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Commission permanente de la présidence du
conseil,
de la constitution et des affaires
intergouvernementales
Etude des crédits du Conseil
exécutif
Séance du vendredi 23 mai 1975.
(Onze heures et vingt-neuf minutes)
M. Pilote (président de la commission permanente de la
présidence du conseil, de la constitution et des affaires
intergouvernementales): A l'ordre, messieurs!
La commission de la présidence du conseil, de la constitution et
des affaires intergouvernementales est réunie ce matin pour continuer
l'étude des crédits du Conseil exécutif. Sont membres de
cette commission M. Léger (Lafontaine); M. Bellemare (Johnson); M.
Bossé (Dorion); M. Bourassa (Mercier); M. Brown (Brome-Missisquoi); M.
Côté (Matane); M. Denis (Berthier); M. Gratton (Gatineau); M.
Lacroix (Iles-de-la-Madeleine); M. Levesque (Bonaventure); M. Ca-ron (Verdun)
remplace M. Malouin (Drummond); M. Morin (Sauvé), M. Samson
(Rouyn-Noranda) et M. Tardif (Anjou); M. Tremblay (Iberville) remplace M.
Lacroix (Iles-de-la-Madeleine).
M. Léger: M. le Président...
Le Président (M. Pilote): M. Dufour remplace M.
Côté (Matane). M. Massicotte remplace M. Bourassa (Mercier).
M. Massicotte: Très bien, c'est un honneurl
Le Président (M. Pilote): La parole est au ministre.
M. Lalonde: M. le Président, lorsque nous avons
ajourné hier, nous étions au programme no 9 et nous
répondions aux questions de l'Opposition. Alors, je l'invite à
continuer.
Francisation (suite)
M. Léger: M. le Président, concernant l'article 21,
qui entrera en vigueur le 1er juillet 1976, qui touche les corporations
professionnelles pour délivrer un permis à une personne qui n'a
pas une connaissance d'usage de la langue française, est-ce que des
normes d'admissibilité sont en préparation actuellement et dans
quel sens?
M. Lalonde: Oui, elles sont en préparation à un
autre comité dont j'avais commencé à vous décrire
la composition hier, et à un comité pour la francisation des
professions où vous retrouvez Me André Thauvette, de l'Office des
professions, M. Roland Picotte, de la Régie de la langue
française, M. Jean Hanna de l'Immigration et M. Beaulieu de l'Education
dirigé aussi par Me Hubert Beaudoin.
La composition indique bien quel est l'objectif de ce comité:
d'établir les normes, les degrés de connaissance qui pourraient
être désirables, utiles ou nécessaires pour obtenir un
permis. Ce comité a commencé, il y a quelques mois, à
travailler sur cette question.
M. Léger: Cela veut dire qu'il doit être prêt
plusieurs mois avant la date de la mise en vigueur, de façon que les
personnes intéressées soient informées,
entraînées et prêtes à agir dans la
légalité, à partir de janvier 1976.
M. Lalonde: Oui. Notre objectif est de rendre le règlement
en vigueur assez longtemps d'avance pour que l'article 21 soit effectif
correctement à partir de, je crois que c'est le 1er janvier 1976.
M. Léger: La régie a aussi, M. le Président,
dans son mandat, le pouvoir de faire effectuer des études et des
recherches dans le cadre du domaine qui lui est dévolu, entre autres,
à l'article 56. Quelles sont les études et les recherches qu'elle
a l'intention d'entreprendre pour l'année en cours?
M. Lalonde: Actuellement, il y a eu quelques études qui
ont été entreprises. Nous avons, par exemple, engagé M.
Pierre-E. Laporte, sociologue, de l'Université de Sherbrooke, pour
entreprendre un certain nombre d'études. C'est surtout parce que les
cadres de la régie ne sont pas complétés que nous avons
dû recourir à l'extérieur. Aussi, MM. Dagenais et Inagaki,
qui avaient préparé des études pour la commission Gendron,
sont à préparer, actuellement, un programme de
catégorisation qui se réfère à l'article 26.
L'article 26 dit que le lieutenant-gouverneur en conseil pourvoit, par
règlements, à l'émission de certificats en faveur des
entreprises. Ces règlements, au deuxième paragraphe,
établissent les catégories d'entreprises, suivant leur genre
d'activités, l'importance de leur personnel, l'ampleur des programmes
adoptés et les autres éléments pertinents. Ils
déterminent aussi, pour chacune des catégories, la date, etc.
Donc, on n'a pas le choix. Il faut le faire, il faut l'établir
pour toutes les catégories d'entreprises, et nous avons recouru aux
services de ces personnes de l'extérieur pour faire les études
avec les membres de la régie.
Maintenant, je vais m'informer pour savoir s'il n'y a pas eu d'autres
personnes qui ont été consultées à
l'extérieur. Cela semble être ce qu'on a fait jusqu'à
maintenant et ce qu'on a l'intention de faire dans l'avenir prochain.
M. Léger: Est-ce qu'on peut résumer où on en
est, dans votre ministère et dans votre responsabilité,
concernant les programmes de francisation prévus aux articles 26, comme
il a été mentionné, jusqu'à 29?
Entre autres, à quelle date l'exigence de francisation sera-elle
respectée, quand il sera question de subventions, de primes, de
concessions, etc.?
M. Lalonde: C'est exactement ce que nous étudions
actuellement. En plus du comité qui a été formé au
ministère et qui est dirigé par Me Beaudoin, la régie a
elle-même préparé une espèce de stratégie
pour ses propres fins, lorsqu'elle sera
consultée par le ministre responsable. Ces deux comités
travaillent maintenant ensemble et, suivant le résultat qui nous sera
éventuellement soumis d'ici quelques semaines, nous allons
établir, justement, le calendrier d'exigibilité du
certificat.
Vous comprenez que, de façon réaliste, on ne peut pas
exiger le certificat à la même date, pour tout le monde. De cette
façon, il y aurait un fardeau absolument impossible à assumer
pour fonctionner à l'intérieur des cadres et des exigences de la
loi.
Nous allons déterminer ces dates, selon les catégories,
exactement comme l'article 26 nous demande de le faire, par
règlement.
M. Léger: Dans ces mêmes articles 26 à
29...
M. Lalonde: Si je peux me permettre, le comité qui est au
ministère, a aussi procédé à un inventaire
systématique de tout ce qui est mentionné à l'article 28.
Quand on dit: "Recevoir de l'administration publique, à compter de la
date fixée, conformément audit article, les primes, subventions,
concessions ou avantages déterminés." Il y en a une série,
un nombre assez considérable. Il fallait quand même les identifier
pour, ensuite, établir le contrôle au sein du gouvernement, pour
qu'une telle prime, une telle subvention ne soit pas accordée à
une compagnie qui devrait, suivant sa catégorie, avoir un certificat et
qui ne l'aurait pas.
Cela exige donc la mise sur pied de mécanismes de contrôle
les plus simples possibles, parce qu'il y a sûrement beaucoup de
fonctionnaires qui sont appelés, à tous les jours, à
prendre des décisions comme cela. Il ne faut quand même pas leur
donner une grille extrêmement compliquée, à savoir si telle
compagnie a droit à la prime ou à la subvention. Il faut que ce
soit le plus simple possible, mais aussi, en vue d'obtenir la francisation et
de faire porter le pouvoir économique du gouvernement de la façon
la plus active possible sur la francisation des entreprises.
M. Léger: Je vais vous donner un exemple concret. C'est
vrai que ces articles ne sont pas nécessairement encore à
édicter, mais il y a une provocation, je crois, dans l'attitude de
United Aircraft, qui vient de démontrer qu'elle veut changer de nom et
qui a repris un nom anglophone uniquement. Est-ce que, quand la loi va
être édictée et appliquée dans son entier, et
même actuellement, les institutions financières n'ont pas
l'obligation d'avoir les deux appellations?
M. Lalonde: II y a deux volets à votre question. Tout
d'abord, les institutions financières retrouvent dans la Loi des
compagnies l'exigence d'avoir un nom français, et ceci a même
précédé la loi 22. Je me souviens qu'on a fait voter, cela
l'année précédente, je pense que c'est en 1973. Les
articles 30, 31 et 32 de la loi 22 reprennent, de façon certes plus
large, ces exigences à ma connaissance, mais j'ai fait une petite
enquête sur cette question; quelqu'un m'a demandé pourquoi le
nouveau nom n'avait pas de texte français et on me dit qu'une compagnie
qui est incorporée à Ottawa, au niveau fédéral, n'a
pas à répondre à cette exigence. Nos articles 30 et 31 ne
s'appliquent que dans notre juridiction, mais là où on peut
rattraper ces compagnies qui n'ont qu'un nom anglais, c'est au niveau des
programmes de francisation. Cela reprend la première partie de votre
question. Lorsque ces articles seront en vigueur, l'article 39, par exemple,
indique bien que le programme de francisation doit porter en outre ce
n'est pas limitatif sur le raison sociale de l'entreprise.
Dans la mesure du possible, la raison sociale devra donc être
francisée, même si c'est une autre juridiction, pour une compagnie
qui demandera un certificat de francisation.
M. Léger: Le fait qu'une compagnie comme United Aircraft
ait choisi un nom seulement anglais alors qu'elle est dans la province de
Québec, et parce qu'elle a une charte fédérale, je
qualifie cela de provocation. Les méthodes préconisées
dans la loi 22 ne sont que des méthodes ou des moyens incitatifs et je
trouve que ce n'est pas suffisamment fort devant une compagnie comme
celle-là. C'est vrai que le gouvernement du Québec lui a
donné une subvention de $5 millions il y a trois ans, je pense, pour
augmenter les emplois et pour faire un travail d'une technologie plus
avancée. Parce que la compagnie ne s'attend pas à avoir des
sommes du Québec, au départ, même si ce n'était pas
légal au point de vue provincial ou obligatoire au sens de la loi,
l'attitude de United Aircraft n'est-elle pas une sorte de provocation puisque
le mouvement que le ministre veut essayer d'amener dans le Québec, c'est
de franciser les entreprises? Qu'une compagnie comme celle-là, parce
qu'elle a une charte fédérale et qu'elle est en plein milieu
d'une grève, agisse de cette façon, je trouve que c'est
absolument inacceptable. C'est de la provocation.
M. Lalonde: Je suis bien tenté d'être en accord, en
principe, je suis en accord avec le député, sauf que dans son
jugement je ne veux pas dire que c'est une provocation, c'est
sûrement un manque de jugement absolument inacceptable
actuellement, si on attend que les articles 26 à 29 soient en vigueur
pour se conformer au désir de la population, je pense qu'on fait un
mauvais calcul. J'ai vu dans plusieurs cas des compagnies qui ont
déjà commencé, même si ces articles ne sont pas en
vigueur et à ce point de vue, je ne suis pas en accord avec le
député en ce sens que la formule incitative a déjà
commencé à avoir des effets et on ne pourra juger de sa valeur
que lorsque ces articles seront en vigueur. Mais déjà, plusieurs
compagnies ont commencé la francisation, soit au niveau de la raison
sociale ou au niveau de la communication interne, la francophonisation,
plusieurs l'avaient commencé avant la loi 22. Mais depuis la loi 22, on
voit un mouvement, une progression géométrique dans l'ampleur du
mouvement pour l'usage du français, l'engagement de Canadiens
français, de francophones.
Cela me surprend que, dans le contexte que
vous décrivez et qui est exact, la compagnie n'ait pas eu la
prudence de se donner un nom français au Québec.
M. Léger: Est-ce qu'il y a déjà eu des
négociations entre les deux paliers de gouvernement, provincial et
fédéral, pour que les compagnies qui ont une charte
fédérale, mais qui ont des succursales très importantes au
Québec, pour exiger du ministère fédéral qui
s'occupe de donner la charte je ne sais pas comment il s'appelle
à une compagnie qui s'installe au Québec, pour exiger qu'elle ait
les deux interprétations, française et anglaise?
M. Lalonde: Je ne suis pas au courant des négociations qui
auraient pu avoir lieu dans ce sens. Je me souviens, quand j'étais aux
institutions financières, de communications qu'on avait, assez
constamment, avec le ministère des corporations fédérales
qui a quand même été un des premiers à rendre
possible, sinon exiger la raison sociale française pour le nom d'une
compagnie.
C'est possible d'engager des communications, quoique la politique du
provincial à ce point de vue est totalement différente de la
politique du fédéral.
Le fédéral a une politique de langues officielles
plutôt orientée vers la protection du consommateur et c'est ce
qu'on voit dans ces lois ou ces règlements concernant
l'étiquetage, alors que la politique du Québec est d'être
franchement et carrément profrançaise, pour la promotion de la
langue française, aussi pour la protection du consommateur ou dans le
concept de la protection du consommateur, mais aussi dans un concept beaucoup
plus large, beaucoup plus profond, celui de la survivance d'une population et
du développement d'une culture.
M. Léger: S'il y avait des négociations, est-ce que
cela relèverait de votre responsabilité ou si cela
relèverait du ministère des Institutions financières du
Québec, pour demander, à Ottawa, à ceux qui donnent des
chartes fédérales aux compagnies qui vont travailler au
Québec, de le faire dans les deux langues?
M. Lalonde: Cela pourrait relever des deux. Vous comprenez,
étant donné que la langue englobe à peu près toutes
les activités qu'on puisse faire, à peu près toutes les
activités du ministre responsable de cette loi se font concurremment ou
de façon mixte avec d'autres ministères, quand il s'agit du
gouvernement ou d'autres organismes. Il n'y a pas de doute que le
ministère des Institutions financières serait
intéressé lui aussi à des communications qui pourraient
avoir lieu à ce sujet. Je rappelle au député que notre loi
va tellement plus loin que la loi des langues officielles et tellement plus en
profondeur dans toutes les activités de la vie, la langue du travail, la
langue des affaires, que je ne pense pas qu'on avance tellement en allant
à Ottawa pour avoir quelque chose comme ça. On est beaucoup plus
en avance que cela.
M. Léger: C'est-à-dire pour tout ce qui reste de la
juridiction provinciale, d'accord.
M. Lalonde: A part cela, avec les programmes de francisation, on
rapproche ces compagnies.
M. Léger: C'est-à-dire, si elles ont besoin de
revenus ou de subventions ou d'un certain privilège, mais si elles
peuvent obtenir ces privilèges et ces subventions du
fédéral, elles vont se foutre du provincial.
M. Lalonde: Oui, mais regardez l'article 27. L'article 27 a une
portée considérable, à ma connaissance, naturellement, il
est trop tôt pour le dire, mais connaissant les politiques des dirigeants
de la régie et connaissant mes propres intentions sur ce sujet, la
régie va sûrement prendre avantage de cet article et l'utiliser
pour aller au-delà de l'article 28 qui n'utilise que le pouvoir
économique de l'Etat.
M. Léger: Oui, mais, à l'article 27, quand
même, il n'est pas question de pénalité si le plan de
francisation n'est pas implanté selon les désirs. C'est
simplement de l'incitation et un gain à obtenir auprès de la
compagnie.
M. Lalonde: La pénalité est beaucoup plus
sérieuse que le député ne le reconnaît dans sa
question.
M. Léger: Qu'est-ce qui arrive à une compagnie
précisément le ministre peut me répondre qui
n'accepterait pas de franciser son entreprise ou qui l'accepterait d'une
façon tellement mitigée que ce serait un oui qui ne serait pas
effectivement en place? Quelle pénalité peut-elle avoir?
M. Lalonde: On n'acceptera pas de oui mitigé. Cela
équivaudrait à un non s'il y avait un oui mitigé, en vue
d'implanter un programme de francisation et qu'ensuite, on ne le suive pas. Le
certificat est suspendu. D'ailleurs, on peut le faire. La loi prévoit
des pouvoirs à la régie et au ministre responsable à cet
effet. Il faut connaître, dans le milieu des affaires, ce qu'est l'image
corporative pour employer une traduction peut-être un peu
littérale de la "corporate image" américaine.
Il faut connaître un peu le milieu des affaires pour voir
jusqu'à quel point c'est précieux à une compagnie. Ces
compagnies dépensent des sommes énormes, souvent des millions de
dollars, pour se faire une image et, deuxièmement, pour la conserver
constamment par la publicité et toutes sortes d'autres façons. Se
faire nommer à l'Assemblée nationale, comme le deuxième
paragraphe de l'article 27 le prévoit, en disant que telle compagnie
n'est pas un bon citoyen corporatif, peut causer des dommages incalculables
à son image, dans sa population, dans sa clientèle. Même
s'il n'y a pas, accrochées a l'article 27, des pénalités
comme des amendes, la connotation de mauvais citoyen que la mention de cette
compagnie, à l'Assemblée nationale, comme ayant refusé de
se franciser, peut causer des dommages beaucoup plus élevés que
ceux découlant de pénalités comme les amendes.
Je pense que c'était l'intention du législateur et je
crois encore aujourd'hui, pour en avoir parlé
avec des milliers de personnes je l'ai dit hier avec 4,500
à 5,000 personnes, dans des périodes de questions-réponses
et de communication d'information, que cette approche de l'article 27 est
extrêmement sérieuse. Elle est sentie très
sérieusement par les hommes d'affaires.
M. Léger: Je suis d'accord avec le ministre concernant les
entreprises petites et moyennes, mais...
M. Lalonde: Et surtout les grosses.
M. Léger: ... quand on parle de multinationales, si elles
se font nommer par le gouvernement provincial et que, d'une autre main, elles
reçoivent des subventions du gouvernement fédéral, je
pense que, pour elles, cela ne les dérange pas tellement. Parce que la
situation et l'attitude de United Aircraft, en ce qui me concerne, comme
député de l'Opposition qui regarde cela, c'est une pure
provocation. C'est là qu'on voit réellement que le gouvernement
des francophones, c'est le Québec, et que le gouvernement d'Ottawa,
c'est le gouvernement des anglophones. Parce que le gouvernement des
anglophones va les encourager quand même. Les multinationales lui
apportent beaucoup plus et il est capable de passer pardessus les
législations provinciales pour aider ces compagnies.
M. Lalonde: Je suis complètement d'accord et je remercie
le député d'appuyer la politique de souveraineté
culturelle de notre gouvernement à cet effet, puisqu'on dit que c'est au
Québec que le...
M. Léger: Ce n'est pas exactement cela. Le gouvernement,
quel qu'il soit au Québec, est le gouvernement des
Québécois. Cela ne veut pas dire qu'il faut tout ce qu'il
faut.
M. Lalonde: Non, c'est une exception, United Aircraft, et j'ai
dit tantôt ce que j'en pensais. Maintenant, plusieurs compagnies
considérables, multinationales, malgré la connotation
négative qu'on met souvent aux multinationales, tellement que c'est
rendu presque un péché d'être une multinationale, alors que
plusieurs de nos bonnes compagnies le sont, comme Alcan qui a, depuis 1938, un
francophone comme président, et elle n'est pas la seule, ce n'est pas
une exception... On peut en nommer d'autres.
M. Léger: II y en a qui ont un sens social, ce n'est pas
la majorité, c'est plutôt l'exception, malheureusement.
M. Lalonde: Oui, elles ont un sens social. Je dirais que c'est
plutôt la majorité ou enfin un très grand nombre. Je m'en
suis aperçu en les rencontrant, pas seulement parce qu'elles ont un sens
civique ou un sens social tellement développé, c'est un fait,
mais plus développé qu'il y a vingt ans. Il y a vingt ans, on
voyait des compagnies de cette nature vivre dans un milieu à vase clos
complètement, sans s'intégrer, sans s'inquiéter même
du milieu de sa culture, de ses problèmes sociaux. Aujourd'hui, on le
voit moins. Naturellement, tous les mouvements de protection du consommateur,
les mouvements de protection de l'environnement ont attiré l'attention
et ont forcé ces compagnies à prendre conscience du milieu. Pour
une multinationale, l'avantage que nous avons concernant la langue, c'est que
la multinationale est habituée de faire affaires dans des milieux
différents. La multinationale, qui a une usine en Espagne, fait face
à un problème linguistique différent, et probablement
qu'elle fait affaires en vingt langues. Du jour au lendemain, naturellement,
c'est un peu inusité, elles ne le savaient pas avant, elles tenaient
pour acquis que l'anglais, c'était très bien, que les
francophones n'étaient pas intéressés, de toute
façon, à faire des affaires. Alors, on les a aidés un peu
à penser cela, de toute façon, jusqu'à ce qu'un geste
comme celui-ci ait été posé. Puisque c'est la règle
du jeu, elles sont prêtes, elles ont les ressources pour le faire, les
ressources humaines, les ressources financières. Avec un certain nombre
de ces compagnies, nous n'aurons pas de problème. Souvent, elles ont
commencé.
Une des premières rencontres que j'ai eues en septembre,
c'était organisé par l'Association canadienne des manufacturiers,
la section de l'équipement de bureau. M. Brophey, vice-président
de Xerox expliquait à d'autres membres de l'industrie, comme lui, de
grosses compagnies, IBM, etc. comment Xerox avait fait pour commencer la
francisation. Ce qui est quand même assez indicatif, on lui avait
présenté le guide d'implantation qui a été rendu
public en juillet l'an dernier et qui est en train d'être
révisé par la Régie de la langue française
actuellement. Sans avoir consulté l'office ou la régie, la
compagnie elle-même avait développé une méthodologie
quasi semblable d'une analogie frappante, parce qu'il n'y a quand même
pas vingt façons différentes de faire une chose, les gestes et
les démarches se suivaient.
M. Léger: Ce n'est pas le gouvernement qui avait
copié cela?
M. Lalonde: Ce n'est pas le gouvernement qui avait copié
cela, le gouvernement l'avait fait à la suite de projets-pilotes dans
d'autres compagnies. Cette compagnie multinationale fait affaires en vingt
langues dans le monde. Elle est prête, comme plusieurs autres. Je pense
que la loi 22, dans ce sens, a marqué une époque et qu'on doit
s'attendre, de ces différentes compagnies, à un effort,
même avant que ces articles n'entrent en vigueur.
M. Léger: M. le Président, pour continuer, à
propos des articles 26 à 29, 34 à 39 et 78 à 99 et 111,
est-ce que le ministre peut nous dire quand ils vont être
proclamés officiellement?
M. Lalonde: D'abord, l'article 35 est en vigueur.
M. Léger: L'article 35 est en vigueur... M. Lalonde:
L'article 36...
M. Léger: Excusez-moi. Ce que je voulais dire, c'est de 26
à 29...
M. Lalonde: Les articles 34 et 39. M. Léger: Les
articles 34 et 39? M. Lalonde: Oui. M. Léger: Les articles
78 à 99?
M. Lalonde: Les articles 26 à 29 et 39 concernent le
programme de francisation et 34, l'étiquetage. Ils seront
proclamés, ils entreront en vigueur lorsque les règlements
auxquels ils se réfèrent seront en vigueur. Donc, c'est le
même cheminement que j'ai expliqué hier à cette commission.
Ils sont en préparation actuellement. Nous avons, au niveau de
l'affichage, déjà consulté la régie; je crois
qu'elle se réunit aujourd'hui pour les examiner, et j'attends la
réaction de la régie pour ensuite les publier. Le
règlement...
M. Léger: Avez-vous l'impression que, là-dessus,
cela pourrait être à la fin de l'été?
M. Lalonde: Pour la publication, probablement, oui, mais pour
entrer en vigueur, il faut que j'attende 90 jours.
M. Léger: C'est cela.
M. Lalonde: Alors, au moins, lorsqu'ils seront connus...
M. Léger: Donc, à l'automne, cela pourrait
être...
M. Lalonde: Sûrement avant la fin de l'année, ces
articles vont entrer en vigueur, à moins qu'on se bute à des
problèmes insoupçonnés actuellement...
M. Léger: II ne peut pas y avoir de grève,
là-dedans?
M. Lalonde: Non, mais il y a peut-être d'autres genres de
problèmes. L'article 34, le projet de l'étiquetage, va être
sur mon bureau mardi, prêt à envoyer à la régie.
Pour les autres, pour la francisation, la prochaine réunion est en juin,
pour les deux comités qui font des travaux entre-temps pour terminer
leur catégorisation, leur identification des catégories, et cela
devrait prendre peut-être un mois ou deux de plus pour venir à la
régie, mais je pense que, d'ici la fin de l'année, tout cela va
être fini.
M. Léger: Les articles 78 à 99, sur les pouvoirs
d'enquête de la régie, quand prévoit-on qu'ils seront
proclamés?
M. Lalonde: C'est une question plutôt de recrutement que
d'autre chose. Les concours ont été lancés aussitôt
que la régie a été mise en place et a eu le loisir de
s'attaquer à son recrutement. Il y a déjà eu un concours
et un jury a été constitué. Des candidats se sont
présentés pour ce poste en particulier et les autres, le
directeur de la francisation, et les autres directions que prévoit la
régie. Selon les résultats de ces concours et la chance qu'on
aurait de trouver le candidat idéal, les articles pourront ensuite
être proclamés.
M. Léger: Bon!
M. Lalonde: Parce que je ne vois pas d'autres problèmes
que le recrutement.
M. Léger: L'essentiel de la loi 22, c'est, quand
même une question de prime sans enquêteurs et de pouvoirs connexes;
il faudrait nécessairement que ce soit fait très rapidement.
M. Lalonde: Ah oui! Nous allons à une vitesse essoufflante
là-dedans. Ecoutez! Moi, je ne suis entré en fonction qu'en
septembre. La régie a été formée en novembre,
décembre. Nous ne sommes qu'en mai et, déjà, la
régie tient sa 18e réunion aujourd'hui; les concours sont
lancés et le recrutement est en train de se faire. Les règlements
sont pour presque la moitié terminés et prêts à
être envoyés à la régie. Un règlement, un
premier, lui a déjà été envoyé.
Je pense que cette période de quelques mois qu'on passe sans voir
rien qui se passe peut en rendre certains un peu inquiets. Mais la production
se fait actuellement, et les résultats vont être très
visibles lorsqu'ils vont venir d'une façon je dirais même
accélérée, d'ici la fin de l'année.
M. Léger: D'une façon très pratique, les
articles 24 et 32 touchent les employeurs qui doivent rédiger en
français les avis de communication, les directives qu'ils adressent
à leur personnel. A l'article 32: Les raisons sociales françaises
devraient ressortir, ou tout au moins figurer dans les textes et documents,
d'une manière aussi avantageuse que les versions anglaises. Le ministre
a-t-il reçu des plaintes, jusqu'à maintenant? Combien a-t-il pu
en recevoir?
M. Lalonde: Je me souviens d'avoir reçu une ou deux
plaintes, mais ce n'était pas tout à fait là-dedans,
à mon bureau. Maintenant, je vais consulter mes adjoints pour savoir si
nous en avons reçu d'autres. Ce sont surtout des demandes de
renseignements, pour savoir ce que cela veut dire au juste, et comment s'y
conformer.
M. Léger: Mais comment la régie
procède-t-elle pour vérifier l'application de cet article 24?
M. Lalonde: Nous n'avons pas reçu de plaintes à la
régie pour l'article 24. Nous en recevons pour l'étiquetage.
L'article 34 n'est pas encore en vigueur.
M. Léger: J'ai parlé de l'article 32 avant.
M. Lalonde: A l'article 32, il est question des raisons sociales.
Il est aussi important de dire qu'avec l'aide du ministère des
Institutions financières, qui avait développé une certaine
expertise
au niveau des raisons sociales, à la suite de l'effort de
francisation qu'il avait fait pour les raisons sociales, la régie a fait
un guide, qui a été distribué récemment, pour aider
les avocats et les gens qui sont préoccupés par ces questions,
à faire des raisons sociales. C'est un art, c'est un métier comme
un autre. Ce guide est actuellement disponible pour le public, afin d'avoir des
raisons sociales en bon français.
M. Léger: Vous n'avez pas eu de plainte à ce sujet
jusqu'à maintenant?
M. Lalonde: Non. Nous n'avons pas eu de plainte à ce
sujet. Ce sont surtout des demandes de renseignements venant, non pas des
employés qui se plaignent que telle et telle chose est faite, nous en
avons reçu quelques-unes chez nous, mais pas d'une façon qui nous
permettrait de dire qu'il y a un viol constant de la loi dans les entreprises.
C'est un peu comme ce que les députés mentionnaient hier, pour la
Fonction publique. C'est assez facile de montrer deux, trois ou dix fascicules
ou formules qui ne sont pas totalement conformes à la loi, mais ce qu'il
faut quand même dire, et je profite de l'occasion pour le faire, c'est
qu'au niveau de l'administration publique, la loi est très largement
respectée. Elle l'était, d'ailleurs, même avant la
proclamation.
M. Léger: Mais elle doit être complètement
respectée.
M. Lalonde: Oui. C'est aussi un phénomène de
changement qui ne peut pas se faire du jour au lendemain. L'effort est
fait.
M. Léger: Mais, en Chambre, on a déjà dit:
Nul ne doit ignorer la loi.
M. Lalonde: Nous connaissons la loi.
M. Léger: Je parle de ceux qui ne la respectent pas. Le
ministre doit savoir ce que je veux dire. Nul ne doit ignorer la loi.
M. Lalonde: Nous ne l'ignorons pas. Nous faisons les
changements...
M. Léger: Je parlais plutôt des ministères
concernés. Je ne parlais pas du ministre, qui a le rôle de
vérifier. Ceux qui ne l'ont pas respectée...
M. Lalonde: Je sais que cela se fait. Justement, après la
réunion que nous avons eue à la commission avant-hier, je
rencontrais le ministre du Revenu, le sous-ministre, le chef du contentieux,
avec les membres de la régie, pour faire le programme du respect de la
loi dans les prochains envois de formules; nous avons là nos avocats, et
tout est très bien sorti.
La prochaine série de documents qui va être imprimée
en tiendra compte. Les commandes doivent être faites avant la fin de mai
pour l'an prochain, et elles étaient d'ailleurs faites au mois de mai
l'an dernier lorsque la loi a été votée. Elles
étaient précisément en voie de production lorsque la loi a
été adoptée. Mais ces documents, ces formules seront
conformes à la loi, cela va l'être, je vous l'assure.
M. Léger: Je remercie le ministre de reconnaître
jusqu'à quel point l'Opposition peut être utile en étant le
chien de garde de ces choses. Quand un ministre a l'esprit ouvert comme le
ministre qui est devant moi, il peut réellement corriger
immédiatement des déficiences. Je pense que, ce matin, en
Chambre, on a assisté à une explication bien précise d'une
fausse affirmation du ministre de l'Education. Je l'ai
répété d'ailleurs. En effet, on s'est caché
derrière le fait qu'il y avait un gros inventaire de formules alors que
les formules que j'ai mentionnées, qui étaient celles des permis
d'enseignement, et celles du bulletin de liaison du ministère de
l'Education, ont été imprimées après l'application
de la loi. A ce moment-là, l'excuse que le ministre a donnée est
absolument fausse. Il va se corriger, mais il ne voulait pas l'admettre.
M. Lalonde: Je ne sais pas. Là, par exemple...
Le Président (M. Pilote): Je vous inviterais,
messieurs...
M. Lalonde: II y a là une affirmation, M. le
Président, vous me permettrez... Avec la petite expérience que
j'ai eue aux différents ministères, il est ressorti d'une
façon très claire qu'un tas de formules sont réellement
faites longtemps à l'avance, même si l'émission de la
formule est faite après.
M. Léger: Pas celles que j'ai mentionnées. Celles
que j'ai mentionnées, normalement...
M. Lalonde: Je ne peux pas me prononcer sur celles-là,
parce que je ne sais pas si la date d'impression apparaît sur la
formule.
M. Léger: Je vais vous renseigner là-dessus. J'ai
donné la preuve, ce matin...
M. Lalonde: C'est la date d'impression que le
député...
M. Léger: Les formules de permis pour les anglophones,
auparavant, étaient indiquées en anglais et le titre du
gouvernement du Québec y était en anglais. Sur cette formule le
nom du gouvernement est maintenant en français; donc, c'est contraire
à ce qu'il y avait avant et, deuxièmement, c'était bien
indiqué pour l'année 1974/75 en anglais. Vous voyez
immédiatement qu'on a respecté la loi sur la partie de la
nomination du gouvernement, ce qui n'était pas le cas des anciennes
formules, et cela a été imprimé par la suite.
M. Lalonde: Peut-être que les déductions du
député sont bonnes. Je ne sais pas pour cette formule en
particulier, mais ce que je sais, c'est que c'est souvent longtemps
imprimé d'avance, pour des questions d'économie. Je pense, sans
mettre les mots dans la bouche du député, qu'il sera en accord
avec moi en disant qu'il est quand même normal, étant donné
qu'on gère les biens
publics, de minimiser les coûts de remplacement de ces
formules.
M. Léger: Quand c'est le cas, peut-être. M.
Lalonde: C'était le cas, par exemple...
M. Léger: Le deuxième exemple, celui du bulletin de
liaison, c'est une chose qui s'imprime tous les mois.
M. Lalonde: C'est le cas, par exemple, des TP-4 que le
député m'a brandi à la commission il y a deux jours et on
m'a affirmé j'ai posé la question que ce n'est pas
imprimé par le ministère.
M. Léger: Oui, mais c'est une directive.
M. Lalonde: C'est imprimé par les entreprises
elles-mêmes, mais c'est souvent une formule qui est acceptée
d'avance.
M. Léger: Mais si le contrat de l'entrepreneur datait de
tellement longtemps qu'il s'est prévalu de l'imprimer sans recevoir les
directives du ministère, le ministère est responsable.
M. Lalonde: Ce n'est pas ce que je veux dire. Ce n'est pas le
ministère qui l'imprime. Ce n'est pas un document qui émane du
ministère. Le député a peut-être raison, mais il a
été induit en erreur c'est que cette formule porte le nom du
ministère du Revenu du Québec, même si elle n'émane
pas du ministère du Revenu. Je ne peux pas blâmer le
député d'avoir été induit en erreur, mais ce n'est
pas un document du ministère. Quant aux autres...
M. Léger: C'est-à-dire que c'est le
ministère qui l'envoie.
M. Lalonde: Non. Les formules TP-4 sont faites, sont
imprimées par les entreprises et ce sont les entreprises qui envoient
cela à leurs employés pour dire combien elles ont déduit,
quel était le montant de leur salaire.
M. Léger: Elles mettent le nom du ministère du
Revenu en haut et ce sont elles qui...
M. Lalonde: C'est cela. C'est une anomalie qui va être
corrigée.
M. Léger: D'accord. M. le Président, concernant
l'article 34 qu'on a touché, pour ce qui est de l'étiquetage des
produits, il est dit qu'il doit se faire en français, sauf dans la
mesure prévue par les règlements. Qu'est-ce que le ministre
entend par cette restriction: "sauf par les règlements"? Qu'est-ce qui
peut permettre des cas où ce n'est pas nécessaire que ce soit en
français?
M. Lalonde: Cela pourrait permettre la présence d'une
autre langue...
M. Léger: Vous voulez dire une troisième
langue?
M. Lalonde: ... et d'après nos conseillers juridiques,
d'une deuxième langue. Cela doit se faire en français, sauf dans
la mesure prévue dans les règlements, donc ça pourrait
être en français et en anglais, il peut y avoir une
étiquette d'un côté en français et de l'autre en
anglais. Cela pourrait aussi prévoir ce que le député a
mentionné, des cas où il n'y aurait pas d'étiquetage en
français.
M. Léger: II pourrait y avoir des étiquetages qui
ne seraient pas en français?
M. Lalonde: Vous me demandez une opinion juridique, je vous donne
celle de nos avocats.
M. Léger: Dans quelle circonstance?
M. Lalonde: II s'agit, pour les règlements, de
prévoir ces circonstances. On a pensé à certaines
spécialités, des produits spéciaux importés pour
des religions qui sont utilisées à certaines fêtes de
certaines religions, des choses exceptionnelles comme ça ou des produits
qui sont distribués en si petite quantité qu'exiger un
étiquetage en français aurait pour effet de tarir la source, de
sorte que le député de Lafontaine ou les autres
députés seraient obligés d'aller acheter certaines choses
à Cornwall, par exemple. Il s'agit d'établir l'équilibre
où on peut exiger l'étiquetage en français, tout en
permettant au produit d'entrer dans la province.
M. Léger: Cela ne voudrait pas dire qu'il pourrait y avoir
un produit hébreu, uniquement "kosher", comme, par exemple, un produit
qu'un groupe particulier va utiliser, mais pour la vérification de la
qualité de ce produit, si le contenu ou l'explication ou le mode
d'emploi n'est pas au moins en français, comment les inspecteurs
pourront-ils vérifier si c'est bien fait, puisque c'est expliqué
en juif? On ne peut pas demander aux inspecteurs gouvernementaux de
connaître toutes les langues. Il faudrait au moins que ce soit en
français.
M. Lalonde: C'est plutôt une question de protection du
consommateur que de langue.
M. Léger: L'exception que vous donnez amène un
autre problème, celui de la connaissance des ingrédients qui sont
à l'intérieur de ces contenants et si l'étiquetage n'est
pas au moins dans la langue de celui qui va l'inspecter...
M. Lalonde: J'ai bien dit que c'étaient des produits
très spéciaux, ce sont des exceptions, c'est ce que l'article 34
dit: Sauf dans la mesure, c'est-à-dire que les règlements doivent
donner des exceptions, des produits qui s'adressent à des groupes
ethniques très particuliers, pour des fêtes religieuses ou des
fêtes particulières, alors nous présumons que ces gens
savent lire l'étiquette et savent se protéger contre les erreurs
dans les contenus. D'ailleurs, nous n'avons pas eu de plaintes à ce
sujet jusqu'à maintenant, ces pro-
duits sont quand même distribués. C'est un exemple que je
donne, il y en aura d'autres.
M. Léger: On n'avait pas de plaintes pour la viande avant,
maintenant, on en a.
M. Lalonde: II y en aura d'autres.
M. Léger: En quelques mots, est-ce que le ministre peut
nous dire comment va se faire la surveillance de cet article et quand ces
règlements vont-ils être publiés?
M. Lalonde: Le règlement va être publié,
comme je l'ai dit tantôt, en particulier l'article 34, c'est bien
celui...
M. Léger: L'étiquetage.
M. Lalonde: Cela va être publié, j'ai le projet
presque définitif qui sera proposé au conseil des ministres dans
les semaines qui vont suivre, peut-être la semaine prochaine ou l'autre
semaine. Ensuite, il va être envoyé à la régie, pour
consultation, comme le prévoit la loi, ensuite il sera publié
dans la Gazette officielle et là, nous aurons la réaction des
gens.
M. Léger: Cela sera encore à l'automne.
M. Lalonde: Celui-là était compris dans ceux que
j'ai mentionnés tantôt qui seraient en vigueur, l'article en
vigueur et les règlements, d'ici la fin de l'année.
M. Léger: Quand les règlements de l'article 35
concernant l'affichage seront-ils rendus publics?
M. Lalonde: C'est cela, ils sont étudiés
actuellement...
M. Léger: Ils sont inclus actuellement... M. Lalonde:
... à la régie, aujourd'hui... M. Léger: A peu
près, oui.
M. Lalonde: Ils vont être connus beaucoup plus rapidement
que cela, par exemple, tard à l'été.
M. Léger: A-t-on déjà commencé
à avertir les propriétaires de panneaux-réclame ou
d'enseignes lumineuses qu'ils ont cinq ans pour franciser ou "bilinguiser"
leurs affiches? Comment cela se fera-t-il? C'est l'article 37.
M. Lalonde: Pour employer une phrase que le député
a mentionnée tantôt: "Nul n'est censé ignorer la loi";
naturellement, la loi est connue. Les producteurs de panneaux-réclame la
connaissent très bien, nous les avons rencontrés. Nous n'avons
pas écrit à chacun des propriétaires de
panneaux-réclame parce que chaque entreprise, en fait, est un
propriétaire en puissance de panneaux-réclame. Nous, dans nos
rencontres, nous avons fait connaître, nous avons eu plusieurs questions
là-dessus. La loi est assez claire. Ils ont cinq ans pour remplacer les
panneaux-réclame. D'ailleurs, je crois qu'on peut voir, ce n'est pas un
sondage scientifique, mais on peut voir certains changements dans certains
secteurs de la ville. J'ai vu la rue Bleury où c'était
exclusivement en anglais, en grec ou en d'autres langues; actuellement, on voit
des affiches, qui sont suspendues, en français, ou en français
seulement ou en français et une autre langue.
La loi, à l'article 38, dit bien que la requête est
dirigée contre l'annonceur ou contre quiconque a placé ou fait
placer l'annonce. Les producteurs de panneaux-réclame ont tout
intérêt à respecter cette disposition parce qu'on peut
prendre cette requête contre eux-mêmes.
M. Léger: D'accord. Une dernière question
concernant les municipalités et l'article 45, entre autres. Est-ce qu'un
programme d'information a été établi concernant
l'application de ces articles qui concernent les municipalités et qui
permettent à une municipalité, si elle le désire, de
publier uniquement dans un journal français?
M. Lalonde: Les municipalités sont frappées par
cette loi, non seulement l'article 45... D'ailleurs cet article ne se limite
pas aux municipalités. C'est toute l'administration publique et c'est
connu. La loi est en vigueur depuis presque dix mois et elle est connue, elle
est appliquée pour les municipalités.
M. Léger: Mais il n'y a pas de programme prévu
là-dessus. Je veux juste faire remarquer au ministre, sans
méchanceté, que, si, même les ministères du
gouvernement n'ont pas été capables jusqu'à maintenant, de
se mettre immédiatement au pas, imaginez-vous ce que ce sera pour les
1,585 municipalités du Québec qui ont des habitudes acquises et
à qui la loi peut permettre des choses... Est-ce qu'il n'y aurait pas
une directive à envoyer?
M. Lalonde: J'ai avisé le ministre des Affaires
municipales de toutes les dispositions qui frappent le gouvernement,
c'est-à-dire l'administration publique, comme pour tous les autres
ministères.
Je pense qu'ils sont tous conscients de ces possibilités, de ces
exigences. Maintenant, vous mentionnez qu'il y a encore des accrocs à la
loi. Le choix aurait été de laisser cette loi en suspens pendant
un an ou deux pour ensuite arriver au jour J où tout le monde aurait
été en mesure de se conformer à la lettre à toutes
les dispositions de la loi. C'est une approche; celle que nous avons
adoptée, c'est de la mettre en vigueur maintenant. Je pense qu'elle est
beaucoup plus efficace, c'est que ça force réellement les gens
à faire le changement. Si on l'avait suspendue pour la faire entrer en
vigueur à une date plus éloignée, ce qui est une
façon de faire qui pourrait être utile dans d'autres secteurs,
mais pour la loi d'une façon globale, il nous est apparu beaucoup plus
efficace de la faire entrer en vigueur maintenant.
M. Léger: Je suis d'accord avec le ministre pour dire que
c'est peut-être une approche qui pourrait être acceptable, à
condition qu'à mesure que les semaines avancent, le gouvernement serre
de plus en plus la vis.
Sinon, le domaine privé ne croira pas à la
sévérité du gouvernement, s'il sent qu'il ne fait pas
respecter sa loi, surtout dans ses propres ministères. En terme de
perception...
M. Lalonde: Ce n'est pas ce que...
M. Léger: ... du domaine privé par rapport au
gouvernement.
M. Lalonde: Je reconnais l'inquiétude et la
préoccupation du député. Elle est tout à son
avantage. Mais, je ne voudrais pas quand même qu'on ait l'impression,
parce qu'il y a justement certains accrocs, certains changements qui n'ont pas
encore été complétés et qui vont prendre quand
même un certain temps, que la loi est systématiquement et
globalement violée par le gouvernement. Ce n'est pas le cas. Au
contraire, même avant la loi, le gouvernement se comportait comme la loi
le désire, sauf quelques exceptions pour lesquelles des dispositions ont
déjà été prises et sont prises encore à tous
les jours, pour amener un respect total dans toutes les formules, dans toutes
les habitudes des communications.
Croyez-moi, l'entreprise privée sait que le gouvernement est
sérieux. J'aurais aimé que le député soit
témoin de certaines rencontres que j'ai eues avec des milieux qui ont
des changements à faire pour voir jusqu'à quel point cette loi
change les choses. Ce n'est pas à dire qu'il y a une résistance
systématique, mais cela fait mal. Cela force les gens à changer
leur mentalité, à reconnaître que le Québec est une
province française. Ce n'est pas toujours facile de faire changer les
mentalités. Le succès de la loi va dépendre, en grande
partie, de la façon dont elle va être appliquée. Je pense
que l'approche que nous avons, dans son application, c'est-à-dire une
approche raisonnable, juste, mais déterminée est la meilleure
pour aider, parce que c'est beaucoup une question de changement de
mentalité, ce n'est non pas seulement changer la couleur d'un bout de
papier.
M. Léger: M. le Président, nous avions convenu
d'ajourner à midi. J'ai été obligé de continuer un
peu pour, au moins, terminer une partie, c'est-à-dire celle qui touche
la langue. Je voudrais, en terminant, dire au ministre qu'il a mon appui
complet pour la partie que nous jugeons bonne de la loi 22 qui n'est pas
grosse, mais au moins...
M. Lalonde: Vous en avez une.
M. Léger:... il y a une partie, dans ces détails,
qui peut être acceptable. C'est un pas, alors que cela aurait pu
être un bond qu'on aurait pu faire. On ne l'a pas fait. Mais, au moins,
dans la partie qui existe, comme l'Opposition, je dois dire que je lui donnerai
mon appui et que je l'aiderai de ce côté.
Concernant les autres aspects des crédits, sur le conseil
privé, ce qui touche le statut de la femme, c'est le chef de
l'Opposition officielle qui est occupé dans une autre commission, qui ne
peut pas être ici, cet après-midi... Concernant des corporations,
c'est le député de Maisonneuve qui est responsable.
Lui-même est occupé dans une autre commission. Donc, il ne serait
pas possible, pour nous, de continuer. Je demanderais, à ce moment, au
ministre j'en ferais une proposition qu'on ajourne sine die,
même si le gouvernement a peut-être, à ce moment-ci,
l'intention de hâter les travaux des crédits et d'essayer de
terminer certains crédits. Parfois, le petit nombre de
députés de l'Opposition empêche d'aller plus vite, parce
qu'on ne peut pas se diviser en quatre. On se divise déjà
suffisamment en 25 et en 40 et on essaie de jouer le rôle d'une
Opposition normale de 40 députés. Ce n'est pas facile.
Je demanderais peut-être au ministre d'ajourner sine die, de
façon que, dans le programme il arrivera peut-être une
journée, la semaine prochaine ou la semaine d'après, où le
gouvernement aura besoin d'une autre commission parlementaire on puisse
avoir celle-là de disponible pour continuer de discuter, surtout qu'on a
touché seulement à un des trois points. Moi-même, à
ce moment, je me réserverais peut-être une autre occasion pour
parler des Jeux olympiques. Je vais plutôt attendre les
développements qui viennent. Peut-être que la commission
parlementaire aura lieu au début de juin. On ne sait pas la date encore.
J'espère que ce sera le plus tôt possible, pour éviter
qu'on soit encore devant des faits accomplis, alors qu'on pourrait
peut-être, en ayant une commission...
M. Lalonde: J'espère qu'on va être devant des faits
accomplis, à un moment donné.
M. Léger: C'est-à-dire devant une...
M. Lalonde: II faut les accomplir les faits.
M. Léger: Non seulement des faits accomplis, mais une
situation réglée, ce qui n'est pas le cas. On est dans une
dynamique de réalisation. Il y a des choses qui pourraient
peut-être être corrigées, pourvu qu'on soit assez vigilant.
Je proposerais, justement, qu'on ajourne sine die, en laissant au gouvernement
le soin de la rappeler, aussitôt qu'il le jugera bon.
M. Lalonde: M. le Président, je remercie le
député de Lafontaine de son appui, quant à l'application
de la loi 22. J'en prends bonne note. Je voudrais seulement, avant d'ajourner,
dire que nous sommes prêts a continuer.
Je.comprends les problèmes de l'Opposition de se rendre
disponible. Nous sommes prêts à continuer, nous étions
prêts jusqu'à 13 heures, mais quand même, si l'Opposition le
désire, nous allons ajourner sine die. Quant à notre
disponibilité pour un autre jour, personnellement, je le suis, il va
s'agir simplement d'une question d'organisation de commissions. Nous
connaissons les problèmes de coordination, surtout à cause du
fait que l'Opposition est en petit nombre, que le leader a pour réunir
des commissions parlementaires. Quant à moi, je suis prêt à
revenir, s'il le faut, pour étudier le reste des crédits.
Le Président (M. Pilote): Les membres de la commission
sont d'accord sur cette proposition du député de Lafontaine.
Alors, la commission ajourne ses travaux sine die.
(Fin de la séance à 12 h 21)