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Version finale

31st Legislature, 3rd Session
(February 21, 1978 au February 20, 1979)

Thursday, June 8, 1978 - Vol. 20 N° 119

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du projet de loi no 92 - Loi sur la consultation populaire


Journal des débats

 

Etude du projet de loi no 92

(Douze heures quatre minutes)

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs!

La commission parlementaire de la présidence du conseil et de la constitution est réunie pour continuer l'étude article par article du projet de loi no 92, Loi sur la consultation populaire.

Les membres de la commission sont: M. Bédard (Chicoutimi), M. Bisaillon (Sainte-Marie) est remplacé par M. Vaillancourt (Jonquière); M. Charbonneau (Verchères), M. Clair (Drummond) est remplacé par M. Dussault (Châteauguay).

Une Voix: Ce n'est pas clair.

Le Président (M. Clair): Cela l'était. M. Garneau (Jean-Talon) remplacé par M. Lavoie (Laval); M. Grenier (Mégantic-Compton), M. Laberge (Jeanne-Mance), M. Levesque (Bonaventure) est remplacé par M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys); M. Paquette (Rosemont), M. Roy (Beauce-Sud) et M.Samson (Rouyn-Noranda).

Les intervenants sont: M. Bertrand (Vanier) remplacé par M. Godin (Mercier), M. Brochu (Richmond), M. Dussault (Châteauguay) remplacé par M. Fallu (Terrebonne); M. Guay (Taschereau), M. Lavoie (Laval) remplacé par M. Ciaccia (Mont-Royal)...

M. Lavoie: M. Ciaccia.

Le Président (M. Clair): ... M. Lévesque (Taillon) remplacé par M. Beauséjour (Iberville); M. Morin (Louis-Hébert) et M. Raynauld (Outremont)...

M. Lavoie: Par M. Gérard D. Levesque.

Le Président (M. Clair): ... remplacé par M. Levesque (Bonaventure). Au moment où nous avons...

M. Grenier: Comme intervenant, M. Brochu (Richmond) est remplacé par M. Fontaine.

Le Président (M. Clair): M. Brochu (Richmond), comme intervenant, est remplacé par M. Fontaine.

M. Grenier: De Nicolet-Yamaska.

L'objet de la consultation

Le Président (M. Clair): Au moment où nous avons ajourné nos travaux hier, nous en étions toujours à l'étude de l'article 6. C'est le leader de l'Opposition officielle, le député de Laval, qui était en train de nous annoncer une motion d'amendement.

M. le député de Laval.

M. Lavoie: M. le Président, nous en sommes toujours à l'article 6 où nous avons apporté, jus- qu'à maintenant, quelques amendements qui ont été malheureusement tous refusés par le gouvernement. On avait la confiance et l'impression que certains amendements auraient pu être acceptables, entre autres celui qui demandait un oui ou un non ou se référant à l'opinion de la Commission des droits et libertés de la personne.

M. Bédard: Pas oui et non

M, Lavoie: La question de oui et de non c'est à cet article-là que nous l'avons apportée, que la réponse n'apporte qu'un oui ou un non.

M. Bédard: On vous a donné les assurances.

M. Lavoie: En ce qui a trait au projet de loi et également à cet article, nous avons eu l'avis de la Commission des droits de la personne. Cette commission se pose encore des questions sur l'esprit et la philosophie qui animent ce projet de loi. Je pense qu'en général, l'opinion de la commission — je le reconnais — se réfère d'une manière peut-être plus particulière à d'autres articles, à un autre chapitre du projet de loi, c'est-à-dire les articles 21 et suivants.

M. Bédard: Là-dessus, vous allez voir qu'on va être très ouvert concernant les...

M. Lavoie: Si vous êtes ouvert comme vous l'avez été jusqu'à maintenant, je ne sais pas quelle garantie nous avons.

M. Bédard: Quand vient le temps! M. Lalonde: ...

M. Lavoie: A ce jour, je n'ai pas encore eu la lueur d'une ouverture. L'Opposition officielle a soumis un document, hier, une proposition au gouvernement et à la commission, relativement à ces comités-parapluies, ces comités nationaux au financement, à la liberté qu'auraient certains individus et groupes à participer activement à la campagne référendaire sans être astreints à s'incorporer obligatoirement dans les comités nationaux.

Nous serons en mesure, dès lundi, de soumettre des amendements précis relativement à la proposition de l'Opposition officielle sur ces comités nationaux et sur le financement de la campagne référendaire. Nous sommes d'avis que la proposition que fait l'Opposition officielle, justement, répond à certaines interrogations, certaines questions que se pose la Commission des droits de la personne.

Est-ce que le gouvernement et le ministre seront en mesure, aujourd'hui ou demain, de nous faire également... D'apporter des réponses aux questions de la Commission des droits de la personne? Il avait été question, d'ailleurs, lorsque nous avons...

M. Bédard: Concernant le chapitre particulier qui traite des comités nationaux...

M. Lavoie: ... spécialement ce chapitre. Je pense que pour le bon déroulement des travaux de cette assemblée, pour garder une atmosphère de confiance et possiblement d'ouverture, n'y aurait-il pas lieu que le gouvernement, étant donné que nous avions discuté, lundi ou mardi — je ne me rappelle plus, la semaine est bousculée — où nous avions pris connaissance...

M. Lalonde: C'est hier; on n'a pas siégé avant-hier.

M. Bédard: Cela dépend à quoi veut référer le député de Laval.

M. Lavoie: Si vous vous rappelez bien, M. le Président, lorsque ces commentaires de la commission ont été déposés, il avait été question de considérer, de prendre peut-être une heure ou deux heures de la commission pour disséquer, analyser les commentaires de la commission. Je ne sais pas ce que le ministre en pense. Il devrait peut-être éclairer cette commission, possiblement avec la proposition que je lui ai faite tout à l'heure à l'effet que le ministre pourrait, aujourd'hui ou demain, nous annoncer sa réaction ou les amendements possibles qu'il pourrait proposer. Je pense que cela faciliterait, améliorerait et pourrait permettre d'accélérer les travaux de cette commission.

M. Bédard: On peut peut-être en reparler demain matin, au début des travaux de la commission.

M. Lalonde: D'accord.

M. Bédard: Nous verrons ce qu'il y a lieu de faire, nous-mêmes sommes en train d'analyser les recommandations, les suggestions qui ont été faites par la Commission des droits de la personne, concernant les comités nationaux et il y a des propositions qui ont été portées à notre connaissance par le leader de l'Opposition. Soit demain après-midi ou demain soir, il y aura peut-être lieu de faire le point étant donné que nous recommençons nos travaux la semaine prochaine, dès le début, il faut l'espérer.

M. Lavoie: Tel que je l'ai annoncé hier soir, je pense que nous avons encore une couple d'amendements à apporter à l'article 6 qui est un des articles neufs du projet de loi. Par la suite, de l'article 7 à l'article 21, il n'y a pas, sauf quelques amendements de technique ou de concordance concernant les délais sur les brefs...

M. Bédard: De l'article 7 à — je ne peux préciser — ... nous avons certains amendements que nous avons soumis également...

M. Samson: Les articles 7, 9, 14, 16.

M. Bédard: ... à l'Opposition. J'imagine qu'elle a pu en prendre connaissance, et que la discussion ne sera pas longue là-dessus.

M. Samson: Les articles 7, 9, 14, et 16, c'est cela. (12 h 15)

M. Lavoie: Revenant à l'article 6, M. le Président, nous avons un amendement qui est tout à fait dans la tradition référendaire surtout puisque le parrain initiai du projet de loi, le député de Maisonneuve, voulait se rattacher ou invoquer le plus souvent possible l'expérience britannique de 1975, le référendum sur le marché commun, alors que, lorsque le mécanisme référendaire s'était mis en marche, le gouvernement travailliste de M. Wilson, dans une déclaration formelle, avait déclaré que le gouvernement prenait un engagement moral de respecter la décision majoritaire de la population. D'ailleurs en Angleterre, cela avait été établi bien clairement, même avant l'adoption de la loi, lors du dépôt d'un livre blanc qui avait été distribué en Grande-Bretagne. J'ai ici ce livre blanc où il est dit, à la page 3, dans l'expérience britannique: "The Government have agreed to be bound by the verdict of the British people as expressed in the referendum result."

Nos recherches nous ont amenés à étudier les expériences vécues lors de plusieurs référendums dans plusieurs pays ainsi que d'états américains, des pays notamment comme l'Australie, le Danemark, la France, l'Irlande, l'Italie, la Norvège, le Royaume-Uni — je l'ai mentionné tout à l'heure — la Suisse et dans des états américains comme la Californie et le Massachusetts où, dans tous les cas, l'autorité en place s'obligeait à respecter la décision majoritaire de la population consultée.

Je crois que c'est une... D'ailleurs, lors de l'étude du livre blanc sur le projet de loi 92, à plusieurs reprises, le député de Maisonneuve, parrain du projet de loi, avait déclaré qu'il était tout à fait normal, tout à fait logique que le gouvernement — le gouvernement du Parti québécois, actuellement — respecte la décision qui sera rendue majoritairement par la population.

Le contexte québécois nous force et nous invite à exiger une garantie de la part du gouvernement, parce que nous vivons dans un contexte différent. Entre autres, le gouvernement du Parti québécois, actuellement — je ne voudrais pas faire le procès d'avant ou d'après le 15 novembre, mais c'est quand même une expérience vécue. Il y a des choses, des déclarations, des décisions qui ont été prises. Notamment, on se rappelle qu'au 15 novembre, vous aviez mis la pédale un peu plus douce sur la question de la séparation que vous ne l'aviez mise lors des deux campagnes électorales précédentes de 1973 et 1970 où l'option initiale, la raison d'être du Parti québécois, soit l'indépendance, soit la souveraineté, soit la séparation du Québec, avait été mise plus en lumière.

En 1976, si je me rappelle bien, j'étais moi-même un des acteurs, un des participants à cette campagne électorale; on sait qu'après l'expérience étapiste ou la proposition étapiste, le gouvernement avait mis en veilleuse cette option indépendantiste et proposait d'être élu dans le régime actuel, comme étant un bon et vrai gouvernement provincial. Depuis ce temps, je dois reconnaître, et plusieurs personnes de mes collègues et des

média reconnaissent que vous êtes revenus, vous avez accentué d'une manière plus précise, surtout avec les déclarations du premier ministre, soit à New York, soit ailleurs, les déclarations récentes du ministre des Finances. Je pourrais citer plusieurs gestes posés et déclarations faites, souvent ambiguës, mais à d'autres occasions plus claires, notamment du ministre des Finances que tout ce qui est fait actuellement par le gouvernement, tout ce qui a été fait depuis le 15 novembre, c'est dans l'optique référendaire, cela fait partie de l'opération référendaire. Le dernier budget, le budget de l'année dernière, tout ce qui anime le gouvernement est dirigé vers l'indépendance du Québec. Cela a été des déclarations claires, précises et plus limpides du ministre des Finances.

Ce qu'on veut, dans cet amendement, c'est un engagement que dans des référendums de nature constitutionnelle et, de façon particulière, dans le référendum qui doit se tenir, un certain référendum dont tout le monde parle actuellement, on voudrait de la part du gouvernement un engagement moral à l'effet que l'opinion de la majorité sera respectée, du moins tel que le projet de loi est rédigé, jusqu'à la fin de la présente législature, parce que la loi prévoit qu'il ne peut pas y avoir deux référendums, je le reconnais, durant une même législature.

Ce qu'on ne voudrait pas, c'est que, lors de la tenue d'un référendum bien connu, bien qualifié et bien prévu et prévisible... on ne connaît pas la date, que ce soit en 1978, dans le courant de 1979 ou au début de 1980... Dans l'hypothèse que la population rejeterait, d'une manière majoritaire — vous êtes fort pour la majorité — 50%, plus un si vous voulez, mais on prévoit que ce sera beaucoup plus majoritaire que cela, ce sera certainement une majorité qualifiée qui sera exprimée lors de ce référendum, on voudrait que le gouvernement respecte la décision qui sera rendue par la population et que le jeu, cette politique d'affrontement permanente du gouvernement actuel, notamment vis-à-vis du gouvernement fédéral, sur tous les dossiers où il y a affrontement permanent et chronique, que cette politique d'affrontement ne se perpétue pas et ne débute pas, ne recommence pas dès le lendemain du référendum. Cette politique que je considère négative, que vous pouvez peut-être considérer positive quant à votre option, mais que nous, nous considérons tout à fait négative pour l'économie et l'état actuel de la Constitution canadienne.

Cet amendement, M. le Président, dont je vous donne une copie, se lit comme suit: "Un référendum portant sur le statut constitutionnel du Québec ne peut être ordonné sans que le gouvernement, avant l'émission du bref référendaire — ou au moment que vous voudrez, si vous voulez l'amender, soit lors de la question ou avant l'émission du bref référendaire — n'ait pris, devant l'Assemblée nationale, l'engagement moral de respecter l'opinion de la majorité des électeurs qui exprimeront leur avis lors d'un tel référendum."

Je crois que le contexte actuel, les agissements, le comportement du gouvernement dans ses négociations autant avec les autres partenaires canadiens, les autres provinces, nous forcent à exiger du gouvernement un tel engagement. Je pense que c'est un minimum; cela n'empêchera, d'aucune façon, la tenue du référendum, cela ne brime en rien les droits du gouvernement de tenir ce référendum, de formuler la question comme il l'entend, de la soumettre à l'assemblée, de respecter les délais des brefs, mais je pense que c'est un minimum de clarté, d'honnêteté, de crédibilité que la population nous demande d'exiger du gouvernement par le biais de cet amendement.

Le Président (M. Clair): M. le député de Laval, avant de vous laisser continuer, nous allons devoir, d'abord, décider de la recevabilité de la proposition d'amendement. Je ne sais si des membres ont l'intention de soulever la question de la recevabilité de l'amendement mais je vous indique immédiatement, M. le député de Laval, qu'en vertu du règlement, le président se doit de signaler toute violation au règlement proprio motu, etc. La question sur laquelle j'apprécierais être éclairé par vous-même et par les autres membres, au sujet de la recevabilité de l'amendement, est en résumé la suivante: En vertu de la Loi de l'excécutif et de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique qui nous régissent, je me demande dans quelle mesure, dans une loi, vous connaissez bien la théorie de la possibilité d'avoir, dans le cadre de la constitution actuelle et de la Loi sur l'exécutif, des référendums qui lient effectivement le gouvernement, la Législature et, finalement, le lieutenant-gouverneur et Sa Majesté elle-même?

Je me souviens d'avoir étudié cette question dans mes cours de droit constitutionnel. Je m'excuse de ne pas m'en souvenir en détail mais chose certaine, c'est que dans la mesure où ce référendum, en vertu de l'amendement que vous proposez, lierait de façon définitive le gouvernement, il m'apparaît que ce serait anticonstitutionnel. A la limite, je relisais même — je suis convaincu que ce n'est pas votre intention — la définition de la sédition, et étant donné que ce serait, en quelque sorte, permettre au peuple de passer par-dessus l'autorité établie, ce serait quelque chose qui se rapprocherait de la sédition.

Je me demande dans quelle mesure c'est re-cevable comme amendement. Il ne s'agit pas d'un voeu que formulerait la commission; il ne s'agirait pas — comme vous l'avez vous-même expliqué — en Angleterre, d'un engagement moral pris par le gouvernement de respecter la décision majoritaire mais d'un engagement qui serait prévu dans une loi. Sans rendre de décision, je pense que j'ai le devoir, comme président de cette commission, de vous soulever cette difficulté qui m'apparaît bien réelle et bien sérieuse au point de vue constitutionnel.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, sur la recevabilité.

Le Président (M. Clair): Peut-être que...

M. Lavoie: Je reconnais le bien-fondé de votre point de droit, M. le Président, mais je voudrais bien clarifier — d'ailleurs, je vais le modifier pour la forme, si vous voulez — que ce qu'on vise par là, ce n'est pas un engagement juridique.

M. Lalonde: Un engagement politique.

M. Lavoie: C'est un engagement moral, un engagement politique. Si vous n'aimez pas le mot engagement, que ce soit précédé d'une déclaration ministérielle. Un engagement moral, une déclaration morale. Nous allons prendre la parole du gouvernement.

M. Bédard: Je peux vous le donner tout de suite l'engagement moral, mais de là à le mettre dans une loi, vous savez que, constitutionnellement, on ne peut pas.

M. Lavoie: Tout dépend de la façon dont c'est formulé. Ce n'est pas un engagement physique, M. le Président, c'est un engagement moral.

M. Bédard: C'est clair que le Parti québécois...

Le Président (M. Clair): Je peux vous indiquer, M. le député de Laval... Et on sait qu'on ne respecte peut-être pas le règlement en discutant comme on le fait, mais je pense que pour l'avancement de nos travaux, cela peut être profitable. Je vous indique immédiatement — je ne veux pas que cela ait l'air d'une menace, en aucune façon, ce n'est vraiment pas cela...

M. Lavoie: Nous vous respectons tout à fait, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Je vous en remercie.

M. Lavoie: Je dois vous féliciter pour la façon dont vous dirigez les travaux de cette commission.

Le Président (M. Clair): Je vous en remercie. Je vous indique tout de suite qu'il me semble que c'est très délicat d'insérer, dans une loi, quelque engagement que ce soit parce que la loi ne tolère pas tellement les notions d'engagement politique, je pense. On fait une loi pour que cela ait force de loi, justement. Je serai chatouilleux là-dessus, de sorte que si vous avez l'intention de retirer cet amendement pour en présenter un nouveau, si vous acceptez le point de droit que j'ai soulevé, peut-être qu'il vaudrait mieux — je n'ai pas de conseil à donner à votre formation politique ni à aucune autre — le travailler à nouveau parce que je n'aimerais pas avoir à vous rejeter des amendements rapidement.

M. Lavoie: Une minute ou deux, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Avec plaisir, M. le député... La commission suspend ses travaux pour cinq minutes.

(Suspension de la séance à 12 h 31)

Reprise de la séance à 12 h 40

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

A moins que des membres de cette commission ne demandent une nouvelle suspension, je pense que les cinq minutes sont largement écoulées. Si on pouvait reprendre les travaux...

M. le député de Laval, vous avez la parole.

M. Lavoie: Je vais proposer un autre amendement...

Le Président (M. Clair): Si je comprends bien, la motion d'amendement que vous aviez faite est retirée. Je pense bien qu'il n'y a pas de problème là-dessus.

M. Lalonde: Elle n'est pas reçue, de toute façon.

M. Lavoie: Oui, elle est retirée. Dans le respect sacré de la constitution qui nous régit, voici le nouvel amendement. Ce que nous voulons, par cet amendement, c'est donner l'occasion au gouvernement de dire, d'un côté ou de l'autre, s'il entend lui donner la plate-forme privilégiée qui est l'Assemblée nationale pour que le gouvernement puisse vraiment déclarer s'il entend respecter l'opinion, avec toutes les subtilités qu'il pourra se permettre, avant la tenue d'un référendum.

L'amendement se lit comme suit, et il ne s'agit plus d'un engagement moral ou quoi que ce soit, cela donne uniquement une plate-forme, une tribune au gouvernement, lors d'un débat à l'Assemblée nationale, pour établir ses positions: "Un référendum portant sur le statut constitutionnel du Québec ne peut être ordonné sans que le gouvernement, avant l'émission du bref référendaire, n'ait requis l'avis de l'Assemblée nationale, sur les mesures qui devraient être éventuellement prises, par le gouvernement, pour que l'opinion de la majorité des électeurs soit traitée d'une façon adéquate ".

Le Président (M. Clair): Je n'ai pas eu l'occasion de noter.

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce qu'on pourrait en avoir une photocopie, M. le Président? Je pense que ce serait nécessaire; il y a eu du patinage... du travail.

Le Président (M. Clair): A l'ordre! M. Lavoie: C'est une subtilité.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je pense qu'on va avoir...

M. Bédard: La subtilité...

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, est-ce que le député de Laval...

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît! En vertu de notre règlement, normalement

on a droit à une copie. Je sais gré à l'Opposition officielle d'avoir toujours eu l'amabilité de distribuer une copie. Personnellement, je n'ai pas eu le temps de le noter. Je me demande si, pour la meilleure marché de nos travaux — je ne veux pas vous inciter à faire d'autres amendements — on ne pourrait pas passer à un autre et vous auriez l'occasion, à l'heure du déjeuner, de le faire dactylographier. Non?

M. Lavoie: II reste une quinzaine de minutes.

Le Président (M. Clair): C'est peut-être le temps que cela va prendre pour le faire transcrire et pour que les membres l'aient.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Clair): Avant de le recevoir, au moins, vous allez me permettre de le transcrire pour moi, pour que je puisse le lire.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, sous réserve de nos commentaires sur la recevabilité, nous aimerions que l'Opposition officielle nous explique, en gros...

M. Lalonde: Seulement une espèce d'avant-propos et cela ne s'adresse pas nécessairement au président parce que, tantôt, on s'adressera à lui sur la recevabilité, pour expliquer la raison pour laquelle on procède par ce biais. C'est vrai que cela reste un problème constitutionnel mais le problème constitutionnel, ce n'est pas que le gouvernement prenne un engagement. Un gouvernement peut prendre n'importe quel engagement. Si un engagement de se sentir lié par le résultat d'un référendum était anticonstitutionnel, je soumets que l'engagement du gouvernement de briser le Canada serait d'autant plus anticonstitutionnel. L'engagement du gouvernement comme tel, c'est là le problème, le député de Jonquière a compris, M. le Président, il faut le souligner, c'est de le mettre dans la loi, l'engagement du gouvernement, qui pourrait être anticonstitutionnel.

M. Vaillancourt (Jonquière): Au contraire, j'ai dit: II ne faut pas le mettre dans la loi.

M. Lalonde: C'est cela.

M. Vaillancourt (Jonquière): Le mettre dans la loi...

M. Lalonde: Le mettre dans la loi pourrait être anticonstitutionnel. Que le gouvernement prenne un engagement de se lier aux résultats pourrait donc être coloré au point de vue de la constitu-tionnalité, et c'est ce que le nouvel amendement du député de Laval évite. Au fond, on veut — et c'est notre opinion, l'Opposition officielle — que le gouvernement se lie mais on ne peut pas le lier dans la loi. On va donc, dans la loi, lui donner le forum, c'est-à-dire que l'obligation de requérir, de l'Assemblée nationale, un avis, c'est parfaitement constitutionnel. C'est pour cela qu'on doit passer par cette espèce de pirouette législative, peut-être, ou cet exercice de subtilité à cause de la constitution, mais le résultat... Ce qui nous importe, c'est que le gouvernement prenne un engagement, à un moment donné, qui va être constitutionnel, sauf qu'on ne peut pas l'engager à prendre ces engagements dans la loi. (12 h 45)

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que le député de Marguerite-Bourgeoys me permettrait une question? Lorsqu'il parle de requérir un ou des avis de l'Assemblée nationale, de quel avis s'agit-il, de quelle sorte d'avis s'agit-il?

M. Lalonde: L'amendement le dit, je n'ai pas le texte devant moi; le président l'a. C'est un avis...

M. Lavoie: Cela peut être une résolution.

M. Lalonde: Au point de vue des procédures, je ne le sais pas. Cela peut être n'importe quel... Je suis sûr que le règlement prévoit assez de flexibilité pour que le gouvernement demande l'avis de l'Assemblée nationale. Cela pourrait être une motion inscrite au feuilleton, débattable, et qui demanderait l'avis de l'Assemblée nationale à savoir s'il y a des mesures à prendre pour, éventuellement, traduire dans les politiques du gouvernement l'opinion majoritaire du référendum.

Au moment de ce débat, il n'y a aucun doute que le gouvernement va, soit prendre un engagement, soit ne pas en prendre. Mais au moins, on jugera et ce sera dans le meilleur forum possible.

M. Vaillancourt (Jonquière): Le but de votre amendement est d'amener le gouvernement, par le moyen de cet avis ou de ces avis, à prendre ou non un engagament.

M. Lalonde: C'est cela, mais en discutant, quand même.

M. Vaillancourt (Jonquière): A partir du moment où vous envisagez la possibilité de prendre un engagement, cela devient anticonstitutionnel.

M. Lalonde: Non, l'engagement — c'est ce que j'ai dit tantôt — l'engagement n'est pas anticonstitutionnel; c'est l'obligation du gouvernement... D'ailleurs le ministre le disait tantôt, au début: Si c'est un engagement que vous voulez, on peut le faire maintenant.

M. Vaillancourt (Jonquière): La réforme électorale, entre nous, a pris plusieurs engagements moraux.

M. Bédard: Cela s'est déjà fait.

M. Lalonde: Je ne me souviens pas de l'avoir eu formellement, cet engagement.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le ministre d'Etat à la réforme électorale a dit plusieurs fois

qu'un gouvernement qui passerait outre à la volonté exprimée démocratiquement par la population serait très mal vu et...

M. Lalonde: II ne faut pas que ce soit trop dilué, quand même.

M. Vaillancourt (Jonquière): En fait, je pense que le député de Marguerite-Bourgeoys admettra avec moi que le ministre d'Etat à la réforme électorale a tenu plusieurs fois, depuis le début de nos travaux, ce genre de propos. Je me rappelle fort bien qu'une fois entre autres, devant un mémoire qui nous était présenté — je ne sais pas trop par qui — il avait maintes fois répété que d'abord, on avait eu des experts en droit constitutionnel qui nous avaient dit qu'un référendum sur l'avenir constitutionnel du Québec ne pouvait qu'avoir une valeur consultative et non délibérative. On nous l'a dit plusieurs fois... décisionnelle, délibérative, une valeur consultative.

J'ai entendu personnellement, plusieurs fois, le ministre répéter quelle serait l'attitude de la population face à un gouvernement qui, le lendemain d'une décision affirmative ou négative, passerait outre et agirait comme si de rien n'était.

M. Lalonde: C'est cela, M. le Président. Je pense que — je n'ai pas les textes devant moi — c'est fort possible que cela ait été fait, mais notre rôle est de légiférer, actuellement, d'améliorer une loi, de mettre toutes les balises possibles; les engagements et les discours, on a vu ce que cela donnait. J'ai tenté de m'en rapporter à un discours et à un engagement ou enfin, à une expression d'opinion du ministre d'Etat à la réforme parlementaire sur le oui ou le non et cela n'a pas donné grand-chose, législativement. J'aimerais qu'on fasse un peu plus de progrès à propos d'un élément qui n'est plus du formalisme, qui n'est plus de la formalité, mais qui est réellement fondamental au point de vue de l'avenir des Québécois.

Les Québécois veulent savoir si le gouvernement va se sentir lié par le résultat du référendum et c'est important quant au large consensus que le gouvernement veut avoir pour cet exercice, pour toute activité référendaire.

Le Président (M. Clair): La copie de la motion devrait être disponible dans les instants qui viennent; elle est manuscrite, mais je pense que c'est une belle main qui nous a rédigé cela et cela devrait être lisible.

Si vous êtes prêts à discuter de la recevabilité, si quelqu'un a l'intention de prendre la parole sur la recevabilité... Peut-être que vous aimeriez mieux attendre d'avoir le texte entre les mains?

M. Vaillancourt (Jonquière): Oui, M. le Président.

M. Lavoie: On peut donner notre point de vue sur la recevabilité, quitte à ce que le ministre...

Le Président (M. Clair): Sur la recevabilité.

M. Lavoie: C'est que nous respectons la Constitution du Québec, la Constitution canadienne et les réserves que vous aviez, M. le Président, on les a enlevées. Il n'y a plus aucune obligation juridique, légale, contenue dans un projet de loi et nous acquiesçons à votre décision, nous l'acceptons d'ailleurs, à savoir que ce serait irrégulier.

Ce que nous ajoutons, c'est uniquement une étape comme cela existe dans la réglementation de l'éducation: il doit y avoir, dans certains cas, l'opinion du Conseil supérieur de l'éducation. Ici, c'est une formalité de plus à l'effet qu'il y aura un débat — limitez-le dans le temps, si vous voulez, un débat à l'Assemblée nationale, je n'ai aucune objection — mais c'est une simple formalité à l'effet qu'il y aura une résolution à l'Assemblée nationale et que cela occasionnera un débat public, limité. A ce moment-là, il ne faudra pas oublier que la question sera connue; on veut un débat public, on veut informer la population, cela donnera... D'ailleurs c'est relevé par la Commission des droits et libertés de la personne où il est dit qu'il doit y avoir le plus d'information possible, le plus d'éclairage possible pour la population.

C'est pour expliquer la question de recevabilité, cette formalité qui donnera l'occasion, au gouvernement et à l'Opposition, sur la question, d'établir sa position constitutionnelle. Je ne veux pas aller trop au fond, mais je vous dis qu'il y a...

Le Président (M. Clair): Pas sur cela... C'est une question dans le but de m'éclairer; cela m'ap-paraît comme étant une question très importante, pour rendre la meilleure décision possible sur la recevabilité. J'aimerais que, dans votre argumentation, vous me parliez de ce que vous étiez en train de me dire, mais également de deux autres points: Est-ce que, quelque part dans nos lois, il y a des précédents qui obligent le gouvernement à demander l'avis à l'Assemblée nationale sur une question précise? Et d'autre part, en vertu de la Constitution, de la loi sur la législature et de la loi sur l'exécutif, est-ce que ce n'est pas, justement, le rôle continu de l'Assemblée nationale de donner des avis au gouvernement sur les choses qu'il est en train de faire? Est-ce que, dans la mesure où on mettrait cela dans un texte de loi, cela ne vient pas changer un peu quelque chose à notre statut constitutionnel, parce que de mémoire, je n'ai pas de cas où il y aurait obligation spécifique, hormis celle qu'il y a dans la Constitution, pour le gouvernement, de consulter l'Assemblée nationale? Comprenez-vous mon idée?

M. Lavoie: Oui. Vous me demandez un exemple où il faut demander l'avis de l'Assemblée nationale; nous en avons un exactement dans le projet de loi actuel où avant le référendum, il doit y avoir un débat sur la question.

C'est un débat qui est analogue à la question, mais qui donnera l'occasion aux tenants, une fois la question connue, aux tenants du oui ou du non de faire leur lit et de le faire connaître à la population pour apporter l'éclairage à la population. Prenons comme hypothèse ce que je vous dis.

Admettons que la question soit sur la souveraineté-association, cela donnera l'occasion au gouvernement si cette option est acceptée par la population, cela donnera l'occasion au gouvernement de dire: Oui, nous respecterons cette décision de la souveraineté-association et voici les mécanismes que nous mettrons en marche pour la réaliser. Cela donnera également l'occasion au gouvernement de dire si cette option de souveraineté-association était rejetée, que le fédéralisme demeurerait et cela donnerait, dans ce débat, l'occasion de dire au gouvernement de quelle manière il va respecter la décision fédéraliste de la population.

C'est un débat public, c'est un éclairage nouveau, additionnel et qui est suggéré même par la Commission des droits et libertés de la personne qui dit qu'il doit y avoir le plus d'information possible. Je pense qu'une information que la population est en droit d'exiger, c'est une déclaration formelle à un endroit, le seul endroit où cela doit se faire, encore plus que sur la scène politique ou sur les tribunes électorales, c'est à l'Assemblée nationale qui sera homologuée, reconnue par une résolution.

C'est un débat additionnel, si vous voulez — il y a un débat sur la question qui est limité dans le temps — mettez un autre débat limité dans le temps, sur les engagements ou sur ce que le gouvernement entend faire si l'option est acceptée ou si l'option est rejetée. C'est ce que je veux vous dire et c'est un éclairage additionnel, une information additionnelle qu'on procure à la population sur une question aussi importante qu'une décision constitutionnelle.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): ... sous réserve de faire d'autres commentaires au début de l'après-midi à 15 heures, j'aimerais vous dire que je pense qu'il est manifeste que, par ce nouvel amendement modifié et corrigé, l'Opposition essaie de faire indirectement ce que son premier amendement lui refusait de faire directement. C'est que l'esprit et l'essence, et les intentions qui animent l'Opposition officielle en présentant ce nouvel amendement modifié, sont exactement les mêmes que pour celui qui vous a été présenté. Je pense qu'il faut le constater et c'est important. Il ne suffit pas de constater, dans un amendement, la formulation même de l'amendement mais de regarder toutes les implications de cet amendement, même modifié.

Regardez l'esprit de l'amendement, dans quel esprit, dans quelle intention il est fait. M. le Président, en regardant l'amendement tel que rédigé, je pense que c'est le premier argument qui me saute aux yeux; on fait obligation légale au gouvernement — je pense que là on parle des privilèges de l'exécutif — de requérir l'avis de l'Assemblée nationale. Je pense qu'il est manifeste que le gouvernement, lorsqu'il veut présenter une loi — pas un exemple loufoque comme vient de nous présenter le député de Laval, de l'Opposition officielle, la question prévue à l'article 6 — est obligé d'aller devant l'Assemblée nationale pour la présenter. La loi doit être adoptée par l'Assemblée nationale. C'est l'Assemblée nationale qui joue de rôle du législatif.

A partir du moment où la loi est adoptée, à partir du moment où l'Assemblée nationale a joué son rôle de législateur, je me pose la question avec vous: Quels sont les précédents, dans nos lois qui forcent un gouvernement, à partir du moment où une loi est adoptée, à retourner devant cette même Assemblée nationale? Je pense que l'article en question, tel que rédigé, force le gouvernement à aller devant l'Assemblée nationale et, en conséquence, M. le Président, c'est manifestement une atteinte aux privilèges de l'exécutif qui doit gouverner et le législatif doit faire les lois.

Je pense que la question que vous avez posée, relativement aux précédents qui font obligation au gouvernement de consulter l'Assemblée nationale, est extrêmement pertinente. Je vais essayer, à l'heure du dîner, de faire des recherches pour voir si ces précédents existent.

M. Lalonde: Vous avez besoin d'avoir de meilleurs arguments que cela.

M. Vaillancourt (Jonquière): D'autre part, M. le Président, un argument qui saute aux yeux, c'est que l'Opposition officielle s'est déclarée d'accord avec votre argumentation à l'effet qu'on ne pouvait, dans la loi, inclure un engagement du gouvernement à être lié par la décision des citoyens québécois. Je pense que tout le monde se doit d'être d'accord. Il y a eu de nombreux experts, lors de l'étude du livre blanc, qui sont venus témoigner, nous avons reçu des avis là-dessus, tout le monde était unanime à dire qu'un tel référendum, celui dont on parle, ne peut avoir qu'une valeur consultative, non pas une valeur délibérative.

M. le Président, à partir de cet état de faits...

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière, je regrette que le texte de l'amendement soit un peu par négation: "Un référendum portant sur le statut constitutionnel du Québec ne peut être ordonné sans que le gouvernement n'ait requis l'avis de l'Assemblée nationale sur les mesures, etc." L'obligation qui serait faite...

M. Lavoie: Ce n'est pas au gouvernement.

Le Président (M. Clair): ... c'est celle de requérir — si on le mettait au positif au lieu du négatif...

M. Lalonde: Vous avez le négatif...

Le Président (M. Clair): C'est une obligation, c'est seulement pour éclairer le débat parce que la question qui m'apparaît vraiment importante, évi-

dente, à ce stade-ci, c'est l'obligation pour le gouvernement de requérir l'avis de l'Assemblée nationale. C'est surtout sur cela que j'aimerais entendre votre argumentation parce que...

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, vous avez demandé des précédents, j'ai dit que j'allais vérifier cela à l'heure du dîner. Je suis sûr que l'Opposition officielle le fera également. Si ces précédents existent, je dis — et je ne suis pas un expert en procédure parlementaire ou en droit constitutionnel — qu'un gouvernement pour adopter une loi, se doit d'aller devant l'Assemblée nationale. C'est le législatif. (13 heures)

Ici, nous forçons le gouvernement à aller requérir l'avis de l'Assemblée nationale, cela est déjà important, mais sur quoi? Sur les mesures que devrait prendre le gouvernement éventuellement pour que l'opinion de la majorité soit adéquatement traitée. Ce n'est pas sans raison qu'on met les mots "adéquatement traitée". C'est évidemment, M. le Président, parce qu'on ne peut pas placer les mots "respect de la décision" qui avaient été mis dans la motion initialement présentée.

Or, M. le Président, par hypothèse, supposons même que l'Assemblée nationale émet l'avis que le gouvernement devrait prendre la mesure de respecter la volonté des citoyens. Est-ce que cette réquisition, est-ce que cet avis de l'Assemblée nationale est lui-même constitutionnel? C'est une autre question qui se pose. Là-dessus, je pense, qu'il y aurait lieu de suspendre nos travaux.

M. Lavoie: S'il y a des précédents ou des cas où le gouvernement est obligé de prendre l'avis, en somme, de l'Assemblée nationale pour mener à bonne fin une décision, il y a quelques cas qui sont des exceptions. Le gouvernement — c'est une analogie que je fais — en général, nomme les fonctionnaires ou les hauts commis de l'Etat par arrêté en conseil. Dans le cas justement du président général des élections, les six nominations qui doivent se faire par l'Assemblée nationale pour mener à bonnes fins...

M. Lavoie: II va les...

M. Lavoie: ...une décision gouvernementale, cela prend une décision de l'Assemblée nationale.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je comprends que j'aurai le droit de parole à 15 heures cet après-midi.

Le Président (M. Clair): Messieurs, il est 13 heures. S'il vous plaît, avant qu'on se quitte, j'aimerais vous indiquer une dernière question sur laquelle j'aimerais être éclairé, soit celle de la présomption qui pourrait — je dis bien qui pourrait — se dégager par l'amendement selon lequel l'exécutif ne traiterait pas de façon adéquate le résultat qui serait connu de façon telle que cela pourrait, encore là, avoir des répercussions sur le droit constitutionnel canadien et le pouvoir de l'exécutif.

La commission suspend ses travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 h 3)

Reprise de la séance à 15 h 17

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs. La commission permanente de la présidence du conseil et de la constitution reprend ses travaux, soit l'étude article par article du projet de loi no 92 intitulé: Loi sur la consultation populaire.

Au moment où nous avons suspendu nos travaux, nous avions eu des propos préliminaires sur la recevabilité de la motion du député de Laval à l'effet d'ajouter l'alinéa suivant à l'article 6: "Un référendum portant sur le statut constitutionnel du Québec ne peut être ordonné sans que le gouvernement, avant l'émission du bref référendaire, n'ait requis l'avis de l'Assemblée nationale sur les mesures qui devraient être éventuellement prises par le gouvernement pour que l'opinion de la majorité des électeurs soit adéquatement traitée".

Sur la recevabilité de cet amendement, est-ce que quelqu'un désire intervenir?

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, très brièvement, d'abord je voudrais tout simplement répéter très brièvement les arguments que vous avez vous-même soulevés à l'endroit de la motion initialement présentée par le député de Laval...

Le Président (M. Clair): J'ai soulevé des interrogations.

M. Vaillancourt (Jonquière):... ou vos interrogations, pour vous dire que la deuxième motion cherche à faire indirectement ce que la première visait à faire directement. Dans son esprit, dans son essence et dans l'intention de l'Opposition officielle, c'est manifestement le cas, sauf qu'il y a quand même, au niveau de la formulation, une différence — non pas dans l'esprit — entre les moyens prévus.

Dans la première motion initialement présentée, on demandait que le gouvernement s'engage formellement, dans une loi, à déclarer à l'Assemblée nationale qu'il respecterait la volonté exprimée par les citoyens lors d'un référendum sur le statut constitutionnel. Dans la deuxième motion qui a été modifiée par le député de Laval, cette fois-ci, au lieu de demander cet engagement formel à l'Assemblée nationale, on demande au gouvernement de requérir — et là, je souligne bien le mot — l'avis de l'Assemblée nationale.

M. le Président, je pense que cette motion, telle que rédigée, nous amène nécessairement à parler du rôle de l'Assemblée nationale par rapport à l'exécutif. Le dictionnaire Robert définit le mot avis comme ceci: Ce que l'on pense, ce que l'on exprime sur un sujet; jugement, estimation, opinion, pensée, point de vue, sentiment. Donc, demander un avis, c'est demander une opinion, un point de vue, un conseil à l'Assemblée nationale.

M. Lalonde: C'est cela.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, l'Assemblée nationale n'est pas un conseil consultatif. L'Assemblée nationale est un organisme de décision, organisme qui adopte des lois et à laquelle l'exécutif est soumis. Elle vote des budgets; elle adopte des crédits; elle adopte des lois. L'Assemblée nationale n'est pas un conseil consultatif. A l'occasion, i'Assemblée nationale émet des voeux mais jamais en matière législative. Exemple, M. le Président, nous avons assisté, hier ou aujourd'hui, à une motion du député de Mégantic-Compton pour que l'Assemblée nationale émette un voeu de bonne fête au député de Johnson.

Ce n'est pas le rôle premier de l'Assemblée nationale d'émettre des voeux mais, à l'occasion, elle peut émettre des voeux mais toujours en matière non législative. En matière législative, ce qui est son principal mandat, l'Assemblée nationale n'émet pas de conseil, ne donne pas d'opinion; elle prend des décisions.

M. le Président, le député de Laval a donné quelques exemples parce que vous avez posé la question suivante: Quels sont les précédents qui obligent le gouvernement à consulter?

Le Président (M. Clair): Messieurs, je demande votre collaboration, s'il vous plaît, parce qu'il m'apparaît que la décision que je vais avoir à rendre est importante et j'aimerais pouvoir prendre attentivement connaissance des arguments des deux côtés. Je vous remercie.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, à la question que vous avez posée: Quels sont les précédents qui obligent le gouvernement à consulter, donc obtenir l'avis, l'opinion, le point de vue, le sentiment de l'Assemblée nationale, le député de Laval a donné quelques exemples, je pense qu'il a choisi celui du Protecteur du citoyen. M. le Président, l'Assemblée nationale n'émet pas le voeu que telle personne soit nommée Protecteur du citoyen; l'Assemblée nationale décide que telle personne est nommée Protecteur du citoyen. Le président de l'Assemblée nationale ne voit pas l'Assemblée nationale émettre un voeu à l'effet qu'il soit nommé président; l'Assemblée nationale décide de ratifier la nomination de tel président. Le directeur général du financement des partis politiques est nommé par l'Assemblée nationale. Il y a des lois qui obligent le gouvernement, non pas à consulter, non pas à obtenir des opinions, un avis, un conseil, mais à obtenir la ratification, à obtenir la décision de l'Assemblée nationale sur des sujets bien précis.

Donc, M. le Président, effectivement, l'Assemblée nationale est un organisme de décision, de législation, et ce n'est pas un conseil consultatif. La motion du député de Laval, telle que rédigée, demande à l'exécutif d'aller obtenir l'opinion de l'Assemblée nationale, opinion à laquelle l'exécutif pourrait se soustraire puisque là il n'y a plus d'obligation. On demande donc à l'Assemblée nationale d'émettre une opinion à laquelle l'exécutif peut se soustraire. L'Assemblée nationale contrôle l'exécutif; elle le contrôle, par exemple, à la période des questions. La période des questions est une période qui permet au législatif de contrôler l'exécutif. Mais adopter la motion telle que présentée, M. le Président, cela voudrait dire que l'Assemblée nationale, qui est au-dessus de l'exécutif, à laquelle l'exécutif est soumis parce que c'est elle qui adopte les lois, cela voudrait dire que, dans ce cas-ci, l'Assemblée nationale ne ferait qu'émettre un conseil, un avis, une opinion à laquelle l'exécutif pourrait facilement se soustraire dans cette deuxième motion.

Donc, M. le Président, on demande dans cette motion, telle que rédigée, en demandant l'avis de l'Assemblée nationale d'émettre un avis, d'abord de dévier à son rôle premier qui est de prendre des décisions, de jouer un rôle de conseil consultatif auprès de l'exécutif alors que le rôle de l'Assemblée nationale n'est pas de conseiller le gouvernement, mais de prendre des décisions, M. le Président. Je pense que recevoir une motion semblable serait accepter le fait que l'Assemblée nationale puisse jouer, auprès du gouvernement, le rôle d'un conseil consultatif. Ce serait faire en sorte que l'exécutif, M. le Président, qui est soumis au contrôle de l'Assemblée nationale, aux décisions de l'Assemblée nationale, pourrait, du revers de la main, dire: L'avis de l'Assemblée nationale je n'en tiens pas compte. Donc l'exécutif, M. le Président, prendrait le pas sur le législatif. Comme nos bons amis d'en face ne pouvaient pas, M. le Président, dans leur première motion, imposer dans la loi cet engagement du gouvernement de le respecter ou non, on a dit: On va prendre la façon de requérir l'avis de l'Assemblée nationale pour qu'elle émette une recommandation, un conseil, à savoir que le gouvernement devrait faire pour que l'opinion de la majorité des citoyens soit traitée adéquatement.

Or, M. le Président, je pense que, manifestement, à sa face même, cette motion est irrecevable, puisque l'Assemblée nationale n'est pas un organisme qui donne des avis. M. le Président, je sais que cela fait, comme moi, seulement un an et demi que vous êtes ici, mais posez-vous des questions à savoir si l'Assemblée nationale a déjà, en matière législative, en un an et demi, émis des avis. Lorsqu'une motion, parce que l'Assemblée nationale procède par motion, est adoptée — exemple, le député de Laval présente un mercredi après-midi, à la journée des députés, une motion qui est débattue, un vote sera enregistré, un vote majoritairement positif ou négatif — lorsque ce vote sera pris, ce sera une décision de l'Assemblée nationale, non pas un voeu, non pas une opinion. Ce sera une décision de l'Assemblée nationale.

M. Lavoie: C'est arrivé dans le passé.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je pense, M. le Président, que la motion telle que présentée est d'avis que, mais à partir du moment, M. le Président, et c'est cela qui est important, il va y avoir un vote sur la motion, à partir du moment où le vote est enregistré, il y a une décision que l'Assemblée prend, aussi bien dans le domaine des lois. Est-ce que le gouvernement, lorsqu'il présente son budget, vient recevoir le voeu de l'Assemblée nationale? Il vient faire adopter son budget, il vient faire adopter ses crédits.

M. Lalonde: C'est une loi.

M. Vaillancourt (Jonquière): II vient présenter des lois, il vient faire décider de ses lois, par l'Assemblée nationale.

M. Lalonde: C'est cela.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je pense, M. le Président, que cette motion, justement, a pour effet de donner, de vouloir donner, de vouloir accorder à l'Assemblée nationale un mandat qui n'esr pas le sien.

M. le Président, ces arguments avaient surtout comme principale raison d'être les mots "avis de l'Assemblée nationale" demandés et écrits dans la motion du député de Laval. Mais je pense que les arguments majeurs sont quand même que cette deuxième motion d'amendements essaie de faire, par un moyen détourné, indirect, ce que la première motion défendait de faire, ou voulait faire. D'ailleurs, j'ai demandé ce matin au député de Laval: Comment l'avis sera-t-il donné pour obtenir l'avis de l'Assemblée nationale? Comment? L'Assemblée nationale, M. le Président, procède par motion, nous avons des motions de première lecture...

M. Lavoie: L'Assemblée nationale ne peut pas agir autrement que par motion. C'est un grand principe.

M. Vaillancourt (Jonquière): Bon, alors comment l'avis sera-t-il donné? M. le député de Laval me répond: Par motion.

M. Lavoie: Par motion. Une résolution.

M. Vaillancourt (Jonquière): Résolution ou motion.

M. Lavoie: Une résolution devient une motion votée.

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est cela, et à partir du moment où l'Assemblée nationale a voté une motion, l'Assemblée nationale n'a pas émis un voeu, l'Assemblée nationale a pris une décision, soit d'adopter un budget, soit de blâmer le gouvernement, soit d'adopter telle loi, soit d'adopter telle motion. Et, M. le Président, l'Assemblée nationale n'émet des voeux qu'en matière non législative. A part cela, elle prend des décisions.

M. Lalonde: C'est cela.

M. Vaillancourt (Jonquière): Or, M. le Président, les arguments que je voulais invoquer, plus tous les arguments de nature constitutionnelle qui ont été soulevés ce matin et qui font en sorte que cette motion est irrecevable, aussi bien la première que la deuxième. (15 h 30)

Le Président (M. Clair): M. le député de Laval.

M. Lavoie: J'aurais une définition à vous donner. Je crois que l'intervention du député de Jonquière renforce notre position. Loin de la détruire, il l'appuie...

M. Vaillancourt (Jonquière): Expliquez-moi cela!

M. Lavoie: ... et il ajoute des arguments. C'était un allié inconnu. Je le remercie beaucoup.

M. Vaillancourt (Jonquière): ...

M. Lavoie: C'est sûr qu'on fait... Nous avons reconnu que le premier moyen que nous voulions employer attaquait les prérogatives du lieutenant-gouverneur en conseil. Nous avons retiré de bon gré cette motion, parce que c'était contre, nous le reconnaissons, la tradition et le droit constitutionnel même. Il est vrai que nous prenons un autre moyen, qui est tout à fait légal. On le fait indirectement. On n'a pas le droit de faire indirectement illégalement ce qu'on n'a pas le droit de faire directement illégalement, mais on peut faire indirectement légalement quelque chose qu'on n'a pas le droit de faire directement illégalement. C'est très simple. Ce qu'on veut...

M. Lalonde: Distinction très importante.

M. Lavoie: Très importante! Ce qu'on veut, on l'a dit, c'est un débat à l'Assemblée, c'est une prise de position. On ne veut pas d'engagement du gouvernement qui soit toujours chapeauté par une décision du lieutenant-gouverneur en conseil. On a mis cela de côté. On veut une tribune. On veut un débat. Notre débat sera d'autant plus fort que ce ne sera pas un débat unilatéral; c'est même un débat bi et trilatéral à l'Assemblée nationale. Tous les partis politiques auront une plate-forme, une tribune pour informer la population avant un référendum, c'est tout.

Vous dites que le gouvernement n'est pas assujetti à l'opinion de l'Assemblée nationale. Bien plus que cela, dans la réglementation, c'est prévu à bien des places, et c'est prévu dans des lois que l'exécutif ne peut agir dans certains cas avant de consulter... C'est depuis quelques années. C'est prévu dans la loi que des règlements ne peuvent être adoptés avant qu'une commission parlemen-

taire ne puisse siéger sur de tels règlements. C'est l'opinion d'un démembrement de l'Assemblée nationale. La preuve de toute la réglementation, c'est qu'il y a des avis pour consulter la population. On donne l'occasion à la population en général, dans la Gazette officielle, de donner son avis, non seulement à l'Assemblée nationale, mais à toute la population.

Il n'y a rien d'irrégulier pour le gouvernement d'être forcé à demander l'avis, s'il considère que, justement, par cette motion nous invitons...

Cet avis, cette opinion, le gouvernement, en aucune façon, dans notre motion n'est même tenu de la respecter. Nous voulons institutionnaliser une espèce de motion le mercredi pour que l'Opposition puisse faire cela. Il peut arriver fort bien, c'est une simple formalité, qu'au moment où on discutera de la motion ou des brefs, on soit soumis aux règles que nous avons actuellement où il n'y a plus de motion le mercredi. Il n'y en a plus actuellement. Cela peut fort bien arriver. Il y a trois semaines dans le mois de juin et trois semaines dans le mois de décembre où il n'y a aucun moyen pour un député de présenter une motion le mercredi. C'est une sauvegarde additionnelle. On institutionnalise, si vous voulez, une espèce de débat public.

Plus que cela — c'est là que je ne rejoins pas le député de Jonquière — une motion — c'est quelque part dans le règlement. Je ne sais pas si on l'a mis dans le nouveau règlement, mais c'était dans l'ancien — une motion peut être un ordre de l'Assemblée; c'est dans les prérogatives de l'Assemblée. La preuve, c'est que l'Assemblée ou une commission donne l'ordre de faire comparaître un témoin. Il est prévu dans les lois de la Législature ou le règlement qu'on peut forcer — cela devient un ordre de l'Assemblée — ... Il est sûr que le législatif ne peut donner d'ordre, même pas à l'exécutif. Je diffère complètement de...

Je vais vous donner un exemple qui est arrivé dans le passé et que le député de Chicoutimi a connu. Lors des motions du mercredi, on émet un voeu où l'Assemblée est d'avis que le gouvernement devrait faire ci ou faire ça. On en a eu une dernièrement qui a été adoptée par l'Assemblée, mais qui n'a aucun moyen de coercition, aucun pouvoir. C'était une motion demandant au gouvernement de produire son dossier ou les documents sur sa position sur la souveraineté-association. Cela a été adopté par l'Assemblée. Je vais vous donner un autre cas qui est arrivé il y a une couple d'années.

Si le gouvernement ne faisait pas suite à la motion adoptée il y a un mois ou un mois et demi, par la majorité et par l'Assemblée, unanimement, que le gouvernement devrait produire des documents, on n'a aucun moyen de coercition devant le gouvernement. Le seul moyen qu'on a serait une motion de blâme, motion de censure.

C'est arrivé, le député de Chicoutimi va s'en souvenir, il y a eu une motion de l'Union Nationale qui a été adoptée par l'Assemblée, il y a trois ou quatre ans, déclarant que l'Assemblée est d'avis que le 24 juin ou quelque chose comme ça, soit déclaré journée du drapeau du Québec. Par oubli ou autre chose, il n'y a pas eu de suite donnée par le gouvernement, et cela n'a pas été fait, cela est resté là.

Ce que je vous dis, c'est que cette motion, lorsque c'est un avis de l'Assemblée nationale, même si c'est adopté, ou un voeu de l'Assemblée nationale, même si c'est adopté, le gouvernement n'est pas tenu de les respecter, du tout. Il n'y a aucune obligation juridique, peut-être morale ou d'éthique, de les respecter. Si ce n'est pas respecté, il y a seulement un recours, c'est une motion de blâme.

Je termine, parce que je ne veux pas parler tellement longtemps sur la recevabilité. Je vous dis que c'est seulement une formalité de plus. D'après moi, c'est totalement recevable, M. le Président, et si ça ne fait pas l'affaire du gouvernement ou de la majorité, cela arrive couramment qu'une motion ne fasse pas l'affaire, le moyen n'est pas de la rejeter lors de la recevabilité, c'est de voter contre. Si toutes les motions qu'on présente ne font pas l'affaire du gouvernement, est-ce qu'elles doivent être rejetées dès la recevabilité? Ce n'est pas ça le parlementarisme, même si ça ne fait pas son affaire. Je pense qu'il n'y a rien contre le règlement, contre le droit parlementaire, contre quoi que ce soit. C'est une motion. Si on disait qu'on va faire une motion un peu plus tard, parler d'un débat sur la question de 30 heures, on pourrait dire: Non, il va y avoir trois débats de 30 heures. Ce seraient des emfarges ou des formalités de plus.

Ce n'est pas parce qu'on dit qu'il y aurait trois débats de 30 heures que ça ne serait pas recevable. Si cela ne fait pas l'affaire du gouvernement qu'il vote contre. C'est la même chose. Je crois que c'est totalement recevable quitte à ce que vous votiez contre.

M. Bédard: Cela existe, des règles de recevabilité, cela se plaide, la recevabilité.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président...

M. Lavoie: Oui, je ne vous le reproche pas... Je plaide, mais, par contre...

M. Bédard: Votre argument qu'on n'a qu'à voter contre ou pour n'est pas tout à fait vrai, on a le droit de plaider sur la recevabilité.

M. Lavoie: D'accord.

M. Bédard: C'est ce qu'a fait le député...

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président...

M. Lavoie: Mais je plaide, je dis que c'est recevable, vous dites que c'est non recevable.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président.

M. Bédard: Le président tranchera.

M. Lavoie: C'est au président à décider et vous voterez contre.

Le Président (M. Clair): Le député de Jonquière.

M. Bédard: C'est ce qu'on aura à faire après la décision du président.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, très brièvement. D'abord, pour dire au député de Laval, par votre intermédiaire, que c'est la première fois qu'on argumente sur la recevabilité...

M. Lavoie: Ce n'est pas un reproche que je vous fais.

M. Vaillancourt (Jonquière): ... ce n'est pas avec l'intention d'en abuser, M. le Président, mais lorsqu'on pense sincèrement que ce n'est pas re-cevable, je pense que c'est de notre devoir de le faire.

Deuxièmement, M. le Président, je voudrais prendre acte de l'aveu du député de Laval, qu'il voulait institutionnaliser le débat du mercredi. Alors...

M. Lavoie: Dans ce cas précis.

M. Vaillancourt (Jonquière): Oui, dans ce cas précis. Je ne pense pas dans ce cas précis, qu'une loi soit le lieu privilégié pour remplacer le règlement de l'Assemblée nationale.

M. le Président, le règlement de l'Assemblée nationale existe, toutes les sortes de motions sont possibles pour discuter d'un sujet bien précis. Je pense que le député de Laval a très clairement avoué qu'il voulait se donner une arme supplémentaire pour s'assurer que le débat ou que ce débat bien précis pourrait avoir lieu. Il n'y a personne, je pense, ici, à cette commission parlementaire, qui connaît mieux son règlement, puisque c'est lui qui l'a fait en très grande partie, que le député de Laval.

Le député de Laval, qui connaît très bien ce règlement, veut se donner, et il l'a dit, une arme supplémentaire et, à l'entendre parler, on se demande si ce n'est pas une sorte de moyen de procédure supplémentaire, qu'au lieu de le mettre dans le règlement, il vient le mettre dans la loi 92 pour que, dans ce cas bien précis, il puisse obtenir ce débat précis. Je ne pense pas que ce soit le but de notre commission que de venir donner des garanties supplémentaires à l'Opposition par un moyen de procédure qui pourrait et qui se retrouve d'ailleurs... Je ne connais pas tous les articles par coeur, comme le député de Laval, mais j'ai l'article 24 en avant de moi. Je ne sais pas si c'est un article qui pourrait s'appliquer. Il y a la journée des députés le mercredi, il y a les motions privilégiées qui ont priorité sur tout autre sujet en discussion. M. le Président, je suis convaincu que mon argumentation n'a pas aidé la tâche de l'Opposition, mais je puis vous dire que celle du député de Laval a aidé la mienne, puisqu'il a admis qu'il voulait se donner une garantie supplémentaire de pouvoir obtenir ce débat.

Donc, ce que veut l'Opposition, c'est un débat là-dessus. Et le règlement de l'Assemblée nationale lui donne déjà les moyens d'obtenir ce débat.

M. le Président, très brièvement, le député de Laval dit que le législatif ne peut donner d'ordres à l'exécutif. Je vous dis bien franchement qu'il y a beaucoup de lois au Québec, presque toutes les lois, où, à un moment donné, l'exécutif est soumis au législatif, en ce sens que si, dans un article de loi, on impose une obligation à l'exécutif, celui-ci se doit de respecter cet article de loi qui a été adopté par l'Assemblée nationale.

M. Charbonneau: C'est d'ailleurs l'exécutif...

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est régulier. Je n'ai même pas besoin de nommer de loi. Je pense que dans toutes les lois...

M. Charbonneau: C'est le législatif qui ordonne l'exécution.

M. Lavoie: A la condition que ce soit ratifié par le lieutenant-gouverneur en conseil. C'est le lieutenant-gouverneur qui ratifie les lois.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je pense que le parlementarisme viendrait à en manger un bon coup s'il fallait que l'exécutif ne soit plus soumis au législatif. A ce moment-là, on aurait le droit d'abolir la période des questions. Plus de contrôle, plus de questions.

M. Charbonneau: C'est le législatif qui ordonne l'exécution.

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est un beau sujet.

M. Lalonde: M. le Président, les arguments ont porté jusqu'à maintenant, dans une certaine mesure — j'avoue que la frontière est assez grise. Cela peut porter un peu sur l'opportunité d'appuyer ou de ne pas appuyer l'amendement... Je me rappelle, juste avant l'ajournement, une question que vous aviez posée. Je pense que vous aviez touché le point de la recevabilité.

Auparavant, je vais faire une petite digression. Relativement à la première motion du député de Laval, vous aviez vous-même, comme le règlement vous le permet, soulevé des doutes sur la recevabilité. Ces doutes s'adressaient à la constitu-tionnalité de l'amendement en présumant que l'amendement aurait été adopté.

Je me pose une question, et ce n'est pas du tout pour faire appel à votre réaction. Au contraire, je pense que c'était très sain au point de vue de nos travaux. Dans quelle mesure la constitutionnalité ou les doutes relatifs à la constitutionnalité s'adressent-ils à la recevabilité d'une motion d'amendement?

II faut faire une certaine rétrospective, donc, je ne veux accuser personne d'avoir fait cela à dessein. On a, dans la loi 101, un chapitre qui a été déclaré inconstitutionnel par une cour. Ce n'est pas final, c'est en Cour d'appel. Ce n'est pas décidé encore, mais il y a une Cour supérieure qui a décidé que cela allait contre la constitution.

Lorsque le gouvernement a proposé ces articles comme motion principale, à l'étape de l'étude article par article, le président n'a pas eu, je pense — peut-être qu'il n'y a pas pensé, il n'avait peut-être pas votre vigilance — à se prononcer sur la constitu-tionnalité possible ou l'inconstitutionnalité de chacun des articles.

Alors, pourquoi devrait-on l'avoir? Pourquoi nous autres, comme motion d'amendement, on aurait ce traitement? Ce n'est pas qu'on veuille faire des choses inconstitutionnelles à cet égard. Je pense que nous accueillons vos réactions, vos lumières sur l'aspect constitutionnel, mais je me pose la question sur l'opportunité d'une telle considération au niveau de la recevabilité d'une motion. (15 h 45)

Je reviens donc, après avoir fermé ma parenthèse, sur votre dernière question qui m'apparaît la plus pertinente. Vous vous êtes attaché au dernier mot de la motion d'amendement, que l'opinion de la majorité des électeurs soit adéquatement traitée. Vous vous posez la question à savoir si le traitement adéquat de l'opinion des électeurs lors d'un référendum ne serait pas équivalent à cet engagement du gouvernement de respecter son opinion. C'est comme cela que j'ai compris votre interrogation et je vous remercie de l'avoir faite. On pourrait discourir assez longtemps sur la signification de ces mots, sur l'interprétation qu'on peut en donner, sur l'interprétation que les cours pourraient en donner a niveau constitutionnel, mais je pense qu'au niveau de la recevabilité, nous avons écarté, je pense, de façon assez sûre, le nuage qui pouvait exister au niveau constitutionnel pour vous permettre de déclarer recevable un tel amendement, parce que traitement adéquat pourrait peut-être dire oui. C'est là que je rejoins votre question. La pertinence de votre question pourrait vouloir dire le respect de cette décision, mais elle pourrait vouloir dire autre chose aussi. Elle pourrait vouloir dire une traduction dans des politiques du gouvernement, pas nécessairement exactement, comme on l'aurait prévu, mais adéquatement. Ce n'est pas une équation, une adéquation, on le sait, ce n'est pas exactement une équation.

Par exemple, le dictionnaire Robert, que le généreux député de Jonquière m'a prêté, dit à adéquation: "Rapport de convenance parfaite, équivalence". Ce n'est pas une équation, ce n'est pas nécessairement un engagement du gouvernement de respecter exactement la volonté des électeurs.

Je pense que, compte tenu des propos que j'ai tenus relativement à l'à-propos des questions constitutionnelles dans la recevabilité, le libellé de la motion donne assez de jeu pour permettre à cette commission d'en discuter, parce qu'en cas de doute, je crois que la règle ou la tradition veut qu'on n'empêche pas une commission de discuter d'un amendement, s'il y a seulement un doute quant à sa recevabilité.

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, me permettriez-vous une question pour m'éclairer? N'est-il pas déjà arrivé dans le passé qu'à l'Assemblée nationale même des motions d'urgence, au niveau de la recevabilité, n'aient pas été accueillies, justement parce qu'elles comportaient un certain aspect anticonstitutionnel? Je n'ai pas de précédent que je peux vous nommer, mais j'ai eu l'occasion en me préparant un peu pour prendre ma décision, de parler au secrétaire général de l'Assemblée nationale qui a une longue expérience, et il m'a dit que, de mémoire, il était déjà arrivé des cas. C'est sous toute réserve que je le rapporte, c'est du ouï-dire ce que je vous dis là, mais n'est-il pas déjà arrivé que des motions d'urgence, par exemple, à l'Assemblée nationale n'aient pas été reçues, parce qu'elles traitaient de sujets carrément de juridiction du gouvernement fédéral?

M. Lalonde: C'est fort possible, M. le Président.

M. Lavoie: L'Assemblée nationale ne peut traiter que dans sa compétence, mais il y a quelque chose sur cela.

Le Président (M. Clair): N'en est-il pas de même pour une commission parlementaire?

M. Lalonde: M. le Président...

M. Lavoie: II y a une extension, mais il y a quelque chose dans le règlement — je ne peux pas le trouver — dans une note où il est dit qu'il n'est pas de l'autorité du président — j'en suis sûr — que le président ne peut pas trancher à propos d'une question si c'est constitutionnel ou non.

M. Bédard: Trouvez-nous cela dans le nouveau règlement.

M. Lavoie: Quand même! On n'a pas répété l'ancien, parce qu'il serait deux fois plus épais que l'ancien. Il y a une tradition qui dit qu'il n'est pas de la compétence...

M. Bédard: M. le député de Laval, on en a fait justement un nouveau.

M. Lavoie: ... du président de l'Assemblée ou d'une commission de trancher sur une question constitutionnelle. Cela n'appartient pas au président, il y a des tribunaux pour cela, si une loi n'est pas constitutionnelle.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je ne sais pas si le député de Laval...

M. Bédard: Sauf que vous admettrez avec moi qu'on n'est pas obligé de faire exprès pour mettre des choses, risquer de mettre des choses anti-

constitutionnelles dans une loi pour la voir contester devant les tribunaux surtout.

Le Président (M. Clair): Attendez.

M. Lalonde: Vous m'avez posé une question.

Le Président (M. Clair): Oui.

M. Lalonde: M. le Président...

M. Lavoie: Mais le président n'est pas un juge, ce n'est pas à lui à trancher si c'est constitutionnel ou non. Ce n'est pas son rôle. Ce sont les tribunaux qui font cela.

Le Président (M. Clair): A l'ordre! A l'ordre! A l'ordre, messieurs!

M. Bédard: II vient d'en trancher une tantôt et vous avez accepté la décision.

M. Lavoie: J'ai retiré la motion.

M. Bédard: Vous avez accepté la décision. Non seulement vous l'avez acceptée, vous avez retiré votre motion.

M. Lavoie: Je l'ai reconnu.

M. Bédard: Là, vous ne le reconnaissez pas, c'est tout.

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, vous m'avez posé une question. Je ne peux pas répondre d'expérience, dans les trois ou quatre ans que j'ai été ici, je ne peux pas témoigner d'un cas dont je me souvienne. Les seuls cas dont je me souvienne, c'est lorsque le président évaluait le degré d'urgence. Je ne me souviens pas d'un cas où on aurait décidé qu'il s'agissait d'un champ de compétence fédérale à propos duquel l'Assemblée nationale ne pouvait pas se prononcer.

Dans un cas — c'est par hypothèse — carrément anticonstitutionnel, par exemple, si l'Assemblée nationale, sur une motion d'urgence, voulait, je ne sais pas, moi, se prononcer sur la conduite d'un ambassadeur du Canada à Paris. A ce moment-là, ce serait possible, et je serais d'accord avec vous. Mais dans un cas de doute, "borderline", dans un cas, réellement, où on se pose des questions, il me semble que c'est l'obligation du président de laisser la commission en délibérer.

Je me souviens d'un précédent où un autre président, que je ne désignerai pas, M. le Président...

M. Vaillancourt (Jonquière): ... seulement regarder.

M. Lalonde: Je vous regarde, M. le Président. ...avait justement décidé — je pense que c'était pour l'amiante — que, dans un cas de doute... Naturellement, le député de Jonquière a présidé plusieurs de ces séances. D'ailleurs, il a fait un excellent président, je dois l'avouer, je dois le reconnaître, mais dans un cas de doute, à un moment donné, on a eu une décision. Il a dit: Dans un cas de doute, je laisse la commission en délibérer. J'aurais de la difficulté à trouver exactement quel amendement, parce qu'il y en a eu quelques-uns.

Mais, dans ce cas-ci, le libellé de la motion écarte, de façon assez éloignée, le problème constitutionnel. On vous a dit très franchement pourquoi on l'avait fait. C'est possible qu'une obligation législative du gouvernement de prendre un engagement relativement à un référendum soit inconstitutionnelle. On vous a donné les raisons. A ce moment-là, ça devient tout à fait une question de libellé. Là, il n'y a pas d'obligation du gouvernement de prendre un engagement.

Le député de Jonquière dit: Bon! On fait indirectement ce qu'on ne peut pas faire directement. Ce n'est pas tout à fait le cas. Laissez-moi vous le proposer, avec tout le respect que j'ai pour le député de Jonquière. On a simplement écarté le problème constitutionnel, sauf la question que je vous ai posée quant au traitement adéquat de la décision.

Je vous dis que l'ombre au tableau est relativement marginale pour que vous ne tranchiez pas de la constitutionnalité, compte tenu des propos que j'ai tenus là-dessus, sur votre pouvoir de le faire, d'ailleurs.

M. Bédard: M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le ministre.

M. Bédard: On se rend compte rapidement que le député de Marguerite-Bourgeoys en est rendu à plaider en fonction des présomptions pour essayer de faire accepter cette motion qui est présentée. Il nous avoue très carrément que nous sommes dans une zone grise par rapport à cette motion qui est présentée, par rapport à la recevabilité. Il plaide qu'en cas de doute il faudrait laisser délibérer la commission, sauf que sur le fait d'accepter un amendement qui pourrait être constitutionnel ou pas, nous avons quand même... le président, également, comme représentant de l'Assemblée nationale, ne doit pas fonctionner en cas de doute. Il doit fonctionner en raison d'une décision à prendre d'une très grande importance.

Je ne vois pas pourquoi on se permettrait, en plaidant la présomption du doute, d'accepter une motion qui, de l'avis de chacun, pourrait être contestée quant à sa constitutionnalité, alors qu'il y a d'autres moyens très simples qui existent dans notre règlement et qui peuvent permettre d'atteindre les mêmes buts, à savoir si le gouvernement se sent lié, par exemple, par un référendum ou une consultation qu'il veut tenir. Il y a d'autres moyens qui existent, qui sont dans notre règlement. Il y a la période des questions; ça se pose, une question, au gouvernement, pour savoir s'il va être lié par la consultation qu'il veut tenir auprès de la

population, il y a l'autre moyen que constitue la motion du mercredi. Etant donné, justement, les représentations du député de Marguerite-Bourgeoys, qui avoue que nous sommes dans une zone grise, dans un cas de doute, je pense que nous devons... Je me permettrais, M. le Président, de nous inviter tous et de vous inviter aussi à la plus grande prudence.

M. Lalonde: Question de règlement, M. le Président, à cause des propos que le ministre a cru bon interpréter de ma part, je n'ai pas fait d'aveu qu'on était dans une zone grise, je n'ai fait que l'hypothèse que votre question nous amènerait dans une zone grise, si vous aviez raison.

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière, rapidement, parce que vous intervenez régulièrement.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je pense qu'on parle beaucoup de constitutionnalité. Un dernier argument, j'ai parlé tout à l'heure de notre règlement, le ministre de la Justice en a parlé. Il y a une section à notre règlement, et je fais suite aux propos, encore une fois, du député de Laval — je m'excuse de me répéter, mais je voudrais donner un exemple — il y a une section dans notre règlement qui s'appelle "motion d'urgence". Si on va à la page 37 de notre règlement, il y a d'autres genres de motions qui peuvent être présentées, des motions privilégiées, des motions d'urgence.

M. Lavoie: Vous savez qu'elle est à la discrétion du président, le président de l'Assemblée peut la rejeter. C'est uniquement le président qui décide si elle est d'urgence ou non.

M. Bédard: On n'a pas besoin d'une motion d'urgence...

M. Vaillancourt (Jonquière): Une motion d'urgence ou une motion privilégiée.

M. Lalonde: On n'est pas pour défendre la décision du président de...

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lalonde: On les fait pour la population, pas pour les députés.

M. Vaillancourt (Jonquière): Ou une question au feuilleton, M. le Président, une question à l'Assemblée nationale.

M. Lalonde: On est là seulement pour la population, les députés...

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est un moyen de procédure qu'on veut introduire dans une loi. On vous demande de méditer sur cette question.

M. Bédard: On vous pose des questions pour la population, aussi.

M. Lavoie: Le gouvernement peut attendre quatre mois avant de répondre à une question. Voyons! Apportez des arguments.

Le Président (M. Clair): Un dernier intervenant, s'il vous plaît, le député de Mont-Royal, sur la recevabilité.

M. Ciaccia: La question de constitutionnalité du sujet a été soulevée. Je peux voir qu'avec la motion antérieure, il y avait une question de constitutionnalité parce que, si le gouvernement est lié, il se peut qu'avec la matière, il ne puisse pas agir; ce ne serait pas constitutionnel de donner effet à cela. Dans la motion qui est devant nous, on dit que, pour que... l'avis de l'Assemblée nationale sur les mesures qui devraient être prises, éventuellement, par le gouvernement, pour que l'opinion de la majorité des électeurs soit adéquatement traitée...

Franchement, en regardant le libellé de cette motion et en examinant la façon dont elle est rédigée, il n'y a rien d'inconstitutionnel dans ce libellé, parce qu'il peut y avoir différents moyens de traiter l'opinion adéquatement. Il n'a rien d'inconstitutionnel à la face même; vous pouvez prendre certaines mesures ou essayer de prendre certaines mesures qui ne seront pas constitutionnelles, mais il ne faut pas présumer d'avance que vous allez prendre des mesures qui ne seront pas contitutionnelles. Vous pouvez prendre des mesures très constitutionnelles pour vous assurer que la population va être adéquatement traitée. Alors, pourquoi présumer que quelque chose d'illégal sera fait, quand il est possible, en regardant la motion et en la lisant, de dire: On va le faire par des moyens constitutionnels?

Je ne crois pas, M. le Président, que, dans votre décision, la question de constitutionnalité devrait être un problème, parce que le libellé même n'est pas inconstitutionnel.

M. Vaillancourt (Jonquière): On est prêt à entendre votre décision, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Le rôle d'un président, c'est un peu le rôle d'un juge, et on dit parfois que la qualité des décisions des juges dépend de la qualité de l'argumentation des plaideurs. Si ma décision est à la hauteur de la qualité des plaidoiries qui ont été faites sur ce sujet, je pense que vous serez satisfaits de ma décision. De toute façon, je ferai mon possible en exerçant mon jugement.

Le rôle premier d'un président de commission parlementaire, comme celui du président de l'Assemblée nationale, c'est de veiller au respect des droits des membres de la Législature, des membres de l'Assemblée nationale. Si on regarde dans la Loi de la Législature, par exemple, cela s'étendrait jusqu'à l'exécutif, puisque, en vertu de la Loi de la

Législature, la Législature de la province de Québec se compose du lieutenant-gouverneur et de l'Assemblée nationale. Est-ce que c'est le rôle d'un président de commission parlementaire ou du président de l'Assemblée nationale de décider de la constitutionnalité d'une motion de fond comme d'une motion d'amendement? On peut se poser la question, mais je pense que, pour les fins de la décision que j'ai à rendre, je n'aurai pas à me prononcer sur la constitutionnalité comme telle de la motion d'amendement, mais plutôt sur la mesure de légalité ou de respect des droits et privilèges de l'Assemblée nationale en rapport avec cette motion d'amendement. (16 heures)

Si on revient au texte intégral de la motion d'amendement qui est proposée, on y lit ce qui suit: "Un référendum portant sur le statut constitutionnel du Québec ne peut être ordonné sans que le gouvernement, avant l'émission du bref référendaire, n'ait requis l'avis de l'Assemblée nationale sur les mesures, etc". Le député de Jonquière argumente que le rôle de l'Assemblée nationale, c'est de décider et que, partant, l'Assemblée nationale ne devrait pas à avoir seulement à donner un avis, mais bel et bien à décider.

De son côté, le député de Laval dit en résumé: Ce qu'on veut, d'une part, c'est une prise de position officielle du gouvernement et j'ai mis entre guillemets "institutionnaliser le débat du mercredi". Dans la mesure où les mots "que le gouvernement n'ait requis l'avis de l'Assemblée nationale" signifient ce que je viens de dire, soit d'institutionnaliser le débat du mercredi, il m'ap-paraît — c'est là, je pense, le rôle d'un président de commission comme du rôle du président de l'Assemblée nationale — qu'il y a à tout le moins un danger de réduire le pouvoir de l'Assemblée nationale de décider, effectivement.

Est-ce que l'Assemblée nationale ne fait que décider? Je ne pense pas. Mais une chose est claire, c'est que l'Assemblée nationale peut toujours décider et, à la lecture de l'amendement, il m'apparaît qu'on pourrait, éventuellement, et assez facilement, en venir à la conclusion qu'en rapport avec les mesures qui doivent être prises par le gouvernement pour que l'opinion de la majorité des électeurs soit adéquatement traitée, si ce n'est qu'un avis, l'Assemblée nationale peut donner, bien sûr qu'elle a le pouVoir, actuellement, de donner un avis là-dessus, bien sûr que l'Assemblée nationale, du moins au point formel, par les motions qui y sont adoptées le mercredi ou les motions de blâme, l'Assemblée nationale est d'avis que, bien sûr que l'Assemblée nationale a le pouvoir de donner un avis, mais il m'apparaît qu'en cette matière, comme dans toute autre d'ailleurs, l'Assemblée nationale peut faire beaucoup plus que donner un avis. Elle peut décider, et c'est dans la mesure où la motion d'amendement peut diminuer les pouvoirs des membres de l'Assemblée nationale, comme législateurs, pour prendre des décisions, que l'amendement est irrecevable.

De plus, les pouvoirs et privilèges des mem- bres de l'Assemblée nationale, comme je l'ai dit précédemment, sont intimement liés à ceux du Conseil exécutif et, partant, du lieutenant-gouverneur, du gouverneur général. D'ailleurs on voit au début des lois, on a lu pendant longtemps, si on ne le lit pas encore: Du consentement de Sa Majesté, l'Assemblée nationale est d'avis que...

Si je porte maintenant mon attention sur les derniers mots de la motion", pour que l'opinion de la majorité des électeurs soit adéquatement traitée", il me semble que, dans cette partie, encore une fois dans la mesure du respect des droits et privilèges de l'Assemblée nationale et indirectement de l'exécutif, on porterait atteinte au vieux principe qui dit: "The King can do no wrong".

Il y a une certaine présomption qu'on retrouve dans ces expressions qu'effectivement le gouvernement pourrait, que l'Assemblée nationale du Québec pourrait ne pas adéquatement traiter le résultat qui serait connu après la tenue du référendum, ou qu'on envisagerait, en tout cas. Pour cette raison aussi, il m'apparaît qu'on risque de toucher non pas à l'équilibre constitutionnel, puisque je ne veux pas rendre de décision sur le pouvoir d'un président de décider de choses constitutionnelles ou pas, mais on risque d'avoir des implications sur l'équilibre fragile de la structure constitutionnelle du Québec, pour autant que les membres de l'Assemblée nationale et que l'institution de l'Assemblée nationale sont concernés.

Enfin, dernier argument qui me motive à rejeter, à déclarer irrecevable la motion d'amendement, c'est que le député de Marguerite-Bourgeoys, comme le député de Laval, ont bien indiqué que le but visé était de faire indirectement mais légalement, ce qu'ils avaient eux-mêmes reconnu comme étant directement illégal. Bien que je reconnaisse la volonté des représentants de l'Opposition officielle pour faire légalement, mais indirectement ce qui, directement, était illégal, il m'apparaît que les déclarations faites par les membres même de l'Opposition officielle dans leur argumentation sont clairement que si leur amendement veut dire quelque chose, c'est bel et bien dans le sens direct qui était poursuivi. En conséquence, malgré tous les efforts qu'ils ont faits, le résultat, si je déclarais l'amendement recevable, serait de considérer, dans les circonstances, que ce serait de permettre de faire indirectement ce qu'on a soi-même reconnu qu'il était directement illégal de faire.

Pour toutes ces raisons, je déclare l'amendement proposé par le député de Laval irrecevable.

M. Lavoie: Est-ce que je peux vous poser une question? Je respecte votre décision et je ne reviens aucunement sur votre décision. Je vous pose une question à titre de président de commission. Si je voulais faire une motion à ce moment-ci sur un article du projet de loi, l'article 20, par exemple, amorcer un débat, une décision ou un amendement à l'article 20, je n'aurais pas le droit de le faire, parce que ce serait irrégulier, ce que j'ai voulu vous dire, mais je pourrais le faire à

l'article 20, je pourrais faire, légalement, à l'article 20, ce que je n'ai pas le droit de faire illégalement immédiatement, c'est seulement ça.

Le président (M. Clair): Je pense vous avoir indiqué, M. le député de Laval, je pense que j'ai bien saisi votre distinction, même si ma décision est rendue, j'ai bien compris votre distinction, vous avez tenté de faire indirectement, mais légalement, ce qui directement, vous le reconnaissiez vous-même, était illégal.

Je comprends vos efforts, mais, dans la discrétion que je dois humblement exercer, il m'ap-paraît que vous n'avez pas réussi, c'est la raison pour laquelle j'ai considéré irrecevable votre motion d'amendement.

M. Lalonde: M. le Président, question de directive. Comme le règlement vous permet, proprio motu, de suggérer des changements, des motions pour les rendre acceptables, comment pourriez-vous faire des suggestions, quelles suggestions pourriez-vous faire relativement à cet amendement, pour qu'il soit recevable, étant donné que vous avez déjà dit que si la motion permet d'obtenir les mêmes résultats que celle qu'on a retiré, elle serait irrecevable fatalement?

Le président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, sur votre demande de directive, je n'ai pas l'intention de vous donner la directive que vous demandez, pour la raison que le président dispose de la recevabilité des amendements, rend des décisions sur les questions de règlement au fur et à mesure qu'elles lui sont présentées, mais il m'apparaîtrait que de vouloir répondre à votre demande de directive serait de m'écarter de ce rôle qui est celui du président.

M. Vaillancourt (Jonquière): Adopté, M. le Président?

M. Lalonde: M. le Président.

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: L'article 6 est un article qui est le noeud de ce projet de loi. Vous avez déjà — et je vous en remercie — déclaré recevables des motions d'amendement tendant à disposer de questions relatives à un référendum en particulier, c'est-à-dire celui, le seul, parce qu'il faut quand même arrêter de ce conter des histoires, de se chanter des chansons, le seul qui soit la véritable raison de ce projet de loi, c'est-à-dire le référendum sur l'indépendance. On va oublier pour l'instant le référendum présidentiel, sur la largeur des routes et tout cela.

Or, si on parle du référendum...

M. Bédard: C'est votre opinion.

M. Lalonde: Est-ce que le ministre veut m'in-terrompre?

M. Bédard: C'est votre opinion.

M. Lalonde: C'est toujours mon opinion quand je parle.

M. Bédard: Vous pouvez vous conter des histoires.

Le Président (M. Clair): Je suis sûr que le ministre ne voulait pas vous interrompre.

M. Lalonde: A ce moment-là, vous pourrez le rappeler à l'ordre.

Le Président (M. Clair): Vous avez la parole, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Si on parle donc du référendum sur l'indépendance, on accroche immanquablement la souveraineté-association, parce que c'est la théorie de la souveraineté-association qui exprime l'option constitutionnelle indépendantiste du Parti québécois. Formellement promis par le Parti québécois, au cours de la dernière campagne électorale, le référendum sur l'indépendance doit en conséquence, nécessairement porter sur l'option de souveraineté-association.

Or, cette notion de la souveraineté-association n'a jamais été clairement définie, et le gouvernement péquiste, et même des députés ministériels, l'ont explicitement reconnu lorsque avec tous les autres membres de l'Assemblée nationale, ils ont voté, le 12 avril 1978, je crois, une motion de l'Opposition officielle demandant au gouvernement de définir sans délai la théorie de la souveraineté-association. On sait aussi que le conseil national du Parti québécois a même exigé qu'un congrès spécial soit tenu à cet effet.

Par ailleurs, et à même les fonds publics, il faut le dire, le gouvernement a fait faire des études élaborées, précisément pour définir le contenu de cette option constitutionnelle de la souveraineté-association.

Ce sont des études techniques, dit-on, qui doivent être sous peu rendues publiques dans leur version originale, ainsi que l'a finalement compris le premier ministre, après plusieurs volte-face, et quelques valses hésitation.

Ces études, toutefois, ne sauraient tenir lieu et place de la définition elle-même de l'option constitutionnelle du gouvernement, définition promise aux membres de l'Assemblée nationale et aux membres du Conseil national du Parti québécois. Le gouvernement péquiste ne peut sûrement pas, dans les circonstances, refuser de dire aux Québécois ce que la souveraineté-association signifie exactement ou se contenter de dévoiler, au compte-gouttes et au gré de sa stratégie de simples hypothèses générales ou de conclusions partielles, au sujet de son option indépendantiste dite de la souveraineté-association.

Le Parti québécois s'est formellement engagé à ce que le référendum porte sur son option constitutionnelle. Ce n'est pas un engagement de l'Opposition officielle, ce n'est pas un engagement d'aucun parti politique autre que le Parti québé-

cois, les Québécois ont le droit de savoir ce que veut dire au juste la théorie de la souveraineté-association. En conséquence, le gouvernement péquiste doit le dire de façon concrète, précise et complète, et cela nécessairement avant la tenue du référendum sur l'indépendance, pour qu'un débat valable, public, puisse, avec avantage, s'engager véritablement sur cet élément fondamental de notre avenir collectif et individuel. (16 h 15)

C'est donc notre intention, M. le Président, de présenter un amendement au projet de loi 92 qui fera au gouvernement une obligation légale de déposer à l'Assemblée nationale, plusieurs mois avant l'émission du bref référendaire, un document définissant concrètement et définitivement son option constitutionnelle de la souveraineté-association. Il devra alors nécessairement s'agir d'un document fondamental qui permettra aux Québécois de connaître la nature véritable de la notion de la souveraineté-association et d'évaluer toutes les conséquences pratiques qui en résulteraient.

A cette fin, la proposition d'amendement que nous avons l'intention de présenter maintenant obligera le gouvernement à satisfaire, dans un document, à un ensemble précis de critères qui serviront de base au jugement que les Québécois auront à rendre. Ces critères ont d'ailleurs été évoqués à la suite de questions de l'Opposition officielle dans la déclaration du premier ministre à l'Assemblée nationale le 16 mars 1977 et le 2 mai 1978. Ils sont même inscrits comme tels dans le programme électoral du Parti québécois, édition 1978.

Je présente donc l'amendement suivant: Ajouter les alinéas suivants à l'article 6, et je lis:

Dans le cas d'une consultation populaire portant sur le statut constitutionnel du Québec, il doit s'être écoulé un délai d'au moins trois mois avant le moment où le gouvernement a déposé à l'Assemblée nationale un document définissant clairement son option constitutionnelle et le jour fixé pour l'émission du bref référendaire.

Le document mentionné à l'alinéa précédent doit établir si l'option constitutionnelle proposée par le gouvernement comporte: a) pour le Québec: premièrement, son retrait définitif de l'ensemble fédéral canadien, et, deuxièmement, son accession à l'indépendance et à la pleine souveraineté politique; b) pour les Québécois: premièrement, la perte de leur citoyenneté canadienne; deuxièmement, l'abandon de leur droit d'élire des députés à la Chambre des communes du Canada et d'avoir des représentants québécois au Sénat canadien; troisièmement, la cessation de leur droit d'accès aux cours de justice fédérales, et, en particulier, à la Cour suprême du Canada; quatrièmement, leur inhabilité à occuper quelque poste que ce soit dans la Fonction publique canadienne et dans les organismes publics et parapublics du Canada.

Ledit document doit, le cas échéant, établir les modalités de mise en branle du processus d'accession du Québec à l'indépendance et à la souveraineté politique, en particulier au titre du transfert conséquent des compétences étatiques et de la répartition des avoirs et dettes et de la propriété des biens publics entre le Québec et le Canada.

Ledit document doit également établir si l'option constitutionnelle proposée par le gouvernement comporte un ou des éléments d'association économique éventuelle du Québec avec le Canada, auquel cas, ledit document doit, le cas é-chéant, établir les modalités d'une telle association, en particulier, au titre de la monnaie, de la libre circulation des biens, des personnes et des capitaux et des organismes communs d'administration d'une telle association économique.

C'est la fin de mon amendement. Je ne sais pas s'il a été distribué. On me dit qu'il a été distribué.

M. Vaillancourt (Jonquière): Sur la recevabilité, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Sur la recevabilité, M. le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, lorsque j'ai soulevé, à la motion précédente, un argument sur la recevabilité, j'ai dit que je n'avais l'intention d'en soulever que lorsque j'estimais, en fonction du règlement qui nous guide, qu'une motion d'amendement qui nous était présentée me semblait irrecevable.

Or, je dois vous dire que c'est le cas relativement à cette motion. Avant de vous livrer mes trois arguments à l'encontre de la recevabilité, j'aimerais vous lire, au soutien de cette argumentation, quelques références que l'Opposition officielle a faites relativement à la recevabilité de deux motions antérieures qui n'ont pas été débattues sur le plan de la recevabilité. "Nous n'avons malheureusement pas pu obtenir du gouvernement qu'il procède, dans le cas du référendum sur l'indépendance du Québec, par une loi spéciale comportant le texte de la question posée. Il n'est cependant pas dit que nous ne puissions pas amener le gouvernement à reconnaître, à l'intérieur de la loi-cadre, le caractère tout à fait particulier d'une consultation populaire portant sur le statut constitutionnel du Québec."

A la séance de jeudi dernier, une motion d'amendement à l'article 6 du projet de loi 92 présentée par le député de Marguerite-Bourgeoys, n'a posé aucun problème de recevabilité, alors qu'elle avait précisément pour effet de reconnaître le caractère particulier d'une consultation populaire portant sur le statut constitutionnel du Québec. M. le Président, ce préambule est pour vous dire que les arguments que je vais employer maintenant n'ont aucunement pour but de venir porter atteinte au jugement sur la recevabilité que vous avez déjà posé. C'est parce qu'il y a...

M. Lalonde: J'aurais une question. Il a lu un texte, pourrait-on savoir quel texte?

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est un texte qui m'a été remis par l'Opposition officielle d'ailleurs, que je remercie.

M. Lalonde: Ah! c'est le texte de la conférence de presse.

M. Vaillancourt (Jonquière): Probablement.

M. Lalonde: C'est simplement ce que je voulais savoir.

M. Vaillancourt (Jonquière): Le 7 juin 1978. M. le Président, tout cela pour dire qu'il y a une différence — c'est le premier argument — fondamentale entre cette motion que nous avons devant nous, actuellement, et ce que l'on qualifie, de façon très subtile, de jurisprudence, relativement à la recevabilité des deux motions antérieures à l'article 6.

Dans les deux motions initiales, on disait: Dans le cas d'un référendum sur le statut constitutionnel du Québec. C'était une allusion à un type de référendum, à une espèce de référendum, à un genre de référendum.

Je pense qu'à ce titre, nous étions bien fondés, comme membres du parti ministériel, de ne pas intervenir sur la recevabilité, puisque je pense qu'il peut en être question, dans une loi générale, on pourrait dire, dans le cas d'un référendum, d'un type de référendum.

Mais la motion que nous avons devant nous est tout à fait différente. Elle n'a pas trait à un type de référendum. Elle n'a pas trait à une espèce de référendum, mais, au contraire, elle a trait à un référendum bien particulir, bien précis, et que le député de Marguerite-Bourgeoys d'ailleurs a précisé lui-même avec moult arguments, c'est-à-dire le référendum que le gouvernement ou que le parti ministériel a lui-même promis durant la campagne électorale qui a amené les élections du 15 novembre 1976 et l'élection du Parti québécois.

Ce n'est pas à un type de référendum auquel on fait allusion, mais à un référendum bien précis. Je pense que c'est un argument de poids. C'est d'ailleurs pour cette raison, et je le répète, que nous ne sommes pas intervenus sur la recevabilité des deux premières motions présentées par l'Opposition officielle, puisqu'elles avaient trait à un type de référendum et non pas à un référendum particulier.

Deuxième argument, M. le Président. Le projet de loi que nous étudions actuellement sur la consultation populaire est une loi organique. C'est une loi organique qui prévoit quoi? Les mécanismes qui vont régir la tenue des consultations populaires qui seront entreprises en vertu du projet de loi 92, quelle que soit la consultation populaire.

Quels étaient les objets des deux premières motions de l'Opposition officielle? La première motion, c'était relativement à un de ces mécanismes.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît! Messieurs, encore une fois, j'ai besoin de votre collaboration sur les questions de recevabilité, pour pouvoir prendre bien en détail... Tout ce que vous dites m'apparaît important. Je fais appel à votre collaboration. M. le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je disais donc que c'est une loi organique qui prévoit des mécanismes. C'est quoi ces mécanismes? C'est qui va avoir le droit de vote. Comment seront calculés les suffrages des citoyens? Est-ce que telle ou telle personne sera habilitée à voter? Quelle est la majorité nécessaire pour adopter la question à l'Assemblée nationale? Comment se déclenche le processus du référendum? Ce sont des mécanismes régissant tous les référendums. C'est donc de la tuyauterie, de la plomberie.

Les deux premières motions de l'Opposition officielle avaient trait à quoi? Elles avaient trait également à de la plomberie, à des mécanismes. La première motion: Cela prendra deux tiers des membres de l'Assemblée nationale pour pouvoir adopter la question. Ce n'est pas une question de fond, M. le Président, c'est une question de mécanique, c'est un mécanisme qu'on voulait introduire dans la loi pour régir les types de référendums mis en branle en vertu de la loi 92.

La deuxième motion avait trait à la question. La question doit être unique et la réponse doit être oui ou non. Ce n'est pas une question de fond. On ne parlait pas de quoi doit être la réponse. On disait: La réponse doit être oui ou non. C'est de la mécanique encore, M. le Président.

Or, qu'est-ce qu'on nous demande par l'amendement? Non seulement, M. le Président, on parle d'un référendum bien précis, mais l'objet même de cette consultation populaire est d'amener une question de fond, de définir une question de fond, pas de la plomberie. Ce n'est pas de la tuyauterie. Là, on parle du Canada, du Québec, on parle de retrait, on parle de citoyenneté, on parle du droit d'élire des députés. Cela, M. le Président, vous admettrez avec moi, à moins que je me trompe, que ce n'est pas une question de plomberie et de mécanismes pouvant régir les consultations populaires de type constitutionnel, mais c'est bel et bien une question de fond. On demande au gouvernement d'émettre une opinion, de déposer à l'Assemblée nationale un document émettant une question de fond, une opinion de fond sur le contenu de la signification d'une notion bien précise.

Je pense, M. le Président, que cette motion pourrait être déclarée peut-être recevable dans le cadre d'une loi spéciale et, encore là, M. le Président, j'ai de fortes réserves. Mais mes réserves, M. le Président, sont complètement disparues, à partir du moment où nous étudions une loi organique, complètement disparues.

Le troisième argument, M. le Président, et je pense que ce n'est pas le moindre, c'est que l'article 64, paragraphe 3, de notre règlement, prévoit que seul un ministre peut présenter une motion qui a comme objet d'imposer une charge additionnelle sur les revenus publics ou sur les contribuables.

Or, M. le Président, et je pense que même s'il est présenté comme troisième argument, il aurait peut-être dû être présenté comme premier, manifestement, en imposant par la loi au gouvernement de déposer un document à l'Assemblée nationale,

donc de faire des études, c'est bien beau de déposer et de définir des choses, mais il faut faire des études; il faut confectionner le document, et nous sommes après la deuxième lecture, M. le Président. Donc, on demande à cette commission parlementaire d'accepter un amendement, de déclarer recevable un amendement qui a pour but de forcer le gouvernement à poser un geste qui va amener des dépenses supplémentaires de la part du gouvernement. Et si on lit l'article 64 de façon très brève, on se rend compte: Une motion ne peut être présentée que par un représentant du gouvernement — on ne se contente pas de ça — après recommandation du lieutenant-gouverneur en conseil — donc le représentant du gouvernement doit avoir l'autorisation du Conseil des ministres — lorsqu'elle a pour objet direct: 3. L'imposition d'une charge additionnelle sur les revenus publics ou sur les contribuables.

M. le Président, très brièvement, je pense que l'un ou l'autre de ces trois arguments, ou l'un ou l'autre de ces trois arguments sont suffisants pour vous convaincre de déclarer irrecevable la motion du député de Marguerite-Bourgeoys. Donc, article 64, paragraphe 3.

Deuxièmement, ce n'est pas un type de référendum, mais un référendum bien précis, et, troisièmement, dans le cadre d'une loi organique, ce que nous demande le député de Marguerite-Bourgeoys, c'est non pas d'introduire un nouveau mécanisme, d'introduire un nouvel élément qui va régir les référendums au Québec, mais, au contraire, d'émettre une opinion de fond sur une question bien précise.

Je suis sûr, M. le Président, que l'Opposition officielle savait fort bien et sait fort bien que cet amendement est irrecevable, mais que ses membres veulent, probablement comme l'autre, discuter de la recevabilité pour faire passer leur message.

De toute façon, M. le Président...

M. Lalonde: Ce dernier argument est très faible.

M. Vaillancourt (Jonquière): Ce n'est pas un argument au soutien de...

M. Lalonde: Non...

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, ça ne milite...

M. Lalonde: C'est presque prêter les...

Le Président (M. Clair):... nullement en faveur de...

M. Vaillancourt (Jonquière): Non, je l'avoue...

Le Président (M. Clair): ... la recevabilité ou de l'irrecevabilité de la motion.

M. Vaillancourt (Jonquière): ... M. le Président, mais je n'ai pu résister à la tentation...

M. Lalonde: C'est son problème. C'est qu'il ne résiste jamais aux tentations, lui. On l'a vu hier soir.

Le Président (M. Clair): Je vais l'aider à résister.

Le Président (M. Vaillancourt): Cela dépend des heures.

M. Lalonde: On ne veut pas qu'il nous raconte sa vie.

M. Vaillancourt (Jonquière): Tout ça pour dire, M. le Président, que je pense que, pour chacune de ces trois raisons, et pour celle que vous jugerez la plus convenable, cette motion devrait être déclarée irrecevable.

M. Lavoie: J'aurais une question à poser au député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je ne m'engage pas à y répondre.

M. Lavoie: Non, mais je pense que vous avez soulevé, mentionné ou invoqué trois points d'argumentation. J'en a noté deux.

M. Vaillancourt (Jonquière): Oui.

M. Lavoie: Une, que ce serait une dépense publique; l'autre, qu'il s'agit d'un projet de loi d'ordre général... (16 h 30)

M. Vaillancourt (Jonquière): Ou organique.

M. Lavoie: ... organique et qu'on ne pourrait pas particulariser, disons une certaine consultation populaire.

M. Vaillancourt (Jonquière): Sur le fond. M. Lavoie: Et votre troisième, c'est quoi?

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est-à-dire que j'aimerais préciser le deuxième, c'est une loi organique où on peut introduire, par des amendements, de nouveaux mécanismes. Ce n'est pas un mécanisme de consultation que nous introduisons par cet amendement, mais c'est une demande d'opinion sur le fond d'une question même, sur l'objet de ce que sera le référendum plus tard, d'un référendum. Le premier, c'est que ce n'est pas un type de référendum, mais un référendum bien précis: celui qui a été promis par le parti ministériel durant la campagne électorale et par l'actuel gouvernement. Donc, ce n'est pas un type de référendum sur l'avenir constitutionnel; c'est un référendum bien précis.

M. Lavoie: Sur votre dernier point, si vous voulez qu'on le particularise davantage, on peut changer la motion de forme. Le président peut le faire lui-même, si vous voulez qu'on particularise

vraiment. S'il s'agit de la consultation populaire que le gouvernement entend tenir on n'a pas d'objection, c'est une modification de forme. Si vous le suggérez, on peut faire cette modification.

Je dis donc qu'il y a eu des décisions rendues depuis les quelques jours que nous siégeons où la présidence, à bon droit, a accepté des motions d'amendement qui identifient ou qui particularisent les consultations populaires, comme cela existe dans beaucoup de législations, par exemple dans la loi organique des assurances, il peut fort bien y avoir un chapitre, un paragraphe ou des clauses portant sur l'assurance-incendie ou même sur l'assurance-vie. D'ailleurs, mon collègue de Marguerite-Bourgeoys va vous donner de multiples exemples dans des lois-cadres d'ordre général, des lois organiques où à certains chapitres, dans certaines clauses, dans certains articles, on particularise dans des cas assez particuliers, assez précis.

Il est évident — d'ailleurs, ce serait une continuité dans les décisions du président — que même si on parle de consultation populaire, de référendum en général, il est tout à fait permis de particulariser, premièrement, soit d'une manière semi-générale, en disant que, sur des consultations d'aspect ou de portée constitutionnelle, comme cela a été fait avant, c'est une particu-larisation — si on peut dire — un peu plus générale. Cela, on peut certainement particulariser encore d'une manière plus définie sur un référendum particulier, que le gouvernement entend tenir ou s'oblige à tenir — j'enlève le mot "obliger", ce n'est pas une obligation qu'on veut faire au gouvernement — comme il pourrait y avoir une loi...

D'ailleurs, il y a des lois tellement particulières qu'on peut avoir dans une loi organique sur la Loi des cités et villes, et faire une particularité en ce qui concerne telle élection qui aurait lieu telle année, en 1978. C'est fort possible, comme on l'a vécu une certaine nuit. Il peut y avoir...

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est une nouvelle loi.

M. Lavoie: II peut y avoir une loi organique pour...

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le député de Laval, s'il vous plaît.

M. Lavoie: ... oui, mais je vous dis que dans une loi...

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est une nouvelle loi.

M. Lavoie: ... générale, il pourrait y avoir un "déterminisme ' ou un "particularisme" spécial.

M. Lalonde: C'est ça...

M. Lavoie: Cela peut arriver. Je vais vous donner un exemple, il peut y avoir...

Le Président (M. Clair): Messieurs, je trouve les arguments du député de Laval très intéressants, aussi intéressants que ceux...

M. Vaillancourt (Jonquière): Les miens aussi, oui?

Le Président (M. Clair):... autant que ceux qui ont été soumis jusqu'à maintenant. Encore une fois, je vous dis...

M. Lavoie: On ne vous a pas interrompu d'ailleurs dans votre argumentation.

Le Président (M. Clair): Ce n'est pas facile de rendre des décisions sur des questions délicates comme celles-là. Alors j'aimerais avoir votre collaboration.

M. Lavoie: Je peux vous donner un autre exemple où il peut y avoir une loi organique sur les négociations dans le domaine public, où on peut viser les négociations qui auront lieu, d'ici 1978 ou en 1979; il n'y a rien en droit parlementaire ou dans la rédaction des lois qui empêche ça, d'aucune façon.

On ne va aucunement contre le principe même des consultations populaires, d'aucune façon. On dit qu'il peut y avoir dans cette loi des consultations populaires sur quoi que ce soit, on pourrait dire dans un paragraphe que, sur une consultation particulière sur le zonage agricole, telles règles s'appliqueront; on pourra apporter un autre amendement sur des expropriations généralisées, il pourrait y avoir telle application. Vous savez, le cadre d'une loi peut être général à condition qu'on ne démolisse pas et qu'on n'attaque pas le principe même de la loi. On peut, sans attaquer ce principe-là, justement...

Notre amendement ne détruit le principe de la consultation populaire d'aucune façon. C'est qu'on particularise dans un cas précis. Quant à l'autre argument apporté par le député de Jonquière, c'est-à-dire que cela serait soumis à l'article 64 et que cela créerait une dépense d'argent, mercredi, on a vu une demande de dépôt de documents d'un député et on peut demander le dépôt... Il y en a eu un, je pense que c'est le député de Mont-Royal, et cela a amené à peu près trois pieds de documentation comme réponse à une question, à une motion, d'ailleurs du député; c'était une demande au ministre de déposer toutes les négociations ou tout...

M. Lalonde: La correspondance.

M. Lavoie: La correspondance et tout. C'est de la photocopie, c'est de la papeterie. S'il fallait, M. le Président, interpréter cela d'une manière aussi restrictive, on ne pourrait plus demander, même un député ne pourrait pas présenter un projet de loi d'ordre public parce que cela amène de l'impression, cela amène une dépense, cela va chez l'imprimeur et tout, 100, 300 copies. Je pense que...

M. Bédard: Cent est pas fort.

M. Lavoie: Ce n'est pas plus fort que l'argumentation du député de Jonquière.

M. Bédard: II y a une différence entre déposer des documents et faire des recherches.

M. Lavoie: Ce n'est pas plus faible non plus. On vit cela d'une manière courante, constamment. Au feuilleton, il y en a. On ne pourrait même plus faire des demandes au feuilleton, des questions au feuilleton ou des demandes de dépôt de documents, parce que cela allonge le feuilleton et cela coûte... Le feuilleton du mercredi coûte tellement cher qu'on a décidé, il y a quelques années, de ne plus le répéter les autres jours que le mercredi. Dans ce cas-là, enlevez-le le mercredi aussi.

Je pense que cet argument n'a vraiment pas de poids. Je pense bien que pour ces deux principes, encore une fois, la commission pourra discuter de cette motion, la majorité ministérielle, si elle ne veut pas l'accepter, votera contre, c'est tout. Il y a également une autre décision qui a été rendue par un vice-président ou par les présidences de l'Assemblée nationale, décision selon laquelle en cas de doute, le président doit toujours permettre une expression. Le président n'est pas là pour restreindre le débat. Même en cas de doute, et je dis qu'il n'y a pas tellement de doute dans ce cas-ci, même s'il y avait un doute, M. le Président, suite à une décision du député de Prévost, une décision très sage, selon laquelle le rôle du président est de permettre la discussion la plus large possible, celui-ci n'est pas là pour restreindre le débat. Je pense qu'en refusant d'une manière trop draconienne toutes les motions ou une deuxième motion ou cette motion-ci, vous pourriez directement restreindre le droit de parole, la liberté de parole des députés. Pour le moment, je n'ai pas d'autre chose à ajouter.

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, je vous remercie de me permettre d'intervenir sur la recevabilité. Je sais que vous vous rendez compte jusqu'à quel point votre décision est importante. Depuis plusieurs années, on parle d'une question qui préoccupe, non seulement tous les Québécois, mais tous les Canadiens; nous sommes actuellement, à étudier un projet de loi qui vise à donner la solution à ce problème, la réponse à cette question, et nous sommes actuellement, avec cet amendement, à toucher le noeud même de la question qui préoccupe tous les Québécois.

Je résume les arguments du député de Jonquière. Tout d'abord, l'article 64, troisièmement, et les deux autres qui, je pense, appartiennent à peu près à la même famille; tout d'abord on demande par cet amendement d'injecter dans la loi un caractère de spécificité, comme disait le député de Terrebonne, non seulement pour une catégorie de référendums, mais pour un référendum, celui sur l'indépendance. C'est très clair, dans notre amen- dement, que c'est celui-là ou plusieurs autres, mais relativement à l'indépendance ou relativement à une option constitutionnelle qui serait le choix du gouvernement parce que l'amendement demande au gouvernement de faire son lit sur son option.

Quant à ce dernier argument sur le référendum, un référendum précis, on a déjà rejeté des motions d'amendement de l'Opposition officielle parce qu'on voulait conserver à cette loi le caractère de loi-cadre. On l'a fait quant à la motion de sous-amendement qui voulait qu'il y ait une réponse oui ou non, qu'il y ait les deux tiers de l'Assemblée nationale pour la question, etc., strictement pour des référendums à caractère constitutionnel. C'est un des arguments invoqués par le côté ministériel pour voter contre. Mais cela n'a pas décrété — je crois que vous allez le reconnaître — une question soulevée au niveau de la recevabilité. Je pense que vous avez reconnu — et c'est important de le dire— le fait que le caractère plus spécifique de cet amendement n'allait pas à l'encontre de la recevabilité.

Je vais vous mentionner — et je vous demanderais de me donner le temps de le faire — des exemples où, dans des lois-cadre, on est allé jusqu'à des détails réellement très restreints. Par exemple, dans le Code des professions, le chapitre 43 dit, à l'article 44 — et le Code des professions, vous savez jusqu'à quel point c'est une loi-cadre, qui veut régir toutes les professions du Québec — ceci: "A l'exception de la Corporation professionnelle des avocats du Québec, de la Corporation professionnelle des notaires du Québec et de la Corporation professionnelle des arpenteurs-géomètres du Québec, une corporation ne peut refuser de délivrer un permis à une personne, uniquement pour le motif que cette personne ne possède pas la citoyenneté canadienne, etc.". Donc, là, on donne des exceptions bien précises.

Un peu plus loin, à l'article 179, on dit; "A l'exception d'un médecin, d'un médecin vétérinaire ou d'un dentiste, agissant conformément aux lois et aux règlements qui les régissent, nul professionnel ne peut faire de radiologie sur les êtres vivants, sans déternir un permis visé à l'article 180".

Encore là, détail bien spécifique d'une loi-cadre...

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lalonde: Détail bien spécifique d'une loi-cadre qui dit: On va parler de radiologie et on va appliquer cela strictement aux médecins, aux médecins vétérinaires et aux dentistes.

Dans la Charte de la langue française, une loi qui a été adoptée sur proposition du gouvernement actuel, on dit, à l'article 81, et je cite: "Les enfants présentant des difficultés graves d'apprentissage doivent être exemptés de l'application du présent chapitre". Un cas bien précis.

A l'article 88, encore de façon plus précise, parce que les enfants ayant une difficulté d'apprentissage pourraient peut-être appartenir à une

catégorie qu'on retrouverait dans divers milieux et on pourrait invoquer un caractère à demi général dans ce cas-là, on dit: "Malgré les articles 72 à 86, dans les écoles relevant de la Commission scolaire crie ou de la Commission scolaire Kativik, contor-mément à la Loi de l'instruction publique, etc., les langues d'enseignement sont respectivement le cri et I'inuttituuit, etc".

On a une loi générale sur le traitement du français au Québec et, dans cette loi générale, on a l'article 88 qui détermine le traitement de la langue dans une, deux ou trois écoles. Combien y a-t-il de commissions scolaires? Peut-être plus, mais une commission scolaire en particulier.

A l'article 97 de la même loi, on dit: 'Les réserves indiennes ne sont pas soumises à la présnte loi". Encore là, une disposition particulière qui ne s'applique qu'à une très petite minorité de personnes vivant au Québec.

La Loi des jurés, que vous connaissez sûrement, M. le Président, à l'article 41, dit: "La présente loi s'applique aux territoires d'Abitibi, de Mistassini et du Nouveau-Québec, dans le district judiciaire d'Abitibi, sous réserve des articles suivants..."

Donc, toute la question 6 qui a pour titre "Dispositions spéciales" pour les mêmes territoires que je viens de mentionner et injectée par le gouvernement, est sûrement acceptée par le président de la commission qui a présidé aux délibérations de l'étude article par article, dans cette loi générale qui est la Loi des jurés. (16 h 45)

Dans le Code des professions, on a adopté des amendements éventuellement, et je vous en lis un. A l'article 48 du chapitre 80, on dit: "Nonobstant les paragraphes b), c), et e), une personne qui, avant le 1er février 1974, était détentrice d'un certificat d admission à l'étude de l'arpentage... Cela commence à être détaillé. Il ne s'agit pas de tous ceux qui détiennent des permis partout. Il s'agit simplement de quelqu'un qui détient un certificat d'admission à l'étude de l'arpentage, et pas n'importe quel permis, c'est avant le 1er février 1974. Est-ce qu'on peut être plus détaillé que cela dans une loi-cadre?

M. le Président, je pense que le principe qui vous a permis d'accepter des amendements concernant le caractère constitutionnel du référendum vous permet, dans le cadre qui a justement été évoqué par le député de Laval, de la présomption qu'une commission parlementaire devrait pouvoir connaître et discuter d'un tel amendement, pour vous permettre d'accepter un amendement qui a trait à un référendum ou peut-être plusieurs, mais référendum sur l'option constitutionnelle du gouvernement, parce que c'est cela, au fond, que l'amendement prévoit, parce qu'il peut y avoir plusieurs référendums là-dessus... Le gouvernement lui-même l'a dit. Peut-être un maintenant — c'est la même loi qu'il y aurait dans cinq ans ou dans dix ans, alors qu'il y en aurait d'autres — mais, à chaque cas, le gouvernement serait obligé de déposer à l'Assemblée nationale un document en question.

Sur l'article 64.-3., le député de Laval a mentionné quelques arguments. Je voudrais simplement ajouter ceci. Je pense que le président d'une commission ne peut pas ignorer ce fait. Comme membre de l'Assemblée nationale, il doit quand même tenir compte de ce qu'il sait. Il n'en a pas une connaissance judiciaire, comme un juge qui n'a pas été informé dans la preuve d'un tel ou tel fait, mais je pense qu'un président de commission diffère d'un juge à ce point de vue. Il doit tenir compte de ce qu'il connaît parlementairement. Il sait que le gouvernement fait des études actuellement. C'est admis, c'est public. Il sait que le gouvernement a pris l'engagement de les rendre publics. Donc, notre motion n'a pas pour effet de faire faire d autres dépenses au gouvernement. Le gouvernement a déjà décidé de faire ces dépenses. La seule chose que la motion forcerait le gouvernement à faire, au-delà de ces études, c'est de prendre ces études, d'en faire une définition et en faire une déclaration ministérielle. Qu'est-ce que cela coûte? Sûrement pas plus cher que d'imprimer un projet de loi d'un député de l'Opposition. A ce point de vue, je pense que l'article 64.-3. devrait être interprété de façon à tenir compte de tout le contexte. Si on demandait au gouvernement de faire faire cinq sondages d'ici le référendum, qui coûteraient $20 000 chacun, d'accord. A ce moment, je pencherais vers l'objection du député de Jonquière. Dans ce cas-ci, le président de la commission sait très bien que ces études sont faites à l'initiative du gouvernement, que ces études vont être rendues publiques et que notre motion d'amendement ne requiert du gouvernement que de faire une définition, un document qui définit. Cela peut être un document de cinq pages, de dix pages ou de vingt pages, mais un document qui définit son option constitutionnelle. Je pense qu'à ce point de vue, l'article 64.-3., qui m'apparaît quand même être peut-être l'argument le plus sérieux du député de Jonquière, beaucoup plus sérieux sûrement que les deux autres, ne devrait pas empêcher la commission de tenir compte et de délibérer de cet amendement.

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, très brièvement, je suis obligé de constater qu'on a parlé beaucoup de mon premier argument, à savoir la différence entre un type de référendum et un référendum bien particulier, mais qu'on a totalement omis de l'autre côté de la table, de parler du deuxième argument, relativement au fait que la loi organique est une loi qui a pour effet de prévoir des mécanismes qui vont régir la tenue d'une consultation populaire, alors que l'objet même de l'amendement du député de Marguerite-Bourgeoys est de faire en sorte que le gouvernement émette une opinion de fond sur l'objet d'un référendum bien particulier. Donc, si l'amendement était déclaré recevable et était adopté dans une loi-cadre, d'abord, M. le Président, j'aime mieux ne pas voir un pareil amendement dans une loi organique

sur les consultations populaires, puisque, M. le Président, si j'étais légiste d'un gouvernement, j'aurais presque honte de le soumettre au comité de législation, mais je me dis, M. le Président, sur le fond, que cela oblige le gouvernement, non pas à prévoir un mécanisme qui va régir les consultations, mais à dire: Quelle est votre opinion sur l'objet de la consultation? Or, la loi que nous étudions actuellement, M. le Président, ce sont les balises qui vont régir les consultations populaires.

Qu'on parle d'un type de référendum bien particulier ou des référendums, actuellement, c'est comme si, M. le Président, on disait: Si le référendum avait lieu sur l'avortement, le gouvernement est obligé, dans les trois mois avant la tenue du référendum, de dire son opinion sur l'avortement, par exemple; le gouvernement est obligé de dire son opinion sur la peine de mort, deuxième exemple. M. le Président, dans le cadre d'une loi générale ou d'une loi-cadre, d'une loi organique, appelez-la comme vous voudrez, et je suis surpris qu'on n'en ait pas parlé, je pense que c'est un argument fondamental, vous voyez cela, une loi-cadre qui prévoit des mécanismes. Ce n'est pas un mécanisme. C'est une opinion qu'on demande au gouvernement. Le gouvernement donnera son opinion mais non pas par une obligation légale dans le cadre d'une loi organique, parce que cela n'a aucunement affaire aux mécanismes qui vont régir.

Deuxièmement, le dernier argument du député de Marguerite-Bourgeoys, les dépôts de documents, M. le Président, ce n'est pas sérieux. Vous êtes lié par le règlement et il y a des articles de notre règlement qui prévoient qu'un ministre qui cite un document, article 177, peut être contraint de le déposer à la demande d'un député. Le député qui le demande exerce un droit. On ne peut jamais être pénalisé à exercer un droit. Le dépôt de documents est prévu, M. le Président, à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale, lorsque nous siégeons tous les jours. C'est un droit, cela fait partie de... C'est même prévu dans le règlement, je ne connais pas l'article, mais on parle de dépôt de rapports de commissions élues, de dépôt de documents. C'est prévu cela. C'est un droit. C'est un droit que les députés ont de poser des questions. C'est un droit également pour le gouvernement, au lieu de donner une réponse verbale, de donner une réponse écrite, de déposer les documents demandés par l'Opposition et, d'autre part, c'est une obligation pour le ministre de déposer un document lorsqu'un député exerce ce droit, de l'obliger à le déposer en vertu de l'article 77. Mais l'article 64 vous fait interdiction, M. le Président, il en fait interdiction. Ce n'est plus un droit, c'est une prohibition, à un autre député qu'un membre du gouvernement, un ministre, après recommandation du lieutenant-gouverneur.

Je suis content de constater, M. le Président, que le député de Marguerite-Bourgeoys admet que son amendement amène le gouvernement à faire des dépenses, cette demande qu'il fait, j'en prends acte, M. le Président, je vous demande d'en prendre acte, cela amène des dépenses.

Justement, le député de Marguerite-Bourgeoys a fait allusion au fait que le gouvernement aurait déjà commencé cet études et que vous ne pouvez ignorer ce fait. Mais le problème n'est pas là. Ce n'est pas un problème d'étude ou non, c'est le problème d'en faire une obligation légale. Ce que le règlement interdit, M. le Président, ce n'est pas de faire des études, c'est de faire une motion autre que par un ministre, qui implique une dépense d'argent. Le gouvernement a le droit d'entreprendre des études, il en a entrepris, vous le savez et tout le monde le sait, mais le problème, ce n'est pas une dépense, de faire des études, c'est la défense de présenter une motion en commission parlementaire ou à l'Assemblée nationale qui implique une dépense de fonds, cela ne peut être fait par une autre personne que le ministre. Donc, M. le Président, je tenais à relever cet argument, qui peut être pertinent, du député de Marguerite-Bourgeoys, que les études sont commencées, mais l'exécutif conserve encore ses pouvoirs. Ici, nous ne sommes pas à l'exécutif, nous sommes au législatif, et nous sommes en commission parlementaire. C'est un prolongement de l'Assemblée nationale. L'exécutif a le droit, par arrêté en conseil ou autrement, de faire certaines dépenses, mais, ici, ce n'est pas la question qui se pose. La question qui se pose, c'est si c'est la bonne personne qui présente l'amendement. Est-ce la bonne personne? Je dis que seul le ministre de la Justice, actuellement, pourrait présenter cet amendement, avec recommandation et autorisation du Conseil des ministres.

Le Président (M. Clair): Messieurs, si vous... M. Lalonde: M. le Président...

M. Levesque (Bonaventure): Ce ne sera pas long. M. le Président, je pense que vous voulez suspendre. Sur un point, si vous me le permettez, soulevé par le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je suis heureux de constater que mon argumentation a fait lever de son siège le chef de l'Opposition officielle. C'est un honneur, M. le Président.

M. Levesque (Bonaventure): Vous avez certainement bien plaidé, M. le député de Jonquière, mais je voulais simplement soulever un point, qui est plutôt un point de procédure plutôt qu'autre chose, parce que vous avez fait référence au règlement et vous avez semblé vous accrocher, comme principal argument, à celui que cela constituerait une dépense de fonds publics. Je dois immédiatement m'inscrire en faux, car il s agit simplement d'un document comme n'importe quels documents qui peuvent être requis par... Je comprends que c'est un document important, mais, au point de vue de dépense publique, il ne comporte pas une dépense telle que celle qui est prévue au règlement. Lorsqu'on parle de cela dans le règlement, on dit qu'un ministre doit introduire

un projet de loi où il y a une dépense d'argent, lorsque, par exemple, il s'agit de construire une route — c'est le budget — lorsqu'il s'agit de dépenses substantielles. Mais, supposons qu'un député — un exemple, M. le Président — présente une motion d'amendement au cours de l'étude d'un projet de loi, suggérant qu'avant qu'une telle disposition puisse être adoptée, ou tel règlement doive être imprimé dans la Gazette officielle, il y a la une dépense d'argent évidente, rien n'empêche un député de l'Opposition de suggérer, dans une motion d'amendement, qu'un tel règlement doive faire l'objet d'une publication dans la Gazette officielle.

A ce moment-là, on a vu la Gazette officielle produire des règlements très substantiels, mais jamais je n'ai entendu dire que ceci était une contravention aux dispositions de notre règlement. C'est tout ce que je voulais dire.

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est peut-être parce que ça n'a jamais été soulevé, M. le chef de l'Opposition officielle.

M. Ciaccia: Les mots importants dans l'article 64, c'est r'imposition d'une charge additionnelle". C'est ça que vous oubliez, je crois, dans votre argumentation. Dans l'article 6, l'amendement qui a été proposé, il n'y a pas d'imposition d'une charge additionnelle, parce que ce sont des documents que vous pouvez obtenir par l'entremise du personnel qui existe déjà, ou certains documents qui existent déjà. Alors, ça ne va pas à rencontre de l'article 64.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: ... je pense que cette intervention du député de Mont-Royal est pertinente, parce qu'il faut bien lire "charge additionnelle". Additionnelle, c'est-à-dire que si, moi, par un amendement, je propose la création d'une régie, qui va demander, je ne sais pas, un budget de $1 million ou de $11 millions comme on le voit, à ce moment-là, oui, je suis d'accord. Mais, "charge additionnelle", il faut quand même qu'il y ait une charge additionnelle.

Maintenant, je voudrais m'en prendre au deuxième argument. Je m'excuse, je n'avais peut-être pas été assez impressionné par le deuxième argument, mais il l'a plaidé d'une façon sûrement beaucoup plus cohérente, enfin, plus claire la deuxième fois.

M. Vaillancourt (Jonquière): ... des exemples comme l'avortement, la peine de mort...

M. Lalonde: Oui, l'avortement, la peine de mort; l'indépendance, c'est la promesse du Parti québécois, c'est la promesse du gouvernement actuel. Le président ne peut pas l'oublier, ça, ne peut pas ne pas le savoir. Il ne peut pas ne pas le savoir, il n'a pas besoin d'avoir une connaissance judiciaire. Il en a une connaissance parlementaire.

M. Ciaccia: Excusez, M. le Président... est-ce que c'est par accident que vous avez utilisé ces exemples? L'indépendance, l'avortement, la peine de mort?

M. Charbonneau: Soyez donc sérieux!

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs!

M. Charbonneau: Soyez donc sérieux!

M. Vaillancourt (Jonquière): Non, parce que nous ne sommes pas compétents en matière de peine de mort, M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Non, mais je voulais savoir s'il y avait un lien.

M. Vaillancourt (Jonquière): Vous le savez fort bien...

M. Charbonneau: Soyez donc sérieux!

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs!

M. Lalonde: Non, je peux répondre à la question du député de Mont-Royal.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît! Brièvement, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: C'est qu'hier soir, lors d'une discussion, on a donné ça comme exemple aussi.

M. Ciaccia: C'est ça que je voulais savoir.

M. Vaillancourt (Jonquière): Merci, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Mais, dans ce cas-ci, dans le cas de notre amendement, M. le Président, je m'adresse au deuxième argument du député de Jonquière, qui dit: Si on accepte l'amendement, le gouvernement va être obligé de prendre position sur un référendum en particulier. C'est exact. Parce que, et vous le connaissez, vous le savez, parlementairement, vous le savez, ce gouvernement a promis un référendum sur l'indépendance, en se rattachant au principe que vous avez accepté, en recevant des motions qui se référaient à des référendums constitutionnels. A ce moment-là, je ne vois pas pourquoi, puisqu'on parle d'un référendum en particulier, ce principe devrait être brisé; je ne vois pas pourquoi ce principe de la spécificité que vous avez accepté pour recevoir... C'est rejeté, d'accord, pour d'autres raisons, mais à ce moment-là, il s'agira d'en discuter et peut-être de le rejeter s'ils ne le veulent pas. (17 heures)

Quant à la recevabilité, la seule question que je veux vous poser c'est: est-ce qu'on peut, dans

une loi générale, comme vous l'avez permis pour les amendements qu'on a présentés hier, permettre de discuter à cette commission d'une motion d'amendement qui prévoit un référendum en particulier, une catégorie de référendums en particulier, une catégorie particulière de référendums ou un référendum en particulier, je pense qu'au niveau des principes, il n'y a pas de différence.

Le Président (M. Clair): Messieurs, vous comprendrez...

M. Ciaccia: M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Un autre argument, M. le Président, en faveur de la recevabilité de la motion...

Le Président (M. Clair): A l'odre s'il vous plaît, Messieurs!

M. Ciaccia: M. le Président, je voudrais vous référer à quelques commentaires de la Commission des droits de la personne sur le projet de loi no 92, Loi sur la consultation populaire. Elle dit, quant à la question du droit à l'information, et je cite l'opinion de la commission: "La commission des droits de la personne avait proposé, dans ses commentaires sur le livre blanc, d'étudier, en rapport avec le modèle britannique, la possibilité d'accorder au public le droit à une information la plus objective et la plus complète possible. Le projet de loi no 92 n'a pas répondu à ces attentes."

M. Bédard: Je vais répondre à cela tout à l'heure si la proposition...

M. Ciaccia: M. le Président, c'est un autre argument qui doit militer en faveur de la recevabilité de notre amendement, parce que l'amendement, spécifiquement, vise ce but d'accorder l'information additionnelle au public, tout en conformité avec les voeux qui ont été émis par la Commission des droits de la personne, en plus de répondre à toutes les autres exigences de notre règlement.

Le Président (M. Clair): Messieurs,, si vous permettez...

M. Lalonde: J'ai oublié une chose...

Le Président (M. Clair): Etant donné que depuis 15 heures cet après-midi je n'ai pu me faire remplacer parce qu'il y a eu des questions de règlement et des questions de recevabilité de façon continuelle, vous conviendrez sûrement qu'il serait bienvenu pour tout le monde de suspendre pour cinq minutes.

Une Voix: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Clair): La commission suspend ses travaux pour cinq minutes.

(Suspension de la séance à 17 h 3)

Reprise de la séance à 17 h 13

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

La commission reprend ses travaux. Au moment où nous avons suspendu, c'est le député de Marguerite-Bourgeoys qui avait demandé la parole.

M. Lalonde: Merci, M. le Président. Je voudrais faire un résumé des arguments. Le premier argument du député de Jonquière indique que c'est une loi générale, une loi-cadre, qu'on ne doit pas parler d'un référendum spécifique. J'ai apporté des arguments là-dessus et je ne veux pas y revenir.

Le deuxième argument, c'est qu'on ne peut pas forcer le gouvernement à donner sa position dans une loi de cette nature, sur un référendum en particulier. L'avortement, par exemple: Comment pourrait-on forcer le gouvernement à prendre position et, ensuite, faire un référendum ou à l'occasion d'un référendum? La question de la peine de mort — je nomme ces deux-là parce qu'on les a mentionnés.

M. le Président, c'est l'argument qui est le plus sérieux, je pense, il serait très sérieux et s'il était aussi sérieux que cela, il aurait fallu que vous déclariez le sous-paragraphe de l'article 6 irrecevable. Le sous-paragraphe b de l'article 6 prévoit justement un cas où le gouvernement, par un projet de loi à l'Assemblée nationale, conformément à l'article 9, ferait son lit. Sur le zonage agricole, par exemple: II décide de prendre telle décision, il décide d'adopter telle politique et ensuite, une fois que la loi est adoptée et avant que la loi n'entre en vigueur — c'est ce que l'article 9 dit — on procède à un référendum. Mais à ce moment-là, le gouvernement a réellement donné son opinion; il a explicité dans un projet de loi. C'est tout ce que nous demandons.

C'est tout ce que nous demandons pour un référendum sur l'indépendance; on n'en demande pas plus. Si vous avez accepté, formellement ou non, le sous-paragraphe b de l'article 6 comme recevable, à ce moment-là, cela élimine le deuxième argument du député de Jonquière.

Quant au troisième, je pense qu'on a tout dit.

Le Président (M. Clair): M. le député de Châteauguay.

M. Dussault: M. le Président, quand l'Assemblée nationale, en deuxième lecture, a adopté le projet de loi 92, elle a adopté à ce moment-là une loi-cadre, et c'est en adoptant l'article 6 que l'on reconnaîtrait effectivement ce principe de la loi-

cadre que l'Assemblée nationale a acceptée en deuxième lecture. L'Assemblée nationale l'a acceptée purement comme une loi-cadre, parce que le projet de loi ne contient pas de particularité, n'en contient aucune, ce que voudrait changer effectivement l'Opposition par son amendement.

Si vous acceptez, M. le Président, une particularité et que l'Opposition, par la suite, veut en ajouter une deuxième et une troisième, je vous pose une question, vous n'êtes pas obligé d'y répondre. Quand considérerez-vous que le principe de la loi-cadre existe encore ou n'existe plus? Je voudrais vous donner un exemple. Nous avions un projet de loi, le projet de loi 67. A l'intérieur de ce projet de loi — l'Opposition nous l'a dit tout à l'heure — il y avait des particularités. Quand nous avons voulu en ajouter une supplémentaire, nous du parti ministériel, relativement à une régie, le président a déclaré cet amendement irrecevable, alors même que nous avions déjà une loi, qu'on a dit loi-cadre, loi organique ou loi générale, avec des particularités, et on a refusé d'en ajouter une. Ici, nous avons une loi-cadre sans particularité et l'Opposition voudrait en ajouter une. Je vous dis, M. le Président, que si vous en acceptez une, vous aurez des problèmes. C'est pour cette raison que je vous demande de juger cet amendement irrecevable.

M. Lalonde: Est-ce que le député me permettrait une question à la fin de son intervention, comme le règlement le permet?

M. Dussault: Je ne sais pas si c'est régulier que sur de telles questions on pose une question à un député intervenant.

M. Bédard: ... argument intéressant.

M. Lalonde: Oui, c'est tout à fait régulier. C'est prévu par les règlements qu'à la fin d'une intervention d'un député, un autre député peut lui demander la permission de lui poser une question.

M. Dussault: Je suis à votre disposition, M. le député.

M. Lalonde: M. le député, vous avez affirmé à plusieurs reprises que ce projet de loi 92 ne contenait aucune particularité. Vous l'avez affirmé très vigoureusement.

M. Vaillancourt (Jonquière): Sur le type de référendum.

M. Dussault: Sur le référendum, bien sûr!

M. Bédard: Non, ce n'est pas sur le mécanisme.

M. Lalonde: Ecoutez, le député de Jonquière vient de lui souffler la réponse. Ce n'est pas ce qu'il a dit tantôt. Aucune particularité, c'est ce que vous avez dit tantôt. Je demande au député s'il a lu l'article 20 qui dit que pour les réserves indiennes, les bulletins de vote sont faits de telle ou telle façon. Est-ce que ce n'est pas une particularité?

M. Dussault: Je pense bien, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, que vous aviez très bien compris que je parlais implicitement de type de référendum.

M. Lalonde: Je pense que vous n'avez pas parlé en connaissance de cause.

M. Bédard: Ce n'est pas une particularité sur le type de référendum, c'est une particularité au niveau de la technique.

M. Lalonde: N'essayez pas de le sauver!

M. Bédard: Non, mais quand même l'article 19.

M. Vaillancourt (Jonquière): On est solidaire!

M. Lalonde: Plutôt, essayez de le sauver, il a besoin d'aide! Au nom de la solidarité, je comprends.

M. Dussault: M. le Président, je sais que mon argumentation dérange M. le député de Marguerite-Bourgeoys, mais c'est quand même un fait que...

M. Lalonde: C'est la vérité que cela dérange, pas tellement moi!

M. Dussault: ... le principe voté à l'Assemblée nationale, ici, prend beaucoup de place. Je pense que c'est l'argument majeur, l'argument de fond et c'est là-dessus que je vous demande, M. le Président, de juger de la recevabilité.

M. Grenier: M. le Président.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Je n'ai pas voulu intervenir sur la recevabilité de la motion précédente qu'on a rejetée et je n'ai pas l'intention de faire perdre le temps de la commission sur celle-ci, puisque c'est bien plus du domaine des avocats de discuter de la recevabilité des motions et c'est ce qu'on fait depuis 15 heures cet après-midi. Ce n'est pas un reproche que je fais, mais j'apprends, je suis à l'école. J'aurai dès demain un conseiller juridique qui m'accompagnera, en tant que député...

M. Lalonde: Vous n'en avez pas besoin, vous êtes bien capable!

M. Grenier: C'est parfois utile d'en avoir.

Je ne vous cache pas, M. le Président, que je ne voudrais pas que vous rejetiez cette motion pour l'argument qui a été soulevée par le député de Châteauguay, afin qu'on ne mette pas à une loi

générale des particularités. On l'a signalé hier; c'est dans le même esprit que dans la soirée d'hier, à savoir qu'une loi générale peut quand même avoir un a) ou un b) qui sert dans une loi-cadre et avoir quand même un c) qui peut servir dans une loi particulière; ce n'est pas principalement l'amendement qui est apporté ici, pas plus lui qu'un autre, mais il me semble que si, à l'occasion, on décidait d'ajouter un c) ou un d) à un amendement qui pourrait servir, à un article qui pourrait servir en cas de référendum portant sur l'avenir constitutionnel, cela ne dérangerait pas le programme d'une loi-cadre, auquel programme j'ai souscrit, auquel ma formation a souscrit, mais ce serait quand même une prudence à se donner dans une loi.

Ce pourrait être intéressant afin de voir le nid que se fait le gouvernement. Bien honnêtement — vous allez me rappeler à l'ordre si je suis trop longtemps sur ce sujet — je voudrais quand même signaler qu'à certaines occasions, on va peut-être vouloir connaître avant la position du gouvernement dans certains secteurs. C'est le deuxième élément, c'est-à-dire que l'autre amendement qui a été apporté aurait pu nous donner une certaine orientation. Ici, je ne vous dis pas et je ne plaide pas, parce que cela prend probablement des qualités d'avocat pour comprendre si cela sera constitutionnel oui ou non, mais j'aimerais bien qu'on sache que je ne voudrais pas que vous rejetiez cet amendement à cause, principalement, de l'argument qui vous a été soumis parce que j'aimerais, dans cette loi-cadre, qu'on puisse reconnaître, à l'occasion, des couleurs propres à une loi particulière.

La loi-cadre que nous sommes appelés à voter va servir, bien sûr, à un référendum en particulier, un référendum qui aura beaucoup d'importance. Je ne voudrais pas non plus que le gouvernement se serve d'une loi-cadre pour se faire un nid si large qu'il n'y aura aucun contrôle par l'Opposition et qu'on ne pourra savoir où le gouvernement fait son nid. Pour nous, c'est important. On en a vu d'autres; on l'a vu dans une élection quand j'ai entendu le ministre des Finances nous dire que le gouvernement a été élu pour faire l'indépendance, qu'il travaille dans ce sens; cela m'a un peu choqué les oreilles.

Je ne voudrais pas qu'on dise qu'on s'est donné une loi du référendum et qu'on nous fasse dire, après la loi, que c'était dans ce but que c'était fait et que ce n'était pas ce qu'on avait mis dans la loi. Pour les mêmes raisons, si, à l'occasion, on doit arriver avec des amendements qui feraient que, dans la loi, on puisse se donner une certaine sécurité sur ce référendum en particulier, je ne voudrais pas que vous vous serviez de cela pour dire que c'est cela qui rend l'article irrecevable.

Le Président (M. Clair): M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Merci, M. le Président, je vais essayer d'être très bref. Je pense qu'il y a un point sur lequel nous devons nous référer, au point de départ. La non-recevabilité d'une motion, c'est une chose; le rejet d'une motion, cela en est une autre.

Lorsque j'ai entendu, tout à l'heure, faire référence, à un moment donné, à la loi 67 pour dire qu'à l'occasion de l'étude de la loi 67, nous avions attiré l'attention de la présidence de l'Assemblée nationale sur le fait qu'un nouveau principe était introduit dans le projet de loi, je pense qu'il n'y a aucun élément de comparaison entre cet argument qui a été invoqué et la motion d'amendement qui a été proposée par l'Opposition officielle. Je pense qu'il ne faudrait pas aller trop loin de ce côté-là en risquant, par une jurisprudence, de se créer des camisoles de force pour fonctionner dans l'avenir.

Sur la motion qui a été présentée, on a aussi fait allusion au fait que l'amendement qui vient d'être présenté pourrait comporter des dépenses pour le gouvernement. Je vous dis, M. le Président, que vous ne pourriez pas, à mon humble avis, tenir compte de cette remarque. Je vous référerais à la décision qui a été rendue par la présidence en date du 15 mai 1974: Une motion présentée par un député de l'Opposition et qui n'a pas un caractère exécutoire à vie, qui n'a pas une implication directe sur des dépenses d'argent, qui est exprimée en termes généraux — ce qui est le cas présentement — sans chiffres, est une motion abstraite dans le sens du dernier paragraphe de l'article 64. Ainsi, la motion suivante est acceptable — c'est le jugement qui a été rendu par la présidence — Cette assemblée est d'avis que l'impôt sur le revenu des particuliers doit être modifié de façon à annuler l'accroissement du fardeau fiscal provenant de l'inflation, en relevant les exemptions de base à un taux acceptable pour les célibataires et les couples mariés ainsi que les enfants à charge. Cela a été accepté.

Je pense, M. le Président, que les deux arguments qui viennent d'être invoqués ne méritent pas d'être retenus. En ce qui a trait au fond de la motion, c'est une autre chose qui pourra faire l'objet d'un débat autour de cette table, mais, sur la question de recevabilité, M. le Président, les arguments qui ont été évoqués du côté ministériel ne m'ont pas du tout convaincu que vous deviez juger la motion irrecevable.

Le Président (M. Clair): Messieurs, je répéterai ce que je vous ai dit tantôt. Si la décision que je vais rendre est à la mesure des argumentations qui m'ont été offertes, elle saura sûrement satisfaire les membres de cette commission. Au moment où je m'apprête à rendre cette décision, vous avez sûrement remarqué que j'ai été très attentif à l'argumentation de chacun des membres de cette commission. Je demanderais la collaboration de tous pour le temps que je vais utiliser afin de rendre ma décision.

Le premier argument dont je disposerai est relatif à l'article 64, alinéa 3, de notre règlement, soulevé par le député de Jonquière. Cet argument veut démontrer que la motion d'amendement

proposée par le député de Marguerite-Bourgeoys entraînerait, pour le gouvernement, l'imposition d'une charge additionnelle sur les revenus publics ou sur les contribuables. Si on lit attentivement l'article 64, il y a trois points qui m'apparaissent particulièrement importants, soit le fait, premièrement, qu'une motion qui engage des fonds publics ne peut être présentée que par un représentant du gouvernement. Dans ce cas, la motion d'amendement est proposée par un député de l'Opposition, de sorte que si on en venait à la conclusion qu'effectivement cette motion engage des fonds, une charge additionnelle sur les revenus publics, on devrait la déclarer irrecevable.

L'autre point important, qu'on n'a pas souligné cependant dans l'argumentation, à ma connaissance, c'est qu'à l'article 64, au premier alinéa, on dit bien: "Une motion ne peut être présentée que par un représentant du gouvernement, après recommandation du lieutenant-gouverneur en conseil, lorsqu'elle a pour objet direct: — Le dernier mot m'apparaît être particulièrement important — l'imposition d'une charge additionnelle sur les revenus publics ou sur les contribuables."

Dans le cas actuel, sans déterminer si le président a ou n'a pas à connaître, présidentiellement parlant, des études qui sont actuellement menées par le gouvernement sur le sujet en question, étant donné que le lien entre les études et l'engagement de fonds ne m'apparaît pas direct, du moins s'il était direct, il le serait pour des sommes qui m'apparaissent ne pas être d'une importance telle qu'elles constituent effectivement une imposition directe d'une charge additionnelle sur les revenus publics...

Sur ce point, je tiens à signaler qu'en vertu de notre règlement, il n'y a pas, comme pour la juridiction des tribunaux, des montants prévus; effectivement, tous les gestes, toutes les motions qui sont présentées par des membres de l'Assemblée nationale entraînent finalement toujours, à un degré plus ou moins élevé, non pas l'imposition d'une charge additionnelle mais, à tout le moins, l'engagement de revenus. On n'est pas à la Cour des petites créances, à la Cour provinciale, ou à la Cour supérieure, où il y a des montants fixes. Alors, le président doit exercer sa discrétion. Pour disposer de ce premier argument, je donne effectivement raison à ceux qui ont défendu le point de vue voulant que l'article 64, alinéa 3, dans les circonstances, ne soit pas déterminant; du moins il ne l'est pas en faveur de l'irrecevabilité de la motion. (17 h 30)

Vient maintenant l'argument concernant le sujet d'une loi-cadre contre une loi spéciale.

Je pense que, depuis le début des travaux de la commission, de part et d'autre, on a reconnu, tant au niveau des oppositions qu'au niveau du gouvernement, que le principe numéro un, si on veut, de la Loi sur la consultation populaire était qu'il s'agissait bel et bien là d'une loi-cadre. D'ailleurs n'est-ce pas là-dessus que tout le débat a porté, loi-cadre contre loi spéciale? Loi organique contre loi sur le référendum, sur l'avenir constitutionnel du Québec?

Maintenant, vient la question de déterminer, dans les circonstances, si l'amendement tel que proposé — en langage parlementaire ou en langage réglementaire, si on veut — contredit un principe déjà affirmé et, en conséquence, si tel était le cas, devient-il irrecevable?

Il m'apparaît, sur cette question, qu'un amendement peut, dans le cadre d'une loi organique, d'une loi-cadre, effectivement particulariser un mécanisme pour un cas particulier. C'est d'ailleurs — même si je n'ai pas à revenir sur les décisions que j'ai déjà rendues — la raison pour laquelle j'ai déclaré recevables d'autres motions d'amendement qui avaient trait à l'introduction, dans le cadre d'une loi générale sur la consultation populaire, de mécanismes plus précis, relativement à un type de référendum. Je pense ne pas me tromper quand je dis que ces cas étaient tous des cas de référendums sur des questions constitutionnelles. Cependant, à la lecture de la motion d'amendement, s'il n'y avait que le premier alinéa de la motion d'amendement, je pense que, même si cette motion d'amendement particularise un mécanisme pour un type de consultation, soit une consultation en matière constitutionnelle, la question serait délicate pour déterminer s'il s'agit, oui ou non, d'un particularisme qu'il est acceptable d'accueillir au niveau de la commission. Cependant, à la lecture complète de la motion d'amendement à l'article 6, on voit, immédiatement après le premier alinéa, toute une série de précisions qui, à mon avis, ne constituent pas, à proprement parler, une particularisation d'un mécanisme à l'égard d'un type de consultation, mais constituent, à proprement parler, la définition d'un contenu, ce qui en fait véritablement une question de fond sur un référendum en particulier, soit le-référendum sur l'avenir constitutionnel du Québec qu'on peut même identifier comme étant celui que le gouvernement actuel s'est engagé à tenir.

Le député de Marguerite-Bourgeoys, dans son argumentation, disait en substance ceci: L'amendement proposé pourra être utilisé, peut s'appliquer à plusieurs référendums sur l'option constitutionnelle, sur des questions constitutionnelles d'un gouvernement. Je pense que si son amendement était à la mesure de son affirmation, la question serait d'autant plus délicate à trancher. Mais il me semble que, à la lecture même des paragraphes 2, 3 et 4, il ne s'agit vraiment plus d'un type de référendum, il ne s'agit plus d'un mécanisme qui pourrait être utilisé pour l'ensemble des référendums en matière constitutionnelle, mais il s'agit bel et bien d'une question de contenu, d'une question de fond pour le référendum sur l'avenir constitutionnel du Québec, soit celui qui a été promis par le gouvernement actuel.

Si maintenant, on prend cette constatation selon laquelle l'amendement proposé par le député de Marguerite-Bourgeoys, au moins en partie — et c'est suffisant pour déterminer de tout l'amendement proposé — ne constitue pas une particularisation d'un mécanisme à l'égard d'un type de référendum mais constitue plutôt la définition d'un contenu d'un référendum en particulier, il faut regarder maintenant, en vertu de notre

règlement, si c'est possible d'introduire ce genre d'amendement au niveau de l'étude en commission parlementaire.

Les amendements qu'on peut introduire en commission parlementaire sont régis par les articles 70, 154, 158 et même par l'article 99, alinéa 1 que j'aimerais vous citer. A l'article 70, on dit, à la fin: "Un amendement est irrecevable si son effet est d'écarter la question principale sur laquelle il a été proposé et il en est de même d'un sous-amendement par rapport à un amendement". A l'article 154 qui prévoit la possibilité pour une commission parlementaire d'amender un projet de loi, on lit ce qui suit à l'alinéa 2: "La commission peut amender un projet de loi, pourvu que l'amendement ne soit pas étranger à l'objet du projet et qu'il ne s'oppose pas au principe affirmé en deuxième lecture." Je note qu'à l'article 154, alinéa 2, on lit "au principe", au singulier, alors qu'à l'article qui prévoit l'étude en deuxième lecture d'un projet de loi, on rapporte en substance — je ne retrouve pas l'article rapidement — que le débat doit porter sur "les principes " du projet de loi. Il y a peut-être une petite difficulté qui se présente à ce niveau mais, quant à moi, je prends les mots au singulier contenus à l'article 154, alinéa 2, "au principe affirmé en deuxième lecture", comme devant être interprétés dans le contexte général de notre règlement. Au niveau de l'étude en commission parlementaire, après la deuxième lecture, il n'y a pas qu'un seul principe en débat mais il y a effectivement un certain nombre de principes en discussion.

Je disais que ce qui nous permet de disposer de la recevabilité de l'amendement du député de Marguerite-Bourgeoys, tenant compte du fait qu'il s'agit d'un amendement qui vient spécifier un contenu, définir une question de fond, on doit tenir compte des articles qui régissent la réception d'amendements en commission parlementaire.

En ce qui concerne l'article 70, il m'apparaît que lorsqu'on y lit "l'amendement est irrecevable si son effet est d'écarter la question principale sur laquelle il a été proposé", il m'apparaît que dans la mesure où l'article 6, que nous sommes actuellement à étudier, est probablement l'article par excellence dans le projet de loi qui établit le principe d'une loi-cadre sur la consultation populaire, d'une loi organique — vous pourriez sûrement me permettre l'expression — d'une loi de tuyauterie, de plomberie, jusqu'à un certain point, je pense que l'amendement, face à l'article 70, écarte en partie, et à un niveau suffisant pour que je considère qu'il y a matière à application à l'article 70, l'amendement, dis-je, au moins en partie, écarte par toute la place qu'il viendrait prendre, s'il était introduit dans le projet de loi, écarte la question principale sur laquelle il a été proposé.

De plus, en vertu de l'article 154, alinéa 2, "la commission peut amender un projet de loi, pourvu que l'amendement ne soit pas étranger à l'objet du projet"; je pense que l'amendement n'est pas étranger à l'objet de projet. Cependant, il s'oppose au principe affirmé en deuxième lecture, ce prin- cipe m'apparaissant être celui d'une loi organique sur la consultation populaire, d'une loi qui peut sûrement, par des amendements, connaître des particularismes, relativement à la mécanique de consultation à l'égard d'un type particulier de référendum, de consultation populaire, mais qui ne peut, cependant, souffrir de définition de particu-larisation, de spécification du contenu même, finalement, la question de ce que serait l'objet d'un référendum en particulier.

A l'appui de cette interprétation de l'article 70 et de l'article 154, j'aimerais également vous rappeler que l'article 158 prévoit spécifiquement qu'"une commision ne peut modifier, dans son principe, une proposition qui a déjà été acceptée par l'Assemblée. A l'article 99, alinéa 1, on lit: "II est interdit à un député qui a la parole de revenir sur une question qui a été décidée pendant le cours de la session." Ces articles n'ont pas d'application précise, stricte au cas qui nous occupe, mais ils tissent quand même la toile de fond dans le cadre duquel on doit décider de la recevabilité d'amendements au niveau de la commission parlementaire, après la deuxième lecture du projet de loi.

M. Lalonde: C'était un sursis...

Le Président (M. Clair): Non, je voulais simplement vérifier les notes que j'avais prises sur les argumentations des différents intervenants. Je voudrais simplement, pour le député de Marguerite-Bourgeoys, relativement à ses arguments que des particularismes ont déjà été introduits dans d'autres lois comme la loi sur les professions, évoquer la loi 101, la loi des jurys. Effectivement, je reconnais que, dans les cas cités par le député de Marguerite-Bourgeoys, autant que j'ai pu en prendre connaissance pendant l'argumentation, que ces lois prévoient des mécanismes particuliers, des cas particuliers, mais ne peuvent en aucune façon, selon moi — je le dis en toute humilité, mais je suis forcé d'exercer ma discrétion — être apparentées au cas qui nous occupe présentement, où encore une fois, l'introduction de l'amendement proposé par le député de Marguerite-Bourgeoys constituerait l'introduction d'une question de fond dans le cadre d'une loi organique, mais ne constituerait pas ce qu'il appelait lui-même, dans son argumentation, l'introduction d'un particularisme au niveau d'un mécanisme pour un type particulier de référendum.

J'ajouterai même que si, en ce qui concerne la première partie de son amendement, il peut effectivement s'agir de l'introduction d'un mécanisme particulier à l'égard d'un référendum, dans la deuxième partie de l'amendement, il ne s'agit plus du tout de l'introduction d'un mécanisme, mais bel et bien d'un contenu. (17 h 45)

Pour toutes ces raisons, je déclare l'amendement, proposé par le député de Marguerite-Bourgeoys, irrecevable.

M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, je vous remercie. Vous voyez jusqu'à quel point...

M. Paquette: ...

Le Président (M. Clair): Vous aviez des bons points.

M. Levesque (Bonaventure): Ce n'est pas fini.

M. Lalonde: ... l'art parlementaire exige de renoncement.

Une Voix: Vous gigotez encore sur cela? M. Bédard: Et d'humilité!

M. Lalonde: Et le Président, j'ai bien écouté votre décision et j'y ai vu une lueur...

Une Voix: Une invitation!

M. Lalonde: Non, pas une invitation, M. le Président, je ne vous ferai pas l'injure de vous dire que vous m'avez invité à faire autre chose. Mais j'ai bien compris, très humblement, que vous avez jugé très sévèrement — à bon droit probablement et ce n'est pas le but de mon propos de vous chicaner là-dessus — la deuxième partie de l'amendement, tout ce qui suit le premier paragraphe. Quand vous avez parlé de contenu, par exemple, dans la dernière partie de votre jugement, quand vous avez parlé de mécanisme de tuyauterie, il me semble que la...

Le Président (M. Clair): Je ne voulais pas l'employer dans un sens péjoratif, mais dans une allégorie.

M. Lalonde: Oui, d'ailleurs on l'a fait d'un côté et de l'autre de la table.

Quand vous avez parlé de tuyauterie, j'ai l'impression que mon premier paragraphe avait un certain espoir de survie...

M. Vaillancourt (Jonquière): On verra tantôt! Le Président (M. Clair): A l'ordre!

M. le député de Marguerite-Bourgeoys, j'aimerais simplement ajouter une précision à ce que j'ai dit. C'est que, dans la mesure où je me prononce sur une partie spécifique de l'amendement, dans la mesure où je déclare une partie de l'amendement irréguiière, c'est tout l'amendement qui s'en trouve vicié et déclaré irrecevable.

M. Lalonde: Mais comme je veux sauver l'autre partie qui m'apparaît moins coupable que la deuxième, M. le Président, je vais...

M. Bédard: II y avait un danger!

M. Lalonde:... vous donner la chance de vous prononcer sur cette première partie.

Le Président (M. Clair): C'est fort aimable à vous!

M. Lalonde: M. le Président, je veux simplement ajouter l'alinéa suivant, comme amendement: "Dans le cas d'une consultation populaire portant sur le statut constitutionnel du Québec, il doit s'être écoulé un délai d'au moins trois mois entre le moment où le gouvernement a déposé, à l'Assemblée nationale, un document définissant clairement son option constitutionnelle et le jour fixé pour l'émission du bref référendaire". C'est la fin de mon amendement.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, sur la recevabilité.

Le Président (M. Clair): Sur la recevabilité de l'amendement?

M. Vaillancourt (Jonquière): Oui.

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, très brièvement, je voudrais, à l'encontre de la recevabilité, soulever l'argument fondamental que vous avez vous-même soulevé dans votre décision.

M. Lalonde: ...

M. Vaillancourt (Jonquière): C'était le meilleur, il a pris le deuxième d'ailleurs, c'est celui dont le député de Marguerite-Bourgeoys a parlé en dernier.

M. Lalonde: Le 64 ne vaut pas cher, là, n'est-ce pas?

M. Vaillancourt (Jonquière): Non, mais je l'avais dit...

M. Bédard: C'était le troisième argument!

M. Vaillancourt (Jonquière): J'avais dit l'un et l'autre ou l'un ou l'autre. Or, cela a été l'un des trois.

M. Lalonde: II en reste un. Il y en a deux de partis.

M. Vaillancourt (Jonquière): Oui, il y en a deux de partis.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs!

M. Charbonneau: Cela prend trois coups pour faire tomber un adversaire.

M. Vaillancourt (Jonquière): Mais, M. le Président, je voudrais tout simplement reprendre le deuxième argument que vous avez vous-même repris puisque, moi-même, dans mon argumentation j'avais dit que, dans le cadre d'une loi

générale, on pouvait prévoir un type de référendum particulier. Vous avez reconnu cela dans votre décision, même en reconnaissant la recevabilité de deux autres motions antérieures qui avaient été présentées par l'Opposition officielle, sauf que vous avez fait la précision suivante et que vous avez également employé le mot "tuyauterie", le mot "mécanisme" et les mots "particularisation du contenu, spécification du contenu". Or, M. le Président, justement dans ce premier alinéa ou dans le seul alinéa de l'amendement nouveau que vient de nous présenter le député de Marguerite-Bourgeoys, nous voyons encore une allusion au contenu, puisque nous y voyons les mots "définissant clairement son option constitutionnelle". Or, M. le Président, ce n'est plus du mécanisme; vous permettez, dans votre décision, l'introduction d'un amendement ayant trait au mécanisme, même dans le cas d'un type de référendum particulier, mais vous ne voulez pas permettre — et c'est normal, je pense, l'introduction de particularisation du contenu ou de spécification du contenu.

Que fait le deuxième alinéa, en fait, que vous avez déclaré irrecevable, la deuxième partie de l'amendement? Il ne fait que spécifier, que détailler la définition de l'option concernée ou les sujets sur lesquels on voulait que l'Opposition officielle... du contenu du document. Mais l'idée maîtresse qui a amené l'Opposition, dans son premier amendement, à faire un deuxième alinéa, ce sont les mots "définissant clairement son option constitutionnelle. Logiquement, l'Opposition, voulant que le gouvernement la précise de façon particulière dans certains domaines, dit: Le document mentionné doit établir.

Quelle est la cause de l'existence du deuxième alinéa du premier amendement? Ce sont les mots "définissant clairement son option constitutionnelle". A partir du moment où les mots "définissant clairement son option constitutionnelle" apparaissent dans un amendement quelconque, cela devient contraire à votre propre décision, cela devient non plus un mécanisme, non plus un élément de tuyauterie, mais une allusion au fond sur un sujet bien particulier qui est un référendum sur l'avenir constitutionnel du Québec.

M. le Président, en terminant, la différence entre le deuxième amendement et le premier est tout simplement la suivante: Dans le premier amendement, de façon générale, on disait "l'option constitutionnelle" et on venait — c'est une question de fond — davantage préciser'ce qu'on voulait savoir, les éléments que l'on voulait connaître à l'intérieur de cette option. Dans le deuxième amendement, on enlève les détails, mais on n'en demeure pas moins dans une question de fond qui est l'option consitutionnelle de celui qui prendra l'initiative du référendum.

Je pense, M. le Président, malgré la petite lueur d'espoir qu'a pu, à raison ou à tort, y voir le député de Marguerite-Bourgeoys, que cette lueur d'espoir est mince, si j'ai bien compris votre décision qui a été rendue tout à l'heure. M. le Président, je pense que tant que les mots "option constitutionnelle" voudront dire "fond d'une ques- tion", tant que ces mots apparaîtront dans un amendement de l'Opposition officielle, ils viendront contredire ce que vous avez rendu comme décision tout à l'heure et amèneront inévitablement les membres de cette commission parlementaire à parler du fond. Au lieu de parler précisément de l'ensemble du fédéralisme canadien, de la question d'indépendance, de la citoyenneté, du droit d'élire des députés, du droit d'élire des sénateurs, des cours de justice, de la Cour suprême, de leur inhabilité à occuper quelque poste que ce soit dans la fonction publique fédérale, on pourra quand même en parler sauf qu'ils n'apparaîtront pas de façon formaliste dans l'amendement.

Autrement dit, M. le Président, déclarer recevable cet amendement serait, encore une fois — et mes collègues m'excuseront d'employer cet argument — permettre tout simplement à l'Opposition de faire déclarer recevable un amendement qui, autrement, serait irrecevable. M. le Président, c'est exactement la même motion, sauf qu'on ne demande pas au gouvernement de préciser dans quel domaine on voudrait que cette option soit définie. Mes collègues de l'Opposition, avec le brio que je leur connais, que je leur attribue, pourront encore parler, à partir du moment où vous admettrez qu'on parle d'option, puisqu'une option ce n'est pas limitatif. Le chef de l'Opposition officielle sera bienvenu de venir nous parler de la Cour fédérale, des sénateurs canadiens, de la fonction publique fédérale. A partir du moment où on permet le débat sur le fond, sur l'option constitutionnelle, vous permettez l'option non seulement sur les sujets compris dans le deuxième alinéa du premier amendement, mais sur tout autre sujet de fond qui peut être compris dans les mots "option constitutionnelle".

M. le Président, j'estime même, à la rigueur, pour raisonner par l'absurde, que la motion du député de Marguerite-Bourgeoys, telle quelle, est encore plus large que la première, puisqu'au lieu de délimiter les sujets sur lesquels on pourrait discuter du fond, non seulement on pourra discuter de ceux-là, mais de tous les autres qu'on voudra bien imaginer, à partir du moment où on peut penser que cela entre à l'intérieur d'une option constitutionnelle. M. le Président, le tout soumis respectueusement.

Le Président (M. Clair): M. le député de Laval. Dans l'ordre, s'il vous plaît.

M. Lavoie: Je ne suis pas du même avis que le député de Jonquière. Le député de Jonquière dit que l'option constitutionnelle que le gouvernement devra établir dans son document est une question de fond. Je suis d'accord avec lui que, lorsqu'il s'agit du contenu du document, il s'agit de fond, mais que, pour la production du document, c'est de la forme. C'est uniquement un mécanisme. Même si je discute de cette manière, cela ne veut pas dire que j'ai l'intention de revenir sur votre première décision. Mais la production d'un document, c'est uniquement de la forme,

c'est de la tuyauterie ou c'est un mécanisme quelconque.

C'est bien beau de s'attacher au fond de tout ce que contenait le deuxième paragraphe qui a été rejeté, mais si on lit l'amendement, on dit que, dans le cas d'une consultation populaire portant sur le statut constitutionnel du Québec, il doit s'être écoulé un délai d'au moins trois mois à partir du moment où le gouvernement a déposé à l'Assemblée nationale un document. Quand on parle de la production d'un document, on ne va pas au fond du document. C'est le fait de déposer un document. C'est un simple mécanisme, c'est une simple question de forme. On ne parle pas du tout du fond dans cela. C'est uniquement une modalité. Comme pour les trois premières motions qui ont été reçues devant cette commission dans le cas d'une consultation populaire sur le statut constitutionnel du Québec, on a demandé que la question n'amène qu'un oui ou un non, cette motion a été reçue. Elle a été battue, rejetée par la majorité gouvernementale.

Un autre cas, celui des deux tiers, c'est encore du mécanisme, de la formalité, des détails. Cette motion a également été reçue.

La troisième, c'était pour demander l'opinion de la Commission des droits de la personne. Elle a également été reçue.

Il faut que vous fassiez bien la différence entre la question de fond — là, c'est le contenu du document — et la production du document, qui est uniquement de la forme.

Je reviens aux articles que vous avez mentionnés dans votre décision précédente, l'article 70. "La motion d'amendement est irrecevable si son effet est d'écarter la question principale sur laquelle elle a été proposée ". Si je lis la motion principale, qui est l'article 6, je ne vois pas comment cet amendement nous fait écarter la question principale, qui est l'article 6. C'est uniquement une modalité qu'on ajoute, c'est une simple modalité à l'article 6.

Vous avez également cité l'article 154: "La commission peut amender un projet de loi, pourvu que l'amendement ne soit pas étranger à l'objet du projet de loi". En apportant cela, je pense bien que ce n'est pas étranger du tout à l'idée de la loi-cadre particularisée ici dans le cas de consultations populaires sur le statut constitutionnel de la même façon que trois autres amendements précédents ont été reçus. Enfin, comme dernier argument, je vous cite ici une décision qui a été rendue à l'Assemblée nationale le 26 avril 1978, très récemment, par le vice-président, le député de Prévost. C'était une très longue décision. Je cite la page 1155 du journal des Débats de l'édition de la 31e Législature: "Considérant qu'à moins qu'un amendement ne soit contre l'essence même ou la nature — c'est du thomisme — je cite au texte — d'une motion principale, il ne faut point, dans le régime parlementaire de type britannique, restreindre la discussion — il faut, au contraire, avoir tendance, au niveau de la présidence, à être permissif plutôt que restrictif; c'est une des règles de notre démocratie — c'est pourquoi, en conséquence, je déclare la motion d'amendement proposée — encore une fois je pèse mes mots — par le député de Beauce-Sud, recevable ".

Je ne peux pas avoir cet esprit, je crois, trop restrictif, et, s'il y a un doute, je ne peux pas peser, établir le poids de ce doute, mais, dans tout doute, cela doit être en faveur de la liberté d'expression des députés, quitte... Ecoutez, c'est seulement une étape, cela, la question de la recevabilité. Le gouvernement, la majorité ministérielle, si cela ne fait pas son affaire, rejettera notre motion. Mais un Parlement est un endroit pour discuter, pour donner notre opinion. Je pense que vous devriez prendre, dans ce cas-ci et en général, l'esprit qui existe dans notre droit parlementaire. C'est un esprit plutôt permissif que restrictif.

M. Lalonde: M. le Président, si elle avait été reçue de consentement, on en aurait déjà disposé, concernant les travaux de la Chambre.

Une Voix: Oui.

M. Bédard: II est six heures, on aura peut-être l'occasion de se parler.

Le Président (M. Clair): Messieurs, il est 18 heures. La commission suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 heures)

Reprise de la séance à 20 h 22

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît! La commission permanente de la présidence du conseil et de la constitution reprend ses travaux pour étudier, article par article, le projet de loi no 92, Loi sur la consultation populaire. Nous en étions, au moment de la suspension de nos travaux à 18 heures, à l'étude de l'article 6 et plus particulièrement à une motion d'amendement du député de Marguerite-Bourgeoys, dont nous n'avions pas encore disposé de la recevabilité.

M. le député de Marguerite-Bourgeoys, vous avez la parole.

M. Lalonde: M. le Président, je pense que c'était le député de Laval qui parlait. Maintenant, si vous voulez que... à moins que... C'est parce qu'il avait commencé à expliciter sur la recevabilité de la motion.

J'ai entendu les propos du député de Jonquière sur la recevabilité. Cela me semblait tendre davantage à refuser de discuter de la souveraineté association qu'à démontrer que ma motion est irrecevable.

M. le Président, ma motion serait irrecevable si elle allait à l'encontre du principe de la loi que vous avez vous-même, non pas défini de façon exhaustive, mais décrit, dans une certaine mesure, comme étant un constituant, un mécanisme de

tuyauterie. Tout ce que je fais avec ma motion, c'est d'ajouter un tuyau à la tuyauterie, c'est de dire qu'à telle étape de l'examen, c'est-à-dire du processus référendaire, se produira ce que ma motion suggère, c'est-à-dire le dépôt à l'Assemblée nationale d'un document.

Faire de la prospective, comme le député de Jonquière en fait, en disant: "Etant donné qu'on parle d'un document, immédiatement, on parle d'un contenu", je serais d'accord avec lui si j'avais conservé le reste de ma motion, mais vous-même l'avez qualifiée d'irrecevable cet après-midi. J'ai conclu, avec plusieurs ici à cette table, que vos doutes s'adressaient davantage à cette partie de la motion qui décrivait justement le contenu du document. Maintenant, si on ne peut plus parler d'un document sans qu'on devienne irrégulier, parce qu'on ouvrirait la porte à parler du contenu du document, M. le Président, je pense que c'est abuser de l'interprétation du règlement. Je pense que votre devoir, comme président, est d'interpréter le règlement, naturellement de façon rigoureuse, dans ce sens qu'au niveau des principes, lorsque c'est clair, à ce moment-là, il n'y a rien à faire.

Mais lorsque nous sommes à une question d'interprétation, à savoir quand on parle du dépôt d'un document, est-ce qu'on ouvre la porte à ce que vous avez refusé, dans la deuxième partie de ma motion que j'ai enlevée, pas à votre suggestion, mais en interprétant vos propos? Je pense, M. le Président, que dans une situation semblable, votre devoir est de laisser la commission disposer de la motion. Les règlements s'appliquent là aussi, il n'est pas question de faire dévier le débat; on va toujours dire, si on discute de la motion, que dans le cas d'une consultation populaire portant sur le statut constitutionnel du Québec, ce que vous avez déjà permis, on va parler du délai de trois mois. Peut-être que du côté ministériel on va trouver le délai trop court, peut-être trop long; est-ce qu'on pourrait s'entendre sur un délai différent? C'est ce qui importe, au fond, c'est là qu'est le noeud. Entre le moment où le gouvernement a déposé à l'Assemblée nationale un document qui définit clairement son option constitutionnelle, naturellement, on pourrait enlever le mot "clairement" si c'est cela qui est le gros problème du côté ministériel. Mais il me semble, cela va sans dire, que si le gouvernement 'définit son option constitutionnelle, cela va être clairement défini. C'est pour cela qu'on l'a mis là. Donc, un document définissant clairement son option constitutionnelle, il me semble que c'est tout à fait dans l'ordre. On ne fait qu'ajouter une étape que, comme législateurs, on demande au gouvernement de franchir.

Je ne vois pas pourquoi le député de Jonquière s'acharne à refuser de permettre des amendements dans le sens que nous voulons le faire, surtout étant donné le contexte dans lequel nous étudions actuellement ce projet de loi, qui est un projet de loi général, d'accord, mais qui, aussi, se fait dans le contexte d'un référendum, comme tous les Québécois le savent, sur l'indépendance, tel que promis par le présent gouvernement.

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est simplement pour dire qu'il y a des règlements qui se doivent d'être respectés et je ne m'acharne aucunement à ne pas vouloir parler d'un sujet ou d'un autre. Bien sûr, M. le Président, que si votre décision est d'accepter cet amendement, nous en discuterons. Mais je pense que mon collègue ne peut m'en vouloir de soulever des questions de recevabilité, lorsque je pense sincèrement, M. le Président, qu'il y a des problèmes de recevabilité. Je le fais en toute bonne foi et je suis sûr que mon collègue I admettra, on n'en a pas abusé et ce n'est pas notre intention de le faire. Je pense que c'est le devoir de tout parlementaire, lorsqu'il croit qu'un problème de réglementation se pose, de le soulever tout bonnement, et à l'Opposition de dire les arguments pour lesquels elle n'est pas d'accord, et au président de décider.

C'est dans cet esprit-là. Cela pourrait être dans le sens contraire, également, que ces mêmes propos pourraient être adressés à l'occasion. Je pense que, comme je n'ai pas à en vouloir à l'occasion au député de Marguerite-Bourgeoys de soulever des problèmes de règlement, je pense que c'est de bonne guerre que l'Opposition accepte également que je joue pleinement mon rôle de parlementaire. C'est dans cet esprit que je le fais, tout simplement.

M. Lalonde: M. le Président, j'ai oublié deux éléments. Au fond, mon amendement prévoit deux obligations. L'obligation de produire un document. Il me semble qu'à ce moment-là, on ne parle que d'une chose à faire, d'un élément qui est tout à fait facile à définir, à circonscrire, et que nous sommes réellement dans la tuyauterie, pour employer un terme que vous avez employé.

Deuxièmement, l'obligation de définir une option. Là, le député de Jonquière, c'est là qu'il a fait une objection, à savoir qu'on s'adresse, à ce moment-là, au contenu. Mais je vous ferai remarquer, comme je l'ai fait d'ailleurs — vous ne l'avez pas relevé dans votre propos, je pense, sur la décision que vous avez rendue — qu'à l'article 6b, lorsque le gouvernement fera adopter un projet de loi à l'Assemblée nationale, conformément à l'article 9, si ce projet de loi contient une disposition à l'effet qu'il est assujetti à la consultation populaire, le gouvernement aura défini son option, à ce moment-là, quel que soit le sujet sur lequel le gouvernement se sera penché. Par exemple, si c'est sur le zonage agricole, mais que le gouvernement pense qu'on doive soumettre à la consultation populaire une politique qui affecte un grand secteur de la population. On aurait des objections au niveau des libertés individuelles des minorités, comme j'ai tenté de l'apporter hier soir, mais c'est en dehors du propos. (20 h 30)

Dans le cas de l'article 9, le gouvernement sera obligé de définir son option. On ne le demande pas davantage dans mon amendement, dans le document qui sera... A l'article 9: "Lors-

qu'un projet de loi adopté par l'Assemblée nationale du Québec contient une disposition à l'effet qu'il est assujetti à la consultation populaire, il ne peut être présenté pour sanction avant d'avoir été soumis aux électeurs par voie de référendum". Le projet de loi est adopté. L'option choisie, la politique choisie par le gouvernement est définie en long et en large et, ensuite, on soumet cela aux électeurs. Je ne demande rien d'autre dans mon amendement. Je ne vais pas au-delà de la mécanique qui est déjà prévue par les articles 6b et 9, à savoir qu'il y a un document qui définit l'option. Cela ne va pas plus loin que cela. Il me semble que, si vous refusez mon amendement, le plus modeste que je puisse avoir présenté, en l'ayant coupé — j'allais dire amputé, non, c'est le reste que j'ai enievé — dans les quatre cinquièmes, vous devriez réviser votre décision d'avoir accepté l'article 6, comme motion principale, et que l'article 6b ne devrait pas être accepté, comme motion principale, si mon amendement va à l'encontre du principe.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: M. le Président, cet amendement qui est amené par le député de Marguerite-Bourgeoys, c'est un réduit de l'amendement qui avait été proposé et qui est conservé dans son premier paragraphe.

D'abord, je dois noter que nous discutons de procédure depuis 15 heures, cet après-midi, et, il est de toute évidence que si cela fait l'affaire des gens qui ont des études de droit, ce n'est peut-être pas le bout le plus efficace que nous ayons passé à cette commission jusqu'à maintenant, et je pense bien que si on avait accepté les amendements, on en aurait même disposé dans le même temps et on aurait vu le fond de la question.

M. Lavoie: Exactement.

M. Grenier: Ce n'est pas un reproche, mais c'est probablement ce qui se serait produit. Je m'en voudrais et je serais malheureux s'il arrivait que vous rejetiez cet amendement pour la raison qui précise cette loi-cadre. Encore une fois, cela ressemble à l'argumentation qu'on a apportée, puisque c'est quand même une partie du premier amendement. Il me semble que ce n'est pas possible qu on ne demande pas dans la loi que le gouvernement précise sa pensée. Il me semble que c'est normal que l'Opposition demande que le gouvernement précise à l'avance sa pensée. Si on le fait dans un alinéa qui n'est pas le a) ou le b) et qu'on arrive dans le c) avec cette requête qu'on fait ici au gouvernement, il me semble qu'on ne va pas contre le principe qu'a émis le ministre, quand il a dit qu'il serait contre — il n'a pas dit qu'il serait jugé irrecevable, bien sûr — tout amendement qui viendrait préciser sa loi-cadre pour en faire une loi spécifique.

Encore une fois, je vous le répète, l'amendement qui est apporté actuellement nous permet d'éclaircir certaines questions avant le référendum, un certain temps avant le référendum pour savoir à quoi s'en tenir.

J'amerais bien, si c'était possible, qu'on ne se base pas là-dessus, puisqu'il y aura des amendements, et j'ai moi aussi des amendements qui viendront préciser cette loi, qui viendront ajouter des lettres et qui garderont, si vous le voulez, on en a fait notre voeu, cette loi-cadre, mais qui nous permettront d'avoir des ajouts pour clarifier certaines positions.

Personnellement, je pense que c'est impossible que, dans cette loi, on n'ait pas, à un moment donné, précisément sur cela, un endroit bien précis où on pourrait connaître la pensée du gouvernement, à l'avance. On avance, les jours avancent. On se donne la loi. On est rendu à presque deux ans de gouvernement et on ne connaît pas encore les termes généraux. Ce serait une façon... Je pense que si on ne l'a pas dans la loi, on ne l'aura pas dans les règlements. On va demander l'étude des règlements. On ne les aura pas, bien sûr, avant que le projet de loi soit voté. Dans un contexte comme celui-là, pour un référendum aussi important que celui qui s'en vient, il me semble qu'on devrait accepter l'un ou l'autre des amendements qui nous permettent de préciser la pensée du gouvernement.

Alors, je serais malheureux s'il arrivait que vous rejetiez cet amendement, parce que cela correspond à ce que le ministre nous disait à savoir qu'il ne voudrait pas voir préciser sa loi-cadre en une loi particulière.

Le Président (M. Clair): M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: M. le Président, on est toujours sur la recevabilité de l'amendement nouveau, parce que cela m'apparaît comme un amendement nouveau. A mon humble avis, ce genre d'amendement est complètement...

Le Président (M. Clair): M. le député de Rouyn-Noranda, vous avez la parole.

M. Samson: Je disais donc qu'à mon humble avis, cet amendement, tel que rédigé maintenant, est complètement recevable, car il ne contrevient en aucune façon, au principe de la loi. Il me semble que tout amendement qui ne contrevient pas au principe d'une loi est recevable. L'amendement tel qu'il se lit ne peut que venir préciser l'un des articles de la loi, c'est-à-dire l'article 6. En passant, cet amendement pourrait aussi bien se retrouver et revenir à l'article 7. C'est donc un argument qui milite davantage en faveur de sa recevabilité, parce qu'il pourrait tout aussi bien se retrouver à l'un ou l'autre de ces deux articles et, tel que rédigé, ne fait que préciser la portée de l'article 6 présentement. Il pourrait revenir à l'article 7 et on pourrait avoir le même débat si actuellement on le déclare irrecevable. A l'article 7, on pourrait avoir un amendement qui aurait, dans le fond, peut-être les mêmes fins, mais sous

une autre forme. Il me semble que la question de recevabilité, présentement, doit être absolument considérée objectivement et positivement. Si cet amendement était déclaré non recevable dans sa forme nouvelle, je ne parle pas de l'ancienne, je soumets respectueusement que ce serait là dévier de beaucoup de l'économie générale de notre règlement. En effet, un amendement proposé en commission parlementaire hors de l'étude d'un projet de loi article par article peut être présenté en aucun moment. La seule condition qui pourrait nous empêcher ou qui pourrait empêcher normalement la présidence de le déclarer recevable, ce serait que cet amendement vienne complètement en contradiction avec le principe de la loi, et ce n'est pas le cas. C'est, au contraire, à l'intérieur du principe de la loi, parce que, quand même, le principe de la loi est assez large. La Loi sur la consultation populaire, c'est un principe qui pourrait permettre des amendements beaucoup plus poussés que celui-là. Il me semble que c'est un amendement absolument régulier et très facile à faire accepter. Évidemment, si on veut parler sur le fond de la question de l'amendement, là, c'est une autre chose. Chacun pourrait avoir son point de vue. Bien sûr, il faudra s'en tenir à la majorité.

Je soumets très respectueusement que ce serait un précédent que je n'aimerais pas du tout que de voir déclarer irrecevable un amendement comme celui-là qui est parfaitement dans la forme normale, parfaitement dans la tradition, dans nos traditions parlementaires et qui a toujours été accepté, quant à sa recevabilité, dans le passé.

M. le Président, je demande que cet amendement soit déclaré recevable par vous.

Le Président (M. Clair): Messieurs, pour disposer de la recevabilité de cette motion d'amendement, pour la rendre recevable dans sa forme et sans me prononcer immédiatement sur la recevabilité de la motion, simplement pour être bien sûr que la forme même de la motion facilite la détermination de sa recevabilité ou de sa non-recevabilité, je modifie, comme j'en ai le pouvoir en vertu de l'article 65, alinéa 2, le libellé de la motion de la façon suivante, de sorte que la motion se lirait comme suit...

M. Vaillancourt (Jonquière): ... M. le Président.

Le Président (M. Clair): Non, c'est ma décision que je suis en train de rendre. "Dans le cas d'une consultation populaire... à l'ordre, messieurs, s'il vous plaît, à l'ordre. "Dans le cas d'une consultation populaire portant sur le statut constitutionnel du Québec, le gouvernement doit déposer, à l'Assemblée nationale, un document définissant son option constitutionnelle, au moins trois mois avant le jour fixé pour l'émission du bref référendaire ".

Cela ne change pas le fond de la motion, cela ne change que la forme, cela la rend plus limpide et cela m'apparaît que ce sera plus facile de déterminer, de cette façon, la recevabilité de la motion.

Alors, je répète: "Dans le cas cadre d'une consultation populaire portant sur le statut constitutionnel du Québec", rayez le tout jusqu'au mot "gouvernement", on reprend là, "le gouvernement doit déposer à l'Assemblée nationale un document définissant son option constitutionnelle, au moins trois mois avant le jour fixé pour l'émission du bref référendaire ".

Pour déterminer maintenant de la recevabilité de cette motion, refaite dans sa forme, je pense que tout le monde comprendra que je dois faire appel aux mêmes notions que celles auxquelles j'ai fait appel cet après-midi pour rendre une décision sur la recevabilité de la "motion mère", si on peut l'appeler ainsi, et il me semble que l'aspect particularisation de la mécanique dans cette motion devient plus important que l'aspect contenu, référence, définition, d'un contenu précis.

L'argument déterminant dans cette question m'apparaît être celui du député de Marguerite-Bourgeoys en rapport avec l'article 9 du projet de loi. En effet, en matière constitutionnelle, comme en toute autre matière, le gouvernement pourrait éventuellement procéder par un projet de loi, auquel cas, effectivement, la position du gouvernement et de l'Assemblée nationale se trouverait reproduite dans cette loi, puisqu'il m'apparaîtrait complètement illogique de penser qu'un gouvernement puisse voter jusqu'à la troisième lecture un projet de loi, en matière constitutionnelle comme en d'autres matières, et que ce ne soit pas là sa position.

Etant donné que, déjà dans le projet de loi, même si on n'en est pas encore rendu là, à l'article 9, il serait possible, dans le cas où le gouvernement... Il serait non seulement possible, mais ce serait réalité, le gouvernement qui procéderait par un projet de loi en matière constitutionnelle, aurait nécessairement dévoilé au préalable sa position. (20 h 45)

Qu'on vienne spécifier, par l'amendement du député de Marguerite-Bourgeoys, que dans le cas d'une consultation populaire portant sur le statut constitutionnel du Québec, le gouvernement doit déposer à l'Assemblée nationale un document définissant son option constitutionnelle au moins trois mois avant le jour fixé pour l'émission du bref référendaire, il m'apparaît que c'est beaucoup plus un mécanisme, de la particularisation des mécanismes à l'égard d'un type de consultation, qu'une définition de contenu. C'est la raison fondamentale pour laquelle je déclare cet amendement recevable.

M. Lalonde: M. le Président, je vous remercie, de la même façon que je vous ai remercié pour d'autres décisions.

Le Président (M. Clair): Sur l'amendement maintenant. L'amendement sera-t-il adopté?

M. Levesque (Bonaventure): Je suis prêt à intervenir sur l'amendement.

M. Bédard: Allez-y.

Le Président (M. Clair): M. le député de Bonaventure.

M. Lalonde: ... intervenant.

Le Président (M. Clair): Vous avez raison.

M. Lalonde: Cela faisait partie de notre stratégie.

M. Vaillancourt (Jonquière): De toute façon, M. le Président, on aurait donné notre consentement.

M. Lalonde: C'est facile à dire quand on est intervenant, mais je n'en doute pas une seconde.

M. Paquette: On l'a déjà fait dans le passé. M. Lalonde: A la loi 101, oui.

Le Président (M. Clair): M. le chef parlementaire de l'Opposition officielle, vous avez la parole.

M. Grenier: Quand il nous dit que cela pouvait être le député de Jacques-Cartier à la place, on aime pas mal mieux cela.

M. Lavoie: Le député de Jacques-Cartier, c'est demain qu'il est intervenant.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, je veux d'abord vous remercier de l'occasion que vous me fournissez de prendre la parole sur cet amendement et je vous félicite de la façon dont vous avez disposé de l'amendement en reconnaissant la recevabilité, après en avoir amélioré la forme.

M. le Président, je n'ai pas à vous rappeler l'importance de la question à l'étude, et particulièrement de l'amendement que nous présentons à ce stade-ci, de l'étude du projet de loi 92.

Vous vous rappelez sans doute, M. le Président, la lutte que nous avons faite afin que ce projet de loi soit un projet de loi spécifique plutôt qu'un projet de loi-cadre. Nous avons fait valoir nos arguments vis-à-vis du gouvernement qui est demeuré insensible à cet aspect extrêmement important des conditions préalables à une consultation populaire vraiment démocratique. Nous a-vons voulu mettre de l'avant l'importance d'avoir un projet de loi spécifique, à ce stade-ci, quelques mois avant la tenue du référendum, parce que nous voulions que la population soit mise au courant immédiatement des conditions de ce rédérendum promis par le Parti québécois, particulièrement au cours de la campagne électorale qui a précédé le scrutin du 15 novembre 1976.

Le gouvernement s'est entêté et a préféré ce gendre d"'étapisme" qui fait qu'il semble bien qu'il veuille procéder à la pièce, à petits pas — cela devient une expression péquiste de plus en plus — de sorte que le scénario va permettre au gouvernement de pouvoir envelopper ce référendum de tout ce qui est contraire à la transparence.

Cependant, nous pensons que cet amendement serait de nature à servir au moins un début de transparence. Nous croyons que ces trois mois permettraient au moins à la population d'être au courant de l'option constitutionnelle du gouvernement actuel. Et Dieu sait qu'il est difficile d'être au courant de cette option. On n'a qu'à se rappeler l'évolution, même dans la terminologie utilisée par le gouvernement, relativement à son option constitutionnelle. Cela a été l'indépendance ou la séparation du Québec, du reste du Canada. Cela est encore conservé par des gens comme le ministre des Finances qui nous dit que c'est l'indépendance pure et simple. Il en a toujours été ainsi pour lui et il en est encore ainsi, mais ce n'est pas cela pour le chef du gouvernement. Ce n'est pas cela pour plusieurs amis du chef du gouvernement ou des porte-parole du gouvernement actuel qui disent: II n'est pas question de rupture du Canada. Il n'est pas question du tout de briser le pays. Il s'agit simplement d'un réaménagement qui s'appelle la souveraineté-association, lorsque l'orî pousse un peu, comme je l'ai fait en Chambre. J'ai reçu une réponse le 16 mars 1977 du premier ministre: Voyons, indépendance et souveraineté, cessez les chinoiseries, cela veut dire la même chose. Et pourtant on n'emploie pas facilement le mot indépendance depuis quelque temps, sauf de la part du ministre des Finances, comme je l'ai mentionné tout à l'heure. Les autres font des discours à gauche et à droite, surtout aux Etats-Unis, parce que les Américains semblent plus informés que nous depuis quelque temps sur certains aspects de la souveraineté-association et sur l'option constitutionnelle du gouvernement. Si on est à Washington ou à New York ou à Boston, ou même à Paris, on peut avoir certains renseignements inédits et tout cela est commenté par des journalistes qui essaient d'interpréter pour les Québécois, ce qu'est cette supposée option constitutionnelle du gouvernement.

M. le Président, à l'Assemblée nationale, j'ai même été accusé de revenir continuellement sur le sujet. Chaque fois que je me lève en Chambre, j'ai vu plusieurs éditorialistes, journalistes, reporters, analystes qui disaient: Le chef parlementaire de l'Opposition officielle revient continuellement avec son dada. Il essaie quoi? Il essaie simplement de demander au gouvernement de se définir et de définir sa position constitutionnelle. C'est bien simple. Simplement, parce que je n'ai pas de réponse, je reviens continuellement à la charge. Nous avons même vu une motion qui a été présentée par le Parti libéral à l'Assemblée nationale et une motion qui a reçu , imaginez-vous, l'unanimité de la Chambre. Cette motion, justement...

M. Paquette: ...

M. Levesque (Bonaventure): Cette motion, M. le Président, a reçu, comme je viens de le mentionner, l'unanimité de la Chambre. Or, elle demandait au gouvernement de définir sans délai la théorie de la souveraineté-association, théorie qui correspond à l'option indépendantiste du gouver-

nement, telle que nous pouvons le deviner du moins. La motion se lisait: "Que cette Assemblée est d'avis que le gouvernement doit définir clairement et sans délai sa théorie de la souveraineté-association afin que les Québécois soient en mesure de bien connaître les implications du projet indépendantiste véhiculé par le présent gouvernement." C'était le 12 avril 1978. Il y a un peu plus de deux mois. De la part de tous les députés, de quelque parti que ce soit, incluant les ministériels, cette motion a été adoptée à l'unanimité. Cela n'a pas fait avancer les choses. Nous n'avons sûrement pas, depuis ce temps-là, su ce qu'était cette fameuse théorie de la souveraineté-association.

Au ministère des Affaires intergouvernementales, les études se poursuivent, les dossiers s'accumulent, les hypothèses s'ajoutent aux hypothèses, le scénario se prépare, l'étapisme se continue. On dit: Voyez-vous, on ne peut pas vous livrer ces documents parce qu'ils sont d'ordre technique. Vous risqueriez de ne pas les comprendre, ou si vous les comprenez, ce serait assez dangereux, parce qu'on pourrait les interpréter, comme a dit le premier ministre, de 25 000 façons. Ce sont des dossiers qui ne sont pas pour le monde ordinaire. C'est plutôt pour des gens qui savent les manier, les manipuler.

M. le Président, nous avons eu de ces réactions qui sont assez surprenantes dans un régime qui se veut démocratique, tellement que je dois dire que, tout récemment, le gouvernement devant les réactions non équivoques de la part de l'opinion publique, des media, etc., a semblé faire volte-face et est revenu en disant: Nous allons vous les livrer, ces documents, mais pas tout de suite. Vous savez, c'est un peu dangereux, particulièrement, à cause des élections fédérales. Il ne faudrait pas mêler les choses. Il ne faudrait pas que, dans une campagne fédérale, on soit pris avec ces documents, ces renseignements, ils ne sont pas de nature à favoriser la sérénité d'une élection fédérale. Peut-être que nous pourrions attendre après. Il était question, à ce moment, d'une élection fédérale, évidemment, prévue pour la fin de juin, le début de juillet. Cette élection n'ayant pas lieu, on demeure silencieux, pas plus de dossiers, pas plus de documents, pas plus de transparence. C'est encore un sujet tabou.

Si on voulait faire venir des témoins, est-ce qu'on ne pourrait pas faire venir un témoin supposément crédible? Le Conseil national du Parti québécois qui a fait venir ces gens du gouvernement? Il a dit: Eh! les amis, qu'est-ce que vous voulez dire par souveraineté-association? Venez donc nous expliquer cela! N'allez pas dire cela à la Chambre et n'allez pas prendre de décision quant à ce que cela veut dire, sans revenir devant nous autres. Vous allez nous expliquer ce que c'est, la souveraineté-association. Le Conseil national du Parti québécois ne le sait pas, et, en bon français, il ne "truste " pas ces gens, quant à leur conception de la théorie de la souveraineté-association.

M. le Président, c'est un témoin dont on voudrait bien mettre en doute la crédibilité, mais, tout de même, on le voit, le Conseil national, qui a toujours eu une grande influence, une grande autorité même, sur les parlementaires du Parti québécois, somme ses parlementaires de venir se rapporter pour expliquer ce qu'est la souveraineté-association. Le parti ne le sait même pas, et pourtant, on se fait dire par le premier ministre: C'est clair, cela fait dix ou douze ans que cette option est la nôtre et nous n'avons jamais changé d'idée. De quelle idée s'agit-il? S'il faut que le Conseil national du Parti québécois n'en ait pas la moindre idée, de cette idée... On veut absolument que le gouvernement ne s'engage pas, que les parlementaires ne se prononcent pas...

M. Vaillancourt (Jonquière): Question de règlement, M. le Président.

M. Levesque (Bonaventure): Cela ne fait pas votre affaire?

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière, sur une question de règlement.

M. Levesque (Bonaventure): Non, mais il me semble que j'ai été poli, gentil, parlementaire. Je n'ai pas employé de mots...

M. Vaillancourt (Jonquière): Non, ce n'est pas l'article 99, ni 96.

M. Levesque (Bonaventure): Ah bon!

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière.

M. Levesque (Bonaventure): La pertinence?

M. Vaillancourt (Jonquière): Voilà!

M. Levesque (Bonaventure): Voyons! Si c'est impertinent de parler de Conseil national du Parti québécois, je suis bien prêt...

M. Vaillancourt (Jonquière): Si le chef de l'Opposition officielle admet qu'il était un petit peu en dehors du sujet, non pas impertinent, puisqu'il ne l'est jamais, mais M. le Président, c'est seulement pour vous dire que vous avez admis vous-même que, dans la motion qui était présentée, il y avait beaucoup plus de mécanique que de contenu, que de fond. Je pense que les interventions doivent également comprendre beaucoup plus de cette mécanique que de fond...

M. Samson: Voyons donc! Mécanique de fond...

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière. M. le chef parlementaire de l'Opposition officielle...

M. Charbonneau: Les lumières viennent de s'allumer, 100 000 watts. (21 heures)

Le Président (M. Clair): ... je vous ai écouté avec beaucoup d'attention depuis le début de votre intervention. Effectivement, vous avez parlé beaucoup de consultation populaire portant sur le statut constitutionnel du Québec. Cependant, il me semble que vous oubliez peut-être un tout petit peu — je ne veux pas être impertinent, je sais tout le respect qui vous est dû à titre de chef de l'Opposition officielle — mais j'aimerais quand même — ça vaut pour tous les membres de cette commission — qu'on essaie de rester sur la motion d'amendement, telle qu'elle a été adoptée, soit une motion d'amendement d'ordre général. Je suis convaincu, M. le chef de l'Opposition, que vous alliez... D'ailleurs, à plusieurs reprises, vous y êtes venu, à cette question générale du devoir pour un gouvernement, parce que c'est bien de ça qu'il s'agit, de déposer, dans toutes circonstances où il y aurait une consultation populaire sur le statut constitutionnel du Québec, au moins trois mois avant le jour fixé pour l'émission du bref référendaire, un document définissant sa position. Ceci étant dit le plus délicatement possible, M. le chef de l'Opposition vous avez la parole.

M. Levesque (Bonaventure): Vous êtes bien gentil et bien délicat, M. le Président, mais je dois continuer dans ce sens-ci. C'est que je dois prouver, M. le Président, à cette commission, le bien-fondé de l'amendement que nous suggérons, et cet amendement, je vous le rappelle, M. le Président, au cas où les membres de la commission l'auraient oublié, c'est que, dans le cas d'une consultation populaire portant sur le statut constitutionnel du Québec, et je prends vos propres mots, le gouvernement — c'est vous qui nous les avez mis dans la bouche, M. le Président — doit déposer, à l'Assemblée nationale, un document définissant son option constitutionnelle, au moins trois mois avant le jour fixé pour l'émission du bref référendaire.

Pourquoi présentons-nous un tel amendement? C'est simplement parce que, dans les circonstances que je vous décris, il y a grand risque que si nous n'avons pas ces trois mois, nous soyons dans l'obscurité et la confusion qui existent présentement, dans un cas bien précis, et, M. le Président, ce serait de la tartuferie si j'oubliais le contexte actuel dans lequel nous nous trouvons, parce que, M. le Président, ce n'est pas nous qui avons demandé un référendum sur le statut constitutionnel du Québec, et vous savez fort bien — ne nous le cachons pas — que s'il y a un projet de loi no 92, ce n'est pas pour établir une loi-cadre pour les référendums à venir, c'est simplement parce que le gouvernement s'est engagé à un référendum sur l'option constitutionnelle. Il a promis, ce gouvernement qui est ici en chair et en os devant nous, à la population du Québec, de la consulter relativement à son option constitutionnelle.

Or, je dis, M. le Président, que ces trois mois sont nécessaires, parce que s'ils n'étaient pas dans la loi, ce gouvernement pourrait continuer à agir comme il a agi depuis le 15 novembre 1976, c'est-à-dire, à jeter de la confusion, à voir des membres, par exemple, du gouvernement disant une chose, d'autres membres du gouvernement disant d'autre chose, et certains délégués et mandataires plus ou moins officiels ou officieux, qui s'en vont à gauche et à droite, les députés, et qui donnent leur interprétation, pendant que le parti qui forme le gouvernement, lui — le conseil national, c'est pour ça que j'y ai fait référence — demande à ses parlementaires de revenir expliquer ce que c'est dans l'opinion de ce gouvernement et de ses parlementaires l'option constitutionnelle du gouvernement.

Or, si ces gens ne le savent pas, la population risque de ne pas le savoir et risque d'avoir à voter un référendum sans avoir été suffisamment informée. C'est pourquoi j'insiste, M. le Président, et je pense que je ne vais pas à l'encontre du règlement, sur l'état de confusion que nous connaissons présentement, et je n'ai pas de meilleur témoin, M. le Président, après ceux, évidemment, que j'ai pu invoquer, je n'ai pas de meilleur témoin encore qu'une association dont je n'ai pas toujours d'ailleurs évidemment partagé l'ensemble des vues et que je n'ai pas évidemment citée à satiété depuis que je suis dans cette Chambre, mais je dois dire que la CSN s'interroge sur la souveraineté-association du Parti québécois.

Une Voix: Cela fait longtemps.

M. Levesque (Bonaventure): Pardon? Il y a longtemps qu'elle s'interroge, mais cela a été assez précis, récemment, et vous me permettrez, M. le Président, dans ce contexte, de dire, de citer la Presse de Montréal. Ce n'est pas une vieille histoire, c'est le mercredi 7 juin, c'est hier, et on y lit: "La thèse de la CSN est d'ailleurs exposée dans un volumineux rapport du comité d'orientation de la centrale, sur lequel siègent seize personnes dont le président et deux vice-présidents de la centrale, et est centrée sur le fait que le projet du Parti québécois pose une multitude de questions auxquelles il n'a pas lui-même commencé à répondre. A quelques mois du référendum, affirme le document de la CSN, nous ne savons à peu près rien du contenu de la souveraineté-association.

Evidemment, M. le Président — là, je quitte la citation pour un instant — si c'était la thèse de M. Parizeau qui prévalait, et si la question était, par exemple: Voulez-vous l'indépendance du Québec, oui ou non, et si vous aviez parlé de ça continuellement, ne pensez pas que j'insisterais comme ça. Ce serait clair. Le gouvernement actuel a été élu en promettant un référendum sur l'indépendance; le premier ministre va à New York et dit: "L'indépendance est irréversible; " le ministre des Finances dit: "Toute notre action est préréférendaire, nous sommes des indépendantistes, nous voulons être appuyés par le gouvernement dans un référendum sur l'indépendance."

Si c'était ça! M. le Président, pensez-vous qu'on serait ici, ce soir, à vous fatiguer avec des subtilités. C est la confusion la plus... Je continue

le document de la CSN, c'est intéressant. "A quelques mois du référendum — M. le Président, d'affirmer ce document — nous ne savons à peu près rien du contenu de la souveraineté-association. Tout se prépare ", dit la CSN; la CSN, M. le Président...

M. Lalonde: Ils n'ont pas leur carte de membre du parti...

M. Levesque (Bonaventure): Ecoutez, il y en a qui ont... oui, je pense bien qu'il y en a. Pas la CSN... il doit y avoir des gens de la CSN qui en ont. "Tout se prépare dans le secret", écoutez ça, M. le ministre de la Justice, c'est intéressant de voir ce que la CSN dit de vous autres, avec la Commonwealth Plywood, je vais vous en dire d'autres.

M. Bédard: Ne mêlez pas les débats, si vous voulez parler de la Commonwealth Plywood, on va en parler à deux.

M. Levesque (Bonaventure): D'accord, c'est vous qui êtes intervenu, à ce moment-là.

Le Président (M. Clair): A l'ordre!

M. Levesque (Bonaventure): Excusez-moi, M. le Président, je reviens. Il n'y a plus de Commonwealth Plywood, il y a simplement l'intervention du ministre de la Justice, la CSN; cela m'a fait penser à ça, mais je n'en parle pas, je n'en parle plus.

M. Bédard: On n'aura même pas le droit de la regarder tantôt. On n'aura pas le droit de la regarder tantôt.

M. Levesque (Bonaventure): Mais ce que vos amis de la CSN disent, M. le ministre de la Justice, "tout se prépare dans le secret des Dieux. Avec la multiplication des tournées des ministres aux Etats-Unis — je ne parle pas du ministre de la Justice, c'est réservé de ce côté, je parle de ses collègues, ils travaillent, oui — le pouvoir économique et politique américain en connaît probablement plus que les Québécois. "Cette attitude qui a commencé par le discours de Levesque à l'Economic Club de New York et qui est maintenant devenue une habitude, est un signe clair de sa faiblesse devant le grand capital américain et commence à manifester du mépris pour le peuple québécois. "

C'est la CSN qui dit ça. Je reviens à la motion, M. le Président.

M. Bédard: Seulement une petite question. Admettez-vous avec moi que lorsque le premier ministre a parlé à l'Economic Club de New York, tous les Québécois ont pu suivre le discours autant que tous les Américains? Arrêtez de charrier.

M. Levesque (Bonaventure): Cela a été la fois où les Québécois ont pu suivre ça davantage, parce que justement, il y avait tous les media d'information...

M. Bédard: A Paris, la même chose.

M. Levesque (Bonaventure): ... qui étaient là, mais ça venait d'où, ça? C'était dit à qui et quand...

M. Bédard: II faut que ce soit dit où?

M. Levesque (Bonaventure): ... dans quel contexte? Si le premier ministre a quelque chose à nous dire, qu'il parle d'abord aux Québécois. Même si les media d'information nous ramènent ça, ça ne veut pas dire que nous, les Québécois, on n'a pas le droit d'être les premiers informés et directement informés.

Je vois mal le ministre de la Justice me dire ça.

M. Bédard: Puis-je dire que nous, du gouvernement, que nous parlions à Paris, que le premier ministre parie à Paris, à New York ou au Québec, il parle toujours aux Québécois. Le message ne change pas. C'est la différence avec le gouvernement qui nous a précédé.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, il y a une intervention à laquelle je dois répondre comme ceci, c'est que je n'ai pas d'objection à ce que le premier ministre s'adresse à un auditoire américain, mais quand la plus grande partie des renseignements qu'on peut avoir sur l'option constitutionnelle du gouvernement nous parvient de l'étranger, on a à s'inquiéter. Je continue, M. le Président.

La CSN, par conséquent, s'interroge sur le projet de souveraineté-association du Parti québécois qu'on pourrait résumer ainsi, et ce sont les questions auxquelles on voudrait avoir les réponses, au moins trois mois avant que la population soit appelée, avant le bref référendaire. C'est ça qui est l'objet de notre motion. Les questions que se posent la CSN, il y a beaucoup de gens qui s'en posent. On dirait que la CSN s'est inspirée des questions que l'on pose continuellement en Chambre, nous de l'Opposition officielle du moins. Je suis convaincu que les autres oppositions se joignent à ce genre de questions auxquelles on veut avoir des réponses. Quelles questions, mentionne la CSN? Quel est le sens de toutes les formules que l'on emploie depuis quelque temps, selon lesquelles on ne peut pas casser le Canada au régime fédéral? Quels sont les objectifs de la stratégie "étapiste" de Claude Morin? Quel est le type d'association économique que l'on préconise? S'agit-ii d'une communauté économique impliquant le libre échange complet des biens du capital et de la main-d'oeuvre? S'agit-il d'un marché commun basé sur le strict échange des biens? Quel est l'intérêt des autres provinces à accepter une union douanière qui favoriserait surtout les industries québécoises en déclin et qui réclame des mesures protectionnistes? En cas d'échec de

l'union douanière, le gouvernement recherchera-t-il des alliances économiques plus poussées avec les Etats-Unis? Quels seraient alors les effets de notre dépendance? Y aurait-il ou non une union monétaire? Quelte serait alors notre autonomie dans l'élaboration des politiques fiscales et monétaires?"

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président...

M. Levesque (Bonaventure): Je continue de citer la CSN qui s'interroge justement. C'est pourquoi ces trois mois que nous suggérons sont tellement importants; cela devrait être six mois, cela devrait être un an, mais c'est un minimum ces trois mois-là. Je continue les questions de la CSN qui dit: "Sur le plan de la politique étrangère et de la dépense, de quel droit le gouvernement s'est-il engagé d'avance à faire partie des deux alliances militaires NORAD et OTAN? De quel droit s'est-il engagé à demander son admission au sein du Commonwealth? Quant au processus démocratique qu'il suivra pour accéder à un nouveau statut politique, il y a là — affirme la CSN — encore matière à se poser des questions sérieuses. Tout est entouré de mystère." C'est la CSN qui parle, M. le Président. Cela vous surprend, je sais que cela vous surprend.

Mais la CSN se réveille, M. le Président. Cette attitude relève-t-elle seulement de la tactique vis-à-vis des forces fédéralistes? On continue ainsi.

Je ne veux pas exagérer, mais la population du Québec dont l'avenir fait l'objet de tous ces caprices du gouvernement, cet avenir de la collectivité québécoise, on ne peut pas jouer avec cela et ensuite demander au peuple du Québec de se prononcer sur une option. On peut appeler cela souveraineté-association. Pourquoi n'a-t-on pas continué avec l'indépendance, comme M. Parizeau continue... Pourquoi pensez-vous qu'on a parlé de souveraineté-association? C'est clair, la souveraineté, le monde comprend moins cela que la séparation et l'indépendance, c'est clair. Commençons par cela. La souveraineté, cela a l'air d'un petit mot comme la fierté et tout cela. La souveraineté, cela va bien. Tout le monde, hum! pas mal, parce que...

M. Bédard: Avez-vous quelque chose contre la fierté?

M. Levesque (Bonaventure): Non, justement, parce que les Québécois, à juste titre, sont fiers.

M. Charbonneau: Ils n'ont pas de fierté.

M. Levesque (Bonaventure): Je dis que le mot "souveraineté " a été utilisé simplement pour flatter cette fierté légitime des Québécois dont on a parlé pendant... J'ai été député du temps de l'autonomie; vous ne l'avez pas été. De l'autonomie, on en a mangé, on en a mangé pendant des années ici. Ce n'était pas la souveraineté dans ce temps-là; c'était l'autonomie. Il n'y avait rien. On pouvait donner des contrats sans soumission; L'autonomie! On pouvait faire n'importe quoi.

M. Paquette: Statut particulier.

M. Levesque (Bonaventure): On pouvait faire des millionnaires avec les Canadiens français, comme disaient certains grands stratèges de l'Union Nationale, du temps.

M. le Président, dans ce temps-là, ils disaient: On va faire des millionnaires avec des Canadiens français. Cela, c'est de l'autonomie. On va arrêter de voir des Anglais seulement millionnaires et on va donner des contrats sans soumissions. On va donner quelques millions à un tel et un tel. Là, on va servir l'autonomie. Là, ce qu'on est en train de faire, c'est la souveraineté.

M. Charbonneau: Cela va faire, le bouffon!

M. Vaillancourt (Jonquière): Question de règlement, M. le Président.

M. Levesque (Bonaventure): Vous n'avez pas vécu.

M. Charbonneau: Cela m'écoeure, cela. Cela m'écoeure, cela.

M. Vaillancourt (Jonquière): Question de règlement, M. le Président.

M. Levesque (Bonaventure): Cela vous écoeure; c'est la vérité qui vous écoeure.

Le Président (M. Clair): A l'ordre! A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre!

M. Charbonneau: Des gens qui n'ont pas plus de... et qui lisent leur texte comme cela.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs! A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Vaillancourt (Jonquière): Question de règlement, M. le Président.

M. Charbonneau: Maudit que cela m'écoeure.

M. Levesque (Bonaventure): Vous sauriez cela.

M. Charbonneau: Vous ne viendrez pas me donner de leçon à moi, en tout cas.

M. Levesque (Bonaventure): Oui, je vais vous donner des leçons. Vous pouvez en prendre, comme n'importe qui peut prendre des leçons.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Levesque (Bonaventure): Vous en prendrez de qui vous voudrez, mais vous en avez besoin.

M. Charbonneau: Pas de vous certainement.

Le Président (M. Clair): Messieurs, à l'ordre, s'il vous plaît!

M. Charbonneau: Maudit que c'est écoeurant.

Le Président (M. Clair): Le député de Jonquière invoque le...

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, est-ce que je peux continuer sans avoir des invectives comme celles que je viens de recevoir de quelqu'un qui est probablement bien intentionné mais qui devrait se contrôler?

M. Charbonneau: Non, mais il y a des limites.

Le Président (M. Clair): Le député de Jonquière...

M. Vaillancourt (Jonquière): Question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Le député de Jonquière a soulevé une question.

M. Charbonneau: Ce n'est pas un cirque ici.

M. Vaillancourt (Jonquière): Question de règlement.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Verchères, le député de Jonquière invoque le règlement.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je dois dire que cela fait au moins quinze fois que je le dis.

M. Charbonneau: ... ici.

Le Président (M. Clair): A l'ordre!

M. Levesque (Bonaventure): Pas de malice.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, évidemment...

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière, sur une question de règlement.

M. Vaillancourt (Jonquière): Je ne voudrais pas déplaire au chef de l'Opposition, mais malgré...

M. Levesque (Bonaventure): Mais vous êtes à la veille de me déplaire, j'en suis convaincu.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, malgré tout le respect que je lui dois et que je lui rends il n'en reste pas moins que le règlement, malgré la délicatesse dont vous faites preuve à l'endroit du chef de l'Opposition...

M. Levesque (Bonaventure): J'achève, M. le député.

M. Vaillancourt (Jonquière): ... s'applique...

M. Levesque (Bonaventure): Mon temps achève. Je voudrais simplement avoir l'occasion de terminer. (21 h 15)

M. Vaillancourt (Jonquière): Je vais vous donner l'occasion de terminer. C'était pour souligner, M. le chef de l'Opposition officielle, que votre temps était expiré et que le règlement ne fait pas de...

M. Levesque (Bonaventure): Je le comprends fort bien. Et je suis très respectueux du règlement.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je pense que le parti ministériel a fait preuve de souplesse. Nous aurions pu soulever plusieurs questions de règlement sur la pertinence du débat. Nous ne l'avons fait qu'à une seule reprise. Mais en ce qui concerne la question des 20 minutes, j'aimerais que ce soit respecté.

M. Levesque (Bonaventure): C'est la générosité dont faisaient preuve mes adversaires assis à cette table dans les années cinquante.

Le Président (M. Clair): Messieurs.

M. Levesque (Bonaventure): Nous pourrions nous défaire de l'Opposition complètement, vous savez. Cela se disait, dans ce temps-là.

Le Président (M. Clair): Messieurs, tenant compte des interruptions dont le député de Bonaventure a fait l'objet, j'ai peut-être eu un peu plus de difficulté à minuter le temps. Je pense que le député de Bonaventure peut terminer en trois minutes.

M. Levesque (Bonaventure): Je vous remercie beaucoup, M. le Président. Je disais tout simplement, avant d'avoir suscité l'ire de certaines personnes qui n'aiment peut-être pas que je sois historien pour un instant, je voudrais simplement... On pourrait faire un autre scénario pour Charbonneau et le Chef, vous savez.

M. Charbonneau: C'est de l'histoire.

M. Levesque (Bonaventure): Je reprends mes trois minutes, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Profitez-en, M. le député.

M. Levesque (Bonaventure): Je disais simplement que le mot "souveraineté" pouvait être associé facilement à une fierté légitime des Québécois, mais qu'ajouté au mot "association ", pourquoi pensez-vous qu'on a ajouté le mot "association"? Pourquoi n'a-t-on pas gardé le mot "indépendance " purement et simplement? "Souveraineté", je vous l'ai dit. Et "association ", c'est parce qu'il est important de sécuriser. Ces gens-là ont été des spécialistes, M. le Président.

Vous avez vous-même participé à la campagne électorale où on a voulu rassurer le peuple.

M. Vaillancourt (Jonquière): II est neutre.

M. Levesque (Bonaventure): Je sais qu'il est neutre, mais il se rappelle.

On a voulu être bien rassurants. Ne vous énervez pas, ne vous inquiétez pas, il n'est pas question d'indépendance, on vous consultera plus tard sur l'indépendance. Pour le moment, votez pour nous, nous serons un bon et vrai gouvernement.

Aujourd'hui, qu'est-ce que vous dites? Ne vous inquiétez pas. Il n'est pas question de rupture du pays, de se séparer. N'employez pas le mot. Et même les instructions que vous recevez un peu intimement, pas secrètes, mais un peu personnelles, n'employez plus le mot "séparation" n'employez plus le mot "indépendance". Probablement que M. Parizeau n'a pas reçu la directive. Il faut employer le mot "souveraineté-association" et rassurer le peuple, ne pas inquiéter, endormir. C'est de l'intoxication, M. le Président, et c'est cela que nous voulons éviter par les trois mois que nous suggérons. Et je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Clair): M. le ministre de la Justice.

M. Bédard: M. le Président, l'amendement qui est proposé...

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs! M. le ministre de la Justice.

M. Bédard: L'amendement qui est proposé par l'Opposition, M. le Président, origine d'un souci respectable et que nous respectons, à savoir le droit du public à l'information, une information la plus objective possible, à l'occasion d'un référendum pour lequel il a à se prononcer.

Je pense que nous pouvons dire très facilement et très clairement que non seulement nous sommes d'accord avec l'idée et la préoccupation de l'Opposition à l'effet que la population ait une information objective, mais que nous sommes prêts à mettre au point un mécanisme qui puisse permettre cette information objective à l'intention de la population à l'occasion, non seulement du référendum promis par le gouvernement du Québec, mais à l'occasion de tous les référendums. Il ne faut jamais oublier qu'on travaille sur une loi-cadre, dont on va essayer de rendre — je l'ai dit à plusieurs reprises — le mécanisme le plus parfait possible, au point de vue démocratique.

Lorsque nous parlons de démocratie, à moins d'en parler dans le vide, je crois que nous devons avoir un souci tout à fait particulier, pour que, à l'occasion de quelque référendum que ce soit, on s'assure, on prévoie des mécanismes pour que la population soit bien informée et, en conséquence, puisse exercer un choix libre et éclairé. Mon opinion, M. le Président — et je pense bien que là- dessus l'Opposition est d'accord — est qu'une période du référendum n'est pas une période d'agitation, quelque référendum que ce soit, mais plutôt une période privilégiée d'information au niveau de la population, sur un sujet précis sur lequel on veut que celle-ci se prononce.

M. Lavoie: Est-ce que le ministre me permettrait une question? Vous avez parlé de mécanismes à mettre en place pour informer la population; pourriez-vous nous indiquer quels sont ces mécanismes?

M. Bédard: Si vous me laissez continuer, vous allez...

M. Lavoie: D'accord.

M. Bédard: Je crois que justement la Commission des droits de la personne, dans son opinion préliminaire qu'elle a rappelée d'ailleurs à l'attention du gouvernement et des membres de la commission lorsqu'elle a exprimé sa dernière opinion, est très sensible — et c'est normal — à cette nécessité d'une information objective de la population à l'occasion de tous les référendums. La Commission des droits de la personne ne parle pas du référendum de l'indépendance, elle parle — et c'est normal — parce qu'elle a compris le projet de loi, elle a compris que c'est une loi-cadre, elle parle de tous les référendums.

Ce que la commission a très bien compris, c'est-à-dire que c'est une loi-cadre, qu'on doit se soucier d'une information objective de la population, l'Opposition ne l'a pas encore compris que c'est une loi-cadre. Si elle veut nous aider, dans l'optique d'améliorer le mécanisme le plus valablement possible, on doit s'orienter en fonction non seulement d'un référendum, mais de tous les référendums puisqu'il s'agit d'un mécanisme qui pourra servir à plusieurs référendums et qu'il s'agit d'une loi-cadre que pourront utiliser, non pas un gouvernement, mais plusieurs gouvernements. Je pense que dans ce sens-là un amendement doit s'adresser à tous les genres de référendums.

Je comprends que le chef de l'Opposition — je ne veux pas lui répondre sur le ton de la polémique qui a caractérisé son intervention — a parlé de la confusion qui semblait exister chez les membres du gouvernement ou chez ceux qui, effectivement sont orientés en fonction... Ceux chez qui cela a été une promesse de la tenue d'un référendum bien précis sur l'avenir constitutionnel du Québec. Si je voulais m'aventurer dans cette manière de discuter, je pense qu'on pourrait parler aussi de l'imprécision ou des imprécisions dont font preuve les oppositions, toutes les oppositions, tant ici à Québec qu'au fédéral, concernant l'avenir constitutionnel du Québec ou du Canada.

M. Levesque (Bonaventure): Nous n'avons pas de référendum, nous.

M. Bédard: Pardon, vous le saurez, vous aurez à vous mêler du référendum. Vous aurez à expliquer comme le gouvernement...

M. Lalonde: On n'a pas parlé de référendum.

M. Bédard: ... vous aurez à définir votre position, vous aurez à expliquer à la population et aux citoyens du Québec, vous aurez à expliquer... Ne fuyez pas vos responsabilités. Vous savez très bien, parce qu'il ne faut pas prendre les gens pour moins intelligents qu'ils ne le sont, vous savez très bien que ce n'est pas le seul fait pour vous de dire: non, on n'est pas d'accord avec le gouvernement ou avec ceux qui préconisent une option en faveur d'un oui, que vous allez régler le problème. Tout au cours de la campagne référendaire, vous savez très bien, si vous ne voulez pas fuir vos responsabilités, que vous aurez à expliquer vos positions. Si vous avez des solutions de rechange, que ce soit la troisième voie de M. Ryan, ou encore le statut renouvelé ou tout ce que vous voudrez...

M. Lavoie: Une question de règlement, M. le Président.

M. Bédard:... vous aurez à les expliquer. Vous le savez très bien. Un référendum...

Le Président (M. Clair): M. le ministre, le député de Laval invoque le règlement.

M. Lavoie: Je pense bien que l'amendement dont il est question actuellement, c'est qu'il y a une obligation pour le gouvernement de déposer devant l'Assemblée nationale, trois mois avant, son option constitutionnelle. Voulez-vous sous-amender que l'Opposition doit également le faire? Là, vous pourrez en parler de l'Opposition...

M. Vaillancourt (Jonquière): Qu'est-ce que c'est, la question?

M. Lavoie: Si vous voulez la pertinence du débat...

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que je peux répondre sur la question de règlement?

M. Lavoie: Je pense bien que c'est clair. C'est une obligation imposée au gouvernement d'éclairer...

M. Bédard: M. le Président, je pense qu'on a droit au même respect qu'a eu le chef de l'Opposition concernant la pertinence du débat.

M. Lalonde: On va vous laisser terminer.

M. Vaillancourt (Jonquière): D'ailleurs, notre règlement... M. le Président, sur la pertinence du débat, notre règlement, évidemment, nous dit qu'on doit être pertinent, qu'on doit parler du sujet, à moins que ce ne soit pour répondre brièvement à quelques digressions. Je ne me rappelle pas du numéro de l'article, mais comme président, je me le suis fait citer dans la nuit d'avant-hier. D'ailleurs, j'ai pris connaissance pour la première fois de cet article.

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière...

M. Vaillancourt (Jonquière): Comme le chef de l'Opposition officielle a fait quelques digressions, je pense qu'il est permis au ministre de répondre brièvement à ces quelques digressions.

M. Lavoie: Sur cette question de règlement, le chef de l'Opposition officielle n'a même pas fait de digression. On n'a pas le droit de répondre à des digressions qui n'existent pas. Il a parlé sur le fond de la question, ce qui n'est pas le cas de...

M. Bédard: Alors...

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est bien mieux un avocat qu'un notaire pour défendre une cause, si vous saviez!

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît! Avec la même délicatesse, je ferai, à l'endroit du ministre de la Justice, miens les propos que je tenais tantôt pour le chef de l'Opposition officielle. J'attendrai de lui les mêmes résultats. M. le ministre de la Justice.

M. Bédard: M. le Président, je n'en crois pas mes oreilles encore. Lorsque j'ai entendu tout à l'heure le chef de l'Opposition dire qu'il n'y a pas de référendum pour eux, c'est vraiment une attitude irresponsable. Le référendum, ce n'est pas seulement le référendum du gouvernement. C'est un référendum où, vous le savez très bien, à moins de vouloir fuir vos responsabilités, vous aurez également à vous adresser à la population, vous aurez également à faire valoir l'option que vous aurez choisie. Ce genre de réflexion ou de digression du chef de l'Opposition m'incite, m'explique, en fait, que...

M. Levesque (Bonaventure): Vous me permettrez quand même! Vous me permettrez, vu que vous avez dit cela, d'apporter seulement une précision. Tout ce que j'ai dit, c'est que nous n'avons pas commis de référendum. Nous ne nous sommes pas engagés dans un référendum.

M. Bédard: Vous avez dit: II n'y a pas de référendum pour nous.

M. Levesque (Bonaventure): Non, j'ai dit... M. Bédard: On n'a pas de référendum.

M. Lalonde: N'essayez donc pas de noyer le poisson!

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bédard: Laissez-moi terminer!

M. Levesque (Bonaventure): Question de privilège, s'il y en a une en commission!

M. Vaillancourt (Jonquière): Non, il n'y en a pas.

M. Bédard: Non.

M. Levesque (Bonaventure): J'ai dit: S'il y en a une en commission.

Le Président (M. Clair): Vous savez fort bien qu'il n'y en a pas, M. le député de Bonaventure.

M. Levesque (Bonaventure): Alors, je ne peux pas répondre.

Le Président (M. Clair): Messieurs, je vous invite à être respectueux les uns et les autres du droit de parole des uns et des autres. M. le ministre.

M. Bédard: M. le Président, cette réflexion du chef de l'Opposition, à savoir que, pour eux, il n'y a pas de référendum...

M. Lalonde: Non.

M. Levesque (Bonaventure): Est-ce que je peux poser une question?

M. Bédard: Je m'explique très bien que...

M. Levesque (Bonaventure): Vous n'avez pas le droit de dire cela.

M. Bédard:... concernant la loi-cadre, l'Opposition essaie de fuir ses responsabilités...

M. Lalonde: ... épouvantable.

M. Bédard: ... pour nous aider à l'améliorer et essaie de fuir ses responsabilités d'avance, responsabilités qu'elle aurait assumées à l'occasion d'une campagne référendaire.

M. Lavoie: II va bien.

M. Lalonde: II nous donne la mesure.

M. Bédard: Je vais revenir sur le sujet principal qui me semble de beaucoup le plus important, à savoir le droit du public et des citoyens à une information la plus objective possible, à l'occasion d'un référendum pour exercer le choix le plus éclairé possible. Je pense qu'il y a lieu... Ce qui est nécessaire, ce ne sont pas les trois mois qui sont contenus dans l'amendement présenté par le Parti libéral. Ce qui est nécessaire, c'est fournir un mécanisme qui permette aux différentes options d'avoir des chances égales de faire valoir leurs opinions et également de fournir le mécanisme possible pour que ces options donnent à la population ce à quoi elle a droit: une information objective. C'est ce qu'a compris la Commission des droits de la personne, lorsqu'elle nous dit, à la page 5, dans son opinion préliminaire, et je cite: "Un dernier point, avant de conclure sur cette partie du livre blanc, concerne le droit à l'information, tel que proclamé par la Charte des droits et libertés de la personne à l'article 44. La commission considère en effet que l'égalité des chances entre les diverses options ne va pas sans le droit du public à une information la plus objective et la plus complète possible, non seulement sur les aspects financiers de la campagne référendaire, ce qui est garanti dans le livre blanc, mais sur l'ensemble de ces aspects techniques et politiques, enjeux et options en présence." (21 h 30)

La commission poursuit son idée en disant qu'elle "propose donc qu'on s'inspire de l'exemple britannique et que l'on étudie: Premièrement, la possibilité de publier, de distribuer, sous la responsabilité et avec l'accord des options en présence, une brochure explicative sur chacune des options proposées par le référendum. "Deuxièmement, la possibilité d'attribuer des périodes de temps égales à la radio et à la télévision à toutes les parties en présence".

Je pense que le gouvernement a déjà donné satisfaction à la deuxième recommandation, à l'effet d'attribuer des périodes de temps égales à la radio et à la télévision, à toutes les parties en présence, et je crois qu'il faut trouver le moyen de mettre au point un mécanisme qui permette justement une information objective de la part des différentes options en présence à l'endroit des citoyens québécois.

Je pense qu'en s'inspirant de l'exemple britannique, il y a lieu de penser — là, je ne formule pas le mot à mot de ce que nous avons à l'esprit — à la possibilité, au début de la campagne référendaire proprement dite — peut-être sous la responsabilité du directeur du financement — de permettre aux différentes options justement de publier et de distribuer, sous leur responsabilité et en accord peut-être avec les comités représentant les différentes options, une brochure explicative, où l'égalité des chances serait respectée, sur les options présentées dans le référendum, afin non seulement que les options aient la possibilité de s'exprimer, mais que la population ait la possibilité également de recourir à une publication qui ferait état, le plus objectivement possible, des différentes options. Ceci pourrait se faire... Je n'ai pas à formuler présentement, mot à mot, l'amendement, mais je pense qu'on pourrait examiner la possibilité que, sous la responsabilité du directeur du financement et avec l'accord des présidents des différents comités nationaux, on puisse mettre au point une publication qui, à ce moment-là, obligerait chacune des parties à faire très bien connaître les tenants et aboutissants de son option, à chances égales, et qui serait un outil de référence privilégié pour l'ensemble des citoyens québécois. C'est dans ce sens-là que... Je n'ai pas demandé à l'Opposition de retirer ou de continuer à discuter l'amendement qui est en cause. Je le sais très bien, comme je l'ai dit au début, que cet amendement provient d'un souci, que nous respectons, d'informer tous les Québécois; une information

objective. Le premier ministre l'a dit souvent et il s'agirait simplement de mettre au point ce genre de mécanisme.

Autrement dit, nous voulons donner suite à cette recommandation de la Commission des droits de la personne qui me semble très à propos. Ce mécanisme-là doit être pensé, non pas en fonction d'un référendum, mais en fonction de tous les référendums. Ce n'est pas seulement pour le référendum sur l'autonomie constitutionnelle du Québec que les citoyens ont besoin d'être informés, c'est sur tous les référendums qu'un gouvernement ou que des gouvernements croiraient devoir être nécessaires. Je crois qu'avec de la collaboration de l'Opposition nous sommes capables, d'ici la fin de nos travaux, d'inclure une disposition très précise à l'intérieur de cette loi-cadre, qui va garantir ce que nous avons à coeur et ce que, j'espère, l'Opposition a à coeur, à savoir tous les mécanismes nécessaires pour une information objective et complète de l'ensemble des citoyens québécois.

M. Lalonde: M. le Président, une question de règlement.

M. Grenier: M. le Président.

M. Lalonde: J'invoque le règlement simplement qui me permettrait de présenter une question au ministre, simplement.

M. Bédard: Cet amendement-là, que je ne peux formuler, je pense que c'est l'intention qui est importante et on demandera la collaboration de l'Opposition pour que la rédaction réponde vraiment aux objectifs que nous poursuivons et que semble poursuivre l'Opposition dans son amendement, cet amendement-là pourrait se situer autour des articles 24 et 25.

M. Lavoie: Si le ministre veut donner ce genre d'obligation d'information, si vous voulez l'étendre à tous les référendums, vous n'avez qu'à amender l'amendement proposé pour l'appliquer à tous, le a), sur toute question approuvée par l'Assemblée nationale. Si vous voulez, on va l'adopter, si vous voulez l'apporter.

M. Bédard: Je pense qu'on se comprend très bien. Le but qu'on poursuit c'est qu'il y ait le plus d'information objective possible qui soit donnée à l'ensemble des citoyens qu'on veut consulter. Alors, vous avez présenté un amendement, vous pouvez peut-être le retenir au niveau de la discussion, jusqu'à ce que, en collaboration, nous en venions... Tel que je le disais tout à l'heure, ce n'est pas une question... Ce ne sont pas les trois mois qui sont importants dans l'amendement présenté par l'Opposition; je pense bien que c'est le souci de donner une information adéquate et objective, la plus objective possible aux citoyens que nous voulons consulter.

Le Président (M. Clair): Messieurs. Avant de donner la parole au député de Mégantic-Compton, il peut se passer trois choses, selon moi: soit qu'on suspende l'étude de cet amendement, soit qu'il soit retiré, ou soit qu'on en continue quand même l'étude et auquel cas je donnerais la parole au député de Mégantic-Compton dans l'alternance des partis habituels.

M. Lalonde: M. le Président, comme je suis l'auteur de l'amendement, je pense que les trois choix que vous avez suggérés couvrent le terrain, soit le retirer en faisant un acte de foi aveugle, soit suspendre. A ce moment-là, on pourrait considérer, après avoir entendu les propos des autres députés, l'opportunité de suspendre l'étude de l'amendement et de l'article 6.

Le Président (M. Clair): Mais quand vous dites: Entendre les autres députés, non pas sur la motion d'amendement comme telle?

M. Lalonde: Sur l'amendement, s'ils veulent.

Le Président (M. Clair): C'est parce qu'à ce moment-là...

M. Lalonde: C'est parce qu'ils ont demandé la parole. Le député de Mégantic-Compton... Je ne veux pas lui enlever l'occasion de parler s'il a d'autres suggestions brillantes à nous faire.

M. Vaillancourt (Jonquière): En ce qui nous concerne, M. le Président, l'ouverture dont a fait preuve le ministre, on est prêt à considérer et à préparer un amendement en ce sens-là, mais en ce qui nous concerne, nous ne verrions pas cet amendement à l'article 6, mais plutôt dans les articles impliquant les comités nationaux.

M. Levesque (Bonaventure): C'est ce qu'on a dit d'ailleurs.

M. Lalonde: ... on pourrait suspendre 6 jusqu'à ce qu'on arrive là.

M. Vaillancourt (Jonquière): Non pas suspendre l'étude de l'amendement, mais...

M. Lalonde: Parce que sans cela, il ne faut pas être naïfs...

M. Lavoie: On ne peut pas vous donner un blanc-seing.

M. Lalonde: On ne peut pas vous donner un blanc-seing. L'idée a été acceptée, mais...

M. Vaillancourt (Jonquière): II me semble que c'est assez clair...

M. Bédard: Vous pouvez le retirer et le représenter, si vous voyez qu'on n'arrive pas.

M. Lavoie: On va le représenter? Oui.

M. Vaillancourt (Jonquière): On donnera notre consentement à la présentation si...

M. Lalonde: On est un peu naïf, mais pas tant que ça.

M. Vaillancourt (Jonquière): ... si on ne respecte pas notre parole.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Lavoie: Ce ne sera pas la première fois. M. Bédard: M. le Président... M. Lalonde: Si vous aviez un texte... Le Président (M. Clair): A l'ordre!

M. Lalonde:... précis, peut-être qu'on pourrait s'arranger. Mais là...

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bédard: M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le ministre.

M. Bédard: ... je pense que j'ai fait état, j'espère, le plus clairement possible, de nos intentions et du souci que...

M. Lalonde: Cela nous prendrait un texte.

M. Bédard: ... nous apportons au fond de la question dont nous venons de parler.

M. Vaillancourt (Jonquière): La confiance règne.

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière, c'est votre ministre qui a la parole.

M. Vaillancourt (Jonquière): J'étais interpellé, M. le Président.

M. Bédard: Parce qu'il est clair que, comme c'est rédigé, je pense que vous connaissez la ligne de conduite que nous avons adoptée, très respectueusement, il ne nous serait pas possible de...

Le Président (M. Clair): Moi, j'aimerais demander au député de Mégantic-Compton, au député de Rouyn-Noranda et au député de Beauce-Sud, de qui relève peut-être, finalement, la décision, au moment où ils s'apprêtent à demander la parole, si c'est pour exprimer un choix sur la suspension de l'étude de l'article 6 ou s'ils veulent parler sur la motion et exercer leur droit de parole immédiatement sur la motion d'amendement?

M. Bédard: M. le Président, j'aurais peut-être une suggestion. Enfin, on s'essaie de chaque côté avec une suggestion. Si vous voulez le suspendre, peut-être le reporter, il ne se situe pas au niveau — on vous le dit — de l'article 6; on peut s'entendre en ce sens qu'au niveau des articles 24 et 25, vous reviendrez avec cet amendement. Je n'ai aucune objection...

M. Levesque (Bonaventure): II faudrait qu'il s'applique à l'article 6.

M. Lalonde: II faudrait qu'il s'applique à l'article 6, parce que...

M. Bédard: Non, écoutez! Il pourrait y avoir... Je pense que le droit à l'information est suffisamment important pour qu'il y ait un article, situez-le où vous voulez dans le projet de loi, qui parle uniquement de ça.

M. Lalonde: Non, pas là.

M. Bédard: Je ne crois pas que ça devrait se situer nécessairement à l'article 6 ou à un autre article.

M. Lalonde: Sur la suggestion du ministre, j'aurais peut-être des choses à dire, parce qu'il nous suggère de... Il ne veut pas suspendre l'article 6. Il nous suggère de le mettre dans le chapitre VIII qui est intitulé: La campagne référendaire.

Je vous vois, M. le Président, réellement tiraillé pour décider de l'opportunité ou de la recevabilité de notre amendement dans ce chapitre, étant donné que notre amendement se situe bien avant la campagne référendaire.

Le Président (M. Clair): La suggestion que je ferais peut-être, messieurs, puisque tout le monde a annoncé ses couleurs, je pense que si l'Opposition officielle était d'accord, on pourrait laisser parler le député de Mégantic-Compton, le député de Rouyn-Noranda et le député de Beauce-Sud et, ensuite, disposer de la motion d'amendement.

M. Lavoie: Ou on pourrait suspendre l'article 6.

Le Président (M. Clair): Oui, mais on ne s'entend pas.

M. Lavoie: On passerait à l'article 7. M. Bédard: M. le Président...

M. Levesque (Bonaventure): Si vous voulez faire avancer les choses...

M. Bédard: Mais oui, je veux taire avancer les choses. Je ne vois pas la nécessité de suspendre l'article 6...

M. Lavoie: L'article 3 est encore suspendu.

M. Bédard: ... puisque nous disons nous-mêmes que le contenu de cet amendement peut venir aux articles 24 et 25, où nous arriverons avec une proposition...

M. Levesque (Bonaventure):... à cette fin, on peut s'engager.

M. Bédard: Non, un moment donné...

M. Levesque (Bonaventure): On peut s'engager seulement à cette fin-là.

M. Lalonde: L'article 3 est encore suspendu. Il ne faut pas s'exciter là-dessus. Le député de Maisonneuve n'avait pas de problème à suspendre les articles. On a suspendu l'article 3, je pense qu'on avait suspendu l'article 4 à un moment donné. L'article 3 est encore suspendu.

Le Président (M. Clair): Je pose une question, à tout hasard. Quelqu'un fait-il une motion pour suspendre l'étude de l'article 6? On fait ça dans les formes.

M. Lalonde: M. le Président, je la ferais si j'avais une indication selon laquelle les ministériels sont d'accord. Parce qu'il ne faut pas commencer à aller jusqu'à minuit sur une motion formelle de suspendre l'article 6. On va perdre deux heures là-dessus.

Le Président (M. Clair): Quelqu'un ferait-il... M. Bédard: Nous ne ferons pas de débat... M. Lalonde: Non. M. Bédard: ... sur le fait de suspendre ou pas.

Le Président (M. Clair): Si le député de Jonquière faisait une motion formelle pour suspendre...

M. Samson: Question de règlement! On a une motion sur la table, il faut en disposer avant de passer à une autre motion et je pense qu'on est aussi bien d'en disposer.

M. Grenier: M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: ... étant donné qu'il semble bien qu'on ne peut pas reporter l'article, c'est réglé, et qu'il y a ici un point qui est extrêmement important pour ce côté-ci de la table, je ne sais pas si ça fera l'unanimité de tous ces gens qui sont ici, mais je pense que c'est une question importante qu'on discute depuis le début de la journée. L'amendement qui est là, qui a été accepté après pas mal de discussion sur l'acceptation des amendements, celui-là l'a été, et on a un amendement de fond qui nous permet de donner véritablement notre opinion sur ce que devrait faire le gouvernement face à... Cela ne vous dérange pas? Je ne dérange personne, non? (21 h 45)

Nous avons devant nous un véritable amendement qui nous permet d'établir des positions plus fermes, de rendre des choses plus précises, des choses qu'on demande depuis déjà plusieurs jours et même depuis plusieurs semaines et plusieurs mois dans certains cas. Nous allons voir le fond de cette question et nous allons voter; on saura à quoi s'en tenir à partir de là.

M. le Président, on a un amendement qu'on relit et qui est peut-être important: "Dans le cas d'une consultation populaire portant sur le statut constitutionnel du Québec, le gouvernement doit déposer, à l'Assemblée nationale, un document définissant son option constitutionnelle au moins trois mois avant le jour fixé pour l'émission du bref référendaire. J'ai l'impression... vous y avez travaillé, M. le Président, vous y avez ajouté, il y avait déjà un bon fond sur l'amendement, vous l'avez rendu acceptable — c'était votre droit — et je pense qu'on doit en disposer après qu'on aura dit, chacun de nous, ce qu'on en pense.

A cet amendement, M. le Président, il y a eu plusieurs débats mais il y en a eu un autour de cette table, ici, qui a eu lieu il y a environ deux mois, où le chef de l'Union Nationale, M. Biron, a demandé au ministre des Affaires intergouvernementales, le ministre étapiste, de préciser sa pensée sur le mouvement, sur cette définition de souveraineté-association. Inutile de vous dire qu'on a les idées un peu mêlées quand on regarde les définitions que peut nous servir l'actuel gouvernement. On a parlé, au début de ce gouvernement, de séparation et on a mis de côté...

M. Charbonneau: Jamais, on n'a jamais parlé de cela.

Une Voix: Surtout pas.

M. Grenier: On n'a pas vécu aux mêmes années.

M. Charbonneau: On n'a jamais parlé de cela.

M. Grenier: II y a un dénommé Marcel Chaput qui en a parlé et c'était le premier souverainiste. Je m'en souviens, si vous ne vous en souvenez pas.

Le Président (M. Clair): A l'ordre!

M. Charbonneau: Le Parti québécois n'était pas formé à ce moment-là.

M. Grenier: Le mouvement souveraineté-association existait à ce moment-là.

M. Charbonneau: Non, monsieur. Une Voix: Exactement.

M. Grenier: Je vous en reparlerai; c'est votre journal que j'ai ici.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: M. le Président, j'aimerais bien faire mon intervention en paix.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mégantic-Compton, puis-je vous assurer de mon

appui pour le respect de votre droit de parole. Vous avez la parole.

M. Grenier: Bon. On a parlé de séparation au début; ce terme est devenu tabou dans l'esprit de bien des gens. On a parlé par la suite, d'indépendance; ce terme est également devenu tabou.

M. Vaillancourt (Jonquière): Excusez-moi, M. le Président. Afin d'aider à avancer le débat, je m'excuse auprès du député...

Le Président (M. Clair): Est-ce que c'est une question de règlement?

M. Vaillancourt (Jonquière): Non, non, même pas, M. le Président; c'est une tentative de suggestion que je voudrais faire aux Oppositions. On parlait tout à l'heure de suspendre ou non l'article 6, ou d'adopter l'article 6, ou l'amendement du député de Laval. Le parti ministériel serait disposé à suspendre l'étude de l'article 6, à continuer à étudier les articles l'un après l'autre, à soumettre l'amendement qu'il aura à proposer dans le chapitre VIII, les articles 20, 21, 22, 23, 24, et laisser l'article 6 ouvert, laisser l'amendement du député de Marguerite-Bourgeoys sur la table mais, tout cela à la condition d'être sûr que si on revenait à l'article 6, éventuellement, on reviendrait seulement sur cet amendement et non sur deux, trois ou quatre autres.

M. le Président, j'ai déjà — M. le député de Laval m'autorise à le dire, je pense — rencontré le député de Laval et l'Opposition officielle me garantit qu'elle n'a plus d'autres amendements à présenter à l'article 6, de sorte qu'on laisserait l'amendement sur la table et on reviendrait éventuellement à l'article 6, seulement pour cet amendement. Evidemment si c'est le cas de l'Union Nationale également, si c'est le cas du député de Rouyn-Noranda et si c'est le cas du député de Beauce-Sud; à ce moment-là, on pourrait passer à l'étude des articles 7, 8, etc. Si l'amendement ne satisfait pas l'Opposition, à l'article 24, nous serions prêts à revenir à l'étude de l'article 6, à l'amendement du député de Marguerite-Bourgeoys et une fois qu'il en sera disposé, voter l'article 6 et non pas revenir avec d'autres amendements.

M. Grenier: Question de règlement, M. le Président. Je n'ai pas fait partie des négociations mais je peux vous dire une chose, c'est qu'on a déposé des amendements mais notre formation politique a l'intention de faire préciser cette partie-ci. Si cet amendement devait être rejeté, je n'entre pas dans l'arrangement, j'aurais voulu le faire ailleurs, ce n'est pas l'endroit pour négocier des choses...

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président...

M. Grenier: ... mais j'aurais voulu quand même qu'on ait la possibilité d'être consultés pour dire qu'on aura peut-être d'autres amendements, nous, à apporter.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le député de Mégantic-Compton, je m'excuse, vous étiez en train de prendre la parole lorsque j'ai... C'est une tentative; la tentative n'a pas réussi, c'est tout, il n'y a pas de...

M. Lalonde: Pour que ce soit dans le journal des Débats, M. le Président. Effectivement, comme le député de Laval l'a sûrement exprimé avant, il nous restait — on l'avait annoncé hier soir — deux amendements...

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est cela.

M. Lalonde:... un a été déclaré irrecevable ce matin, c'est notre dernier. Si l'article 6 reste tel quel, nous n'avons pas d'autre amendement à apporter que celui qui est actuellement notre dernier sur la table.

M. Vaillancourt (Jonquière): On continue.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Le consentement, ce n'est pas moi qui le refuse; ce n'est pas cela qu'on entend, n'est-ce pas? Ce n'est pas là-dessus que vous vous basez, parce que je n'ai pas de raison de refuser le consentement.

M. Vaillancourt (Jonquière): Bien oui! C'est là-dessus qu'il se base. Vous voulez disposer de l'amendement immédiatement. C'est cela que vous voulez?

M. Grenier: Non, ce n'est pas ce que j'ai dit.

M. Lalonde: II aura peut-être des amendements.

M. Grenier: J'ai dit que j'avais des amendements; si jamais on suspend l'article, j'aurai peut-être d'autres amendements.

M. Samson: Si on revient à un processus, il ne faut pas se barrer...

M. Lalonde: II n'y en a pas eu jusqu'à maintenant et...

M. Grenier: Si le Parti libéral n'en a pas, j'ai dit que je n'ai pas...

M. Vaillancourt (Jonquière): A ce moment-là, l'offre du parti ministériel ne tient plus.

M. Lalonde: Cela ne change rien.

M. Vaillancourt (Jonquière): On veut être sûr qu'il n'y aura qu'un seul amendement et non pas cinq, six, huit ou dix. C'est la garantie que nous voulons avoir.

M. Grenier: Voyons donc! M. Roy: M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Quand même, il y a des limites... Je pense qu'on était en train...

M. Samson: On est bâillonné rétroactivement!

M. Roy: Nous étions en train d'en venir à constater plus de souplesse du côté gouvernemental, et je pense que la décision que nous étions en train d'accepter, à cette commission, était une décision sage, très sage. Maintenant, si l'Opposition officielle n'a plus d'amendement à apporter à l'article 6, évidemment, c'est son droit, c'est son privilège. Si mon collègue, le député de Mégantic-Compton, peut avoir des amendements à apporter, compte tenu de ce qui sera accepté, de ce qui sera modifié ailleurs, accepté ou refusé, je pense qu'il ne faudrait quand même pas fermer la porte.

Je pense que, de toute façon, cela ferait avancer le débat que de suspendre l'article 6 et d'aller plus loin; on ferait avancer le débat. Je suggère fortement au gouvernement de laisser passer un peu de vapeur et de procéder à l'étude des autres articles du projet de loi, plutôt que de passer encore une semaine à l'article 6, pour tenter de connaître les intentions et d'avoir plus de détails sur les intentions du gouvernement. Qu'on accepte donc, tout simplement, de suspendre la motion et je peux vous assurer que, de ma part, vous n'aurez pas 25 motions d'amendement à l'article 6.

Le Président (M. Clair): Je me demande dans quel cadre de notre règlement on se situe. M. le député de Verchères.

M. Roy: C'est assez compliqué.

M. Samson: Dans le cadre du consentement.

Le Président (M. Clair): M. le député de Verchères.

M. Charbonneau: M. le Président...

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, la confiance règne de la part du parti ministériel. Nous faisons confiance aux propos du député de Rouyn-Noranda, à ceux du député de Mégantic-Compton et du député de Beauce-Sud et, .évidemment, aux propos tenus par l'Opposition officielle. Tenant pour acquis qu'il n'y aura pas une tonne d'amendement, M. le Président, à l'article 6, nous serions donc disposés à suspendre l'article 6 pour aller à l'étude de l'article 7. J'en fais, M. le Président, une...

M.Grenier: Je vous garantis immédiatement — vous connaissez notre position — qu'il n'est pas question de retarder les débats. Nous aurions désiré, à cet article, faire préciser la position du gouvernement; si cet article était défait, on en aura un qui ressemblera probablement à celui-là, mais il n'y en aura pas plus que cela.

M. Vaillancourt (Jonquière): D'accord.

Le Président (M. Clair): De consentement...

M. Samson: Evidemment, c'est une question de principe que, lorsque nous suspendons un article, on ne conditionne pas cette suspension; c'est simplement une question de principe. Vous aurez notre collaboration, on ne fera pas de "filibuster" inutile et ce qui est suggéré...

M. Vaillancourt (Jonquière): Ce n'était pas de la mauvaise volonté, M. le députe de Rouyn-Noranda. Je suis heureux...

M. Samson: Evidemment, il y a une motion sur la table et, en vertu du règlement, il faudrait en disposer, mais, par consentement unanime, on peut tout faire.

A ce moment-ci, compte tenu de ce qui est dit, je serais prêt à donner mon consentement pour suspendre l'étude de l'article 6, sans condition, mais, quand même...

M. Vaillancourt (Jonquière): On se fait confiance.

Le Président (M. Clair): De consentement, on suspend l'étude de l'article 6 et, partant...

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je fais motion pour que l'étude de l'article 6 soit suspendue et qu'on entreprenne immédiatement l'étude de larticle suivant, c'est-à-dire l'article 7. C'est sans condition.

M. Lavoie: Votre motion, c'est que le débat sur l'amendement à apporter à l'article 6 soit suspendu.

M. Lalonde: C'est tout l'article 6...

Le Président (M. Clair): C'est tout l'article 6, y compris l'étude des amendements. Cette motion sera-t-elle adoptée?

M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Clair): Messieurs, pour être bien certain qu'on se comprendra quand on y reviendra, ie député de Marguerite-Bourgeoys avait fait une motion d'amendement et, jusqu'à maintenant, nous considérons que seulement le député de Bonaventure a exercé complètement son droit de parole et il y a deux ou trois minutes que le député de Mégantic-Compton a pu utiliser; on considérera qu'il n'y a eu aucun temps utilisé par les autres intervenants, ni du côté ministériel, ni du côté de l'Opposition, sur la motion d'amendement.

M. Grenier: J'aurai la parole en commençant...

Le Président (M. Clair): Nous entamons donc l'étude de l'article 7.

Débat privilégié

M. Bédard: Nous avons un amendement, nous en avons fait parvenir la teneur aux membres de l'Opposition. C'est un amendement qui a pour effet d'ajouter, à la fin de l'article, la phrase suivante: "Le débat de cette proposition est privilégié et a priorité sur toute autre question, y compris le débat sur le discours inaugural."

Je ne crois pas que cela fasse une longue discussion. Cette disposition était déjà contenue dans le livre blanc. C'est simplement une omission de ne pas l'avoir reproduite dans le projet de loi. Je crois que, jusqu'à maintenant, les interventions tant des partis d'Opposition que du parti au pouvoir ont été à l'effet de souligner l'importance d'un référendum, peut-être celui auquel nous pensons tous; je crois qu'il est tout à fait normal qu'on puisse prévoir que, lorsque le gouvernement prend une décision de cette importance, à savoir celle de consulter la population d'une façon tout à fait spéciale, il y ait la possibilité qui est réservée par l'amendement que je propose à votre attention.

M. Lalonde: M. le Président, j'aurais une question à poser. Etant donné qu'on a une connaissance de l'amendement, je pense qu'on peut en parler maintenant. Est-ce que le débat sur le discours inaugural est un élément essentiel dans votre amendement?

Je vais vous dire pourquoi: C'est qu'il nous apparaît... on n'aimerait pas que le premier ministre fasse son discours inaugural, dans une situation suivante, quel que soit le premier ministre, et que, tout de suite après, on suspende et on passe à la motion; qu'on donne au moins aux chefs des partis reconnus le temps de faire leur discours pour avoir un certain équilibre avant de suspendre le discours inaugural, ou qu'on enlève complètement le débat de cette motion.

C'est pourquoi je posais la question à savoir si c'est si important que le discours inaugural soit compris là-dedans. Pendant qu'on discute...

M. Bédard: Si nous sommes d'accord sur le principe, on peut peut-être chercher une formulation. Vous amenez une interrogation qu'on doit se poser. Il me semble que l'idée, c'est que le débat sur la motion privilégiée a priorité sur toute autre question, y compris le débat sur le discours inaugural. Je conçois que, dans l'éventualité où le premier ministre ferait le discours inaugural, il me semble normal qu'il y ait la réplique des chefs de partis reconnus.

M. Lalonde: Ce serait conforme à la tradition et pour le discours du budget et pour le discours inaugural.

M. Bédard: Je pense que tout le monde est d'accord là-dessus, c'est d'éviter le délai qui est imparti au niveau du discours inaugural. (22 heures)

M. Lavoie: Ce que vous suggérez, c'est de... vous allez faire une nouvelle rédaction?

M. Vaillancourt (Jonquière): L'idée vient de M. le député de Marguerite-Bourgeoys. C'est difficile à exprimer...

M. Lavoie: Je pense bien qu'il serait facile qu'après que le premier ministre aura prononcé le message inaugural et les discours des chefs des partis — il faudrait couvrir cela, "à l'exception des interventions du premier ministre et des chefs des partis"...

M. Lalonde: C'est-à-dire qu'il n'y a pas de discours inaugural à moins que le premier ministre en fasse un. Je pense qu'on pourrait dire quelque chose comme ceci... vous avez l'amendement: "... y compris le débat sur le discours inaugural après les interventions des chefs des partis reconnus ou représentés, ou leurs représentants."

M. Lalonde: Est-ce que c'est "représentés " ou "reconnus "...

M. Bédard: Reconnus.

M. Lavoie: Non, c'est "représentés"...

M. Roy: Pourquoi ne pas prendre le mot "représentés" dans un débat de ce genre? Quand une formation politique est représentée par plus d'un député à l'Assemblée nationale, évidemment, on peut couvrir un nombre de sujets en partageant le temps entre les députés. Mais, lorsqu'une personne est seule pour représenter sa formation politique et qu'elle a seulement vingt minutes dans un débat au cours duquel les autres députés et les partis peuvent s'exprimer pendant beaucoup plus de temps, je ne pense pas qu'on brimerait les droits de personne en faisant en sorte que les partis représentés aient au moins une heure pour pouvoir s'exprimer dans une assemblée. Cela ne représenterait même pas un jour de plus pour le débat. Il y a déjà des dispositions dans la loi, notamment en matière de finance, qui permettent que les partis "représentés" aient droit de parole, et non pas les partis "reconnus".

Dans ce débat, je suggère, je demande fortement qu'on parle de partis "représentés" à l'Assemblée nationale.

M. Samson: M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: C'est une motion, la motion d'amendement à l'article 7, qui dit que le débat sur... Je pense que pour le bon entendement du journal des Débats, il faut lire l'article 7: "L'Assemblée nationale peut, sur proposition du premier ministre, adopter le texte d'une question devant

faire l'objet d'une consultation populaire. Le débat de cette proposition est privilégié et a priorité sur toute autre question, y compris le débat sur le discours inaugural." C'est la partie qui deviendrait amendée.

M. le Président, je vous soumets très respectueusement que le discours inaugural est, dans nos traditions parlementaires, un discours privilégié. Non seulement j'ai cru comprendre qu'il y aurait un sous-amendement pour couvrir les chefs de partis représentés, mais je me dois — et je pense qu'il ne serait pas normal que nous ne le fassions pas — de plaider en faveur du droit des parlementaires, de l'ensemble des parlementaires, parce qu'on n'est pas élus seulement pour venir écouter des chefs de partis à l'Assemblée nationale; il y a des membres qui sont élus et qui représentent des comtés, qui représentent une population et pour qui leur réponse au discours inaugural est une des occasions privilégiées qu'ils aient de pouvoir parler en faveur des électeurs qu'ils représentent.

Je dis que c'est l'une des rares occasions, M. le Président, pour plusieurs députés, car tous les députés n'ont pas cette chance de participer à tous les débats, n'ont pas cette chance, compte tenu des différentes stratégies, soit du gouvernement ou d'autres partis, de pouvoir s'exprimer aussi souvent qu'ils le voudraient et que leurs électeurs le voudraient.

C'est donc, pour moi, un droit fondamental que tous les députés, nonobstant leur formation politique, puissent exercer leur droit de parole sur le discours inaugural qui, en vertu de l'article 23 de notre règlement, est quand même limité à 25 heures.

M. Lalonde: 20 heures.

M. Samson: 20 heures, pardon. Cela a été modifié parce que c'était 25 heures, avant... Déjà, si nous introduisions la notion de chefs de partis représentés, techniquement, on prendrait six heures. Donc, il y a quatorze heures de différence pour, ou bien respecter la tradition qui est celle qu'un parlementaire est élu dans une circonscription; ce n'est pas un parti qui est élu, c'est un député. C'est l'élu du peuple qui a droit de discourir, à l'occasion du discours inaugural et je vous soumets que le discours inaugural et le discours du budget sont les deux seuls discours privilégiés qui permettent à tous les députés qui veulent prendre la parole sur n'importe quel sujet qui les intéresse. Alors que dans d'autres discussions, dans d'autres débats, les discussions sont évidemment limitées par des balises qui s'appellent la pertinence du débat vis-à-vis soit d'un projet de loi ou d'une motion à l'Assemblée nationale.

Or, je dis que pour le peu de différence que cela peut faire, entraver un droit aussi fondamental que celui que nous retrouvons depuis toujours dans le règlement de l'Assemblée nationale, soit le discours inaugural où tout le monde peut parler sur n'importe quel sujet, je dis que c'est aller un petit peu loin. Je n'accuse pas le ministre, au contraire, de vouloir nous passer un sapin; ce n'est pas du tout l'idée. Je pense que cet amendement du gouvernement a sûrement été présenté de bonne foi, mais nonobstant cet amendement de bonne foi, je souligne que l'amendement devrait être sous-amendé — je ne suis pas formaliste, si le ministre me fait un signe qu'il est d'accord, je ne ferai pas de sous-amendement — pour se lire de la façon suivante: "Le débat de cette proposition est privilégié et a priorité sur toute autre question, sauf le débat sur le discours inaugural. ' C'est le seul débat, il me semble, qu'il nous faut absolument protéger.

S'il arrivait que le gouvernement veuille présenter sa proposition alors que nous avons l'étude des crédits, alors que nous avons l'étude du discours du budget, alors que nous avons l'étude de certains projets de loi, ce qui, comme nous le savons, est déjà pas mal, il me semble qu'il serait valable et normal que la proposition qui serait faite en vertu de l'article 7 pour la question à être posée à l'occasion d'un référendum soit privilégiée et qu'elle ait priorité sur toutes les matières. Mais je pense que le ministre va convenir avec moi... Il a été dans l'Opposition lui aussi, il sait comme les membres de l'Assemblée nationale aiment bien utiliser cette période du discours inaugural et comme il est au pouvoir aujourd'hui, je suis sûr que le ministre sait également que c'est à peu près la seule chance que peuvent avoir plusieurs ministériels de parler — je pense que c'est 20 minutes en vertu de l'article 23 — et de représenter leurs électeurs, de présenter devant l'Assemblée nationale les griefs de leurs électeurs.

M. Lavoie: M. le Président, pourriez-vous ramener Charbonneau et le chef à l'ordre, s'il vous plaît?

M. Samson: M. le Président, ce coup de théâtre étant passé, je demande au ministre de nous accorder cela. Je le fais tout en sachant à quel point c'est important que cette question ait priorité sur les autres matières. Mais quatorze heures de différence, ce n'est pas cela qui va mettre en danger la nation. Quatorze heures de débat, cela peut vouloir dire deux ou trois jours, selon les cas.

M. Bédard: Non, plus que cela, M. le député. M. Samson: Bien, M. le Président...

M. Bédard: Vingt heures de débat sur le discours inaugural.

M. Samson: Attention! Je viens de soustraire les heures qui sont permises pour le premier ministre, le chef de l'Opposition officielle, les chefs de partis reconnus, les chefs de partis représentés; il y a là six heures. Si on enlève ces six heures, de toute façon, vous sembliez disposé à en enlever, il vous en reste quatorze. Pour quatorze heures, je pense que faire un accroc à une tradition longue et qui est le seul moment, au fond, où un député — surtout les députés ministériels, M. le Président — je ne parle pas parce que

c'est l'actuel parti qui est au pouvoir. J'ai vécu sous d'autres gouvernements, M. le Président, où j'étais dans l'Opposition, et je sais, comme le ministre le sait, d'ailleurs, que nous avions dans l'Opposition beaucoup plus de chance de parler que nos collègues du gouvernement. C'est normal. Cela n'a pas changé parce que le gouvernement a changé. C'est la même chose. Le seul moment où vous avez réellement, du côté ministériel, les députés, une chance de parler en faveur de votre comté et en faveur de vos électeurs et de parler sur n'importe quel sujet, c'est le discours inaugural. Je dis que c'est un droit que nous devons protéger, M. le Président. On n'enlève pas du jour au lendemain comme cela un droit aussi fondamental pour les parlementaires.

M. Bédard: Je pense que le ton de la discussion est bien. On ne se prête pas de mauvaises intentions.

M. Samson: M. le Président...

M. Bédard: Vous savez très bien...

M. Samson: ... je m'excuse auprès du ministre, si je parle d'une voix ferme, je ne voudrais pas que le ministre pense que je voudrais l'injurier.

M. Bédard: Non, je ne le crois pas.

M. Samson: Je pense en être demeuré à des termes polis, M. le Président.

M. Bédard: Je ne tremble pas, soyez sans inquiétude.

M. Samson: Oui, même s'il n'y a pas plus de Tremblay dans votre coin. M. le Président, je ne voudrais pas que le ministre interprète le ton de ma voix comme étant coléreux. Au contraire. Le ton de ma voix, M. le Président, reflète la profonde conviction de mes propos. Je pense que le ministre va l'admettre. Le ministre, avec qui j'ai eu l'occasion de travailler dans l'Opposition assez régulièrement, lorsque nous n'étions que huit, le ministre va s'en souvenir. Nous avions souvent à défendre de petites choses comme cela qui n'avaient l'air de rien, qui n'avaient pas l'air malicieuses du tout, mais qui entamaient... Vous savez, M. le Président, depuis que je suis à l'Assemblée nationale, le règlement a changé. On est plus restreint dans notre pouvoir de prendre la parole, M. le Président.

Les débats sont déjà plus restreints. Je ne veux pas dire que c'est une mauvaise chose, parce que l'actuel Code Lavoie est une code qui s'est voulu une amélioration. On a réduit quand même le message inaugural, et on a réduit le droit de parole dans d'autres matières. Ecoutez, je pense que les électeurs que nous représentons...

M. Bédard: II ne faudrait pas se tromper. Il ne s'agit pas de faire disparaître le discours inaugural.

M. Samson: Non, mais...

M. Bédard: Mais de raccourcir le temps qui est normalement alloué au discours — non, mais vous me permettez — inaugural.

M. Samson: M. le Président, attention, je permets, si vous me demandez une question. Mais si vous ne me posez pas de question, laissez-moi parler.

M. Bédard: Si vous voulez faire vos 20 minutes conventionnelles.

Le Président (M. Clair): M. le député de Rouyn-Noranda, c'est justement sur cela que je veux intervenir en votre faveur. Actuellement, je suis forcé de compter le temps de parole que vous utilisez et je ne suis pas sûr de ce sur quoi vous voulez vraiment l'utiliser. Si vous l'utilisez sur l'article 7, je veux juste vous indiquer...

M. Samson: II est sur l'amendement, M. le Président. L'amendement est déposé.

Le Président (M. Clair): Maintenant, est-ce que vous considérez réellement qu'il s'agit d'un amendement? Est-ce que vous ne considérez pas plutôt que les amendements proposés par le ministre font partie intégrante de sa motion?

M. Samson: Ah non! Cela a été déposé au tout début, M. le Président.

M. Charbonneau: Question de règlement, M. le Président.

M. Samson: On nous les a donnés à part cela, projet de loi no 92, article 7.

Le Président (M. Clair): M. le député de Rouyn-Noranda, juste pour prendre notre temps, deux minutes.

M. Samson: Oui. Avec vous, M. le Président, je suis prêt à prendre beaucoup de temps.

Le Président (M. Clair): Vous êtes gentil. M. le député de Rouyn-Noranda, regardez bien. Si vous considérez la motion du papillon distribuée par le ministre de la Justice comme étant une motion d'amendement, prenez garde tantôt de ne pas pouvoir faire de motion de sous-amendement parce que, si l'Opposition officielle fait une motion de sous-amendement, automatiquement, les autres partis ne pourront plus faire de motion de sous-sous-amendement. Cela m'apparaît de l'intérêt même...

M. Samson: M. le Président, l'Opposition officielle n'a pas l'habitude de "jambetter" les autres Oppositions, que je sache.

M. Lalonde: Non, surtout pas le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: M. le Président, conscient de cette longue tradition, je pense que si on regarde le rouleau du journal des Débats, M. le Président, le ministre a bien dit: On a un amendement là-dessus.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière invoque le règlement. (22 h 15)

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je prends à témoin le député de Marguerite-Bourgeoys, je ne veux pas interrompre le député de Rouyn-Noranda, non seulement c'est dans son intérêt, mais il est également de tradition, mon expérience n'est pas longue, mais depuis au moins un an et demi, il est de tradition que lorsque le ministre propose ce qu'il a appelé un amendement, à toutes fins pratiques, les députés s'entendent toujours, loi 101, loi 67, loi ceci, loi cela, pour considérer ce que le ministre a appelé amendement comme faisant partie de la motion principale, ce qui avantage les députés qui ont des amendements et des sous-amendements. M. le député de Marguerite-Bourgeoys est là pour en témoigner, je pense que c'est ce qu'on a toujours fait.

M. Lalonde: II me semble, lorsque le ministre d'Etat à la réforme parlementaire les avait déposés, qu'on avait dit que ce serait considéré comme des motions principales.

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est cela.

M. Lalonde: Mais puisqu'on m'a pris à témoin, je voulais dire que dans le cas de 67, ce n'étaient pas des motions principales. C'étaient des émotions principales.

M. Roy: M. le Président...

M. Bédard: Vous faites un bon témoin.

Le Président (M. Clair): M. le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Je dois dire qu'ici autour de la table on a assez de difficultés à suivre actuellement. C'est assez pénible. Habituellement, je pense que le ministre est le premier à prendre la parole lorsqu'un nouvel article est appelé. Le ministre fait part de l'amendement qui n'est pas inclus dans le projet de loi original, et l'amendement qu'il doit soumettre devient automatiquement et constitue l'article que le gouvernement propose. Par la suite, nous entreprenons le débat, nous entreprenons les discussions. C'est ce qui s'est fait, malgré toutes les émotions que nous avons vécues durant l'étude de la loi 67, malgré les émotions ou les motions que nous avons eues dans l'étude d'autres projets de loi. Il m'apparaît que c'est une formule beaucoup plus souple et qui ne nuit pas aux possibilités de proposer des amendements de la part de l'Opposition, voire des sous-amendements.

Là-dessus, je vous rejoins, M. le Président. Je pense qu'on devrait tout simplement se reprendre selon une procédure cohérente, parce que j'imagine que ceux qui vont lire le journal des Débats vont avoir des petits problèmes.

Le Président (M. Clair): Messieurs, là-dessus disons que c'est une décision, une directive que je donne. Effectivement — c'est dans l'intérêt du député de Rouyn-Noranda que j'avais soulevé la question — je considère que les amendements ou les changements, si vous voulez, qui sont introduits par le ministre au début de l'étude d'un article ne constituent pas en fait des motions de fond, mais sont réputées faire partie intégrante de la motion principale que fait le ministre en proposant l'adoption d'un article. En conséquence, je dis au député de Rouyn-Noranda qu'il a déjà sept minutes de son droit de parole d'utilisées sur la motion principale. Je profitais de l'interruption qui lui avait été faite pour lui signaler le danger d'utiliser tout son droit de parole sur la motion principale et qu'il risquait ainsi de perdre son droit de parole pius tard.

C'était dans l'intérêt du député de Rouyn-Noranda que je faisais cette intervention. Ceci dit, je vous redonne la parole, M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: M. le Président, je ne veux pas entraîner de question de règlement pour retarder les travaux de cette commission. Au contraire. Je considère que la façon dont vous venez d'indiquer pour l'avenir... J'avais compris que c'étaient des amendements que le ministre avait déposés, mais je n'ai pas d'objection qu'on les considère comme faisant partie intégrante pour l'avenir. Etant donné que j'ai sept minutes d'écoulées, M. le Président, et que la réponse qui viendra du parti ministériel pourra peut-être nous donner satisfaction, pour le moment je n'irai pas plus loin. Je vais conserver les treize minutes qui me restent au cas où ce serait utile sur la motion même, l'article 7, et ainsi conserver mon droit de parole pour les amendements ou ies sous-amendements qui pourront venir. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Merci sincèrement de votre collaboration, M. le député. M. le ministre.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, seulement quelques mots pour dire tout d'abord qu'en principe, si on vient à trouver la formulation précise et exacte, je serais plutôt personnellement d'accord à prévoir le cas qu'a soulevé le député de Marguerite-Bourgeoys, à savoir, en supposant que la proposition soit présentée après le discours du premier ministre, qu'il serait absolument essentiel et conforme d'ailleurs à notre tradition que les chefs des autres partis reconnus...

M. Lalonde: Tous les autres partis de l'Opposition.

M. Vaillancourt (Jonquière): Oui, le terme du

règlement, je pense, c'est le parti reconnu. Je ne partirai pas un débat là-dessus.

M. Lalonde: Non parce que s'il est reconnu, cela les enlève.

M. Vaillancourt (Jonquière): Ce n'est pas là-dessus que je veux parler, mais sur le principe que vous avez soulevé et qui est un principe d'équité. M. le Président, je pense cependant que, même s'il n'y a pas eu d'amendement formel présenté par le député de Rouyn-Noranda, je dois dire ici qu'à part les discours de ceux que je viens de nommer, il me semble que la proposition prévue à l'article 7 doit être privilégiée, y compris pour le discours inaugural, sauf pour les quatre discours, cinq ou six discours que je vous ai mentionnés. M. le Président, si on commence à accepter le discours inaugural, pourquoi ne pas accepter le discours du budget?

Le député de Rouyn-Noranda a fait grand état que les députés ministériels, entre autres, avaient peu d'occasions d'intervenir dans les débats et que les deux grands débats de l'année étaient le discours inaugural et le discours du budget. M. le Président, je considère personnellement que le fait de ne pas mentionner ce qui est prévu à l'article 7 est aussi très important. On veut lui donner un statut de débat privilégié et je pense qu'il serait tout à fait normal qu'à part les discours, les interventions des chefs de partis reconnus et du premier ministre, au cas où le discours inaugural serait commencé au moment de la proposition, il serait tout à fait normal de faire une halte de quelque quatorze heures de travaux parlementaires qui peuvent représenter en fait beaucoup plus que deux jours en termes de calendrier.

Quatorze heures de travaux parlementaires, M. le Président, je pense qu'on n'a pas encore fini le discours sur le budget. Pourtant, il est censé durer 15 ou 20 heures. On a commencé le discours du budget le 18 avril, c'est vrai qu'on a été interrompu par toutes sortes de choses, mais on est rendu, je pense, au 8 juin 1978, et nous n'avons pas encore terminé le discours du budget.

M. Samson: Cela fait déjà quelques semaines que cela n'a plus de sens, non plus. Six semaines après que c'est prononcé, vous en avez déjà amputé un discours.

Le Président (M. Clair): M. le ministre.

M. Bédard: Je ne sais pas, en essayant de se situer dans le temps, je pense avec raison que le député de Rouyn-Noranda a souligné qu'avec notre amendement il n'était en aucune façon prévu de vouloir diminuer l'importance que nous reconnaissons au discours inaugural. Je pense également que chacun des partis d'Opposition, chacun des membres de l'Assemblée nationale a déjà énoncé l'importance capitale qu'il attachait au référendum, soit celui que nous avons en tête ou celui qu'un gouvernement pourrait avoir à présenter à l'Assemblée nationale. Si nous suivons l'argument du député de Rouyn-Noranda, il y a bien d'autres discours qui sont très importants au niveau de l'Assemblée nationale. Je pense au discours du budget. Le député de Rouyn-Noranda peut penser à d'autres exemples. Je pense qu'il faut en venir peut-être, en nous référant à la situation actuelle, à une solution qui pourrait, j'espère, satisfaire tous les membres de la commission parlementaire et qui ferait en sorte que, ce n'est pas l'amendement, il ne s'agit pas d'amendement, non, il s'agirait d'ajouter à la fin ceci: "Le débat de cette proposition est privilégié et a priorité sur toute autre question y compris le débat sur le discours inaugural, à l'exception du message inaugural prononcé par le premier ministre et du discours des chefs des partis d'Opposition représentés à l'Assemblée ou de leurs représentants." Tout à l'heure, on parlait de partis reconnus.

M. Samson: II n'y a personne qui a eu cela en tête.

M. Lalonde: II n'y a personne qui a eu le culot d'avoir cela en tête.

M. Samson: Pas du côté de l'Opposition. Pas nous autres. Voyons donc. Ne soyez pas trop dur. Depuis le début que vous n'acceptez rien. Tâchez au moins d'être... Ne touchez donc pas au discours inaugural. Quant aux autres affaires, cela va. Il y a tellement d'autres choses.

M. Bédard: Je pense que tout le monde reconnaît l'importance du discours inaugural. Tout le monde reconnaît l'importance aussi d'une décision politique à savoir de commencer le processus qui mène à la tenue d'un référendum. Je pense qu'à partir de ce moment, c'est une décision politique importante que doit prendre un gouvernement.

M. Samson: Est-ce que le ministre me permet une question?

M. Bédard: II faut la situer dans le temps.

M. Samson: Est-ce que le ministre me permet une question à ce moment-ci? Est-ce que le ministre est en train d'essayer de me faire comprendre, nonobstant bien sûr l'importance de la question du référendum, que le gouvernement ne pourrait pas savoir au moins trois jours d'avance qu'il va présenter une question? Voyons donc. Si vous ne le savez pas avant le discours inaugural que vous êtes pour présenter une question, vous ne me ferez pas croire que vous allez arriver avec elle durant le discours inaugural. Si vous le savez avant et que vous nous coupez le discours inaugural pour l'apporter, ce sera une stratégie à ce moment. Voyons donc, n'essayez pas de bourrer la population de cette façon.

M. Bédard: Franchement, vous allez très loin pour essayer de faire valoir votre point de vue.

M. Samson: Le ministre est-il capable de

m'assurer que le gouvernement ne serait pas prêt à présenter sa question, qu'il n'y aurait pas pensé au moins trois jours d'avance? Tout ce que je vous demande...

M. Bédard: Vous savez qu'un discours inaugural avec l'intervention de chacun des députés, selon les règles normales...

M. Samson: Cela dure deux semaines.

M. Bédard: ... c'est au moins deux semaines. Reconnaissez-le.

M. Samson: Là, si vous donnez le droit de parole aux chefs de partis à l'Assemblée nationale, cela prend une semaine. L'autre, si vous le donnez à tout le monde, cela prend l'autre semaine. Vous ne me ferez pas croire que vous ne serez pas prêts au moins une semaine d'avance. Si cela vous prend cela absolument et que vous ne pouvez pas être prêts une semaine d'avance, je vous dis: Votre affaire, c'est de la foutaise.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Rouyn-Noranda, messieurs, puis-je d'abord demander au ministre de nous lire le texte définitif de sa motion principale à l'article 7?

NI. Bédard: "Le débat de cette proposition est privilégié et a priorité sur toute autre question y compris le débat sur le discours inaugural à l'exception du message inaugural prononcé par le premier ministre et des discours des chefs des partis d'Opposition ou de leurs représentants. "

M. Roy: On pourrait mettre le mot "reconnus ' ou "représentés " après les chefs des partis d'Opposition.

M. Bédard: C'est cela.

Le Président (M. Clair): Est-ce que je peux avoir le texte?

M. Bédard: En fait, s'il y a la possibilité qu'il puisse y avoir, je ne sais pas... pour des circonstances incontrôlables, le chef, un des chefs d'Opposition ne peut donner la réplique, au moins qu'un représentant la donne pour lui en son nom. C'est ce que je voulais couvrir.

M. Samson: Si on trouvait acceptable la proposition du ministre, son libellé serait correct. Le premier ministre et les chefs de partis représentés ou leurs représentants. Le libellé est correct.

M. Bédard: Dans l'état actuel des choses, cela permettrait également au député de Rouyn-Noranda, même s'il n'appartient pas à un parti reconnu, et au député de Beauce-Sud de faire leurs représentations en réponse au discours inaugural.

M. Samson: Ce qu'il vient de lire est conforme à ce qu'il pense. Si cela nous était acceptable. Le libelle est correct. Il n'y a pas de problème. Il me semble que tout ce qu'on demande de plus, pour ne pas créer un précédent dans l'histoire de tout notre règlement, il faut au moins, ne pas toucher au discours inaugural. (22 h 30)

Le Président (M. Clair): L'article 7, tel que proposé par le ministre, à ce stade-ci, se lirait comme suit: "L'Assemblée nationale du Québec peut, sur proposition du premier ministre, adopter le texte d'une question devant faire l'objet d'une consultation populaire. "Le débat de cette proposition est privilégié et a priorité sur toute autre question, y compris le débat sur le discours inaugural, à l'exception du message inaugural prononcé par le premier ministre et des discours des chefs des partis d'Opposition."

Une Voix: Des partis représentés. M. Lavoie: Ou de leurs représentants.

M. Bédard: Des partis d'Opposition ou de leurs représentants, je tiens à le mettre.

M. Lalonde: Oui, parce que c'est prévu par le règlement.

M. Bédard: C'est cela, c'est conforme à notre règlement.

Le Président (M. Clair): M. le député de Rouyn-Noranda, vous avez dit tantôt que vous en faisiez la demande, la suggestion. Est-ce que vous faites une motion formelle d'amendement, auquel cas je vous donnerais le droit de parole sur votre motion d'amendement, ou si on dispose immédiatement de cette motion principale d'adopter l'article 7 tel que proposé par le ministre?

M. Bédard: J'ai apporté cet amendement en essayant de tenir compte, en partie, des représentations du député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: M. le Président, je préférerais grandement, sans être formaliste, que le ministre revoie et qu'ilnous fasse lui-même la proposition, tenant compte des droits légitimes de tous les parlementaires dans un discours inaugural, et tenant compte du fait que cela représente seulement trois jours de session de différence; je préférerais cela. Je supplie le ministre d'accéder à cette demande qui n'est pas contraire à ce qu'il nous a indiqué au début de ses remarques, quand il est arrivé à cette commission. Cela ne change le cadre de la loi d'aucune façon, cela ne change non plus le coeur de la loi d'aucune façon; aucun principe n'est remis en cause dans la loi comme telle, il s'agit là d'une technicité qui fait qu'on risque de priver des députés de leur droit de parole qui est reconnu dans le règlement.

M. Bédard: Dans un effort d'essayer de concilier des représentations faites par le député de Rouyn-Noranda, par rapport au texte initial que

j'avais présenté et qui aurait pu permettre la situation qu'il y ait seulement le premier ministre qui fasse le discours inaugural et que personne d'autre ne puisse lui donner la réplique, je crois avoir fait preuve d'un assouplissement, peut-être pas complet, je ne me rends peut-être pas jusqu'au bout des revendications du député de Rouyn-Noranda, mais je pense qu'avec cet amendement, je tiens compte du fait que le premier ministre, ayant prononcé le discours inaugural, il est normal que tous les partis d'Opposition puissent donner la réplique et puissent faire valoir leur point de vue au nom de leur parti.

M. Samson: Est-ce que le ministre me permet une question?

M. Bédard: C'est le droit de parole tant du point de vue des députés ministériels... je comprends ce que dit le député de Rouyn-Noranda; bien des députés auraient des choses à dire au niveau du discours inaugural, ce qui ne veut pas dire que cela met fin au discours inaugural, cela le suspend simplement. Les députés auront toujours l'occasion...

M. Samson: Quand on le reprend cinq semaines après, cela ne veut plus rien dire.

M. Bédard: Ce n'est pas tout à fait vrai, ce que vous dites, et vous le savez. Le discours du budget dure depuis combien de temps? Cela n'empêche pas les députés de s'exprimer encore à l'heure ac-> tuelle et de voir leurs propos retransmis pour le bénéfice de leurs électeurs, cela ne change absolument rien de ce côté-là. Je pense qu'on essaie de faire chacun notre bout de chemin.

M. Samson: J'aimerais poser une question au ministre, une seule, et je lui demande de me répondre clairement. Est-ce que le ministre, qui a déjà été député dans l'Opposition, alors qu'il était député de lOpposition sans un poste officiel, aurait accepté ce genre de chose?

M. Bédard: Oui, je pourrais l'accepter.

M. Samson: Non, est-ce que vous auriez accepté, quand vous étiez député? Soyez honnêtes, quand vous répondez.

M. Bédard: Vous me demandez...

M. Samson: Vous ne l'auriez jamais accepté, jamais de la vie; je vous connais trop.

M. Bédard: Vous avez le droit... c'est une question hypothétique, au moment où on se parle.

M. Samson: Ce n'est pas hypothétique; quand vous étiez dans le troisième banc en arrière, ces choses-là, vous ne les laissiez jamais passer.

M. Bédard: Je ne sais pas si c'est hypothétique, mais vous vous permettez de répondre à ma place après m'avoir posé une question. Franchement, laissez-moi répondre, au moins.

M. Samson: D'accord, est-ce que vous auriez accepté cela?

M. Bédard: Moi, je vous dis que je l'accepterais. Je n'accepterais pas...

M. Samson: L'auriez-vous accepté, dans le temps?

M. Bédard: Me laissez-vous répondre?

M. Samson: Vous dites: Je l'accepterais aujourd'hui. Vous êtes ministre aujourd'hui, cela ne vous dérange plus.

M. Bédard: C'est cela, pourquoi posez-vous une question si vous ne voulez pas avoir de réponse ou si vous voulez la discréditer d'avance?

Le Président (M. Clair): Messieurs, à l'ordre, s'il vous plaît!

M. Samson: Mais quand vous étiez député, vous n'auriez jamais accepté ce genre de chose.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît, messieurs. A l'ordre! J'ai l'impression qu'on s'éloigne passablement du sujet qui est discuté.

M. Bédard: Permettez-moi simplement de...

M. Samson: C'est parce que je lui rappelle des souvenirs embêtants pour lui un peu.

M. Bédard: M. le Président...

M. Vaillancourt (Jonquière): ... vous donne le droit d'intervenir dans ce débat.

M. Bédard: Le député de Rouyn-Noranda donne l'impression — je ne sais pas si cast une faute de compréhension — que, par l'adoption de cette proposition, on a privé d'une façon irrémédiable les députés de pouvoir intervenir au niveau du discours inaugural. Mais non, ils gardent leur droit de parole, simplement que lorsque le discours inaugural continuera, ils vont garder leur droit de parole, tant du point de vue de l'Opposition que du point de vue ministériel.

Si le fait de cet article était d'abolir le discours inaugural, d'abolir le droit des députés pour parler au niveau du discours inaugural...

M. Samson: Abolissez l'Opposition et vous n'aurez plus de problème.

M. Bédard: Non, non.

M. Vaillancourt (Jonquière): On pourrait abolir la Commission des droits de la personne.

M. Bédard: Je ne serais certainement pas d'accord parce que les députés ministériels ont le droit de parler aussi sur le discours inaugural.

M. Samson: Oui, mais vous êtes en train de leur enlever leur droit.

M. Bédard: Mais non, vous ne comprenez pas. C'est tout simplement qu'on reporte à ce moment le discours inaugural.

M. Samson: C'est de l'inconscience totale que vous faites. Vous n'avez aucune bonne raison.

M. Bédard: Vous employez des gros mots.

M. Samson: II y a trois jours de différence; vous n'avez aucune bonne raison, si vous êtes un gouvernement responsable, voyons donc!

Le Président (M. Clair): M. le député de Rouyn-Noranda, je me dois de vous rappeler encore une fois que votre temps s'écoule sur la motion de fond. Si vous avez l'intention de présenter un amendement...

M. Samson: Mon temps s'écoule peut-être mais les droits des parlementaires sont en train de s'écouler bien plus que mon temps s'écoule, je vous le jure, M. le Président. Quand vous occuperez votre siège de député au lieu d'un siège de président vous verrez que, ce que je viens de faire aujourd'hui, c'est pour vous défendre.

Le Président (M. Clair): Votre temps s'écoule toujours.

M. Samson: Bien oui, mon temps s'écoule, mais s'il y a quelque chose qui s'écoule c'est le gouvernement.

Le Président (M. Clair): Je voudrais juste vous indiquer et vous rappeler, M. le député de Rouyn-Noranda que si vous le voulez...

M. Lalonde: Le gouvernement s'écroule.

M. Samson: II s'écroule. Je m'excuse, j'ai fait une faute de langage.

Le Président (M. Clair): Si vous le voulez, vous pouvez présenter une motion d'amendement. Cela permettrait de disposer plus facilement de la question. Actuellement là...

M. Samson: J'essayais que cela vienne du ministre, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Cela ne vient pas.

M. Samson: Depuis le début qu'on parle de consensus. Ma foi du Bon Dieu, je commence à penser que le consensus, le PQ ne connaît pas cela du tout.

M. Bédard: Vous avez toujours dit qu'un consensus s'obtient à partir du moment où chacun fait son bout de chemin. Là, on a fait chacun notre bout de chemin...

M. Samson: Depuis deux semaines qu'avez-vous fait comme bout de chemin, vous?

M. Bédard: Vous avez droit à votre opinion. Si vous voulez faire un "show", faites-le.

M. Samson: Rien.

M. Bédard: Si vous voulez faire un "show", faites-le.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît.

M. Samson: II y a une limite à rire du monde.

Le Président (M. Clair): Sur la pertinence du débat, M. le député de Rouyn-Noranda.

M. Samson: M. le Président, même si mon temps s'écoule puis au risque que cela s'écoule, je dis que c'est inacceptable de priver les parlementaires de leurs droits qui leur sont conférés par leurs électeurs, quand ils se font élire. Les parlementaires ne sont pas ici seulement pour servir un parti. Ils ne sont pas ici seulement pour servir le gouvernement. Ils sont là pour servir d'abord les électeurs. Ces parlementaires ont des droits. On est en train de proposer un article qui va à l'en- contre du règlement. Il va falloir amender le règlement par la suite pour que ce soit concordant. Et, de quoi allez-vous avoir l'air? Cela a toujours été dans les traditions parlementaires; on n'a jamais touché à cela. Il me semble qu'il y a eu des gouvernements, dans le passé, qui auraient eu des raisons de procéder rapidement à des choses qui pressaient. Le discours inaugural, on n'y a jamais touché. Depuis que le PQ est au pouvoir, M. le Président, il n'y a plus d'ordre. C'est simple, on se retrouve devant la négation des droits stricts et fondamentaux des parlementaires.

Il y a des députés qui ne sont pas ministres de ce côté et je suis sûr que je défends leurs droits bien que c'est délicat pour eux de le faire eux-mêmes. Si le ministre ne veut pas lâcher un peu, c'est délicat pour eux autres. J'en conviens, M. le Président. Mais, n'oublions pas qu'on est en commission parlementaire, on est une dizaine autour de la table, puis qu'il reste encore une centaine de députés qui ne sont pas ici, pour qui on protège des droits. Quand on veut protéger le droit du discours inaugural, on protège ceux aussi qui ne participent pas au présent débat. S'ils avaient la chance de venir parler à ce débat, chacun viendrait vous dire la même chose. Chacun voudrait protéger ses droits.

Quand on se fait élire, c'est pour représenter une population et on n'a pas le droit de faire défaut à cette population. Là, on est en train, par des lois qui ont l'air de rien... Cela a l'air de rien, cette affaire, mais goutte à goutte, chaque fois, le gouvernement nous arrive avec des choses qui ont l'air de rien, et goutte à goutte, il est en train de remplir le vase, puis, petit à petit, on en perd un peu tout le temps. Le jour où on n'aura plus de droits ou presque plus, c'est pour quand ce jour? C'est une question de délai, c'est une question de temps. Je ne peux pas vous dire quand, mais cela s'en va vers cela tranquillement.

Je suggère, M. le Président, que l'article 7... Je le propose, cela va vous rendre service, M. le Président. Ai-je besoin de l'écrire? Je pense que vous avez devant vous le papillon. Je propose qu'on change les mots "y compris", dans la deuxième ligne et la troisième ligne de votre papillon par le mot "sauf" et qu'on mette un point après le mot "inaugural". De sorte que le nouvel article se lirait comme suit: "L'Assemblée nationale du Québec peut, sur proposition du premier ministre, adopter le texte d'une question devant faire l'objet d'une consultation populaire. Le débat de cette proposition est privilégié et a priorité sur toute autre question, sauf le débat sur le discours inaugural." C'est le sens de l'amendement que je fais, M. le Président. C'est un sous-amendement.

M. Lalonde: Non, c'est un amendement. Le Président (M. Clair): L'amendement.

M. Samson: Amendement, parce qu'on a dit que cela faisait partie de l'article, tantôt. Cela devient un amendement que je propose en espérant que j'aurai l'appui de mes collègues pour cet amendement, qui n'a pas de conséquence, qui ne met en danger, d'aucune façon, le gouvernement, qui n'a que trois jours de différence dans le discours inaugural entre ce que j'amende et ce qui a été proposé par le ministre et qui, en fin de compte, ne risque pas non plus de déranger la bonne marche d'un référendum éventuel, d'aucune façon.

Ce référendum, c'est le ministre des Finances qui l'a dit dernièrement, et il l'a répété en Chambre: "Je plaide coupable" — on s'en rappelle, il y a deux jours — "Tout ce que le gouvernement a fait depuis le 15 novembre a été fait en fonction du référendum." C'est vrai que le ministre des Finances l'a dit, parce qu'on le lui a fait répéter en Chambre. Il a dit: "Je plaide coupable d'avoir dit cela". Il l'a dit, il y a deux jours. Si depuis le 15 novembre 1976, tout ce qui a été fait par le gouvernement a été en fonction du référendum, vous ne me ferez pas accroire que trois jours de différence sur le discours inaugural, cela va déranger votre préparation. Ce serait ridicule de tenter de nous faire croire cela. Ou bien le ministre des Finances, qui est un ministre et dont nous devons prendre la parole en vertu de notre règlement, je n'ai même pas le droit de mettre la parole du ministre des Finances en doute... Il faut que je la prenne, sa parole, je l'ai prise. J'ai pris sa parole, il a dit: "Tout ce qu'on a fait, depuis le 15 novembre 1976, c'est préréférendaire, en fonction du référendum".

Si, depuis le 15 novembre, le gouvernement a tout fait cela, il ne sera pas encore prêt au moment d'un discours inaugural à présenter une question, ou après un discours inaugural. Je lui dis que cela lui prend pius de temps à accoucher qu'un éléphant. Cela n'a pas de bon sens. Il faut quand même qu'on soit plus sérieux que cela.

Si le premier ministre était ici ce soir, il rougirait de honte. Je ne dis pas qu'il ne ferait que rougir, parce que rougir, c'est moins pire, mais il rougirait de honte devant cette proposition. Il n'accepterait pas cela, parce que je sais que le premier ministre, qui a déjà siégé en cette Chambre — avant de revenir, vous savez, il a été ici avant 1970 — il se battait pour les droits fondamentaux des parlementaires. Il avait cette réputation, et il l'a encore d'ailleurs, cette réputation.

M. Bédard: Pariez pour vous, ne parlez pas pour le premier ministre.

M. Vaillancourt (Jonquière): Ne donnez pas de leçon aux autres, on n'en a pas à recevoir de vous.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît, messieurs! (22 h 45)

M. Samson: M. le Président, le radical député de Jonquière devrait se contenir un peu.

Je dis que le premier ministre n'accepterait pas cela, et s'il acceptait cela, ce serait parce qu'il a bien changé. Je ne pense pas qu'il ait changé autant que cela.

M. Lalonde: Oui, il a changé.

M. Samson: Oui? Si vous me dites qu'il a bien changé, cela se pourrait peut-être. Mais je n'ai pas eu cette impression.

M. Paquette: II a changé de relations; il a de bonnes relations depuis...

M. Lalonde: II a de mauvaises fréquentations depuis dix ans.

M. Samson: M. le Président, je ne veux surtout pas qu'il y ait un doute, d'aucune façon, qui subsiste après l'adoption de cet article-là, à savoir la possibilité pour le gouvernement d'introduire sa proposition pour une question de référendum en cours de débat sur le message inaugural; je ne voudrais surtout pas qu'un doute subsiste à l'effet que le gouvernement utilise cette période d'une façon stratégique pour venir couper un discours inaugural et pour promouvoir ou pour mettre toutes les chances de son côté de façon absolument partiale dans un référendum.

Là-dessus, le député de Chicoutimi nous a mentionné, à plusieurs reprises, qu'il voulait que cette loi soit une loi juste, honnête, qui donne l'apparence de justice et d'honnêteté. On nous l'a dit souvent et on nous répète souvent, du côté du gouvernement, et le ministre du Saguenay-Lac-Saint-Jean nous dit souvent que ce n'est pas l'intention du gouvernement de poser une mauvaise question. Il veut poser une question claire, précise, unique, on veut que cela se fasse dans les formes, que tout le monde soit informé et ne soyez pas inquiets.

Le Président (M. Clair): Je pense que vous vous éloignez un tout petit peu de votre motion d'amendement...

M. Samson: Non, parce que je suis en train de faire la preuve...

Le Président (M. Clair): ... qui dit de remplacer les mots "y compris" par le mot "sauf".

M. Samson: Je suis en train de faire la preuve que ce que le gouvernement présente à l'article 7 est contraire aux déclarations du ministre, depuis le début de la commission. Il me semble que c'est pertinent cela. A quel moment doit-on croire ou ne pas croire? Est-ce maintenant qu'il faut croire? Mais si on croit maintenant, il ne faut pas croire tout ce qu'on nous a dit avant, ou si on croit ce qu'on nous a dit avant, il ne faut plus croire maintenant. C'est là le problème qui se pose. Il va subsister un doute, je vous le dis. Si vous adoptez cela de cette façon, du côté gouvernemental, il va subsister un doute. Si vous amenez votre question en pleine période référendaire, vous aurez pris les dispositions pour faire subsister des doutes dans la population, à savoir que votre fameux référendum, vous l'aviez piégé d'avance. On m'a dit souvent que ce n'était pas le cas. Je veux prendre la parole du ministre, il nous l'a dit. Là, je suis mal pris, je ne le sais plus. Le ministre est tellement contradictoire et le règlement m'oblige à prendre sa parole. Dites-moi, M. le Président, à quel moment la prendre et à quel moment ne pas la prendre, parce que je ne peux pas prendre la contradiction. C'en est de la contradiction flagrante.

Vous vous apprêtiez à me le dire, M. le Président, quand je dois le croire et quand je ne dois pas le croire? Je comprends que vous préfériez ne pas me le dire. C'est tellement évident que tout le monde le comprend.

Le Président (M. Clair): Ce que je m'apprêtais à vous dire, M. le député de Rouyn-Noranda, c'est que j'ai beaucoup de difficulté, présentement, à relier vos propos à l'amendement que vous avez proposé. C'est seulement cela.

M. Samson: Je vais vous aider.

Le Président (M. Clair): Je vous invite à...

M. Samson: Je vais vous aider, M. le Président, dans ce cas.

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, est-ce que vous avez déclaré la motion d'amendement recevable?

M. Roy: Bien oui, elle est recevable.

M. Samson: Si le débat est engagé, c'est parce qu'elle a été reçue. Il n'y a personne qui a soulevé l'irrecevabilité.

Le Président (M. Clair): Si je n'ai pas soulevé proprio motu la question de la recevabilité de l'amendement, c'est que je l'ai reçue; sans quoi, le député de Rouyn-Noranda aurait expiré depuis longtemps son droit de parole.

M. Samson: Merci, M. le Président.

Je dis que cet article 7, si on ne l'amende pas dans le sens que je suggère à la commission, deviendra un article qui permettra au gouvernement de l'utiliser avec toute la force, toute la capacité gouvernementale, comme moyen privilégié afin de favoriser sa stratégie à l'occasion du référendum. C'est cela que je veux éviter.

D'abord, le gouvernement n'a pas le droit moralement de s'introduire dans un discours inaugural pour amener cette question à ce moment-là, pour en faire une stratégie. Il n'a pas le droit, moralement, de le faire. Il a encore moins moralement le droit de laisser dans un article la porte ouverte à ce genre de choses, et surtout au fait que cela puisse être contesté parce que, justement, on aura laissé une porte ouverte volontairement.

Ce que j'essaie de faire, M. le Président, tout en protégeant les droits stricts, légitimes et fondamentaux des parlementaires, c'est en même temps de tenter de faire accepter un amendement qui va rendre plus crédibles les vues, les actes qui seraient ou qui seront posés par le gouvernement, le cas échéant, relativement à l'article 7 du présent projet de loi. C'est cela que je tente de faire, M. le Président.

On a souvent dit, au cours de l'étude de ce projet de loi, qu'il ne fallait surtout pas, qu'après l'adoption du projet de loi 92 par l'Assemblée nationale, il y ait matière à contestation, surtout par ceux qui l'ont voté. M. le Président, c'est justement ce qu'on est en train de préparer et, par analogie à d'autres lois, je dis que ce genre de loi devrait être voté à l'unanimité, parce que c'est un genre de laboratoire, en fin de compte. C'est le premier projet de loi qu'on a comme cela, qui va être appliqué éventuellement. Nous n'avons pas encore rodé le système et, à ce chapitre, on peut prendre à titre d'exemple la loi 2 qui a été votée le 26 août 1977, en troisième lecture, et où à la suite de nombreuses heures de discussions, nous avions fait un consensus, parce que le ministre d'Etat à la réforme parlementaire, à ce moment, avait fait preuve d'une grande souplesse, de bonne volonté, d'esprit de collaboration et nous avait promis que cette loi serait appliquée avec le conseil consultatif, qu'ils seraient rodés ensemble, et qu'on ne devrait pas avoir de problème. Nous avons pris sa parole, bien sûr, et bien sûr le ministre a tenté de tout faire pour que cela aille bien et que cela se rode bien, mais il reste que nous sommes, avec la loi 2, encore dans du droit nouveau. Puis avec le projet de loi no 92, c'est encore plus nouveau que la loi 2, parce que cette dernière a été votée il y a bientôt un an et qu'elle est appliquée depuis très peu de temps avec beaucoup de difficultés.

C'est un très bon exemple qui vous fait comprendre...

Le Président: La pertinence.

M. Samson:... qu'on aura des problèmes avec l'article 7. C est cela la pertinence, M. le Président. La pertinence, c'est faire comprendre au gouvernement que si on répète les mêmes erreurs que

dans le passé, l'article 7 va amener les mêmes problèmes ou des problèmes semblables. Puis là, on est orienté vers un problème qui, au départ, va façonner, va amener une possibilité de contestation avant même que la loi s'applique, la contestation des parlementaires mêmes qui n'auront pas eu satisfaction et qui pourront dire, si on l'adopte de cette façon: On nous a amputé notre droit fondamental, on nous a voté cela avec de la pression, on a refusé la collaboration avec l'Opposition, on a refusé le gros bon sens, et à ce moment, ils auront raison de dire à la population: le gouvernement, avec sa loi, a ouvert un grand piège et il attend de prendre la population du Québec dans ce piège.

Je ne voudrais pas que cela arrive. Parce que le référendum pourrait être utilisé à d'autres fins que celle à laquelle tout le monde pense. D'ailleurs, la loi-cadre, on s'est fait casser les oreilles avec l'affaire de la loi-cadre. La loi-cadre est justement prévue pour en faire d'autres référendums.

M. le Président, il ne faut pas penser seulement au référendum sur l'indépendance du Québec ou encore sur la souveraineté-association, ou encore, sur un nouveau — je ne sais pas comment on appelle cela. Le gouvernement a tellement de mots à utiliser pour qualifier l'inqualifiable qu'on ne sait plus quel genre de choses il va nous présenter au premier référendum.

De toute façon, il reste que c'est une loi-cadre et, bien que nous eussions préféré un autre genre de loi — je ne remets pas en cause le principe, c'est seulement pour mieux me faire comprendre — il reste une chose, c'est que c'est une loi-cadre et elle va rester là même après; comme dit le proverbe: Le gouvernement va passer et la loi va rester. Il y en a d'autres gouvernements qui vont venir, par la suite, qui vont avoir, probablement, l'occasion d'utiliser cette loi et là on est en train d'attacher par les deux mains les générations futures avec ce genre de loi.

M. le Président, si nos ancêtres parlementaires avaient été de la forme ou du style de ceux qu'on connaît au sein du Parti québécois, on n'en aurait plus depuis longtemps de Parlement. Si nos ancêtres parlementaires n'avaient pas prévu que des droits fondamentaux, s'ils n'avaient pas surtout respecté le fait que des droits fondamentaux, ce sont des choses auxquelles on ne touche pas, s'ils n'avaient pas prévu cela, vous n'en auriez plus de Parlement aujourd'hui. Vous seriez dans quelle sorte de régime? On ne le sait pas. Cela pourrait être n'importe quoi. Du côté du Parti québécois, on est tellement fort en histoire, on nous fait même des cours d'histoire que je trouve magnifiques, parce qu'il y a des professeurs d'histoire qui connaissent l'histoire, mais il y en a qui vous parlent de l'histoire du Canada d'une façon et d'autres professeurs d'une autre façon, et d'autres d'une autre façon. Je pense qu'il y a 6 millions d'histoires du Canada au Québec.

M. Grenier: II y en a dans la poésie.

M. Samson: Je reviens à l'article 7, M. le Président.

Le Président (M. Dussault): J'allais vous le demander, M. le député.

M. Samson: Parce qu'autrement, je serais obligé de vous citer des passages du recueil de poèmes qu'a déposé à l'Assemblée nationale, il y a une couple de jours, le ministre d'Etat aux Affaires culturelles.

M. Charbonneau: Vous auriez besoin de le lire.

M. Samson: Le petit minet qui vient de se réveiller! Allez le flatter quelqu'un pour qu'il se rendorme, parce que quand il dort, cela va bien.

M. Charbonneau: Cela fait pitié de vous entendre, en tout cas.

M. Samson: M. le Président...

M. Charbonneau: On a le goût de faire autre chose dans ce temps-là.

M. Samson: Mais au moins il y a quelque chose, il m'a entendu, s'il ne me comprend pas.

M. Charbonneau: Continuez, vous êtes un bon bouffon.

M. Samson: M. le Président, je m'adresse à vous.

Le Président (M. Dussault): Je vous écoute.

M. Samson: ... en vous disant que jamais je M'accepterai que nous enlevions la priorité qui est donnée dans notre règlement à l'article 23 au discours inaugural. Il n'y aura pas de mesures d'assouplissement camouflées du ministre qui vont me faire accepter ce genre de chose. Les députés ministériels seront les premiers, si jamais cet article est appliqué dans sa forme présentée par le ministre, à s'en plaindre le jour où cela va s'appliquer. Pour le moment, ils ne leur ont sûrement pas dit de quelle façon ils ont l'intention de les bâillonner, mais c'est le jour où ils seront bâillonnés qu'ils s'apercevront que du côté de l'Opposition on avait tenté de préserver leurs droits. Ce jour-là, hélas! il sera trop tard.

Quand on légifère, on légifère pour l'avenir et quand on étudie un projet de loi, comme un parlementaire aguerri l'a dit en cette Chambre un jour, il faut étudier un projet de loi comme s'il devait être appliqué par le pire des hommes. (23 heures)

M. Lalonde: On l'a; c'est le cas.

M. Samson: Non seulement on risque de le faire appliquer par le pire des hommes, mais on est en train de se le faire passer par quelqu'un qui risque de devenir le pire des hommes si on le laisse aller comme cela. J'espère qu'on va pouvoir...

M. Lalonde: On ne parle pas du ministre de la Justice, on parle du gouvernement.

M. Vaillancourt (Jonquière): Une chance qu'il y a l'immunité parlementaire.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs!

M. Bédard: Laissez-le donc s'amuser, il a vingt minutes pour parler.

M. Vaillancourt (Jonquière): Dites donc ce que vous voulez dire; on vous laisse parler.

M. Samson: Voyons donc!

M. Charbonneau: Comment est-ce que cela s'écrit?

M. Samson: Cela s'écrit comme cela se prononce; vous en parlerez à vos élèves.

M. Vaillancourt (Jonquière): Vous irez le dire à la télévision si vous en avez le courage.

M. Samson: M. le Président, j'invoque le règlement. Un député, selon nos traditions parlementaires, n'a pas le droit — regardez le règlement actuel et l'ancien règlement — de défier un autre parlementaire.

M. Lalonde: Qu'est-ce qu'on fait ici?

M. Bédard: II ne s'aperçoit pas qu'il fait rire tout le monde.

M. Samson: II n'a pas le droit de dire — et c'était à l'article, je pense, 233, huitièmement, 21, où les mots antiparlementaires étaient inscrits — à un parlementaire qu'il manquait de courage, qu'il représentait des intérêts obscurs, des choses comme cela.

De toute façon, cela ne me dérange pas parce que venant du député de Jonquière, on peut s'attendre à n'importe quoi.

M. Vaillancourt (Jonquière): Continuez, ça va bien.

M. Charbonneau: Franchement...

M. Vaillancourt (Jonquière): Une chance que vous avez l'immunité parlementaire.

Le Président (M. Dussault): M. le député de Rouyn-Noranda, je vous prierais, s'il vous plaît, de conclure, parce qu'il vous reste à peine trente secondes.

M. Samson: Comme cela a été vite!

M. Charbonneau: Votre numéro s'achève.

M. Vaillancourt (Jonquière): Pour vous, cela a été très vite, mais pour nous...

M. Samson: Cela me prendrait trois jours pour faire comprendre au gouvernement qu'il est en train de se mettre une corde autour du cou pour se pendre. Dans vingt minutes, ce n'est pas possible, mais quand même, il y a une chose que j'ai faite: j'ai tenté de faire des efforts pour sauver le droit de parole de certains innocents qui ne l'ont pas compris.

M. Vaillancourt (Jonquière): Vous ne vous rendez même pas compte que cela fait vingt minutes que tout le monde rit de vous.

M. Samson: Ne me dites pas que vous riez sur un ton choqué!

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plait! M. le député de Beauce-Sud.

M. Charbonneau: Donner le droit de parole à quelqu'un pour faire des bouffonneries comme vous en faites, cela ne vaut pas la peine de le donner.

Le Président (M. Clair): M. le député de Verchères.

M. Samson: Allez soigner vos petits mines, vous reviendrez après.

Le Président (M. Clair): M. le député de Beauce-Sud, vous avez la parole.

M. Roy: M. le Président...

M. Charbonneau: Votre langage de basse-cour, vous le garderez pour vous.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît, messieurs!

M. Vaillancourt (Jonquière): Parce que les gens de Rouyn-Noranda vous regardent.

M. Samson: Ne vous inquiétez pas pour moi. J'étais là avant que vous ne soyez là et j'y serai après.

M. Charbonneau: On n'est pas sûr de cela.

Le Président (M. Clair): M. le député de Beauce-Sud, vous avez la parole.

M. Samson: Boutonnez vos bretelles, un peu.

M. Roy: Je me demande si j'ai la parole, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Je vous la donne.

M. Roy: Merci! Je pense que dans toute cette question, il y a une précision à faire; je m'adresserai tout particulièrement au ministre de la Justice, parrain du projet de loi. Il y a une question qui devrait être précisée au point de départ. C'est très difficile de suivre le débat à l'heure actuelle et c'est très difficile de pouvoir, une fois l'article 7 adopté, entreprendre l'étude des autres articles.

J'aimerais qu'on me dise clairement, avant

d'expliciter mon point de vue sur la motion de sous-amendement qui vient d'être proposée, en vertu de quel article du règlement le débat va avoir lieu. Il y a trois possibilités: on peut se servir de l'article 23 concernant le message inaugural, parce que le message inaugural comporte quand même des motions d'acceptation ou de refus, mais on ne peut pas parler sur les motions que les députés peuvent faire inscrire au feuilleton de l'Assemblée nationale; le débat peut aussi avoir lieu sur la motion de fond en vertu de l'article 94 du règlement; si c'est une motion de fond, elle peut avoir des amendements, elle peut avoir des sous-amendements pendant le débat. Si la motion est faite, si la question posée qui sera l'objet de la consultation, fait l'objet d'une motion, elle est présentée sous forme de motion; mais une motion de fond qui est discutée en tenant compte des dispositions de l'article 94, c'est une motion qui peut être amendée en vertu des dispositions du règlement de la Chambre. Nous avons un règlement pour régir les travaux de l'Assemblée nationale; alors moi je n'ai pas eu d'éclairage là-dessus.

Cela peut être aussi un projet de loi. Si c'est un projet de loi et si je me réfère à l'article 114 du règlement, il y a l'étape de la première lecture, de la deuxième lecture, l'étude en commission pléniè-re ou en commission élue, le rapport de la commission élue ou de la commission plénière et l'étape de la troisième lecture. Si la question est présentée à l'intérieur d'un projet de loi, il y a des dispositions qui régissent la présentation d'un projet de loi en vertu de nos règlements. Moi, ce que je ne sais pas aujourd'hui, c'est qu'il est très difficile de faire un débat objectif à ce moment-ci parce qu'il n'y a pas de décision de prise et il n'y a aucune indication dans le projet de loi qui nous indique en vertu de quelles dispositions du règlement la question sera soumise à l'Assemblée nationale.

Je pense qu'avant d'entreprendre les débats concernant le nombre d'heures, pour savoir si cela doit dépasser le discours inaugural, si cela peut se faire à l'intérieur du discours inaugural, en suspendant le discours inaugural, voire même d'autres motions, j'aimerais bien, M. le Président, que la commission puisse nous éclairer là-dessus. Cela change du tout au tout, M. le Président. Sur l'étude d'un projet de loi, il y a des étapes à franchir et, si c'est une motion de fond, il y a des dispositions dans le règlement qui permettent de l'inscrire en avis au feuilleton, comme toute question de fond, comme toute motion de fond qui est présentée par les députés peut être débattue devant l'Assemblée nationale. L'article 94.

J'aimerais bien savoir, à ce moment-ci, moi, quels sont les articles du règlement de l'Assemblée nationale auxquels le gouvernement veut se référer pour présenter l'objet de la consultation à l'Assemblée nationale comme telle. Je pense qu'il y a un manque dans le projet de loi à ce niveau et j'aimerais bien qu'on nous apporte un éclairage à ce niveau, M. le Président, puisqu'à partir de la décision ou du contenu de ce que contiendra le projet de loi, à partir de la décision que le gouvernement prendra relativement aux règlements de l'Assemblée nationale, on pourra entreprendre le débat de l'article 7 et on pourra reprendre le débat aussi des articles qui suivent l'article 7.

C'est en vertu de quoi, de quel article l'objet de la consultation populaire, la question à être posée qui sera présentée aux membres de l'Assemblée nationale. Est-ce que ce sera une motion de fond ou un projet de loi?

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je pense que la question que pose le député de Beauce-Sud est pertinente, comme d'habitude d'ailleurs, et...

M. Roy: Merci.

M. Vaillancourt (Jonquière):... je pense manifestement, M. le Président, que la motion dont on parle à l'article 7 est effectivement une motion de fond, puisque cette motion, qui sera initiée ou proposée, dis-je, par le premier ministre, comprendra la formulation de la question. Je pense que c'est manifestement une motion de fond et, en ce sens, je serais porté, parce que évidemment je ne parle jamais au nom du gouvernement, je parle en mon nom, à dire que cette motion de fond donc serait soumise à l'article 94. Donc, motion de fond qui est amendable, motion de fond qui est dé-battable. Les droits de parole sont prévus à l'article 94, c'est-à-dire que tous les députés peuvent parler, parler pendant combien de temps, vingt minutes, conformément à l'article 160, mais l'article 94 le prévoit également. Le premier ministre, leader parlementaire, chef d'un parti reconnu ou le représentant...

Le Président (M. Clair): M. le député de Jonquière. Je m'excuse de vous interrompre, M. le député de Jonquière, mais j'ai l'impression que la conversation s'engage en dehors de la motion d'amendement du député de Rouyn-Noranda, dont on pourrait peut-être disposer immédiatement.

M. Roy: M. le Président, sur un point de règlement, moi, avant de me prononcer sur la motion présentée par le député de Rouyn-Noranda, j'aimerais quand même savoir quels seront les moyens ou les dispositions du règlement que le gouvernement entend utiliser. Le député de Jonquière vient de me dire que c'est une motion de fond, alors, c'est une motion de fond, mais une motion de fond peut être amendée, il peut y avoir des propositions d'amendement par les députés. Ces propositions d'amendement font l'objet d'un droit de parole additionnel au député. Il peut y avoir également des motions de sous-amendement qui accorderaient un troisième droit de parole au député. Il faudra qu'on y pense.

M. Lavoie: Je voudrais répondre au député qu'il ne faut pas oublier qu'il y a une clôture automatique.

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est cela.

M. Roy: II y a une clôture automatique, mais moi, ce que je veux savoir à ce moment-ci...

M. Vaillancourt (Jonquière): Vous avez une question bien precise.

M. Roy: C'est une question bien précise. C'est que s'il arrive une motion de fond qui est présentée par le premier ministre, qu'une motion d'amendement est proposée par l'Opposition officielle, qu'une motion de sous-amendement est proposée par un collègue de l'Union Nationale, alors, on commence par disposer du sous-amendement, et, par la suite, on disposera de l'amendement, et nous risquons justement de prendre un temps de parole important qui nous laissera très peu de temps pour aborder à nouveau la question de fond, et le deuxième intervenant va revenir avec une autre motion d'amendement.

M. Vaillancourt (Jonquière): Cela est l'article 8.

M. Roy: Nous avons là, M. le Président, tout le défi devant nous, tout le défi parlementaire qui se pose à la question qui pourra être posée au moment où le premier ministre décidera d'appeler la question référendaire.

Le Président (M. Clair): M. le député de Beauce-Sud...

M. Roy: Moi, je voudrais bien savoir où on s'en va là-dedans, parce que c'est passablement ténébreux.

Le Président (M. Clair): M. le député de Beauce-Sud, ce que vous dites est sûrement très intéressant, cependant, la motion d'amendement du député de Rouyn-Noranda était de changer les mots "y compris" par le mot "sauf", et je pense que peut-être que ce que vous soulevez serait encore plus pertinent, même si je ne vous dis pas qu'au point de vue de l'article 7 vous ne seriez pas dans la pertinence du débat, mais il serait peut-être encore plus pertinent à l'article 8 qui parle des trente heures. C'est juste pour faire mon travail le mieux possible, et il me semble que cela devient difficile de tenir le temps des gens pour savoir ce sur quoi on parle. Peut-être qu'on pourrait disposer immédiatement de la motion d'amendement du député de Rouyn-Noranda et, je ne sais pas, mais soit que vous décidiez de revenir sur la motion de fond, sur ce sujet-là, à ce moment je déciderai si c'est pertinent ou pas, ou revenir à l'article 8.

Je ne veux pas être directif, dirigiste...

M. Roy: Non, merci de cette précision, puis d'ailleurs, je pense que cela va donner le temps quand même, au gouvernement, puis aux conseillers du gouvernement de se pencher sur cette question, et, dès la reprise de nos travaux, demain matin, on pourra avoir des précisions de ce côté. Alors, je suis prêt à accepter, en ce qui me concerne, cette proposition, cette sage proposition que vous faites, M. le Président, mais je pense qu'on aura compris, à cette table, l'importance de préciser de la façon la plus claire possible, la question du règlement de la Chambre, de la façon dont le débat pourra se dérouler, en vertu de quel article le débat pourra se dérouler, de façon que nous sachions à quoi nous en tenir.

Dans sa motion d'amendement le député de Rouyn-Noranda, M. le Président, a proposé que dans les mots "y compris le débat sur le discours inaugural" les mots "y compris" soient remplacés par le mot "sauf". Or, M. le Président, j'aimerais vous rappeler les dispositions de l'article 23 de notre règlement. Les dispositions de l'article 23 se lisent comme suit: "Le débat sur le message inaugural ne peut pas durer plus de vingt heures, mais on ne tient pas compte dans ces vingt heures du temps consacré au vote." C'est vingt heures, en vertu du dernier amendement qui a été adopté. "A l'occasion de ce débat, un député ne peut prononcer qu'un seul discours dans lequel tous les sujets peuvent être abordés nonobstant les dispositions, le paragraphe 2 de l'article 99, et dont la durée limite est de trente minutes à l'exception des discours du premier ministre, du chef de l'Opposition officielle, des autres chefs des partis reconnus et de celui qu'un représentant du gouvernement peut prononcer à la fin du débat, pour exercer un droit de réplique général." (23 h 15)

Le paragraphe 6 de cet article est très important, tant que le débat sur le message inaugural n'est pas terminé, il n'est procédé à aucune affaire importante, sauf en cas d'urgence, mais il est permis de former des commissions, de les faire siéger, de présenter des projets de loi, de déposer des rapports, de déposer le budget principal, de déposer, de voter un budget supplémentaire, de voter des crédits provisoires et de prononcer le discours du budget.

M. le Président, je ne sache pas, en ce qui me concerne, que la question référendaire va devenir une question d'urgence, au point de suspendre le débat sur le discours inaugural. Je pense qu'on devrait mettre le discours inaugural de côté, seulement sur des questions exceptionnelles et lorsqu'il est prouvé qu'il est d'une extrême urgence et que l'Assemblée nationale doit agir. Si nous commençons par mettre le discours inaugural de côté pour des questions référendaires, demain, nous allons mettre le discours inaugural de côté pour d'autres motions, et nous allons finir par adopter une coutume, par adopter une habitude à l'Assemblée nationale qui fera en sorte que le discours inaugural n'aura plus aucune signification.

J'aimerais que le gouvernement y pense très sérieusement, qu'on veuille procéder au moment où la question référendaire sera apportée devant l'Assemblée nationale, que cette question soit privilégiée et ait priorité sur toute autre question, je suis entièrement d'accord avec le principe, cela m'apparaît élémentaire, mais je ne verrais pas pourquoi cette question pourrait donner d'avoir priorité sur le débat qui suit le discours inaugural. C'est mon opinion, je veux souligner mon opinion à votre attention, M. le Président, et à mes collègues de l'Assemblée, et à mes collègues de cette commission, mais je pense, M. le Président,

que, sur ce point, cela ne devrait même pas être nécessaire de faire un long débat, mais qu'on garde donc les prérogatives et les attributions, le prestige que doit conserver le discours inaugural, lorsque nous entamons une nouvelle session.

Cela m'apparaît élémentaire, et je pense que, pour les députés, c'est un droit de parole qu'ils peuvent exercer et non seulement qu'ils peuvent exercer, mais qu'ils doivent exercer, c'est un droit de parole qui est privilégié, et je pense qu'on devrait laisser le caractère privilégié et très exceptionnel du discours inaugural au début de chaque session.

Le Président (M. Clair): Le député de Mégantic-Compton.

M. Grenier: Bien rapidement, pour donner quelques impressions sur cet amendement qui est apporté — c'est bien un amendement et non pas un sous-amendement, c'est un amendement, c'est bien cela — par le député de Rouyn-Noranda. Sur cette question à cet article 7 proposé par le gouvernement, je veux vous dire, M. le Président, que j'écoute les propos depuis que la discussion est commencée, que je comprends mal qu'on soit rendu à parler d'une quinzaine d'heures de débat. Au maximum une quinzaine d'heures de débat suffiraient. J'aurais peut-être dû prendre des informations dans d'autres milieux, mais je vois mal ce qui deviendrait si urgent, au moment d'un référendum, et s'il devait advenir au moment de l'un ou l'autre référendum, une question si urgente, il me semble qu'il pourrait même y avoir un consensus de la part de bien des partis pour accepter de suspendre le discours inaugural. Mais, pour ce référendum qu'on a à l'esprit, depuis le début de la soirée, sur une éventuelle indépendance du Québec, cela fait 111 ans qu'on attend, je pense bien que, quand on présentera le référendum, ce n'est quand même pas une quinzaine d'heures qui vont changer la face du monde. Je comprends mal tant d'acharnement et je vois mal le gouvernement ne pas céder à une chose comme cela rapidement. Qu'il ne dise pas: II n'y a rien là, il n'y a pas de quoi fouetter un chat.

On ne parle pas du discours du budget, du discours inaugural. Il n'y a rien qui empêche cela à mon sens et je ne vois pas pourquoi ce n'est pas accepté. J'espère au moins que ce n'est pas parce qu'on a décidé de ne rien céder aux partis d'Opposition, ce n'est pas pour cela, mais il doit y avoir une raison et j'aurais aimé qu'un député ministériel prenne la parole pour nous l'expliquer. Des arguments ont été soulevés par les deux députés qui ont parlé avant moi. Il y a eu des choses passablement sérieuses qui ont été dites de ce côté. On a également soumis certains arguments et on a oublié un argument qui est important. Par les temps qui courent, il peut y arriver des députés indépendants. On en connaît un qui n'a pas le droit de parole, je n'ai pas de raison particulière de vouloir le sauvegarder...

M. Lalonde: Question de souvenir, de bons souvenirs!

M. Grenier: Mais il reste qu'il y a certainement d'autres députés qui pourraient le devenir et on sait que, quand on a laissé le bipartisme, encore une fois, c'est le cas de certains députés. J'ai connu, dans une autre période, soit de 1966 à 1970, d'autres députés qui étaient indépendants et qu'on aurait aimé entendre là-dessus... Je me rappelle le député de Sainte-Anne, je me rappelle le premier ministre actuel, je me rappelle le député Yves Michaud, le député Jérôme Proulx, le député Antonio Flamand, le député Gaston Tremblay, autant de personnes qu'on aurait peut-être aimé entendre sur un discours comme celui-là et qui en auraient été privés s'il était arrivé une loi à ce moment-là.

Je pense que, parmi les personnes que j'ai nommées, pour n'en citer que trois, soit M. Michaud, M. Lévesque et M. Proulx, c'étaient des personnes, à mon sens, qu'il aurait été agréable d'entendre et qui auraient eu des opinions à émettre. Cela a l'air un peu farfelu, mais il ne faut pas oublier que, dans cinq ans ou dans dix ans, on l'aura, ce sera devenu une loi, on privera des personnes et on courra peut-être après des consensus, à ce moment-là, qu'on refusera. Des consensus, cela s'accepte, quand il y a des urgences; on l'a suspendu avec consensus le débat sur le discours du trône, pour la loi 70, la Loi sur les mines.

On l'a fait pour cela, et le gouvernement en face de nous est au courant que ce n'était pas de gaieté de coeur, nécessairement, que l'Opposition le faisait, puisque cela a été un vote — si je fais erreur — par l'ensemble des formations politiques contre le gouvernement, sur cette loi. A partir de là, s'il y a eu un consensus, je ne verrais pas pourquoi il n'y aurait pas un consensus sur une loi qui intéresse les deux côtés de la Chambre depuis nombre d'années.

Je ne veux pas éterniser le débat et j'ai hâte qu'on dispose de cet amendement, mais, encore une fois, j'aimerais, sans qu'on passe la nuit à discuter d'un amendement comme celui-là, qu'on nous dise les vraies raisons pour lesquelles on ne peut pas laisser terminer le discours inaugural. J'ai été député d'une formation politique qui était le gouvernement et qui comptait deux ou trois voix de majorité. Nous étions alors 56 ou 57 et notre tour de parler comme "back-bencher" — c'est de ceux-là qu'on parle — venait deux fois par année, c'était sur le discours inaugural et sur le discours du budget. Le restant, c'étaient des interventions que le président ne permettait pas qu'on avait aux débats.

Je pense qu'il ne faudrait pas aller au point qu'on puisse priver les députés de la majorité de leur droit de s'exprimer. C'est un amendement, à mon sens, qui est important.

M. le Président, je n'éterniserai pas le débat et je voudrais bien qu'un député de la formation ministérielle, un député du gouvernement, nous dise les vraies raisons pour lesquelles on ne peut pas accepter cette quinzaine d'heures, pour n'importe quel des référendums qui pourraient nous être soumis.

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, je voudrais remettre l'amendement dans la perspective du débat. On se souvient que le ministre a apporté un amendement qui est la motion principale, ce qui a provoqué tout de suite, de notre part, une question qui m'apparaissait fondamentale, laquelle a été réglée à l'amiable, disons, en consultation.

Maintenant, l'amendement du député de Rouyn-Noranda pose un problème différent qui n'est pas réglé par la réponse qui nous a été donnée par le ministre à la question que j'avais posée. Il faut, je pense, se souvenir que le débat sur le discours inaugural est à peu près le seul qui soit, en quelque sorte, privilégié et qui n'obéisse pas au désir, à l'organisation des travaux que le leader du gouvernement est appelé à faire, autrement dit, pour suspendre le discours inaugural.

Je vous donne l'exemple de l'amiante, la loi 70, il a fallu un consentement unanime. Tant que le débat sur le message inaugural n'est pas terminé, dit le paragraphe 6 de l'article 23, il n'est procédé à aucune affaire importante — on ne dit pas à aucune affaire, mais à aucune affaire importante — sauf en cas d'urgence. Je pense qu'étant donné que c'est le règlement qui a été accepté par tous les partis, qui a été unanimement adopté il y a quelques années, qui a fait l'objet d'une réflexion en profondeur de la part des parlementaires à ce moment-là, qui a fait ses preuves, il me semble qu'il y a un principe qui serait naturellement nié, qui serait contredit par la loi. Je ne dis pas que le législateur n'a pas le droit de le faire; le législateur a le droit, il n'y a aucun doute, de changer la tradition ou le principe qui est reconnu par notre règlement. Mais il me semble que cela prendrait une explication.

Je dois reconnaître que le ministre n'a pas eu l'occasion, ou du moins, il n'a pas demandé la parole depuis ce temps, il ne nous a pas dit pourquoi. J'aimerais que le ministre me tende une oreille; il n'a pas eu l'occasion, depuis le dépôt de son amendement qui est devenu motion principale, de nous expliquer pourquoi. Pourquoi on voudrait rendre la motion du premier ministre, prévue par l'article 7, privilégiée, et aussi en priorité sur toute autre affaire, même sur le discours inaugural? Etant donné l'économie de notre droit parlementaire, ce sont seulement les choses urgentes qui peuvent être apportées pendant le discours inaugural. Est-ce que c'est à ce critère que le ministre se rattache pour nous proposer cet amendement? Est-ce que c'est le caractère d'urgence? Cela m'apparaît peu probable. Je ne veux pas d'avance réfuter cet argument qui peut être fait par le ministre, mais un référendum m'apparaît quelque chose qu'on prépare.

J'ai de la difficulté à imaginer un cas où il faudrait absolument, tout de suite après le début du discours inaugural, deux jours, disons, après le début du débat, suspendre les règles, suspendre le discours inaugural pour discuter d'une question référendaire. Cela m'apparaît peu probable. Je pense que le gouvernement aurait beaucoup de difficulté à nous convaincre, nous, de ce côté de la table, que ce serait sage de prévoir cela dans la loi, dans cette perspective. Il n'y a aucun doute que j'appuie tous les plaidoyers qui ont été faits par les députés, ici, pour respecter fondamentalement les principes qui sont énoncés à l'article 23, respecter la priorité que notre règlement a donnée au débat sur le discours inaugural. Cela va au-delà de la question qu'on a réglée ensemble au pis aller, mais c'est sûrement au pis aller cet arrangement que nous avons fait et qui a fait modifier l'amendement du ministre. Ce n'est pas, d'ailleurs, la dernière question que j'ai à poser là-dessus.

Je pense que le ministre a une petite côte à remonter pour nous convaincre que l'on doive — ce n'est sûrement pas l'urgence, alors qu'est-ce que c'est? — suspendre un règlement, suspendre un principe; naturellement, la loi dépasse le règlement, mais suspendre un principe qui a été incorporé à notre règlement et qui a toujours fait partie de notre tradition parlementaire... C'est tout ce que j'ai à dire, M. le Président, et j'espère que le ministre va nous donner, très franchement, les réponses là-dessus.

M. Bédard: Pour ne pas allonger le débat, je dois réfléchir aux représentations qui viennent d'être faites concernant le sujet et peut-être qu'on pourrait suspendre et aborder l'article 8. On avait parlé de l'importance de situer...

M. Lalonde: J'ai un autre point, si vous suggérez de suspendre, avant de suspendre. Je voudrais soulever un autre point qui se rattache à celui que nous avons réglé ensemble, à savoir que... je voudrais plaider la similarité, l'analogie entre, au point de vue de la tradition, le discours inaugural et le discours du budget.

Si, par exemple, cette proposition de l'article 7 devait être faite immédiatement après le discours du budget, sans que les chefs, au moins les chefs des partis d'Opposition... Je reconnais que le discours du budget n'a pas la priorité du discours inaugural, mais la tradition est la même, celle qui veut qu'on permette... Et jamais, je pense, cela n'a été suspendu, à ma connaissance, au cours des quatre ans que j'ai passés ici; je pense que d'autres plus chevronnés que moi pourraient en témoigner; jamais on n'a suspendu la réponse— à moins que ce soit de consentement — du chef de l'Opposition officielle ou de son représentant et des chefs des autres partis d'Opposition ont trait au discours sur le budget. Il me semble que cette tradition devrait être aussi respectée que le ministre l'a fait pour le discours inaugural. (23 h 30)

M. Bédard: C'est bon d'apporter cet élément à notre réflexion. En ce qui me concerne, je suis également à même de dire, d'après l'expérience des quatre ans où j'ai été à l'Assemblée nationale...

M. Lavoie: Des deux côtés de la table, on est ici pour faire de la politique. Si on avait un dis-

cours sur le budget qui était archifavorable aux Québécois...

M. Bédard: Fantastique.

M. Lavoie: ... fantastique et même s'il y avait un déficit de $5 milliards-I'année suivante et qu'immédiatement après on commençait le débat sur la question sans que les représentants de l'Opposition aient pu s'exprimer sur le budget, je pense qu'il y aurait un préjudice quelque part.

M. Lalonde: Un budget qui propose, par exemple, une loi abolissant le chômage.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président, je propose une motion ayant pour effet de suspendre l'étude de l'amendement à l'article 7, pour entreprendre immédiatement l'étude de l'article 8.

M. Lalonde: Adopté.

Le Président (M. Clair): Adopté.

M. Samson: Suspension sans conditions.

M. Vaillancourt (Jonquière): Avez-vous entendu des conditions? Quand vous n'en entendez pas, c'est parce qu'il n'y en a pas!

M. Samson: Ne vous énervez donc pas!

M. Vaillancourt (Jonquière): Ne m'énervez pas, non plus.

M. Samson: Parce que vous ne pouviez pas proposer votre motion avant qu'on n'ait fini l'autre. Cela prend notre consentement et on vous le donne. Reconnaissez-le!

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que l'article 8 sera adopté, M. le Président? Cela ne prend pas le consentement pour adopter une motion.

M. Samson: Cela prend le consentement pour...

Le Président (M. Clair): Messieurs! Nous en arrivons maintenant à l'étude de l'article 8. L'article 8 est-il adopté?

M. Samson: L'article 7 est suspendu.

M. Roy: Est-ce qu'on le suspend lui aussi?

Le Président (M. Clair): C'est l'article 7 qui est suspendu. Les articles 6 et 7 sont suspendus.

M. Lalonde: Ce qu'on devrait faire, M. le Président, c'est suspendre le gouvernement.

M. Lavoie: M. le Président, je voudrais faire une première intervention sur l'article 8.

M. Bédard: On devrait suspendre l'Opposi- tion, c'est elle qui nous a demandé de suspendre à l'article 6.

Le Président (M. Clair): M. le député de Laval sur l'article 8.

M. Lavoie: Dans ma première intervention, je vais me limiter aux problèmes que peut provoquer la clôture. Je profite du fait que le leader parlementaire du gouvernement est ici.

Je pourrais traiter — je voudrais laisser cela à un autre de mes collègues — le premier rapport de la Commission des droits de la personne et le deuxième, où il est question de ce débat limité. La commission se pose des questions à savoir si les cinq heures additionnelles qui ont été ajoutées aux 25 heures proposées dans le livre blanc sont suffisantes, elle se pose des questions sur cela.

M. Bédard: ... aussi donné suite.

M. Lavoie: Mais, en tant que parlementaire, je vais vous poser une difficulté technique: un fouillis peut-être insoluble pourrait se présenter dans un débat limité de trente heures, tel que proposé dans le projet de loi. Je vous donne l'exemple suivant: La question est amorcée, le débat est amorcé par le premier ministre qui parle — prenons un exemple — pendant une heure, proposant une question sur la souveraineté-association. Normalement, le président va reconnaître le chef de l'Opposition officielle comme deuxième intervenant. Le chef de l'Opposition officielle fait un discours d'une heure et termine avec un amendement à la question. Il n'y a rien de prévu dans ce règlement, ce n'est pas comme pour le message inaugural où les motions d'amendement sont suspendues comme les motions de blâme. Le président devra respecter le règlement et dire que la...

M. Lalonde: Question de fond.

M. Lavoie:... pertinence du débat est limitée à la motion d'amendement. Là, l'Union Nationale ne veut pas se prononcer tout de suite, elle veut attendre que la question de l'amendement soit vidée pour faire un débat de fond sur la question principale, peut-être avec l'idée d'apporter un autre amendement. A ce moment, un député ministériel ou un ministre ministériel...

M. Lalonde: Un ministre ministériel, c'est fort!

M. Lavoie: Un membre du cabinet, à cette heure-ci, avec la semaine qu'on a eue...

M. Lalonde: Excusez-moi.

M. Lavoie: D'accord. Un membre du cabinet ou un député ministériel se lève et fait un sous-amendement mineur, mais modifiant quand même la motion d'amendement du chef de l'Opposition officielle. L'Union Nationale, le Parti créditiste, le PNP, les ministériels veulent revenir au plus coupant, soit à l'amendement, soit à la question, mais tous les députés ministériels au nombre de 50 ou

60 reviennent, à tour de rôle, pendant une dizaine de minutes, uniquement sur le sous-amendement. Les 30 heures se terminent, la clôture arrive, le chef de l'Union Nationale, le Parti créditiste et les autres ne sont pas intervenus sur la question de fond.

M. Roy: C'est cela!

M. Lavoie: Le président, dans un débat aussi strict, va faire respecter la pertinence du débat, j'imagine. La clôture arrive au bout de 30 heures et les principaux interlocuteurs, représentant les partis, n'ont pas pu intervenir et se prononcer sur la question. C'est la première difficulté que je veux vous soulever.

M. Roy: C'est cela et cela rejoint les préoccupations et les points que j'ai soulevés tout à l'heure.

M. Lavoie: C'est technique, mais c'est dans le domaine du possible.

M. Charron: Me donnez-vous le droit d'intervenir, M. le Président?

M. Lavoie: On vous donne consentement.

Le Président (M. Clair): II y a, à présent, le leader parlementaire du gouvernement, qui requiert l'autorisation d'intervenir aux travaux de cette commission.

M. Roy: Consentement.

M. Lalonde: Je pense qu'on va y consentir, M. le Président.

Le Président (M. Clair): De consentement unanime.

M. Charron: Très brièvement, M. le Président, parce que je veux simplement intervenir sur cette hypothèse du député de Laval et non pas sur le contenu du projet de loi, ce que je laisse à d'autres.

Je ne peux pas dire que l'hypothèse soulevée ne peut pas exister; elle peut exister, mais le député conviendra avec moi que c'est la plus invraisemblable. Pourquoi? Parce que le gouvernement joue beaucoup sur cette question — tout le monde le sait — et, en aucun temps, politiquement, se paierait les frais de "filibuster" lui-même sa question sur un amendement de l'Opposition et ensuite s'en aller en référendum, sans avoir occasionné un débat ordinaire, à tout le moins, sinon serein et largement démocratique sur la question.

Prenons un réflexe de politicien...

M. Lavoie: Là, c'est caricaturé!

M. Charron: Oui...

M. Lavoie: Mais coupons la caricature de moitié. Sans être odieux ou sans charrier, vous pouvez quand même brimer des gens de partis reconnus ou de tiers partis d'intervenir même sur la question de fond.

M. Roy: Sur le même point, si on me le permet, M. le Président — parce que j'ai constaté que le leader parlementaire de l'Opposition est très modeste — cela pourrait être aussi les députés de l'Opposition qui décideraient eux aussi de parler sur les sous-amendements et sur les amendements et présenter des sous-amendements, de faire en sorte que les députés de l'Union Nationale, le député de Rouyn-Noranda et moi-même n'ayons aucune possibilité d'intervenir sur le fond de la question...

M. Charron: Ou même nos propres députés du parti ministériel.

M. Roy: Et même les députés du Parti québécois.

M. Lavoie: C'est peut-être normal, on voit souvent la paille dans l'oeil du collègue d'en face...

M. Roy: Alors, nous sommes en face d'une situation que nous devons examiner à son mérite et ce n'est pas pour rien, tout à l'heure, que j'ai parlé des dispositions de l'article 23 qui s'appliquent à l'occasion du débat sur le discours inaugural.

M. Bédard: II y a quand même des attitudes politiques responsables à adopter, à l'occasion d'un débat comme celui-là, si manifestement l'Opposition ou le parti ministériel, use de procédures qui, très clairement, tendent à démontrer — vous aurez les débats télévisés en plus — qu'on ne veut pas, que tout cela est fait en vue de ne pas aborder le fond de la question, je crois que la population sera à même d'évaluer.

M. Roy: Oui, mais on fait quoi?

M. Charron: Moi je suis bien... M. le Président...

M. Roy: II y a une question qui va plus loin que cela et je voudrais y attirer l'attention du ministre de la Justice. Sur une question aussi fondamentale, je verrais très mal que des représentants de partis reconnus, comme le chef de l'Union Nationale, ne puissent même pas intervenir sur la question de fond à cause d'une procédure sur laquelle on jouerait. Alors, il faut prévoir, dès maintenant, cette possibilité et faire en sorte que, dans la loi, il y ait des dispositifs clairement établis, bien précisés, pour nous assurer et nous mettre à l'abri de ce genre de chose.

M. Charron: M. le Président, je pense qu'il n'y a pas un projet de loi qui peut remplacer et imposer le bon sens dans la tête des gens. On peut, par un projet de loi, éviter les excès de manque de bon sens, mais on ne peut pas l'exiger.

Est-ce que je me trompe? Mais je soutiens que de tous les débats que cette Assemblée à connus depuis des années et qu'elle connaîtra encore pendant des mois — d'autant plus que la télévision sera introduite à nos débats — il n'y en a pas un qui sera suivi plus attentivement par la population que celui dont on parle ce soir. Je ne pense pas me tromper. De plus, les côtés de la Chambre réclameront, de nos militants, de nos partisans, de nos sympathisants de suivre attentivement ce débat, parce que beaucoup des opinions des gens se feront à partir des opinions émises par leurs parlementaires, par les gens qu'ils ont élus le 15 novembre 1976, de part et d'autre de la table, et qui les influenceront.

Je pense qu'il y aura — à moins que je ne me trompe — les amis des media y collaboreront sans doute — une cote d'écoute invraisemblable à ce débat. Or, un parti politique qui se mettrait à faire, dans ces circonstances, des manoeuvres parlementaires, pour ne pas dire jusqu'à des pitreries parlementaires, comme on en connaît sur certains débats, certains "filibusters", j'en ai fait, mes collègues en font...

M. Grenier: Vous les regrettez?

M. Samson: Vous étiez même bon là-dessus.

M. Charron: Je vous remercie beaucoup, je ne voulais pas le dire, mais... Ce que je veux dire par là, c'est que le sérieux fondamental de la question exigera qu'un certain nombre de manoeuvres parlementaires de bonne guerre, que l'on décrie à certaines occasions, mais qui sont utiles dans d'autres, tout le monde en conviendra, deviennent donc un peu caduques ou très inappropriées et que le parti politique qui utilisera ces manoeuvres comme il peut en utiliser en "filibustant" le projet de la baie James, ou en "filibustant" le projet de la nationalisation de l'amiante, ce qui, dans ces deux cas, est justifiable — ce sont des manoeuvres parlementaires utilisables — celui qui le fera sur cette question fondamentale déjà limitée, prend littéralement ses votes et les transmet à son adversaire.

M. Roy: Je n'en suis pas sûr.

M. Grenier: M. le Président, j'écoute le ministre délégué au haut-commissariat, mais il ne me convainc pas que des partis politiques n'auraient pas avantage à accaparer principalement les é-crans de télévision et à les conserver. Le ministre dit que le public pourrait juger une pareille formation politique, voire un transfert de votes. Je n'en suis pas assuré. Je n'irai pas dire qu'il faudrait laisser le débat s'éterniser et je pense que ce n'est pas une règle du jeu qu'on doive observer, non plus. Si on accepte un minimum, je pense qu'il faudrait également accepter un maximum, aussi, sur cette question principalement.

C'est trop facile de jouer là-dedans et s'il est une question sur laquelle on ne peut pas se permettre — je vais être objectif en disant cela — de laisser éterniser le débat juste pour le plaisir, c'est bien celle-là. Je pense qu'entre les deux, quand on aura décidé d'un minimum et d'un maximum, il faudra absolument trouver des règles qui permettront à chaque formation de pouvoir s'exprimer.

Il faut, bien sûr, se donner peut-être un temps, ce soir, si on ne doit pas suspendre cet article, mais il faudra se donner une limite, et en haut et en bas, et, ensuite, permettre à chaque formation de pouvoir s'exprimer. Je ne voudrais pas qu'on passe sur un article de loi aussi rapidement et laisser de côté des personnes. On n'en a peut-être pas de présentes à l'esprit, dans le moment, parce qu'on rejoint les deux formations qui sont un député par formation, on rejoint notre chef et on rejoint le chef de la formation du Parti libéral, mais on laisse déjà de côté un indépendant; il pourrait peut-être y en avoir d'autres, à ce moment-là, pour des questions aussi importantes, qui pourraient devenir indépendants.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Je me demande si on a assez réfléchi sur la technique de cette proposition. Je ne sais pas si on s'est imposé un scénario pour voir comment cela peut marcher. Je ne suis pas un procédurier en droit parlementaire, je ne connais pas mon règlement à fond comme les leaders qui sont appelés à jouer là-dedans depuis plusieurs années, mais je pense, d'après la réponse du député de Jonquière, tantôt, à une question du député de Beauce-Sud, que cette proposition qu'est l'article 7, qui pourrait être limitée à 30 heures, d'après l'article 8, est une motion de fond. Ce n'est pas comme une motion de blâme qui est limitée à un temps bien précis, qui ne peut pas être amendée, je crois, ou dont les amendements sont très limités, ce n'est pas comme une motion de député qui ne donne pas de résultat obligatoire, péremptoire.

M. Lavoie: Qui est battue d'avance...

M. Lalonde: ... de toute façon, qui est battue, c'est une motion de fond comme la première lecture, la deuxième lecture, la troisième lecture d'un projet de loi sont des motions de fond. Prévoir au départ que c'est limité à 30 heures change toute la perspective dans laquelle, normalement, une motion de fond est débattue. C'est cela, je pense, qui est la difficulté. (23 h 45)

Ne devrait-on pas s'en tenir à la technique qui est prévue par notre règlement, la clôture, si c'est trop long, de la mettre "built in" dans le projet de loi et tous les mécanismes normaux, habituels sont déréglés à l'avance. Je vous dis cela, M. le Président, simplement pour la réflexion du ministre et ce n'est pas un expert qui vous parle; mais j'écoutais tantôt les propos, et naturellement, tous les propos qui ont été tenus sont valides. Quand le

leader du gouvernement dit: Si un parti commence à faire des manoeuvres là-dedans, il va peut-être transposer ses votes. Peut-être, mais ce n'est pas cela qui nous intéresse comme législateurs quand on écrit l'article 8. C'est de faire en sorte que cela marche et que les droits des députés ne soient pas brimés.

Parce que l'on parle dans l'article 8 d'une procédure parlementaire actuellement relative à un débat bien particulier et qu'une formation politique fasse des excès et transporte ses votes, oui, c'est possible. Mais ce n'est pas cette possibilité qui va faire en sorte qu'on ne doive pas, nous, comme législateurs, s'arranger pour que cela marche, que les droits des parlementaires ne soient pas brimés et que le débat se déroule normalement, comme notre règlement veut généralement que cela se déroule.

M. Bédard: Si nous nous permettons de réfléchir tout haut, je pense bien que c'est ce que nous faisons... Que ce soit par un projet de loi ou encore par une question posée par le premier ministre, le but que nous poursuivons, c'est qu'il y ait un débat à l'Assemblée nationale sur la question ou le projet de loi. Je dis bien un débat parce que tout cela est en fonction de déboucher sur une consultation de la population. Autrement dit, c'est un débat qui ne décide pas, mais qui permet à chaque parti, chaque député, de pouvoir exprimer ses opinions. Effectivement, ce n'est pas le débat qui se termine par une décision au niveau de l'Assemblée nationale, sinon celle qu'à un moment donné il faut aller le plus rapidement possible à une consultation de la population puisque c'est le but que se propose le gouvernement quel qu'il soit qui pose une question ou introduit un projet de loi pour fins de consultation populaire.

On a parlé de toutes les difficultés que pourrait amener, je pense, à bon droit, la procédurite. Si on commençait à en faire à partir d'une question de fond avec possibilité d'amendement, etc. Je pense qu'il faut y réfléchir sérieusement parce qu'il faut quand même que le débat permette essentiellement de discuter sur la question de fond et non pas sur des questions de procédure ou d'amendements qui seraient mineurs. Mais discuter, c'est ce que tous les parlementaires veulent, je pense. C'est ce que la population veut aussi. C'est le député de Mégantic-Compton qui soumettait tout à l'heure l'idée — en tout cas, je réfléchis tout haut — pour en arriver à avoir des règles précises, peut-être de la nécessité... Il parlait de la nécessité d'un minimum et d'un maximum — c'est bien cela — qui pourrait permettre, à ce moment, comme cela se fait dans certains débats, au président de l'Assemblée nationale, sachant quel est le minimum, quel est le maximum, cela pourrait lui permettre de partager équitablement le temps entre les différents partis politiques ou les partis représentés à l'Assemblée nationale et chacun des partis utiliserait ce temps à sa manière.

Mais il est clair que la seule manière, à mon sens, qui peut être rentable pour les formations visées, que ce soit pour les ministériels ou pour l'Opposition, c'est d'employer ce temps, non pas pour faire de la procédurite, mais pour discuter essentiellement sur la question de fond. Dans ce sens, je crois que peut-être l'idée que nous amenait le député de Mégantic-Compton mérite qu'on y réfléchisse dans le sens qu'elle permettrait en plus peut-être d'éviter la procédurite, que tous les parlementaires discutent sur le fond de la question et qu'il y ait une division du temps qui soit honnête et équitable pour chaque parti représenté à l'Assemblée nationale.

Le Président (M. Clair): M. le député de Châteauguay.

M. Bédard: Qu'on évite en fait un débat sur de la procédurite qui nous empêcherait de discuter le fond de la question.

M. Lalonde: J'aurais une question à poser au ministre en vertu du règlement qui me permet de la lui poser. Est-ce que ce n'est pas d'après vous, enfin, on peut réfléchir là-dessus, le fait qu'on impose une limite, qu'on fasse un débat limité comme on le fait par exemple pour le débat sur le discours inaugural, tout en recourant à la motion de fond qui permet des amendements, qui est le problème? Oui, mais dans tous les débats limités prévus par le règlement, il n'y a pas de possibilité d'amendement.

M. Paquette: Sauf le débat sur le discours inaugural.

M. Lalonde: Oui, des amendements bien limités, à la deuxième lecture, pour reporter à six mois.

M. Paquette: Le débat du mercredi?

M. Lavoie: Sur le message, il y aurait une technique...

M. Lalonde: Ecoutez, je parle à vous.

M. Lavoie: Sur le message inaugural, le discours du budget, les députés ont le droit de faire des motions de blâme.

M. Lalonde: Oui.

M. Lavoie: Et qui restent au garage jusqu'à la fin, et le vote est pris à la fin. Je ne sais pas si...

M. Lalonde: Les motions des députés peut-être, qu'on peut amender, mais qui n'engagent le gouvernement d'aucune façon, même s'il vote pour ces motions.

M. Bédard: Si on ne veut pas entrer... En tout cas, il s'agit de l'analyser. Si on ne veut entrer dans la procédurite d'aucune façon, c'est que ce soit...

M. Lalonde: II faut qu'il attende la clôture.

M. Bédard: Si le débat est introduit par une question, il me semble que c'est assez clair que peut-être l'idée mise de l'avant par le député de Mégantic-Compton pourrait résoudre bien des problèmes. C'est une question, en fait, avec un temps minimum, un temps maximum et une répartition équitable du temps pour chacun des partis de discuter de la question.

M. Lavoie: Est-ce que je pourrais poser une question au ministre? Elle est très brève, à cause de l'heure.

M. Bédard: Oui.

M. Lavoie: Parce que, avant qu'on ajourne, ce soir, étant donné que le ministre et ses experts vont prendre cela en considération, je voudrais lui soumettre une autre difficulté au sujet de cette fameuse clôture automatique prévue à l'article 8. Avez-vous considéré le fait que, si le référendum est mis en branle par une question qui serait le cas, dans un référendum constitutionnel — question capitale importante pour l'avenir du Québec — il y aurait une clôture automatique en vertu de la loi 8 après 30 heures? Avez-vous considéré que, sur un autre sujet beaucoup moins important, même s'il est très important, disons la réforme de la fiscalité municipale où l'on procéderait à un projet de loi, formule B prévue à l'article 6, la question doit être dans le projet de loi pour une chose moins importante qu'une question sur un référendum sur l'avenir constitutionnel? Dans le deuxième cas, il n'y aurait pas de clôture automatique pour une chose moins importante, alors qu'il y aurait une clôture automatique pour une chose plus capitale.

M. Vaillancourt (Jonquière): C'est-à-dire qu'actuellement la clôture n'est pas automatique. C'est au moins 30 heures.

M. Lavoie: Elle est automatique en vertu de l'article 8. Le couperet tombe à 30 heures.

M. Vaillancourt (Jonquière): Pas automatiquement.

M. Lavoie: "II peut". "Il peut" veut dire "doit".

M. Lalonde: C'est-à-dire qu'il n'y a pas de débat, il n'y a pas de motion de clôture.

M. Lavoie: En rédaction de loi, "peut" veut dire "doit". C'est impératif.

M. Vaillancourt (Jonquière): II n'y a rien qui empêche que le débat dure 32 heures.

M. Bédard: Je ne suis pas si sûr que cela de l'interprétation.

M. Vaillancourt (Jonquière): II n'y a rien qui empêche le débat de durer 32 heures, M. le député de Laval, actuellement.

M. Lavoie: Pendant au moins 30 heures.

M. Bédard: Quand c'est "peut", c'est "peut", quand c'est "doit", c'est "doit".

M. Lalonde: Oui, mais c'est quasi automatique.

M. Bédard: Quand on dit "peut", cela veut dire qu'il peut ne pas mettre cela...

M. Lavoie: Oui, d'accord, mais on est à la merci.

M. Vaillancourt (Jonquière): Vous êtes à la discrétion de, mais ce n'est pas automatique.

Le Président (M. Clair): Messieurs...

M. Lalonde: Comme on peut aller se coucher bien sûr.

M. Lavoie: Dans le contexte qu'on connaît, le couperet ne serait pas loin.

Le Président (M. Clair): M. le député de Laval.

M. Lavoie: J'ai terminé, mais je voudrais qu'on prenne cela en considération.

Le Président (M. Clair): Cela va. Simplement parce que je voudrais donner l'occasion au député de Châteauguay, qui attend depuis un bon moment d'intervenir. M. le député de Châteauguay.

M. Dussault: M. le Président, le projet de loi prévoit effectivement un maximum de 30 heures. Je m'excuse, un minimum de 30 heures, vous avez raison. Nous, du parti ministériel, nous considérons que c'est généreux.

M. Lalonde: Merci beaucoup, on ne le savait pas. On est donc ingrat.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Dussault: Et si, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, je me permets de le dire, c'est que je pense bien que pour l'évaluer, on a besoin de points de comparaison et nous en avons un exemple qui peut nous servir de point de comparaison, c'est le projet de loi déposé à la Chambre des communes par le gouvernement fédéral qui lui prévoit un maximum de 40 heures de débat sur la question. Je n'apporte pas la comparaison pour narguer qui que ce soit.

M. Lavoie: Trente heures, c'est plus généreux que 40 heures?

M. Dussault: Je pense que c'est sérieux effectivement de dire que le projet de loi d'Ottawa peut

se comparer au nôtre ou que le nôtre puisse se comparer à celui d'Ottawa. On va faire une évaluation, M. le Président, si vous le permettez. Si nous prenons nos 30 heures et que nous les partageons entre les députés de l'Assemblée nationale, nous avons une moyenne de seize minutes par député de débat sur la question.

M. Lalonde: On vous remercie, monsieur.

M. Dussault: Si nous appliquons les seize minutes en question aux 265 députés d'Ottawa, nous aurions là un débat de 70 heures. Or, la loi fédérale prévoit qu'il y a un débat de 40 heures, ce qui veut dire, à toutes fins pratiques, au plus neuf minutes par député. Si on appliquait les neuf minutes en question à notre débat à l'Assemblée nationale, nous aurions un débat d'au maximum seize heures et demie. Le projet de loi, tel qu'il a été conçu par le gouvernement, prévoit 30 heures, c'est-à-dire quasi le double de ce que prévoit, à toutes fins pratiques, le gouvernement fédéral. Nous avions un autre point de repère, M. le Président, qui était le discours inaugural qui prévoyait 20 heures.

La Commission des droits de la personne nous a demandé, lors de son témoignage sur le livre blanc, de prolonger le temps prévu pour le débat sur la question. Nous l'avons écoutée. Nous l'avons prolongé de 30 heures et, lors de son dernier témoignage, mais sous forme de lettre, la commission nous a fait valoir qu'elle appréciait effectivement que nous ayons augmenté. Nous l'avons augmenté de dix heures par rapport à ce point de repère qui est celui du discours inaugural. Je pense que nous avons fait preuve de générosité. Je l'ai dit au début et j'y crois.

M. Lalonde: Vous êtes d'accord.

M. Dussault: A mon point de vue, M. le Président, les 40 heures du gouvernement fédéral seraient un très très, j'insiste, un très strict maximum puisque si nous donnions, comme on le fait habituellement dans des débats sur des motions, 20 minutes à chacun des députés, nous atteindrions au maximum 37 heures de débat. C'est pour ces raisons, M. le Président, que je demande aux membres de cette commission d'appuyer l'article du gouvernement relativement au temps à consacrer au débat sur la question.

M. Vaillancourt (Jonquière): M. le Président. est-ce que le député de Châteauguay me permettrait une question?

M. Dussault: Oui, sûrement.

M. Vaillancourt (Jonquière): Est-ce que le projet de loi fédéral prévoit un minimum de temps?

M. Dussault: Non, effectivement, le projet de loi dit: Un maximum de 40 heures.

M. Vaillancourt (Jonquière): Si je comprends bien, ils pourraient terminer cela au bout de 15 heures ou 18 heures.

M. Dussault: Effectivement. Cela pourrait être terminé bien avant les 40 heures.

M. Samson: C'est une suggestion que je veux faire au ministre avant...

M. Lavoie: On a apporté des choses qui se tenaient, mais on n'a pas discuté...

M. Bédard: Je pense qu'il est normal...

M. Lalonde: Quand c'est dit de travers... On a dit, cela ne marche pas.

Le Président (M. Clair): Messieurs...

M. Bédard: Autant pour le député qui vient de parler que pour ceux qui ont parlé précédemment, vous me permettez... je pense que chacun y est allé de réflexions dans le sens de voir quelles sont les embûches qui nous guettent et en même temps avec la préoccupation que la procédure soit réduite au maximum, la préoccupation que lors de ce débat, que ce soit à l'occasion d'une question ou d'un projet de loi, on ait l'assurance, pour la population et pour les parlementaires, qu'on discute véritablement du fond de la question et non pas de la procédurite. Je crois qu'on est à même de constater qu'il y a peut-être matière à réflexion le plus rapidement possible. Nous-mêmes on va le faire et dès demain, chacun pourra peut-être y aller de propositions plus précises.

Le Président (M. Clair): Messieurs, il est minuit, la commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 0 h 1)

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