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Version finale

30th Legislature, 3rd Session
(March 18, 1975 au December 19, 1975)

Thursday, May 29, 1975 - Vol. 16 N° 117

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude des crédits du ministère des Affaires intergouvernementales


Journal des débats

 

Commission permanente de la présidence du conseil,

de la constitution et des affaires intergouvernementales

Etude des crédits du ministère des Affaires intergouvernementales

Séance du jeudi 29 mai 1975

(Dix heures vingt minutes)

M. Gratton (président de la commission permanente de la présidence du conseil, de la constitution et des affaires intergouvernementales): A l'ordre, messieurs!

La commission de la présidence du conseil, de la constitution et des affaires intergouvernementales continue ce matin l'étude des crédits du ministère des Affaires intergouvernementales.

Les changements chez les membres de la commission: M. Parent remplace M. Bourassa et M. Cornellier remplace M. Malouin.

L'honorable ministre des Affaires intergouvernementales.

Relations intergouvernementales (suite)

M. Levesque: M. le Président, je voudrais simplement apporter une correction à une information que j'avais donnée hier, je crois, à une question du chef de l'Opposition. J'avais, à ce moment, donné une liste d'ententes qui avaient été conclues au cours de l'exercice financier 1974/75 et on m'informe qu'il manquait une page d'ententes que je vais remettre à l'instant au chef de l'Opposition pour compléter son dossier.

Il s'agit, en agriculture, de l'entente Québec-Canada sur l'assurance-récolte, l'accord Canada-Québec dans le domaine de l'eau, l'accord Canada-Québec sur les relevés hydrométriques; dans la pêche maritime, écueillage mécanique des pétoncles d'Islande, relevé des bancs de myes de la basse Côte-Nord, culture artificielle des moules et mollusques, entraînement des pêcheurs de la basse Côte-Nord, pêche de prospection des coquillages et crustacés, biologie et prospection du caplan dans le moyen et le bas estuaire du Saint-Laurent, biologie, prospection et transformation des oursins, mise au point d'un plan type pour bateaux de 35 à 45 pieds.

Dans le domaine des transports, projet d'entente entre les commissions scolaires dans la région de Mirabel et le fédéral, représenté par le ministre des Transports, concernant les subventions tenant lieu de taxes dans le territoire exproprié de Mirabel, entente relative aux taxes municipales sur le territoire exproprié aux fins d'aménager le nouvel aéroport international de Montréal. Et, dans le domaine de l'habitation, entente concernant l'acquisition et l'aménagement de terrains, , entente concernant le logement public et les projets d'habitation pour étudiants, entente concernant les projets d'habitation à bas loyer, soit foyers pour personnes âgées, centres d'accueil pour l'enfance inadaptée, entente concernant l'amélioration des quartiers et le dégagement de terrains.

Il s'agit d'ententes qui s'ajoutent à la liste déjà fournie hier.

M. Morin: M. le Président, je remercie le ministre d'avoir complété la liste des ententes. J'en profiterais pour lui poser une question là-dessus. Est-ce qu'il voudrait convenir qu'à l'avenir, lorsqu'une entente importante est signée avec le pouvoir fédéral, il la déposerait en Chambre, tout simplement comme un dépôt de document, et que, pour les ententes de moindre importance — il en est quelques-unes au travers — il pourrait s'engager à les déposer, peut-être au début et à la fin des sessions, comme ça se fait ailleurs, par exemple à Ottawa, en liasse, en vrac, pour que l'Opposition puisse éventuellement demander copie des ententes qui pourraient l'intéresser, sur lesquelles elle aurait des questions à poser au ministre?

Cela se fait ailleurs. Ces ententes sont d'intérêt public. Je crois que ce n'est pas assez fréquent d'en voir déposer la liste une fois par année aux crédits.

Si le ministre veut en convenir et s'engager à le faire, de notre point de vue, ce serait un très grand progrès par rapport à la situation actuelle.

M. Levesque: Je conviens de l'intérêt que peut susciter chez le chef de l'Opposition le dépôt de telles ententes. Je tiens à lui rappeler cependant que la loi organique du ministère ne m'oblige pas à le faire.

M. Morin: J'en suis conscient.

M. Levesque: Et je tiendrai simplement à ajouter ce matin que je vais étudier la proposition du chef de l'Opposition, qui est faite à brûle-pourpoint, et je verrai quelles sont les possibilités de répondre, d'une façon ou de l'autre, à la suggestion de l'honorable chef de l'Opposition.

M. Morin: Le ministre aura noté, M. le Président, que j'ai tenté de faire une proposition qui ne le gêne pas administrativement, qui est raisonnable. Autrement dit, il ne s'agit pas de les déposer toutes au fur et à mesure, je me rends compte que cela pourrait être administrativement assez compliqué.

Mais en vrac, de temps à autre, au début et à la fin des sessions, ou encore, s'il s'agit d'une entente importante, nous aimerions qu'elle soit déposée en Chambre au moment où vous la rendez publique, au moment où vous la communiquez aux journaux.

M. Levesque: II faut dire que, dans plusieurs cas, où cela prend une importance particulière, il y a dépôt à la demande de l'Opposition ou simplement par l'initiative du ministre sectoriel, mais je vais étudier la proposition du chef de l'Opposition dans son ensemble. Puis-je suggérer que nous revenions maintenant aux questions de la capitale canadienne?

M. Morin: Oui, nous en convenons, M. le Président. Je voudrais continuer à entretenir le minis-

tre d'Etat des achats de terrains par le gouvernement fédéral, notamment dans l'Outaouais.

Je vais commencer par lui lire un extrait du rapport de la Commission de la capitale dite nationale, de 1973: "L'une des façons de s'assurer que nos plans soient mis à exécution est de posséder une partie suffisante des terrains pour lesquels vous avez dressé des plans. C'est la politique fondamentale sous-jacente à la politique d'acquisition de terrains de la Commission de la capitale nationale."

Et plus loin: "Nos terrains sont situés en des endroits très stratégiques et peu de routes peuvent être construites ou de commodités aménagées sans passer sur le territoire de la CCN", peut-on lire dans le rapport annuel de cet organisme.

Il semble bien que nous soyons devant une politique fédérale concertée d'achat systématique de terrains situés au Québec, où l'on évite de procéder par voie d'expropriation, à cause des difficultés que cela peut soulever auprès de la population, que cela pourrait peut-être soulever même auprès du gouvernement du Québec, étant donné que l'opinion publique est sensible à ce genre de procédé.

Il semble bien qu'au lieu de procéder par expropriation, on procède par achat, de gré à gré. J'ai lieu de croire que le ministre d'Etat qui est responsable de cette région, pour les fins des Affaires intergouvemementales, n'est informé de la chose qu'à peu près en même temps que tout le monde, par la voie des journaux. Ma question n'est pas de lui demander comment il l'apprend. Ma question est pour savoir si le ministre est conscient du fait que la CCN a une politique systématique d'acquisition, pour en arriver au contrôle du territoire?

Ni. Parent (Hull): M. le Président, je pense que le chef de l'Opposition veut sûrement prêter des intentions à la Commission de la capitale nationale. J'ai dit l'autre jour, à cette commission, que nous avions déjà sur pied, depuis 1970, un comité intergouvernemental qui se préoccupait de l'aménagement du territoire. J'ai bien souligné que le gouvernement fédéral avait cessé toute expropriation du côté québécois et qu'au moment où il y avait des propriétés à être acquises, la demande était faite au gouvernement. Contrairement à ce que dit le chef de i'Opposition, nous ne sommes pas informés après, ou nous ne prenons pas connaissance par la voie des journaux de l'acquisition des terres, nous en sommes informés au préalable.

L'acquisition de terrains par ie gouvernement fédéral n'est toutefois pas une question facile. C'est pourquoi la mise sur pied de notre comité intergouvernemental nous a permis de réaliser un programme auquel le gouvernement fédéral a donné son accord. Il n'est pas question non plus que nous soyons obligés de recourir au gouvernement fédéral quand il s'agit de construite des routes ou d'acheter des équipements dans la région de l'Outaouais. Depuis 1970 déjà, des ententes existent à cet effet et elles ont été respectées, le gouvernement ayant consenti à ce que les ter- rains où nous devons construire des routes soient transférés au gouvernement du Québec pour la somme nominale de $1.

C'est donc dire que, malgré qu'il y ait certaines difficultés dans les projets d'aménagement, il n'en demeure pas moins que nous sommes à la table de discussion continuellement, que nous avons des comités permanents qui sont à étudier chacun des problèmes en particulier pour la conclusion d'accords et également, en ce qui concerne l'aménagement, que nous sommes le maître-d'oeuvre.

Pour autant, le gouvernement fédéral a sûrement des terrains qui lui appartiennent, ce qui, à l'occasion, peut rendre difficile pour le Québec de vouloir entreprendre et réaliser des programmes sans consultation avec le gouvernement fédéral.

Il en est ainsi pour le territoire du côté onta-rien. Cela a fait l'objet de nos rencontres il y a deux semaines et demie, où j'étais accompagné à Toronto du sous-ministre adjoint pour discuter avec M. Darcy McHeough du même problème et du même phénomène qui se produit du côté onta-rien.

Nous avons convenu depuis 1970 quantité d'ententes avec le gouvernement fédéral pour doter la région québécoise des infrastructures qui lui étaient nécessaires. Jusqu'ici, le gouvernement fédéral a été respectueux de la position du Québec. Je peux dire que, peut-être, à certaines occasions, cela a été difficile, mais notre point de vue a prévalu et nous a permis de réaliser que nous pouvions aller de l'avant par le moyen de la négociation.

M ne faudrait pas non plus sous-estimer les pouvoirs que nous avons donnés à un organisme comme la communauté régionale, c'est-à-dire le pouvoir de réaliser un plan d'aménagement du territoire de la capitale nationale en sol québécois avec une date limite pour compléter le mandat et dans lequel le gouvernement du Québec est impliqué avec la communauté régionale pour l'aménagement du. territoire.

Parallèlement, les fonctionnaires qui sont sous ma responsabilité, siègent avec ceux du gouvernement fédéral pour faire accepter notre programmation. Jusqu'ici, malgré qu'à certaines occasions, comme je l'ai souligné, nous ayons eu certaines difficultés à faire approuver notre point de vue, nous avons réussi quand même à le faire approuver et à aller de l'avant avec les projets.

Je pense que le chef de l'Opposition devrait se rappeler également, comme je l'ai mentionné l'autre jour, le fait qu'il y a déjà eu un jugement Monroe de la cour Suprême en 1966, donnant au gouvernement fédéral, à la Commission de la capitale nationale, !es pouvoirs d'expropriation à l'intérieur du territoire de la capitale nationale pour les fins des objectifs de la Loi de la capitale nationale votée par le gouvernement fédéral.

C'est à compter de là, je pense, qu'il faut se rappeler et convenir de la nécessité pour le Québec d'être vigilant, de savoir exactement ce qu'il veut faire de son territoire et d'obtenir le concours de la Commission de la capitale nationale pour réaliser ses objectifs.

J'admets volontiers avec le chef de l'Opposition que c'est beaucoup plus difficile quand il y a à travailler avec un autre gouvernement. Ce n'est pas une sinécure que nous avons à assumer comme responsabilité quand il s'agit d'un territoire où deux autorités convergent. Mais, pour autant, je pense qu'on doit remarquer que le gouvernement du Québec a pris les initiatives et jusqu'ici, nous n'avons pas, je pense, eu d'accrochage qui nous permette de croire en la mauvaise foi de la Commission de la capitale nationale, même si elle est propriétaire de grandes étendues de terres.

Nous avons convenu d'une politique à suivre sur l'acquisition des terres par le gouvernement fédéral; cette politique a été suivie jusqu'ici et n'a pas été à rencontre des projets que le gouvernement du Québec a mis de l'avant.

M. Morin: M. le Président, je ne sais pas si le ministre a écouté ma question. Je ne lui parlais pas d'expropriation. Le gouvernement fédéral, de toute façon, on le verra tout à l'heure, lorsqu'il veut procéder par voie d'expropriation, aujourd'hui, demande souvent au gouvernement du Québec d'exproprier pour lui. On va en reparler, c'est une autre combine assez sensationnelle.

Mais là, je ne vous parle pas d'expropriation. Je vous parle d'achat de gré à gré. Je vais vous relire le texte, car vous étiez en conversation avec le sous-ministre tout à l'heure au moment où je l'ai lu. Je vous cite le rapport de la CCN de 1973. "L'une des façons de s'assurer que nos plans soient mis à exécution" — il s'agit des plans de la CCN — "est de posséder une partie suffisante des terrains pour lesquels vous avez dressé des plans. C'est la politique fondamentale sous-jacente à la politique d'acquisition de terrains de la Commission de la capitale nationale." Plus loin, je répète, "nos terrains sont situés en des endroits très stratégiques et peu de routes peuvent être construites ou de commodités aménagées sans passer sur le territoire de la CCN."

Ce que je demande au ministre, c'est s'il est conscient que la CCN, par une politique d'achat de gré à gré, est en train, en fait, d'organiser le contrôle complet de la région de l'Outaouais et sans doute d'autres régions, mais c'est surtout de celle-là que je veux entretenir le ministre. J'ai devant moi une carte qui montre l'étendue des acquisitions fédérales autour de Hull en 1967. On peut constater, quand on regarde cette carte — le ministre la connaît peut-être — que le territoire de la ville de Hull est complètement circonscrit par des bandes de terrain, quelquefois très ténues, mais qui ont visiblement pour but de dessiner une sorte de cadre autour de la partie hulloise de la capitale dite nationale, c'est à cela que je fais allusion, non pas par voie d'expropriation, mais par voie d'achat de gré à gré. Voici donc ma première question. Est-ce que le ministre est conscient de cette politique fédérale d'achat systématique pour contrôler, de cette politique d'achat stratégique, comme le dit bien le texte que j'ai cité à l'instant: "Nos terrains sont situés en des endroits très stratégiques." Je me demande simplement si le ministre est conscient de cela, s'il a une politique pour contrer cette politique d'achat de gré à gré.

Deuxièmement, je sais que, dans le cas des expropriations, le gouvernement québécois doit être informé des procédures avant que le gouvernement fédéral ne procède. Mais, dans le cas des achats de gré à gré, y a-t-il, de la part du gouvernement fédéral, la moindre obligation juridique d'informer le gouvernement québécois de ses achats?

M. Parent (Hull): M. le Président, je pense qu'il faut bien comprendre une chose. Le chef de l'Opposition veut bien passer à côté des questions comme telles, mais, qu'il s'agisse d'acquisition de gré à gré...

M. Morin: Vous passez à côté de mes questions, jusqu'ici.

M. Parent (Hull): ... qu'il s'agisse d'acquisition de propriétés de gré à gré par le gouvernement fédéral, que le chef de l'Opposition parle d'acquisitions massives faites en 1967...

M. Morin: Avant et depuis.

M. Parent (Hull): ... avant, antérieurement également, soit, depuis 1967, de 1967 à 1970, il y a eu des achats massifs, j'en conviens, et je pense que le chef de l'Opposition n'a qu'à se rappeler ce que je lui ai dit au sujet du jugement Monroe, en 1966, par la cour Suprême du Canada, donnant les pouvoirs au gouvernement fédéral. Que restait-il au gouvernement du Québec? Même si nous n'étions pas au pouvoir à ce moment, que restait-il au gouvernement du Québec pour faire respecter ses priorités d'aménagement, si ce n'est que par le moyen prioritaire de faire respecter notre concept d'aménagement? Qu'il y ait eu des acquisitions massives, de 1967 à 1970, soit, mais depuis, je l'ai dit au chef de l'Opposition, les acquisitions qui se font présentement, soit par l'entremise du gouvernement du Québec, soit par des achats de gré à gré, se font dans le contexte prioritaire pour le Québec de l'aménagement de son territoire. Et, jusqu'ici, c'est ce que j'ai mentionné tout à l'heure, nous n'avons pas eu d'obstruction de la part du gouvernement fédéral au respect des priorités du Québec.

Mais si on part du jugement Monroe, tant pour l'Ontario que pour le Québec, quel moyen nous reste-t-il, si ce n'est les ententes, pour faire respecter nos vues, nos programmes et notre conception de l'aménagement, du côté québécois comme du côté ontarien? C'est par la voie d'ententes qu'il faut réaliser ces choses. Il ne s'agit pas de se bander les deux yeux, de créer un écran de fumée et de croire que, parce qu'il y a eu un jugement Monroe en 1966, qui donne la juridiction au gouververnement fédéral, celui-ci est en train d'envahir le Québec. Il dit, dans un rapport de 1973, que son moyen à lui d'arriver à la conception d'un aménagement du territoire, c'est par l'acquisition massive de terrains situés en zone périphérique, pour permettre, comme on le dit dans le rapport, de pourvoir à ce que le réseau routier soit construit selon le gré du gouvernement fédéral, mais tel n'est pas le cas.

Nous avons réalisé le 7 janvier 1972, par la signature d'une entente sur le réseau routier, une entente avec le gouvernement fédéral, avec une participation financière à 50%.

Le gouvernement fédéral, en plus, s'y engageait à donner au gouvernement du Québec les terrains sur lesquels le réseau routier serait construit pour la somme nominale de $1 et nous cédait le droit de propriété, non pas un transfert de gestion mais un droit de propriété sur le fonds de terre.

La négociation a été longue, elle a duré 18 mois pour le réseau routier. Mais j'ai dit au chef de l'Opposition, malgré ce qu'il peut prétendre, que l'invasion du gouvernement fédéral ne me fait pas peur dans ma politique, dans ma conception du fédéralisme. Contrairement à celle du chef de l'Opposition, elle a valu au Québec que son réseau routier, qui est actuellement en voie de construction, se réalise selon les voeux et les désirs du gouvernement du Québec et également selon les voeux et les désirs des municipalités concernées.

Mais qu'on pense que le gouvernement du Québec peut agir autrement, face à un jugement de la cour Suprême en 1966, je pense, à ce moment, que c'est rêver. S'il y a d'autres moyens qui peuvent permettre au Québec de faire valoir ses priorités, de faire valoir sa conception de l'aménagement, de faire respecter ses vues, c'est par la voie des négociations, par la voie d'ententes à être signées, c'est ce que nous avons réalisé jusqu'ici et c'est ce que nous continuons à préconiser. Nous sommes à la table de négociation d'une façon permanente pour faire valoir notre point de vue. Les programmes réalisés actuellement, depuis 1970 — je puis l'assurer au chef de l'Opposition — les acquisitions qui ont été faites de gré à gré par le fédéral ou quand le gouvernement provincial s'est prêté à l'acquisition de terrains pour ensuite en faire la remise au gouvernement fédéral, tout cela a été fait dans la conception du gouvernement du Québec en regard de l'aménagement de son territoire et de sa juridiction, si minime puisse-t-elle être, mais par la voie d'ententes que nous avons réalisées.

M. Morin: M. le Président, sur les moyens dont dispose le gouvernement du Québec pour contrer le contrôle fédéral, la commission Dorion a donné son opinion et nous y reviendrons tout à l'heure. Le ministre dispose de moyens, en réalité. Il préfère, évidemment, la voie des négociations, mais j'ai bien compris la stratégie fédérale. Une fois que le gouvernement d'Ottawa a mis la main sur des bandes de terrains qui sont disposées de manière qu'on ne puisse accéder à Hull sans passer par ces terrains, je lui signale la chose pour le cas où il ne le saurait pas, il est impossible, aujourd'hui, d'accéder à Hull, de quelque côté que ce soit, sans passer par les terrains fédéraux. Il y a une circon-vallation complète de Hull. M. le Président, je m'excuse du terme. On pourra se voir et je vous expliquerai.

Le Président (M. Gratton): J'aurai appris quelque chose...

M. Morin: M. le Président, ce qui m'inquiète, c'est qu'après avoir acheté des terrains en des endroits stratégiques le pouvoir fédéral soit justement en mesure de forcer le Québec à s'asseoir à la table des négociations, à en passer par les fourches caudines fédérales, à en passer par les désiderata fédéraux. Et, ceci m'amène à répéter ma question. Est-ce que le ministre est conscient du fait qu'il y a une politique d'achat stratégique de la part du gouvernement fédéral? Est-il au moins conscient de cela?

M. Parent (Hull): M. le Président, je suis plus que conscient. Je participe d'une façon régulière aux discussions. Il ne se passe pas deux jours sans que j'aie moi-même l'occasion d'intervenir dans les débats, dans les négociations qui sont en cours, de communiquer avec nos partenaires du côté québécois, soit les municipalités, la communauté régionale, la société d'aménagement, la commission de transport, pour m'assurer que notre point de vue est bien respecté. S'il y a accrochage en quelque lieu que ce soit, j'en suis informé immédiatement, pour y intervenir et faire valoir le point de vue du Québec.

Que le chef de l'Opposition prétende que tous les accès, à l'intérieur du territoire de la capitale nationale, sont contrôlés par la Commission de la capitale nationale, je pense que c'est faux. Il n'a qu'à se rendre compte des ententes que nous avons signées pour constater que les accès sont maintenant la propriété du gouvernement québécois, par suite des accords que nous avons négociés.

Qu'il y ait encore des terrains d'une grande étendue qui sont la propriété du gouvernement fédéral, nous avons circoncis le malaise depuis cinq ans — je l'ai souligné au chef de l'Opposition — en prenant part aux discussions nous-mêmes, en faisant valoir nos priorités, en établissant notre plan d'aménagement, en faisant valoir nos programmes et leur réalisation, ce que nous sommes à compléter actuellement.

Que le chef de l'Opposition veuille passer sous silence le droit qu'a l'autorité fédérale d'exproprier, d'acheter de gré à gré, c'est son affaire. Qu'il soit appelé à traiter avec le gouvernement fédéral, j'en conviens, il aurait énormément de difficulté avec les vues qu'il a sur le fédéralisme. En ce qui nous concerne, nos vues sont déjà établies, le gouvernement du Québec a déjà pris position sur le fédéralisme. Nous vivons à l'intérieur de ce contexte constitutionnel. La façon pour nous d'arriver à nos objectifs, c'est d'être à la table de négociations et, que le chef de l'Opposition aime cela ou n'aime pas cela, il reste une chose, la cour Suprême s'est prononcée, et à partir de là, il fallait pour le gouvernement du Québec tirer les meilleurs avantages qui pouvaient résulter d'un tel jugement.

Que la commission Dorion ait prévu des moyens de résoudre le problème de l'acquisition des terrains par le fédéral, soit que le gouvernement du Québec s'en porte acquéreur, je peux dire au chef de l'Opposition que nous avons retenu quelque peu ses recommandations. Le gou-

vernement, soit lui-même, soit par ses organismes, se porte également acquéreur d'emplacements stratégiques pour lui permettre à lui aussi des interventions et d'être sur le même pied au moment des négociations qu'il a à faire avec le gouvernement fédéral. Je ne vois pas comment le chef de l'Opposition peut passer outre au jugement Monroe, peut passer outre également à la nécessité de négocier. Pour nous, ce n'est pas s'agenouiller devant le gouvernement fédéral, c'est simplement la logique qui nous le commande, nous sommes conscients que nous avons des responsabilités, nous voulons les exercer. Le seul moyen que nous avions, c'était la négociation, pour en arriver à la signature d'ententes pour réaliser nos objectifs, c'est ce que nous faisons.

M. Morin: M. le Président, je ne doute pas que le ministre s'emploie activement à "circoncire" le ' mal, comme il dit si bien, mais je crois que la première condition, pour bien "circoncire", c'est de connaître la stratégie du vis-à-vis, pour ne pas dire de l'adversaire dans cette affaire.

M. Parent (Hull): Pour vous, c'est un adversaire.

M. Morin: C'est pour cela que j'ai employé le mot "vis-à-vis", pour que vous soyez bien à l'aise de me répondre. Pour vous, c'est un simple vis-à-vis. Il est toujours bon de connaître les intentions et les arrière-pensées de celui avec qui on négocie. Vous êtes appelés effectivement à négocier tous les jours avec ces gens. Je vous demandais, c'était une question finalement pas tellement compliquée, si vous aviez pris connaissance de cette stratégie telle qu'elle est décrite dans le rapport de la CCN en 1973, stratégie qui fait que la CCN a une politique d'achat stratégique de façon qu'on ne puisse accéder à Hull sans passer par ces terrains et de façon qu'on ne puisse, par exemple, développer le réseau routier, sans passer par ces terrains.

Je ne vous demande pas de me dire si vous avez négocié. Je suis convaincu que vous avez négocié. Bien sûr, je le sais. Je vous demande si vous êtes conscient de cette stratégie fédérale.

M. Parent (Hull): Nous sommes conscients, tellement conscients que c'est notre raison d'être, d'être à la table continuellement et d'avoir formé une table de négociation permanente, justement parce que nous étions conscients de ce phénomène, justement parce que nous sommes conscients des responsabilités que nous avons assumées et justement parce que nous sommes logiques envers nous-mêmes et savons que la seule façon de résoudre nos problèmes, c'était par une table permanente de négociation. C'est la raison d'être de cette table permanente de négociation, justement pour que nous puissions à l'intérieur du cadre juridique et de la logique, en arriver à réaliser nos propres objectifs. C'est ce que j'ai dit tout à l'heure. Malgré certaines difficultés que nous avons eues à notre table de négociation, nous en sommes arrivés quand même jusqu'ici à faire respecter nos programmes, nos vues et nos objectifs, sans pour autant être frustrés de la part de ce que le chef de l'Opposition peut prétendre, l'adversaire qui est vis-à-vis de nous.

C'est ce que nous avons fait. Le gouvernement du Québec a pris position sur la question de la capitale nationale. J'ai répété, et le premier ministre l'a répété à plusieurs reprises, le gouvernement du Québec s'oppose à la formation d'un territoire de la capitale nationale juridique, tout autant que le gouvernement de l'Ontario s'oppose à ce qu'il y ait un territoire juridique de la capitale nationale. Le chef de l'Opposition sait fort bien que, s'il fallait former une capitale nationale juridique, cela prendrait nécessairement une loi de la Législature du Québec et une loi de la Législature de l'Ontario pour céder ces territoires. Il n'y en a pas parce que le gouvernement du Québec s'oppose à ce qu'il y ait un territoire de la capitale nationale juridique. Nous voulons conserver nos droits.

M. Morin: C'est pour cela que le fédéral achète, parce qu'il sait très bien qu'il sera difficile de créer une capitale juridique, un territoire juridique. Alors, il achète systématiquement. Il achète stratégiquement. Ce n'est pas vous qui le circonscrivez, C'est lui qui est en train de vous "circoncire".

M. Parent (Hull): "Circoncire", il y a déjà longtemps de cela, mais circonscrire, c'est une autre affaire. Je pense qu'il faut se rendre compte de l'évidence, que les achats de gré à gré et les expropriations massives ont disparu pour faire place à un concept d'aménagement, que le Québec y travaille actuellement ardument avec tous les ministères concernés, afin de donner aux organismes en place les mécanismes pour leur permettre de réaliser les objectifs du gouvernement du Québec. Nous sommes conscients que nous éprouvons des difficultés à la mise en oeuvre de nos projets. Nous sommes vraiment conscients de cette situation. Pour autant, nous ne sommes pas découragés, nous sommes optimistes, parce que les résultats obtenus jusqu'ici, démontrent que la force de la table de négociation a prévalu et à valu que nous puissions aller de l'avant, que nous puissions convenir avec le gouvernement fédéral de cesser tous les achats de gré à gré, tant et aussi longtemps qu'ils ne feront pas partie du concept d'aménagement du territoire, que le Québec a voulu se donner par lui-même et par ses organismes. C'est là, à ce moment, que nous sommes à "circoncire", si on peut appeler cela ainsi ce mal de l'acquisition de territoires qui, même si nous nous opposons à un territoire juridique, pourrait, par une acquisition massive de territoire, être dans les faits un territoire de la capitale nationale juridique.

Nous sommes intervenus, le gouvernement a été très vigilant depuis 1970 dans ce domaine, pour permettre de remédier à une situation qui aurait pu devenir catastrophique. Nous n'avions pas les instruments pour nous permettre d'imposer nos vues. Nous n'avions même pas, dans la région de l'Outaouais, jusqu'en 1970, de plan directeur de

développement d'aucune des municipalités. Il n'y avait pas de schéma d'aménagement de l'organisme régional, même si la responsabilité lui était confiée et qu'il devait, au 31 décembre 1971, présenter un schéma d'aménagement du territoire, rien n'avait été fait. C'était la même chose pour les limites territoriales. Nous avions nous-mêmes d'abord à établir une politique qui permettait d'avoir une structure régionale pour pouvoir, en premier lieu, aller envisager l'aménagement du territoire d'une façon cohérente et positive. Il fallait d'abord, si on le veut, en termes clairs, mettre de l'ordre dans nos propres institutions municipales pour nous permettre d'aller négocier, parce qu'on se rappellera qu'en 1970, au moment où j'ai pris ce dossier, le gouvernement fédéral allait négocier avec les 32 municipalités individuellement. L'une était contre l'autre. Si on a imposé ce fardeau, si on veut, par la présence d'un représentant du gouvernement pour s'occuper du dossier, mettre de l'ordre dans les structures municipales par une meilleure cohésion, donner des pouvoirs à la communauté régionale, à la société d'aménagement, réaliser un schéma d'aménagement et un programme et des objectifs, cela a été le fait de la présence du Québec qui n'était pas là avant ce temps. Ce fut cette présence qui a valu que l'on puisse faire valoir nos droits, mais faire valoir nos droits d'une façon cohérente sans avoir pour autant de nos propres institutions qui allaient lutter contre nous. C'est le malaise dans lequel nous étions placés en 1970.

M. Morin: La première condition d'une stratégie québécoise efficace, c'est d'être conscient de la stratégie du vis-à-vis, c'est d'être conscient du pouvoir qu'il possède, et le ministre, avec raison, a évoqué la décision, l'arrêt Monroe. Or, je me demande si le ministre est vraiment au fait de la stratégie fédérale et de l'avance qu'elle a prise dans ce domaine. Tout à l'heure, si j'ai bien compris, il a nié que la CCN ou ses prédécesseurs, aient acquis systématiquement une couronne de terrains autour de la ville de Hull, qui, de fait, l'isole du Québec. Je veux dire qu'on ne peut pénétrer dans Hull, venant de l'ouest, de l'est, du nord ou du sud, sans passer par des terrains qui appartiennent au pouvoir fédéral.

M. Parent (Hull): Plus maintenant.

M. Morin: Le ministre me dit: Plus maintenant. Je vais lui demander s'il peut déposer la carte exacte, à jour, des terrains qui sont propriété fédérale à l'heure actuelle, soit à la suite d'expropriation, soit à la suite d'achat de gré à gré. Le ministre a nié une de mes affirmations. Je pense qu'il devrait être en mesure, maintenant, de la documenter, parce que, d'après les renseignements que j'ai, ce sont des cartes fédérales et je suis prêt à mettre le ministre au défi publiquement là-dessus. D'après les cartes que j'ai, il est impossible d'accéder à la ville de Hull sans passer sur du territoire fédéral.

M. Parent (Hull): Je n'ai pas objection à produire la carte, M. le Président, je vais sûrement ob- tenir la carte, parce que nous avons cette carte à jour; elle est préparée par la communauté régionale, qui a la responsabilité complète de l'évaluation sur tout ce territoire; la carte est mise à jour continuellement. Je vais prendre une note et obtenir de la communauté régionale qu'on nous envoie la carte à jour déterminant les propriétés qui appartiennent au fédéral à l'intérieur du territoire de la capitale nationale.

M. Morin: Toutes les propriétés achetées de gré à gré ou expropriées. Le ministre n'a pas vu cette carte récemment?

M. Parent (Hull): Oui.

M. Morin: II a pu se rendre compte qu'effectivement, la boucle est complète autour du territoire hullois. Il n'y a pas à en sortir. Vous ne pouvez pas entrer ou sortir de Hull sans passer par un terrain fédéral.

M. Parent Hull): Je ne suis pas d'accord avec le chef de l'Opposition. Je le lui ai dit tout à l'heure: L'entente que nous avons signée pour le réseau routier a été déposée en Chambre. Les entrées sont maintenant la propriété du gouvernement du Québec; depuis la signature de cette entente, les terrains nous ont été transférés avec l'entente du réseau routier.

M. Morin: Vous voulez dire les routes, vous voulez dire que le ruban routier vous appartient?

M. Parent (Hull): Tout nous appartient. M. Morin: J'ai compris cela. M. Parent (Hull): Oui.

M. Morin: Mais le ruban routier traverse les propriétés fédérales.

M. Parent (Hull): Les propriétés fédérales ont été cédées au gouvernement du Québec par l'entente que j'ai signée le 7 janvier 1972.

M. Morin: Vous voulez dire le ruban routier.

M. Parent (Hull): Tout le ruban routier, les emprises.

M. Morin: D'accord! Je n'en doute pas. Je vous dis que, compte tenu que le ruban routier appartient au Québec, parce que la voirie est une responsabilité québécoise, vous ne pouvez pas passer sur une de ces routes sans être entouré de territoire fédéral, à gauche et à droite. Ceci, tout autour de la capitale, à des distances variant de trente à cinquante milles, peut-être un peu plus, selon les cas. Je vois que le ministre constate que je n'ai pas tort de dire que, de fait, les propriétés fédérales entourent la ville de Hull, exception faite de ce que le fédéral a bien voulu céder au Québec pour faire passer des routes. Mais, autrement, c'est une circonvallation complète. Je serais heureux que le ministre l'admette, au moins, ce serait

déjà quelque chose. Ce serait un élément de stratégie que d'être conscient de cela.

M. Parent (Hull): M. le Président, j'en suis bien conscient, mais jusqu'à admettre la véracité de ce que dit le chef de l'Opposition, je pense qu'il y a une différence assez notable. Qu'il y ait certaines enclaves du côté québécois par des territoires qui appartiennent à la capitale nationale, il y en a.

M. Morin: C'est vous qui êtes enclavé, ce n'est pas la même chose.

M. Parent (Hull): Que l'usage soit fait d'une façon telle que la décision est unilatérale en ce qui concerne l'aménagement, je pense que c'est tout le contraire. J'ai souligné, l'autre jour, que nous venions de réaliser une entente avec le gouvernement fédéral, à la suite de notre programme d'habitation, afin d'obtenir du gouvernement fédéral la cession de bandes de terrain le long de la rivière Outaouais pour faciliter la construction d'une ville de 2,500 âmes qui nous permettra d'utiliser à profit des terrains qui avaient déjà été acquis par le gouvernement fédéral.

Ces terrains servaient de parcs et, à compter des mois prochains, ils vont servir à de l'habitation pour la municipalité de Hull en regard des changements psychologiques et physiques qui ont été réalisés en particulier sur l'île de Hull.

Il est vrai, d'une certaine façon, que le territoire, comme je l'ai souligné l'autre jour, la majeure partie du territoire que possède le gouvernement fédéral, est le parc de la Gatineau qui est d'une superficie de 88,000 acres. C'est un terrain qui est non urbanisé et qui ne nuit en rien à l'épanouissement ou l'aménagement des territoires urbains. C'est un territoire formé de collines et de montagnes, d'une beauté naturelle et qu'il est à l'avantage de la population de posséder à l'intérieur de son territoire municipal et à proximité des équipements qui peuvent permettre à la population de bénéficier de ces aires de verdure.

Pour autant, nous ne sommes pas restreints dans l'aménagement, même si le gouvernement fédéral a accaparé une quantité énorme de terrains. Aujourd'hui, ce sur quoi nous en sommes arrivés à des accords, c'est sur l'usage de ces terrains. C'est là que le chef de l'Opposition pourra, par la suite, faire des reproches au gouvernement, s'il y en a à faire, sur la valeur qu'il y avait pour le gouvernement fédéral de s'en être porté acquéreur, et sur l'usage que le gouvernement du Québec pourra en faire par la suite pour servir sa propre population. Si le gouvernement du Québec s'était préoccupé lui-même, il y a 10, 15 ou 20 ans de ce territoire, nous ne serions pas dans la situation où nous sommes aujourd'hui. Aujourd'hui, le gouvernement du Québec, à cause de sa politique établie, se porte lui-même acquéreur de territoires stratégiques pour lui permettre aussi de participer à des négociations sur un pied d'égalité. Nous avons profité de la Société d'aménagement de l'Outaouais pour lui permettre aussi de se porter acquéreur de vastes étendues de terrains de camping, des terrains de récréation et de marinas. Nous avons conclu des ententes avec le gouvernement fédéral pour utiliser justement ce que le chef de l'Opposition a dit tout à l'heure, un territoire qui était à l'entrée de Hull par la ville de Gatineau. La société d'aménagement, par un bail emphytéotique, a maintenant l'usage de ce territoire qui est le parc Leamy, à l'entrée ouest de la ville de Hull. Nous contrôlons tout le territoire par la Société d'aménagement de l'Outaouais, qui a obtenu les droits de la Commission de la capitale nationale sur un parc qui était déjà aménagé. La société d'aménagement comme telle vient de dépenser dans les dernières années au-delà de $5 millions pour aménager ce parc en faveur de la population de la région immédiate de Hull. La société d'aménagement s'est portée récemment acquéreur de bandes de terrains situés dans des endroits stratégiques comme l'île Kettle, face à l'Ontario, face à la compagnie C!P, justement pour nous permettre, au moment des discussions, au moment des négociations, d'être sur le pied d'éga-iité que nous recherchons par les moyens qui sont à notre disposition, à la suite du jugement Monroe. Il s'agissait de pouvoir aussi, à ce moment, être en mesure de détenir des morceaux qui sont dans des endroits stratégiques pour pouvoir également amorcer un concept d'aménagement qui réponde le plus directement à nos besoins.

M. Morin: Quand le ministre d'Etat pense-t-il pouvoir nous remettre la carte à laquelle j'ai fait allusion, il y a un instant, et qu'il s'est montré disposé à nous fournir? Est-ce qu'il pourrait déposer cette carte ou la faire parvenir à la commission ou à l'Opposition d'ici quelques semaines au maximum?

M. Parent (Hull): Oui.

M. Morin: Bien. C'est un engagement que le ministre prend?

M. Parent (Hull): Oui.

M. Morin: Bien. Si le ministre considère bien cette carte, une fois qu'il l'aura sous les yeux, il va pouvoir évaluer les conséquences que la circon-vallation peut avoir sur le développement du Québec. Je vais lui donner un exemple. Hydro-Québec devait, pour faire passer ses lignes en direction de Hull, passer, pour mettre en oeuvre sa planification régionale, sur plusieurs terrains qui se trouvent à faire partie de cette espèce de circonscription, de circonvallation fédérale autour de Hull.

Je vous donne des faits qui datent de tout récemment, puisqu'ils sont relatés dans le Droit du 26 mars 1975. Il y a donc à peine un mois.

Hydro ne peut faire autrement qu'être obligée de traverser des propriétés fédérales. Elle doit donc obtenir des droits de passage. Devant cette nécessité, le gouvernement du Québec n'a pas le choix. Il doit négocier avec la CCN. C'est cette dernière qui a le gros bout du bâton. D'après nos sources, elle en profite pleinement. On va mesurer les conséquences de cette emprise fédéral sur le territoire hullois.

Pour concéder des droits de passage à Hydro-Québec, la Commission de la capitale nationale demanderait au Québec de lui céder l'administration et le contrôle de terrains sis le long

du ruisseau de la Brasserie, du terrain appartenant à Hydro, dans le quartier Tétreault, ainsi que des terrains que la société québécoise détient le long de la rivière Outaouais.

On voit les effets concrets de cette politique...

M. Parent (Hull): Oui, mais...

M. Morin: Laissez-moi terminer, vous pourrez faire les commentaires que vous voulez.

M. Parent (Hull): Vous êtes parti sur une mauvaise voie. Vous parlez du ruisseau de la Brasserie, alors qu'il n'est pas question du tout du ruisseau de la Brasserie. On s'est trompé d'endroit.

M. Morin: Vous pourrez...

M. Parent (Hull): Ne prenez pas cela pour l'évangile.

M. Morin: Non, c'est bien ce que rapporte le Droit.

M. Parent (Hull): Le quartier Tétreault est situé environ à un mille du ruisseau de la Brasserie.

M. Morin: Oui, on donne la liste. On dit, le quartier Tétreault, le ruisseau de la Brasserie et les autres.

M. Parent (Hull): II n'y a rien dans le ruisseau de la Brasserie, je ne comprends pas cela.

M. Morin: C'est ce que le ministre pourra nous dire tout à l'heure. J'essaie de lui démontrer que la stratégie fédérale est extrêmement habile et qu'elle permet, au moment où le Québec veut poser des gestes de planification, d'organisation ou d'aménagement du territoire, comme c'est le cas pour Hydro-Québec, dans les faits qui sont relatés... Le pouvoir fédéral peut dire: Oui, je veux bien que vous passiez sur mon territoire, à condition que ce soit à tel endroit. Il faudrait que vous vous montriez souple, j'aurais besoin de quelques petits terrains à gauche et à droite, à l'intérieur de Hull ou à tel endroit. Etes-vous prêts, si je vous laisse passer, à me céder telle chose? Est-ce que le ministre est conscient de cette stratégie? De quels instruments dispose-t-il pour lutter contre ce style de gestion de la part des fédéraux? Est-ce qu'il nie tous les faits qui sont relatés dans le Droit du 26 mars 1975?

M. Parent (Hull): Je peux dire une chose, c'est que dans ce qui est écrit, il n'y a pas beaucoup de véracité. Le chef de l'Opposition invoque ou se fie à des reportages, à du ouï-dire, à des rumeurs, à des choses qui pourraient arriver, parce que le gouvernement fédéral possède les terrains sur lesquels Hydro-Québec voulait procéder à l'implantation et à la pose d'une ligne de transmission électrique de 315 kilowatts.

En ce qui concerne Hydro-Québec, il faut dire que c'est à la suite de la signature d'une entente avec l'Ontario, pour permettre à Hydro-Québec de vendre des surplus énergétiques, qu'Hydro-

Québec nous est arrivée avec une demande en nous disant qu'elle avait besoin de territoires pour passer de Saint-Jérôme jusqu'à Hull, en direction est-ouest et, par la suite, en direction nord-sud pour modifier sa sous-station dans le quartier Tétreault.

Il est donc arrivé qu'Hydro-Québec avait entrepris les discussions sans que nous en soyons informés. Au moment où j'ai été informé que des discussions étaient en cours, nous sommes intervenus. Moi-même, j'ai communiqué avec le président d'Hydro-Québec pour lui faire savoir que, même s'il voulait négocier, il était libre de le faire — la loi 59 n'était pas adoptée encore — tout cela nécessiterait un arrêté en conseil sous l'égide du ministre des Richesses naturelles, pour qu'il puisse réaliser un accord avec le gouvernement fédéral. Nous sommes donc intervenus dans ce dossier. Pour nous, il n'y avait pas de fausse solution, il y avait une solution. Hydro-Québec avait déterminé, du lieu de passage de sa ligne électrique de 3I5 kilowatts, passant sur le territoire comme s'il n'y avait rien.

C'est facile de préparer des plans sans se préoccuper, en disant: C'est une vaste étendue de terrain, il n'y a pas d'aménagement là, c'est une forêt, on passe la ligne électrique. Il est vrai que la présence de la Commission de la capitale nationale, par son parc de la Gatineau, pouvait créer des embûches. C'est ce que nous avons réalisé nous-mêmes et nous étions d'accord qu'Hydro-Québec ne pouvait pas passer n'importe où dans ce parc de la Gatineau et détruire la faune et l'environnement, à cause de son besoin de passer une ligne électrique.

Nous avons donc pris le dossier. Nous l'avons conduit à bon port, si bien que nous allons signer l'entente d'ici la fin de juin. Mais, pour autant, Hydro-Québec est d'un an en retard pour fournir l'électricité qu'elle s'était engagée à fournir au gouvernement de l'Ontario. Nous avons fait des réunions, sous l'égide du ministère des Affaires inter-gouvernementales. M. Brière y a été mon principal adjoint dans la négociation. Nous avons convenu, par des études d'écologistes et de spécialistes en environnement, de l'endroit où il fallait passer à l'intérieur du parc. Les discussions n'ont pas été aussi ardues que le chef de l'Opposition peut le prétendre, avec la Commission de la capitale nationale, pour autant que nous respections les recommandations que nous faisaient les écologistes et les spécialistes de l'environnement.

Il est donc intervenu, actuellement, un accord de principe sur l'endroit spécifique où HydroQuébec va construire sa ligne électrique à l'intérieur du parc. Nous allons utiliser environ 65 acres du territoire du parc de la Gatineau, pour l'usage des lignes de transmission électrique. C'est en direction est-ouest. Mais, à compter du moment où vous êtes dans le parc de la Gatineau et qu'il fallait, à ce moment, par une ligne de I20, amener le courant près de la rivière Outaouais, il fallait, à ce moment encore, traverser le parc de la Gatineau en direction nord-sud, pour aller localiser cette ligne dans une sous-station.

La sous-station nouvelle qu'Hydro-Québec veut construire est sur un terrain appartenant au

gouvernement fédéral. La sous-station actuelle est sur un terrain appartenant à Hydro-Québec. Nous avons donc fait des échanges par transfert de gestion sur un nombre égal de superficie d'acres, tant pour les lignes de transmission que pour les terrains à être utilisés à l'avenir par la Commission de la capitale nationale.

Quels sont les terrains pour lesquels nous nous apprêtons à faire le transfert de gestion et d'administration? C'est le long de la rivière Ou-taouais, à partir du coin Deschênes, l'ancienne municipalité, en venant vers l'est, jusqu'à la sous-station du quartier Tétreault, située dans les limites de Hull.

Par le transfert de gestion, le gouvernement du Québec va céder à la Commission de la capitale nationale une étendue de 35 acres, pour permettre au gouvernement fédéral la construction éventuelle, dans le plan d'aménagement, de la promenade des Outaouais, et également l'aménagement de parcs en bordure. C'est pour ces deux seules fins que le transfert de gestion va valoir. Et tant et aussi longtemps que les lignes d'Hydro-Québec passeront sur le territoire de la capitale nationale, le transfert de gestion vaudra.

C'est donc sur un échange — et c'est bien contraire à ce que le chef de l'Opposition a dit, tout à l'heure, en lisant le journal Le Droit, qui n'est pas la vérité même — par souci peut-être d'appartenance à un parti politique, qu'on a voulu mettre en doute les responsabilités que doit assumer le gouvernement dans les négociations qu'il doit mener avec un gouvernement fédéral.

Ce que nous avons fait l'a été dans la logique même. Nous n'avons pas procédé comme HydroQuébec l'a demandé. Nous avons demandé des études écologiques et des études par des spécialistes de l'environnement pour ne pas détruire ce parc qui est d'une grande beauté et qui est un actif pour la population.

Le transfert de gestion ne se fait que sur la base d'acre à acre, pour des fins spécifiques dans chaque cas.

M. Morin: Si j'ai bien compris le ministre, il a cédé la gestion et le contrôle de terrains de nature récréative qui sont situés en bordure de la rivière Outaouais. C'est bien cela?

M. Parent (Hull): Ce n'est pas cédé encore. Nous avons un accord de principe.

M. Morin: Cédant la gestion et le contrôle de ces terrains situés en bordure de la rivière Outaouais qui sont décrits dans les plans de la CCN comme étant "prime recreational land", n'est-ce pas?

M. Parent (Hull): Non, dans le plan de la CCN, on voit la promenade des Outaouais.

M. Morin: C'est cela. C'est dans la catégorie "prime recreational land".

M. Parent (Hull): C'est la promenade des Voyageurs.

M. Morin: Peu importe son nom, je vous dis que, comme catégorie de terrain, c'est "prime recreational land".

M. Parent (Hull): Absolument.

M. Morin: Pour pouvoir passer les lignes de transmission d'Hydro, si j'ai bien compris, en échange, vous cédez la gestion et le contrôle de terrains qui n'ont rien à voir avec l'électricité, mais c'est une cession qui répond aux besoins de planification de la CCN. C'est bien cela? C'est bien cela qui s'est passé?

M. Parent (Hull): Non.

M. Morin: Expliquez-moi exactement ce qui s'est passé.

M. Parent (Hull): Je viens de l'expliquer. J'ai l'impression que le chef de l'Opposition ne veut pas comprendre. Il se fie à son article de journal qui est faux.

M. Morin: Non, je laisse l'article de journal de côté et je m'en tiens à ce que vous venez de dire.

M. Parent (Hull): Vous parlez d'un aspect et vous oubliez l'autre.

M. Morin: Pour faire passer les lignes de transmission d'Hydro, la CCN vous a dit: D'accord, on va vous céder le terrain nécessaire, mais le Québec va nous céder la gestion, et le contrôle de terrains situés en bordure de la rivière Outaouais qui constituent, qui sont dans les catégories du "prime recreational land", vous allez nous céder la gestion et le contrôle de cela. Autrement dit, il y a un échange qui s'est fait, si j'ai bien compris le ministre, mais, les parcelles de terrains échangées n'ont rien à voir l'une avec l'autre. Autrement dit, ce n'est pas pour faire passer les lignes électriques nous céder la gestion et le contrôle de cela. Autrement dit, il y a un échange qui s'est fait, si j'ai bien compris le ministre, mais, les parcelles de terrains échangées n'ont rien à voir l'une avec l'autre. Autrement dit, ce n'est pas pour faire passer les lignes électriques qu'ils ont exigé que vous leur cédiez du "prime recreational land", n'est-ce pas?

M. Parent (Hull): II n'y a pas de cession.

M. Morin: Si j'ai bien compris... Laissons tomber la cession, parce que la gestion et le contrôle, à toutes fins pratiques, c'est la même chose.

M. Parent (Hull): C'est pour des fins spécifiques, il ne faudrait pas l'oublier.

M. Morin: Pour des fins spécifiques, si vous voulez, mais, une fois que c'est transformé pour les fins spécifiques de la CCN, en "prime recreational land", essayez d'en faire autre chose et essayez de dire que cela appartient au Québec et que cela n'a pas été cédé. Cela revient exactement au même.

Quand les Etats-Unis ont voulu étendre leur contrôle sur les fonds marins, ils n'ont pas dit: Ce

sera notre propriété, ce sera sujet à notre souveraineté, ils ont dit: Nous affirmons notre contrôle et notre juridiction sur ces terrains. C'est la même chose. C'est la même façon de procéder des fédéraux. Si le ministre connaissait la "common law", je pense qu'il l'a connaît d'ailleurs, il doit savoir que la gestion et le contrôle, cela a les mêmes effets pratiques que la propriété. Qu'il ne vienne pas nous raconter que Québec n'a pas cédé le terrain, qu'il a seulement transféré la gestion et le contrôle. Cela revient, dans les faits, exactement au même. C'est pour cela que je n'ai pas parlé de cession. J'ai parlé seulement de gestion et de contrôle.

Je pose la question à nouveau au ministre. Dois-je comprendre qu'en vue de faire passer les lignes de transmission hydroélectriques d'Hydro-Québec, le Québec a été amené, par la CCN, à céder des territoires constituant du "prime recreational land", le long de l'Outaouais? C'est bien cela que vous nous avez dit tout à l'heure.

M. Parent (Hull): Je n'ai pas parlé de "prime recreational land".

M. Morin: Non, mais ce sont des catégories fédérales.

M. Parent (Hull): C'est le chef de l'Opposition qui a soulevé cet aspect.

M. Morin:... de soulever.

M. Parent (Hull): Tout ce que je puis lui dire, au chef de l'Opposition, c'est que la promenade des Voyageurs fait partie de notre plan d'aménagement.

M. Morin: Le plan d'aménagement du gouvernement fédéral.

M. Parent (Hull): Non. Au moment où nous avons signé l'entente du réseau routier, le chef de l'Opposition comprendra que le plan préliminaire de promenade qui devait être établi au Québec a été modifié. Le chef de l'Opposition ne voudra peut-être pas l'admettre, mais, au moment où nous avons négocié l'entente de tout le réseau routier, à l'intérieur du territoire de la capitale nationale en sol québécois, nous avons fait modifier les plans des promenades prévues du côté du Québec, pour tenir compte du réseau routier que nous implantions.

Le gouvernement fédéral — c'est tellement vrai ce que je vous dis — s'était porté acquéreur, en 1967, dans le quartier Tétreault, d'immeubles en prévision d'une construction future d'une promenade. Aujourd'hui, une partie de ce terrain va servir à la construction de la nouvelle sous-station d'Hydro-Québec pour alimenter l'Ontario en besoins énergétiques.

M. Morin: Pour alimenter l'Ontario à part ça.

M. Parent (Hull): Or, que le chef de l'Opposition vienne prétendre que cela est fait selon le concept d'aménagement de la CCN, c'est complè- tement faux. C'étaient les premières prémices. Depuis que nous sommes intervenus dans le dossier, les promenades ne sont plus localisées aux mêmes endroits. Ottawa a respecté l'entente que nous avons réalisée au réseau routier pour tenir compte de cet aspect d'infrastructure que nous mettions en place.

Dans l'échange que !e gouvernement provincial fait avec le gouvernement fédéral, nous prenons, si on veut le croire ainsi, un "prime land" pour le Québec pour passer des lignes électriques. Que le chef de l'Opposition le veuille ou non, le territoire du parc de la Gatineau, est un "prime land". Ce que nous donnons en échange pour des fins spécifiques et à des fins spécifiques, c'est l'aménagement de la bordure du lac de la rivière des Outaouais et la promenade des Voyageurs qui va s'y construire tout autant que, par le fédéral, la cession d'un territoire "prime land" pour construire sa sous-station électrique. Quant au terrain qui est cédé, acre pour acre, entre le fédéral et le provincial, il s'agit de la même catégorie de terrain et non pas de catégories bien différentes.

M. Morin: En bordure de l'Outaouais. Ce ne sont pas les mêmes catégories.

M. Parent (Hull): Dans le cadre de l'aménagement du territoire de la ville de Hull, la promenade est une préoccupation de la ville de Hull et du gouvernement du Québec pour desservir la population. L'aménagement de parcs est pour les fins de la population. C'est la raison d'être que nous avons exigée dans cet échange, non pas selon l'entente ou les premières discussions qu'Hy-dro avait faites avec la CCN et où Hydro-Québec vendait ses propriétés au gouvernement fédéral. C'est un transfert de gestion et d'administration qui est fait pour deux fins bien spécifiques, la construction d'une promenade et l'aménagement de parcs dont les plans doivent être approuvés par le gouvernement du Québec.

M. Morin: II n'empêche que cet exemple illustre parfaitement la stratégie fédérale que je décrivais au tout début de notre entretien de ce matin. Acquérir une bordure de terrains ininterrompue autour de Hull, et, par la suite, lorsque le Québec ou l'un de ces organismes a besoin de terrain pour passer, qu'il s'agisse d'une route ou qu'il s'agisse d'une ligne de transmission hydroélectrique, poser des conditions et exiger en retour des cessions de terrains. C'est exactement ce qui s'est produit là.

Vous aurez beau dire que c'est du "prime land" dans les deux cas, je vous ferai remarquer qu'une ligne de transmission qui passe au milieu de la forêt, ce n'est pas la même chose que du "prime recreational area" sur le bord de la rivière Outaouais. Le ministre ne l'a pas nié, et je ne veux pas éterniser l'entretien, mais il est bien évident qu'il a cédé la gestion et le contrôle de terrains ayant une très grande valeur au bord de la rivière pour les fins de la CCN contre le passage de lignes en pleine forêt. C'est bien clair, c'est cela qui s'est passé. Je ne dis pas que...

M. Parent (Hull): M. le Président, c'est

complètement faux. Ce n'est pas en forêt qu'on passe la ligne électrique, c'est en pleine ville. Le chef de l'Opposition aurait avantage à aller le visiter, ce...

M. Morin: Alors, c'est...

M. Parent (Hull): ... parc de la Gatineau. La ligne électrique passe en plein milieu du parc où l'accessibilité pour les citoyens... Les citoyens vont être privés à l'avenir de se servir de ce territoire. On vient en direction nord-sud passer exactement le long de la promenade du lac des Fées qui est en pleine ville de Hull. Que le chef de l'Opposition vienne me dire qu'on passe en pleine forêt, franchement, il faut être assez naïf pour...

M. Morin: II y a une partie qui passe en pleine forêt. Maintenant, dites-moi, si cela passe en pleine ville, ce n'est plus du "prime land" à ce moment.

M. Parent (Hull): Je le sais, on le détruit.

M. Morin: Vous m'avez parlé de "prime land". Vous m'avez dit que cela traversait le "prime land".

M. Parent (Hull): C'est vous qui parlez de "prime land" le long de la rivière Outaouais.

M. Morin: Oui, du "prime recreational area", ce n'est pas la même chose.

M. Parent (Hull): L'autre, le parc de la Gatineau, c'est du "prime land", c'est de l'espace qu'on enlève aux citoyens qui utilisaient ce terrain comme espace de verdure.

M. Morin: Oui. Pourquoi n'avez-vous pas tout simplement acheté de gré à gré avec le pouvoir fédéral? Pourquoi avez-vous dû céder la gestion et le contrôle d'une partie du territoire québécois plutôt que de l'acheter tout simplement, comme vous l'avez fait pour votre réseau routier? Le ministre nous a dit tout à l'heure: Quand nous voulons faire passer une route, nous l'achetons. On nous laisse le terrain pour $1. Je le cite, je pense que c'est ce qu'il a affirmé au début de cet entretien. Pourquoi n'avez-vous pas fait la même chose pour le passage des lignes d'Hydro-Québec? Pourquoi avez-vous été amené à céder la gestion et le contrôle des berges de l'Outaouais?

M. Parent (Hull): M. le Président, je pense qu'il faut être borné énormément pour voir la politique d'autruche. Je pense que le chef de l'Opposition ne peut pas comprendre qu'au point de départ, nous avons le jugement Monroe de juin 1966 où la cour Suprême donne juridiction au gouvernement fédéral.

Le chef de l'Opposition lui, voudrait plutôt qu'on soit assez borné, qu'on soit tellement à l'en-contre du gouvernement fédéral, que les possibilités d'un règlement qui peuvent exister, il ne voudrait même pas qu'on aille les explorer. Pour lui, le gouvernement fédéral est une bête noire, c'est un gouvernement étranger avec qui on ne doit pas transiger. Il y a un jugement à la cour Suprême. On ne se préoccupe pas d'un jugement de la cour Suprême.

M. Morin: Oh si!

M. Parent (Hull): Ah oui! c'est un autre gouvernement. Vous avez une optique politique différente, c'est votre affaire. On vit dans un régime fédéral, il y a des pouvoirs, il y a des institutions juridiques qui existent, des pouvoirs qui sont concédés par jugement de la cour Suprême. A partir de là, qu'est-ce qu'il y a à faire si ce n'est que de négocier? Le chef de l'Opposition voudrait qu'on aille continuer ce que Hydro-Québec était à faire, vendre des territoires et obtenir des servitudes. C'était logique, pour le chef de l'Opposition, qu'on laisse continuer Hydro-Québec, de son côté, sans se préoccuper des intérêts du Québec d'obtenir des servitudes pour passer ses lignes électriques et qu'en retour, Hydro-Québec vende ses terrains au gouvernement fédéral, ce qui aurait été complètement à l'encontre de la discussion de ce matin. Pourquoi le gouvernement provincial est-il intervenu? Pour empêcher qu'il y ait des ventes de territoire, pour nous permettre de continuer à exercer nos prérogatives par la table de négociation permanente que nous avons et, dans le corps de cette table de négociation, nous permettre de faire valoir nos objectifs, nous permettre de conserver les droits que nous avons, nous permettre d'entreprendre la réalisation des objectifs tout autant que la programmation qui est prévue. Si nous consentons à ce qu'il y ait des cessions de part et d'autre pour une entente semblable, c'est simplement que le gouvernement du Québec a absolument le contrôle de l'aménagement du territoire. Si la loi 59 avait existé au moment où Hydro-Québec a commencé ses négociations, nous n'aurions pas été dans la situation ridicule d'aller recommencer des négociations. C'est là la valeur de la loi 59. Tout le monde se fichait des préoccupations que vous pouviez avoir sur l'aménagement du territoire, sur le droit de propriété des terrains. Tout le monde se fichait de cela. On regardait à sa petite affaire. Le gouvernement a mis de l'ordre. Depuis 1970, j'ai moi-même été traité de dictateur parce que j'ai voulu imposer ce que je dis aujourd'hui, imposer qu'il y ait une cohérence, qu'il y ait une affinité avec ce que le gouvernement voulait pour la protection de son territoire, de ce qu'il voulait pour l'aménagement de son territoire. La logique a voulu qu'il y ait une loi, maintenant, qui vienne sanctionner ce que nous avions fait depuis 1970, pour protéger des choses comme celles dont vous parlez aujourd'hui. Elles se passaient au-dessus de notre tête. De telles situations causent des embarras au gouvernement du Québec, nous empêchent de réaliser des objectifs, nous empêchent de déterminer ce que sera notre territoire de demain, ce que nous voulons que soit notre territoire de demain. Il fallait une cohérence, une affinité dans toute cette question, et c'est pourquoi le gouvernement a pris ses responsabilités: Dans le cas actuel, ce que nous faisons, c'est dans le cadre de cette politique. Nous tenons compte des pouvoirs que détient le gouvernement fédéral par le jugement à la cour Su-

prême, mais nous tenons compte également que, depuis cinq ans, nous avons réussi, comme je l'ai dit tout à l'heure, à "circoncire" le mal qui était déjà fait pour permettre de réaliser les objectifs que nous avons à coeur.

M. Morin: Depuis cinq ans, M. le Président, la CCN a procédé à des acquisitions considérables dans la région dont nous parle le ministre. Je me réfère au Central Real Property Inventory Report, qui est la liste complète de tous les biens-fonds du pouvoir fédéral dans tout le Canada. Pour ce qui est de la région de Hull, la liste est impressionnante. Ce n'est pas nécessairement une liste de terrains acquis avant 1970. De nombreuses acquisitions sont encore toutes récentes. Je parle de ce qui se trouve dans le rapport à compter du numéro 003001.

Le ministre pourra consulter ce rapport et constater que beaucoup de terrains, des superficies considérables, ont été acquis par le pouvoir fédéral. Je pense au no 8,001, qui date de 1973: 2,072 acres; au no 6,001 de 1972, dans le parc de la Gatineau: 23,070 acres; au no 6,001 à nouveau, 1971, une autre section de 10,396 acres; au no 0006, acquis en 1972: 6.7 acres, situées le long de la rivière Outaouais, près des chutes de la Chaudière; no 0007, de 1972: 39 1/2 acres; dans le coeur de Hull: 2.8 acres; au no 2,007, de 1972, qui se trouve également dans le coeur de la ville de Hull: 3,2 acres; au no 6,003, il s'agit, cette fois, de terrains qui doivent se trouver près du parc Fontaine: 8,2 acres, en 1971 ; au no 6,009, près du parc de la Gatineau, qui date de 1971: 163 acres; au no 0001, le camp Pontiac, 1972 et 1973: 60 acres; dans le parc de la Gatineau, la section V, sous le no 6,0001: 15,797 acres acquises en 1972. Et ainsi de suite.

On voit que certaines de ces acquisitions sont toutes récentes. Elles datent du régime Parent, si je peux m'exprimer ainsi. Les questions qui me viennent à l'idée, avant de parler de cas plus spécifiques, m'incitent à demander au ministre s'il est conscient que cet envahissement continue, qu'il n'est pas terminé, qu'il permet au pouvoir fédéral d'étendre chaque jour davantage, sans procéder même par voie d'expropriation, par la simple politique d'achats systématiques, sa compétence territoriale sur la région hulloise? Il y a une seconde question que j'aimerais poser au ministre. Je la lui ai déjà posée, mais je n'ai pas eu de réponse tout à l'heure. Existe-t-il un mécanisme qui oblige, je veux dire qui oblige de façon juridique, le gouvernement fédéral à informer le gouvernement québécois de ces achats de gré à gré, dans la région de Hull?

M. Parent (Hull): M. le Président, il n'y a aucun mécanisme juridique. Il ne faut pas vouloir comprendre la situation juridique qui se pose pour penser qu'après le jugement Monroe, il est impensable de croire qu'un accord juridique pourrait être signé, qui permettrait de restreindre les activités d'une juridiction comme celle du fédéral.

Je l'ai répété à plusieurs reprises. Ce que nous avons convenu c'est que, de part et d'autre, nous aurions une table permanente de négociation, qu'aucun acte ne serait posé par un gouverne- ment ou l'autre en ce qui concerne l'aménagement du territoire et en ce qui concerne particulièrement l'acquisition de terrains.

C'est là un accord tout à fait logique, dans les circonstances, si nous voulions simplement jouer notre rôle et prendre en main les destinés de la région. Ce que nous avons fait et ce que nous continuons de faire, c'est que, de part et d'autre, on s'échange les plans pour savoir quels sont les points de vue de chacun, ce qu'il entend réaliser dans le territoire en question.

J'ai même souligné au chef de l'Opposition, au début de mon intervention, que j'avais eu une rencontre à Toronto avec M. Darcy McKeough le 16 mai, que nous nous étions posé la question tous les deux pour savoir quelles mesures pourraient résulter, mesures par ententes à être conclues d'une façon tripartite mais non coerci-tive, du fait que le gouvernement fédéral se porte acquéreur de terrains, non pas simplement du côté de Québec, mais, dans une plus forte proportion encore, dans le territoire de la ville d'Ottawa et des municipalités environnantes.

Le chef de l'Opposition est peut-être inquiet de la situation; nous posons nous-mêmes des questions et nous essayons, par voie de discussion, avec nos homologues de Toronto et avec Ottawa, de trouver un moyen de résoudre le problème, non pas d'une façon juridique, mais d'une façon ordinaire, dans le cours des opérations, pour nous entendre sur les façons de procéder, sur les programmes, sur l'aménagement du territoire, sur les objectifs que chacun recherche.

Je pense qu'il faut tenir compte qu'il existe une Loi de la capitale nationale, elle remonte à 1899. Elle a été modifiée en 1927, elle a été remodifiée en 1955. Je pense qu'il y a eu un autre intervalle où elle a subi des modifications. La dernière, je pense, remonte à 1958. La Commission de la capitale nationale possède des pouvoirs qui lui sont donnés par le gouvernement du Canada, ceux de pourvoir à l'aménagement d'une capitale nationale pour le Canada. En vertu de ces pouvoirs et par la confirmation du jugement Monroe, qui a donné raison au gouvernement fédéral, les gouvernements provinciaux n'avaient qu'une possibilité, celle de conclure des accords avec le gouvernement fédéral en ce qui concerne ces propres juridictions. C'est ce que nous avons convenu de faire, c'est ce dont nous nous préoccupons depuis 1970. C'est la raison d'être de nos activités assez nombreuses dans ce secteur, de nos préoccupations de tenir des réunions fréquentes avec l'Ontario pour connaître son point de vue, tenter d'en arriver à des accords. C'est dans ce cadre également que j'ai proposé, au mois de juin dernier, un accord directeur entre le gouvernement fédéral, l'Ontario et le Québec sur le territoire de la capitale nationale, autant en sol ontarien qu'en sol québécois. Nous avons discuté de ce projet que j'ai soumis à l'attention de mes collègues du fédéral et de l'Ontario, mais nous avons particulièrement, le 16 mai dernier, discuté avec l'Ontario de la possibilité de pouvoir faire avancer le projet de l'accord directeur que le gouvernement du Québec, par mon entremise, a présenté aux deux autres gouvernements. C'est la semaine prochaine

qu'au niveau des fonctionnaires du ministère des Affaires intergouvernementales du Québec, au moment d'une rencontre régulière avec le gouvernement de l'Ontario et les fonctionnaires, nous pourrons avancer, je pense bien, puisque les deux gouvernements ont donné leur accord de principe sur cette entente directrice qui pourrait pourvoir aux juridictions de chacun dans l'aménagement du territoire de la capitale nationale.

L'accord étant fait avec le gouvernement de l'Ontario sur le principe, au niveau des fonctionnaires, la semaine prochaine, on entreprendra les discussions pour la définition des objectifs et des points particuliers qu'il faudrait incorporer à l'intérieur de cet accord directeur. Nous sommes tout autant préoccupés de la question que semble vouloir le laisser croire le chef de l'Opposition. Nous sommes beaucoup plus préoccupés que lui par les inconvénients que nous pouvons subir. C'est la raison d'être de notre implication quotidienne dans ces dossiers pour nous permettre d'avancer et pouvoir, dans un cadre de coopération, faire accepter d'emblée nos concepts d'aménagement, nos programmes et nos objectifs à l'intérieur du territoire de la capitale nationale.

Quant à ce que le chef de l'Opposition a voulu souligner tout à l'heure en parlant des achats de terrains par le gouvernement fédéral, je pense qu'il ne faudrait pas multiplier les débats.

On me dit qu'au ministère des Terres et Forêts, la même question a été posée au ministre des Terres et Forêts, que le ministre des Terres et Forêts, a admis lui-même que ces documents que le chef de l'Opposition a bien voulu citer ce matin étaient imparfaits et que même le gouvernement fédéral...

M. Morin: Incomplets.

M. Parent (Hull): ... l'a lui-même admis. Mais, le chef de l'Opposition revient ce matin, même si les représentants de son parti politique ont fait le débat à une autre commission parlementaire, avec le même phénomène, les mêmes caractéristiques, les mêmes données dont il sait à l'avance qu'elles sont incomplètes, qu'elles ont été reconnues incomplètes tant par l'autorité provinciale que par l'autorité fédérale. Je pense que c'est vouloir jouer sur plusieurs tableaux, c'est vouloir faire compromettre deux ministres d'un même cabinet ou provoquer les divergences de vues entre eux. Je ne comprends pas la raison d'agir du chef de l'Opposition, de vouloir dresser peut-être un guet-apens semblable, en pensant qu'il va prendre à ses pieds un appât. Je n'ai pas l'intention de tomber dans le piège sur cette question. Je sais que le ministre des Terres et Forêts...

M. Morin: Vous êtes du gros gibier, M. le ministre. Je ne songerais pas à vous tendre des pièges.

M. Parent (Hull): Le ministre des Terres et Forêts a déjà dit qu'il avait demandé à son secteur de la division territoriale de faire toutes les modifications qui sont nécessaires. Ce n'est que par la suite que nous serons en mesure de savoir s'il s'agit bien d'un document incomplet ou d'un document complet.

M. Morin: Je voudrais d'abord faire observer au ministre qu'il est responsable en particulier, étant donné qu'il est ministre d'Etat aux Affaires intergouvernementales, de cette section du territoire québécois, ce qui ne laisse pas de m'inquiéter d'ailleurs, comme je l'ai fait remarquer déjà.

Mais ce qui a été discuté aux Terres et Forêts portait sur l'ensemble du Québec. Je l'interroge pour ma part sur cette région en particulier, qu'il est plus à même que qui que ce soit d'autre dans ce gouvernement de surveiller. Je ne connais pas d'autre membre du gouvernement qui puisse nous donner des renseignements plus précis que lui.

Je reviens à l'argumentation de fond du ministre, celle qu'il nous a servie à plusieurs reprises ce matin. Que voulez-vous que je fasse? Il y a l'affaire Monroe; il y a l'arrêt Monroe et le pouvoir fédéral possède, en somme, la compétence voulue pour exproprier tout ce qu'il veut au Québec. Donc, il peut nous matraquer n'importe quand et donc nous forcer à négocier. C'est ce que nous disons exactement, que le gouvernement québécois, à cause de ce pouvoir d'expropriation des fédéraux, est dans une position de faiblesse. C'est cette position de faiblesse que j'essaie de décrire, que j'essaie de dénoncer depuis ce matin. Les exemples dont nous avons parlé, notamment les berges de l'Outaouais, dans le cas de l'échange avec Hydro-Québec, sont un exemple de plus, à notre avis, de cette nouvelle façon de procéder d'Ottawa. En effet, le ministre ne devrait pas invoquer constamment la menace de l'expropriation fédérale. Il sait que les fédéraux hésitent maintenant à exproprier, qu'ils ont changé leur stratégie. S'il en était conscient, cela pourrait constituer une amélioration de la stratégie québécoise.

Je pensais à la déclaration de M. Danson, il n'y a pas si longtemps, il y a quelques jours, le 23 mai 1975, parlant de la ville de Hull. "The NCC — he said — could expropriate, but that is a little sticky, especially in Quebec". Donc, M. Dan-son est tout à fait conscient que l'arme...

M. Parent (Hull): II est conscient de ce que j'ai fait depuis cinq ans.

M. Morin: II est conscient que l'arme de l'expropriation n'est pas aussi ultime, n'est pas aussi déterminante qu'elle l'était à l'époque de l'arrêt Monroe. Le ministre devrait en être conscient et devrait se rendre compte que la politique fédérale c'est désormais du gré à gré, c'est l'achat de gré à gré. Tous les textes que j'ai pu citer plus tôt ce matin le démontent amplement.

Il y a aussi une autre politique fédérale dont, je pense, le ministre a dû être saisi. C'est ce qu'on pourrait appeler, c'est ce que Jean-Claude Leclerc, l'éditorialiste du Devoir, appelait la politique de la possession. Le ministre sait peut-être que, dans le passé, quand les fédéraux avaient des terrains en surplus, ils les cédaient soit au pouvoir provincial, soit à des particuliers. Or, cette politique a changé de façon draconienne depuis quelques années.

La clef de cette politique est de conserver tous les terrains fédéraux, que ce soit dans les espaces urbains ou dans les espaces ruraux et de ne plus rien laisser sortir du domaine public fédéral.

Je ne sais pas si le ministre est conscient de cette politique. Elle a été exposée dans une déclaration de 1971 et elle tient dans une phrase, et une phrase qui est peut-être passée inaperçue: Les terrains déclarés superflus resteront désormais dans le domaine public et le département d'Etat, chargé des affaires urbaines, examinera la meilleure façon de les utiliser à des fins urbaines.

Le pouvoir fédéral s'est donc rendu compte que la propriété du sol, ou lorsqu'on ne peut pas obtenir la propriété du sol, la gestion et le contrôle qu'on se fait céder de gré à gré, est encore la meilleure façon d'imposer sa volonté sur le territoire québécois. C'est pour cela que nous dénonçons, le ministre n'a pas tort de dire que nos options sont fondamentalement différentes, ce système de propriété, de possession, d'extension de la propriété fédérale, de façon tentaculaire, sur le territoire québécois.

Le ministre nous dit: Nous acceptons les règles du jeu. Ma foi, nous nous inclinons devant la décision Monroe. Je ne sais pas si le ministre est conscient du fait que cela fait partie de tout un système de contrôle et d'extension du contrôle fédéral, non seulement sur le territoire québécois, mais sur l'ensemble des pouvoirs québécois. Ceci intéresse aussi le voisin du ministre d'Etat. Nous pourrons revenir d'ailleurs sur ces problèmes, plus tard, au cours de l'étude de ces crédits.

Ce que je veux demander au ministre, à la suite de ces faits, dont il a certainement été saisi par ses adjoints, c'est s'il est conscient du fait de la politique fédérale de ne plus céder aucun terrain, une fois qu'il est entré dans le giron fédéral. Même les terrains superflus ne seront plus aliénés, ils resteront dans le domaine public fédéral. Est-il conscient de cette politique? En tient-il compte dans ses négociations avec Ottawa?

M. Parent (Hull): Je pense que cela va à l'encontre de ce que je viens de dire tout à l'heure. Si le gouvernement fédéral, comme le chef de l'Opposition le dit, a adopté la position de conserver ses droits de propriété sur les terrains, il n'en demeure pas moins que le Québec a fait de même, et cela depuis plusieurs années. Je ne sais pas si c'était la politique du gouvernement fédéral d'agir de la même façon, mais de là à dire que le gouvernement fédéral veut conserver ses propriétés, même si elles sont en surplus, est contraire à ce que j'ai dit tout à l'heure, parce que je viens de conclure avec la Commission de la capitale nationale un accord, il y a environ trois semaines, pour que le gouvernement fédéral nous cède des propriétés sur le boulevard Fournier, qui appartiennent au gouvernement fédéral et qu'il nous les cède pour les fins de construction d'une ville de 2,500 âmes. Cela va complètement à l'encontre...

M. Morin: Cédées?

M. Parent (Hull): Oui, cédées au gouvernement du Québec, pour la construction d'habitations à l'intérieur de la ville de Hull.

M. Morin: Pour des fins spécifiques.

M. Parent (Hull): Pour la construction d'habitations, absolument! Si le gouvernement fédéral veut conserver son droit de propriété, comme le gouvernement provincial, il le fait par transfert de gestion pour des fins spécifiques. Je ne vois pas quels sont là les obstacles qui peuvent s'opposer à ce que nous demeurions, de part et d'autre, propriétaires des fonds de terre.

Que le chef de l'Opposition ait dit tout à l'heure que nous avions certaines faiblesses en ce qui regarde la déclaration de M. Danson, il n'en reste pas moins que la position que nous avons adoptée depuis I970 a été que, malgré le droit d'expropriation que le gouvernement fédéral possédait, malgré le fait qu'il pouvait acquérir de gré à gré — et c'est du pareil au même — qu'il a un droit de propriété, cela invoque le fait que, pour résoudre ce problème, il fallait en arriver à une table de négociation pour définir ce à quoi nous voulons faire l'utilisation du sol.

Le pouvoir existe à l'intérieur du territoire de la capitale nationale, pour les fins de la capitale nationale. Ce dont nous sommes plus préoccupés, tenant compte des faits et des circonstances, c'est de l'usage qui doit en être fait. Notre principale préoccupation est de nous assurer que le droit de propriété n'est pas néfaste ou à l'encontre des politiques que le gouvernement du Québec veut implanter dans ce secteur de la région de la capitale nationale.

J'ai fait une proposition, au mois de juin I974, à l'intérieur de laquelle nous voulons obtenir ce droit de participation, ce droit de négociation, ce droit de déterminer l'usage des propriétés, quel que soit le propriétaire. On constatera que, dans le document, d'ailleurs je l'ai déjà déposé en Chambre, j'ai parlé dans ma proposition, de trois aspects bien importants. Il y a la réforme du cadre institutionnel, où nous parlions du regroupement municipal, cela a été fait; de la modification des rôles de la CRO, de la SAO, de la CTCRO, c'est en voie d'être fait. Un comité présidé par le ministre Goldbloom est en voie d'élaboration sur les modifications qu'il nous faudra changer.

Que comprenait le projet-cadre de l'accord directeur? Cet accord consiste principalement à déterminer un cadre général à l'intérieur duquel les gouvernements du Canada, de l'Ontario et du Québec entendraient coopérer et coordonner leurs actions respectives aux fins du développement économique, social et culturel de la région de la capitale du Canada; convenir des objectifs communs et respectifs de développement à poursuivre; établir les dispositions pour régir la stratégie des actions engagées communément ou de part et d'autre; institutionnaliser un mécanisme de coordination, avoir des conférences ministérielles avec le concours d'un comité technique; prévoir des dispositions par lesquelles les deux niveaux de gouvernement conviendraient que les plans de développement seraient mis en oeuvre en ce qui concerne les zonages, les acquisitions de terrain et la localisation des infrastructures par l'Ontario et le Québec sur leur territoire respectif; prévoir des accords spéciaux par lesquels les divers gou-

vernements conviendraient de disposer des terrains publics qu'ils possèdent jusqu'à présent.

Le troisième aspect de l'accord directeur, la création du service des affaires de la capitale du Canada, est maintenant un fait. Ce service est en voie d'être doté du personnel requis. C'est au mois de juin 1974, M. le Président, que j'ai fait cette proposition aux deux autres gouvernements et que nous avons eu une réunion, le 16 mai dernier, avec nos collègues de l'Ontario pour discuter de cette question. J'ai eu des rencontres avec M. Danson pour discuter de l'à-propos de cet accord directeur. C'est parce que nous sommes préoccupés. Je suis conscient de la situation, assez pour l'avoir écrit et avoir fait des propositions concrètes pour en arriver à travailler dans un cadre régulier. C'est ce que nous recherchons. Que le chef de l'Opposition prétende qu'il y a des déficiences et des faiblesses à l'intérieur du cadre dans lequel nous travaillons, nous en sommes conscients. C'est pourquoi j'ai fait des propositions bien concrètes, pour établir un cadre définitif dans lequel l'on pourrait fonctionner. C'est là-dedans que nous avons convenu des modifications qui s'imposaient au niveau municipal, au niveau des organismes régionaux, au niveau de la création d'un service au ministère, au niveau des points à définir et sur lesquels doit porter l'accord directeur pour l'exercice de chacune des juridictions de chacun des gouvernements. Nous sommes conscients de toute la situation. C'est pour cela que, dans l'esprit dans lequel nous travaillons, des structures nous étaient nécessaires; nous sommes en voie de les modifier ou elles ont été modifiées. Dans d'autres, c'est en voie d'exercice. Dans le cas de l'accord directeur, nous sommes en pleine négociation avec l'Ontario et le fédéral pour en arriver à la signature de cet accord directeur tripartite pour permettre au gouvernement du Québec de signer des ententes bilatérales, par la suite, comme à l'Ontario, de signer des ententes bilatérales sur des points bien définis. C'est ce que mes fonctionnaires vont faire au cours de la semaine prochaine !ors de la réunion au niveau des fonctionnaires avec le gouvernement de l'Ontario. Ils tenteront de définir les points sur lesquels nous devrions nous pencher pour permettre cet accord directeur entre les trois niveaux de gouvernement. C'est pourquoi j'entretiens moi-même des discussions régulières avec mon collègue du fédéral, M. Danson, avec M. McKeough, à Toronto, pour l'établissement de cet accord directeur qui prévoit une conférence ministérielle aux trois niveaux et une conférence administrative pour permettre, dans le champ d'activité de chacune des provinces, avec ses partenaires, de réaliser les objectifs que nous nous sommes fixés.

M. Morin: C'est bien compliqué, le fédéralisme, M. le ministre, quand il s'agit d'aménager son propre territoire.

M. Parent (Hull): Je n'ai jamais cru cela.

M. Morin: Je voudrais vous demander si, lorsque l'accord-cadre dont vous avez parlé sera conclu, d'ici, si je comprends bien, quelques semaines, le ministre voulait le porter à la connaissance de la Chambre. Est-ce possible?

M. Parent (Hull): Je ne peux pas parler de quelques semaines dans ce cas. Nous sommes au niveau des fonctionnaires, la semaine prochaine, avec l'Ontario.

M. Morin: Oui.

M. Parent (Hull): II nous restera à conclure un accord avec le gouvernement fédéral dès que les deux gouvernements provinciaux auront été d'accord sur les objectifs, pour que nous puissions par la suite entreprendre des discussions avec le gouvernement fédéral pour obtenir son acceptation sur toutes les lignes directrices.

M. Morin: Quand pensez-vous que cet accord-cadre sera conclu?

M. Parent (Hull): Nous y mettons toute l'insistance possible actuellement; j'ai dit au chef de l'Opposition que je m'étais rendu moi-même à Toronto le 16 mai rencontrer M. McKeough. Nous avons convenu que la réunion, au niveau de nos fonctionnaires, aurait lieu les 4 et 5 juin. Elle aura lieu. Nous avançons graduellement. Nous faisons l'impossible pour conclure cette entente dans les plus brefs délais et aller de l'avant pour l'aménagement et les fonctions pour lesquelles nous voulons que cet accord soit signé.

M. Morin: M. le Président, il est presque midi. Nous avions convenu d'ajourner nos travaux à ce moment. J'aurais encore des questions à poser au ministre, notamment sur une autre technique utilisée par les fédéraux qui consiste à faire exproprier par le Québec pour ensuite céder la gestion et le contrôle au pouvoir fédéral de certains terrains situés au Québec.

M. Parent (Hull): II n'y a eu que quelques cas.

M. Morin: Je ne sais pas si le ministre trouve cela suffisamment important pour nous faire l'honneur de sa présence à une séance subséquente. Je ne veux pas insister parce que je me rends compte que déjà j'ai passé pas mal de temps à converser avec lui, mais je laisse cela à son bon jugement. Cela me paraît être une question importante, mais je ne veux pas abuser non plus de son temps; je sais qu'il a pas mal de chats à fouetter, je m'en rends compte. On pourrait peut-être y revenir par la suite en Chambre, mais si le ministre voulait ne pas revenir pour diverses raisons, je lui demanderais au moins s'il serait possible de déposer deux ou trois ententes. D'abord, l'entente connue sous le nom de Masham, l'entente concernant l'affaire Masham, et, deuxièmement, l'entente concernant les terrains qui ont été cédés — j'utilise i'expression dont le ministre a fait état tout à l'heure, bien que j'aie lieu de croire que la propriété soit restée fédérale — destinés à la construction domiciliaire. Il y a une entente qui a été...

M. Parent (Hull): Elle n'est pas encore signée.

M. Morin: Ella n'est pas signée encore. Alors, je demande au ministre, parce qu'il me reste encore tout de même une minute, si j'ai bien compris

le ministre quand il nous a dit que ces terrains étaient cédés au Québec? Est-ce que la propriété passe au Québec également?

M. Parent (Hull): Le chef de l'Opposition devrait savoir que la couronne est indivisible.

M. Morin: Pardon! Nous n'allons pas nous lancer dans un débat...

M. Parent (Hull): Un expert constitutionnel me dit cela.

M. Morin: Oui, mais votre sous-ministre sait très bien que c'est un beau débat que celui de savoir si la couronne est divisible ou indivisible. Nous parlons de la couronne au chef du Canada...

M. Parent (Hull): II me dit qu'elle est indivisible.

M. Morin: ...et de la couronne au chef du Québec.

M. Parent (Hull): C'est un transfert de gestion et d'administration.

M. Morin: Sans propriété.

M. Parent (Hull): C'est un transfert de gestion et d'administration à perpétuité.

M. Morin: Bon. Sans propriété.

M. Parent (Hull): Sans fins spécifiques.

M. Morin: Sans propriété. Le ministre me fait signe que oui de la tête. Je voudrais qu'il le dise pour que ce soit au journal des Débats.

M. Parent (Hull): Une cession de tous les droits que détient la couronne du chef du Canada au profit de la couronne du chef de la province.

M. Morin: Donc, c'est un transfert de propriétés.

M. Parent (Hull): Mon expert me dit qu'on ne pense pas que ce soit un droit de propriété réelle parce que la couronne est indivisible.

M. Morin: Oh! là, on se met à patiner! M. Parent (Hull): Vous aimez patiner?

Le Président (M. Gratton): Messieurs, je pense que...

M. Morin: Lorsque c'est en bonne compagnie, oui. Maintenant, j'aimerais demander également le dépôt de cet accord aussitôt qu'il sera conclu, de cette entente dès qu'elle sera conclue, de même que l'entente sur la vente des usines Eddy au fédéral. Est-ce possible d'avoir cette entente?

M. Parent (Hull): Quelle entente?

M. Morin: L'entente portant sur les usines Eddy.

M. Parent (Hull): Ce n'est pas avec le gouvernement du Québec... Le gouvernement du Québec est intervenu par pure considération pour le fédéral, mais n'est pas signataire de l'entente. C'est une entente intervenue entre le gouvernement du Canada et la compagnie Eddy.

M. Morin: Donc, c'est un transfert de gré à gré...

M. Parent (Hull): Cela a été fait de gré à gré.

M. Morin: ... du type de ceux dont je parlais tout à l'heure. Mais, si le gouvernement du Québec est intervenu, est-ce qu'il y a, néanmoins...

M. Parent (Hull): Je pense qu'il y a eu certains dépôts faits à la Chambre des communes. Je n'ai pas objection à obtenir les documents, parce que...

M. Morin: Est-ce possible?

M. Parent (Hull): Nous allons nous informer sur l'entente.

M. Morin: Si nous pouvions avoir le dépôt de ces documents, lorsqu'ils ont été conclus, ce serait un dépôt assez rapide, et, lorsqu'ils n'ont pas encore été conclus, ce serait en temps et lieu. Bien que je n'aie pas encore terminé l'étude du dossier des expropriations ou des cessions de terrains, dans la région de la capitale fédérale, je serais prêt à remettre la discussion à d'autres lieux, peut-être en Chambre. Je ne veux pas forcer le ministre à revenir ici. Le ministre pourrait-il me dire quelles sont ses intentions? Préférerait-il revenir pour que nous terminions le dossier?

M. Parent (Hull): Cela dépend jusqu'à quelle date vous voulez continuer les crédits, parce que j'aurai à m'absenter la semaine prochaine.

M. Morin: Je pose la question aussi au ministre des Affaires intergouvernementales. Je ne sais pas s'il désire que son collègue revienne.

M. Levesque: Je suis toujours heureux de la façon que mon collègue s'est comporté, ce matin. C'est vous qui devriez vouloir qu'il ne revienne pas. Je n'ai que...

M. Morin: Je peux peut-être insister pour qu'il revienne, si vous y tenez.

M. Levesque: Je n'ai que des félicitations à adresser au ministre de la Fonction publique, ministre d'Etat aux Affaires intergouvernementales, pour la façon dont il a prouvé ce matin combien il connaît ce dossier, combien il s'y intéresse et combien il le suit quotidiennement. Franchement, je m'attends que le chef de l'Opposition concoure avec moi dans cette appréciation.

M. Morin: C'est dans cette perspective, M. le Président, que je demandais au ministre d'Etat s'il ne convenait pas qu'il revienne pour qu'on termine le dossier. Mais je ne veux pas insister, parce

que je me rends compte que, déjà, je l'ai retenu plusieurs heures.

M. Levesque: C'est cela.

M. Parent (Hull): A la dernière réunion, on avait convenu qu'il restait à peu près une demi-heure.

M. Morin: Oui, mais vous êtes tellement intéressant, M. le ministre.

Le Président (M. Gratton): Le programme I est-il adopté?

M. Morin: Non, nous n'avons pas terminé l'étude des points préliminaires. Nous allons procéder comme d'habitude, M. le Président. C'est--à-dire que, après l'étude des dossiers, on adoptera les programmes très rapidement. C'est ce que nous avons fait les années passées.

Le Président (M. Gratton): La commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h 3)

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