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Version finale

30th Legislature, 3rd Session
(March 18, 1975 au December 19, 1975)

Tuesday, May 27, 1975 - Vol. 16 N° 109

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude des crédits du Conseil exécutif


Journal des débats

 

Commission permanente de la présidence du conseil,

de la constitution et des affaires intergouvernementales

Etude des crédits du Conseil exécutif

Séance du mardi 27 mai 1975

(Seize heures vingt-cinq minutes)

M. Gratton (président de la commission permanente de la présidence du conseil, de la constitution et des affaires Intergouvernementales): A l'ordre, messieurs!

La commission de la présidence du conseil de la constitution et des affaires intergouvernementales continue cet après-midi l'étude des crédits du Conseil exécutif, plus particulièrement du programme 4: Coordination du développement économique et régional et interventions de développement régional.

Avant de céder la parole au ministre, j'aimerais aviser la commission des changements suivants: M. Fortier remplace M. Bossé; M. Assad remplace M. Denis; M. Lachapelle remplace M. Malouin et M. Déom a l'agréable tâche de remplacer M. Gratton.

L'honorable ministre des Affaires intergouvernementales.

Remarques générales sur l'OPDQ

M. Levesque: Merci, M. le Président Gratton. On me fait remarquer à juste titre que c'est au nom du ministre responsable de l'OPDQ et non pas comme ministre des Affaires intergouvernementales que je dois m'adresser à ce moment-ci.

Le Président (M. Gratton): Je m'en excuse.

M. Bédard (Chicoutimi): Vous avez plusieurs titres.

M. Levesque: C'est cela. M. le Président, avant de discuter chacun des programmes et éléments de programmes de l'Office de planification et de développement du Québec, qu'il me soit permis de donner un aperçu général du travail envisagé pour l'année 1975/76, de façon à mieux cadrer la discussion détaillée de chacun des programmes budgétaires.

Ce survol des activités de l'office nous permettra notamment de décrire brièvement les principales composantes du budget de l'office; d'indiquer les changements administratifs intervenus dans la constitution du budget de l'office; de faire le point sur les résultats de l'entente-cadre de développement qui a été signée entre le Canada et le Québec; de préciser le sens et la portée du fonds régional de développement et d'indiquer le sens et l'orientation des programmes de travail de la planification.

Je vais essayer d'être le plus bref possible, bien qu'il faille cependant donner l'essentiel des informations requises pour une bonne compréhension d'un organisme comme l'OPDQ.

Les crédits inscrits au budget de l'office en 1975/76 se chiffrent à $85,842,800. Si on compare ces chiffres à ceux qui apparaissent au budget de l'OPDQ en 1974/75, soit $184,316,800, on croirait à une diminution des interventions du gouvernement dans le domaine de l'aménagement et du développement régional.

Aussi, pour bien comprendre le budget de l'office, il faut connaître les modifications générales qui ont été apportées à la présentation du budget du Québec et les modifications particulières apportées au budget de l'office. J'y reviendrai tout à l'heure.

Si l'on donne au budget 1975/76 une présentation comparable à la présentation 1974/75, on se rendra compte que le budget de cette année est de 10% plus élevé que celui de 1974/75, soit en réalité, $201,500,000 par rapport à $183,700,000.

Les systhèses qui suivront tiennent compte de ces facteurs. Ensuite, nous ferons la répartition des crédits de l'office afférant au développement régional, entre chaque ministère maître d'oeuvre.

Cette répartition indiquera également s'il s'agit de projets financés par les ententes fédérales-provinciales, administrées par l'office, ou de projets amorcés dans le cadre du nouveau fonds de développement régional.

Finalement, nous indiquerons également les principales masses budgétaires affectées à l'administration de l'office et à ses autres entités administratives.

Si on regarde d'abord la base de comparaison des budgets 1974/75, et 1975/76, les changements survenus en 1975/76 affectant la base de comparaison des budgets 1974/75 et 1975/76, sont les suivants:

D'abord, modification de la structure budgétaire de l'office. Ensuite, abolition du système dit des imputations OPDQ. Finalement, inscription au budget, des revenus de la province, des contributions fédérales reliées aux ententes de développement.

Les crédits inscrits au chapitre de l'OPDQ, en 1975/76, se regroupent dans trois programmes, comparativement à quatre programmes en 1974/75.

Ainsi le programme intitulé Placement d'étudiants et Initiatives locales n'est plus inscrit en regard de l'office. On le retrouve dans la structure budgétaire du ministère du Conseil exécutif et les crédits concernant ce programme pourront être discutés avec le ministre d'Etat à l'OPDQ, le député de Joliette.

En plus, l'élément de programme intitulé Travaux de planification a été transféré du programme 4 au programme 5. J'ai mentionné l'abolition du système des imputations OPDQ. Ce changement se reflète en une inscription directe au budget des ministères maîtres d oeuvre des crédits reliés aux projets de développement sans nécessiter comme par les années passées une inscription correspondante au budget de l'office.

On retrouve à la page statistique XIV du livre des crédits 1975/76 déposé à l'Assemblée nationale par le ministre des Finances et président du Conseil du trésor, la ventilation de ces crédits par type d'affectation par ministère maître d'oeuvre.

Maintenant, j'avais mentionné l'inscription au budget des revenus de la province des contribu-

tions fédérales afférentes aux ententes de développement, suivant la nouvelle classification des revenus et dépenses adoptée par le Conseil du trésor en 1975/76; ces contributions du gouvernement du Canada sont dorénavant intégrées au budget des revenus du gouvernement du Québec. Ce changement, tel qu'indiqué à la page IV des notes explicatives du livre des crédits 1975/76, modifie le terme "crédit" par opposition à celui de "crédit net" utilisé au budget de 1974/75. Ainsi, les contributions fédérales n'apparaissent plus en déduction des dépenses au programme de l'OPDQ. Compte tenu de ces trois changements, le budget de l'OPDQ 1975/76 se compare comme suit à celui de 1974/75.

Le programme 4: Coordination du développement économique et régional et interventions de développement régional, 1974/75: $177.8 millions, 1975/76: $184.1 millions, avec une variante de plus 9%.

Programme 5: Qualification économique et régionale, consultation et administration de l'OPDQ, $5.6 millions, 1975/76, $7.1 millions avec une variante de plus 27%.

Je veux faire une correction, si je ne l'ai pas dit comme ça: Programme 4, 1975/76, $194.1 millions.

Je reviens au programme 5, $5.6 millions en 1974/75, $7.1 millions en 1975/76 pour une variante de plus 27%, comme je l'ai mentionné.

Programme 6: Consultation des agents socio-économiques, $300,000, c'est la même chose en 1975/76.

Le total des crédits bruts en 1974/75: $183.7 millions; en 1975/76: $201.5 millions; soit une augmentation d'environ 10%. Si on soustrait la part payée par le gouvernement fédéral, en 1974/75, de $95.3 millions et en 1975/76, de $85.3 millions, nous notons que, la part fédérale une fois enlevée, il reste pour la part du Québec en 1974/75, $88.4 millions, en 1975/76, $116.2 millions, soit une augmentation de la contribution du gouvernement du Québec vis-à-vis de ces programmes de 31%.

L'office est donc impliqué dans un budget total de $201.5 millions cette année comparativement à $183.7 millions en 1974/75, soit une majoration réelle de 10% et je répète que la part du Québec augmente de 31%.

Si on enlève de cette somme de $201.5 millions les crédits de $7.4 millions prévus pour l'administration, les travaux de planification, pour l'administration et les travaux de planification pour le financement des CRD et le financement du CPDQ, le Conseil de planification et de développement du Québec, on obtient les budgets de $194.1 millions reliés au projet d'aménagement impliquant l'office.

Pour les fins d'une meilleure compréhension, répartissons cette somme selon les subdivisions suivantes, si on le veut bien: affectation des fonds, répartition de cette somme selon les inscriptions au budget de l'office et à ceux des ministères, répartition de cette masse entre les ententes fédérales-provinciales et le fonds de développement régional.

L'enveloppe budgétaire de $194.1 millions se subdivise selon l'affectation comme suit: $42.6 millions serviront à financer les actions de développement régional amorcées dans le cadre du nouveau fonds de développement régional et $151.5 millions financeront les divers programmes et projets prévus aux ententes fédérales-provinciales.

Comment se répartit cette somme de $194.1 millions selon les inscriptions au budget de l'office et à ceux des ministères? Eh bien! les crédits inscrits à ce titre sont distribués comme suit: Affaires culturelles, $1 million; Affaires municipales, $3.5 millions; Affaires sociales, $2.4 millions; Agriculture, $11.3 millions; Communications, $200,000; Education, $5.5 millions; Fonction publique, $200,000; Industrie et Commerce, $16.4 militons; Richesses naturelles, $5.7 millions; Terres et Forêts, $6.7 millions; Tourisme, Chasse et Pêche, $18.3 millions; Transport, $44.3 millions; Travail et Main-d'Oeuvre, $200,000 pour un sous-total de $115,700,000 et au budget même de l'OPDQ, $78.4 millions, soit un total encore une fois de $194.1 millions.

Si on veut répartir cette somme autrement, soit entre les ententes fédérales-provinciales et le fonds de développement régional, voici comment ça se lit: entente ARDA, $10.5 millions; entente zones spéciales, $23.1 millions; entente Est du Québec, $37.8 millions; ententes-cadres, et les ententes auxiliaires qui s'ensuivent, $80.1 millions, soit un sous-total de $151.5 millions, si on y ajoute le fonds de développement régional de $42.6 millions, on arrive encore comme on le sait, à $194.1 millions.

Si on prend cette somme qui apparaît à l'entente-cadre de $80.1 millions, si on la décompose par ententes auxiliaires, voici comment ça se présente: axes routiers prioritaires, $30 millions; accès aux ressources forestières, $4.3 millions; SIDBEC, $5 millions; infrastructures industrielles, $11.4 millions pour un sous-total de $50.7 millions, si on ajoute les ententes auxiliaires en négociations, soit $29.4 millions, on arrive encore à un total de $80.1 millions.

M. Bédard (Chicoutimi): Tout en termes de millions.

M. Levesque: Au titre de fonds du développement régional, les crédits inscrits à l'OPDQ sont ventilés de la façon suivante: nous touchons le nouveau fonds de développement régional qui totalise $42.6 millions. D'abord, l'aménagement du bassin de la Yamaska, $7.4 millions; construction routière, $16.5 millions; aménagement de complexes industriels de pêche, $2.5 millions; voirie forestière, $4.3 millions; restauration historique de Place Royale, $2 millions, pour un sous-total de $32.7 millions et à ce sous-total, on ajoute une réserve pour permettre le démarrage d'autres projets en cours d'exercice pour $9.9 millions, pour arriver au total susdit de $42.6 millions.

M. le Président, on peut maintenant toucher les entités administratives. D'abord, administration de l'OPDQ: $3,531,500. Ce montant couvre les effectifs, traitements, honoraires, frais de voyages, dépenses afférentes à l'administration, au loyer, aux fournitures, aux approvisionnements, etc. Les travaux de la planification, $2 millions. Il s'agit des montants d'argent nécessaires à la réalisation d'études spécifiques, à l'identification de certaines

orientations du développement du Québec et de ses régions et l'élaboration de schémas régionaux de développement et d'aménagement.

C'est en raison de ces derniers que s'explique l'augmentation substantielle par rapport à 1974/75.

Les subventions aux CRD, conseils régionaux de développement: $1,415,500. Ces subventions de base sont versées aux CRD pour le développement de leurs activités courantes de concertation, d'information et de consultation.

L'office consent aussi des subventions dites de commandite pour des projets précis d'intervention.

Le Conseil de planification et de développement du Québec: $322,800. Ce conseil regroupe l'ensemble des grandes associations socio-économiques du Québec.

Le Bureau d'aménagement et de gestion du complexe scientifique: $169,600. C'est ce qui a été estimé pour le budget administratif de ce bureau d'aménagement.

Provision de l'OPDQ: c'est inclus dans la masse budgétaire de $194.1 millions, dont on a parlé il y a quelques instants. De façon plus précise, la provision de l'OPDQ en 1975/76, inscrite au programme 4, élément 6, est établie à $15,830,000.

J'aimerais dire un mot sur l'entente-cadre de développement. Comme vous le savez, c'est le 15 mars 1974 que fut signée l'entente-cadre de développement entre le Québec et le Canada. Essentiellement, cette entente est signée pour dix ans et elle permet de signer des ententes auxiliaires portant sur certains dossiers moteurs de développement et couvrant certains secteurs économiques significatifs, en tenant compte plus particulièrement de leurs incidences régionales.

Actuellement, quatre ententes sont signées. Certaines pour trois ans, d'autres pour quatre ans. La première entente à être signée fut celle de SIDBEC, au montant de $30 millions. Cette entente intervient à titre complémentaire à l'exécution de la phase 2 du plan d'expansion de SIDBEC, 1974/78.

La deuxième entente fut signée le 23 septembre 1974. Elle porte sur les axes routiers prioritaires 1974/79. Elle finance un premier projet, soit l'autoroute de l'acier, au montant de $44,275,000. D'autres projets routiers sont en cours de négociation et seront intégrés à cette entente auxiliaire.

L'entente auxiliaire sur l'accès aux ressources forestières a été signée le 26 mars 1975. Elle comporte une enveloppe de $24,200,000.

Enfin, une quatrième entente, soit celle des infrastructures industrielles 1974/78, a également été signée le 26 mars 1975. Elle prévoit des dépenses de $60 millions. Nous n'entrerons pas ici dans les détails de chacune de ces ententes.

Par ailleurs, l'OPDQ a déposé auprès du MEER, c'est-à-dire le ministère de l'Expansion économique régionale du gouvernement fédéral, une programmation dans différents autres secteurs économiques.

Nous sommes assurés que nous pourrons bientôt signer d'autres ententes auxiliaires que nous croyons être dans les secteurs suivants: En agriculture, pour favoriser l'assainissement des sols et l'aménagement foncier; dans le domaine des mines, pour encourager la prospection mi- nière, ouvrir de nouveaux chemins d'accès aux ressources et créer un centre de recherche minérale et en tourisme, pour créer un certain nombre d'infrastructures touristiques.

Par ailleurs, d'autres projets d'ententes ont été ou seront bientôt déposés sur la table de négociation. Par exemple, une entente sur le parc industriel aéroportuaire permettra l'aménagement, déjà commencé, du parc industriel relié aux cargos aériens.

Une entente sur le transport régional rapide aéroportuaire Montréal-Mirabel; une entente sur le secteur manufacturier prévoyant une contribution financière importante sur certains dossiers moteurs de développement.

Plusieurs de ces dossiers feront l'objet de notre préoccupation. A la suite de l'énumération de ces diverses ententes, il m'apparaît opportun de vous indiquer comment l'OPDQ procède dans leur préparation.

D'abord, l'OPDQ a préparé, avec les ministères du Québec, une première programmation de cinq ans de certaines activités jugées significatives à l'intérieur du processus budgétaire régulier. Les projets découlant de cette programmation ont ensuite été acheminés au Conseil du trésor et aux groupes ministériels des affaires économiques et du développement régional.

Ensuite, une seconde version à cette programmation se croisant a été présentée au ministère de l'Expansion économique régionale pour fins de négociation. Enfin, les ententes auxiliaires sont signées et administrées par un comité directeur dont le secrétariat est assuré par l'OPDQ.

Comme on peut donc le constater, il s'agit là d'un processus relativement complexe, mais, cependant, le climat actuel des relations entre l'OPDQ et le MEER sont excellentes et la signature prochaine de trois autres ententes auxiliaires porterait donc à sept, l'ensemble des ententes auxiliaires découlant de l'entente-cadre de développement.

Un mot maintenant du fonds de développement régional. L'an dernier, nous avions indiqué que le gouvernement avait l'intention de créer un fonds régional de développement qui ferait appel à des sources uniquement québécoises. En 1975/76, ce fonds régional de développement a été constitué pour un montant de $42.6 millions. Il est composé d'un montant de $32.7 millions, affectés à des ministères maîtres d'oeuvre et, comme je le mentionnais, il y a quelques instants, $9.9 millions sont prévus pour des projets et activités qui seront définis en cours d'année.

Ce fonds répond essentiellement à deux préoccupations majeures. La première préoccupation est celle d'octroyer à l'OPDQ un moyen d'intervention supplémentaire aux fins de développement régional. Ce moyen d'intervention peut être utilisé à l'occasion d'une rallonge budgétaire à accorder à certains ministères sectoriels qui, selon leur vision propre, n'auraient pas jugé opportun d'indiquer que ce projet est prioritaire dans leur budget régulier, mais qui, au nom du développement régional, s'avère important.

En second lieu, à l'intérieur de ce fonds de développement régional, l'OPDQ a, dans le courant de l'année, la possibilité de certaines interventions pour des projets et activités qui sont de-

venus nécessaires ou qui apparaissent nécessaires, à la suite de travaux de planification et de développement régional. Comme ce fonds était nouveau et qu'il fallait éviter certaines règles administratives concernant son utilisation, des séances de travail plus particulières ont été tenues entre des responsables du Conseil du trésor et des responsables de l'OPDQ. Les deux organismes se sont entendus sur un certain nombre de critères administratifs, par exemple que tous les projets amorcés par le fonds soient entièrement financés par lui, pour ce qui est de la partie gouvernementale. C'est-à-dire qu'il n'y ait pas de participation financière des ministères ou organismes du Québec autres que l'OPDQ, ni en 1975/76, ni au cours des années ultérieures, pour compléter les projets lancés en 1975/76, sauf sur des projets spécifiques et après entente avec le Conseil du trésor; que les montants du fonds ne se substituent pas à la participation prescrite des municipalités ou des organismes locaux dans des programmes réguliers du gouvernement du Québec ou du gouvernement du Canada; que le fonds ne s'engage que dans des projets du domaine public, c'est-à-dire qu'aucune subvention ne devrait être accordée à des individus ou à des entreprises à but lucratif, sauf sur des projets spécifiques et après entente avec le Conseil du trésor; que, dans le cas de nouveaux équipements destinés à des organismes ou aux collectivités locales, on se préoccupera que les organismes responsables de son utilisation soient en mesure d'assurer les frais d'exploitation sans devoir recourir nécessairement à des subventions gouvernementales spéciales; que, dans la mesure du possible, dans les projets d'équipements destinés à des organismes ou aux collectivités locales, ceux-ci contribuent à défrayer une partie des coûts d'immobilisation; que le fonds ne finance pas, en partie ou en totalité, des services de la dette, car ces engagements financiers s'étendraient alors sur une période trop longue; que le fonds, en partie, puisse servir à terminer certains projets lancés dans le cadre d'ententes régionales qui ne peuvent être assumées entièrement par ces ententes ou par les budgets réguliers des ministères; que les projets financés, en tout ou en partie, par le fonds devront recevoir, avant d'être amorcés, le visa de conformité de l'office et leur gestion financière tiendra compte des éléments de coordination prévus à la directive du Conseil du trésor à ce sujet, c'est-à-dire l'établissement d'un système de comptabilité auxiliaire et la présentation mensuelle d'un état d'évolution des dépenses.

J'ai voulu vous mentionner ces conditions, parce que je veux bien que l'on comprenne que le fonds de développement régional est soumis à au moins autant de règles administratives que les autres programmes administrés par l'OPDQ.

Un mot sur la planification socio-économique et sur la planification régionale.

Comme je l'ai indiqué précédemment, les crédits de l'office pour des travaux de planification sont passés de $800,000, en 1974/75, à $2 millions, en 1975/76. Il s'agit, comme on le constate bien, d'une augmentation importante. Ces crédits permettront à la fois de poursuivre les travaux généraux de planification socio-économique d'ensemble et d'entreprendre la fabrication de schémas régionaux de développement et d'aménagement.

Quant à la planification d'ensemble, les effectifs de la direction de la planification ont été modifiés récemment, passant de 36 à 49 personnes et le nombre de cadres a été augmenté de 7 à 14. Ces chiffres indiquent bien la volonté de l'office d'assumer pleinement ses responsabilités, en cette matière. Cette direction a, comme mandat, de définir l'orientation du développement socio-économique et d'organisation du territoire du Québec à moyen et long terme, en tenant compte de la situation du Québec dans le contexte canadien et international.

Elle a plus spécifiquement pour mandat, de concevoir et d'améliorer les méthodes, mécanismes et outils nécessaires à la planification, de travailler très étroitement avec les services de planification des ministères et organismes gouvernementaux aux fins d'animer, de coordonner les activités de planification au Québec, de maintenir, à cette fin, des liaisons permanentes avec les ministères et organismes du gouvernement québécois et ceux de l'administration fédérale, des milieux scientifiques et du secteur privé, à effectuer ou faire effectuer des recherches, études ou enquêtes nécessaires, à produire périodiquement des rapports techniques et des documents synthèses d'orientation comprenant l'analyse des tendances, les problèmes, les perspectives et les options et, à proposer les objectifs de priorités politiques, à donner des avis sectoriels sur les plans, projets d'études et de réalisations à caractère économique et socio-économique dans lesquels l'office est impliqué.

Pour accomplir son travail, la direction générale de la planification comprend quatre directions synthèses et neuf services d'études sectorielles Par ailleurs, la direction de la planification a travaillé, l'an dernier, sur la mise au point d'un dossier sur l'aménagement du territoire, ce qu'on appelle le cahier jaune. Des avis reçus du conseil de la planification et du développement et des ministères consultés soulignaient l'absence, dans ce document, d'une proposition, d'une stratégie de développement économique et d'un éventail d'options d'aménagement du territoire.

Suite à la publication du livre jaune, un certain nombre de rapports traitant du développement économique ont vu le jour et la direction de la planification en a fait l'analyse. Cette analyse a permis de constater plusieurs lacunes que le programme de recherche et de la planification visera à combler au cours de la prochaine année. On note, entre autres, que ces rapports et études économiques font amplement état des diagnostics de l'économie québécoise, des points faibles, des handicaps, des causes à structure industrielle actuelle, mais insistent peu sur les potentiels et les opportunités sur lesquels pourrait s'appuyer le développement économique futur du Québec, dans la mesure où le Québec ne peut être qualifié de grand pays industriel.

Il nous faut donc nous spécialiser de manière très sélective dans les domaines où il y a de bonnes chances d'exporter et donc d'être concurrentiels. Il est impérieux de faire une évaluation serrée de nos avantages comparatifs existant au potentiel. Dans cette optique, il nous faudra tenir compte des aspirations sociales et des incidences spatiales du développement. Il nous faudra tenir

compte également des règles du jeu du commerce entre pays, de la division internationale du travail, des stratégies des multinationales, de la demande future de technologie et ainsi de suite.

Il s'agit, comme vous le constatez bien, d'un dossier complexe et vaste qui demande du temps, de la réflexion et de la consultation. Nous espérons bien, au cours de l'année 1975/76, produire un rapport synthèse qui sera suffisamment présentable pour fins de discussions publiques.

Quant à la planification régionale, lors de la défense des crédits, l'an dernier, nous avions indiqué: "L'office amorce la création de schémas de développement et de l'aménagement pour chacune des régions du Québec. Où en sommes-nous rendus dans ce travail? Nous pouvons indiquer que nous marquons un très net progrès. Tout d'abord, au plan des structures, trois éléments méritent d'être indiqués, à cet égard. Tout d'abord, nous avons augmenté considérablement l'équipe de permanents qui travaille sur l'élaboration des schémas régionaux. D'une quinzaine de personnes qui travaillaient, l'an dernier, nous avons maintenant un plan d'effectif d'environ 45 personnes qui travailleront à temps plein sur l'élaboration de tels schémas. Ces effectifs sont groupés au sein de quatre directions régionales, la direction régionale de développement de l'Est, du Nord-Ouest, de la Côte-Nord, du Saguenay-Lac-Saint-Jean et du Nouveau-Québec; deuxièmement, la direction régionale de développement de l'Estrie, Trois-Rivières et de l'Outaouais; troisièmement, la direction régionale de développement de Québec et, quatrièmement, la direction régionale de développement de Montréal.

En second lieu, nous avons constitué, dans le cours de l'année, un comité interministériel de l'aménagement du territoire. C'est un comité constitué de onze sous-ministres qui se réunissent à tous les quinze jours pour analyser différents dossiers d'aménagement du territoire et du développement régional. Ce comité étudie donc de multiples dossiers allant de l'analyse de projets de loi à caractère de zonage jusqu'à des projets précis d'intervention dans différentes régions du Québec. Il est amené à formuler les avis qui sont acheminés au groupe ministériel des affaires économiques et du développement régional. L'OPDQ en assume le secrétariat technique.

Enfin, le troisième élément de cette structure est justement le groupe ministériel des affaires économiques et du développement régional composé d'une douzaine de ministres dont nous avons déjà parlé l'an dernier et qui se réunissent maintenant à chaque semaine tous les jeudis matin à 8 h 30. Ce groupe des affaires économiques et du développement régional que je préside, étudie les conséquences en termes de développement ou encore les problèmes de coordination interministérielle de multiples dossiers à caractère économique et le développement régional.

Voilà donc pour ce qui est des structures. Disons maintenant un mot rapide concernant le contenu et les échéanciers des schémas de développement et d'aménagement régional. Quant au contenu du schéma, celui-ci comprendra les éléments suivants: une analyse de l'ensemble des activités socio-économiques effectives et potentiel- les d'une région et des problèmes reliés au territoire; une série d'options qui permettront des choix collectifs; une batterie d'objectifs de développement et d'aménagement régional; une programmation des activités gouvernementales correspondant aux objectifs retenus. Quant à la période couverte, les schémas fixeront des objectifs de développement et d'aménagement à long terme — on parle de quinze ans — de manière à cadrer les actions à court terme — peut-être trois ans — qui permettront de les atteindre. Quant à l'espace considéré, les schémas s'élaborent sur la base des régions administratives telles qu'elles ont été définies en 1966 par le ministère de l'Industrie et du Commerce.

Quant au processus de planification, il permet la mise à jour des dossiers, d'inventaires et d'analyses, de façon systématique et continue. La problématique, les options, les objectifs et la programmation seront révisés à tous les trois ans.

En terminant cet exposé du début, je voudrais mentionner combien je suis heureux de la collaboration de tous mes collègues au groupe ministériel des affaires économiques et du développement régional, en particulier de mes collègues qui sont responsables avec moi de l'administration, des relations de la corporation de l'OPDQ avec le Conseil exécutif, les deux ministres d'Etat, le député de Chauveau et le député de Joliette. Je voudrais simplement souligner l'excellent travail du président directeur général et de son équipe à l'OPDQ, un travail que je considère extrêmement important et qui ne peut se faire que par une équipe très dynamique. Je dois reconnaître qu'à l'OPDQ il y a une équipe dont il me plaît de souligner l'esprit de travail, l'initiative, le dynamisme. Je crois que mes collègues partagent cette opinion, surtout lorsqu'on voit le travail quotidien et hebdomadaire qui se fait et les rapports rapides qui sont donnés. En même temps, lorsqu'on voit le travail considérable de négociation qui se poursuit et la façon dont on aboutit positivement à des actions concrètes à l'avantage des régions du Québec, je ne puis faire autrement que rendre ce témoignage à l'équipe qui m'appuie dans mes efforts.

Le Président (M. Gratton): Avant de céder la parole au député de Chicoutimi, vous me permettrez sûrement de remplacer parmi les membres de la commission M. Lacroix par M. Quenneville.

M. Bédard (Chicoutimi): Aucune objection. Le Président (M. Gratton): Le député de...

M. Levesque: M. le Président, simplement une question de procédure, vu qu'on est dans la procédure. J'avais mentionné au ministre d'Etat, le député de Joliette, responsable de l'ODEQ, que vu la présence des officiers de Rimouski de l'ODEQ ici, nous pourrions procéder cet après-midi. Après consultation avec le député de Chicoutimi en particulier, on demande de remettre à ce soir l'étude des crédits, parce qu'on ne s'attendait pas à les étudier cet après-midi. Si on pouvait le faire ce soir...

M. Bédard (Chicoutimi): La raison principale,

en fait, est que la responsabilité du dossier appartenait au député de Saguenay. Maintenant, étant donné qu'il est occupé en même temps comme critique au niveau de la commission des richesses naturelles, à ce moment, je prendrai le temps nécessaire pour pouvoir me mettre au courant du dossier et poser les questions qui s'imposent.

M. Levesque: On commencera ce soir par les crédits au nom du premier ministre, c'est-à-dire les programmes 1, 2 et 3, je crois, dont on dispose normalement assez rapidement.

Je ne sais pas ce soir ce qui va se passer. Ensuite, on reprendra, si on le veut bien... S'il y avait des changements, on pourra toujours se consulter.

M. Bédard (Chicoutimi): On s'ajustera en conséquence.

M. Levesque: C'est pour les fonctionnaires que je parle, parce que nous serons ici de toute façon, mais c'est pour qu'ils sachent...

M. Bédard (Chicoutimi): Je suis bien d'accord. C'est dans cet esprit que j'ai accepté d'accomoder le député de Saguenay, en tenant compte également du fait qu'il y a plusieurs fonctionnaires qui se sont déplacés pour venir à l'étude de ces crédits.

M. Levesque: II y avait un autre point aussi. Le ministre d'Etat, député de Chauveau, va poursuivre cet après-midi avec vous l'étude des crédits relativement à l'OPDQ, les programmes.

Le Président (M. Gratton): Le député de Chicoutimi.

M. Bédard (Chicoutimi): M. le Président, tel que l'a fait remarquer le ministre tout à l'heure, il nous a livré un aperçu général du travail du ministère dont il a la responsabilité. Naturellement, nous pourrons procéder dans quelques minutes à une discussion générale là-dessus. Maintenant, étant donné que pas mal de chiffres ont été apportés et que nous n'avons connu le contenu du discours du ministre qu'au moment où il l'a fait, je m'imagine que, pour une discussion générale éclairée et efficace, il y aurait avantage à ce que nous ayons une copie de cet exposé. Il s'agira de nous le fournir dans quelques minutes, à moins qu'on n'ait objection.

M. Levesque: Les chiffres, oui, tout est dans cela.

M. Bédard (Chicoutimi): C'est-à-dire avoir une copie de votre exposé.

M. Levesque: C'est parce que je les ai changés à mesure, c'est pour cela que...

M. Bédard (Chicoutimi): II y a tellement de millions de dollars.

M. Levesque: Je vais essayer de vous donner les chiffres pertinents. Vous pouvez continuer.

Commentaires de l'Opposition

M. Bédard (Chicoutimi): M. le Président, lors de l'exposé du ministre, tel qu'on l'a vu, on a pu s'en rendre compte, il y a eu beaucoup de temps qui a été consacré à l'analyse des dessous comptables qui nous ont amené l'image d'une danse de millions qui semble, à prime abord, très impressionnante et aussi donne l'impression qu'il y a beaucoup plus de millions que n'en a laissé entendre le ministre dans son exposé, qui sont à la disposition de l'OPDQ.

Je crois que les dessous comptables ont leur nécessité, mais j'ai quand même été surpris de voir que cela occupait une grande partie de l'exposé du ministre, parce que notre préoccupation, au niveau de l'Opposition, est moins de connaître cette comptabilité, ces jeux comptables, que de savoir précisément jusqu'à quel point l'Office de planification remplit son rôle, à savoir celui de planifier le développement du Québec. Il est clair que le fait qu'il y ait plus d'argent à la disposition du ministère, ne donne pas comme conséquence nécessaire qu'il y a plus de planification de la part de l'OPDQ, parce qu'on pourrait très bien concevoir un organisme de planification qui n'aurait que son budget interne à sa disposition et qui pourrait, à ce moment, remplir un rôle de planification de tout premier ordre.

M. le Président, il est clair que nous y reviendrons dans la discussion générale, mais l'augmentation de crédits, les jeux comptables, dont on nous a fait état, ne sont pas synonymes de concrétisation des schémas d'aménagement ou schémas de développement régional qui sont nécessaires au développement ordonné du Québec.

Pour ma part, M. le Président, au début de l'étude de ces crédits, je voudrais me faire le porte-parole d'une forte inquiétude que traversent les milieux municipaux, les CRD et tous les citoyens qui sont engagés, de quelque façon que ce soit, dans l'évolution progressive du Québec.

Ces inquiétudes, M. le Président, concernent la planification. D'ailleurs, elles sont d'autant plus dans l'ordre que j'ai remarqué que le ministre, dans son exposé, a été très savoureux lorsque, à un certain moment, il a cru bon de dire — c'est son expression — un mot sur la planification. En ce qui nous regarde, on va essayer d'en dire un peu plus que cela et d'espérer avoir des réponses, de la part du gouvernement, qui peuvent nous prouver non seulement qu'il y a des crédits supplémentaires qui sont octroyés au ministère, mais surtout qu'il se fait plus de planification dans le Québec qu'il ne s'en faisait auparavant, et d'avoir la conviction qu'en ce qui a trait à la planification, ce n'est pas la situation de bordel qui continue.

Enfin, M. le Président, ces inquiétudes, comme je l'ai dit, tant des CRD et des conseils municipaux que des agents intéressés au développement, concernent la planification. En fait, ce que tout le monde se demande ces temps-ci, ce sont les raisons réelles qui font que nous disposons de douzaines d'excellentes études de planification pour la plupart des régions du Québec, que ces études sont commentées, analysées dans les journaux, dans les conseils municipaux, dans les CRD, mais que, lorsqu'on a fait le tour, il n'y a

strictement aucune application de ces études, et je parle tout particulièrement des études concernant l'affectation des sols.

En effet, de ce côté, tout semble être inventorié, région par région. La plupart du temps, des propositions précises et sérieuses ont été faites, à savoir qu'il faut créer un parc à tel endroit, réserver tel endroit à l'agriculture, aménager un port ici, veiller, à cet endroit, à la qualité des équipements touristiques, etc. Tout cela, on le sait, et si le Québec n'avait pas d'études de planification dans les années soixante, maintenant, il semble qu'il y en ait trop, et de plus en plus de gens inquiets se demandent à quoi tout cela mène, toutes ces études, puisque aucune n'est appliquée systématiquement, puisque aucun mécanisme légal, puisque aucune structure de pouvoirs n'existe pour appliquer ces brillantes études menées, pour la plupart, par l'OPDQ ou encore des firmes spécialisées.

En parodiant Napoléon, on pourrait dire que la planification, M. le Président, est un art qui est tout d'exécution. On se demande si ces études n'ont pas pour but, finalement, de calmer la population, de lui faire croire que quelqu'un, quelque part, pense sérieusement à coordonner ensemble les diverses actions ministérielles et municipales.

Nous l'avons déjà mentionné, M. le Président. La planification au Québec, de ces temps-ci, semble avoir dégénéré puisque, d'une part, on néglige la coordination des actions municipales, et je pense ici à la loi-cadre sur l'urbanisme, cette loi qui deviendra bientôt un mythe, si cela continue, et que, d'autre part, la seule éruption des actions planificatrices semble être ces ententes auxiliaires qu'on annonce, comme une nouvelle marque de savon, périodiquement.

Il s'agit nettement de projets pièce à pièce, sans vision d'ensemble, et qui, la plupart du temps, étaient déjà dans les cartons des ministères concernés, comme l'autoroute de l'acier, par exemple, et bien d'autres projets.

M. le Président, la planification est devenue une manière de faire donner de l'argent par le fédéral à un projet précis. Ces ententes peuvent bien tenter de planifier le fédéralisme, mais qu'on ne vienne pas nous faire croire qu'elles planifient le Québec, qu'elles tentent de sauver la culture laitière sur la rive sud de Montréal ou de prolonger le chemin de fer dans le nord de la Gaspésie. Et on pourrait ajouter bien d'autres exemples, ce que nous ferons dans la discussion générale.

M. Levesque: C'est un vieux texte...

M. Bédard (Chicoutimi): Si on tente, M. le Président... Non, c'est un vieux texte... Ce n'est pas le même que celui de l'an passé...

M. Levesque: Quand on parle du chemin de fer...

M. Bédard (Chicoutimi): ... mais on s'aperçoit qu'avec le travail qui a été fait, il y a lieu de toujours revenir à la question principale, à savoir jusqu'à quel point cet Office de planification n'est-il qu'une façade et jusqu'à quel point on peut se rendre compte qu'il... En fait, il faut se creuser la tête pour essayer de voir s'il planifie vraiment le développement ordonné du Québec.

Si on tente, M. le Président, de laisser de côté ces exercices à la pièce que sont les ententes auxiliaires et qu'on va au fond du problème, on y trouve simplement l'absence de pouvoirs régionaux pour appliquer des études d'affectation des sols qui sont, d'ailleurs, presque toutes terminées et dans les cartons des différents ministères.

On connaît ce qu'il faut faire, mais il manque une volonté politique, du simple courage pour mettre en place les moyens de planifier. Ce devrait être la principale préoccupation du ministre au lieu de l'OPDQ, au lieu que l'OPDQ soit une filiale du ministère des Affaires intergouvernementales.

Bien sûr, M. le Président, le ministre — vous allez vous rendre compte que le texte n'est pas si vieux que cela, cela ne fait pas si longtemps que cela qu'elles sont signées, vos ententes auxiliaires — bien sûr...

M. Levesque: Je ne parle pas de tout le texte. Lorsque j'ai parlé du texte...

M. Bédard (Chicoutimi): Vous avez dit simplement un mot sur la planification. On va essayer d'en dire un peu plus.

M. Levesque: C'est lorsque le député a mentionné le chemin de fer en question; évidemment, c'est un peu vieux, cette histoire. Depuis ce temps...

M. Bédard (Chicoutimi): II n'y a rien de...

M. Levesque: ... il y a eu une route de construite...

M. Bédard (Chicoutimi): .. trop vieux pour vous rappeler que...

M. Levesque:... à même les fonds du chemin de fer.

M. Bédard (Chicoutimi):... votre idée de planification est peut-être vieille aussi, cette idée que vous faites miroiter, vraiment, avec l'OPDQ, de donner au gouvernement un véritable instrument de développement planifié. C'est une vieille idée, quand même. Mais on s'aperçoit que, même si elle est vieille, elle n'a pas mûri dans l'esprit du gouvernement et elle ne nous donne pas plus d'éléments pour croire qu'il se fait vraiment un travail de fond en termes de planification.

M. Levesque: Je pensais que le député en aurait profité pour nous féliciter pour les projets de sa région. Non, mais l'infrastructure industrielle, etc.

M. Bédard (Chicoutimi): C'est un projet de quelque $3,100,000. Vous ne voulez quand même pas que, pour toute une région, on se mette à genoux et qu'on tombe dans des félicitations à n'en plus finir...

M. Levesque: C'est du concret.

M. Bédard (Chicoutimi): ... parce qu'enfin, un

projet qu'on annonçait depuis quatre ou cinq ans est venu au terme de la réalisation. Il me semble que c'est le minimum... D'ailleurs, on aura l'occasion d'en discuter lorsqu'on...

M. Quenneville:... on avait parlé pour...

M. Bédard (Chicoutimi): ... saura ce que le ministère responsable de l'OPDQ réserve vraiment pour la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean. Il n'y a pas seulement le parc industriel. Il y a bien d'autres projets...

M. Quenneville:... on volait...

M. Bédard (Chicoutmii): ... dont nous aurons l'occasion de discuter tout à l'heure pour savoir si l'OPDQ a été vraiment sensibilisé par qui de droit.

M. le Président, bien sûr, le ministre nous annonce ces fameuses ententes auxiliaires et nous lui posons des questions sur telle entente ou sur la date de signature de telle autre entente. Le jeu du ministre est visible, même s'il ne s'en rend pas compte lui-même. Tout se passe comme si on voulait faire croire à la population, et même aux députés de cette Chambre ou aux fonctionnaires de l'OPDQ, que planifier signifierait se livrer à ces jeux publicitaires que sont les ententes auxiliaires. Jamais on a tenté de réduire la planification et le développement d'un pays à des données aussi restreintes. Mais les vraies questions, M. le Président, celles dont le ministre a soigneusement évité de parler, ce sont celles-ci: Pourquoi, malgré toutes les promesses faites depuis des années, rien de concret n'a-t-il été mis en place pour protéger les sols arables au Québec, si bien — et cela vous le savez, M. le Président — qu'il disparaît une ferme, toutes les trois heures, maintenant, au Québec?

Les études sont faites. On connaît les sols à protéger, mais rien ne bouge. Le gouvernement est empêtré dans ses petits amis qu'il dérangerait en combattant la spéculation foncière. A moins que ce soit l'immobilisme caractérisé qui fait que le Québec apparaît comme le paradis des spéculateurs, j'invite le ministre, juste pour son plaisir, à comparer la loi de l'Ontario ou de la Colombie-Britannique au laisser-faire qu'on retrouve ici.

Il y a une autre question dont le ministre a soigneusement évité de parler. Pourquoi le ministre des Affaires municipales retarde-t-il le projet de loi sur l'urbanisme et l'aménagement du territoire, cette loi qui doit être la clé de voûte de toute mise en place concrète de la planification du sol québécois? Toutes les études faites et qu'on peut imaginer qui devraient être faites ne demeureront que des masses de papier sans valeur tant que les municipalités n'auront pas concrétisé les schémas par des règlements de zonage pensés régionale-ment, c'est-à-dire les mécanismes prévus dans cette loi, dont un avant-projet, qui comportait des trous, mais qui, au moins, avait le mérite d'exister et de constituer un départ, a été déposé puis retiré sans raison sérieuse en 1972.

Quand on pense que le rapport LaHaye, qui se veut à l'origine de cette loi, date déjà de 1968, on réalise que la planification n'existe encore que de nom au Québec et, pire, cela ne préoccupe pas beaucoup le ministre, puisqu'il ne nous en parle pas. Comme le disait son exposé, il n'a qu'un mot à nous dire concernant la planification.

Dans le même sens, M. le Président, je pose la question au ministre et à son collègue des Affaires municipales, quelles actions a-t-il posées pour contrer la spéculation foncière à l'intérieur des villes? Le ministre des Affaires municipales nous a fait la réponse la plus insignifiante qu'on puisse imaginer, c'est celle-ci, textuellement: Je veux observer les effets de la loi ontarienne avant d'agir. Quand on sait qu'une telle loi prend au moins cinq ans avant de faire sentir des effets réels, on réalise qu'avec cette prétendue prudence qui n'est qu'une justification assez malhabile de l'immobilisme, cela ramène une action sur le terrain d'une future loi québécoise à près de dix ans. D'autre part, le ministre des Affaires municipales — et l'OPDQ aussi — même si c'est le ministre des Affaires municipales qui cristallise l'inaction gouvernementale en ce moment, ne connaît absolument pas la portée de la spéculation foncière intra-urbaine et, d'ailleurs, cela ne semble pas l'intéresser plus qu'il ne le faut. Il raisonne ainsi, m'a-t-il semblé, lors de l'étude des crédits de son ministère. Il prétend que la spéculation n'est pas si grave que cela, que nous pouvons nous permettre d'attendre et de voir les conséquences, comme je disais tout à l'heure, de la loi ontarienne. Par contre, le ministre nous dit qu'il n'a aucune étude sur la gravité de la spéculation foncière et, d'ailleurs, il ne croit pas que la situation soit si grave que cela.

De ces problèmes qui regardent vraiment la planification lorsqu'on parle vraiment de planification, les deux plus importants, et de très loin, qui confrontent la planification au Québec, c'est-à-dire l'affectation des sols déterminés non plus dans de beaux schémas théoriques, mais bien dans des lois et des règlements et aussi la spéculation foncière, les deux sont les deux côtés d'une même médaille. Sur ces deux points chauds de la planification au Québec, on n'annonce absolument rien du côté de l'OPDQ, comme si l'influence négative du ministre des Affaires municipales avait contaminé l'OPDQ lui-même.

Le ministre a beau nous annoncer les ententes auxiliaires qu'il voudra, tant que l'OPDQ ne sera pas en train d'appliquer sur le terrain, avec les municipalités, et les organismes régionaux, une politique d'affectation des sols, l'OPDQ, c'est notre humble opinion, ne sera qu'un paravent de plus en plus transparent au refus du gouvernement de s'attaquer aux vrais problèmes.

D'un côté, il y aura les belles études sur les bureaux de l'OPDQ, et, de l'autre, des intérêts très particuliers qui continueront à modeler le territoire du Québec à leur guise, à courte vue, et dans la seule optique de leur profit personnel. Planifier, nous le savons, n'est pas uniquement faire des études de planification, c'est aussi peser le terrain. Je répète que la planification est un art, mais qu'il est fait d'exécution. L'exécution se fait attendre trop longtemps, de la part de ce ministère.

Le Président (M. Gratton): Messieurs, le programme 4 est-il adopté?

Une Voix: Adopté.

M. Bédard (Chicoutimi): Au niveau de la discussion générale, le ministre serait-il en mesure de

nous donner la liste des ententes ou des projets qui font l'objet de négociation, à l'heure actuelle, avec le fédéral.

M. Lachapelle: M. le Président, je croyais que les ententes auxiliaires n'étaient pas importantes, d'après ce que vous venez de dire.

Ententes auxiliaires

M. Bédard (Chicoutimi): Si vous avez à répondre à tout cela, parlez-moi de la spéculation foncière, parlez-moi des vrais problèmes de la planification. On peut en parler. Je n'ai pas dit que ce n'était pas important. Je vous ai dit que ce n'était pas cela la planification. Qu'on n'essaie pas de nous faire accroire, avec une danse de millions et la danse de multiples ententes auxiliaires, qu'à ce moment on peut s'assoir et prétendre qu'on a fait de la planification au Québec. Si vous pensez que vous en avez fait, il s'agit pour vous de nous le démontrer.

M. Lachapelle: Je posais tout simplement la question, M. le Président, parce que le député de Chicoutimi semblait si peu accorder d'importance aux ententes auxiliaires, et sa première question porte précisément sur les ententes auxiliaires. Je me demandais si...

M. Bédard (Chicoutimi): Je vous demande la liste. Je ne vous ai pas dit que je passerais deux heures là-dessus. Voulez-vous me la donner?

M. Lachapelle: Je me demandais quelle conséquence il y avait dans vos propos.

M. Bédard (Chicoutimi): M. le Président, je vois que le gouvernement n'a pas grand-chose à répondre, en fait, concernant une discussion de fond sur la véritable planification. Nous passons, comme il se doit, à la période de questions concernant les crédits.

M. Lachapelle: Si je comprends bien...

M. Bédard (Chicoutimi): Vous me permettez, deux secondes? Si vous préférez une question peut-être plus générale, je vais vous la poser. Au point de vue de la planification en général, où en est la loi-cadre sur l'aménagement du territoire, dont un avant-projet a été déposé en 1972? Je voudrais savoir qui s'en occupe, au gouvernement et qu'est-ce qui la retarde d'une façon aussi inacceptable.

M. Lachapelle: On peut bien parler de la planification de façon générale. C'est peut-être cela qui serait le sujet à aborder.

M. Bédard (Chicoutimi): Pourvu que vous disiez quelque chose, allez-y.

M. Lachapelle: Je tiens pour acquis que vous voulez que nous disions quelque chose.

M. Bédard (Chicoutimi): Si c'est seulement acquis que vous avez quelque chose à dire.

M. Lachapelle: De façon générale, M. le Président, il faut bien se situer dans le contexte qui est celui du Québec présentement et dans celui qui a été notre contexte depuis quelques années, ici, au Québec, au sujet de la planification. Le concept lui-même de la planification, à quelque niveau que ce soit, en est un qui est encore, reconnaissons-le, et à tous niveaux, dans un processus d'évolution. D'ailleurs, ce qui a été noté tout à l'heure, par le ministre responsable, quant à la nouvelle orientation, et je souligne bien cette nouvelle orientation de l'OPDQ, non pas qu'elle soit tellement différente de ce qui a existé jusqu'à maintenant, mais qui, quand même, reflète une volonté politique certaine, c'est précisément dans le but d'en arriver à une planification, dans son sens le plus large, qui soit encore mieux coordonnée et encore plus systématique dans son élaboration.

D'ailleurs, le travail qui s'est effectué cette année, si ce n'est que la refonte des structures de l'OPDQ a précisément eu pour but de faire refléter davantage cette volonté politique de s'engager dans un processus de plus en plus évident de planification au niveau provincial et, par la suite, par voie de conséquence, aux autres niveaux.

D'ailleurs, non seulement la refonte des structures de l'OPDQ, mais également ce grand thème qui est celui de l'élaboration des schémas régionaux démontrent également cette volonté de s'engager de plus en plus dans un processus de planification. De ce travail des schémas régionaux découleront nécessairement des actions ponctuelles dans un très proche avenir. Qu'il s'agisse, au niveau du tourisme, d'une loi-cadre pour les parcs, qu'il s'agisse du zonage agricole — le discours du trône en faisait mention — qu'il s'agisse d'une loi-cadre d'urbanisme qui a été déposée il y a quelques années, mais laissée à la réflexion de la collectivité, ce sont autant d'instruments qui illustrent que non seulement il y a une volonté politique de planifier, non seulement il y a un besoin de faire des études en ce sens, mais il faudra — ceci va se produire — déboucher sur des actions concrètes.

M. Bédard (Chicoutimi): Si vous permettez, ces trois lois dont vous nous parlez, cela fait au moins trois ans qu'elles reviennent constamment.

M. Lachapelle: C'est possible. Quand même, c'est comme pour toute pièce de planification...

M. Bédard (Chicoutimi): Est-ce que c'est un thème, la planification?

M. Lachapelle: ... pour tout travail de planification qui est fait à l'OPDQ, si je le prends à titre d'exemple. Nous le fabriquons, c'est-à-dire dans le sens que nous le produisons, et nous le laissons à la consultation générale. Ce processus en lui-même en est un qui prend du temps. Je pense que c'est tout à fait normal que cela se déroule de la sorte. Il faut qu'il y ait matière à réflexion; il faut que la volonté locale s'exprime; il faut que les intérêts, si valables soient-ils, qui sont fort divergents dans une collectivité, s'expriment et c'est exactement l'exercice auquel nous nous sommes livrés et auquel nous allons nous livrer davantage. Je pense que cela est tout à fait normal.

M. Bédard (Chicoutimi): C'est un thème.

M. Levesque: Ce que le ministre vient de dire, c'est exactement le sens des remarques plus générales que j'avais faites au début, mais si le député de Chicoutimi persiste dans — je ne dis pas des accusations — ses hésitations, pour employer un terme moins fort, j'aimerais qu'il entende le président directeur général de l'office.

M. Bédard (Chicoutimi): Je dois vous dire que ce sont nettement des accusations.

M. Levesque: Une chance que vous avez un bon recherchiste à côté de vous. Vous avez votre dictionnaire.

M. Bédard (Chicoutimi): II me semble que c'est clair. Si vous voulez jouer ce thème...

M. Levesque: Je vais demander au président...

Le Président (M. Gratton): A l'ordre, messieurs! J'aimerais vous inviter, tous les membres de la commission, à vous adresser au président. Je me sens seul ici, en avant, et j'aimerais qu'on me parle.

M. Levesque: D'accord, M. le Président.

M. Bédard (Chicoutimi): M. le Président, je soulève quand même un point d'ordre.

Le Président (M. Gratton): L'honorable ministre, vous avez la parole.

M. Bédard (Chicoutimi): Je soulève quand même un point de règlement. Le ministre, je ne sais pas si c'est malicieusement ou autrement, fait souvent allusion au recherchiste. Il a l'air de vouloir laisser oublier que...

M. Levesque: Au contraire.

M. Bédard (Chicoutimi): Avez-vous la parole ou...

M. Levesque: Je ne sais pas.

M. Bédard (Chicoutimi):... la demande-t-on au président?

M. Levesque: Si vous voulez l'avoir encore, prenez-là.

M. Bédard (Chicoutimi): II me semble que c'est la politesse. Il veut souvent faire allusion au recherchiste. Il semble oublier que, derrière lui aussi, il a non seulement des recherchistes, mais passablement de monde qui a travaillé...

M. Levesque: C'est cela.

M. Bédard (Chicoutimi): ... et qui serait peut-être plus en mesure d'expliquer son texte que lui-même n'est capable de le faire.

M. Levesque: C'est un autre genre de politesse. Probablement que cela vient d'un autre...

M. Bédard (Chicoutimi): Je vous retourne votre compliment.

M. Levesque: ... souci d'objectivité.

M. Bédard (Chicoutimi): Je vous retourne votre compliment, franchement.

Zonage

M. Levesque: M. le Président, je pense qu'en matière de zonage, il faut distinguer deux sortes de zonage. Il y a ce qu'on appelle le macrozonage et la microzonage. Le macrozonage, ce sont les grands zonages au niveau de l'ensemble des régions du Québec, pour l'ensemble du Québec, et aussi pour chacune des régions du Québec. Pour répondre aux besoins de zonage, ce qu'on appelle le macrozonage, on qualifie cela comme étant les grandes zones agricoles, les grandes zones forestières, les grandes zones touristiques, les grandes zones urbaines, les grandes zones industrielles et, à l'intérieur de cela, je pense que le ministre La-chapelle, tout à l'heure, l'a indiqué, et M. Levesque l'a indiqué aussi dans son texte, il y a quatre documents, quatre textes de loi qui regroupent ces besoins de macrozonage; d'abord, en termes de ce qu'on appelle le patrimoine historique et culturel et de ce qu'on appelle les arrondissements naturels.

Le ministère des Affaires culturelles a, actuellement, de par sa loi, le pouvoir de faire un macrozonage pour les zones historiques et les zones naturelles.

D'autre part, le ministère des Terres et Forêts a, de par le dernier dépôt de la Loi sur les réserves écologiques, le pouvoir de décréter des réserves écologiques très importantes. Il a aussi le pouvoir, de par sa loi constitutive, de faire des réserves en termes de réserves forestières, c'est-à-dire tout ce qu'on appelle les fameuses unités d'aménagement, les 42 unités de réaménagement, en termes d'unités de production de la matière ligneuse. Il y a ensuite — c'est M. Lachapelle qui l'indiquait tout à l'heure — aussi, actuellement en discussion, ce qu'on appelle la loi-cadre des parcs qui va proposer un grand zonage des principaux parcs au Québec. Il y a, en plus, le ministère de l'Environnement, le service de l'environnement qui, à travers les règlements administratifs, décrète un certain nombre de zones qui apparaissent comme étant une forme de macrozonage, qui devraient être protégées plus particulièrement quant à des normes d'environnement.

Vous comprenez, à ce moment, évidemment, qu'avec ces grands macrozonages, on peut arriver avec certains conflits entre l'Agriculture, par exemple, et les Forêts. Le ministère des Terres et forêts voudrait que telle zone soit forestière. Le ministère de l'Agriculture dit: Je pense que cette zone doit être agricole. Mais, sur un même territoire aussi, le ministère du Tourisme peut dire: Je pense que ce territoire devrait être récréatif. Pour pallier et pour faire les arbitrages, le groupe des

ministres, le groupe ministériel aux affaires économiques a créé ce qu'on a appelé — ce qui a été souligné dans le texte de tout à l'heure— le comité de l'aménagement du territoire. C'est un comité de onze sous-ministres que nous présidons et dont nous assumons le secrétariat technique, qui fait l'arbitrage au niveau des ministères centraux à Québec, sur les arbitrages entre les différentes propositions de zonage des ministères. C'est ce qu'on appelle le macrozonage.

Evidemment, il y a ensuite, à l'intérieur des plans d'urbanisme, à l'intérieur de la loi municipale actuelle... Ce sont les municipalités qui sont chargées de faire les plans d'urbanisme, qui doivent conduire à des plans, des propositions de zonage, ce qu'on appelle du microzonage, c'est-à-dire, par exemple, les zones d'habitation, les zones de centres de commerce, les parcs récréatifs internes à une municipalité. C'est au sein des municipalités et c'est la loi-cadre, l'avant-projet ayant déjà été déposé, il est vrai. Mais, étant donné le problème suivant, ce sont les municipalités qui sont vraiment responsables — même le projet de loi-cadre le proposait — du microzonage, des plans de lotissement dans une municipalité. C'est au nom du principe suivant qui est fondamental en termes de municipalités, à moins qu'on pose vraiment le problème fondamental des municipalités, c'est qu'il faut que la municipalité, parce qu'elle élit son conseil municipal, parce que ce conseil municipal a un pouvoir de réglementation, un pouvoir aussi de taxation... Vous savez tout le mécanisme qui existe quand on change un règlement de zonage dans une municipalité. On va en référendum auprès des citoyens qui se sont acheté une propriété privée et qui ont le droit d'habiter le territoire qui leur avait été garanti comme étant une utilisation résidentielle X.

De la même façon, si une municipalité se doit d'avoir des plans d'équipement pour rencontrer une extension de son territoire dans son plan d'urbanisme, elle doit, à ce moment, aller en référendum auprès de sa population pour lui demander si la population est d'accord pour payer les dépenses capitales.

Il faut très bien distinguer, je pense, entre les deux niveaux, le macrozonage et le microzonage. Le macrozonage, on a le mécanisme interministériel au niveau des ministères et, ensuite, ce dossier s'en va au groupe des affaires économiques du développement régional. Mais, ce macrozonage, lui aussi, doit être éclairé par ce qu'on appelle les schémas régionaux de développement et d'aménagement. Ce n'est pas tout de faire du grand zonage dans des régions, à travers l'Agriculture, les Forêts, etc. Encore faut-il fixer des objectifs de développement, étudier la région elle-même. C'est vrai qu'il y a beaucoup d'études, mais on n'a pas encore des synthèses de toutes les régions en même temps, systématiquement, dans toutes les régions du Québec.

Or, ce qui est proposé c'est que, dans toutes les régions du Québec, en même temps, à tous les trois ans, il y ait un schéma d'aménagement qui va définir les options de développement, qui va dire quelle est la problématique du développement de cette région, quels sont les options de développement qui sont proposées et qui sont discutées ensuite avec les ministères, la population, les conférences, administratives régionales?

Troisième point, quels sont les programmes gouvernementaux qui devraient être appliqués dans ces régions et, ensuite, quelles sont les propositions de zonage, de macrozonage ou les arbitrages, en termes de différents ministères, qui devront s'appliquer dans cette région?

C'est essentiellement cela, je pense, qui a été expliqué tout à l'heure, par le ministre, M. Levesque. Je pense que c'est un mécanisme très important, parce qu'il n'est pas possible de faire seulement le microzonage. Il faut qu'il y ait un macrozonage éclairé par des schémas régionaux de développement qui vienne éclairer les plans d'urbanisme locaux avec les microzonages qui sont la résultante des plans d'urbanisme.

Le document qui a été déposé récemment, par M. Godlbloom, à l'Union des municipalités, ce sont des propositions qui conduiront à la remise à jour de l'avant-projet de loi-cadre qui avait été déposé il y a déjà deux ou trois ans.

M. Bédard (Chicoutimi): Quand vous parlez de macrozonage, il y en a combien de fait? Où en êtes-vous rendus, concernant les différentes régions du Québec? Est-ce que c'est fait dans toutes les régions du Québec?

M. Levesque: C'est-à-dire que, actuellement, au niveau des ministères, chaque ministère — il faut bien comprendre comment les ministères fonctionnent et comment on fonctionne avec les ministères — fait une première proposition de ce qu'il pense être le territoire des réserves écologiques, le territoire agricole à protéger, le territoire récréatif, etc.

Nous, en tant qu'OPDQ, nous avons essayé de faire faire l'arbitrage entre les ministères, comme je l'expliquais tout à l'heure. Les propositions, actuellement, en ce qui concerne les réserves écologiques—il y avait justement, cet après-midi, une séance avec les onze ministres — nous avons sur la table, actuellement, des propositions du ministère des Terres et Forêts, mais il y a certains ministères qui ne sont pas d'accord avec les territoires que le ministère des Terres et Forêts voudrait réserver comme réserves écologiques.

Les sous-ministres examinent cela et font des propositions au palier ministériel pour qu'on tranche finalement sur les utilisations du territoire.

Schémas d'aménagement

M. Bédard (Chicoutimi): J'ai l'occasion d'avoir en main un schéma d'aménagement — c'est un macrozonage, j'imagine — d'ensemble de la vallée du Richelieu où on spécifie les endroits qui seront réservés, d'une part, pour le grand parc régional, les réserves boisées à protéger, les réserves écologiques, les zones de préservation agricole, les zones d'industrialisation, le périmètre d'urbanisation à fixer, en fait, les autoroutes projetées et tout cela. Ce que je voudrais savoir, c'est qui va décider? Il y a différents ministères qui sont concernés par chacun de ces problèmes.

M. Levesque: Ce n'est pas ce qui vient d'être décrit comme le macrozonage de la province. Il ne s'agit même pas d'un schéma régional pour une région donnée...

M. Bédard (Chicoutimi): C'est un schéma d'ensemble.

M. Levesque: ... c'est une sous-région, à ce moment.

M. Bédard (Chicoutimi): Quand on le prend comme exemple, c'est un schéma...

M. Levesque: Quand on parle de régions, on parle de l'ensemble des régions administratives, telles que définies en 1966 par le ministère de l'Industrie et du Commerce. C'est toute la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean; c'est toute la région du Nord-Ouest; c'est toute la région de l'Outaouais; c'est toute la région de l'Est du Québec; c'est toute la région de la Côte-Nord; c'est toute la région administrative de Québec, ce sont les dix, c'est dans ce sens qu'on parle de macrozonage.

M. Bédard (Chicoutimi): Mais, je vous donne cela à titre d'exemple. C'est une étude, je crois, qui a été faite par une firme, pour l'OPDQ, qui représente un schéma d'ensemble de la vallée du Richelieu. Donc, quand vient le temps de prendre une décision, puisqu'il y a plusieurs ministères concernés, qu'est-ce qui arrive exactement?

M. Levesque: Un dossier comme cela est acheminé au comité interministériel de l'aménagement du territoire avec les sous-ministres dont j'ai parlé tout à l'heure, parce qu'il faut bien voir que cela, c'était un rapport d'experts qui nous avait été présenté. Il est examiné et les ministères nous disent si, selon eux, selon ce qu'ils voient, ce qui est proposé dans le texte est bon.

Nous, à ce moment, il faut faire la synthèse des propositions qui peuvent être contradictoires d'un ministère par rapport à l'autre. Parce qu'un ministère peut fort bien dire: La réserve qui est prévue, on n'est pas d'accord, parce qu'on pense que cela devrait être l'Agriculture. L'Agriculture dit: Je pense que cela devrait être récréatif et vice versa. Il faut donc faire les arbitrages et faire les propositions. Ensuite, s'il y a des conflits, définitivement, entre des ministères au niveau administratif, il faut que l'arbitrage se fasse finalement au palier ministériel.

M. Bédard (Chicoutimi): Par exemple, vous pourriez peut-être nous fournir un exemple d'un macrozonage qui est complètement fini pour l'ensemble dune région.

M. Levesque: Nous avons eu, encore tout récemment, un exemple, seulement à titre d'illustration. Si un territoire donné doit être affecté uniquement à l'agriculture ou si, par exemple, il peut supporter la présence de lignes d'Hydro-Québec. Nous avons eu un exemple comme celui-là. Il a été étudié par le comité interministériel en question. Les recommandations ont été apportées au groupe ministériel des affaires économiques du développement régional. C'est un cas particulier qui est amené ici, mais c'est encore le même principe. C'est comment le territoire du Québec sera affecté et quelle est la vocation de telle et telle région ou sous-région. Dans l'illustration que je viens de donner, il s'agissait de savoir si on exi- geait d'Hydro-Québec de modifier son tracé pour protéger les territoires agricoles. A ce moment, il y a un arbitrage à faire.

M. Bédard (Chicoutimi): Je pense qu'on peut assez bien comprendre les mécanismes que vous employez pour essayer de faire la planification. D'ailleurs, vous nous les avez explicités passablement dans le même sens lors de l'étude des derniers crédits, l'an passé. Où en êtes-vous rendus? Cela a débouché sur quoi tout cela, jusqu'à maintenant, en termes de travail et de résultats?

Le Président (M. Gratton): L'honorable ministre, le député de Chauveau.

M. Lachapelle: M. le Président, je pense que les incidences des schémas d'aménagement sont quand même nombreuses. Qu'on parle de l'aménagement du bassin de la Yamaska, c'est quand même un schéma d'aménagement. Si on parle de la zone Mirabel, c'est quand même un schéma d'aménagement. Si on parle du couloir fluvial de Montréal, qui devrait, je pense, aboutir incessamment à des propositions concrètes, c'est une forme de schéma d'aménagement. Il y a également des schémas d'aménagement dans des régions fortement urbanisées, telles que la Communauté urbaine de Montréal qui, d'elle-même, a produit un schéma d'aménagement, de la région de Québec, qui doit incessamment, si mes renseignements sont bons, par le biais de la Commission d'aménagement, produire un schéma d'aménagement. L'ensemble de l'est du Québec s'est prêté en premier lieu à un schéma d'aménagement. L'île d'Anticosti également est en voie d'être pensée et réfléchie en fonction d'un schéma d'aménagement. Donc, les incidences d'aménagement, cette volonté politique de planifier, ont été démontrées à nombre d'occasions.

Maintenant, nous allons un pas plus loin. C'est ce que nous affirmons lorsqu'on dit que le schéma doit prendre, doit couvrir le territoire d'une région administrative, parce que cela nous apparaît être les frontières les plus faciles pour les fins de l'élaboration d'un schéma. J'oubliais même l'Outaouais, quand même, qui a fait l'objet d'un schéma d'aménagement fort important et qui, je pense, n'est pas conclu encore, mais qui est fort avancé. Alors, il s'agit maintenant, dans le prolongement de cette volonté politique de planifier, d'y donner une dimension plus large encore, qui est celle du schéma d'aménagement régional. C'est ce dans quoi nous nous engageons présentement d'une façon résolue, à preuve, la refonte des structures de l'OPDQ qui avait précisément comme objectif de faire réfléter dans les structures cette volonté politique et aussi la volonté politique qui a été exprimée par le discours inaugural en ce qui regarde certaines lois-cadres très particulières qui seront déposées au cours de la session actuelle.

Parallèlement à cela, et simultanément à cela, il y a cette planification beaucoup plus vaste pour l'ensemble du Québec, planification socio-économique qui a connu sa première manifestation via le livre jaune dont nous parlions l'an passé. Voici un exemple d'un document extrêmement important, qui a été déposé sur la table comme cela pour que d'abord les ministères nous

disent ce qu'ils en pensent. Nous sommes en voie de digérer le tout. Quand cela sera fait, nous allons le mettre à la disposition du public, à toutes fins pratiques, des populations, des corps intermédiaires, afin qu'eux aussi nous donnent le fruit de leur réflexion. Tout ceci ne prend pas trois semaines, ni trois mois, à moins, bien sûr, qu'on veuille enfoncer dans la gorge des municipalités certains axes directeurs de développement, mais cela n'a pas été notre marque de commerce jusqu'à maintenant, et nous n'avons aucunement l'intention d'adopter ce genre d'approche.

M. Bédard (Chicoutimi): Vous m'avez donné quelques exemples de schémas d'aménagement par rapport à certains projets précis qui ont pu être rendus possibles. Si on fonctionne à partir de régions administratives complètes, est-ce qu'il y a des schémas d'aménagement qui sont terminés pour des régions administratives?

M. Levesque: Oui, il y a le schéma de l'Outaouais. C'est un schéma de développement et d'aménagement, parce qu'au niveau d'une région administrative, ce sont d'abord les objectifs de développement qui viennent éclairer les objectifs d'aménagement. Il y a le schéma de l'Outaouais qui est en cours maintenant. Il y a eu une première consultation qui a été faite au niveau du Conseil régional de l'Outaouais, il y a déjà maintenant sept ou huit mois. Le document a été ensuite cheminé au niveau de l'ensemble des ministères. Nous sommes en train de compléter ce dossier. Au mois de septembre, on aura le document pour fins d'une deuxième discussion avec le public, ses orientations de développement et d'aménagement de l'ensemble de la région administrative de l'Outaouais. Donc, cela va avoir comme réaction de porter un certain nombre de jugements sur d'autres schémas qui ont été faits à d'autres niveaux, c'est-à-dire la Communauté régionale de l'Outaouais pour la partie urbanisée de l'Outaouais, le schéma de la Commission de la capitale nationale aussi, qui est un schéma qui a été déposé récemment, de même que le schéma de développement de l'est de l'Ontario qui a été déposé récemment. Donc, c'est pour la région de l'Outaouais. Il y a ensuite un autre schéma de développement qui est en cours depuis maintenant un an et demi à la suite de l'étude-cadre qui avait été faite dans la région de Québec. Il y a un schéma de développement et d'aménagement pour l'ensemble de la région administrative de Québec, qui devra tenir compte du schéma d'aménagement de la Communauté urbaine de Québec, qui est fait par la communauté, comme le disait M. Lachapelle tout à l'heure. Ce sont les deux régions actuellement où il y a des schémas de développement et d'aménagement.

Ce qui est formulé ici, c'est que, dorénavant, ce ne sera pas une région après l'autre où il y aura des schémas de développement et d'aménagement, ce sont toutes les régions en même temps, de façon systématique et remises à jour tous les trois ans, de façon que chaque région sache en même temps les interrelations d'une région l'une par rapport à l'autre, les objectifs de développement qui sont proposés, les objectifs d'aménagement aussi qui sont proposés, les programmes gouvernementaux qui devront être affectés par ces objectifs à atteindre en termes de développement et d'aménagement, et aussi les conséquences dont les instances municipales devront tenir compte par rapport à leur propre planification sur leur territoire urbain ou urbanisé ou municipalisé.

M. Bédard (Chicoutimi): Quand vous parlez du schéma d'aménagement et de développement de l'Outaouais, dans votre optique, quand cela peut-il avoir force de loi?

M. Levesque: M. le Président, là, on pourrait peut-être préciser qu'un schéma de développement, pour nous, cela n'a pas nécessairement force de loi. Ce n'est pas un plan d'aménagement au sens d'une loi de zonage du type de microzonage dont je parlais tantôt. Là, où il y aura force de loi, c'est au niveau des directives administratives par rapport aux directives sectorielles, c'est-à-dire au grand zonage sectoriel. Par exemple, lorsque la loi-cadre des parcs sera déposée et qu'elle permettra de décréter des territoires de parcs, par arrêté en conseil, nous imaginons en tout cas, pour le moment le mécanisme est en train d'être analysé par l'ensemble des sous-ministres, qu'il y aura des arrêtés en conseil qui décriront le territoire du parc lui-même. A ce moment, ce sera le zonage lui-même qui sera applicable à des tiers. C'est comme cela qu'on entend procéder.

M. Bédard (Chicoutimi): Si on va d'une région à l'autre, pour la région de Québec, quand prévoyez-vous que le schéma d'aménagement et de développement...

M. Levesque: En septembre, il y aura un document-synthèse sur la région de Québec qui comprendra d'abord une problématique du développement de Québec. Quels sont les grands axes du développement de Québec, de la région administrative de Québec? Quand on regarde la région administrative de Québec, on se rend compte qu'on a dit traditionnellement que c'était une fonction administrative, une fonction touristique, une fonction de recherche scientifique à cause de l'université, du complexe scientifique, et une fonction de développement industriel. On s'est posé des questions, à savoir comment se ferait ce développement industriel. On s'est rendu compte que c'est par le fait qu'il y a eu un port, donc peut-être avec une possibilité d'axer le développement industriel sur les exportations d'un certain nombre de produits, et que ce serait intéressant de développer la fonction industrielle de la région de Québec. C'est la région disons dans un rayon d'à peu près 50 milles de Québec. Mais il a fallu se poser d'autres questions. Ce n'est pas tout de réfléchir sur la région dans un rayon de 50 milles de Québec. Il faut encore voir quelles sont les relations avec les sous-régions, comme la région de Portneuf, comme la région de Thetford Mines, comme la région de Montmagny, comme la région de Charlevoix.

On a vu récemment que la région de Charlevoix elle-même, qui avait été identifiée dans nos réflexions dès l'étude de cadrage de Québec et le schéma qui sera rendu public bientôt au niveau de

l'ensemble de la région administrative de Québec, avait une fonction touristique prioritaire. Cela a été discuté avec la population et on a creusé davantage cette fonction. Dans cette programmation, pour vous montrer le lien entre le microzonage et la macrozonage, il est prévu qu'il y aura deux schémas de secteurs qui seront faits dans la zone de Baie-Saint-Paul ou aux alentours et dans la zone de la Malbaie ou Pointe-au-Pic, de façon que les gens puissent identifier les microzonages qui sont directement applicables à eux sur leur territoire, dans le territoire de la municipalité. Ces schémas de secteurs seront faits dans le courant de l'année par les municipalités sous l'aide technique des Affaires municipales.

M. Bédard (Chicoutimi): Si on prend la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean?

M. Levesque: Pour la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, la région du Nord-Ouest du Québec, c'est-à-dire de l'Abitibi-Témiscamingue, la région de la Côte-Nord, la région de Trois-Rivières, la région de Sherbrooke, la région de l'Est du Québec, toutes ces régions, pour mars 1976, on prévoit pouvoir systématiquement déposer dans un premier temps d'abord au palier administratif, au palier d'une discussion, au palier des ministres, ensuite au palier, une fois ces documents analysés et discutés, des conseils économiques régionaux, un document qui sera la problématique de développement de ces régions. Ensuite, si les gens sont d'accord sur...

M. Bédard (Chicoutimi): C'est une date sérieuse quand vous me dites...

M. Levesque: Oui, forcément. M. Bédard (Chicoutimi): D'accord.

M. Levesque: Les indications qui sont données ici par rapport à des effectifs de 45 personnes a temps plein à l'OPDQ, plus du personnel à temps plein dans des ministères sur ce dossier, nous incitent à penser que cette démarche sera réalisée dans ses objectifs comme on prévoit. Donc, en mars 1976, première problématique de ces sept régions que je viens de mentionner. En mars 1977, il y aura pour chacune des régions dépôt des propositions des objectifs de développement et des options de développement. C'est le calendrier qui est proposé ici dans la démarche de planification de l'OPDQ.

M. Bédard (Chicoutimi): Si on prend la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, il y a eu le bill 98 qui a été adopté, pour ne pas dire imposé, et qui amène en fait la formation d'une grande ville dans le Haut-Saguenay. Je pense que cela s'imposait. Là-dessus, je suis d'accord. Maintenant, le conseil métropolitain a eu — ne vous mêlez pas — la fonction de voir à faire un schéma d'aménagement concernant le Haut-Saguenay.

A ce moment, est-ce que, dans l'optique d'une véritable planification, est-ce qu'il n'y aurait pas lieu, non pas de procéder seulement à un schéma d'aménagement pour le Haut-Saguenay, mais de procéder à un schéma d'aménagement pour l'en- semble de la région, parce qu'il est clair que l'aménagement qu'on va faire dans le Haut-Saguenay peut avoir, en tout cas, des conséquences concernant l'autre partie de la région qu'est le Lac Saint-Jean. Pourtant, on procède simplement pour le Haut-Saguenay.

M. Levesque: M. le Président, on pourrait peut-être prendre exemple. Je pense que c'est un bon exemple pour illustrer la démarche. Il y a déjà quand même, depuis maintenant quatre ans, presque cinq ans, eu une mission avec des fonctionnaires du territoire et de l'ensemble des ministères du Québec qui ont étudié l'ensemble de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean, c'est ce qu'on a ap pelé la mission du Saguenay-Lac- Saint-Jean. Ils ont proposé un certain nombre d'objectifs de développement et de programmes d'interventions sur le territoire. Pour donner un exemple, c'est de cette mission qu'a découlé le programme agroforestier. Les ministères des ressources, l'Agriculture, les Forêts, les Richesses naturelles, le Tourisme nous ont dit: Ecoutez, nous, ensemble, par rapport à des objectifs de développement de cette région, on pense qu'on devrait faire un plan agroforestier. Avec l'ensemble des ministères et l'OPDQ, on a fait une programmation de ce que pourrait être ce dossier et nous avons négocié ensuite dans une proportion de 50%-50% le financement et la réalisation de ce programme agro-forestier dans le cadre de la mission Saguenay-Lac-Saint-Jean, par le biais d'ARDA.

Ce que nous voulons faire maintenant dans cette démarche actuellement, qui est proposée pour mars I976, par rapport à la définition d'une première esquisse préliminaire, c'est de refaire, de revoir tout le dossier de la mission qui avait été fait à ce moment, remettre à jour toutes les données fondamentales du développement du Saguenay-Lac-Saint-Jean. En d'autres termes, se dire: Revenons aux objectifs de la mission. En 1969, il était dit: Le Saguenay-Lac-Saint-Jean a une vocation forestière d'abord, deuxième point, il a une vocation qui est basée sur l'aluminium, il a aussi une vocation agricole très importante. Par ailleurs, il y avait une autre dimension qui était aussi importante, le Saguenay-Lac-Saint-Jean, qui a 285,000 habitants, a une population métropolitaine regroupée de 160,000 à 165,000 habitants. Donc, il faudrait — c'est cela qui était recommandé dans la mission — faire un effort spécial pour créer une structure particulière pour le Haut-Saguenay, de façon à pouvoir répondre à des besoins urbains pour le développement urbain de cette zone et, d'autre part, essayer de promouvoir davantage certains dossiers de développement en termes miniers, en termes forestiers, etc.

C'est donc actuellement, et c'est en mars qu'on va voir, à la lumière de toutes les nouvelles données, si la population du Saguenay-Lac-Saint-Jean, entre autres questions, a baissé depuis 1969. Est-ce que la croissance des emplois a augmenté ou baissé depuis 1969? Est-ce que la croissance du secteur minier a augmenté ou non? Là, on va regarder certains projets comme Ferchibal qui est un dossier très important. On va regarder certains dossiers comme actuellement c'est regardé très attentivement par l'OPDQ et les ministères, le dossier Saint-Félicien, pour voir s'il n'y a pas moyen d'avoir une accroissance du côté des ressources

en termes de développement économique, qui ferait qu'il y aurait peut-être une certaine stabilisation, non pas seulement dans la zone du Haut-Saguenay, mais dans l'ensemble de la région du Saguenay-Lac-Saint-Jean.

C'est d'une part, au niveau de l'ensemble de la région. D'autre part, l'OPDQ avec le ministère des Affaires municipales, nous avons travaillé au conseil métropolitain à essayer de préciser davantage, en relation avec l'ensemble de la région, quelle est la vocation propre, en termes de développement et en termes d'aménagement, du territoire du Haut-Saguenay. Lorsque ce schéma sera ait, les municipalités elles-mêmes devront faire leur propre plan d'urbanisme local. C'est une dé-narche à trois niveaux: un schéma de développement et d'aménagement au niveau de l'ensemble de la région administrative, un schéma d'aménagement du territoire au niveau de la zone métropolitaine par le conseil en étroite relation avec le ministère des Affaires municipales comme conseil technique, et nous, l'OPDQ, comme éclairage de la région. Ensuite, les municipalités qui sont membres du conseil métropolitain au niveau du territoire municipal proprement dit. C'est cela le modèle général dans toutes les régions qui est proposé ici. Sinon, on est obligé de dire: L'addition de tous les plans d'urbanisme des municipalités pourrait peut-être faire un plan d'aménagement. L'addition de tous les plans d'aménagement au niveau de trois ou quatre comtés ou de trois ou quatre sous-régions pourrait faire un plan de développement d'une région. Pour nous, c'est l'inverse. On dit: On va d'abord regarder l'ensemble du développement économique de la province pour venir éclairer les schémas de développement régionaux et d'aménagement du territoire de la région au niveau de chacune des régions administratives qui va venir éclairer dans les zones métropolitaines, que ce soit le Haut-Saguenay, que ce soit la région urbaine de Trois-Rivières, que ce soit la région urbaine de Sherbrooke, que ce soit la région urbaine de Québec, de Montréal, de l'Ouaouais, pour venir éclairer le schéma d'aménagement métropolitain.

Ce schéma d'aménagement métropolitain viendra fixer les plans d'urbanisme au niveau de la municipalité pour les microzonages, les plans de construction, les règlements de construction, les plans de lotissement, etc. C'est cela qui est proposé fondamentalement dans la démarche.

M. Lachapelle: M. le Président, il y a peut-être une autre dimension également qu on pourrait ajouter aux explications extrêmement complètes qui viennent de nous être données par M. Tremblay. Un schéma d'aménagement n'est pas quand même une camisole de force dans laquelle une région donnée doit évoluer. Ce n'est pas gravé pour toujours dans {a pierre, l'avenir et le développement d'une région.

M. Bédard (Chicoutimi): Dans certains cas, on sait qu'il faut que ce soit flexible.

M. Lachapelle: C'est éminemment évolutif, cela, compte tenu des circonstances et compte tenu de l'évolution démographique, de l'évolution économique d'une région, et c'est dans cet esprit que le schéma est élaboré. D'ailleurs, des méca- nismes sont prévus pour qu'à des périodes données on effectue des révisions de ces schémas pour que, d'une façon continue, on puisse remettre à jour l'orientation et les axes de développement des différentes régions du Québec.

Je le signale parce qu'on croit souvent qu'un schéma d'aménagement peut vouloir dire qu'on grave dans la pierre, pour ainsi dire, l'avenir d'une région. Ce n'est pas le cas. Ce sont des propositions qui ne doivent pas, en soi, avoir un caractère juridique ou coercitif. Ce sont des propositions de développement qui, évidemment, vont faciliter grandement la coordination des activités de tous les intervenants gouvernementaux, soient-ils au niveau provincial ou au niveau municipal. Mais, encore là, faut-il voir ces mêmes schémas avec une certaine souplesse et avec un certain réalisme, ce qui ne nous empêche pas, tout en faisant ces nombreuses activités de planification dont on vient de vous parler pendant une demi-heure, de faire simultanément des actions ponctuelles, des actions qui, quand même, débouchent vers des interventions qui sont pour le plus grand bien de la collectivité, soit par le biais des ententes auxiliaires ou par le biais de toute autre intervention. Les ententes auxiliaires auront permis, pour le moins, un parc industriel à Chicoutimi et j'ose croire que le député de l'endroit est quand même heureux de cette situation.

M. Bédard (Chicoutimi): Cela faisait assez longtemps qu'on attendait après. On a été très heureux que cela aboutisse, il n'y a pas de doute là-dedans. Ce n'est pas parce que vous avez accordé le parc industriel à Chicoutimi qu'on va arrêter de discuter de ce qui concerne votre ministère, à savoir la planification. Lorsque le ministre nous dit qu'un schéma d'aménagement doit avoir un caractère flexible, tout le monde convient de cela. D'ailleurs, il nous l'avait dit lors de l'étude des crédits l'an dernier, c'est le simple réalisme qui le commande. Il faut aussi que ce schéma d'aménagement ait une base solide si on ne veut pas être placé devant la situation que n'importe qui vienne changer n'importe quoi à son gré et selon ses désirs. Dans ce sens, si on parle de schémas d'aménagement placés sur une base solide, je crois que vous conviendrez avec moi qu'il y a une nécessité urgente que les trois lois dont on a parlé tout à l'heure deviennent une réalité, à savoir la Loi sur les réserves forestières, la Loi concernant la protection des terres arables et également la loi-cadre sur l'urbanisme. Je ne sais pas si vous convenez avec moi que c'est quand même une base nécessaire, si on ne veut pas voir des schémas d'aménagement construits à grands renforts de dévouement être chambardés du jour au lendemain selon les caprices de...

M. Lachapelle: M. le Président, j'en conviens très bien. Je pense bien que toute notre action jusqu'à maintenant a été à cette enseigne, mais elle a aussi été à l'enseigne d'une consultation maximale auprès de tous les intéressés et cela aussi, je pense, est aussi capital que la production de quelque chose qui est fini ou à peu près, parce que jamais nous n'imposerons à la volonté locale une pensée qui n'est pas la sienne.

M. Bédard (Chicoutimi): Simplement.

Le Président (M. Gratton): Messieurs, il est 18 heures.

M. Bédard (Chicoutimi): On continuera à...

Le Président (M. Gratton): Les programmes 4, 5 et 6 sont-ils adoptés? Sinon, tel que convenu...

M. Bédard (Chicoutimi): On a le droit de rêver, M. le Président.

Le Président (M. Gratton): Tel que convenu, à la reprise, nous procéderons à l'étude des programmes I, 2 et 3.

M. Levesque: Si vous me le permettez, M. le Président, dès que le premier ministre arrivera, nous pourrons passer à l'étude des programmes I, 2 et 3. S'il n'était pas arrivé, on continuera avec l'ODEQ ou avec celui-ci, selon les...

M. Bédard (Chicoutimi): J'ai quelques questions. Pour accommoder, nous passerons ensuite au programme de l'ODEQ.

M. Levesque: A l'ODEQ. D'accord! Dès que le premier ministre arrivera et qu'il voudra intervenir, on pourrait reprendre l'étude des programmes I, 2 et 3.

Le Président (M. Gratton): La commission suspend ses travaux jusqu'à ce soir, 20 h 15.

(Suspension de la séance à 18 heures)

Reprise de la séance à 20 h 20

M. Gratton (président de la commission permanente de la présidence du conseil, de la constitution et des affaires Intergouvernementales): A l'ordre, messieurs!

La commission de la présidence du conseil, de la constitution et des affaires intergouvernementales continue l'étude des crédits du conseil exécutif et, tel que convenu, plus spécifiquement les programmes 1, 2 et 3.

Le premier ministre.

M. Bourassa: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Gratton): Le programme 1 est-il adopté?

M. Bourassa: On peut adopter l'administration et après, je serai disponible pour les questions de nature générale, pour libérer peut-être mon...

M. Morin: M. le Président, nous aurons des questions à poser sur chaque programme, mais auparavant, avec votre permission, j'aurais quelques questions à poser au premier ministre sur divers sujets. C'est la coutume que nous puissions discuter de tout à l'occasion de l'étude du programme 1, à moins que le premier ministre ne veuille faire une déclaration liminaire.

M. Bourassa: M. le Président, ma déclaration liminaire serait peut-être d'adopter les programmes administratifs, quitte à revenir sur les questions de nature générale. J'ai quelques pères de famille qui m'accompagnent et qui voudraient peut-être pouvoir se libérer un peu plus tôt, avec la collaboration de l'Opposition. Après cela, je serais disponible pour toutes les questions qui viennent à l'esprit du chef de l'Opposition sur tous les sujets. Mais si nous pouvions adopter les programmes, les questions de salaires, de traitements, des choses comme celles-là, qui ne posent pas tellement de problème...

M. Morin: C'est-à-dire exactement quels programmes?

M. Bourassa: Les programmes 1, 2 et 3, le salaire du chef du cabinet ou celui de M. Rivest, ou des choses comme cela où on peut passer assez rapidement.

M. Morin: Ce sont des questions secondaires, je crois.

M. Bourassa: Oui, assez secondaires.

Le Président (M. Gratton): Si nous les prenons un par un, le programme 1: Bureau du lieutenant-gouverneur.

M. Morin: M. le Président, j'aurais quelques questions tout de même à poser. Ce sera très bref. Je suis disposé à adopter effectivement les trois premiers; ensuite nous pourrons passer à l'étude de questions plus générales.

M. Bourassa: Merci, M. Morin.

Bureau du lieutenant-gouverneur.

M. Morin: Au programme 1, nous notons une augmentation d'environ $80,000 d'un seul coup. Le budget passe de $189,100 à $269,100. Pourrait-on justifier cette augmentation, somme toute plus que substantielle du budget? Je vois que ce sont surtout les traitements qui expliquent cette augmentation, mais j'observe que le nombre d'employés permanents demeure le même, soit seize, et j'aimerais connaître le détail des augmentations de traitements qui sont consenties.

M. Bourassa: C'est pour la sécurité de la résidence du lieutenant-gouverneur, qui était aux Travaux publics et qui est passée au bureau du lieutenant-gouverneur. C'est un transfert.

M. Morin: Un transfert d'employés. M. Bourassa: Oui, d'employés.

M. Morin: D'employés de sécurité, mais comment se fait-il que le nombre demeure le même? Il est de seize, dans les deux cas. L'année dernière, il était déjà de seize et il reste le même cette année.

M. Bourassa: On me dit que ce sont des employés à honoraires.

M. Morin: Je comprends. Ils n'apparaissent donc pas comme employés permanents.

M. Bourassa: C'est cela. C'est une firme de sécurité.

M. Morin: C'est ce qui explique ces $40,000 d'augmentation.

M. Bourassa: J'ai $34,377 ici.

M. Morin: La différence que vous m'expliquez se trouve-t-elle à la catégorie 1 : traitements, ou à la catégorie 4: services?

M. Bourassa: C'est à services.

M. Morin: C'est aux services. Mais je vous interrogeais sur la catégorie des traitements. Qu'est-ce qui explique l'augmentation de $40,000 de traitements pour un nombre d'employés qui demeure le même?

M. Bourassa: Ce sont les augmentations régulières, M. le Président, pour l'ensemble des fonctionnaires, il y a eu des augmentations assez importantes avec le forfaitaire. La révision des traitements compte pour $24,000.

M. Morin: Bon, je comprends mieux. La révision de traitements est de $24,000. Le reste des $40,000 qu'est-ce que c'est?

M. Bourassa: Surtemps 1.5, avancement d'échelon et indexation 1.7, traitement pour postes vacants 8.5, occasionnels 1.5.

M. Morin: Ce qui fait $16,000.

M. Bourassa: A peu près... au calcul rapide.

M. Morin: Bien. Nous sommes disposés à adopter le programme 1, M. le Président.

Le Président (M. Gratton): Programme 1 adopté. Programme 2: Administration des élections.

M. Caron: M. le Président, un instant. Il y a M. Rivest qui travaille 24 heures par jour...

M. Bourassa: Tout d'abord, il ne travaille pas 24 heures par jour, il est pour la plupart du temps au tennis.

M. Caron: Quasiment. Je voudrais savoir comment il se fait qu'il avait moins que d'autres...

Le Président (M. Gratton): Programme 1 adopté. Programme 2: Administration des élections.

Administration des élections

M. Morin: J'ai quelques questions à poser sur ce programme, M. le Président. Dans son rapport de 1973, à la page 3,— 62, le Vérificateur général a constaté que des dépenses étaient effectuées par le bureau du président des élections sans être approuvées par le président ou par un haut fonctionnaire mandaté à cet effet. Ce rapport du vérificateur a été déposé au mois de juin 1974. J'aimerais demander au Premier ministre si on a vérifié quelles sont ces demandes de paiement qui n'ont pas été approuvées. Combien y en a-t-il eu, et quelles sont les raisons de cette lacune administrative?

M. Bourassa: Maintenant on m'assure que cela a été corrigé. Le président des élections est maintenant autorisé à approuver ces dépenses.

M. Morin: Pourriez-vous, néanmoins, me dire quels sont les montants qui ont été versés de la sorte?

M. Bourassa: Les montants ne sont pas mentionnés par le Vérificateur général.

M. Morin: Je ne pense pas... il n'y a pas de montant, M. le Président.

M. Bourassa: On pourrait vérifier.

M. Morin: Je vous donne lecture du paragraphe, si cela vous intéresse: "Nous avons constaté qu'un certain nombre de demandes de paiement de dépenses du bureau du président général des élections ne sont pas approuvées par ce dernier ou l'un de ses hauts fonctionnaires dûment autorisé à assumer cette responsabilité. Nous sommes d'opinion que cette lacune administrative devrait être corrigée".

M. Bourassa: C'est-à-dire que c'était fait directement, à ce qu'on m'assure, au ministre des Finances. La loi disait que cela se faisait directe-

ment au ministre de Finances. Les comptes des présidents d'élections étaient envoyés au ministre des Finances, mais maintenant, cela est approuvé par le président des élections.

M. Morin: Toujours à l'administration de la loi électorale, j'aurais une question plus fondamentale, qui n'est pas d'ordre administratif, à poser au Premier ministre.

Une Voix: Les sondages?

M. Morin: Non, nous pourrions aborder ce sujet si le Premier ministre le voulait, mais je crois que cela retarderait indéfiniment son dîner; je sais qu'il a l'estomac creux, je ne voudrais pas le retenir toute la nuit avec une discussion sur qui a raison dans les derniers sondages.

M. le Président, j'aimerais souligner au Premier ministre le fait qu'aux Etats-Unis, d'après une loi du Congrès qui s'institule Federal Elections Campaign Act, on a confié à celui qu'on appelle là-bas le contrôleur général des élections le rôle de servir comme bureau général de renseignements pour les élections, sur tout ce qui touche aux élections aux Etats-Unis, ce qu'ils appellent "a National Clearing House for information with respect to the administration of elections". Le contrôleur général peut, en vue de réaliser cet objectif, conclure des contrats, faire faire des études indépendantes sur les élections. Déjà, le président général des élections au Québec publie un rapport statistique général à la suite de chaque élection. Il fait aussi certaines analyses ou prépare certaines études à l'occasion pour le gouvernement ou pour la commission de l'Assemblée nationale.

J'aimerais demander au premier ministre, s'il ne croit pas opportun d'accorder une initiative plus large au président général des élections du Québec, qui lui permettrait d'agir auprès de l'Etat et auprès du public comme un bureau d'information sur les élections, de demander à des sources indépendantes, non gouvernementales, des études sur divers aspects du comportement électoral des Québécois, par exemple. Je songe à une histoire électorale du Québec, à des études comparées entre les élections telles qu'elles se font ici et telles qu'elles se font ailleurs, sur les caractéristiques socio-économiques du personnel politique ou des électorats québécois. Est-ce qu'il ne serait pas utile que l'Assemblée nationale et l'opinion publique en général aient à leur disposition de telles études? Je sais qu'elles se font déjà dans les universités et les instituts de recherche. Mais, j'ai l'impression que, pour qu'elles atteignent le grand public, il ne serait pas mauvais que ce soit le président général des élections qui prenne l'initiative de telles études.

M. Bourassa: M. le Président, l'idée vaut certainement la peine d'être examinée, mais cela se ferait comment, par des commandites à des universitaires?

M. Morin: Entre autres. Cela pourrait aussi être fait au sein du bureau du président général des élections. Je n'ai pas de méthode privilégiée à suggérer au premier ministre, mais je sais que cela se fait ailleurs.

M. Bourassa: Actuellement, je crois que le chef de l'Opposition a fait partie de l'Institut de recherche de la faculté de droit à l'Université de Montréal.

M. Morin: Non, j'ai remis ma démission et je puis rassurer le premier ministre: Je ne cherchais pas à obtenir un contrat indirectement!

M. Bourassa: Non, non...

M. Morin: Ce n'est pas ce qu'il insinuait, naturellement.

M. Bourassa: Bien non, parce que je comprends que le chef de l'Opposition n'est pas encore disponible pour obtenir des contrats comme commandite d'universitaires.

M. Morin: Non.

M. Bourassa: Je ne pouvais pas penser à ...

M. Morin: D'ailleurs, je n'ai pas été associé à l'Institut, depuis déjà deux ou trois ans.

M. Bourassa: C'est pour signaler l'excellent travail que fait l'Institut et c'est pour dire au chef de l'Opposition que même si sa suggestion paraît très valable, il faudrait éviter des dédoublements dans ce genre de recherche ou d'étude. Je n'aurais pas d'objection à ce que le bureau de la présidence des élections puisse fournir le maximum de renseignements, mais quant à faire des études sur les attitudes socio-économiques, je me demande si ce ne sont pas typiquement des études de nature universitaire.

M. Morin: Sûrement, l'aspect universitaire ne doit pas être négligé, mais en général, les études universitaires sont très savantes et intéressent surtout les politologues ou les spécialistes des questions électorales. Ce dont je vous parle, M. le premier ministre, c'est d'études vulgarisant les comportements électoraux, qui pourraient être mis à la disposition du public et pourraient peut-être éclairer les Québécois sur leurs propres comportements électoraux.

M. Bourassa: Cela vaut la peine. La suggestion du chef de l'Opposition est positive, mais il y aurait des risques d'interférence politique, les interprétations qui pourraient être faites de ces études et jusqu'à quel point on ne risquerait pas de voir la présidence des élections être accusée de partialité si, disons... On a vu l'interprétation qui a été donnée par certains adversaires poliiques au rapport Cliche. C'est le genre de risques que nous avons quand nous avons des études par des organismes gouvernementaux.

M. Morin: Je constate que le premier ministre veut mêler les sauces, ce soir.

M. Bourassa: Non.

M. Morin: S'il le veut bien, nous allons laisser le rapport Cliche de côté; on en parle dans une autre commission.

M. Bourassa: C'est cela. Et je vois que...

M. Morin: Les ondes vous en parviennent d'en haut, c'est cela! Est-ce que le premier ministre voudrait au moins considérer la suggestion et en saisir le...

M. Bourassa: Oui, oui.

M. Morin: ... président général des élections qui n'est pas tellement loin de lui, d'ailleurs.

M. Bourassa: D'accord, il m'a dit qu'il faisait beaucoup, jusqu'à maintenant, au point de vue des renseignements qui pouvaient être fournis à différents groupes, mais systématiser cela davantage, je suis prêt à discuter de cela avec lui. Je vais demander à mon chef de cabinet d'en discuter avec lui dans les prochaines semaines.

M. Morin: Pour ce qui est des chiffres du programme 2, j'imagine que l'augmentation draconienne de $1,737,200 à $4,154,900 est due au fait que cette année on a revu la carte électorale. C'est bien cela?

M. Bourassa: C'est à cause du recensement. Il n'y a pas d'élection prévue là, c'est pour rassurer le chef de l'Opposition, c'est à cause du recensement prévu pour cette année. C'est pourquoi on a d'avance augmenté le montant.

M. Morin: Le recensement de l'automne? M. Bourassa: De l'automne, oui.

M. Morin: Est-ce qu'il n'a pas lieu chaque année? C'est un recensement annuel, c'est une liste annuelle.

M. Bourassa: II n'y avait pas de révision en septembre dernier non plus.

M. Morin: Mais la révision ne coûte pas $3 millions, $2,500,000.

M. Bourassa: On me dit qu'en I974 cela a coûté $3,700,000. Comme on a une révision additionnelle, cela explique le montant de $4,200,000. Je suppose qu'il y a eu un budget supplémentaire, ce serait plutôt cela.

Une Voix: Non, non.

M. Bourassa: A même le fonds consolidé, c'est cela.

M. Morin: Nous parlons bien du recensement des électeurs, ce qu'on appelle quelquefois, en terme vulgaire, l'énumération. C'est de cela dont nous parlons.

M. Bourassa: Oui.

M. Morin: Est-ce qu'il y en a eu une en 1974/75? Normalement oui.

M. Bourassa: On me dit que, dans les années précédentes, cela ne partait pas de chiffres réels et que cette année on a voulu — si je comprends bien, je veux dire les avis qui me sont donnés — essayer de prévoir un chiffre plus réaliste, alors que, dans les années précédentes, c'était à même le fonds consolidé en vertu de la loi que les montants étaient complétés.

M. Morin: Je comprends. Autrement dit, le montant mentionné pour 1974/75 n'est pas le véritable montant.

M. Bourassa: Non.

M. Morin: Ah bon! Je m'explique un peu mieux la différence considérable entre les deux montants. Cela avait plus que doublé d'une année à l'autre; cela paraissait pour le moins un peu étonnant.

M. le Président, nous' sommes disposés à adopter le programme 2.

Le Président (M. Gratton): Programme 2, adopté. Programme 3: Organismes-conseils auprès du premier ministre et du Conseil exécutif.

Organismes-conseils

M. Morin: J'ai quelques questions là-dessus. Tout le monde peut imaginer, M. le Président, que le premier ministre procède à l'heure actuelle, avec sa discrétion coutumière, à un réaménagement de son cabinet, en particulier depuis le départ de M. Paul Desrochers. Le premier ministre pourrait-il nous faire le portrait général de son cabinet actuel? Plus précisément qui remplace M. Paul Desrochers, avec quel mandat et avec quel salaire?

M. Bourassa: M. le Président, j'ai annoncé la nomination de Maurice Paradis qui n'est pas encore inscrit, qui était à honoraires et qui va reprendre une bonne partie du travail de M. Desrochers pour ce qui a trait à des dossiers économiques ou spéciaux. M. Paradis a une très large expérience...

M. Morin: Pourriez-vous nous donner un exemple du type de dossier économique que vous pensez lui confier?

M. Bourassa: Je pense au projet Ferchibal, par exemple, que M. Desrochers avait examiné avec M. Gilles Bergeron qui est maintenant affecté à la question de l'hébergement pour les Jeux olympiques. M. Paradis a une très bonne expérience et est très respecté dans tous les milieux.

M. Morin: M. Paradis va-t-il avoir quelque chose à voir avec la baie James?

M. Bourassa: Non, pas d'une façon spécifique. Ce qu'on a reproché à M. Desrochers, c'est d'avoir essayé d'éviter des grèves à la baie James. Il ne faut quand même pas exagérer.

M. Morin: Je ne voulais pas entrer là-dedans, mais si le premier ministre veut que nous parlions du rapport Cliche, c'est une autre affaire.

M. Bourassa: On a présenté ça comme des...

alors qu'il a essayé de placer des travailleurs à la baie James et a empêché des grèves...

M. Morin: Oui.

M. Bourassa: Ce qu'on n'a pas dit sur M. Desrochers pour des choses comme ça.

M. Morin: Une toute petite infraction qui consistait à ne pas respecter la loi.

M. Bourassa: Je vous en prie, M. le Président, c'est absolument faux. Ce n'est pas parce qu'il y a des réunions exploratoires pour améliorer les lois. A ce compte-là, tous ceux qui veulent améliorer les lois seraient dans l'illégalité.

M. Morin: Le premier ministre manie l'euphémisme avec beaucoup de dextérité. Mais passons. Est-ce que M. Desrochers a reçu des deniers de l'Etat pour quelques services rendus depuis son départ officiel qui, si ma mémoire est bonne, a eu lieu le 1er avril 1974?

M. Bourassa: D'ailleurs, M. Desrochers avait ralenti considérablement son activité depuis bien avant son départ officiel, à cause de raisons de santé. Je ne crois pas qu'il ait reçu... Non, pas depuis le 1er avril 1974.

M. Morin: Donc...

M. Bourassa: Peut-être des frais de voyages qui ont été remboursés après, mais pas...

M. Morin: Les dossiers spéciaux que vous lui aviez confiés, même après son départ, ont-ils été abandonnés par lui ou bien faisait-il cela pour la gloire ou pour le bien commun?

M. Bourassa: Mon chef de cabinet a repris ces dossiers pour les confier à M. Paradis et je suppose que, s'il avait un point obscur, il pouvait communiquer avec M. Desrochers qui pouvait être disponible au téléphone pour le renseigner sur un point ou sur un autre.

M. Morin: M. Desrochers n'avait donc pas véritablement de dossiers entre les mains?

M. Bourassa: C'est ça, il n'y avait aucun dossier. Il a quitté de fait et de droit le 1er avril 1974 et, comme je l'ai dit, même avant son départ, il avait ralenti son activité. Donc, à ce moment-là, les dossiers avaient déjà commencé à être remis à d'autres personnes. Donc, lorsque son départ officiel est arrivé, il ne restait pas tellement de dossiers en plan.

M. Morin: J'oubliais de vous rappeler cette autre partie de ma question sur le remplaçant de M. Desrochers. Quel est le salaire qui lui sera versé ou quels sont les honoraires que vous avez prévus?

M. Bourassa: $33,000.

M. Morin: Ce qui représente...

M. Bourassa: 50 semaines de 5 jours, $33,000.

M. Morin: 105 jours?

M. Bourassa: Non, 5 jours, 50 semaines.

M. Morin: En fait, il sera au service du cabinet du premier ministre à temps plein.

M. Bourassa: Oui.

M. Morin: M. Jean Prieur est-il toujours consultant à honoraires?

M. Bourassa: Non, il est secrétaire exécutif. M. Morin: Secrétaire exécutif à temps plein? M. Bourassa: Ah oui!

M. Morin: Est ce qu'il y a d'autres consultants?

M. Bourassa: Qu'est-ce que vous entendez, à temps plein, à part M. Prieur?

M. Morin: A temps plein d'abord, oui.

M. Bourassa: Vous ne voulez pas parler de fonctionnaires?

M. Morin: Non, je parle de M. Prieur qui, auparavant, était consultant, n'est-ce pas?

M. Bourassa: C'est ça.

M. Morin: II avait le statut de consultant, est-ce que je me trompe?

M. Bourassa: C'est ça. Si je vous comprends bien, il n'y en a pas d'autres.

M. Morin: II n'y en a pas d'autres. Qu'en est-il de M. Michel Guay?

M. Bourassa: M. Michel Guay est en disponibilité, il a démissionné de son poste. Il est en Afrique dans le moment.

M. Bellemare (Rosemont): M. le Président, est-ce que le chef de l'Opposition pourrait me dire combien gagne son chef de cabinet?

Le Président (M. Gratton): A l'ordre, messieurs! D'abord, je devrai demander à la commiss-sion son consentement pour que le député de Rosemont puisse prendre la parole, parce qu'il n'est pas membre de la commission, Est-ce qu'on a le consentement?

M. Bellemare (Rosemont): Merci, M. le Président, je respecte votre autorité.

M. Morin: M. le Président, à condition que ce soient des questions intelligentes, je n'ai pas d'objection.

M. Bellemare (Rosemont): Je pense que c'est assez intelligent. Je ne pense pas...

M. Morin: Non. Vous ne savez pas consulter les comptes publics, M. le député?

M. Bellemare (Rosemont): Je ne consulte pas les comptes publics.

M. Morin: Vous avez tort.

M. Bellemare (Rosemont): Je demande combien gagne votre chef de cabinet. Est-ce que c'est stupide ou intelligent ou "désintelligent"?

M. Morin: Vous irez consulter les comptes publics. En attendant, c'est moi qui pose les questions. Si vous avez des questions, posez-les au premier ministre.

M. Bellemare (Rosemont): Continuez à poser des questions stupides et idiotes.

Le Président (M. Gratton): A l'ordre! Le chef de l'Opposition officielle.

M. Morin: Merci, M. le Président. Est-ce que le premier ministre...

M. Bellemare (Rosemont): Vous n'avez pas répondu à ma question.

Le Président (M. Gratton): A l'ordre!

M. Morin: Est-ce que je vais être interrompu encore, M. le président? Le député n'est pas membre de la commission.

Le Président (M. Gratton): Je ne le pense pas.

M. Morin: Je veux bien lui permettre de participer aux travaux de la commission, mais si c'est pour les interrompre, je vais m'y opposer.

M. Bellemare (Rosemont): Qu'il soit très calme, je ne j'interromprai plus parce que, quand on veut mentir, on garde le silence.

Le Président (M. Gratton): A l'ordre, messieurs!

M. Morin: M. le Président, je voudrais demander...

M. Bellemare (Rosemont): Cela fait sourire le chef de l'Opposition.

Le Président (M. Gratton): A l'ordre, s'il vous plaît! Le chef de l'Opposition.

M. Morin: Est-ce que le premier ministre voudrait bien dresser pour nous la liste des membres de son cabinet qui reçoivent en salaire et honoraires plus de $15,000.

M. Bourassa: Pour soulager le chef de cabinet, je vais donner ça: Benoît Morin, $37,000; Jean-Claude Rivest, $29,200; Charles Denis, $29,200; René Beaulieu, $19,000; Jean Prieur, $32,000; Marcel Laliberté, $19,000; Jean-Pierre Ouellet, $19,000; Lawrence Cannon, $16,000; Ber-the Drouin, ma secrétaire... Je peux aller plus loin, si vous voulez.

M. Morin: Non, je voulais seulement demander les montants supérieurs à $15,000.

M. Bourassa: Normand Bolduc, $16,000; François Coderre, $22,000; je n'en vois pas d'autres. C'est tout. J'essaie d'en trouver d'autres, mais je n'en vois pas. C'est assez raisonnable, quand même. Est-ce qu'on peut dire que le personnel donne l'exemple de l'austérité?

M. Morin: M. Gilles Néron ne relève pas directement de votre cabinet, n'est-ce pas?

M. Bourassa: C'est le secrétariat général, dirigé par M. Chouinard.

M. Morin: Puisque vous mentionnez M. Chouinard, le secrétaire général du Conseil exécutif vient d'être nommé juge, à ce qu'on nous a appris...

M. Bourassa: Oui.

M. Morin: ... et je pense que ce n'est pas le premier ministre qu'il faut convaincre de la nécessité de nommer à ce poste, qui constitue vraiment une charnière au sein du gouvernement, quelqu'un qui soit de la même qualité, du même calibre que M. Chouinard.

Le premier ministre a-t-il déjà jeté son dévolu sur une personne en particulier?

M. Bourassa: Le chef de l'Opposition veut-il me proposer son chef de cabinet?

M. Morin: II m'est trop précieux pour cela. M. Bellemare (Rosemont): II gagne $18,000.

M. Morin: M. le Président, je regrette, mais, en ce qui me concerne, je n'autorise pas le député de Rosemont à participer à la commission.

Le Président (M. Gratton): D'accord.

M. Bellemare (Rosemont): J'ai un meilleur dialogue avec le chef de cabinet du leader de l'Opposition.

Le Président (M. Gratton): A l'ordre! Puis-je demander la collaboration du député de Rosemont, s'il vous plaît? Il n'est pas membre de la commission, il n'a pas le droit de parole.

M. Bellemare (Rosemont): M. le Président, à compter d'immédiatement, je ne parlerai plus. Je voudrais simplement dire que le chef de cabinet de M. Burns comprend plus que le député de Sauvé, parce qu'il est un ouvrier.

Le Président (M. Gratton): A l'ordre! Le chef de l'Opposition officielle.

M. Morin: Le premier ministre a-t-il un successeur en vue?

M. Bourassa: M. Chouinard a remis sa démission vendredi. Je n'ai pas à mentionner les très gran-des qualités de solidité, de compétence, de jugement et de courage de M. Chouinard. C'est évident que, comme chef du gouvernement, je perds un collaborateur extrêmement précieux. Au cours des prochaines semaines, le nom de son remplaçant sera connu. Sa démission a été annoncée vendredi, on ne peut

pas me demander aujourd'hui même de nommer son remplaçant. D'ailleurs, M. Chouinard ne sera pas assermenté avant un certain temps. Il sera encore disponible pour quelques semaines.

M. Morin: Du moment que le premier ministre m'assure qu'il se rend compte des exigences de la situation et qu'il s'assure de l'impartialité politique, entre autres qualités, du successeur de M. Chouinard.

M. Bourassa: Là-dessus, le chef de l'Opposition ne peut pas reprocher au chef du gouvernement actuel de rechercher toujours des gens qui sont partisans, dans les nominations qu'il fait. Je n'ai pas à mentionner les membres de certaines commissions. De ce côté, je ne pense pas qu'on puisse m'accuser de manquer de tolérance.

M. Morin: C'est une autre affaire. Je ne parle pas des commissions qui ont des rôles spécifiques à jouer et où vous devez tenter de trouver des gens qui connaissent la situation et peuvent vraiment aller au fond des choses. Je vous parle du conseil exécutif. C'est une tout autre affaire.

M. Bourassa: D'accord. Mais, pour rassurer le chef de l'Opposition, devrais-je nommer quelqu'un qui est membre d'un autre parti, pour lui donner des garanties d'impartialité?

M. Morin: Non, mais qui ne soit membre d'aucun parti, ou qui ne soit pas un ancien agent électoral, en tout cas. Le premier ministre me saisit-il?

M. Bourassa: Oui. La personne à qui il se réfère a fait un travail exceptionnel, à l'endroit où elle a été affectée, indépendamment du poste qu'elle pourra obtenir plus tard. Je n'ai pris aucune décision. Je ne sais pas à quoi se réfère le chef de l'Opposition.

M. Morin: Du moment que nous nous comprenons, et que le premier ministre est conscient du caractère impartial du poste de secrétaire général du conseil exécutif, je n'en demanderai pas plus. Je n'ai pas l'intention de pousser les choses plus loin.

M. Bourassa: II est certain que M. Chouinard sera difficile à remplacer. On sait que gouverner le Québec ces années-ci n'est pas une sinécure. C'est même assez exigeant et m. Chouinard détenait un poste clé. Je suis d'accord avec lui que l'importance du poste est telle que les qualités de celui qui l'occupe doivent être assez exceptionnelles.

M. Morin: Pour l'instant, je n'irai pas plus loin, mais c'est une question qui nous intéresse vivement. Je tiens à vous le signaler.

M. Bourassa: D'accord, mais c'est la prérogative du premier ministre de nommer le secrétaire général.

M. Morin: Je n'ai pas fait de suggestion au premier ministre et je n'ai jamais prétendu lui enlever cette prérogative.

M. Bourassa: II ne veut même pas proposer son chef de cabinet comme successeur possible, et après, il veut que je nomme des gens qui soient impartiaux!

M. Morin: Je ne doute pas que mon chef de cabinet ait toute la compétence nécessaire; il n'y a aucun doute. Je pense qu'il n'y a personne à cette table qui le connaisse et qui en doute une seconde. Le premier ministre a essayé si souvent de me l'enlever par tous les moyens possibles et imaginables.

M. Bourassa: Est-ce qu'il veut revenir à la fonction publique?

M. Morin: Je ne parlerai pas pour lui, M. le Président, mais je pense que le premier ministre connaît la réponse déjà, étant donné le nombre d'offres qu'il a faites à mon chef de cabinet depuis quelques années.

M. Bourassa: Quand même, M. le Président.

M. Morin: Sur ce sujet, je donnerai la parole à mon chef de cabinet en temps et lieu. Je n'ai pas à répondre pour lui, c'est un homme libre. Je prends note de l'hommage discret que lui fait le premier ministre; je le lui transmettrai. Cela lui fera certainement plaisir. Ce n'est pas le genre d'homme qui se laisse acheter par des compliments; autrement il serait depuis longtemps parmi les hauts fonctionnaires, les grands commis de l'Etat, du gouvernement.

M. Déom: Est-ce que vous laissez sous-entendre que les hauts fonctionnaires de l'Etat se laissent acheter?

M. Morin: Non, je dis qu'il pourrait sans doute occuper un très haut poste, s'il se laissait allécher par les compliments, ou par le salaire.

M. le Président, maintenant que M. Michel Guay est "en disponibilité en Afrique" — c'est merveilleux comme expression, cela fait rêver au club Méditerranée immédiatement — le premier ministre pourrait-il nous dire qui, désormais, est responsable du placement à la baie James dans son cabinet?

M. Bourassa: J'ai déjà expliqué à plusieurs reprises ce qui était arrivé, M. le Président. Les députés, les ministres et le chef du gouvernement, combien de fois, personnellement, ai-je reçu des offres de travailleurs pour aller à la baie James, que je pouvais rencontrer sur la rue ou dans les restaurants ou dans des piscines, qui s'offraient pour aller travailler à la baie James. Alors, le chef du gouvernement, les ministres ou les députés...

M. Morin: Je croyais que vous faisiez évacuer les piscines d'habitude!

M. Bourassa: Non, M. Morin. Alors, M. le Président, ce qui arrivait c'est que ces offres d'emploi étaient référées à mon chef de cabinet qui, lui, les référait, je suppose, à quelqu'un d'autre, ou mon ancien chef de cabinet, M. Langlois. Il ne faut tout de même pas exagérer ce travail qui a été fait...

M. Morin: Mais, enfin, il y a quelqu'un qui s'occupe de cela dans votre cabinet à l'heure actuelle. Pourrait-on savoir qui?

M. Bourassa: II n'y a personne en particulier, M. le Président.

M. Morin: Est-ce vous-même qui vous en occupez?

M. Bourassa: Ce n'est pas moi qui fais les démarches. Mais, quand on me demande un emploi, je le transmets à qui de droit selon les règlements de la fonction publique ou autrement.

M. Morin: II n'y a personne, donc, qui soit chargé de cette mission.

M. Bourassa: C'est parce que cela ne relève pas du... je comprends que la loi 50 relève du bureau du premier ministre, mais cela ne relève pas directement de mon bureau. Le chef de l'Opposition veut citer le rapport Cliche?

M. Morin: On me le met sous les yeux, M. le Président. "A cette époque, le gouvernement veut créer une banque de placement pour les grands travaux au Québec. M. Paul Desrochers, conseiller spécial auprès du premier ministre et M. Michel Guay, alors chef de cahinet auprès du ministre de la Fonction publique, veulent que M. Yvon Bergeron soit chargé de cette banque de placement. C'est un de leurs hommes"; et ainsi de suite. Je ne veux pas rappeler au premier ministre des passages qu'il a sûrement appris par coeur tant il les a médités. Je voudrais simplement savoir qui remplaçait M. Guay dans ses fonctions délicates?

M. Bourassa: II était à la fonction publique, à l'époque, il n'était pas à mon bureau.

M. Morin: II était chef de cabinet auprès du ministre de la Fonction publique, c'est cela?

M. Bourassa: Tout de même, il ne faut pas confondre les postes et les personnes.

M. Morin: Vous m'affirmez qu'à l'heure actuelle, il n'y a personne dans votre cabinet qui soit chargé de ces fonctions.

M. Bourassa: Lorsque je reçois des demandes, supposons que le chef de l'Opposition veut un emploi pour un travailleur de son comté; je vais en discuter, je vais remettre cela soit à M. Rivest, si cela vient du chef de l'Opposition...

M. Morin: En somme, si je comprends bien, c'est la corbeille à papiers.

M. Bourassa: II n'y a pas d'affectation... aucun membre de mon personnel n'est affecté au placement.

M. Morin: Pour terminer, serait-il possible d'obtenir la liste de tous les consultants contractuels? Vous avez, je pense, à l'occasion, des consultants qui ne sont pas à temps plein dans vos bureaux, qui sont occasionnels ou contractuels, combien y en a-t-il?

M. Bourassa: Vous voulez dire les choses qu'on donnerait pour six mois ou neuf mois? Il n'y a seulement que M. Paradis, à ce qu'on me dit actuellement.

M. Morin: A honoraires. M. Bourassa: Oui.

M. Morin: Oui, mais il est à temps plein, ce M. Paradis. Je vous parle des consultants occasionnels.

M. Bourassa: On n'en a pas. On peut prendre quelqu'un pour trois mois. On n'en a pas...

M. Morin: Même pour un mois, trois mois?

M. Bourassa: Je vais regarder cela. N'en avons-nous pas pour cette année? Non, à ce qu'on me dit, après une vérification sommaire, on n'en a pas. On n'en a pas pour l'année financière. Ils vont vérifier, s'ils en trouvent, ils vont...

M. Morin: J'ai terminé. Prenez tout votre temps. Pour autant que je suis concerné, j'ai terminé...

M. Bourassa: J'ai M. Georges-Henri Cloutier, coordonnateur spécial dans le cadre de la situation socio-économique qui prévaut présentement dans la région de Thetford-Mines, $25,000, pour une année. Il a été désigné par mon bureau afin d'aviser le gouvernement sur les actions gouvernementales visant à résoudre les problèmes socio-économiques qui résultent des difficultés de cette région, à cause de la grève de l'amiante.

M. Morin: La King Beaver et tous ces problèmes? Comment s'appelle-t-il à nouveau, je m'excuse?

M. Bourassa: Georges-Henri Cloutier.

M. Morin: Je crains de ne pas le connaître. Quelles sont ses qualifications professionnelles?

M. Bourassa: Un enseignant qui était maire de Black Lake.

M. Morin: C'est le maire de Black Lake dont vous me parlez. Je vois, d'accord.

M. Bourassa: Vous y aviez fait une assemblée, je crois, qui avait été un fiasco.

M. Morin: Elle avait été un très grand succès. C'est même, lors de cette assemblée que nous avons annoncé...

M. Bourassa: L'étatisation des mines, ce que j'ai réfuté en fin de semaine...

M. Morin: Oui, et ce que cela coûterait au Québec.

M. Bourassa: ... en citant l'économiste suédois Myrdal qui parlait des pertes énormes des nationalisations quand on peut arriver au même objectif avec des contrôles et des normes appropriées.

M. Morin: Oui, mais comme vous n'avez pas de normes appropriées, ni contrôle...

M. Bourassa: Vous devriez viser d'abord des contrôles et des normes appropriés au lieu d'engloutir des centaines de millions pour des actionnaires américains.

M. Morin: On peut peut-être discuter de cette question, M. le Président. Je suis prêt à m'étendre sur la nationalisation de l'amiante, ce soir, mais ce que je voulais savoir, c'est si ce M. Cloutier est à l'emploi du gouvernement pour un an.

M. Bourassa: Oui, c'est un contrat d'un an, jusqu'à la fin de l'année, décembre 1975.

M. Morin: Pourriez-vous nous décrire, de façon un peu plus précise, ses fonctions? Qu'attendez-vous de lui?

M. Bourassa: M. Cloutier nous fait des recommandations pour arriver à corriger ou atténuer la conséquence des grèves actuellement ou du feu qui a eu lieu et des problèmes que connaît la région. Je crois qu'il a été très utile dans ce qu'on a proposé pour la firme Bellevue. Plusieurs centaines d emplois ont été épargnées à cause de l'intervention du gouvernement dans ce secteur.

M. Morin: M. Cloutier se trouve-t-il de la sorte à surveiller la grève qui a lieu dans l'industrie de l'amiante? Est-ce que cela fait partie de ses fonctions?

M. Bourassa: Non, cela ne fait pas partie de ses fonctions. Ses fonctions sont d'apporter ou de faire des suggestions pour essayer d'améliorer la situation socio-économique dans son ensemble.

M. Morin: II a démissionné de son autre poste et il est au service exclusif du gouvernement, pour l'année?

M. Bourassa: Oui. Il y a un remboursement des frais à la commission scolaire et il y a des frais d'honoraires.

M. Morin: Y a-t-il d'autres consultants de cette nature?

M. Bourassa: On me dit que non, M. le Président. Je n'en vois pas d'autres.

M. Morin: Quand le premier ministre choisit un consultant pour résoudre un problème comme celui de l'amiante, par exemple, cette décision demeure-t-elle secrète ou si elle fait l'objet d'une déclaration publique?

M. Bourassa: Dans ce cas, le cas de M. Cloutier, il y a eu un communiqué de M. Charles Denis.

M. Morin: Est-ce que c'est invariable que ce soit annoncé publiquement?

M. Bourassa: Oui. C'était utile pour le gouvernement de l'annoncer.

M. Morin: Je m'en doute, puisque vous l'avez fait. Connaissant le premier ministre, je me doute qu'il considère la chose comme fort "utile", mais je me demandais s'il le faisait invariablement pour toutes les nominations de consultants occasionnels ou contractuels?

M. Bourassa: Cela ne se fait peut-être pas par communiqué de mon bureau parce que, quand même, ce sont des questions administratives alors que M. Denis s'occupe de l'information politique, comme vous le savez. Mais je crois que c'est connu et que c'est dans les comptes publics. Il n'y a rien à cacher.

M. Morin: Les comptes publics, cela vient après que la dépense a été faite. Je parle au moment où la nomination est faite.

M. Bourassa: Je ne peux pas dire qu'on a fait des communiqués chaque fois. D'ailleurs, on y recourt assez rarement. Cloutier et Paradis ont été annoncés par communiqué et ce sont les deux consultants qu'on m'a donnés. Si on en trouve d'autres, on pourra les donner au chef de l'Opposition. Dans ces cas, cela a été annoncé par communiqué.

M. Morin: Le souci que j'ai, c'est qu'il ne se fasse pas de nomination qui ne soit portée d'une manière ou d'une autre devant l'opinion publique.

M. Bourassa: Non, c'est un principe de gestion publique auquel j'adhère.

M. Morin: Si le premier ministre est prêt à y adhérer, nous pouvons adopter le programme no 3.

M. Bourassa: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Gratton): Programme 3, adopté.

M. Bourassa: Le secrétariat général, ce n'est pas dans le programme 3?

Le Président (M. Gratton): Oui, c'est adopté. M. Bourassa: D'accord, c'est adopté.

Le Président (M. Gratton): Je pense que, en définitive, ceci complète l'étude des crédits que doit défendre le premier ministre. Y a-t-il d'autres questions à son intention avant que nous ne revenions à l'OPDQ?

M. Morin: Oui, il y a d'autres questions à l'intention du premier ministre, s'il le veut bien.

M. Bourassa: Je vous écoute.

Repatriement de la constitution

M. Morin: Je n'ai pas l'intention de faire de bien longs discours. Je voudrais simplement poser quelques questions au premier ministre au sujet du rapatriement de la constitution puisque, ce matin, après avoir abordé cette question, lors de l'étude des crédits du ministère des Affaires intergouvernementales, le ministre a cru bon de me

renvoyer au premier ministre pour tout ce qui touche la question du rapatriement.

On se souviendra que, dès la réélection de M. Trudeau, au lendemain même de sa réélection, son bureau émettait un communiqué dans lequel il se réjouissait de l'occasion qui allait être donnée au pouvoir fédéral et au Québec d'enfin procéder au rapatriement de la constitution. Le premier ministre du Québec lui-même, à une ou deux occasions, n'a pas écarté cette possibilité. Il y a même fait allusion récemment. Je ne sais plus si c'était dans un communiqué ou dans un discours. En tout cas, il y a fait allusion comme étant une possibilité tout à fait distincte.

Or, qui dit rapatriement dit nécessairement mode d'amendement constitutionnel et qui dit mode d'amendement constitutionnel dit partages des pouvoirs, des compétences entre les deux niveaux de gouvernement. En d'autres termes, qui dit rapatriement dit révision constitutionnelle. Ce qui m'inquiète, c'est de voir le premier ministre s'aventurer sur le sentier du rapatriement sans qu'il ait mesuré toutes les conséquences que cela peut comporter, du point de vue de la révision constitutionelle, du point de vue de l'avenir du Québec et de son statut.

Nous pourrions nous ramasser à la table de négociation fédérale-provinciale sans qu'une stratégie globale ait été préparée. C'est du moins ce que j'ai cru constater lors de l'étude des crédits du ministère des Affaires intergouvernementales, l'année dernière. Bien que je n'aie pas encore eu un entretien complet sur la question avec le ministre, cette année, j'ai senti, à son exposé préliminaire et au discours qu'il a fait le 5 avril devant la chambre de commerce, je crois...

M. Levesque: Le 8.

M. Morin: Le 8 avril, merci. J'ai senti que...

M. Levesque: Simplement pour vous indiquer que je suis ici.

M. Morin: Oui, je l'avais noté dès le départ et je m'en réjouis puisque, éventuellement, le ministre pourra intervenir dans la conversation. Je n'ai pas d'objection à ce qu'il le fasse.

Ce qui nous inquiète, c'est de voir le gouvernement du Québec parler de rapatriement ou même faire allusion a la possibilité du rapatriement sans être vraiment en possession de dossiers complets sur la révision et sans avoir préparé une politique globale en ce qui concerne l'avenir du Québec.

J'avoue que les déclarations du premier ministre m'ont paru un peu légères, compte tenu des conséquences qu'elles peuvent comporter. J'aimerais, puisque l'occasion nous en est fournie ce soir, qu'il nous précise sa pensée sur le rapatriement; non seulement sur le rapatriement, mais sur le mode d'amendement constitutionnel ainsi que sur le partage des pouvoirs.

M. Bourassa: M. le Président, je crois que le chef de l'Opposition assume ses responsabilités d'une façon tout à fait normale en discutant de cette question et en prévenant le gouvernement du sérieux du problème. Ce que je peux lui dire, c'est que le gouvernement du Québec ne s'est aucunement engagé à accepter le rapatriement de la constitution. Il y a une tradition qui veut au Québec que ce rapatriement soit associé au moins à un certain partage des pouvoirs. C'est un peu ce qui était en discussion a Victoria en I97I, cela n'a pas été une situation facile. C'est peut-être l'un des moments les plus difficiles que j'ai eu à traverser personnellement, parce que le problème québécois se trouvait à s'exprimer dans une acuité particulièrement forte, c'est-à-dire le fait que, sur le plan culturel, les Québécois sont un peu orientés vers une solution, alors que, sur le plan économique, ils sont orientés dans une autre direction, c'est-à-dire du côté du fédéralisme. C'est la tâche du gouvernement québécois de concilier ces exigences plus ou moins contradictoires, c'est-à-dire le maximum d'autonomie sur le plan culturel et une participation au régime fédéral sur le plan économique. Ceci se trouve à être posé évidemment d'une façon particulièrement claire dans le cas du rapatriement de la constitution.

Le premier ministre du Canada, et on le comprend, a manifesté son intention de vouloir rapatrier la constitution ou d'amorcer des discussions pour le faire. On sait qu'il y a plusieurs premiers ministres avant lui qui s'y sont essayés sans succès. On peut considérer qu'étant canadien français, il puisse lui paraître opportun de faire un nouvel effort pour assurer le rapatriement de la constitution, c'est-à-dire que la constitution soit modifiée par les Canadiens eux-mêmes. Le chef de l'Opposition est peut-être au courant des arguments qu'il a apportés au cours de la fin de semaine devant un auditoire d'étudiants ou de jeunes en reprochant au gouvernement du Québec de ne pas abonder dans le même sens. En refusant de rapatrier la constitution purement et simplement sans qu'il y ait au moins un certain partage des pouvoirs sur lequel on pourra discuter tantôt, le gouvernement du Québec ne fait qu'adopter une attitude qui a toujours existé au Québec depuis des générations.

Notre descendance normande fait que nous sommes plutôt réticents à signer des documents qui pourraient nous engager pour l'avenir, d'une façon irrémédiable. C'est pourquoi nous voulons adopter une attitude de prudence, mais s'il était possible d'arriver à un certain partage, surtout dans le domaine culturel, puisque c'est cela qui nous distingue du reste de l'Amérique du Nord et du reste du Canada, s'il était possible de le faire, nous serions prêts à aborder la discussion. Pour le mode d'amendement lui-même, il y avait eu entente à l'occasion de Victoria, et il y avait eu discussion dans cette salle même avec les partis d'Opposition. Si ma mémoire est bonne, mais ceci devrait être vérifié, je crois que le Parti québécois, par la voix du député de Bourget de ce moment, avait exprimé son appui sur le mode d'amendement, évidemment pas sur l'acceptation globale, mais sur...

M. Morin: J'aimerais bien que vous me retrouviez cela.

M. Bourassa: Oui, je crois que je vais le retrouver pour... Le chef de l'Opposition avait été consulté, je crois, à ce moment.

M. Morin: Est-ce que vous voulez faire état publiquement de nos conversations téléphoniques?

M. Bourassa: Non, mais je veux dire...

M. Morin: J'ai toujours gardé la plus grande discrétion là-dessus.

M. Bourassa: Non, M. le Président...

M. Morin: Je ne voudrais pas que vous vous serviez de cela pour essayer de me mettre en boîte.

M. Bourassa: Non, je n'ai pas l'intention de mettre en boîte le chef de l'Opposition.

M. Morin: Parce que, souvent, le premier ministre, pour réduire certains adversaires au silence, les appelle et les met dans sa confidence.

M. Bourassa: Pour les réduire au silence?

M. Morin: Oui, la conversation peut débuter de la manière suivante: "A condition que vous n'en parliez pas, j'ai certaines choses à vous dire." Forcément, l'interlocuteur a les mains liées et la langue cousue. Je vous ferai remarquer que, la dernière fois que vous m'avez appelé, je vous ai dit que je préférais ne rien savoir pour garder ma liberté d'action.

M. Bourassa: M. le Président, le chef de l'Opposition fait toutes sortes d'interprétations aux appels téléphoniques que je peux lui faire.

M. Morin: C'était il y a bien longtemps, j'en conviens.

M. Bourassa: Oui, il faut dire que c'était avant qu'il devienne chef de l'Opposition. Il était professeur de droit constitutionnel à l'université. Il m'avait recommandé à l'université de Harvard, je crois qu'il se souvient des lettres de recommandation qu'il m'a faites pour mes études à l'université de Harvard. Alors, il était normal...

M. Morin: Je ne m'en cache pas. J'avais un jeune étudiant assez brillant devant moi. Je me suis dit: II mérite d'être encouragé, ce garçon ira peut-être loin. Je le voyais déjà comptable chez Simard.

M. Bourassa: Revenons à la constitution. Je dis donc que, pour ce qui a trait au mode d'amendement de la constitution, j'avais cru percevoir un accord au Québec sur le contenu de la formule d'amendement. Là où il y avait eu désaccord, c'était sur la question du partage des pouvoirs et la question du domaine social, où les positions du Québec n'avaient pas été acceptées. Nous croyons que si nous voulons discuter de nouveau de cette question du rapatriement de la constitution, il devra être question de la souveraineté culturelle du Québec, notamment dans les secteurs des communications et de l'immigration, c'est-à-dire que, devant le déclin de la proportion des Canadiens français au Canada, logiquement, devant une certaine perte d'influence sur le plan fédéral en raison même du déclin de la proportion des Québécois francophones, il est normal que nous ayons plus de pouvoirs en matière culturelle, quitte à collaborer pleinement sur le plan social et économique, parce que nous sommes d'avis au sein de notre parti que, quel que soit le statut politique du Québec, il faudrait de toute manière collaborer avec le reste du Canada sur le plan social et économique. Quand on voit qu'il y a quelques mois, on annonçait un Parlement fédéral au suffrage universel en Europe pour mai 1978, on ne voit pas comment le Canada, qui est bien plus intégré économiquement que l'Europe, que le marché commun, voterait contre un Parlement fédéral ou briserait son lien fédéral. L'économie du Québec est tellement intégrée au reste du Canada que, pour nous, elle doit s'appuyer sur un lien fédéral pour fonctionner et nous donner les avantages que nous connaissons. Sur le plan social, c'est la même chose. Du moment qu'on a un marché commun, les politiques sociales doivent s'aligner les unes sur les autres. Donc, la présumée indépendance sociale que nous pourrions avoir est pour nous illusoire.

Ceci étant dit, il reste à obtenir sur le plan culturel les pouvoirs dont nous avons besoin pour assurer notre sécurité pour l'avenir. C'est le contexte dans lequel nous serions prêts à discuter le rapatriement de la constitution. C'est ce que j'avais dit il y a quelques semaines à l'occasion d'une rencontre avec les militants libéraux au dîner-bénéfice que les questions d'immigration et de communications nous paraissaient importantes dans cette question.

M. Morin: M. le Président, je ne voudrais pas à cette occasion lier un débat avec le premier ministre sur les rapports économiques inévitables qui lient le Québec et le Canada en tout état de cause, que nous soyons à l'intérieur d'un fédéralisme strangulateur ou que nous soyons dans une association économique du type de celle que propose le Parti québécois. Ce serait un long débat. Le premier ministre autrefois a eu l'occasion, avant qu'il ne devienne premier ministre, de participer à certains débats dans certains sous-sols sur ces questions. Je crois qu'il en a gardé d'ailleurs un assez bon souvenir, même si, par la suite, il a semblé changer d'orientation pour des raisons sur lesquelles je n'ai pas à me pencher. Je ne voudrais pas refaire ce débat, ce n'est pas l'occasion. Ce que je voudrais examiner de façon assez brève — je ne veux pas faire traîner les choses en longueur ce soir — c'est la question du mode d'amendement.

Le premier ministre nous a dit: Ce mode d'amendement avait été approuvé par le Québec à Victoria. Si j'ai bien compris, il nous signifie par là que c'est sur autre chose que la conference et la charte de Victoria ont avorté. Or, si je peux me permettre de lui rafraîchir les idées, l'Opposition au Québec à ce moment, s'est manifestée de façon très vive. Le premier ministre lui-même a parlé d'une situation aiguë tout à l'heure, d'une crise aiguë. L'Opposition...

M. Bourassa: Pas au niveau de l'ensemble de la population, mais au niveau de ceux qui étaient intéressés au problème.

M. Morin: Oui, chez un assez grand nombre de personnes, même au sein du cabinet.

M. Bourassa: Non, au niveau de l'intelligentsia...

M. Morin: L'opposition, si ma mémoire est bonne, portait non pas contre l'article 94A), je pense que le Québec avait proposé comme solution lors des entretiens de Victoria, mais portait sur le mode d'amendement dont l'effet était de lier le Québec pour l'avenir en ce qui concerne le partage des pouvoirs et des questions linguistiques. Est-ce que le premier ministre veut aujourd'hui laisser entendre que c'est pour d'autres raisons qu'il a dit non à la charte de Victoria? Si c'est le cas, j'aimerais qu'il soit bien clair une fois pour toutes.

M. Bourassa: J'ai dit non à la charte de Victoria parce que, pour le gouvernement du Québec et pour les Québécois, ce qui était offert comme partage de pouvoirs paraissait insuffisant pour justifier le rapatriement de la constitution, parce que le rapatriement de la constitution est un élément de négociation important pour le Québec avec le reste du Canada. Il faudra que cela se fasse un jour ou l'autre. Je comprends que le Parti québécois a intérêt à ce que cela ne se produise pas, je pense bien, politiquement parlant. Peut-être pas le chef de l'Opposition. Je pense que, dans ces questions, il est au-dessus...

M. Morin: Personne n'a intérêt à ce que le Québec ait les mains liées dans une camisole de force, ni vous, ni l'Opposition.

M. Bourassa: M. le Président, on a un droit de veto en vertu du mode d'amendement.

M. Morin: Oui, mais les autres provinces également.

M. Bourassa: Oui, mais je veux dire à certaines conditions. Je crois qu'actuellement on a un droit de veto qui existe d'une façon temporaire, c'est-à-dire que le gouvernement fédéral, et là il peut y avoir des points de vue différents, mais on prétend, dans certains milieux fédéraux, que le gouvernement fédéral pourrait rapatrier la constitution par-dessus les provinces. Je crois que le chef de l'Opposition est au courant de la thèse qui est soutenue par certains milieux fédéraux là-dessus. Je ne sais pas si...

M. Morin: Ils soutiennent cela depuis quinze ans et ils ne l'ont pas fait encore. Je doute qu'ils le fassent, parce que ce serait vraiment un bris de la coutume constitutionnelle. Il n'y a pas que les textes écrits, il y a des coutumes aussi, dans ce domaine, qui sont importantes. Mais je m'excuse, je ne voulais pas vous interrompre.

M. Bourassa: Non, d'accord, mais disons que, quand le chef de l'Opposition parle de bris de coutume constitutionnelle,, il ne se réfère pas à des textes de loi. La valeur juridique de ces arguments peut, à tout le moins, paraître discutable à ceux qui proposent que cela puisse se faire.

M. Morin: Pas pour des gens qui ont été formés dans la tradition britannique, la coutume est aussi déterminante que les textes écrits. Je crois qu'il est fort peu probable que le pouvoir fédéral passe par-dessus les provinces pour rapatrier la constitution. Ce serait un coup de force constitutionnel qui, vraiment, encourrait la désapprobation unanime. En fait, je serais prêt à soutenir que ce serait contraire au droit coutumier, c'est-à-dire contraire au droit tout court, parce que la coutume en droit britannique a la même valeur, comme source de droit, que les écrits.

M. Bourassa: Pour répondre au chef de l'Opposition, c'est parce que le partage des pouvoirs qui était proposé ne nous a pas paru justifier l'acceptation du mode d'amendement.

M. Morin: Dans le domaine social.

M. Bourassa: C'est cela. Mais dans les autres points aussi, la question des droits à la cour Suprême, les droits linguistiques; il y avait certains progrès incontestables, mais pas suffisants pour justifier l'acceptation du rapatriement de la constitution. Actuellement, nous sommes prêts à aborder cette discussion si on peut également discuter des garanties constitutionnelles dans le domaine culturel pour les Québécois. Je ne crois pas que personne au Canada va trouver exagéré que le gouvernement québécois exige des garanties constitutionnelles pour son avenir propre parce que, comme je l'ai dit à plusieurs reprises, on ne peut pas confier à une majorité qui n'est pas la nôtre le soin de développer la culture d'une minorité.

M. Morin: Oui. Ce qui m'inquiète, pour ne rien vous cacher, c'est qu'effectivement, à Victoria, vous aviez posé des conditions. Vous aviez dit: Nous serons d'accord pour le rapatriement, donc pour le mode d'amendement, si vous acceptez notre proposition sur l'article 94A), c'est-à-dire si vous acceptez que le Québec ait compétence exclusive dans le domaine de la sécurité sociale. Ottawa vous a dit non. Vous êtes revenu à Québec et vous avez dit: ll n'y a pas de quid pro quod. Parce que, si j'avais bien compris votre position à l'époque, vous étiez prêt à échanger l'avenir pour ce "tiens", pour cet avantage immédiat que constituait le rapatriement de la sécurité sociale.

M. Bourassa: C'est-à-dire qu'à ce moment, on ne pouvait pas prévoir les arrangements pratiques qui ont eu lieu, si nous avions obtenu ces concessions, le point de vue du cabinet à ce moment, c'était d'accepter l'ensemble de la charte qui comprenait plusieurs facteurs.

M. Morin: Et par la suite, je vous dis que...

M. Bourassa: Par la suite, il y a eu des arrangements pratiques, qui éventuellement pourraient s'inscrire dans un texte constitutionnel. Je vous dis que la préoccupation dominante du gouvernement, présentement, c'est la question culturelle.

M. Morin: Vous étiez parti avec la compétence exclusive que vous revendiquiez dans le domaine

de la sécurité sociale et vous avez abouti à des arrangements pratiques qui font, qu'en fait, c'est Ottawa qui...

M. Bourassa: Non, non. M. Morin: ... qui paie.

M. Bourassa: Qui paie et c'est nous qui décidons des priorités...

M. Morin: Oui.

M. Bourassa: ... évidemment il faut quand même être pragmatique dans toutes ces questions. C'est nous qui décidons du montant et des bénéficiaires. Il y a des normes à respecter. Mais, même si le parti québécois était au pouvoir et qu'il... Le référendum, l'espèce de camouflage que vous avez fait avec le référendum, admettons que le Québec devient indépendant, il faudrait qu'il respecte certaines normes nationales en matière sociale. Je ne vois pas pourquoi le Québec, à l'intérieur du...

M. Morin: Cela ferait l'objet d'ententes. Il n'y a pas de difficulté particulière; c'est une question technique.

M. Bourassa: Mais il faudrait qu'il y ait des ententes. Alors pourquoi briser le lien fédéral pour aboutir au même résultat?

M. Morin: Ah! ce n'est pas sûr que nous aboutirions au même résultat. Vous prenez cela pour acquis, mais ce n'est pas sûr du tout.

M. Bourassa: M. le Président, ce qui est important pour nous, c'est d'avoir le contenu, de pouvoir décider du contenu de la politique. Nous pouvons avec les arrangements pratiques que nous avons et qui pourraient s'inscrire dans la constitution... Je comprends que cela pourrait exiger assez d'ingéniosité sur le plan de la rédaction législative.

M. Morin: Assez, d'ingéniosité, oui. Vous admettrez que, de part et d'autre, ce n'est pas clair. Ces arrangements-là ne sont pas clairs. Ottawa prétend qu'il conserve son pouvoir de décision.

M. Bourassa: Sur des normes générales.

M.Morin:Et à condition que le Québec s'inscrive dans les normes générales, il peut décider. Bien oui!

M. Bourassa: Non!

M. Morin: C'est brillant, c'est brillant! Il faut le faire!

M. Bourassa: Non, non. Le chef de l'Opposition revient à de la partisanerie politique, ce qu'il a évité de faire depuis 32 minutes.

M. Morin: Non, non?

M. Bourassa: Ce que je dis au chef de l'Opposition, c'est que nous décidons du contenu, c'est le gouvernement du Québec qui décide du contenu, du montant et de l'identité des bénéficiaires.

M. Morin: A l'intérieur des normes fédérales.

M. Bourassa: A l'intérieur de normes de bon sens que tout le monde accepte.

M. Morin: Bon, alors continuez.

M. Bourassa: Dites-moi avec quelles normes, vous n'êtes pas d'accord, du gouvernement fédéral, dans les questions sociales actuellement? Vous n'auriez pas un minimum? Le minimum est de $12 ou $20...

M. Morin: Ce qui m'intéresse, c'est de savoir si, après avoir finalement fait ces "arrangements" en matière de sécurité sociale, alors que vous prétendiez obtenir l'exclusivisme au départ, si, maintenant que vous avez changé votre fusil d'épaule et que vous faites porter l'accent sur l'autonomie culturelle — j'ai bien noté que vous parliez "d'autonomie culturelle" et non de souveraineté... —

M. Bourassa: J'ai parlé de souveraineté culturelle.

M. Morin: Je vous avais cru plus modeste et plus réaliste, tout à l'heure, lorsque vous avez utilisé l'expression "autonomie culturelle", qui est beaucoup plus exacte.

M. Bourassa: Non. J'ai dit que les Québécois étaient portés vers des objectifs qui pourraient sembler contradictoires. C'est que, sur le plan économique ils ont intérêt à faire partie du Canada et sur le plan culturel ils doivent avoir le maximum d'autonomie ou la souveraineté culturelle. C'est pourquoi dans notre parti nous proposons la souveraineté culturelle dans le fédéralisme économique. Cela nous paraît être la formule originale, moins simpliste qu'une indépendance traditionnelle comme il y en a en Afrique.

M. Morin: Comme il y en a en Europe, comme il y en a un peu partout dans le monde!

M. Bourassa: En Europe, on a un parlement fédéral qui a été annoncé pour deux ans.

M. Morin: II se trouve qu'il y a à peu près 135 ou 140 états qui possèdent leur souveraineté "traditionnelle".

M. Bourassa: Non, non. M. le Président, je ne sais pas si le chef de l'Opposition a vu l'annonce qui a été faite qu'il y aurait des élections au suffrage universel, en Europe, en mai 1978. Je sais que le chef de l'Opposition n'y croit pas.

M. Morin: J'ai vu cela.

M. Bourassa: Les fédéralistes orthodoxes à Ottawa n'y croient pas non plus. Vous vous retrouvez dans ça...

M. Morin: Je doute que cela ait lieu en 1978. Je pense qu'on a voulu anticiper un peu sur la réalité. Si le premier ministre connaît les sondages qui ont été effectués dans les divers pays d'Europe, il a dû se rendre compte que les populations elles-mêmes sont loin d'être disposées encore. Cela prendra beaucoup plus d'éducation

populaire qu'on en arrive à des résultats comme celui-là. Sur la situation de l'Europe, je ne veux pas laisser aller le premier ministre indéfiniment, M. le Président, parce que c'est tout à fait différent du contexte nord-américain. Lui-même passe son temps à signaler le statut tout à fait spécial du Québec en pleine Amérique anglophone. Les pays d'Europe sont nombreux, ils sont une quinzaine, ils parlent tous des langues différentes, donc l'équilibre entre ces divers pays est bien plus facile à établir qu'entre le Québec et le reste du Canada.

M. Bourassa: Ce que je veux dire, M. le Président, c'est que l'intégration économique du Canada suppose un lien fédéral et qu'on s'en aperçoit actuellement en Europe avec une plus grande intégration économique.

M. Morin: Ecoutez, cela nous ramène au débat de fond de tout à l'heure. Je veux bien m'engager là-dessus, mais je pense à votre estomac qui doit crier famine. Avant de comparer les bienfaits du fédéralisme tel qu'il est pratiqué dans ce pays avec l'indépendance, je pense qu'on ferait mieux de s'en tenir à la révision.

M. Bourassa: Je comprends que vous craigniez de discuter de cette question.

M. Morin: Je ne le crains pas. Voulez-vous qu'on la discute? J'y suis disposé; il est 21 h 30. On peut commencer dès maintenant, je n'ai pas d'objection.

M. Bourassa: M. le Président, ce que je demande au chef de l'Opposition, c'est à quoi répond son parti devant la nécessité, parce que le problème qui se pose actuellement en Europe, c'est que les fonctionnaires ne peuvent pas prendre des décisions politiques. On ne peut pas demander à des fonctionnaires du marché commun indéfiniment de décider du prix des produits agricoles. C'est pour cela que tous les gouvernements sont tombés d'accord pour avoir un Parlement élu au suffrage universel, parce que des décisions comme celle-là supposent des décisions qui soient prises par des élus du peuple. Or, nous, qui avons une économie bien plus intégrée, et nous voyons les avantages que cela nous donne dans la question du pétrole, je ne vois pas pourquoi nous nous couperions de ce lien fédéral.

M. Morin: C'est un débat fort intéressant. Je n'aurais pas d'objection à l'avoir en public, avec le premier ministre, si l'occasion m'en était donnée. Ce pourrait être fort intéressant de comparer les avantages, justement, et les inconvénients des deux formules. Parce que les deux présentent des avantages et les deux comportent des inconvénients. Mais, nous prétendons qu'une indépendance, assortie d'une association économique, serait beaucoup plus avantageuse pour le développement du Quebec. Evidemment, c'est une question d'opinion. Ce n'est pas cette question que je voulais vider ce soir.

M. Bourassa: Je constate que le chef de l'Opposition se rapproche de la position du gouvernement.

M. Morin: Ah! vraiment?

M. Bourassa: Oui.

M. Morin: Je ne voudrais pas que vous vous illusionniez. Enfin, peu importe; passons. Il m'intéresse de savoir à quelles conditions précises vous êtes prêt à négocier le rapatriement de la constitition et le mode d'amendement, à l'heure actuelle.

M. Bourassa: M. le Président, le chef de l'Opposition comprendra que cela n'a pas encore été discuté suffisamment pour que je puisse annoncer publiquement la position du Québec en détail sur cette question. Je dis au chef de l'Opposition que la position traditionnelle du Québec a toujours été de s'opposer au rapatriement pur et simple de la constitution, comme semblent le souhaiter certains milieux fédéraux.

M. Morin: M. le Président, il n'y a pas de rapatriement pur et simple. Il ne peut pas y avoir de rapatriement sans qu'un mode d'amendement ne soit défini.

M. Bourassa: D'accord, le mode d'amendement.

M. Morin: Le rapatriement signifie que Westminster n'a plus la compétence pour modifier le BNA Act. Donc, il faut nécessairement...

M. Bourassa: D'accord, je suis d'accord avec le chef de l'Opposition, avec le mode d'amendement sur lequel on s'était entendu très largement en 1971.

M. Morin: Mais dois-je comprendre que, de toutes les récentes déclarations du premier ministre, de toutes les déclarations depuis à peu près un an et demi, dans le cas où Ottawa s'inclinerait devant ce qu'il appelle la souveraineté culturelle, devant une autonomie culturelle accrue pour le Québec, qu'il serait prêt, dans ces conditions, à accepter le rapatriement et le mode d'amendement?

M. Bourassa: Nous serions certainement prêts à en discuter sérieusement. Tout dépendrait du contenu de ce que vous venez de parler.

M. Morin: Le Québec renoncerait-il, de la sorte, à soulever la question du partage des compétences, dans le domaine économique et dans le domaine financier?

M. Bourassa: M. le Président, quant à ce qui est prioritaire pour le Québec actuellement, puisque pour ces questions, nous pouvons toujours facilement trouver des alliés dans les autres régions du Canada, l'isolement du Québec est une chose du passé, pour ce qui a trait au domaine social et au domaine économique et même au domaine culturel. Au domaine culturel, il faut quand même constater que le Québec est dans une position particulière et qu'il peut se trouver isolé, en raison même de son contexte sociologique. Mais, pour les questions économiques et sociales, que ce soit à l'Est ou à l'Ouest, nous l'avons vu dans les conférences fédérales-provinciales depuis quelques années, le Québec trouve toujours des alliés pour soutenir son point de vue. A certains moments, c'est l'Est, dans les

questions de péréquation, et à d'autres moments, c'est l'Ouest, pour ce qui a trait aux richesses naturelles.

Dans ces questions, le Québec n'est pas dans une situation similaire à celles des questions culturelles.

M. Morin: Pour avoir une réponse un peu plus précise à ma question, je la repose. Dois-je comprendre que si un nouveau partage est accepté par Ottawa, dans le domaine culturel, le Québec ne soulèvera pas la question du partage des compétences dans les domaines économique et financier?

M. Bourassa: M. le Président, c'est une question qui devra être réglée parmi les différentes régions du Canada. Je ne puis pas répondre d'une façon définitive au chef de l'Opposition, je le regrette, mais tout ce que je peux lui dire en exprimant mon opinion et celle du gouvernement, mais non en détail, parce qu'il y a eu très peu de discussions encore jusqu'à maintenant, cette question a été soulevée d'une façon de plus en plus intense depuis quelques mois seulement, tout ce que je peux lui dire, c'est que, pour le gouvernement actuel, la question culturelle est prioritaire, c'est-à-dire que nous ne voyons pas comment nous accepterions — je l'ai dit au dîner-bénéfice, je l'ai dit dans le discours inaugural — le rapatriement de la constitution avec le mode d'amendement si nous n'avons pas des garanties constitutionnelles dans des secteurs comme les communications ou l'immigration. Je ne crois pas que j'assumerais mes responsabilités comme chef du seul gouvernement francophone en Amérique du Nord, si je n'avais pas des garanties constitutionnelles dans des secteurs clés pour la culture francophone au Québec. Ceci nous apparaît indispensable.

Quant aux autres questions économiques, financières, où le Québec bénéficie beaucoup plus qu'il n'est pénalisé de sa participation au Canada, il est incontestable que les bénéfices dépassent de très loin les inconvénients. Seulement dans le cas du pétrole et de la péréquation inconditionnelle, je ne parle pas de toutes les participations du gouvernement aux programmes sociaux, alors que nous avons l'autonomie complète, là où il assume la moitié des salaires, de telle sorte que chaque augmentation de salaires est payée à 50% par le fédéral. Je parle de la péréquation inconditionnelle et le pétrole, c'est au-delà de $2.5 milliards seulement pour ces deux questions, en plus de la sécurité des approvisionnements. C'est pourquoi nous ne mettons pas la priorité sur les questions économiques mais sans éliminer un nouveau partage des pouvoirs au moment opportun.

M. Morin: Si je vous comprends bien, vous n'êtes pas encore prêt, en tant que gouvernement, à prendre position sur le partage des pouvoirs dans le domaine économique et dans le domaine fiscal. Ces questions n'ont pas encore été vidées.

M. Bourassa: Nous en avons déjà discuté au ministère des Affaires intergouvernementales, on examine cette question du rapatriement de la constitution comme éventualité étant donné que le premier ministre du Canada en a parlé, on a discuté de certaines possibilités ou d'amendements à la constitution, par exemple au titre de la péréquation ou des choses comme celles-là. La position du gouvernement du Québec n'est pas encore définitive là-dessus. Tout ce que je peux vous dire c'est qu'il y a une priorité dans cette question du rapatriement, il y a une priorité très nette au domaine culturel pour les raisons évidentes que je vous ai données tantôt. Je ne vois pas pourquoi le chef de l'Opposition ne serait pas d'accord, en enlevant son chapeau de chef du Parti québécois...

M. Morin: Je ne suis pas le chef du Parti québécois.

M. Bourassa: Cela s'en vient, quoi? Non? En enlevant son chapeau de député du Parti québécois, je ne vois pas pourquoi le chef de l'Opposition comme québécois, ne serait pas d'accord avec le gouvernement pour obtenir la sécurité culturelle pour les Québécois francophones.

M. Morin: Bien sûr, mais c'est insuffisant.

M. Bourassa: Je sais que je ferais des miracles et vous diriez que c'est probablement Lucifer qui les fait.

M. Morin: Non, non!

M. Bourassa: Je ne m'attends pas à ce que l'Opposition félicite le gouvernement.

M. Morin: Si le gouvernement adopte les politiques que nous préconisons, j'entends s'il les adopte vraiment, et non pas seulement des slogans, comme la social-démocratie pour faire illusion, faire image.

M. Bourassa: M. le Président, si le chef de l'Opposition veut aborder cette auestion, je vais le référer au budget qu'on a déposé et qui aide sensiblement plus les petits travailleurs, seulement $13 étaient proposés par le Parti québécois pour celui qui gagnait $6,000 et $229 dans notre cas.

M. Morin: Non, $100 plus l'indexation.

M. Bourassa: Dix-neuf fois plus, M. le Président.

M. Morin: Encore un débat qu'on pourrait peut-être garder pour la Chambre ou pour une autre commission.

M. Bourassa: Juste un point là-dessus, je ne comprends pas l'attitude du Parti québécois qui se dit à gauche et qui ne veut pas, disons, utiliser l'inflation pour redistribuer les ressources à l'avantage des travailleurs. Je ne comprends pas votre position.

M. Morin: C'est la première fois que je vous entends énoncer cette politique. C'est intéressant, cela utiliser l'inflation pour redistribuer les revenus.

M. Roy: La richesse.

M. Morin: C'est une politique. Mais vous n'avez jamais dit cela si clairement que cela en Chambre, M. le Premier ministre. C'est fort intéressant comme déclaration!

M. Bourassa: Le chef de l'Opposition n'est pas d'accord qu'on prenne tous les moyens pour aider les travailleurs?

M. Morin: Ce que j'aimerais, c'est que vous fassiez une redistribution consciente, en disant à ceux qui en font les frais, exactement ce qui en est. A l'heure actuelle vous soutirez subrepticement aux uns pour donner aux autres et il n'est même pas sûr qu'avec cette formule, vous arriviez à donner suffisamment aux défavorisés.

M. Roy: Le premier ministre oublie que les première victimes de l'inflation sont justement les travailleurs comme tels.

M. Bourassa: Mais les premiers bénéficiaires du budget que nous avons déposé sont les travailleurs bien plus que les classes...

M. Roy: Vous parlez du budget, avec $1,025,000,000 que vous allez chercher en plus dans les goussets des contribuables du Québec dans une seule année...

M. Bourassa: Vous parlez comme Yvon Char-bonneau, cela n'est pas sérieux.

M. Roy: Je n'ai pas besoin d'Yvon Charbon-neau pour donner ces chiffres. Je les ai donnés le soir même où le ministre des Finances a déposé son budget à l'Assemblée nationale.

M. Bellemare (Rosemont): Pour autant que tu ne parles pas comme Yvon Dupuis.

Le Président (M. Gratton): A l'ordre, messieurs!

M. Roy: C'est fort, c'est fort comme objection!

Le Président (M. Gratton): Sur un point de règlement, est-ce que je pourrais demander le consentement de la commission pour permettre au député de Beauce-Sud de remplacer M. Samson comme membre de la commission et ainsi avoir droit de parole?

M. Morin: Cela va de soi.

M. Côté: Si le député de Rosemont a le droit.

M. Bellemare (Rosemont): M. le Président, je demanderais le même privilège.

Le Président (M. Gratton): II n'y a malheureusement plus de députés à remplacer du côté ministériel, je m'en excuse.

M. Bellemare (Rosemont): Je m'excuse auprès de mon collègue de Beauce-Sud. Si vous donnez le privilège au député de Beauce-Sud...

M. Morin: II n'a même pas le droit de s'exprimer, M. le Président. Franchement, cela dépasse les bornes.

M. Bellemare (Rosemont): M. le Président, je vous demande le même privilège, n'en déplaise au chef de l'Opposition, parce qu'il ne connaît rien au travailleur. Mais je connais le travailleur car je suis un type de la masse et je demanderais d'avoir les mêmes privilèges que ceux de mon collègue, le député de Beauce-Sud.

Le Président (M. Gratton): A l'ordre!

M. Bellemare (Rosemont): M. le Président, je respecte...

Le Président (M. Gratton): A l'ordre! Eh bien, montrez-le par des faits et, s'il vous plaît, ne prenez pas la parole. Le chef de l'Opposition officielle.

M. Roy: Quelle est la décision, M. le Président, suis-je membre de la commission?

Le Président (M. Gratton): Oui. M. Roy: Merci.

M. Bellemare (Rosemont): Est-ce que je suis membre de la commission, M. le Président?

Le Président (M. Gratton): Non, le député de Rosemont...

M. Bellemare (Rosemont): M. le Président...

Le Président (M. Gratton): Vons ne pouvez tout de même pas refuser votre consentement si vous n'êtes pas membre de la commission.

M. Bellemare (Rosemont): M. le Président, je vous remercie et je veux respecter votre décision car, au lieu de faire du bruit, nous... L'efficacité ne fait pas de bruit, ça travaille.

M. Morin: Vous en faites beaucoup, je trouve. M. le Président, peut-on revenir... Je ne voudrais pas interrompre mon collègue de Beauce-Sud. Aviez-vous encore des questions? Puis-je revenir à la question constitutionnelle?

M. Roy: Des questions... Ce n'est qu'un court commentaire que je veux faire. Lorsque le premier ministre dit que la première priorité est la souveraineté culturelle et qu'il nous parle des désavantages qu'il y a actuellement dans le domaine économique de laisser le fédéral envahir de plus en plus toute question, tout le domaine des activités économiques, le premier ministre se sert, comme argument, du pétrole. Le pétrole, cela n'a pas toujours existé, la situation n'a pas toujours existé comme telle. Demain, il se trouvera d'autres situations, et je me demande si l'on peut logiquement, sincèrement et honnêtement croire possible une souveraineté culturelle dans une dépendance économique de plus en plus grande. Je n'y crois pas du tout et le premier ministre ne m'a. pas donné, ce soir, les arguments pour me convaincre.

M. Bourassa: M. le Président, j'ai parlé... M. Roy: C'est impensable.

M. Bourassa: ...d'une priorité culturelle pour la question du rapatriement de la constitution. Le gouvernement a plusieurs priorités en ce qui a trait à son action dans l'ensemble, notamment dans le domaine économique. Je ne voudrais pas que l'on dise que nous avons renoncé à notre

priorité économique dans l'ensemble des politiques gouvernementales. Pour rafraîchir la mémoire du député de Beauce-Sud, il y a la question du pétrole, du gaz, de l'uranium. Nous recevons des centaines et des centaines de millions à cause du pétrole et du gaz, même si nous n'en avons pas du tout au Québec, ou à peu près pas. C'est le pétrole cette année, ça pourrait être le gaz dans quelques années, ou l'uranium.

M. Roy: Et ça pourrait être l'électricité dans quelques années.

M. Bourassa: Sur ce sujet, le député se trompe parce que ce qu'il reste à développer, c'est à peu près 20,000 mégawatts, et ceci servira à des fins québécoises, étant donné que les besoins en électricité seront tels dans les prochaines décennies que tout cela devra être affecté aux besoins québécois. Alors, comment voulez-vous que nous puissions exporter l'électricité quand tout ce qui sera développé devra à peine suffire aux besoins québécois?

M. Morin: En cas d'urgence.

M. Bourassa: Je voudrais que le député de Beauce-Sud se rende compte. Il a ouvert la porte du pétrole et je veux être très bref et aussi concis que possible. S'il avait fallu que nous soyons séparés, je sais que le député de Beauce-Sud est contre...

M. Morin: Cela est inexact. Vous reprenez encore votre chanson, qui n'est que spéculation.

M. Roy: Nous la connaissons.

M. Bourassa: Alors, laissez-moi la dire, la répéter.

M. Morin: Voulez-vous qu'on vous accompagne en choeur?

M. Bourassa: M. le Président, s'il avait fallu que le Québec soit séparé, M. Parizeau lui-même, dans un éditorial du Jour, l'admettait. La question du pétrole est peut-être la plus embêtante à laquelle ait jamais eu à faire face le parti Québécois. Je vous apporterai cet editorial de M. Parizeau qui a ses moments de franchise étant donné qu'il a laissé...

La question la plus embêtante à laquelle vous avez eu à faire face, et pour cause, parce que si le Québec avait été séparé, M. le Président, non seulement chaque consommateur québécois aurait payé $0.14 de plus le gallon, mais des dizaines de milliers de travailleurs qui travaillent dans des usines qui consomment du pétrole auraient été mis en chômage, parce que ces entreprises auraient été en faillite, étant donné la concurrence exceptionnelle que leur aurait pu faire Toronto, où le prix du baril aurait été de $6.50, par rapport à $11. Mettez-vous à la place des entreprises pétrochimi-ques qui auraient dû payer $11 le baril, plutôt que $6.50 qui auraient été payés à Toronto. Quel effet désastreux sur ce secteur économique!

M. Morin: Le premier ministre, dans ses spéculations, oublie toujours de préciser toutes les variables de son hypothèse. Si le Québec avait été indépendant depuis plusieurs années, s'il avait eu des accords avec des pays pétroliers, producteurs de pétrole, s'il avait eu des accords avec le Canada, l'hypothèse est tout à fait différente.

M. Bellemare (Rosemont): Vous rêvez en couleur.

M. Morin: Le premier ministre saisit l'hypothèse qui fait son affaire...

M. Bourassa:... où il y aurait eu une sorte de Québec isolé de ses voisins...

M. Morin: ... qui n'aurait pas d'entente avec les Etats étrangers?

M. Bourassa: Pourquoi nous aurions été...

M. Morin: C'est enfantin ce que vous proposez.

M. Bourassa: Non, c'est ce que vous dites qui est puéril. Pourquoi aurions-nous été de petits préférés, alors que les Etats-Unis, l'Allemagne, la France, la Belgique, la Hollande, l'Angleterre, l'Italie ont été incapables d'avoir des ententes spéciales?

M. Morin: Ils en ont eu.

M. Bourassa: Ils n'ont pas eu des prix spéciaux pour le pétrole. Le prix n'est inférieur dans aucun de ces pays.

M. Morin: II y a eu des ententes spéciales, vous le savez bien.

M. Bourassa: Non, il n'y a pas de prix inférieur. Il y a eu des ententes économiques en échange d'entreprises et d'usines, mais le prix international n'était pas inférieur dans ces pays. Donc, nous aurions payé $11 le baril. Le chef de l'Opposition le sait fort bien.

M. Morin: Tout dépend des ententes.

M. Bourassa: Nous aurions payé $11 le baril. C'est très hypothétique, les mirages du chef de l'Opposition.

M. Morin: Encore là, le premier ministre écarte un certain nombre de variables qui ne font pas son affaire, comme, par exemple, la possibilité d'une association économique avec le Canada, telle que nous la proposons, ce qui modifie complètement le tableau.

M. Bourassa: Le chef de l'Opposition devrait savoir que nous exportons 50% de ce que nous produisons sur le plan manufacturier, et plus que l'Ontario, en proportion.

M. Morin: Et même un peu plus.

M. Bourassa: En proportion, nous dépendons davantage du commerce extérieur que l'Ontario. Cela ne nous place pas dans une position de négociation tellement forte.

M. Morin: Mais il n'a jamais été question d'iso-

ler le Québec, comme vous affectez de le croire, chaque fois que nous en parlons, en nous parlant de barbelés et de murs de ciment, de toutes ces images enfantines.

M. Bourassa: Je vous donne des exemples précis, des faits concrets, et vous me répondez par des généralités comme l'association économique, en faisant valoir que tout cela pourrait créer des miracles pour le Québec.

M. Morin: J'essaie de vous démontrer que, parmi toutes les hypothèses, vous retenez celles qui font votre affaires pour votre petit baratin traditionnel.

M. Bourassa: Des hypothèses d'actualité qui font très mal au Parti québécois.

M. Morin: Je ne le pense pas, quand elles sont discutées sérieusement. Mais, lorsqu'elles sont lancées comme cela en l'air, évidemment, cela fait votre affaire.

M. Bourassa: C'est votre propre conseiller économique qui l'a dit.

M. Morin: Nous en reparlerons et j'espère que vous pourrez me trouver les extraits...

M. Bourassa:... demain, M. le Président.

M. Morin: M. le Président, revenons à la question qui fait l'objet de notre débat, ce soir, qui est la question des amendements, des modifications à la constitution et celle du rapatriement, dans l'hypothèse où le pouvoi rfédéral se montrerait disposé à donner au Québec les garanties qu'il exige, dans le domaine culturel. Dois-je comprendre que le Québec serait prêt à accepter une formule d'amendement aux termes de laquelle l'Ontario aurait un veto sur l'avenir constitutionnel du Québec, une province à l'ouest de l'Ontario...

M. Bourassa: On le possède actuellement.

M. Morin: Laissez-moi finir ma question. Elle est passablement complexe. Une province à l'ouest de l'Ontario disposerait également d'un droit de veto et une province à l'est également disposerait d'un droit de veto sur l'avenir du Québec. Est-ce que c'est cela que vous nous dites?

M. Bourassa: M. le Président, est-ce que le chef de l'Opposition, qui est un expert en la matière, n'est pas d'accord avec moi pour dire qu'actuellement c'est la situation? Actuellement, l'Ile-du-Prince-Edouard possède un droit de veto sur l'avenir constitutionnel du Québec.

M. Morin: Actuellement, sur le plan juridique, ce n'est pas clairet, sur le plan politique, la question est ouverte, tandis qu'avec une formule écrite en noir sur blanc, cela devient un droit écrit. Cela prend drôlement de l'importance pour l'avenir.

M. Bourassa: M. le Président, la réponse du chef de l'Opposition est assez ambiguë.

M. Morin : Je vous ai posé une question, vous me répondez par une autre. J'essaie d'aller au fond, de savoir.

M. Bourassa: Ce que je dis, c'est qu'une interprétation actuelle, c'est qu'une province peut opposer un droit de veto à l'avenir constitutionnel du Québec, alors que, dans la formule qui avait été proposée à Victoria, c'est un ensemble de provin- ces, ou les provinces qui ont plus que 25% de la population du Canada qui pouvaient avoir ce droit de veto. C'est certainement une amélioration incontestable sur la situation actuelle. C'est dans ce contexte qu'il faut regarder, autrement, il ne sera jamais possible de rapatrier la constitution. Cela peut faire l'affaire de votre parti, mais les Canadiens et les Québécois penseront peut-être autrement.

M. Morin: Je ne soutiendrais pas la proposition qu'à l'heure actuelle l'Ile-du-Prince-Edouard possède un droit de veto sur l'avenir constitutionnel du Québec, ce n'est pas le cas.

M. Bourassa: Mais toutes les provinces possèdent un droit de veto actuellement. Pourquoi éliminer l'une des provinces?

M. Morin: Pas nécessairement sur l'avenir de l'une des provinces. Non, je ne crois pas que l'on puisse soutenir cela, à l'heure actuelle, même en droit coutumier. Je ne crois pas que ce soit le cas. Et d'ailleurs, si c'était si clair que cela, vous ne verriez pas Ottawa tant insister pour rapatrier la constitution et rédiger une formule en noir sur blanc. Cela ferait son affaire que n'importe quelle province puisse s'objecter au développement de l'avenir constitutionnel du Québec.

M. Bourassa: II faut quand même comprendre le gouvernement fédéral de vouloir rapatrier la constitution, que ce soient les Canadiens qui décident de modifier la constitution, je pense que c'est un objectif qui est valable.

M. Morin: L'histoire de la formule Fulton-Favreau et de la formule Trudeau-Turner montre que ce qui intéresse le pouvoir fédéral, ce n'est pas tellement le rapatriement de la constitution que d'avoir enfin en main une formule d'amendement précise, une formule d'amendement de droit écrit, qui permette de tenir tête aux aspirations constitutionnelles du Québec. Je rappellerai au premier ministre que cette question des amendements constitutionnels avec la formule Fulton-Favreau, a commencé à donner du fil à retordre en 1964-1965, c'est-à-dire à une époque où on craignait que le gouvernement Lesage ne mène le Québec sur la voie du statut particulier. C'est la cause directe de l'insistance d'Ottawa pour obtenir une formule d'amendement rigide, qui lie le Québec.

M. Bourassa: Je suis d'accord que la question est complexe, d'ailleurs le chef actuel du député de Sauvé était d'accord pour la formule Fulton-Favreau, il s'en souvient.

M. Morin: Pardon? Comment?

M. Bourassa: M. René Lévesque avait exprimé son accord pour la formule Fulton-Favreau.

M. Morin: Mais cela n'a rien à voir. Il faisait partie d'un gouvernement dont il était solidaire; le premier ministre sait-il ce que c'est que la solidarité ministérielle?

M. Bourassa: Ce sont des questions complexes, alors, peut-être n'avait-il pas saisi toute la portée.

M. Morin: Le premier ministre sait ce que c'est la solidarité ministérielle, sûrement.

M. Bourassa: Sur ce sujet, je dois dire que nous donnons l'exemple, un exemple remarquable.

M. Morin: Sur le fond, au sein du cabinet Le-sage, le premier ministre sait peut-être, ou devrait savoir, qu'il y avait des ministres qui étaient foncièrement contre la formule...

M. Bourassa: Ceux qui se disent contre après que ç'a été refusé, je ne sais pas s'ils...

M. Morin: A l'époque il y en avait qui étaient contre et je pourrais vous les nommer, parce que je leur ai parlé, à l'époque.

M. Bourassa: Nommez-les.

M. Morin: Voulez-vous que je vous en nomme un qui va beaucoup vous étonner?

M. Bourassa: Disons, M. le Président...

M. Morin: Je vais vous le nommer, parce que je pense que vous le savez.

M. Bourassa: Je n'insiste pas, car je ne crois pas que ce soit délicat.

M. Morin: Je vous comprends. M. Bourassa: D'accord.

M. Morin: Je vous comprends; celui que je m'apprêtais à vous nommer ne vous aurait peut-être pas étonné, mais il en aurait étonné plusieurs.

M. Bourassa: J'aime mieux pas, parce que révéler des secrets de cette nature... je comprends que la discussion est importante, mais pas au point de trahir les confidences qu'on vous a faites.

M. Morin: Tout ça pour dire qu'au sein du cabinet Lesage il y eut des gens qui retinrent leur langue, mais qui n'étaient pas d'accord, et qui ont été obligés de faire preuve de solidarité ministérielle.

M. Bourassa: Alors, pour eux, ce n'était pas à ce point important qu'il faille qu'ils démissionnent parce qu'ils n'étaient pas d'accord.

M. Morin: Cela, c'est une autre affaire.

M. Bourassa: Oui, mais... c'est une autre chose...

M. Morin: Celui auquel je pense aurait peut-être dû démissionner à l'époque.

M. Bourassa: Mais la formule n'a pas été retenue.

M. Morin: De toute façon, la formule n'a pas été retenue, c'est ce qui s'est finalement produit; donc, la question de démission ne se posait pas.

M. Bourassa: Ce que je veux dire au chef de l'Opposition, c'est que la question du rapatriement de la constitution est extrêmement importante, mais, pour lui, je crois qu'elle est d'une importance totale et absolue, et je voudrais tout de même la situer dans le contexte global des responsabilités québécoises. Même si c'est une question dont je ne sous-estime pas l'importance, il reste que le gouvernement doit quand même tenir compte de l'ensemble de ses priorités. Il n'est pas question que le gouvernement du Québec, pour résumer ma pensée, déroge à l'opposition traditionnelle pour ce qui a trait au rapatriement de la constitution. Le Québec a toujours exigé un certain partage des pouvoirs, qui a varié selon les moments où cela a été discuté. Dans le cas de M. Lesage, est-ce qu'il s'était associé... je n'étais pas en politique à ce moment, j'étais à l'extérieur.

M. Morin: M. Lesage voulait que le Québec ait un statut constitutionnel particulier au sein de la fédération.

M. Bourassa: Les questions de partage des pouvoirs n'avaient pas été discutées en détail. C'était simplement la formule qui avait été discutée.

M. Morin: C'était la formule, et M. Lesage voulait être sûr, du moins avant la conférence, qu'on puisse définir un statut particulier pour le Québec. Finalement, la formule qui lui a été plus ou moins imposée niait la possibilité de ce statut particulier. C'est sans doute pour cela qu'il a fini par dire non, à la formule Fulton-Favreau.

M. Bourassa: D'accord. Nous considérons qu'avant d'aborder la question du rapatriement de la constitution, nous devons être assurés qu'il sera possible pour le Québec d'avoir des garanties constitutionnelles, pour aborder la discussion. Cela ne veut pas dire que ce sera la position finale. Nous verrons après les négociations. L'Alberta exigera peut-être certaines choses. L'Ontario pourra exiger certaines modifications dans d'autres secteurs.

M. Morin: Par exemple, de vendre son pétrole au prix international.

M. Bourassa: L'Alberta, non, cela ne touche pas à la constitution.

M. Morin: Si. Cela touche la compétence en matière de richesses naturelles. Parfaitement. Nous reparlerons sans doute de cela dans l'avenir. J'ai peut-être encore une ou deux questions.

M. Roy: Si vous me permettez, avant d'aller plus loin, M. le Président, le premier ministre a parlé tout à l'heure de pourcentage qui aurait été retenu, lors des discussions qui ont eu lieu, relativement à la charte de Victoria, soit 25%. Le premier ministre peut-il nous dire si le gouvernement du Québec retient encore ce pourcentage dans ses négociations ultérieures?

M. Bourassa: C'est un pourcentage qui protège le Québec.

M. Roy: C'est un pourcentage qui protège le Québec pour combien de temps?

M. Bourassa: C'est pour cela que nous signalons l'importance d'en discuter.

M. Roy: C'est pour cela que j'ai attiré l'attention de la commission.

M. Bourassa: La question du député est très juste. Plus nous retardons la discussion sur le rapatriement de la constitution, plus la question qu'il pose peut se soulever. S'il vient un moment où le Québec a 24% de la population, cela modifie complètement la formule d'amendement.

M. Roy: II faut songer à cette chose maintenant.

M. Bourassa: Ce n'est pas prévu avant I98I, je pense.

M. Roy: Tout de même, si le gouvernement du Québec retient le pourcentage de 25%, dans ses discussions, il y a évidemment le risque, dans quelques années, dans très peu d'années...

M. Bourassa: Dans le mode, il est dit que si c'est 25% au moment, il y a protection pour l'avenir, pour répondre à la question du député. D'accord?

M. Roy: C'est la précision que je voulais obtenir.

M. Morin: Le premier ministre pourrait-il s'engager, avant de partir à nouveau pour une conférence fédérale-provinciale portant sur la constitution, à ce qu'il y ait un débat public, ouvert, sur ce qui fera l'objet de la conférence? La dernière fois, il se souviendra qu'il est parti en catimini pour la conférence de Victoria.

M. Bourassa: J'avais 60 journalistes, M. le Président!

M. Morin: Oui, mais aucun des journalistes qui durent faire le pied de grue à la porte de la conférence ne savait ce qui s'y passait, ne savait ce que le Québec était parti demander, ni quels étaient ses arguments.

M. Bourassa: II y avait eu une commission parlementaire.

M. Morin: Ne serait-il pas opportun que, cette fois, avant de partir, le gouvernement fasse pleinement état de ses arguments, de ce qu'il entend revendiquer? Autrement dit, le premier ministre n'estime-t-il pas opportun de mettre les Québécois "dans le coup", cette fois, pour s'éviter de nouvelles déconvenues, comme le "non" à la formule Fulton-Favreau, ou le "non" à la charte de Victoria?

M. Bourassa: Le chef de l'Opposition propose-t-il un référendum?

M. Morin: Ce ne serait peut-être pas une si mauvaise idée. Mais, avant de faire un référendum, il faut informer la population. Je lui demande s'il a l'intention d'informer pleinement les Québécois de ce qu'il ira négocier à Victoria, ou ailleurs.

M. Bourassa: Je ne sais pas quelles seront les modalités à ce moment. C'est un engagement qui est facile à respecter et que nous avons toujours respecté.

M. Morin: Non, ce n'est pas le cas, justement!

M. Bourassa: J'ai fait une commission parlementaire avant d'aller à Victoria, et c'est là que M. Camille Laurin a dit qu'il était d'accord sur la formule, le mode d'amendement, à l'occasion de la commission parlementaire. C'est malheureux que je sois obligé de vous dire cela.

M. Morin: J'aimerais bien que vous me prouviez cela.

M. Bourassa: Oui, je vais le trouver. M. Ri-vest...

M. Morin: M. le Président, je voudrais quand même que le premier ministre soit plus spécifique. La dernière fois, les Québécois se demandaient exactement quelles allaient être les attitudes de Québec à Victoria. Il n'y avait pas eu de débat public. Le débat public a eu lieu au retour, lorsque la délégation québécoise est rentrée de Victoria.

Elle a tourné de la manière que le premier ministre sait. Il avait dit oui à Victoria. Il a dû dire non, une fois de retour à Québec.

M. Bourassa: C'est faux, M. le Président.

M. Morin: C'est ce qui a été rapporté à l'époque.

M. Bourassa: C'est faux, je n'avais pas dit oui à Victoria. C'est complètement faux.

M. Morin: Qu'aviez-vous dit? Un oui conditionnel ou quoi?

M. Roy: N' oui. Le premier ministre avait dit: N'oui!

M. Bourassa: Non. D'ailleurs, c'est pour cela qu'on avait donné une semaine pour donner les réponses. Comment pouyais-je avoir dit oui, quand une semaine de délai avait été donnée?

M. Morin: Pour la confirmation par les gouvernements.

M. Bourassa: Pas la confirmation, pour la réponse.

M. Morin: Si je comprends bien, le premier ministre avait dit non à Victoria?

M. Bourassa: Je ne peux pas démentir toutes les rumeurs ou les ragots, ou les bobards qui circulent. Il ne me resterait pas de temps pour administrer.

M. Morin: Le premier ministre peut-il nous dire quelle avait été sa réponse, à Victoria même?

M. Bourassa: La réponse que j'avais faite, au

sortir de la conférence, est que, dans une semaine, nous donnerions notre réponse. J'ai réuni le cabinet le 22 juin. Comme je l'ai dit, ce n'étaient pas des moments faciles. Il faut quand même être conscient que, dans toute cette question, se trouve à s'exprimer le problème québécois dans toute son acuité.

M. Morin: Pour terminer, je ne pose plus de question au premier ministre, parce que je vois que je n'aurai pas de réponse. Je lui dis simplement que, pour s'éviter des déconvenues de ce genre, la prochaine fois, il vaudrait mieux que tout le monde soit au courant, au Québec, de ce qu'il s'en va négocier, des concessions qu'il est prêt à faire et des exigences minimales dont il fera preuve durant la conférence. Autrement, au retour, ce sera la même histoire. Le premier ministre aura pris des engagements moraux et se trouvera devant l'obligation de revenir sur sa parole, ou encore, de dire non, alors que tout le reste du pays attend un oui.

Je voudrais que le premier ministre soit conscient de la nécessité de mettre les Québécois dans le coup! Que tout ne se passe plus derrière des portes closes.

M. Bourassa: D'accord.

M. Morin: Je note que le premier ministre est d'accord.

M. Bourassa: M. le Président, je pense bien que le chef de l'Opposition doit admettre que, sur des questions comme celle-là, nous ne pouvons pas engager l'avenir du Québec d'une façon irrémédiable, sans informer les Québécois. C'est une vérité de La Palice que me demande de lui dire le chef de l'Opposition.

M. Morin: Je voudrais bien que cela en fût une. Malheureusement, l'expérience du passé, aussi bien dans votre cas que dans le cas de M. Lesage, en est une de secret. Tout s'était tramé en catimini. Personne ne savait exactement ce qui se passait, même les experts, même les constitution-nalistes dans les universités.

Je pense que j'en ai terminé pour le rapatriement de la constitution.

M. Roy: M. le Président, sur ce point j'aimerais ajouter quelque chose et aller peut-être un peu plus loin que le chef de l'Opposition. On se rappellera qu'au moment où le premier ministre s'était rendu à Victoria, il y avait eu des demandes formulées à l'Assemblée nationale, dans le temps. J'étais un de ceux qui avaient demandé au premier ministre, devant des conférences aussi importantes où on joue l'avenir du Québec, puisqu'il s'agit de la constitution comme telle, qu'il accepte, lorsque ces conférences ont lieu, qu'il y ait des membres de l'Opposition qui y assistent, à titre d'observateurs, de façon que nous sachions, et que l'Opposition sache ce qui se passe et qu'on ne fasse pas des conférences à huis clos.

Je pense que les Québécois ont quand même le droit de savoir.

M. Bourassa: Vous voulez dire tous les partis.

M. Roy: C'est une chose qui pourra se discuter dans le temps.

M. Bourassa: Combien?

M. Roy: Non, c'est une chose qui pourra se discuter dans le temps, ce n'est pas une question de détail.

M. Bourassa: Nous allons vider l'Opposition.

M. Roy: Non. C'est une question de principe. Vous pouvez rire, parce que c'est peut-être vous qui serez dans l'Opposition dans ce temps!

M. Bourassa: Oh! Oh!

M. Roy: Non, un instant. Le premier ministre veut charrier un peu! Je veux dire ceci et de façon sérieuse, étant donné qu'il s'agit d'une question fondamentale, d'une question primordiale...

M. Bourassa: Nous verrons à ce moment, mais il faut que le député sache qu'une partie se fait à la télévision. De toute manière, les membres de l'Opposition peuvent voir ce qui se passe. Ils ne sont pas obligés d'être dans la salle elle-même. C'est bien plus facile pour eux de voir directement ce qui se passe à la télévision, que d'être dans la salle.

Nous verrons à ce moment, si la conférence est publique.

M. Roy: En somme, le premier ministre ne dit pas non à cette possibilité.

M. Bourassa: Je suis d'accord pour examiner cette possibilité.

M. Roy: Le premier ministre ne dit pas non.

M. Bourassa: Nous pourrons voir les modalités. Est-ce que ce serait le député de Beauce-Sud ou le député de Rouyn-Noranda? Seront-ils ensemble à ce moment?

M. Roy: M. le Président, ce sera peut-être le premier ministre qui sera dans l'Opposition, à ce moment aussi.

M. Bourassa: Alors le problème ne se posera pas.

M. Roy: Le premier ministre sera peut-être celui qui se basera sur les propos que nous tenons aujourd'hui. Je dis, de façon sérieuse, nonobstant la petite politicaillerie, mettons cela de côté...

M. Bourassa: On examinera la suggestion, mais je crois que la question est prématurée, car le processus de négociation n'est même pas...

M. Roy: Mais je note que le premier ministre n'a pas dit non.

Le Président (M. Gratton): Est-ce que la commission peut maintenant libérer le premier ministre?

M. Morin: Non, j'aurais encore quelques questions pour lui, M. le Président, à moins qu'il ne veuille revenir un autre jour.

M. Bourassa: C'est bien, je vais accepter les questions du chef de l'Opposition. Est-ce sur la social-démocratie qu'il voulait me poser des questions?

M. Morin: Je le voudrais bien, mais cela voudrait dire au moins trois ou quatre heures de discussion.

M. Bourassa: A un autre moment.

M. Morin: Je préférerais m'en tenir à des questions plus concrètes pour l'instant. Est-ce que le premier ministre pourrait...

M. Bourassa: Les conflits d'intérêts?

M. Morin: ... déposer la dernière édition des divulgations des ministres, conformément aux directives qui ont été adoptées en matière de conflits d'intérêts.

Conflits d'intérêts

M. Bourassa: Je veux tout d'abord signaler, M. le Président, que ces règles sur les directives sont les plus sévères du Canada. Je veux le dire au chef de l'Opposition car le Parti québécois a fait beaucoup de partisanerie politique sur des transactions, dans le cas de Paragon entre autres, alors que ces transactions sont permises par la presque totalité des gouvernements provinciaux, y compris la Colombie-Britannique. Il est assez étonnant de voir la partisanerie ou la démagogie dont a fait preuve l'Opposition sur cette entreprise en citant comme exemple la Colombie-Britannique où de telles transactions sont permises, parce que, dans ces provinces, la divulgation...

M. Morin:... dans certaines provinces. M. Bourassa: Pardon?

M. Morin: On a vu des démissions, à la suite de conflits d'intérêts, dans certaines provinces....

M. Bourassa: Vous comparez des pommes avec des oranges.

M. Morin: ...M. le premier ministre.

M. Bourassa: Je vous dis que, dans le cas des entreprises Paragon, c'est permis dans la presque totalité des provinces et par le gouvernement fédéral. Du moment qu'il y a divulgation, et il y a divulgation puisque c'est dans les comptes publics, c'est permis. Donc, quand vous citez, d'un côté, la Colombie-Britannique en exemple au Québec, et que vous critiquez ces transactions qui sont permises dans la province que vous citez en exemple, il y a là une contradiction assez étonnante. Donc, je veux dire au chef de l'Opposition que les règlements que nous avons édictés sont les plus sévères de l'histoire du Québec et du Canada, et sont appliqués.

M. Morin: C'est une question d'opinion. Je ne veux pas reprendre le débat que nous avons eu sur ce sujet a plusieurs reprises.

M. Bourassa: Vous voulez la divulgation des... C'est ouvert, c'est accessible, ça. On me dit que vous avez une question au feuilleton là-dessus?

M. Morin: Pas de moi.

M. Bourassa: Du député de Beauce-Sud?

M. Morin: C'est possible.

M. Bourassa: Mais c'est accessible.

M. Morin: C'est accessible? Mais alors pourriez-vous déposer la dernière version?

M. Bourassa: Les journalistes ont pu commenter tout l'avoir de mon épouse ou de...

M. Morin: Mais je vous parle des ministres.

M. Bourassa: D'accord, mais dans mon cas, j'ai donné l'avoir et les investissements de mon épouse.

M. Morin: Vous dites que c'est accessible, mais est-ce que vous pourriez faciliter l'accessibilité et déposer le dernier état de la chose?

M. Quenneville: Vous charriez!

M. Bourassa: M. le Président, je ne sais pas pourquoi... On peut le faire, mais je veux demander au chef de l'Opposition de réfléchir sur les conséquences de tous ces gestes pour le recrutement politique éventuel.

M. Morin: Puisque c'est accessible...

M. Bourassa: Oui, d'accord, mais est-ce qu'on doit...

M. Morin: Pouvez-vous nous dire que c'est accessible à tout le monde? Je ne vois pas pourquoi, tout à coup, vous nous dites que cela peut nuire aussi...

M. Bourassa: Non, ceux qui...

M. Morin: ... si c'est vraiment accessible déjà.

M. Bourassa: M. le Président, si on multiplie les commentaires sur l'avoir des épouses ou des enfants ou des hommes politiques et qu'on en tire toutes sortes de nouvelles à sensation ou toutes sortes d'insinuations; si une épouse a cinq actions dans une entreprise, si on tente d'impliquer l'homme politique en cause, je dis que cela peut, finalement, devenir dangereux pour le recrutement des hommes politiques. Très peu de gens voudront faire, d'une façon systématique, du nuvitisme financier.

M. Morin: Mais alors, à quoi sert la divulgation si ce n'est justement destiné à informer le public?

M. Bourassa: II y a une question au feuilleton. Si vous voulez voir les actions ou connaître les compagnies dans lesquelles mon épouse a des actions, vous pouvez vous rendre de l'autre côté, dans le bureau du secrétariat général, vous y verrez toutes les compagnies avec le pourcentage des actions détenues par mes enfants ou mon épouse. Moi, j'ai donné les miens.

M. Morin: Je vous demande s'il est possible d'en déposer copie.

M. Bourassa: Mais pour quelle raison si c'est accessible?

M. Morin: C'est accessible peut-être à un indi-

vidu, ce qui ne veut pas dire que ce le soit à tous.

M. Bourassa: Les journalistes ont écrit des articles là-dessus. Le journal Le Soleil a publié tout le mandat où mon épouse se départit de tous les biens.

M. Morin: Mais puisque c'est accessible, je ne vois pas très bien pourquoi vous faites de telles histoires pour éviter de les déposer devant la commission.

M. Bourassa: Pourquoi faites-vous une telle histoire pour qu'ils soient déposés quand tout le monde en a pris connaissance, ou tous ceux qui étaient intéressés...

M. Morin: Non, tout le monde n'en a pas pris connaissance. La preuve? Je n'en ai pas pris connaissance encore; je ne sache pas que quiconque dans l'Opposition en ait pris connaissance.

M. Bourassa: Demandez à un de vos recherchistes.

M. Morin: En avez-vous pris connaissance, vous? Le député de Beauce-Sud non plus n'en a pas pris connaissance.

Une Voix: Camille le sait, lui.

M. Bourassa: Demandez à l'un de vos recher-chistes. Nous vous avons tout de même attribué plusieurs recherchistes, demandez à l'un d'eux de vous faire faire des copies de tout ce qui a été fait. Ce n'est pas que je m'oppose à le déposer, mais vous pouvez demander a un messager de se rendre au bureau de M. Chouinard et de demander une copie de tout ce qui a été fait par les ministres. Cela revient au dépôt. Pourquoi faire cela?

M. Morin: Mais, cela ne revient pas au dépôt, justement, parce que c'est une communication à une personne. Si vous le déposez, cela devient un document public, ce n'est pas la même chose.

M. Bourassa: Ce que je dis, c'est que cela ne se fait dans aucune province...

M. Morin: Autrement dit, si je comprends bien, vous ne voulez pas le déposerl

M. Bourassa: Non, M. le Président, ce n'est pas cela. Tout ce qu'il y avait à dire à ce sujet a été dit, ce n'est pas que je ne veuille pas le déposer, mais je trouve...

M. Bellemare (Rosemont): M. le premier ministre, soyez assuré...

Le Président (M. Gratton): A l'ordre!

M. Bellemare (Rosemont): ...que le chef de l'Opposition...

Le Président (M. Gratton): A l'ordre, s'il vous plaît !

M. Bellemare (Rosemont): ...aurait aimé marier une jolie dame...

Le Président (M. Gratton): A l'ordre!

M. Bellemare (Rosemont): ...comme vous, et aussi riche, mais, malheureusement, ce n'est pas arrivé.

M. Morin: Une belle dame comme le premier ministre!

M. Bellemare (Rosemont): ...comme son épouse, comme l'épouse du premier ministre, c'est pour cela qu'ils sont si jaloux.

M. Bourassa: M. le Président, ce que je veux dire au chef de l'Opposition...

M. Bellemare (Rosemont): Ils n'ont pas eu cette chance-là.

M. Bourassa: ...que je n'ai pas d'objection à le déposer. Je ne voudrais pas que l'on dise que le premier ministre refuse de déposer les bilans. C'est clair? Je n'ai pas d'objection à le déposer. Dieu sait que j'ai eu à supporter toutes sortes d'insinuations sur ce sujet. Mais je dis au chef de l'Opposition que cela ne se fait nulle part ailleurs. Ce n'est pas pour moi que je parle, c'est pour ceux qui, éventuellement, pourraient être intéressés à faire de la politique. Si on multiplie les gestes pour les détourner, je pense qu'il faut tenir compte de la qualité de l'administration publique. Je dis que le chef de l'Opposition, comme tout autre citoyen, peut avoir une copie de tout ce qui a été déposé, donc, avoir accès direct, complet et total à tout ce qui a été écrit sur les dettes, les actifs ou tout ce qui peut être dû par les ministres ou les épouses des ministres. Mais si le chef...

M. Morin: Je ne veux pas insister.

M. Bourassa: ...si le chef de l'Opposition insiste, nous le déposerons, mais je lui suggère, comme formule alternative, et si cela ne suffit pas, nous le déposerons, d'envoyer un de ses messagers faire faire une copie de tout ce qui a été déposé.

M. Morin: M. le Président, je cherche à comprendre l'attitude qui veut que, d'une part, ce soit c'est accessible et que, d'autre part, on refuse de les déposer. Cela ne me paraît pas très logique; mais j'enverrai quelqu'un chercher les renseignements...

M. Bourassa: Ce que je dis, c'est que cela ne se fait nulle part ailleurs. Et pourquoi? Déjà, nous avons les règlements les plus sévères de l'histoire du Québec et du Canada.

M. Morin: C'est discutable, je vous ai déjà dit ce que j'en pensais.

M. Bourassa: Prouvez le contraire!

M. Morin: Je pense qu'on pourrait le faire assez facilement.

M. Bourassa: Faites-le!

M. Morin: D'ailleurs, nous en avons déjà parlé en Chambre.

M. Bourassa: Faites-le. Vous avez cité comme exemple, en Chambre, la Colombie-Britannique, c'est inscrit au Journal des débats. Or, en Colombie-Britannique, il n'y a aucune interdiction, alors que, dans notre cas, si l'épouse d'un ministre ou du premier ministre...

M. Morin: On vous parle de divulgation.

M. Bourassa: ...détient une action, la compagnie est empêchée de faire affaires avec le gouvernement et cela pénalise tous les autres actionnaires, c'est donc dire que cela force l'épouse ou le ministre à vendre ses actions parce que les autres actionnaires n'acceptent pas d'être empêchés de faire affaires avec le gouvernement. Or, le chef de l'Opposition sait que la plupart des entreprises importantes aujourd'hui font affaires avec le gouvernement, alors, cela pénalise fortement ceux qui font de la politique actuellement.

M. Morin: Le premier ministre a-t-il l'intention d'adjoindre aux directives des sanctions en cas de contravention? A l'heure actuelle, il n'existe pas de sanction dans les directives.

M. Bourassa: M. le Président, tout dépend. On m'a signalé un cas où il y avait $50 qui avaient été payés par mégarde à une entreprise, la sanction doit-elle s'appliquer dans ce cas? Il y a des erreurs de détail, mineures. Si un garage qui appartient à un ministre vend de l'essence à un camion d'Hydro-Québec par mégarde, le ministre sera-t-il obligé...

M. Morin: N'allez pas chercher des histoires farfelues!

M. Bourassa: Mais c'est cela! Si on met des sanctions, il faut les mettre pour les gestes.

M. Morin: Pour les contraventions vraiment sérieuses, n'y aurait-il pas lieu de prévoir des sanctions?

M. Bourassa: S'il y a des contraventions sérieuses, il reste à voir si elles furent commises de mauvaise foi ou non, et si l'Etat a été pénalisé ou s'il y a eu bénéfice réel. Tout ce que je puis dire, c'est qu'il n'y a eu aucun avantage, de quelque nature que ce soit, pour aucun membre de mon cabinet. Aucun avantage. On a fait beaucoup de bruit avec ces conflits d'intérêts, mais on n'a pas été capable de trouver un seul avantage.

Je pourrais vous donner plusieurs cas où il y a eu perte, où les compagnies ont été pénalisées, où les ministres ont été pénalisés, mais aucun cas où il y a eu avantage.

M. Morin: Maintenant, compte tenu de la distinction que vous faites entre les cas où on a agi de bonne foi, ou sans que l'intéressé ne sache les gestes qu'on posait en son nom, et, d'autre part, des situations où l'individu savait ce qu'il faisait, le premier ministre n'est-il pas d'avis qu'il y a des cas où il doit y avoir une sanction?

M. Bourassa: C'est toute la question. Nous sommes dans du droit nouveau.

M. Morin: Oui, c'est vrai.

M. Bourassa: Comment rédiger la sanction dans un texte législatif? Comment évaluer? Il faudrait que la sanction soit correspondante à l'action. Si nous faisons une sanction dans un texte, peut-on écrire que s'il y a mauvaise foi, la sanction s'applique, s'il y a bonne foi, la sanction ne s'applique pas? Comment évaluer la bonne foi ou la mauvaise foi? Il s'agirait que l'épouse d'un ministre — je parle d'une façon purement hypothétique — veuille jouer un tour à son époux et le forcer à démissionner en achetant une action d'une entreprise qui fait affaire avec le gouvernement.

M. Roy: Vous n'en avez pas de meilleure que celle-là!

M. Morin: Le premier ministre devrait être sérieux!

M. Bellemare (Rosement): C'est un droit d'avocat.

M. Bourassa: II ne faut quand même éliminer aucune hypothèse.

M. Morin: Justement, on ne peut éliminer aucune hypothèse. Dans un cas de conflit d'intérêt grave, où il y aurait eu contravention aux directives, le premier ministre n'est-il pas d'avis que dans ces cas, il devrait avoir une sanction?

M. Bourassa: S'il y a mauvaise foi, certainement. C'est au chef du gouvernement à prendre la sanction. Mais, si cela s'est fait à l'insu de l'épouse ou du ministre, doit-on examiner la situation?

M. Morin: Bien sûr, je n'en disconviens pas. Si cela s'est fait à l'insu et si on peut établir la bonne foi de l'intéressé, je pense qu'il n'y a pas lieu d'appliquer des sanctions.

M. Bourassa: Je crois que dans les directives, on parle de la commission des engagements financiers pour examiner cette question. Par exemple, il y a des cas où les seules entreprises qui pouvaient faire affaires avec le gouvernement étaient des entreprises où les ministres ou les épouses détenaient des actions. Dans ces cas, ils ont été obligés de vendre leurs actions à des prix réduits. L'Opposition devrait certainement féliciter le gouvernement pour les gestes qu'il a posés. Je ne vois pas beaucoup d'exemples, dans l'espace et dans le temps, de gouvernements qui imposent autant

d'exigences aux membres du conseil des ministres. Ce sont des exigences qui s'expriment dans des coûts assez importants.

M. Morin: Je ne suis tout de même pas pour vous féliciter pour les conflits d'intérêt où vous avez tenté de mettre un peu d'ordre. Il ne faut pas charrier!

M. Bourassa: M. le Président, ce que je dis au chef de l'Opposition est que nous avons pris des mesures extrêmement rigides pour y faire face, qui ont pénalisé les intéressés.

M. Roy: Je voudrais dire tout simplement au premier ministre que lorsqu'il s'est référé à la commission des engagements financiers tout à l'heure, c'est bien pauvre, pour l'Opposition, comme source de renseignements. Dans la commission des engagements financiers, tous les engagements inférieurs à $25,000 ne paraissent pas. C'est un premier point.

Deuxièmement, on n'a pas examiné les engagements des sociétés paragouvernementales qui sont de plus en plus nombreuses. Cela veut di re que c'est extrêmement limité. Il ne faudrait pas se fier uniquement à la commission des engagements financiers pour examiner la question.

M. Bourassa: Je parle d'un forum pour les cas où les parlementaires voudraient les examiner et où toutes les questions pourraient être posées.

M. Roy: Nous ne pouvons pas poser de questions à la commission des engagements financiers, en vertu de notre règlement, parce qu'il ne s'agit pas d'approuver ou de désapprouver des dépenses gouvernementales. Il s'agit d'un examen, et le ministre qui présente les comptes à la commission des engagements financiers est assez limité dans la possibilité de fournir les réponses. On nous dit toujours, à ce moment, et si c'était inscrit dans le journal des Débats, on pourrait se rendre compte, qu'à chaque fois qu'il y a une séance, je pense que dix à quinze fois on dit, à ce moment, interrogez le ministre en titre. C'est lui qui pourra vous fournir les renseignements.

M. Bourassa: Nous avons proposé cela comme formule.

M. Roy: C'est bien pauvre comme formule!

M. Bourassa: Oui, mais c'est une commission parlementaire comme une autre!

M. Roy: Non, elle n'est pas comme une autre, parce qu'il n'y a pas d'enregistrement. Elle n'est pas comme une autre, c'est une commission parlementaire exceptionnelle.

M. Bellemare (Rosemont): M. le Président, avec l'assentiment de l'Assemblée, me permettez-vous une question?

Le Président (M. Gratton): Est-ce que la commission consent?

M. Bellemare (Rosemont): Je crois que ma question est pertinente.

M. Morin: Non, M. le Président.

Le Président (M. Gratton): Le consentement est refusé. Je m'excuse.

M. Bellemare (Rosemont): Le consentement est refusé, M. Morin?

M. Morin: M. le Président, internpestivement, et à plusieurs reprises, sans y être autorisé, le député est intervenu dans le débat.

M. Bellemare (Rosement): M. le Président, je vous demanderai une...

Le Président (M. Gratton): A l'ordre!

M. Bellemare (Rosemont):... directive.

Le Président (M. Gratton): Vous ne pouvez pas me demander de directive, vous n'avez pas droit de parole. Il me semble que c'est clair, c'est simple. Alors, s'il vous plaît, vous vouliez me respecter, respectez-moi parce que je vais me fâcher.

M. Bellemare (Rosemont): Je vous respecte beaucoup, M. le Président. C'est là que je vois...

Le Président (M. Gratton): A l'ordre! Je rappelle le député de Rosemont à l'ordre pour la deuxième fois.

M. Bellemare (Rosemont): ... à quelle sorte d'acabit j'ai affaire.

Le Président (M. Gratton): Est-ce qu'on a terminé les questions à l'endroit du premier ministre?

M. Morin: Non, pas encore, M. le Président.

Le Président (M. Gratton): L'honorable chef de l'Opposition.

M. Morin: Quinze ou vingt minutes. Si vous voulez me donner encore quinze ou vingt minutes, je pourrai terminer.

M. Bourassa: Ah! cela va, c'est pour commander mon...

M. Morin: Je pense que nous pouvons disposer de ce qui reste. Est-ce que vous comptiez ajourner à une heure précise ce soir, M. le Président?

M. Bourassa: J'aimerais mieux terminer parce que, dans les jours qui viennent, je vais avoir plusieurs problèmes...

Le Président (M. Gratton): Onze heures.

M. Morin: Onze heures? Je vais essayer de faire vite. Je voudrais entretenir le premier ministre du rapport Descent et du rapport Cliche, en matière électorale. Le rapport Descent, on s'en souviendra, portait sur les activités d'Yvon Duhamel, de René Mantha et autres personnages du même acabit, pour parler comme le député de Rosemont.

M. Bellemare (Rosemont): Comme vous mon cher collègue!

M. Morin: Le 29 octobre 1973, ce rapport a conclu à l'inutilité d'entreprendre des poursuites judiciaires et aussi à une situation confuse, notamment dans les comtés de Laporte et de Taillon. Or, le rapport Cliche est beaucoup plus précis, semble-t-il, que le rapport Descent, notamment à la page 70. Les commissaires ont conclu au contraire à une situation très claire, à ce qu'ils appellent l'indécence de l'absence de poursuites. Le premier ministre connaît peut-être par coeur les passages auxquels je me réfère mais simplement pour lui rafraîchir la mémoire, je vais relire ceci:...

M. Bourassa: Je les connais. Quelle est la question?

M. Morin: Alors je ne citerai pas au long. M. Bourassa: D'accord.

M. Morin: Je veux simplement lui rappeler que deux fiers-à-bras, faisant partie d'un groupe d'une dizaine, ont fait l'objet d'une arrestation, dans l'après-midi, à l'entrée d'un bureau de scrutin du comté de Laporte. Ils tentaient d'y pénétrer pour semer le désordre et effrayer les électeurs. Mantha et trois de ses voyous se sont fait arrêter durant l'avant-midi, en train de faire du grabuge à l'entrée d'un comité du Parti québécois dans le comté de Taillon. On ajoute: Tout ce beau monde était commandé par René Mantha, qui avait comme mission de faire "régner l'ordre" dans les bureaux de scrutin. Ils se promenaient du comté de Taillon à celui de Laporte, alternant leurs efforts au soutien des candidatures de MM. Guy Leduc et André Déom.

M. Bourassa: Vous en aviez des fiers-à-bras dans Dorion.

M. Morin: Ah oui! Aucun doute que le premier ministre ait des preuves?

M. Déom: Le député... M. Bourassa: Demandez...

M. Bossé: Y compris "Chapeau"Gagné, qui a été trouvé assassiné.

Le Président (M. Gratton): A l'ordre, messieurs!

M. Bossé: Et Johnny Rougeau, qui est encore vivant.

Le Président (M. Gratton): En l'occurrence, vous permettrez que le député de Laporte puisse s'exprimer.

M. Bossé: Les McSween... Une Voix: "Chapeau" Gagné?

M. Bellemare (Rosemont): Ce sont eux qui ont perdu!

M. Morin: Je n'ai pas d'objection à ce que le député de Laporte s'exprime là-dessus tout à l'heure; au contraire, je pense que cela pourrait éclairer tout le monde. Mais j'ai une question à poser au premier ministre tout d'abord. A la suite des conclusions du rapport Cliche sur ce point, conclusions à l'effet qu'aucune des personnes arrêtées ce jour-là ne fut poursuivie en justice et que le défaut de plainte et l'ordre de libération émanant d'un officier d'élection paraissent, à la commission, nettement "indécent", je le cite textuellement, j'aimerais demander comment le premier ministre peut nous expliquer les conclusions directement opposées de ces deux rapports. J'aimerais aussi lui demander si, ayant pris connaissance du rapport Cliche, il est encore satisfait du rapport Descent.

M. Bourassa: M. le Président, je m'étonne que le chef de l'Opposition parle du rapport Cliche car ses collègues, tantôt, ont quitté l'Assemblée Nationale dans une réaction d'enfant gâté, et on refuse de discuter du rapport Cliche.

M. Morin: Parce que vous avez refusé d'inviter les commissaires, je suppose?

M. Roy: M. le Président, je veux invoquer le règlement.

Le Président (M. Gratton): Question de règlement.

Le député de Beauce-Sud.

M. Roy: Le premier ministre fait référence à une décision qui a été prise dans une autre commission parlementaire et je ne pense pas que le règlement lui permette de le faire. Cependant, j'aimerais lui dire, pour son information, que si l'Opposition a quitté en bloc la commission parlementaire plus tôt...

M. Bourassa: Un petit bloc.

M. Roy: ... c'est à cause du refus du gouvernement de permettre aux commissaires de venir à la commission parlementaire.

Le Président (M. Gratton): A l'ordre! Vous êtes en train de faire exactement...

M. Roy: Non, non.

Le Président (M. Gratton): ... ce que vous ne voulez pas que le premier ministre fasse.

M. Roy: Alors, puisqu'on lui a permis...

Le Président (M. Gratton): Alors, on va arrêter cela là, si vous voulez bien, et le premier ministre...

M. Bourassa: Ayez donc le courage d'assumer...

Le Président (M. Gratton): ... va continuer à répondre.

M. Bourassa: ... vos responsabilités quand même! Il y a des groupes qui viennent faire valoir leur point de vue et ils quittent en bloc comme des enfants gâtés.

M. Roy: C'est le gouvernement qui n'a pas assumé ses responsabilités...

Le Président (M. Gratton): A l'ordre!

M. Roy: ... en voulant faire en sorte de se servir de l'Opposition...

Le Président (M. Gratton): A l'ordre!

M. Roy:... pour essayer de se faire...

Le Président (M. Gratton): A l'ordre!

M. Bourassa: D'accord, M. le Président.

Le Président (M. Gratton): A l'ordre! Votre point de règlement, c'était qu'on ne peut pas faire allusion à une décision qui s'est prise ailleurs.

M. Roy: Bon.

Le Président (M.Gratton): Je ne le partage pas, mais, au moins...

M. Bourassa: D'accord.

Le Président (M. Gratton): ... soyez conséquent avec vous-même et ne faites pas...

M. Bourassa: Alors, le rapport Descent...

Le Président (M. Gratton): ... ce que vous reprochez au premier ministre de faire.

M. Roy: Si vous voulez faire observer le règlement, faites-le observer par le premier ministre aussi.

M. Bourassa: Le chef de l'Opposition a peut-être lu le rapport Descent. Il y avait des choses sur le Parti québécois, sur Pierre Marois qui sera probablement son rival, éventuellement.

M. Morin: Ah! Ah! Ah!

M. Bourassa: Non, mais il faudrait...

M. Morin: Attention à ce que vous dites.

M. Bourassa: Non, mais lisez.

M. Morin: Soyez précis si vous allez porter des accusations.

M. Bourassa: Bien, lisez, je voudrais qu'il relise.

M. Morin: Oui, oui..

M. Bourassa: II y avait des points d'interrogation sur l'activité de certains membres du Parti québécois.

M. Morin: Non.

M. Bourassa: Oui. Je voudrais...

M. Morin: Vous interprétez, un peu à la manière de la fameuse page 133 que vous interprétez à votre façon aussi.

M. Bourassa: Bon. Alors, pourquoi en a-t-on parlé? Pourquoi les commissaires ont-ils jugé bon de parler de M. Burns, du député de Maisonneuve? Pourquoi en ont-ils parlé si ce n'était pas sérieux?

M. Morin: Est-ce que vous voulez qu'on retombe là-dedans maintenant, sur la page 133...

M. Bourassa: Oui, oui.

M. Morin:... et l'usage absolument abusif...

M. Bourassa: Non, non.

M. Morin: ... que vous en avez fait, l'usage même malhonnête...

M. Bourassa: Non, non.

M. Morin: ... que vous en avez fait?

M. Bourassa: Ah! M. le Président...

M. Morin: C'était carrément malhonnête.

M. Bourassa: Revenons à la page 133.

M. Morin: Bon.

M. Bourassa: Le chef de l'Opposition avait l'air de jouir en silence, à ce moment-là!

M. Morin: Le premier ministre pourrait-il définir l'expression "jouir en silence"?

Le Président (M. Gratton): Puis-je m'opposer à ce que vous dites?

M. Bourassa: M. le Président, ce que je dis au chef de l'Opposition, c'est que dans ce genre d'attaque sur les tactiques électorales, je ne crois pas que le Parti québécois puisse jouer au dragon de vertu. Le député de Dorion a parlé tantôt de "Chapeau" Gagné.

M. Bossé: Oui. Assassin reconnu.

M. Morin: Est-ce que vous pourriez répondre à mes questions?

M. Bourassa: Non, non, mais je veux dire que, quand même, il faut que le chef de l'Opposition se rende compte de ce qui existe.

M. Morin: Je sais ce qui existe. J'ai eu affaire, moi-même, à certains fiers-à-bras dans mon comté.

M. Bourassa: Moi aussi.

M. Morin: Je vous assure...

M. Bourassa: Moi aussi.

M. Morin: ... que ce n'est pas un cadeau.

M. Bourassa: Je ne sais pas s'ils travaillaient pour l'abbé O'Neil, mais les tactiques qui étaient employées dans mon comté...

M. Morin: Vous salissez des gens par "innuendo".

M. Bourassa: Non, non.

M. Morin: Ce n'est pas digne de vous, ça.

M. Bourassa: Non, mais ce que je dis au chef de l'Opposition, c'est que, dans certains comtés de la région de Montréal, on ne peut pas dire simplement que le Parti québécois est exempt de tout reproche, est irréprochable. C'est pour ça que je mentionnais tantôt le député de Dorion, qui a eu affaire... Ce n'est pas pour rien que Rene Lévesque n'a pas demandé de recomptage.

Une Voix: Ce n'est pas fini.

M. Bourassa: Ce n'est pas pour rien que René Lévesque n'a pas demandé de recomptage dans Dorion, même...

M. Morin: Allons, allons.

M. Bourassa:... s'il a été battu simplement...

M. Morin: Allons.

M. Bourassa:... par 300 voix.

M. Morin: Encore des insinuations.

M. Morin: Encore des insinuations. Je vous ai demandé, à la lumière du rapport Cliche...

M. Bourassa: Oui.

M. Morin: ... ce que vous pensez du rapport Descent.

M. Bourassa: M. le Président... Rapport Cliche

M. Morin: Le rapport Cliche dit des choses précises...

M. Bourassa:... le ministre de la Justice...

M. Morin: ... et, jusqu'ici, vous n'avez pas répondu à ma question.

M. Bourassa: ... a dit qu'il avait confié à une équipe d'avocats le soin d'examiner le rapport Cliche et d'intenter des poursuites qu'ils jugeront nécessaires. C'est la réponse que je dois lui donner. Je l'ai assaisonnée d'autres commentaires, étant donné les remarques qu'il avait faites et que son parti fait régulièrement. Je crois que, là-dessus, la population se rend compte que les tactiques électorales du Parti québécois, notamment dans le cas des immigrants ou des Néo-Québécois, sont tout à fait inacceptables, pour employer un mot modéré. Il devrait être le dernier à essayer de nous donner des leçons sur ce plan.

M. Morin: II a été mis en preuve, dans mon comté, que le Parti libéral avait fait inscrire des gens qui n'avaient pas le droit de voter, des non-citoyens.

Des Voix: Ha! Ha!

M. Morin: Je vous posais des questions sur les fiers-à-bras, dont parle la commission Cliche.

M. Bourassa: Poursuivez. Vous avez parlé...

M. Morin: ...et vous me répondez par autre chose.

M. Bourassa: Non. Je vous réponds là. La réponse, c'est que le ministre de la Justice a dit...

M. Morin: Bon.

M. Bourassa: ... qu'une équipe d'avocats examinait les poursuites...

M. Morin: Bon.

M. Bourassa:... qui pourraient être prises. M. Morin: Et cela comprend ces aspects-là? M. Bourassa: II a parlé du rapport Cliche. M. Morin: Bon.

M. Bourassa: Je ne sais pas... Il n'a pas fait d'exception quand il a parlé du rapport. Il n'a pas dit: Cela exclut la page 133. Il a dit: L'ensemble du rapport Cliche est examiné par une équipe d'avocats pour voir s'il doit y avoir des poursuites.

M. Morin: C'est une affaire à suivre.

Le Président (M. Gratton): L'honorable député de Laporte.

M. Déom: Je voudrais intervenir, M. le Président, parce que je pense que, depuis la parution du rapport Cliche, il y a un certain nombre de commentaires que j'aimerais faire. Le juge Cliche, à plusieurs reprises, demande aux syndicats de respecter les institutions judiciaires ou quasi judiciaires et lui-même s'est permis de ne pas respecter ces institutions. Je fais référence particulièrement au président général des élections.

Il faut se rappeler que c'est à la demande du juge Cliche que le président général des élections à fait faire une enquête dans les comtés de Taillon et Laporte. Si on analyse l'enquête qui a été faite par le juge Cliche, celui-ci a entendu trois ou quatre témoins au plus tandis que M. Descent, qui a fait le rapport pour le juge Drouin, a vu plus de 57 témoins.

J'ai l'impression que les conclusions du rapport Descent, pour autant que je suis concerné, sont beaucoup plus probantes que celles du juge Cliche. Peut-être que le juge Cliche aurait dû porter un peu plus de respect à l'institution qu'on appelle la présidence générale des élections.

Je voudrais souligner encore une fois, comme je l'ai déjà fait, que le rapport Descent a été très clair en ce qui concerne l'organisation électorale dans le comté de Laporte. Quand on fait référence à l'école Catherine-Primeau, il faudrait peut-être que le chef de l'Opposition se rappelle que le rapport Descent s'est posé plusieurs questions sur la coïncidence étrange de la présence, au même moment, à la même heure, à l'entrée de l'école Primeau, du candidat du Parti québécois, M. Marois, qui s'est amené dans une voiture de police de la ville de Longueuil, accompagné du maire de Longueuil, de M. Mantha et des autres. Le rapport Descent a été très clair là-dessus. Sa conclusion a été, à mon avis, en ce qui me concerne, en tout cas, très claire et est venue confirmer l'enquête que j'avais menée moi-même à la suite des accusations de M. Laberge.

M. Descent a conclu qu'à sa connaissance et après l'enquête qu'il a menée, il n'y avait pas d'or-

ganisation similaire dans le comté de Laporte. Peut-être qu'il y en avait dans d'autres comtés, mais il n'y en avait pas dans le comté de Laporte. L'enquêteur Descent a été très clair là-dessus. Je voudrais bien que le chef de l'Opposition se rappelle que c'est cela le rapport du président général des élections, et le juge Cliche, lui, devrait peut-être penser à respecter les institutions qui sont en place. Il demande aux syndicats de les respecter mais peut-être qu'il devrait les respecter lui-même. Enfin, il y a une chose que je voudrais dire. C'est que jamais M. Marois n'a voulu contester l'élection dans Laporte et pour cause. Jamais M. Marois ne s'est permis de faire des déclarations sur cela. Il l'a toujours fait par personnes interposées...

M. Morin: Vous prêtez des intentions, M. le député.

M. Déom: Laissez-moi finir, M. le chef de l'Opposition.

M. Bourassa: Pourquoi ne conteste-t-il pas? Pourquoi faites-vous des accusations?

M. Déom: Je vais vous dire pourquoi il ne conteste pas...

Une Voix: II n'y a qu'eux qui en ont le droit!

M. Déom: ... parce que la journée même de l'élection, j'aurais pu disqualifier M. Marois parce qu'il a violé, devant moi et devant deux autres témoins, la Loi électorale en tentant d'intimider des scrutateurs...

M. Morin: Allons doncl

M. Déom: Ecoutez, la plainte est au bureau du président des élections et si vous voulez la vérifier, vous irez la vérifier.

M. Morin: Encore une autre tactique pour intimider M. Marois, cela?

M. Déom: Pas du tout, pas du tout.

M. Bourassa: Ce sont des faits affirmés d'une façon sérieuse par un député sérieux.

M. Déom: Je peux ('affirmer. Vous pourrez vérifier. Je suis prêt à discuter avec M. Marois en tout temps, mais dans tout ce débat qui a eu lieu sur le comté de Laporte, jamais on n'a entendu M. Marois dire quoi que ce soit. Cela a toujours été fait par personnes interposées. Moi, comme dirait l'autre, j'ai mon voyage. Il est temps que la population sache que j'aurais pu, la journée même, à dix heures et demie le matin... parce qu'en me présentant dans un bureau de scrutin, j'ai constaté moi-même, avec deux témoins, que M. Marois lui-même violait la Loi électorale en tentant, avec sa loi sous le bras et en se présentant comme avocat, d'influencer des scrutatrices. J'ai fait une plainte. Le président des élections m'a demandé si je voulais le faire disqualifier. J'ai dit: Non. On verra le résultat à la fin de la journée. Mais je pense que ce sont des faits qui sont importants. Je voudrais souligner au chef de l'Opposition que pour autant que je suis concerné...

M. Morin: Est-ce Mme Bastienne Foucrault qui voulait disqualifier M. Marois?

M. Déom: Non, non. Elle ne voulait pas le disqualifier. Elle m'a demandé si en vertu de la loi...

M. Morin: Qui vous demandait si vous vouliez le disqualifier?

M. Déom: Pas du tout, pas du tout. Elle m'a demandé si je voulais faire respecter la Loi électorale.

M. Bourassa: Le chef de l'Opposition...

M. Déom: C'est le rôle d'un président d'élections.

M. Bourassa: Le député de Laporte a été attaqué de toutes sortes de façons avec des insinuations complètement injustifiées et je voudrais que le chef de l'Opposition le laisse donner son point de vue. Je crois que quand même...

M. Morin: J'ai écouté avec beaucoup de soin, M. le Président, je peux vous l'assurer. Seulement je ne peux pas le suivre quand il tente de discréditer la commission Cliche. La commission Cliche avait des pouvoirs d'enquête dont elle s'est servi. Et si elle n'était pas satisfaite du rapport Descent, la commission Cliche gardait le pouvoir, en vertu de son mandat, de faire toutes les observations qu'elle estimait nécessaires.

M. Déom: Pourquoi la commission Cliche ne m'a-t-elle pas assigné publiquement? Le juge Cliche a essayé à trois reprises de m'assigner à huis clos et j'ai refusé.

M. Morin: C'est vous qui avez refusé.

M. Déom: J'ai refusé parce que, s'il voulait avoir une déclaration publique, j'étais prêt à y aller en public. Dans mon communiqué, au mois d'octobre ou novembre, je ne me rappelle pas, j'ai dit que j'étais prêt à aller témoigner en public devant la commission Cliche. Je me suis refusé à y aller à huis clos.

M. Morin: Sur les fiers-à-bras?

M. Déom: ... sur les accusations de M. La-berge. Je me suis refusé à y aller à huis clos pour ne pas jouer dans les politicailleries du président de la commission Cliche; s'il voulait politiser sa commission, c'est son problème. Moi, j'avais le droit, comme député, d'être entendu publiquement là-dessus pour qu'on ne puisse pas dire en public: Ah! le député de Laporte est allé essayer d'arranger son affaire avec la commission Cliche.

M. Morin: Avez-vous offert carrément de comparaître? Je ne veux pas interroger...

M. Le Président (M. Gratton): Ce n'est pas le député de Laporte qui est sur la sellette.

M. Bourassa: Ce que je veux dire au chef de l'Opposition, moi je pourrais parler de l'intimidation dans mon comté sur ceux qui avaient des

pancartes. Ils se faisaient intimider par des gens de votre parti et se faisaient faire des menaces pour les enlever. On pourrait en parler de vos méthodes électorales.

M. Morin: J'ai subi moi aussi ce genre de menaces et d'intimidation — je sais ce que c'est — dans mon comté.

M. Bourassa: Je demanderais au chef de l'Opposition...

M. Morin: On vous parle de fiers-à-bras.

M. Bourassa: Des fiers-à-bras, le député de Dorion peut vous en parler aussi de votre côté.

M. Bellemare (Rosemont): M. le premier ministre, les "guns" sortis, une plainte déposée au poste 3 dans le comté de Rosemont par le parti Québécois. La plainte est là, si vous voulez la vérifier.

M. Le Président (M. Gratton): A l'ordre!

M. Bourassa: Arrêtez donc de jouer au dragon de vertu.

M. Bellemare (Rosemont): ... M. le Président.

M. Morin: Je vous ai posé une question sérieuse.

M. Bellemare (Rosemont): C'est sérieux.

M. Morin: Le rapport de la commission Cliche, qui est public, a constaté qu'il y avait des liens entre un certain parti que vous connaissez bien et ces fiers-à-bras, qui, par ailleurs, étaient des délégués de chantier dans bien des cas.

M. Bourassa: M. le Président, pensez-vous qu'on pouvait être lié de quelque façon que ce soit? Quel gouvernement a poursuivi par "preferred indictment" Dédé Desjardins et Louis La-berge? Quel gouvernement? On ne peut pas dire qu'on...

M. Morin: Le même gouvernement qui a eu recours à ces gens-là quelques mois auparavant. C'est un fait. Lisez le rapport.

M. Bourassa: Ce n'est pas parce qu'il y a quelques dizaines de personnes qui se rendent à une assemblée du ministre qui n'est même pas dans son comté, à Saint-Jérôme, que le ministre va se sentir lié par cela. Quand même, il ne faut pas exagérer. En quoi cela aidait-il le ministre d'avoir 150 personnes de plus pour l'écouter?

M. Morin: Avez-vous lu la conversation?

M. Bourassa: Est-ce que le ministre est impliqué ou son chef de cabinet?

M. Morin: C'est le chef de cabinet, si ma mémoire est bonne. C'est bien clair.

M. Bourassa: II ne faut quand même pas exagérer. On monte en épingle des choses comme celle-là.

M. Bellemare (Rosemont): ...

M. Le Président M. Gratton): Je pense que les questions par rapport au rapport Cliche sont acceptables dans la mesure où elles se rapportent au...

M. Morin: De toute façon, le premier ministre m'a affirmé que le ministre de la Justice ferait étudier tous les aspects du rapport Cliche. Nous suivrons cette question. Je pense qu'on en a assez discuté ce soir.

M. Bourassa: D'accord. Je comprends, parce qu'on pourrait vous répliquer d'une façon foudroyante.

M. Morin: Cela n'a pas de fin. Si on commence à se menacer...

M. Bourassa: Arrêtez, je vous...

M. Morin:... des pancartes de part et d'autres, on n'est pas sorti du bois. Je voulais vous parler de fiers-à-bras. C'est de cela qu'on voulait parler.

M. Bourassa: Non, je dis au chef de l'Opposition qu'il est nouveau! Arrêtez de jouer aux purs. Qu'il en parle à son chef; il a été élu quatre fois dans le comté de Laurier. Qu'il en parle a son chef des tactiques électorales du parti Québécois.

M. Morin: Je suis bien convaincu, pour connaître l'homme, qu'il n'a jamais eu recours à des fiers-à-bras.

M. Bellemare (Rosemont): Johnny Rougeau, c'est qui cela?

M. Morin: On parle de coup-de-poing américains.

M. Bourassa: Ne me forcez pas...

M. Morin: M. le Président, une autre des difficultés...

M. Bourassa: Comment pouvez-vous dire cela sans rire?

Il vous a parlé de "Chapeau" Gagné.

M. Morin: C'est la simple vérité. Pour se tirer d'affaire, le premier ministre peut faire toutes sortes d'insinuations, mais il n'arrivera pas...

M. Bossé: Ce ne sont pas des insinuations, ce sont des affirmations.

M. Morin: ... à ébranler ce qu'a dit la commission Cliche sur les élections dans Laporte et Taillon.

M. Bossé: Johnny Rougeau et sa "gang" étaient très occupés le jour des élections dans Dorion — je veux donner le bénéfice du doute à René Levesque, c'était peut-être à son insu — mais Johnny Rougeau par hasard...

M. Morin: Vous irez raconter cela à la commission Cliche.

M. Bossé: ... et Chapeau Gagné m'a même pris le bras, il a touché à cet objet...

M. Morin: M. le Président...

M. Bossé: ... et je lui ai demandé de ne pas toucher à cette partie fragile.

M. Bellemare (Rosemont): II s'occupait plus de Sauvé.

M. Morin: II y aurait peut-être lieu qu'il y ait une enquête générale sur la dernière élection.

M. Bossé: En ce qui a trait aux radiations dans Dorion, les poursuites se continuent, d'ailleurs.

M. Quenneville: Là vous allez en avoir des surprises.

M. Bellemare (Rosemont): Là vous seriez mal pris.

Le Président (M. Gratton): A l'ordre!

M. Morin: M. le Président, est-ce que je peux vous demander de rappeler le député à l'ordre.

Le Président (M. Gratton): La parole est au député de Laporte.

M. Bourassa: Est-ce qu'il y a d'autres questions?

Je m'excuse d'avoir été un peu...

M. Morin: Je n'ai pas d'objection, quoique ce n'est pas le rôle du député de Laporte d'interroger le chef de l'Opposition, c'est le rôle du chef de l'Opposition d'interroger le premier ministre.

Le Président (M. Gratton): Un instant. M. Déom: A la condition de... M. Bellemare (Rosemont): II va dire non. M. Déom: Non, j'ai juste une question.

M. Morin: Si je peux vous interroger à mon tour, je vous permets de m'interroger.

Le Président (M. Gratton): A l'ordre!

M. Déom: Est-ce qu'on peut prendre au sérieux certaines recommandations d'une commission qui dit, dans les premières pages, une des hérésies les plus fondamentales en matière de relations de travail: que le pluralisme syndical a acquis droit de cité au Québec, depuis des générations, alors que nous vivons depuis 1867 et même avant, si c'est possible, dans un régime de monopole syndical. Et le seul pluralisme syndical qu'on a connu c'est celui du bill 290. Quand je vois une affirmation comme cela, à la page 23 du rapport Cliche qui est censé parler des relations de travail dans la construction, je me pose de sérieuses questions sur le reste du rapport. Merci.

M. Morin: J'imagine que le rapport Cliche fai- sait allusion à la diversité des centrales syndicales au Québec.

M. Déom: Alors, ce n'est pas ce que le concept de pluralisme syndical veut dire, en matière de relations de travail.

Identification des électeurs

M. Morin: Je ne veux pas entrer dans un débat avec le député de Laporte là-dessus, ce n'est pas l'objet de cette commission. Je voudrais en venir à un autre aspect du scrutin. J'en ai déjà parlé au premier ministre, à quelques reprises, et je voudrais y revenir ce soir. Est-ce qu'il ne serait pas dans l'intérêt de tous les partis, le parti gouvernemental comme les oppositions, de pouvoir identifier de manière certaine, les électeurs, le jour du scrutin? Est-ce qu'il ne serait pas utile de prévoir une carte d'identité pour fins électorales, non pas pour fins générales, mais pour des fins strictement électorales, carte qui ne servirait que ce jour, comme cela se fait dans d'autres pays, au moment où on se présente devant les urnes?

M. Bellemare (Rosemont): II faudrait en donner aux immigrants.

M. Bourassa: M. le Président, je suis prêt à aborder cette question. Je m'excuse d'avoir été un peu direct tantôt, mais j'étais scandalisé...

M. Morin: Vous étiez surtout coïncé à ce moment...

M. Bourassa: Vous m'avez déjà vu coïncé?

M. Morin: Oui, oui. Il n'est que de vous voir en Chambre, et la manière dont vous vous tirez d'affaires par des pirouettes, à l'occasion. En tout cas, passons là-dessus, je vous ai posé une question sérieuse, j'aimerais avoir une réponse.

M. Bourassa: Je dis que c'est dans le cadre des études de la réforme électorale. On en a quand même fait plusieurs. On pourra discuter cela à l'occasion, au cours de l'été, probablement au mois d'août.

M. Morin: D'accord on pourra en discuter, je le veux bien, mais là ce soir, je pose une question directe au premier ministre.

M. Bourassa: On pourrait réévaluer. Ma position n'est pas définitive là-dessus. Il y a des avantages à la formule du chef de l'Opposition, il doit y avoir des désavantages, puisqu'elle n'est pas encore en application.

M. Morin: Je dirai au premier ministre que tant que nous n'aurons pas cette carte, il y aura des possibilités de grabuge, le jour du scrutin. Je ne parle pas du Parti libéral, j'essaie de me situer au-dessus des partis...

M. Bourassa: Non, non, je sais...

M. Morin: Et, s'il vous plaît, est-ce qu'on peut tenir la question à ce niveau?

M. Bourassa: II est temps et je comprends

que vous ayez abandonné les attaques contre le parti sur les tactiques électorales.

M. Morin: Ce ne sont pas mes attaques, c'est le rapport Cliche qui aligne des faits, M. le Président, C'est sur le rapport Cliche que je me fondais. A moins de vouloir discréditer la commission Cliche, comme le gouvernement tente de le faire...

M. Bourassa: M. le Président, le député de Sauvé citait une partie du rapport Cliche, alors que je lui rappelais des choses sur lesquelles la commission Cliche n'a pas enquêté. C'est évident, la commission Cliche ne pouvait pas enquêter dans tous les comtés. Je rappelais simplement au député de Sauvé que des gestes avaient été posés par des gens de son parti ou pour son parti qui se comparaient très certainement avec ce qui a pu être mentionné.

M. Morin: Ce sont des affirmations gratuites et qui ne vous tireront pas d'affaire.

Le Président (M. Gratton): A l'ordre!

M. Morin: Revenons-en, M. le Président, à nos moutons.

Le Président (M. Gratton): A l'ordre!

M. Morin: M. le Président, est-ce que je pourrais vous demander de rappeler le député de Rosemont à l'ordre? Cela fait plusieurs fois qu'il perturbe les travaux, ce soir.

M. Bellemare (Rosemont): Je ne perturbe rien, je vous demande de me parler des noms que vous avez fait rayer...

Le Président (M. Gratton): A l'ordre! Le député de Rosemont, s'il vous plaît! La prochaine fois, je devrai vous demander de sortir.

M. Bellemare (Rosemont): Avec plaisir, M. le Président, parce que j'ai du respect pour vous, parce que vous n'êtes pas séparatiste!

Le Président (M. Gratton): Vous avez une drôle de façon de le démontrer!

M. Bourassa: Je dis au chef de l'Opposition que je ne puis pas lui répondre de façon définitive ce soir. Ce sera discuté. Qu'arrive-t-il dans les pays qui l'ont? Le chef de l'Opposition peut-il donner des exemples?

M. Morin: Ils l'ont en France.

M. Bourassa: Ils l'ont en France.

M. Morin: La carte nationale électorale.

M. Bellemare (Rosemont): L'ont-ils à Bruxelles?

M. Morin: J'imagine qu'ils l'ont aussi à Bruxelles. Si j'étais député...

M. Bourassa: L'ont-ils dans les territoires d'outre-mer de la France, en Martinique ou en Guadeloupe?

M. Morin: J'avoue que je n'en sais rien. Probablement, oui, pour fins électorales.

M. Bourassa: Et vous croyez que c'est efficace?

M. Morin: Si ce sont des territoires d'outremer qui élisent des députés à l'Assemblée nationale française, alors, oui, ils doivent avoir la carte.

M. Bourassa: Est-ce efficace dans les territoires d'outre-mer?

M. Morin: Parlez-vous des TOM... M. Bourassa: Oui, de la Martinique.

M. Morin: ... ou si vous parlez de la Corse? Evidemment, si on veut comparer la Corse et le Québec, ce serait intéressant au point de vue des moeurs électorales. Sérieusement, ne croyez-vous pas que toute la réforme électorale peut achopper sur cette question?

M. Bourassa: Nous sommes prêts à l'examiner sérieusement. On a réformé la carte électorale; c'était bien plus difficile, comme réforme, que celle que propose le chef de l'Opposition.

M. Morin: Je n'en suis pas sûr.

M. Bourassa: Changer tous les comtés.

M. Morin: Si c'est tellement simple de s'assurer de l'honnêteté du scrutin et de s'assurer de l'identité de ceux qui votent — cela fait plusieurs fois que je vous en parle — pourquoi hésitez-vous tellement?

M. Bourassa: M. le Président, le chef de l'Opposition devrait savoir que le gouvernement ne serait que très heureux de s'assurer de l'honnêteté du scrutin. Peut-être que nous aurions plus de comtés, si elle avait été totalement appliquée.

M. Morin: Vous en auriez peut-être 110 sur 110? Oui, on peut l'imaginer facilement, surtout avec les majorités par lesquelles vous avez remporté certains comtés. Mais j'essayais de poser une question sérieuse au premier ministre. Je crois que c'est une question sérieuse. Nous aurons beau refaire la carte électorale, nous aurons beau modifier le mode de scrutin, si nous ne pouvons pas nous assurer de l'identité de ceux qui votent, je soutiens, en ce qui me concerne, que la réforme électorale reste illusoire.

M. Bourassa: II ne faut quand même pas exagérer! Je suis d'accord q'elle n'est pas complète, mais de dire qu'elle est illusoire!

M. Morin: Je ne sais pas si le premier ministre est au courant de ces tactiques et de ce qu'on appelle les télégraphes.

M. Bourassa: Avez-vous un cas de télégraphe que vous avez été capable de prouver?

M. Morin: Oui, dans mon comté, nous avons, à

la suite de 1970, établi des dizaines et des dizaines...

M. Bourassa: En 1973?

M. Morin: ...prouvés devant le tribunal, des dizaines de cas de télégraphes.

M. Bourassa: En 1973?

M. Morin: En 1973, il n'y a pas eu de contestation.

M. Bourassa: Ah! Pas de contestation en 1973, après toutes les accusations que vous avez faites!

M. Morin: Pas que je sache, en tout cas.

M. Bourassa: Vous avez accusé le parti au pouvoir durant des semaines et des semaines, et pas de contestation!

M. Morin: C'est parce que nous nous sommes rendu compte que les contestations ne donnaient rien et que, sur ce plan, nous n'avons aucune confiance.

Des Voix: Oh! Oh! Oh!

M. Morin: Oui, oui, parfaitement.

M. Bourassa: Quelle admission!

M. Morin: Je dirai autre chose au premier ministre: La Loi des élections doit être repensée sur le plan de la contestation également, parce que, de la façon dont elle est rédigée, les contestations n'aboutissent absolument à rien. C'est clair? Ceux qui en ont fait l'expérience savent de quoi je parle.

M. Bellemare (Rosemont): Vous autres, vous le savez.

M. Morin: M. le premier ministre, j'aimerais quand même vous demander si vous ne pouvez pas être un peu plus précis sur cette question.

M. Bourassa: D'accord. Nous allons fixer une réunion et nous allons en discuter en priorité, si vous voulez. Il y a la loi pour l'abolition des caisses électorales.

M. Morin: Oui? M. Roy: La vôtre?

M. Bourassa: Nous autres, cela a été appliqué.

M. Morin: Je n'appelle pas cela la loi pour "l'abolition des caisses électorales". Quand vous les aurez vraiment abolies, nous en reparlerons. Là encore, vous jouez sur les mots.

M. Bourassa: Non, je veux dire pour l'abolition des caisses occultes. D'ailleurs, c'est appliqué dans le Parti libéral depuis plusieurs mois.

M. Morin: Oh! Oui. La caisse du Parti libéral est connue de tout le monde! Il n'y a pas de problème! Enfin, nous reparlerons de cela, voulez-vous?

M. Roy: Combien de millions?

M. Bourassa: On sait bien qu'on ne gagne pas des élections avec des grosses caisses électorales; je l'ai dit, M. le Président, et le chef de l'Opposition est au courant.

M. Morin: Cela n'a aucune espèce d'importance! Cela permet seulement d'inonder tous les media de communication de votre savon, de votre confiture!

Une Voix: L'Union Nationale s'est fait laver aussi!

M. Bourassa: L'Union Nationale s'est enterrée avec sa caisse.

Une Voix: Comme le Jour.

M. Morin: M. le Président, puis-je avoir l'assurance du premier ministre que cette question de l'identité des électeurs sera débattue en commission, lorsque nous parlerons de la réforme?

M. Bourassa: Oui, M. le Président. Il approche onze heures.

M. Morin: Je ne fais pas de blague.

M. Bourassa: Je suis d'accord. Ce le sera. Cela fait dix fois que vous le demandez.

M. Morin: C'est une question fondamentale pour tous les partis.

M. Bourassa: D'accord. Il n'y a pas d'élections avant deux ans; il n'y a pas d'urgence à discuter cela, ce soir.

M. Roy: Oui mais il y aura peut-être des élections complémentaires à l'automne.

M. Morin: Si j'étais le premier ministre, je ne ferais pas d'affirmation comme celle-là, parce que c'est suffisant pour que l'Opposition s'interroge sur ses véritables intentions et sur la possibilité d'un scrutin surprise.

M. Bourassa: Ce serait malheureux pour vous, vous avez perdu cinq points depuis octobre 1974.

M. Morin: D'après votre sondage maison, toujours?

M. Bourassa: Non, non. M. le Président — on pourra en reparler — l'IQOP est une maison dont la crédibilité est reconnue...

M. Morin: Et le CROP?

M. Bourassa: ...et c'est l'IQOP qui vous donnait 28% en octobre 1974 et c'est l'IQOP qui vous donne 23% en avril 1975.

M. Morin: Et le CROP?

M. Bourassa: Même formule, même système.

M. Morin: Oui. Et le CROP?

M. Bourassa: Le CROP a fait précéder son sondage de toute une série de questions plus ou moins sombres...

M. Morin: Qui sont beaucoup plus complètes que le sondage de l'IQOP.

M. Bourassa: ...et Maurice Pinard, qui avait été invité par Radio-Canada pour commenter les deux sondages — je pense qu'on peut admettre la compétence de Maurice Pinard — a dit que le sondage de CROP comportait des défauts techniques et que le sondage de l'IQOP était beaucoup plus fiable. C'est Radio-Canada qui, reconnaissant son erreur, a demandé à M. Pinard d'émettre cela sur les ondes.

M. Bellemare (Rosemont): Laquelle est la plus anglaise: CROP ou l'IQOP? Laquelle fait votre affaire, vous?

Le Président (M. Gratton): A l'ordre!

M. Morin: Le député de Rosemont jette la lumière sur le sujet!

M. Bellemare (Rosemont): Je ne jette pas de lumière, je pose une question.

Le Président (M. Gratton): A l'ordre!

M. Roy: II y a tellement de lumière qu'il éblouit tout le monde!

M. Bourassa: Est-ce qu'il y a d'autres questions, M. le Président?

M. Roy: Oui, M. le Président, sur la carte d'identité...

M. Bellemare (Rosemont): Je peux l'éclairer, le député de Beauce-Sud.

M. Roy: ...le chef de l'Opposition l'a mentionné tout à l'heure, c'est une demande qui a été faite à chaque fois que nous avons discuté de réforme électorale à l'Assemblée nationale.

Je suis heureux ce soir. Je pense que le Parti québécois, à une couple de reprises, a parlé de la carte d'identité. C'est une chose qui est réclamée de plus en plus par la population. C'est une chose qui a de plus en plus d'adeptes, la carte d'identité. Si le premier ministre nous donne l'assurance ce soir que cela sera discuté à la prochaine commission parlementaire, cela me satisfait pour le moment, quitte à ce que le gouvernement y donne suite, par exemple, l'étudie de façon objective...

M. Bourassa: D'accord.

M. Roy: ...et qu'on arrive avec des mesures positives de ce côté.

M. Bourassa: D'autres questions, M. le Président?

Information

M. Morin: Oui. Sur le CAD, mais très brièvement, puisque nous n'avons encore que quelques minutes. Pourriez-vous nous dire quel est le budget du CAD cette année, M. le premier ministre?

M. Bourassa: Je croyais qu'on avait adopté cela tantôt.

M. Morin: Oui, mais je me réserve le droit de poser une question là-dessus. Cela va être très bref.

M. Bourassa: J'ai répondu à toutes les questions sur le CAD à plusieurs reprises.

M. Morin: Vous avez dit, je pense, dans le passé, que cela correspondait au quart du budget du secrétariat général. Est-ce toujours le cas?

M. Bourassa: Oui. On me dit que c'est exact.

M. Morin: Donc, cela ferait quoi, à peu près? $500,000 pour l'année à venir?

M. Bourassa: Cela doit. Il n'y a pas de total, là...

M. Morin: Et pourriez-vous nous dire combien de personnes sont employées dans ce service cette année? Il y en avait douze, je crois, l'année dernière.

M. Bourassa: Cela n'a pas tellement augmenté. Vingt, M. le Président.

M. Morin: C'est passé de douze à vingt?

M. Bourassa: Oui.

M. Morin: Cela n'a pas tellement augmenté!

M. Bourassa: C'est huit personnes de plus. Votre personnel a augmenté de combien dans l'Opposition?

M. Morin: Pas autant que cela, je le regrette. Si vous m'en offrez huit nouveaux, je vais les prendre avec plaisir.

M. Gilles Néron est-il encore directeur du service?

M. Bourassa: Oui.

M. Morin: Ce qui nous a toujours inquiétés — le premier ministre le sait — c'est que le CAD n'existe nulle part de façon vraiment officielle, sur le plan législatif ou sur le plan réglementaire. Et le premier ministre se souviendra même qu'on a découvert, dans le passé, que ce service existait déjà depuis quelque temps, de façon secrète, et que personne n'était au courant.

M. Bourassa: II n'y avait pas eu de questions qui avaient été posées.

M. Morin: Justement, n'était-ce pas la responsabilité du premier ministre de nous renseigner

là-dessus, de renseigner l'opinion publique, lorsqu'il crée des services de cette importance?

Est-ce qu'il y a d'autres services du même genre, comportant douze ou vingt personnes, dont le premier ministre n'a pas daigné informer l'opinion publique ou la Chambre?

M. Bourassa: Je ne crois pas, M. le Président. M. Roy: Le permier ministre n'a pas l'air sûr. M. Bourassa: Non, je veux dire... Non.

M. Morin: Est-ce que je pourrais demander au premier ministre s'il serait possible d'interroger, en commission parlementaire, M. Néron ou quelque personne responsable de ce service pour connaître exactement la nature de ses activités...

M. Bourassa: Vous pouvez me poser des questions à moi, M. le Président.

M. Morin: Dans le passé, on n'a pas eu beaucoup d'éclaircissements.

M. Bourassa: Essayez-vous une nouvelle fois, je suis prêt à répondre aux questions.

M. Morin: Je ne sais pas si je me sens disposé à perdre encore du temps. Pourriez-vous alors nous dire exactement en quoi consistent les activités de ce service?

M. Bourassa: Je l'ai dit l'an dernier. C'est d'informer le chef du gouvernement sur les situations qui existent. Là, on a eu la grève dans la construction. J'étais informé, à toutes les quatre heures, de l'évolution de la grève, de la "spontanéité" de ceux qui faisaient la grève, du nombre présumé des fiers-à-bras. C'est pour permettre au chef du gouvernement d'avoir la meilleure qualité d'information possible afin qu'il prenne les bonnes décisions.

L'un des facteurs pour lesquels nous avons procédé rapidement avec la tutelle, c'est qu'on a été informé que des milliers de travailleurs ne pouvaient pas travailler sur les chantiers alors qu'ils voulaient le faire. Ce n'était pas une grève spontanée, c'était une grève imposée par quelques dizaines ou centaines d'individus au plus.

M. Morin: Quelle sorte de réglementation avez-vous pour vous assurer que ce service fonctionne de façon à ne pas empiéter sur les droits des citoyens?

M. Bourassa: Bien, il n'y a pas... C'est au niveau de l'information. On sait que...

M. Morin: II y a plusieurs façons de recueillir l'information.

M. Bourassa: Bien, c'est fait avec les corps constitués. On communique avec le ministère de la Justice. Il y a un agent de liaison avec la Sûreté du Québec. Il n'y a pas...

M. Morin: II n'y a pas de secret?

M. Bourassa: Non. Je ne vois pas pourquoi on ferait des secrets. Je pense que c'est normal qu'on soit informés. Il y a quand même là... Il y a la question de la United Aircraft. On m'informait d'heure en heure, dans le cas de la United Aircraft, de la situation, du nombre de personnes à l'intérieur. Et c'est régulièrement... Il y a toujours des événements au Québec qui suscitent l'attention...

M. Morin: Si c'est un service qui, en somme, ne s'écarte pas des normes ordinaires, un service composé de gens bien ordinaires qui font du renseignement tout simplement, pourquoi cette réticence à ce que nous puissions interroger la personne responsable? Pourquoi?

M. Bourassa: J'ai demandé au chef de l'Opposition de visiter les lieux. Les journalistes sont venus, ils ont pris des photos.

M. Morin: Avec des conditions que vous imposiez. Est-ce que, si nous visitons les lieux, les journalistes et l'Opposition, nous pourrons poser des questions aux personnes responsables?

M. Bourassa: Faites la demande et on verra.

M. Morin: Vous vous souviendrez que ceux qui avaient été invités ont jugé que les conditions que vous imposiez...

M. Bourassa: Oui.

M. Morin: ... étaient inacceptables.

M. Bourassa: Quand même, il faut tenir compte des précédents. Sj les membres de l'Opposition peuvent aller visiter des endroits et commencer à poser des questions aux fonctionnaires, ils les placent dans une drôle de situation. Le député de Beauce-Sud a l'air de trouver cela assez exagéré.

M. Roy: M. le Président, je n'ai pas fait de commentaire et je n'ai voulu donner aucune impression au premier ministre. Je sais qu'il cherche, par tous les moyens possibles, à trouver le moyen de détourner l'attention et de ne pas répondre aux questions.

M. Morin: Ce que je voudrais demander au premier ministre, c'est si ce CAD utilise, à l'occasion, des services d'agents extérieurs pour faire des enquêtes.

M. Bourassa: D'agents extérieurs... Vous voulez dire...

M. Morin: D'agents qui se mêlent, par exemple, à la foule, à Cabano, à Mont-Laurier, dans le Témiscamingue...

M. Bourassa: Bien, le CAD est en communication avec la Sûreté du Québec.

M. Morin: ... qui se mêlent, par exemple, à la grève des policiers, qui se mêlent au milieu sur lequel vous faites faire enquête.

M. Bourassa: II est en communication avec les corps policiers. Si cela fait partie du travail des policiers...

M. Morin: Est-ce que je dois comprendre qu'il y a des rapports institutionnels entre le CAD et les divers corps policiers?

M. Bourassa: II y a des agents de liaison avec la Sûreté du Québec qui, elle, en a avec les autres corps policiers.

M. Morin: Avec les autres corps policiers directement aussi, avec la police des grandes villes, à tout le moins?

M. Bourassa: Bien, je crois... La Sûreté du Québec a des rapports avec tous les corps policiers du Canada.

M. Morin: Quels sont exactement les rapports du CAD avec le ministère de la Justice? J'achève, je tiens à vous rassurer, il est onze heures et...

M. Bourassa: C'est la même chose, M. le Président. Les rapports sont très étroits. Il y a des représentants de part et d'autre. C'est simplement pour que le chef du gouvernement puisse être informé instantanément à travers un organisme qui relève de lui, mais il n'y a aucun problème entre les deux organismes, entre la Sûreté du Québec, qui dépend du ministère de la Justice, et le groupe de M. Néron.

M. Morin: Est-ce qu'il y a des rapports avec la gendarmerie dite royale?

M. Bourassa: A travers la Sûreté du Québec, c'est possible, oui.

M. Morin: Pas directement.

M. Bourassa: Je ne saurais vous dire s'il peut y avoir des communications. Mais d'une façon institutionnelle, je dirais que c'est à travers la Sûreté du Québec.

M. Morin: Est-ce qu'il serait possible d'avoir une idée précise de cela?

M. Bourassa: D'accord. M. le Président, moi, je demande d'être informé de toutes les différentes méthodes. Ce qui est important pour moi, c'est la qualité de l'information.

M. Morin: Je reviens sur la question principale dans tout cela. Comment est-ce que le premier ministre s'assure, dans le concret, que ce CAD respecte les droits fondamentaux des citoyens?

M. Bourassa: J'en suis convaincu.

M. Morin: Cela ne nous suffit pas que vous en soyez convaincu. J'aimerais que vous nous disiez par quels moyens vous vous assurez de la chose.

M. Bourassa: Parce que le travail qui est fait ne se trouve pas à mettre en danger, de quelque façon que ce soit, les droits des citoyens. Le travail qui est fait, c'est de fournir l'information au chef du gouvernement, de manière qu'il prenne les décisions correspondant le plus aux situations décrites.

M. Morin: Est-ce qu'il ne serait pas utile qu'il y ait des règles? Vous savez qu'aux Etats-Unis le président ne savait pas toujours ce que faisait la CIA et même le FBI.

M. Bourassa: Oui, mais on ne doit pas les comparer avec ça.

M. Morin: II s'est fait jouer des tours, parce qu'il n'y avait pas de règles précises.

M. Bourassa: Le chef de l'Opposition peut dormir tranquille.

M. Morin: Je ne songe pas à des dangers personnels. Je songe à la population du Québec et à la possibilité que cette institution puisse, à l'occasion, enfreindre les droits fondamentaux des citoyens.

M. Bourassa: II n'y a pas de danger là-dessus.

M. Morin: C'est une simple affirmation. Je vous demande s'il ne serait pas opportun qu'il y ait des règles qui définissent le comportement de ce service.

M. Bourassa: On pourra en discuter l'an prochain, pour voir si, à ce moment...

M. Morin: Vous nous renvoyez aux calendes canadiennes encore une fois!

M. Bourassa: Non, non.

M. Morin: Ce n'est pas très sérieux, cela.

M. Bourassa: Je veux dire, les règles, quelles règles? Il devrait se fermer des portes pour obtenir l'information ou quoi? Je ne vois pas où veut en venir le chef de l'Opposition.

M. Morin: Pourtant, ce n'est pas difficile d'imaginer qu'un organisme secret comme cela puisse empiéter, à l'occasion, sur les droits des citoyens.

M. Bourassa: On en parle depuis une demi-heure; ce n'est pas secret.

M. Morin: Le comportement, les façons de travailler de cet organisme ne sont pas connues.

M. Bourassa: Oui, je viens de les décrire, j'ai donné le budget, M. Néron est le directeur. Qu'est-ce que vous voulez de plus?

M. Morin: Cela ne nous apprend rien sur le comportement des agents en question, vous le savez bien. Je vois que nous n'avançons guère.

M. Bourassa: J'ai offert au chef de l'Opposition de visiter les lieux.

M. Morin: Visiter les lieux vides ou visiter les lieux avec la possibilité de parler avec les responsables?

M. Bourassa: Là, je vais examiner ce que cela comporte comme précédent, mais, pour visiter les lieux, il n'y a aucun problème.

M. Morin: Cela, je le sais, mais cela ne m'inté-

resse guère de visiter un bureau vide. Le premier ministre sait très bien que cela ne signifie absolument rien. S'il est prêt à nous laisser interroger les responsables, c'est une autre affaire. Je pense qu'il y aurait beaucoup de journalistes qui seraient intéressés à venir avec le chef de l'Opposition.

M. Bourassa: II faut que j'examine le précédent. Est-ce que des fonctionnaires comme cela pourront être soumis à des interrogatoires de la part de députés de l'Opposition? Vous allez commencer avec le CAD; après vous irez au Conseil du trésor; après, au comité de législation.

M. Morin: Au Conseil du trésor, nous avons le loisir d'interroger le ministre responsable et ses principaux lieutenants lors de l'étude des crédits. Ce n'est pas le cas pour le CAD.

M. Tardif: II est le ministre responsable.

Le Président (M. Gratton): A l'ordre, messieurs. Nous avons déjà dépassé 23 heures, la commission reprendra l'étude des crédits du ministère des Affaires intergouvernementales, programme 1, affaires fédérales-provinciales et interprovinciales. C'est surtout à l'intention de l'Opposition officielle que je le mentionne. Le ministre d'Etat sera présent pour les circonstances.

M. Morin: M. le Président, j'ai noté, cependant — je pense que vous l'aurez noté aussi — que le premier ministre va examiner très sérieusement la possibilité de nous permettre des contacts avec les responsables du CAD.

M. Bourassa: Je n'ai pas fait de promesse, mais je suis prêt à examiner la possibilité.

M. Roy: M. le Président, sur le programme 3, une simple question, parce que le premier ministre, la semaine dernière, à la suite d'une discussion assez laborieuse, ici, à la commission parlementaire, s'est engagé à nous fournir la liste de son personnel.

M. Bourassa: J'ai tout donné, c'est au journal des Débats. J'ai fait la liste, sauf pour les secrétaires.

M. Roy: J'ai reçu, l'an dernier...

M. Bourassa: C'est au journal des Débats.

M. Roy: M. le Président, je vais terminer. J'ai reçu l'an dernier, la liste du premier ministre, mais je n'ai pas eu les informations que j'ai demandées. Elles n'étaient que très partielles. J'ai vérifié également ce qui avait été inscrit au journal des Débats, l'an dernier. C'était absolument impossible d'avoir la liste complète et d'avoir l'information complète que nous avions demandée. Je parle pour l'an dernier. Ce soir, il n'a pas été possible de donner toute la nomenclature...

Le Président (M. Gratton): Avec les salaires, etc.? Cela a été fait.

M. Bourassa: Les secrétaires et tout ça!

M. Roy: II y a 110 personnes. Si on me dit que cela a été fait, d'accord, je vais vérifier.

Le Président (M. Gratton ): Vérifiez puis...

M. Roy: Je voulais quand même dire que, l'an dernier, nous nous étions fait organiser...

Le Président (M. Gratton): Sinon, vous poserez une question au feuilleton.

M. Roy: ... dans le sens qu'on n'avait pas en quelque sorte organiser...

M. Bourassa: D'accord. Non, non.

M. Roy: ... par le fait qu'on n'a pas été capables d'avoir les renseignements que nous avions demandés et qui nous aient été promis.

M. Bourassa: J'ai donné la liste tantôt des plus...

M. Roy: Vous avez donné...

M. Bourassa: Le chef de l'Opposition m'a demandé ceux qui étaient au-delà de $15,000.

M. Roy: Parfait.

M. Bourassa: II n'a pas voulu me demander... Alors, si le député n'est pas satisfait, il pourra poser des questions au feuilleton ou venir me voir à mon bureau. Je pourrais lui donner toutes les explications.

Le Président (M. Gratton): Alors, messieurs, merci. La commission ajourne ses travaux à demain, dix heures.

(Fin de la séance à 23 h 6)

Séance du mercredi 28 mai 1975

(Seize heures trente quatre minutes)

M. Gratton (président de la commission permanente de la présidence du conseil, de la constitution et des affaires intergouvernementales): A l'ordre, messieurs!

La commission continue l'examen des crédits du ministère du Conseil exécutif. Le ministre.

Ajournement de la séance

M. Levesque: M. le Président, devant l'absence évidente de tout membre de l'Opposition et du manque d'intérêt évident vis-à-vis des questions de planification et de développement régional, je suggère que l'on ajourne ta séance sine die.

Le Président (M. Gratton): La commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 16 h 35)

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