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Version finale

42nd Legislature, 1st Session
(November 27, 2018 au October 13, 2021)

Monday, August 12, 2019 - Vol. 45 N° 30

General consultation and public hearings on the consultation document entitled “Québec Immigration Planning for the 2020-2022 Period”


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Table des matières

Remarques préliminaires

M. Simon Jolin-Barrette

M. Monsef Derraji

M. Andrés Fontecilla

Mme Méganne Perry Mélançon

Auditions

Table de concertation des organismes au service des personnes
réfugiées et immigrantes (TCRI)

Gestion des placements Stuart ltée et Eterna Groupe financier

Partenaires en gestion de patrimoine Echelon

Stephane Tajick Consulting

MM. Samuel Tessier et Henri Tousignant

Autres intervenants

Mme MarieChantal Chassé, présidente

M. Sylvain Lévesque, président suppléant

Mme Lucie Lecours

Mme Paule Robitaille

M. François Jacques

Mme Stéphanie Lachance

M. Simon Allaire

*          Mme Eva Lopez, TCRI

*          Mme Veronica Islas, idem

*          Mme Dominique Lachance, idem

*          M. Patrick Abikzer, Gestion des placements Stuart ltée et Eterna Groupe financier

*          M. Yanick Labrie, idem

*          M. Pierre Olivier Tardif, idem

*          M. Alex Côté, Partenaires en gestion de patrimoine Echelon

*          M. Stephane Tajick, Stephane Tajick Consulting

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Quatorze heures trois minutes)

La Présidente (Mme Chassé) : Bonjour, tout le monde, bon retour. Je constate le quorum, et je déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens ouverte, et je vous souhaite la bienvenue. Bon retour de vacances. Je demande à toutes les personnes, bien sûr, comme à chaque fois, de bien vouloir... à toutes les personnes de la salle au complet de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

La commission est de retour, réunie ici afin de procéder à la consultation générale et aux auditions publiques sur le cahier de consultation intitulé La planification de l'immigration au Québec pour la période 2020‑2022.

M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. M. Poulin (Beauce-Sud) est remplacé par M. Provençal (Beauce-Nord); M. Skeete (Sainte-Rose) est remplacé par M. Allaire (Maskinongé); M. Birnbaum (D'Arcy-McGee) est remplacé par M. Derraji (Nelligan); Mme Dorion (Taschereau) est remplacée par M. Fontecilla (Laurier-Dorion); et M. LeBel (Rimouski) est remplacé par Mme Perry Mélançon (Gaspé).

La Présidente (Mme Chassé) : Puisqu'il y a eu un léger retard pour le début de nos discussions, est-ce qu'il y a un consentement pour prolonger de trois minutes l'ajournement des travaux? Donc, ça terminerait à 17 h 48.

Des voix : Consentement.

La Présidente (Mme Chassé) : Très bien. Merci.

Cet après-midi, nous débuterons par les remarques préliminaires puis nous entendrons les groupes suivants : la Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes, en audition conjointe, Gestion Stuart et Eterna, ensuite Echelon Gestion de patrimoine, puis Stephane Tajick Consulting, et enfin M. Samuel Tessier et M. Henri Tousignant.

Remarques préliminaires

J'invite maintenant le ministre de l'Immigration, de la Diversité et de l'Inclusion à faire des remarques préliminaires. M. le ministre, vous disposez de 7 min 30 s.

M. Simon Jolin-Barrette

M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. Chers membres de la commission, mesdames messieurs, nous débutons aujourd'hui l'étape des auditions de la consultation publique sur la planification de l'immigration au Québec pour la période 2020‑2022. Durant cet exercice, la population et les acteurs sociaux concernés auront l'occasion de se prononcer sur les orientations du gouvernement en matière d'immigration et plus particulièrement sur le nombre des personnes immigrantes, ainsi que la composition de l'immigration que le Québec souhaite accueillir au cours des trois prochaines années. Votre participation est particulièrement importante pour élaborer une planification pluriannuelle qui contribue de manière significative au développement de la société québécoise et qui tient compte de ses besoins et de ses spécificités.

L'immigration est au coeur du développement d'une société comme la nôtre. Pour tirer parti des compétences et de tous les talents qui nous viennent d'ailleurs et pour permettre aux personnes immigrantes de participer pleinement à notre société, le système d'immigration devait être modernisé. Lors du dépôt du Plan d'immigration du Québec pour l'année 2019, nous avons posé un premier geste en ce sens. Nous avons temporairement diminué le nombre des personnes immigrantes admises afin de nous donner les moyens d'améliorer les services de francisation et d'intégration.

Avec la Loi visant à accroître la prospérité socio-économique du Québec et à répondre adéquatement aux besoins du marché du travail par une intégration réussie des personnes immigrantes, nous avons posé les principaux fondements de cette réforme qui transformera durablement le système d'immigration au Québec.

Ensuite, le budget 2019‑2020 nous a donné les moyens de nos ambitions. Témoignant ainsi de l'importance qu'accorde notre gouvernement à la réussite de l'immigration, les crédits du ministère de l'Immigration ont été augmentés de 146 millions de dollars annuellement pour les cinq prochaines années, pour un total de 730 millions de dollars.

Nous avons lancé les premières invitations dans Arrima, ce qui nous permettra de mieux répondre aux besoins du Québec en termes de main-d'oeuvre. Nous avons investi une somme supplémentaire de 70 millions de dollars en francisation afin de bonifier les allocations de participation et d'élargir l'admissibilité à notre offre de services à toutes les personnes immigrantes. Nous avons également mis en place un parcours d'accompagnement personnalisé afin d'offrir un accompagnement adéquat et adapté à chaque personne immigrante, et ce, tout au long de son processus d'intégration à la société québécoise.

Les 10 orientations que nous proposons aujourd'hui pour l'immigration s'inscrivent dans cette vision modernisée. Elles portent sur la composition de l'immigration, sur le nombre de personnes immigrantes que le gouvernement du Québec souhaite accueillir dans les prochaines années ainsi que sur les caractéristiques des personnes sélectionnées et admises. Elles prennent en considération les différents enjeux soulevés, notamment la politique d'immigration, les besoins démocratiques et économiques du Québec ainsi que sa capacité d'accueil et d'intégration.

Puisque le Québec dispose maintenant des outils pour mieux sélectionner, mieux franciser et mieux intégrer les personnes immigrantes, notamment sur le marché du travail, notre première proposition consiste à rehausser progressivement le nombre de personnes immigrantes admises au cours des trois prochaines années pour atteindre 49 500 à 52 500 personnes en 2022. Ensuite, dans le contexte actuel où la rareté de main-d'oeuvre est présente dans toutes les régions du Québec, il est souhaitable de maintenir une proportion élevée d'admissions dans la catégorie de l'immigration économique. Les personnes admises dans cette catégorie sont maintenant sélectionnées en fonction des besoins de main-d'oeuvre du Québec et sont donc bien placées pour répondre rapidement aux besoins des entreprises québécoises. C'est pourquoi notre deuxième proposition est de fixer à 65 % la proportion de personnes admises dans cette catégorie. Toujours en tenant compte de la réalité des entreprises de toutes les régions du Québec, le gouvernement souhaite miser davantage sur les travailleurs étrangers temporaires. Nous voulons favoriser l'établissement durable de ces travailleurs par une immigration, par la suite, qui sera permanente.

• (14 h 10) •

Comme je l'ai dit à maintes reprises au cours des derniers mois, le gouvernement veut aussi privilégier la sélection des travailleurs qualifiés possédant une formation en demande au Québec ou une offre d'emploi validée. L'immigration est l'une des solutions à la pénurie de main-d'oeuvre, mais pour réellement répondre aux besoins des entreprises, le gouvernement se doit de sélectionner plus rapidement et plus efficacement. Nous croyons qu'il est nécessaire d'accélérer l'arrivée des personnes immigrantes dans la catégorie de l'immigration économique. Grâce à l'utilisation d'Arrima, le ministère sera désormais en mesure de rendre une décision dans un délai de six mois dans le Programme régulier des travailleurs qualifiés à compter du moment où la demande est complète.

Afin de répondre à la rareté de main-d'oeuvre, le gouvernement souhaite offrir également un service de proximité aux entrepreneurs du Québec. Nous sommes d'avis qu'une intégration réussie passe nécessairement par la connaissance des codes socioculturels et éthiques de la société d'accueil. Ainsi, nous souhaitons favoriser la sélection des personnes immigrantes qui connaissent les valeurs québécoises exprimées par la Charte des droits et libertés de la personne.

Un autre facteur clé pour une intégration réussie à la société, au marché de l'emploi est bien sûr la connaissance de la langue française. Le gouvernement souhaite donc, au cours des prochaines années, favoriser et faciliter l'apprentissage du français auprès des personnes immigrantes. Nous avons d'ailleurs élargi l'accès aux services de francisation gouvernementaux et à l'aide financière à toutes les personnes immigrantes, sans égard à la date de leur arrivée au Québec, ainsi qu'aux étudiants et aux travailleurs étrangers temporaires. Il s'agit d'une mesure importante de près de 70 millions de dollars de façon à faciliter l'apprentissage du français et le gouvernement du Québec prend extrêmement au sérieux cette connaissance.

Dans le but de répondre aux enjeux démographiques du Québec, le gouvernement entend encourager l'immigration permanente de personnes jeunes. Finalement, le gouvernement du Québec souhaite poursuivre son engagement humanitaire par l'accueil de personnes réfugiées et d'autres personnes ayant besoin d'une protection internationale.

Nous amorçons un nouveau chapitre en matière d'immigration au Québec. Nous souhaitons que le Québec devienne une référence mondiale en matière d'immigration. Les orientations que nous vous proposons dans le cadre de cet exercice de planification pluriannuelle visent à poursuivre la mise en place d'un système d'immigration plus moderne, plus humain et plus efficace.

En terminant, j'aimerais remercier les organisations et les acteurs de la société québécoise qui ont accepté de s'exprimer devant cette commission. Je souhaite à tous des échanges fructueux et constructifs autour d'un objectif commun : répondre aux besoins du Québec et permettre aux personnes immigrantes de contribuer à la hauteur de leurs compétences au développement et à la prospérité de la société québécoise. Il est fondamental de réaliser qu'au cours de la dernière année le gouvernement du Québec a fait des pas de géant en matière d'immigration. On a décidé de mettre en place les ressources nécessaires pour faire en sorte que chaque personne immigrante puisse être intégrée adéquatement à la société québécoise, notamment en matière de francisation et de ressources à sa disponibilité. Je vous remercie, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. le ministre. J'invite maintenant le porte-parole de l'opposition officielle et député de Nelligan à faire ses remarques préliminaires pour une durée maximale de cinq minutes.

M. Monsef Derraji

M. Derraji : Merci, Mme la Présidente. Chers collègues, bienvenue. Le projet de loi est passé dans les conditions que vous savez. C'est le moment maintenant de se pencher sur la vision du gouvernement en matière d'immigration, une planification que nous espérions en mesure de répondre adéquatement aux besoins du marché du travail, compte tenu du contexte économique actuel et de la pénurie de main-d'oeuvre criante partout au Québec.

Nous aurons la chance d'écouter attentivement des intervenants clés du marché du travail, dotés de l'expertise et de la connaissance de la réalité du terrain nécessaire. C'est avec attention qu'il faudra les écouter pour saisir l'ampleur de la situation, une situation, Mme la Présidente, que je qualifie d'urgente, très urgente. Le Conseil du patronat nous a déclaré, la semaine dernière, qu'on ne va pas frapper le mur, qu'on frappe déjà le mur. L'ensemble des intervenants communautaires, mais aussi aux représentants des employeurs, directement touchés par ce que ce que certains appellent crise... je pense notamment à des regroupements comme la FCCQ, la FCEI, mais je pense aussi à des entreprises qui exportent en milliards de dollars à l'international et dans les autres provinces du Québec, qui rapportent en milliards de dollars en revenus de taxation et de parafiscalité, qui viendront également nous dire ce qu'ils pensent des orientations dévoilées lors de cette planification.

Mme la Présidente, parlant de faits concrets, la réalité est la suivante : selon un sondage réalisé par le FCEI, il y a 116 000 postes vacants présentement au Québec. Les besoins en main-d'oeuvre atteignent des niveaux record, les mesures gouvernementales, y compris la planification de l'immigrant, doivent tenir compte de la réalité actuelle et régionale. Les décisions qui sont prises en matière d'immigration ne concernent pas uniquement l'immigration, ils ont une portée économique indéniable pour les prochaines années.

En parlant de concret, Mme la Présidente, que dire de ces entreprises qui ne parviennent plus à honorer leurs contrats et qui, faute de main-d'oeuvre, sont tenues de fermer boutique des jours de la semaine? Ne parlons pas de ces employeurs qui tombent en dépression parce qu'ils ne sont pas capables de partir en vacances ou, pire encore, qui... des vacances à leurs employés parce qu'ils ne peuvent pas se permettre de laisser aller en congé.

Que de pression économique et sociale sur notre économie, Mme la Présidente, c'est préoccupant, voire même très préoccupant. Où est la cohérence entre la volonté du gouvernement de répondre aux besoins du marché du travail et celui de refuser d'augmenter les seuils d'immigration? C'est de l'incohérence.

Mme la Présidente, ce sont les régions qui écopent maintenant, et je me demande : Le gouvernement écoute qui? Est-ce qu'il écoute les régions? Est-ce qu'il écoute les entrepreneurs? Est-ce qu'il écoute les associations patronales? Donc, j'espère, Mme la Présidente, qu'à la fin de cet exercice le gouvernement va revoir sa stratégie de la planification de l'immigration.

Par ailleurs, des zones d'ombre persistent et soulèvent des questions essentielles. Quand j'entends le premier ministre du Québec avouer que l'économie sera une de ses priorités pour la prochaine session, je me demande : Est-ce que l'économie va sans capital humain? C'est ça, la situation qu'on a et que les entreprises ont devant eux. Il y a des entreprises, Mme la Présidente, qui refusent des contrats maintenant parce qu'il n'y a pas le capital humain pour les accompagner. Ça me rappelle quelqu'un qui espère faire de la pêche, mais en partant pour aller faire de la pêche dans le lac de son choix, il a oublié de ramener avec lui sa canne à pêche. C'est exactement la situation que nous avons devant nous maintenant.

La situation que nous avons devant nous maintenant, Mme la Présidente, c'est que la prospérité économique est là, mais malheureusement il y a des régions qui souffrent. Et ce qu'on voit maintenant, c'est un gouvernement qui délaisse les régions, un gouvernement qui n'écoute pas les régions, parce que la pénurie de main-d'oeuvre, ce n'est plus un rêve, c'est des faits. Donc, le slogan, Mme la Présidente, «en prendre moins pour en prendre soin» est dépassé. Maintenant, j'invite le gouvernement à écouter attentivement l'ensemble des intervenants et de reculer sur sa promesse électorale de ne pas hausser les seuils d'immigration, parce que ça va de soi, c'est l'intérêt, c'est la vitalité économique et c'est la vitalité de nos régions. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. le député de Nelligan. J'invite maintenant le porte-parole du deuxième groupe d'opposition et député de Laurier-Dorion à faire ses remarques préliminaires pour une durée maximale de 1 min 15 s. M. le député.

M. Andrés Fontecilla

M. Fontecilla : Je vous remercie, Mme la Présidente. Je remercie mes collègues ici présents, M. le ministre, après un été où est-ce qu'on se rappelle dans quelles conditions on s'est laissés, l'imposition par bâillon du projet de loi n° 9 sur l'immigration, justement, donc avec une très forte opposition. Et nous sommes ici pour un exercice extrêmement sérieux pour l'ensemble de la société québécoise et pour son avenir, là. En fait, nous allons étudier comment... quels sont les volumes, les seuils d'immigration qui vont faire en sorte d'accepter des dizaines, des dizaines, des milliers de nouveaux citoyens qui vont participer au devenir du Québec. Ce n'est pas rien, ça. Ce n'est pas juste une question de trouver un emploi à court terme dans une entreprise du Québec, là, on est en train de voir combien de nouveaux citoyens on va intégrer à la société québécoise, là.

Ceci dit, nous allons critiquer aussi fortement toute notion économiciste, exclusivement économique de l'immigration à court terme et nous allons nous préoccuper très attentivement de la question du seuil de personnes réfugiées et personnes admises en vertu de la réunification familiale, qui contribuent aussi économiquement et socialement au Québec. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. le député de Laurier-Dorion. Mme la députée de Gaspé, je vous invite à maintenant prendre la parole, vous êtes la porte-parole du troisième groupe d'opposition, pour faire vos remarques préliminaires pour une durée maximale de 1 min 15 s.

Mme Méganne Perry Mélançon

Mme Perry Mélançon : Merci, Mme la Présidente. Donc, je salue tous les collègues de l'Assemblée nationale et également tous ceux qui sont présents ici pour nous faire part de leurs préoccupations, de nous présenter leur mémoire. C'est très apprécié que vous vous soyez déplacés pour cette activité-là, qui est très importante.

Notre groupe de parlementaires aurait préféré que ce soit une consultation qui est faite au préalable avec une méthodologie pour en arriver à un seuil d'immigration sur lequel on peut reposer puis qui prendrait en considération toutes les mesures qu'on doit mettre en place pour une intégration réussie des personnes. Alors, c'est sûr que nous, on était en faveur de donner ce contrat-là, ce mandat-là à une institution tierce qui arriverait avec des données scientifiques qui reposent vraiment sur une méthodologie sérieuse. Alors, on a des questionnements par rapport à la façon que ça a été fait de fixer les seuils. Et puis je crois que c'est bien qu'on puisse avoir des experts qui viennent nous faire part vraiment de leur travail, ils sont vraiment dans ce domaine-là au quotidien. Alors, vraiment, je crois que ce sera très, très pertinent pour le ministre de s'appuyer sur ces dires-là pour prendre une décision éclairée, là, sur la planification des seuils d'immigration. Merci, Mme la Présidente.

• (14 h 20) •

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, Mme la députée de Gaspé. Bon retour de votre été. Et merci pour ces remarques préliminaires à tous.

Auditions

Nous allons maintenant débuter les auditions. La durée de chacune des auditions est d'une durée de 45 minutes. Et je souhaite donc la bienvenue aux représentants de la Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. À la fin, je vais faire un signe quand il va vous rester à peu près une minute, O.K., un petit signe de la main comme ça, et après quoi nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc tout d'abord vous présenter puis ensuite à débuter votre exposé. Bienvenue. Allez-y.

Table de concertation des organismes au service
des personnes réfugiées et immigrantes (TCRI)

Mme Lopez (Eva) : Eva Lopez, directrice de l'organisme Intégration communautaire des immigrants, spécialisé en régionalisation de l'immigration à Thetford Mines, et membre du conseil d'administration de la TCRI.

Mme Islas (Veronica) : Oui. Veronica Islas, directrice générale du Carrefour de ressources en interculturel à Montréal et membre de la TCRI aussi, membre du conseil d'administration de la TCRI.

Mme Lachance (Dominique) : Dominique Lachance, directrice du Centre multiethnique de Québec et également membre du conseil d'administration de la TCRI.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. Allez-y.

Mme Islas (Veronica) : Donc, merci beaucoup de nous accueillir aujourd'hui pour vous partager nos pensées. En fait, qui sommes-nous? En fait, la Table de concertation des organismes au service des personnes réfugiées et immigrantes regroupe 150 organismes communautaires qui interviennent auprès des familles réfugiées, immigrantes et sans statut à travers le Québec. Cette année, on fête 40 ans d'expertise par rapport à la question d'inclusion, intégration.

On pourrait vous dire qu'on est un peu préoccupés par rapport à la politique proposée, parce qu'il y a une tendance à voir les immigrants comme... de voir l'immigration économique comme étant la seule chose qui est importante concernant l'immigration. On oublie qu'on parle aussi de personnes à travers tout cela. On voit qu'il y a des changements majeurs dans les orientations, que la vision de l'immigration est un peu simpliste, et ça pourrait précariser les personnes. Et aussi on se préoccupe par rapport à l'impact que cela pourra avoir sur les familles et sur les femmes, parce que, dans le cadre de la politique globale, il n'y a pas une analyse différenciée selon les sexes.

Donc, en fait, les organismes membres de la TCRI qui travaillent auprès des personnes réfugiées, immigrantes et sans statut... s'est dotée d'une vision de l'intégration des nouveaux arrivants qui sert de cadre de référence à nos pratiques. Et entre autres nous, on considère l'intégration comme un processus complexe, puisqu'on parle des humains. Donc, c'est multidimensionnel par rapport à la question linguistique, économique, sociale, culturelle, politique, religieuse. Il est bidirectionnel parce que cela engage la personne réfugiée et immigrante et sa famille, mais aussi les membres et les institutions de la société d'accueil. Ça, c'est tout à fait pertinent en ce moment avec toute la question de l'interculturalisme dont on est en train de discuter dans les médias. C'est un processus qui est graduel, soit étape par étape. Il n'y a pas une question de pensée magique. Il est continu, c'est un processus qui n'est jamais terminé. Il est individuel parce que ça va selon le rythme et l'histoire de chaque personne et aussi de l'ensemble de sa famille, et il est encadré autant par le sociétal et le familial.

L'intégration est un processus complexe dont les indicateurs sont objectifs et aussi subjectifs. Si on parle des indicateurs objectifs, on pourrait parler de l'accessibilité aux services, avoir accès aux mêmes services, bénéficier des mêmes droits que l'ensemble des citoyennes, citoyens, la compétence linguistique, communiquer et travailler en français, qui est notre langue commune, l'accès à l'emploi, qui est d'obtenir et effectuer un travail de qualité en lien avec ses compétences et basé sur les principes de reconnaissance des acquis, et la participation citoyenne, qui est de s'impliquer en tant que citoyennes et citoyens à part entière.

Et les indicateurs subjectifs, qui sont l'autonomie — là, on parle de valeurs de la société québécoise — donc, en référence à la notion d'«empowerment», renforcement des capacités individuelles, la reconnaissance, en référence au sentiment d'être accepté et reconnu par la société d'accueil, et le sentiment d'appartenance, en référence au sentiment d'inclusion et d'appartenance à la société d'accueil, ce qui fait en sorte que les personnes décident de rester au Québec et pas de partir ailleurs.

Donc, on va plonger tout de suite dans nos recommandations pour pouvoir répondre à vos questions, si cela vous va. Donc, notre première recommandation est : «Le gouvernement devra rester vigilant quant aux impacts du nouveau système Arrima qui pourraient être dommageables tant pour les immigrants que pour les employeurs et la société d'accueil. Dans le contexte de pénurie de main-d'oeuvre, la meilleure façon d'attirer et de retenir la main-d'oeuvre réside dans le fait d'améliorer les conditions de travail offertes. Tous les acteurs doivent être impliqués, [soit] acteurs patronaux, syndicaux et gouvernementaux, et prendre leurs responsabilités. L'immigration peut faire partie de la solution, mais n'est pas l'unique réponse à cet enjeu sociétal. L'immigration ne doit pas être instrumentalisée pour tenter de répondre à des besoins économiques.»

La deuxième recommandation : «Étant donné le nombre de personnes issues de l'immigration sans emploi et avec la venue d'immigrants détenant une formation en demande, il est plus que nécessaire pour le Québec d'offrir à ces personnes compétentes formées à l'étranger les conditions d'une intégration sur le marché de l'emploi dans des emplois à la hauteur de leurs qualifications, ce qui implique de s'attaquer aux obstacles systémiques à l'oeuvre.»

Mme Lachance (Dominique) : La recommandation n° 3, c'est que, dans une optique où le gouvernement ouvrira de plus en plus l'entrée aux travailleurs temporaires et aimerait garder les résidents temporaires afin de combler, on l'a dit, à la pénurie de main-d'oeuvre, nous croyons qu'il devient primordial de pouvoir les desservir dans les services d'aide à l'emploi, et ce, avant même qu'ils obtiennent la résidence permanente. Cela les informerait davantage sur les marchés du travail au Québec ainsi que sur leurs droits et responsabilités, évitant ainsi plusieurs écueils. Donc, nous croyons important d'associer d'autres ministères, notamment le ministère de l'Emploi, etc., pour s'assurer qu'on a une intégration à la même vitesse mais pas à deux vitesses.

Mme Lopez (Eva) : Dans la recommandation n° 4, on recommande... on appuie amplement la recommandation du CCPI, qui propose une égalité de services, de services égaux pour tous les immigrants sans tenir compte de leur statut. Toutes les personnes qui demeurent au Québec, ils devraient être servis avec les mêmes bénéfices et les mêmes réponses à leurs besoins.

Dans la recommandation n° 5, on parle aussi d'impliquer le ministère d'Occupation du territoire, impliquer tous les ministères, tous les acteurs, parce que, quand on parle de régionalisation de l'immigration, on ne voit pas nécessairement la présence du ministère des Affaires municipales, de l'Occupation du territoire, et cela les concerne. On pense aussi qu'il faut outiller les régions, parce qu'on peut avoir beaucoup d'ambition par rapport à la régionalisation, mais est-ce que nous avons les moyens pour pouvoir répondre à une régionalisation responsable? C'est ça qui est important.

• (14 h 30) •

Mme Lachance (Dominique) : Recommandation n° 6, une recommandation qui nous tient à coeur — et on a entendu que certains aussi : «Nous sommes convaincus que réduire le nombre de réfugiés pris en charge par l'État [...] est contre-productif — donc n'est pas une bonne solution. Nous sommes d'avis que le Québec doit maintenir ses cibles d'accueil [de] réfugiés de toutes origines [et] au niveau de 2016.

«Afin d'encourager les demandes de parrainage collectif [des] réfugiés, le gouvernement devrait lancer un projet pilote visant à permettre aux milliers de réfugiés parrainés en attente de visas déjà sélectionnés par le Québec d'obtenir un visa temporaire de la part du fédéral afin de leur permettre de s'établir rapidement au Québec en attendant leur résidence permanente. [Et] en plus de répondre aux besoins de [la] main-d'oeuvre — on a entendu que c'était une préoccupation — cela désengorgerait le programme de parrainage et permettrait de réouvrir le dépôt de nouvelles demandes et [...] stabiliser le programme.

«Globalement, nous recommandons que le gouvernement du Québec réaffirme son engagement humanitaire par l'accueil de 22 % de l'immigration humanitaire canadienne comme [il est] prescrit [dans] l'accord Canada-Québec sur l'immigration.» Voilà.

La Présidente (Mme Chassé) : Il vous reste moins d'une minute.

Mme Lachance (Dominique) : Recommandation — dernière recommandation — n° 7 : «Nous recommandons [également] que le gouvernement du Québec augmente les cibles [...] des personnes réfugiées reconnues sur place et des membres de leur famille — qui font aussi partie des personnes qui doivent être dans les cibles — soit une augmentation qui [serait] minimalement en concordance avec les niveaux d'immigration planifiés par le gouvernement fédéral pour les trois prochaines années.» Voilà.

La Présidente (Mme Chassé) : Très bien. Je vous remercie pour votre exposé. Nous allons maintenant débuter la période d'échange avec votre organisation. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Chassé) : Le bloc pour le parti formant le gouvernement est de 16 min 30 s, pour votre information.

M. Jolin-Barrette : Parfait. Je vous remercie, Mme la Présidente. Mme Lopez, Mme Lachance, Mme Islas, bonjour. Bienvenue à la commission parlementaire. Merci d'être là pour présenter votre mémoire. J'ai oublié, Mme la Présidente, tout à l'heure, de souligner... et de féliciter mon collègue de Nelligan, qui est désormais porte-parole de l'opposition officielle en matière d'immigration, je sens qu'on va avoir beaucoup de plaisir à travailler ensemble, et de saluer mes collègues également, le député de Laurier-Dorion et la députée de Nelligan... pardon, de Gaspé, ainsi que mes collègues de la partie gouvernementale qui nous accompagnent cette semaine.

D'entrée de jeu, vous dites, écoutez, la position du gouvernement serait une position utilitariste du fait de favoriser l'immigration au niveau de la sélection économique. J'aimerais vous entendre un peu plus à ce niveau-là, à savoir pourquoi est-ce que vous considérez cela comme utilitariste, le fait de sélectionner les personnes immigrantes, lorsqu'on parle d'immigration économique, en lien avec les besoins du marché du travail.

Mme Islas (Veronica) : En fait, ce n'est pas le fait d'analyser l'immigration économique en lien avec le marché du travail. Ça, c'est tout à fait normal et ce n'est pas nouveau, c'est quelque chose qui était déjà en place depuis vraiment, là, des décennies. En fait, c'est la question d'accès juste sur l'immigration économique. Quand on va décider d'accepter, en tant que société, une personne travailleuse, qu'elle soit temporaire, qu'elle reçoive un visa temporaire ou bien qu'elle soit avec une résidence permanente, il faut la voir dans sa totalité, comme une personne à part entière dans toute sa complexité, dans tous ses défis, dans tout son vécu. Et cette personne-là, probablement, aura une famille, elle aura une femme ou un partenaire, elle aura des enfants, et il faut voir l'immigration dans sa globalité et dans sa complexité. De penser qu'on pourrait juste focusser sur la personne qui va arriver comme gagne-pain est complexe et est problématique par rapport à ça, parce qu'on focussait énormément sur la question économique sans focusser sur l'ensemble des facteurs qui vont favoriser une intégration pleine de ces personnes-là.

M. Jolin-Barrette : Bien, là-dessus, je vous rejoins pleinement. C'est justement pour ça qu'on a consacré des sommes supplémentaires à la francisation, près de 70 millions, et aussi que, la semaine dernière, on a lancé le Parcours d'accompagnement personnalisé. Donc, maintenant, c'est à la fois les immigrants en situation temporaire qui ont accès aux cours de francisation, au Parcours d'accompagnement personnalisé, depuis plus de cinq ans aussi, parce que ça, c'est un enjeu aussi. Et, nous, notre objectif, c'est d'offrir les services à toutes les personnes immigrantes, peu importe la catégorie dont elles proviennent, pour vraiment les accompagner.

Mais vous avez raison quand vous dites, supposons, qu'on sélectionne des travailleurs qualifiés. Bien, ce n'est pas uniquement un travailleur qualifié qui vient, c'est lui et sa famille. Mais pour nous, pour le gouvernement du Québec, il faut que l'ensemble de la cellule familiale puisse s'intégrer efficacement. Puis la responsabilité du gouvernement du Québec, c'est d'offrir les services. Et c'est ce qu'on est en train de faire, notamment par rapport à la francisation, par rapport à l'accompagnement personnalisé. Mais je voulais vous demander... supposons, par rapport au milieu économique, vous dites : Il ne faut pas avoir une vision utilitariste. Quelle doit être la position des entreprises dans le système d'immigration?

Mme Islas (Veronica) : Bien, en fait, je pense que les entreprises jouent un rôle parce qu'elles demandent des personnes et des travailleurs dans un contexte de pénurie de main-d'oeuvre. Néanmoins, c'est au gouvernement de s'assurer de mettre en place la table et de mettre en place une politique qui va faire du sens pour éviter de privatiser, mettons, l'action de l'immigration. C'est un problème qui pourrait arriver, là. Si on laisse trop la place aux entreprises, elles pourraient, à un moment donné, faire appel à une immigration très homogène.

Moi, je pense qu'en tant qu'employeur, pour moi, il serait vraiment facile d'intégrer des personnes qui vont me ressembler, donc peut-être que je vais décider d'apporter des personnes avec un x profil — c'est tout à fait normal, c'est un biais, on a tous des biais — mais c'est au gouvernement de décider comment on va gérer ça et quelle politique on va mettre en place pour être, à quelque part, le «buffer» ou l'acteur qui va mettre en place les politiques d'État pour que l'immigration ne soit pas privatisée. Moi, je ne connais pas de pays qui ont privatisé, nécessairement, la question de l'immigration. C'est un enjeu de société et en tant que tel, c'est la responsabilité du gouvernement.

Mme Lopez (Eva) : Et moi, j'ajouterais à ça : Les organismes du réseau sont habitués à travailler avec les entreprises, et en effet seul un employeur... Les acteurs les plus importants en immigration, c'est l'employeur et la personne immigrante. Il faut qu'ils soient en relation gagnante pour tout le monde. Le problème se pose aussi, pas nécessairement dans cette sélection que le gouvernement prévoit, dans le sens de ce sont les employeurs qui vont choisir leur main-d'oeuvre. Les employeurs savent très bien de quoi ils ont besoin dans leur entreprise, et on respecte ça. On appuie même une démarche dans ce sens, mais avec prudence pour éviter une privatisation, pour éviter des accidents de parcours très malheureux qui sont vécus réels et sur le terrain, on le constate partout ailleurs, où c'est seulement l'employeur qui prend en charge son travailleur temporaire.

Il y a un autre effet négatif pour les familles, la réunification familiale, quand on parle de travailleurs temporaires, parce que ce n'est pas toutes les catégories de travailleurs temporaires qui vont pouvoir faire venir leurs familles. Et on sait qu'au Québec on a besoin d'ouvriers. Partout, partout, partout dans nos régions, le cri est : On a besoin de travailleurs qui ne sont pas nécessairement au niveau universitaire. Alors, ces gens-là, ils vont être beaucoup plus en difficulté de faire venir les familles. Ça, c'est une inquiétude pour nous, parce qu'on a vu aussi partir les travailleurs temporaires avec de la peine de laisser leur emploi, mais avec priorité envers leur famille. Il fallait rentrer à leur pays, même si le fait d'être ici, c'était une très belle expérience au niveau professionnel et même économique. Alors, il faut voir la globalité de ces travailleurs-là et de quelle manière on va les outiller collectivement pour que cet élan qu'on se donne soit vraiment prospère et significatif pour tous.

M. Jolin-Barrette : Dans votre mémoire, vous dites aussi : L'utilisation d'Arrima, il faut attention pour ne pas avoir les mêmes obstacles qu'actuellement sur l'intégration du marché du travail. À qu'est-ce que vous référez par rapport aux obstacles? Vous disiez : Bon, bien, il ne faut pas que ça devienne la privatisation de l'immigration. Je vous rassure, on n'est pas là du tout. Ça appartient à l'État québécois ou au gouvernement du Québec de sélectionner son immigration. D'ailleurs, le gouvernement du Québec veut étendre ses pouvoirs en matière de catégories d'immigration par rapport au gouvernement fédéral. Mais sur l'aspect... les obstacles rencontrés, lorsque vous faites référence aux obstacles, à quoi faites-vous référence en lien avec Arrima, là?

Mme Islas (Veronica) : Mettons, si on pense à juste, encore là, aux personnes par rapport à leur profil, c'est certain que certains employeurs pourraient juste décider... parce qu'à la base Arrima vise à arrimer des personnes... des employeurs avec des travailleurs, n'est-ce pas? Donc, c'est certain que, veux veux pas, on leur donne beaucoup de pouvoirs et ça pourrait être au détriment de l'immigration de quelques pays par des biais implicites. Donc, c'est un questionnement, c'est pour ça qu'on dit qu'il faudra faire attention à cela.

• (14 h 40) •

M. Jolin-Barrette : ...vous rassurer sur ce point-là, là, le système Arrima, il est bâti sur la déclaration d'intérêt, mais aussi sur la compétence des individus dans un domaine particulier. On veut vraiment faire en sorte qu'en fonction des besoins du marché du travail on sélectionne la personne immigrante. Donc, la classification des gens, si je peux dire, est basée sur leurs compétences, sur leur expérience et non pas sur la région du monde dans laquelle ils proviennent. Pour nous, c'est important, là, d'aller chercher la personne qui répond le mieux aux besoins du marché du travail québécois. Et à partir de ce moment-là, la responsabilité du gouvernement du Québec, c'est de s'assurer qu'elle ait tous les outils pour aller vers une intégration réussie, une francisation. Alors, Arrima est pensé dans cette optique-là, et toutes les démarches du gouvernement du Québec sont bâties aussi au niveau de l'accompagnement pour donner une chance équivalente à tout le monde.

Mme Lopez (Eva) : Je crois que c'est important de considérer le fait que les employés ne sont pas préparés pour l'immigration. Et ça, c'est un des irritants au réseau, c'est une de nos inquiétudes. Oui, on a bien beau avoir besoin de main-d'oeuvre, mais on ne traite pas les immigrants de la même manière qu'on traite un Québécois parce que les repères socioculturels ne sont pas les mêmes. Et on a vu, on a constaté sur le terrain des dérapages assez importants. Des gens des centres employeurs... et heureusement ils ne sont pas tous dans ce même élan, mais il y a des employeurs qui prennent leurs employés en otage, il fait tout ce qu'il veut. Il a investi pour lui, il fait comme il veut, et c'est une inquiétude importante pour notre réseau.

Comment les employeurs vont se préparer non seulement pour aller chercher... Aller chercher, c'est relativement simple : on a le cash, on investit et on va les chercher. Comment on va faire pour les retenir? Parce qu'on sait que la rétention est un peu boiteuse. Alors, comment on va faire pour que ces personnes-là aient vraiment la réponse à laquelle elles s'attendaient une fois en sol québécois? Comment allons-nous, en tant que société... le gouvernement, comment il va préparer les employeurs à travailler avec ces personnes? Et on ne parle pas du patron de l'entreprise, on parle de l'équipe au grand complet. Comment on va faire? Parce que le patron, peut-être qu'il mange du couscous, mais son employé au plancher est loin de ça, et c'est dans ce sens-là qu'on s'inquiète vraiment.

Est-ce qu'on va tenir compte, oui, du fait que l'employeur... C'est très légitime, on ne conteste nullement le fait que l'employeur va aller chercher la main-d'oeuvre qu'il a besoin d'avoir, mais comment et de quelle manière il va pouvoir faire en sorte que cette main-d'oeuvre soit respectée dans ses droits, dans ses obligations, dans tout ça, qu'il y ait l'ensemble de nos citoyens québécois? Ça, c'est une des préoccupations majeures dans notre réseau.

Mme Lachance (Dominique) : Si je peux me permettre, c'est qu'à travers tout ça, dans le système Arrima et dans la charge ou la responsabilité qu'on donne aux employeurs, la réflexion qu'on a, la préoccupation qu'on a, c'est qu'on ne nomme pas, dans le document, du tout l'importance de travailler sur les obstacles systémiques à l'emploi, c'est-à-dire les problématiques qui doivent être travaillées avec le gouvernement en amont, en concertation avec tous les milieux pour tenter de régler certaines problématiques.

Qu'on se le dise ou non, il y a des problématiques qu'on pourrait relier à du racisme systémique. Ce n'est pas de la volonté des employeurs, mais le système fait en sorte qu'il y a une discrimination qui se fait du fait que les gens viennent de l'étranger, ne connaissent pas notre système, sont souvent moins habilités, n'ont pas le réseau de contacts nécessaire pour travailler ou pour se faire valoir, les modalités d'évaluation de diplômes, bon, etc., je pourrais en parler. Et, dans le document, on a l'impression que c'est le travailleur qui doit faire ses preuves, qui doit être justifié.

Et on ne remet pas en question le fait que la société d'accueil... On parle de bidirectionnel tantôt, la société d'accueil a aussi une responsabilité par rapport à ces travailleurs-là et doit se questionner sur ses systèmes de base pour s'assurer que c'est non discriminatoire, et on ne retrouve rien dans le document qui fait état de ces préoccupations ou, à tout le moins, une amorce de travail à cet égard-là. Et, nous, ça nous préoccupe beaucoup parce qu'on remet encore la responsabilité, d'une part, sur le travailleur, qui doit se faire valoir et, d'autre part, on dit aux employeurs, qui ont une très bonne volonté, mais... voilà, sélectionnez les gens... bon, j'y vais de façon grossière, mais sélectionnez les gens selon vos besoins de main-d'oeuvre. C'est correct, mais ces gens-là ont aussi besoin d'encadrement, ont besoin d'être supportés et d'avoir une formation. D'ailleurs, les organismes... il y a le regroupement, le RORIQ, etc., qui fait un travail extraordinaire en régionalisation pour tenter de s'approprier ou, en tout cas, d'accompagner certaines entreprises.

Donc, il y a beaucoup de travail à faire. Donc, la volonté, elle est là, mais il manque des éléments dans votre document, dans ce qui nous est présenté.

M. Jolin-Barrette : Je comprends. Je sais que, Mme la Présidente, j'ai des collègues qui veulent poser des questions. En dernier commentaire, je vous dirais : Le Parcours d'accompagnement personnalisé, il est là justement pour prendre en compte la réalité de chaque personne immigrante et de l'accompagner face aux difficultés qui peuvent être vécues, mais surtout dans les démarches d'installation et d'intégration. Alors, je m'arrête ici, mais je sais que j'ai des collègues qui veulent poser des questions.

La Présidente (Mme Chassé) : Y a-t-il un membre du... Oui, Mme la députée de Les Plaines, la parole est à vous, allez-y.

Mme Lecours (Les Plaines) : Merci beaucoup. Merci beaucoup, Mme la Présidente. Toujours dans la même veine...

La Présidente (Mme Chassé) : ...au bloc formant le gouvernement.

Mme Lecours (Les Plaines) : Oui, je fais ça rapidement. Toujours dans la même veine, parce que, dans le mémoire, vous parlez aussi que les besoins spécifiques des femmes immigrantes seraient mis en cause, là... Je ne reprends pas exactement vos mots, mais en quoi, justement... parce que le ministre l'a bien expliqué dans le parcours d'intégration du nouvel arrivant, il va y avoir aussi des liens avec les organismes communautaires, vous en avez parlé, des organismes d'intégration, donc en quoi ça pourrait être difficile?

Mme Lachance (Dominique) : Bien, si vous me permettez, je vais laisser, après ça, ma collègue, qui a plus d'expertise au niveau des femmes, mais de fait, en diminuant le... Souvent, les femmes immigrantes sont concentrées notamment dans les catégories de réfugiés. Donc, déjà, en diminuant, on est en train... on les discrimine, de base. Deuxièmement, dans les travailleurs temporaires, c'est très technique, c'est davantage des emplois masculins, donc déjà on est en train, encore une fois, d'occulter, de tasser un peu les femmes dans toute cette approche-là.

Mme Islas (Veronica) : Réunification familiale, c'est la même chose, réunification familiale, normalement ce sont beaucoup plus des femmes qui sont réunifiées avec un homme qui arriverait en premier. Donc, c'est certain que, si on commence à ajouter catégorie par catégorie, ça s'en ajoute. Et, oui, c'est certain qu'il y en a en une, analyse différenciée selon les sexes par rapport à certains programmes, par exemple le PRIIME, mais il n'y en a pas, une volonté de vouloir faire une analyse différenciée selon les sexes pour l'ensemble de la politique. Donc, c'est encore plus important de voir l'impact que ça pourrait avoir sur les femmes et davantage aussi même sur les femmes racisées, la politique dans sa globalité, pour ensuite pouvoir parler de différents programmes et de différentes... de la quantité de personnes qu'on décide d'accepter par catégorie, quoi.

La Présidente (Mme Chassé) : ...au bloc. Y a-t-il une autre intervention d'un membre du parti formant le gouvernement? Mme la députée de Les Plaines, vous désirez poursuivre? Allez-y.

Mme Lecours (Les Plaines) : Bien, je vais poursuivre, vu qu'il reste peu de temps. Mais qu'est-ce que vous pensez du plan d'action, du programme d'intégration qui a été annoncé la semaine dernière? Parce que, justement, ça, ça risque de renverser la vapeur.

Mme Lopez (Eva) : Bien, c'est déjà un programme existant dans nos organisations. Tous les organismes du Québec qui sont attitrés à un volet immigration, ils appliquent ça. On a un plan d'action, c'est les services personnalisés adaptés aux besoins de la personne immigrante et sa famille. C'est génial, officialiser, le lancer de cette manière, c'est très, très bien, mais ce n'est pas nouveau. Dans nos organismes, si ça fonctionne, c'est parce qu'il y a un parcours personnalisé. Mais l'officialiser, c'est très important.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. C'est terminé pour ce bloc. Vous allez avoir l'occasion de continuer à parler, parce que maintenant la parole est au parti formant l'opposition officielle, donc je cède la parole au député de Nelligan. La parole est à vous.

M. Derraji : Merci, Mme la Présidente, et je vais partager le temps que j'ai avec ma collègue députée de Bourassa. Je vous remercie, mesdames, pour votre excellent rapport. Vous avez ramené pas mal de points très intéressants, surtout de l'incohérence par rapport à certains éléments de la politique gouvernementale par rapport à la prochaine planification de l'immigration.

J'ai deux points. Le premier point, vous avez évoqué la première incohérence au niveau du test des valeurs. Et la deuxième incohérence, c'est... vous pensez que cette politique va fragiliser la position de certaines femmes et d'entraver le projet de vie de nombreuses familles. Vous avez même évoqué que le ministère de l'Immigration... en fait, le moyen d'action qui est la politique gouvernementale pour l'égalité entre les femmes et les hommes, la politique culturelle du Québec, dans la page 9 de votre rapport... le ministère responsable, à savoir le Secrétariat à la condition féminine et le ministère de la Culture et des Communications, et le collaborateur est le ministère de l'Immigration. Donc, je vous ai entendues, mais j'aimerais bien que vous élaboriez davantage par rapport à cet aspect que... probablement les membres de notre commission aimeraient bien être éclairés par rapport à ces deux points.

• (14 h 50) •

Mme Lopez (Eva) : C'est clairement indiqué dans un des paragraphes, le deuxième paragraphe, on parle de l'accent qui est mis sur l'immigration économique au détriment de l'immigration humanitaire et de la réunification familiale. Je vais me permettre de vous lire ce paragraphe, même si vous l'avez, mais pour ceux qui nous entendent et qui ne l'ont pas. C'est très clairement indiqué qu'elles sont proportionnellement plus nombreuses dans ces catégories de regroupement familial, les femmes, à 58,24 % contre 41,75 % des hommes. Dans les cas des réfugiés, il y a 50,44 % des femmes contre 48,56 % des hommes, et la faible hausse et la stagnation de certains seuils — regroupement familial, notamment, et réfugiés — risque en fait d'allonger les délais, ce qui serait préjudiciable aux femmes dont les conjoints sont déjà au pays.

Alors, le problème, c'est, dans la réunification familiale, la femme va devoir attendre longtemps avant de pouvoir rejoindre son mari. Et je vous parlais tantôt du fait qu'il y a des travailleurs hommes qui partent dans leur pays parce que la pression, cette absence est très difficile à tenir. Vous connaissez bien, partout ailleurs, les familles sont très serrées... tricotées serré, et cette absence n'est pas comblée nécessairement par un salaire. Ça fait que ça, ça précarise beaucoup la condition des femmes dans le cadre des réfugiés, des réunifications familiales et, de façon générale, c'est elles qui vont avoir plus un impact négatif.

M. Derraji : Je vous comprends. Et par rapport au test des valeurs?

Mme Islas (Veronica) : J'aimerais quand même bonifier un peu. Aussi, on a la question de services, par exemple, d'accessibilité à d'autres services qui vont au-delà des services du MIDI. Par exemple, les personnes qui sont réfugiées, normalement, on vient de le dire, sont plus des femmes, et elles n'ont pas accès à des services, par exemple, d'Emploi-Québec, les personnes demandeuses d'asile n'ont pas accès aux services de garde subventionnés. Donc, ça fait en sorte qu'il y a une accumulation sur des personnes qui sont déjà très précaires qui fait en sorte que c'est d'autant plus important d'avoir une analyse différenciée selon le sexe.

Mme Lopez (Eva) : Et par rapport au test des valeurs, c'est très important de considérer... Dominique, veux-tu... bon, O.K. Par rapport à ça, on sait très bien que les femmes sont toujours soumises à différents contextes, que ce soit religieux, culturel, linguistique, même. C'est difficile pour une femme attendre, si elle ne parle pas la langue... elles arrivent ici, de comprendre la société québécoise. Et on sait que, malheureusement, il y a des écarts culturels qui font en sorte que la femme, elle est très isolée dans plusieurs des cas. Elle est à la maison, elle garde les enfants, elle n'a pas de service de garde. Pour toutes sortes de situations, elle peut être confrontée à une ignorance vive de sa condition en tant que femme immigrante au Québec. Ça fait que le test des valeurs, les valeurs de la charte, les valeurs québécoises sont très importantes, mais elles ne sont pas injectées. La personne qui débarque de l'avion, elle ne va pas les acquérir tout de suite ou elle ne va pas les comprendre immédiatement. C'est un délai, c'est un temps. Il y a des familles qui sont ici depuis longtemps, mais qui, malheureusement, n'ont pas adhéré parce qu'elles n'ont pas l'accès ni linguistique ni culturel de par le contexte de leur immigration. Alors, il ne faut pas voir une formule magique dans le fait qu'il y a un beau texte noir sur blanc, parce qu'on n'injecte pas ce principe aux gens quand ils arrivent, c'est un processus lent, graduel, individuel, c'est très subjectif.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. Mme la députée de Bourassa-Sauvé, vous désirez prendre la parole?

Mme Robitaille : Oui. Bonjour, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Chassé) : Bonjour.

Mme Robitaille : Dites-moi, combien de temps on a encore?

La Présidente (Mme Chassé) : Il vous reste 5 min 25 s. Allez-y.

Mme Robitaille : D'accord, merci. Merci, mesdames. Votre point de vue est très, très important pour nous. Écoutez, je suis de Montréal-Nord, mon comté, c'est Bourassa-Sauvé, et donc, vous le savez, il y a beaucoup, beaucoup de réfugiés dans mon comté, des gens qui travaillent très, très fort et qui contribuent, justement, à l'économie du Québec puis de Montréal.

Vous dites dans votre rapport que, contrairement au gouvernement de la CAQ, qui veut diminuer les seuils, le nombre de réfugiés, vous, vous croyez qu'on pourrait l'augmenter au Québec. J'aimerais que vous nous expliquiez comment, justement, ces réfugiés-là ne sont pas un fardeau pour l'économie du Québec, mais bien contribuent à l'économie du Québec — vous en voyez souvent, vous en rencontrez, des réfugiés — et quelle place, donc, ils prennent chez nous. Qu'est-ce qu'ils amènent à la société québécoise?

Mme Lachance (Dominique) : Bon, le Québec a une longue tradition, hein, d'accueil de réfugiés pris en charge par l'État, parrainés, etc. C'est véhiculer des préjugés que dire que les réfugiés, effectivement, comme vous le nommez, sont un fardeau, et notre lecture de la proposition actuelle, c'est qu'on les considère, sans que ce soit nommé, comme un fardeau du fait que c'est la seule catégorie, c'est la catégorie humanitaire... et non seulement n'est pas maintenue, mais on la diminue et on la tient diminuée, alors que nous, on considère que ce sont des gens... outre leur processus d'arrivée qui est différent, ils ne viennent pas pour les mêmes raisons, on s'entend là-dessus, et possiblement qu'il y a certaines vulnérabilités aussi qui sont établies ou qui ont été générées par leur condition précédente, sont quand même des gens qui contribuent économiquement, qui sont des travailleurs, vous l'avez nommé, qui sont des gens souvent diplômés, on a tendance à l'oublier. On les voit comme un fardeau à la société, alors que ce sont des gens qui travaillent très rapidement, qui ont un taux de rétention beaucoup plus élevé. D'ailleurs, dans les chiffres mêmes du... dans les chiffres du document du ministère pour la préparation, on faisait un état, quand même, que les catégories qui augmentaient en fait le taux de rétention au Québec, c'étaient notamment les réfugiés puis les personnes parrainées. Donc, on ne comprend pas pourquoi ces gens-là ne font pas partie de la donnée économique, même si on ne veut pas qu'ils ne soient que considérés là-dessus, parce qu'il y a un regard humanitaire que le Québec doit continuer à avoir de par ses engagements internationaux et sa réputation. Il y a toute une expertise, notamment dans les 14 régions de destination, qui a été développée autour de l'accueil des réfugiés et qui sert l'ensemble des nouveaux arrivants, notamment en région. Donc, on pense qu'il faut regarder les réfugiés non pas juste avec une loupe humanitaire — elle est là puis elle est importante — mais aussi que ce sont des travailleurs qui doivent... qui contribuent, qui restent en région, pour lesquels les enfants sont plus... quand on fait en bout de ligne, sont plus scolarisés, se rendent à l'université et qui restent dans notre région.

Mme Robitaille : Une petite question, brièvement. Justement, à vous écouter, le Québec a toujours fait preuve d'humanité, d'accueil, on l'a vu avec les «boat people» vietnamiens, avec les Haïtiens, avec les Bosniaques, avec les Syriens, avec tous ces gens qu'on a accueillis avec un grand, grand coeur. Est-ce que vous regardez ça... Est-ce que des fois ça vous inquiète? Est-ce que vous avez l'impression que ça pourrait être en train de changer?

Mme Lachance (Dominique) : Bien, une diminution des cibles nous inquiète, effectivement, quand on parle que, d'une part, au fédéral, on veut augmenter les niveaux d'accueil de réfugiés. Parce que ce qui se passe dans le monde, on s'entend, il y a de plus en plus de... Le haut commissariat aux réfugiés, je ne vous ferai pas d'histoire là-dessus, mais a sorti des chiffres, je pense, assez faramineux sur les personnes déplacées et réfugiées dans le monde. Alors, il est tout à fait normal que le Québec continue sa tradition d'accueil, surtout que ces gens-là restent, contribuent, paient des impôts, achètent des maisons et font en sorte, au même titre que les autres, que les travailleurs économiques, à faire avancer et évoluer la société, puis en plus ils amènent une diversité. Ils créent autour de l'accueil des réfugiés — je parlais de vulnérabilité, puis c'est vrai — une concertation d'organisations qui se préoccupent puis qui s'installent, qui se mettent ensemble pour essayer de trouver des solutions...

La Présidente (Mme Chassé) : Il vous reste moins d'une minute.

Mme Lachance (Dominique) : ...et qui sont, je le disais tantôt, bénéfiques pour l'ensemble des personnes immigrantes en région, notamment. Donc, on comprend mal cette décision-là.

La Présidente (Mme Chassé) : Il vous reste une trentaine de secondes.

Mme Robitaille : Oui. Donc, ces réfugiés-là, ces gens issus de la réunification familiale, d'un point de vue économique, ils sont tout à fait... ils contribuent à part entière.

Mme Lachance (Dominique) : Oui, oui.

Mme Robitaille : Ce n'est pas un fardeau.

Mme Lachance (Dominique) : C'est peut-être un peu plus long, mais c'est un investissement à long terme. On ne peut pas se dire que la première année d'arrivée, les gens sont... Bon, ils ont la francisation, etc., mais c'est de l'investissement à long terme. Et en ce sens on trouve que la documentation... le document qui nous est présenté a une vision plutôt court terme de l'immigration, bon, il faut répondre à des besoins de main-d'oeuvre, etc., maintenant. On n'est pas contre, mais il ne faut que voir ce court terme là.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. Merci.

Mme Lachance (Dominique) : Excusez. Je me suis envolée.

La Présidente (Mme Chassé) : Quelle belle envolée. Alors, on est rendus maintenant au bloc d'échange avec le deuxième groupe d'opposition pour un temps total de 2 min 45 s. M. le député de Laurier-Dorion, la parole est à vous.

• (15 heures) •

M. Fontecilla : Merci, Mme la Présidente. J'ai très peu de temps, là, mais croyez-vous que le gouvernement envoie un mauvais message en diminuant le volume de réfugiés qui vont être admis au Québec, en augmentant à 65 % — c'est l'ambition de la politique — les immigrants économiques? Donc, ça fait en sorte de... entre autres, les réfugiés. Est-ce que vous pensez que ça envoie un mauvais message à l'ensemble de la société comme quoi les réfugiés ne sont pas utiles, c'est un fardeau?

Mme Lachance (Dominique) : C'est Gandhi qui disait que donner l'exemple, ce n'est pas la meilleure façon de convaincre, c'est la seule. Donc, oui, effectivement, moi, je pense que c'est un message. On comprend, là, la préoccupation économique. Et, à la lumière de ce qu'on vient de dire, on pense que les personnes réfugiées peuvent contribuer et on est tout à fait inquiets du fait qu'effectivement il y a un écart, c'est-à-dire qu'on va récupérer... on augmente les travailleurs économiques au détriment de ces catégories-là. Nous autres, on pense qu'il faudrait les garder, il faudrait les maintenir, il faudrait continuer à les soutenir parce qu'ils peuvent contribuer de façon économique. Donc, oui, la réponse est oui. C'est inquiétant de voir qu'on est dans un processus de diminution. On est en train de répondre, et j'irai de façon plus large, à des préoccupations ou des questionnements qu'une société peut se poser, c'est normal. Mais, nous, ce qu'on considère, c'est que, s'il y a des questionnements, s'il y a des craintes, s'il y a des préoccupations au niveau de toute la question de l'accueil des réfugiés puis... bon, ce n'est pas en diminuant les cibles, la réponse, c'est au contraire en expliquant, en allant à la rencontre des gens, en valorisant cet apport-là tout en l'augmentant plutôt que de diminuer de façon drastique. Oui, c'est inquiétant, effectivement.

Mme Islas (Veronica) : Je pourrais ajouter qu'il faudrait vraiment faire attention puis... parce qu'en fait... Dominique vient de le dire, en fait, il y a une grande contribution économique, et de ne pas nommer cette contribution économique des personnes, autant des personnes qui arrivent par le biais de la réunification familiale ou les réfugiés, fait en sorte que ça crée des préjugés, parce que les personnes qui n'ont pas plus d'information pensent que : Ah! voilà un fardeau pour nous, ça nous coûte de l'argent. Donc, ça crée des préjugés envers des personnes qui veulent juste contribuer économiquement. Donc, on espère qu'on puisse être plus champions, là, des personnes de toutes origines qui contribuent aussi à l'essor de l'économie.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. Je cède maintenant la parole à la députée de Gaspé pour le bloc d'échange avec le troisième groupe d'opposition. Vous avez 2 min 45 s.

Mme Perry Mélançon : Merci, Mme la Présidente. Je vais aller rapidement, moi aussi, avec mes questions. Vous avez mis le doigt aussi sur la discrimination à l'embauche, qu'il y avait un manque de documentation par rapport à ça, puis c'est autant, là, au niveau politique dans le nouveau projet de loi qu'à la planification, comme on le voit. J'aimerais vous entendre sur votre vision. Vous êtes en contact, vous savez comment c'est difficile pour certaines personnes qui viennent s'installer de se trouver un emploi, puis ça fait partie de votre mission, de vos tâches. Donc, comment est-ce qu'on peut arriver à favoriser, là, l'employabilité de ces personnes-là?

Mme Lopez (Eva) : Il y a un problème, la société d'accueil n'est pas préparée. Collectivement, on parle beaucoup d'immigration, mais l'effort de l'intégration chez la personne immigrante, les employeurs, on fait beaucoup de pression dans le sens de l'intégration, mais on pense rarement à sensibiliser la communauté d'accueil. Et maintenant la tendance, c'est beaucoup à la régionalisation. C'est un sujet que je connais très bien, mais c'est un sujet qui me préoccupe aussi parce que les milieux ne sont pas tous aptes à comprendre, ils ne sont pas informés. Ils vont pouvoir comprendre si on les prépare, mais la communauté d'accueil n'est pas préparée à accueillir les immigrants, de là les préjugés par rapport aux réfugiés, par rapport aux travailleurs temporaires voleurs de jobs, par rapport à tout ce qui englobe l'immigration. Parce qu'on parle beaucoup de préparer et on exige beaucoup de la part de l'immigrant par rapport à son intégration, mais on ne prépare pas nécessairement les milieux d'éducation, de santé, les entreprises, les employeurs, et ça prend une préparation et ça prend une concertation pour que les dossiers d'immigration soient plus inclusifs.

Et il y a de la discrimination pour toutes sortes de raisons. La discrimination à l'emploi, elle est bien documentée. Et la personne... C'est complètement incohérent de faire beaucoup d'efforts à aller chercher ailleurs qu'en donnant un bassin très riche à Montréal pour pouvoir aller développer des techniques, des mécanismes efficaces pour pouvoir faciliter l'intégration de tous ces chômeurs, parce qu'ils sont nombreux de par la situation de discrimination et de méconnaissance par rapport à leur diplôme, par rapport à leur milieu, à leur pays d'origine, et tout ça. Ça fait qu'il y a beaucoup à travailler sur le terrain pour améliorer l'intégration socioéconomique des immigrants.

La Présidente (Mme Chassé) : Mme la députée de Gaspé.

Mme Perry Mélançon : ...vous entendre sur... justement, vous parlez des agents d'intégration, la nouvelle annonce, vous n'aviez pas terminé votre pensée, puis ça m'intéressait de vous entendre. Est-ce que vous voyez ça comme un service qui sera complémentaire à tout ce qui est donné dans les organismes ou que ça peut vous paraître inquiétant de voir le soutien qui sera peut-être moins là de...

Mme Lopez (Eva) : ...

La Présidente (Mme Chassé) : Je suis désolée.

Mme Lopez (Eva) : C'est fini? Bon.

La Présidente (Mme Chassé) : Je suis désolée. Ta question s'est rendue... votre question s'est rendue jusqu'au bout du temps. Merci beaucoup pour votre contribution. Vous étiez les premiers, hein, vous avez brisé la glace, vous nous avez sortis de nos vacances. Merci d'avoir été là.

Je suspends les travaux quelques instants afin de permettre au prochain groupe de prendre place. Merci.

(Suspension de la séance à 15 h 6)

(Reprise à 15 h 9)

La Présidente (Mme Chassé) : Bonjour. Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants de Gestion Stuart d'Eterna. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé — à une minute de la fin, je vais vous faire un signe, si vous ne voyez pas le signe, je vais vous le dire — et après quoi nous procéderons à une période d'échange avec chacun des groupes parlementaires qui sont ici. Je vous invite tout d'abord à vous présenter puis ensuite à commencer votre exposé. Allez-y.

Gestion des placements Stuart ltée et Eterna Groupe financier

M. Abikzer (Patrick) : Mme la Présidente, chers membres de la commission, M. le ministre, mon nom est Patrick Abikzer, président de Gestion des placements Stuart. Je suis accompagné aujourd'hui de Pierre Olivier Tardif, vice-président du Trust Eterna, et de Yanick Labrie, économiste, qui a rédigé le rapport que nous vous avons présenté.

Nous aimerions vous remercier de nous recevoir aujourd'hui pour échanger avec vous sur la planification de l'immigration pour la période 2020‑2022. Trust Eterna et Gestion des placements Stuart sont deux institutions reconnues comme intermédiaires financiers pour oeuvrer au sein du Programme des immigrants investisseurs du Québec. M. Yanick Labrie vous présentera dans un premier temps les résultats de son étude et parlera des retombées économiques du programme. Quant à moi, je vous présenterai certaines pistes de solution aux enjeux de la rétention et de la francisation des immigrants investisseurs. Et Pierre Olivier Tardif, finalement, vous présentera... parlera du fonctionnement de la formule de répartition des contingents entre les intermédiaires financiers. Yanick, je te cède la parole.

• (15 h 10) •

M. Labrie (Yanick) : Mme la Présidente, chers membres de la commission, merci pour l'accueil. Je suis ravi d'être ici présenter les faits saillants de mon rapport, un rapport que j'ai corédigé avec l'économiste Vincent Geloso. Alors, d'abord, le programme Immigrants investisseurs est porteur de bienfaits économiques. En fait, il y a sans conteste des importants bénéfices à ce programme. Vous savez, je suis économiste, donc je vais vous présenter des données économiques sur l'ampleur des bienfaits et des retombées.

D'abord, depuis le début des années 2000, le fonds global de placement constitué par le programme a surpassé les 14 milliards de dollars et généré 1,8 milliard de revenus pour le Québec. Cela a permis notamment à Investissement Québec de consentir à plus de 6 000 PME de la province une aide financière totale de plus de 900 millions pour l'expansion de leurs projets d'affaires. Investissement Québec estime que ces PME ont investi 12,9 milliards et généré ou sauvegardé des emplois à hauteur de près de 50 000 depuis le début des années 2000, donc ce n'est pas rien. Même en gardant l'hypothèse prudente que seulement 10 % de l'aide qui est consentie aux entreprises a pu être directement liée au programme comme tel, c'est 4 800 emplois, c'est un minimum, O.K.? Si on regarde qu'est-ce que ça représente en termes de masse salariale, c'est annuellement plus de 210 millions de dollars, à laquelle il faut ajouter, hein, les profits des entreprises, chose qu'on n'a pas pu quantifier, mais qui sont bien réels.

Les sommes investies, évidemment, ont permis — et on ne peut difficilement en douter — d'améliorer la productivité de la main-d'oeuvre, la productivité de ces entreprises. Elles ont été investies en technologie, elles ont été investies en capital physique, donc en machinerie, en équipement, en formation de la main-d'oeuvre. Et, vous savez, avec les gains de productivité qui ont été générés, bien, évidemment, c'est à la base, là, de l'enrichissement des Québécois, l'amélioration du niveau de vie. Alors, sur le plan économique, sur le plan de l'investissement, c'est un programme qui remplit ses promesses.

M. Abikzer (Patrick) : Bien. Les critiques récurrentes qui sont formulées à l'égard du Programme des immigrants investisseurs concernent son faible taux de rétention et le faible nombre de francophones qui appliquent à ce programme. Quelle en est la raison principale et comment y remédier? Pour répondre à cette question, il faut d'abord s'intéresser au délai de traitement d'un dossier investisseur. En date d'aujourd'hui, cela prend entre six et huit ans pour qu'un immigrant investisseur soit admis au Québec. Le portrait de l'immigration d'affaires que nous constatons actuellement est donc une image du passé. Les immigrants investisseurs qui arrivent aujourd'hui ont pour la plupart déposé leur demande de certificat de sélection du Québec avant 2013. Le programme des investisseurs est ainsi le programme d'immigration d'affaires avec le délai d'attente le plus long au monde. Entre le moment où l'investisseur étranger décide avec sa famille de venir vivre au Québec et le moment où on l'accueille, il pourrait s'écouler huit ans. Bien des choses changement en huit ans : les enfants grandissent et sont maintenant dans des universités européennes, américaines ou même canadiennes, les affaires du requérant principal se sont développées et souvent internationalisées. Il existe tellement de facteurs qui peuvent influencer un plan de vie sur une si longue période.

Rappelons également que l'investisseur, dans la plus grande majorité des cas, a vu son investissement de cinq ans arriver à maturité avant même de recevoir sa résidence permanente. Il ne perd donc plus rien en activant son visa de résidence même si sa décision de vivre au Québec a changé. Cela fausse, bien entendu, le taux de rétention. Il est difficile de retenir un invité pour le dessert si on ne l'a jamais reçu à souper.

La solution que nous proposons est d'offrir au candidat, immédiatement après avoir été sélectionnés par le Québec, une résidence temporaire de deux ans. Il a déjà son CSQ entre les mains. Durant cette période, un des membres de la famille aurait la possibilité de venir au Québec pour y étudier, travailler, développer ses affaires, lui permettant ainsi d'adhérer aux valeurs québécoises, d'apprendre le français et de s'acclimater à l'environnement économique. Le taux de rétention se verra clairement bonifié, et l'investisseur pourra bénéficier d'une voie prioritaire et rapide pour être admis au Québec, car il aura clairement démontré sa décision de vivre ici, un peu comme le système Arrima le fait avec les travailleurs devant être sélectionnés par le Québec. Précisons que le gouvernement du Québec a tous les pouvoirs législatifs pour effectuer ces changements et qu'Ottawa n'aurait aucune raison de s'opposer à cette initiative.

Je laisse mon collègue parler de la formule des contingents.

La Présidente (Mme Chassé) : Il vous reste trois minutes.

M. Tardif (Pierre Olivier) : Parfait. Depuis 2015, il existe un règlement sur les contingents qui permet d'attribuer à chaque intermédiaire financier un nombre déterminé de dossiers immigrants investisseurs qu'il peut soumettre au MIDI. Ce contingent est déterminé par une formule mathématique. Il revient alors à chaque courtier de recruter les meilleurs candidats possible, et cela, afin d'augmenter les chances d'une conclusion positive pour chaque demande déposée.

On peut aisément assumer que plus le taux de succès d'un courtier est élevé et plus ce dernier devrait être considéré comme un performant. Dans les faits, c'est le contraire qui se passe. La formule mathématique établit que le Règlement sur les contingents comporte un biais très important qui la rend inefficace et inéquitable et va à l'encontre du bien public. Cette formule ne favorise pas vraiment la performance des courtiers et protège les plus gros intermédiaires de la concurrence. Rappelons qu'en date d'aujourd'hui cinq intermédiaires financiers contrôlent près de 65 % du marché des contingents alors que les 17 autres intermédiaires financiers inscrits doivent se répartir le reste, donc le maigre 35 % restant. Le gouvernement de l'époque a décidé qui allait être gros et qui allait rester gros et pour des raisons qu'on a du mal à s'expliquer.

La concurrence engendre la performance. Ces cinq gros intermédiaires financiers pourraient avoir des taux de succès plus faibles sans impact significatif sur leur position dominante. Dans les faits, le système actuel ne récompense pas la performance. Afin d'améliorer l'efficacité du programme, il serait avisé de remplacer la formule actuelle de répartition des contingents par une nouvelle formule qui tient compte de la performance réelle de chacun des courtiers. Ainsi, les intermédiaires financiers avec le plus haut taux de réussite seraient alors récompensés pour leur efficacité en se voyant octroyer un contingent plus élevé de dossiers, ce qui est dans l'intérêt du Québec.

La Présidente (Mme Chassé) : ...une minute.

M. Tardif (Pierre Olivier) : C'est tout. Merci de m'avoir écouté aujourd'hui.

La Présidente (Mme Chassé) : Bien oui, merci. Alors, j'ai maintenant... le bloc d'échange avec le parti formant le gouvernement débute pour 15 minutes. M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. M. Abikzer, M. Labrie, M. Tardif, merci d'être présents en commission parlementaire, de nous avoir présenté votre mémoire. Vous êtes le premier groupe qui nous parle des immigrants investisseurs, puis j'aimerais ça qu'on mette la table un petit peu sur ce programme-là, qui a été modifié par le gouvernement libéral de l'époque l'an passé, qui avait rajouté des contingents en 2015.

Juste pour bien expliquer, là, aux gens qui nous écoutent et aux membres de la commission comment ça fonctionne, donc, généralement, c'est suite à un investissement de 1,2 million de dollars qui est prêté à Investissement Québec qu'un immigrant investisseur peut se voir accordé la résidence permanente. Juste avant ça, tout à l'heure vous avez dit : Il n'en revient qu'au gouvernement du Québec de mettre en place une résidence temporaire de deux ans. Or, l'accès au territoire canadien, ça relève du gouvernement fédéral, alors le Québec n'a pas cette juridiction-là.

Je reviens au programme. Donc, avec 1,2 million, la personne peut obtenir sa résidence permanente, est sélectionnée par le Québec et vient sur le territoire québécois par la suite. On est la seule province canadienne à avoir ce programme-là. Le fédéral, lui, a renoncé ce programme-là. Je vous dirais... Vous dites : Il y a beaucoup de retombées économiques rattachées à ce programme-là. Comment ça fonctionne, le montage financier, là? Quel est le rôle des intermédiaires financiers dans le 1,2 million qui est avancé, là? Est-ce que toutes les personnes Immigrants investisseurs déboursent 1,2 million puis le donnent à Investissement Québec?

• (15 h 20) •

M. Abikzer (Patrick) : Le programme Immigrants investisseurs, il y a une obligation pour l'investisseur de déposer 1,2 million auprès d'Investissement Québec, d'accord? L'investisseur a le choix de le faire ou de financer son investissement. Donc, Investissement Québec reçoit donc un dépôt de 1,2 million, et c'est un placement sans intérêt. L'ensemble des intérêts actualisés, c'est l'avantage que l'investisseur donne au Québec et à Investissement Québec. Cet argent est utilisé pour donner des subventions à des PME québécoises, et, bien entendu, à financer des programmes gouvernementaux, et également à rémunérer les intermédiaires financiers qui ont signé une entente tripartite avec le gouvernement du Québec et Investissement Québec.

M. Jolin-Barrette : O.K. Et je reviens là-dessus, là, pour Gestion Stuart et Eterna, là, moi, là, je suis un immigrant investisseur, là, je fais affaire avec vous, là, comment ça fonctionne? Est-ce que c'est vous qui avancez le 1,2 million pour moi?

M. Abikzer (Patrick) : Nous, on finance cet argent, oui, à travers des institutions financières canadiennes.

M. Jolin-Barrette : O.K. Donc, il n'y a pas de nouvel argent de l'étranger, c'est des institutions financières canadiennes qui financent le 1,2 million.

M. Abikzer (Patrick) : Oui, qui financent, absolument, le 1,2 million, tout à fait.

M. Jolin-Barrette : O.K. Ça fait que ce n'est pas de l'argent de l'étranger qui arrive au Canada ou au Québec, c'est : vous, vous faites affaire avec une institution financière qui, elle, prête 1,2 million à Investissement Québec, c'est ça?

M. Abikzer (Patrick) : Exact. Absolument.

M. Jolin-Barrette : O.K. Et là, dans le fond, moi, si je suis un immigrant investisseur, qu'est-ce que je fais? Je vous paie, à vous, un certain montant d'argent pour que vous financiez le 1,2 million?

M. Abikzer (Patrick) : Exactement, et donc cet argent qui est transféré au Québec sert, justement, à emprunter et payer les intérêts aux institutions financières québécoises pour pouvoir financer cette somme de 1,2 million. Donc, l'intérêt va directement à l'institution financière québécoise.

M. Jolin-Barrette : O.K. Donc, l'immigrant investisseur ne sort pas de sa poche 1,2 million.

M. Abikzer (Patrick) : Non.

M. Jolin-Barrette : Il va sortir un montant forfaitaire.

M. Abikzer (Patrick) : C'est ça.

M. Jolin-Barrette : C'est combien, ce montant-là, à peu près, pour financer 1,2 million?

M. Abikzer (Patrick) : On parle d'environ 300 000 $, 300 000 $ à 350 000 $, aujourd'hui, dans le programme 1,2 million.

M. Jolin-Barrette : O.K. Ça veut dire, pour pouvoir obtenir ma résidence permanente, ça me coûte 300 000 $ que je ne reverrai pas.

M. Abikzer (Patrick) : C'est ça, exactement.

M. Jolin-Barrette : O.K. Et là, lorsqu'on revient avec les intermédiaires financiers, dans le fond, j'imagine que les intermédiaires financiers se prennent une cote sur le 300 000 $ pour les frais associés.

M. Abikzer (Patrick) : Absolument. Tout à fait.

M. Jolin-Barrette : O.K. Et puis par la suite, sur les intérêts, là, vous me disiez, il y a une convention tripartite qui a été signée avec Investissement Québec, et là les intermédiaires financiers ont une quote-part aussi sur les revenus d'intérêts.

M. Abikzer (Patrick) : Exactement.

M. Jolin-Barrette : De l'ordre de combien?

M. Abikzer (Patrick) : 22 %.

M. Jolin-Barrette : O.K. Et combien on génère d'intérêts annuellement avec ces sommes-là?

M. Abikzer (Patrick) : Bien, aujourd'hui, pour Investissement Québec?

M. Jolin-Barrette : Oui.

M. Abikzer (Patrick) : Environ... Parce que, là, on est en période de transition, on passe d'un 800 000 $... on va passer à 1,2 million, mais les dossiers de 1,2 million ne sont pas encore financés, donc c'est difficile de le dire.

M. Jolin-Barrette : O.K. Mais sur le 800 000 $, ça donnait combien?

M. Abikzer (Patrick) : Bien, sur le 800 000 $, ça donnait... bien, sur le 800 000 $, ça coûtait environ 200 000 $, d'accord, l'option de financement. Donc, ici, on parle d'environ, aujourd'hui, 120 000 $ environ.

M. Jolin-Barrette : O.K. Mais au net, les intérêts, ça donnait combien, la masse des intérêts?

M. Abikzer (Patrick) : Pour Investissement Québec ou pour la banque?

M. Jolin-Barrette : Bien, vous pouvez nous dire les deux. Pour la banque, c'était combien?

M. Abikzer (Patrick) : Aujourd'hui, pour la banque, on n'est pas loin de 100 000 $.

M. Jolin-Barrette : Par dossier de revenus.

M. Abikzer (Patrick) : Oui, oui.

M. Jolin-Barrette : O.K. Puis, au total, pour Investissement Québec, est-ce que vous avez...

M. Abikzer (Patrick) : Légèrement moins parce que, bon, bien, les rendements du bon du gouvernement du Québec sont plus faibles que le taux d'intérêt chargé par les banques.

M. Jolin-Barrette : O.K. Mais donc l'intermédiaire financier, lui, prenait une cote de 22 % sur les revenus d'intérêts.

M. Abikzer (Patrick) : Oui, sur les revenus d'intérêts d'Investissement Québec, oui. C'est basé sur l'entente tripartite, ça existe depuis 1986.

M. Jolin-Barrette : O.K. Et puis je voulais savoir, vous disiez, bon, tout à l'heure... c'est M. Tardif qui disait : Il y a uniquement les gros joueurs qui ont été favorisés par le précédent gouvernement. Qu'est-ce qui arrive avec des plus petits joueurs? Est-ce qu'eux-mêmes financent ou ils font affaire avec une institution financière? Exemple, comme vous, là, Gestion Stuart et Eterna, est-ce que vous allez voir une banque pour que ce soit la banque qui prête l'argent à Investissement Québec?

M. Tardif (Pierre Olivier) : Oui, une banque ou des compagnies d'assurance.

M. Abikzer (Patrick) : Banques, compagnies d'assurance québécoises, mais ce n'est pas... quand on parle de gros joueurs, on ne parle pas de gens qui financent eux-mêmes leurs investissements. Ce n'est pas parce qu'on est gros qu'on finance les investissements.

M. Jolin-Barrette : Et donc, quand vous dites des compagnies d'assurance, des banques, avec qui vous faites affaire au niveau du financement?

M. Abikzer (Patrick) : Ah! la Banque de Montréal, compagnie d'assurance Capitale, il y a plusieurs...

M. Tardif (Pierre Olivier) : La Capitale, la SSQ, entre autres.

M. Abikzer (Patrick) : Absolument. Et ce n'est pas parce qu'on a un gros quota ou un petit quota qu'on ne finance pas nos activités, parce que l'ensemble des courtiers font affaire avec une banque pour financer leurs activités.

M. Jolin-Barrette : O.K. Et puis, lorsque vous dites qu'il y a des retombées pour les entreprises québécoises, pouvez-vous expliquer aux membres de la commission comment ça fonctionne, dans le fond, ce programme d'investissement là?

M. Abikzer (Patrick) : Absolument. 55 % du revenu d'intérêts sur le 800 000 $ va aux PME. C'est tout simplement une subvention non remboursable.

M. Jolin-Barrette : Et comment le choix est fait de dire : C'est telle entreprise ou telle autre entreprise qui bénéficie de la subvention?

M. Abikzer (Patrick) : Il y a des critères qui sont établis par Investissement Québec, et nous, en tant qu'intermédiaires financiers, on doit identifier l'entreprise, recevoir la demande de subvention et donner notre recommandation.

M. Jolin-Barrette : Donc, Investissement Québec demande aux intermédiaires financiers : Telle entreprise, supposons, à Beloeil, dans mon comté, est-ce que vous donnez votre accord? Quelle est votre opinion là-dessus pour la financer pour que cette entreprise-là ait une subvention non remboursable?

M. Abikzer (Patrick) : Exactement. Ça dépend, bien entendu... C'est une liste de critères, et on peut donner comme subvention jusqu'à 15 % du montant investi. Par exemple, une entreprise, une PME québécoise qui aurait un projet d'investissement peut recevoir jusqu'à 15 % de subvention non remboursable, pour un maximum de 250 000 $ CAN.

M. Jolin-Barrette : O.K. Je vous remercie. Je sais que j'ai des collègues qui veulent poser des questions. Peut-être que je reviendrai par la suite.

M. Abikzer (Patrick) : Bien sûr.

La Présidente (Mme Chassé) : M. le député de Mégantic, vous désirez prendre la parole? Allez-y.

M. Jacques : Oui, merci, Mme la Présidente. Bonjour, messieurs. Vous avez parlé au départ, là, que ça prenait de six à huit ans de traitement de dossier. Pouvez-vous m'expliquer un peu pourquoi les délais sont si longs que ça, là?

M. Abikzer (Patrick) : Bien, oui, je... oui. Écoutez, il y a actuellement presque 19 000 personnes de la catégorie des immigrants investisseurs, donc qui détiennent un certificat sélection du Québec, qui sont en attente de leur résidence permanente. Si on évalue à peu près à 3 500, à 4 000 personnes immigrantes qui peuvent être admises au Québec d'après le plan 2020‑2022, bien, on divise 19 000 par trois et demi, quatre, donc ça fait à peu près six ans.

D'ailleurs, si on va sur le site du gouvernement fédéral et on regarde le temps d'attente pour un dossier Québec, on est rendu aujourd'hui à 54 mois. C'est pour cette raison qu'on parle, au niveau fédéral, d'une attente pas loin de six ans, et, au niveau du Québec, à peu près... bon, on était à un an, maintenant, avec la réduction du nombre de dossiers qu'on sélectionne chaque année, on parle d'environ deux ans, donc à peu près deux plus six, ça peut aller jusqu'à huit ans.

M. Jacques : Donc, c'est une problématique, au niveau de l'immigration au niveau fédéral qui fait que les dossiers ne sont pas traités avant six à huit ans.

M. Abikzer (Patrick) : Pas vraiment. Je pense que la problématique, c'est la problématique des niveaux d'immigration. Je ne suis pas ici pour juger les niveaux d'immigration. Peut-être, je pourrais vous donner mon avis personnel, bien entendu, mais c'est le Québec qui décide, finalement, combien d'immigrants investisseurs vont rentrer chaque année parce que c'est le fédéral... c'est le Québec qui établit ses niveaux d'immigration.

Le Québec pourrait dire : Je veux accepter 10 000 investisseurs demain, ce ne serait pas tellement justifié vu la situation économique du Québec avec les besoins de main-d'oeuvre, mais il pourrait le faire. Même si je suis dans le domaine, ce ne serait pas ma recommandation.

M. Jacques : Et ce serait quoi, votre recommandation?

M. Abikzer (Patrick) : De permettre à ces 18 000 personnes et à ceux qui sont dans le processus de pouvoir venir au Québec avec un visa temporaire. Parce que, quand on obtient un CSQ, ça équivaut à avoir un CAQ, un certificat d'acceptation du Québec, ça peut être considéré ainsi.

Le gouvernement fédéral reproche au Québec que ses immigrants investisseurs ne restent pas ici, qu'ils vont à Vancouver et à Toronto. Ce n'est pas une obligation pour l'investisseur de venir, mais donnons-lui la chance. Et, ceux qui viennent, à ce moment-là, on leur donne une voie rapide. Je ne vois pas comment le fédéral pourrait refuser un permis de travail de deux ans pour venir étudier et travailler lorsque le Québec le demande, parce que le fédéral nous reproche que les investisseurs ne restent pas ici. Ça, c'est la façon avec laquelle ils vont rester puis ils vont participer au développement du Québec.

M. Jacques : Est-ce qu'il y a d'autres provinces qui offrent des programmes d'immigrants investisseurs?

• (15 h 30) •

M. Abikzer (Patrick) : Oui, oui, c'est ce qu'on appelle un peu les PNP. Il y en a un peu partout au Canada. Ce n'est pas un programme investisseurs fédéral, mais c'est des programmes de... le PNP, c'est comme un programme au Québec. Donc, il y a des programmes partout : Provinces atlantiques, il y en a à Vancouver, il y en a à Toronto, c'est différents programmes.

M. Jacques : C'est combien d'immigrants qui sont acceptés par ces programmes-là chaque année?

M. Abikzer (Patrick) : Il y en a beaucoup. Je ne pourrais pas vous le dire, actuellement. Vous donner un chiffre exact, je ne pourrais pas vous le dire, mais je pourrai vous le communiquer avec grand plaisir.

M. Jacques : Vous avez dit, dans votre mémoire, là, qu'au niveau d'augmenter l'immigration économique à 65 %, c'était une bonne idée. Vous voyez ça comment? Pourquoi que c'est une bonne nouvelle?

M. Abikzer (Patrick) : D'augmenter l'immigration économique?

M. Jacques : À 65 %.

M. Abikzer (Patrick) : Écoutez, le Québec est en plein-emploi. On a besoin de gens, il faut les faire rentrer. Puis ce n'est pas seulement les gens qui doivent entrer pour le plein-emploi, je pense, c'est important aussi de faire venir des investisseurs. Pourquoi? Parce que, d'abord, ce sont tous des ambassadeurs économiques. L'exportation est tellement importante. Ces gens peuvent venir au Québec, s'installer, créer de l'emploi, oui, des très bons emplois. Ce sont aussi des gens qui peuvent... qui sont innovateurs. Ils ont des entreprises dans leur pays étranger... dans leur pays d'origine, pardon, c'est important de les avoir ici. Pourquoi les laisser attendre huit ans? Ils peuvent contribuer à la prospérité du Québec et de façon significative.

M. Jacques : Merci.

M. Labrie (Yanick) : Est-ce que je peux ajouter?

M. Abikzer (Patrick) : Bien sûr.

La Présidente (Mme Chassé) : Il reste 1 min 30 s au bloc. Est-ce qu'il y a une autre intervention des membres du bloc formant le gouvernement? Vous désirez, M. Labrie, prendre la parole? Allez-y.

M. Labrie (Yanick) : Bien, tout simplement pour ajouter à ce que mon collègue disait, il y a l'autre élément qui est important à considérer, c'est les liens avec les pays d'origine. Donc, ces investisseurs, quand ils viennent ici, ils ont des liens, évidemment, d'affaires avec d'autres pays, les pays d'où ils proviennent, avec lesquels ils font affaire. C'est important, d'un point de vue économique, de tisser ces liens-là, les liens commerciaux et, après coup, on a des exportations en plus grand nombre, et c'est aussi porteur pour le Québec, c'est aussi générateur d'emplois. Alors, ça, c'est un autre volet aussi qui est à considérer.

La Présidente (Mme Chassé) : Excellent. Il reste une minute au bloc. Y a-t-il... Oui, Mme la députée, allez-y.

Mme Lachance (Bellechasse) : Je vais faire ça rapidement, merci. Merci d'être là. Dans votre positionnement, vous nous avez entretenus du faible taux de rétention, on vient d'en discuter quand même beaucoup, et vous avec mentionné que le délai de six à huit ans pour l'obtention du CSQ était une cause principale et que de proposer un visa de travail temporaire serait une solution. Y a-t-il d'autres solutions pour favoriser la rétention, selon vous?

La Présidente (Mme Chassé) : 30 secondes.

M. Abikzer (Patrick) : Écoutez... Faire venir les gens plus rapidement?

Mme Lachance (Bellechasse) : ...

M. Abikzer (Patrick) : Réduire le délai, ça veut dire automatiquement augmenter l'admission des investisseurs. Ce n'est pas le moment idéal, avec les objectifs du gouvernement. Je pense que c'est une bonne option, reculons un peu pour mieux sauter. C'est ce que fait, actuellement, le gouvernement en évaluant tous les programmes. Mais en attendant, pourquoi ne pas faire venir ces gens-là avec un visa temporaire pour qu'ils puissent s'intégrer?

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. Ça termine le bloc d'échange avec le parti formant le gouvernement. On est maintenant rendus au parti formant l'opposition officielle pour un bloc d'échange de 10 minutes. M. le député de Nelligan, la parole est à vous.

M. Derraji : Merci, Mme la Présidente. Merci pour votre mémoire. Et ma première question : Avez-vous des craintes par rapport à la prospérité de ce programme du point de vue gouvernemental?

M. Abikzer (Patrick) : Des craintes? Non, c'est un bon programme. Pour moi, c'est un excellent programme, définitivement. Bien sûr, on oeuvre à l'intérieur...

M. Derraji : ...reformuler ma question : Si demain, je vous dis que le gouvernement va arrêter ce programme, ça va être quoi, votre réaction?

M. Abikzer (Patrick) : Bien, écoutez, le gouvernement a tous les pouvoirs d'arrêter un programme et de le faire. Je ne suis là que pour participer au programme. Si le gouvernement décide demain d'arrêter le programme, je trouve que ce serait une très, très mauvaise idée, ça serait aller à l'encontre de l'intérêt du Québec. Je ne pense sincèrement pas que c'est dans l'intérêt du Québec ni du gouvernement d'arrêter ce programme.

M. Derraji : Pourquoi?

M. Abikzer (Patrick) : Parce que c'est un programme très bénéfique pour le Québec et qui pourrait être amélioré pour être encore mieux. N'oubliez pas qu'en 1986 ce programme a été créé. Ça a été la première fois dans le monde qu'un programme Immigrants investisseurs a été créé. Le monde entier nous a copiés, et on a laissé ce programme aller à des taux... à huit ans de l'acceptation, alors qu'il y a d'autres programmes, d'autres pays qui nous ont copiés qui sont à un an, moins d'un an. Pour quelle raison? Tout le monde nous a copiés, et aujourd'hui on laisse un programme aller à l'arrière. Non, je ne crois pas que ce serait une bonne idée.

M. Derraji : Donc, pour vous, malgré le fait qu'il y a un délai, vous le jugez quand même nécessaire, que c'est un bon programme, mais il y a une piste à améliorer le programme.

M. Abikzer (Patrick) : Absolument.

M. Derraji : Excellent. Merci, ça répond à ma question.

Ma deuxième question, on a parlé beaucoup de problèmes d'image par rapport aux immigrants investisseurs. Ma question, c'est par rapport à vous. Vraiment, qu'est-ce que vous faites pour nous rassurer, rassurer les élus, rassurer la population? Avez-vous mis en place des pratiques de conformité, gestion d'éthique? Parce que nous et les membres de la commission, j'en suis sûr et certain, nous avons à coeur le développement économique, et j'ai lu votre mémoire, vous parlez de 48 000 emplois depuis 2000, vous parlez de 900 millions de dollars. Et je rajoute un autre point pour le bénéfice de tout le monde, les revenus générés par Investissement Québec financent un programme du MIDI, qui est le programme PRIIME, qui aide les minorités éthiques et visibles à accéder au marché de l'emploi qui est, «by the way», un très beau programme. Mais par rapport à vous, qu'est-ce que vous faites pour améliorer tout ce qui est éthique et gestion de conformité pour éviter les abus?

M. Abikzer (Patrick) : Bien, écoutez, d'abord nous sommes réglementés par l'OCRCVM, par l'Autorité des marchés financiers, on doit respecter toutes les règles de blanchiment d'argent. Donc, on est... il y a de la conformité, énormément. D'ailleurs, aujourd'hui, il y a des gens de l'OCRCVM à mon bureau à Montréal. Donc, il est clair que la conformité est là, on est obligés de suivre toutes ces règles, et donc on est vraiment un paravent pour s'assurer d'abord que l'argent qui rentre au Québec... et l'origine des fonds, s'assurer qu'il n'y a pas d'abus.

En plus de ça, on est là pour pouvoir recruter les immigrants investisseurs au niveau international, les rencontrer à travers nos réseaux d'agents. Donc, il y a tout un travail qui est fait en amont, et en plus de ça, on est ici quand ils arrivent. On peut également jouer un rôle demain pour ces immigrants qui auront obtenu un permis de travail temporaire pour venir s'installer ici pendant les deux ans. On pourrait jouer un rôle avec les investisseurs qui arrivent ici pour les aider, justement, à intégrer la société québécoise, à chercher des opportunités d'affaires, toujours dans le cadre de l'entente tripartite que nous avons avec le ministère de l'Immigration et Investissement Québec.

M. Derraji : ...

M. Tardif (Pierre Olivier) : Et le programme québécois... excusez, le programme québécois est un des programmes les plus compliqués et les plus difficiles à monter des dossiers pour les immigrants qui viennent, là. Ça prend très, très... énormément de temps à monter et faire des «due diligences» sur l'immigrant, beaucoup plus que la plupart des autres pays qui...

M. Derraji : Merci. Vous comprenez que c'est un point très important, la conformité, pas par rapport uniquement aux élus, mais aussi à l'ensemble de la population.

M. Tardif (Pierre Olivier) : Absolument, absolument.

M. Derraji : Un autre point, et je lance une réflexion avec vous, le gouvernement se lance dans une démarche avec une politique internationale avec une bonne présence d'Investissement Québec à l'étranger, et j'entends le ministre, tout à l'heure, par rapport à sa question au niveau des 22 % que les compagnies prennent pour les 300 000 $ et l'argent généré... Si je vous dis : Demain, le gouvernement va plus donner le mandat à Investissement Québec et de faire ce que vous faites présentement, ça serait quoi, votre réaction?

M. Abikzer (Patrick) : Écoutez, je vais vous répondre très franchement, d'accord?

M. Derraji : ...vraiment, c'est pour ça...

M. Abikzer (Patrick) : C'est très, très complexe d'aller chercher des investisseurs étrangers et de les faire venir et c'est excessivement dur. Le programme existe depuis 1986, il est toujours là, et, croyez-moi, c'est parce qu'on est... parce que les intermédiaires financiers sont ici. On est un «screen», on va chercher les clients à l'étranger. On s'assure que ce sont de bons candidats, on s'assure de l'origine de leurs fonds. L'ensemble de leur actif est évalué, non pas comme aux États-Unis. Aux États-Unis, le programme EB-5, bon, il était à 500 000 $ encore il n'y a pas longtemps, l'investisseur devait faire la preuve des sources de fonds seulement du 500 000 $ qu'il investissait aux États-Unis. Au Québec, si un investisseur a 200 millions, il doit faire la preuve de l'origine des fonds du 200 millions qu'il déclare, puis il est obligé de déclarer l'ensemble de ses actifs. Donc, je peux vous dire que ce n'est pas facile et je peux vous dire qu'on travaille très, très fort, parce que chaque dossier, il y a énormément de travail qui est fait. On est constamment partis aux quatre coins du monde pour aller, justement, recruter ces investisseurs.

M. Derraji : Je pense, ma collègue...

La Présidente (Mme Chassé) : Mme la députée de Bourassa-Sauvé, vous désirez prendre la parole?

Mme Robitaille : Oui. Dites-moi, il reste combien de temps?

La Présidente (Mme Chassé) : 3 min 30 s.

• (15 h 40) •

Mme Robitaille : Merci. Merci, monsieur, d'être ici. Écoutez, justement, vous parlez de rétention, vous dites que ces gens-là ne restent pas toujours ici, c'est un problème. Vous parlez, dans votre rapport... Vous suggérez... Vous dites : «La solution la plus porteuse — pour retenir ces gens-là ici — consisterait à adopter des politiques fiscales et réglementaires se rapprochant de celles en vigueur dans les autres provinces canadiennes, [comme] l'Alberta, l'Ontario et la Colombie-Britannique.» À quoi faites-vous référence?

M. Labrie (Yanick) : Évidemment, il y a plusieurs facteurs, hein, qui expliquent les raisons pour quoi les immigrants investisseurs ne vont pas demeurer au Québec. Il y a des facteurs qui sont d'ordre linguistique, culturel, il y a des facteurs pour lesquels les politiques publiques n'ont pas d'emprise. Pour ce qui est de la fiscalité, pour ce qui est de la réglementation, ça, c'est un volet, évidemment, pour lequel le gouvernement a vraiment un impact. Il peut changer les choses, il peut être plus attrayant pour les investisseurs si, justement, le climat d'affaires encourage, justement, la création d'entreprises. Est-ce qu'à l'heure où on se parle le fardeau réglementaire, le fardeau pour lancer une affaire est équivalent à celui des autres provinces, les provinces que vous avez mentionnées, l'Ontario, la Colombie-Britannique? On le sait, c'est effectivement le cas, il y a des gens qui vont transiter par le Québec qui vont aller dans d'autres provinces. Si on veut qu'elles restent ici, il faut qu'il y ait des opportunités sur le plan économique aussi pour eux, pour leurs descendants, donc pour les enfants, la famille, etc., donc il faut qu'il y ait... Si on dit que c'est un obstacle, la question linguistique francophone, eh bien, il faut compenser là où on peut le faire, et c'est via des politiques fiscales comme ça qui sont plus attrayantes d'un point de vue économique.

Mme Robitaille : Alors, vous dites : Il ne faut pas abolir du tout ce programme-là, au contraire, il faut encourager ces gens-là, il faut accélérer le processus.

M. Labrie (Yanick) : Effectivement, effectivement.

Mme Robitaille : Il faut les aider à rester, il faut mettre des mesures en place pour que ces gens-là demeurent chez nous.

M. Tardif (Pierre Olivier) : ...venir s'établir le plus rapidement possible au Québec.

M. Abikzer (Patrick) : Oui, exactement. Pouvez-vous vous imaginer qu'aujourd'hui il y a 18 000 personnes, donc environ 6 000 familles, qui attendent de venir au Québec en tant qu'investisseurs et pour apporter leur contribution? Donc, ce sont des gens qui ont des capitaux, accès à des marchés étrangers et puis ils attendent. Pourquoi? Tout le monde les veut à travers le monde, tout le monde se bat pour les avoir. Nous, on les a, puis il faudrait juste accélérer un petit peu pour les faire venir. Tout le monde se bat pour ça, il y a des programmes partout dans le monde.

Mme Robitaille : Et justement vous dites que, si on accélérait le processus, au moins ils resteraient plus longtemps.

M. Abikzer (Patrick) : Oui, c'est ça.

La Présidente (Mme Chassé) : Il reste une minute pour vos échanges.

M. Abikzer (Patrick) : Mais le problème, c'est que cette situation ne date pas des six derniers mois, cette situation date depuis longtemps. On parle de plusieurs, plusieurs années.

Mme Robitaille : Vous dites «un programme très, très bénéfique pour le Québec». Résumez-moi encore une fois pourquoi, pourquoi vous y tenez.

M. Labrie (Yanick) : Bien, le volet économique, je l'ai résumé. Sur le plan des retombées, c'est indéniable, hein, c'est indéniable. Il y a des retombées en termes d'investissements, des investissements qui sont créateurs de richesse, mais créateurs également d'emplois. J'ai chiffré... en fait, c'est Investissement Québec, ce sont des données publiques, qui chiffre à près de 50 000, là, depuis 20 ans... Et il faut regarder également tout le volet investissements, qu'est-ce qu'il génère en termes de profits...

La Présidente (Mme Chassé) : En terminant.

M. Labrie (Yanick) : ...en termes de profits, en termes de gains de productivité. À la base, hein, le principal facteur d'amélioration de notre niveau de vie, c'est les gains de productivité. Sur le plan démographique, avec le vieillissement, ça risque d'être plus lourd pour les finances publiques, alors on doit compenser par la productivité.

La Présidente (Mme Chassé) : Ça termine le bloc d'échange avec l'opposition officielle. On est maintenant rendus au bloc d'échange avec le deuxième groupe d'opposition. M. le député de Laurier-Dorion, la parole est à vous pour un bloc de 2 min 30 s.

M. Fontecilla : Merci, Mme la Présidente. Je vais enchaîner tout de suite à l'idée de la députée de Bourassa-Sauvé. Et vous avez dit tantôt que le gouvernement fédéral avait abandonné ce programme-là. S'il est si payant, pourquoi l'a-t-il abandonné?

M. Abikzer (Patrick) : Ce n'est pas le même programme, d'abord. Il y avait un programme qui était semblable au niveau du gouvernement fédéral, mais ils ont accumulé des sommes, ils ne savaient pas le placer. La vérité était là, ils n'ont pas pu le placer correctement. Nous, au Québec, on le fait, et c'est placé grâce à Investissement Québec. La collaboration entre Investissement Québec et les intermédiaires financiers nous a permis de placer ces sommes. Puis après ça le programme a été changé au niveau fédéral, et on est passés à un programme où il fallait investir plusieurs millions de dollars pendant une très, très, très longue période sous forme de capital de risque, et puis ça n'a jamais fonctionné, donc le programme a été ouvert puis fermé tout de suite. Donc, on est vraiment, au Québec, les spécialistes du programme Immigrants investisseurs au Canada. Et d'ailleurs ça existe depuis 1986 encore, sans jamais avoir eu 1 $ qui a été perdu par un investisseur, jamais.

M. Fontecilla : Quel est le taux de rétention, déjà, de ce programme-là?

M. Abikzer (Patrick) : Très difficile à dire. Il y en a qui disent 15 %, d'autres qui disent 30 %. Ça dépend comment vous calculez le taux de rétention. Encore une fois, très difficile d'avoir un taux de rétention lorsqu'on n'offre pas aux gens de venir.

M. Fontecilla : Mais c'est plutôt bas.

M. Abikzer (Patrick) : Ah! oui, définitivement.

M. Fontecilla : Parfait, parfait. Il y en a qui disent que c'est un programme qui vise à acheter la résidence canadienne, la résidence permanente, et à aller s'installer ailleurs au Canada, qu'ils ont très peu d'intérêt pour s'installer au Québec. Qu'est-ce que vous répondez à...

M. Abikzer (Patrick) : Oui, oui, oui, je comprends ce que vous voulez dire, mais c'est encore la même chose, d'accord, on revient toujours au même point, O.K.? La personne qui arrive obtient une résidence permanente canadienne, il peut aller où il veut, pas besoin... il n'est pas obligé de venir au Québec. Des fois ils ne viennent pas au Québec parce que, d'abord, ça a pris trop de temps, leurs plans ont changé. Donc, il y en a une partie qui ne viennent même pas au Canada. Ceux qui viennent au Canada, ils vont peut-être aller dans d'autres provinces, oui, mais parce qu'on ne leur a jamais donné la chance non plus de venir ici et de pouvoir... de voir comment fonctionne le Québec...

La Présidente (Mme Chassé) : Il reste moins de 30 secondes.

M. Abikzer (Patrick) : ...de leur donner la chance de venir apprécier qu'est-ce que c'est que de vivre et de faire des affaires au Québec. Donc, ça pourrait être intéressant, encore une fois, de leur permettre de venir, après l'émission de leur CSQ, passer quelques années ici.

La Présidente (Mme Chassé) : Très bien, merci. On est maintenant rendus au bloc d'échange avec le troisième groupe d'opposition. Mme la députée de Gaspé, la parole est à vous pour un bloc de 2 min 30 s.

Mme Perry Mélançon : Merci, Mme la Présidente. Donc, il y a déjà plusieurs questions qui ont été posées, je ne m'éterniserai peut-être pas sur les délais, et tout ça, comme on l'a entendu. On a parlé beaucoup de chiffres, c'est normal, on est dans les impacts positifs financiers, qu'est-ce que ça apporte au Québec.

Moi, j'ai une préoccupation, je vous dirais, très régionaliste. J'ai à coeur le développement régional et j'aimerais savoir si vous avez des données par rapport à ces 6 000 entreprises et plus que vous avez pu faire bénéficier des projets d'affaires et tout. Est-ce qu'on sait si ça a un impact sur les régions puis qu'est-ce qu'on peut faire pour améliorer?

M. Labrie (Yanick) : Il y a des données qui existent d'Investissement Québec. On a fait le choix d'avoir un portrait plus global, agrégé à l'ensemble du Québec, mais c'est indéniable que le programme bénéficie également aux régions. Il y a un processus aussi de sélection des PME qui est fonction de la localisation. Évidemment, l'un des critères est de regarder si le projet d'affaires est viable, est-ce que ça justifie, justement, l'investissement d'Investissement Québec.

M. Abikzer (Patrick) : Mais la majorité... excuse-moi.

M. Labrie (Yanick) : Oui.

M. Abikzer (Patrick) : La majorité des subventions est donnée en région. C'est ça, la beauté du programme Immigrants investisseurs. Si c'est ça, la réponse que vous voulez, oui, les régions sont gâtées au niveau de ce programme, définitivement.

Mme Perry Mélançon : O.K. Oui, bien, ces subventions, c'est sûr, pour nous, c'est important, mais aussi les gens, parce que ça, c'est le gros nerf de la guerre, là. Donc, quand vous parlez de gens qui sont en train de faire des demandes pour venir s'établir, bien, j'aurais été curieuse de savoir s'il y en a énormément qui visent d'autres endroits que les grands centres, parce que c'est sûr que, quand on enrichit les grands centres avec des investissements comme ça, bien, c'est nos régions qui se dépeuplent. Donc, c'est ma seule crainte, et puis je voulais vous entendre là-dessus.

M. Abikzer (Patrick) : Oui, vous avez raison, mais n'oublions pas que ce sont des immigrants investisseurs. Un immigrant investisseur est un nomade, il a des affaires un peu partout dans le monde. Donc, souvent, il peut investir dans une région, mais il ne va pas gérer l'affaire en région, ça, c'est clair, contrairement aux immigrants entrepreneurs, qui vont justement faire ça. Et, voyez-vous, la difficulté que nous avons de les attirer depuis bien longtemps, donc...

La Présidente (Mme Chassé) : Il reste 30 secondes.

M. Abikzer (Patrick) : Un immigrant investisseur est vraiment, donc, un immigrant qui gère ses affaires au niveau global.

Mme Perry Mélançon : O.K. Bien, ça fait le tour de mes questions, mais, comme on vous a, vous avez parlé des retombées que ça a pour la main-d'oeuvre puis aussi les technologies, donc j'aimerais vous entendre à ce niveau-là, parce que ça aussi, d'avoir des investissements au niveau technologique en région, on sait qu'on n'a pas besoin d'être sur place, comme vous dites, c'est des nomades et tout, donc...

La Présidente (Mme Chassé) : En terminant.

Mme Perry Mélançon : Oui, merci, MarieChantal.

La Présidente (Mme Chassé) : Ça s'en vient, on va l'avoir, deuxième réchauffement. Ça termine l'échange avec vous. Je vous remercie pour votre contribution.

Je suspends les travaux momentanément pour permettre au prochain groupe de prendre place.

(Suspension de la séance à 15 h 49)

(Reprise à 15 h 52)

La Présidente (Mme Chassé) : À l'ordre, s'il vous plaît! Je souhaite maintenant la bienvenue aux représentants d'Echelon Gestion de patrimoine. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé — à une minute de la fin, je vous ferai signe — et après quoi nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite tout d'abord à vous présenter puis à débuter. Allez-y.

Partenaires en gestion de patrimoine Echelon

M. Tessier (Samuel) : Bonjour. Mon nom est Samuel Tessier, je représente Echelon Gestion de patrimoine. Également, je suis consultant en immigration au niveau fédéral et au Québec.

M. Côté (Alex) : Moi, c'est Alex Côté, consultant en gestion de patrimoine international, et je suis aussi consultant en immigration régi au fédéral et provincial ici, au Québec.

La Présidente (Mme Chassé) : Allez-y. Merci.

M. Côté (Alex) : Excellent. Chers députés, respectés membres de la commission parlementaire, confrères et consoeurs, merci pour votre présence et attention cet après-midi dans le cadre de cette audition de la planification de l'immigration au Québec pour la période 2020 à 2022.

Aujourd'hui, nous sommes présents devant vous afin de promouvoir les mérites et accomplissements du Programme des immigrants investisseurs du Québec. L'objectif de notre présentation aujourd'hui est d'encourager l'élimination du seuil de placement, qui est présentement fixé à 800 par année, illustrer les retombées économiques du programme pour le gouvernement du Québec et les PME québécoises et aussi inciter le gouvernement à poursuivre avec les périodes de réception de demandes de sélection permanente pour la période 2020 à 2022 pour le programme investisseurs.

Nous représentons l'intermédiaire financier Partenaires en gestion de patrimoine Echelon. Echelon agit à titre de courtier en placement, a des bureaux de Vancouver jusqu'à Montréal, donc c'est un 10 bureaux total, et nous avons présentement 5,8 milliards de dollars d'actifs sous gestion. Nous sommes nouvellement sur la liste des courtiers et des sociétés fiducies autorisées depuis 2016. Et d'ailleurs Echelon s'est conformé à l'article 39 et l'article 117, selon le Règlement de l'immigration au Québec. Ceci veut donc dire que nous avons maintenant une société régie aussi par l'OCRCVM en vigueur sur le sol du Québec, avec des membres du comité exécutif au Québec.

Pour votre information aussi, moi-même et Samuel, comme qu'on a mentionné, nous sommes aussi des consultants en immigration agréés au niveau fédéral et à la province, donc nous avons la chance de nous entretenir beaucoup avec les candidats investisseurs. Et la société Echelon a comme objectif d'accueillir les gens d'affaires de catégorie investisseurs afin d'accompagner ces gens-là dans le déploiement de leur capital à l'intérieur du Québec et d'aussi les guider dans leur nouvelle géographie d'adoption, qui est le Québec.

M. Tessier (Samuel) : Alors, historiquement, le Québec... le programme investisseurs a permis au Québec d'être un pionnier et un modèle en termes d'immigration d'affaires. Ce programme a été extrêmement porteur pour l'économie québécoise pour différentes raisons que nous allons élaborer, là, pendant l'exposé. Alors, notamment, en fait, on va commencer avec les bénéfices économiques liés aux PME au Québec. Donc, en fait, là, il y a plusieurs chefs d'entreprises qui ont été sondés, qui ont reçu la subvention, qui ont fait des demandes de subvention, et environ 91 % des dirigeants d'entreprise interrogés affirment que l'immigration par investissement devrait être favorisée pour injecter davantage de capitaux étrangers dans l'économie du Québec. De plus, le programme permet au gouvernement du Québec d'obtenir des fonds substantiels pour financer des programmes sans hausser le fardeau fiscal sur les contribuables ni réduire l'assiette de services.

Alors, le programme Immigrants investisseurs est une formule originale et avantageuse qui permet notamment, là, d'obtenir la subvention d'aide aux entreprises IMIN. Donc, c'est une contribution financière non remboursable offerte aux entreprises d'ici. Les intérêts générés par le placement, donc provenant des immigrants investisseurs, est géré par Investissement Québec et sont attribués à des entreprises. Donc, selon les sommaires cumulés, là, des retombées économiques sur le programme investisseurs de juin 2000 à avril 2019, les retombées économiques, là, pour les PME sont les suivantes, donc, en fait, plus de 6 000 dossiers ont été présentés et autorisés pour une contribution financière non remboursable, c'est un total de 13 milliards de projets qui ont été présentés à Investissement Québec dans le cadre de la subvention IMIN, et en fait, là, les retombées sont plus de 900 millions de montants d'aide autorisés par Investissement Québec sous forme de subventions qui ont été autorisées aux entreprises pour la croissance ou des projets d'expansion et principalement, donc, en région. Donc, la plupart des entreprises peuvent bénéficier de ce produit, qu'elles soient dans n'importe quelle phase de leur développement.

Le programme d'aide aux entreprises, donc, a permis de créer ou de conserver plus de 43 000 emplois, selon les déclarations des entreprises, et dans toutes les régions du Québec. Puisque nous sommes un intermédiaire financier accrédité par Investissement Québec, nous octroyons les recommandations vers les PME du Québec. Les seuils de placement imposés par le gouvernement nous inquiètent sérieusement, puisque les décisions du ministère de l'Immigration sortent au compte-gouttes au niveau du traitement des dossiers d'investisseurs, étant donné les seuils de placement en place. Nous parlons d'environ 57 % de baisse par rapport à l'année précédente et une augmentation des temps d'attente, là, qui est pratiquement le double au niveau des traitements des certificats de sélection. Nous croyons donc que l'impact qu'il y aura sur le programme est un ralentissement des subventions octroyées à des projets porteurs au Québec, et donc les volumes que nous recevons de demandes pour ces subventions sont extrêmement élevés par rapport aux subventions disponibles.

Donc, en premier temps, le ministre des Finances et le gouvernement du Québec a comme objectif d'emprunter au plus bas coût possible sa dette à long terme. Donc, le bénéfice pour le gouvernement est aujourd'hui de pouvoir emprunter des sommes, environ 1 milliard par année, à un taux de 0 %, qui représente environ, là, entre 5 % et 6 % de la dette annuelle du Québec. Donc, cette dette, en fait, là, depuis le début du programme en 2000 sous la forme actuelle, a permis de lever un peu plus de 14 milliards de dettes à 0 %, et donc qui ont toujours représenté, là, 5 % à 6 % de la dette à long terme du Québec. Alors, le gouvernement épargne plusieurs dizaines de millions de dollars en paiement d'intérêts à chaque année par la diversification de la dette via le programme investisseurs. Également, en fait, il y a des frais exigibles qui sont générés par le programme. Donc, aujourd'hui, un investisseur paie 15 496 $, là, pour le traitement de son dossier, et donc, évidemment, ce montant-là est récupéré 1 900 fois à chaque année.

Également, il y a un programme d'aide à l'intégration des nouveaux immigrants, qui s'appelle le programme PRIIME, qui est en forte partie, là, financé par le programme investisseurs, qui permet l'insertion et le soutien, là, à l'insertion des nouveaux arrivants dans d'autres programmes. D'ailleurs, il y a une étude qui a été faite par l'Institut du Québec, un organisme de réflexion qui réunit HEC Montréal, le Conference Board du Canada, qui a rendu publique il y a quelques semaines une étude par rapport aux seuils d'immigration nommée Analyse des incidences démographiques et économiques, l'étude qui avait comme objectif d'établir des seuils d'immigration optimale pour le Québec. Il va sans dire qu'une augmentation du nombre d'immigrants accroît le PIB de la province. Mais l'étude établit que le montant optimal, là, en fait, n'est pas clair pour une nation, alors l'Institut du Québec estime qu'il n'existe pas de seuil optimal de l'immigration.

Les résultats de l'analyse, surtout ceux au niveau du PIB par habitant, indiquent que le nombre actuel de nouveaux immigrants qui devraient être admis à chaque année devrait être établi en fonction de notre capacité à les intégrer sur le marché du travail. La recommandation qui en découle, donc, du rapport, est un accroissement des seuils d'immigration. Toutefois, cette intégration devrait être tenue en compte. Donc, dans ce contexte, nous recommandons aujourd'hui de ne pas imposer de seuil d'immigration sur le nombre de placements effectués par les immigrants investisseurs et ainsi utiliser un maximum de fonds générés par ce programme pour assurer notamment l'intégration en emploi des nouveaux arrivants dans la société et également la francisation des personnes qui arrivent sur le territoire du Québec.

Tel qu'indiqué dans cette analyse, le nombre optimal de nouveaux immigrants que devrait accueillir le Québec annuellement devrait être établi selon notre capacité, notre volonté à les intégrer sur le marché du travail. Et donc les fonds générés par le programme PRIIME par le biais du programme investisseurs sont une source importante de financement aux différents programmes d'intégration qui devraient donc être arrimés afin d'optimiser notre système d'immigration et éviter de faire payer la facture de l'intégration aux contribuables québécois.

• (16 heures) •

M. Côté (Alex) : Donc, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, le but de nos représentations n'était pas seulement d'illustrer les bénéfices économiques pour le Québec, mais aussi de sensibiliser le gouvernement et encourager de poursuivre pour les périodes de réception de demandes entre 2020 et 2022. Et ce qui nous inquiète en ce moment, c'est qu'il pourrait potentiellement y avoir un moratoire en vue étant donné l'inventaire de dossiers qui est chez le MIDI en ce moment et le seuil de placement qui a été mis en place.

Et en fait l'impact d'un moratoire, qu'est-ce qu'on voit? Pour les PME du Québec, on parle de 42 millions de dollars... pertes, environ, de 42 millions de dollars annuellement d'aide autorisée par IQ, Immigrants investisseurs, donc les contributions financières non remboursables qui sont données à des PME, et donc on peut estimer environ 350 PME impactées en 2019 seulement, avec une majorité des récipiendaires ou des gens qui reçoivent ces subventions-là qui sont dans les régions du Québec. Évidemment, on verrait une décroissance dans le fonds réservé PRIIME pour l'intégration et la perte des frais exigibles pour les dossiers, qui sont environ de 30 millions de dollars par année, qui sont générés par le MIDI, le ministère de l'Immigration.

Donc, faute de temps, chers membres de la commission parlementaire, nous aimerions aussi, dans un futur proche, adresser nos propositions afin d'améliorer le programme pour les requérants et les requérantes investisseurs. Le but de ceci serait de rester compétitif sur le marché mondial et de continuer à attirer les meilleurs candidats dans notre province.

Le Président (M. Lévesque, Chauveau) : Il vous reste une minute, M. Côté.

M. Côté (Alex) : Oui, merci. Donc, je saute tout de suite dans les conclusions. Nous sommes d'avis que le Québec peut continuer à agir à titre de pionnier dans un modèle en termes d'immigration d'affaires. La prospérité que le programme apporte économiquement se marie parfaitement avec le gouvernement, les PME et ses contribuables.

Donc, afin de poursuivre dans cette lancée, nos recommandations sont les suivantes : ne pas imposer un seuil de placement pour les immigrants investisseurs — ça freine, en fait, la limite d'accès de capital pour les PME au Québec, notamment dans les régions, qui entraîne des délais pour la réalisation des projets porteurs dans nos régions; il est possible d'atteindre un seuil de nombre de personnes sélectionnées par le Québec, plan d'immigration 2019, sans pour autant impacter les montants autorisés par IQ. Donc, on propose de revoir, en fait, la répartition des immigrants permanents dans la catégorie économique au Québec...

Le Président (M. Lévesque, Chauveau) : En conclusion.

M. Côté (Alex) : Et voilà, c'est tout. On est prêts pour vos questions.

Le Président (M. Lévesque, Chauveau) : Merci beaucoup, M. Côté, M. Tessier, pour votre présentation. Maintenant, nous allons procéder à la période d'échange avec le gouvernement. La parole est à M. le ministre.

M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. M. Tessier, M. Côté, bonjour, bienvenue à la Commission des relations avec les citoyens. Merci pour la présentation de votre mémoire.

Tout à l'heure, vous disiez : Avec les immigrants investisseurs, c'est de l'injection de capitaux étrangers. On a vu tout à l'heure, avec le groupe qui vous a précédés, que, dans le fond, la majorité du 1,2 million qui est demandé ou préalablement le 800 000 $ qui était demandé pour le programme Immigrants investisseurs, bien, en fait, c'est un flux monétaire qui est généré par des institutions financières canadiennes ou québécoises. Donc, il n'y a pas d'argent qui vient de l'étranger. Principalement, c'est principalement un 300 000 $, un 350 000 $ qui est donné aux intermédiaires financiers, et là on se finance auprès des institutions financières québécoises, c'est bien ça? O.K. Quand vous dites, à ce moment-là, qu'il y a des investissements étrangers, ce n'est pas vraiment le cas.

M. Tessier (Samuel) : Bien, donc, en fait, je répondrais à votre position de la façon suivante, là, il y a deux façons de voir la chose, en fait. On attire des familles fortunées, des acteurs économiques dans leur pays, qui vont, dans un premier temps, faire leur injection soit en déposant le 1,2 million en capitaux propres, donc certains le font, mais la plupart des gens vont aller vers les facilités bancaires qui sont offertes par les intermédiaires financiers. Donc, en effet, l'argent nouveau qui y rentre, là, c'est souvent le montant de 350 000 $, mais il ne faut pas oublier que par la suite ces familles-là, c'est des familles qui ont été auditées par le gouvernement du Québec, et qui ont établi une valeur nette importante, et vont s'établir au Québec. Donc, du coup, l'impact économique va se faire aussi, là, par la suite de leur établissement au Québec dans le cadre de leur installation familiale, là, dans la province.

M. Jolin-Barrette : Mais, quand on regarde les statistiques au niveau de l'établissement, là, au Québec, là, le taux de présence, il est très faible, il est de moins de 20 %, puis surtout il est dans la région métropolitaine de Montréal. Lorsqu'on prend Montréal, c'est à peu près 93 % des immigrants investisseurs qui sont à Montréal. Si on rajoute Laval et la Montérégie, on arrive à 97 %. Alors, ça reste concentré à Montréal, ce n'est pas en région, là.

M. Tessier (Samuel) : En effet. Les subventions sont déployées à la hauteur de 88 % en région, cependant les investisseurs eux-mêmes tendent à s'établir dans les capitales, en effet.

M. Jolin-Barrette : Revenons, là, sur les subventions. J'aimerais ça voir votre vision, parce que, dans le fond, les intermédiaires financiers, eux, principalement, ils vont démarcher à l'étranger avec les contingents pour que des immigrants investisseurs appliquent sur le programme, font leurs démarches avec les facilités bancaires, comme vous le dites, chargent un coût, j'imagine, fixe aux immigrants investisseurs. Ils font un forfait complet, j'imagine, pour débourser x milliers de dollars — tantôt, on parlait de 300 000 $ — et par la suite l'intermédiaire financier, en lien avec l'immigrant investisseur, sa relation s'arrête là. Au niveau du programme d'aide, là, pour les entreprises, comment vous expliquez que ce soient les intermédiaires financiers qui décident où va l'argent et quels dossiers sont choisis?

M. Tessier (Samuel) : Moi, bien, en fait, je peux renchérir sur ça, là. En fait, au niveau de la sélection ou de la décision qui est d'octroyer ou non la subvention, c'est fait par Investissement Québec. Donc, à titre d'intermédiaire financier, ce qu'on va faire, c'est une recommandation. Donc, on voit un certain nombre d'entreprises qui sont soit des clients des différentes firmes de courtage ou des différentes banques et qui ont des besoins de capitaux, qui ont des financements qui se font mettre en place, des projets qui vont être lancés, et donc ces gens-là peuvent être admissibles, et donc l'intermédiaire financier va recommander, là, à Investissement Québec l'octroi de la subvention, et ensuite la décision va venir d'Investissement Québec si le projet est porteur dans les créneaux des industries ciblées, là, par Investissement Québec.

M. Jolin-Barrette : O.K. Mais comment un intermédiaire financier voit le dossier? Exemple, là, supposons, moi, j'ai une entreprise, là, à Beloeil, dans mon comté, puis je vais voir mon prêteur x, y, comment est-ce que je suis mis en relation avec l'intermédiaire financier? Parce que, exemple, vous, là, chez Echelon, là, vous n'êtes pas une banque, ce n'est pas vous qui avez 1,2 million par immigrant investisseur, qui le prête à Investissement Québec, j'imagine, là. Je ne veux pas présumer, là, mais j'imagine que vous faites affaire avec une institution financière, une banque à charte ou des assureurs, tout à l'heure. Donc, comment est-ce que le dossier d'un investissement vient à l'intermédiaire financier?

M. Tessier (Samuel) : Bien, il vient de différentes sources, a priori. Il pourrait venir d'une banque. Donc, souvent, en fait, les gens sont mis à l'affût de cette subvention-là ou de la disponibilité des subventions par la banque avec laquelle il travaille, dans un premier temps, ou encore par le biais de la BDC, Investissement Québec ou d'autres bras financiers, là, qui vont les financer ou les encadrer dans le cadre de leur démarche. Donc, souvent, ça vient par des apporteurs d'affaires.

M. Côté (Alex) : Ou sinon c'est des clients existants chez Echelon déjà qui se font gérer leur argent chez nous.

M. Jolin-Barrette : O.K. Donc, il y a une sorte de tutelle de la part de l'investisseur... de l'intermédiaire financier sur l'argent qui est amené... sur les subventions disponibles en fonction du choix de l'intermédiaire financier de financer telle demande, tel projet ou tel autre projet. Dans le fond, Investissement Québec, ultimement, c'est lui qui décide, sauf que l'intermédiaire financier a son mot à dire dans la démarche de subvention qui est non remboursable.

M. Côté (Alex) : ...comparer les dossiers, mais, voilà, on a beaucoup plus de dossiers que de subventions en ce moment, donc on n'est pas capables, en fait, de combler toutes les demandes qu'on a. Voilà.

M. Jolin-Barrette : Parce que tout le monde veut accéder aux subventions rattachées à ce programme-là.

M. Côté (Alex) : Les gens qui sont admissibles, bien sûr.

M. Jolin-Barrette : O.K. Mais au niveau de l'expertise dans les intermédiaires financiers, comment est-ce que les intermédiaires financiers font pour savoir que ce dossier-là mériterait davantage la subvention qu'une autre entreprise qui demande un prêt?

M. Tessier (Samuel) : Bien, il y a certains paramètres, en fait, qui sont mis en place par Investissement Québec et... comme, par exemple, l'exportation de produits au Québec vers l'international. Et donc, quand on voit des dossiers, par exemple, qui vont répondre à ces paramètres-là de façon très crédible, bien, évidemment, c'est des dossiers qu'on va favoriser, qu'on sait qu'ils ont un haut niveau d'acceptation, là, chez Investissement Québec.

M. Jolin-Barrette : O.K. Et, quand vous dites, là, «on a énormément de dossiers par rapport au nombre de subventions», vous diriez c'est quoi, votre proportion?

M. Côté (Alex) : Mais, comme je vous dis, Echelon, ils sont fraîchement sur la liste depuis 2016, donc on n'est pas la Financière Banque Nationale, là, qui a plus de 35 ans d'expérience, là, dans le programme. Mais qu'est-ce que je peux dire, c'est qu'en ce moment c'est presque du 10 pour un, on se fait écrire 10 demandes par mois et on est capables de décaisser peut-être un dossier. Et en fait, quand on le décaisse, c'est parce qu'il faut que ce soient des plus petits montants parce qu'on a des paramètres, on peut seulement financer entre 40 000 $ et 250 000 $. Donc, en ce moment, voilà, c'est la réalité qu'on travaille avec.

• (16 h 10) •

M. Tessier (Samuel) : Vu, en fait, la réalité du temps de traitement des investisseurs, actuellement, avec le seuil notamment, là, le seuil de placement qui a été mis en place, recevoir 250 000 $ de subvention pour un intermédiaire financier, ça peut être une année d'attente. Alors, du coup, comme Alex le disait, en fait, on va les décaisser à mesure qu'ils rentrent, donc les plus petits projets vont être priorisés. Pour ne pas attendre, en fait, une année pour décaisser une subvention de 250 000 $, on préfère décaisser à chaque trimestre des subventions de 50 000 $.

M. Côté (Alex) : En fait, le projet doit être en vigueur, donc c'est important. Si le projet n'est pas en vigueur, bien, on n'est plus admissibles, en fait.

M. Jolin-Barrette : O.K. Est-ce qu'il y a certains intermédiaires financiers qui ont plus de dossiers qui sont acceptés que d'autres?

M. Tessier (Samuel) : C'est une excellente question. Au niveau des investisseurs?

M. Jolin-Barrette : Oui.

M. Tessier (Samuel) : Oui, certainement qu'il y a des gens qui sont plus habilités à présenter des dossiers au MIDI pour avoir des meilleurs taux d'acceptation.

M. Jolin-Barrette : Non, non, mais je veux dire par rapport aux subventions avec Investissement Québec, à votre connaissance.

M. Côté (Alex) : Pas à ma connaissance.

M. Jolin-Barrette : O.K. Je vous remercie. Je sais que j'ai des collègues qui veulent poser des questions, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Chassé) : Oui, M. le député de Maskinongé, la parole est à vous.

M. Allaire : Merci, Mme la Présidente. Je vais faire du pouce...

La Présidente (Mme Chassé) : Bienvenue avec nous.

M. Allaire : ... — oui, merci, c'est gentil — faire du pouce sur la question de mon collègue ministre. En fait, on sait que, bon, la richesse est redistribuée un peu, là, sous forme de subventions pour les entreprises du Québec. On a appris que c'était beaucoup en région aussi. Croyez-vous que le programme est vraiment équitable? C'est-à-dire qu'une entreprise, là, qui génère des bénéfices de 100 000 $, 200 000 $, 300 000 $ par année, par exemple, versus une entreprise où le niveau de risque de l'entreprise, parce qu'elle est en début, début de cycle, là, si on veut, donc dans un risque financier, là, d'investir dans cette entreprise-là... qui est plus élevé, est-ce que vous pensez que c'est équitable, c'est-à-dire que l'entreprise qui génère des bénéfices a autant de chances de recevoir cette fameuse subvention là qu'une entreprise qui est plus à risque?

M. Tessier (Samuel) : Bien, en fait, ce que je peux dire par rapport à ça, c'est qu'aujourd'hui une subvention peut aller jusqu'à 15 % d'un projet en démarrage. Donc, en fait, Investissement Québec a mis ce paramètre-là pour favoriser les entreprises en démarrage pour qu'elles aient de plus grands montants de subventions, là, pour les aider à lancer leurs projets. Mais, en effet, la profitabilité, là, ce n'est pas un critère, aujourd'hui, qui est regardé lors de l'octroi de subventions, donc, voilà.

M. Allaire : Ça ne devient pas un peu — puis je vous pose la question en même temps, là — une façon, là, en développement des affaires, d'attirer des très, très gros dossiers pour les différentes institutions financières, tu sais, de laisser planer une certaine subvention de 200 000 $, 250 000 $, peu importe le niveau de l'investissement que l'entreprise veut faire, là?

M. Tessier (Samuel) : A priori, ça pourrait être le cas. Est-ce que ces projets-là sont plus porteurs pour l'économie du Québec que plusieurs petits projets? Je ne peux pas... en mesure de l'établir, là, aujourd'hui.

M. Allaire : Pensez-vous qu'il y aurait des solutions pour un peu amener une certaine équité à travers l'ensemble des entreprises du Québec? C'est-à-dire qu'une entreprise, une très petite entreprise, une TPE, ou une moyenne, ou une grande entreprise auraient, selon, là... toutes proportions gardées, là, autant de chances une que l'autre d'avoir accès à ces subventions-là?

M. Tessier (Samuel) : Bien, je pense que les intermédiaires financiers sont guidés par les paramètres mis en place par Investissement Québec. Donc, d'une certaine mesure, si les paramètres seraient mis en place dans ce sens, ça favoriserait, en effet, là, l'octroi de subventions à des plus petites entreprises en démarrage ou dans des secteurs plus risqués, là, de l'économie québécoise.

M. Allaire : Merci. Dans un autre ordre d'idées, on comprend bien votre mission, là, quand même, on comprend bien aussi que la baisse du seuil a un impact sur vos revenus, naturellement. Moi, c'est un autre aspect qui me préoccupe, c'est-à-dire comment qu'on fait maintenant pour garder les immigrants investisseurs ici, au Québec? Est-ce que vous avez des solutions à nous proposer à ce niveau-là?

M. Côté (Alex) : Oui, bien sûr. On sait que la rétention... je pense qu'il y a eu un peu de travail qui a été fait par rapport à la rétention des immigrants investisseurs. Je pense qu'il y a encore plus de travail qu'on pourrait faire. On a toutes sortes de recommandations qu'on serait prêts à partager avec le comité s'ils veulent les lire. Mais, voilà, d'inciter les gens à faire d'autres investissements directement dans la région du Québec en faveur de «fast tracks» ou de traiter plus rapidement leur dossier, d'inciter les gens d'investir dans des biens fonciers ou l'immobilier ici directement et... finalement, c'est des choses qui vont concrétiser leur rétention si les gens achètent des maisons ou investissent dans des business via des placements privés. Il y a toutes sortes de recommandations qu'on pourrait faire, qui augmenteraient, en fait, le taux de rétention des immigrants investisseurs. Et aussi on est en faveur aussi, avec les visas temporaires, là, qui avaient été proposés, en fait, tout à l'heure. On le voit en ce moment, les délais de traitement sont excessivement longs, et donc il faut donner la chance aux gens de venir découvrir c'est quoi, le Québec, et c'est quoi, les différentes villes au Québec, et leur donner une chance de venir s'établir directement dans la province.

M. Allaire : Ça va, merci. Je n'ai pas d'autres questions.

La Présidente (Mme Chassé) : Y a-t-il un autre membre du parti formant le gouvernement qui désire intervenir? M. le ministre, allez-y.

M. Jolin-Barrette : Oui. Je reviens, là, sur ce que vous avez dit. Au moment, là, de la subvention, là, du Programme d'immigrants investisseurs, là, vous avez dit «on décaisse», mais c'est Investissement Québec qui décaisse, ce n'est pas l'intermédiaire financier.

M. Côté (Alex) : C'est exact. Ce n'était pas bien dit de ma part. C'est exact.

M. Jolin-Barrette : O.K., parfait. Mais vous avez quand même une recommandation à faire par rapport au dossier. Je vous donne un exemple, là, prenons le cas, là, de votre situation. Vous n'êtes pas une banque, donc vous êtes en relation avec Investissement Québec, qui vient vous voir, qui vous dit : Bon, bien, nous, on a tel, tel nombre de dossiers, est-ce que, dans le cadre de votre contingentement, vous voudriez que ces entreprises-là obtiennent la subvention associée au programme? C'est comme ça que ça fonctionne?

M. Tessier (Samuel) : Ça pourrait, dans certains cas. Ça pourrait venir d'Investissement Québec, ça pourrait venir d'une recommandation de la BDC, qui est en train d'octroyer un financement dans un certain projet d'un entrepreneur au Québec. Donc, ça peut venir de différents endroits. Après ça, on va s'assurer que la documentation correspond bien aux paramètres d'Investissement Québec pour envoyer l'octroi. Aujourd'hui, les subventions se font tellement rares qu'on peut s'assurer de prendre un dossier et, sur les 10 dossiers, là, ce que M. Côté faisait référence, bien, prendre lui qui a les meilleures chances et de présenter celui-là.

M. Jolin-Barrette : Est-ce que les dossiers sont initiés par vous ou par Investissement Québec?

M. Tessier (Samuel) : Alors, il y a toujours un financement dans un dossier, parce que c'est un projet qui est en train d'être lancé, donc, du coup, c'est certain qu'il y a une banque, Investissement Québec ou la BDC qui est derrière le projet pour financer le reste du projet. Donc, nous, c'est une subvention de 10 % qui se veut être de l'équité dans le projet. Alors, il y a de... là, souvent, qui va être mis en place. Donc, il y a des comptables d'impliqués, voilà.

M. Jolin-Barrette : ...que vous dites qu'il ya de l'équité dans le projet. Qui a de l'équité dans le projet?

M. Tessier (Samuel) : Bien, l'entrepreneur lui-même doit mettre de l'équité en premier temps, mais c'est une certaine façon de réduire son risque parce que la subvention va venir à l'entrepreneur, et donc il vient pallier, en fait, l'équité qu'il aurait dû mettre de sa poche a priori ou ne pas réaliser le projet du tout. Donc, il y avait deux options, et là la subvention vient, en fait, renchérir, là, son niveau d'équité dans son projet et peut-être améliorer, en fait, là, ou faciliter le lancement de son projet.

M. Jolin-Barrette : Mais ça veut dire que les institutions financières qui ont accès, par le biais des intermédiaires financiers, à cette subvention-là dans le cadre d'un montage financier d'un prêt, ils vont avoir une possibilité supplémentaire de réussir à concrétiser l'entente, de venir faire le financement dans x institutions financières parce qu'ils ont accès à la subvention, versus une autre institution financière qui, elle, ne participe pas ou qui n'est pas affiliée avec un intermédiaire financier, qui, elle, ne pourra pas offrir cette bonification-là au niveau de la subvention non remboursable. C'est un peu ça, là, la réalité des choses.

M. Tessier (Samuel) : ...tout à fait exact de dire ça que, si une entreprise pouvait prendre un prêt plus risqué qu'ils n'auraient pas fait normalement, mais qu'avec la subvention seraient en mesure d'octroyer ces crédits-là. Ça serait juste de le dire, et c'est justement un des avantages des intermédiaires financiers...

La Présidente (Mme Chassé) : En terminant.

M. Tessier (Samuel) : ...qui ont un siège au Québec de pouvoir bénéficier de ces subventions-là pour leurs clients et leur donner un avantage concurrentiel versus d'autres intermédiaires financiers qui ne seraient pas basés au Québec.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. Ça termine le bloc d'échange avec le parti formant le gouvernement. On est maintenant rendus au bloc d'échange avec l'opposition officielle. M. le député de Nelligan, vous désirez prendre la parole?

M. Derraji : Oui.

La Présidente (Mme Chassé) : Allez-y.

M. Derraji : Merci, Mme la Présidente. Merci pour votre présentation. Première question, c'est toujours par rapport au montage financier. C'est quand même intéressant de voir que vous avez beaucoup de demandes, donc 10 versus une décaissée. Ça veut dire que l'appétit, il est là pour les subventions. Est-ce que c'est ça qu'on peut comprendre?

M. Tessier (Samuel) : C'est de l'argent gratuit non remboursable, donc, en effet, là, l'appétit est important.

M. Derraji : Oui. Est-ce que vous pouvez nous parler brièvement de la nature des projets et de quelles régions ils nous viennent, ces projets?

M. Tessier (Samuel) : Ah! bien, on en a de toutes sortes, là. En fait, est-ce que je pourrais faire une étendue de tous les projets?

M. Derraji : Non, juste brièvement.

M. Tessier (Samuel) : Je peux vous dire que la majorité viennent de régions. En fait, on a très peu de projets qui viennent de la région métropolitaine, et la raison est simple, il y a des secteurs d'activité comme le manufacturier qui va être mis de l'avant par Investissement Québec, et donc les projets manufacturiers au Québec sont souvent en région, loin de la région métropolitaine, et donc, voilà, donc les demandes viennent principalement de régions.

M. Derraji : Donc, est-ce que c'est juste, ce que je dis que le programme Immigrants investisseurs aide pas mal les régions, aide pas mal le manufacturier dans les régions et améliore la rétention des employés en région et, par conséquent, la pérennité de nos entreprises?

M. Tessier (Samuel) : Tout à fait, c'est exact.

M. Derraji : O.K., merci. Deuxième point, c'est par rapport... Je vais vous reposer la même question, hein — parce qu'on est là, justement, pour comprendre aussi vos pratiques — la même question de j'ai posée à vos collègues ou vos concurrents, vous pouvez l'utiliser comme vous voulez, les pratiques d'éthique. Vous opérez dans pas mal de pays, et comment vous vous assurez d'avoir des standards de qualité au sein de votre organisation? Et c'est quoi, ces standards de qualité, s'il vous plaît?

• (16 h 20) •

M. Côté (Alex) : Bien sûr. Bien, en fait, comme mentionné tout à l'heure, on est régi par l'OCRCVM. Donc, en fait, tout ce qui a trait au blanchiment d'argent, ou de l'activité terroriste, ou autres, on a des standards assez... très élevés. Donc, comment qu'on assure de la qualité? Bien, en premier temps, on est un plus petit joueur sur la liste, donc on n'a pas un contingent aussi grand que des grandes institutions financières. Donc, je pourrais dire qu'on prend le temps de rencontrer chacun des candidats qu'on va leur donner un contingent. Étant donné aussi qu'on est consultants en immigration accrédités au Québec, dans certains cas, on peut représenter ces clients-là s'ils n'ont pas personne pour les représenter. Et je pourrais dire qu'on fait la juricomptabilité complète du candidat investisseur, et on passe par tous les documents qu'on est capables de collecter, et ça, c'est pour les contingents. Bien sûr, on opère aussi dans des marchés où les candidats parlent le français de niveau intermédiaire B2, donc on a certains candidats, en fait, du Maghreb ou de l'Afrique de l'Ouest, et on va se déplacer directement avec des agents qui vont être sur place, et on s'assure de... tout est en place. Donc, on fait la juricomptabilité complète des revenus de ces gens-là, leurs avoirs et autres.

M. Derraji : Oui. Même question encore : Si demain je vous dis que le gouvernement veut changer la mission de ce programme Immigrants investisseurs en regardant, genre, de le faire à l'interne... donc, je pense toujours à Investissement Québec, parce qu'il est sur la table d'Investissement Québec, donc, du coup, Investissement Québec, avec l'appétit qu'ils ont au niveau de l'international, voit une opportunité monétaire, il y a de l'argent à aller chercher, surtout gratuitement, parce qu'on peut faire ce qu'on veut avec les intérêts générés par ce programme, et je vous dis, demain : Le gouvernement va appuyer cette initiative de ramener et rapatrier ce programme à l'intérieur d'Investissement Québec, ce serait quoi, votre réaction?

M. Tessier (Samuel) : Bien, en fait, moi, je serais surpris de voir le fonctionnement, parce que ça demande beaucoup de promotion, là. Moi et Alex, on est relativement jeunes, mais ça fait sept ans qu'on voyage aux quatre coins du monde pour rencontrer des investisseurs, et dans ce contexte-là, en fait, les investisseurs ne sont pas en mesure de présenter ou mettre un dossier en place seuls, alors doivent avoir une représentation légale par un avocat ou un consultant en immigration qui va les aider à mettre en place leur dossier. Et il y a toute une promotion du programme qui est derrière ça. Donc, aujourd'hui, les intermédiaires financiers agissent comme promoteurs, si on peut dire, du projet ou vont promouvoir le programme auprès d'intervenants légaux, que ce soient des avocats ou des consultants en immigration aux quatre coins du monde. Et cette promotion-là, en fait, je pense, qui est véhiculée coûte cher, demande des gens compétents, là, pour faire les représentations, les conférences dans des hôtels aux quatre coins du monde. Et cette portion-là, en fait, là, qui revient aux intermédiaires financiers aujourd'hui, je pense que ce serait difficile la faire d'une façon aussi vigoureuse, disons, là, avec des employés d'État.

M. Derraji : Dernière question, parce que je sais que ma collègue a une autre question : Est-ce que les entreprises à qui vous octroyez une subvention sont au courant de la provenance de la subvention?

M. Côté (Alex) : Bien sûr. En fait, on le promeut et on leur dit exactement la source des fonds, comment que ça fonctionne, et, voilà, à chaque fois, les gens trouvent que c'est un excellent programme. Il y a beaucoup de gens qui ne savent pas que ça existe ici, au Québec, et les gens sont très reconnaissants, et on commence à collecter, en fait, le plus qu'on peut, des témoignages, en fait, des PME qui en ont bénéficié, et comment qu'ils sont contents de ce programme-là.

M. Derraji : Donc, nos PME en région savent que l'argent vient de l'étranger, d'un investisseur étranger qui a cru dans l'économie québécoise et qui a placé 1,2 million... bien, ça va être 1,2 million, qui a placé 800 000 $ dans l'économie québécoise.

M. Côté (Alex) : Oui, oui. Je prends le temps de leur dire exactement la provenance et comment que ça fonctionne, oui.

M. Derraji : Merci.

M. Côté (Alex) : Je vous en prie.

La Présidente (Mme Chassé) : Très bien. Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme Robitaille : Dites-moi, Mme la Présidente...

La Présidente (Mme Chassé) : 4 min 30 s.

Mme Robitaille : Merci. Messieurs, bonjour. Ceux qui étaient là avant vous nous disaient que la compétition pour, justement, avoir ces investisseurs-là chez nous était féroce. Vous nous le confirmez? C'est difficile d'aller recruter des gens à l'étranger?

M. Côté (Alex) : Tout à fait. On parle de gens... si on dit quelqu'un d'aisé, quelqu'un de fortuné qui a des avoirs en excédent de 1 million de dollars américains, disons, on peut se dire qu'il y a un mouvement ou un flux de gens... environ 50 000 familles ont changé de juridiction, ont changé de géographie d'adoption l'année passée. Et tout le monde, tous les pays ou, dans certains cas, les provinces, se battent, en fait, pour accueillir ces gens-là chez eux.

Mme Robitaille : Et pourquoi on décide... pourquoi on choisit le Québec?

M. Côté (Alex) : Je pourrais vous donner les motivations, ça me ferait grand plaisir. En premier temps, on pourrait dire la sécurité, en fait. Dans certains cas, les candidats vivent dans des géographies d'adoption un peu instables, donc les gens recherchent à mettre ça dans le passé et déménager à une place où ce n'est plus une inquiétude au quotidien. En deuxième temps, il y a l'éducation, hein? L'éducation ici, au Québec, est très attrayante pour différentes raisons, et donc ils veulent épanouir leurs enfants directement ici, au Québec. Et on pourrait dire, dans certains cas, c'est des possibilités commerciales ou des motivations qui sont plus entrepreneuriales. Donc, les gens choisissent le programme investisseurs comme investissement passif parce qu'ils ne veulent pas les contraintes d'un programme d'investissement actif comme le programme entrepreneurs Québec, mais pourraient décider de faire une venture entrepreneuriale en palliant le programme investisseurs.

Mme Robitaille : Mais, par exemple, ils pourraient aller en Ontario, en Colombie-Britannique. Pourquoi ils choisissent le Québec? Parce que la sécurité, ils l'ont là-bas aussi, les bonnes écoles, et tout ça. Pourquoi le Québec?

M. Côté (Alex) : Bien, je pourrais dire que c'est... voilà, je pense que c'est... peut-être, c'est plus pluraliste, dépendamment d'autres provinces. Il y a les gens qui sont attirés par le côté plus européen, le «feel» européen, là, du Québec. Il y a des gens qui aiment la proximité, en fait, de New York et de d'autres... Chicago, d'autres villes qu'ils pourraient avoir des opportunités commerciales avec. Donc, des fois, c'est question de géographie, là.

Mme Robitaille : Je me demandais, je regardais... Vous dites : «Nous avons assuré le service de plus de 100 familles fortunées [venant d']Algérie, [...]Arabie saoudite, Bangladesh, [...]Iran, [...]Maroc, Sénégal», entre autres, beaucoup de Chinois, mais beaucoup d'Africains, en tout cas, francophones, des gens d'Arabie saoudite. Ce qui s'est passé durant les six derniers mois, là, au Québec, cette loi sur la laïcité, la baisse des seuils, les 18 000 dossiers qu'on a mis à la poubelle, est-ce que ça rend votre pitch de vente, si je puis dire, un peu plus difficile?

M. Tessier (Samuel) : Je répondrais en disant que non, en fait. Souvent, dans ces pays, on parle de familles aisées, fortunées, hein, donc les gens qui peuvent être admissibles dans le programme, là, ce n'est pas des propriétaires terriens, des héritiers, donc c'est des gens, des entrepreneurs, des acteurs économiques, et je n'ai pas vu de réticence, là, d'aucun investisseur, Au contraire, en fait, l'instabilité qu'ils voient dans leurs pays est souvent causée par ce manque de pluralisme dans leurs sociétés. Donc, les sociétés sont opaques, sont gérées par... il n'y a pas de séparation entre la politique et la religion et... qui crée beaucoup d'instabilité entre différentes factions dans leur pays. Et donc en voyant la laïcité du Québec, au contraire, ça peut être un encouragement, même, pour certaines familles des pays que vous avez mentionnés, qui ont vu la radicalité, là, qu'est-ce que ça peut donner.

La Présidente (Mme Chassé) : Il reste une minute au bloc d'échange.

Mme Robitaille : C'est bon à savoir. Et donc, évidemment, le facteur... le fait que ce sot francophone, j'imagine que ça joue une différence aussi... ça fait une différence.

M. Côté (Alex) : Bien sûr. Dans certains cas, les candidats ont eu de l'expérience avec le français à un certain moment dans leur vie. Et nous, étant donné les incitatifs, on pourrait dire, positifs des candidats qui parlent le français, on cible vraiment des gens d'affaires qui ont une capacité intermédiaire de parler français. C'est qu'est-ce qu'on sollicite.

M. Tessier (Samuel) : Et d'ailleurs on peut faire un point sur la rétention, là, qui est famélique dans beaucoup de catégories ou de beaucoup de provenances, notamment de la Chine, là, qui domine le programme investisseurs. Cependant, quand on regarde d'autres catégories, si on sépare par pays, en fait, il y a des pays où, par exemple, si on prend les francophones, qui est une mesure qui a été adoptée assez récemment, la rétention est au-dessus de 90 %. Donc, c'est très rare, là, qu'un Marocain francophone va aller s'établir en Ontario. Au contraire, il a choisi le Québec pour le français, et donc, du coup, il va y rester, là, dans la grande majorité des cas.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. Ça termine le bloc d'échange avec l'opposition officielle. On est rendus au deuxième groupe d'opposition. M. le député de Laurier-Dorion, vous avez 2 min 30 s. Allez-y.

M. Fontecilla : Oui, merci. Bonjour. Écoutez, on apprend que le niveau de fiscalité au travail de ces immigrants investisseurs est très faible comparé à l'investissement, bien évidemment. Est-ce que vous avez des évaluations qui nous disent combien... c'est quoi, l'apport fiscal de ces investisseurs au Québec?

M. Tessier (Samuel) : On n'a pas vraiment de données là-dessus, mais il faut prendre en considération que le programme investisseurs, c'est un programme d'investissement passif dans lequel on donne le luxe, si on veut, là, aux gens de faire un investissement passif avec Investissement Québec et ne pas leur mettre une immigration conditionnelle, en fait, à la mise en place d'une entreprise au Québec, par exemple, ou avoir un emploi au Canada ou au Québec. Donc, du coup, évidemment, c'est des gens qui n'ont pas d'obligation commerciale avec le Canada, ce qui rend la statistique, là, très faible au niveau de la fiscalité qui est payée au Canada suivant leur établissement.

M. Fontecilla : O.K. Dites-moi, là, on sait que près du tiers des revenus de placement du programme vont dans les institutions, les intermédiaires, etc., là, ce qui est quand même beaucoup, là, un tiers. Est-ce que vous pensez que cela fragilise ce programme-là aux yeux des décideurs politiques, de l'opinion publique, etc.?

• (16 h 30) •

M. Tessier (Samuel) : Certainement que la position pourra être divisée, maintenant, de voir le coût de monter des dossiers investisseurs aujourd'hui et de se rendre chez ces investisseurs, d'aller une fois, des fois deux fois les rencontrer pour s'assurer d'avoir un bon dossier auprès du ministère. Les chiffres, tantôt, que nos confrères, là, avançaient, en effet, là, il y a environ 100 000 $ sur un dossier qui est disponible, mais à ça s'attachent des dépenses, évidemment, pour faire, justement, le contrôle, le «due diligence», la mise en place d'un dossier conforme, adresser les différentes préoccupations du ministère quand vient le temps de traiter les investisseurs. Tout ça prend du temps et prend de l'argent en termes de déplacements, des hôtels, etc. Donc, mettre un dossier en place, ça a un coût qui peut aller jusqu'à 50 % de cette marge-là, là, et donc...

La Présidente (Mme Chassé) : En conclusion.

M. Tessier (Samuel) : Voilà.

M. Côté (Alex) : Et ça, c'est seulement l'opération. Là, on parle... tout qu'est-ce qui est prospection, promouvoir le programme, se déplacer dans différentes juridictions, et donc il y a plusieurs frais engendrés dans ces voyages-là, si on veut.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci beaucoup. Ça termine le bloc d'échange. Mme la députée de Gaspé, 2 min 30 s, allez-y.

Mme Perry Mélançon : Top chrono. Merci. Bonjour, messieurs, merci de votre présence. J'aimerais qu'on revienne à la base, parce que vous avez dit que vous étiez consultants en immigration, alors j'aimerais qu'on en profite pour connaître votre opinion sur ce que devrait être le seuil d'immigration, dans un monde idéal, dans cette présente planification.

M. Tessier (Samuel) : Excellent. Bien, ça va me faire plaisir d'y répondre. En fait, il y a deux grands Pandore qu'on voit, là, entre l'intégration des travailleurs qualifiés et le programme PRIIME. Donc, il y a un arrimage, là, selon nous, à y avoir entre les fonds qui sont reçus d'investisseurs au niveau du programme d'investissement passif, qui est le programme Immigrants investisseurs, qui vont vers le programme PRIIME, vers une relocalisation, là, en fait, des fonds vers l'intégration des travailleurs qualifiés. Alors, les seuils devraient être établis, en fait, là, entre une répartition entre ces deux programmes, et en fait... ou le mariage entre les deux, en fait, c'est ce qui rend l'immigration optimale, en fait. Donc, les fonds d'un, qui sont très rentables, vont aller financer l'intégration des nouveaux arrivants de l'autre côté ou qui ont besoin de beaucoup plus de fonds pour être intégrés versus quelques investisseurs, là, que leur intégration est beaucoup plus facile. Alors, voilà, donc, le mariage entre les deux, là, ça vient d'une répartition entre ces deux programmes.

Mme Perry Mélançon : O.K. Donc, c'est pour ça que vous priorisez, dans vos recommandations, plutôt d'y aller avec une différente répartition de l'immigration ou des catégories d'immigrants et donc de ne pas y aller avec une hausse des seuils, nécessairement, mais plutôt dans la répartition. Mais, dans ce cas-ci, comment vous voyez la part de l'immigration économique dans le contexte de pénurie de main-d'oeuvre au Québec? Quelle est votre opinion par rapport à ça?

M. Tessier (Samuel) : ...en fait, c'est clé, c'est probablement la seule solution. Donc, à cette base-là, les seuils... Ce serait faux de dire qu'on pense que les seuils devraient être maintenus. Au contraire, les seuils devraient être augmentés, mais augmentés d'une façon proportionnelle entre ces deux programmes pour assurer, là, l'intégration des nouveaux arrivants via le programme PRIIME et également via les subventions, là, qui sont déployées dans les PME.

M. Côté (Alex) : En fait, dans le passé, il n'y avait pas de seuil de placement pour les immigrants investisseurs. C'est de l'argent gratuit que les gens investissent, qu'ils nous donnent gratuitement pour la dette du Québec, entre autres, et à IQ, et donc on ne pense pas qu'on doit mettre de seuil sur ces fonds-là, en fait.

La Présidente (Mme Chassé) : En conclusion.

Mme Perry Mélançon : Bien, donc, c'est ça, pour vous, tout ce qui est la demande de résidence, par exemple, ou de pouvoir s'établir, vous pensez que ça devrait être fait vraiment proportionnellement, malgré qu'on connaît le contexte actuel, là, de la pénurie de main-d'oeuvre.

La Présidente (Mme Chassé) : Ça conclut le bloc d'échange. Merci pour votre présence, M. Côté, M. Tessier, très apprécié.

Je suspends les travaux quelques instants pour permettre au prochain groupe de prendre place.

(Suspension de la séance à 16 h 33)

(Reprise à 16 h 36)

La Présidente (Mme Chassé) : Rebonjour. Je souhaite maintenant la bienvenue au représentant de Stephane Tajick Consulting. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. À une minute de la fin, je vais vous faire signe. Je vous invite à débuter en vous présentant puis à faire votre exposé. Allez-y, merci.

Stephane Tajick Consulting

M. Tajick (Stephane) : Merci. Bonjour à tous. Merci de m'avoir invité à cette commission. Ça fait ma troisième commission ces 10 dernières années. Je ne suis pas un avocat en immigration, je ne suis pas un intermédiaire financier, je suis un des spécialistes internationaux au niveau de l'immigration d'affaires. J'ai fait près de 100 rapports sur l'immigration d'affaires et je me concentre énormément sur la prise de données. Et chaque année on fait la vérification de près de 200 programmes d'immigration d'affaires à travers le monde et on prend beaucoup de facteurs et d'indices sur à peu près 200 villes au niveau de la fiscalité, voir leur compétitivité pour les investisseurs. Alors, on travaille surtout avec les grandes entreprises et, de temps en temps, avec les gouvernements. Je vais vous parler un peu du programme Immigrants investisseurs. Si vous voulez, après vous pouvez me poser des questions sur le programme Immigrants entrepreneurs, et je vais vous aider à le comparer avec les autres programmes qu'il y a à travers le monde.

Là, on va parler d'abord de ce qui est bien. Le programme Immigrants investisseurs du Québec, c'est le programme avec le processus de sélection le plus sécuritaire de tous les programmes à travers le monde. Alors, premièrement, il y a une vérification sur les antécédents criminels, qui n'est déjà pas le cas pour beaucoup de programmes, à travers le monde, d'immigration, mais en plus il fait une vérification sur les fonds des individus en tant que tels. Ça, seulement une poignée de programmes à travers le monde le font pour qualifier leurs appliquants. Ce qui différencie le Québec, en fait, c'est le fait que d'utiliser des intermédiaires financiers, c'est comme une première ligne de défense qui peut rendre des comptes au gouvernement et qui fait qu'il y a un filtre des applications. Ils utilisent leur expertise pour voir s'il y a des choses, des applications qui ne devraient pas être là, et ce qui fait qu'aujourd'hui, c'est le programme le plus sécuritaire. D'ailleurs, le programme américain a commencé à s'en inspirer. Et, moi, quand ça m'arrive à parler avec des pays européens, c'est le premier modèle que je préconise parce que travailler avec... on ne peut pas prendre des comptes en invoquant l'immigration dans un pays du tiers-monde, ou en Europe, ou ailleurs, mais on peut le faire dans son propre pays.

Après, on peut parler des frais d'application, qui sont d'un peu plus de 15 000 $. C'est les frais les plus élevés au monde pour ce type de programme. Le seul programme qui pourrait se comparer, c'est le programme australien, et ça, c'est si l'individu ne parle pas l'anglais et s'il a beaucoup d'enfants qui appliquent avec lui. Après, on va parler des taux de traitement de la demande, qui sont aussi à peu près les plus élevés au monde. Maintenant, il y a le programme américain qui risque de dépasser le programme québécois, c'est parce qu'il reçoit presque 10 fois plus de demandes qu'il émet de visas. Par contre, nous, on n'a pas ce problème au Québec, vu qu'on sélectionne le nombre de dossiers. C'est notre propre décision de sélectionner et admettre moins de dossiers qu'on reçoit au début.

• (16 h 40) •

On peut parler de la rétention aussi. Le Québec, c'est le seul endroit où on se pose la question sur la rétention. Nulle part ailleurs, il n'y a aucune donnée sur la rétention des immigrants investisseurs. J'ai moi-même fait plusieurs rapports sur la rétention des immigrants investisseurs au Québec, mon premier, c'était en 2010. Et déjà qu'on parle de six à huit ans, des fois ça peut être jusqu'à 10 ans, on ne peut pas vraiment être sérieux dans notre débat de rétention. On sait que ce n'est pas très sérieux, on ne peut pas vraiment planifier une vie, vous pouvez l'imaginer vous-mêmes.

Après, au niveau de la méthodologie du calcul de présence, on peut en parler aussi très longtemps, vu qu'il nécessite que chaque personne ait la RAMQ. Pour avoir la RAMQ, il faut être six mois par an au Québec, pour se qualifier à la RAMQ, alors que ce n'est pas un critère pour maintenir son statut de résident permanent au Canada. On peut être résident permanent au Canada quatre à cinq mois par an et préserver son statut de résident permanent. Donc, déjà, on a un petit problème. Si vous posez la question : Pourquoi c'est si important?, si vous faites, disons, 2, 3 millions par an, disons, en Chine, de revenus de votre entreprise, si vous êtes résident fiscal au Canada, au Québec, vous payez 50 % sur vos quelques millions par an que vous faites de revenus étrangers, alors que, si vous étiez en Chine, disons que c'est des revenus sur des dividendes, vous paierez 20 %. Alors, aucun fiscaliste au monde ne conseillerait d'être résident fiscal au Québec ou au Canada si votre source de revenus est à l'étranger, de un.

L'autre point important, c'est que le rapport de présence, le dernier rapport de présence date de 2018, qui fait état de l'année 2017, qui elle-même regarde ceux qui sont arrivés au Québec, les immigrants qui sont arrivés au Québec en 2015. Maintenant, quand vous avez environ sept ans, huit ans que ça prend à un immigrant investisseur de venir, vous vous retrouvez à peu près à 2009, 2008, 2010 de ceux qui ont fait leur demande d'application. Ça veut dire, si demain vous faites... vous mettez une nouvelle politique pour intégrer les immigrants investisseurs pour être sûrs qu'ils soient retenus au Québec, disons, à 99 %, 100 %, ça va vous prendre 10 ans avant de le réaliser. Alors, entre-temps, bon, il peut y avoir deux fois un changement de gouvernement, on ne peut pas savoir. Ça veut dire, peut-être que ça a marché les dernières années, peut-être, les nouvelles batchs d'immigrants investisseurs vont tous rester au Québec. Aujourd'hui, on pense qu'ils ne vont pas le faire. «So», on a un gros «lag» entre ce qu'on veut avoir comme information et la collecte.

Après, on a... Je vais toucher aussi peut-être un peu au niveau de ce qui est, ces dernières années, passé un peu dans les nouvelles au niveau des immigrants investisseurs et le marché immobilier. J'ai fait quelques rapports aussi là-dessus. D'ailleurs, il y a un rapport fédéral qui est sorti cet été qui s'est concentré sur le sujet, ils ont voulu voir si les immigrants investisseurs avaient un impact sur le marché immobilier de Vancouver et Toronto. Et, comme qu'il était prévisible, il n'y a pas un impact important. Il y a beaucoup d'autres facteurs qui ont fait en sorte que les marchés immobiliers dans ces villes-là ont augmenté, et l'impact des immigrants investisseurs était minime.

Alors, je ne sais pas combien de temps il me reste. J'ai voulu être court.

La Présidente (Mme Chassé) : Il reste trois minutes.

M. Tajick (Stephane) : Trois minutes? Je vais parler un petit peu alors, si vous voulez, comment améliorer l'impact du programme Immigrants investisseurs. Alors, il y a énormément de choses qui peuvent être faites. La première chose, c'est quelque chose que j'ai souvent parlé, c'est un programme pour améliorer la rétention, c'est un programme d'accompagnement et pour favoriser l'intégration économique des immigrants investisseurs. C'est la première façon où on peut augmenter l'impact du programme.

Juste pour vous donner une idée, aujourd'hui, un peu, le nerf de l'économie, c'est la main-d'oeuvre, O.K., on cherche à attirer de plus en plus de talents. Maintenant, quand vous ramenez une personne, disons, quelqu'un qui a fini l'université et commence à travailler, s'il est très bon dans son domaine, il excelle, souvent il va décider de développer sa propre entreprise, il développe sa propre entreprise. S'il a du succès, elle grandit, il engage des gens, il devient un entrepreneur. Au fil du temps, s'il continue à avoir du succès, son entreprise grandit, il engage des gérants, il commence à se détacher un peu de la structure quotidienne de l'entreprise et devient un investisseur. Il commence à investir dans d'autres... il achète d'autres entreprises dans d'autres secteurs, etc. Alors, la crème de la crème, un peu, du talent, c'est l'entrepreneur.

L'impact que ces gens peuvent avoir au Québec au niveau... que ce soit pour favoriser l'entrée d'un certain marché pour des entreprises canadiennes, pour des entreprises québécoises, favoriser l'exportation, l'importation ou... l'investissement peut être énorme. C'est quelque chose que le gouvernement précédent a toujours été très ouvert. Malheureusement, ils n'ont jamais réussi à l'appliquer. L'année dernière, ils ont mis en place une commission pour essayer d'améliorer l'intégration et la rétention, et ça passait beaucoup par ce type de programme. Ce n'est pas quelque chose qui, nécessairement, risque de coûter au gouvernement. Je sais que beaucoup des intermédiaires risquent d'être ouverts à ce genre d'engagement.

La Présidente (Mme Chassé) : Il vous reste une minute.

M. Tajick (Stephane) : D'accord. Bien, je peux terminer maintenant, si vous voulez.

La Présidente (Mme Chassé) : Très bien, très bien. Je vous remercie pour votre exposé. Et on va débuter le bloc d'échange en commençant par le parti formant le gouvernement. M. le ministre, allez-y.

M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. M. Tajick, bonjour. Merci de participer aux travaux de la commission. À la page 2 de votre mémoire, vous dites : «...j'ai participé déjà à deux consultations publiques sur l'immigration lors des 10 dernières années. J'ai participé à des conférences privées avec plusieurs gouvernements dont celui du Québec sous la gouverne de l'ex-ministre [de l'Immigration, la députée de Notre-Dame-de-Grâce]. J'ai conseillé le ministère sur la façon d'améliorer ses programmes "entrepreneur et investisseur". J'ai écrit plusieurs rapports sur la façon d'améliorer la rétention des immigrants investisseurs au Québec et j'ai effectué de nombreuses études sur le sujet.» Je me demandais de quelle façon, concrètement, avez-vous travaillé avec le précédent gouvernement lorsque vous dites que vous avez conseillé la députée de Notre-Dame-de-Grâce et précédente ministre de l'Immigration.

M. Tajick (Stephane) : J'ai rencontré le ministère à plusieurs reprises. Une fois, c'était avec Investissement Québec, on a eu une rencontre. On a eu d'autres rencontres avec le ministère pendant qu'il faisait la refonte du programme entrepreneurs. Il y a cinq ans, j'étais un peu de ceux qui avaient conseillé qu'on pouvait augmenter les frais d'application au seuil qu'ils le sont, mais ça venait avec la recommandation de baisser les délais de traitement. Alors, on a augmenté les frais d'application, mais on n'a pas... on a réussi peu à peu à réduire, parce qu'à un moment donné ils étaient à huit, neuf ans, et peu à peu ils ont baissé, au fil des années, pour arriver à six ans. Ça, c'était une des façons.

Au niveau du programme entrepreneurs, j'ai conseillé... je ne peux pas vous dire exactement, mais c'était toujours de construire une structure où on utilise le secteur privé pour faire son «bidding», si vous voulez, excusez-moi mon anglicisme. Et premièrement, si ça prend six ans pour un programme entrepreneurs, si quelqu'un vous remet un plan d'affaires et vous lui dites : Parfait, reviens dans six ans, après un an et demi, le plan d'affaires est à la poubelle, il ne vaut plus rien.

M. Jolin-Barrette : Qu'est-ce que vous voulez dire quand vous dites «par le billing»? Par la facturation?

M. Tajick (Stephane) : Non, non, non, «bidding».

M. Jolin-Barrette : Ah! «bidding», O.K., la soumission. O.K.

M. Tajick (Stephane) : Et bref, au niveau des entrepreneurs, on n'a pas besoin de demander le plan d'affaires dans grand nombre des cas, parce qu'ils n'ont pas nécessairement les informations nécessaires pour avoir un plan d'affaires solide. Ça peut être... Je ne dis pas que c'est la règle pour tous, mais en termes généraux, ça serait toujours préférable de les amener avec un programme temporaire. Ils passent six mois, ils bâtissent leur plan d'affaires, ils font leur investissement. On les sélectionne sur leur profil, ça veut dire : Est-ce qu'ils ont la capacité? Est-ce qu'ils ont une expertise? Est-ce qu'ils ont la capacité de réussir? Si oui, ils reçoivent une résidence temporaire, et là on les encadre à pouvoir réaliser leur projet. C'était un peu ça.

M. Jolin-Barrette : Dans votre mémoire, vous dites, là, que le Québec vérifie la licéité des fonds et vous dites : Bien, on ne devrait peut-être pas le faire. Pourquoi on ne devrait pas vérifier la provenance des fonds?

M. Tajick (Stephane) : Attention, si vous avez le passage exactement, je pourrais vous dire, mais ce n'est pas vraiment ma pensée. Ce que je suis en train de dire, c'est que, dans tout autre type d'immigration, on ne le fait pas. Alors, qu'est-ce qui nous faire croire que, disons, quelqu'un qui a des pensées malsaines ou, disons, criminelles, irait payer une fortune, attendre six ans et passer par le processus de sélection le plus rigoureux au monde alors qu'il y a énormément d'autres voies à sa disponibilité? Ce que je dis, c'est : Pas besoin de mettre plein de gardes à l'entrée si toutes les autres portes et les fenêtres sont ouvertes. Ça se limite plus ou moins à ça. Je sais qu'il y a un peu tout ce qu'on... L'importance du processus pour qu'il soit très sécuritaire, ça a plus, je vous dirais, des allures de... pour garder l'intégrité du programme.

M. Jolin-Barrette : Mais quelqu'un qui investit 1,2 million chez Investissement Québec, on doit quand même pouvoir savoir d'où vient l'argent, non?

M. Tajick (Stephane) : Bien sûr, mais, disons, mes parents ont immigré au Québec il y a plus de 25 ans, ils sont venus, ils avaient de l'argent, ils ont acheté une maison, personne n'a vérifié l'origine des fonds.

• (16 h 50) •

M. Jolin-Barrette : Je comprends, mais quand même, dans le type programme que nous avons, c'est des millions de dollars. On comprend qu'avec les intermédiaires financiers la majorité, ce sont des sommes qui proviennent d'institutions financières canadiennes et que c'est un flux monétaire qui est généré à l'interne, mais sur l'ensemble des actifs, dans le fond, le programme est justement fait pour ça, pour dire que, s'il y a des sommes qui viennent de l'étranger, on veut s'assurer qu'elles soient licites.

M. Tajick (Stephane) : Juste pour qu'on soit clairs, je n'ai rien contre ce que vous dites. Je n'ai aucun problème avec ce qui est fait pour vérifier l'origine des fonds.

M. Jolin-Barrette : O.K. Sur la question de l'établissement, là, vous dites : On est un des seuls États à se soucier du fait que... on regarde le taux de présence ou le taux de rétention sur le territoire québécois. Puis vous dites, bon : Pour plusieurs raisons, il y en a qui ne devraient pas être résident fiscal au Canada. C'est un peu dur à réconcilier, le point de vue de dire : Bien, écoutez, on ne devrait pas se soucier de ça, alors que, théoriquement, le programme Immigrants investisseurs, c'est fait en sorte pour que les immigrants investisseurs puissent investir au Québec, puissent y demeurer, puissent immigrer au Québec. Sinon, ça ne va pas à l'encontre de l'objectif du programme s'ils ne sont pas résidents au Québec, s'ils ne font par leur vie ici?

M. Tajick (Stephane) : Il faut voir... Si vous regardez les conditions d'acceptation, vous verrez que le principal critère de sélection, un des principaux critères de sélection, c'est avoir une entreprise dans les deux dernières années, avoir un certain nombre d'employés puis un certain fonds de... une certaine somme de revenus, ce qui nous laisse présager le costume d'un homme d'affaires qui a une entreprise dans son pays d'origine, O.K.? Il n'y a rien qui nous laisse croire que ces gens-là, surtout avec les délais un peu de... qui ne permettent pas vraiment une vraie planification de la vie, que ces gens-là quittent leurs attaches, quittent leur entreprise. Je veux dire, il y a plusieurs types de profils. Je vous dirais, un des grands problèmes qu'on a avec le programme investisseurs, c'est qu'il y en a juste un, alors que, par exemple, si vous regardez comme l'Australie ou d'autres pays, on sait qu'il y a différents profils d'immigrants investisseurs. Il y en a qui vont se relocaliser complètement, il y en a qui vont se faire partiellement, qui vont peut-être se relocaliser complètement tôt ou tard, et il y en a que c'est des touristes qui vont rester quelque temps, il y en a qui vont... Alors, on a un programme qui répond à ces trois profils, alors que, par exemple, l'Australie a trois programmes pour chaque profil.

M. Jolin-Barrette : O.K. Et au niveau du... Je comprends, là, qu'il y a plusieurs profils dans d'autres États, mais l'objectif de l'immigration, généralement, c'est de s'établir dans le pays d'accueil. Et là ce que l'on constate, c'est que les gens ne sont pas présents sur le territoire québécois. Et ce que vous nous dites, c'est de dire, bien, les fiscalistes diraient aux gens : Ne vous établissez pas au Canada de façon à ne pas payer, supposons, l'impôt au Canada.

M. Tajick (Stephane) : Ça, c'est dans le cas où, comme je vous ai dit, des gens ont des revenus à l'étranger. Ça peut être très possible que la personne a appliqué à 55 ans, à 65 ans, il a le droit de venir au Québec, il est retraité et il reste au Québec. Puis il y a différents...

M. Jolin-Barrette : Je comprends, mais ce que vous dites, là, c'est que, lorsqu'on a des revenus de l'étranger, qu'on a une vie active, on ne devrait pas s'établir au Québec pour ne pas se faire imposer au Québec.

M. Tajick (Stephane) : Je vous dis «dans certains cas».

M. Jolin-Barrette : Non, mais je sais, mais l'objectif de l'immigration, c'est de venir enrichir la nouvelle société d'accueil puis pas uniquement de bénéficier des avantages fiscaux attachés à cela, lorsqu'on parle d'immigration en général, là.

M. Tajick (Stephane) : Je n'ai pas dit les avantages fiscaux, ce n'est pas des avantages fiscaux en tant que tels de... ce que j'ai dit. Mais je comprends votre question. Pour la répondre, comme je vous dis, la plupart des États qui ont des programmes d'investisseurs — il y en a plus d'une cinquantaine — se préoccupent principalement de l'impact économique du programme. On sait que les gens d'affaires, souvent c'est très dur de les laisser s'attacher à un seul endroit au long de l'année. Ils risquent de devoir voyager pour leurs affaires, ils ont leur principale affaire, sûrement, qui est dans leur pays d'origine, alors ils font un peu l'amalgame des deux.

Après, le taux de rétention, comme je vous ai dit, j'ai fait beaucoup de rapports sur le taux de présence... ce qu'on publie ici, au Québec, et il n'est pas précis. Le fédéral a fait lui-même sa propre version en 2014, quand il faisait l'évaluation du programme Immigrants investisseurs fédéral, et c'est à peu près le double, parce qu'il utilisait la déclaration d'impôt pour vérifier leur présence, et les taux de présence étaient nettement plus élevés.

M. Jolin-Barrette : Tout à l'heure, dans les groupes qui vous ont précédé, on nous disait : Au niveau des immigrants investisseurs, il y en a qui sont des ambassadeurs de ce programme-là que c'est vraiment des cas de succès majeurs. Vous qui êtes un consultant dans ce domaine-là, est-ce que vous avez en tête quelqu'un qui a appliqué dans le programme, et qui a investi massivement au Québec, et que ça s'en est résulté par des succès publics qui sont connus?

M. Tajick (Stephane) : Je peux vous parler, au niveau du Canada, Li Ka-shing, qui est l'homme le plus riche d'Asie, qui est passé par le programme fédéral il y a très longtemps.

M. Jolin-Barrette : ...du Québec.

M. Tajick (Stephane) : Du Québec... Écoutez, vous parlez à n'importe quel intermédiaire, ils vont vous dire : Moi, je rencontre mes clients, et après, vu que ça prend six ans, ou sept ans, ou huit ans, ou dix ans pour qu'ils reviennent, je ne sais pas ce qui leur arrive. Et ça, c'est un des gros problèmes. On ne peut pas... À cause des délais, on n'est pas capables d'avoir... tu sais, «track», un peu, des résultats, si vous voulez. Ça, c'est un problème massif. Et puis, pour moi, qui est un peu... Pour moi, l'immigration, c'est vraiment relié à l'économie. Quand on fait un investissement chez un immigrant, il faut être capable de voir les résultats, «track» les résultats, et savoir si notre investissement a des retombées ou pas.

M. Jolin-Barrette : Je sais que j'ai des collègues qui veulent poser des questions, Mme la Présidente. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Chassé) : M. le député de Chauveau, vous prenez la parole? Allez-y.

M. Lévesque (Chauveau) : Merci beaucoup, Mme la Présidente. M. Tajick, merci beaucoup pour votre présentation, très intéressant.

Je vais faire un peu de pouce sur ce que le ministre est en train de discuter avec vous. Je constate les délais qui sont longs, avec les présentations qui ont été faites au préalable avant vous, ce que vous nous parlez aujourd'hui, puis toute la comparaison que vous avez avec les autres pays. Ça peut prendre six ans, sept ans, huit ans avant de s'en venir. Vous nous mentionnez également que les avantages fiscaux, peut-être, au Québec ou autres endroits au Canada, ce n'est pas toujours avantageux. J'essaie de comprendre, avec votre expertise qui est internationale, c'est quoi, l'avantage vraiment pour l'investisseur de venir donner... prêter 1,2 million de dollars au Québec dans ce contexte-là où la personne... peu d'entre eux viennent vivre au Québec, viennent s'établir, il y a une rétention difficile, puis en plus la fiscalité est peu avantageuse. Pourquoi une personne décide de s'inscrire dans ce processus-là?

M. Tajick (Stephane) : C'est sûr que la question, peut-être, les intermédiaires financiers peuvent la répondre plus facilement. Mais moi, comme je vous dis, j'ai évalué environ 200 villes à travers le monde, et au Canada j'ai fait Montréal, Toronto, Vancouver, et je peux vous dire que le Québec, c'est vraiment un des endroits les plus formidables à pouvoir vivre. Et ça, moi-même, je l'ai compris en évaluant un peu... en apprenant à connaître le reste du monde, que ça se soit sur énormément de facteurs, et on est très chanceux ici, au Québec : l'équilibre qu'on a entre loisirs et travail est exceptionnel, la qualité de vie est exceptionnelle, la tolérance qu'on a envers les étrangers et les autres aussi est exceptionnelle. Alors, il y a énormément de raisons pourquoi les gens veulent vivre ici.

Maintenant, beaucoup de gens le font pour différentes raisons. Les raisons pourquoi quelqu'un d'Afrique se relocaliserait et... peuvent être différentes de quelqu'un de Chine. C'est des choses qu'on évalue. Souvent, c'est la liberté. Vous savez, quand il y a l'instabilité et le gouvernement perd un peu contrôle de la situation, les premières qui sont prises à... qui sont mal prises, se sont les gens fortunés. S'il n'y a plus l'État pour instaurer la sécurité, c'est ceux qui se font piller, c'est ceux qui se font tuer. Alors, c'est devenu un petit peu... Tout le monde doit avoir une porte de sortie, O.K.? C'est un peu ça que... comment les gens le... disons-le, le «promote», c'est qu'il faut avoir une porte de sortie sécuritaire pour tes enfants, pour ta famille, pour toi-même, etc.

M. Lévesque (Chauveau) : Donc, autrement dit, ce que vous êtes en train de me dire, le Canada et le Québec, c'est une terre d'accueil sécuritaire. Les immigrants investisseurs se paient une porte de sortie dans... Certains viennent, hein... attention, je ne veux pas faire de généralisation, mais certains vont se payer une porte de sortie au cas où que ça aille mal dans leur pays. On le sait que l'instabilité politique, la guerre et tout... donc plusieurs vont se payer une porte de sortie, éventuellement, pour s'en venir, c'est ce que vous me dites.

M. Tajick (Stephane) : Oui, mais je voudrais être très clair, peut-être que je me suis mal exprimé. Je ne veux pas généraliser tous les profils. J'ai peut-être donné cette impression, mais il y a énormément de raisons, on peut en parler pendant des heures, il y a énormément de raisons pourquoi des gens viennent se relocaliser et choisissent le Québec, il y a énormément de raisons pourquoi ils risquent de ne pas rester au Québec. Mais moi, j'ai toujours promu non les forcer à rester, mais leur donner des raisons de rester.

La Présidente (Mme Chassé) : En terminant.

M. Tajick (Stephane) : Et il y a énormément de choses qu'on peut faire sans que ça coûte quoi que ce soit au gouvernement.

• (17 heures) •

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. Ça termine le bloc d'échange avec le parti formant le gouvernement. On est rendus au bloc d'échange avec l'opposition officielle. M. le député de Nelligan, la parole est à vous.

M. Derraji : Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Chassé) : Oui, allez-y pour 10 minutes, oui.

M. Derraji : Merci, Mme la Présidente. Merci pour votre intervention et votre rapport. Je vais commencer par la première question que vous jugez intéressante tout à l'heure, lors de votre réponse à M. le ministre, par rapport au rôle des intermédiaires financiers. Vous avez dit que c'est une exigence qui est unique et ça rassure. Ça rassure des deux côtés : ça nous rassure, nous, en tant que parlementaires, en tant que citoyens, mais en tant aussi que province, mais aussi ça envoie un message à l'extérieur par rapport à la pertinence de notre système par rapport aux immigrants investisseurs.

Si on se compare par rapport aux autres pays, parce qu'on sait que tout le monde veut des immigrants investisseurs, je ne pense pas qu'on a le temps nécessaire pour dire le pourquoi, mais, selon vous, est-ce qu'on doit renforcer ça, on doit le laisser ou on doit penser à le changer?

M. Tajick (Stephane) : Ce n'est pas parce qu'on a le programme le plus rigoureux au monde qu'il faut arrêter ou il faut le rendre moins rigoureux. C'est comme... je vous donnerais un exemple très simple. Le Canada, c'est peut-être le pays le moins raciste au monde, ça ne veut pas dire qu'on ne doit pas faire des choses pour le combattre et pour améliorer encore la situation. Alors, c'est à peu près le même cas. Ce n'est pas parce qu'on est les meilleurs qu'on doit s'asseoir sur ses lauriers et ne pas continuer à améliorer le processus.

M. Derraji : Mais quand vous dites «améliorer», pensez-vous que le système qu'on a maintenant, il faut l'améliorer par rapport au rôle des intermédiaires financiers?

M. Tajick (Stephane) : Je n'ai vraiment pas d'opinion là-dessus.

M. Derraji : O.K. Vous avez dit aussi que le programme, il est le plus complexe, le plus cher, le plus sécuritaire. Mais, malgré ça, on voit que des gens attendent neuf ans avant de venir au Québec. Comment vous voyez ça?

M. Tajick (Stephane) : Disons, je pense, ça a toujours été... on s'est toujours dit : Peut-être, c'est les gens, parce qu'ils sont fortunés, ils sont moins à plaindre. On a favorisé certains... d'autres types d'immigration parce que, bon, on a peut-être cinq places et six personnes, alors on va favoriser ceux qui sont peut-être plus à risque. On a eu la crise des réfugiés qui a fait en sorte que peut-être qu'on a alloué plus de places à une certaine catégorie et, au fur du temps, peut-être que... c'est ça. C'est un choix du gouvernement, en fait.

M. Derraji : Je n'ai vraiment pas compris. Si vous pouvez réexpliquer votre idée, s'il vous plaît.

M. Tajick (Stephane) : Pourquoi les délais de procédure ont tellement augmenté?

M. Derraji : Oui, justement, parce que vous avez dit que le programme, il est le plus complexe... Bien, en fait, je m'inspire de votre analyse. Vous avez dit que vous avez analysé plusieurs programmes au niveau international, et votre constat est le suivant : c'est un programme qui est complexe, cher, sécuritaire aussi. Mais quand même, moi, le constat que j'ai devant moi, les gens attendent pour venir au Québec, donc il y a quelque chose d'intéressant, malgré tout ça.

M. Tajick (Stephane) : Vous voulez dire pourquoi ils attendent autant?

M. Derraji : Oui.

M. Tajick (Stephane) : Bonne question. Vous pourriez le demander aux intermédiaires financiers ou des consultants en immigration, ceux qui font la promotion du programme. Moi, je...

M. Derraji : Vous n'avez pas analysé cette question.

M. Tajick (Stephane) : Pourquoi ils sont prêts à attendre autant d'années?

M. Derraji : Oui.

M. Tajick (Stephane) : C'est la qualité de ce que le Québec offre.

M. Derraji : O.K. Vous avez évoqué un point intéressant par rapport à la rétention et vous avez dit — corrigez-moi si je me trompe — qu'au niveau mondial ce n'est pas un critère que les autres pays ou États prennent en considération, oui ou non?

M. Tajick (Stephane) : Au niveau de l'analyse de la provenance des fonds, vous voulez dire?

M. Derraji : Non, non, non, pas l'analyse des fonds. Vous avez dit que le Québec base son analyse de la... pas la rétention, la présence au niveau de la RAMQ. Et, quand on se compare avec d'autres États, on sait que les capitaux voyagent et les investisseurs voyagent aussi, mais vous pensez que ce n'est pas quelque chose qu'il faut toujours avoir pour garder les investisseurs au Québec?

M. Tajick (Stephane) : Écoutez, chacun peut peut-être avoir sa définition de qu'est-ce que veut dire intégrer ou immigrer. Les conditions qu'ils ont à répondre, c'est être présents sur le territoire deux ans sur cinq ans, deux années sur cinq ans. Ça, c'est l'unique critère qu'ils ont de présence. Tout le reste, ça devient l'opinion des gens, si vous voulez. Du monde qui sont présents au Canada deux ans sur cinq ans, ça, c'est le contrat qu'ils doivent remplir. Si on considère que ça, c'est s'intégrer, c'est une question complètement différente, ça devient peut-être subjectif. Alors, c'est ça, quand quelqu'un est présent deux ans sur cinq ans, il a rempli l'exigence qu'on avait placée en lui.

M. Derraji : L'exigence de rester résident permanent?

M. Tajick (Stephane) : Oui. C'est la seule exigence qu'il a de présence.

M. Derraji : O.K. Mais on s'entend que, s'il veut être citoyen, c'est autre chose.

M. Tajick (Stephane) : Oui, tout à fait.

M. Derraji : O.K. Et, quand vous analysez un peu ce qui se passe ailleurs, vous avez dit tout à l'heure que les États-Unis s'inspirent du même programme, vous avez proposé, hein... probablement j'ai mal entendu, vous avez proposé ou vous avez dit que les États-Unis s'inspirent du même programme, donc le programme québécois, pourquoi?

M. Tajick (Stephane) : Parce que les États-Unis, depuis que le programme fédéral a fermé, ils se sont retrouvés avec énormément de demandes. Les demandes qui venaient pour le Canada, c'est retourné vers le programme américain. Il a connu une croissance énorme, et ils ont commencé un peu à perdre le contrôle, si vous voulez, c'est devenu un peu le far west. Ils ne savent pas combien on doit faire en investissement actif... pas actif, excusez-moi, à risque dans un projet, et, si ce projet réussit et donne les résultats escomptés, il se qualifie pour avoir la résidence permanente. Ce qu'on ne sait pas, c'est combien de ces projets réussissent et ne réussissent pas. Il y a eu beaucoup de scandales, etc. Nous, le programme québécois, ça fait plus de 30 ans qu'il existe. Dans le temps, on a eu des scandales, etc., qui a fait que, peu à peu, on a trouvé une formule qui fonctionnait mieux. Alors, aujourd'hui, le programme américain essaie de trouver des façons, en utilisant le modèle québécois, avec le SEC, de réduire ce genre... avoir plus de supervision sur le programme et ce qui se fait.

M. Derraji : Donc, si je peux comprendre que, malgré, je peux dire, entre guillemets, les irrégularités, parce que ça a été un peu irrégulier, avec le temps, le délai, etc., qu'on peut toujours améliorer ou voir comment avoir... mieux intégrer les immigrants investisseurs dans notre écosystème, vous pensez que le Québec, aujourd'hui, peut dire fièrement, au niveau mondial, qu'on a l'un des meilleurs programmes qui nous permet de ramener les immigrants investisseurs.

M. Tajick (Stephane) : Non. On a un des programmes qui donne... on est très contents de nos résultats au niveau de l'impact économique des investissements, de l'utilisation qu'on fait. Ça ne veut pas dire que l'impact ne peut pas être plus avec l'utilisation des fonds. On a une structure qui est un modèle pour les autres programmes à travers le monde, mais quand un programme d'immigration qui risque de prendre huit ans, maintenant, pour que les gens débarquent, on ne peut pas être fiers de ça.

Après, moi, ce que j'ai toujours promu, c'est trouver des moyens de faire en sorte que les immigrants investisseurs investissent plus au Québec au niveau... disons, qu'on s'aligne un peu avec leurs intérêts. Je vais vous parler un peu d'expériences que j'aie eues avec des immigrants investisseurs, parce que souvent je conseille, quand ils arrivent, quoi faire. J'en ai eu qui sont venus et qui ont dit : Ah! j'aimerais bien peut-être acheter un terrain et construire un immeuble. Moi, ma première approche, c'est : Avant de faire des investissements au Québec, apprend ton environnement, c'est un environnement très différent que d'un pays en voie de développement, ce n'est pas la même vitesse, on ne travaille pas à la même vitesse, il y a beaucoup plus de lois. Il faut vraiment un support autour de lui, il doit avoir plus de connaissances. Et souvent, moi, ce que je lui disais, c'est : À la place de ça, trouve une entreprise au Canada ou au Québec qui fait quelque chose que tu peux exporter dans ton pays, vous comprenez?

• (17 h 10) •

M. Derraji : Mais ça, on s'entend. Moi, ma logique... parce qu'aujourd'hui nous avons devant nous, en tant que députés, un programme. La question qu'on se pose tous : Est-ce que ce programme, on le ferme, on le continue en l'améliorant ou qu'est-ce qu'on fait? Donc, c'est pour ça que je vous pose la question. Aujourd'hui, dans les faits, nous avons quand même un bon programme qui... probablement, il faut l'améliorer, sachant l'impact économique de ce programme, et tout à l'heure ça a été mentionné par... l'impact au niveau des régions, l'impact sur les manufacturiers en région, l'impact sur les entrepreneurs en région qui demandent les subventions qui proviennent de ce programme. Et je rajoute aussi l'intégration des minorités visibles via le financement de quelques heures et quelques mois qui leur permettent d'acquérir une première expérience québécoise. En fait, c'est là où je veux vous ramener.

M. Tajick (Stephane) : Parfait. Maintenant...

M. Derraji : Vous avez quand même une bonne expérience à l'international, c'est juste... comment on peut lire?

M. Tajick (Stephane) : En tant que gouvernement...

La Présidente (Mme Chassé) : Ceci conclut le bloc d'échange avec l'opposition officielle. Et maintenant j'invite le député de Laurier-Dorion à prendre la parole pour le bloc d'échange avec le troisième groupe d'opposition... deuxième groupe d'opposition, pardon. Allez-y. Merci.

M. Fontecilla : Merci. Bonjour, monsieur. Expliquez-moi quelque chose. Vous avez dit tantôt : L'exigence du programme exige une résidence effective deux ans sur cinq ans pour la durée du programme. D'autre part, on sait que, hormis le questionnement s'il faut s'en occuper ou non, la question du taux de rétention, là, il y a beaucoup de ces immigrants investisseurs qui partent très rapidement. Comment concilier ces deux chiffres-là? Est-ce qu'ils partent après deux ans de résidence effective, ou dès qu'ils peuvent, ou ils partent avant? Expliquez-moi, là.

M. Tajick (Stephane) : Ce que je veux être clair, comme j'ai dit, je suis peut-être la personne qui fait le plus de rapports précisément là-dessus, on ne peut pas discuter de la rétention des immigrants investisseurs au Québec, on ne peut pas, on n'a pas les données pour, aussi simple que ça.

M. Fontecilla : Donc, lorsqu'on dit...

M. Tajick (Stephane) : La façon qu'on regarde le problème, la problématique n'est pas adaptée aux immigrants investisseurs, de un. Et, de deux, à cause des délais de traitement, on ne peut pas avoir une image du présent, de... les immigrants qu'on a sélectionnés les deux dernières années, cinq dernières années, sept dernières années, quel va être leur taux de présence. Aujourd'hui, peut-être le taux de présence des immigrants investisseurs est peut-être de 99 %, on ne peut pas le savoir.

M. Fontecilla : O.K. Donc, on ne peut pas savoir si les immigrants investisseurs respectent l'obligation de deux ans sur cinq ans et on ne peut pas savoir si les chiffres du ministère sont corrects.

M. Tajick (Stephane) : Ça, on peut le savoir. Le deux ans sur cinq ans, c'est la même chose pour tous les immigrants, O.K.? Tous ceux qui reçoivent la résidence permanente ont les mêmes critères : deux ans, cinq ans. Alors, on ne va pas mettre les Québécois...

M. Fontecilla : Au pays?

M. Tajick (Stephane) : Oui, au pays. Ça fait qu'on ne va pas mettre les...

M. Fontecilla : Mais on ne sait pas, la province, là.

M. Tajick (Stephane) : Non, mais ça ne veut pas dire qu'ils se déplacent tous les deux mois non plus. En général, les gens sont établis quelque part. Est-ce qu'on peut dire qu'on a un problème de rétention des immigrants investisseurs? Est-ce qu'on peut dire qu'il y a 15 % des immigrants investisseurs?

La Présidente (Mme Chassé) : En conclusion.

M. Tajick (Stephane) : Moi, mon étude, toute ma recherche après toutes ces années, c'est : on ne peut même pas parler d'un chiffre, on ne peut pas parler de chiffres. On peut peut-être penser qu'il y a un problème, mais on n'a pas les chiffres pour pouvoir le démontrer précisément ou pouvoir «track»... voir si nos décisions, nos changements, les politiques qu'on va prendre, qu'on va établir vont avoir un impact dans les prochaines années.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. On est maintenant rendus au bloc d'échange avec le troisième groupe d'opposition. Mme la députée de Gaspé, la parole est à vous.

Mme Perry Mélançon : Merci, Mme la Présidente. Je vais continuer rapidement sur ce que mon collègue a mentionné par rapport à... Bon, vous nous dites qu'en termes de rétention c'est très difficile de se fier à des chiffres puis même qu'on pourrait ne pas en avoir d'ici huit, neuf ans, mais qu'est-ce que vous pensez quand même, par exemple, des mesures comme la francisation? Est-ce que vous êtes en faveur? Parce qu'on n'a peut-être pas le chiffre de rétention, mais on nous disait tout à l'heure qu'il y a un très faible nombre de francophones qui appliquent dans ces programmes-là. Et la francisation, pour nous, est une solution puis un besoin, là, pour l'immigration réussie au Québec. Alors, quand même, est-ce que vous y croyez, à la rétention de ces immigrants investisseurs là?

M. Tajick (Stephane) : Il faut voir aussi le profil. Quelqu'un qui est francophone a plus de portes d'entrée que quelqu'un qui n'est pas francophone. Ça veut dire, si vous êtes francophone, même si vous avez une grosse fortune, peut-être, vous pouvez choisir d'autres programmes pour rentrer au Québec que pour un immigrant investisseur. C'est pour ça que c'est surtout des gens anglophones qui vont appliquer... ou allophones qui vont appliquer pour le programme Immigrants investisseurs.

Mme Perry Mélançon : Mais vous nous dites quand même de prioriser ces... bien, pas de prioriser, mais quand même d'y porter une attention particulière, à ces investisseurs.

M. Tajick (Stephane) : Non, ce n'est pas ça, c'est que, vu que c'est des gens fortunés, ils n'ont pas nécessairement besoin d'intégrer le marché du travail, ça veut dire qu'ils peuvent très bien être intégrés dans la société, si vous habitez à Montréal, par exemple, sans parler beaucoup de français. Maintenant...

Mme Perry Mélançon : Ça m'amène à une autre question, oui, parce que vous dites, justement, que ce n'est pas des gens qui ont besoin de s'établir, mais vous avez, par exemple, bien, dans les objectifs de ce programme-là, il y a... les immigrants investisseurs peuvent potentiellement répondre au problème de succession entrepreneuriale. On parle de gens qui viendraient prendre une entreprise et devenir l'entrepreneur principal.

M. Tajick (Stephane) : Ça, c'est un autre sujet. La succession entrepreneuriale, c'était surtout au niveau des entrepreneurs, et ça devait vraiment être pour les régions parce que...

Mme Perry Mélançon : Et est-ce que ça fonctionne?

M. Tajick (Stephane) : Bien, il n'y a pas de programme à ce niveau-là. C'est quelque chose qui... En 2012, les premiers rapports ont établi qu'il y a une énormément grande demande au Canada pour la succession entrepreneuriale. Et, jusqu'à maintenant, bien qu'il y a eu beaucoup... Moi, j'en ai parlé beaucoup, Board of Canada en a parlé souvent aussi...

Mme Perry Mélançon : ...pas être indiqué comme un avantage au programme, la relève entrepreneuriale. Les immigrants peuvent potentiellement répondre au problème de succession.

M. Tajick (Stephane) : Pas au niveau du programme Immigrants investisseurs, parce qu'en général les immigrants qui viennent du programme investisseurs...

La Présidente (Mme Chassé) : Ça termine le bloc d'échange. Je vous remercie. Merci, M. Tajick, pour votre contribution à la commission.

Je suspends quelques instants pour permettre au prochain groupe de prendre la place. Merci.

(Suspension de la séance à 17 h 16)

(Reprise à 17 h 17)

La Présidente (Mme Chassé) : À l'ordre, s'il vous plaît! Je vais débuter avec M. Samuel Tessier, et je vous souhaite la bienvenue de nouveau, et vous allez vous exprimer maintenant à titre individuel. Je vous rappelle maintenant que vous disposez de cinq minutes pour faire votre exposé, et puis par la suite nous aurons une brève période d'échange. Alors, je vous invite à débuter, allez-y.

MM. Samuel Tessier et Henri Tousignant

M. Tessier (Samuel) : Super, excellent, merci. Rebonjour. Donc, cette présentation-là, en fait, est à titre personnel, à titre de consultant en immigration accrédité au Québec, également à titre d'associé chez Echelon Gestion de patrimoine.

Donc, en fait, je voulais vous parler un petit peu plus, là, en détail de la pratique au quotidien d'un consultant en immigration, puis le type de clients, là, atypiques qu'on voit dans le programme investisseurs, et l'encadrement, en fait, à titre d'intermédiaire financier qu'on offre à ces clients-là fortunés qui veulent déployer du capital, là, au Canada ou au Québec en particulier.

Alors donc, ça fait sept ans, en fait, là, que je fais cette pratique-là, et donc, en fait, qu'est-ce qu'on a pu constater, c'est que ça demande beaucoup de temps monter un dossier, et également il faut se rendre chez les gens, là, pour offrir des services personnalisés haut de gamme, donc, à ces investisseurs fortunés aux quatre coins du monde parce que, comme on le disait tout à l'heure, c'est très compétitif, en fait, là, en termes d'immigration mondiale et, de plus en plus, sur la scène nationale également.

Donc, dans cette pratique-là, en fait, on a la chance de voir plein de sortes d'investisseurs d'un peu partout, des quatre coins du monde, et on a... En fait, j'ai spécialisé ma pratique sur surtout les pays en dehors de la Chine. Donc, on va travailler beaucoup sur les pays francophones et également sur les pays anglophones où les gens ont une bonne propension, là, d'être acceptés dans le cadre du programme.

Alors, pour vous donner un exemple, en fait, là, j'avais en tête un client qu'on a accompagné l'année dernière sur le programme actuel en vigueur, le 1,2 million, et donc c'est un client qui nous a été référé de prime abord par un autre client d'Echelon, c'est un monsieur d'origine du Brésil. Et donc, pour s'établir au Canada, en fait, il a choisi le programme Immigrants investisseurs, comme sa fille était déjà établie au Québec. Et donc, ayant déjà une première fille établie au Québec depuis plusieurs années, il a choisi le Québec, il a participé au programme investisseurs, a déposé son dossier auprès du MIDI, et entre-temps, en fait, comme intermédiaire financier, on l'accompagne dans le déploiement de son capital au Québec.

Alors, pour ce faire, bien, évidemment, comme firme... on est en mesure d'accompagner ces gens-là dans le déploiement de leur capital sur les différentes bourses mondiales, donc d'ouvrir des comptes de courtage au Canada, transférer une partie de leur patrimoine, par exemple, dans son cas, des États-Unis vers le Québec, et donc d'encourager, évidemment, l'industrie du service professionnel et services financiers québécois, et donc attirer des actifs sous gestion au Québec, évidemment, qui créent de l'emploi.

• (17 h 20) •

Parallèlement à ça, bien, ces gens-là ont besoin d'un accompagnement pendant la procédure d'immigration, mais surtout après la procédure d'immigration. Donc, au moment qu'ils obtiennent leur avis de délivrance d'un certificat de sélection, hein, il y a plusieurs choses qui se mettent en place, notamment l'acquisition de propriétés. Et donc, étant une firme dans les marchés financiers, bien, on est en mesure d'encadrer les gens ou de les aider à prendre des bonnes décisions financières, d'établir une planification financière avec eux pour le déploiement de leur capital au Canada et de les encadrer dans les différentes juridictions ou les différentes réglementations provinciales, là, dans les provinces où ils vont investir.

Alors, cet encadrement, je crois qu'il est souhaitable pour les gens, en fait, qu'ils ne soient pas seulement accompagnés auprès de consultants en immigration ou d'un avocat, mais également auprès d'une banque ou d'une institution financière, une firme de courtage qui va les aider à déployer du capital, que ça soit sur les marchés publics ou encore sur des entreprises privées. Mon précédent collègue parlait de la transition au niveau des entreprises au Québec et qui va être un enjeu dans les prochaines années. Bien, ces gens-là, en fait, sont propices... ont du capital à investir, maintenant habitent au Québec et donc sont propices à faire l'acquisition de sociétés.

La personne que je mentionne depuis le début de mon exposé, là, a pu, par le biais de sa deuxième fille, en fait, là, faire l'acquisition d'une société ici, au Québec, dans le cadre de la physiothérapie. Donc, c'est des gens qui sont en mesure de s'établir, s'épanouir, apprendre le français et qui ont une réelle volonté, et c'est ce qu'on promeut, en fait. Aujourd'hui, le système de contingents nous permet de sélectionner de façon rigoureuse des candidats, parce qu'il n'y a pas beaucoup d'allocations pour les non-francophones, et donc, du coup, bien, on s'assure de prendre des gens qui ont une propension et même qui ont déjà fait des démarches, en fait, pour présenter une intention de s'établir au Québec.

Alors, les deux préoccupations que j'aimerais soulever d'une famille atypique de ce profil-là, évidemment, c'est... il a choisi le Québec déjà, donc sa première préoccupation, c'est les délais de traitement. Donc, on a parlé... c'est des gens qui ont déjà leur CSQ, qui attendent déjà depuis plusieurs années. Il reste que le volet fédéral, c'est seulement des... c'est une portion administrative, là, de contrôle de sécurité, contrôle médical, les gens ont déjà fait la démonstration de l'accumulation de leurs avoirs. Cependant, ils vont quand même attendre cinq ans dans le processus pour des formalités administratives, finalement, là, de contrôle médical, contrôle de sécurité qui freinent, en fait, le déploiement de leur capital. Parce que, pour nous, c'est une formalité administrative, c'est quelques formulaires, mais pour eux ça fait toute la différence et ça présente une incertitude...

La Présidente (Mme Chassé) : En conclusion.

M. Tessier (Samuel) : ...dans leur immigration, et donc qui vient ralentir, en fait, le déploiement de leurs capitaux et l'impact économique que ces gens-là vont avoir au Québec. Alors, c'est la plus grande préoccupation de ces gens-là. Et la deuxième réalité, c'est que ces personnes, en fait, n'ont pas nécessairement d'autre alternative aujourd'hui au Québec pour joindre la société québécoise. Donc, a priori, c'est des gens qui ont un certain âge, qui ont eu le temps d'accumuler une fortune, et ils ne vont pas appliquer sur des programmes de travailleurs qualifiés, parce qu'ils n'ont pas l'intention de travailler au Québec...

La Présidente (Mme Chassé) : Je vous remercie, vraiment.

M. Tessier (Samuel) : Merci.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. On va maintenant débuter la période d'échange avec le parti formant le gouvernement. M. le ministre, vous débutez. On a un bloc de cinq minutes.

M. Jolin-Barrette : Merci, Mme la Présidente. Rebonjour, M. Tessier. Vous dites : Ce qui freine le déploiement du capital, c'est principalement les délais de traitement. Et là, vous le dites, à Ottawa il y a un délai de traitement de cinq, six ans. Le précédent gouvernement libéral a laissé s'accumuler des dossiers, créant un inventaire de 19 000 dossiers immigrants investisseurs qui sont présentement à Ottawa. Ça, ça signifie que le Parti libéral a donné des certificats de sélection du Québec, a sélectionné des immigrants investisseurs, mais en ne respectant pas ses seuils d'admission. Dans le fond, ça veut dire qu'ils ont laissé s'accumuler... ils ont sélectionné les immigrants investisseurs, ils ont pris leur argent ou, par le biais d'intermédiaires financiers, pris l'argent puis, comment on pourrait dire, ils ont engrangé, dans le fond, durant des années les demandes, les ont transférées à Ottawa, mais, dans le plan annuel de l'immigration, bien, ils n'avaient pas de place pour ces gens-là, donc le délai s'accumulait, s'accumulait et s'accumulait. Maintenant, on est rendus à 19 000 personnes qui ont un CSQ à Ottawa en lien avec le programme Immigrants investisseurs. Ça fait que ça, c'est le bilan du gouvernement libéral au cours des dernières années.

Vous dites : Ça freine le déploiement de capital. Même si les délais étaient plus courts — tout à l'heure, on a eu des gens qui nous ont dit «ça devrait être à l'intérieur d'un an» — est-ce que vous pensez que les immigrants investisseurs vont véritablement investir au Québec, vont venir s'établir au Québec ou c'est... comme disait la précédente personne avant vous, que c'est une police d'assurance, le fait d'avoir une résidence permanente canadienne?

M. Tessier (Samuel) : Eh bien, en fait, je dirais que d'ordre général, là, en fait, les délais de traitement freinent le capital, parce que ça crée une incertitude dans leur procédure d'immigration. Donc, comme consultants en immigration, on sait, les statistiques d'acceptation au niveau fédéral sont très élevées. Mais il reste que, pour la personne, l'individu, ça reste, évidemment, de l'incertitude qui freine le déploiement de son capital. Donc, sur cette base-là, en fait, c'est là-dessus que je me baserais, là, voilà, pour adresser votre point. Est-ce que ces gens-là vont avoir une meilleure rétention s'ils sont traités plus rapidement dans le terme de la procédure fédérale? Tout à fait. Les plans changent. C'est des gens qui sont fortunés, ils ont une mobilité déjà beaucoup plus importante que la moyenne des citoyens. Et donc, dans ce cadre-là, les laisser attendre six ans, bien, évidemment, des opportunités vont se présenter à eux. L'incertitude que plane devant leur immigration au Canada, malgré qu'ils ont payé, peuvent changer d'idée et décident de partir au Royaume-Uni parce que les délais de traitement sont de 12 mois.

Donc, en fait, tout à fait, ça va freiner le déploiement du capital. Et d'accélérer ça, est-ce que ça va faire une rétention plus élevée au Québec? Bien, potentiellement. Le Québec les a choisis, ils ont choisi le Québec, ils ont confié leurs fonds au gouvernement du Québec. Et en contrepartie ils s'attendent à avoir une carte de résidence dans un délai, là, assez proscrit. Eux, ils ont... tu sais, en fait, ils ont fait ce qui était exigé de leur part, et par la suite c'est seulement une question, là, de délais administratifs.

M. Jolin-Barrette : Vous dites : On voyage partout à travers le monde à la recherche des candidats. Comment ça se fait... Comment ça se déroule à l'étranger lorsque vous recrutez des candidats? Est-ce que vous achetez des dossiers de candidature par le biais de consultants locaux? Est-ce que vous les démarchez vous-même dans les différents pays? Comment ça fonctionne, la vie d'un intermédiaire financier à l'étranger?

M. Tessier (Samuel) : Un peu des deux, en fait, ça se passe un peu des deux. On travaille avec beaucoup de consultants en immigration réglementés canadiens qui sont basés dans les pays, donc souvent d'origine locale, et donc établissent leur pratique dans les pays en question. Et également, en fait, en direct avec des clients, là, qui ont de l'intérêt pour travailler directement avec l'intermédiaire. Donc, on est... je ne dirais pas... je ne peux pas parler pour tous les intermédiaires, mais on est dans une pratique, en fait, où on a intégré, en fait, les consultants en immigration aux gestionnaires de portefeuille pour présenter une pratique holistique, là, au client. Et donc ils travaillent toujours mains dans la main avec notre équipe, là, de A à Z, de la procédure de son immigration jusqu'à l'acquisition de sa maison, l'installation de ses enfants dans des écoles, etc., là, qui va s'ensuivre, là, suivant son immigration.

Donc, au quotidien, en fait, la présentation des programmes est assez simple. Parce que, si on fait le survol des programmes au Québec, il y en a seulement quatre de disponibles, là, sous différents formats. À la fin de la journée, quelqu'un, par exemple, de 55 ans, fortuné qui veut immigrer au Canada, bien, il n'y a pas 25 portes. On pourrait lui présenter le programme entrepreneurs, dans lequel il va devenir gestionnaire activement d'une société au Québec, ce qui n'est pas toujours le cas qu'ils veulent faire. Et, de l'autre côté, il y a le programme d'investissement passif investisseurs. Donc, c'est les deux réelles solutions qui se présentent à lui s'il ne veut pas passer par un programme de DEP pour appliquer sur un programme de travailleur qualifié par la suite...

La Présidente (Mme Chassé) : En conclusion.

M. Tessier (Samuel) : ...qui n'est pas sa réelle intention.

La Présidente (Mme Chassé) : Très bien. Je vous remercie. Ça termine le bloc d'échange avec le parti formant le gouvernement. On est rendus au bloc d'échange avec le parti formant l'opposition officielle. M. le député de Nelligan, vous débutez. Merci.

M. Derraji : Merci, Mme la Présidente. Ma question, c'est par rapport au développement économique régional. Tout à l'heure, ça a été mentionné qu'il y a 10 demandes pour une demande de subvention. Vous avez mentionné dans votre lettre que votre crainte, c'est voir ce passage de 1 400 placements en 2018 passer à 800 placements en 2019. Pensez-vous que nous sommes en train d'envoyer un message négatif à l'économie régionale et aux entrepreneurs qui ont l'habitude d'utiliser ce programme?

M. Tessier (Samuel) : Tout à fait, parce qu'il y a beaucoup d'entrepreneurs qui attendent des subventions. Et force est de leur mentionner qu'en fait on est menotté par les délais de traitement faramineux, donc, tout à fait.

M. Derraji : Et pensez-vous que le gouvernement envoie, encore une fois, un mauvais signal à l'économie régionale qu'on ne les supporte pas assez, vu qu'il y a une demande par rapport à ce programme?

M. Tessier (Samuel) : Tout à fait. Puis je peux parler aussi du point de vue de l'immigrant. En fait, l'immigrant va payer 15 000 $ — 15 496 $, là, exactement — pour le traitement de son dossier, ensuite va se voir sujet de seuils d'immigration qui vont évidemment le faire attendre plusieurs années avant d'obtenir une décision sur sa candidature. Et ensuite on va encore l'envoyer se faire attendre, là, plusieurs années au fédéral pendant presque cinq ans. Donc, moi, je considère que c'est inacceptable. Et pour gérer des clients ou la relation client au quotidien avec ces personnes-là, c'est très difficile d'expliquer à quelqu'un que ça va lui prendre sept ans à devenir canadien dans le contexte actuel, surtout qu'il va investir 1,2 million de dollars, là, auprès du gouvernement.

M. Derraji : Je comprends. Mais, moi, la problématique qui me préoccupe le plus, c'est que ce programme a un impact économique sur les régions. C'est le seul programme de subvention qui peut vraiment venir en aide en utilisant cet argent. Je sais qu'il y a d'autres programmes, mais ce n'est quand même pas négligeable. La demande, elle est là. Vous pouvez être beaucoup plus clair et demander et exiger qu'on revienne au minimum au seuil de placement au lieu de rester à 800 en 2019.

• (17 h 30) •

M. Tessier (Samuel) : Tout à fait, bien, c'est notre demande, et notre présentation précédente, là, en fait, c'était exactement l'objectif. En fait, si on décide de donner 1 900 contingents une année, on devrait s'engager de les traiter dans les 12 mois qui suivent et, à chaque année, comme ça, revenir avec des contingents dans la mesure des capacités opérationnelles du ministère de l'Immigration.

M. Derraji : Bon, je vais être beaucoup plus clair que vous. C'est que votre affirmation aujourd'hui, vous demandez au gouvernement de ne pas limiter ça à 800, de rester à 2 900 parce que ça nuit à l'économie régionale, ça nuit aux entreprises qui demandent des subventions. Est-ce que je l'ai bien...

M. Tessier (Samuel) : C'est notre principal point, en effet, là, de retirer les seuils de traitement mis en place, actuellement.

M. Derraji : Donc, vous appuyez l'affirmation que je viens de dire.

M. Tessier (Samuel) : Tout à fait.

M. Derraji : Merci.

La Présidente (Mme Chassé) : Il reste 30 secondes au bloc.

Mme Robitaille : Oui, écoutez, la rétention... Selon vous — vous avez eu plusieurs clients — qu'est-ce qu'il faudrait faire pour garder ces gens-là chez nous?

M. Tessier (Samuel) : Eh bien, je crois que de travailler avec des intermédiaires financiers, ça les encadre. En fait, ces gens-là ont des besoins financiers, besoins d'investissement, ils doivent être encadrés. On a mis des autorités de marché en place qui régissent ces intermédiaires financiers là, les banques, et donc on devrait les utiliser, en fait, pour guider ces gens-là et s'assurer, là, que, dans leur nouvelle géographie d'adoption, ils sont bien encadrés en termes de développement de capital et passent par les bonnes pratiques, en fait, canadiennes, là, qui...

La Présidente (Mme Chassé) : En conclusion.

M. Tessier (Samuel) : ...sur lesquelles ils cherchent en venant investir et s'établir au Canada.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. Les deux prochains groupes, vous avez 50 secondes. Je débute par M. le député...

M. Fontecilla : Je n'ai pas d'autre question, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. le député de Laurier-Dorion. Mme la députée de Gaspé, un sprint.

Mme Perry Mélançon : Oui, en fait, dans tous les argumentaires qu'on a entendus récemment, là, on parle toujours des exemples d'Australie, Royaume-Uni pour parler des délais de traitement plus courts, mais est-ce qu'on sait réellement si le taux de succès de rétention est vraiment nettement supérieur?

M. Tessier (Samuel) : Bien, je ne pense pas qu'ils ont les mêmes enjeux régionaux ou compétitions interprovinciales, là, qu'on peut voir ici. Donc, c'est spécifique, je crois...

Mme Perry Mélançon : Mais, si on compare, par exemple, avec le genre d'investissements, le genre de projet d'affaires, est-ce que ces gens-là, vraiment, s'implantent? Et vous parlez d'aller dans les écoles, leurs enfants et tout, est-ce que, je veux dire, ça, c'est semblable d'un pays à l'autre?

M. Tessier (Samuel) : Oui, oui, bien, c'est vraiment une pratique, disons, là... une planification successorale, hein, que les investisseurs font en choisissant le Canada, vont le choisir, oui, pour eux, mais a priori, même s'ils sont dans des pays instables, ils sont très bien installés et ils sont privilégiés dans leur pays. Quand ils choisissent le Canada, c'est surtout pour leurs enfants.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, ça conclut. Je vous remercie pour votre contribution de nouveau aux travaux de la commission.

Et je souhaite maintenant la bienvenue à M. Henri Tousignant. Vous avez cinq minutes, et ensuite nous procéderons à la période d'échange, tel que vous venez de le vivre avec M. Tessier. Je vous invite à vous présenter de nouveau et à débuter votre exposé pour cinq minutes. Allez-y.

M. Tousignant (Henri) : Merci, Mme la Présidente, M. le ministre, Mmes et MM. les députés. J'ai été député à Ottawa, alors je sais ce que c'est que d'être assis alentour d'une table, pas même aller aux toilettes jamais.

Alors, écoutez, moi, je pense que... puis je suis un bonhomme de 83 ans aujourd'hui, alors c'est à titre personnel que je m'adresse à vous, et moi, je vais aller dans des considérations beaucoup plus terre à terre. Naturellement, on entend toutes sortes de présentations, puis c'est correct, c'est bien, puis il faut que vous les écoutiez, puis c'est d'intérêt pour tout le monde. Mais moi, je vais tout simplement regarder les choses qui pourraient peut-être être faites simplement, simplement puis qui ne coûteraient peut-être pas cher non plus.

Alors, quand on se retrouve dans une situation de pénurie de travailleurs, de ressources humaines comme on le vit présentement, il me semble que ce serait le temps de faire le ménage. Vous savez, on a tous été pauvres un jour ou l'autre, puis on grattait les fonds de tiroir, puis on essayait de trouver les trente-sous puis la piastre, puis ça ne nous donnait pas grand-chose, mais ça nous permettait de faire le ménage. On pourrait peut-être faire le ménage dans le ministère du Travail puis dans l'emploi au Québec, premièrement. Il y a du monde, il y a des milliers de personnes au Québec qui seraient prêtes à travailler, mais voilà, ce n'est pas facile d'aller se chercher une job. Si vous avez une bonne job, tout le monde court après vous. Si vous n'avez pas de job, puis que vous vous présentez quelque part, déjà là, là, on a des préjugés contre vous. Ce n'est pas facile. Il y a des gens qui n'ont même pas d'argent pour mettre du carburant dans leur auto pour aller se chercher une job.

Donc, du côté du ministère du Travail, vous ne pouvez pas parler d'immigration sans inclure le ministère du Travail et puis d'autres ministères aussi quand on veut parler de main-d'oeuvre, quand on veut parler de combler les besoins, quand on veut parler de la démographie du Québec, la perte de poids vis-à-vis le reste du Canada. Alors, on veut combler ça par l'immigration, mais ça, ça ne peut pas se faire sans concerter tous les ministères, s'il y en a un... si la main gauche ne sait ce que la main droite fait. Alors, on devrait... il me semble que le ministère du Travail devrait, aujourd'hui, avec l'informatique, tout ce qui existe aujourd'hui... il me semble qu'ils devraient être les premiers intervenants à aller chercher... On devrait être numérotés partout dans... numérotés au gouvernement, et puis qu'on appuie sur un bouton, pareil comme les échanges qui se font à la bourse de New York, et puis être en contact avec tout le monde puis avec tous les employeurs en même temps. Quelqu'un veut travailler, il appuie sur un bouton, et puis le ministère répond, et puis ça se fait tout mécaniquement, ça pourrait tout se faire. Là, on est au cheval puis à la charrette encore au ministère du Travail. Alors, ça, c'est une constatation qui... Je pense que ça pourrait être amélioré. Ça ne se peut pas qu'en 2020... qu'on soit obligés de travailler soi-même. Parce qu'il y a des gens qui ne sont pas capables... Puis là, quand on parle de gens qui sont disponibles pour travailler, on parle souvent des assistés sociaux. Il y a des assistés sociaux qui pourraient travailler. Il y a des gens qui ont cessé de regarder pour trouver du travail, ils sont découragés, ils n'aiment pas ça. Il y a des autochtones, je ne parle pas les plus âgés, mais dans les plus jeunes, il y a des gens de 16, 17, 18, 19, 20 ans, des beaux garçons, des belles filles, si on les prenait par la main puis on leur disait, bien : On va vous aider à vous trouver un emploi si vous voulez travailler, je suis certain, moi, qu'on trouverait 50 000 personnes pour travailler. Bon, ça, ce serait une chose, ce serait un départ. Ces gens-là, ils n'ont pas besoin d'être naturalisés, c'est des Canadiens français. Alors, peut-être que de ce côté-là... je ne sais pas s'il y aurait moyen d'améliorer des choses.

La Présidente (Mme Chassé) : Je vous invite à conclure, il vous reste 30 secondes. Allez-y.

M. Tousignant (Henri) : Bien, voilà, je voulais parler d'immigration, justement.

La Présidente (Mme Chassé) : Il vous reste 30 secondes.

M. Tousignant (Henri) : 30 secondes. Moi, je pense que l'immigration, oui, mais à nos conditions. Je vais être clair avec ça. D'abord, moi, je suis un bonhomme de 83 ans puis je m'inquiète de la situation du Québec à moyen, long terme. On est entourés d'anglophones partout. Même les Français, en France, les jeunes à l'école apprennent l'anglais.

La Présidente (Mme Chassé) : M. Tousignant, ça termine votre exposé. Merci, et on débute le bloc d'échange. M. le ministre, le bloc d'échange avec le gouvernement est de cinq minutes. Allez-y.

M. Jolin-Barrette : Oui, merci, Mme la Présidente. Merci, M. Tousignant, d'être venu en commission parlementaire nous partager votre opinion en lien avec la planification pluriannuelle en matière d'immigration.

Tantôt, vous avez soulevé un bon point relativement au fait que le gouvernement du Québec devait travailler, tous les ministères devaient travailler ensemble. C'est pour ça que, dans le projet de loi n° 9, qu'on a adopté au mois de juin dernier, on a consacré le rôle du ministère de l'Immigration au niveau de la coordination. Parce que ce que j'ai constaté quand je suis arrivé comme ministre de l'Immigration, c'est qu'il y a beaucoup... les ministères travaillaient beaucoup en silo au niveau de l'immigration. Puis ça prend une approche coordonnée, et maintenant c'est le ministère de l'Immigration qui va le faire, et ce, dès l'étranger, donc au niveau international, et, par la suite, aussi à l'intérieur du gouvernement du Québec. Ça prend un ministère qui est imputable pour l'accueil des nouveaux arrivants. Puis actuellement il y avait des choses qui se faisaient au ministère du Travail, à l'Immigration, à l'Éducation aussi, et maintenant le point de chute, c'est le ministère de l'Immigration, qui est imputable, justement pour faire en sorte qu'on ait une approche globale, une vision globale.

Pour ce qui est du ministère de Travail, Emploi, Solidarité sociale, mon collègue le ministre du Travail fait une grande corvée, est en train de recenser région par région l'ensemble des emplois qui sont disponibles. Mais bien entendu, actuellement, il y a une pénurie de main-d'oeuvre et il y a beaucoup de demandes pour des travailleurs. L'immigration peut constituer une des solutions, mais, comme vous le dites, justement, les travailleurs expérimentés peuvent contribuer au marché du travail, les jeunes dans les programmes de formation, les membres des nations autochtones aussi, mais c'est la responsabilité du gouvernement du Québec de les intégrer aussi et de les accompagner là-dedans, comme on fait avec les personnes immigrantes.

Je ne sais pas qu'est-ce que vous en pensez, des propositions qu'on fait.

• (17 h 40) •

M. Tousignant (Henri) : Excellent. Je voulais d'ailleurs vous féliciter pour le projet de loi sur la laïcité, qui, à mon sens, ne va pas encore assez loin, mais c'est ça.

Mais ce que je voudrais ajouter, moi, je pense que vous devriez mettre l'accent sur les francophiles, en termes d'immigration, les gens qui sont francophiles, les gens qui aiment la francophonie puis qui sont prêts à accepter notre façon de vivre, parce que, nous, comme je l'ai mentionné tout à l'heure, il y a des risques qu'on disparaisse. Puis on a beau jaser, puis parler de toutes sortes de belles choses, puis parler d'investissements, puis tout ça, mais, à la fin du compte, qu'est-ce que c'est qui est l'objectif? Quel est l'objectif? L'objectif, c'est la survie de notre peuple. Puis je ne suis pas séparatiste puis je ne veux pas faire de politique, là, mais la survie de notre peuple, là, c'est très important puis c'est la première chose, je pense, que le ministère de l'Immigration devrait prendre en compte, aller chercher des gens francophones. Les Français, ça, ils sont... Vous pourriez accepter les Français sans condition parce que les Français, ils sont chez eux, c'est eux autres qui ont découvert le Canada. Alors, il me semble que, ça, on pourrait en prendre sans trop d'hésitation, parlant français, oui, mais pas nécessairement parlant français, les gens qui veulent s'intégrer ici puis qui sont francophiles.

M. Jolin-Barrette : En fait, M. Tousignant, ce sur quoi on travaille avec le lancement de la plateforme Arrima, justement, c'est de sélectionner des personnes immigrantes, peu importe la région dans le monde, qui correspondent aux besoins du marché du travail. Puis nous, au gouvernement du Québec, de la façon dont on voit ça, c'est que c'est une responsabilité partagée au niveau de l'intégration, au niveau de la francisation. Le rôle du gouvernement du Québec, c'est d'offrir toutes les ressources, tous les services disponibles aux personnes immigrantes qui choisissent le Québec. Puis j'ai annoncé cette semaine un parcours d'accompagnement personnalisé, la semaine dernière, qui fait en sorte que, dès l'étranger, on offre des cours de francisation, la reconnaissance des diplômes, la facilité avec les ordres professionnels parce que souvent, ça, ça constitue un frein à l'intégration.

Puis les deux facteurs les plus importants pour l'intégration, bien souvent, dans n'importe quelle société, c'est la connaissance de la langue d'usage, donc le français pour le Québec, mais aussi le fait d'occuper un emploi.

La Présidente (Mme Chassé) : Il vous reste 30 secondes.

M. Jolin-Barrette : Alors, sur ces deux volets-là, on travaille ardemment là-dessus vraiment pour accompagner les personnes immigrantes. Puis, nous, notre objectif, c'est que les personnes immigrantes puissent occuper un emploi à la hauteur de leurs compétences, mais surtout qu'ils adhèrent à la connaissance de la langue française, aux valeurs québécoises inscrites dans la Charte des droits et libertés de la personne.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. le ministre. Ça termine le bloc d'échange avec le parti formant le gouvernement. Nous sommes rendus au parti formant l'opposition officielle. M. le député de Nelligan, pour 3 min 20 s.

M. Derraji : Merci, Mme la Présidente. Merci pour votre présentation. Je partage en partie votre présentation, mais je ne la partage pas à 100 % parce que... je vais vous partager le pourquoi, hein? Ce qu'on a devant nous maintenant : 116 000 postes disponibles vacants, 1 million pour les 10 prochaines années. Et vous dites qu'il y a un risque de survie pour notre peuple. Vous ne voyez pas qu'au-delà de la survie d'une population ou d'un peuple, il y a aussi la survie de nos services? C'est que, demain, on va avoir de la misère à avoir des personnes qui vont s'occuper de nos personnes âgées en résidence de personnes âgées. Moi, c'est ça, la crainte que je vois qui frappe à l'horizon.

M. Tousignant (Henri) : Je suis tout à fait d'accord avec vous. Je suis à 100 % pour l'immigration, mais ce que je dis : Essayons donc d'aller chercher des personnes qui sont heureuses ici... qui vont être heureuses ici. Puis j'en parle à l'aise, je sais qu'il y a des gens ici qui sont issus de l'immigration, mais vous acceptez, vous vous intégrez totalement. C'est ça qu'on veut. Quelqu'un qui ne peut pas s'intégrer, c'est de la violence, c'est inacceptable. C'est de nous faire un doigt d'honneur. Quelqu'un qui vient chez nous... On ne doit pas s'excuser d'être chez nous, là.

Alors, il me semble, moi, qu'il faut s'assurer que les gens sont heureux ici et puis qu'on écrive dans les documents d'acception... qu'on écrive en gros caractères puis en rouge s'il le faut : Étant donné la situation du Québec, qui est précaire... C'est un cas, c'est réel, ça, là. Les Français, là, en France, là, tous les jeunes apprennent l'anglais à l'école. Dans deux générations, c'est 40 ans, ça, vous allez voir ce qui va se passer, même en France. Donc, nous autres, là, c'est... vous comprenez ce qui va se passer. Tout le monde apprend l'anglais. Bon, alors, c'est ça, si on ne veut pas tomber dans le melting-pot, comme on dit, puis disparaître... C'est bien beau, l'argent, c'est bien beau, le commerce, c'est bien beau, toutes ces choses-là, mais l'objectif fondamental : Est-ce qu'on doit continuer de survivre, nous, comme peuple? Qu'on soit de n'importe quelle nationalité, que les... Oui, je m'excuse, là.

La Présidente (Mme Chassé) : Non, non, allez-y.

M. Tousignant (Henri) : Qu'on soit de n'importe quelle nationalité, si on accepte de s'intégrer ici, c'est des purs Québécois. Tout le monde est pur Québécois, puis on est heureux avec ça, puis on vit avec ça. Il n'y a pas de racisme au Québec, ça, c'est aussi simple que ça. S'il y a du racisme, c'est juste des gens qui ne veulent pas se conformer, c'est simple.

M. Derraji : Donc, selon vous, on doit juste accueillir des Français parce que ça va être bon pour notre survie.

M. Tousignant (Henri) : Non, non, pas juste... tous les gens d'Europe, n'importe qui, mais quelqu'un qui est content, qui est francophile puis qui est heureux de vivre au Québec, c'est aussi simple que ça, puis qui veut faire sa vie ici heureuse.

M. Derraji : Juste pour une petite note anecdotique, parce que moi, je suis francophone, mais je suis de l'Afrique, pas de l'Europe...

M. Tousignant (Henri) : Non, non, ça peut être d'Afrique aussi, ça peut être de n'importe où.

M. Derraji : ...mais je suis très heureux au Québec.

M. Tousignant (Henri) : Non, n'importe qui, n'importe quel individu de n'importe où dans le monde, s'il veut s'intégrer, c'est un Québécois pure laine.

La Présidente (Mme Chassé) : Ça termine le bloc. Je vous remercie. 50 secondes, M. le député de Laurier-Dorion.

M. Fontecilla : Très rapidement, vous êtes préoccupé par la situation du français. Que pensez-vous qu'il faudrait faire pour améliorer la francisation des immigrants?

M. Tousignant (Henri) : La francisation des Québécois?

M. Fontecilla : Non, des immigrants.

M. Tousignant (Henri) : Bien, il faut s'en tenir aux règles, la loi 101. Et puis les lois, ce n'est pas fait trop, trop... Ce n'est pas une bonne chose de passer des lois parce que tout le monde conteste les lois, les avocats contestent les lois devant les tribunaux tout le temps. C'est d'avoir des principes puis faire comprendre à ces gens-là que, s'ils veulent être heureux ici, qu'ils s'intègrent. Puis, si les gens s'intègrent, nous, on est heureux, les Québécois, on est pleinement heureux. Moi, je connais des immigrants que je préfère à mes frères et soeurs, c'est aussi simple que ça, mais ils s'intègrent.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci, M. Tousignant. Mme la députée de Gaspé, vous vous essayez pour 50 secondes? Allez-y.

Mme Perry Mélançon : Oui, merci. Vous avez dû être un député très coloré, en tout cas. J'aurais bien aimé vous voir dans vos fonctions au fédéral.

Bien, simplement dire que je pense qu'il ne faut pas non plus voir la connaissance du français à l'entrée comme une marque de discrimination non plus, parce qu'il n'y a pas seulement les Français, pas seulement les Européens, il y a les Africains aussi. Moi, j'en ai connu, au Pérou, qui le parlaient très, très bien aussi. Donc, c'est là qu'on ne se rejoint peut-être pas, mais sachez que notre position, c'est certain qu'au Parti québécois on veut qu'il y ait une connaissance du français dès la porte d'entrée. Ça, on s'entend sur cet objectif-là.

M. Tousignant (Henri) : Tous les gens qui veulent être francophones, parler français puis nous accepter chez nous, c'est mes amis, qu'ils viennent de n'importe quel coin de la planète, c'est aussi simple que ça. C'est des humains, c'est des gens qui sont souvent plus qualifiés que nous, qui nous apportent beaucoup, mais qu'on se respecte.

La Présidente (Mme Chassé) : Merci. Merci beaucoup. M. Tousignant, je vous remercie pour votre contribution aux travaux, et ça ajourne nos travaux jusqu'à demain, mardi 13 août, 10 h 15, où on va poursuivre notre mandat.

(Fin de la séance à 17 h 48)

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