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Version finale

41st Legislature, 1st Session
(May 20, 2014 au August 23, 2018)

Friday, January 20, 2017 - Vol. 44 N° 67

Special consultations and public hearings on Bill 115, An Act to combat maltreatment of seniors and other persons of full age in vulnerable situations


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Table des matières

Auditions

Fédération des centres d'assistance et d'accompagnement aux plaintes (FCAAP)

Office des personnes handicapées du Québec (OPHQ)

Conférence des tables régionales de concertation des aînés du Québec

Curateur public

Mémoires déposés

Intervenants

Mme Véronyque Tremblay, présidente suppléante

Mme Francine Charbonneau

M. David Birnbaum

Mme Karine Vallières

M. Harold LeBel

M. François Paradis

M. Pierre Reid

*          Mme Manon Fortin, FCAAP

*          M. Josey Lacognata, idem

*          Mme Nathalie Lavoie, idem

*          Mme Stéphanie Bérard, idem

*          Mme Edith Keays, OPHQ

*          Mme Anne Hébert, idem

*          Mme Nicole Bolduc-DuBois, Conférence des tables régionales de concertation des aînés du Québec

*          Mme Jocelyne Rancourt, idem

*          Mme Isabelle Daigle, idem

*          M. Normand Jutras, Curateur public

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Neuf heures trente-quatre minutes)

La Présidente (Mme Tremblay) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens ouverte. Un beau bonjour à tous! Je vous souhaite la bienvenue et je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

La commission est réunie afin de poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de loi n° 115, Loi visant à lutter contre la maltraitance envers les aînés et toute autre personne majeure en situation de vulnérabilité.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. Mme Rotiroti (Jeanne-Mance—Viger) est remplacée par M. Reid (Orford) et Mme Lavallée (Repentigny) est remplacée par M. Paradis (Lévis).

Auditions

La Présidente (Mme Tremblay) : Merci beaucoup. Nous terminons ce matin les auditions en entendant les organismes suivants : la Fédération des centres d'assistance et d'accompagnement aux plaintes, l'Office des personnes handicapées du Québec, la Conférence des tables régionales de concertation des aînés du Québec et le Curateur public du Québec.

Sans plus tarder, je souhaite la bienvenue aux représentants de la Fédération des centres d'assistance et d'accompagnement aux plaintes. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, ensuite nous allons procéder à la période d'échange avec les membres de la commission, et je vous invite donc à vous présenter et à commencer votre exposé.

Fédération des centres d'assistance et
d'accompagnement aux plaintes (FCAAP)

Mme Fortin (Manon) : Bonjour. Mon nom est Manon Fortin. Je suis directrice générale de la Fédération des centres d'assistance et d'accompagnement aux plaintes, communément appelée la Fédération des CAAP. Bonjour et merci aux membres de la commission de nous accueillir ce matin afin de nous permettre de vous présenter nos observations et nos recommandations dans le cadre du projet de loi, et particulièrement, c'est sûr, nous, on amène une perspective terrain.

La Présidente (Mme Tremblay) : Merci beaucoup, Mme Fortin. Est-ce qu'il serait possible de présenter tous les gens qui vous accompagnent, s'il vous plaît?

Mme Fortin (Manon) : Oui, absolument. J'étais justement rendue là.

La Présidente (Mme Tremblay) : Ah! O.K.

Mme Fortin (Manon) : Pour l'occasion, je suis accompagnée de trois de nos membres, Mme Stéphanie Bérard, qui est à ma droite, qui est directrice générale du CAAP—Laurentides, Mme Nathalie Lavoie, du CAAP—Bas-Saint-Laurent, également directrice générale, et M. Josey Lacognata, directeur général du Saguenay—Lac-Saint-Jean.

La fédération accueille favorablement ce projet de loi. Nous sommes d'avis que le régime d'examen des plaintes s'avère un canal qui est approprié pour dénoncer la maltraitance. D'autre part, on émet certains questionnements. Notre mémoire souhaite mettre à profit l'expertise terrain développée par nos membres au regard du régime d'examen des plaintes et de la lutte contre la maltraitance afin d'apporter certaines réflexions et propositions qui permettront de bonifier le projet de loi.

D'abord quelques mots sur les centres d'assistance et d'accompagnement aux plaintes, communément appelés les CAAP. Ils sont d'abord des organismes communautaires qui sont légalement constitués, mandatés par le ministre de la Santé en vertu de la Loi sur les services de santé et les services sociaux pour assister et accompagner les usagers et les résidents de résidences privées pour aînés dans le cadre de leur démarche de plainte ou de signalement en regard des services et des soins de santé en vue de faire respecter leurs droits.

Il y a 16 centres d'assistance au Québec. Ils sont situés dans chacune des régions sociosanitaires. Ils sont présents sur le terrain depuis près de 25 ans, et les conseillers des CAAP sont des professionnels en relation d'aide et ont une solide expertise au plan du soutien à la personne dans un contexte de démarche de plainte et de signalement. Leur expertise se situe également sur le plan des droits des usagers, des critères et des normes de certification des résidences privées pour aînés et de tout ce qui touche les soins et les services dans le réseau de la santé et des services sociaux. Les CAAP ont d'ailleurs accompagné, au cours de la dernière année, plus de 6 500 personnes. Pour mieux comprendre notre rôle, je vous dirais que les CAAP sont des organismes équivalant aux CAVAC, mais dans un contexte santé et services sociaux.

Donc, en quoi les CAAP peuvent aider à contrer la maltraitance? Ils le font déjà en répondant aux demandes des personnes en matière de maltraitance sur le terrain parce que, dans le réseau de la santé et des services sociaux souvent, les soins et les services de santé sont intriqués avec des situations... avec le visage de la maltraitance, avec des formes de maltraitance.

Les CAAP ont un rôle terrain essentiel. Ils sont accessibles rapidement par un numéro sans frais unique. Ils rencontrent la personne, au besoin, à domicile dans un très court délai. Ils évaluent avec celle-ci la situation, adaptent les moyens mis en place pour bien l'assister et l'accompagner en fonction de ses besoins et de ses limites. C'est un service qui est offert, bien sûr, gratuitement et en toute confidentialité. Les CAAP, travaillant aussi en concertation avec le coordonnateur régional en maltraitance, ils siègent sur les comités à cet effet avec les partenaires du milieu et sont au fait des ententes sociojudiciaires qui sont en cours d'implantation dans chacune des régions du Québec.

• (9 h 40) •

La Fédération des CAAP a également déposé un mémoire concernant le plan d'action en maltraitance et commenté la politique type qui servira de canevas pour les établissements. Concernant notre mémoire, permettez-moi de vous présenter les recommandations que nous avons identifiées comme étant les plus importantes.

Tout d'abord, nous pensons, comme les commissaires aux plaintes ont amené, que la structure complète du régime d'examen des plaintes soit utilisée dans le cadre du traitement des plaintes et des signalements de maltraitance. Que le règlement de l'établissement qui pourra être adopté à cet effet précise la procédure applicable à l'intérieur des établissements pour contrer la maltraitance, et ce, en précisant les mécanismes de concertation des intervenants impliqués dans la trajectoire de services. Mme Bérard pourra vous en parler un peu plus longuement tout à l'heure.

Également, que les mesures de soutien disponibles pour aider une personne à formuler une plainte ou à effectuer un signalement soient précisées et, en ce sens, que les CAAP, qui sont les ressources ayant la structure et l'expertise nécessaires pour jouer ce rôle, soient dûment nommés au paragraphe 5° de l'article 3 comme étant les organismes communautaires désignés pour assister et accompagner une personne à formuler une plainte ou effectuer un signalement, comme le prévoit la loi santé et services sociaux actuellement. Cette recommandation s'applique également pour le chapitre IV, «Dispositions [modifications]», LSSSS. Que les articles 76.6 et 76.7 de celle-ci soient modifiés afin d'ajouter aux mandat et fonctions des CAAP l'assistance et l'accompagnement des aînés et de toute autre personne majeure en situation de vulnérabilité lors de leur démarche de plainte ou de signalement, ajouter nommément la lutte à la maltraitance.

Également, que le gouvernement effectue une campagne d'information et de sensibilisation d'envergure nationale afin d'informer la population sur les différents types de maltraitance, sur les droits de la personne, sur le régime d'examen des plaintes comme moyen permettant de dénoncer la maltraitance et que cette campagne de promotion là s'applique également aux établissements parce que c'est important que la connaissance des recours et le fait d'y accéder rapidement et que ce soit facile pour les gens... Donc, c'est le moyen, il faut agir au plan de la promotion et avoir le financement qui va avec. Donc, que soit ajoutée à la présente loi aussi l'obligation pour les établissements d'afficher à la vue du public les coordonnées des commissaires aux plaintes et des CAAP pour que, justement, le recours soit facilité.

Que la possibilité de recourir à un CAAP pour porter le signalement d'une personne qui souhaite garder l'anonymat tout en dénonçant une situation de maltraitance soit expressément indiquée et décrite dans les politiques de lutte contre la maltraitance adoptées par les établissements. C'est-à-dire, si un employé décidait de dénoncer une situation, mais il veut garder son anonymat, actuellement, il peut appeler le CAAP, puis le CAAP va porter le signalement pour lui sans révéler son identité. Alors, que ce soit possible de le faire, ça, autant pour une personne... Quand on n'a pas besoin d'identifier la personne... que la situation ne permet pas d'identifier la personne, on peut porter le signalement pour conserver l'anonymat d'un employé ou d'une personne.

Que les ressources humaines et financières nécessaires au bon déroulement des opérations des commissaires aux plaintes soient accordées sans disparités régionales. En ce moment, on sait que ce sont les conseils d'administration qui nomment les commissaires aux plaintes et les commissaires adjoints aux plaintes. Alors, dépendant des orientations de chacune des régions, il y a... il peut y avoir disparité au niveau du nombre des personnes qui sont nommées. Donc, il faudrait qu'il y ait des budgets dédiés aux équipes de commissaires pour que, notamment... également que ces budgets-là soient attribués directement aux commissaires pour qu'il y ait une indépendance administrative, que ce soit... Par exemple, s'ils ont besoin de nommer une personne dans leur équipe, qu'ils aient le pouvoir de le faire.

Donc, en gros, ce sont les recommandations les plus importantes que nous souhaitions porter à votre attention. Pour le reste des recommandations, nous vous demandons de consulter notre mémoire, et ça nous fera plaisir de répondre à vos questions.

La Présidente (Mme Tremblay) : Merci beaucoup, Mme Fortin, pour votre exposé. Nous allons maintenant débuter la période des échanges. Mme la ministre, à vous la parole.

Mme Charbonneau : Merci, Mme la Présidente. Bon matin! Bon matin, tout le monde! Dernière matinée pour nous pour écouter les groupes, qui fut une semaine folle d'émotions, je vous dirais, puisque parler de maltraitance nous provoque, nous... dans comment on le perçoit, mais, en même temps, d'avoir eu des témoignages avec des exemples de choses qui se passent sur le terrain, ça peut être fort émouvant.

Maintenant, bienvenue à vous, mesdames monsieur. On a beaucoup entendu parler de vous cette semaine. Plusieurs partenaires nous ont signalé soit votre présence, soit votre complicité, soit l'apport que vous pourriez apporter à l'ensemble du système de la santé, mais surtout au niveau de la maltraitance chez nos aînés. Donc, bravo! parce qu'habituellement quand les partenaires parlent de nous et signifient l'apport qu'on peut apporter de plus, c'est parce qu'ils apprécient le travail que vous faites.

Avant que la session commence, je vous le disais un peu à la blague : Autrement on n'entend pas parler de vous. Et vous m'avez dit : Merci. C'est comme ça qu'on veut que ça se passe. On ne veut pas que vous entendiez parler de nous autrement parce que ça donne tout l'aspect de cette discrétion que vous avez sur le terrain à faire le travail, à bien le faire et à accompagner les gens. Donc, là-dessus, je suis obligée de... je ne suis pas obligée, mais je me fais plaisir de vous dire bravo pour le travail accompli à l'ensemble des gens que vous représentez parce que vous êtes bien entourés de gens, mais c'est quand même 16 régions.

Quand vous avez dit 16 régions, ça m'a un peu interpellée parce qu'à chaque fois que nous, on met des coordonnateurs en place ou des choses comme ça, il y a plus de régions. Et j'ai bien compris que vous étiez rattachés au niveau du principe de la santé.

Mme Fortin (Manon) : Oui, c'est bien ça.

Mme Charbonneau : Et j'imagine que le groupe Mauricie-Centre-du-Québec, ça doit être un grand, grand groupe.

Mme Fortin (Manon) : Oui, effectivement, c'est une de nos régions.

Mme Charbonneau : Oui. Mais ça doit être quand même un... parce que le nombre de gens que vous avez doit être différent dans chacune de vos régions.

Mme Fortin (Manon) : Oui. Il y a des régions qui sont plus populeuses que d'autres.

Mme Charbonneau : Exactement. Exactement. Ça vous fait quand même une grande région à couvrir.

Revenons à vos recommandations. Merci. Merci d'avoir bien pris le temps de regarder chacun des articles puis de nous avoir fait des recommandations. Mon premier commentaire va aller à la recommandation 10, où vous nous parlez de garder dans l'anonymat. À l'article 10 de notre projet de loi, vous allez voir, il y a vraiment... là, on a titré l'anonymat des personnes qui font une divulgation pour s'assurer que... un, les représailles, hein, parce qu'on a aussi pensé qu'il ne faudrait pas qu'il y ait de représailles, mais, deux, de garder le principe de l'anonymat. Donc, je vous rappelle juste, si vous avez quelques minutes plus tard, là, de le regarder. Si jamais vous ne reconnaissez pas là l'anonymat qu'on se doit d'avoir, je vous le dis, vous pouvez nous relancer, là. Il n'y a pas de souci.

Dans votre recommandation 8, que le gouvernement effectue une campagne d'information et de sensibilisation d'envergure nationale, vous n'êtes pas les premiers qui nous le disent. On l'entend très bien. On a vu aussi, hein, avec la campagne La vie en rose, puis avec la campagne de M. Deschamps. Nous on l'a vu dans Aide Abus Aînés, la ligne téléphonique. Il y a une augmentation d'appels téléphoniques quand on fait une campagne nationale. Mais je viendrais plus sur le principe qui dit que les établissements soient mandatés pour faire la promotion d'un régime d'examen des plaintes comme outil de dénonciation de la maltraitance parce qu'il y a un débat cette semaine qui confronte un des articles du projet de loi, qui est celui de la dénonciation obligatoire.

Puis, ce matin, j'ai le goût de vous entendre parce que toute la réflexion qu'on a à faire sur le principe de la dénonciation obligatoire, c'est aussi le débat de : Qu'advient-il si on l'oblige? Quelles seront les mesures qu'on mettra en place pour pouvoir donner un aspect punitif si je ne dénonce pas? Alors, je vous donne un peu une partie de la réflexion qu'on a eue cette semaine. Il y a des gens qui nous ont dit : Oui, mais. Et dans le «oui, mais», il y a : Bien, peut-être pas des membres de la famille. Peut-être pas des regroupements. Hein, le comité des usagers nous ont dit : Bien, oui, il faut dénoncer obligatoirement, mais il ne faudrait pas que ça soit le comité des usagers qui en porte l'odieux s'il n'a pas dénoncé. Donc, vous avez compris qu'il y a des exceptions.

Hier, on a un groupe de gens qui nous ont dit : Ne pas obliger de dénoncer pour les gens autonomes, mais obliger de dénoncer pour les gens en situation de vulnérabilité. Donc, j'essaie de situer l'idée d'obligation. J'essaie de voir si l'autodétermination, qui est pour moi une valeur majeure, se doit de rester cadrée comme elle se doit. Je voulais savoir, vous, sur le terrain, là, qu'est-ce qu'on va... vous nous demandez de faire la promotion de l'attribution de qui vous êtes, l'accompagnement que vous pouvez en faire, la promotion de la politique aussi, j'imagine. Donc, vous voyez ça comment?

Mme Fortin (Manon) : Je donne la parole à M. Josey Lacognata, qui va répondre à votre question.

• (9 h 50) •

M. Lacognata (Josey) : Oui, mais, écoutez, nous, on a beaucoup suivi, depuis plusieurs années, les travaux de la Chaire de recherche en maltraitance. Il y a, au Québec, tout un bagage. On a à peu près 25 ou 27 mécanismes qui sont en place pour faciliter une protection sociale des gens qui sont en vulnérabilité. Est-ce qu'à ce stade-ci rajouter une obligation de dénonciation ça va nous faire atterrir à une protection optimale? On se dit déjà... Dans certaines législations, que ce soit au niveau des codes d'éthique des établissements, que ce soit au niveau des ordres professionnels et que ce soit même au niveau citoyen, on a déjà une obligation de porter assistance à quelqu'un qu'on considère en danger ou en difficulté. Est-ce qu'on ne devrait pas plutôt maximiser ça, faire en sorte que les mécanismes se parlent mieux entre eux? Parce que c'est un peu ce qu'on voit sur le terrain, malheureusement, des gens, parce que les mécanismes ne sont peut-être pas bien mariés entre eux, tombent entre une craque.

Donc, on se dit : On a un coffre à outils qui existe, qui devrait être mieux identifié, avec des trajectoires qui sont claires, en identifiant correctement le rôle de tous et chacun à l'intérieur de ça. Et ça, on se dit : C'est déjà en place, ça ne commanderait pas de rajouter une structure additionnelle, ça laisse aussi une marge de manoeuvre parce qu'il y a toute la question aussi, quand vous dites l'«empowerment», il y a toute la question... la personne qui vit cette difficulté... le coût-bénéfice. Des fois, il y a des gens, et ça, on va le voir au niveau de la maltraitance faite par des proches, avec les trajectoires puis les ententes sociojudiciaires... Mon fils vient me voir uniquement parce qu'il a des difficultés x le premier de chaque mois, je le sais que je vis un peu de maltraitance, il vient me soutirer, mais, en même temps, ça me permet de me sécuriser, je sais qu'il est encore vivant.

Il faut trouver un équilibre là-dedans. Ce qu'on dit, c'est que, oui, on a des gens vulnérables, mais on a un coffre à outils, au Québec, qui est merveilleux. Il y a 25 recours, il y en a tout plein, des outils. Malheureusement, présentement, est-ce qu'ils fonctionnent optimalement entre eux afin de protéger rapidement les gens qui sont en situation de vulnérabilité? Alors, à ce stade-ci, on se dit : Rajouter une obligation de signaler, est-ce qu'on va réellement atterrir à l'objectif de protection? Alors, on a un «oui, mais», nous aussi.

Mme Charbonneau : Mais vous avez compris que je vais vous forcer à me dire un oui ou un non.

Mme Fortin (Manon) : C'est un non.

Mme Charbonneau : Parce que, veux veux pas, on a une tête à se faire, hein? Nous, les législateurs, on a à regarder ça avec une optique de... parce qu'une loi ne s'écrit pas sur un oui, mais elle s'écrit sur des facteurs de risque qui sont concrets ou de protection qui sont aussi concrets.

Donc, je comprends que le coffre à outils de 25...parce que vous avez raison, il y a une multitude de mesures, vous avez aussi raison, puis peut-être que vous avez éveillé chez moi quelque chose qui pourrait se rajouter dans une loi, c'est-à-dire une obligation de communication entre les uns et les autres parce que la communication, c'est peut-être quelque chose qui... en tout cas, ici, on en a beaucoup parlé, information pour faire de la prévention, mais aussi communication, donner aux aînés toute l'information sur leurs droits, pour qu'ils aient une bonne idée de comment bien faire les choses. Donc, ça me donne une meilleure idée de vers où vous allez.

Vous disiez aussi, dans la recommandation 7, de faire une reconnaissance qui fait en sorte qu'on peut vous donner tous les effectifs possibles pour faire un signalement, puisque vous avez une opportunité incroyable. Vous n'avez pas lu la dernière phrase, vous êtes stratégique, qui disait que les ressources financières afférentes à l'actualisation du mandat de la CAAP soient ajustées en conséquence. Je vous donne une opportunité, là, parlez-moi de l'ajustement parce qu'on en a beaucoup parlé ici, de pouvoir appuyer le commissaire aux plaintes. Maintenant, de votre côté, ça veut dire quoi?

Mme Fortin (Manon) : Bien, écoutez, j'étais là quand le regroupement des commissaires a passé puis je vous ai entendu parler que le ministre Barrette avait dit, s'il y a besoin de sous, s'il y a besoin d'investissements pour apporter les ressources, bien, qu'il était prêt à avancer les sommes. En ce sens-là, nous, on pense qu'automatiquement en faisant la promotion de recours possibles en matière de maltraitance il risque d'y avoir des gens qui vont se manifester, comme vous l'avez mentionné, dans le cadre de la ligne... au niveau abus aînés.

Donc, à ce moment-là, on croit qu'effectivement on devrait avoir une augmentation des demandes, bien que nous en traitons déjà. Nous croyons qu'il y a aura une augmentation des demandes en regard des personnes vivant des situations de maltraitance. Donc, je crois qu'il y aura des besoins à cet effet, des besoins en matière de ressources humaines, ressources financières.

La Présidente (Mme Tremblay) : Il reste 5 min 30 s.

Mme Charbonneau : D'Arcy-McGee.

La Présidente (Mme Tremblay) : Alors, je cède la parole au député de D'Arcy-McGee.

M. Birnbaum : Merci, Mme la Présidente. Mmes Fortin, Bérard, Lavoie, M. Lacognata, merci beaucoup pour votre présentation. Il me semble que c'est assez pertinent parce qu'on peut parler d'un encadrement et des protocoles qui vont faciliter la lutte contre la maltraitance, mais, en quelque part, on parle de l'importance d'une offre active. Il faut changer le comportement des gens, y compris les gens très vulnérables, pour qu'ils se sentent en confiance de dénoncer les actes de maltraitance, d'agir.

Deux questions. J'aimerais que vous nous parliez de comment un résident dans un CHSLD, quelqu'un qui se sent visé, vous sollicite ou vous les sollicitez. Comment ça marche sur le terrain? Et, deuxième question qui est liée, vous notez que vous serez contre l'idée que le Regroupement provincial des comités d'usagers ait le mandat d'assistance et d'accompagnement, là il faut que je parle de l'offre active. Pouvez-vous nous parler de pourquoi ça serait une meilleure idée que ça soit vous et pas les comités d'usagers?

Mme Fortin (Manon) : D'abord, dans un premier temps, je vais transmettre la parole à Mme Lavoie, qui va vous parler de comment ça se passe directement quand il y a une demande de service, par exemple, qui provient d'un résident en CHSLD où il y aurait des éléments de maltraitance. Et, concernant le comité d'usagers particulièrement, parce que le Regroupement provincial des comités d'usagers, à notre avis, ne pourrait pas avoir le mandat, c'est plus les comités sur le terrain, alors c'est M. Lacognata qui va vous parler de comment les comités d'usagers, justement... quelle est notre argumentation-là à l'effet qu'il y aurait certaines difficultés pour les comités d'usagers sur le terrain à cet effet.

Mme Lavoie (Nathalie) : Alors, bonjour. Je vais vous répondre concernant habituellement comment ça se déroule. Alors, il y a le numéro 1 877, là, qui est commun partout. Les gens... c'est un appel téléphonique, on regarde avec la personne, on l'écoute pour voir qu'est-ce qu'il se passe. On clarifie avec elle la situation. On regarde aussi son besoin. Et, si elle a un besoin qu'on la rencontre, on va se rendre à domicile. On couvre tous les territoires et on regarde avec elle, on clarifie la situation. On lui propose les différents choix où est-ce qu'on peut l'orienter selon les différents recours. On regarde la responsabilité en fonction du problème qui a été identifié et on va vraiment voir avec elle, lui apporter le soutien et l'amener à faire son choix, et on va respecter son choix. Si c'est de porter plainte, nous allons rédiger la plainte, lui proposer, et c'est elle qui signe. On accompagne auprès du commissaire si la plainte est déposée dans le régime d'examen des plaintes. Alors, on s'adapte vraiment en fonction des personnes et de leurs choix.

C'est de l'assistance et de l'accompagnement. On ne fait pas de représentation, alors on ne parle pas en son nom comme un avocat. C'est vraiment en termes de soutien, et on est là tout le long du recours, avant, pendant et après aussi. Lorsqu'elle reçoit les conclusions du commissaire, on l'aide à comprendre la situation. Puis il y a toutes sortes de situations, hein, comme toutes sortes de besoins. La même situation peut arriver à deux personnes différentes, mais elles n'auront pas les mêmes attentes à leurs conclusions. Ça, c'est si elles décident de faire une plainte.

Et, comme Manon l'a dit tout à l'heure, il y a aussi le signalement. La politique peut décider de faire un signalement, et on va le faire... on va continuer à l'accompagner dans ce cas là. Et aussi le signalement anonyme, on en fait déjà des signalements quand la personne ne veut pas être identifiée ou que c'est un proche. Si ce n'est pas la personne elle-même qui fait la plainte, on peut faire, nous, un signalement au nom du CAAP. Alors, il n'y a que nous qui connaissons le nom de la personne. Ça se produit plus souvent dans les résidences privées pour aînés quand les gens sont en situation plus de vulnérabilité. Alors, c'est une situation, là, qu'on connaît, le signalement, on est habitués, là, de travailler avec cet outil-là.

La Présidente (Mme Tremblay) : ...minutes. Je cède maintenant la parole à la députée de Richmond.

• (10 heures) •

Mme Vallières : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci beaucoup, mesdames et monsieur, pour votre présence toujours bien appréciée. Étant une députée de terrain, je sais à quel point vous êtes un organisme de terrain aussi parce que, constamment dans nos bureaux de comté, en fait, c'est le cas dans le comté de Richmond, en tout cas, on est en lien avec votre organisme. À chaque année, on a l'opportunité de se rencontrer aussi pour faire une espèce de bilan puis regarder quelles sont les meilleures pratiques, ensemble, qu'on peut mettre en place puisque nous, on reçoit des gens et que vous en recevez aussi. Donc, déjà un grand merci de cette organisation-là.

J'ai bien pris connaissance de votre mémoire, mais il y a un sujet dont on a beaucoup parlé, soit la surveillance par caméra, où je n'ai pas nécessairement pu voir votre opinion là-dessus. J'aimerais vous entendre sur votre opinion sur les orientations ministérielles. Je ne sais pas si vous avez pu regarder le document. Comment, justement parce que vous êtes terrain, vous voyez différentes situations dans différents milieux aussi, comment vous entrevoyez ces orientations-là par rapport au travail que vous faites, vous, sur le terrain.

La Présidente (Mme Tremblay) : Très rapidement parce que le temps est déjà écoulé. Donc, peut-être en 30 secondes maximum.

Une voix : M. Lacognata.

M. Lacognata (Josey) : Alors, écoutez, au niveau des caméras, ce qu'on se dit, c'est qu'on n'empêchera jamais un usager ou son représentant légal d'utiliser une caméra dans son milieu de vie, qui est sa chambre. Par contre, nous, on a fait une réflexion en disant : Pourquoi on en est rendu là, au niveau du Québec, à ce que les proches aient la nécessité de penser d'installer une caméra? Alors, on se dit pourquoi, collectivement, ne pas lutter à l'amont du problème, qui est : Est-ce qu'on a suffisamment de ressources pour que la qualité de service et la quantité de services soient livrées d'une façon qui est adéquate? Parce qu'on se disait : Demain matin, Mme Simard, M. Tremblay sont en chute dans leur chambre, oui, les proches vont voir ça sur caméra, mais s'il n'y a qu'une préposée dans la résidence ou s'il n'y a qu'une préposée au niveau de l'étage du CHSLD, les gens vont rester par terre quand même.

Alors, la caméra, on comprend que les gens ont ce besoin de protection là, c'est technologique, mais on se dit : Le coeur du problème, est-ce qu'on devrait s'attaquer au ratio de gens présents sur place pour livrer en quantité suffisante les services dont les gens ont besoin?

La Présidente (Mme Tremblay) : Merci beaucoup à la partie gouvernementale. C'est maintenant au tour du député de Rimouski, de l'opposition officielle, qui a accepté, là, de donner une partie de son temps pour que vous puissiez compléter votre réponse.

M. LeBel : Merci, Mme la Présidente. Bonjour, tout le monde. Je salue Mme Lavoie, qui vient de chez nous. Un petit côté chauvin, un peu, là. C'est la vie. J'ai le droit.

C'est nouveau pour moi. J'ai appris plein de choses cette semaine, là, plein de choses que... mais j'ai beaucoup de difficultés à voir le cheminement de tout ça. J'essaie de voir puis j'espère que, quand on va étudier le projet de loi, on va arriver à clarifier tout ça, mais quand vous me parliez, tantôt, vous avez dit : 25 ou 27 mécanismes. Là, là, vous m'avez encore plus découragé. Je pensais qu'il y en avait une dizaine, mais là vous en rajoutez. Tu sais, genre, il y a la ligne abus aînés, que j'ai entendu, il y a le Protecteur du citoyen qui peut recevoir des plaintes, le Curateur, la Commission de protection des droits qui peut aussi avoir des plaintes, bon, les comités d'usagers, la police avec des comités, vous autres, le CAVAC, bon.

Il s'ajoute... il y a plein de choses. Puis là je me dis, la... Puis en plus, depuis une semaine, on se dit qu'il faut ouvrir du réseau, il faut sortir du réseau. Il faut aussi protéger les personnes aînées ou vulnérables qui sont à l'extérieur du réseau. On parle, entre autres, des entreprises d'économie sociale qui peuvent voir... les gens qui font du maintien à domicile peuvent voir des choses, on parle des agences privées, la maltraitance financière, les institutions, les ordres... Aïe! Ça devient... Là, déjà qu'il y avait déjà beaucoup de mécanismes, beaucoup de portes d'entrée, et là on rajoute d'autres secteurs qu'il faudrait aussi... Moi, je commence à trouver que ça peut être compliqué pour la personne qui, là... Moi, je vois toujours la personne, là, qui subit la maltraitance, qui est vulnérable. Comment elle fait pour se sortir de tout ça? Où elle appelle? La ligne, c'est-u... J'aimerais ça que vous... Selon votre expérience, là, avec tout ce qu'on s'est dit cette semaine, c'est quoi, la meilleure façon pour clarifier la situation?

Mme Fortin (Manon) : Dans le fond, avant de transmettre la parole à Mme Bérard, qui va vous parler des ententes de collaboration, je vais vous tracer un petit topo graphique qui va vous permettre de comprendre comment on voit ça, nous autres.

Quand on parlait de mécanismes qui permettent de soutenir la personne, c'est-à-dire qu'il y a beaucoup d'organismes communautaires, d'intervenants, qui ont été interpellés pour être les yeux puis les oreilles, puis apporter une aide quand on a à identifier la maltraitance, puis à soutenir les gens pour la dénoncer, O.K.? Ça, c'est une chose. Il y a un seul recours possible, officiel... bien, deux, là, en soit, là, de la façon dont je le vois : le régime d'examen des plaintes, qui permet justement de traiter une plainte et de faire des recommandations, ça se fait déjà à l'heure actuelle au niveau du réseau de la santé et des services sociaux... parce que les droits des usagers, là, on parle de dignité, de sécurité, de droit d'avoir des services adéquats, donc, quand on ne les a pas, là, il y a une forme de maltraitance qui est là, là. Donc, ça, c'est une chose. Et puis il y a la Commission des droits de la personne, qui est un mécanisme, je pense, qu'il faudrait venir bonifier pour inclure la maltraitance parce qu'on parle d'exploitation. Je pense que c'est Me Ménard qui avait amené cette... De venir bonifier, je pense que ce serait bien de le faire. Mais c'est un mécanisme qui est beaucoup plus formel et qui prend beaucoup plus de temps.

Le régime d'examen des plaintes, on parle d'environ 45 jours pour le traitement de la plainte avec des conclusions à l'autre bout puis des recommandations, des fois, donc qui fait que ça peut bouger au niveau... Mais un recours plus formel, judiciaire, comme la Commission des droits de la personne, je pense que ça peut être très pertinent aussi parce qu'il y a des gens qui vont favoriser cette voie-là parce qu'ici il n'y a pas de dommages et intérêts dans le cadre du régime d'examen des plaintes, là. C'est juste le respect des droits de la personne puis s'assurer qu'on rétablit la situation. Donc, ça, c'est une chose.

En ce qui concerne les ententes de collaboration entre les partenaires puis qu'est-ce que ça peut faire concrètement en soutien, Mme Bérard va vous en parler.

Mme Bérard (Stéphanie) : Merci. Vous avez mentionné certains groupes, dont les services de police, les CAVAC qui sont présents. Donc, il existe, dans plusieurs régions, des ententes de collaboration, qui sont déjà signées, visant à contrer la maltraitance. Donc, c'est avec le coordonnateur à la lutte à la maltraitance du Secrétariat aux aînés, qui a mobilisé certains regroupements sur le terrain, dont Sûreté du Québec, entre autres, il peut y avoir un service de police du milieu, les CAVAC sont présents, les CAAP, on est présents. Il y a également nos partenaires, FADOQ, qui sont là, les tables de concertation des aînés dans certaines régions, dans la plupart des régions, ils sont présents. C'est sûr que les travaux ne sont pas avancés de la même façon d'une région à l'autre. Par contre, ce qui est important, c'est que ces ententes de collaboration là sont essentielles pour le bon fonctionnement et l'arrimage des 25 recours qui existent présentement.

Je vais vous donner un exemple terrain parce que je sais que vous aimez entendre ce qui se passe sur le terrain. Au CAAP — je ne nomme pas de région en particulier, je vais parler au «on» — on reçoit un téléphone de la part d'une préposée aux bénéficiaires qui nous dit : Bonjour. J'aimerais juste vous informer que, ce soir, je finis mon quart de travail, je quitte, et il n'y a pas personne pour répondre à l'appel pour le bouton d'urgence dans la résidence X. Donc, à ce moment-là, en ayant une entente de collaboration qui est liée à la confidentialité des renseignements personnels, on a tout de suite mobilisé les instances concernées, dont les services de police qui étaient là, sur le territoire, pour s'assurer de la sécurité des gens de ce milieu de vie là.

Donc, ces ententes de collaboration là sont vraiment primordiales pour le bon fonctionnement et l'arrimage, que les organismes, entre eux, se parlent. Et c'est ce qu'on demande. On demande à ce que les organismes impliqués pour venir en aide aux gens vulnérables puissent se rencontrer sur le terrain, et c'est ce qu'on fait régulièrement. Ces ententes de collaboration là contribuent à ce que les intervenants du milieu, que ce soient les services de police, les CAVAC, si des gens ont besoin de soutien, qui vivent une période choc post-traumatique, par exemple, quand on parle de maltraitance, qui peut avoir des représailles au niveau émotion...

Nous, les CAAP, on est là pour tout ce qui est la démarche, les bichonner, si on veut, dans cette situation-là. Ils n'ont pas à se soucier de tout ce qui est administratif, de rédiger la plainte. Ils en ont déjà assez dans leurs émotions. Donc, le CAAP est là pour ça. On rédige la plainte pour eux. On s'occupe de les rediriger vers la bonne instance dans le cas d'une démarche de plainte. Que ce soit, comme ma collègue disait, au niveau du régime d'examen des plaintes ou à la Commission des droits de la personne, on va les rediriger au bon endroit. On a un service d'accompagnement, mais aussi de référence pour ces gens-là. Donc, on ne les laisse pas seuls, et c'est ça qui est important.

Mme Fortin (Manon) : Peut-être dire le résultat qui s'est passé à la résidence, finalement.

Mme Bérard (Stéphanie) : Bien, finalement, dans ce cas-ci, le cas terrain, bien, au lendemain de l'événement, parce qu'on s'entend que ça s'est passé dans la nuit, le soir, mais effectivement il y a eu une intervention qui a été faite tout de suite auprès du directeur de l'établissement. On n'est pas obligés d'attendre le 45 jours de délai de traitement d'une plainte. Quand il y a des situations imminentes qui arrivent au niveau d'un incident qui peut arriver sur le terrain, bien, à ce moment-là, il y a une intervention qui va se faire immédiatement. Donc, c'est important de dire que ça existe, mais il faut nous outiller correctement pour le faire. Il faut que ces organismes-là puissent avoir les ressources pour se parler entre eux.

Mme Fortin (Manon) : Mme Lavoie va compléter votre réponse également.

Mme Lavoie (Nathalie) : Oui. M. LeBel, je vous ai déjà parlé du projet pilote qu'on a mené au Bas-Saint-Laurent et au Saguenay—Lac-Saint-Jean, qui est un bon exemple de deux recours qui étaient séparés, la Régie du logement et le régime d'examen des plaintes. Nous, on accompagnait les gens qui avaient des problèmes dans les résidences privées pour aînés au niveau de la certification et on voyait que les gens avaient aussi des problèmes par rapport à leurs baux, mais on ne pouvait pas intervenir. Alors, on a déposé un projet qui a été accepté au Secrétariat des aînés. Et le fait d'être là, nous, et de pouvoir diriger les gens par nos connaissances, nos expertises et aussi notre implication dans chacun des milieux au niveau de la maltraitance, on connaît les recours, on connaît les ressources.

Alors, nous, on pense qu'on peut être aussi une bonne porte d'entrée pour diriger les gens au bon endroit parce que ça demande beaucoup de connaissances et beaucoup de recours. Et, je peux vous dire, le projet pilote, on l'a terminé en décembre, et les résultats sont très positifs. On a pu aider beaucoup de gens et on a pu les aider aux deux niveaux.

• (10 h 10) •

La Présidente (Mme Tremblay) : Merci beaucoup. Merci à l'opposition officielle. C'est maintenant au tour du député de Lévis, du deuxième groupe d'opposition.

M. Paradis (Lévis) : Merci, Mme la Présidente. Bonjour à tous en cette dernière journée, dernier avant-midi. Mesdames, monsieur, bienvenue.

Oui, c'est vrai que c'est complexe quand on regarde le nombre d'organismes, hein? Puis, de fait, dans le document qui émane de la chaire de recherche, on dit d'ailleurs de ces 26 mécanismes, bon, on dira 26, 27, que 12 seulement sont répertoriés et sont considérés comme étant utilisés pour réagir aux situations de maltraitance. Puis, déjà là, 12, c'est énorme. Puis en plus que, là, on fait la distinction entre les mécanismes de surveillance internes puis les externes. Ça fait qu'imaginez-vous, manifestement, celui qui en a besoin, il risque d'y perdre son latin, puis ça lui prend de solides bases.

Mais, dans ça, on dit : «Dans le mécanisme de surveillance de la qualité à l'interne du réseau de la santé, notamment pour réagir aux situations de maltraitance, on nomme — entre autres, là, il y en a plusieurs, mais je m'en vais sur la dernière ligne — le Regroupement provincial des comités des usagers, le Conseil pour la protection des malades et les centres d'assistance et d'accompagnement aux plaintes.»

Certains nous ont dit : Les plus près de ceux et celles qui vivent une situation de maltraitance, et il n'y a pas de secret, vous l'avez probablement entendu, c'est le regroupement des comités des usagers, qui disait : Donnez-nous cette fonction-là également. Vous dites : Nous avons l'expertise, nous sommes présents partout, nous en faisons. Je comprends donc que vous souhaiteriez, au bénéfice de ceux et celles qui ont besoin de vos services, que vous soyez nommément l'organisation qui devrait se charger de l'accompagnement. Est-ce que je comprends que, quelque part, ce que vous souhaiteriez en fonction de votre expertise, c'est un peu le monopole de l'accompagnement dans le dossier de ces... dans ces cas-là de plaintes de maltraitance?

Mme Fortin (Manon) : Dans le fond, je vais transmettre la parole à M. Lacognata pour répondre, mais d'abord il faut savoir que nous travaillons dans un esprit de concertation. Nous pensons que, dans le cadre de maltraitance, c'est un ensemble de partenaires qui peut agir. Et, en ce sens-là, la fédération des CAAP, comme ses membres, travaille en collaboration avec les comités d'usagers. Et, en ce sens-là, M. Lacognata va vous expliquer comment ça se passe sur le terrain.

M. Lacognata (Josey) : Vous savez, ce ne sont pas les regroupements qui livrent les services directement, ce sont les comités des usagers, comités de résidents. Avec les comités des usagers, comités de résidents, qui sont majoritairement formés de gens bénévoles, de gens citoyens qui s'impliquent pour améliorer le sort de leurs concitoyens, on fait des séances d'information communes, on tente de vulgariser les droits et recours d'une façon simple pour les gens qui sont sur le terrain.

Vous savez, au niveau du guide de référence pour contrer la maltraitance, souvent, ce qui est identifié au niveau de l'acte bénévole, ce qu'on demande aux gens, c'est de faire du repérage, et c'est de faire de la détection, et c'est de livrer l'information. Et les gens qui sont sur le terrain, ils sont importants, ils sont primordiaux, ils sont dans les milieux. Une fois qu'ils ont détecté, une fois qu'ils ont vu, l'objectif pour que ça fonctionne, c'est qu'après ça ils puissent passer une porte pour qu'on travaille en complémentarité. C'est ce qui se fait dans la plupart des régions au niveau des comités des usagers, comités de résidents. Et souvent on a eu, dans nos expertises puis dans nos expériences, des gens qui sont membres de comités des usagers et membres de comités de résidents et qui frappent à nos portes pour avoir un service d'assistance pour porter plainte parce que, souvent, eux-mêmes vont être des fois dépassés par cette situation-là, vont être impliqués émotivement parce qu'au quotidien vont aller voir les gens, vont travailler en lien avec les gestionnaires et des fois, à un moment donné, disent : On dirait que, là, c'est rendu trop gros. Je ne sais plus quoi faire avec ça.

Alors, moi... ce qu'on essaie de vous faire voir, c'est que chacun a un rôle, mais le rôle doit être bien circonscrit pour ne pas qu'on s'y perde. Et les gens disent : Mais à quelle porte je frappe? Il faut que les portes se connectent entre elles.

M. Paradis (Lévis) : ...parce qu'hier on a entendu cette notion-là aussi de bénévolat par l'association québécoise des retraités des secteurs de l'enseignement, qui disait notamment : Nous autres, le comité d'usagers, il y a des bénévoles là-dedans. On en a qui font partie de notre association, puis ce n'est peut-être pas leur rôle de faire de l'accompagnement, alors qu'il existe des organisations où les gens ont d'abord une rémunération — aussi minime soit-elle, là, puis on n'ira pas dans vos échelles de salaire, mais, bref — puis cette volonté, cette expertise-là de mener à terme un processus qui est drôlement important.

Vous venez de dire : Ça se fait dans la plupart des régions. Est-ce que je comprends qu'il y a des régions où, manifestement, la connexion est moins facile?

M. Lacognata (Josey) : Si c'était parfait, on n'en serait pas là. Vous savez, des fois, les gens ont plein de bonnes intentions, plein de bonne volonté. Est-ce que les rôles de tous et chacun sont bien campés, bien compris? Puis, vous savez, tout à l'heure, on parlait de bénévolat, d'action bénévole. Vous savez, c'est une obligation pour les établissements d'avoir des comités des usagers actifs.

En 2013‑2014 au Québec, on versait 5,5 millions pour le fonctionnement des comités des usagers. Nous, parallèlement, à cette même époque-là, on recevait 3,8 millions pour desservir nos gens. Alors, on se dit : Si on travaille bien ensemble, si les rôles de tous et chacun sont bien en place, on a tout un coffre à outils pour protéger nos gens de façon efficace.

Puis, comme je vous le redis, on a des professionnels qui sont formés en intervention sociale. Que ce soient des techniciens, des psychoéducateurs, quelqu'un qui est un membre de comité de résidents, qui est un membre de famille, qui veut s'impliquer et qui voit une situation de maltraitance, il est parfois isolé avec ça. Il faut créer pas l'obligation, mais le réflexe, la mécanique de dire : J'ai un rôle à jouer, je le joue très bien. Maintenant, je passe la puck pour continuer ça, pour protéger l'individu.

M. Paradis (Lévis) : Continuons là-dessus. Est-ce que je comprends que vous souhaiteriez, au bénéfice de ceux et celles qui auraient besoin de vos services dans les cas dont on parle, que cette vocation vous soit reconnue, permettant de faire en sorte que l'information de votre existence... Je suis convaincu qu'il y a des résidences d'aînés, là, où je vais aller me promener cet après-midi puis je dis : Puis le CAAP, racontez-moi. Là, on va dire : C'est quoi, ça?

Alors, dans la mesure où, et c'est ce que je comprends, vous souhaitez être identifiés comme les partenaires de l'accompagnement officiels, évidemment, ceci s'accompagne d'une campagne de sensibilisation pour faire en sorte que tous... (panne de son) ...savoir que vous...

La Présidente (Mme Tremblay) : Nous n'aurons malheureusement pas le temps d'entendre la réponse, puisque le temps est écoulé. Désolée.

M. Paradis (Lévis) : Mais vous faites un signe de tête. J'imagine que... Hochez de la tête, tu sais.

La Présidente (Mme Tremblay) : Alors, Mme Bérard, Mme Fortin, Mme Lavoie, M. Lacognata, merci beaucoup pour votre contribution aux travaux de la commission.

Je suspends quelques instants les travaux, le temps de permettre au prochain groupe de prendre place.

(Suspension de la séance à 10 h 17)

(Reprise à 10 h 22)

La Présidente (Mme Tremblay) : Alors, nous sommes de retour en ondes pour poursuivre les travaux. Sans plus tarder, je souhaite la bienvenue aux représentants de l'Office des personnes handicapées du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour faire votre exposé. Ensuite, nous allons procéder à la période des échanges avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter d'abord et ensuite à commencer votre exposé.

Office des personnes handicapées du Québec (OPHQ)

Mme Keays (Edith) : Alors, Mme la Présidente, Mme la ministre, messieurs, Mme la députée, membres de la Commission des relations avec les citoyens, merci d'abord de l'invitation. Je suis Edith Keays, membre du conseil d'administration et du comité exécutif de l'Office des personnes handicapées du Québec. Ça me fait plaisir de vous présenter Mme Anne Hébert, la directrice générale de l'office, ainsi que Mme Céline Marchand, qui est conseillère au projet interministériel.

Alors, sans plus tarder, j'aimerais vous présenter quelque peu notre organisation. L'office est un organisme gouvernemental dont le rôle est notamment de conseiller et de soutenir le gouvernement dans toute initiative pouvant avoir des impacts sur la participation sociale des citoyens et citoyennes handicapés. Il possède une fine compréhension des enjeux les concernant, tout type d'incapacité confondue et dans tous les domaines d'activité. Cette expertise lui vient carrément de son travail direct auprès des personnes handicapées et de toutes leurs familles, de ses actions en collaboration avec les organisations concernées, qu'elles soient gouvernementales, publiques, privées, associatives, communautaires ou municipales, de ses travaux d'évaluation et de recherche et, bien sûr, de son conseil d'administration, dont j'ai le plaisir de faire partie, qui inclut des parents et des proches de personnes handicapées, ainsi que des membres de la société civile, que ce soit au niveau du syndicat, du patronat, des ordres professionnels et représentants du milieu et des personnes handicapées. Sans plus tarder, je cède à présent la parole à Mme Anne Hébert, qui vous fera part des commentaires de l'office en lien avec le projet de loi n° 115.

Mme Hébert (Anne) : Aujourd'hui, l'office vient vous livrer un message fort simple. Il est important de prendre en considération la réalité des personnes handicapées, et ce, dans tous les aspects développés dans le cadre de la stratégie de lutte contre la maltraitance. Cette prise en compte est nécessaire pour assurer une cohérence avec les choix antérieurs qui ont été faits dans la société québécoise. Je rappelle qu'au Québec on a pris la décision de responsabiliser davantage tous les acteurs de la société. On l'a fait en 2004 en adoptant la loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées en vue de leur intégration professionnelle, sociale et scolaire, ainsi que par l'adoption, en 2009, de la politique gouvernementale À part entière.

Sachez que certaines personnes handicapées sont plus susceptibles de se trouver en situation de vulnérabilité et doivent bénéficier des mesures de protection. Ce fait est documenté et fait l'objet d'un consensus. Elles sont également plus vulnérables aux différentes formes d'exploitation. D'ailleurs, l'article 48 de la Chartre des droits et libertés de la personne accorde le droit aux personnes handicapées d'être protégées contre toute forme d'exploitation, et l'office peut les assister dans ce type de situation. Il y a un article, dans la loi sur l'exercice, qui donne la responsabilité à l'office de référer aux autorités concernées, là, quand c'est le cas.

D'emblée, je pense que c'est important de vous dire que l'office est favorable au projet de loi n° 115. Pourquoi? Parce que nous sommes d'avis que ce projet de loi donne une impulsion importante à la lutte contre la maltraitance en mobilisant des efforts et des ressources à cette fin. Puis je souligne d'ailleurs la cohérence de ce projet de loi avec la politique gouvernementale À part entière. Dans cette politique-là, il y a une priorité d'intervention qui est d'agir contre toute forme d'exploitation, de violence et de maltraitance à l'égard des personnes handicapées.

Pour nous, le projet de loi n° 115... par ce projet de loi là, le législateur reconnaît formellement l'existence de la maltraitance commise envers les personnes vulnérables, et puis parmi lesquels font partie certaines personnes handicapées, puis reconnaît le caractère inacceptable de cette maltraitance et de l'importance d'une intervention gouvernementale pour la prévenir, l'enrayer et protéger celles qui en sont victime.

Maintenant, je ne ferai pas une revue exhaustive de notre mémoire. Je vais souligner trois points qu'on trouve très importants. On veut les saluer comme des points positifs. Puis je veux attirer votre attention sur trois principaux éléments qui, de notre point de vue, méritent d'être bonifiés.

Donc, je commence par les trois points qu'on veut saluer. D'abord, on veut saluer positivement la large portée du projet de loi, qui ne s'adresse pas exclusivement aux personnes aînées exposées à des situations de maltraitance, mais aussi à toute autre personne majeure en situation de vulnérabilité, ce qui inclut de facto les personnes handicapées majeures et en situation de vulnérabilité. Vous comprendrez que nous sommes très... de ce choix-là, mais on va vous interpeller à plein des éléments bonifiés pour s'assurer que l'ensemble du projet de loi soit cohérent dans cette perspective-là.

Deuxièmement, on salue la mise en place annoncée d'une série de mesures visant à prévenir et à contrer la maltraitance. L'adoption obligatoire de la mise en oeuvre d'une politique par les établissements du réseau de la santé et des services sociaux constitue, pour l'office, un levier d'importance. On a suivi un peu les débats puis on trouve qu'on n'en parle pas assez. Ce levier-là, pour nous, apparaît comme un dispositif très intéressant pour être préventif plutôt que réactif et aussi d'intervenir dans les situations de maltraitance. Puis c'est important parce que ça permet aussi de... il y a une obligation de la faire appliquer puis de la faire connaître aux usagers. Nous croyons au potentiel de cette disposition, mais nous avons aussi à vous faire des suggestions pour vraiment que ce dispositif-là se déploie dans toute son importance et donne des résultats intéressants. Ça pourra faire partie de la discussion.

Dernier point qu'on voudrait souligner, c'est le fait que le projet de loi vise à faciliter la dénonciation des actes de maltraitance, protéger contre les représailles. Ça aussi, c'est bien accueilli par l'office.

Maintenant, je vais attirer votre attention sur trois éléments qui, de notre point de vue, méritent d'être bonifiés. Nous comprenons que les plaintes déposées en vertu de la politique de lutte contre la maltraitance seront adressées au commissaire local aux plaintes et à la qualité des services. Quand on considère la diversité des plaintes qui peuvent être reçues par le commissaire local, l'office est particulièrement préoccupé par le délai de traitement qui serait nécessaire, dans l'ensemble des plaintes, là, pour celles qui sont en lien avec maltraitance. Compte tenu de la nature particulière des plaintes et des signalements, de la gravité des gestes qui sont associés à la maltraitance, de la grande vulnérabilité des personnes qui en sont l'objet puis des conséquences dommageables, pour l'office, il importe que de telles plaintes ou signalements puissent être traités en priorité et qu'on puisse agir, par la suite, avec promptitude.

Donc, nous avons fait une recommandation à l'article 30, qu'il soit bonifié, pour que les plaintes et les signalements soient traités de façon prioritaire et dans les meilleurs délais.

• (10 h 30) •

Deuxièmement, l'article 13 du projet prévoit, et je cite, que «le gouvernement peut, par règlement, exiger l'adoption d'une politique de lutte contre la maltraitance envers les personnes en situation de vulnérabilité de tout organisme, de toute ressource [et] de toute catégorie d'organismes et de ressources qu'il désigne et prévoir, dans de tels cas, les adaptations nécessaires». J'insiste sur «adaptations nécessaires».

Pour nous, cette disposition, conçue pour un autre levier d'action prometteur, qui permettrait d'élargir la lutte à la maltraitance à d'autres contextes, milieux... Puis on le peut dire, là, on pourra vous en parler un peu plus, l'office, on accompagne aussi les personnes, on le constate qu'il y en a, des maltraitances dans d'autres milieux de vie que réseau de la santé et des services sociaux.

Donc, ce qu'on vous demande, c'est que le gouvernement, avec l'adoption du projet de loi, se mette à l'oeuvre très rapidement pour définir l'article 13, la réglementation, notamment pour réfléchir. Il y a des moyens, il y a des mesures, mais comment les adapter dans les différents milieux, quelles adaptations ça demande? Il faut s'y mettre... On vous demande de se mettre au travail rapidement sur cet aspect-là parce que, pour nous, les autres milieux où il y a de la maltraitance, c'est aussi inacceptable que dans le réseau de la santé et des services sociaux. Et donc on offre notre collaboration pour participer à ces travaux-là. Compte tenu qu'on est confrontés à ce genre de situation, on peut vous aider dans la précision des adaptations à faire.

Dernier élément, là, dans les éléments qui méritent d'attirer votre attention, là, sur ce qui doit être bonifié. Le chapitre III du projet de loi confère à la ministre responsable des Aînés de nouvelles responsabilités, soient celle de lutter, en concertation avec les intéressants de milieux concernés, contre la maltraitance envers les aînés et celle de coordonner la mise en place d'un processus d'intervention. On se demande pourquoi cette responsabilité se limiterait seulement aux cas de maltraitance envers les aînés, alors que le projet de loi vise une population plus large, c'est-à-dire toutes les personnes majeures en situation de vulnérabilité. Ce qu'on souhaiterait, c'est que le mandat de concertation et de coordination gouvernemental en matière de maltraitance couvre toutes les populations, ne s'arrête pas aux personnes handicapées. Cela, ça permettrait d'interpeller l'ensemble des acteurs concernés...

La Présidente (Mme Tremblay) : Conclure rapidement, s'il vous plaît.

Mme Hébert (Anne) : Merci. Donc, en conclusion... J'achevais. En conclusion, je rappelle qu'on salue ce projet de loi là, on l'appuie, mais on vous demanderait de bonifier certains éléments sur les délais de traitement, sur la mise en oeuvre rapide de l'article 13, la portée du mandat de concertation et de coordination. Et je fais un appel aussi à donner tout son potentiel à la disposition sur l'obligation d'adopter une politique.

La Présidente (Mme Tremblay) : Merci beaucoup pour votre exposé. Nous allons maintenant procéder à la période des échanges avec les membres de la commission. Alors, nous commençons par Mme la ministre. La parole est à vous.

Mme Charbonneau : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Mesdames, bonjour. Merci de participer à cette grande consultation, mais surtout pour le mémoire que vous avez déposé, puisque vous, effectivement, pointez vers des choses que certaines personnes ont plus passées discrètement, je vais le dire comme ça parce que tout le monde a passé le projet de loi au complet, mais vous vous attardez, effectivement, longuement sur la politique qu'on veut instaurer obligatoirement dans chacune de nos institutions, mais partout au Québec, pour parler de la maltraitance puis faire en sorte chacun des intervenants aient une responsabilité face à ça.

Il y a quelqu'un, dès le départ des consultations, qui nous a dit : C'est malheureux que, comme citoyens, nous n'avons pas d'emblée ce réflexe-là de dire : C'est inacceptable, il ne faudrait pas que ça arrive. On n'aurait pas de faire une politique comme celle-là et, comme on s'est dit ici, on n'aurait pas non plus besoin de regarder le principe d'utilisation des caméras comme on le regarde cette semaine, puisqu'en ce moment tout le monde a le droit d'utiliser les caméras, puis c'est un encadrement qu'on veut poser.

Dans cette perspective-là, dans vos trois regards portés positivement, il y a la large portée, vous avez raison, puisque, dès le départ dans le principe même de l'étude d'un projet de loi, on s'est dit : Bien, si on commençait qu'à parler des CHSLD, il faudrait parler du monde qui sont dedans. Et, à l'intérieur des CHSLD, il n'y a pas que des aînés. 10 % de la clientèle, c'est des gens qui n'ont pas 50 ans, donc qui sont lourdement handicapés et pour toutes sortes de raisons et de milieux... ils sont logés dans un milieu qui, malgré tout, quelquefois ne leur ressemble pas. Il y a des efforts qui sont faits dans le milieu de la santé en ce moment pour voir comment faire autrement, mais qui sont là. Donc, on se doit de s'adresser à ces gens-là. Puis, par après, le regard de dire : Bien, la maltraitance chez les aînés, c'est partout. À l'intérieur des CHSLD, malheureusement, il y en a, mais il y en a partout, il y en a comme aîné chez lui, et on est un Québec qui veut que l'aîné habite chez lui le plus longtemps possible, du moins jusqu'à temps que lui, il décide de changer la donne par rapport à son habitation.

Faciliter la dénonciation et s'assurer qu'il n'y ait pas de représailles, c'est aussi quelque chose que vous voyez de très positif. Dans cette conséquence-là, est-ce que vous voyez plus un aspect positif à faciliter ou, comme la question va vous être posée, plus une obligation de dénoncer, puisque, pour moi, il y a une différence entre faciliter l'encadrement pour la dénonciation et l'obligation de la dénonciation? Vous le voyez comment par rapport à l'ensemble des gens que vous représentez?

Mme Hébert (Anne) : Comme vous avez constaté, dans notre mémoire, on ne se prononce pas sur l'obligation de dénonciation parce que, pour être très honnête, quand on regardait les tenants et aboutissants de ça, on n'avait pas une position très franche. Cependant, on est très sensibles aux arguments que...

Je vais répondre directement à votre question parce que vous l'avez dit pour la présentation précédente, le oui ou le non, on serait plutôt pour le non. C'est-à-dire qu'on n'est pas convaincus qu'il faut mettre d'abord les efforts sur ça parce que le rendre obligatoire, ça veut dire aussi une conséquence de mobilisation de certains efforts. Et nous, on est convaincus qu'il faut mettre beaucoup d'efforts sur une approche préventive. Et la politique, l'obligation de faire la politique, si on la balise d'une manière uniforme pour qu'elle soit précise, elle a des possibilités d'actions préventives, mais aussi des possibilités de préciser bien les responsabilités pour agir avec promptitude dans les cas de maltraitance. Elle responsabilise.

Je vous disais en début qu'au Québec on a fait le choix de responsabiliser les acteurs par rapport aux participations sociales des personnes handicapées et leurs droits. Bien, dans le même esprit, la politique, c'est de responsabiliser l'ensemble des acteurs pour agir. On mise sur ce dispositif puis on n'est pas convaincus que de mettre d'abord l'importance sur l'obligation porterait ses fruits.

Puis chose sur laquelle nous sommes également convaincus, c'est qu'il ne faut pas mettre — c'est une autre façon de dire la même chose, là — tout l'accent sur la signalisation. C'est-à-dire, oui, c'est important, puis, oui, il faut agir rapidement, puis tout ça, mais c'est un élément d'un ensemble, et c'est pour ça que l'obligation de la politique nous semble intéressante, c'est qu'il faut agir sur l'ensemble des éléments. Oui, il faut bien faire le travail de signalement, il faut bien accompagner les personnes, il faut agir rapidement, mais il faut aussi déployer d'autres mesures dans une perspective plus de redressement, mais aussi de prévention.

Mme Charbonneau : Effectivement, je ne reviendrai pas pour le oui ou le non, vous avez répondu. Mais j'aime aussi le complément que vous y donnez parce que plusieurs regroupements nous ont sensibilisés sur le maillon qu'on doit serrer entre la communication des uns et des autres. Donc, vous refaites aussi cette même volonté-là.

Je sais que vous êtes un partenaire important pour nous au niveau du PAM, du plan d'action sur la maltraitance, aussi sur vivre et vieillir chez soi au Québec. Sur le plan de lutte contre la pauvreté, vous êtes au rendez-vous aussi. Donc, quand vous nous dites : Mieux regarder le principe des délais, en ce moment les délais sont pareils pour tous les dossiers. Il n'y a pas de priorisation sur certains délais ou sur d'autres. Vous voyez l'impact de quelle façon? Parce qu'en ce moment c'est 45 jours, vous avez raison de dire que c'est long, surtout si on est dans une situation de maltraitance. Mais vous le voyez comment? Quand on dit : Actualiser pour faire en sorte que le délai soit priorisé, vous nous donnez, je vous donne une marge de manoeuvre, là, mais vous nous donnez un délai de combien? Et comprenez bien que je veux juste entendre une marge de manoeuvre, là, je ne veux pas que vous précisiez.

• (10 h 40) •

Mme Hébert (Anne) : C'est sûr que notre réflexion n'était pas aussi poussée, là, sur le délai, mais l'idée, c'est d'avoir un canal particulier pour ces plaintes-là. C'est sûr que, d'une plainte à l'autre, ça peut demander un peu plus d'études. Ça fait que la marge, tu sais, le maximum, il faut que ça reste 45. C'est plus qu'il soit un peu... je vous dirais, qu'il y ait une voie d'accès rapide dans le traitement puis qu'on l'examine rapidement, qu'on mette ça très rapidement sur la voie d'analyse, là.

Notre préoccupation n'est pas tellement sur la durée du traitement, du maximum, que de la rapidité à prendre ça... de le recevoir très rapidement parce qu'il faut comprendre que, dans les cas de maltraitance, il peut avoir un arrêt d'agir demandé, là, une action très, très rapide pour régler la situation. Donc, il faut que ça arrive très rapidement dans les mains du commissaire aux plaintes, là, que ça ne soit parmi la pile d'autres plaintes. Notre préoccupation est plus dans ce sens-là, plus que du délai maximum de la réponse, là.

Mme Charbonneau : Je réponds en partie à votre inquiétude par rapport à votre troisième inquiétude qui était : Pourquoi la ministre des Aînés? Pourquoi son champ d'intérêt ne devrait pas plus être élargi? Je vais vous dire, parce qu'il y a quelqu'un avec qui je travaille qui est fort possessif de ses dossiers, avec raison parce qu'elle vous apprécie beaucoup, c'est Mme Charlebois, avec qui j'ai beaucoup, beaucoup discuté. Vous savez, on est trois ministres à signer concrètement le projet de loi, le ministre de la Santé, Mme Charlebois et Mme Charbonneau, parce que chacun des cas peut être dans un de nos milieux ou dans nos champs d'action à nous. Donc, sachez que ce n'est pas par manque d'intérêt, c'est vraiment parce que Mme Charlebois est vraiment très impliquée dans le principe du projet de loi. Donc, quand on dit la ministre, on dit, oui, la ministre des Aînés, mais ma collègue Lucie est très au fait et me suit avec beaucoup d'attention, là, pour pouvoir supporter ce projet de loi là jusqu'au bout.

Le principe des caméras, hier on a un regroupement qui nous a parlé du fait que vous avez des gens qui sont dans des milieux de vie beaucoup plus petits. Hein, on n'est plus dans les CHSLD à 96 chambres, on est des fois dans des résidences où il y a deux personnes. Des fois, on est dans des coops, hein? Maintenant, on a le privilège d'avoir ça, qui est une bonne chose, un peu partout au Québec, là, des coops où les gens habitent chez eux tout en étant accompagnés.

L'utilisation de la caméra, pour vous, vous la voyez... vous l'avez un peu effleurée tantôt en disant : On ne s'y attardera pas, le débat, il n'est pas juste là. Vous avez raison, mais, en même temps, si on est pour être très inclusifs dans le projet de loi sur le principe d'un adulte en situation de vulnérabilité, vous le voyez où, ce moyen-là? Parce que, pour nous, c'est un moyen que tout le monde peut utiliser en ce moment. Il n'est pas restreint en ce moment. Mais vous voyez comment l'encadrement qu'on propose de mettre en place pour pouvoir gérer cet outil-là qu'on voudrait utiliser?

Mme Hébert (Anne) : On est assez à l'aise avec les orientations ministérielles, là, qui sont proposées. Pour nous, là, l'élément le plus important, c'est de faire en sorte que ça soit une initiative de la personne concernée ou de ses proches. Pour nous, ça, c'est majeur. Pour respecter, vous l'avez dit en introduction, le principe, là, de l'autodétermination, de prise... donc, on insiste beaucoup sur ça, que ça soit une initiative... qu'on respecte ce principe-là que ça soit une initiative de la personne qui est concernée et de ses proches. Mais c'est un moyen parmi d'autres. Et on ne voudrait pas aussi qu'on mette beaucoup l'accent sur ça. Pour nous, c'est comme une sorte de moyen palliatif, mais on espère que l'obligation de produire une politique qui va responsabiliser, qui va prévoir des moyens au-delà de la sensibilisation puis de la formation, même des moyens de contrôle sur la qualité, là, des milieux, bien ça va prévenir les situations puis ça peut faire diminuer la demande d'utilisation des caméras parce qu'on va vraiment agir en amont. Donc, pour nous, c'est un moyen palliatif, peut-être transitoire si on agit d'une manière beaucoup plus proactive et préventive.

La Présidente (Mme Tremblay) : Il reste environ quatre minutes à la partie gouvernementale. Je cède maintenant la parole au député d'Orford.

M. Reid : Merci. Écoutez, moi, je... On travaille ici pour se préparer à écrire un projet de loi, mais ce n'est pas uniquement pour ça. C'est l'occasion de vous écouter et de vous entendre sur des problématiques dans lesquelles vous vivez et qui... Et moi, j'aimerais sortir... on sort un tout petit peu, peut-être, du projet de loi, mais c'est une notion qui est proche de ce qu'on fait, de la maltraitance, c'est les préjugés qu'il y a, et je vais être assez concret. Évidemment, il y a des gens qui sont handicapés puis que, parce qu'ils sont des génies, comme Stephen Hawking, par exemple, bon... ça ne fait pas une grosse différence, mais ce n'est pas le cas de tout le monde.

Et moi, je regarde dans un cas... Souvent, ce n'est pas une maltraitance, mais c'est souvent un problème qui est plus systémique, pour prendre les mots du député de Rimouski, qui est plus institutionnel ou social. Et je vais prendre le cas d'une préoccupation que nous avons, sur laquelle on travaille, nous, beaucoup dans mon comté, qui est le travail des aînés, le travail à temps partiel pour avoir un peu plus de sous quand ça va moins bien puis pour se sentir utile.

Et là j'ai un cas qui m'est arrivé récemment parce qu'on avait, comme à chaque année, la guignolée des Chevaliers de Colomb, et puis ils ramassent beaucoup d'argent, de sous, etc. Puis, pendant toute une journée, là, il y a trois monsieurs qui, depuis des années, là, passent la journée. Et il y en a un qui est handicapé, qui est assis, il ne peut pas... il a une chaise roulante, et il passe la journée à compter, à arranger, quelqu'un de bright, là. C'est quelqu'un qui a travaillé dans une usine, qui a perdu sa job à un moment donné parce qu'il était handicapé et qui m'a dit, on parlait un peu de ça, qui m'a dit... Il dit : C'est beau, ce que vous faites, là, pour essayer de trouver de l'ouvrage pour les aînés, mais il dit : Moi, il dit, je suis sûr que, parce que je suis handicapé, il n'y aura jamais personne qui va me donner des jobs, là, à temps partiel de type qui ne sont pas nécessairement de comptable ou des choses comme ça. Pourtant, si vous me donnez une chaise, je suis capable de travailler toute la journée. Regarde, je le fais.

Alors, moi, je regarde ça puis je me dis : Ce n'est pas de la maltraitance, on ne peut pas porter plainte, mais il y a un problème, quand même, qui ressemble à ça, là, des gens de notre société, qui sont vulnérables. Cette personne-là, elle n'a pas beaucoup d'argent parce que, dans les paniers de Noël, là, même s'il est Chevaliers de Colomb, quand c'est le temps des paniers de Noël, il part avec le sien parce qu'il est sur le bien-être social.

Et donc ces personnes-là, qu'est-ce qu'on peut faire pour elles? Comment vous voyez ça, vous, parce que vous êtes là-dedans, là, et c'est l'occasion de nous en parler? Même si ce n'est pas la maltraitance qu'on traite dans le projet de loi, il reste qu'on est sur la même longueur d'onde, il me semble.

Mme Hébert (Anne) : Il y a plusieurs choses que j'aimerais dire à ce sujet-là. C'est dire que c'est vrai qu'il y a des préjugés qui peuvent être à l'origine de discrimination, ne pas embaucher, ne pas louer un logement, etc. Et la politique À part entière, là, qui a été adoptée par le gouvernement en 2009, reconnaît qu'il faut agir contre les préjugés. Puis il y a plusieurs organisations qui sont actives dans la... tu sais, pour faire de la sensibilisation, de la lutte aux préjugés, dont notre organisation, qui organise à chaque année, dans le cadre de la Semaine québécoise des personnes handicapées, des activités de sensibilisation. Mais les activités de sensibilisation, il faut les répéter, il faut que ça soit continu. Mais j'aimerais... Donc, on travaille dans cette perspective-là de répéter les activités de sensibilisation.

Mais j'aimerais quand même souligner, même si on reconnaît que c'est un travail continu et qu'il faut le faire, au Québec, il y a quand même une ouverture assez grande par rapport aux personnes handicapées. On le constate, plus elles sont actives, plus ça diminue, les préjugés. Donc, il faut aussi travailler pour éliminer des obstacles très précis pour qu'elles soient actives, qu'elles soient présentes, visibles dans la société. Et ça, ça contribue à diminuer les préjugés. C'est à quoi s'emploie... qu'on veut soutenir par différents moyens leur participation sociale, qu'ils aient plus de transport, qu'ils aillent à l'école, qu'ils aient des logements. Le fait d'être en contact, les études montrent le fait que, quand il y a un contact, un échange, les préjugés diminuent.

La Présidente (Mme Tremblay) : Le temps alloué à la partie gouvernementale est maintenant écoulé. Je cède maintenant la parole au député de Rimouski, de l'opposition officielle.

M. LeBel : Merci, Mme la Présidente. Bonjour à vous trois. Je vais faire du pouce aussi sur la question du député d'Orford parce que c'est fondamental, là, il faut toujours revenir à la personne souvent. Puis il y a des cas dans chacune de nos... Puis ça nous touche tout le monde, les députés, là.

Le député d'Orford disait : La maltraitance organisationnelle ou systémique, qu'il appelle, là, c'est un cas de maltraitance. C'est identifié dans la littérature. C'est de la maltraitance. Selon la chaire, là, c'est une des sept façons de voir la maltraitance. Moi, je pense que le projet de loi doit s'adresser à ça aussi. Si le projet de loi se dit : Moi, cette maltraitance-là, là, je n'y touche pas, moi, je ne touche que le reste, je pense qu'on manque notre coup. Il faut d'adresser aussi à cette maltraitance. Puis les gens du comité des malades, ils sont venus. Il y avait un monsieur qui était là, M. Binette, en tout cas, je ne me rappelle plus vraiment de son nom, mais une personne handicapée qui vit en CHSLD. Un bain par mois quand il en a un. Ils l'amènent dans sa chambre contre son gré pour... c'est l'heure du dodo, c'est l'heure de ci. Ça, c'est de la maltraitance organisationnelle. C'est de la maltraitance systémique.

Comment on fait pour combattre cette maltraitance-là? Vous dites que la ministre devrait... La ministre des Aînés devrait avoir la responsabilité plus large, là, de sensibiliser, de convaincre, là, de lutter contre la maltraitance. Mais, si on donne toute cette responsabilité-là à la ministre, qui est bien bonne, là, mais comment on va faire pour lutter contre cette maltraitance organisationnelle et systémique là? C'est quoi, ses moyens?

• (10 h 50) •

Mme Hébert (Anne) : En fait, ce qu'on comprenait de cet article de loi, c'est qu'il y avait une responsabilité de coordonner puis de concerter les acteurs. Et, vous l'avez entendu de l'organisation qui nous a précédés, le travail de concertation entre les organisations qui ont différentes responsabilités est majeur pour agir pour prévenir des situations de maltraitance puis les enrayer. Donc, c'est dans cette perspective-là. Il faut vraiment se concerter.

Mais, sur la maltraitance organisationnelle, je peux peut-être dire deux choses. D'abord, nous, on pense qu'il faut baliser, il faut — on le suggère dans notre mémoire — qu'il y ait des orientations ministérielles pour harmoniser, encadrer l'élaboration, là, des politiques, qui sont obligatoires pour les établissements. Dans ces orientations-là, on peut aborder toutes les questions de contrôle de la qualité puis certains éléments. Ce n'est pas juste les politiques qui doivent... pas juste s'attarder à régler les problèmes de signalement puis de maltraitance. Elles doivent être préventives. Et d'agir sur les éléments organisationnels qui peuvent amener des situations de maltraitance, ça devrait être au coeur des politiques. C'est ce qu'on pense.

Et les orientations ministérielles, on suggère qu'il y en ait justement pour organiser l'action, mobiliser l'action puis faire comme une dynamique de mobilisation continue d'actions pour contrer ces éléments-là. Il ne faut pas que ce soit juste réactif aux cas de maltraitance qu'on constate, mais s'attaquer à des éléments... s'attaquer... regarder qu'est-ce qu'on peut faire pour améliorer les éléments organisationnels.

Je dois dire aussi...

M. LeBel : Dans le fond, ce que vous dites, c'est, quand on fait les politiques au niveau des établissements, on doit se poser la question : Est-ce que, dans ma politique... est-ce qu'il y a des choses qui se font dans mon établissement qui peuvent amener de la maltraitance?, et corriger ça avant... dans la politique, corriger ces éléments-là. Moi, je trouve que c'est une bonne idée, c'est une avancée. Mais qu'est-ce que vous dites au ministre quand le ministre de la Santé coupe 20 millions au CISSS—Bas-Saint-Laurent, qui avait moins de ressources? Est-ce que, lui aussi, il faudrait qu'il se donne une réflexion sur qu'est-ce qu'il est en train de faire par rapport à la maltraitance?

Mme Hébert (Anne) : Mais il y a des travaux en cours qui sont... tu sais, ce qu'on dit sur, tu sais, la nécessité... On suggère des orientations ministérielles pour encadrer les politiques. Il faut que ça touche des éléments organisationnels. Ça, pour nous, on le voit comme complémentaire avec des travaux qui sont en cours par le ministère pour l'amélioration de l'organisation puis la qualité des services, particulièrement, par exemple, le cadre de référence pour les ressources intermédiaires, les ressources familiales. Donc, c'est complémentaire à ça. C'est des éléments qui doivent agir ensemble, là. Ce n'est pas juste la politique qui peut le faire, mais il y a des travaux qui sont complémentaires. Il faut agir sur améliorer la qualité des services dans ces milieux-là.

M. LeBel : Oui, mais il y a... puis là je parle du ministre de la Santé. Par les coupures, moi, je pense qu'il amène des situations qui sont, selon la littérature... par le manque de services, il amène des situations qui doivent être jugées comme de la maltraitance. Mais il n'y a pas que le... Je pense, dans le monde municipal, par rapport aux personnes handicapées, je regarde juste la disponibilité du transport adapté. Dans certaines régions, dans certains coins, ce n'est pas là. Et, selon ce qu'on lit, ça peut être jugé pour... on ne respecte les droits des personnes handicapées, dans certains coins, d'avoir la capacité de se déplacer parce qu'on n'offre pas le service.

Je me demandais, hier, je posais la question, pour aider la ministre dans son rôle de coordination, est-ce qu'on ne devrait pas... J'ai déjà, à l'époque, moi, travaillé sur le projet de loi pour lutter contre la pauvreté. J'étais directeur de cabinet de la ministre à l'époque. Et les groupes nous avaient demandé d'intégrer dans le projet de loi la clause d'impact, dans le fond, s'assurer que chaque ministre qui dépose une réforme ou un mémoire au Conseil des ministres, qu'il y ait des gens qui soient chargés, par une lunette, de voir quel impact que ça peut donner sur la pauvreté. On l'a fait dans ce cas-là. Je ne dis pas que ça marche toujours, mais, au moins, c'est là.

Pour aider la ministre dans son rôle, est-ce que, dans le projet de loi, on ne devrait pas dire qu'il y ait une clause d'impact sur la maltraitance, en l'identifiant comme il faut, qui obligerait chaque ministre, quand ils font... dans différents domaines quand ils font des changements ou des réformes, qu'on s'assure que ça n'a pas d'impact sur la maltraitance? Est-ce que ça pourrait être fait?

Mme Hébert (Anne) : Il faudrait y réfléchir. Ce que je peux vous dire, c'est qu'il existe une clause d'impact, dans la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées, qui prévoit que la ministre responsable de l'application de la Loi assurant l'exercice des droits des personnes handicapées doit être consultée au moment de l'élaboration de toute initiative qui pourrait avoir un impact sur les personnes handicapées. Cette clause-là, elle existe déjà. Puis on a insisté comparativement à d'autres clauses, là, au moment de l'élaboration, c'est-à-dire quand on est au début du processus, on réfléchit, qu'il y ait une consultation de la ministre justement dans une perspective pour éviter des impacts négatifs. Ça pourrait être une avenue aussi, mais ça touche les personnes handicapées, là, pour... Puis, nous, quand est associés à ces travaux-là, on le regarde sur l'impact, là, de créer des conditions.

Puis j'insiste sur dire, c'est une autre façon de le dire, mais, nous, notre mandat, c'est vraiment de travailler à réduire les obstacles qui existent, réduire les obstacles qui empêchent les personnes handicapées de se réaliser pleinement, de réaliser leur participation sociale. Vous nommiez le transport adapté. Quels sont les obstacles qui existent, en termes de transport, qui limitent les déplacements des personnes handicapées? C'est à ça qu'on s'emploie, avec les différents acteurs, à essayer d'éliminer ces obstacles-là par des moyens. Ce n'est pas de la lutte à la maltraitance à proprement dit. Nous, on dit qu'un c'est un travail pour soutenir la participation sociale des personnes handicapées. Je veux dire, c'est une autre façon de dire notre mandat à l'Office des personnes handicapées.

La Présidente (Mme Tremblay) : Une minute.

M. LeBel : Ça m'intéresse ce que vous venez de nous dire, là, sur la clause, la manière que vous... On va garder le contact si ça peut nous aider — puis je pense que tout le monde, on va être collaborateurs — à faire en sorte qu'on n'échappe rien parce que c'est ça, notre... L'objectif à tout le monde ici, là, c'est qu'on n'échappe plus aucun cas de maltraitance. Merci.

La Présidente (Mme Tremblay) : Merci au député de Rimouski. On va maintenant céder la parole au deuxième groupe d'opposition. Le député de Lévis.

M. Paradis (Lévis) : Merci, Mme la Présidente. Mesdames, bonjour. Je regardais parce que je suis en train de faire justement une petite revue des dossiers qui sont aussi les vôtres. Puis ça n'a l'air de rien, hein, puis vous disiez : Faciliter l'accomplissement de la personne handicapée. C'est comme ça. S'accomplir totalement, sans contrainte, en tout cas, le moins possible, eut égard à leur condition, bien sûr. Souvent, on sourit puis on dit : L'accessibilité aux bâtiments. Tu sais, ça a tellement l'air, tu sais : Oui, mais... Tu sais, il y a-tu de quoi de plus important que ça, tu sais? On pourrait jaser. C'est important. C'est une barrière aussi tellement évidente. Et je regardais, de ces dossiers-là et de tous ceux que vous avez amenés, dans l'accomplissement, puis, en même temps, bien, vous avez la pression de ceux pour qui vous travaillez. J'en reçois, moi, des téléphones de gens handicapés qui disent : L'office, là, il me semble qu'il pourrait faire ci, puis l'office pourrait faire ça, puis etc. Puis vous en avez parlé, donc, transport...

Je vous poserai trois questions, trois petites questions. Mon collègue parle d'impact, hein, de notion d'impact. Moi, je vais parler d'imputabilité aussi. C'est bien beau, là, de dire : En début de processus, là, on s'assure que la ministre, elle sache ce qu'on est en train de faire, il y a un impact, tout ça. Mais, si ça n'aboutit pas, est-ce qu'il ne faudrait pas, pour pousser puis améliorer le système, qu'alors que les organisations s'efforcent d'arriver à un résultat lorsqu'il n'est pas là il y ait aussi de l'imputabilité pas seulement pour l'employeur, pour ceux et celles, qui, dans une politique, ne sont peut-être pas arrivés aux résultats qu'on aurait souhaités en mettant tous les efforts du bon côté, là? Est-ce que l'impact, ça ne suppose pas aussi de l'imputabilité?

Mme Hébert (Anne) : Dans notre mémoire, une des recommandations qu'on fait, c'est qu'on demande que le directeur général de l'établissement soit imputable de la mise en oeuvre et des résultats de la politique. On fait cette recommandation-là dans notre mémoire. Dans la politique, on vous... tout à l'heure, je soulignais qu'on souhaitait des orientations ministérielles pour bien baliser cette pratique-là, mais une des balises, ça devrait être le cadre des responsabilités de chacun puis l'imputabilité. Nous, on a suggéré dans le mémoire que le directeur général rencontre... c'est déjà dit qu'il fasse une reddition de comptes, mais il faut vraiment qu'il soit nommé qu'il y ait une imputabilité de la mise en oeuvre et des résultats de la politique.

M. Paradis (Lévis) : Vous dites que ce soit là, et j'en suis, mais il va falloir qu'on réfléchisse plus loin. Bien beau dire : Regarde, tu seras imputable de... Mais, tu sais, à la même enseigne qu'un employeur ou qu'un propriétaire de bâtiment décide de passer outre au devoir qu'il a de faciliter l'accès, par exemple, à un bâtiment à une personne qui est handicapée, je veux dire : Regarde, mon chum, si tu ne le fais pas, là, je veux dire... D'abord, tu es imputable de, puis ensuite, si tu ne le fais pas, il va y avoir des conséquences. Allez-vous jusque-là?

Mme Hébert (Anne) : Bien, c'est-à-dire que, là, c'est une question assez large, hein? Ça varie selon les secteurs. Par exemple, si on parle d'accessibilité des bâtiments...

M. Paradis (Lévis) : Je prends celui-là parce qu'il est facilement compréhensible, là.

• (11 heures) •

Mme Hébert (Anne) : Il est facilement compréhensible, mais il est difficile à... Quand on regarde le cadre des responsabilités, actuellement, il y a le Code de construction, qui est prescriptif, puis il y a des mécanismes de surveillance, mais le cadre de responsabilité est très précis, sinon les municipalités ont le pouvoir réglementaire. Donc, le niveau... les acteurs, leur imputabilité... sont très différents, même dans le domaine de l'acceptabilité. Ça a l'air simple, mais ça ne l'est pas.

Et il y a un projet très intéressant qui a été annoncé par la Régie du bâtiment, une réforme qui proposait, puis ce projet-là est en cours de réflexion, mais qui proposait une norme unique en matière d'accessibilité des bâtiments. Ça, ça pourrait aider à l'imputabilité parce que, quand il y a un partage beaucoup de temps avec des exigences différentes, là, nous, on appuyait cette proposition-là.

M. Paradis (Lévis) : Voyez-vous, ce que vous dites illustre parfaitement ce dont on parle ici depuis un bout de temps. Vous dites : Oui, regarde, c'est aussi ordinaire que de dire accessibilité à, mais là qui est imputable, parce que, là, un tel peut intervenir, un tel peut intervenir, un tel peut intervenir. C'est genre 20 quelques organismes, puis là chacun, là, on va dire : Bien, moi, O.K., je vais être imputable à 1 %, puis je vais imputable à 8 %, puis je vais imputable à 12 %. On a un problème sur lequel il va falloir se pencher également pour être en mesure d'aller chercher vraiment celui ou celle ou, en tout cas, l'organisation qui devra répondre du fait qu'on n'avance pas.

Ceci dit, qu'un handicapé n'ait pas en transport adapté adéquat, par exemple, lui permettant de s'accomplir pleinement, de se rendre à des... bien, écoutez, c'est sa vie de tous les jours, que ce soient des traitements médicaux, que ce soient, bon, ne serait-ce que ses loisirs, est-ce que c'est de la maltraitance?

Mme Hébert (Anne) : Je dirais que c'est un obstacle, c'est un obstacle très important à la participation sociale des personnes handicapées. Le transport, là, c'est un outil majeur, là, pour les gens dans la réalisation de leurs activités. C'est un obstacle sur lequel il faut travailler pour faciliter l'accès. Comment le faire? Bien, c'est sûr que nous, on l'a dit à plusieurs tribunes, il faut hausser le financement du transport adapté, mais ce n'est pas la seule solution. Il faut chercher l'effet combiné de plusieurs autres solutions, regarder les bonnes pratiques en matière de transport adapté, d'alliance avec le transport collectif dans certains milieux rural et collectif, aussi augmenter l'accessibilité des moyens de transport en commun réguliers.

Donc, il faut travailler sur plusieurs niveaux pour augmenter l'offre de service.

La Présidente (Mme Tremblay) : Merci beaucoup. Le temps est déjà écoulé.

M. Paradis (Lévis) : ...

La Présidente (Mme Tremblay) : Non, c'est ça. Mme Marchand, Mme Hébert, Mme Keays, merci beaucoup pour votre contribution aux travaux de la commission.

Je suspends les travaux quelques instants, le temps de permettre au prochain groupe de s'installer.

(Suspension de la séance à 11 h 3)

(Reprise à 11 h 7)

La Présidente (Mme Tremblay) : Alors, nous poursuivons les travaux. Sans plus tarder, je souhaite la bienvenue aux représentants de la Conférence des tables régionales de concertation des aînés du Québec. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Ensuite, nous allons procéder aux échanges avec les membres de la commission. Donc, je vous invite à vous présenter et ensuite à commencer votre exposé.

Conférence des tables régionales de
concertation des aînés du Québec

Mme Bolduc-DuBois (Nicole) : Bonjour, Mme la Présidente, Mme la ministre, mesdames et messieurs les députés. Je m'appelle Nicole Bolduc-DuBois. Je suis présidente de la Conférence des tables régionales de concertation des aînés du Québec et de la Table régionale de concertation du Saguenay—Lac-Saint-Jean. Je suis accompagnée de Mme Jocelyne Rancourt, qui est présidente de la Table de concertation des aînés de Chaudière-Appalaches, à ma gauche. Elle est aussi administratrice à la conférence. Et à ma droite, c'est Mme Isabelle Daigle, qui est notre conseillère et agente de recherche à la conférence. Il nous fait plaisir d'être ici aujourd'hui. Nous vous remercions de l'invitation, que nous avons acceptée avec plaisir.

Présentation de la conférence. La Conférence des tables régionales de concertation des aînés du Québec est une organisation non corporative, dont le conseil d'administration est composé de membres aînés bénévoles et démocratiquement élus. La missionde la conférence est de regrouper sous une seule entité l'ensemble des tables pour qu'elles puissent s'exprimer d'une seule voix relativement aux grands enjeux qui touchent les personnes aînées du Québec, et ce, en lien avec un aspect important de la politique Vieillir et vivre ensemble.

Pour rédiger son mémoire, la conférence a fait appel à toutes les tables régionales de concertation afin d'obtenir leurs points de vue. Ce document correspond donc à la majorité des commentaires reçus. Notre exposé d'aujourd'hui aborde une à une les cinq grandes mesures du projet de loi. Mais, avant, nous croyons bon de vous présenter quelques commentaires généraux.

La conférence des tables générales de concertation des aînés du Québec est favorable à ce projet de loi. En tant qu'organisme dédié à l'amélioration des conditions de vie des personnes aînées, nous voyons en ce projet des mesures qui protègent, outillent et accompagnent les personnes aînées, leur entourage et les différents intervenants de manière à créer un environnement favorable à la prévention, à la dénonciation et à l'arrêt des situations de maltraitance. Toutefois, nous ne pouvons passer sous silence nos inquiétudes en ce qui a trait à la maltraitance organisationnelle, c'est-à-dire toute situation préjudiciable créée ou tolérée par les procédures des établissements responsables d'offrir des soins et des services qui compromet l'exercice des droits et libertés des usagers. Cette forme de maltraitance, souvent causée par le système en manque de ressources, fait en sorte que les soins et services auxquels ils ont droit sont dispensés dans un contexte irrespectueux et proche de la maltraitance.

Bien que le projet de loi définisse la maltraitance comme étant un geste singulier ou répétitif ou un défaut d'action appropriée qui se produit dans une relation où il devrait y avoir de la confiance et qui cause du tort ou de la détresse à la personne, nous pensons qu'il serait intéressant de préciser le concept de maltraitance en abordant le droit à la qualité et au respect des besoins en ce qui a trait aux soins et services. Cette précision permettrait de porter une plus grande attention et ainsi poser des actions concrètes quant à la surmédicamentation, aux besoins en lien avec l'hygiène, aux aides aux déplacements, au temps requis pour prendre le repas, et le reste.

• (11 h 10) •

Autres formes de maltraitance. La conférence désire également porter à votre attention que, tel qu'il l'a été rapporté par certains médias, le projet de loi ne contient rien pour contrer les abus financiers envers les aînés, notamment les fraudeurs par Internet, qui comptent pour à peu près la moitié des cas de maltraitance. Il serait donc à propos de se pencher sur la question et sur les façons possibles de légiférer en ce sens.

Concernant les ressources requises pour la mise en oeuvre du projet de loi, le projet de loi n° 115 démontre la volonté du gouvernement actuel de lutter contre la maltraitance envers les aînés et toute autre personne en situation de vulnérabilité. Cependant, nous constatons que les mesures d'austérité préconisées — ou de rigueur administrative — par le gouvernement, affectent, via les services offerts par le système public, les personnes les plus vulnérables. À cet effet, la Protectrice du citoyen a sonné l'alarme dans son dernier rapport annuel en disant que la performance de gestion a de plus en plus préséance sur la performance de service. Cela se traduit par de longs délais, de nombreux reports qui, dans plusieurs cas, constituent un déni de service. Mme St-Germain a d'ailleurs précisé que c'est dans le réseau de la santé et des services sociaux qu'il est le plus urgent d'agir, notamment en ce qui a trait aux soins à domicile pour les personnes aînées. Aussi, bien que nous accueillions favorablement le projet de loi n° 115, la mise en oeuvre de ces mesures nécessitera des ressources humaines et financières importantes pour répondre aux objectifs qu'il suggère... et que celui-ci gagnerait à offrir des dispositions pour tout type de maltraitance.

La première mesure, l'adoption obligatoire d'une politique de lutte contre la maltraitance envers les personnes en situation de vulnérabilité. La mise en place d'une politique de lutte contre la maltraitance envers les personnes en situation de vulnérabilité est une mesure essentielle et représente un signal clair de la nécessité de la responsabilisation du gouvernement à l'égard de l'intégrité physique et psychologique des aînés. Par contre, il faut s'assurer de son application, de sa promotion et des suivis par de la formation, de la sensibilisation et de l'accessibilité. Par ailleurs, pour établir des mesures visant à prévenir la maltraitance et à soutenir les personnes en situation de vulnérabilité dans ce contexte, il faudra susciter la participation des employés dans un objectif de collaboration avec les usagers et leur famille.

Les sanctions disciplinaires. Le septième alinéa de l'article 3 du projet de loi n° 115 nous amène à nous poser quelques questions. La politique de lutte contre la maltraitance envers les personnes en situation de vulnérabilité fait état de la possibilité d'appliquer des sanctions disciplinaires devant un cas de maltraitance, mais qu'en est-il lorsque la source de la maltraitance se situe au niveau des pratiques organisationnelles? Est-ce l'employé qui est fautif pour avoir suivi certaines directives?

La diffusion de la politique. En ce qui concerne l'affichage à la vue du public, nous croyons qu'il serait important de mieux encadrer cette notion en imposant que le cadre de la politique, les lignes directrices, la trajectoire et les ressources disponibles soient affichés à plusieurs endroits dans l'établissement. Un résumé en langage accessible et compréhensible ainsi qu'une personne-ressource désignée facile à rejoindre devraient également faire partie des éléments essentiels à être affichés. Dans le cadre de la rédaction des politiques, il serait bien d'élargir la réflexion et de se doter, au Québec, d'une charte des valeurs pour la protection des droits pour le respect de la dignité des personnes aînées.

Deuxième mesure, la bonification du rôle du commissaire local aux plaintes et à la qualité des services. La conférence est en accord avec la proposition d'utiliser des ressources déjà présentes dans le but de ne pas ajouter une structure additionnelle. Elle recommande que les centres d'assistance et d'accompagnement aux plaintes soient considérés comme partenaires privilégiés. Effectivement, les CAAP existent depuis plus de 20 ans, sont installés dans chacune des régions du Québec et sont bien réseautés avec leur milieu. De plus, leurs services sont gratuits, et les professionnels du CAAP, qui ont tous une formation académique en lien avec la relation d'aide, comme les travailleurs sociaux, conseillers en orientation, psychologues, et le reste, peuvent se rendre à domicile au besoin.

Par ailleurs, quelques interrogations sont aussi soulevées quant à l'impartialité du commissaire local aux plaintes. À ce propos, une consultation pourrait être intéressante afin de déterminer quels enjeux entrent en compte dans l'attribution de ce mandat. L'organisme dédié pourrait être le Conseil pour la protection des malades, ou bien la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, ou bien le Protecteur du citoyen.

Troisième mesure, la levée de la confidentialité ou du secret professionnel, l'interdiction de mesures de représailles et l'immunité de poursuite. Les tables régionales de concertation sont divisées en ce qui concerne l'obligation de signalement. Malgré ces divergences, la plupart s'entendent sur le fait que le signalement obligatoire pourrait avoir un plus grand impact négatif. Trop directif, le signalement obligatoire pourrait créer de la méfiance et ne pas favoriser la dénonciation de la situation de maltraitance. Enfin, préserver la relation de la confiance établie entre la population, les professionnels ou les institutions est également au coeur des arguments contre le signalement obligatoire. Un signalement obligatoire ne constitue pas, selon nous, un incitatif à dénoncer une situation de maltraitance. Au contraire, il pourrait arriver que les gens soient portés à fermer les yeux sur des situations par peur de se retrouver au coeur de dédales administratifs. Il est préférable, selon nous, de faciliter la dénonciation, de la démystifier, d'offrir de l'accompagnement et des ressources pour le faire.

En bref, qu'il s'agisse de la personne victime de maltraitance ou de personnes témoin de la situation, nous croyons à l'autodétermination et au libre choix. En ce sens, cette mesure du présent projet de loi s'avérera utile. L'interdiction des mesures de représailles et l'immunité de poursuite sont des incitatifs plus valables qu'une obligation de signaler.

La quatrième mesure, qui est : «Règlement visant à déterminer les modalités d'utilisation des mécanismes de surveillance.» La conférence conclut que les mécanismes de surveillance peuvent constituer des moyens efficaces pour les familles qui soutiennent une personne en situation de vulnérabilité et que l'utilisation de ces mécanismes nécessite un encadrement minimal afin que ces outils demeurent accessibles. Nous avons également pris connaissance des orientations ministérielles déposées et nous sommes en accord avec ce qui est proposé. Dans ce sens, en tout temps, il faut garder en tête que l'objectif est d'offrir une protection à la personne vulnérable avant tout.

Cinquième mesure, le déploiement des ententes sociojudiciaires partout au Québec. Cette mesure fait l'unanimité en ce sens que l'entente sociojudiciaire a déjà apporté des résultats concluants et qu'elle prône la collaboration et le travail.

La conclusion et recommandations. Le mémoire que vous avez en main, en plus de présenter les prises de position de la Conférence des tables, se veut également un outil de réflexion et de questionnement. Par ailleurs, en parallèle de ce projet, nous soutenons qu'il importe de poursuivre les efforts de sensibilisation et d'information à la population en général quant à la maltraitance afin qu'une majorité soit outillée pour accompagner et soutenir les personnes aînées qui vivent de la maltraitance dans le but de la faire cesser.

Nous croyons que la personne aînée doit demeurer au coeur des interventions et que ses choix et ses décisions se doivent d'être respectés. Cependant, une préoccupation demeure, la disponibilité et la qualité des soins et des services offerts aux personnes aînées. Ce projet de loi est un pas dans la bonne direction, et la conférence régionale des tables fait de la lutte à la maltraitance une de ses priorités dans l'objectif de permettre aux personnes aînées de vivre en toute dignité au sein d'une communauté sécuritaire. Merci.

La Présidente (Mme Tremblay) : Mme Bolduc-DuBois, merci beaucoup pour votre exposé. Nous allons maintenant débuter la période des échanges avec les membres de la commission. Et, Mme la ministre, la parole est à vous.

Mme Charbonneau : Merci, Mme la Présidente. Mme la présidente, bonjour. Madame et madame, c'est un plaisir de se voir ce matin, puisque, nous, ça fait presque deux ans maintenant qu'on s'en parle, de cette politique qui devrait être déposée et qui devrait être déposée. Et finalement nous y voilà, dans la même pièce, à l'Assemblée nationale, parce qu'habituellement je vous fréquente plus chez vous qu'on se fréquente à la maison, ici. Donc, c'est vraiment un plaisir. Puis, en même temps, en vous voyant, c'est un peu un signe qu'on en a beaucoup parlé, mais qu'on avance. Et ce n'est quelquefois pas à la vitesse qu'on veut, mais on avance.

J'apprécie la franchise de votre document. Je vous dis pourquoi, Mme la présidente, parce qu'on se connaît bien, je connais bien les gens que vous représentez. Et, quand vous dites : Cette décision, elle a été difficile à prendre parce que ça a occasionné beaucoup de discussions, je suis même capable de fermer les yeux puis imaginer votre table parce que je sais où les gens sont assis et je peux même entendre les voix des gens alentour de la table qui vous disent : Bien, oui ou non, puis ça veut dire quoi, puis chez nous... Et vous avez... la table a cette qualité-là d'avoir quelqu'un de chacune des régions, donc vraiment un regard porté sur la différence des régions. Mon collègue nous en parle souvent, de coins où, des fois, on peut peut-être oublier des choses, mais, dans le cas de la table de concertation des aînés, vous vous faites rappeler à l'ordre par les gens de Gaspésie—Les Îles, les gens de la Mauricie parce que, justement, il y a des gens de partout, et vous êtes ceux qui tenez le bâton de pèlerin des yeux et des oreilles de la ministre dans chacune des régions. Puis, pour ça, c'est toujours un plaisir d'être avec vous puis d'échanger parce que c'est... Les gens pourraient penser que c'est doux quand on se parle, c'est toujours agréable, mais, des fois, on parle des vraies affaires puis on brasse des trucs par rapport à cette volonté de faire avancer des règles, des visions puis des façons de faire pour les aînés du Québec.

Donc, ce pourquoi vous êtes ici ce matin, je l'apprécie énormément, puis, quand vous l'écrivez dans votre document que ça a été déchirant, je suis capable de l'imaginer.

• (11 h 20) •

Dans la volonté de mettre une politique partout, dans toutes nos institutions, il y a des gens qui se sont inquiétés de plein de choses, mais vous êtes les premiers à nous faire la proposition d'avoir clairement une personne-ressource pour pouvoir mettre ou dire dans un langage pratique comment ça se passe. On a les gens de la CAAP qui sont aussi venus nous dire qu'afficher la politique, c'est super important puis la rendre accessible aux gens pour que ça soit une information.

Quand vous nous parlez d'une personne accessible, une personne-ressource, vous la voyez comme un acteur comment dans l'institution? Parce qu'il y a le commissaire aux plaintes qui a des responsabilités à qui on en donne plus. Est-ce que cette personne devrait découler de la responsabilité du commissaire aux plaintes ou de la même personne qui serait probablement regardée sous un angle sévère s'il y avait une maltraitance organisationnelle? Je prends le temps d'ouvrir cette parenthèse-là pour dire que les directeurs généraux seraient responsables de cette politique qui serait implantée partout, de chacun des CISSS ou des CIUSSS. Donc, quand vous me parlez d'imputabilité, de maltraitance, le premier en titre serait le directeur général. Et le ministre de la Santé, cette année, a fait un forum, et, à la fin de ce forum, ils ont signé un contrat pour s'assurer qu'ils étaient pour répondre aux attentes du ministre, puis il y avait là-dedans la gestion rigoureuse, oui, mais sans contraintes physiques, morales ou autres auprès des gens qui sont sous leur responsabilité.

Donc, quand vous nous dites : Est-ce qu'il y a quelqu'un qui va être responsable puis qui va avoir un regard à porter ou des sanctions?, bien, vous avez compris que le directeur général, là, il va avoir une responsabilité. Mais la personne-ressource, vous la voyez responsable de la politique pour en répondre de ces informations, mais sous qui? Qui aurait la responsabilité de cette personne-là?

Mme Bolduc-DuBois (Nicole) : C'est une bonne question parce qu'on parle de personnes-ressources dans notre optique. Dans le fond, ce qu'on voudrait avoir, tu sais, une seule ressource, là, qu'elle soit une personne, qu'elle soit un organisme, mais qu'elle soit identifiée. On a écouté, on était ici tantôt, quand les deux groupes sont venus parler de ce projet de loi, et nous, on a remarqué qu'il y a 25... on l'avait aussi dit qu'il y a 25, 27 organismes.

Alors, les gens ne savent pas à qui s'adresser, ça fait qu'on voudrait que le canal se rapetisse le plus possible de façon à ce que les gens puissent aller vers une personne, ou un numéro de téléphone, ou un organisme, mais qu'ils ne disent pas : Bien, on a 25 personnes, à qui je vais m'adresser? Est-ce que cet organisme-là traite telle plainte? Est-ce que cette personne-là, c'est telle plainte? Il ne faudrait pas... il faudrait peut-être essayer de réunir dans un seul endroit toutes les plaintes, qu'elles arrivent toutes à la même place. Je pense que Mme Rancourt voulait rajouter quelque chose.

Mme Rancourt (Jocelyne) : Oui. Au niveau des... On parle d'affichage dans les établissements. Donc, la personne-ressource serait à l'intérieur de l'établissement, soit une infirmière responsable, une coordonnatrice. Ça peut être cette personne-là qui a eu une formation sur tous les types de maltraitance et qui est capable d'écouter, de recevoir ce que la personne a à dire, soit un signalement ou une situation qu'elle a vécue, si on parle de personne aînée, ou d'une intervenante. Donc, c'est une personne à l'intérieur.

Mme Charbonneau : Et c'est beaucoup plus clair, merci, Mme Rancourt. Merci, Mme la présidente.

Maintenant, si je sors du contexte du principe de quelqu'un en établissement, si je me souviens bien, Mme la Présidente, vous avez votre résidence. Vous êtes chez vous, vous. Vous êtes autonome, et je sais que vous avez de l'autodétermination.

Une voix : Assez.

Mme Charbonneau : Oui, assez, oui. Je sais aussi que plusieurs sujets de la santé vous interpellent énormément parce qu'on a eu le privilège de s'en parler beaucoup.

Si je suis à l'extérieur du principe d'un établissement, vous avez dit, hein, puis vous le connaissez bien, le comité sociojudiciaire parce qu'on s'en est beaucoup parlé, vous le connaissez, alors, à ce moment-là, est-ce que vous voyez une personne en titre dans chacune des régions ou dans chacun des milieux? Comment je pourrais mettre une personne en titre pour que le canal dans lequel il aurait un lieu de référence pour pouvoir dénoncer, demander de l'aide devrait être même? Et à ce moment-là vous le voyez situé où?

Je vous donne un peu... parce que, là, je réfléchis à haute voix avec vous, là, comme je fais habituellement, là, mais est-ce que c'est le 9-1-1 qui pourrait être un numéro que tout le monde connaît où on appelle puis on dit : O.K., moi, je pense que mon voisin vit de la maltraitance, et que, là, nécessairement, la responsabilité du comité sociojudiciaire, qui est en ce moment le responsable, mais qui pourrait changer, là, parce qu'on a eu des propositions de tout le monde pour changer la responsabilité... Mais est-ce que vous voyez là un canal sûr ou vous voyez peut-être quelque chose se développer alentour de ça pour avoir une seule personne dans chacune des régions, qui est à l'extérieur des gens qui sont en résidence, qui ne sont pas sous le commissaire aux plaintes, mais un résident autonome? Vous, Mme la présidente, là, demain matin, vous avez besoin de faire un coup de téléphone pour dire : Je pense que, vous voyez qui pour répondre à votre appel?

Mme Bolduc-DuBois (Nicole) : Bien, moi, je vois plus un numéro de téléphone facile, pas trop long parce que je fais référence à d'autres organismes que le téléphone, c'est trop long. Ça fait que je pense qu'un numéro de téléphone, mais qui soit vraiment connecté avec l'entente sociojudiciaire qui va se développer, en espérant... dans toutes les régions, avec toujours quelqu'un capable de répondre à ça, par exemple, pas un centre d'appel que tu laisses un message, là, mais vraiment un message direct. Ça fait qu'un numéro de téléphone, là, ça serait intéressant de, je pense... Oui, Mme Rancourt, vous voulez ajouter? Oui. On travaille en collaboration.

Mme Rancourt (Jocelyne) : Oui. C'est que Mme Nicole parle d'un numéro de téléphone, mais il y a le numéro d'accueil psychosocial dans les CLSC qui existe. Donc, par cette voie-là, si elle est maintenue, en tout cas, en souhaitant qu'elle soit maintenue, l'accueil psychosocial est capable de référer, et on a parlé d'ententes sociojudiciaires, mais souvent ce ne sont pas toujours des situations d'ordre criminel. Donc, au niveau maltraitance, ça peut être les trajectoires de services. S'il y a une porte identifiée, que ce soit une intervenante sociale ou une employée au niveau des coops de services qui va à la maison ou qui offre déjà les services, ça peut être par cette porte-là. Mais il faut que ce soit... bien informer la population par quel endroit elle peut appeler ou entrer.

La Présidente (Mme Tremblay) : Il reste maintenant 5 min 30 s à la partie gouvernementale. Je cède maintenant la parole à la députée de Richmond.

Mme Vallières : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Bonjour, mesdames. Merci de votre participation. Compte tenu que vous avez des opinions très claires, c'est le fun de vous entendre. Justement, il n'y a pas de zones grises. Et j'ai posé tout à l'heure la question à un autre groupe, j'aimerais aussi vous entendre par rapport au sujet des caméras, puisque vous ne l'avez pas abordé. Quelle est votre vision là-dessus, si vous avez pris connaissance des orientations ministérielles? Les plus, les moins dans votre travail au quotidien, puisque vous êtes sur le terrain aussi énormément. Comment vous percevez tout ça et comment ça peut atterrir, là, selon vous?

Mme Bolduc-DuBois (Nicole) : Pour les caméras, évidemment que ça touche tout le ministère, les ministères... il y a le... La personne, où qu'elle demeure, peu importe où elle demeure, comme Mme Charbonneau, elle dit souvent, c'est son chez-soi. Donc, nous, on est d'accord avec les règlements, mais on se dit que des caméras, ça doit être très, très, très bien encadré. Et, quand on... Évidemment, on a eu le règlement hier, là, puis on a pris le temps de le lire un petit peu, mais on n'a pas approfondi. Mais on se dit : Si on respecte l'autodétermination de la personne aînée, de la personne en situation de vulnérabilité, évidemment que la caméra ne peut... Ils ont le droit d'avoir ce qu'ils veulent dans leur chambre ou dans leur logement, mais que l'encadrement, c'est... je pense que tout dépend du règlement et de l'encadrement sur les caméras, sur la présence des caméras dans les chambres ou dans les logements privés.

Mme Vallières : Est-ce que c'est déjà un sujet qui a été abordé dans le cadre des discussions des différentes tables partout en région?

Mme Bolduc-DuBois (Nicole) : Partout en région, je ne sais pas. Je sais que, dans la région, nous, on n'a pas abordé ça.

Mme Rancourt (Jocelyne) : Oui. Au niveau des tables régionales, et même à l'intérieur des tables régionales il y a des tables locales terrain, donc, oui, ça a été discuté. La plupart sont... c'est sûr qu'ils sont mitigés, mais c'est surtout dans l'angle... parce que c'est légal, la famille peut le faire, et c'est surtout dans un contexte... Si une caméra est installée, c'est parce qu'il y a eu des réponses qui n'ont pas été données ou des questionnements ou de l'inquiétude que les gestionnaires de l'établissement n'ont pas donnés. Donc, la famille... bien, le moyen, c'est par une caméra pour être capable ensuite de mieux intervenir. C'est ça, tu sais. On n'est pas contre l'utilisation des caméras, un encadrement minimal, mais, si les mesures, la communication entre les familles, les employés, les gestionnaires d'établissement s'améliorent et que c'est facile, bien, peut-être que les caméras vont diminuer.

La Présidente (Mme Tremblay) : Il reste 2 min 30 s à la partie gouvernementale.

• (11 h 30) •

Mme Charbonneau : Si vous me permettez, Mme la Présidente. Mme la présidente, ce n'est pas la première fois que vous me parlez, maintenant vous le faites à plus grand, puis mon collègue d'en face va être supercontent de vous entendre, sur le principe de la maltraitance organisationnelle. Je commence à penser que c'est quelque chose qui se passe dans les journaux dans votre bout parce qu'on disait que vous étiez un peu du même patelin, mais en même temps c'est un souci que plusieurs personnes au Québec ont. Pour vous, la maltraitance organisationnelle... J'aimerais ça que vous m'expliquiez votre perception ou la perception de la table sur la maltraitance organisationnelle.

Mme Daigle (Isabelle) : Dans le fond, on a pris la définition, on la connaît déjà. On sait ce qu'on voit dans les journaux. On s'est dit : C'est souvent un manque de ressources, c'est provoqué par un manque de ressources, ressources financières, ressources humaines, on le sait. Des fois, ça peut être une question de gestion aussi.

Alors, on n'a pas une perception, on reçoit l'information, on l'analyse. On sait que ça existe partout à différents degrés. Puis, à travers ça... bien, c'est ça, tout simplement, que, oui, ça existe, il faut s'en occuper. Ça fait partie des formes de maltraitances, puis ce serait bien que les formes de maltraitances, incluant celle-ci, soient écrites clairement dans le projet de loi, soient nommées et définies aussi, que ça fasse partie du projet de loi.

Mme Charbonneau : Merci de nous le rappeler. Et je vous dirais que je suis toujours un peu vigilante sur le principe du «partout». Partout, pour moi, c'est toujours épeurant, mais je comprends quand vous me dites : On en a entendu parler partout. Que ce soit partout de la maltraitance organisationnelle, je comprends que ce n'est pas ça que vous avez dit, là. Vous dites que ce...

Mme Daigle (Isabelle) : Je veux dire que tout le monde, un peu partout, en a déjà entendu parler.

Mme Charbonneau : Exactement, exactement, c'est parce que...

Mme Daigle (Isabelle) : Ce serait plus...

Mme Charbonneau : ...je voulais juste être sûre que... mais effectivement. Mais la maltraitance organisationnelle, vous me corrigerez si vous ne le percevez pas de la même façon, de toute façon, mon collègue va me corriger si ce n'est pas ça, mais, pour moi, c'est un amalgame de gestes posés auprès de la même personne qui fait en sorte qu'il peut se lever puis dire : Je subis de la maltraitance organisationnelle. Je vous donne un exemple. Si un aîné, dans une résidence, puis on en a entendu, des histoires, malheureusement, là, non seulement est mal nourri, n'est pas nourri de la bonne façon, hein, mal nourri dans la qualité...

La Présidente (Mme Tremblay) : Mme la ministre, je vais malheureusement devoir vous interrompre, le temps à la partie gouvernementale est complété.

Alors, je vais maintenant céder la parole à l'opposition officielle, le député de Rimouski.

M. LeBel : Merci, Mme la Présidente. Dans le fond, on se complète. C'est ça que ça veut dire.

Une voix : ...

M. LeBel : Oui. Bien, bonjour à vous trois.

Je commencerai par une parenthèse. Comme quelqu'un de région, je suis très sensible à tout ce qui touche la concertation régionale. Hier, le maire de Montréal, il parlait de réflexe Montréal. Il faut trouver une façon, au Québec, d'avoir le réflexe région aussi, de se donner les moyens d'avoir une lunette. Ce qui se passe en Gaspésie ou dans le Bas-du-Fleuve, ce n'est pas pareil comme la Côte-Nord, ce n'est pas pareil comme l'Abitibi. Et des groupes comme vous existent pour nous le rappeler puis nous dire : Attention, là. Vous êtes en train de faire une affaire nationale, mais l'application dans un coin où il y a beaucoup de villages, c'est bien différent qu'ici dans la Basse-Ville de Québec. Bon, ça fait que ça, c'est des tables de concertation où on amène tout le monde autour de la table pour... c'est important.

Et je sais que votre financement a été beaucoup déstabilisé avec la fin des CRE, les conférences régionales des élus. Je sais que vous êtes encore en négo, vous êtes encore un peu là-dedans, à savoir comment vous allez assurer le financement de ces concertations régionales là, qui sont bien importantes. Dans votre document, juste faire un clin d'oeil, je trouvais ça intéressant quand vous dites : Est-ce que les aînés valent le prix d'un café au Québec, là? C'est une bonne base de négociation, je pense, puis qu'effectivement, à mon avis, il faut financer la concertation régionale. Et, si ça coûte un café par aîné, bien, il faut y aller, à mon avis. Parenthèse.

L'autre parenthèse que je veux dire aussi, c'est... moi, là, je suis... que quelqu'un brasse ou maltraite un aîné, insulte un aîné ou intimide un aîné ou une personne vulnérable partout, là, il faut combattre ça, c'est sûr. Il ne faut pas échapper, personne. Puis la maltraitance est très bien identifiée. On sait ce que c'est. Ça fait que, partout au Québec, là, si quelqu'un du réseau ou autrement maltraite un aîné, il faut sanctionner, il faut intervenir, et on va travailler sur ce projet de loi là pour y arriver.

Quand je parle de maltraitance organisationnelle, ce n'est pas que je veux expliquer l'autre maltraitance. Moi, ce que je veux... ce n'est pas vrai. Mais ce n'est pas vrai non plus que le gouvernement va passer à côté de cette maltraitance organisationnelle par manque de services. Ce que vous dites là, dans votre mémoire, c'est assez gros, là, le droit à la qualité et au respect des besoins en ce qui a trait aux soins de services. Vous dites : «Nous constatons que les mesures d'austérité préconisées ou de rigueur administrative — dépendamment qui en parle — par le gouvernement affectent, via les services offerts par le système public, les personnes les plus vulnérables.» Et ça amène de la maltraitance. C'est ça, de la maltraitance organisationnelle. Puis la chaire de recherche, là, elle est assez... c'est clair, là. Tu sais, la maltraitance organisationnelle : «Toute situation préjudiciable créée ou tolérée par les procédures d'organisations privées, publiques ou communautaires responsables d'offrir des soins et des services de tout type, qui comprend l'exercice des droits et libertés des personnes, les violences et les conditions de pratiques organisationnelles qui entraînent le non-respect des choix ou des personnes, des droits», bon, les services, etc.

Il y a eu des rapports dans nos CHSLD, comment les gens sont traités. Hier, les gens... il y a un groupe qui est venu au niveau de la santé mentale, qui nous a expliqué comment c'était... moi, j'ai trouvé ça terrible, là, comment on pouvait obliger... surmédicamenter des personnes contre leur gré. Ce qu'on a entendu, c'était effrayant hier. Quelqu'un des groupes des malades, une personne... 54 ans, en CHSLD, un bain par mois gros max. Bon, ça, là, c'est de la maltraitance organisationnelle.

Madame, tantôt, en réponse à la ministre, disait : Il faut voir que ça existe, il faut l'inscrire. Parfait, mais on fait quoi après? Puis qu'est-ce que... Ça existe, on fait quoi? Et qu'est-ce qu'on pourrait mettre dans la loi? Tu sais, on oblige le personnel, on les surveille, on dit : Non, ce n'est pas vrai qu'il va y avoir de la maltraitance. Mais comment on fait pour s'assurer qu'il n'y ait pas de maltraitance organisationnelle et comment on fait pour avoir des sanctions ou cogner sur les doigts de quelqu'un pour dire : Non, ça ne marche pas, là? C'est quoi, la procédure? Le commissaire aux plaintes, là, il va appeler le premier ministre, il va dire : Non, ça ne marche pas? C'est quoi, le... J'aimerais ça savoir.

Mme Bolduc-DuBois (Nicole) : Je pense que ça passe aussi par la formation, par l'information, par la formation du personnel aussi, parce que... puis pour la revalorisation du personnel en place. Quand le personnel ne se sent pas revalorisé, c'est certain qu'il est moins intéressé à bien travailler. Pour avoir travaillé pendant 35 ans dans le milieu, je peux vous en parler. Quand on ne se sent pas à la bonne place ou on ne sent pas que les gens reconnaissent le travail qu'on fait, ne reconnaissent pas le bien qu'on fait ou que les dirigeants, que ce soit la chef de service, que ce soit plus haut, que ce soient les directeurs... je pense que ça passe vraiment par la revalorisation du personnel et donner la formation nécessaire.

Je pense que les gestionnaires, peu importe qui sont ces gestionnaires, s'ils sont incapables de s'apercevoir que leur personnel manque de formation et qu'ils sont devant une situation qui revient trop souvent... parce que, normalement, un gestionnaire doit s'apercevoir que sur son étage, dans son établissement, il y a du mécontentement. Alors, s'il y a du mécontentement et qu'on sent la grogne, bien, il me semble que la personne en place va réagir. Et ça, cette grogne-là, il faut l'écouter. Et c'est les gens en situation d'autorité qui doivent l'écouter, cette grogne-là, qui vient des gens qui sont dans le milieu, qui sont vraiment sur le terrain. Et je pense que la formation et la revalorisation est importante. Oui, Mme Rancourt.

Mme Rancourt (Jocelyne) : Pour compléter, je peux donner un exemple simple quand on parle soit de maltraitance ou de négligence au niveau de l'organisation. Étant infirmière dans un passé... il y a quelques années, je travaillais avec une équipe dans une unité où des personnes vivaient avec des problèmes cognitifs. Et on s'est aperçu d'une situation, on s'est arrêté pour l'analyser, l'équipe, et on a proposé un moyen à la direction. Ça n'a pas été simple parce que ça demande un changement de mentalité, de façon de faire, et c'était simplement d'arrêter de polir le plancher, qui ressemble à un miroir. Mais ce n'était pas facile dans l'optique du bien paraître de... écoutez, qu'il faut que ça soit clair et propre, un établissement. Donc, avec des discussions, en faisant comprendre, l'équipe savait de quoi elle parlait, avec un exemple concret, avec les gestionnaires, ça s'est fait.

M. LeBel : Quand on parle de maltraitance organisationnelle, il y a ça, puis... parce que ce n'est pas toujours des questions d'argent.

Mme Rancourt (Jocelyne) : Non, non, non!

• (11 h 40) •

M. LeBel : Des fois, c'est de l'organisation, et merci de nous le dire. Des fois, c'est l'organisation terrain, mais il y a des fois aussi, c'est des questions d'argent. Je vais vous dire, quand on coupe 20 millions au CISSS dans le Bas-Saint-Laurent, c'est sûr que ça a impact sur les personnes, c'est clair que ça en a un. Et ça, là-dessus, ce n'est pas le gestionnaire, on ne peut pas sanctionner le gestionnaire local, on ne peut pas sanctionner... c'est une décision politique et gouvernementale. Et là il faut trouver une façon, dans cette politique-là, de ne pas échapper ça. Comment on fait pour s'assurer que le gouvernement, quand ils font des politiques, quand ils sous-financent ou qu'ils décident de faire des réformes, qu'ils respectent l'impact sur les aînés, les personnes vulnérables, qu'il évite qu'il y ait de la maltraitance? Il faut trouver une solution, une façon de faire, à mon avis. Mais je ne sais pas comment qu'on va faire parce qu'on dit : Ça existe, mais...

Mme Bolduc-DuBois (Nicole) : ...ce qu'on disait au début, nous, on est le porte-parole, on reflète les commentaires de toutes les tables, et c'est ce qui s'est passé. C'est qu'ils ont remarqué, les gens, c'est ce qu'ils nous ont donné comme commentaire, qu'il y a de la maltraitance organisationnelle, il y a du manque de ressource, les gens sont épuisés. On l'a entendu depuis trois jours. Vous l'avez entendu et plus qu'entendu. Mais, souvent, c'est organisation, mais c'est, comme je vous disais, vraiment une question aussi d'organisation de travail, de revalorisation du personnel. Moi, je reviens toujours à ça parce que la personne qui ne se sent pas...

Une voix : Considérée.

Mme Bolduc-DuBois (Nicole) : ...considérée, ne sent pas que ce qu'elle fait, c'est important, ça devient démoralisant. Et c'est ce qui fait aussi que... Et ce n'est pas tout le temps les ressources financières, comme vous dites, c'est les ressources, mais la façon de travailler en équipe, de travailler dans la concertation. La concertation, elle est aussi présente dans l'organisation... dans un CHSLD ou ailleurs. Quand la personne est prise pour travailler toujours toute seule... Le travail d'équipe est important, mais, pour ça, il faut l'encourager, ce travail-là, encourager ces échanges-là entre le personnel et la direction, qui fait qu'on va pouvoir pallier à certains manques. Je ne dis pas que... de ne pas rajouter de ressources quand c'est prouvé qu'il manque de ressources parce que c'est de plus en plus lourd, hein? Il faut penser que, si...

La Présidente (Mme Tremblay) : Je vais devoir vous interrompre, puisque le temps alloué à l'opposition officielle est maintenant écoulé. Je cède maintenant la parole au député de Lévis, du deuxième groupe d'opposition.

M. Paradis (Lévis) : Merci, Mme la Présidente. Merci, mesdames, d'être là. Puis je vais ajouter quelque chose à mon collègue député de Rimouski, puis c'est vrai, lorsqu'il y a des coupures dans une organisation pour satisfaire à des impératifs budgétaires, que manifestement il peut y avoir des effets. Puis là je sors un petit peu de la maltraitance, puis, quelque part à un moment donné, tout se rejoint. Mais je vais vous donner un exemple très, très récent. On a décidé de couper, par exemple, le service de cafétéria le matin dans un centre hospitalier de Chaudière-Appalaches parce qu'il fallait sauver des sous. Ça n'a l'air de rien comme ça, là, mais l'aîné conjoint qui va reconduire son aînée conjointe pour des traitements tôt le matin puis qui a envie de manger une toast, bien là, on décide, pour sauver les centaines de milliers de dollars qu'on demande de plus, de dire : Bien, il n'y en aura plus, de déjeuner. On va commencer plus tard.

Tu sais, je veux dire, ça n'a l'air de rien comme ça, mais, oui, c'en est, ça aussi, un problème, un impact des contraintes budgétaires sur le quotidien d'individus où on dit : Ça fait quoi? Bien, ça fait de quoi. Puis là, bien, on a fait pression, puis on en a parlé, puis là c'est revenu. Là, ils vont le maintenir. Mais encore une chance qu'on l'a dit, puis encore une chance que des gens ont décidé de signer... Rapidement dans la Beauce, plusieurs milliers de personnes ont décidé de réagir rapidement et dire : Aïe! Wo! Minute, là. Ça fait aussi partie de qualité de service dans un réseau parce que tout est intimement lié. Et on a réussi à renverser la vapeur.

C'est ça, madame, ceux à qui vous parlez puis que vous côtoyez quand vous me parlez du système de santé. Je pense que...

Mme Rancourt (Jocelyne) : Oui, parce que c'est sûr que la mobilisation des équipes de travail, la mobilisation soit de la population ou des usagers qui utilisent les services... mais il faut aussi, en tout cas, ce que je dis, malheureusement aller dans les médias. Souvent, c'est par la pression aussi des médias qu'il y a une sensibilisation plus large et qui touche... soit au niveau du député local et au niveau des ministères.

M. Paradis (Lévis) : Bien, une chance, en tout cas, qu'on est là, chacun d'entre nous, pour vous accompagner là-dedans, puis comptez sur notre appui également.

Je reviendrai sur un élément dont vous avez parlé en tout début. Vous avez dit : Là, il faut que le... vous parlez d'un numéro unique, là, que les gens sachent à qui s'adresser, comment faire le cheminement. Tout à l'heure, on a reçu puis on a parlé avec les gens qui sont du comité d'accompagnement aux plaintes, qui disaient : On a un numéro unique. S'il se passe quelque chose, là, il y a un numéro unique où on peut parler, puis ensuite, après cet appel-là, bien, souvent, on est appelé à rencontrer. Il y a des trucs, mais ce que vous êtes en train de me dire, c'est que cette information-là, elle n'est pas connue. On a un problème de...

Mme Bolduc-DuBois (Nicole) : ...il y a peut-être un peu trop de canaux d'information. C'est ce que je disais tantôt. Il faudrait peut-être canaliser de façon à arriver à une seule porte parce que, présentement, là, ça dépend de la plainte. Tu sais, si c'est une plaine sociojudiciaire, comme on a parlé, ce serait la police. Si c'est une autre plainte... Mais il faudrait avoir un endroit, une personne-ressource, ou un canal, ou un numéro de téléphone où la plainte que vous faites, elle est là, mais après le suivi se fait. La personne qui va vous répondre ou l'organisme qui va vous répondre va être capable de diriger votre plainte, ou votre dénonciation, ou votre signalement, appelez-le comme vous voulez, à la bonne place sans que vous, vous soyez obligé de dire : Bien là, appelez à tel numéro. C'est sûr que ça va lâcher, c'est sûr que ça va arrêter, tandis que, si on a une seule place, un seul numéro régional... ça peut être régional. Toutes les régions ne sont pas... Ce n'est peut-être pas tout le même canal, ce n'est peut-être pas la même personne-ressource, mais au moins, dans une région ou dans un secteur donné, que les gens de ce milieu-là sachent qu'ils peuvent appeler là et ils ont avoir une réponse.

M. Paradis (Lévis) : Vous devez le constater, et je terminerai là-dessus, vous devez le constater parce que vous abordez beaucoup de thèmes, mais ça aussi, ce thème-là, majeur, de l'accessibilité au réseau de santé, la qualité des soins qui sont donnés, de la maltraitance, bon, ça revient, je présume, continuellement dans vos discussions aussi à travers autre chose.

Vous savez, dans les centres hospitaliers, on a dû vous le dire, dans des CHSLD, et tout ça, il y a des gens qui ne pourraient même pas vous dire comment rejoindre leur comité d'usagers, ils ne savent pas c'est qui, c'est où, c'est comment, ni non plus leur comité de résidents. Alors, c'est bien pour dire. J'imagine que vous entendez ça aussi assez régulièrement.

Une voix : Oui, oui.

M. Paradis (Lévis) : Bien, moi, ça complète. Je pense que le portrait est clair. Merci, mesdames.

La Présidente (Mme Tremblay) : Parfait. Alors, Mme Daigle, Mme Bolduc-DuBois et Mme Rancourt, merci beaucoup pour votre contribution aux travaux de la commission.

Je vais maintenant suspendre quelques instants, le temps que de permettre au dernier groupe de prendre place. Alors, à tout de suite.

(Suspension de la séance à 11 h 47)

(Reprise à 11 h 51)

La Présidente (Mme Tremblay) : Alors, nous poursuivons les travaux. Sans plus tarder, je souhaite la bienvenue aux représentants du Curateur public du Québec. Bonjour à vous quatre! Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, ensuite nous allons procéder aux échanges avec les membres de la commission. Je vous invite donc d'abord à vous présenter et ensuite à commencer votre exposé.

Curateur public

M. Jutras (Normand) : Alors, bonjour, Mme la Présidente, Mme la ministre, Mmes, MM. les parlementaires. Alors, je me présente, Normand Jutras, Curateur public. Je vous présente les personnes qui m'accompagnent. À ma droite immédiate, Pierre Lamarche, qui est directeur général des services aux personnes, à ma gauche, Me Nicole Filion, qui est directrice générale des affaires juridiques, Gilles Dubé, qui est à l'arrière, directeur de la planification des politiques et de la recherche, Gilles Brunet, qui est agent de recherche socioéconomique, et ces deux Gilles ont beaucoup participé, là, à la rédaction du mémoire.

Je rappelle brièvement la mission du Curateur public, c'est de voir à la protection des personnes inaptes, défendre leurs intérêts, défendre leurs droits et voir à la sauvegarde, le plus possible, de leur autonomie, ce qui est très important. On parle, au Québec, de personnes inaptes, là, qui sont sous une mesure de protection, je dirais, 13 600 qui sont sous régime public, 17 000 qui sont sous régime privé, mais, de ce nombre, il y a 5 000 mineurs, et il y a 13 000 personnes qui sont sous mandat de protection homologuée.

Alors, ces personnes sont certainement parmi les plus vulnérables au Québec. De qui parle-t-on? Ce sont des personnes qui ont une déficience intellectuelle, des problèmes de santé mentale, maladie dégénérative. Mais alors que les maladies dégénératives, ça représente 20 % de notre clientèle, cependant, au cours des dernières années, les nouveaux dossiers, dans une proportion de 50 % à chaque année, ce sont des cas de maladies dégénératives, vieillissement de la population, les personnes âgées qui vivent plus longtemps, et aussi ce sont des traumatisés crâniens et des personnes victimes d'AVC sévère.

Alors, maintenant, commentaire sur le projet de loi n° 115 comme tel. Alors, ce que nous saluons, c'est la présentation de ce projet de loi, et ce que nous disons : C'est un pas dans la bonne direction. Et il y a, à notre avis, des points qui sont très positifs, comme le projet de loi ne parle pas seulement des aînés, mais il parle aussi des personnes majeures en situation de vulnérabilité. Aussi, on ne vise pas seulement les CHSLD, mais on parle des ressources intermédiaires, des ressources de type familial, des résidences privées et même à domicile, et on a beaucoup de nos personnes qui vivent dans des ressources intermédiaires et dans des RTF.

Par contre, le projet de loi, sa portée est trop restreinte parce qu'il s'applique seulement aux personnes qui reçoivent des services, des soins de santé et des services sociaux. Qu'en est-il de ceux et celles qui ne reçoivent pas de tels services? Et le chapitre III aussi, article 16 et article 17, étrangement, alors que le titre parle des aînés et des personnes en situation de vulnérabilité, à ce moment-là, on ne parle plus seulement que des aînés. Et, à notre avis, l'entente sociojudiciaire devrait concerner les personnes vulnérables.

Alors, on dit donc qu'il faut viser plus large parce qu'entre autres il y a beaucoup de maltraitance financière, nous sommes souvent, souvent confrontés, au Curateur public, à ce problème-là, voir quel serait le rôle le rôle des institutions financières, Mouvement Desjardins et les banques, comme aide à ce chapitre, le domaine de la consommation aussi où il y a beaucoup d'aînés et de personnes vulnérables qui sont exploitées, domaine du logement. Quand je vous parle de maltraitance financière, chez nous souvent, les cessions d'immeubles ou donations d'immeuble qui se font au profit d'un enfant au détriment des autres enfants, les tentatives de changement de testament au profit d'un héritier et au détriment des autres héritiers... et vous dire les chicanes de famille que ça entraîne, évidemment, et les poursuites judiciaires, et des conflits qui peuvent devenir épouvantables, des vols d'argent ou l'obtention d'argent par des pressions indues, pressions psychologiques, etc.

Alors, le premier élément dans nos recommandations. À notre avis, il faut en venir à la dénonciation obligatoire avec sanction, et puis, pour ça, on suggère au législateur de s'inspirer des dispositions de la Loi sur la protection de la jeunesse, où il y a déjà, de toute façon, la dénonciation obligatoire dans certains cas, parce qu'en fait de quoi on parle? On parle de personnes qui ne peuvent pas dénoncer. Alors, qui peut dénoncer? C'est autrui. Puis, si on ne dit pas à cette autre personne là qu'elle doit dénoncer, ça veut dire qu'on se retrouve dans des situations où, effectivement, il n'y a pas de dénonciation. Et là on se retrouve dans des situations où on dit : Mais comment ça se fait que ça a duré aussi longtemps?

Alors, j'ai écouté beaucoup de la commission. Tous sont venus dire que la maltraitance, c'est inacceptable, que ne pas la dénoncer, c'est se rendre complice. Et d'ailleurs aussi ce qu'on constate, c'est souvent des cas de grande cruauté. On parle, oui, d'information, de sensibilisation, de prévention, ça, j'en suis. D'ailleurs, dans le plan d'action, c'était parmi les recommandations, et encore, ça a lieu d'être. Mais je pense qu'on en est rendus qu'il faut avoir le courage de nos convictions. On considère que c'est inacceptable, on considère que c'est inadmissible, alors, à ce moment-là, il faut aller plus avant.

Et je suis très sceptique, très sceptique quand à l'argumentation qu'on a fait valoir devant vous à l'effet que la dénonciation obligatoire retardait la dénonciation. À mon avis, ça va à l'encontre de la logique. Et j'ai été tellement surpris de ça que je me suis dit : On nous a parlé d'un cas d'Australie, mais encore là il faudrait voir, en Australie, comment ça s'est passé. Mais chez nous? On a communiqué, nous, avec la CDPDJ, entre autres le volet jeunesse, où il y a de la dénonciation obligatoire. Puis la CDPDJ nous dit : On n'a jamais été victime de ça, on n'a jamais réalisé ça. Puis, dans d'autres provinces canadiennes aussi, on a rendu la dénonciation obligatoire. Alors, il faudrait aller voir là avant de nous parler d'exemples bien lointains.

Il y a aussi des définitions, à notre avis, dans le projet de loi, qui sont à revoir. Je pense que les définitions, entre autres, c'est des traductions trop rapides de l'anglais au français sans les adapter, là, au contexte québécois. Je vous donne juste un exemple. Quand on parle de la maltraitance, on parle de gestes. Mais le geste, en français, ne couvre pas la parole. D'ailleurs, on dit souvent : Joindre le geste à la parole. Alors, moi, je pense que ces définitions-là, il faut les cerner davantage, il faudrait parler des paroles et des gestes.

La même chose pour le cas des personnes en situation de vulnérabilité. La définition qu'on donne, avec, semble-t-il, comme un seul critère : La capacité de demander de l'aide est limitée. La personne vulnérable, c'est beaucoup plus que ça, il y a d'autres définitions. Et puis, justement, quand la capacité n'est pas limitée, qu'est-ce qui arrive?

Bon, le rôle du commissaire local, bien, je pense qu'on élargit son rôle considérablement. Est-ce que les ressources vont suivre? Est-ce que la formation va être là? Il n'y a pas de pouvoir d'enquête. À cet égard, nous, ce qu'on recommande, quand ça concerne une personne inapte, que le commissaire local nous réfère le cas immédiatement parce que moi, j'ai un pouvoir d'enquête, j'ai un pouvoir d'assigner des témoins, j'ai un pouvoir d'aller voir dans les comptes de banque, de fouiller dans les documents. Alors, on éviterait un chevauchement.

L'entente sociojudiciaire, ce que l'on dit, c'est qu'il faut y joindre les personnes vulnérables.

Le secret professionnel, nous sommes d'accord avec les dispositions qui sont mises de l'avant.

Et finalement... Combien qu'il me reste de temps?

Une voix : ...

M. Jutras (Normand) : Combien?

Une voix : Deux minutes.

La Présidente (Mme Tremblay) : Deux minutes.

M. Jutras (Normand) : Alors, j'en viens à ma proposition principale. Moi, je pense qu'on est rendus, au Québec, avec une loi-cadre contre la maltraitance à l'endroit des aînés, mais que l'on parle de bientraitance. Alors, on le dit, la maltraitance, malheureusement, est trop présente, la maltraitance, elle est inacceptable. On dit : Tolérance zéro. Bien, je dis : Ayons le courage de nos convictions.

D'ailleurs, on peut craindre une augmentation des cas parce que les personnes âgées, leur nombre augmente, et en plus de ça avec, entre autres, le vieillissement de la population. Je vous cite une magistrate française, qui dit : N'est-ce pas en fonction des réponses apportées par une société pour protéger les plus faibles de ses membres que l'on juge son niveau de civilisation?

Alors donc, ne parlons pas seulement de lutte à la maltraitance, mais parlons de bientraitance puis comment assurer à ces personnes la bientraitance en voyant comment on peut respecter leur intégrité physique et psychologique, comment assurer à ces personnes l'égalité, l'équité ainsi que des comportements respectueux à leur endroit, leur permettre de garder le plus possible le contrôle de leur vie, leur permettre d'avoir un réseau ou un soutien social permettant de briser l'isolement et un environnement qui doit leur être assuré, physique et psychosocial, sain, dans lequel la personne aînée se sent en sécurité. Et beaucoup de ce que je vous dis là, je l'ai pris dans le plan de lutte à la maltraitance.

Et je termine avec les caméras. Je suis d'accord avec la position du Barreau, qui dit que la chambre, dans un CHSLD, par exemple, c'est un lieu privé. Ça, j'en conviens. Mais il va falloir faire attention dans l'utilisation de ces caméras. Il faudra vraiment que la personne âgée qui donne un consentement... est-ce qu'elle donne un consentement libre, volontaire et éclairé et est-ce qu'elle est consciente des conséquences de ce qui peut se produire? Et là où je n'ai pas de réponse... parce que j'avais participé à la consultation qui a été faite, là, quand certains groupes ont été convoqués, j'ai soulevé la question de la personne qui n'a pas de représentant légal. Il y a beaucoup de personnes au Québec qui sont inaptes et qui n'ont pas de représentant légal. Qui va donner l'autorisation? Et souvent nous, le Curateur public, on est au coeur de conflits familiaux d'importance. Si le fils, par exemple, veut installer la caméra, puis sa soeur, elle ne veut pas qu'il y ait de caméra, est-ce qu'on va assister à une scène où, une journée, la caméra s'installe, l'autre journée la caméra est enlevée? Alors, qui va autoriser dans ces cas-là? Qui va arbitrer ça? Est-ce qu'il va falloir se retrouver devant le tribunal pour faire déterminer s'il y a lieu d'installer une caméra ou non? Et c'est une situation avec laquelle, je pense, on pourrait être confrontés plus souvent que l'on pense.

• (12 heures) •

La Présidente (Mme Tremblay) : Merci beaucoup, M. Jutras, pour votre exposé. Nous allons maintenant débuter la période des échanges avec Mme la ministre, qui prend la parole d'abord.

Mme Charbonneau : Merci. Merci, Mme la Présidente. M. Jutras, on se retrouve. On a travaillé ensemble quelque temps, puis maintenant ça fait un petit bout qu'on ne s'était pas vu. Alors, bienvenue chez vous, puisque, pour les gens qui nous écoutent... puis les gens qui nous connaissent le savent, que vous avez été déjà alentour de cette table. Donc, vous savez exactement comment se font les démarches pour écrire une loi et la complexité du législateur pour s'assurer qu'elle soit non seulement bien écrite, mais clairement écrite.

Alors, je reviens sur votre prise de position ferme et assurée de l'obligation de dénoncer parce que vous le dites avec beaucoup d'assurance qu'on est rendus là. Je vous entends quand on dit : On est rendus là, mais je vous ramène au titre du projet de loi, hein, parce que c'est important de bien le comprendre que le titre, c'est loi visant à lutter contre la maltraitance envers les personnes aînées et toute autre personne majeure en situation de vulnérabilité.

Donc, vous, ce que vous nous dites, c'est : Une personne en situation de vulnérabilité devrait être reconnue sous une forme plus une dénonciation obligatoire, mais, si j'ai bien compris, puis moi, je connais bien le rôle que vous occupez dans la société, là, la personne aînée, elle, ce n'est pas la même chose parce qu'elle a encore, puis là-dessus je le sais qu'on se rejoint, toute son autodétermination. Parce que de par le rôle que vous occupez, il y a des fois des débats, hein, des enfants qui disent : Mon père ou ma mère n'est plus apte à gérer ses choses, je veux que ça soit moi, je veux avoir la responsabilité de son patrimoine. Et vous êtes un de ceux qui défendez, avec beaucoup de justesse, cette volonté-là de dire : Tant que quelqu'un est capable de s'occuper de son propre patrimoine, laissez-lui sa responsabilité. Ce n'est pas parce que c'est un aîné qu'il n'est pas capable de le faire.

Donc, je veux bien comprendre, quand vous me dites l'obligation, vous ne parlez pas de la personne aînée qui a encore... bien, je vous dirais, quand je lève mes yeux, là, j'ai des aînés alentour de cette table qui sont capables de prendre des décisions, vous ne parlez pas de ces gens-là. Vous me parlez plus des gens, je veux être sûre, en situation de vulnérabilité.

M. Jutras (Normand) : Absolument, madame, parce que moi, je ne parle pas de la personne qui a 80 ou 85 ans, qui a bon pied bon oeil, qui est encore en possession de toutes ses facultés, puis qui est capable de gérer sa personne, puis qui est capable de gérer ses biens. Je parle vraiment de la personne qui a perdu de ses facultés et qui a besoin de l'aide d'autrui pour se débarrasser, là, pour se défaire d'une situation qui peut être problématique pour lui.

Mme Charbonneau : Maintenant que ça, c'est plus clair pour moi, parce que c'est ce que j'avais perçu, je voulais juste m'assurer...

M. Jutras (Normand) : Il ne faut pas tomber dans l'âgisme, comme on dit.

Mme Charbonneau : Merci, parce que ça fait partie de la maltraitance, l'âgisme. Donc, quand j'enlève à quelqu'un son autodétermination malgré le fait qu'il l'ait encore, croyez-moi... Puis je sais que vous avez déjà eu un bureau de comté. Quand on dit à un homme ou à une femme, mais c'est souvent les hommes qui ont cette réaction-là, qu'il n'aura droit à son permis de conduire parce qu'il est rendu à un certain âge, vous avez entendu, comme moi et comme mes collègues, tous les arguments pour pouvoir garder son permis de conduire, hein? C'est son autonomie, puis il veut l'assurer, puis il la défend très bien.

Donc, je comprends votre principe qui dit : Bon pied bon oeil. Par contre, le projet de loi, dès le départ, vise les personnes aînées et toute autre personne en situation de vulnérabilité. Pourquoi? Bien, parce que, malgré le doute que vous donnez sur la chaire de recherche et les travaux qu'elle fait, ce que la chaire de recherche a aussi été capable d'établir, c'est que, plus souvent qu'autrement, ce ne sont pas les professionnels de la santé qui posent des gestes. C'est une personne en lien de confiance, donc un fils, un parent, un ami très proche, un voisin.

De ce fait, le principe qui veut qu'on dise : une possibilité de divulguer, puis le changement, un peu, de la définition, vous en faites un peu... Je vais revenir sur la définition après. Vous avez compris que le projet de loi vise la clientèle aînée pas pour lui enlever son autodétermination, mais pour faire en sorte que, s'il y a quelque chose qui se passe puis que l'aîné n'a pas assez de force, il doit être accompagné pour le dénoncer. On veut mettre toutes les possibilités, toutes les... l'ancrage et le filet de sécurité alentour de lui pour pouvoir permettre aux gens de le faire en étant protégé, hein, parce qu'on y va un peu pour la levée du secret, mais aussi pour protéger des sanctions les gens qui vont s'avancer sur ce principe-là. C'est pour ça que le projet de loi visait plus large.

De la façon que vous me parlez, ce que je comprends, c'est que je devrais retirer les gens qui ont bon pied bon oeil de mon projet de loi. Donc, j'enlève les aînés puis je garde le projet de loi juste pour les gens en situation de... les personnes majeures en situation de vulnérabilité. Donc, j'enlève les aînés.

M. Jutras (Normand) : Non, je ne pense pas que ce soit nécessaire de faire ça parce qu'effectivement on a en quelque sorte comme deux catégories d'aînés. Parlons de la dénonciation obligatoire, puis je l'ai dit tantôt, parlons de la dénonciation obligatoire pour les gens qui ne sont pas capables de dénoncer. Alors, qui peut dénoncer dans ces cas-là? La personne n'est pas capable de le faire. Ça appartient donc à autrui de le faire. Puis là nous, comme société, on va tolérer que la personne qui pourrait dénoncer, qui serait témoin, on va lui permettre de se croiser les bras et de ne rien faire?

Moi, je ne peux pas acheter ça, madame. Je vois trop, moi, de cas de cruauté, de grande cruauté et trop de cas aussi que... comment ça se fait que ça a duré aussi longtemps que ça? Bien, à ce moment-là moi, je me dis : On est là pour protéger ces personnes-là, et, s'il y en a qui hésitent à le faire, bien, à ce moment-là, qu'il y ait une obligation de faire, de dénoncer la situation.

Mme Charbonneau : Je reviens à votre principe. Donc, à partir de ce moment-là, si je garde le même titre, j'impose à ceux qui ont bon pied bon oeil la situation que... parce que je ne peux pas... puis vous avez déjà écrit des lois, là. Je sais à qui je parle, là. Je sais que vous avez cette finesse-là, là, des gens qui sont alentour de la table, du rôle du législateur. Vous me demandez d'établir une loi avec des critères qui feraient en sorte que j'aurais deux clientèles très précises, là, bon pied bon oeil, pas bon pied bon oeil. Après ça, il faut que je définisse autrement.

Vous avez compris la complexité de ce que vous... ce qui se dessine dans la perspective que vous avez. Je veux juste être sûre de bien comprendre parce que dans la société dans laquelle on vit, dans le Québec dans lequel on vit, on a l'obligation de divulguer. On l'a. Si je marche dans la rue puis que je vois quelqu'un poser un geste, normalement, j'ai l'obligation de divulguer. Je dis normalement. Si je suis... non, pas si je suis, je suis grand-mère de trois petits-enfants, et, dans mes petits-enfants, il se passe quelque chose entre un de mes petits-enfants et moi-même, puis je prends pour acquis que ça va se régler rapidement, que c'est une situation ponctuelle. Puis je ne veux pas que personne ne le sache parce que je ne veux pas que ça finisse comme une mauvaise histoire. Je veux juste être accompagnée pour aider cet enfant-là à mieux comprendre ce qu'il est en train de faire, mais je ne veux pas. Et là j'imposerais une façon de faire qui est différente.

Je ne sais pas si, dans la perception que vous avez, il est plausible de voir deux projets de loi parce que, dans un projet de loi, faire des distinctions par rapport à un aîné, ça devient un petit peu plus complexe. Donc, j'écris un projet de loi qui dit : lutte visant à contrer la maltraitance envers les aînés et toute autre personne majeure en situation de vulnérabilité. Dans mon projet de loi, je dis : Bon pied bon oeil, vous faites ce que vous voulez. Situation de vulnérabilité, là, il y a des conséquences, puis je suis obligée de divulguer.

• (12 h 10) •

M. Jutras (Normand) : Mais un projet de loi, c'est fait pour régler des situations puis c'est fait pour régler des situations qui peuvent être différentes. Puis d'ailleurs le titre de votre projet de loi, il est éloquent, il parle de la maltraitance, là, envers les aînés et toute autre personne majeure en situation de vulnérabilité. Et je vous ai entendue vous-même, Mme la ministre, dire, dans le cadre de la présente commission, qu'il ne fallait pas tomber dans l'âgisme et qu'il y avait des aînés qui étaient très bien capables de se défendre eux-mêmes et qui avaient bon pied bon oeil. Bon. Alors, ça, on s'entend, dans ces cas-là, qu'il n'y a pas de dénonciation obligatoire parce que la personne elle-même est autonome et est capable de dénoncer.

Moi, je vous parle des aînés qui sont en situation de vulnérabilité et de personnes majeures qui sont en situation de vulnérabilité. Il faut l'encadrer, cette dénonciation obligatoire que nous voulons. Et comment pouvons-nous l'encadrer pour ces personnes-là? Et ça, moi, je vois très bien que ça peut se faire à l'intérieur d'un même projet de loi.

Mme Charbonneau : Trouvez-vous, parce que je ne vous ai pas beaucoup entendu là-dessus, que la levée du secret professionnel est un moyen pour pouvoir aider la dénonciation? Je reste avec le principe qui est écrit dans le projet de loi présentement, là, je ne suis pas encore rendue à la dénonciation obligatoire parce que ce n'est pas comme ça que le projet de loi est écrit. Trouvez-vous que c'est un moyen intéressant pour pouvoir avoir accès à l'information par rapport à un professionnel?

M. Jutras (Normand) : Oui. On s'est dit d'ailleurs d'accord avec les dispositions, là, qui concernent le secret professionnel, et le Curateur public, déjà, d'ailleurs, dans le passé, s'est prononcé dans ce sens-là. Mais il faut beaucoup de moyens parce que, beaucoup d'intervenants l'ont dit, puis, quand on lit sur la maltraitance, on voit que c'est complexe, la maltraitance... Des fois, les gens ne le réalisent même pas que c'est de la maltraitance. Souvent, c'est très caché. Et en plus ce à quoi on est confrontés aussi souvent, le Curateur public, c'est la preuve, d'aller chercher la preuve, qui n'est pas nécessairement une preuve aussi lourde qu'en matière criminelle, mais, même en matière civile, il faut quand même aller chercher une preuve prépondérante, et c'est très difficile.

Quand ça se passe, entre autres, dans une petite chambre de CHSLD, là, puis qu'il n'y a pas de caméra, O.K., puis c'est juste une pression qui s'exerce, là : Je ne viendrai plus te voir, si tu ne fais pas ça, O.K., tu as toujours préféré les autres de la famille plutôt que moi...

Mme Charbonneau : ...j'en suis certaine.

M. Jutras (Normand) : Oui. Alors, c'est difficile, dans ces cas-là, d'aller faire la preuve d'une maltraitance. Alors, c'est pourquoi moi, je dis : Plus on a de moyens à notre disposition, plus on va pouvoir la contrer, la maltraitance, et bien traiter nos aînés.

Mme Charbonneau : Malheureusement, tout exemple étant un peu boiteux, l'exemple que vous prenez fait en sorte que j'ai le droit d'installer une caméra, j'ai le droit de l'utiliser parce que, dans le droit en ce moment, dans le droit de la personne, j'ai le droit d'utiliser une caméra.

Vous avez fait partie des 30 personnes qui étaient alentour d'une même table pour parler de la disposition, hein, des orientations qu'on se doit de réfléchir par rapport aux règlements qui seraient écrits pour l'utilisation d'une caméra. Vous venez d'utiliser un exemple type qui est intéressant parce que ce n'est pas envers le personnel que la caméra viendrait chercher une espèce de témoignage, c'est envers peut-être un adulte de l'entourage de la famille qui vient de menacer, dans sa façon de faire, la visite, l'écoute puis de la relation qu'il a avec son aîné. Par contre, en même temps, vous nous dites : Vigilance par rapport à l'installation des caméras. Voulez-vous élaborer là-dessus?

M. Jutras (Normand) : Bien oui, je parlais du consentement, du consentement libre, volontaire et éclairé de la personne. Est-ce qu'elle est vraiment consciente, là, de ce que ça va représenter? Mais, parlant des personnes, entre autres, que je représente, bon, si, c'est moi, comme Curateur public, qui autorise la caméra, bien, on va encadrer ça, là, on va adopter une politique à cet égard-là, là, on ne fera pas ça, là, de n'importe quelle façon. Mais qu'est-ce qui se passe quand le curateur privé est l'abuseur? Il ne voudra pas en installer, lui, de caméra ou, s'il le fait parce qu'il veut surveiller ce que sa soeur va dire à sa mère quand il n'est pas là, il ne voudra pas en installer, de caméra.

Alors, ça, là, je comprends que c'est juste des orientations. Ces points-là, je les avais soulevés lors de la réunion, puis c'est sûr qu'on va se faire entendre, là, quand vous allez aller plus loin dans l'élaboration du règlement, mais il faut penser à ces situations-là. Et peut-être que nous, le Curateur public, on est davantage confrontés à ça parce qu'on se retrouve souvent au centre de conflits familiaux où la famille est divisée et où il est question d'argent. Puis il y en a qui se font céder un immeuble, puis l'autre qui se fait céder telle chose, puis là c'est la chicane dans la famille, c'est divisé, puis des fois il y a des chicanes dans des familles, là, qui sont... il n'y a pas d'autre mot que de dire épouvantables.

La Présidente (Mme Tremblay) : Il reste 20 secondes à la partie gouvernementale.

Mme Charbonneau : Juste vous dire, on a reçu la Chambre des notaires. Ils nous ont signifié peut-être le rôle de quelqu'un qui pourrait se rajouter au groupe, qui s'appelait comme le protecteur du malade ou le protecteur de l'aîné. S'il y avait lieu de rajouter une personne, est-ce que vous voyez ça favorable de rajouter quelqu'un qui s'appellerait le protecteur de l'aîné?

La Présidente (Mme Tremblay) : En 10 secondes, s'il vous plaît.

M. Jutras (Normand) : Oui. Bien, dans le cadre d'une loi-cadre, c'est quelque chose qu'on pourrait envisager, ça.

M. LeBel : C'est exactement ma question.

La Présidente (Mme Tremblay) : Bon, alors ça tombe bien. Merci beaucoup à Mme la ministre. Je cède maintenant la parole au député de Rimouski de l'opposition officielle.

M. LeBel : Bien, c'est exactement ma question. Bonjour, tout le monde. M. le Curateur, parlons-en de la loi-cadre. Vous étiez député à l'époque, quand on a adopté la loi n° 112, la loi-cadre pour lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale. C'est une loi-cadre. Vous proposez, là-dedans, d'adopter une loi-cadre. Là, on ne parle pas... aujourd'hui, 115, ce n'est pas une loi-cadre. Vous nous proposez d'adopter une loi-cadre. Qu'est-ce que, pour vous, ça donne de plus, une loi-cadre, quand on parle de la maltraitance?

M. Jutras (Normand) : Bien, premièrement, une loi-cadre, c'est plus important qu'une politique, n'est-ce pas? La loi est plus forte qu'une politique. Alors, ça donne plus de dents à une politique qu'on veut vouloir implanter.

Vous parlez de la loi-cadre, là, sur l'élimination de la pauvreté. Je me souviens très bien de ça. Puis il y en a eu d'autres, lois-cadres, là. Il y a eu la loi sur l'occupation du territoire et l'aménagement du territoire, il y a eu aussi la Loi sur le développement durable, de mémoire, en tout cas, là, celles qui me reviennent. Mais l'avantage de ça, c'est qu'on voit plus large, on donne des orientations puis avec des cibles où on doit se rendre.

Puis je vous réfère, entre autres, à la politique, au plan d'action contre la maltraitance à l'endroit des aînés, là, aux pages 34 et 35 puis aux pages 52, on voit bien comment une loi-cadre... il y a déjà des dispositions qui concernent une loi-cadre. Je cherche... Tu sais, quand on parle, là, d'avoir un réseau ou un soutien social adéquat permettant de briser l'isolement, un environnement physique et psychosocial sain dans lequel la personne aînée se sent en sécurité, une information adaptée aux besoins de la personne aînée, un entourage qui connaît l'existence et les différentes facettes, un soutien donné aux proches aidants, on voit à quel point c'est large.

Puis regardez juste ce qui se passe présentement à l'Assemblée nationale du Québec. Ici, on parle de la maltraitance à l'endroit des aînés, dans une autre salle, on parle des régimes de rentes, et Dieu sait que ça concerne énormément les personnes aînées. Hier, je rencontrais Mme Galarneau, qui est présidente de l'Office de la protection des consommateurs puis qui me parlait justement de la protection des aînés dans le domaine de la consommation. Combien de marchands, malheureusement, vont profiter de la faiblesse d'un acheteur un peu démuni, là, puis qui vont lui vendre — il y a un cas qui a été rapporté dernièrement dans les journaux — quelque chose qui ne lui convient pas du tout, profitant de sa crédibilité, ou de sa naïveté, ou de sa faiblesse, ou de son manque d'instruction.

Et aussi l'avantage d'une loi-cadre, ça permet un continuum plutôt que de procéder à la pièce. Ça permet aussi de toujours... de bien situer... de bien savoir de quoi on parle parce que parfois on parle de personnes aînées, parfois on parle de personnes en situation de vulnérabilité. À un moment donné, on parle des personnes qui sont de quel âge? Alors, ça aussi c'est important, savoir de qui on parle. Puis, oui, on parle d'aînés qui sont autonomes, mais on parle d'aînés aussi qui sont en situation de faiblesse.

M. LeBel : Je trouve ça intéressant, l'idée de la loi-cadre. Il me reste un peu de temps?

La Présidente (Mme Tremblay) : Il vous reste cinq minutes.

M. LeBel : S'il y a des gens que ça... Je sais que mon collègue de Lévis a beaucoup de questions sur la déclaration, et tout ça. Moi, je lui laisserais le reste du temps, si ça vous va.

La Présidente (Mme Tremblay) : Pour qu'un groupe donne son temps à un autre groupe, il faut avoir le consentement. Est-ce que j'ai le consentement de tous?

Mme Charbonneau : Je vous dirais, tant qu'on ne dépasse pas le temps qu'on a ici, moi, je n'ai pas de souci.

La Présidente (Mme Tremblay) : Parfait. Alors, le député de Lévis, à vous la parole.

Une voix : ...

• (12 h 20) •

M. Paradis (Lévis) : Je suis bien d'accord. Merci, Mme la Présidente. Je pense que c'est intéressant, ce qu'on... mais c'est intéressant puis extrêmement questionnable, puis c'est quand même très complexe également. À travers les dossiers que vous avez à traiter, il y a une notion de complexité que plusieurs n'imaginent pas. Seulement ce que vous avez dit il y a deux instants concernant les caméras, sans vous poser une question, mais en relevant ce que vous avez dit, quand le curateur privé est peut-être l'abuseur, ouf! Et Dieu sait que vous devez à un moment donné être confronté à ça. Il y a toujours un jeu de pouvoir là-dedans, ce n'est pas évident, et je les comprends.

Je reviens sur le questionnement et sur votre mémoire, et là c'est écrit noir sur blanc, je comprends bien ce que vous dites. Et d'ailleurs vous avez utilisé mot pour mot un terme qui a été aussi utilisé par d'autres groupes venus nous voir : il faut avoir le courage de nos convictions. À un moment donné, il faut être capable d'agir puis décider qu'on se dote d'outils pas n'importe comment. Puis d'ailleurs vous en savez quelque chose. Quand vous intervenez, ce n'est pas n'importe comment. Et vous citez à juste titre également des endroits où on a décidé, par exemple, et là je parle de dénonciations obligatoires : l'Alberta, l'Ontario, le Manitoba. Vous auriez pu citer la Colombie-Britannique, qui l'a fait, mais avec un protocole d'application particulier, mais ils l'ont fait. La France l'a fait. Puis vous dites : Je suis sceptique — je comprends aussi, je rapporte ça — sur la notion voulant qu'on retarde tellement qu'à un moment donné on échappe peut-être quelque chose. Puis, écoutez, je partage votre scepticisme, mais il y a des choses, il y a des revues que l'on n'a pas, il y a des données que l'on n'a pas, et ça a été confirmé par des gens qui sont venus nous voir également, puis il serait peut-être intéressant qu'on les ait également.

Mais là la notion que vous apportez, qui est très importante, c'est l'aîné vulnérable puis celui qui l'est moins ou qu'il ne l'est pas. La grande question, c'est : Qui décide et comment juge-t-on de la vulnérabilité d'un aîné? Et là corrigez-moi, M. Jutras, moi, j'ai rencontré beaucoup d'aînés puis j'en suis bien content, des situations, à un moment donné, où était porté à mon attention, puis probablement la vôtre à un moment donné, des aînés qui, dans une période de temps x de leur vie, vivent des moments de confusion absolument intenses. Je mets ça comme... au terme d'un deuil, d'une perte d'un être cher, où la personne, à un moment donné, a une confusion, je dirais, momentanée, le mot n'est pas bon, puis vous me corrigerez ensuite, là, où ensuite on reprend, on se ressaisit puis on redeviendrait moins vulnérable. On l'est, on l'est moins. Je ne dis pas que c'est le lot de ceux et celles, les 36 000 avec qui vous... Mais est-ce que, de fait, il peut y avoir cette notion-là, qui rend un peu complexe ce dont on est en train de se parler, celui qui, dans sa vie, sera confronté à une période qui le rendra vulnérable, mais qui ne sera pas permanente?

M. Jutras (Normand) : C'est vrai que voir ce qu'il en est de la vulnérabilité d'une personne, c'est difficile. Nous, le législateur, quand il a fait la réforme du Code civil, il nous a donné des moyens. La personne doit être évaluée par un médecin, il doit y avoir un... voyons...

Des voix : ...

M. Jutras (Normand) : ...un travailleur social qui doit déterminer si la personne a besoin de protection. Ça s'en va au directeur de l'établissement, qui communique avec nous, et par la suite nous, on rencontre les parents et amis, et, en plus, on s'en va devant le tribunal pour faire déclarer la personne inapte. Ça, c'est de la façon avec laquelle on procède.

Oui, oui, il y a des épisodes qui peuvent être plus problématiques, entre autres, des épisodes de santé mentale. Et il arrive, là, nous, que, pour protéger la personne, on va ouvrir un régime de protection dans un tel cas, par exemple une personne qui fait une dépression majeure. Mais, à un moment donné, c'est possible d'obtenir la levée de son... la mainlevée de son régime. Alors, à ce moment-là, si la personne s'est rétablie affectivement, on obtient une mainlevée de son régime, et la personne devient apte.

Et il y a d'autres situations aussi qui se présentent, puis on ne sait pas jusqu'où ça va mener. Le Code civil me permet, moi, d'intervenir dans une administration provisoire. On voit, là, que la personne, ça ne fonctionne pas, là, puis elle pose des gestes étranges. Alors, quand on voit un tel danger qui se présente, on peut s'adresser au tribunal puis dire : Confiez l'administration provisoire au Curateur public entre-temps. Et, si la personne se replace, bien, ça va, puis la mainlevée est donnée, mais, si ça se prolonge, bien là, à ce moment-là, l'administration nous est confiée de façon définitive, mais définitive entre guillemets parce que, si la personne se rétablit, il y a toujours possibilité d'obtenir la mainlevée du régime. Et on en obtient, des mainlevées de régimes, là.

M. Paradis (Lévis) : Et je comprends. Et vous vous êtes dotés d'outils vous permettant de bien agir en fonction des situations ponctuelles d'un individu pour lequel vous aurez à intervenir. Je reprends la phrase dans votre mémoire et votre recommandation : «Le Québec ne devrait-il pas s'inspirer de ces exemples — ceux dont vous avez parlé — pour aller plus loin dans son projet de loi, parce qu'on a l'occasion de le faire, et rendre la dénonciation obligatoire?», avec les paramètres que vous y placez. Vous ne les définissez pas, là. Vous dites : Oui, il y a peut-être des questionnements à se poser.

Est-ce que je peux penser qu'on pourrait éventuellement, on réfléchit ensemble, définir ces modalités-là, ces modes d'application là par règlement, par exemple? C'est-à-dire que la formule soit là. On est rendu là. Certains l'ont dit, beaucoup de groupes le réclament. La population, par le biais de sondages, à travers de ce que nous ont présenté les groupes, disent : C'est là qu'on est rendus. Il ne faut plus qu'on n'échappe rien. Est-ce que vous vous... Avec l'expérience que vous avez en fonction de vos fonctions, qui ne sont pas nécessairement celles-ci, mais qui s'y rapprochent, est-ce que, par règlement, on peut penser, par exemple, établir des modalités d'application, comme certaines provinces l'ont fait, en fonction de ceux à qui s'adresse l'obligation de dénonciation?

M. Jutras (Normand) : Bien, nous, ce qu'on propose, c'est de s'inspirer des dispositions de la Loi sur la protection de la jeunesse. C'est un système... Ce n'est pas à dénonciation obligatoire dans tous les cas parce qu'effectivement il peut y avoir certains abus. Mais je pense que les dispositions de la Loi sur la protection de la jeunesse ont bien vécu. Elles datent de 25, 30 ans. Et même, quand on parle aux gens de la protection de la jeunesse à la CDPDJ, ils vivent bien avec les dispositions telles qu'elles sont là. Alors, nous, ce qu'on dit : Bien, inspirons-nous de ça.

Ce qu'on retrouve dans le projet de loi aussi et que je trouve intéressant à cet égard-là, c'est d'assurer à la personne, là, la confidentialité, d'assurer à la personne qu'elle est à l'abri de poursuites judiciaires, qu'on lui donne une immunité. Ça aussi, ça peut inciter à la dénonciation plus facilement. Mais ce qui m'apparaissait tellement spécial dans ce qu'on a entendu, on dit : Peut-être que ce qui est important, c'est de donner une réponse rapide et efficace. Je veux bien, mais il faut que la question vienne, par exemple. Alors, si la dénonciation ne vient pas, bien, la réponse rapide et efficace, elle ne viendra jamais. Et, pendant ce temps-là, il faut penser à la personne. Et, pendant ce temps-là, cette personne-là souffre, et on ne vient pas à son secours.

M. Paradis (Lévis) : Il est là, le dilemme. C'est-à-dire qu'on... est-ce qu'on peut encore se permettre, dans une volonté collective de mieux-être pour nos aînés... puis éventuellement, par la suite, mille fois bravo parce qu'on ira vers la bientraitance, mais il faut se rendre compte qu'il y a des états, des situations qui nous sont rapportés et qui nous ébranlent chacun nous.

Il est clair que, dans la vie de tous les jours, moi, j'en ai un, système d'alarme chez nous. J'aimerais ça ne pas en avoir puis laisser ma porte peut-être débarrée. Puis moi, je connais des aînés qui, plus que ça, quand ils sont à la maison, le système d'alarme, ce n'est pas pour prévoir les infractions lorsqu'ils ne sont pas là, c'est pour se protéger aussi quand ils sont là. Ils en mettent un parce qu'ils craignent. Bien, c'est parce que la vie est de même, il y en a, des pas gentils. Ça serait le fun s'il n'y en avait plus, mais il y en a. Et vous êtes là pour ça aussi.

Est-ce que... J'imagine... Permettons-nous de comprendre. Dénonciation obligatoire. Il y a des gens qui craignent, qui disent : Oui, mais ça peut porter à de l'abus. Ça pourrait amener des plaintes frivoles, puis etc. Personnellement, je vous dirai que, dans ma vision des choses, je préfère qu'on mette à jour une plainte frivole et qu'on la laisse tomber, qu'on n'en fasse pas puis qu'on s'en aille vers quelque chose de plus grave. Ça, c'est ma vision à moi.

Mais j'imagine que, lorsqu'on vous donne un mandat, avant de décider que vous établirez une curatelle, vous avez le personnel suffisamment efficace pour juger de la pertinence ou non de la suite de la demande que l'on vous fait. À même enseigne pour une dénonciation obligatoire, tous ne mèneront pas, comme disait, par exemple, le maire de Montréal, à un déploiement judiciaire ou une action. Ça fait aussi partie des équipes et de la confiance qu'on a dans les équipes qui entourent un processus comme celui-là. Est-ce que je me trompe?

M. Jutras (Normand) : Oui. Bien, entre autres, au Curateur public, on a une équipe de médecins puis a une équipe d'infirmiers, infirmières qui se penchent sur ces questions...

La Présidente (Mme Tremblay) : Veuillez conclure rapidement, s'il vous plaît. Il reste 10 secondes.

M. Jutras (Normand) : O.K. Oui. Et je conclus en parlant des institutions financières. Les institutions financières ont souvent connaissance, là, de transactions douteuses. Comment ça se fait, un tel retrait? Comment ça se fait, tant de retraits? Ou encore ils vont pour...

La Présidente (Mme Tremblay) : Je dois malheureusement vous interrompre. Le temps est écoulé.

M. Jutras (Normand) : ...ils vont pour du financement, ils ne savent pas quoi faire...

La Présidente (Mme Tremblay) : C'est complété. M. Brunet, M. Lamarche, M. Jutras, Me Filion, merci beaucoup pour votre contribution à nos travaux. Merci également à tous ceux et celles, élus et non élus, qui ont participé et contribué au bon déroulement des auditions publiques.

Mémoires déposés

Avant de conclure les auditions, je procède au dépôt des mémoires des personnes et des organismes qui n'ont pas été entendus lors des auditions publiques.

La commission, ayant accompli son mandat, ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h 30)

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