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Version finale

28th Legislature, 3rd Session
(February 20, 1968 au December 18, 1968)

Wednesday, November 6, 1968 - Vol. 7

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Politique salariale


Journal des débats

 

Régies gouvernementales

Politique salariale

(Dix heures quinze minutes)

M. GRENIER (président du comité): A l'ordre, messieurs! J'ai lu, hier, dans un journal: Un homme qu'il faut épauler. J'ai pensé, à un moment donné, que c'était moi, jusqu'à la fin de la lecture. Or je voudrais bien demander le concours de chacun des membres de ce comité afin que nous continuions dans le calme et dans l'ordre comme nous l'avons fait depuis les premières séances. A cet effet, je tenterai d'être impartial autant envers ma gauche que ma droite comme j'ai tenté de l'être depuis le début à la surprise de l'Opposition. Je donne la parole à M. Bertrand.

UNE VOIX: Ah, ça, c'est bien dit!

M. LESAGE: M. le Président, vous le constatez, M. le Premier ministre, aune double personnalité et ici il montre sa bonne.

M. BERTRAND: Disons, M. le chef de l'Opposition, qu'il est un peu comme tout homme. Il y a toujours deux hommes et ils sont constamment en constestation l'un contre l'autre — je veux dire à l'intérieur du même homme.

M. le Président, j'ai noté avec plaisir d'abord à la lecture des journaux puis d'une annonce qui a paru dans tous les journaux, qu'il semblait qu'à la suite de notre demande de reprendre les négociations et de tenter de régler, dans toute la mesure du possible, certains points qui étaient demeurés en suspens et où, de part et d'autre, on pouvait reprendre la discussion et en arriver à une entente, j'ai donc noté que le climat des négociations semblait serein. Dans les circonstances, je me demande, étant donné que le problème des négociations est peut-être immédiatement beaucoup plus important que celui de la tenue des séances de ce comité — je dis immédiatement — ne serait-il pas à propos, si les membres du comité acceptent ma proposition, et si du côté des parties en cause on accepte également, qu'aujourd'hui nous suspendions les travaux du comité, que nous ajournions s'il y a lieu à demain matin pour permettre que les négociations se poursuivent aujourd'hui de manière que ceux qui représentent les parties et qui sont nécessairement mobilisés devant le comité puissent accomplir la tache la plus urgente et qui est d'une importance primordiale immédiatement?

Je soumets cette proposition dès le début des travaux et je demanderais au chef de l'Opposition de faire connaître son point de vue.

M. LE PRESIDENT: M. Lesage!

M. LESAGE: M. le Président, M. le Premier ministre, j'ai été fort heureux, avec mes collègues, de constater que des progrès avaient été accomplis au cours des négociations qui ont repris et qu'un certain degré de succès avait été atteint.

Je sais que les parties ont négocié jusqu'à deux heures ce matin. Je n'ai pas pu lire dans les journaux quels progrès ont été faits au cours de la soirée, hier soir, et au cours de la nuit. Je l'ignore. J'étais au courant des progrès qui ont pu s'accomplir dans la journée d'hier. Il reste certaines clauses importantes, certaines clauses à incidence monétaire et certainement la question des salaires. Cela, ce n'est pas réglé.

Est-ce qu'il y aurait avantage en vue d'un règlement relativement plus rapide à reprendre les séances de négociations avant d'entendre le ministre d'Etat à la Fonction publique terminer son exposé sur l'application de la politique salariale aux employés de la Régie des alcools? Je pense que ce sont les négociateurs beaucoup plus que moi-même qui sont en mesure de le juger.

Il est entendu — je le répète, je l'ai dit déjà à deux reprises à cette table — qu'il ne saurait être question pour nous de remplacer les équipes de négociations et de tenter de négocier à ce comité. D'un autre côté, nous sommes puissamment intéressés à entendre de la bouche du ministre d'Etat à la Fonction publique ce qu'il nous a annoncé, c'est-à-dire la politique gouvernementale des salaires, telle qu'elle trouve son application dans le conflit actuel.

Si le gouvernement nous disait qu'il est disposé à être plus flexible, à abandonner la rigidité absolue qui semble avoir été la ligne de conduite que les négociateurs se sont vu imposer par le gouvernement, eh bien, il est clair que ce que nous devrions espérer, c'est que les négociateurs se réunissent dès maintenant.

Mais il faudrait quand même — si l'on veut espérer un règlement rapide — que d'un côté le gouvernement soit prêt, non pas à abandonner sa politique salariale, mais à être plus flexible dans sa mise en application, pour autant que le conflit de la Régie des alcools est en cause.

Maintenant, nous n'étions pas à la table des négociations. J'aimerais bien savoir de ceux qui y étaient, de ceux qui se sont fait rapporter ce qui s'y est fait — je pense, évidemment, que le

premier cas est celui de M. Parent, que le deuxième est celui de M. Pepin, — si les négociateurs, de part et d'autre, croient qu'il serait utile de reprendre les négociations dès maintenant, dès ce matin, à la lumière de ce qui s'est passé à venir jusqu'à deux heures ce matin. Ou bien, croient-ils plus utile, en vue d'en arriver à une conclusion heureuse, d'entendre le ministre. Je pense sérieusement que l'avis des négociateurs, de part et d'autre, pourrait nous éclairer sur la réponse à donner à la suggestion du premier ministre.

M. MASSE: M. le Président...

M. GRENIER: M. le ministre de la Fonction publique a la parole.

M. MASSE: M. le Président, j'ai suivi de très près les progrès de la négociation depuis l'ajournement du comité de jeudi dernier. Je crois que les deux parties ont fait des progrès très intéressants en vue d'un rapprochement pour permettre de conclure une convention collective.

Je tiens à répéter qu'à l'intérieur de la structure légale des négociations dans le secteur public, la table de négociations reste l'endroit privilégié pour un règlement entre les parties.

Le gouvernement, pour répondre à la question du chef de l'Opposition, est tout à fait disposé à faire des efforts identiques à cette table de négociations, comme il a fait des efforts aux autres tables de négociations.

Sa bonne foi, dans ce secteur de négociations, la bonne foi du gouvernement a été, à maintes reprises, reconnue par les parties avec lesquelles nous négocions. Encore hier, le syndicat des professionnels à l'emploi du gouvernement signait la convention collective qui va régir les conditions de travail dans ce secteur, pour les prochaines années.

Nous croyons qu'il est dans l'intérêt de tout le monde que les efforts que nous avons faits depuis le début de l'année, avec un ensemble de syndicats, que des efforts identiques soient faits avec ce syndicat afin que le gouvernement conclue là une convention collective qui soit juste pour les employés de la RAQ; juste, également, pour les employés des autres secteurs et juste, aussi, pour les contribuables québécois que nous représentons à ces tables de négociations.

M. BERTRAND: M. le Président, je crois que M. Parent a demandé la parole.

M. LE PRESIDENT: Alors, M. Parent.

M. PARENT: Si vous permettez, comme on l'a déjà mentionné, nous avons négocié de façon intensive depuis l'ajournement de la semaine dernière. Nous ne savons pas si c'est une coïncidence, parce que les journalistes étaient là, mais de toute façon nous devons dire que nous avons fait des progrès très considérables sur plusieurs clauses normatives de telle façon que, maintenant, les négociations sont étranglées par deux noeuds gordiens bien précis, celui de la sécurité de l'emploi et celui des salaires, de la question monétaire.

Sur ces deux questions, il y a des difficultés considérables, mais nous sommes disposés — dans la perspective que le comité demeure disponible à siéger demain - à reprendre les négociations immédiatement, ou, à très brève échéance, ici même, pour tâcher de trouver des solutions au présent litige, sur les points qui restent.

Cependant, nous aimerions espérer que les représentants du gouvernement ou de la régie, qui seront à la table, seront un peu plus flexibles que le gouvernement de Trudeau l'a été ces derniers jours. Que tout en restant des hommes libres, nous puissions espérer ne pas partir les mains vides.

M. BERTRAND: J'ai déclaré que j'étais peut-être venu les mains vides, mais il y a des jalons qui sont posés. J'aurai, sans doute, l'occasion en Chambre, en réponse à une question du chef de l'Opposition, cet après-midi, de fournir...

M. LESAGE: Ah, je n'ai pas donné avis! Je n'ai donné avis d'aucune question.

M. BERTRAND: Non, mais très souvent, je ne reçois pas avis et je reçois la question.

M. LESAGE: C'est aujourd'hui la journée des députés.

M. BERTRAND: C'est ça. Alors, étant donné que c'est la journée des députés, je pourrais, devant mes collègues...

M. LESAGE: Ce n'est pas la journée du premier ministre.

M. BERTRAND: C'est-à-dire que c'est la journée du premier ministre comme député comme c'est la journée du chef de l'Opposition comme député.

M. PINARD: C'est la mise au jeu.

M. BERTRAND: Alors, c'est la mise au jeu. J'ai déjà joué au hockey.

M. PINARD: Ah, oui! Vous aimez les sports.

M. BERTRAND: Je donnerai en Chambre, je réserve à mes collègues les informations que j'aurai à donner dans ce domaine-là.

On a parlé de bonne foi, il me semble. Quelles que soient les raisons, je ne veux pas entrer dans les détails. Il semble que les négociations qui ont été reprises ont été conduites avec beaucoup d'efficacité, de célérité. Aucun doute que nos gens, ceux qui nous représentent et en qui nous avons confiance, s'en iront dans le même esprit qui semble avoir animé les travaux de la table de négociations depuis quelques jours. Entrer dans plus de détails serait oiseux car j'ai déclaré dès le début que nous n'étions ici, nous, membres du comité, ni comme négociateurs, ni comme tribunal d'arbitrage.

M. le Président, étant donné que M. Parent vient d'exposer son point de vue, je prierais, quant à nous, à moins qu'on ait objection, et M. Renaud et M. Pepin qui nous représentent, et leur équipe à la table de négociations, de nous dire si les négociations peuvent être continuées instanter et à Québec. On permettra à M. Renaud...

M. LESAGE: Oui.

M. RENAUD: Je suis certainement prêt, M. le Président et les membres du comité, à continuer la négociation à Québec et immédiatement.

M. LESAGE: Votre bâton est-il bien raide, Paul, ce matin?

M. BERTRAND: Il est membre du Barreau et non du bâton.

M. LE PRESIDENT: Question indécente!

M. BERTRAND: M. le Président, je propose donc, appuyé par le chef de l'Opposition, que le comité soit ajourné à demain matin.

M. BELLEMARE: C'est ça. UNE VOIX: Non, à ce soir.

M. LESAGE: Des progrès pourraient être faits dans la journée, on pourrait siéger à 8 heures.

M. BERTRAND: Je suis engagé!

M. LESAGE: Est-ce qu'il y a séance du cabinet ce matin?

M. BERTRAND: Non, je suis engagé et j'ai des rencontres à Montréal, deux ententes.

M. le Président, je propose donc et je crois, appuyé par le chef de l'Opposition, que le comité soit ajourné à demain avant-midi à 10 heures.

M. LESAGE: Ce qui veut dire que la Chambre ne serait ajournée qu'à 3 heures demain après-midi.

M. BELLEMARE: Que la Chambre serait ajournée?

M. BERTRAND: Nous pouvons mettre cela à 9h 30. Je n'ai pas d'objection.

M. LESAGE: Si nous entreprenons, s'il n'y a pas de progrès de fait dans les négociations et que ça bloque...

M. BELLEMARE: Nous verrons cela à 6 heures.

M. BERTRAND: A 9 h 30.

M. BELLEMARE: Nous aurons des nouvelles à 6 heures.

M. LESAGE: Non, mettons 10 heures, mais la Chambre ne pourra pas siéger à 11 heures. Vous ne pouvez pas ajourner la Chambre à 6 heures...

M. BERTRAND: Alors, nous pourrions peut-être, siéger en Chambre...

M. LESAGE: ... en disant si ça marche ou si ça ne marche pas.

M. BELLEMARE: S'il y a des progrès, nous verrons cela à 6 heures.

M. BERTRAND: Alors, nous reviendrons à 10heures demain matin et nous verrons s'il y a lieu de ne pas siéger en Chambre.

M. LESAGE: Le mieux à faire serait peut-être d'ajourner la Chambre à 11 heures demain matin.

M. BERTRAND: A 11 heures demain matin.

M. LESAGE: A11 heures demain matin et, s'il n'y a pas eu de progrès et que nous devons continuer les séances du comité, il y aura appel des ordres du jour et nous reviendrons.

M. BERTRAND: C'est cela. Très bien. Merci, messieurs.

M. LE PRESIDENT; La séance est levée! (10 h 32)

Séance du 7 novembre 1968

(Dix heures trois minutes)

M. GRENIER (président du comité): A l'ordre, messieurs! La séance est ouverte.

M. BERTRAND: M. le Président, je vous demande la parole. J'ai été informé que les négociations s'étaient poursuivies hier dans un excellent climat; que plusieurs des points avaient été non seulement discutés mais que plusieurs principes avaient été acceptés.

Il semble donc que les négociations, non seulement se poursuivent, mais qu'elles semblent nous indiquer qu'il y aura, nous l'espérons tous, un soleil au bout.

Dans les circonstances, est-ce que je réponds bien aux vues des deux parties en cause, en proposant de nouveau ce matin, M. le Président, l'ajournement des travaux de ce comité à 4 h 30 cet après-midi.

M. LESAGE: Qu'est-ce qu'il reste comme points importants en discussion?

M. BERTRAND: M. le Président, M. Parent pourrait répondre au chef de l'Opposition.

M. LE PRESIDENT: M. Parent. UNE VOIX: M. Masse.

M. MASSE: Je pense qu'il reste un point concernant ce qu'on pourrait appeler le monétaire en général...

M. LESAGE: Oui.

M. MASSE: ... à l'intérieur duquel sont situées les questions de reclassement ou de redéfinition de catégories...

M. LESAGE: Y compris les manutentionnaires; c'est cette question-là, je pense? Cela va plus loin que cela?

M. MASSE: On est rendu pas mal plus loin que cela.

M. LESAGE: C'est plus complexe que ça?

M. MASSE: Et il reste également, je pense, à terminer des textes concernant la sécurité.

M. LESAGE: Pour ce qui est de la sécurité d'emploi,...

M. LAPORTE: Nous avons l'impression que vous ne parlez pas assez fort!

M. LESAGE: Pardon. ... je comprends qu'un accord de principe est intervenu, d'après les nouvelles que j'ai entendues. Est-ce que la sécurité d'emploi à la régie est la même que celle qui est accordée aux employés ouvriers du ministère des Travaux publics, par exemple?

M. MASSE: Disons que oui...

M. PARENT: Si vous permettez, à cette première question-là,...

M. LESAGE: Oui.

M. PARENT: ... je peux indiquer que l'accord de principe qui est intervenu donne une sécurité qui n'est pas exactement identique à celle des ouvriers du gouvernement mais qui leur donne — d'après nous —au niveau de l'accord de principe, au moins autant de sécurité, mais sous une autre forme.

M. LESAGE: Sous une autre forme.

M. MASSE: Cela tient compte de particularités.

M. BERTRAND: Si vous me permettez, M. le Président, loin de moi l'idée d'empêcher qui que ce soit d'entrer dans les détails, mais nous nous sommes très bien entendus depuis le début que ce comité ne devrait être une table ni de négociations, ni un tribunal d'arbitrage. La motion ou la demande que j'ai formulée répond à ce qu'il semble aux voeux des deux parties soit que les négociations se continuent cet après-midi» J'ai suggéré jusqu'à quatre heures trente, heure où nous pourrions revenir devant le comité ici et s'il y a lieu encore de l'ajourner avec l'espoir que peut-être d'ici 4 heures et demie, on en sera venu à une entente.

M. LAPORTE: Est-ce qu'on peut prévoir immédiatement que le même comité, M. le Président, va siéger ensuite sur le problème des enseignants où il y a un problème actuellement?

M. MASSE: Sans vouloir faire de jeu de mots, M. le Président, nous ne nous servirons jamais d'un comité pour siéger sur un conflit afin de ne pas l'écraser.

M. LAPORTE: Je remercie notre professeur de français, j'aimerais mieux que nous ayons de-

vant nous un professeur de relations de travail afin que ce conflit qui empêche des milliers d'élèves...

M. BERTRAND: Vous n'allez avoir, M. le Président, ni un professeur, ni un agent des relations publiques, tout simplement le chef du gouvernement qui, à ce moment-là, doit prendre ses responsabilités devant tous les conflits que nous avons et juger avec ses collègues des gestes à poser. Nous en avons posé un dans le domaine de la politique salariale et nous avons discuté de ses incidences sur la RAQ. Par contre nous n'avons pas voulu d'aucune façon que les actes de ce comité soient de nature à paralyser les négociations qui se poursuivent et c'est pourquoi j'en demande aujourd'hui l'ajournement, suivant la formule que j'ai proposée, jusqu'à 4 heures trente.

Quant au reste, le gouvernement jugera et fera connaître sa politique.

M. LESAGE: M. le Président, sur la motion d'ajournement?

M. LE PRESIDENT: Très bien, M. Lesage.

M. LESAGE: Le premier ministre dit: Le chef du gouvernement prendra ses responsabilités...

M. BERTRAND: Avec ses collègues.

M. LESAGE: Avec ses collègues. Le gouvernement lui-même posera des gestes mais il ne faudrait quand même pas que le premier ministre oublie le rôle essentiel que l'Opposition a joué dans le cas qui nous occupe à ce comité présentement.

Il ne faudrait pas oublier que c'est parce que l'Opposition a fortement pressé le gouvernement que ce dernier a consenti à ce que le comité siège pour prendre connaissance de la politique salariale du gouvernement! Il ne faudrait pas oublier qu'il a fallu un débat en Chambre pour amener un déblocage. Ce débat-là, c'estl'Opposition qui l'a amené.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. BERTRAND: M. le Président, il ne faudrait toujours pas...

M. LOUBIER: Un petit commercial partisan.

M. BERTRAND: ... transporter, devant ce comité, les problèmes que j'appellerai électoraux qui, à l'heure actuelle, sont débattus dans deux comtés: le comté de Bagot et le comté de Notre-Dame-de-Grâce. Laissons l'expression des opinions électorales des deux mouvements politiques — car ils sont les deux seuls à y participer dans Bagot et dans Notre-Dame-de-Grâce alors, laissons donc aux campagnes électorales les problèmes qui relèvent des campagnes électorales et aux travaux de ce comité les problèmes qui relèvent des travaux de ce comité. C'est ainsi que nous aurons, selon moi, beaucoup d'ordre.

M. LAPORTE: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: M. Parent a demandé la parole.

M. LESAGE: Les membres de ce comité...

M. LE PRESIDENT: C'est l'Opposition elle-même qui a demandé, il y a quelque temps, que l'assistance puisse avoir la parole, ainsi que les députés, même s'ils ne sont pas membres du comité. Alors, M. Parentl

M. PARENT: Si vous permettez! De fait, nous avons accompli du progrès hier après-midi sur la question de la sécurité d'emploi, comme ça été ultérieurement mentionné. Reste cependant toute la question monétaire, la question des salaires. Nous avons formé là-dessus deux comités de travail. Un comité qui travaille sur le groupe ouvrier a fait plus de progrès que l'autre qui travaille sur la partie des fonctionnaires, soit magasins, bureaux. Nous avons suggéré ce matin, puisque nous avons repris les négociations à 8 h 30, que ces comités de travail continuent. Cependant, je doute, même avec beaucoup d'optimisme tout en étant réaliste, que nous puissions faire suffisamment de progrès, parce que la situation est fort complexe d'autant plus que nous aurons de nouvelles approches du problème à ce sujet. Je doute que nous puissions vraiment faire suffisamment de progrès pour que ce soit, disons donc, valable de faire une réunion du comité à 4 h 30 cet après-midi.

Je sais bien que je n'ai rien à voir dans l'horaire de vos travaux, mais si je me permettais une humble suggestion, ce serait que l'ajournement se fasse à 8 heures ce soir, comme délai le plus rapproché...

M. LAPORTE: Jusqu'à ce soir?

M. PARENT: ... afin que nous ayons quand même quelques heures de plus pour pouvoir travailler.

M. BERTRAND: J'amende donc ma proposition d'ajournement à 4 heures et demie pour la mettre à 8 heures ce soir.

M. LE PRESIDENT: M. Loubier. M. LAPORTE: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: M. Laporte, vous avez demandé la parole alors que M. Loubier l'avait déjà demandée. M. Loubier.

M. LOUBIER: Voici, M. le Président, simplement quelques mots à la suite des réflexions du chef de l'Opposition. C'est que, étant donné qu'il veut s'attribuer tous les mérites des progrès des négociations et que ça a été lui qui, semble-t-il, aurait été le thaumaturge dans tout cela, cela prouve tout simplement une chose, M. le Président, c'est qu'il est meilleur dans l'Opposition qu'il ne l'était au pouvoir.

DES VOIX: A l'ordre! A l'ordre! M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. LAPORTE: M. le Président, est-ce que je peux vous demander la faveur d'adresser la parole à ce comité?

M. LE PRESIDENT: M. Laporte.

M. LAPORTE: M. le Président, nous sommes tout à fait d'accord sans hésitation pour laisser les problèmes politiques être débattus en dehors de ce comité, sans l'ombre d'une hésitation. Ce qui m'a amené à faire la suggestion que j'ai faite ce matin, c'est qu'il existe, à mon avis, deux choses. Nous avons constaté — et ce n'est pas, je pense exagéré, de le dire — que depuis que ce comité siège ou ne siège pas, même les ajournements ont semblé bénéfiques.

Il y a eu des progrès sensibles d'accomplis, et nous pouvons espérer un règlement pas trop lointain.

Il y a chez moi un problème qui intéresse un grand nombre de parents, à cause d'un autre conflit, le conflit des enseignants. Il y a actuellement 17,000 enfants qui sont menacés de perdre leur année scolaire. C'est ce qui m'a amené, devant les nouvelles publiées ce matin, à l'effet que le conflit devenait majeur, à suggérer que ce comité qui a semblé faire du bon travail soit maintenant autorisé à étudier cet autre problème.

Je veux bien que le gouvernement nous dise qu'il saura prendre ses responsabilités. C'est un peu différent du problème de l'alcool. La fermeture des magasins d'alcool causait et cause encore des problèmes sérieux au point de vue économique; mais pour les enfants dans les écoles, à mesure que les semaines passent, il sera un jour trop tard, même pour le rattrapage.

Je me demande si, pour sauver l'année scolaire de ces 17,000 enfants qui sont dans ma région et qui perdent actuellement à cause d'un contrat de travail, une journée de classe par semaine, et certains d'entre eux deux jours et demi, nous ne pourrions pas venir devant ce comité pour tenter de régler également ce conflit qui, à mon avis, est infiniment plus grave dans ses conséquences que celui que nous sommes en voie de régler indirectement ou le comité des relations industrielles.

M. BERTRAND: M. le Président, j'ai répondu tantôt. J'espère que le député de Chambly comprendra que nous sommes de ce côté-citout aussi conscients que lui des problèmes, en particulier dans le domaine de l'enseignement. Je n'ai pas besoin d'élaguer là-dessus.

Toutefois, ce comité a siégé. A ce moment-ci, on demande un ajournement jusqu'à 8 heures ce soir. Nous pourrions en rester là pour le moment, de manière à laisser nos gens retourner au travail. Quant à nous, nous prendrons nos responsabilités en temps et lieu.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que c'est adopté? Alors, le comité est ajourné à ce soir, 8 heures.

Reprise de la séance à 20 h 5

M. GRENIER (président du comité): A l'ordre, messieurs!

M. BERTRAND: Ce matin nous avions proposé un ajournement à 4 heures trente, on nous a demandé jusqu'à 8 heures. Est-ce qu'il nous serait possible de savoir... M. Parent, avez-vous des nouvelles à nous donner sur les progrès accomplis au cours de ces deux journées et sur le résultat et avez-vous de très bonnes nouvelles à nous annoncer?

M. LE PRESIDENT: M. Parent.

M. PARENT: Nous avons effectivement continué ce matin, tard en matinée et cet après-midi, les réunions des comités, jusqu'au moment où le négociateur gouvernemental nous a demandé de reprendre les négociations générales. Nous l'avons fait et nous pouvons dire maintenant que, sur la clause de sécurité d'emploi, nous sommes d'accord maintenant, non seulement en principe mais généralement, sur la mécanique, même si nous ne nous sommes pas encore entendus au point de parapher les textes.

Nous avons abordé la question monétaire. Ce que nous avons fait hier au comité, c'était de trouver de nouvelles approches au problème monétaire. Nous avons fait un certain progrès sur la question des employés d'entrepôt. Les progrès ont été moins substantiels sur la question des magasins et des bureaux, pour les employés de la régie, mais nous avons fait suffisamment de progrès en négociation pour croire que la meilleure façon de passer à travers le problème actuel, c'est de continuer à négocier. Alors, ce n'est pas la grande nouvelle peut-être, mais c'est la nouvelle qui nous paraît la meilleure, celle de croire que, si les deux parties veulent travailler en essayant de trouver une solution ad hoc au problème de la Régie des alcools, c'est à la table des négociations, en négociant vraiment.

M. BERTRAND: M. Parent, quant à moi, je ne saurais m'empêcher de vous dire, d'abord en mon nom personnel et comme chef du gouvernement, et je suis sûr de me faire l'interprète des députés des deux côtés, que la déclaration que vous venez de faire est non seulement bienvenue, mais qu'elle est très bien accueillie.

Si vous le jugez à propos, étant donné que nous avons tous, des deux côtés de cette table, déclaré que cette table n'était pas une table de négociations... et si vous désirez continuer, étant donné que de très grands progrès ont été accomplis aujourd'hui — vous avez noté qu'il pouvait en avoir d'autres — a ce moment-là, je ne vois pas pourquoi, quant à moi, je serais un obstacle, par ma présence au comité ou par la tenue de la séance du comité ici, à la poursuite des négociations qui semblent s'annoncer meilleures. Elles semblent révéler un climat satisfaisant et excellent pour les deux parties. Climat que nous avions souhaité, il n'y a aucun doute, depuis longtemps. A moins qu'on ait d'autres choses à ajouter? Le chef de l'Opposition a sans doute, lui aussi, un mot à dire.

M. LE PRESIDENT: M. Lesage!

M. LESAGE: Un mot très bref. J'ai été fort heureux d'entendre M. Parent nous dire que des progrès sérieux ont été accomplis. Il a exprimé son désir de retourner à la table des négociations. C'est évidemment là que l'affaire peut être réglée; ce n'est pas ici. S'il y avait eu blocage complet, il aurait bien fallu continuer le travail du comité, entendre la dernière partie de l'exposé de M. Masse. Mais, si des deux côtés, sur la question salaire, il y a déblocage? C'est là-dessus que j'aimerais une confirmation de M. Parent.

M. LE PRESIDENT: M. Parent!

M. PARENT: J'ai dit, sur le plan de la sécurité d'emploi, ce qui s'était passé. Sur la question des salaires, c'est beaucoup plus complexe; c'est-à-dire que, par exemple, sur le plan du groupe travaillant à l'entrepôt nous avons formé un sous-comité, il y a quelques jours pour établir la hiérarchisation des fonctions, c'est-à-dire pour essayer d'établir la valeur relative des fonctions les unes par rapport aux autres.

Il faut tout de suite dire que ceci ne se fait pas en vertu d'un système perfectionné d'évaluation de tâches, il se fait un peu au « piffomètre ». Mais nous sommes quand même arrivés à une hiérarchisation des fonctions.

Pour les groupes d'employés féminins, il y a maintenant accord sur les taux qui devraient être payés. Pour les groupes masculins, il y a huit groupes au total, trois de ces groupes, surtout parmi les employés au bas des échelles, c'est-à-dire les manoeuvres et les employés de production, les fonctions assignées, il y a là un problème qui nous sépare encore assez sérieusement.

Pour le groupe des fonctionnaires, depuis très longtemps, planait dans l'atmosphère des négociations et ailleurs, par des changements

d'horaires de travail, non seulement de plans mais d'horaires de travail, une possibilité en tout cas de prévoir des gains monétaires améliorés. Un sous-comité a travaillé là-dessus hier soir, ce matin et cet après-midi, sans même pouvoir arriver à une conclusion sur ce que pourraient être des horaires augmentés. Donc, avant de parler de quantum de salaires, reste un différend sur les heures de travail ou sur les plans de travail des employés qui sont du groupe des fonctionnaires.

Il est bien évident que, dès que nous ne nous entendons pas sur des horaires, le problème reste global sur le plan de la rémunération de ces employés. Il est évident également que ce soir, vers 5 h 50, avant qu'on nous dise qu'il fallait ajourner la séance de négociations vers 6 heures, à cause de la tenue du comité, il y a eu des accrochages assez sérieux à la table des négociations.

Mais nous croyons quand même, malgré ces accrochages, que, s'il y a flexibilité du côté des négociateurs de la régie et des représentants du gouvernement qui sont là, c'est peut-être la meilleure place. Mais on ne peut pas prédire — ce qui a été prédit — que le conflit de la régie peut prendre fin à brève échéance. Il ne faudrait pas s'illusionner là-dessus. Ce qui sépare les deux parties présentement est encore quand même très considérable.

Les quanta de rémunération qui sont proposés, a ce moment-ci, pour les employés de bureau et pour les employés de magasin — même si hier on a fait un pas du côté gouvernemental sur le forfaitaire qui n'affecte pas les échelles — demeurent un fossé considérable à combler.

Mais nous avons le sentiment que, là-dessus — à la condition que nous ne soyons pas « collés » avec des positions absolument intransigeantes et négatives - il y a véritablement place pour des pourparlers. Mais reste le deuxième noeud gordien, dont je parlais hier; il n'est pas encore dénoué. Nous ne nous sentons pas totalement étranglés; par ailleurs, nous ne sommes pas sûrs encore d'être en pleine sécurité. Alors là-dessus, il reste un fossé considérable, mais nous sommes prêts à le reprendre à la table des négociations.

M. BERTRAND: M. Parent, quant à moi, je vous remercie. Maintenant, comme nous ne voulons pas entrer dans les détails, je crois qu'il serait peut-être à propos que M. Pepin qui, d'autre part, représente l'employeur, la RAQ, donne seulement quelques détails relatifs aux propos que vient de tenir M. Parent. Seulement pour éclairer les membres du comité sur les quelques points qui ont été soulevés.

M. PEPIN: Tout le monde pensait que c'était moi.

M. BERTRAND: Non, je n'ai pas nommé M. Marcel Pepin.

UNE VOIX: C'est l'autre Pepin de la RAQ. M. LE PRESIDENT: Alors, M. Pepin.

M. PEPIN: M. le Président, M. les membres du comité. Voici, au sujet des entrepôts, ce qui s'est passé. Nous avons fait une offre qui a été modifiée par une nouvelle échelle de salaires qui représente 6.8%. Au début, on l'avait offerte pour les deuxièmes 18 mois; nous l'avons amenée à la signature. C'est une augmentation assez considérable qui, hier, à la discussion, a encore été changée devant les représentations de la partie syndicale, surtout du côté féminin.

M. CHOQUETTE: M. Pepin, puis-je faire une interruption? 6.8%, ça signifie 6.8% par période de 18 mois?

M. PEPIN: C'est une nouvelle échelle qui représente une augmentation de 6.8%. Cette nouvelle échelle-là continue de s'appliquer, évidemment. Mais ce n'est pas une nouvelle échelle qui arrive année après année. Ce n'est pas 6.8% et, l'an prochain, encore 6.8%, et l'année ensuite, encore 6.8%. C'est une nouvelle échelle qui s'applique à un moment donné. Elle vaut 6.8%, elle représente 6.8%.

M. LESAGE: Mais cela, c'est en dehors des augmentations?

UNE VOIX: En plus des 7.5%...

M. CHOQUETTE: Cela, c'est au départ.

M. PEPIN: C'est-à-dire que le départ est 7.5%...

M. LESAGE: Le réajustement d'échelle veut dire en lui- même une augmentation de 6.8%, c'est ce que nous appelons généralement rattrapage, c'est cela?

M. PEPIN: C'est cela.

M. MALTAIS (Saguenay): On ne comprend rien ici.

M. LESAGE: Si j'ai bien compris, il y a 6.8% dans le cas que M. Pepin vient de mentionner, 6.8% de rattrapage et à partir de là...?

M. CHOQUETTE: Deux fois 7.5%.

M. PEPIN: C'est ça.

M. LESAGE: Deux fois 7.5%.

M. PEPIN: C est-à-dire les premiers 7 1/2% au 1er avril 1968. La nouvelle échelle s'applique dès le retour au travail. Les deuxièmes 7 1/2%, dix-huit mois après le 1er avril 1968, c'est-à-dire le 1er octobre 1969. C'est le sens de la base des offres monétaires pour les ouvriers d'entrepôt.

Chez les femmes, le salaire de base est amené, à la signature, à $1.85 et, au 1er octobre 1969, à $1.99.

Cette nouvelle offre d'aujourd'hui, enfin, qui a été décidée au comité hier soir, a modifié un peu l'échelle. Je vous fais grâce des détails. Chez le personnel masculin, nous avons les manoeuvres à $2.28, au 1er octobre 1968. Le taux de manoeuvre devient la base de la nouvelle échelle chez les hommes et le taux de manoeuvre devient à $2.46, au 1er octobre 1969, par l'effet de l'application des deuxièmes 7 1/2%.

Tous les autres taux sont affectés selon une échelle basée sur des niveaux. Les niveaux sont distancés et déterminés par des écarts réguliers qui vont de la base, c'est-à-dire de $2.46, jusqu'à un maximum de $3.48. Cette nouvelle échelle est faite conformément au principe de la politique générale qui veut reconnaître les spécialisations.

Chez les employés de magasin, les fonctionnaires, la régie offrait 7 1/2% - 7 1/2%. La régie n'a pas reconnu la nécessité de rattrapage chez les employés de magasin parce que, chez les employés de magasin, la comparaison avec l'entreprise privée, nous plaçait, avant toute augmentation, environ 10% en avant du commerce en général.

En conséquence, nous ne pouvions pas justifier de rattrapage. Il s'en est donc suivi une application stricte de l'augmentation, en général, de la politique salariale soit 7 1/2 — 7 1/2%, dix-huit mois.

Cependant, en faisant des recherches et, à la suite de discussions, nous avons réalisé qu'en se comparant avec les autres régies d'alcools, du point de vue des heures de travail, nous étions un peu bas, à 37 heures et demie par semaine.

Ailleurs, les employés travaillent 40 heures par semaine dans toutes les autres régies des alcools canadiennes, à l'exception de Terre-Neuve où ils travaillent 38 heures par semaine.

Nous avons tenté d'appliquer la semaine de 40 heures qui permettait une augmentation équi- valente de l'échelle de salaires. C'était une proposition qui devenait intéressante nous permettant d'augmenter d'autant les salaires.

M. LESAGE: Le « take-home-pay ».

M. PEPIN: Le « take-home-pay », oui.

Cette nouvelle disposition, alliée avec une autre disposition, c'est-à-dire une période de lunch d'une heure au lieu d'une heure et demie — pour la période du lunch — les employés ont une heure et demie... Nous avons offert aux employé s de travailler 40 heures, mais, au lieu de rallonger la période de travail, au début nous disons: Nous allons payer une demi-heure de votre période de lunch. Nous allons prendre soin de cela. Nous allons pouvoir augmenter d'autant les salaires.

Nous nous sommes aperçus qu'en appliquant la semaine de 40 heures et en donnant une heure pour le lunch nous pouvions faire beaucoup plus, c'est-à-dire ouvrir plus de magasins, mais avec trois hommes seulement: un gérant, un caissier et un commis. Ce qui nous permettait de distribuer un peu plus le service dans la population, de rendre un meilleur service à la population.

Nous pouvions, de plus, faire face à une difficulté qui existe vraiment chez les employés, c'est-à-dire nos magasins par équipes. Nos magasins par équipes sont désagréables pour les employés parce que cela occasionne beaucoup de déplacements.

En appliquant la semaine de 40 heures, nous pouvions considérer l'élimination des magasins par équipes en fermant le lundi soir, le mardi soir, le mercredi soir et en ouvrant à l'Intérieur des 40 heures le jeudi soir, le vendredi soir et le samedi. Nous avions accepté le samedi jusqu'à midi ce qui devient de plus en plus une habitude dans le commerce. Nous avions accepté cette disposition-là. En discutant en comité, nous avons trouvé que certains employés auraient préféré fermer complètement le lundi — ce qui est possible vu les habitudes des gens — mais ouvrir le samedi toute la journée en compensation. Nous avons accepté cette disposition, ce qui nous permet évidemment de faire disparaître les magasins par équipes. C'était améliorer en fait...

M. CHOQUETTE: M. Pepin, donnez donc une explication sur les magasins par équipes, la rotation...

M. PEPIN: Pour les magasins par équipes, il faudrait un horaire, pour être assez précis.

M. LAPORTE: Qu'est-ce que ça veut dire?

M. PEPIN: Les magasins par équipes sont ceux qui ouvrent disons, vers 9 heures le matin. Une équipe entre à 9 heures et retourne chez elle à midi. Une équipe entre à midi, travaille jusqu'à 6 heures et le groupe qui est venu le matin revient le soir jusqu'à minuit.

M. LESAGE: Cela va.

M. PEPIN: Ce sont des magasins par équipes.

En appliquant la semaine de 40 heures, nous éliminions les magasins par équipes, nous maintenions des heures d'affaires populaires chez le public, nous pouvions éliminer le désagrément des voyages, nous pouvions éliminer d'autres coûts, pour autant que la régie est concernée, et nous pouvions fournir plus de petits magasins pour effectuer le service et répondre aux demandes du public.

Cela donnait, en même temps, plus d'argent, plus de « take-home-pay » à l'employé. Nous avons travaillé sur différents plans de travail. Chez les employés — je ne veux pas leur faire dire des choses qu'ils ne voudraient pas dire — je crois qu'il y en a qui préfèrent travailler par équipes; d'autres préfèrent travailler le lundi et pas le samedi; d'autres voudraient travailler le samedi sans travailler le lundi; d'autres voudraient travailler tout d'un bout, plus l'après-midi et moins le matin. Nous avons tenté de rencontrer toutes ces dispositions.

Maintenant, nous ne nous sommes pas rencontrés. Comme représentants, comme responsables du côté administratif, nous devons assurer le meilleur service au public. Mais, il faut considérer que les employés ont des désirs que nous tentons de contenter et jusqu'ici, malheureusement, nous n'avons pu nous entendre.

J'espère qu'on pourra le faire un jour.

M. BERTRAND: Oui, M. Parent. M. Parent vous demande la parole.

M. LE PRESIDENT: M. Parent.

M. PARENT: J'ai fait, intentionnellement, tantôt, attention pour ne rien mentionner de ce qui était dans le contenu, afin d'essayer de rester dans un contenant qui pouvait se tenir, ceci était d'ailleurs dans l'esprit de ce que le ministre délégué à la Fonction publique nous a enseigné depuis longtemps, à savoir qu'on devait d'abord régler les problèmes à la table des négociations.

Si le comité décide — et c'est déjà fait par M.

Pepin — d'entrer dans le contenu, au moins là-dessus, je répliquerai, parce qu'il y a quand même des choses qui doivent être mentionnées.

Nous, nous préférons être à la table des négociations parce que, parfois, lorsque le négociateur patronal se fâche, nous sommes prêts à accepter qu'il se fâche. Mais nous préférions que la détente ou la prochaine chicane se fasse au comité.

M. BERTRAND: M. Parent, est-ce qu'il accepte, lui aussi, que vous vous fâchiez?

UNE VOIX: Cela n'arrive pas. UNE VOIX: Cela n'arrive pas de ce côté-ci. M. BERTRAND: Cela n'arrive jamais? M. PARENT: Je ne suis pas un coléreux.

M. BERTRAND: M. Parent, si vous me permettez.,..

M. LESAGE: Je demanderais à M. Renaud si c'est l'influence de M. Bellemare.

M. BERTRAND: ... je l'avais bien indiqué tantôt, autant à M. Pepin qu'à vous, mais il y a eu des réponses à des questions qui ont été posées pour préciser certaines choses. Je vois immédiatement — et c'est pour ça qu'on ne voulait pas entrer dans les détails — que si l'on commence à entrer dans les détails, nous allons devenir ici la table de négociations.

Quant à moi, je l'ai exprimé au départ; ce n'est pas notre rôle et, dans les circonstances, je demanderais à M. Pe'pin d'écourter ou de terminer son témoignage et ses réponses, quitte à M. Parent d'ajouter un mot avant que je ne demande l'ajournement des travaux du comité à demain matin, 10 heures. M. Parent voulait dire un mot.

M. GRENIER: M. Parent.

M. PARENT: Je voudrais mentionner immédiatement, sur les heures des magasins, la demande syndicale et l'objectif que nous avons poursuivi depuis le début, c'est d'avoir la semaine de cinq jours et fermeture complète le samedi. Nous n'avons jamais dérogé de cette position.

Quand nous avons tenté de voir s'il n'y avait pas d'autres moyens de faire les programmes de travail, parce que la régie nous disait que c'était plus opérant et plus fonctionnel d'aller vers la semaine de 40 heures, nous avons es-

sayé de voir ce que cela voulait dire, non pas en notion de rattrapage mais en notion d'efficacité. Or, voici la dernière proposition qui nous a été faite ce soir. Malgré tout le travail du comité, ce travail a été sabré. Il n'a pas été retenu. La régie nous a proposé d'augmenter le travail de deux heures et demie par semaine. Remarquez qu'en négociations de travail, c'est très rare que les syndicats font la grève pour augmenter les heures. Mais nous avons quand même essayé de travailler là-dessus mais la proposition de la régie a été de dire: Nous allons augmenter les heures de deux heures et demie.

Nous allons faire disparaître le travail des employés par équipes, c'est sûr que c'est un problème. Nous allons également éliminer le travail à temps simple, le samedi après-midi, et finalement nous voulons que les employés acceptent, au lieu d'une heure et demie pour le lunch, une heure. Il est clair que de réduire d'abord l'heure du lunch, d'une heure et demie à une heure pour un bon nombre d'employés, ça représente des problèmes très sérieux et c'est un changement de conditions de travail qui doit être considéré monétairement dans la rémunération. Il est clair également que de réduire, en augmentant la durée de travail, la semaine de travail, cela suppose, comme M. Pepin l'a mentionné, l'ouverture des magasins en soirée plus que cela l'est présentement. Travailler en soirée, et vous le savez vous-même, c'est moins intéressant qu'en journée régulière. Cela doit être considéré aussi, même au niveau des primes ou de la rémunération, cela estbien clair.

Finalement, la régie nous a dit cet après-midi: Il n'y aura pas de travail en temps régulier le samedi après-midi, mais les magasins qui sont ouverts le samedi après-midi, demeureront généralement ouverts. Donc, la régie nous dit: Nous paierons du temps supplémentaire pour faire fonctionner un certain nombre de magasins, le samedi après-midi. Nous avons dit là-dessus — et là-dessus cela rejoint le pivot très central de toute la politique salariale et de la rémunération: Comment, en administration publique, peut-on considérer que c'est efficace et que c'est de l'administration rationnelle, que de dire qu'on va faire travailler des employés régulièrement en temps supplémentaire le samedi après-midi quand on n'accepte pas de les rémunérer normalement et avec des augmentations de salaires raisonnables en temps régulier? Il serait pas mal plus simple de reprendre tout ce problème-là, de prendre le problème des ouvertures du service au public, mais de le prendre dans un schè- me normal de rémunération équitable pour les travailleurs.

Et là, nous nous sentons un peu coincés dans la question de ce qu'on a appelé jusqu'ici la politique salariale. C'est un des noeuds de la négociation et je voudrais bien établir devant le comité que, quant à nous, nous ne sommes pas intéressés à augmenter les heures, absolument pas. Nous sommes intéressés à avoir une rémunération équitable mais si nous avons à explorer cette nouvelle avenue, c'est avec l'espoir de trouver là-dedans des compensations et une rémunération qui fassent que le « take-home-pay » des employés soit raisonnable, soit équitable. Et là-dessus, en tout cas, quant à nous, nous n'avons pas d'objections à continuer ici, si vous le désirez, à examiner tout le problème, au contraire, parce qu'il y a des points qui peut-être vous reviendront.

Quand le premier ministre suggère d'ajourner à 10 heures, demain matin, j'ai senti, cet après-midi, et pas le premier, — je ne parlerai pas pour moi, je vais parler par interprétation — que le négociateur en chef de la régie était fatigué. Nous faire revenir à 10 heures, demain matin, j'ai l'impression que c'est nous imposer la troisième nuit consécutive de négociations.

M. BERTRAND: A quelle heure siégez-vous?

M. PARENT: Nous avons négocié jusqu'à deux heures, à Montréal, l'avant-dernière nuit, et nous avons dû être ici à 10 heures. Hier soir, les travaux se sont terminés en comité vers minuit trente. Cela a impliqué qu'après ça les deux parties, en tout cas quant à notre partie, on aille plus loin. On a repris à 8 heures trente, ce matin. Mais nous n'avons pas d'objection sur l'horaire, si ça peut apporter du progrès, on ne fera pas de problème de contenant là-dessus. Mais nous croyons que, s'il y a une séance à 10 heures, demain matin, c'est vraiment un très court délai.

M. BERTRAND: Ce soir, M. Parent, si vous me le permettez, vous reprendriez vos travaux a la table des négociations disons d'ici une vingtaine de minutes, une demi-heure? Vous pouvez siéger... Cela a l'air drôle...

M. PARENT: Jusqu'à 5 heures, M. le Premier ministre.

M. BERTRAND: Cela a l'air drôle, mais ce sont peut-être des réflexes d'hommes qui ont déjà connu des séances nocturnes dans la vie parlementaire. Tous mes collègues, qui sont

ici, savent que ce n'est jamais très profitable.

Cela ne me regarde pas, mais vous venez de dire que les conditions normales de la vie, même pour tous les ouvriers, c'est de travailler, autant que possible, pendant le jour. Vous venez de le noter vous-même. A première vue, rendu à minuit, une heure, le soir, je pense que le travail — on l'a souvent constaté — n'est pas tellement profitable. Et, pour ceux qui en parlent, les députés qui sont ici le savent, dépassé une certaine heure, je ne crois pas qu'il y ait beaucoup de travail efficace qui s'accomplisse. C'est peut-être à ce moment-là que vous notiez tantôt qu'il y avait de la fatigue chez les uns, il peut y en avoir aussi chez les autres. Ça ne me regarde pas mais c'est une constatation que je fais, il y a certainement moyen d'une manière générale, de négocier à des heures raisonnables et durant des heures raisonnables. Cela serait peut-être de nature à créer un meilleur climat, dans ce domaine-là, comme nous avons constaté, nous, parfois, en Chambre, que siéger jusqu'à des heures indues, créait un climat de tension et d'agressivité, de part et d'autre, et parfois de violence, ne profitant à personne dans nos discussions parlementaires, et n'étant pas de nature à profiter ni aux uns ni aux autres, ni au bien public. Dans ce domaine-là, votre remarque me permet ces propos qui seront peut-être jugés comme ceux d'une personne qui devrait se taire et se mêler de ses affaires. Je les crois, quant à moi, fondés et disons que nous ajournons à 10 heures demain matin, si à 10 heures demain matin, vos négociations peuvent se poursuivre, vous n'avez qu'à prendre le téléphone et nous appeler et nous irons en Chambre à 11 heures.

Parce que nous siégons en Chambre à 11 heures demain matin.

DES VOIX: A 10 h 30!

M. BERTRAND: A 10 h 30, demain matin. Alors ne vous sentez pas obligés de siéger jusqu'à 4 heures cette nuit, ni jusqu'à 3 heures, en vue de nous apporter au comité le résultat de vos travaux pour telle heure donnée. Si vous n'êtes pas prêts à 10 heures demain matin, vous nous le direz. Reposez-vous tous pour avoir, comme nous, de part et d'autre, autant que possible, le sourire aux livres, et continuez à travailler demain matin. A 10 heures, si vous n'êtes pas prêts, ne venez pas. Prenez le téléphone, M. Parent, et communiquez avec moi ou avec le chef de l'Opposition, ou avec le président plutôt...

M. LESAGE: Nous pourrions peut-être confier cela au président!

M. BERTRAND: Le chef de l'Opposition et moi confions cela au président. Appelez M. Fernand Grenier et dites-lui: Nous nous sommes couchés à bonne heure et nous avons recommencé à bonne heure: et puis à 10 heures nous ne pouvons pas venir au comité. Et là, nous allons accepter cela avec plaisir, espérant que, des deux côtés, on manifesterabeaucoup de compréhension et beaucoup d'esprit de dialogue véritable, sachant que tous, nous souhaitons le règlement du conflit de la RAQ. C'est dans cet esprit-là que nous sommes venus travailler ici, et je sais que, de part et d'autre vous voulez travailler également dans cet esprit pour mettre un terme au conflit de la RAQ.

M. LESAGE: Pour ma part, je crois bien, M. le Premier ministre, qu'il y a lieu de permettre aux négociateurs de continuer leurs négociations autour de la table. Mais ce que j'ai entendu ce soir, de la part de M. Pepin et de M. Parent, me convainc qu'il y a encore beaucoup de travail à faire autour de la table de négociations et que, si on veut en venir à un règlement, il va falloir, de part et d'autre, faire preuve de beaucoup d'imagination. Le premier ministre a parlé de compréhension, de dialogue, je pense qu'il va falloir faire preuve aussi d'imagination — cela m'a apparu comme cela après avoir entendu les deux versions — et de beaucoup de flexibilité aussi.

M. BERTRAND: Des deux côtés!

M. LESAGE: Oui, je dis des deux côtés, mais je regarde M. Pepin!

M. MASSE: M. le Président... M. LE PRESIDENT: M. Masse.

M. MASSE: M. le Président, je suis parfaitement d'accord avec la suggestion du premier ministre et du chef de l'Opposition de faire en sorte que les négociations entre les deux parties reprennent ce soir. Si ce n'est pas terminé demain, avant 10 heures, il nous sera possible, si nous en sommes informés, de ne pas siéger à 10 heures.

Je suis parfaitement d'accord. L'ayant dit à maintes reprises afin de faire en sorte que tous ceux qui sont intéressés aux différentes tables de négociations l'entendent bien: l'endroit idéal pour régler une convention collective, c'est la table de négociations.

Advenant le cas où, dans le peu qu'il reste, compte tenu de l'ensemble de la négociation qui dure quand même depuis un an, même si ce peu est important, c'est une partie d'un tout.

Je crois qu'il est dans l'intérêt public que la population en général, et les spécialistes en particulier, soient bien informés, même si cela est difficile à faire dans un climat raisonnable de façon qu'ils soient bien au courant des difficultés de rapprochement, si celui-ci n'est pas évident au point que tout est conclu demain. Afin que tous ces gens soient bien informés, entre autres, les membres du comité parlementaire qui se sont réunis pour être au courant de la situation, nous avons étudié jusqu'à maintenant, d'une façon raisonnable, la politique salariale du gouvernement comme telle. Il nous restera à voir - ce qui permettra à la population, puisque finalement c'est elle qui juge, de comprendre pourquoi il est difficile de s'entendre sur un point particulier, celui des traitements - les incidences que peut avoir cette politique salariale dans la position de la RAQ comme table particulière.

D'ici à demain, il y a, quand même, un temps de travail; il y aura une nuit de réflexion de part et d'autre, et reprise de travail si cela n'est pas terminé, de sorte qu'il serait possible que le comité se réunisse non pas être encore ajourné, mais pour être informé, demain après-midi, à partir de deux heures, après la fin des travaux parlementaires. Le comité se réunirait pour entendre et comprendre également les deux parties afin que la négociation se termine dans la compréhension, non pas uniquement pour les gens à la table des négociations, mais également pour la population. Je crois que demain, à partir de deux heures, nous aurons amplement le temps, dans l'après-midi et dans la soirée, de faire une très bonne séance d'information et de compréhension au comité afin de permettre aux parties de retourner, compris ou incompris, à la table de négociations pour s'entendre si cela n'est pas encore fait. Je crois que cela est dans l'intérêt de tout le monde.

M. LE PRESIDENT: M. Laporte.

M. LAPORTE: II n'est pas certain que la proposition que nous fait actuellement le ministre délégué à la Fonction publique soit celle qui puisse le plus facilement contribuer à régler le problème. Il avait été entendu que, devant ce comité, on ne ferait pas de négociation. Ce soir, nous avons presque atteint à la négociation et c'est peut-être le premier moment où le climat a risqué de se gâter. Je pense que la proposition du premier ministre est plus raisonnable pour atteindre les buts que justement se fixe le ministre délégué à la Fonction publique. Nous pourrions revoir ces messieurs, de- main, à l'heure qui leur paraîtra la meilleure. S'ils nous disent demain: Nous sommes sur le point de régler, nous avons fait d'autres progrès, nous aurions besoin de continuer à négocier; il est bien possible que la séance du comité, à ce moment-là, contribue à geler la négociation plutôt qu'à l'accélérer.

Alors, j'aimerais mieux, M. le Président, que nous acceptions la suggestion du premier ministre et que, demain matin, le comité siège ou soit ajourné, si vous voulez, à loisir. Ainsi, lorsque ces messieurs nous feront signe qu'ils sont prêts à nous voir, c'est devant les déclarations qui seront faites à ce comité que nous pourrons juger de la situation.

S'ils ont atteint une impasse, il faudra bien, à un moment donné, que le comité sache exactement de quoi il retourne et que l'Opposition et le gouvernement aient l'occasion de dire exactement ce qu'ils pensent de l'attitude de l'un et de l'autre.

Mais jusqu'à ce que nous ayons atteint cette impasse, en souhaitant qu'elle ne se produise pas, la contribution la plus grande que l'Opposition puisse faire au règlement de ce problème qui dure quand même depuis assez longtemps, c'est d'être en état de disponibilité.

M. BERTRAND: Je crois que le but que poursuivait mon collègue, le ministre d'Etat délégué à la Fonction publique, était que nous ayons un rapport demain sur l'état des négociations. Or, j'ai demandé tantôt qu'avant dix heures,,.. Bien entendu, nous allons nous réunir, nous, à 10 heures, ici, demain matin, à moins d'avis contraire. Et, à ce moment-là, le président nous communiquera, à 10 heures, le résultat des travaux accomplis jusque là. A ce moment-là, le comité, ici, devant le rapport qui sera fait par les représentants des deux parties, jugera si le noeud gordien est tel qu'il ne puisse être tranché par les parties en présence et si ce noeud gordien se révèle véritablement ce que nous avons appelé la politique salariale du gouvernement et, à ce moment-là, le comité devra, à 10 heures, continuer ses travaux et entendre l'exposé plus précis du ministre d'Etat délégué à la Fonction publique sur la politique salariale du gouvernement et ses incidences sur la grève de la RAQ, qui constituerait ce noeud gordien, le dernier dont si parlé tantôt M. Parent.

Alors, M. le Président, demain à 10 heures, nous serons ici et nous attendrons votre rapport si les membres du comité l'obtiennent.

M. LESAGE: Il ne faudrait pas, M. le Premier ministre, être trop optimiste. Il est déjà

presque 9 heures et, avec ce qu'on nous a dit tout à l'heure, de part et d'autre, et avec toutes les avenues qu'il y a possibilité d'explorer, si on négocie réellement de bonne foi de chaque côté et qu'il y a flexibilité, je ne pense pas qu'à 10 heures, demain matin, on puisse faire autre chose que de rapporter progrès.

M. LE PRESIDENT: M. Demers.

M. DEMERS: M. le Président, la meilleure façon, c'est de renvoyer les gens négocier si on veut se réunir demain matin.

M. LE PRESIDENT: Oui. Alors, nous ajournons la séance à demain matin, 10 heures. Les députés qui ne sont pas membres du comité pourront se rendre sur place, ici, pour y participer, s'ils le désirent. En attendant, nous retournons à la Chambre...

(20 h 50)

Séance du 8 novembre 1968 (Dix heures cinq minutes)

M. GRENIER (président du comité): A l'ordre messieurs! Alors, M. Bertrand.

M. BERTRAND: M. le Président, les renseignements que j'ai obtenus sont à l'effet — on complétera s'il y a lieu ce que je dois dire — que ce noeud gordien dont j'ai parlé, il serait peut-être mieux de le définir, parce qu'il y avait une personne qui était hier soir dans la salle en arrière et qui a dit: Qu'est-ce qu'il veut dire par noeud gordien? Nous utilisons parfois des expressions que nous comprenons tous parce que nous connaissons ensemble le problème. Il semble que les éléments de ce que nous avons appelé la politique salariale du gouvernement seraient de nature à créer une situation suivant laquelle le conflit entre la RAQ, et le syndicat reposerait sur cette politique, qui a été, comme mon collègue, le ministre d'Etat délégué à la Fonction publique l'a maintes fois mentionné, une politique qui aurait été appliquée, qui aurait reçu son acceptation, du moins à l'occasion de plusieurs signatures de conventions collectives, et que nous serions, à ce moment-là, dans une impasse.

C'est pourquoi, M. le Président, à la lumière de ces renseignements, je soumets que nous devrions, ce matin, continuer les travaux de notre comité, puisque le problème qui nous était soumis était celui de la politique salariale du gouvernement et de ses incidences sr la grève de la RAQ.

M. Masse avait commencé l'autre jour à exposer cette politique d'une manière globale, générale. Après quoi, nous avions dit que, comme deuxième étape, il y aurait le cas de la RAQ et de cette politique. Dans les circonstances, M. le Président, je vous prierais, avec l'assentiment de nos collègues, de permettre que M Masse puisse continuer l'exposé de la politique du gouvernement en matière de salaires et les incidences qu'elle a ou peut avoir sur la grève de la RAQ.

M. LE PRESIDENT: M. Parent a communiqué, tel que convenu, ce matin. Je pense bien qu'il pourrait peut-être faire le « status questionis » immédiatement.

M. BERTRAND: C'est ça.

M. LE PRESIDENT: M. Parent.

M. PARENT: Je voudrais informer le comité

que, tel que convenu hier soir, j'ai fait un appel téléphonique au président du comité à 9h30 pour lui indiquer que nous avions négocié hier soir sans aborder à nouveau les questions monétaires. Cependant nous les avons reprises ce matin. Nous avions convenu de reprendre les négociations à 8 h 30, attendu que nous, la partie syndicale, nous nous réunissions ex parte à 8 heures. Les négociations ont effectivement repris à l'arrivée des négociateurs patronaux à 9 heures. Nous avons abordé la question monétaire à ce moment-là.

Nous avons fait de nouvelles suggestions, comme moyens nouveaux d'approche pour essayer de voir s'il n'y avait pas moyen de trouver une issue à la table des négociations. Nous avons abordé, par conséquent, cinq points qui, quant à nous, paraissaient s'inscrire ou ne pas venir en contradiction en tout cas avec les critères qui ont déjà été définis comme étant ceux de la politique salariale.

La réponse du comité patronal sur quatre des cinq points — il restait la rétroactivité — même si nous apportions des éléments nouveaux, a été immédiate et sans autre considération. Cela s'est fait automatiquement à la table. Nous avons reçu un « non » très expéditif.

Ce que j'ai indiqué à 9 h 30 au président du comité, c'est que nous étions prêts à continuer à négocier, nous étions prêts à poursuivre ce matin, parce que nous considérions que c'est à la table des négociations que ce conflit doit se régler. C'est le rapport que je lui ai fait. A ce moment-là, le président nous a quand même demandé de nous présenter au comité, ce que nous avons fait de très bonne grâce et avec plaisir.

M. LE PRESIDENT: Merci. M. Lesage.

M. LESAGE: M. le Président, si nous devons entendre M. Masse nous exposer les incidences de la politique salariale sur les salaires à la Régie des alcools du Québec, je pense qu'il serait peut-être bon, simplement pour notre information non pas pour discussion, que soit M. Parent, soit M. Renaud nous indique quels sont ces quatre points sur lesquels il y a un refus catégorique d'envisager de nouvelles avenues, sur lesquelles il n'y a eu aucune flexibilité, sur quoi le premier ministre et moi avions insisté hier soir.

M. BERTRAND: M. Parent.

M. LE PRESIDENT: II serait peut-être bon par exemple, de vous prévenir que c'est une question qui est un petit peu « chatouilleuse » et qu'on veut ici l'état de la question et non pas le jugement de l'une ou l'autre des personnes ou votre appréciation sur telle question.

M. PARENT: Sans manquer de jugement, nous allons essayer de ne pas en parler.

M. LESAGE: C'est bien prudent. M. LE PRESIDENT: M. Parent.

M. PARENT: Le premier point que noue avons soulevé est celui des employés de bureau et de magasin. La situation présente, dans le cas des employés de bureau et de magasin, quant à nous, est la suivante: ces employés sont régis par une échelle de salaires qui tire son origine de l'ancienne classification du service civil de 1959. Par conséquent, elle n'a pas suivi la révision en même temps que toute la classification nouvelle qui a été faite dans l'élaboration des plans de carrières, en 1965 ou 1966, pour les autres secteurs dont les fonctionnaires provinciaux. Cette échelle ne prévoit que cinq degrés de salaires, un taux minimal, trois taux intermédiaires et un taux maximal. Alors que, dans la fonction publique, la moyenne des échelons qui existent, y compris le taux maximal et le taux minimal, sont de huit. Par conséquent, la ligne d'avancement salariale des employés à la régie est plus courte que dans la fonction publique. Nous avons proposé de l'augmenter d'un échelon pour qu'au lieu d'avoir cinq échelons de rémunération, il y en ait six. Cela est un premier point. Cela vaut pour les employés de magasin et les employés de bureau.

Les employés de magasin, également les commis-vendeurs et les caissiers sont classés actuellement à des niveaux qui sont les échelons dix pour les commis, et l'échelon douze pour les caissiers. Cela correspond aux anciens échelons, cela aussi, de la fonction publique du service civil du temps.

Nous soutenons, parce que les employés de magasin à la régie font 37 1/2 heures de travail par semaine, alors que les autres fonctionnaires font 32 1/2, que cette différence de cinq heures mérite sa considération dans la détermination de l'échelle. C'est pour ça que nous avons proposé qu'on augmente, qu'on revalorise ces deux classifications-là d'un échelon, pour monter le commis-vendeur de dix à onze et le caissier de douze à treize. Pour l'échelle des ouvriers, nous avons mentionné hier soir qu'il y avait trois taux dans les catégories les plus basses, soit celle du manoeuvre, soit celle des classes de production immédiatement supérieures.

Il y a un écart entre la position patronale et la nôtre de $0.09 l'heure pour chacune de ces catégories. Ce litige demeure entier, et nous nous inscrivons à cette requête sous le terme de «contre-rattrapage», c'est bien sûr, parce que le?

taux de la régie pour le manoeuvre étaient plus élevés qu'au gouvernement, mais nous considérons alors qu'avant par l'ancienne convention, les deux anciennes conventions, il y avait $0.57 l'heure de différence entre le manoeuvre à la régie et le manoeuvre au gouvernement.

Le gouvernement nous propose, dans une seule convention, de réduire ces différences à $0.17, donc, de faire un contre-rattrapage de $0.40 l'heure. Nous trouvons que c'est vraiment freiner trop rapidement. Nous sommas d'accord pour qu'on aille vers un nivellement ou une comparaison relative des taux mais nous disons que cela devrait être à un rythme moins accentué. Il ne faudrait pas que les freins soient plus forts que le moteur; ça été notre expression.

Finalement le cinquième point, c'est la question que nous avons ramenée ce matin, qui existe dans certains secteurs parapublics. Nous a-vons suggéré, pour trouver un terme, de prévoir pour les employés qui ont déjà atteint le maximum des classifications - donc qui sont déjà au sommet de la classification - de leur accorder, comme ça existe dans certains secteurs parapublics dont les hôpitaux et un certain nombre de municipalités, la ville de Montréal et ailleurs, une prime d'ancienneté.

Alors, sur chacun de ces quatre points-là, la réponse a été immédiate et négative.

M. CHOQUETTE: M. Parent, est-ce que je pourrais vous poser une question sur une des parties de votre exposé? C'est au sujet de la comparaison entre les commis-vendeurs et les caissiers de magasin et les fonctions équivalentes dans la convention des fonctionnaires de l'Etat. Vous semblez dire qu'on peut trouver dans la convention des fonctionnaires des fonctions équivalentes à celles de caissiers et commis de magasin et que la différence entre les propositions gouvernementales, à la table des négociations de la Régie des alcools du Québec, c'est la question des heures de travail. C'est-à-dire que le gouvernement voudrait que les commis-vendeurs accomplissent une semaine de 37 1/2 heures de travail, tandis que la fonction équivalente, sous la convention des fonctionnaires, ne requerrait que trente-deux heures et demie de travail pour la même rémunération. Est-ce que j'ai bien compris votre exposé sur ce point-là?

M. PARENT: M. le Président, il est difficile d'avoir des points de comparaison très nets avec d'autres fonctions de la fonction publique. D'abord parce que des commis-vendeurs du type des caissiers de la Régie des alcools, on n'en trouve nulle part dans d'autres services.

L'autre partie aussi où il est difficile de trouver des points de comparaison, c'est que pour les fonctionnaires, depuis 1964-1965, il y a une nouvelle classification qui est basée sur une tout autre économie, elle est basée sur la notion de plan de carrière; tandis que l'autre fonction, c'est une fonction établie en vertu de la classification de 1959, au moment où l'on était encore à ce qu'on appelle par comparaison les «position plans».

Il est très difficile, par conséquent, d'avoir des comparaisons justes à l'intérieur.

Il reste quand même que là-dessus, nous, nous disons: L'économie de la structure des salaires a été bâtie, sans tenir compte du surplus d'heures de travail que font les employés de magasin à la Régie des alcools. Et nous disons que le fait de faire cinq heures de plus devrait entrer en ligne de compte dans leur rémunération. Nous appuyons cela également sur un autre argument: si nous tentons de prendre ce qui est comparable ailleurs, non pas dans la fonction publique en soi, mais dans les autres régies du pays où il y a des caissiers, où il y a des commis-vendeurs, nous nous rendons compte que par rapport à la structure les salaires payés par les autres régies sont plus élevés que ceux d'ici. En fait, on arrive avec un écart qui, avant les offres salariales, à une date comparable, fait que, avec la moyenne du reste du pays, nous sommes $0.22 ou $0.23 plus bas.

M. CHOQUETTE: M. Parent, par des conversations que j'ai eues hier...

M. BELLEMARE: II serait normal maintenant, je pense, vu que le chef de l'Opposition a demandé à M. Parent d'établir les quatre points, que le ministre puisse lui-même... après cela vous auriez le droit, je pense que ce serait nor--mal.

M. CHOQUETTE: M. le Président, j'essaie de clarifier la position...

M. BELLEMARE: ... nous pouvons entendre le ministre lui-même!...

M. CHOQUETTE: Je n'ai pas d'objection à entendre le ministre, je veux seulement poser une question pour clarifier une partie de l'exposé de M. Parent.

M. LE PRESIDENT; M. Choquette, vous aviez une question a poser; vous en avez eu une. Alors, je crois bien que nous avons entendu...

M. LAPORTE: M. le Président, je voudrais bien savoir en vertu de quel ordre, de quel article vous allez limiter le nombre de questions des députés devant ce comité.

M. LE PRESIDENT: Non pas en vertu d'un article, mais pour garder la bonne entente ici, je pense qu'il serait...

M. BERTRAND: M. le Président, je pense qu'il y a eu, disons, de l'ordre jusqu'à présent. Après mes propos, le chef de l'Opposition a fait une courte déclaration. A ce moment-là, j'avais indiqué que le ministre d'Etat devait continuer à exposer lapolitique du gouvernement. Mon collègue, le député d'Outremont, a posé une question; je ne crois pas qu'elle exige des explications très longues. Alors, nous pourrions peut-être la permettre au député d'Outremont, pour autant que le ministre pourra continuer son exposé immédiatement après.

M. LE PRESIDENT: C'est bien sûr qu'après l'exposé du ministre, il y a une certaine période de questions.

M. BERTRAND: Oui, bien sûr.

M. LESAGE: Ce n'est pas le président qui décide cela, c'est le comité.

M. LE PRESIDENT: Ne vous fâchez pas ce matin, ne vous fâchez pas! M. Choquette.

M. CHOQUETTE: M. Parent, par des conversations que j'ai eues à l'extérieur de ce comité, en particulier avec des représentants des parties à la table des négociations, j'avais l'impression, hier, que la question de la classification à la Régie des alcools, même si on ne considère pas que cette classification ancienne de 1959 est parfaitement adéquate, qu'en fait on avait considéré de part et d'autre que c'était un instrument de travail suffisant — avec quelques améliorations à y apporter — pour permettre une négociation rationnelle sur les salaires dans toutes les catégories. Est-ce que j'avais bien compris ou mal compris?

M. PARENT: Vous aviez bien compris en ce qui a trait à l'unité des ouvriers. Parce que pour le groupe ouvrier, ce que nous avons fait d'aillleurs, il y a eu un comité de Travail qui a refait la hiérarchisation de chacune des fonctions, qui a par conséquent établi une échelle des emplois, des salaires. Nous en sommes venus là à peu près à un accord, sauf sur les trois points qui sont déjà mentionnés.

Mais pour les fonctionnaires, cela n'a jamais été abordé à la table des négociations dans le sens que cela pouvait constituer une base de discussion.

M. LE PRESIDENT: M. Masse.

M. MASSE: M. le Président, dans les quelques minutes qui vont suivre avant l'ajournement pour se rendre en Chambre, nous pourrions quand même uniquement dire un peu la façon dont le tableau va se dérouler. Ensuite nous pourrons retourner en Chambre et reprendre l'exposé comme tel. Nous avons vu au cours des séances précédentes les principes qui nous avaient servi de point de départ pour établir nos grilles de traitements et nos offres pour l'ensemble des tables de négociations.

Nous nous étions engagés a expliquer comment ces principes et ces grilles s'appliquaient dans un secteur déterminé, celui qui nous concerne, la Régie des alcools. C'est ce que nous verrons en expliquant d'abord pourquoi et comment ces principes s'appliquent à la Régie des alcools, pour ensuite, nous diriger vers des points particuliers qui ont été soulevés comme les commis de bureau et autres personnels. Ensuite, il sera possible de faire témoigner des experts dans ces domaines, autant du côté syndical que du côté gouvernemental à qui vous pourrez poser toutes les questions concernant les équivalences dans un secteur ou dans l'autre; je pense que cela pourrait se dérouler de cette façon. Ça va? Très bien, alors, M. le Président, je demanderais l'ajournement du comité.

M. LE PRESIDENT: Alors nous ajournons pour monter en Chambre à 10 h 30 et revenir ici immédiatement après la période de questions.

M. BERTRAND: Très bien, M. le Président.

Reprise de la séance à 11 h 17

M. GRENIER: On demande aux intéressés de bien excuser les retardataires car la Chambre siège simultanément avec le comité. Alors il y en a qui sont encore appelés à demeurer en Chambre pour quelques instants. Nous allons commencer dans quelques minutes.

A l'ordre! Alors, M. Masse.

M. MASSE: Les intéressés étant présents, nous pouvons maintenant commencer.

Avant l'ajournement, j'avais donc dit que nous devions situer le problème en répondant à la première question qui a été soulevée à travers ce conflit, au sujet de la coordination du gouvernement et pourquoi le gouvernement paraissait à la Régie des alcools.

Deux raisons incitent particulièrement le gouvernement à inclure les négociations à la régie, dans le cadre de sa politique salariale.

D'abord la loi de la régie, par l'article 94 qu'il est bon de rappeler, se lit ainsi: « Les biens que possèdent la régie, sont la propriété — je m'excuse, mais c'est la loi — de la couronne. Mais le conseil,,.,, »

M. LESAGE: C'est très important. Vous savez que c'est la raison fondamentale qui empêche le trafic entre provinces.

M. MASSE: Probablement oui.

Enfin c'est un problème de la couronne...

M. LESAGE: Ou qui est sensé l'empêcher.

M. MASSE: C'est le problème de la couronne. « Mais le conseil d'administration est autorisé à utiliser ces revenus pour le paiement de ses dépenses, y compris le traitement des membres, des gérants, des greffiers et autres fonctionnaires et employés de la régie. Les surplus de la régie qui sont disponibles de l'avis du ministre des Finances doivent être versés au fonds consolidé du revenu de la province. » Fin de cet article 94.

L'article 95: « La régie rend ses comptes au ministère des Finances en la manière et aux époques qu'il indique. Son administration financière est soumise à l'examen et à la vérification des personnes désignées à cette fin par le lieutenant-gouverneur en conseil. » Fin de l'article 95.

Donc, à partir de ces articles 94 et 95 de la loi de la régie, l'on peut conclure tout d'abord que le gouvernement a un droit de regard très strict sur les opérations, sur les dépenses et sur les surplus de la régie; l'on peut conclure, en second lieu, que ces surplus de la régie doivent être considérés comme produits de taxes et non pas comme revenus dont pourrait disposer la régie. Les surplus ayant été indiqués à l'article 94 sont disponibles au ministère des Finances.

Le niveau des salaires à la Régie des alcools a donc une influence directe sur les revenus nets de la régie et, par conséquent, sur la contribution de la régie aux ressources du gouvernement.

Je tenais à spécifier ces deux points, étant donné qu'à plusieurs reprises il était venu dans les conversations l'idée que la régie faisait de l'argent, beaucoup plus d'argent que ce qu'il lui en coûtait, et pouvait aisément elle-même rajuster ces traitements.

Le principe de coordination de ces négocia- tions dans le secteur public et parapublic en général constitue la seconde raison qui motive le gouvernement à appliquer à la régie les principes de la politique salariale du gouvernement. Le statut de la régie qui est celui de compagnie de la couronne en fait un organisme parapublic dont les négociations avec ses employés peuvent influencer directement les autres secteurs dans lesquels le gouvernement se trouve financièrement intéressé. Puisque nous avons établi qu'il était nécessaire d'avoir certains principes pour négocier l'ensemble des tables de négociation, il faut que ces principes s'appliquent — et c'est ce que nous verrons — à la Régie des alcools au même titre que ces principes se sont appliqués à d'autres tables de négociations.

Par conséquent une certaine coordination est nécessaire en vue d'assurer que les termes des conventions collectives correspondent bien à la politique d'ensemble du gouvernement dans ces matières. De plus, il ne faut pas oublier que les employés qui se trouvent exclus des syndicats de la régie — parce que tous les employés ne sont pas en grève à la Régie des alcools — les autres demeurent des fonctionnaires soumis à la loi de la Fonction publique en vertu de deux arrêtés en conseil successifs datés du 17 mars 1965 au numéro 525 et du 23 mars de la même année, au numéro 548.

Par les arrêtés en conseil 525 et 548, le personnel de la Régie des alcools est régi par la convention collective intervenue entre la régie et le syndicat des fonctionnaires provinciaux, section Régie des alcools, le 17 janvier 1965; et celle intervenue entre la régie et le syndicat des ouvriers, à la même date, était soustraite de l'application de la loi du service civil à compter de la signature des dites conventions. Ces arrêtés en conseil ne s'appliquaient cependantpas à ceux exclus de la convention, soit en vertu du code du travail, soit en vertu d'une entente intervenue entre les parties...

Ce fait donne donc une responsabilité supplémentaire au ministre délégué à ces négociations, en particulier à celle de la régie. Par conséquent, les offres que la régie a faites à ses employés au cours des mois précédents, ont été, à notre avis, strictement conformes aux principes de base de la politique salariale du gouvernement.

L'application de ces principes se traduit dans le cas de la régie par une offre de rémunération qui tient compte de l'offre qui a été précédemment faite au syndicat des fonctionnaires du Québec et acceptée par ce syndicat. A titre d'exemple, voici des taux de rémunération de certaines fonctions en relation avec la Fonction publique.

Dactylo. A la Fonction publique, pour la première période de convention de travail c'est : minimum $2,932, maximum $3,932

A la RAQ, toujours pour la première période, l'offre de la régie est: minimum, $3,178, maximum $3,994.

Pour la deuxième période, à la Fonction publique, minimum $3,189, maximum $4,189.

A la RAQ, deuxième période du contrat, l'offre est: minimum $3,439, maximum $4,271.

Pour les sténos, pour avoir des points de comparaison, Fonction publique, première période: minimum $2,946, maximum $4,196.

RAQ, première période: minimum $3,394, maximum $4,316.

Fonction publique, deuxième période, secteur des sténos: minimum $3,214, maximum $4,464.

RAQ, deuxième période, les sténos: minimum, $3,671, maximum $4,617.

Pour les commis seniors dont il a été question à plusieurs reprises. Il y a les commis seniors, les commis juniors et les commis intermédiaires.

Les commis séniors, Fonction publique, première période: minimum, $4,489, maximum, $5,589. RAQ, commis séniors, première période, minimum: $4,584, maximum; $5,706. Deuxième période, Fonction publique, commis séniors: $4,867, maximum $5,967, RAQ, deuxième période, minimum: $4,958, maximum $6,104.

Les commis juniors, à la Fonction publique minimum: $2,817, maximum; $3,717; à la RAQ, première période: minimum $3,394, maximum $3,994. Dans la deuxième période de la convention à la Fonction publique: minimum: $3,062, maximum; $3,962. A la RAQ, deuxième période: minimum: $3,671, maximum; $4,271.

Des commis intermédiaires, Fonction publique, première période: minimum:$3,403, maximum; $4,903. A la RAQ, première période; minimum; $3,609, maximum: $5,061. A la Fonction publique, deuxième période; minimum; $3,714, maximum; $5,214. A la RAQ, deuxième période; minimum; $3,902, maximum; $5,411.

Dans le secteur du personnel ouvrier, quelles seraient les comparaisons entre la Fonction publique et la RAQ? Pour les manoeuvres: Fonction publique, première période de la convention, en salaires horaires: $2.14, deuxième période $2.29. Pour ces manoeuvres de la RAQ, en salaires horaires pour la première période: $2.28, deuxième période: $2.46. Les écarts sont issus des taux de rémunération supérieure du début, des journaliers de la régie.

Pour les menuisiers, première période de la convention, toujours en salaires horaires pour les ouvriers. A la Fonction publique, les menui- siers; $2.94, à la deuxième période; $3.14; à la RAQ: $2.92 et deuxième période; $3.14.

Chez les électriciens, première période de la convention, à la Fonction publique: $3.10 l'heure, deuxième période: $3.31 l'heure, à la RAQ, première période: $3.08 l'heure, deuxième période: $3.31 l'heure comme dans la Fonction publique.

Quant aux commis de magasin, la comparaison exige un ensemble de données techniques. Je ne les inclurai pas ici; mais, nous pouvons les présenter au comité, s'il le souhaite. Dans ce cas, comme dans ceux que f ai mentionnés pré-cédement, nous nous sommes efforcés d'offrir aux employés de la régie au moins autant que ce qu'ils auraient obtenu à l'emploi de la Fonction publique.

(Note de l'éditeur: En annexe, on verra ces explications en tableau statistique.)

M. MASSE : Un des principes de la politique salariale, on s'en souviendra, a trait à l'établissement d'écarts importants de rémunération entre les employés non spécialisés et les employés spécialisés. En d'autres termes le gouvernement tient à maintenir des incitations très importantes à la spécialisation et au perfectionnement.

Ainsi dans le cas des fonctionnaires du Québec où il existait déjà un écart très important de 52% entre le niveau de rémunération du journalier et celui de l'emploi de métier, cet écart a été maintenu tel quel. A la Régie des alcools au contraire, à la suite de la précédente négociation, l'écart de rémunération entre le journalier et l'emploi de métier, n'étant que de 21%, la régie propose de l'augmenter à 42%. Ce qui amène la régie à offrir une échelle de salaires nouvelle pour les ouvriers, dès la signature de la convention. Exemple: les menuisiers auraient au départ une augmentation de 38%.

En somme, les offres de la régie faites aux employés, au cours des mois précédents, ont été strictement conformes aux principes de base de la politique salariale du gouvernement. L'on peut se demander, dans ces conditions, comment il se fait que ces mêmes principes aient été acceptés par un certain nombre d'autres syndicats affiliés à la CSN et qu'ils aient été refusés depuis quatre mois par les syndicats de la RAQ, également affiliés à la CSN.

Je rappelle à ce sujet que, dans le cadre général des négociations de cette année entre l'Etat et ses employés des secteurs public et parapublic, les groupes suivants ont déjà accepté les offres que le gouvernement leur a faites: les 32,000 fonctionnaires et ouvriers affiliés à

la CSN, à l'emploi du gouvernement; les 2,000 agents de la paix du gouvernement, affiliés à la CSN; les employés de la raffinerie de sucre de Saint-Hilaire, affiliés à la CSN; le Syndicat des professeurs du Collège d'enseignement général et professionnel de Sainte-Foy, groupant les 125 enseignants de ce collège; le Syndicat professionnel des enseignants des collèges classiques également affilié à la CSN; le Syndicat des professeurs de l'Etat du Québec également affilié à la CSN; les 70,000 enseignants des commissions scolaires, dont la demande a été acceptée par les négociateurs patronaux enfin, cette semaine, les 2,500 professionnels du gouvernement également affiliés à la CSN.

Il semble donc que l'attitude des syndicats des employés de la Régie des alcools soit dictée — et cela a été redit hier — par le désir de défoncer là où le coût est moindre, le cadre que constitue la politique salariale du gouvernement, afin d'amener le gouvernement à céder dans quelques secteurs à venir ou déjà réglés.

Nous avons déjà dit et répété qu'une politique salariale réellement juste et efficace doit s'appliquer à tous les employés du secteur public et parapublic sans qu'il puisse y avoir des exceptions, et ce afin d'être juste aussi bien envers le contribuables québécois qu'envers les employés qui sont régis par ces conventions.

Céder en faveur de certains groupes et passer outre au cadre qui a été fixé afin de répondre aux exigences de certains constitueraient, à l'égard de ceux qui ont donné leur accord à la politique salariale du gouvernement, une injustice qui donnerait une prime à la grève pour ceux qui veulent parvenir à leurs fins par une épreuve de force. Nous avons déjà annoncé que nous entendions, dans l'avenir, proposer aux centrales syndicales de définir les rythmes généraux d'accroissement des traitements des secteurs public et parapublic au cours d'une série de rencontres préliminaires. Un tel processus est, à bien des égards, une innovation. Il implique, non seulement des discussions salariales mais une discussion de l'organisation même du budget de l'Etat puisqu'il y a un rapport direct entre les augmentations consenties sur la masse salariale, qui représente plus de 50% du budget général de l'Etat, et la capacité du gouvernement d'innover ou d'inaugurer de nouveaux programmes de dépenses en tenant compte également de la possibilité du contribuable québécois d'avancer les fonds nécessaires à ces nouveaux programmes et d'avancer les fonds nécessaires à l'ensemble des traitements.

Il faut également tenir compte de la possibilité économique du Québec d'être en concur- rence valable avec l'ensemble du reste de l'Amérique du Nord.

Lorsqu'on joue dans un domaine qui touche plus de 50% d'un budget, on ne peut reprocher à un gouvernement d'avoir établi ce qui aurait pu être fait depuis longtemps, une politique salariale qu'on peut qualifier de budgétaire, mais qu'on peut également qualifier de nécessaire, compte tenu de la situation dans laquelle le Québec se trouve.

Cependant, un tel système de consultation préalable ne pourra intervenir que dans la période de préparation des prochaines négociations de conventions collectives. A l'heure actuelle, notre rôle est d'assurer la bonne administration de la chose publique, conformément aux politiques que le gouvernement s'est données et que nous avons élaborées en fonction des ressources dont le Québec dispose.

M. le Président, nous sommes prêts à aller dans des secteurs plus particuliers. Nous pouvons, avec votre accord, demander aux responsables de la Régie des alcools de répondre à toutes les questions concernant ce problème particulier des échelles, des classifications à la Régie des alcools et nous pourrons revenir dans l'énoncé de ce qui constitue des principes généraux, lesquels relèvent de la Fonction publique.

Je pourrais demander à M. Fernand Pepin, le directeur des relations industrielles à la Régie des alcools, de répondre à toutes vos questions techniques, ou toutes vos questions de grilles, ou de classification que vous pouvez avoir à poser, compte tenu des informations que M. Parent vous a données et également d'avoir des réponses qui ne sont pas uniquement des principes.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Masse. M. Lesage.

M. LESAGE: M. le Président, avant d'entrer dans les détails en posant des questions sur des points spécifiques, je suggérerais que le député d'Outremont, M. Choquette, fasse valoir notre point de vue sur l'ensemble de la situation.

Il ne s'agit pas de négocier, encore une fois, il s'agit de faire valoir notre point de vue.

M. MASSE: Je suis parfaitement d'accord. M. LE PRESIDENT: M. Choquette.

M. CHOQUETTE: En consentant à convoquer le Comité des régies gouvernementales à caractère industriel et commercial, le pre-

mier ministre énonçait le jeudi 24 octobre 1968 qu'il s'agissait pour les députés de prendre connaissance de la politique salariale du gouvernement. « tant au niveau des principes qu'à celui des applications pratiques », et d'en mesurer d'une façon objective les multiples implications sociales, financières et économiques.

C'est on ne peut plus dans cet esprit que l'Opposition veut aborder la question. C'est notre objectif que la lumière la plus complète possible soit jetée sur les conceptions et les principes qui ont été à la base des positions gouvernementales et de ses organismes aux diverses tables de négociations où il a dû négocier avec ses employés pour la détermination de leurs conditions de travail, et en particulier, à la Régie des alcools du Québec.

C'est notre intention d'examiner de très près l'emploi par le gouvernement de l'instrument qu'il s'est donné et qu'il a désigné lui-même sous le nom de politique salariale. C'est enfin notre devoir de démontrer en quoi les positions gouvernementales, tant sur le plan théorique que sur le plan pratique, ont été la cause principale de la durée de la grève à la Régie des alcools. Et comment l'inflexibilité de l'attitude du gouvernement risque d'entraîner le désordre dans les négociations qui ne sont pas encore conclues.

Premièrement, une politique salariale bien articulée doit être assez souple pour permettre la négociation. Les exposés des représentants du gouvernement devant notre comité auront permis aux membres de cette Chambre et à l'opinion publique d'être confirmés dans les vues qu'ils étaient en droit d'avoir, par suite du comportement du gouvernement depuis plus d'un an, à l'effet que le gouvernement n'avait pas une politique de négociation mais bien plutôt une politique salariale qu'il voulait à tout prix imposer à toutes et chacune des vingt tables de négociations où il a été et sera obligé de participer au cours des années 1968-1969.

En effet, ce besoin de cohérence dont faisait état M. Masse, besoin qui se comprend fort bien de la part du gouvernement, a eu pour résultat d'écarter dans l'esprit du gouvernement cette autre nécessité, soit celle de la négociation.

La conséquence de cette vue parcellaire de la réalité a été celle de négociateurs de l'Etat à diverses tables de négociations se donnant une attitude de rigidité absolue équivalente à un refus de la négociation, à tel point qu'il est de commune renommée que les négociateurs de l'Etat n'ont jamais, avant les actuelles séances de ce comité, bougé des positions et des offres patronales initiales.

Il a fallu quatre mois de grève à la Régie des alcools du Québec pour que finalement le gouvernement se décide, comme ultime solution, à convoquer le présent comité pour mettre cartes sur table au sujet de sa politique dite salariale.

La rigidité absolue qui a donc été la marque de commerce du gouvernement tout au cours de ces négociations a été désignée sous le vocable de politique salariale. Il convient donc immédiatement de dissiper l'ambiguïté ou l'équivoque qu'a créée l'attitude gouvernementale sur les responsabilités de l'Etat dans l'état actuel des choses en matière de salaires et de conditions de travail. S'il est parfaitement exact que l'Etat doit avoir une politique salariale, il n'en reste pas moins que l'Etat se devait de négocier de bonne foi une politique absolue et devant être maintenue intégralement à toutes et chacune des tables de négociations, sans même que les négociateurs aient mandat pour en discuter et au surplus pour la modifier au fur et à mesure des négociations. Voilà une politique qui ne tient pas compte de la réalité.

Il est vrai que MM. Masse et Parizeau, dans leurs exposés devant le comité, ont dit que la politique salariale n'était pas un dogme, et que ce n'étaient que les offres finales qui importaient. Mais quoi que nous disions, il ressort clairement de l'esprit du gouvernement — et j'en veux à preuve les affirmations de principe faites par le ministre d'Etat, ce matin, au présent comité — en abordant la question des relations de travail dans le secteur public qu'il importe plus au gouvernement de maintenir la cohérence parfaite de ses offres que de signer des conventions collectives avec ses employés.

Malgré ses dénégations, le gouvernement s'est enfermé dans un système qui ne tient pas compte de la négociation: aspect qui est pourtant fondamental en matière de relations de travail. Inutile d'insister sur l'application aux parties des dispositions de l'article 41 du code du travail qui rendent impérative la négociation de part et d'autre. Cette obligation légale ne fait que correspondre à la réalité des choses dans le monde des relations de travail au Québec, au Canada et en Amérique du Nord. Notre système des relations de travail reconnaît justement l'aspect humain, l'aspect du dialogue, l'aspect des échanges entre employeurs et employés pour en arriver à la conclusion d'un accord en matière de relations de travail.

Le fait que le gouvernement ait été légalement tenu de négocier séparément à chaque table de négociation en vue de la conclusion de

contrats collectifs particuliers ne saurait être une excuse qui justifie son refus de négocier une fois qu'il a déterminé le montant de son offre ou de ses offres à ses employés. Au surplus, et quels que soient les impératifs de négocier séparément et individuellement les diverses conventions avec chacun des groupes dans le secteur public, rien n'interdisait au gouvernement de convoquer les principales centrales, fédérations, syndicats, etc, à la discussion de l'ensemble de ses propositions initiales avant que les négociations ne débutent à chaque table de négociations.

Au surplus, et au nom de cet impératif de la cohérence interne entre les fonctions dans le secteur public, il aurait été beaucoup plus sage de dépasser le stade de la table distincte de négociations. Mais, ce besoin de cohérence interne est-il absolu? Non, car les contrats ne sont pas arrivés à expiration en même temps. Les catégories d'employés visés sont fort diverses même si des fonctions similaires se retrouvent sous diverses conventions collectives où l'Etat est intéressé. En comparant ces offres salariales à des fonctions dans le secteur privé ou dans le secteur public fédéral ou ailleurs, il est sûr que la discussion peut être très longue et la comparaison n'être pas nécessairement concluante quant à déterminer le chiffre des offres gouvernementales.

En effet, si comme le disait M. Parizeau, les offres gouvernementales pour chaque fonction résultent d'un arbitrage entre ce qui est payé dans le secteur privé et le secteur public ailleurs, il est certain que la variation est suffisamment grande entre les divers points de référence et qu'il y a encore beaucoup de marge pour la discussion; de telle sorte qu'il est complètement erroné de conclure que les résultats obtenus par le moyen de la comparaison s'imposent nécessairement d'eux-mêmes.

Le contraire, il me semble, est justement une vue de l'esprit qu'entretiennent les principaux porte-parole du gouvernement. En somme, dans ce domaine, il ne peut y avoir d'absolu. Et c'est à vouloir faire de sa politique de négociations un absolu — en la dénommant sous l'appellation sacrée de politique salariale — que le gouvernement s'est enfermé dans une logique qui l'empêche de négocier véritablement avec ses employés. Il est ainsi la cause de la durée excessive de la grève à la Régie des alcools.

Deuxièmement, la technique de négociation adoptée par le gouvernement. En matière de négociations, nous connaissons deux types de démarches: la négociation fermée, c'est-à-dire la négociation qui commence par des positions passablement éloignées et puis, au fur et à me- sure, le rapprochement tend à s'opérer pour finalement être conclu par un accord; et la négociation ouverte qui a lieu lorsqu'une partie ne veut pas allonger inutilement le débat ou encore, lorsqu'elle considère que sa position est de toute évidence bien fondée et qu'elle peut donc se permettre de divulguer des le début des négociations sa position définitive ou presque définitive.

Mais, alors, dans ce dernier cas, il faut de toute évidence — au point de vue de la bonne foi des négociations — que la partie qui emploie cette stratégie de la négociation ouverte, soit disposée dès ce moment à montrer les raisons qui justifient sa position, afin de démontrer qu'elle n'a aucune arrière-pensée et, surtout, aucune position ultérieure à présenter.

Dans le cas des négociations poursuivies par l'Etat du Québec avec ses employés, il nous faut conclure qu'il n'a adopté ni l'une ni l'autre de ces méthodes de négociations. Il a eu recours à une formule bâtarde entre ces deux stratégies, en mettant sur la table des offres finales, mais sans ouvrir son dossier, excepté après quatre mois de grève à la Régie des alcools du Québec, après avoir subi une perte d'environ $20 millions de revenus, par défaut de ventes à la régie, et après avoir imposé une dure grève à ses 2,800 employés.

C'est devant l'échec de sa méthode que l'Etat a maintenant décidé d'ouvrir son jeu et d'adopter carrément la méthode ouverte de la négociation. Dès le début ou durant la grève de la Régie des alcools, chose certaine, le gouvernement aurait dû expliquer les raisons de ses offres à ses employés. Si le gouvernement désirait véritablement pratiquer une politique salariale dans le secteur public, il ne pouvait se contenter d'agir comme le pire des employeurs privés en s'abstenant de communiquer la raison d'être de ses propositions à ses employés et à l'opinion publique.

Le gouvernement a donc marié, intempestive ment et injustement, deux techniques de négociations alors, que de toute évidence, il aurait dû, dès le départ, adopter la technique ouverte de la négociation.

Il a pratiqué le « bulwarism » dans toute la force du terme. C'est-à-dire, déclarer en fait que ses offres étaient sa première, sa deuxième, sa troisième, son avant-dernière et sa dernière proposition et qu'il ne remuerait pas de cette position: que c'était à prendre ou à laisser et ceci, sans aucune explication.

Que devait-on attendre devant cette attitude hautaine et cavalière de la part des autorités, sinon que le mouvement syndical se rebiffe? C'est justement ce qui est arrivé au grand dé-

triment des revenus de l'Etat et des grévistes. La tactique employée par l'Etat s'est peut-être inspirée de la victoire des Horaces sur les Curiaces, afin de permettre d'emporter des victoires successives à chaque table de négociations,, Mais il est certain qu'elle n'a pas favorisé un bon climat dans les relations de travail. En fait, le gouvernement a donné le mauvais exemple dans un domaine où il devait, sinon innover, du moins adopter l'éthique moyenne des employeurs dans leurs relations de travail.

Qu'on ne vienne pas nous dire que les conventions signées avec les fonctionnaires, les agents de la paix, et autres, justifient à posteriori la méthode adoptée.

On sait que des facteurs autres ont joué dans chacun de ces cas pour que des conventions collectives interviennent.

Le rattrapage. Au cours de son exposé, le ministre de la Fonction publique a déclaré que le rattrapage était presque complètement terminé dans le secteur public. Nous avons trouvé, dans une autre partie de son discours, le démenti catégorique à cette affirmation. En effet, le ministre d'Etat ne disait-il pas, par ailleurs, qu'il reconnaissait encore l'existence d'écarts allant jusqu'à 20% entre des fonctions similaires dans le secteur public. On admettra que des écarts de 20% entre des fonctions similaires sont énormes. On admettra également que l'existence d'écarts allant jusqu'à 20% prouve de toute évidence que la négociation est encore nécessaire dans le secteur public et que l'ordre que le ministre aimerait voir régner dans son domaine est encore loin d'être établi. Ceci est une autre preuve de la nécessité de la négociation dans le secteur public. On ne peut prétendre que l'ordre y règne au point de rendre la négociation caduque et inutile.

Les augmentations prévues au cours des conventions. La politique du gouvernement est d'accorder des augmentations de 7 1/2% par période de 18 mois de convention d'une durée de trois années, soit des augmentations de 5% par année. Cette offre, nous dit-on, est faite en fonction de l'augmentation prévue des ressources fiscales de 8.5% par année, en tenant pour acquis que toute nouvelle taxe irait au paiement de programmes nouveaux. Or, si l'on réduit le taux prévu de l'accroissement des ressources fiscales, lequel, suivant le gouvernement, doit refléter l'augmentation de la productivité et l'augmentation du coût de la vie jusqu'à concurrence de 3%, d'un pourcentage de 1.5% représentant l'accroissement attribuable à la population, ceci laisse un accroissement net des ressources fiscales prévues de 7% par année, au cours des trois prochaines années, alors que les offres gouvernementales ne sont que de 5% par année.

Par conséquent, même en se basant sur les critères adoptés par le gouvernement, soit les augmentations annuelles de 5% projetées aux employés du secteur public qui doivent refléter l'augmentation de laproductivité en général dans l'économie et un accroissement prévisible de pas plus de 3% dans le coût de la vie, l'offre gouvernementale n'est pas conforme à ses propres prévisions, ni aux critères qui ont été proposés par le ministre d'Etat. Il y a donc un écart entre les 5% et les 7%, soit environ 30% de différence, de telle sorte que les employés du secteur public éprouverait 30% de retard sur les employés du secteur privé au point de vue des augmentations prévues au cours des trois années à venir.

Sous un autre aspect, l'offre de 5% d'augmentation annuelle représenterait une augmentation de 3% pour compenser les tendances inflationnistes prévisibles de l'économie et 2% pour l'augmentation de la productivité en général dans l'économie.

Or, nous soumettons qu'un accroissement prévu de la productivité de 2% de l'économie en général ne reflète pas la situation réelle puisque sur la base des comptes nationaux, la productivité réelle par habitant a augmenté au Canada, en 1967, de 2.8% et devrait normalement être de cet ordre pour les années 1968, 1969 et 1970.

Au surplus, malgré que la productivité dans le secteur public soit très difficile à mesurer, tenant compte de ce que le facteur prix n'y intervient guère ou pas et qu'il s'agit de service, il n'en demeure pas moins vrai que laproductivité du secteur public peut être mesurée par d'autres méthodes et peut être augmentée.

En effet, personne dans la province de Québec ne met en doute la possibilité pour l'Etat et les organismes du secteur public d'augmenter leur productivité par de meilleures méthodes de gestion, des innovations techniques et aussi obtenir un rendement accru de la part des employés du secteur public. Mais les décisions visant à l'augmentation de la productivité dans le secteur public sont du ressort de l'Etat et des organismes publics de telle sorte qu'une action énergique et efficace de la part des employeurs du secteur public est de nature à accroître la productivité dans le secteur public par beaucoup plus que les 2% prévus aux offres gouvernementales et même beaucoup plus que l'augmentation réelle de 2.8% par tête d'habitant prévisible pour l'économie en général.

Qu'on ne vienne pas nous dire que les employés du secteur public ont, par nature, une productivité inférieure au secteur privé. Nous sommes d'avis que ce sont les autorités du secteur public qui sont responsables de l'accroissement de la productivité. La Régie des alcools du Québec, qu'on a comparée avec un net désavantage à celle de l'Ontario, en est un exemple concret. Par conséquent, la responsabilité première, pour l'augmentation de la productivité dans le secteur public, repose essentiellement sur le gouvernement et les organismes publics.

Nous sommes convaincus qu'ils sont capables d'augmenter la productivité de beaucoup plus que les 2% prévus aux offres gouvernementales. Il est reconnu que l'action syndicale est souvent une source d'innovation et d'augmentation de la productivité par les décisions qu'elle impose à l'employeur visant à s'adapter aux exigences des conditions de travail et du revenu de ses employés.

Ce facteur a complètement échappé au gouvernement. La reconnaissance de ce facteur procède de la constatation que le monde des relations de travail n'est pas complètement statique ou mécaniste. Du moins, cette constatation prouve qu'il y a place à la négociation, ce dont on n'a pas tenu compte au niveau gouvernemental.

Suggestions pour l'avenir. On me permettra de faire valoir rapidement quelques idées pour l'avenir dans le domaine des relations de travail dans le secteur public. J'exprimais un certain nombre de ces idées dans un discours que je prononçais à la Chambre le 13 février 1967. Je les résume donc:

Premièrement, le gouvernement et les principaux groupements d'employés dans le secteur public devraient prévoir la création d'institutions stables et permanentes, aux fins d'étudier les conditions de travail dans le secteur public. Entre autres, par l'institution d'un « Pay Research Bureau » qui serait chargé d'études comparatives sur les emplois du secteur public et du secteur privé.

Deuxièmement, des recherches et discussions conjointes devraient être faites sous un aspect plus général sur l'état des relations entre employeurs et employés dans le secteur public, bien avant l'ouverture des négociations, afin que le débat, lors du commencement des négociations, soit en quelque sorte circonscrit et que les parties se soient entendues ou aient au moins essayé de s'entendre sur les données de base et les principes devant être acceptés pour en arriver à la conclusion de convention collective.

Troisièmement, comme l'a suggéré mon collègue, le député d'Ahunstic, la création d'un con- seil de la Fonction publique s'impose dans l'état actuel des choses. Maintenant, cet échange permanent dans le secteur public ne règlerait pas, nous l'admettons, tous les problèmes de la négociation mais aurait favorisé la création d'une mentalité commune et laisserait présager un accord beaucoup plus facile au moment des négociations proprement dites.

Au surplus, ces institutions qui peuvent être créées sans intervention législative, pour certaines au moins, pour les deux que j'ai énumé-rées plus haut, et qui s'imposent dans les faits, ne supprimeraient pas la nécessité de la négociation qui demeurera toujours un impératif tant dans le secteur public que dans le secteur privé.

Car, comme nous le disions plus haut, la nature des relations de travail au Québec, comme partout en Amérique du Nord, écarte toute solution autoritaire et unilatérale à la conclusion de contrats collectifs de travail.

Finalement, nous sommes d'avis que le futur ministère de la Fonction publique devrait s'intituler comme tel mais en ajoutant « et de la réforme administrative », car nous sommes d'avis que l'Etat doit augmenter la productivité dans le secteur public.

Conclusion. Dans l'immédiat, nous souhaitons que le gouvernement se décide à vraiment négocier sur les salaires comme il s'est décidé à le faire, depuis quelques jours, dans d'autres domaines de la convention collective de la Régie des alcools du Québec, non pas que nous encourageons le gouvernement à dilapider les fonds publics mais nous pensons qu'il faut qu'il reconnaisse la réalité de la négociation et la nécessité de s'y soumettre.

M. LE PRESIDENT: Merci M. Choquette. M. Pepin a demandé la parole.

M. PEPIN: M. le Président, est-ce qu'à ce moment-ci des débats, vous pourriez permettre au négociateur, Jean-Paul Lalancette, de faire une première intervention sur des choses techniques touchées en bonne partie par le ministre délégué à la Fonction publique.

Par la suite, il est possible, si vous êtes toujours d'accord, que je réintervienne sur certains autres aspects de portée un peu plus générale.

M. LE PRESIDENT: Quelle est la première partie de la question?

M. PEPIN: La première partie est de permettre à Me Lalancette d'intervenir sur les sujets techniques touchés par M. Masse et qui vont englober, bien sûr, certains autres détails que M. Lalancette aimerait donner au comité.

M. LE PRESIDENT: Très bien, Me Lalancette.

M. LALANCETTE: M. le Président, la première question est la suivante. Je comprends ce que M. Masse a donné tout à l'heure du côté des bureaux. Il s'agissait de certains points de repère. D'après moi, ce sont certains points de repère pour faire des comparaisons au niveau des é-chelles. Ma question est la suivante: A quel moment, au cours des négociations, la Régie des alcools a-t-elle soumis ces points de repère et accepté de les discuter? Je comprends qu'on a pris un certain nombre de points de repère. Deuxième question: A quel moment, également, a-t-on accepté, du côté de la Régie des alcools, de discuter de nous, de nos points de repère, même du côté des bureaux, parce que nous a-vions fait des calculs sur 26 points de repère dans les bureaux? A quel moment, évidemment, nous a-t-on demandé de justifier... Je me rappelle qu'on en a discuté au niveau du maximum des é-chelles dans les bureaux, parce que 80% environ de nos employés à la régie sont au maximum des échelles. A quel moment la régie a-t-elle accepté de discuter la prétention que nous avions à l'effet que, globalement, en partant des maximums des échelles, les employés de la Régie des alcools étaient payés 8.8% et même 9% de moins que les employés de bureau de la Fonction publique? Deuxièmement, à quel moment — c'est une autre question, si vous le voulez — la Régie des alcools, au cours des huit mois de négociations où j'ai été avec la régie, a-t-elle accepté de discuter de sa comparaison technique des commis de magasin avec les points de repère de la Fonction publique? A quelle date? Je voudrais le savoir.

La dernière question est la suivante: Combien d'employés à la Régie des alcools sont-ils menuisiers? Combien d'employés de la Régie des alcools sont-ils actuellement — parce que les augmentations ne sont pas encore données — au taux de manoeuvre? Ce sont les questions que j'ai à poser.

M. LE PRESIDENT: Merci M. Lalancette. Est-ce que M. Masse ou M. Fernand Pépin pourrait répondre?

M. F. PEPIN: M. le Président, je vais essayer de répondre aux quatre points présentés par Me Lalancette. A quel moment, au cours des négociations de la Régie des alcools, a-t-on accepté de discuter des points de repère?

Lorsque nous avons commencé à discuter de chiffres, nous avons tout de suite frappé un différend qui a porté sur la base des comparaisons.

Je peux fixer ici même le moment, c'est le 15 ou le 16 juin. La partie syndicale basait ses informations sur l'industrie manufacturière, les brasseries, les distilleries, l'Hydro-Québec, la ville de Montréal, la Commission des transports de Montréal. J'en oublie peut-être un peu. A ce moment-là, nous les avons discutés en disant: La Régie des alcools, selon la loi, n'est pas une industrie manufacturière, ni un service, ni une municipalité, mais, selon la loi, un commerce.

Ce n'était pas une question d'opinion, c'était une question de fait. C'est pourquoi, au départ, il y avait différend.

Deuxièmement, quand avons-nous discuté les points de repère concernant les employés de bureau? Je crois que ma réponse au premier point couvre, en principe, le deuxième point.

Le troisième point: Les commis de magasin en comparaison avec la Fonction publique. Disons que, pour bien situer le problème, les commis de magasin dans la province de Québec, il n'y en a qu'à la Régie des alcools — il n'en a pas dans la Fonction publique — mais on peut se référer à d'autres catégories dans la Fonction publique qui sont les commis de bureau et les agents de bureau. Les employés qui étaient, auparavant, au même niveau, niveau comparable des anciennes classifications de la Fonction publique — et ici, je n'ose pas trop m'avancer parce que cela a été fait avant moi — dans la nouvelle organisation, les nouvelles classifications, les nouveaux règlements de classification, les employés qui étaient compris dans l'ancien grade 10 ont été distribués dans d'autres grades, dans de nouveaux règlements de classification qui ont perdu le titre de grades et qui comprennent des définitions, des contenus absolument différents. La comparaison demeure extrêmement difficile, elle doit référer au contenu ancien et au contenu nouveau avec aussi — parenthèse sur les échelles de salaires — les anciennes échelles, base et maximum; les nouvelles échelles base et maximum. C'est ce à quoile ministre Masse référait tout à l'heure dans son texte.

Le quatrième point: Combien y a-t-il de menuisiers à la Régie des alcools? Le nombre exact, je pourrais vous le donner, d'après mes chiffres...

M. LALANCETTE: C'est 20 menuisiers»

M. PEPIN (Fernand): ... c'est 20. Merci!

Le deuxième point est: Combien de manoeuvres? Il faut bien s'entendre ici que, lorsque nous donnons un nombre d'employés dans une entreprise, il faut situer ce nombre à une date donnée. Si je dis qu'il y a 200 employés dans une entre-

prise le 1er janvier, il faut tenir pour acquis que si l'on parle du 5 janvier, il se peut que ce ne soit plus 200 employés.

Le nombre de manoeuvres à la Régie des alcools, au 31 décembre 1967, était d'environ 590. La raison est qu'au mois d'octobre, en prévis ion des Fêtes, les entrepôts — parce que les manoeuvres sont exclusivement dans les entrepôts — remplissent les magasins à leur pleine capacité. C'est-à-dire qu'à ce moment-là, à la Régie des alcools, nous avons quelque chose comme une centaine d'employés temporaires de surplus pour un surplus temporaire de travail» Si on reprend la même question au 22 juin 1968, alors que les conditions, les exigences du commerce, de l'entreprise sont différentes, nous avons un total de 495 manoeuvres.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Pépin. M. Masse.

M. MASSE: Je pense que M. Marcel Pepin désire prendre la parole.

M. LE PRESIDENT: Alors, M. Marcel Pepin.

M. MARCEL PEPIN: Merci, M. le Président. Je voudrais faire une première remarque à la suite des chiffres fournis par M. Fernand Pépin. Je pense que les membres du comité vont comprendre ce point.

Lorsque vous appliquez un patron d'une négociation exactement à une autre négociation alors que la composition de la main-d'oeuvre est différente, vous pouvez vous attendre raisonnablement à des résultats différents.

Si, par exemple — je vais prendre une illustration extreme pour essayer de me faire comprendre - vous négociez pour un groupe d'employés qui sont tous, disons, des menuisiers ou des électriciens où dont la très grande majorité est ainsi, et que vous leur donnez disons $3 l'heure comme taux horaire... Si vous prenez ce patron-là, si vous l'importez dans une autre négociation, à une autre table de négociations, en disant: Là, cependant, on va donner le même taux pour les menuisiers, mais il n'y en a qu'une partie de la force, une partie plutôt minime, on peut facilement conclure que les gens n'accepteront pas des choses identiques. C'est vrai pour cette catégorie. Mais, regardez la composition de la main-d'oeuvre, telle qu'elle vient de nous être fournie par M. Pepin. Je ne pense pas qu'il faille nécessairement avoir des accusations ou des choses un peu plus malveillantes à l'idée pour comprendre le phénomène qui s'est produit à la Régie des alcools et celui qui se produit présentement.

De plus — et je fais une deuxième remarque là-dessus - lorsque vous négociez un contrat de travail - et je pense que tous ici vous avez déjà négocié, sinon des contrats de travail, du moins, d'autres genres de contrats — vous savez que vous devez en peser les avantages au complet. On ne peut pas détacher les clauses les unes des autres et je crois que tout le monde est bien d'accord sur ce point.

Si vous prenez un groupe qui part de $1.55 l'heure, comme c'est le cas pour les ouvriers du gouvernement provincial, que vous leur offrez une augmentation qui les porte à $2.29 l'heure et que vous leur attachez d'autres bénéfices, à ce moment-là, vous comprendrez que c'est plus facile pour ce groupe de répondre dans un sens qu'un autre groupe à qui vous offrez de passer de $2.12 à $2.46. Les pourcentages sont évidemment fort différents.

Je crois que, pour bien comprendre la situation à la Régie des alcools, il ne faut pas oublier d'avoir en tête ces principales données du problème.

Je voudrais aussi faire une autre observation; celle-là elle est plutôt sur le plan juridique, M. le Président. On nous a fait valoir qu'il y avait d'abord la Loi de la Régie des alcools. Le ministre délégué à la Fonction publique nous a référé à deux articles principaux ou à ce qu'il a considéré comme étant les articles principaux. Il y a donc une loi qui s'appelle la Loi créant la Régie des alcools. Il y a aussi une autre loi qui s'appelle le code du travail.

Le code du travail, en 1965, si ma mémoire est bonne; cela peut être en 1964, a décidé - ce sont les parlementaires qui ont pris cette décision, pas nous — de sortir de la Fonction publique les employés syndicables de la Régie des alcools. D'ailleurs, le ministre délégué à la Fonction publique l'a mentionné précédemment. Qu'a fait le Parlement lorsqu'il a décidé de prendre une telle position? Il a dit aux employés de la Régie des alcools: Vous n'êtes plus des employés qui avez les mêmes droits que les employés directs du gouvernement. Il a fait en sorte que les premiers, ceux de la Régie des alcools, soient sortis de ce qu'on appelle communément la fonction publique.

Cela a des implications. Lorsque M. Fernand Pepin dit: C'est un fait que l'on ne peut pas se comparer à l'industrie manufacturière, je regarde les dispositions législatives et je me dis: On les a envoyés au même titre, au même niveau que tous les autres employés qui sont soumis au code du travail.

Peut-être me direz-vous: Ce n'est pas important, d'autres affaires sont plus importantes? Mais, je vous prierai de noter, vous, les parle-

mentaires, que lorsque vous avez posé ce geste-là, pour les employés, cela avait une conséquence. Ils se disaient: Nous ne sommes plus dans la fonction publique ordinaire.

Nous sommes plutôt considérés comme des employés d'une entreprise donnée et nous les mettons exactement sur la même base que les autres employés des autres entreprises qui sont soumis au code du travail. Pour une fois, l'importance de ce débat, — je ne veuxpas le soulever pour qu'il soit uniquement académique — les deux lois, la loi des régies, ou la Loi créant la Régie des alcools, et le code du travail peuvent, à mon avis, se marier très bien. Il n'y a pas de problème quand le ministre délégué à la Fonction publique dit: Nous sommes aux prises avec la Loi créant la Régie des alcools. Moi, je lui dis; Vous êtes aux prises aussi avec le code du travail. Je pense bien que ce n'est pas tellement contradictoire.

Mais il ne faut pas oublier, tout de même, que les employés de la Régie des alcools sont des employés assujettis au code du travail, alors que les employés du gouvernement sont des employés assujettis à une autre loi qui s'appelait dans le temps le bill 55, si ma mémoire est bonne. Et le bill 55 donnait des particularités et, quant au reste, quant aux sujets qui ne sont pas inclus dans le bill 55, les autres articles du code du travail s'appliquent à eux.

Il me semble, M. le Président, qu'il est important que cette distinction soit reconnue et soit mise devant les membres du comité pour, quand on raisonne le problème, ne pas oublier que les employés de la Régie des alcools ne sont pas des employés par rapport aux lois de cette province adoptées par l'Assemblée législative — je pense même, unanimement — ne sont pas des employés régis au même titre que des employés de la fonction publique. Est-ce que ceci doit se traduire par des changements au niveau de la négociation collective? Juridiquement, tout le monde le sait, celle qui négocie avec les syndicats en cause, c'est la régie gouvernementale, ce n'est pas le gouvernement, c'est la régie comme l'Hydro-Québec qui négocie juridiquement avec ses employés.

Légalement, me direz-vous, cela ne peut pas avoir de conséquences. Moi, je pense que cela en a certainement, mais je voudrais aussi souligner aux membres du comité que les conséquences existent. En tout cas, si cela n'existe pas pour le gouvernement, cela existe bien sûr pour les employés de la Régie des alcools qui se sont fait dire par une loi: Vous n'êtes plus soumis à la Fonction publique. Et puis, quand ils viennent pour négocier devant le comité parlementaire, on les traite exactement com- me s'ils étaient soumis à la Fonction publique. Je vous prierai donc de faire attention à ce point, qui, quant à moi, revêt une certaine importance parce que les employés peuvent facilement avoir l'impression — ils ont demandé eux-mêmes — d'être soustraits à l'application de la loi générale de la Fonction publique. Ils ont fait des démarches, des pressions, tout le monde doit s'en souvenir. Moi, en tout cas, je m'en souviens, parce que j'étais un de ceux qui faisaient cette réclamation-là. Et quand, on leur a dit: Vous l'avez, et que maintenant on leur dit: Vous ne l'avez pas, je pense qu'il y a entre les deux quelque chose que l'on peut voir.

Maintenant, avant de passer à d'autres choses, M. le Président, j'aimerais poser une première question à l'honorable ministre délégué à la Fonction publique. C'est une question, je pense, à laquelle il pourra répondre lui-même, parce qu'elle n'est pas très très technique.

Les critères n'étant pas négociables, j'ai compris, depuis une semaine ici que les critères de détermination de la politique salariale, d'après ce que f ai compris de M. Masse, ne sont pas négociables. Ils sont établis, ils sont là. Je voudrais savoir de M. Masse si l'application de ces critères, la manière de les passer, de les traduire en actes, en résultats, s'il considère que, au moins, l'application des critères, c'est quelque chose qui peut être négocié entre les parties intéressées, donc la régie gouvernementale et les deux syndicats impliqués. C'estla première question que je voudrais poser.

M. LE PRESIDENT: M. Masse.

M. MASSE: Si vous le permettez, M. le Président, je vais essayer de résumer notre position face à l'intervention du député d'Outremont et du président de la CSN.

Les deux interventions se rejoignent par un hasard autour de certains thèmes.

M. CHOQUETTE: C'est un hasard qui a du bon sens.

M. MASSE: Le hasard, c'est le fouillis de toutes sortes de conjonctures. Les deux interventions, bien que les questions aient été différentes, tournent autour de la question de l'inflexibilité de la politique salariale.

Nous avons très bien déclaré, vous l'avez noté, M. le député d'Outremont, que nous ne considérions pas cette politique salariale comme étant un dogme, mais, au contraire, comme étant un certain nombre de principes budgétaires d'un gouvernement qui considère que 50% de son budget doivent être régis par un certain

nombre de principes. Autrement, vous seriez les mêmes à nous accuser d'anarchie, à nous accuser de ne pas avoir de politique. Nous ne croyons pas devoir accuser les autres de ne pas en avoir eue. Au contraire, nous nous en sommes donné une politique.

Maintenant, les cadres généraux de cette politique ont toujours donné lieu à des discussions, à des négociations à chacune des tables de négociations. L'application de cette politique, de ces principes, est négociable. Mais, nécessairement, on en arrive à atteindre quand mime certaines normes, certains maxima possibles. Cette souplesse de l'application, nous en avons tenu compte dans l'ensemble des tables de négociations auxquelles nous avons participé jusqu'à maintenant. La preuve que cette souplesse, à l'intérieur de ces principes, a été reconnue, c'est qu'il faut quand même toujours admettre qu'il y a eu conclusion de conventions collectives dans la majorité des secteurs non pas au point de vue du nombre de syndiqués, mais au point de vue des syndicats distincts.

Ce qui veut dire que nulle part cette politique budgétaire ou cette politique salariale n'a été imposée mais que, partout, elle a été acceptée par les négociateurs, par les syndicats, à l'intérieur des négociations, à l'intérieur des règlements et des lois qui, pour l'instant, régissent ces négociations.

Nous ne pouvons accepter de nous faire accuser d'inflexibilité lorsque les résultats calculables sont, au contraire, le fruit d'ajustements, le fruit de flexibilité, mais à l'intérieur de normes qui nous font repousser l'anarchie de la situation que nous avions connue au départ. C'est cette tentative de justice que nous accordons à chacun des individus qui oeuvrent dans les secteurs de l'Etat, directement, ou dans les secteurs parapublics, donc indirectement,, Nous n'avons jamais refusé de négocier. La preuve, c'est que nous avons conclu des négociations. Si nous avions refusé de négocier, il n'y aurait aucune convention de conclue. Nous aurions été dénoncés, à maintes reprises, par l'ensemble des syndicats avec lesquels nous négocions. Qu'il y ait des points de divergence, qu'il y ait des points d'accrochage, qu'à certains moments donnés, l'humeur des négociateurs fait que les communiqués de presse sont virulents, cela n'est peut-être pas raisonnable, mais c'est un fait auquel nous nous devons de nous rendre.

Le code du travail a été observé dans toute la mesure, et les clauses normatives ont été discutées, ont été négociées, ont été acceptées, même à la RAQ, et, en partie, même à la RAQ, certaines clauses salariales. Par contre, ce n'est pas parce que le gouvernement s'est équipé d'une structure de négociations, par contre, ce n'est pas parce que le gouvernement a coordonné ses négociations, qu'on doit accuser ce même gouvernement qui a voulu moderniser ces structures de négociations, afin d'éviter l'anarchie que nous avions connue — je ne dirais pas le nombre d'années — mais dans beaucoup d'années précédentes, qu'il va falloir accuser ce même gouvernement d'être dirigé par un technocrate, d'être dirigé par un ministre qui est beaucoup plus technocrate que politicien, ne tenant pas compte de certaines situations anarchiques ou autrement.

Je crois que le travail que nous avons abordé depuis quelques mois est peut-être un travail marqué au point de la technocratie, mais c'est quand même un travail qui était nécessaire dans l'évolution des relations de travail entre l'Etat et ses 250,000 syndiqués.

S'il faut inclure dans notre ministère ou dans notre secteur de la Fonction publique, une part plus grande de technocratie, c'est un devoir que le gouvernement s'est imposé et si ce devoir, il se doit de l'imposer dans d'autres secteurs, dans d'autres ministères, il prendra ses responsabilités et il le fera.

La différence entre la technocratie et la politique, ce n'est pas la différence entre l'ordre et l'anarchie, mais c'est au contraire la différence entre la justice et trop souvent la démagogie qui aboutit à l'injustice.

Le type de négociations que nous avons faites a, depuis le début, respecté les lois et les règlements. Tant et aussi longtemps que dans l'intérêt du Québec, il nous sera possible de le faire, vous pouvez être certains que nous nous battrons pour respecter ce que le Parlement nous a donné comme instruments de travail. Mais si, à un moment donné, l'intérêt même de la collectivité veut que le Parlement change ses lois et ses structures, il devra le faire, parce que son but premier est de faire en sorte que l'ordre règne dans le Québec afin d'assurer aux Québécois un minimum de vie raisonnable au point de vue des citoyens. Ce n'est pas uniquement un minimum de traitements, c'est également un minimum de repos mental.

Egalement, le climat dans lequel ces négociations se sont déroulées jusqu'à maintenant a été un des climats les plus sains que nous ayons connus dans un domaine de négociations qui touchent autant de syndicats et autant de syndiqués. Si vous tenez compte que, lors de la dernière ronde de négociations, le Québec avait connu, dans le secteur public, une grève dans les hôpitaux, un ensemble de grèves dans le secteur des enseignants des écolesdes commissions scolaires,

une grève très dure et très difficile dans le secteur des enseignants à l'emploi des écoles de l'Etat, si vous tenez compte d'une grève très dure également et très longue dans le secteur des professionnels à l'emploi de l'Etat, d'un ensemble de grèves dans le secteur de l'Hydro-Québec et d'une grève également à la RAQ, je crois qu'on peut difficilement comparer ces deux climats de négociation et nous faire actuellement porter l'odieux de négocier dans un mauvais climat.

Au contraire, je crois que le gouvernement, par l'action de se donner une politique coordonnée, par l'action de se donner une structure de négociation et par l'action de regrouper le plus d'hommes et de cerveaux dans ce domaine, a fait tout ce qu'il pouvait faire. Il a même fait la preuve que le climat a drôlement changé.

Certes, M. le député, vous avez mentionné qu'il restait encore des écarts de 20% dans certains domaines entre les grilles. Il faut tenir compte que nous sommes partis, au mois de janvier, avec des écarts qui étaient de l'ordre de 200% à 300%. Nous avons réduit ces écarts à 20% en tenant compte de certaines situtations qui nous semblaient très particulières. Il ne faudrait pas, cette fois-ci, nous demander d'être inflexibles et de niveler partout, alors que le plaidoyer que vous avez soutenu était marqué au coin de l'inflexibilité du gouvernement.

Peu de gouvernements en Amérique du Nord et même en Europe sont allés aussi loin que le gouvernement québécois, que les gouvernements québécois, dans la reconnaissance du droit au syndicalisme pour les employés du secteur public. Peu de gouvernements en Amérique du Nord et en Europe sont allés aussi loin dans la conclusion de conventions collectives assurant des droits de consultation et des droits de participation. Peu de gouvernements ont osé travailler en commun avec les ouvriers qui oeuvrent pour l'Etat. Je peux vous assurer que nous ne craindrons pas de continuer à innover dans ce domaine, dans ce domaine de consultation et de participation, soit par des lois, soit par des conventions collectives.

J'aimerais également revenir sur un point qu'il ne m'a pas été possible de mentionner dans l'exposé général. Je l'avais noté, j'allais y revenir — M. Fernand Pepin en a parlé — et je tiens à le poser dans un contexte. Dans mon exposé général, vous avez remarqué que je n'ai fait aucune référence particulière au problème des commis de magasin, du fait que toute référence à ces employés impliquait un problème technique de comparaison de fonctions.

On a tendance à comparer, dans la fonction publique, le commis-vendeur à l'agent de bureau.

Il est cependant nécessaire de préciser les exigences et les devoirs de chacune de ces fonctions,,

Pour l'agent de bureau, classe Il de la Fonction publique, par exemple, on exige une 11e année et deux ans d'expérience dans un travail de bureau. La fonction en elle-même est suffisamment complexe, du fait qu'elle sert de classe d'embauche pour nos futurs agents, classe I et agents, classe principale.

Par contre, à la régie, pour être commis-vendeur, les exigences sont une neuvième année et une certaine habileté à compter. De plus, la fonction, en tant que telle, est routinière, jusqu'à un certain point, étant donné que le commis-vendeur répond strictement à une demande de client limitée à un secteur particulier, celui des alcools.

Si, par hasard, nous prenons la classe la plus basse des commis de bureau de la fonction publique où l'exigence de base est tout de même une dixième année, nous pouvons probablement conclure que le commis-vendeur se situe à la RAQ entre ces deux fonctions.

Il est connu que le commis de bureau et l'agent de bureau ont à la fonction publique une semaine de 32 heures. Il est bon de se rappeler que le grade dix de l'ancienne classification à la fonction publique avait été accordé aux commis-vendeurs pour compenser, par une semaine de travail plus longue, bien que les exigences d'entrée étaient moins fortes.

Il est bon de vous donner, en terminant, les traitements qui ont été acceptés à la fonction publique pour les deux occupations mentionnées, et le traitement offert pour les commis-vendeurs, à la régie, au cours des négociations.

Je répète le tableau, pour, encore première période, etc. Première période, minimum, commis de bureau, $2,817; agent de bureau, classe H, $3,403, et commis-vendeur à la RAQ, avec des exigences d'entrée moins fortes, quand même situé entre les niveaux: $3,831.

Dans le maximum, $3,717 pour le commisde bureau; $4,903 pour l'agent de bureau et $4,631 pour le commis-vendeur à la RAQ.

Pour la deuxième période: minimum, commis de bureau $3,063; agent de bureau, minimum, $3,714; RAQ, minimum, $4,148.

Maximum: commis de bureau, $3,961; agent de bureau, $5,214; commis-vendeur, $4,948. On a donc tenté d'entrer, en fin de convention, le niveau de commis-vendeur entre le niveau d'agent de bureau, exigence, onzième année, et le niveau de commis de bureau, exigence, dixième année.

II faut également tenir compte que l'offre de 40 heures de travail augmente de 6% le revenu a la maison, le « take-home-pay », de ce type de commis-vendeur.

Pour ce qui est également de la flexibilité des négociateurs de la régie, tous se souviendront qu'hier, M. Parent, secrétaire général de la CSN, disait que la majorité des clauses du conflit de la Régie des alcools du Québec étaient réglées, comme, d'ailleurs, nous avions prétendu qu'il était possible d'en régler, jeudi dernier, à la fin du comité, que la majorité des clauses étaient donc réglées, sauf celle portant sur la sécurité d'emploi et celle sur les salaires, qui selon son dire, représentaient les deux noeuds gordiens»

Or, pour prouver de nouveau sa bonne foi, et surtout sa flexibilité, la régie, même si, depuis le dernier contrat de travail, elle n'a pas mis à pied d'employés réguliers, a accepté de préciser dans le nouveau contrat de travail, que tous les fonctionnaires considérés comme permanents, ne pourraient être mis à pied pour manque de travail et demeureraient définitivement à l'emploi de la régie.

De plus, dans le cas des employés qui ont obtenu le statut d'employés réguliers, au 31 octobre 1967, la régie s'est engagée, en cas de manque de travail, à garder quand même ces employés à son emploi jusqu'à ce qu'elle puisse leur trouver un autre poste à la Fonction publique ou parapublique du Québec.

Non seulement s'est-elle engagée à trouver un emploi à ce personnel, mais elle a également accepté de payer les frais de déménagement si ses employés étaient transférés dans d'autres centres. C'est donc là, à mon avis, une concession de première importance, qui ne sera pas sans occasionner des déboursés supplémentaires, mais que la régie a accepté afin de permettre aux deux parties de se rapprocher davantage. La régie venait donc, à elle seule, de régler en entier la sécurité d'emploi, qui représentait pour le syndicat un des deux noeuds gordiens. Restait donc le second noeud, celui des salaires.

On se souviendra que la régie avait offert comme augmentation moyenne, des échelles de traitement, soit 7.1/8% pour 18 mois. 7.1/2% pour 18 mois, enfin, ainsi qu'un montant forfaitaire de $135 tenant lieu de rétroactivité pour des mois précédents. Le syndicat avait alors répondu que ce n'était pas $135 qu'il désirait comme forfaitaire, mais bien $500. Evidemment, l'écart était énorme. Toutefois, dans le but d'en venir le plus tôt à une entente, la régie prouvait de nouveau sa flexibilité en augmentant et augmentait le montant forfaitaire à plus du double, soit $275. Réponse du syndicat, $500. On se rend à une offre finale de la RAQ, $300, réponse du syndicat: $500. Je pose la question, où est l'inflexibilité?

M. PEPIN: Ce n'est pas vrai.

M. MASSE: Les négociateurs de la régie avaient indiqué de plus que, quant aux taux de salaires, certains ajustements restaient possibles. Au cours de la même période de 24 heures où la régie venait de faire des concessions dont je viens de parler, elle acceptait en outre certaines modifications des taux applicables à certains emplois féminins et ouvrait une nouvelle classe d'ouvriers de production, permettant d'augmenter le salaire de certains de ses employés.

En somme, le premier noeud gordien de M. Parent est tranché. Le second semble demeurer, mais nous considérons que la régie a fait plus que sa part pour le dénouer. On aurait souhaité que le syndicat en fasse autant et, je répète ma question: De quel côté y-a-t-il manque de flexibilité?

Maintenant, M. le Président, les offres du gouvernement représentent pour les magasins et les bureaux de la régie, une augmentation moyenne des taux de l'ordre de 15.5625% pendant la durée de la convention. Les demandes syndicales les plus récentes sont de l'ordre de 27%. Admettons que le gouvernement, malgré l'ensemble de la flexibilité qu'il a montrée depuis quelques jours, compte tenu des noeuds gordiens qu'on nous avait présentés, admettons que le gouvernement accepte la contre-proposition syndicale, admettons que le même ordre d'augmentation, et c'est ça, le principe de justice que nous cherchons depuis le mois de janvier, et il faudra le faire, soit étendu à tout le secteur public et parapublic. Or, il ne faut pas oublier qu'un écart de la politique salariale du gouvernement provoquerait une réaction dans les secteurs publics et parapublics qui ont accepté ces offres jusqu'à maintenant, de même que dans les secteurs actuellement en négociations, c'est évident.

Le coût total de cette acceptation - et la population doit en être informée, parce que c'est elle, finalement, qui paye la note, ce n'est pas le conseil d'administration de la régie — compte tenu que l'ensemble des profits sont versés au fonds général du Québec, le coût total de cette acceptation, dis-je, se situerait entre $130,000,000 et $140,000,000 par année, lorsque toutes les augmentations seraient en vigueur. Une somme pareille permettrait, par exemple, de financer en même temps tous les

programmes suivants: établissement de la gratuité scolaire dans les universités.

M. LAPORTE: M. le Président, je demanderais au ministre combien cela représenterait pour la RAQ?

M. MASSE: Si vous aviez été présent tout à l'heure, je m'excuse, je vous l'aurais dit.

M. LAPORTE: J'étais en Chambre.

M. MASSE: Je ne veux pas vous accuser de ça, M. Laporte, mais on l'a dit tout à l'heure. On pourra y revenir si vous voulez, mais tout ça a été expliqué depuis une heure. Donc, ce montant...

M. LAPORTE: Est-ce que je peux savoir combien?

M. MASSE: De 15% à 27%.

M. LAPORTE: En millions?

M. MASSE: En millions à la RAQ?

M. LAPORTE: Quel est le montant de l'augmentation, si vous appliquez les demandes à la RAQ?

M. MASSE: Trois quarts de million. Donc... Enfin, au moins trois quarts de million, on dit plus que ça.

M. LAPORTE: On est loin de...

M. MASSE: Compte tenu de toute l'argumentation qui a été faite jusqu'à maintenant au comité, il serait nécessaire de réajuster les conventions signées et de demander les mêmes choses dans les conventions non signées, c'est évident! C'est une évidence certaine,...

M. LAPORTE: D'accord!

M. MASSE: Or, ces $130 millions à $140 millions permettraient à l'Etat ou au public de financer en même temps les programmes suivants; établissement de la gratuité scolaire dans les universités; construction de 10 écoles polyvalentes par année.

M. CHOQUETTE: C'est de ladémagogie!

M. MASSE: ... augmentation de 50% du régime provincial d'allocations familiales et en même temps, au moins, la construction d'un hôpital d'envergure. Si, par contre, la même somme de $130 millions à $140 millions devait être obtenue par une augmentation d'impôt, il faudrait hausser de 8% à 10% la taxe de vente ou bien augmenter l'impôt provincial sur le revenu des particuliers de 20%. En somme, si le gouvernement disposait de la somme, il lui faudrait renoncer à d'importantes dépenses — j'en ai donné des exemples — et s'il n'en disposait pas, il lui faudrait procéder à de très forts relèvements d'impôts.

Même si ces facteurs ne sont pas la préoccupation première du syndicat, il ne faudrait pas oublier que le gouvernement a reçu de la population un mandat clair et précis, soit celui d'administrer la chose publique dans le meilleur intérêt de la collectivité québécoise. Ce que ceux-là appellent de la rigidité n'est en somme qu'une saine administration qu'un gouvernement ne peut atteindre qu'avec des innovations comme la politique salariale actuelle.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Masse. M. Choquette.

M. CHOQUETTE: M. le Président, on me permettra une brève réponse au ministre d'Etat à la Fonction publique. Ce que je retiens de son exposé, lorsqu'on veut aller derrière et voir exactement la pensée qui l'inspire, c'est une conception très autoritaire de la négociation dans le secteur public.

M. MASSE: M. le Président, j'ai répondu là-dessus à moult reprises.

M. CHOQUETTE: Et cette conception, je pense l'avoir démontrée antérieurement aux séances de l'actuel comité. Pendant toute la période de la grève de la Régie des alcools, à partir du début de juillet jusqu'aux actuelles séances du comité, le gouvernement n'a pas réellement négocié. Il a commencé à négocier il y a quatre jours...

M. MASSE: M. le Président, je tiens à répéter...

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Un instant, M. Masse, il est bon de répéter à l'assistance qu'aucune manifestation n'est acceptée, ou pour ou contre, si nous voulons la bonne entente et l'ordre.

M. MASSE: M. le président a répété au comité que le comité des négociations de la Régie des alcools oeuvre à l'intérieur du même mandat qu'il a eu depuis le début. C'est

le même mandat qu'il avait au début de la grève et c'est le même mandat qu'il a actuellement.

M. CHOQUETTE: J'ai été interrompu par le ministre alors que j'étais en train de faire un exposé.

Je ne sollicitais pas les applaudissements, je voulais simplement exposer la situation telle qu'elle était et non pas isoler du contexte général ce qui s'est passé depuis que nous siégons dans ce comité-ci, ce qui s'est passé au niveau de la table des négociations. Il n'est certainement pas dans mon intention de reprocher au gouvernement de s'être enfin décidé à négocier après quatre mois!

M. MASSE: C'est le même mandat, M. le Président, c'est le même mandat. Il n'y a pas eu de changements.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre!

M. CHOQUETTE: M. le Président, je m'objecte aux interruptions! M. le Président, j'invoque le règlement. J'ai la parole et le ministre ne l'a pas!

M. LE PRESIDENT: M. Choquette.

M. CHOQUETTE: En somme, M. le Président, si l'on fait abstraction des notions technocratiques et des notions d'ordre que le ministre a reconnues au cours de son exposé, comme étant les principaux mobiles de son attitude dans cette affaire-là, si l'on fait abstraction de ces notions qui, je l'admets, doivent faire partie d'une politique salariale, mais tout en tenant compte d'une politique de négociations, que reste-t-il de l'exposé du ministre? Il reste qu'à l'heure actuelle, il nous dit que l'Etat refuse de continuer à négocier. Et je lui demande — et c'est ma dernière question: Qu'est-ce que vous faites à partir de maintenant? Est-ce que vous êtes assis sur des positions définitives ou bien si vous êtes prêt à continuer à négocier?

Est-ce que vous considérez qu'il y a encore une marge pour s'entendre ou bien est-ce que vous considérez que vous êtes arrivé au maximum?

M. MASSE: M. le Président, je pense que je redemanderais au député d'Outremont de relire les notes qui vont lui être transmises. Compte tenu de sa question, il y trouvera là toutes les réponses.

M. CHOQUETTE: Ce n'est pas une réponse, cela.

M. LAPORTE: M. le Président... M. LE PRESIDENT: M. Laporte.

M. LAPORTE: M. le Président, je veux bien que nous relisions toutes les notes du ministre, je veux bien que nous revoyions le dossier très complexe et assez clair sur certains points, qu'il nous a soumis. Mais il y a une chose qui est évidente, M. le Président, c'est que lorsque l'on aura relu toutes ces notes, lorsque l'on aura revu chaque ligne et chaque virgule du dossier, il y aura encore 2,400 employés de la Régie des alcools qui seront en grève, parce que rien n'aura été réglé.

Si cette nouvelle lecture nous amenait à des conclusions, nous pourrions suspendre le comité et nous atteler à la tâche de lire et de relire aussi souvent que cela serait nécessaire, mais apparemment, cela ne réglerait rien.

Je pense que nous avons atteint le stade de cette discussion où la grève doit cesser. M. le Président, une chose en particulier que je n'aime pas et le ministre me permettra de le lui dire, c'est l'espèce d'agressivité dont il a fait montre au moins pendant les quelques minutes où j'ai été ici.

M. MASSE: M. le Président, je m'excuse, mais..»

M. LAPORTE: M. le Président, est-ce que je peux au moins m'exprimer sur ce point?

M. GOSSELIN: C'est une opinion!

M. LAPORTE: C'est une opinion. J'exprime généralement les opinions que je ressens moi-même.

M. MASSE: C'est de l'interprétation... M. LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre!

M. LAPORTE: M. le Président, le ministre devrait être dans ce débat en particulier l'arbitre neutre, l'arbitre indépendant, celui qui a autant de considération pour l'une et l'autre partie et qui recherche dans le calme les solutions.

C'est d'autant plus le cas que ce que nous lui reprochons fondamentalement au sujet de sa politique salariale, c'est de ne l'avoir jamais négociée. Toutes les structures qu'il nous a expli-

quées, toutes les déclarations qu'il a faites ne changent pas les choses fondamentales. La politique salariale du gouvernement a été le fait d'une partie seulement; cela a été unilatéral, sans que les syndicats aient jamais été invités à la négocier avec le gouvernement.

M. le Président, deuxième chose que je n'accepte pas de la part du ministre, surtout de lui qui se veut jeune ministre progressiste, c'est l'espèce de démagogie qu'il nous a faite tout à l'heure avec les $130 à $140 millions que représenteraient le règlement dont il est question actuellement. Il est bien évident que si, dans les $130 à $140 millions, il y a de quoi donner la gratuité scolaire, bâtir des hôpitaux, faire ceci ou cela, il y a peut-être trois quarts de million aussi pour régler la grève.

Ce qui est en discussion, ce matin, ce n'est pas $130 à $140 millions, c'est trois quarts de million, de l'aveu même des négociateurs, pour régler le problème de la RAQ. Si le gouvernement veut aider un peu plus ceux qui sont à peu près les moins payés actuellement parmi les salariés du gouvernement, il peut fort bien le faire sans déranger sa politique salariale. Nous lui avons suggéré deux ou trois façons de le faire ce matin, soit en accordant une classe supérieure, soit en accordant une échelle légèrement différente, soit en reconnaissant que la reclassification de ces gens-là n'a pas été faite depuis 1959. Il y aurait des moyens, à l'intérieur de la politique salariale du gouvernement, de régler le problème de ces employés, les moins bien payés, M. le Président.

Il n'y a personne, dans la province de Québec, qui va croire qu'en accordant trois quarts de million aux grévistes de la RAQ, nous allons déséquilibrer complètement la politique salariale du gouvernement et que cela va coûter $130 à $140 millions. Je suis convaincu, puisque le gouvernement discute et plaide devant à peu près les mêmes syndicats, qu'ils vont être les premiers à aller trouver les syndicats qui ont déjà signé des ententes pour dire; Vous allez, évidemment, comprendre que les gens les moins payés ont pu obtenir un traitement légèrement différent sans que cela déséquilibre la politique salariale.

M. le Président, je crois que nous devrions, une fois de plus, demander au gouvernement de faire preuve de souplesse dans ce cas. Autrement comment ça va finir, ça? Est-ce que la grève va durer pendant vingt ans? Le gouvernement devrait décider de suspendre une fois de plus ce comité, de donner à ses négociateurs, qui sont qualifiés et en qui nous avons confiance, des instructions précises afin qu'ils fassent preuve d'un peu plus de flexibilité — ceci ne peut être autorisé que par le gouvernement -pour régler, dès cet après-midi, le problème des clauses salariales, de sorte que, ce soir, nous ayons l'impression que ce comité, tous les gens qui se sont déplacés ainsi que les négociateurs n'auront pas travaillé en vain...

L'objectif, c'est de régler la grève, et celui qui peut régler cette grève, c'est le gouvernement, et je l'invite instamment à le faire.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! M. BERTRAND: M. le Président...

M. LEVESQUE (Laurier): J'avais demandé la parole...

M. BERTRAND: Ah, excusez-moi!

M. LEVESQUE (Laurier): ... très rapidement...

M. LE PRESIDENT: M. Lévesque, un instant. Je ne veux pas faire le reproche à qui que ce soit, mais bien sûr, il y a des responsabilités qui sont autres en dehors de ce comité-là. Mais je ne voudrais pas qu'on se mette à répondre maintenant à ce que M. Laporte vient de donner là, parce que tout cela a déjà reçu réponse avant que M. Laporte ne soit ici.

M. MASSE: Oui, tout cela a été fait.

M. LE PRESIDENT: Alors, il faudrait bien qu'on s'engage sur un autre terrain que celui-là, puisque tout a été dit, deux heures avant.

M. LAPORTE: M. le Président, c'est notre responsabilité de revenir sur les terrains que l'on veut bien. Je n'accepte pas que le président dise ça. Je suis d'accord sur le principe, mais ce n'est pas à vous de nous le dire.

M. LE PRESIDENT: C'est assez rare que vous acceptiez ce que la présidence décide. M. Lévesque a la parole.

M. LAPORTE : Ce n'est pas dans la loi du président.

M. LEVESQUE (Laurier): Trois minutes seulement, pour voir s'il n'y a pas des choses qu'on peut souligner peut-être et qui découlent de ce qui a été dit ce matin, mais très, très rapidement. La grève actuelle est dans son cinquième mois. Elle a coûté, paraît-il, à peu près une vingtaine de millions de dollars sans compter ce qu'elle coûte, moralement aussi bien que

matériellement, aux grévistes eux-mêmes, une vingtaine de millions au trésor de l'Etat. Il est fort probable qu'à mesure que les Fêtes se rapprochent, elle coûte quelque chose comme $1 million, $2 millions par semaine, et la progression va être géométrique à partir de maintenant.

Il y a une chose qui me frappe. C'est que le ministre d'Etat à la Fonction publique, depuis tout à l'heure, parlait du mandat qui n'a pas changé. Est-ce que, raisonnablement, on ne peut pas dire que le mandat a changé? Il ne faudrait pas jouer sur les mots. Il y a une dizaine de jours, peut-être moins, quand nous étions ici, au comité, M. Masse a énuméré, et à un moment donné, on lui a même demandé, s'il y avait quelque chose de réglé, énumérez-donc ce qui est réglé.

Il a énuméré quelque chose comme vingt ou trente clauses normatives qui n'étaient pas réglées, qui n'avaient pas été paraphées, parmi. lesquelles se trouvaient les noeuds gordiens dont on a parlé de part et d'autre, par exemple, la sécurité d'emploi.

Il est évident que si, entre autres, ce noeud gordien extraordinairement important qui est celui de la sécurité d'emploi, sans compter toutes les autres clauses apparemment, a été réglé dans les sept ou huit, au plus les dix derniers jours, une chose est certaine, c'est que le mandat est peut-être resté le même. C'est pour cela que je dis qu'il ne faut pas jouer sur les mots. Mais il y a eu forcément un sacré assouplissement de l'interprétation de ce mandat du côté de la Régie des alcools à la suite d'instructions du gouvernement ou enfin de ceux qui ont préparé la politique du gouvernement ou qui en font l'application.

Alors, à partir de là, qu'on dise ce qu'on voudra. Il y a une très grande responsabilité du gouvernement lui-même et je tiens compte seulement de ces quelques douzaines de clauses normatives dont quelques-unes extraordinairement importantes.

Si c'était possible depuis une semaine, c'était donc possible depuis trois ou quatre mois. Et, en très grande partie, la responsabilité appartient aussi bien au gouvernement, au moins, qu'aux négociateurs syndicaux. Ce qui revient à dire que pour le prolongement de cette grève, la responsabilité principale est quand même, en grande partie, celle du gouvernement.

Puisqu'on est rendu dans le cinquième mois et que, aussi bien du côté des grévistes que du côté du gouvernement — les chiffres ne se comparant pas, mais dans les deux cas étant extrêmement lourds et faisant mal de plus en plus si on continue à accumuler des pertes, tous les contribuables, dont nous sommes, vont les payer quelque part au printemps. Et puis nous allons les payer, chèrement.

Sans tenir compte de ce transfert de $130 à $140 millions dont parlait le ministre, j'ai fait un calcul qui est peut-être mauvais, c'est que, dans le forfaitaire, le ministre l'a répété trois fois — on a offert $135, ils ont demandé $500. On a offert $275, Us ont dit $500. On a offert $300, ils ont dit $500. Ce qui vient à dire — peu importe le détail des faits — dans la bouche même du ministre qu'il manque $200. Il y a à peu près 2,500 grévistes. Si je fais un calcul convenable, dans les trois quarts de millions dont parlait le ministre, il y a $500,000 qui sont du forfaitaire, qui, à mon humble avis, serait le commencement, et pas beaucoup, la compensation pour cette responsabilité que porte le gouvernement et la Régie des alcools pour le prolongement de la grève.

J'ai dit la responsabilité, en grande partie. Mais qu'on ne vienne pas me dire que c'est blanc comme une feuille de papier et que c'est pur comme de l'angélisme de l'autre côté. Si on a débloqué quelques douzaine de clauses normatives, dont la sécurité d'emploi, sur lesquelles c'était bloqué depuis quatre mois, et si on a fait ça cette semaine, il est sûr que le gouvernement était légèrement rigide lui aussi, ou enfin les gens de la Régie des alcools. C'est un fait, ça. On les a débloquées depuis une semaine alors qu'on ne les débloquait pas depuis quatre mois. Qui est responsable? Il y a au moins une responsabilité massive du côté des négociateurs, régie, gouvernement. Le forfaitaire dont on parle coûterait, sauf erreur à peu près un demi-million. Ce n'est pas nécessairement répercutable sur les demandes des autres syndicats. Dans ce domaine-là, il n'y a pas un syndiqué qui a une tête sur les épaules et qui a des chefs convenables qui ira dire aux hôpitaux ou ailleurs: Faites la grève pendant trois ou quatre mois pour qu'on vous donne plus de forfaitaire. Jusqu'à un certain point, c'est une compensation forfaitaire pour la responsabilité du gouvernement. Je ne vois pas pourquoi ça ne serait pas accepté. Et si on pouvait ajouter à cela un maximum de souplesse dans l'application des taux — comme le disait lui-même le ministre là, qu'on est ouvert à ça — il n'y a pas de raison que ça ne puisse pas être réglé d'ici la fin de la fin de semaine. Et s'il y avait moyen de régler d'ici la fin de la fin de semaine, on ne finirait pas le cinq-ieme mois. Sinon, moi, je répéterais une chose, c'est que si le gouvernement est si sûr d'avoir raison et d'être rendu au bout de tout ce qu'il avait à offrir, pourquoi est-ce que

lundi ou mardi, si ce n'est pas rendu plus loin, il n'accepterait pas la médiation?

S'il est si sûr d'avoir raison, bien, qu'il accepte une médiation. Mais, il semble qu'il pourrait régler ce conflit, en fonction des chiffres qu'on a eus depuis à peu près une heure — et je prends juste les derniers — en répondant convenablement aux dernières demandes du syndicat et en s'allégeant de sa responsabilité dont il ne sert à rien de discuter, elle est là.

M. LE PRESIDENT: M. Bertrand.

M. BERTRAND: M. le Président, je n'étais pas moi-même ici, étant retenu en haut par les travaux de la Chambre. Il faut que nous travaillions, dans la mesure du possible, aux deux endroits. C'est ce qui a expliqué l'absence de mon collègue de Chambly et mon absence. Toutefois, les propos qui ont été tenus par le ministre délégué à la Fonction publique, mon collègue M. Masse, représentent les vues du gouvernement. Les explications qu'il a données, nous les faisons nôtres, car nous les connaissons. J'espère bien que l'on va réaliser que, s'il y a un ministre délégué à la Fonction publique, qui a été chargé par ses collègues de s'occuper de ces problèmes de négociations avec le secteur public et parapublic, nous sommes au courant de tout. C'est là qu'est notre responsabilité.

Le député de Laurier a parlé de la grande responsabilité du gouvernement, oui. Au début des travaux de ce comité dont j'ai demandé la formation pour examiner la politique salariale du gouvernement et ses incidences sur la RAQ, j'ai déclaré que c'était en vue d'éclairer, non seulement la Chambre, mais l'opinion publique au Québec.

Je serais bien mal venu, quant à moi, de porter un jugement. Je n'en porterai pas. Je souhaite, comme tous les citoyens du Québec, comme les négociateurs du côté de la RAQ et comme ceux qui représentent le syndicat que ce conflit prenne fin.

Mais nous devons tenir compte du bien commun des impératifs que nous avons, nous — moi, en particulier, qui dirige le gouvernement — d'une gestion des biens publics et des répercussions que pourrait avoir, non seulement sur un budget, mais sur la situation financière du gouvernement, toute autre application, au sujet du conflit de la RAQ, de principes autres que ceux qui ont servi à réaliser des ententes dans les autres secteurs où des milliers de syndiqués ont accepté de signer une convention collective. C'est un devoir. Je l'ai déjà déclaré: Si l'on appelle ça de la raideur, du durcissement, loin de moi cette pensée. Mais, la fermeté dans les positions que nous avons tenues, lafermeté dans l'exposé des principes qu'a fait mon collègue, M. Masse, est une fermeté qui s'impose. Gouverner, ce n'est pas toujours un rôle joyeux; c'est un rôle difficile. Ce sont des responsabilités terribles. Je reviens aux mots que vous utilisiez. Je n'irai pas plus loin pour ce matin. Je proposerai, M. le Président, que les négociations se poursuivent et que ce comité soit ajourné à mardi après-midi, trois heures trente.

M. LE PRESIDENT: Accepté?

M. CHOQUETTE: Par conséquent, encore négocier.

M. BERTRAND: Oui. Mais, grands dieux, c'est ce que je viens de dire implicitement!

M. CHOQUETTE: Le ministre devrait répondre aussi clairement que le premier ministre. Je lui ai posé la même question tout à l'heure.

M. LAPORTE: M. le Président, sur la motion d'ajournement, je voudrais simplement signaler...

M. LE PRESIDENT: M. Pepin a demandé à parler.

M. PEPIN: M. le Président, je voudrais dire que, du côté syndical, nous sommes fort bien disposés à reprendre les négociations dès cet après-midi, à deux heures ou à deux heures et quart. Maintenant, pour épargner du temps, je ne voudrais pas, quand même, que le bloc des négociations aient à se déplacer et à s'en aller à Montréal. Je pense que cela pourrait être fait à Québec.

M. BERTRAND: Oui, aucune objection.

M. PEPIN: Je voudrais aussi souligner que certains points ont été mentionnés Ici au comité, ce matin, qui ne l'ont jamais été à la table des négociations. Par exemple, le délégué à la Fonction publique, M. Masse, a dit qu'on nous a offert un montant forfaitaire de $300.

Ce n'est pas vrai, les gars qui sont ici nous ont offert $275. Je comprends que si on continuait une autre séance, on aurait $25 de plus, j'aimerais ça, mais mardi prochain on reviendra!

M. BERTRAND: M. Pepin, vous vous direz tout ça cet après-midi à la table des négociations. .0

M. PEPIN (Marcel): Oui, mais je ne voulais pas, M. le Premier ministre que l'impression qui demeure soit celle de celui qui affirme quelque chose qui n'est pas tout à fait exact.

J'ai voulu, au moins, préciser, corriger.

M. BERTRAND: Je dois déclarer, et ce serait probablement beaucoup plus à mon collègue de le faire, parce qu'il a été plus en relation avec eux mais, étant donné les rapports que j'ai eus, les rencontres que j'ai eues, les informations que j'ai obtenues de nos négociateurs parlant, à ce moment-là — comme on a toutes sortes de rôles à jouer quand on est chef d'un gouvernement, également dirigeant de l'Etat employeur comme on le dit, ça fait plusieurs rôles — je dois dire que ceux qui nous représentent jouissent de l'entière confiance du ministre d'Etat délégué à la Fonction publique, et de l'entière confiance des membres du conseil des ministres qui ont eu l'occasion d'avoir un exposé complet de la situation à la RAQ.

M. LAPORTE: M. le Président, pour que ce comité soit bien renseigné, il y a au moins une chose qu'on peut préciser. On prétend ici qu'on a offert $300 et là, qu'on a offert $275. Il faudrait au moins qu'on sache, le comité, lequel des deux? Alors, a-t-on offert $300 ou $275.?

M. RENAUD: M. le Président, on a posé ce matin les quatre points, les quatre ou cinq points que M. Parent a d'ailleurs déjà mention- nés. Enfin, actuellement, c'est lui qui semble être le négociateur principal, à la table. Il a posé ces différents points qui, dans l'ensemble, certainement, changeaient toutes les normes, si vous voulez, dont vous avez entendu parler. Alors, sur ces points, je lui ai dit que je ne pouvais pas changer les réponses que je lui avais données, c'est-à-dire que nous avions déjà donné tout ce qu'il nous était permis de donner sauf que, sur la question forfaitaire, si au lieu de se départir de l'attitude que c'était encore $500 et que ça restait à $500 il s'approchait du montant que j'avais déjà offert la veille, c'est-à-dire $275 là on pourrait réellement s'entendre au moins sur le forfaitaire.

Mais, comme vous le savez, il faut se mettre dans le contexte des négociations. Vous ne pouvez pas, quand vous êtes à la table de négociations, lâcher sur le forfaitaire sans savoir s'ils vont accepter au moins, le reste des salaires, voyons.

Alors, c'est la situation qui se présentait ce matin.

M. LE PRESIDENT: On rappelle aux membres du comité et aux autres députés qui pouvaient peut-être siéger en haut que, mardi matin, à 9 h 30, le comité de l'éducation siège ici, la Chambre à 11 heures et le comité des régies à 3 h 30, mardi.

La séance est levée.

(13 h 8)

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