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Version finale

31st Legislature, 4th Session
(March 6, 1979 au June 18, 1980)

Tuesday, November 6, 1979 - Vol. 21 N° 200

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Audition des membres de la Commission permanente de la réforme des districts électoraux


Journal des débats

 

Audition des membres de la

Commission permanente de la réforme

des districts électoraux

(Quinze heures trente minutes)

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, messieurs!

La commission de la présidence du conseil et de la constitution est réunie pour étudier les projets de loi no 9 et 10 ainsi que le document sur l'hypothèse de découpage, de même qu'entendre les argumentations sur le rapport no 5..

Les membres de cette commission sont: M. Bédard (Chicoutimi); M. Bisaillon (Sainte-Marie) remplacé par M. Dussault (Châteauguay); M. Charbonneau (Verchères) remplacé par M. de Belle-feuille (Deux-Montagnes); M. Forget (Saint-Laurent) remplacé par M. Larnontagne (Roberval); M. Grenier (Mégantic-Compton) remplacé par M. Fontaine (Nicolet-Yamaska); M. Laberge (Jeanne-Mance); M. Levesque (Bonaventure) remplacé par M. Lavoie (Laval); M. Morin (Louis-Hébert) remplacé par M. Lefebvre (Viau); M. Paquette (Rosemont), M. Samson (Rouyn-Noranda).

Les intervenants présents cet après-midi sont: M. Bertrand (Vanier); M. Ciaccia (Mont-Royal) remplacé par M. Gratton (Gatineau); M. Lévesque (Taillon) remplacé par Mme Denise LeBlanc-Bantey.

Cela me prendrait un rapporteur pour cette commission. M. Lefebvre (Viau)?

Nous sommes prêts à procéder. Est-ce que le ministre a des choses à dire?

Remarques préliminaires

M. Bédard: Seulement une phrase, M. le Président, pour remercier les membres de la commission d'avoir bien voulu accepter de répondre, d'une façon positive, à l'invitation qui leur a été faite de venir rencontrer les membres de la commission aujourd'hui. Je suis convaincu que cette discussion — et c'est le voeu que je formule — nous permettra d'apporter un éclairage à l'ensemble des discussions que nous devrons continuer concernant l'étude des projets de loi 9 et 10.

Mes propos seront aussi brefs pour permettre à tous les membres de la commission de profiter pleinement de la présence des membres de la commission ici cet après-midi.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Roberval.

M. Lamontagne: M. le Président, nous sommes évidemment très heureux de rencontrer ceux qui ont présidé à la confection du cinquième rapport de la réforme des districts électoraux. On doit dire également que ce midi, à nos bureaux, nous avions une étude, l'hypothèse de découpage du quotient de 36 000 électeurs. Je n'ai pas besoin de vous cacher que l'Assemblée nationale siégeant à 14 heures cet après-midi, nous n'avons pas eu le temps de prendre connaissance de cette hypothèse.

Comme l'a fait le ministre, M. le Président, je voudrais immédiatement vous dire que, si nous étions opposés au cinquième rapport — je l'ai mentionné lors de la commission parlementaire du 6 décembre dernier — nous le sommes tout autant à l'hypothèse de découpage en la voyant un peu rapidement, parce qu'encore une fois notre inquiétude sur ces hypothèses présentées par la commission — les conclusions sont là pour le prouver — vient du fait qu'on ne tient pas compte de l'avis même de certains comtés.

Je ne voudrais pas enlever les mots de la bouche du député des Îles-de-la-Madeleine, mais je voudrais strictement prendre comme exemple que les parlementaires à l'Assemblée nationale du Québec, depuis un très grand nombre d'années, sont unanimes pour dire que le comté des Îles-de-la-Madeleine est une entité par lui-même. Quelle n'est pas notre surprise, en prenant rapidement connaissance de cette hypothèse-là, de voir que le comté des Îles-de-la-Madeleine doit être rattaché à un autre comté, etc.

Lorsque nous parlons d'hypothèse de 36 000 électeurs, nous convenons qu'il y a des exceptions au Québec, évidentes pour tout le monde. Nous convenons que ces exceptions doivent se retrouver dans toute carte électorale proposée par une commission ou une autre. Sinon, nous devrons — nous sommes disposé à le faire — souscrire entièrement, par exemple, à la proposition que la députée des Îles-de-la-Madeleine a faite la semaine dernière à l'Assemblée nationale et demander au ministre titulaire de cette loi que les exceptions qui font l'unanimité à l'Assemblée nationale se retrouvent dans un projet de loi.

C'est notre inquiétude. J'arrête là pour donner immédiatement la parole à d'autres. MM. les commissaires, pour une région comme l'Abitibi et le Saguenay-Lac-Saint-Jean, vous proposez maintenant à deux reprises successives d'enlever l'Abitibi pour une bonne partie; je pense qu'autant les députés de l'Abitibi que ceux de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean sont évidemment fort heureux de rapatrier une bonne partie de la baie James, de Chibougamau-Chapais dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean. Ce n'est pas nous qui allons y faire opposition, mais il reste que je n'ai pas besoin de vous dire que, dans les deux régions concernées, il demeure, depuis un an et demi déjà, de nombreux points d'interrogation.

En résumé, M. le Président, pour faire une hypothèse de travail sur 36 000 électeurs, 32 000 électeurs, 33 000 électeurs, 34 000 électeurs, à mon avis et à l'avis de ma formation politique, on doit toujours tenir compte d'exceptions évidentes pour tout le monde. Notre exemple que tout le monde reconnaît ici, c'est les Îles-de-la-Madeleine, et nous en aurons d'autres au cours de la présente rencontre. Merci.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Nicolet-Yamaska, avez-vous quelque chose à dire?

M. Fontaine: M. le Président, je veux tout simplement remercier moi aussi les membres de la commission d'avoir bien voulu répondre à l'appel qu'on leur a lancé la semaine dernière. Je prends connaissance moi aussi, depuis son dépôt à l'Assemblée nationale, de ce document de travail d'une hypothèse avec 36 000 électeurs par district électoral. Avant de donner quelque commentaire que ce soit, il va falloir en prendre connaissance et approfondir ce document. Nous avons également des questions à poser aux membres de la commission concernant le cinquième rapport. Pour l'instant, je m'en tiendrai à ces quelques commentaires. Je reviendrai tout à l'heure en leur posant des questions. Je pense que le principal but de la réunion d'aujourd'hui, c'est d'avoir les commentaires de la commission. Je voudrais qu'on y procède le plus rapidement possible.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Vanier.

M. Bertrand: Je voudrais remercier les membres de la commission d'avoir fait ce travail. J'ai été un peu surpris de voir le député de Roberval se lancer un petit peu; je suis sûr que ce n'était pas sous forme de reproche, loin de là, mais cela avait un peu l'air de cela. Je me disais: Ce sont quand même eux qui ont demandé ici même, à la commission, que la Commission permanente de la réforme des districts électoraux prépare un projet de carte électorale sur la base d'une hypothèse d'une moyenne de 36 000 électeurs.

M. Lamontagne: Question de règlement. M. Bertrand: Elle a fait son travail.

M. Lamontagne: Je veux qu'on s'entende bien. Effectivement, la commission, à la suite de notre suggestion, a demandé une hypothèse de travail de 36 000. Je n'accepte pas personnellement qu'une hypothèse de travail sur n'importe quel chiffre ne tienne pas compte d'exceptions évidentes, tout simplement.

M. Bertrand: Simplement pour terminer, il n'avait pas été dit à ce moment dans le mandat qui avait été donné à la Commission permanente de la réforme des districts électoraux: Tenez compte des exceptions qu'on vous signale immédiatement, par exemple, les Îles-de-la-Madeleine. On lui a dit: Faites-nous quelque chose sur la base de 36 000. On n'a pas à faire un reproche, quel qu'il soit, à la Commission permanente de la réforme des districts électoraux. S'il y a des exceptions à faire et s'il y a des comtés qui doivent être exclus de l'application de la loi dans le cadre général, c'est à nous, hommes et femmes politiques, de prendre ces décisions. Je crois que c'est dans ce sens que la députée des Îles-de-la-Madeleine avait fait ses représentations à l'Assemblée nationale et qu'elle avait été appuyée par l'ensemble des formations politiques. La Commission permanente de la réforme des districts électoraux n'avait pas, elle, à faire un choix politique qui est de notre ressort et non pas de sa responsabilité.

Le Président (M. Jolivet): M. Côté...

M. Bertrand: Ce qui prouve bien qu'il n'y a pas eu d'influence de la part de notre formation politique auprès de la Commission permanente de la réforme des districts électoraux. Elle a fait ce qu'elle avait à faire selon le mandat qui lui avait été présenté par la commission. Nous prendrons nos responsabilités d'hommes politiques et de femmes politiques en ce qui a trait aux exceptions.

M. Bédard: M. le Président, je sais gré au député de Roberval de plaider la cause des Îles-de-la-Madeleine, d'autant plus qu'elle a été plaidée avant lui avec brio par la députée des Îles-de-la-Madeleine et je crois que nous ne sommes pas ici pour discuter de ce sujet particulier.

Il y a une hypothèse de travail. On avait demandé à la commission de travailler à cette hypothèse de travail, à la demande même de l'Opposition. Alors, on aura tout le loisir de poser des questions. Si le député de Roberval sent le besoin de plaider la cause des Îles-de-la-Madeleine, je me demande si ce n'est pas parce qu'il est en train de réaliser qu'avec son hypothèse de 36 000, le Saguenay-Lac-Saint-Jean est en train de perdre un comté par rapport à ce qu'il avait avec l'autre carte.

M. Bertrand: Ah bon!

Le Président (M. Jolivet): M. Côté, vous avez la parole. Je vous demanderais, pour le bénéfice du journal des Débats, de nous présenter les gens qui sont avec vous.

Témoignage de M. Pierre-F. Côté

M. Côté (Pierre-F.): Merci, M. le Président. Si vous permettez, je vais d'abord vous présenter les membres de la commission. À ma droite, M. le juge Alphonse Barbeau, de la Cour supérieure; à ma gauche, Me Jacques Prémont, qui est le conservateur de la Bibliothèque nationale. Je pense que la plupart d'entre vous le connaissent bien. À la droite de M. le juge Barbeau, Me Eddy Giguère, qui est secrétaire de la commission.

Avec votre permission, M. le Président, pensez-vous que ce serait opportun que je vous fasse une brève introduction sur le travail oui a été fait? Ce ne serait pas très long. Enfin, si vous trouvez que c'est un peu long, vous pourrez me demander d'abréger. Mais il me semblerait peut-être opportun, avant de discuter de façon spécifique du rapport V, de vous donner une vue d'ensemble, sans, évidemment, répéter, relire le texte du rapport V.

Le Président (M. Jolivet): Je vous demanderais simplement, pour les besoins de notre écoute, d'approcher votre micro de vous, si c'est possible.

M. Côté: Je pense que ça va être mieux. Le Président (M. Jolivet): C'est ça.

M. Côté: Merci. Je veux d'abord vous signaler, M. le Président, messieurs les membres, que le rapport V a été préparé sous la présidence de mon prédécesseur, M. le juge François Drouin, qui a quitté ses fonctions, comme vous le savez, le 25 mai. J'ai, pour ma part, étudié ce rapport en collaboration avec les collègues de la commission et nous avons préparé un bref résumé, une vue à vol d'oiseau, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, de ce rapport.

Il nous semble peut-être opportun au tout début, encore avec votre permission, de faire simplement une brève mise au point mais, je ne voudrais pas que cela entraîne de polémique. Nous avons l'impression que, durant les débats qui ont eu lieu à l'Assemblée nationale pendant les dernières semaines, certains membres de l'Assemblée nationale ont peut-être dépassé leur pensée en faisant certaines allusions à l'égard du travail de la commission.

Je puis affirmer de façon absolument catégorique, au nom de mes collègues et après avoir également vérifié auprès de M. le juge Drouin, que le travail qu'a eu à faire la commission et son cinquième rapport qui a été présenté au mois de février 1978, tous les membres, ainsi que tous les employés de la commission l'ont fait de façon absolument indépendante et de la façon la plus professionnelle possible. Il est possible qu'on ne soit pas d'accord sur le cinquième rapport, mais je pense qu'il faut rendre justice à la vérité en faisant cette mise au point. Nous croyons tout simplement que les propos qui ont été échangés à ce moment-là ont certainement dépassé la pensée des personnes qui les ont exprimés dans le feu du débat.

La commission qui a été mise sur pied le 14 juillet 1971 avait déjà produit, avant ce cinquième rapport, quatre autres rapports. Les deux premiers ont conduit à l'adoption de la loi 62 qui est devenue par la suite le chapitre 4 des lois du Québec, 1972, et qui constitue la description des districts électoraux actuels.

Les rapport III et IV ont été produits après les élections de 1973 et ont amené l'Assemblée nationale à déposer le projet de loi no 16, qui, malheureusement, en est resté au stade de la première lecture à la dissolution des Chambres en 1976.

Avec ces quatre premiers rapports, la commission a acquis une grande expérience dans le domaine du découpage électoral. Elle a maintenant une connaissance plus approfondie du territoire québécois et est en mesure de développer des programmes de recherche qui permettent d'établir ou de prédire, avec une certaine justesse, l'évolution du nombre des électeurs dans certaines régions du Québec.

De plus, la commission a pris bonne note des remarques qui lui ont été faites par les députés lors de l'étude en commission parlementaire des rapports précédents. Je m'arrêterai simplement à quatre principales remarques qui avaient été faites lors d'audiences antérieures. La première c'est que beaucoup d'électeurs sont déplacés lors d'un redécoupage de la carte électorale, ce qui ne facilite pas l'identification de l'électeur à son milieu ou à son député. La deuxième c'est qu'on ne tient pas assez compte du milieu de vie naturel des gens ou de leur sentiment d'appartenance. La troisième c'est que le nombre d'électeurs est parfois trop élevé dans certains districts électoraux, et l'augmentation rapide du nombre des électeurs fait que ces districts électoraux ont rapidement atteint le maximum prévu par la loi, soit 40 000 électeurs. Quatrièmement, le découpage électoral est avant tout une opération strictement mathématique dans laquelle on néglige le caractère socio-économique des diverses régions du Québec.

C'est en se basant sur ces commentaires que la commission a effectué des travaux ayant mené à la rédaction du rapport V. Ce rapport porte le nombre des districts électoraux de 110 à 121 et respecte la moyenne de 32 000 électeurs, plus ou moins 25% par district.

Cinq critères principaux ont été pris en considération lors de l'élaboration de ce cinquième rapport. Le premier de ces critères est la prévision de l'évolution du nombre d'électeurs. On a tenté d'évaluer la croissance de la population électorale dans certaines régions données. Par exemple, en ajoutant deux districts électoraux aux trois déjà existant sur l'île Jésus, on en arrivait en 1976 à une moyenne de 30 543 électeurs par district. Si on applique les chiffres du recensement de 1979 — avant évidemment la période de révision — à ces cinq districts, la moyenne est de 33 321. En appliquant donc les chiffres de 1979 dans tous les districts, on constate qu'un seul, celui de Laprairie, dépasse le maximum de 40 000 prévu par la loi. Ce qui est une performance assez bonne et montre qu'au cours des années, la commission a amélioré ses façons de fonctionner et a raffiné ses recherches. (15 h 45)

À cet égard, je tiens à vous souligner avec beaucoup d'insistance que la commission doit, évidemment — c'est inutile de vous le rappeler, mais c'est peut-être bon de s'en souvenir — agir uniquement dans le cadre de la loi qui la régit et particulièrement des dispositions de l'article 9 de cette loi.

Le deuxième critère pour établir le rapport V a été de s'efforcer, dans toute la mesure du possible, d'éviter des réactions à chaîne. Le découpage du rapport V est d'ordre général. Il ne faut pas non plus perdre cela de vue contrairement peut-être à celui des rapports antérieurs. Ceci permet d'éviter ce qu'on appelle des réactions à chaîne ou ce que j'appelle, en langage peut-être plus coloré, la réaction du ressort. Par exemple, pour faire le découpage des districts électoraux de la rive sud du Saint-Laurent, sans diviser ce territoire en régions, il aurait fallu modifier tous les districts, à partir de celui de Huntingdon à celui de Gaspé. En divisant le territoire en régions, les transferts d'électeurs ont moins de conséquence et plusieurs districts peuvent demeurer inchangés. Je

voudrais peut-être préciser davantage cette idée du travail qui a été fait par région pour éviter cette réaction à chaîne. Lorsqu'on travaille à l'établissement d'une nouvelle carte électorale, en vue de répartir à nouveau la délimitation des districts, et je reprends d'une autre façon l'exemple de tout à l'heure, en partant du comté de Duplessis, en essayant de rétablir l'équilibre, par voie de réaction à chaîne, on aboutirait à une situation assez étrange qu'on peut comparer à un ressort qui se détend. On pourrait donc avoir les situations suivantes. Du comté de Duplessis, on aboutirait jusqu'au comté de Gaspé en ayant, évidemment, certaines surprises. Cette façon de travailler ne peut être considérée d'aucune façon. Si, par exemple, on change la limite du district de Duplessis et que par voie de conséquence on est obligé de changer les limites de tous les districts électoraux, on aboutit, au bout de la carte électorale du Québec, à des situations assez surprenantes. La seule façon pratique d'aboutir est d'envisager la carte électorale du Québec par grandes régions. Le rapport V fait donc état de cinq grandes régions en fait: le secteur de Montréal, le secteur de Québec, la rive nord du Saint-Laurent, la rive sud du Saint-Laurent et finalement les Îles-de-la-Madeleine, qui ont toujours été considérées comme étant une exception.

L'autre facteur qui est entré en ligne de compte dans la rédaction du rapport V, le troisième, c'est le respect des tendances démographiques. Avant de faire le découpage électoral d'une région, il faut se demander ce qu'est sa tendance démographique. Certaines régions, en effet, sont en progression, alors que d'autres ont des populations assez stables. Ainsi, dans l'île Jésus, à l'élection de 1976, la moyenne était de 50 904 électeurs par district. En ajoutant un district aux trois existants, on en arrivait à une moyenne de 38 178; avec cinq districts, la moyenne était de 30 543. C'est cette dernière solution qui a été retenue par la commission.

La quatrième caractéristique de ce rapport, c'est le respect, dans toute la mesure du possible, des caractéristiques socio-économiques. Je vous signale entre parenthèses que c'est peut-être l'aspect le plus difficile dont il faut tenir compte dans la délimitation des districts électoraux. Chaque fois que c'était possible, les caractéristiques socio-économiques d'une région ont été prises en considération. Par exemple, on sait que la municipalité de Beloeil est un pôle d'attraction pour celles de McMasterville et Mont Saint-Hilaire, entre autres. Ces municipalités ont donc été placées dans un même district électoral.

Un autre exemple peut être cité, le découpage de la région du nord de Montréal. Je vous signale en particulier que peu de remarques ont été formulées par les organismes de cette région. La commission y a effectué des études, que je qualifierais d'études types ou pilotes, qui ont duré près d'une dizaine de mois. On a tenu compte non seulement des pôles d'attraction, mais aussi des territoires, d'organismes tels que le Conseil régional de développement, les commissions scolaires, et des axes de communication. Encore une fois, je le répète, il s'agissait là d'une étude à caractère expérimental.

La cinquième caractéristique est le respect des limites municipales. Dans le rapport V, plusieurs limites de district ont été modifiées dans le but de permettre à certaines municipalités de les situer en entier dans un district.

Voyons maintenant les raisons qui ont amené les propositions du rapport V par région. Je vais être très bref là-dessus, quitte à répondre à vos questions de façon plus précise tout à l'heure parce que je pourrais détailler, évidemment, dans chacun des cas. L'île de Montréal d'abord. L'expansion de la population s'étant effectuée aux extrémités est et ouest de l'île, il fut décidé de ne pas en modifier le centre. Neuf districts sont donc demeurés inchangés, ce qui a entraîné des modifications dans tous les districts électoraux de l'île.

L'île Jésus. La création de deux nouveaux districts, pour un total de cinq, sur l'île Jésus, a été dictée par le souci d'une juste répartition des électeurs. Avec quatre districts, la moyenne aurait été de 38 000 environ, ce qui est trop près de la limite et ne laisse pas de possibilité de développement, alors que la ville de Laval connaît une forte expansion.

La région de Québec. Trois districts avaient une population électorale de plus de 40 000 électeurs: ceux de Charlesbourg, Chauveau et Louis-Hébert. Celui de Montmorency frôlait le maximum permis avec ses 39 743 électeurs. Le district de Charlesbourg a été modifié pour ne comprendre que la ville de Charlesbourg. Le district de Neufchâtel a été créé pour répartir le surplus de population de celui de Chauveau. Ces modifications ont fait que le district de Vanier a subi de grands changements.

Le Nord-Ouest. Les villes de Chibougamau et de Chapais ont été transférées du district d'Abitibi-Est à celui de Roberval parce que les voies de communication favorisent plus cette situation. Le district d'Abitibi-Est a donc une nouvelle délimitation.

Le district de Pontiac-Témiscamingue a été divisé en ceux de Pontiac et de Témiscamingue, ce qui a eu pour conséquence de faire disparaître le district électoral de Rouyn-Noranda.

L'Outaouais. Le district de Gatineau a été transformé pour ne comprendre que la ville de Gatineau en partie, et l'ancien district électoral de Gatineau a été, dans sa majeure partie, transféré dans celui de Pontiac.

Les Laurentides. Comme la population de cette région a augmenté de façon considérable en 1973 et 1976, des changements importants y sont proposés. Deux nouveaux districts sont créés, ceux de Laurentides et de Masson, ce qui entraîne des modifications territoriales importantes à ceux de Joliette-Montcalm, L'Assomption, Prévost et Terrebonne. La ville de Mirabel a dû être divisée entre deux districts.

Le Saguenay-Lac-Saint-Jean. Dans cette région, on s'est efforcé de respecter la barrière naturelle que constitue la rivière Saguenay. Le

district de Roberval voyant sa population augmenter à la suite de la venue de 5210 électeurs du district de Saguenay et de 9000 électeurs des villes de Chibougamau et de Chapais, le nouveau district de Tremblay a été créé.

Le sud-est de Montréal et La Plaine. L'expansion démographique de la région métropolitaine de Montréal s'est manifestée de façon prononcée dans la région de Longueuil. Le district de Taillon comportait, avant la confection du rapport V, le plus grand nombre d'électeurs pour un district, soit 65 384. On ne pouvait donc échapper à la nécessité de créer deux districts dans cette zone, ceux de Bertrand et de Longueuil.

Pour les mêmes raisons, un district a été ajouté dans la région de La Plaine.

Je dois vous souligner qu'un très grand nombre de commentaires — en fait, nous les avons compilés et nous arrivons au chiffre de 90 en date du mois d'août — ont été exprimés et acheminés à la commission par plusieurs organismes. Il y a plusieurs de ces remarques qui nous ont été soumises que nous considérons comme très pertinentes, sans mentionner, ce que nous avons compilé dernièrement, les commentaires faits par les membres de l'Assemblée nationale au cours des dernières semaines, commentaires qui, si je peux me permettre moi-même un commentaire, nous démontrent de toute évidence que ce n'est pas une tâche facile de délimiter une nouvelle carte électorale.

Par ailleurs, ce qui, je pense, vaut la peine de vous être souligné et qui ne rend pas la tâche facile, c'est que chaque groupement concerné envisage le problème du changement de la délimitation de son district électoral dans une perspective parfois trop restreinte. Il faut, de toute nécessité, que les modifications proposées soient comprises dans une perspective plus vaste d'une grande région, voire même, dans certains cas, de toute la province.

Il est relativement facile, pourvu que l'on dispose du personnel et du temps requis, d'établir ou de dresser n'importe quelle carte électorale. Le problème, en fait, consiste surtout à conserver une juste proportion des électeurs pour chacun des districts électoraux pour que la population soit représentée équitablement à l'Assemblée nationale.

En terminant, je voudrais vous faire part de brefs commentaires sur l'expérience que les membres de la commission ont vécue cet été et l'an dernier à la suite de l'adoption par l'Assemblée nationale de ce qu'on a appelé dans notre jargon la loi 44, la loi modifiant la loi concernant les élections municipales. Je voudrais vous souligner à cet égard que nous sommes assez fiers du travail qui a été accompli, l'an dernier, à Longueuil et à Montréal en particulier et, cette année, à Jonquière, à Mirabel, à Chambly, à Thetford Mines et à Alma.

Nous avons tenu dans cinq de ces villes, Montréal, Longueuil, Mirabel, Chambly et Jonquière, des audiences publiques, ce qui a été une expérience très enrichissante. Une des principales conclusions, je crois, qu'on puisse tirer de ces audiences publiques pour la délimitation des districts électoraux municipaux a été que cela a vraiment permis aux commissaires de prendre le pouls de la population, de connaître ses objections et d'en arriver à soumettre des propositions qui, d'après les remarques ou les commentaires qu'on en a eus subséquemment, rejoignent absolument les désirs des citoyens des villes concernées.

Vous me permettriez peut-être, en terminant, de faire un très bref commentaire concernant l'hypothèse de découpage à 36 000 électeurs. J'avais, lors de l'audience de la commission, le 6 décembre, signalé aux membres de la commission que nous étudierions très attentivement la demande qui nous était faite. Je dois souligner que la demande, telle que nous l'avons comprise — je m'en excuse auprès de M. le député de Roberval, si nous l'avons mal comprise — comportait à ce moment-là deux exigences: un quotient de 36 000 électeurs et un nombre maximum de 110, mais ne dépassant pas dans tous les cas 112 districts électoraux. Nous soumettons une hypothèse de 112 districts électoraux.. À l'égard de cette hypothèse de découpage de 36 000 électeurs, là encore je dois insister sur le fait que ce n'est qu'une hypothèse de travail. Je pense qu'il est important de le souligner. Encore là, il y a un très grand nombre d'autres solutions qui peuvent être trouvées.

À titre d'exemple, je voudrais vous souligner que, pour une région seulement, en travaillant à cette hypothèse de 36 000 électeurs, nous avons envisagé huit hypothèses de solution. C'est donc dire que des hypothèses de solution dans le découpage d'une carte électorale, on peut en établir un très grand nombre.

M. le Président, messieurs, je vous remercie.

Le Président (M. Jolivet): Les questions maintenant. M. le ministre. Oui, M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: M. le Président, M. Côté a mentionné à plusieurs reprises la belle municipalité de Mirabel qui est, comme vous le savez, dans le tout aussi beau comté de Deux-Montagnes. Pour ne pas brouiller les cartes, je ne veux pas du tout parler du découpage fait aux fins des élections municipales, mais plutôt du fait qui a été signalé par M. Côté que, dans le cinquième rapport, il est proposé de partager la municipalité de Mirabel entre deux comtés, ces deux comtés étant Deux-Montagnes et Prévost, si ma mémoire est fidèle.

Par ailleurs, M. Côté nous a dit qu'un des principes qui ont guidé les travaux, un des critères qui ont guidé les travaux de la commission, c'était justement de ne pas partager les municipalités entre deux ou plusieurs circonscriptions. Il arrive qu'en toute modestie je suis d'avis qu'il ne serait pas souhaitable de partager la municipalité de Mirabel entre deux comtés. Je me demande si M. Côté pourrait nous dire pourquoi dans ce cas-ci la

commission n'a pas suivi le critère qu'elle avait fixé.

M. Côté: Je pense que vous avez un très bon point, M. le député. Dans le cas de la ville de Mirabel, la raison est la suivante: C'est vrai que, dans la majorité des cas ou dans la plupart des cas, on s'est efforcé de ne pas couper une municipalité de quelque façon, mais de tenir compte des limites d'une municipalité. Dans le cas de la ville de Mirabel, c'est une municipalité qui est, à notre avis, d'une superficie tellement grande qu'il a fallu la partager en deux. La façon de le faire, cela a été de suivre la ligne de partage que présente l'autoroute du Nord. Mais vous avez raison de dire que cela va à l'encontre du principe que j'ai émis tout à l'heure. Dans ce cas-là, il nous a semblé qu'il fallait la partager. On ne voyait pas comment la garder dans un seul district.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Laval.

Commentaires des députés M. Jean-Noël Lavoie

M. Lavoie: M. le Président, j'aimerais faire quelques commentaires autant sur votre cinquième rapport que sur le quatrième et sur le sixième. (16 heures)

Je reconnais — et je pense que tous les membres de cette commission le reconnaissent — que ce n'est pas facile de bâtir une carte idéale. C'est relié sans doute au mode de scrutin. Si on veut respecter le critère d'une personne un vote, c'est sûr que ce serait peut-être la proportionnelle absolue qu'il faudrait prendre comme en Israël. C'est un vote. Il n'y a pas de circonscription. Le pays forme une seule circonscription. Il y a tant de votes d'exprimés et ce sont des scrutins de liste. Si un parti a 30% des votes à l'échelle du pays, il a 30% des députés. Si un autre a 15% des votes, les quinze premiers sur la liste de ce parti font partie du Parlement. On n'est pas prêt à adopter ce système. Ce n'est pas facile; on pourrait avoir quinze commissions comme la vôtre avec des membres aussi compétents dans chacune des quinze commissions qui pourraient faire une carte, et je pense qu'il n'y en a pas une qui arriverait avec la même carte. C'est aussi complexe que cela. C'est aussi difficile que cela. Un système parfait, il ne faut pas se leurrer, il n'en existe pas. Même une proportionnelle totale, une proportionnelle dosée, une proportionnelle régionale, une proportionnelle suivant le système D'Hondt — je pense que c'est le système de l'Allemagne de l'Ouest — n'amène pas, après une élection, un portrait véridique ou exact de la manière dont la population s'est exprimée aux élections.

Il s'agit, je pense bien, de trouver un moyen terme. Un reproche que je veux vous faire — il n'est pas malin — c'est que vous êtes peut-être liés, possiblement par la loi, par un système mathématique. Vous prenez le nombre d'électeurs au Québec et vous divisez cela par le nombre de comtés, et là, vous arrivez avec une moyenne. À partir de là, vous essayez d'avoir le moins de disparités possible. C'est une base qui est valable pour arriver à l'idéal d'une personne, un vote. C'est pour cela qu'on retrouve dans votre rapport V une moyenne assez identique dans toutes les régions. Dans le secteur de Montréal, vous avez une moyenne de 35 370 électeurs. Il faut donner les centaines, parce que c'est pas mal proche. Dans le secteur de Québec, 35 692; rive nord du Saint-Laurent, 33 052. J'en saute quelques-unes: rive sud du Saint-Laurent, 32 174. Vous arrivez avec une moyenne provinciale de 33 254.

Je pense que votre premier critère a sans doute été — vous me le direz si ce n'est pas cela — le critère mathématique pour arriver le plus possible à l'idéal d'une personne, un vote. La réalité est un peu autre chose. Vous êtes sur un côté de la table, vous êtes nos experts. Je pense bien que personne ne peut vous porter des accusations. Vous avez fait votre boulot au meilleur de votre connaissance. C'est sûr qu'il y avait des choses qui nous sautaient aux yeux. Entre autres, dans votre quatrième rapport, après l'élection de 1973, vous proposiez au Parlement l'addition de deux nouveaux comtés, de 110 à 112. Quelques années après, après les élections de 1976, vous nous proposez, au lieu de deux comtés additionnels, onze comtés additionnels, pour monter à 121. Encore votre critère mathématique. C'est une opinion personnelle, mais je crois qu'une personne, un vote, c'est un principe, mais on ne peut pas l'atteindre, de toute façon.

On vous a demandé, nous du côté libéral, de faire une simulation, de faire une pratique, un exercice avec 36 000 électeurs de base, au lieu de 32 000, tel que la loi actuelle vous ordonne de le faire, avec une variante de 25% en plus ou en moins, ou une simulation de 36 000, avec 25% de plus ou de moins. Aussi bien le dire tout de suite, pourquoi vous a-t-on demandé ça? C'est qu'on considère, nous, du moins, du Parti libéral, que notre Parlement a assez de députés, soit 110. Si on compare nos barèmes avec ceux des autres provinces canadiennes ou d'autres pays, c'est déjà un nombre fort suffisant, 110. Si on prend les critères de l'Ontario, entre autres, on devrait en avoir 98, je crois, si je ne me trompe pas, grosso modo. L'Ontario a neuf millions de population, et nous, près de six millions, grosso modo. On a un Parlement de 125 députés, si je me rappelle bien, en Ontario. Si on prend ce critère, on devrait avoir une centaine de députés.

Par contre, d'autres peuvent m'apporter d'autres exemples montrant qu'à l'Île-du-Prince-Édouard, au Nouveau-Brunswick ou en Nouvelle-Écosse, il en ont beaucoup trop. Où est le juste milieu?

Par contre, on peut aller ailleurs. Il faut étudier la carte avec notre compétence et notre constitution actuelle. Le Parlement du Québec, je pourrais dire, est un gouvernement, si je fais un parallèle avec les autres provinces, que je ne compare pas exactement aux autres provinces, parce

qu'on occupe de compétence que d'autres provinces désirent, préfèrent déléguer à Ottawa, comme le ministère du Revenu, entre autres, ou la taxation. D'autres provinces ne s'occupent pas d'immigration; ici, on s'en occupe. À cause de notre spécificité ici, au Québec, je dirais que c'est un gouvernement semi-souverain.

Mais, par contre, on n'est pas un gouvernement souverain; jusqu'à nouvel ordre, on ne l'est pas encore.

M. Bédard: ... la partie...

M. Lavoie: On ne l'est pas encore. La population se prononcera à ce sujet, etc., même si vous avez des intentions bien définies là-dessus.

Dans d'autres pays... Je pense bien que je n'ai pas les chiffres exacts, mais on peut prendre des comparaisons ailleurs. En France, entre autres, pays unitaire, il y a un seul Parlement et les députés s'occupent de toutes les compétences. Le Parlement s'occupe autant des affaires extérieures que de défense, etc. Ses pouvoirs sont illimités. La moyenne porte à faux là encore, parce qu'il y a, en France, des circonscriptions électorales qui ont 40 000 ou 45 000 électeurs et d'autres qui ont 100 000 et 125 000 électeurs. C'est un peu plus juste, peut-être, en Angleterre, où il y a moins de disproportion.

Je vous apporte ça pour vous dire que notre point de vue, à nous, c'est que... Ma première conclusion est la suivante: Dans notre constitution actuelle, dans notre pratique actuelle, dans notre coutume actuelle et suivant nos usages parlementaires et le rôle d'un député, moi, je n'accepte pas votre contrainte mathématique du cinquième rapport pour l'avoir vécue comme député depuis près de 20 ans.

Cette proportion mathématique est trop exacte. Vous allez me dire: Une personne, un vote. D'accord, mais je calcule que mon opinion est aussi valable, à savoir qu'il faut considérer les régions, les municipalités, le territoire, la densité de la population ou la non-densité de la population. Je vous donne un exemple choisi tout à fait au hasard.

Dans votre région de La Plaine, comme vous l'appelez, je trouve une disproportion, dans votre cinquième rapport. Nicolet-Yamaska, entre autres, a 33 000 électeurs, mais on me dit que c'est pas mal grand au point de vue territoire, avec beaucoup de municipalités et tout, et il y a Richelieu qui, je pense, est assez petit. Richelieu, ça doit être Sorel, ce coin-là. Vous n'avez que 600 électeurs de différence.

Voici d'autres exemples. Pour l'île de Montréal, dans votre cinquième rapport, vous arrivez avec une moyenne de 35 000 électeurs. Si on compare ça avec l'Outaouais, vous avez la même proportion de 35 000, mais un député de Saint-Jacques, de Maisonneuve, de Rosemont ou d'Outremont, à Montréal, a dix fois moins, non pas de préoccupations, mais de problèmes soumis par ses électeurs que le député d'Argenteuil, entre autres, qui peut avoir 30 ou 40 municipalités ou une quinzaine de commissions scolaires.

Votre barème a une base mathématique, mais c'est différent quand vous appliquez à Montréal une moyenne de 35 000 électeurs et 35 500 dans l'Outaouais ou 33 000 seulement dans la Mauricie où vous avez des comtés comme Laviolette, Maskinongé, Champlain, à ma connaissance, ou Berthier qui ont un territoire énorme. Or, vous arrivez à peu près à la même proportion d'électeurs que dans un comté de Montréal. À l'île Jésus, entre autres, on peut dire que c'est pratiquement tout urbanisé aujourd'hui. Vos cinq comtés dans l'île Jésus ont une moyenne de 30 000 qui est peut-être modifiée à 33 000 avec le dernier recensement. Je trouve que, si on compare avec la Côte-Nord, le Saguenay et Sept-Îles qui ont 34 000, ils ont plus d'électeurs dans des comtés de Saguenay et de Duplessis que les comtés de l'île Jésus où il y en a uniquement 30 000. Je ne sais pas, mon comté, le comté que vous proposez, va avoir à peu près un mille et demi de long par un mille de large.

Pourquoi est-ce qu'on vous a demandé cette simulation sur 36 000? Mon propos va s'en tenir à ça pour le moment: votre contrainte mathématique, je crois, est trop sévère ou trop respectée. C'est une opinion personnelle. Il y en a d'autres qui vont dire: II faut aspirer à cette moyenne ou il faut désirer une moyenne la plus juste possible. Je vous dis comme conclusion que, dans les comtés urbains, si on prend 36 000 de moyenne, ça donne 45 000 maximum et 25 000 dans un comté rural. D'après moi, c'est peut-être un déséquilibre. Peut-être que mes prémisses sont fausses, mais, dans les comtés urbains assez limités, vous devriez vous rapprocher le plus possible de 45 000, soit 42 000, 43 000, 44 000. De la manière dont on est payé, pas nécessairement avec nos salaires qui ne sont pas extraordinaires, mais avec le personnel d'appoint et les facilités qu'on a aujourd'hui, je vous dis qu'un député urbain peut facilement représenter 45 000 et même 50 000 électeurs. Vous devriez donc vous rapprocher dans les comtés urbains le plus possible de 45 000 et dans les comtés ruraux vous rapprocher le plus possible de 27 000 qui est le minimum, 27 000 ou 28 000.

L'étude très préliminaire que j'ai faite, c'est que, si on prenait la base de 36 000, il y aurait très peu de chambardements dans notre carte électorale actuelle qui a été à la base des élections de 1973 et de 1976. Dans votre rapport V je pense que vous touchez à 74 comtés au point de vue des limites et vous en créez onze nouveaux. Cela fait un énorme chambardement pour la population parce que les comtés existent d'abord pour la population et en second et en troisième lieu pour les députés. Mon étude me disait qu'il y avait à peu près 17 comtés où il y avait vraiment une disproportion. Il y en avait quatre sur l'île de Montréal qui dépassaient les normes de 40 000 et ce serait facile, à Montréal du moins, de garder le même nombre. Je pense qu'avec 36 000 vous gardez le même nombre. Il y a beaucoup moins de chambardements si vous changez les limites d'un comté urbain. Si vous ajoutez ou retranchez deux rues à Montréal, personne ne s'en rend compte et, parfois, le député ne s'en rend même pas compte, deux rues de plus ou deux rues de moins! Mais, quand vous

changez des paroisses et des municipalités dans le milieu rural, tout le monde s'en rend compte. Non seulement la population des comtés de Montréal n'est pas assez nombreuse, mais dans votre rapport V vous proposez deux nouveaux comtés dans l'île de Montréal. Dans l'île de Montréal, vous avez des comtés, dans votre rapport V, de 31 000 électeurs, de 33 000 électeurs, un paquet de 33 000 et de 34 000. Je trouve que ce n'est pas réaliste avec tout ce que ça représente. (16 h 15)

Dans Laval, un cas un peu spécial, il y en a trois actuellement, je pense qu'on pourrait en avoir un seul nouveau au lieu de deux. On pourrait en faire deux qui seraient saturés, qui ne bougeraient plus, une fois pour toutes, au sud de l'île, et en garder deux en réserve pour plus tard, pour en faire peut-être un cinquième ou un sixième s'il y a expansion. Sur la rive sud de Montréal, il y aurait sans doute lieu d'en créer un autre, en faisant un réaménagement sectoriel du sud de Montréal. Dans la région de Québec, je pense qu'il y a un réaménagement à faire. Il y a des comtés, à Québec, on le sait, actuellement, comme Taschereau et Jean-Talon, qui sont très peu populeux et il y en a d'autres qui sont très populeux, comme Chauveau et autres. On pourrait faire un réaménagement de la région de Québec. Dans les Laurentides également, il y a un problème. Mais pour le reste, je pense qu'il n'y aurait pas tellement de changement. Je pense qu'il y en aurait seulement deux qui seraient déficitaires dans les comtés ruraux. C'est un peu l'approche que je voulais vous soumettre pour le moment.

Le Président (M. Jolivet): M. Côté.

M. Côté: Juste deux brefs commentaires avant que vous désiriez, M. le député, avoir d'autres précisions. D'abord, je veux vous remercier de votre introduction à l'effet qu'il n'y a pas de système parfait. Cela nous rassure un peu parce qu'il est bien évident que dans ce domaine il n'y en a aucun. Et surtout, dresser la carte parfaite, je pense que c'est impossible. Mais, il y a un point que je voudrais souligner avec insistance, parce qu'il me semble très important à ce stade-ci, c'est que dans la rédaction du cinquième rapport, il est bien évident que la commission a senti qu'elle avait une contrainte juridique très claire à l'égard du critère numérique. Il faut se référer à l'article 9 de la loi qui nous régit où cette contrainte est très précise. Quand vous dites que vous nous adressez un doux reproche parce que nous nous sentons liés par la loi, je pense qu'on ne peut pas agir autrement.

M. Lavoie: On va lire l'article 9, si vous voulez.

M. Côté: Oui. "La commission doit, en appréciant le nombre des districts électoraux au Québec, et l'étendue de chacun d'eux, s'assurer que chaque district électoral comprend 32 000 électeurs et, à cette fin, elle devra tenir compte des facteurs de variation de la population; toutefois, elle peut admettre des districts électoraux dont le nombre des électeurs est supérieur ou inférieur à ce nombre d'au plus 25%, chaque fois qu'elle l'estime nécessaire en raison de la densité de la population"; ce qui fait donc une variation de 40 000.

M. Lavoie: De 24 000 à 40 000. On peut continuer aussi.

M. Côté: "La commission peut s'écarter des règles énoncées au premier alinéa pour des considérations exceptionnelles d'ordre démographique et géographique telles que la très faible densité de la population, le taux relatif de croissance de la population d'une région, son accessibilité, sa superficie, sa configuration".

Depuis le début de l'existence de la commission, ce deuxième paragraphe n'a trouvé son application que dans un cas, c'est le cas des Îles-de-la-Madeleine. Je dois vous dire... Pardon? Une des raisons qui ont motivé la commission — ce que j'ai compris des rapports antérieurs et du cinquième rapport — qui ont motivé la commission à agir de cette façon c'est que cela pourrait nous entraîner à avoir un très grand nombre de districts d'exception. Il faudrait essayer de tirer certaines conclusions. S'il y avait un grand nombre de districts d'exception, dans quelle situation serait-on placés, en regard du principe qui est énoncé au paragraphe premier, de 32 000 électeurs? Ce qui nous apparaît comme étant la règle générale, c'est le paragraphe 1er; ce qui apparaît l'exception, c'est le deuxième paragraphe de l'article 9. Si on avait un très grand nombre d'exceptions — à notre avis, les Îles-de-la-Madeleine, à cause de sa situation géographique, peut être justifiée — il nous semble — il est possible qu'on se trompe, c'est bien certain — que multiplier les districts d'exception ne serait pas, finalement, rendre service — si je peux exprimer cette opinion — à une carte électorale qui soit satisfaisante pour tout le monde.

Le Président (M. Jolivet): Mme la députée des Îles-de-la-Madeleine.

Mme LeBlanc-Bantey: Merci, M. le Président. J'avoue que je suis un peu surprise de voir avec quelle ardeur l'Opposition officielle...

M. Fontaine: On ne fait pas le tour de l'Opposition?

Le Président (M. Jolivet): Qu'est-ce qu'il y a? Excusez-moi, madame.

M. Fontaine: Est-ce que, habituellement, M. le Président, on ne demande pas des commentaires du côté de l'Opposition et ensuite on retourne du côté gouvernemental?

Le Président (M. Jolivet): Non. Compte tenu que tout le monde a droit de parole ici cet après-midi, je n'ai pas tenu compte de cette formule.

Cela ne me dérange pas de dire au député de Brome-Missisquoi qu'il peut intervenir après, mais...

M. Fontaine: C'est parce que le député de Brome-Missisquoi doit retourner en Chambre le plus rapidement possible.

Mme LeBlanc-Bantey: D'accord, je lui cède ma place. Je parlerai après.

Le Président (M. Jolivet): D'accord. M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Armand Russell

M. Russell: Merci, madame. M. le Président, je serai très bref d'ailleurs. Ce serait simplement pour vous dire que je déplore un peu l'effort qu'on fait et le peu de succès qu'on peut avoir.

J'ai vécu la révision de la carte électorale, en 1972, et je sais quel malaise se sont créé les commissaires pour tâcher d'arriver à un consensus pour établir ce qu'on vit actuellement. Je peux vous dire, pour avoir visité la province avant et depuis ce temps, qu'on a créé un joli chambardement, au point de vue administratif, en province. Je voudrais prendre comme comparaison des districts que je connais. Une chose qui est certaine, c'est qu'on ne pourra jamais arriver à nos fins, dans la province de Québec, quand on va tenter de comparer nos régions à des provinces comme l'Ontario; on va se comparer à l'Angleterre, on va se comparer à la France, c'est complètement impossible de le faire. À mon sens, il y a deux critères dont il faut tenir compte, l'étendue géographique et la densité de population. Il est impossible et impraticable de penser qu'on va pouvoir établir chaque comté par le nombre d'électeurs et arriver à un consensus acceptable.

Dans la province de Québec, on a un territoire très vaste et très peu populeux dans certaines régions; je pense à des comtés comme Abitibi-Est. Il faudrait qu'un commissaire se dirige vers cette région, qu'il pense qu'il devient député et essaie de rendre service aux électeurs de ce comté; il se rendra compte que c'est complètement ridicule à l'extrême. C'est un exemple. Je pense qu'on pourrait dire la même chose pour le comté de Duplessis, pour citer simplement ces deux-là. C'est la question de territoire.

Je pense qu'on devrait examiner ce qui semble un territoire naturel, indépendamment des densités de population, parce qu'aujourd'hui c'est nécessaire qu'un député rencontre ses électeurs, réponde à leurs besoins, à leurs désirs, rende service. C'est là à mon sens le rôle d'un député, surtout de connaître leurs problèmes. S'il veut bien les représenter en Chambre, je pense que c'est le rôle premier d'un député. Je suis convaincu que, dans ces comtés, c'est impossible de le faire.

Je voudrais retourner à une autre comparaison que je connais assez bien, la région des Cantons de l'Est. J'ai représenté le comté de

Shefford pendant 18 ans; avec les mêmes bornes qu'avant 1972, il y aurait aujourd'hui, probablement, 50 000 à 55 000 électeurs. Je peux vous dire, sans crainte de me tromper, que c'est un comté qui serait plus facile à représenter pour un député aujourd'hui, avec 55 000 électeurs, que le comté que je représente, avec 28 000 électeurs, à cause du territoire. Non seulement à cause du territoire, mais aussi le courant naturel des affaires d'un comté, qui est drôlement important.

Je jetais un coup d'oeil, rapidement, sur la nouvelle division qu'on vient de proposer. Il n'y a rien de plus ridicule au monde. Quand on connaît le territoire physique, c'est impensable. Imaginez-vous, quand vous parlez de Dunham, de Stanstead, où le député va-t-il établir son bureau? Vous frappez quatre comtés au point de vue civil; au point de vue des services de voirie, c'est la même chose, les affaires sociales, vous déchirez un comté. C'est impraticable au point de vue administratif. Je pense qu'on s'éloigne complètement d'une situation qu'on veut essayer de corriger. S'il faut que le législateur amende cette loi, je pense que la commission devrait demander au législateur de faire une carte électorale basée sur des faits réels qui soit homogène, acceptable, à l'intérieur de laquelle les députés vont pouvoir travailler avec un personnel convenable. Je suis d'accord avec le député de Laval pour le nombre de députés; 110, on est amplement en Chambre pour servir les électeurs de la province de Québec, j'en suis convaincu.

Je dis que la ville de Montréal, aussi bien que des comtés comme Shefford peuvent porter beaucoup plus d'électeurs, parce que c'est un territoire restreint, à cause de la ville de Granby qui se trouve à l'intérieur de ce comté. Naturellement, la population est plus élevée mais les services sont là, se tiennent ensemble et c'est beaucoup plus facile pour un député de desservir une population de 40 000. La ville de Granby présente 40 000 citoyens et, seulement dans le canton de Granby, il y en a 10 000, ce qui fait 30 000 électeurs dans un territoire de 7, 8 ou 10 milles carrés. C'est facile à desservir, un groupe de paroisses; quand même on enlèverait 15 ou 20 autres petites paroisses autour, c'est un comté facile à servir.

Pour toutes ces raisons, on pourrait en arriver à un consensus raisonnable. Je vous dis que je ne voudrais pas répéter ce qu'on a fait en 1972, je trouve que ce n'est pas nécessaire. Si on est des hommes raisonnables, bien mesurés, si on a dans l'idée l'intérêt des citoyens de la province qu'on veut servir, on va s'asseoir ensemble, les députés, on va amender cette loi si c'est nécessaire et on va vous expliquer un peu les régions. Je ne veux pas me mêler de la région du Nord, mais pour la région des Cantons de l'Est, je pourrais m'asseoir avec les commissaires et leur donner de bons conseils.

Si vous avez des doutes que je puisse le faire, je connais des officiers d'élection qui se feraient un plaisir de venir vous donner les lignes naturelles de chacun des comtés. Je pense qu'on peut se rapprocher de la réalité et faire en sorte d'avoir

quelque chose qui est fonctionnel, pratique, qui ne coûtera pas plus cher à administrer et qui va être beaucoup plus convenable que ce qu'on tente de faire actuellement. Je vous dis cela sous toute réserve et je mets cela au-dessus des personnalités. Je ne vise personne en particulier.

Je ne voudrais pas qu'on continue à se déchirer. Je connais la tâche que vous tentez de remplir actuellement. Ce n'est pas facile. Mais je pense que c'est votre rôle de tenter de demander au gouvernement, au législateur, d'amender la loi et de tenir compte de deux facteurs: le territoire et la densité de population.

Je suis d'accord pour que la ville de Montréal ait au moins 50 000 ou 55 000 électeurs, 20% ou 25% de plus ou moins. Je pense que les comtés ruraux, dans certains territoires, pourraient même aller en bas de 25 000 électeurs, et cela serait encore beaucoup trop comme territoire. C'est un critère dont on ne peut pas réellement tenir compte dans les comtés ruraux, surtout les comtés éloignés comme la Côte-Nord, l'Abitibi et même le Lac Saint-Jean, par rapport à la densité de la population.

Je pense qu'il faut choisir ces critères d'une façon raisonnable. Il faut bien les mesurer et penser au rôle qu'aura à remplir le député, indépendamment des gouvernements qu'il y aura en place. Il faut penser aux citoyens qui sont là, qui ont droit aux mêmes services de la part des députés, autant dans les comtés du nord que dans ceux des Cantons de l'Est et de la ville de Montréal.

M. Côté: Oui, M. le député, je ne peux faire autre chose que de prendre bonne note de vos remarques. Je pense que vous avez souligné, avec justesse d'ailleurs, que les dispositions de la loi actuelle qui nous régit, comme je l'ai exprimé depuis le début, nous imposent certaines limites. En fait, les propositions que vous faites devraient être transmises ou incorporées dans une nouvelle loi. En somme, le principe que vous exprimez, je pense qu'il se résume de la façon suivante: Est-ce qu'il doit ou peut y avoir ou non une certaine forme de zonage? Par exemple, dans une région donnée, la plus forte densité de population aurait un quotient d'électeurs plus élevé et d'autres secteurs de la province où la densité de population est plus faible devraient avoir un quotient différent.

Je prends tout simplement note de votre observation et je crois qu'en guise de réponse tout ce que je peux dire, c'est que c'est une question à caractère purement politique, puisque cela relève du rôle du législateur de modifier la loi selon la façon dont il le désirera.

Le Président (M. Jolivet): Mme la députée de Bonaventure... des Îles-de-la-Madeleine.

Des voix: Oh!

Mme Denise LeBlanc-Bantey Mme LeBlanc-Bantey: M. le Président, ne dire tout à l'heure que j'ai été surprise de voir quelle ardeur l'intervention que j'ai faite à l'Assemblée nationale la semaine dernière pour demander au gouvernement de préserver explicitement l'intégrité territoriale, si vous me permettez le terme, des Îles-de-la-Madeleine, avait soulevée dans les rangs de l'Opposition officielle. Je ne l'ai jamais vue défendre une de mes causes avec autant d'intérêt. J'espère que le ministre se trompe quand il laisse entendre que si l'Opposition officielle défend ma cause avec autant d'ardeur, c'est peut-être parce qu'elle a des intérêts à négocier par-dessous la table, qu'elle a d'autres comtés à préserver, à discuter ou à redécouper, etc. Je veux conserver assez de naïveté pour croire que ce serait faux, parce que ce serait, à mon avis, peut-être un peu trop cynique de tenir une population comme celle des Îles-de-la-Madeleine en otage pour essayer de négocier ou le principe de la loi, ou d'autre chose.

Ma question, pour le moment, est très simple. Vous avez amené vous-même...

Un autre commentaire avant de dire cela. Ce qui m'a le plus rassurée dans tout votre exposé — et vous comprendrez pourquoi — c'est que vous avez dit que c'était une hypothèse de travail. Ma question est la suivante.

M. Côté: Vous parlez de l'hypothèse de 36 000?

Mme LeBlanc-Bantey: L'hypothèse qu'on a entre les mains, de 36 000 électeurs.

M. Côté: C'est cela. D'accord.

Mme LeBlanc-Bantey: Ma question est la suivante. Vous avez admis vous-même que vous aviez gardé les Îles-de-la-Madeleine comme une exception. C'était le seul comté que vous aviez considéré, probablement à cause de caractères socio-économiques, géographiques, etc.....

M. Côté: Non. Je m'excuse de vous interrompre, madame.

Mme LeBlanc-Bantey: Pas dans l'hypothèse de 36 000, mais dans l'hypothèse de 32 000.

M. Côté: Oui, c'est cela.

Mme LeBlanc-Bantey: Les îles, donc, demeuraient une exception. Le ministre m'avait assurée de cela d'ailleurs. Les Madelinots étant méfiants de nature, on a quand même demandé au gouvernement de consacrer spécifiquement l'exception parce que nous ne voulions pas qu'éventuellement il nous arrive ce qui vient de m'arriver entre les mains, c'est-à-dire une hypothèse de travail où le comté des Îles-de-la-Madeleine subirait le même sort qu'il a déjà subi au fédéral, c'est-à-dire disparaître au profit d'un autre comté, celui de Bonaventure. (16 h 30)

J'ouvre une parenthèse pour vous dire qu'en termes de sympathie naturelle, en termes d'ac-

cointances, si vous voulez, si vous deviez rattacher les Îles à un autre comté, ce comté se sentirait davantage identifié au comté de Verdun ou à un autre comté de Montréal qu'au comté de Bonaventure. La situation sociologique aux Îles est comme cela. C'est pour vous dire que ce n'est pas aussi simple que cela en a l'air, même quand vous parlez de découpage régional, si vous voulez.

La question est celle-ci, je le répète: Pourquoi, si dans l'hypothèse de 32 000 électeurs, vous vous étiez basés sur certaines raisons pour consacrer les Îles comme une exception, avez-vous changé d'idée dans l'hypothèse de 36 000 électeurs?

M. Côté: Je pense que je l'ai souligné tout à l'heure. Je vais le répéter, madame. C'est que l'hypothèse de travail de 36 000 électeurs a été faite à partir de la demande qui nous a été adressée par les membres de la commission, le 6 décembre 1978. Nous avons compris à ce moment-là, en relisant les textes du journal des Débats — j'ai dit au député de Roberval tout à l'heure que nous l'avons peut-être mal comprise — que l'hypothèse de travail sur laquelle on nous demandait de travailler était la suivante: d'envisager qu'il y ait un quotient de 36 000 électeurs avec une marge de 25% en plus et en moins; deuxièmement, qu'on ne dépasse pas le nombre limite de 112 districts électoraux. Il n'a pas été fait mention — c'est ce que j'ai mentionné tout à l'heure — qu'on puisse conserver des districts d'exception.

En partant de l'idée qu'il n'y a aucune exception dans l'hypothèse qu'on soumet, pour en arriver à découper la province avec le quotient de 36 000 électeurs, à notre avis, il n'y avait pas d'autre façon que d'englober les Îles-de-la-Madeleine dans un autre district électoral. Si on nous avait demandé de tenir compte d'exceptions, à ce moment-là, je crois qu'on serait probablement arrivé à la conclusion, évidemment avec un autre découpage que celui qui est soumis, de conserver encore l'hypothèse d'exception pour les Îles-de-la-Madeleine, puisque cela a été une constante du travail de la commission depuis le début.

Mme LeBlanc-Bantey: Quels étaient les arguments qui, depuis le début du travail de la commission, vous faisaient considérer les Îles-de-la-Madeleine comme une exception?

M. Côté: Depuis le début, c'est l'éloignement des Îles-de-la-Madeleine, son caractère d'éloignement du reste...

Mme LeBlanc-Bantey: Des centres du Québec.

M. Côté: ... du Québec, son caractère avant tout géographique.

Mme LeBlanc-Bantey: Si je comprends bien, si le gouvernement décidait de consacrer explicitement l'exception des Îles-de-la-Madeleine, vous n'y auriez pas d'objection?

M. Côté: Si je m'en réfère aux précédents rapports de la commission, si la commission veut être constante avec elle-même et tenir compte de la jurisprudence qu'elle a établie à cet égard, je ne crois pas qu'il y aurait objection à maintenir cette tradition, mais je dois vous répéter que seul le critère numérique de 36 000 électeurs est intervenu dans notre travail.

Mme LeBlanc-Bantey: Merci.

M. Lavoie: M. le Président, brièvement, sur cette question, je voudrais faire une courte intervention. Lorsque nous vous avons demandé, en décembre 1978, de faire une simulation ou un exercice avec 36 000 électeurs comme base, au lieu de 32 000, je peux déclarer personnellement, pour avoir suggéré cet exercice-là, que, dans notre esprit, nous avions toujours considéré les Îles-de-la-Madeleine comme une exception restant de beaucoup en bas de la moyenne. Je pense que vous avez 8000 ou 9000 électeurs. Dans notre esprit, on n'a jamais voulu l'intégration des Îles-de-la-Madeleine avec quelque autre comté au Québec.

Mme LeBlanc-Bantey: On devrait dire qu'il y a quand même 1000 électeurs de plus depuis la dernière élection. La natalité va bien chez nous, n'est-ce pas?

M. Lavoie: Oui!

Le Président (M. Jolivet): M.Côté.

M. Côté: Seulement une information supplémentaire, si vous le permettez. J'ai bien précisé tout à l'heure que c'est une hypothèse de travail. On s'est posé la question à un moment donné: Si on gardait l'exception des Îles-de-la-Madeleine? Il y a peut-être une chose qu'on doit vous dire tout de suite, c'est qu'en gardant les Îles-de-la-Madeleine comme un district d'exception, une des conséquences, c'est que tous les districts de la rive sud auraient été modifiés considérablement. Je pense qu'il faut vous le souligner. À cause de la faible densité de population, tous les districts de la rive sud — au complet, je pense que cela regroupe 32 districts électoraux — auraient été modifiés considérablement.

M. Lavoie: Je ne comprends pas. Je vois des comtés comme...

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Laval, je voudrais...

M. Lavoie: Très brièvement, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Oui, c'est parce qu'il y en a d'autres qui ont demandé la parole, M. le député.

M. Lavoie: Très bien, je n'abuserai pas. Le Président (M. Jolivet): D'accord.

M. Lavoie: Je vois votre réaction en chaîne. Les Îles-de-la-Madeleine auraient pu rester tout à fait indépendantes. La majorité de ces comtés que vous appelez de la rive sud, Beauce-Nord, Beauce-Sud, etc., aurait eu le critère de base de 27 000. Cela ne changeait pas grand-chose dans tous ces comtés de la rive sud. Il y en a deux qui auraient été déficitaires. Si on voulait arriver à 110 comtés — votre moyenne actuellement à Montréal est de 35 000 — cela aurait été facile à Montréal d'augmenter la moyenne à 38 000 ou à 42 000, et vous seriez même arrivés à beaucoup moins que 110 comtés, à mon point de vue. Vous auriez pu arriver avec 105 ou 107 comtés. Dans l'île de Montréal, vous auriez eu peut-être comme moyenne 42 000 ou 43 000, tout en laissant comme moyenne dans les comtés ruraux 29 000, 30 000 ou 31 000, tel que cela existe actuellement.

Le Président (M. Jolivet): M. Côté.

M. Côté: M. le député de Laval, je peux simplement prendre note de vos commentaires. Il y aurait probablement lieu de revoir, peut-être avec plus de détails et plus de précision, l'hypothèse de 36 000 qui est avancée, parce qu'une des règles qu'on a essayé de suivre, c'est de ne pas dépasser le critère. Quand on détermine 36 000, on a un maximum de 45 000 et un minimum de 27 000. Dans le cas des districts électoraux de la rive sud, la majorité des districts est plus près du minimum. Ce que je veux vous signaler tout simplement, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, c'est qu'il y a d'autres solutions possibles, mais une des choses qu'on a essayé de faire dans l'hypothèse de 36 000 — oublions seulement pour un moment, si vous permettez, le cas des Îles — c'est de chambarder le moins possible les limites des districts électoraux actuels. Il a fallu le faire, mais c'est le moins possible.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Vanier.

Mme LeBlanc-Bantey: Je m'excuse, M. le Président, mais je n'ai pas compris le raisonnement de M. Côté. Ou les Îles sont une exception ou elles n'en sont pas une. Elles ne sont rattachées ni de près ni de loin à aucune autre circonscription électorale. Je ne comprends pas votre raisonnement qui veut qu'en gardant les Îles comme une exception, cela modifie le découpage électoral de certains comtés de la rive sud. Honnêtement, c'est peut-être parce que je n'ai pas suivi les travaux de la commission que je ne comprends pas comment vous en arrivez à un tel raisonnement.

M. Côté: C'est parce que le quotient passant de 32 000 à 36 000, quand on l'applique sur la rive sud, on touche à 32 districts électoraux. Si on exclut les Îles-de-la-Madeleine, on exclut 8000 électeurs qu'on peut inclure dans le chiffre de 27 000, par exemple. Si on exclut les Îles-de-la-Madeleine, il faut qu'on répartisse 8000 électeurs différemment sur les 32 autres districts électoraux. À ce moment, cela a un effet d'entraînement, un effet de conséquence, un effet à chaîne qui est considérable. C'est tout ce que je mentionne.

Mme LeBlanc-Bantey: La meilleure solution, quand on fait une carte électorale, on devrait oublier les Îles complètement, ne pas du tout les calculer en fonction des électeurs des autres régions et répartir les comtés en fonction des électeurs de la région.

M. Côté: C'est juste.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Vanier.

M. Jean-François Bertrand

M. Bertrand: Merci, M. le Président. J'ai l'impression qu'il y a un certain nombre d'interventions qui ont été faites par l'Opposition officielle à l'endroit de la commission, qui étaient carrément des demandes d'interprétation ou d'opinions politiques sur la base d'un projet de loi qu'on aura à étudier à compter de demain en commission parlementaire.

M. Lavoie: Correction, c'est le projet de loi 9 demain.

Le Président (M. Jolivet): Allez!

M. Bertrand: Le projet de loi 10 un peu plus tard, qu'on aura à étudier, de toute façon, en commission parlementaire. On est en train un peu de vous faire reproche d'avoir obéi à la loi qui a été votée par les législateurs, comme si vous aviez à faire autre chose que d'administrer la loi qu'on vous remet et avec laquelle vous devez par la suite définir la délimitation des circonscriptions électorales. Le député de Laval et ses collègues devraient peut-être attendre qu'on soit rendu à cette étape de nos travaux en commission parlementaire où justement, en jouant notre rôle d'élus politiques, nous aurons à définir les termes de la loi que, par la suite, une commission indépendante sera appelée à appliquer en délimitant les circonscriptions électorales. Je pense, au-delà même de cette discussion qui est éminemment politique, que, dans le fond, vous avez, dans le cadre du cinquième rapport et maintenant de ce cinquième rapport, annexe A, si on veut, sur la base d'un quotient de 36 000 électeurs, vous avez simplement fait ce que la commission vous avait demandé de faire.

Vous avez même inclus les Îles-de-la-Madeleine, parce que la commission ne vous a pas demandé de les exclure. Donc, vous avez obéi au mandat même qui vous a été donné, et je pense que personne ne doit vous en faire un reproche.

Mais, cela étant dit, je pense que votre proposition d'une carte qui aurait comme quotient 36 000 électeurs vient de constituer, à toutes fins utiles, une espèce de pelure de banane sur

laquelle l'Opposition elle-même va glisser et une pelure de banane qu'elle s'est elle-même servie.

M. Lavoie: Pourquoi de la petite politique? On discute entre grandes personnes ici.

M. Bertrand: Vous parlerez quand ce sera votre tour, vous, le député de Laval.

M. Lavoie: On a l'impression que c'est un Parlement-école quand vous parlez.

Le Président (M. Lefebvre): Les membres s'adressent à la présidence, s'il vous plaît.

M. Bertrand: D'accord.

M. Lavoie: II faut qu'il fasse de la politique partout, de la petite politique partout.

Le Président (M. Lefebvre): À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre!

M. Bertrand: Cela va, à part ça?

M. Paquette: Bon! Qu'est-ce que vous faites, là?

M. Bertrand: Cela va bien, à part ça, M. le député de Laval?

Le Président (M. Lefebvre): M. le député de Vanier, s'il vous plaît!

M. Bertrand: M. le Président, ce que j'étais en train de dire, c'est qu'on a soumis, à la Commission de réforme des districts électoraux, une hypothèse de 36 000, dont le résultat est exactement celui que l'Opposition officielle a tenté, à un moment donné, de décrier en disant qu'il fallait faire attention, parce qu'il y a des comtés, au Québec, où les députés ont des responsabilités considérables; ce sont les comtés ruraux, c'est-à-dire les comtés à territoire très grand, mais à faible densité de population, mais où il y a beaucoup de municipalités, il y a beaucoup de variété dans les problèmes. Je pense que le député de Nicolet-Yamaska, qui est député de ce genre de comté, sait de quoi je parle. Je pense que j'ai des collègues ici... Le député de Frontenac, le député de Matapédia, et d'autres sont des députés qui, justement, quand ils voient arriver l'hypothèse des 36 000 électeurs, se rappellent que l'Opposition nous disait: II faut faire attention pour ne pas davantage grossir nos comtés, élargir nos frontières, parce qu'on a déjà suffisamment de problèmes dont on doit s'occuper avec la carte existante. Comment se fait-il que, tout à coup, avec l'hypothèse des 36 000, on se rend compte que nos comtés prennent une mesure sans bon sens par rapport aux types de problèmes qu'on a à vivre et par rapport à la population et aux municipalités qu'on a?

Donc, l'hypothèse de 36 000 vient un peu, comment dirais-je? péter à la face même de l'Opposition officielle. On voulait régler le problème des députés ruraux qui sont déjà suffisamment achalandés avec la circonscription qu'ils ont, le nombre de municipalités et tout. On se voit offrir une carte électorale qui, à cause de ce quotient de 36 000 — vous aviez à l'appliquer comme tel — fait justement que, si on ne veut pas augmenter le nombre de circonscriptions électorales et maintenir la proportion moins 25% ou plus 25%, on est forcément obligé, dans certains cas, d'agrandir certaines circonscriptions rurales.

Or, je pense que ce principe est un principe mauvais, qui consisterait, à la limite, à faire en sorte que les circonscriptions rurales, qui sont déjà suffisamment grandes et qui ont déjà suffisamment de travail dont elles doivent s'occuper, soient davantage élargies. Le quotient de 36 000, avec plus ou moins 25%, a comme effet direct d'entraîner justement l'agrandissement de ces circonscriptions rurales.

Cela, c'est la première chose et je pense qu'il fallait que ce soit dit justement pour que l'Opposition officielle réalise que, quand on monte la moyenne des électeurs par comté, on doit faire face à ce genre de problème, qui était justement le genre de problème qu'ils voulaient éviter.

Deuxièmement, je pense qu'il y a un principe qui doit être réaffirmé et qui est fondamental. C'est d'arriver à faire en sorte que chaque électeur ait un droit égal en ce qui concerne son choix démocratique au moment d'une élection.

À la limite, si on voulait appliquer ce principe dans l'absolu théorique, ça voudrait dire que toutes les circonscriptions du Québec devraient avoir, par exemple, 32 000 partout, ou 36 000 électeurs, si c'était le quotient qu'on retenait. À la limite, si on voulait que chaque électeur ait un droit égal sur le plan électoral, il faudrait qu'on ait exactement le même nombre d'électeurs partout.

Déjà, la loi admet, comment dirais-je? jusqu'à un certain point, qu'il puisse y avoir une distorsion à ce principe d'égalité de l'ensemble des citoyens, en admettant que des comtés vont se rendre jusqu'à plus 25%, donc 40 000 dans la loi actuelle, ou moins 25%, soit 24 000. Même si, en théorie, j'avoue que je préférerais, quant à moi, qu'on puisse finalement arriver — mais c'est un absolu théorique qui m'apparaît irréaliste — à ce que toutes les circonscriptions aient 32 000 électeurs, justement à cause de ce travail des députés dans leur circonscription, tenant compte des différences qui existent entre le milieu rural et le milieu urbain et du type de travail qu'un député est amené à remplir dans un comté rural et dans un comté urbain, je pense que le législateur, en 1972, quand la loi a été adoptée — et là, M. le député de Laval, je rends honneur à l'Opposition officielle; vous voyez qu'on peut faire de la petite politique même en vous flattant, à l'occasion — a bien fait de prévoir que, justement pour satisfaire à ces exigences de travail supplémentaire dans les circonscriptions rurales, de travail différent, de grandeur des distances à parcourir, on ait des circonscriptions qui puissent s'écarter de la moyenne générale à moins 25%, en mettant justement une

limite, parce que je pense qu'aller à 40%, 50% ou 60%, c'est tomber dans le ridicule. Mais cela apparaissait raisonnable. (16 h 45)

Les responsables de la réforme des districts électoraux à l'époque — c'étaient vous — avaient fait attention justement pour qu'on situe entre 24 000 et 32 000 électeurs ce genre de circonscriptions où les problèmes sont différents, où les distances sont plus grandes, où la population est certainement moins dense, mais qui apportent peut-être au député un supplément de travail à cause même des distances, des problèmes et du nombre de municipalités. C'était, je pense, une façon tout à fait intelligente d'appliquer la loi dans son esprit, de faire que ces municipalités soient entre 24 000 et 32 000.

La même chose dans le sens inverse. Vous avez découpé une carte électorale à l'époque qui faisait que les circonscriptions urbaines se retrouvaient entre 32 000 et 40 000, ce qui est tout à fait normal à mon point de vue et qui correspond tout à fait à l'esprit de la loi qui voulait que dans ces circonscriptions où les distances sont nettement moins grandes, où les problèmes sont différents, le député ait un accès peut-être plus facile à l'ensemble de ses citoyens parce qu'ils ne sont quand même pas très éloignés de son bureau de comté. C'était tout à fait normal de faire que la carte électorale respecte ce type de principe.

Mais — c'est là que le danger arrive — dès lors qu'on accepterait de dire — c'est un peu ce qu'on nous sert dans l'Opposition officielle — dès lors qu'on nous dit: Oui, mais finalement, acceptons que la règle d'exception puisse être élargie et acceptons que des comtés urbains puissent comprendre 50 000, 55 000 et 60 000 électeurs ou qu'un comté rural puisse en comprendre 15 000, 20 000 ou 22 000, moi, je dis qu'à ce moment-là, justement, on sombre dans le ridicule parce qu'on retombe à l'époque où, avant justement la réforme de 1972, on avait des comtés... Je me rappelle le comté de Missisquoi, de mon propre père, qui avait 12 000 électeurs, Bagot qui avait 8000 électeurs, enfin tous les comtés protégés des Cantons de l'Est, les Îles-de-la-Madeleine, évidemment, mais on avait à côté de ça des comtés comme Sherbrooke avec 60 000, 65 000, 75 000 électeurs, des comtés de Montréal avec 75 000, 80 000 et 85 000 électeurs. Cela a donné quoi? Cela a donné une élection comme 1966 où avec 40% du vote — je me le rappelle très bien — l'Union Nationale avait pris le pouvoir, alors que les libéraux avaient 47% du vote. Est-ce qu'on peut appeler ça une carte électorale qui donne le droit le plus égal possible à chaque citoyen d'être représenté, alors qu'on obtient un pourcentage inférieur et qu'on est au pouvoir et qu'avec un pourcentage de vote supérieur on est dans l'Opposition? C'est sans doute par suite de cette analyse tout à fait juste des distorsions qui existaient dans la représentation à cause de la carte électorale, que l'Opposition officielle d'aujourd'hui, qui a été au pouvoir en 1970, a cru bon de modifier une telle carte électorale, sans doute pour ne pas revivre l'expérience vécue en 1966 et qui, effectivement, n'était pas, je pense, tout à fait correcte à l'époque.

Elle a corrigé la situation. C'est elle qui a introduit la notion d'une moyenne d'électeurs. C'est elle qui a introduit la notion d'un maximum de 25% ou d'un minimum de 25%, ce qui m'apparaissait alors tout à fait convenable, et je doute que l'Opposition de l'époque ait voté contre un tel principe. Si ma mémoire est bonne...

M. Lavoie: M. le Président, est-ce que je pourrais demander la permission au député de Vanier de poser une question?

M. Bertrand: À la fin, d'accord?

Alors, ce principe-là m'apparaissait tout à fait convenable et c'est celui-ci que nous tentons de maintenir aujourd'hui. C'est sur la base du même principe que vous avez préparé une hypothèse de travail sur le quotient de 36 000 électeurs. Je dis une chose, c'est que autant vous avez fait votre travail au moment du cinquième rapport et au moment du rapport actuel qu'on vous a demandé de soumettre par suite du mandat qui vous a été donné par la commission de l'Assemblée nationale, autant je dis que l'Opposition, dans ce contexte-là, est malvenue de juger le travail que vous avez fait alors que c'est sur la base même du mandat qui vous avait été donné que vous avez préparé ce genre de délimitation des circonscriptions électorales. Mais là où j'ai des craintes supplémentaires — c'est là qu'on va y revenir en commission parlementaire au moment de l'étude du projet de loi no 10 — c'est au moment où justement on veut quitter l'esprit des principes qui avaient été contenus, qui avaient été émis dans la loi de 1972, qui se référaient à une moyenne, d'abord, et, deuxièmement, à un écart maximal ou minimal pour justement s'assurer qu'il n'y aura pas des situations absurdes ou ridicules.

Au moment où on sent qu'il se prépare une espèce de bataille pour faire en sorte qu'on arrive à des exceptions qui puissent presque devenir la règle, je me dis: Quel genre de représentation aurons-nous demain et quel genre de garantie et d'assurance auront les citoyens qu'ils peuvent justement vivre à l'intérieur d'une loi qui leur assure le maximum de justice au niveau de la représentation? Dans ce contexte, je dis que la Commission de la réforme des districts électoraux n'a fait, finalement, que le travail que la loi l'invitait à faire à cause des définitions mêmes qui y étaient contenues. Le mandat qu'elle avait reçu de la commission elle l'a appliqué sur la base qui a été donnée par cette commission et pas autrement. Si nous, élus politiques, membres de la commission parlementaire, qui avons la responsabilité de définir et de décrire les termes du mandat que nous lui donnerons comme future commission indépendante, nous n'avons pas ici la prudence, si nous ne prenons pas nos responsabilités quant à la définition des termes mêmes du mandat qu'elle aura à exécuter, je dis que c'est nous qui errons et non pas la Commission de la réforme des districts électoraux.

Dans ce contexte-là, M. le Président, je pense que le travail qui a été fait par la commission jusqu'à maintenant est tout à fait correct sur le plan des principes, même si évidemment ces gens-là sont très ouverts à une discussion sur la façon de procéder et ils l'ont dit eux-mêmes. Il y a huit hypothèses, dix hypothèses, quinze hypothèses, cinquante hypothèses de découpage d'une carte électorale. Ce qui m'intéressait, c'était surtout d'émettre le principe qu'ils ont fait le travail que la commission parlementaire leur demandait de faire et que c'est à nous et non pas à eux de définir les termes politiques, les principes politiques auxquels ils doivent être assujettis à l'avenir. Ce sera le travail de la commission parlementaire une fois que nous entreprendrons l'étude du projet de loi no 10.

Le Président (M. Jolivet): M. Côté.

M. Lavoie: Le député m'a permis une question.

Le Président (M. Jolivet): C'est parce que je voulais voir... D'accord, M. le député de Laval.

M. Bertrand: Même si vous n'êtes pas bien "smart", je vais vous en permettre une quand même.

M. Lavoie: Vous, vous êtes trop "smart". Vous êtes chanceux!

Le Président (M. Jolivet): Allez, posez la question.

M. Lavoie: Lorsque vous parlez de disproportion et tout, êtes-vous au courant qu'on a fait un exercice, nous aussi, et réalisez-vous qu'aux dernières élections où, avec 41% des voix au Québec, vous avez eu 71 sièges, soit 65% des sièges, si on avait eu le rapport V tel que soumis, avec une personne un vote, avec 41% des voix, vous auriez eu 82 sièges, soit 68%? C'est pour vous dire que l'idéal, ce n'est pas facile à atteindre, parce que, avec le rapport V, il y aurait encore plus de disproportion qu'on n'en a connu en 1976.

M. Bertrand: Admettez-vous une chose, M. le député de Laval — je vous donne ma réponse sous forme de question — c'est que les 65% des sièges qui ont été obtenus en 1976 l'ont été sur la base de la loi de la réforme de la carte électorale qui avait été votée par ce Parlement et que c'est sous l'empire de la même loi votée par votre administration que nous obtiendrions, dans le contexte actuel, 81 sièges? Admettez-vous que c'est sur le même principe de carte électorale avec la même moyenne et le même écart de plus ou moins 25%?

M. Lavoie: Non.

M. Bertrand: Je m'excuse, c'est parce que vous n'avez pas exactement compris le sens de votre loi et l'application de la loi telle qu'elle doit être faite normalement si on respecte le maximum de 40 000 et le minimum de 24 000. S'ils ont préparé le cinquième rapport, c'est parce qu'il y avait des comtés qui dépassaient 40 000 et d'autres qui étaient en dessous de 24 000. S'ils voulaient respecter la loi, forcément on arrivait à une représentation qui aurait été différente avec l'ajout d'un certain nombre de comtés et, bien sûr, le Parti québécois aurait obtenu à ce moment-là 81 sièges. C'est très clair, mais c'est sous l'empire de la loi existante et pas sous l'empire d'une espèce de discrimination qui aurait existé.

Le Président (M. Jolivet): M. Côté.

M. Côté: Je voudrais juste souligner, M. le Président...

M. Bédard: Est-ce que je pourrais faire une remarque, M. le Président? Juste une petite remarque au député de Laval. Si son calcul l'amène à nous dire que le cinquième rapport aurait donné 82 sièges au Parti québécois par rapport aux autres partis, je pense que vous devez tirer la conclusion que, si nous apportons une réforme, ce n'est pas par calcul électoral. En effet, si la réforme n'était guidée que par un calcul électoral, nous aurions essayé de vous imposer le cinquième rapport en nous cachant derrière l'indépendance de la commission. Au contraire...

M. Lavoie: Vous auriez pu essayer.

M. Bédard: Vous devez, au moins, nous savoir gré de ne pas avoir essayé.

M. Lavoie: Quelle garantie avons-nous?

M. Bédard: Je pense qu'on est capable... Vous parlez tout le temps. Laissez parler les autres. Si vous voulez parler tout seul, parlez tout seul.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Laval.

M. Lavoie: J'ai appris cela de M. Derome, de Radio-Canada.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Bédard: Tout ce que je vous dis, vous le savez très bien, vous l'avez compris et c'est pour ça que vous voulez intervenir, si vos calculs sont bons et que le cinquième rapport aurait donné 82 députés au Parti québécois, je pense que vous devez admettre que ce n'est pas par calcul électoral que nous n'acceptons pas le cinquième rapport. C'est simplement que la loi qui est présentement devant la Chambre n'a qu'un souci c'est de trouver le moyen qu'au cours d'une élection la volonté populaire soit mieux respectée qu'elle ne l'a été dans le passé.

Le Président (M. Jolivet): M. Côté... Une voix: M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): Je ne voudrais pas que ça vienne à ce niveau, pour le moment. Vous allez avoir la possibilité de parler tout à l'heure, votre nom est sur la liste. M. Côté.

M. Côté: Seulement une très brève remarque, M. le Président. Je pense que la discussion qui a lieu présentement nous démontre à l'évidence que c'est un travail fort complexe que l'établissement d'une carte électorale. En ce qui concerne le devoir de la commission, je pense, et c'est l'idée également des membres de la commission, qu'il est bien évident que nous avons un mandat à accomplir qui est défini dans une loi et que nous devons nous efforcer, le plus possible, de réaliser ce mandat en conformité avec les dispositions d'une loi.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Rosemont.

M. Gilbert Paquette

M. Paquette: M. le Président, je trouve cette commission fort instructive, parce qu'on voit déjà commencer le débat qu'on pourrait avoir si nous n'avions pas, dans ce projet de loi que nous allons discuter demain, le principe d'une commission indépendante. Déjà, on commence à parler des avantages que tel ou tel parti pourrait retirer et chaque député s'inquiète de sa circonscription. Il y a des préoccupations normales là-dedans, il y a des principes à dégager. Ma position, c'est qu'on devrait être assez intelligent pour les mettre dans la loi. Premièrement, la question du nombre d'électeurs. On a un projet de 36 000 électeurs par comté, en moyenne. Cela démontre bien qu'une bonne partie des débats qu'on a faits à l'Assemblée nationale étaient inutiles, parce qu'on voit qu'il est possible de maintenir le nombre de députés actuels à l'Assemblée nationale, si tel est l'objectif, tout en déplaçant probablement moins d'électeurs.

Là, tous les reproches qu'on a faits à ce projet de carte, jusqu'à maintenant, qui sont justifiés, à mon avis, c'est qu'on n'a pas tenu compte de la densité de la population. D'ailleurs, M. Côté nous l'a dit tantôt, ce n'est pas dans la loi, on n'en a pas tenu compte. Si vous voulez qu'on en tienne compte, mettez-le dans la loi, on va en tenir compte. Simplement pour donner un exemple pour appuyer ce que disaient les députés de l'Opposition, le comté de Matane-Matapédia a 41 376 électeurs avec 60 municipalités, comparativement au comté d'Outremont qui a 35 000 électeurs avec une seule municipalité. Il est bien sûr que la carte qui nous est proposée n'a pas été proposée en tenant compte de la densité de la population; c'est bien évident.

Maintenant, cela ne veut pas dire qu'on ne pourrait pas en faire une qui ne tienne pas compte de la densité de la population et ça ne veut pas dire non plus qu'on ait besoin de fourrer les députés là-dedans pour en faire une qui tienne compte de la densité de la population. Je voudrais mettre ça bien clair, parce que je ne voudrais pas que l'Opposition se serve de cette carte, où carrément les gens qui l'ont faite n'ont pas tenu compte du critère de la densité, pour dire: II faut laisser ça aux députés. Je pense qu'il ne faut pas laisser ça aux députés, la confection de la carte, essentiellement.

Cela étant dit, je vais vous poser quelques questions, M. Côté. On a combien d'électeurs déplacés avec le projet à 36 000, et on a en a combien en tout avec le projet à 32 000?

M. Côté: Si vous me permettez un moment de recherche, je pense que j'ai la réponse sous la main.

M. Paquette: Je vais continuer, si cela demande un certain temps, je pourrais poser mes autres questions.

Le Président (M. Jolivet): M. Côté? Donc, M. le député de Rosemont, continuez vos questions.

M. Côté: Je vais faire la recherche et je vais revenir, je vais prendre note de votre autre question.

M. Paquette: D'accord, je comprends que cela puisse demander un certain temps. (17 heures)

M. Côté: J'ai l'impression qu'on a le chiffre sous la main, mais il faut que je le retrouve.

M. Paquette: Oui, on ne peut pas trouver cela nécessairement comme cela.

L'autre question que j'ai à poser est d'un autre ordre. C'est une préoccupation de cohérence administrative. Vous vous basez, pour élaborer votre projet de découpage, sur six régions. D'autre part, tout l'appareil gouvernemental — c'est vrai qu'il y a des différences mineures d'un ministère à l'autre — fonctionne suivant treize régions administratives. Cela peut poser des problèmes à un moment donné. On n'est quand même pas pour refaire la structure gouvernementale chaque fois qu'il y a un changement de carte, si on doit en faire une à tous les quatre ans. D'autre part, on ne voudrait pas non plus qu'un comté soit à cheval sur deux régions administratives, ce qui vient multiplier encore une fois le travail du député.

Je pense que l'objectif qu'on doit avoir dans toute cette carte, c'est de donner la possibilité, la plus équitable possible, à tous les députés, de jouer tous les aspects de leur rôle, à la fois être au service de leurs électeurs, de jouer le rôle de législateurs, de faire des débats politiques. On se rend compte que, même actuellement, il y a quasiment deux types de députés, les députés où il y a une large superficie, où il y a plusieurs municipalités...

Je pense qu'il ne faudrait pas compliquer le problème en faisant chevaucher un comté sur plus d'une région administrative.

Est-ce que, dans le projet que vous nous présentez, il y a de tels comtés qui chevauchent deux régions administratives?

M. Côté: Oui, effectivement, les régions administratives sont venues s'ajouter. Autrefois, les régions administratives étaient plutôt calquées sur les régions de la carte électorale. Avec le temps, les régions administratives ont été modifiées. Le début de réponse que je peux vous donner à cet égard, c'est que je crois qu'il peut être possible d'envisager l'établissement d'une carte électorale en tenant compte davantage des régions administratives.

M. Paquette: Est-ce que vous évaluez que les régions administratives sont relativement cohérentes sur le plan socio-économique actuellement?

M. Côté: Oui, et ce que je vous donne est une impression que j'envisage comme une hypothèse de travail. Il nous apparaît que les régions administratives, dans la bonne partie des cas, tiennent compte en particulier des pôles d'attraction. C'est un des éléments qui, pour un district électoral, sont importants.

M. Paquette: Et si le législateur vous faisait l'obligation, plus ou moins contraignante, qui pourrait être souple aussi, de procéder en fonction des régions administratives — je parle en mon nom personnel, on ne s'est pas consultés avant, ce sont des idées que je lance comme cela — si on vous disait: Vous allez procéder en fonction des treize régions administratives, c'est-à-dire que vous soyez obligé de respecter les frontières des régions administratives, et, à l'intérieur de chacune, les autres critères peuvent s'appliquer, est-ce que ce serait une contrainte insurmontable?

Je constate que, dans votre rapport, vous fonctionnez avec six régions. Évidemment, cela vous donne plus de souplesse, mais il y a le désavantage qu'il y a des comtés qui chevauchent deux régions administratives.

M. Côté: Je peux vous répondre aussi simplement tentativement, je vous l'avoue bien franchement. On n'a pas fait de recherche approfondie à cet égard. L'information qu'on me donne — sous toute réserve — c'est que cela pourrait, si on tenait compte des régions administratives, entraîner des modifications assez grandes, en particulier dans la région de Trois-Rivières. Il y a un secteur qu'il faudrait revoir.

L'autre question que je me poserais à cet égard: Est-ce que, dans votre esprit, si on tient compte d'une région administrative, cela prendrait aussi le caractère de ce qu'on mentionnait tout à l'heure, d'une espèce de zonage? Est-ce que ce serait une contrainte qui serait restrictive? Il faudrait se poser la question.

M. Paquette: C'est cela. On a, dans le projet de loi actuel, une contrainte au niveau microscopique, avec l'idée des secteurs de population. Ce à quoi je pense, c'est à une contrainte macroscopique, c'est-à-dire qu'on respecte les régions administratives, et que c'est à l'intérieur, région administrative par région administrative, qu'on fait le découpage.

Il me semble que, déjà, cela simplifierait énormément la tâche des députés et également le sentiment d'appartenance des électeurs.

M. Côté: Les spécialistes de la commission me signalent qu'on s'est efforcé, dans le rapport V — on n'y a pas toujours réussi — de respecter, dans toute la mesure du possible, les régions administratives.

Il faudrait le voir de façon très précise. Je pense que l'exercice qu'il nous faudrait faire pour répondre très adéquatement à votre question, ce serait de prendre la carte des régions administratives et la superposer soit avec la carte actuelle ou avec l'hypothèse du cinquième rapport, l'hypothèse de 36 000 électeurs, pour voir exactement quelle serait la réponse.

Quant à l'autre question que vous avez posée tout à l'heure sur le transfert d'électeurs selon les 36 000 et le rapport V, j'ai des chiffres en termes de régions. Je peux vous les citer comme on me les fournit ici. Le rapport V prévoit, par exemple, pour l'île de Montréal, 223 989 électeurs qui sont transférés. Dans l'hypothèse de 36 000 électeurs, ce serait 175 807 électeurs.

M. Paquette: Quel est le premier chiffre? M. Côté: 223 989 électeurs. M. Paquette: D'accord.

M. Côté: Évidemment, les chiffres que je vous donne, c'est le nombre d'électeurs qui sont transférés dans la région même. Dans l'hypothèse de 36 000 électeurs, toujours pour l'île de Montréal, ce serait 175 807 électeurs.

Pour l'île Jésus — je vous donne les deux chiffres — ce serait 72 271 électeurs dans le rapport V. Dans l'hypothèse de 36 000 électeurs, ce serait 92 859 électeurs. Pour la région de Québec, dans le rapport V, il y a 74 234 électeurs. Dans l'hypothèse de 36 000 électeurs, ce serait 34 666 électeurs. Pour la rive nord, dans le rapport V. ce serait 257 305 électeurs. Dans l'hypothèse de 36 000 électeurs, ce serait 197 910 électeurs. Pour le Saguenay-Lac-Saint-Jean, dans le rapport V, ce serait 78 182 électeurs. Dans l'hypothèse de 36 000 électeurs, ce serait 38 342 électeurs. Je vous signale que le chiffre de 78182 comprend les 31 000 électeurs pour la formation du nouveau district de Tremblay, globalement. Dans le secteur de la rive sud, dans le rapport V, les transferts sont de 167 093 électeurs. Dans l'hypothèse de 36 000 électeurs, ce serait 253 003 électeurs.

M. Bertrand: Seulement une parenthèse, M. Côté. Combien y a-t-il de comtés touchés par le rapport V et combien y a-t-il de comtés touchés selon l'hypothèse de 36 000 électeurs?

M. Côté: Dans le rapport V, toujours pour les mêmes régions, si on prend le même ordre de régions, sur l'île de Montréal, le chiffre que je vous donne, le premier, c'est le nombre de districts électoraux actuels. Dans l'île de Montréal, il y a 31

districts électoraux, selon cette répartition. Dans le rapport V, il y en a 22 de touchés. Dans l'hypothèse de 36 000 électeurs, il y en a 24. Pour l'île Jésus, le chiffre demeure inchangé, trois sur trois, trois sur trois. À Québec, dans le rapport V, neuf sur dix. Je veux bien me faire comprendre dans les chiffres que je donne. Le premier chiffre, ce sont les districts actuels. Il y en a dix. Dans le rapport V, il y en a neuf qui sont modifiés. Dans l'hypothèse de 36 000 électeurs, il y en a dix. Sur la rive nord, sur vingt districts électoraux, il y en a onze de modifiés. Dans l'hypothèse de 36 000 électeurs, il y en a seize. Pour le Saguenay-Lac-Saint-Jean, la Côte-Nord, dans le rapport V, cela reste inchangé. Dans l'hypothèse de 36 000 électeurs, il y en a six sur sept. Sur la rive sud, sur 39 districts, dans le rapport V, il y en a 22 de changés. Dans l'hypothèse de 36 000 électeurs, sur les 39 districts, il y en a 26 de changés.

M. Bertrand: Pour un total de combien?

M. Côté: De 110 districts dans les deux cas. Dans le rapport V, il y en a 74 de modifiés. Dans l'hypothèse de 36 000 électeurs, il y en a 85.

M. Bertrand: D'accord. Merci.

Le Président (M. Jolivet): Avez-vous terminé?

M. Paquette: J'avais un troisième point, M. le Président. Sur la question de la densité, j'ai l'impression que dans le projet de loi actuel, il y a déjà deux principes. Le premier est le plus contraignant, le plus impératif. C'est le principe démocratique de un homme, un vote, l'égalité des votes. C'est pour cela qu'on fixe une moyenne de 32 000 électeurs. On permet une variation de 25% plus ou moins, en partie pour des raisons techniques, j'imagine, pour donner plus de souplesse parce que ce n'est pas facile de faire une carte électorale, mais aussi probablement en ayant derrière la tête — mais c'est difficile de préjuger là — que les comtés à grande superficie auraient tendance à se situer en bas de la moyenne et les comtés dans les régions à forte densité de population, en haut de la moyenne. Sauf erreur, actuellement, il y a seulement deux comtés qui sont en bas de 27 000 électeurs. Est-ce que je me trompe? Il y a Matapédia et il y en a un autre, les Îles-de-la-Madeleine. Je pense que ce sont les deux seuls. Cela veut donc dire que, si vous aviez fait la carte selon l'hypothèse de 36 000 avec plus ou moins 25%, soit le même principe que la loi actuelle, c'est-à-dire entre 27 000 et 47 000, il y aurait seulement deux comtés et, si on exclut le cas des Îles-de-la-Madeleine, en supposant qu'on décide d'en faire une exception, un seul comté qui aurait vu son nombre d'électeurs augmenter. Il y en a peut-être deux à part des Îles.

M. Lavoie: Deux à part des Îles-de-la-Madeleine.

M. Paquette: Mais, enfin, c'est vraiment très minime. Ce à quoi j'arrive, c'est que je me demande s'il ne serait pas possible de faire une carte qui respecte les régions administratives et qui, de par la loi, fixe un critère de densité qui situerait les comtés à grande superficie systématiquement proche du minimum et les comtés à forte densité, proche du maximum. Mais, une fois posés tous ces critères en plus des autres et en supposant que ce soit possible — il faudrait en tester la faisabilité — est-ce qu'on aura encore besoin du député comme décideur? C'est la question que je vous pose et que je pose à la commission. Merci, M. le Président.

M. Côté: Je crois qu'il n'appartient pas à la commission, M. le député, de répondre à votre question. J'ai l'impression que cette réponse vous appartient.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Roberval.

M. Robert Lamontagne

M. Lamontagne: M. le Président, je voudrais peut-être reprendre où le député de Rosemont vient de laisser. J'ai devant moi le recensement des électeurs de 1979. M. Côté vient de nous dire que, pour son hypothèse de travail de 36 000 électeurs par comté avec 25% de plus ou de moins, il a dû toucher 85 comtés. Quand on a la liste des électeurs et qu'on voit qu'on en a seulement deux, comme le député de Rosemont vient de le mentionner, en bas de 27 000 électeurs, on conçoit très rapidement et très facilement, en respectant les régions administratives du Québec, qu'on peut facilement faire une carte électorale sans toucher 85 comtés. Lorsque nous avons suggéré l'hypothèse de travail de 36 000 électeurs, il faut se rappeler que, dans notre opinion — les cartes sont là un peu pour le démontrer — nous convenions que, dans un comté urbain, il doit y avoir plus d'électeurs, autour de 45 000 électeurs, et beaucoup moins dans les comtés ruraux. Tout à l'heure, on a dit: Écoutez, c'est la même chose, il faut faire attention, le député, c'est pour tout le monde. Quand on a des comtés comme Duplessis, Pontiac-Témiscamingue, Abitibi, Laviolette dans certains cas, est-ce qu'on veut des fonctionnaires pour représenter la population ou un député? La définition même d'un député, c'est celui qui représente ses électeurs. Or, pour représenter ses électeurs, c'est élémentaire, il faut les rencontrer au moins occasionnellement. J'ai eu l'occasion, la semaine dernière, de rencontrer le député de Duplessis et de faire un tour d'horizon privément avec lui. Je pense que ses collègues doivent connaître son idée. Il faut regarder ce que cela veut dire, le comté de Duplessis sur une carte; c'est la moitié de la province de Québec. Un électeur, un vote, pas plus que cela. C'est rigoureusement impossible là-dedans.

Je maintiens là-dessus que cette hypothèse, qu'on aime cela ou qu'on n'aime pas cela, où on tend à avoir un électeur un vote, en pratique, c'est de la théorie. Tous ceux qui sont ici autour de cette table savent fort bien que, pour mieux repré-

senter ses électeurs, il faut tout de même avoir une possibilité de les rencontrer, c'est élémentaire. (17 h 15)

M. le Président, les membres de la commission me permettront de vous parler un peu de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean et de l'Abitibi-Témiscamingue.

Il est évident qu'à l'occasion du dépôt d'un cinquième rapport, lorsqu'on propose un comté additionnel à une région, la région est toute heureuse d'apprendre que des personnes suggèrent l'addition d'un comté. Donc, c'est la première réaction, presque unanime, dans la région Saguenay-Lac-Saint-Jean. Un sixième comté, on est très heureux. Mais lorsqu'on voit les conséquences de l'addition d'un comté, on commence à rire un peu jaune. Par exemple...

M. Bédard: Excusez, M. le député. C'est la chaise qui est complètement brisée, non pas le comté.

M. Lamontagne: Dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, pour arriver à un sixième comté, je voudrais d'abord vous dire ce qui se passe dans le recensement 1979. Nous n'avons que cinq comtés dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean. Je vais vous les donner pour que ce soit enregistré. Chicoutimi, 38 732 électeurs. C'est le recensement avant révision, cependant. Dubuc, 33 635 électeurs; Jonquière, 41 033 électeurs; Lac-Saint-Jean, 34 860 électeurs et Roberval, 37 516 électeurs. C'est donc dire qu'on est dans la moyenne.

À partir de là, la commission décide de nous donner un sixième comté. Par les chiffres que je vous fournis, il est évident que, pour avoir un sixième comté, qu'on apprécie, vous êtes obligés de chambarder complètement la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean. Le ministre responsable de toute la réforme électorale et parlementaire sait aussi bien que moi ce qu'est notre région. On est bien heureux et, à un moment donné, on se met à lire le rapport.

Évidemment, je commence par regarder le comté de Roberval avant de regarder le comté de Chicoutimi.

M. Bédard: C'est dommage!

M. Lamontagne: La ville de Roberval ne fait plus partie du comté de Roberval. Je n'ai pas besoin de vous dire que le soir même du dépôt du cinquième rapport, les media, Radio-Canada, etc., cela a été leur manchette. Roberval ne sera plus dans le comté de Roberval! Et la ville la plus au nord du comté de Roberval, soit Mistassini, on réussit à la rattacher à Forestville et, d'après moi, il n'y a même pas de parents entre les deux villes... Même les deux maires, d'après moi, ne se sont jamais rencontrés de leur vie.

Je n'ai pas besoin de vous dire notre inquiétude lorsque, pour obtenir un sixième comté, vous devez chambarder toute la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, parce qu'il y a un prix à chaque chose. Moi, je suis d'accord pour qu'on étudie la possibilité de six comtés au Saguenay-Lac-Saint-Jean. Mais si, pour ça, vous détruisez complètement toute l'homogénéité du Saguenay-Lac-Saint-Jean... D'ailleurs, cela a été la réaction spontanée de toute notre population. Nous, les députés, en sommes le reflet. Le député de Dubuc et d'autres ont pris la parole là-dessus.

Vous dites; C'est le principe des vases communicants. C'est l'Abitibi qui a trop d'électeurs. Donc, on les rattache au Saguenay-Lac-Saint-Jean. On est bien heureux. En passant, moi, comme ancien citoyen de Chibougamau, y ayant pratiqué quinze années le notariat, je suis très heureux d'apprendre que la ville de Chibougamau pourra, à l'avenir, faire partie du comté de Roberval.

Mais ayant donné mon opinion, je suis bien obligé d'écouter celle des autres. Je constate, par exemple, qu'unanimement toute la région de l'Abitibi dénonce la perte du Nord-Ouest québécois. Je suis obligé de constater, parce que j'ai eu des résolutions et des télégrammes on ne peut plus sévères, que les villes de Chibougamau et de Chapais n'y voient aucun intérêt quel qu'il soit. J'ai l'impression, lorsqu'on parle de consultation de citoyens, qu'il va bien falloir avoir leur opinion également. Le télégramme de la ville de Chapais, en particulier, a été d'une sévérité, je pense, qui nous porte à réfléchir.

Mais, quant à nous — je le reprends pour que ce soit bien clair — le Saguenay-Lac-Saint-Jean, tous les députés sont fiers de pouvoir compter sur une partie du territoire de la Baie James. D'avoir ça dans notre secteur, ça renforce la section Saguenay-Lac-Saint-Jean. Mais là, vous arrivez avec un problème majeur. Je reviens sur mon principe des vases communicants.

Lorsqu'on parle d'exceptions, vous avez l'Abitibi-Est, qui compte effectivement 48 414 électeurs au recensement annuel de 1979. Mais il faut savoir pourquoi le comté compte 48 000 électeurs au recensement de 1979. Pour ceux qui ne le savent pas, la Baie James est dans l'Abitibi-Est. Or, les électeurs inscrits également à la Baie James peuvent très facilement être inscrits dans leur domicile permanent, qui n'est pas la Baie James.

Vous avez dit tout à l'heure que le premier critère était la projection des électeurs. On sait fort bien qu'à la Baie James la durée de permanence des travailleurs n'est pas très longue, de sorte que, si vous marchez par projection, il faut prévoir que le comté Abitibi-Est va diminuer en nombre d'électeurs, parce qu'une fois la Baie James en exploitation le taux va revenir à environ 30 000 électeurs. Il faut en tenir compte.

Qu'on soit indépendant, décisionnel ou autres... Je comprend les députés de Montréal de parler comme ça. En fait ils ne vivent pas ces problèmes régionaux mais l'Abitibi, le Saguenay-Lac-Saint-Jean, ce n'est pas pareil; vous entrez dans le vif du sujet. Peut-être que les députés n'ont pas affaire là-dedans, mais vous connaissez le communiqué conjoint qui a été fait par M. François Gendron, ministre de la Fonction publique, et d'autres: c'est un problème très sérieux que nous avons.

Nous sommes déjà allés en 1972, je le rappelais au député de Chicoutimi, à Chibougamau. À un moment donné, lors de l'étude de cette commission-là, les députés de la région souhaitaient inclure Chibougamau et Chapais dans notre région. Pour être bien sûr de son opinion, nous avons organisé un voyage et sommes allés rencontrer cette population à l'hôtel de ville de Chibougamau. On est revenus et ils ne voulaient pas trop. C'est un problème sérieux que vous posez et sur lequel j'attire votre attention.

Dans la région Saguenay-Lac-Saint-Jean — je vous avertis d'avance, je prends mon collègue à témoin — on est très heureux d'avoir six comtés. Si vous voulez nous donner la moitié de l'Abitibi, on prend tout. Si vous voulez nous donner toute la Baie James, on la veut toute. Mais, une fois qu'on a dit ça, on n'a rien réglé.

Quelle position, nous, du Saguenay-Lac-Saint-Jean, allons-nous prendre? Elle est déjà prise. Tout le monde s'est déclaré favorable à ce que vous proposez dans le cinquième rapport, sauf, évidemment, qu'il va falloir refaire la "map" de la région parce que dans ce temps-là, la région, je l'ai déjà dit et je le répète... Je me fais le reflet fidèle des concitoyens. Le cinquième rapport, quant à nous de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, si je ne représente pas les électeurs de Chicoutimi, je représente au moins ceux de mon comté et du comté de Dubuc qui pourraient venir vous dire... C'est comme si vous aviez pris la région, l'aviez tirée en l'air et aviez collé les morceaux qui tombaient ensemble. On n'a pas le droit de se choquer, mais on a le droit d'être frustré de temps en temps lorsqu'il nous arrive des choses comme celles-là dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean.

Tout à l'heure le jeune député de Vanier disait qu'en 1972 son père, dans son comté, etc.. Nous avons corrigé des choses importantes en 1972, mais nous n'avons pas tout corrigé.

Je le lance en vrac comme ça pour permettre une discussion là-dessus à un moment donné. Avec le député de Duplessis, la semaine dernière, il se demandait, je ne sais pas s'il a déjà eu l'occasion de le dire publiquement: Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de penser à un moment donné à un comté représentant le Nouveau-Québec? Est-ce qu'il n'y aurait pas lieu de penser d'avoir au Québec un comté, une espèce de comté pas imaginaire, pour les autochtones au Québec? À titre d'exemple: Dans plusieurs comtés, dans le mien, dans celui d'Abitibi-Est, en particulier, il y a les autochtones. Ils refusent même de se faire inscrire sur les listes électorales.

Pointe-Bleue en particulier, je voudrais vous en dire un mot une fois de plus. Ces gens-là ne sont pas intéressés par les élections, mais, cependant, si, au Québec, on prévoyait un comté pour représenter tous ces gens-là, ils seraient heureux de se faire représenter ici à l'Assemblée nationale par un des leurs qui serait présent à l'Assemblée nationale. Au contraire, ils sont perdus un peu dans différents comtés du Québec et ils ne prennent aucune part à l'élection.

Par exemple, il va y avoir des élections dans D'Arcy McGee prochainement; je pense bien que tout le monde convient que celui qui va être élu là sera un anglophone et possiblement un Juif. C'est ça, il y a des moyens de faire de la représentation.

C'est un problème qu'on n'a pas pu régler en 1972, parce que ça concernait les comtés protégés, mais il me semble qu'on peut évoluer un peu plus au Québec. Même si on aime ça ou non, je pense que, lorsque vous étendez des "maps", elles parlent par elles-mêmes. Il y a des choses ici qu'il faut essayer de corriger. Le comté de Duplessis, cette étendue-là, c'est à décourager quelqu'un. Le représentant de Pontiac-Témiscamingue, qui est M. Larivière, c'est bon de le rappeler, comment voulez-vous que cet homme-là représente, même avec la meilleure volonté possible, ses électeurs efficacement? Pour venir à Québec, ça lui prend presque deux jours et deux jours pour retourner. Il faut qu'il passe par l'Ontario pour couvrir son comté. Il me semble qu'il pourrait...

Si les Îles-de-la-Madeleine sont une exception, dans Pontiac-Témiscamingue, lorsque tout le monde en est conscient, on peut peut-être regarder une telle éventualité. Lorsque je vous parle des autochtones au Québec, je sais que tous les députés sont bien conscients du problème que cela peut soulever, mais... Pardon?

Mme LeBlanc-Bantey: Les négociations commencent à devenir officielles?

M. Lamontagne: Non. Je soulève cette chose-là. Ce sont des discussions que j'ai eues avec un de vos collègues là-dessus. Je pense que c'est bon d'en parler. Je voudrais vous poser une question assez directe qui concerne le Saguenay-Lac-Saint-Jean et le comté de Roberval, malgré que j'aie bien l'impression que cela va être corrigé, mais je m'en tiens à ce qui a été inscrit dans le cinquième rapport. Comment avez-vous pu arriver à soustraire la ville de Roberval, chef-lieu du comté de Roberval, du comté de Roberval? Je pose cette question, si vous permettez. Je ne demeure pas à Roberval, mais je pense que je représente fidèlement ce qui s'est dit dans la région là-dessus.

Le Président (M. Jolivet): M.Côté.

M. Côté: M. le député, je pense que je devrais vous préciser au départ qu'en ce qui concerne le Saguenay-Lac-Saint-Jean et le Nord-Ouest québécois, ce sont peut-être les deux régions de la province au sujet desquelles nous avons eu le plus grand nombre de représentations à la suite du rapport V. À la suite de ces représentations, nous nous sommes penchés sur des hypothèses de solution. Tout ce que je suis en mesure de vous dire pour le moment c'est que nous avons des hypothèses de solution, mais je ne crois pas être en mesure de vous les communiquer. Je tiens à vous signaler quand même que les commentaires — dont un certain nombre sont assez pertinents, je pense — qui nous ont été faits nous amènent à repenser sérieusement ce problème.

M. Lamontagne: J'ai une deuxième question, si vous permettez, avant de donner la parole aux autres. Dans le cas de la Baie James, parce que je crois que c'est bien important, tantôt, lorsque vous avez donné cinq critères, le premier, avez-vous dit est la projection du vote. Est-ce que vous considérez, parce que c'est la Baie James... Il peut arriver que dans un comté donné, on ait un immense chantier... On a eu, dans le comté de Roberval, à Saint-Félicien, par exemple, Donohue. À l'occasion d'un recensement, il est sûr qu'il y a 1000, 1500 personnes additionnelles qui ont pu se faire inscrire sur les listes électorales alors que c'étaient des gens complètement de l'extérieur. Est-ce que pour vous la projection, par exemple, du comté d'Abitibi-Est, qui comprend tous les travailleurs de la Baie James, implique un chambardement de toute la carte du Nord-Ouest québécois?

M. Côté: Dans le rapport V, savoir si on a tenu compte de ce facteur?

M. Lamontagne: Oui.

M. Côté: On me signale que ce facteur est la principale raison pour laquelle nous sommes arrivés à la conclusion, dans le rapport V, qu'il fallait qu'il y ait un district électoral qui disparaisse. Si on avait tenu compte de ce facteur d'augmentation de la population temporaire, on aurait probablement laissé quatre districts électoraux.

M. Lamontagne: Je ne vous saisis pas trop.

M. Côté: Si on tient compte de l'augmentation temporaire de la population dans ce secteur — là vous parlez de la Baie James et des travailleurs qui sont là - si on avait tenu compte de ces facteurs, des milliers de personnes qui sont là, cela nous aurait probablement permis, dans le rapport V, au lieu d'arriver avec la proposition de la disparition d'un district électoral dans le Nord-Ouest, d'arriver avec une proposition du maintien de quatre districts électoraux. Mais parce qu'on a tenu compte du facteur éphémère de cette population, on est obligé d'arriver à la conclusion que la population électorale n'est pas assez nombreuse. C'est ce qui nous a amenés à la conclusion de recommander qu'il y ait trois districts électoraux plutôt que quatre.

M. Lamontagne: Je voudrais vous poser une dernière question. Je ne voudrais pas vous embarrasser. Si vous ne voulez pas répondre, vous me le direz. Est-ce qu'après le nombre considérable de représentations que vous avez eues — et nous aussi — concernant le Nord-Ouest, vous êtes toujours d'avis que le Nord-Ouest québécois doit être rattaché au Saguenay-Lac-Saint-Jean?

M. Côté: Le problème crucial qu'il y a dans cette région, c'est Chibougamau-Chapais. C'est de savoir de quel côté on rattache Chibougamau-

Chapais. Vous savez peut-être qu'une des représentations qui ont été faites, à un moment donné, c'est que les gens de ce secteur ont demandé d'être considérés comme un district d'exception.

M. Lamontagne: Oui, c'est sûr. (17 h 30)

M. Côté: II y a environ 10 000 électeurs qui peuvent faire la différence à savoir de quel côté ils doivent être rattachés, soit du côté du Saguenay-Lac-Saint-Jean, soit du côté du Nord-Ouest québécois.

M. Lamontagne: Vous savez, M. Côté, le problème va se poser quand la commission va venir faire des auditions au Saguenay-Lac-Saint-Jean. D'un côté, nous allons être unanimes à les vouloir dans notre région et la région de l'Abitibi va être unanime à ne pas vouloir venir.

M. Côté: C'est un bel exemple d'une des grosses difficultés qui se posent à cause de l'étendue du territoire dans un endroit très particulier où on retrouve à peu près 10 000 électeurs et il faut déterminer à quel endroit on doit les rattacher.

M. Bédard: Je note que le député de Roberval a admis qu'il y aurait une commission indépendante qui irait effectivement consulter la population.

M. Lamontagne: M. le Président, dans la commission indépendante, puisque je vis ce problème qui est passablement particulier, le résultat de la consultation, on le sait d'avance: l'unanimité du Saguenay-Lac-Saint-Jean d'un côté et l'unanimité de l'Abitibi, de l'autre côté. Également, si vous allez à Chibougamau-Chapais, ils vont vous dire: Nous autres, on veut avoir un comté autonome. C'est ça, la consultation; on le sait d'avance. Mais comment est-ce qu'on fait ça?

M. Côté: Je vais vous dire que je vais souhaiter bonne chance à la prochaine commission.

M. Lamontagne: Oui, c'est un problème.

M. Côté: Vous avez raison, il y a là un problème qui est réel, qui n'est pas facile à régler.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Châteauguay.

M. Roland Dussault

M. Dussault: Merci, M. le Président. J'aurai un court commentaire et une question. On vise tous, je pense bien, à régler un problème qui est celui de refaire une carte électorale à cause de problèmes bien connus et on souhaite particulièrement le faire en éliminant tout arbitraire. Je pense que tout le monde convient de ça.

Si je me réfère aux propos du député de Laval, tout à l'heure, quand il faisait une distinction entre

les comtés urbains et les comtés ruraux, il partait d'une prémisse qui consiste à peu près en ceci: le comté urbain, c'est moins de travail pour le député et le comté rural, c'en est plus. Je pense que c'est vraiment une porte ouverte à l'arbitraire que de partir avec cette prémisse, parce qu'on ne peut pas généraliser de cette façon. Certains comtés urbains, particulièrement à revenu fort modeste, exigent du député une disponibilité sur des objets différents et fort souvent très personnalisés, qui l'amènent à travailler tout aussi fort que le député des comtés ruraux ou même semi-urbains. Parce que même dans les comtés semi-urbains, il arrive qu'il y ait des poches...

M. Fontaine: Les affaires sociales à Montréal, ça appartient à la ville de Montréal.

M. Dussault: ... je m'excuse de l'expression, de population à revenu modeste ce qui amène le député à déployer une quantité d'énergie considérable, tout autant que le député qui a à s'occuper des problèmes de voirie. Je pense que vouloir appuyer une nouvelle réforme de la carte sur une base comme celle-là, c'est ouvrir la porte à l'arbitraire. Je ne pourrais pas être d'accord avec ça, bien sûr.

J'ai remarqué — ce sera l'introduction de ma question — que la commission a un souci que je trouve fort légitime de permanence. Je ne dirais pas de permanence absolue, parce que je pense bien qu'on me fera remarquer que la permanence absolue est en contradiction même avec le problème qu'on essaie de régler, avec la démarche qu'on essaie de faire pour régler un problème. Mais je pense qu'il y a une certaine permanence relative et je vais rejoindre un peu le point de vue de mon collègue de Rosemont. On a parlé de grandes régions. Je pense qu'il y a là effectivement un élément de permanence à l'échelle du Québec. Je pense que, dans les réflexions que nous aurons encore à faire sur le projet de loi no 10, il faudra tenir compte de ce point de vue qui est fort intéressant: jusqu'à quel point il faudrait respecter les régions administratives. Peut-être faudrait-il refaire les régions administratives pour y arriver. Je pense qu'il y a là un élément de réflexion important.

Je pense qu'il y a une autre façon d'assurer une certaine permanence. C'est relié à l'objectif que partagent beaucoup de personnes. Cela a été un objectif important pour le comité Dussault en tout cas — auquel on m'a fait l'honneur de donner mon nom — sur la réforme électorale, où l'on voulait permettre une identification au milieu naturel. C'est en ce sens qu'on a parlé de secteurs de vote.

M. le député de Rosemont a évoqué cette question tout à l'heure, mais très brièvement. J'ai même craint qu'il pose la question, parce que cela m'aurait enlevé mon intervention ou presque.

Je voudrais savoir de la part du président de la commission actuelle si le travail qu'ils ont fait sur la réforme de la carte les a amenés à une réflexion dans ce sens-là, c'est-à-dire à la création, par souci de permanence, de secteurs électoraux. Si une certaine réflexion a été faite là-dessus, je voudrais savoir si déjà on a tiré quelques conclusions.

M. Côté: Je peux peut-être vous répondre juste par un exemple, si vous le permettez, M. le député. On n'a pas, jusqu'à maintenant, travaillé de façon spécifique sur l'hypothèse de la constitution ou la création de secteurs électoraux. Mais si on se base sur l'expérience qu'on a vécue, en se référant à ce que j'ai mentionné dans mon introduction tout à l'heure, au projet de loi 44, dans la détermination des districts électoraux municipaux de Montréal, de Longueuil et de Jonquière, cette notion, même si elle n'était pas exprimée de cette façon, de secteurs électoraux, est nettement apparue comme étant une réalité. Si je comprends bien la notion de secteurs électoraux, c'est d'essayer de retrouver certaines caractéristiques socio-économiques le plus homogènes possible dans un milieu déterminé.

On l'a vérifié, comme je vous le mentionne, et on l'a vécu d'une façon plus immédiate, parce que la délimitation d'un district électoral municipal est beaucoup plus restreinte. Mais on s'est aperçu que dans ces cas-là, c'était une préoccupation et un facteur dont il fallait absolument tenir compte.

M. Dussault: Je vous remercie.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Gatineau.

M. Michel Gratton

M. Gratton: M. le Président, on sait que la semaine prochaine ou très bientôt, la commission permanente de la refonte de la carte électorale devra céder son mandat à une commission indépendante. Selon les dispositions du projet de loi no 10 qui vient d'être adopté en deuxième lecture à l'Assemblée nationale, cette nouvelle commission devra adopter, avant le 31 mars 1980, une carte électorale se fondant sur le cinquième rapport de la commission.

La commission, depuis la publication de son cinquième rapport, en février 1978, si je ne m'abuse, a reçu des représentations de divers organismes de diverses régions de la province, dans certains cas, contestant ces recommandations par rapport à une délimitation de certains comtés dans certaines régions, dans d'autres cas, j'imagine, venant les appuyer.

Pourrais-je vous demander, M. le président de la commission; ce que la commission a fait de ces recommandations, jusqu'à maintenant? Pour illustrer le fond de ma question, je me référerai aux recommandations d'un comité qui s'était formé dans le secteur de Papineau, le secteur de Buckingham de l'actuel comté de Papineau, qui désirait revenir aux limites de l'ancien comté de Papineau, c'est-à-dire le comté de Papineau d'avant la réforme de 1972.

Ce que j'aimerais savoir de M. le président, c'est: Est-ce qu'il y a eu effectivement des dis-

cussions, des rencontres avec ce genre d'associations ou de groupes de citoyens? Est-ce qu'on a étudié les implications de ce que ces gens-là demandaient? Et est-ce que la commission, au moment de remettre tout le dossier à la nouvelle commission qui sera créée en vertu du projet de loi no 10, greffera au cinquième rapport que nous connaissons ces représentations et peut-être même une évaluation de la valeur de ces représentations à la nouvelle commission?

Le Président (M. Jolivet): M. Côté.

M. Côté: M. le député, c'est qu'effectivement, nous avons — je l'ai mentionné tout à l'heure — reçu un grand nombre de commentaires, de suggestions et de rapports. Ce que la commission a fait jusqu'à maintenant de ces remarques, ces commentaires et ces observations, elle les a évidemment étudiés. Nous nous sommes penchés sur ce que j'appellerais un certain nombre d'hypothèses de solution à la suite des observations, des commentaires ou enfin des rapports qui nous ont été soumis.

Cependant, il n'y a pas eu de communication directe, je veux dire d'audience auprès des groupements ou des associations ou des personnes qui ont fait ces recommandations. On a fait comme par le passé. On a reçu ces commentaires et ces observations et on a fait une étude là-dessus.

Autrefois, on m'informe que la façon de procéder de la commission parlementaire, c'était de recevoir le rapport, de soumettre des commentaires et, à la suite des commentaires exposés par les députés et venant de l'extérieur, on demandait à la commission de produire un autre rapport.

Or, ce mandat-là ne nous a pas été confié. Tout ce qu'on a eu comme mandat jusqu'à maintenant, cela a été de soumettre le cinquième rapport, qui a été soumis en février 1978. Pour compléter ma réponse, il est bien évident que cette documentation, ces commentaires, ces observations seront à l'entière disposition de la future commission.

M. Gratton: M. le Président de la commission, il me semble, à moi en tout cas, qu'au moment où on demandera à la nouvelle commission de produire une carte, avant le 31 mars 1980, en se fondant sur le cinquième rapport ou sur les travaux de votre commission, il serait peut-être utile et valable que cette commission — je vous demande de me donner votre appréciation personnelle à cette suggestion que je formule — ait le mandat de remettre à la nouvelle commission toute étude qui aurait pu être effectuée par votre commission, suite à des représentations de l'extérieur de l'Assemblée nationale. Ainsi, on ne courrait pas le risque de voir des personnes qui ont produit des mémoires ou qui, en tout cas, ont formulé des recommandations écrites à votre commission placées dans la situation de devoir de leur propre initiative faire d'autres représentations auprès d'une nouvelle commission, alors que celles-ci sont déjà faites et ont même déjà fait l'objet d'études de la part de la commission actuelle.

M. Côté: Je crois qu'il s'agit là d'une question à caractère plutôt... C'est difficile pour moi d'y répondre, parce que cela revient au législateur de déterminer la continuation qu'il doit y avoir d'un organisme à l'autre.

Je comprends que la future commission doit baser ses travaux sur les données que possède la commission actuelle. Il me semble que cela va de soi, que les documents ou les données, toutes les informations, les études qu'on possède présentement devront être acheminés à la future commission. Dans le projet de loi 10, on dit que la future commission succède à la présente et que les travaux qui devront être faits devront être fondés sur les travaux de la Commission permanente de la réforme des districts électoraux, à l'article 37, tels qu'ils ont été effectués au moment de l'entrée en vigueur de la loi.

À moins que je ne comprenne mal votre question, il me semble que cela va de soi pour moi que tous les documents et toutes les études qu'on a pu faire soient transmis automatiquement à la future commission.

M. Gratton: En fait, c'est ce que je voulais savoir, à la condition que vous nous assuriez qu'effectivement tout le matériel que vous pouvez avoir dans la boîte, à ce moment... en d'autres mots, que vous ne vous limiterez pas à transmettre tout simplement les rapports déposés à l'Assemblée nationale à une nouvelle commission, mais toutes les autres études qui ont pu être faites à la demande de diverses personnes.

M. Côté: Si vous me demandez mon opinion personnelle, en plus des dispositions de la loi, je trouve que cela va de soi. (17 h 45)

M. Gratton: D'accord. Une autre question. On sait que le projet de loi no 10 — personne ne voudra nous empêcher d'en parler ici à la commission — confie à la nouvelle commission la tâche de délimiter les sections de vote, c'est-à-dire les "polls", comme on les appelle dans le jargon. On sait d'ailleurs que dans certains cas, lors du dernier recensement, effectivement, le bureau du directeur général des élections a procédé, sauf erreur, à la confection de la description de certaines sections de vote. J'ai fait la représentation en deuxième lecture, à savoir qu'il serait peut-être plus convenable de laisser aux directeurs de scrutin locaux cette tâche de procéder à la description des sections de vote. Je voudrais savoir du président si cette suggestion ou cette inclusion dans le projet de loi no 10 découle de l'intention qu'avait le gouvernement de faire adopter son projet de loi no 3 sur le registre des électeurs ou s'il y a d'autres raisons qui motivent le gouvernement à inscrire cette notion dans le projet de loi no 10.

M. Bédard: M. le Président, sur cette question, je peux dire tout de suite au député de Gatineau

que la décision qui est contenue dans le projet de loi 10 concernant la section de vote n'a aucune relation avec la décision de faire adopter ou pas un registre électoral.

Maintenant, j'ai dit en deuxième lecture que j'avais pris bonne note des représentations qui ont été faites par les partis de l'Opposition sur l'opportunité que les sections de vote puissent relever du directeur des élections plutôt que de la commission permanente. Effectivement, j'ai demandé au directeur général des élections de procéder à une étude — on ne commencera pas à parler de grandes études — à une réflexion sur cet aspect particulier, de telle façon que lorsque nous procéderons à l'étude du projet de loi no 10, nous soyons en mesure de donner tout l'éclairage possible à tous les membres de la commission afin de prendre la décision la plus valable possible dans l'intérêt des électeurs.

M. Gratton: Je remercie le ministre pour la précision qu'il vient d'apporter. Il comprendra que j'aie voulue profiter de la présence du directeur général des élections aujourd'hui, puisqu'il ne sera probablement pas disponible au moment où nous étudierons le projet de loi no 10 article par article. Je n'en fais pas une demande formelle.

Une dernière remarque. Cela vaut ce que ça vaut parce qu'on a souvent l'impression, en tant que députés, que les représentations qu'on peut faire peuvent être retenues ou non par des commissions indépendantes ou non.

Je voudrais vous faire remarquer que, dans votre cinquième rapport, bien entendu, vous faites une nouvelle délimitation des comtés dans la région de l'Outaouais. En l'occurrence, vous n'ajoutez pas de comté, mais vous créez un nouveau comté à caractère plutôt urbain dans la ville de Gatineau, auquel vous donnez le nom de Gatineau, ce qui est fort bien. Vous prenez le reste du comté de Papineau, vous y greffez plus des deux tiers des électeurs de l'ancien comté de Gatineau et vous en faites un comté qui s'appelle Papineau. Papineauville et la seigneurie de Papineau ne sont pas du tout dans le présent comté de Papineau, ni dans le futur comté de Papineau. L'actuel comté de Gatineau couvre toute la vallée de la rivière Gatineau et vous allez maintenant le limiter à la ville de Gatineau qui, soit dit en passant, trouvait son nom déjà dans le nom de Gatineau Mills. En fin de compte, c'était une ville où la CIP est venue s'installer. On a dénommé ça Gatineau Mills et puis c'est devenu Gatineau. Vous voyez un peu le charabia dans lequel on s'embarque, surtout que le comté fédéral de Gatineau ne correspond pas à ces limites du nouveau comté de Gatineau, ni même aux anciennes.

Pour ma part, je vous suggérerais — là, je ne veux pas argumenter sur le fond; je sais que la commission indépendante nous écoutera très religieusement au moment où on lui fera des représentations — de mettre ça dans le bagage d'informations que vous transmettrez à cette nouvelle commission, à savoir qu'il y aurait peut-être lieu de laisser tomber tout simplement le nom de

Papineau ou le nom de Gatineau, ou peut-être même les deux, et d'en trouver des nouveaux pour éviter toute la confusion que les recommandations de votre rapport ne seront pas sans engendrer.

M. Côté: Je m'excuse, mais, si j'ai bien compris, vous faites référence surtout à la désignation du district électoral?

M. Gratton: Oui.

M. Côté: Est-ce que je peux me permettre une observation sur ce sujet? Dans la loi actuelle qui nous régit, il n'y a pas de disposition qui autorise la commission à désigner un district électoral. C'est une coutume qui s'est établie. Nous devrons, je pense, si la loi continue à s'appliquer, tenir compte de la commission de toponymie dans la désignation des districts électoraux.

M. Gratton: Est-ce qu'à ce moment-là, en supposant que le projet de loi no 10 soit adopté, la nouvelle commission aurait le même problème que la vôtre a présentement?

M. Côté: II faudrait vérifier le texte du projet de loi no 10, mais j'ai l'impression que oui.

M. Gratton: Concernant la désignation des comtés, M. le président nous dit que sa commission n'a pas les pouvoirs de changer la désignation de comtés, sauf, bien entendu, lorsqu'il s'agit d'un nouveau comté, d'un comté additionnel.

M. Côté: Ce qu'on faisait dans les rapports, c'est qu'on proposait. On disait, par exemple: On suggère d'ajouter tel nom. Alors, c'était une suggestion qu'on faisait dans le rapport à la commission. Nous disions: Nous proposons tel comté. Nous proposons de lui donner tel nom. Les députés de l'Assemblée nationale avaient évidemment la liberté d'accepter ou non la proposition qui était faite.

M. Gratton: Oui, au moment de l'adoption de la loi.

M. Côté: C'est cela, au moment de l'adoption de la loi de...

M. Gratton: C'est cela, sauf que maintenant il n'y en aura plus de loi, parce que la commission décidera de par son autorité.

M. Bédard: Pour répondre à votre question, en vertu de la nouvelle loi, c'est la commission permanente qui va prendre la décision.

M. Gratton: D'accord!

M. Bédard: Maintenant, après recommandation de la commission de...

M. Côté: C'est l'article 5 du projet de loi, M. le ministre?

M. Bédard: C'est ça.

Le Président (M. Jolivet): II reste cinq minutes, M. le député de Nicolet-Yamaska. Si vous aimez mieux revenir à 20 heures, je vais demander au député de Vanier s'il veut prendre le temps qui reste, ou nous pourrions suspendre.

M. Fontaine: Vous ne trouvez pas qu'il a assez parlé?

Le Président (M. Jolivet): II a demandé la parole, je suis la liste des gens qui me demandent la parole.

M. Bertrand: Je serais prêt à ajourner immédiatement, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Je n'ajournerai pas, mais je vais suspendre les travaux jusqu'à 20 heures.

Suspension de la séance à 17 h 53

Reprise de la séance à 20 h 20

Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission de la présidence du conseil et de la constitution est réunie à nouveau pour continuer les travaux qu'elle avait commencés avant le souper. Si on veut bien s'installer. La parole était au député de Nicolet-Yamaska.

M. Serge Fontaine

M. Fontaine: Merci, M. le Président. J'aimerais tout d'abord commencer par parler de ce dont le député de Vanier discutait avant que nous n'ajournions à l'heure du souper à l'effet que le système que nous avons actuellement au Québec fait en sorte qu'il y a certaines distorsions dans notre mode de scrutin. Il nous parlait, cet après-midi, de l'élection de 1966 comme étant quasiment un scandale alors que probablement, à ce moment-là, il était le premier à monter sur la table pour applaudir...

M. Bertrand: Je comprends donc.

M. Fontaine:... mais je pense qu'aujourd'hui il voit l'affaire d'un autre oeil. Cependant, les distorsions qui continuent à exister, d'après nous, nous ne pourrons les corriger de façon définitive tant et aussi longtemps que le gouvernement et particulièrement le ministre d'État à la Réforme électorale ne prendront pas de décisions concrètes quant à savoir ce qu'il advient du mode de représentation proportionnelle qui a déjà été proposé dans le livre vert de son prédécesseur et sur lequel il était censé y avoir une large consultation. On sait que la consultation s'est résumée à peut-être deux comtés, ou quelque chose comme cela, deux régions.

M. Bédard: Est-ce que je peux vous corriger là-dessus?

M. Fontaine: Oui.

M. Bédard: On a très bien dit quel était notre échéancier. Nous votons la loi 10, la loi 9, la loi 3. Pour ce qui est du livre vert, il y aura consultation. À un moment donné, quand on veut être efficace il faut se tracer une manière de travailler. On ne peut quand même pas prendre tout cela en même temps. Le temps que je suis ici, je ne peux quand même pas faire une consultation..

M. Fontaine: Je voudrais rappeler au ministre d'État à la Réforme électorale que son prédécesseur, M. Burns, le 6 décembre 1978, disait ceci: "Si vous voulez que je règle cette question tout de suite, je vais dire tout de suite que le gouvernement examine actuellement tout un train de lois qui concernent le mode de scrutin, qui concernent donc, si vous voulez, par voie de conséquence, la carte électorale, qui concernent le registre des électeurs, qui concernent l'identification des électeurs et un certain nombre d'autres phénomènes dont le plus important est la remise en place ou la remise en termes modernes de la Loi électorale elle-même. "Le gouvernement, je suis autorisé à vous le dire cet après-midi, a décidé, ce matin, que pour une meilleure cohérence toutes ces lois devraient être soumises à l'Assemblée nationale en même temps. J'avais pensé, au début, comme ministre responsable de ces projets de loi, les soumettre les uns après les autres quand ils seraient prêts, mais le Conseil des ministres avait décidé le contraire..." Il continuait dans ce sens: "Je vous dis que tant que le gouvernement ne nous annoncera pas ce qu'il advient du mode de représentation proportionnelle, il est difficile de faire une carte électorale qui serait réaménagée lorsqu'on aura adopté ce mode de scrutin si le gouvernement décide de continuer dans cette idée. C'est un premier point. "Deuxième chose, c'est que la commission nous dit qu'il y a des contraintes juridiques qui sont dans la loi et on ne peut pas aller à l'encontre de ces contraintes juridiques. Les contraintes juridiques qu'il y a dans la loi, si je les lis, si j'essaie de les comprendre, c'est que "la commission doit, en appréciant le nombre de districts électoraux au Québec et l'étendue de chacun d'eux, s'assurer que chaque district électoral comprend 32 000 électeurs et, à cette fin, elle devra tenir compte des facteurs de variation de la population. Toutefois, elle peut admettre des districts électoraux dont le nombre des électeurs est supérieur ou inférieur à ce nombre d'au plus 25%, chaque fois qu'elle l'estime nécessaire en raison de la densité de la population." C'est un critère et il y a des variations. "L'autre article nous dit: "La commission peut s'écarter des règles énoncées au premier alinéa

pour des considérations exceptionnelles d'ordre démographique et géographique telles que la très faible densité de population, le taux relatif de croissance de la population d'une région, son accessibilité, sa superficie ou sa configuration."

Les commissaires qui ont rédigé le rapport n'y ont vu qu'une seule exception, soit les Îles-de-la-Madeleine. Ils ont dit: On ne peut pas faire d'autre exception que celle-là. Je voudrais savoir, surtout de M. Prémont et de M. le juge Barbeau qui, si je ne me trompe pas, étaient membres de la commission qui a fait le rapport... Je ne veux pas manquer de respect à M. Côté, je sais qu'il est compétent pour répondre aussi, mais étant donné qu'il n'était pas partie au rapport lui-même, je ne sais pas si les membres de la commission pourraient nous dire comment il se fait que l'on interprète ce paragraphe de la façon la plus restrictive possible, pour en arriver à dire qu'il y a seulement le comté des Îles-de-la-Madeleine qui peut souffrir cette exception.

M. Prémont (Jacques): II faut se rappeler, M. Fontaine, qu'il y a quelques années il existait au Québec des comtés protégés. Le gouvernement avait pris la décision, lors de la première refonte, que ces comtés devaient disparaître — j'emploie ce mot — pour donner une proportion plus équitable de la population en suivant le principe qui a été exposé cet après-midi, un vote, un électeur.

Évidemment, lorsque nous fûmes appelés à étudier la carte électorale, les projets de réforme, nous avions toujours à l'esprit le danger que pouvaient comporter des exceptions répétées ou renouvelées. Je crois qu'il en a été question cet après-midi. Je ne sais pas si je m'exprime clairement. Nous pouvions avoir d'autres exceptions. Pensons au Nord-Ouest. Je crois que la région de Pontiac-Témiscamingue pouvait représenter un cas. Même avec l'hypothèse de 36 000, M. Côté nous a expliqué un peu cet après-midi que les 32 comtés de la rive sud pourraient être influencés en partant du principe que les Îles-de-la-Madeleine demeuraient une exception. Je crois que nous pourrions avoir, je ne dirais pas un fort pourcentage d'exceptions, mais qu'il y aurait sûrement, par voie de conséquence, des exceptions qui suivraient. C'est un peu le fond du problème. J'espère que vous comprenez un peu ce que je veux dire. Je crois que nous reviendrions au point de départ. Nous pourrions nous retrouver avec de nouveaux comtés protégés, en quelque sorte.

M. Fontaine: Vous voulez ajouter quelque chose?

M. Barbeau (Alphonse): Je voudrais tout simplement ajouter ceci, M. le député. À l'origine même de notre commission, en 1972, lorsque celle-ci a été créée, nous nous sommes rendu compte que l'article 9 était un peu l'échine du texte de loi en vertu duquel nous devions agir.

Je me rappelle, à l'époque, — c'était mon collègue Prémont et M. le juge Drouin qui nous présidaient — je me rappelle qu'on s'est penché très longuement sur ce texte-là. Il s'agissait pour nous d'y trouver une interprétation. Comme dans tous les textes de loi, on essaie toujours de rechercher l'intention du législateur, ce qu'il a vraiment voulu dire.

Nous nous sommes arrêtés au facteur numérique de 32 000 électeurs par district électoral et on s'est dit: Voici l'intention première du législateur. En nous confiant la responsabilité, il entend que la commission essaie de délimiter des districts électoraux ayant un chiffre le plus rapproché possible des 32 000 électeurs, avec évidemment l'indexation en plus ou moins de 25%. On a interprété la seconde partie ou, si vous voulez, le deuxième alinéa du premier paragraphe comme nous autorisant à tenir compte des facteurs qui y sont mentionnés pour tenir compte, entre autres, de la différence entre les comtés à densité de population intense, comme la ville de Montréal, le Québec métropolitain, l'Outaouais, disons Gatineau et Hull, par opposition aux autres comtés ruraux ou semi-ruraux.

Finalement, le troisième alinéa, naturellement, on l'a considéré comme un facteur d'exception. À l'époque, on ne l'a reconnu que pour les Îles-de-la-Madeleine. On a toujours eu à l'esprit, je pense, depuis 1972, que, si nous répétions et si nous permettions la répétition de l'exception, nous retombions dans l'ornière de la grande différence dans les districts et nous retombions peut-être dans ce qui était avant: les comtés protégés. À notre humble avis, il ne fallait pas multiplier les exceptions.

M. Fontaine: Je comprends très bien votre interprétation. Si on se réfère au projet de loi 10 que nous sommes en train d'étudier à l'Assemblée nationale qui, en quelque sorte, reproduit quasiment les mêmes critères, sinon exactement les mêmes, comment la nouvelle commission qui s'appellerait la Commission de la représentation électorale pourrait-elle tracer une carte électorale différente de celle que vous avez faite si elle a les mêmes critères et si elle doit interpréter l'article concernant l'exception de la même façon que vous l'avez fait? (20 h 30)

M. Barbeau: Avec respect, M. le député, j'ai l'impression que la réponse à cette question dépasserait ma compétence, à moi, comme membre de la commission. Je pense que c'est plutôt une réponse à caractère politique qu'il faudrait donner. Je ne pense pas être compétent pour donner une réponse.

M. Fontaine: Si les députés de l'Assemblée nationale vous disent qu'ils voudraient que le critère d'exception soit interprété de façon plus large, est-ce que vous auriez des suggestions à faire aux membres de cette commission pour nous dire de quelle façon le texte devrait être rédigé pour que le critère d'exception du dernier paragraphe de l'article 9 soit rédigé de façon qu'on l'interprète plus largement?

M. Barbeau: Encore une fois, nous avons donné l'interprétation que nous pensions la bonne. Si, évidemment, la Chambre n'est pas satisfaite de l'interprétation qu'on a donnée, elle peut sûrement, dans un nouveau texte de loi, clarifier, imposer l'interprétation qu'elle veut vraiment. Évidemment, à ce moment, si c'est nous qui sommes encore en place, nous n'aurons pas d'autre objet que de satisfaire les voeux de la Chambre. C'est notre devoir comme membres de la commission. Maintenant, la seconde partie de votre question, si la Chambre ou la commission s'adressait à nous pour savoir quel est le texte véritable qu'il faudrait employer, je pense bien qu'il n'y aurait pas d'objection à ce qu'on fasse les suggestions que la commission nous demanderait. Personnellement, je ne vois pas d'obstacle.

M. Côté: On pourrait certainement se pencher sur ce problème et peut-être soumettre des hypothèses de solution.

M. Fontaine: En fin de compte, est-ce que c'est le mot "exceptionnel" qui serait un obstacle à ce que vous puissiez aller en deçà ou au-delà des critères fixés dans l'article 9, c'est-à-dire 32 000 plus ou moins 25%?

M. Barbeau: Un article doit s'apprécier dans son ensemble, dans tous les termes qu'il comporte. Encore une fois, je vous réitère qu'on s'est penché pendant de longues heures sur le sens à lui donner. Nous avons retenu ce facteur numérique d'abord, avec certaines exceptions comme l'éloignement et la densité pour enfin interpréter le dernier paragraphe comme étant une exception vraiment à part.

M. Prémont: Je m'excuse de reprendre... Je me rappelle la longue discussion et je pense qu'à l'époque, nous interprétions le texte comme étant, à de très rares exceptions... Nous nous étions arrêtés uniquement aux Îles-de-la-Madeleine parce que, dans notre esprit, le législateur voulait refaire une carte qui était la plus équitable possible pour la population du Québec. Je pense qu'à ce moment-là l'exception ne pouvait pas devenir pour nous une règle. Nous nous sentions liés... Je m'excuse d'employer le mot "liés". Nous sentions qu'en acceptant une seconde exception il y avait danger que d'autres exceptions surviennent et, à un certain moment, l'exception serait devenue la règle. Parce que lorsque les membres de cette Chambre font part de leurs représentations, de leurs craintes ou de leurs griefs à l'occasion d'un projet de carte, à ce moment-là, ils sont tout à fait justifiés. Je les comprends de faire part de leurs griefs vis-à-vis de nous dans le sens de nous donner des suggestions. Très souvent, ils ne tiennent pas toujours compte de cette réaction en chaîne et des conséquences que leurs demandes peuvent avoir sur les districts voisins.

C'est la raison pour laquelle, je crois, nous avons toujours maintenu notre décision de maintenir une seule exception, soit les Îles-de-la-Made- leine. C'est seulement le troisième alinéa de l'article, remarquez bien. C'est en tout dernier lieu qu'on mentionne: "Cependant, exceptionnellement, la commission peut..." Enfin, c'est peut-être...

M. Fontaine: Est-ce que le ministre a des commentaires à faire sur l'article 9 et les articles 3 et 4 du projet de loi no 10?

M. Bédard: Je pense que nous aurons l'occasion d'en discuter amplement lors de l'étude article par article.

M. Fontaine: Parce que la question est de savoir si...

M. Bédard: Le critère de l'ancienne loi, ou le guide de l'ancienne loi était d'avoir une carte juste et équitable. Le critère actuel est plutôt orienté vers l'égalité du vote. Je pense que ce sont deux différences assez fondamentales au niveau de la formulation des deux textes de loi.

Maintenant, si nous voulons aller plus loin dans notre réflexion lors de l'étude article par article, je pense que...

M. Fontaine: Non, mais la question est de savoir, M. le Président, étant donné l'interprétation que les membres de l'ancienne commission ou de la commission actuelle ont donnée à l'article 9 de la loi actuelle qui fait, en quelque sorte, jurisprudence, et le fait qu'on reproduise ces mêmes critères dans le projet de loi no 10, qu'on est en train d'étudier, comment la nouvelle commission va faire pour tracer une nouvelle carte électorale si elle est obligée de tenir compte de la jurisprudence et des critères.

M. Bédard: C'est essentiellement ce que j'ai répété. Nous avons la chance, aujourd'hui, de rencontrer les commissaires, de prendre connaissance, entre autres, de l'interprétation qu'ils avaient donnée aux articles de l'ancienne loi. Je pense que cette audience-là est de nature à nous aider dans la réflexion que nous aurons à faire au niveau du projet de loi 10 et je partage, d'autre part, une des opinions émises, à savoir que, quand on parle d'exceptions, il faut vraiment que ce soient des exceptions. Comme le disait M. Prémont tout à l'heure, quand on commence à additionner des exceptions, on en vient rapidement peut-être pas à une règle générale, mais à ce que les exceptions se multiplient. Je pense que, lorsqu'il s'agit de représentation de députés, le comté de chacun est presque une exception en soi. Ils ont leur manière de le voir, ils ont leur manière d'imaginer comment il devrait être découpé. Ils le sentent à leur manière. S'il faut que le mot exception donne ouverture à plusieurs cas, surtout lorsqu'il s'agit de découpage de carte électorale, à ce moment-là on n'en finirait plus d'avoir des exceptions.

M. Fontaine: Donc, il faudrait donner d'autres critères.

M. Bédard: Au moins garder le critère selon lequel, quand on parle d'exception, c'est vraiment une exception.

M. Fontaine: Étant donné que vous connaissez maintenant la volonté de la majorité des députés de l'Assemblée nationale, sauf peut-être celle du député de Châteauguay, à savoir qu'il faut nécessairement faire une différence entre les comtés ruraux et les comtés urbains, est-ce que, dans cette optique, il ne serait pas possible de penser à des districts urbains qui pourraient se rapprocher du maximum prévu, c'est-à-dire 32 000 plus 25%, tandis que les districts ruraux, eux, pourraient se rapprocher du minimum, c'est-à-dire 32 000 moins 25%?

M. Bédard: Je voudrais quand même corriger tout de suite une affirmation. Je ne sais pas à quoi fait référence le député de Nicolet-Yamaska lorsqu'il parle de volonté unanime des députés. Je ne crois pas qu'il y ait de volonté unanime qui se soit exprimée dans un sens ou dans l'autre, si ce n'est au niveau de l'énoncé du principe du projet de loi que nous avons voté en deuxième lecture. Pour ce qui est du reste, nous avons très bien spécifié, lors du discours de deuxième lecture, qu'il y avait lieu de réfléchir sur certains articles en particulier.

M. Fontaine: II y a une bonne quantité de députés qui se sont exprimés à l'Assemblée nationale en disant qu'il fallait faire une différence entre les districts ruraux et urbains.

M. Bédard: J'ai bien dit que je voulais juste corriger votre affirmation. Je ne vous dis pas qu'il n'y a pas de députés qui se sont exprimés dans le sens que vous venez de le dire concernant les comtés ruraux et les comtés urbains. Ce que je corrige c'est l'unanimité à laquelle vous avez fait allusion.

M. Fontaine: De toute façon, la question est de savoir quel critère il faudrait mettre dans la loi pour en arriver à cette solution.

M. Côté: Vous avez mentionné tout à l'heure, si j'ai bien compris, qu'il faudrait que la future commission ait la possibilité de déterminer, pour certains districts électoraux, en ayant le plus bas palier possible, 24 000, par exemple, et dans certains autres cas, le maximum. Or, dans la loi actuelle, parce que je veux donner une précision qui est en relation avec le rapport V, il est dit qu'il faut tenir compte des facteurs de variation de la population. Alors, si une carte est établie et qu'on applique systématiquement le principe que vous énoncez, on ne pourrait pas tenir compte de la variation de la population qui risque de se produire. En plus, si on prend un district électoral avec une forte densité de population qui, par exemple, au moment où on dresse la carte, est à 38 000 ou 39 000 et que le maximum serait de 40 000, pour prendre un exemple, on risque, au bout d'un an ou deux, que ce soit rapidement dépassé. Je peux peut-être vous signaler que dans le rapport V, sur 121 districts électoraux il y en a 31 qui sont en dessous de 32 000, et que ces 31, si on les regarde rapidement, sont en grande majorité des districts électoraux à caractère dit rural.

M. Fontaine: Qu'est-ce que vous penseriez, comme on le fait au Manitoba, par exemple, de la possibilité d'avoir deux critères numériques, un, par exemple, pour une densité de population urbaine et un autre pour une population rurale?

M. Côté: Je m'excuse, je reviens à la réponse que j'ai donnée là-dessus cet après-midi. Je pense que je dois insister là-dessus. C'est une décision qu'il revient, je pense, aux membres de l'Assemblée nationale de déterminer. C'est un critère, c'est une décision carrément politique qui doit être déterminée par les membres de l'Assemblée nationale, parce que c'est un problème de zonage, en fait, de détermination... Je pense que, pour nous, il est très difficile de se prononcer là-dessus.

M. Fontaine: Merci.

Discussion générale

M. Dussault: M. le Président, si vous le permettez, à cause de l'allusion de M. le député de Nicolet-Yamaska, en vertu de l'article 96, j'avais justement évité de demander l'opinion des membres de la commission à la suite des propos que j'avais tenus sur cette question des comtés urbains et des comtés ruraux, parce qu'il m'apparaissait que ce serait embêter les membres de la commission que de leur demander une réponse là-dessus.

M. Fontaine: Oui, vous avez donné la vôtre, par exemple.

M. Dussault: Moi, j'ai donné mon point de vue, parce que je trouvais que M. le député de Laval mettait beaucoup trop d'insistance sur ce critère. Je trouvais qu'accepter cela voulait dire accepter de mettre énormément d'arbitraire dans cette loi; c'est pourquoi je m'y suis refusé et je m'y refuse toujours. Ce n'est sûrement pas sur le travail que cela donne au député d'être député d'un comté X d'une certaine grandeur qu'il faudrait s'appuyer pour prendre une décision. Je dis que ce critère n'est pas bon et c'est mon point de vue personnel.

M. Fontaine: Un des critères dont il faut tenir compte...

Le Président (M. Jolivet): II ne faudrait pas engendrer une discussion. Est-ce que vous avez terminé, M. le député de Nicolet-Yamaska?

M. Fontaine: Oui, j'ai terminé.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Vanier.

M. Bertrand: J'enchaîne, M. le Président, avec le député de Nicolet-Yamaska. Vous venez de dire quelque chose, M. Côté, qui est intéressant. (20 h 45)

Vous dites que d'après le rapport V, il y a 31 comtés qui sont en bas de la moyenne de 32 000, donc 80 qui sont au-dessus de 32 000, entre 32 000 et 40 000. Est-ce que vous avez fait le calcul du nombre total d'électeurs dont on tenait compte dans la préparation du rapport no V? Divisé par le nombre de comtés que vous avez retenu, 121, cela faisait quoi?

M. Côté: Pourriez-vous répéter la dernière partie de votre question?

M. Bertrand: II y a un nombre total d'électeurs dont on a dû tenir compte pour préparer ce rapport no V, électeurs contenus dans 121 comtés projetés du Québec, tel que le définit le rapport V. Le fait que vous me disiez qu'il y a 31 comtés qui sont en bas de 32 000 et 80 qui sont en haut de 32 000 me fait croire qu'effectivement la moyenne générale du Québec, si on divise l'ensemble des électeurs dont il a fallu tenir compte pour préparer ce projet de carte électorale par le nombre de 121 circonscriptions, cela doit être quelque chose d'un peu supérieur à 32 000.

M. Côté: Cela va prendre une minute, si vous permettez, je vais consulter mes experts, je pense qu'on a la réponse sous la main.

M. Bertrand: D'accord.

M. Côté: On a de la difficulté pour se retrouver dans nos papiers, je m'excuse, on devrait être bon pour l'avoir, je pense qu'on a le chiffre, on va regarder patiemment.

La moyenne donne 33 254. C'est à la page 17 du rapport. Merci, M. Fontaine.

M. Bertrand: J'enchaîne avec une question que je voulais vous poser, M. Côté. Elle s'adresse peut-être davantage à vos deux collègues qui ont travaillé à la préparation du rapport no V et peut-être finalement à tous ceux qui ont travaillé à la préparation de l'annexe. La proposition 36 000, est-ce qu'aux yeux de la commission c'est important d'arriver à faire en sorte que dans des comtés où on évalue que le taux d'expansion, en termes de population, la progression de la population, ce taux est extrêmement dynamique, élevé... Par exemple, à Laval, on constate que ça augmente très rapidement; d'un recensement à l'autre, on voit que ça passe de 30 000 à 33 000, etc. Est-ce qu'aux yeux de la commission c'est important, puisque la loi dit qu'il ne faut pas défoncer le plafond de 40 000, de bâtir un comté qui soit autour de 32 000 ou 33 000, pour prévoir justement de tels accroissements, de telle sorte qu'on ne soit pas obligé de chambarder un comté après chaque élection générale? Ou êtes-vous plutôt d'avis, étant donné que le rôle d'une commission de districts électoraux est de se pencher sur une carte électorale chaque fois qu'une élection générale est terminée ou chaque fois que des correctifs doivent être apportés, qu'on pourrait dire: Dans toute la mesure du possible, quand on se trouve en milieu tout à fait urbain, dans des comtés à dimension très réduite, où il y a une très grande homogénéité, etc., à ce moment-là, il est préférable de faire un comté de 39 500 électeurs ou de 39 700, risquer de dépasser le plafond assez rapidement, mais d'accepter le principe qu'on le refait très souvent?

Vous allez peut-être me dire que c'est une chose qu'on devrait décider nous-mêmes. Mais d'un strict point de vue d'analyste des cartes électorales, du taux de progression de la population, des problèmes que ça pose de refaire continuellement des comtés, parce que, le taux de progression de la population étant très fort, ces comtés doivent être chambardés fréquemment, est-ce que c'est préférable pour vous — la moyenne des électeurs étant à 32 000 — de faire que ces comtés soient à 31 000, 32 000 ou 33 000 plutôt que de les mettre à 37 000, 38 000 ou 39 000? C'est une opinion que je vous demande davantage qu'autre chose.

M. Côté: Je vais vous répondre par une impression plutôt que par une opinion, cela va peut-être être plus prudent. Je ne veux pas répéter l'opinion de mes collègues, mais notre sentiment, c'est qu'il faut vraiment tenir compte de l'évolution, du changement démographique dans l'établissement d'une carte. Sauf erreur — je pourrais le préciser et c'est pour cela que j'ai dit que c'était une impression — il y a des endroits où, en établissant une carte et en essayant de faire une projection de la population, on va dire: II faudrait prévoir que ce district électoral devrait grouper 35 000 ou 36 000 personnes, pour ne pas atteindre trop facilement 40 000. Mais il y a des endroits où on peut se tromper. Il y a des endroits où c'est difficile de voir où il peut y avoir une évolution de la population, et elle ne se produit pas, en fait.

Un phénomène, à titre d'exemple, qui, pour nous, est assez frappant, c'est le sud de Montréal. Dans le sud de Montréal, il y a une augmentation très rapide de la population. Il y a certaines années, je pense qu'on aurait pu dire que cette augmentation aurait pu se produire plutôt au nord, dans l'île Jésus, et elle s'est produite plutôt au sud.

Si on ne tient pas compte de ce facteur — la deuxième partie de la réponse est la suivante — on peut être placé très rapidement dans la situation où un district électoral comprend un trop grand nombre d'électeurs, où, effectivement, la limite est rapidement dépassée. Je pense que l'autre aspect qu'il faudrait fournir à la réponse, c'est que tout dépend à quel rythme ou à quelle période de temps la carte est refaite. Si elle est refaite dans une courte période, il est relativement plus facile de tenir compte du facteur minimum ou maximum. Mais si elle est faite sur une période qui est beaucoup plus longue, à ce moment-là, l'écart est trop considérable. Au moment où la carte est

établie, il faut vraiment tenir compte de l'évolution démographique.

M. Bertrand: Le sens de ma question, M. Côté, c'est ceci. Supposons que la commission indépendante que la loi crée prépare un projet de carte électorale soumis à l'attention de la population et que, par la suite, elle prend les décisions.

Prenons un exemple où vous avez fait l'analyse qu'il y a un comté qui est en très forte progression sur le plan démographique et que ce comté, pour ne pas avoir à y retoucher avant 1988, vous le placez, pour l'instant, à 32 000, prévoyant qu'il sera autour de 39 500 en 1988. Par contre, juste à côté de ce comté, pour d'autres raisons — prenez Québec que vous connaissez bien, où il y a des comtés qui ont tendance à diminuer, en termes de population, et d'autres à demeurer très stables — il y a un comté, par exemple, qu'on installe à 39 500 parce qu'on se dit: Lui, il va demeurer stable d'ici 1988. Si on analyse les 10, 15, 20 dernières années, il y a une très grande stabilité dans ce comté sur le plan démographique.

Ceci veut dire que s'il y avait une élection en 1980, avec la nouvelle carte électorale, il pourrait y avoir, côte à côte, un comté dont le taux d'expansion, de progression sur le plan démographique, étant très élevé, on l'installe à 32 000 et, juste à côté, un autre qui est relativement stable sur le plan démographique qu'on installe à 39 500. Ceci fait que pour l'élection de 1980, il y a une très nette différence sur le plan de la représentation pour les deux comtés, mais peut-être qu'en 1988, il y aura presque une adéquation sur le plan de la population des deux circonscriptions.

C'est là que je rejoins votre deuxième commentaire. Dans le fond, tout dépend de la fréquence de chambardement, de la fréquence des interventions qu'on s'apprête à faire sur une carte électorale.

M. Côté: Mais j'ajouterais peut-être juste un autre commentaire. En tenant compte, dans le rapport V, de ces facteurs, on arrive aujourd'hui à la constatation suivante. Dans les prévisions que la commission a faites en 1976, si on regarde le recensement de 1979, après le recensement et non pas après la révision, parce qu'on n'a pas encore les rapports de la révision, il y a un seul district électoral où les prévisions que la commission a faites ont été une "erreur". C'est Laprairie. Je l'ai mentionné cet après-midi. Vraiment cela a atteint un très grand nombre.

En ayant proposé dans le rapport V, en s'en tenant aux critères de l'article 9, d'être le plus près possible du quotient établi par la loi et en tenant compte de ce facteur d'évolution démographique, je pense qu'on atteint actuellement une moyenne qui peut être relativement acceptable.

M. Bédard: Mais vous avez eu la prudence de situer, pour les comtés très urbanisés — je prends le rapport no V — un ensemble de comtés autour de 34 000, 35 000, 36 000 électeurs prévoyant qu'il y aurait une augmentation de population et qu'ils pourraient se rendre, en l'espace d'une élection, peut-être à 38 000, 39 000 ou 40 000 électeurs.

M. Côté: Oui, je dois vous dire qu'il y a un autre facteur qui intervient qui est assez important. Je pense que c'est une préoccupation de la commission. Mes collègues pourront me corriger si l'opinion que je vous donne est fausse. Ce que j'ai compris du rapport V et des rapports antérieurs, c'est qu'il y a une autre préoccupation qui domine, soit celle de s'efforcer dans toute la mesure du possible de ne pas trop modifier les limites des districts existants. C'est un facteur qui nous semble passablement important. Je l'ai mentionné cet après-midi, n'importe qui pourrait établir une carte électorale, une répartition des districts électoraux en s'amusant, en divisant, etc., mais il y a quand même d'autres facteurs dont on doit nécessairement tenir compte. Je pense que vous êtes les premiers conscients de ce facteur qui est très important, c'est le sentiment d'appartenance des gens à un district électoral. On sait très bien que, quand on fait une proposition de modification, d'ajout ou de diminution, cela affecte une limite. Pour nous, ce n'est jamais un travail intéressant, ce n'est jamais un travail qui est fait de gaieté de coeur. C'est un autre facteur, je pense, dont on doit tenir compte.

M. Bertrand: Je suis tout à fait d'accord avec vous, M. Côté, d'autant plus que, si ce sentiment d'appartenance d'une population à son comté est vrai, l'inverse est aussi vrai. Il y a un phénomène d'appartenance ou de relation d'un député avec son électorat. C'est assez agaçant jusqu'à un certain point de vue — on admettra que, malheureusement, toute réforme de la carte électorale nous place dans cette situation — pour un député qui dessert une circonscription électorale donnée pendant quatre ans, huit ans ou douze ans d'apprendre un beau jour qu'on l'ampute de 30% de l'électorat de son comté pour lui substituer 30% d'un autre électorat avec lequel il n'a jamais eu de relations et de contacts pendant plusieurs années. C'est effectivement très agaçant. J'avoue avec vous que le problème du chambardement est très important.

Une dernière question, M. Côté. Vous arrivez à cette Commission de la réforme des districts électoraux, mais vous aviez une longue expérience auparavant d'administration de carte électorale ou d'administration d'élections au niveau municipal et, plus particulièrement, dans la ville de Québec. Or, permettez-moi, comme président du caucus régional de Québec, de vous poser une question spécifiquement là-dessus. Nous avons dans la ville de Québec — vous les connaissez mieux que moi à cause de votre expérience — des districts naturels qui ont une longue tradition sur le plan de leurs appartenances. Je pense particulièrement au district Limoilou de Québec. Or, on constate une chose. Je prends cet exemple-là pas parce que je voudrais qu'on parle seulement de cela, mais parce que cela peut aussi être révé-

lateur pour bien d'autres circonscriptions électorales. Le quartier de Limoilou en ce moment est littéralement divisé entre deux comtés, le comté de Vanier... D'ailleurs, c'est assez amusant parce que, là encore, il y a toujours un problème de dénomination de comté. Les gens m'appellent le député de ville Vanier, alors qu'en réalité, la ville de Vanier compte pour 12% de l'ensemble de mon comté et que, là-dedans, 35% sont dans Limoilou. Même si j'ai 35% de mon comté dans Limoilou, le comté de Limoilou, c'est celui qui est à côté. Il y a quand même des problèmes réels à ce niveau-là, sur le plan de l'identification des comtés. Déjà, en ville, ce n'est pas facile d'identifier un comté pour la population. L'appellation pose des problèmes très sérieux.

M. Fontaine: Surtout quand il s'agit d'identifier le député de Vanier?

M. Bertrand: II n'y a pas de problème. Il est très bien identifié, ne craignez pas là-dessus. Vous viendrez faire un tour. Je prends le quartier de Limoilou comme tel, M. Côté. Le quartier de Limoilou est actuellement divisé littéralement entre deux comtés, cinq paroisses dans un comté et six dans l'autre. Or, la partie de Limoilou qui est dans le comté de Limoilou a aussi, rattachée à elle, la moitié de l'ancienne ville de Giffard qui, maintenant, fait partie de la ville de Beauport, laquelle ville de Beauport est entièrement, sauf pour la partie Giffard, contenue dans le comté de Montmorency qui est à côté. C'était l'ancienne carte électorale.

Dans le cinquième rapport, loin de tenter de réintégrer Limoilou dans son centre naturel qui est le quartier même de Limoilou, on prolonge dans la ville de Beauport et on va chercher tout le reste de Giffard, ce qui fait qu'une partie de la ville de Beauport, qui est quand même une entité naturelle, est amputée de toute l'ex-ville de Giffard et, en plus, Limoilou continue d'être encore plus divisé, parce qu'on ajoute encore une paroisse de Limoilou dans le comté de Vanier. On en enlève donc une dans Limoilou. (21 heures)

En d'autres mots, on dirait qu'à certains moments les découpages de carte électorale se font pour déchirer encore davantage certains milieux très naturels. Pourquoi ne fait-on pas des efforts supplémentaires pour tenter, au contraire, de faire coller les circonscriptions électorales à des quartiers qui sont connus comme étant très naturels; je pense, en particulier, à celui de Limoilou?

M. Côté: Le problème que vous soulevez est, en fait, celui que j'ai qualifié ce matin de ressort, du fait qu'il faut considérer une région dans son ensemble et essayer, dans cet ensemble de la région, d'en arriver à délimiter des districts électoraux selon les critères établis. J'ai des réponses plus précises ici, mais je vous réponds, en première réaction: Si on tenait compte des facteurs que vous mentionnez, qui sont des facteurs de milieu naturel où les gens se reconnaissent plus facilement, vous parlez d'un district électoral municipal où les gens se retrouvent très facilement, le quartier Untel et le quartier Untel, pourquoi ne le laisse-t-on pas très carrément dans tel district électoral? C'est quasi insoluble, à mon avis, de réaliser cela tout en ne chambardant pas toutes les limites des autres districts. On peut peut-être réussir, dans une région donnée, à le faire, mais j'en douterais à cause de la réaction que cela aura sur l'autre région. Quand on considère une région pour établir les limites des districts électoraux dans une région donnée, il faut aussi qu'on la considère dans l'ensemble, qu'on considère cette région et les effets de la décision pour cette région sur l'ensemble de la province, sans cela, il y a ce que je qualifiais cet après-midi de réactions en chaîne qui sont automatiques. Je ne sais pas si je me fais assez bien comprendre et si cela répond à votre question.

M. Bertrand: Oui, cela répond en partie, bien sûr. Je comprends la complexité du problème devant lequel vous vous trouvez placés, mais je crois que l'éventuelle commission indépendante devra comprendre aussi que, bien que vous soyez contraints dans certains cas de faire des choses que vous-mêmes trouvez difficiles à faire, nous, par la suite, on doit vivre avec. Les populations qui vivent dans ces comtés ont à vivre avec. La consultation qui sera menée par la commission indépendante sera révélatrice, à ce point de vue, des difficultés très réelles que des gens ont à vivre. Des quartiers qui, pour eux, sont vraiment naturels sont un peu disloqués à cause de la complexité des problèmes que vous avez à vivre. Pour eux, cela devient peut-être un problème encore plus grand, étant donné qu'ils ont chaque jour, dans le quotidien, à saisir en même temps leur appartenance à un milieu tout à fait naturel et comprendre que cela chevauche sur deux comtés différents. À un moment donné, ils ne savent plus exactement à qui s'en remettre.

M. Côté: Me permettez-vous deux commentaires rapides? Vous avez raison sur ce problème qui n'est pas facile à résoudre et qui a deux réponses. La première, je l'ai mentionnée cet après-midi et je la répète, c'est à partir d'expériences qu'on a vécues dans les villes de Montréal, Longueuil, Jonquière, où la future commission va certainement trouver un très grand profit d'avoir à consulter les gens. Non seulement cela va fournir un éclairage nouveau, mais cela va compléter le travail que des employés de la commission font eux-mêmes. J'ai mentionné que les employés de la commission avaient marché littéralement treize villes. Selon un dicton — les géographes n'aiment pas quand je leur mentionne cela, mais c'est vrai — la géographie s'apprend par les pieds. C'est ce que les fonctionnaires de la commission ont fait et c'est ce qu'ils continuent de faire. Il faut vraiment connaître les limites naturelles, par exemple, les caractéristiques d'un quartier. Comme le projet de loi le prévoit, si on permet que les gens expriment

leur opinion, leur sentiment d'appartenance, cela peut certainement n'être que très profitable à la commission, mais il va rester quand même des problèmes. Il va falloir trancher, à un moment donné, et dire: C'est bien regrettable, même si vous avez tel sentiment d'appartenance, mais à cause de tel ou tel critère qui est déterminé dans la loi, il va falloir trancher.

Seulement un exemple, dans le cas de la région de Québec, on me signale que le district électoral de Taschereau voit sa population diminuer annuellement, constamment. Il va falloir, si on veut garder le district électoral de Taschereau avec un certain critère, aller chercher ailleurs. Alors, il faut aller chercher dans la région immédiate. Ce sont seulement les remarques que je peux vous faire. Cela répond en partie à votre question, je pense.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Roberval.

M. Lamontagne: M. le Président, c'est sans doute la dernière fois que j'interviens avant mon collègue de Laval. Avant de nous quitter, il faut se rappeler peut-être certaines choses, c'est que nous, les parlementaires, serons appelés, à compter du 15 novembre prochain, je crois, à siéger en commission parlementaire pour l'étude article par article du projet de loi no 10.

Au terme de ce projet de loi, s'il était adopté tel que rédigé, nous aurions une commission indépendante décisionnelle. Tout à l'heure, le député de Vanier disait: Lorsque la commission indépendante sera nommée... J'espère qu'il ne voulait pas faire état que vous ne représentiez pas une commission indépendante, mais plutôt qu'il voulait dire: Nous aurons une commission indépendante décisionnelle.

M. Bédard: Ce soir, sur ce point spécifique, je pense que les commissaires ont fait une mise au point au début de nos travaux qui a clairement exprimé qu'ils avaient eu à travailler...

M. Lamontagne: C'est parce que le député de Vanier a dit...

M. Bédard:... d'une manière très indépendante...

M. Lamontagne: ... lorsque la commission indépendante sera nommée.

M. Bédard: ... avec aucune pression.

M. Bertrand: Est-ce que ça peut vous rassurer si je dis qu'effectivement je ne faisais pas référence à la commission indépendante, mais au fait que la commission indépendante aura à consulter?

M. Lamontagne: II est évident que vos collègues, M. Côté et vous-même, depuis plusieurs années, avez acquis une très grande expérience à la suite des mandats successifs qui vous ont été donnés par le Parlement pour confectionner une carte électorale au Québec. Vous êtes donc plus à même que d'autres d'évaluer des difficultés auxquelles vous avez eu à faire face.

M. le juge, tout à l'heure, précisait, malgré sa qualité de juge, qu'il avait été obligé, avec ses collègues, de scruter les intentions véritables du législateur. Imaginez, ça nous fait sursauter un peu! J'en conviens bien, parce que nous, également, nous avons été obligés de le faire.

Il me semble qu'il aurait été extrêmement souhaitable qu'avant que nous commencions cette étude du projet de loi no 10 en deuxième lecture vous ayez pu nous présenter un rapport contenant vos propositions, à vous, compte tenu de votre expérience là-dedans.

Par exemple, il s'est dit beaucoup de choses. Vous avez dit, M. Côté, que, sans aucun doute, les parlementaires, on ne les changera pas. Ils dépassent parfois leur pensée, c'est évident et ça va toujours être comme ça.

Mais, au fond de tout ça, il y a des questions sérieuses qui ont été posées et vous êtes, vous, sans aucun doute, en mesure de nous préciser, au point de vue pratique, ce que le législateur devrait vous proposer pour éviter d'être obligé de passer de longues heures ou de longues journées à nous interpréter. C'est un mauvais départ quand vous ne savez même pas ce qu'on veut vous dire.

On ne connaît pas tout à fait les intentions du gouvernement mais, comme deux commissaires, suivant ce qui est suggéré par le gouvernement, devront être permanents, j'ai l'impression qu'il y en a qui vont retrouver leurs fonctions personnelles.

Donc, il me semble qu'il y aurait comme une espèce de testament que vous devriez nous laisser. À titre d'exemple, je vais vous poser certaines questions et il me semble qu'on pourrait y répondre avec précision.

Plusieurs auteurs depuis le rapport Grenier, en 1962, en particulier disent que, lorsqu'un Parlement décide de faire une carte électorale, il doit d'abord indiquer le nombre de comtés sur lesquels il veut que sa carte porte.

Dans le cas présent, on laisse à la commission indépendante décisionnelle le soin de décider, dans une province, combien il y aura de comtés. Nous maintenons — nous l'avons dit le 6 décembre dernier — que le Parlement, l'Assemblée nationale, devrait, dans son projet de loi no 10, vous indiquer combien il y aura de députés. J'aimerais connaître votre opinion sur ce sujet. Vous avez une expérience dans ce domaine.

Également, écoutez... Là, évidemment, je ne sais pas si vous pouvez émettre une opinion, mais je voudrais simplement rappeler ce que le député de Nicolet-Yamaska vient de mentionner tout à l'heure.

Il faut bien que nous prenions les choses qui nous ont été dites. Le 6 décembre 1978 — ça fait presque un an — le représentant officiel du gouvernement — cela a été, par la suite, notre souci constant — nous a parlé de mode de scrutin, nous

a parlé d'un train de lois et on ne sait plus à quelle place elles sont. Mais c'était un engagement formel du gouvernement. Là, le ministre ici, le successeur, nous dit: Écoutez, ça nous prend un échéancier, mais il ne nous dit pas que le mode de scrutin est enlevé. Il nous dit: II n'est pas aux calendes grecques, mais aux calendes. Tout en vous provoquant, j'espère que vous nous direz, tout à l'heure, s'il y aura un nouveau mode de scrutin, oui ou non, pour les prochaines élections provinciales.

M. Bédard: Vous ne me provoquez pas; vous interprétez mal.

M. Lamontagne: Non, mais, à un moment donné... Votre prédécesseur nous a dit qu'il y aurait une loi concernant le mode de scrutin. Depuis que vous lui avez succédé, vous n'avez pas dit, vous, qu'il y aurait une réforme du mode de scrutin, de sorte que les formations politiques...

En tout cas quant à nous, nous avons siégé sur le mode de scrutin, nous avons manifesté notre intention de concourir avec le gouvernement pour équilibrer la distorsion qu'on retrouve dans certains comtés.

Également, vous nous avez fait part, M. Côté, du fait que vous aviez reçu de nombreuses représentations de différentes régions du Québec. Il m'apparaît, M. le Président, qu'il serait utile aux membres de la commission d'avoir un dépôt de toute représentation, une copie de toute représentation faite à la commission. Nous sommes tout de même les parlementaires qui devront, dans quelques jours, étudier le projet de loi qui ordonnera à la nouvelle commission indépendante décisionnelle, si elle agit comme ça, de faire une carte électorale. Il me semble qu'on devrait nous fournir tous les éléments pour nous permettre d'améliorer, si possible, ce projet de loi-là.

On parle des exceptions, des Îles-de-la-Madeleine, et vous avez mentionné quels critères vous avaient guidés dans le projet de loi et également dans la confection de la carte électorale. J'aimerais savoir de vous, compte tenu de votre expérience au cours des dernières années dans la confection de la carte électorale, du rapport V, si vous suggéreriez au Parlement, à cette commission, d'avoir plus d'une exception, en plus de celle des Îles-de-la-Madeleine qui est reconnue par tous. Je pense que tout le monde conviendra ici facilement et rapidement qu'on ne peut pas étendre ces exceptions, mais dans la confection de votre carte électorale no 5, est-ce que vous, si vous n'aviez pas eu une contrainte que vous avez voulu répéter, vous auriez été d'avis d'avoir une autre exception? Sans la nommer, vous avez dû passer là-dessus... Il m'apparaît que votre opinion deviendrait pour nous fort enrichissante ainsi que de vivre avec vous vos préoccupations, de sorte que, redonnant un mandat à une nouvelle commission qui sera nommée par la loi 10, nous soyons guidés dans l'étude du projet de loi 10 par les difficultés que vous avez pu vivre.

Nous avons parlé aussi, la loi antérieure, la loi actuelle, c'est-à-dire, parle d'un critère de 32 000 électeurs. Le 6 décembre, la commission, unanimement, c'est même, en dernier ressort, le ministre qui avait dit: Mettons-nous d'accord pour qu'il y ait une étude, comme hypothèse exclusivement de travail, portant sur 36 000 électeurs. Vous avez fait rapport et nous vous en remercions beaucoup. Mais, en même temps, on a 32 et on a 36. Nous, le 15 novembre au matin, avec le ministre, on va commencer là-dessus. C'est un sujet extrêmement important dans nos décisions. Est-ce qu'on va suggérer 36, 35, 34? À ce moment-là, est-ce que vous pourriez nous aider à prendre une décision commune dans l'étude de ce projet de loi? Est-ce que vous avez certains faits qui pourraient nous permettre d'avoir une opinion éclairée à l'occasion de l'étude du projet de loi no 10?

Ce sont quelques questions que je voulais poser et je reviens en dernier ressort... Je comprends que vous allez devoir donner le résultat de vos études personnelles à l'autre commission, mais il m'apparaît que toute représentation qui vous a été faite par des organismes ou municipalités devrait être remise aux membres de la commission, lesquels pourraient être aidés ainsi dans l'étude du projet de loi no 10.

C'était une série de questions; il serait utile d'avoir vos réponses là-dessus.

M. Côté: J'en ai noté cinq, M. Lamontagne, vous me corrigerez s'il y en avait une autre supplémentaire. Dans la première, j'ai compris que vous aviez été surpris du fait qu'on avait interprété le texte de la loi. Je pense que c'est un phénomène...

M. Lamontagne: Excusez-moi. Je n'ai pas été surpris, mais on l'a sans doute mal rédigé.

M. Côté: C'est pour ça que je voudrais compléter en ce sens. Je pense que, comme vous l'avez dit, il n'y a rien de surprenant là. Un texte de loi, une fois qu'il est rédigé, doit trouver son application, et pour trouver son application, il doit parfois être interprété. Tout ce que je peux vous répondre à cet égard, c'est que pour pouvoir bien appliquer une loi, il faut bien comprendre l'intention du législateur. C'est au législateur à exprimer le plus clairement possible son intention. C'est la seule réponse que je peux vous fournir là-dessus.

Quant à la deuxième question, vous avez demandé quelle serait notre opinion... Je m'excuse... (21 h 15)

M. Lamontagne: Excusez-moi, M. Côté. Justement, comme c'est le législateur — là, vous ne répondez pas à la question — pourriez-vous aider le législateur à mieux rédiger cet article d'un projet de loi?

M. Côté: La seule chose que je peux vous répondre là-dessus... Cela va être la même réponse pour un certain nombre d'autres questions, sauf pour la troisième où je pense, si le voeu en est exprimé, on pourrait le fournir très rapidement.

À la troisième question, vous avez demandé d'avoir copie de toutes les représentations qui ont été faites. Personnellement, je ne vois pas de difficulté, mais, pour les autres questions, c'est le même genre de réponse que...

M. Lavoie: Combien avez-vous eu de représentations?

M. Côté: Si je ne me trompe pas — j'ai donné le chiffre ce matin; je vous le donne sous réserve d'inventaire, si vous le permettez — c'est de 88 à 90; 88, c'était au mois d'août et on en a eu une couple depuis ce temps-là. Je vous le donne sous réserve, parce que le document que j'ai ici comporte également des commentaires des journaux et j'espère que le chiffre de 88 ne comprend par les articles qui ont paru dans les journaux. C'est pour cela que je vous le donne sous toute réserve. Je voudrais refaire le calcul. De toute façon, personnellement, je ne verrais pas de difficulté, tout au contraire, à fournir des réponses aux membres de la commission, si vous en exprimiez le voeu. C'est déjà une réponse, M. Lamontagne, que je vais vous faire pour les autres demandes que vous faites. Si la commission formule le voeu que nous vous fournissions certaines opinions ou certains commentaires, on fera l'impossible pour vous donner des réponses ou vous soumettre des suggestions.

Il y a une question qui était très précise. Je pense que je peux vous répondre là-dessus. Vous demandiez si on suggérerait plus d'une exception, selon l'expérience qu'on a vécue jusqu'à maintenant. Après avoir consulté rapidement mes collègues, en ce qui nous concerne, je ne pense pas qu'on en arriverait à la conclusion d'en soumettre plus d'une à cause du principe qu'on a établi tout à l'heure que, si on en arrive à soumettre plus d'une exception, quand est-ce qu'on arrêtera? On tombe dans le travers d'en avoir un très grand nombre et l'exception deviendrait la règle générale. C'est le principe qui nous anime.

M. Lamontagne: Votre réponse nous guide pas mal. Autrement dit, si vous êtes d'avis, avec votre expérience, de ne pas en suggérer plus d'une, cela va nous aider également dans le projet de loi.

M. Côté: Je vous dis quelle est la constance de la commission jusqu'à maintenant et dans tous les rapports. Vous avez demandé notre opinion sur le nombre de députés. Est-ce que le critère est de 32 000 ou 34 000 ou 36 000? Là-dessus, la seule réponse que je peux vous faire, c'est que, s'il y a un voeu qui est exprimé par la commission ou une demande formelle, on pourrait se pencher sur ces questions-là. Mais je ne crois pas que ce soir nous serions en mesure de vous donner des réponses satisfaisantes, d'autant plus que je tiens à répéter ce que j'ai mentionné à plusieurs reprises aujourd'hui qu'à mon avis il y a des questions qui sont carrément et clairement des décisions politiques et qui appartiennent aux membres de l'Assemblée nationale.

Je pense qu'il faut quand même protéger les membres de la commission actuelle d'une intervention qui pourrait être interprétée ou qui pourrait prendre l'allure d'une intervention à caractère politique. Je crois que la commission — je l'ai mentionné au tout début — a toujours agi dans l'exercice de ses fonctions d'une façon indépendante et je pense qu'il faut conserver ce caractère et tout faire pour ne pas impliquer la commission dans un débat politique ou dans une question qui est carrément politique. Mais je répète que s'il y a des voeux exprimés de la part de la commission pour que nous vous soumettions des réflexions et des commentaires, c'est évident que, comme nous l'avons fait au mois de décembre, dans toute la mesure du possible, nous le ferons.

M. Lamontagne: Avant de passer la parole à un autre, je profite de l'étude du projet no 10 pour dire qu'à ce qu'il semble, suivant les fonctions que vous occupez tous les trois actuellement, le gouvernement — je peux me tromper, le ministre pourra le dire lui-même — ne nommera pas ceux qui sont là actuellement.

M. Bédard: Vous tenez pour acquis des choses. Ne présumez donc de rien. À l'heure actuelle, on a une commission indépendante devant nous. On va voter un projet de loi et le gouvernement et les oppositions auront à prendre les décisions appropriés. Tout le monde sait qu'effectivement les oppositions vont avoir leur mot à dire, puisque toute nomination se fait aux deux tiers et que le parti gouvernemental ne représente pas les deux tiers. Alors, il ne faudrait quand même pas indirectement tenir des choses pour acquises. Je ne tiens jamais rien pour acquis.

M. Lamontagne: M. le ministre, je pense que vous saisissez mal mon intervention.

M. Bédard: Pour le moment, ce qui est important, c'est la loi 10 que nous avons à étudier. Je pense qu'une fois qu'elle sera adoptée la deuxième chose importante sera de faire les nominations qui devront être faites, mais chaque chose doit venir en son temps.

M. Lamontagne: Excepté que si ce ne sont pas les mêmes membres qui sont nommés, ils pourraient, sans impliquer leur commission actuelle, fournir un précieux témoignage d'experts aux parlementaires.

M. Bédard: Je crois que M. le président a réitéré tout à l'heure l'indépendance de la commission permanente qui est devant nous, également sa préoccupation qu'elle le demeure et, de ce fait, ne s'oriente pas dans des opinions qui relèvent d'une décision politique. Je pense que c'est une attitude très responsable de la part des membres de la commission. Certains prétendaient, en deuxième lecture, que les députés étaient capables de voter une carte électorale. Je pense que les députés sont capables de réfléchir, en

commission, sur le projet de loi 10 pour en arriver au projet de loi le plus équitable possible.

Le Président (M. Laberge): M. le député de Laval, vous aviez demandé la parole, je crois.

M. Lavoie: Merci, M. le Président. Je remercie les membres de la commission de nous apporter leur éclairage. L'expérience qu'on a aujourd'hui, — je pense que le ministre et tous les membres de cette commission vont le reconnaître — c'est que cette commission aurait dû avoir lieu avant d'aborder l'étude en deuxième lecture du projet de loi, parce que les membres qui sont là depuis une dizaine d'années nous ont apporté des éléments qui portent à réflexion.

Dans cette loi, il y a des principes, il y a beaucoup de technique, il y a beaucoup de détails et il y a beaucoup de portée. Je me pose énormément de questions. Une des questions que je me pose, c'est qu'on a, dans l'ancienne loi et dans la nouvelle loi, les mêmes critères pour la confection, la délimitation des comtés. À partir des mêmes critères, il y a eu un cinquième rapport et on sait que, de chaque côté de la Chambre, il y a des insatisfactions. Je ne parle pas au nom des députés, je parle au nom de la population qu'on représente. Il y a eu 90 représentations. J'imagine que ce ne sont pas des individus; j'en ai eu des municipalités, de corps publics, de chambres de commerce. Je vous dis une chose: Je me pose des dizaines de questions.

Est-ce que les critères que nous avions dans l'ancienne loi, de 32 000, 25% en plus ou en moins, après dix ans d'expérience, on l'a vu aujourd'hui, dans l'interprétation que les commissaires ont fait de la loi, cela a été un genre de corset arithmétique? Je ne les blâme pas — avoir été à leur place, j'aurais peut-être fait la même chose — de l'interprétation qu'ils ont faite de la loi, du premier paragraphe, et de considérer le dernier paragraphe comme une exception. J'aurais peut-être fait comme eux.

Si on continue ça, si la commission a la même interprétation du nouvel article 3, on peut se réveiller, M. le Président, avec 4 200 000 électeurs au Québec, divisé par 32 000, qui est la première règle. Si c'est ça l'interprétation des lois, on peut se réveiller avec 130 députés. 130 députés, si ça varie un peu plus dans certains comtés, en haut de 32 000 et un peu plus en bas de 32 000. Avec cette rigidité de ce critère arithmétique, on peut se réveiller avec 130 députés, parce que si vous divisez 4 200 000 par 32 000, vous arrivez à 130. Bon.

Je pense que ce n'est pas l'intention du législateur. On laisse ça à une commission indépendante. Les députés, je le reconnais, ne sont pas des maîtres absolus et des experts, et laisser ça aux députés, on n'en sortirait pas, je suis d'accord avec vous. Mais aller à l'extrême, confier ça à des gens complètement en dehors de l'expérience parlementaire, avec toute la science qu'ils peuvent avoir, des politicologues et tout... autant on est peut-être trop près de la réalité, autant ils sont peut-être trop loin de la réalité et de l'expérience pratique également.

Ce sont des questions que je me pose, j'ai le droit de me les poser, personne ne m'a encore apporté de réponses. Je pose une question. Une nouvelle commission, ce qu'on appelle une nouvelle commission permanente, je ne sais pas où est la différence parce que la vôtre est également permanente, indépendante — on sait que vous avez été indépendants et la nouvelle, j'espère qu'elle va l'être — comme nouvelle commission en vertu de la loi 10, avec les mêmes critères, mutatis mutandis, parce que les critères sont à peu près les mêmes dans les deux lois, fondant son travail sur votre travail. C'est écrit dans la loi.

Voici ma question: Est-ce que vous croyez que cette nouvelle commission va arriver avec des conclusions substantiellement différentes des vôtres? Ma question est posée au président.

M. Bédard: Je comprends, mais...

M. Lavoie: Une nouvelle commission, avec les mêmes critères, se fondant sur votre travail, est-ce qu'elle va arriver avec des conclusions différentes de votre rapport V?

M. Bédard: Vous oubliez la consultation populaire.

M. Lamontagne: Mais les critères n'ont pas changé.

M. Bédard: Le cinquième rapport, après une consultation populaire, peut apporter de grands changements, même au cinquième rapport.

M. Côté: Je vais vous dire bien franchement, M. Lavoie, que je ne crois pas qu'il soit possible de répondre facilement à votre question, parce qu'il y a trop d'inconnues pour pouvoir y répondre, à mon avis. Pour être bien honnête, je vais vous répondre carrément que ce n'est pas tenir compte des autres facteurs qui interviennent dans la nouvelle loi et en particulier celui de la consultation. Il y a la composition de la future commission qui va avoir à remplir son rôle, à interpréter ou comprendre son rôle et de quelle façon ce sera exprimé. Je trouve que votre question est trop hypothétique pour pouvoir y répondre, en ce qui nous concerne.

M. Lavoie: Ma réponse serait peut-être semblable à la vôtre.

Entre la loi existante, l'ancienne loi, et la loi qui a passé l'étape de la deuxième lecture, quelle différence y a-t-il, M. le Président? C'est une autre question que je me pose. Je me la pose à moi.

M. Bédard: M. le Président, il doit y en avoir.

M. Lavoie: Non, c'est moi qui ai la parole. Vous parlerez après.

M. Bédard: Je pensais que vous me posiez la question.

M. Lavoie: Non, je me la pose à moi.

M. Bédard: Je peux vous répondre.

M. Lavoie: Voici les différences que j'y vois.

M. Bédard: Vous avez voté pour l'une et vous avez voté contre l'autre. Il y a une différence au moins.

M. Lavoie: J'ai l'impression que c'est à peu près la même chose.

M. Bédard: Expliquez-moi votre vote différent, si c'est la même chose.

M. Lavoie: M. le Président, il s'agit de deux commissions. La vôtre, je pense bien qu'elle est permanente, qu'elle est indépendante, je l'espère. D'après mes informations, vous avez une vingtaine de fonctionnaires au service de votre commission, à temps complet, démographes, géographes, etc. Je pense que c'est la même chose dans la nouvelle commission.

Les critères sont pratiquement les mêmes. Ce qu'il y a de différent, grosso modo, c'est que les membres, possiblement, vont changer, parce qu'un juge ne peut pas être fonctionnaire de l'État à temps plein.

Et sur cette question décisionnelle, encore là, je me demande s'il n'y aurait pas moyen de trouver un moyen terme lorsque nous étudierons le projet de loi article par article. Je reconnais que les députés ne doivent pas être les seuls à la confectionner — d'ailleurs, il y en avait une commission avant — je rejette la capacité des parlementaires de la faire eux-mêmes. C'est clair. Mais je rejette autant de laisser tout à des gens en dehors, possiblement, de l'arène politique. Il y a peut-être un moyen de trouver un moyen terme.

Je ne critique pas le travail qui a été fait dans le cinquième rapport, c'est peut-être à cause du corset arithmétique qu'ils avaient. Mais on peut se réveiller, pas les députés, mais la population, avec un rapport qui sera loin de faire un consensus et de rejoindre l'unanimité, non seulement des députés, mais de la population. On peut trouver un rapport qui rejoindra plus les aspirations de la population ou peut-être moins. Et ce rapport deviendra un décret du gouvernement.

(21 h 30)

Ce sont quand même de lourdes responsabilités, M. le ministre. Je pense que c'est relié aux critères et tout cela. On fait le point actuellement, après dix ans d'expérience de cette commission-là, après neuf ans. C'est normal qu'on fasse le point. En faisant le point, il faut se poser des questions sur la nouvelle commission. Sauf pour la question décisionnelle et peut-être la nomination de certains autres membres, il n'y a rien en profondeur. Ne me dites pas que c'est parce que ce sera des auditions publiques que cela change énormément. Il n'y avait rien dans l'ancienne loi qui vous empêchait de tenir des auditions publiques. Il aurait pu y avoir des auditions publiques, il n'y avait rien qui l'empêchait.

M. Bédard: Oui, mais entre cela et les légaliser, obliger à des auditions publiques, je pense qu'il y a peut-être une différence.

M. Lavoie: Quand même! Il y a un autre point qui a été soulevé par le député de Vanier, je crois, à bon titre, et je me demande s'il n'a pas été soulevé par le député de Rosemont également. On est contre les chambardements de la population, des électeurs ou des délimitations de comté, et on fait encore le point sur le travail de 9 ans.

Ce qui me renverse, c'est qu'il y a eu énormément de chambardements. Prenons le comté de Rosemont, entre autres. En vingt ans — ce n'est pas énorme vingt ans — le comté de Rosemont va changer pour la quatrième fois. Comme député de Laval, la prochaine fois — probablement que je serai candidat; je vous annonce quelque chose — je serai candidat dans un cinquième comté différent. Ce sera mon cinquième comté différent la prochaine fois. Des électeurs que j'ai perdus en 1966, il est question que je les reprenne actuellement. D'ailleurs, ils s'ennuient depuis ce temps-là et ils vont me donner leur appui. J'en ai déjà l'assurance. Mais ce sont des chambardements!

M. Bédard: Les autres vont vous lâcher!

M. Lavoie: Ce sont des chambardements. Je serais curieux de voir vos troisième, quatrième et cinquième rapports qui n'ont pas eu force de loi dans tous les comtés de Montréal. Vos troisième, quatrième et cinquième rapports ont tous changé, je crois, les délimitations des comtés de la région de Montréal, même s'il n'y a pas eu de suite par une loi. Ils les ont tous changées. Je me pose la question à savoir si on a les bons critères.

Les autres Parlements sont assez rares qui ont le même critère que le nôtre: une moyenne d'électeurs avec une différence de 25% en plus ou en moins. D'après mes recherches, ils sont assez rares. Je me pose la question encore. Je me demande si ce ne serait pas mieux d'avoir une décision du Parlement qui dirait qu'on veut 110 ou 115 comtés, de les diviser selon la population et laisser à la commission plus de latitude, à condition qu'il y ait un mécanisme, que cela revienne devant l'Assemblée dans un certain débat limité. Prenons, un exemple, les 4 200 000 électeurs du Québec. Par une décision parlementaire, on dit qu'il y a 110 députés au Québec. On fait la moyenne, 38 000 électeurs. En donnant une latitude à la commission, on pourrait dire qu'entre le plus haut et le plus bas, en partant du plus haut, il ne devrait pas y avoir plus de 40% de différence. C'est cela la différence qu'il y a actuellement. Si on prend 32 000, ce qui peut aller à 40 000 ou 24 000, cela fait 40% du plus haut, du plus populeux. Je me demande si ce ne serait pas encore mieux que de prendre 32 000 ou 36 000. Ce sont des questions que je me pose. Si on donne comme critères 32 000 ou 36 000, que c'est l'interprétation de la loi et que vous devez vous coller à cela, personnellement, comme parlementaire, selon l'opinion dps membres de cette commission, on ne rejoint pas,

avec cette interprétation-là, ce que la loi veut dire, je pense. Cela n'est pas une solution souhaitable. Peut-être qu'il y aurait moins de chambardements de populations... Ce critère de 32 000 ou 36 000, 25% en plus ou en moins, va amener... La loi dit surtout qu'après chaque élection, il faut une révision. Je pense qu'en continuant dans cette voie-là, il va y avoir des chambardements de populations à tous les quatre ou à tous les cinq ans. C'est cela que je voudrais éliminer.

C'est sûr que cette commission nous a apporté un éclairage des plus valables. Moi-même, j'ai fait un exercice à partir du dernier recensement ou des derniers chiffres que nous avons du nombre d'électeurs dans chacun des comtés. J'arrive à la conclusion qu'il y a un problème majeur. Peut-être que je simplifie. Je suis peut-être trop pragmatique, je m'en excuse auprès de tout votre personnel et de toute votre équipe. Je trouve qu'il y a un problème majeur, à mon point de vue, c'est l'Abitibi-Est; avec l'impact de la Baie James, il y a 48 000 électeurs dans ce comté. Je vois que c'est un problème assez majeur.

Je vois trois problèmes moyens au Québec, qui ne sont pas insolubles, mais auxquels une commission doit apporter une solution. C'est la région de Québec, avec des comtés comme Taschereau et Jean-Talon où le nombre d'électeurs est très bas, 29 000 et 30 000, et d'autres comme Chauveau et Charlesbourg. La région de Québec, j'appelle cela un problème à solution moyenne. Je vois la rive sud de Montréal où il y a des comtés comme Taillon et d'autres; c'est une région que vous pouvez étudier. Je vois le problème des Laurentides, partant de L'Assomption, Terrebonne, Prévost où, dans une poche sectorielle, il y a certains problèmes.

Je dis qu'il y a sept problèmes assez mineurs dans la carte que nous avons actuellement, c'est l'île Jésus. Ce n'est pas la fin du monde. On pourrait trouver deux comtés assez saturés qui ne bougeraient plus et deux en expansion. Je vois Bonaventure, Deux-Montagnes, 43 000, c'est peut-être un peu fort; Duplessis, Joliette-Montcalm, Richmond et Matapédia. Je laisse toujours de côté les Îles-de-la-Madeleine. Avec l'approche que je fais, il y a 31 comtés sur l'île de Montréal où on peut garder le même nombre et possiblement même les réduire, parce qu'une moyenne de 33 000 ou de 34 000, à mon point de vue, ce n'est pas suffisant pour des comtés urbains. Cela peut facilement se rapprocher de 45 000. Il y en a huit dans la région de Québec. Mon approche, c'est qu'il y a 44 comtés en province qui n'auraient pas d'affaire à bouger de frontière, qui varient entre 29 000 et 40 000 environ. Ce n'est pas la fin du monde, à moins qu'on s'attache au principe le plus possible d'un vote, une personne.

Selon notre approche, le ministre qui hérite de ce dossier nous apporte une loi qui peut avoir les mêmes lacunes à cause des critères et de l'expérience que nous avons vécue. Dans la loi, il est prévu que cette carte devra être terminée pour le 31 mars. Quand même, il faut être réaliste! C'est bien beau, mais nous sommes rendus en novem- bre. Cette loi ne passera pas l'étape de la troisième lecture avant décembre ou fin novembre. La nomination des nouveaux commissaires, la mise en place de cette commission, on tombe dans la période des Fêtes. Les députés vont vouloir faire entendre leurs représentations en commission parlementaire en province et on veut une nouvelle carte pour le 31 mars. Je me demande, avec toute votre équipe, comment vous allez faire. Je n'ai pas le droit de m'adresser à vous; il faudrait que je m'adresse à vos successeurs. Comment vont-ils faire pour arriver à cette échéance? Je ne sais pas dans quelle galère, dans quels rapides...

M. Bédard: Les navires, cela vous dépasse!

M. Lavoie: Oui, mais j'arrêterais de faire adopter des lois aussi improvisées.

M. Bédard: Vous venez de dire qu'elle ressemble exactement à celle que vous avez fait adopter. Ayons donc de la logique un peu!

Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. Lavoie: Est-ce que le ministre pourrait être un peu sérieux, quand même?

M. Bédard: Je suis très sérieux, au contraire! Franchement!

Le Président (M. Jolivet): Vous aurez la chance de discuter lors de l'étude de la loi no 10. Est-ce qu'il y a d'autres commentaires?

M. Lavoie: II n'y a eu aucune consultation avant cette loi, rien.

Le Président (M. Jolivet): M. le député, est-ce qu'il y a d'autres questions?

M. Lavoie: On n'a même pas de moyens de recensement et de confection de liste électorale. C'est encore sur les tablettes et dans les airs avec votre registre des électeurs. Je ne vous envie pas avec les dossiers que vous avez, M. le ministre. Écoutez l'expérience des autres aussi. D'accord?

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: Merci, M. le Président. Je voudrais revenir brièvement, M. le Président, sur des remarques qui ont été faites par le député de Nicolet-Yamaska et qui m'ont rappelé des interventions faites à l'Assemblée nationale, par exemple, par le député de Mégantic-Compton sur la question de la représentation des comtés ruraux.

Le ministre a déjà mis en doute le fait qu'il y ait consensus sur l'idée du député de Nicolet-Yamaska de considérer que les comtés ruraux devraient plutôt être dans les 25% de moins que la norme, et les comtés urbains dans les 25% de plus que la norme.

Je ne suis pas d'accord sur cette règle, bien que les élans oratoires auxquels j'ai fait allusion de la part du député de Mégantic-Compton m'aient fortement impressionné. Il est vrai, dans son cas, qu'avec, je ne sais pas, 54 municipalités et évidemment beaucoup de déplacements dans ces régions rurales, ça ne lui fait sûrement pas une vie facile. Mais je pense, M. le Président, qu'on peut bâtir une argumentation pour montrer que le député urbain a une tâche tout aussi lourde par tête de pipe.

Je représente une circonscription dont une partie est rurale et une partie est urbaine. Alors, je pense que je suis assez bien placé pour faire une comparaison.

Il y a le rôle traditionnel du député comme on le conçoit surtout dans les régions rurales et alors, les relations avec les municipalités sont très importantes, ça prend beaucoup de son temps, c'est exact. Il y a les dîners officiels, les soupers de la Chambre de commerce et il y a un très grand nombre d'activités de ce genre-là. C'est effectivement une charge de travail très lourde. Mais, dans les comtés urbains ou les parties urbaines des comtés mixtes, il y a un travail d'une autre nature que nous faisons et qui est à développer, c'est, en quelque sorte, le député qui est un peu ombudsman, le député qui est un peu animateur. Vous prenez des lois comme la Loi de l'assurance automobile, ou la loi que nous venons d'adopter ce soir, la loi 107, sur les relations locateur-locataire. Ce sont des lois qu'il est très important de préparer en fonction des besoins de la majorité de la population. Il faut, par conséquent, tenir compte des fortes concentrations de populations urbaines et ces populations urbaines n'ont pas l'habitude de s'exprimer par les mêmes moyens, ni de ma même façon que les populations rurales qui ont beaucoup plus de structures, beaucoup de moyens d'expression traditionnels.

Alors, quand un député travaille en milieu urbain, il devient beaucoup plus un animateur, un ombudsman. Il faut qu'il suscite l'expression de la population. Il faut aller chercher l'opinion des gens. Ce rôle du député-animateur, je pense qu'il va devenir de plus en plus important.

Je ne dis pas ça pour torpiller l'argumentation relative à l'importance du travail que le député doit faire auprès d'une population rurale. Je cherche à faire la démonstration qu'il y a deux argumentations parallèles, que les deux rôles sont également importants et que, devant la présence de ces deux argumentations, il vaut mieux s'en remettre au principe selon lequel autant que possible le vote doit avoir le même poids politique partout.

Si on fixe une norme, autant que possible, il faut s'en tenir à cette norme, tout autant en région rurale qu'en région urbaine et non pas dire: En région rurale on met moins de monde, en région urbaine on met plus de monde, parce que, si on tend généralement à mettre en région urbaine plus de monde, on va rendre plus difficile l'élaboration de ce nouveau type de travail du député auprès d'une population qui a moins de structures, qui a moins l'habitude de s'exprimer, qu'il est plus dif- ficile de consulter, qu'il est plus difficile d'engager dans le processus politique qui débouche ultimement sur le processus législatif. Puisqu'il y a ces deux argumentations parallèles, je ne partage pas l'idée du député de Nicolet-Yamaska et je préfère considérer qu'il faut que le poids du votant soit le même, qu'il soit en secteur urbain ou en secteur rural. (21 h 45)

M. Lamontagne: Je voudrais poser une question au député.

M. de Bellefeuille: Oui.

M. Lamontagne: Ce que vous venez de dire, c'est qu'en fait vous proposez qu'une commission soit chargée de délimiter 130 comtés. C'est ça que vous venez de dire?

M. de Bellefeuille: Mon intervention était limitée à exactement ce que j'ai dit. Je ne faisais aucune espèce de proposition.

M. Lamontagne: Mais c'est la conclusion logique de ce que vous venez de dire.

M. de Bellefeuille: Non, c'est peut-être votre conclusion logique, M. le député, mais je me chargerai moi-même de tirer des conclusions logiques de mes interventions. Mon intervention se limitait aux remarques du député de Nicolet-Yamaska auxquelles j'ai fait allusion et elle ne débouche que sur une seule conclusion, c'est que le principe qui doit nous guider, c'est celui du poids égal des électeurs. Je n'ai fait aucune autre proposition.

Le Président (M. Jolivet): Je ne voudrais pas arrêter le débat ici, je sais que d'autres personnes peuvent avoir d'autres questions, mais, comme la commission d'aujourd'hui avait comme but de poser des questions aux gens de la commission qui ont eu à préparer le rapport V qui est le rapport sur les 36 000, j'ai cru comprendre, depuis au moins une quinzaine de minutes, qu'on commençait déjà l'étude du projet de loi no 10. À moins que je ne me trompe, à moins qu'il n'y ait des informations additionnelles à demander aux membres de la commission, je pense qu'on pourrait clore le débat. Ah bon! Allons-y, mais il faudrait éviter...

M. Lamontagne: Le ministre va sans doute prendre la parole.

M. Bédard: Non, j'ai essayé de prendre la parole le moins possible. On avait demandé la convocation de la commission pour lui poser des questions et non pas pour se faire entendre devant la commission. J'essaie d'être logique avec ce pour quoi la commission a été convoquée. Je ne suis pas ici pour reprendre le débat de deuxième lecture du projet de loi 10. Je pense essentiellement que cette convocation des membres de la commission, qui ont eu la gentillesse de répondre positivement à cette invitation, était essentielle-

ment pour poser des questions et non pas de se faire entendre devant la commission.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Roberval, vous voulez intervenir?

M. Lamontagne: Je m'adresse au ministre, M. le Président. Tout à l'heure j'avais demandé s'il avait un inconvénient à déposer copies des représentations qui ont été adressées à la commission permanente indépendante. Deuxièmement, M. le juge disait tout à l'heure, au nom de ses collègues et en son nom personnel, qu'ils étaient disposés à faire des suggestions à la commission, à nous, sur l'article de loi qui a donné lieu à certaines interprétations. Le juge avait pris la parole à ce moment-là pour dire: Oui, si vous nous demandiez des suggestions, nous serions disposés à vous en faire. Il me semble qu'on devrait accepter.

M. Bédard: Pour ce qui est de la documentation ou des représentations publiques qui ont été faites aux membres de la commission, je pense bien qu'il n'y a aucune objection à ce que les représentations publiques soient portées à la connaissance des membres de la commission.

Le Président (M. Jolivet): Donc, je constate qu'il y a consentement.

M. Bédard: Maintenant, tout en disant que... M. Lavoie: Un dossier par parti.

Le Président (M. Jolivet): Je tiens pour acquis qu'il y a consentement à ce qu'un dossier par parti soit envoyé.

M. Côté: Je m'excuse, M. le Président. Vous avez dit: Un dossier par parti?

Le Président (M. Jolivet): Oui, au lieu de l'être à tous les membres de la commission.

M. Côté: D'accord.

M. Bédard: M. le Président, tout en spécifiant dès maintenant, parce qu'on aura peut-être à le refaire ou à le rappeler en commission, que le travail des membres de la commission sur le projet de loi 10, ce n'est pas de confectionner une carte électorale. Le projet de loi 10 c'est essentiellement, comme principe, de donner ce travail à faire à une commission indépendante décisionnelle. Je pense que c'est bien que tous les membres de la commission aient tout l'éclairage possible dont ils pourront faire usage ou la réflexion qu'ils voudront, mais je voudrais être bien clair. Je pense qu'on devrait s'entendre là-dessus. Les travaux de la commission parlementaire sur la loi 10 ce n'est pas de confectionner une carte. Cela va être de discuter le projet de loi 10, qui essentiellement a pour effet, justement, que les députés ne commencent pas à faire une carte électorale; que les membres de la commission parlementaire ne com- mencent pas à faire une carte électorale, mais que ce travail soit confié à une commission indépendante tel que le stipule le projet de loi 10.

Pour ce qui est des amendements qui peuvent être faits, je pense que ce sera le travail de la commission de faire les amendements. Chacun des membres de la commission des différents partis proposera les amendements qu'il jugera à propos de présenter à la lumière, entre autres, de certaines représentations qui ont pu être faites par les membres de la commission indépendante ou permanente qui est devant nous. Je pense bien qu'essentiellement le projet de loi, ce sera essentiellement le travail de la commission parlementaire de le voter, d'y apporter les amendements qu'elle jugera à propos.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Vanier.

M. Bertrand: Une seule question sur celle que le député de Roberval avait posée tout à l'heure en demandant: Est-ce qu'il y a possibilité que vous nous donniez un avis, à titre de membre de la commission, sur la façon dont l'article 9 était rédigé et le mot "exceptionnel"? Tantôt, à une autre question qui était posée, à savoir: Est-ce que, si vous aviez eu à créer d'autres exceptions que les Îles-de-la-Madeleine, il y en aurait eu d'autres? vous avez eu, je pense, M. Côté, à peu près la réponse suivante: Non, nous ne le croyons pas, les Îles-de-la-Madeleine seraient le seul cas. Donc, si je comprends bien, dans un sens, à votre propre point de vue, il y aurait une exception, même dans le contexte actuel.

Mais, de votre point de vue, étant donné peut-être le caractère un peu élastique que pourrait avoir ce paragraphe qui définit le caractère exceptionnel des choses, est-ce que vous préféreriez — vous me direz si oui ou non vous avez l'impression de vous immiscer dans notre travail — que la loi indique elle-même l'exception ou les exceptions qu'elle envisagerait et vous laisser surtout le principe général comme intouchable, à savoir que vous préféreriez travailler avec une moyenne de plus et de moins 25%, 30% ou 50% plutôt que d'avoir à interpréter un paragraphe qui parle de circonstances exceptionnelles, parce que vous ne sauriez jamais exactement ce que peut vouloir signifier cet exceptionnel, jusqu'où il peut être élastique? Vous auriez l'impression de jouer un rôle politique davantage qu'un rôle de gens qui ont à appliquer une loi qui essaie d'être la plus précise possible dans toutes ses dimensions et même vous iriez jusqu'à dire: Quant à nous, il y a une exception, ce sont les Îles-de-la-Madeleine, il n'y en a pas d'autre. Pour le reste du travail, voici la moyenne, voici le maximum, voici le minimum.

M. Côté: Sous toute réserve, M. le député, je peux peut-être émettre une hypothèse. Je reviens à mon expression de tout à l'heure; c'est une impression, parce que je pense qu'effectivement c'est une responsabilité qui revient aux membres de l'Assemblée nationale avant tout. Je peux peut-

être vous donner l'information qu'à notre connaissance, dans certains pays, une disposition analogue à celle-là existe, à savoir qu'il est dit de façon très précise que, dans telle région ou dans tel secteur, il peut y avoir des districts électoraux d'exception. On me signale qu'il y en a en Nouvelle-Zélande, en Australie. Peut-être même qu'on pourrait fouiller davantage la loi de l'Ontario où il semble y en avoir, — encore là, sous toute réserve parce que je voudrais bien vérifier mes sources — et on le dit spécifiquement dans la loi. Cela peut être une solution.

M. Bertrand: Vous êtes des avocats, je pense, tous les trois, à l'heure actuelle, membres de la commission. Est-ce que c'est plus facile pour des avocats qui ont à interpréter un texte de loi, lorsqu'ils ont à l'appliquer, de s'être fait dire par la loi c'est quoi l'exception, quand il y en a une, que d'avoir à l'interpréter continuellement, surtout quand on ne sait pas exactement ce que le législateur avait en tête au moment où il mentionnait qu'il y avait des circonstances exceptionnelles?

M. Côté: Je dirais que le problème serait le même, même si ce n'étaient pas des avocats.

M. Bertrand: Je vous demandais une opinion peut-être parce que votre formation juridique vous amène à réagir un peu différemment.

M. Côté: En ce qui me concerne, je peux peut-être vous mentionner que j'ai aussi une autre formation en sciences sociales. À ce moment-là, ça peut peut-être équilibrer ou tempérer ce que pourrait avoir de néfaste ou de bénéfique une formation juridique. Non, je dois dire que ce n'est pas seulement une question d'interprétation stricte d'un texte de loi; c'est aussi de comprendre l'intention du législateur et de voir quelle est la meilleure solution à apporter.

On s'attarde beaucoup, si vous me permettez un commentaire très bref là-dessus, sur cette interprétation qu'on donne à l'article 9 actuel. Il reste quand même qu'il y a d'autres préoccupations — j'en ai mentionné un certain nombre tout à l'heure — qui animent les membres de la commission en dehors de la préoccupation uniquement numérique. J'ai mentionné, dans l'exposé que j'ai fait ce matin, de façon très brève qu'on pourrait aussi détailler, que dans le rapport V en particulier, on s'est efforcé de considérer d'autres facteurs que les facteurs numériques. C'est une voie qui est à explorer, quelles que soient les personnes qui sont responsables de la délimitation des districts électoraux.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Châteauguay.

M. Dussault: Je vais laisser faire, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Roberval.

M. Dussault: II m'était venu une idée qui serait peut-être utile à la commission. Je me disais que les représentations dont on parlait tout à l'heure, qui ont été faites auprès de la commission, si elles portent sur le bien-fondé des cartes qui ont été confectionnées par la commission sur le projet de loi no 10, cela ne me paraît pas pertinent. Si ces représentations portent sur les critères qui ont été utilisés pour la confection de la carte, cela me paraît avoir une utilité beaucoup plus grande.

Déposer auprès des membres de la commission ces représentations, le sens premier que je donnais au bien-fondé des cartes, je ne vois pas pourquoi je donnerais mon consentement à ce qu'on dépose ces documents. Ce ne seraient que des éléments qui ne nous serviraient pas vraiment et qui, même, nous donneraient une tentation beaucoup trop grande, qui serait de discuter sur le fond, c'est-à-dire sur la confection de la carte, et de nous éloigner largement de ce qui devrait nous rallier tous, c'est-à-dire le fond même du projet de loi no 10.

Cela me paraît utile que ce soit clarifié. Si j'ai bien compris, ce sont des représentations qui portent davantage sur le bien-fondé des cartes. Dans ce sens-là, je ne suis pas tenté du tout de donner mon consentement à ce dépôt auprès des membres de la commission, à moins qu'on y apporte des clarifications.

M. Lamontagne: II y en a certainement. Après le projet de loi no 10, chaque formation politique va suivre de près l'élaboration de la carte électorale. Ce n'est pas une cachette. Une représentation, le seul fait qu'elle ait été expédiée à la commission, mériterait que chaque parti politique en prenne connaissance pour suivre de près l'évolution de la carte. C'est aussi simple que cela. Pourquoi cacher aux parlementaires des représentations qui ont été faites auprès de la commission? Nous devrons en tenir compte également dans nos propres représentations.

M. Dussault: Ce qui me paraît intéressant et souhaitable, c'est qu'on ait la garantie que la présente commission, en tant que telle, remette à la nouvelle commission qui viendra à la suite de la loi 10, ses représentations, parce qu'elles seront fort utiles, je pense, à la nouvelle commission qui aura à travailler à la nouvelle carte, puisque la base de la nouvelle carte sera le travail qui a été fait par la présente commission.

Je pense qu'on devrait s'en tenir à cela, à moins qu'on ne nous garantisse du côté de l'Opposition qu'une fois déposé on n'aura jamais à être enfargé par cela lors de nos travaux, parce que ce ne serait pas du tout pertinent.

M. Lamontagne: Le projet de loi 10? Bien non, cela n'a aucun rapport.

M. Bédard: Je pense que c'est très clair pour le député de Roberval. C'est comme cela que je l'ai compris. Je prenais des précautions tout à l'heure.

M. Lamontagne: Cela n'a aucun rapport.

M. Bédard: Je pense que le député de Roberval reconnaît que ces rapports ou ces représentations n'ont aucun rapport avec l'étude du projet de loi 10.

M. Lamontagne: Avec le projet de loi 10.

M. Dussault: C'est cela. C'est ce que je voudrais qu'on reconnaisse, de façon qu'on ne soit pas embêté par cela par la suite.

M. Lamontagne: Cela n'a pas de rapport.

M. Dussault: A-t-on la garantie, M. le député de Roberval, qu'il n'en sera pas question lors de nos travaux sur le projet de loi 10?

M. Lamontagne: Le projet de loi 10 ne parle pas d'une carte électorale. C'est la garantie de l'étude article par article. C'est élémentaire.

M. Dussault: Je suis content que vous le reconnaissiez. On n'aura pas du tout à être embêté par ce contenu-là.

M. Lamontagne: D'après le projet de loi 10 adopté le 29 novembre, il y a une confection de carte électorale. Cela va nous servir.

M. Dussault: Vous savez, un chat échaudé craint l'eau froide, dit-on. J'ai connu l'étude de la loi 3. Vous devez vous rappeler cela, M. le député de Laval.

M. Lavoie: Oui, à juste titre.

M. Lamontagne: Vous savez d'avance que le 29 novembre le projet de loi 10 sera adopté.

M. Dussault: C'est une excellente idée.

M. Lamontagne: Je pense qu'on a témoigné de notre bonne foi au ministre.

M. Bédard: C'est dans ce sens-là que j'avais pris les représentations du député de Roberval. C'est bien qu'on clarifie les choses. Cela évitera des débats au niveau de l'étude article par article du projet de loi 10.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Roberval.

M. Lamontagne: J'avais une question à poser, suite à l'intervention du député de Vanier.

M. Côté: Me permettez-vous une intervention, M. le député? Je voudrais seulement très bien saisir la demande qui a été faite à la commission pour ne pas qu'il y ait un imbroglio. Si j'ai bien compris, les membres de la commission expriment le voeu que nous remettions un exemplaire à chacun des partis des commentaires qui ne portent que sur le rapport V. C'est là-dessus?

M. Lamontagne: C'est exact.

M. Bédard: Des représentations publiques faites concernant le rapport.

M. Côté: Des représentations publiques des différents organismes, corps publics. Ce sont des exemplaires de cela dont il est question?

Le Président (M. Jolivet): C'est cela. (22 heures)

M. Bédard: Au niveau de la commission, nous nous sommes entendus. Nous sommes bien d'accord que cela ne peut faire l'objet de discussions lors de l'étude du projet de loi 10.

M. Côté: Merci.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Roberval.

M. Lamontagne: M. le Président, en terminant, parce que beaucoup de ceux et celles qui travaillent avec vous, M. Côté, sont ici présents...

M. Bédard: Les documents publics.

M. Lamontagne: Ce qui va arriver, c'est que, lors des consultations qui seront tenues dans chacune de nos régions au Québec, il va y avoir beaucoup de représentations pour des comtés moins populeux que 25 000 ou 26 000 électeurs, le Nord-Ouest, Pontiac-Témiscamingue, etc. Si la plaidoirie est fort bonne, il peut arriver que la future commission soit influencée par cette plaidoirie et décide de former un certain nombre de comtés du genre de celui des Îles-de-la-Madeleine, en plus élevé.

L'intervention du député de Vanier sur laquelle vous avez dit que dans certains autres pays et provinces, la loi l'indiquait, parce que si elle ne l'indique pas, il se pourrait qu'une commission décisionnelle, comme il est proposé dans le projet de loi 10, décide, à la suite de consultations populaires, de créer cinq ou six comtés et qu'on revienne, comme vous l'avez dit tout à l'heure, à des comtés protégés comme nous en avions auparavant. C'est pour cela que je favorise, et on en a fait une suggestion à l'Assemblée nationale... En terminant, je voudrais dire que nous sommes toujours disposés à ce que le comté des Îles-de-la-Madeleine, qui est une exception assez évidente pour tout le monde, puisse être indiqué dans la loi, de sorte qu'on sache où on va.

M. Bédard: J'ai cru comprendre que la députée des Îles-de-la-Madeleine avait également formulé préalablement une opinion dans le même sens. On aura l'occasion d'en discuter.

Le Président (M. Jolivet): Oui.

M. Lavoie: M. le Président, demain nous devons commencer l'étude article par article de la loi 9, et, la semaine prochaine, le projet de loi 10. Comme cela s'est fait dans le passé — je ne sais

pas si ma question doit s'adresser au ministre ou à M. Côté — est-ce qu'il est possible que M. Côté, en tant que Directeur général des élections, puisse être à notre disposition à chaque séance de la commission sur l'étude des projets de loi 9 et 10, comme cela s'est fait dans le passé?

M. Bédard: En principe, je vais prendre mes responsabilités d'essayer, comme ministre responsable de la loi, de répondre à toutes les questions qui pourront être posées en commission. Il est évident que si, à un moment donné, face à certaines questions, je sens le besoin de recourir aux lumières du directeur des élections, c'est avec grand plaisir que je le ferai.

M. Lavoie: Non, ce n'est pas ma question.

M. Bédard: Je sais que ce n'est pas votre question, mais c'est ma réponse.

M. Lavoie: Sur la question des lois 9 et 10, comme cela s'est fait dans le passé, étant donné qu'il s'agit de l'étude de la refonte de la Loi électorale et de la représentation, je crois qu'il est essentiel que M. Côté, le président qui siège à la commission actuelle, comme directeur — c'est notre expert, en somme — soit constamment, comme le juge Drouin l'était à chaque fois qu'on étudiait des lois électorales, à la disposition de la commission. Si on étudie un article, qu'on a besoin de renseignements et qu'on vous les demande, avec le peu d'expérience que vous avez, si vous nous envoyez aux calendes grecques en disant: On aura une réponse dans trois ou quatre jours, cela ne fera pas avancer les travaux de la commission. Je vous demanderais M. le ministre, de la part de l'Opposition, votre collaboration si vous voulez que cela fonctionne assez bien.

M. Bédard: Je vous demanderais justement d'avoir peut-être une manière d'aborder les choses un peu plus élégamment que vous ne le faites actuellement.

M. Lavoie: Votre première réponse n'était pas satisfaisante.

M. Bédard: Au contraire, ma première réponse demeure ma réponse, parce qu'en tant que responsable de cette loi ma responsabilité est d'essayer de répondre à toutes vos questions. S'il y en a auxquelles on ne peut pas répondre, c'est avec plaisir que je ferai appel aux lumières du président des élections. Je garde cette réponse, justement ayant à l'esprit que le Directeur général des élections est quand même le Directeur général des élections et qu'on doit, je pense, se conduire de manière que toute son indépendance et son impartialité ne soient pas, à un moment donné continuellement mises à l'épreuve en essayant de toutes les façons de le mêler à notre rôle de législateurs, alors que, je pense, son rôle est bien déterminé par la loi. Je suis convaincu — le président des élections pourra me le dire — que je peux compter sur la collaboration complète et entière du président des élections, du Directeur général des élections, M. Côté, pour me donner toutes les informations nécessaires pour que les membres de la commission aient des réponses à toutes leurs questions.

M. Lavoie: M. le Président, vous avez eu l'expérience de la séance d'aujourd'hui, qui a commencé cet après-midi. Je pense bien que ce n'est pas l'intention des députés, en aucune occasion, de placer le Directeur général des élections sur la brèche. Je pense bien qu'on respecte autant que quiconque son titre et ses responsabilités. Je pense que, même dans les moments difficiles comme la loi 3 ou ailleurs, les députés sont assez civilisés pour respecter des hauts fonctionnaires comme M. Côté qui peuvent apporter leur contribution. Ma question est assez claire: Est-ce que M. Côté sera présent à chaque séance de la commission lors de l'étude des projets de loi nos 9 et 10?

M. Bédard: M. le Président, ma réponse demeure la même.

M. Lavoie: Aussi louvoyante.

M. Bédard: Je suis responsable, comme ministre, des travaux qui nous conduiront à l'adoption du projet de loi no 10 et je veux me conduire comme tel. J'essaierai d'apporter les réponses à toutes les questions posées par l'Opposition. Lorsque ce sera nécessaire, c'est avec grand plaisir que je recourrai aux lumières du Directeur général des élections dont, j'en suis convaincu, la collaboration et la disposition sont entières tant pour le côté gouvernemental que pour le côté de l'Opposition.

M. Lavoie: Cela veut dire qu'on n'aura pas sa présence physique à chaque séance de la commission. Est-ce qu'on va avoir sa présence physique, oui ou non?

M. Bédard: Si c'est indiqué, j'aviserai en conséquence.

M. Lavoie: Vous êtes solidaire au gouvernement actuel en ce qui concerne la sinuosité et le louvoiement.

M. Bédard: II n'y a pas de sinuosité. On ne prendra pas vos moyens. Nous, on ne fait pas passer nos lois par des fonctionnaires. D'accord? Surtout pas essayer de placer dans des mauvaises situations des gens dont la responsabilité est très grande, dont l'indépendance est très nécessaire dans les hautes fonctions qu'ils occupent.

M. Lavoie: Dépêchez-vous parce que vous n'en passerez pas longtemps, des lois. Dépêchez-vous.

M. Bédard: Et contrairement à l'ancien gouvernement, chacun des ministres responsables

d'une loi prend sa pleine responsabilité et c'est ce que je ferai.

Le Président (M. Jolivet): M. Côté, vous aviez quelque chose à ajouter?

M. Côté: Oui, juste un bref commentaire sur ce qui a été dit. C'est évident que je suis à la disposition et de M. le ministre et de la commission, selon les demandes qui me seront adressées, cela va de soi.

Je voudrais juste dire un mot de remerciement, si vous me permettez, M. le Président, aux membres de la commission de nous avoir reçus aujourd'hui, de nous avoir écoutés avec beaucoup de patience et je dirais même de gentillesse, je pense que je peux employer cette expression, je peux me le permettre. Je voudrais peut-être, juste en terminant, encore ajouter un seul mot, qui est celui de signaler aux membres de la commission jusqu'à quel point, nous, les membres de la Commission permanente de la réforme des districts électoraux, apprécions l'énorme travail qui est accompli par nos employés. M. Lavoie a signalé tout à l'heure que nous avions une équipe de 20 à 25 employés permanents. Je peux vous dire, et je pourrais en parler très longuement, mais je pense que ça vaut la peine de le souligner, qu'aucun d'entre eux ne trouve le moyen de chômer depuis un an ou un an et demi en particulier que nous sommes là. Ils font un excellent travail, je pense que c'est justice de leur rendre hommage et de vous signaler jusqu'à quel point nous apprécions grandement le travail qu'ils accomplissent.

M. Bédard: M. le Président, je tiens à remercier chacun des membres de la commission encore une fois d'avoir répondu positivement à la demande des membres de la commission parlementaire. Je me permets, en terminant, de rendre hommage non seulement aux membres de la commission, mais également à tout le personnel qui les appuie dans le travail extrêmement difficile — on est à même de le constater — qu'ils ont à effectuer. Merci.

Le Président (M. Jolivet): Comme il est 22 heures, j'ajourne les travaux de cette commission à demain matin 10 heures.

Fin de la séance à 22 h 9

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