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Version préliminaire

43rd Legislature, 2nd Session
(début : September 30, 2025)

Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.

Pour en savoir plus sur le Journal des débats et ses différentes versions

Wednesday, October 22, 2025 - Vol. 48 N° 7

General consultation and public hearings on the consultation document entitled “Planning of Immigration to Québec for the 2026-2029 Period”


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Journal des débats

11 h (version non révisée)

(Onze heures treize minutes)

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Alors, à l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des relations avec les citoyens ouverte.

La commission est réunie afin de poursuivre les auditions publiques dans le cadre de la consultation générale sur le cahier de consultation intitulé La planification de l'immigration au Québec pour la période 2026-2029.

M. le secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

Le Secrétaire : Oui, Mme la Présidente. M. Fortin (Pontiac) remplace Mme Prass (D'Arcy-McGee); M. Fontecilla (Laurier-Dorion) remplace M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve); et M. Boissonneault (Arthabaska) remplace M. Bérubé (Matane-Matapédia).

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. Alors, messieurs, bienvenue à la commission. Nous entendrons ce matin les groupes suivants : l'Union étudiante du Québec, qui est ici présente, ainsi qu'Éducation internationale.

Alors, bienvenue, madame, monsieur. Je vais vous demander dans les prochaines minutes de vous présenter et, par la suite, nous aurons une discussion avec les parlementaires. Et votre présentation va durer au total 10 minutes. Alors, le micro est d'ores et déjà à vous.

Mme Dommanget (Flora) : Bonjour à vous. Je m'appelle Flora Dommanget et je suis présidente de l'Union étudiante du Québec. Je suis accompagnée aujourd'hui de Loïc Goyette, coordonnateur aux affaires sociopolitiques.

Nous souhaitons tout d'abord remercier l'ensemble de la commission de nous entendre aujourd'hui.

L'Union étudiante du Québec est une association étudiante nationale qui représente 14 associations étudiantes universitaires de tous cycles confondues, francophones et anglophones, ce qui équivaut à 110 000 personnes étudiantes à travers le Québec, en allant de Rouyn-Noranda à Chicoutimi, en passant par Gatineau, Montréal, Sherbrooke, Drummondville et Lévis.

L'UEQ a pour mission de défendre et améliorer les droits et intérêts des personnes étudiantes québécoises, canadiennes et internationales étudiant au Québec. Dans cette optique, l'UEQ participe à la consultation sur la planification en immigration de 2026-2029. Notre mémoire aborde 12 recommandations regroupées en trois sections.

M. Goyette (Loïc) : Les personnes étudiantes internationales contribuent directement à la société québécoise et à son économie. Elles étudient, travaillent, paient des taxes et consomment localement. Elles... participent activement à la création de savoir au Québec et sont indispensables à la recherche et à l'innovation.

Pourtant, les récentes décisions du gouvernement, notamment l'imposition de quotas sur les certificats d'acceptation du Québec, les CAQ, la suspension du Programme de l'expérience québécoise, le PEQ, volet Diplômés minent gravement l'attractivité du Québec.

Ces mesures envoient un signal clair à l'international. Le Québec ne se montre pas accueillant envers les personnes qui souhaitent y étudier et s'y établir. Ce signal a été reçu, comme le démontre la baisse des demandes d'admission.

Nous invitons donc le gouvernement à recentrer la planification de l'immigration sur une vision plus juste et cohérente qui reconnaît l'apport de la communauté étudiante internationale à la hauteur de ce qu'elle apporte au Québec.

Les universités tirent une part importante de leur financement des personnes étudiantes internationales. C'est d'ailleurs la vision du gouvernement. La politique de financement des universités mentionne explicitement que les investissements dans le réseau universitaire proviendront des frais imposés aux personnes étudiantes internationales. Toute mesure qui a pour effet de réduire directement ou indirectement le nombre des personnes étudiantes internationales contribue non seulement à miner la réputation du Québec, mais a des conséquences dévastatrices sur les universités, qu'elles vous ont exprimées dans le cadre des consultations, particulièrement celles en... francophones et celles en région.

Le Québec...

M. Goyette (Loïc) : ...il ne peut à la fois dépendre de la présence de ces personnes pour financer ses universités et en même temps les décourager d'y venir. C'est pourquoi nous recommandons que le gouvernement consulte obligatoirement la communauté étudiante et universitaire avant toute décision touchant l'encadrement des personnes étudiantes internationales et que les quotas de CAQ soient suffisamment élevés pour éviter toute baisse du nombre de personnes étudiantes.

Par ailleurs, les établissements pourraient devoir refuser des personnes étudiantes qui ont besoin de leur renouvellement parce que leur quota est atteint ou est en voie de l'être. Ça engendre un risque de rupture de statut pour des personnes intégrées, francisées et déjà investies dans leur parcours académique. C'est pourquoi l'UEQ recommande que les renouvellements de CAQ soient exclus des quotas.

Au-delà des quotas, les règles actuelles entourant le renouvellement des CAQ créent une série d'obstacles inutiles pour les personnes étudiantes déjà établies au Québec. Deux éléments sont préoccupants : la preuve de capacité financière et la mention obligatoire de l'établissement. Cela crée un fardeau administratif lourd, retarde les études et alimente l'anxiété. Nous recommandons donc de retirer l'obligation de redéposer une preuve de capacité financière lors des renouvellements de CAQ. Nous demandons donc aussi que la mention de l'établissement soit retirée des CAQ, revenir aux règles de renouvellement antérieures est simple et essentiel pour que le Québec demeure une destination d'études... d'études, pardon, accueillante et compétitive.

Mme Dommanget (Flora) : La deuxième section de notre mémoire porte sur l'importance de rétablir le PEQ, volet diplômé. Depuis l'année dernière, il a été suspendu une première fois jusqu'en juin 2025, puis jusqu'en novembre, laissant les personnes étudiantes dans une situation d'incertitude et de stress intense. Cela prive des milliers de jeunes qualifiés, formés ici et déjà intégrés de la possibilité de s'établir durablement au Québec.

Comme voie alternative, depuis cet été, le gouvernement propose le programme de sélection des travailleurs qualifiés, PSTQ, aux personnes étudiantes diplômées qui travaillent. Or, il ne constitue pas une nouvelle porte, mais bien un recul marqué de leur accès à la résidence permanente, ne prenant pas en compte les réalités propres à la population étudiante. L'UEQ estime que le PEQ volet diplômé est le programme le plus adapté pour permettre aux personnes diplômées de venir s'établir de façon permanente.

C'est pourquoi notre demande principale est la recommandation six, que le PEQ pour le volet diplômé soit rétabli avec les mêmes conditions fixées par la réforme de 2023. Nous invitons le gouvernement à reconnaître que le PEQ et le PSTQ sont des programmes distincts et ne peuvent se substituer. Miser sur les personnes étudiantes diplômées, c'est investir dans une immigration qualifiée, francophone et déjà enracinée dans nos communautés. Les prochaines recommandations traitent du PSTQ en attendant le rétablissement du PEQ pour le volet diplômé. Contrairement au PEQ qui permet un dépôt direct des demandes sans plafond ni compétition avec d'autres catégories de personnes candidates, Le PSTQ impose une logique de sélection restrictive, seules les personnes invitées par le gouvernement peuvent déposer une demande et les invitations sont limitées à certains volets. Le PSTQ sans le retour du PEQ ne fait qu'augmenter le poids de l'incertitude qui pèse sur les personnes étudiantes et les dilue dans une catégorie beaucoup trop large. Plusieurs milliers de demandes sont toujours en attente, selon le ministre de l'Immigration. L'UEQ recommande qu'un volet sans déclaration d'intérêt soit réservé aux personnes étudiantes diplômées du Québec dans le PSTQ dans l'attente du rétablissement du PEQ.

Dans le cadre des scénarios des cibles migratoires proposés par le gouvernement, nous formulons une recommandation claire. Les personnes diplômées du... du Québec ne devraient pas être comptabilisées dans les cibles globales d'immigration économique, comme c'était le cas avant la suspension du PEQ. Si le gouvernement maintient leur inclusion, de ces cibles sans rétablir le PEQ, il devient impératif d'aborder la cible la plus élevée possible pour permettre de garantir à un plus grand nombre de diplômés du Québec une réelle possibilité de s'établir de façon permanente. Nous recommandons donc que la cible de 45 000 personnes immigrantes admises par année au titre de la résidence permanente soit privilégiée afin de ne pas limiter le nombre de personnes diplômées du Québec dans l'attente du rétablissement du PEQ.

Maintenant, sur l'exigence d'une année d'expérience de travail, cette condition retirée du PEQ, lors de sa réforme en 2023, est réintroduite dans le PSTQ. Pour l'UEQ, c'est venir freiner les personnes étudiantes ayant déjà... ayant déjà des critères demandés sachant que le fédéral ajoute des freins. On demande que les personnes étudiantes ne soient pas soumises à l'exigence d'expérience du travail d'au moins un an du PSTQ dans l'attente du rétablissement du PEQ.

• (11 h 20) •

Sur la question de la connaissance du français, nous saluons les avancées obtenues dans le PEQ et recommandons que les conditions du programme d'études, où au moins 75 % des cours ont été suivis en français, ainsi que la rédaction des travaux de recherche dans une autre langue que le français, conditionnellement au suivi de 75 % des cours en français, soient conservées dans le PEQ. Dans le PSTQ, seuls trois types de diplômes secondaires sont reconnus comme preuve linguistique. Ceux délivrés en France, en Belgique francophone et en Suisse romande. Les autres pays francophones sont complètement oubliés. Donc, les personnes venant de l'Algérie, du Cameroun ou d'Haïti, par exemple, et bien d'autres pays francophones n'ont pas cette reconnaissance. Cette restriction oblige de nombreuses personnes étudiantes à passer des tests linguistiques coûteux et parfois difficilement accessibles, alors même qu'elles ont étudié en français pendant plusieurs années, ou bien que leur langue première est le français. Cette restriction est juste discriminatoire. On demande que tout... que tout... excusez-moi, on demande que tout type d'études secondaires ou postsecondaires réalisées en français soit pris en compte dans le PSTQ... en tant que preuve...

Mme Dommanget (Flora) : ...une preuve de connaissance du français dans l'attente du rétablissement du PEQ.

M. Goyette (Loïc) : Enfin, l'UEQ tient à souligner la situation particulière des personnes étudiantes qui déposent une demande d'asile. La situation d'un pays d'origine peut grandement évoluer durant les années d'études, obligeant certaines personnes à déposer une demande d'asile pour assurer leur sécurité ou leur dignité. Les demandes d'asile doivent être évaluées selon les dangers de retourner dans un pays, non selon des critères arbitraires comme la durée de séjour au Canada. Nous recommandons donc que le gouvernement du Québec demande au gouvernement fédéral de continuer à traiter ces demandes, peu importe la durée de séjour prévue initialement.

Mme Dommanget (Flora) : Pour conclure notre présentation, nous souhaitons rappeler que derrière les chiffres et décisions du gouvernement, ce sont des personnes qui paient les frais et l'incertitude de leur avenir. Nous voulions prendre quelques minutes pour vous partager le témoignage d'Anne-Laure, étudiante d'origine française, qui illustre parfaitement l'incohérence des politiques migratoires. Anne-Laure est arrivée au Québec en 2017, via le programme Étudier et vivre au Québec, qui recrute des jeunes d'outremer et les envoie en région pour étudier au cégep. Elle a ensuite obtenu son DEC en architecture en 2020 à Trois-Rivières. Cette même année a eu lieu la première réforme du PEQ, qui a complexifié les démarches vers l'obtention de la résidence permanente. Elle a donc décidé de continuer à l'université afin de ne pas impacter son parcours scolaire et professionnel. Elle s'est endettée afin de payer ses frais de scolarité et a obtenu son diplôme en baccalauréat en génie civil en décembre 2024, soit un mois après la suspension du PEQ. Donc, aujourd'hui, elle se retrouve bloquée sans voie vers l'obtention de la résidence. Le PSTQ ne lui offre pas une assurance d'obtenir cette résidence, dû à la complexité des critères. Ça fait maintenant huit ans qu'Anne-Laure est au Québec, a étudié au Québec, contribue à l'économie et travaille en ingénierie. Elle est intégrée, et pourtant son futur est toujours incertain.

L'UEQ appelle à une refonte des politiques d'immigration qui placent au cœur de ses priorités la rétention des talents formés au Québec. On voit déjà les impacts des répercussions des politiques d'immigration. Le BCI voit les demandes d'inscription chuter. Le budget 2025-2026 du financement des universités est en baisse. Ça va avoir un impact sur l'ensemble de l'économie du Québec. Rappelons que les personnes étudiantes internationales sont la meilleure immigration possible, comme le rappelle lui-même le ministre de l'Immigration. Elles sont formées au Québec, intégrées dans nos milieux et prêtes à contribuer activement à notre société. Nous vous remercions de votre attention.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Eh bien, merci beaucoup pour cette présentation. Alors, on commence la période d'échange avec les parlementaires. M. le ministre, et votre banquette, vous bénéficiez de 16 min 30 s.

M. Roberge : Merci, Mme la Présidente. Merci pour votre présentation. Les étudiants étrangers, particulièrement ceux qui sont dans nos cégeps, formation technique, longue, et dans nos universités, sont définitivement une richesse pour le Québec. Vous l'avez dit, je l'ai déjà dit, ce sont souvent des immigrants, on va dire, idéaux. Diplômés ici au Québec, pas de problème de reconnaissance d'acquis, très souvent francophones, le plus souvent possible, évidemment, puisqu'il faut être francophone maintenant pour faire partie de l'immigration économique, c'est une décision de notre gouvernement.

Malheureusement, cette année, pour la session de l'automne, il y a une diminution d'inscriptions dans nos universités des étudiants étrangers. Ça arrive au Québec, mais ça arrive aussi en Ontario, ça arrive dans le reste du Canada, ça arrive dans les Maritimes. Comment ça se fait? Est-ce que l'ensemble du Canada vit le contrecoup de l'adoption de la loi n° 74, Loi visant principalement à améliorer l'encadrement relatif aux étudiants étrangers au Québec? Bien non. Ce qui a créé ce ressac-là, c'est surtout les politiques fédérales, qui ont annoncé deux années de suite, coup sur coup, l'intention de réduire de 50 %, pas 5 %, pas 12 %, 50 % des étudiants étrangers, puis l'année suivante, 35 % encore de réduction. Ça, c'est le message du gouvernement fédéral. Ça a fait très mal.

Ça a eu des impacts, et ce n'était pas ce qu'on souhaitait avec la loi, et ce n'est pas ce que nous avons causé avec la loi, puisque le nombre de CAQ qu'on a distribués l'an passé permettait cette année d'avoir une stabilisation. Et dans notre cahier de planification, en ce moment, ce qu'on propose, c'est 110 000 étudiants étrangers, c'est loin d'une fermeture des frontières, 110 000 étudiants étrangers pour ce qui s'en viendrait. Et la légère réduction, bien, on souhaiterait la faire, non pas dans nos cégeps et dans nos universités, surtout pas dans les deuxième et troisième cycles, mais dans des entreprises privées qui se spécialisent à vendre le Québec en même temps qu'ils vendent le diplôme. Donc, je pense qu'il faut rassurer nos cégeps, rassurer nos universités, rassurer nos chercheurs pour dire qu'on va faire partie de la solution pour avoir une prévisibilité, rassurer tout le monde et s'assurer qu'on va accomplir notre mandat tous ensemble, avec un accent régional.

Vous avez, dans votre présentation, déploré la diminution du nombre d'étudiants étrangers cette année, globalement, sur l'ensemble du réseau. Est-ce que vous avez un chiffre de l'admission, cette année, elle est de combien en pourcentage...

M. Roberge : ...par rapport à l'an passé.

Mme Dommanget (Flora) : Dans les chiffres que nous avons, c'est vraiment les demandes d'inscription qui ont été réduites, comme le montrait le rapport du BCI qui est sorti il n'y a pas très longtemps. On voyait une diminution de 12 % dans les demandes d'inscription. Ça fait que, nous, c'est vraiment quelque chose qu'on trouve problématique. Parce que ça veut dire que le message qu'on envoie ici, avec toutes les politiques d'immigration, c'est que les personnes étudiantes ne sont plus les bienvenues au Québec. Ça fait que, que ce soit avec les politiques fédérales ou même juste ici, on parle du contexte québécois, le message qu'on envoie à ces personnes, c'est qu'elles ne sont plus les bienvenues. On leur bloque des programmes également pour qu'elles puissent s'établir de façon permanente. Et, nous, ce qu'on voit, c'est que ça crée un stress intense, ce qui fait que ça a des répercussions sur l'ensemble de nos universités, ça a des répercussions dans le financement de... de nos universités. On le voit, la part étudiante augmente de plus en plus, et pourtant, bien, on a une diminution du financement des universités.

M. Roberge : Juste clarifier quelque chose. Malgré la diminution d'inscriptions pour la session d'automne, la nouvelle cohorte cette année d'étudiants étrangers, l'effectif étudiant universitaire a augmenté cette année par rapport à l'an passé, une légère hausse, mais quand même. De manière générale, on a plus d'étudiants sur nos campus parce que... Le fait qu'il y ait moins d'étudiants étrangers est réel, mais le fait est aussi qu'il y a davantage d'étudiants québécois, un peu canadiens, mais surtout québécois. Donc, c'est important de le préciser, là. Il n'y a pas une désertion de nos campus. Il y a plus d'étudiants que l'an passé.

Mais, je tiens à le rappeler, la loi 74, là, qui vise à améliorer l'encadrement relatif aux étudiants étrangers, maintenait les effectifs par rapport à l'an passé pour l'an 1. Il y avait des baisses intentionnelles, assumées, précisées, voulues, oui, pour des collèges privés qui étaient beaucoup dans des programmes courts. Donc, on n'est pas dans... universitaire, on n'est pas dans nos cégeps. On était dans des collèges privés non subventionnés pour des programmes courts, qui se servaient essentiellement de cet attrait-là, et souvent, même pas en français d'ailleurs, pour vendre d'une certaine manière la citoyenneté canadienne.

Le message qui a été envoyé était beaucoup plus fort du côté d'Ottawa, qui dit : Moi, je coupe de 50 % et de 35 %. Quand les gens viennent au Québec... Moi, je suis comme nationaliste, je me dis : Ils viennent au Québec, bien sûr, mais, si je quitte l'Europe ou l'Afrique, dans leur tête, ils arrivent au Canada. Puis le message du gouvernement canadien, c'était : On réduit de 50 % puis de 35 %. Je comprends que ça a eu un impact ici. On veut travailler fort pour aider nos institutions à rétablir le message positif qu'au Québec on est ouverts. Puis on a besoin de cette force-là aussi pour faire de la recherche fondamentale.

Je sais qu'il y a une grande proportion des étudiants de cycles supérieurs qui sont des étudiants étrangers. On pourrait travailler aussi un chantier, ceci dit, pour qu'il y ait davantage de Québécois qui poursuivent leur formation dans les cycles supérieurs. Ce n'est probablement pas normal qu'on ait si peu de Québécois, maîtrise, doctorat, postdoc. Mais je ne lance la pierre à personne. Puis on est capables de... je pense, de revenir à des niveaux qui ressemblaient à ce qu'il y avait avant. Ça ne fait pas 10 ans, là, qu'on a baissé. Ça a été un soubresaut cette année.

• (11 h 30) •

Vous avez parlé du tout nouveau programme, le PSTQ, le Programme de sélection des travailleurs québécois. Le volet 1, qu'on a... il est tout nouveau, ce programme-là, donc il n'y a pas d'historique, il n'y a pas de... on n'a pas beaucoup, par dizaines de milliers, des histoires à succès, des gens qui témoignent de leur parcours de réussite parce qu'il est totalement nouveau. On l'a lancé, là, en juillet, août cette année, mais la... le premier appel de candidatures, il était à 100 %... tout le monde qui a été invité était des diplômés québécois. Ce n'était pas nombreux parce qu'on commence le programme. Mais c'était axé sur ça.

Vous avez raison de dire par contre que ce n'est pas garanti. Ce n'est pas tous les étudiants, peu importe où ils habitent, peu importe la langue qu'ils parlent, peu importe qu'ils soient en histoire de l'art, en marketing ou en soins infirmiers, qu'ils ont automatiquement, avec le PSTQ, le CSQ, le Certificat de sélection du Québec. Mais est-ce que c'est normal de le donner de manière automatique? Est-ce que c'est normal de dire : On a un nombre limité de personnes qu'on peut inviter sur le territoire québécois comme résident permanent, ce n'est pas 60 000 ou 100 000 ou 120 000, on a une capacité d'accueil qui est limitée... Est-ce que c'est normal de dire : Bien, peu importe mes besoins en main-d'œuvre, peu importe que ta formation nous permette de combler un poste, on va t'accueillir, quitte à refuser ensuite des gens qui pourraient combler les postes...


 
 

11 h 30 (version non révisée)

M. Roberge : ...est-ce que ce statu quo là est souhaitable? Bien, moi, je pense que non. Pourquoi pensez-vous que oui?

Mme Dommanget (Flora) : Bien, par rapport à cette partie-ci, nous, ce qu'on considère, c'est que les personnes sont déjà intégrées dans la société. Elles viennent au Québec pour pouvoir étudier. Ça fait plusieurs années qu'elles sont là, elles sont intégrées niveau... socialement, elles travaillent aussi à côté de leurs études, potentiellement. Ça fait que ça veut dire qu'ici elles contribuent activement à la société, elles veulent s'établir, puis nous, ce qu'on leur dit au final, c'est qu'après tant de nombre d'années... comme, par exemple, Anne-Laure, quand ça fait huit ans qu'elle est présente, on lui dit : Bien non, finalement, on ne veut plus que tu sois présente, alors qu'on est allé la chercher. Ça fait que c'est vraiment cette incohérence ici que... nous, on ne trouve pas ça normal. On accepte des personnes sur notre territoire, il faudrait qu'elles puissent pouvoir rester après de façon permanente.

M. Goyette (Loïc) : Oui, puis on est contents de vous entendre dire que vous voulez envoyer un message positif à l'international, comme quoi le Québec, c'est une destination de choix pour étudier. Puis je pense qu'un des messages positifs, puis nous, on le mentionne dans notre mémoire, plusieurs universités aussi, là, le mentionnent, là, ce serait le rétablissement du PEQ à l'international. Plusieurs personnes viennent étudier ici, puis une fois qu'elles font leur vie ici, elles se rendent compte que c'est cool, le Québec, bien, souhaitent rester aussi, puis c'est leur permettre ça, de rétablir le PEQ.

M. Roberge : Je suis d'accord avec vous, c'est pas mal, pas mal cool, le Québec. On peut être fiers des gens qui nous ont précédés, hein, on a reçu ça, une société avec une belle démocratie, prospère, avec un réseau universitaire, hein? C'est la génération de mes parents qui ont fait le rapport Parent, qui ont créé le réseau UQ, qui ont déployé les cégeps, puis on a la responsabilité d'essayer de faire même un petit peu mieux pour laisser à ceux qui nous suivent. Ça fait un Québec très attractif. Beaucoup, beaucoup de personnes d'un peu partout sur la planète veulent venir ici, puis je les comprends, à la fois pour notre art de vivre puis aussi pour la qualité de la formation.

Si on dit qu'on ne revient pas des seuils très bas, le Parti québécois, lui, dit : On part... on est à 120 000 étudiants étrangers, on devrait retourner à 50 000. Le Parti québécois veut réduire de 60 % le nombre d'étudiants étrangers sur le territoire québécois. C'est sûr que, si on fait ça, ce n'est pas ma politique du tout, ce n'est pas la politique de mon gouvernement, bien, après, on peut bien dire : OK, ceux qui sont là peuvent rester comme résidents permanents. On réduit tellement, on réduit notre capacité de recherche, on s'attaque à nos régions, mais on réduit tellement qu'après on peut dire : Ceux qui sont ici peuvent rester.

Mais si on garde un seuil suffisamment élevé, nous, on propose, dans le cahier, 110 000 étudiants étrangers, bien, c'est difficile de dire que tout ce monde-là, automatiquement, devient résident permanent, devient Québécois, devient Canadien. Il y a des gens qui viennent ici et ils repartent. D'ailleurs, ils viennent ici comme... on dit «immigrant temporaire», c'est un permis d'études. Après ça, c'est un permis de travail post-diplôme, puis, après ça, on voit. Est-ce que cette personne-là, réellement, veut rester ici? Je les comprendrais. Est-ce que cette personne-là a réussi son intégration au marché du travail? Est-ce que cette personne-là répond à un secteur qui est en pénurie? Et, si tout ça est vrai, comme on dit, excusez-moi l'anglicisme, on a un match, et là on dit : Bien, formidable, formidable! Mais de dire que c'est garanti avec un niveau élevé, qu'on propose, ça devient un peu difficile.

Vous me parlez de la capacité d'accueil, dans votre mémoire, page 11. Vous critiquez l'usage de la notion de la capacité d'accueil par le gouvernement du Québec, mais le nombre de places dans les universités n'est pas infini. D'ailleurs, les universités et les cégeps nous demandent plus d'argent au Plan québécois d'infrastructures. Les cégeps nous disent : Il faudrait rajouter 50 %. Ils disent : On aurait besoin de rajouter 50 % de plus de locaux de cégeps. C'est des milliards et des milliards. Il y a un taux de chômage qui est plus élevé, particulièrement chez les jeunes, chez vos membres, il y a une difficulté à se loger, la disponibilité de logements est moins grande, puis les loyers sont plus élevés. Est-ce que ce n'est pas ça, la capacité d'accueil, la capacité d'intégrer les gens puis de leur donner une chance de s'établir durablement, de décrocher un emploi, d'avoir un logement décent?

Mme Dommanget (Flora) : Oui. Considérant la capacité d'accueil, c'est sûr qu'en ce moment il n'y a pas de définition claire. Ça fait que c'est sûr qu'on peut jouer sur les mots et savoir un peu, OK, bien, qu'est-ce qui nous arrange en ce moment... OK, on va dire que c'est ça, la capacité d'accueil. Nous, ce qu'on voit, dans le contexte de la crise du logement ou ce genre d'affaires, c'est que c'est vraiment plus contextuel au manque de logements, donc, prix abordables, etc., et que ça repose... il ne faut pas que ça repose ici sur les personnes étudiantes parce que celles-ci se regrouperaient...

Mme Dommanget (Flora) : ...principalement autour des centres universitaires. Tu sais, si on regarde également dans d'autres secteurs où la crise du logement est touchée, par exemple en Gaspésie, on a un taux d'inoccupation de presque 0 % alors qu'il n'y a vraiment pas beaucoup d'immigration. Ça fait qu'attribuer le rôle de l'immigration à toutes les crises en ce moment sociétal au Québec, c'est ça qui n'est pas normal et c'est ce qu'ici ce qu'on déplore. Ça fait qu'il faut vraiment prendre en considération que la population étudiante internationale est vraiment un ajout à la société. Elle contribue activement, elle veut s'établir, veut être intégrée. Ça fait que c'est ça ici, que nous, on appuie.

M. Roberge : Puis je suis content que vous ameniez ça parce qu'il ne faut pas faire une relation de cause à effet. Je ne l'ai pas fait. Certains m'ont mis des mots dans la bouche, comme quoi moi ou mon gouvernement, on disait : C'est la faute aux immigrants, c'est la faute aux étudiants, c'est la faute s'il y a, par exemple, des enjeux de logement. Ce n'est pas... ce n'est pas du tout ce qu'on dit. Par contre, alors qu'on est en période de pénurie de logements, une question d'offre et demande, est-ce... est-ce qu'on veut maintenir tous les temporaires sur le territoire québécois? Là, on parle des étudiants, mais on fait la planification pluriannuelle. Comprenez que, oui, on parle des étudiants, mais moi, j'ai aussi en tête tous les travailleurs étrangers temporaires, les 200 000 personnes qui relèvent du PMI du fédéral, les autres 200 000 personnes qui relèvent, demandeurs d'asile, du fédéral, je regarde tout ça, puis on se dit : Bien, considérant qu'on a un enjeu, par exemple, de logement, est-ce qu'on veut attirer plus de nouvelles personnes sur le territoire avant de construire des logements ou est-ce qu'on ne veut pas régulariser la situation? C'est ça, c'est la question que l'on pose.

Et d'aucune manière je ne dirais : La pénurie de logements est causée par les étudiants ou est causée par les temporaires. Il faut juste se demander... Par contre, si j'invite 10 personnes à souper chez moi puis j'ai huit chaises autour de la table, on a déjà deux personnes debout, c'est gérable, il y en arrive deux autres, on est rendus 14, c'est gérable, on peut faire ça, la question, c'est : Est-ce que j'invite cinq autres personnes? Là, je me dis : Bien là, attendez, on va faire un peu de place, puis après ça on va inviter d'autre monde. C'est ça, la notion de capacité d'accueil. Et d'aucune manière je veux dire que ce seraient les étudiants qui seraient responsables de la pénurie de logements. Mais vous, comme UEQ, vous avez des membres qui ont de la misère à se loger, donc il faut se demander, dans ce contexte-là : Est-ce qu'on stabilise l'effectif étudiant des universités, ce qui est notre proposition, ou est-ce qu'on en ajoute 10 000, 20 000, 30 000 de plus? Je pense que c'est ça qu'on doit avoir comme débat de politique publique, sans blâmer un groupe plutôt qu'un autre.

M. Goyette (Loïc) : Et certainement qu'on a des membres qui vivent activement la crise du logement, là. Puis on a plein de propositions. Je pense que ce n'est pas le cadre des consultations, là, de ces propositions, mais on a plein de propositions qu'on pourrait soumettre à votre gouvernement, si vos collègues le souhaitent, pour solutionner ou, en tout cas, en partie la crise du logement.

Vous avez mentionné le 110 000 personnes étudiantes puis ce serait trop à accueillir de façon permanente au Québec. Là, je pense qu'il y a... Ni à l'UEQ ni aucune autre organisation ne pensent que toutes les personnes étudiantes qui viendraient au Québec souhaiteraient s'établir de façon permanente au Québec. On est loin de ça. Ce n'est pas... ce n'est pas parce qu'il y avait le PEQ qu'il y avait toutes les personnes étudiantes qui venaient au Québec qui souhaitaient rester au Québec. Mais, lorsqu'elles sont au Québec, dans le cadre... lorsqu'elles sont en personnes étudiantes, elles contribuent activement au Québec. On a vu qu'il y a 4,2 milliards de contributions au PIB. Elles contribuent aussi à créer...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : En terminant.

M. Goyette (Loïc) : ...48 000 emplois, pardon.

M. Roberge : ...présentation. Désolé de ne pas pouvoir poursuivre encore avec vous.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci. Vous avez compris? Je suis la gardienne du temps. Donc, quand je dis «en terminant», il reste 10 secondes. M. le député de Pontiac, bienvenue. Vous représentez l'opposition officielle et vous avez une période de 12 minutes 23 secondes.

• (11 h 40) •

M. Fortin :Merci, merci, Mme la Présidente. Bonjour à vous. Merci, merci d'être avec nous. Je vous promets, je vous promets de me rappeler que c'est une consultation, donc vous donner le droit de parole autant que possible. Mais je veux juste revenir sur une chose que le ministre a dit, parce que c'est vrai, là, merci de m'accueillir dans cette commission-là, moi, c'est la première fois que je prends activement part aux travaux de la commission, puis, honnêtement, M. le ministre, je ne comprends pas vos propos. C'est comme si M. le ministre vient de dire : Il y a des gens qui mettent des mots dans la bouche de mon gouvernement, on ne dit jamais que c'est l'immigration qui cause des problèmes de logement ou la crise du logement. Moi, j'ai une citation : «Selon François Legault, — ça, ça date du 11 juin 2024 — "100 %" du problème de logements au Québec s'explique par la hausse de l'immigration temporaire.» 100 %. Alors, comment aujourd'hui vous pouvez être ici, là, puis nous dire : On dit...

M. Fortin : ...nous autres que c'est de la faute de l'immigration. On ne dit jamais ça. 100 % du problème, selon le premier ministre, qui en théorie est votre patron, quand même.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : ...

M. Fortin : Oui, Mme la Présidente, j'apprends à vous connaître, Mme la Présidente. Tout le monde a des règles un peu différentes, mais je m'excuse de devoir faire ce petit rappel au ministre qui est devant moi. Bonjour, comment ça va? Très bien. Alors. La recherche puis l'innovation, là, quand vous parlez de ça, honnêtement, là, vous me rejoignez. Parce que le ministre, tantôt, a dit : Bien, nous, on y croit, à l'importance de la recherche, l'importance de l'innovation, de l'importance d'avoir des cycles supérieurs. On aimerait même qu'il y ait plus de Québécois qui s'investissent dans les... dans les études de cycles supérieurs. C'est comme s'il nous disait : Bien, mes politiques n'affecteront pas, n'affectent pas en ce moment, là, le nombre de gens qui s'investissent dans ces milieux-là. Mais vous avez des préoccupations quand même importantes par rapport à ce qui est proposé et l'impact sur la recherche, sur l'innovation. J'aimerais ça vous entendre peut-être sur ce que vous entrevoyez, sur ce qui s'en vient. Parce qu'on ne peut pas se mettre la tête dans le sable, là, les recteurs d'université viennent ici, Mme D'Amours était ici hier pour nous dire : Faites attention à ça. Il y a un gros problème sur la recherche et l'innovation. J'aimerais ça comprendre votre préoccupation principale autour de ça.

Mme Dommanget (Flora) : De notre côté, nous, ce qu'on voit, c'est qu'il y a à hauteur de 32 % des personnes étudiantes qui sont internationales, donc, dans les cycles supérieurs, ça fait que pour nous, c'est vraiment... c'est vraiment important de pouvoir bien les accompagner dans leur parcours. Ce qu'on voit dans les restrictions avec les quotas, les différents programmes, c'est qu'on ne leur permet pas de pouvoir être... s'établir durablement. Ça fait que, par exemple, quand ils vont devoir faire des demandes de renouvellement parce que leurs... leurs études prennent plus de temps que prévu, bien, elles pourraient se retrouver dans un flou et finalement devoir retourner chez elle parce qu'il y a un problème administratif. Ça fait que, nous, c'est vraiment quelque chose qu'on déplore. Il faut que les personnes qui soient déjà au pays puissent pouvoir continuer à être présentes puis poursuivre leurs études. Ça va vraiment contribuer ici à l'innovation, à la recherche et c'est ce qu'on veut, puisque, bien, en ce moment, ce qu'on voit, c'est que c'est pas mal de la population étudiante internationale qui se retrouve dans nos cycles supérieurs.

M. Fortin : Sur la question des renouvellements, là, parce que vous y avez touché, là, dans votre... dans votre réponse, pouvez-vous me dire concrètement ce qui arrive, là? Quelqu'un qui, par exemple, fait face à un obstacle comme celui-là, là, doit renouveler son CAQ. Tantôt, vous avez dit que ça peut causer des retards dans les études, que c'est un fardeau administratif important, puis on le sait que ce n'est pas facile... Pas facile faire affaire avec le gouvernement du Québec pour des choses qui sont simples d'habitude, là. Alors, je n'ose même pas penser un renouvellement de CAQ ce que ça peut représenter pour quelqu'un qui a souvent la tête ailleurs, c'est-à-dire survivre financièrement, sur réussir des études, sur bonifier, améliorer son français, peut-être, peu importe, là. Qu'est-ce que... qu'est-ce que ça... Qu'est-ce qui arrive à quelqu'un qui, en cours d'études, doit renouveler son CAQ?

M. Goyette (Loïc) : Oui, bien, premièrement, là, plusieurs personnes étudiantes, que ce soit québécoises, internationales ou qui proviennent du Canada, là, prennent plus de temps dans leurs études que ce qui est imparti normalement pour le diplôme en question. Donc, lorsqu'une personne étudiante internationale fait ça, elle doit renouveler son CAQ, son certificat d'acceptation du Québec et par la suite son permis d'études. En ce moment, il y a des quotas qui sont... qui sont mis aux universités puis les renouvellements rentrent dans ces quotas-là.

Nous, notre crainte, c'est qu'une université qui arriverait proche de son quota ou par mauvaise gestion des quotas, étant donné aussi le moment où les universités reçoivent les quotas dans le cycle académique, elles ne soient pas capables de prévoir suffisamment de quotas... de quotas de côté puis doivent refuser des personnes, là, qui seraient en renouvellement de CAQ puis finissent leur parcours plus tôt que prévu. Puis ils doivent retourner dans leur pays sans avoir de diplôme avec plusieurs milliers d'argent investis dans des droits de scolarité au Québec sans diplôme.

M. Fortin : OK, c'est des gens qui retourneraient dans leur pays, là. Ce n'est même pas des gens qui temporairement devraient mettre leurs études de côté, faire... rester ici en attendant que ça se... que ça se replace, là, ou qu'ils obtiennent leur renouvellement, c'est des gens qui carrément retourneraient dans leur pays avec un diplôme à moitié terminé.

M. Goyette (Loïc) : Bien, c'est sûr qu'à ce moment-là, ces gens-là sont sur le territoire en tant qu'étudiant, en tant que personne étudiante. Si elles ne sont plus étudiantes, bien, vont devoir retourner. Après ça, est-ce qu'elles vont pouvoir revenir? Certainement qu'il y a des personnes, là, qui vont trouver des moyens de réavoir un permis par la suite, mais en retardant leur processus académique de plusieurs sessions...

M. Goyette (Loïc) : ...de plusieurs années, puis tout ça, ça apporte un stress et une anxiété importante, là, comme vous pouvez l'imaginer.

M. Fortin :OK. Je nous encourage collectivement à penser si c'est vraiment ça qu'on veut, là. Est-ce que c'est vraiment le genre de situation qu'on veut créer au Québec où quelqu'un qui obtient, là, un CAQ, donc qui est accepté vient ici, fait une partie de ses études pour une raison x, y, z, que vous mentionnez, là, vous en avez plusieurs des exemples, il doit faire un renouvellement puis là se retrouve à devoir quitter le pays temporairement pour après ça, peut-être un jour, revenir s'il obtient son renouvellement de CAQ. Est-ce que c'est vraiment l'expérience québécoise qu'on veut offrir? Est-ce que c'est vraiment ce qu'on veut comme... comme société d'accueil pour ces... pour ces gens-là?

Sur la question du... Je reste sur la question du renouvellement, là, quelques instants, là, vous en avez fait état dans votre mémoire, puis je trouve que ce serait... Ce serait faire erreur de passer à côté, là. La question des gens qui étudient au cycle supérieur et qui, pour une raison ou une autre, ils doivent changer d'établissement universitaire. Vous faites état de la situation où, par exemple, un directeur de recherche serait harcelant envers l'étudiant. On doit changer d'établissement de recherche. C'est ce qui arrive souvent quand on parle de directeur d'établissement d'études, quand on perd notre directeur de recherche. Cette personne-là qui aurait dénoncé une situation de harcèlement se retrouverait potentiellement, vraisemblablement, à refaire un renouvellement de CAQ, avec tous les impacts que vous venez dire, c'est-à-dire possible retour dans son pays, etc. Est-ce que c'est des situations que vous avez vues, entendues ou vous pensez que les gens ne seraient même pas... les gens se garderaient de dénoncer le harcèlement par peur de se retrouver dans cette situation-là?

Mme Dommanget (Flora) : Nous, c'est clairement une crainte qu'on voit spécifiquement. Et ça rajoute une pression supplémentaire sur la personne étudiante. Est-ce que je me lance dans un tel risque? Est-ce que ça veut dire que je vais devoir... Est-ce que changer d'établissement, ça veut dire, donc, devoir refaire tous ces documents parce que, bien, ce n'est pas pris en considération, ce qui fait qu'une personne qui vit une situation va devoir se questionner sur, tu sais, la critique qu'elle se fait mettre sur les épaules ou bien juste devoir repartir dans son pays? Ça fait que c'est vraiment juste subir pendant ses études, alors que, là, on pourrait juste la soulager de cette charge-ci puis lui dire : OK, tu vas pouvoir faire le processus de plainte, etc., pouvoir également changer d'établissement parce qu'on s'entend, avoir un directeur, une directrice de recherche dans un domaine spécifique, bien, il va falloir changer d'établissement pour pouvoir retrouver cette même spécificité. Ça fait que c'est sûr que ça rajoute une charge supplémentaire sur le choix de la personne étudiante, et c'est ce que, nous, on demande d'enlever.

M. Fortin :OK. Bien là... Encore là, je nous encourage collectivement à garder ça en tête. Moi, je lève mon chapeau sur certaines des avancées en matière de harcèlement qui ont été faites au cours des dernières années, mais ce serait... ce serait douloureux, je crois, de laisser une clause comme celle-là qui pourrait faire en sorte que des gens se retrouvent à ne pas dénoncer une situation de harcèlement, là. Collectivement, c'est... c'est notre devoir de s'assurer que les gens ont toutes les opportunités et ils ne sont pas pénalisés s'ils font une démarche comme celle-là.

Sur le PRTQ, je veux juste bien vous comprendre, là, et encore là, je ne suis pas un expert en la matière, mais tantôt vous avez parlé, si je me... si je me souviens bien, de la Belgique, de la Suisse et de la France je crois, là, où les diplômes sont... sont reconnus, mais tous les autres pays francophones qui ne le sont pas. Alors, qu'est-ce qu'il se passe dans une situation où on a un étudiant qui, par exemple, dans sa... dans ce programme-là, vient de la Tunisie et n'a pas son diplôme reconnu à la même... de la même façon que quelqu'un qui viendrait de la Suisse, par exemple? Est-ce que vous pouvez m'expliquer la démarche et le délai que ça cause, cette non-reconnaissance immédiate?

• (11 h 50) •

M. Goyette (Loïc) : Oui. Bien, ces personnes-là vont devoir faire un test de français, là, pour... puis prouver leur... prouver leurs... leurs capacités en français. Ces tests-là sont souvent très onéreux. C'est encore une fois des démarches supplémentaires qui doivent être faites. Surtout quand on sait que ces gens-là proviennent de pays francophones, ont étudié en français. Donc, a priori, on peut supposer que quand tu as un diplôme qui a été fait en français, tu parles français. Puis il y a plein de pays qui, on le sait, là, il y a plus de personnes francophones au Maroc, par exemple, qu'en Suisse, là. Donc, nous, on trouve ça aberrant que certains pays francophones soient reconnus dans... certains diplômes de certains pays francophones sont reconnus dans ce cadre-là puis pas d'autres. Je tiens à rappeler quand même, là, que nous, notre demande principale, là, c'est le retour du PEQ. On trouve que le PRTQ n'est pas forcément adapté aux besoins et aux réalités des personnes étudiantes. Donc, notre demande principale, c'est le retour du PEQ.

M. Fortin : Très bien. Je pense qu'il me reste à peu près deux minutes, Mme la Présidente. Puis vu que c'est le temps du Parti québécois, je vais en profiter. Le Parti québécois propose de réduire le nombre d'étudiants étrangers...

M. Fortin :...à 50 000. Vous en pensez quoi?

Mme Dommanget (Flora) : Nous, on trouve que c'est complètement aberrant en ce moment, considérant que la plupart de notre financement à l'université dépend de ce genre de personnes, et notre économie québécoise aussi en dépend. Ça fait que c'est sûr que, nous, ce que... ce qu'on veut, c'est que ces personnes puissent s'établir de façon permanente, puissent... puissent être vraiment bien accueillies au Québec.

M. Fortin :Très bien. Et je vous remercie de votre... de votre présence, de votre apport aujourd'hui. Et je m'excuse pour ma petite intrusion dans le monde parallèle du ministre, tantôt, mais c'était difficile de passer à côté de quelque chose qui... qui est si peu ancré dans la réalité des propos de sa formation politique. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Maintenant, on en est rendus à... au deuxième groupe d'opposition, et vous avez quatre minutes 58 secondes, étant donné que le temps n'a pas été tout pris par l'opposition officielle. Le micro est à bout.

M. Fontecilla : Merci, Mme la Présidente. Bonjour. Merci beaucoup d'être ici.

Écoutez, à votre recommandation huit, vous proposez que la cible de 45 000 personnes immigrantes admises par année au titre de résident permanent soit privilégiée. Donc, c'est la... c'est la fourchette supérieure, là. Ce qu'on... Ce qu'on peut comprendre de votre position, c'est que ça... évidemment, en premier lieu, ça favorise la population étudiante, cette cible-là. Mais, de façon plus générale, c'est que vous considérez que le Québec a besoin de davantage d'étudiants et étudiantes internationaux, des travailleurs qui viennent d'ailleurs, une population en général, et que, pour vous, la question de dépassement des seuils de la capacité d'accueil ne joue pas tellement dans ce... dans ces calculs-là. Est-ce que je vois... Est-ce que je vise juste?

M. Goyette (Loïc) : Bien, notre 45 000, on l'a pris... notre... comme... comme je l'ai dit quand même à quelques reprises, là, notre demande principale, c'est le retour du PEQ. Le PEQ était hors cible. Donc, dans... s'il y a une cible, nous, on privilégierait, là, 45 000. Mais on reste à penser que la meilleure solution pour les personnes étudiantes internationales, c'est le rétablissement du PEQ. Le 45 000, on l'a choisi, là puis on a évolué dans le cadre du cahier de consultation qui a été proposé dans le cadre des consultations. Le 45 000 était la cible la plus élevée. On pense que ça donnerait, là, plus de chances aux personnes étudiantes internationales de pouvoir contribuer au Québec. Rappelons-le, là, ces personnes-là sont déjà intégrées au Québec, ils sont, la plupart, francisés, ont déjà un cercle d'amis qui a été fait ici, là. Donc, on pense que la plus... la cible la plus élevée permettrait aux personnes étudiantes internationales de pouvoir contribuer par la suite, là, au Québec.

M. Fontecilla : Est-ce qu'on a les moyens de les accueillir?

M. Goyette (Loïc) : ...la capacité d'accueil, là, nous, c'est un concept qu'on trouve flou, qui n'est pas basé sur des données probantes ou en tout cas pas des données probantes sur lesquelles on a pu évaluer ce concept de capacité d'accueil. Donc, on n'est pas en mesure de déterminer c'est quoi, la capacité d'accueil. Puis on critique l'utilisation de ce concept-là sans... sans réellement l'expliquer puis le définir exactement, ça veut dire quoi, capacité d'accueil.

Mme Dommanget (Flora) : Nous, ce qu'on considère ici, c'est qu'il faut vraiment prendre en considération que, venir diminuer le nombre de personnes étudiantes au Québec, ça va avoir des impacts sur le financement, sur l'ensemble de la société. Ça fait que c'est ça, ici, que, nous, on veut que ce soit pris en considération quand on regarde les cibles qui doivent être établies.

M. Fontecilla : Le ministre mentionnait tantôt la question très précisément du logement, comme quoi vos étudiants n'ont pas les moyens de se loger, et donc qu'il faudrait fermer le robinet, en quelque... en quelque sorte. Vous avez dit que vous avez d'autres propositions. Vous... Par ailleurs, là, vous avez des propositions concernant le logement. J'aimerais vous entendre. Qu'est-ce... Quelles sont vos propositions? Ça m'intéresse.

Mme Dommanget (Flora) : Oui. Nous, ce qu'on encourage, dans le cadre plus logement, là, c'est sûr qu'on s'écarte un peu de... de la commission immigration, mais ce serait...

M. Fontecilla : Non. Excusez-moi. On ne s'écarte pas tout à fait parce qu'on ramène constamment la question du logement à la... aux seuils d'immigration, là. Donc, on est dans le vif du sujet, là. Logement et immigration aujourd'hui sont étroitement reliés dans la tête du gouvernement, là, et du ministre.

Mme Dommanget (Flora) : Oui. C'est sûr que, nous, on les dissocie, pour le coup. Parce que, comme on le voit, la crise du logement touche l'ensemble du territoire, et il n'y a pas forcément de... beaucoup d'immigration qui peuvent se retrouver dans ces zones-là. On le voit notamment en Gaspésie, où il y a la crise du logement qui est bien présente, et pourtant, bien, il n'y a pas beaucoup de personnes immigrantes qui sont dans ces territoires-ci.

Ça fait que nous, ce qu'on encourage, c'est vraiment la... plus de construction pour pouvoir réduire la crise du logement, également avoir quelque chose qui favorise le contrôle des loyers. Ça fait que nous, c'est vraiment dans cette optique-là qu'on le voit. Puis on le dissocie vraiment de l'immigration, parce que, pour nous, c'est aberrant d'associer les deux.

M. Fontecilla : Donc, c'est... c'est deux problématiques qui n'ont pas... qui n'ont pas à être reliées ensemble, comme c'est souvent fait dans le discours politique actuel.

Mme Dommanget (Flora) : C'est ça. Pour nous, on voit que c'est un sujet beaucoup plus large, la crise du logement, et que ça ne touche pas la... ça ne touche pas seulement la population...

Mme Dommanget (Flora) : ...sont étudiantes internationales, ça fait que c'est pour ça qu'on les dissocie ici.

M. Fontecilla : Très bien. Je n'ai pas d'autre question, Mme.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Alors, si c'est terminé, je vous remercie pour votre présence en commission. Vos propos ont été accueillis par l'ensemble des parlementaires. Alors, je vous souhaite une bonne fin de journée.

Et je vais suspendre la commission quelques instants, le temps de recevoir le prochain groupe. Merci.

(Suspension de la séance à 11 h 56)

(Reprise à 12 heures)

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Donc, pour les prochaines minutes, nous recevons les représentantes d'Éducation internationale. Alors, mesdames, bienvenue à la Commission des relations avec les citoyens. Vous allez avoir une période de 10 minutes pour vous présenter et... et par la suite... voyons, exprimer vos commentaires sur le cahier, je m'excuse, j'avais autre chose en tête, et nous allons ensuite discuter avec les parlementaires. Alors, le micro est d'ores et déjà à vous.

Mme van der Knaap (Lysiane) : Bonjour, Lysiane van der Knaap, je suis directrice générale d'Éducation internationale. Je suis accompagnée de...

Mme Bolduc (Véronique) : Véronique Bolduc, directrice services éducatifs en formation professionnelle, éducation aux adultes et services aux entreprises au Centre de services scolaire des navigateurs.

Mme Bergeron (Gabrielle) : Et Gabrielle Bergeron, je suis conseillère réglementée en immigration pour les étudiants étrangers chez Éducation internationale.

Mme van der Knaap (Lysiane) : Mme la Présidente, M. le ministre, Mmes et MM. les députés, merci de nous recevoir. Éducation internationale, c'est une...


 
 

12 h (version non révisée)

Mme van der Knaap (Lysiane) : ...coopérative du réseau scolaire. À travers son service Québec métiers d'avenir la coopérative à développer une expertise en matière de recrutement et d'accompagnement d'étudiants internationaux qui ont pour projet de poursuivre des études dans un centre de formation professionnelle publique du Québec. Nous offrons aussi de l'expertise-conseil au réseau scolaire au sujet des règles d'immigration qui concernent les étudiants internationaux. Les étudiants étrangers diplômés de nos programmes francophones nous apparaissent comme des candidats idéaux. Étant donné que ces personnes possèdent un diplôme québécois, qu'elles sont jeunes et qu'elles vivent déjà ici en français depuis plusieurs années, elles constituent un bassin exceptionnel où recruter des nouveaux Québécois. Ces mots ne sont pas les miens, ce sont ceux de François Legault dans son mot d'introduction du cahier de consultation publique pour la planification de l'immigration 2023-2026. Le rapport du commissaire à la langue française, qui a été publié le 8 octobre dernier, vient appuyer cette position. Il souligne que les étudiants internationaux francophones représentent une opportunité stratégique pour le Québec, notamment en raison de leur intégration linguistique et sociale déjà amorcée. Pourtant, malgré cette reconnaissance du rôle stratégique des étudiants étrangers, des mesures restrictives en immigration ont été imposées au cours de la dernière année, tant par Québec que par Ottawa, ce qui affecte lourdement et de façon disproportionnée, j'insiste, la formation professionnelle par rapport aux autres formes d'enseignement.

À la fin du mois de septembre 2025, on a réalisé un sondage auprès des centres de formation professionnelle pour connaître l'impact des mesures sur leur capacité à attirer des étudiants étrangers. 55 représentants issus de 39 centres de services scolaires, commissions scolaires qui représentent l'ensemble des régions du Québec, ont répondu. 65 % des personnes sondées observent une baisse de 25 % ou plus à la rentrée 2025 par rapport à 2024. Pour 44 % des... des répondants, c'est une baisse de plus de 50 %. Et à l'hiver 2026, le portrait est encore plus sombre.

Pourquoi ça devrait nous inquiéter? On a 20 établissements parmi nos répondants qui nous rapportent de devoir annuler ou reporter 77 cohortes au cours de l'année scolaire. Pour l'ensemble du Québec, ce nombre est certainement encore plus élevé. Les cohortes qui sont annulées ou reportées, c'est des cohortes d'élèves québécois pour lequel le nombre d'élèves inscrits est trop faible pour démarrer. Donc, les élèves québécois en sont victimes aussi. Ils voient rompre leur parcours de formation, ce qui affecte leur employabilité.

Aussi, ce qui devrait nous inquiéter, c'est que les diplômés de la formation professionnelle, ils occupent des emplois essentiels à la vitalité économique de toutes nos régions. Les données disponibles parlent d'elles-mêmes. L'état d'équilibre du marché du travail qui est publié par le gouvernement du Québec nous renseigne à l'effet que 80 % des programmes de formation professionnelle sont... sont identifiés comme menant à des métiers qui sont en léger déficit ou en déficit de main-d'œuvre. Considérons également qu'il y a un nombre important de professions qui sont les plus touchées par les pénuries persistantes de main-d'œuvre qui relèvent directement de la formation professionnelle : préposés aux bénéficiaires, machinistes, soudeurs, les 32 métiers de la construction qui relèvent de la CCQ, les cuisiniers.

Dans notre sondage, les centres de formation professionnelle nous ont nommés des programmes sont fragilisés par les mesures restrictives en immigration. J'en nomme quelques-uns : cuisine, préposés aux bénéficiaires, électromécanique, mécanique de machine fixe, usinage, soudage, ferblanterie, arpentage, mécanique de véhicules lourds routiers. J'attire votre attention sur les deux derniers programmes que j'ai mentionnés : arpentage et mécanique de véhicules lourds routiers. Le 21 août dernier, le ministre de l'Éducation et la ministre de l'Emploi, qui était en poste à ce moment, en collaboration avec Hydro-Québec, ont annoncé des investissements de 250 millions de dollars pour soutenir la formation professionnelle dans des métiers qui sont jugés prioritaires pour la transition énergétique du Québec, notamment arpentage et mécanique de véhicules lourds routiers. Cette initiative vise à répondre aux besoins de main-d'œuvre qualifiée dans le cadre de projets structurants pour le Québec. Or, le bassin d'élèves québécois ne suffit pas à combler les cohortes dans ces programmes. Alors que fera Hydro-Québec quand il va chercher à embaucher un nombre suffisant de travailleurs qualifiés mais que la main-d'œuvre ne sera tout simplement pas disponible dans le nombre désiré? Une révision des critères d'admissibilité aux permis de travail postdiplôme pour les programmes ciblés serait une réponse cohérente et stratégique à ce paradoxe. Il s'agit d'un exemple, mais il en existe plusieurs autres où nous voyons une incohérence entre les priorités projets du Québec puis les barrières qu'on se met dans les roues pour attirer des talents en formation professionnelle.

On a entendu à maintes reprises l'ancien ministre de l'Éducation, M. Bernard Drainville, valoriser la formation professionnelle. Dans un discours qu'il a prononcé le 16 avril dernier à Alma, il affirmait : Je le dis souvent, chaque diplôme compte. Regardez autour de vous. Quel serait notre quotidien sans les personnes des métiers, sans les électriciens, les mécaniciens, les cuisiniers, les soudeurs? Ces métiers sont indispensables, et on doit leur donner toute la valeur qu'ils méritent. Je crois énormément au potentiel de la formation professionnelle. Ceci mène à des métiers stimulants, bien rémunérés...

Mme van der Knaap (Lysiane) : ...et concrets qui ont une grande utilité sociale. M. Drainville a raison, la formation professionnelle est un pilier du système éducatif québécois. Elle offre des formations pratiques et adaptées au marché du travail. La formation professionnelle, elle existe pour répondre aux besoins de main-d'œuvre pour des métiers spécialisés. Elle joue donc un rôle fondamental dans la vitalité économique de toutes nos régions.      Présentement, les gouvernements du Québec et du Canada étouffent la capacité des centres de formation professionnelle à attirer des élèves internationaux, essentiels au besoin de main-d'œuvre et au maintien d'une expertise dans les centres de formation professionnelle. Il faut savoir que 12 % des répondants à notre sondage ont mentionné avoir commencé à effectuer une réduction de personnel devant la baisse des inscriptions des internationaux. Nous sommes ici aujourd'hui et plaidons pour une reconnaissance pleine et entière de la formation professionnelle comme levier prioritaire de développement économique, régional et linguistique dans le présent exercice de planification de l'immigration.

On a formulé 18 recommandations dans notre mémoire, mais je vous en présente ici mes trois principales, nos trois principales. Les quotas d'émissions de CAQ imposés aux centres de services scolaires et commissions scolaires devraient l'être en fonction des programmes et régions, tel que le prévoit la Loi visant à encadrer les étudiants étrangers, et non pas seulement une formule paramétrique qui est contraire à l'essence même de la loi. Le réseau public a été pénalisé pour des pratiques qui ont été observées dans un réseau qui n'est pas le nôtre. On est réalistes, on pense que les quotas vont demeurer. Donc, on ne demande pas d'exempter complètement notre ordre d'enseignement comme le font d'autres acteurs du système de l'enseignement du Québec. Cependant, il est essentiel, premièrement, de protéger les programmes qui mènent à des métiers en pénurie ou à forts besoins et ensuite intégrer une variable liée à la réalité des régions, en considérant notamment le taux de chômage local, le maintien d'une expertise régionale, les secteurs de développement économique et le besoin de main-d'œuvre qui s'y rattachent. Deuxième recommandation. Bien qu'il s'agisse d'une mesure fédérale, il est important pour les décideurs du Québec de considérer l'impact significatif des restrictions liées au permis de travail post-diplôme, le PTPD, et qui concerne spécifiquement la formation professionnelle. C'est la mesure qui affecte le plus le réseau des centres de formation professionnelle public présentement, selon notre sondage. En vertu d'un critère d'admissibilité qui est basé sur le domaine d'étude qui est mis en œuvre depuis le 1ᵉʳ novembre 2024, il demeure qu'il y a 55 programmes qui sont admissibles alors qu'il y en avait 142 précédemment. Et on a su à travers IRCC que, début 2026, cette liste pourrait être réduite à 35 programmes. Puis, parmi les programmes qui sont admissibles, on compte 41 programmes qui mènent à des métiers qui sont en déficit de main-d'oeuvre ou pour lequel il y a des besoins appréhendés de main-d'œuvre dans les années à venir.

Je vous nomme ici quelques exemples de programmes qui sont admissibles puis j'ai choisi ceux qui sont identifiés comme étant prioritaires par le gouvernement du Québec. Conduite de procédés de traitement de l'eau, extraction de minerais, installation et entretien de systèmes de sécurité, mécanique automobile, mécanique de véhicules lourds routiers. Ce qu'on nous dit à IRCC, c'est que la mesure restrictive du PTPD a été décidée en fonction de données disponibles sur le marché du travail. Pourtant, l'ensemble des diplômes universitaires sont admissibles au PTPD. Difficile de croire que l'ensemble des programmes universitaires affichent des taux de placement supérieurs à des programmes de formation professionnelle, comme préposés aux bénéficiaires ou mécaniciens. On permet... Nous permettons de noter une grande incohérence entre le discours et la mise en application de la mesure qui se fait une fois de plus au détriment de la formation professionnelle.

À Ottawa, aucune demande d'assouplissement à l'admissibilité au PTPD pour des programmes de formation professionnelle n'aurait été formulée par Québec. On pense qu'il est dans l'intérêt du Québec de le faire.

Et finalement, comme bien d'autres témoins dans cette commission, on demande de la prévisibilité dans les mesures. Les étudiants étrangers et les établissements pourront ainsi se fier aux paramètres en place plutôt que de naviguer dans un climat incertain et qui crée de multiples enjeux, au premier chef, des drames humains. Merci de votre écoute.

• (12 h 10) •

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup pour cette présentation. On entame donc les discussions avec le ministre de la banquette gouvernementale pour une période de 16 min 30 s.

M. Roberge : Merci bien. Merci pour votre présentation très documentée sur ce qui se passe en ce moment, là, tout de suite dans nos centres de formation professionnelle, dans nos centres de services scolaires. La baisse d'inscriptions des étudiants internationaux ou étrangers, c'est cet automne-ci. Est-ce qu'on avait connu des baisses aussi dans les années précédentes ou c'est réellement là, là?

Mme van der Knaap (Lysiane) : C'est maintenant, la baisse, c'est vraiment à la rentrée. Je ne sais pas si Navigateurs...

Mme Bolduc (Véronique) : Oui. Actuellement, ce qu'on ressent, c'est qu'avec les différents changements, actuellement, juste pour notre centre de services, on a 50 % de moins au niveau des inscriptions. Donc, les changements ont entraîné des gens à changer leur projet de vie, mais aussi, c'est tout ce qui est accompagnement administratif actuellement dans le secteur qui doit être revu en continuité. Donc, on le sent vraiment. Et notre préoccupation, c'est la suite...

Mme Bolduc (Véronique) : ...parce qu'actuellement on voit 50 % dans notre... mais je sais que mes collègues qui sont dans la région... exactement la même situation, et on prévoit une baisse encore plus grande dans les prochaines... prochains mois, parce qu'on est toujours en prévision, là, au niveau de nos admissions actuellement.

M. Roberge : Puis, en nombre absolu, parce qu'en pourcentage, c'est beaucoup, mais à l'échelle du Québec, si on regarde, supposons, combien de personnes s'inscrivaient en septembre 2024 versus combien de personnes en septembre 2025, on parle de combien de personnes de moins?

Mme van der Knaap (Lysiane) : On n'a pas préparé le chiffre absolu, là, tu sais, il y avait des statistiques dans le cahier de consultation publique, là. Donc, on voit... Puis là c'est sûr que ces chiffres-là sont balancés aussi fortement dans le réseau privé qui en accueillait beaucoup aussi. Donc, tu sais, nous, on a essayé de faire une extrapolation puis on s'est dit Bien, dans le réseau public, en 2023, il y en avait à peu près 6 000, 7 000, 7 % de l'effectif étudiant, hein, pour l'ensemble des étudiants étrangers quand on compare aussi au cycle d'enseignement supérieur. Puis, en 2024, ça aurait été à peu près 10 000. Donc là, si on parle d'une réduction de 25 % à 50 %, bien, en tout cas, je vous laisse faire le calcul. On n'a pas cette donnée-là, la donnée au niveau de l'éducation est plus difficile à aller chercher de façon spécifique qu'au niveau de l'enseignement supérieur, mais...

M. Roberge : À 'échelle du Québec, c'est quelques milliers de personnes, mais vous dites : Attention, attention, on est dans des secteurs clés, on est dans des secteurs d'avenir, notamment, pour... quand on pense à ce qu'on veut faire avec Hydro-Québec. Et c'est dans des secteurs où les gens se placent et trouvent un emploi, puis vous n'avez pas pris à partie le réseau universitaire, vous avez simplement dit : Écoutez, si on regardait PEQ pour PEQ, dans le système qui est actuellement suspendu, il y avait une espèce d'automatisme dans le réseau universitaire. Puis vous dites : Nous, on ne l'avait pas. Or, ce n'est pas tous les programmes universitaires qui ont un taux de placement de 100 %. Peut-être pas tous les programmes qui ont un taux de placement 100 % FP non plus, mais c'est un taux qui est élevé.

Et vous avez dit : Ce qui a eu le plus gros impact, c'est le fait que le gouvernement fédéral a revu l'attribution du permis de travail postdiplôme, c'est-à-dire... parce qu'il a des personnes qui viennent ici suivre un cours de, on va dire — c'est tout le temps l'exemple qu'on sort, mais peu importe — s'ils savent qu'il y a un permis de travail postdiplôme, donc, ils vont vouloir travailler ici, et donc gagner un revenu, et donc, peut-être, pouvoir rester. Ils vont s'inscrire. Et, s'ils ne savent pas qu'il y a le permis de travail, ils ne viendront pas. Et quand est-ce que ce changement là du fédéral est arrivé exactement dans votre réseau puis que ça a eu un impact?

Mme van der Knaap (Lysiane) : La mesure est en vigueur depuis le 1er novembre 2024. Puis donc là, ça... puis ça, c'était pour les demandes de permis d'études, si je ne me trompe pas. Donc, c'est maintenant, là, tu sais, qu'on voit l'impact. Parce que ceux qui l'avaient demandé avant, ils n'ont pas eu d'impact. Donc, ça prend quand même neuf, 10, 12 mois avant qu'ils arrivent. Donc, c'est à la rentrée 2025 qu'on voit l'impact de façon majeure, puis même pour les programmes qui sont encore admissibles, là. Le candidat international, lui, dit : Les gouvernements jouent au yoyo, là. Tu sais, je ne sais pas, dans un an, si mon programme va être encore admissible ou le temps que j'applique à mon permis d'études, est-ce qu'il va avoir une autre liste de programmes qui vont être sortis? Ça fait que, pour des programmes qui sont encore admissibles au PTPD, on voit une baisse.

M. Roberge : OK. L'an passé, vous êtes venus en commission, on a parlé de la Loi qui vise à mieux encadrer les étudiants étrangers. Suite à ça, il y a eu une analyse et puis on a choisi d'épargner le réseau de formation professionnelle des centres de services scolaires. On avait donné, en 2024, 16 357 CAQ, puis, en 2025, 17 446, donc, même 1 000 de plus pour corriger les ajustements. Donc, il n'y a pas eu d'intention de réduction, d'aucune manière, de la part du gouvernement. Il n'y a pas centre de FP qui dit : Mon Dieu, pourquoi on m'a coupé 20 %, 30 % de mes CAQ? Pourquoi ils m'ont coupé ça? Ce n'est pas ça qui est arrivé. Il y a eu une discussion autour du nombre de personnes souhaité. Ça se peut que cette discussion a inquiété certains groupes, hein, c'est un peu comme à la bourse, des fois, les gens s'emballent. Ils ont des craintes que la bourse plante; ils sont enthousiasmes, la bourse monte, alors que, dans le réel de l'usine, il ne s'est rien passé. Ça se peut que la discussion, la simple discussion, sur les seuils, ait amené des gens inquiets à l'international, c'est possible. Les gens qui ont dit : Je ne suis pas certain. Mais là on veut donner de la prévisibilité...

M. Roberge : ...puis de la certitude pour l'année qui vient. C'est l'objectif de la planification pluriannuelle de se donner des cibles, puis de s'enligner. Il y a des gens... on se parle entre nous, mais il y a des gens qui nous écoutent. Je peux vous dire que, de l'an passé à cette année, on a donné plus de CAQ pour notre réseau public en FP. On n'a pas l'intention de réduire, d'aucune manière... on est très, très conscients des pénuries de main-d'œuvre qui vont dans cette direction-là. Donc, ce qui a changé, c'est beaucoup, si je ne m'abuse, le permis de travail du fédéral puis les restrictions pour les travailleurs étrangers temporaires. Est-ce qu'il y a des gens qui passaient de la FP au TET, au travail... travailleurs étrangers temporaires ensuite?

Mme van der Knaap (Lysiane) : Sur cette question précise, là, je vais laisser ma collègue répondre, là, passer de la FP à TET. Mais, juste avant, je veux juste vous dire, l'année dernière, on n'a pas été invités en commission quand il y a eu l'étude sur la loi. On avait trouvé un peu dommage que la formation professionnelle ne puisse pas être représentée, alors qu'il y avait des représentants des cégeps et d'universités.

Ensuite, de dire... oui, vous avez raison, c'est vraiment la mesure du PTPD qui nous fait mal. Les quotas de CAQ, on n'arrive pas à les remplir parce que les étudiants n'arrivent pas assez, puis ça, on l'a quand même nommé aussi dans notre mémoire, là, c'est ce qui nous fait le plus mal, puis c'est ce que nous révèle notre sondage. Ceci dit, je voudrais quand même dire qu'il y a sept centres de services scolaires qui ont 22, au total, de quotas, c'est très bas. Il y en avait qui commençaient des initiatives d'aller recruter des étudiants étrangers, parce qu'il manque d'élèves dans des programmes pour lesquels il y a des besoins de main-d'œuvre, les employeurs leur disent. Le marché du travail est dynamique, hein, il change quand même assez... il peut changer assez vite.

J'ai entendu un centre de services scolaire sur la... une commission scolaire sur la... en Gaspésie qui disait : Soutien informatique, les employeurs m'appellent, je n'en ai pas, puis là mon quota, il est zéro. Donc, tu sais, il n'est pas distribué non plus de façon à prendre en considération les besoins régionaux, là, ce qu'on déplore quand même un peu, là. Puis le réseau public a hérité de 55 % des quotas de CAQ, pour 174 centres de formation professionnelle, alors que le privé en a 45 %, pour 35 établissements. Donc, on trouve qu'il pourrait y avoir un balancier un peu plus équitable, là, en termes de mission des centres de formation professionnelle.

M. Roberge : Je veux préciser qu'on est ouverts à des... à des aménagements, justement, pour des créations de nouveaux programmes, parce qu'il y a des besoins qui changent puis préciser que, l'an passé, par rapport à cette année, le réseau public a eu une augmentation du nombre de CAQ, donc de quotas, tandis que le réseau privé a eu une baisse de 35 %. Donc, il y a eu quand même un traitement privilégié pour le réseau public, définitivement. Et là on me fait signe, j'ai des collègues qui veulent poursuivre l'échange avec vous. Merci, Mme la Présidente. Merci pour votre présentation, je vais vous laisser poursuivre avec les collègues.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci, M. le ministre. Alors, j'ai la députée de Vimont qui a quelques questions. Il reste encore 7 min 39 s.

Mme Schmaltz : Parfait. Merci, Mme la Présidente. Merci, Mesdames, d'être là, d'être présentes, toujours apprécié. Deuxième recommandation. Dans la deuxième recommandation, vous proposez de bonifier les voies d'accès à la résidence permanente pour les personnes diplômées de formations de courte durée qui ne sont pas... qui ne sont pas admissibles au permis de travail postdiplôme, donc le fameux PTPD dont on parle... dont vous parliez tout à l'heure. Peut-être... Bien, je pense que vous le savez, sinon, il faut quand même que vous sachiez qu'on a mis en œuvre le Programme de sélection des travailleurs qualifiés, le PSTQ, dans le volet II, qui est Compétences intermédiaires et manuelles, du PSTQ, dans lequel les personnes qui ont obtenu un diplôme d'une formation de courte durée au Québec, qui ont acquis une expérience en dehors, peuvent être invitées ou sélectionnées. Est-ce que ça, vous le saviez, cet aspect-là?

Une voix : Oui.

• (12 h 20) •

Mme Schmaltz : Oui? OK, parfait. De plus, bon, on le sait, on l'a mentionné tantôt que tout ce qui était conditions d'admission au PTPD, qui est géré par Immigration, réfugiés, malheureusement, on ne peut pas déterminer les conditions d'admissibilité. Je pense que ça, c'est quelque chose dont on a discuté.

Recommandation 9, qui propose l'intégration d'une condition de sélection, dans les programmes d'immigration permanente, qui porte sur la régionalisation, vous en avez mentionné, d'entrée de jeu, dans votre mémoire. Il faut peut-être... j'aimerais aussi peut-être attirer l'attention là-dessus que les critères de classement d'invitation au PSTQ favorisent, justement, la régionalisation, donc les gens qui sont invités peuvent le faire, d'autant plus qu'il y a également des points supplémentaires au classement quand ces gens, on sait, justement, qu'ils ont séjourné à l'extérieur de la CMM, qu'ils ont eu de l'expérience à l'extérieur de la CMM, qu'ils ont eu des stages aussi à l'extérieur de la CMM. Donc...

Mme Schmaltz : ...fait en sorte qu'ils ont des chances... plus de chances d'être d'être invités à présenter une demande de sélection. D'autant plus qu'au 31 juillet, la totalité des personnes qui étaient invitées par le ministère sur le volet II séjournait aussi au Québec et à l'extérieur de la CMM. Donc, je voulais peut-être juste faire cette petite mise au point, là. Peut-être, vous le mentionnez quand même, là, qu'il y a eu quand même des ajouts là-dedans, mais bien sûr, ce que vous mentionniez tantôt, là, je le comprends parfaitement.

Petite demande aussi, curiosité par rapport à la... Bon, voyons, je m'excuse, mon ordi a gelé un petit peu. Je voulais parler de Francisation Québec parce que j'ai la chance d'être l'agente gouvernementale au ministre en francisation. Donc, c'est toujours des sujets qui vont venir m'interpeler. Vous disiez tantôt que vous... au niveau des critères de sélection, vous privilégiez beaucoup les gens qui ont des... une bonne connaissance déjà du français, selon des critères, etc. Par contre, vous demandiez peut-être d'avoir un ajout ou une aide supplémentaire en francisation. Je veux juste comprendre. Si déjà vos critères sont élevés, pourquoi vous aimeriez en plus d'avoir un ajustement en francisation, d'être accompagné, disons, davantage en francisation? Je voudrais juste comprendre ce côté-là.

Mme Bolduc (Véronique) : Peut-être actuellement, peut-être juste vous situer, ce qu'on exige en formation professionnelle, ce sont des niveaux nécessaires pour pouvoir intégrer. Donc, dans le processus d'admission, on exige, par exemple, en secrétariat, un niveau c, niveau 10, l'équivalent d'un niveau 10. Les gens doivent nous démontrer que le français est maîtrisé au niveau. Et actuellement, comment ça fonctionne, ce sont des tests qui sont internationals, qui sont exigés pour prouver leur niveau.

Au niveau des recommandations, je vous laisse peut-être poursuivre au niveau de ce que vous proposez parce que c'est quand même une obligation pour nous. Donc, si la personne ne maîtrise pas le niveau, on va référer à la francisation, comme on a l'offre actuellement au niveau des centres de services. Mais c'est quand même une obligation avant l'admission, là, en formation professionnelle. Sinon, malheureusement, c'est extrêmement difficile pour les gens de pouvoir intégrer des métiers dans des programmes de très courte durée. Donc, c'est quand même un enjeu qui est important. Mais quand même, au niveau des tests, je vous laisse peut-être compléter avec la suggestion.

Mme Schmaltz : Peut-être juste une petite question, là, pour être certaine, est-ce qu'on parle d'un gros pourcentage? C'est à peu près à vos demandes, là, si... parce que vous semblez en avoir beaucoup. Est-ce que c'est un gros pourcentage?

Mme Bolduc (Véronique) : Tous les élèves qui vont venir de l'international, qui veulent être admis en formation professionnelle, doivent prouver le niveau de français. Donc, pour nous, on parle de centaines d'élèves annuellement pour lesquels... et même plus, parce que selon le processus, bien entendu, les gens vont faire des démarches. On les accompagne dès le départ, dès... avant leur arrivée, et ça fait partie même de nos critères, là, de base. Donc, premièrement, est-ce que le niveau de français répond aux attentes? On parlait de secrétariat. Vous comprenez que c'est un programme pour lequel la maîtrise doit être assez élevée pour être capable d'intégrer un programme comme celui-ci. Donc, on demande à tous nos élèves d'avoir un niveau. Donc, on parle C1 et B2. Le B2 est peut-être un peu plus, je dirais, utilisé dans certains de nos programmes, par exemple en soudage montage où on est plus au niveau 8, mais, quand même, c'est une exigence. Donc, c'est sûr que si les gens ne le maîtrisent pas, on doit les référer vers d'autres êtres possibles selon si les gens sont ici ou bien sûr à l'extérieur du Québec.

Mme Schmaltz : Je comprends, mais je me mets à la place d'une personne qui désire souhaiter... qui désire suivre une formation en secrétariat avec un niveau 10, donc un niveau, hein, de compréhension parfaite. Il me semble que, d'instinct, on n'ira pas s'inscrire là parce que j'imagine que dans vos critères, déjà à l'avance, vous expliquez ce que ça nécessite comme compréhension ou comme... de la langue. Donc, vous en avez quand même des gens qui vont s'inscrire dans ce programme-là?

Mme Bolduc (Véronique) : Tout à fait. Donc, même si on mentionne les critères, les gens vont vouloir souvent poursuivre dans des programmes pour lesquels ils ont de l'intérêt.

Mme Schmaltz : Mais vous ne pouvez pas les refuser?

Mme Bolduc (Véronique) : Bien, bien entendu. C'est que si le niveau ne respecte pas le niveau minimal, on doit, nous, regarder de notre côté comment on peut les diriger vers l'aide possible pour aller acquérir le français nécessaire.

Mme Schmaltz : À ce moment-là, combien de temps peut prendre cette formation si, tu sais... je ne sais pas, moi, quel niveau vous avez puis versus l'apprentissage de la langue pour qu'elle soit apte à suivre la formation? Il peut se passer énormément de temps, là, pour...

Mme Bolduc (Véronique) : ...Donc, tout dépendamment, comme je vous dis, les candidatures sont...

Mme Bolduc (Véronique) : ...totalement différente. Donc, en fonction du niveau vers lequel les gens vont... vont être, bien, comme on vit actuellement avec Francisation Québec, les gens ont différents niveaux, donc on va les accompagner pour leur permettre d'aller chercher le niveau nécessaire.

Mme Schmaltz : Vous ne pouvez pas les refuser carrément, de leur dire «on ne peut pas vous accepter?»

Mme Bolduc (Véronique) : Mais il y a des élèves pour lequel on va le... on va exiger, surtout ceux qui sont à l'extérieur, donc vont décider de changer leur projet ou vont tout simplement aller poursuivre leur apprentissage en français. Ils vont revenir beaucoup plus tard.

Donc, on a toutes sortes de situations, les candidatures sont d'un peu partout dans le monde. Donc, on a des gens qui ont des parcours totalement différents, qui... qui vont venir nous... nous rencontrer pour voir s'ils peuvent intégrer ou pas.

Mme Schmaltz : ...des... Êtes-vous obligés des fois... Êtes-vous obligés... Je vais faire vite ma question. Est-ce que vous êtes obligés des fois de refuser?

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Le temps est terminé. Je suis désolée. Le temps est terminé pour cette portion de discussion. Je me tourne du côté de l'opposition officielle, vous bénéficiez 12 min 23 s.

M. Morin : Merci, Mme la Présidente. Alors, bonjour, mesdames van der Knaap, ma prononciation n'est pas trop mal?

Une voix : ...

M. Morin : Excellent. Mme Bergeron. Mme Bolduc, merci d'être là. Merci pour vos explications. Merci également pour votre mémoire qui est très bien fait, complet, avec une série de recommandations. Et j'aimerais... J'aurais quelques questions pour vous en lien avec les recommandations que vous faites.

Je comprends que vous êtes Éducation internationale, c'est un organisme puis qui s'occupe de la formation professionnelle, que cette formation-là, elle est... elle est dispensée au secondaire notamment. À la page 28 de votre mémoire, dans les recommandations transversales, vous dites au tout départ : «fixer des quotas selon l'année scolaire de début de formation et non selon l'année de la demande de la CAQ et privilégier — ça, c'est la 12 — privilégier le décompte des étudiants effectivement arrivés au Québec plutôt que le seul nombre de CAQ délivrés». Le gouvernement actuel a... fixe des quotas, pas très prévisible ce qu'ils font en matière d'immigration. Est-ce que vous avez été consultés avant ces nouvelles décisions-là ou si vous vous êtes ramassés avec les décisions imposées par le gouvernement puis là, bien, vous, vous êtes obligés de gérer vos quotas puis ce n'est pas toujours évident?

Mme van der Knaap (Lysiane) : Mais Éducation internationale, on n'a pas été consultés. Dans les centres de services scolaires, je sais que la Fédération des centres de services scolaires, il y a une consultation qui a été faite dans le... sur la loi, mais non pas sur le décret et sur les quotas. Donc, la réponse à votre question, c'est non. Puis, par rapport à la recommandation, si vous avez besoin de plus d'explication, peut-être Gabrielle sur le... Oui.

Mme Bergeron (Gabrielle) : Oui, c'est ça, dans le fond, les deux recommandations viennent justement avec notre suggestion d'avoir un peu plus de... de prévision, de pouvoir permettre aux centres de formation d'avoir, justement, de... de mieux s'organiser avec ces quotas-là, parce que les quotas ont été, comme beaucoup de mesures en immigration, imposés du jour au lendemain, puis on a ce quota-là, on dit : Bon, finalement, ce centre-là a 0, a trois, a six sur des demandes, finalement, qui étaient peut-être déjà en cours également, des admissions qui étaient déjà en cours. Donc, ça a fait en sorte que certaines personnes, bien, avaient une admission, finalement ont dû l'annuler, etc. Donc, la recommandation est plutôt pour permettre aux centres de formation, dans l'optique qu'on comprend le quota, à quoi ça sert aussi pour le Québec de permettre aux centres de formation quand même d'avoir un petit peu plus de prévisibilité sur qu'est-ce qui s'en vient pour gérer leur année scolaire, ce qu'il pourrait faire en sorte aussi qu'on n'aurait justement moins de fermetures de cohortes, moins... une baisse d'inscriptions, en tout cas, qui va être peut-être palliée avec d'autres actions, en sachant qu'il y a tout ça qui arrive, ce nombre-là qui, par exemple, va être très bas pour 2026-2027. Actuellement, c'est des quotas qui sont de février à février sur une demande qui a été effectuée. Malheureusement, une demande de CAQ qui a été effectuée, ça ne se traduit pas en quelqu'un qui arrive non plus, parce qu'il y a l'étape du permis d'études aussi qui est souvent là, malheureusement, que les projets de certaines personnes sont freinés, d'où l'autre recommandation, là, qui était de... d'avoir une méthode de calculer le nombre de CAQ émis et utilisés, finalement, étant donné que la majorité... mais pas la majorité, mais quand même beaucoup de CAQ qui sont demandés ne sont pas utilisés parce que les gens ne peuvent jamais finalement arriver même au Québec, là.

• (12 h 30) •

M. Morin : Exact. Et parce que votre... Votre année scolaire, est-ce que c'est des cohortes en continu ou ça commence habituellement en septembre ou au mois d'août?

Mme Bolduc (Véronique) : ...sont variables en fonction de l'offre. Par exemple, on peut avoir des cohortes qui débutent au mois d'août, d'autres vont être en janvier, février. Donc, c'est...


 
 

12 h 30 (version non révisée)

Mme Bolduc (Véronique) : ...toujours en fonction de l'adéquation formation emploi, et peut-être en complément avec ce qui se passe actuellement au niveau plus de notre réalité, c'est que ça vient un peu biaiser la planification aussi de l'offre des diplômés pour le marché du travail. Donc, notre préoccupation, elle est aussi à venir, par exemple dans le secteur de la construction, et je vais parler pour mon territoire, la construction navale, pour moi, nous avons 296... qui est notre cible actuellement. Mais ce qu'on voit, on parle de milliers d'emplois qu'on va devoir desservir au niveau de la région. Donc, vous comprenez que, si on regarde dans une planification plus à moyen terme, il y a un enjeu quand même parce que les élèves, pour nous, viennent combler des cohortes actuellement. On parle de combler des cohortes, donc de continuer à donner des services dans des secteurs qui sont critiques pour répondre aux besoins du marché du travail. Donc, c'est pour ça que la planification en fonction de la réalité régionale peut avoir un impact important parce que certains sentent actuellement... et même certains de nos programmes sont actuellement en péril parce que des élèves ne viennent plus malheureusement pour certains de nos programmes. Donc, la planification pourrait nous aider, là, actuellement au niveau du réseau.

M. Morin : Oui. Bien... mais je vous remercie. Écoutez, moi, je vous écoute, je vous écoute très attentivement parce que vous parlez du Centre de services scolaire des Navigateurs. Vous parlez de construction navale, donc j'en déduis que vous êtes dans la grande région de la Capitale-Nationale, plus, plus, plus qu'en Abitibi, n'est-ce pas, ou au Saguenay.

Mme Bolduc (Véronique) : Exactement.

M. Morin : Il y a toutes sortes de programmes du gouvernement. Il y a le gouvernement fédéral aussi qui veut se lancer dans la construction navale, la défense, etc. Donc, ça pourrait être une manne pour le Québec. Puis là, je comprends que le gouvernement du Québec, finalement, avec son manque de prévisibilité, fait en sorte que vous, vous ne savez plus trop sur quel pied danser, puis ça ne vous facilite pas la vie. Est-ce que je vous comprends bien?

Mme Bolduc (Véronique) : Ça nous demande de nous réorganiser constamment actuellement puis administrativement parlant aussi. Parce que, techniquement, les changements nous apportent aussi une réorganisation de nos processus, avec une limite au niveau du quota, au niveau des CAQ, au niveau administratif puis pour tous les centres de services, on doit revoir nos processus actuels pour être capables de bien répondre aussi à nos élèves qui sont ici et ceux qui ont aussi des questions qui sont à l'extérieur. Donc, il faut revoir nos processus actuellement, là, pour être capable de bien planifier l'arrivée de nos élèves, puis répondre aussi, comme on disait tout à l'heure, là, aux besoins actuels de nos entreprises. Juste parler... Par exemple, on parlait du secteur métallique, qui est un secteur qui est quand même assez important actuellement, pour lequel on va avoir des enjeux. Donc, de prévoir qu'on a un besoin assez important dans les prochains mois, prochaines années pour des secteurs comme la construction navale, c'est une planification qui est dès maintenant, là, pour ce qui s'en vient pour nous.

M. Morin : Je ne suis pas un spécialiste en construction navale, mais j'imagine que des soudeurs, ça doit quand même être assez en demande. On ne se trompe pas encore quand on dit ça?

Mme Bolduc (Véronique) : Totalement, totalement, oui.

M. Morin : Puis là, je comprends que les CAQ que vous avez, là, c'est une enveloppe globale, donc ça vise les étudiants... les étudiants qui sont ici présentement parce qu'eux aussi il leur en faut un CAQ.

Mme Bolduc (Véronique) : Tout à fait.

M. Morin : OK. Donc... Puis là, si, à un moment donné, vous... votre côté est tellement réduit que vous n'êtes pas capables d'en faire venir d'autres, comment vous allez être capable de répondre à la demande du marché, puis qu'est ce qui va se passer?

Mme Bolduc (Véronique) : C'est... c'est un petit peu la recommandation, hein, au niveau de la réalité régionale, l'annonce, c'est le secteur naval qui est quand même prioritaire et la construction. Donc, en complément, on veut augmenter notre nombre de cohortes. Bien entendu, les élèves viennent combler nos cohortes avec les élèves qui sont ici au Québec bien entendu. Donc, comment est-ce qu'on peut répondre à des milliers de travailleurs? Par exemple, en soudage, montage, on parle de 500 travailleurs d'ici les deux prochaines années. Donc, bien entendu, les entreprises veulent... veulent voir bien comment est-ce qu'on va pouvoir travailler ensemble pour être capable de répondre aux besoins urgents pour ces secteurs-là. Donc, oui, on est préoccupés, là, actuellement pour répondre aux besoins.

M. Morin : Parce que je comprends qu'évidemment il y a des étudiants qui qui sont ici, qui vivent ici, vous en faites venir de l'étranger aussi à l'international, parce que j'ai compris que vous avez dû, puis ce n'est peut-être pas dans le secteur de la construction navale, mais vous avez dû reporter des cohortes parce que c'était trop faible pour démarrer. Donc là, ce n'est pas très bon. Pourtant, on a des étudiants ici qui ne peuvent pas avancer. Dans le... dans le secteur justement, bon, naval ou dans les régions, là, si vous avez quelqu'un d'étranger que...

M. Morin : ...vous formez. Puis que là, à un moment donné, il a son diplôme, il a ses cartes, il peut se mettre à souder, mais il vient de l'étranger. C'est facile de le garder ici puis de le faire embaucher ou les règles font en sorte qu'il va repartir à l'étranger?

Mme Bergeron (Gabrielle) : Mais ça va vraiment dépendre, en fait, de la formation, là. Soudage, en tant que tel, c'est admissible encore au PTPD, là, c'est une des rares formations qui est encore admissibles. Mais, pour plusieurs domaines de formation, les gens, en fait, en formation professionnelle, la très, très grande majorité des formations a un stage en entreprise, dans les restaurants, par exemple, pour la cuisine, et tout ça, se place déjà à quelque part en emploi, a un droit aussi de travail hors campus, des fois travaille déjà un petit peu dans ce domaine-là.

Finalement, pour les permis... pas pour les permis, mais pour les formations qui ne sont pas admissibles au permis postdiplôme, mais leur seule porte, c'est des permis fermés, mais encore là il y a quand même des restrictions aussi au niveau des permis fermés.

Donc, c'est des gens qui sont... sont déjà... sont déjà dans les entreprises la majorité du temps puis finalement, bien, n'ont pas la possibilité de continuer avec cet emploi-là, alors qu'ils répondent à un besoin direct de cet employeur-là.

M. Morin : Puis, dans votre recommandation 15, vous suggérez, à la page 29 : «Permettre aux candidats du PEQ volet diplômé issus de la FP, bon, de démontrer leur connaissance du français». Mais là je comprends que le volet PEQ, il est suspendu présentement. Puis ça, avez-vous été consulté avant la suspension? Non, vous l'avez découvert comme nous, un matin comme ça. Qu'est-ce que vous faites? Qu'est-ce qu'ils font? Là, ils ne peuvent plus travailler. Tantôt on parlait du PSTQ, est-ce que c'est adapté à vos besoins? Est-ce que c'est quelque chose qui vous aide?

Mme Bergeron (Gabrielle) : C'est ça? Ce n'est pas tout à fait adapté, en fait, le PSTQ, là. On a mentionné tout à l'heure, tu sais, que oui, la formation professionnelle, les métiers de courte durée par rapport au PEQ qui est vraiment 1 800 heures totales, si on veut, le PSTQ offre quand même une flexibilité au niveau du nombre d'heures du diplôme. Par contre, il y a toujours le volet... on parlait du volet deux. Volet deux, c'est quand même avoir un an à l'étranger, un an au Québec. Mais l'année au Québec, finalement, les gens ne peuvent pas l'avoir la majorité du temps parce qu'ils n'ont pas accès au PTPD. Et là, avec les programmes sont menacés d'être retirés en 2026, là, du PTPD, il nous reste 12 programmes de 1 800 heures qui pourraient être admissibles au PEQ et qui pourraient permettre d'avoir l'expérience de travail aussi d'un an, deux ans, là, selon le volet. On ne va pas loin avec les 12 programmes, là, vous comprendrez qu'il y a quand même beaucoup de programmes de moins de 1 800 heures et même des programmes de 1 800 heures aussi dont le besoin est là puis malheureusement les programmes de résidence permanente ne sont pas adaptés du tout parce que, bien, l'expérience de travail peut difficilement être acquise autre que par, justement, des permis fermés qui sont aussi difficiles d'accès, là.

M. Morin : Et je comprends également qu'au niveau de la francisation, puis ça, c'est votre recommandation 13....

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : En terminant.

M. Morin : ...Francisation au Québec, non seulement... amis ne les forme pas en francisation, mais les formes en intégration, est-ce que j'ai bien compris? Ça fait que comment est-ce qu'ils font pour apprendre le français?

Mme Bergeron (Gabrielle) : Mais c'est ça, en fait... Bon, là, on reparle un petit peu aussi des travailleurs étrangers qui doivent s'intégrer en formation, qui peuvent être des travailleurs qui ont le niveau minimal.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. Alors, le temps de compléter pour l'opposition officielle. On termine avec le deuxième groupe d'opposition pour 4 min 8 s.

M. Fontecilla : Merci.Bonjour, mesdames. On a constaté hier que la baisse globale du nombre d'étudiants internationaux était compensée de façon globale au Québec, là, par une augmentation d'étudiants natifs, là, du Québec, là. Je crois comprendre que cela ne se reflète pas dans votre secteur d'activité. Donc, il y a quand même une baisse d'étudiants globalement, là, et internationaux et des étudiants, étudiantes provenant du Québec, est ce que c'est le cas?

• (12 h 40) •

Mme van der Knaap (Lysiane) : Mais avec les statistiques qu'on... dont... sur... auxquelles on a accès, là, sur le tableau de bord du ministère de l'Éducation, on voit qu'il y a une hausse d'élèves en formation professionnelle, mais ce nombre-là n'est pas suffisant quand même pour remplir toutes les cohortes, pour les programmes pour lesquels il y a des besoins de main-d'œuvre, là.

J'entendais dans la commission avant parler d'accès au logement, et tout ça, là, tu sais, il y a 80 000 emplois en pourvoir d'ici 2030 en les métiers de la construction, ce sont tous des métiers de la formation professionnelle. Il y a 32 métiers de la formation professionnelle. Ces cohortes-là ne sont pas complètes. Donc, ça nous prend des internationaux.

Ça fait que même si les Québécois s'inscrivent plus, il reste qu'il y a de la place quand même, puis qu'on en a besoin dans certains métiers, là. Dans le secteur minier aussi, il y a à peu près 50 000 travailleurs à aller chercher. Puis la moitié, c'est des... c'est des métiers de la formation professionnelle. Donc, tu sais...

Mme van der Knaap (Lysiane) : ...mais, oui, il y a une hausse des élèves québécois, mais il y a de la place quand même pour des internationaux étant donné les besoins du marché du travail.

M. Fontecilla : Vous avez mentionné les 77 cohortes qui n'ont pas été formées. Je suppose, et vous allez me le confirmer, que, lorsque vous formez des cohortes, c'est étroitement relié à la demande au marché du travail. Donc, il y a presque une... comment dire, une embauche assurée à la sortie, là. Donc, non seulement des cohortes sont non formées parce que ça prend un nombre minimal de personnes pour former une cohorte, mais il y a des entreprises qui sont directement affectées parce qu'ils n'ont pas de travailleurs ou travailleuses. Est-ce que c'est le cas, là?

Mme van der Knaap (Lysiane) : C'est exactement ça. Je pense que Véronique pourrait en parler, parce que les centres de formation professionnelle sont vraiment... parlent aux entreprises, aux employeurs tous les jours.

Mme Bolduc (Véronique) : Exactement. Donc, on est sollicité constamment pour voir comment est-ce qu'on peut augmenter le nombre de diplômés dans des secteurs prioritaires. On en parlait, je prends encore le secteur métallique, en soudage montage, par exemple. Donc, c'est sûr que si je prends Chaudière-Appalaches, tous mes collègues aussi vivent la même réalité. Donc, le besoin, il est criant. Donc, oui, on a une augmentation des élèves québécois dans nos demandes actuelles. Par contre, avec les cibles actuelles, pour répondre aux besoins du marché du travail, il y a encore des manques à gagner actuellement pour être capable d'atteindre les cibles pour les besoins actuels.

Donc, bien entendu, tout ce qui se passe au niveau socioéconomique pour nous, les entreprises nous appellent dans différents secteurs, le secteur de la santé, c'est la même chose. Donc, les résidences qui nous appellent pour voir comment est-ce qu'on peut collaborer ensemble pour être capables de répondre à l'adéquation formation emploi. Donc, c'est le quotidien au niveau de la formation professionnelle, comment est-ce qu'on peut répondre aux besoins actuels. Donc, pour plusieurs, les élèves de l'international viennent nous aider à soutenir ce besoin-là puis combler des cohortes actuelles, qui est nécessaire. Donc, pour ceux qui n'ont pas pu partir de cohortes, c'est que la demande, elle est là, mais on manque d'élèves aussi dans certains de nos programmes pour lesquels c'est une solution pour certains secteurs.

M. Fontecilla : Vous avez fait mention dans votre mémoire, la recommandation 17, exempter des demandeurs d'asile de l'obligation d'obtenir un CAQ pour suivre des formations de courte durée, six mois et moins.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : En terminant.

M. Fontecilla : Quelle est la situation concernant les demandeurs d'asile, là?

Mme Bergeron (Gabrielle) : Très rapidement, les demandeurs d'asile n'ont pas le droit de faire une formation de moins de six mois sans obtenir un CAQ ni un permis d'étude. Et les demandeurs d'asile occupent des emplois très importants, dont préposés aux bénéficiaires notamment.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci. Merci beaucoup. C'est ce qui conclut cette ronde de discussions. Merci pour l'apport à nos travaux, et je suspends les travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 44)


 
 

15 h (version non révisée)

(Reprise à 15 h 05)

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des relations avec les citoyens reprend ses travaux. Nous poursuivons donc les auditions publiques dans le cadre de la consultation générale sur le cahier de consultation intitulé La planification de l'immigration au Québec pour la période 2026-2029.

Avant qu'on ne débute les travaux... des travaux, pardon, j'ai besoin de votre consentement pour que la députée de Terrebonne remplace le député de Matane-Matapédia cet après-midi. Est-ce que j'ai votre consentement?

Des voix : ...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Consentement. Parfait. Alors cet après-midi, nous allons entendre les organismes suivants :

Immigration CAST — est-ce que c'est bien CAST, oui, parfait — alors qui sont ici présents. Nous allons poursuivre avec M. Jean-François Daoust, ensuite, avec le Regroupement des cégeps de régions, et nous allons terminer avec l'Université Concordia.

Donc, messieurs, messieurs, messieurs, je vais... Oui, oui, bon, c'est sur mon autre feuille. Bien, en fait, je vais vous demander de vous présenter, messieurs. Bienvenue à la commission. Vous allez bénéficier d'une période de 10 minutes pour vous présenter et présenter l'essentiel de votre mémoire et vos recommandations et, par la suite, on va pouvoir en discuter avec les parlementaires. Alors, le temps est à vous à compter de maintenant.

M. Côté (Alex) : Mme la Présidente, mesdames et messieurs, les membres de la commission, merci de nous accueillir aujourd'hui. Nous sommes cofondateurs d'Immigration CAST, une firme spécialisée en immigration par investissement au Québec...

M. Côté (Alex) : ...notre mémoire s'intitule Sept recommandations pour faire du Québec une destination phare pour les entrepreneurs et investisseurs francophones. La catégorie des gens d'affaires, les investisseurs, les entrepreneurs, les travailleurs autonomes, est stratégique pour le Québec. Ils possèdent un réseau, une expérience et surtout un capital prêt à être investi immédiatement. Leur actif net, entre 600 000 $ pour les entrepreneurs et 2 millions pour les investisseurs, équivaut à près de trois fois celui d'un ménage québécois moyen. Ils viennent ici pour créer des emplois et investir. C'est pourquoi nous sommes déçus de constater, une fois de plus, après la planification pluriannuelle de 2023, que le gouvernement ait fixé son objectif à environ 1 % d'immigration totale pour la période 2026-2029. On parle ici d'une cible d'environ 70 à 130 familles appartenant à cette catégorie porteuse.

Une telle proportion soulève une question fondamentale : Quel modèle de société voulons-nous bâtir si nous réservons une place aussi marginale aux entrepreneurs et investisseurs et repreneurs immigrants qui créent de la richesse, de l'emploi et de la relève économique dans toutes les régions du Québec? Souhaitons-nous une immigration tournée vers de la main-d'oeuvre à court terme ou de l'immigration capable d'ancrer durablement du capital patient et des familles dans notre économie, à l'instar d'un portefeuille équilibré? Nous pensons que le gouvernement devait rapprocher... se rapprocher de l'objectif historique, soit entre 5 % et 7 % de notre immigration totale. Il s'agit environ 350 à 650 familles, ce qui donnerait environ 1 250 personnes selon le scénario 2A et 2 250 personnes selon le scénario 2C dans le cahier de consultation du ministère.

Le débat public se concentre sur la capacité d'accueil au Québec en ce moment. Or, nous plaidons que les gens d'affaires francophones ne devraient pas être enfermés dans des seuils globaux. Ce sont des profils stratégiques dont le volume restera toujours modeste en raison des critères d'éligibilité très exigeants. Notre recommandation phare propose que la sélection et l'admission devraient être continues et distinctes, ce qui permettrait des délais plus courts et une intégration économique accélérée.

Nous voulons nous assurer que nous sommes tous sur la même longueur d'onde cet après-midi, quelle que soit l'allégeance politique, en matière de capacité d'accueil, les candidats appartenant à la catégorie des gens d'affaires du Québec ne prennent pas de places, elle accroît la capacité du Québec. Chaque immigrant investisseur qui réussit augmente la capacité d'accueil du Québec en créant des emplois, du logement et des revenus pour l'État dès jour 1. C'est pourquoi notre recommandation numéro un est claire : un mécanisme distinct de sélection et d'admission pour les francophones de la catégorie des gens d'affaires afin de sortir ces profils stratégiques du carcan des seuils globaux. Nous devons faire preuve de plus d'audace et prendre des décisions sur une base de risque ajustée.

M. Tessier (Samuel) : Donc, pour ma part, je vais mettre en lumière, là, des irritants ou des situations préoccupantes qu'on voit au niveau des programmes des gens d'affaires. Déjà, en 2023, nous avions tiré la sonnette d'alarme, il y avait plus de 12 000 candidats dans la catégorie des gens d'affaires qui étaient en attente à la période... à l'étape d'admission au fédéral. Le Québec, à ce moment-là, admettait seulement 450 personnes par année, selon le cahier de consultation. Les mathématiques sont simples et implacables : à ce rythme, il faudra près de 20 ans pour résorber l'arriéré.        C'est précisément ce constat qui nous a menés à l'idée d'une admission en continu qui a été reçue et saluée en 2023. Deux ans plus tard, nous rejouons la même scène, avec les mêmes chiffres et des conséquences similaires : des familles bloquées dans l'admission, des investissements en suspend et un Québec qui perd du terrain face à la concurrence internationale.

• (15 h 10) •

Donc, aujourd'hui, et vous le voyez à l'écran, il y a un peu plus de 4 100 personnes en attente, et on présente, sur le site d'IRCC, pour des nouveaux gens d'affaires francophones, un délai de 93 mois, donc quelque chose pour décourager tout entrepreneur francophone d'entreprendre une démarche vers le Québec. Donc, trop de prudence finit par coûter plus cher que l'audace. Le Québec doit redevenir un terrain d'action et non une salle d'attente.

Le... Au niveau du permis de travail C-60, donc c'est un deuxième sujet qui nous préoccupe, le Québec doit obtenir les pouvoirs d'émettre les permis de travail C-60 pour les candidats d'affaires présélectionnés par le ministère. Ce permis transitoire permettrait d'accueillir plus rapidement des entrepreneurs qui ont retenu l'attention du ministère, qui ont un avis d'intention positive. Actuellement, ce pouvoir relève exclusivement du fédéral, ce qui engendre des délais additionnels, des coûts supplémentaires pour les entrepreneurs et surtout un fardeau administratif doublé, puisque chaque palier de gouvernement reprend l'analyse avec les mêmes facteurs, mais des formulaires différents. Rapatrier cette compétence au Québec...

M. Tessier (Samuel) : ...ce serait de réduire les délais pour les profils déjà présélectionnés par le ministère, favoriser la mise en œuvre immédiate des projets d'investissement et renforcir le leadership du Québec dans la sélection des entrepreneurs et des investisseurs. Donc, le permis C-60 avantage canadien est un outil d'attraction et de rétention stratégique cohérente avec la vision du Québec, soit d'accueillir plus vite ceux qui bâtissent notre prospérité.

Finalement, au niveau de la francisation, les candidats d'affaires francophones, la francisation, naturellement, n'est pas un enjeu, ils sont déjà intégrés à la culture linguistique du Québec. Mais pour les investisseurs non francophones, souvent à haute valeur économique, nous proposons une francisation postarrivée structurée et adaptée à leurs besoins et à la réalité entrepreneuriale du Québec. Cette approche pragmatique et inclusive permettrait d'accompagner l'apprentissage du français dans un contexte d'affaires, favoriser leur intégration en région et maximiser leur contribution économique au Québec.

Depuis la réforme de 2024, la majorité des programmes d'affaires fonctionnent en deux temps, un avis d'intention de sélection délivré par le ministère, suivi d'une phase d'implémentation commerciale avant de recevoir un certificat de sélection. Dans cette même logique, nous proposons d'introduire un quota de francisation ciblé permettant au Québec d'accueillir certains candidats non francophones, à condition d'apprendre le français dans les deux ans suivant leur arrivée. Cette mesure élargirait le bassin d'investisseurs potentiels, diversifierait nos partenaires commerciaux, tout en préservant la cohérence linguistique de la nation québécoise. L'immigration d'affaires ne devrait pas être vue comme une charge pour le Québec, c'est un investissement qui rapporte dès le premier jour.

Mme la Présidente, nous ne demandons pas d'augmenter aveuglément les volumes globaux, nous ne demandons pas non plus de faire un traitement préférentiel pour la catégorie des gens d'affaires, mais un meilleur équilibre dans nos politiques d'immigration. C'est une question d'optimiser l'équilibre économique entre les facteurs de production, la main-d'oeuvre et le capital. Les gens d'affaires immigrants sont des profils stratégiques qui créent des emplois, investissent leur capital et s'installent durablement sur le court au Québec. En appliquant nos sept recommandations, le Québec pourrait redevenir un chef de file mondial en immigration d'affaires au sein de la Francophonie.

Nous vous remercions pour votre attention et serons heureux de répondre à vos questions.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Bien, merci beaucoup pour cette présentation, d'autant plus qu'elle était quasi animée. Alors, on va commencer les discussions avec les parlementaires. Je me tourne du côté du gouvernement avec M. le ministre. Vous bénéficiez de 16 min 30 s.

M. Roberge : Merci. Bonjour, bonjour. Vous parlez d'immigration d'affaires. Le principe d'immigration, c'est que les gens viennent vivre ici. Est-ce que vous savez dans quelle proportion les gens qui ont levé la main, qui ont participé, qui ont été admis dans le programme des gens d'affaires, sont venus vivre au Québec dans les années précédentes?

M. Tessier (Samuel) : Bien, en fait, certainement que vous faites référence au... à la période préalable, là, à la refonte qui a eu lieu... qui a livré les nouveaux programmes, en 2024, pour les francophones. Donc, à ce moment-là, en effet, il y avait une sélection de candidats allophones qui, on le sait, là, allaient s'établir dans d'autres provinces que le Québec. Maintenant, depuis la réforme, on sélectionne uniquement des profils qui ont un niveau intermédiaire avancé de français et donc, dans la grande majorité, vont s'établir au Québec, surtout avec un avis d'intention suivi d'une période d'implémentation. Donc, les gens doivent venir faire un investissement sur le territoire et du coup, bien, on croit que la rétention va être très importante sur les candidats francophones qui ont un projet commercial au Québec dans le futur. Et donc c'est pour ça qu'on attire l'attention aujourd'hui sur les délais puisque les 300 personnes qui ont été sélectionnées jusque... jusqu'à aujourd'hui dans la nouvelle refonte, bien, ils sont en arrière des 3 800, environ, personnes qui attendent depuis quatre ans déjà dans les carcans des seuils d'admission, et c'est ce qui nous préoccupe. En fait, les nouveaux francophones qui déposent des dossiers aujourd'hui doivent attendre derrière les candidats allophones, et c'est pour ça qu'on propose de faire une admission en continu des gens d'affaires qui sont sélectionnés par le Québec pour mieux arrimer la sélection et l'admission des candidats francophones.

M. Roberge : Parce qu'historiquement les gens se disaient des immigrants d'affaires, mais ils ne venaient pas. Il y avait de, 2010 à 2020, seulement 15 % des gens admis de façon permanente sont venus. Ça fait que 85 % des gens qui se disaient des immigrants d'affaires n'étaient pas des immigrants d'affaires, ils ne venaient pas au Québec. Là, vous nous dites : Mais ça va changer parce qu'on va prendre des francophones. Mais quand je lis votre mémoire, vous dites qu'il ne faut pas sélectionner des francophones. J'ai de la misère à vous suivre.

M. Côté (Alex) : Non, non, en fait, pour... donc, la première chose, notre recommandation, c'est qu'on doit entamer une sélection et une admission en continu pour les candidats qui parlent le français. Et donc notre recommandation tient la route sur le fait français et les réformes qui ont eu lieu le 1ᵉʳ janvier 2024. On les reçoit très bien. Je pense qu'il y a une demande pour la... dans la francophonie. On est 360 millions de locuteurs qui parlent le français. Je pense qu'on veut cibler...

M. Côté (Alex) : ...ce profil-là et de leur dire de venir vivre, investir au Québec. Ceci dit, on croit que, si le gouvernement rechercherait à accroître l'impact économique, par exemple, dans le cadre du programme investisseurs, bien, qu'il pourrait considérer de mettre en place un contingent pour des candidats qui aimeraient se franciser une fois sur le territoire. Donc, en fait, l'exemple que je peux donner, c'est qu'il y aurait des candidats qui seraient prêts à se franciser et faire partie par exemple, du programme des investisseurs. Mais se franciser dans son pays d'origine, en Chine, par exemple, bien, c'est plus difficile. Mais si quelqu'un viendrait s'établir sur le territoire, et on leur donnerait un délai de 24 mois, par exemple, pour se franciser, bien, en fait, on garde le fait français, on fait juste le déplacer dans le temps, l'obligation de, bien, apprendre la langue commune, en fait, du Québec.

M. Roberge : Et, si je vous suis, qu'est-ce qui arrive après 24 mois si la personne n'est pas francisée?

M. Côté (Alex) : Donc, en fait, ce serait... on a des hypothèses sur qu'est-ce qui pourrait être fait. Bien, évidemment, on met le CSQ contingent à la francisation des candidats. Par exemple, en ce moment, dans le programme investisseurs, les candidats ont une obligation de s'établir pendant 12 mois sur le territoire. Si les candidats ne sont pas ici pendant 12 mois sur le territoire, bien, en fait, ils n'aboutissent pas au CSQ. Bien, on pourrait faire tout juste le même genre de modus operandi qui est déjà en place, en ce moment, dans le cadre du programme investisseurs. Monsieur, madame ou un ménage doit s'établir 12 mois sur le territoire, par la suite de leur établissement, peuvent avoir accès à un Certificat de sélection du Québec, qui, bien sûr, les apporte à avoir la résidence permanente. On pourrait apporter la même logique, en fait, à l'apprentissage du français. Si on n'apprend pas le français d'ici 24 mois, d'un niveau intermédiaire avancé, bien, à ce moment-là, on ne peut pas aboutir vers un CSQ, qui ne nous permettrait pas d'obtenir une résidence permanente canadienne.

M. Roberge : Une espèce de condition, avec un délai. Parce que là, on a amené cette exigence de français, nouvelle, parce que ce n'était vraiment pas le cas précédemment, là. Quand je revois, en 2022, programme des investisseurs, 2,5 % déclaraient connaître le français, 97,5 % disent : Moi, je ne connais pas le français. Ils voulaient devenir migrants au Québec, la seule nation francophone d'Amérique. Ils partaient mal l'affaire. Mais vous nous dites : Il faudrait que les personnes soient mises en dehors des cibles régulières. Est-ce que c'est bien ça, en dehors des cibles régulières? Mais donc ce serait quoi la cible? Parce qu'on fait la planification, on veut compter, on veut vérifier puis s'assurer combien de personnes viendraient. Est-ce qu'on a une capacité d'accueil. On a des cibles de 25 000, 35 000 ou 45 000, mais là vous nous dites : En dehors. Ça voudrait dire... ce serait quoi, 25 000 plus un certain nombre, ou 40 000 plus un certain nombre? C'est quoi, votre chiffre?

M. Tessier (Samuel) : ...bien, on ne veut pas établir de chiffre précis. Nous, on pense qu'on devrait avoir une proportion de gens d'affaires de 5 % à 7 % là, comme ça l'a été historiquement. Et également, bien, il y a un pouvoir de sélection du ministère. Donc, dans tous les cas, pour qu'un entrepreneur vienne racheter une entreprise, par exemple, au Québec, et obtienne son droit de sélection, il doit y avoir des entreprises à vendre et des opportunités de repreneuriat sur le territoire. Et donc, tant qu'il y a des opportunités de repreneuriat sur le territoire, on croit qu'un entrepreneur francophone qui vient racheter une entreprise pour assurer la pérennité de l'opération et la stabilité des emplois... on pense qu'il devrait être reçu d'une façon rapide, et en dehors des seuils standards d'immigration, parce que c'est un profil stratégique pour le Québec.

• (15 h 20) •

M. Côté (Alex) : Évidemment, il faut garder en tête que la valeur nette, en fait, des gens d'affaires, par exemple, un entrepreneur, c'est 600 000 $ canadiens, pour un investisseur, c'est 2 millions de dollars canadiens. Donc, nous, en fait, qu'est-ce qu'on est d'avis, c'est que le gouvernement pourrait mettre en place un mécanisme qui plafonne, en fait, en matière de pourcentage, et donc qu'on émet 2 000 CSQ, à la hauteur de 2 000 CSQ dans le cadre de la catégorie des gens d'affaires, qui équivaut environ à 5 %, je donne un exemple, comme ça, et... Mais selon nous, en ce moment, avec le nouveau programme, avec les volumes qu'on voit, avec la façon que les programmes sont faits, je ne crois pas qu'on atteindrait cette cible-là. Je pense que c'est une cible ambitieuse, qu'on devrait concevoir des programmes pour attirer plus de gens d'affaires francophones, mais je pense que ce serait un bon... un bon mécanisme, en fait, de plafonner l'émission de CSQ dans le cadre de cette catégorie-là, et on donne 5 % à 7 %. Si on se base sur l'historique, en fait, de la planification de l'immigration, historiquement, c'était environ la proportion qui était considérée.

Et je pense qu'il faut juste faire une nuance, c'est important, Mme la Présidente, c'est... en fait, tout ce qui est avant le 1er janvier 2024, je pense qu'il faut faire attention à faire un amalgame avec les candidats post-2024, parce qu'en fait, là on cible des candidats qui maîtrisent le français, qui doivent détenir un diplôme d'études secondaires, qui rencontrent tous les critères du programme du gouvernement, et c'est complètement différents profils des candidats de la mouture antérieure de la catégorie des gens d'affaires, qui étaient environ, à 95 %, des immigrants investisseurs allophones venant, notamment, de l'Asie. Donc, il faut faire attention avec les candidats. Maintenant, c'est de la francophonie, c'est des gens du... de l'Europe, l'Europe francophone, du Maghreb, de...

M. Côté (Alex) : ...l'Afrique de l'Ouest, des gens de la Francophonie qui recherchent à soit reprendre une entreprise ou investir dans une entreprise. Et, en fait, c'est beaucoup plus l'investissement actif des programmes qui est recherché que le programme investisseur qui n'est pas tout à fait compétitif en ce moment.

M. Roberge : Vous dites qu'il n'est pas compétitif en ce moment, il a évolué. Qu'est-ce qu'il se passe dans les autres provinces?

M. Tessier (Samuel) : Oui, c'est une très bonne question. Bien, il y a évolué, en effet, dans un bon sens. On comprend le projet de société d'imposer un test de français aux nouveaux arrivants investisseurs également. Cependant, tu sais, dans les dernières années, ce qu'on a vu, c'est des volumes faméliques. Là, on parle de quelques dossiers, huit dossiers depuis la nouvelle mouture. C'est famélique comme réussite d'un programme d'immigration. Donc, huit familles, naturellement, là, ce n'est pas considérable. Et donc l'impact économique que le programme avait avance auprès des PME, en région notamment, mais n'existe plus aujourd'hui. Et donc on a une perte d'investissements directs étrangers.

Et donc nous, on est d'avis que, oui, de mettre un test de français, c'était une priorité, mais, maintenant, il faudrait revoir les conditions financières pour s'assurer d'attirer des clients francophones finalement. Parce que, là, on a augmenté le prix du programme, on a mis un test de français, on a mis une exigence de présence sur le territoire, on a mis une exigence de diplôme et, finalement, on n'a pas de candidat. Donc, c'est à réviser, en effet, pour avoir un volume de candidats intéressants pour le Québec.

M. Côté (Alex) : Pour vous répondre à votre question...

M. Roberge : Oui, c'est ça, vous comparez notre programme actuel avec l'ancien programme. Ma question, c'est : Qu'est-ce qui se passe dans les autres provinces du Canada? Quelles sont les exigences? Quels sont leurs volumes?

M. Côté (Alex) : Donc, en fait, comme vous le savez, le champ à compétence exclusive du Québec, c'est la sélection des immigrants économiques. Et donc, évidemment, les autres provinces n'ont pas un genre de programme comme celui-là, et ce n'est pas offert non plus par le gouvernement fédéral. J'aime bien comparer le programme à d'autres pays, en fait. Donc, si on regarde les États-Unis, le Royaume-Uni, on pourrait regarder le Portugal, l'Espagne, la Nouvelle-Zélande, donc, on a des... d'autres géographies qui sont... qui offrent des programmes comparables. Et donc, selon nous, avec l'imposition de différents critères en matière du français, de résidences, on pourrait dire la formule hybride du ministère, bien, si on regarde avec d'autres programmes, on considère qu'on est trop cher, en fait. Si on regarde la compétition, on pourrait dire global.

M. Roberge : Mais ce que je comprends, c'est que dans l'est du Canada, il y avait un programme semblable, mais qui a été retiré. Je vous remercie, mais j'ai des collègues qui veulent poursuivre l'échange avec vous.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci, M. le ministre. Alors, je reconnais la députée de Vimont, et il reste 6 min 15 s.

Mme Schmaltz : Parfait. Merci, Mme la Présidente. Merci, messieurs. Merci d'être présents. C'est important, votre collaboration à nos travaux.

J'aimerais bien revenir, s'il vous plaît...

Des voix : ...

Mme Schmaltz : Ah! non, OK, c'est beau... Je voudrais revenir, s'il vous plaît, avec le modèle de francisation. Vous parlez de francisation post-arrivée structurée pour les candidats non francophones. Bon, vous avez mentionné pour une période de deux ans. Là, on a compris, bon, advenant le fait que ça ne fonctionne pas après deux ans, là, M. a expliqué un petit peu qu'est-ce qui en était, là, des conséquences. Est-ce qu'au niveau de tout ce que Francisation Québec fait actuellement, c'est-à-dire la francisation avant l'arrivée des candidats, donc qu'il y a aussi ça qu'on ne doit pas... qu'on ne doit pas non plus mettre de côté, c'est quand même une opportunité, une possibilité pour les futures personnes, bon, qui ne sont peut-être pas suffisamment francisées... Qu'est-ce que vous pensez de ce programme-là, de cette francisation directement dans le pays d'origine? Est-ce que vous ne pensez pas que ça peut déjà permettre d'éviter peut-être la francisation post-arrivée, pas d'en rajouter encore une supplémentaire étant donné que l'offre de services de francisation au Québec est assez large?

M. Tessier (Samuel) : En effet, se franciser dans son pays d'origine, ça peut être un défi, ça peut être complexe, et donc de se franciser sur le territoire... Et on ne parle pas toujours de personnes allophones, hein, on peut... Aujourd'hui, dans tous les programmes d'immigration des gens d'affaires, on regarde le niveau 7, donc intermédiaire avancé, et donc on peut souvent avoir des candidats de différentes origines qui ont une base de français, en fait, et pourraient déjà atteindre des niveaux B1 ou A2, et donc être fonctionnels, en fait, dans la société québécoise sans problème. Cependant, le niveau d'exigence est très élevé, et donc on pense que, si quelqu'un a un A2, il vient sur le territoire pendant deux ans, va atteindre le seuil de B2, donc va pouvoir améliorer son français sur le territoire en travaillant au Québec. Donc, ça facilite son implémentation, son investissement, donc crée de la richesse économique dès le départ et lui et sa famille, l'investisseur et sa famille, peuvent apprendre le français, et, bien sûr, dans le contexte d'un contingent, donc on limite ce type de profil là. Cependant, il y a des profils stratégiques pour le Québec qui ont des...

M. Tessier (Samuel) : ...des ambitions entrepreneuriales sur le territoire qui peuvent être très pertinentes pour la création d'emplois, et on souhaite ne pas bloquer l'ensemble de ces profils-là pour le niveau intermédiaire avancé de français qui est requis.

Mme Schmaltz : OK. Donc, si je comprends, c'est... Je ne veux pas dire que... Est-ce que, véritablement, vous voyez vraiment cette entrave, la francisation, pour les entrepreneurs? Est-ce que ça semble être... Depuis tantôt que j'écoute... que je vous écoute, puis on n'a pas eu tout le temps le même son de cloche non plus des autres organismes ou, peu importe, qui sont venus ici, puis c'est la première fois que je l'entends à ce point-là, que le français semble être... en tout cas, la langue, là, semble être une barrière quasi infranchissable ou... Je suis très étonnée honnêtement. Peut-être que j'en ai manqué un bout, là, je dormais au gaz, je n'en ai aucune idée, mais je suis vraiment étonnée d'entendre ça de... à ce point-là, là, que c'est pratiquement ça, là, qui empêche...

M. Côté (Alex) : Bien, voici comment je pourrais le mettre. En fait, si on regarde auparavant, le terrain de jeu était la planète, donc on avait des candidats de toutes sortes de pays qui pouvaient venir vivre et investir au Québec. Depuis la réforme, avec une imposition de test de français intermédiaire avancé, je tiens à le dire, c'est un niveau 7 sur 12, donc on demande quand même un niveau plus élevé. Je ne sais pas c'est quoi, le cas pour toutes les catégories, on travaille exclusivement, nous, avec la catégorie des gens d'affaires. Donc, intermédiaire avancé, pour quelqu'un qui est à 0 à son français, c'est sûr qu'il va avoir des défis à se franciser. Et donc nous, qu'est-ce qu'on dit, c'est que, bien, avec les locuteurs en français, il y a 360 millions de personnes, c'est un beau bassin. Il y a des bons candidats à l'intérieur de la Francophonie qu'on est capable de cibler, de venir vivre et investir au Québec. Ceci dit, si on donne un chemin à des candidats qui sont prêts à se franciser, qui peuvent venir de profils très intéressants, de d'autres pays où le français n'est pas la langue commune, bien, à ce moment-là, on peut faire gagner le Québec en attirant ces profils-là en leur donnant un chemin où ils peuvent se prêter au jeu et intégrer la langue commune du Québec.

Mme Schmaltz : Merci. Je vais laisser... Je pense que j'ai un collègue qui veut...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. Le député de Jonquière, il vous reste encore 1 min 49 s.

M. Gagnon : Combien?

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : 1 min 46 s.

M. Gagnon : Comme Mme la Présidente le mentionnait, député de Jonquière, alors... député de région. Dans votre mémoire, là, j'ai... vous avez piqué ma curiosité quand on parle de repreneuriat en arrière en région. Vous avez même mis un beau mot, là, que ça pouvait être un bénéfice. Vous croyez vraiment à l'impact que peut avoir le repreneuriat en région. Avez-vous des données, on pourrait dire, en pourcentages des entrepreneurs immigrants qui s'établissent en région versus Montréal? Peut-être, première question. Et, deuxième question, on peut-tu se projeter vers une implantation réussie dans le milieu à long terme, si on parle en région?

M. Côté (Alex) : On a... Bien, voilà, je sympathise avec les régions. J'ai grandi sur la Côte-Nord pendant 18 ans, donc je connais bien les régions. Et donc, par exemple, on a aidé des repreneurs qui ont repris une business récréotouristique au Saguenay. Et donc c'est des candidats, en fait, de la France qui ont repris une entreprise. Et donc on a toutes sortes d'exemples parmi nos régions où il y a toutes sortes de belles opportunités pour les repreneurs.

En parlant de repreneuriat, l'Observatoire du repreneuriat dit que, d'ici quelques années, on va avoir environ 50 000 entreprises à céder qui vont chercher des repreneurs. Donc, je pense qu'il faut vraiment miser sur cette catégorie-là d'entrepreneurs immigrants qui vont venir opérer sur le terrain ces nouvelles entreprises là et vont assurer leur pérennité. Et ça fait partie de nos recommandations dans le mémoire qu'on pense qu'on devrait mettre en place un tableau de bord. Je pense que c'est avec les nouveaux candidats qui rentrent, selon moi, avec les changements qui ont eu lieu du programme, qui favorisent les entrepreneurs immigrants, les immigrants investisseurs francophones, mettre en place un tableau de bord qui est capable de démontrer l'impact économique comme ça que la population québécoise est au courant. Quand je parle dans mon réseau, c'est anecdotique, mais quand je parle dans mon réseau, les gens ne savent même pas qu'il y a des programmes qui existent pour les gens d'affaires. Et donc de mettre de l'avant la population...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci. Merci beaucoup.

M. Côté (Alex) : ...économique serait une bonne recommandation.

• (15 h 30) •

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci. Alors, je me tourne du côté de l'opposition officielle, 12 min 23 s.

M. Morin : Merci, Mme la Présidente. Bon après-midi. Merci. Merci d'être là. Merci pour votre mémoire. Il y a un article qui a été publié dans Radio-Canada, je crois, cette semaine, en lien avec le programme des immigrants investisseurs, ce dont on parle avec vous cet après-midi. Maintenant, à la lecture de l'article, on comprend que le programme a été suspendu en 2019. Il y avait certains enjeux qui ont été soulevés. Je comprends qu'avant ça, ça avait quand même permis à de nombreuses personnes, habituellement des gens assez riches, qui ont pu venir...


 
 

15 h 30 (version non révisée)

M. Morin : ...ici. Le programme a repris, c'est ce qu'on dit dans l'article, mais c'est quelques candidatures qui ont été... qui ont été traitées. Cependant, dans l'article, on dit également que le Québec a toujours le programme, il a repris, mais que le gouvernement fédéral a mis fin à un programme similaire pour toutes les autres provinces en 2014. Et est-ce qu'on sait pourquoi?

M. Côté (Alex) : Si je peux me permettre...

M. Morin : Oui.

M. Côté (Alex) : Donc, en fait, le gouvernement fédéral a élaboré un programme immigrant investisseur, mais je vous dirais que le maillon qui manquait dans leur modus operandi était quelle province allait recevoir les revenus d'intérêts et comment ces revenus d'intérêts là allaient être attribués dans chaque province, à l'extérieur du Québec. Qu'est-ce que Québec a fait excessivement bien, c'est un partenariat public-privé entre à la fois le gouvernement, les courtiers en valeurs mobilières et les sociétés de fiducie et Investissement Québec. Les revenus d'intérêts viennent financer une solution de financement qui va à Investissement Québec, et ensuite Investissement Québec était capable de déployer ces sommes-là. On parle de dizaines de millions de dollars en matière de subventions. Et donc ça, ça a fonctionné. Et donc 80 % des sociétés au Québec qui ont reçu ces subventions-là étaient dans le secteur manufacturier et en grande partie à l'extérieur de la grande région métropolitaine de Montréal. Qu'en est-il pour le fédéral? Cet argent-là n'a pas été capable de mis... d'être mis à profit d'une façon structurante, comme le gouvernement fédéral aurait souhaité. Éventuellement, ils ont reçu des dizaines de milliers de dossiers. C'est devenu un programme ingérable. Et donc, à l'époque, le gouvernement a dû renvoyer les demandes et a mis de l'avant un nouveau programme, qui a reçu trois dossiers par la suite.

M. Morin : Mais là on parle... trois dossiers, on parle du gouvernement du Québec ou du gouvernement fédéral?

M. Tessier (Samuel) : Le gouvernement fédéral a également eu un dossier... un programme similaire, avec un investissement de 2 millions de dollars canadiens, qui a... qui a reçu trois demandes.

M. Morin : Qui a reçu trois demandes.

M. Tessier (Samuel) : Donc, il était mal positionné dans le marché, là, par rapport au... à la compétition internationale. C'est un peu ce qu'on décrit dans cet article. À huit dossiers, bien, naturellement, il y a un problème au niveau des conditions, là. Si on n'a pas de demande, quand on sait qu'il devrait y avoir une demande de francophones qui veulent s'établir... puis il y a une demande, mais, en fait, le programme est peut-être mal positionné, là, pour attirer les investisseurs francophones que le Québec a besoin et que les entreprises, en fait, là, regardent pour avoir, là, accès à des différentes subventions pour améliorer leur productivité.

M. Morin : Donc, si je vous ai bien compris, si le fédéral a aboli son programme, c'est entre autres parce qu'ils étaient incapables de redistribuer les intérêts qui avaient été accumulés dans les différentes provinces?

M. Tessier (Samuel) : C'est exact.

M. Côté (Alex) : Entre autres. À l'époque aussi, les conditions étaient assez souples. C'étaient seulement des conditions financières. Il n'y avait aucune condition linguistique, par exemple, du français ou de l'anglais. Et le volume de demandes qu'ils ont reçues, qui était faramineux... c'était en 2015, donc je ne veux pas dire de bêtises, mais c'étaient environ 50 000 demandes. Donc, le gouvernement a dû revoir le programme pour mettre des conditions plus sélectives.

M. Morin :  Bien. Donc là, présentement, il y a toujours un programme au Québec qui fonctionne, bon, au ralenti. Vous avez mentionné qu'il y a 3 800 personnes en attente présentement dans ce programme-là. Est-ce que j'ai... je vous ai bien compris?

M. Côté (Alex) : Effectivement. Dans la catégorie, pas juste dans le programme.

M. Morin : Dans la catégorie.

M. Tessier (Samuel) : Incluant les entrepreneurs, les investisseurs et les travailleurs autonomes. Actuellement, sur IRCC, là, en date du 9 octobre, on voit environ 93 mois d'attente, là, en effet, sur le site du gouvernement fédéral.

M. Morin : Oui, c'est...Bien, c'est ce que j'allais... Donc, ça, c'est des gens qui ont un intérêt pour venir travailler ou investir ici, au Québec, on se comprend, ou dans l'ensemble du Canada?

M. Tessier (Samuel) : C'est des gens qui ont déjà été sélectionnés par le ministère de l'Immigration et de la Francisation au Québec. Ils ont un avis d'intention, leur projet a été retenu, leur candidature a été sélectionnée et ils doivent attendre 93 mois ensuite pour passer l'admission fédérale. Et ça, c'est en ligne, avec le seuil d'admission de 450 vis-à-vis le nombre de personnes en attente.

M. Morin : OK.Mais, quand on regarde les différents scénarios qui sont projetés dans le cahier qu'a produit le ministère... corrigez-moi si je fais erreur, mais ces gens-là tomberaient dans la catégorie gens d'affaires?

Une voix : ...

M. Morin : Alors, selon le scénario 2A, la cible, c'est 250. Puis ça va jusqu'à 450 dans le scénario 2C. Là, on en a 3 800 en attente, c'est ça? Ça va prendre combien de temps?

M. Tessier (Samuel) : Dans 93 mois, selon le gouvernement fédéral, avec les seuils en vigueur. Naturellement, si on les baisse, bien, ça va être d'autant plus. Et donc on sait que les délais réels ne sont pas... ne sont pas de 93 mois, mais c'est une question d'arrimer les seuils d'admission...

M. Tessier (Samuel) : ...avec la sélection que le ministère fait en amont. Donc, le ministère sélectionne ces personnes-là, leur dit de venir sur le territoire avec des permis de travail C60, pour venir exécuter des projets commerciaux pour lesquels ils ont été sélectionnés. Et ensuite, mais ils doivent attendre près de 10 ans pour avoir une résidence permanente, ce qui est selon nous inacceptable.

M. Morin : Sauf que... Alors, mais si je vous comprends bien, le permis C60, c'est l'office fédéral qui donne, pas le Québec.

M. Côté (Alex) : Il ne faut pas faire un amalgame entre... C'est ça, il y a le volet temporaire et permanent. Et qu'est ce que je peux dire, c'est qu'il y a environ 3 800 individus selon... approximatifs, c'est difficile d'avoir toute l'information, qui sont en attente en ce moment, c'est l'arrérage qui a été créée par des gouvernements successifs. Et nous, qu'est ce qu'on se dit, c'est que les candidats qui sont sélectionnés et admis depuis le 1er janvier 2024, c'est des excellents candidats qui maîtrisent le français, qui viennent ici pour vivre et investir au Québec, et donc il faut s'assurer de ne pas pénaliser ces nouveaux candidats-là qui vont rentrer sur le territoire.

Je parlais tout à l'heure du monsieur qui a repris une entreprise au Saguenay, mais lui, il doit constater avec ce délai-là de 93 mois, même si, techniquement, lui, il va... il a fait son investissement, il va suivre les règles. Je ne pense pas qu'il est prêt à attendre sept ans, tout à fait, avant d'avoir sa résidence permanente, je pense que ce serait raisonnable de lui donner sa résidence permanente dans un délai comparatif avec les autres catégories d'immigration.

Donc, tout pour dire qu'on est dans le même scénario que 2023. 2023, on avait beaucoup plus de candidats, c'était 14 000 personnes. On est à... on est à 4 100. Il reste environ 3 800 personnes dans l'arriéré, selon moi, de tous les candidats avant le 1er janvier 24. Et donc il reste encore du travail à faire pour admettre ces gens-là, pour ne pas pénaliser les nouveaux candidats qui sont des candidats... des bijoux pour le Québec qui viennent ici pour vivre et investir.

M. Morin : Et les gens qui sont en attente avec le délai, je comprends qu'ils ont déjà fait leur contribution de 200 000 $ non remboursable, est-ce que je comprends bien?

M. Tessier (Samuel) : C'est exact. Mais en fait ils ont fait leur investissement. Les entrepreneurs ou les investisseurs, pour arriver au point de la résidence permanente aujourd'hui, avec les nouveaux programmes, doivent réaliser leurs engagements commerciaux, leurs investissements tels qu'ils ont été sélectionnés. Donc, sur la base de leur sélection, il y avait un projet commercial dans leurs dossiers, et donc ils l'ont réalisé, et donc ils sont en attente, en effet, une fois la réalisation, la concrétisation de leur projet. Et naturellement, mais on est sensibles, c'est nos clients, on leur parle à chaque jour, d'attendre 93 mois quand on est déjà en train de gérer, par exemple, une auberge à Saguenay, bien, c'est de l'angoisse, c'est des délais, c'est des permis de travail qui vont être renouvelés pendant des années. Et donc ces familles-là vivent beaucoup de stress. Ça leur coûte de l'argent. Et donc ils sont pris, en fait, dans un... dans un processus administratif très lourd et pénible.

M. Morin : Et quand c'est ces gens-là qui viennent ici pour investir, ils ont des familles, ça prend combien de temps à leur famille pour venir les rejoindre? Parce que, le permis, ça vise eux ou la famille au complet?

M. Tessier (Samuel) : Ils viennent avec toute la famille, normalement. Donc, les permis de travail ouverts pour le conjoint, les permis de travail... les permis d'étude pour les enfants dépendants.

M. Morin : OK. Très bien.

Une voix : ...

M. Morin : OK. Vous... vous parlez, à votre recommandation 7 à la page 3 dans votre mémoire, d'aligner les exigences de la catégorie avec les orientations de francisation et de régionalisation. J'aimerais ça que vous me parliez davantage de la régionalisation, parce que nos régions au Québec ont besoin d'entrepreneurs, ils ont besoin d'investissements. Ça fonctionnerait comment, concrètement, la recommandation que vous émettez?

• (15 h 40) •

M. Côté (Alex) : Bien, durant la dernière année, on a parcouru la francophonie pour rencontrer cette clientèle prospective qui aimerait venir vivre et investir au Québec. Et donc, bien, pour avoir du succès à la régionalisation, ça aiderait beaucoup de ne pas avoir des délais qui disent 93 mois quand on se présente chez quelqu'un pour leur expliquer qu'ils devraient venir s'établir au Québec et gérer une entreprise. Pour cette recommandation là, en particulier pour la recommandation 7, on parle bien du tableau de bord pour les retombées économiques ou...

M. Morin : ...c'est 6. 7, c'est aligner les exigences de la catégorie avec des orientations de francisation et de régionalisation.

M. Côté (Alex) : En fait, qu'est-ce qu'on voulait dire par ça, c'est que ça revenait un peu à la sélection, l'admission en continu, que techniquement, ces gens-là, c'est une... c'est une clientèle que tous les pays, toutes les provinces aimeraient accueillir. Je pense que c'est des gens qui sont hautement sollicités pour venir s'établir, peu importe, c'est quel le pays, et dont il faut s'assurer... avoir des processus efficaces qui sont... qui sont concrets, qui ne font pas du Québec une salle d'attente, là, pour... en matière surtout des délais au fédéral.

M. Morin : Bien. Bon, évidemment, le français, c'est hyper important pour le Québec. Donc, vous recommandez également que le gouvernement priorise les investisseurs francophones. Est-ce que j'ai bien compris?

M. Tessier (Samuel) : Actuellement, c'est fait, puis on le salue, en fait. On pense que peut-être...

M. Tessier (Samuel) : ...les niveaux de français sont un peu exigeants, donc on pourrait avoir un niveau moindre, comme la citoyenneté canadienne par exemple. Mais... mais on salue et on comprend le fait français dans les programmes des gens d'affaires, et donc ça fonctionne bien, et il y a de la demande. Toutefois, il faut être agiles, parce que c'est des gens qui sont sollicités. C'est des programmes compétitifs, il y a plusieurs pays qui vont offrir des processus d'immigration pour attirer les investisseurs avec du capital dans leur économie, et donc on croit que le Québec doit être... en fait, mieux se positionner sur ces programmes, notamment au niveau du programme investisseurs, pour attirer cette clientèle-là d'investisseurs francophones, qui vont venir s'établir, oui, avec un premier investissement de 1 million de dollars canadiens sur un bon du Trésor, mais également avec d'autres investissements subséquents, et leurs familles, sur le territoire.

M. Morin : Sauf que, si on veut prioriser des investisseurs francophones, dans les 3 800 en attente, j'imagine que ce n'est pas uniquement des francophones?

M. Tessier (Samuel) : C'est des gens qui ont été sélectionnés dans le passé, sur les anciennes moutures pré-2024, et donc, à ce moment-là, il n'y avait pas de condition linguistique sur leur sélection. Et donc c'est des gens qui ont des certificats de sélection en poche, qui ont des demandes, là, de résidence permanente en cours, et donc qui ont été sélectionnés par les gouvernements précédents, et on est d'avis que le gouvernement devrait assumer la sélection qui a été faite et donc vider l'inventaire, là, actuellement, en admission au fédéral.

M. Côté (Alex) : Et surtout, pour ne pas...

M. Morin : ...

M. Côté (Alex) : Désolé. Et surtout, pour ne pas pénaliser les candidats qui sont en arrière de la file, mais qui sont les candidats qu'en fait on veut être capables d'accueillir rapidement au Québec.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : En terminant.

M. Morin : Qui sont sur le territoire déjà?

M. Côté (Alex) : Certains oui, certains non.

M. Morin : OK. Merci.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. Alors, on termine avec le député du deuxième groupe d'opposition pour 4 min 8 s.

M. Fontecilla : Merci, Mme la Présidente. Bonjour, messieurs. Écoutez, je vous avoue que j'ai un peu de difficultés à voir les retombées de ces programmes-là et je vois qu'à la... votre septième point, mettre en place un tableau de bord annuel de performance économique pour la catégorie des gens d'affaires. Est-ce que ça veut dire qu'en ce moment on a... on manque de données pour évaluer ces retombées-là ou combien ont-ils... Des questions de... des débats de base : Combien cette masse déjà ont investi? Combien sont restés au Québec, etc. là? Qu'est-ce que vous pourriez nous dire par rapport à ça?

M. Tessier (Samuel) : Mais en fait, la mise en place d'un tableau de bord nous permettrait, un pour l'industrie, d'apprécier dans quelle région vont les personnes, dans quels secteurs d'activités investissent, puis à quelle hauteur, donc déjà pour avoir une compréhension de la sélection globale qui est faite par le Québec, pour les Québécois mais aussi pour... pour... pour mieux gérer la sélection pour... pour l'avenir. Et également, mais pour le public donc qu'il y ait... qu'il y ait une bonne appréciation de... des efforts qui sont faits en termes de recrutement d'investisseurs et d'entrepreneurs, puis leur impact économique sur le Québec. On pense que ça, c'est positif et ça devrait être mis de l'avant puisque c'est une immigration très favorable pour le Québec.

M. Côté (Alex) : Donc, je ne sais pas si on manque de données. Ceci dit, on le sait que le MIFI va demander des pièces justificatives afin d'émettre des CSQ pour confirmer que des transactions ont lieu. Ça, c'est dans le cadre du programme Entrepreneurs, que ce soit des repreneurs, des démarrages d'entreprises ou des entreprises innovantes. Et donc on sait que les données existent, et donc nous on pense que ça serait vraiment une bonne idée de partager cette information-là afin de montrer, en fait au public, les initiatives qui sont faites et qu'on a d'autres sortes de catégories d'immigration qui viennent contribuer du niveau sociétal, culturel et économique au Québec.

M. Fontecilla : Mais peut-être que ces données existent, mais elles ne sont pas publiques d'après ce que je comprends, là. Donc, en quelque sorte, nous, les députés ou le public en général, on navigue à vue en termes de... pour orienter, savoir l'utilité de ce programme-là, là.

M. Tessier (Samuel) : Tout à fait. On pense que c'est une immigration positive. Il y a... et...

M. Fontecilla : Mais vous n'êtes pas sûrs.

M. Tessier (Samuel) : Non, mais on le sait. Il y a des projets, il y a des entreprises qui pourraient fermer, qui pourraient être achetées par des investisseurs étrangers, donc des sièges sociaux de perdus. Donc, on pense que des entrepreneurs qui viennent faire le choix personnel, c'est des gens fortunés qui sont scolarisés, qui ont une expérience en gestion, qui viennent s'établir sciemment sur le territoire du Québec et investir leur capital, le mettre à risque dans notre économie, on pense que c'est très positif et ça maintient des emplois et ça en crée d'autres. Donc, après ça, de le mesurer et mesurer l'impact économique et sectoriel, on croit que c'est très pertinent et que ça devrait être mis de l'avant devant... devant le public québécois.

M. Fontecilla : M. le ministre parlait tantôt de l'ancien programme, là, qui était en fait un pont vers le transfert de ces investisseurs-là vers d'autres provinces canadiennes. C'est pour ça que... a été réformé, selon votre expérience. Est-ce que les nouveaux programmes améliorent la rétention de ces personnes-là ici au Québec?

M. Tessier (Samuel) : Sans équivoque. Dans l'ancien programme, on voyait que les personnes allophones, M. le ministre le mentionnait tout à l'heure, là, c'est environ 15 % de rétention au Québec, toutefois, était en...

M. Tessier (Samuel) : ...la rétention était au-delà de 90 % pour les candidats francophones. Et donc on prétend qu'en effet, là, la plupart des candidats francophones qui appliquent sur ce programme pour s'établir au Québec restent au Québec par la suite.

M. Fontecilla : ...des données pour le prouver objectivement, là, ça, j'ai compris ça, là.

M. Côté (Alex) : Et je pense que c'est important aussi de faire la nuance entre c'était un programme d'investissement, et d'immigration en second temps, l'ancienne mouture du programme investisseur, et là, maintenant, on veut un programme d'immigration qui a un volet investissement. Mais je pense qu'on peut trouver un meilleur équilibre en rendant le programme plus attrayant afin de générer plus d'investissements directs étrangers au Québec et, du coup, de financer plus la solution de financement du programme immigrant investisseur aide à l'entreprise d'Investissement Québec.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : En terminant.

M. Fontecilla : Très bien. Vous avez parlé d'abolir la contribution de 200 000 $. Les gens... Ces personnes-là doivent arriver avec un... de l'argent pour investir...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : C'est terminé. Alors, voilà, messieurs Côté et Tessier, nous vous remercions pour votre contribution à nos travaux. C'est apprécié. Je vais suspendre quelques instants, le temps de recevoir le prochain groupe.

(Suspension de la séance à 15 h 47)

(Reprise à 15 h 50)

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Donc, pour notre deuxième audition aujourd'hui, nous recevons le... M. Jean-François Daoust, professeur agréé à l'École de politique appliquée de l'Université de Sherbrooke. Professeur Daoust, j'imagine.

Professeur, bienvenue à la commission. Alors, si vous êtes un habitué, je vous répète ce que vous savez déjà. Vous allez bénéficier d'une période de 10 minutes pour présenter l'essentiel de votre mémoire et de vos recommandations. Par la suite, on va discuter avec les parlementaires. Alors, le micro est à vous pour les 10 prochaines minutes.

M. Daoust (Jean-François) : Merci beaucoup. Bonjour à toutes et à tous. Merci de prendre un moment pour m'écouter aujourd'hui.

Alors, comment le Québec devrait-il planifier ses politiques d'immigration des prochaines années? Il y a plusieurs aspects qui ont été considérés dans cette commission et qui continueront d'être considérés...

M. Daoust (Jean-François) : ...on parle beaucoup d'économie, d'équité, de justice. Vous avez déjà entendu beaucoup d'intervenants sur ces thèmes, notamment, dans les dernières minutes... Par contre, pardon, on parle très peu de l'opinion publique des Québécois et de son rôle. Et lorsqu'on en parle, c'est essentiellement encadré comme un outil politique, et la discussion tourne surtout autour des stratégies, notamment, électorales et de l'opportunisme politique. Mais l'opinion publique est beaucoup plus que simplement instrumentale, et aujourd'hui, j'aimerais vous parler de deux grands thèmes. Premièrement, je veux revenir sur l'idée de l'opinion publique comme étant centrale aux théories de la démocratie et à l'action gouvernementale, en l'accompagnant de quelques analyses en matière d'immigration. Deuxièmement, je veux aborder la notion de capacité d'accueil et de volonté d'accueil et argumenter que l'opinion publique devrait être systématiquement intégrée à la notion de capacité d'accueil, qui gagnerait, par ailleurs à être mieux circonscrite.

Alors, pour l'aspect normatif, il y a beaucoup de théories de la démocratie... Pour beaucoup de théories de la démocratie, l'opinion publique, qui mesure la volonté d'une population donnée, est cruciale pour évaluer ce qu'un gouvernement devrait faire. Autrement dit, il y aurait une valeur normative désirable à représenter la volonté générale. En fait, mes travaux montrent que, parmi les grands modèles théoriques de la représentation politique qui se concentrent soit sur, par exemple, les promesses électorales, l'opinion publique de la majorité ou encore la conscience individuelle morale des élus, bien, c'est l'opinion publique, la volonté de la majorité qui est, de loin, le critère le plus important aux yeux des citoyens, aux yeux des gouvernés eux-mêmes. Donc, ce n'est pas juste une affaire de théorie politique de philosophes, les citoyens eux-mêmes estiment que l'opinion publique est essentielle pour guider l'action gouvernementale.

Enfin, il y a tout un sous-champ académique complet sur la réactivité gouvernementale où on examine, essentiellement, si les politiques sont en concordance avec l'opinion publique et, si oui, on se demande si le gouvernement est plus réactif dans certains domaines ou pour certains groupes. Et on suppose toujours que la concordance entre l'action gouvernementale et l'opinion publique est une bonne chose, démocratiquement parlant. D'ailleurs, les acteurs politiques de toutes les orientations reconnaissent le caractère désirable de l'opinion publique lorsqu'ils défendent une idée partagée par la majorité. Ça ne veut évidemment pas dire que toutes les mesures souhaitées par l'opinion publique sont bonnes, ni même qu'elles devraient être mises en place. Parce que, bien sûr, l'opinion publique n'est pas le seul critère.

Mais déjà de reconnaître qu'elle est un critère tout à fait noble parmi d'autres, nous informant de la désirabilité d'une politique, c'est aller au-delà des lieux communs, voulant que l'opinion publique ne serve qu'à être instrumentale. Bref, tout ça soulève la question : Dans le cas de l'opinion publique en matière d'immigration, à quoi ressemble l'opinion publique et quelle est la volonté des Québécois en matière d'immigration? Je me concentre seulement sur les données des études électorales canadiennes, car elles permettent des comparaisons dans le temps, de 2000 à 2021, puis j'utilise les sondages de l'Association d'études canadiennes, de 2019 à 2025, pour compléter les séries temporelles. On pourra reparler de la méthodologie, sans problème, dans la période d'échange, si vous voulez. D'emblée, je peux dire qu'il n'y a rien de parfait, les données de sondage utilisées ne sont pas parfaites, mais elles ont quand même plus de mérite que de limites et peuvent être, somme toute, tout bien pesé, assez utiles selon moi.

Alors, les données du graphique 1 que vous avez reçu, il n'y a pas si longtemps que ça — désolé, je ne l'ai pas envoyé beaucoup d'avance, j'ai un petit bébé de quatre mois à la maison qui me tient occupé — mais vous l'avez reçu il a environ deux heures de temps. Alors, si on regarde les données du graphique 1, on voit qu'il y a eu, pendant assez longtemps, essentiellement, deux décennies, il y a eu un consensus relatif par rapport au nombre d'immigrants que le gouvernement devrait admettre, c'est-à-dire qu'en moyenne, entre l'année 2000 et 2021, donc, sur plus de deux décennies, environ 50 % des gens pensaient que le gouvernement devrait admettre le même nombre de personnes. Donc, il y avait un consensus assez relatif pendant plus de 20 ans. Il y avait seulement moins du tiers, environ 30 % des Québécois qui souhaitaient que le gouvernement en admette moins. Or, cette proportion a littéralement doublé à partir de 2024, jusqu'à nos jours.

En moyenne, depuis 2024, c'est essentiellement 60 % des Québécois qui souhaitent que le gouvernement admette moins d'immigrants. C'est beaucoup 60 %, surtout qu'il y a très probablement un biais de désirabilité sociale qui sous-estime cette proportion-là dans les données de sondage. Et l'avantage d'utiliser une question classique, disons-le comme ça, sur le niveau souhaité d'immigration, une question simple, mais à trois catégories, hein, est-ce que le gouvernement devrait admettre plus, moins ou, à peu près, le même nombre d'immigrants? Bien, ça permet... L'avantage, c'est que ça permet des comparaisons à travers le temps. Parce que la question est régulièrement posée, mais elle est quand même limitée en termes de gradation, parce que ça reste seulement trois catégories.

Alors, si on se concentre sur un sondage, un seul sondage de 2024 qui, lui, est plus précis, mais a moins de comparaisons dans le temps, bien, ça nous permet de voir un petit peu plus clair en termes de gradation. Ce sondage-là avait cinq catégories, posait essentiellement la même question, mais il y avait cinq catégories plutôt que trois, et cinq catégories allaient de fortement diminuer l'immigration, à fortement l'augmenter. Et ce qu'on voit, c'est que...

M. Daoust (Jean-François) : ...comme les données présentées au graphique 1 en 2024, il y a essentiellement 65, 66 % des Québécois qui souhaitent une réduction de l'immigration, mais, sur les 66 %, il y en a 40 % qui souhaitent fortement diminuer le nombre d'immigrants au Québec et 26 % souhaitent une diminution qui serait légère. Donc, 40 plus 26 nous donnent 70 % de réduction, mais 40 % souhaitent une forte réduction.

Alors, en somme, il y a eu un changement très important dans l'opinion publique au point où, depuis environ deux ans, c'est une forte majorité qui souhaite une réduction de l'immigration. Si on accepte qu'on ne doit pas balayer du revers de la main l'opinion publique pour les raisons que j'ai mentionnées précédemment, alors l'orientation à préconiser serait de diminuer assez fortement l'immigration au Québec, à moins que d'autres critères pointent dans d'autres directions. Mais c'est, selon moi, les personnes qui argumenteraient qu'il ne faut pas diminuer l'immigration qui ont un fardeau supplémentaire, considérant ce que je viens de mentionner.

Les autres critères incluent notamment la capacité d'accueil qui est mon deuxième point. Alors, en plus de l'aspect normatif de l'opinion publique, tenir compte de l'opinion publique apparaît encore plus important en matière d'immigration, comparativement, par exemple, à d'autres domaines, parce que, justement, l'opinion publique devrait informer notre conception de la capacité d'accueil. D'abord, je tiens à mentionner que cette notion-là devrait être mieux définie, et le fardeau revient surtout au gouvernement à cet égard. Mais c'est sûr que, quand on parle de capacité d'accueil, on parle beaucoup d'habitation, on parle des services de l'État, en santé notamment. Mais l'opinion publique est, selon moi, centrale à la notion de capacité d'accueil. Pourquoi? L'argument est très simple, une volonté d'accueil est propice à une meilleure intégration des personnes immigrantes, ce que tout le monde souhaite, une meilleure intégration des personnes immigrantes. À l'inverse, sans volonté de la société d'accueil, il y a plus de risques de tension sociale. Or, tel que mentionné précédemment, les Québécois actuellement n'ont pas cette volonté d'accueillir davantage de personnes immigrantes. L'intégration, c'est bien fait pour la majorité des gens déjà sur le territoire, mais elle est compromise par la cadence des dernières années qui n'est pas adéquate selon la population, et ce n'est pas sans conséquence. On conviendra, tout le monde, ici qu'une intégration désirable comprend une intégration linguistique, le français étant la langue commune au Québec. Or, les analyses du Commissaire à la langue française illustrent que cette intégration linguistique de l'immigration ne répond pas aux attentes pour maintenir le français comme langue commune à long terme, et cela se reflète dans l'opinion publique. Mes recherches académiques récentes montrent que le sentiment de menace linguistique, plus précisément la perception individuelle des Québécois que le français est menacé au Québec, est en augmentation et est corrélé avec le solde migratoire international.

Le graphique 2 que vous avez reçu suggère une réactivité de l'opinion publique, c'est-à-dire qu'une augmentation de la perception que le français est menacé au Québec est reliée au solde migratoire, tel que mentionné. Le coefficient de corrélation, on pourra en reparler si vous voulez, mais il est très fort pour des données en sciences sociales. C'est rare qu'on voie des corrélations de cette ampleur-là. Alors, évidemment, l'immigration n'est pas la seule cause du déclin du français au Québec ni de l'augmentation de la perception du sentiment de menace, mais c'est très clair que l'immigration et les politiques en immigration actuelles y contribuent. Et mes analyses semblent boucler un peu la boucle, de façon complémentaire, à celle du Commissaire à la langue française, ça semble boucler la boucle d'un cercle qui ne me paraît pas pas du tout vertueux, en montrant que le solde migratoire contribue aussi à l'augmentation du sentiment de menace, ce qu'on appelle parfois, en psychologie sociale et dans un milieu académique, le sentiment de menace de groupe. Et ce sentiment de menace n'est pas, toutes choses étant égales par ailleurs, particulièrement souhaitable. Il crée des conditions davantage propices aux tensions sociales. Et, encore une fois, c'est moins propice à une intégration réussie des personnes immigrantes.

Alors, pour conclure, j'aimerais simplement rappeler que l'opinion publique devrait être considérée, parce que, contrairement aux lieux communs, elle est utile et ne sert pas simplement à des considérations instrumentales. Elle a une valeur normative et elle est particulièrement utile dans le cas des politiques d'immigration, car non seulement elle nous donne une bonne idée de l'orientation générale qui est désirée, mais aussi elle est utile pour mieux circonscrire la volonté d'accueil qui devrait faire partie, selon moi, de la notion de capacité d'accueil. Et, sur ça, ça me fera plaisir de répondre à vos questions. Merci beaucoup.

• (16 heures) •

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Pr Daoust, merci beaucoup pour cette présentation. On commence la période d'échange avec les parlementaires. On va commencer avec le ministre et la banquette gouvernementale. Évidemment, vous avez toujours 16 min 30 s, M. le ministre.

M. Roberge : Bonjour, M. Daoust. Merci pour votre présentation très intéressante, très différente de d'autres intervenants, pas parce que vous êtes en désaccord, parce que vous abordez un sujet différent. C'est ça qui est intéressant, dans des consultations comme ça, d'avoir une pluralité de points de vue. Vous arrivez avec un pas de recul, vous n'avez pas un intérêt personnel, votre groupe non plus, à ce qu'il y ait plus ou moins de nouveaux arrivants dans telle ou telle catégorie...


 
 

16 h (version non révisée)

M. Roberge : ...et vous ne vous dites pas : Il faudrait qu'il y en ait plus, il faudrait qu'il y en ait moins, il faudrait qu'il y en ait plus dans telle ou telle autre catégorie? Et ce que vous nous dites, essentiellement, c'est : Tenez compte de l'avis des Québécois, grosso modo. Oui, allez-y.

M. Daoust (Jean-François) : Oui, oui, je pense qu'il y a... et il y a un réflexe dans l'espace public, là, pas juste les acteurs politiques, là, mais il y a un réflexe dans l'espace public au Québec, de balayer la volonté générale qui, souvent, est mesurée par l'opinion publique, mais j'aimerais simplement rappeler qu'il y a quand même une valeur normative à l'opinion publique. Alors, oui, je pense qu'il faut la considérer. Dans ce cas-ci, la tendance ou la volonté générale, elle est plutôt claire en matière d'immigration. Ça, c'est un point effectivement que j'aimerais rappeler.

Le deuxième point, c'est aussi que l'opinion publique devrait être intégrée à la notion de capacité d'accueil qui, je suis sûr, fait partie... je n'ai pas écouté toutes les audiences de la commission, mais probablement centrale à cette notion-là, à vos débats et à votre réflexion dans l'élaboration des politiques d'immigration.

M. Roberge : Vous n'êtes pas ici en tant que porte-parole de M. Mme Tout le monde et de la nation québécoise, vous nous dites juste : Faites attention à ce qu'il dit. Mais plein de gens sont venus sur cette chaise-là et peu ont tenu des propos disant : Il y a peut-être trop d'immigrants sur le territoire québécois. Comment ça se fait qu'une grande majorité de groupes qui viennent en commission nous disent le contraire de ce que pensent les Québécois?

M. Daoust (Jean-François) : Il y a plusieurs raisons possibles, mais c'est sûr que... en fait, on le sait, il y a un biais de sélection qui se présente en commission parlementaire, et généralement, c'est... en général, c'est... quand on est un groupe, on a des intérêts à défendre, on a des membres, on est un syndicat, peu importe. Et, dans ce cas-ci, il peut y avoir des groupes qui soient plus actifs s'ils ont des intérêts particuliers à défendre. Donc, c'est qu'en fait, en la commission parlementaire, l'objectif non plus n'est pas... n'est pas de représenter l'opinion publique en soi, hein? Il y a des invitations, il y a des mémoires qui sont déposés, et puis ce n'est pas l'opinion publique qui est représentée, qui est défendue, ce sont des groupes. Et ces groupes-là ne sont pas distribués de façon aléatoire à représenter l'ensemble des points de vue de la population. Si c'était le cas, probablement que la tendance générale des opinions qui ont été véhiculées à cette chaise-ci ne serait pas nécessairement la même.

M. Roberge : Parce que plusieurs groupes arrivent, ce sont des professionnels qui font autant de politique que moi et les autres députés ici, ils ne sont pas des élus à l'Assemblée nationale, mais ils forment ce qu'on appelle du lobby, ils sont inscrits au registre... C'est tout à fait noble et légal et correct, on a le droit de faire du lobby au Québec, c'est même balisé, etc., mais ils arrivent ici, payés, pour représenter un groupe, ont une vision un peu corporatiste, ils viennent défendre l'intérêt de leurs membres ou même l'intérêt de leurs membres les plus vocaux, arrivent avec... en disant : Bien, moi, mon groupe aimerait qu'on ait plus de tel type d'immigrants parce que ça serait bon pour mes membres. Et arrive un autre groupe après, puis il dit : moi, mon groupe voudrait qu'on aille plus de telle catégorie d'immigrants parce que c'est ça que mes membres veulent. C'est bon pour mon entreprise, c'est bon pour... ça amène de l'argent, ça amène, etc.

Et la somme de ces opinions diverses là n'a rien à voir avec les enquêtes sur l'opinion publique des Québécois qui, comme vous nous le démontrez, ne sont pas des racistes, ne sont pas des xénophobes, ne sont pas des personnes refermées sur eux-mêmes, ce sont juste des personnes qui disent : Oui, mais l'augmentation est forte ces dernières années. Puis c'est Pierre Fortin, lui, qui dit que c'est l'expansion migratoire qui a eu un impact sur notre attitude envers l'immigrant. Puis il dit : C'est grave, c'est même grave pour notre avenir collectif.

Donc, on veut des nouveaux arrivants, on est ouverts, on a toujours été ouverts au Québec, mais s'ils en arrivent un peu plus que ce qu'on est habitué puis qu'on voit des enjeux de chômage chez les jeunes, d'accès au logement ou de coûts du logement, ou que notre enfant, dans sa classe, a devant lui ou un enseignant qui est non qualifié parce qu'on a une pénurie d'enseignants, bien là, les gens disent : Bien là, comme dit M. Fortin, l'expansion migratoire amène un changement de posture...

M. Roberge : ...mais si je n'écoute que les différents groupes qui disent chacun : Moi mes membres veulent telle sorte, moi mes membres veulent telle catégorie d'immigrants, moi, mes membres veulent telle catégorie d'immigrants. Est-ce qu'il n'y a pas un danger, est-ce qu'il y a un ressac dans l'opinion publique puis que l'opinion publique bascule dans des camps de droite et d'extrême droite comme on a vu au sud de la frontière?

M. Daoust (Jean-François) : Bien, je prendrai la question en deux temps. D'abord, tel que vous le mentionnez, les gens qui viennent ici, souvent, ils ont des intérêts à défendre. Ce sont beaucoup des lobbies, des groupes et même souvent qui défendent un sous-groupe parmi leurs membres, généralement les plus vocaux, ceux qui participent le plus, qui ont une influence souvent plus importante que les autres membres au sein du groupe, et c'est une bonne chose que ces gens-là arrivent en commission et représentent. Tout le monde est d'accord avec ça, c'est une bonne chose, on veut entendre le plus de points de vue possible et. Et par ailleurs, ça se peut très bien qu'il y ait un groupe qui a de meilleurs arguments que d'autres et même qui pointent dans le sens inverse de l'opinion publique et qu'ultimement c'est cette position-là qui va, à travers le temps, réussir à convaincre l'opinion publique. Donc, c'est une bonne chose de les entendre.

Mais après, une fois qu'on a entendu ces groupes-là, soit de la société civile, soit... soit des... des représentants des groupes d'intérêts, c'est au gouvernement à faire l'arbitrage entre d'autres considérations, en intégrant évidemment les considérations qui ont été exprimées en commission parlementaire, mais en intégrant d'autres considérations, et c'est là, selon moi, qu'aussi que l'opinion publique joue. Et là, selon moi, le pas malsain qu'on a... le réflexe malsain qu'on a au Québec, c'est que lorsqu'on dit : Je vais faire l'arbitrage de ce qui s'est dit entre autres en commission parlementaire, en intégrant la volonté des Québécois et des Québécoises, bien, tout de suite, on pense en termes de stratégie, notamment stratégie électorale. Mais à la base et en termes... ça peut être ça, ça peut être ça. Mais en termes de théorie de la démocratie, faire le contraire me paraîtrait particulièrement contre-intuitif. Comment on peut ne pas vouloir tenir compte de l'intérêt général? Alors, c'est un peu embêtant parce que lorsqu'on tient un discours qui fait référence à la volonté générale ou à une majorité de Québécois, c'est normativement désirable d'un point de vue de la démocratie, mais on est rapidement accusés d'électoralisme ou de faire preuve de stratégie politique, ou d'avoir une coalition restreinte d'électeurs pour maintenir son pouvoir pour soit se rendre au pouvoir ou le maintenir. Alors, je pense que c'est une bonne chose d'écouter toutes sortes de groupes, toutes sortes d'individus en commission parlementaire. Après, c'est au gouvernement à faire l'arbitrage de toutes sortes de considérations. J'ai mentionné l'opinion publique, évidemment l'opinion représentée, puis les arguments des groupes, mais il y en a d'autres, autres les promesses électorales. D'un point de vue de la représentation politique, c'est important. La conscience individuelle des élus, c'est important. Bref, c'est au gouvernement à faire l'arbitrage, mais c'est sûr qu'on ne doit pas considérer l'ensemble des groupes qui sont... qui s'assoit à cette chaise-ci comme étant... Il ne faut pas penser que la somme de ça... il ne faut pas penser que la moyenne serait la meilleure politique publique. La moyenne de ces interventions-là serait la meilleure politique publique donnée, donc premièrement.

• (16 h 10) •

Deuxième élément, pour ce qui est de Pierre Fortin et la cadence insoutenable des politiques d'immigration des dernières années qui affecteraient les attitudes des Québécois envers l'immigration, c'est probablement vrai. Je n'ai pas les tests... j'ai n'ai pas fait les tests moi-même, ça m'apparaît tout à fait plausible sans que je puisse me prononcer. Par contre, je peux vous dire que si je change la variable dépendante, et plutôt qu'on tente d'expliquer la perception de menace, de menace linguistique. Donc, quand on demande aux gens une question toute simple, claire : Pensez-vous que le français est menacé au Québec? Bien, on voit que c'est en constante augmentation puis que c'est fortement corrélé tel qu'illustré au graphique 2, c'est fortement corrélé avec le solde migratoire international du Québec, et ça, ça crée un sentiment d'insécurité et ça ne me paraît pas souhaitable en 2025. Et on en a vu des sociétés où le sentiment d'insécurité s'est... s'est accru à travers les dernières années décennies, et ça ne semble pas souhaitable au Québec qu'on ait de plus en plus de gens qui soit insécures linguistiquement parlant. Ça peut mener à des tensions sociales et alimenter des... des inégalités.

M. Roberge : C'est ce qu'on ne veut pas. Le Commissaire à la langue française, un peu comme vous, expert, non pas porte-parole de... d'un groupe ou de membres qui le paient pour dire X ou Y est venu nous dire un peu ce que vous nous dites. L'Institut du Québec aussi est venu nous dire un peu ce que ce que vous nous dites. L'enjeu aussi, c'est qu'il y a des groupes qui ne sont pas représentés dans ce genre de consultations. On a les groupes patronaux très, très bien...

M. Roberge : ...plusieurs. Des fois, ils viennent l'entité... la fédération puis, après ça, chacun des membres. Des groupes d'institutions d'enseignement viennent aussi. Des organismes communautaires viennent aussi. Mais, par exemple, des... personne ne vient nous parler au nom des 18-30 ans qui ont de la misère à se trouver un logement. Ça n'existe pas, l'Association des gens dans la vingtaine qui peinent à se trouver un logement. Il n'y a pas de fédération, il n'y a pas de regroupement qui vient porter cette voix-là. Il n'y a pas non plus l'Association des... ou le Regroupement national des francophones qui s'inquiètent du déclin de la langue française au travail, par exemple. On n'a pas ça. Bien, heureusement, on a des experts, on a des chiffres, on a des données. Puis je prends ces données-là, j'interroge les gens qui viennent pour dire : Bien, qu'est-ce que vous pensez de... Mais c'est peut-être la zone d'ombre dans la consultation, quoiqu'elle soit éclairante, parce qu'il y a quand même une pluralité de points de vue puis il y a des gens qui nous amènent des choses auxquelles on n'avait pas pensé, et ça, c'est très éclairant.

Vous avez parlé d'une espèce d'acceptabilité sociale qui amène une plus grande capacité d'accueil. Je trouve ça intéressant parce qu'on a adopté, il n'y a pas très longtemps, une loi sur notre modèle d'accueil au Québec, qui s'appelle l'intégration nationale. On a rejeté le multiculturalisme canadien, on a dit : On a notre manière de vivre ensemble au Québec, on veut notre cohésion sociale, puis ça repose sur le principe d'une responsabilité partagée. Il y a l'État, qui doit fournir un cadre pour les nouveaux arrivants, il y a les nouveaux arrivants, qui ont des devoirs : apprendre la langue, apprendre la culture, puis il y a la société d'accueil, les gens qui sont là, les humains, là, pas juste des... pas juste le gouvernement, mais bien M., Mme Tout-le-monde, qui ont un rôle aussi à jouer pour avoir de la mixité puis des relations interculturelles. Relations interculturelles, ce n'est pas entre 10 personnes de nations différentes qui viennent d'arriver ici, mais ça implique aussi les gens qui sont ici, qui sont nés ici. Et il faut que ces gens-là soient d'accord avec l'arrivée de nouveaux arrivants pour dire : Bien, tiens, je vais aller le voir, je vais aller l'interroger sur son parcours, je vais l'inviter chez moi à Noël, je vais l'inviter à mon barbecue. Il faut qu'il y ait ce désir-là. Le danger, c'est peut-être de ne pas suffisamment les écouter.

Mais, maintenant, comment on fait pour que votre intervention, pour que cette perspective-là aille au-delà de votre présentation puis que des gens qui tiennent compte de la volonté des Québécois ne se fassent pas traiter de populistes dans le sens négatif du terme, là? Populistes dans le terme... Je ne sais pas. Je n'ai jamais trouvé, là, que le mot «populiste» était une insulte, mais on me l'a déjà lancé comme une insulte, donc je ne sais pas trop comment le prendre, là. Mais comment on fait pour réhabiliter le souci de tenir compte de l'opination... l'opinion des Québécois comme étant quelque chose de sain et de normal en démocratie?

M. Daoust (Jean-François) : Première façon, c'est de rappeler que ça fait partie des théories de la démocratie puis que c'est quelque chose de souhaitable, comme j'ai tenté de le faire aujourd'hui. Ça, c'est un... la partie un peu plus... un peu plus facile.

Une autre façon, qui ne répond pas directement à la question, mais une autre façon un peu de... peut-être de... pas détendre le climat, mais de nuancer un peu à quel point les gens sont polarisés et où on devrait voir ce débat-là ou ce thème-là comme étant polarisé tient dans le fait que les enquêtes sur l'opinion publique nous permettent parfois... pas tout le temps, mais parfois d'analyser les résultats par sous-groupes. Et on... intuitivement, ça fait partie de notre logique de système médiatique au Québec et ailleurs dans le monde, mais souvent on dichotomise. Dans le cas de l'immigration, du dossier de l'immigration, c'est souvent les gens de la société d'accueil qui ne penseraient pas différemment. Il y aurait l'opinion publique d'eux et il y aurait l'opinion publique des personnes immigrantes, soit de première ou deuxième génération. Il y aurait aussi les personnes de la société d'accueil qui sont surtout, pour la majorité, blanches, francophones. Et, encore une fois, on les... on dichotomise ces catégories de personnes là, ces groupes socials là, qui se distinguent sur des caractéristiques sociodémographiques, et on tend à les opposer. Bien, les enquêtes d'opinion publique nous permettent quand même de nuancer ça. Et, sur un sujet aussi sensible que l'immigration, ce qu'on voit, c'est : lorsqu'on regarde les francophones par rapport aux non-francophones, par exemple, bien, leur opinion publique n'est pas si différente que ça, hein...

M. Daoust (Jean-François) : ...dans les deux cas, il y a une majorité qui souhaite une réduction de l'immigration,, et dans les deux cas, la catégorie la plus... la catégorie modale, qui est la catégorie la plus choisie dans le sondage, c'est : fortement diminuer l'immigration. Certes, cette catégorie-là est choisie plus fortement par les francophones, mais, au final, ça reste une majorité dans les deux cas. Donc, c'est 70 %, par exemple, chez les francophones qui veulent fortement diminuer ou légèrement diminuer l'immigration, c'est 52 % chez les non-francophones. Donc, dans tous les cas, l'option, la voie, l'orientation générale, elle est la même. Alors, ça, il faudrait peut-être relativiser quand on présente le débat public. Et c'est la même chose lorsqu'on regarde... là, j'ai mentionné francophones, non-francophones, mais c'est la même chose lorsqu'on regarde les personnes qui s'identifient comme étant des personnes blanches par rapport aux minorités visibles. On ne l'a pas dans tous les sondages...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : En terminant.

M. Daoust (Jean-François) : ...et un exemple, par exemple, les personnes qui veulent moins d'immigration, chez les personnes qui s'identifient comme étant blanches, 32 %, contre 26 % chez les minorités visibles. Il y a une différence, mais elle est... elle est très mince.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup, le temps est terminé. On poursuit avec le député d'Acadie, pour une période de 12 min 23 s.

M. Morin : Merci, Mme la Présidente. Alors, Pr Daoust, bonjour, merci d'être avec nous en commission cet après-midi. Merci également pour les graphiques que vous nous avez fait parvenir. Je comprends que les graphiques... est ce que ça fait partie d'un article que vous avez écrit, publié?

M. Daoust (Jean-François) : Ça dépend lequel. Le graphique 1 ou le graphique 2?

M. Morin : Le graphique 2.

M. Daoust (Jean-François) : Le graphique 2, oui, c'est... ça fait partie... pardon, je le regarde... le graphique 2, bien, en fait, c'est qu'il y a deux types de données. Dans le graphique 2, il y a la perception... il y a le pourcentage de gens qui estiment que la langue française est menacée au Québec, et puis, ensuite, il y a le solde migratoire. Donc, la perception que le français est menacé au Québec, ces chiffres-là, oui, c'est tiré d'un article qui est accepté pour publication à la Revue canadienne de science politique. Donc, ces données-là viennent de là, mais, à la base, la source originale, c'est les études électorales canadiennes. Et pour ce qui est du solde migratoire, dans le même graphique, ça vient de l'Institut de la statistique du Québec.

M. Morin : OK, je comprends. Mais ça ne fait pas partie d'un article que vous avez écrit.

M. Daoust (Jean-François) : L'article porte sur... plus précisément, sur la perception que le français est menacé au Québec.

M. Morin : OK, je comprends. Et ça, ça a été publié dans la Revue canadienne de science politique?

M. Daoust (Jean-François) : C'est à paraître.

M. Morin : C'est à paraître. Mais c'est accepté. OK.

M. Daoust (Jean-François) : Donc, c'est accepté pour publication, ça a passé le processus de révision à double aveugle, et c'est à paraître.

M. Morin : Parfait. Merci beaucoup. Vous nous avez parlé de l'opinion publique, de la volonté du public. Et est-ce que je vous ai bien compris si vous dites qu'entre autres l'opinion publique est un élément important dont devrait tenir compte l'action gouvernementale?

• (16 h 20) •

M. Daoust (Jean-François) : Oui, tout à fait. Il y a plusieurs facteurs qui sont... qui sont centraux. J'ai mentionné les... bien, selon les grandes théories de la démocratie, là, il y a les promesses électorales, où ce serait ça qui serait central, pour que les citoyens tiennent responsables leurs gouvernements. Il y a la... il y a un modèle qui se concentre sur la conscience morale individuelle des élus. Donc là, l'accent est mis sur la qualité individuelle... la qualité du jugement d'un élu individuel. Il y a un autre modèle qui se concentre sur l'opinion publique, au sens où là, ça devrait être surtout la volonté générale. L'élu a fait des promesses électorales, a son propre jugement, mais devrait surtout tenter de maximiser la représentation de la volonté générale.

Donc, il y a ces grands modèles théoriques là, et il y en a d'autres. Et, par exemple, dans un des articles scientifiques que j'ai publiés avec des collègues, notamment, Ruth Dassonneville, on isole l'effet causal de ces trois critères là, et ce qu'on voit c'est que les trois critères jouent, hein? Les gens veulent que les politiciens tiennent leurs promesses électorales, veulent qu'ils agissent selon leur propre conscience et qu'ils suivent l'opinion publique. Mais on peut quantifier la force relative de chacun des trois critères, et c'est l'opinion publique qui est la plus centrale, le plus centrale.

M. Morin : La plus centrale?

M. Daoust (Jean-François) : Oui, qui est le plus important.

M. Morin : Donc, au fond... et là ça vous permet, après ça, d'affirmer que... et si je vous comprends bien, qu'en fait c'est tellement central que ça peut devenir une valeur normative. Est-ce qu'on se comprend bien?

M. Daoust (Jean-François) : Oui, c'est qu'il y a une valeur. Il y a quelque chose de normativement désirable à suivre la volonté générale. Pas systématiquement, nécessairement, parce qu'il y a d'autres critères. Entre autres, il y a des critères juridiques, qu'il faut qu'ils soient mobilisés. Mais il y a quelque chose de désirable à représenter la population.

M. Morin : Très bien...

M. Morin : ...Et cette opinion publique là, le pouls de la population. Est-ce qu'on est d'accord pour dire que quand un sondage est fait scientifiquement, ça peut être un indicateur? Parce qu'il faut que le politicien, bon, évidemment, sa conscience, il vit avec, les promesses qu'il a faites, il s'en souvient, mais après ça, bien, pour qu'il prenne le pouls, les sondages, ça peut être un moyen scientifiquement, évidemment, prouvé, n'est-ce pas?

M. Daoust (Jean-François) : Tout dépend du sondage.

M. Morin : Oui, mais si on prend par exemple des firmes de sondage reconnues, ça peut être valable parce que sinon, comment on fait pour avoir le pouls de l'opinion publique?

M. Daoust (Jean-François) : Mais ça dépend. En fait, la réponse courte serait «oui, s'il a un bon sondage». Maintenant, un bon sondage, ça ne veut pas juste dire par une firme crédible, il faut regarder des critères... là, commençons par ceux qui sont dans la loi électorale par exemple, où les médias, ils sont obligés de mentionner, par exemple, qui a payé pour le sondage, quel était le libellé exact de la question, ensuite est ce qu'il y a des biais, des biais de sélection, des biais de désirabilité sociale, toutes sortes de choses comme ça, mais ultimement, oui, c'est possible, puis c'est prouvé à travers des décennies de recherche. L'opinion publique, là, c'est un champ académique en soi. Donc, c'est prouvé que c'est possible, mais ce n'est pas systématiquement... ce n'est pas automatiquement le cas dans la... en fait...

M. Morin : Mais c'est quand même un bon indicateur.

M. Daoust (Jean-François) : Ça peut l'être.

M. Morin : Et donc, théoriquement, un politicien, quand il y a un sondage, devrait un peu regarder ce que ça dit puis après ça, bien, réfléchir à la suite.

M. Daoust (Jean-François) : Il devrait tenter de regarder, oui, la volonté générale, à tout le moins l'orientation, oui.

M. Morin : Exact. Tout à fait. Alors, bien, écoutez, avec ce qu'on a lu ce matin dans les journaux, il y a des politiciens qui auront à réfléchir. Ça, c'est mon premier commentaire.

Mais deuxièmement, récemment, un sondage Léger et Léger, tu sais, quand on parle du... de la valeur normative de l'opinion publique, il y a un sondage Léger et Léger qui rappelait qu'en matière de regroupement familial au Québec, et moi, c'est un dossier que je porte avec beaucoup d'intérêt, on demandait : Dans quelle mesure êtes-vous en accord ou en désaccord avec les affirmations suivantes? Les délais de traitement pour réunir des familles québécoises devraient respecter la durée de traitement canadienne de 12 mois, 67 % des gens sondés par la firme qui est reconnue sont en accord. Est-ce que vous savez c'est combien, le délai, présentement pour le regroupement familial au Québec suite aux décisions du gouvernement de la CAQ?

M. Daoust (Jean-François) : Non, je ne sais pas.

M. Morin : 39 mois, 39 mois. Pourtant, il y a 67 % des gens sondés qui disent qu'on devrait ramener ça à la moyenne canadienne.

Autre question : Faciliter le regroupement familial devrait être une priorité importante pour les gouvernements fédéral et provincial Québec en matière d'immigration? 64 % sont en accord. Si je me fie, et je vous écoute, et vous êtes un expert, à l'entretien, et aux recommandations, et à votre opinion que vous venez de nous donner, c'est important pour un politicien de tenir compte de l'opinion publique. L'action gouvernementale devrait, évidemment, ce n'est pas la seule chose, mais devrait être en partie fondée sur l'opinion publique, puisque ça peut avoir une valeur normative. Est-ce que vous êtes d'accord avec moi que le gouvernement aurait intérêt à écouter l'opinion publique et à agir rapidement pour le regroupement familial? Parce que, quant à moi, ce que le gouvernement fait, c'est inhumain.

M. Daoust (Jean-François) : Je ne peux pas... je ne peux pas commenter directement parce que j'ai l'impression que la question est cadrée comme étant de façon très, très positive puis que c'est dur de dire non et, en plus, elle ne dit rien sur le nombre, donc on pourrait très bien dire : Bien oui, il faut accélérer les demandes, mais on en veut 14 fois moins. Donc, je ne vais pas me prononcer là-dessus parce que je ne connais pas le contexte autour de ce sondage-là, mais on est bel et bien d'accord que l'opinion publique est une considération qui devrait certainement être examinée par les politiciens.

M. Morin : Tenir compte le gouvernement... par le gouvernement. Je vous remercie. Je n'ai pas d'autres questions, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Bien, merci beaucoup. Alors, on poursuit avec le député... Laurier-Dorion. J'ai eu un petitblanc pendant quelques instants. La parole est à vous.

M. Fontecilla : Combien de temps, Mme la Présidente?

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Bien là, avec l'ajout des minutes qui n'ont pas été prises par votre collègue, c'est 8 min 8 s. 

M. Fontecilla : Merci. Bonjour, M. Daoust. Merci beaucoup de nous apporter votre éclairage particulier, en effet, là. Écoutez, beaucoup se...

M. Fontecilla : ...de vos propos. Vous avez fait état d'une, comment dire, d'une évolution de l'opinion publique concernant l'immigration, là, plutôt négative, d'après ce que j'ai compris. Et donc la question que je me pose sur cette question-là, c'est parce qu'il y a plusieurs... Il y a plusieurs, comment dire, termes du débat. Il y a la réalité qui est comme une... une boîte, là, une montre scellée qu'on a de la misère parce qu'on ne tient pas... on ne connaît pas toute la réalité. Il y a l'opinion publique, c'est-à-dire que les gens se font une idée sur cette réalité-là. Il y a le pouvoir politique, le ministre, le gouvernement, l'opposition, etc., là. Qui influence qui dans cette trilogie-là? Est-ce que c'est l'opinion publique qui influence les... la parole des politiciens ou c'est la parole des politiciens qui influencent l'opinion publique?

M. Daoust (Jean-François) : C'est une bonne question. Je vais la prendre en deux temps, là. Je vais commencer par la première partie. Vous avez mentionné qu'il y a une évolution, et qui serait négative à travers le temps. Je ne dirais pas qu'elle est négative. Je dirais qu'il y a de plus en plus de gens qui veulent réduire l'immigration au Québec. Donc, c'est passé d'essentiellement 30 % à 60 %, 65 % des gens qui veulent réduire l'immigration. Mais pour moi, ça, ce n'est pas... Le mot «négatif» est ambigu parce que, pour moi, l'évolution des attitudes qui serait plus négative, ce serait plutôt la valeur attribuée à la contribution de l'immigration. Et pour ça, il ne semble pas y avoir beaucoup de changement. Les gens continuent à reconnaître la valeur ajoutée de l'immigration au Québec à travers le temps. Par contre, ils considèrent que, bien, pour toutes sortes de considérations, il devrait... l'immigration nette devrait être réduite. Donc, je ne suis pas... Je ne suis pas contre...

M. Fontecilla : ...n'est-ce pas?

M. Daoust (Jean-François) : Bien ça, c'était sur la deuxième partie, pour la... le sentiment de menace linguistique...

M. Fontecilla : Parfait.

M. Daoust (Jean-François) : ...qui n'est pas directement... envers l'immigration. Donc, dans un premier point, là, on pourrait reparler du sentiment de menace linguistique, si vous en voulez. Votre deuxième question s'articule... Bon, vous avez mentionné trois sphères. Ça peut se faire dans plusieurs directions, c'est-à-dire que le discours politique peut influencer les attitudes des gens. Les attitudes des gens peuvent influencer le positionnement politique puis ce que les politiciens vont dire. Et généralement, ce que... ce que les études nous montrent, c'est... Bien, d'une part, c'est très, très dur d'isoler l'effet causal de qui influence qui, mais que lorsqu'on a des bons designs, des bons devis de recherche pour le faire, ce qui est plutôt rare, ça nous dit que les deux jouent. Ça nous dit qu'à la fois le discours du politique influence les attitudes et que les attitudes influencent les positionnements, surtout politiques. Donc, ce n'est pas... Ce n'est pas nécessairement un ou l'autre ou les deux, ça peut être plusieurs.

M. Fontecilla : Plusieurs. Il y a un quatrième terme dans ce système-là, c'est le pouvoir médiatique aussi qui joue un rôle et qui influence peut-être beaucoup plus que le pouvoir politique.

M. Daoust (Jean-François) : Oui. Par exemple, ne serait-ce que de choisir quelles paroles on va rapporter au Téléjournal, par exemple, et ensuite comment on va rapporter et comment on va l'analyser. C'est sûr que les médias peuvent jouer un rôle important. En même temps, il y a une partie... Les médias sont influencés par ce que les gens veulent entendre, ce qu'ils considèrent important. Et donc, encore une fois, l'influence ici peut être bidirectionnelle ou multidirectionnelle si on a plus que deux... deux sphères, là.

• (16 h 30) •

M. Fontecilla : Dites-moi si je me trompe, là, mais des fois on peut avoir... J'ai l'impression, en tout cas, qu'il y a une sorte de découplage entre la réalité, un fait réel objectif et l'opinion qu'on se fait sur ce fait réel là. Je vais vous donner un... Je vais faire un parallèle, là, les changements climatiques. Il y a plein de scientifiques qui disent que ça existe, mais il y a quand même un courant, un courant fort, là, on va le dire, qui dit que ça n'existe pas. Et par-dessus ça, on fait de la politique. Quel est le rôle et quelle est la... Et je veux arriver à la notion de responsabilité du pouvoir politique. Quelle est la responsabilité du pouvoir politique par rapport à ce découplage-là? Est-ce que c'est dire, oser aller... pas... in extremis, aller à l'encontre de l'opinion pour... d'un courant politique en disant : Vous vous trompez. Les changements climatiques existent, ou dire non, vous avez raison, ça n'existe pas? Donc, je vais légiférer dans un des deux sens

M. Daoust (Jean-François) : Donc, si on avait une vision où vraiment ce n'est que l'opinion publique, là, on se retrouverait dans la dernière situation que vous avez décrite c'est-à-dire que si les gens nous disent que ça n'existe pas, le gouvernement devrait dire que ça n'existe pas. Mais heureusement ce n'est pas que l'opinion publique qui joue. Par contre, je pense qu'il faut amener une distinction vraiment importante entre des objets qui seraient, des objets d'étude, qui seraient objectifs, ou des objets qui sont considérés dans les débats qui sont objectifs versus subjectifs, comme par exemple des opinions ou des attitudes. Là, vous avez mentionné les changements climatiques qui est, selon moi, quelque chose qui est mesurable objectivement parlant, mais aussi par exemple, pensons à... à, par exemple, l'effet des vaccins, hein? Tout d'un coup, si les gens...


 
 

16 h 30 (version non révisée)

M. Daoust (Jean-François) : ...majorité des gens pensent que les vaccins peuvent causer des choses qui ne sont pas souhaitables, par exemple, que serait le rôle du gouvernement? Bien, je pense que la distinction, elle est vraiment importante. Lorsque c'est quelque chose d'objectif que la communauté scientifique sait vraiment, et, souvent, c'est davantage en sciences naturelles plus qu'en sciences sociales, je pense qu'il n'y a pas de raison pour le gouvernement d'aller contre ça. Et alors que quand c'est dans des attitudes ou des opinions ou des questions de valeurs, là, ce n'est pas la même chose, parce qu'il n'y a pas de réalité objective en tant que telle, et ça dépend vraiment de la perception subjective des gens. Alors, s'il y a une majorité de gens qui croient ci ou ça d'un groupe ou d'un autre groupe, c'est quand même... on pourrait argumenter que l'opinion publique n'est pas au même... n'est pas en adéquation avec la réalité qui devrait être, les perceptions qui devraient être, mais c'est quand même différent que lorsqu'on aborde des choses objectives, comme, par exemple, les vaccins, l'effet des vaccins sur toutes sortes de maladies.

M. Fontecilla : Il y a la notion de responsabilité, mais je vous amène à un thème qui nous préoccupe, là, la capacité d'accueil. Vous avez parlé de capacités versus volonté... volonté d'accueil. Là, on tombe dans des... on est dans un champ... ce n'est pas des sciences pures, là, mais vous avez mentionné la nécessité de la définir, vous n'êtes pas le seul d'ailleurs, là, et le débat tourne beaucoup autour de ça, c'est-à-dire, on doit réduire le seuil d'immigration parce qu'on a dépassé notre capacité d'accueil ou on doit... ou le contraire. Donc, quelle est votre pensée par rapport à cette notion de capacité d'accueil ou versus volonté d'accueil?

M. Daoust (Jean-François) : En fait, je pense que les deux sont des notions importantes et distinctes et... en fait, la notion de capacité d'accueil mériterait à être définie. Et le point que j'essaierais de faire, l'argument que j'essaierais de faire, c'est de dire que la volonté d'accueil devrait être intégrée comme étant une composante importante de la notion de capacité d'accueil. Alors, si on s'imagine une espèce de rond, là, qui est la capacité d'accueil, on va bien sûr avoir le nombre de logements disponibles au Québec, la capacité de notre système de santé d'absorber d'autres patients, le système d'éducation, tout ce qu'on connaît, les classiques, mais je pense qu'on doit ajouter une sous-bulle, si on veut, dans ce cercle-là, qui est la volonté d'accueil. Pourquoi? Parce que, sans cette volonté d'accueil là, même si on a assez de logements, même si on a la capacité dans le système de santé et d'éducation, si cette volonté d'accueil là n'est pas là, je pense qu'il y a beaucoup plus de risques d'alimenter des tensions sociales et de créer ou de produire ou reproduire des inégalités.

Alors, je pense que les deux notions sont distinctes. La première devrait être mieux définie puis mieux pondérée. On doit attribuer un poids relatif à chacun des critères. Et surtout, l'argument que je souhaite faire aujourd'hui, c'est que la volonté d'accueil devrait être un des sous-critères de la capacité d'accueil. Est-ce que c'est clair?

M. Fontecilla : Oui.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci. Merci beaucoup, M.... Pr Daoust. C'était vraiment intéressant. Alors, je vous... je vous souhaite une bonne fin de journée. Et, pour les collègues, je vais suspendre quelques instants, le temps de recevoir notre prochain groupe. Merci.

(Suspension de la séance à 16 h 35)

(Reprise à 16 h 40)

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Alors à l'ordre, s'il vous plaît! La commission reprend ses travaux. Donc, pour notre troisième, nos troisième, notre troisième groupe d'invités, c'est le Regroupement des cégeps de régions, qui est représenté par M. Sylvain Gaudreault, j'allais dire un vieux routier de la politique, mais j'allais dire, il ne serait pas content de ce qualificatif. Il y a d'autres qualités que ça, il est maintenant président et directeur général du cégep de Jonquière, bienvenue dans votre enceinte; Mme Julie Gasse, qui est directrice générale du cégep de Rimouski; ainsi que M. André Gobeil, directeur général du cégep de Chicoutimi.

Alors, madame, messieurs, bienvenue à l'Assemblée nationale. Donc, vous connaissez le principe. Vous avez 10 minutes pour vous présenter et présenter l'essentiel de votre mémoire, de vos commentaires. Et, par la suite, nous allons en discuter avec les parlementaires. Alors, le micro est à vous pour les 10 prochaines minutes.

M. Gaudreault (Sylvain) : Merci, Mme la Présidente. Je voudrais saluer évidemment les membres de la commission, les députés qui sont sur la Commission des relations avec les citoyens. Le Regroupement des cégeps de régions vous remercie de nous accueillir aujourd'hui dans le cadre de cette importante consultation pluriannuelle en immigration. D'abord, une petite présentation du Regroupement des cégeps de régions. Nous sommes évidemment tous membres de la Fédération des cégeps du Québec, mais le Regroupement des cégeps de régions regroupe les 12 cégeps dans les régions ressources, donc, les cégeps de Gaspésie, Bas-Saint-Laurent, Côte-Nord, Saguenay—Lac-Saint-Jean et Abitibi-Témiscamingue, et nous nous réunissons, nous nous regroupons pour faire ressortir...

M. Gaudreault (Sylvain) : ...les réalités et les intérêts, là, particuliers des cégeps en région. On partage tous une même mission, assurer l'accessibilité, la vitalité et le rayonnement de l'enseignement supérieur dans toutes les régions du Québec.

Comme vous le savez, les cégeps de région sont des acteurs économiques, sociaux et culturels essentiels qui contribuent à l'attractivité de nos milieux, à la rétention des jeunes et à l'intégration réussie des personnes immigrantes. Vous me permettrez de souligner la disparition récente du grand sociologue Guy Rocher, le père du réseau collégial québécois. M. Rocher, comme vous le savez, avait compris, dès la création des cégeps et la rédaction du rapport Parent, que le savoir devait être un moteur de développement régional et un levier d'égalité des chances. Donc, c'est dans cet esprit de M. Rocher que nous poursuivons aujourd'hui son œuvre, celle d'un Québec qui mise sur l'enseignement supérieur pour bâtir des communautés fortes et inclusives partout sur le territoire.

Vous avez reçu notre mémoire. Je ne veux pas le lire mot à mot, vous l'avez. Mais je veux quand même insister sur nos principales recommandations. D'abord, une planification pluriannuelle prévisible et adaptée aux réalités régionales. La discussion lancée par le gouvernement sur la capacité d'accueil du Québec en matière d'immigration est une démarche que nous accueillons favorablement. Concernant la planification pluriannuelle proposée, pour qu'elle soit véritablement efficace, nous croyons qu'elle doit s'inscrire dans une durée minimale de trois ans. Cette stabilité est essentielle pour amener les établissements... aux établissements, c'est-à-dire, la prévisibilité nécessaire afin de planifier adéquatement leurs effectifs, leurs programmes et leurs investissements. Chaque région connaît des besoins distincts en matière de main-d'œuvre et de démographie, donc offrir une marge d'adaptation annuelle régionale permettrait une meilleure répartition des étudiants sur le territoire au bénéfice de l'ensemble du Québec.

Nous recommandons ainsi aussi la mise en place d'un mécanisme d'autonomie régionale dans la gestion et l'attribution des certificats d'acceptation du Québec pour les étudiants internationaux. Également, le plafonnement actuel des dépenses en infrastructures, on a eu l'occasion d'en parler dans d'autres tribunes, doit être aboli. Nos cégeps ont besoin d'espace, de ressources également pour accueillir adéquatement la relève étudiante, qu'elle soit d'ici ou d'ailleurs.

Deuxièmement, on propose une gestion équitable et prévisible de l'immigration temporaire. Les décisions récentes en matière d'immigration étudiante, notamment les décrets, qui limitent le nombre de nouveaux étudiants internationaux, ont eu des conséquences majeures dans nos régions. On pourra en reparler tout à l'heure avec vos questions. Ces mesures, prises sans consultation préalable, fragilisent des programmes qui sont déjà vulnérables et limitent la capacité d'action des cégeps régionaux.

On a quelques recommandations à ce sujet. Par exemple, les cégeps doivent être exemptés de toute limitation d'accueil concernant les étudiants internationaux. Les contraintes devraient viser uniquement les institutions à l'origine, j'insiste là-dessus, à l'origine des problèmes identifiés et non de l'ensemble du réseau. Les décrets qui limitent les nouvelles admissions doivent donc être levés.

Le recours à de tels processus unilatéraux ne doit plus se reproduire. Les décisions en immigration doivent être concertées, prévisibles, alignées sur les besoins du marché du travail. Les renouvellements des certificats d'acceptation ne devraient pas être inclus dans les quotas. Le gouvernement devrait envisager de confier aux cégeps, en tant qu'organismes parapublics autonomes, le rôle de mandataire pour l'émission des certificats d'acceptation étudiants, à l'image de leur rôle actuel dans l'aide financière aux études. Cela assurera une meilleure cohérence et une gestion plus proche des réalités du terrain.

Finalement, nous recommandons... Nous recommandons aussi la mise en place d'un mécanisme interne au réseau pour identifier les programmes à protéger selon les besoins réels des régions, plutôt qu'une liste figée établie de manière centralisée. Bref, les cégeps publics de région font preuve d'exemplarité dans leur gestion étudiante et dans leur accompagnement de leurs étudiants internationaux. Comme vous le savez, ça a d'ailleurs été reconnu par le commissaire à la langue française, M. Dubreuil.

Troisième élément, l'immigration permanente, c'est un levier de vitalité régionale. Pour nos établissements, le passage des étudiants internationaux vers la résidence permanente est un vecteur essentiel de rétention et de vitalité. Or, certaines mesures actuelles compromettent cette transition. Là-dessus, on recommande d'inclure une exemption pour les diplômes des programmes d'études... collégiaux, donc les DEC, une exemption quant au niveau de français exigé pour l'obtention d'un permis de travail postdiplôme. Et on demande au gouvernement de nous appuyer là-dessus dans leurs revendications auprès du gouvernement fédéral. Parce qu'un étudiant qui sort avec un DEC dans les cégeps du Québec a déjà forcément passé l'épreuve uniforme de français, ce qu'on appelle l'EUF...

M. Gaudreault (Sylvain) : ...Et, pour nous, bien, c'est inutile que le gouvernement fédéral exige un deuxième test de français pour ces étudiants.

On demande également de rétablir le Programme de l'expérience québécoise dans sa version antérieure parce que sa suspension prive les régions d'une main-d'oeuvre qualifiée qui est déjà intégrée à nos milieux de vie.

Nous demandons également d'assurer une meilleure coordination entre le PEQ et les permis de travail postdiplôme afin de garantir la cohérence des politiques dans ce domaine de compétence partagée.

En conclusion, les cégeps de région sont prêts à jouer pleinement leur rôle dans l'accueil, la formation et l'intégration des personnes immigrantes. C'est également dans nos établissements que sont enseignées les valeurs québécoises, notre culture, notre langue. Une... Une planification pluriannuelle en immigration efficace se doit d'intégrer quatre éléments clés à ses orientations structurantes, soit la vision, l'autonomie, la prévisibilité et la consultation des parties prenantes. Le RCR invite le gouvernement à prendre davantage en considération ces éléments pour ainsi reconnaître la triple nécessité de respecter le rôle essentiel des cégeps, de travailler en concertation avec eux et de laisser les cégeps gérer de manière autonome leur capacité d'accueil.

Je terminerais, Mme la Présidente, en vous disant que, depuis certainement 25 ans, les gouvernements successifs au Québec, tous partis confondus, ont travaillé pour régionaliser l'immigration. Ça fait 25 ans qu'on parle de ça. Nous, nous constatons que la meilleure clé pour garantir la régionalisation de l'immigration, c'est certainement l'admissibilité, l'admission des étudiants internationaux dans nos cégeps, en français, et dans des milieux où ils vont se développer un réseau, qu'ils vont parfois rencontrer, même, leur conjoint et conjointe future, qu'ils vont s'établir en région, qu'ils vont faire leur stage, qu'ils vont découvrir des milieux de travail, puis qu'ils vont rester en région.

Il y a des députés de région ici, autour de la table, là, et vous le savez tous que les étudiants internationaux dans nos cégeps deviennent des citoyens, deviennent des ressources humaines, deviennent des actifs pour le développement de nos régions. Puis on est fiers que les cégeps dans les régions y contribuent de façon puissante.

Alors, merci de nous recevoir. Maintenant, on est prêts à recevoir vos... vos questions, puis avec mes collègues, que je n'ai pas présentés, Julie Gasse, directrice générale du cégep de Rimouski, et André Gobeil, directeur général du cégep de Chicoutimi, une circonscription orpheline. Merci.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Alors, merci pour cette présentation. On a beaucoup de réflexions et de recommandations. On va donc entamer les discussions avec la banquette gouvernementale et M. le ministre. Seize minutes 30 secondes.

• (16 h 50) •

M. Roberge : Merci beaucoup. Bien hâte de remédier à cette situation de circonscription orpheline. Heureux d'accueillir ce nouveau ou cette nouvelle députée dans votre formation politique. Bonjour! Rebienvenue à l'Assemblée nationale. Content de vous voir, de vous revoir, d'échanger avec vous. Entre amoureux du Québec, de l'enseignement supérieur et des régions, on va trouver des points de convergence, c'est sûr.

J'étais content de... d'entendre, dans votre... dans votre présentation, votre désir d'avoir des discussions. Vous accueillez favorablement la discussion sur la capacité d'accueil. Je trouve ça intéressant. Parce qu'il y a des gens qui, au fil des rencontres... vous n'êtes pas le premier groupe à passer, là, nous disent que ça n'existe pas, la capacité d'accueil, tu sais, que plus de monde qui arrive, par magie, plus que l'espace se crée, puis c'est comme infini, là. Alors que je pense qu'il faut avoir un débat là-dessus. Il faut voir de quelle manière on est capables d'accueillir de la meilleure façon, en considérant les espaces, en considérant le taux de chômage puis les opportunités qu'il y a définitivement, dans vos institutions, d'accueillir des étudiants étrangers. J'y crois beaucoup. Votre final, j'aurais pu dire exactement ces mots-là. C'est clair que la régionalisation de l'immigration passe définitivement en bonne partie par l'établissement en région de nouveaux arrivants, soit dans des cégeps, soit dans des universités. J'y crois fondamentalement. Il faut que ça continue.

Je trouve dommage qu'il y ait eu des baisses cette année d'étudiants étrangers dans vos institutions. Ce n'était pas l'intention avec la loi 74. On a donné le même nombre de CAQ que les années précédentes. Et ça a été... D'après ce que je comprends, il n'y a pas d'établissement de votre regroupement qui a atteint son quota. Donc, ce n'est pas comme si...

M. Roberge : ...le quota avait forcé de refuser des gens. Le contexte a été difficile pour accueillir tout ce monde-là.

Je m'étonne par contre que vous vous demandiez d'être exempté de toute limitation de capacité d'accueil. Il y a comme plus aucune limite, plus aucune cible, ou peut-être que je vous ai mal compris, mais il me semble que, sans imposer des plafonds qui vous empêchent d'accueillir les étudiants que vous aviez il y a un an puis en vous permettant même une certaine croissance, c'est quand même normal pour un État qui fait une planification de l'immigration, bien, de fixer des seuils ou des cibles ou des objectifs même positifs, qui peuvent impliquer des accroissements de population. Mais de dire qu'il n'y a plus de cibles, plus de limite, il me semble, que c'est contraire à l'exercice que l'on fait. J'aimerais ça vous entendre à ce sujet-là.

M. Gaudreault (Sylvain) : Oui. Bien, vous savez, dans le fond, ce sur quoi nous insistons, c'est sur l'autonomie de nos institutions pour gérer nos capacités. Je vais laisser mes collègues compléter. Mais on tient particulièrement à répéter que les situations qui ont causé des problèmes par le passé ne découlent pas de l'action des cégeps publics. Les cégeps publics... dans les collèges publics, les cégeps dans les régions du Québec, ceux que nous représentons puis ceux de la Fédération des cégeps du Québec, bien sûr, ont su très, très bien gérer le recrutement, l'admissibilité, l'accueil et l'intégration des étudiants internationaux. Et ce qui conduit les autorités publiques, le gouvernement, le ministère, les médias également à parler des problèmes qui ont été, dans certains cas, là, importants, dans certains milieux, bien ça ne découle pas de l'action ou de l'inaction, je dirais, ou d'une mauvaise gestion des cégeps.

Veux-tu compléter ou... Julie?

Mme Gasse (Julie) : M. le ministre, moi, je voudrais rebondir sur la lecture qui est faite à l'effet que nous n'avons pas atteint les quotas qui nous avaient été accordés. Je pense qu'il y a quand même une combinaison de facteurs qui a fait en sorte qu'on est arrivés avec ce résultat-là. Il y a eu des décisions au niveau fédéral qui ont laissé présager à la clientèle internationale. Peut être que ce serait plus compliqué de rentrer au pays, et c'est assurément une couche, ça, qui a été assez importante dans la partie décisionnelle, le choix de ces personnes-là de continuer de poursuivre leur cheminement vers... vers le Québec. Alors, dans... ce qu'on a constaté, c'est que cette impression-là qui avait été dégagée du fait qu'il y avait des resserrements, tant au niveau fédéral que provincial, a laissé sous-entendre à ces étudiants-là qui étaient déjà en cheminement pour s'en venir au Québec qu'il aurait peut-être plus de freins. Ça les a découragés, et ils ont opté peut-être pour d'autres destinations pour lesquelles c'était peut-être plus sûr d'avancer dans leur projet de formation.

M. Gobeil (André) : Si je peux me permettre d'ajouter sur cet élément-là? C'est à géométrie variable dépendamment des cégeps. Lorsque vous avez imposé le décret, vous avez dit : Bon, mais on va prendre le même CAQ que vous aviez dans le passé. Il y a des cégeps qui ont eu... qui ont fait un travail d'orfèvre pour déterminer le nombre exact de CAQ qu'on devait émettre. Il y en a d'autres qui ont dit : Bien, nous, on continue d'en émettre plus, puis on verra de quelle façon ça va se gérer à l'interne. Donc, c'est sûr et certain que, dans un contexte où, comme Julie l'évoque, il y a eu une baisse d'intérêt pour venir étudier au Québec à cause des différentes mesures tant fédérales que provinciales, mais qu'on se retrouve dans une situation où on n'a peut être pas réussi à émettre tous les CAQ qui nous étaient autorisés. Donc, il y a des cégeps où on n'en a pas assez de CAQ, il y a d'autres cégeps qui en ont trop parce qu'il y avait, entre autres, cette géométrie variable là dans la... dans la gestion de ces documents importants.

Puis je reviens sur votre dernière intervention par rapport au fait que... qu'on est là et on vous dit : On ne veut pas nécessairement de limite. Il m'est apparu une image. C'est comme la personne qui fait des marathons, qui est un athlète, qui a un poids santé, qui s'entraîne et qui est en top shape. Mais vous lui dites : Je ne comprends pas comment ça se fait que tu ne veux pas avoir mon régime. C'est exactement ce que les cégeps ont fait par le passé, c'est-à-dire qu'on est efficaces, on le fait bien, on a bien travaillé nos politiques d'immigration, d'accompagnement de nos étudiants. On est vraiment, je dirais... dans les sacoches. Mais vous nous dites : Pourquoi vous ne voulez pas faire mon régime? On n'en a pas besoin, on le fait bien, puis on le fait très, très bien. Puis je pense que les gens de nos communautés en périphérie de nos cégeps, ils sont... ils sont reconnaissants du travail qu'on fait puis de la capacité qu'on a d'accueillir nos étudiants, puis de les amener vers les emplois qui sont disponibles dans leur milieu. Donc, c'est pour ça qu'on arrive devant vous avec... Tu sais, on n'a pas besoin de limite, on l'a toujours fait bien. Moi, c'est mon troisième...

M. Gobeil (André) : ...collégial, j'ai été à Matane, j'ai été à Rivière-du-Loup, puis maintenant je suis au Saguenay, et puis, à chaque fois, on a travaillé avec les étudiants internationaux de façon impeccable. Et lorsqu'arrive une mesure comme celle que vous avez posée, on a été un peu surpris. On aurait aussi aimé peut-être travailler avec vous en amont. On aurait pu vous dire comment ça se passe, un peu plus, puis de quelle façon on aurait peut-être pu trouver des éléments plus chirurgicaux sans nécessairement en arriver avec cette mesure d'impact que vous nous avez proposée.

M. Roberge : Bien, la discussion va se poursuivre, assurément. Vous avez mon numéro, ceux de mon équipe et celui de la nouvelle ministre de l'Enseignement supérieur. Parce que, oui, il y a la planification pluriannuelle, et je précise que les universités puis les cégeps publics ne sont absolument pas dans la mire pour des réductions d'étudiants étrangers. Il y a, je vous dirais, des... vous avez dit des mauvais joueurs ou des gens qui ont travaillé à la marchandisation, à la fois du savoir, des programmes courts et de la citoyenneté québécoise et canadienne pour en faire une espèce de modèle d'affaires. C'était légal, mais on s'attache et on s'attaque, je vous dirais, à colmater ça. On ne veut pas, d'aucune manière, s'en prendre à nos institutions régionales. Puis, à la phase deux, l'an passé, c'était la phase un, on pourra peut-être avoir plus de flexibilité, là. Vous avez... On veut s'arranger pour être sûr de donner de l'air à nos institutions régionales, que l'on... que l'on chérit. Donc, je vais m'arrêter là-dessus parce que j'ai, je pense, des collègues qui veulent poursuivre les échanges avec vous. Peut-être que je reprendrai la parole, mais, sinon, je vous remercie infiniment pour présence puis votre contribution.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci, M. le ministre. Suis-je surprise de voir que le député de Jonquière a des questions? Il vous reste encore 7 min 40 s.

M. Gagnon : Parfait. Merci, Mme la Présidente. C'est un plaisir d'accueillir à l'Assemblée nationale ceux qui ont traversé le parc des Laurentides. Et vous, Mme Gasse, qui avez longé le fleuve. M. le Président, vous avez fait mon travail avant moi pendant 17 ans, c'est un plaisir de vous accueillir aujourd'hui à l'Assemblée nationale.

M. Gaudreault (Sylvain) : ...

M. Gagnon : Quinze?

M. Gaudreault (Sylvain) : ...

M. Gagnon : Peut-être. N'empêche que, maintenant, quand je vais vous voir dans votre cégep, vous faites un très bon travail puis vous nous sensibilisez toujours à : Yannick, on a un privilège dans notre région, quatre cégeps, universités. À chacune de nos rencontres, vous le martelez, puis c'est important de l'entendre. C'est important de l'entendre, puis ça montre aussi bien votre implication aussi, quand on voit toute la délégation.

Je faisais lecture du rapport. Je vais y aller avec une première question. Vous proposez une voie rapide pour la CAQ. Quand vous parlez de voie rapide, vous parlez de retirer peut-être différentes formations ou programmes...

M. Gaudreault (Sylvain) : Pour le CAQ. Pour le CAQ.

M. Gagnon : Pour le CAQ, excusez... Retirer différentes formations puis programmes pour le processus habituel de le CAQ. Pouvez-vous élaborer? Dans le fond, quand on parle de la voie rapide, mais... dans le fond, quand je regarde les statistiques, le traitement d'une demande est assez court. 80 %, c'est 25 jours. Ça cause...

• (17 heures) •

M. Gaudreault (Sylvain) : Bien, en fait, ce qu'on déplore, c'est que, d'abord, du côté du décret, là, avec les quotas, ça a complexifié beaucoup les choses pour le recrutement d'étudiants. D'abord sur la tombée du décret, comme telle, qui était en février, qui ne correspondait pas à nos périodes de recrutement à l'international. Deuxièmement, le décret avec les quotas incluait les renouvellements, donc, les renouvellements de certificats, donc pour des étudiants qui doivent renouveler parce que leur parcours se poursuit ou qui sont... leur certificat est échu, donc ils doivent le renouveler. Donc, déjà là, ça diminuait également les... c'est-à-dire, ça allongeait les procédures.

Et l'autre élément, c'est la complexité des... je vous dirais, des relations fédérales-provinciales. C'est pour ça qu'on demande un meilleur arrimage. D'abord, le rétablissement du PEQ, le Programme expérience Québec, avec les modalités autour du permis de travail post-diplôme. Et on demande également d'avoir... qu'il n'y ait pas de double test de français, parce que, comme je le disais tout à l'heure dans ma présentation, vous savez, les étudiants qui sortent avec un DEC ont tous fait l'épreuve uniforme de français... puis il a fait quatre cours de littérature et l'épreuve uniforme de français qui est déjà plus sévère, je dirais, ou qui va plus loin, en termes de connaissances ou de compétences, que les tests du fédéral. Donc, nous, ce qu'on dit, c'est : Est-ce qu'on peut aller plus rapidement, là, sur ces choses-là...


 
 

17 h (version non révisée)

M. Gagnon : ...puis, si je peux me permettre, M. le ministre dit toujours qu'on est là pour écouter. J'aimerais vous entendre davantage — C'est la première fois qu'on entendait ça — dans les recommandations, «un mécanisme interne pour les programmes en région».

Une voix : ...

Mme Gasse (Julie) : Bien, dans le fond, ce qu'il faut voir, c'est que les cégeps en région ont différents programmes, des programmes qui ne remplissent pas nécessairement à 100 %. Des fois même, on a des programmes à faibles effectifs qui fait en sorte qu'on n'atteint pas le seuil minimal avec nos étudiants québécois pour démarrer ces cohortes-là. Alors, c'est sûr qu'en accueillant des étudiants de l'international, ça nous permet d'assurer le lancement de ces cohortes-là, de démarrer ces programmes-là et, de fait, diplômer éventuellement des gens qui vont soutenir, comme disait mes collègues, là, tout le tissu socioéconomique et communautaire de nos régions.      Alors, ce qu'on souhaite par ce mécanisme local là, si on veut, c'est être capable d'être en mesure de dresser un portrait plus exact, plus proche des besoins de nos régions qui sont associées à nos programmes techniques, souventefois, pour être en mesure de bien... avoir un bon nombre d'étudiants pour bien répondre à nos industries, santé et organismes sociocommunautaires.

M. Gagnon : Merci.

M. Gobeil (André) : Cette délégation-là, on le voit déjà, on est... entre autres, dans nos établissements, c'est nous qui gérons l'aide financière. Donc, si on gère l'aide financière, on pourrait aussi gérer des émissions tout en faisant les redditions de comptes qui sont associées à ce genre d'opération.

M. Gaudreault (Sylvain) : Autrement dit, comme vous le savez, un étudiant, par exemple, qui a un besoin d'un support ou qui... pas qui postule, mais qui fait une demande d'aide financière, prêt ou bourse, bien, c'est géré localement, ans nos cégeps, on a des bureaux d'aide financière. Alors, nous, on dit : Ça, c'est un modèle qui marche, qui fait confiance aux instances locales. Alors, est-ce qu'on ne pourrait pas faire la même chose avec les certificats... d'admission du Québec?

M. Gagnon : Je termine avec un choix, Mme la Présidente. Je souhaite tout simplement que les deux représentants du Lac-Saint-Jean repartent avec des pneus d'hiver. On dit qu'il ne fait pas beau... C'est tout pour moi.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Est ce qu'il y a d'autres questions? Oui, M. le ministre, il vous reste encore 2 min 27 s.

M. Roberge : Je reprends... rapidement. Vous avez parlé du Programme d'expérience québécoise Diplômés, le fameux PEQ Diplômés, qui est comme la voie royale, un outil de vente incroyable à l'étranger. Je me fais un peu critique de ça, parce qu'il est très attractif, évidemment, mais il est automatique, c'est-à-dire que quelqu'un qui arrive ici, peu importe dans quel domaine il étudie, peu importe que ce soit en région ou en ville, peu importe que ce soit dans un secteur où on a réellement des pénuries ou un autre secteur où on a même un surplus de main-d'œuvre automatique, on donne le CSQ.

Dans un contexte où notre capacité d'accueil, je pense qu'elle est dépassée, pas dans toutes les régions, mais à l'échelle du Québec, je fais cette nuance. Il faut choisir. On ne peut pas dire oui à tout le monde qui veut venir vivre au Québec cette année, on le voit, il y a plus de 600 000 temporaires, puis ça pourrait être plus que ça. Dans ce contexte-là, plein de gens veulent venir, on ne peut pas prendre tout le monde. Est-ce que ce n'est pas normal de sélectionner des diplômés du Québec, bien sûr, mais dans des secteurs et dans des régions, plutôt que de dire : Tout le monde gagne?

M. Gaudreault (Sylvain) : Vas-y, Julie.

Mme Gasse (Julie) : Bien, je pense qu'on est passé du tout au tout. On est passé peut-être d'une voie avec un potentiel qui n'avait pas de limite à un arrêt. Alors, je pense qu'il faut trouver peut-être un chemin, entre les deux, pour permettre justement à ce que nos régions, mais aussi d'autres... Quand je parle de régions, je parle des régions administratives à ce moment-ci, je pense que, dans l'ensemble du Québec, on a une certaine évolution à appuyer par le domaine de la formation, par l'arrivée de l'immigration aussi, qu'elle soit via la formation ou en dehors des circuits de la formation. Mais je pense qu'il y a peut-être une façon de mieux cibler l'arrivée de ces personnes-là, soit par rapport aux besoins aux régions, soit par rapport à qu'est-ce qu'on veut aussi dans l'avenir pour notre Québec, tout simplement.

M. Roberge : Merci beaucoup. Ça répond très, très bien à la question. Merci.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. Alors, on en est rendu au tour de l'opposition officielle pour 12 min 23 s.

M. Morin : Merci, Mme la Présidente. Alors, M. Gaudreault, Mme Gasse, M. Gobeil, bonjour. Merci d'être là avec nous. Vous avez parlé de l'importance de la prévisibilité et de la planification dans le domaine de l'immigration, et il y en a plusieurs, que ce soit dans des cégeps ou universités, qui sont venus nous dire que le programme du PEQ était un excellent programme...

M. Morin : ...j'écoutais M. le ministre. Avec la suspension, est-ce qu'on est passé d'un scénario où tout le monde gagne à tout le monde perd?

M. Gobeil (André) : Je peux y aller. Ce qui est... Je pense, l'impact qu'on vit depuis un an et demi ou deux ans, c'est le changement de règle à tout bout de champ de ce qui se passe en matière d'immigration, que ce soit au fédéral, que ce soit provincial. Et il ne faut pas sous-estimer le bruit que ça peut faire auprès des différentes communautés de population immigrantes intéressées à venir s'établir au Canada puis au Québec principalement et dans nos régions. Donc, cette situation-là... puis il ne faut pas sous-estimer, je dirais, la capacité de communiquer dans les milieux.

Je ne sais pas si vous vous rappelez, il y a quelques années, le ministre, Jean Boulet, avait annoncé pour certains programmes très précis, une gratuité pour des frais scolaires pour des étudiants internationaux. Moi, je suis membre de la Commission des cégeps du Canada, CICan, College and Institutes Canada, et puis tous les réseaux dans le reste du Canada, les gens ont arrêté de postuler sur des possibilités d'aller étudier dans les collèges canadiens parce qu'ils se disaient : Ah, on va aller au Québec, c'est gratuit. Il y a eu une pénurie de demandes dans le reste du Canada. Après ça, ça a été les permis de travail post-diplôme qui fait en sorte que ça a amené des freins un peu. On a le PEQ, on enlève le PEQ, ça aussi, ça crée des freins. Et c'est cette situation-là, quand on parle d'une prévisibilité sur trois ans, on voudrait avoir des choses qui soient claires, dans lesquelles on va pouvoir évoluer sur une période de temps, mais avec aussi des outils pour nous permettre de recruter des gens qui vont venir contribuer à un effort collectif, pas seulement économique, social, culturel aussi dans nos milieux.

Et je prends pour exemple... on a un programme en métallurgie au cégep de Chicoutimi, j'ai trois inscriptions. J'ai quand même plusieurs entreprises qui sont dans le secteur de la métallurgie, dont une importante qui s'appelle Rio Tinto, et on n'est pas en mesure de recruter. Avec un PEQ, avec un programme de permis de travail post-diplôme, avec tous ces éléments-là, ça pourrait me permettre facilement de recruter des gens qui sont essentiels au développement des entreprises comme celle-là.

M. Morin : je comprends qu'avant la suspension du PEQ, avant les décrets et le nombre de CAQ, vous l'avez souligné, ça a été fait sans consultation. Vous, vous vous êtes réveillé un matin, vous aviez un fait accompli devant vous. Qu'est-ce que vous pensez de l'idée de... en matière d'immigration, de s'asseoir avec les régions, les cégeps, dans des forums régionaux puis essayer véritablement de planifier, donc décentraliser plutôt que d'avoir des gens... habituellement, ils sont dans la capitale nationale, qui prennent des décisions? Et là vous, vous avez à vivre avec. Et qu'est-ce qui arriverait si on faisait ça à l'envers, si on partait de chez vous puis des régions pour arriver dans la capitale nationale?

Mme Gasse (Julie) : Bien, effectivement, moi, je pense que les personnes les plus appropriées pour déterminer les besoins, c'est seuils-là, éventuellement, ce sont les leaders tant en formation, tant les leaders économiques, les responsables de nos régions, puisque, d'une région à l'autre... on représente plusieurs régions, mais chacune de nos régions qu'on représente au sein de notre regroupement sont très différentes. Puis même chacun des cégeps ont des capacités d'accueil très différentes, soit en termes de solutions mobilières, soit en termes de capacité d'intégration sociale.

Alors, ce sont tous des variables... toutes des variables, pardon, qui entrent en ligne de compte. Et ce portrait de situation là, je pense que les personnes les plus appropriées sont celles-là mêmes qui viennent de ces fameuses régions là. Ça ne veut pas dire qu'on aurait une tendance globale, on ne pourrait pas avoir... on pourrait avoir un objectif global, mais je pense que c'est important que chacune des personnes qui sont à même de redresser ce portrait de situation là soit appelée à dialoguer avec ces changements-là.

• (17 h 10) •

M. Morin : Et je vous...

M. Gaudreault (Sylvain) : ...

M. Morin : Oui, allez-y, je vous prie.

M. Gaudreault (Sylvain) : ...compléter parce que je suis entièrement d'accord avec vous. Vous savez, pour moi, souvent, le synonyme de décentralisation, c'est confiance, c'est de faire confiance à une instance locale. Et vous savez, au Québec, la dernière instance décentralisée dans les régions sont les cégeps. Les municipalités, c'est des gouvernements locaux, ce n'est pas pareil. On n'a plus de conseils d'administration de centres de santé, c'est l'agence Santé Québec. On n'a plus de conseils régionaux de concertation et de développement — puis là, je parle tous gouvernements confondus, ça a été réduit, voire éliminé — on n'a plus de centres locaux de développement. La dernière instance décentralisée avec un conseil d'administration autonome représenté par des gens du milieu, du socioéconomique, des diplômés, des représentants des entreprises, des syndicats, des partenaires du marché du travail, des étudiants, des parents, des enseignants, du personnel de soutien sur le conseil d'administration, c'est le cégep. Alors, confiance, synonyme de décentralisation...

M. Gaudreault (Sylvain) : ...on va s'asseoir, on va... on va penser à l'avenir du Québec, mais on est capables de le gérer. Puis la démonstration, c'est pour ça que j'ai cité Guy Rocher, là : depuis plus de 50... presque 60 ans, les cégeps ont livré la marchandise. On va continuer de le faire avec ce défi démographique qu'on a puis de gestion de l'immigration. Alors, faites confiance aux cégeps. On va s'asseoir pour en parler. Mais je suis entièrement d'accord avec vous.

M. Morin : Parce que je vous... je vous écoute et, tu sais, vous êtes... vous êtes véritablement un moteur et un leader dans vos régions respectives.

M. Gaudreault (Sylvain) : ...

M. Morin : Tout à fait. Sans pollution, c'est parfait. Mais, tu sais, vous parliez tantôt de Rio Tinto Alcan. Donc, vous êtes capables de vous asseoir avec des entreprises dans votre région puis dire : Moi, j'ai un programme en métallurgie, voilà ce que je peux offrir. L'entreprise vous dit, j'imagine : Bien, nous, on a besoin de tant ou tant de travailleurs. Vous êtes capables de vous enligner. Après ça, bien, si vous regardez vos logements étudiants, vous savez combien est-ce qu'il y en a de disponibles. Donc, vous devriez être capables, je pense, d'arriver avec des recommandations pour le gouvernement en disant : Bien, nous, dans notre région, c'est ce qu'il nous faut. Puis probablement que votre région ne vit pas les mêmes enjeux que l'Abitibi, nécessairement, ou Matane.

M. Gobeil (André) : C'est ce qu'on faisait depuis 15 ans. On faisait ces choses-là. C'est-à-dire, comme Sylvain l'évoquait, on est en contact avec nos milieux, on a une proximité avec les gens, on connaît les besoins. Et le recrutement à l'international, c'est comme ça qu'on le faisait aussi, en s'assurant de pouvoir maintenir nos programmes puis répondre aux besoins des entreprises de nos milieux. On le fait déjà. Donc là, on a un changement... il y a le changement de règles, mais c'est quelque chose qu'on fait. Donc, oui, si vous nous proposez un chemin de cette façon-là, on peut revenir à ce qu'on faisait très, très bien, puis ça serait... puis c'est des éléments qu'on a soumis, d'ailleurs, dans notre rapport.

Je ne sais pas si, Julie, tu voulais ajouter là-dessus.

Mme Gasse (Julie) : Oui.Puis, en complément, on parle beaucoup, là, de l'industrie, du milieu économique, mais c'est aussi vrai pour le domaine de la santé, le domaine de l'éducation à l'enfance. On a beaucoup de programmes, là, justement, qui sont touchés par cette diminution de CAQ... des CAQ, des quotas, en lien avec l'éducation à l'enfance. On a analyse biomédicale qui... par exemple, on parlait de discussions avec des dirigeants qu'on pouvait avoir entre cégeps et CISSS. C'est exactement ce qu'on a ici, à Rimouski. À Rimouski, on discute avec les responsables des différents secteurs de l'organisation puis on est capables de savoir combien ils auraient besoin de main-d'oeuvre. Puis ça, c'est comme ça qu'on gérait au quotidien, dans le fond, le recrutement de nos étudiants. Alors, ça revient à ce que vous disiez, c'est important, ce dialogue-là, oui.

M. Morin : Les décisions qui ont été prises par le gouvernement de la CAQ, est-ce que ça a eu un impact sur certains de vos programmes? Est-ce qu'il y a des programmes qui sont en péril à cause de ces décisions-là gouvernementales?

Mme Gasse (Julie) : Bien, le fait que nous ayons moins de quotas a, effectivement, un impact assez important dans des programmes, les programmes, notamment, en construction, en technologie, tantôt je parlais d'analyse biomédicale, dans le secteur maritime aussi, architecture navale, logistique du transport, les secteurs de l'administration aussi, qui est quand même une couche assez importante, là, dans tout ce qui est en lien avec le suivi de nos activités. On en a en transformation des produits forestiers. C'est des secteurs... En métallurgie, on parlait tout à l'heure. Alors, c'est des secteurs aussi qu'on voit un peu en péril avec toute la crise économique qu'on vit, avec les droits de M. Trump. Alors, on se dit : Bien là, on est comme happés des deux côtés, autant par notre impossibilité à assurer le démarrage des cohortes, comme je disais tout à l'heure, parce que ces étudiants-là nous permettent d'assurer de démarrer ces cohortes-là et ainsi avoir un nombre suffisant de diplômés pour appuyer nos entreprises et nos organisations.

M. Morin : Est-ce qu'il y a des cohortes qui ont été retardées ou fermées à cause de ces décisions-là?

M. Gobeil (André) : ...des collèges qui ont suspendu des programmes.

M. Morin : ...lesquels?

M. Gobeil (André) : Bien, une suspension de programme, c'est-à-dire qu'il n'y a pas assez d'étudiants pour pouvoir l'offrir, puis, finalement, on dit : Bien, l'année prochaine, nous n'offrirons pas ce programme, on va attendre à l'année suivante parce qu'il manque d'étudiants, puis des programmes qui sont dans des domaines techniques qui sont tous en lien avec des besoins de nos milieux, que ce soit en télécommunications... Même nous, on a eu cette réflexion-là par rapport à des programmes comme métallurgie ou d'autres programmes de cette nature-là.

Mme Gasse (Julie) : ...

M. Gaudreault (Sylvain) : Oui, c'est ça. Techniques d'aménagement et... Techniques d'aménagement et d'urbanisme du côté de Matane, du Cégep de Matane, est suspendu depuis trois ans.

Vous savez, on a des programmes... là, je regardais ma liste, là, pendant que mes collègues parlaient, on pourrait vous en nommer plusieurs, je pense à Baie-Comeau, des programmes qui sont fragilisés...

M. Gaudreault (Sylvain) : ...technologie forestière, techniques d'éducation à l'enfance, génie civil, techniques administratives, techniques d'aménagement cynégétique et halieutique. Du côté de Rivière-du-Loup, les programmes plus fragilisés par la diminution d'étudiants internationaux, soins infirmiers, éducation à l'enfance. En Abitibi-Témiscamingue, les programmes... fragilisés, pardon, technologie minérale, technologie forestière, techniques d'éducation à l'enfance. Puis on peut continuer comme ça dans tous les cégeps qui sont membres du Regroupement des cégeps de régions.

Je pense qu'il y a une chose qu'il faut bien comprendre, là. Nous sommes tous ici préoccupés par la saine gestion des fonds publics. Bien, ça coûte pas mal plus cher à l'État de gérer des programmes qui sont fermés, puis des profs mis en disponibilité, puis des laboratoires sous-utilisés ou pas utilisés que de gérer des étudiants qui viennent pour justement étudier dans ces programmes-là. C'est ça qui fait en sorte que c'est... que c'est rentable, puis que c'est intéressant, puis que l'investissement a des retombées. Gérer des espaces vides, gérer des profs MED, gérer des programmes qui ferment, ça, ça coûte cher à l'état.

Puis l'autre élément, quand on a créé les cégeps, là, je reviens là-dessus, je... déformation professionnelle d'historien, mais quand même, quand on a créé les cégeps, c'était pourquoi, c'était pour assurer la démocratisation de l'accès à l'enseignement supérieur dans toutes les régions. Les programmes que je viens de vous nommer, puis on pourrait en nommez plusieurs autres, ils sont partout sur le territoire pour permettre aux étudiants puis aux étudiantes en provenance, par exemple, du Saguenay Lac-Saint-Jean, du Bas-Saint-Laurent, de la Gaspésie, peu importe, de pouvoir avoir accès au même titre que n'importe qui sur le territoire, qu'il soit à Montréal, ou à Laval, ou à la Capitale-Nationale. Donc, si on vient fragiliser des programmes qu'ils ne sont pas capables d'ouvrir, comme aménagement et urbanisme...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : En terminant.

M. Gaudreault (Sylvain) : ...disons, à Matane, bien, les étudiants de cette région-là vont être obligés d'aller étudier en aménagement et urbanisme à Montréal ou ailleurs. Donc, c'est... Il faut avoir en tête que les étudiants internationaux soutiennent la poursuite de la démocratisation...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci.

M. Gaudreault (Sylvain) : ...de l'enseignement supérieur dans les régions.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. On va terminer nos discussions avec le député du deuxième groupe d'opposition pour quatre minutes huit secondes.

M. Fontecilla : Merci, Mme la Présidente. Bonjour, Mme, Messieurs. Merci, merci beaucoup de nous éclairer avec votre vision. On entend beaucoup parler dans ces consultations-là de la dichotomie qu'il peut y avoir entre la capacité d'accueil versus la volonté d'accueil. Et je vous pose la question parce que vous demandez davantage du financement des infrastructures pour, entre autres, héberger des étudiants et étudiantes, avoir plus de classes, etc. Comment concevez-vous, comment voyez-vous, là, cette relation entre volonté d'accueil et capacité d'accueil?

Mme Gasse (Julie) : En fait, pour plusieurs des cégeps du regroupement puis même pour l'ensemble de la fédération, je crois, le premier problème, ce n'est pas tant d'agrandir, c'est de s'assurer de la bonne mise à niveau de nos infrastructures. On a plusieurs cégeps qui sont justement en très grand déficit en lien avec cet état de santé là pour nos bâtiments. Ce qui est inquiétant, c'est que le besoin de base, il doit être maintenu, il doit être préservé, il doit être entretenu, et on... présentement, le niveau de financement que nous recevons ne nous permet même pas d'affirmer ça. Ensuite, on pourrait parler peut-être de l'augmentation de la capacité, mais je pense que, dans un premier temps, c'est par rapport à l'entretien de ce que nous avons déjà que nous avons besoin. Et la question de l'immigration s'invite parce que nous devons maintenir nos cours autant pour nos étudiants québécois que pour les étudiants que nous accueillons. Et c'est, je pense, la première... la prémisse de cette affirmation-là. Je pourrais peut-être laisser mes collègues continuer.

• (17 h 20) •

M. Gobeil (André) : ...me permettre d'ajouter. Les 12 membres du réseau des cégeps de régions, on est tous sous notre devis. Autrement dit, le nombre d'étudiants qui est prévu par établissement, le nombre d'étudiants qui sont réellement présents est inférieur à la capacité de nos établissements. Donc, on a une capacité d'accueil qui est là. Donc, on ne veut pas dire... Par exemple, pour mon collège, c'est 3 200, on est à 2 300 étudiants actuellement. Donc, j'ai de l'espace encore pour pouvoir accueillir des nouveaux étudiants. Quand on vous présente des éléments comme aujourd'hui, quand on parle d'infrastructures, ce n'est pas de nous monter à 5 000 puis à 6 000, c'est de pouvoir accueillir des personnes qui sont en mesure de contribuer, tu sais, là, au développement de nos programmes. Donc, on est vraiment dans cette situation-là.

Puis je veux rappeler, encore une fois, je pense que c'est important de le faire. Nous, les étudiants internationaux, ça n'amène aucun argent. Les sommes, qu'elles sont... qui paient pour pouvoir venir étudier au Québec dans un établissement public comme un cégep, les sommes sont retournées au ministère. Sur l'ensemble des frais de scolarité, 90 % retourne au ministère, 10 % reste pour gérer pour nous l'administration. Ça nous permet... On convertit avec un étudiant international, on le convertit en étudiant local avec ce système-là. Donc, tout à l'heure, M. Roberge, je vous ai... tu sais, vous...

M. Gobeil (André) : ...tu sais, le problème, c'était ça, des usines, des gens qui accueillaient plein d'étudiants, puis qu'on n'avait pas de contrôle, mais... Pas «usines». Je ne veux pas vous paraphraser, vous faire dire des choses que vous n'auriez pas dites. J'espère que vous ne serez pas cité là-dessus. Mais on évoquait des situations comme celles-là. Ce n'est pas le cas des cégeps. Ce n'est pas nous, les gens qui font ces choses de cette nature-là. Nous, on est à l'intérieur des limites puis on le fait bien, encore une fois. Donc, on a de l'espace, on a une capacité. Oui, effectivement, dans nos milieux, on a des défis, mais ces défis-là sont capables d'être relevés par notre société civile en termes d'hébergement puis de services à offrir. Donc, pour moi, je ne pense pas que ce soit un enjeu. Puis, quand on l'évoque, c'est juste pour maintenir nos équipements puis nos infrastructures en mesure de donner des programmes de qualité aux étudiants tant locaux qu'internationaux.

M. Fontecilla : Vous dites que... Vous êtes assez... comment dire, vous allez... vous allez loin, là. Vous exigez la gestion de certificats d'acceptation du Québec, les CAQ, là, donc c'est... en quelque sorte, on pourrait avoir une vision comme quoi... dans le sens où c'est l'État qui gère cette notion-là, mais...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : En terminant.

M. Fontecilla : ...mais vous réclamez ce pouvoir-là. Pourquoi?

M. Gaudreault (Sylvain) : Bien, c'est pour avoir plus de flexibilité et d'être adaptés aux réalités quand on vous dit par exemple la réalité du marché du travail. Mais quand... quand on demande la gestion, c'est... on parlait de décentralisation tout à l'heure, c'est une gestion décentralisée. Comme l'aide financière aux étudiants, c'est géré par le ministère, mais c'est appliqué sur... dans le cégep. C'est...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. Alors, c'est ce qui termine cette... cette audition. Alors, Mme, messieurs, merci de votre apport, de vos commentaires. Ils sont bien accueillis par la commission. Je souhaite bon retour.

Et je vais suspendre quelques instants, le temps de recevoir notre dernier groupe de la journée.

(Suspension de la séance à 17 h 23)

(Reprise à 17 h 25)

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : À l'ordre, s'il vous plaît! La Commission des relations avec les citoyens reprend ses travaux. Donc, comme derniers intervenants aujourd'hui, nous recevons M. Graham Carr, recteur et vice-chancelier de l'Université Concordia, M. Pascal Lebel, directeur général des relations gouvernementales, ainsi que Mme Stéphanie de Celles, registraire à l'Université Concordia. Mme, Messieurs, bienvenue à la commission. Donc, vous allez avoir une période de 10 minutes pour présenter l'essentiel de vos recommandations, de votre mémoire. Et, par la suite, nous allons pouvoir en discuter avec les parlementaires. Le temps est à vous d'ores et déjà. Allez-y.

(Visioconférence)

M. Carr (Graham) : Merci, Mme la Présidente. Merci de nous permettre de participer à ce processus...

Nous comprenons que le gouvernement souhaite réduire le nombre de personnes immigrantes temporaires sur le territoire afin de soulager la pression sur le logement et sur les services publics...

M. Carr (Graham) : ...or, une baisse de l'immigration temporaire aura aussi nécessairement plusieurs effets négatifs à court, moyen et long terme. Il est donc important de limiter le plus possible les impacts négatifs. Or, en incluant les étudiants internationaux et universitaires dans cet effort, nous croyons fortement que la planification du gouvernement aura des effets négatifs, voire pervers, sur l'économie et la société québécoise. Ils ne sont donc pas la cible à privilégier dans cet exercice d'arbitrage.

Au cours des dernières décennies, le Québec s'est imposé comme un chef de file dans la production de nouveaux savoirs et de nouvelles technologies. Aujourd'hui, le Québec compte 13 des 50 meilleures universités de recherche au Canada. L'importance des étudiants et chercheurs internationaux dans un tel environnement ne saura être... En effet, l'automne 2024, 46 % de toutes les inscriptions aux programmes de recherche, de maîtrise et de doctorat, à travers le Québec, provenaient d'étudiants internationaux. Ces étudiants hautement qualifiés sont tout simplement indispensables au bon fonctionnement de tous les laboratoires et centres de recherche du Québec. Ils stimulent également des innovations et enrichissent le capital humain, ce qui a des répercussions positives pour les économies locales et nationales.

Selon une étude de... les étudiants internationaux contribuent chaque année plus de 4 milliards de dollars à l'économie québécoise. Cela représente presque la moitié de la taille du secteur de l'aluminium, un secteur névralgique pour l'économie du Québec. Finalement, la présence des étudiants internationaux renforce la compétitivité des institutions sur la scène mondiale... en grande partie grâce à sa population étudiante internationale, Montréal est la ville canadienne la plus active en matière de recherche. Cependant, au cours des cinq dernières années, il y a eu au moins 10 changements majeurs de politiques touchant les étudiants provenant de l'extérieur du Québec. Ici aussi, les politiques fédérales ont posé des problèmes, entraînant une baisse de demandes d'inscription d'étudiants étrangers dans les universités à travers le Canada. Avec le recul, nous estimons que les quotas imposés au Québec sont inutiles, car les restrictions fédérales visant les étudiants étrangers entraînent à elles seules une baisse significative des demandes d'admission.

• (17 h 30) •

D'autres indices témoignent également des répercussions négatives de ces politiques sur la réputation internationale du Québec. Par exemple, en 2017, QS, une agence de classement réputée basée à Londres, a classé Montréal... ville universitaire... Cette année, nous sommes arrivés à la 18e place. La concurrence pour recruter les meilleurs talents est devenue de plus en plus intense. Je vais vous donner un autre exemple. Notre projet Voltage est actuellement en train de recruter 250 doctorants à la recherche sur l'électrification, un domaine qui reste économiquement important pour le Québec. Voltage a reçu 200 millions de dollars en financement de recherche du Canada, du Québec et de partenaires privés. Elle est en mesure de financer entièrement ces postes. Cependant, en raison des quotas et de la mauvaise perception du Québec, il est difficile d'attirer des étudiants internationals pour ce projet. De même, il est devenu extrêmement exigeant de traiter les demandes que... Que ce soit intentionnel ou non, ces changements politiques ont donné à de nombreux étudiants étrangers un sentiment d'être indésirables et...


 
 

17 h 30 (version non révisée)

M. Carr (Graham) : ...l'accueil au Québec. La preuve? Les universités québécoises ont constaté cette année une baisse des inscriptions des étudiants internationaux allant de 25 % à 50 %. Le déclin de la stature internationale est particulièrement regrettable étant donné que les États-Unis ne sont plus une destination privilégiée pour les candidats internationaux, et ce, sans compter l'impact financier qui ne peut pas être compensé par une augmentation du nombre d'étudiants de premier cycle du Québec. L'augmentation du nombre d'étudiants québécois dans nos universités découle de la forte croissance actuelle du nombre d'étudiants dans les cégeps et se concrétise donc au premier cycle. Bien que nous soyons très heureux d'accueillir davantage d'étudiants locaux, les étudiants qui commencent le premier cycle ne peuvent pas répondre aux besoins actuels du Québec en matière de recherche. Et il n'y a pas assez d'étudiants québécois aux cycles supérieurs en ce moment pour remplacer les étudiants internationaux.

Nous comprenons et soutenons la nécessité d'adopter une approche équilibrée en matière d'immigration. Pour se faire, soulignons d'abord quelques faits importants de notre mémoire concernera les universités. Entre 2018 et 2024, la hausse des étudiants internationaux dans les universités québécoises n'a été que 12 900 d'étudiants, soit 29 %. Cette hausse fut fortement encouragée par le gouvernement du Québec. Elle s'est faite dans les universités francophones surtout en région, conformément aux objectifs du gouvernement. Notons aussi que les universités anglophones ont eu plutôt une baisse de près de 1 000 étudiants pendant cette même période, soit moins 5 %.

Le Québec constate déjà de nombreux effets négatifs à court terme liés à la limitation du nombre d'étudiants internationaux. Cependant, le processus de consultation en cours offre l'opportunité de limiter, voire d'inverser ces effets négatifs à l'avenir. Par conséquent, nous recommandons au gouvernement de ne pas réduire davantage le nombre d'étudiants internationaux au niveau universitaire et qu'il abroge le décret de 2025. Si le gouvernement tient particulièrement à conserver des quotas à travers un décret, nous recommandons qu'il retire les quotas pour les cycles supérieurs ainsi que pour les demandes de renouvellement de certificats d'acceptation du Québec. Nous recommandons aussi que le gouvernement améliore et accélère les procédures conduisant à l'obtention ou au renouvellement d'un CAQ. En ce qui concerne le Programme de l'expérience québécoise volet diplômés, nous recommandons son maintient tout en le modifiant pour les critères prennent en compte les compétences en français réelles de la personne candidate plutôt que du statut linguistique de son programme universitaire.

Grâce à une planification réfléchie de l'immigration pour les étudiants internationaux, nous pouvons maintenir la place légitime du Québec en tant que pôle d'attraction pour le monde entier et qui est dans l'intérêt de tous les Québécois et toutes les Québécoises.

Nous vous remercions de votre attention et de la prise en considération de ces recommandations.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup pour cette présentation. On va donc commencer les discussions avec les parlementaires. On va commencer avec M. le ministre. La parole est à vous pour 16 min 30 s.

M. Roberge : Merci bien. Merci pour votre présentation. Il y a beaucoup été question de l'effectif total à Concordia, l'ensemble des étudiants ou les étudiants étrangers. Vous avez parlé particulièrement aussi de la...

M. Roberge : ...de la recherche, mais je suis très conscient que... et nous sommes très conscients au gouvernement qu'à la grandeur du Québec il y a une part considérable de la recherche qui se fait au cycle supérieur par les étudiants étrangers. Puis d'ailleurs, avec la loi n° 74 adoptée l'an passé, les premiers décrets, les CAQ par quota ou par niveau, c'est une stabilisation qu'on a faite. Il n'y a pas d'universités qui ont eu moins de CAQ pour cette année que les années précédentes. Et ça, c'est important de le préciser. À Concordia, cette année, si je ne m'abuse, vous avez un petit peu plus d'étudiants, quand on regarde l'ensemble de votre effectif étudiant, une hausse d'à peu près 1,1 %. Vous avez cependant moins d'étudiants étrangers, pas à cause des quotas, vous n'avez pas réussi à utiliser l'ensemble vos quotas, mais vous avez moins d'étudiants étrangers, mais vous avez quand même une hausse de l'effectif étudiant. Est-ce que ce sont surtout des étudiants québécois ou canadiens qui ont permis de compenser et même d'augmenter l'effectif étudiant?

M. Carr (Graham) : Merci pour la question. L'augmentation, c'est lié avec le recrutement d'étudiants québécois principalement. Maintenant, notre effectif à l'université, et je pense que ça nous distingue comme université anglophone, 72 % de nos étudiants sont Québécois.

M. Roberge : Sont quoi? Excusez-moi.

M. Carr (Graham) : 72 % de nos étudiants sont des Québécois. Et il y a... Et nous sommes à 17 % des étudiants internationaux qui nous placent à... septième parmi les universités québécoises dans...

M. Roberge : Bon. Là, nous sommes à l'automne 2025. Vous nous dites qu'il y a eu une baisse d'étudiants étrangers cette année par rapport aux admissions pour la session de septembre 2024. Si je ne m'abuse, la session de septembre 2024 représentait aussi une baisse par rapport à septembre 2023. Je ne sais pas si vous avez ces informations-là sous la main, mais, entre 2022 et 2023, c'est ça... c'est ça, il y a eu une baisse. De quel ordre était cette baisse entre septembre 2022 et septembre 2023? C'est ça? Oui.

M. Carr (Graham) : Je vais demander à Stéphanie de répondre. Vous avez raison, on a vécu une baisse... aussi. Le chiffre... c'est...

• (17 h 40) •

M. Roberge : ...OK. D'accord, c'est ça, il y a eu une baisse. C'est parce que tout à l'heure, j'étais surpris, vous avez dit : Il y a eu une baisse d'étudiants étrangers en raison des quotas. Or, bien, cette année, les quotas, le nombre de CAQ était égal à ceux de l'an passé. Donc, ce n'est pas parce que, tout à coup, on... le gouvernement vous permettait... ne vous permettait pas d'avoir le même nombre d'étudiants, c'était le même nombre de CAQ. Et ce que je sais, c'est que la la tendance à la baisse à Concordia a commencé non seulement avant qu'on émette les quotas de CAQ, a même été commencée avant qu'on dépose le projet de loi n° 74. C'était antérieur. On n'avait même pas le début du commencement de l'écriture du projet de loi qui allait amener des quotas et, déjà, Concordia perdait des étudiants étrangers. Donc, on ne peut pas faire une relation de cause à effet, avec respect, entre une base d'étudiants étrangers et une loi qui n'était même pas écrite, même pas déposée à l'Assemblée nationale. Est-ce que c'est possible que cette spirale à la baisse ait commencé plutôt avec les annonces du gouvernement canadien qui a annoncé, lui, de son côté, pour l'ensemble du Canada, des baisses de 50 % et 35 % d'étudiants étrangers? Même si, dans les faits, les plafonds qu'ils mettaient ne touchaient pas le Québec, mais à l'international, quand le gouvernement du Canada parle, ça résonne plus fort. Et je pense qu'il y a une corrélation sur une ligne du temps entre les annonces fédérales et la première baisse à Concordia pour les étudiants étrangers.

M. Carr (Graham) : Ah! vous savez, il y a plusieurs raisons. Je n'ai pas dit que le facteur va... qui a créé la baisse cette année, c'est les quotas. J'ai fait référence à l'impact des politiques fédérales et j'ai fait référence au fait aussi que, pendant les dernières années, il y a beaucoup de changements à de politiques au niveau du Québec et au niveau du fédéral qui affectent...

M. Carr (Graham) : ...d'ailleurs. Alors, il y a... il y a une panoplie de facteurs, les quotas de... qui étaient appliqués après la... l'adaptation de la loi 74, a ajouté un autre élément dans tout ça. Mais ce n'est pas... Ce n'est pas le seul facteur.

(Interruption)

M. Carr (Graham) : Oh!

M. Roberge : La lumière s'est éteinte, mais on a continué de vous voir. Très bien. Merci. Je suis content que vous soyez encore là. J'ai eu peur de vous perdre.

M. Carr (Graham) : C'est difficile de... de... parce que je suis chauve, c'est difficile de... avec les lumières.

M. Roberge : OK. Vous m'avez déstabilisé, là! Oui. OK. Très bien. Pour ce qui est de la capacité de recherche, parce que je suis conscient, puis d'autres l'ont dit avant vous, là, beaucoup de la recherche à l'échelle du Québec se fait par des étudiants étrangers. Néanmoins, ce que je vois, c'est qu'à Concordia, cette année, malgré une baisse d'étudiants étrangers, vous avez une hausse de 5.4 % au troisième cycle au doctorat. Ce n'est pas quelque chose qu'on observe partout. HEC aussi a eu une hausse cette année de 11 % en troisième cycle. Même s'il y a moins d'étudiants étrangers, ils ont une hausse d'effectif total. Donc, non seulement ils ont comblé la baisse d'arrivées, mais ils ont quand même augmenté. Comment vous expliquez cette belle performance, moi, je pense que c'est une... c'est fierté, que vous avez réussi à maintenir, puis même à augmenter votre effectif au troisième cycle, malgré cette diminution, que je déplore, d'effectif d'étudiants internationaux?

M. Carr (Graham) : C'est... Oui. Nous sommes très fiers de cette... ce chiffre. Et ça représente une tendance, un investissement, une décision stratégique que l'université a pris il y a plus de 10 ans. C'est intéressant que pendant les 10 dernières années, le nombre d'étudiants internationaux à Concordia a augmenté par 500 personnes. Et c'est... c'est lié exactement avec les investissements qu'on a faits dans les programmes de recherche, à la... et la croissance au niveau des doctorats. Ça explique exactement l'augmentation qu'on a faite.

Cette année, l'augmentation est liée avec cette tendance depuis quelques années, mais aussi avec l'impact de notre grand projet de recherche de Volt-Age financé par... par le programme Apogée avec un soutien du gouvernement du Québec. On a réussi à recruter un nombre important d'étudiants internationaux à ce projet, mais on veut faire encore plus parce qu'on a... on a la finance pour attirer plus, comme j'ai dit dans ma... dans ma présentation, on a le financement pour attirer 250 étudiants. À ce moment, nous sommes légèrement en hausse de 100 étudiants, qu'on a réussi à attirer. Et on sait qu'il y a un problème dans le recrutement à... lié avec... avec la perception du Canada, du Québec, comme... comme pays accueillant pour les étudiants internationaux et aussi quelques complexités dans le processus d'obtenir le CAQ, le visa... les visas, etc.

Mais nous sommes très, très fiers de l investissement qu'on a fait dans les programmes de recherche. Et ce sont exactement les étudiants à l'échelle internationaux que nous sommes... à laquelle nous sommes à la recherche. Alors, il y a une tendance maintenant, en 2024. Si on voit la répartition d'étudiants internationaux chez nous... chez nous, c'est environ 12 % en première cycle, 55 % en deuxième cycle, programmes de recherche, et 53 % en troisième cycle. Alors, c'est vraiment les investissements qu'on a faits dans les... dans les programmes de recherche qui expliquent cette répartition.

M. Roberge : Merci. C'est très bien de poursuivre sur cette voie-là, de continuer à obtenir notre part du lion aussi, parce qu'on sait, au gouvernement canadien, les fonds de recherche sont considérables, puis on doit les avoir dans nos institutions, en grande partie, au Québec, pour des étudiants québécois, mais aussi avec le concours d'étudiants internationaux et des étudiants étrangers. Je le répète, la loi 74 maintenait nos effectifs, donc aussi aux cycles supérieurs. Là où il y a eu des baisses réellement cette année...

M. Roberge : ...souhaitées dans nos CAQ, non pas engendrées par le gouvernement fédéral, mais souhaitées par nos CAQ, ça a été dans des collèges privés, pas nos cégeps, mais des collèges privés qui donnaient des formations courtes, surtout dans le Grand Montréal puis surtout dans d'autres langues que le français. C'est surtout ce qu'on a visé.

La question de la langue française, bon, vous faites votre présentation en français, je vous en remercie, honnêtement, je vous remercie énormément, mais la question de la langue française, évidemment, nous préoccupe avec les indicateurs de vitalité de la langue à la grandeur du Québec, mais particulièrement à Montréal. Alors, vous êtes une institution anglophone à Montréal. Qu'est-ce que Concordia fait et va faire pour s'assurer que ces diplômés, qui, dans certains cas, parlent français, mais dans d'autres cas ne parlent pas français, qu'est-ce que Concordia va faire pour s'assurer que ces gens-là puissent rester au Québec puis réinvestir la richesse de leurs connaissances puis de leurs compétences, tout en maîtrisant la langue de la société d'accueil?

M. Carr (Graham) : Merci pour la question, M. le ministre, parce que la première chose que je veux souligner, c'est que, pour nous, à l'Université Concordia, l'importance d'aider nos étudiants, d'apprendre le français, de s'intégrer dans la société québécoise, c'est primordial, c'est quelque chose qu'on a la volonté de faire et on a la volonté de le faire pour plusieurs raisons. Premièrement, parce que nous sommes une université québécoise, bien, nous sommes reconnaissants que, dans le contact de l'Amérique du Nord, ça a mis de la vitalité dans la langue française qui... en péril. Ce n'est pas une question pour l'anglais.

Mais deuxièmement, et je pense que ça, c'est directement lié avec les investissements qu'on a faits dans les programmes de recherche, on veut préparer une prochaine génération d'étudiants de diplômés de... pour qu'ils peuvent s'intégrer dans le milieu de travail au Québec suite à leur diplomation. Alors, c'est dans nos intérêts, c'est dans leurs intérêts, dans l'intérêt de la société québécoise d'apprendre le français, et on a mis en place plusieurs programmes à cibler pour les étudiants en génie, en commerce, etc., pour les aider. Et on travaille à... je pense que vous êtes au courant du... trois universités anglophones s'engagent, avec votre collègue, la ministre Biron et son équipe, sur des choses qu'on peut faire ensemble pour s'assurer que nos étudiants sont bien formés en français.

L'autre chose que je dois souligner, c'est que, malgré le fait que nous sommes une université d'expression anglaise, on a essayé de recruter beaucoup plus d'étudiants francophones à Concordia que dans les années passées. Et on veut le faire pour deux raisons, parce que le bassin d'étudiants francophones à l'échelle internationale est très grand et parce que le fait qu'ils sont Français facilite leur intégration dans la société et l'économie québécoise. Alors, nous sommes très reconnaissants de l'importance de cet enjeu pour le Québec. Nous, on veut être des partenaires avec le gouvernement du Québec dans cette démarche puis je pense qu'on a déjà manifesté du progrès exceptionnel dans ce domaine.

• (17 h 50) •

M. Roberge : Bien, je vous remercie beaucoup pour votre présentation. Puis je comprends que vous voulez de la prévisibilité, pas le contrôle sur ce que le gouvernement fédéral va faire. Mais, de notre côté, l'idée de faire cet exercice de planification, de s'engager sur quatre ans, c'est vraiment avec l'intention de donner à tous nos partenaires économiques, mais aussi en enseignement supérieur, les moyens de se projeter en avant, de rassurer la communauté internationale, comme quoi, au Québec, on demeure une terre d'accueil pour des étudiants étrangers puis qu'on est ouvert à des gens qui viennent s'établir ici, particulièrement pour diplômés dans nos institutions. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Merci beaucoup. Alors, on va poursuivre les discussions avec le député d'Acadie...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : ...d'Acadie, pour 12 min 23 s.

M. Morin : Merci, Mme la Présidente. Alors, M. Carr, M. Lebel, Mme de Celles, bonjour. Merci d'être avec nous en cette fin de journée. Merci pour votre mémoire. J'attire votre attention à la page 14 de votre document. M. le ministre a parlé des décisions du gouvernement fédéral, qui a pu avoir un impact sur votre université. Vous l'avez d'ailleurs mentionné clairement dans votre mémoire, mais dans le même paragraphe, après, on continue la lecture et on dit : «Les quotas provenant du décret ministériel ayant suivi l'adoption du projet de loi n° 74 l'hiver dernier...» Et vous vous rappellerez probablement, M. Carr, j'ai siégé pour l'opposition officielle avec ma collègue, la députée de Mont-Royal—Outremont, dans ce projet-là. D'ailleurs, les universités nous avaient tous dit d'un commun accord : S'il vous plaît, M. le ministre, n'adoptez pas ça. Ça a été adopté quand même. Donc : «Le décret ministériel ayant suivi l'adoption du projet de loi n° 74 l'hiver dernier ont, quant à eux, eu l'effet d'une douche froide sur les demandes d'admission de l'automne.» Donc, il y a une contribution, ici, du gouvernement du Québec pour évidemment créer cette douche-là. Quel a été l'impact plus particulier pour votre université?

M. Carr (Graham) : Merci pour la question, M. Morin. Alors, je pense qu'il y a... Évidemment, il y a un impact financier... avec la perte de revenus liée avec des inscriptions à l'international, et, de plus, le changement de formule de financement l'année précédente pour les étudiants à l'international. Mais, de plus, il y a des conséquences pour nos programmes de recherche parce que c'est encore plus difficile de chercher, de trouver... des étudiants à l'échelle internationale.

Et comme j'ai dit dans mon introduction, c'est presque 50 % des étudiants, au niveau de doctorat, à travers le Québec, qui sont... Alors, nous, on a réussi à augmenter par un certain pourcentage le nombre d'étudiants au niveau de doctorat, mais ce n'est pas le... qu'on a eu, on a... On voudrait recruter encore plus. Alors, il y a des conséquences financières, il y a des impacts sur la... de nos programmes de recherche, de nos centres de recherche.

Et l'autre chose qu'il faut comprendre, c'est, quand on perd ou on ne réussit pas à trouver, à recruter en étudiant international, la perte financière, la perte de connaissance n'est pas que pour une année, c'est... ça peut durer pour quatre ou cinq ans, dans le cas d'un étudiant au niveau baccalauréat et entre deux et cinq ans, même, au niveau maîtrise et doctorat. Alors, la chute d'inscriptions internationaux qu'on remarque, à Concordia et partout au Québec, cette année, on va vivre avec ça pendant les prochaines années aussi. Il y a des conséquences collatérales liées avec ça pour les années à venir.

M. Morin : Donc, si je vous comprends bien, l'effet, compte tenu, bien sûr, des années pour un baccalauréat mais des années pour rédiger et compléter un doctorat, vont se faire sentir chez vous pendant plusieurs années.

M. Carr (Graham) : Oui. Exactement.

M. Morin : Très bien. Autre élément que vous citez, toujours à la page 14, et j'aimerais que vous m'expliquiez parce que j'ai un peu de difficulté à comprendre... vous soulignez que : «La stratégie de financement par le recrutement international fait partie intégrante des dernières politiques de financement des universités. En fait, l'actuelle politique de financement des universités 2024‑2025 mise...

M. Morin : ...directement sur l'attraction et l'intégration des étudiants non québécois. La citation, ça viendrait du ministère de l'Enseignement supérieur. Vous ajoutez. De plus, les règles budgétaires 2025‑2026 prévoient déjà un budget de 42,5 millions de dollars pour attirer un plus grand nombre d'étudiants internationaux francophones et francophobes au sein des établissements universitaires francophones. Il est actuellement prévu que ce montant augmentera pour éventuellement passer à 85 millions par année à compter de 2027‑2028. Et ce que vous citez, ce serait également des documents du ministère de l'Enseignement supérieur. Aidez-moi à comprendre, parce que moi, quand je lis ça, que j'écoute, il me semble que le gouvernement d'une main fait quelque chose en vous imposant des quotas, en envoyant un signal à l'international comme quoi des étudiants étrangers, woups! peut-être pas au Québec. Puis d'un autre côté, on dépense de l'argent pour en attirer. Alors, comment on peut concilier tout ça?

M. Carr (Graham) : Peut-être que c'est une question à mieux poser à le gouvernement qu'à moi, mais c'est dans les règles budgétaires. C'est dans les règles budgétaires qu'il y aura une filière d'investissement... pour les universités francophones pour les aider de faire le recrutement à l'échelle internationale. C'est des montants, les montants qui ont été cités qui sont en croissance pendant les dernières années et pour l'année à venir, mais ces montants, c'est pour, comme j'ai dit, c'est exclusivement pour les universités francophones, afin de donner un coup de main à l'échelle internationale. Et... n'a pas... n'ont pas un accès à cette enveloppe dans le... dans les crédits budgétaires. Il y a... Parce que, vu de l'extérieur, ça semble un peu... québécois qu'on veut investir dans le recrutement des étudiants internationaux d'un côté et de réduire le nombre d'étudiants internationaux de l'autre côté. Mais je pense que ce n'est pas à moi à expliquer la raison derrière tout ça.

M. Morin : Cependant, je constate à la page 13 de votre mémoire que vous avez inauguré un campus thématique francophone à Shawinigan pour la transition énergétique. Et donc j'imagine que ça fait partie des démarches que vous faites pour, bon, franciser, vous assurer qu'il y a une vitalité avec le français. Le fait que vous ayez un campus thématique francophone, est-ce que ça vous permettrait d'avoir accès à une partie de ces sommes-là?

• (18 heures) •

M. Carr (Graham) : Non, parce que nous restons encore une université d'expression anglaise. Alors, nous sommes exclus de cette enveloppe. Mais c'est intéressant parce que le campus thématique à Shawinigan, ça, c'est lié directement avec notre projet de recherche Montage subventionné par le programme Apogée. Et, en fait, ça entre en concertation, en collaboration avec la CNESST et cégep de Shawinigan, la ville de Shawinigan. Alors, c'est... Pour moi, c'est un bel exemple comment une université à l'expression anglophone qui est basée à Montréal peut quand même travailler étroitement avec la région et le faire en français.

M. Morin : Tout à fait. Et...

M. Carr (Graham) : Et si je peux ajouter une autre chose...

M. Morin : Oui, oui, bien sûr.

M. Carr (Graham) : ...qui est plus récemment, le mémoire qu'on a soumis, peut-être vous l'avez lu la semaine passée, c'est de la Faculté des Beaux-Arts. Et la Faculté des Beaux-Arts de l'Université Concordia, c'est un joyau pour la culture, pour la vie artistique du Québec, la faculté a fait l'annonce avec le Musée contemporain d'arts à Baie-Saint-Paul, pour un programme de francisation pour nos étudiants qui va commencer au printemps 2026... un autre exemple pour démontrer comment une université montréalaise à l'expression anglaise travaillait étroitement avec des collaborateurs en région et pour aider nos étudiants à se franciser.

M. Morin : Tout à fait. Et c'est aussi très important. Vous le soulignez. D'ailleurs, dans votre mémoire, vous dites que pour votre programme d'art, notamment, et de design, vous êtes la deuxième au Canada parmi les 150 meilleures universités...


 
 

18 h (version non révisée)

M. Morin : ...dans le monde, et c'est tout à votre honneur.

Maintenant, vous parlez aussi, à la page 8, de la codirection du Consortium national pour la cybersécurité. 160 millions de dollars et également chef de file pour Volt-Age et le projet Apogée. Je comprends que, dans ce programme-là, le gouvernement du Québec investit plusieurs millions de dollars. Est-ce que... J'imagine que vous avez besoin de chercheurs internationaux de haut niveau, entre autres, pour faire avancer votre projet? Est-ce que les décisions du gouvernement actuel vous nuisent?

M. Carr (Graham) : Ah! oui, on a besoin de plusieurs internationaux, on a besoin des chercheurs québécois, canadiens et internationaux parce que ce sont des programmes de classe mondiale allant de semblable recherche de meilleurs talents à travers le monde parce que l'objectif du programme Apogée du gouvernement du Québec, c'est vraiment de mettre les universités québécoises et canadiennes à... dans la donne le classement plus haut mondial dans les domaines de recherche.

Alors, nous sommes très chanceux au Québec, l'Université de Montréal, l'Université Laval, l'Université Concordia ont des projets à Apogée, et même l'Université de Sherbrooke. Mais c'est certain que toutes les universités sont à la recherche de talents internationaux. Eh oui, c'est plus difficile pour nous, surtout si nous sommes en train de recruter quelqu'un qui n'est pas francophone et pour lequel le déménagement à Montréal au Québec, avec sa famille, l'intégration, tout ça, il y a des obligations, et pour quelques-uns, c'est un très grand, très grand défi. On fait le plus possible pour les accompagner, c'est certain. Je sais que c'est vrai pour les autres universités, même les universités francophones. Oui, parfois il y a un défi et parfois il y a trop de défis, pas nécessairement à l'accompagnement, mais à la rétention parce qu'on risque de perdre des chercheurs, des nouveaux chercheurs qui sont ici, qui sont très performants à l'échelle internationale. Mais...

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : M. Carr...

M. Carr (Graham) : Oui.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : ...je dois vous arrêter, le temps imparti ou à l'opposition officielle vient de se terminer. Il reste encore un intervenant, le deuxième groupe d'opposition. M. le député, vous avez 4 min 8 s.

M. Fontecilla : Merci, Mme la Présidente. Bonjour, M. Carr, et je salue également vos collègues, Mme de Celles et M. Lebel. Merci d'être là.

Écoutez, à la lecture de votre... la lecture de votre mémoire, il y a un aspect qui m'intéressait, j'aimerais bien comprendre la compréhension. Vous dites que c'est les gouvernements qui vous ont incités de façon structurelle à cause du financement, à aller chercher des étudiants et des étudiants internationaux pour pallier à un sous-financement. Donc, en quelque sorte, un sous-financement vous incite à aller chercher des étudiants internationaux et aujourd'hui, on vous... on vous coupe en quelque sorte cette source de financement. Est-ce que j'ai bien compris votre... votre affirmation.

M. Carr (Graham) : Bien, le programme à lequel je fais référence pour le recrutement, le financement pour le recrutement, ça faisait partie du plan stratégique du ministère de l'Enseignement supérieur. C'est dans les règles budgétaires, mais ce n'est ouvert que pour les universités francophones. Alors, c'est une incitation aux universités francophones d'augmenter le nombre d'étudiants internationaux. Ce n'est pas quelque chose à laquelle les universités anglophones ont accès... actuellement.

M. Fontecilla : Très bien. Mais vous dites que le réseau universitaire est... Le problème fondamental pour le réseau universitaire est le sous-financement structurel et chronique des universités québécoises, toutes comprises, francos et anglos, et qu'une étude a chiffré à 2 milliards de dollars. Est-ce... C'est ça que vous dites, là?

M. Carr (Graham) : Oui, c'est ça. Ce n'est pas nous qui le dites, je pense que déjà dans les... dans les audiences, l'économiste Pierre Fortin a présenté son mémoire. C'est lui qui a fait une recherche, il y a quelque temps, en disant qu'il y a un manque de financement...

M. Carr (Graham) : ...structurel de 1,4 million de dollars. Et c'était le Scientifique en chef, Rémi Quirion, qui a dit que, non, le manque de financement, quand on... y compris les programmes de recherche pour le réseau québécois, c'est plus comme 2 millions de dollars. Alors, je cite leur étude.

M. Fontecilla : Cela vous incite à aller chercher une source de financement qui serait les étudiants internationaux.

M. Carr (Graham) : Ça, c'est un facteur pour aller chercher les étudiants internationaux, c'est pour compenser le... un manque de financement. Mais aussi, ce n'est pas... ce n'est pas juste une question de financement. On cherche les étudiants internationaux pour leurs... pour leurs cerveaux, on cherche les étudiants internationaux pour leur talent. Et à l'Université Concordia, on fait beaucoup de recherche appliquée, on a des liens très importants avec l'industrie, etc., alors on veut... on veut trouver des étudiants, former des étudiants qui répondent aux besoins de l'économie québécoise, et, pour le faire, il faut élargir le bassin potentiel, être plus grand que les... que les Québécois.

M. Fontecilla : Tout à fait. Écoutez, vous reprenez une demande qui a été faite par plusieurs universités, y compris des cégeps, là, c'est d'exclure, en quelque sorte, le renouvellement des Certificats d'acceptation du Québec, là, des quotas, là. Parlez-nous... parlez-nous-en, de cette proposition-là.

M. Carr (Graham) : Peut-être, je vais demander à notre registraire Stéphanie de répondre à ça, parce que c'est vraiment elle qui doit composer avec ces règlements.

Mme de Celles (Stéphanie) : Bonjour. Alors, le problème avec les renouvellements, c'est que c'est quasi impossible — d'autres universités ont dû vous le dire — de faire le suivi. Quand les étudiants obtiennent un premier CAQ, ils doivent souvent renouveler, les durées de CAQ sont très variables. Donc, dans un quota, qui est, en fait, un nombre total de demandes... je sais que le ministre Roberge disait plus tôt qu'on n'était pas rendu à notre quota, mais on a encore un très grand nombre d'étudiants, chez nous, par exemple, qui devront renouveler leur CAQ avant la fin de la période du décret, et c'est ça qui est le problème.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : Mme de Celles...

Mme de Celles (Stéphanie) : Oui, je comprends. D'accord.

La Présidente (Mme Lecours, Les Plaines) : ...je dois, malheureusement, vous arrêter. Je vous ai laissé parler, étant donné que vous preniez la parole pour la première fois. C'est ce qui met fin à notre audition aujourd'hui. Au nom des parlementaires, je vous remercie infiniment de votre apport à nos travaux et je vous souhaite une bonne fin de, je vais dire, soirée, pour le moment. Alors, merci beaucoup.

Et pour vous, chers collègues, eh bien, la commission ajourne ses travaux au jeudi 23 octobre, après les avis touchant les travaux des commissions.

(Fin de la séance à 18 h 10)


 
 

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