Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
Commission permanente de la présidence du
conseil,
de la constitution et des affaires
intergouvernementales
Etude des crédits du ministère des
Affaires intergouvernementales
Séance du mercredi 28 mai 1975
(Dix heures quatorze minutes)
M. Gratton (président de la commission permanente de la
présidence du conseil, de la constitution et des affaires
intergouvernementales): A l'ordre, messieurs!
La commission de la présidence du conseil, de la constitution et
des affaires intergouvernementales continue ce matin l'étude des
crédits du ministère des Affaires intergouvernementales. Pour les
besoins de la séance d'aujourd'hui, M. Houde (Fabre) remplacera M.
Malouin. Nous en sommes toujours au programme 1: Affaires
fédérales-provinciales et interprovinciales.
L'honorable chef de l'Opposition officielle.
M. Morin: M. le Président, je voudrais revenir sur les
questions de personnel au ministère des Affaires intergouvernementales
en l'absence du ministre d'Etat aux mêmes Affaires avec qui j'avais
commencé hier l'étude du service des affaires de la capitale
canadienne.
M. Levesque: Le ministre est retenu ce matin, comme on le sait,
au Conseil du trésor.
Personnel du ministère
M. Morin: Oui, j'ai bien compris cela et j'imagine que nous
aurons, au cours d'une séance subséquente, l'occasion de
continuer notre entretien parce qu'il nous restait un certain nombre de
questions à lui poser.
Pour ce qui est de l'augmentation des effectifs du personnel du
ministère, j'ai constaté qu'on prévoit une augmentation
des effectifs d'environ 30%. Le ministre a fait état de la chose
d'ailleurs dans son discours de présentation hier. Les effectifs
passeront de 339 à 441. Aux affaires
fédérales-provinciales, on passe de 38 à 52. Aux affaires
internationales, on connaît une croissance considérable de 211
à 274 et enfin, à la gestion interne, on passe de 90 à
115. J'ai dit hier, dans ma réponse au ministre, que je me
réjouissais de l'expansion que prenait son ministère. Toutefois,
il y a une chose que j'ai quelque peu de difficulté à comprendre.
L'année dernière, le ministre avait affirmé, lors de
l'étude des crédits, que le recrutement du personnel de son
ministère était terminé pour l'essentiel. Je me
réfère à la page 2940 des débats de l'année
dernière. Qu'est-ce qui s'est passé dans l'intervalle, depuis un
an? Y a-t-il eu un changement fondamental de politique pour que, après
nous avoir affirmé que le gros du personnel était recruté,
au cours de l'année, on prévoie une augmentation telle des
effectifs?
Encore une fois, M. le Président, il y aurait... Je voudrais
qu'il soit clair que je ne m'oppose pas à l'augmentation du personnel,
je veux comprendre pourquoi le ministre a changé son fusil
d'épaule.
M. Levesque: Quant à la question des postes permanents du
ministère, ce que je disais l'an dernier, c'était exact. Mais il
y a eu des modifications depuis, particulièrement à la suite de
la loi 59 qui a été adoptée, comme on le sait, au mois de
décembre 1974. La question des ententes, comme je l'ai mentionné
dans mon exposé d'ouverture, cela veut dire que si chacune des ententes
dont on disposait autrefois dans chacun des ministères ou des organismes
du gouvernement sans nécessairement passer par le ministère des
Affaires intergouvernementales, à ce moment-ci, ces ententes doivent
être révisées chez nous et cela constitue tout un boulot.
Ceci explique une partie de l'augmentation des effectifs. Il y a ensuite la
question des affaires internationales, coopération avec l'ACDI,
où il y a des gens qui sont ajoutés au ministère pour des
fonctions spécifiques et pour la d u-rée d'une entente et qui,
ensuite, retournent dans leur ministère d'origine. Ceci veut dire que
c'est une banque que nous avons de 13 cadres, 31 professionnels et 4
fonctionnaires pour un total de 48. C'est une banque de coopération. Il
y a ensuite la question dont s'est entretenu hier le chef de l'Opposition avec
le ministre d'Etat relativement à la capitale nationale, il y a cette
nouvelle unité SA-CAN qui...
M. Morin: La capitale fédérale, la capitale
nationale, c'est ici.
M. Levesque: Enfin, chacun a ses termes. M. Morin: C'est
ici.
M. Levesque: Chacun a ses termes. C'est le terme exact, du moins
c'est le terme technique, c'est le terme...
M. Morin: Non, le terme technique, d'après votre
organigramme, ce n'est pas cela.
M. Levesque: Un instant! C'est notre appellation à nous,
dans le nouveau service, le SACAN. Mais lorsqu'on parle de la CCN, de la
Commission de la capitale nationale, c'est comme cela que s'appelle cet
organisme.
M. Morin: Cela devrait être le SACAQ. Oui, d'accord!
M. Levesque: Ici, dans les structures nous l'avons appelé,
quant à notre unité, SACAN.
M. Morin: Cela devrait être SACAQ. Peu importe.
M. Levesque: Je m'excuse, il n'y a pas de N.
Une Voix: Où est-il allé?
M. Levesque: Je pense que j'ai vu SACAN quelque part. On a
enlevé le N.
M. Morin: La bataille des sigles qui reprend. Pourriez-vous me
dire, dans chacun des cas, par exemple, pour la vérification des
ententes internationales, combien cela représente de personnes? Pour
l'ACDI, pour la coopération, cela veut dire 48, une banque de 48
personnes.
M. Levesque: Oui. A l'ACDI...
M. Morin: Et pour SACA, SACAQ ou SACAN?
M. Levesque: Pour les affaires internationales, la
coopération internationale, sans l'ACDI, c'est 39 postes.
M. Morin: Nouveaux?
M. Levesque: Non, pas nouveaux. Il y a seulement cinq postes
nouveaux.
M. Morin: Je ne vous demande pas de justifier les postes qui
existaient déjà, mais l'augmentation.
M. Levesque: Je peux bien vous le dire. Aux affaires
fédérales-provinciales, relations fédérales et
provinciales, il y a quatorze postes nouveaux.
M. Morin: Oui.
M. Levesque: Pour les relations internationales comme telles, il
y a dix postes nouveaux.
M. Morin: Dix seulement?
M. Levesque: Dix, oui. Mais cela ne comprend pas la
coopération internationale. Ce ne sont que les maisons du Québec,
etc.
M. Morin: Je vois. La coopération, c'est la banque dont
vous m'avez parlé tout à l'heure.
M. Levesque: II y a deux articles là-dedans. Il y a la
coopération internationale excluant l'ACDI: cinq postes nouveaux. Quant
à la banque, les postes nouveaux: 31 sur 48.
De plus, dans la gestion interne et soutien en direction, il y a huit
postes nouveaux. Dans toute question de gestion, administration, protocole,
etc., c'est huit, onze et quatre, c'est-à-dire 23 postes nouveaux.
Pour tout le ministère, cela représente, comme on le sait,
83 postes nouveaux, soit 19 cadres, 29 professionnels et 35 fonctionnaires.
M. Morin: Combien sont affectés exactement aux ententes,
à la question des ententes? Je ne suis pas sûr que...
M. Levesque: C'est aux relations
fédérales-provinciales. A ce moment-ci, lorsqu'il est question
d'ententes avec le gouvernement fédéral, d'ententes
interprovinciales...
C'est assez difficile à préciser, parce que nous avons
déjà une direction dans ce qu'on appelait, autrefois, des
modules, mais nous avons une direction... Si on veut regarder l'organigramme...
Lorsqu'on regarde l'organigramme, vous avez la direction
générale, à gauche, des relations
fédérales-provinciales, sous la direction de M. François
Lebrun. Vous avez la direction de l'économie et de la finance, à
l'intérieur de cela, où se trouve M. Pintal, des affaires
sociales, et M. Desrochers, des affaires éducatives et culturelles, avec
M. Gagné, et des affaires institutionnelles, avec M. Lecuyer. C'est
justement là que se trouve l'aspect juridique des ententes. C'est
surtout à cette direction que sont acheminées les ententes venant
des divers ministères et organismes du gouvernement.
M. Morin: C'est donc surtout ce service qui augmente ses
effectifs?
M. Levesque: C'est là que l'on ajoute un cadre
supérieur, deux professionnels additionnels, et nous sommes à
recruter des juristes. On me dit qu'il y a là certaines
difficultés, parce que cela prend des juristes qui ont une
expérience particulière dans ce domaine et il n'en pleut pas.
M. Morin: C'est un fait.
M. Levesque: Evidemment, il y a une expertise dans chacune des
autres directions, selon le sujet traité, qui donne son avis sur le
contenu.
M. Morin: Dans votre organigramme de cette année, par
rapport à celui de l'année dernière, j'observe que, sous
la direction générale des relations
fédérales-provinciales, le secrétariat a disparu. Y a-t-il
une raison particulière? Je m'excuse, le secrétariat a
été ajouté, c'est bien cela?
M. Levesque: Oui. Il y en a un.
M. Morin: Oui. C'est un service qui fait quoi exactement?
M. Levesque: II y a là un poste à combler, il ne
l'est pas encore. C'est pour assurer une meilleure...
M. Morin: Coordination.
M. Levesque:... coordination.
M. Morin: Très bien.
M. Levesque: A l'intérieur de la direction
générale, avec les autres directions du ministère.
M. Morin: Puisque nous sommes à l'organigramme, autant
peut-être éclaircir encore un ou deux points. J'observe que sous
la direction générale de l'administration, deux directions
semblent avoir disparu de l'organigramme cette année, celle de
l'information, ainsi que la...
M. Levesque: ... sous le titre: Communications, maintenant. Dans
la troisième boîte en descendant, après les ressources
financières, ressources humaines, ensuite communications. C'est
là que se trouve l'information.
M. Morin: Ah bon! On modernise le vocabulaire.
M. Levesque: C'est cela tout simplement.
M. Morin: Bien. La documentation et recherche?
M. Levesque: La documentation est attachée aux
communications. Quant à la recherche, elle s'intègre dans chacune
des directions sous la responsabilité du secrétaire.
M. Morin: J'observe également que le protocole est
maintenant rattaché directement aux sous-ministres adjoints et aux
sous-ministres plutôt que d'être intégré dans la
direction générale de l'administration. Y a-t-il une
signification particulière à ce déplacement?
M. Levesque: Cela nous paraissait plus conforme à la
réalité des choses. Le protocole prend de plus en plus
d'importance et de signification. Il a à recevoir des instructions assez
précises et directes et immédiates de la direction
générale ou du ministère.
M. Morin: Je suis tout à fait d'accord sur l'idée
que le protocole doit prendre de plus en plus d'importance, parce que j'imagine
que le nombre des visites protocolaires augmente sans cesse. Il augmente
même, j'ai cru remarquer, à un rythme considérable. Est-ce
que, parmi tous ces nouveaux postes que vous avez, il en est quelques uns qui
soient destinés au protocole?
M. Levesque: Quatre nouveaux postes.
M. Morin: Quatre nouveaux postes. De sorte que ce service
comportera combien de personnes maintenant?
M.Levesque: Nous avons deux cadres, quatre professionnels et cinq
fonctionnaires, pour un total de onze, c'était sept, cela deviendra
onze.
M. Morin: Encore une ou deux questions sur l'organigramme, et
nous pourrons passer à autre chose.
Pour les organisations internationales, j'observe qu'elles se trouvaient
dans l'ancien organigramme, sous la direction générale des
relations internationales. Pourriez-vous... Je vois qu'elle est là.
M. Levesque: Elle est encore là.
M. Morin: Elle est encore là, oui. Je m'excuse. J'avais
mal interprété l'organigramme.
Il y avait également une direction de dévelop- pement
régional, qui se trouvait, si ma mémoire est bonne...
M. Levesque: De développement international?
M. Morin: Non, de développement régional.
C'était sous la direction générale des relations
fédérales-provinciales dans l'ancien organigramme.
M. Levesque: C'était le SACA, le SACAN ou le...
M. Morin: Parce que vous appuyez pudiquement le
développement régional.
M. Levesque: SACAQ, le SACAQ
M. Morin: Vous me donnez raison sur le sigle.
M. Levesque: On vient de l'ajouter.
M. Morin: Bien! On se comprend.
J'ai terminé avec l'organigramme pour l'instant.
Peut-être une dernière question à propos du
personnel. Est-ce que je pourrais savoir combien il y a de personnes qui
travaillent au cabinet du ministre et du ministre d'Etat, qui sont
rattachées directement à sa personne?
M. Levesque: Je suis heureux de cette question, parce qu'on verra
comment j'essaie de pratiquer l'austérité.
Il y a le chef de cabinet, M. Gagné. Il y a une secrétaire
particulière adjointe, Mme Lachance, et...
M. Morin: Vous vous distrayez, à ce que je vois.
M. Levesque: ... de toute façon, cela se résume pas
mal à ça, si on ne parle pas du personnel de soutien. Il y a
également un secrétaire de comté.
M. Morin: C'est comme tout le monde.
M. Levesque: Oui, c'est comme tout le monde.
M. Morin: Un secrétaire de comté dans votre
comté.
M. Levesque: Oui.
M. Morin: Mais je parlais du cabinet du ministre, sur place,
à Québec.
M. Levesque: C'est cela.
M. Morin: II y a deux personnes simplement.
M. Levesque: C'est cela. Il y a évidemment ma
secrétaire principale de bureau, un messager, et
quelqu'un pour classer les dossiers. Mais dans ce qu'on appelle le
personnel...
M. Morin: Y a-t-il des personnes à contrat?
M. Levesque: II y a, en plus de ceux que j'ai mentionnés,
un auxiliaire de bureau, un agent de bureau, une employée de
secrétariat, des réceptionnistes au téléphone. Je
dois dire qu'il y a plusieurs postes vacants, si je voulais utiliser ces
postes.
M. Morin: Le ministre donne l'exemple de
l'austérité, malheureusement, il n'est pas toujours suivi dans
les autres ministères.
M. Morin: Y a-t-il des personnes à contrat? M.
Levesque: Dans mon cabinet, non.
M. Morin: Y en a-t-il qui soient détachés de leur
service régulier et qui soient assignés à votre
cabinet?
M. Levesque: Non. Ce que je vous ai dit. c'est cela.
M. Morin: Maintenant, dans le cabinet du ministre d'Etat?
M. Levesque: Un agent de bureau, une employée de
secrétariat, une téléphoniste, un secrétaire
particulier adjoint, c'est tout... les employés de secrétariat.
Je pense que cela se ressemble, qu'il y a là aussi un exemple
d'austérité.
M. Morin: II n'y a pas là de personne à contrat non
plus?
M. Levesque: Non. Pas que je sache, non.
M. Morin: Ni de personnes détachées de leur service
régulier?
M. Levesque: Non.
M. Morin: M. le Président...
M. Levesque: Evidemment, encore à l'intérieur du
SACAQ dont le ministre d'Etat a la responsabilité plus
particulière, il y a là un personnel. Il y a des
fonctionnaires.
M. Morin: Oui, dans le service. Mais je parlais du cabinet du
ministre.
M. Levesque: Ceux que je viens de vous donner...
M. Morin: Au SACAQ, combien y a-t-il de membres du personnel?
M. Levesque: 19 postes.
M. Morin: 19 postes. Qu'est-ce qu'ils font ces gens pour
s'occuper toute la journée?
M. Levesque: II y en a seulement neuf postes comblés
présentement. Il en reste une dizaine de vacants. Il y a
présentement un concours de recrutement, publié dans les media la
semaine dernière.
M. Morin: Dois-je comprendre que cela prend deux fois plus de
postes pour résister à l'envahissement d'Ottawa?
M. Levesque: Lorsque nous n'avons pas assez de personnel
affecté à cette opération, le chef de l'Opposition
s'inquiète et lorsque nous en avons, que nous en prévoyons, il
s'inquiète encore. C'est l'inquiétude permanente chez le chef de
l'Opposition.
M. Morin: Je ne suis pas mécontent de savoir que ce
service va être mieux étoffé, mais je trouvais que par
rapport à l'année dernière c'était une augmentation
considérable.
M. Levesque: Oui, c'est vrai.
M. Morin: Dans son rapport, le Vérificateur
général nous fait part de quelques remarques sur le
contrôle interne des petites caisses. Il souligne qu'il y aurait eu des
dérogations à la directive I6-7I du Conseil du trésor. Il
souligne également l'absence de vérification des pièces
justificatives de certaines dépenses, surtout celles qui sont faites par
d'autres ministères. Est-ce que le ministre pourrait nous dire ce qu'il
a l'intention de faire pour corriger ces lacunes? Est-ce qu'il a l'intention,
en particulier de suivre les trois recommandations précises qui lui sont
faites par le Vérificateur général?
M. Levesque: Nous avons pris certaines mesures parce qu'il s'agit
là d'un problème technique. Il faut bien comprendre que le
vérificateur parlait, à ce moment-là, d'un fonds de
roulement des comptes à l'étranger. On ne sait peut-être
pas, mais est-ce que je puis simplement vous informer des difficultés
lorsque l'on veut appliquer les règles générales dans 17
postes à l'étranger, que tout ce que cela peut comporter: la
distance, les circonstances particulières du milieu, les communications,
etc. Cependant, nous avons mis sur pied un système de contrôle
pour donner suite, autant que possible, aux voeux du vérificateur.
M. Morin: De sorte qu'on peut s'attendre, l'année
prochaine, que les recommandations auront été mises en
oeuvre.
M. Levesque: J'espère avoir des félicitations de la
part du vérificateur, mais je ne pense pas que ce soit son habitude.
M. Morin: Tout de même, il y a des ministères qui
s'en tirent assez bien.
M. Levesque: J'insiste là-dessus...
M. Morin: Je n'insiste pas là-dessus, parce que je me
rends compte que ce ne sont pas des
critiques fondamentales. Il n'y a pas eu d'irrégularités
sérieuses.
M. Levesque: Non et j'insiste là-dessus parce que c'est
très difficile, lorsque des gens sont en poste. J'entends parler
régulièrement des particularismes ou des situations
particulières qui existent dans chacune de ces boîtes qui sont
souvent à des milliers de milles de la maison-mère.
M. Morin: Mais, est-ce que vous allez, du moins, donner suite
à ce qui me paraît être la principale recommandation, qui
est la création d'un service de vérification interne.
M. Levesque: C'est cela que je dis... M. Morin: Ah bon!
C'est cela. M. Levesque: ...qui est déjà en place.
Relations intergouvernementales
M. Morin: II est déjà en place. Très
bien.
Peut-être pourrons-nous passer maintenant au bilan des relations
intergouvemementales.
Dans le discours inaugural de 1972, si la mémoire du ministre est
bonne, on spécifiait que le bilan des relations intergouvernementales
comportait deux phases distinctes. La première en était une de
compilation et, pour citer le ministre, la seconde la plus décisive, la
plus déterminante pour l'avenir du Québec, celle où nous
aurons à poser le diagnostic de l'état de nos relations
intergouvernementales et à définir les orientations à
prendre pour l'avenir. Lors de l'étude des crédits,
l'année dernière, en particulier, à la page 2962, le
ministre nous a indiqué que cette deuxième phase de
l'opération, si l'on veut, était en cours, qu'on y travaillait
activement aussi bien au ministère des Affaires intergouvernementales
qu'aux deux comités interministériels chargés de
définir la politique gouvernementale, c'est-à-dire les hauts
fonctionnaires, le CCRI et le comité interministériel, ce qu'on
appelle le CIDA. Pourriez-vous me dire, cette année, M. le ministre,
quels sont les dossiers que l'on a pu compléter, où l'on a pu
compléter la deuxième phase et quel est, dans chaque cas, le
diagnostic qui a été rendu par le CCRI et le CIDA?
M. Levesque: Voici une question, je pense bien que je vais vous
passer mon livre.
M. Morin: Je n'ai pas d'objection, à condition que...
M. Levesque: Je vais vous passer le livre du maître, comme
on dit, à peu près en 19 chapitres, pour répondre
réellement d'une façon satisfaisante à la question
posée.
M. Morin: Je suis sûr que vous n'hésiteriez pas
à le faire pour me renseigner pleinement, si telle était votre
intention.
M. Levesque: Nous allons publier, je crois, dans quelques jours,
au plus tard dans quelques semaines, j'espère, notre rapport annuel pour
l'exercice financier se terminant le 31 mars 1975. J'aurais aimé faire
un record et déposer, à la suite de notre entretien de l'an
dernier, ce rapport annuel même avant l'étude des crédits.
Je pense qu'il était physiquement impossible de recueillir les
données en si peu de temps et de passer à l'impression. Je
reviendrai à sa question dans un instant, mais je tiens à dire au
chef de l'Opposition, parce que c'est relié à cette question, que
nous aurons à ce moment produit trois rapports annuels en l'espace de
douze mois. Nous avons repris le temps...
M. Morin: Perdu.
M. Levesque: .. nous avons fait du rattrapage, autrement dit, et
je suis heureux de le souligner, parce que cela voulait dire
énormément de travail pour nos troupes et elles ont réussi
à le faire. J'ai déjà le manuscrit du rapport annuel
1974/75 et j'espère pouvoir le déposer après son
impression avant l'ajournement de nos travaux d'été. Ce serait
quelque chose qui me plairait beaucoup.
M. Morin: Cela plairait également à l'Opposition,
mais est-ce que ce rapport annuel contiendra un bilan...
M. Levesque: II contiendra plusieurs éléments du
bilan. Nous avons voulu faire une sorte d'inventaire, essayant d'éviter
ce qui ne serait pas d'intérêt public, dans le sens que cela
pourrait être préjudiciable à une bonne stratégie
dans les négociations fédérales-provinciales.
Mais les instructions que j'avais données, il s'agissait de
renseigner le plus possible, par le rapport annuel, sur l'état de la
situation, la problématique, mais peut-être sans aller aussi loin
que la stratégie ou certains éléments dont la publication
pourrait nuire à la bonne marche des choses.
M. Morin: Est-ce que je puis tout de même demander au
ministre...
M. Levesque: D'ailleurs, la mise à jour dont j'ai
parlé ici l'an dernier je ne veux pas me citer, mais vu que le
chef de l'Opposition l'a fait je disais que la seconde phase consiste
à porter des jugements de valeur, a évaluer, à
étudier, non seulement la problématique, mais des options qui
s'ouvrent, des solutions, et, en même temps, à définir des
stratégies.
C'est exactement ce qui a été fait. Non seulement nous
avons continué la mise à jour dans tout ce bilan qui touche les
ressources naturelles, les industries primaires, les industries secondaires,
les services, l'immigration, le travail, la main-d'oeuvre et l'emploi, le
transport, l'éducation, la culture, la jeunesse, les sports et les
loisirs, la sécurité du revenu, la santé et la
socialité, les affaires municipales et urbaines, la fonction publique,
la protection de la personne, de la propriété, les
affaires indiennes et esquimaudes, le territoire, les ententes de
développement, la science et la technologie, l'environnement; autrement
dit, tous ces sujets qui sont souvent l'objet de discussions, de
négociations, avec le gouvernement fédéral ou dans des
conférences interprovinciales, non seulement nous faisons la mise
à jour continuelle de ces dossiers dans chacune des directions, mais, en
plus de cela, cela nous a permis de dégager des orientations qui m'ont
amené à faire l'allocution que j'ai prononcée devant la
Chambre de commerce de Montréal, où j'ai essayé de
ramasser un peu ces orientations qui touchaient...
Si on veut le lire dans cette optique, on verra, comme le premier
ministre le mentionnait hier soir, qu'il y avait des éléments qui
se touchaient entre les propos que vous avez tenus hier soir avec le premier
ministre et les propos contenus dans le volume que tient présentement
entre ses mains le chef de l'Opposition.
M. Morin: Je devrais en conclure alors que votre bilan est
très ambigu, parce que, d'une part, vous nous dites, à la page
trois ou quatre, que la vieille loi constitutionnelle convient toujours,
qu'elle a tenu 100 ans, qu'elle peut encore servir. Plus loin, vous nous dites
qu'il y a des changements, des conflits qui surgissent constamment entre le
gouvernement central et...
M. Levesque: II faut bien comprendre que c'est normal et que cela
va être de plus en plus comme cela. Nous vivons à un rythme
différent de celui suivant lequel nous vivions il y a 100 ans. Entre les
Etats du monde, aujourd'hui, il y a de ces choses qui se précipitent et
qui changent complètement une situation dans 24 heures.
C'est normal qu'il y ait des chevauchements dans un
fédéralisme qui est dynamique et qui n'est pas statique.
M. Morin: Je veux bien croire que les choses peuvent changer en
24 heures, mais ce sont surtout les grands courants de fond qui comptent
là-dedans.
Si je m'en tiens au discours du 8 avril, je devrais conclure que votre
bilan, finalement, ce bilan tant attendu, ne vous mène pas à des
conclusions bien fermes.
M. Levesque: Ce bilan tant attendu est l'instrument de travail
privilégié au ministère, dans le domaine des relations
fédérales-provinciales. C'est quelque chose dont nous ne
disposions pas autrefois et dont nous disposons aujourd'hui. C'est, de plus, un
instrument de travail extrêmement important, parce qu'il est plus
complet. Il est fait en relation avec les ministères sectoriels. Il y a
là une mise à jour continuelle et, finalement, c'est un document
de base pour les discussions qui ont eu lieu au CCRI et au CIDA, parce que ces
dossiers sont continuellement montés, lorsqu'il y a un nouveau
problème qui surgit. Nous avons tous les documents de base. Juste au
moment où ce problème surgit, nous n'avons pas à faire
tellement de recherche. Nous n'avons qu'à toucher particuliè-
rement ce point que nous devons discuter, y ajouter une précision et
voilà, nous sommes prêts à en discuter.
M. Morin: Pour plus de précision, dans combien de
dossiers, de secteurs, avez-vous terminé la deuxième phase, au
cours de l'année écoulée?
M. Levesque: Tous les dossiers des relations
fédérales-provinciales viennent d'être mis à
jour.
M. Morin: La deuxième phase, la plus décisive, la
plus déterminante pour l'avenir du Québec, a donc abouti
maintenant. Vous avez en main non seulement un diagnostic, mais vous avez des
orientations qui ont été définies.
M. Levesque: C'est évident qu'il faut définir ce
qu'on veut dire par deuxième phase. Dans le sens que vous venez de
parler...
M. Morin: Je m'en tiens à votre...
M. Levesque: ... évidemment, cela va s'étendre sur
plusieurs années. Ce n'est pas arrêté là... Nous
avons la réponse complète pour les problèmes; pour toutes
les orientations, non, mais, si on le prend dans le sens d'une mise à
jour, elle est à point présentement et nous en dégageons
chaque jour des leçons en vue de l'action, en vue des
orientations...
M. Morin: Oui, je comprends. Bien sûr...
M. Levesque: Dans certains dossiers que j'ai mis en
lumière dans mon discours du 8 avril, il y a là des orientations
précises qui ont été dégagées. Il y a des
dossiers qui ont été plus actifs, durant l'année 1974/75,
que d'autres. C'est clair. Nous savons que le dossier énergétique
le dossier des communications, le dossier de l'immigration, ces dossiers ont
été privilégiés dans la discussion.
M. Morin: Je conçois qu'au cours des années qui
viennent, probablement des siècles qui viennent, constamment, votre
ministère va tenter de se tenir à jour et d'avoir une
stratégie qui tienne compte de l'état de chaque dossier. Mais, ce
n'est pas dans ces termes qu'avaient été décrites, en
I972, les deux phases du bilan que vous entendiez dresser. A ce moment, il
était clair que, à un moment donné, le bilan serait
arrêté, qu'il y aurait une sorte de portrait des relations
fédérales-provinciales. Vous vous souvenez de cela. Ce que je
vous demande c'est: Est-ce que ce bilan a été
complété? Bien sûr, il va être modifié au
cours des mois et des années qui viennent, mais...
M. Levesque: Je puis dire que, pour le moment, pour rassurer le
chef de l'Opposition, nous avons ce portrait, nous avons cette photo à
laquelle vous vous référez, mais nous n'avons jamais dit que nous
en ferions une publication intégrale. Je ne sais pas où vous avez
pris cela.
M. Morin: Non, je n'ai pas l'intention de reprendre la discussion
de l'année dernière. Je pense que cela aurait été
utile que le ministre procède à une publication peut-être
pas des éléments de stratégie, mais au moins...
M. Levesque: Je demanderais au chef de l'Opposition de relire le
rapport annuel où nous faisons un effort particulier pour
répondre à ce voeu en autant que ce serait de
l'intérêt public.
M. Morin: Je l'ai lu, mais je ne peux pas dire...
M. Levesque: Non, mais avec le nouveau, nous allons plus
loin.
M. Morin: Oui. Alors, vous allez plus loin, vous donnez plus de
détails. Est-ce que ce bilan est rendu seulement au niveau du CCRI ou
bien si le CIDA s'est également penché sur ce bilan?
M. Levesque: Constamment. Il n'y a pas, en général,
de réunion plénière du CCRI sans que cela ne soit suivi
d'une réunion plénière du CIDA. Cela se fait ordinairement
durant la même semaine. Si on veut parler des faits, concrètement
parlant, c'est comme cela que cela se passe.
M. Morin: Sur chacun des dossiers, il y a donc un diagnostic du
CIDA, sur chacun des dossiers sectoriels?
M. Levesque: Oui, mais à ceux qui nous sont
acheminés. D'abord, le bilan qui a été acheminé au
début, et ensuite on ne peut pas discuter à chaque semaine de
tous les sujets. Seulement pour les têtes de chapitre, je pense qu'il y
en avait 25 ou 30, comme je vous les ai énumérées tout
à l'heure. C'est évident que, dans une réunion du CIDA,
une réunion de trois ou quatre heures, nous ne pouvons pas aborder
chacun de ces sujets.
M. Morin: Non.
M. Levesque: II faut être pratique. Ce que nous avons,
c'est que nous avons acheminé le bilan vers le CCRI et le CIDA ensemble,
et ensuite, à chaque occasion où il se présente une
conférence fédérale-provinciale, où il se
présente une situation particulière où une décision
doit être prise, là les instances du CCRI et du CIDA sont saisies
de la question avec un dossier complet sur la question à l'étude.
Là, se dégagent évidemment des orientations et des
décisions.
M. Morin: Est-ce que, par-delà les bilans sectoriels que
vous avez énumérés tout à l'heure, par-delà
tous ces secteurs, tous ces ministères, commence à se
dégager ou s'est dégagé un bilan global des rapports
fédéraux-provinciaux?
M. Levesque: La direction générale des relations
fédérales-provinciales a l'intention au cours de
l'été de faire une synthèse de ces dossiers contenus au
bilan et en dégager des recommandations à l'intention du CCRI et
du CIDA. C'est un travail qu'on envisage pour l'été qui s'en
vient.
M. Morin: Ce serait donc une sorte de bilan global des avantages
et des inconvénients qu'on trouve dans les rapports
fédéraux-provinciaux. C'est cela en gros. Est-ce que j'ai bien
compris?
M. Levesque: La façon que veut aborder la direction
générale, ce serait plutôt de faire une évaluation
de chacun des dossiers, ensuite de chacun des secteurs avant d'en arriver
à une évaluation globale.
Il y a une problématique générale qui se
dégage, comme on le trouvera dans le discours que j'ai prononcé
le 8 avril. J'y reviens, parce qu'il y a là une problématique
générale qui se dégage, déjà globale, comme
vous le dites, parce qu'à ce moment, on parle de la clarification des
pouvoirs, du financement de la fédération et de la
concertation.
Alors, il y a là, déjà, des éléments
d'une politique ou d'une évaluation plus globale d'une situation
générale. Autrement dit, ce que j'ai voulu dégager
là...
M. Morin: Ce qui m'inquiétait dans votre discours du 8
avril...
M. Levesque: II y a là une problématique où
se dégage trois...
M. Morin: Oui, je sais.
M. Levesque:... objectifs majeurs.
M. Morin: Oui, mais il ne se dégage pas l'idée
d'une réforme en profondeur. Il se dégage l'idée d'un
certain nombre de réformes, assurément, mais...
M. Levesque: On dit que cet examen doit porter sur trois
points...
M. Morin: Oui.
M. Levesque:... les pouvoirs de taxation... Un instant! C'est ce
qui a trait au financement. Un instant!
Mais ces problèmes essentiels continuent à s'inscrire au
coeur même de notre fédéralisme canadien et s'articulent
autour de trois questions fondamentales: Les responsabilités des deux
ordres de gouvernement, c'est-à-dire le partage des pouvoirs, les
ressources dont dispose chacun de ces ordres de gouvernement pour l'exercice de
leurs responsabilités respectives...
M. Morin: C'est la question fiscale.
M. Levesque: C'est la question fiscale que je viens
d'évoquer il y a un instant et, enfin, comment concerter leurs actions
pour assurer le développement maximal de la collectivité.
M. Morin: Mais, de l'ensemble de ce discours, puisque vous dites
qu'il reflète, en somme, le bilan...
M. Levesque: Non, on propose, évidemment,
des changements. Ceci implique, lorsque je parle, un peu plus tard, des
communications, par exemple, l'immigration; on propose des changements qui
touchent des choses fondamentales. Evidemment, cela ne va pas... On va revenir
encore à la question fondamentale que pose toujours le chef de
l'Opposition à cause de son option politique. Non, cela ne va pas
jusque-là.
M. Morin: Ce n'est pas toujours très clair. Evidemment, je
conçois que le ministre se garde de la marge de manoeuvre, mais j'ai
trouvé, dans l'ensemble, ce discours plutôt ambigu, même
à l'intérieur de la perspective où se place le ministre,
la perspective du maintien du fédéralisme canadien. On sent qu'il
n'y a pas de volonté de réformes en profondeur de l'ensemble du
système. On sent bien des ponctions sectorielles, un effort dans
certains secteurs...
M. Levesque: Si on veut voir les choses comme elles sont, si on
veut se voir à l'intérieur d'un système
fédéral, est-ce qu'il n'y a pas là les trois questions
fondamentales qui ont été posées? Est-ce qu'on peut
demander autre chose que de regarder quelles sont les responsabilités de
chacun des deux ordres de gouvernement?
M. Morin: Peut-on indiquer quelles responsabilités on
veut?
M. Levesque: On parle, à ce moment, de regarder le partage
des pouvoirs. C'est là qu'on touche, par exemple, dans les
communications, à quelque chose de fondamental. On veut changer un
certain ordre de choses d'une façon réellement substantielle.
Autrement, cela ne ferait pas deux ou trois ans qu'on en discuterait si
c'était simplement superficiel. C'est parce qu'on touche au coeur des
choses. Lorsque l'on parle, en second lieu, de questions telles que: Comment
financer la fédération? C'est-à-dire, comment permettre
à chacun des gouvernements de répondre à leurs
responsabilités? On touche à quelque chose de fondamental. C'est
le partage des ressources financières à l'intérieur de la
fédération. Et lorsque l'on parle de concertation, c'est qu'on
veut être impliqué dans les actions posées par le
gouvernement central.
M. Morin: Je reviendrai plus tard, d'ailleurs, dans le
détail, dans chacun des secteurs, puisque nous allons prendre les
secteurs les uns après les autres par la suite.
Ce qui m'a frappé, c'est que vous ne touchez guère au
domaine économique; vous faites bien allusion aux communications,
à l'environnement, à un certain nombre de dossiers qui ont
été dans l'actualité, mais on ne sent pas une
volonté de réforme de l'ensemble du système. C'est une
volonté sectorielle de réforme, c'est ce que j'essaie de vous
dire depuis tout à l'heure.
Mais, puisque la synthèse s'en vient, c'est peut-être que
vous n'aviez pas encore sous les yeux cette synthèse au moment où
vous avez fait ce discours. Peut-on s'attendre à ce que cette
synthèse fasse l'objet d'une publication également?
M. Levesque: Je n'ai pas l'intention de publier ces travaux;
cependant, ils peuvent être publiés indirectement dans des prises
de position du gouvernement, ils peuvent être connus par des
déclarations ministérielles, par des allocutions comme celles
auxquelles nous venons de nous référer. Je tiendrais cependant,
à revenir sur la question économique; cela n'a certainement pas
été négligé de la part du gouvernement actuel; on
sait que ces dossiers font constamment l'objet de négociations, et je me
plais à rappeler encore une. fois ce qui s'est fait
particulièrement dans le domaine de l'énergie, où le
Québec, qui n'avait pas de pétrole, a certainement tiré
son épingle du jeu simplement parce qu'il était à
l'affût de la situation et il avait un dossier extrêmement bien
étoffé.
Si on regarde du côté de l'agriculture, des richesses
naturelles, dans tous les domaines où...
M. Morin: Vous n'en parlez guère dans votre discours du 8
avril.
M. Levesque: Je n'allais pas faire le bilan, j'avais 20 minutes
pour parler à la Chambre de commerce, le discours aurait duré 40
minutes, si je n'avais pas passé par-dessus quelques paragraphes. Il
faut bien comprendre que ce n'était pas la publication d'un rapport
annuel, mais, j'invite encore le chef de l'Opposition à regarder le
rapport annuel, qui sera plus complet.
M. Morin: Je me demandais...
M. Levesque: Je parle de concertation, et je parle en
particulier... Evidemment, il y a un travail considérable qui s'est fait
aux Affaires intergouvernementales et à l'OPDQ dans le domaine des
ententes, l'entente-cadre et les ententes auxiliaires, ceci est du concret, et
chacune des régions du Québec est très heureuse de voir
que le gouvernement actuel fait des efforts considérables dans le
développement économique, dans le développement
régional, et cela...
M. Morin: La multiplication des zones grises... M. Levesque:
Quelles grises?
M. Morin: Les zones grises constitutionnelles où, par ces
ententes, vous amenez Ottawa dans à peu près tous les secteurs du
développement.
M. Levesque: Dans le domaine économique ou dans le domaine
du développement régional, nous avons réussi à
faire accepter par le gouvernement fédéral que ce seraient les
priorités du Québec qui seraient au début, au tout
début de ces ententes de développement. Il y a déjà
eu un document, avant même la signature de l'entente-cadre, pour bien
établir que les priorités du Québec seraient celles qui
seraient retenues. Cela n'empêche pas le gouvernement
fédéral de pou-
voir en discuter, parce qu'il contribue financièrement, mais ce
sont les priorités du Québec qui sont retenues, et si le
Québec décide que telle et telle action, ou tel et tel domaine
est prioriaire pour lui, ce seront ces domaines qui seront retenus pour le
contenu des ententes-cadres, surtout des ententes auxiliaires.
M. Morin: La raison pour laquelle j'ai posé toutes ces
questions est la suivante: l'année dernière, quand je vous avais
demandé si vous comptiez publier le bilan, vous m'avez dit
essentiellement, que, par stratégie, il convenait de ne pas le publier,
le rendre public. Je me demande si lemoment n'approche pas où le
ministre sera, par stratégie, plutôt enclin à publier le
bilan, et surtout la synthèse qui en sera faite cet été.
On assiste, en ce moment, en effet, je pense que le ministre en est
conscient...
M. Levesque: Vous m'aviez dit que vous ne reprendriez pas cette
discussion plus tôt.
M. Morin: Comment?
M. Levesque: M. le Président, le chef de l'Opposition m'a
dit qu'il ne reparlerait pas de ces discussions qu'il avait faites l'an dernier
sur la question.
M. Morin: Je ne veux pas, point par point comme je l'ai fait l'an
dernier, tenter de vous tirer les vers du nez, c'était un exercice qui a
été pénible pour tout le monde.
M. Levesque: Non, pas du tout.
M. Morin:... et qui a abouti à absolument rien.
M. Levesque: J'ai trouvé cela fort intéressant.
M. Morin: Oui, bien sûr. Mais cela n'a pas donné
beaucoup de résultats. Ce que je me demande, c'est s'il ne viendra pas
un moment où devant le bloquage systématique du gouvernement
fédéral, dans un très grand nombre de dossiers
pensons au plus récent, les communications blocage complet avec
l'espoir qu'on se reprendra en juillet. On va explorer l'impasse plus avant, au
mois de juillet. Cela n'en restera pas moins une impasse parce que nous savons
très bien que le pouvoir fédéral n'a pas l'intention
d'abandonner ses positions qu'il a acquises depuis 30 ans dans le domaine des
communications. Je doute même qu'il abandonne ses positions en
matière de cable, où pourtant le Québec a un très
bon dossier. Devant un blocage comme celui-là, est-ce qu'il n'y aurait
pas intérêt à publier d'abord certains secteurs du bilan et
ensuite, peut-être, le bilan global? Est-ce que ce ne serait pas vous
donner un instrument de travail et un instrument de pression qui serait utile?
Parce qu'à l'heure actuelle, vous êtes renseigné sur le
bilan. Vous avez votre petit livre du maître, mais les
élèves qui sont fort nombreux...
M. Levesque: Ce n'est pas un petit livre. C'est peut-être
le livre du maître, mais c'est un gros livre.
M. Morin: Si vous voulez, vous avez le gros livre du
maître, mais les élèves, les millions de
Québécois qui eux n'ont pas le livre du maître, qui se
demandent bien ce qui se passe et qui n'en voient que des bribes dans les
journaux ou dans les media tous les jours ont beaucoup de difficultés
à se faire une idée de l'état véritable des
rapports fédéraux-provinciaux. Est-ce que ce ne serait pas utile,
à un moment donné, qu'il y ait une publication qui fasse
état du bilan et de la synthèse que vous êtes à
préparer?
M. Levesque: Je vais dire immédiatement au chef de
l'Opposition premièrement, on ne peut pas parler d'échec lorsque
l'on parle des communications, par exemple. C'est l'exemple qu'il a
donné. Je tiens à lui rappeler que nous sommes partis de loin
dans ce domaine et que simplement au cours des douze derniers mois, alors que
le Québec était seul ou à peu près à tenir
cette position avec un dossier comme dit le chef de l'Opposition
bien étoffé. Présentement, le Québec a
réussi à rallier toutes ou à peu près toutes les
provinces du Canada autour de sa thèse et autour de ses propositions. Il
y a donc là un aspect qu'il faut souligner. Le gouvernement
fédéral...
M. Morin: Est-ce que le ministre a l'impression que cela va
impressionner le pouvoir fédéral?
M. Levesque: Je crois que oui. M. Morin: Je crois
qu'il...
M. Levesque: Je crois même que l'attitude du
fédéral lors de la dernière conférence, où
d'ailleurs il avait déjà été obligé par la
force des parties en présence à changer même l'ordre du
jour, a dû convenir d'une autre réunion en juillet et ce qui
était autrefois une fin de non recevoir complète, aujourd'hui,
attendons et nous verrons. Deuxièmement, une autre remarque que je
voulais faire, c'est que nous avons dit que le bilan était un instrument
de travail privilégié. Premièrement, le gouvernement
fédéral, avec qui nous négocions la plupart de ces
dossiers, dans le contexte du contentieux fédéral-provincial, je
ne crois pas qu'il veuille publier, s'il a un bilan ou s'il a une partie de
bilan.
Il ne répond pas à un voeu possible des Canadiens de
l'Atlantique au Pacifique, si l'on veut, de déposer sa stratégie
dans chacun des dossiers. Je ne pense pas qu'on s'attende à ce qu'il le
fasse.
M. Morin: II l'a fait avant les grandes conférences
fédérales-provinciales.
M. Levesque: II l'a fait et nous le faisons également,
nous l'avons fait dans le domaine, par exemple, des communications, nous venons
de le faire dans le domaine de l'immigration. Nous le
faisons lorsque nous jugeons à propos autrement dit si notre
stratégie nous indique qu'il est temps de faire connaître un
dossier aussi complet que possible. A ce moment, nous l'avons fait, je le dis,
nous l'avons fait dans les communications, dans l'immigration, nous l'avons
fait autrefois, il y a quelque temps, dans le domaine des affaires sociales.
Nous croyons à un moment donné qu'il est de bonne
stratégie de déposer un livre blanc ou de faire connaître
une politique dans son ensemble. A ce moment, tout le bilan dans ce secteur est
déposé devant le public. Je tiens également à dire
une autre chose. Lorsqu'on parle un peu négativement, comme le fait le
chef de l'Opposition, on devrait se rappeler que, simplement dans
l'année qui vient de s'écouler, il y a de nombreux dossiers qui
ont débloqué et qui n'ont peut-être pas fait l'objet d'une
grande publicité, si l'on veut, mais qui ont fait cependant l'objet
d'une trentaine d'ententes signées, seulement durant le dernier exercice
financier, entre le Québec et le gouvernement central.
M. Morin: Des ententes financières?
M. Levesque: De toute nature. Dans tous ces dossiers, il y a
finalement des ententes qui aboutissent et on donne beaucoup plus de
publicité là où cela n'aboutit pas, là où il
y a un contentieux qui semble se prolonger, mais lorsqu'il y a des ententes
réelles qui se signent, cela ne dure pas 24 heures. Quelquefois, cela
passe inaperçu.
M. Morin: Certaines nous sont connues, certaines ont
été rendues publiques. D'autres, visiblement, n'ont pas
été rendues publiques. En tout cas, il n'y en a certainement pas
eu une trentaine durant l'année.
M. Levesque: C'est vrai.
M. Morin: Est-ce que le ministre serait en mesure de
déposer ces ententes?
M. Levesque: Dans le rapport annuel, le chef de l'Opposition aura
la liste de toutes les ententes signées au cours de l'année
1974/75.
M. Morin: Ce n'est pas la liste qui m'intéresse, c'est le
contenu de chaque entente.
M. Levesque: S'il y avait une entente qui vous intéressait
particulièrement, évidemment le chef de l'Opposition sait comment
faire pour obtenir...
M. Morin: Le dépôt, bien sûr! Justement, l'une
des façons...
M. Levesque: Nous aidons particulièrement le chef de
l'Opposition dans son travail en faisant une nomenclature, en disant: "Voici
toutes les ententes qui ont été signées, les têtes
de chapitre, s'il y a quelque chose en particulier qui l'intéresse ou
qui intéresse un autre membre de l'Assemblée nationale, qu'on
utilise la procédure nécessaire".
M. Morin: L'une des procédures qui est à ma
disposition, et je tente de l'utiliser en ce moment, c'est de demander le
dépôt au moment de l'étude des crédits. C'est ce que
je fais, vous n'avez qu'à me dire: Non, je ne veux pas les
déposer.
M. Levesque: C'est-à-dire que je ne suis pas prêt
à les déposer immédiatement parce que cela demanderait un
certain travail de recherche. Je ne suis pas équipé
présentement pour les déposer.
M. Morin: Je ne vous demande pas de le faire séance
tenante.
M. Levesque: Lorsque le chef de l'Opposition, dans deux ou trois
semaines, recevra, j'espère du moins, je ne veux pas prendre
d'engagement, le rapport annuel, il verra à ce moment ce qui
l'intéresse et il m'en fera part.
M. Morin: Si le rapport annuel...
M. Levesque: II y a une procédure pour cela.
M. Morin: ... par hasard, n'était pas déposé
avant la fin de la session, est-ce que le ministre peut prendre l'engagement de
me communiquer les ententes en question?
M. Levesque: Je suis convaincu que le rapport annuel sera
déposer avant la fin de la session. Je suis convaincu.
M. Morin: II est arrivé, dans le passé, qu'il y ait
des retards occasionnés par telle ou telle grève ou telle ou
telle raison.
M. Levesque: Je suis intellectuellement et moralement convaincu
que ce rapport annuel sera déposé avant la fin de la session.
M. Morin: Est-ce que le ministre pourrait du moins, avant que
nous passions à autre chose, me donner une énumération des
ententes, pour que j'aie une idée déjà de ce que
contiennent ces trente ententes dont vous avez parlé?
M. Levesque: Celles-ci comportent les secteurs de pêche
maritime, de main-d'oeuvre, de transport, d'éducation, jeunesse, loisirs
et sport, sécurité du revenu, intégrité du
territoire, protection de la personne et de la propriété, des
ententes de développement et l'environnement.
M. Morin: II est évident que tout cela serait fort utile
pour l'étude des crédits et que ce n'était pas besoin
d'attendre le rapport pour faire état de ces ententes et les
communiquer, dans le cas où elles n'ont pas été rendues
publiques. Combien ont été rendues publiques?
M. Levesque: Je ne sais pas.
M. Morin: Ce serait tout de même intéressant de le
savoir.
M. Levesque: On me dit qu'il y en a environ la moitié.
L'importance de ces ententes varie. Il y a simplement des reconductions, il y a
des ententes qu'on peut appeler de routine et il y a des ententes qui sont plus
significatives.
M. Morin: C'est pour cela que je veux les détails, avant
de me laisser impressionner par le chiffre 30. Je voudrais être bien
sûr qu'il s'agit d'ententes réglant des problèmes
substantiels, des problèmes importants.
Est-ce que le ministre me communiquerait cette liste qu'il a devant lui?
Est-ce possible?
M. Levesque: Un instant, je vais vous le dire, pour le journal
des Débats. C'est aussi bien que je le dise à tout le monde.
M. Morin: C'est ce que je pensais.
M. Levesque: Pas de secret.
Modernisation des engins de pêche et équipement de
détection du poisson.
Accord sur une nouvelle formule de financement du programme de formation
de la main-d'oeuvre du Canada.
Accord relatif à la main-d'oeuvre agricole.
Accord sur la création de bureaux de la main-d'oeuvre
agricole.
M. Morin: II y en a qui ne sont pas neufs, là-dedans.
M. Levesque: Je vais vous donner la liste et, par la suite, vous
ferez des commentaires. Parce qu'on va se mêler et les gens vont penser
que c'est votre titre à vous qui est un accord. Vous m'en donnez
tellement peu d'accord.
Accord sur le financement et la mise à l'essai d'un
aéroglisseur le long de la Côte-Nord.
Entente concernant le mandat et le début des opérations de
la Société interport de Québec.
Entente concernant le réseau autoroutier et routier desservant la
région du nouvel aéroport de Montréal à
Mirabel.
Entente concernant le financement de la construction de l'autoroute 13
et de l'autoroute 220 à l'autoroute 640.
Entente sur le financement du pont enjambant le canal Chambly, dans le
prolongement de la route I, qui contourne Chambly.
Entente relative à la construction de l'autoroute 20 à
travers la garnison de Longue-Pointe, de la base de Montréal des forces
armées canadiennes.
Entente sur l'interpénétration des deux réseaux
d'autobus de la région d'Ottawa-Hull.
Entente sur le déminage et sur le transfert du terrain au
polygone d'essai Saint-Maurice, à Montréal.
Entente auxiliaire sur les axes routiers prioritaires.
Entente relative à l'Ecole de médecine
vétérinaire de Saint-Hyacinthe.
Entente au sujet du rôle international du conseil des ministres de
l'Education.
Programme fédéral-provincial de bilinguisme en
éducation.
Entente sur les jeunes voyageurs.
Accord prévoyant le paiement de prestations à des
cotisants à deux régimes, la Régie des rentes du
Québec et le Régime des pensions du Canada ou à leur
égard. Il y a du neuf dans l'entente.
M. Morin: Ce n'est pas neuf, cela non plus.
M. Levesque: Entente de principe sur le règlement des
réclamations des autochtones dans les territoires annexés au
Québec en I898 et I9I2.
Carrefour I975.
Entente-cadre sur le développement économique du
Québec.
Entente auxiliaire sur le financement du plan d'expansion 1974/75 de la
société SIDBEC.
Entente auxiliaire sur les axes routiers prioritaires 1974/79, dont on a
parlé dans les transports.
Entente auxiliaire sur l'accès aux ressources forestières
1974/78.
Entente auxiliaire sur les infrastructures industrielles.
Entente sur la qualité des eaux du Saint-Laurent.
Entente auxiliaire sur l'accès aux ressources forestières
1974/78.
M. Morin: Est-ce que la liste pourrait m'être
communiquée? Est-ce possible de faire faire une copie de cela? Ce serait
plus utile comme document de travail.
M. Levesque: Nous en avons un double.
M. Morin: Merci beaucoup.
M. le Président, quitte à revenir sur certaines ententes
par la suite, soit dans cette commission, soit peut-être dans d'autres,
je voudrais maintenant passer à l'étude des priorités du
gouvernement en matière d'affaires intergouvernementales.
L'an dernier, le ministre avait indiqué que les grandes
priorités du gouvernement dans ses rapports, dans ses relations avec le
pouvoir fédéral, c'était premièrement au titre de
ce qu'on appelle la souveraineté culturelle, c'est-à-dire au
titre de l'autonomie culturelle: les arts et les lettres, y compris les biens
culturels, les communications et l'immigration; deuxièmement, au titre
du développement économique: le développement de la baie
James, la pétrochimie et la sidérurgie, le projet TDM, à
Mirabel, et l'usine d'eau lourde.
Ces priorités avaient été définies aux pages
294I et 2942 des crédits de l'année dernière. Est-ce que
le ministre peut nous dire dans quelle mesure ces priorités sont
restées les mêmes, dans quelle mesure elles demeurent
d'actualité et nous indiquer également s'il y a de nouvelles
priorités? Quel est l'ordre des priorités, en ce moment?
M. Levesque: D'ailleurs, je suis encore obligé de
référer le chef de l'Opposition à mon allocution du 8
avril qui reprend ce thème et qui indique bien que nous n'avons pas
changé d'opinion là-dessus, particulièrement à la
page 7.
M. Morin: La page 7 nous donne une énumération en
vrac, affaires urbaines, environnement, loisirs, communications, arts et
lettres. J'ai été étonné d'ailleurs de voir que
l'agriculture n'y figurait pas.
M. Levesque: Mais, on voit... Non.
M. Morin: Enfin, c'est un oubli, c'est un petit oubli,
sûrement. C'est que l'agriculture signifie si peu de chose au
Québec maintenant.
M. Levesque: Le chef de l'Opposition sait qu'il s'agit d'un
domaine où il y a une juridiction partagée...
M. Morin: Mixte.
M. Levesque: ... au sujet de laquelle il y a eu des
progrès assez intéressants faits l'an dernier, en ce qui a trait,
notamment, à l'assurance-récolte. La question des grains de
provende aussi a été réglée au cours de
l'année, à notre satisfaction. Il y a une loi
fédérale qui a été déposée sur la
stabilisation des prix qui est également conforme à des voeux que
nous avions exprimés. Nous n'avons certainement pas oublié
l'agriculture.
M. Morin: Nous reviendrons sur ce dossier par la suite et sur la
possibilité...
M. Levesque: Je suis très heureux que le chef de
l'Opposition en parle, ce n'est pas son habitude.
M. Morin: Nous reviendrons sur la possibilité de
créer une régie de mise en marché des grains de provende
et des aspects constitutionnels de cela. On en a déjà
parlé en Chambre. Il serait peut-être bon qu'on y consacre
d'ailleurs un peu d'attention, plus tard. Mais, pour revenir maintenant,
à la liste des priorités, je ne voudrais pas m'en éloigner
avant quelque temps.
M. Levesque: Vous avez vu qu'on avait développé,
volontairement, des sujets qui sont l'immigration, les affaires urbaines, la
protecion de l'environnement, les communications et les affaires sociales.
Simplement le fait de les avoir développés davantage indique que
nous n'avons pas changé nos priorités.
M. Morin: La première priorité, au titre de
l'autonomie culturelle, c'était les arts et lettres, y compris les biens
culturels. La politique du ministère, telle qu'elle a été
définie, l'année dernière, c'était que le
Québec réclamait un droit prépondérant
d'interventions dans ce domaine. Est-ce que cette priorité a
changé? Est-ce que le ministère a obtenu des résultats,
dans ce domaine, au cours de l'année écoulée?
M. Levesque: Je pense que cette question a été
traitée plus longuement, assez longuement par le ministre des Affaires
culturelles, durant l'étude de ces crédits. Justement, le
ministre des Affaires culturelles a mis l'emphase sur les programmes du
ministère des Affaires culturelles. Il a parlé, en particulier,
des législations prochaines, dans les domaines du cinéma et du
livre. Il a été question assez longuement de souveraineté
culturelle. J'ai un résumé ici de ce qui s'est passé
à la commission.
Le premier volet de la souveraineté culturelle doit consister,
selon le ministre des Affaires culturelles, en l'occupation, par le
Québec, des champs qui sont encore ouverts. Le deuxième volet
devra consister en la négociation, avec le gouvernement
fédéral, d'ententes devant ordonner les interventions des deux
gouvernements. A cet effet, le ministre mentionne qu'un budget de $55,000 a
été prévu pour permettre la constitution du dossier
fédéral-provincial qui servira de base aux futures discussions.
Je pense bien que toute cette question a été longuement
discutée à la commission de l'éducation et des affaires
culturelles. A ce moment, on entre dans le contenu.
M. Morin: Je ne veux pas entrer dans tous les détails,
mais seulement dans l'aspect strictement fédéral-provincial. Bien
sûr que, si le ministre veut faire adopter une loi sur le cinéma
ou sur le livre au Québec, c'est tant mieux, mais cela ne règle
pas le contentieux fédéral-provincial automatiquement, parce que,
si Ottawa décide de son côté d'agir dans ces domaines, il y
aura des chevauchements, il y aura conflit de compétences.
M. Levesque: Le ministre a donné
générale-nent sa position. Il faut dire que, quant au secteur
culturel au sens strict, c'est-à-dire les arts, les le-tres et la
question du patrimoine dont il a été question, il n'y a pas eu de
négociation à proprement parler avec le fédéral
pour 1974/75, malgré qu'une certaine coordination entre les organismes
culturels fédéraux et québécois prenne quand
même place dans des mécanismes, comme l'Assemblée des
administrateurs d'art du Canada, le Conseil des directeurs de sports et de
loisirs, ou par les ententes comme celles qui prévalent pour les
musées. Quant à nous, je dois dire qu'il y a d'autres secteurs
où nous avons eu beaucoup plus de négociations avec le
gouvernement fédéral au cours de l'exercice financier.
M. Morin: Autrement dit, cela n'a pas été une
priorité au cours de l'année écoulée pour ce
secteur, en particulier.
M. Levesque: II ne faut pas mêler les priorités et,
si le dossier n'a pas été acheminé, encore cela ne veut
pas dire que ce n'est pas une priorité. Je ne voudrais pas que ce soit
interprété comme cela.
M. Morin: Oui, mais comme le dossier a été mort,
pendant ce temps...
M. Levesque: Non, il n'a pas été mort, au
contraire, il est en...
M. Morin: II est resté inactif.
M. Levesque:... train d'être constitué et
d'être complété. Il a déjà été
présenté d'ailleurs au CCRI, retourné encore pour
être complété, il doit revenir.
M. Morin: Pendant ce temps, le ministre le sait, dans le domaine
du livre, notamment, qu'Ottawa agi, a continué d'agir. Il a ouvert une
maison du livre soit-disant canadienne, qui est en fait le livre
québécois en France. Il a organisé à
Montréal une foire du livre qui entre en concurrence avec celle de
Québec, et qui avait l'appui du ministère
québécois. Autrement dit, le pouvoir fédéral ne
s'arrête pas pendant que vous ratiocinez dans vos officines.
M. Levesque: D'après les renseignements que je
reçois, je dois conclure qu'il s'agit d'une question...
M. Morin: A l'instant.
M. Levesque: A l'instant... fort complexe, qui fait l'objet d'une
étude très intense au ministère des Affaires culturelles,
en particulier. Ce que souligne le chef de l'Opposition...
M. Morin: C'est ce qu'on appelle une réponse
passe-partout.
M. Levesque: ... mérite d'être retenu; ses
remarques, je ne les repousse pas du revers de la main. Il y a là sujet
à réflexion, mais surtout à action.
M. Morin: Est-ce que votre ministère plus
spécifiquement, en ce qui concerne la Foire du livre ou le Salon du
livre, je ne sais trop comment on l'appelait à Montréal,
où l'Ontario a été plus présente que le
Québec, est intervenu dans ce dossier, en particulier? Est-ce qu'il a
fait des représentations ou bien est-ce qu'il a laissé faire?
M. Levesque: Vous parlez du Salon du livre? M. Morin: A
Montréal, pas celui de Québec.
M. Levesque: Nous n'avons pas été impliqués.
C'est une organisation à caractère privé.
M. Morin: Une organisation à caractère
privé, mais financée par le pouvoir fédéral.
M. Levesque: Par le gouvernement fédéral. M.
Morin: Et par l'Ontario.
M. Levesque: Cela n'implique pas de relation interrouvemementale
comme telle.
M. Morin: Ah non? Autrement dit, la politique du ministère
des Affaires culturelles peut être d'avoir un Salon du livre pour qu'il
soit important, bien étoffé à Québec, un groupe
privé peut aller chercher l'appui du pouvoir fédéral, les
fonds fédéraux, créer un salon concurrent à
Montréal. Cela ne vous touche pas. Cela ne vous intéresse
pas.
M. Levesque: Disons que c'est très récent. Nous
sommes en train, aux Affaires culturelles, d'évaluer cette situation et
nous sommes à la disposition du ministère s'il y a une suite
à donner à sa réflexion. Mais nous ne sommes pas en
mesure, nous n'avons pas l'évaluation de cette situation que
décrit le chef de l'Opposition.
M. Morin: Oui. Vos priorités sont, effectivement, tout
à fait dormantes dans ce domaine. Est-ce qu'on peut dire qu'il y a de
nouvelles priorités, à part celles qui avaient été
énumérées l'année dernière lors de
l'étude des crédits?
M. Levesque: Le chef du gouvernement a répondu au chef de
l'Opposition, hier soir, en établissant très clairement, les
priorités. Cette question a été discutée pendant au
moins une heure sur les trois heures qu'a duré la discussion.
M. Morin: Non, nous n'avons parlé finalement hier soir que
du rapatriement de la constitution,
M. Levesque: Oui, et lorsqu'on a dégagé les
priorités, le premier ministre a été clair
là-dessus. Il a insisté sur la question d'autonomie ou de
souveraineté culturelle.
M. Morin: Ah oui!
M. Levesque: Oui. Lorsque l'on parle d'immigration, lorsque l'on
parle de communications, lorsque l'on parle d'arts et de lettres,
évidemment, on touche ces priorités.
M. Morin: De sorte qu'en gros on peut dire: Vos priorités
sont restées les mêmes, même si certains dossiers sont
restés clos pendant l'année.
M. Levesque: Quant à nous, cela ne veut pas dire qu'ils
sont clos aux ministères sectoriels...
M. Morin: Oui, j'ai compris. Je parle de votre
ministère.
M. Levesque: Cela ne veut pas dire, non plus, qu'ils sont clos au
niveau du CCRI. C'est simplement que le dossier n'était pas suffisamment
mûr pour être acheminé jusqu'au CIDA,
M. Morin: Bon! En tout cas, puisque le ministère des
Affaires culturelles n'a pas cru bon d'informer le ministère des
Affaires intergouvernementales qu'il se posait un problème au niveau du
livre, et qu'il y avait là une intervention fédérale
précise, j'en profite pour en informer le ministre,
pour qu'il puisse agir éventuellement. Cela posera certainement
des problèmes.
M. Levesque: Disons qu'il s'agit là d'un
événement très récent.
M. Morin: Bien oui, il y a deux semaines. M. Levesque:
Bon! Alors...
M. Morin: Oui, mais vous m'avez dit que vous étiez
toujours à jour...
M. Levesque: Oui.
M. Morin:... et que votre bilan, votre cahier du maître
était toujours tenu...
M. Levesque: C'est à jour. La seule chose, c'est qu'il
s'agit là d'une activité de caractère privé. Les
circonstances de financement par le gouvernement fédéral ont
été soulignées tout à l'heure par le chef de
l'Opposition. Ceci fait l'objet d'une évaluation présentement et
d'une étude au ministère des Affaires culturelles. On ne peut pas
s'étonner que, dans les deux semaines qui suivent
l'événement, le ministère des Affaires culturelles n'ait
pas terminé son travail d'évaluation et ne nous ait pas
déjà fait rapport. Je ne reconnais pas cela comme un retard.
M. Morin: Oui, enfin. Il y a tout de même un an qu'on voit
venir cette concurrence de Montréal, plus d'un an. J'avais
signalé au ministre à l'époque, que cela s'en
venait...
M. Levesque: Continuez de le signaler aux instances
appropriées.
M. Morin: Oui. Depuis les derniers crédits, est-ce que
vous pourriez nous indiquer de façon précise, M. le ministre,
quels sont les principaux dossiers qui ont été soumis au CCRI et
au CIDA, pour l'année écoulée.
M. Levesque: Prenez toutes les conférences
fédérales-provinciales qui ont eu lieu, ou
interprovinciales...
M. Morin: Oui. Alors...
M. Levesque: Toutes ces conférences, ou à peu
près, ont été précédées d'un dossier
qui a été acheminé au CCRI et au CIDA. Alors,
peut-être qu'on pourrait prendre la liste de toutes les
conférences fédérales-provinciales et interprovinciales,
qui sont nombreuses. Tous les dossiers qui ont été
étudiés lors de ces conférences, ou abordés, ont
fait l'objet d'études et de présentations aux instances du CCRI
et du CIDA. En général, c'est...
M. Morin: Oui. Ces comités se sont réunis à
peu près combien de fois?
M. Levesque: En plus de cela, les ententes dont j'ai fait une
liste tout à l'heure, et qui seront beaucoup plus considérables
l'an prochain, parce que, comme je l'ai mentionné, les ententes,
aujourd'hui, doivent être acheminées au ministère des
Affaires intergouvernementales. Je pense bien que la liste sera encore plus
longue l'an prochain, même dans la question des ententes. En plus des
conférences fédérales-provinciales et interprovinciales,
il y a toutes ces ententes qui font l'objet de discussions au CCRI et au CIDA,
lorsque c'est nécessaire.
M. Morin: II y a eu, approximativement, combien de
réunions de ces deux comités?
M. Levesque: Pardon?
M. Morin: Combien y a-t-il eu de réunions de ces deux
comités, approximativement?
M. Levesque: Le CCRI se réunit,
régulièrement, chaque lundi, une fois par semaine, et le CIDA
chaque fois que le CCRI indique que tel sujet doit faire l'objet d'une
discussion au niveau ministériel.
M. Morin: M. le Président, je pense qu'il convient de
passer maintenant, peut-être aux négociations du GATT. Le ministre
se souviendra que, l'année dernière, il avait souligné,
non sans satisfaction, que le gouvernement fédéral avait
accepté de mettre sur pied un comité consultatif groupant des
représentants des provinces dont le mandat serait de conseiller les
négociateurs canadiens quant à la position canadienne lors des
discussions du GATT. Le ministre nous avait dit que le représentant
québécois auprès de ce comité était le
sous-ministre de l'Industrie et du Commerce, M. Robert DeCoster; ce
détail se trouve à la page 2975 des crédits de
l'année dernière. Le ministre pourrait-il nous dire, étant
donné que les négociations du GATT sont maintenant
engagées, si ce comité a été très actif;
combien de séances a-t-il tenues, sur quels sujets en particulier?
M. Levesque: Je sais qu'il a été très actif.
Il étudie au moins une cinquantaine de secteurs qui font l'objet des
discussions du GATT. Comme le mentionnait le chef de l'Opposition, le
Québec a créé le comité Québec-GATT, dont le
mandat est de préparer la position québécoise; cette
étude est maintenant complétée et doit être
acheminée dès lundi, aux instances du CCRI. C'est encore M. De
Coster, le sous-ministre de l'Industrie et du Commerce, qui assume la
direction, la responsabilité du groupe.
M. Morin: Le comité Québec-GATT, je suis conscient
du fait qu'il a été actif, mais ce n'est pas de celui-là
que je vous entretiens. Celui qui m'intéresse est le comité
fédéral-provincial, comité consultatif groupant des
représentants des provinces. Est-ce que ce comité a
été très actif?
M. Levesque: Le comité fédérale-provincial a
été mis en place seulement au mois de mars 1975. Il y a
déjà eu une réunion et d'autres sont prévues
très prochainement.
M. Morin: II n'y a eu qu'une réunion? Alors que les
négociations sont déjà engagées!
M. Levesque: Avant même l'institution du comité,
depuis un an, nous recevons continuellement du gouvernement
fédéral des documents sur ces négociations du GATT. Nous
avons même un observateur à Genève qui obtient de
l'information et nous la transmet également. Le comité
fédéral-provincial a été mis en place au mois de
mars 1975 et les réunions sont prévues
régulièrement. Consultations et réunions continueront
durant toute la période de négociations du GATT. Cela veut dire,
possiblement, assez longtemps.
M. Morin: Du point de vue fédéral-provincial
êtes-vous satisfait du fonctionnement de ce comité?
M. Levesque: Nous sommes au tout début. Il faut dire que
le fédéral, jusqu'à maintenant, nous a fourni toute
l'information requise.
M. Morin: Vous venez de rappeler à l'instant que vous avez
un observateur à Genève. L'an dernier vous aviez
déclaré que le Québec ne pouvait pas se satisfaire
seulement ou simplement de ce comité consultatif, et que vous
désiriez obtenir le droit d'avoir un observateur à la
conférence. Même vous aviez parlé d'un
délégué participant.
M. Levesque: C'est un mécanisme différent des
anciennes négociations du GATT, car le Canada, présentement,
prend les décisions ici, à Ottawa, et non pas à
Genève. De sorte que...
M. Morin: Mais le round...
M. Levesque: Mais c'est important de savoir comment les choses
vont se passer, c'est-à-dire que ceux qui sont à Genève
font rapport à Ottawa, notre représentant ou notre observateur
à Genève nous fait rapport et le comité se réunit
pour discuter de la position canadienne.
M. Morin: Le comité consultatif.
M. Levesque: Sur chaque question, nous sommes consultés.
Le comité fédéral-provincial est consulté.
M. Morin: Vous aviez fait, quand même, une demande
formelle, si ma mémoire est bonne je me réfère
à la page 2976 des crédits de l'année dernière
à l'effet d'obtenir un participant, un
délégué participant et non pas seulement un
délégué observateur.
M. Levesque: Evidemment, si nous étions restés avec
l'ancien système où les décisions se pre- naient là
sur place à Genève, nous aurions continué d'insister, mais
comme on a changé le mécanisme et que les décisions se
prennent au pays et que nous avons voix au chapitre dans le comité
fédéral-provincial, nous avons obtenu ce que nous voulions.
M. Morin: II faut bien s'entendre. Les décisions ont
toujours été prises ici au pays.
M. Levesque: Non.
M. Morin: Je veux dire que les délégués
à Genève ou à Tokyo ou ailleurs pour le Kennedy Round ou
le Dillon Round ont toujours été mandatés par leur
gouvernement respectif.
M. Levesque: II y avait des orientations prises ici à
Ottawa, au Canada, et un mandat était donné à ceux qui
allaient à Genève. Aujourd'hui, le mécanisme est
changé. Il y a là des gens qui observent, qui font rapport. Quant
à nous, nous recevons ce sont les renseignements que j'ai
toute l'information nécessaire à donner un avis.
M. Morin: Est-ce que, lors des réunions parce qu'il
y a tout de même des réunions du GATT à Genève... On
a beau dire que les décisions sont prises ici, elles ont toujours
été prises ici en dernière analyse, est-ce que, lors des
réunions qui vont avoir lieu, qui ont commencé d'ailleurs...
M. Levesque: Notre observateur est sur place, il fait
pratiquement partie de la délégation.
M. Morin: C'est un observateur.
M. Levesque: C'est un observateur presque intégré
en ce sens qu'il est près de l'information, il discute avec la
déléguation canadienne, il est...
M. Morin: II n'en est pas membre.
M. Levesque: II n'est pas membre comme tel, non.
M. Morin: II n'est pas participant. Est-ce que Ottawa vous a
précisé sa position à l'égard de ce
délégué participant que vous aviez demandé?
Avez-vous reçu une réponse? Parce qu'en juin dernier vous n'aviez
pas de réponse.
M. Levesque: Ce que nous avons eu nous satisfait davantage, parce
que si nous avions simplement quelqu'un qui serait là à la
délégation à Genève, nous aurions moins d'avantages
que nous croyons en avoir présentement, parce que le gouvernement
fédéral a accepté de changer le mécanisme de sorte
qu'aujourd'hui, l'information nous provient complète, je le crois, et du
fédéral et de notre propre observateur à Genève, et
nous avons ce comité fédéral-provincial où nous
avons un sous-ministre, le sous-ministre de l'Industrie et
du Commerce, présent, qui reçoit l'information. Le groupe
en question peut regarder, évaluer, étudier cette information et
donner un avis avant que les décisions ne se prennent. C'est ce que nous
voulions.
M. Morin: Ce n'est pas ce que vous vouliez. Vous vous êtes
satisfait de moins que ce que vous demandiez.
M. Levesque: Au contraire, plus. M. Morin: Ah oui!
M. Levesque: Evidemment, vous êtes de l'autre
côté de la table. Vous voyez l'envers de la médaille.
M. Morin: Non, écoutez, il ne faut pas jouer sur les mots.
Vous demandiez un délégué participant et vous avez un
observateur.
M. Levesque: Si nous avons l'assurance qu'aucune décision
ne sera prise dans les négociations du GATT sans qu'il y ait
consultation du Québec, sans qu'il y ait un avis donné par le
Québec, c'est ce que nous voulions.
Qu'on l'appelle comme on voudra, qu'on regarde les modalités que
l'on voudra, ce qui nous intéresse, c'est la chose et la chose, nous
l'avons. Evidemment, il faut bien comprendre ce que sont les
négociations du GATT. Il s'agit pour le Canada de prendre une attitude
dans tel et tel secteur.
Une Voix: C'est cela!
M. Levesque: II est évident que le Canada ne peut pas
répondre affirmativement aux vues de chacune des régions qui
constituent l'ensemble canadien, il s'agit là...
M. Morin: II faut qu'il sacrifie quelque part. M. Levesque:
II y a des arbitrages. M. Morin: Bien sûr!
M. Levesque: Soyons réalistes. Dans le marché
commun, il y a des arbitrages.
M. Morin: Le malheur, c'est que le Québec a souvent
été la partie perdante dans ces questions d'arbitrage.
M. Levesque: Que le chef de l'Opposition ne soit pas pessimiste,
ne voie pas tout en noir; au contraire...
M. Morin: Vous irez voir les gens du textile.
M. Levesque: ... on devrait souligner les progrès
considérables faits par le gouvernement du Québec pour
s'intégrer dans les négociations du GATT. Nous n'étions
pas là avant. Nous étions absents. Là, nous sommes
présents. Aucune déci- sion ne sera prise sans que le
Québec n'ait eu l'occasion d'étudier et d'évaluer la
proposition, de voir l'impact sur l'économie du Québec et de
donner son avis, je pense que c'est cela qu'on voulait.
M. Morin: II ne s'agit pas de pessimisme; si on voulait trouver
du pessimisme...
M. Levesque: Et jamais la position du Québec n'a
été aussi bien articulée.
M. Morin: Oui. Mais, il ne s'agit pas de pessimisme; si on
voulait en trouver, on pourrait aller se promener du côté de
l'industrie du textile, là, vous verriez ce que cela donne.
M. Levesque: C'est justement pour éviter les situations
que déplore le chef de l'Opposition. Je ne dis pas que c'était
parfait avant, au contraire, je dis que cette situation que souligne le chef de
l'Opposition, nous voulons la corriger au moins partiellement, non pas d'une
façon idéale, en ayant toujours raison et en mettant de
côté tous les intérêts du reste du Canada. C'est une
situation impossible. Dans un marché commun...
M. Morin: Ce n'est pas de cela...
M. Levesque: ... européen, américain ou autre, il y
a des arbitrages à faire. Avant que les arbitrages ne soient faits, nous
voulons être présents, nous voulons évaluer, nous voulons
étudier, nous voulons donner notre avis et c'est ce que nous avons
réussi à faire par les mécanismes mis en place.
M. Morin: Autrement dit, l'année dernière, vous
désiriez avoir un délégué participant...
M. Levesque: Nous n'avons jamais voulu avoir un
délégué, nous avons voulu avoir les résultats. Un
délégué, c'était une modalité. Si les
décisions étaient prises à Genève par une
délégation qui avait un mandat général du Canada,
nous voulions être là pour surveiller de près et essayer de
faire rapport ici à Québec pour que Québec fasse pression
à Ottawa. Nous voulions, autrement dit, être présents
là où se trouve le centre de décision. Si le centre de
décision a été déplacé, s'il se trouve
présentement au Canada et que nous avons l'assurance que rien ne se fera
sans que nous soyons consultés et que nous ayons donnés notre
avis, à ce moment, nous sommes satisfaits parce que nous avons
réussi à obtenir le résultat escompté.
M. Morin: Je m'excuse, je cherchais le passage, mais je me
souviens ...
M. Levesque: Vous pouvez trouver un passage qui va dire, je prie
le chef de l'Opposition de bien comprendre que je ne cherche pas à
enlever le mot, à lui dire qu'il s'est trompé en disant que
j'avais dit cela; au contraire, j'ai pu favoriser cette modalité, mais
si j'en arrive à la conclusion que
j'atteins le même résultat, au moins le même
résultat, par ce nouveau mécanisme, je suis satisfait. Je ne dis
pas que le chef de l'Opposition a tort de souligner que j'avais parlé
d'un délégué, mais je parlais d'un
délégué dans un autre contexte. Si le contexte est
changé, je lui connais suffisamment d'honnêteté
intellectuelle pour dire: Si vous atteignez le même résultat par
une autre modalité, d'accord.
M. Morin: Non. Le contexte, en fait, n'est guère
changé en ce sens que la décision, c'est ce qui importe, la
décision est toujours entre les mains d'un organisme
fédéral. C'est cela qui est essentiel.
M. Levesque: On n'a jamais cru, pour une minute, qu'on pouvait,
dans un marché commun...
M. Morin: Vous n'avez pas pensé que vous pourriez au moins
participer à la décision?
M. Levesque: Le chef de l'Opposition parlait hier soir d'une
association économique avec le reste du Canada, dans sa thèse de
l'indépendance. A ce moment-là, il faudrait qu'il y ait des
arbitrages, s'il y a une association économique.
M. Morin: Avec participation.
M. Levesque: C'est là que je viens d'expliquer le
mécanisme de participation.
M.Morin: D'observation. Ce n'est pas la même chose.
M. Levesque: Au contraire.
M. Morin: Vous jouez un peu sur les mots. Nous jouons sur les
mots.
M. Levesque: Au contraire, il y a beaucoup plus. Il y a
consultation, participation et avis. Mais que ce soit.... A un moment
donné, il va falloir qu'il y ait une décision de prise pour
l'ensemble du territoire.
A ce moment-là, évidemment, la décision ne peut pas
être prise par deux instances à la fois.
M. Morin: Elle peut être prise en participation. M.
Levesque: C'est ce que nous allons faire.
M. Morin: Non. La décision, Ottawa va la prendre. On vous
consulte, bien sûr et vous observez. Vous observez tant que vous voulez.
Mais ce n'est pas vous qui prenez la décision, qui participez à
la décision.
Il faut être clair sur les techniques. Je trouve qu'on joue un peu
sur les mots en ce moment.
M. Levesque: Moi aussi.
M. Morin: Observer, ce n'est pas participer.
M. Levesque: Le chef de l'Opposition joue sur les mots, parce
que, ce que nous voulons avoir, c'est le maximum possible dans un contexte de
fédéralisme et de marché commun, si on veut. C'est de
pouvoir évaluer l'impact d'une orientation ou d'une décision et
de donner notre avis. De participer à un comité
fédéral-provincial dont les recommandations seront normalement
déterminantes.
M. Morin: Est-ce que vous pourriez nous dire qui est le
fonctionnaire affecté à Genève?
M. Levesque: L'an dernier, c'était M. Yvan Bernier; cette
année, c'est M. Jacques Lacroix.
M. Morin: M. Bernier est-il fonctionnaire ou n'est-il pas
universitaire?
M. Levesque: II était contractuel. M. Morin: II
était contractuel.
M. Levesque: Tandis que M. Lacroix est fonctionnaire.
M. Morin: M. Bernier est celui qui a écrit sur les accords
de restriction volontaire.
M. Levesque: C'est cela.
M. Morin: C'est moi qui ai eu l'honneur de le publier, sur cette
question-là.
Quel est son statut exactement, à Genève?
M. Levesque: Observateur.
M. Morin: Oui, j'ai bien compris cela. Je veux dire, comment
est-il intégré au travail du GATT?
M. Levesque: II a une collaboration totale de la part de la
délégation canadienne, des réunions périodiques
avec elle, avec la délégation canadienne.
M. Morin: II a des bureaux, j'imagine?
M. Levesque: II n'a pas de bureau à l'intérieur de
l'ambassade, il a un bureau à l'extérieur.
M. Morin: De l'ambassade canadienne?
M. Levesque: Oui.
M. Morin: II a un bureau à l'extérieur?
M. Levesque: On me dit qu'il fait également des travaux
à l'université, sur ces questions.
M. Morin: Son mandat est de faire rapport sur le cheminement
hebdomadaire des négociations...
M. Levesque: C'est exact.
M. Morin: ... de vous tenir au courant.
M. Levesque: En plus de faire des études sur des points
précis.
M. Morin: II rencontre la délégation canadienne
périodiquement, j'imagine?
M. Levesque: Régulièrement.
M. Morin: Cela veut dire toutes les semaines, tous les mois?
M. Levesque: Cela dépend de l'intensité du travail,
disons une fois par semaine. Mais, il nous fait rapport qu'il n'y a aucun
problème du côté des contacts et de la collaboration qu'il
reçoit de la délégation canadienne.
M. Morin: Dans votre discours du 8 avril, vous avez fait allusion
à la nécessité d'un nouveau partage fiscal. Dans le
passé, les formules alchimiques sur le partage fiscal ont beaucoup
varié, depuis l'époque Lesage. Il fut un temps où
c'était même 100, 100, 100; à un autre moment,
c'était 25, 50, 25. Il y a eu des variations saisonnières
considérables.
M. Levesque: 100, 100, 100, ce n'était pas à
l'époque Lesage.
M. Morin: Non, c'était M. Johnson. A l'heure actuelle,
quelle est la formule retenue par le ministère?
M. Levesque: On a peut-être laissé un peu
l'alchimie, comme dirait le chef de l'Opposition. Nous avons
développé trois aspects, soit les pouvoirs de taxation, le
partage fiscal et la péréquation des revenus des provinces.
M. Morin: J'ai vu cela dans votre discours. Oui, bien
sûr.
M. Levesque: Quand on parle du partage fiscal proprement dit,
notre théorie n'est pas celle que j'ai évoquée en parlant
de celle qui était retenue par certains, soit la théorie de la
taxation parallèle où il est facile de régler cette
question, d'après certains, en disant que chaque ordre du gouvernement
taxe selon ses besoins. Si vous poursuivez mon argumentation là-dessus,
vous verrez que je dis que c'est illusoire, cette façon de
réagir, parce que, chacun des Etats-membre de la
fédération n'a pas les mêmes ressources et, en plus, il
faut bien comprendre que la croissance des coûts n'est pas la même
dans les divers domaines de la juridiction.
Je crois qu'au contraire, il faut que les Etats, chaque ordre de
gouvernement ait des ressources financières nécessaires pour
s'acquitter de ses responsabilités vis-à-vis des domaines de
compétence respectifs.
M. Morin: Bon. Donc il faut une concertation fiscale. Il faut se
partager les points de taxation sur le revenu des particuliers, sur les
bénifices des sociétés. Est-ce que, à l'heure
actuelle, vous avez un objectif, une formule de partage? Les gouvernements
antérieurs...
M. Levesque: Si vous poursuivez la lecture du texte, vous verrez
que nous avons mis sur pied un groupe interministériel spécial
où nous avons justement un représentant du ministère des
Affaires intergouvernementales...
M. Morin: Vous étudiez la question.
M. Levesque: ... il y a des gens du ministère des
Finances, parce que nous voulons bien articuler la position
québécoise, particulièrement, en vue des
négociations préparatoires aux nouveaux accords de 1977.
M. Morin: C'est à cela que je pensais justement. Je me
demandais si vous aviez déjà dégagé une formule ou
si vous allez y procéder au cours de l'année qui vient.
C'était le sens de ma question.
M. Levesque: C'est-à-dire que nous avons, pour employer un
terme cher au chef de l'Opposition, mis de côté, mis en veilleuse
l'alchimie et nous avons une approche plus scientifique. C'est pour cela que
nous avons mis sur pied ce comité interministériel, pour
développer cette formule.
M. Morin: Est-ce que vous excluez tout à fait que votre
approche scientifique ne débouche sur une formule qui résumerait
les revendications du Québec dans le domaine du partage fiscal.
M.Levesque: C'est une hypothèse. M. Morin: Oui.
M. Levesque: II faut attendre que le comité fasse
rapport.
M. Morin: Je ne serais pas surpris qu'il y ait un retour à
l'alchimie. Quand prévoyez-vous que ce comité fera rapport? Au
cours de l'année qui vient?
M. Levesque: Oui.
M. Morin: Autrement dit, avant que la conférence de 1977
ne se réunisse, il y aura des positions claires de la part du
Québec.
M. Levesque: J'ai exprimé le voeu que nous puissions
entamer des pourparlers avec le gouvernement fédéral dès
l'automne 1975 à ce sujet. J'espère que si ce voeu était
exaucé, que nous soyons en mesure à ce moment, sinon d'avoir une
formule définitive, d'avoir suffisamment d'éléments pour
entreprendre ces pourparlers.
M. Morin: M. le Président, jusqu'à quelle heure
comptez-vous siéger?
Le Président (M. Gratton): Comme vous voulez. Pourrais-je
suggérer 12 h 30?
M. Morin: Si vous le voulez, moi, cela me convient.
Le Président (M. Gratton): Si cela convient à la
commission.
Application de la loi 59
M. Morin: Si nous abordions maintenant la loi 59 et sa mise en
oeuvre, vous vous souviendrez, M. le ministre, que l'article 21, qui exige
l'autorisation préalable du ministre pour la conclusion d'ententes par
des organismes gouvernementaux, ne devait entrer en vigueur que sur
proclamation. A ma connaissance, en tout cas, cet article n'est pas encore
entré en vigueur. Il n'a pas fait l'objet d'une proclamation.
M. Levesque: J'en ai parlé dans mon exposé
d'ouverture.
M. Morin: Pour dire?
M. Levesque: Les raisons pour lesquelles on ne l'avait pas, parce
que les consultations n'étaient pas terminées, et nous avions
particulièrement demandé aux ministères de l'Education et
des Affaires municipales d'entrer en contact avec les organismes qui sont dans
leurs réseaux respectifs, afin de nous bien conseiller, avant que nous
proclamions cet article,sur une réglementation à promulguer,
parce que si on proclamait, présentement, l'article 21, tel quel,
à ce moment-ci, sans une réglementation antérieure, on
bloquerait peut-être des choses très valables, pas une bourse ne
pourrait être donnée à un chercheur, par exemple. Autrement
dit, nous ne voulons pas, aveuglément, proclamer l'article 21, pour
exclure certains types d'activités, que nous ne voulons pas geler ou
retarder, et où nous n'avons pas d'intérêt à
intervenir. C'est cela qu'il faut évaluer.
M. Morin: Est-ce que l'Education et l'autre ministère que
vous avez mentionné...
M. Levesque: Les Affaires municipales.
M. Morin: ... les Affaires municipales sont les deux seuls
qui...
M. Levesque: Qui sont les seuls?
M. Morin: Je me demande si ce sont les seuls qui n'aient pas
encore donné de réponse à votre démarche.
M. Levesque: Ce sont les deux qui nous intéressent plus
particulièrement, parce que c'est dans ces réseaux que se
trouvent les situations plus particulières.
M. Morin: Le plus d'ententes. M. Levesque: Oui.
M. Morin: Est-ce qu'il y a d'autres ministères avec
lesquels vous avez maintenant réglé ces questions?
M. Levesque: II n'y a pas d'autre... peut-être les affaires
culturelles; il y a un réseau d'institutions culturelles qui pourrait
être affecté. Avec eux, c'est réglé.
M. Morin: Autrement dit...
M. Levesque: C'est-à-dire, dans le projet, la
préparation d'une réglementation, mais la réglementation
n'est pas encore à point. Lorsqu'elle le sera, nous verrons à ce
qu'elle soit passée pour, ensuite, proclamer l'article 21.
M. Morin: Et cette réglementation pourrait être
préparée au cours de l'année qui vient.
M. Levesque: Oui, je l'ai dit au début de mes remarques
hier matin. Nous croyons qu'au cours de cette année, prochainement, nous
pourrons proclamer l'article 21.
M. Morin: Bien. L'article 22 qui vous permet d'exclure certaines
catégories d'ententes de l'approbation préalable du ministre. Y
a-t-il eu des exclusions acceptées par le gouvernement?
M. Levesque: Pas encore.
M. Morin: Cet article est donc demeuré lettre morte pour
l'instant.
M. Levesque: C'est-à-dire que nous n'avons pas eu à
exclure de l'application de la loi certaines catégories d'ententes
alors...
M. Morin: Et si cela devait être fait...
M. Levesque: ... cela n'est pas resté lettre morte, on n'a
rien mis de mort.
M. Morin: Je veux dire que vous n'avez pas eu à appliquer
cet article et que, sans doute...
M. Levesque: Pas encore.
M. Morin: ... s'il est appliqué, ce sera défini
dans la même réglementation qui porte sur l'article 21.
M. Levesque: En regard de l'article 21.
M. Morin: Bien. Pour ce qui est des articles 17, 18 et 19 de la
loi, le ministre pourrait-il me dire quelles sont les ententes qui ont
été signées par lui en vertu de ces articles?
M. Levesque: Je dois vous dire, M. le Président, que
depuis que cette loi nous a été accordée par le Parlement,
à notre demande, j'ai été surpris du nombre d'ententes qui
doivent être signées ou contresignés par le ministre des
Affaires intergouvemementales.
M. Morin: C'est la liste...
M. Levesque: Non, il y en a beaucoup d'autres. La liste qui est
là s'arrête au 31 mars 1975, il y en a quelques-unes là,
mais depuis le 31 mars 1975, on voit que l'effet de la loi a eu une sorte de
"momemtum" et j'ai l'impression qu'il y a constamment une entente à
signer. Avant de la signer, il faut normalement avoir une opinion et une
recommandation de la part du ministère. Y a-t-il quelque chose...?
M. Morin: Oui. On me prévient que nous avions caucus
à midi, je croyais que c'était à midi et demi.
M. Levesque: D'accord.
M. Morin: Peut-être qu'avec votre permission, je vais
devoir quitter, nous reprendrons à votre convenance.
M. Levesque: Nous n'avons jamais d'objection à ce que
votre parti puisse se réunir pour être mieux
éclairé.
M. Morin: Merci de cette condescendance, M. le ministre.
Le Président (M. Gratton): Puis-je demander à la
commission si les programmes 1, 2 et 4 sont adoptés?
M. Morin: Non, je préférerais...
Le Président (M. Gratton): Je connaissais
déjà la réponse.
M. Morin: Cela va aller très vite. Une fois que nous
aurons fait le tour des dossiers, cela ira très vite, comme d'habitude.
Je peux en assurer le ministre. Il a vu d'ailleurs que même si nous
demandons pas mal de détails, nous ne tentons pas de faire perdre une
minute à la commission. Ce n'est pas du tout notre but. Il s'agit de
tirer l'information nécessaire.
M. Levesque: D'accord.
Le Président (M. Gratton): La commission ajourne ses
travaux sine die.
(Fin de la séance à 12 h 5)