Journal des débats (Hansard) of the Committee on Citizen Relations
Version préliminaire
43rd Legislature, 2nd Session
(début : September 30, 2025)
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Wednesday, October 8, 2025
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Vol. 48 N° 4
General consultation and public hearings on the consultation document entitled “Planning of Immigration to Québec for the 2026-2029 Period”
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11 h (version non révisée)
(Onze heures vingt-deux minutes)
La Présidente (Mme Poulet) : À
l'ordre, s'il vous plaît! Alors, ayant constaté le quorum, je déclare la séance
de la Commission des relations avec les citoyens ouverte.
La commission est réunie afin de
poursuivre les auditions publiques dans le cadre de la consultation générale
sur le cahier de consultation intitulé «La planification de l'immigration au
Québec pour la période 2026 à 2029». Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a
des consentements... des remplacements?
La Secrétaire : Oui, Mme la
Présidente. Mme Lecours (Les Plaines) est remplacée par M. Lévesque
(Chauveau), M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve) est remplacé par M. Cliche-Rivard
(Saint-Henri—Sainte-Anne) et M. Bérubé (Matane-Matapédia) est remplacé par
M. Boissonneault (Arthabaska).
La Présidente (Mme Poulet) : Parfait.
Est-ce qu'il y a consentement que le député de Pontiac remplace le député de D'Arcy-McGee?
Des voix : Consentement.
La Présidente (Mme Poulet) : Parfait.
Merci. Alors, nous entendrons ce matin les personne et groupes suivants :
M. David Santarossa et l'Université du Québec à Trois-Rivières.
Alors, M. Santarossa, bienvenue. Je
vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous
procéderons à une période d'échange avec les membres de la commission. Alors,
la parole est à vous.
M. Santarossa (David) :
Excellent. Bien, merci beaucoup. Donc, bonjour à tous, bonjour au ministre de l'Immigration
de la Francisation et de l'Intégration. Je suis David Santarossa et je viens
vous parler à titre de professeur à l'université TELUQ.
Dans le cadre de mes fonctions, je suis
responsable de la formation des futurs enseignants appelés à dispenser le cours
culture et citoyenneté québécoise au primaire. Dans un des travaux, les
étudiants qui enseignent déjà, car ils sont tous des enseignants non légalement
qualifiés, doivent présenter les défis qu'ils vivent au quotidien dans la
classe. Au fil des travaux, un constat revient avec insistance : la
gestion de la diversité constitue l'un des principaux défis pour les
enseignants.
D'abord, plusieurs enseignants expriment
une ambiguïté quant au rôle de l'école en matière d'intégration. Une étudiante
m'a confié son malaise face à une discussion en classe où des élèves, influencés
par leur contexte familial, l'ont interrogé sur la légalité de la polygamie au
Québec. Certains lui ont demandé pourquoi l'État ne permettait pas, comme dans
leur pays d'origine, d'avoir plusieurs réponses... plusieurs épouses, pardon.
Cette étudiante craignait d'imposer une norme culturelle québécoise. Nous
retrouvons fréquemment cette ambiguïté lorsqu'il est question de l'éducation à
la sexualité, alors que plusieurs parents s'opposent frontalement à son
enseignement en classe, notamment pour des raisons religieuses.
Ces exemples sont représentatifs d'une
situation de la part des enseignants et ceci témoigne d'un déficit d'outillage,
mais aussi d'un flou institutionnel quant à ce qui relève de l'accueil, de la
diversité et de l'affirmation des principes fondamentaux du Québec.
Un autre élément que plusieurs enseignants
soulignent est que beaucoup d'élèves, parfois même la majorité, ne parlent pas
français à la maison. Bien entendu, il ne s'agit pas ici de contrôler les
pratiques familiales ni d'intervenir dans la sphère privée, cependant, cette
donnée doit être vue comme un indicateur important de la vitalité linguistique
et les défis que pose la transmission du français comme langue commune. Si l'école
est le principal lieu de contact avec la langue française, elle porte alors une
charge disproportionnée dans le processus d'intégration linguistique, une
situation qui exige des ressources, une stratégie, mais surtout une cohérence
entre immigration, éducation et culture commune...
M. Santarossa (David) : ...commune.
Il faut aussi souligner que plusieurs enseignants me confient qu'en raison des
défis importants de francisation, même dans les classes régulières, il n'est
pas rare de mettre de côté l'éducation à la citoyenneté québécoise. En effet,
lorsque les besoins sont criants, les enseignants préfèrent privilégier les
matières de base comme le français et les mathématiques plutôt que le cours de
culture et citoyenneté québécoise.
Pourtant, la Loi sur l'intégration à la
nation québécoise, adoptée sous le gouvernement actuel, est claire, elle
reconnaît, ici, j'ouvre les guillemets : «La culture québécoise en tant
que culture commune est vecteur de cohésion sociale, une culture dont la langue
française est le principal véhicule et qui permet l'intégration à la société
québécoise des personnes immigrantes et des personnes s'identifiant à des
minorités culturelles. Cette orientation suppose non seulement la transmission
d'un socle commun, mais aussi des conditions concrètes de mixité sociale et
linguistique.» Or, plusieurs données récentes vont à l'encontre de cet idéal.
En 2024, La Presse rapportait que plusieurs écoles montréalaises dites
multiethniques étaient en réalité de plus en plus homogènes sur le plan
ethnoculturel créant ainsi des silos culturels involontaires. Cette absence de
mixité freine les interactions entre élèves francophones et allophones,
limitant ainsi les occasions d'intégration réelle.
Avant d'aborder de front ma proposition
concernant la planification de l'immigration, certains éléments méritent encore
quelques éclaircissements. Premièrement, devant les différentes réalités
mentionnées précédemment, il devient nécessaire de redéfinir les termes de
majorité et de minorité à l'aune des réalités québécoises. Ce que l'on nomme
généralement «la majorité», c'est-à-dire les Québécois d'origine
canadienne-française, constitue en réalité une minorité culturelle et
linguistique à l'échelle du Canada et de l'Amérique du Nord. Ce statut
minoritaire a des conséquences profondes sur sa capacité à maintenir sa langue
et sa culture. En revanche, ce que l'on désigne comme «des minorités» au Québec
peuvent, dans certains quartiers de Montréal, représenter la majorité dans les
écoles. Ces changements démographiques appellent une réflexion urgente sur la
façon dont les politiques d'intégration et de francisation sont conçues.
Deuxièmement, dans le débat public
entourant l'immigration, une confusion fréquente nuit à la sérénité des
échanges, celle qui consiste à confondre les personnes immigrantes avec le
phénomène de l'immigration lui-même. Cette confusion mène à la personnalisation
du débat, alors que ce dernier devrait demeurer une discussion sur des
orientations collectives, des choix politiques et des capacités
institutionnelles. Je remarque que plusieurs politiciens font explicitement
cette différence et je salue cette nuance. Remettre en question les seuils
d'immigration ne revient aucunement à critiquer les personnes qui émigrent. Il
s'agit plutôt d'un exercice de responsabilité collective qui vise à réfléchir à
la manière dont l'immigration peut s'inscrire dans un projet national cohérent.
J'entends aussi beaucoup d'experts et de commentateurs accuser les politiciens
de pointer du doigt uniquement les immigrants comme source des difficultés du
système éducatif. Ces commentateurs font dire à différents partis ce qu'ils ne
disent pas et accentuent la polarisation, même s'ils prétendent ainsi la
combattre. En effet, à ma connaissance, aucun élu à l'Assemblée nationale du
Québec ne dit que les défis vécus par le système éducatif sont causés
uniquement par une hausse de l'immigration.
Troisièmement, il est essentiel dans le
débat public d'utiliser l'expression «diminution des seuils d'immigration»
plutôt que celle, souvent imprécise, de «diminution de l'immigration». Réduire
les seuils ne signifie pas que l'immigration cesse ou même qu'elle diminue en
valeur absolue. Cela... cela signifie... En fait oui, ça signifie qu'elle
diminue en valeur... pardon. Cela signifie seulement que le nombre de personnes
admises annuellement par le gouvernement du Québec serait revu à la baisse.
Donc, le nombre par année est revu à la baisse. Or, même avec des seuils
réduits, la proportion de personnes immigrantes au sein de la population
québécoise continuera d'augmenter en raison des effets cumulés de l'immigration
passée. Utiliser les bons termes permet de sortir d'une logique alarmiste. Il
ne s'agit pas de fermer les portes à l'immigration, ce qu'aucun parti politique
représenté à l'Assemblée nationale de demande, mais de mieux synchroniser la
capacité d'accueil du Québec.
Quatrièmement, le maintien d'un espace
civique commun est indispensable pour que le Cours culture et citoyenneté
québécoise remplisse sa mission. Ce cours ne vise pas uniquement à exposer
les élèves à la diversité culturelle, il a notamment pour objectif de
construire une culture publique commune. Or, sans un espace commun, le cours
risque de devenir un simple exercice rhétorique, la transmission de valeurs
communes dans un espace fragmenté où les groupes culturels vivent en parallèle,
devient alors inefficace.
• (11 h 30) •
Cinquièmement, la notion de capacité
d'accueil est parfois contestée, car elle semble difficile à quantifier avec
précision. Certains soutiennent qu'il s'agit d'un concept flou et qu'aucun
seuil objectif ne permettrait de déterminer à partir de quand une société est
saturée. Pourtant, poser la question de la capacité d'accueil, c'est poser une
question fort simple : Est-ce qu'un élève immigrant est réellement accueilli
et intégré au Québec lorsqu'il entre dans une école où la majorité des élèves
sont issus de l'immigration? Selon le portrait socioculturel des élèves
inscrits dans les écoles publiques de l'île de Montréal en 2022. Donc, ça
risque d'augmenter... c'est-à-dire, ça va probablement augmenter d'ici 2022.
C'était le cas pour 219 sur 447 écoles. À force d'éviter la question de
la capacité d'accueil, on risque de glisser vers une image fantasmée de
l'intégration ou c'est censé se produire naturellement avec le temps, sans
tenir compte des conditions concrètes de la vie...
11 h 30 (version non révisée)
M. Santarossa (David) : ...Je
souhaite au passage commenter un article du Devoir qui date du 1er octobre,
qui est indiqué que la population n'a pas augmenté dans les écoles québécoises
entre 2000 et 2025 et qu'il fallait donc relativiser la pression qu'exerçait l'immigration
sur le système d'immigration... sur le système d'éducation, pardon.
Cette comparaison est trompeuse pour deux
raisons. De un, l'immigration s'est surtout concentrée dans la grande région de
Montréal. Pendant ce temps, d'autres régions ont vu leur population d'élèves
diminuer ou stagner. Pour donner une idée, dans les dernières années, qui est
la dernière année que le tableau de bord en éducation collige, là, la
population d'élèves à Laval a augmenté de 19 %, Montréal, 10 % et la
Montérégie, 24 %. Les besoins des élèves ne se calculent pas à la grandeur
du Québec, mais en fonction des ressources disponibles dans une région donnée.
Pour prendre un exemple concret, si 500 élèves s'ajoutent à Montréal, on
ne peut pas dire qu'il y a de la place au Québec en disant qu'il y a 500 places
disponibles dans une école en Gaspésie. Donc, il est trompeur de comparer la
population d'élèves québécois de 2000 à celle de 2025, cela n'éclaire en rien
le débat.
De deux, un élève en 2025 n'égale pas un élève
en 2000. Les élèves ont beaucoup plus de services aujourd'hui qu'avant. Les
élèves à besoins particuliers travaillent dans des classes plus petites, on a
donc besoin de plus de classes et d'enseignantes qu'il y a 25 ans pour le
même nombre d'élèves. Bref, un nouvel arrivant en francisation va demander
davantage de ressources qu'un élève natif au régulier. Et, pour donner un
exemple, en 10 ans, le nombre d'élèves en classe d'accueil s'est multiplié
par 2,5 à Montréal.
Devant les défis qui viennent d'être
mentionnés, il est tentant de poser le problème en termes de choix exclusif.
Faut-il agir sur l'offre ou sur la demande? Devons-nous, d'un côté, accroître
notre capacité d'accueil en investissant massivement dans l'intégration ou
bien, d'un autre, devons-nous limiter la pression sur nos institutions en
réduisant les seuils d'immigration? Le gouvernement du Québec doit refuser
cette fausse dichotomie. Il ne s'agit pas de choisir entre l'intégration et la
modulation des seuils, mais de reconnaître que ces deux leviers sont
complémentaires et indissociables. Réduire considérablement les seuils
permettrait de donner un répit aux institutions éducatives qui sont déjà sous
pression. Ce temps gagné doit être mis à profit pour renforcer les mécanismes d'intégration
linguistique et culturelle non seulement dans une perspective de services, mais
dans une perspective nationale que chaque nouvel arrivant puisse non seulement
s'installer, mais véritablement participer à la société québécoise et y trouver
sa place.
À cette fin, je recommande, de un, de
réduire considérablement les seuils d'immigration de manière à soutenir la
capacité d'accueil du réseau scolaire, de deux, d'investir massivement en
francisation et en intégration culturelle, notamment à travers le financement d'activités
culturelles communes en milieu scolaire, trois, de soutenir explicitement les
enseignants dans leur rôle de transmission des repères communs, notamment en
clarifiant les attentes en lien avec le programme Culture et citoyenneté québécoise
et la Loi sur l'intégration à la nation québécoise. Sur ce, merci beaucoup de
votre écoute.
La Présidente (Mme Poulet) : Merci
beaucoup. Alors, nous allons procéder à la période d'échange. M. le ministre,
la parole est à vous.
M. Roberge : Merci beaucoup, Mme
la Présidente. Merci pour votre présentation. C'est intéressant d'avoir des
éclairages qui sont distincts. On reçoit une pluralité de groupes d'experts ou
de lobbys qui viennent tantôt nous éclairer avec... tantôt représenter l'intérêt
des membres. Vous apportez un éclairage qui est différent en parlant, oui, de l'immigration,
mais aussi de l'accueil, de la capacité d'accueil, de la capacité d'intégration
qui est... Tout ceci est connexe, mais on est différents, on est ailleurs que
simplement dire est-ce qu'on a besoin de plus ou de moins de travailleurs dans
tel ou dans tel secteur. Mais les intervenants se succèdent, ne disent pas
toute la même chose ou des fois disent des propositions semblables pour des
raisons différentes. Mais qu'est-ce que vous répondez à des groupes qui
viennent nous voir, des lobbys patronaux ou des syndicats qui nous disent :
Il faudrait augmenter l'immigration? Eux, ils... La posture du gouvernement, c'est
qu'il faut savoir jusqu'à quel point on doit continuer d'accueillir des gens
mais réduire les nôtres. Eux, ils nous disent qu'il faut augmenter encore l'immigration.
Qu'est-ce que vous leur répondez?
M. Santarossa (David) : Donc,
si on regarde... Donc, moi, je suis enseignant... je suis professeur, en fait,
à l'université, j'ai enseigné pendant près de 10 ans au secondaire, et, si
on regarde strictement du point de vue du thème d'éducation, après ça on
pourrait parler d'économie, et de logement, et de plein d'autres choses, mais
si on regarde strictement du point de vue de l'éducation, bien, ça me semble
assez évident qu'une augmentation de l'immigration augmente la pression sur les
services. Donc, du point de vue de l'éducation uniquement, j'ai une voie
unique... La seule solution possible, c'est la réduction de l'immigration. C'est
ça qui va permettre de réduire la pression sur le système d'éducation. Après
ça, comme je vous dis, il y a d'autres... il y a d'autres éléments pris en
considération sans doute, mais la diminution, c'est sûr que ça va aider, c'est
certain. Et puis... En fait, même, on pourrait le voir autrement, c'est-à-dire
qu'il faut... Dans ce genre de débat là, c'est intéressant de se dire où est
le...
M. Santarossa (David) :
...fardeau de la preuve qu'il y a, le fardeau de la preuve, et il semble assez
clair que, de plus en plus, le fardeau de la preuve, c'est du côté de ceux qui
disent qu'il faut réduire l'immigration, c'est-à-dire qu'on tient pour acquis
qu'il faut toujours l'augmenter. Or, j'aurais tendance à penser plutôt que, bien,
la donnée de base devrait être de dire : On devrait réduire l'immigration,
parce que, manifestement, il y a une pression importante sur les services, j'ai
donné quelques statistiques à ce propos, soit 2,5 de classes d'accueil à
Montréal, en l'espace de 10 ans, c'est énorme. C'est beaucoup de services
qu'on a de la difficulté à donner. Je parlais à une spécialiste en
francisation, Tania Longpré, qui me disait : Bien souvent, on envoie les
élèves dans les classes régulières, même s'ils ne sont pas francisés à
100 %, en quelque sorte. On fait ce qu'on peut avec ce qu'on a, si on
veut, parce que, justement, on a une limite de ce qu'on peut offrir.
M. Roberge : Donc, simplement,
si je vous écoute, compter le nombre d'élèves, c'est un peu réducteur. Hier, il
y a quelqu'un qui nous a dit : Bien, voyons donc, il n'y a pas de
problème dans les écoles, sur plusieurs années, il y a eu seulement une hausse
de 2 % du nombre d'élèves. Vous nous dites : Attention, puis corrigez-moi
si je me trompe, mais vous nous dites : Attention, la répartition
géographique est un facteur à considérer et les services demandés par les
élèves. Vous avez dit 2,5, 250 % de hausse de classes d'accueil dans la
région de Montréal.
M. Santarossa (David) : Oui,
exactement. Selon le tableau de bord de l'éducation que j'ai regardé récemment,
oui, c'est énorme comme chiffres. C'est exactement ça, c'est-à-dire qu'il y
a... c'est à dire qu'à mon sens, la comparaison entre 2000 et 2025 est un peu
boiteuse, c'est-à-dire 25 ans, c'est, je veux dire, en 2000, on ne parlait
pas d'intelligence artificielle, on ne parlait pas de plein de choses. Le monde
a énormément changé, ont changé en 25 ans. Donc, ça me semble assez
boiteux comme comparaison, une comparaison, sur une échelle de 10 ans, est
beaucoup plus crédible à mon sens. Et, oui, c'est-à-dire qu'il y a des régions
dont le nombre a stagné ou même diminué. Mais, comme je le disais en
Montérégie, l'augmentation de 25 % en l'espace de 10 ans, on n'avait
pas prévu ça, on n'a pas mis les effectifs probablement pour prévoir ça non
plus.
Donc, oui, je ne pense pas que cette
comparaison-là me semble totalement boiteuse. Et, aujourd'hui, on donne
énormément de services aux élèves en mieux, mais, en même temps, il y a une réalité
qui fait en sorte qu'on a besoin de beaucoup plus de... bras, en quelque sorte,
beaucoup plus d'enseignants, de TES, d'experts en francisation, etc., donc,
d'orthopédagogues, on pourrait continuer. Donc, oui, un élève en 2000 n'égale
pas un élève en 2025, ça, c'est sûr et certain.
M. Roberge : Et, dans les
dernières années ou dans la dernière décennie, le nombre d'immigrants
permanents, des nouveaux Québécois qui vont rester ici pour toute la vie, n'a
pas tellement fluctué, mais on se maintient là, à part pour le creux de vague
pendant la pandémie, on se maintient grosso modo en moyenne autour de
50 000. Donc, c'est comme une espèce de stabilisation. Ce n'est pas
tellement ce nombre qui a explosé, mais c'est plutôt l'arrivée de résidents non
permanents où on peut qualifier d'immigrants temporaires de toutes sortes de
catégories. Parce que ce que je vois, c'est qu'en juin 2023, il y avait
44 884 élèves résidents non permanents, puis, en décembre 2024, quoi,
18 mois plus tard, il y en avait 62 351. Donc, en 18 mois, on
avait ajouté à peu près 18 000 élèves non permanents.
18 000 élèves, ça veut dire à peu près combien d'enseignants, ça?
M. Santarossa (David) :
...c'est une bonne question. Bien, on le sait, dans ces populations-là, on a on
a beaucoup de... de classes de francisation, on le sait, c'est-à-dire les
classes de francisation, c'est principalement pour les personnes immigrantes,
ce n'est pas pour les natifs, on le devine bien, mais, en général, bien, il
faudrait faire le calcul. Une classe d'accueil, c'est quelque chose comme 16,
17 élèves par classe. Donc, si on fait le calcul, vous m'avez dit, 18 000
personnes, 18 000 personnes de différence?
M. Roberge : Admettons qu'on
a des classes qui débordent à 18 élèves par classe, ça voudrait dire
1 000 classes en un an. Donc, il aurait fallu avoir 1 000
enseignants de plus et 1 000 locaux de plus en un an. Une classe primaire,
là, une classe primaire, c'est à peu près 30 locaux, ça coûte
50 millions. Donc, imaginez 1 000 locaux en infrastructures,
l'investissement que ça peut représenter.
• (11 h 40) •
M. Santarossa (David) : Oui,
et on pourrait parler aussi de les TES, les concierges, les directions d'école,
tu sais, on peut... Il n'y a pas juste...
M. Santarossa (David) : ...des
enseignants dans une école, même s'ils sont... c'est un élément fondamental.
Mais donc, oui, c'est... c'est des investissements qui sont colossaux. Après
ça, c'est un choix, c'est un choix politique, mais manifestement, c'est que ça
met une pression, et il y a une limite à ce qu'on peut faire. À nouveau, je
pense, qu'est-ce qu'on voudrait donner des services de la meilleure qualité
possible à tous ces élèves-là, les intégrer, c'est certain, mais il y a une
limite. Le réel impose ses limites en quelque sorte, là.
M. Roberge : Et certains
pourraient dire : Mais l'explosion est arrivée du côté des résidents non
permanents, des immigrants temporaires, là, par centaines de milliers.
18 000 élèves, mais c'est des centaines de milliers de personnes. Pourquoi
réduire alors le nombre d'immigrants permanents si c'est l'explosion de
temporaires qui peut peut-être mettre à mal notre capacité d'accueil? Je
soumets que c'est parce que si tout ce monde-là devient permanent, on enverra
le message à toute la planète que dès qu'on met le pied ici, on devient
permanent. Il risque d'en arriver encore davantage et encore davantage.
Qu'est-ce que vous en pensez?
M. Santarossa (David) : Oui.
Bien, ça, j'ai l'impression que c'est un peu jouer sur les mots de dire il va
arrêter d'avoir des immigrants temporaires parce qu'ils vont tous devenir
permanents. Bien, je veux dire, on ne réglera aucun problème parce que ces
personnes ont quand même besoin de services. Donc, il y a eu une explosion
démographique dans les dernières années au Québec, on le sait. Donc... donc,
manifestement, il faut réagir à ça puis il faut... Oui, il y a toutes les
questions légales de statut et tout ça, c'est certain, mais il y a une question
fondamentale de démographie, c'est-à-dire : Il y a... il y a combien de
têtes à qui il faut offrir des services? Il y a combien de têtes à qui il faut
offrir de la francisation? Parce que je pense que c'est un souci très important
chez... chez les Québécois et pour le gouvernement aussi. Eh bien, manifestement,
et je le disais, et ça, j'aimerais ça qu'il y ait des études plus spécifiques
là-dessus. Mais moi, je reçois beaucoup, beaucoup de travaux à ce sujet qui
disent : Je dois mettre de côté le Cours culture et citoyenneté québécoise
de côté parce que je dois franciser mes élèves en quelque sorte, parce qu'ils
arrivent dans mes classes régulières, mais manifestement, ils n'auront pas été
francisés comme... comme il se devrait. Donc, c'est une des... une des
difficultés. Puis évidemment, si on... c'est-à-dire, on peut... Si on réduit le
nombre d'immigrants au Québec, la question des seuils, je dois le spécifier,
est-ce que ça va augmenter la pression? La réponse est non. C'est sûr et
certain que ça va réduire la pression, ça ne va pas l'augmenter. Ça me semble
assez évident.
M. Roberge : Il y a quand
même des gens qui nous disent : Mais s'ils sont ici, ils ont appris la
langue, s'ils ont appris la langue, ils ont un appartement. Ils sont ici, donc
s'ils sont ici, ils ne mettent pas de pression sur le réseau scolaire, ils
occupent déjà une place. Ils ne mettent pas de pression sur les logements, ils
sont déjà logés. Donc, on régularise, là, tous ceux qui sont ici deviennent
permanents, puis on avance à partir de là. Mais ce que je comprends, c'est que la
situation actuelle n'est pas soutenable à long terme. La situation actuelle,
c'est une situation où on est en crise, où on est obligés de couper, puis c'est
ce que vous dites : On coupe dans le programme de formation de l'école
québécoise, on n'enseigne pas le régime pédagogique parce que le système est
sous pression. Donc, l'idée, ce n'est pas de régulariser la situation actuelle,
puis dire : À l'avenir, on en prendra moins. Est-ce que je vous suis?
M. Santarossa (David) : C'est
exactement ça. La situation actuelle est intenable à court terme, même là.
Donc, on entend de plus en plus, par exemple, que la langue commune n'est
plus... n'est pas le français dans certaines écoles. Donc, c'est un des... des
défis qui me semblent assez importants. Il y a des... il y a des... il y a des
enclaves ethnoculturelles, on l'a vu avec l'école Bedford. Donc, oui, il y
avait l'enjeu de laïcité avec l'école Bedford. Mais il y a aussi la question de
lorsqu'on... lorsqu'on... lorsqu'il cesse cesse d'avoir de la mixité sociale,
de la mixité culturelle, c'est un réel problème. Je pense que le Québec doit
mettre ça de l'avant, et c'est pour ça que le français doit être la langue
commune. C'est-à-dire que, si tout le monde arrive avec une origine
ethnoculturelle différente, mais on doit se retrouver dans une culture commune
qui est la culture québécoise, la culture française, la culture de langue
française. Après ça, évidemment, je tiens à souligner il n'empêche rien que
cette culture-là se modifie au fil du temps, c'est certain. Mais il y a quand
même quelque chose commun, comme un noyau francophone qui s'inscrit dans une
histoire, là.
M. Roberge : Merci pour
votre présentation. Je vais laisser mes collègues poursuivre les échanges avec
vous. Merci.
La Présidente (Mme Poulet) : Oui,
M. le député de Chauveau, il vous reste 3 min 6 s.
M. Lévesque (Chauveau) : Je
vais tenter d'être très efficace, Mme la Présidente. Merci beaucoup, M.
Santarossa. Merci pour votre contribution à cette commission. Très heureux de
pouvoir échanger avec vous. Vous avez fait brièvement référence...
M. Lévesque (Chauveau) : ...votre
expérience, là, au niveau du cours culture québécoise, vous avez contribué à
ça? J'aimerais avoir une idée des impacts que ça a aussi sur l'immigration,
toute cette implication-là qu'on a. Évidemment, oui, la langue française, c'est
l'élément socle, c'est l'élément central, c'est bien évident, mais tout
l'apprentissage de la culture québécoise. Tu sais, quand il y a une immigration
extrêmement élevée, vous avez parlé à Montréal, à Laval, l'intégration demeure
quand même le centre. Puis, pour vous laisser le maximum de temps, là, vous
nous dire un peu de ce que vous avez constaté, des défis que ça peut amener.
Puis évidemment, je vais lancer une fleur à mon collègue ministre qui a quand
même mis en place le fameux cours au Québec en lien avec la modification de
l'ancien cours d'éthique et culture, que, là, maintenant, on parle davantage de
culture québécoise plus centrée. Peut-être nous faire part de votre expérience
là-dedans, M. Santarossa, s'il vous plaît.
M. Santarossa (David) : Oui.
Autant de par mon expérience personnelle à titre d'enseignant que de professeur
qui reçoit beaucoup de témoignages de la part des enseignants sur le terrain,
beaucoup à Montréal, beaucoup à Laval, ce qu'il me disent, c'est qu'il y a une
grande problématique autour du mot «Québécois». Et ce que je veux dire par là,
c'est que, pour beaucoup de personnes issues de l'immigration, le terme
«Québécois» est connoté sur le plan ethnique. Donc, pour eux, si... je ne vous
donnerai pas d'exemple, ce n'est pas nécessaire, mais disons qu'ils sont
d'une... particulière, et ils vont s'identifier davantage dans leur...
particulière même si, par exemple, ils n'ont jamais été dans le pays de leurs
parents ou de leurs grands-parents. Donc, ça, c'est une réelle problématique.
Donc, justement, c'est-à-dire que
lorsqu'ils ne sont pas en... lorsqu'on ne vit pas la mixité culturelle,
justement, donc, par exemple, je ne sais pas si on est dans un quartier où il y
a une très forte communauté magrébine, par exemple, bien, on va avoir beaucoup
plus tendance à s'identifier à cette communauté-là plutôt que de dire : Je
m'identifie au Québec. À l'inverse, on va plutôt dire : Le mot «Québécois»,
c'est un terme qui est ethnique, et puis on va... on va justement s'en détacher
parce qu'on ne se considère pas Québécois. Alors que dans des milieux où
justement il y a davantage de mixité culturelle, bien, le terme «Québécois»
perd son statut ethnique pour être davantage un statut national, une identité
nationale, de se dire : On peut être à la fois Québécois et avoir une
origine autre, ça se peut très bien, il y a quelque chose comme une entité
nationale, et ça, c'est un des gros, gros, gros défis que j'ai un peu souligné
dans mon... dans le mémoire que je vous ai soumis.
M. Lévesque (Chauveau) : C'est
intéressant, ce que vous mentionnez. Donc, je comprends que plus le nombre est
élevé, plus ça peut soulever des défis d'identification à la culture nationale.
Puis on ne vous a pas posé la question, je pense, ça n'a pas été posé, là. Dans
la consultation actuelle, le 45 000, 35 000, 25 000, est-ce que
vous avez un nombre en tête que vous privilégiez? Je comprends que vous êtes d'accord
avec le principe de réduction par rapport au statu quo ou encore à
l'augmentation, mais du volet nombre, là, avez-vous une opinion claire ou une
opinion sur ce sujet-là?
La Présidente (Mme Poulet) : Malheureusement,
c'est tout le temps qu'il nous reste. Alors, M. le député de l'Acadie, la
parole est à vous pour une période de 9 min 9 s.
M. Morin : Merci. Merci, Mme
la Présidente. Alors, bonjour, M., merci d'être... d'avoir produit votre
mémoire. Merci d'être avec nous virtuellement avec la commission. Mon collègue
vient de vous poser une question. On n'a pas eu le bénéfice de votre réponse.
Alors, moi, sur mon temps, je vais vous permettre de répondre, on ne voudrait
pas vous laisser en plan comme ça.
M. Santarossa (David) : Oui,
parfait. Merci. Donc, à nouveau, puisque l'augmentation de la population
demande davantage de services, la suite logique me semble... le raisonnement me
semble assez logique, bien, je miserais sur 25 000 personnes, qui me
semble totalement raisonnable dans les circonstances, à plus forte raison
considérant qu'on est dans un contexte de minorité culturelle, c'est-à-dire que
le Québec forme une minorité culturelle en Amérique du Nord. Donc, il devrait y
avoir un principe de précaution qui devrait s'appliquer.
• (11 h 50) •
Donc, c'est-à-dire que, devant un
système... devant une situation qui est, comment dire, instable, difficile à
prévoir, imprévisible, c'est-à-dire comment ces personnes-là vont s'intégrer au
Québec. On espère évidemment, je le répète, que ça se passe très bien, mais que
c'est difficile donc... c'est-à-dire qu'on ne peut pas obliger les gens à se
franciser non plus. On ne peut pas obliger les gens à écouter de la musique
québécoise, à s'intéresser à l'histoire, au cinéma, etc. Donc, devant une
situation imprévisible, bien, le principe de prudence me semble aller de soi.
Donc, je miserais beaucoup plus sur le 25 000 immigrants par année
plutôt que le 45 000 parce que, justement, la population immigrante
demande beaucoup de services. D'ailleurs, c'est assez documenté...
M. Santarossa (David) : ...documenté
que les immigrants, surtout au début de leur parcours, demandent plus de
services, parce que, justement, ils ont de la difficulté à s'intégrer, puis
c'est tout à fait normal, puis l'État est là pour les appuyer. Mais il y a une
réalité que ce type de personnes là demandent davantage de services, donc de
réduire ces personnes-là va donner une forme de répit au gouvernement, là.
M. Morin : Donc, si je vous
comprends bien, dans les trois scénarios qui sont proposés par le gouvernement,
vous optez pour le scénario 2-A, donc, qui est la cible la plus... la plus
basse, le 25 000. C'est très intéressant, la réponse que vous nous donnez.
Je ne sais pas si vous avez écouté les débats à l'Assemblée un peu plus tôt, ce
matin, mais mon collègue le député de Saint-Henri—Sainte-Anne posait,
justement, des questions dans cette optique-là, donc il aura la chance de vous
en parler, j'en suis sûr. Mais je trouve ça intéressant.
Ça m'amène à vous poser une autre question.
On... dans les consultations hier — et c'est très important pour
nous, les parlementaires — il y a plein de groupes, différents
groupes qui sont venus nous parler. Plusieurs groupes nous ont dit qu'au fond,
si on se ramassait avec une concentration puis un pourcentage de travailleurs
temporaires très importants c'est parce qu'on avait ouvert les vannes, entre
autres, le gouvernement avait ouvert les vannes aux alentours de 2019, 2020. Il
y a eu la pandémie, puis, après ça, woup! c'est reparti. Ce qui fait que,
maintenant, sur le territoire du Québec, il y a, grosso modo, là, une
approximation, à peu près 140 000 personnes qui ont des certificats, des
CSQ, qui seraient dans la voie d'obtenir, éventuellement, la résidence
permanente et la citoyenneté.
Si je prends votre argumentaire... il y en
a, à peu près, 140 000, puis que, dorénavant, le gouvernement en permet
25 000... ça va prendre combien de temps pour que tous ces gens-là passent
dans le système? Et, si on ne les passe pas, bien, il va arriver quoi? Ça va
prendre, quoi, six ans, sept ans, huit ans? Parce qu'ils sont... ils sont ici,
là. Ces gens-là, ils travaillent, ils sont logés, là. Ça fait que comment on va
être capables... Parce qu'à la fin, évidemment, les parlementaires, on va se
parler, là, on va conseiller... on va parler avec le ministre. Ça fait que
comment on va faire? Est-ce qu'on va les retourner chez eux? C'est quoi, votre
option?
M. Santarossa (David) : Oui,
bien là, moi, je suis un expert en éducation. C'est quand même difficile de
me... de me prononcer sur cette question-là. J'imagine qu'il y a certaines
personnes qui ont des contrats spécifiques en fonction d'un emploi. Après ça,
M. le ministre l'a proposé, bien, est-ce qu'on peut fermer l'immigration
jusqu'à tant que toutes ces personnes-là aient un statut permanent? Mais,
pendant ce temps-là, c'est-à-dire, le... c'est-à-dire que le 25 000 permet
de piger dans le 140 000, je ne me rappelle plus du chiffre exact, là.
Donc, oui, ça pourrait être une option, parce que, justement, ça permettrait de
régulariser ces personnes-là. Mais, en même... mais, en même temps, comme on
l'a dit tantôt, la situation actuelle n'est pas pérenne. Donc, oui, il y a
probablement certaines personnes qui vont devoir retourner chez eux au bout de
leur contrat de travail, parce que, justement, le nom le dit, c'est une
immigration temporaire, en théorie. Donc, c'est un peu... c'est un peu
sous-entendu que, lorsque tu viens au Québec pour un contrat temporaire, bien,
c'est temporaire.
M. Morin : Et si on prend le
même scénario, donc, le 25 000, quand on regarde ce qui est suggéré, dans
ce scénario-là, par le gouvernement, au niveau du regroupement familial, donc,
il y en aurait 5 800 qui seraient admis. Présentement, là, le gouvernement
en admet à peu près 10 000. Ma compréhension, c'est qu'il y en a à peu
près 40 000 en attente. Au Québec, c'est déjà plus de trois ans avant de
regrouper une famille, alors que, dans le reste du Canada, c'est 13 mois. Ça
fait que, si on prend votre cible, ça va prendre combien de temps pour
regrouper une famille? Six ans, sept ans, huit ans? Bien, à ce moment-là, on va
être... on va avoir des enjeux majeurs, sur la scène internationale, avec nos
obligations. Puis est-ce que vous avez une idée de la détresse que les gens
vivent quand ils attendent leurs proches, ceux qu'ils aiment, pendant trois,
puis là avec le scénario A, quatre, cinq, six, sept ans? Il y a des gens qui
ont été plus chanceux que d'autres, et ça s'est fait plus rapidement, puis,
maintenant, leur famille est réunie. Mais pour d'autres, ça crée véritablement
de la détresse.
Donc, comment...
M. Morin : ...on va... on va
concilier ça avec le scénario que vous suggérez?
M. Santarossa (David) : Bien,
je veux dire, je pense que l'important... C'est un enjeu important que vous
soulignez, mais un des éléments les plus importants, je pense, dans le système
de l'immigration, c'est que les jeux... les règles du jeu soient le plus clair
possible. Donc, s'il s'agit que ça prenne sept ou huit ans, bien, si les règles
sont le plus clair possible le plus rapidement possible et que la personne qui
décide d'immigrer au Québec adhère, donne son consentement à ce processus-là,
bien, je veux dire, à ce moment-là, le gouvernement québécois a fait ce qu'il
avait à faire. Donc, je vois difficilement, à un certain moment...
L'immigration, non plus, ce n'est pas un droit, ce n'est pas tout... Tous les
gens de la population mondiale ne peuvent pas se dire : Ah! je vais... je
vais venir m'installer au Québec. C'est un privilège de venir au Québec. Mais
je suis d'accord avec vous, il faut que les règles soient le plus clair
possible. Peut-être qu'elles n'ont pas toujours été claires, mais c'est un
appel issu du gouvernement pour que les règles soient le plus clair possible et
qu'un immigrant qui arrive ici sache dans quoi il s'embarque.
M. Morin : Je vous dirais, si
vous permettez, que c'est pire que ça, M., parce que le gouvernement a changé
les règles pendant la partie. Puis moi, je peux vous parler de Nathalie, Nicole
et Cydrille qui sont sur le bord de la porte. C'est un article dans La Presse
ce matin. Et elles sont ici. Elles ont un logement, c'est des travailleurs
temporaires, elles viennent aider nos gens qui sont à domicile parce qu'ils ont
besoin de services, donc elles rendent des services, et là elles ont reçu de la
part du gouvernement du Québec, le ministère de l'Immigration, un avis auquel
leur permis ne sera pas renouvelé. Ils vont devoir partir, ils ont huit jours.
Donc là, vous voyez, quand il n'y a pas de prévisibilité, puis je vous écoute
là-dessus, puis quand on change les règles dans le milieu du jeu, c'est ce que
ça donne. Et là on va priver des gens qui sont à la maison, qui ont besoin de
soutien à cause de l'absence de prévisibilité.
La Présidente (Mme Poulet) : Oui,
juste un petit moment. Oui, M. le ministre.
M. Roberge : Le collègue
est... a les meilleures intentions, mais est-ce que je peux faire un point
d'orgue parce qu'il y a quelque chose qui est inexact qui a été mentionné? En
aucun cas les trois dames auxquelles on réfère dans l'article et auxquelles
vous référez aussi, parce que c'est ce qui est écrit dans l'article, n'ont vu
leur permis être refusé par le gouvernement du Québec, c'est la mesure fédérale
qui s'est appliquée. Ce sont les fonctionnaires du Québec qui ont dû
transmettre cette information-là, mais d'aucune manière c'est une décision du
gouvernement du Québec. C'est écrit dans journal. Vous le soulevez, c'est très,
très bien, mais je veux quand même faire une mise au point, les gens nous
écoutent, puis malheureusement c'était inexact, donc je... avec respect, M....
cher collègue.
La Présidente (Mme Poulet) : M.
de l'Acadie, vous ne perdez pas votre... il vous restait 12 secondes.
Alors, allez-y.
M. Morin : En tout cas,
j'avais l'impression qu'il y avait des règles quand même un peu différentes qui
s'appliquaient à Laval, mais, bref, j'écoute la parole du ministre, mais il
n'en demeure pas moins que ça illustre très bien, quand il n'y a pas de
prévisibilité, quand il n'y a pas de dialogue entre les deux ordres de
gouvernement, bien, c'est ça que ça donne. Puis là, bien, on a des gens au
Québec qui n'auront pas de services auxquels ils ont droit. Je vous remercie.
La Présidente (Mme Poulet) : Parfait.
Alors, M. le député de Saint-Henri Sainte-Anne, la parole est à vous.
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup. Merci pour votre présentation, M. Santarossa. J'ai une question. Vous
parlez de l'impact puis de la pression sur les services publics. Est-ce que
vous avez évalué aussi, de l'autre côté, l'apport sur les services publics de
nouveaux arrivants? Là, je comprends que vous vous placez sur l'école
spécifiquement, mais moi, j'ai en tête les préposés aux bénéficiaires, j'ai
aussi en tête les éducatrices, les aides-éducatrices en CPE, j'ai aussi en tête
plusieurs autres cas, là, comme celui que mon collègue a relevé de La Presse
aujourd'hui. Ça fait que j'ai des fois l'impression qu'on soulève la colonne
des moins, là, mais qu'on nommait un petit peu la colonne des plus. J'aimerais
ça vous entendre là-dessus.
• (12 heures) •
M. Santarossa (David) : Oui.
Donc, ça me semble assez bien documenté, de plus en plus que... bien, la
question de... l'immigration, c'est-à-dire, augmente... augmente à la fois
l'offre et la demande, hein? Donc, on a donné mille et un exemple. Donc,
quelqu'un qui va s'installer, puis ce n'est pas un mécanicien qui va
s'installer dans un endroit, bien, il va aller à l'épicerie, il va avoir besoin
d'un dentiste, il va avoir besoin de ci, besoin de ça. Donc, au final, c'est
pas mal équivalent, c'est-à-dire, la demande en offre, la demande en service,
si on regarde à la grandeur du Québec. Quand on regarde spécifiquement dans le
monde de l'éducation, il y a des gens qui arrivent au Québec, il y en a qui
sont... il y a des enseignants qui étaient enseignants dans leur pays
d'origine, il faut... il faut le souligner. Souvent, ils doivent faire une
formation... comment dire, une formation d'appoint, en quelque sorte, notamment
les DESS qu'on offre à l'université TÉLUQ, mais... et... Ça, ce serait une
question importante à se poser, et je n'ai pas les chiffres, mais est-ce que la
population... est-ce que les enseignants... est-ce que la...
12 h (version non révisée)
M. Santarossa (David) : ...enseignante
est surreprésentée parmi la population immigrante par rapport à la population d'Afrique.
Mon intuition me dit qu'elle est sousreprésentée dans la population immigrante,
donc ça reste qu'elle, elle ne donne pas davantage d'enseignants que ce que
ferait la population native. Donc, elle ne vient pas régler le problème de du
manque d'enseignants. Une fois cela dit, est-ce que les immigrants,
individuellement, donnent un fier coup de main à la société québécoise? Bien
entendu. Il faut... Il faut le souligner, il y a beaucoup d'articles qui le
soulignent. J'ai vu beaucoup d'articles, notamment dans LaPresse
qui parlent des portraits d'immigrants dans différentes régions, et c'est tant
mieux, mais là la question, ce n'est pas une question individuelle, c'est
vraiment une question collective. Donc, est-ce que le groupe, est-ce que l'immigration
augmente la pression sur les services? Et la réponse, c'est oui.
M. Cliche-Rivard : Bien,
avec tout le respect que je vous dois, c'est avec l'individuel qu'on fait le
collectif quand même, là, je veux dire. C'est avec des succès et avec des
éducatrices, deux éducatrices, quatre éducatrices qu'on ouvre des CPE. C'est
avec la même chose qu'on ouvre des lits. Je veux dire, oui, il y a des
conséquences directes. Puis du moment où on va se mettre à couper dans les
services publics, il va y avoir des conséquences.
La Présidente (Mme Poulet) :
Merci. C'est tout le temps que nous avons. Alors, je cède maintenant la parole
au député d'Arthabaska.
M. Boissonneault : Merci,
Mme la Présidente. Merci, M. Santarossa, pour votre présentation. Je
trouve ça intéressant parce que vous... Vous faites une différence entre l'intégration
linguistique et l'intégration culturelle. Si on parle de l'intégration
culturelle, est-ce qu'il y a des mesures qui sont mises en place? En quoi ça
peut être une histoire de succès? Puis qu'est ce que ça fait si ça ne
fonctionne pas? Quelles sont les conséquences?
M. Santarossa (David) :
Bien, il y a... Il y en a, ici et là, qui sont... On pourrait faire toute une...
toute une longue liste. Moi, ce que je remarque, c'est que là, la principale
difficulté, le principal défi, c'est dans les endroits où il y a une forme d'homogénéité
ethnoculturelle, donc, dans certains quartiers où il y a un groupe particulier
qui est prédominant. Eh bien, là, l'intégration culturelle se fait très, très,
très difficilement. Et j'ajouterai que, bien souvent, la seule personne d'origine
canadienne-française, on va le dire comme ça, qui... que les jeunes vont
rencontrer, c'est l'enseignante, par exemple. Donc, il y a... il y a... il y
a... Et là, cette enseignante-là essaie de transmettre la culture québécoise d'une
manière ou d'une autre. Mais là il y a une espèce de : OK, est-ce qu'on
veut m'imposer quelque chose du haut vers le bas? Il y a comme quelque chose de
pas nécessairement naturel qui se fait. Or, dans un... dans des... dans des classes
où il y a davantage de mixité, eh bien, là, justement, cette confrontation-là
est beaucoup moins présente. À nouveau, il y a une différence. C'est-à-dire que
tous et chacun ont leur... leur identité individuelle. Tous et chacun ont leur
propre histoire en quelque sorte, mais il y a quelque chose comme une identité
commune. Et l'identité commune ne veut pas dire identité unique. Et c'est pour
ça qu'il y a quelque chose comme une identité nationale. Et il faut... il faut
miser sur cette identité-là. Puis je tiens à le souligner au passage, parce qu'on
en discute dans d'autres... en ce moment dans l'actualité, la question de la
Constitution québécoise. J'ai parlé tantôt d'une ambiguïté autour du terme «québécois».
Est-ce que la question d'une Constitution québécoise viendrait... Du moins, c'est
une tentative de clarifier le terme «québécois» comme quoi c'est un terme
national. Ce n'est pas un terme ethnique d'aucune manière. Mais il faut ajouter
à ça davantage de mixité, puis ça me semble assez important.
M. Boissonneault : Sur l'enjeu
de la langue, sur la francisation, je sais qu'il y a des observateurs qui
disaient qu'en fait ce qui est important comme donnée, c'est la maîtrise du
français. Mais vous aviez fait référence au fait qu'il y a de moins en moins de
gens, par exemple, sur l'île de Montréal, qui parlent français à la maison. Est-ce
qu'on peut dire que l'intégration linguistique est réussie lorsque les gens
maîtrisent le français, même s'ils ne le parlent ni au travail ni à la maison?
M. Santarossa (David) : Donc,
la langue, ce n'est pas qu'un outil de communication. Bien, je pense qu'au
Québec, particulièrement, on a une conception de la langue qui, justement, qui
est... qui est... qui n'est pas qu'un outil de communication, qui est vraiment,
qui est... qui est attaché spécifiquement à l'identité, ce qui n'est pas
nécessairement le cas dans tous les pays du monde, soit dit en passant, mais au
Québec, il y a un fort attachement à... un fort lien entre l'identité et la
langue. Donc, il ne s'agit pas seulement que de... que d'être capable de
commander un café au Tim Horton pour qu'on décide ce qu'est une intégration
réussie. Et ça, une intégration réussie, c'est... c'est à nous, collectivement,
de déterminer ce qu'est une intégration réussie. Donc...
La Présidente (Mme Poulet) :
Merci. C'est tout le temps que nous avons. Je m'excuse de vous interrompre.
Alors, je vous remercie de votre contribution aux travaux de la commission. Je
suspends quelques instants, le temps que le prochain groupe s'installe.
(Suspension de la séance à 12 h 05)
(Reprise à 12 h 06)
La Présidente (Mme Poulet) :
Alors, on reprend les travaux. Nous accueillons maintenant des représentants de
l'Université du Québec à Trois-Rivières. Je vous demande de vous présenter et
je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé. Par la
suite, on va procéder à la période d'échange. Alors, la parole est à vous.
M. Blanchette (Christian) :
Parfait. Christian Blanchette, recteur de l'Université du Québec à
Trois-Rivières, Mme Catherine Lazure, qui est registraire et Mme Caroline
D'Astous, qui est directrice du Bureau des relations gouvernementales. Écoutez,
merci de nous accueillir.
L'UQTR, c'est une université qui accueille
environ un peu plus de 15 000 étudiants, principalement en Mauricie, au
Centre-du-Québec et dans Lanaudière. Nous sommes une université de taille
moyenne depuis plusieurs années, notre intensité de recherche est en croissance
continue. La qualité de notre recrutement de professeurs, leur positionnement
en recherche, nos niches d'excellence et notre recrutement d'étudiants
québécois et internationaux ont contribué à cette transformation. Deux grandes
conséquences de cette évolution, c'est que depuis l'hiver 2024, on nous
reconnaît parmi les universités canadiennes à vocation intensive de recherche
et que depuis 5 à 6 ans, la proportion des étudiants internationaux qui
nous fréquentent était naturellement en croissance. Pourquoi en croissance?
Parce que dans les secteurs hautement spécialisés, le recrutement d'étudiants
québécois ne suffit pas à combler les besoins en talents de nos équipes de
recherche pour qu'elles mènent à bien leurs projets de recherche financés.
En 2023, l'UQTR comptait 18 % de ses
étudiants qui étaient des étudiants internationaux. Depuis la mise en place
du... des échanges et des discours sur les étudiants internationaux, bien, il y
a eu une chute. Aujourd'hui, c'est 14 % qui le sont. Mais si on examine le
recrutement des nouveaux étudiants, en 2023, nous accueillons
1062 nouveaux étudiants internationaux. En 2024, c'était 489 et cette
année, ce sera 172. C'est une baisse extrêmement importante. Juste dans la
dernière année, en nouveaux étudiants, c'est une baisse de 65 %. C'est un
renversement de tendance qui est à la fois inquiétant et désolant.
J'aimerais clarifier une chose, les
étudiants internationaux ne sont pas à proprement parler des immigrants.
Certains, bien sûr, aimeraient l'être, mais la très grande majorité d'entre eux
retournent dans leur pays ou, à tout le moins, quittent le Québec. Je partage avec...
Ils sont par ailleurs d'incroyables ambassadeurs pour le Québec. Je partage
avec vous un exemple, M. Gilbert Houngbo, qui est un diplômé de l'UQTR, dans
les années 80, du Département des sciences comptables. Il a une histoire
remarquable. Africain originaire du Togo, il est venu étudier au Québec à titre
d'étudiant étranger. Il a diplômé. En fait, pour diplômer, il a dû faire
modifier les règles de l'examen de l'ordre des comptables, qui était alors
réservé aux seuls Canadiens. En 1994, il est rentré en Afrique après avoir
œuvré au Québec pendant plusieurs années. Il a alors pris la direction des
finances de la Banque internationale du Mali. Deux ans plus tard, il rejoint le
Programme des Nations Unies pour le développement, le PNUD, où il occupe plusieurs
postes pour devenir éventuellement le directeur du PNUD Afrique et à ce... à ce
titre, sous-secrétaire général des Nations Unies. En 2008, il devient premier
ministre du Togo. En 2016, il accepte la présidence d'un organisme des
Nations-Unies, le Fonds international de développement agricole et en 2022, il
prend la direction de l'Organisation internationale du travail. M. Houngbo est
un produit de l'UQTR et du Québec. Il a le Québec tatoué sur le cœur. Dans son
quotidien, il s'est d'ailleurs entouré de Québécoises et de Québécois. Une
partie de sa famille est toujours au Québec. Il y revient.
• (12 h 10) •
Ces histoires d'ambassadeurs de cœur au
sein de la population des étudiants internationaux, elles sont multiples. À
l'UQTR, nous recevons des étudiants...
M. Blanchette (Christian) :
...internationaux provenant de 80 pays. Chacun porte son histoire, ses
aspirations et ses ambitions. Dans les régions où l'UQTR est présente, les
étudiants internationaux sont appréciés à travers leur implication sociale et
communautaire ainsi que par leur apport au développement économique. Ils sont
un atout pour le Québec, qu'ils restent ici ou qu'ils s'installent ailleurs et
ils contribuent au développement du Québec.
À l'UQTR, nous accueillons des étudiants internationaux
à tous les cycles d'enseignement dans les programmes de premier cycle. Ils
amènent souvent une diversité culturelle bien plus grande que celle de la
population de nos régions. Vivre et travailler avec la diversité culturelle
prépare l'ensemble de nos étudiants à une vie professionnelle où ils devront
vivre cette diversité.
Par ailleurs, en 2024, nos étudiants
internationaux étaient à 42 % inscrits dans des programmes de recherche de
deuxième et de troisième cycles. Donc, ils participent à l'avancement de la
science et de l'innovation. Je vais vous donner trois exemples de l'importance
des étudiants internationaux. Le Pr Kodjo Agbossou, qui est le titulaire de la
Chaire de recherche Hydro-Québec en gestion transactionnelle de l'énergie électrique,
le professeur Yannick Audet-Delage, du Département de biologie médicale, qui
travaille sur la réponse métabolique et le développement de la résistance des
tumeurs au traitement par chimiothérapie, et la Pre Samaneh Shahgaldi, Chaire
de recherche du Canada sur les piles combustibles à base de lignine, tous sont
des leaders dans des domaines de pointe reconnus comme essentiels pour
l'économie de demain. Ces professeurs attirent dans leurs laboratoires près de
50 % d'étudiants internationaux, la crème de la crème dans leur domaine.
Le Québec a réussi à les attirer. Ces étudiants internationaux sont un
investissement et non pas un boulet à nos chevilles. Et s'ils étaient
immigrants, ce serait des immigrants déjà intégrés. La population étudiante
internationale représente le bassin idéal des candidats à l'intégration à la
culture est la nation québécoise. En effet, leur intégration et leur
apprentissage de la vie et à la culture québécoise se font rapidement pendant
leurs études. Rencontrez-les en première année, ils maîtrisent le français avec
gêne, en deuxième année, avec assurance et en troisième année avec une aisance
remarquable. Et là, je pense aux étudiants au troisième cycle. Ils sont des
personnes hautement qualifiées, disponibles pour nos entreprises, pour nos
gouvernements. Ils nous aideront, comme leurs collègues québécois, à atteindre
nos objectifs de développement économique en occupant des emplois qui existent
ou encore en en créant de nouveaux.
Notre débat public laisse à penser que
nous sommes moins ouverts à l'accueil des étudiants internationaux que nous
l'étions. Ce débat public a terni l'image du Québec à l'international. Il nous
a rendus moins attractifs. Le recrutement des étudiants internationaux, c'est
une course aux talents, une course menée entre pays développés. Le bilan de
notre recrutement international des deux dernières années a bien démontré que
nous perdons cette course. Les médias sont attentifs aux débats que nous avons.
Les déclarations qu'on entend font le tour du monde et elles ont un impact
particulièrement important dans les bassins de recrutement des étudiants
francophones. Depuis le projet 74 et depuis l'arrivée des quotas, la
réaction a été instantanée, le Québec a perdu son attraction et son lustre. Les
universités comme l'UQTR en font les frais. Par exemple, fin mars 2025, les
demandes d'admission à l'UQTR en provenance des étudiants internationaux
avaient fondu de 53 %, et ce n'est que 36 % des quotas qu'on nous a
attribués qui ont été comblés en 2025.
Rappelons que, selon les déclarations
publiques, la politique des quotas devait permettre de contenir les
inscriptions des nouveaux étudiants internationaux au niveau de 2024. Mais il
faut savoir que la manière actuelle de déployer la politique des quotas ne
permettra pas de simplement contenir les inscriptions au niveau de 2024, elle
est structurée pour amplifier des baisses dans les prochaines années. La
prémisse était que les quotas devaient contraindre les nouvelles inscriptions
sans affecter les inscriptions actuelles. En cours d'année, on nous a avisés
que les renouvellements de visa faisaient partie des quotas. Rappelons...
rappelons que la totalité des étudiants de troisième cycle et la grande
majorité des étudiants de maîtrise doivent renouveler leur visa. Conséquemment,
les étudiants présentement inscrits dans les programmes de recherche maîtrise
et de doctorat vont s'accaparer une part importante des quotas. Pour l'UQTR, ça
veut dire que 1 000 étudiants devront renouveler leur quota sur un
quota de 2 238.
Donc, du point de vue l'UQTR, il ne suffit
pas de trouver un chiffre idéal pour le nombre d'étudiants internationaux à
recevoir, il faut nous assurer que l'ensemble des universités puissent combler
les quotas qui leur ont été attribués. Il faut relever les manches, renouer le
dialogue avec les autres pays, rappeler que le Québec et ses universités sont
des lieux...
M. Blanchette (Christian) : ...ouverts
et hospitaliers. Au-delà des chiffres de la chute des inscriptions recensées,
c'est toute la filière de recherche et d'innovation qui sont fragilisées. Je ne
lirai pas ici nos recommandations, j'en rajouterai une par ailleurs : que
le gouvernement n'inclue pas les renouvellements des visas dans les quotas de
CAQ attribués aux universités. L'objectif, vous aurez compris, c'est de renouer
un dialogue pour trouver un nouveau modus operandi. C'est le désir de toutes
les universités. Redevenons une destination de choix pour les étudiants
internationaux pour ainsi atteindre les quotas attribués et développer le Québec.
Merci.
La Présidente (Mme Poulet) : Merci
beaucoup. Alors, on va débuter la période d'échange avec M. le ministre.
M. Roberge : Merci, Mme la
Présidente. M. le Recteur, l'équipe qui l'accompagne, je vous salue. Merci pour
votre présentation. J'aime bien le terme «ambassadeur de cœur». Je suis
conscient qu'il y a beaucoup d'étudiants étrangers qui viennent étudier au
Québec. On est passés d'environ 50 000 à quelque 120 000, pas
seulement dans les universités, on compte les cégeps, on compte le primaire, le
secondaire, etc., mais on est passés d'environ 50 000 à 120 000, qui
est une hausse considérable. Dans notre cahier de propositions, on propose une
réduction d'environ 15 %, mais attention, ça compte tout le monde, on ne
cible pas spécifiquement le réseau universitaire, encore moins les cycles
supérieurs. La discussion reste à faire. Le Parti québécois propose une
réduction, lui, de 60 %, donc de retourner à 50 000. Mais il n'y a
personne qui dit qu'on n'en veut plus. Après ça, on peut débattre de politiques
publiques sereinement.
Il y a des étudiants qui viennent ici et
qui deviennent des... et même s'ils repartent, deviennent, je vous dirais, des
actifs pour le gouvernement québécois et pour la nation québécoise, puisque
vous avez donné un exemple éloquent... Évidemment, là, c'est l'exemple parmi
les exemples, je ne dirai pas l'anecdote...
M. Blanchette (Christian) :
...M. le ministre.
M. Roberge : ...je ne dirai
pas l'anecdote, là, mais, tu sais, on n'en a pas 300 comme ça, c'est assez...
c'est extraordinaire, puis on en est fiers, puis je comprends que vous en êtes
fiers aussi. Mais, à divers niveaux, des gens qui viennent ici, se
familiarisent avec la culture québécoise, la langue, repartent, peuvent être ensuite
des alliés de plein de manières. Mais, quand on fait la planification de
l'immigration et qu'on considère pour la première fois l'immigration permanente
et temporaire... Vous dites : Les étudiants étrangers ne sont pas des
immigrants. On peut bien dire d'abord : Nous planifions le nombre de
résidents non permanents. Différents termes, même réalité : Il y a combien
de Québécois sur le territoire? On va se dire ça de même. Il y a des gens qui
sont ici de manière permanente, d'autres, temporaire. Bon. On peut bien dire...
au lieu de temporaires, on peut bien dire non permanents, là, mais, à un moment
donné, là, hein, on va s'entendre, on doit discuter de ça. Et même si ces
étudiants-là repartent et deviennent, on le souhaite, des alliés pour le
Québec, et même si les étudiants qui restent ici enrichissent réellement le
tissu social puis économique, parce que sont des diplômés du Québec, il reste
qu'on est passés de 50 000 à 120 000. On met, dans le cahier, au jeu
une proposition de retourner autour de 110 000, d'autres, c'est
50 000. Bon. Jusqu'où on va? Ce n'est pas infini. On ne peut pas passer de
50 000 à 120 000 sans se poser des questions puis dire : Bien,
si c'est 140 000, ce sera 140 000, puis, si c'est 190 000, ce
sera 190 000. À un moment donné, il faut qu'on se dise : Oui, mais là
ces étudiants-là qui contribuent dans nos universités puis qui deviennent des
alliés ensuite, ils occupent quand même des logements, par exemple. À
Trois-Rivières, le taux d'inoccupation, les derniers chiffres que j'ai obtenus,
ça... fin 2024, là, ça fait presque un an, mais bon, on était à peu près à
0,9 %, le taux d'inoccupation des logements. On est peut-être à 1/10
au-dessus, là, mais la cible, ce serait 3 %. Donc, on est loin.
Donc, considérant tout ça, est-ce que vous
ne pensez pas qu'on devrait s'assurer d'avoir au moins une stabilisation ou une
légère diminution du nombre d'étudiants étrangers à la grandeur du Québec,
sachant qu'on peut privilégier, je veux dire, les gens en région puis les gens
qui sont francophones? Moi, je vais vous dire, j'ai un petit a priori, là.
• (12 h 20) •
M. Blanchette (Christian) : Écoutez,
le... la question du logement est intéressante. Et moi, je vais... je vais
m'attarder aux étudiants universitaires. Les étudiants universitaires, écoutez,
il y a eu une montée haut 40 000 jusqu'à 57 000. Maintenant, c'est
50 000 étudiants universitaires qui sont des étudiants internationaux...
M. Blanchette (Christian) : ...quand
on examine la question du logement, la crise du logement est partout au Québec,
la grande question, c'est : Découle-t-elle de la présence d'étudiants
internationaux et quel est le poids des étudiants internationaux sur ce... sur
cette crise-là?
À Trois-Rivières, je vais prendre
l'exemple de notre université, c'est seulement... En fait, il y a
11 villes universitaires au Québec, si on rassemble, là, les villes de la
région montréalaise en une ville, il y a 11 villes universitaires au
Québec et elles sont à peu près toutes des destinations universitaires. Les gens,
pour les fréquenter, doivent se déplacer, qu'ils soient Québécois ou
internationaux. À Trois-Rivières, deux tiers des étudiants qui nous
fréquentent, qui étudient à temps plein ont une adresse permanente qui est à
plus qu'une heure du campus en auto. Donc, essentiellement, c'est à peu près
6 000 étudiants québécois et internationaux qui se déplacent vers la
Ville de Trois-Rivières pour se loger. On a... Les étudiants se logent dans des
logements qui sont dans bien des cas bien différents de ce qu'une famille a besoin.
Nous, on n'a jamais... on n'a jamais eu de difficulté à trouver du logement à
nos étudiants.
En 22, quand on a commencé à avoir des
enjeux, on a mis en place un service pour justement aider la communauté à
accueillir les étudiants internationaux. On a eu un ou deux étudiants qui ont
utilisé les règles d'urgences qu'on a eus, arrivés pendant le trimestre, il n'y
avait pas de logement à l'hôtel pendant une semaine, deux semaines, mais sinon
on a placé tous nos étudiants. Mais on s'est dit : Le discours public est
tel que les universités... les étudiants sont vus comme un poids, on va
travailler à développer nos résidences étudiantes. Avec des partenaires, en une
année, on a augmenté de 440 places nos places en résidences, 43 % de
plus. Nous partions de 1 000, nous sommes à 1 440 maintenant. On a
fait un travail où, présentement, on n'a vraiment pas de poids de nos étudiants
sur le marché locatif à Trois-Rivières. Il y a une présence, mais c'est ces
étudiants québécois et internationaux qui y vont. 76 % de nos étudiants
partagent les logements. Dans bien des cas, ils sont dans des résidences
étudiantes, dans des studios, dans des résidences partagées. Donc, quand on
examine ce poids global à Trois-Rivières, il est moindre.
À l'échelle du Québec, en 2018, il y avait
314 000 étudiants universitaires au Québec au total, étudiants internationaux,
étudiants québécois. Cette année, ce sera 318 000. Il n'y a pas eu de
croissance majeure du nombre d'étudiants... du nombre d'étudiants au total au
Québec. Et, puisque les Québécois autant que les internationaux utilisent le
marché locatif quand ils vont vers ces 11 villes universitaires, on ne
peut pas dire qu'il y a eu de la part des étudiants universitaires une pression
très, très accrue sur le marché locatif. Il y a une pression qui était là. Ils
ont besoin du marché locatif. L'UQTR a mis en place des mesures, l'UQAR est en
train de construire des résidences, l'UQO, l'UQAT. À travers le Québec, des
résidences se construisent pour réduire la pression des étudiants, qu'ils
soient québécois ou internationaux, sur le marché locatif, mais ce n'est très
certainement pas ces étudiants qui ont créé la crise du logement.
M. Roberge : On s'entend.
Puis, je veux dire, il faut faire attention. Vous ne le dites pas, je ne le dis
pas non plus. Je veux dire, on n'est pas à l'époque d'immigrants voleurs de
jobs, d'immigrants ou d'étudiants voleurs d'emplois, ou de logements, ou... tu
sais, on n'ira pas là. On considère simplement... Je regarde tous les étudiants
internationaux, résidents non permanents, si vous préférez, je me dis, quand on
passe de 50 000 à 120 000, c'est sûr que, dans cette époque-là, pas
dans les deux, trois dernières années, il y a un impact sur le logement. Après,
quand même 8 millions de Québécois, il n'y a pas que ces personnes-là qui
sont logées. On en tient compte, on tient compte de tout ça. Puis c'est sûr
qu'après, si on sous-catégorise, bien, on va minimiser l'impact si on
dit : Oui, mais si on regarde juste les cycles supérieurs, ou si on regarde
juste l'UQAR. Mais l'exercice de la planification pluriannuelle, ça dit :
Bien, on va regarder toutes les catégories d'immigrants permanents, toutes les
catégories de résidents non permanents, ceux qui relèvent du Québec, ceux qui
relèvent d'Ottawa, une vision 360. On va considérer la richesse des
étudiants étrangers, l'apport intellectuel, l'apport à la diversité culturelle,
l'apport à la capacité de recherche. On va regarder aussi les logements
occupés, on va... C'est vraiment 360. Même chose pour les gens qui arrivent
puis qui sont des travailleurs étrangers temporaires en région, bien, on
considère aussi que, dans certains cas, ils maintiennent la dernière épicerie
du village ouverte, là, puis on ne se mettra pas à dire : Bien là, si...
Il faut couper partout mur à mur, tu sais, il faut avoir une approche...
M. Roberge : ...équilibré.
Vous nous parlez du... de certains
programmes très, très précis. Je vais aller... Page 14, vous recommandez que le
ministère inclue les professeurs d'université à la liste des emplois
d'exception, parce que, oui, il y a des étudiants étrangers, mais il y a des
professeurs, aussi, qui arrivent, puis ça prend ça. On veut... on veut de la
mobilité puis on veut accueillir des sommités de l'international. Je veux simplement
vous signifier que le nouveau programme, qui est méconnu, parce que tout
nouveau encore, le Programme de sélection des travailleurs qualifiés... des
fois, je dis «travailleurs du Québec» parce que le «q»... mais on va dire que
c'est les deux, «qualifiés au Québec»... volet 4, Talents d'exception, est
sélectionné, privilégié par l'entreprise... notre partenaire, le Fonds de
recherche du Québec.
Donc, si vous voulez attirer, notamment,
des chercheurs américains, là, qui fuient, on va dire, les lubies de notre
voisin du Sud, on va vous donner un coup de main, là, je veux vous le dire, là,
on va vous donner un coup de main. Ça va être bon, humainement, pour ces
gens-là, puis ça va être bon pour notre capacité de recherche. Pour ce qui est
des étudiants, le PEQ-Diplômés est suspendu pour l'instant, voyons s'il sera
renouvelé, ou quand, ou dans quelles conditions. Mais, en attendant, je veux
souligner que... le nouveau programme PSTQ n'a fait que quelques invitations, à
ce moment-ci, mais pour... là, on planifie 2026 jusqu'à 2029... il y aura, par
milliers, des invitations pour des étudiants diplômés du Québec dans le volet
1, parce qu'il y a quatre volets. Est-ce que vous avez analysé les opportunités
de ce nouveau programme là? Est-ce que vous y voyez des voies d'accès? Je sais
que ça n'a pas encore donné ses fruits en ce moment, mais, pour les années à
venir, qu'est-ce que vous en pensez?
M. Blanchette (Christian) : Bien,
en fait, le grand enjeu d'expérience de travail, c'est que, quelquefois,
pendant leurs études, ils n'ont pas à même... ne sont pas à même de trouver une
expérience de travail qui les qualifie pour ces programmes. Cela dit, quand on
parle de la rétention des diplômés internationaux au Québec... et la rétention,
c'est un enjeu d'immigration, c'est un enjeu de vouloir faire en sorte que ceux
et celles qui ont étudié ici, qui ont appris nos manières de faire, qui ont été
formés correctement au Québec puissent contribuer à l'économie québécoise. Les
éléments qui guident l'immigration sont différents de ceux qui guident le choix
d'une université pour aller étudier, même si ceux qui ont un projet immigration
en venant vont les examiner. L'immigration, c'est un phénomène familial, avant
tout, et beaucoup de ces programmes considèrent l'immigration comme un
phénomène individuel.
Un... nos étudiants au doctorat, à la
maîtrise terminent leurs études, ils sont à la fin de la vingtaine, début de la
trentaine, souvent, à l'âge où ils commencent une famille, et, s'ils ont laissé
la famille dans le pays au moment de venir étudier, bien, dans le choix du lieu
où ils vont aller exercer leur profession, ils vont choisir là où ils pourront
réunir leur famille, là où ils pourront avoir la citoyenneté, la résidence
permanente au Canada le plus rapidement possible.
Lors de la première réforme du PEQ, qui
avait été faite par le ministre Jolin-Barrette, on avait rajouté une certaine
période de temps nécessaire pour obtenir le statut de résident permanent. Eh
bien, ce qu'on a examiné à travers les universités, de manière anecdotique, je
le conçois, M. le ministre, nous parlons à nos diplômés au moment de la
diplomation puis on leur demande : Que ferez-vous? Bien, le nombre
d'étudiants sortant des programmes de génie, de doctorat, de recherche, que
nous trouvions brillants, que nous espérions voir s'établir au Québec... qui
nous ont dit, que ce soient à la rectrice de l'Université Laval, recteur de
l'UQAQ, ou chez nous... se faire dire : Bien, on va aller en Ontario,
parce que la résidence permanente, je pourrai l'obtenir plus rapidement. Il y a
eu un changement qui a été fait au PEQ, par la ministre Fréchette, qui a
redressé cette situation-là.
• (12 h 30) •
Et je pense que l'analyse, présentement,
que feront nos diplômés, c'est : Comment... combien de temps cela prendra-t-il
pour qu'au Québec je puisse faire venir ma conjointe, mon conjoint, nos
enfants? Quelles seront les conditions de... que mon conjoint et ma conjointe
verront quand ils viendront ici? Pourront-ils avoir la résidence permanente? Et
je pense qu'il nous faut, quand on parle de la rétention des étudiants
internationaux, réfléchir l'ensemble de l'oeuvre comme un phénomène
d'immigration familiale. Le Conseil supérieur de l'éducation, d'ailleurs, avait
fait une étude... un avis sur l'éducation et l'immigration, là, en 2021,
j'avais dirigé les travaux pendant trois ans, et ça nous avait vraiment indiqué
comment agir pour assurer que cette transition importante est nécessaire. Et
d'ailleurs votre...
12 h 30 (version non révisée)
M. Blanchette (Christian) :
...pourtant j'avais mis en place beaucoup des mesures à ce moment-là qui
étaient nécessaires pour réussir l'intégration.
M. Roberge : C'est
intéressant ce que vous... Perspective très intéressante. J'aime ça que les gens
nous amènent des réflexions qu'on n'a pas entendues avant, qui nous amènent à
creuser ensuite. Merci pour cet éclairage-là. Le volet 1 du nouveau PSTQ, vous
avez raison, exige une expérience de travail. Mais à la fin d'un baccalauréat,
on a un permis de travail, pas de diplôme, excusez-moi, d'au moins trois ans
qui permet d'acquérir cette expérience de travail. Et l'intérêt aussi, en
prenant ce virage-là, tranquillement, en testant cette voie-là, c'est de dire
que ce sont des gens qui, oui, sont venus au Québec, sont diplômés du Québec.
Pas de problème de reconnaissance d'acquis, excellent, maîtrisent de la langue
française, évidemment.
La Présidente (Mme Poulet) :
Merci. C'est tout le temps que nous avons.
M. Roberge : Je pensais
que j'avais 16 min 30 s.
La Présidente (Mme Poulet) :
Non. Le temps était reparti, là, parce qu'on est... On a commencé en retard.
M. Roberge : Je suis
désolé. Bien, je me suis fait voler ma minute. Merci.
La Présidente (Mme Poulet) :
On a commencé… Alors, le député de...
M. Morin : L'Acadie,
La Présidente (Mme Poulet) :
...l'Acadie, la parole est à vous.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. Alors, M. le recteur, bonjour. Mme d'Astous, directrice du Bureau
des affaires gouvernementales, Mme Lazure, registraire, bonjour. Merci.
Merci d'être là. Merci pour votre mémoire. J'aimerais parler avec vous dans un
premier temps, parce que M. le ministre, il a fait référence à toute la
question du recrutement des professeurs. C'est à la page 14, dans votre
document. Et vous... vous souhaitez effectivement que les professeurs soient
ajoutés à la liste des emplois d'exception parce qu'effectivement il y a une
compétition à l'international. Je vous écoutais attentivement. Dans votre
exposé, vous avez les laboratoires de recherche. On sait que, présentement, aux
États-Unis, c'est n'est pas toujours facile pour la science et les chercheurs. Alors,
peut-être qu'il y en a qui voudront venir ici. M. le ministre faisait référence
à son nouveau programme, le PSTQ volet 4 pour les emplois hautement
qualifiés. Sauf que quand on regarde le site du ministère pour ce volet-là, récemment,
au mois d'août, on a envoyé quatre invitations, donc quatre personnes. Puis ce
n'était pas juste à Trois-Rivières. C'est pour l'ensemble. Est-ce que vous
pensez que ça répond à vos préoccupations? Est-ce que c'est un...
M. Blanchette (Christian) :
Bien, écoutez, on avait un système qui... On a un système en place, là, avec le
Canada et le Québec qui classifie certaines professions en pénurie comme étant...
comme étant... ayant voie... une voie d'accélérée pour accéder à la résidence
permanente et au Canada. On a retiré l'année dernière le titre de professeur d'université
en disant qu'il n'était pas en pénurie. Ce qu'on ne se rend pas compte, c'est
que, dans le fond, un professeur d'université, c'est un titre générique, mais
qui décrit... chacun d'entre eux sont des personnes hautement spécialisées qui
ont, de par la nature même de leur formation, et qui sont une denrée rare. Donc,
les professeurs de talent, nous sommes constamment en compétition avec d'autres
pays qui cherchent à les attirer, avec d'autres provinces qui cherchent à les
attirer. Et les recteurs et les rectrices de Québec, quand on a vu ce
changement-là, on était déboussolés parce que ça nous enlève cette facilité de
pouvoir négocier avec ces personnes hautement qualifiées et les attirer chez
nous pour qu'ils viennent créer leur laboratoire, enrichissent les laboratoires
qui existent déjà et faire en sorte qu'il y ait de l'innovation au Québec a un
plus grand rythme encore qu'il y en a maintenant. Donc, c'est un boulet qui est
particulièrement important pour nous. Tous les délais qu'on crée dans l'attraction
et dans les transitions de ces personnes hautement qualifiées vers le Canada,
vers le Québec, ça crée des enjeux de baisse de compétitivité pour nos
universités.
M. Morin : Je vous
remercie. Souvent, quand vous réussissez à attirer, j'imagine, pas toujours,
mais ça doit arriver assez souvent que la personne, l'enseignant va avoir un
conjoint, conjointe. On sait qu'au Québec, à cause justement des quotas pour le
regroupement familial, c'est excessivement long, beaucoup plus long qu'ailleurs
au Canada. Est-ce que c'est un enjeu supplémentaire pour vous pour attirer...
M. Blanchette (Christian) :
...je pense que mes... Comme je le mentionnais au ministre, l'immigration est
un phénomène familial avant tout. Ce n'est pas un individu qu'on accueille. Qu'elle
soit la...
M. Blanchette (Christian) :
...brillante au monde, qu'il soit le plus brillant au monde. Ces personnes-là
veulent venir avec leur famille et toutes les embuches qu'on peut créer, mettre
en place pour retarder l'arrivée de leur famille sont des enjeux pour vous.
M. Morin : D'autant plus que
j'imagine, mais vous me corrigerez si je fais erreur, quand... quand vous
recherchez un chercheur, souvent quelqu'un qui va avoir un doctorat ou même un
postdoctorat, c'est souvent des gens qui ont une mobilité, alors ils peuvent
aller ailleurs, ils ne sont pas... Donc, il faut que vous soyez capable de...
finalement de démontrer que Trois-Rivières et votre université est tellement
exceptionnelle qu'ils vont aller chez vous. Ça ne doit pas être toujours
facile.
M. Blanchette (Christian) :
Bien, écoutez, on recrute à l'international dans des niches d'excellence que
nous avons, dans lesquelles nous nous situons au-dessus des autres, au Québec
ou ailleurs. Écoutez, l'UQTR, l'Institut de recherche sur l'hydrogène, c'est
l'exemple qu'on donne, Cinq des chercheurs les plus cités au...
10 chercheurs les plus cités au monde dans ce domaine-là sont à... sont à
Trois-Rivières. Donc, quand on arrive dans des niches d'exception comme
celles-là, et on en a quelques-unes, bien, les gens veulent venir chez nous.
Cela dit, toutes les conditions d'arrivée de leur famille font partie de
l'équation pour eux.
M. Morin : Très bien, je vous
remercie. Dans le sommaire de vos recommandations, à la page trois, vous
mentionnez entre autres, le numéro sept, « Que le gouvernement arrime sa
vision et le mandat des délégations du Québec avec les orientations
stratégiques des universités ». On voit présentement, et je ne pense pas
que ça a été changé dans les dernières 48 heures, que même sur le site du
ministère des Relations internationales ou le ministre de l'Immigration, on
invite les gens, enfin, à faire du recrutement à l'étranger pour aller chercher
des cerveaux. Sauf qu'après quand... on dirait que c'est tout compartimenté.
Donc, après, quand on frappe, le ministère de l'Immigration, bien là c'est très
compliqué. Alors, je comprends que c'est ce que vous voulez faire, que
finalement le Québec envoie un message clair à tout le monde, pour ne pas pour
que la main gauche dise quelque chose puis que la main droite fasse une autre
affaire.
M. Blanchette (Christian) : Ah
oui! Il y a plusieurs grilles d'analyse qui sont utilisées pour déterminer
quels immigrants, quelles professions sont à privilégier. Il y a les grilles
d'analyse qui nous viennent de la classification canadienne des professions que
la CPNT utilise, commission des partenaires du marché du travail, ministère de
l'Emploi qui font des analyses de rareté de main-d'œuvre. Ce qu'il faut
comprendre, c'est que les universités, si elles forment des gens qui viendront
travailler dans différentes professions, dans leur planification, ne se résume
pas à des emplois qui sont en pénurie. Une université a un mandat de développer
le savoir, de former les gens dans tous les domaines, qu'ils soient culturels,
artistiques, sciences sociales, génie, tout ce qui est système ou gestion,
intelligence artificielle aussi. Notre mission elle est à travers les
disciplines. On peut comprendre qu'il y ait un désir gouvernemental de
privilégier certaines disciplines. Mais pour les universités, c'est l'ensemble
des espaces disciplinaires que nous voulons... dans lesquels nous voulons
recruter des gens. Et à l'international, nous recrutons dans tous les domaines.
Donc, de pouvoir mettre au jeu avec les délégations qui nous aident bien dans
nos maillages internationaux, les plans stratégiques des universités, les
orientations stratégiques, et qu'on puisse créer ce lien et que les
délégations... la personne qu'on veut recruter ait l'accès directement au
Québec le plus directement possible, parce que ces gens qu'on recrute souvent
viennent développer les nouvelles niches d'expertise que nous n'avions pas au
Québec. C'est ça qu'on veut attirer. Et c'est à travers les plans stratégiques
des universités qu'on les définit, ceux-là.
M. Morin : Donc, évidemment,
avec ce que vous dites, bien, ça permet l'innovation et donc de mieux
positionner le Québec au Canada puis sur la scène mondiale.
M. Blanchette (Christian) :
Tout à fait. Je vais vous donner un exemple rapide. Il y a 30 ans... avait
de la difficulté à obtenir des fonds de financement à l'Université de Montréal.
Il a pris des fonds de tiroir et a financé sa recherche parce que sa recherche
n'était... était jugée comme non pertinente par beaucoup de fonds
subventionnaires. Bien, ça, c'est le savoir-faire de l'Université de Montréal
qui a déterminé que cet investissement-là était nécessaire. Et vous voyez,
Montréal, le Québec sont devenus des niches importantes en intelligence
artificielle. C'est cette manière de voir à long terme que les universités ont
développé comme savoir-faire qui n'est pas présentement appliquée dans la
sélection des immigrants.
M. Morin : Oui. Je vous
remercie. Excellent exemple. Autre élément, le programme d'aide présentement
est suspendu. Est-ce qu'il y a des étudiants chez vous au deuxième ou au
troisième cycle qui sont arrivés, qui espéraient ou qui sont déjà dans le
programme puis que là, woups! Ils ne savent plus quoi faire. Ils n'ont
peut-être pas fini leur doctorat ou sur le point de le faire. Est-ce que c'est
une réalité que vous vivez?
• (12 h 40) •
M. Blanchette (Christian) :
Oui. Quand le programme a été suspendu, beaucoup d'étudiants m'ont approché à
cause...
M. Blanchette (Christian) : ...cette
suspension-là, l'anxiété a monté... Si la plupart des étudiants ne visent pas
un projet d'immigration, il y en a qui en visent. Il y a peu de données qui
nous permettent de conclure combien la fraction. Il y a une recherche au Bureau
canadien d'éducation internationale qui dit que 34 % des étudiants
internationaux qui viennent au Canada ont un projet, un souhait d'immigrer.
Quand on regarde les données.
La Présidente (Mme Poulet) : Merci.
Je m'excuse de vous interrompre.
M. Blanchette (Christian) :
Oui.
La Présidente (Mme Poulet) : Alors
on poursuit les discussions avec le député de Saint-Henri—Sainte-Anne
M. Cliche-Rivard : Merci
beaucoup. Merci pour votre présentation aujourd'hui. Votre dernière
participation sur la planification et les universités. Il y avait beaucoup de
représentations qui ont été faites, puis finalement, la planification est
sortie en 2023 qui mettait le PEQ hors cible, hors quota, le même gouvernement
il y a moins de deux ans. Et là, aujourd'hui, ces mêmes programmes-là sont
suspendus. Donc, qu'est-ce qui s'est passé selon vous?
M. Blanchette (Christian) : Je
ne sais pas. Le ministre pourra peut-être nous éclairer là-dessus. Dans les
journaux, on disait que, une année, il y a eu un très grand nombre de
titulaires... d'étudiants diplômés qui ont demandé le bac. C'était d'ailleurs
une année où il y avait eu énormément... Là, après la pandémie, il y a eu une
hausse importante du nombre d'étudiants internationaux, jamais jusqu'à 120 000
pour les universitaires, M. le ministre, mais il y a eu une hausse, et il y a
une seule donnée québécoise que nous avons, qui est un rapport de
l'université... du réseau de l'Université du Québec qui n'a pas été publié,
mais qui indiquait que 30 % des étudiants internationaux au Québec ont un
projet d'immigration. Le nombre de diplômés universitaires qui avaient demandé
à ce moment-là... voulaient se... utiliser le PEQ correspondait à peu près à
30 % des étudiants. Donc... donc je pense que quand on réfléchit le PEQ,
quand on réfléchit le recrutement d'étudiants internationaux de diplômés pour
qu'ils restent ici, ce genre de données, on devrait le considérer. Pour moi, ce
n'était pas une surprise on voyait que le nombre était pour diminuer dans les
années suivantes, parce qu'il y avait un trop plein lié à la pandémie. Et donc,
M. le ministre, qui pourra confirmer pourquoi le changement a eu lieu.
M. Cliche-Rivard : Il y a eu
quand même plusieurs fluctuations, vous l'avez mentionné tout à l'heure dans
les versions du PEQ. On a même eu, à un moment donné, une version où ça prenait
une expérience de travail à la fin des études. Il y a même eu un premier jet ou
un premier décret duquel il y avait des diplômes admissibles, mais finalement,
ça, ça n'a pas eu lieu. C'est quoi les conséquences finalement de six, sept ou
huit réformes du PEQ en autant d'années?
M. Blanchette (Christian) : Les
gens disent... Il y a des jeunes qui viennent au Québec sans projet
d'immigration, mais qui, une fois ayant vécu ici trois ans, quatre ans, cinq
ans selon les études, sont séduits par le Québec ou par des Québécois et des
Québécois, aussi ça se fait.
M. Cliche-Rivard : Bien, oui.
M. Blanchette (Christian) : Où
des gens veulent rester et, à ce moment-là, ça complexifie justement cette
transition, on est dans la... mais il est certain que dans certaines... pour
certaines personnes, venir vivre au Québec peut être un objectif. Et pour ceux
de toutes ces personnes-là, ils vont examiner le Québec et ils vont examiner
d'autres provinces, d'autres pays et peut-être choisir ceux... ces pays où ils
pourront immigrer, très certainement. La mesure que nous n'avons pas, c'est
quels talents perdons-nous en ne mettant pas des mesures qui facilitent la
venue? En ayant une sélection...
La Présidente (Mme Poulet) : Alors,
c'est tout le temps que le député de Saint-Henri—Sainte-Anne a. Maintenant, je
cède la parole au député d'Arthabaska.
M. Boissonneault : Merci, Mme
la Présidente. Mesdames, monsieur, merci pour votre présentation. Le
Commissaire à la langue française, Benoit Dubreuil, vient tout juste de
présenter un document, je trouve ça intéressant dans la perspective de notre
discussion, et dans ce document-là, il recommande, lui, tout simplement,
d'abolir le volet diplômés du PEQ en disant qu'en ce moment, étant donné qu'on
doit coordonner ça avec Immigration Canada qui a eu des enjeux de coordination
sur les prévisions de nos besoins, font en sorte qu'on devrait d'abord miser
sur les seuils permanents. Donc, que ce devrait être le Québec qui, dans
l'émission de ces seuils permanents, puis choisir directement les diplômés des
établissements francophones, puis laisser tomber l'histoire du PEQ pour les
diplômés. Qu'est-ce que vous pensez de ça, vous?
M. Blanchette (Christian) : Vous
écoutez, on va examiner différents mécanismes ici pour limiter l'arrivée sur le
territoire de nouveaux immigrants. Moi, je vous dirais, pour n'avoir pas
examiné de manière précise ce qu'il a indiquait, il y a toute une série
d'enjeux avec Ottawa, c'est une juridiction partagée. Je pense qu'on ne devrait
pas faire l'économie du travail à faire avec Ottawa. J'ai mentionné un exemple.
Je mentionnais qu'à peu près tous les étudiants internationaux doivent demander
un renouvellement de visa. Pourquoi? Parce que les visas...
M. Blanchette (Christian) : ...les
visas d'études attribués pour le Ph. D. qui sont de trois ans, pour la
maîtrise, qui sont de deux ans. Un Ph. D., ça se fait en cinq ans. Une maîtrise
de recherche, ça se fait entre deux et trois ans. Alors, on force les jeunes à
demander un renouvellement. Bien, je pense que ce dialogue-là qu'on doit avoir
pour le Québec doit joindre sa voix à celle des universités qui demandent à
Ottawa : Changeons la durée des visas, qu'on ait un PEQ qui permette de
lancer le signal à ceux et celles qu'on veut voir s'établir au Québec. Ce sera
plus facile ici qu'en Ontario. Bien, je pense que c'est un outil qu'on devrait
utiliser. Et, s'il y a des enjeux avec Ottawa, qu'on les règle.
M. Boissonneault : Mais ce ne
serait pas plus simple que le Québec n'ait pas à demander un permis de travail,
par exemple, ou voir... à coordonner ses efforts avec Immigration Canada pour
qu'on puisse savoir s'il va y avoir permis de travail ou pas dans l'émission de
ses programmes.
M. Blanchette (Christian) : Bien
sûr, je pense que le dialogue est nécessaire. Nous parlons au gouvernement du
Québec comme nous parlons, comme universitaire, au gouvernement canadien pour
solutionner les choses.
M. Boissonneault : Autre
suggestion du Commissaire à la langue française, lui, il veut limiter à
15 % la part des étudiants étrangers dans les établissements au Québec,
tous les établissements, en disant qu'en ce moment une bonne partie des étudiants
étrangers se retrouvent dans des universités anglophones, dans la région de
Montréal par exemple. Ça serait une meilleure façon de répartir les étudiants
étrangers que de permettre ça. Qu'est-ce que vous en pensez?
M. Blanchette (Christian) : Écoutez,
la présence des étudiants internationaux dans les universités, il y a quand
même une différence selon la nature de l'université, le type d'université.
Nous, quand on se compare avec nos partenaires européens, des universités de
notre taille avec la même intensité de recherche, ils sont à peu près à
20 % d'étudiants internationaux. Quand on pense à des universités de
grandes tailles qui ont une intensité de recherche et un volume de recherche
surtout ou une intensité de recherche égale à la nôtre mais un volume de
recherche beaucoup plus grand, elles vont se situer autour de 25 %
d'étudiants internationaux. Et donc, lorsqu'on parle d'universités comme
Harvard ou McGill, ils sont en général au-dessus de 30 %. Donc, de dire
15 % pour tout le monde, pour certains types d'universités, puis vous
demanderez à nos collègues, à mes collègues qui passeront combien... quel
pourcentage, ils ont et quel pourcentage ils devraient avoir... mais c'est un
pourcentage qui pourrait être adéquat pour certains types d'universités, mais,
pour d'autres, créerait des enjeux.
La Présidente (Mme Poulet) : Parfait.
Merci beaucoup à vous trois pour votre apport, votre contribution à nos
travaux.
Alors, je suspends les travaux quelques...
pardon, je suspends les travaux, et nous sommes de retour vers 15 heures.
Merci.
(Suspension de la séance à 12 h 48)
15 h (version non révisée)
(Reprise à 15 h 03)
La Présidente (Mme Poulet) : À
l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des relations avec les citoyens reprend
ses travaux. Alors, nous poursuivons les auditions publiques dans le cadre de
la consultation générale sur le cahier de consultation intitulé La
planification de l'immigration au Québec pour la période 2026-2029.
Avant de débuter, y a-t-il consentement
pour permettre le remplacement suivant : M. Bouazzi, député de Maurice-Richard, en remplacement de... du député d'Hochelaga-Maisonneuve?
Des voix : ...
La Présidente (Mme Poulet) : Parfait.
Merci. Alors, cet après-midi, nous entendrons les organismes suivants : l'Université
de Montréal, la Coalition des organismes communautaires pour le développement
de la main-d'oeuvre, conjointement avec l'Alliance des centres-conseils emploi,
le Regroupement des organismes en hébergement pour les personnes migrantes et
le Conseil du patronat du Québec.
Alors, M. Jutras, bienvenue. Vous disposez
de 10 minutes pour votre exposé. Par la suite, nous allons procéder à une
période d'échange. Alors, la parole est à vous.
M. Jutras (Daniel) : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Mmes, MM. les députés, M. le ministre, merci
beaucoup de nous recevoir.
La contribution que l'Université de
Montréal veut faire aux consultations d'aujourd'hui, de celles qui vous
occupent reflète ce que nous sommes comme institution. Je parle au nom de la
plus grande université de recherche au Québec, la troisième plus importante au
Canada, avec 750 millions de dollars en fonds de recherche annuellement,
une université francophone, dont le cœur est à Montréal, qui agit partout au
Québec, une université de calibre mondial qui est incontestablement un vecteur
d'attraction et de rayonnement international pour le Québec.
Alors, parlons d'abord, dans cette
perspective, du français, qui est au cœur de l'identité et de la mission de
notre université. Comme grande institution québécoise, nous sommes préoccupés
par la survie et la vitalité du français et conscients des menaces qui pèsent
sur notre langue. Et je veux le dire clairement cet après-midi, l'apport de nos
étudiants internationaux ne constitue pas une menace à notre identité. À l'Université
de Montréal, près de 70 % de nos 6 205 étudiants internationaux ont
le français comme langue maternelle ou comme langue d'usage. D'ailleurs, les
trois premiers pays d'origine de nos étudiants étrangers sont francophones.
Plus de 40 % de nos étudiants internationaux sont Français. Notre approche
est aussi différente de celle de plusieurs établissements d'enseignement
supérieur, une bonne pratique, à mon avis. Dans la majorité de nos programmes,
la connaissance du français au niveau B2, ou niveau sept québécois, si mon...
si mes renseignements sont exacts, la connaissance du français, donc, est une
condition d'admission et pas seulement une exigence à l'obtention du diplôme.
Bref, la réalité, c'est que l'Université de Montréal n'est pas un facteur d'anglicisation
ni à Montréal ni au Québec.
Deuxièmement, je tiens à dire tout aussi...
M. Jutras (Daniel) : ...que le
recrutement d'étudiants internationaux, contrairement à un mythe qui est
véhiculé couramment... que le recrutement d'étudiants internationaux n'est pas
un modèle d'affaires pour nous ni un moyen pour équilibrer nos budgets en
tirant un profit des frais de scolarité plus élevés que paient ces étudiants
internationaux. Au premier cycle, chaque étudiant français ou belge paie
9 447 $ de frais de scolarité, mais la structure de financement des
universités fait en sorte que l'Université de Montréal perçoit le même revenu
net pour cet étudiant français que pour un étudiant québécois, soit
7 000 $. La différence, c'est le ministère de l'Enseignement
supérieur qui leur récolte via le paiement des forfaitaires.
Toujours au premier cycle, parmi les
étudiants internationaux qui paient des frais de scolarité de près de
30 000 $, il y en a 20 % qui bénéficient d'une bourse
d'exemption de 14 000 $. Après versement du montant forfaitaire au MES,
de plusieurs milliers de dollars aussi, il ne reste que 1 200 $ de
revenu net pour ces étudiants de premier cycle internationaux qui reçoivent une
bourse d'exemption, soit beaucoup moins que pour les étudiants québécois.
Et puis, dernier exemple, au troisième
cycle, les doctorants internationaux qui paient les pleins droits de scolarité
génèrent un revenu net total pour l'université de 25 000 $ contre
près de 40 000 $ pour les étudiants québécois. Autrement dit, les
doctorants internationaux sont moins payants pour l'Université de Montréal que
les doctorants québécois.
Pourquoi cherchons-nous alors à attirer
des étudiants internationaux à l'Université de Montréal? La réponse est claire
et je l'ai évoquée d'entrée de jeu. Les étudiants internationaux font partie
intégrante de notre projet éducatif et de recherche. Ce ne sont pas des vaches
à lait. Leur présence enrichit le parcours des étudiants québécois et permet à
certains de nos programmes, laboratoires et surtout unités de recherche de
fonctionner. L'Université de Montréal sait que certains établissements ont
abusé du système alors que d'autres ont peut-être été instrumentalisés par des
demandeurs d'asile, mais ce n'est pas le cas chez nous. L'Université de
Montréal prend ses responsabilités très au sérieux. Nos critères de sélection
sont stricts, tant sur le plan académique que sur le plan linguistique. Les
dossiers sont évalués par une équipe spécialisée qui vérifie systématiquement
l'authenticité des demandes, et c'est pourquoi nous recommandons que tout quota
appliqué au certificat d'acceptation du Québec soit fonction des projets
d'enseignement légitimes et que le gouvernement du Québec distingue les
établissements de confiance comme le mien, comme l'Université de Montréal, de
ceux qu'il faut vraisemblablement encadrer de manière plus serrée.
Lors de l'adoption du projet de loi n° 74, le ministre de l'Immigration souhaite être
chirurgical dans son intervention, je reprends ses mots, malgré tous, les
quotas imposés aux établissements postsecondaires l'ont été, à notre avis, sans
faire les distinctions qui s'imposent entre les différentes catégories
d'immigration temporaire en particulier. Le message négatif véhiculé par ces
quotas a été entendu par les étudiants internationaux. Chez nous, la chute des
nouvelles inscriptions d'étudiants internationaux est de 24 % cette année.
Alors, je veux le dire en fait tout aussi clairement que ce que j'ai dit
jusqu'ici, les étudiants internationaux de l'Université de Montréal ne sont pas
un problème à régler, ils sont une richesse, un vecteur de croissance
économique et sociale. Nos étudiants sont triés sur le volet. Les étudiants que
nous recrutons sont, pour la plupart, jeunes et en santé. Ils arrivent le plus
souvent, pas toujours, mais le plus souvent seuls, sans dépendants. Ils ne
mettent aucune pression indue sur le système de santé, le système scolaire ou
le réseau des garderies.
• (15 h 10) •
En mars dernier, le premier ministre
Legault a déclaré qu'il fallait absolument redessiner l'économie du Québec. Je
suis totalement d'accord. Plusieurs facteurs accentuent l'urgence de
transformer cette économie. Nous sommes dans l'obligation d'innover, de faire
éclore de nouvelles entreprises et d'ouvrir de nouveaux marchés internationaux.
L'innovation, ça passe par la recherche. Au Canada, plus de 76 % de la
recherche et développement commandé par l'industrie se fait dans les
universités. Or, tout cela dépend directement de la qualité de notre capital
humain, et notamment des étudiantes et étudiants de maîtrise et de doctorat qui
font la part du lion de notre recherche et développement. À l'UdeM, près de la
moitié des étudiants au cycle supérieur viennent de l'étranger, un peu plus de
60 % des postdoctorants sont des internationaux et c'est notamment grâce à
eux que nous développons et maintenons des réseaux de contact et de
collaboration à travers le monde...
M. Jutras (Daniel) : ...le
contexte actuel nous offre une occasion historique de renforcer la recherche et
l'innovation au Québec et d'en maximiser les retombées économiques et sociales.
L'excellence, la recherche et l'économie du savoir se déploient à l'échelle
planétaire, et c'est pourquoi il faut absolument éviter d'alimenter la
rhétorique voulant que les étudiants internationaux sont un problème à régler.
Il faut au contraire envoyer un signal clair : le Québec veut attirer les
meilleurs cerveaux de partout, les accueillir, les appuyer pour que, de la
médecine à la physique, en passant par la science politique ou la littérature
française, nous bâtissions ici une société exemplaire, curieuse, inventive.
Et cette réflexion alimente directement
deux de nos recommandations, soit d'exclure les étudiants internationaux aux
deuxième et troisième cycles de l'application des quotas et de reconduire le
Programme de l'expérience québécois ou tout autre mécanisme qui permette de
garder ici les meilleurs talents venus d'ailleurs et qui sont prêts à
contribuer à l'avenir du Québec.
Au-delà des chiffres et des réformes, j'ai
la conviction profonde que nous sommes tous ici et tout le monde au Québec unis
par une ambition commune qui est celle de bâtir un Québec fort, dynamique,
capable de rayonner dans le monde. Et c'est à ce projet que l'Université de
Montréal s'attaque chaque jour. C'est à ce projet que l'Université de Montréal
souhaite contribuer avec l'ensemble de la société québécoise.
Je vous remercie, Mme la Présidente. Je
vous retourne la parole.
La Présidente (Mme Poulet) : Merci
beaucoup. Alors, on va procéder à la période d'échange avec M. le ministre.
M. Roberge : Merci, Mme la
Présidente. Merci pour votre présentation. Ça fait plusieurs fois que j'ai
l'occasion d'échanger avec vous. Toujours intéressant de voir la perspective
qui est la vôtre et celle de votre institution. Vous avez raison de souligner
les bons coups de l'Université de Montréal. On est fiers de l'Université de
Montréal effectivement.
Vous avez mentionné la chute de presque
27 %... 24 %, je pense, le nombre d'étudiants étrangers pour la
cohorte, là, de cette année, pas le total, je pense, sur votre campus.
M. Jutras (Daniel) : ...
M. Roberge : De nouveaux
inscrits cette année. Je le déplore. Ce n'est pas l'intention que nous avions
et que nous avons avec la loi 74, qui est venue, je pense, donner des
outils au gouvernement pour s'assurer qu'il n'y ait pas d'abus et pour
s'assurer que la capacité d'accueil générale, pas seulement sur les campus,
mais en matière d'emploi, en matière de logement, soit respectée. Il faut se
rappeler qu'il y a une dizaine d'années on avait environ, tout compris, pas
seulement les universités, tous les étudiants étrangers, internationaux
compris, 50 000 étudiants. On est passés à peu près à 120 000.
Le Parti québécois voudrait nous ramener à 50 000. On voudrait plutôt une
stabilisation.
Je comprends que le simple fait de poser
la question a pu contribuer... non pas à être la cause, mais contribuer au
climat d'incertitude qui a... qui peut avoir amené une baisse. Je pense
humblement que le fait que le gouvernement canadien parle plus fort que nous à
l'international, quand le gouvernement canadien dit : Moi, je vais réduire
de 35 % le nombre d'étudiants, ça fait beaucoup de bruit aussi, au-delà du
Québec qui dit : Bien, moi, je vais stabiliser mon nombre d'étudiants
internationaux. Je pense que, s'il n'y avait que nous, vous auriez peut-être eu
un impact. Mais je ne pense pas que ça aurait eu l'impact que ça a eu avec ce
que le gouvernement canadien a fait. Mais là on arrive à terme, puisqu'on a
cette loi 74, dont on ne veut pas abuser.
On fait, la planification sérieuse, en
vous écoutant notamment. Et bientôt, on va être capables de se donner une
planification, une stabilité qui va rassurer les milieux économiques, mais
aussi, je pense, les milieux universitaires, puis qui va être perçue par nos
partenaires à l'étranger comme rassurante... dire : Ah bon, voici ce que
veut le Québec, le Québec veut... je ne sais pas, on a mis au
jeu 110 000, bien, 105 000, 110 000, 115 000, on
discutera ensemble... 120 000. Donc, on en veut, des étudiants internationaux,
des étudiants étrangers, ça va être clair, ça va être écrit, ça va être limpide
pour tous. Puis je pense que ça contribuera certainement à envoyer un message
qui est positif, mais en même temps, on aura clarifié le contrat social qu'il y
a entre l'État québécois et ses partenaires que sont tous les dirigeants
d'établissement. Oui, il y a des grandes universités, comme vous l'êtes, mais
il y a aussi toutes sortes d'écoles qui peuvent avoir fait des abus ou pas,
parce que ce n'est pas toutes les écoles privées qui ont abusé non plus. Je
veux faire attention.
Par rapport aux étudiants...
M. Roberge : ...en fait, vous
arrivez à la fin, là, à la page 20, avec neuf constats et recommandations. Vous
dites d'abord : exclure... la un, exclure des étudiants... les étudiantes,
étudiants deuxième, troisième cycles des quotas d'immigration. Juste
comprendre. Vous voulez qu'on ne les compte pas lorsqu'on émet des CAQ pour que
vous puissiez en accueillir autant que vous voulez ou vous voulez qu'on... qu'ils
soient hors seuil? Pouvez-vous me préciser ce que vous voulez dire, là, ici,
là, exclus des quotas d'immigration?
M. Jutras (Daniel) : Alors,
la réponse courte, c'est que l'on souhaite l'exclusion des étudiants de
deuxième et troisième cycles des quotas liés à l'octroi des certificats
d'acceptation du Québec. C'est ce volet-là, je pense, de la planification qui
nous intéresse. Et l'argument s'appuie... je l'ai évoqué dans ma présentation,
l'argument s'appuie sur le rôle qu'ils jouent dans l'innovation et les
capacités de recherche de nos laboratoires. Et ça ne vise pas nécessairement le
programme de l'expérience québécoise, par exemple, qui est un autre volet de la
réflexion de cette commission. Donc, c'est vraiment l'exclusion des étudiants
en deuxième et troisième cycles du volet du CAQ.
Si vous me permettez de revenir sur ce
que vous avez évoqué d'entrée de jeu, sur l'incertitude qui a créé, je pense,
le phénomène de réduction des inscriptions... des candidatures, d'abord, de
manière très marquée, d'étudiants internationaux et ensuite d'inscriptions. Ce
climat, je suis entièrement d'accord avec vous, est le fruit du cumul de
mesures annoncées au fédéral et des mesures annoncées par le gouvernement du
Québec, qui ont créé beaucoup d'incertitude, là. On a compté une douzaine de
mesures dans une période très, très courte, je pense, de 18 mois, en
additionnant celles qui venaient du fédéral et de Québec. Ce climat
d'incertitude, je suis absolument certain, a alimenté les décisions des
étudiants à l'échelle internationale.
Alors, je suis content de vous entendre,
M. le ministre, évoquer l'hypothèse d'un message positif par rapport aux
étudiants internationaux, une volonté d'accueil. Et, ce message, je vous
encourage à le porter en tenant compte du contexte géopolitique et de
l'économie du savoir, appelons ça comme ça, très particulier dans lequel nous
vivons en ce moment. Il y a des occasions de recrutement d'étudiants
internationaux, de chercheurs et de chercheuses internationaux aussi, que l'on
ne doit pas laisser passer. Et il me semble que le Québec est extrêmement bien
placé pour porter un message d'accueil, non seulement dans une perspective de
bien intégrer et de bien accueillir nos étudiants et nos chercheurs
internationaux, mais aussi de profiter de cet environnement géopolitique et de
se placer comme une nation qui est au premier plan de l'économie du savoir
internationale. C'est ça, le message, je pense, qui est important et qui va
attirer chez nous des personnes de qualité pour travailler à l'innovation, au
développement de la recherche au Québec.
M. Roberge : Il y a un
contexte fort défavorable aux sciences en général et aux savoirs et aux
facultés de recherche au sud de la frontière. Il y a sans doute des gens qui
peuvent être intéressés à venir ici. Je vous rappelle, je vous souligne, vous
le savez sans doute, mais je veux le mentionner, notre nouveau programme,
Programme sélection travailleurs qualifiés, volet quatre, presque taillé sur
mesure pour vous permettre d'aller faire du recrutement de professeurs, aux
États-Unis, mais partout ailleurs, d'autant plus quand ces candidatures-là sont
appuyées par le FRQ, là, notre Fonds de recherche du Québec. Il y a vraiment une
voie d'accès, je pense, qui peut vous permettre de faire ça.
Le volet un, lui, peut vraiment être une
voie d'accès assez extraordinaire pour les étudiants diplômés du Québec. Je
pense que c'est quelque chose de très intéressant. Il faut dire que, lorsque...
par exemple, pour un bac de trois ans, les gens peuvent avoir un permis
d'études de trois ans. Après, habituellement, il y a le permis de travail pour
trois ans. À l'intérieur de ça, ils peuvent assez aisément, normalement, avoir
l'expérience de travail, se qualifier puis être sélectionnés.
Mais, une fois qu'on a dit ça, donc, il y
aurait de la place dans... avec ce programme-là pour à la fois des professeurs
puis des diplômés du Québec, de votre institution et de d'autres institutions,
qu'on pourrait réserver, aménager. Est-ce que vous avez une idée de combien de
personnes ça pourrait représenter, soit pour l'ensemble des universités, parce
que vous avez une vision plus large que la vôtre, ou pour votre université?
D'après vous, combien de personnes ça pourrait représenter par année?
M. Jutras (Daniel) : Vous
voulez savoir le nombre de personnes qu'on peut imaginer s'installer au Québec
après leur graduation...
M. Roberge : Mettons, combien
de profs...
M. Jutras (Daniel) : ...ou
vous voulez que je fasse une prévision sur le...
• (15 h 20) •
M. Roberge : ...combien de...
combien de... Supposons, là, vous êtes ministre, là, puis vous avez à...
M. Roberge : ...un nombre de
places via des volets, peu importe, pour des enseignants émérites qu'on
viendrait chercher à l'international puis pour des étudiants étrangers qu'on
diplômerait ici, qui resteraient sur le territoire parce qu'ils ne veulent pas
tous rester. Combien de places, d'après vous, ça peut représenter par année?
M. Jutras (Daniel) : Bien,
c'est une prévision qui est difficile à faire. À l'Université de Montréal en ce
moment, comme je le mentionnais dans ma présentation, on a environ
6 000 étudiants internationaux. C'est un chiffre qui est en baisse
par rapport à l'année dernière, mais qui n'est pas très éloigné de ce qu'on
avait au cours des cinq ou 10 dernières années. Il en gradue à peu près
1 300, 1 400 par année, là, de ces étudiants internationaux, toutes
catégories confondues. L'estimation est difficile à faire parce qu'on n'a pas
vraiment des chiffres probants pour ce qui est de la proportion des étudiants
qui souhaitent rester après leur diplomation, des étudiants internationaux.
Un chiffre qu'on a vu dans un reportage de
Radio-Canada, que peut-être vous avez vu aussi, là, qui touchait les étudiants
dans les systèmes, les sciences, technologies, génie et médecine, suggérait
que, pour ce qui est des étudiants internationaux, c'est à peu près la moitié,
entre 50 % et 60 % dans les premières années qui restent dans
l'environnement dans lequel on parle. Alors, 50 % à 60 % du chiffre
que je viens d'évoquer me semblerait être une prédiction ou une prévision
raisonnable avec les outils dont on dispose.
Par ailleurs, le PEQ, qui est une autre
voie d'entrée, là, qui sert à la même fin dans la version telle qu'elle
existait auparavant, celle qui était la plus favorable peut-être, nous
donnerait une idée aussi de l'évolution du nombre de personnes issues des rangs
internationaux qui souhaiteraient s'installer au Québec. Là, c'est plus
difficile à prédire, parce que, comme le PEQ a changé au fil des années,
parfois avec des conditions plus exigeantes, comme il est suspendu en ce
moment, il est possible qu'il y a des pointes de demandes au PEQ qui soient
supérieures à ce qu'on pourrait imaginer être un chiffre régulier d'année en
année. Mais moi, je suis à peu près convaincu que ces deux volets-là sont
intéressants.
Je dirais que le PEQ est plus intéressant
pour les étudiants que le programme... que le volet I que vous évoquez, là,
parce qu'il y a une exigence d'expérience de travail qui est attachée à cette
dernière voie d'accès, alors que le PEQ se concentre sur l'existence de
conditions beaucoup plus favorables pour les étudiants et qui sont faciles à
remplir, en particulier pour les étudiants comme les nôtres qui maîtrisent le
français et qui sont capables de satisfaire aux exigences du PEQ.
M. Roberge : Donc, il y a la
notion de renouvellement des... d'une planification pragmatique. Puis, à votre
recommandation VI, vous parlez du scénario c parmi les trois scénarios.
Pourquoi avoir retenu ce scénario-là?
M. Jutras (Daniel) : Bien,
écoutez, nous, on est d'avis que... comme je l'évoquais dans ma présentation
d'entrée de jeu, que l'apport d'étudiants internationaux et de personnes issues
de la filière internationale, plus généralement, est un apport pour le Québec.
On a de grands défis démographiques à l'avenir. Pour moi, la question, c'est la
manière dont on les intègre. Je sais que c'est une préoccupation que vous avez
aussi, qu'on soit capables d'entourer ces gens-là des conditions qui vont
assurer le succès de leur intégration à la société québécoise, mais je suis
absolument convaincu qu'en particulier les étudiants issus des filières universitaires
québécoises et de l'Université de Montréal en particulier peuvent contribuer de
manière très efficace à l'essor du Québec et à l'innovation. Alors, c'est pour
ça qu'on choisit le chiffre le plus important.
Mais je vous avoue que, pour nous, cette
recommandation-là... parce qu'on s'efforçait, dans la mesure du possible, de
répondre aux questions qui étaient posées par la consultation, cette
recommandation-là est beaucoup moins importante que celle qui concerne le cœur
de notre action, là, qui est la formation et la recherche.
M. Roberge : Merci beaucoup
pour votre contribution. Je pense que j'ai des collègues qui veulent poursuivre
les échanges avec vous.
M. Jutras (Daniel) : Merci à
vous.
La Présidente (Mme Poulet) :
Oui, allez-y, Mme la députée.
Mme Boivin Roy : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. M. Jutras, c'est un plaisir de vous retrouver
aujourd'hui.
M. Jutras (Daniel) : Et pour
moi aussi.
Mme Boivin Roy : Alors,
écoutez, je vous amènerais sur la page 12 de votre mémoire. Vous
soulevez...
Une voix : ...
Mme Boivin Roy : Voilà. Vous
soulevez qu'une approche régionalisée aurait un impact majeur sur la capacité
d'innovation du réseau universitaire en général. Est-ce que vous pouvez développer
davantage sur les impacts que vous envisagez dans un premier temps? Et, dans un
deuxième temps, selon vous, quelles seront les meilleures façons de contrôler
l'immigration temporaire sur la région métropolitaine, si tant est, là, qu'on
veut réduire la pression sur les services publics, sur les logements, etc.?
M. Jutras (Daniel) : Alors,
je vais peut-être prendre votre question à l'envers, en commençant par la fin,
parce que, comme je le suggérais dans ma présentation, je ne suis pas du tout
convaincu, moi, que les étudiants internationaux qui sont à l'Université de
Montréal mettent une pression sur un plan sur... appelons ça le contrat social
ou sur...
M. Jutras (Daniel) : ...les
services publics qui sont offerts à la communauté pour les raisons que j'ai
évoquées dans ma présentation. Ils sont jeunes, ils sont en santé, ils sont
rapidement bien intégrés. Dans le cas de de l'Université de Montréal, ils sont
en très, très vaste majorité francophone ou francotrope, parlent rapidement le
français. Ceux qui ne le sont pas sont rapidement amenés à développer une
compétence en français. Alors, je pense que notre capacité d'accueil à l'Université
de Montréal est réelle.
On parle du logement aussi et chez nous,
les résidences ne sont pas très grandes, on n'a pas énormément de place, mais
c'est plus de 60 % des appartements en résidence qui sont occupés par des
étudiants internationaux. Alors, on s'en occupe de nos étudiants
internationaux. Je pense qu'ils sont... je pense qu'ils sont... qu'ils sont
bien intégrés.
Je ne sais pas... donc là, j'en viens à la
première partie de votre question, je ne sais pas si c'est opportun... En fait,
je suis pas mal convaincu que ce n'est pas opportun de régionaliser le
processus d'immigration. L'Université de Montréal est très consciente de
l'importance de ce processus d'intégration d'étudiants internationaux et plus
largement d'immigrants pour nourrir la vitalité des régions. J'en suis. Je
pense qu'on est passé d'un contexte où il y avait assez peu d'immigration à quelque
chose comme plus de 30 % maintenant d'immigration qui s'installe en région
et je pense que c'est une excellente nouvelle, mais le... Si le message qui est
transmis... on est dans le message, hein? On est dans les perceptions beaucoup,
on l'évoquait il y a un instant avec le ministre. Si le message qui est
transmis par le régime qui résulte de la consultation que vous menez est un
message qui est défavorable à Montréal, qui présente Montréal comme un espace
qui est en quelque sorte exclu de la capacité d'accueil du Québec, pour mon
université, ça, c'est une retombée négative. Ça va rendre beaucoup plus
difficile notre capacité de recrutement de chercheurs, d'étudiants. Ils sont
très à l'affût, les étudiants, les chercheurs, les chercheuses, d'informations
de cette nature-là qui permet de distinguer les espaces où ils seront
bienvenus. Et pour nous, c'est très important de pouvoir montrer une capacité
d'accueil pareille à celle des autres environnements au Québec.
J'ajouterais que ce ne serait pas simple,
à mon avis, de régionaliser la gouvernance de l'immigration pour un ensemble de
raisons, et je vous en donne deux. D'abord, nous, on n'est pas qu'à Montréal,
on est à Rimouski, on est à Saint-Hyacinthe, on est en dehors du grand centre.
Alors, s'il y a par exemple des quotas de CAQ imputés à l'Université de
Montréal, est-ce que ces quotas couvrent mes étudiants en médecine vétérinaire
à Rimouski? Est-ce qu'ils couvrent mes étudiants en médecine à Trois-Rivières?
Inversement, plusieurs universités hors Montréal sont installées à Montréal.
Est-ce qu'un quota imputé à l'Université du Québec à Trois-Rivières couvrirait
les étudiants à Longueuil, à Terrebonne, à Joliette? Je pense que, là, on
entrerait dans des détails logistiques qui rendraient rendrait vraiment
complexe la gestion de quotas ou d'attribution de quotas. Alors, compte tenu de
la nature pas mal éclatée sur le plan territorial du réseau universitaire
québécois, il me semble préférable de ne pas faire de geste dans cette
direction-là, du moins pour les étudiants. Pour le reste, pour ce qui est des
travailleurs par exemple, là, peut-être que c'est fonction des besoins du
marché du travail dans chacune des régions qui vous intéressent...
La Présidente (Mme Poulet) : Merci
beaucoup. Alors, on va poursuivre les discussions avec le député de l'Acadie...
de 12 min 23 s.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. Bon après-midi, M. le recteur Jutras. Heureux de vous retrouver en
commission. Merci. Je salue également vos collègues qui sont avec vous. Merci
pour votre mémoire. Vous y avez fait référence pendant votre exposé.
Présentement, ma compréhension, c'est que le programme PEQ est suspendu. Est-ce
que vous aviez été consulté à l'avance avant la suspension?
M. Jutras (Daniel) : Non.
M. Morin : Donc, vous l'avez
découvert quand vous avez vu le décret ou par la voie des journaux, j'imagine.
M. Jutras (Daniel) : Exact.
M. Morin : Et quel est
l'impact sur votre université? Là, je comprends qu'il n'y a pas eu de
planification, vous ne saviez pas? Est-ce que vous avez présentement des
étudiants qui étaient dans le parcours, qui là sont arrêtés? Est-ce que vous
avez été capables d'évaluer?
• (15 h 30) •
M. Jutras (Daniel) : On n'a
pas d'évaluation. Je voudrais pouvoir vous donner une évaluation vraiment
solide, probante. L'évaluation qu'on a fait et fondée sur ce que l'on apprend
des étudiants qui étaient dans ce parcours ou qui auraient souhaité être dans
ce parcours, parce qu'il faut comprendre que la suspension du PEQ, elle vise
non seulement... ou elle affecte non seulement les étudiants qui aspiraient à
cette voie d'accès à l'issue de leurs études, mais aussi ceux qui envisageaient
de venir au Québec et qui se disaient : OK... si j'obtiens un diplôme
québécois, il y a une voie d'accès via le PEC et là, maintenant, je ne sais pas
si, pour l'avenir prévisible, si je vais au Québec comme étudiant ou étudiante,
je...
15 h 30 (version non révisée)
M. Jutras (Daniel) : ...peut
compter sur la remise en place de cette... de cette mesure ou cette voie d'accès.
Alors, on entend beaucoup de situations, des histoires humaines, parce que
derrière les chiffres et les politiques dont on parle, il y a des êtres
humains. On entend beaucoup d'histoires de nos étudiants, nos étudiantes qui
aspiraient à ce chemin-là puis qui maintenant sont un peu découragés, qui
attendent avec beaucoup d'impatience l'espoir que le régime soit remis en
place. Ça a eu probablement... c'est difficile à mesurer, encore une fois pour
les raisons que je viens d'exposer, ça a eu un effet aussi. Ça fait partie des
mesures annoncées qui ont eu un effet négatif sur l'attractivité de l'Université
de Montréal dans les différents marchés auxquels... auxquels on envoie des
invitations.
M. Morin : ...en fait, je
vous écoutais, là, attentivement. Si j'ai bien compris, vous avez quand même
des chutes de 24 %?
M. Jutras (Daniel) : Oui. De
nouveaux inscrits.
M. Morin : De nouveaux
inscrits. Ce qui est quand même un chiffre important pour l'université. Vous
allez probablement être d'accord avec moi pour dire qu'en matière d'immigration,
la prévisibilité est sûrement le concept qui est excessivement important,
auquel il faut faire attention, parce que sinon, on se ramasse dans des
situations.
Si on revient au PEQ, je comprends qu'il y
a probablement de vos étudiants qui sont venus ici parce qu'il y avait cette
voie-là. Ils sont dans cette voie-là, mais là, soudainement, sans aucun
avertissement, il y a une suspension, et là, ils sont... ils sont bloqués.
M. Jutras (Daniel) : Exactement.
Et vous avez raison d'identifier la prévisibilité comme un élément absolument
critique dans les processus de recrutement d'étudiants internationaux. J'ajoute
que c'est particulièrement vrai aux cycles supérieurs, parce que ce n'est
pas... pas instantané, de recruter des étudiants en cycles supérieurs, de les
amener dans nos environnements, de les... leur permettre de joindre les travaux
de nos chercheurs, nos chercheuses dans nos laboratoires. Alors, ça s'étale sur
la durée. C'est très important pour toutes les universités. C'est vrai de la
mienne comme de toutes les universités, au Québec, qui aspirent à recruter des
étudiants internationaux, que l'on ait une prévisibilité sur plusieurs années.
D'où l'intérêt d'établir une planification pluriannuelle puis d'envoyer un
message aussi clair que possible que le Québec est ouvert et accueille,
souhaite accueillir les meilleurs cerveaux dans le monde, à la fois du côté des
étudiants et des côtés... du côté des profs et des chercheurs. Parce qu'on
évoquait tantôt les programmes des travailleurs spécialisés, et je reviens sur
le fait qu'au cours de la dernière année on a suspendu une voie d'accès
accélérée qui bénéficiait aux enseignants, aux professeurs et aux chargés de
cours, c'est le même enjeu de prévisibilité qui touche le recrutement
professoral, le recrutement de chercheurs et de chercheuses. Il faut qu'on
puisse leur dire : On aura une réponse pour vous rapidement. Si la voie d'accès
maintenant est celle qui est ouverte à tous, qu'il n'y a pas de voie d'accès
privilégiée il y a de bonnes chances que ces gens-là aillent ailleurs qu'au
Québec dans un processus d'immigration au Canada ou en Amérique du Nord.
M. Morin : Parce que... Et,
si on reprend évidemment ce nouveau programme dont parlait M. le ministre, donc
le PSTQ volet 4, fait pour des gens hyperspécialisés, là, de haut calibre,
bien, quand on regarde le site du ministère par exemple, ça se fait sur
invitation, le 28 août, il y a eu quatre invitations. Donc, ma
compréhension, c'est pour quatre personnes. Alors, je ne sais pas, vous, dans
vos prévisions, si vous avez besoin de plus de quatre personnes, mais ça va
devenir très compliqué, s'il n'y en a pas plus. Et j'aimerais que vous puissiez
nous expliquer, nous parler un peu quand vous essayez de recruter un chercheur
ou un enseignant, donc, de haut niveau, qui a sûrement un doctorat ou un
postdoc, comme on dit. Vous êtes en compétition, pas seulement avec le Québec,
le Canada, mais avec le monde. Est-ce que je me trompe?
M. Jutras (Daniel) : Non,
vous ne vous trompez pas du tout, et en particulier dans le contexte actuel.
Là, la compétition américaine, curieusement, est moins forte que ce qu'elle
représentait il y a... il y a quelques années. On entend beaucoup de chercheurs
et de chercheuses qui explorent des options hors États-Unis, alors que, je vous
dirais, pendant ma carrière universitaire, c'était la voie privilégiée pour les
chercheurs, les chercheuses. Particulièrement dans les secteurs où on a besoin
d'équipements coûteux et de ressources très, très importantes, les États-Unis
finançaient très fortement la recherche. Ce n'est plus le cas, ou en tout cas c'est
moins le cas. Et là on est dans un... encore une fois, ce n'est pas une
expression que j'aime beaucoup, mais dans un marché du savoir ou un marché de
recrutement des chercheurs et chercheuses qui est extrêmement concurrentiel. D'autres
pays à travers le monde, la France au premier chef, investissent des ressources
très, très importantes pour recruter des chercheurs et des chercheuses. Alors,
c'est critique, pour les universités québécoises et surtout pour les
universités francophones comme la mienne, d'avoir les coudées franches, d'avoir...
M. Jutras (Daniel) : ...les
outils de recrutement qui sont aussi transparents, et aussi efficaces, aussi
rapides, effectifs que possible.
M. Morin : Et je comprends,
évidemment, que, pour vous, l'agilité est clé, n'est-ce pas, ça va vous
permettre d'avancer.
Quand vous faites référence aux
États-Unis, qui, c'est vrai... qui ont été jadis, en fait, un terreau, là, que
les gens, en fait, ils voulaient explorer... ils voulaient y aller, ils
avaient, effectivement, énormément d'argent pour la recherche... la situation a
changé, mais n'est-ce pas là une opportunité, pour une université comme la
vôtre, donc, peut-être d'aller recruter des gens qui sont hypercompétents dans
des domaines de recherche? Pour ce faire, il faut que vous soyez agiles, donc
il faut que les politiques migratoires, en immigration vous aident. Est-ce que
vous avez l'impression que, présentement, on est très aidants?
M. Jutras (Daniel) : On
pourrait être plus aidants qu'on l'est maintenant, d'abord en raison du
message, qui est ambigu, là, de l'incertitude qui entoure l'attractivité ou la
volonté d'accueil de personnes qui sont à l'extérieur du Québec et qui
souhaiteraient s'installer chez nous comme chercheurs et chercheuses. Il y a du
financement, évidemment, qui pourrait servir à faciliter le recrutement de ces
personnes, et je sais qu'on y réfléchit du côté du ministère de Mme Fréchette
et qu'on y réfléchit aussi au fédéral, à des mécanismes de soutien, qu'on y
réfléchit aussi au ministère de l'Enseignement supérieur, qu'on réfléchit à des
mécanismes de soutien pour le recrutement de chercheurs et de chercheuses de
premier plan.
Parce que, presque... j'allais dire
«quotidiennement», mais ce serait exagéré... presque chaque semaine, j'entends
une histoire d'un doyen ou d'un... d'une directrice d'un grand centre de
recherche ou de labo qui me dit : Là, j'ai eu un appel, un jeune
chercheur, une jeune chercheuse qui est au Texas puis qui veut sortir...
presque chaque semaine, j'entends ça... et qui explore des options. Alors, vous
avez parfaitement raison, il faut que les universités québécoises soient
agiles, et qu'elles aient les moyens de le faire. Et je pense qu'on peut faire
mieux en ce moment, pour nous aider.
M. Morin : Parce
qu'évidemment, avec l'attrait et la possibilité d'avoir ces chercheurs-là, bien
là, on développe la recherche fondamentale, l'innovation. Évidemment,
éventuellement, ça pourrait déboucher sur des brevets, sur des inventions, donc
positionner le Québec dans le monde.
M. Jutras (Daniel) : Oui,
bien, j'évoquais dans ma présentation le fait qu'au Canada... ça, c'est un
phénomène qui est canadien, hein, ce n'est pas propre au Québec... mais au
Canada, à la différence de la plupart des pays occidentaux, des pays de l'OCDE,
la recherche et développement se fait dans les universités. Il y a beaucoup
moins de recherche et développement qui se fait dans le secteur privé, au
Canada, que ce que l'on voit dans les pays qui ont une certaine puissance
économique. Et donc, oui, je pense que c'est une condition incontournable de
l'essor économique, et de l'essor social, par ailleurs, parce qu'on parle aussi
d'innovation sociale, de l'essor du Québec de pouvoir recruter des jeunes
chercheurs, des jeunes chercheuses, des étudiants des cycles supérieurs qui
peuvent contribuer à ce... à ce développement.
M. Morin : Merci. Il y a un
autre volet que j'aimerais explorer avec vous, c'est en lien avec la
possibilité, par exemple, de recruter des chercheurs ou des professeurs de l'étranger,
et c'est toute la question du regroupement familial. C'est un dossier, pour
moi, qui est très important. On le sait, présentement, au Québec, les délais
sont d'à peu près un petit peu moins que quatre ans, plus de trois ans, alors
que, dans le reste du Canada, c'est à peu près 13 mois. C'est très long
pour regrouper une famille. Est-ce que vous voyez ça comme un... comme un
enjeu? Parce que, présentement, il y a des... il y a des quotas, c'est à peu
près 10 000, là, mais il y en a quand même des milliers sur la liste
d'attente. Voyez-vous ça comme un enjeu pour être capables d'attirer des
chercheurs ou des enseignants dans votre université?
M. Jutras (Daniel) : La
réponse honnête, c'est que ce genre de problématique là n'est pas remontée
jusqu'à moi à l'heure actuelle. Je pense que le genre de personnes dont on
parle, comme je l'évoquais d'entrée de jeu, là, les jeunes personnes, les
jeunes étudiants et jeunes étudiantes qui viennent chez nous, dans la plupart
des cas, viennent seuls. Mais probablement qu'il y a des dossiers comme ceux-là
qui existent et qui ne sont pas nécessairement partagés avec moi, en tant que
recteur, ou avec la direction. Je pourrais explorer ce volet-là et revenir à la
commission, le cas échéant, pour voir si on a eu... si on a eu des indications
de ça. Mais je crains que ces informations-là soient plutôt anecdotiques, parce
que ce seront de petits nombres.
• (15 h 40) •
M. Morin : D'accord. Dans vos
recommandations, il y a deux éléments, à la recommandation 4, qui sont
importants, donc réintégrer sans délai les professeurs et professeures dans la
liste de traitement simplifié, donc ça va aider le recrutement...
M. Morin : ...mais aussi
instaurer un mécanisme de consultation obligatoire avec les établissements
universitaires avant toute modification future de cette liste. Ça, je trouve ça
très intéressant. Qu'est-ce que vous pensez également d'un mécanisme de
consultation qui pourrait être fait avec les universités, où on pourrait vous
consulter sur l'impact de certaines décisions gouvernementales, de certains
décrets, comme celui, par exemple, du PEQ suspendu? Est-ce que vous y voyez un
avantage? Parce que ce que je comprends, c'est que vos admissions, tout ça, ça
se planifie. Ce n'est pas quelque chose que soudainement, un matin, vous vous
levez puis vous dites : Ah! il nous en faut tant. Ce n'est pas comme ça
que ça fonctionne.
M. Jutras (Daniel) : Oui.
Alors, vous avez parfaitement raison, le processus d'admission est complexe,
hein, les exigences qui sont imposées à la fois par Ottawa et par Québec pour
les étudiants et les étudiantes qui souhaitent se joindre à nous sont... ne
sont pas simples et sont difficiles à satisfaire. Et ils engagent de l'argent,
ils engagent des démarches complexes. C'est important que l'on puisse... on
revient toujours à ça, là, qu'on puisse envoyer des signaux clairs.
La Présidente (Mme Poulet) : On
va poursuivre la discussion avec le député de Maurice-Richard pour une période
de quatre minutes huit secondes.
M. Bouazzi : Merci, Mme la
Présidente. Je vais commencer par une note personnelle que je ne fais
pratiquement jamais, c'est que j'ai eu la chance d'arriver comme étudiant
étranger à l'École polytechnique il y a maintenant 26 ans et j'ai appris à
devenir Québécois au sein de votre institution en commençant par militer avec
Amnistie internationale du côté de Jean-brillant, avec beaucoup, beaucoup de
plaisir. Il y a... ce que... Vous dites énormément de choses vraiment
importantes et je commencerais par... peut-être, à dire, ce n'est pas le
premier projet de loi qui touche directement aux droits des étudiants à rester,
il y avait le projet de loi n° 74. Est-ce que vous vous êtes senti écouté
déjà à l'époque?
M. Jutras (Daniel) : Bien, on
a... Je pense qu'on a eu un certain impact, en tout cas, j'aime à croire qu'on
a eu un certain impact, un certain impact. Nous avons présenté à cette
occasion-là un mémoire conjoint des quatre grandes universités de recherche du
Québec, Sherbrooke, McGill, Laval et l'Université de Montréal, et le consensus
très net entre les quatre universités... en tout cas, j'ose espérer qu'il a
donné à réfléchir. Le résultat, je pense, est malheureux. Là, on voit les
conséquences de ce projet de loi là. Puis, dans ma vie, je n'aime pas ça
dire : Bien, tu vois, on te l'avait dit ou on vous l'avait dit que c'est
ça qui arriverait, mais c'est pas mal ça dans ce cas-ci. On avait prédit que,
peu importe le chiffre des quotas, c'est le message des quotas qui aurait des
conséquences négatives. Cette année, je dirais que la plupart des universités
québécoises n'atteindront pas leurs quotas. C'est la prédiction que l'on peut
faire. Et peut-être que certains vont dire : Ah! bien, ça, c'est une bonne
nouvelle, ça a fonctionné. Nous, on voit ça comme une très mauvaise nouvelle.
Alors, je reviens peut-être à la question qui m'était posée précédemment, si
vous permettez.
M. Bouazzi : Oui. Bien, en
fait, j'ai juste quatre minutes, si vous permettez, mais je vais aller dans le
même sens. Donc, on va...
M. Jutras (Daniel) : Je ne
veux pas gruger votre temps. Allez-y.
M. Bouazzi : ...on va faire
des questions très courtes et des réponses très courtes. Donc, vous, ce que
vous dites, c'est la prévisibilité, le manque de prévisibilité n'aide pas à
recruter.
M. Jutras (Daniel) : Est
capitale, oui.
M. Bouazzi : Vous dites que
le fait d'avoir gelé le PEQ n'aide pas à faire en sorte que les gens même
postulent parce qu'ils ne savent pas s'ils vont pouvoir rester ou pas.
M. Jutras (Daniel) : Absolument.
M. Bouazzi : Vous dites le
fait qu'on va bloquer le nombre de personnes qui vont pouvoir venir déjà comme
étudiant, mais rester après, met à mal la recherche et développement,
principalement la recherche qui se fait au sein, sachant que la recherche, ce
que vous dites dans votre mémoire, c'est 70 % de la recherche qui se fait
au Québec au complet. C'est bien ça?
M. Jutras (Daniel) : Exactement.
Absolument.
M. Bouazzi : Donc, on met à
mal la recherche, on met à mal même la grandeur de la science au Québec avec
des politiques de restriction. C'est bien ça?
M. Jutras (Daniel) : Absolument.
Mes réponses sont courtes, là.
M. Bouazzi : Les réponses
sont courtes et les questions sont courtes aussi. Donc, on comprend aussi qu'il
y a un certain nombre de recommandations que vous faites pour éviter de mettre
à mal et les universités, mais aussi le secteur privé, qui va profiter des
recherches que vous apportez.
M. Jutras (Daniel) : Tout à
fait.
M. Bouazzi : C'est très bien.
Parmi les recommandations, il y en a plusieurs, et puis je n'aurai pas le temps
de passer à travers plusieurs, mais ce que vous dites, c'est que vous voulez
exclure les demandes de renouvellement de certificats d'acceptation du Québec,
de la comptabilité des nouveaux étudiants et étudiantes du calcul de quota
annuel. C'est bien ça?
M. Jutras (Daniel) : Oui.
M. Bouazzi : Donc, imaginons
que votre quota, je vais dire n'importe quoi, c'est 3 000 personnes,
s'ils sont déjà là, ils font un doctorat qui va durer quatre ans, cinq ans, six
ans, l'année d'après, vous ne pouvez plus, de toute façon, en rajouter parce
que, si on ne fait pas ce que vous dites, bien, ça va s'arrêter à ça parce que
le quota est atteint.
M. Jutras (Daniel) : Là, si
vous me permettez, ça appelle une réponse peut-être un petit peu plus longue
que ce que... tu sais, ce n'est pas juste un mot, là.
M. Bouazzi : Allez-y,
allez-y. Il y a...
M. Jutras (Daniel) : Le
renouvellement... le renouvellement des CAQ, en fait, il est attaché à la durée
qui est prévue par le permis d'études dont on parle, le maximum, c'est
49 mois. Il n'y a pas beaucoup d'étudiants en doctorat qui terminent leur
programme en 49 mois. Ça veut dire qu'à peu près, systématiquement, tous
les...
M. Jutras (Daniel) : ...étudiants
au doctorat internationaux au Québec doivent demander un renouvellement, alors
qu'on a déjà ces gens-là chez nous, ils sont déjà installés, déjà intégrés, ils
parlent en français. Nous, on pense que ce groupe-là devrait être exclu
carrément de...
La Présidente (Mme Poulet) :
Merci, M. Jutras.
M. Jutras (Daniel) : ...du
calcul des nouveaux CAQ.
La Présidente (Mme Poulet) : Merci,
M. Jutras, de votre contribution à nos travaux.
Alors, je suspends les travaux quelques
instants, le temps que le prochain groupe puisse s'installer.
(Suspension de la séance à 15 h 46)
(Reprise à 15 h 49)
La Présidente (Mme Poulet) :
Alors, on reprend les travaux. Bonjour, mesdames. Alors, on vous rappelle que
vous disposez de 10 minutes pour faire votre exposé. Par la suite, on va
procéder à la période d'échange. Alors, si c'est possible de vous présenter, et
la parole est à vous.
Mme Cormier (Sonya) : Parfait.
Merci. Bonjour. Merci beaucoup, chers membres de la commission. Donc,
évidemment, nous vous remercions chaleureusement de cette occasion toute
particulière de contribuer à cette importante réflexion collective pour bien
répondre aux besoins démographiques et économiques du Québec.
Alors, mon nom est Sonya Cormier. Je suis
directrice générale de la Coalition des organismes communautaires pour le
développement de la main-d'oeuvre, la COCDMO. Merci de recevoir nos deux
délégations. Au nom de la COCDMO, je suis accompagnée de Mme Nisrin Al Yahya,
directrice générale du Réseau des services spécialisés de main-d'oeuvre, le
RSSMO, et présidente de la COCDMO. Donc, Mme Nisrin va se joindre à nous dans
quelques minutes. Et, ensuite, au nom de la délégation d'AXTRA, sont présentes
Mme Valérie Roy, directrice générale d'AXTRA, ainsi que Mme Lyne Laplante,
directrice générale du Quartier de l'emploi et du service L'ANCRE, membre
d'AXTRA.
Est-ce que vous m'entendez bien?
La Présidente (Mme Poulet) : Oui,
on vous entend. Vous pouvez poursuivre.
• (15 h 50) •
Mme Cormier (Sonya) : Parfait.
Excellent. Donc, aujourd'hui, je prends parole, en fait, au nom des membres de
notre coalition, qui regroupe 12 réseaux nationaux, dont AXTRA, la TCRI et le
RSSMO, qui ont tous déposé des mémoires à votre attention. Ensemble, nous
rejoignons près de 1 000 organismes à travers le Québec qui oeuvrent à
l'inclusion et à la formation, à la francisation puis à l'intégration en emploi
des personnes immigrantes. Notre mémoire s'inscrit dans le cadre de la
planification pluriannuelle de l'immigration 2026-2029, évidemment. Il vise
éclairer les décisions gouvernementales à partir de l'expertise terrain de nos
membres et d'une lecture critique des orientations proposées. Ensemble, les
membres de la coalition portent une vision commune, soit celle d'un Québec qui
se développe sans exclure et qui fait de l'inclusion un moteur de prospérité
collective. Le Québec doit donc adopter une politique...
Mme Cormier (Sonya) : ...humaniste,
inclusive et respectueuse des droits, qui reconnaît la diversité des parcours
migratoires et professionnels ainsi que le rôle central des organismes
communautaires dans l'accueil et l'intégration de ces personnes.
En fait, de manière globale et
transversale, notre message clé est axé sur l'importance de l'emploi pour la
réussite de l'insertion socioprofessionnelle des personnes immigrantes. C'est
le point central et la revendication commune des membres de ... panne de son
... l'emploi comme vecteur central de l'insertion socioprofessionnelle.
En ce sens, nous portons aujourd'hui à
votre attention nos trois grandes recommandations : garantir un accès aux
services d'employabilité, de francisation et d'intégration, repenser la
reconnaissance des compétences pour une pleine utilisation du potentiel humain
et reconnaître l'expertise des organismes communautaires en employabilité et en
intégration, en assurant bien sûr leur financement, mais aussi en consolidant
leur place et leur rôle comme partenaires stratégiques, et ce, d'autant plus
que nous sommes ancrés... allant dans toutes les régions du Québec, en fait,
sur l'ensemble du territoire.
Enfin, nous sommes convaincus de ce qui
suit : si l'on omet cet axe crucial qu'est l'emploi, on peut mettre en
péril l'insertion socioprofessionnelle des personnes immigrantes. Pour réussir
la planification 2026-2029, il faut des politiques cohérentes, des services
adéquats avec une meilleure coordination et un partenariat fort et solide, avec
les acteurs du terrain, notamment les organismes communautaires, qui tissent
chaque jour le lien social en reconnaissant la valeur de chacun, pour bâtir
ensemble une société non seulement plus productive, mais surtout plus juste,
inclusive et accueillante.
Alors, sur ce, je passe la parole à ma
collègue Valérie Roy d'AXTRA.
Mme Roy (Valérie) : Merci.
Bonjour, chers membres de la commission. Mme Laplante et moi sommes heureuses
d'être parmi vous cet après-midi, là, avec nos collègues de la Coalition des
organismes communautaires pour le développement de la main-d'œuvre.
Ce n'est pas la première fois qu'AXTRA
participe aux consultations pluriannuelles de l'immigration. Notre regroupement
a pour mission de représenter, d'informer et de soutenir ses
89 centres-conseil en emploi membres face aux enjeux du marché du travail,
de les informer et de les soutenir. Ils sont dispersés partout au Québec, ces
89 organismes. Ils embauchent, là, environ 1 700 professionnels,
donc des personnes conseillères en emploi, d'orientation, des agents, agentes
de liaison avec les entreprises, et elles accompagnent ces professionnels-là.
Ces personnes professionnelles là accompagnent dans leur cheminement plusieurs
milliers d'individus chaque année qui sont en recherche d'emploi, en
réorientation de carrière, mais aussi des milliers d'entreprises.
Et, bien sûr, parmi nos membres, plusieurs
accompagnent des milliers de personnes issues de l'immigration. Puis ils sont
témoins, ils sont vraiment aux premières loges, là, des obstacles qu'ils
rencontrent dans leur parcours socioprofessionnel. On a la chance de faire
partie d'un écosystème plus large que sont, là, les 400 organismes
spécialisés en employabilité au Québec, les OSE, comme nous appelle le
ministère de l'Emploi ou les ressources externes, si vous voulez, du ministère
de l'Emploi. Donc, 400 organismes, 400 portes à travers la province.
Chaque année, ces organismes signent des ententes de soutien financier avec le
ministère de... de l'Emploi pour offrir la prestation de services des services publics
d'emploi, les SPE que l'on nomme dans notre jargon. Donc, on est responsables
de la livraison des services à la population et de la prestation de ces
services. Et, bon an mal an, là, c'est près de 200 000 personnes, là,
qu'on... que ces organismes-là, ces 400 organismes là réussissent à
soutenir pour intégrer ou réintégrer le marché du travail.
Donc, d'entrée de jeu, aujourd'hui, là, je
peux vous dire que nous sommes particulièrement préoccupés par l'accès limité
aux services publics d'emploi pour plusieurs personnes immigrantes en raison de
leur statut. On peut nommer, là, les personnes, les travailleurs et
travailleuses étrangers issus du Programme de travailleurs étrangers
temporaires, là, le PTET que vous connaissez bien, les personnes détentrices
par exemple d'un permis de travail ouvert dans le cadre du Programme de
mobilité internationale, le PMI. Donc, PVTistes, jeunes professionnels, les
conjoints admissibles, les étudiants internationaux puis bien sûr les personnes
en demande d'asile. Donc, toutes ces personnes sont pourtant légalement en
droit de travailler, et pourtant, nombre d'entre elles peuvent, pourraient
contribuer. Elles se voient... Elles se voient voir restreint l'accès à des
services spécialisés en emploi. Mais normalement, elles pourraient rapidement,
si elles avaient le petit appui nécessaire ou l'accompagnement nécessaire,
contribuer au marché du travail. Souvent, c'est qu'elles ne vont pas maîtriser
les codes du marché du travail québécois ou les pratiques à privilégier, à mettre
de l'avant. Parce que, souvent, ce qui arrive, c'est qu'à tort on va comprendre
ou percevoir que...
Mme Roy (Valérie) : ...ces
personnes-là ont accès aux services publics d'emploi, mais elles ont accès aux
services universels d'emploi, qui se traduisent par l'accès aux salles
multiservices des BSQ, des bureaux de Services Québec. Donc, elles ont accès,
en libre-service, aux ordinateurs, par exemple, pour envoyer des CV ou faire de
la recherche sur le Web. Mais il ne faut pas confondre ces services universels
d'emploi là que sont l'accès aux salles multiservices des bureaux de Services
Québec, des BSQ, à l'offre de services publics d'emploi, les SPE, dont je
faisais mention tout à l'heure, là, qui offrent un accompagnement personnalisé,
une approche globale, qui est faite par les professionnels auxquels je faisais
référence plus tôt, qui vont soutenir les personnes dans leurs démarches, que
ce soit de la révision du CV, en passant par le bilan de compétences, bien
démystifier, décoder l'information sur le marché du travail québécois, la
création de réseaux de contacts professionnels.
Et, c'est ça, depuis avril dernier... en
fait, depuis l'hiver dernier, je devrais dire, depuis le 1er février,
là... depuis l'année... le début de l'année 2025, il y a une décision qui a été
prise de ne plus permettre l'admissibilité de ces personnes-là immigrantes aux
mesures actives d'emploi offertes aux individus, aux... donc, au panier de
services publics d'emploi, et... dont les travailleurs étrangers temporaires et
leurs conjoints. Puis je vous dirais que cette situation fait mal sur le plan
économique, sur le plan humain, et de façon plus frontale dans certaines
régions. C'est pour ça qu'on a un bloc de recommandations là, qui insiste sur
cela, sur l'accès aux services publics d'emploi, dans notre mémoire. On
recommande un financement adéquat, mais... pas juste à la hauteur, mais
flexible, pour que les organismes puissent garantir cet accompagnement-là.
Une meilleure cohérence gouvernementale,
aussi, est mentionnée dans notre mémoire, pour observer cette meilleure
cohérence là, parce qu'on voit sur le terrain, des fois une incohérence entre
les politiques d'immigration, celles du ministère de l'Emploi, de
l'Intégration. Donc, il faut avoir une meilleure cohérence pour éviter aux
personnes qui sont là, oui, depuis un petit moment, mais aussi les personnes
nouvellement arrivées, d'être pénalisées dans leur parcours, finalement, en
raison de contradictions administratives. Par exemple, rapidement, les gens qui
ont accès aux services du MIFI, accueil, établissement, francisation, bien sûr,
bien, une fois qu'ils ont... qu'ils sont dans ces services-là, ne peuvent pas
basculer vers des services publics en emploi spécialisés qui sont... qui
relèvent du ministère de l'Emploi. Donc, ça, c'est un cloisonnement qui vient
nuire à une progression rapide puis une intégration réussie, économiquement,
sur le marché du travail.
Puis, en résumé, là, en ce qui a trait aux
autres recommandations, bien sûr, on a parlé de la... de l'offre de
francisation dans notre mémoire, l'importance... on l'a souligné, l'importance
de réinvestir massivement dans cette offre-là, d'avoir aussi une offre de francisation
qui soit contextualisée, arrimée au marché du travail actuel, en misant sur
l'expertise, encore, de ce réseau d'OSE, d'organismes spécialisés en
employabilité, pour accompagner ces personnes-là, parce que, vous le savez, là,
apprendre une seconde langue, troisième langue, quatrième langue, ce n'est pas
toujours facile. Et puis, en plus...
La Présidente (Mme Poulet) :
Merci. Je m'excuse de vous interrompre, c'est tout le temps que nous avons.
Mme Roy (Valérie) : ...ça
résume... Donc, on est prêtes à discuter avec les parlementaires.
La Présidente (Mme Poulet) :
Parfait, merci. Alors, nous allons commencer la période d'échange avec M. le
ministre.
M. Roberge : Merci beaucoup, Mme
la Présidente. Merci, on voit que vous êtes passionnés. Mmes Roy, Laplante,
Cormier et... j'ai manqué un nom, la quatrième personne...
Mme Al Yahya (Nisrin) : Al
Yahya.
M. Roberge : Bonjour aussi,
vous êtes saluée. Il y avait beaucoup de choses dans vos deux mémoires, dans
vos deux présentations. J'ai été interpelé par votre... la page 13 du mémoire
sur la coalition, ça dit : «Pour une approche humaniste et inclusive»,
puis je fais un lien avec l'intervention de Mme Roy, à la toute fin, quand elle
dit que ça prend un décloisonnement — j'ai retenu ce mot-là — des
services qui sont accessibles, des services en emploi, mais pas seulement, pour
avoir une vraie intégration. Puis je vois, dans le deuxième paragraphe, à la
page 13... là, on dit que ça prend la réciprocité entre la société d'accueil,
les individus, on dit que ça ne se limite pas... l'inclusion ne se limite pas à
l'intégration socioprofessionnelle, elle englobe dimensions sociale, citoyenne,
linguistique, culturelle, puis je trouve ça très important.
• (16 heures) •
Il n'y a pas si longtemps, on adoptait, à
l'Assemblée nationale, avec les collègues des oppositions, là, qui ont bonifié
le projet de loi — je les remercie, d'ailleurs — notre
modèle à nous, qui n'est pas le multiculturalisme, qui est l'intégration
nationale, avec, écrit en toutes lettres, dans la loi, le principe de la
réciprocité, très clairement, puis on dit : Il y a la personne elle-même,
mais, attention, il y a l'État, mais pas seulement ça, il y a la société
d'accueil, donc les Québécoises et Québécois. Et c'est là où on a... on a
vraiment tous une responsabilité. Ça passe par l'emploi, mais pas seulement...
16 h (version non révisée)
M. Roberge : ...ce n'était pas
une question, mais c'était juste une réflexion, j'ai trouvé intéressant que
vous apportiez ça.
J'ai une question, par contre, parce que
là, j'ai été interpelé, mais peut-être que j'ai mal compris dans ce cas-ci, sinon,
vous m'éclairerez. À la page 7 du même mémoire, premier... sur la coalition là,
je suis tombé là-dessus, il y a deux... il y a des recommandations, et la
troisième, ça dit : «Augmenter les seuils d'immigration dans les
différentes catégories — donc, je comprends, peut-être, dans toutes
les catégories, vous me le direz — afin de résorber l'arriéré dans le
traitement des demandes, tout en garantissant des ressources naturelles à leur
traitement». Mais vous dites : augmenter les seuils d'immigration tous
azimuts, les permanents, les travailleurs étrangers temporaires... tout le
monde? Est-ce que je vous comprends bien? Pouvez-vous préciser ce que vous voulez
dire?
Mme Al Yahya (Nisrin) : Oui,
absolument. Bien, merci, M. le ministre. Mme la Présidente. Bonjour, tout le
monde. Bonjour, MM., Mmes les députés. Donc, dans le fond, c'est une excellente
question que vous amenez là, mais j'aimerais bien revenir sur votre première
intervention, parce qu'en fait on parle toujours de la bidirectionnalité. Et,
très souvent, pour avoir une bidirectionnalité, il faut être deux parties, dans
le fond. Souvent, on prépare beaucoup la personne immigrante, mais on oublie de
préparer nécessairement la société d'accueil à, entre guillemets, l'accueillir
dans les meilleures conditions. Et quand on nommait ça, c'est vraiment pour
donner une part de responsabilité à chacune des deux parties dans cette
intégration-là. Donc, on est très heureux d'entendre que ça a l'écoute et l'impact
qu'on voulait par rapport à cela.
Maintenant, pour revenir à l'augmentation
de seuil ou la question de l'augmentation de seuil, on parle principalement,
bien sûr, de la question de la résidence permanente. Et là où on veut arriver,
c'était que, depuis toujours, on n'a jamais pris en considération la question
des seuils temporaires. Dans toute notre réflexion en amont, dans l'ensemble
des planifications précédentes, on avait toujours parlé de résidents
permanents, d'un seuil de résidence permanente, d'un 50 000 qui a été,
pendant très, très longtemps notre chiffre magique. Pendant un certain temps, on
avait aussi parlé de baisser les seuils, on avait parlé d'en accueillir moins
pour en prendre soin. Donc, l'idée avait été vraiment de : Comment est-ce
qu'on va pouvoir reconsidérer l'immigration permanente et l'octroi de la... de la
résidence permanente à des personnes qui, actuellement, ont des statuts autres
et qui peuvent être, entre guillemets, éligibles à cette résidence permanente
de par leur parcours?
Entre autres, je citerai, par exemple, les
personnes qui sont issues du Programme de l'expérience québécoise, programme qu'on
considère vraiment comme étant un levier pour une intégration réussie, étant
donné que c'est des personnes qui ont déjà fait des études ici, pour plusieurs,
ou qui ont déjà travaillé, qui sont déjà francisées et qui peuvent
éventuellement devenir un levier, une valeur ajoutée pour notre société.
M. Roberge : Donc, c'est ça, les
seuils suggérés, 25, 35, 45, vous voulez rehausser ça même en haut du 50, qui
est, je vous dirais, le seuil moyen des dernières années, vous voudriez plus
que ça? Mais qu'est-ce que vous répondez à certaines personnes qui sont venues
avant vous, dont l'Institut Québec, dont l'économiste Pierre Fortin, dont le Pr
David Santarossa, qui nous dit : On est au-delà déjà, on est au-delà de
notre capacité d'accueil, on le voit par le taux de chômage, on le voit par les
enjeux de logement, on le voit par des enjeux dans les écoles, sachant que ce
n'est pas vrai que tout ça est causé exclusivement par des seuils d'immigration
trop élevés, là, mais c'est un facteur.
Ce matin, le professeur Santarossa nous disait
que même dans plusieurs écoles publiques, des professeurs qui n'enseignent pas
l'ensemble du programme de formation à l'école québécoise, parce que les
classes d'accueil sont tellement saturées, il y en a tellement, qu'on fait
basculer les élèves de la classe d'accueil à la classe régulière alors qu'ils
ne sont pas prêts. Ils arrivent en classe régulière, le professeur, il
dit : Ils ne sont même pas finis d'être francisés. Je n'enseigne même pas
tout mon programme régulier, il faut que je continue de faire de la
francisation. Donc, mon seuil est dépassé, dépassé. Là, vous nous dites : Bien,
il faudrait en accueillir plus. Comment vous réconciliez ça, ce désir, votre
proposition d'en faire encore plus, alors qu'il y a des gens, sur le terrain, qui
disent : Écoutez, la situation actuelle est intenable?
Mme Al Yahya (Nisrin) : Oui, bien,
je vous répondrai comme suit : Dans le fond, la question des seuils est
importante, mais elle ne peut pas être discutée isolément, donc, on ne peut pas
l'isoler de l'ensemble. Il va falloir qu'on recentre ce que j'appelle... sur ce
que j'appellerai la cohérence. On peut accueillir plus au moins de personnes,
mais sans services adéquats, logement, francisation, emploi, bien, on crée des
tensions et des inégalités. Donc, l'objectif n'est pas nécessairement de
hausser ou de baisser, mais de planifier de manière...
Mme Al Yahya (Nisrin) : ...réaliste
et humaine pour qu'on puisse mieux accueillir tout le monde.
Et je comprends ce que vous me dites quand
vous dites que, bien, on est dépassé de partout, mais, initialement et à la
base, puis je ne nommerai pas les 616 000 personnes qui sont en résidence
temporaire, on s'entend... mais c'est juste qu'elles sont là. Comment est-ce
qu'on va pouvoir traiter avec les personnes qui sont là? Comment est-ce qu'on
va faire que ces personnes-là, qui sont ici, puissent devenir une valeur ajoutée
pour nous si jamais on ne revoit pas notre manière de planifier autrement?
Donc, ce qu'on est en train de nommer, ici, c'est vraiment une évaluation
rigoureuse de ce que vous nommez, de votre côté, la capacité d'accueil, et puis
d'une concertation avec les organismes communautaires, un financement à la
hauteur pour les services d'intégration et d'employabilité pour qu'on puisse
mieux ouvrir et intégrer ces personnes-là. Puis j'entends très fort ce que vous
me dites quand on parle de classes qui sont trop remplies ou des problématiques
de logement, etc., mais elles sont là. Qu'est-ce qu'on fait?
M. Roberge : Bien, en fait,
on fait au mieux, mais je ne pense pas qu'on en ajoute avant d'avoir pu régler
les enjeux causés par des débordements dans certains secteurs. C'est ma
perspective, c'est l'écho du terrain. Mais, si vous permettez, je vais laisser
ma collègue poursuivre les échanges avec vous, en vous remerciant de votre
présentation, à vous deux, les deux groupes. Merci.
La Présidente (Mme Poulet) : Mme
la députée de Vimont, il reste 8 min 19 s.
Mme Schmaltz : Merci. Merci,
Mme la Présidente. Bonjour, mesdames. Merci d'être présentes pour nos travaux.
J'aimerais vous ramener à votre recommandation un, en page quatre. Vous
recommandez de ne pas exclure la sélection des personnes immigrantes
permanentes ou temporaires qui ne maîtrisent pas le français. Je ne sais pas si
vous êtes au courant de la façon que Francisation Québec fonctionne, c'est
qu'on a... en fait, on propose gratuitement plusieurs cours généraux, qui sont
offerts par domaine d'emploi, qui sont disponibles partout sur le territoire
durant toute l'année, au moyen de quatre sessions, que ce soit à temps complet,
que ce soit à temps partiel, en présentiel, en ligne, et même depuis
l'étranger. Qu'est-ce que vous pensez de cette offre, de ce panier de services
de Francisation Québec? Est-ce qu'elle est suffisante à vos yeux?
Mme Al Yahya (Nisrin) : Valérie,
est-ce que je te laisse aller avec cette question-là ou est-ce que je
m'embarque?
Mme Roy (Valérie) : Tu peux y
aller. Tu peux y aller.
Mme Al Yahya (Nisrin) : Bien.
Très bien. Mais c'est sûr que l'offre de services de francisation au jour
d'aujourd'hui est assez grande et assez diversifiée. Cependant, avec l'ensemble
de la demande, malheureusement, elle ne couvre pas tous les besoins, donc, il y
a beaucoup de délais d'attente pour les personnes qui arrivent. Et, très
souvent, ça peut engendrer un découragement parce que c'est certain aussi que,
pour pouvoir obtenir des emplois, même si on parle d'emploi d'entrée, bien, la
personne devrait être minimalement francisée. Donc, la problématique qu'on
génère avec la question de manque d'accessibilité à la francisation pour
certaines personnes ou les délais qui sont très longs par endroits. Ceci
implique souvent que les gens ne vont pas pouvoir aller de l'avant dans leur
projet d'intégration sur le marché de travail.
Un autre élément important qu'on nomme,
c'est la question de la francisation dans les milieux professionnels, parce que
ce n'est pas tout le monde qui arrive à avoir, entre guillemets, cet accès-là
dans les milieux professionnels. Puis on comprend qu'il y a des enjeux de...
qui sont en lien avec la productivité de l'entreprise, avec la libération des
employés, mais cependant, c'est important qu'on puisse avoir cette réflexion-là
ou cette pensée-là par rapport aux personnes qui doivent se franciser, dans le
fond, parce qu'on s'entend que le français, pour nous, comme... au Québec puis
comme Québécois, est une langue qui a un lien direct avec notre fonctionnement
social et professionnel.
• (16 h 10) •
Mme Schmaltz : Peut-être vous
rappeler, là, qu'au niveau des délais, là, oui, c'est vrai, on a connu, à un
certain moment, là, une longue période, mais celle-ci a énormément diminué,
presque de moitié si l'on compare à l'année dernière. Donc, les délais, on ne
parle pas de semaines et de semaines, là... je ne veux pas... je ne veux pas
afficher un chiffre, là, mais j'avais l'impression que c'est en bas de 30
jours, là. Permettez, là, juste de ne pas être certaine, à ce moment-ci, mais
je sais qu'on a... les délais sont beaucoup moins élevés qu'ils ont étaient
dans le passé. Donc, ça, c'était... On a répondu à cette demande qui était
aussi... qui venait d'un petit peu partout.
Concernant, maintenant, le volet
entreprise, qui est quand même la portion...
Mme Schmaltz : ...la portion,
mais disons le... Francisation Québec, le volet deux, appelons ça comme ça, de
francisation Québec, qui était justement de franciser en entreprise. À ce
niveau-là, vous parlez de l'accessibilité, c'est-à-dire je vais... je veux
juste être sûre de comprendre. Parce qu'on peut franciser désormais les
travailleurs directement sur leur lieu de travail, donc on évite aussi, parce
que c'est un enjeu de fatigue souvent, etc. Donc, les gens préféraient, des
fois, ne pas se franciser parce qu'ils jugeaient que, bon, c'était un peu
compliqué, et on peut très bien comprendre, hein, soit dit en passant. Alors,
le fait maintenant de se franciser sur les lieux de travail, est-ce que vous
avez des échos de ça? Parce que... Ou, quand vous parlez de difficultés, c'est
à quel niveau?
Mme Al Yahya (Nisrin) : Mais
je vous dirais très simplement qu'on ne peut pas nécessairement libérer ces
travailleurs-là pendant les heures de travail. Donc, qu'ils le fassent après
des quarts de travail, par exemple, des journées longues, etc., bien, ça ne
donne pas la même qualité du rendu que cela devrait être. Donc, est-ce qu'on
peut, par ailleurs, demander aux employeurs de libérer sur des heures de
travail? Bien, on s'entend que ça, c'est plus difficile avec la pénurie de
main-d'oeuvre qu'on observe souvent dans certaines entreprises. Donc, comment
est-ce qu'on pourrait arrimer entre ces deux équations complexes, la fatigue de
l'individu versus les besoins de productivité de l'entreprise? C'était plus
dans cet esprit-là que je nommais la problématique, en fait.
Mme Schmaltz : Je comprends,
mais on... Pour avoir visité certaines entreprises aussi qui avaient... qui
étaient en train de franciser certains de leurs employés, souvent la
francisation en entreprise permettait de comprendre aussi l'enjeu du travail.
Donc, on avait un côté plus technique aussi dans l'apprentissage, qui était à
la fois extrêmement intéressant, là, pour les travailleurs, parce qu'il y a
quand même une... peut-être, un vocabulaire différent, disons, au travail
versus quand on est... quand on est à l'extérieur. Alors, cette francisation se
faisait directement en travaillant, et puis ça peut aller encore plus loin
aussi, de travailleurs étrangers qui étaient francisés un peu directement sur
leur lieu de travail.
Je donne un exemple. À Montréal, à un
moment donné, on a rencontré une coopérative qui faisait de la francisation des
fois au moyen de pictogrammes. Donc, les gens, en même temps, je ne sais pas,
moi, ils coupaient un brocoli, bien, ils voyaient la photo, comment c'était
écrit. Donc, il y avait l'apprentissage qui se faisait. La personne... Des
fois, ils étaient accompagnés d'une personne, d'un mentor. Là, des fois, il y
avait... on... des noms, là, des vocables, là, qu'on donnait à ces gens qui
étaient aidants. Donc, il y a quand même toute une panoplie d'offres en
entreprise. Il y en a... Il n'y a pas seulement une... seulement une facette,
là, d'apprentissage, il y en a plusieurs, dépendamment.
Peut-être que les organismes que vous
représentez n'ont peut-être pas toute l'étendue. Je ne sais pas. Est-ce qu'ils
ont vraiment toute l'étendue des services ou... peut-être regarder de notre
côté, est-ce qu'on pourrait peut-être davantage les informer aussi? Il y a
peut-être un peu... Je ne ne mets pas le tord en disant que vous ne les
informer pas, là, pas du tout, mais est-ce qu'il manque peut-être un peu plus
d'infos qu'on devrait peut-être vous soumettre aussi pour que ça soit plus
facile? Puis, ma foi, au MIFI, ils sont très ouverts aussi aux idées ou aux
nouvelles façons de faire, là, pour la francisation en entreprise. Je pense
que, quand on est plusieurs à penser, on peut facilement mettre de l'avant, là,
des nouvelles façons de faire. Je pense que c'est quelque chose qui peut
être... qui peut être vraiment intéressant.
Dernière petite, petite mise au point
peut-être aussi. Dans le PSTQ, volet quatre, on n'a pas mis d'exigence minimale
de français justement pour nous donner la flexibilité d'inviter des experts
mondiaux qui seront un atout et qui vont pouvoir entreprendre leur francisation
une fois sur le territoire. Donc, peut-être, vous voulez peut-être mettre une petite
mise au point aussi là-dessus, peut-être que ce n'était peut-être pas clair ou
des fois... vous savez, l'information, elle circule puis des fois on a... on
pense que. Donc, ça, c'est important. Est-ce qu'il y avait quelqu'un qui
voulait poser une question ou je continue? Ah! c'est fini?
La Présidente (Mme Poulet) : Il
reste 45 secondes.
Mme Schmaltz : Ah! il
reste... Ah, mon Dieu Seigneur! D'accord. Ça a passé vite, le huit minutes,
finalement, en fait. Bien, voilà, moi, je voulais juste vous remercier encore
une fois, là, de votre participation à nos travaux, puis en espérant, là,
peut-être de continuer aussi à collaborer sur... C'est important. Je pense, la
francisation, on l'a tous à coeur puis on ne doit pas reculer, même si c'est
difficile, même si c'est des fois ardu, le chemin. Là, je pense que, si on s'y
met tous à l'oeuvre, là, on va être capables de franciser.
La Présidente (Mme Poulet) : Parfait.
Alors, merci. Il reste 14 secondes. Alors, c'est tout. Parfait. Alors, M.
le député de l'Acadie, la parole est à vous.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. Alors, bon après-midi à vous quatre. Merci pour vos mémoires. Il y
a un élément que vous soulevez, c'est...
M. Morin : ...le mémoire de la
COCDMO, à la page 7, et ça traite du regroupement familial. Et j'aimerais vous
entendre là-dessus parce que, présentement, et vous vous le soulignez,
regroupement familial, les conjoints, le délai... même des fois un peu plus que
36 mois, des parents, 48 mois. C'est le cas au Québec. C'est moins long dans
le reste du Canada. Les quotas, à peu près, c'est de 10 200 à 10 600
par année. Il y a présentement 11 800 personnes sur le territoire en
attente, mais il y en a 30 000 à l'étranger, donc les délais vont
continuer à s'étendre.
Et là le ministère a différents scénarios
qu'il propose dans le cadre de la consultation. Dans le scénario a, avec une
admission de 25 000 pour des permanents, il y en aurait 5 800 pour le
regroupement familial, c'est à peu près la moitié de ce qu'il y a maintenant.
Donc là, les délais, ce ne serait plus 36 mois, ça pourrait monter à 70 mois.
Évidemment, le scénario c, bon, on parle de 45 000, donc là on reste à
10 400, c'est à peu près les mêmes délais, mais le scénario b, 35 000,
qui est aussi le chiffre qui est retenu par le Parti québécois, là, on
parlerait de regroupement familial d'à peu près 8 100. Donc, ça va
augmenter les délais.
Vous dites que ces délais-là nuisent à la
vie familiale, causent des souffrances inutiles, compromettent l'intégration
des personnes concernées. Tout dépendant des scénarios, ça risque d'aggraver la
situation. J'aimerais que vous puissiez nous parler un peu de ce que vous en
pensez et... si vous avez différentes options pour nous qui feraient en sorte
qu'on pourrait raccourcir ces délais.
Mme Al Yahya (Nisrin) : Bien,
merci, M. le député, pour la question. Dans le fond, ce qu'on est en train de
nommer ici, c'est que nous avons toujours considéré le Québec comme une terre
d'accueil. Et, quand on est une terre d'accueil, pour une meilleure
intégration, pour une meilleure... pour un meilleur accompagnement, pour une
réussite d'intégration, le fait d'avoir le noyau familial tous ensemble est un
élément extrêmement important. Et le noyau familial égale à quoi? Égale à
conjoint, conjointe, enfants. Donc, si une personne qui a fait son parcours de
résidence permanente et qui arrive toute seule n'est pas rejointe par le reste
de sa famille, bien, ça risque de créer des fragilités, des difficultés et
surtout beaucoup, beaucoup de problématiques au niveau d'un parcours migratoire
qu'on pourrait considérer de façon positive. Ce parcours migratoire, il ne
consiste pas seulement, justement, dans une phase d'intégration réussie, à
avoir simplement un accès aux services et tout ce qui va avec, mais d'avoir
aussi le noyau familial qui est solide et présent, ensemble, tout le monde.
Maintenant, ce que vous me nommez en lien
avec les seuils, c'est certain qu'aucun des scénarios ne serait valable pour
ces personnes-là qui vont demander un regroupement familial. Donc, est-ce
qu'initialement on devrait réfléchir ça en amont? Donc, est-ce qu'on devrait
penser que la personne qui arrive devrait soit arriver avec le conjoint ou la
conjointe et que ce soit pensé dans nos méthodologies d'accès à la résidence
permanente, puis là encore, je parle vraiment de la résidence permanente, ou
est-ce qu'on voudrait enlever cette option quand on... quand on parlera des
personnes temporaires? Puis là je reviens un petit peu à l'intervention de Mr
Roberge hier, en parlant de la définition du mot «temporaire». Donc,
éventuellement, si la résidence est temporaire puis qu'elle cible une personne
en particulier, est-ce que la question des conjoints, conjointe devient
centrale à ce moment-là?
Donc, nous, notre souci, c'est vraiment
par rapport à un regroupement familial qui touche directement les personnes qui
sont installées au Québec et qui comptent avoir un projet de longue durée de
devenir un citoyen québécois à part entière, et cette citoyenneté-là, bien, on
ne l'obtient que quand on a une vie qui est de qualité, puis cette vie de
qualité... si le noyau familial et... le noyau familial existe, il devrait
faire partie de l'équation au complet.
• (16 h 20) •
M. Morin : Compte tenu des
délais et compte tenu des scénarios proposés, ces délais risquent de
s'accroître. Est-ce que ça peut avoir un impact sur les engagements
internationaux du Québec?
Mme Al Yahya (Nisrin) : Bien,
il me semble bien que oui...
M. Morin : ...et compte tenu
de l'impact que ça a sur les familles, sur des enfants, est-ce qu'on ne devrait
pas les traiter hors seuil?
Mme Al Yahya (Nisrin) : Bien,
moi, je pense qu'il ne faut pas décourager les personnes de vouloir venir au
Québec. C'est ça la grande question que nous avons dans le fond, c'est que si
jamais on est pour mettre des obstacles entre parenthèses qui font partie de
l'identité de l'humain, dans le fond, on est des acteurs de société qui... puis
on est... On est des personnes qui vivons dans une structure qui est assez
claire dès le départ. Donc, si par exemple, on veut dire que, bien, le Québec,
le Canada veut accueillir des personnes, puis pour nous, le fait de les
accueillir égale à, bien, on veut les avoir seuls, sans leur famille, bien,
est-ce que cela ne va pas ramener la grande réflexion de pourquoi je choisirai
le Québec versus ailleurs? Cependant, nous, on a besoin de cette
immigration-là, on s'entend, pour maintes raisons, pour différentes raisons. On
parle de vieillissement de la population, on parle d'enjeux économiques, on
parle de besoins d'entreprises. Donc, comment est-ce qu'on va pouvoir en fait
allier l'ensemble de ces réflexions pour pouvoir réussir à obtenir une société
solidaire, humaniste et qui fasse du sens?
M. Morin : Je vous remercie.
L'autre élément aussi que j'aimerais aborder avec vous, bien là, vous le savez,
le PEQ a été suspendu. On ne sait pas s'il va revenir, mais pour l'instant, les
gens qui étaient dans le processus sont arrêtés. C'est une décision qui a été
prise par le gouvernement. On constate qu'il n'y a pas de prévisibilité, il ne
semble pas y avoir non plus de planification. C'est quoi votre opinion
là-dessus? C'est quoi l'impact que ça a avec les gens avec qui vous faites
affaire?
Mme Al Yahya (Nisrin) : Bien,
je vous dirai tout simplement que pour nous, autant le programme d'expérience
québécoise que celui du programme du programme... du programme de sélection des
travailleurs qualifiés, on parle vraiment de logique complémentaire. Donc, le
PEQ, pour nous, valorise les personnes qui sont déjà ici. C'est des personnes
qui sont formées, intégrées. Le PCQ, lui, quant à lui, bien, il sert à attirer
des personnes. Donc, en fait, en bout de ligne, nous, notre réflexion, c'est
que si on arrivait à intégrer ces personnes-là, pouvoir leur garantir un
accompagnement jusqu'à la résidence permanente de façon rapide et intéressante,
bien, ils vont venir répondre à des besoins spécifiques du marché de travail.
Surtout que c'est pour la majorité des personnes qui ont... qui ont travaillé
sur sol québécois et/ou éventuellement étudié sur sol québécois et encore plus
qui ont des expériences sur le marché. Donc, pour nous, limiter l'accès ou
arrêter ce programme-là à la base n'aurait probablement pas dû avoir lieu.
M. Morin : Je vous remercie.
Autre élément, et j'aimerais avoir votre éclairage là-dessus. Admettons que le
scénario a, deux a soit retenu, donc 25 000 personnes pour les permanents.
On sait que présentement, là, dans le système, il y a à peu près 142 000 personnes
qui ont... qui sont en attente de leur résidence permanente, qui ont leur CSQ,
etc. Bon, ils sont ici, là, ils travaillent, là, on ne parle pas d'autres qui
pourraient venir, là. Alors, qu'est-ce qu'on va faire... Et puis là, ça, c'est
ceux qui sont en attente d'une résidence permanente, puis il y a aussi des
travailleurs temporaires, temporaires. Si c'est le scénario 2a qui est
retenu, qu'est-ce qu'on va faire avec les 142 000 personnes? Ça va prendre
combien de temps? Est-ce qu'on va les retourner chez elles et qu'est-ce qui va
arriver?
Mme Al Yahya (Nisrin) : Bien,
en fait, moi, je vous dirais tout simplement que ma réflexion, puis on en
parlait il n'y a pas longtemps entre collègues, c'est que, quand on octroie un
certificat de sélection du Québec, avons-nous vraiment réfléchi aux besoins du
Québec puis à nos seuils initialement? Donc, qu'est-ce qu'on fait avec eux?
Bien, si jamais on va prendre ça juste de façon très, très chiffrée, bien, ceci
voudrait dire qu'on n'acceptera personne d'ici huit ans parce qu'ils sont déjà
là, puis qu'on va leur donner leur accès à la résidence permanente. Cependant,
est-ce que c'est ça le modèle qu'on veut produire?
Mme Cormier (Sonya) : Bien,
j'ajouterais, si je peux me permettre aussi, je porterais à votre attention
dans la page cinq de notre mémoire, le chiffre comme suit qui dit qu'entre 2024
et 2033 sera composé de 24 %... la main-d'œuvre sera composée de 24 %
de la future population immigrante. Donc, si je calcule le 70 mois, ça
m'amène 5 ans et quelques, donc j'arrive en 2030 et je n'arrive pas à mon
24 % pour qu'on... Pour remplir les besoins de main-d'œuvre. Donc, c'était
aussi en ce sens-là qu'était apportée la recommandation d'augmenter les seuils
d'immigration à...
Mme Cormier (Sonya) : ...à ce
niveau-là ainsi que par rapport aux différentes catégories.
M. Morin : Je vous remercie.
Dans le mémoire d'AXTRA, parce que ça aussi, c'est un élément qui revient
souvent à la page deux, la recommandation neuf. On dit : «Renforcer la
reconnaissance des acquis et des compétences des personnes immigrantes, en
allégeant des démarches administratives, bonifiant les programmes passerelles,
favorisant une collaboration soutenue entre employeurs, ordres professionnels
et institutions de formation. Souvent, ce qu'on entend, c'est que, les gens
qu'on va aller recruter à l'étranger, on ne leur explique pas toujours très
bien quels sont tous les critères, les compétences qui sont exigées par les
ordres professionnels. Au Québec, les ordres professionnels jouent un rôle,
c'est un rôle fondamental, ils sont là pour la protection du public. On le
comprend très bien, mais ça devient parfois un peu le parcours du combattant
pour que des compétences soient reconnues. Avez-vous des recommandations ou des
suggestions pour les membres de la commission là-dessus?
Mme Roy (Valérie) : Oui.
Bien, je vais laisser ma parole à ma collègue Lyne Laplante pour lui permettre
de prendre la parole, mais oui, en effet, vous avez raison, c'est un parcours
du combattant.
Mme Laplante (Lyne) : C'est
vraiment un parcours du combattant pour une personne qui arrive et qui veut
obtenir une reconnaissance des acquis. Mais, au-delà, avant la simple
reconnaissance des acquis, actuellement, les personnes n'arrivent même pas à
obtenir les services de base en emploi, et par la suite, pour être capable
d'aller chercher la reconnaissance des acquis, on va ajouter des délais, on va
ajouter beaucoup de parcours. Nos recommandations ne peuvent pas s'inscrire
autre que de dire : Il faut qu'on puisse accompagner la personne dans
toutes les sphères et tous ses besoins pour être capable de lui permettre
d'obtenir un emploi à la hauteur de ses compétences. Il va falloir que les
ordres professionnels nous aident aussi à... tout le monde, collectivement, à
ce qu'on puisse utiliser la bonne personne avec le maximum de ses compétences pour
venir combler des besoins sur notre marché du travail parce qu'on...
La Présidente (Mme Poulet) : Merci.
Alors... Je suis désolée de vous interrompre, désolée de vous interrompre. On
va poursuivre la discussion avec le député de Maurice-Richard.
M. Bouazzi : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. Merci beaucoup, mesdames, pour vos éclairages, vos
éclairages. Peut-être une question simple pour commencer : Est-ce que vous
avez déjà vu une définition claire de ce que c'est que la capacité d'accueil?
Et je vous le dis, je n'ai pas beaucoup de temps.
Mme Roy (Valérie) : Il n'a
pas beaucoup... Non, on n'a pas... Non, on n'a pas eu une définition claire.
Mme Al Yahya (Nisrin) : Mais
je vais... je vais rebondir sur la question puis je vous dirais tout simplement
qu'en ce qui concerne la coalition et ses membres on conteste souvent l'usage
politique du concept de la capacité d'accueil qu'ils jugeaient comme vague et
non mesurable, dans le fond. Ce concept, il alimente plutôt la peur et ne repose
pas vraiment sur ce que j'appellerais un fondement scientifique. On devrait
plutôt parler de comment on peut à mesurer la capacité d'améliorer les systèmes
d'intégrations, par exemple, comment on peut renforcer des mécanismes de
sensibilisation citoyenne, est-ce qu'on peut éventuellement abandonner cette
notion pour dire plus comment pourrions-nous améliorer nos systèmes.
M. Bouazzi : Je vous entends.
Je m'excuse, j'ai très peu de temps. Donc, la définition claire n'existe pas.
Vous n'avez jamais vu un chiffre qui vous a été présenté qui vous dit : La
capacité d'accueil est ceci, ni, d'ailleurs, par les deux partis qui en parlent
tout le temps, ni la CAQ ni le Parti québécois, à ma connaissance, pour les
avoir beaucoup écoutés au sein de cette Assemblée.
Peut-être aller sur les différentes
ressources que vous avez pour, justement, permettre aux différentes personnes
qui arrivent sur notre territoire et qui veulent travailler, qui, d'ailleurs,
vont payer, faut-il le rappeler, des impôts toute leur vie et donc payer aussi
avec tout le monde pour les suivants. Est-ce que vous avez des manques dans le
communautaire, dans les différents services que vous apportez?
Mme Roy (Valérie) : Oui,
bien, je vais laisser... c'est ça. Lyne, vas-y. C'est une très bonne question.
• (16 h 30) •
Mme Laplante (Lyne) : Depuis
le début de l'année 2025, là, début février, appliqué au début avril, on
ne peut plus accueillir plusieurs personnes avec des statuts d'immigration,
entre autres les travailleurs étrangers temporaires. On a beaucoup de cas de
figure sur le terrain où... et je vais vous en citer quelques-uns qui sont
arrivés dans les dernières semaines. Le secteur de la santé accueille beaucoup
d'infirmiers, infirmières de l'étranger avec une courte formation emploi
garanti, le conjoint ou la conjointe arrive avec, avec une expérience et une
expertise, et on...
16 h 30 (version non révisée)
Mme Laplante (Lyne) : ...on ne
peut pas accompagner cette personne-là vers l'intégration en emploi. Donc,
cette personne-là a un permis légal de travailler, un permis ouvert, a une
expertise à offrir, mais ne connaît pas du tout le milieu d'emploi. J'ai des
cas de figure qui sont arrivés, dans les dernières semaines, où on a, entre
autres, une dame qui nous arrive de la France, qui est diplômée en psychologie,
qui a cinq ans d'expérience, qui pourrait travailler dans un milieu scolaire
pour aider, mais ne connaît pas le milieu de l'emploi, ne sait pas comment
faire sa recherche d'emploi, ne peut pas adapter son curriculum vitae, sauf les
services universels d'emploi dans les DSQ, parce qu'ils ne sont plus
admissibles à aucun service public d'emploi depuis le 1er avril dernier. Ça
fait que ça, ça vient vraiment compromettre le placement en emploi de gens qui
nous arrivent avec un espoir de s'installer ici. On a besoin de leurs
conjointes dans le milieu de la santé puis on n'est pas capables de soutenir le
conjoint ou la conjointe dans d'autres secteurs d'emploi, là.
M. Bouazzi : Intéressant de
voir que les exemples que vous donnez, c'est justement des personnes qui
offrent des services et donc qui participent peut-être à augmenter la fameuse
capacité d'accueil.
Mme Roy (Valérie) : ...le
lien avec la capacité d'accueil, vous avez mis le doigt dessus, il nous faut
une meilleure cohérence des ressources, puis ça, c'est primordial, de revoir
ces critères d'admissibilité là. Ça met une pression sur le plan économique,
dans les régions, où la vitalité économique est en... il y a des enjeux parce
qu'il y a pénurie de main-d'oeuvre sectorialisée. Et ça a des enjeux sur le
plan humain. Si on laisse les gens dans la vulnérabilité et qu'ils n'ont pas de
salaire stable avec un emploi convenable, bien, ils vont utiliser davantage les
autres services publics, donc... capacité d'accueil.
La Présidente (Mme Poulet) : Merci
beaucoup à vous quatre. Merci beaucoup à vous quatre, de votre collaboration.
Alors, je suspends quelques instants les
travaux, le temps que le prochain groupe s'installe.
(Suspension de la séance à 16 h 33)
(Reprise à 16 h 37)
La Présidente (Mme Poulet) :
Alors, bonjour. Bienvenue! Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes,
et par la suite on va procéder à une période d'échange avec les membres de
la... de la commission. Alors, allez-y. La parole est à vous.
M. Durieux (Arthur) :
Merci beaucoup. Merci, Mme la Présidente. Mmes et MM. les parlementaires,
permettez-moi, avant toute chose, de vous présenter notre organisme ainsi que
les membres que nous représentons. Je me présente en premier lieu, Arthur
Durieux. Je suis directeur et cofondateur du centre Le Pont‑APPI. Je suis aussi
cofondateur du centre... du ROHMI avec l'organisme Foyer du monde, ici
représenté par sa directrice, Eva Gracia-Turgeon. Je vous présente également
Florence Bourdeau qui est la co-coordonnatrice du ROHMI. Au ROHMI, nous
regroupons des organismes qui offrent de l'hébergement, des services juridiques,
des biens de nécessité et qui œuvrent à la défense des droits civils,
socioéconomiques et politiques des personnes migrantes à statut précaire.
L'objectif de notre présentation n'est pas de venir débattre sur les seuils
d'immigration, en particulier sur l'immigration humanitaire, car lorsqu'on
parle d'immigration, on nous demande toujours de répondre à la question du
combien. Combien de personnes immigrantes le Québec devrait-il admettre?
Combien de personnes temporaires, de personnes permanentes ou d'étudiants
étrangers?
Nous venons aujourd'hui vous parler du
comment, comment certaines politiques ont changé le visage de l'itinérance à
Montréal et comment nous pouvons faire en sorte d'améliorer la situation. Nous
pouvons parler du comment des conditions de vie des personnes à statut
précaire, car c'est elle que nous accompagnons au quotidien. Il y a plus de
trois ans, l'actualité a été monopolisée par la fermeture du chemin Roxham.
Cette fermeture s'est concrétisée par l'élargissement de l'Entente des tiers
pays sûrs. Initialement, cette entente permettait aux personnes cherchant la
protection contre la persécution de demander l'asile tel que défini dans les
conventions internationales dont le Canada est signataire, et ce, même si, ils
et elles arrivaient sans visa. La fermeture des endroits comme le chemin Roxham
nous a permis de constater, dès septembre 2023, soit moins de cinq mois après
l'élargissement de l'Entente des tiers pays sûrs, un débordement notable de
personnes demandeuses d'asile vers les ressources pour personnes en situation
d'itinérance, surtout des familles avec enfants et des hommes seuls.
Pourquoi? Parce que de plus en plus de
personnes vulnérables n'entament plus la procédure d'asile à leur arrivée, soit
parce qu'elles rentrent par des points irréguliers et doivent maintenant
attendre 14 jours pour le faire, soit parce qu'elles rentrent via
l'aéroport, mais craignent d'être déportées. Elles s'orientent vers le
processus d'asile interne, un processus qui place les personnes immigrantes
dans une grande précarité. Elles n'ont donc pas droit aux hébergements prévus
par le gouvernement provincial ni à l'aide sociale. Si une personne immigrante
n'a pas de famille ou d'amis à Montréal, elle se retrouve donc en situation
d'itinérance jusqu'à ce qu'elle ait réussi à déposer une demande d'asile
complète. L'itinérance engendre à son tour un obstacle majeur à l'exercice de
plusieurs droits, mettant en péril leur santé et leur sécurité, entre autres.
Les demandeurs et demandeuses d'asile vivent souvent plusieurs difficultés
cumulées, traumatismes ou symptômes de santé mentale fragilisée, barrière de la
langue, absence totale de réseau de soutien ou de connaissance du milieu, etc.
Les hébergements pour personnes en situation d'itinérance, bien qu'elles
fassent de leur mieux, ne sont pas souvent adaptés à leurs besoins. La
cohabitation avec des personnes aux prises avec des problèmes de santé mentale
et de toxicomanie s'avère un obstacle de plus à l'intégration.
Ajoutons à cela que la situation d'itinérance
complexifie le processus de régularisation de leur statut. De nombreuses
personnes sans adresse fixe ne reçoivent pas leur courrier, le courrier
essentiel de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié et ne
peuvent donc pas se présenter à leur audience. Déposer une demande d'asile est
complexe et doit inclure un narratif de persécution détaillée, une étape qui
requiert notamment les... des services juridiques. Ces personnes immigrantes
n'ayant bien souvent pas d'argent pour payer un représentant, un représentant
légal, se retrouvent à vivoter dans des sites d'hébergement pour personnes en
situation d'itinérance. Notons qu'en 2022, 20 % des personnes sondées à
Montréal ont déclaré être issues d'une trajectoire migratoire. Le dénombrement
de 2025 devrait encore être plus élevé.
• (16 h 40) •
Mme Bourdeau (Florence) : Je
vais prendre le relais. Bien, c'est donc pourquoi, en fait, les reculs...
Mme Bourdeau (Florence) : ...dans
l'accès à... ont contribué à transformer le visage de l'itinérance à Montréal,
et, encore là, on parlait des personnes en demande d'asile. C'est sans
mentionner les récentes réglementations qui ont coupé, en fait, l'accès à la
résidence permanente pour de nombreuses personnes, qu'elles soient entrées
comme travailleurs ou comme étudiants internationaux.
Donc, ça, ça a été un peu le portrait.
Maintenant que nous avons décrit la situation, nous allons vous faire part de
nos pistes de solution. Parce qu'en fait, peu importe les décisions que les
gouvernements prendront sur le combien, ce dont on vous parle, c'est-à-dire
l'hébergement puis les services essentiels pour les personnes immigrantes, ça
demeurera un enjeu pour les années à venir. Les besoins vont continuer d'être
très élevés, et nous avons collectivement ce devoir-là de trouver des solutions
et des solutions pragmatiques pour y répondre.
Donc, nos recommandations sont les
suivantes en, un, élargir les critères d'éligibilité et d'accès aux ressources,
que ce soit des ressources d'hébergement de services... gouvernement, afin de
permettre ainsi aux personnes en demande d'asile ou des personnes à statut
précaire de bénéficier de l'aide et du soutien nécessaires. Ensuite, et c'est
la raison de notre présence, bien, c'est des organismes comme les organismes que
vous avez ici, les membres du ROHMI qui offrent de l'hébergement temporaire et
de transition. Pourquoi les financer? Bien, parce que ça permettrait la
bonification du nombre de lits et des services offerts, mais aussi des services
sociaux communautaires de qualité et qui vont être centrés sur les personnes;
et finalement financer aussi des ressources qui s'occupent de populations
spécifiques, des femmes, des femmes avec enfants, des hommes seuls, en fonction
des besoins.
Il faut savoir, en fait, qu'historiquement
les organismes qui sont membres du RHOMI ne reçoivent aucun financement
récurrent du gouvernement. En avril 2024, le gouvernement du Québec avait
créé un fonds, le fonds qui s'appelait le Fonds d'urgence pour les demandeurs
d'asile, qui était doté d'une enveloppe de 5,5 millions de dollars,
qui était déjà, à l'époque, comme un premier pas dans la bonne direction.
Malheureusement, bien, plusieurs organismes n'ont pas pu bénéficier de cette
enveloppe. Pour ceux qui ont reçu ces sommes, bien, l'aide n'était pas
forcément à la hauteur des besoins. Et, en fait, cette enveloppe budgétaire là
n'a pas été renouvelée. C'est une enveloppe qui était au sein du... et qui a
été comme envoyée au milieu de l'itinérance, qui en ont également grand besoin,
ce n'est parce qu'on est en train de dire.
Donc, nous, ce qu'on demande, c'est de de
mettre sur pied, en fait, un programme qui va être un programme de financement,
pas un fonds d'urgence, un programme récurrent et de suivi pour les personnes
en demande d'asile, les personnes à statut précaire, d'une somme qui est quand
même assez dérisoire, si on considère l'appareil gouvernemental, on parle de
2,5 millions de dollars. Ça permettrait quoi? Bien, ça permettrait
comme... qui se déclinerait, en fait, pour un 350 000 par an pour des
organismes qui font de l'hébergement; en 90 000, pour ceux qui offrent des
services d'accompagnement, qui fournissent des biens de première nécessité, des
services juridiques.
Chez nous, au ROHMI, en fait, on fait
partie, on est comme une des parties de la solution sur la prévention de
l'itinérance chez les personnes migrantes. Puis, de façon plus large, bien, nos
membres contribuent à une intégration réussie des personnes migrantes dans le
but que celles-ci puissent participer pleinement à la société québécoise, et je
pense que c'est pour cette raison que nous sommes tous ici aujourd'hui. Les
gouvernements doivent mieux soutenir les organismes offrant de l'hébergement
transitoire, mais aussi des services aux personnes migrantes. C'est bien sûr
une question de dignité, c'est aussi une question de santé publique. Et c'est,
avant tout — j'allais dire avant tout — mais une question
de saine gestion des fonds publics.
Donc, en plus, nous avons fait preuve de
synthèse. Merci. C'est tout pour notre exposé. On peut passer aux questions.
La Présidente (Mme Poulet) :
Parfait. Merci beaucoup. Alors, on va procéder à l'échange. On va commencer
avec M. le ministre.
M. Roberge : Merci beaucoup.
Merci pour votre présentation. Merci pour ce que vous faites aussi au quotidien
pour aider des personnes qui ont des parcours de vie qui, souvent, sont plus
difficiles, des gens qui ont des besoins particuliers, souvent, des besoins
d'urgence. Vous dites : La question, ce n'est pas toujours combien de
personnes on accueille, mais comment. C'est une question tout à fait
intéressante, comment on accueille ces personnes-là. Je pense qu'il y a un
corollaire par contre, on ne peut pas accueillir de la même manière puis
aussi...
M. Roberge : ...avec tous
les services qu'on voudrait, les gens, si on en a 50 000, ou si on en a
500 000, ou s'il y en a 1 million, on ne peut pas simplement faire comme
si c'était... Vous le savez, vos ressources, vos nombres de chambres, vos...
votre personnel, ce n'est pas illimité.
Et on n'est pas tous seuls dans la danse
aussi. Peu importe le nombre de personnes qui mettent le pied sur le territoire
québécois, qui demandent l'asile, si le gouvernement fédéral est capable
d'évaluer rapidement la demande, bien, c'est beaucoup plus facile aussi dans le
comment ces personnes-là peuvent s'enraciner dans la manière de faire. En
Australie, ça leur prend à peu près 22 mois pour dire à quelqu'un : Oui,
vous êtes demandeur d'asile, vous êtes accepté, vous êtes réfugié; en Italie, 6
à 12 mois; en France, quatre mois et demi; en Allemagne, entre huit et neuf
mois; au Canada, plus de 37 mois. Et donc ça garde les gens vraiment dans la
précarité, si on parle de bienveillance, là, c'est difficile pour ces
personnes-là. Puis, pendant tout ce temps-là, il faut savoir qu'il y a des gens
qui espèrent vraiment rester, mais il y en a quatre sur 10, à la fin, qui ne
seront pas acceptés au bout du compte comme des demandeurs d'asile, donc des
réfugiés, par le gouvernement canadien. Et ça, ça cause des enjeux, je pense,
qui sont importants.
Il y a aussi la question qui complique les
choses, c'est la très grande concentration géographique. Ce que... Les chiffres
que j'ai, c'est qu'environ 76 %, 75 % des demandeurs d'asile
s'installent à Montréal et en Montérégie. Ça veut dire une très, très grande
concentration des besoins dans un endroit. En même temps, on peut dire :
Bien, on développe une expertise, mais, en même temps, comme ces gens-là
demandent de l'aide et des ressources, c'est exigeant pour la région de
Montréal, la Montérégie.
Mais là où je m'interroge, c'est que vous
dites : Il faudrait davantage de sommes, là. Vous demandez, à un moment
donné, page 10, la création d'un programme de financement, de suivi au fonds
d'urgence puis ajouter une somme de 2,5 millions par année. Je comprends que,
sur le terrain, vous dites, on a ces besoins-là, mais la capacité de financer
et de payer est atteinte, sinon dépassée. Le fédéral ne nous donne pas
suffisamment d'argent pour financer les services juridiques. On prend
l'enveloppe du fédéral, on la dépense au complet, puis, à la fin, il y a encore
des gens qui veulent des services juridiques, puis on arrive au bout. Même
chose pour tout le reste. Écoutez, en 2024, juste en assistance sociale, juste
pour les demandeurs d'asile, 507 millions ont été engagés juste par le
gouvernement du Québec. Donc, c'est difficile pour nous dire : On va
rajouter 1 million de plus, 2 millions de plus. À un moment donné, ça devient
très, très, très difficile, même si je ne nie pas qu'il y a plusieurs personnes
qui ont des besoins, puis vous, vous êtes au front, vous les voyez.
Est-ce que vous croyez qu'on devrait
partager cet accueil de demandeurs d'asile mieux avec le reste des autres
provinces et territoires? On était autour de 50 %. Là, maintenant, on est peut-être
autour de 35 %, 40 % des demandeurs d'asile qui arrivent sur le territoire
québécois. Est-ce que vous pensez que ça serait plus normal que d'autres
provinces fassent davantage leur part pour nous aider à les aider?
Mme Bourdeau (Florence) : Eva,
peut-être, tu pourrais la prendre la question. Moi, j'avais juste comme un...
Au niveau... Vous avez mentionné un chiffre, le taux d'acceptation des
personnes. Nous, les statistiques que nous utilisons sont celles de la CISR, la
Commission de l'immigration et du statut de réfugié, qui est une commission de
commissaires indépendants. Les dernières statistiques étaient de l'ordre de 70
%, 72 %. On était plus dans les... ce qui est une statistique pour... au
niveau canadien mais qui est la même chose dans le bureau de l'Est.
Est-ce que tu veux, Eva, reprendre plus la
parole sur, toi, tes observations?
• (16 h 50) •
Mme Gracia-Turgeon (Eva) : Oui.
Parfait. Merci. Donc, en fait, nous, ce qu'on dit, c'est plus d'utiliser les
fonds actuellement plus intelligemment. On comprend qu'il y a des pressions
financières de part et d'autre, mais nous, on a fait le calcul ici, puis, de
notre côté, notre coût unitaire de nuitée, donc pour une personne par nuit,
pour tous les services qu'on offre, qui peuvent inclure des services
juridiques, c'est le cas à Foyer du monde, justement, sont 50 % moins
chers que le coût unitaire de l'organisme provincial qui s'appelle le PRAIDA,
le programme d'accueil...
Mme Gracia-Turgeon (Eva) : ...l'intégration
des demandeurs d'asile et sont 150 % moins cher que le coût fédéral pour
une nuitée. Donc, ce qu'on est en train de vous dire, finalement, c'est que...
on demande juste que des sommes qui vont être sauvées ailleurs puissent être
mieux utilisées avec nous. On considère qu'on a l'expertise terrain puis qu'on
sait comment offrir plus de services à moindre coût, mais il faut juste qu'on
soit financés.
M. Roberge : Bien, quand on
nous parle d'efficacité puis de faire plus avec chaque dollar, j'avoue que
c'est intéressant. On pourra continuer d'échanger, directement ou avec mon
cabinet, mais, pour la suite de la présentation en commission aujourd'hui, je
vais permettre... bien, je vais permettre à mes collègues de poursuivre les
échanges. Merci beaucoup pour votre présentation.
La Présidente (Mme Poulet) : Oui,
M. le député de Jonquière.
M. Gagnon : Oui. Merci, Mme
la Présidente. Bonjour. D'entrée de jeu, respect à votre travail puis votre
regroupement, hein, on n'est pas... on n'est aucunement insensible, c'est
extraordinaire, ce que vous faites comme mission. Je ne voulais pas aller vers
la lourdeur du financement, mais vous l'avez abordé, alors je voudrais juste
m'assurer de bien comprendre. Si j'ai bien saisi, puis ce que je voyais dans le
rapport... l'ensemble du regroupement ne reçoit pas de financement à la
mission, mais il y a eu une certaine enveloppe au SACAIS, une enveloppe
d'urgence, si j'ai bien compris. Et là différents organismes qui représentent
le regroupement ont déposé... et certains en ont eu, certains n'en ont pas eu.
Est-ce que c'est comme ça qu'il faut le comprendre?
Mme Bourdeau (Florence) : En
fait, bien, techniquement, le SACAIS a mandaté la fondation Centraide pour
distribuer les fonds qui avaient été alloués.
M. Gagnon : D'accord. Je
comprends bien. Et puis, c'est ça Centraide... si on ne fait pas d'activités de
financement ou quoi que ce soit, on peut bénéficier de l'aide de Centraide.
D'accord.
Puis je repose la question : L'ensemble
des organismes du regroupement ne reçoivent pas d'aide du gouvernement du
Québec, si ce n'est que des projets spécifiques, comme le cas... qu'on l'a vu,
là, dans l'enveloppe d'urgence, sinon, il n'y a pas de soutien à la mission
pour l'ensemble de ces organismes, c'est bien ça?
Mme Bourdeau (Florence) : Non,
il n'y en a pas. Non, non, il n'y a pas de... il n'y a pas de financement à la
mission, non.
M. Gagnon : Alors, c'est
beaucoup du sociofinancement ou du côté fédéral?
Mme Bourdeau (Florence) : Non,
on ne reçoit rien du fédéral, on ne reçoit rien du fédéral non plus. C'est la
particularité des populations que l'on dessert, qui ne sont comme ni du côté
provincial ni du côté fédéral. Eva pourrait vous en parler, elle a tapé comme à
plusieurs portes. Au niveau du MIFI, les programmes sont très cadrés, ce n'est
pas comme une critique, ils sont très cadrés, c'est les personnes qui sont
résidentes permanentes. La seule chose qui finance, c'est un sous-volet pour
les demandeurs d'asile, pour l'aide à la recherche de logement. C'est vraiment
des petites sommes.
Puis, au niveau... On a fait l'exercice,
l'an passé, lors des consultations prébudgétaires. Le MSSS nous dit :
Allez voir le MIFI, le SACAIS nous dit : Allez voir le MIFI, le MIFI
dit : Ça ne rentre pas dans les programmes. Donc, je ne sais pas si, Eva,
tu veux compléter.
Mme Gracia-Turgeon (Eva) : Absolument.
Merci, Florence. En fait, donc, c'est ça, différents ministères ont des
restrictions différentes. Donc, par exemple, avec le MSSS, on n'est pas
éligible quand on fait de l'hébergement temporaire, ce qui est le cas de
beaucoup des membres du ROHMI, malheureusement, donc ça nous rend inéligibles à
ce volet-là, puis, au côté du MIFI, c'est parce qu'on dessert principalement
des personnes demandeuses d'asile qu'on n'y accède pas.
Donc, au final, en termes de financement
provincial, le seul qui pourrait être possible, c'est le SACAIS, comme
ministère, qui est un SACAIS pour les organismes orphelins. Malheureusement,
bien, on est plusieurs dans ce même bateau là, donc il n'y a personne qui a été
financé jusqu'à présent.
Puis, après, du côté fédéral, le fédéral
ne finance pas à la mission directement les organismes provinciaux au Québec,
en raison, en fait, de la particularité de la P-31, qui fait qu'on ne peut pas
financer si on reçoit des fonds, même si ce n'est pas la mission, du
provincial. Donc, oui, on dépend du sociofinancement à peu près... à presque
100 %, pour la majorité des organismes.
M. Gagnon : OK. Alors, vous
êtes beaucoup en autofinancement. Quelque chose qui... Bien, une image forte
qu'on pouvait voir dans votre rapport, c'est... puis j'aimerais peut-être vous
entendre un petit peu là-dessus, la cohabitation. Vous parlez, là, de santé
mentale, toxicomanie. Bref, un peu, dans... j'imagine, quand je vois les
organismes, un peu en mode réduction des méfaits, mais n'empêche qu'avec avec
l'immigration ça peut être tout sous le même toit de l'hébergement. C'est un
peu comme ça...
M. Gagnon : ...peut ressembler
une journée, une journée, exemple, à la maison... à l'action des réfugiés de
Montréal. C'est un peu comme ça qu'il faut le comprendre?
Mme Gracia-Turgeon (Eva) : Je
ne suis pas certaine de saisir exactement, mais le quotidien, en fait, c'est plutôt
qu'on précarise des personnes qui n'auraient pas à tomber... peut-être à être
dans des risques de toxicomanie, par exemple. Puis un exemple très concret.
Tout à l'heure, mes collègues expliquaient, finalement, les impacts de, par
exemple, justement, des nouvelles... des nouvelles lois qui ont été changées
aussi la fermeture de Roxham. Un exemple très concret, c'est qu'en fait,
souvent, les... le système d'immigration ne s'arrime pas sur ces changements
législatifs là qui ont lieu. Par exemple, c'est à la fermeture du chemin Roxham
puis à l'étendue de l'entente des tiers pays sûrs, on a parlé d'un
14 jours qui est un «buffer» ou un temps où les personnes qui passent,
autrement que par un poste frontalier, doivent attendre pour faire une demande d'asile.
Or, au provincial, au Québec, l'organe ou l'institution qui reçoit en premier
lieu en hébergement ces personnes-là, le PRAIDA, a un délai interne de
10 jours. Donc, si une personne est sur le territoire depuis plus de
10 jours, elle n'accède pas aux services d'hébergement. Donc, il faut
attendre 14 jours pour faire la demande d'asile, mais il faut avoir fait
avant 10 jours pour pouvoir accéder à l'hébergement. Ça fait que ce que ça
fait, c'est que les gens, à cause que le système ne s'est pas arrimé avec les
nouvelles lois, tombent en situation d'itinérance, vont vers des refuges. Et,
dans ces circonstances-là, comme beaucoup de ces refuges-là ne sont pas
familles, bien, il y a des gens qui tombent dans la toxicomanie parce que la
situation devient une situation de plus en plus complexe, où toutes les portes
se ferment. Puis beaucoup de familles aussi deviennent suivies par la DPJ parce
qu'on... si on ne peut pas offrir un toit à ses enfants, on est en cas de
négligence parentale.
M. Gagnon : Je comprends.
Merci.
La Présidente (Mme Poulet) : ...je
pense que la députée de Vimont aussi. Alors, il vous reste quatre minutes.
Mme Schmaltz : Parfait. Merci,
Mme la Présidente. Merci à vous trois. Je veux juste comprendre. J'ai pris des
petites notes, là, mais je veux juste être certaine d'avoir bien compris. Vous
avez mentionné que 20 % de la trajectoire migratoire de Montréal provient,
si j'ai bien compris, de l'itinérance liée aux réfugiés ou au statut de
réfugié, est-ce que c'est un... est-ce que c'est ça, ce que vous avez mentionné
tantôt?
Mme Bourdeau (Florence) : En
fait, c'est que lors... on n'a pas... C'est ça qui est compliqué, c'est qu'on
n'a pas exactement de données extrêmement précises. Lors du dernier
dénombrement, il y avait... qui a été fait dans le Grand Montréal, il y avait
20 % des personnes en situation d'itinérance, mais d'itinérance visible
parce que le dénombrement ne prend pas en compte les personnes en situation
d'itinérance cachées, qui étaient issues de l'immigration. Après,
malheureusement, on n'a pas le détail. Donc, issues de l'immigration.
Moi, je suis issue de l'immigration, je suis
là depuis 25 ans. Et est-ce que... Donc, on ne peut pas dire avec
précision combien, en fait, viennent d'une trajectoire de demande d'asile
récente et tombent dans les craques? Mais on sait, enfin, on parle avec... on
parle avec les réseaux en itinérance, on sait qu'il y a beaucoup de gens qui,
malheureusement, parce que, comme l'a expliqué ma collègue Eva, le système est
mal fait, bien, vont tomber, vont tomber dans les craques. Et, oui,
effectivement, il va y avoir des enjeux de cohabitation. Je veux dire, ces
personnes-là, leur parcours, c'est juste d'arriver ici et de demander... de
demander l'asile. Puis, en plus du choc culturel, elles peuvent se retrouver
face, mais c'est ça, à des personnes en situation d'itinérance qui ont eu comme
des parcours... des parcours assez compliqués.
Mme Schmaltz : OK. Mais une
fois que vous les recensez, de façon visible, là, disons, est-ce qu'il y a une
prise en charge de l'organisation ou des organisations? C'est parce que, vous
l'avez mentionné tantôt, c'est quand même assez compliqué, là, de faire la
demande. Puis, souvent, bien, les gens, ils n'ont pas accès soit à un téléphone
ou, peu importe, boîte aux lettres, là, peu importe. Mais comment vous les
prenez en charge si vous êtes en présence, si vous les voyez, ou si vous avez
échos, là, de personnes, est-ce qu'ils sont quand même pris en charge par une
organisation. Est-ce qu'ils sont... Ou ils sont vraiment laissés à eux pour une
période indéfinie?
• (17 heures) •
Mme Gracia-Turgeon (Eva) : Si
je peux me permettre, je prendrais la question. En fait, mais déjà juste pour
ajouter sur le premier volet de votre question, parce que, tu sais, oui, le
20 % c'est général, mais moi, à titre d'exemple, on est situés sur le
plateau est. Nos collègues les plus près en itinérance, c'est le Chaînon. Le
Chaînon, c'est un hébergement qui héberge aussi des femmes, bien, des femmes,
généralement, en situation d'itinérance. En 2022, ils avaient 50 % de
leurs résidentes qui étaient des femmes en situation de... bien, qui étaient
des... pardon, des parents des femmes immigrantes à statut précaire...
17 h (version non révisée)
Mme Gracia-Turgeon (Eva) : ...Donc,
quand nous, on a vent de ça, en tant qu'organisme partenaire, c'est sûr qu'on
va essayer d'appuyer du mieux qu'on peut. Par contre, on n'est pas financé, on
l'a dit tout à l'heure, donc c'est très difficile. On fait beaucoup d'économies
de bouts de chandelle. Ce qu'on va faire, c'est qu'on va aider à former leurs
intervenants, intervenantes pour que ces gens-là puissent agir sur les éléments
que nous, on ne peut pas faire à distance. Parce qu'en plus, malheureusement,
bien, l'aide juridique, elle est aussi de plus en plus coupée et diminuée.
Donc, ces personnes-là, bien, finalement, le soutien, qui est souvent le plus
important au départ, d'emblée, qui est celui de sécuriser le statut ou de le
régulariser, c'est celui qui est le plus difficilement accessible,
malheureusement.
Mme Schmaltz : ...encore du
temps?
La Présidente (Mme Poulet) : 19 secondes.
Mme Schmaltz : Ah! bon. Non,
il ne me reste plus de temps... J'avais une autre question, mais ce n'est pas
grave. Je vais laisser la place au collègue. Et encore merci.
La Présidente (Mme Poulet) : M.
le député de l'Acadie, la parole est à vous.
M. Morin : Merci, Mme la
Présidente. Alors, bon après-midi. Bonjour. Merci d'être là, merci pour votre
mémoire. J'ai... En le lisant, j'ai regardé qu'il y a... c'est un collectif, en
fait, c'est un regroupement d'organismes, mais on a déjà eu le privilège de
lire et d'entendre Action Réfugiés Montréal et le RATTMAQ, qui sont les
organismes qui font partie de votre regroupement. Vous vous occupez
principalement des demandeurs d'asile. J'aimerais que vous puissiez m'expliquer
davantage, et je suis à la page huit dans votre mémoire. Vous avez un tableau
avec la trajectoire d'hébergement des demandeurs d'asile à la porte d'entrée,
et là, évidemment, il y a l'arrivée au pays, et vous nous expliquez qu'en
arrivant au pays, si la personne fait une demande, elle sera traitée d'une
certaine façon, si elle ne le fait pas et qu'elle quitte, là, sa situation va
devenir plus précaire. Est-ce qu'il y a une différence entre quelqu'un qui
arrive à un port d'entrée terrestre ou un aéroport ou ça ne fait pas de
différence?
Mme Bourdeau (Florence) : Bien,
en fait, la différence est effectivement par rapport au port, à la notion de
port d'entrée. Donc, quand elle arrive à un port d'entrée, elle rencontre
quelqu'un de... l'agent des services frontaliers. Si elle demande l'asile, là,
comme, sa procédure va s'enclencher, elle va être ultimement référée au PRAIDA
qui va faire l'évaluation psychosociale, qui va ou non, en fonction de certains
critères, lui fournir de l'hébergement. Si elle ne fait pas sa demande... Puis
souvent, de toute façon, les gens arrivent avec d'autres... d'autres visas
puis, si... Donc, si elle ne fait pas sa demande, elle sort du point d'entrée,
que ce soit l'aéroport ou un autre point d'entrée, et elle arrive sur le...
donc, en sol canadien, puisque, là, on est au niveau fédéral, et là c'est là où
les 14 jours embarquent, donc elle doit attendre. C'est considéré comme
une demande interne parce qu'elle a mis le pied à l'intérieur et donc elle doit
attendre 14 jours avant de faire sa demande. Mais souvent, dans ces 14 jours
là, bon, en plus de l'incohérence avec les 10 jours du PRAIDA, c'est les
14 jours où, en fait, elle n'est pas en contact avec les ressources,
c'est-à-dire qu'autant le processus depuis... depuis des ports d'entrée est
comme plutôt bien... c'est un processus plutôt bien... où tout s'arrime bien,
PRAIDA, évaluation psychosociale, etc., réfère vers des organismes, mais, si
elle n'a pas accès à ça et qu'elle se retrouve... à la rue, donc, ces refuges
avec des gens plus ou moins formés, ça peut être aussi d'être... d'être
récupérée par des personnes moins... moins bien intentionnées. Donc, nous,
c'est vraiment là-dessus qu'on est comme... qu'on attire, comme, la vigilance,
c'est sur ces 14 jours là, de gens qui ne font pas leur demande à un point
d'entrée, parce qu'ils ont peur, ils...
M. Morin : Exact. Et donc,
que ce soit dans un aéroport ou, par exemple, une frontière terrestre, là,
genre, le chemin Roxham ou d'autres endroits, là, à Lacolle ou autrement, si la
personne ne fait pas sa demande en arrivant, qu'elle passe... je ne sais pas,
moi, elle a eu un visa visiteur parce que c'était le seul moyen qu'elle avait
pour quitter son pays, là... parce que j'imagine que les demandeurs d'asile qui
vivent des situations de persécutions ou d'injustices graves, ils ne vont pas
faire une demande officielle dans leur pays pour partir, tu sais, ils ne vont
pas leur dire parce que ça risque de mal finir pour eux. Alors... Donc, ça,
s'ils ne le font pas puis ils se ramassent sur le territoire ici, bien, à ce
moment-là, s'ils ne font pas leur demande en arrivant, ils ne seront pas pris en
charge par le PRAIDA.
Mme Bourdeau (Florence) : C'est
ça. Puis il y a une petite distinction avec les points d'entrée...
Mme Bourdeau (Florence) :
...les points d'entrée... la frontière avec les États-Unis, donc c'est dans le
cadre de l'entente des tiers pays sûrs... on pourrait débattre si les
États-Unis sont un pays sûr ou non pour les personnes à statut précaire, mais
ce n'est pas l'objet ici. Donc là, la personne...
M. Morin : Prenons pour
acquis que c'en est un, là, alors, oui.
Mme Bourdeau (Florence) :
C'est ça. Voilà. Donc, dans ces cas-là, la personne ne peut pas demander
l'asile, sauf si elle a déjà de la famille au Canada, ça, c'est vérifié. Enfin,
ce n'est pas... Ils appellent, ils... Donc, en fait, en règle générale, on ne peut
pas demander l'asile à la frontière terrestre, sauf si soit on est un mineur
non accompagné ou on a de la famille déjà au Canada.
M. Morin : Sinon, bien, ils
vont être retournés aux États-Unis immédiatement.
Mme Bourdeau (Florence) :
C'est ça.
M. Morin : Parce que c'est
considéré comme un tiers pays sûr. Donc finalement, s'ils n'ont pas de famille,
alors le point d'entrée qui leur reste, c'est un aéroport, en fait, ou un port.
OK, mais pas la frontière terrestre. D'accord. Je comprends. Et donc alors vous
vous êtes obligés... vous allez devoir vous occuper de ces gens-là parce que
le... ne les prendra pas en charge. Puis les politiques gouvernementales sont
faites de cette façon-là. C'est leur compréhension?
Mme Bourdeau (Florence) :
C'est ça.
Mme Gracia-Turgeon (Eva) : Si
peux me permettre de faire un complément. Additionnellement, ce qui est
extrêmement dommage, c'est qu'on a des ressources qui sont non utilisées. Donc,
le PRAIDA à l'heure actuelle, qui compte 1 200 lits,
en raison de ces manques d'arrimage là, est à capacité de 30 % uniquement.
Et on a des gens dans la rue.
M. Morin : Donc là, je
comprends que le PRAIDA, c'est l'organisme gouvernemental, n'est-ce pas,
financé par l'État. Là, je vous écoute. Ils ont une capacité d'accueillir des
gens. Présentement, cette capacité-là est utilisée à 30 %. C'est ce que
vous venez de dire. Mais, par ailleurs, vous, dans votre travail communautaire,
vous accompagnez des gens qui vont faire une demande comme demandeur d'asile,
mais qui sont dans la rue et qui n'ont pas de toit et le PRAIDA ne les prendra
pas.
Mme Gracia-Turgeon (Eva) :
Exactement.
M. Morin : OK. Parce que les
politiques sont faites de cette façon-là.
Mme Gracia-Turgeon (Eva) :
Exactement.
M. Morin : Il n'y aurait pas
moyen d'arrimer tout ça pour le gouvernement?
Mme Gracia-Turgeon (Eva) :
Bien, ça fait deux ans.
M. Morin : Je suis certain
que vous avez soulevé ça. Vous êtes... Vous en êtes rendus où dans vos... dans
vos démarches avec le gouvernement à ce sujet-là?
Mme Gracia-Turgeon (Eva) :
Bien, le PRAIDA nous revient toujours avec la même réponse. On nous dit que ça
a été discuté, puis que ça... ça ne changera pas.
M. Morin : Mais ils ne sont
pas en pleine capacité, donc il y aurait des lits. Puis là on parle du
gouvernement fédéral ou du gouvernement du Québec?
Mme Gracia-Turgeon (Eva) :
Provincial.
M. Morin : Provincial du
Québec. Donc, on laisse dormir des gens dehors parce qu'ils n'ont pas le bon nombre
de jours, c'est... je comprends bien ou...
Mme Gracia-Turgeon (Eva) :
Absolument.
Mme Bourdeau (Florence) :
C'est ça. En fait, il faudrait une directive du MSSS. Donc, c'est pour ça,
quand on dit dans nos recommandations, c'est d'élargir l'éligibilité, bien, de
ne plus prendre en considération cette histoire des 10 jours, enfin, ce
délai de 10 jours.
M. Morin : Et là vous parlez
d'une directive des CS-SSS ou de l'immigration?
Mme Bourdeau (Florence) :
Bien, le PRAIDA, en fait, est financé par le MSSS, c'est Santé et services
sociaux.
M. Morin : OK, donc à ce
moment-là, il faudrait s'adresser non pas à M. le ministre qui est ici, mais à
un autre ministre pour essayer de voir à ce qu'il y ait un arrimage possible.
Et est-ce que je vous ai bien... Est-ce que je vous ai bien entendu? Ici, vous
avez dit que vous offrez... puis corrigez-moi si je fais erreur, vous offres
des services moins chers ou ça coûte moins cher que le PRAIDA, les services que
vous offrez?
Mme Gracia-Turgeon (Eva) :
Oui, absolument.
• (17 h 10) •
M. Morin : Et... OK. Donc,
vous êtes... vous coûtez moins cher, vous ramassez... vous vous occupez de ces
gens-là qui sont dans la rue. Puis vous, votre financement vient des démarches
que vous faites pour obtenir des dons privés.
Mme Gracia-Turgeon (Eva) : De
M., Mme Tout-le-monde.
M. Morin : Parce que le
CS-SSS ne vous finance pas non plus.
Mme Gracia-Turgeon (Eva) : On
ne rentre pas dans les critères.
M. Morin : D'accord. Donc,
une autre directive pour changer les critères. Très bien, je vous remercie.
Écoutez, je n'ai pas d'autre... Ah! une autre question, éventuellement...
M. Morin : ...Une fois
que ta personne fait sa demande comme demandeur d'asile, elle va se ramasser
devant la commission fédérale pour déterminer si c'est une réfugiée ou pas. Les
délais sont anormalement longs au Canada. D'ailleurs, M. le ministre y a fait
référence un peu plus tôt. Est-ce que vous faites aussi des... En fait, est-ce
que vous avez un dialogue avec le gouvernement fédéral, avec la commission?
Est-ce que vous faites des pressions, sur le gouvernement fédéral pour que les
délais soient réduits? Parce qu'il me semble que votre organisme PRAIDA ou pas
PRAIDA, si ça prend trois ans ou quatre ans pour qu'on détermine un statut, ça
m'apparaît anormalement long. Puis la personne, bien, pendant trois, quatre
ans, va essayer de travailler, va rencontrer peut-être quelqu'un, va peut-être
avoir des enfants. Les enfants vont être canadiens. Ils ne pourront pas... Eux
autres, ils ont le droit de rester ici. Est-ce que vous avez aussi ce
dialogue-là avec le gouvernement fédéral?
Mme Bourdeau (Florence) :
Oui, en fait, par l'intermédiaire de... même dans d'autres regroupements. Il y
a un regroupement qui s'appelle le Conseil canadien pour les réfugiés, qui est
un regroupement pancanadien, qui a des... des rencontres fréquentes avec la...
et avec la... Ils ont été notamment sur l'histoire des délais qui revient...
qui revient constamment dans quasiment toutes les catégories, les catégories
d'immigration. On n'a pas parlé du parrainage, du regroupement familial, que ce
soit pour des personnes qui viennent d'être acceptées comme réfugiées, mais c'est
pareil, c'est des délais qui n'ont aucune allure...
M. Morin : Mais vous
pouvez en parler parce que c'est un dossier qui m'intéresse particulièrement.
Donc, le regroupement familial, les délais sont totalement hors norme, là.
Mme Bourdeau (Florence) :
...
M. Morin : Et là, vous,
vous accompagnez ces gens-là puis vous voyez l'impact que ça fait, évidemment,
pour ceux qui sont ici puis qui attendent un parent.
Mme Bourdeau (Florence) :
Oui, un parent, un conjoint, un enfant qu'on ne voit pas pendant 10 ans.
M. Morin : Pendant
10 ans?
Mme Bourdeau (Florence) :
Bien, si on a... si on met bout à bout. Pour quelqu'un qui vient, qui demande
l'asile, si on met bout à bout l'attente jusqu'à...
(Panne de son)
Une voix : ...Florence.
M. Morin : Oui, on
vous... On vous perd. Malheureusement, là, je ne vous entends pas.
Mme Bourdeau (Florence) :
Ah! OK. Vous pouvez prendre le relais?
M. Durieux (Arthur) :
J'aurais peut-être un exemple à donner à M. le député. On a une famille qui est
arrivée au Pont en 2017 ou 2018, si je me rappelle bien. Une maman
monoparentale avec deux jeunes filles, qui a accouché au Canada. La plus petite
fille a maintenant sept ans et elle n'a jamais vu son père, alors que madame a
été acceptée en tant que réfugiée il y a trois ou quatre ans, de mémoire. On
fait appel à nos députés fédéraux, on fait appel à Immigration Canada. On
demande, on demande. Puis c'est un des exemples que... Je suppose que peut-être
Florence pourrait un peu élaborer sur la réunification familiale. Je parle
vraiment d'une personne demandeuse d'asile qui a été acceptée en tant que
réfugiée. Et donc, voilà, on a une petite fille de sept ans, des plus grandes
soeurs qui sont au secondaire et qui n'ont jamais ou peu, en tout cas, vu leur
père dans les sept dernières années. C'est un des exemples. Et pourtant,
monsieur est Soudanais, et le Soudan fait partie notamment de certaines
politiques de demande d'asile ou en tout cas d'immigration un peu plus rapides,
souvent à cause de la situation en particulier au Soudan. C'est un des exemples
que je pourrais vous partager aujourd'hui.
La Présidente (Mme Poulet) :
Merci beaucoup. Alors, on poursuit les échanges avec le député de Maurice-Richard.
M. Bouazzi : Merci, Mme
la Présidente. Merci pour vos témoignages, Je pense que des témoignages
vraiment importants qui rappellent l'humanité, hein, derrière les cas dont on
parle. Rappelons ici qu'on a des obligations face à la détresse humaine à
l'international, qu'on est signataire au Canada de la troisième Convention de
Genève et que c'est une des raisons pourquoi nous avons le devoir légal
d'accueillir des gens. Vous nous avez donné un exemple que, je dois dire, je ne
connaissais pas et qui... qui est quand même terrifiant, cette idée de dire
que, d'un côté, on a décidé de faire attendre 14 jours des gens qui
arrivent déjà en détresse, ce qui n'est pas la manière la plus accueillante
pour des gens qui ont vécu des traumatismes chez eux et qui ont traversé
parfois vents et marées avant d'arriver ici, mais qu'en plus, pour des
questions administratives, ils ne peuvent plus faire appel à des services
auxquels ils auraient eu droit et se retrouvent donc dans la spirale de la rue.
C'est bien ça, peut-être. Et puis évidemment, il y a aussi la question de votre
financement qui n'est pas non plus réjouissant, parce que j'ai...
M. Bouazzi : ...ça vous prend
beaucoup de temps d'aller chercher du financement étant donné que vous ne
l'avez pas de manière automatique. Peut-être déjà nous dire quelles sont... si
vous en avez, quelques décisions, politiques publiques qu'on pourrait prendre,
qui, tout simplement, faciliteraient la vie de ces personnes-là qui arrivent en
détresse et pour qui nous avons un devoir, pour des coûts minimaux ou peut-être
des coûts nuls parfois.
Mme Bourdeau (Florence) : Est-ce
que je commence et vous complétez?
Oui, effectivement, bien, il y a déjà, à
coût quasi zéro, que le MSSS puisse changer les règles d'acceptation au PRAIDA,
parce que, tu sais, tout à l'heure, on parlait du PRAIDA en disant qu'ils
étaient quasi vides. Le but n'est pas de récupérer, en fait, toutes les
personnes qui y sont, ce n'est pas ça, c'est vraiment d'agir comme en
complémentarité, mais, sur leurs 300 lits qui sont occupés sur 1 150,
s'ils avaient cette latitude-là de pouvoir accueillir des personnes en demande
d'asile qui sont présentes depuis même un mois, deux mois, bien, ça nous
soulagerait beaucoup. Donc, il y a ça.
L'autre chose qui peut être faite, c'est,
effectivement, au niveau du financement des organismes. Donc, ça, ce serait de
voir comment on peut ouvrir dans les programmes du MIFI. C'est un programme qui
s'appelle le PASI, mais qui est comme très... très cadré par statuts
d'immigration. Et, au sein du PASI, il y a juste un volet, qui s'appelle le
volet trois, qui reconnaît l'existence de personnes qui demandent l'asile
puisqu'il permet de financer des organismes mais juste pour les aider à se
trouver du logement. Donc, pourquoi ne pas élargir ce programme, qui existe déjà,
pour d'autres services? Un, on sait que c'est extrêmement difficile de se
trouver un logement. Donc, penser à avant, hébergement transitoire, et penser
également à des services attenants. Trois... est-ce qu'il pourrait à coût
nul, je ne sais pas, mais c'est en termes d'aide juridique. Bien, vous êtes
bien placé pour savoir, à Québec, le bureau d'aide juridique a fermé. Il y
avait notamment différentes personnes en demande d'asile qui dépendaient de ce
bureau qui se sont retrouvées un peu, du jour au lendemain, sans conseil...
sans conseil juridique.
Si vous voulez continuer, Eva, Arthur.
Mme Gracia-Turgeon (Eva) : Oui.Merci. Je vais prendre le relais. Merci, Florence. Bien, l'aide juridique,
je ferais du pouce sur ça, parce qu'en fait, pour moi, je le vois vraiment
comme un investissement, au sens où plus rapidement une personne peut finir ses
démarches juridiques, plus rapidement elle peut aussi être active à d'autres
niveaux, donc... et, à l'inverse, plus long son parcours juridique est, plus elle
a de chances, en fait, de tomber dans l'irrégularité et de ne pas pouvoir
participer à la société, ce qui se passe beaucoup plus actuellement,
malheureusement.
Sinon, les services d'employabilité. Donc,
Florence parlait des services en général. C'est des services déjà existants
pour les personnes migrantes mais, habituellement, quand elles sont acceptées
ou réfugiées. Si les personnes demandeuses d'asile pouvaient accéder à ces
services-là, ça ferait un changement complet et total. Leurs deux priorités quand
ils arrivent...
La Présidente (Mme Poulet) :
Je m'excuse de vous interrompre...
Mme Gracia-Turgeon (Eva) :
...ce n'est certainement pas de toucher de l'aide sociale...
La Présidente (Mme Poulet) : Je
m'excuse de vous interrompre, c'est tout le temps que nous avons. Alors, je
vous remercie, tous les trois, pour votre contribution aux travaux.
Alors, je suspends les travaux quelques
instants, le temps que le prochain groupe s'installe.
(Suspension de la séance à 17 h 20)
(Reprise à 17 h 22)
La Présidente (Mme Poulet) :
Alors, on reprend nos travaux. Je vous rappelle... Messieurs, bienvenue. Alors,
je vais vous demander de vous présenter. Je vous rappelle que vous disposez de
10 minutes, par la suite, on va procéder à la période d'échange. Alors, la
parole est à vous.
M. Hamel (Denis) :
Merci, Mme la Présidente. Alors, je me présente, Denis Hamel. Je suis
conseiller stratégique à la présidence au Conseil du patronat du Québec. Je
suis accompagné par mon collègue Arnaud Champalbert, qui est vice-président aux
affaires publiques et gouvernementales.
D'abord, je tiens à remercier la
commission, au nom de CPQ, de nous entendre, de nous permettre d'exposer le
point de vue des quelque 70 000 entreprises que nous représentons
directement ou via les associations sectorielles qui sont membres du CPQ. Dans
le cadre de la consultation, nous avons consulté beaucoup de nos membres de
petites à très grandes entreprises dans toutes les régions du Québec. Ce qu'on
vous présente aujourd'hui, c'est vraiment un point de vue généralisé de la
situation des entreprises du Québec à l'égard de l'immigration, puisque c'est
un sujet d'importance pour la plupart de nos entreprises.
D'entrée de jeu, là, c'est le CPQ
reconnaît que l'immigration, ce n'est pas simplement un dossier technique...
L'immigration soulève des enjeux identitaires, culturels, économiques et
sociaux. Dans l'opinion publique, les opinions sont variées, parfois,
polarisées, contradictoires. Les perceptions, pour certains, l'immigration est
synonyme de dynamisme, d'ouverture; pour d'autres, elle suscite des inquiétudes
liées à l'intégration, à la préservation du français ou encore à la pression
sur les services publics. Ce sont toutes des préoccupations très légitimes et
c'est précisément pour dépasser les débats ponctuels que la planification
pluriannuelle est si importante à nos yeux. Elle permet d'établir des
orientations stables, basées sur les besoins réels du marché du travail et non
sur des cycles politiques ou des réactions de crise. Une immigration
planifiée donne de la prévisibilité aux employeurs, rassure les travailleurs et
les travailleuses et permet une meilleure intégration de nos nouveaux
arrivants. En ce moment, pour les employeurs québécois, la situation n'est rien
de moins que critique. Les projets d'investissement, comme le respect des
contrats, sont mis à risque par le manque de travailleurs. Plusieurs d'entre
eux ne voient pas de solution autre que de fermer des lignes de production ou
de délocaliser une partie de leurs activités. Les employeurs, les immigrants et
la société tout entière font les frais de politique d'immigration improvisée.
Plusieurs associations patronales ont récemment dénoncé des changements
drastiques apportés au Programme des travailleurs étrangers temporaires.
L'incertitude économique causée par l'application des tarifs par l'administration
américaine et à un certain courant de pensée en provenance des États-Unis et
d'Europe ont exacerbé un certain discours anti-immigration qui amène à pointer
du doigt les nouveaux arrivants comme étant la source de beaucoup de nos
problèmes de société. Il y a de quoi s'inquiéter, et ça motive notre volonté
d'interpeler le milieu politique afin de rappeler que le succès économique,
social et culturel du Québec a toujours reposé sur son ouverture.
Les faits demeurent, le Québec connaît une
transition démographique rapide. La population vieillit. Le nombre de jeunes
qui rentrent sur le marché du travail ne suffit pas à compenser ceux qui
prennent leur retraite. Depuis quelques années déjà, le Québec compte moins de
nouveaux travailleurs que de nouveaux retraités. Ce déséquilibre s'accentuera
au cours des prochaines années...
M. Hamel (Denis) :...si rien n'est fait. Les conséquences sont nombreuses,
car la rareté de main-d'œuvre augmente les coûts de production, fragilise la
compétitivité du Québec sur la scène internationale. En plus des effets sur la
croissance économique, une société vieillissante entraîne une pression accrue
sur les retraites et le système de santé.
Même si le taux de chômage a récemment
augmenté, il demeure historiquement bas. Le bassin principal des travailleurs — on
parle des 25 à 54 ans — est déjà fortement mobilisé. Ça montre que
les Québécois en âge de travailler participent activement au marché du travail,
et c'est illusoire d'espérer une hausse significative à partir de cette seule
population locale. Résultat, l'immigration économique devient un levier
indispensable. Elle permet non seulement de répondre aux besoins des
entreprises, mais aussi d'assurer la continuité des services et de soutenir le
développement de nos régions. Toutefois, accueillir plus d'immigrants n'est pas
suffisant. Encore faut-il leur offrir une intégration réussie. C'est pourquoi
le CPQ insiste sur une approche équilibrée, augmenter les seuils d'immigration,
mais aussi renforcer les outils d'intégration, de formation et de francisation.
Le message clé que nous transmettons
aujourd'hui en est un de stabilité. Trop souvent, les programmes d'immigration
ont été suspendus, modifiés du jour au lendemain, laissant les employeurs et
les immigrants eux-mêmes dans l'incertitude. Pour le CPQ, il faut mettre fin à
ces changements brusques. La prévisibilité est essentielle, tant pour les
entreprises, qui planifient leurs besoins de main-d'œuvre, que pour ces
travailleurs, qui investissent temps et argent dans leur projet de vie au
Québec.
On pourrait croire que les entreprises
vont compenser le manque de main-d'œuvre en investissant dans la robotisation
ou dans divers types d'investissements. C'est, en partie, vrai, parce que beaucoup
d'entreprises québécoises, actuellement, investissent dans l'intelligence
artificielle et de divers procédés, et nous continuons, au CPQ, à les
encourager à le faire. Mais ces transformations demandent du temps, des
compétences spécialisées, souvent, que nous n'avons même pas au Québec et des
capitaux importants. De nombreuses PME n'ont pas les moyens financiers ou
techniques pour opérer rapidement cette transition. Ainsi, des projets
d'innovation sont retardés, certains investissements sont repoussés et la
compétitivité du Québec s'en trouve affectée.
Si la métropole de Montréal concentre une
partie des débats, la pénurie est parfois plus grave en région. Plusieurs
municipalités dépendent de secteurs spécifiques, qui peinent à recruter
localement. Quand les travailleurs manquent, cela amène des entreprises à
ralentir, voire, à fermer, et ces entreprises sont pourtant vitales pour les
économies locales. À long terme, c'est la vitalité même des régions qui est
menacée. Il est clair que, pour nous, l'immigration est un des seuls leviers
capables d'inverser cette tendance.
Pour l'immigration permanente... c'est,
pour nous, une clé de prospérité durable. Contrairement à l'immigration
temporaire, qui répond souvent à des besoins urgents ou ponctuels, l'immigration
permanente permet aux personnes de s'enraciner, de contribuer, à long terme, à
l'économie, et participer pleinement à la société québécoise.
Dans son cahier de consultation, le
gouvernement propose trois scénarios de seuils pour 2026-2029, mais tous sont
jugés insuffisants par le CPQ. Afin de composer... de compenser à la fois le
vieillissement démographique et résoudre la rareté de main-d'oeuvre, le CPQ
recommande l'admission annuelle de 44 800 personnes dans la catégorie
économique. Cette cible est appuyée par plusieurs études, qui montrent que
c'est seulement en atteignant cette cible que nous pourrons maintenir la
proportion de personnes en âge de travailler et soutenir la croissance du PIB.
Avec une telle hausse, le Québec pourrait stabiliser son taux d'activité,
répondre à environ le quart des besoins de main-d'œuvre projetés d'ici 2033, et
offrir une meilleure transition des travailleurs temporaires vers la
permanence.
• (17 h 30) •
Le CPQ est d'accord avec l'idée que la
grande majorité des immigrants permanents devraient connaître le français.
Viser 75 % de nouveaux arrivants francophones ou francophiles est
réaliste, mais sans, toutefois, exclure les talents stratégiques, notamment
dans les secteurs de pointe. Pensons à l'intelligence artificielle,
l'aéronautique ou la recherche, qui en dépendent. Nous ne pouvons pas nous
permettre le luxe de fermer la porte à ces gens.
Le CPQ appuie aussi l'idée d'augmenter la
proportion d'immigrants permanents déjà installés au Québec, comme les travailleurs
étrangers, les étudiants réfugiés et demandeurs d'asile. Par contre, cet
engagement n'est réaliste que si... qu'avec un seuil global de 70 000
personnes par année, sinon, avec un chiffre moindre, ça revient à régulariser
uniquement des personnes qui sont déjà ici, et ça bloquerait presque
systématiquement l'entrée de nouveaux immigrants de l'étranger.
Le CPQ adhère aussi à une immigration...
17 h 30 (version non révisée)
M. Hamel (Denis) :...essentiellement économique, à 60 % des
immigrants... de la totalité des immigrants. Mais, encore une fois, avec 45 000
ou moins, on ne pourrait pas... ça n'aurait pas de sens et ce serait impossible
à maintenir à la fois l'immigration économique dont nous avons besoin et l'engagement
à l'égard de nos obligations humanitaires. C'est pourquoi nous croyons que
70 000 personnes représentent le chiffre magique.
Pour sa part, l'immigration temporaire, c'est
devenu incontournable pour l'économie québécoise. Alors que l'immigration
permanente assure une intégration à long terme, l'immigration temporaire,
étudiants à l'université et internationaux et mobilité professionnelle, comble
les besoins immédiats, souvent dans des secteurs en crise, voire grave besoin
de main-d'œuvre. Dans ce contexte, les travailleurs temporaires sont devenus
essentiels. Ils occupent des emplois que les entreprises ne réussissent pas à
combler localement, notamment dans des secteurs comme le manufacturier, l'agroalimentaire,
la restauration, le tourisme et le transport routier.
Pour le CPQ, la proposition du
gouvernement de réduire le nombre de résidents permanents est a priori
irréaliste, voire nuisible. Maintenir la proportion actuelle de travailleurs
dans le cadre du PTET, au contraire, est indispensable. En limiter l'accès
entraînerait des conséquences très négatives, notamment en freinant la
production dans certains secteurs, en réduisant notre compétitivité face à d'autres
provinces ou à d'autres pays qui recrutent plus librement et augmenteraient le
risque de fermetures d'entreprises.
Selon nous, il est impératif de donner au
volet du traitement simplifié toute sa valeur, toute sa raison d'être. C'est un
volet essentiel. Par définition, le traitement simplifié s'applique à des
postes dont le déficit est reconnu et bien documenté. Nous demandons de revenir
à la pratique qui avait cours et de ne pas soumettre au seuil de recrutement,
quel que soit le niveau de salaire. C'est un important levier en immigration
dont dispose le Québec et nous vous encourageons à l'utiliser.
La Présidente (Mme Poulet) : En
terminant.
M. Hamel (Denis) :Et en terminant, très brièvement.
La Présidente (Mme Poulet) : ...15
secondes, vous avez déjà dépassé.
M. Hamel (Denis) :15 secondes. Pour dire que les chiffres ne suffisent pas
pour que l'immigration soit un réel moteur de prospérité. Il faut le regarder
dans l'ensemble, nombre, francisation, reconnaissance des compétences et
accompagnement à l'intégration. Pour nous, ce n'est pas une option, c'est une
nécessité stratégique. Et, sur ce, nous...
La Présidente (Mme Poulet) : Parfait.
Merci beaucoup. Alors, on va procéder aux échanges. M. le ministre, la parole
est à vous.
M. Roberge : Merci, Mme la
Présidente. Merci pour votre présentation. À commencer pour les points sur
lesquels nous sommes d'accord. On a besoin de stabilité, on a besoin de
prévisibilité. L'exercice qu'on fait en s'engageant sur une planification
pluriannuelle sur quatre ans, je pense que ça devrait être rassurant,
intéressant pour les gens qui veulent venir ici, intéressant et rassurant pour
nos établissements d'enseignement supérieur et les établissements qui
accueillent des étudiants étrangers, aussi évidemment pour le monde des
affaires. Heureux de voir aussi que, bon, il y a cinq... pardon, six
orientations mises au jeu par le gouvernement, non pas six décisions qui ont
été prises, je le répète, pour mes amis de la deuxième opposition, mais six
orientations sur la table. Vous avez des enjeux avec l'orientation un et deux,
mais conditionnellement à une cible différente. En fait, vous êtes d'accord sur
les orientations trois, quatre, cinq et six présentées par le gouvernement,
donc la connaissance du français, des personnes présentes sur le territoire,
proportion d'économique et, encore une fois, prioriser, pour les demandeurs d'asile,
les gens sur territoires, avec les bémols que vous venez d'émettre, je
comprends bien.
Vous nous dites que la question migratoire,
c'est... ce n'est pas juste des chiffres, c'est du monde, bien d'accord. Vous
nous dites que c'est des enjeux, ou des avantages, ou des défis, vous avez dit,
culturels, identitaires, économiques et sociaux. Je suis d'accord avec vous. Je
vais rajouter question du logement, les finances publiques et les services
publics, il faut considérer tout ça. Mais j'ai l'impression qu'après que vous
nommiez tout ça, là, culturels, identitaires, économiques et sociaux, vos
recommandations ne sont là que pour répondre à des enjeux économiques, qui sont
le mandat donné par vos membres, et vous arrivez avec une proposition 70 000
permanents par année. Mais vous dites aussi qu'il faut laisser le PMI à plein
volume, pas de contraintes. Enlever toutes les contraintes sur les TET, ça veut
dire des hausses de travailleurs étrangers temporaires, ça veut dire, on
poursuit la fuite en avant pour les PMI. Parce qu'en ce moment il y a des
contraintes, le fédéral a mis des contraintes sur le PMI. Vous voulez les
retirer, vous voulez retirer les contraintes sur TET. Donc, il y aurait des
hausses de PMI, des hausses de TET. Il faut revenir, d'après vous, au niveau
historique de l'an passé pour les étudiants étrangers, donc des hausses d'étudiants
étrangers permanents puis des hausses de permanents. Si on vous suit, ça fait
combien de nouvelles personnes par année à partir de 2026? Pas juste 70 000,
là, parce qu'il y a...
M. Roberge : ...ça veut dire
combien au net, net?
M. Hamel (Denis) :Je pense qu'au niveau des permanents, le 70 000 est
assez clair, on appuie le 60 % d'immigration économique, puis, évidemment,
en entraînant une augmentation... bien, des autres, au niveau de l'humanitaire,
pour garder cet équilibre avec le 60 %.
Au niveau des temporaires, si on exclut
les réfugiés demandeurs d'asile, est est quand même le gros morceau de
l'immigration temporaire, si on regarde le PTET et le PMI, le PTET nous sert de
tampon en fonction de notre activité économique. Si on a vu, dans les dernières
années, une forte augmentation du nombre de travailleurs dans le PTET, c'est
pourquoi? C'est parce que l'économie du Québec va bien. Lorsque l'économie du
Québec va ralentir, il va y avoir tout naturellement une baisse des
travailleurs étrangers temporaires. En augmentant à 70 000 le nombre de
permanents, on va faciliter beaucoup plus la transition des travailleurs
temporaires vers la permanence, et c'est ça qu'on vise comme objectif. Tous les
employeurs qu'on a consultés nous disent : Nous, on a des travailleurs et
on les a francisés, on les a formés, ils sont habitués à la société, ils
veulent rester et ils devraient rester. En abaissant les seuils d'immigration
permanente, on enlève la chance à ces gens-là, on les maintient temporaires et
on n'envoie pas vraiment un très bon signal à savoir est-ce qu'ils devraient
venir ici, alors... et ça se parle dans le milieu.
Donc, au niveau des temporaires, pour le
BMI, c'est très particulier, ce programme-là, parce que, je dirais, c'est un
programme un peu fourre-tout. Il y a évidemment beaucoup de mobilité
intraentreprise internationale, difficile d'aller contre ça. Il y a, dans les
PMI, souvent, les permis accordés aux conjoints des conjointes de travailleurs
temporaires. Vous savez, c'est très, très, très vaste, le PMI, et c'est très
difficile de le freiner parce qu'encore là il répond à des considérations à la
fois économiques et humanitaires. Les réfugiés ukrainiens, par exemple, font
partie du PMI, donc on a des engagements à l'égard de ces gens-là, donc... Mais
si on a, dans les quatre prochaines années, cette prévisibilité-là qui est
importante, à savoir que les gens vont arriver ici et auront toujours cet
espoir d'avoir éventuellement la résidence permanente, on va résoudre le
problème à la fois économique, et quand je dis social, culturel et sportif,
c'est parce que ça touche... ça va tellement au-delà de nos entreprises.
M. Roberge : Mais vous ne
dites pas : On va faire passer des travailleurs étrangers temporaires dans
les permanents, donc on va réduire les TET, vous nous dites : On va
augmenter les permanents à 70 000 puis on va aussi enlever toutes les
barrières sur les TET, donc c'est des hausses aussi. Je répète ma question. Si
je vous écoute, les 70 000 permanents, plus des hausses de PMI par
rapport au sommet historique, plus des hausses de TET par rapport au sommet
historique, ça fait combien de plus par année? On essaie de faire une
planification sur quatre ans, vous donner une prévisibilité. Je ne dirais pas
au Conseil du patronat que ça prend des chiffres. Je ne peux pas croire que
vous n'avez pas de chiffres, vous êtes le Conseil du patronat.
M. Hamel (Denis) :
Dans plus... Dans le domaine du temporaire, comme je vous ai dit, c'est très
lié à la conjoncture économique. Oui, on souhaiterait une augmentation parce qu'on
a vu que la diminution imposée par le fédéral, de 20 % à 10 % dans
certains secteurs, de 30 % à 10 %, a fait très mal à nos entreprises
et va surtout faire mal dans la prochaine année quand ces gens-là vont partir.
Les entreprises ont la capacité de recevoir ces gens-là et c'est au
gouvernement et à l'ensemble de la société... Vous avez reçu ce matin, de la
Commission des partenaires du marché du travail, un message assez, je dirais,
unanime, à la fois des employeurs des syndicats du milieu de l'éducation et de
l'employabilité, pour dire : On va se donner les outils. Nous devons avoir
une volonté d'accueil et de prévoir l'arrivée de ces gens-là. Plus on va avoir
d'immigration temporaire... on devrait s'en réjouir, c'est parce que notre
économie va très bien, notre économie se porte bien. Et puis on veut surtout
éviter que ces gens-là quittent vers d'autres juridictions, d'autres provinces
ou d'autres pays. Donc, au niveau temporaire, c'est difficile de mettre un
chiffre puisqu'il est...
• (17 h 40) •
M. Roberge : Vous n'avez pas
de chiffres. Bon, ça fait qu'on a des chiffres de hausses pour les permanents,
on a des programmes de temporaires qui n'ont plus de limites, non chiffrées.
Les demandeurs d'asile, si je vous suis, là, les demandeurs d'asile, vous
dites, sont très nombreux. Effectivement, ils étaient... on était à plus de
quoi, 160 000 l'an passé, sinon plus, cette année 40 000 de
plus. Ces gens-là, on le souhaite, ont des permis de travail, travaillent
aussi. Vous ne les comptez pas comme force de travail? Vous ne les considérez
pas? Parce qu'eux aussi arrivent en plus grand nombre. On fait de la... on
parle de planification pluriannuelle, on compte qu'il y a des personnes
derrière chaque chiffre, c'est des histoires de parcours de vie, mais on est
aussi dans la démographie. Est-ce que vous les considérez, les demandeurs
d'asile? Le fait qu'il y en arrive 40 000 cette année, c'est correct?
Est-ce qu'il en faudrait 50 000 l'an prochain, 120 000 l'an prochain
ou zéro? Est-ce que ça a un impact? Est-ce que, pour vous, le fait qu'ils
arrivent demandeurs d'asile, qu'il en arrive plus ou moins, ça a un impact sur
le reste ou...
M. Roberge : ...on ne
considère pas ça.
M. Hamel (Denis) :On l'a considéré dans notre analyse parce que vous
conviendrez avec moi, M. le ministre, qu'on ne sait pas combien vont franchir
la frontière, légalement ou illégalement, par... on l'a entendu tantôt, par
diverses façons. Ce qu'on souhaite, avec les demandeurs d'asile, oui, c'est
une... je dirais, c'est une force de travail. Ce sont des gens qui viennent ici
pour travailler. D'une part, il faut leur donner rapidement le permis de
travail, ce qui n'est pas toujours le cas actuellement, afin de les sortir de
l'aide sociale, parce que justement, les gens veulent travailler. Il faut les
inciter aussi à sortir de la grande région de Montréal parce que la
concentration, notamment à cause de la présence de l'aéroport, une porte
d'entrée, vient surtout à Montréal. Il faut aussi... Et on a toujours appuyé le
gouvernement du Québec pour dire : Nous en recevons beaucoup trop par
rapport à notre... notre part par... dans la population canadienne. Donc, oui,
on encourage le gouvernement fédéral à vous écouter pour avoir une répartition
beaucoup plus équitable, pancanadienne des travailleurs d'asile. Mais ces
gens-là, surtout, d'émettre rapidement les permis de travail. Ces gens-là
veulent travailler. On a vu des expériences récentes avec le forum sur les...
le salon d'emplois pour les immigrants, les... (panne de son) ...asile. Ils
veulent travailler et ils veulent avoir leur permis rapidement.
M. Roberge : Si, l'an
prochain, il arrive 60 000 autres demandeurs d'asile, est-ce qu'on
réduit d'autant les PMI, les travailleurs étrangers temporaires, les cibles de
permanents ou, pour vous, c'est en surplus?
M. Hamel (Denis) :Comme on ne peut pas les prévoir, on va les prendre en
surplus. J'ai assisté une rencontre récemment à l'Organisation internationale
des immigrants et des migrants. Il faut se préparer à ce que le nombre de
réfugiés et demandeurs d'asile partout sur la planète double d'ici 2030. Alors,
au lieu de dire : Qu'est-ce qu'on fait avec eux, est-ce qu'on les jette,
est-ce qu'on les envoie dans un autre pays ou...
M. Roberge : ...hein? On ne
jette personne. Attention.
M. Hamel (Denis) :Non. Non. D'accord. Mais on les... ou on les rejette ou on
les... Bon. Qu'est-ce qu'on fait avec ces gens-là? Il faut surtout se préparer
à une... à une nécessité.
M. Roberge : Quand je lisais
le mémoire, je me disais : Ça ne se peut pas, là, ils vont... ils vont me
rassurer, ils les considèrent. Mais je suis... je suis surpris de voir que vous
proposez des hausses dans plein de secteurs, mais sans les comptabiliser, sans
mesurer l'impact économique. Puis vous m'avez dit vous-même, là, culturels,
identitaires, économiques et sociaux, mais on compte juste les permanents.
C'est... C'est très... C'est déstabilisant.
Et d'autant plus que la revue de presse
est assez éloquente, là. Dans La Presse, 26 août : «Taux de chômage
chez les jeunes atteint des niveaux de récession.» Mais il faut faire rentrer
plein, plein de gens. Après ça, Radio-Canada : «2050, sera-t-il encore
possible de s'acheter une première maison?» L'équité entre les générations.
Après ça, des chercheurs universitaires qui nous disent : «La crise du
logement sévit aussi en région. Les gens ne peuvent plus se loger.» Après ça,
taux de chômage chez les jeunes : «Stoppons l'alarmante progression.» Ça,
c'est la revue de presse actuelle. On peut dire : Bah! Qui a écrit tout
ça? Bien là, CIBC... CIBC, dans Le Devoir, après ça, Desjardins, qui nous dit,
je le cite : «À mesure que la pandémie s'est éloignée dans le rétroviseur
et que l'activité économique est revenue à la normale, ce déluge - c'est
Desjardins qui dit ça, là - ce déluge de travailleurs disponibles a largement
dépassé la demande, pouvant... poussant ainsi à la hausse le taux de chômage
chez les jeunes.» Ils font une corrélation que vous ne semblez pas voir ou
reconnaître. L'institut... L'Institut C.D. Howe qui nous disent, qui nous
disent : «La politique d'immigration du Canada a pris une mauvaise
direction et nécessite une réorientation fondamentale.» Ils n'ont pas dit «une
hausse démesurée sans compter le monde», là. Ils ont dit «réorientation
fondamentale». «Ils ont souligné - ça, c'est les chercheurs, C.D. Howe - que
les compétences du marché du travail et le potentiel de revenu des immigrants,
qu'ils soient temporaires ou permanents, eux, ils comptent les deux, comptent
davantage que l'atteinte d'objectifs numériques. La politique d'immigration
devrait viser à accroître le capital humain moyen plutôt qu'à combler
uniquement les pénuries de main-d'œuvre à court terme.»
Qu'est-ce que vous répondez à Desjardins?
Qu'est-ce que vous répondez à CIBC? Qu'est-ce que vous répondez aux jeunes qui
ne sont pas capables de se payer leur appartement, qui ne sont pas capables
d'accéder à la propriété? Quand vous dites : Bien, on va augmenter les
permanents, puis on va juste ouvrir les vannes sur les temporaires, puis on
comptera après combien qu'il en est rentré, il me semble qu'il y a beaucoup de
gens, là, qui disent que ça a des impacts concrets, ce que vous proposez, sans
le définir.
M. Champalbert (Arnaud) : Si
je peux me permettre, je pense qu'il y a... il y a des éléments à préciser. Le
taux de chômage chez les jeunes, ce n'est pas une nouveauté, a déjà été plus
haut que la moyenne. Et ça va... ça va se poursuivre. Est-ce que l'immigration
a un rôle à jouer? Peut-être. Est-ce qu'ils répondent aux besoins des
entreprises? Pas sûr. Les entreprises ont besoin...
M. Champalbert (Arnaud) :
...permanent ont besoin de compétences particulières. Un étudiant ne va pas
forcément pouvoir combler ces emplois-là. Pour la crise du logement, bien, il y
a des éléments, c'est certain, qui peuvent être liés à l'immigration, qui met
une certaine pression. Est-ce que la crise du logement est à cause de
l'immigration? Je pense qu'on peut en débattre, c'est certain. Je regardais les
chiffres. Et pour avoir visité Gaspé, je n'ai pas vu beaucoup d'immigrants.
Mais il n'y a pas de logement. Donc, je vous dirais, ça ralentit même la
migration... inter-interrégionale. Quelqu'un de Montréal qui veut aller
travailler à Gaspé ne trouverait pas de logement demain, alors qu'il n'y a pas
d'immigration. Donc,je pense qu'il faut le voir aussi comme une solution. Il
manque 12 000 personnes en construction. On veut construire des logements. On
a, comme je vous le disais, des réfugiés, des réfugiés qui n'ont pas été
choisis sur leurs compétences. C'est le propre du statut de réfugié, qui en ont
certainement des compétences qu'on pourrait reconnaître plus facilement, qui
pourraient peut-être notamment aider à résoudre le défi de la main-d'œuvre dans
la construction. Donc, je pense qu'il faut vraiment le voir aussi de manière
positive et comment ça peut être un avantage. De coller la crise du logement
100 % à l'immigration, je pense qu'il y a des choses à voir aussi
différemment. Si je me fie à ce que j'ai vu à Gaspé, le défi pour construire
des logements, c'est davantage le manque de moyens pour avoir des égouts et
l'eau potable dans les nouveaux quartiers que de gérer un afflux d'immigrants
qui prendraient les logements disponibles.
M. Roberge : Ne me faites pas
dire ce que je n'ai pas dit. La crise du logement n'est pas causée par les
immigrants, mais évidemment, à l'arrivée de 400 000 personnes en deux ans, ça
nécessite des logements. Et admettons que la situation actuelle n'est nullement
impactée par ces 400 000 personnes là, par une magie, là, que je n'explique
pas, la crise du logement est là en ce moment. En période de crise de logement,
en période de chômage à la hausse, est-ce que c'est une bonne idée d'ajouter
plusieurs dizaines de milliers d'immigrants permanents et temporaires qui
auront besoin de se loger alors que nous vivons déjà une crise du logement.
M. Champalbert (Arnaud) : Je
vous dirais oui, s'ils répondent aux besoins du marché du travail, tout
simplement. On est en pénurie de main-d'œuvre dans plusieurs secteurs. Je vous
dirais, la commission d'aujourd'hui est très attendue par nos membres, dans
toutes les régions. Le cri du cœur est assez clair de leur part. C'est des gens
qui habitent dans leur communauté et qui ne sont pas déconnectés de la réalité
de celle-ci. Quand ils font venir des gens, que ce soit au
Saguenay–Lac-Saint-Jean ou dans d'autres régions, ils travaillent avec leur
municipalité pour les intégrer. Ils veulent que ce soit pérenne sur le long terme.
Donc, il n'y a pas un employeur qui se lève le matin en disant : Bien, je
vais... je vais... je vais aller chercher ce que je peux aller chercher puis je
ne vais pas m'assurer de les intégrer dans ma communauté, de pouvoir pérenniser
le fait de les avoir ici. Donc, je vous dirais, le défi, c'est qu'on a une
classe qui... de temporaires, qui est moins maîtrisée, qui est difficile à
maîtriser, qu'on appelle les réfugiés. Nos entreprises, eux, ont besoin de
l'immigration économique dont on parle aujourd'hui. Et ce qu'on veut illustrer,
c'est quel... Quel serait, selon nous, le taux idéal pour répondre à ces
besoins économiques sans écarter le défi que peut représenter les réfugiés,
d'où la convergence entre le Conseil du patronat et le gouvernement, d'avoir
une meilleure répartition à travers le Canada de ce défi que porte seul pour
l'instant le Québec.
M. Roberge : Mais l'offre et
la demande en période de crise du logement, c'est quand même quelque chose.
Taux d'inoccupation du marché locatif au Québec, 3 %, c'est un marché
équilibré. On est en dessous et on voudrait se rapprocher. Donc, il faut
augmenter l'offre de logements sans susciter trop de demandes de logement en...
pour sortir de la crise. Comment? Si je rajoute des dizaines de milliers de
personnes dans une situation en crise, j'augmente la demande du logement. Nos
jeunes qui ont de la misère à se loger, qui ont de la misère à accéder à la
propriété, puis qui n'ont même pas d'emploi, parce qu'ils sont au chômage, le
taux de chômage vient de monter. Est-ce que vous répondez aux jeunes
générations?
M. Champalbert (Arnaud) :
Bien...
La Présidente (Mme Poulet) :
...tout le temps qu'on a. On va poursuivre les discussions avec le député de
Pontiac... de l'Acadie, désolée.
• (17 h 50) •
M. Morin : Youpi! Ah! bien,
c'est... il n'y a pas de souci, j'aime voyager. Ça fait que j'aurais pu me
rendre dans le Pontiac. Merci, Mme la Présidente. Merci beaucoup d'être là.
Merci pour votre mémoire. Je vous ai écoutés avec beaucoup d'attention. Moi, je
vais prendre ça différemment. On a présentement sur la table, de la part du
gouvernement, trois scénarios. Scénario a : 25 000 permanents. Si ce
scénario-là est retenu, quel sera l'impact chez vos membres? Qu'est-ce que ça
va faire pour l'économie du Québec...
M. Champalbert (Arnaud) :
...je vous dirais, le défi est surtout l'environnement d'affaires, le CPQ en
parle beaucoup. On a une fiscalité plus imposante, une réglementation plus
lourde, au Québec, pour diverses raisons, et, pour nous, la pénurie de
main-d'œuvre vient accentuer ce défi-là. Donc, c'est sûr que, si on réduit
beaucoup le capital humain sans prévisibilité, nos entreprises vont se
retrouver sans solution, et ce n'est pas... ce n'est pas demain qu'elles vont
pouvoir innover ou changer, ou amener des innovations pour faciliter cette
baisse de main-d'oeuvre. Donc, je vous dirais, c'est sûr que, dans un contexte
où on est en guerre tarifaire, où on compétitionne davantage sur de nouveaux
marchés, où les États-Unis sont encore plus agressifs économiquement, de ne pas
avoir la capacité de compter sur une main-d'œuvre disponible et qualifiée va
être un gros défi pour nos entreprises.
M. Morin : Je... Oui? Oui,
allez-y, allez-y, je vous en prie.
M. Hamel (Denis) :J'aimerais compléter. M. le ministre référait tantôt à
votre revue de presse. Vous avez vu, il y a quelques semaines, une importante
entreprise québécoise de 6 milliards de capitalisation boursière disait,
notamment à cause des règles d'immigration : Je vais être obligé de
délocaliser aux États-Unis, je vais être obligé de réduire ma production.
La plupart des entreprises, des
entrepreneurs ne prennent pas la parole comme ça, mais ils nous disent,
nous : Allez nous représenter parce que, nous, on est sur la... à la
veille de fermer des lignes de production, de fermer des quarts de travail. Ça,
c'est avec la situation actuelle. Alors, vous pouvez vous imaginer avec
25 000, avec un seuil de 25 000 au lieu de ce qu'on a reçu,
66 000, cette année, on va empirer les causes. Et encore, dans la revue de
presse aujourd'hui, vous avez vu que même le gouvernement... vous avez vu
beaucoup de travailleurs étrangers temporaires sont dans le secteur de l'aide à
domicile, des soins de santé. Le nombre de travailleurs étrangers temporaires a
augmenté, 17... temporaires a augmenté 17 fois plus vite dans les services de
santé que le nombre de locaux. Alors, on a une forte concentration.
Et, pour répondre à la question de M. le
ministre, tantôt, que je n'ai pas pu répondre, vous savez, ce que les
entreprises veulent avoir... c'est recruter localement, parce que ce n'est pas
le plan A, d'aller chercher des travailleurs étrangers temporaires. Si les
réfugiés et les demandeurs d'asile ont rapidement leur permis de travail, c'est
sûr que ça va faire baisser le nombre de travailleurs étrangers temporaires.
M. Morin : Et je me suis
promené dans plusieurs régions du Québec. J'ai rencontré plusieurs entreprises,
et il y a des entreprises qui m'ont dit : Écoutez, nous, là, on a de la
misère à arriver, on a de la misère à remplir nos contrats que nous avons parce
que... bien, parce qu'on n'a pas assez de travailleurs le soir. Il y a d'autres
entreprises qui m'ont dit : Écoutez, on est dans le secteur du transport
et on a besoin de mécaniciens, on a besoin de soudeurs, il n'y en a pas assez,
on n'est pas capables d'arriver. Est-ce que c'est quelque chose que vous
entendez également de votre côté?
M. Hamel (Denis) :Je vous dirais : Quotidiennement. Ça fait huit ans que
je suis au CPQ. Depuis la pandémie, on voit... Vous avez vu, le nombre de
postes vacants a explosé après la pandémie. Il est revenu à une situation un
petit peu plus normale, mais quand même très, très, très élevé. Il manque
énormément de compétences. Il y a 176 métiers et professions au Québec qui sont
en déficit et qui le seront au cours des cinq prochaines années. Ce qu'on nous
dit, nous : On n'est pas capable de recruter localement. On a besoin de
l'immigration pour continuer à vivre et à prospérer, mais c'est de plus en plus
à survivre, parce que le besoin est vraiment criant. Et ça, on l'entend dans
toutes les régions, à Montréal, bien sûr, mais on a fait récemment une tournée
de toutes les régions du Québec et on l'a entendu de l'Abitibi jusqu'en
Gaspésie.
M. Champalbert (Arnaud) : Et,
si je peux me permettre, c'est aussi un défi pour la vitalité des régions,
parce que ces entreprises veulent attirer du monde dans des régions
périphériques, un peu plus loin des grands centres, et, s'il n'y a pas de
pharmacien dans cette région-là, dans la ville où ils sont, s'il n'y a pas de
ressources pour aller au restaurant, par exemple, ça va être difficile
d'attirer cette main-d'oeuvre là, de les garder, et souvent ça va leur obliger
d'avoir des gens qui viennent sporadiquement dans la région, créer des
déplacements pour que les gens viennent travailler quelques semaines et
repartent. Donc, tout le monde perd au change, là.
M. Morin : Et, si on prend le
deuxième scénario du gouvernement, c'est 35 000, mais c'est aussi le
scénario qui a été publié par le Parti québécois. Donc, 35 000, bien,
c'est un peu plus que 25 000, mais je comprends que l'impact... pour les
entreprises, ça va avoir un impact terrible.
M. Hamel (Denis) :Bien, on s'est beaucoup appuyés, nous, sur l'étude faite
par Pierre-Carl Michaud, de HEC Montréal, de l'Institut du Québec et des
données d'Emploi-Québec. Emploi Québec, nous dit, bon : On va avoir...
pourvoir 1,4 million d'emplois, de postes qui vont se libérer d'ici 2033, et de
ce 1,4 million là, 25 % devra venir de l'immigration. L'étude de
Pierre-Carl Michaud, elle n'est quand même pas commandée par les employeurs, et
ils sont arrivés à ce chiffre de...
M. Hamel
(Denis) : …pourquoi c'est un point d'équilibre pour nous. Ça va nous amener
assez de gens pour pourvoir les postes, pour assurer le remplacement des
personnes qui partent à la retraite, donner des services à tous ces retraités
qui... dont je vais bientôt faire partie et qui vont composer le Québec de
demain. On va dépasser le 25 % de gens de 65 ans et plus. Donc,
l'immigration peut aussi augmenter notre... notre... notre... la possibilité
d'accueillir ces gens-là, comme d'autres provinces l'ont fait, en invitant
beaucoup d'immigrants dans le secteur de la construction à venir ici pour
construire des maisons, venir enseigner et travailler dans les hôpitaux.
M. Morin : Donc, je vous
écoute, je comprends, en fait, vous en avez, des chiffres. C'est préférable.
M. Hamel
(Denis) : Oui. Ils sont dans notre mémoire.
M. Morin : Merci. Merci.
Vous avez parlé aussi de prévisibilité. Et ça, c'est une chose que j'ai
dénoncée à plusieurs reprises, manque de planification, manque de
prévisibilité. Le programme DEC a été suspendu. On l'a tous appris, pouf! un
matin. Peut-être que vous, c'était la veille, mais ça n'a pas changé
grand-chose. Les règles du jeu ont changé alors que les gens qui espéraient
obtenir la résidence permanente... C'est quoi l'impact de cette
improvisation-là chez les gens que vous représentez?
M. Hamel
(Denis) : On a recensé, dans les 14 derniers mois,
24 modifications au programme de migration. La plupart ont été annoncées,
comme vous dites, à la dernière minute, puis ont eu des impacts importants sur
nos entreprises. Actuellement, je parlais d'entrée de jeu d'un ras-le-bol, d'un
essoufflement des entreprises. Ce que les entreprises voient venir
actuellement, c'est la situation qu'on a eue après la pandémie, où on avait
tellement de postes vacants que les gens devaient travailler des heures
supplémentaires. On a été obligé d'annuler les vacances, épuisement
professionnel à plus d'accidents. C'est ce qu'on redoute actuellement si la
tendance se maintient. La prévisibilité... C'est très difficile pour une
entreprise d'obtenir un contrat de deux ans sans savoir s'il va y avoir des
gens pour pouvoir travailler dans l'entreprise, qu'elle soit manufacturière ou
des services, pour pouvoir répondre à ce contrat-là. Donc, on va y aller six
mois, trois mois. On est tellement loin de la prévisibilité et surtout de la...
je dirais, de l'efficacité.
M. Morin : Quand on
regarde les scénarios du gouvernement, le scénario 2a-2b, là, le
25 000, le 35 000, on sait présentement qu'il y a à peu près
142 000 personnes qui sont en attente de résidence permanente au Québec,
donc, qui ont les CSQ et qui attendent. Avec ces seuils-là, comment... comment
on va y arriver et qu'est ce qu'on va faire avec ces gens-là?
M. Hamel
(Denis) : Bien évidemment, plus les seuils sont bas, plus les
listes d'attente vont s'allonger. Alors, au niveau de l'immigration économique,
il y avait à un moment donné... Votre chiffre, je ne le conteste pas. C'est ce
que j'ai vu à peu près aussi dans les derniers temps. Même chose pour le
regroupement familial. Pourquoi des gens doivent attendre quatre...
M. Morin : ...qu'on
parle, parce que c'est un volet qui est très important pour moi également. Puis
ça, c'est... Tu sais, on ne permet pas à des familles d'être réunies.
Personnellement, je trouve que ça n'a aucun bon sens, mais ça doit avoir un
impact aussi. Ça fait que j'aimerais que vous en parliez aussi du regroupement
des familles.
M. Hamel
(Denis) : Oui, parce que, là, je vous dirais, la perception que
les gens ont des employeurs a beaucoup changé dans les dernières années. Un employeur
me disait : Moi, je donnerais un rein pour mes travailleurs étrangers
temporaires, là, pour qu'ils restent ici. Beaucoup d'entreprises ont créé à
l'intérieur même de leur service des ressources humaines, des escouades dédiées
à l'accompagnement des travailleurs et de leurs familles. On leur trouve des
places en garderie, on y retrouve des logements, on les aide pour la première
épicerie. On ne voyait pas ça il y a 10 ans ou il y a 15 ans.
Maintenant, la main-d'œuvre est rendue tellement précieuse que les employeurs
déploient des efforts incroyables. Alors, imaginez le regroupement familial.
Comment voulez-vous travailler dans un milieu de façon harmonieuse quand les
vôtres sont à des milliers de kilomètres et si vous savez qu'ils ne pourront
pas venir avant quatre ans? C'est invivable. Donc, tout le côté... On a beau
parler de chiffres, puis je suis économiste de formation, on amène des
chiffres, mais on escamote toujours le côté humain de l'immigration qui est
tellement important. Et les employeurs nous disent : Moi, ça m'arrache le
cœur de voir quelqu'un qui est arrivé au Québec il y a deux ans, qui a... Ses
enfants vont à l'école française. Ses amis sont des enfants qui sont nés ici.
Et puis là il va être obligé de partir.
• (18 heures) •
M. Morin : Et pensez
vous que, pour le regroupement familial, compte tenu évidemment du stress que
ça fait vivre aux familles, on devrait ne pas les... En fait, permettre le
regroupement mais... mais hors normes ou hors seuils? Parce que, comme c'est
là, le quota, c'est à peu près 10 000. Il y en aurait 40 000 en
attente. Si on regarde le scénario a du gouvernement, pour le regroupement
familial, ça serait 5 800. Donc, aujourd'hui, avec un quota d'à peu près
10 000, là, on est à peu près à quatre ans. Donc, avec 5 800, on va
être à quoi? Sept ans ou huit ans? On devrait être capable d'attirer du monde.
Si une entreprise veut avoir quelqu'un qui est spécialisé dans un domaine...
18 h (version non révisée)
M. Morin : ...vous lui dites :
Oui, mais votre famille, par exemple, elle va arriver dans sept ans.
M. Hamel (Denis) :
Je n'aime pas parler d'anecdote, parce que, souvent des individus c'est
symptomatique, mais ce n'est pas représentatif. Mais il y en a qui m'ont dit :
J'ai perdu mon meilleur employé qui a déménagé à Toronto, parce qu'à Toronto, c'est
six mois d'attente. Alors, on perd de la main-d'œuvre francisée, compétente,
habituée au marché du travail du Québec, et on les force à s'en aller ailleurs
parce que les exigences dans les autres provinces sont moindres. Ça nous fend
le cœur, nous, c'est nos entreprises qui écopent de ça. Alors, on ne veut pas
ça.
Donc, la question, il faut absolument
tenir compte du regroupement familial, même si complètement en dehors de notre,
je dirais, de notre champ d'expertise, ce ne sont pas techniquement des gens...
bien, plusieurs vont joindre le marché du travail. Ce n'est pas immédiatement
des travailleurs et des travailleuses, mais ça contribue au bien-être et à la
prospérité de nos entreprises.
M. Morin : Si je prends votre
exemple, le gouvernement a payé pour franciser ces gens-là, puis, bien là,
aujourd'hui, ils sont à Toronto.
M. Hamel (Denis) :
Et, souvent, maintenant, ce sont... Depuis les coupures à Francisation Québec,
c'est beaucoup les entreprises qui s'occupent de francisation. On a rencontré
encore une entreprise, une très grosse entreprise, hier, qui nous dit :
Nous, on francise les gens sur les heures de travail à nos frais. Pensez-vous
qu'ils sont intéressés à les voir partir dans leur pays ou dans une autre
province?
M. Morin : Écoutez, je vous
remercie beaucoup, c'est très éclairant. Merci bien.
La Présidente (Mme Poulet) : Oui,
M. le député de Maurice-Richard.
M. Bouazzi : Merci. S'il
restait un peu de temps, moi, je veux bien le prendre de chez mes collègues.
La Présidente (Mme Poulet) :
...
M. Bouazzi : Ah! Bon. Merci
beaucoup. Bien, d'abord, peut-être, parler de la question de la prévisibilité.
Vous avez parlé des changements, 14 fois sur... non, 14 fois sur...
24 fois sur les derniers 14 mois. Je vais reculer juste un peu, en
janvier 2022. Si mes souvenirs sont bons, le gouvernement et fédéral et
provincial ont annoncé, en grande pompe, l'idée que les compagnies pourront
avoir désormais non pas 10, mais 20 % de travailleurs et travailleuses
temporaires dans leurs compagnies. Est-ce que vous vous souvenez?
M. Hamel (Denis) :
...bien, on l'avait demandé.
M. Bouazzi : Vous l'aviez
demandé, vous-mêmes, vous l'avez obtenu. Est-ce que ce passage de 10 à
20 % a participé à augmenter les travailleuses, travailleurs temporaires
au Québec?
M. Hamel (Denis) :Oui, bien sûr. Vous voyez les chiffres d'augmentation. Vous
avez aussi une baisse drastique du nombre de postes vacants au Québec.
M. Bouazzi : Et donc... Alors,
moi, je n'avais pas prévu, parlons prévisibilité, que, quelques années plus
tard, donc, 2022, on est en 2026, quatre ans plus tard, on pointe du doigt le
fédéral pour la situation actuelle. Maintenant, le seuil retombe à 10 %.
Vous, vous dites, le fait qu'on n'avait pas prévu déjà que ça passe de 10 à 20,
ça crée une grosse pression sur nous. On n'arrive pas à gérer ça comme...
M. Hamel (Denis) :
Bien, on n'arrive pas à gérer la diminution, alors qu'on va voir, surtout...
qui a déjà commencé, mais qu'on va surtout voir, en 2026, perdre 10 % de
ses effectifs de travailleurs étrangers, pour plusieurs entreprises, c'est
majeur. Ça peut sembler petit 10 %, mais, pour des entreprises... celles
qu'on rencontrait hier, elles nous disaient : Nous, ous, c'est une
fermeture, carrément.
M. Bouazzi : Évidemment, nous,
à Québec solidaire, on n'est pas fan des questions de travailleurs temporaires,
étant donné surtout... enfin, principalement, le permis fermé qui permet
malheureusement un certain nombre d'abus qui ont été décriés par toutes sortes
d'agences, y compris des rapporteurs de l'ONU. Vous, de ce que je comprends de
votre mémoire, vous avez quand même une préférence pour les travailleurs qui ne
sont pas temporaires, en fait.
M. Hamel (Denis) :Bien sûr, oui. Les employeurs nous disent : Les travailleurs
temporaires, ce n'est jamais le plan A d'une entreprise. Les entrepreneurs
préfèrent recruter localement et d'avoir des gens qui vont avoir la résidence
permanente et éventuellement, bon, une plus grande mobilité, devenir citoyens à
part entière. C'est une nécessité. Et si le nombre, comme je l'expliquais
tantôt au ministre, si le nombre a explosé au niveau des travailleurs
temporaires, c'est parce que c'est symptomatique de notre économie qui était
florissante dans les derniers mois.
M. Bouazzi : Et donc, quand
vous parlez des... des immigrants permanents que vous voudriez avoir, vous
parlez aussi dans votre programme que les temporaires qui sont déjà là, qui ont
d'ailleurs déjà un logement, pour vous, ça serait prioritaire étant donné qu'on
les a francisés ou qu'ils savaient déjà le français, d'ailleurs, pour beaucoup
d'entre eux, pourraient passer en immigrant permanent et pour leur permettre ce
passage-là.
M. Hamel (Denis) :Exactement. C'est... d'ailleurs, M. le ministre l'a soulevé, c'est
l'une des orientations, on est d'accord avec ça. On va privilégier les gens qui
sont ici, bien sûr, on a beaucoup investi comme société, comme entreprise
auprès de ces gens-là...
M. Hamel (Denis) :...sans toutefois... et la nuance que j'apportais : il
ne faut pas fermer la porte à... parce que, dans le fond, on régulariserait
aujourd'hui tous ceux qui sont ici de façon temporaire. Même avec notre
scénario de 44 000, on en aurait encore pour plusieurs années. Donc, il faut
s'occuper des gens qui sont ici, mais aussi permettre l'arrivée de nouvelles
personnes. Sinon, on va passer comme... la réputation d'un pays fermé.
M. Bouazzi : Et c'est votre
point, quand vous dites qu'il y a plus de gens qui partent que de jeunes
Québécoises et Québécois, qui soient, d'ailleurs, enfants d'immigrants ou pas,
qui arrivent sur le marché du travail. Et donc on a besoin de travailleurs
étrangers. Ça, c'est juste pour remplacer les personnes qui sont là. Si on a
des nouveaux investissements, il faut encore plus de gens. Et donc évidemment,
si on n'a pas ces personnes qui arrivent, les investissements partent dans le
beurre.
Il me reste quelques instants. Moi,
j'étais 15 ans à la BDC. Il y a aussi le repreneurship, c'est-à-dire les
personnes qui viennent racheter les compagnies des personnes qui quittent, qui
est un vrai, vrai problème. En 10 secondes, parce que je n'ai plus de temps.
La Présidente (Mme Poulet) : ...on
a pour les travaux. Alors, merci, messieurs, pour votre contribution.
Alors, je suspends les travaux... jusqu'à
demain, 9 heures... 9 octobre, après les avis touchant les commissions. Merci.
(Fin de la séance à 18
h
07)