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Version finale

39th Legislature, 2nd Session
(February 23, 2011 au August 1, 2012)

Monday, September 12, 2011 - Vol. 42 N° 14

Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 25, Loi visant à interdire la revente de billets de spectacle à un prix supérieur au prix annoncé par le vendeur autorisé


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Table des matières

Journal des débats

(Quatorze heures dix minutes)

Le Président (M. Bernier): À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

Le mandat de la commission est de tenir des consultations particulières et auditions publiques à l'égard du projet de loi n° 25, Loi visant à interdire la revente de billets de spectacle à un prix supérieur au prix annoncé par le vendeur autorisé.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. Alors, M. Leclair (Beauharnois), le porte-parole de l'opposition officielle en matière de protection des consommateurs, remplace Mme Poirier (Hochelaga-Maisonneuve); M. Blanchet (Drummond) remplace M. Cousineau (Bertrand); M. Bernard (Rouyn-Noranda--Témiscamingue) remplace M. Dubourg (Viau); et M. Drolet (Jean-Lesage) remplace M. Marsan (Robert-Baldwin).

Le Président (M. Bernier): Merci, Mme la secrétaire. Donc, cet après-midi, nous entendrons l'Association québécoise de l'industrie du disque, du spectacle et de la vidéo. Nous entendrons également les représentants de Juste pour Rire, de Billets.ca, de L'Équipe Spectra et, en soirée, la Fédération des chambres de commerce du Québec et M. Alain Therrien.

Mémoires déposés

Avant de débuter avec les remarques préliminaires, je tiens à déposer deux mémoires qui nous ont été déposés mais qui ne font pas l'objet d'audition et... mais qui sont déposés au greffe de la commission: celui du Conseil canadien du commerce de détail, division de Québec, et le mémoire de M. Guillaume Déziel.

Remarques préliminaires

Sans plus tarder, pour une période d'environ sept minutes, M. le ministre, je vous invite à présenter vos remarques préliminaires.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président. À titre de ministre responsable de l'Office de la protection du consommateur, je tiens à remercier les groupes présents aujourd'hui et ceux qui seront là demain dans le cadre des consultations particulières portant sur le projet de loi n° 25. Je suis fort heureux de les savoir disponibles et prêts à échanger au sujet de ce projet de loi qui vise à interdire aux commerçants de vendre à un consommateur un billet de spectacle ou d'événement sportif ou culturel à un prix supérieur à celui qu'annonce le vendeur autorisé. Les modifications à la Loi sur la protection du consommateur que nous proposons d'apporter viennent d'abord... visent d'abord à corriger certaines situations inéquitables du marché qui causent un préjudice pécuniaire aux consommateurs. Parmi ces situations figurent les pratiques qu'utilisent certains commerçants qui, au détriment des consommateurs, revendent des billets de spectacle sur le Web à un prix plus élevé que le prix d'origine. Imaginons un instant l'impact que peuvent avoir ces pratiques sur la personne qui constate avoir payé, disons, 30 $ de plus que le spectateur assis immédiatement à côté de lui. Imaginons aussi l'impact de ces montants parfois astronomiques pour le consommateur qui a un budget limité à consacrer aux événements sportifs ou culturels.

M. le président, j'entends déposer à la commission une étude d'impact commandée par l'Office de la protection du consommateur et réalisée par la firme Raymond Chabot Grant Thornton. Ce rapport établit notamment les conséquences de la pratique actuelle de revente de billets sur les consommateurs et sur le marché du spectacle et des événements sportifs. Il a été démontré dans cette étude d'impact que les dépenses moyennes des ménages consacrées aux droits d'entrée des arts de la scène sont estimées pour l'année 2006 à 97 $ et à 42 $ pour les droits d'entrée d'événements sportifs. L'étude explique que, chaque fois que le prix d'un billet augmente de 1 %, la demande du consommateur diminue de 0,5 %. En d'autres mots, plus les prix des billets d'événements culturels ou sportifs augmentent, moins les consommateurs ont les moyens de les acheter.

En juin dernier, lors de la conférence de presse pour le dépôt du projet de loi n° 25, Daniel Gélinas, directeur général du Festival d'été de Québec, a illustré une autre inquiétude. Le premier matin de mise en vente des billets pour le festival, des millions de requêtes avaient été faites sur le site Internet officiel de vente de billets. En peu de temps, il ne restait plus de billet accessible. Il explique ce phénomène notamment par le fait que les entreprises de revente de billets contournent les mécanismes de contrôle mis en place par les producteurs, en utilisant des systèmes informatisés sophistiqués pour acheter en ligne des billets. Le but: se procurer la plus grande quantité de billets possible et les revendre à fort prix pour faire un grand profit. Ce phénomène est d'autant plus présent que certaines organisations d'événements sportifs et d'arts de la scène essaient tant bien que mal de le contrer. Je pense notamment à l'édition 2011 du tournoi de tennis Roland Garros, juste pour dire que ça ne se passe pas qu'au Québec, et le populaire groupe Arcade Fire, tout récemment, qui ont tous deux opté pour une vente de billet nominative, c'est-à-dire qui oblige chacun des détenteurs de billets de justifier leur identité. Imaginez, c'est encore le consommateur qui se voit contraint à une démarche additionnelle pour lui permettre d'avoir accès à des billets au prix original affiché. Clairement avantageux, le projet de loi n° 25 met fin à la surenchère systématique au profit des entreprises qui opèrent dans le domaine de la revente de billets. Le projet de loi permettra une plus grande équité entre les consommateurs qui ont acheté des billets de catégories comparables pour un même spectacle. Il permettra également aux consommateurs d'acheter des billets de spectacle en toute confiance, en connaissant le véritable prix et la réelle disponibilité.

Cette mesure, pour laquelle les intervenants de l'industrie ont manifesté leur appui, confirme l'intérêt que notre gouvernement porte aux produits culturels québécois. D'ailleurs, l'étude d'impact citée démontre bien que la pratique actuelle de revente de billets va à l'encontre des efforts d'investissement du gouvernement pour permettre la pérennité du monde du spectacle et du secteur sportif au Québec. Si les consommateurs ont la possibilité d'acheter plus de billets dans une année, les profits engrangés par les courtiers seraient récupérés par les consommateurs qui pourraient, à leur tour, consommer plus de spectacles et d'événements sportifs.

J'ajouterais même que l'argent qui serait conservé par l'industrie des arts et de la scène et les événements sportifs représenterait, toujours selon l'étude d'impact, d'ici 2016, environ 99 emplois potentiels. Non seulement ce projet de loi protège les consommateurs, mais il permet, à long terme, de créer des emplois dans l'industrie du spectacle et sportif. Devant ce fait, il est normal que notre gouvernement prenne des mesures afin d'empêcher que les fonds investis dans l'industrie culturelle ou touristique soient détournés au profit de quelques entreprises qui n'offrent, en bout de compte, aucune valeur ajoutée.

Enfin, M. le Président, beaucoup de choses se sont dites sur ce projet de loi. Je souhaite, ici, d'entrée de jeu, clarifier brièvement la portée. Nous aurons l'opportunité d'en discuter en détail bientôt, évidemment, mais ajoutons quand même ceci: La loi s'applique... la Loi sur la protection du consommateur s'applique aux échanges entre un commerçant et un consommateur. Il faut donc comprendre que les transactions entre consommateurs ne sont pas affectées par ce projet de loi. Aussi, je rappelle que l'office sera responsable d'appliquer cette loi. Son service d'enquêtes et de poursuites verra à ce que les entreprises s'y conforment, et ça, c'est sans dire l'effet pédagogique de la clarté du message gouvernemental que nous pourrions apporter par l'adoption de ce projet de loi.

C'est donc avec la plus grande attention bien sûr que nous allons sous peu entreprendre les auditions publiques afin d'entendre les commentaires, les suggestions, dialoguer probablement, peut-être même débattre des positions de chacun. À la fin du jour, M. le Président, soyez assuré que ce qui nous gouverne, c'est d'abord et avant tout la protection du consommateur -- c'est mon travail. Deuxièmement, commande du gouvernement, c'est de s'assurer de la cohérence dans nos actions: puisque nous investissons pour la culture, que nous croyons importante pour l'identité nationale du Québec, que nous investissons dans le tourisme pour la croissance économique qui peut découler de ce secteur-là, que l'un et l'autre parfois se rejoignent dans les investissements gouvernementaux que nous faisons, nous espérons, aspirons et travaillons à ce que les plus-values que nous pouvons obtenir de ces secteurs soient de retour dans les secteurs culturels et touristiques. Et c'est pourquoi nous agissons aujourd'hui.

En terminant, M. le Président, permettez-moi de déposer le rapport dont je parlais tantôt de l'étude d'impact de Raymond Chabot Grant Thornton, qui saura, j'en suis persuadé, intéresser les membres de cette commission. Et je vous en remercie.

Le Président (M. Bernier): Merci, M. le ministre. Donc, j'accepte le dépôt de votre rapport. Nous allons l'examiner et je rendrai ma décision tout à l'heure. Sans plus tarder, nous poursuivons avec M. le député de Beauharnois pour un bloc d'environ cinq minutes de remarques préliminaires.

M. Guy Leclair

M. Leclair: Merci, M. le Président. Tout d'abord, mes salutations à vous. J'aimerais saluer les gens qui sont avec moi: M. Yves-François Blanchet, député de Drummond, mon recherchiste, Guillaume Rousseau, ainsi que tous les membres de la commission, saluer le ministre, les gens de son cabinet, profiter du fait même de remercier les gens qui sont présents aujourd'hui de leurs mémoires qui nous ont été fournis, qui vont sûrement nous éclairer davantage, mais on aura sûrement quelques questions à leur poser.

Puis c'est définitivement... Nous, comme parti, on souscrit entièrement à la volonté des artistes de protéger et favoriser l'industrie québécoise du spectacle. On est bien d'accord à dire que nous travaillerons à une loi qui va viser à interdire la revente des billets de spectacle à un prix supérieur. Mais, tout ça bien dit, je crois que beaucoup de questionnements restera à poser aux divers groupes qui sont les gens eux-mêmes qui travaillent dans le domaine puis qui vivent cette conséquence-là depuis déjà plusieurs années. Et nous tenterons avec eux, leurs mémoires, ainsi que tous les membres de la commission de s'assurer que nous prendrons une position législative qui réglera le problème une fois pour toutes. On sait que c'est très difficile d'avoir un projet de loi qui règle définitivement, mais je crois que le ministre ainsi que tous les membres de la commission travailleront dans ce sens pour s'assurer que, même si on doit amender ce projet de loi là, s'assurer que ça vise toutes les inquiétudes d'à peu près tous les gens dans l'industrie.

Alors, nous aurons plusieurs questionnements. Donc, l'ampleur du projet de loi... Est-ce qu'on vise absolument tous les types de divertissement incluant les sports, plein air, les parcs d'amusement extérieurs? Alors, c'est des questions que le projet de loi vise mais qui... On nous dit: Tout autre... «à [tout autre] divertissement de quelque nature que ce soit». Alors, on aimerait avoir peut-être une définition un peu plus claire de la part du ministre, là, au courant des échanges, à savoir si on vise tout ou si c'est vraiment diminué.

En plus de ça, bien c'est sûr, l'ampleur de la problématique... On sait que la problématique se passe surtout sur le réseau Internet et le Web, alors ça va être assez difficile de légiférer pour apporter une loi dans ce cadre-là puis aller légiférer en même temps les pratiques sur le Web. Alors, je crois qu'on va avoir du travail à faire pour s'assurer qu'on ne déplace pas le problème. Je crois que les intervenants qui vont s'expliquer, aujourd'hui et demain par la suite, vont nous dire qu'ils auront certaines craintes que le problème soit juste déplacé peut-être dans une autre province, parce qu'avec l'inforoute informatique on sait bien que le problème, là, ne sera peut-être pas juste au Québec. Donc, j'espère que le projet de loi va réussir à combler ces choses-là aussi.

Alors, on va sûrement poser plusieurs questionnements sur les avantages et les inconvénients des solutions proposées en ce moment avec le projet de loi n° 25. Alors, je crois que, M. le Président, on va avoir deux bonnes journées très bien occupées, puis il nous fera plaisir de suivre ça de près puis de poser des questions pertinentes à tous les groupes surtout pour nous éclairer, les membres de la commission, pour tenter d'élucider le problème puis s'assurer qu'on va le régler alors au mieux de nos connaissances. Alors, ça sera pour mes remarques préliminaires, M. le Président.

**(14 h 20)**

Le Président (M. Bernier): Merci, M. le député de Beauharnois. Mme la députée de Lotbinière, environ deux, trois minutes.

Mme Sylvie Roy

Mme Roy: Merci, M. le Président. Je veux saluer mes collègues et M. le ministre pour la rentrée et notre commencement de rentrée parlementaire, en tout cas pour ma part, on brise la glace aujourd'hui. Je ne sais pas si ça va être la suite d'une série de longues rencontres qui vont être fructueuses, mais j'espère que ce sera le cas. Nous sommes tous les deux leaders, donc nous avons souvent à travailler ensemble, donc je peux le souhaiter. Je vous remercie, chacun des membres aussi de l'équipe de M. le ministre, et tous les gens qui ont voulu se prêter à l'exercice de nous rédiger un rapport et venir nous le présenter. Ces échanges-là seront fructueux.

Ce qui est important de penser dans ce dossier-là... Moi, je pense, c'est une première de beaucoup de défis qu'on va avoir comme législateurs, parce que le commerce a changé avec l'avènement du Web, la façon dont on magasine, la façon dont on échange. C'est un vrai défi que l'arrivée du Web, autant à ce niveau-ci que dans la lutte à la criminalité, que dans toutes les relations interpersonnelles. Et puis c'est un premier pas qu'il va falloir se questionner à ça, ce niveau-là: l'impact sur notre société, puis, nous, comme législateurs, ce qu'on peut faire.

Ce qui est important, des fois où je regarde le projet de loi, M. le Président... On essaie de corriger quelque chose et on fait quelque chose... on provoque un peu plus de problèmes. En voulant corriger une petite chose, on provoque un gros désavantage ou inconvénient. Ce que je dis souvent, c'est que le plus... le mieux des fois est l'ennemi du bien. Il va falloir s'entendre pour cibler exactement ce qu'on veut réprimer et ne pas, par des mesures trop fortes, envoyer la vente des billets au marché noir carrément avec... et les bandes criminalisées. Je pense qu'il va falloir faire bien notre travail avec une bonne discussion, avec des bonnes conversations avec les intervenants, les multiples intervenants. On va offrir toute notre collaboration pour bonifier ce projet de loi là, qu'il soit le plus efficace possible. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bernier): Merci de ces remarques préliminaires. Donc, je vais en profiter, bien sûr, pour souhaiter la bienvenue à tous les parlementaires et vous souhaiter de bons échanges avec les groupes qui auront l'occasion de venir présenter leurs mémoires ici au cours des prochaines journées.

Auditions

Donc, sans plus tarder, nous allons donc saluer un premier groupe, qui est l'Association québécoise de l'industrie du disque, du spectacle et de la vidéo, bienvenue, représentée par Mme Solange Drouin. Mme Drouin, je vous invite à présenter la personne qui vous accompagne. Je vous invite à faire votre présentation, vous avez environ 15 minutes. Par la suite suivront des échanges avec les parlementaire. Merci.

Association québécoise de l'industrie du disque,
du spectacle et de la vidéo (ADISQ)

Mme Drouin (Solange): D'accord, oui.

Le Président (M. Bernier): La parole est à vous.

Mme Drouin (Solange): Merci. Merci d'abord de nous avoir invités à comparaître devant vous aujourd'hui. La personne qui m'accompagne est Claude Larivée, président du conseil d'administration de l'ADISQ ainsi que président de La Compagnie Larivée, Cabot, Champagne. Je ferai la présentation. M. Larrivée se fera un plaisir de répondre aux questions. Évidemment, je lui prêterai... je le ferai également au besoin.

Alors, ça nous fait très plaisir d'être ici devant vous aujourd'hui pour vous manifester clairement notre appui au projet de loi n° 25, qui a été déposé le 7 juin dernier par le ministre de la Justice, M. Jean-Marc Fournier. Nous avions alerté le ministre quelques mois auparavant pour lui manifester tous les problèmes qui, selon nous, étaient engendrés par des sites de revente de billets de spectacle ou d'événement sportif, et nous sommes très heureux que le ministre ait agi rapidement, très rapidement, en déposant ce projet de loi. Donc, nous vous demandons, à tous les parlementaires, de l'adopter le plus rapidement possible.

Chaque année, les membres de l'ADISQ, tous les membres de l'ADISQ offrent aux Québécois des millions de billets de spectacle. Il va sans dire que chacun des membres qui produisent des spectacles ont développé une relation très privilégiée avec les consommateurs de ces billets. Ils les connaissent, ils les respectent et ils souhaitent surtout poursuivre une relation à long terme avec tous ces consommateurs de spectacles. Parce que, contrairement aux revendeurs de billets visés par le projet de loi n° 25, pour tous les membres de l'ADISQ, ou la très grande majorité des membres de l'ADISQ, ces consommateurs sont des fans dont on doit prendre soin et non, comme le pensent les revendeurs de billets, des personnes qu'on peut presser comme des citrons pour en tirer le maximum tout de suite, sans égard aux effets négatifs que cela peut produire dans l'avenir. C'est exactement cela que le projet de loi n° 25 veut corriger et nous en sommes très heureux.

Le projet de loi n° 25 veut empêcher que se poursuive justement cette pratique déloyale des revendeurs qui, par des stratagèmes cachés, et je vous invite à leur poser des questions précises sur la façon dont ils s'approprient... avec laquelle... et qu'ils utilisent pour s'approprier des billets, donc, c'est des stratagèmes cachés où ils s'approprient des billets de spectacle dans le seul but d'empêcher un fan, un consommateur, d'avoir accès à ces billets au prix établi par le producteur. On lui en demande, comme vous l'avez dit, M. le ministre, parfois 30 %, mais plusieurs fois le double, voire le triple du prix d'origine, en les bernant sur... en les amenant vers des sites... leurs sites, le site des revendeurs, qui ont toute l'apparence d'un site officiel de billetterie.

Nous avions préparé une présentation pour vous montrer comment il était facile d'être berné lorsqu'on fait appel, par Internet, à une recherche de billets. Je peux bien la faire, ça va me faire plaisir, mais je n'ai pas l'impression que vous allez voir grand-chose, mais bon... De toute façon, vous avez reçu, je pense, par... on a fait parvenir ces documents-là à la greffière qui... ils vous le seront... vous... ils seront disponibles.

Si on prend le cas de -- je vais essayer ici, oui -- Ima, qui offre des billets de spectacle. La recherche que nous avons faite, c'est: «billets Ima». Vous ne voyez peut-être pas très bien, mais les premiers sites que vous voyez qui sont dans la recherche, qu'on retrouve dans la recherche après avoir fait... lancé cette recherche sur Google, ce que vous voyez, c'est que tous les premiers sites que l'on trouve ici sur la liste que vous avez sont des... on nous dirige vers le site de Billets.ca pas seulement une fois, mais plusieurs fois.

S'il est vrai que ces sites de revente utilisent de façon judicieuse les outils de référencement, et ils le font de façon très claire, et ça réussit, mais il est clair que pour un consommateur, lorsqu'on fait une recherche aussi simple et qu'on arrive sur un site comme celui-là et qu'on clique, par exemple, sur une des... Woups! Ça ne marche pas. C'est-u supposé de marcher, là?

Une voix: Clique sur la page suivante.

Mme Drouin (Solange): Pardon?

Des voix: Page suivante.

**(14 h 30)**

Mme Drouin (Solange): Excuse-moi, Annie, je... d'accord.

Une voix: Comme ça.

Mme Drouin (Solange): O.K., merci. O.K.

Une voix: Ici.

Mme Drouin (Solange): Merci. Donc, sur ce site, quand on clique finalement sur l'entrée de Billets.ca, voici ce qu'on trouve: on trouve une photo de l'artiste, on trouve une description, évidemment, de l'artiste, le spectacle et évidemment toute l'information, ça a l'air d'un... et plusieurs personnes se font berner et pensent être sur un site officiel et peuvent rapidement s'approvisionner, évidemment, via ce site-là en pensant qu'ils sont sur un site officiel ou le site régulier, et la seule différence étant... Ça ne va pas très bien, je m'excuse. En tout cas, on va laisser faire. La seule différence évidemment, est évidemment le prix, le prix offert des billets. La seule différence peut-être, des projets de loi avec une barre peut-être qu'il y en a que... on est sur le site de Billets.ca.

Alors, c'est le genre de pratique à laquelle évidemment se livrent les revendeurs où ils font, ils concoctent finalement un site qui a toutes les apparences d'un site officiel. Et il faut se rappeler qu'un consommateur de billets ne pose cette action-là que quelques fois par année. De façon générale, un Québécois achète en moyenne un ou deux billets de spectacle par année, pas plus. Quand on parle d'un... quand on parle justement qu'il a un budget de 97 $ à dépenser pour des billets de spectacle, le coût moyen d'un billet de spectacle étant à peu près de 35 $ à 40 $, c'est donc quelque chose, c'est un acte qu'il pose de façon très sporadique dans l'année. Donc, c'est facile pour un consommateur, un Québécois, d'être confus et de penser évidemment être sur un site tout à fait ce qu'il y a de plus légitime. La seule différence évidemment vous... évidemment le prix étant différent, mais le consommateur lui-même, étant donné qu'il ne pose pas ce geste-là souvent, c'est difficile d'avoir une idée du juste prix qu'on devrait finalement charger pour un spectacle. Ce n'est pas comme une pinte de lait où on est capables de voir où qu'on a payé trop cher. Un billet de spectacle, quelqu'un nous offre un billet d'Ima à 80 $, si on ne sait pas qu'il y a un site officiel où on peut se l'approvisionner à 40 $, évidemment c'est facile de penser que c'est le coût réel de ce spectacle-là.

Lors de leur comparution, les revendeurs de billets, plus tard aujourd'hui et demain, vont tenter de vous faire croire qu'ils nous rendent service, qu'ils rendent service à l'industrie, lorsqu'ils achètent des billets, parce que, pour en offrir, faut-il qu'ils en... faut-il évidemment qu'ils en aient acheté, donc, et qu'ils nous démontrent aussi qu'il y a une demande pour des billets à un coût supérieur. C'est le service qu'ils rendent à l'industrie. Ils vont vous le dire. En tout cas, ils nous l'ont dit, à nous.

Sur le premier point sur lequel... à l'effet qu'ils nous rendent un service en achetant des billets, les revendeurs vous diront qu'ils n'achètent des billets que des artistes québécois qui ont du succès. Si ça est vrai, je vous le demande, quel service rendent-ils à un artiste qui n'a pas besoin d'eux pour vendre ses billets? Louis-José Houde, qui s'est présenté à l'Assemblée nationale en soutien de ce projet de loi là, pensez-vous réellement que Louis-José Houde a besoin que Billets-514 ou... 514-Billets ou Billets.ca... a besoin d'eux pour vendre ses billets à ses fans ou à son public? Il n'a pas besoin d'eux pour vendre ses billets.

Pour les artistes moins établis, en naviguant sur le site des revendeurs, vous allez voir qu'il y a quand même référence à des artistes... pas seulement des artistes à grand succès, mais des artistes qui sont en développement. Pour ces artistes-là, quel genre de service les revendeurs leur rendent-ils? Achètent-ils des billets dans ce cas-là? Oui, ils achètent des billets, mais seulement lorsque les critiques ont été bonnes et que la vente des billets va déjà très bien. Donc, ils décident d'acheter des billets lorsque l'artiste finalement, bien que moins établi, n'en a plus besoin et qu'eux sont certains de pouvoir les revendre plus cher aux consommateurs.

En résumé, ils aident les artistes, selon eux, mais qui n'en ont pas besoin, et, pour les autres artistes, ils attendent qu'ils n'aient plus besoin d'aide pour acheter leurs billets.

Sur le deuxième point, à l'effet que les revendeurs rendent service à l'industrie en nous démontrant qu'il est possible de vendre les billets plus cher. D'abord, disons-le franchement, l'industrie n'a pas besoin d'aide des revendeurs pour établir le prix des billets. Je vous invite d'ailleurs à poser des questions à Claude Larivée ici, à côté de moi, et aux autres intervenants de L'Équipe Spectra ou Juste pour Rire, à eux, ils cumulent plus de 100 années d'expérience dans la vente de billets au public. Alors, je crois qu'ils n'ont pas de leçon à prendre de personne pour établir un prix, d'entreprises qui sont en affaires depuis un petit peu plus que 10 ans.

Quant à la démonstration qu'il est possible de vendre des billets plus cher, pour nous, c'est la manifestation flagrante que les revendeurs ne sont pas dans le même commerce que nous, et qu'ils jouent un rôle essentiellement parasitaire aux dépens de notre industrie. Nous sommes conscients qu'il serait sans doute possible de vendre, dans certains cas, des billets à un coût plus élevé que celui demandé. Comme pour d'autres biens, il y a des personnes qui peuvent accorder une valeur extrême pour acquérir un certain bien ou encore des personnes qui ont des moyens très importants et que, pour eux, le prix a peu d'importance. Mais, pour nous, ce n'est pas des raisons suffisantes pour niveler par le haut le prix des billets pour la très grande majorité des consommateurs. Pour maintenir l'accessibilité au plus grand nombre, l'industrie ne demande pas nécessairement le prix le plus élevé qu'une minorité est prête ou encore capable de défrayer. Encore une fois, l'industrie n'a pas besoin des revendeurs.

L'autre grand argument que vous allez entendre et que mettront de l'avant les revendeurs est celui qu'ils rendent service cette fois aux consommateurs. Pour répondre à cet argument, il est important de rappeler d'abord que le commerce des revendeurs, c'est essentiellement deux grandes activités. La première activité dont on a parlé, où ils achètent des billets de spectacle en engageant une armée de personnes, comme on l'a dit ce matin en conférence de presse, pour s'approvisionner en billets et ensuite les remettre à la vente sur leurs propres sites, en les vendant plus cher. Ça, c'est eux personnellement qui engagent des gens pour le faire. L'autre activité consiste à s'approvisionner finalement auprès de gens qui, eux, veulent se départir de leurs billets. Soit qu'ils ne peuvent plus y aller ou... Et, selon eux, ce faisant, ils rendent un service à la population.

Pour la première catégorie d'activité, je pense qu'on en a assez parlé pour voir clairement que de limiter l'accès au juste prix en le vendant plus cher, il n'y a rien là qui peut vous laisser croire, je pense, qu'ils aident... qu'ils sont au service du consommateur, parce qu'eux, ils veulent en tirer le maximum.

Pour le deuxième genre d'activité des revendeurs, qui est de rendre service aux personnes qui veulent se départir de leurs billets, il faut peut-être analyser un petit peu plus en détail qui est le consommateur à qui ils rendent service, parce que, lorsqu'ils s'approvisionnent auprès de ces gens-là qui veulent se départir de leurs billets, ils ne se contentent pas finalement de les revendre au même prix. Ces consommateurs donnent, c'est-à-dire mettent ces billets-là en vente sur le site des revendeurs et demandent au site d'en tirer le maximum, et le profit qui sera fait sera partagé entre billets... les revendeurs, qui gardent un 15 % de commission, et tout l'autre lot de profit -- si le billet, par exemple, valait 100 $ et ils le vendent 200 $ -- tout le reste est reversé à la personne qui veut se répartir des billets. Donc, la personne qui, elle, veut se départir de ses billets finalement fait de l'argent avec ses billets, c'est ce qu'ils offrent, et en plus au passage les consommateurs... c'est-à-dire les revendeurs gardent une commission de 15 %.

Donc, les vrais consommateurs... mais... et... donc ils sont... ils s'approvisionnent à deux sources: leurs propres sources et la source de sous-revendeurs, si je peux dire. Il y a évidemment des gens qui sont vraiment aux prises avec des billets et qui ne peuvent, par exemple, se présenter au spectacle. Mais il y a plusieurs personnes, il semblerait, de la bouche même des gens de Billets.ca et Billets-514... 514-Billets, pardon, qui achètent, par exemple, 10 billets, en gardent deux pour leur propre usage, offrent en vente par le biais des sites huit billets à Billets... aux revendeurs et finalement paient leurs propres billets avec les profits qu'ils font de la vente par le biais des sites des revendeurs. Ces personnes-là sont un peu comme... ils sont organisés... Finalement, ça fait partie de l'armée des revendeurs, à savoir d'autres personnes qui ont vu là une possibilité, oui, de faire des profits, mais ce n'est pas les vrais consommateurs de spectacles, de billets de spectacle. Peut-être qu'ils se gardent des billets au passage, mais finalement cette activité-là pour certains évidemment devient aussi une activité lucrative sur le dos des vrais fans qui au bout du compte, eux, veulent acheter un billet de spectacle...

Une voix: ...

Mme Drouin (Solange): Je dois conclure?

Le Président (M. Bernier): Oui, vous devez conclure.

**(14 h 40)**

Mme Drouin (Solange): Je dois conclure. Finalement, ce qu'on... évidemment, on pourra y revenir, mais certains... les billets... C'est que les revendeurs vont tenter de vous faire croire qu'il s'agit là d'un combat d'arrière-garde, hein, qu'on est un peu arriéré de penser faire un projet de loi à ce sujet-là. Je vous invite à regarder au niveau canadien les législations qui sont comparables. Il y en a en Ontario, il y en a dans l'Ouest. Il y a, très récemment, pas plus tard que le 7 septembre dernier, un projet de loi français qui a été déposé, qui vise exactement le même effet. Aux États-Unis, c'est un débat, je dirais, qui fait rage. Alors, étant donné que c'est une pratique qui s'est développée au fil des ans avec le développement d'Internet, c'est normal que nous ne soyons pas intervenus il y a 12 ans. Le phénomène s'est amplifié, s'est... a monté et qu'on intervienne maintenant pour freiner ce développement-là, on trouve qu'il est grand temps.

Documents déposés

Le Président (M. Bernier): Merci beaucoup, Mme Drouin, merci. Avant de donner la parole au ministre, j'accepte le dépôt de l'étude d'impact concernant la revente de billets de spectacle et d'événement sportif. Cette étude sera disponible sur le site de la Commission des relations avec les citoyens. J'accepte également le dépôt des documents que vous avez présentés tout à l'heure. Bon, vous comprenez que c'était assez difficile pour les gens de bien voir. Ils seront également disponibles sur le site de la Commission des relations avec les citoyens pour fins d'information.

Alors, sans plus tarder, pour un premier bloc, M. le ministre, la parole est à vous.

M. Fournier: Bien, je... Mais merci, M. le Président. Mme Drouin, M. Larivée, merci d'être là et de lancer cette consultation. Je vais peut-être commencer par la fin de votre présentation, où vous avez fait référence au projet de loi français, qui -- j'en profite pour mentionner -- démontre donc que la préoccupation que nous manifestons, elle est quasi universelle. En tout cas, dans un bon nombre d'économies comme la nôtre, on voit bien que le problème est en progression et que les législateurs tentent de la contrôler.

Je vais prendre la peine de souligner à ceux qui ne le savent pas que dans cette proposition française, en fait, ce qu'on dit, c'est... Il y a une différence avec la nôtre. Ce qu'on prohibe, c'est le fait, de manière habituelle et sans autorisation du producteur, d'offrir à la vente. En fait, en France, ce qu'on est en train de faire, c'est de barrer, de dire: Il n'y aura pas de revente, sauf évidemment sur autorisation du producteur initial, mais là, ma foi, dans la chaîne de titres, on est dans la même lignée. L'approche qu'ils ont en est une de prohiber complètement la revente.

Je le souligne parce qu'on a fait commentaire sur notre projet de loi à l'effet qu'il était catégorique, allait trop loin et prohibait. Je prends la peine de dire, et je vais le relire, puisqu'on lance la commission, l'article dit ceci: «Aucun commerçant ne peut exiger d'un consommateur, pour la vente d'un billet de spectacle, un prix supérieur à celui annoncé par le vendeur autorisé...» La revente reste possible, pas au prix supérieur du producteur initial. Je prends la peine de le dire, parce qu'on voit là, dans notre législation, que nous acceptons la revente. Jusqu'à un certain point, on va nous proposer que nous réglementions. Nous le faisons: il ne peut pas y avoir de revente à un prix supérieur du prix qui a été... qui était le prix initial.

Ça m'amène, comme logique -- et puis j'en discute avec vous -- de retrouver les arguments, là... Certains qui vont venir devant nous vont sans doute nous dire qu'il n'y a pas de chaîne téléphonique et qu'il n'y a aucun appareil informatique qui permet d'acheter de façon systématique des billets. Je vais vous poser... Ce sera ma deuxième question. Par contre, lorsqu'on s'intéresse au consommateur qui aurait acheté un billet... Je parle d'un... Disons, mon voisin a acheté deux billets. Il a acheté deux billets, il veut les revendre. Il n'y va pas, il est pris, il s'en va en voyage, bon, il veut les revendre. Et là il y a l'argumentation que ces sites-là permettent de le reprendre, de le revendre. Maintenant, en France, ce ne sera plus possible à moins d'une autorisation avec le producteur. Ici, ce serait toujours possible s'il le revendait à un prix qui n'est pas supérieur.

Croyez-vous qu'il y a une utilité pour les gens de pouvoir utiliser un service comme celui-là et de revendre leurs billets? Et, de la façon dont notre projet de loi est fait, il n'y a qu'à revoir, puis on demandera bien sûr aux gens qui font la revente, mais il n'y a qu'à revoir la façon dont ils procèdent. Si celui qui a acheté le billet, mon voisin, s'en va en voyage et veut le revendre, il l'a payé 100 $, mais la décision de voyager vient par la suite, va vers le revendeur et dit: Écoute, moi, je suis pris avec, je te le vends à 80 $, puis donne-moi 80 $ pour mon bien, et lui le revendra à 100 $. On peut même minimiser les risques. J'imagine que sur des plateformes ils peuvent même dire: Bien, je prends ton offre, mais donne-moi un peu de temps pour aller trouver un acheteur, et... Mais, à la limite, il pourrait même ne pas y avoir de risque. Je ne suis pas un spécialiste, mais on commentera là-dessus. Mais est-ce qu'il n'y a pas une pertinence -- je profite donc de l'argument de la France -- une pertinence à organiser un système, là, de revente au bénéfice du consommateur et qui peut être fait dans le cadre de l'article qui est sur la table présentement?

Le Président (M. Bernier): M. Larivée ou Mme Drouin. M. Larivée.

M. Larivée (Claude): Oui.

Le Président (M. Bernier): La parole est à vous.

M. Larivée (Claude): Votre exemple est excellent. Il y aurait effectivement pertinence. C'est un truc qui existe déjà aux États-Unis sur certains marchés sportifs, mais tout ça se fait dans le cercle des ayants droit. Donc, l'équipe de football américaine revend certains billets de ses abonnés à d'autres clients, mais donc c'est l'ayant droit qui reprend possession du billet pour le revendre dans une structure contrôlée, donc...

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le ministre.

M. Fournier: ...cadre-là, ce n'est... il peut le revendre à un prix supérieur du prix initial?

M. Larivée (Claude): Il le revend au prix du marché, donc...

M. Fournier: ...initial, prix du marché, c'est toujours confondant. Il y a des gens qui vont me dire que le prix du marché...

M. Larivée (Claude): Bien, il y a une nuance, dans le sens qu'on parle d'abonnements à des événements sportifs, donc est-ce que le prix d'un abonnement vaut... est le même pour une saison que pour... que par représentation, si on veut, là?

M. Fournier: ...ce qu'on est en train de dire. Je vais essayer de prendre un exemple. On a des billets de saison dont la valeur unitaire pour une partie serait de 125 $, mais, comme c'est en billet de saison, on les vend 110 $, le prix unitaire étant 125 $...

M. Larivée (Claude): ..de 125 $, qui est le prix unitaire.

M. Fournier: ...il les revend à 125 $ et non pas à 150 $.

M. Larivée (Claude): Exactement.

M. Fournier: Parfait. Donc...

Mme Drouin (Solange): Sur l'exemple que vous donnez, je trouve... Je vous avoue que, moi, quand on a commencé à regarder ce dossier-là, je comprenais tout à fait le modèle que vous êtes en train d'exposer. Je ne comprenais pas pourquoi il y avait... que le modèle... C'est-à-dire, je comprenais pourquoi, mais je voyais qu'il y avait un autre modèle possible, qui était justement... Si on veut dire qu'on rend vraiment personne à quelqu'un qui est pris avec des billets, qui veut s'en départir, bien, moi, c'est... tout à fait, je serais prête à perdre un peu sur mes billets, ne pas perdre tout. Alors là, à ce moment-là, le profit, il pourrait y avoir quand même des sommes qui pourraient... Il y a un modèle d'affaires qui peut se développer quand même pour des reventes à ce moment-là avec un frais de commission, dans le fond. C'est ce que ça veut dire.

M. Fournier: ...une vertu, honnêtement, dans l'argumentation que nous font les revendeurs. Il faut bien être capable de voir la vertu qu'il y a là-dedans. Il y a, pour certaines personnes, l'utilisation d'une plateforme pour se faire rembourser un billet parce qu'ils ne peuvent pas y aller. Alors, il y a... et puis je tiens à le dire parce que le projet de loi, si on revoit le modèle d'affaires, permet d'arriver à cette fin-là, et je crois -- vous me le permettez -- je crois que les revendeurs, à ce moment-là, seraient justifiés de dire qu'ils aident l'industrie, parce que, comme on achète des billets parfois de six à huit mois, à 10 mois à l'avance, ils seraient en train de donner une raison de plus de procéder à l'achat.

Le Président (M. Bernier): M. Larivée.

M. Larivée (Claude): Si je peux me permettre de préciser la réponse... Aussi, il faut s'entendre quand même qu'un tel événement, c'est-à-dire la cancellation d'un détenteur de billets pour cas de force majeure ou autre, c'est un truc minimum. Donc, dans une salle de 900 places, là -- moi, j'ai un parc de salles -- dans une salle de 900 places, il y a au maximum deux clients par soir qui ne peuvent se présenter pour des raisons diverses. Donc, ça ne justifie pas une banque de 100 billets, par exemple, sur un parc de 900.

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le ministre.

M. Fournier: J'aimerais que vous me reparliez de... Je vais nommer Louis-José Houde, là, mais ça pourrait être un autre, là. Mais l'exemple a été pris parce qu'effectivement il a porté le message que vous avez... la problématique que vous avez depuis un certain temps l'an dernier. Il est venu lors de la présentation du projet de loi. Les revendeurs ont exprimé qu'il n'y avait aucun problème, que tout cela n'était que de l'invention puisqu'ils avaient participé à hauteur d'à peine 1 % -- je pense, c'était point quelques pour cent -- à la revente des billets dans son cas. Prenons cet exemple-là ou d'autres exemples. Est-ce que l'industrie est en mesure de dire ici à la commission qu'il y a vraiment un problème? Parce que je sais à l'avance que ceux qui vont suivre vont dire qu'il n'y en a pas.

Le Président (M. Bernier): M. Larivée.

**(14 h 50)**

M. Larivée (Claude): Oui. Donc, en plus de mon rôle à l'ADISQ, dans le parc de salles que je gère, il y a une salle qui est très performante en ce moment sur le marché, qui s'appelle L'Étoile, à Brossard, qui est un lieu... qui est un peu le lieu chouchou, dans le type de salle traditionnelle qu'on trouve en région, des revendeurs, donc. C'est un endroit qui a énormément de succès. Et, sur, donc, une salle de 900 places, on a une centaine de billets... un peu moins par les temps qui courent vu la situation, mais on avait jusqu'à une centaine de billets, donc, qui étaient réservés par les revendeurs pour les spectacles de tête d'affiche.

Louis-José Houde, lors de sa dernière tournée, a fait une trentaine de dates dans notre salle, L'Étoile, et ce qui a mis la puce à l'oreille de Louis-José à l'époque, c'est qu'il performait, et il savait que des rangées très précises de la salle étaient réservées à son fan-club. Et il savait que les gens de son fan-club -- donc le fan, hein, le truc le plus important pour l'artiste -- avaient acheté ces billets-là. Et il se retrouvait à performer soir après soir devant, mettons, la rangée C, D, E, dans laquelle il y avait des trous. Et il se dit: Bien, c'est étrange quand même, c'est un drôle de hasard. Ce sont mes fans les plus mordus, et il y a des trous à chaque soir. Jusqu'à ce qu'il se rende compte finalement que les revendeurs avaient pris possession... avaient accès à son fan-club et donc mettaient la main sur les meilleurs billets, soir après soir, et tentaient de les revendre. Bien là, il y avait insulte ajoutée puisqu'il prenait soin de ses fans, et là les gens se retrouvaient à acheter les billets de ses fans au double du prix. Donc...

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le ministre.

M. Fournier: Revenons sur le 0,5 % ou 0,7 %. De la façon dont vous faites la description, lorsqu'on fait de la revente commerciale, appelons ça comme ça, on n'achète pas L'Étoile au complet. On achète quelques rangées. Pourquoi on achète ces rangées-là? Est-ce qu'on achète des billets dans tout le Québec ou on en achète dans quelques endroits. Comment ça fonctionne?

M. Larivée (Claude): Je pense que le revendeur court après le succès -- Solange l'a dit dans sa présentation -- donc, les artistes qui ont du succès, qui performent dans des salles autour desquelles il y a un grand bassin de population, donc, bien sûr, Montréal et sa ceinture, bien sûr, Québec et sa ceinture et, bien sûr, le grand territoire aussi... donc, je ne sais pas, les Sherbrooke et Gatineau de ce monde principalement, et ça, autant donc dans l'événement culturel que l'événement sportif.

Le Président (M. Bernier): Oui, allez-y, Mme Drouin.

Mme Drouin (Solange): Si je peux compléter, l'étude qui a été déposée, que vous avez déposée, il me semble, fait... précise qu'il y a 14 % des billets qui seraient finalement... que s'approprient les revendeurs de billets. Alors, c'est à peu près 14 % du total de la masse des billets.

M. Fournier: Mais pour le bénéfice... parce que... je ne sais pas... encore un peu de temps?

Le Président (M. Bernier): Oui. Oui, oui, allez-y, M. le ministre. Il n'y a pas de problème.

M. Fournier: Pour le bénéfice de nos compréhensions respectives et à ceux qui nous écoutent, quand on ne connaît pas ça puis qu'on entend la problématique, on se dit: Ah! Bien, il y a des gens qui achètent les billets puis créent une rareté -- théoriquement, c'est possible -- et après ça les revendent. Ce que vous nous dites, c'est: La rareté n'est pas créée pour... Même pour un artiste vedette, là, parce qu'on court après les succès, vous dites: On n'achètera pas... Les revendeurs ne vont pas acheter tous les billets de la salle et ne vont pas acheter toutes les salles. C'est ce que vous nous dites. La...

M. Larivée (Claude): Bien, moi, je vous parlais de mon... de l'exemple précis, donc, de L'Étoile où, à la différence d'un spectacle au Centre Bell de Madonna, par exemple, où tu as une ou deux représentations, donc, effectivement, là, il y a moyen de créer rareté. On peut acheter le plus de billets possible en salle et les revendre par la suite. Dans les salles du Québec, les artistes québécois peuvent aussi se présenter plusieurs fois sur une tournée. Donc, il y a rareté, mais c'est une rareté éphémère.

Et ce qui rend, dans le fond, je vous dirais, le fait que le consommateur s'est acheté un billet deux fois plus cher encore peut-être plus effrayant que celui de l'achat d'un billet trop cher sur un événement unique, c'est-à-dire que pourquoi la dame qui s'est achetée deux billets pour Véronic Dicaire aurait payé ce prix-là si finalement il y avait encore des billets disponibles sur le marché?, c'est... ça amplifie le problème. On reçoit vraiment des appels au quotidien de clients qui s'aperçoivent, soit en passant dans la salle et en étant sur les lieux, donc en voyant une liste de prix, qu'ils se sont retrouvés sur un site qu'ils pensaient être le site officiel et qu'ils ont acheté leur billet deux ou trois fois trop cher. Ou, en étant assis à côté de leur voisin qui, finalement, dans une discussion de... amicale, le voisin dit: Bien, j'ai payé mes billets 45 $ et, ah, moi, j'ai payé mes billets 90 $. Qu'est-ce qui s'est passé? Quelle est la différence, là? Est-ce qu'il y a une limousine qui m'amenait à la salle?

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le ministre.

M. Fournier: Alors, si je comprends bien l'argument à l'effet qu'on aurait transigé par l'intermédiaire d'un revendeur commercial seulement 1 %, disons, des billets de Louis-José Houde, cela témoigne de 1 % de l'ensemble des billets dans toute la province, dans toutes les salles, pour chacun des sièges de chacune des salles. Et le 1 % peut sembler petit. Par contre, si la stratégie du revendeur est plutôt de cibler les meilleures places dans les meilleurs spectacles, là on commence à avoir un effet qui est un peu plus important sur, un, l'occupation de la salle, et sur la marge de profit qui peut être faite, à ce moment-là.

Le Président (M. Bernier): Mme Drouin.

Mme Drouin (Solange): Moi, la question que je vous proposerais de poser aux revendeurs est: Le 1 %, que devient-il lorsqu'on applique le pourcentage sur les billets que, eux, offrent que... seulement sur les salles où eux ont acheté des billets? Parce que là c'est 1 % du total; ils n'achètent pas des billets sur l'ensemble des salles du Québec. Ce pourcentage-là devient quoi lorsqu'on veut savoir le nombre de billets qu'ils ont acheté sur le total des salles et des soirs qu'ils ont acheté? Je suis certaine que c'est beaucoup plus que 1 %.

Le Président (M. Bernier): Merci.

M. Fournier: On assiste de plus en plus... En fait, «de plus en plus», je dis ça, parce que, dans les remarques préliminaires, je parlais de Roland Garros, mais c'est Arcade Fire, il y a, quoi, il y a trois semaines, peut-être, je ne sais plus, ça ne fait pas longtemps, en tout cas, qui ont utilisé un système de vente à la porte avec carte de crédit. Pourquoi sentent-ils le besoin de faire ça? Dans le fond, on pourrait présumer que, si les billets sont vendus, tout le monde est content. Pourquoi, du côté artistique, on souhaite avoir une relation privilégiée? Je pense que c'est leur argumentation, là, qui était de dire: Écoutez, nous autres, on ne veut pas d'intermédiaire entre nous et notre public. Pourquoi cette valeur, que j'oserais appeler artistique, est-elle si importante? Expliquez-nous-la.

Le Président (M. Bernier): M. Larivée.

M. Larivée (Claude): L'artiste, on s'entend, n'est pas une marionnette, c'est quelqu'un d'intelligent qui a le contrôle de son image. Contrôle de son image dit, donc, contrôle de son rapport à son public, ses fans. Un artiste sans public, sans fan, ce n'est rien, hein, un artiste devant une salle vide, ce n'est personne, c'est quelqu'un qui est en répétition. Plus l'artiste est respectueux de son public, plus grandes sont ses chances d'avoir une longue carrière et d'avoir un impact culturel important sur une nation.

Des gens comme Arcade Fire, moi, je travaille avec les Cowboys Fringants, les gens comme les Cowboys Fringants, aux États-Unis les gens comme Bruce Springsteen, à l'international les gens comme U2 sont des gens qui ont un rapport avec leurs fans qui est un rapport de communauté. Donc, ils savent et contrôlent le prix des billets en salle de leur performance, contrôlent leur image, l'utilisation de leur image, sont soucieux de l'utilisation de leur image. Et la situation de la revente de billets nous amène dans un contexte qui va souvent à l'encontre de ça. Donc, pour Arcade Fire, qui a un contrôle sur ses prix de billets en salle, bien de savoir que ses fans n'auraient pas accès à ces billets et que, finalement, ces billets seraient revendus à travers des sites de revente, bien, c'est un drame.

Il y a un groupe américain qui, au printemps, qui s'appelle LCD Soundsystem, puis c'est des... disons que ce sont des amis d'Arcade Fire, un groupe qui a eu une carrière importante, mais dans les circuits en marge, et qui finissait sa carrière deux soirs au Madison Square Garden à New York. On s'entend que ce n'est pas le... ce n'est pas le garage de... ce n'est pas mon garage chez moi, là. Et ils ont mis pour leurs fans en vente les deux soirs au Madison Square Garden, et les deux soirs ont été vendus en quelques heures, et les fans n'ont mis la main sur aucun billet. Les billets avaient été achetés par des revendeurs. Ils ont dû, donc, faire des concerts supplémentaires dans les semaines précédant le Madison Square Garden, on s'entend, pour le respect de leurs fans, où ils ont appliqué le système appliqué par Arcade Fire, c'est-à-dire le système du client identifié chaque soir du spectacle. Ce n'est pas mal, c'est possible, c'est une clientèle jeune qui est capable d'attendre en ligne une heure ou deux à la porte avec sa carte de crédit puis sa photo passeport. Ce n'est pas nécessairement le cas des clients du Grand Théâtre de Québec, des clients de L'Étoile à Brossard, des clients de la Place des Arts et autres.

Puis je reviens sur les Cowboys Fringants, mais... Donc, les Cowboys Fringants, depuis toujours, vous savez, les Cowboys Fringants, c'est plus de 1 million d'albums vendus au Québec, c'est des centaines de milliers de billets vendus partout à travers le Québec, c'est des gens qui sont populaires de Port-Cartier jusqu'à Gatineau en passant par où vous voulez. Ils ont fait trois fois le Centre Bell. La dernière fois, ils se sont retrouvés avec leurs photos sur le site de revente des vendeurs de billets avec leur biographie, avec un truc qui semblait officiel et avec des billets qui étaient jusqu'à 80 $, alors qu'ils avaient tenu à être accessibles à une clientèle qui est la leur et qui est jeune et ils avaient limité le prix de billet au Centre Bell à 40 $. Leurs fans leurs disaient: Mais pourquoi avez-vous fait ça? Pourquoi avez-vous mis vos billets aussi chers? Parce que certains fans s'étaient retrouvés sur ces sites-là en pensant qu'ils étaient sur les sites officiels. Il y a problème.

Donc, problème pour Louis-José Houde, problème pour Arcade Fire, problème pour les Cowboys Fringants, problème pour Bono de U2, problème pour Bruce Springsteen, problème en général. L'artiste contrôle son image, possède son image et, s'il n'est pas là, bien, il n'y a personne pour chanter à sa place, hein, puis il n'y a personne pour écrire les chansons à sa place, puis il n'y a pas toutes ces chansons-là qui résonnent dans nos têtes, là, c'est...

**(15 heures)**

Le Président (M. Bernier): Merci.

M. Fournier: Je ne sais pas s'il nous reste...

Le Président (M. Bernier): Bien, quelques... environ une minute...

M. Fournier: Bien, peut-être juste pour... je le dis, puis il y en a peut-être d'autres qui vont suivre qui vont pouvoir répondre aussi: On peut bien faire toutes les mesures législatives qu'on veut -- je pense que c'est toujours de l'aide, je pense que ça nous permettrait d'endiguer un peu une problématique -- il reste qu'il peut y avoir toujours des tentations d'aller chercher le succès pour en profiter un peu.

Est-ce que, du côté des producteurs, on a imaginé des moyens technologiques? Est-ce qu'il existe des... Je sais que plusieurs courent après, on a vu tantôt la... Je ne pense pas que c'est un moyen technologique, là, d'attendre en ligne avec sa photo passeport, là, mais est-ce qu'il y a des moyens qui peuvent aussi être pris par les producteurs?

Le Président (M. Bernier): Courte réponse, M. Larivée.

M. Larivée (Claude): Des moyens, des moyens... Bien, il y a... Mis à part le rapport direct avec un public, et donc l'identification du public à l'achat de son billet, là, si on veut, il y aurait des moyens de dynamisation de billetterie mais qui ne feraient que faire de nous des compétiteurs de revendeurs qui ne sont pas des vendeurs officiels. Donc...

Conscientisation du public, mais, comme Solange le disait, quelqu'un qui s'achète un billet par année, bien, a peut-être d'autres chats à fouetter au quotidien. Donc...

Le Président (M. Bernier): Merci. Nous allons donc passer du côté de l'opposition officielle. M. le député de Beauharnois.

M. Leclair: Merci, M. le Président. Bien, tout d'abord, Mme Drouin, M. Larivée, je vous remercie d'être présents. Ma première question irait peut-être pour bien comprendre le phénomène, là, un peu moins familier, moi, avec tout le monde du spectacle, mais j'imagine qu'il y a beaucoup de gens qui vont nous suivre qui n'ont peut-être même pas eux aussi la familiarisation. J'aimerais un peu voir le pourcentage, qu'on prenne au Quartier Dix30 ou ailleurs, le pourcentage via l'artiste, le producteur... Lorsqu'il réserve une salle, on sait que l'artiste doit se réserver quelques billets pour sa parenté, là, s'il est proche de matante, c'est bien comprenable. Le producteur s'en réserve sûrement une couple de billets lui aussi, le fan-club, si certains artistes ont des fan-clubs, puis, après ça, les revendeurs qui arrivent, eux. Donc, après ça, il va rester la place du consommateur.

J'aimerais avoir à peu près le portrait qui, d'après vous, là... on ne peut pas être précis pour chaque spectacle, là, mais le portrait global de ces pourcentages-là pour voir combien qu'il reste de vrais billets pour les consommateurs.

Le Président (M. Bernier): M. Larivée.

M. Larivée (Claude): Les diffuseurs au Québec, donc, qui ont des salles semblables à celle de L'Étoile, et on s'entend, là, c'est la plupart des diffuseurs de grand centre, donc, sur une salle de 900 places, il y a 12 billets au contrat qui sont réservés pour l'exploitant de salle, et ça inclut ses commanditaires, s'il y a lieu. Et l'artiste a l'équivalent, donc a aussi 12 billets à sa disposition pour sa famille, sa tante, son oncle. Si ces billets-là ne sont pas utilisés, il est dans l'usage de les remettre en circulation pour que les consommateurs puissent en profiter. Et bien sûr aussi parce que le revenu aide à payer les dépenses.

Ensuite, bien, fan-club... Tout le monde n'a pas un fan-club organisé comme Louis-José Houde, c'est-à-dire que tout le monde a des fans, quand tu est populaire, tu as des fans. Certains artistes ont des fan-clubs organisés, d'autres non. Donc, Michel Louvain a des fans, mais ses fans, dans le fond, s'achètent le plus vite possible les meilleurs billets. Louis-José Houde a un fan-club, lui, organisé. Donc, la nuance, là.

Le fan-club de Louis-José Houde, par exemple, c'est quelques rangées dans la salle, donc, j'imagine, une quarantaine de billets, quelquefois jusqu'à cent billets, dépendamment des capacités de salle.

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.

M. Leclair: O.K. D'après vos calculs à vous -- on parle toujours d'une salle, là, de 900 places, là -- les revendeurs utiliseraient là, puis... Là, quand on parle de revendeurs, on comprend, là, qu'on cible, là, pour le moment, ces gens-là, mais il y en a plusieurs autres, là. On a des gens à la porte. On a peut-être des gens justement qui en achètent, des billets, eux-mêmes, pour jouer au revendeur, pour faire de l'argent... Ils ont... Vous estimez ça à combien, ce pourcentage-là, par spectacle?

Le Président (M. Bernier): M. Larivée.

M. Larivée (Claude): Sur une salle de 900 places, jusqu'à une centaine de billets. Donc, dépendamment du spectacle et de sa popularité. Donc, entre 40 et 100 billets, là...

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.

M. Leclair: Je reviendrais sur -- excusez-moi -- l'aspect référencement que Mme Drouin parlait, là, dans son mémoire. J'aimerais comprendre pourquoi et en quoi le projet de loi, lui, face au référencement -- en ce moment, là, c'est une compagnie connue québécoise, là, qui exploite ce site-là -- si on met une loi québécoise puis... Là, tantôt, on parlait, on a le même phénomène, là, lorsqu'on va au Madison Square Garden à New York. En quoi le projet de loi va nous... va arrêter tout ça? Quelqu'un peut faire du référencement, on parle de l'inforoute Web, là, ça peut être n'importe où, là, on comprend bien. Alors, ce projet de loi là qui est un début... Mais pour s'assurer d'arrêter ça... Un référencement peut être fait par n'importe qui ailleurs qu'au Québec puis avoir la même portée. Est-ce qu'on est certains qu'on va relier notre problème de référencement parce que cette billetterie-là, en ce moment, semble avoir des outils un peu plus efficaces?

Puis de là ma deuxième question. Votre réseau primaire que vous appelez votre réseau officiel, eux, pourquoi qu'on ne peut pas exiger d'eux qu'ils soient les premiers en référencement ou avoir des exigences minimales de dire: Lorsqu'ils voient des gens que, ça peut être billetterie, ça peut être d'autres... On n'est pas capables d'avoir ces exigences-là pour, on dit, là, pour combien de milliers de billets qui se vendent par année? J'imagine qu'ils devraient être les «top classes», eux autres, ces gens-là?

Le Président (M. Bernier): M. Larivée.

M. Larivée (Claude): Ça, je vais répondre à votre deuxième question en premier. Référencer un spectacle sur un moteur de recherche, ça coûte, hein? Donc, on s'entend, je n'ai pas de chiffre à vous donner, là, moi, je ne suis pas dans ce cas-là. Donc, ça coûte... Le réseau officiel de billetterie fait quelques dollars de billet par billet vendu. Le revendeur de billets fait quelques dizaines jusqu'à 50 $ ou 100 $ de profit pur sur un billet vendu. Donc, il a les moyens de se référencer parce que le référencement devient, dans le fond, son arme principale, hein? Sans référencement, le site de revente de billets, tel qu'on le connaît sur le Web, est bien peu de choses, hein? Avant lui apparaîtront les sites officiels de billetterie, les sites de salle, les sites officiels des artistes, etc.

Donc, ça prend les moyens pour référencer le spectacle et, bien, si ça devient ta seule dépense, bien, c'est déjà plus faisable que si ce n'est qu'une dépense parmi tant d'autres et qu'il faut aussi que tu paies tes ressources humaines, ton marketing, ta préproduction, ta production, tes musiciens, etc., hein?

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.

M. Leclair: Bien, je comprends ça aussi, là, mais là, si on parle que les revendeurs... puis on parle de tous revendeurs confondus, là, je reprends vos chiffres, tantôt vous me disiez 10 % -- excusez-moi -- ça inclut les gens à l'extérieur. Donc là, lorsqu'on parle de référencement, on parle que de nos amis, là, qui ont été cités, là, sur la vidéo tantôt. Ils n'ont sûrement pas le 10 % au complet. Mettons qu'ils en ont 6 % ou 7 %, là, je n'ai aucune idée comment qu'on peut séparer tous ces revendeurs-là. Mais j'imagine qu'un réseau comme Admission, et tout ça, qu'eux ne détiennent pas la clé parce qu'eux vendent quand même 90 % des billets, là. Donc, on est-u en train de dire que ces gens-là ne peuvent même pas avoir le contrôle sur la vente de billets? Je pense que, si on veut travailler à la source, je suis d'accord que je pense que c'est logique de légiférer.

Le Président (M. Bernier): M. Larivée.

M. Larivée (Claude): Le référencement est vraiment par sujet et le Réseau Admission, comme je vous le dis, ne fait que quelques dollars par billet. Je ne me plains pas pour eux, là, mais...

M. Leclair: ...le calcul mathématique de tout ça... Mais, si on dit qu'exemple, là, que si la billetterie ici qui est toujours en avant-plan a 5 % d'un spectacle, j'imagine que tous les billets vendus, là, on parle de tous, tous les spectacles partout, j'ai un petit peu de misère à croire qu'ils n'ont pas les moyens de dire: Ça devrait être... Parce que là on parle d'un marché qui est sur le Web, là. Tu sais, il faut attaquer le marché sur le Web.

Ça fait que j'aimerais bien entendre... On aura peut-être la chance de les rencontrer, ces gens-là, et de les questionner, mais ça, ça faisait partie d'un de mes questionnements. L'autre...

Mme Drouin (Solange): ...je peux juste ajouter quelque chose?

Une voix: Oui.

Le Président (M. Bernier): Oui. Allez-y, Mme Drouin.

Mme Drouin (Solange): Merci. Quand on parle de... Quand parle, M. Larivée, Claude, de 10 % d'une salle, c'est vraiment... c'est 10 % des meilleurs billets aussi, il ne faut pas oublier. Ce n'est pas... Évidemment, en termes de pourcentage total, c'est quelque chose. Mais je pense que c'est important de voir que les revendeurs n'attachent... ne s'approprient pas les billets de fond de salle, là, ils prennent vraiment les meilleurs billets. Donc, je pense que c'est important de voir que, dans toute la mécanique du spectacle, c'est quand même... ils ne choisissent pas n'importe quoi, là.

Et, sur la portée de la loi... Puis c'est clair que le référencement est une chose, mais le référencement, même si on réglait le problème du référencement, selon moi, ça ne réglerait pas l'ensemble du problème. C'est sûr que c'est un outil, le référencement, mais c'est un aspect de la confusion, ce n'est pas la confusion totale parce qu'il pourrait... Mettons qu'Admission sort avant Billets.ca, ce qui arrive quelquefois, mais ils sont deuxièmes ou troisièmes. Et, quand on arrive sur le site, il a de l'air aussi véritable, aussi véridique, aussi légal que l'autre. Alors, la confusion, elle est à plusieurs niveaux: la confusion est au niveau du référencement, c'est une chose, dans le site lui-même, les informations qui sont là. Alors, ce n'est pas le seul référencement qui va régler non plus le problème.

**(15 h 10)**

Le Président (M. Bernier): ...

Mme Drouin (Solange): Je pense que ça, c'est important de le dire et que la loi a une portée extraterritoriale. Si les sites ferment... les sites québécois devaient changer d'activité, même si l'activité de commerce allait à l'extérieur de la province de Québec, l'Office de la protection du consommateur, avec les pouvoirs qu'elle a dans sa loi, a les pouvoirs, d'à chaque fois qu'une transaction se passe avec un Québécois, peu importe où le commerçant est situé, en Ontario, aux États-Unis, ou ailleurs, il a le pouvoir d'intervenir. Alors, ce n'est pas... même si on allait... Si les revendeurs changeaient, ici, au Québec, ça ne veut pas dire que la loi devient inapplicable. Elle a une portée extraterritoriale, c'est très clair, vous pourrez demander au ministre, par exemple, de confirmer ça.

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.

M. Leclair: Bien. Peut-être une question. Je laisserai peut-être place à mon collègue à poser quelques questions. Concernant le projet de loi, en ce moment, on parle des revendeurs. On parle absolument... Il n'y a rien qui parle du consommateur. Donc, si, moi, je suis malfaisant puis je veux continuer à le faire, on ne touche pas du tout à ce consommateur-là, là. Alors, je suis surpris de ne pas vous entendre là-dessus, là. Je comprends que, même dans votre mémoire, vous visez une entreprise très spécifique, là. Moi, je le regarde, côté... pour le consommateur que tous les revendeurs font partie, puis même la personne, si le projet de loi passe, qui va acheter des billets, qui décidera de les payer plus cher même s'il n'a pas le droit, le projet de loi n'est pratiquement pas parlant du tout face au consommateur.

M. Larivée (Claude): Le...

Le Président (M. Bernier): M. Larivée.

M. Larivée (Claude): Oui, pardon. Le consommateur a rarement une telle façade professionnelle. Donc, en ce moment, ce qui dupe le consommateur, c'est la parure finalement. Si, moi, j'ai deux billets à vous vendre pour un spectacle x, il reste que je reste un individu derrière, hein, un volant ou une chaise, puis je peux vous vendre des billets. Je n'ai pas l'air d'un site officiel de revente de billets. Et, quand je vais vous passer le billet, vous allez voir le prix officiel du billet écrit sur le billet puis vous allez me dire: Pourquoi vous avez... pourquoi est-ce à ce prix-là puis qu'est-ce qu'il se passe, hein? Je ne suis pas simplement un...

M. Leclair: ...comprendre...

Le Président (M. Bernier): M. le député.

M. Leclair: ...sauf que tantôt on parlait d'une armée, là. De la manière vous parlez, là, il y a... ces gens-là ont une armée de consommateurs, là, ni plus ni moins. Parce que ce n'est pas des... C'est un paquet de petits pions qui va chercher des billets. Si, eux, dans le projet de loi, ont des amendes directement reliées à... on peut avoir... on va affaiblir l'armée un peu, là. Mais là, ici, en ce moment, dans le projet de loi, on ne vise que l'entreprise.

Mme Drouin (Solange): Si l'entreprise n'est plus là, l'armée n'existera plus non plus. Et, si le consommateur... Ce que la loi vise... la Loi sur la protection du consommateur, ça, on ne l'invente pas avec le projet de loi, là, elle ne vise qu'un consommateur versus un commerçant. Puis, s'il y a un consommateur qui, sous le couvert, essaie de se prétendre consommateur en s'appropriant 40 puis 50 billets par spectacle, l'Office de la protection du consommateur va dire: Mon ami, vous êtes un commerçant, vous n'êtes plus un consommateur. Alors, à un moment donné, il y a des limites, là, à se prétendre consommateur quand on ne l'est plus, quand on est rendu un commerçant. Alors, si une armée de sous-revendeurs n'ont plus le général de son armée pour revendre ses billets, bien, ils vont faire d'autre chose.

Le Président (M. Bernier): Merci. Le député de Drummond.

M. Blanchet: Merci, M. le Président. Je ne sais pas comment je vais faire pour vous appeler M. Larivée et Mme Drouin, mais je vais essayer.

Une voix: ...

M. Blanchet: L'intention du projet de loi me semble aussi claire que louable. Beaucoup de gens ont soulevé des questions quant à l'efficacité du projet de loi. Mettons-le en termes clairs: il y a des gens qui spéculent en créant une rareté artificielle sur des produits potentiellement à forte demande sur la base de la popularité d'un artiste. Ils déséquilibrent le phénomène normal de l'offre et de la demande et, ce faisant, vont chercher une marge de profit souvent supérieure à celle cumulative de l'artiste, de l'auteur-compositeur, du producteur et du diffuseur légitime. Toute espèce de moyen qui permettra d'endiguer, de limiter ou de mettre un terme à cette pratique me semble souhaitable et louable.

Cela dit, la question de l'efficacité a été soulevée par pas mal de gens. Je ne reste pas totalement convaincu de certains des éléments. Et je reviens sur la question du consommateur. Le consommateur que mon collègue visait, je crois, c'est celui qui va aller acheter le billet.

Lorsqu'on interdit un phénomène, on interdit le phénomène souvent des deux extrémités. Donc, on dit: Tu ne peux pas acheter un volume de billets, l'offrir de façon qui sera devenue illégale. Mais il y en a qui vont le faire pareil, puis il faudra développer, peut-être, sur la notion d'extraterritorialité, parce que j'entretiens certains doutes sur la capacité de mettre ça en oeuvre de façon efficace et à court terme. J'entretiens les doutes sur l'ouverture d'esprit du gouvernement américain par rapport à des demandes que pourrait faire le puissant gouvernement du Québec. Alors, il y a des gens qui vont aller les acheter pareil. Il doit y avoir des gens, déjà, qui, peut-être plus qu'en Ontario, mais à Plattsburgh ou à n'importe quelle ville frontière américaine, vont déjà avoir ouvert des sites, vont être prêts. Si, de ce côté-ci, le client achète quand même de ce site-là qui sera volatil, mobile puis une savonnette à attraper par les autorités, est-ce qu'il n'y a pas la nécessité, sur la base territoriale du Québec, d'interdire aussi l'achat à partir de ces sites, si tant est qu'on puisse les identifier?

Le Président (M. Bernier): M. Larivée. Ou Mme Drouin?

Mme Drouin (Solange): ...question ou c'est une affirmation?

M. Blanchet: C'est une question. Pour que ce soit clair, la question, c'est: Est-ce que la loi ne devrait pas dire: Non, tu n'as pas le droit de les acheter non plus?

Mme Drouin (Solange): Oui. Écoutez, peut-être, je pense, on peut clarifier le fait que, moi aussi, j'ai de la misère à vous appeler M. Blanchet, étant donné que vous avez été président de l'ADISQ pendant quelques années, n'est-ce pas?

Le Président (M. Bernier): ...député de Drummond.

M. Blanchet: C'est plus simple.

Mme Drouin (Solange): Ah! D'accord, je vous remercie. M. le député de Drummond. Écoutez, nous, ce qu'on... Évidemment, l'achat... évidemment, ça aurait été... Ce serait difficile, moi, je pense, de viser les personnes, chacune des personnes qui achètent des billets, parce qu'il y en a qui les achètent pour ne pas les revendre, là. Alors, je ne sais pas quel genre de contrôle on aurait pu faire au moment de l'achat. Les achetez-vous au moment de les revendre? Je pense que l'interdiction qui se passe au moment où tu ne peux les mettre en vente pour avoir un profit, je pense que c'est la bonne place où on doit se positionner. Finalement, qu'est-ce qu'on demanderait à un consommateur au moment de l'achat pour être sûr qu'il les achète puis qu'il n'a pas l'intention de les revendre? Je me demande comment on ferait pour se dire... On demanderait une profession de foi? On demanderait de signer à la reine? Je ne sais pas, tu sais?

M. Blanchet: ...réflexion, je me permettrai une comparaison amicale: on le fait bel et bien en matière de téléchargement. Le consommateur qui télécharge illégalement de la musique est coupable du téléchargement. Donc, peut-être qu'il y a une manière... Moi, c'est un angle que, je pense, qui doit être envisagé, parce que le phénomène existe.

Mon autre question, elle est très technique. On parle de «vendeur autorisé» dans le projet de loi, et Dieu sait qu'il y a des débats interminables par rapport aux terminologies utilisées dans l'industrie. Un vendeur autorisé, dans votre monde, ça ne veut pas dire grand-chose. Est-ce qu'on parle ou on devrait parler du producteur, du diffuseur, de l'ayant droit, de... Est-ce qu'il n'y a pas la nécessité de préciser la notion de vendeur autorisé pour qu'on sache bel et bien de quoi il s'agit?

Le Président (M. Bernier): Courte réponse, s'il vous plaît.

M. Larivée (Claude): Il y aurait effectivement... en tout cas, il y a matière... On pourrait préciser plus, l'ayant droit d'un spectacle étant en général l'artiste et le producteur. Mais ces gens-là, ensuite, mandatent un diffuseur qui devient aussi, par la bande, un ayant droit autorisé. Et le diffuseur, lui, a un contrat avec un réseau de billetteries officielles. Donc, ce réseau-là est aussi autorisé à...

Le Président (M. Bernier): Mme la députée de Lotbinière.

Mme Drouin (Solange): ...élément de réponse, c'est que, dans le projet de loi, on parle du «vendeur autorisé par le producteur [de] spectacle», donc il y a... c'est le producteur de spectacle qui peut identifier le vendeur autorisé.

Le Président (M. Bernier): Donc, il y a un lien. Il y a un lien qui se crée entre les deux.

Mme Drouin (Solange): C'est ça. C'est ça.

Le Président (M. Bernier): Mme la députée de Lotbinière.

Mme Roy: Bon, j'ai écouté vos prétentions puis je veux me faire un peu l'avocat du diable, parce que, quand vous allez être partis, ce ne sera plus le temps de vous poser ces questions-là puis de vous demander des éclaircissements.

Vous savez, moi, je suis la plus ancienne critique en matière de sécurité publique ici, à l'Assemblée nationale, parce que je le suis depuis 2003. Donc, il y a quelque chose que j'ai étudié beaucoup, c'est la criminalité sur le Web, et puis il y a tout un problème qui part de l'hameçonnage au vol d'identité comme ça. Puis vos artistes se disent trahis premièrement parce qu'ils ne contrôlent plus leur image parce que quelqu'un d'autre les utilise. Ça, c'est peut-être là qu'il faudrait voir à travailler pour que ce soit clair sur... Admettons que ce soit clair sur ces réseaux-là, que ce ne sont pas les vendeurs officiels, qu'ils demandent un prix plus élevé, il va toujours rester le phénomène qu'ils écrèment... Ils écrèment parce que, c'est ça, ils prennent le meilleur, là, ils laissent le petit lait puis ils prennent la crème fouettée. Eh bien, ils écrèment le marché et... bien... Mais ça, ça ne pourrait pas être un axe envisagé puis un retour à l'artiste sur le profit?

**(15 h 20)**

Le Président (M. Bernier): Merci.

Mme Roy: Tu sais, si, mettons, on prendrait le dossier comme ça puis si on se fait proposer ça, qu'est-ce que vous en dites?

Le Président (M. Bernier): M. Larivée ou Mme Drouin.

Mme Drouin (Solange): Quant aux informations qu'on retrouve déjà sur un site, là, parce qu'ils vont vous dire que déjà ils ont fait apporter des modifications, déjà sur leur site on peut voir qu'ils vendent le billet 80 $ mais, en tout petit, ici, en bas, c'est écrit «les prix d'origine varient entre 25 $ et 55 $», mettons, mais il faut toujours se rappeler qu'une personne, un Québécois achète un ou deux billets de spectacle par année. Moi, quand j'achète une affaire une ou deux fois par année, même s'il y a plein d'informations sur le site, premièrement, je ne les lis pas toutes, et je ne suis pas seule... On pourrait toujours dire: Bien, le consommateur, c'est sa faute puis, bon, s'il se fait berner lui-même, il devrait...

Mais je pense que, jusqu'à un certain point, il faut aller au-delà de ça parce qu'on sait de toute façon que, même s'il y avait plus d'informations sur le site, plus claires, mais même plus... juste plus d'informations, pourquoi l'interdiction nous apparaît la seule solution? C'est que même s'il y a plus d'informations, vu que c'est un acte que je pose tellement rarement et que j'ai de la difficulté aussi parce que je n'ai pas une connaissance à savoir c'est quoi, le juste prix d'un billet de spectacle -- je sais c'est quoi, le juste prix d'une pinte de lait mais pas d'un billet de spectacle -- bien, je ne pourrai pas me formuler un jugement, vu que je ne le fais pas souvent puis vu que la matière du billet de spectacle, c'est quelque chose qui demeure diffus. Ça fait que, pour nous, c'est pour ça que l'interdiction demeure la seule solution.

Une voix: ...

Le Président (M. Bernier): Merci beaucoup. Merci beaucoup. Malheureusement, c'est terminé. C'est court, on sait que c'est court, mais...

Mme Roy: ...il faudrait que, si vous me donnez juste trois minutes, vous limitiez aussi les réponses pour que je puisse avoir une interaction, ce serait plus facile.

Le Président (M. Bernier): Mais, écoutez, j'essaie de balancer les choses comme je fais. Et c'est moi qui préside cette commission, donc, normalement, quand il y a des questions... Si vous voulez en poser une dernière, posez-en une dernière, sauf qu'ici on a à entendre plusieurs groupes, et plus on prend des délais, plus les groupes doivent attendre, à ce moment-là.

Donc, c'est juste ça. Ce que j'essaie de faire, c'est de respecter un horaire qui est très chargé et qui demande d'être capable...

Mais c'est moi qui préside. Vous avez une dernière question? Question courte, réponse courte.

Mme Roy: Je suis tout à fait consciente, mais je vais m'imposer la discipline de faire des questions courtes pour pouvoir en poser plus puis avoir des...

Le Président (M. Bernier): Bien, posez-en... Je vous en laisse une à poser.

Mme Roy: La dernière, c'est qu'il va... J'ai lu dans le dossier de Billets.ca que c'est une fraction très marginale de billets touchant les artistes québécois de l'industrie québécoise, c'est un tiers de 1 % de l'industrie québécoise, qu'ils prétendent, que le reste, c'est des ventes à l'international. Qu'est-ce que vous en pensez, de cet argument-là?

Mme Drouin (Solange): On pense que ce n'est pas...

Le Président (M. Bernier): Mme Drouin.

Mme Drouin (Solange): On pense que ce n'est pas un argument qui peut rendre le dossier plus acceptable parce que, l'industrie, de façon générale, ce qu'on souhaite, c'est que les gens aillent voir beaucoup de spectacles. Et on sait qu'en moyenne ils dépensent 97 $ par année pour aller voir des spectacles. Si, au lieu d'aller deux fois aux spectacles pour ce montant-là, ils n'y vont qu'une fois parce qu'ils ont payé trop cher parce que quelqu'un a usurpé justement le reste, le 50 $ par exemple, alors on pense sincèrement que le billet de spectacle... Nous, ce qu'on souhaite pour l'ensemble de l'industrie... Donc, quand ils paient trop cher pour aller voir même Madonna ou U2, bien, c'est moins d'argent qu'ils risquent d'investir dans l'industrie québécoise du spectacle.

Le Président (M. Bernier): Merci beaucoup. Merci aux représentants de l'Association québécoise de l'industrie du disque et du spectacle, Mme Drouin, M. Larivée.

Je suspends quelques instants pour permettre aux représentants de Juste pour Rire de prendre place.

(Suspension de la séance à 15 h 25)

 

(Reprise à 15 h 27)

Le Président (M. Bernier): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux.

Alors, nous avons le plaisir d'accueillir, cet après-midi, les représentants de Juste pour Rire, représenté par M. André Picard. M. Picard, vous avez une période d'environ 15 minutes pour faire votre présentation. Je vous souhaite la bienvenue. Et, par la suite, suivront des échanges avec les parlementaires. La parole est à vous.

Juste pour Rire

M. Picard (André): Bonjour, M. le ministre, Mmes, MM. les députés, M. le Président. Au nom du groupe Juste pour Rire, je vous remercie de nous avoir invités à nous faire entendre dans le cadre de la présente consultation.

Je suis André Picard, vice-président, Affaires publiques et corporatives, et je suis venu vous dire que Juste pour Rire et les humoristes qu'elle produit soutiennent avec vigueur le projet de loi n° 25 sur la revente des billets de spectacle.

Comme vous le savez, le groupe Juste pour Rire est un acteur de premier plan dans le monde québécois, canadien et international du spectacle. Au cours des 30 dernières années, nous avons oeuvré en tant que producteur, gérant et diffuseur à la présentation de plus de 5 000 spectacles, 50 000 représentations sur les scènes québécoises. Nous avons collaboré avec des agents, gérants et producteurs et avec des milliers d'artistes d'ici et d'ailleurs, mais, d'abord et avant tout, d'ici.

Plusieurs entrepreneurs, artistes et artisans, sociétés de service et autres collaborateurs contribuent à la création et à la chaîne de valeurs d'un produit ou d'un bien culturel: artistes, scénaristes, metteurs en scène, éclairagistes, décorateurs, producteurs, diffuseurs et, bien entendu, les sociétés autorisées de vente de billets. Les gouvernements en font partie, puisque l'industrie culturelle québécoise, dont celle du spectacle, bénéficie du soutien du gouvernement du Québec sous forme, entre autres, de subventions et de crédits d'impôt.

En retour de la valeur que les artistes et les producteurs contribuent au produit et du risque artistique et financier qu'ils prennent, ceux-ci s'attendent légitimement à recevoir leur juste part des bénéfices engendrés, que ce soit en termes de reconnaissance, de visibilité, d'échanges commerciaux et de retombées financières. Chez Juste pour Rire, nous sommes fiers de contribuer à créer une offre culturelle originale et diversifiée dont profitent les Québécois. Notre mission de rendre les gens heureux reflète d'ailleurs notre engagement en ce sens.

**(15 h 30)**

Les systèmes de revente de billets mis en place par certaines sociétés ne nous rendent pas heureux. Ils ne rendent pas les artistes heureux. Permettez-moi de vous citer l'humoriste Guy Nantel, que certains considèrent notre comique le plus politique: «Les artistes et les producteurs de spectacle consacrent des centaines d'heures de travail et risquent des sommes colossales pour créer une nouvelle oeuvre publique. À ce compte, il m'apparaît tout à fait inapproprié que des entreprises n'ayant aucun lien avec la création d'une oeuvre et n'étant mandatées d'aucune façon par l'artiste ou le producteur profitent de la revente de billets de spectacle et encaissent des sommes substantielles grâce à leurs opérations. Je réclame donc une loi pour ce secteur d'opérations.» Guy Nantel, humoriste.

Ils ne rendent pas les consommateurs heureux non plus. Ce produit qu'est le spectacle, qui est une expérience esthétique et artistique, a une valeur économique pour laquelle un consommateur de spectacle est prêt à payer un certain prix. Quand le consommateur réalise qu'il a payé son billet scandaleusement plus cher que... et jusqu'à des fois 100 % de plus que son voisin de siège, il n'est pas heureux. En fait, personne n'est heureux, si ce ne sont que les exploitants de ces systèmes eux-mêmes. Pour nous, voir un tiers partie, un revendeur s'immiscer dans le milieu du spectacle pour détourner à son profit des millions de dollars sans y apporter la moindre valeur, c'est un affront à l'ensemble du travail minutieux de création, de production et de mise en marché pour offrir un spectacle original, de qualité. C'est aussi une attaque sur tous les autres maillons de la chaîne de valeur du spectacle, à commencer par l'artiste. Elle entraîne des conséquences à court et à long terme sur l'accessibilité du produit pour le consommateur, sur sa qualité et sa diversité, donc sur cette offre exceptionnelle célébrée de tous et reconnue à travers le monde.

Les revendeurs de billets se présentent comme une solution alternative qui permet aux consommateurs de se procurer des billets autrement inaccessibles. C'est faux. En réalité, ces revendeurs sont en concurrence avec le consommateur. Imaginez-vous, par exemple, dans une file d'attente pour vous procurer la dernière fournée d'un boulanger du coin, une demi-douzaine de personnes se bousculent... tout le monde pour acheter les meilleurs pains. Au bout de 15 à 20 minutes, ils ont mis la main sur leur butin. Ils reviennent alors pour offrir, sous une façade identique, tel un franchisé... Ils installent leurs boutiques... 40 % à 50 % plus cher ils vendent ce même pain aux mêmes consommateurs qu'ils ont commencé par tasser. C'est exactement ce qui se passe pour les billets de spectacle, sauf que ça se passe désormais sur Internet. Dans les premières minutes de la mise en vente officielle d'un spectacle, les revendeurs kidnappent littéralement des billets, souvent parmi les meilleures places, places que les fans et les consommateurs convoitent le plus et qu'ils lui revendront moyennement le versement d'un supplément, une rançon sous la forme d'une prime importante sur le prix d'achat, sans aucune valeur ajoutée. On ne peut pas appeler ça la liberté de commerce, à moins de faire reposer la liberté de commerce sur la duperie et la tromperie du consommateur et l'inégalité des chances et de l'accès.

Ici, quelques mots sur ce que l'Internet a changé dans cette situation au courant des dernières années. En utilisant les dernières technologies et algorithmes, les revendeurs s'assurent de la première et souvent de plusieurs des premières positions dans le palmarès des moteurs de recherche lorsque le consommateur cherche sur Internet à acheter un billet de spectacle. Ils s'approprient l'identité de salles de spectacle et de leurs billetteries. Ils utilisent des images de spectacles et d'artistes sans permission et sans libérer les droits. Ils créent une fausse rareté pour certains spectacles pour en revendre d'autres, affichent «complet» dans leurs inventaires.

Si je décide de transiger avec un «scalper», j'en suis conscient et tacitement j'accepte les conditions de cette transaction. Pourquoi? J'ai promis des billets à ma fille pour sa fête, je les prends à la dernière minute, j'en suis conscient. Dans le cas des revendeurs, ce n'est pas le cas: ils se cachent, se camouflent derrière un voile virtuel et assument l'identité, aux yeux des consommateurs, de vendeurs autorisés, légitimes, de premier rang.

On a aussi entendu que les revendeurs offraient une plateforme de courtage pour les consommateurs qui seraient coincés avec des billets qu'ils ne pourront pas utiliser. Deux remarques à ce sujet. D'abord, la dernière fois que j'ai fait affaire avec un courtier pour vendre ma maison, ce n'était pas le courtier qui a acheté ma maison. Il a acheté comme un intermédiaire dans la transaction entre moi, en ma qualité de vendeur, et l'acheteur, et, en retour de ses services, il a demandé une commission de quelques points de pourcentage, connue de tous à l'avance, commission payée par le vendeur, non par l'acheteur. Les sites de revente vous proposent plutôt de racheter vos billets à un prix qu'ils discuteront avec vous et les revendront ensuite avec le maximum de marge possible. Ce n'est pas du courtage. Ce n'est pas une simple commission. L'impact du «scalper» est accéléré et démultiplié par les revendeurs qui utilisent l'Internet plutôt que le trottoir.

Ensuite, le consommateur le moindrement averti sait qu'il dispose de multiples autres moyens pour revendre ses billets sur Internet, de consommateur à consommateur. Il peut notamment utiliser eBay, Kijiji, Facebook et les multiples autres sites d'annonces ou de réseautage et personne n'exigera une marge de 20 %, 30 %, 40 % au passage. Bien entendu, ce n'est pas sans risque, il y a toujours un risque d'acheter un faux billet. Dans le cas de certains événements sportifs, il peut utiliser le système consommateur à consommateur mis en place par le promoteur de l'événement lui-même. Bref, si les revendeurs en ligne sont une solution de courtage pour les consommateurs, c'est une solution à un problème qui n'existe pas, à moins de faire croire le contraire.

Juste pour Rire s'efforce d'offrir au consommateur de spectacles de la plus haute qualité à un prix qu'il sera d'autant plus disposé à payer qu'il le trouvera juste. Que les consommateurs qui veulent s'offrir les meilleures places en soient réduits à sortir des dizaines de dollars de plus parce que des revendeurs se sont immiscés dans le système sans y contribuer le moindrement est une aberration.

De plus, la valeur accordée par le consommateur à un spectacle reflète directement sur l'image de l'artiste, autant que le contenu de son spectacle et de sa performance sur scène. En marketing, une des principales composantes de la stratégie est le prix du produit. Pour l'artiste, il est essentiel de maîtriser cet élément critique de sa commercialisation dans ses relations avec le consommateur de spectacles, ses fans et son public. Il en va de son image de marque et de l'avenir de sa carrière.

On a entendu aussi certaines personnes affirmer qu'il n'existe pas une telle chose que le juste prix d'un spectacle et que la loi de l'offre et de la demande primait. Cette affirmation est hautement contestable. Vous n'êtes pas sans savoir qu'il existe en comptabilité une notion appelée la juste valeur marchande que les entreprises s'efforcent d'ailleurs d'établir à grands frais d'experts comptables et de banques d'investissement avant de conclure une transaction importante. C'est qu'il doit bien y avoir un certain nombre de critères objectifs qui permettent d'établir un juste prix avant d'acquérir un bien quel qu'il soit.

Dans le cas des billets de spectacle, on peut parler de plusieurs variables. Certaines sont des variables objectives, par exemple: les coûts d'écriture, de préproduction, de production de spectacles, les frais de la promotion, de la publicité, le coût de la salle qui varie selon le lieu et les équipements. On étudie le marché compétitif des autres spectacles et en particulier, pour nous, ceux de l'humour. D'autres sont des variables plus intangibles qui reflètent l'évaluation subjective que nous faisons de la demande, par exemple: l'image et la popularité de l'artiste, le contenu des spectacles d'artistes comparables, le nombre anticipé de représentations et le positionnement des sièges.

Mais ultimement toutes ces variables sont évaluées selon un critère incontournable qui est le grand égalisateur: la capacité de payer des consommateurs québécois. Lorsque nous établissons un prix, c'est parce que nous jugeons que ce prix nous permettra de remplir nos salles avec des fans et des spectateurs heureux d'être là tout en maintenant leur capacité financière de se payer d'autres spectacles dans la même année. Nous ne voulons pas non plus cannibaliser tout le marché avec le blockbuster d'un seul artiste. Quand on sait que le consommateur québécois dispose en moyenne de 88 $ par année pour assister à des spectacles culturels, on réalise à quel point ce jugement est essentiel et que, oui, il existe une telle chose qu'un juste prix pour un billet de spectacle.

En outre, comme le démontre le rapport d'expert livré par Raymond Chabot Grant Thornton à l'Office de la protection du consommateur, le marché du spectacle n'est pas élastique. Les revendeurs exacerbent la demande et créent une rareté artificielle. Ils étirent une capacité de payer que nous essayons de préserver. Et, si cette capacité est atteinte, le consommateur ira voir moins de spectacles ou ira dépenser son argent dans des loisirs pour lesquels il ne risquera pas de se faire rançonner, arnaquer par les revendeurs.

En fait, plutôt que d'utiliser le terme «revendeur», on devrait plutôt se référer à des entreprises comme des manipulateurs de marchés, qui introduisent une spéculation systémique à grande échelle dans le marché du spectacle. Elles interfèrent avec le mécanisme du marché. Elles rompent l'équilibre de l'offre et la demande, elles montent artificiellement les enchères dans le mépris des conséquences pour l'ensemble du marché. Ce qui risque de se produire aussi, c'est que la qualité des contenus développés par nos producteurs et nos artistes de spectacle diminuera. C'est un simple effet de dilution. L'argent que le consommateur ne peut plus dépenser sur l'offre additionnelle de spectacles, c'est autant de sommes en moins dont disposent nos producteurs pour investir dans le développement de la relève et la production d'une diversité de spectacles. Le consommateur est lésé, le milieu du spectacle est brisé dans son élan. Je cite Nabila Ben Youssef, humoriste: «Je soutiens ce projet de loi, qui permettra au public de voir plus de spectacles de qualité.»

C'est pourquoi, mesdames messieurs, nous vous demandons de voter en faveur de ce projet de loi au nom du consommateur, au nom de nos artistes, au nom de notre industrie et de notre culture et au nom d'une saine gestion des finances publiques.

Je finis, si vous me permettez, avec une dernière citation. «En tant qu'artiste de la scène depuis de nombreuses années, j'appuie l'ADISQ, L'Équipe Spectra, le groupe Juste pour Rire, RIDEAU, l'APIH et l'Impact de Montréal dans leur demande au gouvernement d'adopter le projet de loi n° 25 dans les meilleurs délais.» Stéphane Rousseau, humoriste. Merci.

Le Président (M. Bernier): Merci, M. Picard. Merci de votre exposé. Nous allons donc procéder aux échanges avec les parlementaires. M. le ministre.

**(15 h 40)**

M. Fournier: Merci beaucoup, M. Picard. Je reviendrai plus tard -- j'annonce au collègue de Drummond que je reviendrai plus tard -- peut-être à l'autre groupe, la question du consommateur, et, à l'autre bout, j'exprimerai les raisons du choix que nous avons fait à cet égard-là.

Je vais m'attarder à ce que vous nous avez présenté en vous remerciant. Je voudrais m'arrêter sur deux points avant de chercher de votre part quelques précisions sur un troisième. Je tiens à vous dire que, lorsque vous parlez de l'État qui intervient par voie de subventions ou de crédits d'impôt, vous touchez à un point qui est important pour moi. Bien sûr, la motivation première que j'ai, c'est comme ministre responsable de la Protection du consommateur où je crois qu'il y a, à travers le procédé actuel, un consommateur qui n'est pas traité correctement, équitablement et justement. J'y reviendrai dans le deuxième point, que vous avez aussi soulevé.

Mais, dans le premier point, vous avez soulevé cette cohérence de l'État qui est attendue lorsqu'elle aide un secteur économique, que ce soit la culture... Je vais prendre l'exemple du tourisme. C'est le Festival d'été de Québec, qui participait à la conférence de presse, qui nous donnait l'exemple, je crois que c'est un macaron, là, qui est vendu, qui donne accès à un ensemble de spectacles. Et, évidemment, pour fonctionner, là, il y a un certain nombre d'aide qui vient de différentes organisations, dont certaines publiques. Donc, il y a des fonds publics d'investis dans ce festival-là. Et une des raisons pourquoi il y a cette aide, c'est entre autres parce que c'est un appel touristique, je veux dire, il y a des gens qui viennent voir ça, ces spectacles-là, et qu'on attire de l'extérieur. Puis, pour nous, on trouve ça important d'aller chercher cette clientèle-là, cette activité touristique qui est une activité économique. Et il expliquait que le macaron n'était pas vendu à un prix, et là je ne vais même pas dire «juste valeur marchande», à un prix qui correspond au produit; il était vendu à un prix inférieur au produit, justement parce qu'il cherchait à attirer notamment une activité touristique pour toutes les retombées hôtelières, restaurants et autres, qu'on peut imaginer. Évidemment, il nous expliquait que ces droits d'accès, sous forme de macarons, étaient très intéressants pour les revendeurs parce que l'idée initiale était de vendre à moins cher un produit pour que plus de gens viennent.

Quand on entend un élément comme celui-là nous venir, et qu'on se rappelle que nous utilisons déjà des produits des taxes et impôts des Québécois pour aider notamment le festival et qu'on s'aperçoit que ne rien faire, on se trouve à se tirer dans le pied sans cohérence par rapport à nos interventions, je crois qu'il y a lieu de s'arrêter. Vous l'avez fait sous l'angle de l'artiste et du producteur qui demandent à ce qu'ils soient traités convenablement, que, si éventuellement il y a des retombées encore plus grandes que celles qui avaient été prévues, elles serviront d'effet levier pour d'autres activités culturelles ou touristiques. Je crois que vous avez raison.

Mais je voulais apporter l'élément encore plus loin et pousser la réflexion une étape de plus. Non seulement le crédit d'impôt... la subvention vise-t-elle à participer à ce qu'il y ait une activité culturelle, mais en plus, si cette activité peut avoir un certain niveau de profitabilité, on n'est pas fous, on va espérer que ce soit un effet levier et qu'il y en ait d'autres qui viennent. C'est un des éléments qui est derrière la motivation du projet de loi. Ce n'est pas le premier. Le premier élément qui est derrière la motivation du projet de loi, c'est à l'égard du consommateur de billets pour qu'il soit bien informé, bien au courant, qu'il fasse le bon choix et qu'il soit traité comme tous les autres.

Et vous avez fait... procédé -- c'est le deuxième point -- avec l'analogie avec la vente de la maison où le courtier s'entend préalablement, c'est son «listing», s'entend préalablement avec le vendeur. Dans ce qu'on regarde aujourd'hui, l'entente intervient plus avec l'acheteur. Et je disais d'entrée de jeu, et je veux le répéter: Je crois qu'il y a une vertu à ce que, si jamais il y a des gens qui veulent rester dans le domaine de la revente, qu'ils soient dans le domaine de la revente en chargeant la commission au vendeur et non pas à l'acheteur. On va arriver à quoi avec un système comme celui-là? Ceux qui veulent aider ceux qui ont acheté des billets mais qui ne peuvent pas y aller vont pouvoir lui dire: Toi, tu as acheté le billet, tu le savais. Tu ne peux plus y aller, tu veux le revendre, c'est ta responsabilité, c'est de ton fait que tu ne peux pas y aller, il est normal que la contribution que je te demande comme plateforme d'échange de billets vienne de ta part. On est tout à fait dans l'analogie du courtier qui vend sa maison. On aura compris par contre que d'accepter ce qui est la loi -- dans le fond, la loi, c'est ce qu'elle permet, c'est ce qu'elle envisage -- c'est que cette relation se base en se basant sur le même prix, ça se trouve à être le vendeur qui se trouve à concéder la contrepartie.

Évidemment, on comprendra que cela ne peut pas fonctionner avec les achats systématiques de billets. Celui qui veut les revendre, mais qui les a achetés, pourra difficilement se dire à lui-même: Je vais te les acheter moins cher que ce que tu as payé. Évidemment, sa marge de profit elle est ailleurs. On comprend la logique. Mais je trouvais que votre analogie se mariait bien avec le projet de loi qui, à la différence de la France, n'est pas une prohibition, mais une réglementation, et je pense qu'elle peut servir d'élément de dialogue avec ceux qui vont vous suivre.

Vous avez utilisé des termes forts comme «kidnapper les meilleures places». J'aimerais que vous nous parliez de votre expérience, de ce que vous... On nous dit que c'est marginal, les achats de billets qui sont faits par les revendeurs, et donc, lorsqu'on est, soit à l'ADISQ ou chez vous, en train de nous dire que vous avez vécu littéralement un kidnapping de meilleures places et que ça avait un effet pour vous, êtes-vous capables de nous dire quel est le niveau ou les stratagèmes que vous savez qui ont été utilisés est à ce point important, diriez-vous, pour analyser le tout comme étant du kidnapping des meilleures places?

Le Président (M. Bernier): M. Picard.

M. Picard (André): Bien, je voudrais en profiter premièrement pour parler d'un effet de théâtre que M. Bussières a fait, là, dans la dernière demi-heure, puis je m'excuse de m'être absenté quelques fois pour faire des entrevues avec les médias qu'on me demandait, puis je pense c'est important d'être disponible pour répondre aux questions, surtout dans des conditions comme celles-là. Alors, on m'a présenté, quand je me suis éclipsé dans le derrière de la salle, un bon de commande de Juste pour Rire avec M. Bussières qui datait de 2009, hein, c'est exact? Alors, bon, moi, je suis plus un porte-parole, là, je ne suis pas un producteur de spectacles moi-même, alors, j'ai dit aux médias que j'allais m'informer. Et j'ai parlé à Lucie Rozon, qui est une des soeurs, soeur jumelle de Luce, les deux productrices des spectacles d'humour de Juste pour Rire et soeurs de Gilbert Rozon, le président et fondateur du groupe, et il est exact qu'on a vendu un certain nombre de billets, je pense qu'à ce moment-là, c'était un assez grand nombre, là, quelques centaines, à M. Bussières, puisqu'on a commencé à faire affaire avec lui, parce qu'il avait une offre intéressante de vendre plusieurs billets à la fois. Et, comme vous savez, là, par exemple, dans le grand succès de Mélodie du bonheur, on a vendu plus de 10 000 billets à des tours, à des gens qui venaient de plusieurs villes pour Montréal en autobus. Des fois, on vend des billets à des entreprises. Là, cette fois-ci, on avait vendu des billets, parce qu'il en achetait un grand nombre en même temps, mais on ne savait pas sous quel genre de représentation. Ça fait que, quant à nous, peut-être qu'on n'avait pas été assez profondément dans... sous quelle forme il allait les revendre, mais depuis on n'a pas fait affaire avec lui. Et le coup de théâtre était bon, mais ne change rien à notre position aujourd'hui, qu'on ait fait affaire avec lui dans le passé et, qui sait, peut-être qu'on ferait affaire avec lui dans l'avenir s'il changeait ses pratiques d'affaires, parce que c'est vraiment ses pratiques d'affaires contre lesquelles ont en a.

Pour répondre plus directement à votre question, je ne veux pas monter quelque chose en épingle, mais souvent, pour un artiste, de se faire interpeller une seule fois par une personne qui a acheté des billets sous de fausses représentations et qui a eu l'impression d'être lésée, comme vous, il s'agit d'un citoyen qui trouve qu'il n'a pas eu le service qu'il aurait dû recevoir, on a l'intention de s'en occuper puis d'aller au fond de la question. Alors, Martin Matte, lui, il était en train de signer un autographe, puis la personne lui a dit: Ils sont bien rendus chers tes billets, Martin, qu'est-ce qui se passe, là? Lui, il a été surpris. Alors, ça, c'est un billet, c'est une paire de billets.

Pour nous, c'est comme Claude Larivée l'a dit: Souvent, c'est quelques rangées, des spectacles d'humour sont faits dans des salles qui vont de 50 à, dans le cas de nos galas, 3 000 places. Donc, de vous donner un pourcentage exact de combien de places, je pense que peut-être que M. Bussières qui va suivre va être capable de le faire mieux que moi. Ça fait que vous allez finir par avoir le chiffre en fin de journée. On ne s'est pas consultés avant nos interventions réciproques, mais je pense que ça va de quelques dizaines de billets et peut-être pour des grandes salles peut-être à une centaine ou plus. Mais, comme on a dit, souvent, ce sont des très bons billets. Des fois, c'est considéré comme les meilleurs billets, comme dans une raquette de tennis, là, il y a une place où est-ce que, si on frappe, là, la balle, elle retourne comme si on n'avait fait aucun effort, bien, là, ces places-là dans la salle, c'est les places les plus convoitées par les fans.

Et aussi, comme on a déjà discuté, nous autres, on n'a rien contre vendre des billets plus cher, là. Pendant le Festival Juste pour Rire, on a des billets, certains d'entre vous le savez peut-être, platine, ils sont à 500 $. On a des billets Club Charlot à 200 $. Les gens ont un stationnement réservé, ont un service VIP, ils ont un repas cinq services, ils ont des très bons vins. Ils ont un accès privilégié à la scène, ils ont un cocktail. Nous, on n'a rien contre un prix du billet qui peut être plus cher, que vous alliez à Cavalia ou à Cirque du Soleil, il y a un prix VIP puis il y a des primes.

Ça, ce n'est pas la prime, là, mais c'est les représentations sur lesquelles elles sont faites qui sont des fausses représentations et qui bernent le consommateur qui doit avoir... comme s'il s'adresse à la billetterie de la Place des Arts pour acheter nos billets, la billetterie du Saint-Denis, ou à notre propre billetterie, si on n'a plus de billet, bien, on dit: Mais il y a des billets ailleurs. Là, on crée une fausse impression de rareté avec un spectacle et on distrait le consommateur, on essaie de le diriger vers un autre spectacle. Voilà.

**(15 h 50)**

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le ministre.

M. Fournier: Tantôt, on donnait l'exemple... Louis-José Houde étant un humoriste, je vais vous ramener ça chez vous, j'aurais pu la poser tantôt. Mais les revendeurs donc qui achèteraient systématiquement les meilleurs billets... Là, on parlait tantôt de l'exemple des fans, dont peut-être deux ou trois rangées, si j'ai bien compris l'exemple qui était donné tantôt... Et, malgré tout, si j'ai bien compris l'effet que cela a eu sur M. Houde, c'est que les billets n'avaient pas été vendus. C'est-à-dire que le revendeur les a achetées, les meilleures places, vous les présentez, par vous et par l'ADISQ, comme étant les faciles à vendre, je penserais de prendre ça comme ça, celles qui ont le moins de risques. Pourtant, dans l'exemple qui nous est donné, néanmoins, les revendeurs n'arrivent pas à les vendre, d'où l'effet de Louis-José Houde qui dit: Moi, je voyais -- j'imagine, c'est son agent qui lui dit, là, je ne sais pas comment ça fonctionne, mais -- je voyais que la salle devait être pleine parce que tous les billets étaient vendus -- effectivement, ils avaient donc été vendus à un revendeur -- mais il y avait des trous dans ceux qui devaient être mes premiers clients. Comment vous êtes capable de m'expliquer, si c'est à vous que je dois poser la question, que les meilleurs billets dans une salle qui est, de toute façon, toute vendue, là -- puis je comprends qu'ils prennent trois rangées, mais il y en a plein d'autres rangées, là, que les gens achètent via les vendeurs initiaux -- comment se fait-il qu'on arrive avec des trous néanmoins puis il y a des billets qui ne sont pas vendus?

Le Président (M. Bernier): M. Picard.

M. Picard (André): Peut-être que les revendeurs devraient faire affaire avec des rerevendeurs ou nous les remettre, les billets, puis que, nous autres, on les revende pour eux mais on leur paierait une commission, bien entendu, puisqu'on veut opérer légitimement. Mais ça, franchement, c'est un, tu sais, un billet de spectacle, puis de bien, bien, bien gérer, jusqu'à la dernière minute, la billetterie... On a parlé des billets de l'artiste, on a parlé des billets du producteur. On garde des fois des invitations, des fois, c'est à des premières. C'est peut-être plus susceptible d'arriver quand il n'y a qu'un spectacle dans une ville à la fois, parce qu'on lance des invitations, les gens ne viennent tout simplement pas, des fois, ils envoient de la famille, vous l'avez peut-être déjà fait vous-même. Des fois, ils ne viennent pas. Eux, les revendeurs, je ne peux pas répondre pour eux, mais, comme je vous dis, donc il y a comme double fausse information.

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le ministre.

M. Fournier: Tantôt, vous avez fait référence au fait que vous ayez déjà eu, dans le passé, et peut-être aurez, à l'avenir, recours à des revendeurs, des acheteurs de bloc de sièges, vous avez parlé de en 2009, avec M. Bussières.

M. Picard (André): On le fait nous-mêmes à l'intérieur de notre entreprise pour des forfaits touristiques. À l'intérieur de l'entreprise, on achète des blocs de billets pour... à l'avance et là on se met... il y a un vendeur à l'interne qui vend ça en collaboration avec des hôteliers, par exemple. Des fois, ils les vendent avec des tourneurs. Moi, je suis responsable des affaires publiques, j'achète un bloc de billets pour faire des invitations.

M. Fournier: Premièrement, essayons de comprendre, là. Vous vendez à des hôteliers ou à des organisateurs de tours. Le billet est imprimé, là, B-1, là, c'est 100 $. Vous lui vendez 100 $, 150 $ ou 75 $?

Le Président (M. Bernier): M. Picard.

M. Picard (André): Ça dépend, là. Il y a une telle chose qui s'appelle la gestion dynamique du prix d'un billet. Des fois, ça va dépendre de la demande, des fois, ça va dépendre du nombre de billets qui sont achetés, comme n'importe quoi, là. Il y a des rabais qui sont faits sur le volume. Un tourneur qui achète des billets, il a une force sur le marché. Ça va dépendre aussi dans le timing. Nous-mêmes, on fait des rabais importants sur des billets quand la date du spectacle arrive.

M. Fournier: Je veux dire, je comprends bien, je veux dire... Vous, vous êtes un spécialiste, moi, je n'y vais pas souvent. Pas que je n'aime pas rire, remarquez bien, là, mais je ne vais pas, malheureusement pas assez souvent voir des spectacles. Mais je peux comprendre facilement que, si vous vendez... Dans l'exemple que je prenais tantôt, vous avez évalué que le billet vendu à l'unité vaudrait 100 $, mais que quelqu'un veut servir d'intermédiaire avec qui vous prenez entente, donc une entente entre le producteur et le revendeur -- jusqu'à un certain point, on ne peut pas parler de revendeur indépendant, là, c'est un revendeur en lien, néanmoins vous prenez entente avec lui -- et on peut comprendre que vous puissiez dire: Puisque tu m'en prends 100, je ne te les vendrai pas à 100 $ l'unité, je vais te les vendre à 90 $ l'unité. Toi, tu les vendras... Puisqu'ils sont marqués à 100 $, j'imagine que vous vous dites: Tu es aussi bien de les revendre à 100 $, parce que c'est marqué 100 $ dessus, puis les gens vont être pas mal frustrés. Est-ce que c'est un peu comme ça que le...

M. Picard (André): C'est que généralement ces gens-là ne les revendent pas. Là, On a utilisé, ici, pour... puis pour le sens... pour la loi, le terme «revendeur» dans un contexte très particulier. Mais on vend des billets -- parce que le terme, c'est «revendre» -- qu'ils les offrent à leur propre clientèle, des gens qui ont acheté des packages. Qu'on aille en France faire le tour en autobus puis qu'on va une série de spectacles, les hôtels ont des billets en réserve pour certains spectacles, ça fait partie de notre économie depuis toujours, là.

M. Fournier: Ce que je vois, c'est que, lorsque vous utilisez le système de la vente systématique, je crois comprendre -- c'est ce que je comprends, jusqu'ici, vous pouvez me dire que je me trompe -- je crois comprendre que ce que vous envisagez, c'est la même logique que celle que vous nous avez démontrée tantôt sur la vente de la maison, c'est-à-dire celui qui est le vendeur, vous, dans ce cas-là, vous acceptez une baisse du prix unitaire pour maximiser le nombre de billets vendus. Mais vous êtes celui, par exemple, par rapport au prix unitaire, vous êtes celui qui assumez la contrepartie, parce que vous n'aurez pas le plein prix payé, alors que, dans le système actuel, ce que l'on voit, c'est que rien n'est demandé au vendeur à part d'avoir les billets, mais c'est à l'acheteur qu'on les demande, d'où le déséquilibre qui est fait.

Mais, dans le système... Vous vivez dans un système où il y a une possibilité pour le vendeur d'être, c'est un exemple qu'on peut donner au revendeur... Il y a déjà un système où c'est le vendeur qui assume la contrepartie, comme c'est le cas pour les ventes de maisons. C'est ce que vous faites déjà. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bernier): Merci, M. le ministre. M. le député de Beauharnois.

M. Leclair: Merci, M. le Président. M. Picard, j'aimerais vous entendre, là, vous venez d'ouvrir une porte, là, que ça me fait chatouiller un petit peu, là. Tantôt, on parlait un peu avec les gens de l'ADISQ. On disait qu'incluant l'artiste, le producteur, les commanditaires et les revendeurs, que ça faisait à peu près un total dans une salle de 10 % de billets, là, qui malheureusement, là, ne sont pas accessibles aux consommateurs. Puis, dans ces billets-là, là, il y a peut-être quelques billets, là, comme disait, là, M. le ministre, qui sont quand même les «hot spots», là, dans la salle. Puis ça, c'était à peu près global.

Est-ce que vous croyez que c'est dans toutes les salles de spectacle qu'il y a un peu cette forme-là que vous expliquez que, vous, vous faites le Festival Juste pour Rire, qu'avant même la mise en vente vous pouvez retenir quelques places? J'imagine vous ne prenez pas le pigeonnier vous non plus.

Le Président (M. Bernier): M. Picard.

M. Picard (André): ...on fait ça pour les premières, là, en général, là, ce que je vous disais, là, quand je vous donnais une série d'exemples. Pour des questions touristiques, c'est plus au courant du festival qu'on fait ça. On ne fait pas vraiment ça quand on fait des tournées de spectacle, on ne fait pas ça avec les spectacles individuels d'humoristes.

M. Leclair: ...tantôt, vous disiez: Tout dépendant du timing, l'offre, la demande, il peut y avoir même des rabais applicables sur le prix. Vous avez de l'air à dire aussi que les prix peuvent avoir un petit peu une divergence face au prix unitaire de base. Donc, ce projet de loi là ne vous permettrait plus de faire ça, là, de changer le prix, là, pour... même si c'est pour des groupes ou...

Le Président (M. Bernier): ...

M. Picard (André): ...façon que je le lisais, moi, c'est «entente de vendeurs autorisés», là. Je ne sais pas, peut-être que je lis mal le projet de loi...

M. Leclair: ...autorisés, mais on...

M. Picard (André): Moi, je suis autorisé, je peux les donner, les billets, si je veux, là. Non?

M. Leclair: C'est bien. O.K. Je voulais vous entendre là-dessus.

**(16 heures)**

M. Picard (André): O.K. Oui, puis, comme vous avez déjà vu aussi, là, il y a... je pense c'est François Rozon qui avait innové il y a quelques années en vendant, disons, deux spectacles d'humoristes qu'il gérait. Si on achète les deux billets, on paie moins cher. Si on en achète trois, on paie encore moins cher. Ça fait que ça assure un roulement, là. La dynamique de vente de billets d'une série de spectacles, que ça soit unitaire ou une série, là, de 10, 30, 100 billets, là, c'est... c'est extrêmement complexe comme stratégie de marketing et de commercialisation.

M. Leclair: O.K.

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.

M. Leclair: Je crois comprendre aussi... Là, vous, vous dites: Vous avez, pour les humoristes, ce type de package là. Sur le site de l'Assemblée nationale, il y a une dame qui s'est permis d'écrire que -- je ne lirai pas son nom, mais, si on veut avoir le nom, là, c'est public, c'est sur le site de l'Assemblée -- elle se dit une revendeuse de billets elle-même. Puis, elle, elle dit que... je ne nommerai pas le nom de l'entreprise, mais qu'il joue très bien son rôle en ne parlant pas. C'est eux les pires. Ils font venir leurs propres «scalpers» lors de spectacles importants, des matchs autant de hockey ou d'autres dans le Centre Bell pour faire acheter leurs billets de façon comptant pour rendre une cote immédiate sur le billet. Cette dame-là explique que, même avant la vente des billets qui soit faite officielle, un peu comme vous nous expliquez que, vous, ça se fait aussi... Est-ce que ça se fait dans tous les milieux, qu'on peut réserver une bande de billets, tout dépendant du producteur... Il peut décider, lui, que les quatre ou cinq rangées ou, si on parle du Centre Bell, où il y a 20 000 sièges, il y a 4 000 sièges qui sera... Est-ce que c'est à la discrétion du producteur?

Le Président (M. Bernier): M. Picard.

M. Leclair: Ça fonctionne comment?

M. Picard (André): Bien, moi, je peux juste me prononcer sur les pratiques du Groupe Juste pour Rire puis je suis ici pour parler au nom du Groupe Juste pour rire. Alors, on a pleinement illustré, puis vous m'avez questionné auparavant sur la nature des billets qui étaient réservés, qui ont été reflétés aussi par Claude Larivée.

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.

M. Leclair: Mais ce que je veux... La question va un petit peu plus sens plus large. Je ne veux pas vous parler du Centre Bell ou des autres amphithéâtres. Est-ce que c'est... le producteur, lui, a le droit... Est-ce que, dans les contrats avec les artistes, est-ce que ça existe que les producteurs ont le droit de se réserver des billets?

Le Président (M. Bernier): M. Picard.

M. Picard (André): Bien, comme on l'a illustré auparavant, faisant partie du contrat avec l'artiste, il y a toujours des billets pour ses plus proches collaborateurs. Des fois, c'est plus que l'artiste: il y a quelques artistes, le scénariste... Le metteur en scène va avoir des billets, le comédien va avoir des billets et il va avoir des billets pour sa famille et pour ses proches.

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député de Drummond.

M. Blanchet: Merci, M. le Président. M. Picard, bonjour. J'ai une question. Vos propos sont clairs, très complémentaires avec ceux de l'ADISQ. Parmi les critiques qui sont formulées, il y en a qui disent que c'est marginal comme impact au niveau des arts au Québec, que c'est essentiellement les événements sportifs ou des artistes internationaux de très grand renom qui subissent ce genre de phénomène là, parce qu'après tout la plupart des artistes en variété au Québec ont de la misère à vendre leurs billets normaux. Parce que là, ici, on parle du phénomène de la revente de billets comme si on était dans une industrie d'une prospérité incroyable et que le monde s'arrachait les billets du nouvel artiste qui était en nomination comme découverte de l'année au gala de l'ADISQ. Dieu sait que ce n'est pas le cas et qu'une tournée qui veut faire le tour du Québec va avoir besoin d'un important soutien public pour aller tourner dans des salles où parfois il y aura relativement peu de gens. Mais il faut commencer à quelque part pour arriver au sommet.

Et les mêmes observateurs disent... Je supposerais avec à-propos que c'est beaucoup les humoristes, parce que les humoristes sont, en musique on le reconnaissait bien, de bien meilleurs vendeurs de billets que la plupart des artistes en chanson dans bien des cas, sauf peut-être certains événements spécifiques. Ça sert un peu à dénigrer l'intention, au demeurant fort noble, de ce projet de loi là.

Et je me permettrai un aparté parce qu'il y avait la question des billets faciles à vendre qui étaient restés dans des espaces disponibles. Je me permettrais de suggérer une explication possible: un billet facile à vendre à 60 $ l'est peut-être moins à 120 $. Et donc ça ne rend que la loi plus nécessaire. Et qu'il est de l'essence même de la spéculation de prendre un risque. Parfois, ça peut marcher moins. Et peut-être que, s'ils restent disponibles, c'est que les deux marchés ne correspondent pas. Il y a des gens qui vont aller sur le site officiel de l'artiste ou qui sont habitués avec certains sites légaux ou normaux de vente de billets puis qui vont consommer là et qui n'iront pas ailleurs, ne sachant pas que ça existe, ou qu'ils vont savoir que c'est potentiellement une arnaque, ou d'autres qui vont aller systématiquement ailleurs, ne sachant pas qu'il existe un site officiel avec peu de correspondance entre les deux univers, et ça pourrait être un facteur d'explication.

Maintenant, ma question -- je suis désolé d'avoir été long pour m'y rendre: Lorsqu'on dit qu'au Québec c'est très peu, tout petit pourcentage même pas quantifié des artistes québécois qui subissent du «scalping»... Passez-moi l'expression anglaise, mais c'est passablement ça. Et j'aimais beaucoup l'image, là, parce qu'on imagine évidemment le «scalper» avec ses pantalons en coton puis sa vieille veste des Expos à la porte du Centre Bell, là, mais là on parle d'autre chose hautement plus technologique. Est-ce qu'il y a une différence entre le marché local québécois et le marché local new-yorkais pour les New-Yorkais, le marché local des gens de Philadelphie pour Philadelphie? Est-ce que c'est une anomalie que, localement, les artistes émergents aient un plus petit marché et que les artistes qui sont continentaux ou internationaux aient un marché beaucoup plus vaste et soient davantage l'objet de revente de billets? Est-ce qu'on est une exception ou est-ce que ce n'est pas tout à fait normal que la plupart des artistes en circulation sur notre marché domestique soient encore en phase de développement et donc que l'analyse que ça touche peu de monde n'est pas valable?

Le Président (M. Bernier): M. Picard.

M. Picard (André): Donc, la question, c'est: Est-ce qu'il y a une distinction entre les humoristes qui sont plus susceptibles d'être affectés par les revendeurs que les artistes émergents?

M. Blanchet: Pas juste les humoristes. Est-ce que c'est une particularité de notre marché local que, parmi toute l'offre qui existe, la majeure partie soient des artistes en émergence, avec un succès croissant, qui fasse que les artistes locaux ne représentent, dans un petit marché, ici, qu'une petite fraction de l'offre en revente?

M. Picard (André): Ah, ça, c'est normal. Je pense que oui, là. Peut-être André Ménard sera mieux placé pour répondre que moi, là, il va me suivre. Mais c'est normal, là, c'est... Premièrement, ils ne vendent des billets qu'à l'unité: ils sont moins chers, il y a moins de variation dans leur prix du billet, entre le meilleur billet puis le moins bon billet dans la salle, s'il y en a une, quelle qu'elle soit. Bon, il y a quelques exceptions. Des groupes comme Cowboys Fringants, qui se donnent une politique et qui la tiennent, quel que soit leur niveau de popularité ou de succès, quel que soit le type de spectacle qu'ils donnent, à grand déploiement dans une grande salle ou une petite salle intime. Mais aussi, donc, un prix du billet unitaire moindre, un nombre de billets vendus, des salles plus petites, plus petites jauges, moins de spectacles dans l'année. Ça fait que c'est sûr que, quand ils se comparent, je ne sais pas, moi, à Martin Matte qui a été l'humoriste qui a vendu le plus de billets, là, avec son dernier spectacle, qui est dans les 200 000 billets, c'est... puis si on compare à des milieux comme la danse contemporaine ou d'autres, là, il n'y a pas de commune mesure, là.

Mais même si c'est un petit peu de pourcentage, je pense qu'il est de la responsabilité du législateur, quand un vice est identifié, qu'il est clair, qui est exprimé, dont on peut tous témoigner... Parce que des fois c'est beaucoup plus... tu sais, les scalpers, il faut les suivre, ce n'est... bon, c'est sous la loi municipale. Ici, c'est clair, là, ce qui se fait. C'est aux us... à la vue de tout le monde.

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.

M. Blanchet: Les artistes... Juste pour Rire développe aussi des artistes dans des nouveaux marchés, fait de la représentation, par exemple, des artistes québécois qui commencent en Europe. J'imagine qu'évidemment un artiste qui commence en Europe, à sa première présence à Poitiers, ne risque pas d'avoir trop de problèmes de «scalping», ça risque peu d'arriver. Et, lorsqu'il y a le début d'un phénomène de revente de billets, que ce soit à la porte ou par Internet, pour un artiste, sur le coup, évidemment, il y a une petite fierté, il se dit: Oh! J'ai atteint un certain niveau de succès, on revend mes billets. Ça aussi, c'est un argument des adversaires ou de certains des adversaires du projet de loi. Mais est-ce que le fait que la revente de billets soit une indication de succès ou de début de succès rend le phénomène davantage souhaitable?

Le Président (M. Bernier): M. Picard.

M. Picard (André): Non, je pense que les humoristes seraient satisfaits de bonnes critiques et de reconnaissance de leurs pairs dans ces événements comme l'ADISQ, les Olivier, les Gémeaux, les Jutra. Je pense qu'ils en seraient grandement satisfaits, ils n'ont pas besoin de... atteint le statut de meilleurs billets de revendeurs pour croire qu'ils sont prêts peut-être à la retraite ou à la préretraite.

M. Blanchet: Excellent thème pour un trophée aux Olivier: meilleur revendeur de billets. Je vous remercie beaucoup, monsieur.

Le Président (M. Bernier): Merci, M. le député. M. Picard, représentant de Juste pour Rire, merci de votre contribution, merci de votre présentation.

Je vais suspendre quelques instants pour permettre aux représentants de Billets.ca, M. Éric Bussières, M. Stéphane Perrault, de prendre place.

(Suspension de la séance à 16 h 10)

 

(Reprise à 16 h 14)

Le Président (M. Bernier): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux. Nous accueillons cet après-midi les représentants de Billets.ca, M. Éric Bussières, président, bienvenue, et M. Stéphane Perrault, conseiller en communication, bienvenue. Vous avez une période d'environ 15 minutes pour faire votre présentation. Par la suite suivront des échanges avec les parlementaires. La parole est à vous.

Billets.ca courtier en billets inc.

M. Bussières (Éric): Donc, rebonjour, M. le Président de la commission. Mmes et MM. les membres de la commission, bonjour, et M. le ministre, bonjour. Je voudrais vous remercier de l'invitation. On a été surpris, parce qu'habituellement nos portes sont toujours ouvertes, mais les gens ne nous appellent pas, ni l'ADISQ. Et on est sincèrement contents de participer à ce débat. On croit vraiment en la protection du consommateur. Veux veux pas, on est un site de revente, mais on a des clients. Ça fait 12 ans qu'on existe, on existe depuis 1999. On est une entreprise de type familial et on a à coeur les consommateurs. Sinon, si on n'avait pas à coeur les consommateurs, on n'existerait plus depuis un bon bout de temps. Et, juste pour vous dire, notre entreprise, les employés qui travaillent au service à la clientèle connaissent par leurs noms nos clients, nos centaines de clients qui appellent au téléphone, et ces clients-là connaissent par leurs noms les gens qui répondent au service à la clientèle.

On a deux millions de visiteurs sur notre site Web par année et on n'a jamais eu aucune plainte de l'OPC. Jamais, pas une. Et qu'est-ce qu'il est important à dire, c'est que oui, on vend des billets, mais notre site Web, en premier, il est informatif. On s'est aperçus très vite qu'il y a plusieurs billetteries au Québec, et ces billetteries-là ne se parlent pas. Donc, on est le seul site Web, au Québec, qui affiche un calendrier complet de tous les événements de toutes les salles de spectacle. Donc, en premier, les gens appellent pour avoir de l'information, et peut-être après un troisième, quatrième appel ils s'aperçoivent qu'on donne un bon service, vont décider d'acheter des billets.

Donc, Billets.ca, c'est un service d'achat mais aussi un service de vente. Donc, pour le service d'achat, il y a différentes raisons pourquoi les gens nous appellent: quand c'est complet, quand ils n'ont pas le goût d'attendre en ligne, quand les mises en vente tombent qu'ils sont en vacances. Et aussi qu'est-ce qui est très important, c'est quand il y a des billets indisponibles. Je vous donne un exemple: le Canadien de Montréal. Si vous n'avez pas de billet de saison du Canadien de Montréal parce que votre grand-père n'a pas acheté, voilà 40 ans, ses billets de saison, bien il n'y a aucune chance que vous soyez dans les rouges, c'est impossible. Il faut passer par quelqu'un qui soit qui a des billets de saison ou soit un site de revente. Ça peut être nous, ça peut être des petites annonces classées, Kijiji, eBay, mais il faut qu'il passe par quelqu'un d'autre.

On a aussi notre service de vente. Donc, notre service de vente, bien sûr, permet au consommateur de vendre ses billets d'une façon sécuritaire et fiable. Oui, il pourrait passer par eBay, Kijiji et tout. Mais qui va donner l'argent en premier? Est-ce que, la personne, est-ce qu'elle est sûre de recevoir son chèque? Chez Billets.ca, il est sûr, il est certain de recevoir son chèque. Et, premièrement, les gens peuvent afficher leurs billets eux-mêmes. On a des clients qui affichent leurs billets eux-mêmes. Ils ne nous appellent pas. Donc, c'est eux qui décident du prix qu'ils mettent, et ça, c'est très important, ce n'est pas nous qui décidons le prix. Et on se prend un pourcentage, 15 %. Puis, comme on a 2 millions de spectateurs, bien, c'est certains que, quand ils mettent leurs billets sur notre site, ils sont assurés qu'ils sont vendus. C'est ça, le plus important. Vous pouvez afficher des billets sur d'autres sites, mais, si vos billets ne sont pas vendus, ça va mal.

On a entendu beaucoup qu'on n'a aucune valeur ajoutée. C'est qu'est-ce qui me fait le plus mal. Comme c'est mon entreprise que j'ai partie et tout, et je sais comment les gens au service à la clientèle travaillent, et tout, les programmeurs, puis, quand j'entends ça, là, ça me met à terre. Premièrement, qu'est-ce que l'ADISQ n'a pas dit et qu'elle sait très bien, c'est qu'on a une politique de remboursement sans condition jusqu'à 30 jours avant l'événement. Il n'y a aucune billetterie officielle qui offre ça. Si vous appelez chez Admission, Ticketmaster ou toute autre billetterie, vous devez... c'est un achat final non remboursable. Donc, ça, c'est notre première valeur ajoutée. On offre aussi, bien sûr, comme je disais auparavant, possibilité au consommateur de vendre leurs billets sans tracas, sans sécurité, au prix qu'ils souhaitent. Les autres billetteries non plus ne le font pas. Service à la clientèle, comme je disais, personnalisé, efficace, en français, ce qu'un service -- si la revente est interdite -- un service américain n'offrira jamais, là.

On a aussi une garantie de validité. Donc, la personne qui arrive chez Billets.ca sait que les billets sont valides, que ce n'est pas des billets frauduleux ou volés. La rue n'offre pas ça, le marché noir n'offre pas ça.

**(16 h 20)**

On a aussi une grande disponibilité de billets. Comme je disais tantôt: calendrier complet. Les billetteries, bien, ce n'est pas un calendrier complet. Si quelqu'un cherche des billets de Louis-José Houde, puis qu'il est à la salle Dix30, puis qu'il cherche sur le réseau d'Evenko, ce n'est pas là, sur le Réseau Billetech, ce n'est pas là, Ticketmaster, ce n'est pas là. C'est difficile des fois pour un client de savoir exactement où est le billet. Puis ça, c'est le gros problème de l'industrie: tous les joueurs tirent la couverture de leur bord puis ils n'essaient pas de s'aider. Ils essaient de s'aider quand ils essaient de... quand ils ont un problème mais pas à la base.

Et, comme je disais, avec les billets de dernière minute... ou s'ils viennent sur notre site, comparativement à la rue, le client peut faire un achat réfléchi. S'il est sur la rue, c'est à la dernière minute. Sur notre site, bien, il peut aller vérifier ailleurs et revenir sur notre site.

Je vais vous faire un petit survol de l'industrie de la vente et de la revente de billets. Premièrement, sûrement qu'on va mentionner le marché primaire et le marché secondaire. Le marché primaire, c'est les billetteries officielles autorisées, c'est parfait. Le marché secondaire, c'est très important de mentionner, comme l'OPC, l'étude de Raymond Chabot Grant and Thornton, le marché secondaire, il est coupé entre les sites de revente consommateur à consommateur, les sites de vente de courtier de billets qui n'offrent pas le choix... n'offrent pas la possibilité de vendre les billets, les revendeurs, et les sites comme nous qui faisons les deux. Donc, on offre... on vend... on achète et on vend des billets, on doit l'avouer, et, bien sûr, on a 60 % de nos ventes de billets... proviennent de billets d'utilisateurs qui ont des billets en trop.

Là, je vais lire un petit peu le texte, un petit peu plus poussé, je ne pourrai pas vous parler comme ça.

Donc, la vente de billets sur Internet, elle connaît un essor important. L'enquête NETendances de 2010 du centre du CEFRIO -- vous regarderez les documents -- signale qu'en 2010 49 % des internautes Québécois qui ont acheté sur Internet ont acheté des billets de spectacle, ou de divertissement, ou de cinéma.

Selon l'Office de la protection du consommateur, les achats en ligne représentent 46,5 % de tous les billets vendus. L'Observatoire de la culture et des communications, elle, si vous regardez l'étude, elle dit que ça va très bien, surtout au niveau des humoristes. Ça va tellement bien depuis 2007 et 2009 que les revenus de la billetterie étaient en hausse de 25 %. Et les spectacles d'humour, ça a augmenté de 36 %. Les ventes de billets et les revenus en billetterie ont eu une hausse de 83 %. Donc, quand on dit: Parce que les revendeurs existent que ça brime le marché primaire, bien là, là, ce n'est pas qu'est-ce que l'observatoire est en train de dire, là.

Là, il y a l'approche du législateur. Bien que le marché primaire demeure en expansion au Québec, on s'est aperçu qu'il y a plusieurs failles dans le système. Et, bien sûr, je dois avouer qu'on en a tiré profit. Comme je disais tantôt, les spectacles se vendent neuf à 12 mois d'avance. Les gens ne peuvent pas savoir qu'est-ce qu'ils font, ils ne savent pas où aller, ça, c'est vrai, mais ils ne peuvent surtout pas savoir qu'est-ce qu'ils vont faire dans 12 mois. Et un consommateur qui ne peut pas savoir qu'est-ce qu'il fait dans 12 mois, il n'a pas le goût d'acheter le billet. Par contre, chez Billets.ca, il peut savoir qu'il peut acheter le billet, puis, s'il ne peut pas, il se fait rembourser, ce n'est pas compliqué, là. Il a jusqu'à 30 jours avant l'événement, il se fait rembourser.

De plus, il faut bien mentionner que la valeur nominale du prix du billet est déterminée par le producteur, selon sa propre perception du marché. Et là, là, il y une recherche, là, de Connolly Pray et de... excusez-moi, d'Alan Krueger, professeur à l'université Princeton, qui ont fait une recherche sur 28 concerts aux États-Unis. C'est super détaillé et Mme Connolly Pray, c'est une professeure adjointe au Département de sciences économiques de l'Université du Québec à Montréal, et vous devriez la lire, parce que c'est vraiment... Elle montre que la revente de billets est justifiée parce que, un, les producteurs vous l'ont dit tantôt, ils veulent que les billets soient accessibles à leurs consommateurs. Mais, des fois, ils se trompent. Des fois, c'est trop bas et la demande est vraiment trop forte. Donc, premièrement, il faut dire qu'il y a un système de marketing, et peut-être que monsieur...

Une voix: Le député de Drummond.

M. Bussières (Éric): Peut-être que le député de Drummond pourrait confirmer. Il y a vraiment un système de marketing qui fait qu'un humoriste va afficher peut-être, au début de sa tournée, 20, 30 spectacles pour créer un buzz, pour que ce soit complet rapidement et dire: On a vendu les billets en 25 minutes, en une journée, on rajoute d'autres supplémentaires. Donc les... pas les consommateurs mais les producteurs créent une rareté à la base. Je ne dis pas que c'est tout le monde. Mais je dis que, pour les humoristes, vous devez le voir, là: Reste seulement que 20 billets, faites vite. Les derniers spectacles, là, tout d'un coup, on remet. Combien de fois qu'on a entendu dire: La dernière tournée d'adieu? Tu sais, ça arrive souvent.

Une voix: ...

M. Bussières (Éric): O.K. Je vais passer un petit peu... Il y a d'autres failles, c'est dans les billetteries officielles, comme je disais. Donc, comme il y a plusieurs billetteries, les gens... les sites de revente, eux, offrent une multitude de billets, une multitude d'événements, puis c'est un point central. Et, je vous le dis, s'ils veulent nous contrer, les producteurs, ils ont juste à faire une billetterie centrale, puis on ne sera plus là, là. Mais ça, avant qu'ils s'entendent, ça, c'est un autre cas, là.

Ça, j'en ai parlé... Parlé...

Bon, bien, je vais vous parler de l'Association québécoise de l'industrie du disque, du spectacle et de la vidéo et je voudrais vous dire que l'ADISQ représente premièrement les producteurs et, bien sûr, les compagnies de disque, ne représente pas les artistes. Et je me pose la question: Comment ça l'Union des artistes n'est pas ici? Premièrement, l'ADISQ, elle a colporté beaucoup de demi-vérités et elle a basé son argumentaire... C'est un argumentaire émotif et basé sur, comme je disais, des demi-vérités et non sur la réalité et non sur des chiffres.

On a été voir l'ADISQ en mars ou avril, à leur colloque, et on leur a dit que nos portes étaient ouvertes. J'ai été dans une salle qui avait je ne sais pas combien de producteurs et je leur ai dit: Mes portes sont ouvertes, mes chiffres sont ouverts. Appelez-nous. Il n'y a personne qui nous a appelés.

Donc, le premier point des mythes de l'ADISQ, c'est que les courtiers créeraient une rareté artificielle dans le marché et feraient monter sciemment le prix, privant même le coût... en tout cas. On crée une rareté artificielle. En fait, l'achat direct de billets par Billets.ca représente une portion marginale, on l'a dit. C'est un tiers de 1 %. En chiffres, là, l'année passée, ça a été... Non. En 2009, ça a été 900 000 $ sur 275 millions. On ne vend pas de billets d'artistes québécois. Tout simplement, quand l'artiste québécois est complet, il rajoute une supplémentaire.

Il n'y a aucune entreprise qui va se lancer dans des achats, comme M. Claude Larivée dit, 100 billets par spectacle. J'ai fait vérifier pendant qu'il parlait. On a vérifié dans notre base de données depuis... C'est 4 700 représentations. Donc, j'aurais acheté, là, 47 000... 477 000 billets à L'Étoile Dix-30? Je suis une petite entreprise de 14 employés, là. Je n'ai pas les fonds pour ça, là. C'est impossible. Donc là, là, il faudrait qu'il sorte ses chiffres, puis je vais sortir les miens, puis vous allez voir la vraie vérité.

Juste un exemple, on l'a sorti beaucoup, Louis-José Houde, 625 000 billets. On en a vendu 1 228. C'est 1/4 de 1 %. Ça, là, Louis-José Houde, c'est notre plus gros. Là, je ne parle pas de Mario Pelchat, d'Isabelle Boulay ou d'un autre artiste qu'on ne vend pas de billets. Éric Lapointe, c'est impossible premièrement et pourquoi on irait revendre des billets d'Éric Lapointe ou d'Isabelle Boulay quand ils peuvent rajouter des supplémentaires? Le client est conscient.

Et je trouve ça dommage qu'on prenne le client -- c'est un mauvais mot, là -- pour un imbécile, mais c'est vraiment aller, comment je pourrais dire ça, c'est... Bon, je vais...

Une voix: ...

M. Bussières (Éric): Oui. C'est vraiment... C'est l'intelligence du consommateur, là, qui est pris en défaut. Je trouve ça dommage.

Le Président (M. Bernier): Je vous invite à conclure, M. Bussières.

M. Bussières (Éric): O.K. Je vais conclure. Courtier de billets confondrait insidieusement les clients, prétendant être une billetterie officielle. On ne prétend pas. Et là, là, il y a plusieurs mentions, et qu'est-ce que je veux dire, c'est qu'à la fin de l'achat, le client doit cocher et après ça, si le client ne l'a pas vu, on envoie un encart explicatif avec les billets pour dire qui on est. Et, si le client est encore... ne le sait pas, bien il peut se faire rembourser par notre garantie de 30 jours, là.

Dans le fond, je vais conclure avec ça. Je pourrais vous dire, la conclusion, vous allez pouvoir lire le mémoire. Posez-moi des questions, je vais être heureux de vous répondre, parce qu'il y a plusieurs mythes qui restent à être débattus.

**(16 h 30)**

Le Président (M. Bernier): ...M. Bussières. Je dois vous dire que plusieurs groupes ont été invités, dont l'Union des artistes, mais malheureusement n'ont pas retenu l'invitation de venir présenter ici leur mémoire. Libre à eux cependant de le déposer en tout temps, comme je l'ai fait tout à l'heure avec deux autres groupes.

Merci. Nous allons donc passer aux échanges avec les parlementaires. M. le ministre.

M. Fournier: Merci beaucoup, M. le Président. M. Bussières, merci d'être là et de venir exposer la situation que vous vivez, c'est intéressant de vous entendre. Ce sera intéressant aussi de pouvoir vous poser des questions, de pouvoir engager un échange avec vous.

Quelques petits éléments, peut-être, qu'ont suscités en moi la présentation que vous avez faite, avant de poser des questions, qui, pour moi, m'habitent depuis le tout début. La première, c'est l'argument que vous faites qu'il n'y a pas de plainte à l'Office de la protection du consommateur. À mon avis, vous n'avez pas trop à vous en glorifier dans la mesure où... Et c'est un peu comme lorsque vous dites que vous ne menez pas une activité illégale. Bien sûr, en ce moment, la loi n'étant pas adoptée, vous n'êtes pas dans aucune illégalité. Alors, c'est un peu court de dire qu'il n'y a pas d'illégalité. Bien sûr, la loi n'est pas adoptée, et il n'y a pas de législation, par exemple, comme celle qui dit de ne pas revendre à un prix supérieur que le prix initial. C'eût été difficile, voire hypocrite de la part d'un consommateur de se plaindre que vous leur vendiez plus cher que le prix initial quand il n'y a rien dans la loi qui vous empêche de le faire. Alors, je pense que le contexte législatif actuel fait en sorte qu'il est normal que vous n'ayez pas eu de plaintes, tout au moins à cet effet-là.

Je vous entends parler... Je dois vous dire que, lorsque je vous écoute, le... D'abord... Et je dois dire que je vous trouve sympathique, et que c'est bien que vous veniez nous voir. Cela étant dit, lorsque vous nous dites qu'il n'y a rien de tel, finalement, que des achats systématiques de billets au Québec, pas par vous, en tout cas, minimalement pas par vous, peut-on présumer que vous pouvez partager que peut-être d'autres le feraient mais peut-être pas votre compagnie? Mais, quand même, la lecture du dossier sur la scène internationale démontre, notamment avec la présence accrue de l'Internet, que c'est une tendance de plus en plus présente, importante à l'échelle de la planète. Ce serait difficile de croire que nous sommes une société distincte à ce point que, chez nous, il n'y a pas de tels achats systématiques de billets. Je crois qu'il y en a, comme Roland Garros a pu l'éprouver, comme c'est éprouvé aux États-Unis et ailleurs, peut-être pas de votre entreprise, peut-être de d'autres, mais force est d'admettre que la tendance qu'il y a en croissance de ventes de billets et, selon Grant Thornton, la croissance de revendeurs à prix au-delà du prix initial est une tendance à la hausse, et non pas à la baisse. Ça, je pense que tout le monde peut l'admettre.

Vous avez parlé aussi de Louis-José Houde. Ce n'est pas la première fois que vous abordez la question. On regarde l'ensemble des billets. Je pense que c'est important de ramener... J'ai abordé la question justement tantôt, avec l'ADISQ et Juste pour Rire, à escient, sachant que la prétention que vous avez, c'est que vous ne représentez que point quelques pour cent des billets partout vendus. Vous avez entendu les deux groupes qui sont passés devant vous, ils ne disent pas que vous achetez tous les billets de toutes les salles, mais que vous achetez les bons billets de certaines salles, de grands artistes.

Donc, si on veut se résumer, peut-être qu'on arrive avec quelque chose de plus près des chiffres qu'on retrouve dans l'étude qui a été rendue publique, que vous avez citée vous-même, où on dit que, dans le marché secondaire, 53 % reviennent au courtier, mais que le marché secondaire, c'est autour d'une vingtaine de pour cent. Alors, vous êtes plus dans le 14 % de billets qui sont des billets de courtier. Donc, ce n'est pas 0,4 %, c'est plutôt 14 % de billets qui viennent dans le marché secondaire être distribués par les courtiers. L'étude qui a été rendue publique parle de ces chiffres.

Évidemment, il faut être prudents. On pourra toujours se dire: Mais 14 % par rapport à 86 %, franchement, tu sais, ce n'est pas beaucoup. Par ailleurs, on a toujours un consommateur, il y a toujours un consommateur en quelque part qui va se trouver à payer plus. Et, derrière tout le travail qu'on tente de faire, c'est d'avoir une justice pour le consommateur.

Il y a deux éléments que vous avez mentionnés qui m'intéressent particulièrement. D'abord, le fait -- et jusqu'à un certain point, savez-vous, j'ai le goût de vous de suivre -- le fait que vous ayez développé une expertise, certains diront un «know-how» -- quand on est plus dans le domaine commercial, on fait souvent référence à cette expression -- une expertise, un savoir-faire que les producteurs, isolément, n'arrivent pas à faire.

J'ai une question pour vous: Est-ce qu'il vous est déjà passé par l'esprit de mettre... puisque vous le présentez à l'avantage des producteurs et des artistes, de faire une proposition d'affaires aux producteurs? Si tant est que vous réussissez à vendre des billets qu'eux ne réussissent pas à vendre, il doit y avoir une communauté d'intérêts qui vous habite. Est-ce que vous avez réussi à mettre sur papier une proposition d'affaires qui intéressait les producteurs?

Le Président (M. Bernier): M. Bussières.

M. Bussières (Éric): Pour la vente?

M. Fournier: Pour la vente ou la revente, même pour la vente. Parce que, vous nous dites, c'est qu'ils vendent mal et que, vous, vous vendez mieux, et c'est la recette que vous avez. Est-ce que vous avez pu intervenir auprès d'eux pour essayer de proposer: Vous y aurez un intérêt économique à utiliser votre savoir-faire pour que la vente soit meilleure?

Le Président (M. Bernier): M. Bussières.

M. Bussières (Éric): On a pensé à la vente, on y pense beaucoup et on pense vraiment que... je ne dirai pas Billets.ca mais un autre site Web, qu'on serait capables d'utiliser la même technologie qu'on utilise pour aider les producteurs à vendre leurs billets et que ce ne soit pas... Mais je ne suis pas sûr que tous les producteurs vont s'entendre, c'est ça, il y a plusieurs acteurs dans le milieu. Et, comme je dis, quelqu'un qui va arriver puis qui va dire: On veut unir tous les producteurs sous une même bannière, je ne suis pas sûr... tout le monde va essayer d'être le patron de ça, là. Ça, c'est un autre problème.

Pour Billets.ca, pour la revente de billets, vous savez, on a parlé à Juste pour Rire, on a déjà parlé à Juste pour Rire, on leur a acheté des billets de groupe. Par contre, eux voulaient un pourcentage de profit, ils l'ont pris. Peut-être monsieur n'était pas au courant, là, M. Picard, mais les billets qu'on a vendus à Juste pour Rire, qu'ils nous ont vendus, le prix coûtant était de 65 $ et ils nous les vendaient 12 $ de plus parce qu'ils savaient qu'on faisait un profit, là.

Donc, on a tout le temps dit que nos portes étaient ouvertes, ce n'est pas la première fois qu'on le dit, ça fait depuis au moins 2007, et on a toujours invité les producteurs à vendre leurs billets, au prix qu'ils le désirent, sur notre site. Les producteurs québécois, je vous le dis, on ne fait pas d'argent avec les billets québécois ou presque peu, là, je ne vous dirais... je ne vous mentirai pas, là, Louis-José Houde, on a fait de l'argent avec Louis-José Houde, mais, la plupart des spectacles québécois, on ne fait pas d'argent. Donc, un producteur qui dit: Moi, là, je trouve que vous êtes mieux référencés et je vois que mon artiste serait mieux représenté sur Billets.ca mais je veux les vendre au prix coûtant, je n'ai aucun problème.

Le Président (M. Bernier): M. le ministre.

M. Fournier: Alors, si, demain matin, vous aviez un producteur qui vous disait: Moi, pour moi, ce qui est important, là, c'est... ou mon artiste, on a compris que ceux qui sont passé tantôt nous ont dit combien, pour l'artiste, c'était important, la notion de relation avec son public. Si un producteur vous disait: Écoute, moi, ce qui est important, c'est que le chiffre qui est écrit, le montant du billet, là, du prix qui est marqué sur le billet, que cela ne soit pas dépassé et que ce soit moi qui t'en vende à 10 % de moins cher, ou qu'il y ait un revendeur... un consommateur qui l'a acheté isolément, là, et qui passe chez vous et que ce soit dans l'entente que vous avez, vous ne pouvez l'acheter qu'à 10 % de moins que la valeur. Autrement dit, que, dans la manière de mener l'affaire, ce soit le vendeur qui assume le montant du courtage, dans le fond, la commission, et non pas l'acheteur. Est-ce que vous seriez partant pour une entreprise comme celle-là, qui est un peu l'inverse de ce que vous avez, hein?

Dans le système que vous avez, c'est plutôt celui qui vient acheter le billet qui assume le coût de votre travail, les profits qui y viennent. Je ne suis pas contre les profits, là, remarquez bien, là, mais, dans le système que vous avez, c'est l'acheteur. Or, ce que ça provoque comme façon de procéder, c'est que, dans ce système-là, vous pouvez bien en acheter de façon systématique, qui est le coeur du problème. Le coeur du problème, c'est que vous avez décidé d'acheter quelques billets de Louis-José Houde pour faire quelques profits, comme vous l'avez dit. Or, vous n'êtes pas le producteur de Louis-José Houde, vous n'êtes pas Louis-José Houde. Par contre, si vous étiez en mesure de vous entretenir avec le producteur et de convenir avec le producteur: Tes billets sont 100 $, tu ne veux pas qu'on les vende plus cher que 100 $ mais tu veux passer chez nous, je m'en vais te les acheter à 80 $. Et, si quelqu'un qui te les achète à 100 $, un individu, monsieur X les achète à 100 $ chez Admission ou chez toi, producteur, et qu'il veut passer chez moi, je vais lui payer 80 $. Je ne paierai pas 100 $, je vais les revendre à 100 $. Ma marge de profit sera donc, comme dans l'exemple qui a été donné par M. Picard tantôt, dans la vente de maison... le vendeur assume sa part de responsabilité, il l'a achetée.

Que ce soit vendeur ou producteur, on parlait de Juste pour Rire tantôt, là, que ce soit lui qui dit: Moi, j'en vends en gros, je les vends moins cher, ou que ce soit l'individu qui l'a acheté lui-même puis qui s'aperçoit qu'il ne peut plus y aller, il y aurait un intérêt. Puis je vous écoute puis je me dis: Il me semble qu'il y a de la place, là, pour avoir des ententes entre tout ce monde-là, si tant est que l'objet n'est pas d'aller à une valeur au-delà de la valeur initialement identifiée mais au montant. Et donc c'est celui qui vend qui se trouve à payer la commission.

Est-ce qu'il y a de l'espace, pour vous, là-dedans?

**(16 h 40)**

Le Président (M. Bernier): M. Marceau.

M. Bussières (Éric): Il y a de l'espace. Par contre, je vais répondre en trois temps. Donc, il y a de l'espace pour le producteur, s'il vient nous parler et nous dit ça. Par contre, il ne faut pas oublier que, sur Billets.ca, il y a des gens qui vendent leurs billets et ça, je ne peux pas décider à quel prix qu'ils vont mettre leurs billets. Ça, c'est leur choix. Je ne ferai pas la police pour dire à telle personne: Vous devez vendre vos billets à tel prix.

M. Fournier: ...site de revente, là. Vous ouvrez la porte à ce que quelqu'un le vende au prix qu'il veut. Vous êtes le commerçant qui ouvre cette possibilité-là. Je fais juste vous dire que je ne partage pas votre point de vue que vous ne pouvez pas donner des règles. Je ne partage pas votre point de vue, là. Je veux vous arrêter tout de suite dans l'exemple, ça ne sera pas un bon exemple, là. Vous avez une business, vous faites les règles de la business. Vous établissez votre commission. Vous avez décidé que c'est l'acheteur qui paie. Moi, je vous dis: Êtes-vous capable de réfléchir à ce que ce soit le vendeur?

Le Président (M. Bernier): M. Perrault.

M. Bussières (Éric): Je vais laisser répondre aussi...

Une voix: M. le Président.

Le Président (M. Bernier): M. Perrault.

M. Perrault (Stéphane): Ça me fascine à quel point on voudrait que les gens qui ont des billets à vendre les vendent en deçà de la valeur réelle du billet. Ce n'est pas nous qui fixons la valeur du billet. Le marché s'établit selon l'offre et la demande puis selon d'autres critères: Est-ce que les critiques sont bonnes? Est-ce qu'on est à tant de semaines du spectacle? Etc.

Pourquoi est-ce qu'on veut absolument, pour faire plaisir aux producteurs, demander à la personne qui a acheté un produit qui veut le revendre, peu importe la raison pour laquelle elle veut le faire, de le vendre absolument en deçà de sa valeur? Si vous achetez une voiture, pourquoi est-ce que vous accepteriez de la vendre moins cher à ce moment-là?

Je suis surpris d'entendre l'ADISQ quand elle nous dit... Elle se soucie beaucoup de nos clients qui achètent des billets sur nos sites -- parce que c'est nos clients, soit dit en passant, ce n'est pas ceux des billetteries -- ils se soucient de nos clients qui revendent, qui achètent des billets à un prix supérieur, ils se soucient beaucoup qu'on les informe comme il faut, mais -- Éric vous a expliqué tantôt toutes les précautions qu'on prend, jusqu'à même permettre de rembourser -- mais ils se soucient très peu de leurs clients à eux à qui ils ont vendu un billet plein prix puis qui se rendent compte, en fin de course, que finalement il reste des billets à vendre, on va les écouler à 50 %. L'écart entre celui avec qui ils ont contracté -- leur client à eux, théoriquement, c'est celui qui a acheté le plein prix à la billetterie -- puis celui qui l'a acheté à moitié prix à côté, ça n'a pas l'air à les énerver beaucoup, beaucoup, je trouve. Puis pourtant ils en créent un, déséquilibre, quand ils font ça.

Mais je suis d'accord avec vous, M. le ministre, c'est le prix que ça vaut. Si c'est le prix dans le marché, qu'ils le vendent moins cher, c'est leur choix. Mais pourquoi est-ce qu'on obligerait quelqu'un qui a acheté... Trouvez-moi un produit, à l'heure actuelle, que vous pouvez acheter puis que quelqu'un va absolument vous réglementer sur le prix de vente? Vous parliez des maisons tantôt, c'est un principe intéressant, mais c'est toujours bien le vendeur qui a le choix de décider à quel prix il vend sa maison.

M. Bussières (Éric): Il y a une commission aussi à l'acheteur, souvent, si on a utilisé un courtier.

Une voix: Oui, absolument.

Le Président (M. Bernier): M. le ministre.

M. Fournier: Comprenons-nous bien: la vente entre deux consommateurs n'est pas visée par cette loi. Alors, à chaque fois qu'on me dira: On ne peut pas empêcher un consommateur de vendre à son frère le billet 150 fois plus, puis ça constitue quasiment une donation par-dessus le prix, là, ce n'est pas visé. Ce qui est visé, c'est le fait que, de la manière dont le système fonctionne, il déréglemente, il dérégularise le procédé d'achat et de vente de billets, et de production d'artistes, et nous, comme gouvernement, d'aide via des crédits d'impôt et des subventions au milieu culturel. Et on se retrouve avec un consommateur qui se fait avoir parce qu'il ne sait pas vraiment qu'est-ce qu'il a acheté à cause de la façon dont ça fonctionne.

Je vous pose une question bien simple, bien, bien simple, qui réglerait pas mal d'affaires. La raison pour laquelle je vous parle de faire payer le vendeur plutôt que l'acheteur, vos services, c'est que, de cette manière-là, on évite l'achat systématique. Le coeur du problème, ce n'est pas de savoir si quelqu'un veut vraiment payer 50 $ de plus. Le coeur du problème, c'est qu'il y a des gens qui s'organisent comme plan d'affaires pour acheter les meilleurs billets rapidement pour aller chercher un profit. Ça, ça cause un certain, disons, une certaine iniquité dans le système.

Mais les arguments que vous faites valoir sont intéressants, et je ne veux pas les mettre de côté. Voyez-vous, je ne veux pas vous mettre de côté. Lorsque vous dites: Moi, j'ai un «know-how», moi, j'ai un savoir-faire, moi, je permets aux gens de racheter leurs billets parce qu'ils sont pris avec, ils les ont achetés, ils ne peuvent pas y aller, moi, je peux faire ça, je dis: Aïe, on peut s'entendre. Un, ce serait bon que vous parliez avec les producteurs, après tout, c'est leurs shows. Deuxièmement, si vous étiez en mesure de discuter avec eux pour dire: Moi, je vais les revendre, je peux même vendre les tiens, je suis une bonne plateforme, je vais les vendre. Établis ton prix. C'est toi qui établis ton prix, ce n'est pas moi. Fais ton prix, je vais acheter en dessous, je vais vendre ce prix-là, je vais prendre... Évidemment, j'ai des employés et tout ça, alors je vais prendre la participation que je dois prendre là-dedans. C'est cet élément-là.

Si vous me ramenez sur: Les gens sont libres, faisons ce qu'on veut, on peut jaser pendant 150 ans, là. Moi, je suis pour la liberté, mais en même temps je ne veux pas que les gens soient lésés, puis je veux en plus avoir le plein montant des dollars qu'on donne à l'industrie culturelle et touristique. Je parlais tantôt du Festival d'été. Écoutez, je comprends bien, là, ce que vous me dites: Ce sont probablement des ordinateurs d'Autriche ou d'autres pays qui ont fait des «hits» sur le Festival d'été pour acheter des macarons moins cher puis pouvoir les revendre plus cher. Je vous entends. Il y a un petit doute dans ma tête, là, mais je vous entends. Coeur de ma question: Achat des billets, mais avec la commission payée par le vendeur plutôt que par l'acheteur.

Le Président (M. Bernier): M. Perrault.

M. Perrault (Stéphane): Bien, c'est-à-dire que c'est le système qu'on a à l'heure actuelle, c'est-à-dire qu'on offre des plateformes, comme je vous dis, c'est le consommateur qui fixe le prix. Maintenant, on n'a pas de discussion encore. Ce que vous offrez, c'est des discussions éventuellement avec l'industrie. Ça pourrait être intéressant, on a montré une certaine ouverture de ce côté-là. Et on présente d'ailleurs, vous allez le voir dans le mémoire de 514-Billets demain, ce qu'on propose, M. le ministre, c'est plutôt que de simplement abolir et à notre sens perdre un certain contrôle sur l'industrie, c'est plutôt proposer un encadrement. Et une des choses qu'on préconise dans cet encadrement-là, c'est effectivement d'abolir les robots, si robots il y a, là, parce que c'est un peu comme les ovnis, on en entend beaucoup parler, mais on n'en a pas vu encore. Mais on est prêts à vous croire que ça peut exister.

M. Bussières (Éric): C'est une pratique aussi déloyale pour nous, tu sais, c'est une pratique qu'on n'aime pas, mais c'est une pratique déloyale pour nous, parce que c'est de la mauvaise compétition pour nous aussi et pour le consommateur, là.

M. Fournier: Est-ce que j'ai encore 30 secondes?

Le Président (M. Bernier): Oui, vous avez encore quelques minutes, M. le ministre.

M. Fournier: Je comprends de votre dernière réponse qu'advenant que le projet de loi n° 25 soit adopté, qui est, selon moi, une forme de régulation plutôt que de prohibition, tantôt je donnais l'exemple de la France qui vraiment empêche la revente, s'il était adopté, il n'y a rien qui vous empêche d'aller vous rasseoir avec les producteurs, avec l'industrie et de concevoir un plan d'affaires avec tout le «know-how» que vous avez, qui va même mettre en valeur nos billets et nos artistes, en prenant par exemple le chemin de la commission payée par le vendeur plutôt que par l'acheteur. Vous savez que le projet de loi fait juste mentionner le prix qui a été fixé au départ. On ne peut pas aller au-dessus de ce prix-là. Alors, si vous êtes capables de développer un plan d'affaires où l'acheteur qui ne peut pas y aller néanmoins se dit: Bien, je suis prêt à assumer une partie de ma responsabilité, c'est moi qui ne peux pas y aller, à ce moment-là, vous êtes en mesure d'établir, grâce à votre savoir-faire, une formule profitable pour vous, pour l'industrie, pour nos artistes, pour la société au complet.

M. Perrault (Stéphane): Mais ce qui est fascinant...

Le Président (M. Bernier): M. Perrault.

Une voix: Excusez...

M. Bussières (Éric): Il faut...

Le Président (M. Bernier): Oui, M. Bussières.

M. Bussières (Éric): Il faut aussi penser, là, que c'est 13 % de notre chiffre d'affaires, là, les artistes québécois. Le 87 %, là, c'est des artistes internationaux. On ne peut pas s'asseoir avec eux, là, c'est impossible. Et l'autre chose aussi, là, il y a le sport. Les gens qui paient 13 000 $ et 15 000 $ en billets de saison, là, ils veulent un retour sur investissement, là. Le Canadien, il demande de l'argent, là, six mois d'avance. J'aimerais bien ça, là, que tout soit beau, là, mais veux veux pas, le consommateur, le vendeur de billets, me semble qu'il aurait le droit de faire un profit. S'il te vend à rabais, c'est difficile pour l'industrie...

M. Fournier: C'est intéressant, là...

Le Président (M. Bernier): M. le ministre.

M. Fournier: Je vais laisser faire le bout des Canadiens, là, mais c'est intéressant ce que vous me dites. Pour les vedettes internationales, vous ne pouvez pas aller vers les producteurs. Le projet de loi ne vous y forcera même pas. En fait, le projet de loi ne vous forcerait même pas à vous asseoir avec l'industrie, simplement de considérer que vous ne pouvez pas vendre au-dessus de la valeur du billet, juste ça. Vous serez en mesure de faire les affaires en demandant au vendeur d'assumer.

Je crois, en vous entendant... Et vous savez pourquoi je vous dis ça, hein? C'est simplement pour éviter l'achat systématique. Vous autres, vous n'avez pas de robot, puis je n'ai pas de misère à vous croire. Je sais qu'il y en a qui en ont, alors, j'essaie de trouver un moyen pour éviter que ça vienne perturber le marché. Alors, je fais juste dire que l'énergie que vous mettez à protéger le vendeur... l'acheteur, si on pouvait se dire... en fait, protéger le vendeur... si on pouvait dire: On va protéger l'acheteur. Celui qui a acheté initialement, il a fait son choix, c'était le prix qui était demandé par le producteur. Il y a une impossibilité pour lui d'y aller, il le revend, il l'assume. L'acheteur qui arrive le deuxième après la revente, lui, ce ne sera que justice: on le traitera comme tous les consommateurs de billets, celui qui a gardé son billet et les autres. Il me semble que ce serait plus juste, puis tout le monde y gagnerait.

**(16 h 50)**

Le Président (M. Bernier): Courte réponse, s'il vous plaît.

M. Perrault (Stéphane): M. le ministre, il y a deux choses qui me brûlent les lèvres. La première, je vous dirais: Qu'est-ce qu'on fait avec... Parce que je comprends votre préoccupation, vous êtes ministre responsable de l'Office de la protection du consommateur, vous voulez protéger le consommateur, puis ça, c'est tout à votre honneur. Mais on permet aussi quand même, comme je vous le disais tantôt, à des producteurs de vendre en deçà du prix. Alors, qu'est-ce qu'on fait du fait qu'on lèse celui qui est le premier, qui est supposément le fan, là, celui qui se lance sur le site pour acheter le billet en premier au meilleur prix, alors qu'en bout de piste la réalité, c'est qu'il se vend probablement beaucoup plus de billets à rabais qu'il s'en vend au-dessus du prix? Ça, c'est mon premier point.

Mon deuxième point... puis je comprends...

M. Fournier: ...au moins décidé par le producteur, c'est... Honnêtement, excusez-moi, mais c'est son show, non? Ce n'est pas le vôtre en tout cas.

Le Président (M. Bernier): Merci.

M. Fournier: Une chose est sûre, ce n'est pas le vôtre, là.

Le Président (M. Bernier): Merci. Merci, M. le ministre.

M. Perrault (Stéphane): ...votre consommateur est lésé...

Le Président (M. Bernier): Terminez, M. Perrault. Par la suite, on va passer du côté de l'opposition officielle.

M. Perrault (Stéphane): Bon, bien écoutez, mon deuxième point que je voulais vous dire, j'écoutais M. Ménard en conférence de presse tantôt puis je trouvais intéressant... Il disait: Il y a de l'argent que les revendeurs font qui n'est pas réinjecté dans l'industrie. Puis vous me disiez tantôt, vous aviez une préoccupation par rapport au fait que l'État met de l'argent dans ces artistes émergents là, et c'est une bonne chose, on sait qu'on a des bons artistes au Québec. Maintenant, justement, pourquoi, encore une fois, ne pas vouloir aller chercher, entre guillemets, la valeur exacte pour un billet et justement permettre autant au producteur d'en bénéficier en partie s'il le faut et qu'il puisse le réinjecter lui-même dans l'industrie culturelle...

Le Président (M. Bernier): Merci, M. Perrault.

M. Perrault (Stéphane): ...plutôt que de le laisser sur la table?

Le Président (M. Bernier): Merci, M. Perrault. Nous allons passer du côté de l'opposition officielle. M. le député de Beauharnois, la parole est à vous.

M. Leclair: Merci, M. le Président. M. Bussières, M. Perrault, bonjour à vous deux. Merci d'être là, fort intéressant. J'aimerais d'entrée de jeu peut-être, contrairement à M. le ministre, moi, approuver vos dires de dire que, l'OPC, il n'y a eu aucune plainte. Parce qu'il aurait pu y avoir plusieurs, plusieurs plaintes, là, si on regarde, là, il y a des articles, là, l'article 239, qui dit qu'«aucun commerçant, [ou] fabricant [...] publicitaire ne peut [...] déformer le sens d'une information»-- comme on a stipulé pas mal, là, aujourd'hui, là -- à votre insu... Alors, j'imagine que l'Office de la protection du consommateur aurait agi si tel avait été le cas. Puis, bien sûr, s'il y a un projet de loi, bien là on n'en parle pas, mais ça fait quand même 12 ans que vous êtes dans le métier.

Mais, à voir où est-ce que le projet de loi s'en va, on sait bien qu'on est prêts à regarder, même l'opposition, à tenter de pousser ce projet de loi là à l'heure qu'on se parle, à moins qu'il y ait des grands amendements, là, qui feraient en sorte, là, qu'on se retire de là. Mais, pour le moment, sur les grandes lignes, nous sommes à peu près d'accord.

Est-ce que vous pouvez m'expliquer sans... Vous ne me sortirez sûrement pas vos recettes, là, mais là il y a du monde qui parle que... Comme là, c'est un petit peu contradictoire, pas ce que vous dites, mais ce que l'on entend aujourd'hui. On dit que, tous revendeurs confondus, c'est 10 %. Donc, j'imagine, mettons que vous êtes meilleurs que les autres, vous en avez 7 %, 8 % juste à vous, donc qui n'est pas la majeure partie du marché, 7 %, 8 % là. Vous, vous dites que, lorsqu'on parle côté québécois surtout, c'est 10 %, 12 %, 13 %, 14 % de votre marché peut-être, là, puis...

Mais là tantôt on parlait d'une armée ou des robots, là, informatiques et tout ça, là. Sans nous donner votre clé, là, mais... pouvez-vous nous expliquer un peu comment ça marche? Pourquoi que vous êtes vraiment, là, le génie de ça, là? Toutes les meilleures places, là, même le producteur ne peut même pas se les réserver, vous lui volez, là, à entendre parler les gens. Alors, est-ce qu'on peut savoir comment ça fonctionne exactement?

Vous parlez de services que vous offrez aux gens pour revendre des billets, mais avec le peu de pourcentage que vous avez sur le marché, être si efficace que ça... J'aimerais savoir exactement comment ça marche, parce qu'encore cette semaine on voit sur votre site... les billets du Canadien vont être en vente, là, puis je prends une journée aléatoire, samedi matin, à 10 heures. Vous sortez sur votre site: Nous autres, à 10 h 20, on est d'attaque, on en a en masse à vendre aussi. Alors, tout ça fait un petit peu écartiller nos yeux puis à dire: C'est des rapides, ça n'a pas de bons sens, là, ils ont des billets quasiment en même temps que la ticketterie ou la billetterie officielle, là. Alors, j'aimerais comprendre un peu votre processus, là, sans peut-être nous donner votre recette, là, parce que la guerre n'est pas finie, donc...

Le Président (M. Bernier): M. Bussières, M. Perrault. M. Bussières.

M. Bussières (Éric): Je vais essayer d'être le plus transparent possible. Donc, en général, là, on utilise les mêmes procédures d'achat que tous les autres consommateurs. Chez Billets.ca, les achats de billets, ça a toujours été fait à l'échelle humaine. Il ne faut pas oublier que 60 % des billets vendus sur Billets.ca proviennent des individus qui ont des billets en trop. Pour le Canadien, c'est aussi simple que ça, là. Ça fait 12 ans qu'on est dans le marché. On s'est créé des contacts, là, de gens, là, qui ont des billets de saison, et je peux vous dire: Vous seriez surpris des personnalités connues qui nous vendent leurs billets de saison, là. Ça va de tous les domaines, de tous les marchés et même des politiciens. Puis je ne veux pas...

Une voix: ...vendre les miens, je n'en ai pas, moi.

Le Président (M. Bernier): Je vous invite à la prudence, M. Bussières.

M. Bussières (Éric): Excusez-moi, excusez-moi.

M. Leclair: Transparence, transparence. Il n'y a pas de problème.

Le Président (M. Bernier): Poursuivez, poursuivez.

M. Bussières (Éric): Pour les meilleures places, bien, veux veux pas, on est à l'affût quand le spectacle tombe en vente. Et, si les billets tombent à midi en vente, bien, on est là et les billetteries officielles nous offrent les meilleurs billets. Donc... Mais il ne faut pas oublier que les billets qu'on achète, là, dépendamment des spectacles, on n'achète pas toujours les meilleurs billets. Un billet... Je vous donne un exemple: Paul McCartney, cet été, là, les meilleurs billets, la dixième rangée, au prix coûtant de Paul McCartney, là, les billets étaient de 1 000 $ et ça allait jusqu'à 2 000 $ pour la première rangée. C'est certain que nos clients n'avaient pas besoin de ça, là, on n'en a pas acheté. On a acheté des rouges, sur les côtés. Donc, c'est certain qu'on va acheter les billets et les catégories que nos clients nous demandent.

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député de Beauharnois.

M. Leclair: Oui, j'aimerais aussi avoir peut-être un autre éclaircissement, là. Tantôt, vous avez fait part de Juste pour Rire qui vous vendait des billets, là, à un prix, là, avec un pourcentage ou 10 $ de plus élevé. Ça, c'est le 10 $ de plus élevé de qu'est-ce qu'on offrait aux gens ou... Comment que ça marche au juste, ce deal-là? C'est un deal qui est avant la vente? Alors, j'aimerais avoir des éclaircissements, là, sur ces ententes-là.

Le Président (M. Bernier): M. Bussières.

M. Bussières (Éric): Lui, pendant peut-être un an et quelques, il nous a vendu des billets, là. Et on achetait des billets pour, je vais vous donner l'exemple: Gregory Charles, le prix du billet était de 65 $. Et Juste pour Rire savait qu'on les vendait plus chers, donc, ils nous ont demandé un profit de 12 $. Donc, aux consommateurs, ils le vendaient 65 $, à nous, 76 $ et quelques. On a accepté, ça ne nous dérangeait pas, on était très heureux, et on a fait un profit. Par contre, il en a pris beaucoup, là. Donc, quand qu'ils disent qu'il y a 12 billets, là, de réservés, là, les producteurs, là, ça, c'est... je ne sais pas pour l'ADISQ et M. Larivée, mais je peux vous dire pour Juste pour Rire, là, il a la mainmise sur ses billets, là, puis il décide qu'est-ce qu'il donne aux consommateurs. Ça fait que, quand moi, là, je vois Juste pour Rire dire qu'il a à intérêt le consommateur, là, puis il se garde, là, la moitié de la salle, soit pour nous revendre, soit à quelqu'un d'autre, puis que le consommateur arrive, là, la journée de la vente, puis qu'il reste peut-être 500 billets à l'arrière, là, faites-moi pas pleurer, là.

Le Président (M. Bernier): O.K., merci. M. le député.

M. Leclair: J'aimerais savoir de votre expérience aussi, avec d'autres organisations, là, ça, sans peut-être même les nommer, là, mais... Est-ce que c'est monnaie courante, ça? Comme, vous, c'est votre domaine, là, c'est vraiment, là, c'est votre business à vous, là, donc, je... Est-ce qu'il y a d'autres domaines qui vous disent: Regarde, nous, on vous laisse une plage de 100, 225, ou même 5 000 tickets, mais on vous charge un «over»?

Le Président (M. Bernier): M. Bussières.

M. Bussières (Éric): Là, mon but aujourd'hui, là, ce n'était pas de faire une chasse aux sorcières. C'était juste pour indiquer que souvent les producteurs disent quelque chose «up front» et derrière, ils font autre chose, là. Demandez-vous pas pourquoi, là, qu'il n'y a pas d'autres producteurs ici, là.

Le Président (M. Bernier): M. le député.

M. Leclair: Donc, je peux prendre, en conclusion, que c'est quand même répandu un peu, là, dans les...

M. Bussières (Éric): ...pas que c'est répandu, c'est quand même assez exceptionnel, mais ça reste quand même que qu'est-ce que l'ADISQ propose, ce n'est pas toute l'industrie qui pense comme elle. L'ADISQ et les producteurs ont des plus gros problèmes sur Internet à se référencer que sur... Et on n'existerait même pas s'ils feraient deux choses: si les producteurs se référenceraient bien sur Internet et s'ils s'unissaient. Mais ils ne s'uniront jamais parce qu'ils ne peuvent pas s'entendre eux-mêmes.

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.

M. Leclair: Juste peut-être une dernière petite question. Vous dites que ces gens-là, là, jamais, malgré, là, la crainte qu'ils ont avec vos sites, là, qui semblent être assez efficaces, vous n'avez jamais eu de discussions avec eux autres, là, d'affaires autres que, mettons, l'exemple que vous avez donné de 60 $ à 76 $, mais je parle d'occasion d'affaires, là. Vous n'avez jamais eu de... Ces gens-là n'ont jamais été vous voir pour tenter de soit d'avoir vos trucs ou s'associer?

Le Président (M. Bernier): M. Bussières.

**(17 heures)**

M. Bussières (Éric): Juste pour Rire était le seul vraiment qui a pris un profit puis qui demandait, là. On a des producteurs, là, qui laissent leurs billets mais ils nous le disent: Mettez le prix coûtant, et on met le prix coûtant.

Le Président (M. Bernier): Terminé. Merci. M. le député de Drummond.

M. Blanchet: Bonjour, messieurs. Aujourd'hui, je ne parle évidemment plus au nom de l'ADISQ et pas davantage au nom de l'UDA, mais je vais me faire un plaisir d'essayer de répondre à vos questions. L'ADISQ et l'UDA n'ont pas une relation, du moins à l'époque où j'y étais, normale parce que les membres de l'ADISQ ne sont pas les employeurs des artistes: ce sont des partenaires. Et il arrive donc, même si parfois il y a des relations tendues dans des négociations, il arrive donc que l'UDA ne se sente pas mal représentée lorsque c'est l'ADISQ qui est à quelque part. Alors, voyez-y plutôt quelque chose de sain et voyez-y plutôt un exemple qu'effectivement l'industrie du disque et du spectacle au Québec a un sens de la cohésion assez remarquable, tant et si bien que, dans beaucoup de dossiers, c'est souvent eux qui prennent la pôle pour aller faire les représentations publiques.

Vous dites que les producteurs et les... Je vous fais un certain nombre de commentaires puis je vais vous laisser après... Vous dites que les producteurs, eux aussi, utilisent les dates de supplémentaires, les prix de billets pour créer leur buzz. Mais je vous dirais que l'artiste qui fait ça, bien, c'est son show. C'est son billet. C'est son buzz. C'est sa mise en marché. Et, lorsque M. Perrault dit: C'est nos clients, pas sûr que c'est vos clients. Je ne suis pas sûr que vous ne parasitez pas les clients de quelqu'un d'autre en profitant de leur mise en marché, à laquelle vous n'auriez pas eu besoin de participer autrement qu'en poussant des référencements en haut, sur Internet. Alors, je vous invite à analyser ça.

Je ferais même une comparaison. N'ayant pas les taxes à payer, il y a des gens qui vendent des cigarettes pas mal moins cher ou au même prix avec un profit très élevé. Ce n'est pas la mise en marché directe avec un profit élevé qui donne de la valeur à quelque chose, mais bien ceux qui l'auront produit et développé au préalable.

Je me demande si le fait que vous ayez une si forte part de votre marché qui vient d'individus qui veulent revendre un billet n'est pas un encouragement à ce phénomène de multiplication de petits revendeurs privés qui se disent: Un 50 $ facile. Je me demande si le pourcentage que vous dites être marginal du marché que vous occupez avec les arts québécois est si marginal que ça, puisque pourquoi vous opposer à devoir y renoncer s'il est si marginal que ça. Je doute que vous soyez là dans le but de soutenir les arts et la culture québécoise. Et, lorsque vous dites que pour ne pas... vous n'êtes pas à ce point-là dans le marché des artistes locaux, la preuve en étant que vous embarquez juste lorsqu'il s'agit de supplémentaires, bien, je dirais que vous embarquez juste quand la job est faite. Lorsque la popularité est créée, lorsque le marché est effervescent, vous dites: Allez, hop! On embarque. C'est très facile comme exercice. C'est un risque moindre, en tout cas, une autre nature de risque que celui que le spéculateur moyen prend ou le producteur moyen prend.

Quand c'est complet et que vous le vendez... Vous dites: on vend les billets quand c'est complet. Parce qu'évidemment, lorsqu'il n'y a pas de demande, vous ne vendez pas beaucoup. Vous avez acheté des billets que vous remettez en vente lorsque la salle est complète. Est-ce qu'il n'y a pas là un phénomène de perversion justement de la loi de l'offre et de la demande que M. Perrault invoquait, puisque, justement, c'est lorsque la valeur augmente que vous faites l'offre au marché? Vous avez créé une demande artificielle en retirant des biens du marché et vous les remettez sur le marché au moment où leur valeur est artificiellement accrue. J'aimerais vous entendre sur cette question-là.

Je lis et j'entends que vous êtes ouverts à une réglementation. Moi, je dis qu'on ne peut encadrer que ce qu'on s'est donné le droit d'interdire d'abord, et donc le processus de la loi est un préalable nécessaire avec possiblement des ajustements.

Je reviens aussi sur un autre élément, le processus... Vous parlez que vous êtes une petite équipe de 14 personnes, je crois. Vous savez, il y a des maisons de disques à Montréal qui ont à peu près ça. Il y en a qui ont plus de monde que ça. Puis, si on tient compte des musiciens sur la route, si on tient compte des techniciens sur la route, en effet, vous avez une toute petite équipe. Et les gens qui ont créé le produit que vous recommercialisez après eux, eux, ont des grosses équipes, investissent beaucoup d'argent en création, en préproduction, en production, en commercialisation, en circulation. Votre petite équipe arrive à la fin, lorsque le travail est fait, avec un risque, si vous calculez votre spéculation comme il le faut, infiniment moindre que le risque que les entrepreneurs auront pris initialement.

Enfin, vous avez des démarches qui semblent effectivement tout à fait louables. Je regardais la liste de ce que vous faites pour, comment dire, être au service, ou être honorables face au consommateur. Je vous dirais que le producteur québécois moyen n'a pas les moyens de s'offrir ça, mais que la marge que vous prenez par-dessus ce que le producteur aurait, lui, demandé pour son spectacle vous donne probablement cette latitude. C'est une manière, comment dire, d'enrober le bonbon de telle sorte qu'il ait l'air plus sucré pour le consommateur, mais il va quand même payer beaucoup plus cher. C'est, à la limite, une police d'assurance pour quelqu'un qui n'aura pas d'accident. Ça laisse une marge de manoeuvre hautement plus significative au revendeur que ce que ça laisse au client.

Dernière chose: vous avez peut-être des pratiques honorables, mais le phénomène de la revente ne se limite pas à ce que vous en faites, mais bien à ce beaucoup d'autres joueurs en font. Et il y en a qui sont passablement moins propres dans leurs pratiques que vous, ce qui, en soi et d'emblée, appelle une intervention de l'État. Il y en a qui ne sont même pas basés au Québec, phénomène qui risque de se maintenir, toutefois, puis il y a des gens qui se font franchement flouer. Si vous avez de bonnes pratiques, sous réserve des encadrements que la loi suggère, ainsi soit-il, mais il y en a qui n'ont pas de bonnes pratiques et qui... Écoutez, on a tous entendu parler des gens qui achètent un billet pour arriver, puis voir quelqu'un déjà assis à leur place, là. Donc, je pense qu'une hirondelle ne faisant pas le printemps, bien, un revendeur honnête ne rachète pas ceux qui ne le sont pas. Alors, voilà.

Le Président (M. Bernier): M. Bussières... M. Perrault?

M. Bussières (Éric): ...je vais laisser répondre M. Perrault, mais je dois avouer que vous aviez beaucoup de bons points, mais ça...

Le Président (M. Bernier): M. Perrault. Vous pouvez y aller.

M. Perrault (Stéphane): Je vous dirais que... plusieurs choses. Premièrement, vous avez raison quand vous dites qu'effectivement, à l'heure actuelle, on ne contribue pas au développement de l'artiste, c'est évident. Et on a parlé d'une ouverture tantôt, en discussion avec le ministre, sur ce côté-là. Maintenant, je veux juste vous signaler que les billetteries non plus... les billetteries officielles non plus n'investissent pas dans les artistes. D'ailleurs, les billetteries officielles prennent uniquement un frais à l'artiste. Puis ce que je comprends, en tout cas, si on regarde le référencement Internet, 8,5 milliards de dollars qu'a fait...

M. Bussières (Éric): Le chiffre d'affaires Ticketmaster qui est Admission, Billetech, ici, ils ne sont pas capables de mettre du référencement payant, mais il font 8,6 milliards. M. Larrivée, il dit: Ah! Ils font... Ils prennent juste 3 $, 4 $ de frais, là. Bien, c'est Ticketmaster. Ça, c'est en 2008, donc ça doit être plus gros en 2011.

M. Perrault (Stéphane): Je pense que ça va rassurer le député tantôt sur le fait qu'effectivement on est pas mal efficaces. Si Ticketmaster n'est pas capable à 8,6 milliards d'investir intelligemment sur le Web pour que le référencement de ces billetteries se fassent... Maintenant, ça, c'est une chose.

Je veux juste aller à l'essentiel de ce que vous avez dit. C'est exactement ce qu'on propose. On propose une intervention de l'État, et il y a eu beaucoup d'efforts qui ont été faits dans les 10, 12 années d'existence de Billets.ca pour faire en sorte justement de bien baliser. On s'occupe de nos clients. On pourrait avoir un débat longtemps sur à qui est le client, là. Si vous achetez un Proctor Silex chez Sears, êtes-vous un client de Proctor Silex ou de Sears, là? Mais on pourrait avoir une discussion longtemps là-dessus.

Mais, ceci étant dit, je pense que ce qui est important, effectivement, c'est qu'il y ait un encadrement, et c'est ce qu'on propose. On ne dit pas qu'il faut laisser tout aller. Ce qu'on dit, c'est qu'il y a une opportunité, autant pour l'industrie, je pense, qui est intéressante, parce qu'il y a une valeur sur le marché et ce n'est pas le cas pour tous les artistes, malheureusement. Vous l'avez reconnu, M. le ministre, tantôt. C'est clair qu'il y a des artistes qui ont besoin d'aide, mais il y a des artistes pour lesquels il y a des revenus substantiels, et on se pose la question, juste: Pourquoi est-ce qu'on se priverait de ces revenus-là, alors qu'on pourrait très bien encadrer ça et faire en sorte que ça profite à l'ensemble de l'industrie? Maintenant... Et c'est exactement ce qu'on propose. Vous allez le voir dans un mémoire, l'ensemble de ce qu'on propose, mais on fait une offre à savoir qu'il y a certains éléments qui peuvent être balisés, et ce serait dans l'intérêt à la fois du consommateur mais aussi, effectivement, dans l'intérêt des artistes, que ce soit via leur producteur.

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député de Drummond, il reste quelques minutes.

**(17 h 10)**

M. Blanchet: Oui, rapidement. Les billetteries ont des pratiques commerciales légèrement différentes, utilisent moins le référencement, probablement parce qu'elles ont un très, très large public qui accepte de payer des frais que beaucoup considèrent déjà comme élevés. Mais ces frais-là sont préétablis, fixes, avec des pourcentages. Ces pratiques-là... D'ailleurs, rien ne vous empêcherait de faire pareil et d'approcher les producteurs et de vous convertir en billetterie, on aurait moins de débats.

Cela dit, lorsque quelqu'un revend un billet, vous lui demandez 15 % de son prix de vente. Êtes-vous prêt à me dire qu'à chaque fois que vous achetez vous-même des billets et que vous les revendez, votre marge de profit brut ne dépasse jamais 15 %?

M. Perrault (Stéphane): Dans...

Le Président (M. Bernier): M. Perrault.

M. Perrault (Stéphane): Dans notre cas, les marges de profit brut varient environ entre 30 % à 40 %, puis ça, c'est règle générale.

M. Bussières (Éric): Et c'est corroboré par l'OPC, et c'est corroboré par Pray et l'autre étude de la chercheure de l'UQAM, là.

Une voix: Connolly Pray.

M. Bussières (Éric): Oui.

M. Perrault (Stéphane): Alors, effectivement, et là, évidemment, à partir de là, 30 % à 40 %, c'est de la marge brute. Alors, à partir de là, il faut payer nos frais. Vous avez été en affaires, vous savez ce que c'est. Alors, ce n'est pas de l'argent qui va directement dans nos poches. Parce qu'il faut dire qu'on en perd, de l'argent, aussi sur certains événements parce que, nous, contrairement aux billetteries, on les achète, les billets. Les billetteries ne les achètent pas, eux autres, ils font uniquement ramasser leurs frais. Nous, on prend un risque à chaque fois sur des artistes. Puis, si vous allez faire un tour sur le site de Billets.ca, vous allez voir, il y a plusieurs artistes. On en achète, des artistes émergents. Évidemment, on n'en achète moins, mais on est toujours disponibles quand même à offrir un maximum de choix à nos clients.

M. Blanchet: 40 %, compte tenu d'une petite équipe et compte tenu du fait que vous avez parfois des pertes, si jamais vous restez légal, on va vous envoyer à la Caisse de dépôt. C'est une marge très importante pour laquelle les artistes pourraient certainement avoir un appétit. Merci.

Le Président (M. Bernier): De consentement, le ministre avait une question additionnelle. Est-ce que vous êtes consentants? Est-ce que vous consentez à ce que le ministre puisse poser la question? M. le ministre.

M. Fournier: Juste... Ça me chicote depuis tantôt. Les billets de Juste pour Rire sont en vente à 65 $ au comptoir, et vous dites: Moi, je veux les acheter à 72 $ ou 76 $. C'est comme ça que ça s'est passé?

M. Bussières (Éric): Passé?

M. Fournier: Il n'y avait absolument rien de plus pour passer de 65 $ à 76 $? Vous avez fait une décision d'affaires de payer plus cher des billets qui, au comptoir, se vendaient déjà moins cher?

M. Bussières (Éric): Exactement.

M. Fournier: L'objectif, c'était quoi?

M. Bussières (Éric): L'objectif, c'est: on n'a pas de robot, donc on ne peut pas acheter des centaines de billets, là. Donc, si on voulait avoir, là, je crois que c'était peut-être 400 billets, là, 400, 500 billets, bien, c'était le seul moyen.

M. Fournier: Les gens peuvent l'acheter au comptoir, pourquoi ils vont vous les acheter 80 $ quand vous prenez votre profit par-dessus le prix. J'ai de la misère à comprendre le raisonnement que vous aviez. Excusez-moi.

M. Bussières (Éric): On a une grande clientèle, hein? On a vraiment une très grande...

M. Fournier: ...ça appeler au comptoir, ils aiment mieux appeler chez vous, c'est ça?

M. Bussières (Éric): On a beaucoup de clients qui nous appellent directement puis ils ne veulent pas passer la billetterie, ils ne veulent pas se casser la tête d'aller aux ventes en ligne, rien. Ils sont habitués. Les gens nous... La personne, là, qui nous achète du hockey, du Grand Prix et tout, après ça, sa femme veut aller voir un humoriste, là, il ne va pas à la billetterie officielle. Il est habitué de passer par nous. On a un service à la clientèle, il connaît par leurs petits noms les gens de notre service à la clientèle. C'est beaucoup plus facile.

Et, je vais vous dire, faites le processus d'achat sur une billetterie officielle et faites-le sur Billets.ca. Vous allez voir, c'est pas mal plus simple, pas mal plus facile, et c'est... Il y a vraiment, là, tout, tout l'aspect du processus d'achat, là, et de la transparence jusqu'à la fin. Jusqu'à la réception des billets, je dois avouer qu'on est meilleurs. Dites-le pas trop fort aux billetteries, par contre.

Le Président (M. Bernier): Merci, M. Bussières, M. Perrault. Merci de votre participation à cette commission parlementaire, vos propos ont été fort éclairants.

Donc, je suspends quelques instants pour permettre aux représentants de L'Équipe Spectra de prendre place.

(Suspension de la séance à 17 h 14)

 

(Reprise à 17 h 18)

Le Président (M. Bernier): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux. Donc, nous avons le plaisir de recevoir cet après-midi L'Équipe Spectra, représentée par M. André Ménard. Bienvenue, M. Ménard, ça nous fait grand plaisir. Merci de participer à nos travaux. Vous avez 15 minutes pour faire votre présentation. Par la suite suivront des échanges avec les parlementaires. La parole est à vous.

L'Équipe Spectra

M. Ménard (André): Merci, M. le Président, M. le ministre, MM. les députés, messieurs et mesdames. Bon, premièrement, je vais dire tout de suite que je fais... que L'Équipe Spectra fait sienne la position de l'ADISQ et celle développée aussi par Juste pour Rire aujourd'hui, sans ambiguïté, pour plusieurs raisons.

On a vu les évolutions. L'Équipe Spectra a été formée en 1977 par Alain Simard et moi-même. J'étais déjà un professionnel depuis deux ans; Alain l'était, lui, depuis six ans. Et on a cheminé depuis dans diverses opérations dans le milieu culturel québécois, ce qui nous a amenés entre autres à fonder des festivals, mais aussi à opérer des salles et des billetteries. À travers les années, on a construit évidemment à titre de producteurs et à titre d'opérateurs de salles une relation de confiance avec les artistes en premier, mais aussi avec le public. Le public qui, bon an, mal an, supporte la culture comme il le peut, et on a vu passer le temps, on a vu aussi beaucoup de périodes où ça allait plus ou moins bien. Donc, quand on évoque aujourd'hui que le spectacle québécois n'est pas toujours aussi vendeur ou que l'humour vend plus que la musique, il n'y a rien de nouveau à mes oreilles là-dedans. C'est des phénomènes qui sont cycliques et qui n'interdisent pas quand même de se poser des questions sur les évolutions qu'on a vues au niveau de la billetterie à travers les années.

**(17 h 20)**

Une des tâches les plus ardues et les plus difficiles, mais en même temps les plus agréables, c'est de faire la fixation du prix, justement, de réaliser qu'il n'y a pas que l'artiste et ses besoins, qu'il n'y a pas que le producteur et ses ambitions, mais qu'il y a aussi le public et ses moyens qu'il faut tenir en compte. À travers les années, on a essayé de le faire avec le plus d'intégrité possible, avec le plus d'intelligence et aussi avec le plus de sympathie pour celui qui, en bout de ligne, consomme les spectacles en question. C'est sûr que d'entendre, ces jours-ci, parler de notre incompétence à fixer nos prix de façon correcte, c'est un peu spécial. Il en va de la relation avec le public, il en va de celle avec les artistes aussi. Et je pense que c'est les producteurs qui sont visés au premier chef là-dedans, comme étant peut-être incompétents à représenter leurs artistes ou à prendre la défense du public ou, enfin, à bien mesurer comment... à quel point le public a envie de payer pour certains produits culturels.

Il faut voir que le billet de spectacle dont on discute aujourd'hui a une nature quand même assez diverse. On a évoqué beaucoup aujourd'hui les spectacles qui s'inscrivent dans la durée, des spectacles d'artistes québécois qui vont tourner tant qu'il y aura du monde pour les voir. On a moins évoqué les spectacles qui, eux, viennent pour un seul soir et qui font l'objet souvent d'une très grande demande.

Évidemment, on a parlé d'artistes québécois, on doit parler aussi de consommateurs québécois. Je ne vois pas pourquoi, si on installait une certaine morale autour de l'opération des spectacles mettant en vedette des artistes québécois, il ne faudrait pas aussi en parler pour les spectacles étrangers. À mon avis, c'est le même consommateur québécois qui fait affaire au même vendeur de billets à ce moment-là.

À travers les années, on a aussi vu... Tantôt a été évoqué par le député de Drummond le folklorique «scalper» sur le coin de la rue, à côté de l'aréna ou de la salle de spectacle, qui revendait les billets sur lesquels il avait mis la main. On a vu une très grande sophistication de ce phénomène-là s'installer avec l'Internet, évidemment, et tout le phénomène qui s'en est suivi. On a vu des grands bouleversements dans le monde de la musique se produire avec ça, mais aussi beaucoup dans le monde du spectacle.

À l'origine, avant même que l'Internet existe, il y avait eu une informatisation des billetteries qui avait beaucoup représenté en fait un certain progrès pour la distribution des billets, pour l'accès du public à des billets et aussi à une mise en marché qui est à peu près simultanément faite partout pour le même spectacle, qui donnait accès à plusieurs personnes pour avoir des bons billets. Évidemment, les «scalpers» avaient déjà repéré ça à l'époque, il n'y a rien de nouveau sous le soleil. Mais, avec l'arrivée de l'Internet, on a vu que les systèmes d'appropriation des meilleurs inventaires se sont beaucoup sophistiqués.

À travers les années, par exemple, je peux vous dire que, bon, on fait une gestion sensée des inventaires le plus possible. Au Festival de jazz, par exemple, à chaque année, il y a un certain nombre de billets qui est retenu, oui, pour le développement touristique, à la demande du ministère du Tourisme, qui nous aide aussi à faire de la publicité sur les marchés étrangers. Quand les ventes touristiques ne rencontrent pas tout à fait les objectifs, on va remettre des billets en vente pour les voir saisis en plein milieu de la nuit, deux minutes après, par un système qui, lui, avait une veille sur la remise en vente des billets. Comment ils s'y prennent? Je ne sais pas trop, je ne suis pas un spécialiste informatique, mais on voit que les bons billets qui sont remis en vente disparaissent tout de suite. Et on soupçonne que ce n'est pas le public qui reste réveillé toute la nuit et qui, comme ça, va dans les systèmes à coeur de journée ou en pleine nuit pour aller voir s'il y a des billets qui sont disponibles.

On a même vu, ces dernières années, une billetterie de revente anglophone de Montréal mettre en vente un billet, en fait, des billets pour un spectacle qui ne faisait que l'objet d'une rumeur, spectacle qu'on n'avait toujours pas programmé dans le système de la Place des Arts et qui s'est retrouvé en vente sur le système en question avec même des billets identifiés, des places identifiées. Alors, dès le lendemain, on a fait enquête auprès de la Place des Arts pour savoir ce qui s'était passé. Il dit: Bien, c'est impossible, vous nous avez même pas dit encore que vous faisiez ce spectacle-là. Et, en fait, la méthode qui a été adoptée, c'était celle de mettre en disponibilité un billet dans le deuxième balcon de la Salle Wilfrid-Pelletier, ce qu'on appelle la mezzanine, la rangée E, sièges 6 et 8 par exemple, et dire que «ces billets-là vous seront réservés à la mise en vente ou mieux».

Donc, c'est une façon d'hameçonner le client avant même que le spectacle existe dans le système. Assez sophistiqué. J'espère que je ne donne pas d'idées à nos amis ici présents, mais c'est une des méthodes. À mesure que nos référencements sont quand même assez présents, les salles d'ordinaire ont un référencement prioritaire sur leurs noms, les artistes aussi et, pourtant, quand ont fait le nom de l'artiste ou quand ont fait le nom de la salle, à chaque fois, il y a des références qui apparaissent par-dessus parce que ces référencements-là sont renouvelés au quotidien. Donc, c'est une lutte dans ce qui est devenu un peu ce far west de l'Internet, qui est difficile à réglementer. Mais c'est une lutte en fait pour continuer d'exister et continuer aussi de voir nos décisions respectées.

La décision, comme je disais tantôt, qui est prise par l'artiste et le producteur pour le prix du billet est faite à partir de plusieurs facteurs qui sont ceux qu'ils ont décidé, eux, d'intégrer dans leur décision. De voir ces facteurs-là, qui sont au coeur même de la relation de l'artiste avec son public, révisés par des compagnies qui sont étrangères, qui parasitent le système et qui en profitent pour s'approprier le meilleur inventaire et pour, après ça, le proposer à prix supérieur et parfois très supérieur, c'est quelque chose qui vient ruiner l'effort que l'artiste fait pour établir une relation qu'on dit «fair» avec le public, et, dans la continuité, ça crée aussi une ambiance, une perception où les gens ont l'impression que le spectacle, c'est le fait, c'est le privilège du «boys' club» qui est capable de payer, et les autres ne seront jamais assis dans des bons sièges. C'est quelque chose qu'on trouve déplorable, c'est quelque chose qu'on dénonce, c'est quelque chose qu'on veut faire arrêter dans la mesure de la possibilité que nous offre le système législatif et tous les instruments qu'on pourrait avoir dans ce sens-là. Il y a eu aggravation, et c'est pour ça qu'on se réjouit de la présentation de cette loi qui enfin tient compte de cette réalité.

Également, on a entendu aujourd'hui... Bon, on nous parle souvent de produit, mais le billet de spectacle est un produit physique. Le spectacle lui-même est un produit qui est immatériel et qui est conditionné par deux choses: la temporalité et la quantité des billets qui sont mis en vente. Quand on crée une rareté artificielle... C'est un produit qui est spécifique, qui est spécial et quand on le retire du marché comme ça pour le revendre à prix cher, pour nous autres, il y a une perversion complète de la relation entre les artistes et leur public, et c'est pour ça qu'on souhaite que ce projet de loi là aille de l'avant. C'est en gros le point de vue qu'on voulait exprimer. Comme je vous ai dit, ça reprend ce que l'ADISQ est... Mais quand même, on peut alimenter maintenant la conversation à partir de ce qu'on a entendu aujourd'hui aussi. Merci.

Le Président (M. Bernier): Merci, M. Ménard, de votre présentation. M. le ministre.

M. Fournier: Oui, merci, M. Ménard, d'être avec nous. Si je comprends bien, vous avez passé l'après-midi avec nous pour entendre les versions des uns et des autres. Je vais commencer par m'arrêter sur un élément intéressant que vous avez soulevé. On parle beaucoup des artistes et des producteurs, mais vous avez parlé du respect du public et de ses moyens, et je pense qu'il ne faut pas le perdre de vue non plus. Dans les... Au-delà... Et je pense que ça accompagne une réflexion qu'on peut avoir sur la façon dont on traite le consommateur, de façon juste et équitable, l'un par rapport à l'autre. C'est un peu un des éléments de ce projet de loi là.

Tantôt, les gens qui vous ont précédé, je l'ai dit d'ailleurs avec tout le caractère sympathique que je leur reconnaît, ont démontré la force de leur entreprise, leur capacité d'aller chercher jusqu'à la limite du prix, prétendant, jusqu'à un certain point, que, bon, qu'ils étaient plus performants que d'autres à aller chercher le maximum du prix et tentant de dire que... Et je vais essayer de voir, là, je pense qu'il y a peut-être une suite qui n'est pas venue, là, mais il y a peut-être une suite à l'effet que, puisque j'aurai obtenu encore plus, peut-être que je pourrais, dans une relation avec un producteur, lui en remettre. Peut-être qu'il y a ça que je n'ai pas entendu, mais c'est peut-être à ça que servait de me dire que ce serait utile, pour la culture notamment, d'aller chercher le maximum du prix. Je ne l'ai pas entendu, mais c'est peut-être ça qui était visé.

Ceci étant... Et l'étude qu'on a rendue publique tantôt démontre bien que, si, par exemple, on porte un intérêt au public et à ses moyens, comme vous l'avez dit, il y a une façon indirecte d'aider tous les producteurs: si on se vide moins les poches pour un spectacle, on va peut-être aller en voir un deuxième. Et, sous l'angle, donc, du meilleur moyen pour viser l'essor de la culture, peut-être qu'il y en a un qui est de dire: On va laver le monde au maximum pour remettre de l'argent. Il y en a peut-être un autre qui est de dire: Allons-y donc aussi avec une valeur moyenne, avec peut-être un principe de respect de la capacité de payer du public. Généralement, s'il en reste un peu plus dans ses poches, il va aller voir plus de spectacles.

Ça fait que l'étude qui a été déposée le démontre amplement, et je pense que cela concourt à soutenir la thèse que nous avons dans le projet de loi, qui est dans le fond très simple, qui est de dire: Limitons-nous à la valeur qui a été fixée. Vous avez dit, vous avez parlé de vos critères tantôt, vous avez tenu compte de la rareté, du nombre de sièges dans la salle, du nombre de spectacles, vous en tenez compte. Peut-être que, si on se fie toujours à cette première évaluation et qu'on dit, pour l'ensemble des consommateurs: On n'ira pas gérer votre fixation de prix... la loi ne fait pas ça. Elle ne s'en va pas dire au producteur: Tu charges trop cher. Elle va dire au producteur: Fais ton prix. Elle dit au consommateur: Tu ne paieras pas plus cher que ce que le producteur a décidé. C'est ce que ça dit. Ça n'empêche pas d'aller moins cher, ça n'empêche pas plein d'autres options, mais c'est ce qui est visé.

Je veux profiter de votre présence pour vous poser une question qui demande explication, surtout dû à l'expérience que vous avez dans le système. Les gens qui vous ont précédé offrent à leurs clients une garantie. Tu achètes mon billet, tu n'en veux plus, 30 jours avant le spectacle, je te rembourse intégralement ce que tu as payé. M. Ménard, pourquoi il faut attendre un revendeur pour qu'il y ait ce genre de proposition là pour le consommateur? Comment réussit-il à le faire là où, vous, vous n'y arrivez pas?

**(17 h 30)**

Le Président (M. Bernier): M. Ménard.

M. Ménard (André): ...mon très long parcours, un spectacle à guichets fermés, quelqu'un qui voulait revendre son billet, d'ordinaire, n'avait aucun problème à le revendre. De faire une promesse comme ça pour les 10 premières rangées ou pour un spectacle à guichets fermés à 30 jours d'avis minimum, là, qu'il faut au moins donner 30 jours, à mon avis, en anglais, on appelle ça un «no-brainer», ce n'est pas si compliqué que ça. Mais la demande n'a jamais été là pour ça.

Ce qui existe maintenant, c'est que la perversion qui est introduite dans le marché par ces systèmes-là, c'est qu'on fait de beaucoup de monde, bon, une petite «cottage industry», comme on appelle en anglais aussi, on fait des revendeurs individuels qui rejoignent une grande collectivité. C'est comme un système pyramidal qui s'installe, et ça, c'est une vraie perversion. Et ça, ça veut dire que, bon, les plus zélés à aller chercher des billets n'ont pas forcément la motivation d'aller appuyer un artiste puis aller s'exciter sur un produit culturel mais juste de spéculer dessus. À ce moment-là, ça transforme le consommateur ou le présumé consommateur en un simple spéculateur. Il rejoint un club de spéculateurs. Je pense que ça, c'est une très grave perversion de l'intention originale du spectacle.

Le spectacle, quand on le met en place, ce n'est pas pour contenter celui qui est le plus riche, au plus fort la poche, ce n'est pas pour ça. C'est pour faire en sorte que le plus de monde possible puisse adhérer à cette proposition artistique là. Il n'y a pas un artiste qui n'ambitionne pas de remplir ses salles et d'avoir de nouveaux fans. Et, au niveau du prix avec les artistes, je peux vous dire qu'à travers les années on s'est souvent battus avec les artistes pour vendre un peu plus cher parce qu'ils réalisaient mal tout ce que c'était pour coûter puis ce que ça devait... Je me rappelle qu'à mes tout débuts, au Théâtre Outremont, avec les Séguin, on ne pouvait pas charger plus que 3,50 $ puis on trouvait des bouteilles de vin à 5 $ par terre après le spectacle. On trouvait ça spécial.

Mais d'offrir de rembourser à un mois d'avis sur un spectacle qui est complet ou des billets dans les 10 premières rangées, sans problème. N'importe qui pourrait faire ça, je pense.

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le ministre.

M. Fournier: Lorsqu'on regarde la façon dont ça fonctionne, vous me dites, vous, là, de votre expérience, vous me dites: En ce moment, presque nul n'est besoin d'avoir un système informatique qui vient faire des «hits» sur un ordinateur de vente parce que le système de revente est à ce point intéressant que des acheteurs individuels font la queue pour en acheter pour pouvoir en revendre. C'est un peu ça que vous me dites?

M. Ménard (André): Je pense qu'on connaît les deux en ce moment. On connaît les systèmes de veille qui font en sorte que, du moment qu'un billet entre en vente, il va être tout de suite acheté par des revendeurs ou sinon il y a aussi une partie du public qui se transforme en revendeurs. La nature humaine là-dedans est mise à contribution, et je pense que l'Office de la protection du consommateur a été mis sur pied pour éviter les excès de la nature humaine en matière commerciale. Ça, je pense qu'il s'agit d'un excès, à mon avis. C'est quelque chose qu'il faudrait pouvoir empêcher.

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le ministre.

M. Fournier: Le groupe qui nous a précédés fait état d'une expérience dans la revente qui serait supérieure à l'expérience des vendeurs primaires ou des producteurs. Est-ce qu'il y a un intérêt pour vous de venir en association avec eux si tant est que vous jugiez qu'ils ont effectivement une expertise plus grande que la vôtre et de convenir qu'ils puissent vendre des billets, parce que leur plate-forme serait meilleure, par exemple en disant: Écoute, moi, ils sont à vendre à 100 $, je te les vends à 80 $ parce que tu m'en vends plusieurs? Est-ce que c'est quelque chose que vous envisagez parce que vous considéreriez qu'ils ont une expertise particulière?

M. Ménard (André): N'importe qui qui m'approcherait pour me proposer d'acquérir les 10 premières rangées et les billets dont on sait qu'un spectacle... parfois, on sait d'avance qu'un spectacle va être complet, il me dirait: Je vais tout acheter ça et je m'en occupe après, ne t'en fais plus... On ne le ferait pas. Parce que notre métier, c'est justement de vendre au public et d'avoir la relation avec l'artiste, avec le public, et c'est pour ça qu'on est en affaires. On n'est pas des revendeurs de clous puis de marteaux qui font de la vente au gros puis peut-être donner une cote, etc. Ce n'est pas comme ça. Le métier de producteur de spectacles, c'est de s'occuper de son produit. Et, quand vous nous demandez d'entrer en accord avec d'anciens rançonneurs, je sais... Dans la bergerie, est-ce que le loup peut devenir le défenseur des brebis? Je ne sais pas. Mais je n'ai pas une inclinaison naturelle à être sympathique à cette proposition-là.

Mais, par contre, quelqu'un qui nous apporterait et qui voudrait se faire payer pour des idées marketing éclatantes et pour des pratiques auxquelles on n'a pas pensé, certainement, oui, il n'y a aucune fermeture là-dessus. Mais la question de la billetterie, une partie de notre métier, c'est de s'en occuper, et de bien s'en occuper, et de faire en sorte que ça ne tombe pas dans n'importe quelles mains, et que le public ne soit pas pris en otage. C'est ça, notre mission, c'est ça, notre métier. Et de défendre les artistes qu'on représente.

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le ministre.

M. Fournier: Mais, quand vous faites de la fixation de prix, vous dites: C'est facile à l'avance de savoir qui va avoir les 10... pas tous les spectacles, là, j'ai compris que ce n'était pas tous les spectacles, là. Pour commencer, parfois, vous prenez des risques en fonction du quatrième spectacle qui va suivre dans huit ans, là.

M. Ménard (André): ...il y a des risques fréquents.

M. Fournier: J'imagine, j'imagine. Mais, lorsque vous fixez des... vous choisissez une salle, si... Vous pouvez presque, dans le contexte actuel, savoir qu'avec tel artiste les 10 premières rangées, elles vont se vendre vite, vite, vite. Pour quelle raison vous décidez, dans votre fixation de prix, que, pour ces 10 rangées là, vous n'allez pas avoir un prix supérieur à celui que vous fixez là, sachant que, de toute façon, si je comprends bien, il y a des acheteurs spéculateurs qui vont vous les acheter de toute façon.

M. Ménard (André): On n'est pas contre la modulation des prix dans une salle, mais on est, en fait, plutôt d'accord avec l'idée que le public doit être traité de façon équitable. On évoquait tantôt les billets qui ont été revendus... qui peuvent être vendus à rabais à la dernière minute. C'est un phénomène qu'il y a, je pense, dans toutes pratiques commerciales. Un livre qui ne se vend pas, par exemple, en librairie, va être vendu à rabais. Par contre, si un conseiller pédagogique d'une commission scolaire dit à un libraire ou à un site Internet: On va mettre à l'étude tel roman d'Anne Hébert, tu devrais mettre la main sur toutes les copies qu'il y a dans le marché, tu ferais vraiment une bonne affaire, est-ce que le ministère ne serait pas obligé de réagir? Parce qu'il dirait: Oh! Oh! Il y a quelques années, je pense que ça c'était produit aussi avec le liquide lave-glace, juste avant l'hiver, là. Il y avait une rareté artificielle qui avait été créée et le ministère des Consommateurs, je pense, avait dû s'en mêler. Il y a des choses, il y a des pratiques commerciales qui, pour nous, ne seront jamais acceptables. De moduler les prix, et même de les moduler peut-être après la mise en vente, ce n'est pas impossible, on le fait dans le cas des rabais.

Il y a aussi, parfois, des artistes sont appelés à mettre leur image au service d'une cause, une cause qui est noble aussi. Par exemple, une fondation d'hôpital va nous demander d'acheter un bloc, avant qu'on aille en vente avec un spectacle, un bloc de rangées, qu'eux vont pouvoir revendre à prix fortement majoré, mais ça va pour la fondation de l'hôpital.

M. Fournier: Mais là, évidemment, là, ce n'est pas pareil, là. Ça, c'est pour la fondation, là.

M. Ménard (André): Ce n'est pas au profit des individus qui sont au conseil d'administration de la fondation de l'hôpital, c'est au profit de la fondation de l'hôpital. On n'est pas opposés à des pratiques comme ça. Il y a parfois des gens qui ont payé 400 $ dans la salle, mais il y a une cause qui venait avec. Donc, l'artiste met son image au service de la cause. Et là, les gens qui ont à vendre ces billets-là, et qui d'ailleurs le font avec beaucoup d'entrain et d'agressivité, parce que ce n'est pas facile vendre des spectacles bénéfices maintenant, là, il y en a beaucoup, il y a beaucoup de demandes et tout... Mais on n'est pas contre l'idée que certains billets, des fois, se revendent plus chers, même beaucoup plus cher. Mais il faut voir au service de qui et de quoi.

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le ministre.

M. Fournier: Ça va être sur la fondation et le liquide lave-glace que nous allons nous laisser pour l'instant. Merci beaucoup, M. Ménard.

Une voix: ...

Le Président (M. Bernier): Oui, allez-y, M. le député de Lévis.

M. Lehouillier: Moi, j'aurais juste une question, qui est la suivante... Parce que je regardais l'étude d'impact, et je regardais trois chiffres en parallèle pour la période... parce qu'on a fait, dans cette étude-là, des estimés pour jusqu'en 2016, donc pour quatre ans, et on s'aperçoit que, par exemple, on prévoit que ça va presque doubler si on ne fait rien au niveau du processus de pénétration du marché secondaire, donc les revendeurs de billets. Et, avec une marge brute de 43 % en moyenne, qui est estimée dans l'étude, on estime aussi que ces revendeurs-là, si on adopte la loi, c'est 41 millions de moins, jusqu'en 2016, de profit de cette industrie-là. Ce 41 millions là, il a-tu une valeur ajoutée pour le consommateur? Parce que c'est de l'argent, là, 41 millions de dollars, c'est ça que l'étude estime.

**(17 h 40)**

M. Ménard (André): Pas que je sache. Bon, le service personnalisé, on lui remet son enveloppe, tant mieux. On le fait aussi dans nos billetteries, quand même, là. Parfois, le consommateur va acheter sur Internet, mais on imprime son billet dans la billetterie. Quand il arrive à la salle, on lui remet et tout. Quand même, il y a tout ça qui est offert déjà par toutes les salles.

Mais il y a quand même une certaine fatalité, parce que, quand vous parlez de la progression, comme ça, de la revente, dans le public, il y a beaucoup de gens qui ont baissé les bras, et qu'effectivement quand ils ont les moyens ils disent: Bon, tant pis, je vais payer, d'abord, parce que je veux vraiment voir ce spectacle-là. Mais cette fatalité-là s'alimente au fait que les arguments de l'industrie de la revente disent: Bon, il n'y a pas eu de plainte à l'office. O.K. Il faudrait faire de tout le monde des plaignants professionnels. Si ce n'est pas illégal, pourquoi les gens se plaindraient? Ils diraient: C'est comme ça, on sait bien, le show-business, c'est tout le temps comme ça, ils profitent des gens, etc., alors que ça n'a rien à voir avec ce qu'on appelle le show-business. C'est un marché parallèle.

Deuxièmement, quand on dit: Bien, ils ont juste à voyager comme il faut sur Internet pour comprendre comment ça marche... On ne fera pas des gens qui achètent deux billets de spectacle par année, ou quatre quand on parle d'un couple, des «surfers» professionnels sur Internet. C'est impossible, ils n'ont pas le temps pour ça. Donc, celui qui a une connaissance limitée des pratiques sur Internet peut très bien tomber dans ce panneau-là, un panneau qui, ma foi, est très apparent dans le paysage, tu sais. C'est comme si, quand tantôt quand j'ai évoqué le far west, on était obligés de dire à tout le monde: O.K., vas-y, tu peux te rendre en Californie, mais là ne passe pas là, ne passe pas là, ne passe pas là, tu pourrais te faire rançonner, tu sais. Il faut trouver une façon de faire une autoroute propre avec une règle qui est la même pour tout le monde puis des péages qui sont les mêmes aussi.

Une voix: Merci beaucoup.

Le Président (M. Bernier): M. le député de Beauharnois.

M. Leclair: Merci, M. le Président. Bien, tout d'abord, M. Ménard, bonjour, merci d'être là. J'aimerais faire une référence, toujours à notre histoire de référencement et tout ça, que ça semble être un peu notre point premier de toute cette guerre-là, puis c'est là que devient aussi mon inquiétude de voir que, si un jour notre projet de loi prend forme puis on le module pour tenter de cibler le plus large possible pour que ce soit équitable pour tout le monde, bien, je reste toujours un peu inquiet de voir que le Web va rester existant puis les moteurs vont toujours être là.

Puis je vais prendre l'Union des consommateurs, qui ont sorti eux autres le 9 mai 2011, là, face à une consultation portant sur les propositions de modification, là, eux, ils disent: Plusieurs intervenants du milieu soutiennent que les billetteries officielles sont victimes de l'utilisation, par les revendeurs, de «boots» informatiques -- ce qu'on parlait, là, quand on met un billet, il se ferait prendre tout de suite. Si cette information est exacte, il est à cet égard extrêmement étonnant de constater que la plus importante billetterie au Québec, Réseau Admission, une filiale de Ticketmaster, n'a toujours pas soumis son processus d'achat à une captcha, qu'ils appellent, un moyen technique pourtant couramment utilisé pour faire échec à ces «boots»-là. Donc, ils trouvent vaguement inquiétant de voir la nonchalance des acteurs impliqués, de leur inertie face aux moyens qui s'offrent à eux pour s'attaquer eux-mêmes à la problématique qu'ils dénoncent.

Donc, j'espère, j'ose espérer que l'industrie, face à ce qu'on entend aujourd'hui, lorsqu'on parle des revendeurs qui... Oui, malgré tout, le citoyen va devoir payer une somme des fois deux, trois fois le prix. J'aimerais bien ça, moi aussi, que ce soit équitable pour tout le monde, tout le monde paie le même prix pour aller voir un spectacle, mais ça ne semble pas être toujours le cas pour toutes sortes d'événements, là. Vous, vous dites: Quand même, pour un OSBL qui va faire un cours pour faire du financement pour un groupe, bien, les prix peuvent être... Donc, ce ne sera jamais toujours qu'un seul prix, pour plein de bonnes raisons, en espérant que ça reste pour les bonnes raisons.

Sauf qu'avec ce qu'on a entendu aujourd'hui, la plupart des groupes, on a questionné les gens de billetterie.ca, on parle toujours de 10 % du marché des tickets, puis je pense que où est-ce que ça fait le plus mal à l'industrie, c'est que c'est les meilleurs tickets. Je pense que, s'ils achèteraient 10 % des tickets dans le pigeonnier...

M. Ménard (André): ...parle pas de 10 % du marché des billets dans le cas des spectacles d'un soir. Dans le cas des spectacles de longue durée, ça se peut, mais, dans le cas des spectacles d'un soir, c'est plus que ça. Ça, je suis... j'en ai la conviction intime et juste à voir la vitesse de la mise en vente de certains shows qui, le lendemain, va tomber. Les spectacles, on sait très bien que, quand la demande va être forte, ça peut même tout partir dans une journée. Parfois, ça va être assez long.

Mais, de nos jours, toute mise en vente, il y a un petit «rush», toujours, quand même qui peut être assez important, qui va se passer dans quelques minutes, et après ça on voit la vraie vitesse de croisière d'un spectacle qui va remplir. Comme, par exemple, sur un spectacle d'un soir au Métropolis, quand, après la mise en vente, il y a un soutien, là, qu'il y a 100 billets par jour qui vont se vendre, on sait très bien qu'avant quelques semaines ça va être complet. Par contre, quand il y a un spectacle qui va entrer en vente et qui va vendre 400 billets le premier jour, qui après ça, le lendemain, va tomber à 25 billets par jour, on se dit: Oh! Là, il y a eu un phénomène un peu étrange qui s'est passé. Précipitation des fans? Peut-être. Précipitation des revendeurs qui pensaient que ce spectacle-là était pour vendre vite? Peut-être.

Mais il y a aussi que, quand on parle des fans, il y a infiltration de tous les fan-clubs et aussi des fan-clubs des artistes étrangers par les revendeurs. Ça, écoutez, on le voit de façon systématique. Il y a du monde qui sont fans de beaucoup de musiques. Moi qui m'estime être quelqu'un assez polyvalent en musique, je me suis découvert des collègues en regardant les listes d'achats. Il y a des gens qui achètent systématiquement à peu près de tous les styles de musique, c'est toujours un petit peu étonnant, dans des quantités des fois aussi qui vont être de quatre ou six ou huit billets ou... Donc, sur un spectacle dont on sait qu'il va être archiplein, c'est sûr qu'on va mettre le minimum de billets disponibles par transaction. Et on a dû, pour Arcade Fire la semaine prochaine au Métropolis, justement, mettre la discipline du billet sans papier et de la carte de crédit montrée, du bracelet installé, etc., tu sais, qui n'élimine pas tout danger mais, quand même, c'est... Mais c'est coercitif et ça va être long. L'admission va durer deux heures.

M. Leclair: J'aimerais vous entendre aussi parler des «scalpers», eux, qui sont sur les trottoirs, là, puis on sait que c'est une juridiction municipale. Mais ça n'a pas de l'air à inquiéter personne. On n'en parle pratiquement pas. Eux, c'est totalement illégal.

M. Ménard (André): Bien, c'est que c'est une juridiction municipale et aussi c'est applicable par la police. Et la police, dans un centre-ville, ces années-ci, a des préoccupations des fois un petit peu ailleurs que celle d'aller arrêter les revendeurs. Une fois, de temps en temps, ils vont faire des exemples. Ils vont faire une opération. Le revendeur paie son amende. Je ne me rappelle plus... Dans le temps où je surveillais ces revendeurs-là en particulier, c'était 50 $. Ils revenaient sur la rue. Ils n'ont aucun dossier, rien. Ce n'est pas un crime. Ils font commerce sur la rue sans en avoir le droit, sans en avoir des permis de la municipalité. C'est une autre histoire. Mais une loi...

M. Leclair: Mais sans savoir comment est-ce qu'ils vont...

M. Ménard (André): ...une loi qui engloberait toutes ces pratiques-là ferait sans doute plus d'effet que juste un règlement municipal sur la vente sur la voie publique, sûrement.

M. Leclair: Parce que c'est quand même des revendeurs qui ont des tickets de top qualité, ces gens-là aussi, là.

M. Ménard (André): Ça, c'est des vieux professionnels qui ont leur système d'approvisionnement depuis longtemps et qui, bon, vont cheminer dans toutes sortes de canaux et tout. On ne peut pas tout deviner, on ne peut pas tout savoir non plus. On ne peut pas lancer des enquêtes non plus. On n'est pas des... On essaie de protéger le citoyen, mais on n'est pas la police quand même.

Une voix: Je comprends bien. Je vais laisser mon collègue...

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député de Drummond.

M. Blanchet: M. le Président, bonjour. M. Ménard. Petite image: on parlait des revendeurs de billets sur le trottoir, avec leur pantalon en coton puis leur vieille veste des Expos, qui ont des bonnes sources d'approvisionnement, bon, bien, comme le disait mon collègue, ils ne crient pas, là. Ils ne disent pas... Ils n'appellent pas la police pour leur dire: Écoutez, je vais vendre des billets. Ils sont plutôt discrets puis ils murmurent puis, bon, même s'ils sont faciles à identifier...

Mais est-ce que... Une autre image pittoresque: les lignes d'attente au moment de la mise en vente des billets, ces files interminables avec des gens qui venaient mettre leur tente la veille quasiment puis qui s'installaient, est-ce que ce n'est pas un phénomène qui va disparaître? Et je ne le dis pas simplement pour le côté bucolique de la chose. Les jeunes qui allaient faire le poteau pendant une nuit, deux jours des fois, pour avoir les billets, ce n'était pas les billets les plus chers nécessairement qu'ils achetaient, c'était pour être sûrs d'en avoir un. Ce n'était pas nécessairement celui qui allait être payé 150 $. Est-ce que cet étudiant-là ne va pas se retrouver obligé de passer par un site de revendeur puis le payer cher, son billet, dans un certain nombre de cas? Est-ce que la transposition de la ligne d'attente vers l'Internet ne crée pas une réduction dans l'accessibilité?

M. Ménard (André): ...dire que la transposition de la ligne d'attente dans l'informatique que j'ai évoquée tantôt, à l'arrivée au Québec du système Ticketron, avait quand même aidé les gens à avoir accès. Ils pouvaient aller dans un centre d'achats dans leur voisinage acheter des billets. Il y avait une heure de mise en vente et tout. Mais ce système-là a été rapidement perverti aussi par du monde qui plantaient des poteaux dans les files d'attente. Bon. Tu sais, ça a déjà été problématique, à ce moment-là déjà, tu sais.

Maintenant, c'est quand même plus systématique, les moyens sont pas mal plus sophistiqués. Et, si on ne peut pas trouver un moyen d'établir qu'il est illégal de revendre à plus qu'un certain pourcentage du «face value» un billet sur le marché... Tantôt, quand on a évoqué que Juste pour Rire avait vendu des billets pour 10 $ plus taxes de plus que la valeur du billet, ça s'appelle un frais de service. N'importe qui qui veut faire de la vente de groupe qui contacte un festival qui a un très grand inventaire comme Juste pour Rire, des pièces de théâtre qui sont là pendant un mois, etc., je veux dire, peut toujours transiger, mais Juste pour Rire n'a aucune obligation. Je ne veux pas parler en leur nom, mais ils n'ont aucune obligation de tout faire ça pour rien, parce qu'il y a quand même de l'administration là-dedans, il y a de la manipulation.

Dans notre cas aussi, si on était sollicités pour ça. Mais je peux vous dire, par exemple, parce que, quand on parle justement d'être sollicités, chose qui est un peu spéciale à Montréal depuis longtemps, c'est qu'au niveau des concierges d'hôtel, on a très, très peu de demandes et dans le Festival de jazz et dans l'opération des salles. Tout est dans le marché parallèle. Et il y a un partage qu'on suppose entre les concierges d'hôtel et les revendeurs du profit qui est réalisé. Ça nous consterne un peu parce que justement, quand on retient des billets pour le ministère du Tourisme, si... mais... Et ça, ça consiste, à ce moment-là, à prendre le touriste qui arrive en ville et à le traiter de façon spéciale. Passe par là puis tu vas payer, tu sais.

C'est un peu décourageant parce qu'on essaie justement de, bon, justement, de faire de la promotion touristique et tout. Et quand... C'est comme si le touriste américain qui arrive ici se ferait donner 0,50 $ pour son dollar, il dirait: Aïe! le Canada, ce n'est pas bien, bien fin, hein? Vous faites ça juste au Québec, j'espère, tu sais?

Dans le cas de... Je peux vous parler de la scène de Montréal: très, très peu de demandes des hôtels en général, tout passe par le système parallèle. Très rare qu'un concierge va contacter nos billetteries. C'est quand même quelque chose. On lutte contre quelque chose qui est établi depuis un certain temps et qui s'intensifie, tu sais, et qui fait que le public maintenant a l'impression qu'un bon billet, oublie ça, tu sais, si tu n'es pas connecté ou si tu n'as pas un gros morceau à sortir, là, une bonne liasse d'argent, là, tu n'auras pas ça. C'est une perception qu'on trouve désolante, là, tu sais. On n'est pas allés dans le monde de la musique, en tout cas, mes confrères, mes collègues, avec les artistes pour assister à ça.

**(17 h 50)**

Le Président (M. Bernier): ...député de Drummond.

M. Blanchet: On parlait... Tout à l'heure, on revenait sur la question de comment Billets.ca peut faire pour dire: Écoutez, si... 30 jours avant, vous pouvez vous le faire rembourser, il n'y a pas de problème. Et là on parlait des raisons. Vous invoquiez que le risque est somme toute relativement faible parce que la fréquence de ça n'est pas très, très élevée et puis que c'est quelque chose qui peut se faire relativement bien.

J'ajouterais à ça que c'est un peu le même phénomène que les assurances parce qu'après tout ce genre d'entreprises là n'investissent pas dans le produit. C'est une entreprise de liquidités, une entreprise de cash-flow. J'ai la capacité d'acheter ça, je pense que ça va se revendre tel pourcentage plus cher que ce que j'ai acheté. Des fois je me plante, des fois je réussis plus gros. Si la moyenne est à 30 %, 40 %, c'est parce que des fois c'est 70 %, puis des fois c'est moins 10 %. C'est comme un peu le phénomène des assurances qui se produit. Je peux me permettre parce que, moi, je n'ai pas pris le risque de la production: je suis une entreprise de cash-flow. Je peux faire un peu comme un service financier puis dire: Je prends le risque de leur promettre de leur rembourser le cas échéant, supposant qu'il n'y a pas grand monde qui vont abîmer leurs voitures, il n'y a pas grand monde qui vont dire: Rembourse-moi mon billet.

Et ça, je trouve ça révélateur parce que, dans l'industrie -- on l'a déjà fait vous et moi -- on se rend compte, on jase, comment on met le prix du billet -- vous l'invoquiez tout à l'heure -- puis là on évalue notre marché, puis on dit: Toi, tu pourrais te rendre jusqu'à tant. Puis, moi, moi, je veux garder mon billet un peu plus bas pour une question de relation et de proximité entre l'artiste et son public. Même si ça passe par un opérateur de salle puis un producteur de spectacle, il reste qu'une des caractéristiques de l'industrie au Québec, c'est la proximité. C'est un bloc, pas beaucoup de monde, qui se connaissent, qui en général essaient d'entretenir des bonnes relations.

Est-ce que, dans les évaluations, lorsque vous fixez maintenant avec le producteur le prix des billets, mettons, au Métropolis, vous tenez compte de cette variable-là? Est-ce qu'en termes stratégiques, ils vous disent: Comment on fait pour gérer le fait qu'il y a un certain pourcentage de nos billets qui vont être ramassés par Internet, qui vont s'en aller sur le marché, puis qui vont avoir un impact sur le comportement du consommateur? Est-ce que vous devez en tenir compte?

Le Président (M. Bernier): M. Ménard.

M. Ménard (André): Non. Bien franchement, quand un billet est vendu, il est vendu. Malheureusement, quand on le voit réapparaître sur le marché à un prix supérieur, je n'ai pas tendance à me dire: Ah! merde, il y en a qui vont payer ça, ça aurait été le fun qu'on les vende tous ce prix-là. Je n'ai jamais... pas par jésuitisme, là, ce n'est pas pour être plus catholique que le pape, là, mais c'est juste que, quand on établit quelque chose avec un artiste, on est en relation avec lui, on est en entente avec lui et, quand on le transmet au public, c'est suite à cette entente-là. Et il y a une confiance qui s'est établie. Puis combien de fois, dans ma carrière, j'aurais pu m'approprier une partie de l'inventaire et payer mon épicerie avec ça juste en faisant un peu de revente et tout. Je n'ai jamais fait ça. C'est quelque chose que je trouve totalement immoral.

On est venus dans cette business-là parce qu'on aime la musique, parce qu'on aime travailler avec les artistes et pas pour égorger le public. Et ce qu'on voit, c'est qu'il y a du public qui renonce maintenant, hein, qui va attendre le show gratuit dans un festival ou qui va attendre de voir l'artiste à la télévision et qui ne se présente plus au spectacle. Quand on voit que... J'ai l'intuition que, quand on apprend que c'est 88 $ par année en 2011 ou 2010 qui est dépensé dans le spectacle, je me dis que proportionnellement il me semble qu'il y a un certain bout de temps, avec le prix des billets qui était pratiqué à l'époque, on devrait en voir un petit peu plus que ça par année. En tout cas, les gens de ma génération, si je dois parler, la génération nombreuse, je crois qu'on en voyait un peu plus que ça. Il y avait plus de salles d'ouvertes, on voyait plus de spectacles aussi. C'est un peu... Je ne veux pas dire qu'il n'y a que cet effet-là qui est au travail dans les modifications qu'on vit, mais celui-là, c'est le plus détestable, et c'en est un qu'on peut identifier, qu'on peut avertir le public, et qu'on peut protéger le public, puis je pense qu'on doit le faire.

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.

M. Blanchet: Vous m'amenez à l'autre question. Il doit avoir un effet marketing -- passez-moi l'expression -- à vendre un billet pour le spectacle de Marie-Mai à 50 $ et à le vendre... en fait, à l'acheter -- je le prendrais de l'autre bout pour le consommateur qui achète le billet pour Marie-Mai 50 $ -- versus le consommateur qui achète le billet pour Marie-Mai à 100 $. Donc, ce que vous dites, c'est: Effectivement, il y a des gens qui décrochent, qui disent: À ce prix-là, je n'ai plus les moyens, ça ne vaut pas la peine, je vais attendre de la voir gratuitement à un festival ou ce type de phénomène là.

Est-ce que plus profondément... Et je ferais le parallèle parce que la technologie a affecté la relation entre le consommateur et l'artiste. C'est vrai en vente de disques, c'est vrai par tout le phénomène du téléchargement illégal. Donc, il y a un effet sur la confiance que le consommateur a dans son geste de consommateur d'acheter un disque, d'acheter un billet, de peut-être payer trop cher pour rien et toute cette espèce de propagande qu'on se fait de toute façon avoir par l'industrie. Est-ce qu'en profondeur on sent cette espèce de cynisme là des gens qui ne sont plus proches de leur... jadis appelée colonie artistique?

Le Président (M. Bernier): M. Ménard.

M. Ménard (André): Que les gens n'ont pas confiance de trouver sur le marché un billet de la qualité qu'ils aimeraient avoir, c'est généralisé, je pense, carrément.

M. Blanchet: Et, dernière chose: Dans une production moyenne au Métropolis, parce que les gens qui sont passés avant vous ont parlé d'une équipe de 14 personnes comme étant un frais important à assumer -- j'ai des cas qui me viendraient à l'esprit où je pourrais répondre à la question -- mais en moyenne, lorsqu'un spectacle rentre au Métropolis, combien de gens travaillent sur le spectacle?

M. Ménard (André): Bien, on parle d'une dizaine de techniciens, minimum. On parle d'employés d'accueil et de sécurité, il y en a une quinzaine au moins. Le service dans les guichets, bon, il y a trois personnes les soirs de spectacle, etc. Bon. Il y a le personnel de bar, et tout, ça, il y a une vingtaine aussi. C'est une compagnie qui fait quand même tourner un certain nombre d'emplois à l'année avec ses dates d'occupation, qui accepterait avec joie d'en accueillir plus aussi, hein?

Les salles du centre-ville de Montréal sont occupées peut-être à la moitié de la capacité de date, donc on pourrait sans problème en accepter d'autres, mais encore faut-il que les gens aient envie de venir aux spectacles et pensent que c'est accessible, que le spectacle n'est pas un phénomène qui est train de devenir complètement étranger à celui du commun des mortels, que c'est juste accessible à ceux qui sont plus argentés.

M. Blanchet: Dois-je en conclure qu'à une soixantaine de personnes qui travaillent en une soirée, à la moitié des soirs occupés, ça veut dire qu'à chaque semaine, pour une seule semaine, ou en nombre d'heures égal, la seule salle du Métropolis, c'est plus que le double des emplois chez le revendeur?

M. Ménard (André): En tout cas, je peux déjà vous dire qu'on n'a pas 43 % de marge de profit brut, ça, c'est impossible.

M. Blanchet: Merci, M. Ménard. Ce fut un plaisir.

Le Président (M. Bernier): Merci. Merci, M. Ménard, de votre participation à cette commission parlementaire.

Donc, compte tenu de l'heure, je suspends ces travaux jusqu'à 19 h 15. Ceux qui désirent laisser des documents ou des objets dans cette salle, vous pouvez le faire, la salle sera fermée. Merci.

(Suspension de la séance à 17 h 58)

(Reprise à 19 h 17)

Le Président (M. Bernier): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux. Donc, ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens ouverte. Je demande encore une fois à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires. Nous allons poursuivre sans plus tarder les auditions publiques sur le projet de loi n° 25, Loi visant à interdire la revente de billets de spectacle à un prix supérieur au prix annoncé par le vendeur autorisé.

Donc, sans plus tarder, nous débutons cette soirée en recevant les représentants de la Fédération des chambres de commerce du Québec et M. Denis Hamel, vice-président, Affaires publiques, qui est présent. Vous vouliez nous présenter la personne qui vous accompagne, M. Hamel? Ça va nous faire plaisir. Vous avez 15 minutes pour faire votre exposé.

Fédération des chambres de commerce du Québec (FCCQ)

M. Hamel (Denis): Certainement. Merci, M. le Président. M. le ministre, bonsoir, Mmes et MM. les députés, bonsoir. Alors, je suis Denis Hamel, vice-président aux affaires publiques, Fédération des chambres de commerce. Je suis accompagné par Mathieu Filion, directeur des communications à la Fédération des chambres de commerce également.

Vous connaissez, depuis les 102 ans que la fédération existe, vous connaissez tous qui nous sommes. Nous sommes un regroupement de 150 chambres de commerce, constituant ainsi le plus grand réseau de gens d'affaires et d'entreprises au Québec. La FCCQ représente 60 000 entreprises et plus de 125 000 gens d'affaires qui exercent leurs activités dans tous les secteurs de l'économie sur l'ensemble du territoire québécois. Notre fédération est l'ardent défenseur des intérêts de ses membres au chapitre des politiques publiques. Nous favorisons un environnement d'affaires innovant et concurrentiel. Nous nous employons à promouvoir la liberté d'entreprendre et nous inspirons de l'initiative et de la créativité afin de contribuer à la richesse collective du Québec en coordonnant l'apport de tous ses membres.

La FCCQ est particulièrement inquiète de l'adoption éventuelle du projet de loi n° 25 dans sa forme actuelle. Ce projet de loi semble répondre à une problématique qui n'existe pas réellement à nos yeux en créant une série de précédents qui risquent, à long terme, de remettre en question certains acquis de la libre entreprise.

La FCCQ souhaite que le gouvernement s'attarde à encadrer cette industrie plutôt que l'interdire. Pour nous, il est possible que le gouvernement puisse s'immiscer dans la gestion d'une entreprise afin de protéger le public contre des abus graves, mais, dans ce cadre-ci, il va trop loin en gelant les prix sur un bien qui est loin d'être un bien essentiel. De plus, le gouvernement s'attaque à des entreprises légitimement constituées au Québec et qui exercent leurs activités en prenant un risque d'affaires. Qui plus est, ce projet de loi ne règle rien le problème puisque les revendeurs de billets exercent leurs activités au Québec à partir de sites Internet souvent localisés hors de sa juridiction; ils ne seront donc pas touchés par le projet de loi n° 25. Notre présentation porte donc sur les trois points principaux suivants, soit: le précédent au Québec que crée une telle législation, l'absence du problème présumé et les problèmes d'application de la loi.

**(19 h 20)**

Le Québec est une société de libre entreprise où la plupart des secteurs économiques sont soumis d'abord et avant tout aux lois du marché. Le marché fixe les prix, et les consommateurs, par leur force économique, ont le pouvoir d'influencer à la baisse les prix des biens et services. Il existe certains marchés de biens et services qui sont régis par l'État, je pense notamment à l'électricité et certaines denrées alimentaires, mais ces marchés sont de rares exceptions et existent dans des domaines présumés essentiels aux citoyens.

Les entreprises de vente et de revente de billets sont des entreprises légalement constituées. Elles paient des taxes et des impôts, font parfois des profits et doivent assumer des risques inhérents à leur secteur économique. Elles offrent un service recherché par certains, service qui répond donc à une demande. Comme pour toute entreprise, elles doivent faire des profits pour survivre.

Rien dans la loi n'empêche la revente de billets. Il s'agit d'une activité parfaitement légitime. C'est aussi une activité qui comporte des risques puisque la chance de retrouver avec des produits invendus est assez grande. Il n'y a rien de moralement répréhensible d'agir de la sorte, et jamais le client n'est forcé d'acheter le produit, quel que soit son prix.

Il n'existe pas, à notre connaissance, de marché de biens ou de services non essentiels dont le gouvernement a fixé le prix comme le projet de loi n° 25 le propose. Bien que nous croyons à la place importante de la culture doit occuper au sein d'une société, il nous apparaît présomptueux de déclarer le marché du spectacle comme un marché de biens et services essentiels.

Juste pour une question de clarification, la question du marché culturel est évidemment importante, surtout dans une société comme la nôtre, mais, quand on parle de biens essentiels, il est essentiel à notre société, mais du point de vue du microéconomique, du point de vue du consommateur... Vous comprendrez, quand on utilise le nom essentiel, c'est par rapport aux denrées de base et... comme l'électricité, l'essence et les denrées alimentaires.

Ce marché, comme pour d'autres, est soumis au phénomène de rareté créé par le manque de places dans les installations ou les salles. Ce phénomène crée une demande à la hausse, qui a un impact sur le prix des billets, qui s'en trouve augmenté. Dans un monde idéal, le prix des billets refléterait exactement la demande projetée d'un spectacle; il n'y aurait pas de hausse dans le cas d'une revente. En pratique, il est difficile pour un promoteur ou un artiste d'estimer précisément le prix d'un billet puisque celui-ci sera soumis aux aléas de l'intérêt général que portera le public au spectacle à travers le temps.

Le service de revente de billets sert alors ici de réévaluateur du marché des coûts sur le bien acheté longtemps à l'avance. Certains spectacles créent des vagues d'intérêt et le coût de la revente en est la réflexion. Il se trouve que certains spectacles génèrent tant d'intérêt que les prix explosent. Il s'agit d'un phénomène économique simple d'offre et de demande qui se termine lorsque le prix devient nettement exagéré.

Pour la FCCQ, il est intéressant de constater que ce marché, supporté par les nouvelles technologies, n'a pas été investi par les promoteurs eux-mêmes, qui pourraient créer un système de coûts variables, comme on le voit notamment dans le domaine du transport aérien. Il y aurait certainement une réflexion nécessaire de l'industrie sur cette question. Certains artistes répliqueront que le coût du billet reflète la valeur de leur spectacle: bien que légitime, cette analyse sous-estime leur propre pouvoir d'attraction.

Le service de revente est aussi un service qui permet de revendre à perte des billets que certaines personnes ne veulent pas pour différentes raisons. Ce service serait, selon nous, menacé par l'interdiction d'augmenter les prix puisque les marges de profit des entreprises du secteur seraient rapidement diminuées, laissant le marché de ce service aux entreprises étrangères. Ainsi, le service de revente est un service dérivé nécessaire au secteur des spectacles, service qui répond à un besoin du client et qui permet à nombreux spectacles de se tenir à guichets fermés.

La fixation des prix par le gouvernement est aussi un précédent qui nous inquiète. La question qui se pose ici est: Pourquoi le gouvernement refuserait le même type de législation à d'autres secteurs? Le cas de l'automobile d'occasion, où la marge de profit vient d'un prix de revente plus élevé, nous vient à l'esprit. En quoi cette industrie est différente de celle de la revente des billets? Elle est aussi soumise à la même spéculation et subit les mêmes contraintes. Est-ce que ce secteur d'activité doit subir le même contrôle que celui visé par le projet de loi n° 25? La réponse est évidemment non. Et qu'en est-il du secteur immobilier, dont les gains en capital proviennent d'un prix de revente plus élevé que celui de l'achat?

Dans toutes les chaînes de production et de vente, il y a toujours un prix de vente plus élevé que le prix d'achat, c'est la base du profit. Nous ne croyons pas que ça devrait être différent pour l'industrie du spectacle. Le précédent créé pourrait inquiéter les entrepreneurs et constituer une exagération de l'intrusion du gouvernement dans des relations économiques d'ordre privé. La vente, au départ, est déjà très bien balisée au Québec, que ce soit par le Code civil ou la Loi sur la protection du consommateur. Cette restriction supplémentaire n'est pas nécessaire. Elle enlève même au consommateur la possibilité d'utiliser des services de revendeurs de billets dans le cas où celui-ci serait dans l'impossibilité d'assister à un spectacle pour lequel il aurait acheté des billets.

Selon l'industrie, le nombre de billets échangés et vendus par le biais des services de revente constituent une infime minorité des billets vendus par l'ensemble des spectacles; les promoteurs demeurent les principaux points de vente des billets de spectacle. Une simple analyse du comportement du consommateur nous laisse croire qu'un faible pourcentage est intéressé par un prix plus élevé que celui qui est demandé à l'origine, comme logique économique, comme c'est d'ailleurs un faible pourcentage qui est intéressé à faire la file longtemps à l'avance pour acheter des billets convoités. Inversement, un faible pourcentage des détenteurs de billets a des raisons suffisantes pour vouloir revendre leurs billets à des nouveaux acheteurs. Ainsi, nous parlons d'un phénomène relativement marginal.

Rien n'empêche l'industrie du spectacle de gérer elle-même l'achat d'un nombre important de billets par un même acheteur. Certains secteurs le font déjà. Il existe diverses façons techniques, électroniques de contrôler l'identité réelle d'un client. Ces techniques sont déjà appliquées dans divers secteurs et au sein même du gouvernement comme pour la consultation 2.0. Il serait possible pour un promoteur voulant laisser volontairement les prix de billets bas d'en contrôler l'achat, bien que, selon nous, ce comportement serait contraire à une logique de marché. Un contrôle de prix devient alors exagéré, le gouvernement répondant à une perception faussée de la réalité économique du secteur pour régler un problème qui n'existe pas ou, tout au plus, qui n'est pas étendu.

Une grande quantité de billets sont maintenant vendus par l'entremise de l'Internet. Parallèlement, une grande partie de la revente se fait par le biais de ce même médium. Cette revente se fait par divers moyens, partant d'une vente de gré à gré par courriel passant par des sites d'enchères ou des petites annonces aux sites d'entreprises spécialisées. La gamme de services de ce type est variée, foisonnante, et surtout internationale. Il n'est pas rare de retrouver des billets sur des sites, comme eBay, qui ne sont pas basés au Québec.

Comment le gouvernement entend-il contrôler ce type de vente? Nous sommes d'avis que cela s'avère impossible, si ce n'est que de surveiller toutes les transactions de ce type sur les sites mentionnés. La tâche est titanesque; il nous apparaît incertain que l'Office de la protection du consommateur soit équipé pour la remplir. Il y a actuellement des revendeurs électroniques présents sur Internet qui offrent les services à partir du Québec. Les contraintes ne feraient pas disparaître l'industrie mais déplacerait simplement l'offre à l'extérieur du Québec. Nous doutons que ce soit là l'intention du législateur. Devant l'impossibilité d'appliquer sa loi et en se basant, on le présume, sur un système de dénonciation, est-ce que le gouvernement du Québec s'approprie le matériel qui lui est impossible de remplir? Notre réponse est affirmative.

En conclusion, nous sommes d'avis que l'industrie de la revente de billets et une industrie qui relève de la vente de biens non essentiels et qui s'inscrit dans la philosophie de la libre entreprise répondant aux forces du marché. Pour la Fédération des chambres de commerce du Québec, il est clair que le gouvernement exagère sa réaction en réglementant un secteur et en fixant les prix pour régler ce problème qui est peu répandu. Ce faisant, il crée un précédent qui nous apparaît inquiétant. Nous sommes aussi d'avis que le gouvernement n'aura pas les moyens d'appliquer sa propre loi, étant donné la réalité des technologies de communication.

En conséquence, nous suggérons, nous attendons que le gouvernement devrait s'attaquer à une réglementation qui soit... qui encadre ce milieu plutôt que de l'interdire carrément. Merci.

Le Président (M. Bernier): Merci, M. Hamel de votre exposé. Nous allons donc débuter immédiatement les échanges avec les parlementaires. M. le ministre?

M. Fournier: Merci beaucoup, M. le Président. Bonjour, M. Hamel, et merci de votre présentation. Je vais commencer par la fin, mais, je pense, je vais dérouler un certain nombre de sujets ou de réflexions qui me sont venues à l'occasion de votre présentation.

D'abord, vous dites que vous êtes sûrs que... c'est votre avis, que la loi ne pourra pas être appliquée. Alors, évidemment, pourquoi l'adopter, hein, si elle n'est pas applicable? Alors, je comprends bien la conclusion. Je ne suis pas d'accord avec cependant sur le fait qu'elle ne pourrait pas être adoptée, ne serait-ce que pour cet élément: à partir du moment où on est capables de dire... Puis la législation au Québec est à l'effet que le consommateur a droit de payer le prix fixé par celui qui le vend en premier. Si vous payez plus cher, vous vous êtes faits avoir. Juste ça permet de conscientiser, de faire de la pédagogie, de partager avec la population, quelque chose qu'on ne peut pas faire aujourd'hui. On ne peut même pas aujourd'hui la mettre en garde parce que c'est tout à fait légal, participant peut-être à ce que vous appelez la liberté de commerce.

En adoptant la loi, ne serait-ce que par cette pédagogie, on peut déjà faire quelque chose. Et là je ne parle même pas du travail qu'il y a à faire à l'office, à ceux qui s'en plaindraient, au travail qu'on ferait pour aller ensuite chercher des amendes chez les contrevenants. Je ne parle même pas de ça. Bien sûr que ça devrait s'appliquer, parce qu'il y aurait là force de loi. Mais ne serait-ce que par son adoption, on est déjà en mesure de dire aux gens: Soyez prudents, vérifiez où vous êtes. Ne serait-ce que ça, une vertu que vous pourriez voir par l'adoption de la loi. Il y a un usage, ne serait-ce que dans la conscientisation, qui ne peut pas être partagé aujourd'hui.

**(19 h 30)**

D'autre part, je m'étonne que vous me parliez d'une position à l'effet qu'on devrait adopter une réglementation à la place. Deux raisons: d'abord, parce que, moi, je considère que c'est une réglementation qu'on fait. Je vais vous expliquer pourquoi j'appelle ça réglementation plutôt que prohibition, j'y reviendrai. Mais, si je suis votre raisonnement, si on fait une réglementation, est-ce que les corporations ou les gens qui font dans la revente aux États-Unis vont appliquer la réglementation? Je présume que oui, parce que vous proposez une réglementation plutôt que ce qu'on l'on fait sous prétexte que ce qu'on l'on fait ne sera pas appliqué ailleurs. J'imagine que vous plaidez que la réglementation serait suivie par les autres juridictions. Je vous entendrai peut-être là-dessus. Je crois franchement que vous allez arriver à la même conclusion et que dans le fond, votre message est plutôt à l'effet de dire: Écoutez, laissez donc les affaires faire les affaires puis ne vous en mêlez pas. Je pense que c'est plutôt ça, la position que vous défendez.

Je veux revenir sur réglementer, encadrer plutôt qu'interdire. C'est un peu ce que vous avez dit tantôt. Je notais cet après-midi, je pense, c'est la semaine dernière: la France est en train d'étudier un projet... Le problème existe un peu partout, et j'imagine que tout le monde est en train de se demander: Est-ce que la liberté de commercer s'étend jusqu'à la liberté d'abuser? Et peut-être qu'il y a des limites. Alors, tout le monde est plutôt dans le camp de la limite, là. Je comprends que ce n'est pas la théorie que vous supportez. Mais eux, ce qu'ils proposent, c'est le fait, de manière habituelle et sans autorisation du producteur, d'offrir à la vente. Nous... Ça, c'est la prohibition de revente. Ce que nous mettons ici, ce n'est même pas de la fixation de prix. Je vous ai entendu dire que nous voulions fixer les prix. Même pas. Nous voulons simplement que le prix établi par le producteur soit le prix qui est respecté.

Je vais vous dire pourquoi. Deux raisons: d'abord, pour que le citoyen consommateur puisse connaître la valeur du prix et qu'assis un à côté de l'autre, ils puissent avoir à peu près la même valeur de spectacle pour le prix équivalent, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui, on comprend maintenant, dans les bonnes rangées. Dans les moins bonnes rangées, les gens sont égaux; dans les bonnes rangées, ils le seraient peut-être moins. Donc, il y a une raison ici de consommateur à protéger dans l'information qu'il a, dans la façon dont il est traité.

Mais il y en a une autre, et l'autre, c'est celle qui a trait à ce que dans votre esprit... Puis je ne vous en veux pas. Si j'étais dans vos souliers, peut-être que je ferais la même différence entre les biens essentiels comme le lait et puis dire: Bon, bien, le spectacle, ce n'est pas essentiel. Mais mettez-vous dans mes souliers. Je suis membre du gouvernement. Je suis responsable des consommateurs. On me montre qu'il y a une façon de faire qui vise à atteindre toujours le plus cher possible, malgré que pour d'autres ils aient un prix différent, dans un domaine, la culture -- et je vais parler du tourisme aussi, parce que le tourisme est culturel -- où nous, comme État, nous utilisons les fonds publics pour supporter ces activités-là.

Je vais vous donner l'exemple du Festival d'été de Québec. Ils viennent en conférence de presse, nous expliquent... J'ai eu l'occasion de le dire cet après-midi, puis j'aimerais ça que vous m'aidiez un petit peu. Je sais que la Fédération des chambres de commerce, d'habitude, vous aimez ça quand le gouvernement, il ne fonctionne pas en silo puis il est cohérent, ça fait que je vais vous lancer un petit défi. Nous autres, on aide ces entreprises-là parce que, notamment, ça crée de l'activité économique, puis pour nous la croissance économique, c'est important, puis pour vous aussi. Alors, le Festival d'été vient, ils nous racontent qu'ils vendent des macarons à moins cher, puis ça donne accès à plusieurs spectacles. Ils les vendent moins cher parce qu'ils veulent attirer les gens. Ça, ça fait l'affaire de certains de vos membres qui sont soit restaurateurs soit hôteliers, ils trouvent que c'est une bonne idée. Nous, on fait ça, ça crée de l'activité économique, ça aide nos artistes. Pour nous, la culture est un domaine excessivement important pour porter l'identité québécoise, alors on intervient, on agit, puis on agit avec votre argent. On prend les taxes, les impôts des Québécois pour faire ça. Ce n'est pas la mienne, tu sais... bien, un petit peu la mienne, un petit peu la vôtre, tout le monde.

Alors là, on arrive dans une situation où on a des gens qui produisent des spectacles, des artistes qui sont là, qui demandent un prix. Si on fait augmenter le prix parce qu'on est dans la liberté totale, les études, dont celle que j'ai déposée cet après-midi, nous démontrent que pour 1 % de prix plus élevé, tu as 0,5 % de pertes dans le prochain spectacle. S'il te coûte plus cher, celui-là, tu n'iras pas au deuxième que tu avais prévu dans l'année. Moi, je veux qu'ils viennent, qu'ils achètent le macaron, là, puis qu'ils viennent ici, à Québec, puis pas juste du monde de Québec, même d'ailleurs. Puis on veut que les gens aillent voir d'autres spectacles. On veut un effet levier. On veut s'assurer que les subventions ou les crédits d'impôt qui soient donnés puissent aller au maximum du rendement. C'est votre argent. On veut s'assurer du maximum.

Au nom de la liberté de commerce, vous me dites: Occupe-toi pas de ça, il y a quelqu'un qui va faire le maximum d'argent, puis ce ne sera pas nécessairement ni le développement touristique ni le développement culturel. Je crois que je peux mettre cet élément-là dans ce qu'on pourrait qualifier -- d'ailleurs, vous avez pris le soin de le dire -- sur un bien essentiel ou pas... culture n'est peut-être pas... J'ai compris ce que vous vouliez dire, là, remarquez bien, là. Je ne vous en veux pas. C'est... On n'est pas dans le domaine du lait, là.

Néanmoins, c'est un domaine que l'État considère excessivement important, si on veut laisser faire les mots «essentiel», excessivement important au point que certains consensus, je dirais, où la société se dit: Investissons là-dedans. D'abord, parce que c'est notre culture; il y a un rendement économique collectif. La possibilité d'avoir des prix qui sont fixés initialement sans qu'il y ait un abus par dessus qui permet de tirer le maximum d'autres spectacles, d'autres ventes de billets, ça semble intéressant. C'est ce que nous faisons.

Encore une fois, nous ne fixons pas les prix. Ce n'est pas nous qui le fixons. Vous avez entendu peut-être un peu plus tôt cet après-midi des gens qui sont venus nous dire que c'était leur métier. Ils sont producteurs. Ils tiennent compte de ce qu'ils ont à offrir, ils tiennent compte de la salle, ils tiennent compte des bons billets de la salle, ils tiennent compte du nombre de spectacles qui vont être donnés, ils font une analyse des billets qu'ils ont à offrir. Ils fixent le prix, pas nous. Nous, tout ce qu'on dit, c'est que, puisqu'ils l'ont fixé, le prix, à leur produit... Dans le cas qui nous concerne, considérant la façon dont le consommateur peut être traité et considérant la cohérence de l'État qu'on doit demander, il y a lieu de dire, pour ce qui est de la revente... pas n'importe quelle revente, une revente qui est devenue une entreprise, une revente qui devient... avoir un effet qui perturbe l'aide qu'on ne peut pas donner au maximum, avoir les pleins effets.

J'ai entendu dire tantôt, dans votre présentation, vous dites -- ça, c'est un petit élément de ce que vous avez dit: L'acheteur, en tout cas, s'il fallait que les revendeurs n'existent plus, l'acheteur, en ce moment, peut revendre à perte. Celui qui a acheté son billet peut le revendre à perte. Et j'aimerais ça que ce que vous nous dites soit la vérité. Parce que, dans le fond, ce qu'on nous a présenté jusqu'ici, c'est que nous n'avons pas, avec les revendeurs, des acheteurs à perte qui vont vers le revendeur. Nous avons des acheteurs spéculatifs qui vont chercher du revendeur plus que la valeur initiale, et le revendeur, à son tour, d'aller en chercher plus chez le deuxième niveau de consommateur.

La loi, par contre, de la façon dont elle est faite, permet de faire ce que vous voulez faire: permettre à l'acheteur de vendre à perte. Dans le fond, c'est lui qui l'a acheté, c'est lui qui veut le revendre. Il assume une partie des frais que cela occasionne, fait affaire avec une plateforme, peu importe laquelle, même s'il faut la réinventer, laquelle plateforme pourra toujours vendre au prix qui avait été initialement fixé. Jusque-là, il me semble qu'on est capables de développer une formule qui est utile pour l'acheteur qui veut revendre et qui, en même temps, respecte la cohérence que le gouvernement a dans ses interventions et, je dirais, la pleine information que peut avoir le consommateur.

Vous avez dit tantôt que les revendeurs étaient un outil ou un instrument de plus pour assurer qu'on allait fonctionner à guichets fermés. Si c'était vrai, j'ai l'impression qu'il n'y a pas grand monde qui s'en plaindrait. Or, il y a des gens qui s'en plaignent. Il doit y avoir une raison. Parmi les raisons, c'est que les revendeurs n'ont pas -- de ce que j'en apprends en écoutant les gens qui viennent nous voir -- les revendeurs n'ont pas pour mandat d'acheter toute la salle, de prendre le risque et de le revendre. Ils prennent les meilleures places, les vendent au moment qu'ils veulent pour en tirer le maximum de profit, entraînant même parfois des phénomènes de sièges libres. Pour un des artistes qui me l'a déjà dit, ça change un peu le spectacle quand tu sais que tous tes billets sont vendus mais qu'il y a trois rangées vides. Ce n'est pas tout à fait la même chose comme ambiance. Ce n'est pas l'essentiel de la raison pour légiférer, mais il faut quand même comprendre qu'il y a des effets perturbateurs à plus d'un titre lorsque ce système-là arrive.

Moi, je regarde ce qui se passe en France, en ce moment. Il y a aussi des mouvements aux États-Unis. En Ontario, ils ont procédé de la même façon à ce que nous faisons. Dites-moi, est-ce que le Québec devrait éviter d'aller dans le même courant qu'on voit ailleurs? Parce que, dans le fond, si tout le monde fait cela en ce moment, c'est parce que l'augmentation rapide de l'intervention des revendeurs commence à avoir des effets. Est-ce que nous devrions ne pas tenir compte de ce qui se passe ailleurs, dans les autres juridictions? Et comment réagissez-vous à l'idée que l'État devrait tout mettre en oeuvre pour profiter du meilleur effet levier des fonds publics lorsqu'il n'est plus dans une situation comme celle-ci? Est-ce que la Fédération des chambres de commerce ne nous dirait pas à un moment donné: Vous gérez les fonds publics, assurez-vous, quand vous avez l'image devant vous qu'il y a de l'argent qui ne va pas au meilleur endroit, de le gérer convenablement?

**(19 h 40)**

Le Président (M. Bernier): M. Hamel, une longue question.

M. Hamel (Denis): Oui. Merci, M. le Président. Beaucoup de commentaires suite à votre intervention, M. le ministre. D'abord, oui, la clarification que j'ai faite sur la notion de bien essentiel... La fédération est porte-parole de l'Agenda 21, alors ça démontre, je dirais, l'engagement que nous avons pris pour la culture québécoise dans notre société. C'est important et ce n'est absolument pas remis en cause dans notre approche. Ce n'est pas, je dirais, une dévalorisation de la culture. C'est un produit, on s'entend, pas essentiel dans le sens purement économique du terme, mais c'est un produit essentiel pour une culture comme la nôtre, pour une société comme la nôtre. Alors ça, c'est... D'entrée de jeu, je voulais clarifier.

Maintenant, vous avez parlé au début de la conscientisation du consommateur, celui qui achète le billet de spectacle. Alors, pourquoi certains le paient au prix affiché offert par le promoteur et dans le marché secondaire les prix montent, et montent, et montent? Est-ce qu'on doit nécessairement interdire de revendre à un prix plus élevé pour conscientiser... comme outil de conscientisation? Sur les sites... Bon, il y a un prix de marqué sur le billet. Sur les sites de revente officiels, c'est bien indiqué que ce site de revente vend à un prix supérieur. Donc, le consommateur... On prend pour acquis souvent... En économie, on parle de l'Homo oeconomicus. La réaction économique logique du consommateur, c'est qu'il va payer un peu plus cher, c'est bien indiqué, c'est clair. Et les lois du marché font en sorte qu'un consommateur est prêt à payer plus que le prix demandé pour avoir accès au spectacle.

On voit des gens qui font des fois la file pour avoir les meilleurs billets, des gens qui se décident à la dernière minute, et c'est là qu'intervient le marché secondaire. Le marché primaire établit selon, comme vous l'avez dit... le promoteur établit la valeur du spectacle à un prix x, mais il a peut-être sous-estimé le pouvoir d'attraction de l'artiste, et le prix se met à monter. Ou bien il peut y avoir, par exemple, au moment de l'émission des billets, un attrait pour un spectacle. Et là les critiques sortent, elles sont élogieuses, et là tout à coup tout le monde veut y aller. Alors là, question d'un simple jeu d'offre et de demande: les gens sont prêts à payer plus cher parce qu'ils savent que le produit est de qualité, et, à ce moment-là, le prix est un reflet de cette qualité qu'on offre au consommateur. Donc, sans marché secondaire... Le marché secondaire envoie le signal. Ça veut dire qu'au promoteur, la prochaine tournée ou les prochaines fois que l'artiste en question va faire sa prestation, il pourra fixer un prix qui sera beaucoup plus près de la valeur du marché.

Donc... Et j'ai bien compris la clarification que vous avez faite. Ce n'est pas une prohibition de revente comme ça s'est fait à d'autres places, et c'est simplement une réglementation sur le prix de revente, non fixé par l'État mais fixé par le promoteur lui-même. Ça, c'est bien, je veux dire, on l'a très bien compris.

Par contre, on croit savoir... On n'est pas des spécialistes du secteur. Nous, on regarde vraiment d'une approche macroéconomique, là, je dirais, à 10 000 pieds et non pas sur le terrain. Mais on croit comprendre qu'une bonne partie des billets vendus par les revendeurs sont des billets qui ont été achetés par des individus comme vous et moi et qui sont dans l'impossibilité d'aller au spectacle, ou d'aller au match de hockey, ou d'aller... c'est ça, au spectacle en question. Alors, au lieu de le perdre, c'est un outil utile qui répond à un besoin des consommateurs de pouvoir écouler à des inconnus, dans le fond, là, au lieu de pouvoir le revendre à un ami, dire... de le remettre sur le marché, et, à ce moment-là, les lois économiques embarquent. Alors, il peut être plus bas que le prix fixé par le promoteur, il peut être au prix, ou il peut être au prix plus élevé, tout étant un jeu d'offre et de demande.

Donc, pour la question d'information, je pense qu'il y a manière de... peut-être pas de légiférer, mais, soit par un code d'éthique, d'avoir une certaine manière d'expliquer aux gens que, si vous achetez du promoteur, vous payer un billet x, et le revendeur a un rôle. Il a un rôle à jouer, comme on l'a dit... D'ailleurs, ce n'est pas pour tous les spectacles qu'on voit le phénomène de la revente. Sans... vous savez... C'est surtout... On parle surtout de sport et des spectacles à grand déploiement, essentiellement, qui font, je pense, une grosse, grosse, grosse partie du marché. Alors, est-ce qu'il y a manière de donner l'information aux citoyens autrement qu'en disant: Vous ne pouvez pas vendre le billet à un prix supérieur au prix demandé? Nous croyons que oui.

Alors, les lois économiques, dans le fond, interagissent pour justement aider le promoteur à fixer. Sans cette réponse du marché, ça va être plus difficile de le faire. Il n'y a rien qui empêche le promoteur, lui-même, de créer un système de revente. On le voit dans d'autres pays. Il est possible, par exemple pour un promoteur, un club de hockey, un club de sport professionnel, de racheter des billets, et de les remettre sur le marché.

Le Président (M. Bernier): M. le ministre...

M. Hamel (Denis): Le prix...

Le Président (M. Bernier): Excusez, je vous arrête, M. Hamel. M. le ministre, vous avez une question additionnelle.

M. Fournier: Est-ce que j'ai le temps?

Le Président (M. Bernier): Oui, c'est pour ça que... Je veux vous donner le temps.

M. Fournier: Je m'excuse de vous interrompre. D'abord, parce que la prémisse de base que vous avez, c'est que les revendeurs revendent les billets que les consommateurs avaient par ailleurs achetés à l'unité presque et qui ne peuvent pas y aller, donc qui les revendent. Je crois que c'est d'un autre ordre. Il y a, oui, ce marché-là qui est inclus, mais il y a une portion excessivement importante... On l'a vu ce matin, Billets.ca ne s'en cache pas, ils achètent, ils achètent les billets dans les bonnes rangées, dans les grandes salles, pour n'importe où, ils font l'analyse des billets qui vont... Dans le fond, ils analysent les billets qui vont se vendre, puis ils les vendent plus cher. Et ceux qui les achètent vont avoir un petit moins d'argent pour en acheter d'autres.

Et je veux revenir sur cet élément-là. Je veux savoir comment la Fédération des chambres de commerce souhaite que nous nous comportions lorsqu'il y a une information à l'effet que toute hausse des prix, dans ce cas-là, artificielle... On se comprendra, là, hein, le spectacle, il va se dérouler, là, les billets, dans le siège à côté, se vendaient à un autre prix. Comment doit-on se gouverner quand la méthode entraîne l'effet pervers qu'il va y avoir moins de monde qui vont acheter soit ce billet-là soit le prochain spectacle? Parce que dans leur budget assez limité, selon les études, il y a un nombre limité de spectacles qu'on va voir.

L'Agenda 21. Je suis sûr que, quand vous en discutez, ou quand vous intervenez sur la place de l'État, vous dites: Il faut qu'il intervienne dans la culture, il faut qu'il intervienne dans le domaine économique. Pourquoi est-ce que vous me dites: Ne vous interrogez pas? Au-delà du consommateur qui est lésé parce qu'il y a deux prix différents avec le processus... Vous, vous dites: Il n'est pas lésé, il a bien voulu payer le prix. Disons que la vision de chacun, là, il semble que ce n'est pas tout le monde qui ont lu si bien que ça, là, le fait que c'était un prix plus cher puis il était sur un Web de revente...

Le Président (M. Bernier): M. le ministre, M. le ministre, si on veut laisser un peu de temps pour répondre...

M. Fournier: Excusez, excusez. Je veux savoir comment vous réagissez à la question de la cohérence gouvernementale.

Le Président (M. Bernier): Allez-y, M. Hamel. Je vous laisse deux, trois minutes pour répondre. Allez-y.

M. Hamel (Denis): D'accord. Bon, écoutez, rapidement. Écoutez, on est dans une société de libre marché. Quand une entreprise prend des risques en achetant des billets pour... en spéculant sur la valeur future, plusieurs entreprises le font, bon, on le voit ici dans le domaine, il se fait la même chose avec des tableaux, des bouteilles de vin... Je parlais tantôt du transport aérien. Sur un vol Montréal-Paris, il n'y a à peu près personne qui a payé le même prix, son siège, dépendant de la période de l'année où ils ont acheté leur billet et puis s'ils l'ont acheté six mois d'avance ou deux mois d'avance ou à la dernière minute. Alors, c'est un phénomène qui n'est pas propre, je veux dire, qui n'est pas artificiellement causé. Il existe, il existe, sauf, dans le cas des compagnies aériennes, ce sont les compagnies elles-mêmes, les mêmes, qui le gèrent.

M. Fournier: Oui. C'est toute la différence au monde. C'est toute la différence au monde.

M. Hamel (Denis): Mais pourquoi? Ça pourrait se faire qu Québec aussi. Et...

M. Fournier: Ce n'est pas ce qui se fait en ce moment?

M. Hamel (Denis): Et, si jamais... Si ce qu'on veut freiner, c'est le fait de pouvoir acheter, je ne sais pas, moi, 200 billets de la part d'un particulier, il peut y avoir des limitations autres que l'interdiction. Pourquoi est-ce que, par exemple, ce serait impossible d'acheter plus que... Puis on pourrait envisager l'idée impossible d'acheter plus que quatre billets en même temps, au lieu d'avoir à en acheter 100 ou 200.

M. Fournier: ...

M. Hamel (Denis): Écoutez, si c'est...

M. Filion (Mathieu): ...limite la vente. Chaque transaction se limite à un certain nombre de billets. Ça pourrait être faisable.

M. Fournier: ...multiplié par... en tout cas, merci.

Le Président (M. Bernier): Merci. nous allons donc passer du côté du député de Beauharnois. La parole est à vous.

**(19 h 50)**

M. Leclair: Merci, M. le Président. Tout d'abord, bienvenue, M. Hamel, M. Filion, merci d'être là, merci pour le mémoire. Contrairement à la plupart des gens qui ont venus aujourd'hui, il y en a qui étaient pour, qui étaient contre, mais, une chose est certaine, vous expliquez dans votre mémoire: «un faible pourcentage des détenteurs de billets a des raisons suffisantes pour vouloir revendre leurs billets». Donc, vous êtes convaincus, vous aussi, puis la plupart des gens l'ont confirmé aujourd'hui, on parlait peut-être de 10 % au maximum, là, tous revendeurs confondus. Donc, vous semblez dire, vous aussi, que le projet de loi s'attaque à une infime partie des billets revendus pour les spectacles.

Autre que ça, moi, c'est la partie que je retiens, là, depuis le début de la journée, là, c'est qu'on s'attaque à une petite partie, là, sans dire qu'on est pour ou contre à cette heure-ci, mais c'est quand même une infime partie. Puis, dans votre mémoire, vous parlez d'un précédent qui inquiète. Vous craignez un précédent. J'aimerais ça vous entendre là-dessus. Je ne prendrai pas votre temps, je vais vous laisser m'expliquer un peu, précédent face peut-être à d'autres services qu'on pourrait faire lorsqu'on légifère tel qu'on prétend vouloir le faire.

Le Président (M. Bernier): Le temps, c'est votre temps à vous, M. le député. Vous en faites ce que vous voulez.

M. Leclair: Je le laisse à mon invité.

Le Président (M. Bernier): Allez-y, M. Hamel.

M. Hamel (Denis): Merci, M. le Président. Écoutez, on n'a pas vu, à part... Je donnais l'exemple, tantôt, de l'électricité, pour laquelle il y a un tarif maintenu, disons, artificiellement bas -- sans ouvrir un débat, là -- artificiellement bas pour justement profiter à l'ensemble des consommateurs, les prix planchers dans l'agriculture pour permettre de garder une industrie agricole prospère chez nous. Mais, à part ça, il y a très peu d'interventions de l'État qui permettent de... pas fixer un prix, mais fixer un prix, là, ici par un intermédiaire.

Il y a beaucoup de secteurs dans l'économie où la nature même de la business, de l'ouvrage, est d'acheter à un prix et de le revendre à un prix plus élevé pour en faire un profit, afin d'absorber les coûts. Alors, si le gouvernement se met à intervenir dans le secteur, par exemple, de la vente d'auto ou des carburants, de l'essence, à ce moment-là, pourquoi on le fait pour le spectacle puis on ne le ferait pas pour d'autres? Ça va ouvrir la porte à d'autres entreprises qui vont peut-être, elles, vous dire aussi: Bien, écoutez, moi, je trouve que je paie trop cher. Plutôt, les associations de consommateurs qui vont dire: Je paie trop cher pour telle affaire, est-ce que le gouvernement pourrait nous mettre un plafond? Alors, à ce moment-là, on rentre dans une réglementation qui pourrait, à la limite, ne pas avoir de fin.

Le Président (M. Bernier): M. le député.

M. Leclair: Merci, M. le Président. Merci de cette réponse-là. Puis, en plus, c'est sûr que j'ai quand même entendu quelque chose de la part du ministre qui est du bonbon à mes oreilles, là. Le ministre, il nous disait tantôt: On doit s'assurer que les fonds publics sont bien utilisés. Alors, j'imagine qu'on va avoir une enquête sur la construction bientôt, ça fait partie du cadre de bien utiliser notre argent.

Le Président (M. Bernier): M. le député, je veux rien que vous dire que vous êtes hors d'ordre...

M. Leclair: Ah! Excusez-moi.

Le Président (M. Bernier): J'aimerais ça que vous reveniez au sujet.

M. Leclair: Je reviens.

Le Président (M. Bernier): O.K.

M. Leclair: Parce que c'est quand même mon temps, M. le Président...

Le Président (M. Bernier): Le temps vous appartient, mais c'est moi qui le contrôle.

M. Leclair: O.K.

Le Président (M. Bernier): O.K.? Je veux rien que vous dire ça.

M. Leclair: Je vous refilerai mes questions, M. le Président.

Vous parliez tantôt d'encadrement. On a reçu beaucoup de mémoires. Ces mémoires-là nous parlent d'encadrement, mais malheureusement il y a plusieurs gens qui n'assisteront pas mais qui ont juste entendu des mémoires. J'aimerais entendre un peu quel type d'encadrement vous parlez ou vous voyez qui serait possible, car vous parlez, par la suite, que dans le cadre... la vente, elle est très bien balisée au Québec, là, dans... À la fin des précédents, là, vous parlez que c'est déjà bien encadré -- le Code civil, la Loi de la protection du consommateur -- face à la réglementation ou l'encadrement que vous parlez. J'aimerais entendre un peu, là, où est-ce que vous pensez que ce serait faisable.

Le Président (M. Bernier): M. Hamel.

M. Hamel (Denis): Oui. Certainement, M. le Président. Nous, on pourrait... Quand je vous parle d'un encadrement, on a des entreprises qui sont actuellement... les principales entreprises de revente de billets sont installées au Québec, alors, en vertu des lois du Québec, paient des impôts au Québec et puis, donc, on les connaît ces entreprises-là. La crainte qu'on a, c'est l'adoption du projet de loi ferait fuir ces... dans le fond, éliminerait... Il n'y a pas de raison qu'elles existent si jamais il n'y a pas de profit possible. Il faudrait juste pouvoir acheter des billets à rabais, puis je ne pense pas que le volume le justifie.

On est donc dans une situation où on devrait donc, pour... Un vendeur de billets serait dans l'obligation de passer soit par des sites étrangers, eBay, pour ne pas le nommer, ou les petites annonces. Et là on est complètement, complètement en dehors de la réglementation. Alors, il peut y avoir à ce moment-là des possibilités de fraude, parce que ces entreprises-là, qu'on les aime ou qu'on ne les aime pas, nous donnent quand même une garantie de confiance que ce sont des vrais billets qui sont transigés. Alors, j'ai tout à fait... Tantôt, pour m'amuser, je suis allé sur deux... un site de petites annonces et sur eBay, et, pour des billets de spectacles à Montréal, il y a 4 662 annonces sur le site de petites annonces, et 2 777 sur eBay. C'est un marché énorme. Et puis là, bien, tout projet de loi ou toute bonne intention du législateur ne pourra pas attaquer ça.

Alors, en contrepartie, quand -- je reviens à votre question -- quand vous dites: Est-ce qu'il pourrait y avoir une façon de faire? Oui. Que la revente soit faite par des entreprises ayant place d'affaires au Québec. Et puis déjà, au moins, on sait à qui on a affaire... l'interdiction d'utiliser des programmes informatiques d'achat, par exemple.

Alors, il pourrait y avoir des mesures qui seraient mises de l'avant comme ça et qui sont beaucoup plus, je dirais, qui donneraient probablement un bien meilleur résultat que le projet de loi n° 25 dans sa forme actuelle.

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député, sur le sujet.

M. Leclair: Oui. Lorsqu'on parle d'outils électroniques déjà existants, là, on parlait des «boots». On a parlé un petit peu avec d'autres groupes plus tôt dans la journée. Est-ce que vous êtes d'avis ou est-ce que vous croyez avec la technologie que, lorsqu'on dit qu'on ne peut pas utiliser de robot, est-ce que vous croyez que c'est faisable en ce moment, là, en 2011? Parce qu'on semble prétendre que c'est pratiquement infaisable. Donc, si on peut utiliser ces intercepteurs-là, donc là on pourrait régler un petit peu plus à la source le problème. Car là on ne parle plus seulement des gens du Québec: on parle de tout le monde qui sont sur l'inforoute, là, sur le Web. Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus, là. Je ne sais pas si vous avez des compétences là-dedans ou si vous avez entendu dire... Là, moi, je n'ai pas de compétence face à ça, mais, pour le...

Le Président (M. Bernier): M. Hamel.

M. Hamel (Denis): Oui. M. le député, vous avez lu dans mes pensées, je n'ai vraiment pas de compétence en Web ou, en tout cas, tout ce qui est la position des robots ou comment se fait l'achat de billets, comment prévenir la faute. Tout ce que je sais, c'est qu'on est inscrits. Le gouvernement du Québec fait actuellement une consultation sur le Web 2.0 puis, en rentrant pour la consultation, il faut rentrer un code qui empêche justement l'utilisation des robots. Donc, j'en conclus que, si le gouvernement l'utilise, ça doit être possible.

Le Président (M. Bernier): Merci. Avez-vous des éléments à ajouter, monsieur? Non. C'est beau.

Une voix: ...mon collègue.

Le Président (M. Bernier): M. le député de Drummond.

M. Blanchet: Merci, M. le Président. Vous avez sûrement une expertise plus étoffée que la mienne. Il me viendrait des exemples où la réponse n'est pas nécessairement positive, mais pouvez-vous me donner des exemples de bienfaits de la pure spéculation? Des cas où c'est bien bon, la spéculation, c'est bon pour l'économie, c'est bon pour... à part les quelques bénéficiaires, évidemment, des marges bénéficiaires importantes que ça peut accorder? Est-ce que la spéculation est bonne pour l'économie du Québec ou d'ailleurs?

Le Président (M. Bernier): M. Hamel.

M. Hamel (Denis): Je vais vous répondre de façon très théorique. Quand la Caisse de dépôt gère les avoirs des Québécois, elle investit dans des compagnies, elle spécule sur un avenir plus brillant pour les compagnies, sur des marges de profits élevées afin d'enrichir le portefeuille collectif des Québécois. C'est un genre de spéculation avec lequel je suis très à l'aise.

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député de Drummond.

M. Blanchet: L'achat... Exemple, l'exercice boursier, tel que des gens le font, suivent le journal puis ça, ça devrait monter, ça, ça devrait descendre, avec bien peu de liens avec l'activité économique réelle parce que vous me donnez l'exemple de la Caisse de dépôt... Excusez-moi, M. le Président, je ne voudrais pas que vous me jugiez hors d'ordre, mais il y a débat à savoir si son rôle ne doit pas contribuer...

Le Président (M. Bernier): ...

M. Blanchet: ...justement au développement économique davantage qu'à un exercice purement spéculatif. Donc...

Le Président (M. Bernier): ...je confirme vos dires.

Une voix: Il t'appuie en plus.

M. Blanchet: Ce n'était pas hors d'ordre?

Une voix: Non, non. Il voulait en parler.

Le Président (M. Bernier): Non. Non, loin de là. Je confirme vos dires sur la Caisse de dépôt.

M. Blanchet: O.K. On continue. Donc, j'ai ce doute-là parce que, dans ce cas-ci, je pense que ça peut même être préjudiciable. Je reprends votre exemple de la voiture. Je veux acheter une voiture usagée. Je vais voir le marchand de voitures usagées. Si je ne m'entends pas avec lui, je vais aller voir l'autre à côté, l'autre à côté, l'autre à côté puis, à la limite, acheter un Ford ou un GM, il va probablement me dire: Ce n'est pas si grave, c'est le rapport qualité-prix qui va faire le travail.

Dans le monde du spectacle, l'offre est limitée. On ne peut pas dire qu'ad infinitum un artiste va multiplier les spectacles. Sa marge de manoeuvre pour la présentation de spectacle est plus restreinte. S'il aurait eu suffisamment de places pour vendre 300 billets de plus dans une salle de 1 000, il ne va pas mettre en vente un autre spectacle à 1 000, parce que, là, il va le faire à perte. Donc, le type de rapport, compte tenu du fait que le transfert ne se fait pas non plus... Quelqu'un qui veut voir un show d'Isabelle Boulay ne va pas dire: Ah! Il n'y a plus de billet pour Isabelle Boulay à bon prix, je vais aller voir Lynda Lemay. Ça ne marche pas comme ça. Je veux voir Éric Lapointe, je vais voir Éric Lapointe. Ça ne se transfère pas d'un artiste à l'autre.

Donc, la mécanique, telle que vous la décriviez, je pense qu'elle n'est pas applicable et qu'on ne peut pas simplement faire ça. Et donc j'aurais une question fort large. J'ai eu un débat avec quelqu'un qui fait une chronique dans un journal récemment par rapport à l'application des lois du marché aux arts. Quel est votre point de vue et les nuances sur l'application des lois du marché aux arts?

**(20 heures)**

Le Président (M. Bernier): M. Hamel.

M. Hamel (Denis): Écoutez, encore là, quand on parle du domaine artistique, c'est un domaine qui est très souvent supporté par l'État, fort heureusement, parce qu'on a besoin de nos artistes.

Mais, à la question que vous posiez tantôt, il m'est venu un autre exemple: celui de la peinture, par exemple. Restons dans le domaine des arts. Un peintre peut vendre une toile et généralement l'acheteur... bon, évidemment, il a un béguin pour la toile, mais il le fait souvent pour des raisons spéculatives. Les toiles de l'artiste, à mesure que l'artiste va être de plus en plus connu, les toiles vont prendre de la valeur, et puis ça fait partie, donc, du marché des oeuvres d'art. Ce n'est pas un marché qui... Je veux dire, c'est un marché qui répond aux lois de l'offre et de la demande à la base, qui a peut-être ses particularités, mais qui demeure qu'elle répond aux grandes lois... aux lois économiques. Alors, si le peintre en question, pour revenir à mon exemple, devient célèbre, atteint une notoriété, la peinture que j'ai achetée 300 $ il y a 10 ans, je peux... je vais sûrement la vendre le double, le triple et beaucoup plus. Donc, je dirais, sans que ça s'applique à l'ensemble de tout le domaine artistique, c'est quand même un domaine pour lequel... un domaine qui répond aux lois du marché.

M. Blanchet: Cela dit...

Le Président (M. Bernier): M. le député.

M. Blanchet: ...lorsque la peinture du peintre en question aura atteint des valeurs faramineuses, lui ne touchera pas un sou de plus. Alors, je prend votre exemple pour vous dire que l'artiste et les arts ultimement ne sont pas bénéficiaires ni de l'exemple que vous donnez en termes de spéculation ni de l'essentiel de l'exercice auquel se prêtent les spéculateurs qui le font présentement de façon légale.

Si les lois du marché s'appliquaient de façon brute, la nouvelle salle le l'OSM n'existerait pas. Il n'y aurait pas de présentation d'opéra à Montréal. En revanche, si les lois du marché s'appliquaient de façon brute, les artistes populaires qui fonctionnent bien ne fonctionneraient pas bien parce qu'ils n'auraient probablement jamais été découverts. Parce que, pour être découverts, la collectivité s'est donné des outils, des systèmes de subvention que certains de vos collègues ou de certains économistes décrient et aussi des systèmes de protection par les quotas. La réglementation par l'État est essentielle à l'émergence d'artistes ou de formes d'art qui éventuellement peuvent atteindre un niveau de rentabilité économique. Et, dans d'autres cas, on souhaite, comme collectivité, que ça s'exprime pareil, même si ce ne sera jamais rentable. La danse contemporaine ne sera jamais rentable. Elle n'a pas à l'être parce qu'on a fait des choix dans ce sens-là. Donc, les lois du marché appliquées aux arts, je pense qu'il faut nuancer beaucoup.

Je ferai un dernier commentaire par contre. Je crois, mais... Et je suis très intéressé de voir comment ça va s'orienter. M. le ministre disait qu'il voyait la loi comme une réglementation. Je sais qu'il y a des aspirations à ce que ce soit plus proche d'une réglementation au sens conventionnel par rapport à un exercice coercitif, même si je crois que la prohibition doit précéder son propre assouplissement dans ce cas-ci, mais la réflexion devrait porter sur comment on peut effectivement encadrer, si tant est que la démonstration soit vraiment faite que ça peut être contributif au succès des arts au Québec. Et, pour l'instant, on n'en est pas là.

Le Président (M. Bernier): Commentaires?

M. Hamel (Denis): Oui, certainement, M. le Président. Je reprends votre analogie. Que les arts soient subventionnés au Québec, c'est une excellente chose, puis ça nous permet d'avoir une variété d'arts. Vous parliez de la danse, de l'opéra. Les gens paient des billets, ne paient pas la totalité du coût du billet parce que ce serait impossible de le faire.

D'interdire la revente de billets, est-ce que ça va faire en sorte que la salle va être plus pleine? L'idée, dans le fond, ce n'est pas une attaque, ou, je dirais, ce n'est pas une façon d'empêcher les artistes de performer. Au contraire, moi, je pense que plus il va y avoir de billets vendus, plus la salle va être pleine, puis au moins plus les artistes vont pouvoir toucher une partie de la vente des billets. C'est tout à fait normal comme ça. Et surtout que la vente... Lorsqu'on parle de revente de billets, on ne parle pas de danse contemporaine, on ne parle même pas de l'OSM.

Le Président (M. Bernier): M. le député de Drummond.

M. Blanchet: Mais je donnais clairement cet exemple-là pour dire que l'intervention de l'État en soutien aux arts est essentielle. Je ne pense pas... Et justement, et justement, le jour où une entreprise de spéculation sur les billets va dire: Ça marche, je vais soutenir puis je vais vous donner ma vitrine pour aider à en vendre, là, je vais dire: Ah! Déjà, on parle d'autre chose. Mais je pense qu'on n'est pas rendus là.

Et d'ailleurs, dans l'équilibre entre la vente et la revente, bien, il y a tout le risque financier qui est pris par le producteur, avec une aide de l'État, qui arrive sur le marché en disant: Si ça vaut tant, je pense pouvoir être capable d'en vendre combien? Et la contrepartie de ça, c'est: s'il a le malheur d'avoir du succès, il va se faire vampiriser. Donc, je n'ai pas du tout l'impression qu'on est dans une application saine des lois du marché.

Encore là, je pense qu'encore une fois -- là, je renverse le fardeau de la preuve sur l'autre école de pensée -- que, si on ne fait pas non plus la démonstration que cette loi-là est applicable et qu'elle ne sera pas facile à contourner -- et j'ai fait des luttes dans le milieu culturel assez pour savoir que la technologie rend les lois parfois faciles à contourner -- mais si cette démonstration-là n'est pas faite, bien, il faudra effectivement se replier vers une forme d'encadrement réglementaire avec une force d'application. Parce que l'autre phénomène, c'est: c'est facile d'énoncer des interdictions sans se donner les moyens pour les faire respecter. Voilà.

Le Président (M. Bernier): Merci. Autres commentaires? Vous avez quelques minutes. M. Filion.

M. Filion (Mathieu): Peut-être un petit commentaire. À la Fédération des chambres de commerce du Québec, on trouve très louable la défense des arts. Ce que l'on constate avec ce projet de loi là, c'est que ce n'est pas nécessairement les arts qui vont être protégés, mais bien les spectacles à grand déploiement.

Juste pour répondre à M. le député, quand vous disiez tout à l'heure qu'un individu peut se promener, aller d'un concessionnaire automobile à l'autre jusqu'à temps qu'il va trouver le prix exact pour le type de véhicule exact, je vous dirais que, quand il y a près de 7 000 personnes aujourd'hui qui veulent vendre des billets sur Internet, un consommateur qui a du temps va pouvoir trouver un billet au prix où il veut et ce ne sera pas souvent de l'art québécois qui va être brimé par ça, mais bien des spectacles à grand déploiement et en grande majorité, je dirais même, du sport, qu'il faut défendre, mais je crois que ces billets-là se vendent. Et dans un cas présent, ici, le prix... le nombre minime de billets qui sont vendus pour les arts québécois par les revendeurs est assez difficile à calculer, mais n'est pas très élevé. Donc il faut juste s'assurer que ce n'est pas les arts qu'on tente de défendre... d'attaquer, ici, mais bien une industrie qui crée de l'emploi et qui paie des impôts au Québec.

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député de Drummond.

M. Blanchet: J'ai un peu de misère avec cette espèce de distinction là, ça vient souvent, que, lorsque quelque chose a du succès, ce n'est plus de l'art. Ou, si on fait de la spéculation sur un artiste étranger, ce n'est pas grave, c'est un étranger. Copier un disque de Madonna, ce n'est pas grave, elle est riche. Les principes qui s'appliquent aux artistes québécois devraient être appliqués à tous les artistes. Et le succès n'est pas une preuve de manque de talent, souvent, c'est le contraire.

Ensuite de ça, si le nombre de billets que vous me dites, je vous crois... Divisez le nombre de billets qui sont offerts sur Internet maintenant par le nombre de spectacles que ça représente, vous allez être bien en bas des milliers: vous allez avoir quelques billets, peut-être quelques dizaines de billets par spectacle. Et, si vous en arrivez à la conclusion que le prix de vente de ces billets-là est à peu près au même niveau que ce qui serait acheté ailleurs, bien je dirai que ce n'est pas si mal. Mais je ne pense pas qu'on va en être là. Les gens qui sont les particuliers qui revendent des billets le font parfois pour s'en débarrasser; ils ne peuvent plus y aller. Mais les entreprises qui en font un modèle d'affaires systématique ont une autre intention: c'est celle du profit. Et c'est précisément ce qui mérite d'être soit interdit soit encadré.

Le Président (M. Bernier): Merci.

M. Hamel (Denis): Peut-être...

Le Président (M. Bernier): Autres commentaires?

M. Hamel (Denis): ...juste un bref commentaire.

Le Président (M. Bernier): Oui.

M. Hamel (Denis): Vous avez raison qu'on devrait appliquer la même chose à tous les artistes, mais ceux qu'on veut protéger d'abord et avant tout, c'est ceux qui sont subventionnés à même les ressources de l'État et donc des contribuables. Quand on parle de spectacles à grand déploiement ou de sport, ce n'est pas une façon de catégoriser comme étant des moins bons spectacles ou des spectacles qui ne méritent pas de... qui ne devraient pas faire l'objet d'intérêt de la part des gens. Mais l'idée, c'est de protéger d'abord les artistes que l'on soutient comme collectivité. Et donc, ce projet de loi là, nous, on ne voit pas effectivement le lien entre le soutien à l'artiste et la mesure d'interdiction de revendre les billets.

Le Président (M. Bernier): Merci. Merci, M. Hamel. Oui.

M. Fournier: Pour répondre à...

Le Président (M. Bernier): Est-ce que vous êtes... Monsieur...

M. Fournier: ...la question entre la...

Le Président (M. Bernier): Oui, excusez.

M. Fournier: ...réglementation et...

Le Président (M. Bernier): Est-ce que vous êtes d'accord? Oui?

M. Fournier: ...la prohibition...

M. Blanchet: Oui, oui, oui.

**(20 h 10)**

Le Président (M. Bernier): Merci.

M. Fournier: ...et la question qui vient d'être dite, je vais retirer le mot «réglementation». Mais le mot «encadrement»... Ce que j'essaie de dire, c'est que, par exemple, en comparaison avec la législation française sous étude présentement, ils ont choisi la prohibition de la revente. Nous n'avons pas fait le choix de la prohibition de la revente, nous avons fait l'encadrement de la revente au prix fixé par le producteur. C'est donc un encadrement. Il n'y a pas une réglementation qui est prévue à ce moment-ci outre le pouvoir qui découle de la loi, peut-être pas de réglementation générale qui pourrait découler, mais ici l'objectif qui est visé, ce n'est pas de dire: Il n'y a pas de revente. Il peut y avoir de la revente, mais à la valeur du prix indiqué de façon à ce que tout le monde soit bien au courant de la valeur du billet tel que chacun des consommateurs peut se l'approprier.

Et je termine en vous rappelant ce que l'étude qui a été déposée nous dit: Pour chaque 1 % de valeur supérieure payée, il y a 0,5 % de recul dans l'achat de billets. Dire qu'il n'y a pas de lien entre une revente à un prix supérieur à la limite de la capacité de payer et le développement de l'activité culturelle, c'est faire un peu exprès pour ne pas tenir compte de la limite budgétaire qui fait en sorte que, si je vais à la limite du possible pour ce billet-là, évidemment, je vais décliner les autres offres culturelles. Et donc la raison pour laquelle non seulement y a-t-il un consommateur qui doit avoir une certaine justice, mais une certaine cohérence dans l'action gouvernementale.

Le Président (M. Bernier): Nous sommes maintenant à la limite du temps. Donc, M. Hamel, M. Filion, merci de votre participation à cette commission parlementaire.

Je suspends quelques instants pour permettre à M. Alain Therrien de se préparer.

(Suspension de la séance à 20 h 11)

 

(Reprise à 20 h 13)

Le Président (M. Bernier): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons donc reprendre nos travaux. Nous avons le plaisir d'accueillir, comme dernier intervenant aujourd'hui, M. Alain Therrien. Bienvenue M. Therrien. Nous allons procéder à une période de présentation et d'échange d'environ 30 minutes. Donc, je vous donne une période de 10 minutes pour faire votre présentation. Par la suite, suivront des échanges avec les parlementaires. La parole est à vous, M. Therrien.

Alain Therrien

M. Therrien (Alain): Merci. Merci de m'accueillir ainsi. D'abord, je me nomme Alain Therrien, je suis économiste de formation et j'ai une maîtrise en économie. Je suis enseignant au cégep André-Laurendeau, chargé de cours aux HEC et chargé de cours à l'UQAM.

Ce qui m'amène ici, c'est un peu d'éliminer certains mythes. Je ne veux pas brusquer personne, mais, en économie, disons qu'il y a des choses qu'on entend à ce sujet-là, et des fois ça ne passe pas nécessairement la rampe de l'analyse économique. Donc, je viens ici un peu pour donner mon opinion là-dessus. Moi, j'ai toujours été intéressé par les politiques économiques des gouvernements, leurs effets dans l'économie. J'enseigne ça d'ailleurs aux HEC.

Alors donc, bon, je vous ai offert une lecture de mémoire que je vous ai envoyé. Dans la section 1, dans le début de mon mémoire, j'expliquais qu'est-ce qu'on retrouvait dans une économie gérée par une offre et demande théorique, là, traditionnelle, comme on connaît à peu près tous, là. Donc, le prix d'équilibre est déterminé par l'offre et la demande.

Dans la section 2 du travail comme tel que j'ai effectué, j'expliquais les différences entre le modèle théorique, celui qu'on est habitués de voir, et le modèle de la vente de billets de spectacle, et je retenais votre attention sur trois éléments importants. D'abord, le prix est fixé par les producteurs de spectacle au départ. Et ça, ça peut causer un problème parce que, quand on est dans une concurrence pure et parfaite ou même en concurrence monopolisée, vous fixez un prix et, si vous voyez que le prix amène des déséquilibres sur le marché, à ce moment-là, bien, on va établir le prix, on va rétablir. Par conséquent, si on a une pénurie, on va monter le prix pour atteindre l'équilibre, pour éliminer cette pénurie-là. Et, si, par contre, on est dans un surplus, bien, on va baisser le prix, puis on va atteindre l'économie... l'équilibre, pardon.

Donc, c'est comme ça que ça fonctionne sur l'ensemble des marchés et dans le cas du... qui nous intéresse, bien, le prix est fixé d'avance et ne peut définitivement pas bouger. Donc, on est un peu pris dans une situation de déséquilibre qui peut devenir, dans ce cas-là, permanent.

Deuxième situation importante à souligner: il s'agit, vous l'avez mentionné tantôt, d'une offre inélastique. Ça veut dire que l'offre comme telle ne va pas réagir au prix. La quantité offerte ne va pas bouger selon les prix ou selon la volonté des consommateurs. C'est assez particulier à ce marché-là. Par exemple, si on va prendre un marché traditionnel, bien, quand les gens... qu'on voit un certain engouement, bien, les producteurs vont augmenter leur quantité produite afin, justement, de combler cette demande qui est excessive. On n'a pas cette réaction-là chez les producteurs malheureusement.

Finalement, la demande est très imprévisible, entre autres parce que les services offerts par l'industrie du spectacle sont très différents. Quand on va voir Isabelle Boulay, on ne va pas voir Éric Lapointe et ainsi de suite. Donc, chaque spectacle est assez... a sa touche originale, et donc ça devient difficile de prévoir la demande à cause de ça. Ce n'est pas comme le prix du maïs ou le prix de la patate qui est... Si tu dis: bon, bien, le prix est fixé à tant de la tonne, bien, à ce moment-là, c'est facile d'arriver avec un prix qui est juste. Bien, dans l'industrie du spectacle, on a ce problème-là. Et donc, conséquemment, si on fixe un prix au départ, on est rarement en équilibre et donc il va arriver dans plusieurs cas qu'on aura des déséquilibres. Et, la plupart du temps, ça se trouve à être des pénuries. Ça veut dire que les prix sont inférieurs aux prix qu'on remarque sur ce marché-là, ce qui devrait être en équilibre.

Et donc, à ce moment-là, il y a un problème qui arrive. Quand on est dans une situation de pénurie, bien, ça veut dire qu'il y a des consommateurs qui vont obtenir le bien à un prix inférieur à sa valeur juste, et il y en a une partie des consommateurs qui seront lésés parce qu'ils voudraient assister au spectacle, mais le fait est que la quantité offerte est insuffisante. Et donc ces gens-là vont se retrouver dans une situation où ils ne pourront pas aller au spectacle qu'ils voulaient justement aller voir.

Et donc, c'est... Donc, étant donné qu'on a ce problème-là, il y a des possibilités, il y a des façons de contourner ce problème-là. La première façon, celle qu'on entend toujours parler, c'est la file d'attente. À ce moment-là, si on a une quantité de billets vendus, il va y avoir une file d'attente. Si la quantité demandée ou si les consommateurs sont supérieurs au prix... aux biens qui sont sur le marché, bien, à ce moment-là, il y aura une file d'attente puis il y aura des gens qui n'auront pas accès à ce spectacle-là. Ça, c'est une façon de gérer, si on veut, de choisir quel consommateur héritera de ce billet-là. Ça, ce n'est pas très rentable économiquement, parce qu'à ce moment-là ce n'est plus la valeur que le consommateur va... que va donner au spectacle, qui va déterminer qui va aller au spectacle. C'est celui qui est prêt à faire la file d'attente ou par ordinateur aller attendre sur Internet ou d'autres façons. Ça peut être les préférences individuelles aussi. Donc, ça cause ce problème-là.

Et, face à cette situation-là où les prix sont inférieurs au prix d'équilibre, bien, c'est là qu'arrive le revendeur. C'est là que... Vous savez, l'économie, c'est ça, hein? Tu as l'Homo oeconomicus qui va réagir aux problèmes économiques qu'on va rencontrer. Ce marché-là, fondamentalement, il a un problème évident, puis ce n'est pas les revendeurs qui amènent le problème. C'est la structure originale du marché. Les revendeurs répondent pour améliorer l'efficacité du marché. Il y a une nuance à apporter. Et donc, si les revendeurs arrivent, à ce moment-là, qu'est-ce qu'ils vont faire? Ils vont faire en sorte que le prix va monter et va aller le plus près possible de l'équilibre. De cette façon-là, on aura un ajustement et on s'approchera du prix juste. C'est ce que je voyais dans la section 3.

Ensuite, je regardais les conséquences de la revente. On dit souvent que la revente va raréfier les billets de spectacle. C'est faux. Si vous voulez une raréfication des biens, il faut que ces biens-là soient retirés du marché. Ces biens-là ne sont pas retirés du marché. Ils sont achetés par le revendeur et ensuite sont réorientés sur le marché des billets de spectacle. Et donc, si on offre un spectacle avec 10 000 personnes qui vont assister au spectacle, ce n'est pas parce que les revendeurs arrivent sur ce marché-là que les 10 000 personnes, bien, vont se trouver à être amoindries. On ne raréfie pas la quantité offerte sur ce marché-là.

Deuxième conséquence, on élimine les déséquilibres partiellement, parce que l'action de la revente n'est pas totale. On élimine partiellement. Ça veut dire que cette pénurie-là, bien, va se trouver à être amoindrie, et c'est pour ça qu'on parle d'une amélioration de l'efficacité économique, tout simplement.

Ensuite, bon, parfois le prix des billets va augmenter dans bien... même, il y en a qui vont dire dans bien des cas. Oui, mais ça passe... C'est ce qui fait en sorte qu'il y a une efficacité économique. Dans n'importe quel marché où tu as une pénurie, tu vas toujours avoir une augmentation des prix pour justement nous amener à un prix d'équilibre qui est le prix optimal, la valeur optimale du bien en question. Et finalement le producteur ne se trouve pas perdant dans cette démarche-là, parce que, de toute façon, lui, il avait vendu ses billets à un prix quelconque, un prix qu'il avait fixé au départ. Que tu aies de la revente ou non, le producteur ne se trouve pas perdant, pas du tout.

Alors, qui gagne, qui perd, là-dedans? Au départ, le gagnant, c'est le consommateur qui obtient son billet à un prix inférieur au marché. Lui, il est gagnant, c'est sûr. Le perdant: le consommateur qui, lui, veut aller acheter un billet, il n'aura pas accès à ce billet-là pour x raisons, et, dans bien des cas, c'est parce que cet individu-là n'a pas le temps d'aller en file d'attente ou n'a pas l'opportunité d'aller sur Internet ou d'autres contraintes qu'il va avoir. Ça, c'est le perdant dans cette histoire-là. Celui qui va se retrouver dans une situation identique avant et après l'action des revendeurs, c'est le producteur, tout simplement.

Alors, pour ces raisons-là, je suis contre le projet de loi que vous proposez. Et je considère que l'action des revendeurs n'est pas le problème en soi. Elle est une solution au problème de la structure du marché qui est déficiente, elle est une réponse qui est défendable économiquement: que l'Homo oeconomicus fonctionne toujours avec des stimuli économiques pour contourner les problèmes qui se retrouvent sur le marché. Et c'est pour ça que je suis contre.

**(20 h 20)**

Le Président (M. Bernier): Merci, M. Therrien.

M. Therrien (Alain): Ça fait plaisir.

Le Président (M. Bernier): Nous allons donc débuter les échanges avec les parlementaires, deux blocs de 10 minutes. M. le ministre?

M. Fournier: Oui, merci. Merci, M. Therrien. Votre présentation a l'avantage d'être claire. Je reviens un peu sur l'exemple... On nous a donné l'exemple des billets d'avion, tantôt, qui sont en montée et en descente constante. Et, évidemment, l'intérêt des billets d'avion, c'est quand même de savoir que c'est celui qui les met en vente qui semble jouer aux montagnes russes avec.

Les gens qui sont venus nous voir, notamment aujourd'hui, dans le domaine des producteurs, sont venus nous dire que, parmi les éléments qu'ils considéraient -- la grandeur de la salle, le nombre de billets -- la relation particulière de l'artiste avec son public, son premier... -- il y aurait même des degrés de public -- son premier public et le public -- enfin, c'est ce que j'ai entendu -- un désir de respect par rapport au public qui semble un peu différent, évidemment, de ce qui est la théorie parfaite à laquelle vous adhérez. Je n'en disconviens pas, on parle de deux éléments bien différents.

Pourtant, lorsqu'ils établissent les prix d'un... appelons, pour les fins de la théorie économique, d'un produit culturel, ils regardent tous les éléments. Ils ne cherchent pas à avoir le moins bon prix, ils ne veulent juste pas les mettre aux enchères l'un après l'autre pour voir comment ils peuvent attirer le plus de jus possible. Ce n'est pas l'objectif, le plus de jus possible pour chacun des sièges, ce n'est pas ça, l'objectif.

Ils font business pendant pas mal d'années. Probablement qu'ils réussissent à garder leur artiste parce qu'il y a un respect de l'artiste et de la relation artiste-public. Alors, ils peuvent bien vous écouter puis dire: Changeons notre système, pas de revendeurs, on vend aux enchères, on vend... puis on va mettre nos plateformes nous-mêmes pour aller tirer le maximum de prix. Ça se peut qu'ils ne soient plus producteurs la semaine d'après, parce que l'artiste ne veut peut-être pas ça.

Alors, n'oublions pas que, dans ce lien du producteur qui nous est expliqué avec l'artiste, il y a un lien qui m'a semblé très personnel avec le public, avec le -- on va l'appeler nous autres le consommateur -- consommateur avec qui on veut jouer franc-jeu. Il y aura toujours une limite du nombre de places, là. Excusez-nous, mais ça fonctionne comme ça, il y a toujours une limite. Mais on veut lui dire: Que tu sois dans telle rangée, un siège à côté de l'autre, tu as le droit d'avoir le même service avec le même spectacle. Tu n'auras pas plus parce que tu as payé plus. Je ne disconviens pas qu'il y a des revendeurs en ce moment, mais je ne dirais pas franchement qu'ils contribuent à une solution.

Dans la liberté complète de marché... Je reviens toujours avec ce que je disais tantôt, puis je sais que vous m'avez entendu puis j'aimerais bien profiter de votre savoir en termes économiques. Dans la liberté complète de marché, il reste qu'il y a un État qui intervient qui a un certain nombre de principes auxquels il croit que c'est important. D'abord, le consommateur doit connaître la situation, essayer d'être dans un environnement économique juste. De toute évidence, nous n'y sommes pas quand un certain nombre vont chercher des billets, les mettent en retrait pour pouvoir les surévaluer. Forcément, on vient de changer l'environnement économique qui défait l'ordre des choses.

Mais plus fondamentalement, quand on sait... et vous le savez, on a produit une étude là-dessus, plus on va chercher le maximum de prix pour le premier spectacle, moins on a de facilité à vendre le deuxième et le troisième. Admettons que c'est vrai. Les études le disent, mais, entre vous et moi, là, faisons semblant que c'est vrai. Est-ce que nous devrions en tenir compte au-delà de la question de la justice entre les consommateurs dans l'action gouvernementale, ou vous considérez que c'est deux mondes complètement différents et que, peu importe si l'État intervient pour soutenir l'activité culturelle, il n'a pas à s'assurer qu'il en a pour tous les dollars qu'il investit là-dedans, il n'a pas à s'assurer de l'effet de levier de ces règles qui créent le marché?

Le Président (M. Bernier): M. Therrien.

M. Therrien (Alain): Oui. Il y a beaucoup de choses dans votre commentaire et, en tout cas, j'ai soulevé beaucoup de choses qui sont un petit peu à l'encontre de mon exposé de tantôt. D'abord, vous parlez du fait que les consommateurs qui sont assis un à côté de l'autre vont payer des prix différents puis vous dites que, à quelque part, ce n'est pas nécessairement juste. Il ne faut pas oublier qu'au départ il y a une injustice beaucoup plus grande: c'est qu'il y a des gens qui ont accès au spectacle puis il y en a d'autres qui n'ont pas accès au spectacle. Ça, c'est une injustice beaucoup plus importante que de dire: Je participe à un spectacle où est-ce que ce n'est pas tout le monde qui paie le même prix. L'injustice de base, c'est qu'il y a des gens qui se voient refuser la porte d'entrée alors qu'ils veulent assister au spectacle puis ils ont les... ils veulent payer pour aller voir le spectacle. Ça, c'est un problème.

Ensuite, vous...

M. Fournier: ...solution à ce problème-là?

M. Therrien (Alain): Pardon?

M. Fournier: Quelle est votre solution à ce problème-là?

M. Therrien (Alain): J'y arrive.

M. Fournier: O.K.

M. Therrien (Alain): Je vais terminer avec la réponse à vos propos puis ensuite j'arriverai avec des solutions. Alors donc, vous parlez des prix variables ou la surenchère, la surévaluation des prix. On ne peut pas dire surévaluation des prix si le prix de vente correspond à ce que le consommateur est prêt à payer. Un prix qui est surévalué va voir toujours un surplus s'établir sur un marché. Ça veut dire que, moi, si j'arrive avec un produit puis il ne se vend pas, c'est parce que le produit est surévalué, le prix est surévalué. Vous me parlez de prix surévalué: ce n'est pas le cas, parce qu'il trouve preneur. C'est un prix juste. Si, moi, je suis prêt à vendre à un prix, à ce moment-là, si la personne est prête à payer ce prix-là, on parle d'un prix juste, en économie. On ne parle pas d'un prix surévalué.

Quand on parle aussi de la rarification du fait que les producteurs vont prendre des billets, vont les mettre de côté pour ensuite les remettre sur le marché, c'est faux. Je vous l'ai expliqué, ce n'est pas une raréfaction, ça. Pas du tout. Non. Bien non. Vous avez le même nombre de billets, en bout de ligne, qui sont mis sur le marché. Il n'y a pas raréfaction.

Ensuite, vous parlez du 1,5... Non, non. Chose importante, vous parlez d'activité culturelle. Vous dites que c'est important qu'il y ait des retombées économiques, ainsi de suite. On ne juge jamais, jamais, jamais des dépenses gouvernementales à travers des retombées économiques. Jamais qu'on fait ça. Jamais. Parce que, peu importe où vous mettez l'argent, vous allez avoir des retombées économiques tout le temps. Vous pouvez faire une piscine de dimensions olympiques, quatre en ligne, vous allez faire des dépenses, il y aura des retombées économiques. Ce n'est pas utile pour la société? Non, ce n'est pas utile pour la société, mais il y a des retombées économiques. Quand vous jugez de la pertinence d'un projet par retombées économiques, moi, je n'embarque pas là-dedans parce que ce n'est pas économiquement solide.

Finalement, vous parlez d'activités culturelles qui sont importantes pour une nation. On parle d'externalités, à ce moment-là. Quand on parle d'externalités dans un marché, ça veut dire que ce qu'on va faire comme activité, il y a des retombées positives ou négatives sur notre entourage. Exemple: la cigarette. Exemple: l'essence. Il y a des externalités négatives, donc on va taxer. Si je fais des choses à externalités positives comme l'éducation, c'est positif, on va subventionner. Vous subventionnez déjà l'industrie du spectacle. Vous subventionnez. Pourquoi arriver avec un projet qui va tout simplement nuire à l'accessibilité des consommateurs à un produit parce que supposément qu'il y aurait une externalité?

Si vous voulez -- non, non, écoutez -- si vous voulez arriver sur un marché et arriver en termes économiquement rentables, il faut y aller comme vous le faites depuis très longtemps: vous y allez avec des subventions, pas avec des interventions pour faire en sorte que le producteur ne se fasse pas léser. De toute façon, le producteur ne se fait pas léser, soit dit en passant. Quand vous dites que... l'histoire du 1 % du 0,5 %, vous le dites souvent, bien, moi, je peux vous dire là-dessus que, si c'était le cas, ça veut dire qu'ils auraient de la misère à vendre leurs billets par la suite. Mais, étant donné qu'on est en situation du pénurie, ça veut juste dire que la pénurie est un petit peu moins grande, c'est tout.

M. Fournier: Y a-t-il encore du temps?

Le Président (M. Bernier): Deux... environ deux, trois minutes.

M. Fournier: Votre premier exemple: vous n'avez pas répondu. Vous m'avez donné le cas où...

M. Therrien (Alain): ...répondre à... Je m'excuse.

M. Fournier: ...où l'injustice totale qui fait qu'il n'y a pas assez de sièges dans la salle, là, comment vous la réglez, celle-là?

M. Therrien (Alain): Pardon, je n'ai pas entendu.

M. Fournier: Vous avez dit que la plus grande injustice... Mes injustices à moi n'étaient pas tellement graves; celle qui était la plus grave, c'était qu'il y avait du monde qui ne pouvait pas aller voir le spectacle, il n'y avait pas assez de sièges. Comment vous réglez cette injustice-là?

**(20 h 30)**

M. Therrien (Alain): Bien, c'est justement. Si vous voulez faire en sorte d'améliorer le marché, il y a une seule façon d'y arriver, une seule: c'est de faire en sorte que les producteurs de spectacles fixent plus près du prix d'équilibre le prix d'accès à leurs spectacles.

Ceci étant dit, à cause de ce que je vous ai dit au départ, c'est difficile, c'est difficile. Mais vous me dites: Dans le meilleur des mondes... Non, non, mais écoutez, je réponds à votre question. Vous me dites: Dans le meilleur des mondes, qu'est-ce qu'il faudrait faire? Bien, il faudrait que le producteur de spectacle monte son prix de façon à ce qu'il se colle plus sur l'équilibre de marché. Je vous réponds en économiste, là. Mais je vous ai dit que c'était difficile de faire ça. Étant donné que c'est difficile, bien, les revendeurs arrivent justement pour nous coller plus près de l'équilibre pour faire en sorte que ceux qui veulent assister aux spectacles vont pouvoir assister aux spectacles.

Le seul bien, ou à peu près, qu'on va voir ça, là, que, moi, je suis prêt à payer, mais ce n'est pas ça qui va déterminer si je vais aller voir le spectacle, c'est si je vais assister à une ligne d'attente ou d'autre chose, il n'y a pas d'autre bien dans l'économie qui fonctionne comme ça. Moi, si j'ai le goût d'avoir une Mercedes-Benz, là, ce n'est pas ce que je vais attendre une semaine à la porte puis dire aux gens: Moi, je la veux vraiment, la Mercedes-Benz, tu peux-tu me la vendre? Non. Il va la vendre au plus offrant. C'est comme ça que ça fonctionne, l'économie, là. On ne peut pas passer à côté de ça.

Quand même qu'on essaierait de faire des lois, vous n'empêcherez jamais l'Homo oeconomicus d'oeuvrer sur un marché, c'est impossible, je vous le dis. Faites les lois que vous voulez, vous allez voir que la revente va continuer puis elle sera encore moins contrôlée qu'elle est contrôlée actuellement.

Le Président (M. Bernier): Merci, M. Therrien. Nous allons donc passer du côté de l'opposition officielle. M. le député de Beauharnois.

M. Leclair: Merci, M. le Président. Merci, M. Therrien, d'être là. Contrairement, là, à ce que vous expliquez, il y a un phénomène que je n'ai pas été capable de cerner, là, face à vos modèles économiques que vous parlez, qui a été la plainte, tout d'abord, de plusieurs artistes, puis qui a été répétée au courant de la journée, avec la vente des billets, les revendeurs qui rajoutent les billets. La problématique des artistes qu'eux disent aussi, c'est que, dans des bancs clés, des bancs de... la vraie place, là, qui est convoitée par tout le monde, ils arrivent à un spectacle puis ces bancs-là sont toujours vides, malgré les revendeurs, puis ils essaient de jouer le mode économique de tout ça, là, pour rééquilibrer, comme vous l'expliquez si bien. Alors, comment qu'on peut s'assurer que ces bancs-là ne soient pas vides? Parce qu'en bout de ligne on est d'accord, là, le producteur a vendu tous ses billets, lui. Ça fait que lui devrait breaker en fin de ligne, là. Mais là, l'artiste, lui, qu'est-ce qu'il dit en plus? C'est que, oui, bravo, j'ai tout vendu mes billets mais, en plus, dans les grands bancs, là, qui sont convoités, il y a des espaces libres. Comment on règle ce problème-là?

Le Président (M. Bernier): M. Therrien.

M. Therrien (Alain): Honnêtement, là, d'où il vient, ce problème-là, vous pensez? Je reposerais la question.

M. Leclair: Je n'ai aucune espèce d'idée, je vous le demande.

M. Therrien (Alain): Bien, non, mais, écoutez, je veux dire: Logiquement... Moi, je suis un économiste, je vais vous dire que ça ne tient pas la rampe, le fait qu'il y a des bancs vides. Je veux dire... Mais en quoi le problème des bancs vides en avant vient faire en sorte que c'est à cause des revendeurs? Vous me dites... C'est à cause de la revente? Je ne sais pas, moi.

M. Leclair: C'est ce qu'on entend aujourd'hui.

M. Therrien (Alain): Moi, j'essaie de comprendre. Économiquement, ça, je ne comprends pas pourquoi il y aurait des bancs vides. Donc, si vous vous étonnez de ça, moi aussi, je m'en étonne.

Le Président (M. Bernier): M. le député de Beauharnois.

M. Leclair: Exact. Parce que ce qu'on nous dit aujourd'hui, c'est que les revendeurs achètent tous les bancs, les meilleures sélections, puis ils les revendent à prix élevé ou très élevé, là, on peut... Sauf que, s'ils ne réussissent pas à vendre tous leurs billets qu'ils avaient achetés pour ces bancs-là, mais, eux autres, ils sont quand même satisfaits parce qu'ils ont fait leur profit déjà.

Donc, l'artiste arrive, puis, lui, il dit: Bien, malgré qu'il y a des bons bancs encore de disponibles, oui, il a peut-être été acheté, mais... Il y a des gens, comme vous disiez tantôt, eux n'ont pas accès à la culture, puis il y a des bancs vides dans la salle.

Le Président (M. Bernier): M. Therrien.

M. Therrien (Alain): Là, si je résume, là, votre propos, ça veut dire qu'il y a des bancs vides parce qu'il y a des revendeurs qui ne vendraient pas tous leurs billets puis qui se satisferaient du fait qu'ils ont fait assez de sous puis ils se contentent de ça, puis ces billets-là, ils ne les vendraient pas, c'est ce que vous me dites?

M. Leclair: Bien, qu'ils se satisferaient, là, je ne peux pas parler ou prétendre pour les revendeurs mais, une chose est certaine, c'est de là que part un peu l'argumentaire des artistes qui disent: Bien, ces billets-là, ils devraient... ces endroits-là devraient être pleins, là, c'est sûr et certain, avant même les balcons.

M. Therrien (Alain): O.K. Bien, moi, je vais vous dire simplement que, si les revendeurs considèrent que le profit est suffisant puis qu'ils ne vendent pas ces billets-là, bien, on a un problème: c'est que les revendeurs, ils ne veulent pas maximiser leurs profits. Puis, en sciences économiques, c'est rare qu'on va voir ça. Alors, vous avez parlé... vous avez effleuré l'autre possibilité, c'est que ces bancs-là sont achetés et puis ces gens-là ne se présentent pas, c'est ce que vous m'avez dit?

M. Leclair: Bien, c'est parce que...

M. Therrien (Alain): Mais là c'est parce que là on a un problème, on a...

M. Leclair: Sauf que, moi, dans ma tête, c'est sûr que, ces bancs-là, le revendeur, que ce soit un petit revendeur, un gros revendeur, il doit payer les billets. Ça fait qu'ils ont été achetés, ni plus ni moins, à la base, à la source, là. Sauf que l'artiste, lui, il dit: Ce n'est pas normal que mon banc soit vide, puis on affiche «sold out», là.

M. Therrien (Alain): Bien, comme je vous dis, écoutez, ça m'étonne. Et, à ce moment-là, vous me dites que le revendeur, ce n'est pas quelqu'un qui veux maximiser son profit. Vous me demandez d'expliquer ça. Moi, je ne peux pas vous expliquer ça, parce que ça doit être des erreurs. Vous savez, là, quand on est en... bien là, je ne veux pas justifier pour eux, là, mais, quand on est en entreprise, des fois, on peut faire des faux pas, on peut mal calculer certains gestes qu'on fait. C'est peut-être le résultat de ça. Mais je ne pense pas que ce soit systématique. Parce qu'il n'y a pas personne, dans une économie de marché comme on connaît, qui ne vise pas la maximisation du profit, surtout dans une situation comme ça. Alors, je ne peux pas répondre, là, je ne peux pas vous dire autre chose que ça.

Le Président (M. Bernier): Monsieur... M. le député.

M. Therrien (Alain): Je ne sais ça si ça vous... satisfait de ça, là.

Le Président (M. Bernier): M. le député.

M. Leclair: Je vais passer à...

Le Président (M. Bernier): M. le député de Drummond.

M. Blanchet: Merci, M. le Président. Je vous formulerai une hypothèse très candide: le revendeur a mis le prix de ces billets-là trop cher, puis le monde ne les ont pas achetés. Tu sais, c'est beau, là, on peut tergiverser dans la théorie, mais, s'il a mis 150 $ un billet que le client pensait payer 75 $, le client, il a peut-être fait un psychologique doigt d'honneur au revendeur.

Ensuite de ça, j'aurais plusieurs questions, je vais vous les envoyer en vrac. L'activité du gouvernement ne doit jamais être mesurée en termes de retombées économiques, à part... Je me mets dans une position confortable, on va devenir trop d'accord avec le ministre puis je vais être malheureux...

Une voix: ...

M. Blanchet: Non, on peut s'habituer, des fois. Non, cela dit, ça veut dire que, selon ce raisonnement-là, vous avez dit: On peut mettre l'argent n'importe où. Donc, de cibler l'éducation pour la formation des futurs travailleurs, de cibler l'environnement pour diminuer la dépendance aux énergies fossiles, bref, tous les choix, les infrastructures, tous les choix que le gouvernement fait, qu'il mette l'argent n'importe où, les retombées économiques sont les mêmes, et ce n'est pas la façon de le calculer. On m'expliquera ça. Ensuite de ça, le prix juste. Le mécanisme des revendeurs a la grande vertu de fixer le prix juste. Bien, si le prix juste est à 150 $ pour un billet de 75 $ -- vous avez même dit que ça garantissait l'accessibilité -- bien, moi, je vous dis: L'accessibilité à qui? Parce que j'ai un énorme problème.

Et là je me remets dans la peau de l'État. L'État a investi passablement d'argent en expression artistique au Québec. C'est offert sur le marché, ça a du succès, les spéculateurs sautent sur la glace, ramassent les billets et les revendent. Dieu du ciel! Les spéculateurs ont touché des subventions. Bien, c'est épouvantable! Il y a des logiques que j'échappe.

Est-ce que les subventions affectent les lois du marché? Si les subventions affectent les lois du marché, il va falloir faire beaucoup d'analyses, parce que... Malheureusement, je n'ai pas les coordonnées précises, vous les connaissez sûrement, il y a un M. Martel qui est un chercheur français qui a fait une analyse sur les investissements culturels des États et, contrairement à ce qu'on entend dans certaines radios, le Québec n'est pas un lieu délirant d'investissements dans les arts et la culture. C'est à peu près partout pareil, incluant aux États-Unis, sauf que ça se passe davantage au niveau local et au niveau des États. Si les lois du marché devraient s'appliquer en culture, pouvez-vous m'expliquer pourquoi la plupart des États occidentaux adhèrent à la notion d'exception culturelle?

Bref, j'aurais une série d'exemples qui me donnent l'impression, mais je le dis avec, à la limite, avec humour et gentillesse, que le reste de la planète a tort et que vos théories scientifiques auraient raison. Tellement qu'ultimement on a un problème qui est davantage un problème philosophique qu'un problème économique.

Le Président (M. Bernier): M. Therrien.

M. Therrien (Alain): Bon, vous attaquez la science économique, vous... Je ne vois pas c'est quoi, l'idée de s'attaquer à la science économique comme vous le faites. D'abord, vous me parlez de prix élevés puis de théories. Ces théories-là sont vérifiées dans la réalité. Je veux dire, ce que je vous ai expliqué tantôt, c'est vérifié dans la réalité, là. Ce n'est pas des lubies de scientifique de fin de semaine, là. Vous semblez un petit peu, là, oublier ça.

M. Blanchet: ...juste en total désaccord.

**(20 h 40)**

M. Therrien (Alain): Non, non! Je sens un peu d'attaque envers les économistes, là. Je ne trouve pas ça à propos, ici. Ensuite, vous parlez de retombées économiques. Vous n'avez vraiment pas compris ce que je voulais dire. On n'évalue pas un projet en retombées économiques mais en utilité que le projet va avoir. Ce que vous m'avez parlé, la recherche, la formation de la main-d'oeuvre, l'éducation, c'est prouvé scientifiquement que c'est utile pour une société, puis il y a des externalités positives, puis c'est pour ça que les économistes sont d'accord avec le fait qu'on doit subventionner ça. C'est clair pour tous les économistes qu'il faut subventionner l'éducation, parce que c'est extrêmement utile pour la société. Ceci étant dit, on ne va pas expliquer avec... calculer avec des retombées économiques les actions des gouvernements mais avec l'utilité des projets. Et donc il ne faut pas confondre tous les projets sous prétexte qu'on ne vérifie pas à partir de retombées économiques. Il faut regarder les utilités.

Vous parlez du prix juste, des vertus d'un prix à 75 $ ou 150 $. Si le bien est vendu à 150 $, le prix juste, ce n'est pas 75 $, c'est 150 $, tout simplement. Le prix de vente est le prix juste.

Artistique, subventions des... Les subventions: oui, moi, je n'ai rien contre les subventions au niveau de la culture. Honnêtement, je ne suis pas qualifié pour vous critiquer votre démarche en termes de favoriser la... pour favoriser la culture. Ce n'est pas... Je ne suis pas spécialisé là-dedans, puis je vous crois. Quand vous dites que la culture, c'est important, je vous crois. Puis, bon, je ne suis pas spécialisé à savoir c'est quoi, les externalités positives puis l'utilité, puis on est une société qui ne va pas subventionner autant que les autres. Je vous crois là-dessus. Moi, je n'ai aucun problème de subventionner, mais il faut subventionner correctement. Il faut aider la culture, mais, moi, je suis d'accord pour qu'on aide avec des subventions. Si vous dites que les lois du marché ne sont pas... ne permettent pas de vérifier l'impact des subventions, vous vous trompez. C'est que, quand on a une externalité positive, dans le cas de la culture, alors il se distingue deux offres sur le marché: l'offre privée et l'offre sociale. Et, nous, on la distingue. Et la différence entre les deux, c'est l'externalité positive. Et donc, si vous subventionnez, vous permettez à l'offre privée de se déplacer à l'offre sociale et d'atteindre l'optimum social. Donc, c'est très vérifiable empiriquement. À savoir, quel est... Comme, par exemple, un paquet de cigarettes coûte 4 $ d'effets d'externalité, d'effets externes. C'est prouvé. Donc, vous taxez de 4 $ pour atteindre l'optimum social. C'est un exemple que je vous donne, là.

Finalement, bon, il y a beaucoup de gouvernements qui donnent des exceptions culturelles. Les gens n'ont pas tort. Moi, je ne suis pas contre cette idée-là, mais, vous voyez, on est tous pour la vertu, mais il faut l'atteindre avec les meilleurs moyens possibles. Moi, ce que je vous dis, je respecte beaucoup ce que vous faites, c'est extraordinaire, votre idée, c'est bien, mais, moi, je vous dis que vous n'avez pas utilisé le moyen adéquat. C'est juste pour ça que je suis venu ici. Je tiens à vous féliciter pour votre démarche, mais le moyen n'est pas approprié parce que vous tirez sur le messager, tout simplement.

Le Président (M. Bernier): Merci. Sur ces derniers mots, merci, M. Therrien, d'avoir participé à cette commission parlementaire. Donc, je remercie également tous les groupes qui ont participé aux travaux aujourd'hui.

J'ajourne les travaux à demain, le mardi 13 septembre 2011, à 9 h 30, où la commission se réunira dans cette même salle afin de poursuivre ce mandat. Merci à vous tous. Merci au personnel de l'Assemblée nationale.

(Fin de la séance à 20 h 42)

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