To use the Calendar, Javascript must be activated in your browser.
For more information

Home > Parliamentary Proceedings > Committee Proceedings > Journal des débats (Hansard) of the Commission permanente de la présidence du Conseil, de la Constitution et des affaires intergouvernementales

Advanced search in the Parliamentary Proceedings section

Start date must precede end date.

Skip Navigation LinksJournal des débats (Hansard) of the Commission permanente de la présidence du Conseil, de la Constitution et des affaires intergouvernementales

Version finale

30th Legislature, 2nd Session
(March 14, 1974 au December 28, 1974)

Thursday, June 13, 1974 - Vol. 15 N° 92

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude des crédits du Conseil exécutif


Journal des débats

 

Commission permanente de la présidence du conseil,

de la constitution et des affaires intergouvernementales

Etude des crédits du Conseil exécutif

Séance du jeudi 13 juin 1974

(Vingt heures vingt et une minutes)

M. PICARD (président de la commission permanente de la présidence du conseil, de la constitution et des affaires intergouvernementales): A l'ordre, messieurs!

La commission de la présidence du conseil, de la constitution et des affaires intergouvernementales continue ce soir l'étude des crédits du Conseil exécutif.

Pour la séance de ce soir, M. Lachapelle (Chauveau) remplace M. Beauregard (Gouin), M. Bédard (Chicoutimi) remplace M. Charron (Saint-Jacques), M. Houde (Limoilou) remplace M. Côté (Matane) et M. Lessard (Saguenay) remplace le chef de l'Opposition, M. Morin (Sauvé). La parole est au leader parlementaire du gouvernement.

Office de planification et de développement du Québec (suite)

M. LEVESQUE: M. le Président, nous avons interrompu nos travaux à un moment donné lorsque nous avons entrepris l'étude des crédits du premier ministre, toujours à l'intérieur des crédits du Conseil exécutif, et si on nous le permet, nous revenons maintenant aux crédits de l'Office de planification et de développement du Québec.

Je répondais, lorsque nous avons quitté ce sujet, de la façon la plus concise possible, la plus aimable possible également aux propos du député de Saguenay.

J'avais fait certaines remarques préliminaires et certains propos sur les remarques préliminaires du député de Saguenay. Par la suite, j'avais parlé des cinq principaux points soulevés par le député de Saguenay, le premier étant la discussion des objectifs de développement économique, le second étant le document jaune de l'OPDQ et de l'entente cadre de développement, et nous en étions aux instruments de planification.

A ce sujet, le député de Saguenay a rappelé, au titre des instruments de réalisation de la planification, une déclaration de M. Rolland Parenteau, en 1962. Je lui rappellerai que c'était M. Maurice Joubert, en 1962, qui était directeur général du Conseil d'orientation économique du Québec, et que c'est en 1966 que M. Parenteau a fait une analyse de l'expérience de la planification québécoise où il a identifié six problèmes importants, à son avis.

M. LESSARD: J'avais simplement cité le mémoire.

M. LEVESQUE: D'accord, "errare humanum est". Le député du Saguenay en a choisi un seul qui, vraisemblablement, fait son affaire.

Je lui rappellerai donc qu'à la page 19 du premier rapport annuel de l'Office de planification et de développement du Québec, les six problèmes identifiés par M. Parenteau étaient les suivants: une connaissance trop imparfaite de la réalité; l'absence d'une volonté non équivoque non seulement de planifier mais d'en accepter les conséquences; l'absence d'accords sur les objectifs; la désuétude des structures d'exécution; le partage des pouvoirs économiques entre deux niveaux de gouvernement; la perméabilité de l'économie québécoise aux influences étrangères.

Vous me permettrez de dire un mot concernant chacun de ces ordres de problèmes.

Nous avons, je pense, amélioré de beaucoup nos connaissances de la réalité, que ce soit par l'intermédiaire de la comptabilité nationale, du tableau industriel, de la préparation de stratégies sectorielles dans chacun des secteurs d'activité du Québec: forêt, agriculture, tourisme, industrie manufacturière, ainsi de suite, et, enfin, par la mise au point de la structure des programmes gouvernementaux.

Il existe, au sein du gouvernement, une volonté non équivoque de planifier et d'en accepter les conséquences, la plus belle preuve étant, comme je vous l'ai dit il y a quelques jours, la création d'un comité de onze ministres, appelé groupe ministériel des affaires économiques et du développement régional. Puis, concernant les objectifs de développement, nous nous sommes entendus sur les cinq objectifs dont je vous ai parlé dans mon exposé d'ouverture et, au fur et à mesure de l'évolution des dossiers, nous préciserons davantage les objectifs.

Pour répondre à la nécessité de structures d'exécution, nous avons crée l'Office de planification et de développement du Québec. En ce qui concerne l'influence étrangère et l'économie québécoise, nous avons constitué un comité ministériel sur les investissements étrangers qui a tenu jusqu'à ce jour plus de 45 réunions. Ce comité nous fera bientôt des propositions à cet égard.

Reste donc le partage des pouvoirs économiques entre deux niveaux de gouvernement. A cet égard, je dirai que ce qui est plus important que le partage des pouvoirs, en matière de développement économique, c'est la coordination des pouvoirs. Et, à cet égard, la crise toute récente du pétrole nous a démontré la possibilité d'arriver à une coordination des pouvoirs entre différents paliers de gouvernement qui soit avantageuse pour le Québec.

Le député de Saguenay s'est interrogé par la suite à savoir si les ententes actuelles, ou la

nouvelle entente-cadre constituait un fonds d'argent neuf ou servait à défrayer le coût de programmes réguliers des ministères.

Avant de continuer ces notes, je vais lui dire que c'est une préoccupation que j'ai eue personnellement, particulièrement entre les années 1966 et 1970, lorsque j'étais dans l'Opposition. Et j'ai déjà fait des discours là-dessus.

M. BEDARD (Chicoutimi): Cela devait être édifiant.

M. LEVESQUE: Ce n'était pas seulement édifiant, mais je crois que c'était fondé.

Il faut se rappeler qu'en 1968 il y a eu une entente signée entre MM. Trudeau et Johnson, à Rimouski, quant à l'ODEQ. J'avais l'impression, à ce moment-là, que cette entente ne comportait pas tellement d'argent neuf, surtout dans le domaine des communications. Pour nous, le problème no 1 en Gaspésie, c'était le réseau routier. Or, il n'y avait absolument pas d'argent mentionné dans l'entente de 1968. Il y avait là des choses concernant l'éducation des adultes, mais, pour nous, c'étaient des choses qu'on pouvait retrouver partout au Canada.

Alors, j'avais nettement l'impression, malgré le fait qu'il y en avait — dans l'Opposition, je disais qu'il n'y en avait pas, comme vous autres — qu'il n'y avait pas suffisamment d'argent neuf dans le programme.

M. BEDARD (Chicoutimi): Si vous aviez été au Saguenay-Lac-Saint-Jean, vous auriez tenu les mêmes propos.

M. LEVESQUE: Bon, c'est pour ça que, lorsque nous avons redéfini l'entente et que nous l'avons renégociée pour la signer en novembre 1971, il y avait là de l'argent neuf. Il y avait là plus de $60 millions, par exemple, dans le domaine de la voirie. On savait que c'était de l'argent neuf très concret qu'on voyait et qu'on voit présentement dans l'exécution. Mais vous avez raison de le soulever. Il est important que ces programmes-là ne soient pas de la poudre aux yeux, comme nous l'avons dit nous-mêmes à maintes reprises, lorsque nous croyions qu'il s'agissait, dans une partie du programme du moins, de poudre aux yeux et qu'il ne s'agissait pas d'argent neuf.

Je dirai donc au député de Saguenay que certains ministères ont, en effet, essayé dans le passé de faire financer des programmes réguliers à même ces fonds spéciaux. Alors, il y a deux volets, soit qu'il n'y avait pas d'argent et qu'on a essayé de nous faire croire qu'il y en avait ou que c'était de l'argent qui aurait été dépensé de toute façon, comme l'a mentionné le député de Saguenay.

Cependant, depuis la création du groupe ministériel de planification et de développement, nous avons été très attentifs, et d'autant plus attentifs que nous en avions soufferts nous-mêmes, à l'effet que ces fonds financent réellement des programmes nouveaux spéciaux dans les régions concernées.

Je ne dis pas que nous avons réussi à 100 p.c. Il en reste encore probablement que nous aurions eus de toute façon, mais je peux assurer le député que sur les quelque $600 millions des ententes, plus de 80 p.c ont servi à financer des programmes nouveaux qui, sans cela, n'auraient pas été faits, du moins à ma connaissance. Cela aurait peut-être été fait; c'est difficile de le dire, on est dans un monde hypothétique. Est-ce qu'ils l'auraient fait ou pas? A mon avis, ils n'auraient pas été faits sans l'apport de ces nouvelles sommes d'argent. Dans l'entente-cadre de développement que nous venons de signer, nous allons être encore plus attentifs au fait que ces sommes d'argent doivent financer des programmes spéciaux de développement. Cependant, nous avons indiqué que nous serons tout aussi attentifs à ce que ces fonds financent les véritables priorités du gouvernement du Québec.

Maintenant, le député de Saguenay semble trouver une contradiction dans la lecture qu'il aurait faite d'un document de l'OPDQ entre le financement de dossiers ponctuels et le financement de dossiers découlant d'une approche de planification. Il me permettra de lui expliquer un peu plus ce qu'il a pu lire dans ce document. Dans le passé, l'office, qui administrait un certain nombre d'ententes, choisissait de façon plus ou moins ponctuelle certains projets de développement liés aux infrastructures routières, industrielles, touristiques et autres.

Le choix de ces projets se faisait selon certains concepts de développement, mais ces projets n'étaient pas choisis selon un véritable plan de développement du type de celui de l'Est du Québec. Ce qui est proposé pour l'avenir, c'est de faire en sorte que l'Office de planification et de développement du Québec prépare systématiquement et en même temps pour toutes les régions du Québec un schéma de développement et d'aménagement qui permettrait à l'office de présenter au conseil des ministres un document synthèse sur les priorités de développement qui devraient être reflétées à l'intérieur du budget.

Trois situations peuvent dès lors se retrouver:

Premièrement, le conseil des ministres pourrait proposer d'augmenter certaines enveloppes à l'intérieur des budgets réguliers des ministères pour réaliser certains projets de développement. Nous n'aurions pas eu d'objection, s'il n'y avait pas d'argent dans tel plan, qu'on puisse augmenter le budget régulier, parce qu'enfin, cela revient au même. Premièrement, comme je l'ai dit, le conseil des ministres pourrait proposer d'augmenter certaines enveloppes, et cela à l'intérieur des budgets réguliers. Deuxièmement, le conseil des ministres pourrait retenir certains projets de développement prioritaires qui devraient faire l'objet d'une entente auxiliaire, donc, d'un financement conjoint d'environ 60-40, 60 p.c. fédéral

et 40 p.c. provincial, à l'intérieur de l'entente-cadre de développement Canada-Québec.

Troisièmement, le conseil des ministres pourrait retenir certains projets prioritaires d'intervention régionale comme devant être financés par un nouveau fonds qui serait créé en 1975/76, appelé fonds de développement régional, dont l'argent sera strictement québécois et qui servira à financer certaines interventions gouvernementales, même si ces projets sont non retenus par les ministères, dans la mesure où ce sera prioritaire par rapport au développement régional.

Donc, je le répète, nos objectifs, ce que nous recherchons, c'est d'influencer les décisions gouvernementales, premièrement dans l'extension des budgets réguliers, deuxièmement dans les ententes auxiliaires qui pourraient être conclues à l'intérieur de l'entente-cadre pour des projets moteurs de développement et, troisièmement, de faire appel au fonds de développement régional qui commencera, que l'on verra dans le budget à partir du 1er avril 1975.

Il ne s'agit donc pas de deux approches qui sont exclues mais bien d'une approche intégrée qui va de la planification d'ensemble à la planification régionale en intégrant le choix de priorités d'interventions régionales, en distinguant les sources de financement possibles.

Enfin, pour terminer, le député de Saguenay a insisté pour qu'il y ait une masse monétaire supérieure nouvelle pour permettre aux régions de se développer. Encore une fois, je le répète, à partir d'avril 1975, à moins que le ministre des Finances et moi-même nous ne nous soyons pas compris, si je comprends bien ce que le ministre des Finances et le Conseil du trésor ont répliqué au ministre ici présent ainsi qu'au président-directeur général de l'office et à tous ceux qui étaient présents, à partir du 1er avril 1975, nous allons créer un fonds régional de développement dont l'argent sera exclusivement québécois. On n'attendra pas de savoir si le fédéral est d'accord ou pas d'accord. Ce sera exclusivement québécois et cela servira à financer des interventions prioritaires régionales dans toutes les régions du Québec et plus particulièrement dans les régions périphériques.

Je lui rappellerai aussi que nous attachons tellement d'importance aux régions que dans le nouveau groupe ministériel des affaires économiques et du développement régional, nous avons affecté un ministre à chacune des régions administratives. Je lui rappellerai qu'il y a eu cette fusion entre le groupe ministériel des affaires économiques, présidé par le ministre de l'Industrie et du Commerce, et le groupe ministériel de l'OPDQ.

Ainsi nous avons constitué ce groupe de onze ministres au lieu d'avoir du chevauchement, de la duplication; nous avons décidé de faire la fusion de ces deux groupes au lieu d'assister à deux réunions hebdomadaires où les mêmes sujets revenaient trop souvent. Cette fusion fait que nous avons un groupe avec deux fonctions, deux volets. Ce sont les affaires économiques jumelées avec le développement régional.

Dans le développement régional, nous avons assigné une région aux ministres suivants: Saguenay-Lac-Saint-Jean, le ministre de l'Agriculture; cela va intéresser le député de Chicoutimi, en particulier, et le député de Dubuc, parmi ceux, évidemment, qui sont ici ce soir; le Nord-Ouest québécois, le ministre des Richesses naturelles; la Côte-Nord et le Bas-Saint-Lau-rent-Gaspésie, le ministre d'Etat à l'OPDQ, le ministre responsable de l'ODEQ, le ministre responsable du placement étudiant, le ministre responsable des initiatives locales et de Perspectives-Jeunesse, le député de Joliette, autrement dit M. Quenneville; Québec, le ministre du Revenu; Trois-Rivières, le ministre des Terres et Forêts; Sherbrooke, le ministre des Affaires municipales et responsable de la qualité de l'environnement, Sherbrooke ou l'Estrie, si vous voulez; Montréal métropolitain, le ministre de l'Industrie et du Commerce; Montréal, régions nord et sud, le ministre d'Etat à l'OPDQ et député de Chauveau, M. Lachapelle; l'Outaouais, le ministre du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche. Ces ministres suivront de près l'évolution des dossiers régionaux de façon à faire rapport au conseil des ministres.

Il y a, de plus, parmi ces ministres régionaux — on me le signale et je suis heureux de le signaler — d'autres ministres qui n'ont peut-être pas de responsabilité régionale comme telle mais qui font partie de ce groupe réuni. Il y a le ministre des Institutions financières, le ministre des Transports et votre humble serviteur, qui essaie de présider ce groupe dans le meilleur intérêt du développement des affaires économiques en même temps que du développement régional proprement dit.

LE PRESIDENT (M. Picard): L'honorable député de Saguenay.

M. LESSARD: M. le Président, je suis fort heureux que mes remarques préliminaires aient provoqué les remarques du ministre responsable de l'OPDQ et vice-premier ministre du Québec. D'abord, je vais faire deux précisions. Je regrette que le ministre responsable de l'OPDQ doive partir. Cependant, il pourra lire mes remarques dans le journal des Débats.

Je voudrais faire une première remarque concernant une démocratie inférieure par rapport à une démocratie supérieure. Je pense qu'à ce sujet, les remarques du ministre responsable de l'OPDQ rejoignent les miennes, si on excepte les mots qui sont différents.

Il est vrai qu'il n'y a qu'un type de démocratie et j'ai bien dit, dans mes remarques préliminaires, qu'au cours du 19e siècle s'était particulièrement développé ce qu'on peut appeler la démocratie politique, c'est-à-dire la possibilité de permettre aux gens de voter pour l'élection de leurs représentants, mais démocratie qui se

faisait sur une période de temps déterminée. Quant à nous, le maximum, c'est une période de cinq ans.

Mais je pense — et c'est dans ce sens que je parlais d'une démocratie inférieure de cette démocratie politique — que, de plus en plus, se développe une nouvelle démocratie, celle que nous appelons et allons appeler maintenant la démocratie économique, c'est-à-dire que le gouvernement du peuple par le peuple, ce n'est pas seulement faire l'élection de représentants à l'Assemblée nationale que nous jugeons, par la suite, après quatre ou cinq ans d'administration, mais c'est aussi de pouvoir participer aux décisions économiques. C'est dans ce sens que je parlais d'une démocratie économique.

J'ai cité, les cas de Cabano, de Sacré-Coeur, de Tembec, dans le Témiscamingue, et nous avons pu constater aujourd'hui même, après l'annonce du projet de Cabano par le ministre de l'Industrie et du Commerce, que cette démocratie économique, la population avait l'intention de l'exiger. N'eût été de la pression populaire qui s'est faite à Cabano, je ne pense pas que nous aurions pu aujourd'hui entendre la déclaration du ministre de l'Industrie et du Commerce concernant le projet de Cabano.

La même chose aussi s'est faite dans la région de Sacré-Coeur, et il est certain que c'est en premier lieu à cause du dynamisme de la population de Sacré-Coeur comme du dynamisme de la population de l'Abitibi que des projets comme Sacré-Coeur et Tembec se sont réalisés.

C'est dans ce sens que je parle d'une démocratie inférieure, une démocratie qui se limiterait strictement, sur le plan économique, à l'élection d'individus. Je pense que nous devons aller plus loin et parler de cette participation populaire au niveau des décisions économiques. C'est d'ailleurs l'une des raisons qui ont justifié le gouvernement du Québec de s'impliquer dans la planification économique et de créer des organismes populaires que sont les CRD qui sont les "interlocuteurs privilégiés", selon la politique à la fois du ministre responsable de l'ODEQ et de l'Office de planification et de développement économique du Québec. En tout cas, je l'espère.

Je ne pense pas qu'il y ait donc contradiction entre ce qu'expose, dans sa deuxième réponse, le ministre responsable de l'OPDQ et ce que j'ai moi-même dit. Il n'y a simplement qu'une différence de phraséologie, de mots, c'est-à-dire que nous faisons strictement de la sémantique lorsque nous nous engageons sur ce terrain.

Cependant, la remarque la plus importante, en réponse à ma déclaration préliminaire, du ministre responsable de l'OPDQ concerne la coordination entre les politiques fédérales et les politiques provinciales. Je dois d'abord dire que probablement si nous avions eu l'avantage d'avoir cette année le rapport de l'Office de planification et de développement économique du Québec, nous aurions pu, peut-être, modifier notre intervention préliminaire. En effet, je dois préciser que le rapport annuel de l'OPDQ de 1972/73 vient juste d'être déposé, soit le 4 juin 1974. En fait, avec près d'un an de retard.

Je pense qu'il est très important pour l'Opposition de pouvoir obtenir ces rapports lorsque nous avons à discuter des crédits d'un office comme l'Office de planification et de développement économique du Québec. Mais, comme je le disais, le problème fondamental — et je le maintiens toujours — de la planification économique du Québec vient du fait que nous avons un partage de pouvoirs qui ne permet pas au Québec d'avoir ses véritables instruments de planification.

Je voudrais, à ce sujet, citer deux sources. Premièrement, je voudrais citer le document même — non, pas Le Jour — de l'Office de planification et de développement économique du Québec concernant les orientations du développement du Québec, concernant justement les politiques fédérales dans le passé. A la page 24, on y lit ce qui suit: "L'Ontario — on compare le développement de l'Ontario au développement du Québec — a tiré partie de sa proximité géographique par rapport à cet ensemble et des facteurs naturels et autres qui l'avantageaient: topographie, climat, fertilité du sol, caractéristiques socio-économiques de la population, etc. pour édifier une structure industrielle qui constitue une copie conforme à celle des Etats américains limitrophes. Toutefois — et c'est là, je pense, la remarque importante — ceci n'aurait pas été possible sur la base des seuls facteurs physiques; après tout, l'Ontario aurait très bien pu devenir un deuxième Wisconsin, c'est-à-dire une province agricole, efficace et prospère, plutôt que de ressembler, sur le plan économique, à l'Ohio ou à l'Illinois".

M. BOSSE: Illinois.

M. LESSARD: Avec le bill 22, M. le Président, je traduis cela en français.

M. BOSSE: L'Ohio et l'IUinois.

M. LESSARD: "Une telle vocation ne pouvait satisfaire les entrepreneurs écossais qui s'étaient établis dans la province au 19e siècle. L'édification de barrières douanières élevés permit donc de protéger l'industrie ontarienne autochtone naissante et entraîna la migration au nord des sociétés manufacturières américaines. Tout naturellement, celles-ci se localisèrent d'une façon prépondérante en Ontario, plus proche des usines et des maisons-mères américaines dans le prolongement géographique et culturel naturel de leurs propres espaces économiques. Depuis la deuxième guerre mondiale, cette position favorable a été consolidée et pour ainsi dire consacrée par' d'autres mesures volontaires dont les principales sont la canalisation

du Saint-Laurent, l'établissement de la National Oil Policy et de la ligne Borden et le pacte canado-américain de l'automobile. Aujourd'hui, la puissance économique de l'Ontario est au moins égale à celle de la Suède et le niveau de vie de sa population équivaut à celui des régions américaines les plus favorisées. Maintenant que les fruits de l'intégration économique au nord-est américain ont été récoltés et que leur pérennité en a été assurée pour un avenir prévisible, il n'est pas étonnant que le gouvernement canadien songe à des mesures, tel le contrôle des investissements étrangers destinés à renforcer l'originalité ou l'autonomie nationale par rapport à l'économie du sud. Ainsi, le miracle économique ontarien aura peu de chances de se reproduire, du moins selon le même modèle au profit des autres parties du Canada. En toute hypothèse, cela paraît invraisemblable".

Voilà, M. le Président, une affirmation même de l'Office de planification et de développement économique du Québec concernant justement les contradictions des politiques fédérales par rapport aux véritables objectifs du gouvernement du Québec dans son développement économique.

Deuxièmement, je voudrais utiliser une autre source, soit l'analyse qui fut faite par l'économiste Fernand Martin du document de l'OPDQ, en date du 6 avril 1974. Cette analyse est parue dans le journal Le Soleil du 6 avril 1974. M. Fernand Martin analyse justement les politiques fédérales. Nous pouvons lire, en tout cas, concernant cette analyse, les remarques suivantes dans le journal que j'ai cité précédemment: "Précisant que les politiques fédérales en matière de fiscalité, de monnaie, de transport, de communication, de sécurité sociale, de tarifs douaniers sont prépondérantes dans l'explication des déséquilibres régionaux, l'auteur du rapport se surprend que les fonctionnaires de l'OPDQ les aient ignorées. L'OPDQ devrait essayer de quantifier l'effet bénéfique ou nocif de ces politiques. Mon opinion est que le Québec a bien plus besoin de décisions fédérales favorables dans ce domaine que de subventions monétaires. L'OPDQ devrait obtenir, afin de faciliter le développement du Québec..."

M. BOSSE: Est-ce qu'il vous manque quelque chose?

M. QUENNEVILLE: Ce n'est pas le bon journal.

M. LESSARD: "II aurait dû aussi se prononcer sur l'impact des subventions du ministère de l'Expansion économique régionale et sur les modifications à apporter à ces programmes".

M. BOSSE: Est-ce qu'il manque un qualificatif?

M. LESSARD: Non, M. le Président, c'est qu'il doit manquer un mot. Alors, je cite exactement les paroles de M. Fernand Martin.

M. BOSSE: Dans le Soleil, c'est pas une fuite; c'est un article...

M. LESSARD: Je devrais ajouter, M. le Président, que c'est entre guillemets. Justement, le député qui paraît très rarement à l'Assemblée nationale, c'est-à-dire le député de Dorion, me parle continuellement de fuites, mais...

M. QUENNEVILLE: II a eu les oreillons. M. BOSSE: J'en profite, j'en profite.

M. LESSARD: II a eu les oreillons longtemps.

M. BEDARD (Chicoutimi): Vous parlez d'absence; la question a été soulevée.

LE PRESIDENT (M. Picard): A l'ordre!

M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, on n'est pas ici pour noter les absences à l'Assemblée natioanle.

UNE VOIX: II était malade. Soyez sympathique.

M. BOSSE: Pourtant, vous le savez, vous avez été malade, vous.

M. BEDARD (Chicoutimi): Oui, d'accord.

M. BOSSE: On comprend ça. Alors, votre confrère pourrait peut-être, à ce moment-là, s'en tenir au texte du Soleil; il n'est pas dans la lune.

M. LESSARD: M. le Président, le député de Dorion est intervenu en me parlant de fuites, mais il faudrait bien dire qu'il y a des documents fort importants qui sont payés à même les deniers de l'Etat et qui demeurent malheureusement bien souvent, dans la poussière des différents ministères du gouvernement. Je pense qu'il est extrêmement important que ce gouvernement cesse de diriger les Québécois en cachette. Je pense qu'il est nécessaire, en particulier en ce qui concerne l'Office de planification et de développement économique du Québec, que ces documents forts importants...

M. BOSSE: Je pense que l'étude à laquelle il réfère, justement, c'est un document produit. C'est un article produit par un fonctionnaire — vous l'avez dit vous-même — et qui, loin d'être caché, est rendu public dans un article du Soleil. Je m'enquérais tout simplement...

M. LESSARD: Non, M. le Président, c'est vraiment une fuite, je dois le dire.

M. BOSSE: ... si c'était une fuite, mais apparemment vous me confirmez que ce n'est pas une fuite. Vous m'avez dit que c'était un article paru et signé par un fonctionnaire.

M. LESSARD: Le député de Dorion, qui n'a plus l'habitude de l'Assemblée nationale...

M. BOSSE: Au contraire; c'est ce qui peut-être vous inquiète.

M. LESSARD: ... semble-t-il, n'a pas fait la distinction entre, justement, une étude d'un économiste, qui s'appelle M. Fernand Martin, sur la version préliminaire des orientations économiques que prévoyait l'OPDQ, qui est un document que j'ai reçu par fuite et...

M. BOSSE: Ah! je vois une admission. Les fuites constantes.

M. LESSARD: Le député de Dorion aurait pu lire aussi deux autres journaux; je pense que c'est le journal La Presse et le journal Le Jour, qui a de très bonnes informations, et le journal Le Soleil qui a obtenu ce document.

M. QUENNEVILLE: Des informations biai-sées.

M. BOSSE: En parlant de fuite, je voudrais ajouter, celle-ci, M. le Président. Une fuite fort remarquable à l'Assemblée nationale, depuis deux termes, c'est la fuite du chef spirituel du

PQ.

LE PRESIDENT (M. Picard): A l'ordre, s'il vous plaît!

Tout ce que le député peut faire, c'est invoquer l'article 177 et demander que le document auquel se réfère le député de Saguenay soit déposé.

M. LESSARD: Je ne suis pas ministre, M. le Président, et je répondrai à ceci qu'en vertu de l'article 177 il n'est pas d'intérêt public de déposer ce document, pour le député de Saguenay.

LE PRESIDENT (M. Picard): Je vois que le député de Saguenay connaît son règlement.

M. QUENNEVILLE: II ne sera jamais ministre.

M. LESSARD: Donc, M. le Président, pour ne pas prolonger ce débat, il est extrêmement important de pouvoir modifier les politiques du gouvernement fédéral qui, dans le passé, ont été défavorables aux intérêts du Québec et c'est dans ce sens-là que j'ai fait mes remarques. Aussi, il est extrêmement difficile de faire de la planification économique dans un territoire quand nous n'avons pas les instruments de cette planification économique.

De toute façon, nous aurons, avec mon collègue le député de Chicoutimi, à discuter de ce projet, de cette entente-cadre, et je pense que le député de Chicoutimi est assez bien préparé pour discuter de ce document comme, d'ailleurs, son collègue le député de Saguenay.

En ce qui concerne les autres remarques du leader du gouvernement, ministre responsable de l'OPDQ, nous poserons surtout des questions, en particulier sur le fonds de développement régional, quel sera le pourcentage de ce fonds, etc. Quand nous constatons, depuis 1968, en particulier dans la région de l'Est du Québec, les conséquences du développement économique, nous arrivons à la conclusion que ça n'a pas donné grand-chose, nous arrivons à la conclusion que le taux de chômage est resté à peu près le même depuis 1968.

LE PRESIDENT (M. Picard): Le député de Chicoutimi.

M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, c'est simplement des questions que j'aurais à poser. J'imagine qu'à la suite de ces questions, nous pourrons entrer dans certaines parties du document de l'OPDQ qui expriment sa philosophie de développement.

Au niveau de l'entente-cadre, je voudrais savoir une chose, tout d'abord. Régulièrement on entend dire, par le ministres ou par les députés, que cette entente-cadre va représenter, pour le Québec, $3 milliards. Régulièrement, par le leader parlementaire, en tout cas, du Parti libéral.

M. QUENNEVILLE: M. le Président, avant...

M. BEDARD (Chicoutimi): Vous me permettrez de poser ma question. Elle vient justement là-dessus. Je voudrais savoir, M. le Président...

M. BOSSE: Un instant.

M. BEDARD (Chicoutimi): ... en vertu de quoi et sur quoi on se base pour laisser entendre régulièrement à la population que cela représente $3 milliards de développement d'ici la fin de l'entente-cadre?

M. QUENNEVILLE: M. le Président, je regrette infiniment, mais le chiffre de $3 milliards n'apparaît pas dans l'entente. Lors de la signature de l'entente, M. Levesque avait dit: Ce sera environ $300 millions pendant dix ans. Si vous étiez présent, il a même dit à l'honorable M. Jamieson, à ce moment-là: II y a toujours la possibilité que ce soit plus ou moins, etc. On n'a jamais donné de chiffre précis sur le budget prévu pour dix ans. C'est un chiffre qui a été lancé comme cela.

M. BEDARD (Chicoutimi): Qui a été lancé comme cela? Il a été lancé...

M. QUENNEVILLE: Mais pas plus que cela. D'ailleurs, on a dit que ça peut être plus ou moins.

M. BEDARD (Chicoutimi): II a quand même été lancé assez précisément pour laisser entendre...

M. QUENNEVILLE: Pas du tout.

M. BEDARD (Chicoutimi): Entre vous et moi, ça...

M. QUENNEVILLE: Est-ce que vous étiez là?

M..BEDARD (Chicoutimi): ... figure bien, quand même.

M. QUENNEVILLE: Est-ce que le député de Chicoutimi était présent?

M. BEDARD (Chicoutimi): J'étais là. J'étais présent en Chambre, lorsque j'ai posé des questions.

M. QUENNEVILLE: Non, j'entends lors de la signature de l'entente.

M. BEDARD (Chicoutimi): J'ai posé des questions très directement au leader. Dans un document officiel de l'OPDQ on peut lire: On prévoit que l'entente-cadre permettra d'injecter quelque $3 millards...

M. QUENNEVILLE: Quelque $3 millards...

M. BEDARD (Chicoutimi): ... dans l'économie québécoise au cours des dix prochaines années.

M. QUENNEVILLE: ... c'est plus ou moins, à ce moment-là.

M. BEDARD (Chicoutimi): Ce sont des chiffres en l'air? C'est ce que je voudrais savoir, il n'y a rien de précis de ce côté-là?

M. QUENNEVILLE: Ce ne sont pas des chiffres précis.

M. BEDARD (Chicoutimi): Bon.

M. LACHAPELLE: M. le Président, est-ce que je pourrais ajouter quelque chose, s'il vous plaît, à ce que le ministre d'Etat vient de déclarer? C'est sûr qu'il s'agit d'une approximation, mais une approximation qui est basée sur l'état actuel des ententes et une extrapollation sur une période de dix ans. Ce sont donc des chiffres réels extrapollés, et au total ils donnent une approximation d'à peu près $3 milliards.

Donc c'est basé sur des chiffres réels avec une progression qui serait normale si les ententes actuelles se continuaient.

M. BEDARD (Chicoutimi): Oui, si elles se continuaient parce que, lorsqu'on fait la lecture de l'entente-cadre, on sait que cette entente peut être discontinuée après avis préalable de deux ans d'une des parties.

M. LACHAPELLE: Oui, je pense qu'il est raisonnable de croire...

M. BEDARD (Chicoutimi): Effectivement, c'est courir après un chiffre qui paraît bien...

M. LACHAPELLE: Non, c'est beaucoup plus fondé que ça, puisqu'on dit qu'il s'agit d'une extrapollation de chiffres réels, de chiffres qui sont effectivement vécus. Il est raisonnable de croire que l'entente-cadre, pour le moins, apportera à l'économie du Québec au moins les montants qui ont été avancés à ce jour, dans le cadre des ententes existantes.

M. BEDARD (Chicoutimi): Sur quoi vous basez-vous? J'imagine que vous avez autre chose qu'une projection comme base de raisonnement; ça donne $300 millions pour la première année. Alors, on imagine que ça va donner $300 millions chaque année. Est-ce qu'il y a des projets précis qui vous font croire que ce montant de $300 millions par année est un chiffre qui va se vérifier à chaque année de l'entente-cadre?

M. LACHAPELLE: Bien sûr.

LE PRESIDENT (M. Picard): A l'ordre, messieurs, s'il vous plaît. Est-ce que je pourrais demander aux opinants de s'adresser à la présidence? L'expérience nous prouve qu'à un moment donné ça dégénère dans un dialogue de bord en bord de la table et ce n'est plus contrôlable.

Posez vos questions, soit au ministre ou à un autre député, via la présidence.

M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, ma question reste sur la table, le fait de savoir sur quel projet précis on peut se baser pour...

M. LACHAPELLE: M. le Président, je suppose que les réponses également doivent vous être dirigées, ce que je vais faire, d'ailleurs. Ce montant a été couramment utilisé dans les conversations que les fonctionnaires et les ministres ont eues entre eux. Je pense qu'encore là il est raisonnable de croire que ce montant sera effectivement le cadre général ou le montant approximatif des ententes.

M. LESSARD: Quand on a eu la première entente de 1968 jusqu'à 1972, à peu près 20 p.c. des montants ont été dépensés au cours

de cette période. Il restait $211 millions sur un montant de $200 millions comme le ministre...

M. QUENNEVILLE: $258 millions.

M. LESSARD: ... sur $258 millions. Donc il y avait $47 millions qui n'avaient pas été dépensés.

M. QUENNEVILLE: C'est loin d'être 20 p.c, ça.

M. LESSARD: Pardon, $47 millions avaient été dépensés par rapport à $211 millions qui restaient.

M. QUENNEVILLE: Au contraire.

M. LESSARD: Je doute que ce soit le contraire, M. le Président, parce que j'ai affirmé l'autre jour que le montant de $411 millions...

M. QUENNEVILLE: $411 millions, c'est une entente qui date de 1971, ça n'a rien à voir avec l'entente de 1968.

M. LESSARD: D'accord, mais à l'intérieur duquel étaient intégrés les montants...

M. QUENNEVILLE: Les $258 millions de 1968.

M. LESSARD: Dont une grande partie n'avait pas été dépensée.

M. QUENNEVILLE: Cela avait été dépensé en partie.

M. LESSARD: Oui, mais ce que nous voulons savoir, c'est d'abord: Est-ce que cette entente s'inscrit dans un schéma d'aménagement global du Québec? Et est-ce que c'est précisé? Dans le document on parle d'une période de dix ans, de $3 milliards, une entente-cadre de $3 milliards. Je cite Développement Québec, revue mensuelle de l'OPDQ, volume 1, numéro 5, avril 1974, à la page 3: "On prévoit que l'entente-cadre permettra d'injecter quelque $3 milliards dans l'économie québécoise au cours des dix prochaines années". Tel que le disait tout à l'heure le ministre responsable de l'OPDQ, on ne voudrait pas que ce soit encore de la poudre aux yeux, comme malheureusement cela a été le cas dans le passé. Ce qu'on vous demande: Est-ce que vous avez, actuellement, suite à cette entente cadre, des précisions concernant les montants réels qui devront être dépensés? Et est-ce que l'OPDQ a préparé tout un schéma d'aménagement afin que ces montants soient véritablement dépensés? C'est ça qu'on voudrait savoir.

Ce sont simplement des genres de voeux. On dit: un montant de $3 milliards est prévu. Est-ce vrai, est-ce réel, ou est-ce que ce ne sont que des prévisions de montants qu'on estime pouvoir dépenser?

M. LACHAPELLE: M. le Président, je pense bien que ce ne serait qu'à l'état de voeux si nous n'avions rien sur quoi nous fonder. Cependant, nous avons l'expérience des années antérieures. Nous avons également les chiffres qui ont été mentionnés lors de nombreuses conversations, et au niveau des fonctionnaires et au niveau ministériel. C'est l'ensemble de ces données qui ont été fournies par des gens responsables, des gens qui ont fait la preuve, qu'ils s'en tiennent scrupuleusement à leur parole; nous pouvons donc prévoir de façon très confiante le chiffre qui a été mentionné.

Parmi les projets particuliers qui découleront de cette entente-cadre, il y en a au moins un en tout cas qui est déjà en marche, il s'agit de SIDBEC. Il y en a deux ou trois qui sont sur le point d'être conclus. Et les autres, de plus en plus, s'intégreront dans un aménagement global du territoire au fur et à mesure que les données pour un tel aménagement global du territoire seront arrêtées et seront connues.

M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, on discute de l'entente-cadre. Je veux bien, dans un premier temps... D'une part, c'est peut-être intéressant d'entendre les ministres ou les porte-parole du gouvernement nous dire que cela va repesenter $3 milliards, nous dire que le fonds québécois, c'est $300 millions qu'on va mettre là-dedans. Mais ce que je voudrais faire ressortir, c'est que ce ne sont que des chiffres que vous lancez comme ça, parce que si on lit l'entente-cadre, sur l'aspect légal, il n'y a absolument aucun montant de précisé. Lorsque le gouvernement, à mon sens, avance des chiffres comme $3 milliards, avance des chiffres comme $300 millions dans le fonds québécois, je comprends que cela parait bien, mais il n'y a rien qui vous dit que dans deux ans vous pourrez mettre $300 millions dans le fonds québécois.

M. QUENNEVILLE: Oui, bien sûr.

M. BEDARD (Chicoutimi): Vous pourrez peut-être en mettre plus, aussi. C'est sous cet aspect que je trouve qu'effectivement on essaie peut-être un peu trop... Remarquez que cela peut, peut-être, rapporter plus, donner plus que ces montants, mais il reste du point de vue des principes, du point de vue légal, qu'il n'y a rien qui vous permet, à l'heure actuelle, de laisser, en fait, planer l'image de $3 milliards qui s'en viennent au Québec et de $300 millions que vous mettez d'une claque, comme ça, dans un fonds québécois, en deux ans. Vous ne savez pas encore ce que vous allez y mettre.

M. LACHAPELLE: M. le Président, encore là, au risque de me répéter; je répète que l'expérience passée ainsi que les indices qui ont été fournis par tous les interlocuteurs, qui sont des interlocuteurs valables, avec lesquels nous avons transigé, nous font dire et redire que le montant de $3 milliards est une approximation

qui est des plus réalistes et rationnelles. Si, d'ici dix ans ou dans l'espace de dix ans, le système politique, au Québec, devait changer et que notre position politique vis-à-vis du reste du Canada était différente, c'est sûr que les $3 milliards ne seraient plus $3 milliards. C'est clair.

M. BEDARD (Chicoutimi): C'est clair que si vous n'avez pas la prétention de demeurer toujours au gouvernement, les ententes qui se font de bonne foi au niveau des paroles entre les ministres, tant du gouvernement fédéral que du gouvernement provincial, au moment où ils sont en fonction, si elle ne sont pas consignées légalement dans des ententes, au niveau des montants, n'engagent ni l'une ni l'autre des parties en cas de changement de gouvernement. C'est dans ce sens que je voulais voir jusqu'à quel point cette entente peut légalement obliger les deux parties à donner suite à ce que le gouvernement appelle une injection de $3 milliards et une mise de fonds de $300 millions dans le fonds québécois.

Maintenant...

M. LESSARD: Suite à ça, justement, on remarque que le problème fondamental que nous soulevons, ce n'est pas de dire, par exemple, que ce montant de $3 milliards est relativement peu important.

Je pense qu'il peut être important, mais à la condition que ce soit véritablement de l'argent nouveau, tel qu'on nous le dit. Mais on a l'impression que c'est de l'administration à la petite semaine que vous faites, c'est — si vous me permettez — de la planification à la petite semaine.

Encore dans le même document que je citais tout à l'heure, après avoir dit qu'on pourrait signer des ententes auxiliaires, dans le document Développement Québec, revue mensuelle de l'OPDQ, volume 1, no 5, avril 1974, à la page 7, on dit: "Evidemment, nous avons aussi certains autres projets que nous déposerons progressivement à la table de négociation, suivant les priorités de développement qui seront retenues par le gouvernement du Québec".

Puis là, il nous arrive une entente auxiliaire concernant l'autoroute de l'acier, qui était d'ailleurs prévue depuis assez longtemps par le ministère des Transports. On en parlait au ministère des Transports du Québec. Est-ce que cette entente auxiliaire comme telle nous apporte de l'argent nouveau?

On voit, par exemple, l'entente auxiliaire concernant SIDBEC, première entente auxiliaire. Encore là, on prévoyait un développement nécessaire pour SIDBEC. Encore là, est-ce que c'est de l'argent nouveau?

Deux ententes sont apparues, tout à coup, sur le tapis, deux ententes auxiliaires concernant le parc industriel de Sherbrooke et le développement du mont Orford et Magog. Encore là, cela fait longtemps, au ministère du

Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, qu'on parle du développement du mont Orford. Est-ce que c'est cela que vous entendez par argent nouveau?

Ce qu'on veut que vous nous disiez, c'est si cela s'inscrit — tout cela, ces ententes auxiliaires — dans un plan d'aménagement bien concret. Par exemple, vous avez prévu qu'au cours de cette année, il y aura tant de millions de dépensés dans des projets bien précis.

Vous dites aussi "selon les priorités de développement du Québec". Si vous avez un schéma d'aménagement, déposez-le. Dites-nous justement que c'est prévu. Si vous avez un document précis, suite à l'entente Canada-Québec, dites-nous que vous l'avez, ce document précis. S'il y a des priorités de développement que vous avez, j'espère, prévues et que vous avez élaborées, quelles sont-elles? Il me semble qu'on ne signe pas, comme ça, une entente et, après cela, on s'amuse, comme on l'a fait un peu pour la baie James, à créer des 125,000 emplois par ici et 125,000 emplois par là. C'est plus que cela, de la planification !

La planification, c'est une prévision des investissements futurs qui vont être faits. Là, vous nous apportez $3 milliards sur une période de dix ans, mais nous, ce qu'on vous dit, c'est: Est-ce de l'argent nouveau? Si c'est de l'argent nouveau, quelles sont vos priorités et quel est votre schéma d'aménagement?

Si vous n'êtes pas capables de nous le dire, c'est une drôle de planification que vous faites!

M. BEDARD (Chicoutimi): M. le Président, j'aurais une question. Vous parlez de $3 milliards, j'imagine que vous avez quand même des dossiers-moteurs en tête. Vous avez quand même des priorités, comme l'a dit le député de Saguenay, qui sont établies, certains développements que vous entrevoyez pouvoir inscrire à l'intérieur d'ententes auxiliaires avec le gouvernement fédéral.

Même si vous avez ces dossiers-moteurs en tête — je ne sais pas si vous les avez — qu'est-ce qui arrive, par exemple, si vous présentez un dossier-moteur à Ottawa, au gouvernement fédéral, et que celui-ci n'est pas d'accord pour investir?

Parce que je conçois que cette entente-cadre dit: D'une part, le gouvernement fédéral, le gouvernement québécois s'engage disons à financer certains dossiers-moteurs par le biais des ententes auxiliaires. D'autre part, comme il s'agit de deux parties, il faut naturellement qu'il y ait entente entre les deux parties, pour pouvoir effectivement mener à bien la réalisation ou amener les investissements qui sont nécessaires. Qu'est-ce qui arrive si vous présentez un dossier-moteur et que le fédéral ne l'accepte pas, parce que cela ne répond pas à ses critères?

M. LACHAPELLE: M. le Président, je pense bien qu'il faut convenir que cette question est purement hypothétique, dans le sens...

M. BEDARD (Chicoutimi): Elle n'est pas hypothétique.

M. LACHAPELLE: ... qu'on prévoit ou on suppose qu'un jour, un dossier ou un projet sera soumis, qui ne rencontrerait pas l'approbation du fédéral.

Pour le moment, je pense que l'expérience de ces rapports a été très heureuse. D'ailleurs, l'entente-cadre prévoit que les deux ministres responsables conviendront de priorités et orientations et que, dans le cadre de ces conventions annuelles, s'inscriront un certain nombre de dossiers moteurs.

M. LESSARD: Qu'est-ce qu'un dossier moteur?

M. LACHAPELLE: Je pense bien qu'on les définit d'une façon assez nette dans l'entente-cadre; ce sont des dossiers des projets qui sont d'une ampleur significative et qui auront un impact également significatif sur l'économie québécoise. C'est précisément la philosophie de la nouvelle entente-cadre. Si on cite SIDBEC à titre d'exemple, je pense qu'on doit convenir qu'elle constitue, ici au Québec, présentement, un facteur économique d'importance et très significatif. C'est un exemple de dossier moteur. Il y en aura d'autres, bien sûr, de cet ordre-là. Il y en aura d'autres également peut-être d'un ordre plus modeste, parce que les dossiers moteurs sont quand même à la mesure des régions où ils peuvent se produire. Si un projet de la taille de SIDBEC est économiquement important pour une région comme celle de Montréal, il est plausible qu'un projet beaucoup plus modeste soit aussi important économiquement, sinon plus, pour une autre région du Québec. Il y a donc beaucoup de souplesse quant à l'interprétation de ce que peut être un dossier moteur. C'est à l'expérience qu'on va roder les normes qui feront que les dossiers sont admissibles au titre de dossiers moteurs.

M. BEDARD (Chicoutimi): Dans votre entente-cadre, au tout début, dans les attendus, il est déclaré: "Le Canada et le Québec conviennent de se mettre d'accord sur l'orientation générale que doit prendre le développement socio-économique du Québec". Est-ce qu'on doit comprendre que cette orientation économique ou cette philosophie de développement, si on peut employer cette expression, qui est contenue à l'intérieur de l'entente-cadre, reflète vraiment et profondément la philosophie du gouvernement en termes de développement économique du Québec?

M. LACHAPELLE: Dans quel sens? Est-ce que vous avez des exemples à donner qui pourraient expliciter votre pensée là-dessus?

M. BEDARD (Chicoutimi): Dans l'entente-cadre, par exemple, vous parlez, entre autres, des priorités d'intervention dans les secteurs primaire, secondaire et tertiaire; vous êtes très précis dans ce domaine-là. Vous explicitez, je pense, d'une façon assez claire que l'ensemble des interventions, du point de vue de l'injection de capital au niveau des dossiers moteurs, vont se faire en fonction de Montréal et non pas des régions. Vous faites également une analyse de chacune des régions. On y retrouve une analyse de chacune des régions, d'ailleurs, qui est presque la reproduction textuelle du volume de l'aménagement du territoire et de développement économique de l'OPDQ.

Je veux savoir si ça reflète vraiment et profondément la philosophie de développement du Québec par le gouvernement provincial.

M. LACHAPELLE: Les éléments de stratégie qui apparaissent dans l'entente-cadre, qui en composent, du moins, l'appendice, sont également sujets à revue annuelle par les deux ministres responsables, parce que ça explicite la teneur de l'entente-cadre. Il n'est absolument pas dit dans l'entente-cadre ou dans les appendices qu'une région sera favorisée au détriment des autres. Certains cas sont mentionnés à titre d'exemple. Lorsqu'on parle de consolider la puissance économique de Montréal, je pense que c'est un but, un objectif tout à fait raisonnable parce que Montréal joue quand même, ici au Québec, un rôle d'attraction et d'entraînement fort important.

Simultanément, rien ne dit dans cette entente que les autres régions sont ignorées. Bien au contraire, l'esprit dans lequel nous avons développé cette entente-cadre et dans lequel nous l'appliquons présentement veut que toutes les régions du Québec, sans exception, profitent des retombées économiques que l'entente-cadre va permettre.

M. LESSARD: Ce sont de beaux voeux, ce sont de belles intentions mais je ne pense pas que vous ayez répondu encore à la question qui nous paraît assez fondamentale. C'est bien beau de dire qu'on va développer l'ensemble du Québec mais, par exemple, le port de plaisance de Sorel va coûter de $700,000 à $800,000. Est-ce un projet moteur pour la région? Est-ce un projet moteur pour le Québec? Est-ce une décision comme ça qu'on vient de prendre sans aucun schéma d'aménagement pour l'ensemble du territoire québécois? Encore là, vous êtes prêts à développer les autres régions du Québec mais comment, de queDe façon? Vous autres mêmes, dans le document de l'OPDQ, l'aménagement régional, et dans Développement Québec, volume I, numéro 5, avril 1974, à la page 9, vous le confirmez lorsque vous dites: "Le fait majeur est évidemment la prédominence considérable de la région de Montréal où sont concentrés plus de 56 p.c. de la population, les deux tiers de la production et 70 p.c. de l'emploi secondaire. Cette région possède la structure manufacturière la plus diversifiée et presque toutes les industries à haute productivité y sont

localisées. Le secteur tertiaire de Montréal est proportionnellement beaucoup plus développé que dans les autres régions du Québec, y compris les régions de Québec et de l'Outaouais. C'est aussi la première région agricole du Québec." Et là, vous continuez sur l'importance de Montréal.

A la page 10, vous dites ceci: "Ainsi, au cours des 20 dernières années, les disparités régionales de production et de population ont augmenté au profit de la région de Montréal. Toutefois, les écarts de revenus ont diminué sensiblement même s'ils demeurent, dans certains cas, importants; par exemple, le revenu disponible per capita de la région de Montréal était, en 1951, de 46 p.c. plus élevé que celui du reste du Québec; en 1970, l'écart est de 35 p.c. La région du Bas-Saint-Laurent-Gaspé-sie a le revenu le plus faible du Québec; en 1970, il est de 60 p.c. plus bas que celui de Montréal".

Vous dites: D'accord, on prend conscience de cela. Par contre, dans votre document selon votre philosophie, et dans votre entente, il faut consacrer la région de Montréal, semble-t-il, comme région prioritaire. Vous nous dites aussi: En même temps, il faut faire des développements, il faut faire des efforts considérables pour diminuer l'écart de revenus et l'écart de développement économique entre les régions. Mais de quelle façon cela se fera-t-il en vertu de l'entente Canada-Québec? Dans quel schéma d'aménagement cela se fera-t-il? Si on fait de la planification, si on veut réduire les écarts entre les régions, on ne peut pas revenir — un peu comme ça me semble être le cas — à la force des régions, au patronage: Si elles sont bien organisées, si elles sont fortes, si elles ont un député libéral, etc., là on va élaborer un projet moteur pour ces régions. Si ce n'est pas le cas et si elles n'ont pas de force de pression, etc., là ce ne sera pas considéré comme un projet moteur. C'est ce que je vous demande: la planification, ce n'est pas du patronage. La planification, c'est de la prévision. On vous demande si vous avez un document concernant ces projets moteurs spécifiques pour la région du Lac-Saint-Jean, pour la région de la Côte-Nord, pour la région de l'Abitibi, pour les régions périphériques, afin de diminuer cet écart. Dites-le nous! C'est bien facile de dire à un moment donné: Nos priorités sont de stimuler la création d'emplois productifs et consolider les emplois du secteur traditionnel; augmenter le niveau de vie; renforcer la structure industrielle et urbaine du Québec et favoriser le développement optimal de ses différentes régions; susciter une participation accrue des Québécois à leur propre développement; favoriser un meilleur équilibre dans le développement du Québec par rapport aux différentes régions du Canada.

C'est bien beau ça, ce sont de beaux voeux; ça fait des années qu'on dit ça au Québec. André Raynauld constatait aussi cette dispari- tion régionale. Cette disparité, excusez, mais c'est presque de la disparition si vous continuez comme ça.

M. BOSSE: Les régions disparaissent pour vous autres.

M. LESSARD: Alors...

M. QUENNEVILLE: Si le député de Saguenay continue à s'occuper de la Gaspésie, ça peut devenir comme ça, mais...

M. LESSARD: Justement, cette disparité régionale est en train, par l'entente-cadre, par votre philosophie de développement, de devenir de la disparition régionale. C'est ce qu'on vous demande, en avez-vous un projet de planification? Avez-vous des projets moteurs précis dans différentes régions du Québec et dans quels schémas d'aménagement ça s'inscrit?

Voilà, il me semble que la question est concrète. Les critères de choix pour le projet moteur, c'est quoi? Encore là, ce sont de beaux mots, mais vous pouvez à ce moment accepter n'importe quel projet moteur, n'importe quel projet d'immobilisation.

M. BOSSE: Vous êtes fort sur les moteurs; à la marina, il va y en avoir, des moteurs, si c'est ça que vous voulez.

M. LESSARD: Non, non, ce n'est pas ça.

M. BOSSE: Pour revenir aux questions que vous posez, vous semblez insinuer que, dans le Québec, c'est un cas particulier, que par exemple, le fait d'avoir des pôles d'attraction sur le plan du développement industriel au niveau tertiaire, comme on le cite dans le document, dans le cas de Montréal. Or, ce n'est certes pas unique. Si on prend toutes les autres provinces et tous les autres pays, on retrouve aussi des centres d'attraction, on retrouve des pôles d'attraction. C'est tout à fait normal. Quand on parle ici de l'OPDQ, ce n'est pas d'aujourd'hui...

M. LESSARD: Oui, oui, on parle...

M. BOSSE: ... ce n'est pas nouveau, ce n'est pas récent, il y a certes des projets moteurs. Il y en a qui sont non seulement moteurs, mais qui sont présentement en action, qui roulent. Ce n'est pas un phénomène particulier au Québec. Au fond, la question que vous posez et sur laquelle vous revenez toujours me paraît être la même d'un sujet à l'autre: les relations fédérales-provinciales, toujours, pour essayer de créer ce doute sur la capacité du Québec à l'intérieur d'une confédération.

M. LESSARD: Ce n'est pas ça, la question.

M. BOSSE: Bien c'est ça au fond, si on reprend...

M. LESSARD: Pas si on...

M. BOSSE: ... succinctement vos propos depuis que vous discutez sur l'OPDQ. C'était aussi vrai au niveau de l'ODEQ et c'était aussi vrai au niveau des affaires intergouvernementales, lorsque votre confrère, le chef parlementaire, posait des questions. C'était toujours sur le même sujet. Evidemment, je pense que votre planification s'oriente uniquement vers l'élection future, et c'est compréhensible et normal du point de vue de l'Opposition.

M. LESSARD: Non, mais ce n'est pas la question. C'est qu'on constate...

M. BEDARD (Chicoutimi): On n'avance pas dans le débat.

M. LESSARD: ... par exemple, l'OPDQ le constate aussi, que le Québec se vide vers Montréal. C'est vrai aussi qu'on parle en France du désert français par rapport à Paris. On sait qu'il y a d'autres problèmes aussi dans le reste du Canada puis il y en a partout dans le monde. Ce sont nos problèmes qu'on va discuter aujourd'hui, pas les problèmes du monde entier. On va discuter les problèmes du Québec.

Vous constatez justement que le reste du Québec se vide au profit de Montréal, comme on l'a constaté aussi en France. Par contre, on est en train de refaire des politiques de déconcentration industrielle. Ce qu'on vous demande justement, c'est quels sont concrètement les projets que vous prévoyez pour vous opposer à ce mouvement de concentration industrielle de plus en plus fort vers Montréal. Je voudrais que ce soit le ministre responsable du Conseil exécutif qui me réponde. C'est lui qui est responsable.

Le député de Dorion me parle de pôles d'attraction. Je dis oui, cela en prend, des pôles d'attraction, mais quels sont-ils à part Sherbrooke, Trois-Rivières et Montréal? Quels sont-ils, ces pôles d'attraction? Est-ce qu'on les a déterminés au Québec? Je voudrais que le ministre réponde. Je voudrais que le ministre réponde à cette question qui nous parait fondamentale et qui est toujours la même, j'en conviens avec le député de Dorion, qui est toujours la même, et ce n'est pas une question de relations fédérales-provinciales qu'on pose. On nous dit qu'il y a $3 milliards de prévus pour une période de dix ans. Mais le ministre responsable de l'ODEQ ne sait plus si c'est $3 milliards ou si ce n'est pas $3 milliards...

M. QUENNEVILLE: M. le Président, je regrette infiniment, c'est une interprétation. M. le Président, je regrette...

M. LESSARD: ... aux sources. Si le ministre veut parler, il utilisera l'article 96, selon les règlements. Mise au point après. Alors, ce que je demande au ministre responsable du Conseil exécutif et adjoint à l'OPDQ — si ce n'est pas le cas, le ministre pourrait-il me répondre? vous corrigerez ça tantôt; vous me corrigerez, pas de problème, on va vous le permettre — c'est qu'est-ce qu'il a de prévu, quel schéma d'aménagement il a, quels projets moteurs il a, quels sont les pôles où il veut concentrer le développement économique. C'est ça qu'on veut savoir. Ou s'agit-il simplement d'une entente que vous avez signée comme ça, puis là on dépensera l'argent à la va-comme-je-te-pousse?

M. LACHAPELLE: M. le Président, je pense qu'il a été nettement dit que l'entente-cadre avait pour but, entre autres, d'assurer un développement régional équilibré. L'entente-cadre fait allusion à Montréal comme un pôle économique d'importance. Il est bien sûr, normal et raisonnable que la position de Montréal comme pôle économique d'importance soit consolidée soit par le biais de l'entente-cadre ou de l'action gouvernementale, d'une façon générale. Simultanément, faut-il que les régions périphériques bénéficient, elles aussi, des retombées de l'entente-cadre aussi bien que de l'action gouvernementale dans son ensemble.

Quant aux dossiers-moteurs précis, il y en a plusieurs qui sont présentement à l'étude, qui font l'objet d'examens, d'analyses et qui, le temps venu, feront l'objet de négociations. En effet, l'entente-cadre dit bien, quand même, que les fonds fédéraux, qui serviront à financer ces projets, sont conditionnés, dans une bonne mesure, par une acceptation — cela aussi est normal — parce qu'il s'agit d'une entente des deux parties. Ces dossiers, au fur et à mesure qu'ils seront prêts, seront déposés, seront connus et feront l'objet d'ententes auxiliaires. Cela se déroulera conformément à ce qui nous apparaît avec les données qui sont disponibles présentement et qui le seront davantage au fur et à mesure qu'on perfectionne notre approche en ce qui regarde l'aménagement du territoire. Ces dossiers moteurs refléteront les priorités qu'un tel aménagement va mettre en évidence.

Bien sûr, une politique de développement régional, une planification régionale et un aménagement du territoire, quels que soient les termes qu'on utilise, d'autres bien avant nous, y compris MM. Parizeau et Morin en 1966, ont découvert que ce n'est pas chose facile à réaliser. D'ailleurs, leur comité a échoué. Nous avons entrepris une approche systématique pour, cette fois, aboutir à un schéma d'aménagement global, aussi bien qu'à des schémas régionaux qui, eux, se voudront le plus rationels possible et qui nous permettront beaucoup plus facilement d'identifier quelles sont les priorités et d'identifier également quelles sont les mesures correctives, en supposant qu'il y en ait qui doivent être prises.

Entre-temps — d'ailleurs, je pense que le ministre responsable de l'OPDQ l'a dit — on n'est pas pour arrêter le train tout simplement parce qu'on étudie le système ferroviaire. On n'est pas pour arrêter'les bateaux de pêcher

parce qu'on étudie une politique de pêcheries. C'est à peu près l'approche que nous utilisons, qui se veut pragmatique et qui se veut également à la fine pointe des préoccupations que nous avons des intérêts économiques des régions.

M. LESSARD: Est-ce que le ministre veut dire, par cela, que les schémas d'aménagement ne sont pas prêts? Lorsque le ministre dit: Nous déposerons progressivement les projets à mesure qu'ils sont prêts, est-ce que ce n'est pas là exactement le contraire de la planification?

M. LACHAPELLE: Je pense que le ministre responsable de l'OPDQ l'a dit dans ses remarques. Nous avons déjà un grand nombre de données qui nous permettent d'apporter un éclairage extrêmement intéressant en matière d'aménagement. De là à dire que nous avons des schémas complets, je pense que ce serait une exagération qui serait tout à fait inexacte. C'est précisément le travail qui se déroule présentement avec des calendriers très précis. D'ailleurs, quand ces schémas seront disponibles, il y aura consultation auprès de la population, tout comme l'office, d'ailleurs, le fait pour tous ses documents d'importance, afin que le milieu puisse réagir à ce qui a été identifié comme étant ses caractéristiques, son potentiel et la façon de le développer. Ceci va se faire incessamment, dès que les données suffisantes auront été recueillies et colligées sous forme de schémas d'aménagement rationnels et présentables.

M. BEDARD (Chicoutimi): Vous parlez allègrement des $3 milliards dont bénéficiera le Québec dans les dix ans. Vous vous permettez de dire cela. Pouvez-vous nous donner justement — c'est cela qu'on vous demande — un éclairage? Vous parlez d'un éclairage de certains dossiers que vous avez déjà en préparation; vous parlez même de calendriers précis concernant certains dossiers.

Ce que nous vous demandons c'est: Pouvez-vous — puisqu'on en est à l'étude des crédits — nous donner certaines indications de dossiers en préparation dans certaines régions qui puissent nous permettre de croire qu'effectivement ce que vous vous attendez à recevoir du fédéral ce n'est pas quelque chose en l'air. Quand vous parlez de dossiers moteurs, que vous dites que vous ne voulez négliger aucune des régions, justement, on vous demande: Est-ce que vous pouvez nous dire maintenant, puisque vous êtes... Non?

M. BURNS: Au moins, M. le Président, vos projets...

LE PRESIDENT (M. Picard): A l'ordre, s'il vous plaît.

M. BURNS: Je comprends.

LE PRESIDENT (M. Picard): Est-ce que je pourrais rappeler au leader parlementaire qu'il faudrait, en vertu de l'article 148, obtenir la permission de la commission.

M. BURNS: Ah! bien, mon Dieu Seigneur!

LE PRESIDENT (M. Picard): Je suis certain qu'elle va vous être accordée, pourquoi ne pas respecter le règlement.

M. BURNS: Vous êtes d'une rigidité, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Picard): Est-ce que vous me permettez de laisser la parole au leader parlementaire? D'accord.

UNE VOIX: Pas de problème.

M. BURNS: Je vais m'en aller chez nous, j'aime bien mieux aller me coucher de bonne heure ce soir.

M. BOSSE: Justement, M. le Président, il est endormi.

M. BURNS: Simplement, j'écoute mes deux collègues, le député de Saguenay et le député de Chicoutimi depuis tout à l'heure, et j'écoute les réponses du ministre. Je conçois qu'il nous dise qu'à un moment donné tous ces projets doivent être négociés, doivent faire l'objet d'une entente bipartite, fédérale-provinciale, on comprend tout ça. Dans le cadre où vous êtes "poignés", vous autres, c'est évident que vous allez être obligés de faire ça. Mais ce qu'on vous demande, dans le fond, ce sont des indications; vous avez quoi comme projets? Ces milliards de dollars qui sont suspendus dans les airs, vous avez sans doute, vous autres qui parlez de planification, de développement, vous avez sans doute un plan. Ce plan, c'est quoi? Je ne vous demande pas de me dire qu'il va se réaliser, si c'est soumis selon l'en-tente-cadre à une acceptation bipartite. Mais c'est quoi, c'est dans quel bout que ça se dirige l'affaire? C'est ça qu'on veut savoir, dans le fond, pas plus que ça. Il n'y a pas d'attrape dans cette question, c'est comment cela se présente? Vers quoi on se dirige? Qu'est-ce qu'on est en droit de s'attendre de votre part de la mise en application de cette entente-cadre?

M. LACHAPELLE: M. le Président, les ententes antérieures, lorsqu'elles ont été convenues, contenaient, elle aussi, des objectifs généraux qui, en temps opportun, se sont traduits par des actions ponctuelles sur le terrain. Et au cours des années, on a vu de nombreux projets qui ont été réalisés grâce à ces ententes. Bien sûr, au moment où les ententes ont été signées, ces projets n'étaient pas identifia-

bles. C'est dans la pratique, par la suite, dans le cadre de l'application de l'entente que chaque projet a été étudié, examiné et qu'il a été convenu qu'un projet donné et un projet précis dans une région bien précise devait se réaliser. Et c'est exactement l'approche que nous utilisons pour la nouvelle entente-cadre. D'ailleurs, vouloir pour l'instant mentionner quelque dossier que ce soit le qualifierait presque automatiquement et sans autre examen comme dossier moteur. Or, c'est précisément le but de l'examen que nous poursuivons présentement et que nous poursuivrons à l'avenir sur chacun de ces dossiers à savoir si oui ou non ils se qualifient comme dossiers moteurs.

Alors, l'entente, je pense, pour l'instant, constitue pour nous un guide suffisant, quitte à ce que nous ayons des outils plus perfectionnés au fur et à mesure que nous produisons et les schémas globaux et les schémas régionaux.

M. BEDARD (Chicoutimi): Est-ce que la philosophie de développement, qui est contenue dans l'entente-cadre, est la philosophie de développement du Québec telle que pensée par l'OPDQ? Parce que c'est très révélateur, en fait. Si c'était oui, il veut dire beaucoup, votre document. Dans un premier temps vous faites l'analyse de la situation économique. Dans un deuxième temps, dans l'analyse de la situation économique vous vous permettez, par exemple, de décider ou de constater que la région de Montréal domine de tout son poids, que la région de la Côte-Nord est une région qui a été en croissance, qu'il y a les régions de Québec et de l'Outaouais qui sont d'une croissance moyenne, puis que les autres régions sont en stagnation ou en régression. C'est très bien établi dans l'entente-cadre.

Vous décidez également des objectifs que vous allez poursuivre au niveau de cette entente-cadre. Vous décidez également des priorités d'intervention. Là l'important c'est de savoir jusqu'à quel point ces priorités d'intervention qui sont contenues dans l'entente-cadre seront les priorités d'intervention dont vous tiendrez compte dans la philosophie du développement du Québec au niveau de l'OPDQ, pas seulement au niveau de l'entente-cadre.

Vous définissez les priorités d'intervention, par exemple, dans le secteur primaire, comme je l'ai dit tout à l'heure, le secteur manufacturier, le secteur tertiaire. A un moment donné — vous allez plus loin que ça — au niveau du chapitre des équilibres régionaux, vous définissez non seulement les secteurs d'économie où vous allez intervenir mais vous définissez même les endroits où vous allez intervenir. C'est très précis, cette entente-cadre. On a de quoi à s'inquiéter, en fait. En tout cas, en ce qui me regarde, concernant la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, c'est qu'on n'y est même pas présent, en aucune façon. Vous définissez, d'une part, Montréal, que vous considérez comme étant la place prioritaire au niveau des interventions qui seront faites. Ensuite, vous vous permettez même d'être précis au point de déterminer dans quelles villes se situeront les priorités d'intervention. Vous ne les nommez pas pour rien. C'est parce que, dans votre idée, il y a déjà des projets ou encore c'est à la suite d'une réflexion très précise, dont on voudrait bien savoir le cheminement, que vous en arrivez à cette conclusion.

Vous nommez des villes, par exemple. C'est sélectif. Je voudrais savoir si c'est restrictif aussi. Vous nommez des villes comme Trois-Rivières, Sherbrooke, celles qui sont près de Montréal.

M. BURNS: Joliette, oui?

M. BEDARD (Chicoutimi): Non, non, vous me permettez? Vous nommez Drummondville, Joliette, naturellement, Granby, Sorel, concernant l'industrie lourde. C'est à la page 29.

M. BURNS: On sait bien, Sorel, c'est bien normal.

M. QUENNEVILLE: Joliette aussi! M. BURNS: Joliette, pas trop.

M. BEDARD (Chicoutimi): Ce sont des villes, j'imagine, où vous avez indiqué des priorités d'intervention avec des idées, des projets ou des dossiers moteurs derrière la tête, ou encore en étant bien décidés d'intervenir, disons, dans ces endroits prioritairement à d'autres endroits. Vous sélectionnez également la ville de Québec, parce qu'elle est la capitale, pour des raisons que vous énoncez dans votre document.

C'est très sélectif. Pour ce qui regarde les villes qui n'y sont pas mentionnées, vous avez un paragraphe général qui dit ceci: "Dans les autres régions, on s'efforcera de renforcer le rôle des capitales régionales et des principaux centres intermédiaires en général par des mesures favorisant soit la reconversion, la consolidation de leur économie ou l'accélération de leur développement". C'est très général pour les autres régions.

Je suis bien prêt à vous croire ce soir quand vous nous parlez d'équilibrer le développement de toutes les régions du Québec et que vous nous dites que les régions ne doivent pas être négligées.

Mais je ne peux m'empêcher de voir dans votre document que vous indiquez Montréal comme étant la place maîtresse où se fera définitivement une injection prioritaire au niveau de l'entente-cadre. Après, vous nommez des villes d'une façon spécifique, ce qui nous permet de vous demander, jusqu'à quel point vos interventions se situeront ailleurs que dans les endroits très précis que vous mentionnez.

Si c'était cela, votre politique de développement, je pense qu'il y a bien des régions qui

seraient en mesure de dire et ce avec raison, qu'elles ne sont pas d'accord. Personnellement, tant à l'intérieur du Parti québécois qu'à l'intérieur de l'Assemblée nationale, pour autant que nos moyens nous le permettent, je n'accepte pas cela. Si cela devait être votre philosophie de développement du Québec, je ne l'accepterais pas, parce qu'à ce moment-là, on favorise trop Montréal.

Remarquez que je n'ai rien contre Montréal. Je sais très bien qu'il faut que Montréal soit confirmée comme pôle de croissance, d'accord. Mais l'économie du Québec, j'imagine que dans l'esprit de l'OPDQ, ce n'est quand même pas seulement Montréal. C'est également l'ensemble de toutes les régions qui sont capables, pourvu que le gouvernement veuille bien y mettre du sien, de constituer un élément important au développement économique de l'ensemble du Québec.

Dans ce sens, tant à l'intérieur du Parti québécois — je le répète — qu'à l'intérieur de l'Assemblée nationale, si cela devait être votre politique de développement, vous pouvez être assuré que je ne cesserais pas de faire toutes les représentations pour m'élever contre ces priorités, d'une façon globale contre cette philosophie de développement qui laisse les régions pour compte.

Dans votre document, vous dites que les régions sont en train de se vider. Vous avez raison, en termes de population. Si vous appliquez cela tel quel, si cela doit être la philosophie de développement de l'OPDQ d'une façon générale, qui est contenue dans l'entente-cadre, on a le droit de se poser des questions parce qu'il y a des passages qui sont tout simplement la transcription presque intégrale du document de l'OPDQ concernant les orientations de développement du Québec. On a raison de se poser des questions et d'être inquiets, nous, des régions.

C'est évident que, quand vous faites l'analyse, vous parlez du fait que les régions sont en train de se vider. Vous n'avez qu'à appliquer cela et je vous jure qu'elles vont se vider, les régions. Cela va devenir presque une sorte de plan de démobilisation ou de déportation des populations vers les grands centres.

Si cela devait se faire, je ne pense pas que ce serait à l'avantage de Montréal, ni du Québec. Je crois que les régions ont vraiment un rôle important à jouer en termes de développement.

C'est dans ce sens, quand je vois ce document tellement précis, que je vous demande: Est-ce votre philosophie de développement du Québec qui est contenue dans l'entente-cadre?

M. LACHAPELLE: M. le Président, nous avons eu l'occasion, tout à l'heure, de signaler que cette annexe à laquelle se réfère le député de Chicoutimi ne constitue ou ne constituait pour le moins qu'une stratégie au moment de la signature de l'entente et, à cet effet et à ce titre, sera sujette à être revue annuellement, comme le veut d'ailleurs l'entente elle-même. Cette stratégie, bien sûr, s'appuie sur ce qu'on appelle communément le livre jaune. Or, ce livre jaune est clairement identifié comme étant une version préliminaire, qui, présentement, fait l'objet de consultations auprès des autres ministères et qui, en temps opportun, fera sûrement l'objet de consultations avec les mécanismes habituels avec lesquels l'OPDQ transige. Lorsqu'on aura ainsi rodé cette stratégie, la stratégie sur laquelle s'appuie l'entente pourra elle aussi être revue en conséquence.

D'ailleurs, il est tout à fait normal qu'une stratégie économique soit revue périodiquement, si ce n'est annuellement. La situation économique est quelque chose très fluide, qui change et qui mérite un examen et une revue continuels. C'est précisément ce que nous entendons faire et, en conséquence, les stratégies sur lesquelles l'entente-cadre s'appuie seront, elles aussi, modifiées au fur et à mesure que la situation changera.

Quant aux exemples qu'on appelle spécifiques, je pense que, si on lit l'entente comme il faut, les villes qui sont mentionnées le sont à titre d'exemple. On dit: Des villes comme Trois-Rivières, comme Drummondville. Bien sûr, on aurait pu mentionner les 1,656 municipalités du Québec mais il nous manquait de papier, on ne pouvait pas compléter ça, c'était trop épais. Mais, ces villes ont été mentionnées comme exemples d'endroits, de milieux où une action pourrait se faire sentir, et il n'y a rien dans le texte qui exclut quelque centre que ce soit, bien au contraire. D'ailleurs, l'esprit dans lequel s'est déroulé la signature de l'entente et les déclarations qui l'ont entourée par la suite ont prouvé autant comme autant que les intentions des gouvernements en cause étaient bien de faire en sorte que l'entente touche toutes les régions du Québec sans exception.

Il ne faut pas oublier non plus que cette entente-cadre représente, nous l'avons dit tout à l'heure, $3 milliards ou à peu près sur une période de dix ans, donc une moyenne de $300 millions par année. Ce sera l'injection dans l'économie québécoise en raison de cette entente-cadre. Il ne faut pas oublier, cependant, que le budget québécois lui-même est de $6 milliards. Donc, ce sont $300 millions, en regard des $6 milliards du budget québécois total. Donc, le budget québécois total, si on veut parler de facteurs d'influence sur le développement régional ou sur l'économie régionale, est certainement beaucoup plus important que cette entente-cadre, qui ne constitue qu'un élément parmi tant d'autres et un élément relativement faible puisqu'il s'agit de $300 millions en regard de $6 milliards.

Si on regarde le budget total du Québec, on y voit nettement que ce sont les régions périphériques qui reçoivent — et je pense qu'il y a d'excellents motifs pour ce faire — la plus

grande part de la participation gouvernementale.

Ainsi dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, qui représente 4.5 p.c. de la population totale du Québec, c'est 5.2 p.c. du budget total du Québec qui est consacré. Dans le Bas-Saint-Laurent-Gaspésie, où se trouve 3.8p.c. de la population, c'est 7.3 p.c. des dépenses gouvernementales qui sont investies dans la région. Dans la région de Québec, pour 15.5 p.c. de la population, c'est 18.6 p.c. des dépenses gouvernementales. Dans les Cantons de l'Est, pour 3.6 p.c. de la population, c'est 4.9p.c des dépenses gouvernementales. Et on pourrait continuer de la sorte: à Montréal, pour 56.9 p.c. de la population — si vous permettez, M. le Président, j'aimerais bien, s'il vous plaît, terminer sans interruption — c'est 49.2 p.c. des dépenses gouvernementales. Cette enveloppe globale de $6 milliards, d'après les chiffres que je viens de vous donner, est donc répartie nettement en faveur des régions périphériques.

Il ne faut certainement pas perdre de vue l'ordre de grandeur de l'entente-cadre relativement au budget global du Québec et il ne faut pas perdre de vue non plus l'ordre de grandeur de l'impact que cette entente-cadre va causer en regard du budget total du Québec. Je répète que l'entente-cadre — je persiste à croire qu'il s'agit d'un but extrêmement raisonnable, bien fondé et défendable — tout en voulant consolider les pôles économiques importants que nous avons déjà, dit aussi qu'il nous faut développer toutes les régions du Québec et leur permettre l'accès au développement économique au même titre que les pôles les plus importants, qu'il s'agisse de Montréal, de Trois-Rivières, de Sherbrooke, de Québec, et continuez jusqu'à la liste complète.

M. HARVEY (Dubuc): M. le Président, est-ce que je peux savoir de quand datent les statistiques que vous avez données?

M. LACHAPELLE: II s'agit, M. le Président, des dépenses gouvernementales pour 1972/73. Les chiffres que je vous ai donnés sont ceux qui ont pu être effectivement régionalisés parce qu'il s'agissait de données qui étaient elles-mêmes régionalisables. De la sorte, on a pu couvrir 80.1 p.c. de l'enveloppe totale du budget québécois.

M. LESSARD: Est-ce que le ministre accepterait de déposer ce document? En vertu de l'article 177.

M. BEDARD (Chicoutimi): Concernant la région de Saguenay-Lac-Saint-Jean, j'ai ici également les dépenses qui ont été faites: en termes de pourcentage, en 1971/1972, c'est 4.5 p.c. En 1972/73, vous dites 5.2 p.c.

M. LACHAPELLE: II s'agit d'un travail qui a été effectué par deux économistes, travail qui vient d'être complété après six mois d'études et qui, compte tenu de la complexité d'en arriver à de telles données lorsqu'on veut régionaliser, bien que de plus en plus je pense que les dépenses gouvernementales vont refléter un élément de régionalisation, semble extrêmement valable sur le plan technique.

M. LESSARD: Alors, vous acceptez de le déposer?

M. LACHAPELLE: Bien sûr.

M. BEDARD (Chicoutimi): M. le ministre, j'en ai justement contre le critère sur lequel vous semblez vous baser à l'effet que vous évaluez le pourcentage de la population et que vous évaluez d'autre part le pourcentage du budget global qui est assigné aux populations des régions.

C'est tout à fait normal qu'il y ait beaucoup plus d'argent qui soit envoyé aux régions et on ne doit pas se baser sur le pourcentage de la population. Justement, les régions, parce qu'elles sont éloignées, ont définitivement besoin, pour être seulement sur le même pied que des grandes agglomérations comme Montréal, d'une injection de capital beaucoup plus sensible que celle dont vous nous parlez, dont vous faites état.

Je ne crois pas que le gouvernement puisse dire: On a tout fait, on a fait ce qui devait être fait pour une région, à partir du moment où il assigne à cette région un pourcentage du budget global qui équivaut à son pourcentage de population. Une action énergique pour développer les régions demande justement, à cause de l'éloignement des régions, à cause des difficultés, que ce soit dans le domaine routier, que ce soit dans le domaine de la santé, que ce soit dans le domaine de tous les services qu'on doit donner à ces populations-là, une injection et une action gouvernementale beaucoup plus énergique, si effectivement le gouvernement veut montrer son intention de développer ces régions.

Ce n'est quand même pas la faute des régions si, du fait qu'elles sont plus éloignées, tout coûte plus cher.

M. LESSARD: Oui, l'éloignement du territoire; c'est certain que, quand vous construisez à Blanc-Sablon, par exemple, un aqueduc de $1 million, ça coûte cher.

M. LACHAPELLE: M. le Président, je pense qu'il n'y a aucune apologie à faire des chiffres qui ont été cités tout à l'heure. Bien au contraire, ça réflète nettement une préoccupation gouvernementale à l'endroit des régions. Cela réflète également — il faut bien l'avouer — le fait que peut-être, certaines régions sont plus dispendieuses à desservir, en raison de leur éloignement et tout. Cependant, on y voit — si

ce n'est que pour se référer à l'argument qui a été fait, disant qu'on veut mettre tous nos oeufs dans le même panier et concentrer nos efforts en particulier dans la région de Montréal — que tel n'est pas le cas, que l'impact gouvernemental est clairement sur l'ensemble des régions et que toutes les régions en profitent.

M. LESSARD: En tout cas, encore là, nous avons eu l'assurance de voeux pieux. Quand le ministre nous parle justement des $300 millions par année qui seront injectés, il faut bien aussi préciser que, quand on planifie, on ne planifie pas $300 millions. Cela s'inscrit dans un budget global de $6 milliards aussi, à un moment donné. Les priorités de cette entente-cadre doivent aussi s'inscrire à l'intérieur des priorités du Québec et de l'ensemble des budgets du gouvernement du Québec. Il y a une autre question que je voudrais vous poser, parce que je n'ai pas reçu, à mon sens, en tout cas, des critères bien précis sur ce que vous entendez par projet moteur. Lorsque vous allez négocier avec le gouvernement fédéral il y a deux types de planification: d'un côté celle du MEER et de l'autre celle de l'OPDQ.

Est-ce que le gouvernement fédéral, par exemple, a une politique de planification du Québec? Est-ce que cette politique de planification du Québec est en relation avec les politiques de planification de l'OPDQ? De quelle façon on va négocier? De quelle façon allez-vous convaincre le gouvernement fédéral que pour vous autres c'est ça un projet moteur?

Par exemple, est-ce que le port de Gros-Cacouna va devenir un projet moteur pour le Québec? Par contre, on sait que le problème du port de Gros-Cacouna se discute dans l'ensemble du tout qu'est le territoire du gouvernement fédéral et qu'il y a aussi le développement du port d'Halifax. Quand vous allez rencontrer le gouvernement fédéral pour dire que le port de Cacouna vous paraît être un projet moteur, de quelle façon allez-vous le négocier? Si le fédéral dit: Oui, peut-être que pour vous autres c'est un projet moteur, mais dans l'ensemble du Canada, par exemple, vous nuisez au projet du port d'Halifax. Comment allez-vous être capables de vous entendre sur des objectifs qui sont à la fois les intérêts du Québec et qui ne sont pas contradictoires avec les intérêts de l'ensemble du Canada?

M. LACHAPELLE: M. le Président, je regrette que nous ayons à répéter encore la même chose, parce que je pense que cela a déjà été cité. Si on parle de critères et d'objectifs, de dossiers moteurs, déjà, les critères principaux, les axes majeurs ou les caractéristiques principales que doivent avoir les projets qui feront l'objet de l'entente, elles sont décrites dans l'entente. On peut les citer, si ce n'est que pour clarifier le débat: l'effet qu'une entente auxiliaire peut avoir sur la création directe d'emplois ou sur leur maintien, sur le maintien ou l'encouragement d'autres activités créatrices d'emplois; son effet sur la diversification des activités économiques au Québec; son impact temporaire ou permanent sur les dépenses provinciales ou fédérales; sa contribution à stabiliser ou à augmenter le niveau de revenu personnel au Québec; l'impact qu'elle aurait sur la concentration de la population et la qualité de la vie et de l'environnement; la mesure dans laquelle des subventions permanentes seront requises pour toute activité industrielle ou commerciale. C'est quand même un nombre impressionnant de critères qui déterminent, de façon suffisamment précise, à quoi devrait répondre chaque dossier pour qu'il soit éligible au titre de dossier moteur.

Bien sûr, il n'était pas question, dans une entente, de commencer à définir d'une façon odieusement explicite quel peut être un dossier moteur, et cela a été le cas des autres ententes qui ont précédé où des critères de cet ordre ont été mentionnés. Dans la pratique et dans l'application, là, on est passé à des cas concrets comme les routes, comme les campings et comme un tas d'activités qui ont fait que l'économie du Québec a profité.

Les priorités, c'est le gouvernement du Québec qui, essentiellement, les établit dans le cadre de son exercice budgétaire. En juin, le gouvernement sera appelé à définir les grandes lignes des orientations qu'il entrevoit pour 1975/76 et, de là, pourront découler les secteurs qui seront propices à une entervention par le biais soit de l'entente-cadre soit de tout autre mode d'intervention et de financement gouvernemental.

Dans le même esprit que les projets qui ont pu être négociés et transiges dans le cas des ententes antérieures, et c'est ce même esprit qui a valu au Québec une économie qui a été rehaussée grâce à ces ententes, ainsi l'entente-cadre sera-t-elle un moyen d'encouragement, un moyen qui permettra de favoriser davantage l'économie du Québec.

M. LESSARD: La différence qu'il faut bien cerner entre cette entente-cadre et les autres ententes, c'est que cette entente-cadre actuelle couvre l'ensemble du territoire québécois. Dans les ententes précédentes entre le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial, ces ententes étaient limitées à une région bien précise. Je pense que les gens — j'en connais un peu à l'arrière — qui travaillaient pour le BAEQ ont élaboré pendant plusieurs années un plan très précis. On mentionnait, par exemple, dans la région de la Gaspésie, des pôles touristiques assez précis. Je comprends que dans la planification il faut garder une certaine souplesse. Les plans, c'est bien beau, et je ne veux pas aller à l'idéal, c'est bien beau des plans, mais ça doit être modifié aussi annuellement, selon la conjoncture économique et sociale.

Dans le document du BAEQ, on disait: Au

point de vue touristique, par exemple, il faut développer précisément trois pôles. C'était bien précisé à ce moment, il y avait Mont-Saint-Pierre, Mont-Louis, il y avait des précisions, c'était bien précisé. Quand on disait, par exemple: développer les rivières à saumon, c'était la même chose. Avec cette entente, on savait où on allait. Cette entente avait été précédée par un schéma d'aménagement global. On vous dit: Votre entente touche l'ensemble du Québec; est-ce que cela s'inscrit dans un schéma d'aménagement, à la fois d'une politique de planification fédérale et à la fois d'une politique de planification provinciale? Vous avez, par exemple, l'Abitibi, vous avez la région de l'amiante, vous avez la région du Lac-Saint-Jean qui ont préparé des documents assez importants sur une certaine planification. Est-ce qu'à l'intérieur de cette entente sont prévus des projets moteurs pour ces différentes régions?

Je vais vous donner un exemple précis pour expliquer ce que j'entends et avoir une réponse du ministre assez satisfaisante sur la façon dont il va arbitrer certains projets moteurs. Il peut être farfelu, mon exemple; c'est simplement un exemple. Vous décidez qu'un jardin zoologique est important aux Iles-de-la-Madeleine, la pression de la population demande qu'un jardin zoologique soit construit aux Iles-de-la-Madeleine. Est-ce que ce serait mieux que ce jardin zoologique soit construit aux Iles-de-la-Madeleine ou à Carleton ou à Montréal? Il y a certains critères. La construction d'un jardin zoologique, au point de vue du développement touristique, ça doit s'inscrire dans un schéma d'aménagement.

Autre exemple, on a la marina de Sorel; d'après les informations que j'ai eues postérieurement, il y en a déjà deux. Je ne dis pas que c'est un projet moteur mais ce sont des exemples que je prends... Après que cela a été annoncé, on s'aperçoit qu'il y a déjà deux marinas à Sorel. Là, on construit une troisième marina qui va coûter $800,000 alors qu'il aurait peut-être été plus important de la mettre à Pointe-au-Pic, la marina de Sorel. C'est ça — je résume — la différence entre votre entente actuelle et les ententes précédentes: c'est que les ententes précédentes touchaient des régions très particulières, des régions qui avaient été précédées d'études assez importantes pour préparer un plan d'aménagement.

Là, vous signez une entente globale pour l'ensemble du Québec. Vous n'avez pas de plan d'aménagement. Or, une loi devait être présentée, qui a été justement déposée à l'Assemblée nationale, la Loi-cadre sur l'urbanisme, qui était justement un début de planification du territoire québécois. Elle n'a pas été discutée et on l'a reprise trois fois, je pense, cette loi-cadre. Ce serait peut-être une loi qui nous permettrait justement d'avoir un peu plus de planification sur le territoire.

Mais je reviens encore à ma question qui est fondamentale: Comment allez-vous répartir, si vous n'avez pas de plan d'aménagement, ces projets moteurs entre les différentes régions du Québec?

M. LACHAPELLE: M. le Président, si le comité Morin-Parizeau, créé en 1966, avait, comme il était souhaité à l'époque, produit un plan d'aménagement régional, peut-être aurions-nous aujourd'hui des outils plus complets. Malheureusement, on sait très bien que ce comité a avorté-

M. BEDARD (Chicoutimi): C'est trop facile comme excuse.

M. LACHAPELLE: II y a des données qui existent, de nombreuses données qui sont valables dans le cas des ententes existantes, qu'il s'agisse des zones spéciales ou des autres ententes; ce sont ces données, qui ont été produites par l'OPDQ et également par certains autres ministères, mais coordonnées par l'OPDQ, qui ont fait que ces projets ont pu être exécutés, ont pu se dérouler d'une façon rationnelle et pour le meilleur bénéfice du territoire.

D'aucuns, je pense, pourraient prétendre que les données que nous avons à l'heure actuelle sont complètes. D'ailleurs, je pense qu'en matière de planification les données ne sont jamais complètes. Les données sont nécessairement évolutives. Elles sont constamment sujettes à changement. Aussi faut-il considérer l'aspect pratique de l'application de la planification. La planification n'est pas un exercice académique en soit qui doit se traduire par des livres qui n'en finissent plus; il faut aussi mesurer l'envergure et le degré de planification qui est exercé pour que, quand même, cela puisse avoir une portée pratique. C'est l'équilibre que nous cherchons à obtenir constamment. Les données qui sont déjà en possession de l'OPDQ sont extrêmement valables, extrêmement intéressantes.

Il a été signalé antérieurement, au cours de cette même discussion, que ces données sont présentement en voie d'être complétées d'une façon encore plus satisfaisante. Mais jamais, je pense, pourra-t-on prétendre que les données en matière de planification peuvent être complètes ou peuvent être définitives. Ce serait tout à fait utopique, illusoire et tout à fait méconnaître la planification, son usage et ses applications de prétendre le contraire.

M. LESSARD: M. le Président, le ministre d'Etat à l'OPDQ nous disait justement tout à l'heure que, si M. Parizeau avait été capable de soumettre un plan général d'aménagement global et de planification du territoire, il pourrait peut-être y avoir cette planification aujourd'hui. M. Parizeau n'a jamais été ministre, à ce que je sache, et il appartenait au ministre de voir à ce que ce plan, si c'était possible de le faire, se fasse.

M. Parizeau, aussi, M. le Président, n'aurait-il pas soumis un document interne, qui s'appelait justement Planification dans le cadre des relations fédérales-provinciales, et qui en arrivait à la conclusion suivante, que c'était impossible de planifier dans ce cadre?

En tout cas, M. Parizeau, en arrivant à ces conclusions, a été logique avec lui-même.

Autre question, M. le Président, toujours dans le cadre de l'intégration des politiques fédérales et des politiques provinciales.

Je constate, par exemple, que les dépenses en immobilisation, de 1970 à 1972, en particulier d'abord les subventions du MEER, depuis le début jusqu'à avril 1973, se sont réparties comme suit, par région:

Gaspésie-Bas-Saint-Laurent: 5.6 p.c. pour une population de 3.8 p.c, alors que les dépenses du gouvernement québécois étaient de 8 p.c.

Voici, M. le Président. Il s'agit des dépenses du MEER depuis sa naissance jusqu'à avril 1973.

Je dis donc: Gaspésie-Saint-Laurent, les dépenses du MEER, organisme du gouvernement fédéral, ont été de 5.6 p.c. pour une population de 3.8 p.c; Saguenay-Lac-Saint-Jean, 2.3 p.c. pour une population de 4.5 p.c.; région de Québec, 10.8 p.c. pour une population de 15.6 p.c.; Trois-Rivières, 18.1 p.c. pour une population de 6.9 p.c. Pourquoi Trois-Rivières 18.1 p.c. par rapport à une population de 6.9 p.c?

Par contre, les dépenses d'immobilisation du gouvernement québécois, si je prends Trois-Rivières, par exemple, ont été de 5.4 p.c Y a-t-il eu une relation entre les 18.1 p.c. du MEER et les 5.4 p.c. du gouvernement provincial?

Dans la région de l'Estrie, toujours les dépenses du MEER, 7.4 p.c. pour une population de 3.6 p.c; dans la région de Montréal, les subventions du MEER ont été de 36.6 p.c. pour une population de 57.2 p.c.

La région de l'Outaouais. On sait que c'est la région où le gouvernement fédéral est en train de faire sa capitale nationale. Cela devient de plus en plus une région où on enlève, en particulier, l'industrie. Dans la région de l'Outaouais, subventions, 0.6 p.c. par rapport à une population de 4 p.c; Nord-Ouest, subventions du MEER — si c'est faux, je voudrais qu'on en parle, justement, car c'est une question que j'ai posée au ministre — 7 p.c. par rapport à 2.4 p.c. de population; Côte-Nord, 11.3 p.c. et on sait que c'est à cause des zones Port-Cartier, Sept-Iles, par rapport à une population de 1.6 p.c; tout cela, sur la Côte-Nord, en particulier à cause de Rayonier Québec et l'Iron Ore, etc

Quand on compare ces différents chiffres, soit les dépenses d'immobilisation du gouvernement du Québec, les subventions du MEER, les dépenses du gouvernement fédéral et d'entreprises publiques dans les régions, on se pose la question suivante: De quelle façon fait-on ces choix? Par exemple, on a dit que, dans la région de l'Outaouais, le MERR allait subventionner des entreprises dans un pourcentage de 0.6 p.c. par rapport à des dépenses du gouvernement provincial de 2.7 p.c. Est-ce qu'il y a eu des négociations entre le gouvernement du Québec, l'Office de planification et de développement du Québec, à l'intérieur de la discussion de l'entente-cadre pour essayer d'en arriver à une certaine coordination de l'ensemble de ces dépenses qui sont faites de part et d'autre? Est-ce qu'il y a une coordination qui est faite de ces dépenses?

M. LACHAPELLE: Est-ce que vous déposez le document?

Ce serait un échange de bons procédés.

M. LESSARD: D'accord, il n'y a aucun problème, M. le Président, ça me fait plaisir d'informer le ministre.

M. LACHAPELLE: C'est parce que j'aurais une question d'information à poser au député de Saguenay.

M. LESSARD: Oui, M. le Président, j'accepte de déposer le document. Il s'agit du rapport d'avril 1973 du MEER, statistiques principales des projets par régions et sous-régions administratives. Vous constaterez aussi, quand on va au niveau des emplois crées, que c'est encore pire.

M. LACHAPELLE: J'aurais cependant une question d'information avant d'aller plus loin. Lorsqu'on parle de subventions du MEER, est-ce qu'on inclut les subventions à l'industrie dans ces chiffres-là?

M. LESSARD: C'est cela. D'ailleurs le MEER, ce sont des subventions.

M. LACHAPELLE: Alors, si on parle de subventions à l'industrie, cela ne tombe pas sous la juridiction de l'OPDQ. Il y a une nuance très nette à faire.

M. LESSARD: Oui, je suis d'accord, et c'est là que ça crée un problème.

M. LACHAPELLE: Si vous me permettez, M. le Président...

LE PRESIDENT (M. Brisson): La parole est au ministre.

M. LACHAPELLE: Si vous me permettez de continuer, vos chiffres d'après ce que vous venez de déclarer, comprennent donc également les subventions du MEER à l'industrie, un secteur où l'OPDQ, présentement, n'a pas de juridiction. D'ailleurs je ne pense pas qu'il serait normal que l'OPDQ en ait non plus. Cependant, il est... Un instant, est-ce que je peux compléter?

M. LESSARD: Oui. Complétez, on va... Allez-y.

M. LACHAPELLE: A ce jour, il est vrai que le MEER, en ce qui regarde les subventions à l'industrie, a procédé d'une façon unilatérale en décidant quelles étaient les industries éligibles à son aide et également l'envergure de l'aide accordée à chacune de ces industries.

Cependant, je crois comprendre que, dorénavant, ce type ou ce genre d'activité de la part du MEER se déroulera en concordance et en cohérence avec les intentions du ministère de l'Industrie et du Commerce.

Donc, il y aura dans ce secteur le même type de rapports qu'il y a entre le MEER et l'OPDQ dans les secteurs qui concernent l'OPDQ. Sans vouloir me prononcer sur les chiffres, parce que je ne les ai pas examinés, s'il y a indice d'un semblant d'incohérence ou que les chiffres semblent démontrer qu'une meilleure coordination pourrait peut-être donner de meilleurs résultats, je pense qu'il est bien sûr que ce nouveau type de rapports qui existeront entre le MEER et le ministère de l'Industrie et du Commerce devraient être de nature à créer le même genre de cohérence qui a été si bénéfique dans le cas des relations MEER-OPDQ.

M. LESSARD: Mais, M. le Président, le ministre affirme qu'il ne serait pas logique que l'OPDQ ait un contrôle sur les subventions qui sont données par le MEER dans l'industrie.

M. LACHAPELLE: C'est tout simplement une question de responsabilités sectorielles. Il me paraît beaucoup plus raisonnable que le ministère de l'Industrie et du Commerce soit celui qui agisse comme interlocuteur du MEER en ce qui regarde les subventions aux industries. En définitive, qu'il s'agisse du ministère de l'Industrie et du Commerce ou de l'OPDQ, c'est quand même le gouvernement du Québec qui est en cause et c'est quand même le gouvernement du Québec qui sera, dans tous les secteurs d'activités du MEER, son interlocuteur, id au Québec.

M. LESSARD: Maintenant, quelle est, à ce moment-là, la coordination qui existe entre l'OPDQ et le ministère de l'Industrie et du Commerce concernant justement les subventions du MEER?

M. LACHAPELLE: Alors, c'est le même type de coordination, M. le Président, qui existait à un certain degré, mais qui existe maintenant à un degré tellement plus satisfaisant entre tous les secteurs gouvernementaux qui s'intéressent à l'activité économique au Québec, ainsi qu'au développement régional. Le ministre responsable de l'OPDQ nous a parlé un peu plus tôt du nouveau groupe ministériel qui a été mis sur pied, le groupe ministériel des affaires économiques et du développement ré- gional. Ce groupe sera précisément la plaque tournante ou le point de rencontre de toutes les préoccupations économiques du gouvernement du Québec. C'est là où se coordonneront les préoccupations du gouvernement et où on assurera la cohérence entre toutes les actions gouvernementales qui touchent au développement économique, ainsi qu'au développement régional, en plus d'assurer que le développement économique se fasse d'une façon encore plus évidente à l'enseigne de la préoccupation régionale.

M. LESSARD: Maintenant, est-ce que le ministère de l'Industrie et du Commerce — puisque ce n'est pas l'OPDQ qui a le contrôle sur les subventions du MEER à l'industrie — sait d'avance quelles seront les entreprises qui vont être subventionnées par le MEER, de telle façon que ça s'intègre à l'intérieur de votre "schéma d'aménagement" de l'OPDQ?

M. LACHAPELLE: M. le Président, je pense bien que cette question devrait être en priorité dirigée au ministre de l'Industrie et du Commerce. Je n'ai pas à répondre à sa place.

LE PRESIDENT (M. Brisson): L'honorable député de Dubuc.

M. HARVEY (Dubuc): M. le Président, c'est une question pratique. Certains ont dit que les ententes-cadres ou les ententes auxiliaires ne favorisent pas d'autres régions que celle de Montréal.

Dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, on entend parler des projets comme l'implantation d'un parc industriel régional et la construction d'une autoroute de quatre voies rapides entre Alma et Port-Alfred pour favoriser le développement régional de cette région. Est-ce que parmi ces ententes il y a possibilité d'aller chercher le financement pour faire avancer ces projets?

M. LACHAPELLE: M. le Président, il y a quantité de projets qui sont présentement examinés afin de déterminer s'ils répondent aux critères de ce qu'on sera convenu d'appeler dorénavant les dossiers moteurs. Ils sont précisément examinés pour s'assurer que ce titre ou cette qualité des dossiers moteurs peut effectivement leur être attribué.

Les projets qui viennent d'être mentionnés ainsi que beaucoup d'autres sont examinés sous cet angle-là.

M. BEDARD (Chicoutimi): Dans la même veine, concernant le Saguenay-Lac-Saint-Jean, tel que le prétend le CRD à l'heure actuelle, est-ce que le développement du lac Albanel par exemple serait inscrit comme étant un des dossiers moteurs qui pourraient se concrétiser?

M. LACHAPELLE: M. le Président, cette question figure aussi parmi les projets qui sont

examinés à l'instant. Cependant, tant et aussi longtemps que l'examen n'est pas complété et qu'il n'a pas été clairement établi par les parties en cause qu'il s'agit bien de dossiers moteurs, aucun de ces projets ne peut à l'heure actuelle être baptisé de dossier moteur.

M. BEDARD (Chicoutimi): Lors de l'étude des crédits des Richesses naturelles, le ministre en titre a parlé d'un développement pouvant se chiffrer entre $300 et $700 millions et qui pouvait effectivement se concrétiser au niveau du lac Albanel. Egalement, il a été question de la réfection nécessaire pour l'exploitation des gisements du lac Albanel, de la construction d'un chemin de fer de Chibougamau jusqu'à Port-Alfred, jusqu'à un port en eau profonde, que vous devez connaître naturellement. Est-ce que ce projet est avancé à l'heure actuelle, assez avancé pour pouvoir se situer au niveau d'un dossier moteur pour la région?

M. LACHAPELLE: C'est un projet examiné dans cette optique, M. le Président.

M. BEDARD (Chicoutimi): Même l'Office de planification du Québec a laissé entendre au niveau de la région que, dès juin, serait terminé le dossier concernant d'une part le parc industriel, d'autre part l'autoroute Aima-Grande-Baie. Je voudrais bien qu'on se comprenne une fois pour toutes dans la région, parce qu'il y a des dossiers moteurs partout.

Je m'aperçois que c'est peut-être au niveau de certains organismes ou de certains représentants de la population.

Est-ce que ces deux projets, entre autres, sont des projets pour lesquels l'OPDQ a demandé un travail particulier — c'est cela que je veux savoir — de confection de dossiers devant être acheminés ou présentés comme dossiers moteurs?

M. QUENNEVILLE: M. le Président, je pense bien qu'il y a quelques dossiers, dans la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, qui présentent sûrement, par leur importance et leur envergure, des possibilités d'être considérés comme des dossiers moteurs. Cela reste quand même dans le domaine des possibilités. Je pense bien que jusqu'ici, pour tout ce qui a été avancé par l'OPDQ quant aux projets dont parlait tantôt le député de Chicoutimi, il s'agit de projets qui seront soumis à l'analyse, comme le disait tantôt le ministre d'Etat responsable de l'OPDQ, de dossiers qui seront analysés à la lumière des critères dès le mois de juin de cette année. C'est la raison pour laquelle, effectivement, on a demandé que ces projets soient achevés avant d'être présentés, qu'ils soient le mieux étoffés possible afin, justement, de pouvoir répondre à ces critères.

Au mois de juin, ils feront l'objet d'analyses et d'études et on verra à ce moment si on peut les classifier comme projets moteurs ou non.

M. BEDARD (Chicoutimi): Le lac Albanel, également, se situe au même niveau?

M. QUENNEVILLE: Ce sont tous des projets qui sont susceptibles d'être catalogués comme des projets moteurs. Encore une fois, il faut qu'ils subissent l'analyse au mois de juin.

M. LESSARD: M. le Président, question de règlement. Un, deux, trois, quatre, cinq, six; trois, six, sept. D'accord.

M. HARVEY (Dubuc): M. le Président, je tiens à dire que cela a toujours été la position des députés du gouvernement dans la région, que des projets allaient être présentés pour étude, à savoir si ce sont véritablement des dossiers moteurs. On n'en a pas inventé beaucoup; il y a l'autoroute, le parc industriel et le lac Albanel.

M. BEDARD (Chicoutimi): Pour le moment, ce sont les trois principaux projets qui sont mis de l'avant, en tout cas, ou qui vont être soumis.

M. QUENNEVILLE: Qui seront soumis, encore une fois, comme je l'ai dit, à l'analyse au mois de juin.

M. LESSARD: Malgré le fait que je ne puisse utiliser l'article 146, étant donné qu'il est dix heures trente, est-ce qu'on pourrait ajourner?

LE PRESIDENT (M. Brisson): Est-ce qu'on peut considérer le programme 4 adopté?

M. LESSARD: Non, non! En passant, comme le ministre me demandait tout à l'heure si j'acceptais de déposer le document, j'accepte que le document déposé soit inscrit au journal des Débats. Cela va?

LE PRESIDENT (M. Brisson): Vous proposez que?

M. LESSARD: Je propose, M. le Président, que le document que j'ai déposé soit inscrit au journal des Débats. (Voir Annexe A)

LE PRESIDENT (M. Brisson): On vient de me donner ici un document de l'Office de planification et de développement du Québec 1971/72, 1972/73. Ce document sera également déposé et inscrit au journal des Débats. Accepté unaniment? Donc les deux documents paraîtront au journal des Débats. (Voir Annexe B).

Aucune autre question au programme 4?

M. LESSARD: Oui, M. le Président, nous avons beaucoup de questions au programme 4. Voici, je ne veux pas avoir de vote sur ça, il est dix heures trente, on travaille depuis dix heures,

ce matin, surtout le jeudi soir, quand c'est le mardi c'est moins pire, mais surtout le jeudi soir, après une semaine fort chargée, nous pourrions discuter jusqu'à onze heures, je le comprends, il nous reste 25 minutes, je soumets que nous ajournions à demain après la période des questions et que nous puissions siéger demain jusqu'à midi. Si le ministre est d'accord.

M. LACHAPELLE: Cela me va.

LE PRESIDENT (M. Brisson): La commission ajourne ses travaux à demain, onze heures.

(Fin de la séance à 22 h 32)

annexe et tableau Référer à la version PDF page B-3501 à B-3509

Document(s) related to the sitting