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Version finale

39th Legislature, 2nd Session
(February 23, 2011 au August 1, 2012)

Wednesday, November 2, 2011 - Vol. 42 N° 24

Consultations particulières et auditions publiques sur le projet de loi n° 24, Loi visant principalement à lutter contre le surendettement des consommateurs et à moderniser les règles relatives au crédit à la consommation


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Table des matières

Journal des débats

(Onze heures vingt-quatre minutes)

Le Président (M. Bernier): À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens ouverte et je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs téléphones cellulaires.

Le mandat de la commission est de poursuivre les auditions et les consultations particulières sur le projet de loi n° 24, Loi visant principalement à lutter contre le surendettement des consommateurs et à moderniser les règles relatives au crédit à la consommation.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. Alors, M. Lemay (Sainte-Marie--Saint-Jacques) remplace Mme Bouillé (Iberville).

Auditions (suite)

Le Président (M. Bernier): Merci. Nous aurons le plaisir ce matin d'entendre l'Union des consommateurs sur ce projet de loi. Donc, je vous souhaite la bienvenue, Mme Simone Bilodeau, Mme Bilodeau, M. Boucher, Mme Labelle. C'est Mme Labelle qui va faire la lecture du mémoire. Donc, sans plus tarder, je vous donne la parole. Vous avez 15 minutes pour faire votre présentation.

Union des consommateurs

Mme Labelle (Yannick): Merci, M. le Président. M. le ministre, Me Allard, Me Borgeat et membres de la commission, Union des consommateurs vous remercie de cette occasion qui nous a été donnée de vous faire part de nos commentaires sur le projet de loi n° 24.

Je me présente: Me Yannick Labelle. Je suis l'analyste en protection du consommateur et pratiques commerciales pour Union des consommateurs. Et je suis accompagnée de Me Marcel Boucher, qui est le responsable des affaires juridiques, et de Mme Simone Bilodeau, conseillère budgétaire à l'Association coopérative d'économie familiale de Rive-Sud de Québec.

Avant de débuter, je désire brièvement vous présenter l'organisme que nous représentons. Union des consommateurs est un organisme sans but lucratif qui regroupe 10 ACEF, l'Association des consommateurs pour la qualité dans la construction ainsi que des membres individuels.

Notre mission est de promouvoir et de défendre les droits et les intérêts des consommateurs en tenant compte de manière particulière des ménages à revenus modestes.

Notre équipe est constituée d'analystes spécialisés qui s'intéressent notamment aux dossiers d'endettement, de politiques sociales et fiscales ainsi que des dossiers de télécommunications. Nos ACEF qui sont nos membres font un énorme travail terrain qui implique un contact direct avec des ménages qui souvent sont aux prises avec des problèmes d'endettement.

En premier lieu, pour commencer, nous applaudissons les mesures audacieuses qui sont proposées par le projet de loi n° 24. L'ensemble de ces mesures, qu'il s'agisse de la responsabilisation des prêteurs, par exemple, qui devront vérifier dorénavant, avant d'octroyer du crédit, la capacité de rembourser du consommateur, de l'encadrement des courtiers en prêt, de nouveaux encadrements pour la publicité du crédit, de l'obligation pour les commerçants d'assumer les frais de quittance, de remise et de radiation, etc., l'ensemble de ces mesures, donc, nous semblent propres à assurer une meilleure protection du consommateur.

Nous ne nous attarderons pas, dans le cadre de cette présentation, à ces différentes mesures, que nous appuyons. Nous désirons plutôt profiter de votre invitation pour proposer certains ajustements qui, selon nous, pourraient accroître la protection du consommateur. Dans les minutes qui suivront, nous allons donc vous proposer l'essentiel de nos commentaires sur certaines des mesures législatives qui ont été proposées. L'ensemble de nos commentaires est contenu au mémoire que nous avons soumis préalablement à la commission.

Les éléments que nous avons jugé opportun de vous présenter concernent principalement l'interdiction de l'octroi du crédit variable aux mineurs, la vérification de la capacité de rembourser des consommateurs ainsi que l'encadrement de la publicité et de la sollicitation en matière de crédit. Notre mémoire fait état d'autres ajustements, bien sûr, qui devraient, selon nous, être apportés aux dispositions du projet de loi afin d'offrir une protection encore plus adéquate aux consommateurs québécois.

**(11 h 30)**

Donc, pour commencer avec l'interdiction du crédit variable pour les mineurs, en premier lieu, l'article 75 du projet de loi prévoit notamment l'introduction d'un nouvel article 245.3 dans la LPC, et cet article prévoit qu'aucun commerçant ne peut conclure un contrat de crédit variable avec un mineur non émancipé sans l'autorisation écrite d'un titulaire de l'autorité parentale.

Après mûre réflexion et maintes discussions au sein de notre organisme, nous nous retrouvons face à un tel nombre de questionnements qu'il nous est difficile d'appuyer cette mesure telle qu'elle est conçue.

La majorité des mesures qui sont proposées dans le projet de loi visent à freiner l'endettement problématique des consommateurs de manière générale. Le surendettement ou le risque de surendettement qui... se présente, selon nous, à tout âge, il est primordial d'assurer une protection optimale à tous les consommateurs, peu importe leur âge.

Brièvement, voici quelques-unes des questions que soulève cette disposition pour notre organisme. Un de nos questionnements porte sur la justification de l'entorse proposée à la capacité de contracter pour ses besoins usuels et ordinaires que reconnaît le Code civil du Québec aux mineurs. Existe-t-il vraiment des risques d'endettement ou encore un problème d'endettement qui touche particulièrement des mineurs en lien, qui plus est, avec les cartes de crédit, ou autres crédits variables, bien sûr? La conjonction de l'incapacité de contracter si ce n'est que pour ses besoins usuels et ordinaires et, de plus, la protection qui est ouverte par l'entremise de la nouvelle disposition 103.4, qui imposerait désormais aux prêteurs de vérifier la capacité de rembourser, ne suffiraient-elles pas à protéger plus adéquatement le mineur? Le problème d'endettement ou même le risque d'endettement des mineurs du fait du crédit variable existe-t-il vraiment dans les faits? En pratique, les émetteurs de cartes de crédit n'émettent pas de crédit aux mineurs. Et la nouvelle disposition ne risque-t-elle pas, à ce moment-là, de les amener à revoir leurs pratiques? On se questionne à savoir si, par le biais de cette nouvelle disposition, la LPC autoriserait en effet explicitement à émettre des cartes de crédit à des mineurs pour peu que cette émission soit autorisée par le titulaire de l'autorité parentale.

Malgré toutes les réticences qu'on peut avoir, si une telle mesure devait être adoptée, différents éléments de la disposition, telle qu'elle nous est proposée, nous apparaissent, là encore, problématiques.

Le fait que la loi interdise de consentir du crédit à un mineur mais que le titulaire de l'autorité parentale puisse lever une telle interdiction nous semble aussi problématique à plus d'un titre. Le législateur, par le biais d'une disposition qui semble viser à interdire l'émission de crédit variable à un mineur, reporte en effet sur le titulaire de l'autorité parentale la charge d'autoriser ou non l'émission du crédit. Cette demi-mesure nous semble mal avisée. Le projet de loi qui reconnaît les problèmes et les risques d'endettement des consommateurs confierait donc à ces mêmes consommateurs le soin d'autoriser l'émission de crédit à leur enfant mineur.

Nous nous questionnons également quant aux effets de cette autorisation. À quel point cette autorisation qui est donnée par le titulaire de l'autorité parentale pourra-t-elle par ailleurs être considérée comme relevant le prêteur de son obligation de vérifier la capacité de rembourser, en vertu de l'article 103.4, de celui à qui le crédit est consenti? La disposition, tel qu'elle est rédigée, ne risque-t-elle pas d'être interprétée comme reportant à nouveau sur le parent une responsabilité que la loi tente par ailleurs de faire reposer, dans toutes les autres situations, à celui qui compte tirer un profit du crédit qui est accordé?

On se questionne également à savoir si le créditeur pourra avoir à assumer les conséquences d'une absence de vérification de la capacité de rembourser un prêt qui aurait été autorisé par le parent. Serait-il toujours possible pour le mineur d'invoquer la lésion pour faire rescinder un contrat s'il a été autorisé préalablement par le titulaire de l'autorité parentale? Nous nous inquiétons donc de ce risque que l'autorisation écrite du titulaire de l'autorité parentale ne se traduise ici par une déresponsabilisation des institutions financières.

Et on se questionne également par rapport à la responsabilité du titulaire de l'autorité parentale relativement au crédit consenti. Celui qui l'autorise serait-il considéré comme caution, comme codétenteur de la marge de crédit ou de la carte? Le libellé que l'on retrouve au projet de loi ne risque-t-il pas de semer une certaine confusion ou d'ouvrir la porte à certains abus? Si le parent doit engager sa responsabilité, selon nous, la plus grande transparence s'impose. Mais même cette transparence n'écarterait pas le fait qu'une nouvelle porte à l'endettement s'ouvrirait alors. Nous sommes donc d'avis que cette disposition devrait être réévaluée en profondeur.

Le deuxième élément sur lequel on voulait brièvement exposer nos commentaires concerne l'obligation de vérifier la capacité de rembourser du consommateur. Nous nous réjouissons des mesures qui sont proposées par le législateur, soit les nouveaux articles 103.4 et 103.5 proposés par l'article 22 du projet de loi, qui imposent aux créditeurs, lors de l'octroi d'un crédit nouveau ou lors du renouvellement en vue d'accroître un montant qui a été consenti auparavant à titre de crédit, l'obligation de vérifier la capacité des consommateurs de rembourser et qui, en cas de défaut, font perdre aux prêteurs le droit aux frais de crédit.

Ces nouvelles mesures qui introduisent à la LPC le principe du prêt responsable pourraient avoir pour effet de réduire substantiellement l'endettement problématique lié au crédit impulsif et de prévenir certaines situations de surendettement. Quand on parle de crédit impulsif, ici nous pensons notamment aux demandes de crédit qui sont remplies dans les centres commerciaux et dans certains grands magasins à travers le Québec.

Donc, cette nouvelle obligation qui est faite aux commerçants, que l'on retrouve au projet de loi, est certes un pas dans la bonne direction. Il faut cependant garder à l'esprit que cette obligation de vérifier la capacité de rembourser du consommateur devrait faire l'objet d'un encadrement beaucoup plus complexe que la simple mention qui apparaît au texte de loi proposé. L'article 103.4 prévoit en ce sens qu'un règlement pourra prévoir les renseignements dont le commerçant devra tenir compte dans le cadre de son évaluation et fixer les conditions d'application de cette obligation.

Nous tenons à vous faire part d'une recherche qu'a faite l'Union de consommateurs en 2007, qui était intitulée Endettement problématique des consommateurs: quelles pistes explorer? Et, dans le cadre de cette recherche, on soulevait diverses mesures envisageables afin de contrer le surendettement des ménages québécois. Dans cette recherche, nous faisons état de l'obligation de vérification et de conseil en matière de crédit, une mesure que nous retrouvons dans certaines juridictions européennes et dans des directives de l'Union européenne, notamment.

Nous avons retenu principalement l'interdiction qui est faite au prêteur de conclure un contrat de crédit à moins que, compte tenu des informations dont il dispose ou devrait disposer, il estime raisonnablement que le consommateur sera à même de respecter les obligations qui découlent du contrat. Cette obligation de vérification est souvent liée à une obligation de conseil, comme je le mentionnais auparavant. En cas de manquement, la loi prévoit à l'encontre du commerçant des sanctions allant de la perte du droit de réclamer des intérêts et des frais, pour les manquements qui sont jugés moins graves, à la perte du crédit consenti lui-même pour les manquements qui seraient plus importants. Le consommateur peut également, dans le cadre de certaines juridictions étrangères, réclamer le remboursement des montants qu'il a déjà versés, en application des règles de l'enrichissement illégitime. Y est également prévu des règles... des mesures pénales.

Donc, nous rapportons plus en détail dans notre mémoire les principes et les mesures qui sont adoptés dans les différentes juridictions. Nous n'allons pas nous attarder ici à ces principes et à ces mesures. Nous sommes d'avis que les différentes approches qui sont retenues à l'étranger devraient être considérées au Québec lors de l'établissement du cadre réglementaire de l'obligation de vérifier la capacité de rembourser du consommateur qui sera désormais imposée aux commerçants.

De plus, nous sommes d'avis qu'afin de développer un cadre réglementaire efficace on doit se poser une série de questions. Par ailleurs, comment devrait-on fixer, si l'on veut que l'esprit de la loi soit respecté et ses objectifs atteints, les éléments sur lesquels devra reposer l'évaluation de la capacité de rembourser? Parmi les éléments qui sont souvent tenus en compte ailleurs et qui le sont déjà en pratique, nous retrouvons la consultation de bases de données utiles dont nous disposons au Québec, soit les dossiers de crédit qui sont tenus par TransUnion et Equifax, mais malheureusement elles ne nous apparaissent pas suffisamment complètes pour, à elles seules, fournir au prêteur un portrait efficace et complet pour évaluer la capacité de rembourser d'un consommateur. Il est souvent tenu en compte également le ratio d'endettement, qui ne nous apparaît pas non plus, à lui seul, être un outil assez précis, réaliste ou personnalisé à même de permettre une évaluation efficace de la capacité de rembourser d'un consommateur.

Le travail terrain de nos membres nous porte à considérer que l'établissement d'un budget constitue sans conteste un outil de choix quand il s'agit de procéder à une évaluation crédible de la capacité de rembourser un crédit; un tel exercice constituerait une base objective assez solide pour appuyer une décision d'accorder ou non du crédit.

L'établissement d'un budget aux fins de l'évaluation de la capacité de rembourser ne serait toutefois pas sans poser problème. Nous révélons dans notre mémoire deux problématiques. Donc, nous nous questionnons à savoir si le budget, étant donné qu'il tient compte de l'ensemble des revenus et des dépenses d'un ménage, ne se heurterait pas, en premier lieu, à un problème lié au respect de la vie privée. Le second problème en est un d'indépendance: un budget aura de meilleures chances d'être réaliste si celui qui assiste le consommateur dans l'établissement de ce budget et qui, le cas échéant, s'appuie sur ce budget pour conseiller le consommateur ne tire aucun avantage économique des résultats d'un tel exercice.

Comme vous le savez, il existe au Québec un grand nombre d'organismes reconnus qui sont spécialisés en consultation budgétaire et qui possèdent l'expertise nécessaire pour apporter un éclairage, qui nous apparaît essentiel, sur les différents éléments qui devront être considérés. Nous espérons que, dans les mois à venir, toutes les parties intéressées seront appelées à travailler de concert afin de créer un cadre réglementaire adapté à la société québécoise et de trouver, pour ce faire, réponse à une myriade de questions que soulèvera la mise en application de cette nouvelle disposition, qui, nous le répétons, nous apparaît être incontournable. En ce sens, nous invitons ardemment le gouvernement à consulter les organismes qui se spécialisent dans les questions de budget et d'endettement en vue de déterminer les différentes conditions d'application qui devront être prévues au règlement.

Enfin, en ce qui concerne les sanctions par rapport à l'obligation de vérifier la capacité de rembourser d'un consommateur, nous sommes d'avis que la seule perte des intérêts et des frais serait insuffisante, puisque le consommateur qui n'était pas en mesure de rembourser ne le sera toujours pas si le montant remboursé est maintenu. Et ces mesures, ces sanctions ne nous semblent pas assez dissuasives également. Nous suggérons que soient adoptées des sanctions qui comprendraient la perte du capital pour des manquements graves aussi bien que des dispositions pénales.

Finalement, la dernière disposition sur laquelle nous voulons vous faire part de nos commentaires concerne l'encadrement de la publicité et de la sollicitation en matière de crédit. Lors des rondes de consultation tenues auparavant, l'Union des consommateurs avait appuyé une mesure qui proposait un encadrement de l'offre d'accès au crédit dans les établissements d'enseignement. Nous encouragions l'adoption du régime le plus strict possible en cette matière, notamment. On invitait même à étendre cette mesure à toutes les formes de sollicitation et non seulement celles qui sont en lien avec les établissements d'enseignement.

**(11 h 40)**

Le présent projet de loi se veut, sur la question, beaucoup moins audacieux: il prévoit uniquement une interdiction d'offrir une prime en vue d'inciter un consommateur à demander une carte de crédit, par l'entremise du nouvel article 245.2, omettant donc toute réglementation stricte des activités de sollicitation et se refusant à l'interdire dans les établissements d'enseignement. Nous sommes d'avis qu'une telle mesure est bien en deçà de celles qui sont jugées appropriées par les groupes de défense des droits des consommateurs.

Nous sommes conscients du fait que certaines mesures visant à encadrer la publicité sur le crédit sont prévues au projet de loi. Nous restons cependant d'avis que la sollicitation ou l'incitation à compléter une demande de crédit pourrait faire l'objet d'une interdiction. Nous distinguons clairement la sollicitation et la publicité. Il nous semble que les objections qui pourraient se poser à l'encontre d'une tentative d'interdiction de la publicité sur le crédit -- on pense notamment au risque de contestation basée sur l'atteinte à la liberté d'expression -- pourraient être écartées si seule l'interdiction de la sollicitation était envisagée. Nous restons d'avis...

Le Président (M. Bernier): Je vous invite à conclure, Me Labelle.

Mme Labelle (Yannick): Nous restons d'avis que la loi devrait prévoir une interdiction de toute sollicitation au crédit, incluant la sollicitation relative aux marges de crédit, aux prêts personnels et aux prêts hypothécaires. Donc, en s'attaquant à l'un des incitatifs les plus visibles, une telle mesure serait, à notre avis, absolument appropriée dans le cadre d'un projet de loi qui vise à lutter contre le surendettement des consommateurs.

Donc, en conclusion, nous vous remercions de cette opportunité de vous faire part de nos commentaires. On se réjouit de ce projet de loi qui, selon nous, est un pas dans la bonne direction en ce qu'il propose des mesures concrètes qui sont susceptibles de mettre un frein au surendettement des consommateurs. Nous remercions également l'Office de la protection du consommateur pour l'occasion qu'il nous a offerte de participer aux travaux qui ont eu lieu et en vue de l'élaboration et du dépôt du présent projet de loi. Et enfin on vous rassure que nous demeurons à votre entière disposition, dans l'avenir, pour l'élaboration du règlement d'application, pour toute autre consultation dans le cadre de la présente réglementation et pour les phases de modification à venir de la LPC. Je vous remercie.

Le Président (M. Bernier): Merci, Me Labelle. Merci infiniment. Merci de ces bons mots, ces bons remerciements.

M. le Président... M. le Président! M. le ministre, la parole est à vous pour entamer ces débats avec nos représentants.

M. Fournier: Merci, M. le Président. Me Labelle, Me Boucher, Mme Bilodeau, merci d'être avec nous. Merci de votre collaboration, merci de votre collaboration anticipée. Il n'y a pas de doute que nous allons... et l'office aussi va continuer de pouvoir bénéficier de vos lumières, de vos interrogations, parfois multiples.

J'en parlais tantôt, je trouve que, franchement, vous avez travaillé fort sur le cas des mineurs. Ce n'était pas inintéressant par contre, j'aime autant vous le dire. Mais je trouvais qu'il y avait quelques questions qui se répondaient aisément, d'autres peut-être un peu moins, mais vous avez mis toute la gomme, là, sur le mineur, là. Je dois avouer que vous êtes allés dans plusieurs directions, mais je vais y revenir tantôt.

Puisqu'on parle du mineur et puisque vous parlez... Et je tiens à vous remercier, ce n'est pas le premier groupe qui le dit, on a... Je suis presque en préparatif de remarques finales, puisque vous êtes le dernier groupe qu'on reçoit, et, parmi un des commentaires qui est revenu à quelques reprises, c'était de souligner le caractère audacieux qu'il y avait dans le projet de loi. Je le note parce qu'en même temps je veux souligner que vous avez trouvé non audacieuses les dispositions sur les restrictions à la sollicitation. Alors, je vais m'arrêter un peu là-dessus.

D'abord, oui, il y en a concernant les primes, par exemple, vous l'avez mentionné. Vous dites qu'on pourrait aller plus loin: on pourrait interdire la sollicitation individuelle. Bon, là, celle-là, c'est un peu trop loin, considérant des dispositions de la Cour suprême à l'effet qu'il y a une compréhension que la liberté d'expression inclut même le caractère commercial et donc qu'il y a des limites auxquelles on ne peut pas aller.

Par ailleurs, vous parlez de la question des institutions scolaires. Je suis persuadé que vous avez suivi le déroulement de nos travaux et donc avez assisté, en quelque sorte, tout au moins dans mon cas, à mon cheminement sur la question. Je crois que mes collègues cheminent aussi. Enfin, nous cheminons ensemble sur cette avenue-là. J'étais... Je ne vous pose pas de question là-dessus, juste vous dire où j'étais. J'aurais un frein... je dirais que j'ai un frein logique qui m'empêchait de dire pourquoi, dans les universités... les cégeps, c'est d'autre chose un peu, mais pourquoi, au niveau universitaire, quand les gens sont majeurs... Et puis, ça, ils ont tous les outils pour être capables de comprendre ce qui se passe à l'université comme ce qui se passe trois ou quatre coins de rue plus loin. Je veux dire, c'est le même individu majeur à qui on a donné le droit de vote et tous les droits où on va dire: Bien, quand il est dans son endroit où il passe le plus de temps, à l'école, là il est plus facile de le manipuler ou lui... En fait, je vais le dire différemment, ma compréhension était: Pourquoi serait-il moins apte à comprendre le message quand il est là? Et mon blocage était presque: Quand je me mets dans ses souliers, pourquoi je considère que je dois le considérer comme moins capable? Honnêtement, je vous le dis, ça me fatiguait.

Au fil du temps, puis c'est un peu la raison pour laquelle je chemine, on m'a amené, par les témoins, à me mettre plutôt dans les souliers du commerçant qui avait donc affaire à une clientèle bien définie, assez prisonnière d'un endroit, facile de passer un message, et une clientèle justement qui pouvait répondre très positivement à un message d'endettement à venir, pour des projets à venir, pour une jeunesse qui a effectivement beaucoup plus d'avenir que... en tout cas que moi, là, puis M. Borgeat, nous deux, on en a un petit moins, mais donc pour les jeunes de l'université, forcément, eux, ils en ont beaucoup. Alors, je dois avouer que, lorsqu'on le regarde comme ça, ça nous fait peut-être arriver à une réponse différente. On va se garder la conclusion de ce cheminement pour l'étude article par article, mais disons que je suis moins fermement appuyé dans mes convictions sur la disposition qui concerne les institutions scolaires.

Bon, parlons... restons sur le dossier des mineurs, où vous avez posé beaucoup de questions. J'ai essayé de décoder, à la fin... Parce qu'il y en avait tellement que je pouvais même, moi-même, me poser des questions sur les questions que vous posiez et me demander: Coudon, est-ce qu'ils veulent que les jeunes aient accès au crédit ou pas? J'étais un peu perdu. Alors, je crois, dans le fond, que j'ai décodé qu'il y avait plusieurs autres mesures qui faisaient en sorte que le jeune n'aurait pas eu accès au crédit, donc vous n'avez pas besoin de celle-là. Bon, je pense que c'était un peu ça, quoique j'aurais pu me poser des questions, moi aussi, sur les questions que vous avez posées.

Le choix qui est fait... D'abord, il n'y a rien, dans les dispositions, qui font que le parent ou ceux qui agissent pour l'autorité parentale seraient cautions. Il s'agit d'une disposition qui dit, grosso modo, qu'est-ce qu'on veut dire, là, c'est: Il n'y a pas de carte de crédit pour les jeunes, sauf si l'autorité parentale dit oui. Bon.

Est-ce qu'il peut arriver des cas où il serait approprié qu'il y ait une carte de crédit pour un jeune, pour des situations que je ne connais pas? Il y a une limite où... Le législateur, dans sa rigidité, peut peut-être avoir causé des effets pervers. Il peut y avoir des cas où l'autorité parentale, qui, elle, a la capacité de faire des... de faire des ententes... Parce qu'il n'y a pas rien qui empêche quelqu'un qui est majeur de le faire. Quelqu'un qui exerce l'autorité parentale, on présume qu'il l'exerce au bénéfice de la personne qui est soumise à cette autorité parentale là. Ça n'enlève pas les autres dispositions des autres articles, là. Ça n'enlève absolument pas les dispositions. Enfin, je suis prêt à entendre l'argument contraire, mais ce n'est pas comme ça que je lis la loi, et ce n'est sûrement pas comme ça qu'on me l'a présenté non plus, à l'effet que, cette autorité parentale donnant son accord pour le mineur, le prêt n'aurait plus à être responsable, et les créanciers n'auraient plus à faire les vérifications.

J'ajoute: Je ne peux pas présumer que les vérifications du créancier ne pourraient pas arriver à un résultat valable. Je ne peux pas présumer ça. Il y a peut-être des jeunes qui ont des bilans qui sont positifs. Le législateur n'est pas là pour prévoir tous les cas de figure. Il est là pour essayer de donner le cadre général avec les freins aux bons endroits, puis laisser le monde vivre là-dedans. Alors, c'est un peu ce qui était visé.

Une fois que je vous ai dit ça, j'ai probablement éliminé quelques-unes de vos questions mais pas toutes. Alors, échangez avec moi pour me dire que je fais fausse route. Je ne pense pas que je fais fausse route. Je ne chemine pas encore, je n'ai pas commencé à cheminer pour aller vers vous, mais je suis prêt à entendre d'autres arguments pour voir si je devrais commencer à être tenté d'aller sur le chemin.

Le Président (M. Bernier): Me Labelle. Me Parent.

M. Boucher (Marcel): Me Boucher.

Le Président (M. Bernier): Me Boucher.

M. Boucher (Marcel): Oui. Comment commencer? Nous autres aussi, nos questions soulèvent des questions; vos questions vont en soulever aussi. Est-ce qu'on est pour ou si on est contre? C'est votre première question. Ce qu'on se dit, c'est: Si le législateur est parti avec l'idée qu'il veut interdire les crédits pour les mineurs, il va le faire. On va vivre avec ça. On ne voit pas l'utilité de ça. On ne voit pas l'utilité d'une telle disposition parce qu'il nous semble, comme vous le disiez, qu'il y a déjà suffisamment de mesures, et de pratiques, et des prêteurs aussi qui évitent les problèmes pour les mineurs, des problèmes qui, à notre connaissance, sont inexistants présentement, là, sur le terrain.

Si une telle mesure doit être adoptée? Vous me dites que ce n'est pas votre lecture de la loi, et ce n'est pas comme ça qu'on vous l'a présenté. Tant mieux. Est-ce que le texte, tel qu'il est rédigé, risque d'être interprété comme ça? Est-ce que l'autorisation du parent pourrait être interprétée comme ça? Si oui, il faudrait immédiatement mettre un frein.

**(11 h 50)**

M. Fournier: ...comme il y a eu plusieurs questions, je vais me concentrer sur celle-ci, là, l'intervention, qu'est-ce que ça pourrait créer, là?, puis cibler, parce que tantôt vous en avez évoqué plusieurs. Là, quand vous le dites, vous parlez à quoi? À la caution? À quoi, là? À quel problème vous parlez?

M. Boucher (Marcel): ...deux choses, là. Parlons de la caution, d'abord. La loi ne dit pas, évidemment, le projet de loi... L'article proposé ne dit pas que le parent serait caution. Est-ce que l'institution financière va le prendre comme ça? Est-ce que l'institution financière, les autorisations, ils vont les rédiger de telle façon, ils vont les accepter de telle façon que le parent sera caution dans ces cas-là?

M. Fournier: Mais arrêtons là-dessus, là, arrêtons là-dessus: «La loi ne les rend pas cautions.» Vous dites: Si la loi ne les rend pas cautions, est-ce qu'un prêteur pourrait décider, en discutant avec une autorité parentale... Mettons, là, si tu donnes ton accord, le jeune peut avoir sa carte... Et d'ailleurs, quand je te demande de signer, je te demande de signer pas juste son autorisation de l'avoir, mais que tu sois caution. Là, on est dans un autre horizon, là. Là, on est dans un contrat que l'autorité parentale assume et accepte. Dans le fond, c'est comme si cette autorité parentale a obtenu une carte de crédit en son nom elle-même. Et là, bon, si on veut envisager ça comme ça, tout le reste du projet de loi existe pour les majeurs, il s'applique. Mais, pour le jeune, on ne fait que l'autorité parentale qui donnait le... qui levait le cran d'arrêt, qui était de dire: Non, les jeunes ne peuvent pas d'eux-mêmes le faire.

Alors, à la question que vous posez, je comprends, on s'entend, le projet de loi ne crée pas cette caution. Est-ce que cela empêcherait une institution prêteuse de demander à l'autorité parentale de devenir caution? Ça, c'est possible. Mais pour quelle raison est-ce que j'empêcherais ce genre de comportement?

M. Boucher (Marcel): ...le comportement?

Le Président (M. Bernier): Me Boucher.

M. Boucher (Marcel): Excusez-moi, est-ce qu'on parle d'empêcher le comportement ou de l'encourager? Le projet de loi, à notre avis, l'encourage, le comportement. Présentement, les institutions financières n'en donnent pas, du crédit aux mineurs. On dit aux institutions financières: Dorénavant, vous pouvez donner du crédit aux mineurs, allez chercher une signature du parent, puis, «by the way», si vous voulez demander une caution, vous l'aurez. Il est là, le risque.

M. Fournier: Alors, dites-moi, nommez-moi l'article de loi -- on va commencer comme ça, dans l'état actuel, ce n'est pas un défi, là, c'est pour comprendre -- l'article de loi qui empêche le prêteur d'en prêter aux mineurs aujourd'hui.

M. Boucher (Marcel): Il n'y en a pas.

M. Fournier: Il n'y en a pas. Est-ce que vous êtes sûrs qu'il n'y a pas de prêt aux mineurs? Vous avez dit: On n'a pas vu de problème. Mais êtes-vous sûrs qu'il n'y en a pas? Parce que, moi, je sais au moins qu'il y a de la sollicitation des mineurs.

Je vais vous dire ce que je pense. Je n'ai pas de preuve de rien, mais j'ai une petite présomption. S'ils ont commencé à solliciter puis s'ils sollicitent encore, d'après moi ils ont ramassé quelqu'un. D'après moi, ils ont pu réussir à offrir du crédit. Je dis donc... J'aime autant me prémunir, là, je fais une loi là-dessus, alors je dis -- on fait le constat général: Non seulement vous ne les sollicitez pas, il n'y aura pas de carte de crédit pour eux autres, là, c'est fini, les cartes de crédit aux gens de 17 ans, là. Ça, vous n'en ferez pas. Puis, si jamais -- parce que là je veux prévoir les cas de figure, je veux donner un peu d'amplitude -- si jamais il y a une nécessité, je ne sais pas, moi, des parents qui vont quitter pour l'Europe, puis le 17 ans, il reste là, a besoin d'outils pour... Là, je vous donne ça comme exemple, là, je ne peux pas vous dire que je suis sûr de mon exemple, mais j'ai un petit doute qu'il peut arriver des cas dans la vie où ça pourrait être utile, puis que les gens se font confiance, puis ils sont un peu éduqués, puis...

Alors, voyez-vous, je ne pense pas que l'article dit que les parents sont cautions, je ne pense pas que je suis en train de dire que j'encourage à ce que ça soit fait avec les jeunes. Au contraire, je mets un frein, parce que toutes les possibilités sont là aujourd'hui. Alors, je veux bien... Puis j'aime ça jouer dans le jeu des questionnements, mais il me semble que j'ai quelques réponses qui bloquent, là.

Le Président (M. Bernier): Me Boucher.

M. Boucher (Marcel): Si, en pratique, ils ne le font pas, mettre un frein à quelque chose, on met un frein à quelque chose qui est inexistant.

M. Fournier: Je présume, moi, qu'ils le font présentement. Donc, c'est quelque chose qu'ils font et que je ne veux pas qu'ils fassent. Si je ne l'écris pas dans la loi, ils vont continuer de le faire. Ça, c'est moi, comment je vois la vie. Vous, vous voyez la vie autrement?

M. Boucher (Marcel): La réponse à votre autre objection... Vous me dites: Oui, mais présentement ils sont sollicités. Bien, ça, je vous rapporte à plus loin dans notre mémoire, on dit: Mettez fin à la sollicitation du crédit pas juste pour les mineurs, pour tout le monde, ça va régler le problème...

M. Fournier: Ah! non, non.

M. Boucher (Marcel): ...ils ne seront plus sollicités.

M. Fournier: Ah! non, non, non. Je ne fais pas juste vous dire ça, je vous dis: Ils font la sollicitation, on empêche la sollicitation. Je vais un cran plus loin. S'ils font de la sollicitation, je crois qu'ils ne l'ont pas fait juste une fois. S'ils ne l'ont pas fait juste une fois, c'est parce qu'à un moment donné ça a marché. Donc, je suis sur le chemin où je me dis: Il y en a, des cartes de crédit aux mineurs. Ça, c'est où je me loge, moi. Vous, vous me dites: M. Fournier, on n'a pas de preuve de ça. Bien, savez-vous quoi? Je pense que je vais rester avec le doute que j'ai, parce que j'ai l'impression qu'il y en a qui en ont, sinon il n'y aurait pas de sollicitation pour les jeunes.

Le Président (M. Bernier): Me Boucher? Me Labelle?

Mme Labelle (Yannick): Bien, nous, on était partis de la prémisse qu'il semblerait que la disposition telle que proposée, elle est pas mal coulée dans le béton, là, que c'est quelque chose qui est... l'idée était déjà faite que les cartes de crédit devraient être interdites aux mineurs. Nous, ce qu'on disait, au fait, c'est que c'est vrai que la loi ne prévoit pas ici que le parent est caution. Les effets que peuvent avoir cette interdiction risquent d'être contraires par rapport à ce qu'on voudrait vraiment. Nous le voyons aussi d'un point de vue d'un parent qui est déjà surendetté. Si maintenant elle peut, par l'entremise d'une autorisation, octroyer du crédit à son enfant et qu'ils ont les moyens limités, elle risque de le faire davantage.

M. Fournier: Moi, j'ai...

Mme Labelle (Yannick): Il y avait aussi cette... Il y avait aussi cette crainte: un parent qui n'a déjà pas le moyen, qui est déjà surendetté, hop! soudain, elle peut permettre à son enfant mineur de s'endetter également.

M. Fournier: Jasons pour jaser. L'obligation du prêteur reste de vérifier pour le jeune, puis le parent qui a l'autorité parentale serait, soi-disant, dans l'exemple que vous donnez, surendetté, donc ne sera même pas demandé comme caution; il y aurait même impossibilité de le faire. Là, on arrive à l'autre aspect. Quand va s'exercer le devoir du prêteur de voir si le débiteur, le jeune peut avoir accès au crédit ou pas, il va devoir aussi faire une vérification. Je ne sais pas, moi -- je ne peux pas connaître la vie de tout le monde -- il peut arriver des cas où il y a des jeunes qui ont des capacités d'assumer un crédit que leurs parents n'ont pas. En fait, je ne peux pas présumer du contraire, la... Il y a beaucoup de diversité de situations dans notre société. La loi ne peut pas... Enfin, je ne veux pas vous convaincre, mais la loi ne peut pas viser à donner un modèle unique pour tout le monde, parce que tout le monde est différent, elle peut donner des cadres généraux. Et donc il faut arriver à une conclusion: les jeunes ne devraient pas avoir de carte de crédit. Il peut arriver des cas où c'est assez nécessaire, l'autorité parentale peut l'octroyer. Même si ça, ça arrive, le prêteur doit quand même vérifier si le jeune est en mesure de le rembourser. Voici l'histoire que je raconte.

Le Président (M. Bernier): Me Labelle.

Mme Labelle (Yannick): Bien, si on va dans cette optique-là, que la loi est créée de manière à avoir une application générale, on peut aussi penser, également, aux jeunes -- on en fait état dans notre mémoire -- qui n'ont plus de contact avec leurs parents, par ailleurs. On pense, par exemple, à un jeune qui travaille à temps partiel, 17 ans, qui ne parle plus à ses parents ou qui est en mésentente avec eux. Comment est-ce qu'il ferait à ce moment-là pour avoir accès à un crédit, outre le fait qu'il serait pleinement capable de rembourser ce prêt?

M. Fournier: Alors, je vous pose la... Moi, le choix que j'ai fait dans la loi, moi... Il faut faire des choix dans la vie. Moi, le choix que j'ai fait, c'est que le jeune qui n'a pas l'autorisation parentale n'a pas accès au crédit. Qu'est-ce que vous me proposez? Qu'il ait accès? Si oui, donnez-moi les barèmes. Mais comment je fais des freins aux autres conséquences? Je suis très intéressé de connaître votre point de vue.

Le Président (M. Bernier): Me Boucher.

M. Boucher (Marcel): Il y aurait une solution simple: ne pas adopter cette disposition-là. Présentement, comme vous le disiez tantôt, il n'y a rien, dans la loi, qui interdit à un émetteur de crédit à émettre du crédit à un mineur. Un mineur qui, avec les dispositions qui s'appliquent présentement, aurait le droit de contracter pour ses propres besoins, qui a les moyens de payer, il y aurait une vérification, il y a des recours, le créditeur peut lui faire du crédit.

M. Fournier: Je vous dis franchement, franchement, là, je vous entends puis je comprends la logique que vous y voyez, là, mais, dans... Le même législateur qui dit: Bannissons des institutions scolaires toute forme de promotion du crédit puis qui en même temps dit: Laissons ouvertes toutes les capacités pour les jeunes d'avoir accès à des cartes de crédit, moi, je vous le dis, je vois ça contradictoire. Et j'aime bien mieux pouvoir dire: On va mettre la base; ce n'est pas compliqué, il n'y a pas de sollicitation puis il n'y a pas de crédit pour les jeunes à moins que quelqu'un, majeur, soit en mesure d'attester que cela est correct et nécessaire. On parle du crédit, là.

Enfin, je vous entends, mais c'est comme si vous disiez dans le fond: Nous, on est d'accord pour que les jeunes puissent répondre favorablement aux offres qui vont leur être faites. Voyez, si on reconnaît le droit de prêter aux jeunes, on va reconnaître tous les moyens de les solliciter aussi, là.

Le Président (M. Bernier): Me Labelle.

M. Fournier: Bien, pas mal.

**(12 heures)**

Mme Labelle (Yannick): Pas nécessairement, parce que, comme vous l'avez dit tout à l'heure, c'était par rapport à l'endroit où se situait le jeune que rentraient tous les éléments problématiques, il se situait dans un endroit fermé, dans des circonstances particulières où l'endettement serait plus propice. Si le jeune, il... On le dit également dans notre mémoire que ça passe par l'éducation. Si le jeune désire avoir une carte de crédit de 500 $ et qu'il a un emploi à temps partiel, ou quoi que ce soit, s'il a les capacités de rembourser ce prêt-là, nous, on juge qu'il serait alors en mesure de le faire, parce qu'il en a les capacités, il... C'est deux contextes différents, qu'il dépose une demande de crédit dans une institution financière ou qu'il se fasse solliciter après un souper, je ne sais pas, moi, dans un établissement scolaire, il dit: Ah, bon, maintenant on vous offre une carte de crédit de 2 000 $, c'est deux contextes complètement différents. S'il y a une décision réfléchie et qu'il y ait une évaluation efficace de sa capacité de payer, pourquoi pas.

Le Président (M. Bernier): M. le ministre.

M. Fournier: Bien, je vais... on va manquer de temps, sinon. Puis je veux profiter de votre présence pour parler aussi d'autres sujets, là. Vous avez abordé... Évidemment, vous avez abordé la question du crédit responsable, plusieurs dimensions, là. Vraiment, il y en a une qui m'intéresse particulièrement. Vous n'êtes pas les premiers qui nous en parlez. Je vois que vous êtes favorables. Par contre, elle peut être plus étendue, tout ça, dans ses conséquences. J'ai compris. Mais il y a, là aussi, une... J'y vois -- c'est peut-être juste moi qui le vois comme ça, là -- une espèce de contradiction.

On souhaite que le créancier fasse des vérifications sur la capacité de remboursement. Ça, on le souhaite. Je pense que vous êtes d'accord avec ça. Quand il fait des vérifications, là on se dit, par contre: Il faut vérifier pas mal de choses, puis là on commence... Puis là c'est un des sujets que vous pourriez me répondre: C'est quel genre de choses précises? Parce que l'Europe, dont vous m'avez parlé tantôt, c'est des textes aussi assez généraux, là, ce n'était pas très précis dans les choses. Alors, peut-être qu'il y a des enseignements présentés là-dedans. Parce que c'est aussi général que nous autres, tant qu'à faire, là, ce n'est pas plus clair. Alors, il faut aller plus précis. Puis on travaille sur un projet de règlement pour lorsqu'on va discuter article par article, vous pourrez en prendre connaissance à ce moment-là.

Mais vous me dites: Par contre, aussi, soyons prudents sur l'atteinte à la vie privée. Alors là, donnez-moi plus d'information. Je sens qu'il faut aller loin pour être sûrs d'avoir couvert le terrain, pour s'assurer de la capacité de rembourser et que c'est une mesure importante pour éviter le surendettement...

Le Président (M. Bernier): Me Labelle.

M. Fournier: ...mais qu'il y a une complication, d'aller trop loin. Alors, est-ce que vous sentez, comme moi, qu'il y a comme une zone grise un peu?

Le Président (M. Bernier): Me Boucher, vous avez deux minutes.

M. Boucher (Marcel): Oui, il y a une zone grise. Il y a certainement, jusqu'à un certain point, intrusion dans la vie privée si on commence à vérifier sérieusement la capacité de payer de quelqu'un. Je crois que la loi doit quand même y aller. La loi doit aller dans cette direction-là, puis elle doit aller aussi loin qu'il faut qu'elle aille. Parce que l'intrusion dans la vie privée, c'est une atteinte à des droits individuels. La question de surendettement, là, c'est rendu plus que des droits individuels, ça touche les droits collectifs. C'est un problème qui est rendu un problème de collectivité, un problème social. Il faut que la loi aille dans cette direction-là. De toute façon, la direction même du projet de loi le dit, c'est une loi qui vise principalement à lutter contre le surendettement. Allons-y.

Ce qu'il faut faire maintenant, sachant que... C'est clair qu'il y a une atteinte, jusqu'à un certain point, à la vie privée. Mais il y a déjà une atteinte à la vie privée si vous allez consulter le bureau de crédit. Là, c'est déjà consulté par plein de monde, qu'ils aient le droit ou pas de le faire, c'est consulté. Puis il y a déjà une atteinte à la vie privée.

Ce qu'on suggère... Ce à quoi on réfléchit, je ne vous dis même pas ce qu'on suggère, parce qu'on est encore au stade de la réflexion, et c'est pour ça qu'on invite... Consultez, consultez les gens qui sont sur le terrain, parce qu'ils ont déjà des bonnes idées. Les gens qui sont sur le terrain, qui font des budgets avec les consommateurs, ils vont très loin dans la vie privée. Les consommateurs se soumettent à cet exercice-là parce que ça leur est bénéfique. Nous croyons que c'est dans cette direction-là qu'il faut aller. Est-ce que c'est bénéfique de tout dévoiler au prêteur, à l'institution financière, au caissier dans un grand magasin? Pas certain. Est-ce qu'en faisant intervenir un tiers ce serait une solution? Peut-être. Le faire intervenir à quel niveau des vérifications? Le faire intervenir pourquoi? Ça reste à voir. Ça reste à voir surtout avec les tiers qui seraient susceptibles de le faire. C'est une invitation à la discussion. Pour ce qui est de l'atteinte elle-même à la vie privée, je ne suis pas vraiment inquiet.

Le Président (M. Bernier): ...une dernière question. Il n'y a plus de temps.

M. Fournier: Un des aspects qui m'intéressent, là, dans ce que vous avez soulevé, c'est la possibilité d'utilisation, par le prêteur, de ces informations aux fins de d'autres sollicitations à venir, d'une caractérisation de sa clientèle, et donc aux fins d'utilisation commerciale autre. Il y a un peu ça que j'ai compris dans ce que vous m'avez dit tantôt. Et là-dedans il y a quelque chose qui m'interpelle puis que je ne suis pas sûr qu'on a couvert dans le projet de loi. On cherche un échange pour savoir si on est capable de rembourser ce contrat-là, on ne cherche pas un échange pour donner un outil de plus au commerçant pour t'offrir d'autres contrats à l'avenir -- et, en vous parlant, je parle aussi à l'office, je parle à mes collègues -- est-ce qu'il y a... Est-ce qu'on a quelques remparts qu'on peut élever pour faire en sorte que l'information donnée ne puisse pas, avec toute la confiance qu'on peut y faire, là, ne puisse pas être utilisée à d'autres fins, notamment de sollicitation de crédit et de surendettement, finalement? Est-ce qu'il y a quelque chose là-dedans, là... Vous voyez, vous m'avez amené cette réflexion-là.

Le Président (M. Bernier): Me Boucher, je vous donne quelques instants pour répondre, quelques minutes.

M. Boucher (Marcel): Je vais prendre ces quelques instants pour réfléchir.

Le Président (M. Bernier): Regardez, Me Boucher, si vous avez des informations que vous voulez transmettre d'une façon additionnelle au secrétariat de la commission, par écrit, vous pouvez le faire en tout temps, et à ce moment-là on va s'assurer de le transmettre aux parlementaires.

M. Boucher (Marcel): Cette préoccupation-là d'utilisation des renseignements personnels à d'autres fins, c'est une préoccupation qui est constante. On la voit dans tous les domaines, on la voit beaucoup avec le commerce en ligne. Mais c'est une préoccupation qui est constante. Les lois, présentement, qui protègent la vie privée et les renseignements personnels sont beaucoup axées sur une question de demande d'autorisation préalable ou d'information de la personne de qui on prend des renseignements personnels sur l'utilisation qui sera faite. Ce n'est pas particulièrement efficace parce que les renseignements puis les demandes passent de n'importe quelle façon, et, s'il y a quelque chose en échange, les gens sont prêts à laisser passer beaucoup de choses.

Dans ce contexte-ci, comment parer ça? Je ne le sais pas. En adoptant des règles plus strictes, en prévoyant, dans la loi sur les... je ne sais pas, je ne sais pas qu'est-ce qu'on pourrait faire. C'est pour ça que l'idée me revient encore, qui reste à valider avec les personnes qui seraient interpellées: Faisons intervenir un tiers, faisons intervenir quelqu'un qui n'a pas d'intérêt commercial pour aller chercher ces renseignements-là, pour les traiter, pour les évaluer, à tout le moins pour établir une grille qui, si c'est... si eux le font dans la vie de tous les jours, qu'ils puissent respecter certaines balises.

Le Président (M. Bernier): Merci, Me Boucher. M. le député de Beauharnois.

M. Leclair: Merci, M. le Président. Bonjour à vous, Me Boucher, Me Labelle puis Mme Bilodeau. Merci d'être présents et de participer au projet de loi n° 24.

Ma première question irait sur un point qu'on a peut-être un peu moins touché avec les autres groupes, ce serait, dans votre mémoire, à la page 16, sur les paiements préautorisés. C'est quand même clair dans votre mémoire, mais j'aimerais quand même vous entendre là-dessus, là. Vous semblez avoir quand même quelques inquiétudes face à ça ou... peut-être élargir un peu l'article dont nous voulons cibler. Alors, j'aimerais vous entendre là-dessus.

Le Président (M. Bernier): Me Labelle?

M. Leclair: ...je réfère surtout au dernier paragraphe de l'article 32 du projet de loi, là. «Si un retrait d'autorisation doit entraîner automatiquement un arrêt de paiement, le principe devrait trouver [l']application dans tous les cas, et la portée de l'intervention législative sur le sujet, puisqu'elle s'avère nécessaire, [mérite] d'être généralisée.» Alors, j'aimerais comprendre, là, de...

Le Président (M. Bernier): Me Labelle.

Mme Labelle (Yannick): Bien, selon nous, ça dit tout, ce paragraphe-là, comme vous l'avez...

M. Leclair: Comparativement à ce qu'il y a dans le projet de loi.

Mme Labelle (Yannick): Comparativement à ce qu'il y a dans le projet de loi?

M. Leclair: Exact. Est-ce que vous nous soumettez de le généraliser encore plus?

Mme Labelle (Yannick): Oui. Bien, oui, c'est ça qu'on... C'est ça qu'on souhaite en fait, que ce soit généralisé davantage.

M. Leclair: Davantage. C'est bien. C'était juste pour faire certain que je comprenais bien.

Je reviendrais après ça à la page 15, utilisation de la carte de débit, vous apportez la notion «explicitement». J'aimerais vous entendre là-dessus. Parce que, le but du ministre, et sûrement de l'Office de protection des consommateurs, on ne veut pas ouvrir davantage à la fraude. Alors, vous semblez porter quelques inquiétudes à changer quelques mots. Alors, j'aimerais vous entendre.

Le Président (M. Bernier): Me Labelle.

**(12 h 10)**

Mme Labelle (Yannick): Merci. Nous avons une inquiétude spécifique. Quand on a conseillé que soit ajouté le mot «explicitement» à la disposition... Donc, on prévoit: «explicitement autorisé l'utilisation de sa carte», et on ajoute également: «et les transactions en litige». Pourquoi? Parce qu'on trouvait que, dans un concept juridique, si on reprochait une faute à un consommateur, faute qui aurait causé des dommages, il faut établir un lien de causalité entre les deux. Donc, le fait que le consommateur ait, par le passé, par exemple, divulgué son numéro d'identification personnel à son fils pour aller lui faire un retrait et que, par la suite, il y a eu une fraude qui n'est pas en lien avec la divulgation du NIP, qui a été faite auparavant, cet article, tel que rédigé, risque d'être interprété de la sorte, que toute autorisation ou divulgation préalable pourrait avoir une influence sur le fait qu'il y a eu des transactions litigieuses ou frauduleuses par la suite. Donc, on est d'avis que la loi devrait prévoir qu'il y ait preuve de deux éléments, premièrement divulgation du NIP, mais aussi qu'il y a un lien direct entre cette divulgation et les transactions qui sont contestées.

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.

M. Leclair: Merci, M. le Président. Pour ma part, une dernière question. J'aimerais vous entendre un petit peu plus... Plusieurs groupes, lorsqu'on parle du paiement minimum qui va être augmenté... qui pourrait être augmenté à 5 %, là, après les discussions... Vous semblez être quand même inquiets, là, que le fardeau, pour certains contribuables, d'être capables de payer ça... Alors qu'on a rencontré des groupes qui, eux... On va prendre les caisses Desjardins, la Fédération des caisses, eux ont déjà fait le pas avec leurs membres. Ce n'est peut-être pas le cas, là, de tous ceux qui ont des cartes de crédit, Desjardins nous avise déjà qu'il y a plusieurs milliers de personnes ça leur crée problématique. Sauf qu'eux les encadrent bien, c'est une institution financière en tant que telle, donc eux les encadrent et leur donnent d'autres portes, d'autres ouvertures. Alors, votre crainte à vous... Plusieurs autres nous suggèrent d'y aller en étapes, de donner du temps aux gens, donc forcément les éduquer par le temps et par la force des choses. Est-ce que votre risque est toujours là si on dit qu'on étend ça sur une échelle de plusieurs années ou en... Alors, j'aimerais vous entendre, là, face à ça.

Le Président (M. Bernier): Madame... Me Boucher.

M. Boucher (Marcel): Le risque qu'on voit, c'est que quelqu'un qui est déjà étouffé par les paiements minimums qu'il a à faire aujourd'hui, si ces paiements-là augmentent, il ne saura pas où prendre l'argent, il va être encore plus étouffé. J'ai entendu les propositions qui ont été faites d'augmenter de 0,5 % plutôt que de 1 %. Le problème qui se présenterait l'année prochaine, il va se présenter dans deux ans. Ça ne nous donne rien de séparer en deux les taux d'augmentation. Si le taux doit, à un moment donné, doubler ou monter de 1 % ou de 2 %, il va finir par monter à 2 %, et les gens qui ne sont pas capables de payer, ils ne seront pas capables de payer à ce moment-là. Ne retardons pas pour rien le mal. S'il faut augmenter, augmentons de 1 %, tel que le projet le prévoit.

Puis ce qu'il faut faire, c'est de prévoir... Vous nous dites que les caisses Desjardins encadrent bien ces gens-là. C'est bien, tant mieux s'ils le font. Il faudrait que le législateur s'assure que tout le monde va le faire. Et il faudrait que le législateur s'assure que ça va être bien fait, que ça va être à l'avantage des consommateurs et non pas à l'avantage d'institutions financières. Ce que nous soulevons dans notre mémoire, c'est qu'il y a ce risque-là qui est bien réel, il va falloir que quelqu'un s'en occupe: Est-ce qu'on fait confiance aux institutions financières ou pas? Ça, c'est la question que je vous lance. Nous autres, on est paranoïaques, on ne fait pas confiance. On se dit -- bon, on s'entend sur ce point-là -- on se dit: Si...

Puis même chose pour votre question de tantôt: «Pourquoi préciser des choses dans la loi?», parce qu'on se dit: Si ça va devant les tribunaux, là, explicitement, là, si ça va devant les tribunaux puis que le commerçant peut invoquer telle chose, il va le faire. Fermons la porte immédiatement. Il ne pourra pas invoquer que laisser traîner mon NIP dans ma poche, c'était une autorisation implicite; on demande une autorisation explicite. Même chose, pour cette question-là, pour les banques: Est-ce qu'on fait confiance ou si déjà on est capables de penser à ce qui peut arriver et de trouver une façon d'éviter que ça arrive, autant que possible? Fermons toutes les portes. C'est la balle qu'on vous lance, ce n'est pas nous autres qui va le faire, adopter ces règlements-là, ou préciser ces choses-là, ou imposer aux commerçants ou aux prêteurs certaines mesures à prendre. La balle vous est lancée.

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.

M. Leclair: ...je vous dirais que, parfois, dans certains articles, au début, on se croyait paranoïaques aussi, mais maintenant le ministre nous a suggéré un autre terme: on «chemine» maintenant. Alors, je vais laisser la parole à mon collègue.

Le Président (M. Bernier): On se croirait dans un cabinet de médecin. Allez-y, M. le député de Sainte-Marie--Saint-Jacques, en autant que vos problèmes personnels ne soient pas...

M. Lemay: Non, soyez sans inquiétude, ce n'est pas dans mes habitudes. Je n'ai pas la prétention que ça intéresse personne. Et les problèmes des autres, si les gens veulent m'en parler, ça m'intéresse, mais, pour le reste, non. Alors, bonjour, mesdames, monsieur. Évidemment, de par la nature même de votre organisation, vous penchez pour le consommateur, et c'est très bien, et ça transparaît. Je vais jouer un peu l'avocat du diable, quand même. Nous, notre rôle, c'est... On reconnaît ici le -- je sais que le terme est inapproprié, là -- le droit à la consommation, ou la liberté d'être heureux, ou... bon, je ne sais pas comment on pourrait définir ça. Mais il y a aussi la liberté de commerce. Il y a aussi la liberté contractuelle.

Donc, on essaie de trouver un point d'équilibre dans tout ça. Et c'est ça, notre rôle, en fait, comme législateur, c'est de faire en sorte que tous ces droits-là, cette liberté-là... et prenant aussi pour acquis que tous ces gens-là dont on parle, c'est des majeurs, c'est des personnes majeures, vaccinées. Donc, ce n'est pas toujours simple de le faire, de trouver -- sur chacun des articles d'ailleurs -- l'équilibre, et on va travailler là-dessus dans les prochaines semaines, trouver l'équilibre dans tout ça. Donc, c'est un peu ça, notre rôle.

Hier, l'économiste Pierre Fortin nous a dit que, d'après lui, c'est à peu près 15 % des familles, des couples, là -- appelons ça des familles ou des individus -- qui auraient des difficultés. Donc, ce projet de loi là, là, serait fait, serait proposé pour à peu près, là, 15 %, ce qui est beaucoup, là, je ne suis pas en train de dire que ce n'est pas beaucoup, c'est beaucoup. Que pensez-vous de ce 15 % qui serait en danger, qui est... qui sont en surendettement ou en danger réel de surendettement?

Le Président (M. Bernier): Allez-y, Mme Bilodeau.

Mme Bilodeau (Simone): Je suis un peu étonnée par ce 15 %, j'avoue, parce que... Et il faudrait voir de quelle partie du projet dont on parle. Si on parle en termes... du côté des contrats de prêt d'argent, contrats, surtout, de crédit variable, je dirais, je hausserais ce 15 % là. Moi, je n'y crois pas trop. Puis le nombre de faillites, qui augmente depuis 20 ans, aussi, nous dit aussi que, bon, il y en a qui sont passés à cette étape-là, à cette solution-là.

Alors donc, c'est de plusieurs façons que les gens s'endettent, et, quand ils en arrivent à être en défaut de paiement dans des contrats de crédit variable ou contrats de prêt d'argent, je vais vous dire, c'est qu'il y a déjà un bout de temps qu'ils ont coupé dans l'épicerie, qu'ils ont rogné sur... qu'ils sont en retard auprès de services d'électricité, de téléphone.

M. Lemay: ...on comprend l'effet... on comprend le...

Mme Bilodeau (Simone): De quoi parle-t-on quand on parle d'endettement?

M. Lemay: On comprend l'effet néfaste, là. Ça, ici, s'il y a une chose dont on est unanimes à l'heure actuelle, c'est bien ça, là. Il reste que, si on parle d'endettement, l'endettement est aussi rattaché à des actifs. Donc, ça aussi, ça aussi, il faut calibrer notre réflexion. Oui, il y a du prêt d'argent, mais, dans le 15 %, ou dans le 85 %, ou dans l'endettement, il y a aussi l'actif, la maison, la voiture, bon. Il y a ça aussi dans le décor des choses qu'on doit réfléchir. Donc, comme je le disais tantôt, trouver, là, le point d'équilibre dans la responsabilité des uns et des autres.

Si le crédit est rendu difficile dans le monde dans lequel on vit, où on parle aujourd'hui, vous le savez, d'hyperconsommation -- on ne parle même plus de surconsommation, on parle d'hyperconsommation -- ne pensez-vous pas que, ce désir de consommer, j'oserais même dire ce désir de s'accomplir, si les gens n'ont pas accès au crédit officiel, ils vont aller ailleurs pour... Je vous pose la question. Il y a un point d'interrogation au bout de ça, là. Ne pensez-vous pas qu'il y a aussi ce danger-là que les gens, succombant à la mode qui est la nôtre, dans le monde occidental en général, aillent se trouver des sous ailleurs?

Le Président (M. Bernier): Mme Bilodeau.

Mme Bilodeau (Simone): Bien, écoutez, honnêtement, on ne rencontre pas l'ensemble de la population québécoise, mais, dans les 30 quelque associations qui sont réparties sur le territoire du Québec et qui rencontrent les gens en consultation budgétaire, ce n'est pas toujours pour de la surconsommation. Et, le crédit étant trop facile, la sollicitation trop facile, les gens... Il y a beaucoup de circonstances, je dirais, atténuantes.

Et là je reviendrais peut-être sur votre question d'équilibre. On tente aussi... On est proconsommateurs, mais on essaie aussi de responsabiliser le consommateur...

M. Lemay: Ce n'est pas un défaut, là.

**(12 h 20)**

Mme Bilodeau (Simone): Non, mais je précise quand même qu'on n'est pas proconsommateurs à tout crins, et à les défendre... Alors donc, je reviens aux causes d'endettement, qui sont cause de divorce, perte d'emploi, ça peut être un accident d'automobile -- vous les connaissez -- alors ce n'est pas nécessairement de la surconsommation. Il y a les gens aussi qui retournent aux études, les jeunes qui sont aux études eux-mêmes. Alors, le crédit est devenu le coussin que les gens n'ont plus parce qu'ils ne font plus d'épargne depuis longtemps, peu importent les raisons. Et donc le crédit remplace le revenu. Alors, ce n'est pas toujours pour avoir... Puis, si on se déplace en région, il n'y a pas de transport en commun; une voiture, là, dans la cour, ça en prend deux et trois, si on va dans certaines régions. Alors, on s'endette pour des voitures, on s'endette pour des biens de consommation de base.

Alors, ce n'est pas... Je réfute cet argument-là de surconsommation, ce n'est pas ce qu'on voit, nous, quand ils passent dans nos bureaux. Je ne vous dis pas qu'il n'y en a pas. Quelqu'un qui a... Un exemple comme ça, que j'ai rencontré: un couple qui avait cinq cartes de crédit à 3 000 $ de limite chacune, puis elles étaient pleines. Ils avaient chacun un prêt auto à 11 000 $ chacun, à part l'hypothèque de la maison, qui a été surévaluée par l'institution financière qui leur a prêté. Et c'étaient deux personnes qui travaillaient. Mais on peut être certain que ça va bloquer à un moment donné, qu'à un moment donné le crédit va faire boule de neige et qu'ils auront plus à rembourser en intérêts que ce qu'ils seront capables. Alors donc, c'est ça, la...

M. Lemay: Je retiens de votre intervention que «surendettement» ne veut pas... n'est pas nécessairement synonyme de «surconsommation». Il y a des cas... Alors, c'est un excellent point que vous nous avez soulevé.

À la page 10, pour en venir maintenant à des questions peut-être plus précises, à la page 10, vous parlez beaucoup de la vérification. Et effectivement, là, c'est un article qui est apporté par le gouvernement, qui est assez important. Mais vous... Puis il y a un règlement qui suivra, là, l'adoption de la loi. Vous dites qu'en cas d'omission pure et simple, s'il y a un règlement qui décrit: Voici ce que vous devez demander, tel que rédigé, cet article pourra en effet être interprété comme ne s'appliquant qu'en cas d'omission pure et simple du commerçant. Oui, c'est effectivement... C'est ce que je comprends en tout cas, c'est: En cas d'omission de ne pas avoir suivi les prescriptions du règlement, à ce moment-là le prêt pourra être retiré, bon, mais en cas...

Qu'est-ce que vous voyez d'autre qu'une omission pure et simple? C'est un petit peu la raison pour laquelle il y a un règlement qui va être proposé, là. Vous ne devez pas omettre de poser ces questions-là pour avoir un portrait clair de la situation de la personne. Qu'est-ce que vous voyez d'autre que...

Le Président (M. Bernier): Me Boucher.

M. Boucher (Marcel): Le faire sérieusement, tout simplement, pas l'omission pure et simple, mais l'omission de faire la job pour vrai. Établir le budget de quelqu'un -- on parle d'établir le budget, c'est ce que j'ai en tête -- mais vérifier sa capacité de payer. On va demander aux gens, par exemple: Vous avez quoi comme dépenses? Si je pose cette question-là à quelqu'un qui me dit: Mon loyer mensuel, c'est 15 $, je vais marquer 15 $: c'est beau, loyer mensuel 15 $. Je ne poserai pas de question? Non, j'ai fait la vérification. J'ai posé la question, j'ai fait la vérification de la capacité de payer, il a la capacité de payer. Est-ce que je l'ai cru? Pas du tout. Est-ce que c'était crédible, est-ce que c'était sérieux, le travail que j'ai fait? Pas du tout. Je l'ai fait. Ce que la loi m'impose, c'est de le faire.

Encore une fois, ce que je vous dis, c'est: On regarde les ouvertures qu'il pourrait y avoir pour pouvoir échapper aux prescriptions de la loi. Ce que nous suggérons, c'est: Faisons la loi plus serrée, exigeons une vérification sérieuse, une vérification réaliste, ou quoi que ce soit, et cet argument-là tombe. On ne pourra pas dire: Je l'ai fait, et se dégager de toute responsabilité sur le simple fait qu'on a accompli un geste, pas sérieusement, mais on a accompli un geste, et donc on se libère des conséquences.

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.

M. Lemay: Donc, la personne qui dit 15... disons un chiffre plus... qui dit 250 $ à la place de 700 $ -- c'est là, je vous dis, le point d'équilibre, là -- là, le client ment sur sa déclaration. La personne n'a pas nécessairement le moyen de faire ces vérifications-là. Un loyer, là, vous ne pouvez pas dire: Amenez votre bail, là. On parlait tout à l'heure des papiers personnels qui sont exigés, la limite... Alors, je reviens à ce que je vous disais, hein, c'est de trouver le point d'équilibre dans tout ça, parce qu'effectivement le client peut aussi, malheureusement, là, conter une petite menterie sur sa situation. Et là, de mettre ça 100 % sur le fardeau du commerçant, je réfléchis, là, je réfléchis, je ne dis pas que ce n'est pas nécessairement...

Je vais aller vite, M. le Président. Page 13, vous dites: Aucune publicité. Donc, vous assimilez... Page 13, bien, en tout cas, je vais... C'est ce que j'en ai compris. Je vous cite, là: «Nous restons d'avis que la loi devrait prévoir une interdiction de toute sollicitation au crédit, incluant la sollicitation relativement aux marges de crédit, aux prêts personnels et aux prêts hypothécaires.»

Une voix: ...

Le Président (M. Bernier): Mme Labelle.

Mme Labelle (Yannick): Pardon. Merci.

M. Lemay: Allez-y. Je vous écoute. Avant de poursuivre, je vous écoute.

Mme Labelle (Yannick): O.K. On fait une distinction entre sollicitation et publicité. Pour nous, il ne s'agit pas de la même chose. Et on fait état des éléments qu'on retient pour faire cette distinction, et une d'entre elles, c'est que la sollicitation, pour nous, c'est la tentative ou la prise en contact directe avec une personne en particulier, tandis que la publicité s'étend à la population en général, même si elle peut cibler une tranche de la population de manière particulière. Donc, c'est cette sollicitation directe qu'on propose d'interdire et non la publicité en général.

Le Président (M. Bernier): Merci. M. le député.

M. Lemay: Ça va demander beaucoup de réflexion. Je ne sais pas s'il y a une jurisprudence dans la différence entre la publicité et sollicitation. C'est intéressant ce que vous proposez.

Page 17 -- moi, c'est un article qui me tient à coeur, et je m'excuse auprès de mes collègues de toujours revenir là-dessus, mais, bon -- vous, vous élargissez passablement l'expression «force majeure». Ça, c'est... On s'entend que c'est du nouveau droit. En termes de consommation, là, on assimile ça à la protection des créanciers, là, dans le monde des affaires, hein, des gens qui déposent leurs bilans et qui sont protégés de leurs créanciers le temps qu'il y ait un bilan qui se fasse, et tout ça, et, vous, vous l'élargissez passablement. Les gens, les commerçants, les institutions financières, celles qui sont venues en tout cas, nous ont dit... Ils étaient un peu inquiets, là, de l'arrivée de cette nouvelle législation là et de comment tout ça allait se... allait être jugé par les tribunaux, parce que c'est de ça dont on parle, là, c'est de... C'est parce que c'est lourd, c'est des sous pour tout le monde.

En tout cas, j'aimerais savoir un peu: Pensez-vous vraiment que cet article-là peut aider dans le cadre du surendettement? Ce n'est pas déjà prévu au Code civil, les assurances hypothécaires et autres, là, qui peuvent vous aider quand vous perdez votre emploi, ou autres? Je vais rapidement un peu parce que je sais que le temps est compté.

Le Président (M. Bernier): Me Boucher. Me Labelle.

M. Boucher (Marcel): Assez rapidement, je ne comprends pas la question.

M. Lemay: Ah non?

M. Boucher (Marcel): Est-ce que c'est... On demande d'élargir, oui, on demande d'élargir. À notre avis, tous les... On ouvre la porte au tribunal à appliquer, dans ces cas-là, la notion d'imprévisibilité, qui est connue, qui est appliquée en common law. Ce qui... Est-ce qu'il y a un danger... C'est clair que c'est une bonne protection pour le consommateur, quand il est mal pris, de pouvoir invoquer ça. Est-ce que c'est du droit nouveau? Pas totalement dans le cadre de la Loi sur la protection du consommateur parce que quelqu'un qui reçoit un avis de défaut peut déjà invoquer ces mêmes choses là qu'on va prévoir à l'article 103.3. C'est déjà prévu à la LPC, c'est une autre façon de l'appliquer, une façon qui est, à notre avis, préférable pour le consommateur parce qu'il n'aura pas besoin d'attendre après le commerçant. S'il y a un problème, il peut directement s'adresser au tribunal pour dire: Voici le problème que j'ai, est-ce qu'il y a moyen d'organiser quelque chose?

Ce pour quoi on veut ouvrir la porte... enfin on veut s'assurer que la porte est ouverte. Est-ce que les termes «force majeure», est-ce que ça couvre tous les événements de la vie qui peuvent arriver à quelqu'un? On est loin d'être certains de ça. Il faudrait, à notre avis, regarder qu'est-ce qu'on vise avec ça. Ce que nous comprenons de ce que vise cette disposition-là, c'est justement ça, les événements de la vie: un divorce, une maladie, une perte d'emploi, une diminution dramatique du revenu, ce genre de choses là. Est-ce que ça correspond à «force majeure»? Pas certain. Il faudrait s'assurer que la disposition ouvre la porte à tout ça.

M. Lemay: Rapidement. Toujours dans le même sujet. On sait que c'est long devant les tribunaux. Donc, êtes-vous d'avis que, si quelqu'un dépose un avis de force majeure devant le tribunal, bien là, il y a les paiements, il ne peut plus continuer les paiements? Donc, au niveau de la gestion de ces cas-là, moi, ça m'apparaît, théoriquement à tout le moins, assez complexe, là, parce que les paiements devront continuer. Tant que vous n'êtes pas passé devant le tribunal, vous n'êtes pas libéré de rien, là, et les paiements qui sont à 500 $ devront demeurer à 500 $. Si ça prend un an avant que vous passiez devant le tribunal, à court terme ça ne règle malheureusement pas vraiment votre problème, là.

Le Président (M. Bernier): Me Labelle.

Mme Labelle (Yannick): On se réconforte dans le fait que cet article-là se base sur les mêmes prémisses que l'article 69 de la LPC, qui prévoit que ce sera jugé d'urgence, qu'une demande de ce genre est jugée d'urgence. Donc, on présume que cela sera la solution. Cependant, on a toujours, en tant qu'organisme, soutenu que l'accès à la justice ne se tient pas uniquement au fait de prévoir des recours mais de prévoir la mise en place de mécanismes qui vont soutenir un recours de manière efficace.

Le Président (M. Bernier): Merci. Donc, merci aux représentants de l'Union des consommateurs, Mme Bilodeau, Me Boucher, Me Labelle. Merci de votre participation à cette commission parlementaire. Vos propos ont été fort intéressants.

Je suspends quelques instants avant de reprendre pour les remarques finales.

(Suspension de la séance à 12 h 30)

 

(Reprise à 12 h 32)

Mémoire déposé

Le Président (M. Bernier): À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons reprendre nos travaux. Donc, avant de passer aux remarques finales, je vais procéder au dépôt de mémoires d'organismes qui n'ont pas été entendus lors de nos auditions. Il s'agit du mémoire de l'Association des banquiers canadiens, que je dépose et qui sera disponible au greffe de la Commission des relations avec les citoyens.

Remarques finales

Nous allons donc passer aux remarques finales. M. le député de Beauharnois, vous avez sept minutes environ, sept à huit minutes pour faire vos remarques. La parole est à vous.

M. Guy Leclair

M. Leclair: Merci, M. le Président. Bien, tout d'abord, je crois qu'avec tous les groupes que nous avons reçus nous avons très bien entendu les gens qui, pour la plupart, ont souligné leur appui au projet de loi. Donc, c'est bon signe, on est sur la bonne voie. Et, par le fait même, nous saluons le travail des fonctionnaires et la volonté de protéger les plus vulnérables. Puis je crois que, l'OPC, les gens de la protection du consommateur, bien, ça fait longtemps qu'ils souhaitaient que ce projet de loi là finisse par se rendre au salon bleu. Alors, je crois qu'on y est presque. C'est sûr que je crois que plusieurs amendements seront portés, puis nous travaillerons dans ce sens-là.

Le petit doute qui me reste à la tête, je l'avais dit en remarques lorsque nous avons ouvert ce projet de loi là: Il ne faut pas oublier que le gouvernement qui veut lutter contre l'endettement... Bien, je vais réitérer des faits des années financières de 2002-2003 à 2011-2012: la dette brute du gouvernement qui a augmenté de 55 milliards, une hausse de 42 %. Alors, le gouvernement libéral actuel est donc responsable, à lui seul, de près du tiers dans la dette du Québec contractée au cours de son histoire. L'augmentation historique de la dette est marquée par une détérioration spectaculaire depuis deux ans, au rythme de plus de 10 milliards par année, se poursuivra encore en 2012-2013. De sorte que le gouvernement fera croître la dette de près de 30 milliards en seulement trois ans, un record absolu, et cela directement lié au surendettement des individus. Puisque comme, un jour, la dette devra être payée, cette dette est en fait une taxe différée, les citoyens seront donc toujours taxés pour la payer dans un futur. Alors, c'est bien de parler d'endettement, c'est bien de protéger le consommateur, mais j'espère que le gouvernement aussi gardera ça en tête pour protéger tous les citoyens du Québec.

De plus, avec l'augmentation drastique des frais de scolarité, le gouvernement a trouvé une autre façon d'endetter plus que jamais les générations futures. C'est d'autant plus problématique que les étudiants sont parmi les plus vulnérables face aux prêteurs. On l'a vu, on a entendu les gens. C'est pourquoi plusieurs intervenants ont demandé que la publicité concernant le crédit soit interdite sur le campus.

Parmi les autres aspects du projet de loi qui méritent d'être améliorés, il y a la question du paiement minimal sur les cartes de crédit. Certains doutent que 5 % soit suffisant ou non. D'autres pensent qu'une hausse de 1 % par année risque d'entraîner des difficultés, voire des faillites. On nous demande aussi de vérifier si on ne pourrait pas avoir un encadrement autre pour s'assurer qu'il y ait des moyens palliatifs à ça. Je ne suis pas convaincu qu'on est capables d'embarquer là-dedans, mais on va regarder ça, je crois, article par article.

L'autre faiblesse du projet de loi, des nombreuses références à des concepts flous, mal définis; le Barreau l'a souligné. On s'attend à des améliorations. Ils s'attendent, eux aussi.

Un autre problème souligné par le Barreau, celui des renvois à plusieurs règlements. On l'a dit à plusieurs occasions, plusieurs groupes nous l'ont fait savoir. Alors, on constate que le législateur délègue à l'exécutif d'importants pouvoirs réglementaires. C'est assez commun dans les projets de loi, on reconnaît ça. Sauf que plusieurs dispositions qu'on retrouve dans la loi ou en annexe, celles-ci se retrouveront dorénavant dans un texte réglementaire. Cette délégation, qui soulève la question de la séparation des pouvoirs législatif et exécutif, comporte davantage de souplesse mais prive les parlementaires d'un débat sur le contenu normatif des règlements, tout en ne permettant pas au lecteur de connaître précisément la portée de la loi. Cette façon de procéder rend difficile l'exercice auquel nous nous livrons. Bien sûr, souvent, on dit: La base de l'article est bien faite; on ne sait pas encore la profondeur du règlement, comment vraiment il va être défini. Alors, on ose espérer que nous pourrons avoir au moins des projets de règlement avant l'article par article, car il y en a plusieurs dans le projet de loi n° 24.

Enfin, un autre grave problème du projet de loi n° 24, qui risque de ne pas s'appliquer aux banques autant qu'aux caisses populaires Desjardins... Les caisses Desjardins nous ont souligné ce problème; le Pr Fortin a abondé dans le même sens. Le gouvernement ne semble pas en tenir compte, mais je dirais plutôt: «On chemine», que de dire qu'il n'en tient pas compte, car je crois que... Le ministre nous a dit hier... Il semblait plus convaincu que les gens qui sont vraiment ciblés à ça. Mais je crois qu'il faudra vraiment en tenir compte, de voir... si jamais, dans un futur proche ou loin, plus éloigné, que la cour reprend une autre position. Alors, j'espère qu'on va s'assurer ou on tentera de s'assurer, à l'article par article, qu'on pourra pallier à cette éventualité-là, là, qui pourrait nous frapper. Nous nous attendons à ce que le gouvernement nous dise ce qu'il entend faire si jamais les tribunaux devaient décider que les banques ne sont pas soumises à certaines dispositions.

Bref, il s'agit d'un projet de loi qui part d'une bonne intention. C'est pourquoi nous comptons travailler de manière constructive. Nous nous attendons aussi à ce que le gouvernement en fasse autant, qu'il propose de nombreux amendements pour y répondre, aux problématiques soulevées lors des consultations. Définitivement, je crois que, dès le départ, on a eu quand même des bons échanges avec les gens du ministère, qui nous ont quand même bien aidés, bien informés. Alors, j'espère que cette pratique-là va se continuer à l'article par article, et je n'en doute aucunement.

En terminant, M. le Président, je tiens à vous remercier pour votre bon travail tout au long de cette commission. Merci, M. le ministre, les collègues de la commission parlementaire. Merci, mes collègues à moi. Notre recherchiste, Guillaume Rousseau, merci du travail que tu as fait au travers de tout ça, les gens de l'Assemblée nationale qui, égaux à eux-mêmes, nous supportent très bien lors de nos commissions parlementaires, et surtout à tous les groupes qui ont venu donner leurs points de vue, qui ont pris leur temps, qui... Ils se sont déplacés pour tenter de faire avancer les choses avec nous, je vous en remercie. Et puis ça sera un plaisir de se revoir très bientôt pour poursuivre dans cette belle veine là. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Bernier): Merci, M. le député. M. le ministre, la parole est à vous pour vos remarques finales.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président. À mon tour, et je vais commencer sur la même note que mon collègue de Beauharnois le faisait, je vais commencer par les remerciements, d'abord aux groupes qui sont venus partager leurs expériences, partager leur savoir, qui sont venus ici mais, je dois dire, qui avaient déjà collaboré amplement avec l'office et qui nous ont aussi assurés de leur collaboration pour l'avenir. Et il est vrai que nous avançons en terrain qui n'est pas toujours expérimenté dans d'autres juridictions. Forcément, ça soulève un certain nombre de questions. On ne peut pas toujours s'appuyer sur les expériences étrangères quand on innove. À partir de là, ça ne veut pas dire qu'il faut se rendre aveugles, il faut quand même essayer de trouver les bonnes réponses à ces questions qui ont été soulevées. J'en profite pour remercier, donc, les groupes et remercier aussi les autorités de l'Office de la protection du consommateur, qui nous ont bien préparés, je pense, tous les parlementaires, à cet exercice et qui vont continuer de nous accompagner, à leur plus grand plaisir, je n'en doute point, au cours des semaines à venir pour nous assurer d'avoir les articles les mieux libellés qui soient pour servir, dans le fond, la cause que soutient ce projet de loi. Je remercie les parlementaires, nos adjoints qui nous ont accompagnés durant ces travaux.

**(12 h 40)**

Je crois que le travail qu'on a fait entre parlementaires durant cette commission, au gré de nos questions les uns les autres, nous a permis de développer une compréhension encore plus grande des enjeux, des pistes de solution, et il est bon de le dire. Ce n'est pas inutile de rappeler qu'il y a, dans nos institutions, des moments privilégiés où le travail en commun, au-delà de toute ligne partisane, permet d'améliorer, de travailler pour toute la société. Donc, je salue mes collègues, tous mes collègues, qui ont travaillé dans cet esprit, qui vont continuer de le faire.

Ce qui m'amène évidemment à aborder quelques remarques, peut-être, au passage. Mon collègue de Beauharnois ne m'en voudra pas, puisque j'aborde cette question de non-partisanerie. Et je n'empêche pas qu'on ait des convictions profondes, les uns les autres. Et peut-être de souligner que, comme Pierre Fortin nous l'apprend si bien, les statistiques parfois comportent des messages qui peuvent être interprétés différemment. Moi, je sais que des statistiques établissent que les Québécois ont vu leur pouvoir d'achat augmenter au cours de la période que vous avez envisagée, soit celle où le Parti libéral occupe la fonction de gouvernement. Je sais aussi que la dette, qui a pu augmenter, est appuyée sur des actifs qu'on appelle assez généralement des infrastructures, et toutes les infrastructures qui ont été faites n'ont jamais été isolément dénoncées par l'un ou l'autre des députés de cette Assemblée, peu importe dans quels comtés ils étaient. D'habitude, ils le souhaitent. Alors, à tous égards, j'attends peut-être la liste des infrastructures que mon collègue de Beauharnois aurait préféré que nous ne fassions pas.

Mais, ceci étant, je ne lui lance pas le défi parce que la conclusion de ces infrastructures, de ce grand plan était, dans le fond, de faire face à une crise économique mondiale. On en a parlé d'ailleurs pour ce qui est des impacts aux États-Unis durant la commission. Personne ne nie qu'au Québec on ait pris les bons moyens pour se prémunir contre cette crise qui a frappé partout et qui doit avoir pour le Québec, si elle n'a pas eu les effets qu'elle a eus ailleurs... Le taux de chômage, au Québec, est très bas et atteint des records, même. Alors, ça ne veut pas dire qu'il ne faut pas tirer des enseignements de ce qui s'est passé ailleurs, des effets qu'il y a eu ailleurs, et c'est un peu le sens du projet de loi.

Je dis un tout petit mot sur Desjardins avant, ensuite, d'embarquer sur ce qu'on a entendu en commission. Ce n'est pas que je souhaite, à l'égard de l'affaire Marcotte, démontrer un jovialisme débridé. Je crois que, comme parlementaire ou, au premier titre, comme ministre de la Justice, il n'est pas approprié de faire montre d'un défaitisme qui pourrait être interprété comme signifiant que nous baissons les bras dans un combat où nous avons emporté la première manche. Et, si la paranoïa peut nous occuper les uns les autres, dans certains cas elle est sélective. Si ça doit nous servir un peu de guide, elle ne doit pas nous paralyser et elle ne doit pas non plus nous faire perdre de vue que nous devons nous battre pour l'exercice de nos juridictions que nous avons. Et la Cour supérieure nous a donné raison. Et je n'entends pas apporter ma voix en soutien à ceux qui pensent que les autres vont nous donner tort. Et j'appuie nos procureurs qui plaident à la Cour d'appel avec vigueur pour dire qu'ils ont raison et que nous allons nous battre pour nos juridictions. Je le dis pour Desjardins. Je n'empêche pas leur questionnement, mais je les invite à être aussi fermes que moi sur notre désir d'avoir gain de cause et sur les motifs que nous avons pour penser que nous avons... nous aurons gain de cause.

Bon, ceci étant dit, je retiens un élément, un qualificatif qui a été dit à l'égard du projet de loi, et il a été dit encore ce matin, on a dit qu'il était audacieux. Et je crois que le fait qu'il soit audacieux amène des effets collatéraux, mais il reste néanmoins audacieux, audacieux et, je dirais, approprié. Hormis un groupe -- dans une soirée mémorable -- hormis un groupe, tous conviennent qu'il y a une préoccupation, qu'il y a un enjeu, qu'il faut trouver un réponse. Alors, audacieux, approprié, je pense qu'on est à la bonne place pour commencer l'adoption de principe et ensuite l'étude article par article.

On a appris dernièrement, aujourd'hui et hier, avec la présentation de M. Fortin -- c'est assez intéressant aussi, notre collègue le soulevait tantôt, de Sainte-Marie--Saint-Jacques -- sur les aspects de surconsommation, sous-épargne, surendettement dû à la surconsommation. Tantôt, on a eu... J'en profite parce que les gens sont encore là; on disait: Sans épargne, le crédit est devenu le coussin. C'est une belle... En tout cas, ça faisait un beau lien avec la présentation de M. Fortin hier. Je crois qu'il y a néanmoins quelque chose qui s'appelle une consommation importante. Je crois que, c'est certain, il y a une surconsommation. Est-ce qu'elle est la cause de tous les surendettements? Peut-être pas. Il est possible qu'il y ait du surendettement qui est dû à des circonstances particulières qui viennent atteindre les gens. Mais il y a certainement une tendance à une consommation impulsive, pas de tout le monde, mais ça fait partie de l'air du temps, jusqu'à un certain point. Peut-être est-ce dû à la facilité d'être sous l'effet de nombreuses publicités, sollicitations, peut-être que c'est le cas, mais il y a une grande consommation, alors qu'il n'y a plus d'épargne, alors qu'on est dans le coussin, alors que c'est le crédit. Si on n'inverse...

Le Président (M. Bernier): ...à conclure, M. le ministre.

M. Fournier: Ah oui? J'ai combien de temps?

Le Président (M. Bernier): Il vous reste 30 secondes.

M. Fournier:«Oh boy!» C'était fort intéressant, ce que je disais, mais je n'ai pas commencé à vous parler. Alors, puisque je n'ai pas commencé à vous parler, je vais réserver l'ensemble de mes commentaires pour le principe. Ceci étant, je conclus donc en disant merci à tous ces groupes qui nous ont renseignés. Et la suite la semaine prochaine, M. le Président.

Le Président (M. Bernier): Merci. Donc, avant de suspendre notre travail, je désire remercier tous les parlementaires qui ont participé à cette commission. Nul n'est besoin de vous rappeler l'importance des travaux en regard de ce projet de loi. C'est un projet de loi très important pour la population. C'est un projet de loi auquel on doit apporter notre contribution parce que le surendettement est un élément de notre société moderne auquel on doit faire face.

Je veux remercier les parlementaires, remercier les gens de l'Office de la protection du consommateur, les recherchistes qui ont travaillé à cette commission, remercier, bien sûr, le secrétariat de la Commission des relations avec les citoyens, qui m'accompagne, les gens au niveau de l'enregistrement, les gens qui sont ici, les gens qui sont à l'extérieur, au niveau de l'enregistrement -- c'est ce qui permet la qualité de nos débats et de retrouver trace de tout ce qui s'est dit -- remercier également tous les groupes qui ont participé à la Commission des relations avec les citoyens, qui sont venus déposer lors de ces auditions. C'est ce qui enrichit et ce qui va permettre de bonifier ce projet de loi. À tous, merci.

La commission ayant accompli son mandat, j'ajourne les travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h 48)

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