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Version finale

32nd Legislature, 4th Session
(March 23, 1983 au June 20, 1984)

Tuesday, June 14, 1983 - Vol. 27 N° 105

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude des crédits du lieutenant-gouverneur et des organismes-conseils auprès du premier ministre et du Conseil exécutif


Journal des débats

 

(Onze heures cinquante minutes)

Le Président (M. Jolivet): La commission permanente de la présidence du conseil et de la constitution est réunie aux fins d'étudier les programmes 1 et 2 des crédits budgétaires du Conseil exécutif. Vous retrouvez cela à partir des pages 11-4 jusqu'à 11-7 du cahier des crédits budgétaires.

Les membres de la commission sont: MM. Baril (Arthabaska), Brassard (Lac-Saint-Jean), Brouillet (Chauveau), de Bellefeuille (Deux-Montagnes), Levesque (Bonaventure), Lévesque (Taillon), Lachance (Bellechasse), Marx (D'Arcy McGee), Charbonneau (Verchères), Ryan (Argenteuil), Scowen (Notre-Dame-de-Grâce).

Les intervenants sont: MM. Bisaillon (Sainte-Marie), Ciaccia (Mont-Royal), Dussault (Châteauguay), Gratton (Gatineau), Perron (Duplessis), Rivest (Jean-Talon), Dauphin (Marquette). Il nous faudrait maintenant désigner un rapporteur de cette commission.

M. Charbonneau: Je propose le député de Chauveau.

Le Président (M. Jolivet): Le député de Chauveau, M. Brouillet, est donc désigné rapporteur. La parole est maintenant à M. le premier ministre.

Remarques préliminaires M. René Lévesque

M. Lévesque (Taillon): M. le Président, mes quelques remarques préliminaires vont être très brèves. Je voudrais très rapidement souligner la présence de mon nouvel adjoint parlementaire, qui nous a fait l'honneur d'accepter ce rôle, surtout en fonction des programmes touchant la jeunesse, dont le Conseil exécutif sera responsable, et j'ai nommé le député de Verchères. Parmi les personnes qui nous donnent un coup de main, je pense que vous reconnaissez la plupart des membres de notre équipe, sauf une nouvelle, qui est Mme Danièle Bouchard, directrice du Secrétariat à la jeunesse qu'on est en train de mettre sur pied.

Pour ce qui esc des changements depuis un an, je me contenterai simplement de souligner qu'on a aboli les postes de ministres d'Etat qui étaient reliés depuis cinq ans au Conseil exécutif. Dans certains cas, cela a été remplacé par des postes de ministres délégués: à la Science et à la Technologie, à l'Aménagement et au Développement régional, à la Condition féminine, aux Relations avec les citoyens. Il y avait aussi le ministre délégué au Commerce extérieur, mais il est maintenant devenu un ministère complet, si on veut. Pour ce qui est de mes collègues à la Science et à la Technologie et des trois autres ministres délégués, si on peut employer l'expression, je pense que vous avez déjà eu l'occasion de voir avec eux l'essentiel de ce qui apparaissait au budget du Conseil exécutif mais qui a été transféré surtout dans d'autres domaines. Cela nous évitera peut-être des discussions de ce côté-là en ce qui concerne les cabinets ministériels et les secrétariats qui vont avec.

Pour le reste, je ne vois pas tellement de grands changements, sauf ce qui a accompagné la mise sur pied, parce qu'il a fallu des virements, etc. du ministère de la Science et de la Technologie, en particulier, et du ministère du Commerce extérieur. Il y a également la création - c'est nouveau depuis quelques mois et je crois que c'était requis, on s'en rendait compte depuis longtemps - d'un petit secrétariat qui permet de faire le suivi des séances du comité des priorités du gouvernement.

Pour le reste j'aimerais mieux attendre les réactions de l'Opposition et les questions qui peuvent venir.

Le Président (M. Jolivet): M. le chef de l'Opposition.

Discussion générale

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, évidemment avec les changements qui ont lieu ou les déménagements de partie de ministères, il est assez difficile de concilier tous les chiffres. En partant, par exemple, des chiffres de 1982-1983, nous conclurions normalement que les crédits du ministère passeraient de 130 000 000 $ à 158 000 000 $.

M. Lévesque (Taillon): Beau travail! Je suis assez nerveux! Je m'excuse.

M. Levesque (Bonaventure): Si on veut reprendre, après ce que le premier ministre nous a indiqué dans ses courtes remarques

préliminaires, on ne peut pas conclure qu'il y a effectivement une augmentation de 130 000 000 $ à 158 000 000 $ dans les crédits affectés au ministère, et c'est là qu'il est difficile de faire de la conciliation.

M. Lévesque (Taillon): Bien oui!

M. Levesque (Bonaventure): Quant au cabinet du premier ministre, il me semble que si on s'arrête à cela et qu'on ne va pas dans les autres domaines, où il a pu y avoir des déménagements de partie de responsabilités etc., si on s'en tient simplement au cabinet du premier ministre...

M. Lévesque (Taillon): D'accord.

M. Levesque (Bonaventure): ...les chiffres que j'ai devant moi sont les suivants. On demande cette année des crédits de l'ordre de 3 500 000 $. Lorsqu'on fait référence à l'année précédente on retrouve des crédits de l'ordre de 6 600 000 $. On pourrait conclure à une diminution substantielle des crédits, et ce n'est pas ce que le premier ministre a indiqué.

M. Lévesque (Taillon): Non, non.

M. Levesque (Bonaventure): Le premier ministre peut-il nous dire quel est le morceau qui est disparu de là et où il est rendu?

M. Lévesque (Taillon): Essentiellement il y a à peu près 3 000 000 $ qui sont disparus par transfert, parce que vos collègues, sinon vous-même, ont eu l'occasion de rencontrer les ministres délégués, c'est versé maintenant à leur budget directement, c'est-à-dire les frais de secrétariat pour l'essentiel et les frais de cabinet politique.

M. Levesque (Bonaventure): Une autre précision avant de passer à autre chose. Je vois qu'au cabinet du premier ministre, lorsqu'on réfère aux crédits de 1982-1983, on mentionne la somme de 6 679 800 $.

M. Lévesque (Taillon): Oui.

M. Levesque (Bonaventure): Par contre, lorsqu'on regarde les crédits de l'an dernier, on s'aperçoit que les crédits votés étaient plutôt de l'ordre de 7 729 000 $. Est-ce normal qu'il y ait, pour la même année, dans le même livre de crédits, une contradiction de cette nature?

M. Lévesque (Taillon): C'est-à-dire que j'ai là les chiffres probablement définitifs. On m'explique simplement que c'est évident que cela arrive chaque année qu'il y ait des transferts et des modifications à la baisse. C'est tout. Par conséquent, le chiffre réel pour 1982-1983 serait celui qui est là. Maintenant que l'année est écoulée on le sait.

M. Levesque (Bonaventure): Je pense que ce serait intéressant, pour nous du moins, de savoir quels sont exactement, pour faire un peu de conciliation, ces chiffres, parce que quelqu'un qui prend le livre des crédits de 1982-1983 voit que le cabinet du premier ministre a une somme qui lui est attribuée de 7 700 000 $. Et cette année, dans le livre de crédits, on dit que la somme qui lui a été accordée l'an dernier est de 6 600 000 $.

M. Lévesque (Taillon): Ce qui explique cela à peu près totalement, c'est justement le transferts de quatre cabinets de ministres délégués, aux programmes 3, 5, 6, 8, c'est-à-dire en moyenne 530 000 $ multiplié par quatre. Donc, transfert de 2 120 000 $ qui a été effectué en cours de route et l'abolition de trois cabinets, celui du développement économique, celui de la réforme électorale, et celui du ministre délégué aux Affaires parlementaires, c'est-à-dire encore à peu près 1 600 000 $. Alors, si vous enlevez 2 120 000 $ et 1 600 000 $, je pense que vous retombez à 3 000 000 $... Forcément, pour tous ceux qui restent le taux de croissance normale, c'est-à-dire les augmentations normales...

M. Levesque (Bonaventure): Je pense que le premier ministre répond à la première question que j'ai posée,

M. Lévesque (Taillon): Oui, oui.

M. Levesque (Bonaventure): C'est-à-dire, pourquoi on passait de 6 600 000 $ à 3 500 000 $, mais il n'explique pas pourquoi le livre des crédits, d'une part, nous indique en 1982-1983 le chiffre de 7 700 000 $ et lorsqu'on réfère à cela cette année, on parle d'un chiffre de 6 600 000 $, c'est-à-dire une différence de 1 100 000 $.

M. Lévesque (Taillon): Cette partie-là s'explique essentiellement par ceci: l'abolition de trois cabinets en cours de route, c'est-à-dire celui du développement économique, de la réforme électorale et des affaires parlementaires, pour un total de 1 607 600 $. Je pense que si vous voyez comment cela se concilie, cela permet de voir pour l'essentiel comment on est passé de 7 729 000 $ à 6 679 000 $.

M. Levesque (Bonaventure): Cela ne donne pas cela. C'est bien de valeur mais j'aimerais bien... Je ne comprends pas... Je comprends qu'on ne passera pas la matinée là-dessus, mais si le premier ministre voulait me faire parvenir les chiffres, ce serait

mieux parce que... (12 heures)

M. Lévesque (Taillon): Cela se concilie mais pour l'instant, j'ai de la misère à faire des additions, des soustractions. Je pourrai vous faire parvenir cette page-ci et vous verrez tout cela. Il y a cinq postes, le transfert de quatre cabinets, l'abolition de trois cabinets, le taux de croissance normal autorisé par le Conseil du trésor pour les traitements, le fonctionnement - il y a toujours des changements - et puis finalement la question des transferts. Tout cela donne le total qui correspond à ce que vous avez.

M. Levesque (Bonaventure): Nous attendons les détails.

M. Lévesque (Taiilon): D'accord.

Mise en demeure à la Presse

M. Rivest: Sur le bureau du premier ministre qui est enfin devenu célèbre - il aura mis un certain temps - je voudrais que le premier ministre, s'il le peut ou s'il le veut bien, donne un peu plus de détails sur la réponse qu'il a fournie au leader parlementaire de l'Opposition relativement à la mise en demeure qu'il a ou qu'il aurait...

M. Lévesque (Taillon): Je n'ai pas l'intention...

M. Rivest: J'aimerais peut-être juste formuler ma question. Les seules questions que je voudrais vous poser, c'est de savoir si c'est une mise en demeure qui vous est personnelle?

M. Lévesque (Taillon): Oui.

M. Rivest: Est-ce que c'est contre la corporation de la Presse ou si c'est contre le journaliste qui a écrit l'article?

M. Lévesque (Taillon): C'est nommément adressé versus, versus: la Presse, M. Landry, M. Roy et M. Girard.

M. Rivest: Est-ce que c'est une mise en demeure demandant une rétractation?

M. Lévesque (Taillon): Oui.

M. Rivest: Dans un délai imparti?

M. Lévesque (Taillon): Oui.

M. Rivest: Qui est de?

M. Lévesque (Taillon): Trois jours, je jense.

M. Rivest: Sinon, vous entendez procéder à une action, enfin, suivre le cours en dommages et intérêts?

M. Lévesque (Taillon): Cela va de soi.

M. Rivest: Cette mise en demeure a-t-elle été effectivement envoyée?

M. Lévesque (Taillon): Elle a été signifiée hier.

M. Levesque (Bonaventure): Avant d'entreprendre d'autres sujets, est-ce que je peux demander au premier ministre, qui avait tenu certains propos l'an dernier sur le poste de lieutenant-gouverneur, s'il prévoit des changements...

M. Rivest: Le député d'Arthabaska est là. Il est un spécialiste.

M. Levesque (Bonaventure): Ah oui!

M. Baril (Arthabaska): J'attendais le programme no 1 et le chef de l'Opposition.

M. Levesque (Bonaventure): Parce qu'on...

Le Président (M. Jolivet): On était sur l'ensemble. Maintenant, on peut aller directement au programme no 1.

M. Levesque (Bonaventure): Je pense que ce serait plus facile de procéder comme je le suggère, parce que autrement, si on veut être trop...

Le Président (M. Jolivet): Rigide.

M. Levesque (Bonaventure): ...rigide et structuré, cela va prendre plus de temps.

Le Président (M. Jolivet): Donc, allez-y sur la question.

M. Rivest: M. le Président. Le Président (M. Jolivet): Oui?

M. Rivest: Juste avant, j'ai une dernière question sur le bureau du premier ministre. Sur les réductions de salaires, est-ce que cela s'est appliqué au bureau du premier ministre?

M. Lévesque (Taillon): En fait, cela s'est appliqué de façon mutatis mutandis comme partout ailleurs, c'est-à-dire qu'il y a eu un gel passé certains niveaux...

M. Rivest: Plus récupération pour les...

M. Lévesque (Taillon): ...et modulation pour les salaires les moins élevés.

Le Président (M. Jolivet): Sur la question du lieutenant-gouverneur, M. le premier ministre.

Bureau du lieutenant-gouverneur

M. Lévesque (Taillon): Si on va au programme no 1, il y avait 521 000 $, comme vous le voyez, en 1982-1983, qui avaient été prévus aux crédits. Les dépenses réelles ont été de 469 000 $ avec la coopération, je dois dire, du lieutenant-gouverneur lui-même. 11 y a eu des compressions, là comme ailleurs, au moins en première étape. Donc 469 000 $ et on prévoit des crédits. À partir de là, il faut se garder une certaine souplesse. Comme vous le voyez, on présente une légère diminution cette année par rapport à l'an dernier, c'est-à-dire 504 000 $. Cela, c'est au Conseil exécutif. Évidemment, cela ne tient pas compte des éléments travaux publics. Je ne sais pas s'il y a d'autres questions.

Le Président (M. Jolivet): M. le député d'Arthabaska.

M. Baril (Arthabaska): Oui, M. le Président. L'an dernier, le premier ministre s'était engagé ici à cette commission. Je le cite: "Évidemment, on a un lieutenant-gouverneur qui achève son mandat bientôt, mais je pense qu'au moment de la transition il va falloir absolument faire quelque chose et vite, parce que ce n'est pas justifiable. C'est tout ce que je peux dire." Cette année, je suis d'accord et je reconnais que le lieutenant-gouverneur a fait un effort en diminuant en gros pratiquement de 90 000 $ le budget qui lui était alloué. Par contre, cette année, si on compare au budget de l'an passé, il y a une diminution d'environ 16 000 $. Encore une fois, je reviens là-dessus, considérant qu'il me semble que les ministres des différents ministères ont beaucoup plus de difficultés à maintenir leur budget face au Conseil du trésor que le lieutenant-gouverneur semble avoir de difficulté à maintenir son budget à peu près équivalent. Est-ce que le M. le premier ministre pourrait nous dire ce qu'il entend faire à la suite des propos qu'il avait tenus l'an passé ou ce qu'il a pu faire?

M. Lévesque (Taillon): Ce que j'ai fait, c'est d'abord d'accompagner - je le souligne de nouveau - avec les efforts personnellement très corrects du lieutenant-gouverneur actuel, M. Côté, certaines mesures de compression ou de diminution. Mais, évidemment, le fond de la question n'est pas là.

Sur le fond de la question et sur l'avenir - puisque M. Côté doit partir, je pense qu'il l'a laissé savoir récemment, probablement à l'automne ou quelque part vers la fin de l'année - j'ai écrit à M. Trudeau, le premier ministre fédéral, de qui dépend bien sûr la nomination des lieutenants-gouverneurs - il y a en général certaines consultations quand un nouveau lieutenant-gouverneur doit être nommé, mais la décision appartient au fédéral - le 14 avril et l'essentiel de la lettre est ceci: "L'an dernier, lors de l'étude à l'Assemblée nationale des crédits budgétaires relatifs au bureau du lieutenant-gouverneur, j'ai fait part de l'intention du gouvernement d'étudier attentivement les moyens que nous pourrons prendre pour réduire, là comme ailleurs, les dépenses de fonds publics et, à la suite de cet engagement, nous avons analysé les dépenses encourues à cet égard par les autres provinces et nous avons conclu que le meilleur moyen d'obtenir le résultat recherché était de cesser de mettre une résidence à la disposition du lieutenant-gouverneur suivant ainsi l'exemple de l'Ontario et de la Saskatchewan. J'en ai informé M. Jean-Pierre Côté, tout en lui précisant que cette nouvelle politique ne prendrait effet qu'à la fin de son terme actuel. Le nouveau titulaire de ce poste, comme il arrive ailleurs de plus en plus, devra donc voir lui-même à se loger. Pour le reste, il y a des contributions raisonnables qu'on serait prêt à faire, etc." Je terminais en disant, avant les salutations d'usage: "Je compte que vous voudrez bien informer de cette nouvelle politique les personnes que vous jugerez bon d'approcher pour remplir la fonction". 11 y avait une copie pour le lieutenant-gouverneur actuel. Tout ce qu'on a eu jusqu'à maintenant, c'est peut-être normal, c'est un accusé de réception qui prouve que la lettre a été reçue. On verra à la prochaine étape.

M. Baril (Arthabaska): Oui, au sujet des autres dépenses qui sont encourues par le gouvernement du Québec, l'an dernier, on en avait détaillé beaucoup - je ne veux pas les reprendre cette année - tous les services qui sont payés par le gouvernement du Québec au lieutenant-gouverneur, soit au niveau du personnel, soit au niveau de l'entretien de la maison, mais si vous dites qu'au Québec, le gouvernement ne s'engage plus à fournir cette maison. Par contre, est-ce qu'on fournira quand même l'entretien d'une résidence qui appartiendra possiblement au lieutenant-gouverneur?

M. Lévesque (Taillon): Non, mais il pourrait y avoir certaines contributions de dépenses de fonctionnement. Mais par le fait - je pense que cela tombe sous le sens -qu'il n'y aura plus de résidence officielle fournie par le gouvernement du Québec, par voie de conséquence cela va diminuer radicalement aussi les besoins en personnel.

M. Baril (Arthabaska): C'est cela. Je voulais en venir au personnel. L'an dernier, on avait fait toute la liste du personnel, peut-être que je pourrais vous la sortir. Quant aux automobiles fournies, on sait qu'il y avait deux limousines fournies avec deux chauffeurs, et pour utiliser un terme qu'on utilise et que les gens comprennent, c'est-à-dire deux automobiles avec un "spare" en plus. Ce n'est pas un pneu de rechange.

M. Lévesque (Taillon): On ne peut adresser le moindre esprit ou la moindre intention critique à l'égard du lieutenant-gouverneur actuel parce qu'en fait il a hérité d'une situation qu'on a laissé se prolonger. Il est évident que sur tous ces plans, cela va être passablement plus modeste quand viendra le successeur.

M. Baril (Arthabaska): Ma dernière question est celle-ci. On vote les budgets pour l'année qui vient, soit 504 007 $.

M. Lévesque (Taillon): Au budget de l'Exécutif.

M. Baril (Arthabaska): Oui, parce que dans les autres ministères, il y en a également. Je n'ai pas fait le calcul cette année, mais cela doit être aux environs de 800 000 $ avec les autres ministères.

M. Lévesque (Taillon): Probablement.

M. Baril (Arthabaska): C'est pour le budget qui s'en vient. Advenant que M. Côté quitte ses fonctions à l'automne, l'autre qui prendra la place va quand même être habitué à dépenser ou à dispenser le même budget pour l'année qui vient.

M. Lévesque (Taillon): II y a une certaine reprise économique. C'est une résidence qui a quand même passablement d'allure et si le marché de l'immeuble s'améliore, elle sera mise en vente et on espère bien faire une opération rentable pour le Québec. À partir de là, forcément, plus vite cela sera réglé, plus vite les budgets diminueront en conséquence.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Ma question est la suivante: le gouvernement du Québec est propriétaire, je suppose, de la maison Dunn, comme on l'appelait, et va effectivement se départir de cet immeuble.

M. Lévesque (Taillon): Je ne vois pas de raison de la garder.

M. Rivest: Donc, il n'y a aucun projet pour le gouvernement du Québec de la...

M. Lévesque (Taillon): Écoutez, je consulterai soit le ministère des Travaux publics ou éventuellement, si cela se concrétise, la Société immobilière.

M. Rivest: En ce moment, il n'y a pas de décision ferme de prise à savoir qu'on va effectivement se départir de cela.

M. Lévesque (Taillon): Très rapidement on avisera de la façon soit de s'en départir ou soit de l'utiliser autrement, mais on va probablement s'en départir car c'est une résidence.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Chauveau.

M. Rivest: Si vous voulez me permettre, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Oui.

M. Rivest: Vous nous avez donné l'essentiel de la lettre que vous avez envoyée au premier ministre du Canada. Vous ne l'avez pas rendue publique ou enfin, vous allez peut-être la...

M. Lévesque (Taillon): Non, je n'y voyais pas de raison, mais enfin, je peux bien la déposer.

M. Rivest: Ai-je bien compris le sens de la lettre dans le mesure où ce sont des dépenses que le gouvernement du Québec assume, que vous aviez communiqué la décision du gouvernement du Québec au premier ministre du Canada de façon que le successeur soit averti des conditions physiques dans lesquelles il devra fonctionner?

M. Lévesque (Taillon): Bien oui, c'était pour cela.

M. Rivest: Est-ce que la pratique ne veut pas que le gouvernement du Québec suggère au premier ministre du Canada un certain nombre de personnes? Non?

M. Lévesque (Taillon): Non. Enfin, selon la pratique que j'ai connue, non. Peut-être que c'était comme cela avant, quand il y avait peut-être certaines concordances qui ne se sont pas retrouvées depuis six ans et demi. J'ai eu l'occasion une fois, sauf erreur, M. Lapointe a terminé son mandat un an ou deux, je crois, après le changement de gouvernement, et j'ai eu des appels, enfin deux ou trois appels comme d'habitude, du premier ministre fédéral pour donner un certain nombre de noms et pour voir quelle était notre réaction pour, finalement, lui dire: Faites votre choix.

M. Rivest: J'ai presque envie de poser la question au chef de l'Opposition s'il est candidat au poste.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Chauveau.

M. Lévesque (Taillon): Je ne sais pas. D'après les rumeurs qu'on entend - je le vois, qui est là, d'un air songeur et méditatif - sa carrière n'est pas sur le point de se désactiver. Enfin, ce n'est pas à moi de répondre pour lui.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Chauveau.

M. Brouillet: Serait-il possible de nous indiquer à peu près ce que pourrait représenter le gain? Le fait de soustraire la résidence du lieutenant-gouverneur, combien cela pourrait-il représenter de gain sur un budget? Est-ce qu'on récupère 100 000 $, 200 000 $?

M. Lévesque (Taillon): Ah! Cela va plus loin que cela. Je pense, mais, enfin, je n'ai pas le calcul devant moi, mais il y a tout un personnel assez important - et c'est normal -protocolaire jusqu'à un certain point et personnel de services, etc, qui sont attachés à la maison. Je pense même qu'il y en a qui sont attachés aussi à une ferme qui est un complément immobilier de cet "establishment". Évidemment, sur le plan de l'immeuble et sur le plan du personnel, il y aurait une réduction très très importante. Maintenant, je ne peux pas l'évaluer. On me souligne que le personnel de services, par exemple, c'est à peu près 500 000 $. Seulement cela'. Alors...

Le Président (M. Jolivet): Donc, on peut conclure que le programme 1 est adopté.

M. Levesque (Bonaventure): Oui, M. le Président.

Cabinet du premier ministre

Le Président (M. Jolivet): Programme 2?

M. Levesque (Bonaventure): On revient...

M. Lévesque (Taillon): Bien oui, on revient où on était.

M. Levesque (Bonaventure): ...où on était. Est-ce que le premier ministre pourrait m'indiquer le montant des subventions discrétionnaires qu'il a l'intention d'utiliser cette année et à quelles fins?

M. Lévesque (Taillon): Je pense que, pour l'essentiel, c'est ce qui se trouve à la page 11-6, à la sous-catégorie 10, transfert, c'est-à-dire environ 725 000 $. C'est cela. Pour l'an dernier, la liste est disponible. Je pense que vous l'avez eue dans les réponses qu'on vous a fournies. C'était un total de 728 000 $, je pense, et ce serait un montant de 726 000 $ qui serait prévu, tel que vous le voyez là.

M. Levesque (Bonaventure): Est-ce que l'utilisation de cette somme est prévue dans ses détails ou est-ce qu'on va répéter certaines...?

M. Lévesque (Taillon): II y a toujours des choses qui se répètent. Il y a le Comité organisateur des rencontres francophones -comme on les appelle maintenant - qui est là pour un montant de 225 000 $ en partant. Il y a l'Institut d'administration publique -c'est devenu une sorte de tradition - qui profite aussi à nos administrateurs québécois; c'est une somme d'environ 40 000 $. Il y a IMA3 85: cela va aller du côté des jeunes; il y avait 50 000 $, il est probable qu'il y ait récidive. En gros c'est cela. Cette année, c'est le 375ème anniversaire de la ville de Québec, on ne peut pas évaluer tout de suite ce que pourront vouloir dire les manifestations, 1534-1984. Pour l'instant, on a prévu 726 000 $, ce qui semble être conforme à peu près à ce qui se passe depuis quelques années.

M. Levesque (Bonaventure): Lorsque le premier ministre parle d'environ 40 000 $ pour l'Institut d'administration publique, je vois dans la liste qu'il y a eu, en date du 19 octobre 1982, une somme de 38 480 $, et je constate que, le 30 mars 1983, pour le même Institut d'administration publique, on a versé le même montant de 38 480 $. Y a-t-il une raison à cela?

M. Lévesque (Taillon): II y a 50 000 $ dans deux cas: le Comité organisateur des rencontres francophones pour 1983-1984 et l'Institut d'administration publique pour 1983-1984, c'est par anticipation et pour éviter des crédits périmés et pouvoir...

M. Levesque (Bonaventure): Ah bon!

M. Lévesque (Taillon): ...nettoyer cela avant la fin de l'année budgétaire.

M. Levesque (Bonaventure): II y a d'autres oeuvres qui tiennent à coeur au premier ministre, si on regarde un peu la liste, c'est assez curieux. On voit, par exemple - je ne sais pas cela doit être certainement une bonne oeuvre - l'église Sainte-Praxède-de-Bromptonville, 10 000 $, Est-ce que le premier ministre est passé là et a fait une promesse? Qu'est-il arrivé?

Des voix: II a donné à la quête.

M. Lévesque (Taillon): Non. Si j'ai bonne mémoire, c'est arrivé il y a quelques mois. Les gens ont perdu leur église et une corvée extraordinairement chaleureuse a été organisée. Il fallait payer pour l'essentiel, au-delà des assurances, tout ce qu'il fallait et, à un moment donné, certaines choses du mobilier manquaient. Cela m'a paru indiqué de contribuer quelque peu.

M. Levesque (Bonaventure): Est-ce que cela pourrait se répéter, par exemple, pour le collège Jésus-Marie de Sillery?

M. Lévesque (Taillon): II n'y a rien qui exclut cela, sauf que, là, il s'agit d'autre chose qu'une petite contribution mobilière. Ce sera un autre problème d'une autre taille quand cela viendra.

M. Rivest: Jusqu'à présent, vous n'avez pas reçu de demande de la fondation pour le collège Jésus-Marie? Non?

M. Lévesque (Taillon): Que je sache, non. Probablement que cela viendra, mais, là, ce doit être les assurances etc.

Pour l'église Sainte-Praxède, le CT, la reconstruction de l'église est presque terminée. Une somme de l'ordre de 400 000 $ a été recueillie lors d'une campagne de souscription dans la région et les assurances avaient versé 590 000 $. Alors, devant un tel effort, on s'est dit: Pourquoi ne pas contribuer, nous aussi, un petit peu? C'est plutôt symboliquement si on veut.

M. Levesque (Bonaventure): C'est dans le comté de...

M. Lévesque (Taillon): C'est dans Je comté de Johnson, il me semble.

M. Levesque (Bonaventure): Le carrefour Saint-Eusèbe...

M. Lévesque (Taillon): Si l'église de Bonaventure avait connu le même triste sort, il est probable qu'on aurait eu la même réaction.

M. Levesque (Bonaventure): J'en prends note.

M. Lévesque (Taillon): Ce n'est pas à souhaiter.

M. Levesque (Bonaventure): Je ne le souhaite pas, mais j'en prends note.

M. Lévesque (Taillon): Cela s'applique également ailleurs.

M. Levesque (Bonaventure): Le carrefour Saint-Eusèbe, est-ce que c'est une oeuvre chère au premier ministre? C'est 3000 $.

M. Lévesque (Taillon): Cela venait du député de Sainte-Marie...

M. Rivest: Ah mon Dieu!

M. Lévesque (Taillon): ...comme insistance et je crois que c'est valable. C'est un projet d'action communautaire dans une paroisse de Montréal, la paroisse Saint-Eusèbe est dirigée par une religieuse et un groupe de travailleurs bénévoles travaillant très fort dans le milieu. C'était recommandé par beaucoup d'autres gens que le député de Sainte-Marie. Alors, cela a paru, là encore, indiqué.

M. Rivest: C'était en 1982.

M. Lévesque (Taillon): Pardon?

M. Rivest: En novembre.

M. Lévesque (Taillon): Oui, peut-être.

M. Levesque (Bonaventure): Le député de Sainte-Marie était encore bien vu par le premier ministre à ce moment.

M. Lévesque (Taillon): Oh! écoutez, il a été élu par les citoyens, il est toujours bien vu. Au point de vue politique disons qu'on a certaines divergences, mais on n'a pas besoin d'insister longuement sur cela. Ceci ne change pas le fait que dans Saint-Eusèbe il y a des gens bien qui font du bon travail.

M. Rivest: II y avait un bon député pour vous acheminer la demande.

M. Lévesque (Taillon): Dans ce temps, c'était le milieu aussi qui nous faisait signe avec insistance.

M. Levesque (Bonaventure): Je n'ai pas l'intention de continuer bien longtemps, mais la Jonquille, 2000 $, c'est quoi?

M. Rivest: C'est la campagne.

M. Lévesque (Taillon): C'est la campagne annuelle pour la Société canadienne du cancer. Je crois que cela est devenu une tradition.

M. Levesque (Bonaventure): La

Fondation pour le conseil de presse du Québec est-ce une contribution annuelle?

M. Rivest: Aucun rapport avec la Presse.

C'est probablement le fonds de défense

pour la Presse. Non?

M. Levesque (Bonaventure): 100 000 $ pour...

M. Lévesque (Taillon): Oui, cela achève. C'était un engagement qui avait été pris de 400 000 $, des tranches de 100 000 $ par année pour aider. C'est du "matching fund", comme on dit en anglais, c'est-à-dire que c'est le milieu qui doit en avoir les moyens. Il est capable de fournir l'équivalent. Bien, le gouvernement s'était engagé pour quatre ans à 100 000 $ par année. Je pense que cela achève.

Sauf erreur - et peut-être que cela rappellera des souvenirs au député de Bonaventure - il y avait une première tranche de 100 000 $ avant cet engagement qui avait été versée probablement au début du conseil par le gouvernement précédent.

M. Levesque (Bonaventure): Mais cela fait sept ans. Est-ce que vous avez manqué des années?

M. Lévesque (Taillon): Je pense qu'il y a eu un trou. On n'avait pas réussi en première étape. Cela a dû traîner pendant un an et demi, deux ans, je pense. On n'avait pas réussi à amasser les 100 000 $ de "matching fund" à ce moment, c'est-à-dire de fonds d'équivalent.

M. Rivest: M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Oui. M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: M. le premier ministre, vos ministres qui écrivent des livres nous révèlent que vous n'êtes pas très bon dans les remaniements ministériels ou enfin que vous êtes généralement embarrassé dans les remaniements ministériels.

M. Lévesque (Taillon): C'est une opinion comme une autre.

M. Rivest: Je voudrais vous poser une question au sujet de l'imbroglio ou de l'espèce de confusion qui s'est installée entre le ministre des Affaires intergouvernementales et le ministre du Commerce extérieur pour vous demander si, au niveau du Conseil exécutif - je ne sais pas à quel programme cela s'applique exactement - vous envisagez... Parce que ces gens dans le domaine du commerce extérieur ont des clients sur le terrain qui doivent savoir qui fait quoi et dans la mesure où... J'ai soulevé cette question au ministre des Affaires intergouvernementales, en détail. Je n'ai pas l'intention d'être long là-dessus. Dans la mesure où dans la loi sur les affaires intergouvernementales, si on la regarde à la lettre, ainsi que dans celle du ministre du Commerce extérieur, les choses se recoupent au moins au niveau des textes, avez-vous envisagé la possibilité d'adopter un arrêté en conseil qui sera public, clair, définissant les attributions respectives de l'un et de l'autre ministre en regard des activités économiques du Québec à l'extérieur?

M. Lévesque (Taillon): Non. Parce que ce serait comme dire que c'est insoluble par d'autres moyens. Il y a un besoin de coordination. Je pense qu'il suffit de lire les deux lois pour voir que cela exige de la coordination. Il y a un chevauchement qui doit se régler par un esprit d'équipe. Il y a des rodages un peu difficiles à l'occasion. Cela a été un peu plus difficile qu'à l'habitude dans ce cas, mais j'ai l'impression qu'il y a une sorte de rythme de croisière qui va finir par se prendre. En tout cas, jusqu'à nouvel ordre, dans un avenir prévisible, je ne vois pas l'utilité de mesures aussi draconiennes que celles que vient d'évoquer le député de Jean-Talon.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Marquette.

Secrétariat à la jeunesse

M. Dauphin: M. le Président, en étant bien conscient que le temps est précieux à cette commission, j'aurais quelques questions concernant le Secrétariat à la jeunesse. En mars dernier, vous annonciez la création d'un budget de 150 000 000 $ avec la création du Secrétariat à la jeunesse. Vous disiez à ce moment que ce devait être une structure légère dont le mandat était, selon moi, aussi large que flou avec les définitions. Jusqu'à maintenant, on a très peu entendu parler du secrétariat et de ses activités.

Je demanderais seulement au premier ministre de donner quelque éclairage. Tout d'abord, j'aimerais faire part au premier ministre de mon étonnement de ne pas voir apparaître le Secrétariat à la jeunesse dans les notes explicatives concernant les crédits de son bureau. Ma première question est la suivante: Le secrétariat serait-il un organisme à la structure si légère qu'il est en fait invisible, si on regarde le cahier des crédits?

M. Lévesque (Taillon): C'est vrai que jusqu'ici, il n'a pas fait beaucoup de bruit parce que des fois, quand on fait trop de bruit trop vite, cela ne donne pas beaucoup de résultats. C'est mieux de s'organiser Jusqu'à présent, les premières étapes de mise en place ont été faites et ce, sans perte de temps.

Au point de vue politique, il y a mon adjoint parlementaire, le député de Verchères, qui a un personnel complet avec lui pour lui donner un coup de main de ce côté parce qu'il a travaillé très fort du côté des sommets de la jeunesse - toute une série de coordination sur le terrain - et pour l'aider à continuer, il y a un contractuel, en fait, deux contractuels, et une employée de soutien qui est, je crois, de la fonction publique. Je pourrais vous donner les noms, si vous le voulez. Pour ce qui est du secrétariat lui-même, c'est-à-dire la structure administrative et de coordination aussi, les programmes pour les jeunes au gouvernement, la première chose était évidemment de trouver un directeur ou une directrice. Alors, la directrice générale, Mme Bouchard, je pense qui était assez bien connue dans la région de Québec comme directrice du festival depuis quelques années, a accepté de prendre l'emploi. En ce moment, il y a un début de... Aujourd'hui même - parce que le mardi, c'est toujours le Conseil du trésor - à la suite de toute une série de rencontres dont Mme Bouchard pourrait donner l'essentiel, il y a un premier plan d'effectif au Conseil du trésor et qui implique - il y a déjà cinq personnes qui sont entrées - une équipe qui serait composée de sept occasionnels pour le soutien administratif, de trois contractuels professionnels chargés de la recherche, deux permanents - qui viennent de la machine, comme on dit - affectés respectivement à la coordination interministérielle - parce qu'il y a toujours beaucoup de variété dans ces trucs-là, on sait qu'il y en a souvent trop -et également de la direction des communications. Cela serait donc une équipe de douze personnes. Dès le mois d'août, on prévoit qu'une partie de cet effectif - parce qu'il s'agit d'un animal, si vous me permettez l'expression, d'une taille exceptionnelle; il s'agit de la région métropolitaine de Montréal - cinq à sept personnes qui seront affectées au travail de coordination d'animation, de communication et de contact dans la région de Montréal. Éventuellement, on pense ne pas dépasser une vingtaine de personnes.

M. Dauphin: Est-ce qu'un budget a été adopté?

M. Lévesque (Taillon): La plupart sont occasionnels ou contractuels.

M. Dauphin: Au moment où on se parle, est-ce qu'il y a un budget adopté pour le secrétariat comme tel?

M. Lévesque (Taillon): Pas encore. C'est au Conseil du trésor aujourd'hui. Le budget proposé est de 655 000 $ pour le fonctionnement.

M. Charbonneau: La structure dont on parle en termes de personnel occasionnel, contractuel...

M. Dauphin: Au même titre que vous, je suis heureux de vous rencontrer, Mlle la directrice. Ce n'est pas par malice que je demande cela, mais je présume que le salaire a été négocié et non pas décrété.

M. Lévesque (Taillon): Oui, oui, négocié.

M. Dauphin: Est-il exact que le salaire de la directrice est de 49 000 $ par année, plus élevé que le responsable du Secrétariat à la jeunesse.

M. Charbonneau: Cela n'est pas inusité dans l'appareil gouvernemental.

M. Dauphin: Est-ce que les autres membres du secrétariat vont recevoir des rémunérations aussi belles?

M. Lévesque (Taillon): C'est selon l'échelle normale pour ce qui est de la fonction publique ou alors par négociation normale quand il s'agit de contractuels ou d'occasionnels.

M. Levesque (Bonaventure): Est-ce que les sommes mentionnées de 655 000 $ comprennent l'effectif qui sera muté ou est-ce que les mutations sont en plus?

M. Lévesque (Taillon): Non parce que les salaires viennent avec les gens.

M. Dauphin: On a une ou deux autres questions. On a pu lire, dans certains médias, que la principale fonction de l'adjoint parlementaire du premier ministre responsable du secrétariat serait surtout de voir à l'application du programme Action jeunes volontaires. Est-ce qu'on peut savoir où on en est? Y a-t-ii des démarches d'entreprises?

M. Lévesque (Taillon): Le rôle de M. le député de Verchères en est essentiellement un d'accompagnement politique du travail qui va se faire - parce qu'il y a des responsabilités administratives qu'il faut toujours surveiller - au Secrétariat à la jeunesse, y compris pour le programme des jeunes volontaires. Il serait peut-être bon de vous lire tout simplement l'ABC, les décrets qui nommaient M. le député de Verchères, M. Charbonneau, comme adjoint parlementaire. Dans le cadre général que lui attribue la Loi sur l'Assemblée nationale d'assister le premier ministre dans l'exercice de ses fonctions et remplir les mandats spécifiques suivants: Premièrement, responsabilité politique du Secrétariat à la jeunesse et faire rapport régulièrement de

ses activités à votre serviteur; deuxièmement, de conseiller le premier ministre sur toutes les questions relatives à la jeunesse québécoise et assurer la liaison entre les jeunes et le gouvernement, le mieux possible parce que cela est complexe; troisièmement, superviser le soutien apporté par le gouvernement au projet du Sommet québécois de la jeunesse et aux autres projets jeunesse d'envergure - de la façon dont cela se développe, cela devrait être intéressant, c'est le moins qu'on puisse dire -notamment les projets liés à l'Année internationale de la jeunesse, parce que cela se prépare toujours longtemps d'avance, ces damnées années internationales. Il y a pas mal de choses à prospecter et à essayer de mettre au point. C'est en 1985; cela vient assez vite quand même, et il y a déjà des choses dans le paysage. C'est drôle. Tel que c'est défini par le député de Verchères comme adjoint parlementaire et pour ce qui est du secrétariat, je pense que Mme Bouchard pourrait répondre à vos questions si vous en avez pour vous dire où on en est. (12 h 30)

Une voix: Vous parliez des jeunes volontaires?

M. Lévesque (Taillon): Entre autres, dans ce domaine, parce que c'est à peine amorcé pour l'instant. On espère être à pied d'oeuvre, en tout cas, avec ce programme à la fin de l'été.

M. Charbonneau: En fait, des étapes ont déjà été franchies. La conception du programme est prête. Des consultations préliminaires ont été engagées. D'autres consultations vont être engagées au cours des prochaines semaines parce que dans ce programme, qui est un programme expérimental - on a tenu à ce que cela en soit un - il n'est pas question de bousculer qui que ce soit. Je pense qu'il est question de le faire avec les organismes des milieux concernés. Ce programme sera utilisé par les organismes de milieu.

M. Lévesque (Taillon): Étant nouvelle, Mme Bouchard n'en parle pas beaucoup, mais j'ai des rapport sur un travail très intense, parce que, au début il s'agissait d'essayer de mettre cela ensemble, et ce n'est pas très ancien quand même, cela date du mois d'avril ou à peu près. Dès le début de mai, il y a eu récupération des dossiers, rencontres avec les gens du ministère des Communications, réunion de la table jeunesse du comité permanent du ministère des Communications - je pense que c'est cela -ensuite, il y a eu rencontres du côté du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, avec le ministère de l'Éducation, pour voir comment ajuster ce qu'on appelle les modules jeunesse. C'est le ministère de la

Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du revenu qui est censé avoir au moins une personne dans chacun des centres Travail-Québec pour s'occuper spécifiquement des questions des jeunes. Or il y a eu des rencontres avec eux pour qu'il y ait une coordination aussi avec le ministère des Affaires intergouvernementales.

Peut-être qu'on en aura des échos quand on sera en France prochainement pour un voyage officiel pour l'ouverture d'un dossier jeunesse à la Commission permanente franco-québécoise. On aura aussi des rencontres avec le ministère des Affaires sociales. Là encore, on essaie d'arrimer cela le mieux possible parce qu'il y a aussi des choses du côté du ministère des Affaires sociales. Il y a des maisons de jeunes, etc. Il y a une sorte d'expansion qui s'est prise. Également, avant la fin de mai - c'est en préparation - j'espère qu'on aura des choses concrètes à proposer ou à échanger avec eux au cours du voyage en France à la fin de juin à la partie franco-québécoise, si on veut.

Le groupe interministériel, parce que vu qu'il faut se mettre le plus possible sur une même longueur d'ondes, ou essayer de la partager avec plusieurs ministères, Mme Bouchard me dit que la première rencontre interministérielle a eu lieu le 7 juin, de façon à voir où on en est.

M. Charbonneau: En fait, M. Lévesque, on pourrait ajouter qu'il y a eu un comité interministériel qui avait été mis en place d'une façon un peu...

M. Lévesque (Taillon): Ad hoc!

M. Charbonneau: ...ad hoc à l'occasion de la préparation du plan d'action qui relevait du secrétariat du Comité des priorités. Maintenant, le Secrétariat à la jeunesse prend la relève sur une base permanente d'un comité interministériel jeunesse dont la première rencontre a eu lieu la semaine dernière et qui va se réunir tous les mois, à la fois pour le suivi des mesures annoncées dans le cadre du plan d'action par le premier ministre et pour l'ensemble des autres actions gouvernementales à l'égard des jeunes qui ne sont pas nécessairement contenus dans le plan d'action annoncé par le premier ministre.

M. Dauphin: J'ai une dernière question, en terminant, M. le Président. Plusieurs groupes de jeunes ont d'ailleurs souligné qu'il y avait eu un manque de consultation lors de la préparation de ce programme, entre autres les jeunes volontaires. On est allé consulter des jeunes en France, mais pas du Québec.

M. Lévesque (Taillon): Non.

M. Charbonneau: Ce n'est pas exact.

M. Lévesque (Taillon): Non, non, non, ce n'est pas vrai.

M. Dauphin: En tout cas, on m'a dit qu'on ne les avait pas consultés. C'est ce qu'on m'a dit.

M. Charbonneau: Non, ce n'est pas exact.

M. Lévesque (Taillon): Vous étiez... avant le parti. Peut-être que Mme Bouchard pourra raconter la suite.

M. Dauphin: Je sais qu'on a fait des représentations à savoir si vous étiez pour les modalités, les consulter...

M. Charbonneau: J'avais organisé, au mois d'octobre, une réunion où on avait réuni 80 intervenants jeunesse à Québec. Par la suite, les contacts avaient été maintenus avec plusieurs de ces organismes, de ces porte-parole et de ces intervenants jeunesse. C'était à l'époque où le secrétariat du comité des priorités planifiait ou coordonnait l'action préparatoire du plan d'action. Depuis ce temps, un mandat spécifique a été donné au Secrétariat à la jeunesse afin d'assurer la liaison avec les organismes de jeunes et s'assurer une consultation. C'est déjà engagé, à la fois avec des tables de concertation de services d'aide à la jeunesse qui existent dans plusieurs régions du Québec et avec des organismes jeunesse, tant par le personnel du secrétariat qui a déjà eu à rencontrer un certain nombre d'organismes de jeunes, notamment sur le programme jeunes volontaires et moi-même ainsi que l'équipe politique. Par exemple, la semaine dernière, j'étais dans la région de Sherbrooke. Hier, j'étais dans la région de Saint-Jean où j'ai rencontré tous les intervenants jeunesse de cette région. Il y a un travail de suivi qui va s'intensifier, parce qu'on passe au Conseil du trésor, le personnel du secrétariat pourra prendre plus d'importance au cours des prochaines semaines. Ce travail de contact et de consultation, dont on veut faire la marque de commerce du secrétariat, se fera avec plus d'intensité au cours des prochains mois.

M. Lévesque (Taillon): À partir du noyau initial du secrétariat, depuis le début de mai, pour vous donner une idée, peut-être que vous pourriez...

On a entrepris une consultation auprès des organismes jeunesses pour mettre sur pied le programme Action jeunes volontaires. Je peux vous donner la liste des organismes qui ont été consultés depuis mai, depuis un mois: L'Association des centres de bénévolat du Québec, le Regroupement des organismes de loisir du Québec, le Regroupement des associations étudiantes universitaires, la Conférence des organismes régionaux de loisir du Québec, le CLSC Matane, le Mouvement québécois des chantiers, IMAJ '85 qui a mandat d'organiser l'Année internationale de la jeunesse, Pierre Noreau et André Delisle du Sommet québécois de la jeunesse et quelques maisons de jeunes, dont la maison de jeunes de Sainte-Thérèse

D'ailleurs, on a pris contact avec les dirigeants montréalais qui ont pas mal d'implication constante - c'est normal - avec des organisations ou des groupes de jeunes, de façon qu'on puisse voir comment on peut mieux coordonner le travail, parce que, dans le cas de la ville de Montréal, évidemment, c'est exceptionnellement important. Cela se fera incessamment.

M. Dauphin: D'accord. Je vous remercie. Je suis conscient que c'est tout nouveau et on suivra cela de près. Je remercie la directrice d'être venue.

L'avenir politique du Québec

M. Lévesque (Bonaventure): M. le Président, le premier ministre s'était engagé formellement à tenir la prochaine élection principalement sur le thème de l'indépendance. Il s'est même engagé à déclencher le processus d'accession à l'indépendance sur la base d'un vote majoritaire à 50% des suffrages exprimés dans une élection de type conventionnel.

Par la suite, alors que j'ai eu l'occasion d'interroger le premier ministre sur la façon dont se ferait cette fameuse élection référendaire, on a commencé à voir quelques fissures dans l'engagement formel du premier ministre. Autrement dit, l'élection référendaire est devenue possiblement, dans son esprit, une élection ordinaire accompagnée d'un référendum. Même, le premier ministre n'a pas rejeté le fait qu'on pourrait avoir un bulletin de vote en deux parties, une sur l'élection et une sur...

M. Lévesque (Taillon): Je ne l'ai pas endossé.

M. Levesque (Bonaventure): ...le référendum. Il nous a laissés avec cette situation plutôt ambiguë et il semble que nous recommençons une partie de cet étapisme qu'il semblait chérir autrefois, qu'il a semblé mettre de côté pour un temps pour, en quelque sorte, essayer de donner un nouveau souffle à ses troupes séparatistes, la "hard line". Maintenant, il revient un peu à l'étapisme, donc à l'ambiguïté, à l'incertitude dont on parlait en 1976-1977, alors qu'il a fait passer la province pendant quatre ans à attendre un référendum. Une fois que la population s'est prononcée d'une

façon bien claire, il recommence encore. Est-ce que le premier ministre pourrait au moins nous dire sans hésitation si la décision des électeurs sur l'indépendance sera prise le même jour que celle de l'élection des candidats?

M. Lévesque (Taillon): En tout cas, je ne sais pas, évidemment, quelle sera l'impulsion que donnera, sur ce point, à son parti, le député de Bonaventure, si les intentions qu'on lui prête se réalisent, mais je pense bien que cela devrait rejoindre cette idée de centrer la prochaine élection sur la question nationale, sur l'avenir politique, institutionnel du Québec. Cela devrait rejoindre un certain nombre de libéraux. On me rappelle une déclaration récente, je pense, du député de Notre-Dame-de-Grâce qui souhaite justement qu'il y ait une élection sur cette question. On ne serait peut-être pas nécessairement dans le même camp, mais on serait au moins sur la même longueur d'onde pour considérer que le sujet doit être central. Je pense que c'est inévitable qu'il soit central jusqu'à ce que la perception soit là que, ou bien c'est réglé dans le sens que nous souhaitons de tout notre coeur ou cela ne pourra pas se faire. Mais c'est loin d'être clair pour l'instant.

Pour ce qui est de la façon d'aller en élection on n'est pas rendu là. On prévoit un congrès et, d'un congrès à l'autre, il est évident que le programme est rediscuté dans notre parti. On prévoit au moins qu'il va falloir une réflexion - enfin, je me suis permis de le dire - additionnelle sur la façon de se présenter à cette élection en centrant la campagne électorale sur la question de l'avenir du Québec. Cela mérite encore d'être précisé. Si je relis notre programme politique - je le relis plus souvent que ces messieurs du Parti libéral; après tout, c'est notre propos - il y a encore du flou. Justement, je voudrais qu'on sorte, enfin, qu'on extraie tout ce qui peut être flou et que ce soit le plus clair, pour employer un mot qui me paraît encore bon, le plus transparent possible quand viendra le moment.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, le premier ministre se rend-il compte que la dernière élection générale a eu lieu le 13 avril 1981, qu'il vient de dire lui-même qu'il avait dit à ses troupes...

M. Lévesque (Taillon): Oui, je m'en rends compte.

M. Levesque (Bonaventure): ...en fin de semaine que l'élection générale pourrait venir plus vite que l'on pense? Le terme normal d'un gouvernement, selon la tradition, se terminerait vers le printemps 1985, c'est-à-dire qu'il nous reste à peu près un an et dix mois pour arriver à l'élection de façon normale, sans précipitation, mais sans délai comme la dernière fois, alors que le premier ministre a jugé à propos de dépasser la période traditionnelle.

Est-ce que le premier ministre se rend compte qu'à un an et quelques mois de l'élection il serait temps d'être moins flou et d'être plus précis? Est-ce qu'on va avoir droit à une question encore, question qui serait, selon la Loi sur la consultation populaire, étudiée à l'Assemblée nationale? Est-ce qu'on va encore avoir des comités-parapluies? Le premier ministre a laissé entendre que les lois se changent, etc., mais est-ce que le premier ministre ne pense pas, avec un sens minimal des responsabilités, qu'il ne devrait pas laisser le Québec encore une fois dans une période flou comme il le dit, bien longtemps avant que des décisions ne soient prises?

M. Lévesque (Taillon): Soi dit en passant, c'est vrai, on doit s'en souvenir des deux côtés, la dernière élection a eu lieu le 13 avril 1981, on n'a pas oublié cela. Je pense que vous non plus.

Pour ce qui est de la suite, la tradition, c'est quatre ans. De plus en plus, il y a des gouvernements qui y vont au bout de trois ans ou trois ans et demi. Le gouvernement de M. Trudeau, quand il a été battu, avait épuisé presque jusqu'à la dernière goutte la cinquième année de son mandat. Nous, nous sommes allés à quatre ans et cinq mois à peu près. Je pense que cela reste quand même une chose sur laquelle, au besoin... Le jour où la décision sera prise, je consulterai le chef de l'Opposition, si c'est lui qui l'est encore. Chose certaine, c'est que ce n'est pas le moment aujourd'hui.

Ce que je voulais dire et ce que j'ai dit, c'est que dans un parti comme le nôtre, qui a fait sa raison d'être d'une idée extraordinairement légitime, d'un projet aussi légitime que n'importe quel autre, on peut bien avoir comme projet de rester à perpétuité dans un régime fédéral, on peut également avoir comme projet, comme toute nation dans le monde qui se respecte - et il y a une nation ici au Québec qui a toute sa consistance - très légitime de faire l'émancipation ou d'aider à faire l'émancipation politique de cette nation, de ce peuple. C'est cela qui va être central pour nous, à la prochaine élection, quel qu'en soit le moment. Pour ce qui est de la façon d'y arriver, je répète ce que j'ai dit tout à l'heure au chef de l'Opposition: Quant à nous, il reste à peu près un an d'ici le prochain congrès national, en juin 1984, qu'on prépare. Comme à chaque congrès, des choses sont remises en discussion. Celle-là aura des chances très sérieuses de l'être aussi et on sortira de là, je l'espère, avec la

position la plus claire possible. Ce sera amplement suffisant pour que tout le monde ait le temps de voir où on s'en va.

Je ferai remarquer au chef de l'Opposition que, dans le temps, j'ai connu des campagnes électorales centrées, à la dernière minute, sur un slogan tel "100 000 emplois". On en a eu une sans grande préparation dans les esprits, sur la nationalisation de l'électricité, même si cela s'en venait depuis quelques années. Je pourrais citer d'autres exemples. Enfin, je ne vois pas à quoi rime de se poser des questions. Peut-être deux ans, peut-être même plus avant la prochaine élection puisque, de toute façon, d'ici à un an, notre parti et tous ensemble de notre côté, nous aurons précisé nos intentions et notre façon de procéder. (12 h 45)

M. Levesque (Bonaventure): Notre premier ministre, M. le Président...

M. Lévesque (Taillon): Je ne peux pas le prévoir et je ne peux pas faire cela pour faire plaisir au député de Bonaventure en ce moment.

M. Levesque (Bonaventure): ...ne me rassure pas du tout, lorsqu'il répond ainsi.

M. Lévesque (Taillon): J'avoue que je ne me faisais pas d'illusions.

M. Levesque (Bonaventure): Surtout lorsqu'il nous renvoie dans un an à son congrès. Quand on sait ce qu'a donné le dernier congrès et quand on a sait qu'il a fallu tenir un "renérendum" pour contredire le congrès... Je me demande si on va avoir la même chose au prochain congrès.

M. Lévesque (Taillon): Avec le fourmillement d'idées qu'il y a chez ces messieurs du Parti libéral, je pense que vous ne risquez rien de ce côté-là.

M. Levesque (Bonaventure): Deuxièmement, la question que...

M.Rivest: Vous verrez le 20 juin.

M. Lévesque (Taillon): Le premier ministre pourrait-il nous dire comment il a pu déclarer, à la suite de son engagement formel, que la prochaine élection générale serait centrée sur l'indépendance et qu'elle se ferait sur l'indépendance, comment peut-il nous expliquer qu'il ait dit, à ce moment-là - c'est ce que nous avons compris du moins et ses ministres également l'ont compris, d'après les propos tenus par la suite - qu'il allait se mettre la tête sur le billot et que les députés péquistes allaient se mettre la tête sur le billot? Tout le monde a compris que cela voulait dire qu'il y aurait un vote - pas deux votes, un vote - à l'élection référendaire. Comment peut-on s'imaginer qu'on se met la tête sur le billot quand on a une élection générale et, à côté, pas en même temps, mais à côté, simultanément, parallèlement, un autre vote sur la question de l'indépendance? Comment peut-on concilier cela avec des propos comme: On va se mettre la tête sur le billot? Où est le billot? Où est la tête? La tête de qui?

M. Lévesque (Taillon): En tout cas, ce serait un billot beaucoup plus réel et beaucoup plus honnête que celui employé par M. Trudeau pour faire voter non au référendum. Vous vous souvenez? Il mettait sa tête...

M. Levesque (Bonaventure): Oui, mais cela ne répond pas à la question.

M. Lévesque (Taillon): Non, non, attendez un peu!

M. Levesque (Bonaventure): Cela ne répond pas à la question.

M. Lévesque (Taillon): Non, non, ce que je veux dire, c'est que l'expression est peut-être un peu dévaluée. On devrait en changer et en trouver une autre parce que ia façon sournoise et profondément malhonnête dont le premier ministre fédéral est venu influencer, par un engagement solennel comme celui-là, le vote du référendum au Québec, laissant entendre à tout le monde que les aspirations légitimes à l'intérieur du régime fédéral, qui traînent dans le paysage depuis une génération et plus, seraient réalisées. C'est ce que tout le monde a compris. Après cela, ce qu'on a eu a été plutôt une des opérations, à mon humble avis, les plus répugnantes au point de vue constitutionnel qu'on n'ait jamais vues dans notre histoire. Et Dieu sait qu'on en a vu pourtant!

Pour nous, ce que cela veut dire est ceci: De façon absolument centrale - cela est dans notre programme et c'est écrit comme cela, j'en enverrai un exemplaire au député de Bonaventure s'il veut se renseigner le gouvernement actuel mettra son existence en jeu et personne ne pourra l'ignorer au moment des prochaines élections. Quelle va être la façon de le faire de manière que ce soit le plus légitime, le plus clair possible, si les résultats sont ceux que nous espérons? Cela reste à mettre au point, parce que ce n'est pas clair dans le programme du parti actuellement. Je n'y peux rien et ce n'est pas à moi de fabriquer le programme. J'ai simplement indiqué, je n'ai pas du tout dit au député de Bonaventure - c'est lui qui a inventé des scénarios - en Chambre qu'il y aurait deux bulletins, qu'il y aurait deux votes ou qu'il y

aurait un vote coupé en deux. Toutes ces façons de procéder, pourvu qu'elles soient légitimes, qu'elles soient claires, ce sont des choses qui, à mon humble avis, doivent encore être mises au point et discutées entre nous, de notre côté, et le public jugera si c'est satisfaisant comme façon de procéder.

M. Levesque (Bonaventure): Le premier ministre admet qu'il n'a pas rejeté l'idée d'avoir un double vote à ce moment-là?

M. Lévesque (Taillon): Je n'ai endossé ni accepté aucune idée, puisque c'est cela qu'on va discuter de notre côté. Je vais écouter avec beaucoup d'intérêt tout le long du chemin, s'il en a d'autres, les suggestions du député de Bonaventure, mais ce sera à nous de décider.

M. Levesque (Bonaventure): En effet, mais si on arrivait à prendre cette décision, je dis qu'il faudrait ne plus parler de mettre la tête sur le billot à moins que le premier ministre soit convaincu - et cela, il a des bonnes raisons de l'être - que la prochaine fois, qu'il y ait un ou deux bulletins, cela va être un rejet autant du gouvernement que de l'option. Mais si on veut rester dans la pleine logique et éviter le côté partisan, simplement rester dans la logique des choses, comment peut-on imaginer que le gouvernement va mettre la tête sur le billot lorsqu'il y a deux parties de bulletin de vote, une partie portant sur l'élection elle-même et l'autre portant sur le référendum? Si on arrive avec cette solution, il serait grand temps qu'on sorte de la situation floue qu'admettait le premier ministre tout à l'heure parce qu'il nous reste un an et quelques mois avant d'arriver au terme normal de ce gouvernement.

M. Lévesque (Taillon): Bon! Il y a quelques notes un peu méchantes que j'ai ici. Si on veut faire un petit débat sur cela, on peut toujours continuer. J'aimerais mieux et je pourrais quasiment demander au député de Bonaventure... 11 est là, il fait des suggestions et c'est lui qui les invente, ce n'est pas moi. Je pourrais peut-être lui demander ses préférences, s'il ne veut pas me les donner tout de suite, il pourra peut-être m'envoyer une note et j'en tiendrai compte au besoin. 11 est en train de nous dessiner son propre scénario. Quand on nous accuse d'être flous sur une question qui mérite vraiment qu'on s'y engage à fond, si c'est central dans la prochaine élection, je ferai remarquer au député de Bonaventure qu'il n'y a pas grand monde au Québec qui va ignorer que c'est central. Et, quand les gens vont voter, quelle que soit la forme finale de la consultation de l'élection elle-même, ils vont savoir sans la moindre ambiguïté de quoi il s'agit. Mais quand je les vois nous accuser d'être flous, sauf erreur, les gens qui ont annoncé qu'ils auront un programme politique au moment de l'élection d'un chef, c'est-à-dire quand on verra ce que le chef éventuel voudra mettre dedans, je suppose... Si je prends les échéances que fabrique lui-même le député de Bonaventure, dans moins de deux ans, il me semble que vous avez du temps perdu à rattraper et que vous pourriez peut-être vous occuper de la façon dont vous vous présenteriez comme éventuel gouvernement parce que cela commence aussi à presser de votre côté. Nous, au moins, on sait notre but, et le but on ne l'abandonnera pas; la façon d'y arriver, bien, cela se met au point en cours de route.

M. Levesque (Bonaventure): Combien de fois le premier ministre juge-t-il qu'il est nécessaire que la population dise non à son projet avant qu'il soit convaincu qu'il doit être mis de côté?

M. Lévesque (Taillon): C'est une bonne question. Je ne le sais pas. Je ne sais pas combien de temps dure... Dans le cas du peuple grec - cela m'a frappé l'autre jour -il a été deux mille ans avec une identité Dieu sait! bien connue puisqu'elle avait été à la source même de la civilisation que nous avons. Il a été deux mille ans dans des régimes qui lui enlevaient et continuaient de lui enlever, enfin, le gardaient en sujétion comme colonie d'empires successifs. Il n'a jamais lâché et, au bout de deux mille ans, au siècle dernier, il a retrouvé son indépendance. L'Irlande a passé combien de générations, à partir de Cromwell jusqu'au XXe siècle, à se faire bardasser de façon particulièrement barbare à l'occasion? Cela ne l'a pas empêchée éventuellement de récupérer son existence nationale. J'espère et je suis confiant qu'on n'aura pas à passer par autant de tribulations. Mais pourquoi cette idée artificielle qu'un peuple qui ne s'est pas abandonné depuis trois siècles et demi, qui a une existence nationale indiscutable, surtout sur ce continent où la différence elle-même par rapport au reste du continent nous donne notre identité, enfin, sous-tend notre identité, pourquoi cette question artificielle? À quel moment... Au fond, ce que vous voulez dire, c'est à quel moment les Québécois abandonneraient l'idée de pouvoir s'appartenir un jour? Je n'ai vu cela nulle part, dans l'histoire d'aucun peuple bien identifié qui se respectait de façon minimale.

Pour régler la question, j'ai bon espoir que si ce n'est pas la prochaine fois... J'ai confiance, la prochaine fois, qu'on ait des chances parce que cela se maintient pour l'essentiel. Il y aura quelques centaines de milliers de jeunes électeurs qui n'étaient pas là en 1980, il y a aura quelques centaines de personnes qu'on avait terrorisées qui ne

seront plus là et qui étaient là en 1980. Elles ne seront plus là. J'ai confiance qu'on arrivera peut-être au résultat, mais je ne peux en dire davantage. Qu'on puisse déraciner l'idée de s'appartenir, i'idée de la souveraineté ou de l'indépendance chez un peuple? Je n'y crois pas ou alors il s'est lui-même abandonné.

Le Président (M. Jolivet): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: M. le Président, je voudrais tout d'abord redresser une couple de faits qui ont été évoqués par le premier ministre. Quand il parle de l'expérience du référendum et qu'il laisse entendre qu'une certaine déclaration du premier ministre du Canada aurait été le facteur décisif dans le verdict qu'ont rendu les électeurs, je pense qu'il est lui-même conscient qu'il y a un risque de déformation de la réalité qui n'est pas négligeable.

M. Lévesque (Taillon): Écoutez, si le député d'Argenteuil, veut que je - pour ne pas en faire un long débat - rende hommage à ses efforts du côté du non et à ses qualités à ce moment d'organisateur et de leadership. Simplement, c'est que M. Trudeau a eu, lui, l'impression qu'il venait de régler la question.

M. Ryan: M. le Président, ce n'est pas cela que j'attendais, pas du tout. Quand je serai mort. Pour le moment, ce que je veux dire - et je voulais le rappeler au premier ministre parce que je l'ai souvent entendu répéter cela - c'est qu'avant cette fameuse assemblée tenue au Centre Paul-Sauvé, un sondage réalisé par Pinard et Hamilton avait été publié dans tous les journaux. Ce sondage s'est révélé comme étant le plus exact de tous et il indiquait un résultat à peu près semblable à celui qu'on a connu. Le sondage avait été fait environ quinze jours avant les déclarations de M. Trudeau. Par conséquent, je pense qu'on peut au moins prêter au peuple québécois l'intelligence suffisante pour avoir été capable d'en venir à cette décision sans que le facteur que vous évoquez ait été causal et premier. Que cela ait été un facteur, je ne le nie point. J'ai souvent constaté qu'on faisait ce lien. Je comprends que, dans l'emportement de la polémique, on est souvent porté à établir des liens comme celui-là. Je soumets ces faits à votre réflexion pour que, dans l'avenir, ils vous conduisent peut-être à des déclarations plus nuancées.

M. Lévesque (Taillon): II y aura peut-être un chapitre - pas le plus beau - dans l'histoire contemporaine qui sera là et probablement que les gens remettront cela à la bonne place.

M. Ryan: Mais en attendant, vous voulez dire qu'il y en a qui vont continuer à faire de la politique partisane avec ces choses-là?

M. Lévesque (Taillon): C'est-à-dire que - vous le dites vous-même - emportés dans le feu de l'action, on peut peut-être sous-estimer certains facteurs et en surestimer d'autres.

M. Ryan: J'ai peut-être commis une grande erreur, M. le Président, mais j'ai toujours pensé que si on essayait davantage d'asseoir l'action politique sur la raison, sur le respect des faits, on ferait peut-être avancer les peuples plus vite, même si, dans l'immédiat, cela pouvait se solder par des résultats moins intéressants.

M. Lévesque (Taillon): Si vous pouviez en convaincre vos collègues, cela aiderait.

M. Ryan: Je travaille sur vous pour l'instant. Deuxièmement, je souligne très brièvement que le Parti libéral du Québec, malgré toutes les tares que le premier ministre veut voir chez lui, a un programme constitutionnel pas mal plus explicite que celui du Parti québécois en matière de réforme du fédéralisme.

M. Lévesque (Taillon): Est-ce qu'il est encore officiel?

Des voix: Oui.

M. Ryan: Deuxièmement, il a également un programme politique, économique et social qui s'appelle le livre rouge et qui fut adopté avant la dernière élection, non pas à la veille d'une élection sur un bout de table comme cela s'est déjà fait - l'ex-premier ministre et moi avons des souvenirs en commun là-dessus - mais qui avait été l'objet de longues délibérations dans toutes les régions du Québec, qui avait été adopté chapitre par chapitre au niveau régional avant d'être adopté en conseil général spécial, ce qui équivaut à un congrès de plusieurs semaines. Tout cela, encore une fois, pour le souoi des faits, mais la question que je voulais soulever était plus directement reliée à ce qu'a dit le premier ministre et aux questions que lui a posées le chef de l'Opposition.

La question que je n'ai pas encore comprise, c'est que pendant plusieurs années le Parti québécois et le gouvernement nous avaient dit: On ne veut pas vous brusquer, on ne veut pas vous forcer sur la question de l'indépendance, pour laquelle j'ai le plus grand respect personnellement. Je serais porté à croire qu'aussi longtemps qu'un peuple existe, ce sont des questions qui vont se poser à sa conscience et qui trouveront

vraisemblablement une expression politique, le peuple restant libre de décider majoritairement si c'est celle qu'il préfère. On nous avait dit pendant des années: C'est une chose tellement importante. Il faut sortir cela des considérations électoralistes. 11 faut mettre cela à un niveau spécial. C'est pour cela qu'on est allé faire des enquêtes sur la manière de tenir des référendums. C'est pour cela qu'on est arrivé avec une loi sur les référendums qui a une portée évidemment plus générale dont le libellé ne se rattache pas directement ni exclusivement à ce sujet, mais quand même, lorsqu'on se souvient de l'histoire de la manière la moindrement vraie, cela a été fait pour cela. On a tenu un premier référendum qui s'est bien déroulé, tout compte fait. Nous avions des appréhensions très pessimistes. Vous nourrissiez peut-être des espoirs exagérément optimistes. Mais, finalement, on craignait même le regroupement en camps. Cela s'est fait d'une manière dont on peut dire, après coup, qu'elle était convenable. Ce que je n'ai pas compris, c'est que tout à coup il y a eu un changement de cap. On a dit: Cela ne marche plus, les référendums. On s'en va en élection là-dessus et c'est ce qui va régler l'affaire.

Je voudrais poser deux questions au premier ministre là-dessus. D'abord, pourquoi ce changement de cap? Qu'est-ce qui n'a pas marché dans l'affaire du référendum? Pourquoi êtes-vous porté à laisser cela de côté maintenant? Quels avantages sérieux y a-t-il dans ce changement de cap pour le peuple québécois et pour le caractère sérieux de la décision que vous espériez obtenir de lui par rapport aux avantages qu'on pouvait tirer de la formule référendaire? Ce sont deux points sur lesquels je n'ai pas encore compris le cheminement de la pensée gouvernementale et de la pensée péquiste, s'il peut être question de pensée là-dedans. (13 heures)

M. Lévesque (Taillon): Je voudrais faire une remarque et exprimer un remerciement normal, je pense. La remarque, je pense que cela rejoint la discussion qu'on avait avec le député de Bonaventure. Je viens d'entendre le député d'Argenteuil dire qu'à la dernière campagne électorale, ce qui s'est appelé le livre rouge dans le jargon populaire, c'est-à-dire le programme électoral du Parti libéral - j'ai noté les mots - "avait été mis au point de façon définitive", c'est-à-dire approuvé de façon définitive, plusieurs semaines, pas un an et demi, pas deux ans, mais plusieurs semaines avant la campagne électorale. Je pense qu'il y a un élément de réponse. Je voudrais remercier le député d'Argenteuil - je n'ai pas à le remercier, mais enfin, cela m'a frappé, de la façon extraordinairement précise et cohérente, aussi, dont il a parlé de la question de la souveraineté ou de l'indépendance nationale pour notre peuple comme pour les autres. Cela fait du bien d'entendre cela, parce que cela n'arrive pas souvent de l'autre côté.

Maintenant, pour ce qui est de la loi sur les référendums, elle a été mise au point - c'est vrai - pour usage général, mais en fonction, forcément, d'une échéance qui approchait. Elle a fonctionné convenablement. Je pense et j'espère qu'on aura l'occasion de s'en resservir. Est-ce qu'elle peut avoir besoin d'amendements? J'ai toujours pensé qu'il y avait - je prends la loi elle-même -un délai trop long. Peut-être que c'était inévitable dans ce cas - c'était peut-être même nécessaire - mais il y avait un délai trop long entre, si vous voulez, l'amorce, qui prend la forme d'une question qu'on propose, et tout le débat, enfin, les délais ensuite pour la formation des camps, selon les cas, qui se forment pour aller porter cette question à l'opinion publique pour qu'on ait une réponse définitive de ceux qui ont le pouvoir véritable, c'est-à-dire les citoyens. Je pense que, comme toute loi, l'expérience vécue pourrait vouloir dire qu'elle mériterait d'être amendée, mais cela reste à voir.

Pourquoi ne s'est-on pas accroché cette fois-ci de façon définitive à un autre référendum et qu'on a plutôt eu cette pression d'aller vers une élection? Je pense que cela vient essentiellement de toute une série de remous dans notre parti qui sont légitimes, comme dans tous les partis démocratiques, avec l'impression que j'essaie d'interpréter, je ne suis pas plus psychanalyste, surtout des grandes foules, des grandes masses, que n'importe qui - les parlementaires, enfin, ceux qui dirigeaient la campagne référendaire de notre côté, ne se sentaient pas impliqués au point d'avoir leur existence même comme parlementaires en jeu. Cela ne me paraîtrait pas nécessairement la pire des explications. C'est-à-dire qu'il y a derrière cela, je pense, le sentiment, dans notre parti, chez des militants qui attendent depuis des années, forcément avec impatience, que cela puisse se réaliser, ce sentiment que, si on met tout le monde au "bat", comme on dit dans le langage courant, et que chacun doit jouer à la fois sa tête politique et la question elle-même, ce serait probablement une façon d'arriver à un résultat maximal. C'est une façon de voir les choses.

Je l'ai rappelé l'autre jour, j'ai déjà vécu une élection... Quelquefois, les élections ont des allures référendaires en soi. J'en ai vécu une qui était nettement cela en 1962 où, forcément, personne ne pouvait ignorer que, si on élisait le gouvernement, tout de suite après il y aurait la nationalisation des compagnies d'électricité et que si le gouvernement était battu, à cause de l'attitude de l'Opposition d'alors, cela ne se ferait pas ou cela se ferait pas ou cela se ferait par petits morceaux.

Donc, il y avait un enjeu qu'on peut qualifier de référendaire. C'était un gros enjeu pour l'époque quand même. Cela arrive à l'occasion. Ce n'est pas illégitime en soi, mais sur une question aussi vaste et aussi "all embracing" - comme on le dit en anglais - que la question de l'avenir national, peut-être qu'il faut y repenser encore. C'est tout ce que j'ai évoqué puisque je l'ai évoqué aussi dans le dernier conseil national de notre parti, en fin de semaine. Cela ne veut pas dire que les gens vont être du même avis. Mon avis, c'est qu'il faut au moins réfléchir là-dessus et essayer de voir le plus clair possible dans la façon d'en arriver à la prochaine échéance.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, les remarques du premier ministre me confirment qu'il demeure encore, peut-être volontairement, dans cette attitude floue. Il ne prend pas l'attitude d'un chef de gouvernement, mais il prend plutôt celle d'un analyste de la situation. Il continue d'analyser et de regarder passer les choses. On verra. On ne sait pas au juste. On a des "afterthought" sur l'affaire de 1962. On n'aurait peut-être pas dû. Ce n'est pas si mauvais parce que, après tout, c'est sectoriel. Maintenant, c'est plus important, car c'est l'avenir d'un peuple. Enfin, on continue comme cela dans une suite qui ne fait que consacrer l'incertitude dans laquelle se trouve présentement la population qui dit: Est-ce qu'on va continuer encore? Et plus là, le premier ministre dit que cela peut durer 2000 ans. Je ne sais pas si c'est Mathusalem, mais, enfin, à un moment donné, il faut qu'elles se règlent ces choses-là.

M. Lévesque (Taillon): Cela étant dit, le flou que vous discernez chez nous permet de dissimuler quelque chose qui est plus que du flou qui règne de votre côté. Enfin, je ne veux pas être méchant inutilement.

M. Levesque (Bonaventure): Attendez au 20 juin et vous verrez tout ce qui est flou.

M. Rivest: M. le Président, juste une question additionnelle si vous me le permettez. En réponse à la question du député d'Argenteuil, je pense, à moins de mal interpréter la préoccupation du député, que vous avez ouvert la porte à savoir... Je pense que le fait que vous ayez décidé, la dernière fois, de tenir un référendum, c'était justement - je pense que c'était la raison de la loi et je comprends qu'elle est générale, mais elle s'appliquait en pratique sur cette question de l'avenir constitutionnel - de mettre au-dessus des contingences électorales toujours extrêmement complexes et extrêmement conjoncturelles une question qui est celle de l'avenir d'une nation, l'avenir du Québec.

Je pense que l'essentiel de la question du député d'Argenteuil était de dire: Comment cela se fait-il que vous ayez abandonné cette idée de sortir cela de toutes les contingences électorales - dans le cadre d'une élection où un gouvernement a du bon et du mauvais - et que, là, sur la table, en tout cas à ce jour, il est clair et même votre congrès de 1984 ne semble pas... Je voudrais que vous nous indiquiez cela. Est-ce que votre congrès de 1984 pourrait remettre en cause l'idée d'une élection référendaire sans égard aux modalités de ladite chose?

M. Lévesque (Taillon): Un peu comme on dit pour l'Assemblée nationale, à l'intérieur d'un parti qui veut respecter un minimum de démocratie interne, tout peut être remis en question. Je ne pense pas que, dans notre cas, le but lui-même, l'objectif pourrait être remis en question. Ce serait la fin du parti. Mais la façon d'y arriver, oui, cela peut être remis en question. Je ne veux pas dire qu'elle va l'être. Je dis qu'elle peut l'être.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): Avant que l'on continue, je voudrais faire remarquer qu'il y a un commun accord pour poursuivre après 13 heures. M. le chef de l'Opposition.

La réforme du Sénat

M. Levesque (Bonaventure): Oui, M. le Président. Nous avons voulu accommoder le premier ministre qui nous a dit qu'il avait d'autres engagements assez importants qui l'attendaient. Nous avons voulu apporter notre collaboration afin de continuer après 13 heures. J'espère que nous n'aurons pas cependant, pour employer un mot cher au premier ministre, escamoté les choses essentielles. Parmi les choses importantes, je pense qu'il faudrait au moins souligner ici qu'il semble bien que la prochaine étape de la réforme constitutionnelle portera sur le Sénat canadien, une institution présentement relativement, dans l'esprit du premier ministre certainement, secondaire au Canada.

M. Lévesque (Taillon): Parfois, on s'ennuie du vieux Conseil législatif, mais enfin, je pense que c'était mieux de l'abolir quand même.

M. Levesque (Bonaventure): Oui. Il y avait, dans le Conseil législatif, certains aspects positifs également. Il y avait là...

M. Lévesque (Taillon): Positifs, non. Disons, de convenance.

M. Levesque (Bonaventure): Non, je

pense qu'il y avait la prudence à part la convenance. Il y a eu des...

M. Lévesque (Taillon): On ne se chicanera pas là-dessus.

M. Levesque (Bonaventure): Bon. D'accord. Je ne voudrais pas non plus faire de diversion à ce moment-ci. Cette institution, par sa position stratégique parmi nos institutions parlementaires, pourrait jouer un rôle de premier plan dans le fédéralisme renouvelé. Présentement, le gouvernement fédéral doit rendre public un livre vert du ministre de la Justice, M. MacGuigan, justement sur la réforme du Sénat. Selon nos renseignements, il s'agirait d'un document d'information qui, sans présenter de modèle défini d'une Chambre haute, donnera quelques options en matière de composition de pouvoir, de modes de nomination, etc. Ce livre vert servirait à une commission mixte du Sénat et de la Chambre des communes, qui a déjà été mise en place, la commission MacLaren-Molgat, dans une vaste tournée de consultation envisagée pour l'automne prochain.

Le premier ministre me parlait du livre beige. Oui, nous avons, dans le livre beige, pris position pour une formule de Sénat qui, selon nous, avantagerait les provinces et singulièrement le Québec.

Le premier ministre s'inquiétait tout à l'heure du livre beige. Je dois lui dire que dans le manifeste du Parti libéral... S'il m'envoie une copie du programme de son parti, je pourrai lui envoyer une copie du manifeste du Parti libéral où il verra que notre parti, lors de son dernier congrès plénier, a renouvelé sa confiance dans les objectifs que l'on retrouve dans le livre beige. Justement, il y a une partie de ce livre beige qui traite du Sénat où l'on suggère que le Sénat actuel soit remplacé par un conseil fédéral, véritable Chambre des provinces composée entièrement de délégués nommés par les gouvernements provinciaux et votant selon les instructions de leurs gouvernements respectifs. Une telle institution inspirée du modèle ouest-allemand de Chambre haute avait d'ailleurs été proposée par le gouvernement ontarien, par la commission Pepin-Robarts et par d'autres groupes il y a déjà quelque temps. Elle devrait permettre aux provinces d'influencer l'élaboration de certaines politiques fédérales dont l'ampleur touche l'ensemble du pays ou affecte l'action des provinces. Nous croyons également qu'il est possible de confier à un tel Sénat certaines responsabiltés comme gardien et protecteur de la dualité canadienne. Il pourrait, par conséquent, jouer un rôle important dans la défense des intérêts du Québec.

D'autres, cependant, depuis ce temps ont proposé d'autres formules. Une de ces formules, c'est le Sénat électif à la mode américaine. Il est trop tôt évidemment pour poser un jugement final sur une telle proposition, mais il est tout à fait possible que certaines formules de Sénat électif soient contraires ou puissent être contraires aux intérêts du Québec. Je pense bien que c'est assez difficile de demander au chef du parti séparatiste de donner une contribution réellement valable mais, comme il s'est engagé à diverses reprises avant les élections parce que cela est toujours avant les élections - que, s'il était réélu, il continuerait à agir comme premier ministre du Québec dans le régime constitutionnel actuel et qu'il continuerait à apporter sa contribution pour améliorer les choses tant que cela dure, je lui demande simplement si...

M. Lévesque (Taillon): Un long préambule.

M. Levesque (Bonaventure): ...il va se retirer de cet exercice, parce que nous nous attendons bien qu'à l'automne cette commission itinérante vienne à Québec. Qu'est-ce que le gouvernement actuel du premier ministre entend faire? Est-ce que le premier ministre va se retirer et regarder passer le train ou, comme il le disait aux conférences fédérales-provinciales, ramasser les miettes qui peuvent tomber? Qu'est-ce qu'il va faire? Est-ce qu'il va réellement participer à cet exercice de suggérer des réformes au Sénat canadien?

M. Lévesque (Taillon): Si j'ai bien compris le cheminement qu'évoque le député de Bonaventure, il va y avoir un livre vert. On sait que c'est en général une couleur assez floue, pour reprendre une expression qui...

M. Levesque (Bonaventure): ...bibliothèque...

M. Lévesque (Taillon): ...un livre vert, ensuite une commission mixte, ensuite le terme passe-partout qui est la vaste tournée, ensuite peut-être, éventuellement, un livre blanc. Pendant ce temps, il y a un nouveau chef conservateur et il y aura peut-être des changements en ce qui concerne le Parti libéral fédéral. Cela nous donne quand même le temps de voir venir, je crois; c'est le moins qu'on puisse dire. Maintenant, je suis obligé de souligner, et je pense que le député d'Argenteuil va bien être d'accord avec moi, que la réaction à la fois fédérale et anglo-canadienne la plus négative qu'il y ait eu ces dernières années dans le domaine constitutionnel, pour autant que je me souvienne, cela a été justement autour du livre beige dont je n'enlève aucun des mérites en tant que Québécois dans un

régime fédéral, mais c'est exactement cela qui s'est produit. (13 h 15)

Maintenant, je voudrais tout de même qu'on n'oublie pas que la réforme éventuelle du Sénat, ce n'est pas exactement ce qui presse le plus. D'abord et avant tout - ce n'est pas d'hier que c'est la position du Québec; on l'appelle position traditionnelle, mais il y a de sacrées bonnes raisons pour qu'elle soit devenue traditionnelle - d'abord et avant tout, c'est la répartition des pouvoirs à l'intérieur du régime fédéral pour accroître les moyens à la disposition de l'État québécois, c'est la priorité. Cela avait déjà été bien entendu et on peut bien, comme on dit en anglais, nous promener le "red hearing" d'une réforme du Sénat sous le nez, en nous prenant toujours pour des naïfs qu'on peut perdre dans le maquis en oubliant ou en leur faisant oublier l'essentiel. Ce qui pressait le plus et qui continue à presser le plus, pour autant qu'on est encore dans un régime fédéral, c'est une répartition des pouvoirs plus vivable et plus respirable pour le Québec. Quant à nous, cela reste le seul objectif qu'on peut appeler constitutionnel pour autant qu'il y en ait un qui puisse être sérieux. Mais la réforme du Sénat, franchement... En temps et lieu.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, ma question est bien simple.

M. Lévesque (Taillon): Oui.

M. Levesque (Bonaventure): Nous sommes à la fin de juin ou au milieu de juin et nous allons probablement nous quitter pour quelque temps, dans quelques jours, et nous nous retrouverons à l'automne au moment même où les mémoires, où les auditions, etc., tout cela se passe. Est-ce que le gouvernement du Québec a l'intention de se préparer pour faire valoir son point de vue? Parce que c'est encore un gouvernement, quelles que soient les options du parti de ceux qui le dirigent, c'est encore un gouvernement à l'intérieur de la constitution canadienne, dans le fédéralisme canadien, qui a des responsabilités et des devoirs. Est-ce qu'il a décidé de se préparer en vue de ces consultations? Est-ce qu'il a l'intention de présenter un mémoire? À-t-il l'intention de témoigner devant le comité mixte du Sénat et de la Chambre des communes?

M. Lévesque (Taillon): Non, pas pour l'instant, mais peut-être - juste un peu pour voir l'état de l'opinion publique par rapport à certaines priorités; je réfère un peu aux questions du député de Bonaventure posées ce matin - on pourrait, si vous n'avez pas d'objection, penser à un sondage sur ces questions pour voir quelle est actuellement l'évolution des idées là-dessus et ce que les gens considèrent comme prioritaire.

Le Président (M. Jolivet): M. le député d'Argenteuil.

M. Ryan: Je voudrais tout d'abord corriger une impression fausse, encore une fois, qui a été répandue par certains au cours des années qui ont suivi le référendum. J'entendais le premier ministre dire tantôt qu'on aura peut-être rarement vu une réaction de rejet aussi forte que celle qui s'est produite au Canada anglais à l'endroit du livre beige.

M. Lévesque (Taillon): À Ottawa peut-être particulièrement.

M. Ryan: Oui. Je pense que c'est bon d'apporter des précisions. Je vais vous en fournir quelques-unes pour vos futures interventions dans ce dossier. Je me souviens que le gouvernement de l'Ontario avait réagi fort positivement à propos du livre beige. Dans l'Ouest du pays, la Conférence des premiers ministres de l'Ouest était présidée, à l'époque, par M. Lougheed, le premier ministre de l'Alberta. La Conférence des premiers ministres de l'Ouest s'était réunie et avait publié une déclaration éminemment positive au sujet du livre beige qui, malheureusement, n'eut point, au Québec, dans la presse du Québec en particulier, les échos qu'elle aurait du avoir.

Une voix: C'est leur problème.

M. Ryan: On ne les a pas poursuivis pour cela.

M. Lévesque (Taillon): C'est une façon d'attirer l'attention.

M. Ryan: Mais je sais que certains journaux, en particulier le Toronto Star, a publié une critique "devastating critic". C'était dans le Toronto Star, un journal éminemment centralisateur qui ne voyait que par la concentration plus grande des pouvoirs à Ottawa. Il n'a pas changé beaucoup depuis ce temps, mais, ici au Québec, il y a malheureusement trop d'éléments - peut-être intéressés, peut-être d'autres qui ne connaissaient pas autre chose - qui ont laissé entendre que l'opinion du Toronto Star était l'opinion du Canada anglais.

Tout le monde sait que ce n'est pas vrai. Le Toronto Star est un journal qui, souvent, a des opinions très marginales par rapport à l'opinion moyenne anglo-canadienne. Je vous donne un exemple: Ce journal fait croisade depuis des années pour l'abolition de la monarchie parce que son "publisher" M. Honderich, appartient plutôt au tiers groupe au Canada depuis de nombreuses années. Il n'a pas les attaches à la monarchie contre

ceux qui sont issus des groupe anglo-saxons, par exemple. Mais cela ne veut pas dire qu'il reflète, là-dessus, l'opinion moyenne du Canada anglais. Je pense que l'opinion moyenne du Canada anglais demeure plutôt favorable au maintien de la monarchie. On l'a su au cours de la dernière réforme constitutionnelle où ils nous ont passé ce sapin, entre autres. On ne pourrait avoir de changement de régime, à ce niveau, sans le veto de l'Île-du-Prince-Édouard. Celui qu'on a refusé au Québec pour des choses qui nous intéressaient, on l'a donné à d'autres dans des choses qui les intéressaient par exemple. C'est là un aspect de la dernière réforme qui est éminemment déplorable à mon point de vue.

Ceci dit, je voudrais, par conséquent, éviter, parce qu'on a tendance souvent -peut-être plus du côté du Parti québécois parce qu'on est intéressé à la cause de la thèse politique que défend le parti - à présenter les opinions comme des monolithes... Je voudrais dire, pour l'honneur des faits et de la vérité, qu'au Canada anglais l'opinion n'est pas aussi monolithique qu'on le pense et que le livre beige en conséquence avait suscité de nombreuses réactions positives qui, malheureusement, n'ont pas rejoint le palier supérieur des décisions gouvernementales à Ottawa. Je serais tout à fait d'accord avec le premier ministre pour reconnaître que le gouvernement fédéral du temps a eu une réaction extrêmement décevante au sujet des propositions de changement qui étaient contenues dans ce document. Il n'y en a pas eu, d'abord verbalement. Il y en a eu une en pratique qui était la négation de l'esprit même de ce document-là.

Dans le livre beige, la réforme du Sénat jouait un rôle important, occupait une place fondamentale. D'abord, c'était l'abolition du Sénat et la création d'un nouvel organisme. Je voudrais souligner ceci à l'attention du premier ministre. Le premier ministre disait: On va regarder aller les choses, on va laisser faire cela un petit peu et un petit peu plus tard, on verra. Vous savez comme moi que, pour des changements importants, celui qui prend l'initiative de la problématique a souvent un avantage quand arrive le moment des solutions. Cela a peut-être fait défaut dans l'approche du gouvernement actuel. Il n'a pas eu assez de leadership dans la problématique et après cela, il est aux prises avec des propositions de M. Trudeau ou d'un autre et il est obligé de réagir négativement. Cela lui rend les choses infiniment plus difficiles. Je voudrais demander au premier ministre...

Le chef de l'Opposition a fait allusion tantôt aux dangers qui pourraient émerger d'une formule de Sénat électif, par exemple. Je ne suis pas contre un Sénat électif en principe, mais je me méfie de cette formule- là parce que je trouve qu'elle pourrait contribuer à augmenter l'ambiguïté du régime politique canadien, si on pensait que cela pourrait être la clé. Cela pourrait nous rendre encore plus difficiles des changements que nous avons tous raison de souhaiter, tandis que l'autre formule qui n'est pas une formule inventée - il y a des modèles de cette formule-là qui existent ailleurs - me semble présenter des meilleures garanties pour la défense des intérêts du Québec.

Est-ce qu'on ne pourrait pas demander au premier ministre, au moins, de mettre un groupe de travail à l'oeuvre là-dessus, dans les meilleurs délais? Il pourrait peut-être nous soumettre un document de réflexion parce que le Québec, jusqu'à nouvel ordre, étant partie de cette entité politique qui s'appelle le Canada, il me semble qu'on ne peut pas être absent, surtout au niveau du gouvernement, dans un débat comme celui-là qui pourrait déboucher sur des changements importants. J'avoue être très sceptique moi aussi quant aux possibilités immédiates, mais étant donné la conjoncture politique qui évolue continuellement, les possibilités de changement de direction dans les partis, les possibilités de changement gouvernemental, il me semble que si, au lieu du néant dans lequel nous sommes actuellement concernant la position du gouvernement, nous avions une position étoffée comme cela existe dans d'autres domaines, cela serait plus convenable au mandat qui est celui du gouvernement, qui est de nous défendre positivement dans le régime fédéral actuel.

M. Lévesque (Taillon): Si on met des fonds publics - parce que cela me rappelle des questions de ce matin - sur des études fouillées de ce genre-là, on pourrait peut-être en tirer certaines conclusions utiles dans l'éventualité d'un Québec souverain, une Chambre haute. Cela peut avoir son utilité sur divers plans mais, cela étant dit, je dois souligner une chose. Je suis d'accord que, jusqu'à un certain point, le Toronto Star peut être assez marginal; j'aimerais bien qu'il soit encore plus marginal parce qu'il a toujours, sauf erreur, solidement endossé M. Trudeau à chaque élection. Cela étant dit, il est vrai que l'opinion n'est pas monolithique au Canada anglais autant qu'on peut l'imaginer, quand on essaie d"'hypersimplifier". Je me souviens quand même qu'il y avait - on pourra retrouver ces choses-là - une acceptation dans certains milieux extraordinairement influents de la perspective, en dépit des hurlements qu'il y avait à l'époque, d'une éventuelle association économique entre le Canada et le Québec si le résultat du référendum avait été différent. C'est loin d'être monolithique quand les questions se posent d'une façon pressante.

Je dois dire quand même au député d'Argenteuil que, selon nos souvenirs - on

s'en parlait entre nous - dans le contexte des gens qui sont là, la partie du livre beige qui a peut-être été le plus spontanément rejetée ou traitée négativement, pas l'ensemble nécessairement, mais la partie du livre beige qui avait été quelque peu évacuée rapidement, pour autant qu'on se souvienne, dans l'ensemble des commentaires anglo-canadiens - je ne parle même pas d'Ottawa, mais on sait quelle était l'attitude d'Ottawa devant cela comme devant le rapport Pepin-Robarts - c'était justement cette question du Sénat, la structure qui était proposée pour un Sénat renouvelé. Alors, tout ce que je peux dire, c'est que je ne sais pas comment cela a évolué ou si cela a évolué depuis ce temps, mais une chose certaine, c'est qu'on n'a pas l'impression que ce serait facilement accepté ou rediscuté au mérite.

Cela étant dit, je veux seulement noter une chose parmi les remarques sur le leadership du député d'Argenteuil. La problématique constitutionnelle, telle qu'on pouvait la comprendre de bonne foi, une fois le référendum passé, était plutôt une problématique basée sur certains engagements. Peut-être que ce n'était pas déterminant dans le résultat du référendum, mais c'était quand même déterminant dans l'idée qu'on devait se faire de la suite, si on était de bonne foi, c'est qu'il y aurait une révision constitutionnelle où certaines des positions du Québec seraient au moins traitées d'une façon normale et respectueuse, si on veut. Je pense que le député d'Argenteuil s'en souvient assez pour partager cette impression. C'est ce qui nous semblait être la suite normale. Là-dessus on était préparé. On n'était pas préparé pour le genre de coup de force unilatéral qui nous est arrivé en pleine face quelques semaines plus tard. Il a bien fallu réagir parce qu'il y avait une sorte d'abus des résultats et une sorte de distorsion d'ailleurs de toute la compréhension qu'on pouvait avoir des résultats devant laquelle on s'est trouvé. Le moins que je puisse dire, c'est que la bonne foi n'avait pas régné dans certains esprits au gouvernement fédérai et que sournoisement on profitait d'une espèce d'affaissement psychologique inévitable au Québec pour "railroader" quelque chose, à quoi il a fallu réagir. On ne peut pas voir venir des choses comme celles-là. On aurait peut-être dû, mais on ne pouvait pas soupçonner que c'était cela qui flottait dans ces esprits.

M. Ryan: Cela, c'est très bien. On pourrait épiioguer longtemps sur ces données. On aura l'occasion de le faire un jour. Mais la question qui était posée au premier ministre par le chef de l'Opposition portait sur la réforme possible de la deuxième Chambre du Parlement canadien. Je me demande si le premier ministre - je ne veux pas élargir l'affaire, et me demander ce que serait une deuxième Chambre dans un Québec souverain; c'est un sujet très intéressant, mais qui est assez éloigné de celui dont on discute ce matin - si le premier ministre ne pourrait pas, au moins, vu que ces questions sont dans l'air, s'engager à faire connaître une position de son gouvernement sur ce sujet, y compris sur les propositions qui étaient contenues dans le livre beige du Parti libéral du Québec.

Le livre beigne n'a pas été défendu bien fort par le gouvernement actuel du Québec. Il y avait des bonnes choses là-dedans. Le gouvernement du Québec a été complice, peut-être, de M. Trudeau dans une attitude qui a consisté systématiquement à décrier ce document. De ce côté-là, vous avez été pareil. Cela a été deux trente-sous pour deux. Je vous dis cela bien simplement...

M. Levesque (Bonaventure): ...quatre trente-sous pour une piastre.

M. Ryan: Je pense que c'est un document qui mériterait d'être étudié, surtout la partie sur la deuxième Chambre. J'aimerais que le gouvernement l'étudie. C'est une demande que je vous soumets bien modestement. Qu'il l'étudie et qu'il fasse connaître sa position parce qu'il y a une option de fond qui risque d'être prise, soit pour garder le Sénat actuel dont l'utilité est extrêmement limitée, à mon humble point de vue, quoique ce n'est pas mauvais de l'avoir, mais son utilité pourrait être beaucoup plus grande, soit d'aller vers un Sénat électif, soit d'aller vers un Sénat qui soit vraiment une autre Chambre complètement, une espèce de Chambre de la fédération des parties constituantes, sur le modèle qu'on a en Allemagne et qui fonctionne très bien. C'est une demande que je soumets au premier ministre, et c'est la question qui a été posée tantôt. Si on pouvait avoir un document de travail là-dessus, qu'il prenne la couleur qu'il voudra, cela m'indiffère complètement, il me semble que ce serait une bonne chose.

M. Lévesque (Taillon): Vu qu'il n'y a pas péril en la demeure pour l'instant, puisqu'on nous parle d'un livre vert éventuel, je ne dis pas oui ni non à la demande du député d'Argenteuil, je dis ceci: Je ne vois pas pourquoi le Québec serait toujours obligé de suivre, comme s'il était un chien de poche, les choses que M. Trudeau et son gouvernement mettent sur la table quand cela fait leur affaire et qui, très souvent, nous perdent dans le maquis. On a littéralement violé certains de nos droits contre toute expectative, au lendemain du référendum. Maitenant, on nous jette dans le paysage une possible, éventuelle réforme du Sénat. Je répète ce que j'ai dit tout à

l'heure: jusqu'à nouvel ordre, c'est l'attitude du gouvernement. Ce n'est pas cela notre priorité. Notre priorité demeure celle, je crois, du gouvernement de M. Lesage, dont j'ai fait partie, celle du gouvernement de M. Johnson, de M. Bertrand, de M. Bourassa, tous gouvernements provinciaux dans un régime fédéral. Et pour autant que nous accompagnions un régime fédéral encore pendant les années qu'il nous reste à servir comme gouvernement, c'est aussi notre priorité et c'est une réflexion du partage des pouvoirs à l'intérieur de la structure fédérale. Le Sénat se situe quelque part là-dedans, si on veut, mais à cause des précédents qui ont accompagné le rapport Pepin-Robarts et le livre beige du député d'Argenteuil, je ne crois pas qu'on doive en faire notre première priorité d'aucune façon. C'est tout ce que je peux dire pour l'instant. (13 h 30)

M. Ryan: Très bien. Dans la même veine, je rappellerai brièvement au premier ministre que la grande faiblesse de son gouvernement, c'est qu'il n'a pas de position claire et complète, même en ce qui touche sa priorité numéro un qui est la révision du partage des pouvoirs. Je vous rappellerai, avec toute la précision désirable, qu'avant les pourparlers constitutionnels nous avions demandé, en commission parlementaire, aux représentants du gouvernement qui siégeaient là: Quelle est votre position sur le partage des pouvoirs en matière économique, par exemple? On n'a pas été capable d'énoncer une position claire et précise, M. le Président. Le gouvernement est, de ce point de vue, à cause de son absence d'un programme complet de révision en matière constitutionnelle, exposé à être toujours à la remorque de ceux qui font des propositions.

J'avais noté - là-dessus, on me contredira si on le peut - quand le processus s'est engagé, après le référendum, autour d'une douzaine de sujets différents, que le Québec était toujours le dernier à mettre sa position dans le sac. Le Québec n'a jamais produit un document clair disant: Sur tel ou tel sujet, voici notre position. Vous arriviez toujours après les autres. Vos représentants étaient là comme des observateurs. Ils participaient en dernier lieu. Je vous défie de m'apporter un document où serait énoncée d'une manière claire et fonctionnelle la position du Québec en ce qui concerne le chapitre du partage des pouvoirs en matière économique, par exemple, qui est le noeud de toute réforme éventuelle du fédéralisme canadien.

M. Lévesque (Taillon): Je dois dire au député d'Argenteuil que je pourrais lui envoyer littéralement une tonne de documents sur lesquels on a travaillé comme des déchaînés, en 1977, 1978, 1979, pour accompagner certains sujets qui n'étaient, pour nous, que des tests.

Par exemple, on avait hérité, de l'ancien gouvernement, de la question des communications. On sait à quel point il y a eu des sparages autour de la question des communications, qui est quand même une question vitale pour n'importe quelle entité culturelle distincte comme la nôtre. On n'a jamais abouti à rien. À un moment donné, on avait réussi, à partir de tout le travail de préparation, à rallier un certain nombre de nos confrères des autres provinces. Cela s'est tout effiloché avec les "long lists" et les "short lists". Je ne sais pas si le député d'Argenteuil se souvient de tout cela.

Dans le cas des tribunaux, le bon sens dit qu'il y a quelque chose de complètement désuet dans la façon dont l'ensemble judiciaire est partagé au Canada. Cela ajoute à des coûts et cela ajoute à l'inefficacité. Les provinces étaient d'accord. On avait réussi. C'est nous, Québec, qui avions réussi - si j'ai bonne mémoire - en 1979, sur une dizaine de points, de peine et de misère, à obtenir, au moins temporairement, un consensus autour d'une dizaine de points aussi importants que ceux-là. Il y avait de l'économique là-dedans, forcément. Ce n'était pas tout un programme, si on veut, de décentralisation économique, c'est sûr, mais il y avait, sur une foule de points, les positions probablement les plus cohérentes et les plus longuement étudiées, y compris en tenant compte de ce qui avait été fait par nos prédécesseurs, sur ces sujets. On sait les résultats. Mais cela demeure quand même l'essentiel de la position d'un gouvernement du Québec, le nôtre en tout cas: Tant que nous sommes dans le régime fédéral, bon Dieu! qu'on règle ces cas dans l'intérêt des citoyens, à part cela, dans un régime fédéral qui fonctionnerait comme du monde.

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, je dois conclure, parce que nous devons peut-être passer à un autre sujet, que, si je comprends bien, le chef du gouvernement n'a pas l'intention d'apporter quelque contribution que ce soit à l'exercice qui se fait présentement. Un livre vert doit être publié cette semaine ou la semaine prochaine. À l'automne, on réagira à travers le pays sur la réforme du Sénat et le gouvernement du Québec se désintéresse de la question.

M. Lévesque (Taillon): Non, mais cela me paraît, pour l'instant - on verra l'ampleur de la réaction - quelque peu académique. Est-ce que je peux terminer là-dessus?

Les conflits dans le secteur public

M. Levesque (Bonaventure): M. le Président, j'aimerais, avant que vous ne

soyez appelé à passer la parole au député de Mont-Royal qui voudrait aborder la question des Amérindiens et des Inuits, poser une question au premier ministre sur le sujet suivant: On sait qu'en prenant le pouvoir, le gouvernement avait laissé entendre qu'il pouvait trouver des solutions qui seraient de nature à régler d'une façon positive les conflits dans les secteurs public et parapublic.

On sait qu'il est arrivé à la veille du référendum avec la préparation de la convention de 1979-1980 et à ce moment-là, il a dit: On était tellement pris qu'on n'a pas pu régler cela mais on s'est dit qu'une fois cet exercice terminé, nous allons prendre des mesures pour faire en sorte que toute cette question soit revue et que l'on trouve des mécanismes qui seraient plus propres à répondre au problème suscité par ces négociations qui demandent tellement d'énergie et qui se terminent trop souvent par des arrêts de travail interminables et par des lois spéciales, etc.

Il ne l'a pas fait et il s'en est confessé mais encore que nous avions connu, depuis un an ou un an et demi, la même situation et en pire. Le premier ministre a dit: La prochaine fois, nous allons prendre des dispositions, des mesures dès que cette étape sera passée, nous nous mettrons au travail et cela ne se répétera pas.

Est-ce que le premier ministre pourrait nous dire quelles sont les mesures qu'il a prises ou que son gouvernement a prises au moment où on se parle afin de donner suite non pas à des voeux mais à des engagements assez précis de la part du chef du gouvernement?

M. Lévesque (Taillon): J'essaie de résumer cela très rapidement. Je voudrais juste souligner que quand le chef de l'Opposition dit que ce qu'on a connu, c'était en pire la dernière fois par rapport à ce qui était déjà arrivé, je crois que c'est quand même un peu excessif.

M. Levesque (Bonaventure): Je pense aux lois 70, 105 et 111.

M. Lévesque (Taillon): Est-ce qu'on me permet de répondre? Je ne veux pas perdre de temps. Me souvenant quand même de mon rôle, des effervescences - pour employer un terme gentil - qui ont ponctué à peu près toutes les rondes de négociations, je me dis quand même - dans le secteur le plus névralgique qui est celui de la santé, on a eu une grève "accidentelle" mais c'est vrai que c'était une grève accidentelle d'une journée dans le secteur des hôpitaux et des centres d'accueil - on a réussi, grâce au ciel, à régler convenablement avec les infirmières - on sait à quel point c'est central dans un hôpital avec les médecins - les techniciens de la santé.

Les fonctionnaires ont finalement réglé sans grève sauf évidemment les professionnels pendant un certain nombre de jours. Je ne crois pas que c'était en pire, enfin si l'on tient compte de ce qu'on peut appeler la moyenne de nos malheurs depuis 15 ou 18 ans.

Cela étant dit, je pense que c'est plutôt vers l'avenir qu'on doit se tourner. Ce qu'on a fait jusqu'ici, par une décision du 28 avril - parce qu'il fallait attendre quand même que tout le monde soit parlable - du comité des priorités du gouvernement et un groupe de travail spécial composé du Secrétaire général du Conseil exécutif, du chef de cabinet que vous connaissez bien maintenant, M. Boivin, du secrétaire du Conseil du trésor, avec le mandat suivant -il faut ajouter maintenant le sous-ministre du travail, M. Blain: prendre contact avec les syndicats et les autres partenaires sociaux en vue de recueillir leur point de vue sur l'évolution souhaitée du régime de détermination des conditions de travail dans les secteurs public et parapublic, mettre sur pied, avec la participation des syndicats du secteur public, un mécanisme paritaire - vous vous souvenez en fonction de l'engagement qu'on a pris si on pouvait s'entendre pour ouvrir la troisième année, c'est-à-dire l'année 1985 - permettant de fournir aux parties les statistiques dont la validité serait reconnue de part et d'autre et faire rapport au comité des priorités au plus tard à la fin de juin prochain. Je pense qu'on devrait avoir le rapport avant que tout le monde se disperse.

M. Levesque (Bonaventure): Juin 1983?

M. Lévesque (Taillon): Oui. Jusqu'ici les membres de ce groupe de travail ont rencontré les représentants de la CSN, de la FTQ, de la CEQ et du syndicat des professionnels - qui étaient en tandem ces derniers mois - et des infirmières. Aujourd'hui, si on sort d'ici, ils doivent rencontrer les représentants de la CSD et demain ceux du Syndicat des fonctionnaires. Normalement, soit jeudi de cette semaine, on devrait avoir un rapport parce qu'on a un comité des priorités. Tout cela signifie que pendant quelques mois encore, pendant le temps qu'il faut, mais pas trop, on va faire un effort au maximum pour voir si on peut faire route ensemble, le plus possible, avec nos interlocuteurs syndicaux. C'est normal. Seulement si, par hasard, on s'aperçoit ou enfin, si, par malheur, on devait s'apercevoir que cela ne marche pas ou que cela tourne en rond, il est sûr qu'on aura des décisions à prendre à l'automne. Peut-être qu'une autre formule... On verra à ce moment-là.

Ce qu'on vise - je pense que c'est logique - pour autant que c'est humainement possible, c'est d'en arriver à un nouveau

mode de fonctionnement pour la fin de 1984, au plus tard. Cela nous paraît une logique serrée, mais c'est possible.

M. Rivest: Une précision. Dans le mandat qui a été confié au groupe de travail par exemple, le premier ministre a référé, je crois, à des données statistiques et à l'harmonisation des données. Est-ce qu'il y a la question centrale de la détermination ou, enfin, de convenir d'une méthode et d'une méthodologie pour déterminer l'écart entre la rémunération du secteur public et celle du secteur privé, ce qui éviterait bien des embûches et des discussions de part et d'autre, en période de négociations? Je pense bien que personne ne peut être contre la parité entre la rémunération dans le secteur public et dans le secteur privé. Est-ce que cette question a été évoquée dans les rencontres nécessairement préliminaires que vous avez eues?

M. Lévesque (Taillon): C'est une des questions centrales qui ont été évoquées dans nos rencontres avec les parties syndicales.

M. Rivest: C'est la clé.

M. Lévesque (Taillon): Oui, oui. C'est une des grandes clés, c'est sûr.

Simplement pour compléter. Les deux questions centrales que nous soumettons à leur réflexion, en plus de celle que vous avez mentionnée et qui touche la politique salariale, ce sont celles de la décentralisation-centralisation, de la flexibilité dans les conditions de travail, institution par institution ou uniformité à l'échelle nationale.

M. Rivest: D'accord. Dernière précision. Étant donné le caractère préliminaire quand même, d'après la réponse du premier ministre qui essaie de voir si, effectivement... Par exemple, sur la question de l'exercice du droit de grève en milieu hospitalier, etc., est-ce que vous explorez certaines avenues? Compte tenu d'ailleurs de l'expérience d'un conseil, dont on parle peu mais dont je sais qu'il oeuvre actuellement, qui est le Conseil du maintien des services essentiels, il y a des expériences qui se font, qui sont quand même très locales mais qui peuvent être riches d'enseignement pour l'avenir, est-ce que toute cette question est prématurée pour l'instant?

M. Lévesque (Taillon): Oui, exactement. Ce qu'on a exposé à la partie syndicale est que, si on pouvait en arriver à des modus vivendi acceptables en ce qui concerne le fond des choses, ce sur quoi on doit s'entendre, ce qui arrive, quand on ne réussit pas à s'entendre, serait vu dans une lumière nécessairement différente. Par exemple, il est sûr que si un conflit survient localement, il y a des mécanismes qui peuvent être disponibles, comme l'arbitrage, mais qui sont impensables au plan national. De sorte que ce n'est qu'après avoir fait le tour de la façon dont on peut négocier ou aménager la masse salariale et, deuxièmement, les conditions locales, qu'on abordera la question de la résolution des conflits.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Mont-Royal.

M. Levesque (Bonaventure): Excusez-moi.

Le Président (M. Jolivet): Oui.

M. Levesque (Bonaventure): Dans cette discussion préliminaire que vous avez, est-ce que la question de la sécurité d'emploi est également un point en discussion?

M. Lévesque (Taillon): Jusqu'à maintenant, on ne l'a pas abordé. On a seulement une première prise de contact pour voir si les syndicats sont capables et désireux d'engager avec nous une démarche conjointe de réflexion concrète sur le prochain mode de négociation. Si la réponse est favorable, au cours de l'automne, nous pourrons voir quel progrès nous pouvons faire. Si les progrès sont suffisamment sérieux, on pense qu'on respectera notre échéancier de décembre 1984. Si on s'aperçoit, soit qu'ils ne peuvent pas ou qu'ils ne veulent pas, il faudra trouver une méthode différente pour respecter l'échéance.

M. Lévesque (Bonaventure): Par exemple, est-ce qu'on envisage un Code du travail spécifique dans ce domaine qui serait complètement différent des conditions qui régissent les autres employés? (13 h 45)

M. Lévesque (Taillon): Si vous continuez, vous allez avoir le rapport du comité des priorités deux jours avant qu'il nous arrive. C'est-à-dire que c'est une démarche parallèle. Il y a bien des passerelles entre ces deux secteurs. C'est une démarche parallèle. Celle qui a été entreprise par le "task force", dont le secrétaire général vient de donner l'essentiel, est une démarche qui concerne strictement les secteurs public et parapublic. En même temps, il y a un projet de loi devant la Chambre, qui est un petit projet de loi, si l'on veut. 11 y a des gens qui le trouvent déjà gros mais enfin... un projet d'amendement, dis-je, au Code du travail mais qui doit, en même temps, s'enclencher en parallèle, à la réflexion sur l'ensemble du Code du travail. Maintenant, est-ce que ça va aboutir en même temps? Cela n'a pas tellement d'importance en soi parce qu'il y a

plein de passerelles là-dedans. On va essayer de mener ça.

M. Rivest: Pour l'information du premier ministre, on vient de me signaler que les perspectives évoquées par le premier ministre et le secrétaire général rejoignent substantiellement les dispositions du livre rouge dont vous devez vous faire un échange amical.

M. Lévesque (Taillon): II faudrait le relire.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Mont-Royal.

Affaires amérindiennes et inuites

M. Ciaccia: À l'occasion des discussions constitutionnelles concernant les droits des autochtones je crois que les relations entre le gouvernement et les autochtones se sont améliorées. Les autochtones ont senti qu'ils avaient l'appui du gouvernement dans les revendications qu'ils apportaient quant à l'inclusion de leurs droits dans la constitution canadienne. Cependant, il y a encore beaucoup de problèmes, spécialement au niveau du développement économique et de la mise en application de l'entente de la Baie James. Est-ce que le premier ministre pourrait nous dire s'il y a eu un engagement de sa part de revoir les obligations du Québec dans l'ensemble de la Baie -James afin de procéder à une révision de l'application de cette entente? Apparemment, je sais que les Cris se sont plaints que plusieurs des aspects de l'entente n'ont pas été mis en application. Alors, est-ce que le premier ministre pourrait nous confirmer s'il y a cet engagement? Est-ce que cette révision sera entreprise conjointement avec les Cris?

M. Lévesque (Taillon): II serait peut-être opportun - je n'ai pas à vous le présenter, depuis quelques années c'est lui qui s'occupe du Secrétariat des activités gouvernementales en milieu amérindien et inuit, le SAGMAI - que M. Gourdeau vous mette au courant, de façon plus spécifique que je ne le pourrais parce qu'il est en plein dans le bain en ce qui concerne la question que vient de poser le député. Alors, M. Gourdeau, si vous permettez.

Il y a eu un déblocage important de ce côté. Vous faites bien de rattacher cela au climat qui est beaucoup meilleur à la suite des rencontres entourant la constitution. Il y a eu une première rencontre le 10 avril entre les Cris et le SAGMAI et on a établi une certaine approche ensemble pour faire une évaluation de la mise en application de la Convention de la Baie James.

Le 19 mai, on a eu une autre réunion où on a fait des investigations encore un peu davantage à la suite d'un texte qu'ils nous ont remis identifiant les plaintes qu'ils avaient à faire d'une façon un peu générale mais en regard de chacun des chapitres de la Convention de la Baie James. On a un échange qui va se produire demain, des notes qu'ils ont préparées additionnellement à leurs remarques générales, et des notes que, nous, on a préparées en faisant une revue à l'intérieur des ministères concernés - HydroQuébec, la Société d'énergie - en essayant de voir les obstacles tels qu'ils étaient vus par nous, et eux, les obstacles qui sont vus par eux.

On va faire une réunion ensuite le 23 juin à Montréal où l'on déterminera pour de bon - c'est du moins l'objectif commun qu'on a - la façon dont on va faire conjointement l'évaluation de la mise en application de la Convention de la Baie James dans les mois qui suivront.

M. Ciaccia: Si je comprends bien, les réunions que vous avez eues, est-ce que c'est sur des problèmes spécifiques ou bien est-ce que c'est vraiment une approche globale pour revoir l'application entière de l'entente?

M. Lévesque (Taillon): C'étaient des réunions pour déterminer une approche, pour faire l'évaluation. Eux, ils avaient proposé, au début de 1981, que soit confiée à une personne, comme cela avait été fait au gouvernement fédéral, l'évaluation de la mise en application de la Convention de la Baie James. M. Lévesque avait suggéré, en réponse, qu'au lieu de cela, on fasse d'abord chacun un bout de chemin, que le gouvernement examine les obstacles comme ils étaient vus à l'intérieur des cinq ministères principalement concernés, qu'eux fassent la même chose de leur côté et qu'ensuite M. Lévesque et les ministres concernés rencontrent les Cris avec leurs institutions. Il n'y a pas eu de suite à cette offre de M. Lévesque mais le 10 avril dernier, presque un an et demi après - étant donné que leurs négociations avec le fédéral étaient terminées, qu'ils avaient reçu la réponse du fédéral - ils ont décidé d'embarquer dans le processus en essayant d'emprunter ce chemin, celui qui avait été suggéré. On verra ce que cela donnera mais on a espoir des deux côtés que vraiment cela puisse se faire conjointement d'une façon qui soit de nature à les aider.

M. Ciaccia: Alors, si je comprends bien, il y a un engagement de la part du gouvernement de réviser la mise en application de cette entente, et cette révision se fera conjointement avec les Cris.

M. Lévesque (Taillon): C'est cela. D'ailleurs ceux qui formaient ce qu'on a

appelé la coalition, c'était au moment de la réunion d'Ottawa...

M. Ciaccia: Oui.

M. Lévesque (Taillon): ...on doit avoir une rencontre avec leurs principaux dirigeants dès cette semaine, jeudi, dans deux jours, pour voir un peu le climat aussi avec eux.

M. Ciaccia: Dans son message inaugural, le premier ministre avait annoncé la tenue d'une commission parlementaire pour entendre, s'ils le désirent, les nations indiennes et inuites dans le but de faire part de leurs besoins dans les domaines politique, économique, culturel, et de tout autre problème se rattachant à leur situation spécifique. Est-ce que le premier ministre pourrait nous dire si certaines nations lui ont fait part de leur désir de participer à une telle commission, et est-ce que c'est encore l'intention du gouvernement de tenir cette commission et quand?

M. Lévesque (Taillon): Oui. C'est un des points qui sont à l'ordre du jour jeudi, dans deux jours, pour voir comment cela a progressé dans leur esprit. Mais déjà dès le début, quand il a été question d'une commission parlementaire éventuelle, je trouvais même - je le dis comme je le pense - que ce ne serait pas mauvais qu'on fasse une expérience de ce genre. Cela n'a jamais eu lieu. Après tout ce sont nos concitoyens, les premières nations. Il serait peut-être bon que cela devienne même un instrument permanent de communication, de coordination aussi entre nous. De toute façon on va en reparler jeudi, c'est un point à l'ordre du jour. Les réponses qu'on a eues préliminairement quand cela a été évoqué étaient plutôt favorables, je pense, celles qu'on a entendues. 11 y a même des gens qui, très spontanément, ont dit: Oui, ce serait une bonne idée. Maintenant il s'agit de voir où ils en sont.

M. Ciaccia: Est-ce qu'on pourrait s'attendre que peut-être on pourrait avoir une telle commission au début de la prochaine session, à l'automne?

M. Lévesque (Taillon): À l'automne. On penserait à octobre mais je ne veux pas me commettre à leur place. Il faudrait voir si cela fait leur affaire.

M. Ciaccia: Dans le budget du SAGMAI quels programmes sont inclus? Premièrement est-ce que vous pourriez nous donner le montant du budget, le budget du SAGMAI? Quel est le montant du budget? Quels programmes sont inclus dans ce budget?

M. Lévesque (Taillon): Les affaires amérindiennes et inuites, c'est le numéro 3 parmi les éléments. C'est 3 891 000 $ cette année par rapport à 3 978 000 $ l'an dernier.

M. Ciaccia: Est-ce que c'est totalement le budget du SAGMAI, ces 3 000 000 $?

M. Lévesque (Taillon): II y a d'inclus là-dedans 1 400 000 $ qui partent du ministère des Finances pour payer ce qui reste à payer des indemnités, mais c'est affecté au budget du SAGMAI quand même.

M. Ciaccia: Autrement dit, est-ce qu'il y a des montants dans ce budget qui vont directement aux Indiens?

M. Lévesque (Taillon): C'est cela. M. Ciaccia: C'est le 1 400 000 $. M. Lévesque (Taillon): Oui.

M. Ciaccia: Et le solde représente les frais d'administration du SAGMAI.

M. Lévesque (Taillon): Oui, oui. En gros c'est cela. On donne des subventions directement mais surtout pour des programmes expérimentaux qui démarrent et ensuite, quand, à l'usage, cela s'est révélé bon, on a...

M. Ciaccia: À combien s'élèvent les sommes qui vont directement aux Indiens dans votre budget?

M. Lévesque (Taillon): II y a 136 000 $ qui vont aux associations, à l'Alliance laurentienne des Métis, à l'Associations des Métis et Indiens sans statut et aux femmes autochtones. Ensuite il y a une série de subventions de 4500 $ à 1500 $, selon les demandes, pour un montant total de 75 000 $.

M. Ciaccia: Alors, si je comprends bien, il y a ...

M. Lévesque (Taillon): Pour des projets précis.

M. Ciaccia: 136 000 $ plus 75 000 $.

M. Lévesque (Taillon): Oui. En subventions directes. Découlant des conventions, c'est environ 1 400 000 $?

C'est 1 800 000 $, M. Ciaccia, je l'ai ici.

M. Ciaccia: Cela inclurait quoi, ces 1 800 000 $?

M. Lévesque (Taillon): Sur la dernière

tranche des 75 000 000 $ qu'il y avait à verser, il y avait des montants plus importants qui étaient versés dans les premières années et dans les années pour terminer la période - je pense qu'il reste encore quatre ou cinq ans - les montants sont beaucoup plus faibles. Les montants forts qu'il reste à recevoir sont de la société d'énergie et sont versés directement par la société d'énergie.

Cela ne tient pas compte de tous les versements qui découlent des ententes et que fait la société d'énergie. Cela ne tient pas compte non plus des programmes de transport, d'éducation ou de la santé.

M. Ciaccia: Non, non, je ne parle que de SAGMAI...

M. Lévesque (Taillon): II ne s'agit que de SAGMAI.

M. Ciaccia: Est-ce qu'il y a un mécanisme...

M. Lévesque (Taillon): Excusez-moi, je ne sais pas si j'ai bien dit la réponse. Il me reste encore trois ans avec cette année, c'est-à-dire qu'il reste deux ans à partir de l'an prochain, pour les subventions aux Cris et aux Inuits de 1 300 000 $. Le reste, 1 689 000 $.

M. Ciaccia: Est-ce qu'il y a un mécanisme pour s'assurer les fonds nécessaires pour la mise en application de l'entente? L'entente inclut une série de programmes et d'obligations. Quel est le mécanisme pour s'assurer que les fonds nécessaires seront disponibles et seront donnés aux Indiens pour mettre en application...

M. Lévesque (Taillon): II y a des cas... C'est chacun des ministères, au besoin, en étant épaulé par le SAGMAI devant le Conseil du trésor qui fixe cela en négociation avec eux. C'est assez difficile à déterminer. Par exemple, les Affaires sociales et l'Éducation ont pris comme base la base pour le Québec. Ils ont ajouté des considérations particulières pour le Nord. Ils sont partis de certains budgets 0 pour une certaine année...

M. Ciaccia: II n'y a pas de mécanisme central. Ils doivent transiger...

M. Lévesque (Taillon): C'est le Conseil du trésor...

M. Ciaccia: ... avec chaque ministère, par exemple le ministère de l'Éducation, le ministère des Affaires sociales, le ministère des Affaires municipales.

M. Lévesque (Taillon): Cela va toujours au Conseil du trésor, c'est là que se trouve le... Ce ne sont pas toujours Jes mêmes qui négocient non plus. Dans le cas de la commission scolaire, c'est la commission scolaire qui négocie avec le ministère de l'Éducation. Dans le cas des municipalités, c'est le gouvernement régional ou les municipalités.

M. Ciaccia: Êtes-vous au courant que les corporations des villages cris ont été avisées au mois de février qu'il n'y aurait plus de fonds disponibles pour leurs opérations commençant au mois d'avril?

M. Lévesque (Taillon): Oui, ce sont les corporations sur les terres 1-B. Comme on le sait, il s'agit de terres inhabitées. Je pense que c'est la façon que vous avez trouvée pour que les terres ne passent pas au fédéral, de réserver la plus grande partie des terres de propriété pour les Cris, de leur réserver cette propriété par un système particulier, les terres 1-B. Là-dessus, ce sont lés membres du conseil de bande qui constituent le conseil de village cri. Le ministère des Affaires municipales avait l'habitude de donner un certain montant automatique, fondé sur celui qu'il donne pour le reste des édiles municipaux dans le Québec. Un imbroglio s'est produit dernièrement. Précisément, le ministère des Affaires municipales a annoncé qu'il ne donnerait plus la subvention. Les raisons qu'il a données sont: la première, c'est que ces corporations refusaient de faire des rapports expliquant ce qu'elles faisaient avec cet argent. Il y en avait une qui avait fait un rapport finalement, le ministère des Affaires municipales a prétendu qu'il ne s'agissait pas du tout d'activités rattachées à l'administration des terres 1-B. C'est un des sujets qui ont été identifiés pour notre revue de la mise en application...

M. Ciaccia: Quelle est la position de SAGMAI? Allez-vous faire des représentations auprès du ministère afin de vous assurer qu'ils aient ce montant-là?

M. Lévesque (Taillon): Ce sont des très petits montants.

M. Ciaccia: Autrement, si on crée des corporations pour administrer ces terres 1-B et qu'on ne leur donne pas les fonds nécessaires, on va à l'enncontre de l'entente même.

M. Lévesque (Taillon): La position du SAGMAI a été qu'une condition, contre laquelle on ne peut pas se rebiffer, que le ministère des Affaires municipales mettait et qui était normale, c'était de faire rapport, qu'ils remplissent certaines formules qui

n'étaient pas tellement compliquées à remplir. Le ministère des Affaires municipales pouvait être justifié de ne plus continuer sa subvention. La position du SAGMAI en tant que mise en application de la Convention de la Baie James est d'essayer, à l'occasion de cette révision dans les prochains mois, de s'entendre sur le rôle que ses corporations vont jouer et sur une façon plus facile de faire rapport si, eux, trouvent cela trop difficile. C'est vraiment trouver une solution pour qu'ils aient leur argent. (14 heures)

M. Ciaccia: Oui, parce que, habituellement, les normes que le ministère des Affaires municipales ou tout autre ministère pourrait avoir, ce ne sont pas tout à fait les mêmes normes qui sont applicables. S'ils utilisent ces normes comme excuse pour ne pas donner les subventions, cela va vraiment à l'enncontre de l'entente.

M. Lévesque (Taillon): Mais il était tout simplement question d'accepter de faire rapport. Ce n'était pas...

M. Ciaccia: J'ai deux autres petites questions brèves. Que va-t-il arriver à la Société pour le développement des autochtones de la Baie-James si la SDBO cesse ses activités? Les programmes de la Société de développement des autochtones ne devaient-ils pas se faire conjointement avec la SDBJ. Je pense qu'elle devait avoir une capitalisation de 15 OQQ 000 $ et qu'elle n'a pas encore reçu les 15 000 000 $. Elle a peut-être reçu 4 000 000 $. Que va-t-il arriver...

M. Lévesque (Taillon): Je dois faire une petite correction. C'est la SODAB. Vous avez bien raison de dire qu'il y a un lien très étroit, car c'est une filiale de la SDBJ. Donc, si la SDBJ était abolie, cela causerait des problèmes. Ces problèmes sont étudiés, à l'heure actuelle, du côté du SAGMAI. Ce qu'on a trouvé, jusqu'à maintenant, c'est qu'il serait préférable que la Société de développement de la Baie James continue d'assumer ses obligations. Donc, qu'elle puisse continuer d'avoir une certaine existence. 11 appartiendra au gouvernement de décider ce qui devrait arriver avec cela, mais il ne sera pas nécessaire d'avoir la même forme de société qui existe déjà. Par exemple, les mines et les forêts ont déjà été transférées à REXFOR et à la SOQUEM. De plus, les Cris m'ont parlé de cette question dès qu'ils en ont eu vent. Je les ai bien assurés que le gouvernement ne prendrait pas de décision finale sans qu'on ait eu l'occasion de leur faire savoir ce que le gouvernement veut faire.

M. Ciaccia: Il avait été annoncé que la SDBJ devait cesser ses activités. Y a-t-il eu des protestations de la part des autochtones?

M. Lévesque (Taillon): Oui. Leur fondé de pouvoir, M. O'Reilly, m'a téléphoné pour me demander si cela signifiait la disparition de la SDBJ. Je lui ai répondu non, parce que cela n'était pas la disparition. C'étaient, à ce moment-là, des transferts de certaines responsabilités de la SDBJ vers SOQUEM et REXFOR. C'est cela qui a essentiellement été fait. Ce sont certaines activités de développement, mais cela ne les touchait pas.

M. Ciaccia: Le premier ministre est-il en train de nous dire que la SDBJ va continuer ses activités?

M. Lévesque (Taillon): Je ne dis pas cela.

Non, non, non, la SDBJ est en voie de...

M. Ciaccia: Disparition.

M. Lévesque (Taillon): ...liquidation, si on veut, mais cela n'exclut absolument pas, loin de là, que ce qui concerne, dans ses activités, les autochtones soit maintenu sous une autre forme et qu'il y ait une transition qui puisse s'effectuer. Il n'y a rien de compliqué là-dedans.

M. Ciaccia: Le rôle de la Société de développement des autochtones, conjointement avec la SDBJ, était de participer au développement économique du territoire. Alors, si vous enlevez la SDBJ qui ne fera plus le développement économique du territoire, que va-t-il arriver à la Société de développement des autochtones? Elle n'aura presque plus de raison d'être.

M. Lévesque (Taillon): II n'y a pas...

M. Ciaccia: Elle aurait une raison d'être, mais comment va-t-elle fonctionner si la société, qui doit s'occuper de tout ce développement, cesse les activités?

M. Lévesque (Taillon): M. Ciaccia, la SODAB, c'est une formule bien spéciale que vous avez trouvée quand vous avez fait la Convention de la Baie James. C'est une filiale de la SDBJ, mais c'est seulement sur papier pour dire que ce serait accroché à quelque chose. Il y a deux membres qui sont nommés par la SDBJ, deux membres qui sont nommés par les Cris et un membre nommé par le gouvernement qui doit, par définition, n'avoir aucun lien ni avec la SDBJ, ni avec les Cris. Alors, c'est spécifié dans la loi. Si la SDBJ disparaissait, les deux membres nommés par la SDBJ, il faudrait peut-être modifier la constitution de SODAB, mais soit qu'il y en ait quatre de nommés par les Cris

ou qu'il y en ait deux de nommés par une autre organisation.

M. Ciaccia: Oui. Je ne veux pas faire un long débat parce que je sais qu'on achève nos travaux, mais ce n'est pas strictement la nomination des membres du conseil d'administration par la société de développement, c'était toute la mission de la SDBJ et la mission de SODAB qui étaient reliées ensemble. Une fois que vous enlevez la SDBJ, qui ne fera plus le développement économique du territoire, vous restez avec la SODAB, que va-t-elle faire? C'est cela vraiment la question.

J'aurais seulement une autre question, M. le Président. En ce qui concerne les droits territoriaux, les Attikamègues, les Montagnais et les Algonquins veulent aussi négocier avec le gouvernement sur certains droits. Est-ce que le premier ministre pourrait nous dire où en sont les négociations avec ces différents groupes...

M. Lévesque (Taillon): En ce qui concerne les ...

M. Ciaccia: ... à quel stade...

M. Lévesque (Taillon): ...droits territoriaux?

M. Ciaccia: Oui, les Attikamèques...

M. Lévesque (Taillon): Essentiellement -je vais faire une réponse globale si on ne veut pas prolonger - c'est que, à Ottawa, je pense que tout le monde sait que cela n'a pas avancé beaucoup de ce côté avec l'ensemble des interlocuteurs, soit fédéraux soit provinciaux, du reste du pays. Il reste à voir la suite, parce qu'il est entendu qu'il doit y avoir une autre conférence l'an prochain...

L'an prochain, une deuxième, une troisième et une quatrième.

C'est-à-dire que c'est un processus qui a l'air parti pour longtemps. Nous, on est pas mal plus avancé que cela, comme - je le pense - tout le monde sait. Par rapport à des "principes" qui touchent les droits territoriaux, l'usage du territoire, principes qu'ils nous avaient soumis, on a donné des réponses concrètes. C'est dans la réflexion de part et d'autre, et on devrait pouvoir avancer. Cela sera évoqué probablement, très sûrement même, à une éventuelle commission parlementaire. On verra comme cela peut...

M. Ciaccia: Est-ce l'intention du gouvernement de procéder à ces négociations avec ces différents groupes?

M. Lévesque (Taillon): Pour l'instant, nos interlocuteurs les plus assidus, normalement, sont ceux qu'on appelle la coalition, c'est-à-dire ceux qui ont travaillé assidûment avec nous; on a aussi travaillé avec eux assidûment, en fonction de la conférence d'Ottawa. On avait dit qu'on reprendrait nos discussions sur une base québécoise aussitôt que cela serait opportun; après, parce qu'il ne faut pas oublier qu'ils ont été littéralement mobilisés - d'ailleurs, c'est une attitude normale - par l'espèce de front commun qu'ils avaient constitué à l'échelle pancanadienne et, après, il était entendu qu'on devait reprendre les discussions. Il y a en a sur la Convention de la Baie James. Jeudi, on aura probablement l'occasion d'évoquer la suite.

M. Ciaccia: II y avait aussi les Attikamègues qui avaient présenté des revendications.

M. Lévesque (Taillon): Les Attikamègues et les Montagnais, c'est cela. Cela a beaucoup marqué le pas. Le gouvernement a établi ses positions, le gouvernement fédéral aussi. Mais le rythme est très lent. Ce sont les Montagnais eux-mêmes qui trouvent que le rythme doit demeurer lent.

Dernièrement, à l'occasion d'une présentation devant le sous-comité de la commission parlementaire fédérale sur le gouvernement autonome, qui s'est tenue à Pointe-Bleue, le président du Conseil Attikamègues-Montagnais, René Simon, en réponse à une question posée par un membre de la commission, a dit qu'il n'était pas question qu'il signe quoi que ce soit avec le Québec avant que toutes les discussions constitutionnelles ne soient terminées à Ottawa. Comme il y a pour encore quatre ans de conférence, cela peut déjà nous indiquer qu'actuellement leur idée est plutôt de procéder avec précaution.

Actuellement, au moment où on se parle, les trois parties - les Attikamègues-Montagnais, le gouvernement fédéral et les représentants du Québec - sont actuellement sur la Côte-Nord à visiter chacune des bandes montagnaises dans le but de se faire connaître, de dire ce qui est entrepris comme négociations depuis la dernière année ou les deux dernières années.

M. Ciaccia: À la commission parlementaire, à Schefferville, les Montagnais avaient un peu exprimé l'inquiétude que le gouvernement du Québec ne s'avance pas assez dans les discussions et réponde à leur... Ils n'étaient pas prêts à signer, c'est vrai, mais ils auraient voulu avoir une réponse un peu plus positive du gouvernement du Québec et ils trouvaient que cela prenait du temps pour avoir ces réponses.

M. Lévesque (Taillon): M. Lévesque les a rencontrés au moins à trois reprises. Le Conseil des ministres a pris des décisions sur

chacune des choses et les a communiquées. Je ne pense pas qu'on puisse dire qu'il y a du retard du point de vue du Québec. Peut-être faisaient-ils allusion au fait que le Québec met du temps à accepter ce qu'ils avaient demandé au départ, soit qu'ils puissent jouir d'une pleine souveraineté à l'intérieur du territoire qu'ils habitent. Là-dessus, le Québec a déjà répondu qu'il n'acceptait pas cela.

M. Ciaccia: Ce n'était pas une souveraineté-association qu'ils exigeaient?

M. Lévesque (Taillon): Pardon?

M. Ciaccia: Ils ne demandaient pas une souveraineté-association?

M. Lévesque (Taillon): S'ils avaient proposé cela, cela aurait peut-être été différent.

Je voudrais remercier M. Gourdeau.

Le Président (M. Jolivet): Les éléments 1, 2, 3 et 4 du programme 2 du Conseil exécutif sont adoptés et, en conséquence, les programmes 1 et 2 sont adoptés. La commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 14 h 05)

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