pour avoir plus d'étudiants, en plus grand nombre?

M. COUTU: En ce qui nous concerne, évidemment, il faut peut-être distinguer d'une faculté à l'autre. Mais de toute façon, en ce qui concerne Montréal, je puis vous dire que nous ne pouvons pas présentement prendre plus d'étudiants que nous en prenons parce que nos laboratoires ne le permettent pas, au point de vue physique. Alors comme je le disais tantôt, les budgets, les espaces manquent. Maintenant, vous savez peut-être que M. le premier ministre a dit à Montréal: Je vous donne le Centre médical tel que je vous l'ai promis à condition que vous augmentiez le nombre d'étudiants. Et nous avons consenti à augmenter le nombre d'étudiants jusqu'à une limite raisonnable qui ne doit pas évidemment nuire à nos standards, bien sûr. Et nous attendons encore la réponse de ce côté-là.

M. BLANK: Pensez-vous qu'à un moment donné vous preniez un maximum, vous puissiez dire: c'est le maximum des étudiants que vous prendrez dans la province de Québec?

M. COUTU: Dans chaque faculté vous voulez dire?

M. BLANK: Non, dans la faculté de médecine.

M. COUTU: Oui, mais pour chaque faculté?

M. BLANK: Bien, il n'y a qu'une faculté de médecine dans chaque université.

M. COUTU: Oui, oui.

M. BLANK: A un moment donné on va pouvoir dire que, dans une faculté, le maximum qu'on prendrait serait 400 étudiants.

M. COUTU: Oui.

M. BLANK: Mais vous avez une raison pour ce chiffre?

M. COUTU: Oui. Le chiffre 400, vous le dites...

M. BLANK: Je dis 400 seulement en exemple, je ne le sais pas.

M. COUTU: Evidemment, il faut une limite,

M. BLANK: Mais pour quelle raison faut-il une limite? C'est ça que je demande.

M. COUTU: Pour plusieurs raisons. D'abord pour une raison d'excellence. Deuxièmement, il faut savoir que la médecine s'enseigne sur une base individuelle. Il faut pratiquement —aux Etats-Unis on l'a prouvé et puis ici c'est la même chose — deux professeurs par étudiant. Il faut bien penser que si un étudiant est au fond de la salle et qu'on traite d'un malade, au lendemain de son diplôme il est pris devant n'importe quel genre de cas. Et là il est seul devant le malade. C'est un enseignement qui doit être très individualisé. Et c'est pour ça qu'on vise — parce qu'on n'a pas ça présentement— à deux professeurs par étudiant en clinique. Je pense que c'est une raison très importante que cet enseignement individualisé pour la médecine.

M. RENAUD: Docteur Coutu, je comprends que vous venez de nous exposer le rôle et la contribution des facultés de médecine en rapport avec la santé et advenant peut-être le cas de l'établissement d'un plan d'assrrance-maladie. Est-ce que vous avez examiné cet angle-là? Quelle est la position des doyens des facultés de médecine relativement à l'établissement d'un régime d'assurance-maladie?

M. COUTU: Je dois vous dire que, dans notre mémoire, nous sommes partis du principe que advenant le cas que vous dites très bien, on n'a pas étudié en fait si oui ou non nous étions en faveur du régime. Par conséquent, je ne pourrais pas répondre au nom de mes collègues parce que cette question n'a pas été étudiée comme telle.

M. RENAUD: Disons qu'advenant le cas où il y aurait l'établissement d'un régime,..

M. COUTU: C'est ça!

M. RENAUD: ... voici le rôle que vous seriez appelés à jouer.

M. COUTU: C'est ça! C'est le sens en somme du mémoire.

M. RENAUD: Alors, ça ne servirait à rien de poser d'autres questions pour savoir ce que vous penseriez du champ d'application, par exemple un plan d'assurance-maladie dans la province?

M. COUTU: Non, nous pourrions vous répondre à ça peut-être avec une étude, mais enfin,nous ne sommes pas préparés pour répondre à ça aujourd'hui.

M. RENAUD: Pour répondre à ça. Vous vous en êtes rapportés à votre rôle....

M. COUTU: Exactement.

M. RENAUD: ...comme enseignants de la médecine dans la province.

M. BARIBEAU: Dr Coutu, en douzième recommandation, vous recommandez que les facultés aient la possibilité de suggérer au ministère de la Santé les nécessités de l'enseignement dans les programmes de réaménagement ou de construction pour les hôpitaux d'enseignement. Voici ma question: Quel mécanisme les doyens suggèrent-ils pour arriver à cette fin?

M. COUTU: Je vais vous dire que dans notre milieu nous sommes un peu avancés parce que M. Kierans nous a réunis, toutes les facultés de médecine — ça s'est fait à Laval et à Montréal — et nous a précisément demandé en présence des hôpitaux, si les hôpitaux étaient consentants à ce qu'il y ait une planification dans ce sens-là établie par la faculté de médecine en collaboration avec les hôpitaux. Et les hôpitaux ont répondu oui à ce moment-là. Nous avons fourni depuis, à Montréal en tous cas et la même chose à Québec, un mémoire à M. Kierans où nous donnons justement les nécessités d'enseignement dans les hôpitaux affiliés, parce que, vous savez, tous ces hôpitaux-là n'ont pas du tout été conçus pour l'enseignement. Alors, nous avons des besoins maintenant et il faut qu'on les réalise, par conséquent c'est pas mal avancé dans ce sens-là.

M. RENAUD: M. Coutu, je me demande encore si ma question est dans l'ordre mais est-il désirable que la grande majorité ou, enfin, la majorité des docteurs en médecine s'engagent plutôt dans la voie de la spécialisation que comme omnipraticiens?

M. COUTU: S'il est désirable, vous dites? M. RENAUD; Oui.

M. COUTU: Bien, évidemment, là encore je pourrais vous répondre de la même façon que tantôt, ce n'est pas l'objet du mémoire. Vous savez, souvent une opinion personnelle c'est une autre histoire...

M. RENAUD: ...c'est pire...

M. COUTU: ...mais ça ne fait pas partie du mémoire....

M. RENAUD: Cela ne fait pas partie de votre mémoire?

M. COUTU: ...j'aimerais mieux ne pas en discuter ici, si vous permettez, et m'en tenir strictement au mémoire.

M. BOUDREAU: Docteur, quand vous avez mentionné votre mémoire tout à l'heure, vous avez dit qu'il y avait un choix de fait pour l'admission des étudiants à la médecine. Quels sont les critères que vous employez pour admettre les étudiants?

M. COUTU: Bien, les critères en somme sont les suivants: actuellement pour les facul-

tés de médecine du Québec, en tout cas de la langue française — je pense que c'est la même chose pour la langue anglaise —il faut le baccalauréat ès arts ou ès sciences. Evidemment, avec le rapport Parent, etc, il se pourra que ceci change, mais actuellement c'est ceci; alors comme base, il faut connaître évidemment la langue dans laquelle la médecine est enseignée, et il faut avoir réussi correctement dans les sciences parce qu'évidemment, non seulement les sciences, les humanités également, mais les sciences sont très importantes, en mathématiques, en biologie, en physique et en chimie. Par conséquent, un candidat qui ne présente pas de garantie au point de vue des sciences, ne sera pas considéré autant que celui qui a des capacités au point de vue scientifique.

M. BOUDREAU: L'année dernière, les journaux nous ont rapporté que les écoles de médecine avaient refusé tout près de 300 élèves parce qu'il n'y avait pas de place pour les recevoir. Est-ce que c'est exact?

M. COUTU: Trois cents, je pense que c'est assez juste, parce qu'en somme ça fait à peu près une centaine à Montréal, une centaine probablement à Québec, ça fait deux cents. Maintenant, je ne sais pas à McGill exactement. M. Joron, combien à peu près?

M. JORON: Bien la question c'est qu'ils avaient été refusés parce qu'il n'y avait pas de place. Au McGill, je ne crois pas qu'ils aient refusé parce qu'il n'y avait pas de place. Nous avons refusé des québécois qui ne rencontraient pas nos «standards» et nous avons accepté tous les québécois qui rencontraient nos «standards».

M. BOUDREAU: Oui, chez vous, mais je parle, moi, de l'école de médecine de Québec et celle de Montréal.

M. COUTU: C'est la même situation, Monsieur. Nous avons pris tous les candidats qui répondaient à nos normes. Et pour les derniers que nous avons dû choisir, il a fallu faire un travail énorme pour tâcher d'en avoir qui se comparaient avec ceux qu'on avait acceptés.

M. BOUDREAU: Et on m'a affirmé que tous les étudiants qui avaient fait leurs demandes d'admission possédaient leurs B.A.

M. COUTU: C'est juste, mais ce n'est pas suffisant.

M. BOUDREAU: Ah bon, alors, là il y a eu un choix de fait, mais la raison pour les refuser? On a dit: « Il n'y a pas de place dans les universités. »

M. COUTU: Non, ce n'est certainement pas chez nous, en tous cas, ça ne doit pas être comme ça à Québec non plus, ce n'est pas la raison. Et j'ai dit tantôt, qu'on ne pourrait prendre plus d'étudiants que nous en prenons parce que l'on n'a pas de place dans nos laboratoires, mais seulement ceci correspond très bien actuellement avec ceux que l'on peut accepter selon leurs aptitudes.

M. BOUDREAU: Je n'ai pas besoin de vous dire, docteur, que moi j'en ai eu connaissance. Il y a plusieurs étudiants qui se sont préparés pour aller en médecine et puis que les portes leur ont été fermées.

M. COUTU: Bien comme je vous dis, si quelqu'un n'a pas les aptitudes jugées nécessaires pour faire le cours, c'est sûr qu'il est refusé et ce sera toujours comme ça. A moins évidemment de vouloir former des gens de second...

M. BOUDREAU: ... oui, mais ce n'est pas la raison que l'on a donnée. On a donné la raison il n'y avait pas de place.

M. COUTU: Non, mais ce n'est pas ce qu'on a répondu chez nous, monsieur.

M. RENAUD: Vous avez combien d'entrées qui ont été faites, l'an dernier par exemple, dans nos universités?

M. COUTU: Pardon?

M. RENAUD: Combien d'entrées? Combien d'admis à l'étude en première année...

M. COUTU: Bon.

M. RENAUD: ... dans les quatres universités?

M. COUTU: Cela a été à peu près 130 à Montréal, 130 à Québec et Sherbrooke va commencer avec 16 bientôt mais actuellement ce n'est pas fait encore, et c'est environ 126 à McGill.

M. RENAUD: Et combien de nouveaux docteurs ont été reçus, docteurs en médecine, l'an dernier?

M. COUTU: Le nombre exact... en tout cas, mettez entre 100 et 110 par faculté.

M. RENAUD: Les quatre. Dans la province, il y a 4 universités...

M. COUTU: Oui, voyez-vous, il y a à peu près 10% d'échecs, monsieur.

M. RENAUD: De la première année à aller jusqu'à la fin du cours?

M. COUTU: C'est ça, exactement 10% d'échecs.

M. ASSELIN: Docteur, vous venez de nous dire que ceux qui ont été refusés, pas généralement mais toujours, ce n'est pas à cause du manque d'espace mais parce qu'ils ne rencontraient pas les normes déterminées pour l'admission à l'étude. Pouvez-vous nous dire, à part le B.A., quelles sont les normes en vigueur, sur lesquelles les facultés se basent pour refuser les étudiants?

M. COUTU: Bien, comme je vous ai dit tantôt, la médecine est basée sur les sciences. Evidemment, quelqu'un qui est très fort en littérature et qui a passé d'une façon très juste au point de vue scientifique, ne sera pas considéré avant celui qui est plus fort en sciences. Alors, nous prenons, évidemment, ceux qui offrent des garanties parce qu'ils ont, en plus d'avoir un baccalauréat bien réussi, de bons résultats aussi en sciences, ça c'est bien important.

M. RENAUD: Est-ce que les normes sont les mimes pour les 4 institutions?

M. COUTU: Exactement, la même chose, le même nombre de crédits.

MR. BLANK: I would like to ask a question to the gentleman from McGill. In your reply a minute ago, I understood that anybody, any Quebecker who applied and had required qualifications was accepted in the Faculty of Medicine at McGill, is that what you said?

MR. JORON: Yes, that's what I said.

MR. BLANK: In other words, if you have 126 people from Quebec who applied you would accept nobody from any place else?

MR. JORON: We are talking now a little bit about theorical considerations. Theorical considerations in many cases happen to coincide with the facts. The fact is that, both last year and the previous year, the numbers were about 70 or 77, something in that order, of people from the province of Quebec who met our standards and were given top priority.

MR. BLANK: Who met your standards, but not necessarily had the basic qualifications?

MR. JORON: Oh no, you see, on the contrary, if I may elaborate a little bit on this. In distinction to other faculties who say: As long as you have got the basic requirements then we let you in. Then at the end of the first year, may be the failures might be 50%. Well, in medicine, places are so hard to obtain, the investment in the form of laboratory space, the fact that you got to have patients who are contributing something of themselves to this process, is such and is so valuable that you try to choose people whom you think are very likely to get through. Now, it turns out, that if you take all the best students at the beginning, or they all get through, then you go down and down and down...

MR. BLANK: ... you do have choice.

MR. JORON: ... sure, you find out that a higher percentage of them are failing, there is no point in choosing people who are bound to fail...

MR. BLANK: Do you have any distinction, any quota system in regard to territory or countries, so many from the British Commonwealth, so many from the United States, so many from the other provinces...

M. JORON: Well...

M. BLANK: ... do you fixa minimum in your faculty of persons in order to get a varied content?

M. JORON: Well, I think, that it is true, that McGill feels that one of the advantages of the university is it that you tend to broaden your knowledge and contacts which implies that you meet people who come from other areas of the world» Having said that in the case of medecine the only, what you might call « strict priority » would be that everyone who comes from the province of Quebec who meets the standards is accepted. But, there are people from the States, there are people from the rest of the world, and from the Commonwealth, and from other provinces, does that answer your question?

M. BLANK: I realize that my question... but what would happened if you did find 126 from Quebec who filled your standards, you would then accept nobody from elsewhere?

M. JORON: The situation hasn't presented itself, if it did, I suppose that's what we would do.

M. RENAUD: Dr Coutu, je reviens à la spécialité. Vous avez des nouveaux docteurs en médecine qui ont été reçus l'an dernier. Est-ce qu'il y a spécialité à ce moment-là, dans certains cas, ou s'il faut un stage ultérieur dans les hôpitaux, des études...

M. COUTU: Voyez-vous...

M. RENAUD: ... voulez-vous élaborer un peu sur cette question-là pour nous renseigner?

M. COUTU: Voyez-vous, en somme, lorsqu'ils finissent dans une université, dans une faculté de médecine, ils sont en quatrième année, ils reçoivent leurs diplômes de m.d., mais ils doivent, nécessairement, s'ils veulent pratiquer dans la province de Québec, compléter une année d'internat, dans un hôpital reconnu par le Collège des médecins, et c'est seulement après cette cinquième année, qui n'est pas actuellement sous notre contrôle, que l'étudiant, le nouveau médecin en somme, peut pratiquer, peut opter pour la pratique générale ou bien opter pour une spécialisation.

M. RENAUD: Là, je ne vous demande pas d'opinion, mais dans les faits, pourriez-vous nous fournir les renseignements? Après l'année d'internat, quels sont ceux qui s'en vont comme omnipraticiens, la proportion? Et ceux qui sont dans les spécialités?

M. COUTU: Je pense que ça a été assez variable d'une année à l'autre, mais je crois qu'il n'y a pas tellement longtemps on a dit 50%, 50%.

M. RENAUD: 50%, 50%?

M. COUTU: Maintenant, vous savez, il faut faire attention à ceci. Eyena qui vont pratiquer une année pour se faire un peu d'argent et qui reviennent à la spécialisation. C'est extrêmement difficile d'avoir des chiffres précis.

M. RENAUD: Mais dans le cours qui est donné dans nos universités, est-ce qu'il y a déjà des cours de spécialisation pour ceux qui tendent à opter pour une spécialisation en particulier, ou si c'est la pratique générale?

M. COUTU: Non, le cours donné est uniforme pour tout le monde...

M. RENAUD: Uniforme pour tout le monde? M. COUTU: ... polyvalent, si vous voulez... M. RENAUD: ... polyvalent..» M. COUTU: ... c'est ça exactement.

M. BOUDREAU: Docteur, pardonnez-moi si je reviens encore sur cette question d'admission...

M. COUTU: C'est important!

M. BOUDREAU: ... ah oui, je considère que c'est important. Est-ce que vous affirmez que tous ceux qui possèdent les aptitudes ont été admis dans les universités?

M. COUTU: Pas nous, mais excepté...

M. BOUDREAU: Mais quelle est la raison, s'ils n'ont pas été admis?

M. COUTU: Ah bien, c'est parce que là on n'a pas de place, évidemment, ça c'est d'accord.

M. BOUDREAU: Il n'y a pas de place. Alors, j'avais raison quand j'ai posé cette question-là.

M. COUTU: Ah oui, vous avez raison, mais partiellement comme je pourrais dire; c'est parce que, prenez l'an dernier, on a eu de la difficulté avec les dossiers que nous avions à examiner, à trouver 128 étudiants pour les placer en prenière année. Une autre année, il est arrivé déjà où on a eu plus que 128 qui auraient pu faire le cours, on n'avait pas plus de place. Mais, l'an dernier je peux vous assurer ceci, à Montréal, on a eu des difficultés à trouver les derniers dossiers qui soient comparables pour pouvoir les admettre.

M. MARLER: M. Gingras...

M. GINGRAS: M. le Président, je voudrais essayer d'éclairer un peu le problème avec l'optique que nous avons à Laval. D'abord, M. le doyen Coutu a dit tout à l'heure, qu'il voulait s'en tenir au rapport, et ceci pour une raison fondamentale. C'est que, comme doyen et comme faculté de médecine de la province de Québec, nous croyons que notre devoir et notre mandat sont de former des médecins compétents, bien qualifiés, et non pas d'apporter des

équipes médicales dont îa province de Québec a besoin. Nous devons collaborer mais ce n'est pas notre rôle, nous ne sommes pas le ministère de la Santé, nous n'avons pas à trouver des moyens de donner les médecins ou les paramédicaux qu'il faut à la province de Québec. Nous avons le devoir de former des gens avec les moyens dont nous disposons. Dans ce contexte, nous sommes liés par des associations, des organismes de classification qui s'appellent l'American Medical Association et la Canadian Medical Association. Il faut bien comprendre que ces organismes ne nous imposent pas d'une façon arbitraire des conditions de travail et des conditions de programmes. Ils les imposent parce que les conditions qu'ils réclament sont des conditions qui conviennent aux populations actuellement, et on a déjà dit que nous n'avions pas à recevoir les ordres de l'American Medical Association. Nous ne recevons pas d'ordre, nous demandons à l'American Medical Association, qui est un organisme puissant, qui a des moyens dont nous ne disposons pas au Canada — et ceci toutes les provinces du Canada le demandent — de venir classer nos facultés de médecine. Cela veut dire que ces gens-là viennent chez nous, évaluent pendant des semaines avec nous ce dont nous disposons comme moyens pour faire des médecins compétents, nous indiquent nos difficultés, nous essayons de les corriger, et s'il y a des difficultés qui sont vraiment très sérieuses, nous donnent un avis qu'il faudra les modifier ou fermer nos facultés de médecine. Et ceci ce n'est pas une vue de l'esprit. Je pense qu'aux alentours de 1904 ou 1914, il y a eu un rapport, si Je me souviens bien, qui est le rapport Fresner que l'on a examiné aux Etats-Unis, dans l'Amérique du Nord. Les facultés de médecine qui existaient — il y en avait environ 300 — et après que le rapport eut été mis devant le public, il y en a 213 qui ont fermé leurs portes parmi les facultés de médecine parce que ce n'était pas des facultés de médecine montrables» Il y en est resté 87, qui ont conservé des « standards » tels qu'ils ont pu continuer à former des médecins. Et c'est la situation devant laquelle nous sommes acculés. Si les facultés de médecine du Québec ne rencontrent pas les exigences nord-américaines, il faudra fermer nos portes, ou bien nous serons placés devant l'opinion publique et les associations qui nous classent nous diront: Vous n'êtes pas admis chez nous dans aucun niveau et, devant l'opinion publique, vous n'êtes pas une faculté de médecine convenable. » Or, les conditions qui régissent les programmes d'enseignement médical, font qu'à l'expérience et à l'étude sérieuse des programmes, il faut qu'il y ait un certain nombre d'étudiants, par rapport à un certain nombre de professeurs, de vrais professeurs, et par rapport à un certain nombre de malades, de vrais malades, je veux dire des malades auxquels l'étudiant a accès, parce qu'on peut former un chimiste avec des éprouvettes. Multipliez les professeurs, et multipliez les éprouvettes. On ne peut pas former l'étudiant en médecine en multipliant les professeurs et en n'ayant pas de malade pour enseigner; ça s'enseigne sur un malade, la médecine, et ça s'enseigne à partir de la première année, ça devrait s'enseigner à partir de la première année. Cela s'enseigne chez nous à partir de la deuxième année du cours, dans le deuxiième semestre. On envoie des étudiants à l'hôpital et on leur montre des méthodes pour examiner un malade, comment le percuter, comment l'ausculter, c'est pour ça. Cela peut vous surprendre, mais c'est pour ça qu'il faut plusieurs médecins pour un étudiant. Il faut qu'un étudiant puisse avoir accès à un malade, qu'il permette, lui le malade d'être examiné, que son médecin traitant permette qu'il soit examiné et qu'il soit enseigné par un professeur qui peut être le même, enfin qu'il soit enseigné par un professeur. Et ça prend des conditions très particulières pour faire l'enseignement médical- L'enseignement médical présentement se fait dans des hôpitaux qui sont repartis à travers quasi l'est de la province de Québec pour Laval: Chicoutimi, Trois-Rivières, Québec, quatre, cinq, six ou sept, un peu partout, avec des gens qui sont des médecins traitants, des excellents médecins qui ont une grande expérience de la clientèle, etc, et qui enseignent parce qu'ils veulent bien enseigner, qui prêtent leurs malades, parce qu'ils veulent bien les prêter, parce que le malade veut bien s'y prêter; mais ce sont des gens qui, pour la plupart, ne reçoivent pas de salaire de l'université, parce que l'université n'a pas de budget pour les payer, et ne peuvent pas être employés en plein temps parce que, même si nous avions les budgets pour les payer, nous n'aurions pas des échelles de salaires qui nous permettent de les payer, parce que l'université a présentement des échelles de salaires qui s'opposent à ce que l'on paie les médecins plus cher que les autres facultés. Et des médecins en pratique actuellement qui ont un « m.d. » et qui ont un « fellow » du Collège royal, qui ont 5 ou 10 ans d'expérience, par conséquent, n'acceptent pas nos échelles de salaires.

La situation est très critique et très pénible; elle frise le scandale présentement. Nous avons certaines sections qui frisent le scandale dans

l'enseignement médical. Et dans cette situation-là nous sommes obligés de tenir compte de nos possibilités. Nos possibilités ne sont pas basées sur nos vraies possibilités, elles sont basées sur des traditions qui ont fait que, devant le besoin de la population qui demande non seulement d'être soignée mais de faire de la médecine, c'est le droit de l'individu de faire de la médecine dans la province de Québec s'il a des aptitudes, des talents pour le faire. Or, pour répondre à M. Boudreau, je pense...

M. BOUDREAU: Oui.

M. GINGRAS: Pour répondre à la question directe de M. Boudreau, nous aurons cette année — je vous demande pardon, je n'ai pas de chiffres devant moi, je vous donne des chiffres approximatifs et qui serrent de très près à la vérité et je pense que c'est ça que vous voulez savoir — nous aurons à la faculté de médecine 300 candidatures d'étudiants d'ici quinze jours à juger, 300; nous en admettrons 125.

M. RENAUD: A Laval ça?

M. GINGRAS: A Laval, 300 à Laval, 300 qui sont admissibles à la faculté de médecine, en autant que vous admettez que les collèges classiques de l'université Laval, faculté des arts, préparent un baccalauréat qui est la condition d'admission pour ces facultés et, dans d'autres facultés, on accepte la 12e année. Dans la faculté de médecine de Laval, on exige le baccalauréat. Or, nous avons 300 baccalauréats devant nous. Nous avons déjà refusé — nous ne les comptons pas parce que, systématiquement, nous refusons déjà tout ce qui est Nord américain, tout ce qui est américain, tout ce qui vient de l'extérieur, tout ce qui vient au nom de la survivance. Nous avons dit, au nom de la survivance, dans les provinces de l'Ouest: Dans les provinces de l'Est, nous admettons deux ou trois étudiants à la condition que ce soient des dossiers vraiment supérieurs, supérieurs à tous les autres. Donc, les autres sont également écartés et nous restons quand même avec des paquets de papiers où ce sont tous des baccalauréats de l'université Laval, et il y en a au-delà de 300.

Par conséquent...

M. RENAUD: Vous allez en admettre combien sur 300?

M. GINGRAS: Cent vingt-cinq.

M. BOUDREAU: Cela c'est toujours condi- tionné à la place que vous avez. Vous n'avez pas de place pour en prendre plus que ça.

M. GINGRAS: Entendons-nous par place, s'il s'agit de chaises ou d'autres choses comme place...

M. BOUDREAU: Je parle du nombre possible d'élèves.

M. GINGRAS: Le nombre possible a été fixé présentement à 125, et c'est exagéré. Si les conditions qui nous sont faites actuellement ne sont pas changées nous devrons diminuer à Laval le nombre de nos admissions.

M. RENAUD: Est-ce que ça dépend que les étudiants n'ont pas les aptitudes ou s'il y a manque d'espace et d'organisation dans les universités?

M. GINGRAS: Je vais y venir. Je pense que ce comité, même si c'est un peu long, gagnera à connaître nos méthodes d'admission, parce qu'on a dit n'importe quoi là-dessus, on a dit: «On accepte des fils de médecins, on n'accepte pas les autres, etc». J'ai sorti un rapport récemment qui démontre qu'il y a peut-être 2% des fils de médecins qui sont admis et que les fils de cultivateurs, d'ouvriers, etc, font la masse de l'admission. L'admission se fait de la façon suivante: nous cherchons — et c'est imparfait comme tous les systèmes humains — nous cherchons à avoir le tableau des individus et à prendre les 125 meilleurs parmi 300. Nous ne croyons pas que ce soit un pourcentage de points qui établisse le meilleur tableau de l'individu. Nous faisons donc un contact personnel d'au moins une heure avec une personne qui est attitrée, présentement le Dr Larochelle, qui reçoit les étudiants, trois quarts d'heure, une heure, et qui essaie de faire leur dossier, de voir leurs motivations, etc. Nous faisons l'étude du dossier, du curriculum vitae, étude des points, nous faisons des examens de psychologie et puis, finalement, un comité de neuf personnes représentant l'université, la faculté de médecine, des psychiatres, des pédagogues, des cliniciens, des sciences fondamentales, nous essayons de trier les 125 meilleurs sur 300.

M. RENAUD: Si vous aviez toute l'organisation voulue vous en accepteriez combien?

M. GINGRAS: Deux cents. M. RENAUD: Deux cents.

M. GINGRAS: C'est une opinion personnelle...

M. RENAUD: Il y en a 75 qui restent en panne.

M. GINGRAS: C'est une opinion personnelle, je tiens à le signaler. La faculté de médecine présentement n'a pas pris d'action là-dessus, mais seulement, parce qu'il y a présentement une politique nord-américaine qui veut que les facultés de médecine reçoivent un très petit nombre d'étudiants. Yale, Harvard, 60 étudiants; Toronto ne recevait pas plus que nous autrefois. Il y a une raison à ça, c'est que s'il y a une université à Purdue, à Boston, qui dépasse son nombre d'étudiants on peut en ouvrir une autre à côté, on va chercher un professeur à Chicago et puis on fait une autre faculté de médecine. Mais, dans la province de Québec, c'est différent. Pour enseigner à notre groupement ethnique, il y a Montréal, il y a Québec et on ne peut pas aller ailleurs et je crois qu'il va falloir élargir les facultés de médecine et c'est peut-être plus facile d'élargir une faculté de médecine que d'en créer plusieurs autres. Cette philosophie que, personnellement, j'ai mise de l'avant il y a quelques années, a surpris mon milieu mais actuellement on est en train d'en revenir parce que Toronto est en train de prendre 250 étudiants en médecine et les universités américaines sont en train de s'élargir aussi. Il me semble, à moi — je tiens à le préciser, c'est une opinion personnelle — que c'est plus facile de faire une faculté de médecine à Laval de 200 étudiants que d'en fonder une autre à Chicoutimi ou à Rimouski. Il y a des bases là-dedans, il y a des facultés des sciences fondamentales. Augmenter le nombre de professeurs, ça n'augmentera pas les laboratoires et, en 1949, quand nous avons bâti notre faculté de médecine nous l'avons bâtie pour 200. Nous étions conscients ou pas à ce moment-là, nous avons fait 200 places dans les amphithéâtres, nous avons fait 200 places dans les laboratoires qui sont pour 50% du temps inutilisés. Alors pourquoi pas? Pourquoi pas, parce que nous n'avons pas les professeurs, nous n'avons pas les budgets et nous n'avons pas l'échelle de salaires et de toute façon les professeurs ne se créent pas dans une journée; ça prendrait un certain temps. Et puisqu'on parle de planification, nous croyons, que l'assurance-santé, si elle est établie, sera prise devant un vacuum, devant un vide. L'assurance-santé offrira des services, paiera pour des services et ne pourra pas les obtenir, parce que les services médicaux ça se donne par des médecins, des para-médicaux, et nous ne les avons pas. Cela, comme individu, nous pouvons vous le dire, comme faculté de médecine ce n'est pas notre rôle de nantir la province de Québec des effectifs dont elle a besoin. Notre rôle, c'est de faire de bons médecins et des bons para-médicaux avec les moyens dont nous avons et les moyens nous ne les avons pas, et nous le disons depuis 1949, et ça n'a rien changé.

M. RENAUD: Pardon, excusez-moi. Voulez-vous nous donner encore les trois moyens pour l'agrandissement de nos facultés?

M. GINGRAS: Pour l'agrandissement de la faculté de médecine de Laval, je ne dis pas que ma faculté suivrait ce programme mais je suis prêt à le lui proposer. Premièrement, augmentation des budgets sur une base convenable et ce que j'entends par une base convenable — j'ai assez distribué à la députationle rapport que j'ai publié en 1942, rapport de quelque 400 pages, je pense que vous devez l'avoir entre les mains, il va me faire plaisir de vous le faire parvenir éventuellement — il est démontré dans ce rapport que, sur les 87 facultés de médecine de l'Amérique du nord, Laval occupe strictement le dernier point, le dernier palier au point de vue des budgets et que sur le tableau qui se prépare comme ça, nous sommes en bas et nous sommes en bas avec une moyenne de $1,000 point quelque chose...

M. RENAUD: Quand vous parlez de budget vous parlez de traitements des professeurs?

M. GINGRAS: Je parle de tout le budget dans l'ensemble, tout ce que ça coûte pour faire vivre une faculté de médecine.

M. RENAUD: Oui mais le premier item, évidemment, c'est le traitement des professeurs.

M. GINGRAS: Oui.

M. RENAUD: Ensuite les frais généraux, il y a une partie qui tombe dans les frais généraux, il faut que l'université entretienne les bâtisses.

M. GINGRAS: L'entretien des bâtisses, l'entretien des laboratoires, le paiement des professeurs.

M. RENAUD: Oui mais ça, ça tombe dans l'administration générale de l'université elle-même.

M. GINGRAS: Oui, mais chaque faculté a son budget.

M. RENAUD: Qui présente son budget à chaque année.

M. GINGRAS: Chaque année la faculté présente son budget et alors pour vous donner un peu l'idée, dans une faculté de médecine comme Laval, en 1962, le rapport tiré de l'American Medical Association nous avions un budget comparativement à l'étudiant de $l,000 point quelque chose, c'est la même chose pour Montréal, $1,000 point quelque chose par étudiant, alors qu'un pays qu'on ne peut tout de même pas dire très riche comme l'Indonésie avait $3,000.7 et que Saskatchewan avait $7,000.8 des choses de cet ordre-là. Par conséquent, on a, à l'oeil nu, 4 ou 5 fois nos facilités monétaires. Le budget qui est présentement $1,000 point quelque chose à Laval est dépassé par le budget de 1 point, presque 2 par le budget que individuellement les professeurs de Laval vont chercher dans le secteur de la recherche. C'est totalement anormal.

M. RENAUD: Votre deuxième recommandation?

M. GINGRAS: Deuxième recommandation, c'est que si nous ayons un budget, quel qu'il soit. A moins de pouvoir payer un salaire qui puisse attirer les professeurs, il est impossible de les avoir. Je ne parle pas du pactole, je ne parle pas de choses impossibles, je parle de salaires acceptés par tout le contexte nord-américain présentement,

M. RENAUD: Et même des professeurs étrangers.

M. GINGRAS: Même les professeurs étrangers, je parle de salaires, par exemple, qui seraient superposables, je voudrais essayer de faire comprendre le point qu'on ne vise pas l'impossible. Un salaire qui serait superposable à celui que l'assurance-hospitalisation paie pour nos professeurs d'université qui sont dans nos hôpitaux à l'unité de radiologie, à l'unité de laboratoire. Bien, le salaire du professeur d'université comme tel n'est pas plus de 60% de ce salaire. Or, ce n'est pas possible. Quand le professeur de Laval peut gagner à l'Hotel-Dieu de Québec un salaire X, faisant une besogne professionnelle de qualité, il va opter pour ça s'il a un salaire inférieur à Laval et je ne parle pas d'un salaire un peu inférieur.

M. LE PRESIDENT: Docteur, je vais vous interrompre parce que le comité doit suspendre pour quelques minutes, pour permettre aux dé- putés d'aller à l'Assemblée législative prendre part à un vote qui va avoir lieu incessamment... A l'ordre, messieurs. Je pense, messieurs, que nous allons inviter le Dr Gingras à continuer son exposé et, si les membres du comité désirent poser des question en cours de route, ce sera permis.

M. RENAUD: On était rendu à la deuxième recommandation, vous avez dit que vous aviez trois recommandations.

M. GINGRAS: La première recommandation était, je pense, d'augmenter les budgets des facultés qui sont nettement inférieurs.

DR RAYMOND: Dr Gingras, pendant qu'on y est, est-ce que, dans les différentes facultés ici dans la province de Québec, les salaires des professeurs sont à peu près identiques?

M. GINGRAS: Non. Les salaires de la faculté de médecine de l'université Laval ne sont pas comparables aux salaires des autres universités de la province de Québec.

M. MARTIN: Est-ce que vous avez envisagé la question de salaire des professeurs dans le contexte d'un régime d'assurance-maladie?

M. GINGRAS: Nous l'envisageons comme individu, pas comme faculté, parce que ce n'est pas le rôle de la faculté d'organiser un système de santé; c'est le rôle de la faculté de donner de bons médecins à ce système de santé.

Deuxième point, pour répondre à votre question, c'est que, advenant que nous ayons les budgets convenables pour qu'on puisse se satisfaire, il faudrait que nous ayons aussi une échelle de salaires qui nous permette de faire du recrutement. Elle n'existe pas présentement. Nous avons, ces dernières années, réussi à faire quelques accrocs, quelques exceptions pour faire quelque recrutement. Enfin, d'une façon générale, nous ne pouvons pas faire de recrutement dans nos sciences fondamentales pas plus qu'en clinique, parce que nous n'avons pas les salaires. Ce ne serait pas nécessaire d'avoir l'équivalent des salaires que l'on gagne en clinique, des salaires acceptables. Ils ne sont pas acceptables. Pour vous donner une idée, par exemple, un médecin qui est gradué, qui a fait cinq ans de spécialisation et qui est «fellow» du Collège royal, bien je pense qu'on le partirait à quelque chose de l'ordre de $8,000 ou $9,000. Bien après 10 ans d'études médicales ce n'est pas acceptable, personne n'en veut. De toute façon, on ne peut pas. La société a fait ça comme

ça et, actuellement, si nous voulons garder le meilleur professeur de la faculté, si nous voulons le retenir dans nos cadres comme professeur à temps complet, nous pourrions lui offrir un salaire qui serait à peine de 60% celui qu'il peut gagner dans un hôpital affilié payé par le gouvernement de la province de Québec par l'assurance-hospitalisation. Alors, ce n'est pas acceptable.

M. ASSELIN: En somme c'est un problème d'argent, question de ressources.

M. GINGRAS: Il y a un problème d'argent, il n'est pas unique. D'abord les budgets, deuxièmement l'échelle de salaire et troisièmement des structures dans les hôpitaux qui représentent notre laboratoire d'enseignement fondamental et principal, des structures qui nous permettent d'avoir accès aux malades, d'avoir des organismes tels que l'on peut localiser dans les hôpitaux des médecins qui seraient nos professeurs, qui auraient leur bureau, qui auraient leur laboratoire de travail, qui auraient un intérêt académique d'être là. Parce qu'à partir du moment où nous avons des professeurs qui soignent de la clientèle qui entre et qui sort de l'hôpital nous ne pouvons plus compter sur eux pour faire des médecins, enseigner les médecins.

Je voudrais — parce qu'on m'a posé une question, les journalistes m'ont posé une question, j'avais, pour le moment, oublié qu'ils étaient là. J'ai dit que la situation pouvait, dans certains secteurs, être scandaleuse. Je voudrais me corriger dans une certaine mesure. Ce que je veux dire, c'est qu'actuellement, je crois sincèrement, que nous avons des médecins qui sont très bien formés par la faculté de médecine mais ils sont formés non pas par nos structures, par nos budgets, par notre programme, ils sont formés par le dévouement de la classe médicale qui se donne gratuitement, ou à peu près gratuitement, dans tous les hôpitaux, de grands cliniciens qui enseignent strictement sans salaire et parce qu'ils veulent enseigner et qu'ils comprennent la nécessité d'apporter leur quote-part à la société, mais c'est à vous de juger qu'actuellement l'évolution sociale fait qu'il y a des choses qui changent.

Or. se plaint de la disparition du dévouement du médecin. J'ai peur que, dès demain, on se plaigne aussi de la disparition du dévouement des professeurs. On ne peut pas tabler sur des systèmes comme ça avec l'assurance-santé.

M. RENAUD: Docteur, vous avez parlé de vacuum tout à l'heure, on a parlé de vacuum. Cela voudrait dire qu'il y aurait un manque de médecins. Est-ce que ça laisserait entendre qu'il y aurait un manque de médecins advenant l'établissement d'un plan d'assurance-maladie?

M. GINGRAS: Si nous faisons confiance aux commissions royales d'enquête qui ont été créées par Ottawa, par Québec ou ailleurs, si nous faisons confiance aux enquêtes poursuivies, officielles, par le Collège des médecins, nous allons manquer terriblement de médecins; comme membre d'une profession médicale et étant attaché au Collège des médecins, je fais confiance à ce mémoire-là. Mais, comme faculté, nous n'avons pas fait d'enquête.

M. LE PRESIDENT: Docteur Gingras, lorsque vous dites qu'il y aura une pénurie de médecins, parlez-vous du temps actuel ou de l'avenir?

M. GINGRAS: Je crois qu'actuellement il manque de médecins et je crois qu'il en manquera beaucoup plus dans l'avenir mais, encore une fois M. le Président, c'est une opinion personnelle, et je suis obligé de me reporter aux commissions sérieuses d'enquête qui ont fait une enquête là-dessus: je parle de la commission Hall, je parle de la commission d'enquête du Collège des médecins, etc., qui situent à quelques milles le manque de médecins d'ici 1970.

M. BOUDREAU: Est-ce que des représentations ont été faites aux autorités comme celles que vous venez de faire?

M. GINGRAS: Des représentations ont été faites, en 1949, par le recteur de l'université Laval qui déclarait comme essentiel, prioritaire et urgent la création d'un centre médical à

Québec qui comporterait une école de médecine et qui comporterait aussi un hôpital universitaire intégré. Ce mémoire, qui a été fait tout petit, a été présenté à la députation, a été présenté à tout le monde et, en 1962, comme le petit mémoire n'avait pas fait son effet, on a produit un gros mémoire de 450 pages et on m'a demandé de le résumer en une page ou deux. Ce mémoire-là a été donné à la députation et nous nous attendons à ce qu'on prenne action à un moment donné, qu'on nous dise qu'on nous aidera à constituer une faculté qui soit en mesure de faire face à ses obligations.

M. BOUDREAU: Moi j'espère, Docteur, que vos représentations tombent dans une oreille qui va entendre et qui va corriger la situation, parce que je trouve ça tragique actuellement, dans nos collèges classiques, là où on prépare des jeunes gens pour étudier la médecine,

là où il y a des orienteurs qui dirigent les jeunes gens vers la médecine et que ces jeunes gens-là, la plupart, soient bloqués à la porte de l'université parce que vous manquez de budget, comme vous venez de l'admettre, parce que vous manquez d'espace aussi.

M. LE PRESIDENT: Je pense que pour être juste, M. Boudreau, envers le Dr Gingras, il a dit que ce n'était pas l'espace qui manquait, c'étaient les candidats avec des qualifications nécessaires et avec l'aptitude nécessaire, mais ce n'était pas l'espace qui manquait, n'est-ce pas.

M. GINGRAS: M. le Président, j'aimerais revenir sur cette question et vous laisser libre de juger comme vous l'entendrez. C'est que présentement nous avons 300 demandes d'admission; on peut philosopher beaucoup autour de ça. C'est bien évident que sur les 300 candidatures, toutes n'ont pas la même valeur. Seulement, il y a à la base que ce sont 300 baccalauréats ès-art qui ont réussi à faire des études classiques. On nous demande, à nous, un comité de neuf personnes, de prendre les 125 meilleurs et quand nous avons terminé notre travail nous nous disons, nous espérons avoir choisi les 125 meilleurs mais nous ne sommes pas sûrs qu'il n'y en ait pas d'autres qui pourraient faire des médecins. Nous sommes aussi parfois — et c'est ce que le Dr Coutu a dit tout à l'heure — assez rassurés sur le sort des derniers. Nous nous disons: Ces gens-là probablement n'auraient pas réussi en médecine. C'est possible, enfin, c'est une question que vous aurez à juger vous autres mêmes.

M. RENAUD: Mais la réponse que vous m'avez donnée tout à l'heure, c'est que vous vous restreignez à 125, parce que vous n'avez pas l'espace et l'organisation voulue 'dans les facultés de médecine...

M. BOUDREAU: C'est ça.

M. RENAUD: ... malheureusement, il y en a 75 qui tombent en panne parce que vous pourriez en prendre 200. C'est ça que j'ai compris de votre réponse. Est-ce que c'est ça?

M. GINGRAS: A condition que vous interprétiez l'espace non pas par des planchers mais...

M. RENAUD: Non, non.

M. GINGRAS: ... mais l'espace par des lits, et des professeurs dans ce sens-là, oui.

M. ASSELIN: L'organisation, les laboratoires, etc.

M. GINGRAS: Et, ici, s'exerce une philosophie nord-européenne qui veut qu'un monsieur qui a ses crédits pour entrer dans une faculté de médecine soit accepté. Cela crée une situation passablement difficile et on arrive à des facultés de médecine de Paris à avoir des 5,000 à 6,000 admissions en première année et il y en a 50% qui échoue. Mais on estime qu'on doit donner à chacun sa chance de vouloir faire ce qu'il veut dans la vie. Ici, on ne peut pas donner cette chance-là, et puis ce n'est pas notre philosophie de le faire non plus. On se demande si un monsieur qui échoue en médecine n'est pas un homme qui sera désaxé pour un certain temps dans la vie.

Mais il reste que, mon opinion personnelle quand je préside un comité d'admission, je ne suis pas du tout sûr qu'en ayant pris 125 sur les 300 candidatures, il n'y en ait pas un certain nombre d'autres qui pourraient faire de bonnes études.

M. TREPANIER: Est-ce que vous avez encore la pré-médicale? Non?

M. GINGRAS: Non.

M. TREPANIER: C'était le but un peu de la pré-médicale de faire une élimination dans le temps.

M. GINGRAS: Le but de la pré-médicale était surtout, monsieur, de préparer mieux nos étudiants à l'admission en médecine parce que quand ils arrivaient chez nous en médecine ils n'avaient pas les bases scientifiques suffisantes et, comme les collèges classiques ne pouvaient pas, à ce moment-là, la leur donner, d'une façon homogène du moins, on choisissait les meilleurs, on les envoyait en médecine directement et les autres on leur faisait faire une année de pré-médicale. Cela a été un fiasco sur toute la ligne.

M. TREPANIER: Oui.

M. GINGRAS: Et alors nous avons abandonné la pré-médicale et nous avons demandé entre temps aux collèges classiques d'augmenter la formation des étudiants. Elle est beaucoup meilleure aujourd'hui et nous tombons dans le rapport Parent et les instituts qui vont nous les préparer. Cela, c'est autre chose.

M. BOUDREAU: Pour des profanes comme nous, prenez des jeunes gens, par exemple, qui

ont subi tous les examens au cours classique, qui détiennent leur baccalauréat, qui ont été orientés vers la médecine, qui s'en vont avec l'idée d'apprendre la médecine et qui sont refusés à l'université, voyez-vous comme c'est tragique pour ces jeunes gens-là? Qu'est-ce qu'ils vont faire?

M. DUPRE: Des avocats.

M. GINGRAS: M. le Président, je pense que j'ai abusé de votre temps, je peux répondre à d'autres questions, mais celle-là.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs s'il vous plaît Dr Coutu.

M. COUTU: Je voudrais mentionner que le Dr Gingras a bien dit que certaines de ses opinions étaient personnelles, c'est son droit, et à titre de Président de ce comité-ci, je dois dire qu'il est entendu qu'avec plus de facilité nous pourrions prendre plus d'étudiants que nous en prenons présentement, mais je ne veux pas admettre que nous en prendrions au-delà d'un nombre qui nous permet de garder des normes correctes. On veut encore garder de l'excellence, on ne veut pas faire des médecins de second ordre autrement dit. Il est facile de prendre des gens qui ont un baccalauréat et dire: Ils vont nécessairement faire des médecins, ce n'est pas sûr. D'autres facultés le font et ont des échecs à 60% et à 45%. Nous avons opté pour une autre méthode qui est celle d'un comité d'admission où chaque étudiant est vu, où on reçoit des lettres de recommandation directement des personnes qui les connaissent très bien dans les collèges, des lettres qui sont très bien codifiées, une entrevue à chacun, dossier examiné à fond par deux professeurs, comité d'admission qui scrute toutes les demandes ensuite et avec cette méthode-là, nous avons pu arriver à un taux d'échecs qui varie entre 4% et 7% en première année et 10% pour tout le cours.

Dans d'autres facultés où on ne fait pas de sélection, le taux d'échecs est très fort et vous savez qu'il en coûte actuellement pour un étudiant, autre que ceux de la médecine, environ $2,000 par année. Cela fait pas mal d'argent en somme si au bout d'une année vous perdez un nombre très considérable d'étudiants. Nos étudiants coûtent $5,000 par année, mais seulement nous les gardons. Nous avons opté pour cette méthode-là.

Et je pense que même si nous pouvons prendre un peu plus d'étudiants par la suite avec des centres médicaux et d'autres facilités, il faudra quand même qu'il y ait d'autres facultés de mé- decine dans la province de Québec. On ne peut pas s'en passer.

M. RENAUD: Pour en venir à cette question-là, combien d'étudiants considérez-vous qu'il faut avoir dans une faculté de médecine pour que ce soit fonctionnel, à votre avis?

M. COUTU: Cela est difficile à dire, voyez-vous, ça dépend des facilités, des budgets que nous avons comme on disait tantôt des facilités d'espace, du nombre de professeurs, dunombre de malades. Mais, je pense qu'il n'y a pas de nombre absolument fixe, magique, mais il faut que ce soit un nombre compatible avec des bons standards.

M. RENAUD: Mais il va y avoir une limite à l'agrandissement.

M. COUTU: Oui, oui, bien si vous voulez des chiffres à peu près, moi, mon opinion, c'est quand on a dépassé 150, 160 étudiants, ça devient extrêmement dangeureux. Le docteur va jusqu'à 200; ça peut être une question d'opinion, vous savez.

M. RENAUD: Cela voudrait dire qu'à ce moment-là, si nous n'avons pas suffisamment d'étudiants en médecine que nous pouvons admettre pour répondre aux besoins de la population, il faudrait créer de nouvelles facultés de médecine.

M. COUTU: Cela incontestablement, il faudra éventuellement former d'autres facultés, c'est mon opinion personnelle. Je pense que c'est partagé par mes collègues ici.

M. ASSELIN: Pour le choix des étudiants, est-ce que vous déterminez d'abord le nombre que vous pouvez accommoder, que vous pouvez recevoir et ensuite, je suppose...

M. COUTU: Oui.

M. ASSELIN: ... c'est un chiffre hypothétique que je vous donne. Je suppose que vous décidez que vous pouvez recevoir 200 étudiants, là vous acceptez les 200 les plus qualifiés selon vos normes, et puis ensuite vous fermez la porte...

M. COUTU: Exactement.

M. ASSELIN: ... Alors il peut en rester sur le carreau qui sont qualifiés aussi mais que vous ne recevez pas parce que vous avez arrêté votre chiffre...

M. COUTU: Oui.

M. ASSELIN: ... à un chiffre déterminé. Si j'ai bien compris le Dr Gingras tout à l'heure, on a décidé à Québec, par exemple, à l'université Laval d'en recevoir 125...

M. COUTU: Oui.

M. ASSELIN: ... puis on va prendre les 125 meilleurs et on ferme la porte parce qu'on ne peut pas en recevoir plus, mais, parmi ceux qui n'ont pas été acceptés, il peut y en avoir encore qui répondent aux normes...

M. COUTU: Oui.

M. ASSELIN: ... à un moindre degré peut-être que ceux que vous avez reçus, mais qui répondent d'une façon satisfaisante aux normes et puis qui n'ont pas accès à l'université.

M. COUTU: D'accord.

M. ASSELIN: C'est ça, n'est-ce pas?

M. COUTU: Cela c'est juste et je dirais même plus que ça, il n'est pas impossible que ceux qui n'avaient pas les normes à ce moment-là auraient pu faire de bons médecins. Cela est bien difficile à dire. Nos méthodes, vous comprenez, sont les meilleures qu'on puisse choisir.

M. RENAUD: Ils vont dans d'autres institutions puis ils réussissent des fois aussi.

M. COUTU: Oui, mais il y a d'autres institutions des fois où c'est plus facile. Vous savez, si vous avez des aptitudes... Nous avons tous obtenu un baccalauréat, mais nous n'avions pas tous les mêmes aptitudes pour tout. Les uns aimaient le grec, d'autres aimaient le latin, d'autres les mathématiques, la physique, la chimie. Alors, évidemment on se dirige un peu vers ce dans quoi on est assez fort. Celui qui est assez fort en science va peut-être se diriger vers les sciences mais, en fait, tout ce qui est science.

M. RENAUD: Ce qui est dangeureux évidemment c'est que ceux que vous n'admettez pas vont dans d'autres institutions soit dans d'autres provinces, soit à l'étranger, il est fort possible que ça deviennent des médecins très compétents que nous n'avons plus pour ici.

M. COUTU: Oui. Il peut y en avoir un certain nombre, mais ce n'est pas si fort qu'on pourrait se l'imaginer, à mon avis.

M. ROY: Dr Coutu, les 175 applicants qui sont refusés à l'université Laval, est-ce qu'ils ont la possibilité de pouvoir se diriger vers une autre université où il y aurait des disponibilités, des places pour les accepter?

M. COUTU: Puisque vous parlez de Laval, je pense que c'est mieux de demander la réponse à M. Gingras.

M. GINGRAS: Si vous me permettez trente secondes seulement, je voudrais bien préciser un point. Qu'on ne donne pas l'impression que les doyens ne s'entendent pas sur la philosophie de l'admission. Je me place simplement dans le point de vue d'un organisme que je ne préside pas présentement, un comité d'admission, et que je ne juge pas la qualité des candidats, là sur le plan général. Sur le plan général, je pense que tous les doyens sont d'accord pour dire qu'on pourrait, à condition qu'on ait des facilités d'abord, on pourrait augmenter notre nombre. On peut changer d'idée sur le nombre, que ce soit 160 ou 150 ou 180. Tout le monde est d'accord que ça pourrait s'améliorer si on améliorait les conditions. Je dois vous dire à ce sujet-là que j'ai fait allusion aux organismes qui classent et je dois vous dire, c'est une opinion dont je dois tenir compte.

Lors de la dernière classification de Laval, nous avons posé la question. J'ai posé la question à l'American Medical Association qui était représentée par six doyens venant des Etats-Unis et du Canada et la recommandation écrite du comité, c'est que nous ne devions pas augmenter de un nos admissions qui sont déjà trop grandes à 125 jusqu'au moment où on ne nous donnera pas d'abord des facilités, qu'à ce moment-là, nous pourrions augmenter et que nous pouvions envisager la possibilité d'aller jusqu'à 200, mais à condition toujours que le nombre de professeurs par étudiant soit maintenu, que le nombre d'étudiants par rapport au nombre de malades accessibles soit maintenu. Ce n'est donc pas un chiffre que je préconise pour l'an prochain. Je dis que c'est une possibilité dans un programme de planification. Ceci étant dit, nous aurons les 175. Eh bien les 175, ils peuvent aller à Montréal; ils sont refusés, parce que ce ne sont pas nos 175 meilleurs nécessairement. Ils pourraient essayer à Ottawa, ils seraient également refusés, ils pourraient aller dans des provinces anglaises, vous voyez les difficultés, puis ils seraient également refusés

dans bien des endroits. Là, il reste une chose, ils peuvent aller en Europe...

M. ROY: A McGill.

M. GINGRAS: A McGill, je crois qu'ils en adopteraient peut-être un, deux, trois, et il faut bien se placer dans l'optique. McGill n'a pas de place, Montréal n'a pas de place, puis nous nous n'avons pas de place. Alors, si Montréal nous envoie un candidat premier de classe, on va peut-être penser l'accepter, même s'il a été refusé à Montréal. Mais, pourquoi le serait-il s'il est premier de classe, puis s'il demeure à Montréal, pourquoi ne va-t-il pas à Montréal? Et alors si les 175 qui viennent suivant les 125 premiers, en pratique, ils ne sont pas admis ailleurs et alors ils s'en vont en Europe. Ils s'en vont à Bordeaux, ils s'en vont à Lille, ils s'en vont à Genève pour un certain nombre et chaque année il nous revient, je ne sais pas quatre, cinq, six peut-être qui sont diplômés de ces universités et alors c'est un problème considérable, il faut qu'ils se présentent devant le Collège des médecins qui leur impose une année d'internat, enfin qui juge de leur affaire, qui leur impose des examens par le Collège des médecins. Ils finissent par passer, les uns passent en première instance, les autres après un an, deux ans, mais c'est un petit nombre extrêmement limité, les autres vont ailleurs, ils vont en droit, ils vont en sciences sociales, ils vont en art dentaire, ils font ce qu'ils peuvent.

M. RENAUD: J'ai connu des cas où n'ayant pas été acceptés à Montréal, ils ont été acceptés à Ottawa.

M. GINGRAS: Quelques-un mais, mais ça arrive, un deux ou trois.

M. BOUDREAU: En résumé on peut dire que...

M. COUTU: Juste une seconde je vais répondre à ceci. Des fois à Ottawa, mais des fois en pré-médical, monsieur. Attention, pas nécessairement en première de médecine, souvent en pré-médical, parce qu'ils ont une pré-médicale.

M. BOUDREAU: En résumé, on peut dire que beaucoup d'étudiants sont refusés parce qu'il n'y a pas de possibilité dans aucune université. Les universités font tout ce qu'il y a moyen pour admettre le nombre d'étudiants qui le sont actuellement Ce qui manque, ce sont les possibilités, l'espace nécessaire, les médecins nécessaires.

M. ALLARD: Ce n'est pas exactement ce que le Dr Gingras a dit. On parle toujours disons de certaines qualifications des candidats, c'est bien ça, Dr Gingras?

M. BOUDREAU: Oui, mais il y en a d'autres qui sont même refusés et qui pourraient être d'excellents candidats, qui pourraient faire d'excellents médecins.

M. COLLARD: J'aimerais qu'on précise. Il me semble que vous avez dit que vous acceptiez disons 125 candidats et que les autres n'étaient pas qualifiés.

M. GINGRAS: Nous acceptons 125 candidats parce qu'on n'en accepte pas 126 et alors je vais préciser ma pensée par un exemple, si vous permettez. Le 126iême, il y a deux ans, c'était un jeune homme de dix-huit ans qui avait un baccalauréat, qui n'avait jamais échoué un examen de sa vie et on était rendu à avoir des paquets de papier. On a dit ceux-là, tous ceux qui sont dans les premiers tiers de la classe, on va les prendre, il n'était pas dans le premier tiers de sa classe, il est allé en droit. Bien, ce monsieur-là, n'avait jamais échoué un examen de sa vie, c'est un garçon que je connais personnellement qui est extrêmement intelligent, et qui, excusez l'expression, ne s'était pas forcé la rate; il est arrivé dans le deuxième tiers de sa classe, et je suis convaincu qu'il va briller dans la vie. Celui-là, je pense qu'il auraitpufaire un bon médecin.

M. RENAUD: Il avait l'étoffe pour faire un bon médecin.

M. GINGRAS: Parce qu'on en avait 125 puis on ne pouvait pas aller plus loin. Il m'est arrivé, une année, d'agir d'autorité puis de dire on ne peut pas refuser ça et alors on a accepté quelques candidats de plus, et la faculté m'a dit: Il ne faut pas que ça se répète, parce que nous allons être déclassés, puis on est revenu à 125.

Dans le temps de la guerre, nous avons formé — ce n'est peut-être pas réalisable ma politique — mais enfin dans le temps de la guerre, on a formé 195 étudiants en première année dans un trou de la rue Ste-Famille que nous occupions à ce moment-là. C'était une urgence nationale, mais nous avons formé 195 étudiants et je peux me demander si les gens qui pratiquent actuellement ne sont vraiment pas des médecins convenables. Et, alors, je crois qu'avec un effort supplémentaire, un effort qui peut se faire en temps de guerre, par une cohésion de la population médicale, par un dévouement accru, pourra aussi se faire par des

moyens normaux. A Toronto, on est en train de faire d'autres facultés de médecine, à Kingston à Hamilton ou ailleurs, et cependant le doyen à Hamilton m'a dit: Nous allons vers 250, puis nous ne voyons pas d'objection. Hamilton faisait partie du groupe qui a classé la faculté de médecine. C'est à ce moment-là que j'ai posé la question: Qu'est-ce que vous pensez de la possibilité de deux cents? Ils nous on dit: Jamais avant que vous ayez d'autres facilités. A ce moment-là, montez vos admissions de 125 à 130, 135, c'est ça que je veux dire, de 125 à 130, à condition que les cinq derniers soient bons. Et, si nous n'avons pas 200 bons candidats c'est entendu, je pense exactement comme le doyen Coutu, nous ne sacrifierons pas la qualité au nombre, mais je pense qu'actuellement nous sacrifions, je ne dis pas nécessairement la qualité au nombre, mais nous sacrifions des gens qui, de notre expérience, ont pu, dans le passé être admis alors qu'on se demandait: Qu'est-ce qu'ils vont faire? Puis, ils ont réussi très bien, parce que nos barèmes d'appréciation portent sur un nombre de points obtenus au baccalauréat, dans les collèges classiques, et à partir du moment où l'individu devient mature, où il entre à l'université, où il a un autre objectif devant lui, ça change le tableau. Il peut arriver fort bien qu'un prix du Prince de Galles fléchisse et puis qu'un autre prenne les devants. On voit ça souvent. Pour moi, je ne suis pas satisfait du tout quand je remets le 126e de côté puis que je me dis: Celui-là, il ne peut pas faire de médecine? Ce n'est pas ce que je pense.

M. RENAUD: En somme, on peut dire qu'un tiers de ceux qui font application qui auraient des aptitudes et ne peuvent pas entrer à cause des raisons que vous avez données.

M. GINGRAS: Dans mon opinion personnelle, oui au moins.

M. LE PRESIDENT: Dr Coutu, pardon...

M. LASALLE: Je voudrais juste faire entendre la voix des universités sises dans les petites villes, Sherbrooke, comme Oxford et Cambridge, est situé dans une petite ville. Jusqu'à maintenant nous avons insisté sur un des rôles d'une école de médecine qui est le rôle de l'enseignement scolaire, c'est-à-dire de former des médecins. Il y a aussi deux autres paliers à l'enseignement de la médecine qui est le palier postscolaire, où nous formons les spécialistes dont la société a besoin, et troisième palier qui prend une importance de plus en plus grande à tous les jours avec l'explosion des connais- sances dans le domaine de la biologie, qui est le palier de l'enseignement continu. Palier ou service d'une école de médecine qui consiste à permettre aux médecins d'une région de se tenir au courant des nouveautés dans le domaine de la médecine et quand on sait qu'il y a 50,000 revues qui sont publiées dans le monde de la biologie, je vous donne idée de l'importance de la mise à jour qui est requise de la part de tous ceux qui pratiquent la médecine. Puis il y a une autre ombre aussi, c'est de participer à une meilleure répartition des médecins dans un Etat et en répartissant les facultés de médecine à travers un Etat, au lieu de les concentrer dans les grandes villes, on permet une meilleure distribution des médecins dans la société. Vous savez qu'un étudiant qui part de Gaspé et qui s'en vient étudier à Québec court un grand risque de convoler à Québec et de demeurer à Québec, alors que s'il y avait une école de médecine dans un centre d'importance, nous rendrions je pense plus facile l'accès de toute la société aux soins de la médecine. C'est pour ça qu'aux Etats-Unis dans les dernières dix années il s'est fondé de nombreuses écoles dans des petits centres, je pense à l'école de Caroline du nord qui est à Chapel Hill qui avait, quand je l'ai visitée il y a quelques années, 10,000 de population et qui a une faculté de médecine. Je songe à la faculté de médecine de Hershey qui est en voie de construction, et qui est située dans un village de 5,000 âmes. Vous avez tous à la pensée, je pense, la clinique Mayo, qui est une institution de réputation internationale qui est située dans un village, dans le fin fond du Minnesota. Alors, je voulais juste faire entendre cette loi des facultés de médecine sises dans les petites villes.

M. TARDIF: C'est un gros point, docteur, je vous félicite. C'est un fait, et les campagnes paient pour savoir que ce que vous dites là est vrai.

M. BARIBEAU: Dr Coutu, si vous me le permettez, à la 13e recommandation de votre mémoire, vous désirez que les facultés de médecine de l'université de Montréal, de l'université Laval, de l'université de Sherbrooke, opèrent dans le cadre d'un centre médical, groupant les départements des sciences fondamentales et de sciences cliniques dans un tout intégré situé sur le campus universitaire. Ma première question serait celle-ci. Serait-il possible d'avoir une estimation du coût impliqué par cette recommandation? Et ma deuxième question: Cet enseignement donné par les hôpitaux serait-il réduit, advenant la formation de centres médicaux sur les campus universitaires?

M. COUTU: Bon, la première question. Vous remarquerez, d'ailleurs, ici qu'on ne parle pas que de Montréal, Sherbrooke et de Laval, on a volontairement mis de côté McGill, parce que McGill actuellement a à peu près l'équivalent d'un centre médical.

M. BARIBEAU: Alors McGill a son centre médical.

M. COUTU: Ce n'est pas un véritable centre médical, mais c'est à peu près l'équivalent, parce qu'il y a un Mclntyre Building qui est situé à équidistance des deux hôpitaux principaux. D'autant plus qu'il y a une tradition depuis longtemps établie au Montreal General Royal Victoria où c'est peut-être — je ne veux pas dire plus universitaire — mais aussi universitaire à l'hôpital qu'à la faculté même. Alors ils ont à peu près l'équivalent, ils sont satisfaits de la situation, tout va bien. Nous, à Laval et à Sherbrooke évidemment, c'est un autre cas parce que déjà c'est en marche, la situation est tout à fait différente. Nous avons des départements sciences fondamentales sur le campus et on doit aller jusqu'à six milles pour aller rejoindre nos hôpitaux affiliés. Or, supposez que vous avez un directeur de département de médecine en plus d'être chef d'un hôpital, ce qui n'est déjà pas bien parce qu'il se met dans une drôle de position par rapport aux autres hôpitaux. On dit: Comment se fait-il que le chef de médecine, c'est-à-dire le médecin, est à tel hôpital plutôt que d'être à l'autre? Mais, en plus, il est chef là, il doit voir à tout ce qui se passe chez lui au point de vue des renseignements, de la recherche, soins des malades.

En plus, il doit voir dans les autres hôpitaux comment l'enseigne mont se passe, pendant qu'il va faire la tournée. Il doit aussi venir à la faculté de médecine assister à tous les comités; c'est impensable. Il n'y a pas de vie facultaire possible et c'est pour ça qu'on recommande qu'il y ait des centres médicaux dans ces facultés-là. Bien votre deuxième question, je m'excuse...

M. BARIBEAU: Certainement, je vous remercie. Serait-il possible de donner une estimation du coût de l'établissement de centres médicaux?

M. COUTU: Le centre médical c'est variable d'une place à l'autre aussi. Cela comprend un édifice qui groupe les sciences fondamentales, et l'hôpital universitaire. Alors prenez à Laval ils ont déjà les sciences fondamentales établies sur le campus, il leur manque un hôpital. Alors il y a un coût-là pour un hôpital, selon le nom- bre de lits. A Montréal, comme nous sommas organisés, c'est que même sur le campus nos départements sont situés les uns à l'ouest, les autres à l'est puis l'administration est quelque par là-dedans. On n'a pas de bibliothèque médicale raisonnable. Alors, nécessairement, on est obligé de se déplacer de l'édifice principal. Donc, ça prend le coût des départements sciences fondamentales et ça prend le coût d'un hôpital. Par conséquent, c'est plus cher chez nous que ça peut l'être ailleurs. Alors, mettez pour un hôpital, peut-être pour une faculté de médecine, quelque chose de l'ordre de $12 millions, et à peu près autant en tout cas pour un hôpital universitaire de 500 à 600 lits.

M. BARIBEAU: Cinq à six cents lits. Merci.

M. ASSELIN: Dr Coutu, un renseignement de détail que j'aimerais vous demander. Je me réfère à la page 9 de votre mémoire au paragraphe 14. Pourriez-vous me dire à ce propos quel est le nombre de professeurs fondamentalistes dans chacune des facultés de médecine qui vous intéressent actuellement?

M. COUTU: Actuellement? M. ASSELIN: Oui.

M. COUTU: Bon actuellement, ça varie entre quatre et sept professeurs, je ne sais pas si dans d'autres endroits c'est différent. Evidemment on ne peut pas parler de Sherbrooke pour le moment.

A Québec, est-ce que c'est à peu près ça dans les formations départementales, de quatre à sept professeurs? Il y a peut-être des départements qui en ont plus; il y en a qui en ont moins. Mettons une moyenne d'à peu près cinq.

M. ASSELIN: Est-ce que vous pourriez me dire aussi, une autre question, le nombre de cliniciens à plein temps et le nombre de cliniciens à temps partiel dans chacune de ces facultés?

M. COUTU: Voyez-vous, nous avons en tout à Montréal 500 professeurs à peu près, mais ça comprend tous les bénévoles. Celui qui donne une clinique dans l'année, qui est dans un hôpital affilié, il y a un certain titre de chargé d'enseignement. Tout ça est compris là-dedans, il y en a 500. Mais de ceux qui sont à plein temps géographique, admettons les véritables plein temps, il y en a présentement, à Montréal, environ 65 et ça comprend des gens qui sont à l'Hôtel-Dieu, à Maisonneuve, à Notre-Dame, à

Ste-Justine, à St-Luc.

Maintenant, ce que nous visons, c'est un rapport étudiants-professeurs.

M. ASSELIN: Oui.

M. COUTU: Aux Etats-Unis actuellement, l'an dernier le rapport était 1.5 étudiants-professeurs. Nous avons présentement 3.4 étudiants-professeurs, en clinique, nous visons 2; on pense que ce n'est pas trop.

M. LE PRESIDENT: Dr Lasalle, tout à l'heure vous avez parlé de l'établissement de facultés de médecine dans les petites villes des Etats-Unis. Vous avez mentionné Hershey, en Pennsylvanie, Chapel Hill, population de 10,000, dans l'autre cas vous avez dit 5,000. Je vais vous poser la question: Si vous créez des facultés de médecine où il y a seulement 5,000 personnes, que faites-vous pour avoir la quantité suffisante de malades?

M. LASALLE: C'est la qualité...

M. LE PRESIDENT: La qualité des malades?

M. LASALLE: ... la qualité du personnel enseignant qui attire les malades, comme à Mayo. Qui aurait pensé que Mayo pourrait développer un centre où l'on voit 100,000 nouveaux malades par année, dans un petit village de 5,000 âmes, dans le fond du Minnesota? Maintenant, je pense...

M. LE PRESIDENT: Alors, vous faites des importations dans ces conditions-là?

M. LASALLE: Il faut voler des professeurs aux autres facultés. C'est le seul vol permis d'ailleurs.

M. COUTU: Nos facultés en souffrent maintenant.

M. LASALLE: Bien, j'ai cité ces deux-là. J'aurais pu vous en citer une dizaine d'autres, même la faculté de l'état de Floride, à Gainsville, qui est un petit bourg de 25,000 âmes. Je pense à Saskatoon, lorsque l'hôpital universitaire de la faculté a été fondé, il y a quelques années. Elle avait été établie il y a une quarantaine d'années, alors qu'elle ne donnait que l'enseignement de base. Elle donne l'enseignement complet depuis 1954 ou 1955, il n'y avait que 40,000 à 50,000 habitants dans le temps, et ils ont construit là un hôpital de 500 lits qui s'est rempli dans l'espace d'un an ou deux. C'est la qualité du personnel qui attire.

M. COUTU: M. le Président, je suis en faveur des facultés de médecine dans les petites villes, mais je ne pense pas que, pour la province de Québec, il faudrait prendre ce modèle-là nécessairement pour les futures facultés de médecine. Je pense bien qu'il y aurait avantage à en mettre une autre dans une grande ville, parce que nous avons là le matériel, malades, nombre d'hôpitaux etc., je pense bien qu'il faudrait pour la prochaine, qu'elle soit à Montréal, je crois. C'est mon opinion personnelle, ça aussi, celle-là.

M. LE PRESIDENT: Comme Montréalais, je comprends bien cette pensée-là.

M. BOUDREAU: Une question au Dr Gingras. Qu'est-ce que vous pensez de la conversion de l'Hôpital des vétérans, qui est à Ste-Foy, en hôpital universitaire? Est-ce que ça peu aider à régler le problème?

M. GINGRAS: Je crois que le transfert d'Hôpital de Ste-Foy à l'université pourrait aider sensiblement le problème, un de ces problèmes. Mais, au moment où on nous a offert cet hôpital, nous avons dit que tel qu'il est constitué présentement, il ne pourrait pas représenter le centre médical que nous envisageons pour la raison suivante: Il s'agit d'un hôpital de 325 lits. Le ministère des anciens combattants, en donnant l'hôpital à la province de Québec qui la ferait administrer par une corporation, laquelle mettrait ses services à la disposition de l'université, nous oblige à garder, en chiffre rond toujours, 150 vétérans sur 325 et 50 militaires sur 325. De sorte que les facilités sont réduites et nous avons besoin de tous les services pour faire l'enseignement. Quand je fais allusion au secteur qui est épouvantable ment démuni, je pensais par exemple à la pédiatrie. Nous n'avons pas un seul hôpital de pédiatrie dans Québec, de sorte que vous ne pouvez pas concentrer au même endroit les spécialistes compétents qui peuvent prendre charge des cas compliqués et qui n'ont pas les laboratoires pour les aider. Alors, chaque fois qu'il y a un cas compliqué, il faut l'envoyer à Montréal. Et il y a peut-être une relation entre le taux de mortalité infantile qui est élevé dans la province de Québec plus que dans toute autre province du Dominion. D'ailleurs, sur ce plan, nous sommes en-dessous de tout partout. La province de Québec a le taux de santé le plus bas de toutes les provinces du Dominion, sauf Terre-Neuve. Et quant à ce qu'on appelle « life expectancy », les espérances de vie, quand vous venez au monde vous pouvez vous attendre de vivre dix ans de moins qu'en Colombie-Bri-

tannique. C'est notre situation actuellement, il y a peut-être des raisons à chercher là-dedans. Ce sont les raisons que j'ai essayé à découvrir dans le rapport que j'ai produit en 1962.

De sorte que nous sommes prêts à accepter l'hôpital des vétérans, nous croyons que ça serait un hôpital excellent pour en faire un hôpital de pédiatrie et que, progressivement, nous devrions enlever les vétérans de là, les mettre dans un autre centre médical qui serait également sous notre direction, que nous pourrions utiliser pour les fins de l'enseignement et qui serait le centre de l'hôpital intégré, tel que nous le concevons.

Maintenant, j'aimerais bien ajouter un mot en ce qui concerne les philosophies qui ont été émises sur la construction de facultés de médecine dans les plus petits centres. Je veux d'abord qu'on sache — je pense que ce serait le désir des quatre facultés de médecine existantes, que l'on fasse autant de facultés de médecine que possible — mais qu'on nous permette à nous de recevoir 50, 60 étudiants en médecine en première année. Ce serait vraiment l'idéal. Nous pourrions travailler à l'échelle humaine avec des étudiants de toute première qualité, puis les professeurs auraient un contact immédiat, il y aurait beaucoup d'avantages à ça. Et si nous préconisons une possibilité d'élargir nos cadres, ce n'est pas parce qu'on le désire, c'est parce qu'on veut collaborer avec le service de santé de la province de Québec.

Mais quand on parle de Mayo, on parle d'une institution qui est née d'un accident, d'un accident très heureux, et où il se trouve actuellement 1,200 médecins de grande taille dans la même institution, 1,200 médecins, où M. Eden ou un autre va partir d'Angleterre pour venir se faire soigner là, et c'est 1,200 médecins qui sont au niveau de post-gradués. On ne fait pas l'enseignement de A et B dans cette clinique-là. Alors nous, ce que nous avons à faire c'est l'enfance de l'art, il faut montrer à un étudiant comment palper, comment ausculter, comment entendre un souffle, comment donner une injection intraveineuse, c'est l'enfance de l'art qu'il faut montrer et ça, Mayo n'en veut pas, Yale n'en veut pas et puis les hôpitaux de Québec n'en veulent pas non plus. Le clinicien qui a un malade de qualité entre les mains ne veut pas le prêter à ses étudiants, et puis il n'a pas le temps de surveiller son acte. Alors pour qu'il puisse prêter son malade à un étudiant, il faudrait qu'il soit assuré qu'il ne jouera pas de mauvais tour à son patient et il faudrait qu'il surveille tout ce que l'étudiant fait et ça prend un professeur qui a la mission de faire ça. C'est pour ça qu'on veut avoir un centre médical.

Maintenant, je crois qu'en principe il faudrait peut-être penser à avoir des facultés de médecine dans d'autres centres, il faudrait aussi penser à ce moment-là ce que ça va entraîner. Cela entraîne non seulement la formule d'une faculté de médecine qui aurait des hôpitaux, comme ça existe en Angleterre, qui a des hôpitaux comme faculté de clinique. Il faut aussi penser où vont se faire les sciences fondamentales, j'entends la dissection, la physiologie, l'anatomie, l'histologie, la biologie, enfin tout ça. Cela se fait dans des sciences de base fondamentale, et ça prend des équipes compétentes et les équipes compétentes ne voudront pas aller dans un milieu où ils n'auront pas l'atmosphère scientifique convenable. Alors, c'est un gros problème. Nous ne sommes pas contre, nous sommes pour. Nous y voyons des difficultés de réalisation pratique immédiate. Et, pour aider à soulager un peu le problème que le ministère de la Santé aura à envisager un de ces jours — et là, je me place comme citoyen de la province de Québec — nous, dans les facultés de médecine, disons: Nous sommes prêts à collaborer. Maintenant, comprenez dans quelle situation nous sommes. Nous ne pouvons pas si vous ne donnez pas les moyens. Et ces moyens là, dans l'ensemble, ça représente peu de chose parce que ça entraînerait une économie nationale et il y aurait différentes planifications à envisager à ce point de vue. Je suis bien prêt à vous laisser sur une question, je pose avec un gros point d'interrogation. Sur le plan économique national, est-il économique qu'un étudiant en médecine opte pour la médecine au mois de juin 1966, qu'ils commence ses études au mois de septembre 1966, qu'on lui fasse faire 26 à 30 semaines d'études par année, qu'on le renvoie dans le public pendant 26 semaines, sous prétexte qu'il faut qu'il gagne sa vie à agir comme « waiter » ou comme guide historique? peut-être qu'il y aurait lieu, puisque nous avons besoin de médecins, parce qu'on planifie le programme, qu'on prenne un étudiant en médecine en charge à partir du moment où il a opté pour la médecine que, dans nos laboratoires vides, on lui enseigne de la médecine pendant une année de temps. Je ne vois pas pourquoi un jeune homme dans la pleine fleur de l'âge, actuellement, on lui impose 30 semaines. C'est révolutionaire comme formule. C'est nouveau, nous sommes dans une révolution et aux périodes de révolution, je pense qu'il faudrait envisager des formules révolutionnaires. Et si nous prenions nos étudiants en médecine présentement et leur faire faire 50 semaines ou 48 semaines par année d'études, peut-être y a-t-il lieu de penser qu'on va faire des médecins plus

rapidement. On l'a fait pendant la guerre parce qu'il y avait urgence.

M. ROY: Dr Coutu, dans votre mémoire vous affirmez que les jeunes gens ont aujourd'hui le choix de toute une gamme de professions intéressantes et hésiteront bientôt à s'engager dans des études médicales très longues, s'ils doivent débourser davantage. Ma question est celle-ci: Est-ce que les facultés de médecine ont tendance à diriger les étudiants en médecine plutôt vers la spécialisation que vers la médecine générale?

M. COUTU: Non, comme je l'ai mentionné tantôt, nous essayons — je ne sais pas si nous réussissons — mais nous essayons de donner un cours polyvalent qui offre toutes les possibilités à l'étudiant une fois qu'il a terminé. Est-ce que j'ai répondu à votre question, monsieur?

M. ROY: Oui.

M. COUTU: Si ce n'est pas suffisant, je peux élaborer. Parce que le Dr Robillard, M. le Pré- sident, aimerait dire quelques mots sur la recherche, si vous le permettiez.

M. LE PRESIDENT: Dr Coutu, avant, je veux accorder la parole au Dr Lizotte qui voulait justement poser une question lorsque je l'ai interrompu.

M. LIZOTTE: J'ai une question à poser au Dr Gingras. Je ne voudrais pas que, dans les rapports de ce qu'il vient de dire, on soit injuste pour lui. On a parlé d'hôpital universitaire. J'ai cru comprendre qu'il avait dit que les hôpitaux ordinaires les cliniciens, nécessairement, ne voulaient pas prêter leurs malades de choix à des étudiants. Je voudrais poser la question suivante: Dans un hôpital universitaire, quelle catégorie de patients seraient prêtés aux étudiants au point de vue de l'étude?

M. GINGRAS: D'abord, je dois dire que je ne fais pas de différence. Quand nous parlons d'un centre médical, nous ne parlons d'un hôpital intégré qui, au niveau de l'école de médecine au niveau de la faculté, aurait certains mandats» Il est entendu que nous garderions nos hôpitaux affiliés dans les mêmes fonctions qu'ils ont actuellement. Mais nos hôpitaux affiliés acceptent toutes les fonctions présentement parce qu'on leur demande, à part du dévouement, de le faire, et ils le font et ils prêtent leurs malades. Ils se dévouent. Les médecins donnent de l'enseignement et ce n'est pas mauvais du tout, mais ce n'est pas un système, ce n'est pas une structure, et nous prévoyons qu'advenant qu'on nous demande de faire davantage, ça ne serait pas possible. Nous n'avons pas ressenti beaucoup les effets de l'assurance-hospitalisation parce que les médecins ont bien voulu contribuer à ce qu'on n'en ressente pas les effets. Mais à partir du moment où l'assurance-hospitalisation a assimilé les malades admis dans les hôpitaux à des malades privés, nous avons perdu nos salles d'assistance publique, et à partir de ce moment-là tous les malades sont des malades privés. Il s'agirait qu'un malade dise — je ne dis pas que c'est une situation de fait qui existe actuellement — je dis que si le malade disait: Je ne veux pas servir? Qu'est-ce qui aiderait à le faire servir? Et si le médecin disait: Voici un malade privé, ie ne veux pas qu'il serve. Nous comptons sur la bonne volonté individuelle. Jusqu'à présent, nous n'avons qu'à nous louer des bons offices de nos collègues, nous croyons que l'enseignement est bien fait, avec les moyens dont on dispose, quoique dans certains secteurs, c'est pénible. Je vais vous en indiquer un et je ne voudrais pas que l'on se figure que je descend l'enseignement existant actuellement, mais je voudrais prendre un exemple. Nous pouvons disposer actuellement à notre hôpital principal pour l'enseignement de l'obstétrique — c'est la Miséricorde — de 42 lits. 42 lits pour enseigner à une faculté de médecine de 125 étudiants en première année, c'est nettement Inférieur à ce que nous devrions avoir et dans des conditions qui ne sont pas bonnes. C'est à ça que je fais allusion dans les choses qui ne sont plus acceptables. Mais pour l'instant, nous pensons que nous avons tenu le coup, nous avons reçu nos rapports d'accréditation qui sont valables et nous avons une approbation complète de la part des organismes d'accréditation, qui cependant nous signalent des points depuis 1949. Ils nous disent; Dépêchez-vous à avoir votre centre médical, il vous le faut. Dépêchez-vous à avoir un hôpital de pédiatrie, il vous le faut. Comme nous n'en avons pas, nous demandons à nos gens d'essayer de tenir le coup en attendant et alors ils le tiennent. Mais, vous n'êtes pas ici pour savoir ce qu'on fait de bien, vous êtes ici pour savoir ce qu'il faut faire pour l'avenir, pour qu'on ait des structures dans la province de Québec qui puissent faire face à la musique On ne les a pas.

M. LE PRESIDENT: Docteur Robillard. M. ROBILLARD: M. le Président, je voudrais

attirer très brièvement votre attention sur un point qui peut avoir été passé un peu rapidement dans le mémoire. Il s'agit de l'activité des facultés dans le domaine de la recherche. Cette activité est essentielle, non seulement pour l'enseignement, mais aussi pour les soins aux malades.

Pour l'enseignement, cette activité est absoment indispensable dans les facultés parce qu'elle valorise l'enseignement, permettant aux professeurs de faire un enseignement dynamique et non pas un enseignement basé uniquement sur ce qui est actuellement acquis dans la science médicale, mais sur ce que l'on peut entrevoir dans l'avenir et dans un avenir prochain. Et cette activité est essentielle aussi pour que les professeurs puissent conserver cet intérêt dans la science et puissent aussi critiquer d'une façon valable les acquisitions qui sont dans la littérature médicale.

De plus, il est essentiel aussi pour pouvoir rénover les cadres professoraux, de façon que les professeurs puissent engendrer, si on peut dire ainsi, d'autres jeunes professeurs qui soient meilleurs qu'eux. J'avais un de mes anciens professeurs qui disait que les fils qui n'était pas plus intelligent que le père était très bête. Alors c'est la même chose, le professeur qui ne peut pas former des étudiants qui soient meilleurs que lui n'est pas un bon professeur. Par conséquent, il faut qu'il y ait, à côté de la faculté des étudiants sous-gradués, la faculté des étudiants post-gradués formée de médecins qui viennent se recycler ou qui s'engagent vers des études un peu plus différentes. Il y a aussi une faculté qui correspond à peu près actuellement aux cadres de la faculté et qui forme des étudiants en vue de la spécialisation biologique médicale, c'est-à-dire en vue des degrés de maîtrise et de doctorat. Cette activité est aussi extrêmement importante dans nos institutions pour le soin aux malades, parce qu'elle permet immédiatement que les acquisitions récentes, nouvelles, immédiates, de la science soient mises au service de nos malades et je crois qu'il est essentiel pour les malades de la province, pour la population de cette province, que les acquisitions médicales récentes valables soient mises immédiatement au service des soins médicaux, de façon que l'on n'attende pas quelques mois, ou parfois même quelques années avant que ces découvertes soient mises au service du malade.

De plus, je crois qu'actuellement il serait peu convenable que la population de cette province, que les professeurs de nos universités puisent toujous dans le domaine de la connaissance, dans les connaissances acquises par les autres sans jamais y contribuer. Ce serait d'une fierté assez peu enviable pour nous. C'est pourquoi il serait important que les membres de ce comité prennent grande attention à toutes les recommandations qui sont faites à propos de la recherche médicale. Merci, messieurs.

M. LE PRESIDENT: Y a-t-il d'autres...

M. ROY: Dr Coutu, dans la deuxième recommandation de votre mémoire, il est avancé que, dans l'établissement d'un système d'assurance-santé, un souci particulier soit apporté à l'attrait de l'exercice de la profession médicale, afin qu'elle puisse recruter des candidats doués des plus hautes qualités intellectuelles et morales. Dans votre opinion, quel organisme doit s'intéresser à ce souci particulier, à cette préoccupation particulière?

M. COUTU: Je pense que c'est un effort commun, vous savez. Le Collège des médecins d'abord, je pense bien que c'est son rôle de montrer quels sont les avantages de la médecine, les différentes possibilités pour le futur médecin. Il y a également les sociétés médicales qui peuvent le faire. Je pense que c'est un ensemble d'organismes. Egalement, j'imagine l'assurance-santé, cet organisme-là pourra faire sa part dans ce sens-là.

M. ROY: Merci.

M. TREPANIER: Dr Coutu, vous mentionnez à la page 13 de votre rapport qu'il faut s'attendre à ce que les exigences de l'enseignement fassent augmenter le per diem des hôpitaux d'enseignement.

M. COUTU: Oui.

M. TREPANIER: Est-ce qu'actuellement, le per diem est plus élevé que dans un hôpital non universitaire?

M. COUTU: Evidemment, je ne vais pas dans les hôpitaux, mais je crois qu'il l'est, mais je n'ai pas de précision là-dessus parce que ce sont des hôpitaux autonomes. Je crois qu'il est plus fort de fait que dans les hôpitaux communautaires. Mais je pense qu'il n'est peut-être pas suffisant par ailleurs, si on pense à toutes les facilités qu'il faudra pour bien enseigner dans ces hôpitaux. Comme on l'a dit tantôt, même si on a un centre médical, ça ne serait pas suffisant, il faudrait quand même garder les hôpitaux affiliés. Les gens qui vont se former à l'extérieur ne se formeront pas tous pour...

Les gens qui vont se former à l'extérieur ne se formeront pas tous pour l'hôpital universitaire. D'ailleurs, ce ne serait pas souhaitable d'imaginer un hôpital qui a formé un homme, qui l'envoie aux Etats-Unis, qui revient et qui, immédiatement, s'en va à un autre hôpital. Il n'aimera pas ça, je pense qu'il en faut partout. Ces hôpitaux-là doivent servir d'ailleurs, un peu comme des clubs fermés, si je peux employer l'expression, afin qu'on ait un surplus de professeurs pour l'hôpital universitaire.

M. TREPANIER: Ce qui occasionne plus de dépenses, l'augmentation du per diem.

M. COUTU: Laboratoires, etc, l'espace pour étudiants, etc.

M. LE PRESIDENT: Messieurs, avez-vous d'autres questions à poser?

M. TREPANIER: J'en aurais une autre rapide. A la page 14 au paragraphe 24, vous parlez des relations qui existent entre la faculté et l'hôpital. Est-ce que le type de relations existant actuellement est satisfaisant?

M. COUTU: Il n'est pas tout à fait satisfaisant parce que nous avons des contrats d'affiliation, comme vous le savez, et c'est sur une base bénévole. Le contrat d'affiliation dit en un sens que personne ne sera nommé à l'hôpital sans qu'il y ait une entente avec la faculté de médecine. C'est déjà quelque chose et ce n'est pas tout, donc ce n'est pas satisfaisant présentement. Nous avons une belle collaboration des hôpitaux, ils font, comme disait le docteur Gingras, leur possible, mais, vous comprenez, quand vous n'êtes pas chez vous c'est extrêmement difficile de commander. Imaginez un de vos fils qui est dans un collège, qui fait ses deux premières années quelque part, et qu'après ça le collège vous dirait: Pour les deux autres années, on les envoie dans d'autres collèges, dans d'autres maisons. Cela ne dépend pas de nous, on fait notre possible, ils ont de la bonne volonté, mais nous n'avons pas le contrôle absolu. Vous n'aimeriez pas beaucoup ça pour votre fils, c'est la même chose pour les étudiants en médecine.

M. LE PRESIDENT: Messieurs, avez-vous d'autres questions à poser? Sinon, docteur Coutu, au nom du comité je vous remercie ainsi que vos collègues de l'exposé que vous avez fait de votre mémoire cet après-midi, la belle façon avec laquelle vous avez répondu aux questions posées par les membres et je crois qu'ils ont tous profité de cette discussion intéressante et amicale.

M. COUTU: M. le Président, nous en sommes très reconnaissants.

M. LE PRESIDENT: Le comité est ajourné à huit heures.

Reprise de la séance à 8 h p.m.

M. LE PRESIDENT (M. Roy): Messieurs les membres du comité, je remercie le docteur Desrosiers, ainsi que le docteur Boulay, d'être venus nous rencontrer et j'aimerais, avant de commencer, lire la lettre que le docteur Des rosiers a adressée à M. Claude Castonguay, Prési- dent du comité de recherche sur l'assurance-santé. M. Castonguay me disait tout à l'heure que le mémoire préparé par ces messieurs a été d'une grande utilité aux membres du comité de recherche. « M. Claude Castonguay, (une lettre en date du 25 mars 1966)

M. le Président,

Nous avons pris connaissance du rapport que votre comité apréparé sur l'assurance-maladie. Nous vous savons gré d'avoir utilisé le lexique des assurances sociales que nous avions envoyé à M. Boudreau et d'en avoir publié les principales expressions. Vous avez posé par ce geste un précédent qui, nous l'espérons, sera imité à l'avenir par les comités et les commissions qui feront des études pour le compte du gouvernement. Je vous prie d'accepter, M. le Président, avec mes remerciements, l'expression de mes sentiments distingués.

Le Président du comité d'étude des termes de médecine

Georges Desrosiers. »

M. LE PRESIDENT (M. Roy): M. Desrosiers, je vous demanderais, si vous avez quelques mots à dire concernant votre mémoire.

M. DESROSIERS: M. le Président, messieurs les membres du comité, mesdames et messieurs. Le comité mixte de l'Assemblée législative et du Conseil législatif est chargé d'entendre les groupes qui désirent donner leur avis sur les différents aspects d'un régime d'assurance-maladie. Nous laissons à d'autres le soin d'en discuter les principes et les modalités d'application. Notre travail a porté essentiellement sur l'aspect linguistique, plus précisément sur le vocabulaire technique de l'assurance-maladie.

Nous vous présentons dans une première partie, un glossaire contenant la définition de 160

expressions des assurances sociales et, dans une deuxième partie, un lexique anglais français d'un nombre à peu près égal de termes techniques. Ce genre de travail n'existait pas auparavant, il n'existait pas parce qu'aucun pays francophone ou anglophone n'a été placé dans une situation telle qu'il lui a fallu faire le partage entre le vocabulaire technique anglais et français des assurances sociales. La situation du Québec est unique, c'est pourquoi nous avons cru qu'il était nécessaire de faire ce travail.

Le Québec étudie aujourd'hui les moyens d'établir un système d'assurance sociale, dont la pièce maîtresse est sans contredit l'assurance-maladie. Ce besoin survient à un stade précis de notre développement socio-économique, il s'insère dans un mouvement qui englobe tout le Canada et même toute l'Amérique de Nord. Il est donc naturel de puiser dans la documentation de langue anglaise les renseignements nécessaires sur les projets fédéraux, les systèmes des autres provinces et ceux des Etats-Unis, puisque les solutions que nous pouvons apporter doivent en tenir compte. Alors, la consultation des ouvrages et des revues écrits dans notre langue, qui sont européens, n'est pas essentielle, elle sert surtout de complément ou elle peut être motivée par des raisons d'ordre culturel.

Ceux qui ont à puiser à ces diverses sources, dans un domaine nouveau, du moins quant au vocabulaire technique, sont naturellement enclins à utiliser les termes avec lesquels ils sont les plus familiers, et ainsi, à leur insu, à opérer un métissage de la langue. Ce nouveau vocabulaire métissé se diffuse ensuite rapidement dans la masse des usagers. Si par contre, en plus de consulter des ouvrages français au moins pour connaître le vocabulaire, on charge des spécialistes de faire des recherches lexicologiques, on pourra ainsi obvier à ce danger qui nous menace constamment. C'est ce à quoi nous nous sommes appliqués. Notre travail a été facilité par la richesse du vocabulaire français, des assurances sociales. Il faut se rappeler qu'il existe en France des systèmes de prévoyance depuis le XIXe siècle et que la sécurité sociale obligatoire a été établie dès 1945. Déjà, notre travail a porté fruit. Nous sommes heureux de pouvoir citer en exemple le comité de recherche sur l'assurance-maladie dont le rapport sert de base aux délibérations de votre comité, il a fait siennes nos recommandations et il a même publié dans le premier volume de son rapport une cinquantaine d'expressions tirées de notre vocabulaire.

Nous souhaitons que le ministère de la Santé mette sur pied un comité de la terminologie auquel nous sommes prêts à apporter notre col- laboration. Ce comité pourrait conseiller le ministère sur tout ce qui touche à la langue, c'est-à-dire revision des projets de loi, des textes réglementaires, des brochures, des imprimés, etc.

Voilà, messieurs, en quelques mots, la raison de notre intervention. Nous ne doutons pas que vous tiendrez compte de nos recommandations, en raison même du mandat qui vous a été confié. Je vous remercie.

M. COLLARD: M. le Président, j'aurais simplement une question à poser. Je crois que, dans le langage populaire, tous les individus qui doivent aller à l'hôpital ou rencontrer un médecin, parlent souvent de « check-up ». Je cherche ça dans votre lexique et je ne le trouve pas. Quel mot suggérez-vous pour remplacer ce terme?

M. DESROSIERS: L'expression utilisée en France pour ce terme, c'est bilan médical préventif.

M. COLLARD: Pardon?

M. DESROSIERS: Bilan médical préventif. C'est le terme technique pour rendre « checkup ». En fait un « check-up » qu'est-ce que c'est? C'est un bilan, c'est-à-dire que la personne va voir un médecin pour savoir si elle est en bonne santé ou non, alors le médecin fait un bilan, bilan médical préventif. C'est l'expression.

M. COLLARD: Est-ce qu'il y a moyen de trouver un terme plus court? Un examen, ça ne peut pas...

M. BOULAY: On peut parler d'examen systématique de dépistage, si c'est un examen qui est fait dans le but de dépister une maladie. Le mot bilan médical préventif est certainement plus explicite puisque c'est bien un bilan, il s'agit de faire l'actif et le passif du malade, et préventif, parce que ça se fait toujours en général dans une prerspective de prévention. Quand on va à l'hôpital pour un « check-up », pour employer l'expression courante, c'est parce que l'on veut prévenir l'apparition de maladies graves et qui peuvent être dommageables pour le malade.

M. BOUDREAU: Moi, je ne suis pas fâché d'entendre dire qu'on veut franciser les termes concernant cette assurance-maladie, mais je voudrais savoir si déjà vous avez soumis à une organisation quelconque de médecins ou d'hôpitaux, ce que vous nous proposez ici ce soir.

M. DESROSIERS: Eh bien voici, en premier lieu ce vocabulaire a été soumis au comité de recherche sur l'assurance-maladie, comité présidé par M. Castonguay qui l'a accepté. Toute la terminologie utilisée dans les onze ou douze volumes de ce rapport s'inspire de notre travail. Notre comité est un comité formé de membres des professions de la santé, c'est-à-dire de médecins, d'infirmières, diététiciennes, traducteurs médicaux et il est patronné par le Collège des médecins, par l'Association des médecins de langue française, par la Société médicale de Québec, la Société médicale de Montréal et d'autres associations médicales. Est-ce que ça répond à votre question?

M. Boudreau: Oui, oui, très bien.

M. BOULAY: M. le Président, je voudrais ajouter que notre comité est un organisme agréé par l'Office de la langue française. Nous sommes un comité qui travaille en collaboration étroite avec l'Office de la langue française, parce qu'évidemment les solutions que nous apportons, nous les apportons avec nos connaissances médicales, mais souvent sur le plan linguistique il faut l'avis de spécialistes et c'est pour ça que nous travaillons en étroite collaboration avec l'Office de la langue française.

M. BOUDREAU: Je m'en réjouis.

M. RENAUD: Vous avez beaucoup de mérite.

M. TREPANIER: Le terme « risque » que vous définissiez à la page 27 comme étant du point de vue de l'assuré, l'éventualité aux conséquences préjudiciables et dont il est responsable. Est-ce qu'en fait, ça ne semble pas un peu contraire aux principes de l'assurance sociale, le fait de reconnaître la responsabilité unique de l'assuré à ce sujet-là, au sujet des risques tels que la vieillesse, la maladie et l'invalidité?

Que voulez-vous dire exactement par responsable? Est-ce que l'on peut employer exactement ce terme dans l'assurance sociale?

M. DESROSIERS: Dand notre glossaire sur les assurances sociales, nous avons inclus un certain nombre d'expressions qui sont utilisées aussi par les assurances privées, parce qu'on ne peut pas trancher cela au couteau, n'est-ce pas. Alors, le mot risque s'est employé d'abord dans l'assurance privée, alors on a assuré des gens pour un risque dont eux étaient responsables. Maintenant, quand on parle d'assurance sociale, c'est un peu la même chose, avec l'as- surance sociale, on assure les gens, on les garantit contre des risques, si vous voulez, dont ils sont responsables, c'est-à-dire si je tombe malade, eh bien c'est un problème qui me touche personnellement, l'Etat ou une compagnie d'assurance me garantit contre ce risque. Mais, si je tombe malade, j'en suis le premier responsable, je suis le premier responsable du traitement de ma maladie, de consulter qui il faut et de payer. Maintenant, l'Etat, par une assurance-maladie, peut me garantir contre ce risque, voyez-vous.

M. TREPANIER: Alors, vous entendez par là donc que l'individu, l'assuré est responsable de toutes ces éventualités.

M. DESROSIERS: Bien, c'est-à-dire qu'il est responsable, mais, par une assurance-maladie, on le garantit contre ces risques, c'est-à-dire que si la personne tombe malade, on lui garantit qu'on va payer ses dépenses médicales. Mais, en fait, parce qu'il est responsable de sa santé, si vous voulez, en premier lieu, il s'assure, il paie une cotisation pour être garanti contre ce risque, que ce soit une assurance privée ou à l'Etat, c'est toujours la même chose.

M. CLOUTIER: Docteur Desrosiers, vous avez à la page 22 l'expression médecine libérale. Est-ce que vous avez exploré toutes les possibilités avant...

M. MARLER: C'est un ouvrage qui incombe à l'Opposition.

M. DESROSIERS: Oui, Monsieur, la médecine libérale peut-être...

M. RENAUD: Est-ce que ceci est un excès de français ou...

M. DESROSIERS: ... exercée autant par un conservateur que par un libéral. D'ailleurs, messieurs, la médecine libérale est plutôt le propre, je dirais, des gens qui sont plutôt conservateurs je dirais.

M. CLOUTIER: Merci beaucoup, docteur.

M. LE PRESIDENT: D'après la réponse, je lui demanderais de rester dans le cadre des discussions, sans parti pris pour quelque parti politique que ce soit.

M. BELLEMARE: A condition qu'il conserve le pouvoir, je n'ai pas d'objection.

M. ASSELIN: A la première page de votre lexique anglais français, en bas de la page, vous avez le mot anglais « deductable » qui est un adjectif, évidemment, du moins je le pense — vous pouvez me corriger si ce n'est pas exact — que vous corrigez par un nom: « franchise ». Pouvez-vous me donner une explication là-dessus ou une phrase dans laquelle les deux mots seraient employés en anglais et en français?

M. DESROSIERS: Le mot « deductable » est surtout employé dans l'assurance privée. Nous sommes obligés là de mettre des expressions qui sont du domaine de l'assurance-maladie privée, parce que nous ne pouvons pas séparer complètement ces deux choses. Maintenant, « deductable » ça veut dire que quelqu'un s'assure et il doit payer les premiers $50 et les frais supplémentaires sont payés par la compagnie d'assurance. En français, on appelle cela une franchise, en anglais, on dit « deductable. » Maintenant, en français, on préfère utiliser la forme substantive, le nom, tandis qu'en anglais on utilise une forme adjectivale, c'est une question de sémantique, si vous voulez.

M. LE PRESIDENT: D'autres questions, messieurs?

M. DESROSIERS: Si vous me permettez de compléter ma réponse. En ce qui concerne l'assurance-maladie, les assurances d'Etat, en anglais on dit « deterret fee » et en français on enploie l'expression soit « tiket modérateur » ou « participation au frais ». On n'emploie pas le mot « franchise » ou le mot « déductable ». On dit « deterrent fee » en anglais et en français on dit « ticket modérateur » ou « participation au frais ».

M. TREPANIER: Est-ce que le terme à ce sujet-là de frais dissuasif ne vous paraîtrait pas opportun?

M. DESROSIERS: C'est une traduction littérale de l'anglais et ce n'est pas d'usage. En français, on dit « ticket modérateur » depuis 1920 ou on dit participation au frais. Maintenant, le comité de recherches sur l'assurance-maladie devait probablement trouver le mot « ticket modérateur » un peu difficile, alors il a proposé « frais modérateur ». En somme, nous n'avons pas d'objection à ce que l'on emploie « frais modérateur » parce que ça s'inspire de la même expression, « ticket modérateur » ou « frais modérateur », c'est à peu près la même chose. C'est toujours selon l'usage, si vous voulez, français.

M. BOULAY: L'expression « ticket modérateur » vient du fait qu'en France, l'individu qui bénéficie d'une mesure d'assurance sociale ou d'assurance-maladie est obligé de rembourser à la caisse un certain montant, est obligé de payer un certain montant qui correspond à un ticket, c'est-à-dire à un morceau de carton qu'on lui donne. Alors, l'expression vient d'une habitude particulière, d'une situation particulière à la France. Je pense qu'il vaut mieux employer l'expression « participation au frais » parce que nous n'avons pas encore le ticket, nous n'avons pas ce petit morceau de carton qu'on appelle le ticket en France.

M. LE PRESIDENT: Je vous remercie, docteur Desrosiers ainsi que le docteur Boulay, pour les réponses que vous avez données aux questions qui vous ont été posées par les membres du comité conjoint.

Je demanderais au Président de la Corporation des opticiens d'ordonnance de la province de Québec de présenter les gens qui l'accompagnent et de plus de soumettre sommairement les remarques qu'il aurait à passer sur le mémoire présenté.

M. CRETE : Messieurs, nom nom est Marcel Crête, avocat. J'agis conjointement comme procureur de la corporation avec Me Alphonse Barbeau. Nous avons ici le Président de la corporation, M. Allaire Savage, les deux vice-présidents, MM. Roland Baril et André Lesage et un autre vice-Président, M. Jules Saulnier. En deux mots, je serai le porte-parole de la corporation. Notre mémoire a été déposé. Il ne s'agit pas pour moi de le lire en entier textuellement.

Simplement pour dire ceci d'abord que nous apprécions beaucoup d'avoir été invités à donner nos vues bien modestes, quand on parle de vue dans le domaine de l'optique, c'est peut-être un terme un peu plus approprié, en vue de l'instauration d'un plan d'assurance-santé. Nous sommes heureux de cette initiative de l'autorité gouvernementale et nous avons déclaré tout de suite que nous sommes parfaitement d'accord sur l'instauration d'un tel plan dans l'intérêt de la population.

D'abord, pour nous situer. Notre profession existe depuis 1920. Elle a été groupée en association en 1928, groupée en corporation profession-

nelle incorporée par statut, une loi de la Législature, en 1940. Quant à notre rôle, je prends une définition dans la loi, l'opticien d'ordonnance, c'est une personne dont l'art consiste à exécuter les ordonnances des médecins, des optométristes, relativement aux lentilles ophtalmiques et à fabriquer, vendre, fournir, poser, ajuster, remplacer des lentilles ophtalmiques ainsi que leurs montures. Dans le domaine de l'optique, il faut distinguer trois corps professionnels. Je ferai la distinction parce que souvent on est porté à confondre. Vous avez en premier lieu, les ophtalmologistes ou les oculistes qui sont des médecins spécialistes dont la fonction ou l'art consiste à diagnostiquer et à traiter les maladies de l'oeil. Vous avez en deuxième lieu, les optométristes qui s'occupent de l'examen de la vue, de la réfraction et de la correction, non pas des maladies, mais des défauts visuels par le port des lunettes. Vous avez en troisième lieu, nos gens, les opticiens d'ordonnance, qui s'occupent, eux de remplir ou d'exécuter les ordonnances des deux premiers groupes, soit des médecins, soit des optométristes.

A la deuxième page de notre mémoire, nous vous donnons très succinctement les exigences statutaires pour devenir opticien d'ordonnance ainsi que les exigences de la corporation, puisque nous avons une école qui est fondée depuis 1940, une école qui détient ses lettres patentes du gouvernement de la province.

Nous ne savons pas évidemment ce que contiendra le programme d'assurance-santé, quant à nous. Nous nous sommes inspirés pour notre mémoire des trois recommandations qui nous concernent dans les conclusions du rapport Hall ou de la commission royale d'enquête, en ce qui concerne la section ou la partie de l'optique.

La première recommandation est pour nous la plus névralgique, si je peux m'exprimer ainsi. C'est la recommandation 92 que nous citons; « Que la direction des services provinciaux de santé prennent des dispositions spéciales, en vue de l'achat en grosse quantité au moyen de soumissions, de montures de lunettes et de verres. » Pour donner notre point de vue sur cette recommandation particulière, nous avons tenté de nous inspirer, dans toute la mesure du possible, non pas de notre intérêt à nous, mais de l'intérêt public, et à ce point de vue-là. Je me permettrai peut-être de citer notre mémoire où nous disons que « la vue est le plus précieux des biens et qu'il est essentiellement de l'intérêt public que l'ajustement des lentilles ophtalmiques ainsi que l'exécution des ordonnances des ophtalmologistes et des optométristes demeurent dans les attributions des spécialistes, tels que les opticiens d'ordonnance. » Je ne citerai pas le paragraphe « b » qui est un extrait du rapport Hall. Nous disons que dans l'exercice de leur art, les opticiens d'ordonnance ont également l'avantage de ne pas remplir leurs propres ordonnances et cette situation leur permet d'éviter tout conflit d'intérêt comme celui qui peux exister pour 'une personne qui prescrit et remplit ses propres ordonnances. En incidence, nous suggérons que l'intérêt public commande la délimitation précise des services offerts par chacun des trois groupes professionnels que j'ai mentionnés tantôt. Et nous disons que, par leurs études, leur formation, leur statut professionnel, leurs relations avec le public-client, le maintien de leur équipement, leurs dossiers, les opticiens d'ordonnance offrent à la population un service que ne pourraient apporter très évidemment les manufacturiers de verres, des grossistes et des agences gouvernementales. Le soin des yeux requiert une attention personnelle, on conçoit ça, constante et doit être entouré du maximum de précaution et de protection, e) L'ajustement des lentilles ophtalmiques est individuel, requiert des vérifications fréquentes qui ne peuvent être assurées que par des professionnels, activement engagés dans l'exercice de leur art et qui doivent conserver le souci constant du bien-être de leurs clients, f) la correction des défauts visuels par la réfraction requiert une interprétation et une exécution exacte des ordonnances. La fourniture des lentilles de qualité requise, un ajustement personnel pour chaque oeil, afin d'assurer à chaque individu le traitement qui lui convient adéquatement, g) les yeux étant particuliers à chaque personne, l'achat de lunettes doit être individuel et ne peut pas se faire par soumission comme pourrait être le cas des remèdes brevetés ou autres produits du même genre, h) le soin des yeux doit être entouré de toute la conscience professionnelle possible et cette exigence ne pourrait être atteinte par la fourniture de lunettes achetées en grosses quantités, comme le suggère la recommandation 92.

La deuxième recommandation; « Qu'une loi concernant la qualification et la modération des opticiens d'ordonnance soit mise en vigueur dans toutes les provinces et dans tous les territoires, » fort heureusement, ceci existe dans Québec depuis 1940 et je passe plus loin.

La troisième recommandation; « Qu'on adopte des lois interdisant la vente de lentilles de contact par qui que ce soit, sauf sur l'ordonnance d'un ophtalmologiste. « Nous sommes parfaitement d'accord sur cette recommandation puisque la lentille cornéenne est une len-

tille qui est placée sur l'oeil même. Actuellement, et toujours, nous faisons l'ajustement de lentilles cornéennes sur ordonnance. Plus que cela, nous faisons vérifier l'exécution de notre ordonnance par celui qui l'a prescrite. Alors, ce sont les trois recommandations du rapport Hall qui nous concernent et, en appendice, nous vous donnons le curiculum d'étude de l'école de la corporation. Je pense bien que nous n'entrerons pas dans les détails sur cet appendice.

De nouveau, nous vous remercions et nous sommes à votre disposition pour toutes les informations que nous pourrions vous fournir. Je vous remercie, messieurs.

M. VAILLANCOURT: Pourquoi, selon la corporation des opticiens d'ordonnances, les ophtalmologistes seraient-ils les seuls à pouvoir prescrire des lentilles de contact à l'exclusion des optométristes?

M. CRETE: Nous ne sommes pas en mesure de dire, nous, qu'ils sont les seuls, mais ce qu'on sait, parce que cela a été dit ici devant le comité des bills privés à maintes reprises, comme au Conseil législatif, les ophtamologistes soutiennent que les lentilles cornéennes où l'ordonnance exige un acte médical afin de déceler des complications possibles.

Enfin, nous n'entrons pas le débat entre les deux corporations, mais nous prenons la conclusion du rapport Hall telle qu'elle existe et nous disons que nous sommes d'accord.

M. BOUDREAU: Est-ce que vous admettez, par exemple, que des lentilles de contact qui sont appliquées par des optométristes peuvent avoir des conséquences graves pour la vue ou des maladies de l'oeil?

M. CRETE: Nous ne sommes pas en mesure de nous prononcer là-dessus. Ce sont les médecins ou les ophtalmologistes, j'entends des spécialistes en médecine, qui le prétendent, mais nous n'intervenons pas là-dessus.

M. RENAUD: Actuellement, la loi c'est que vous préparez des verres ou des lunettes sur ordonnance d'un ophtalmologiste ou d'un optométriste.

M. CRETE: Nous sommes, comme le rapport le dit d'ailleurs, ce que les pharmaciens sont aux médecins.

M. THEBERGE: Vous mentionnez en bas de l'article de la recommandation 212 que d'après les deux dernières lignes qui sont mentionnées, signalons aussi que l'ajustement des lentilles cornéennes se fait sur ordonnance, lorsque l'opticien a le droit d'ajuster des lentilles cornéennes, d'après la loi existante.

M. CRETE: D'après la loi existante de la Législature, ici.

M. THEBERGE: Je pensais qu'il y a deux ans, à cause de la petite discussion...

M. CRETE: Il y a eu une exception pour cette personne avant que la loi soit amendée, il y a eu exception pour cette personne qui ajustait des lentilles cornéennes depuis nombre d'années. Quand MM. les optométristes sont venus ici pour faire amender leur loi, par la même loi, la Loi des optométristes, nous avions le droit d'ajuster les lentilles cornéennes. Il y a eu une exception de faite pour cette personne pour préserver les droits acquis. Je vais être complet. Ici, à l'Assemblée législative, ce droit-là nous avait été refusé et, au Conseil législatif, il nous a été accordé. La sagesse!

M. MARLER: Sauf, M. Crête, qu'il faut admettre que, par la suite, l'Assemblée législative a bien compris l'amendement du Conseil législatif.

M. CRETE: Disons que la loi a été sanctionnée, M. Marler.

M. COLLARD: Une chance qu'on vous a. M. THEBERGE: J'ai dû manquer ça.

M. COLLARD: Dans l'avant-dernière page de votre mémoire, article 2, entre parenthèses, 211, on dit qu'une loi concernant la qualification et l'homologation des opticiens d'ordonnance soit mise en vigueur dans toutes les provinces et dans les territoires. Je vois que c'est la même recommandation que celle faite par le rapport Hall.

M. CRETE: Nous avons cité le rapport Hall, mais nous disons que ça existe déjà ici dans la province de Québec. Le rapport Hall évidemment s'appliquait à tout le Canada. C'est une commission d'enquête fédérale, parce qu'il y a beaucoup d'autres provinces qui ne sont pas affectées comme nous le sommes au point de vue des opticiens d'ordonnance. Notre province est la mieux organisée de ce côté-là.

M. LE PRESIDENT: Avez-vous d'autres questions, messieurs, à poser à M. Crête?

M. VAILLANCOURT: On comprend très bien votre mémoire.

M. LE PRESIDENT: Je remercie M. Crête de son exposé ainsi que les membres de la corporation des opticiens d'ordonnance de la province de Québec.

M. CRETE: Merci, messieurs.

M. LE PRESIDENT: Nous allons suspendre les travaux du comité pour que les députés puissent se rendre voter.

M. ROY: (Président du comité de l'assurance-maladie): A l'ordre, messieurs. Je demanderais au Dr Jules Gilbert de nous faire un bref exposé de son mémoire.

M. GILBERT: Si la chose m'est permise, je voudrais prier les membres du comité d'apporter trois corrections mineures au mémoire qui a été distribué. A la page 3, troisième paragraphe, quatrième ligne, s'il vous plait rayer le mot auxiliaire.

M. COLLARD: Le paragraphe 12.

M. GILBERT: Ah, oui, j'aurais dû dire ça, c'est exact, paragraphe 12. A la page 5, au paragraphe 19, s'il vous plaît, à la sixième ligne, changer 30% pour 43.5%. A la page 6, paragraphe 24, quatrième ligne, au bout de la ligne, après le mot: public, du gouvernement, à ajouter, et le reste est tel quel.

Quant à résumer ce mémoire, il est déjà, vous savez, relativement court, je ne puis faire mieux que de parcourir avec vous, si vous voulez, en quelques instants, le résumé que vous trouvez à la page 6, il n'y a pas de pagination, mais enfin, c'est la suivante de la page 6, page 7 alors, devrais-je dire. Le mémoire justifie l'inscription de l'assurance-santé au programme de sécurité sociale. Il donne les raisons d'ajouter l'assurance-médicale à l'assurance-hospitalisation. Il affirme qu'elle contribuerait à réduire le coût de l'hospitalisation et indique par quels moyens et à quelles conditions. Le mémoire prévoit une demande accrue des soins médicaux et ce, de façon permanente. Il favorise la pratique d'équipe, préconise un régime volontaire et suggère de l'établir progressivement, en plusieurs phases d'une année chacune.

L'auteur est opposé à l'établissement de frais de dissuasion et il présume que les médicaments brevetés ne seront pas fournis par le régime. Il reconnaît des avantages indéniables au salariat, pour lequel la mentalité médicale n'est pas prê- te. Reste la rémunération à l'acte, d'après un tarif calqué sur celui des honoraires versés pour des soins comparables par la Commission des accidents du travail. L'auteur souhaite que le régime soit placé sous l'autorité d'une commission, avec représentation du public, du gouvernement et des médecins. Là aussi il faudrait ajouter: du gouvernement, comme on l'a fait il y a un instant. Je suppose que vous avez pris connaissance des recommandations à la page suivante. Alors je suis à la disposition du comité pour répondre aux questions qu'on voudrait me poser.

M. RENAUD: Docteur, vous préconisez un régime financé par le fonds consolidé des revenus de la province. Avez-vous pensé à ce qu'une partie du fonds pourrait être financée par des contributions des malades, ou enfin, des citoyens de la province...

M. GILBERT: Oui.

M. RENAUD: ... dans le système d'assurance maladie?

M. GILBERT: Evidemment que j'y ai pensé, mais comme l'assurance-hospitalisation est déjà financée d'après ce mode auquel je fais allusion, il est douteux que le gouvernement change et adopte un mode différent pour un régime qui s'y apparente assez étroitement.

M. VAILLANCOURT: Docteur Gilbert, selon l'Association des hôpitaux du Québec, dans leur mémoire à notre comité, l'instauration d'un régime d'assurance-maladie couvrant les soins médicaux contribuerait à augmenter le nombre d'hospitalisations. Qu'en pensez-vous, docteur?

M. GILBERT: Je regrette, je suis d'une opinion tout à fait opposée. J'ai indiqué, je crois, dans mon mémoire, qu'il y a des moyens qui, d'une part, permettraient d'améliorer la qualité des soins rendus par les omnipraticiens — et si les services auxiliaires hospitaliers sont approuvés au complet sur l'assurance-hospita-lisation —, qui permettraient de réduire considérablement le nombre de malades hospitalisés. Selon l'opinion de gens du métier, je veux dire de personnes qui ont passé leur vie dans les hôpitaux, on pourrait libérer 50% des malades hospitalisés, en approuvant les services de laboratoire et de radiologie pour patients externes sous l'assurance-hospitalisation et en obtenant plus de lits pour malades chronique et convalescents.

M. MARLER: Docteur, je trouve un peu diffi-

cile de reconcilier le fait que, si vous préconisez le paiement des soins médicaux à même le fonds consolidé, vous parliez encore du volontariat. Je ne vois pas de quelle façon les deux idées peuvent se marier. Si, évidemment, on suppose le paiement d'une prime quelconque, là, je comprends que ça peut s'accorder avec l'idée de volontariat, mais, si le gouvernement doit payer les frais à même le fonds consolidé cela veut dire, il me semble, qu'on ne peut pas faire de distinction.

M. GILBERT: Je crois que, même s'il y avait une cotisation ou prime quelconque, le régime pourrait quand même être offert sous forme de volontariat. Evidemment, la contribution se trouverait obligatoire, puisque toute la population serait obligée d'y participer. Mais disons, par les taxes, que ça pourrait se marier. Si le régime est financé à même le revenu consolidé, tout le monde y contribue obligatoirement par les taxes, mais tout le monde n'est pas obligé de se faire soigner sous le régime.

M. TARDIF: Docteur, si mes informations sont justes, je pense que tous les médecins pratiquants font observer qu'ils ont ce qu'ils appellent des malades plutôt difficiles à satisfaire, des malades qui se cherchent des maladies, même, dans certains cas. Ne croyez-vous pas que si les futurs malades n'ont rien à payer, il y ait un abus assez prononcé de ce côté-là?

M. GILBERT: Il est évident que l'instauration d'un tel régime exigerait un assez gros travail d'éducation, éducation populaire, afin que la masse soit incitée à ne pas abuser du régime inutilement, surtout à ses débuts. Education aussi professionnelle, afin que les membres de la profession médicale, dans le sens large du mot, n'entreprennent pas plus de travail qu'ils n'en peuvent faire, très bien.

M. THEBERGE: Docteur Gilbert, vous mentionnez aux paragraphes 23 et 24 que vous êtes en faveur de la formation d'une commission, afin d'enlever l'ingérence gouvernementale. Pourriez-vous expliciter vos idées là-dessus?

M. GILBERT: J'ai mentionné, si je me souviens bien, qu'il est tradionnel de considérer une commission comme étant indépendante, ou, si vous voulez, libre d'ingérence gouvernementale, mais ce n'est pas la seule raison, si vous avez remarqué, pour laquelle je recommande ce genre d'administration. Je signale, en particulier, qu'une commission partage les responsabilités au lieu de les laisser reposer sur les épaules d'un seul homme, d'un directeur.

M. THEBERGE: Oui, vous placeriez la même chose, l'assurance-hospitalisation sous la même commission?

M. GILBERT: Je dis à l'article 24: Il pourrait y avoir intérêt. Personnellement, je le pense parce que c'est difficile de s'imaginer que quelqu'un pourrait, disons par exemple, se faire une légère fracture du poignet en tombant dans l'escalier de son domicile et qu'alors son cas soit administré par un organisme quelconque. S'il se fait la même fracture dans l'escalier de l'usine, cela va être administré par un autre organisme et si, par hasard, il faut qu'il entre à l'hôpital pour le traitement en question, cela serait un troisième organisme, je doute beaucoup qu'on tienne à compliquer les structures administratives à ce point.

M. COLLARD: Docteur, au paragraphe 9, il est mentionné que des malades hospitalisés pourraient être soignés comme patients externes et, un peu plus loin, vous dites que cela rendrait la pratique plus scientifique et améliorerait considérablement la qualité des soins. Est-ce qu'également cette méthode diminuerait le coût ou serait plus économique?

M. GILBERT: Cela dimunuerait le coût considérablement, parce que ce qui coûte cher, c'est le traitement d'un malade qui est hospitalisé. Comme je le disais tantôt, il y a une très grosse proportion — on m'a même dit que dans certain service de médecine cela s'élevait jusqu'à 60%, je ne l'ai pas mis dans mon mémoire — une grosse proportion de malades sont hospitalisés et qui pourraient être diagnostiqués et traités comme patients ambulants, à un prix de $5, disons, du traitement, tandis qu'une fois hospitalisés, cela dépend du per diem de l'institution, cela peut s'élever jusqu'à $30 par jour.

M. MARLER: J'ai un peu l'impression, docteur, que, si l'on accordait gratuitement tous les services que vous êtes obligés de payer actuellement aux cliniques externes, cela augmenterait la dépense mais en même temps que cela augmenterait l'efficacité de l'emploi et de l'usage des lits. Je ne suis pas convaincu que cela veut dire qu'il y aura des lits vacants à l'hôpital. Je pense qu'il y aura peut-être une occupation plus intensive. Mais le fait d'ajouter des services gratuits, il me semble que nécessairement, évidemment des services actuellement payés par le public, si le gouvernement s'en charge, cela va augmenter les dépenses fatalement. N'êtes-vous pas d'accord?

M. GILBERT: Oui, d'accord, de la part du gouvernement. Mais le gouvernement va prendre à sa charge des dépenses qui sont actuellement effectuées largement par le public. Tout ce que coûtera une...

M. MARLER: Oui, c'est vrai.

M. GILBERT: ... tout ce que coûtera une assurance-maladie ne sera pas constitué de dépenses nouvelles...

M. MARLER: Non, je suis d'accord.

M. RENAUD: Docteur, aux paragraphes 18, 19, 20 et 21 de votre mémoire, vous parlez du mode de rémunération des médecins. Et vous semblez préconiser que les médecins devraient travailler sur une base de salaire. Croyez-vous que cela serait facile d'amener les médecins à travailler sur une base de salaire avec ce que nous connaissons aujourd'hui? Ce serait changer les habitudes.

M. GILBERT: Si vous vous souvenez, j'ai nuancé un peu ma pensée, j'ai signalé que la mentalité de la profession, présentement, ne semble pas être prête pour cela. En dépit des avantages d'ordre médical et évidemment des très grands avantages d'ordre populaire. Je veux dire pour les patients eux-mêmes, pour les malades eux-mêmes.

M. RENAUD: Quant aux médecins, avec la grande expérience que vous avez, est-ce que vous croyez que ce serait facile de soumettre aux médecins dans un système d'assurance-maladie, de leur demander de travailler sur une base de salaire?

M. GILBERT: Non, je crois même que ce serait commettre une erreur que de la leur imposer, mais je crois que la mentalité médicale évolue dans cette direction. La mentalité des dirigeants également, étant donné la tendance socialisante qu'on remarque de plus en plus dans l'administration des pays dans le monde, le nôtre comme les autres, de sorte que graduellement la proportion des médecins qui sont salariés déjà et qui est très élevée, va continuer à augmenter parce que c'est une proportion croissante. Elle était de 41.2 en 1961, elle est rendu à 43.5 de gens qui sont salariés soit à temps complet soit à temps partiel, 60% à temps complet, 40% à temps partiel. Tous ces gens-là n'ont pas peur du salaire et il en est d'autres qui ne sont pas salariés et qui m'ont exprimé à moi, leur opinion à l'effet qu'ils seraient satisfaits de l'être.

Evidemment, il y a des conditions, mais vous avez peut-être pris connaissance de certains chiffres. C'est ainsi qu'en Saskatchewan, en l'année 1964, la moyenne des salaires pour les généralistes fut de $30,000 et pour les spécialistes de $38,000. Si vous faisiez un référendum parmi la profession médicale pour leur proposer des salaires de cet ordre, j'ai l'impression que ça pourrait sourire à pas mal d'entre eux.

M. ASSELIN: Est-ce que ce sont des salaires réellement ou si seulement....

M. GILBERT: Non, non des honoraires...

M. ASSELIN: Ils sont payés à l'acte médical.

M. GILBERT: Payés à l'acte.

M. ASSELIN: Il y a une différence.

M. GILBERT: Ah mais oui, je comprends ce que vous voulez dire mais ça ne fait rien. Si les gens étaient salariés avec des chiffres de cet ordre ils n'auraient pas objection à toucher un salaire de préférence à des honoraires.

M. RENAUD: Est-ce qu'en Saskatchewan ils sont payés à salaire? Ils sont payés à...

M. GILBERT: A l'acte.

M. RENAUD: ... à l'acte médical.

M. GILBERT: Ils sont à l'acte. Je me suis peut-être trompé quand j'ai dit la moyenne des salaires, ce n'est pas ça que je voulais dire, je voulais dire la moyenne des revenus, je m'excuse.

M. RENAUD: Mais ce qui me surprend beaucoup — je prends évidemment votre parole — c'est qu'il y ait 43.5% des médecins dans la province de Québec qui soient sur une base de salaire.

M. GILBERT: J'avais déjà lu dans un article, il y a pas mal de temps, que la proportion était de 30%. Comme j'avais de la difficulté à trouver ma référence pour venir appuyer mon mémoire devant vous, j'ai communiqué avec le Collège des médecins, le service de recherche a fait séance tenante, à ma demande, une estimation basée sur l'étude de 3,000 médecins sur ces 1,900, donc trois septièmes, c'est un gros échantillon, très représentatif, et on a trouvé en extrapolant, en estimant ce que cela

serait pour l'ensemble de la profession, 43.5% de salariés actuellement dans la profession.

M. RENAUD: Parmi ces salariés il y a des médecins qui, tout en recevant des salaires en même temps pratiquent, ils sont payés à l'acte médicale. Prenez par exemple une compagnie d'assurance. Elle peut engager un médecin, il est sur une base mensuelle ou peut-être sur une base d'unité d'examen, mais, par ailleurs il pratique.

M. GILBERTS Les temps partiels touchent une partie de leur revenu sous forme de salaire et l'autre partie sous forme d'honoraires.

M. RENAUD: Alors pour éclairer votre énoncé, 43.5% sont ceux qui reçoivent des salaires?

M. GILBERT: Des salaires soit à temps complet, soit à temps partiel.

M. RENAUD: Soit à temps complet, soit à temps partiel.

M. GILBERT: Trois cinquièmes, complet; deux cinquièmes, partiel.

M. CLOUTIER: Est-ce que vous iriez jusqu'à dire, docteur, que le choix de rémunération pour le médecin devrait être discuté ou à faire individuellement, à chaque médecin, soit l'acte médical ou le salariat?

M. GILBERT: Pour des raisons d'ordre psychologique, je ne parlerais jamais de salariat au début d'un régime comme celui-ci. Il y a déjà assez de bouleversements que ça amène; mais petit à petit, les choses vont se tasser et j'ai l'impression que, de plus en plus, la mentalité médicale s'orientera vers l'idée du salariat.

M. CLOUTIER: Vous dites qu'au début du régime, vous ne seriez pas en faveur de parler immédiatement de salariat. Est-ce que, dans cet énoncé, dans cette affirmation, docteur, vous tenez compte du nombre d'heures que les médecins doivent consacrer à la pratique? Et je m'explique en disant que, si c'est une base à salariat, vous craindriez que le nombre d'heures consacrées par les médecins ne diminuent pas au lieu d'augmenter alors que la demande va augmenter, elle?

M. GILBERT: Evidemment, on peut s'attendre à ce que l'exercice de la médecine sur une base de salaire prenne une tournure légèrement différente de ce qu'elle est sur la base d'honoraires. Je pense aussi que l'on peut faire confiance en la profession et affirmer que les médecins ont assez de conscience professionnelle pour donner les meilleurs soins dont ils sont capables, quel que soit le mode de distribution et de rémunération de leurs soins. Quant aux exceptions, s'il y en a, il vaudrait aussi bien ne pas leur demander de soigner les malades.

M. ASSELIN: Dr Gilbert quand vous parlez de salaires, de salariat, voulez-vous dire une rémunération déterminée du type qui a tant par mois ou tant par année ou tant par jour, comme un fonctionnaire, par exemple? Est-ce que c'est cela que vous voulez dire ou bien si c'est une rémunération à tant de l'acte?

M. GILBERT: Non, non, quand il est question de salaire ce n'est plus une question de rémunération à l'acte. Ce serait sur une base de traitement.

M. ASSELIN: Tant par jour, tant par mois, tant par année, comme un fonctionnaire ordinaire?

M. GILBERT: C'est ça.

M. ASSELIN: Vous trouveriez ça désirable?

M. GILBERT: Il y en a déjà énormément, vous voyez que le mémoire le dit, d'ailleurs. Il y a à cette proportion de 43.5%. Vous ne les trouvez pas seulement dans les Compagnies d'assurance.

Permettez que je retrouve ce passage. C'est à la page 5, au paragraphe 19, au service de la santé publique, au service de l'armée, au service d'industries, de compagnies d'assurance, d'organismes bénévoles de santé, de l'enseignement, de certains départements hospitaliers.

M. MARLER: Docteur, ne faut-il pas faire distinction entre le cas où le médecin salarié relève d'un employeur qui peut en somme exercer une certaine surveillance sur l'activité du médecin salarié et le cas où le médecin, en somme, n'a pas d'employeur direct? C'est vrai qu'il sera payé par l'Etat, mais j'ai bien l'impression que le médecin qui sera à salaire, rendu à la fin de la journée, s'il est appelé par un patient pour aller assez loin, dans des conditions un peu désagréables, il pourra dire; Non, j'irai demain. Tandis que s'il est payé à l'acte, j'ai bien l'impression — je ne vise pas les méde-

cins en particulier — mais je pense que la nature humaine saura se laisser attirer par le fait que vous recevrez une compensation directe pour le service que vous serez appelé à rendre.

M. GILBERT: Tout ce que vous dites là est parfaitement vrai, surtout si l'on considère la génération présente de médecins qui a été habituée à exercer avec rémunérations à l'acte. Mais, la modification s'accentuera avec les années et avec les générations suivantes. J'irais plus loin, je dirais qu'il me paraît, à moi, souhaitable que l'ensemble des soins médicaux hospitaliers, éventuellement — je ne le verrai pas, éventuellement — devienne une entreprise non lucrative.

M. MARLER: Je suis sûr que ça n'arrivera pas de mon temps, docteur.

M. GILBERT: Non, mais ça se justifie. Prenez une station de pompiers, elle n'est pas établie pour faire de l'argent; elle est établie pour éteindre le feu. La maladie aussi, c'est un incendie qu'il faut éteindre au plus vite. Et Dieu sait qu'il y a plus d'incendies chez les pauvres que chez les riches, qu'il s'agisse de leur maison ou de leur santé.

M. RENAUD: Mais, docteur, pour les pompiers il y a des différences de salaires en ce qui concerne la séniorité. Mais, quand on arrive dans le domaine des médecins, c'est une question de compétence, n'est-ce-pas? Une question d'expérience.

M. GILBERT: Là où il y a exercice...

M. RENAUD; Comment pourriez-vous établir une échelle de salaire entre un jeune médecin qui commence, celui qui a une plus grande expérience, entre un grand spécialiste, un omnipraticien, ou enfin un acte médical qui demande moins de responsabilité, ou enfin, moins de compétence qu'un autre acte médical? Toutes ces distinctions doivent se faire dans le domaine médical.

M. GILBERT: Tout ceci se fait dans presque tous les pays du monde, sauf, les Etats-Unis, l'Australie et le Canada. Et, même, il n'est pas besoin d'aller aussi loin, prenez à New York, vous avez ce qui s'appelle le Health Insurance Plan of Greater New York, qui est organisé par le service municipal de cette grande cité, pour ses employés et les membres de leurs familles. L'exercice de la médecine se fait par des équipes médicales qui sont ré- munérées sur une base de salaire, et il y a un système de promotion, d'évaluation de la qualité des soins et ça fonctionne très bien. D'ailleurs ç'a été institué par le maire La Guardia, il y a déjà plusieurs années et ça dure encore.

M. TREPAN1ER: Dr Gilbert, au paragraphe 13 de votre rapport, vous mentionnez que la pratique d'équipe en milieux hospitaliers a donné de très bons résultats et vous ajoutez que cette pratique d'équipe devrait également se faire en dehors de l'hôpital. Est-ce que vous croyez que cette pratique d'équipe en dehors de l'hôpital pourrait être réalisée seulement sur l'initiative des médecins eux-mêmes ou autrement?

M. GILBERT: Avec le temps, il se ferait beaucoup de médecine en dehors de l'hôpital mais dans des espèces de polycliniques. Ces polycliniques pourraient s'établir sous l'inspiration du gouvernement, mais le personnel qui y donnerait des soins, eh bien, ce seraient des médecins de l'entourage.

M. TREPANIER: Autrement dit, le gouvernement se trouverait à équiper un certain nombre de médecins, quoi?

M. GILBERT: Je crois que cela peut se faire, cela se fait ailleurs.

M. TREPANIER: Mais en fait ce serait d'après l'initiative des médecins eux-mêmes?

M. GILBERT: Là où la chose est possible la pratique d'équipe a eu tendance à s'organiser. Là où elle n'est pas organisée, c'est parce qu'elle est difficile. S'il n'y a seulement qu'un ou deux médecins on ne peut pas songera organiser une pratique d'équipe. Surtout avec le sens que j'ai donné à cette notion d'équipe médicale.

M. TREPANIER: C'est cela, oui. M. GILBERT: ... avec les diverses...

M. TREPANIER: ... distinguer avec un groupe de médecins qui pratiquent ensemble.

M. GILBERT: C'est cela. Autrement dit, c'est quelque chose qui serait souhaitable en autant qu'elle est applicable. N'oubliez pas qu'il a déjà été mentionné que 66% des municipalités de la province n'ont qu'un médecin ou pas de médecin. Bien dans ce temps-là on ne peut pas avoir d'équipe. Ce serait en somme un système

d'organisation assez restreint par la force des choses.

M. TREPANIER: Maintenant plus loin, aux paragraphes 14, 15 et 16, vous parlez de certaines étapes dans l'instauration d'un régime d'assurance-maladie et vous mentionnez des étapes assez rapprochées. Alors quels seraient donc les avantages qui résulteraient, étant donné que les étapes sont tellement rapprochées, seulement une année d'intervalle?

M. GILBERT: Cependant, ces étapes sont plus éloignées que celles que le gouvernement semble se proposer d'établir, parce que, si je ne me trompe, on s'est à peu près engagé à donner l'assurance-santé complète pour le premier juillet 1967. Alors que le gouvernement fédéral est prêt à considérer comme universel un régime qui protègerait 95% de la population, en trois ans, au bout de trois ans. Pourquoi alors ne pas profiter de ce délai qui nous habitue à la dépense et à l'organisation nécessaire et commencer le premier avril les assistés sociaux, disons au bout d'un an les enfants, au bout d'une autre année les vieillards et finalement à la troisième année, disons le premier juillet 1969, 1966-1969 je dis bien, les autres? Ces délais-là sont assez raisonnables.

M. TREPANIER: Vous ne voyez pas d'autres avantages spécifiques sauf que celui de suivre cette suggestion-là?

M. GILBERT: Oui et ensuite cela permet d'éviter la grande erreur qu'a commise la National Health Service, en Grande-Bretagne, alors que, le 5 juillet 1948, du soir au matin, il ont établi un régime nouveau et complet, et cela a créé un fouillis inextricable. Tandis que si l'on procède par étapes comme cela, cette progrestion facilite l'instauration du régime.

M. RAYMOND: Docteur Gilbert, seriez-vous en faveur que les médicaments soient payés dès le début?

M. GILBERT: De façon idéale, oui. Parce que si l'on donne des soins à quelqu'un et que, pour une raison d'ordre pécuniaire, les gens ne peuvent se procurer les médicaments dont ils ont besoin, eh bien mon Dieu, le traitement a peu de valeur. D'un autre côté, il ne faut pas oublier ce que cela coûte tout cela. Ce serait aussi une autre manière d'établir le régime progressivement, de ne pas nécessairement approuver les médicaments dès le départ, d'y arriver par la suite.

M. RAYMOND: Et en médicaments vous entendez, médicaments prescrits seulement?

M. GILBERT: Ah oui, bien sûr. Si vous avez remarqué j'ai formulé l'espoir que les médicaments brevetés en particulier soient rejetés complètement. Un point capital, c'est le fameux ticket modérateur qui est recommandé dans certains milieux pour éviter des abus. Il serait applicable, en principe, là où il y a le plus de danger d'abus et c'est du côté des médicaments qu'on peut le craindre. D'un autre côté, un ticket modérateur, disons qu'il serait $1 par ordonnance. Cela ne fera pas grand chose aux gens aisés de le payer. Cela va faire mal aux gens pauvres de le payer. De sorte que cela va être quelque chose qui va enlever de la valeur prophylactique au régime et qui va jouer surtout sur les pauvres, contre les pauvres, devrais-je dire. De sorte que, malgré que je connaisse la nature humaine, je crois que, de façon idéale, il vaudrait mieux n'en point avoir mais je ne suis pas prêt à recommander tout de même qu'on approuve les médicaments dès le début, sans restriction.

M. BOUDREAU: Mais, docteur, dans toutes ces étapes que vous mentionnez, c'est toujours basé sur le paiement de tout cela par le fonds consolidé de la province, n'est-ce-pas?

M. GILBERT: Oui.

M. BOUDREAU: Est-ce que vous n'avez pas envisagé le paiement contributoire de tous les citoyens à cette...

M. GILBERT: ... si vous voulez bien...

M. BOUDREAU: ... moi, j'approuve cela l'affaire d'étapes, par étapes là.

M. GILBERT: Oui.

M. BOUDREAU: Je suis en faveur de cela. Seulement j'imagine mal que ce soit payé par le fonds consolidé de la province.

M. GILBERT: Si vous voulez bien regarder à la page 4, le paragraphe 14, vous allez voir que j'ai cru qu'il ne serait pas sage de ma part de poursuivre mes réflexions dans les avenues parcourues par le comité d'étude. Vous avez eu là un comité qui avait à sa disposition toutes les ressources possibles et qui était formé surtout de comptables et d'actuaires et d'économistes. Eh bien, eux, se sont appliqués à étudier les modes de financement. Moi je n'ai pas approfondi cette question-là. Je peux bien avoir des préférences personnelles, mais s'il est quelque chose dans un régime d'assurance-maladie qui ne relève pas des médecins, mais des dirigeants, c'est bien le mode de financement.

M. MARLER: Le mode de financement dépendra dans une très grande mesure de la nature des soins que nous allons donner gratuitement.

M. GILBERT: Oui.

M. MARLER: Par exemple, docteur, vous parlez de faire des distinctions peut-être selon l'âge des assurés. Si par exemple nous faisons abstraction des gens âgés, disons de plus de 60 ans, c'est impossible de demander à ces gens-là de payer des primes sous forme de taxes. Vous ne pouvez pas dire: Vous allez payer pour, sans avoir quelques avantages et donc c'est une raison pourquoi il faut songer peut-être à un système universel, au début en créant, en faisant des étapes dans la couverture plutôt que dans les couches de la population que vous allez assurer.

M. GILBERT: Je n'ai pas de commentaires à ajouter, je suis en principe d'accord avec vous sur ce point-là.

M. RENAUD: Tout le monde, mais pas pour tout.

M. BOUDREAU: Moi je serais en faveur que ça s'applique à tout le monde. Tous contribueraient à ce moment-là.

M. GILBERT: Oui ça viendra assurément avec un peu de temps.

M. TARDIF: Je pense que l'idée d'échelonner ça sur quelques années, ça mérite d'être considéré, et même appliqué.

M. GILBERT: Il ne faut pas prendre des bouchées...

M. RENAUD: S'il fallait mettre des restrictions sur la couverture qu'est-ce que devrait à votre avis constituer l'essentiel, qui devrait être donné dans un système d'assurance-maladie?

M. GILBERT: Je ne conçois pas très bien, à l'instant même, des soins qui devraient être exclus, je crois qu'il faudrait s'en remettre à l'opinion médicale pour juger si tel soin est requis pour le recouvrement de la santé de telle personne ou non. C'est ce qui se fait d'ailleurs déjà à l'assurance-hospitalisation, c'est l'opinion médicale qui décide qu'une personne doit être hospitalisée et qu'après ce long traitement, elle doit être retournée chez elle. Il faudrait faire la même chose, je pense bien, en matière de soins médicaux.

M. RENAUD: Merci.

M. LE PRESIDENT: Docteur Gilbert, croyez-vous que chaque omnipraticien pourrait disposer d'un bureau, à l'hôpital, pour y traiter les malades externes?

M. GILBERT: Je ne pense pas, je pense que en somme vous faites allusion à la possibilité d'avoir ce que l'on appelle des hôpitaux ouverts où d'autres praticiens pourraient être admis pour soigner leurs propres malades. En principe, c'est vrai ça; en pratique, ce n'est pas possible, parce que l'hôpital est responsable de la qualité des soins qui s'y donnent et je ne vois pas que la direction d'un hôpital puisse comme cela assumer une telle responsabilité sans s'assurer des qualifications de ceux qui sont admis à soigner dans cette institution. Et c'est encore plus vrai et plus rigide, quand il s'agit d'hôpitaux affiliés à des facultés de médecine où se font en même temps de l'enseignement et de la recherche.

M. LE PRESIDENT: Avez-vous d'autres questions, messieurs, à poser au docteur Gilbert?

M. TREPANIER: Seulement une. Docteur Gilbert, vous parlez d'étapes dans l'application du régime concernant le champ d'application, c'est-à-dire la population qui devrait être protégée progressivement à différents secteurs à la fois. Je ne me rappelle pas de l'avoir lu dans le mémoire, est-ce que vous recommandez également une réalisation par étape dans la couverture des soins?

M. GILBERT: Je ne crois pas saisir très bien le sens...

M. TREPANIER: C'est-à-dire, est-ce que vous considérez que le régime d'assurance-maladie devrait couvrir tous les besoins, y compris soins médicaux, remèdes, le dentiste, etc.?

M. GILBERT: Je ne crois pas qu'il me soit possible de répondre catégoriquement à votre question, parce que il est quand même des méthodes thérapeutiques qui sont tellement onéreuses que, même sous le signe de la médecine privée à honoraires, l'on s'en prive volontiers. Je fais allusion par exemple aux longues et nombreuses séances de psychanalyse établies, réparties sur une période d'années. Cela coûte une fortune, je pense bien qu'il y aura comme ça, certains genres de soins qui auront besoin d'être restreints, c'est possible.

On a eu quelque chose du genre en matière

d'assurance-hospitalisation. Je ne sais pas ce qui se passe présentement, mais pendant un temps en tout cas on n'approuvait pas la chirurgie esthétique, on approuvait la chirurgie réparatrice, vous comprenez la différence. Etes-vous médecin?

M. TREPANIER: Non.

M. GILBERT: Vous comprenez la distinction...

M. TREPANIER: Quand même.

M. GILBERT: ... que je veux faire! Il y a ceux qui veulent se faire redresser le nez, etc., ça coûte si peu cher d'éteindre la chandelle au lieu de la redresser.

M. LE PRESIDENT: Docteur Gilbert, je vous remercie au nom des membres du comité conjoint, de la manière dont vous avez répondu aux questions et surtout des réponses très adéquates que vous avez données aux questions qui vous ont été posées. Merci docteur.

Demain matin, à dix heures et trente, la Corporation des biochimistes des hôpitaux du Québec, mémoire No 19, et aussi le Collège des chiropracticiens de la province de Québec, le numéro 25. La séance est ajournée.

(à suivre)

Séance du 30 mars

(Dix heures quarante de l'avant-midi)

M. MARLER (Président du comité de l'assurance-maladie): A l'ordre, messieurs, s'il vous plaît, nous avons quorum.

C'est la corporation des biochimistes des hôpitaux du Québec qui doit présenter d'abord son mémoire. Voulez-vous vous identifier, s'il vous plaît.

M. LETELLIER: Docteur Letellier, Prési- dent de la corporation.

M. LE PRESIDENT: Et ceux qui vous accompagnent?

M. LETELLIER: Docteur Roméo Soucy, au conseil d'administration à magauche; le docteur D.-B. Tonks qui est aussi au conseil d'administration et nous avons amené avec nous comme observateur, et à titre de Président de la corporation des chimistes professionnels du Québec, le docteur Papineau Couture, à ma droite.

M. LE PRESIDENT; Alors, voulez-vous nous donner un résumé de votre mémoire?

M. LETELLIER: Certainement. M. le Président, messieurs les membres du comité, dans le mémoire que nous vous avons remis, nous avons insisté sur des principes généraux définissant les biochimistes des hôpitaux, parce que, croyant que c'est une science très récente, très nouvelle dans les hôpitaux de la province que la biochimie, nous avons cru bon de nous faire connaître un peu en définissant tant notre rôle que le rôle que nous jouons dans les hôpitaux aujourd'hui. Nous avons différentes sections, une première qui définit la chimie-clinique et donne l'évolution de celle-ci dans les dernières années, pas seulement au Canada mais à travers le monde et aussi un aspect plus important, c'est la disponibilité des biochimistes-cliniques dans nos hôpitaux.

Evidemment, nous tenons aussi à un aspect de la formation du biochimiste au stade universitaire et le statut que le biochimiste possède actuellement dans les hôpitaux est le statut qu'il devrait posséder à nos yeux. Et les différentes recommandations, en général, que nous faisons, eh bien, c'est que premièrement nous constatons que dans les hôpitaux du Québec, il n'y a que très peu de biochimistes et qu'il existe un besoin réel dans chaque hôpital pour un tel poste, soit un biochimiste à plein temps dans les grands hôpitaux ou les hôpitaux moyens et un biochimiste consultant dans les plus petits hôpitaux.

Eh bien, si on regarde à l'addendum que nous avons annexé à notre mémoire, qui est un article très intéressant du docteur Coutu, doyen de la faculté de médecine, on découvre qu'il y a environ une cinquantaine de biochimistes pour 280 hôpitaux privés et publics dans la province. Evidemment, dans ces 280 hôpitaux, il y en a qui n'auraient besoin que d'un consultant, mais, une grande partie d'entre eux manquent quand même de biochimistes; surtout si l'on considère le fait que, dans les plus grands hôpitaux, nous sommes très souvent deux biochimistes alors même que, dans certains endroits, nous devrions être trois ou plus.

Alors, ce manque actuel de biochimistes dans les hôpitaux, peut être attribué à certains faits. Il faudrait peut-être reviser le statut du biochimiste, toujours dans le complexe d'un plan d'assurance-santê. Le biochimiste, ou le laboratoire en général et la section de biochimie dans les laboratoires, vont évidemment prendre de l'ampleur. Nous allons en parler un peu plus tard. Eh bien, si tel est le cas, le statut du biochimiste devrait être revisé; et, s'il est revisé, nous devrions être considérés, nous les biochimistes, non pas comme des para-médicaux, au sens du mot comme on l'entend actuellement, mais comme faisant partie du personnel médical de l'hôpital. Parce que là, il n'y a pas seulement des médecins qui font partie du personnel médical dans un hôpital, exemple, les dentistes en font partie, ils sont considérés comme des membres du personnel médical d'un hôpital. Si tel est le cas, le sort du biochimiste ne devrait pas être discuté avec l'Association des hôpitaux du Québec, mais directement, à nos yeux, avec le gouvernement, par l'intermédiaire de la Corporation des chimistes professionnels qui nous représente et dont nous faisons une partie dans un tout.

Nous considérons également que le biochimiste, avec ses longues années d'études en chimie, est l'homme qualifié pour diriger un laboratoire ou un service de biochimie, ou un laboratoire spécialisé de chimie clinique, soit endocrinologie, physiologie, cardiologie ou autres; et nous recommandons, comme principe général, que la chimie ne soit exercée que par un chimiste professionnel, tel que le demande le Bill 106, un bill privé, instituant la Corporation des chimistes professionnels du Québec en profession fermée. Alors, considérant qu'il y a un manque de biochimistes cliniques dans la province — et les administrateurs des hôpitaux peuvent le confirmer facilement — il y a beaudoup d'hôpitaux actuellement qui sont à la recherche de

biochimistes, et ce qu'il y a de malheureux c'est qu'on a constaté que depuis quelques années, le nombre de biochimistes allait en augmentant, mais, depuis une couple de mois, on a remarqué qu'il semble y avoir une tendance inverse. Plusieurs de nos membres ont quitté les hôpitaux pour l'industrie, l'enseignement ou d'autres services. Alors, pour remédier à une telle chose, il faudrait faciliter l'accès à de telles études universitaires, et prendre les moyens pour attirer du personnel qualifié dans la profession. Il faut surtout éviter, évidemment, que les biochimistes qui sont formés aussi aux frais de la province, quittent le Québec pour offrir leurs services à l'étranger.

Comme moyens à prendre, nous recommandons, premièrement, un statut égal dans l'hôpital à celui de leurs confrères, pathologistes, bactériologistes, hématologistes, et c'est l'avis du docteur Lucien Coutu, qui, dans son article de L'Hôpital d'aujourd'hui, mentionne, à la page 24, qu'il soit médecin ou non, le biochimiste doit être considéré à l'égal de ses confrères des autres disciplines Il a donc droit aux mêmes égards et aux mêmes privilèges que ces derniers.

Deuxièmement — et nous ne faisons qu'effleurer la question ici — des salaires à un niveau raisonnable et comparable à celui des autres disciplines professionnelles du laboratoire et, troisièmement, pour intéresser ces gens qui ont sept ou huit années de formation universitaire, les intéresser à venir faire de la chimie clinique et, dans leur intérêt, leur permettre de faire de la recherche, mais de la recherche non pas fondamentale, de la recherche d'aspect clinique, amélioration de techinique de laboratoire, collaboration avec des médecins dans des problèmes de recherche dans les hôpitaux, et, cela, pour l'intérêt des biochimistes et aussi, pour le bien-être des patients de nos hôpitaux. Ceci est le résumé du mémoire que nous vous présentons.

M. RENAUD: Il y a cinquante biochimistes dans nos hôpitaux, à peu près, dans la province de Québec?

M. LETELLIER: Oui. Ici, le Dr Coutu mentionne — c'est un article écrit l'an dernier — qu'il y avait quarante-cinq biochimistes non médecins et neuf biochimistes médecins. Mais ces neuf biochimistes médecins ne sont pas tous dans des hôpitaux. Cela signifie que ce sont des médecins qui ont leur spécialité en biochimie. Et j'en connais au moins deux — enfin, il y en a un qui est décédé depuis — il y en a deux autres qui sont à l'Université de Montreal. Alors, il y a à peu près cinq ou six médecins qui ne sont pas dans les hôpitaux mais seulement trois à ma connaissance qui agissent dans les hôpitaux comme biochimistes proprement dit. Et dans notre corporation, nous sommes une quarantaire de membres. Comme je l'ai mentionné tout à l'heure, malheureusement, depuis un mois et demi, quatre biochimistes se sont retirés du domaine hospitalier pour aller dans un autre secteur.

M. RENAUD: Combien de membres avez-vous dans la corporation, en tout et partout?

M. LETELLIER: Actuellement, nous sommes trente-neuf membres dans la corporation.

M. RENAUD: Trente-neuf dans la corporation.

M. LETELLIER: Oui, des biochimistes qui couvrent à peu près tous les biochimistes. Il y en a seulement quelques-uns qui ne sont pas membres de la corporation... Deux ou trois.

M. RENAUD: Ils ne sont pas tous médecins?

M. LETELLIER: Non. Au contraire, la grosse majorité des biochimistes dans notre corporation sont des non médecins. Dans notre corporation, nous n'avons qu'un biochimiste médecin. C'est un médecin qui s'est spécialisé et qui a obtenu son baccalauréat en chimie et qui pratique dans un hôpital.

M. RENAUD: Vous dites que cela en prendrait combien pour couvrir les hôpitaux de la province?

M. LETELLIER: Actuellement, disons qu'il y a au moins une quinzaine de postes d'ouverts de façon active où on recherche activement un biochimiste, mais il y a au moins une cinquantaine d'autres hôpitaux qui en auraient besoin d'un pour le bon fonctionnement des laboratoires de ces hôpitaux et même, d'avantage.

Dans nos 280 hôpitaux, tout hôpital possédant 200 ou 250 lits devrait avoir dans ses laboratoires, un biochimiste à plein temps et il serait idéal évidemment que la plupart, que tous les hôpitaux qui ont un laboratoire, aient au moins un biochimiste consultant une fois par semaine pour solutionner certains problèmes.

M. RENAUD: Vous voudriez pour les biochimistes un statut égal à celui des autres membres des laboratoires?

M. LETELLIER: Oui.

M. RENAUD: Quel est votre statut exactement dans les hôpitaux?

M. LETELLIER: Actuellement, d'une façon officielle si vous voulez, nous n'avons pas de statut en soi. Plusieurs biochimistes font partie du bureau médical de leur hôpital, mais cela varie avec les hôpitaux. La plupart ne font pas partie du bureau médical et en plus au point de vue des salaires, nous faisons un travail analogue à nos autres confrères des laboratoires sans avoir les mêmes rémunérations et même sans avoir actuellement les rémunérations qui sont données dans les industries. On a établi une échelle de salaires — c'est une comparaison qui a été faite il y a quatre ans, elle était assez valable il y a quatre ans, elle ne l'est plus aujourd'hui, parce que là aussi tout a changé.

M. RENAUD: Comment se compare les études que vous faites?

M. LETELLIER: On fait...

M. RENAUD: ... avec les autres membres des laboratoires que vous avez mentionnés?

M. LETELLIER: A peu près le même nombre d'années d'études. On fait sept à huit années d'études à l'université. Un baccalauréat ès science qui prend quatre ans et trois à quatre années de recherches pour la préparation d'une thèse de doctorat, recherches fondamentales en général. Souvent aussi plusieurs de nos membres sont demeurés quelques années à l'université et ils sont allés poursuivre des études à l'étranger pour se perfectionner davantage dans leur domaine.

M. CLOUTIER: Quel est le salaire moyen des biochimistes d'hôpitaux actuellement?

M. LETELLIER: Actuellement, l'échelle des salaires est de $8,500 à $13,500.

M. CLOUTIER: Comment cela se compare-t-il avec les biochimistes de laboratoires?

M. LETELLIER: Ce sont les biochimistes de laboratoires. Ah! dans l'industrie?

M. CLOUTIER: Non, parce que dans la recommandation numéro deux vous demandez des salaires raisonnables et comparables à ceux des autres disciplines professionnelles du laboratoire...

M. LETELLIER: Du laboratoire, c'est cela.

M. CLOUTIER: Je voudrais savoir la comparaison.

M. LETELLIER: C'est cela, avec les médecins qui sont affectés à un hôpital — parce que nous faisons un travail dans un hôpital — si nous comparons nos salaires à ceux des médecins qui sont en charge des autres secteurs, hématologie, bactériologie, et pathologie...

M. CLOUTIER: Oui.

M. LETELLIER: ... l'échelle des salaires est de $12,000 à $22,000 ou quelque chose du genre.

M. CLOUTIER: $12,000 à $22,000, à comparer avec $8,000...

M. LETELLIER: Et il y a une autre différence aussi, c'est qu'ils sont sur une base unitaire et nous sommes à salaire. Nous n'avons aucune objection à être à salaire, mais nous voulons avoir des rémunérations quelque peu analogues avec ce que les médecins possèdent actuellement.

M. COLLARD: M. Letellier, si l'on parcourt votre mémoire, nous nous rendons compte que vous ne faites aucune mention de l'établissement du régime d'assurance-maladie. Est-ce que votre corporation a des objections à exprimer une opinion sur l'opportunité de l'établissement de ce régime et sur le champ d'application, couverture et modalités de l'administration?

M. LETELLIER: Non, au contraire, nous sommes très en faveur d'un plan d'assurance-santé et, évidemment, nous sommes en faveur avec certaines recommandations. Pour que nous puissions rendre des services dans un plan d'assurance-santé, il faudrait que nous ayons les armes nécessaires pour réaliser ce que nous pouvons faire. Alors, voici ce que les biochimistes peuvent faire dans un plan d'assurance-santé. Cela implique, si vous le voulez, l'ouverture bientôt des analyses gratuites dans les cliniques externes, comme ce sera le cas dans notre hôpital. Cela demande, à ce moment-là, un plus grand nombre de techniciennes pour répondre au nombre d'analyses accrues, qu'un tel plan demandera, et aussi, un système d'auto-mation, d'appareils qui existent déjà, que nous avons dans nos laboratoires — mais nous en aurons besoin en plus grande quantité — pour faire les analyses sur une base plus grande, il est assez difficile, actuellement, de trouver du

personnel qualifié, du côté des techniciennes, et il faudrait voir à la formation d'un plus grand nombre de ces techniciennes. Cela n'est pas seulement qu'en biochimie, évidement il y a les autres secteurs du laboratoire, mais dans tous les secteurs de laboratoire on manque actuellement de techniciens qualifiés. En plus, les appareils d'automation peuvent réaliser un très grand nombre d'analyses pour un coût minimum, et un exemple de ceci: Il y a sur le marché un appareil qui fait douze analyses sanguines simultanément et cet appareil, si l'on calcule le prix des réactifs, le prix des deux techniciennes qui le feront fonctionner et si l'on répartit le prix du coût de l'analyse sur une base de quatre ans à cent patients par jour, on s'aperçoit qu'il en coûterait pour analyser ces patients qui viendront aux cliniques externes, $1 par patient pour douze analyses plus, une analyse manuelle, une analyse d'urine, une analyse de routine. Je pense que cela revient à un prix très économique pour examiner ces gens-là.

M. COITEUX: Quelle est la durée moyenne de votre semaine de travail, actuellement, dans les hôpitaux?

M. LETELLIER: Excusez?

M. COITEUX: La durée, la longueur de votre semaine de travail, de six jours, de cinq jours?

M. LETELLIER: Nous sommes, sur appel, théoriquement, vingt-quatre heures par jour. S'il y a quelque chose qui cloche, le biochimiste doit se rapporter, voir à ce qui ne va pas au laboratoire d'urgence. La nuit, nous opérons un laboratoire d'urgence. Vous parlez du travail du biochimiste même? Alors, nous sommes responsables de tous les résultats qui sortent. Il se fait des analyses vingt-quatre heures par jour. Le gros du travail fait par les techniciennes se fait de huit heures du matin jusqu'à cinq heures de l'après-midi, mais là, le laboratoire d'urgence entre en cause et nous sommes appelés à répondre à ce service, à voir à ce que tout fonctionne vingt-quatre heures par jour, et à temps complet, cinq jours par semaine. Mais on est d'accord à ce que le plan devrait être porté à six jours complets, si vous le voulez, pour le travail des techniciennes, et, de toute façon, le dimanche, en ce qui concerne la plupart des hôpitaux, un très grand nombre d'analyses nous sont demandées.

M. COITEUX: Cela, je comprends qu'il faut que vous...

M. LETELLIER: Là, vous voulez dire, le temps...

M. COITEUX: A l'individu, par exemple, la moyenne de temps que vous donnez. Je comprends que le service doit être continu...

M. LETELLIER: Ah bon!

M. COITEUX: ... mais l'individu « X » par exemple, en moyenne, est-ce que vous pourriez..

M. LETELLIER: L'individu « X ».

M. COITEUX: ...nous donner, nous dire; « Eh bien, dans une semaine un biochimiste ordinaire donne quarante heures, ou quarante-cinq heures ? »„

M. LETELLIER: Oh, de quarante-cinq à cinquante heures, je dirais en moyenne.

M. TREPANIER: M. Letellier vous mentionnez que vous êtes environ 50 biochimistes pour 280 hôpitaux?

M. LETELLIER: Oui.

M. TREPANIER: Quelle mesure alors prennent les hôpitaux qui n'ont pas de biochimistes à leur emploi pour effectuer le travail qui normalement serait la responsabilité du biochimiste?

M. LETELLIER: Actuellement, ces hôpitaux essaient d'employer des techniciens pour compenser, mais si on s'en remet à un contrôle de la qualité qui a été établie ici à travers tout le Canada, en 1960, par le Dr Tonks, et que l'on analyse les résultats qui sont sortis de 170 laboratoires d'hôpitaux ou privés à travers le pays, pour un certain nombre d'analyses qui sont quand même considérées comme des analyses de routine, il y avait un très grand nombre de résultats erronés en dehors des limites permises, dans plusieurs de ces laboratoires qui, tout de même, avaient l'honnêteté de vouloir se faire contrôler par un tel système.

M. TREPANIER: La, vous parlez des laboratoires d'hôpitaux?

M. LETELLIER: Principalement, ces 170 laboratoires d'analyses-là, c'était des laboratoires d'hôpitaux, mais à travers tout le pays.

M. TREPANIER: Est-ce que les hôpitaux peuvent confier la charge de faire certaines

analyses à des laboratoires privés? Est-ce qu'il n'existe pas des laboratoires privés?

M. LETELLIER: Il y a des laboratoires privés, mais nous croyons que ces laboratoires privés devraient être sous la surveillance d'un chimiste.

M. TREPANIER: Vous n'avez pas de memabres de votre corporation?

M. LETELLIER: Il y a quelques membres de notre corporation qui sont à la tête de laboratoires privés, oui, qui s'occupent de laboratoires privés.

M. RENAUD: Est-ce qu'il y en a parmi ceux-là qui travaillent dans des hôpitaux et puis en même temps pour d'autres hôpitaux peuvent faire des travaux à leur bureau?

M. LETELLIER: Oui.

M. RENAUD: Alors, quand vous parlez du traitement, il se trouve à être augmenté; si vous travaillez pour d'autres hôpitaux en même temps.

M. LETELLIER: Ici, on ne travaille pas pour d'autres hôpitaux.

M. RENAUD: Ah, je comprends.

M. LETELLIER: J'ai pas le temps de travailler pour d'autres hôpitaux à l'hôpital où je suis.

M. KENNEDY: M. Letellier, pourriez-vous nous dire combien il y a environ de techniciens à travers la province qui remplissent les fonctions ou qui se substituent aux biochimistes dans les hôpitaux, pour les cliniques médicales, ces choses-là?

M. LETELLIER: Assez difficile à dire.

M. COLLARD: Approximativement, est-ce que vous avez un chiffre?

M. LETELLIER: Bien, évidemment, tous les hôpitaux ont des techniciens à leur emploi. Si vous voulez un exemple, j'ai été pendant plusieurs années dans un autre hôpital où je n'ai jamais pu avoir des techniciens diplômés. Il a fallu que je forme comme techniciens des gens qui avaient leur dixième, onzième année. Evidemment, ce n'est jamais aussi bon que des techniciens formés dans nos écoles de techno- logie, à l'université Laval, à l'université de Montréal. Alors c'était partout ainsi dans un hôpital de 360 lits et j'avais de la difficulté à obtenir des techniciens, donc il y a un assez grand manque de techniciens.

M. KENNEDY: Dr Letellier, vous avez mentionné aussi tantôt qu'à la suite d'une étude statistique, une certaine proportion des analyses qui avaient été effectuées par les techniciens étaient entachées d'erreurs. Sur quoi pouvez-vous vous baser pour déterminer que dans une analyse par exemple qui a été faite au cours de l'année, vous puissiez arriver et dire à un moment donné qu'il y a eu une erreur dans le résultat?

M. LETELLIER: Dans le contrôle de la qualité qui a été établi?

M. KENNEDY: ... dans le contrôle de la qualité, oui.

M. LETELLIER: Oui, si, justement, dans ces contrôles de qualité, il y avait sept ou huit analyses différentes demandées, et si plusieurs de ces analyses étaient erronnées — et quand je dis des valeurs erronées, ce sont des valeurs en dehors des limites permises pour que le résultat soit valable sous forme de diagnostic — c'est que les techniques employées n'avaient pas la précision voulue ou n'étaient pas employées adéquatement. Et, principalement, un des problèmes du biochimiste dans l'industrie et beaucoup d'hôpitaux, c'est qu'il y a souvent des techniciens qui ne connaissent pas la préparation des standards: de chacune de ces analyses-là. Lorsque l'on fait des analyses en laboratoire, il faut préparer des standards adéquats. Si, évidemment, nous donnons une série de résultats erronés, nous commes continuellement erronés. Nous avons maints et maints exemples des contrôles de la qualité. Je vous ai donné un exemple. Il y a beaucoup de publications là-dessus. Nous, les biochimistes, nous tendons à former de ces contrôles de la qualité justement pour améliorer les résultats obtenus dans les laboratoires de biochimie dans les hôpitaux. C'est ainsi dans tous les domaines.

M. KENNEDY: Les résultats dans cette enquête-là ont été obtenus en se basant sur la méthode employée plutôt que le résultat obtenu.

M. LETELLIER: Oui, mais, je comprends votre question. Ce qui a été envoyé, c'était des sérums standards connus. C'est-à-dire avec des

quantités ajoutées d'un produit, et il fallait retrouver la quantité ajoutée de ce produit-là.

M. KENNEDY: D'accord.

M. TREPANIER: M. Letellier, ce n'est pas en se basant sur les analyses déjà faites antérieurement que cette enquête-là a été faite, mais en envoyant...

M. LETELLIER: Des sérums de contrôle des quantités connues de produits. Et si l'on veut un exemple de ce qui s'était passé dans ces cas-là, il s'agissait d'une analyse sur une analyse de routine, le dosage du glucose, c'est-à-dire du sucre dans le sang. Pour ce contrôle-là, pour un échantillon donné, les gens auraient du trouver 130 par cent milligrammes, parce que c'était la quantité ajoutée, et on a eu des résultats allant de 50 à 300 par cent milligrammes.

Alors, pour vous montrer la marge d'erreurs fantastiques qui, dans certains cas, se glissaient, cela c'est des extrêmes, remarquez bien, il y a une forte proportion de laboratoires qui, dans cette enquête, a été faite sous forme anonyme. Mais nous les biochimistes, nous savons, que dans les hôpitaux, nous contrôlons très bien nos analyses justement par des standards que nous faisons, par des sérums de contrôle que nous achetons, qui ont été analysés dans de grands laboratoires avec précision, avant de sortir nos résultats.

M. RENAUD: Docteur, vous nous avez dit tout à l'heure, comment se compare les traitements des biochimistes avec les autres membres du laboratoire.

M. LETELLIER: Oui.

M. RENAUD: Comment se comparent les traitements des biochimistes avec ceux qui sont exclusivement dans l'industrie?

M. LETELLIER: Il n'y a pas beaucoup de biochimistes dans l'industrie, c'est surtout des chimistes organitiens ou des physicho-chimistes. Des biochimistes, ceux qui ont leur P.H.D., s'orientent en partie vers la recherche médicale à l'université ou le travail clinique dans les hôpitaux ou l'enseignement.

M. RENAUD: Dans les laboratoires privés?

M. LETELLIER: Dans les laboratoires, là il y a les laboratoires privés...

M. RENAUD: C'est l'industrie ça.

M. LETELLIER: Dans les laboratoires privés, mais il n'y a pas de salaire, c'est l'exception parmi nos membres et, deuxièmement, ils n'ont pas de salaire fixe pour leur entreprise et là je ne pourrais pas dire ce qu'ils font et ce qu'ils ne font pas. Ils ne sont jamais venus s'en vanter.

M. COLLARD: M. Letellier, dans vos recommandations numéro 3, vous mentionnez qu'il y a un manque de biochimistes actuellement...

M. LETELLIER: Oui.

M. COLLARD: Advenant l'établissement du régime, est-ce que cela nécessitera plus de biochimistes et, en surplus, vous mentionnez qu'il faut éviter que les biochimistes formés aux frais de la province quittent le Québec pour offrir leurs services à l'étranger. Est-ce qu'effectivement, depuis quelques années, les biochimistes quittent la province?

M. LETELLIER: Il y en a eu quelques-uns, mais ce n'est sûrement pas la majorité. C'est peut-être une question de sentiment qui nous retient dans notre belle province. C'est plus vrai du côté anglais, évidemment. Les Canadiens anglais ont plus tendance à s'exiler du côté des Etats-Unis où les salaires sont réellement supérieurs. Quant à nous, en général...

M. LE PRESIDENT: ... les salaires aux Etats-Unis sont supérieurs à ceux qu'on paie dans le Québec...

M. LETELLIER: Je pense bien que ce n'est pas seulement pour les biochimistes évidemment.

M. LE PRESIDENT: Je sais que les salaires aux Etats-Unis sont plus élevés. En ce qui concerne votre profession, est-ce qu'il y a un attrait particulier, est-ce que les salaires dépassent de beaucoup les salaires que vous avez mentionnés?

M. LETELLIER: Sûrement. Lorsque je suis allé me perfectionner aux Etats-Unis et qu'il a été question que je revienne par ici, on m'a offert là-bas évidemment de me garder et les salaires qu'on m'offrait étaient d'emblée supérieurs à ce que j'aurais pu obtenir, surtout à ce que je pouvais obtenir à ce moment-là, et même à ce que je pourrais obtenir actuellement ici.

M. LE PRESIDENT: Etes-vous capable de nous donner un chiffre, plutôt que de parler en

disant que c'est plus, que les salaires sont plus élevées?

M. LETELLIER: Toute comparaison gardée, disons qu'à l'époque, cela date de 1958 ça, les chiffres étaient plus différents qu'actuellement parce que c'était avant l'avènement de l'assurance-hospitalisation. Les salaires que j'ai pu avoir en venant ici étaient de l'ordre de $6,500 à $7,000. A ce moment-là, on m'avait offert une position à $12,000 aux Etats-Unis. C'est dans l'industrie, ce n'était pas dans les hôpitaux là-bas.

M. TARDIF: Vous dites qu'il yaune tendance vers la diminution du nombre des biochimistes. A quoi attribuez-vous cette tendance de la diminution?

M. LETELLIER: Une tendance qui s'est notée depuis quelques mois. Il y a quatre de nos membres qui ont laissé les hôpitaux pour diverses raisons. Le salaire est sûrement une des raisons et aussi la conception que, dans certains hôpitaux, pas dans tous, on se fait du biochimiste qui est encore considéré dans certains cas comme un super-technicien.

Ce n'est pas le cas dans beaucoup d'hôpitaux, surtout dans les grands hôpitaux, mais c'est le cas dans plusieurs hôpitaux.

M. RENAUD: Je comprends que ces gens-là vont continuer à exercer leur profession. Où vont-ils?

M. LETELLIER: Justement, il y en a un qui quitte l'hôpital pour s'en aller dans un laboratoire privé, un autre s'en va dans l'enseignement, et enfin, un troisième a quitté l'hôpital pour quelque chose de mieux pour lui, j'en suis persuadé, comme conseiller scientifique au gouvernement de Québec.

M. LE PRESIDENT: Quelqu'un a-t-il une autre question à poser à M. Letellier?

M. COLLARD: Dans votre revue « Le biochimiste », je note qu'il est fait mention du rôle du biochimiste d'hôpital. Et on souligne le rôle principal du biochimiste qui est celui de collaborer avec le clinicien aux diagnostics et parfois même au traitement des maladies. Qu'est-ce que vous entendez par là, par cette expression; aux traitements des maladies?

M. LETELLIER: Remarquez bien que l'article est écrit par le docteur Lucien Coutu, le doyen de la faculté de médecine, et non par un biochimiste, et ici, c'est plutôt une orientation du traitement, en ce sens que les résultats que nous donnons aux médecins vont leur permettre de préciser le traitement qu'ils doivent apporter à leur patient. Ce n'est pas d'une façon directe. Le biochimiste ne va pas au lit du patient discuter avec le médecin sur le cas en particulier. Ce sont nos résultats, et des résultats qui doivent être précis, qui permettent aux médecins de poser un diagnostic, premièrement, et aussi, les résultats vont orienter le traitement.

M. TREPANIER: M. Letellier, compte tenu du manque de biochimistes, auquel vous faites allusion à plusieurs endroits dans votre mémoire, est-ce qu'il serait réaliste d'exiger, conformément à votre recommandation numéro 1 que tous les hôpitaux de la province de Québec aient un biochimiste dans leur personnel?

M. LETELLIER: Dans tous les hôpitaux, entendons-nous, oui, mais pas nécessairement à plein temps. Ce peut être comme consultant. Il y a un manque de biochimistes, mais ce qu'il faudrait, ce serait nécessaire de voir "a la formation de biochimistes.

M. TREPANIER: Ce que je veux savoir, c'est s'il s'agit-là d'une recommandation que vous jugeriez devoir être appliquée immédiatement.

M. LETELLIER: Oui.

M. TREPANIER: Mais, en fait, c'est impossible.

M. LETELLIER: Il s'agirait de voir le plus tôt possible, à la formation d'hommes, de biochimistes, et aussi à les attirer vers les hôpitaux. On a donné des détails, de quelles façons vous pouvez les attirer vers les hôpitaux.

M. LE PRESIDENT: Quelqu'un a-t-il une autre question?

M. RAYMOND: Dr Letellier, quelle est la proportion de malades qu'un biochimiste peut satisfaire? Quand vous parlez d'un biochimiste par hôpital, pour revenir a la question de mon collègue...

M. LETELLIER: Bien voici, ça relève évidemment du nombre d'analyses qui sont faites, mais disons que, dans un hôpital de 500 lits, on devrait avoir au moins un biochimiste. Et même dans un hôpital, comme Notre-Dame, on a 1,000 lits, et on essaie d'en avoir un troisième. Nous

sommes seulement deux et nous sommes surmenés actuellement. Nous étions trois un bout de temps, lorsqu'un biochimiste-médecin est retourné dans l'enseignement à l'université. A deux nous n'arrivons pas à donner adéquatement les résultats qu'il faut pour les quelques 250 analyses différentes, parce que dans un laboratoire complet, les grands hôpitaux, on fait au moins 200 ou 250, c'est-à-dire, que l'on analyse 200 ou 250 produits différents, soit au niveau du sang, des urines, ou des autres liquides de l'organisme.

M. RAYMOND: Maintenant, les conditions de travail, croyez-vous que ç'a une certaine influence pour inciter les biochimistes à s'en aller aux Etats-Unis ou dans d'autres domaines?

M. LETELLIER: Dans d'autres domaines, plutôt qu'en dehors de la province. Parce que l'on tient à rester dans un milieu français en général. Maintenant, ça pourrait avoir un effet du côté des hôpitaux anglais. Peut-être que dans les hôpitaux anglais, les biochimistes anglais verront moins d'objection que nous, pourraient nous quitter pour aller soit dans les autres provinces, ou soit dans les Etats-Unis.

M. ROY: Dr Letellier, si, dans la province, on instaurait un régime d'assurance-maladie, croyez-vous qu'il y aurait nécessité d'augmenter le personnel professionnel dans les hôpitaux?

M. LETELLIER: Oui, sûrement. Et, tant du point de vue de la biochimie, que des autres points de vue, c'est sûr. Au point de vue de la biochimie, nous avons un tel plan et là-dessus, je puis me baser un peu sur ce qui va se produire chez nous prochainement, avec l'ouverture des cliniques externes où il va se faire des abalyses gratuites, probablement une partie. Il y a un début de votre plan d'assurance-santé.

Nous avons eu pour cela, ne subvention pour acheter un appareil d'automation — j'e nai parlé un peu tout à l'heure — qui peut faire douze analyses simultanément et qui va examiner ces gens-là pour un prix minimum. Maintenant, là où le biochimiste joue un très grand rôle, c'est que, contrairement au médecin qui, lui évidemment, fait son travail auprès du patient et a ses deux mains et examine le patient, le biochimiste, avec ces nouveaux appareils d'automation et aussi, les techniciennes ou techniciens qu'il peut avoir sous sa surveillance, il peut se multiplier pratiquement à l'infini. Ils vont faire un très grand nombre d'analyses quand même pour les patients, tout en étant seulement deux ou trois biochimistes.

M. ROY: L'augmentation de travail des professionnels dans les hôpitaux proviendrait de l'hospitalisation ou, surtout, des cliniques externes?

M. LETELLIER: Actuellement, tel que je le conçois du moins, tout d'abord il en manque déjà à l'intérieur même des hôpitaux, même dans les hôpitaux qui sont déjà organisés, — on pourrait citer des exemples ici, mais ce n'est pas l'endroit pour donner des noms — mais il y a de grands hôpitaux qui recherchent activement depuis quelques années un ou deux biochimistes, et qui n'en trouvent pas. Et ce n'est pas par mauvaise volonté, nous n'en avons pas à leur donner. On voudrait bien qu'il y ait de nos confrères qui s'orientent vers la biochimie. Maintenant, dans le contexte de l'assurance-maladie, je crois que les cliniques externes devraient donner la gratuité des examens. Et si c'est cela, justement ce qui sera en opération à l'Hôpital Notre-Dame — je peux bien donner le nom — Nous aurons cet appareil — nous allons pouvoir faire douze analyses de 150 ou 200 patients par jour au maximum. Alors, regardez le nombre d'analyses que pourrait faire un tel appareil qui demande par exemple, deux techniciennes de plus pour le faire fonctionner et, évidemment, un biochimiste pour la surveillance et l'étude des résultats dans leur ensemble. Maintenant, en plus, je pense que dans un plan d'assurance-santé, on vise aujourd'hui probablement à la médecine préventive. Le biochimiste, dans un plan de médecine préventive, peut faire beaucoup avec ce très grand nombre d'analyses à l'aide de statistiques et d'évolution des maladies.

M. MARLER: Y a-t-il d'autres questions à poser au Dr Letellier?

M. BOUDREAU: Connaissez-vous le nombre des étudiants en biochimie, actuellement?

M. LETELLIER: Il y en a, actuellement — je ne suis pas au courant à l'université de Laval — mais à l'université de Montréal, il y a quatre finissants au B.S.C., au Baccalauréat en biochimie, cela veut dire que ces gens-là ont trois, quatre années à faire, pour leur doctorat et, évidemment, je ne les ai pas rencontrés, mais il semble que ce soient des gens intéressés à se trouver des positions dans le domaine de recherches et l'enseignement à l'université ou dans les collèges, il n'y en a aucun, en tous les cas, qui soit venu se renseigner auprès d'un membre de notre corporation en disant: « Je serais intéressé après mon doctorat à m'orienter vers la chimie clinique »„ Il y en a seulement qu'un que je connais qui a fait sa maîtrise chez nous, qui pré-

pare son doctorat à l'université et nous fondions de grands espoirs sur lui, mais, parce que nous n'avons pas pu lui trouver les fonds nécessaires et que d'autres organismes ont pu le faire, il a accepté des bourses de ces gens-là et, par la suite, ira travailler pour eux. Alors, ç'en est un qui semblait intéressé mais, parce qu'il a besoin d'argent et est obligé d'étudier encore quelques années, et qu'on n'a pas pu lui fournir les bourses nécessaires, d'autres l'on fait et l'ont attiré vers eux.

M. MARLER: Est-ce que les membres du comité désirent poser d'autres questions à M. Letellier? Est-ce que veux qui vous accompagnent...

M. SOUCY: Monsieur le Président, j'aimerais peut-être attirer l'attention à la suite de ce qui vient d'être dit du manque de biochimistes dans notre province, étant donné qu'il y a environ une quarantaine de biochimistes actifs actuellement pour 280 hôpitaux et qu'il faut huit années de formation universitaire pour obtenir un tel candidat qualifié. On devrait encourager nos professionnels qui pratiquent la chimie actuellement, en reconsidérant le statut professionnel du biochimiste, particulièrement le traitement actuel et, surtout, son statut dans l'hôpital, qui permettrait à des chimistes professionnels de poursuivre leurs études et de s'orienter vers la pratique de la biochimie dans nos hôpitaux.

Et, considérant que le biochimiste saurait que, dans la plupart des hôpitaux, il serait considéré comme faisant partie du personnel médical, je crois qu'on encouragerait un grand nombre de chimistes professionnels à s'orienter vers la pratique de la chimie clinique dont actuellement nos hôpitaux ont un grand besoin et particulièrement avec la venue de l'assurance-santé et l'établissement des cliniques externes. Même l'automatisation, au lieu de diminuer le nombre de chimistes, je crois qu'elle va augmenter l'importance et la nécessité du biochimiste, parce que le grand nombre d'analyses qui pourrait être fait va exiger d'abord une initiation particulière du personnel technique et un contrôle plus rigoureux de tous ces examens qui seront faits en masse, pour assurer toujours une précision et une valeur à ces résultats qui devront servir aux renseignements de cliniques et au dépistage des risques de maladies chez nos concitoyens.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que les membres désirent poser des questions au docteur Soucy? Doctor Tonks, would you like to say a word to the committee?

MR. TONKS: Well, I have to speak in English. Perhaps I should say why I am on this committee. I am here to support the group in general as a member of the Council, also perhaps to represent the English speaking hospitals, also to voice approval of hospital insurance. Personally, I feel this is a good thing, also I think we are here in the interests of the patient and also the medical profession which we serve.

Why do we present a brief? In order to make this group, this committee, aware of ourselves as scientists and this group which is concerned with health insurance and the establishing of health insurance. I think that we are here to offer our services and we feel that if our recommendations are followed that our chemistry in hospitals can be improved. We feel that we can play a vital and essential part in any health insurance plan.

I think there is one need that perhaps has not been mentioned. Anyone who is financing such a scheme should be aware that a large hospital laboratory needs money for research as well as the facilities to run routine tests. This is something that has been neglected in these hospitals, until now. We must be able to keep up with advances, study new tests and apply them. And if we don't do this, then our profession and the service to the patient will fall behind. We must have libraries for example and we must keep up with the littérature we have to operate as scientists in this regard.

We are scientists, chemists, trained in production methods. I myself have had a great deal of experience in industrial work and I put this to good use in automation and in trying to increase the efficiency of our laboratories and we can do this as scientists. We have learned a great deal about the latest scientific equipment, we know how to use this and we can... we continually keep learning about this and apply this in our laboratories, when we can get this equipment.

We work by exact scientific methods. We feel that chemistry can only be performed by chemists or under the direct supervision of chimists. We feel that we are the only persons who are actually trained to run large biochemistry or clinical chemistry laboratories.

It takes for a large laboratory a P.H.D., plus five years of actual experience, in order to run one of these labs. Concerning finances,I would like to mention that the amount of money we actually handle is very large. We do in the Montreal General perhaps 300,000 tests a year, the value of each of these tests is $3 or more, this represents close to $1,000,000 of work, the amount of equipment we have is also large, perhaps it might represent $200,000. Our actual

budget for one of these labs is quite large and is a good part of a hospital budget, and I think that the committee should be aware of that.

MR. CHAIRMAN: Dr. Tonks, if there were such a thing as free medical care, using the word free in a very broad sense, would you anticipate that number of tests that the biochimist would be expected to do, would increase substantially?

DR. TONKS: Well, I think that the outpatient tests would certainly increase substantially. I think that as far as the hospital inpatient, this continually goes up, we are increasing by perhaps 30% a year, and...

MR. CHAIRMAN: I think this is the result perhaps of the advancement of the art rather than...

DR. TONKS: Well, this is true we introduce new tasks all the time. We are much better with automation now able to handle these things, so we don't really have to say: Well, we can't do these tests any longer. That is the simple routine ones with the more complicated ones we still have great difficulty in doing them in large enough number to really benefit the general population, I would think.

MR. CHAIRMAN: I take it from what you just said, that the increase is likely to come from the outdoor department rather as a result of making those tests free, then.

DR. TONKS: I certainly would expect an increase because of this. I think all hospitals have done a considerable amount of free work, but before hospital insurance was put in, they certainly but we would expect more patients to come in and I think the numbers of tests that would be ordered, would be increased and certainly would be more useful. I feel that not enough tests are ordered on patients, today. Perhaps the best areas that are covered now are in public inpatients, they do pretty well, the private inpatients, they do pretty well, the private inpatients have not done as well, because there just aren't that many interns or doctors, available in the hospitals to cover these or order these tests. The outpatients have not been coveredtoo well and I would expect increases in those areas.

M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'on désire poser des questions au docteur Tonks? Sinon, docteur Letellier, je veux remercier les biochimistes d'être venus ce matin et d'avoir présen- té leurs vues dans le mémoire dont vous avez donné un résumé ce matin et d'avoir répondu aux questions posées par les membres du comité.

M. LETELLIER: Je vous remercie tous également de nous avoir écoutés et soyez assurés que la Corporation des biochimistes sera toujours à votre disposition, dans l'organisation d'un plan d'assurance-santé, et tout ce que nous pourrons faire pour la santé du public, il nous fera plaisir de l'accomplir.

M. LE PRESIDENT: Alors le comité doit maintenant entendre le Collège des chiropraticiens de la province de Québec.

M. HOULE: Dr J. O. Edgard Houle, de Montréal, vice-Président du Collège des chiropraticiens de la province de Québec et directeur de la division de l'assurance-santé pour ledit collège.

M. LE PRESIDENT: Etes-vous seul ce matin?

M. HOULE; Non, j'ai avec moi les Drs Gilbert, de Trois-Rivières, Rivard de Québec, et Lacroix, aussi de Trois-Rivières, je crois.

M. LE PRESIDENT: Alors voulez-vous nous donner un résumé de votre mémoire?

M. HOULE: M. le Président du comité, distingués personnages qui forment ledit comité, messieurs de la presse, mademoiselle, je voudrais vous présenter, ce matin, notre mémoire sur l'assurance-santé. C'est un plaisir, vu qu'au collège, chez nous, il n'y a pas de problème, nous donnons notre adhésion sans réserve à un plan universel obligatoire et complet d'assurance-santé. Présenter la profession qui m'a élue vice-Président, ce serait à mon sens superflu, vu que dernièrement on a eu tellement d'enquêtes, de commissions. La commission Lacroix a siégé pendant quatre ans pour clarifier la profession, pour surveiller les praticiens de la profession, pour enfin fouiller le problème adéquatement.

Le mémoire que l'on présente ce matin, comporte neuf points particuliers. Puisque vous en avez eu une copie, si vous le permettez, pour ne pas changer la teneur de ces recommandations, j'aimerais, M. le Président, les lire textuellement. Le collège recommande l'adoption, sans délai, d'un plan d'assurance-santé qui soit universel, obligatoire et complet. Le collège recommande, en outre, pour rendre

complet un plan d'assurance-santé, l'inclusion des soins chiropratiques dans ce pain, afin d'éviter aux malades l'injustice de la double taxation et le collège recommande pour des raisons analogues l'inclusion des soins optométriques, psychologiques, dentaires, pharmaceutiques, etc.

Le collège, et cela depuis toujours, recommande la formation d'un organisme chargé de l'éducation de la masse sur les phases multiples et si importantes de l'hygiène naturelle et de la saine alimentation. Le collège recommande en outre l'adoption d'une régie provinciale des médicaments, et j'aimerais tantôt avec votre consentement élaborer sur ce point en particulier, pour éviter avec la venue de l'assurance-santé une spéculation abusive quant à ces produits vitaux. Le collège, en fonction de la stabilité et de la permanence d'un plan d'assurance-santé, recommande l'abolition et l'abolition formelle d'une provision d'adhésion facultative communément appelle « opting in » ou de rejet de participation des praticiens qui composent l'équipe moderne de santé dont parle M. Louis Laberge, le Président de la Fédération des travailleurs du Québec. Le collège recommande en outre le respect de l'acte professionnel codifié avec ses implications et ses mérites. Le collège recommande aux autorités de tracer Un plan d'assurance-santé conservant aux malades — c'est un point important — le droit sacré de recourir à la thérapeutique et au praticien de son choix. Le collège recommande en outre un financement obligatoire par l'individu, et cela par le truchement d'une prime, afin d'éviter au gouvernement des responsabilités financières devant déjà un budget trop considérable. Le collège, en dernier lieu, recommande, vu la complexité des multiples problèmes créés par cette mesure sociale, la formation d'une commission consultative, constituée d'un représentant de chacune des disciplines qui s'occupent de la santé physique, de même que des syndicats ouvriers capables de voir à la planification et à la recherche positive dans ces domaines.

Voilà les points fondamentaux élaborés par le Collège des chiropraticiens de la province de Québec. Alors, si vous me permettez, je suis à votre disposition pour toutes les questions qui se rapportent à ces neuf points-là.

M. COLLARD: Alors, M. Houle, je pose la première question. A la page 4, paragraphe 3. Est-ce que les honoraires trop élevés dont le mémoire fait mention, les honoraires sont dus aux médecins ou aux chiropraticiens?

M. HOULE: Cela c'est mignon comme question, sans commentaire.

Les honoraires considérables évidemment c'est toujours un sujet extrêmement délicat, parce que c'est un point chatouilleux des professionnels. On invoque toujours la sacro-sainte raison: c'est mon affaire, c'est notre affaire et c'est sacré.

Quand on a invoqué la remarque des honoraires un peu exagérés, on faisait allusion, non pas tellement au traitement du praticien de la santé, mais surtout et davantage à certaines multiplications de services que j'aimerais qualifier de non nécessaires. On voit, par exemple, à la suite d'une radiographie de 15 ou 20 clichés qui, à mon sens, sont nettement superflus et qui mettent la santé du patient en jeu. Et en plus, il faut quand même être logique. Lors de la présentation d'un mémoire que j'ai fait à Ottawa, devant la Conférence des soins de santé au Canada, j'ai eu l'honneur de parler avec M. Dalpé et M. Pépin, de la Confédération des syndicats nationaux. Et, si vous me le permettez, c'est un sujet que je n'aime pas tellement traiter parce que ce n'est pas le mien, mais si l'on fait un parallèle entre les émoluments d'un scientiste affecté aux recherches, ou travaillant dans un laboratoire pharmaceutique ou dans une maison de sciences, on voit que le type a fait des études avec un baccalaurait ès-science, une maîtrise et un doctorat qui le conduisent jusqu'à la trente-troisième année de sa vie sur les bancs de l'école, par contre, le médecin sortant de l'université, après quatre ou cinq ans d'études, reçoit immédiatement le titre de docteur en fait. Alors le problème foncier, c'est que, si l'on compare les émoluments de l'un et de l'autre, on voit que, foncièrement, il n'y a pas de rapport adéquat.

L'homme de science affecté, par exemple, au laboratoire Bell de recherches, touche $15,000 par année et puis malheureusement le toubib touche des émoluments de $30,000. Evidemment, je n'aime pas tellement m'engager dans un débat du genre, puisque cela donne à la conversation une allure par trop mercantiliste qui me déplaît énormément.

M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres questions?

M. BERTRAND: Docteur...

M. ASSELIN: M. Houle, à la page 9, une recommandation que vous venez de lire, au paragraphe h). Vous dites: Le conseil recommande un financement obligatoire par l'individu.

M. HOULE: Oui.

M. ASSELIN: Et cela par le truchement d'une prime, afin d'éviter au gouvernement des responsabilités financières grevant un budget déjà considérable. Est-ce que vous voulez dire par là, que le coût du système devrait être financé entièrement par l'individu, que vous excluriez des contributions des patrons et de l'Etat?

M. HOULE: Non, au contraire, monsieur. Je n'ai pas l'honneur de connaître votre nom. Mais si l'on se réfère à l'instauration du régime d'assurance-santé en Suède, en 1955, on verra qu'à ce moment-là, 44% des fonds provenaient de primes individuelles, 29% des fonds du gouvernement et 27% des fonds des employeurs.

M. ASSELIN: Alors, vous recommandez un système contributif.

M. HOULE: Contributif par primes, exactement

M. ASSELIN : Tripartite. Alors qu'est-ce que vous faites de la contribution de l'individu indigent, pauvre ou de moyens modestes? Est-ce que vous le dispensez de toute contribution?

M. HOULE: On doit quand même être humain, charitable. J'ai l'impression que c'est le devoir de chacun, par charité chrétienne, de pourvoir aux indigents. Et j'ai l'impression que le gouvernement actuel, de ce côté-là, a pris des dispositions qui sont logiques, qui sont extrêmement favorables, extrêmement bonnes et humaines.

M. ASSELIN: Maintenant, il y a une troisième catégorie d'assurés: le petit artisan, le cultivateur, etc, qui n'a pas de patron pour payer une contribution. Est-ce que vous lui laisseriez à sa charge le gros de la contribution ou l'équivalent de la contribution du patron et de l'employé à sa charge ou si vous répartiriez cela, si vous en mettriez une partie au compte de l'Etat?

M. HOULE: Pour ce qui est de l'individu à sa propre charge, j'ai l'impression nette que c'est souvent celui qui est le plus en moyen de payer les primes. Cela a l'air abusif. Peut-être que vous allez me dire; Eh bien, oui, mais le cultivateur a quand même des troubles financiers et de très grandes obligations. Il reste quand même qu'on peut avoir avec une compagnie — que ce soit de la Couronne ou une compagnie privée — une protection très adéquate pour aussi peu que $9 par mois. Alors, j'ai l'im- pression, encore une fois — et j'en ai parlé à ce moment-là dans le mémoire — que si chaque individu prenait ses responsabilités, c'est peut-être un problème de sociologie, à ce moment-là, mais que si chaque personne avait pris conscience — évidemment, j'exclus les indigents qui sont incapables d'en défrayer le coût actuellement — au lieu d'acheter une voiture, par exemple, si l'individu avait consenti d'abord et avant tout, par respect de ses obligations, à payer une prime d'assurance-maladie, peut-être que le problème ne serait pas si gigantesque actuellement. Et, c'est une considération peut-être un peu mineure, mais il reste quand même que c'est peut-être un danger, quand de viens plaider pas tellement en faveur des mesures radicales au niveau du social, si l'on veut, je veux tout simplement impliquer que si l'on promet trop, on en arrive à une situation où l'individu se balance de ses responsabilités, et puis laisse, comme on dit, avec une béate quiétude, ses responsabilités à l'Etat. Et c'est à mon sens, un danger. Du reste, on l'a souligné dans le mémoire.

M. ASSELIN: Une dernière question. Vous recommandez que — évidemment il y avait lieu de s'attendre à ça aussi — qu'un plan d'assurance-santé...

M. HOULE: Oui.

M. ASSELIN: ... utilise les services des chiropraticiens. J'imagine que tout cela présuppose qu'il y ait tout d'abord une loi pour reconnaître l'existence légale des chiropraticiens. Dans l'état actuel, est-ce que vous seriez d'avis que, même en l'absence d'une loi qui consacre l'existence légale, on inclue leurs services quand même?

M. HOULE: Si je me réfère au début du préambule, j'ai bien souligné que l'on avait tellement parlé de chiropratique, que l'on était actuellement en train de régler la question. Evidemment, je parle d'un plan d'assurance-santé avec des normes corporatives ou des normes de commission gouvernementale, ce qui donnerait une entière protection au public, et c'est ce que l'on cherche depuis 65 ans, mes prédécesseurs et moi. Il reste quand même une chose, et j'ai admiré votre question; le soin qu'on peut offrir aux malades est un soin unique et c'est tellement un soin unique, c'est un art tellement complexe, et de ça, après trois années et demie de recherches, le juge Lacroix a été formel, que seul le chiropraticien compétent peut administrer son art sans danger pour le public. Et

le juge Lacroix a même mentionné — et c'est un point extrêmement important — que même le médecin avec sa formation très adéquate, n'a pas la technique. C'est aussi illusoire que de penser que demain matin un chiropraticien puisse faire de la chirurgie. Mais, par contre, c'est aussi illusoire de penser qu'un chirurgien soit en mesure d'administrer la thérapeutique chiropratique. La thérapeutique chiropratique est une chose complexe qu'on doit laisser à des gens compétents, et les gens compétents ne le seront qu'en autant que l'Etat — et c'est là un point important — que l'Etat prendra ses responsabilités sans tergiversations. C'est un soin extrêmement valable, valide, qui non seulement a une très grande valeur thérapeutique, mais en plus une très grande valeur de prophylaxie. Ici, dans le mémoire, le Collège des chiropraticiens a élaboré qu'un plan d'assurance-santé doit être tracé parallèlement avec un plan radical de prévention, et que c'est illusoire de croire qu'on pourra arriver, avec les fonds, à faire un plan d'assurance-santé adéquat, si la prévention est laissée aux mains de tierces personnes, ou laissée à personne. L'assurance-santé présuppose d'abord un plan de prophylaxie, c'est évident.

M. BERTRAND: M. Hamel, voulez-vous me dire combien de membres appartiennent au collège?

M. HOULE: Erigé en compagnie en vertu de la troisième partie de la loi des compagnies, le collège évidemment n'a aucun droit légal. Donc, aucun droit d'autodiscipline, aucun droit de nettoyage, si vous me permettez le terme, aucun droit de légiférer intérieurement sur le comportement de ses membres. Un type peut être membre du bureau des chiropraticiens, peut avoir fait ses études convenablement avec tout ce que ça comporte — et on l'a demandé à plusieurs reprises, ici, à la Législature. On demande un baccalauréat ès-arts ou un baccalauréat ès-sciences, accompagné d'un cours de quatre années et une année d'internat. Ce qui se compare, non seulement avantageusement mais qui dépasse les prérogatives du biochimiste dont vous avez entendu, tout à l'heure, le réquisitoire. Face donc à de tels sacrifices, pour répondre à votre question, on a actuellement dans nos rangs au-delà de 230 membres.

M. BERTRAND: Bon. Vous dites que vous attendez la législation à la suite du rapport Lacroix.

M. HOULE: Exact.

M. BERTRAND: Et d'après ce qu'on voit, un bill gouvernemental sera déposé au cours des prochaines semaines qui devrait vous donner votre statut légal.

M. HOULE: Exact.

M. BERTRAND: Est-ce qu'il y a une autre association de chiropraticiens qui existe et qui a un certain nombre...

M. HOULE: A ma connaissance, non. Le collège des chiropraticiens de la province de Québec compte la très grande majorité des confrères de la province. A 1 'extérieur, évidemment, et c'est une raison pragmatique d'économique, certains membres n'ont pas cru bon de donner leur adhésion au mouvement ou à la corporation, pour être quand même logique, parce que supposément il y avait des sacrifices monétaires. Foncièrement, dans le collège actuellement, 240 membres environ.

M. BERTRAND: Quel est le pourcentage de vos membres qui sont localisés dans les quatre grandes villes de la province: Montréal, Québec, Sherbrooke, Trois-Rivières, incluant Laval, si vous voulez? Quel serait le nombre de ceux de votre collège qui opèrent dans les petites villes de province?

M. HOULE: J'oserais affirmer, vous me prenez au dépourvu, mais si je me réfère au bottin du collège, on est actuellement divisé en onze districts. Cela comporte un représentant de la profession au moins par ville de l'importance de celle de Ste-Thérèse. Il y en a au moins dans chacune de ces villes-là. En d'autres termes, la profession est répartie vraiment partout à travers la province. Et encore là, il y a un point. Vous m'ouvrez la porte, M. Bertrand. J'aimerais si vous me le permettez, glisser une parenthèse. Il semble — et c'est notre voeu le plus sincère — qu'on devrait avoir chez nous, dans notre province, une école structurée, digne de la science qu'on représente. A ce qu'il semble, cette école s'ouvrira prochainement avec la bonne collaboration de l'abbé Gilles Boulet du centre universitaire de l'université Laval, pardon, de l'Université de Trois-Rivières. A ce moment-là, vu la complexité de la thérapie et, surtout, vu la demande énorme par le peuple de la thérapeutique chiropratique, on va avoir un problème absolument extraordinaire pour administrer à la population les soins chiropratiques requis. Avec la passation d'une loi, j'ai l'impression qu'on devra ajouter pratiquement au-delà de 200 chi-

ropraticiens pour subvenir au besoin. J'insistais dans le mémoire sur un point: que l'Etat doit intervenir dans l'assurance-santé pour mettre chaque individu mieux à même de faire son travail, que cela soit d'ordre phychologique, psychique, intellectuel ou physique ou matériel. Plusieurs patients actuellement ne consultent pas les chiropraticiens, peut-être par crainte de trouver un indésirable, mais aussi et davantage pour des raisons strictement matérielles. Si, par exemple, vous consultez un représentant de la médecine allopathique, donc un médecin, vous avez évidemment le bénéfice des prestations d'assurance des compagnies privées ou des organismes gouvernementaux. Si vous allez consulter un représentant de la médecine chiropratique, à ce moment-là vous devrez défrayer les coûts à même vos fonds personnels. C'est peut-être l'entrave majeure, actuellement, à la dispensation des soins chiropratiques à la majorité de la population.

M. BERTRAND: Bon une question... juste pour finir. A la page neuf, vous suggérez l'adoption d'une régie provinciale des médicaments. Je comprends qu'à la base de la chiropratique, il y a une question de prévention et si quelqu'un vous fréquente d'une façon régulière pendant des années et des années, il va s'éliminer une longue série de troubles intestinaux, du foie, etc. parce qu'à la base de tout il y a la prévention.

M. HOULE: Exact.

M. BERTRAND: Autrement dit, quand vous soignez quelqu'un, contrairement par exemple au médecin, vous ne lui donnez jamais de prescription ou c'est dans des cas excessivement rares, parce que vous ne soignez pas pour recommander des médicaments et des prescriptions. Les médicaments chez vous n'existent pas, vous ne bourrez pas vos patients de pénicilline, d'aspirine, de bromo-quinine. Vous pratiquez votre art par les formules, les formules de l'art même, et les médicaments chez vous n'existent pas.

M. HOULE: Foncièrement, le collège représente l'essence de la profession et il n'a jamais été de notre recours, pour une raison ou pour une autre, de déplacer le médecin. On offre un service différent qui a une application dans une foule de maladies, qu'on aime à appeler maladies structurales ou vertébragéniques, mais par contre, en aucun temps, fait-on une substitution à la médecine, en d'autres termes, aucune fausse représentation.

Le patient qui s'adresse à moi — je me sens parfaitement à mon aise d'en parler — n'a jamais de moi, une bouteille de quoi que ce soit. Si nécessité il y a, le patient est dirigé vers le pharmacien ou encore chez le spécialiste qui en fait est le plus compétent dans le trouble qui m'échappe à ce moment-là pour une complication ou pour une maladie que je ne soigne pas. En d'autres termes, l'obstétrique à l'obstétricien, la dentisterie au dentiste, c'est évident.

M. RENAUD: Dans votre exposé, tout à l'heure, vous avez dit que vous vouliez élaborer davantage cette question d'une régie provinciale des médicaments.

M. HOULE: Bon qu'est-ce que c'est? C'est extrêmement gentil de me le rappeler. C'était un point que je voulais particulièrement toucher. La question médicamenteuse actuelle est d'une gravité sans précédent. J'ai, depuis sept ans, rédigé approximativement une cinquantaine d'articles, j'ai actuellement un livre en préparation dont le titre est le « Commerce pharmaceutique » qui traite, non pas en tant que pharmacien, mais en tant que praticien de la santé, des dangers extraordinaires que court la population par un manque d'une législation adéquate. Dans deux lettres adressées à M. René Lévesque, en date du 27 mars 1965, et dans une lettre adressée à M. Jean Lesage, le 12 novembre 1963, nous lui avions indiqué qu'il serait plus qu'opportun, avant même l'instauration de l'assurance-santé, de fouiller à fonds la question des médicaments. Peut-être un chiffre pour montrer l'envergure du problème pourrait suffire. Actuellement — et les chiffres sont récents puisqu'ils datent du congrès à Ottawa de l'Association des hôpitaux — les hôpitaux sont alarmés par un nombre considérable, soit 20% de leurs lits, qui sont occupés par des malades dont les maladies sont iatrogéniques. En d'autres termes des maladies qui sont des conséquences de médications qui sont colportées, si vous me permettez le terme, sans souci de l'altruisme et d'un peu de charité chrétienne.

J'aimerais donner deux exemples. Je ne sais pas si c'est hors d'ordre de le faire, mais j'aime à prendre des produits connus, Contac en particulier. A la liste des précautions, on dit carrément que le médicament peut causer du glaucome. Or, j'ai la mésaventure d'avoir eu une chirurgie qui n'a pas été un succès, dans un oeil, et, évidemment j'ai perdu un oeil. Alors, dans celui qui me reste, si on ne me dit pas à la télévision que c'est un médicament préjudi-

ciable, comment le commun des mortels va-t-il être protégé? Quand j'Invoque donc une régie provinciale et que le collège fait de même, c'est pour éviter les catastrophes dont vous avez été témoins depuis 4 ans. Et j'aimerais, si vous me le permettez, donner 4 exemples. On a eu en France le stalinon à la vitamine F, où l'on a eu à peu près 500 enfants décédés. On a connu la tragédie de la thalidomide qui se vendait sous 5 noms différents. La multiplicité, si on me permet le terme, des patentes où l'on avait le softenon, le parstelin, le distoval, le quévadon enfin, c'étaient des synonymes,, Et on l'a colporté, avant même d'être assuré des effets secondaires. On avait déjà préparé une campagne massive de vente. Or, si je représente la santé, moi, je suis à mon sens, en obligation morale de demander aux autorités gouvernementales de faire, d'abord et avant tout, un nettoyage. Nous, du Collège des chiropraticiens, on l'a invoqué quant à nous et, de grâce, le gouvernement se doit d'en faire autant dans l'industrie pharmaceutique. Un exemple encore, le parnate, qui était en fait, la conjugaison du parstelin et de la stélazine, on l'a vendu pendant je ne sais combien de temps. On l'a retiré du marché. Le mer-29, 30 capsules qui se vendaient $12, on l'a vendu pendant 2 ans et, alors que la littérature de Richardson-Merrill disait qu'après 3 années de recherches cliniques, le document avait été signé par 87 médecins allopathiques, on disait à ce moment-là, que le mer-29 était magnifique pour baisser le cholestérol hématique. Après 2 ans de vente, on le retire du marché. Ce sont des exemples — on pourrait les multiplier à l'infini — qui militent dans le sens, non seulement d'un bureau de régie mais, en plus, militent dans le sens d'un contrôle étatique au niveau de la production, de la mise en marché et de la distribution des médicaments. Est-ce que c'est logique, messieurs du comité, par exemple — et je donnerai 5 noms synonymes — de vendre le néopirine, fait par Burroughs & Wellcome, c'est exactement la même formule dans les 5 produits: ça contient 3 1/2 grains d'aspirine, 2 1/2 grains de phénacetine et 1/2 grain de caféine citrate. Est-ce que c'est normal que ça se vende sous 5 noms différents? Donc...

M. LE PRESIDENT: M. Houle, je ne veux pas vous interrompre, mais il me semble que nous sommes très loin du sujet qui occupe le comité, c'est la question de l'assurance-maladie. Nous n'avons pas le mandat d'étudier toute la question de la santé. Nous avons le mandat d'étudier un système d'assurance-santé, et de faire rapport à la Chambre. Je ne veux pas, pour un seul instant, nier... Ce que vous dites est intéressant, mais c'est très loin du sujet qui est le mandat du comité. Alors, je vous demande de bien vouloir retourner à la question de l'assurance-maladie, s'il vous plaît.

M. HOULE: Si vous me permettez, pour clore la remarque précitée...

M. RENAUD: Pour reprendre ma question... M. HOULE: Oui.

M. RENAUD: Vous recommandez une régie provinciale de médicaments, en rapport avec l'application d'un plan de système d'assurance-maladie?

M. HOULE: Exact.

M. RENAUD: Voulez-vous vous confiner à cette partie-là, comme suggère M. Marler?

M. HOULE: D'accord. Donc, ce qu'on aimerait voir, nous du collège, c'est un formulaire ou un registre des médicaments, non plus par leurs noms enregistrés en vertu de la loi des Trade Marks, si l'on veut, mais un formulaire de médicaments par leurs noms spécifiques, pour éviter, comme j'insistais tantôt — et je crains qu'on ne m'ait pas compris puisque je croyais le sujet extrêmement relié — pour éviter la multiplicité de termes synonymes, comme dans l'exemple de la thalidomide.

M. CLOUTIER: Cela serait une des fonctions de ce comité-là, mais quelle serait la composition de cet organisme ou de cette régie? Comment le voyez-vous, quels seraient les responsables, les corps, les structures...

M. HOULE: Des gens?

M. CLOUTIER: ... brièvement là.

M. HOULE: Oui, brièvement un resprésen-tant des gens connaissant la chose pharmaceutique, pharmaciens, médecins, biochimistes et surtout agences gouvernementales, donc un chimiste de l'Etat.

M. BARIBEAU: Dr Houle, à la page 3 de votre mémoire, au troisième alinéa, vous prétendez qu'une régie sévère s'impose, devant un mauvais état de santé de la population, surtout au Québec. Est-ce que le niveau de santé au Québec n'est pas aussi bon que dans toutes les autres provinces du Dominion?

M. HOULE: Je faisais référence à un texte dû à la plume de Guy Cormier, dans la Presse du 25 mars 1965, où il est dit, et je lis textuellement: « Bien entendu les comparaisons sont odieuses, la Saskatchewan a eu par exemple des démêlés avec les médecins, l'Alberta a acheté cette thèse, chez nous le nombre des chômeurs est élevé, la santé est assez médiocre, comme l'ont révélé les études préparatoires au régime provincial de retraite. Les médecins et l'équipement ne sont pas assez nombreux, autant de facteurs aggravants, »

Est-ce que cela répond à votre question?

M. BARIBEAU: Oui, je vous remercie mais seulement la même question a été posée ici et on a prétendu que le niveau de santé dans le Québec est aussi bon que dans n'importe quelle autre province du Dominion.

M. HOULE: A ce moment-là les statistiques pourraient être consultées, mais il faut voiries malades pour, je crois, être en mesure de faire une telle assertion. Moi, quant à ma spécialité, si vous me démangiez de faire un examen structural d'un patient, j'ai l'impression qu'au niveau de la structure, on fait pitié.

M. COITEUX (Duplessis): Dr Houle à la page 7, paragraphe 8, comme conclusion à votre huitième paragraphe, vous faîtes une distinction très précise entre honoraire et tarif. Pourriez-vous expliciter ce que vous entendez d'abord par honoraire et par tarif?

M. HOULE: Je vous remercie de me poser la question, je l'avais inscrite là et puis j'espérais que l'on ferait la remarque.

Si l'on codifie par exemple la prise de tension artérielle, la prise de température, un examen oculaire pour voir par exemple la couleur de la stérotique, si en d'autres termes on multiplie les actes professionnels, on va en arriver à une situation où le fond national ou enfin les primes ne pourront pas faire autrement que de monter. Prenez un patient par exemple qui consulte un praticien de la santé, il devra défrayer ou l'Etat devra défrayer, ou lui en partie et l'Etat aussi, un examen complet, c'est ce que je veux dire par honoraire; l'honoraire c'est — je n'aime pas employer le terme mais enfin — c'est la quantité de dollars qui correspond à l'ensemble du travail. En d'autres termes, pour un examen que je fais chez moi, si j'osculte le patient, si je prends la tension artérielle, si par exemple je vérifie les réflexes, à ce moment-là bien évidemment on peut monter des honoraires catastrophiques. Alors, c'est pour ça que je dis de ne pas attacher un tarif à chaque geste posé. Je pense que ce n'est pas clair.

M. COITEUX: Il y a certains articles dans la pratique de la profession médicale qui peuvent être facilement déterminés à l'acte médical, c'est assez difficile pour vous autres de déterminer l'acte médical, c'est un ensemble de traitements.

M. HOULE: Exactement.

M. COITEUX: C'est pour ça que vous préconisez le système honoraire qui comprend...

M. HOULE: Exact.

M. COITEUX: ... qui englobe un certain nombre d'examens.

M. HOULE: Exact. M. COITEUX: Merci.

M. TREPANIER: Dr Houle vous mentionnez à la page 6 de votre rapport, qu'un plan d'assurance-santé laissera entrevoir aux individus un accès par trop facile et pourrait entraîner l'inconcience, etc. Sur quoi vous basez-vous pour faire cette affirmation?

M. HOULE: Sur des arguments partagés par la majorité des gens, des praticiens de la santé. A cette même session, le collège des pharmaciens a présenté une recette qu'ils qualifiaient eux de frais dissuasifs.

C'est le danger du « over crowding », si l'on me permet le terme. Si, demain, par l'assurance-santé on donne accès aux malades à tous les soins chiropratiques, ce qui va arriver, c'est que ceux qui n'avaient pas osé consulter un chiropraticien pour des raisons financières puisque les primes ne reconnaissaient pas dans le Québec le dit service, vu qu'il n'y avaitpas de corporation, (je tiens à faire une parenthèse c'est que 788 compagnies d'assurance reconnaissent nos services) mais de toute façon, si demain on donnait accès aux bureaux chiropratiques dans la province de Québec, amendés ou scrutés à la suite de la loi ou des recommandations du rapport Lacroix, il reste quand même qu'on aurait un travail impensable où un homme ne pourrait pas suffire.

Un exemple, lundi j'ai commencé le bureau, si vous me permettez un peu de personhalisme à neuf heures et j'ai terminé à minuit vingt-cinq. Pour répondre à une question tantôt, combien d'heures passez-vous dans le bureau? C'est

cinq jours par semaine et aujourd'hui, je vous remercie, c'est un congé, mais de neuf heures à aller jusqu'à dix heures et demie en moyenne.

M. COLLARD: M. Houle, est-ce que vous avez l'impression que, dans le régime, si on incluait les soins chiropratiques, cela augmenterait le coût ou si les patients qui se feraient traiter par les chiropraticiens, diminueraient le coût de ceux qui se feraient traiter par les médecins?

M. HOULE: Je vais répondre brutalement à votre question par des points extrêmement précis. Le collège dans ses règlements a demandé que la visite professionnelle soit de $4 et que la première visite soitde $5 et, avec les patients que nous avons actuellement, c'est nettement suffisant. Je ne vois pas du tout pourquoi les honoraires augmenteraient, bien au contraire, j'ai l'impression que l'intervention de l'Etat dans les soins de santé, empêcherait peut-être des abus de la part des praticiens. Des visites à $25, vous avouerez avec moi que ce n'est pas tellement altruiste.

Il reste quand même une chose, cela a l'air malin à un moment donné de parler de chiffres à ce point-là, mais il reste quand même qu'on est d'abord et avant tout un service professionnel de santé et puis, notre profession, c'est ensuite un gagne-pain. Mais c'est d'abord une profession de santé. C'est malheureux mais on a l'impression que l'optique est un peu sans dessus dessous, le diamètre opposé prime.

M. CLOUTIER: Pour compléter la question de M. Trépanier tout à l'heure, les trois premiers termes, l'inconscience, l'imprudence et l'abus, s'expliquent assez bien. Mais vous en avez un quatrième, la témérité. Voulez-vous me dire, docteur, ce que vous voulez dire?

M. HOULE: La témérité évidemment, c'est le malin qui fait du cent milles à l'heure pour venir au parlement le matin. C'est le type qui, par exemple, ferait de l'escrime alors qu'il est aveugle partiellement, c'est le type par exemple, qui muni d'une jambe de bois, fait du ski, afin c'est rigolo, mais c'est ça l'idée.

On dit à une personne que l'alcoolisme, l'alcool nuit à la santé. Alors, le type s'empiffre avec les résultats qu'on connaît.

M. TREPANIER: Dans une recommandation, vous mentionnez que le régime devrait être obligatoire, (du moins c'est ce que j'en conclus) devrait être obligatoire pour tous les praticiens, c'est-à-dire obligatoire: participation pour les patients et aussi pour les praticiens. Sur quoi vous basez-vous pour faire cette recommandation?

M. HOULE: C'est une recommandation intra-professionnelle. J'ai employé le « opting in » et le « opting out » parce que cela a été la sémantique utilisée lors des congrès d'Ottawa, mais, quant à nous, sachant le nombre restreint des praticiens, quatre fois en fait la corporation des biochimistes, si on laissait le « opting in » et le « opting out » disons l'adhésion facultative comme 1' « exit » facultatif quoi, à ce moment-là on peut se demander: si le nombre de praticiens qui se rallieraient au plan provincial d'assurance-santé serait suffisant pour administrer à tous les malades, la thérapeutie-chiropratique. J'affirme très volontiers que cela ne le serait pas.

Or donc, quant à nous, peut-être que certains y verront de la malice, mais c'est fait strictement dans notre intention, ce n'est pas du tout non plus l'obligation de rendre obligatoire l'appartenance, si le collège des médecins ne veut pas.

Quant à nous, on y adhère comme on dit au début du mémoire. Cela nous fait peut-être des fois un peu mal au coeur, parce qu'on dit que c'est quand même beaucoup d'ouvrage qui s'ajoute, on devient inconsciemment un peu plus fonctionnaire, mais de toute façon, 1' « opting in » et 1' « opting out », quant à nous, cela n'existe pas.

M. CLOUTIER: Vous dites que vous seriez prêts à participer à un plan obligatoire, universel et complet.

M. HOULE: Oui.

M. CLOUTIER: Advenant le cas où l'Etat ne pourrait, tout de suite au départ, accepter ces trois qualificatifs au plan, où situez-vous votre profession dans les priorités?

M. HOULE: Je vous demanderais d'être assez aimable de bien vouloir reformuler votre question. Elle est un peu ambiguë', je la comprends mal.

M. CLOUTIER: Advenant le cas où l'Etat ne pourrait pas installer un système d'assurance-maladie universel et complet, disons qu'il faut procéder par étapes, à ce moment-là, où situez-vous votre profession dans les priorités? Quelle importance donnez-vous à votre profession pour l'intégrer dans le système d'assurance-maladie? Est-ce que les soins médicaux doivent avoir

priorité? Est-ce que d'autres professions paramédicales doivent avoir la priorité sur la chiropractie?

M. HOULE: Pour être conséquent avec ce que je viens de dire au début, oui. La médecine d'abord, puis ensuite, on intègre la chiropratique. Et, d'abord et avant tout aussi, une législation pour faire un peu,... enfin, disons trois points de suspension.

M. BERTRAND: Pignon sur rue.

M. LE PRESIDENT: Y a-t-il d'autres questions, messieurs?

M. DUPRE: M. Houle, vous avez parlé tout à l'heure, de votre association, de votre collège de quelque 200 membres, n'est-ce pas?

M. HOULE: Exact.

M. DUPRE: Je suis sûr qu'il y en a beaucoup plus que ça à Montréal. Maintenant, est-ce que à ce moment-là, vous pouvez faire une couverture à tous les... parce que je sais, pour en avoir rencontrés, qu'il y en a qui n'ont aucune formation, instruction avancée, disons le cours secondaire. Je sais qu'ils ont une espèce de cadre avec un certificat comme quoi ils sont chiro-praticiens; alors, est-ce qu'il y aurait moyen de nous faire, pour le comité, une différence entre eux ensuite, leur nombre surtout, parce qu'ils sont nombreux à Montréal.

M. HOULE: Est-ce que vous me permettez de prendre deux secondes? J'ai un document dont je voudrais vous faire part.

M. BERTRAND: M. Houle, pour compléter la question...

M. HOULE: Je vous en prie...

M. BERTRAND: Nécessairement, quand le bill sera adopté avec les normes que le gouvernement va y mettre, je comprends que les autres chiropraticiens, s'ils sont qualifiés, joindront le collège ou joindront l'organisme, c'est ça?

M. HOULE: Exactement. Alors voici. Relié étrangement à la question pharmaceutique que j'ai laissé tomber par obligation, je vous l'affirme, puisque — une petite paranthèse — le doyen même de la faculté de pharmacie considère qu'actuellement le plus gros trouble, c'est la pharmacie; mais, enfin, j'ai laissé tomber de bon gré. J'ai dernièrement correspondu avec l'American Council on Education, à 1785 Massachusetts Avenue, Washington, pour lui faire part — et ce sont des problèmes qui se greffent à tout le problème majeur, le Master Vue, par exemple. Il existe malheureusement aux Etats-Unis une foule d'institutions genre casier postal, où l'on vend des diplômes à n'importe qui, pour n'importe quoi, pour un prix ridiculement bas. Je m'en suis procuré un, je suis docteur en philosophie, ça me fait grand plaisir de vous le dire, ça m'a coûté $150. Mais, par contre, la catastrophe est la suivante: lorsqu'on se sert d'un casier postal pour faire de la fausse représentation, pour vendre une science jeune, mais qui a quand même raison d'être, et je crois que le rapport Lacroix, encore une fois, est clair et formel à ce point de vue là, qu'on achète des diplômes, par exemple, à l'American Institute of Sciences, qui est un titre ronflant... Un patient se présente chez un praticien de la chiropratique qui arbore un tel diplôme, ça inspire confiance, mais, malheureusement c'est un casier postal. Or, quand on insistait sur des normes légales pour faire un nettoyage, peut-être que ces faits-là échappaient au gouvernement. Mais, j'ai l'impression que maintenant ces points-là sont considérés. Même, si vous me le permettez, j'ajouterai ceci, qu'encore dernièrement — et la lettre est signée du 18 janvier 1966 — avec le même American Counsil on Education, je leur faisais part d'une compagnie au New Jersey qui porte le nom d'Aurea Publications, à partir d'un diplôme d'avocat, de docteur en médecine, d'herboriste, de chiro, d'ostéopate, ou n'importe quoi.

Mais par contre, avec une profession fermée, c'est évident que la fausse représentation n'est plus possible.

M. LE PRESIDENT: Y a-t-il d'autres questions que les membres du comité désirent poser à M. Houle? sinon, M. Houle, je vous remercie d'être venu, de votre mémoire, de la façon que vous avez répondu aux questions posées par les membres du comité. Le comité est ajourné à demain matin à dix heures et demie.

M. HOULE: Je vous remercie de votre bienveillante attention.

Séance du 31 mars

(Dix heures cinquante-quatre de l'avant-midi)

M. ROY (Président du comité de l'assurance-maladie): A l'ordre, messieurs. Je demanderais à M. Georges Filteau, directeur de l'Association des pharmaciens d'hôpitaux de la province de Québec, de présenter les gens qui l'accompagnent, et de donner un sommaire de son mémoire.

M. FILTEAU: M. le Président, messieurs les membres du comité, l'Association des pharmaciens d'hôpitaux de la province de Québec, m'a demandé d'être son porte-parole dans cette rencontre avec votre comité, ce matin.

Je suis assisté, à ma droite, de M. Ernest Bernier, Président du comité qui a préparé le mémoire; à ma gauche, de M. Pierre Deniger, Président de l'Association des pharmaciens d'hôpitaux de la province de Québec, qui a aussi participé à la préparation de ce mémoire, et de M. Denis Benoît, pharmacien de la ville de Québec.

M. le Président, si les assistés sociaux voient venir avec impatience l'avènement de l'assurance-santé, les pharmaciens d'hôpitaux la voient avec une certaine pointe d'appréhension. Ils craignent de voir de nouvelles charges leur être confiées et leurs responsabilités minimisées, car la profession de pharmacien est la plus mal comprise de toutes celles que l'on connaisse.

Nul ne songe qu'une erreur de diagnostic n'a en soi, aucune influence sur le cours de la maladie, tandis qu'une erreur de médicament peut avoir des conséquences désastreuses. Vous me répondrez sans doute que le pharmacien n'a qu'à s'en remettre au médecin pour le choix des médicaments, mais vous oubliriez alors que le pharmacien est coresponsable du médicament avec le médecin qui le prescrit et que si ce dernier prescrit un médicament nocif, le pharmacien l'endosse. Les poursuites intentées contre les pharmaciens, lors du désastre de la thalidomide, en sont la preuve. En toutes circonstances, le pharmacien reste responsable du médicament qu'il délivre. Ce qui rend sa situation encore plus tragique, c'est qu'il donne souvent des médicaments contraceptifs, avortifs ou capables de causer la mort, sans en connaître toutes les raisons. Si le traitement de la maladie n'est autre qu'une intoxication calculée, encore faut-il qu'elle soit bien calculée. Quand on pense aux erreurs de noms, d'orthographe, de posologie, d'imcompatibilité qui peuvent se glisser dans une ordon- nance, sans tenir compte des erreurs et des imprévus de la fabrication, on doit admettre que la somme des risques que le pharmacien d'hôpital doit éviter ne peut être compensée que par le bien qui en résulte pour le patient.

Aussi peut-on dire que la pharmacie d'hôpital est jusqu'à un certain point presqu'un sacerdoce. C'est un peu dans cet esprit que le mémoire de l'Association des pharmaciens d'hôpitaux du Québec a été préparé. Il revoit rapidement les étapes du développement de la pharmacie d'hôpital, avant l'assurance-hospitalisation et après l'assurance-hospitalisation, et prévoit les changements qu'elle peut subir en regard de la future assurance-santé.

Dans cette partie, le mémoire reconnaît que la distribution des médicaments peut être faite par le médecin, le pharmacien d'officine publique et la pharmacie d'hôpital. Mais dans un esprit réaliste, le pharmacien d'hôpital est forcé de constater que la pharmacie d'hôpital présente certains avantages qu'il nous fera plaisir de vous expliquer en détail, si vous le jugez nécessaire.

Ce mémoire constate que la pharmacie d'hôpital ne peut manquer d'être impliquée dans ce nouveau développement des services de bien-être et de santé de la province. C'est pourquoi, elle présente certaines recommandations pour rendre ce service plus efficace et plus économique.

M. le Président, nous sommes à votre disposition.

M. COLLARD: M. le Président, à la page 6, dernier paragraphe, il est fait mention de la liberté d'adhésion du médecin et du pharmacien à l'organisation des services d'assurance-santé. En quoi cela peut-il être un élément, une nécessité économique, M. Filteau?

M. FILTEAU: Nous avons basé cette assertion sur le fait que, dans le passé, l'assurance-hospitalisation a constaté que les services les plus économiques et les plus efficaces étaient fournis à l'hôpital. C'est pourquoi nous avons pensé que nous serions nécessairement impliqués et englobés dans ce nouveau développement des services de bien-être.

M. RENAUD: M. Filteau, dans la liste des recommandations, à la troisième, vous parlez des limitations du service pharmaceutique hospitalier aux patients vus et traités à l'hôpital. Qu'entendez-vous par limitation? Voulez-vous nous dire votre idée à ce sujet, s'il vous plaît?

M. FILTEAU: Ceci répond à la section 8 article 20 no 2 de la loi de pharmacies de la pro-

vince de Québec, qui exige que les personnes qui reçoivent des médicaments à l'hôpital doivent être des patients traités à l'hôpital.

Par conséquent, ceci veut dire que le pharmacien d'hôpital, dans ce contexte, ne pourra fournir de médicaments que sur réception d'une prescription d'un médecin pratiquant dans l'hôpital où il se trouve.

M. RENAUD: C'est la définition du mot limitation dans votre recommandation.

M. FILTEAU: Pardon?

M. RENAUD: La définition du mot limitation, c'est dans le sens que vous venez de l'indiquer.

M. FILTEAU: C'est dans le sens de cet article-là.

M. MARLER: M. Filteau, à la page 10 du mémoire, vous dites ceci: « Les services pharmaceutiques devront nécessairement, pour des raisons diverses, être assurés selon les exigences du Collège des pharmaciens de la province de Québec. » Est-ce que cela veut dire que vous pensez que, nécessairement, un plan d'assurance-santé doit couvrir les médicaments, que ce soit à l'hôpital, que ce soit en dehors de l'hôpital?

M. FILTEAU: Non, nous croyons plutôt que, s'il y a un service médicamentaire à l'hôpital, il devra être dans les cadres de la loi de pharmacie de la province de Québec, toujours en faisant allusion à cet article 20, paragraphe 2.

M. MARLER: Mais, M. Filteau, ce n'est pas la question que je vous posais. Actuellement, en vertu du plan d'assurance-hospitalisation, les produits pharmaceutiques donnés aux patients lorsqu'ils sont à l'intérieur de l'hôpital, sont payés par le gouvernement, n'est-ce pas?

M. FILTEAU: Oui, monsieur.

M. MARLER: Est-ce que vous préconisez, si nous avons un plan d'assurance-maladie, que lors de la consultation du médecin par quelqu'un du public, les médicaments fassent partie de la couverture donnée par ce plan d'assurance-maladie?

M. FILTEAU: Ceci n'est pas de notre juridiction. Nous croyons que ça devrait éventuellement faire partie de ce service, mais je ne pense pas que ce soit à nous d'en imposer la nécessité ou d'avoir une opinion là-dessus.

M. MARLER: Dans ma question, je me suis inspiré de ce que vous disiez à la page 10 de votre mémoire. Je voulais bien comprendre la pensée de votre organisation.

M. DENIGER: J'ai une réponse peut-être plus précise à votre question, si vous le permettez, M. Marler. On dit ici: « Les services pharmaceutiques devront nécessairement, pour des raisons diverses, être assurés selon les exigeances du Collège des pharmaciens de la province de Québec. » Alors, ce texte a été fait dans l'esprit suivant, c'est que, dans le contexte de l'assurance-hospitalisation, il ne faut pas se leurrer. Avant l'avènement de l'assurance-hospitalisation, on sait très bien qu'un très grand nombre d'hôpitaux n'avaient même pas de pharmacien, et on sait très bien tout de même comment ça se passait dans certaines pharmacies d'hôpital. L'assurance-hospitalisation a été instaurée, des normes ont été établies au point de vue de la pharmacie d'hôpital. Les normes prévoient, entre autres, que toute pharmacie d'hôpital, dans tout hôpital de 100 lits et plus, devrait avoir comme responsable du service de pharmacie, un pharmacien dûment en règle avec le Collège des pharmaciens. Alors, je pense bien que c'est l'esprit de ce texte. On dit que si, l'assurance-santé est établie, on devra se conformer aux exigences du Collège des pharmaciens de la province de Québec. Parce que la distribution des médicaments ne doit pas nécessairement être faite par n'importe qui, à l'échelle provinciale. Qui est le spécialiste du médicament et qui doit être le distributeur du médicament, si ce n'est le pharmacien? Dans certaines circonstances, on a prévu même le médecin. D'ailleurs — la loi du Collège des pharmaciens le prévoit — dans une localité où il n'y a pas de pharmacien, le médecin peut, en répondant aux exigences du Collège des pharmaciens, et en étant en règle avec le collège des pharmaciens, devenir dans ce cas-là, un distributeur des médicaments. Est-ce que ça répondrait, M. Marler, à votre question?

M. MARLER: Oui.

M. TREPANIER: A la page 6 de votre mémoire, vous mentionnez que l'organisation des services d'assurance-santé doit assurer, entre autres, la liberté de choix pour le patient, quant au pharmacien. Et vous dites, à la page 6, deuxièmement, « le libre choix de la phar-

macie; » vous énumérez a, b, c, et vous mentionnez à c, « la pharmacie d'hôpital. »

Est-ce qu'il y a possibilité à ce moment-là que le patient puisse choisir la pharmacie d'hôpital? Je veux dire, est-ce qu'un patient qui est à l'extérieur peut choisir d'aller chercher ses médicaments à la pharmacie d'hôpital ou encore est-ce qu'un patient qui est à l'hôpital pourrait aller chercher ses médicaments à l'extérieur, dans une autre phamacie? Que voulez-vous dire par là?

M. FILTEAU: Nous voulons laisser le libre choix total aux patients, mais nous sommes certains que la loi du moindre effort va jouer dans ce choix et qu'il prendra le médium le plus à sa portée pour obtenir le médicament. Dans ces conditions, la pharmacie d'hôpital est un des points de distribution de médicaments qui peuvent servir de sources d'approvisionnement pour le patient. Si, pour une raison ou pour une autre, dans un endroit où il n'y a pas de pharmacie d'hôpital, il y a une pharmacie publique, le patient pourra, à ce moment-là, aller à cette pharmacie publique et en obtenir ces médicaments, ce qui n'empêche pas non plus les pharmacies d'hôpital de rayonner à une distance assez grande autour de leur centre de distribution.

Il. TREPANIER: Mais la pharmacie d'hôpital n'est-elle pas plutôt à la disposition de l'hôpital...

M. FILTEAU: Evidemment..,,

M. TREPANIER: ... et que les patients eux-mêmes...

M. FILTEAU: ... en premier lieu, la pharmacie d'hôpital a été créée pour l'hôpital. Cependant, si nous sommes placés dans l'obligation de desservir — et nous avons été obligés de le faire dans le passé pour les indigents — les patients qui ne pouvaient pas se procurer les médicaments autrement, les communautés religieuses ont toujours fait preuve d'un très grand esprit de charité et elles ont toujours distribué gratuitement des médicaments à ces patients dans le besoin. M. le Président, M. Deniger a quelque chose à ajouter.

M. DENIGER: Me permettez-vous d'ajouter quelque chose? Disons donc que dans cette question aussi, il faut tenir compte des réalités, C'est en ce sens que l'on a prévu qu'il y a peut-être aussi — cela existe en fait, c'est réel — certains médicaments qui sont à titre d'expé- rimentation, ou sont rendus au stade d'expérimentation chez les humains, disons l'expression vraie: en essai clinique. Alors, si le médecin prescrit à un patient déterminé une médication qui est à l'heure actuelle à l'essai clinique, il est impossible de se procurer ce médicament dans les pharmacies de détail, dans les officines. Alors, c'est limité à la pharmacie d'hôpital. Des formules de contrôle sont même prévues pour cette classe donnée de médicaments. Maintenant, si vous tenez compte du contexte nord-américain dans lequel nous vivons, il y a énormément de patients qui favorisent beaucoup le pharmacien d'hôpital au point de vue de leurs prescriptions en ce sens que ce sont des gens qui y sont vus assez souvent, par exemple à l'Institut de cardiologie de Montréal. Vous avez quelqu'un qui est suivi par un cardiologue de l'Institut de cardiologie, alors il a tout une kyrielle d'examens, une ribambelle de processus à suivre. Il peut y avoir des soins spéciaux à lui donner, même en clinique externe comme patient ambulant, et puis il peut y avoir aussi certains médicaments très spéciaux que le patient ne pourrait se procurer qu'à la pharmacie de l'Institut de cardiologie ou d'un autre hôpital déterminé. Cela répond à votre question?

M. TREPANIER: Partiellement.

M. RENAUD: M. Filteau, j'en reviens à votre liste de recommandations. Vous dites, à la cinquième recommandation qu'advenant l'établissement d'un système d'assurance-maladie, il faudrait prévoir une période de temps maximum pour les différentes catégories pharmacologiques de médicaments à dispenser. J'aimerais bien que vous nous développiez ce point-là un peu, pour savoir de quelle façon ça peut se traduire ça.

M. FILTEAU: Ceci est une façon de déterminer le nombre de doses que nous devrions dispenser à un patient qui vient chercher ses médicaments à l'hôpital. Est-ce que nous devons lui fournir des médicaments pour une semaine, quinze jours, un mois? C'est pourquoi il faudra déterminer la période prévue par la médication, de façon que nous ayons des normes de format à distribuer pour ces patients de la clinique externe.

M. RENAUD: Cela ce serait indépendamment de la nature des médicaments, cela s'appliquerait pour tous les médicaments prescrits par les médecins, sauf que le médecin dirait pour telle période le médicament pourrait être fourni par l'assurance-maladie? C'est cela?

M. FILTEAU: Nous avons actuellement des normes qu'on appelle des prescriptions limitées ou du « stop-orders » qui prévoient qu'une médication ne devra pas être donnée pour plus quatre jours, une semaine, en général c'est de quatre à sept jours à l'hôpital. Certains médicaments, qui sont surtout des médicaments dangereux, sont ainsi revus périodiquement de façon à ce que le patient ne reçoive pas de doses dangereuses, nocives. Par conséquent, nous prévoyons que dans les mêmes services de distribution, il faudra y avoir des catégories de périodes prévues pour chaque catégorie de médicaments suivant sa toxicité.

M. DENIGER: Me permettez-vous d'ajouter quelque chose? Nous sommes partis du réel, de ce qui se fait actuellement dans le monde hospitalier avec l'expérience acquise, par l'assurance hospitalisation. Dans chaque hôpital, il y a une réglementation. On parle de catégories pharmacologiques. C'est édivent que les médicaments sont divisés en différentes catégories pharmacologiques. Il y a des médicaments qui sont plus dangereux les uns que les autres.

Alors, à l'intérieur même de nos hôpitaux, on a prévu que l'ordonnance du médecin doit être renouvelée même, pour certains de ces médicaments, à chaque 24 heures. D'autres médicaments comme les antibiotiques, doivent être limités à une période de trois jours. Si l'antibiotique n'est pas efficace au bout de trois jours, c'est évident, c'est officiel qu'on rend service au patient, au médecin aussi, en lui montrant que la médication est inefficace. Alors il faut donc qu'il refasse son opinion, qu'il prescrive un autre médicament.

Maintenant vous avez actuellement, ce qui se répand énormément dans la province, des cliniques externes au point de vue des hôpitaux psychiatriques. Les patients qui sortent des hôpitaux psychiatriques, qui sont vus aux cliniques externes de psychiatrie, reçoivent des médicaments et on doit prévoir aussi un arrêt automatique, c'est ce qu'on appelle dans le langage pharmaceutique le «stop-order » automatique ou l'arrêt automatique de l'ordonnance du médecin, suivant la catégorie de médicaments, pour que nos gens ne deviennent pas des habitués. De même vous avez la fameuse question des barbituriques entre autres, les pilules pour dormir, ces choses-là. On sait que ce sont des médicaments qui peuvent créer ce qu'on appelle l'accoutumance, l'habitude. C'est un rôle du pharmacien de protéger le public contre l'abus de médication.

M. RENAUD: Ce contrôle-là existe actuellement.

M. DENIGER: Ce contrôle-là existe actuellement à l'intérieur de l'hôpital, dans le contexte de l'assurance-hospitalisation par les normes qui sont établies.

M. RENAUD: Vous demandez que dans un... M. DENIGER: ... c'est une prévention.

M. RENAUD: ... système d'assurance-maladie que l'état de choses existant soit continué...

M. DENIGER: Je crois que l'expérience acquise devrait servir dans le contexte d'un plan d'assurance-santé qui serait généralisé. Il y a des choses qui sont très valables dans ce domaine-là qui devraient être appliquées, qui devraient devenir une loi générale. Le danger est qu'un médecin serait tenté pour un chronique de prescrire telle médication. Bien, mon Dieu, prescrivons-lui tel médicament pour six mois. Alors, il est peut-être bon que le patient soit revu, soit réévalué. On entend parler de plus en plus des effets secondaires des médicaments ou d'associations médicamenteuses qui sont dangereuses.

M. RENAUD: En tous les cas, est-ce qu'il faut comprendre qu'il y a actuellement un contrôle dans les hôpitaux et qu'en dehors des hôpitaux il n'y en a pas du tout?

M. DENIGER: Il y en a un qui est prévu actuellement par la loi. En ce sens que l'ordonnance du médecin ne peut pas être répétée, si le médecin n'a pas spécifié sur l'ordonnance: à répéter. Même la loi prévoit que si le médecin a marqué — c'est une nouvelle loi qui nous vient du département des aliments et drogues d'Ottawa qui a été faite pour le contrôle des médicaments narcotiques, ainsi que des barbituriques, cette fameuse question des goof-balls, entre autres, il y a toute une catégorie de médicaments qui est prévue — si le médecin marque d'une façon générale; à répéter, la loi prévoit que l'ordonnance pharmaceutique ne peut pas être répétée plus que trois fois, sans le consentement du médecin, et on doit tenir compte de la date et de la quantité que l'on donne à chaque répétition. Alors je vous parle tout de même de ce qui regarde la pharmacie d'officines.

M. RENAUD: Alors, le médecin a la responsabilité. Est-ce qu'advenant l'établissement d'un plan d'assurance-maladie, il faudra aller plus loin que cela pour la dispensation de ces médicaments, en dehors des hôpitaux?

M. DENIGER: Il faudra nécessairement,

pour certaines catégories pharmacologiques d'un médicament, prévoir que la médication ne peut pas être donnée aux patients pour plus qu'une certaine période. Alors, si le médecin le juge bon, après avoir revu son patient, refait un examen, une histoire de cas, de continuer la médication, il refait une nouvelle ordonnance. Mais une ordonnance pharmaceutique ne doit pas être quelque chose qui se répète ad vitam aeternam.

M. RENAUD: Est-ce que cela resterait toujours la responsabilité professionnelle du médecin?

M. DENIGER: Et aussi, du pharmacien d'ailleurs, qui est lié par la loi actuelle du département des aliments et drogues.

M. LE PRESIDENT: M. Deniger, pourriez-vous nous donner le nombre de pharmaciens qui font partie de l'Association des pharmaciens d'hôpitaux?

M. DENIGER: Je crois qu'actuellement, nous avons dans l'Association des pharmaciens d'hôpitaux 105 pharmaciens.

M. LE PRESIDENT: Sur un total d'hôpitaux de 280...

M. DENIGER: Si vous me le permettez, je crois que M. Bernier, qui a tous les chiffres, pourrait mieux répondre que moi à cette question.

M. BERNIER: Il y a 170 hôpitaux généraux, je crois, dans la province et il y a 109 hôpitaux ayant 100 lits et plus, et les recommandations qui sont faites pour les normes hospitalières, ce serait qu'il y ait un pharmacien par 100 lits d'hôpital. On a 109 hôpitaux ayant 100 lits et plus. A l'heure actuelle, on a 105 pharmaciens. Il y en a plusieurs en dehors de Québec et de Montréal. Il se trouve dans les hôpitaux régionaux, 25 pharmaciens. La différence des pharmaciens se trouverait à Québec et à Montréal. Il y a des régions, comme la Cote-Nord, où il n'y a pas de pharmacien du tout. Maintenant, s'il y a une pénurie de pharmaciens dans les hôpitaux, cela se rattache aussi aux rémunérations, aux salaires qui sont offerts aux pharmaciens d'hôpitaux, qui sont réellement très bas, puisque le pharmacien d'hôpital débute avec un salaire de $6,250. A ce salaire — par exemple, sur la Cote-Nord — on ne peut pas attirer un pharmacien en dehors des villes de Québec et de Montréal.

M. RENAUD: Il y en a 105? Combien y a-t-il de phamaciens dans la province de Québec?

M. FILTEAU: Il y a 1,700 pharmaciens dans la province.

M. RENAUD: Vous êtes 105 dans les hôpitaux?

M. FILTEAU: ... qui sont enregistrés comme pharmaciens directeurs d'un hôpital. Il y a beaucoup de pharmaciens qui ne sont pas enregistrés au collège et qui travaillent quand même dans un hôpital.

M. RENAUD: Et quand vous dites que cela en prend un par cent lits, cela prendrait combien de pharmaciens d'hôpitaux dans la province?

M. FILTEAU: Nous avons dans la province 109 hôpitaux qui ont plus de 100 lits, ce qui donne en tout 36,000 lits pour la province avec, dans les hôpitaux généraux, 26,950 lits — à peu près 27,000 lits — et 4,000 lits dans les hôpitaux publics pour malades chroniques. Ce qui fait en tout 31,000 lits. Ce qui voudrait dire 310 pharmaciens en tout.

M. LE PRESIDENT: Combien de pharmaciens en tout?

M. FILTEAU: 300. 31,083 lits divisés par cent, cela fait à peu près cela: 310 pharmaciens.

M. LE PRESIDENT: Dans la liste des recommandations à la première, vous parlez de rémunération à l'acte pharmaceutique. A quel montant établissez-vous le prix de cette rémunération?

M. FILTEAU: Il y a plusieurs théories sur cette rémunération professionnelle. Il est évident que la rémunération professionnelle au sens strict doit s'adresser à l'acte professionnel en ce qu'il a de plus pur, par conséquent, dans le sens où il inclut uniquement une responsabilité de délivrance d'un médicament suivant sa toxicité, suivant les dangers qu'il comporte.

Nous croyons qu'il y a trois catégories de toxicité dans les médications. Il y a les médicaments dont la toxité est considérée comme modérée et nous n'exigeons pas, par conséquent, une surveillance étroite de la part du médecin. C'est ce que l'on appelle les médicaments ordinaires. Il y a les médicaments « PR » qui exigent une prescription de la part du mé-

decin et qui, par conséquent, doivent recevoir une surveillance beaucoup plus étroite. Il y a enfin la médication contrôlée des narcotiques qui, elle, entraîne le danger de produire une habitude et qui, alors, devient un danger social et qui implique une responsabilité encore plus grande. Si l'on juge que, pour une médication ordinaire, nous pourrions mettre $0.50 pour la responsabilité de vérifier la prescription et tout, nous pourrions doubler et tripler pour les autres catégories. Enfin, nous pourrions prévoir un honoraire de $2, si la prescription est magistrale, c'est-à-dire, s'il faut que le pharmacien prépare les médications. Ceci ne tient pas compte évidemment du coût des médications, que nous considérons à part, et qui, alors, dépend tout simplement de l'arrangement avec les compagnies et qui peuvent être aussi accrus des coûts d'administration. Cela est un aspect de la rémunération professionnelle. Il y a un autre type de rémunération professionnelle qui a été suggéré par un économiste de Toronto, le docteur Fuller qui, lui, prévoit le coût de la médication d'un médicament courant qui s'établit autour de $1.80 pour une prescription courante, en moyenne, sur un grand nombre de prescriptions. Nous admettons que le coût du médicament s'élèverait autour de $1.80, que le coût de l'administration, de l'entreposage, de tout ce qu'il faut pour maintenir ce médicament en étalage, équivaudrait à peu près $1.20 et qu'il faudrait ajouter à cela une rémunération professionnelle qu'il calcule, lui, au total de $2 pour l'acte professionnel, quel qu'il soit, sans distinction.

M. BERTRAND: M. Filteau, page dix, dernier paragraphe. Je présume que la loi des pharmacies tend à assurer l'exclusivité de la vente des médicaments aux pharmaciens, avec l'exception dans les villes où il n'y a pas de pharmaciens. Est-ce que, d'après vous, cette loi, en général, est bien observée?

M. FILTEAU: Je suppose que vous vous demandez s'il y a encore des médecins qui vendent des médicaments, là où il y a des pharmaciens?

M. BERTRAND: Oui?

M. FILTEAU: Je suis obligé d'admettre que cela se fait couramment.

M. BERTRAND: D'autres questions, pendant que j'ai la parole. Est-ce que les pharmaciens dans les hôpitaux sont la propriété de l'hôpital même ou si l'hôpital, dans certains cas, accorde des concessions à des pharmaciens ou autres entreprises privées?

M. FILTEAU: En autant que mes connaissances me le permettent, je puis dire qu'il n'y a pas de tels arrangements, mais je pense que, dans Montréal, on a déjà mentionné que certaines concessions avaient été faites à des pharmaciens, mais dans des cas extrêmements exceptionnels, où l'on permettait, par exemple à un pharmacien d'avoir une certaine clinique externe, un certain dépôt de médicaments qui dépendrait uniquement de lui. Mais, là il faudrait faire enquête à savoir si c'est plutôt un arrangement avec une pharmacie de l'extérieur ou si c'est bien une allocation donnée à un pharmacien.

M. BERTRAND: Mais, habituellement, c'est la propriété de l'hôpital?

M. FILTEAU: Ah! tout appartient à l'hôpital.

M. BERTRAND: Et un pharmacien est engagé par l'hôpital pour...

M. FILTEAU: Oui.

M. BERTRAND: ... assurer le service des médicaments sur les prescriptions des médecins...

M. FILTEAU: Très bien... oui.

M. BERTRAND: ... selon les malades qui sont dans l'hôpital.

M. FILTEAU: Oui, monsieur.

M. BERTRAND: C'est cela, c'est essentiellement...

M. RENAUD: Je dois comprendre alors qu'au lieu d'être payés sur une base de salaire ou de traitement, dans les hôpitaux, vous demandez à être autonomes et à être payés à l'acte pharmaceutique. Est-ce cela que vous voulez dire?

M. FILTEAU: Nous trouvons, il nous semble logique, d'après le comité que a préparé ce mémoire, qu'à travail égal, les rémunérations soient de même nature.

M. DENIGER: Au sujet de la recommandation no 1, rémunération à l'acte pharmaceutique, il faut garder l'esprit dans lequel ce mémoire a été fait et présenté. Nous sommes des

pharmaciens d'hôpitaux et nous avons l'intention de demeurer des pharmaciens d'hôpitaux, mais on est parti de ce qui se faisait avant l'instauration de l'assurance-hospitalisation, ce qui se fait actuellement dans le contexte de l'assurance-hospitalisation, et ce qui pourrait peut-être nous arriver, à nous pharmaciens d'hôpitaux, dans l'établissement d'un plan d'assurance-santé. On part de ce principe, on est tout de même des pharmaciens à 100% autant qu'un pharmacien d'officine.

Si vous prévoyez, vous, messieurs, un plan de rémunération à l'acte pharmaceutique pour le pharmacien d'officine en prévision des économiquement faibles ou de l'établissement du plan de l'assurance-santé, si il y a une proportion de ces ordonnances pharmaceutiques qui devront être remplies à la pharmacie d'hôpital par le pharmacien hospitalier, le pharmacien hospitalier, dans ces conditions, reste un pharmacien à 100% comme le pharmacien d'officine et on vous donné la réponse à la page 16. On vous dit: Il ne saurait être question pour le pharmacien d'hôpital d'être rémunéré différemment des autres pharmaciens qui assureront les services pharmaceutiques; il devra toucher les mêmes honoraires professionnels inhérents à chaque ordonnance médicale qu'il aura à remplir. Je crois que vous avez la réponse à cette recommandation no 1.

M. BERTRAND: Merci. Très bien.

M. LE PRESIDENT: Vous avez d'autres questions, messieurs?

M. DUPRE: Monsieur Deniger, quand vous parlez de services pharmaceutiques, est-ce que vous parlez strictement d'ordonnances médicales?

M. DENIGER: Absolument.

M. DUPRE: Seulement d'ordonnances médicales?

M. DENIGER: Absolument.

M. DUPRE: C'est parce que, dans votre acte professionnel, vous pouvez aussi bien donner une boite d'aspirines.».

M. DENIGER: Non, tout de même, nous sommes des pharmaciens d'hôpitaux, alors on s'en tient à la pharmacie d'hôpital, la pharmacie d'hôpital c'est de la pharmacie à 100% quoi, ce sont strictement des médicaments.

M. DUPRE: D'accord, mais ce que je veux dire, c'est que chaque fois que vous faites votre acte professionnel, c'est par une ordonnance médicale, dans un hôpital.

M. DENIGER: Toujours.

M. DUPRE: Alors il y a une différence avec la pharmacie, tout de même.

M. DENIGER: Ah! bien oui. Je crois bien aussi que, dans l'établissement d'un plan d'assurance-santé, tout devra être sous l'ordonnance médicale, même pour le pharmacien de détail. Je ne verrais pas un plan d'assurance-santé où tout un chacun pourrait aller à la pharmacie, que ça soit la pharmacie d'hôpital ou la pharmacie de détail, s'acheter des médicaments patentés, si vous voulez, et que le gouvernement, dans sa bonté, dans sa générosité, paierait ces choses-là. Je ne crois pas.

M. ASSELIN: Monsieur Filteau, il y a plusieurs associations de pharmaciens, elles sont presque toutes venues devant le comité; il y a le pharmacien d'hôpital, il y a le pharmacien détaillant, il y a le pharmacien des centres médicaux. Est-ce que vous avez une espèce de trait-d'union entre toutes ces associations, sous l'égide du Collège des pharmaciens, pour travailler ensemble à étudier les problèmes communs à votre profession, surtout à l'occasion de l'instauration d'un plan d'assurance-maladie?

M. FILTEAU: Le seul organisme actuellement qui rejoint toutes ces associations, c'est le Collège des pharmaciens. Nous avons recommandé même à ce collège de s'adjoindre un comité consultatif qui permettrait d'avoir les vues de différents groupes de pression pharmaceutiques à l'intérieur de la profession, pour rejoindre les idées et les suggestions de ces gens-là. Malheureusement, à l'heure actuelle, le comité n'a pas encore été formé, que je sache.

M. ASSELIN: Je dis ça, parce que des mémoires nous ont été présentés par les associations de pharmaciens — j'en ai pas fait une analyse détaillée, maintenant — et nous constatons à premier abord qu'il y a peut-être des recommandations qui sont faites par vos différentes associations et qui vont en sens contraire les unes des autres.

C'est ce fait-là qui m'amène à poser la question à savoir si vous ne trouveriez pas avantage à coordonner vos différentes associations vers un but commun, M. Déniger.

M. DENIGER: Disons qu'à la base, je pense bien, tous les pharmaciens ont à coeur la revalorisation de la profession de pharmaciens. Nous, à titre de pharmaciens d'hôpitaux, nous avons certes une philosophie qui est différente, si vous voulez, de l'art et de l'exercice de la profession du pharmacien d'officine, mais de là à conclure que nous avons des divergences d'opinions qui sont tout à fait l'opposé, je ne le croirais pas. Le pharmacien d'officine est certainement le grand distributeur de médicaments pour le public, mais le pharmacien d'hôpital reste aussi un spécialiste du médicament. C'est un spécialiste d'ailleurs qui est très bien formé par des cours post-universitaires et tout ce que vous voudrez. Alors le mémoire vous a été présenté dans ce sens-là et non pas pour entrer en contradiction avec aucun autre mouvement de pharmaciens ni avec le Collège des pharmaciens, ni avec les pharmaciens détaillants qu'on appelle des pharmaciens d'officine. D'accord?

M. ASSELIN: C'est bien, merci.

M. LE PRESIDENT: Avez-vous d'autres questions, messieurs?

Je vous remercie M. Filteau d'avoir bien répondu aux questions qui vous ont été posées par les membres du comité.

M. FILTEAU: M. le Président, au nom de mes collègues, je tiens à vous remercier, M. le Président, de l'amabilité que vous nous avez manifestée, de la clarté de vos questions et des suggestions que vous nous avez laissé entrevoir.

M. LE PRESIDENT: Je demanderais à M. Keating, le Président de la succursale de Montréal de l'ordre des infirmières de Victoria de la province de Québec de bien vouloir présenter les gens qui le représente ainsi que de donner un sommaire du mémoire présenté au comité.

Je demanderais à M. Keating d'avancer auprès des micros.

MISS PETERS: Mr. Chairman, unfortunately Mr. George Keating was unavoidably detained in Montreal. Consequently it is my privilege, Sir, to introduce to you the members of the delegation representing the Victorian Order of Nurses for the Province of Quebec. I apologize for speaking in English, but my french accent is so atrocious that I am not going to subject you to listening to it.

I have with me, Sir, I am Miss Peters, the vice-president of the Victorian Order for the province of Quebec. I have with me Mr. Gib

Stewart, Q.C., the honorary secretary of the province of Quebec; Doctor Copping, who is the director of our Medical Advisory Committee; Doctor Gabriel Guay who is the Medical Director of the Home Care Plan in Hull, and Miss Alice Gage, who is the supervisor of V. O. N. in the Province of Quebec.

In presenting this brief to you, Sir, I wish to express to you our thanks and appreciation for your courtesy in accepting our brief and also in giving us this privilege of appearing before you, today.

Judging from press reports, we believe that most of the delegations who have appeared before you have suggested ways in which you could spend more money. We have, I hope, a rather refreshing difference. We would like to point out to you ways In which you can save a great deal of money. There are many, many patients who can be cared for and who are now being cared for because visiting nursing service is available at a saving to the Government of many thousands of dollards. And, in order to point this up a little more adequately, I would like, with your permission, Sir, to call upon Dr Copping, who would like to speak to our recommandation number 4, particularly with reference to and from the point of an attending physician at the Montreal General Hospital. Doctor Copping.

DR COPPING: M. le Président, je puis me faire comprendre en français, mais c'est jouai et c'est atroce. Je vous demande pardon, je regrette, mais je parlerai en anglais. C'est moins douleureux, je vous le promets.

The government hospital scheme in Montreal is working very well. We are all very pleased with it. There is only one thing wrong with it. The waiting list is too long, and the patients, the patients' family, the patients' friends — and I would remind you, gentlemen, that these people all vote — are very unhappy about the scheme. They say: It was not like this before the government took it, and look at it now. The hospital which I serve, Mr. President, has a waiting list regularly of one thousand or more people, and some of these are very sick. Now, Mr. President, why is there a waiting list of one thousand? Is there anything we can do about reducing the waiting list, and making your very splendid efforts in running the Hospital Scheme in Montreal, more acceptable, more happily acceptable to the voters of Montreal? I believe there is. What are the reasons for the long waiting lists? Well, there are many, Mr. president. But, one of the most important, is that, we the doctors, are unable to send patients home to convalescence as soon as we would like. There

are not enough convalescent hospital beds for those patients who still require some degree of nursing care, some degree of medical surveillance, but do not require the full power and force of an active hospital service. If we can reduce the length of time the individual patient stays in hospital, will that cut down the waiting list? It will, and I can prove it to you, Mr. Chairman. For reasons with which I shall not bore you, we were able in the hospital, the Montreal General Hospital where I work, to cut down the length of stay of our patients by one day for each patient, and during the year we were able to admit one thousand more patients than we had the year before, one thousand more patients, that is a big reduction on the waiting list. You, the Government, are constantly being asked to build more convalescent hospitals, more nursing homes, more hospitals and nursing homes for chronic sick patients. Now, I will not quarrel with that, but let me tell you, Gentlemen, that there are losts of convalescent beds in Montreal, lots of them, and they are not being used now, and they are good convalescent beds. They are convalescent beds that the patient would be very happy to go home to. Why? Because he is in his own home. That is the way his convalescent bed is. The bed is there now, it's got a roof over, it's got walls around it and it's warm, it is comfortable, and it is in the bosom of his family, au sein de sa famille.

Why not send him home there? It seems simple does it not? Well, we thought we would look into this and if you, gentlemen, cherchez dans votre mémoire, page 7, les numéros 24, 25 et 26. I would like to speak a little more in detail on those three sections. We thought: Can we not use all this great number of convalescent beds all over Montreal and take patients out of hospital earlier, put them in those beds so we can cut down the waiting list? So, we instituted what is now known as the liaison referai discharge system. Now that means this. We went to the Victoria Order of Nurses and we said: « Give us a nurse. We will put her in an office, we will give her a secretary and when a patient is over the acute sickness, the pneumonia is better, the appendix incision is healing, whatever it may be, and we think that the patient may go home but he has to be seen by a nurse for certain procedures to be carried out, he has to have a surveillance du médecin. We will send him home and we ask that girl to come to the ward and she meets with the doctor, she sees the patient, she sees the nurse, she sees the social workers, she sees all those people who have to deal with that patient and then, she goes back and she telephones the district in Montreal, where that patient lives and she says would you send a nurse to such and such a street at such a number tomorrow, there is a patient going home from the hospital and the doctor says he is to have this, this and this done, and we want a report three times a week ». The reports come through the liaison official and go back to the doctor. It is just like having the patient in the hospital bed, except he is in a convalescent bed and it has not cost the government anything, that bed was there to start with. Now, it makes sense, does it not? And he is « en famille », and that is a good thing. Now, this scheme works out very well. We wanted to find out how well it works out and we had a survey made. We have four hospitals in this scheme in Montreal and we took their figures for 1965, and some of these figures, I am sorry to say, gentlemen, are not in your « mémoire », because they have come to us since, since I heard I was going to have the happy privelege of appearing before this august body. I realized I must do more homework and I have done more homework, but we did not have time to get it into the mémoire, but we studied intensively the 3,000 patients or more who went home in 1965 under this referai system we have studied 200 from my own hospital very carefully and we have learned some very interesting things. We have not saved each of those patients one day in hospital. We have saved them an average of 40 days out of hospital. We have done that with 11 average, 11 visits of the Victoria Order of Nurses or « Société des infirmières visiteuses ». They are VON's opposite number. The doctors are pleased, the patients are pleased, the hospital is pleased and how pleased might the government be? Well, we have saved the government the need to have a 400 bed convalescent hospital in Montreal, because if you multiply the number of bed days by the number of patients and you multiply 400 by 365, it comes out to very closely the same thing. We have saved you 400 convalescent hospital beds, « cela coûte cher, mes amis, cela coûte environ $6 millions ». Now, if you can get interest on money at 5%, I cannot, perhaps you can, that is $300,000 a year interest and it costs about $1 million a year to run a 400 bed convalescent Hospital and do you know what it costs? Those nurses charge $4.18 a visit, as you will see from your mémoire.

The total cost was something like $150,000. Pour les quatre hôpitaux seulement. L'étude est faite sur 200 malades de mon hôpital, mais ces 3,000 malades qui ont été envoyés chez eux provenaient de quatre hôpitaux.

Now, we figure we are in a position to save the government a great deal of money. We are in a position to offer you convalescent beds

right away. But we have to have the Victorian Order of Nurses or la Société des Infirmières visiteuses, because we have to have someone to go to the homes.

MR. RENAUD: How many nurses in the two organisations?

MR. COPPING: 89 in V.O.N. and 58, 89 and 58. Now, Mr. Chairman, 1 am not a statistician, I am not a business man, I am not a mathematician, but I am a doctor. As a matter of fact I have been in practice for 30 years in Montreal. I maintained myself in practice, I am an Associate Professor of Medicine at McGill University, I am a Senior Physician of the Montreal General Hospital and I can assure you that on all three counts: a practical side from my practice, the academic side from my university appointment, the hospital side from my hospital appointment, this is a good thing. Patients are well looked after, patients get good medical and good surgical care under this scheme. Do I need to say further on the matter? It seems to me that we need this service, we need it very quickly.

I would make one point in closing, Mr. Chairman. I am not making a plea that you, the Government, take over the V.O.N. or that you take over the S.I.V., not at all. They don't want to be taken over, they want to remain indépendant. This work, these 3,000 patients looked after from these four hospitals and given convalescent care at home, were looked after by just about one fifth of the working capacity of the V.O.N. and the S.I.V. It's capable of great expansion, but they don't want you to take it all over. All they want to do is be sure that you will buy from them these services which we feel you need, which you are getting very reasonably in price.

MR. RENAUD: Are there any other organizations like this order and l'Association des Irfirmiêres visiteuses? Are they the only two in Montreal?

MR. COPPING: A mon sens je pense que non, je vais le demander à mes assistants.

MLLE PETERS: Il y a aussi les Petites soeurs de l'Assomption, monsieur.

MR. MARLER: Do you have great difficulty in recruting nurses for the V.O.N.? May I ask you that?

MISS PETERS: No, Sir, we don't have any trouble recruting nurses, we have considerable difficulty in retaining them for very long, but I think this is part of the problem of any organization employing women. Our turnover in staff is tremendous. You, gentlemen, know that there is a shortage of nurses, generally speaking, and where you have a visiting nurse, she may be handling 8 to 10 patients per day instead of perhaps only dealing with one if she is on private duty in a home.

Therefore, we have no trouble, Sir, in recruiting staff and I think we could increase our staff if we had the financial means available to do so.

MR. MARLER: Dr Copping, there are two other questions I wanted to ask. You spoke about the effect of this V.O.N. care on the average stay in the Montreal General. What is the average stay now in the hospital?

MR. COPPING: If's about 17 days, I would say.

MR. MARLER: Certainly not 17 days on an average.

MR. COPPING: I must confess that I didn't do my homework up to that point but I guess it's about that.

MR. MARLER: I will be shocked and I am sure you will be too, Doctor, if you go back to the hospital and tell them that their average is 17 days, because the provincial average is around ten.

MR. COPPING: If we are not up, we are not as good as the provincial average, Sir, I will be shocked beyond all belief.

MR. MARLER: I would be much surprised too. The other question I wanted to ask was this: One of the difficulties I see in connection with convalescent beds whether you have them in people's houses or whether you have an institution which is really a convalescence hospital, is the Doctor going to visit the patient in this period of convalescence as, what is the score?

MR. COPPING: Mr. Chairman, may I answer Mr. Marler through you, Sir? May I differ my answer to that question until my colleague speaks? I think he will deal with it very much better than I am prepared to deal. Insofar as my presentation is concerned, that depends entirely on the liaison between the V.O.N. who

sees the patient, the liaison officer in the hospital and the doctor. If it is felt necessary, a doctor can go out or the patient's own doctor can go and see them whatever arrangements have been done. But certainly, there is no reason why that patient should be denied the services of a doctor. As you will see from his presentation, and perhaps I might lead into that from now, Sir, I must ask your patience please, not to allow me to answer completely that question as he will do it very much better. But in conclusion, Sir, may I say that if you think this is a good thing, if you think with the very simple liaison device, which we have produced in these four hospitals on this experimental trial, if you think this is a good thing, I will ask you to listen to what my colleague, Dr Gabriel Guay, has to say to you about an experiment which he has been conducting on a smaller scale, but on a much more intensive approach, in Hull. We have seen a very small trial of this same system, as he is running, in Montreal and I can certify to you that it is amazingly effective.

M. GUAY: Je crois que depuis que vous siégez ici, vous avez entendu plusieurs organismes qui sont venus vous consulter et vous suggérer d'organiser les soins à domicile avec l'avènement de l'assurance-santé. Maintenant, je peux vous dire que j'ai un peu d'expérience dans ce domaine, étant donné que je suis directeur médical d'un service de soins dits organisés à domicile, qui est une petite variante de ce service, depuis octobre 1963 dans la ville de Hull. Comme vous le savez probablement, dans la ville de Hull, nous n'étions pas trop favorisés à cette période là, dans les 1960-61-62, nous n'avions aucun débouché pour nos malades chroniques. Donc, à ce moment-là, les différentes agences de santé et de bien-être de la ville de Hull se sont réunies afin d'essayer de solutionner le problème. On avait entendu dire qu'il y avait des subventions que nos bons gouvernements pouvaient mettre à la disposition de la population pour ses services. Nous avons donc, sous l'égide de l'Ordre des Infirmières de Victoria du district de Hull, organisé un programme qui s'appelle soins organisés à domicile des villes de Hull et Pointe-Gatineau. C'était un plan pilote de trois ans, et le premier qu'on appelle à base communautaire dans la province de Québec. Je dois dire qu'il existait déjà un service du même genre mais attaché à l'Hôpital Ste-Jeanne-d'Arc de Montréal depuis 1961. Maintenant, au début, nous nous sommes naturellement attaqués aux chroniques. Je suis en position pour en parler parce que je suis médecin pratiquant de la médecine généra- le dans la ville de Hull, je suis directeur du département de pratique générale à l'Hôpital Sacré-Coeur et je sais que les patients entraient là, disons — un exemple concret — avec une paralysie du côté gauche ou du côté droit. Le patient restait là des trois ou quatre mois parce qu'on ne pouvait pas franchement lui offrir grand chose d'abord au point de vue de la physiothérapie et de la réhabilitation.

C'était à peu près nul, malheureusement. Avec quelques pauvres soins, on réussissait à le faire tenir debout sur des béquilles, et après quatre mois, le patient retournait chez lui. Depuis l'avènement du service, un cas de ce genre peut passer deux semaines à l'hôpital ou trois semaines. Au moment où Il peut se nourir lui-même et voir un peu à sa propre hygiène, le malade est retourné chez lui. Maintenant, vous vous demandez peut être comment nous opérons ce service. Essentiellement, on donne les mêmes service que ceux que vous pouvez recevoir ordinairement à l'hôpital. Nous avons d'abord le service médical où le médecin traitant demeure le médecin du patient et c'est lui qui est, ni plus ni moins, la tête du patient. Les demandes d'admission au service sont faites par lui et ses ordres sont mis à exécution tels que demandés. Nous avons ensuite le service de nursing, qui nous est donné en grande partie par les infirmières du VON et aussi, dans quelques cas, par les Petites soeurs de l'Assomption, lesquelles nous ont rendu des services. Ceci est pour vous énumérer les services que nous pouvons donner à domicile et que vous avez dans les hôpitaux. Le troisième service que nous pouvons offrir, c'est le service social. Nous avons une travailleuse sociale qui, comme consultante, volt aux problèmes sociaux quotidiens de nos patients. Nous avons une physiothérapeute qui se rend aux maisons des malades pour leur faire faire des exercices, les faire marcher, les lever. Nous avons même à la maison, dans le moment, toute sorte d'appareils orthopédiques, comme ce que l'on appelle des « monkey bars », que vous voyez peut-être dans les hôpitaux déjà, des « walking frame », des affaires assez compliquées.

Le patient a essentiellement les mêmes services que s'il était à l'hôpital. Nous avons aussi un service d'aides domestiques, un atout très important dans un service comme celui-ci. Même c'est le plus gros article au point de vue budgétaire. Nous avons, jusqu'ici eu un budget de $50,000 par année, et cette année, l'article des aides-ménagères se chiffre à près de $10,000. Mettez-vous un peu dans l'ambiance du problème de la mère de famille qui a une maladie quelconque, et qui peut être soignée à

la maison. Si nous l'envoyons à la maison avec cinq ou six petits, c'est assez difficile; par contre, si nous pouvons lui offrir de l'aide pour préparer les repas, faire les emplettes, changer les couches, etc..., la mere peut toujours être là et, comme on dit, donner les ordres de son lit. Nous avons ensuite un service de prescriptions pharmaceutiques. Dans plusieurs cas, nous payons les prescriptions pharmaceutiques pour les indigents médicaux. Nous avons aussi un service d'analyses de laboratoire et de radiologie. Si le patient a besoin d'une prise de sang, plutôt que d'aller à l'hôpital, nous avons un technicien qui va chercher le sang à la maison. Pour les rayons-X, nous pouvons toujours transporter le malade à l'hôpital, soit en ambulance ou en taxi, selon le cas. Un service d'infirmiers. Si le bon vieux a besoin d'un cathéter, nous appelons un infirmier qui va à la maison installer le cathéter. Ce qui veut dire que tout ce à quoi vous pouvez vous attendre de recevoir à l'hôpital, nous pouvons vous le donner à la maison. Mais il faut bien s'entendre. Les services de soins organisés à domicile ne remplacent pas l'hôpital. Ceci est pour un certain pourcentage de malades qui réellement ne devraient pas être à l'hôpital, ils devraient être à domicile. Dans nos statistiques, vous verrez que, depuis le début du plan, nous avons admis au-delà de 275 malades. Nos statistiques ne sont pas à l'avant-dernière page, mais à la troisième page de la fin des statistiques de mon service de Hull. Ce sont des statistiques que nous avons prises pour l'année 1965, parce que notre année fiscale va de mars à mars, mais pour le mémoire, nous avons pensé vous présenter une année de janvier à décembre. Vous pouvez voir que nous avons admis 166 malades en 1965 et, ce qui est intéressant, c'est de voir que sur les 166, il y en avait 80 qui étaient allés à l'hôpital auparavant, alors que 86 n'ont pas eu besoin de se présenter à l'hôpital auparavant. C'est un peu l'avantage d'un plan comme le nôtre, à base communautaire, sur un plan hospitalier,comme il y a à Ste-Jeanne d'Arc. Nous ne pouvons pas dire que ce n'est pas un bon plan, c'est un plan très efficace, mais à base hospitalière. Ils n'acceptent que des malades qui sont hospitalisés d'abord. Ce qui veut dire que nous avons évité en 1965 l'hospitalisation de 86 malades et nous avons écourté le séjour de 80 malades à l'hôpital. Je vous ai dit que au début nous nous étions attaqués aux malades chroniques. Maintement, il y a tellement de possibilités avec ce service que nous admettons des enfants de zéro à quatorze ans.

Nous avons eu 53 malades de 15 à 44 ans. Dans les services — c'est un peu de quoi nous avons parlé — vous avez des statistiques. Ce qui est intéressant, c'est le coût de toute cette entreprise. Ici on a comme coût par jour $4.66; cela peut varier de $4 à $6. Je pense que le prix accepté aux Etats-Unis et dans les plans existants au Canada, est d'environ $6 par jour, à comparer à un per diem dans les hôpitaux qui peut varier de $25 à $35.

M. RENAUD: Est-ce que ça comprend l'aide-domestique aussi?

M. GUAY: Cela comprend tout, oui. Cela comprend même l'administration qui est un tiers de l'ensemble, sur $50,000. J'ai calculé ça, juste pour nos salaires et le salaire de l'infirmière en charge, le loyer, le téléphone; ça comprend un tiers des $50,000. Ce qui veut dire que l'on pourrait agrandir les cadres sans tellement augmenter le coût. On aurait le même personnel, je serais encore le même directeur, la même infirmière coordinatrice qui est en charge du plan, le même loyer, le même téléphone, etc.

M. COITEUX (Duplessis): Docteur, est-ce qu'au cours de cette expérience-là, les écots étaient payés par l'hôpital ou bien si c'était un fonds spécial?

M. GUAY: Nous avions un budget du gouvernement...

M. COITEUX: Ah! du gouvernement.

M. RENAUD: Maintenant comment est-ce que ça origine? Pour commencer à vous occuper d'un malade à domicile, comment cela se passe-t-il?

M. GUAY: On exige une demande du médecin. Disons que le docteur Untel a un malade et juge que ce malade serait un candidat pour les soins à domicile. Il remplit une formule d'admission, un peu comme on fait pour le rentrer à l'hôpital. On a des dossiers d'hôpitaux, la même chose que l'hôpital; pour tous les malades, on a tous les dossiers avec l'histoire de cas, la demande d'admission, les observations d'infirmières, les rapports de laboratoire, rapport de rayon-X, tout ce que vous trouvez sur un dossier d'hôpital.

Maintenant ce sur quoi j'aimerais attirer votre attention, c'est que nous avons commencé avec les malades chroniques, et je vous ai dit que nous avons toujours des possibilités dans ce domaine. On prend des cas plus aigus. Cela va peut-être vous bouleverser un peu, maintenant, à Hull, on fait des cas d'hernies. Si vous avez une hernie et que vous devez être opéré; votre

médecin traitant, votre chirurgien, va vous dire que ça peut prendre trois ou quatre mois avant que l'on puisse avoir un lit pour vous. Nous autres, on a contourné cela, on peut le faire comme externes. Le malade va voir son chirurgien, on nous avertit: « Dans trois, quatre jours j'opère monsieur Untel pour une hernie ». Nous visitons à la maison, le malade se rend à l'hopital la veille, au laboratoire, pour ses analyses d'usage, et, la journée de l'opération, à huit heures il se rend à l'hôpital, il est opéré de bonne heure, huit heures, huit heures et demi. A sept heures le soir une ambulance est là, ramène mon bonhomme chez lui, la garde-malade est là pour le visiter. C'est formidable les réactions que l'on a eues des malades! Imaginez-vous, là, le temps, l'argent que l'on sauve! Cela passe pour une journée d'hospitalisation sur l'assurance-hospitalisation, (parce qu'il faut que quelqu'un défraie le coût) mais c'est une journée au lieu d'une semaine. Ainsi, on peut étirer ça à d'autres maladies.

M. TARDIF: Est-ce que les malades en général préfèrent ce service-là à l'hospitalisation?

M. GUAY: Si ce sont des cas que l'on peut soigner à la maison, oui; je dois même dire qu'une thèse qui a été écrite par un M. Vandette de l'école des sciences politiques de Montréal, intitulée « Les Canadiens français aiment-ils les soins à domicile ?» Il a étudié neuf plans et le plan de Sainte-Jeanne-d'Arc, et franchement les réponses ont été renversantes. Il y a peut-être un ou deux patients sur le groupe — il y en a toujours qui sont dissidents — qui ont dit qu'ils n'aimaient pas ça. Mais la plupart, même les médecins, sont satisfaits. J'ai été surpris. Dans la ville de Hull, on a envoyé des questionnaires à 17 médecins qui soignaient, dans ce temps-là, des patients sur le plan. Moi, j'ai dit à l'enquêteur; « Tu sais bien que les médecins ne répondront pas à ça. On a assez de paperasses. Fais ce que tu veux, mais, j'ai dit; prends une chance. Il a dit: Je vais prendre une chance ». Sur dix-sept, il y en a quatorze qui ont répondu. Treize aimaient les soins à domiciles, il y en a un qui a dit qu'il n'aimait pas ça, qu'il aimait mieux avoir ses patients à l'hôpital; mais, c'est toujours un peu plus facile d'avoir tous ses malades à l'hôpital et les visiter là.

Maintenant, est-ce que je peux répondre à la question de M. Marler, de tantôt: si c'est un problème pour les médecins de visiter leurs malades à domicile? Pour ce qui regarde les omnipraticiens dans la ville de Hull, ce n'est pas un problème, parce que c'est dans notre routine de faire des visites à domicile. Pour ce qui regarde les spécialistes, dans un cas de spécialité pure, tel un cas d'orthopédie, de fracture, nous laissons le patient au nom de l'orthopédiste. L'orthopédiste ne va pas à la maison, mais au besoin, on le ramène soit à son bureau soit à l'hôpital pour qu'il le voie. Cela contourne le problème et les spécialistes ne se plaignent pas de cet état de choses.

M. MARLER: Docteur, je voudrais poser deux autres questions, premièrement, combien avez-vous d'infirmières à votre service à Hull?

M. GUAY: Dans le moment ça varie; je pense quatre, cinq; plutôt six, je crois...

M. MARLER: Et il y a combien d'hôpitaux à Hull actuellement?

M. GUAY: Un hôpital général, l'hôpital Sacré- Coeur, qui a 350 lits. On s'occupe des malades chroniques. On sauve beaucoup de journées d'hospitalisation pour ce groupe de malades.

Comme vous savez, le sanatorium recevait les tuberculeux et quand la tuberculose fut à la baisse, on y admit quelques malades chroniques. Maintenant, on a la fameuse pieta qui ouvre et, par contre, le sanatorium devient un hôpital psychiatrique. Mont-St-Jude a été ouvert, je crois, il y a à peu près un an. Deux mois après, c'était plein à craquer.

Les patients attendent pour entrer. Ce qui arrive souvent, c'est qu'on attrape des patients qui sont congédiés de l'hôpital et qui attendent leur admission soit à St-Jude, ou dans un hôpital chronique. Eventuellement on nous les réfère, la famille n'est pas contente au début; mais une fois qu'on leur a expliqué le plan, puis qu'ils ont eu le malade chez eux pendant deux ou trois jours, ils nous disent: « Laissez donc faire St-Jude, on va le garder à la maison. » Même ce qui est drôle, c'est que nous avons eu des patients sur notre plan, éventuellement leur place étant prête à St-Jude, (c'est le seul qu'il y ait dans le moment) ils y sont allés, ils sont restés deux ou trois jours, puis ils ont dit: « Non, non, moi je m'en retourne à la maison, j'aime bien mieux être à la maison. D'abord on mange bien mieux, on est chauffé...»

M. TARDIF: J'imagine que vous avez une bonne liste d'attente là-dedans? Est-ce que vous êtes en mesure d'accepter toutes les demandes raisonnables?

M. GUAY: Malheureusement, on a encore des

listes d'attente. Ce qui arrive, cette année, je suis là comme administrateur, je ne m'y connais" pas tellement. J'ai $50,000, puis là je pense, cette année qu'on va avoir environ de $49,000, $50,000. Alors, moi, je ne peux pas dépenser plus d'argent que j'en ai. Je pense bien que si on donnait $25,000 on pourrait peut-être admettre 500 patients. Là, on la baisserait la liste d'attente.

M. MARLER: Docteur, la deuxième question que je voudrais vous poser avait trait aux dépenses. Est-ce que, les frais que vous faites pour le service à domicile, ne sont pas compris dans le plan d'assurance-hospitalisation?

M. GUAY: Non, dans le moment nous n'avons aucune...

M. MARLER: Cela fait l'objet de subventions spécifiques.

M. GUAY: Spéciales, oui. C'est une entente fédérale-provinciale. C'est avec le docteur Lizotte que je corresponds habituellement.

M. COLLARD: Docteur, est-ce que l'expérience qui a été tentée à Hull justifierait que l'on suggère de l'étendre à toute la province?

M. GUAY: Je crois que oui, il faudrait y aller prudemment. Il ne faudrait pas trop entreprendre. Comme nous autres, dans le moment, pour Hull proprement dit, on peut augmenter le nombre de nos patients, et je pense qu'on pourrait s'étendre plus loin. Au début, c'était la Pointe-Gatineau, la deuxième année on s'est étendu à Lucerne, on a pris Aylmer, Limbourg, Cantley, là on pourrait aller à la Gatineau, et éventuellement on pourrait prendre tout le bas du Québec, avec un bureau central, quitte à créer un service adéquat. Le problème, c'est que nous avons seulement une physiothérapeute ; elle ne peut pas partir de chez nous pour aller à Montebello, donner des soins de thérapie, elle n'aura pas le temps. Si on en avait deux, une autre, dans cette région-là, ferait de la physiothérapie.

M. CLOUTIER: Alors, vous organiseriez ça sur une base qui serait rattachée à l'hôpital...

M. GUAY: Non, ce n'est pas-tellement sur une base d'hôpital...

M. CLOUTIER: ... sur une base hospitalière ou dans un secteur donné avec une centrale?

M. GUAY: Personnellement, ayant eu de l'expérience avec un plan de base communautaire, je crois que le plan communautaire a des avantages sur le plan hospitalier. A Montréal, il semble y avoir bien des problèmes. Ce n'est pas que je me pense bien habile pour venir tout régler, mais j'ai l'impression que tout le monde veut avoir son plan à son hôpital, ce qui est un dédoublement de personnel. Cela veut dire que chaque hôpital aurait d'abord un directeur médical, comme moi, une infirmière coordinatrice, une secrétaire, une physiothérapeute... etc.

Si vous avez un bureau central comme on en possède un à Détroit. A Détroit, ils desservent une population de 8 millions et puis ils ont un bureau central avec des sous-régions pour les différents services. Mais le tout est centralisé, il n'y a qu'un seul directeur médical pour tout Détroit. On diminue, naturellement, les dépenses.

M. TARDIF: Maintenant, j'imagine que pour étendre le réseau, je ne dirai pas provincialement, mais l'étendre graduellement, il y aurait aussi la question à savoir si nous avons des infirmières nécessaires.

M. GUAY: Nos compagnes ici, prétendent que non... Il n'y a pas juste le nursing, il y a des cas qu'on admet qui n'ont pas besoin de nursing, ils ont peut-être besoin de physiothérapie, d'aide du médecin, mais la plupart du temps il y a du nursing.

M. CLOUTIER: Est-ce qu'on pourrait dire que pour la formation de vos infirmières visiteuses vous envisagez de modifier cette formation, d'y ajouter les branches spéciales en plus de l'hygiène publique ou d'autre...

M. GUAY: Là, vous êtes un peu en dehors de mon domaine. Je dois vous dire que je suis médecin pratiquant, j'ai été demandé pour organiser un service de soins à domicile. Nous achetons les services du V.O.N., quoique nous sommes responsables au V.O.N. Je suis certain que le V.O.N. a prévu ces choses-là, parce qu'on y est très intéressé aux plans des soins à domicile. On les a étudiés. D'abord à Toronto, ça marche très bien. Je ne sais pas si vous êtes au courant qu'à Toronto, dans le moment, l'assurance-hospitalisation va payer les dépenses encourues par un malade qui quitte l'hôpital prématurément. Supposons qu'un malade va à l'hôpital, disons pour une hernie, cela prends sept jours. Si vous envoyez le malade à la maison avant sept jours, s'il peut

épargner des journées d'hospitalisation, l'assurance-hospitalisation paie les services à la maison. S'ils ont besoin de nursing, d'analyses de laboratoire, de quoi que ce soit, c'est avantageux: plutôt que de payer un per diem de $25 à $35 cela peut leur coûter $3 ou $4 par jour.

M. RENAUD: C'est pour ça qu'ils paient l'aide domestique, c'est parce que ça compense ce que ça coûterait pour le per diem à l'hôpital.

M. GUAY: Maintenant, ce n'est pas tout le monde qui a des aides domestiques, il faut s'entendre. Si la famille peut s'occuper de son malade, on exige qu'elle en prenne soin. Mais, des fois, ça arrive qu'il n'y ait personne pour s'occuper du malade, dans ce cas-là, on a une aide domestique.

M. RENAUD: Pour fonctionner normalement, chez vous, c'est Hull et Gatineau dans le moment...

M. GUAY: Toute la région Hull Gatineau...

M. RENAUD: Vous couvrez un territoire de combien?

M. GUAY: On a un territoire en millage... on couvre à peu près une population de 80,000.

M. RENAUD: Vous répondez à la demande, mais avec des listes d'attente.

M. GUAY: Pas à notre service. M. RENAUD: Non?

M. GUAY: A notre service, il n'y a pas de liste d'attente. Nous sommes assez occupés. En février, nous avons admis 22 malades, ce qui est beaucoup. Parce que c'est du travail toutes les fois qu'un malade est admis. Il faut aller à la maison, faire l'évaluation. Si le malade est à l'hôpital, il vaut voir le malade à l'hôpital, s'assurer qu'il peut être soigné à la maison et qu'on peut lui offrir des services. Si le bonhomme a besoin d'oxygène à la maison, quoi qu'on peut toujours lui en donner, on en a qui ont été à la maison et ont reçu de l'oxygène. Les malades chroniques, on leur donne une bonbonne d'oxygène et on l'installe.

M. RENAUD: Dites-vous, docteur, que votre organisation actuellement peut répondre à la demande de toute la population que vous couvrez?

M. GUAY: Ce serait une question financière, il faut être sûr que l'on peut avoir tous les services. Je crois que, pour ce qui est du nursing, il n'y a pas de problèmes. Il y a juste le fait que si l'on avait beaucoup de cas de physiothérapie... Nous n'avons qu'une physiothérapeute qui travaille pour nous deux jours par semaine. Maintenant, si elle était prête à donner son plein temps, il n'y aurait pas de problème. Mais elle est une femme mariée avec des enfants, elle fait ça à temps partiel.

M. RENAUD: Et vous avez à plein temps des infirmières? Combien, dites-vous?

M. GUAY: Des infirmières, il y en a 6 dans le moment. Comme je vous le dis, dans le moment, nous achetons les services. Si l'infirmière fait une visite d'envol, le prix accepté, dans le moment, est de $3.50 la visite. Et la même chose pour la physiothérapeute, c'est $5 la visite. La travailleuse sociale est payée àl'heure, parce qu'elle ne travaille qu'une journée par semaine, comme consultante, et puis elle ne fait pas de gros travail. Les infirmiers sont payés $3 la visite. Le technicien de laboratoire qui va prendre la prise de sang, $3, et ainsi de suite. Notre argent, c'est là qu'on le dépense, c'est pour les services que l'on achète, si je puis dire, des différents organismes de santé, dans la ville.

M. BERTRAND: Je comprends, docteur, qu'en plus des subventions que vous pouvez recevoir directement du gouvernement, il y a d'autres souscriptions, parce qu'en fait, vous vivez avec des souscriptions du public.

M. GUAY: Encore là, cela, ça s'applique à l'or- dre du V.O.N. Comme je vous le dis, strictement, les soins à domicile. Tout ce que le V.O.N. également a eu à faire dans cette chose, c'est qu'ils ont pris le programme en main, c'est tout. Ils ont fait beaucoup, parce que le plan avait été offert à l'hôpital et il l'a refusé, comme on dit, ils ont eu peur, ils ne l'ont pas pris en main. Le V.O.N. a eu le courage de le prendre en main et de l'administrer.

M. BERTRAND: D'ailleurs, je dois vous dire pour les membres du comité, que je suis largement impressionné par le travail que le V.O.N. fait. Je le suis d'autant plus, que je demeure dans une des branches nouvellement créées, celle de Rosemère-Ste-Thérêse, qui a débuté il y a peu, en fait. Parce qu'en somme, vos services sont — à part de Hull, Sherbrooke, et quelques endroits — localisés dans la péri-

phérie ou à Montréal même. Mais, j'ai été impressionné par le travail fait à Rosemère, St-Eustache, Ste-Thérèse, et la population l'a tellement été, que lors de la souscription qui a été faite récemment, la Fédération des Oeuvres de charité des Laurentides, il y a eu un article spécial en faveur du V.O.N. D'ailleurs, il y a aussi un groupe des infirmières visiteuses qui opère chez nous, et je sais que, dans le domaine social, l'assistance à des femmes qui revenaient de l'hôpital, et dont la présence était nécessaire à la maison, le V.O.N. a rendu des services devant lesquels je m'incline. Et, comme membre du comité, je le dis à mes collègues, parce que vous n'êtes pas encore entrés d'une façon définitive dans les centres ruraux. Mais ce que vous avez fait, on the place you have, it was a splendid job. I must say that to the members of the comittee, at this moment.

MISS PETERS: Thank you.

M. GUAY: Je dois dire que je représente juste une petite section des soins à domicile, parce que le V.O.N., je crois, c'est beaucoup plus vaste que ça. Si vous avez des questions qui s'adressent au V.O.N., je pense que mes consoeurs et confrères pourraient vous répondre plus en détail.

M. MARLER: Dr Guay, avant de vous asseoir, est-ce que, comme conséquence de votre plan pilote à Hull, la durée du séjour, la durée moyenne a baissé sensiblement?

M. GUAY: A l'hôpital, vous voulez dire? M. MARLER: Oui.

M. GUAY: Franchement — je ne voudrais pas que l'on me cite — j'ai l'impression que ça a baissé. Oui. Quoique l'an passé on avait l'impression que c'avait baissé, en ce moment, il y a une liste d'attente de 500 malades encore, qui attendent d'entrer à l'hôpital. Mais, je dois vous dire que l'on a pas fait beaucoup de publicité pour ce programme-là, parce que, justement il y a $50,000 et que si l'on fait de la publicité, et qu'il y ait des gens qui nous appellent et qu'on soit obligé de leur dire: On n'a plus d'argent, c'est regrettable. Il y en a qui nous disent qu'on devrait faire de la publicité, d'autres qui disent: N'en faites pas. Dans le moment, on est limité par la finance.

M. BERTRAND: Vous êtes limité par la finance?

M. GUAY: On est limité par la finance. Ce n'est pas que l'on se plaigne c'est un plan pilote. Mais, je pense bien que si ça entre dans un plan général d'assurance-santé, il faudra élargir les cadres. Mais, dans le moment, je pense bien que si l'an prochain on arrive au mois de novembre et qu'il reste 4 mois à opérer et puis que l'on ait dépensé $49,000, si on écrit au ministère de la Santé, il va probablement nous donner un surcroît, car il semble convaincu de l'affaire.

M. MARLER: Les espoirs ne sont pas défendus évidemment, docteur.

M. GUAY: Merci.

M. COPPING: M. le Président, si j'ai bien compris, there is some question as to whether this home care program presented by Dr Guay could be extended geographically and could be extended into many more specialities in medecine, orthopedic specialist care, home making care, educational care, physiotherapy, in all these various branches.

Now there has been running the last while in Montreal, in The Montreal Children's Hospital an experiment like this and I saw recently a demonstration of their work and I was most inpressed. They have gone out into all these branches with great success and they can handle most difficult cases in the ho me which previously had to be handled in the hospital and they are doing it at $5 a day where it costs $35 a day to keep that patient in hospital getting no better treatment than he or she is getting at home and under the care and under the affection and under the warmth of the family circle at home of an inestimable value with children and not to be overlooked in aldults either.

I am quite sure this scheme can be extended, I think we have got enough information now to guide us in a general way and I am sure it can be extended, but of course the V. O.N. and the, «les infirmières » must be supported.

M. LE PRESIDENT: Y a-t-il d'autres questions, messieurs? Je remercie le représentant des infirmières de l'Ordre de Victoria des renseignements qu'ils nous ont fournis et aussi le comité apprécie grandement les remarques que vous avez faites à la suite de leurs questions.

MISS PETERS: Merci bien, messieurs. And before we adjourn may I just please, quite briefly refer you to our five recommendations? They are really very simple, it has already been pointed out that we serve in a relatively small

area of the Province geographically, although we do serve in the very large area of the Province, population wise, and if there were any way of our being included in any form of Government Health Insurance I know that we are only too ready to co-operate with you in any possible way that we can and we do thank you, Gentlemen, for listening to us this morning.

M. LE PRESIDENT: Thank you for your cooperation. Mlle Custeau, représentante de la Fédération de la société d'infirmières visiteuses, je vous demanderais de bien vouloir vous approcher, ainsi que les membres qui vous accompagnent.

Mademoiselle, je vous demanderais de présenter les gens qui vous accompagnent et aussi de nous donner un sommaire de votre mémoire.

MLLE CUSTEAU: M. le Président, messieurs les membres du comité, il me fait plaisir de vous présenter les représentants officiels de la Fédération des sociétés d'infirmières-visiteuses,, A ma gauche, le Dr Georges-Albert Bergeron, vice-doyen de la Faculté de médecine de l'université Laval et Président du comité exécutif de la Fédération des sociétés d'infirmières-visiteuses; Mlle Renée Rivard, directrice de la Société des infirmières-visiteuses de Montréal; Mlle Gertrude Blanchard, directrice de la Société des infirmières-visiteuses de St-Jérôme.

A mon extrême droite, M. Horace Lamarche, directeur général de l'hôpital de Lachute et vice-Président du comité exécutif de la Fédération de la Société des infirmières-visiteuses; le docteur Jean-Paul Parent, Président de l'Oeuvre d'assistance aux malades à domicile de Québec; Mlle Thérèse Saint-Onge, directrice de l'Oeuvre de l'assistance aux malades à domicile de Québec.

M. le Président, la Fédération des sociétés d'infirmières-visiteuses et le groupement des sociétés d'infirmières-visiteuses, légalement incorporées et demeurant autonomes dans leur territoire respectif. Une société d'infirmiêres-visiteuses est un organisme privé de soins à domicile. C'est pour répondre à un besoin de la population canadienne-française que la première société d'infirmières visiteuses fut fondée à Montréal en 1937. C'est en effet à lasuite d'une période de chômage que cette société fut fondée alors qu'un grand nombre d'économiquement faibles devaient garder leurs malades au foyer et ne pouvaient se payer les services d'une infirmière licenciée.

Vouloir secourir ces malades, dans de telles circonstances, impliquait une entreprise essentiellement déficitaire qui devait faire appel au dévouement des conseillers d'administration bénévoles et d'infirmières conscientes de l'immense portée sociale de leur mission.

C'est donc grâce au dévouement de ces membres et aussi aux subventions des fédérations d'oeuvres de charité que ces sociétés ont pu survivre. Encore aujourd'hui, les pauvres constituent l'élément le plus important de la clientèle, puisque, comme mentionné dans le rapport annuel pour l'ensemble de nos services, les visites gratuites sont de l'ordre de 60%. il n'est pas étonnant que la plupart des sociétés membres dépendent encore d'octrois des fédérations d'oeuvres de charité pour poursuivre leur but. L'idéal des infirmières visiteuses a essaimé puisqu'aujourd'hui ces sociétés, dont celles de Montréal, Québec, Trois-Rivières, La Tuque, St-Jean et St-Jérôme, oeuvrent dans la province et font la fédération des sociétés d'infirmières-visiteuses.

C'est à la demande générale des sociétés locales qu'est née en février 1963, la fédération des sociétés d'infirmières-visiteuses et les sociétés locales se sont associées dans le but d'unir en fédération les sociétés de la province de Québec, d'étudier les besoins de la population de la province dans le domaine des soins infirmiers à domicile, de promouvoir, orienter, coordonner et représenter les services infirmiers à domicile, de susciter et maintenir l'intérêt de la population en général des services hospitaliers, des services gouvernementaux et des cadres professionnels à l'égard des soins infirmiers à domicile, d'établir et conclure des ententes avec les organismes privés et publics, de promouvoir la formation d'un personnel qualifié, d'établir des standards professionnels pour les services affiliés, d'aider à la formation du personnel de ces services, d'employer tout autre moyen jugé adéquat pour la poursuite de ces buts.

Il n'est donc pas étonnant qu'après une expérience poursuivie depuis 29 ans, les infirmières-visiteuses participent activement à des projets pilotes de soins organisés à domicile. Notre fédération considère que les changements scientifiques et sociaux, de même que l'éducation ont modifié les besoins de la population en matière de santé. L'entrée d'autres travailleurs professionnels dans le domaine de la santé a modifié les fonctions des soins infirmiers et augmenté le besoin d'une coordination étroite entre les diverses disciplines et le développement du travail d'équipe.

Les principales causes de mortalité ont changé, la population âgée, de plus en plus croissante, a fait multiplier les malades chroniques qui demandent souvent un traitement médical continu et des services de réadaptation. Une plus grande connaissance des comportements hu-

mains amène la nécessité pour les organismes de santé de développer davantage les services d'hygiène mentale. Les malades hospitalisés reçoivent leur congé plus tôt de l'institution hospitalière alors qu'ils requièrent encore des soins que la famille ne peut dispenser sans aide.

Les organismes privés de soins infirmiers donnent des soins à domicile. Cependant, ils ne peuvent répondre à tous les besoins de la population et particulièrement dans les régions rurales. Mais l'ambition de la fédération des sociétés des infirmières-visiteuses est de s'étendre à tous les diocèses afin de procurer à la population du Québec ces soins essentiels à leur bien-être. Hâter le rétablissement des malades, promouvoir la réadaptation des malades chroniques et les maintenir à domicile quand la chose est possible est une conception humanitaire de la santé publique.

Le foyer est l'endroit le plus heureux pour le malade et où il se sent le plus en sécurité. La chaleur des relations humaines qui y existent est propice à favoriser un retour plus rapide à la santé physique et mentale ainsi qu'une heureuse convalescence. D'ailleurs, une des fonctions de la famille, n'est-elle pas le support de chacun des membres dans les épreuves? Les liens se resserrent d'avantage et cette petite société devient plus forte quand les problèmes sont réglés en commun avec la participation de chacun. Au point de vue économique, les études et les expériences en cours tant aux Etats-Unis qu'au Canada démontrent que les soins organisés à domicile coûtent moins cher que l'hospitalisation. De plus, les soins à domicile favorisent grandement l'éducation sanitaire de la famille. L'infirmière qui donne les soins pourra facilement conseiller chacun des membres de la famille et ses conseils seront mieux reçus et vécus à cause du prestige de l'infirmière dispensant des soins et du conditionnement de la famille en période de maladie. Des expériences en cours à Montréal, Hull et Québec, démontrent que des méthodes de coordination sur tous les plans favorisent le travail d'équipe indispensable pour mener à bien un tel service et assurer au malade le maximum de possibilités de retour à la santé. Sur le plan social, cette coordination sera facilitée par des fiches de diagnostic social. Sur le plan médical, par des dossiers des médecins traitants et des infirmières. Sur le plan administratif, par des rapports quotidiens d'activités, des réunions de travail, des rencontres avec les travailleurs sociaux, les physiothérapeutes, les aides-ménagères ou autres membres de l'équipe. Un personnel compétent est un actif indispensable pour réaliser cette coordination de soins. Cette formation peut être individuelle, considérant l'expérience et les lacunes de chacun. La formation de l'infirmière-hygiéniste répond aux besoins de prévention et d'éducation, permet de considérer l'aspect social et psychologique des besoins du malade et de la famille. L'infirmière est préparée à enseigner à la famille les soins à donner et à la diriger dans son attitude à prendre avec le malade. Par contre, ses connaissances du soin des malades et des méthodes à suivre seront rafraîchies et renouvelées par un programme d'éducation en cours d'emploi. Des stages en milieu hospitalier et à domicile sous une surveillance sont de première importance. Un centre d'entraînement du personnel permet l'uniformité des méthodes tant au point de vue des soins que des dossiers et des rapports et permet également une philosophie et un état d'esprit communs. Permettez-moi de demander au Dr Parent, qui est le Président de l'oeuvre d'assistance aux malades à domicile de Québec, de présenter le programme de la ville de Québec qui est un service communautaire de soins à domicile.

DR PARENT: Messieurs, il me fait plaisir de dire quelques mots du plan communautaire de la ville de Québec parce qu'à Québec, le service de soins à domicile fonctionne depuis environ 1954. Jusqu'à décembre 1964, il a été financé par la Fédération des Oeuvres. Maintenant, depuis décembre 1964, un plan pilote a été établi pour la ville de Québec et la région, un plan pilote fédéral-provincial et, maintenant, nous sommes financés à même ce plan. Les buts du plan communautaire de Québec sont les mêmes que ceux qui vous ont été exposés jusqu'ici, traiter les malades à domicile. Nous traitons à domicile les malades qui ne peuvent être traités au bureau du médecin ou à la clinique externe des hôpitaux et qui ont besoin de soins particuliers à domicile. Ainsi, nous leur procurons de meilleurs soins et puis, dans une meilleure atmosphère. Ce faisant, — dans le temps, c'était peut-être à notre idée un but secondaire, et primordial je crois aussi — c'est que nous raccourcissons les durées d'hospitalisation et puis, parfois non seulement on peut diminuer la durée d'une hospitalisation, mais on peut empêcher une hospitalisation également. Parce qu'il y a certaines maladies qu'on peut traiter à domicile si on a tous les soins du nursing, et le reste. Alors, pour pouvoir faire cela, nous donnons des soins de nursing mais, également, nous faisons des examens de laboratoire à domicile, des soins de physiothérapie. La clinique de réhabilitation

de l'hôpital Laval coopère très bien avec nous et si nous avons besoin de physiothérapeutes, ils acceptent à chaque occasion de nous rendre service,, Nous pouvons parfois faire faire de la radiologie, nous fournissons les aides domestiques et pour les malades qui ne peuvent absolument pas payer leurs médicaments, nous les leur procurons également.

De plus, nous avons une travailleuse sociale et pour les malades encore indigents, parce que la plupart des malades que nous soignons sont indigents, nous payons également, depuis quelque temps, les services du médecin. Maintenant, non seulement nous traitons le malade mais les infirmières leur enseignent à se tirer d'affaires et à la famille, parfois. Par exemple, prenez un diabétique qui est toujours désiquilibré parce que personne n'est capable de lui donner ses traitements comme il le faut. Nous pouvons alors enseigner à quelqu'un de la famille à lui donner ses injections etc, ainsi nous prévenons les hospitalisations et, au bout d'un certain temps même, les infirmières n'ont pas besoin d'y aller aussi souvent, la famille sait très bien comment se débrouiller, etc. Alors, je crois que, — cela est seulement un exemple — l'on peut rendre de grands services avec cette oeuvre de soins à domicile. Depuis quelque temps, d'une façon très timide je l'avoue — et nous ne savons pas au juste de quelle façon cela évoluera — nous avons commencé à entrevoir de prendre certains malades psychiatriques également. Nous avons des infirmières qui ont des diplômes post-scolaires en psychiatrie, qui sont capables de prendre soin de ces malades sur la surveillance des psychiatres. Nous avons l'intention de commencer graduellement à prendre soin de certains malades psychiatriques à domicile. Encore une fois, cela rendra service à ces malades qui seront traités dans leur milieu et il y a un gros « stress » pour eux qui n'existera plus. De plus, il y aura plus de place dans les hôpitaux pour traiter ceux qui en ont absolument besoin. Alors cela est un résumé rapide de ce que nous faisons. Si vous voulez des détails, il me fera plaisir de vous les donner.

M. CLOUTIER: Mlle Custeau ou M. Parent. Mlle Custeau, tout à l'heure dans votre présentation du mémoire, vous avez parlé de régions rurales, de l'extension possible de ces services, de ces soins à domicile dans les régions rurales, même vous avez mentionné le mot diocèse. Est-ce que vous entrevoyez la possibilité dans les régions rurales?

MLLE CUSTEAU: Nous avons déjà quelques sociétés qui fonctionnent dans les régions rura- les. Victoriaville dessert Victoriaville, Arthabaska et les alentours, et pour le diocèse de St-Jérôme également. Le service de La Tuque, dessert également une région rurale et tout près de Montréal nous avons le diocèse de St-Jean qui dessert St-Jean, Ville Jacques-Cartier et tous les alentours.

M. CLOUTIER: Lorsque vous avez mentionné le mot diocèse, est-ce que je dois comprendre que vous voyez une forte incidence entre les soins à domicile et le bien-être social, ou si c'est parce que les fonds que vous avez actuellement viennent des campagnes des oeuvres de charité?

MLLE CUSTEAU: C'est exact, M. Cloutier.

M. CLOUTIER: Ce sont les deux facteurs qui...

MLLE CUSTEAU: Oui, oui.

M. CLOUTIER: ... vous amènent à organiser cela sur une base de diocèse...

MLLE CUSTEAU: De diocèse.

M. CLOUTIER: ... plutôt que par...

MLLE CUSTEAU: Parce que, si vous avez remarqué dans le mémoire, les différents services sont subventionnés par les fédérations d'oeuvres de charité des diocèses.

M. BERTRAND: Est-ce que je pourrais ajouter un mot pour M. Cloutier qui vient de poser une question? En tant que le diocèse de St-Jérôme est concerné, ce n'est pas une section qui est très vieille puisqu'elle a été fondée en 1963, si je dis bien, et maintenant elle couvre quatre pôles dans le diocèse. Quatre endroits principaux, aux endroits les plus reculés comme Mont-Rolland, Lachute, Ste-Thérèse et St-Jérôme. Cela couvre le diocèse en entier. Et je répète ce que j'ai dit tout à l'heure qu'après trois années d'existence les services que vous avez rendus sur le plan social, avec des effectifs fort peu nombreux, cela je l'avoue — et je vous poserai une autre question après — a reçu l'approbation de l'entière population. Ceci est tellement vrai que, dans la campagne des oeuvres de charité qui vient d'avoir lieu, il y avait un montant qui, à mon avis, est encore trop modeste pour les services que vous avez rendus. Peut-être que bientôt il y aura une nouvelle politique d'aide de ce côté-là, mais je sais que les familles que vous soignez, surtout chez nous, ce

sont les familles indigentes, les familles que le malheur frappe, où une dame est obligée d'être à la maison absolument et, à certaines heures, recevoir une infirmière, recevoir une visiteuse pour l'aider dans ses travaux domestiques.

En tout cas je vous rends le même témoignage, parce que j'ai eu l'occasion de le palper chez nous. Maintenant vous avez combien d'infirmières-visiteuses dans votre association au palier provincial, dans les secteurs organisés?

MLLE CUSTEAU: Nous avons 58 infirmières-visiteuses.

M. BERTRAND: Dans le secteur de St-Jérôme, combien y en a-t-il, Mlle Custeau.

MLLE CUSTEAU: Nous en avons cinq.

M. BERTRAND: Cinq.

MLLE CUSTEAU: Cinq infirmières.

M. BERTRAND: Cela ne suffit pas au besoin?

MLLE CUSTEAU: Non, on pourrait en avoir davantage.

M. BERTRAND: Merci.

M. RENAUD: Mademoiselle Custeau je vous réfère à la page 17 de votre mémoire. Votre fédération recommande que les hôpitaux prévoient un mécanisme de liaison avec les services de soins à domicile. Pourriez-vous nous dire, suivant votre conception, comment cela pourrait fonctionner, dans un système d'assurance-maladie?

MLLE CUSTEAU: Dans l'exposé qui précède, on dit que souvent les malades quittent l'hôpital, ne reçoivent pas les soins adéquats une fois qu'ils ont quitté l'institution hospitalière et ce sont des choses que nous sommes à même de constater tous les jours. Les malades font appel à nos services, soit par l'intermédiaire d'un parent, d'un ami ou autres, et c'est une constatation. Le mécanisme de liaison consisterait en la présence d'une infirmière à l'hôpital qui s'occuperait d'organiser le départ de ce malade. Une fois qu'il serait rendu chez lui, elle s'occuperait de communiquer, de transférer le malade, si je peux m'exprimer ainsi, au service des infirmières ou si le malade a besoin de nursing ou s'il a besoin d'autres services. A Québec, il y a un service communautaire. Les malades des différents hôpitaux sont dirigés au service d'oeuvre d'assistance aux malades à domicile et il y a là un plan de soins d'établi, c'est en ce sens-là que nous désirerions que les hôpitaux organisent un mécanisme de liaison.

M. RENAUD: Le malade a sa fiche à l'hôpital et le rapport est fait par une infirmière à l'hôpital?

MLLE CUSTEAU: Le malade à l'hôpital est dirigé par son médecin traitant. Peut-être que le Dr Parent pourrait vous donner exactement comment fonctionne le service de Québec.

M. PARENT: Les malades nous sont dirigés maintenant que le plan pilote existe, en plus grande partie par le médecin qu'auparavant. Je crois que 67% des malades que nous avons viennent du médecin traitant alors qu'il y a deux ans, alors que nous fonctionnions au ralenti à cause d'un manque de fonds bien entendu, sans trop de publicité, je crois qu'il y avait à peu près 10% à 15% seulement des malades qui nous venaient, référés par le médecin traitant. Mais, de toute façon, que le malade nous vienne par le médecin traitant ou non, c'est une oeuvre ou encore une travailleuse sociale, ou un service social, ou bien une aide, qui nous leréfère. Nous nous informons toujours du médecin traitant et nous l'appelons. Lui, nous envoie le dossier du malade, les traitements que le malade prend et combien de fois il faudra qu'il le voie etc. Parce que, tous les malades sont soignés par leur médecin traitant, et puis, les infirmières appliquent les traitements du médecin traitant de même que ceux des physiothérapeutes, etc. Nous avons un service, maintenant, qui est plus étendu; mais, c'est toujours sous la responsabilité du médecin traitant. Si le malade nous appelle de lui-même, bien, nous nous informons au médecin traitant. C'est nous qui le rejoignons.

M. RENAUD: Lorsqu'un malade sort de l'hôpital, est-ce que vos infirmières font un rapport à l'hôpital au médecin traitant ou...

M. PARENT: C'est le médecin traitant.

M. RENAUD: ... pour suivre la fiche du malade à l'hôpital...

M. PARENT: oui.

M. RENAUD: ... cela doit être enregistré.

M. PARENT: Mais nous avons nos propres dossiers parce que nous, nous prenons soin des malades de dix hôpitaux, l'Hôtel-Dieu, Saint-François, Saint-Sacrement etc..,, à Québec. Le

médecin, avant que le malade sorte, nous envoie le dossier du malade et puis ce que les infirmières font, c'est au dossier; lorsque le médecin va voir le malade, il communique avec nous aussi et, ça aussi, c'est au dossier. Donc, l'hôpital nous envoie le dossier, et puis, si le malade est obligé de retourner à l'hôpital, s'ils veulent avoir des renseignements nous leur renvoyons le dossier également. Ainsi, le dossier est toujours complet, toujours sous surveillance. On ne traite jamais personne sans dossier médical.

M. COITEUX (Duplessis): Si je comprends bien, au départ de l'association, les infirmières visiteuses, c'était plutôt une oeuvre sociale. ..

M. PARENT: D'accord.

M. COITEUX: ... c'est-à-dire qu'on allait surtout vers l'indigent ou l'économiquement faible. Aujourd'hui, adevenant l'hypothèse qu'on veuille intégrer un service à domicile complet, alors cela sera beaucoup plus grand.

M. PARENT: Oui.

M. COITEUX (Duplessis): Jusqu'ici, vous avez été financés par la cotisation des gens, aujourd'hui vous avez un plan pilote. Disons que, théoriquement, le gouvernement installe un soin à domicile, qui va être beaucoup plus vaste, qui va couvrir bien plus que les indigents parce que le but qu'on viserait dans l'éventualité d'une recommandation de cette nature ce serait surtout de racourcir la liste des attendants dans les hôpitaux. Alors, là vous tomberiez dans un domaine infiniment plus large. De quelle façon envisagez-vous le pourcentage du gouvernement pour la rétribution des infirmières? Parce que là ça deviendrait infiniment plus qu'une oeuvre de charité...

M. PARENT: Oui.

M. COITEUX (Duplessis): ... et en même temps il ne faudrait pas tout de même tuer toute initiative des gens qui ont encore le coeur d'aider les plus faibles.

M. PARENT: Je crois que, depuis que nous avons un plan pilote, beaucoup de nos problèmes sont réglés et nous pouvons réellement donner des soins à tout le monde. C'est ce que nous faisons dans le moment. Si quelqu'un a le moyen de payer, il paie pour les soins selon ce que ça coûte. Mais nous soignons, je crois, 66% d'indigents, même avec le plan pilote, parce que vous comprenez que la plupart des gens ont des assurances-santé privées, qui ont le moyen de payer leur médecin, leurs médicaments, ils font parfois appel à nous quand même, mais c'est plus rare. Nous soignons surtout, quand même, les indigents: même si nous ne sommes fermés à personne actuellement. Et puis je crois que le plan que nous avons en oeuvre actuellement s'intégrerait très bien dans un plan d'assurance-santé généralisé avec le plan pilote que nous avons actuellement.

M. COITEUX (Duplessis): Ma question est la suivante. Là vous dites qu'il y a des gens qui paient, je l'admets, mais en définitive on ne pourra toujours pas faire une loi qui va s'appliquer à l'individu. Il va falloir faire une loi générale advenant le cas, l'hypothèse qu'on décide de donner un plan à domicile spécifiquement pour soulager les lits d'hôpitaux, comme cela nous a été dit à maintes et maintes reprises, au lieu d'établir des hôpitaux de convalescents qui auraient encore un per diem moindre que l'hôpital mais qui serait supérieur à ce que vous pouvez offrir. Alors advenant cette hypothèse là, il faudra nécessairement faire une loi. Dans la loi, ce sera peut-être contributoire. Alors, est-ce que vous êtes d'avis qu'il faudrait discuter, établir un plan pour que la contribution au départ de l'assurance-santé couvre une certaine partie ou en son entier les soins que vous couvrez?

M. PARENT: Je crois qu'elle devrait le couvrir dans son entier. Parce que vous savez que ce serait beaucoup plus facile, et je crois que les oeuvres de charité peuvent fournir des sommes tellement infimes; je veux dire que ce ne serait pas une grosse différence.

J'ai dit que quelques malades payaient, mais c'est la très grande minorité. (Je crois qu'il y en a 10% à peu près qui paient seulement.) L'an dernier, le budget que nous avons présenté à la province,pour Québec et toute la région — cela comprend Charlesbourg, Notre-Dame-des-Laurentides etc... — a été de l'ordre de, je crois, $72,000. Je peux me tromper, je n'ai pas les chiffres, mais c'est à peu près ça que ç'a coûté l'année dernière.

Alors, je crois que cela pourrait coûter un peu plus probablement si l'on englobait tout le monde mais ce serait encore, je pense bien, dans les chiffres qui sont raisonnables. Cela coûterait beaucoup moins cher que l'hospitalisation.

M. TREPANIER: Est-ce que vous considé-

rez que le service que vous faites actuellement est un palliatif et que l'idéal serait d'avoir des hôpitaux pour malades chroniques et des maisons de convalescence?

M. PARENT: Il faut des hôpitaux pour malades chroniques, mais je crois qu'en plus il va falloir des soins à domicile. Cela va demander moins d'hôpitaux, moins d'hôpitaux pour malades chroniques, parce qu'il n'y a pas seulement les lits d'hôpitaux qu'on sauve avec ce service-là. Par exemple, vous avez un hémiplégique. Comme le disait le docteur, tout à l'heure, autrefois, on était obligé de le garder longtemps, puis, il sortait de l'hôpital et retournait chez lui. Souvent, chez lui, c'était un fardeau tellement énorme qu'on n'était pas capable d'en prendre soin. Alors, il lui fallait retourner à l'hôpital, mais, cette fois, dans un hôpital pour malades chroniques. Et puis cela prenait un lit pour cinq, dix ans, deux ans, cela dépendait du temps de la survie du malade. Tandis qu'actuellement, nous pouvons les suivre à domicile, et les suivre pendant plusieurs années. Je veux dire que ça sauve, non seulement des lits d'hôpitaux ordinaires, mais des lits d'hôpitaux pour malades chroniques aussi.

M. TREPANIER: Supposons que ce n'est pas un problème mais qu'on peut avoir un nombre suffisant d'hôpitaux pour malades chroniques et de maisons de convalescence. Est-ce qu'à ce moment-là vous jugeriez préférable, dans le contexte d'un ordre social idéal, que votre service continue à exister?

M. PARENT: Oui, pour certains malades; et ce, au point de vue psychologique du malade. Il y a beaucoup de malades qui, (je pourrais vous en donner de multiples exemples) à l'hôpital, malgré tous nos efforts, dépérissent, sont déprimés enfin... surtout les malades âgés. Lorsque nous pouvons les sortir de l'hôpital et les traiter à domicile, ils reprennent goût à la vie. Hyena un, en particulier, que j'ai à la mémoire, on ne savait pas comment le sortir de son marasme; il était dans un état dépressif épouvantable. Au bout de deux semaines, je l'ai rencontré dans la rue, il était chez lui, alors il se promenait un peu. Mais, il était dans son milieu, il mangeait la nourriture à laquelle il était habitué, et tout. Ainsi, le malade a guéri beaucoup plus rapidement à domicile. Donc, il faudrait quand même garder, je crois, des services de soins à domicile, pour beaucoup de malades.

M. TARDIF: Mais, me diriez-vous, docteur, que, dans le grand public — je ne parle pas des économiquement faibles, je ne parle pas non plus de ceux qui sont plus en moyens, en général — ce service que vous donnez à domicile, serait considéré, par exemple, par les malades en général, comme un peu, je dirais, dégradant? Les gens s'imagineraient, par exemple, que s'ils font appel à vos services, c'est parce qu'ils sont plutôt pauvres. Est-ce que il y a un aspect négatif là-dedans, ou si c'est bien vu en général?

M. PARENT: Non, il n'y a aucun aspect négatif. D'ailleurs, je vous ai dit qu'ils étaient très peu nombreux, mais nous avons quand même — je vous donne des chiffres de mémoire — mais 10% de malades qui ont fort bien le moyen de payer et qui sont très heureux de profiter de nos soins. D'ailleurs, je dois vous le dire, j'ai été très surpris, depuis deux ou trois ans que je m'occupe des soins à domicile, de voir que nous n'avons jamais eu de plaintes des malades. Les malades nous envoient même des remerciements, comme jamais je n'en ai eu à l'hôpital pour avoir soigné un malade. Ils sont très heureux des soins que les infirmières leur donnent. Si vous voyiez les lettres d'appréciation que nous avons des malades, vous verriez qu'au point de vue psychologique, ils sont très heureux de ces soins.

M. TARDIF: Ce ne doit pas être des gens qui ont des maladies de coeur.

M. PARENT: Oui, il y en a beaucoup qui ont des maladies de coeur.

M. COITEUX (Duplessis): Pour moi, c'est parce qu'à l'hôpital, ça passe sur le dos du médecin qu'on mange mal. Il faut mettre la faute sur quelqu'un. Est-ce que vous verriez une objection, disons, l'organisme anglais qui est venu avant vous, c'est pas mal identique...

M. PARENT: Oui.

M. COITEUX (Duplessis): ... peut-être dans les modalités. Mais, est-ce que vous envisageriez une possibilité — ou si votre affaire est plutôt tellement sociale, tellement spécifique pour certaines raisons qu'on ne peut déceler peut-être, nous — une fusion de ces deux organismes un peu semblables?

M. PARENT: Je crois qu'il faudrait qu'il y ait collaboration. D'ailleurs, il y en a déjà, mais je laisserais parler le docteur Bergeron,

étant donné que, mol, je suis simplement pour Québec.

M. COITEUX (Duplessis): Mais moi, ce n'est pas tellement dans le mécanisme, c'est dans les buts visés qui...

M. PARENT: Non, les buts sont pas mal semblables, et moi je ne vois pas pourquoi les deux sections, la section française et le V.O.N. ne marcheraient pas en collaboration. Moi, je crois que les deux services font un travail excellent. D'ailleurs, à Montréal, je pense qu'ils ont une expérience de cela, où ça va très bien. J'aimerais mieux pour ça, peut-être...

M. BERTRAND: Il peut y avoir une petite variante, pas grand-chose...

M. PARENT: Non, en fait, ce sont deux organisations qui ont les mêmes buts.

M. BERTRAND: Maintenant, les services sont adaptés aux régions aussi.

M. PARENT: C'est ça.

M. BERTRAND: Il y a des services que vous allez rendre dans une partie rurale qui ne sont pas les mêmes que ceux que vous allez rendre à Montréal, par exemple.

MLLE CUSTEAU: Justement. Tout à l'heure, dans mon exposé, j'ai mentionné que les sociétés d'infirmières-visiteuses, la première société d'infirmières-visiteuses, avait été fondée pour répondre, justement, à un besoin de la population canadienne-française. C'est un peu en ce sens qu'il y a deux organismes qui fonctionnent. Egalement, les subventions nous proviennent de fédérations différentes, alors, ça répondrait peut-être encore, à votre question. Et nous serions très heureux, les deux organismes, de continuer à travailler en collaboration.

M. BERTRAND: Mais, d'ailleurs, on a remarqué tantôt, que, dans leur mémoire qui a précédé, toutes les recommandations ou, du moins, les suggestions qu'on pouvait y faire, portaient le nom de V. N. O. et en même temps le vôtre, V.O.N. et en même temps le vôtre.

MLLE CUSTEAU: Oui.

M. BERTRAND: Mais, nécessairement, vous êtes à peu près sur le plan provincial, les deux organismes qui militent dans ce domaine.

MLLE CUSTEAU: Oui. Nous travaillons ne collaboration.

M. RAYMOND: Mlle Custeau, votre gros problème au point de vue du recrutement parmi vos membres?

MLLE CUSTEAU: Recrutement du personnel? M. RAYMOND: Oui.

MLLE CUSTEAU: M. le Président dit que c'est un problème économique. Nous n'avons pas eu de problèmes jusqu'ici. Nous n'avons pas de problèmes de recrutement de personnel.

M. RAYMOND: Le jour où vous auriez la certitude d'avoir une rémunération pour tous vos membres, ça serait plus facile d'avoir le personnel voulu.

MLLE CUSTEAU: Oui, au point de vue économique; parce qu'à date nous n'avons pas de problème de recrutement de personnel. Nous avons des demandes d'emploi.

M. PARENT: Est-ce que je pourrais ajouter que, depuis que nous avons le plan pilote à Québec, nous n'avons pas de problème; le seul problème que nous avons c'est de choisir parmi les infirmières, c'est un problème extrêmement agréable.

M. LE PRESIDENT: Je vous remercie Mlle Custeau ainsi que...

M. DUPRE: Pourriez-vous me dire où se situent les Petites Soeurs de l'Assomption dans votre groupement? Est-ce qu'elles sont membres? J'ai chez moi dans mon comté les petites Soeurs de l'Assomption qui font un travail admirable chez les gens dans le besoin.

MLLE CUSTEAU: Les petites Soeurs de l'Assomption travaillent également à Montréal, elles font un travail social et elles ont quelques infirmières. Elles ont plus de travailleuses sociales que d'infirmières, mais elles donnent quand même des soins infirmiers à domicile.

M. LE PRESIDENT: Je vous remercie Mademoiselle Custeau des réponses que vous avez bien voulu donner au comité.

MLLE CUSTEAU: Au nom des membres de la fédération, j'aimerais à remercier le comité d'avoir bien voulu nous permettre d'exposer les vues des sociétés d'infirmières visiteuses.

M. LE PRESIDENT: Merci.

Document(s) related to the sitting