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Version finale

28th Legislature, 3rd Session
(February 20, 1968 au December 18, 1968)

Wednesday, July 3, 1968 - Vol. 7

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Comité des relations industrielles


Journal des débats

 

Relations industrielles

(Dix heures quinze minutes)

M. D'ANJOU (président du comité): On m'a demandé de remplacer M. Pierre Roy, député de Joliette, qui devait présider cette assemblée. En attendant son arrivée, je vous souhaite à tous la plus cordiale bienvenue. J'espère que les délibérations que nous aurons ici aujourd'hui porteront fruit. Merci.

M. BELLEMARE: Messieurs, je n'ai pas besoin de vous dire que c'est un problème vieux comme le monde, celui du charroyage ou du camionnage. Je suis très heureux, ce matin, de vous accueillir à la suite de la motion de mon collègue de l'Opposition, M. Mailloux, qui a présenté une motion en Chambre pour attirer l'attention du gouvernement sur un problème grave et extrêmement urgent, celui du camionnage, et particulièrement sur le rapport qui a été déposé en Chambre sur le comité d'étude, la cédule des justes salaires et au sujet du transport.

L'honorable député de Charlevoix nous avait demandé de convoquer les intéressés. Nous avons décidé de fixer à ce matin cette rencontre pour pouvoir entendre le témoignage de plusieurs personnes en autorité parmi vous qui venez nous exposer votre problème. Je n'ai pas besoin de vous dire que nous sommes tous, chacun dans nos comtés, sensibilisés d'avance à vos problèmes respectifs parce que j'ai eu, l'année passée, dans mon propre comté — comme ministre du Travail, ce n'est peut-être pas un exemple — à subir trois grèves de camionneurs. Cela est probablement dû à un malaise qui existe, je l'ai constaté. Ce printemps on a pris une nouvelle formule et, en définitive, je pense qu'avec l'Association indépendante des camionneurs et l'organisation des camionneurs-artisans de la province, nous avons fait un compromis et nous avons fait, je pense, un mémoire d'entente qui est pour le plus grand avantage de tous. Ce n'est pas parce qu'un problème est réglé I l'échelle locale qu'il n'existe pas à l'échelle provinciale. C'est pourquoi, Je pense, que ce matin il est utile et nécessaire que nous nous entendions pour que nous puissions aviser après vous avoir entendus sur les moyens à prendre pour tâcher de trouver une solution à ce grave problème.

M. LESAGE: M. le Président, je voudrais joindre ma voix à celle du ministre du Travail pour souhaiter la bienvenue à tous ceux qui sont venus ce matin en réponse à l'invitation qui leur a été faite pour nous donner le fond de leur pensée non seulement sur le problème — je devrais dire les problèmes des camionneurs, particulièrement des camionneurs artisans, je le sais — non seulement pour cela mais également pour nous dire ce qu'ils pensent quant aux solutions possibles à ces problèmes. Les législateurs ne prétendent jamais et d'ailleurs ne pourraient jamais prétendre à la science universelle et infuse. Un des principes de la démocratie telle qu'elle se développe maintenant, c'est celui d'aller de plus en plus vers la démocratie de participation. Et s'il est un cas où la participation des intéressés s'impose pour l'élaboration de la législation ou de la réglementation qui sont nécessaires pour amener les solutions qui s'imposent, c'est bien le cas du camionnage, le cas des justes salaires, les cas soulevés parle juge Lippé dans son rapport.

Alors, veuillez croire, messieurs, que nous sommes désireux de vous entendre nous suggérer des solutions aux problèmes que vous connaissez à fond puisque vous les vivez chaque jour.

M. BELLEMARE: Alors, messieurs, nous pourrions peut-être, si c'est le voeu du comité, prendre les noms de ceux qui veulent se faire entendre et après que nous vous aurons entendus; les membres du comité pourront peut-être vous poser des questions auxquelles je sais que vous pourrez répondre et après, nous aviserons. Alors, M. le Président, voulez-vous demander les noms de ceux qui veulent se faire entendre.

M. LE PRESIDENT: Voulez-vous, s'il vous plaît, donner vos noms, ceux qui ont des représentations à faire?

M. LESAGE: D'abord les associations, les représentants des associations.

M. BILODEAU: André Bilodeau, avocat. Je représente F Association du camionnage du Québec Inc., ainsi que le Syndicat des camionneurs du comté de Lévis.

M. BERNIER: Paul Bernier, avocat, représentant de l'Association nationale des camionneurs-artisans indépendants Inc.

M. LESAGE: Paul-Etienne Bernier. Je ne sais pas pourquoi il cache son nom d'Etienne?

M. BERNIER: C'est parce qu'il y a tellement de gens qui le comparent...

M. LESAGE: Ce sont les camionneurs-artisans.

M. DUFOUR: Alphonse Dufour, président de l'Association nationale des camionneurs-artisans.

M. ROY: Raymond Roy, directeur général de l'Association des constructeurs de routes du Québec.

M. LESAGE; Me Bilodeau, le président de l'Association du camionnage vous accompagne?

M. BILODEAU: Non, malheureusement, le président de l'Association, qui est de Saint-Félicien, n'a pas pu se rendre ce matin. J'ai ici avec moi le secrétaire général, M. Roméo Blouin, qui m'accompagne.

M. LESAGE: Ah, bont M. Laurier Drouin?

M. BELLEMARE: Non, Blouin.

M. LESAGE: Blouin.

M. BILODEAU: M. Roméo Blouin.

M. LESAGE: Roméo Blouin.

M. TOUGAS: M. Marc Tougas, vice-président provincial du comté de Missisquoi.

M. BELLEMARE: Marc Tougas.

M. TOUGAS: Tougas.

M. BELLEMARE: Dugas?

M. TOUGAS: Tougas.

M. BELLEMARE: D'autres personnes?

M. ROY (président): Est-ce qu'il y en a d'autres qui veulent se faire entendre?

M. LAMONTAGNE: M. Rosaire Lamontagne, président des camionneurs du comté de Roberval, de l'Association nationale.

M. LE PRESIDENT: C'est Rosaire...

M. LAMONTAGNE: Lamontagne.

M. LE PRESIDENT: Association régionale...

M. LAMONTAGNE: Association nationale des comionneurs-artisans et indépendants incorporée.

M. BELLEMARE: Est-ce qu'il n'y a pas de représentants des camionneurs indépendants de la région de Trois-Rivières et de la Mauricie? M. Cournoyer, est-ce que vous voulez vous faire entendre?

M. COURNOYER: S'il vous plaît.

M. BELLEMARE : Une chance que je vous l'ai demandé.

M. LE PRESIDENT: Quel est votre prénom, M. Cournoyer?

M. COURNOYER: Je ne suis pas représentant de la région de Trois-Rivières mais de la Fédération des associations des camionneurs de la Mauricie. Gaston Cournoyer.

M. BELLEMARE: Alors, le premier, M. André Bilodeau.

M. LE PRESIDENT: M. Bilodeau.

M. BILODEAU: M. le Président, M. le Ministre du Travail, M. le Chef de l'Opposition, messieurs. Notre association groupe environ 1,200 membres dont plus de 500 sont propriétaires d'un ou deux camions seulement. Nous avons pris connaissance des recommandations du rapport Lippé du juge Lippé, devant qui d'ailleurs nous avions soumis un mémoire. En ce qui concerne le problème des camionneurs-artisans, nos recommandations principales sont les suivantes. D'abord, nous souhaitons ardemment que les propriétaires des camions à bascule, les camionneurs-artisans, enfin tout camionneur qui actuellement n'est pas sous le contrôle de la Régie des transports, soient sous un contrôle quelconque, que ce soit par l'intermédiaire d'une autre régie ou encore par le contrôle de la régie actuelle. Nous souhaitons que ces camionneurs-là soient sous l'effet d'un contrôle. D'abord, c'est dans leur meilleur intérêt puisque nous constatons souvent que les camionneurs ont des mésaventures ou des déconfitures parce que, par manque d'expérience ou manque de fonds, ils ne savaient pas dans quelle galère ils s'engageaient et, parce qu'ils n'ont pas été contrôlés lors de l'émission d'un permis quelconque, bien, leur entreprise a fait faillite ou a mal terminé.

Alors, première demande que nous faisons, c'est qu'un contrôle soit établi sur tous les camionneurs qui ne font pas actuellement l'objet d'un contrôle de la Régie des transports. Deuxièmement, nous souhaitons également qu'il ne soit pas fait de distinction entre un camionneur-artisan qui serait possesseur d'un seul

véhicule et le camionneur qui posséderait plus d'un véhicule.

Actuellement, la cédille des justes salaires ne s'applique qu'à celui qui ne possède qu'un véhicule de sorte que, si un camionneur qui possède plus d'un véhicule entre en contrat avec le ministère de la Voirie ou un sous-entrepreneur, il n'est pas lié par les taux prévus à la cédule des justes salaires. Ceci nous semble une anomalie puisque nous assistons à ce moment-là à une guerre des taux qui est à la défaveur, évidemment, du camionneur qui ne possède qu'un seul camion, puisqu'il ce mo-ment-là le sous-entrepreneur a intérêt à aller demander les services de celui qui n'est pas tenu à la cédule des justes salaires. Alors nous demandons qu'il ne soit pas fait de distinction entre le camionneur d'un seul camion ou de plusieurs camions. C'est notre deuxième demande.

M. BELLEMARE: Est-ce que c'est la définition du mot « salarié » surtout?

M. BILODEAU: Dans la cédule...

M. BELLEMARE: Est-ce la définition du mot « salarié » qui apparaît dans le code du travail qui vous cause ce préjudice-là?

M. BILODEAU: Bien, évidemment, nous avons cru que c'est en vertu de l'arrêté en conseil 1399 que le gouvernement considérait un camionneur-artisan comme celui qui ne possédait qu'un seul camion. Et ceci en vertu de l'article 6 de cet arrêté en conseil qui se lit comme suit: « Le chauffeur de camion... Le tableau peut prévoir une rémunération à la tonne-mille, à la verge cube-mille ou à l'heure pour le camionneur-artisan propriétaire d'un seul véhicule qu'il conduit lui-même ». Alors, nous avons déduit qu'il s'agissait là de la définition du camionneur-artisan qui donnait l'application de la cédule des justes salaires et nous demandons que tout le monde soit mis sur le même pied pour éviter les disparités dans les taux.

M. BELLEMARE: Mais l'imbroglio vient de la définition du code du travail. Dans la définition du code du travail, le mot « salarié » est différent dans son application et surtout limitatif. Un salarié, c'est un homme qui reçoit un salaire et il ne peut pas être considéré comme un artisan.

M. BILODEAU: Oui, oui, évidemment... M. BELLEMARE: Parce que le salarié, lui, qui est propriétaire d'un camion, qui est un artisan ni plus ni moins, n'a pas le droit de... C'est ce qui arrive aujourd'hui, il devient sous-entrepreneur parce qu'il emploie un autre de ses camions. Il devient propriétaire de deux camions puis il devient sous-traitant et là il ne devient plus salarié, il devient sous-entrepreneur. Et là, il devient sujet à la cédule.

M. BILODEAU: Evidemment, la raison de notre demande I ce sujet, c'est qu'il faut bien réaliser que le camionneur qui a plusieurs unités fait vivre plusieurs chauffeurs de camion. EL a également les mêmes dépenses que celui qui n'a qu'un seul camion pour chacune de ses unités et, au point de vue social, si le camionneur qui a plusieurs unités tombe en banqueroute, les répercussions seront les mêmes vis-à-vis des chauffeurs qui sont à son emploi que s'il était seul.

M. PINARD: M. Bilodeau, pensez-vous que c'est logique que vous demandiez à la fois le statut du camionneur-artisan, en même temps que le statut du camionneur-entrepreneur? Est-ce qu'il n'y aurait pas une espèce d'illogisme entre les deux définitions, puis surtout entre les deux fonctions?

M. BILODEAU: C'est-à-dire, pour ne pas se confondre, nous ne demandons pas un statut particulier au camionneur-artisan. Nous demandons que tous les camionneurs qui ne sont pas actuellement soumis à la juridiction de la Régie des transports, en vertu de l'article 33, soient soumis à un contrôle, quel que soit le nombre d'unités qu'ils possèdent. Et ce, parce qu'on possède une unité ou plusieurs unités, on a les mêmes dépenses pour le nombre d'unités qu'on possède et on fait vivre indirectement le même nombre de personnes à l'aide de chaque unité. Quant aux répercussions sociales, si une compagnie ou une personne qui a plusieurs camions fait faillite, comme je le disais tantôt, bien ce sont cinq, trois ou quatre chauffeurs qui sont dans le chemin. S'il n'a qu'un seul camion, c'est un seul qui tombe dans le chemin. Je ne sais pas si cela répond à votre question.

M. PINARDs A ce moment-là, il faudrait que vous nous disiez combien de propriétaires de camions vous représentez, au niveau de la définition du camionneur-artisan. C'est-à-dire combien de camionneurs propriétaires d'un seul camion, représentez-vous, par rapport aunom-bre de camionneurs propriétaires d'une flotte de camions ou de plusieurs camions que vous représentez?

M. BILODEAU: Nous en représentons 500 qui ont un ou deux camions. Je ne saurais pas vous dire quelle proportion a un camion ou plus d'un camion. Ce serait difficile à établir aujourd'hui.

M. MAILLOUX: Mais est-ce que ce n'est pas la très forte partie qui ne possèdent qu'un seul camion?

M. BILODEAU: De nos membres?

M. MAILLOUX: De vos 500 membres, oui. Est-ce que ce n'est pas la très forte partie?

M. BILODEAU: Sur les 500, M. Blouin me dit qu'il y en a à peu pris 300 qui ont un seul camion.

M. PINARD: Sur 1,200 membres?

M. BILODEAU: Sur 1,200 membres. Evidemment, nous représentons plusieurs camionneurs qui détiennent, dans toute la province et notre association est provinciale, des permis de la régie.

M. PINARD: Vous en avez 500 qui sont propriétaires de camions à bascule? D'un camion à bascule ou de plusieurs camion à bascule?

M. BILODEAU: Nous avons à peu près 1,000 camions à bascule appartenant à nos membres.

M. PINARD: Combien? M. BILODEAU: 1,000. M. PINARD: 1,000.

M. PLAMONDON: Et sur ces 1,000, il y aurait à peu près 300 camionneurs qui posséderaient un camion. C'est ça?

M. BILODEAU: C'est ça.

M. PLAMONDON: Quant au reste, de 300 à 1,000, ce seraient des propriétaires de deux ou de plusieurs camions?

M. BILODEAU: Plus d'un camion.

M. BELLEMARE: Maintenant, pour ne pas être trop long, est-ce qu'on ne pourrait pas définir, en partant ce matin, une chose pour toute la discussion? Le mot « salarié », qui a fait le sujet d'une enquête et qui a été traité par plusieurs mémoires, à votre point de vue, les ca- mionneurs, vous demandez que ce terme soit changé au point de vue de vos effectifs, de l'accréditation ou de la syndicalisation.

C'est une chose qui regarde le ministère du Travail. Par ailleurs, les artisans, ça, c'est ce qui regarde justement les normes, l'application de la cédule des justes salaires. Cela, c'est une autre chose.

M. BILODEAU: C'est ça!

M. BELLEMARE: On ne peut pas discuter, je pense, ce matin, l'un sans l'autre. Ou bien, si vous voulez...

M. BILODEAU: Non.

M. BELLEMARE: Parce que si la discussion se porte seulement du côté des artisans vis-à-vis d'une cédule des justes salaires, vous allez avoir demain, tout de suite après, les autres camionneurs qui vont venir nous dire: On a un autre problème, c'est celui du mot « salariés » qui, dans le code du travail, nous exclut.

M. BILODEAU: C'est vrai.

M. BELLEMARE: Les camionneurs ne sont pas reconnus au point de vue du code du travail, nous sommes obligés d'avoir des coopératives et nous sommes obligés de nous syndiquer en vertu de la troisième partie de la Loi des compagnies au Secrétariat provincial ou nous sommes obligés d'avoir des associations indépendantes. Et ça, ça nous cause un préjudice au point de vue syndical.

M. BILODEAU: Les deux vont de pair.

M. BELLEMARE: Si, ce matin, on peut définir, en partant, à votre suggestion, ce qu'est un camionneur-artisan, on aura bien plus de facilité pour savoir s'il doit être, lui, au code du travail, un salarié oui ou non.

Je prétends que c'est ça, les définitions. Je ne sais pas si je me trompe, mais en tout cas...

M. BILODEAU: Je crois que les deux vont de pair. Il faut régler le problème de la définition du salarié en même temps...

M. BELLEMARE: Dans le fond, tout votre problème des camionneurs, c'est un problème d'accréditation et de syndicalisation. Cela, c'est la base. Si vous avez des associations indépendantes, si vous avez des coopératives, si vous avez des artisans indépendants, ça, ce sont trois

mouvements différents qui se font la lutte, qui essaient de faire du maraudage et d'avoir le plus de membres possible. Cela ne crée pas l'union. Alors, là, c'est un problème. C'est ça qui est la base de tout le problème. Si ça, c'est réglé, pour le reste, vous allez vous entendre quant à l'artisan, quant au camionneur, quant à la régionalisation, quant à la localisation, quant au nombre de camionneurs, quant à la régie, ses devoirs, ses pouvoirs, son extension juridique, etc. Je pense que c'est ça. C'est un problème de syndicalisation, ni plus ni moins.

M. BILODEAU: Oui, c'est aussi un problème du nombre des camionneurs.

M. BELLEMARE: Bien non, le nombre vient parce que, si je m'explique bien, si l'association était réellement une association accréditée qui groupait tous les membres à l'échelle provinciale, elle, avec sa force de persuation, son unité syndicale accréditée, elle pourrait faire ses suggestions dans tel domaine et tel autre domaine. Et ça, ça réglerait le problème. Ne cherchez pas à aller à New York en passant par Rome. Moi, je pense que deux et deux ne font pas six. Cela fait quatre.

M. BILODEAU: Non, non.

M. PINARD: Est-ce que le ministre voudrait nous expliquer que cette union-là qui recevrait une accréditation serait en mesure d'établir ses propres contrôles?

M. BELLEMARE: Non, elle serait en mesure de demander au gouvernement, comme d'autres unions font, dans des mémoires, des suggestions et améliorent d'année en année tous leurs standards, leurs barèmes de vie et d'administration, de régie interne, les normes de travail, etc. Mais c'est au gouvernement à prendre ses responsabilités, d'accord. Mais le grand problème qu'ont actuellement les camionneurs, c'est un problème d'accréditation, de syndicalisation.

Ils sont répartis en trois ou quatre différentes sortes d'organisations, ils ont des coopératives, des associations indépendantes et, en vertu du code du travail, ils ne peuvent ni être reconnus ni accrédités. Et comme ils ne sont pas accrédités, ce sont des associations indépendantes qui font des ententes avec des compagnies, des conventions collectives qu'elles ont le droit de faire mais qui ont bien moins de force que s'il y avait une véritable accréditation par la CRT qui pourrait être effective.

M. BILODEAU: Evidemment, le problème pourrait aussi être résolu si, comme je le disais tantôt, un contrôle s'exerce par une régie quelconque, et là, la régie en question détermine des taux qui sont obligatoires pour les sous-entrepreneurs, pour tout le monde.

M. BELLEMARE: Cela ne réglerait pas, mon cher monsieur, même si la régie existe, le problème qui va exister dans chacune des localités, dans chacune des régions, quand il s'agira des camionneurs, artisans ou non? Est-ce qu'un artisan qui a deux camions peut être considéré comme un artisan? Moi, je dis non, parce que c'est un sous-entrepreneur. A ce moment-là...

M. BILODEAU: Là, il n'y a pas de taux.

M. BELLEMARE: II peut éviter le juste salaire, la politique, il s'en va à côté.

M. BILODEAU: C'est ça.

M. BELLEMARE: Et il n'y a personne qui le régit. Alors, le gars peut le faire travailler pour dix ou vingt cents. Et là, il est dans la rue. Il dit: Moi, ça va bien.

M. BILODEAU: En plein ça.

M. BELLEMARE: En plein ça. C'est certain que c'est ça.

M. BILODEAU: Pour terminer, je dirai qu'en ce qui concerne la politique du ministère de la Voirie, d'exiger des sous-entrepreneurs qu'au moins 75% du transport soit donné à des résidants, je pense que c'est ça, des résidants d'une région donnée, locaux, nous souhaitons, nous, que ce ne soit pas 75% de résidants mais 75% en volume de transport.

M. BELLEMARE: Vous demandiez 90%, c'est encore bien pire. 90-10.

M. BILODEAU: Je crois que, dans le mémoire que nous avions soumis...

M. BELLEMARE: Dans le mémoire, oui, mais dans le rapport de la commission Lippé, il y a ici 90-10.

M. BILODEAU: On devient plus raisonnable et on s'en tient à 75%.

M. BELLEMARE: Je suis content de vous entendre — surtout vous — dire que vous com-

mencez à être raisonnables. Il y a des petits à côté de vous qui crèvent.

M. BILODEAU: Alors, ce que nous voulons, à ce sujet, c'est que ce soit le volume de transport et non pas la personne du camionneur qui soit en cause.

Alors, ce sont nos demandes. S'il y a autre chose, je suis à votre disposition.

M. BELLEMARE: Merci, M. Bllodeau.

M. LE PRESIDENT: M. Paul-Etienne Ber-nier.

M. BERNIER: M. le Président, messieurs les membres, c'est le cas de vous dire que, quant à moi, comme procureur de l'Association nationale des camionneurs-artisans, je représente les oubliés du grand partage, les camionneurs-artisans. Les camionneurs-artisans, au point de vue de notre association, sont au nombre de 2,500 adhérents. J'ai bien souligné le mot « artisan ». J'en dirai un mot dans un instant. Comme le soulignait tout à l'heure l'honorable ministre du Travail, je pense qu'il est d'abord essentiel d'établir que le problème fondamental est celui de la représentation. En définitive, tant et aussi longtemps qu'on n'aura pas trouvé un mécanisme de représentation ou d'accréditation, aussi longtemps le problème subsistera.

Deuxièmement, je pense également qu'il ne faut pas confondre les artisans avec les camionneurs propriétaires d'un, deux ou trois véhicules et qui sont, en quelque sorte, des entrepreneurs en camionnage. Comme le soulignait l'honorable Pinard, tout à l'heure, ce sont deux notions juridiques distinctes qui, tant et aussi longtemps qu'elles ne seront pas clarifiées, seront l'objet de confusion, de problèmes et de litiges devant les différents organismes qui ont trait au problème crucial.

Pour nous, nous considérons que l'artisan est le propriétaire du camion qu'il opère lui-même et il en tire, en somme, sa principale source de revenus et de subsistance. Et cela, je crois, c'est absolument essentiel que ce soit maintenu en regard, évidemment à l'encontre de ce que prétendait mon confrère, parce que, lorsqu'on vient parler d'une personne qui aurait, par exemple, deux camions, cela implique, nécessairement, d'abord, un lien de salarié pour l'opération de son camion.

Deuxièmement, on ne peut pas parler de deux camions parce qu'il n'y a rien et aucun critère logique pour limiter à deux, ce qui voudrait dire qu'éventuellement une personne pourrait avoir 500 camions et, de ce fait, annihiler tous les effets quant aux camionneurs-artisans proprement dits. D'où je considère qu'il faut d'abord maintenir, et nous le demandons ardemment, cette définition particulière d'artisan et limiter le problème de ce côté-là. Quant aux autres qui ont plusieurs camions, qui impliquent deux camions et plus, je considère, pour ma part, qu'à ce moment-là, ce sont des entrepreneurs en transport, peu importe, évidemment, la relation juridique qui pourra s'établir à l'occasion de la signature d'un contrat quelconque.

M. BELLEMARE: Même pour un garatiste?

M. BERNIER: Même pour un garagiste qui veut effectuer avec son camion...

M. BELLEMARE : J'irais plus loin que cela, Me Bernier, j'irais jusqu'à dire que sont exclus des camionneurs-artisans ceux qui ne font pas leur principale occupation du camionnage, mais comme artisans. Il y a eu des médecins qui ont eu des camions. Il y a des garagistes qui ont des camions, qui empruntent de vieux camions et qui les envoient travailler ailleurs. L'artisan, lui, qui a seulement cela, dont la principale source de revenus est le camionnage, lui, il est mis de côté, parce que lui a plus d'influence, le gros, il est garagiste et il passe avant l'autre.

M. BERNIER: M. Bellemare, vous touchez exactement encore là l'essence du problème, de bien caractériser, spécifier l'artisan au point de vue de son caractère absolument exclusif. Parce qu'après tout, qui souffre, qui a souffert en fait, du problème? Il n'y a, actuellement, que les artisans, il ne faut pas se le cacher. Si nous avons connu des difficultés, c'est parce qu'on a précisément ignoré ce problème extrêmement humain. On a, dans quelques cas, considéré plutôt des dépenses d'argent au point de vue des routes, que considéré le problème humain des artisans. Et c'est sur cela, je pense, qu'il faut s'en tenir.

Donc, distinction essentielle entre le camionneur-artisan tel que je le définissais, définition complétée également par l'honorable ministre du Travail, en regard, évidemment, de celui qui a plusieurs camions, peu importe le nombre.

J'en viens maintenant à la question du droit du travail proprement dit. Le sens même de tout droit du travail, au Canada, au Québec et ailleurs, c'est la relation juridique du salarié, c'est la relation de dépendance, en fait, précisément. Or, je sais que l'honorable juge Lippé, dans son

rapport, a proposé un amendement au code du Travail. Je soumets respectueusement que cela ne peut pas se faire, ne peut pas se faire, parce que... Evidemment le signataire peut le faire. Mais quand je dis que cela ne peut pas se faire, cela ne réglera pas le problème, parce que nous resterons toujours avec cet élément essentiel de subordination. Evidemment, on prétendra, à l'occasion, qu'il n'existe pas et cela sera une source de conflit continu. Quant à nous, artisans, nous croyons qu'au point de vue d'abord des contrats du gouvernement, nous devons remercier le gouvernement...

M. BELLEMARE: Est-ce que vous permettez, pour ne pas aller trop vite...

M. BERNIER: Certainement.

M. BELLEMARE: C'est bien la recommandation 17, sur le code du travail, à l'article 1.

M. BERNIER: Oui. l'amendement à la définition du mot « salarié ».

M. BELLEMARE : La définition du mot « salarié », autrement, devrait être modifiée...

M. BERNIER: C'est ça.

M. BELLEMARE: ... pour permettre au camionneur propriétaire d'un ou de plus d'un camion d'être considéré comme un salarié et de pouvoir négocier des conventions de travail.

M. BERNIER: C'est exactement ça.

M. BELLEMARE: Vous êtes contre ça, que l'artisan, le salarié devrait être reconnu comme l'artisan qui a seulement un camion.

M. BERNIER: Oui, distinctement, évidemment, de toute autre relation, savoir celui qui est propriétaire d'un camion qu'il opère lui-même et qui en tire la source principale, évidemment, de son revenu, de son gagne-pain.

M. BOUDREAU: Maintenant, est-ce qu'il y a un contrôle pour le nombre de camionneurs-artisans qui peuvent se lancer dans ce métier-là? Je suppose, par exemple, qu'à un moment donné, il y a de l'ouvrage à tel ou tel endroit et que plusieurs autres camionneurs qui voient les camionneurs-artisans travailler s'achètent des camions et vont se lancer là-dedans eux aussi. Alors, une fois que l'ouvrage est fini, il y a trop de camionneurs-artisans.

M. BERNIER: Evidemment, c'est un problème qui ne peut pas être résolu dans un mois, même par une législation. C'est un problème qu'il s'agit d'examiner dans son ensemble comme le soulignait M. Bellemare tout à l'heure à M. Boudreau.

M. BELLEMARE: Me Bernier... M. BERNIER: Oui.

M. BELLEMARE: ...Est-ce que, dans le rapport qui est fait ici, le rapport Lippé, il n'est pas dit qu'il y a trop de camionneurs?

M. BERNIER: Oui, c'est exact. C'est un des problèmes...

M. BELLEMARE: Est-ce qu'il faudrait même limiter le nombre des artisans?

M. BERNIER: Oui, et je crois...

M. BELLEMARE: Vous êtes d'accord sur ça?

M. BERNIER: D'accord. J'aurai quelques suggestions à vous faire.

M. BELLEMARE: Il faudrait le limiter parce que, justement, à l'occasion de certains travaux qui se sont faits dans un comté ou dans une région particulière, tout le monde est devenu artisan et, le lendemain matin, quand les travaux ont été terminés, tout le monde est resté sur le carreau et ceux qui étaient véritablement propriétaires d'un camion ont eu à subir eux aussi le chômage et la dépression. Est-ce que. d'abord, dans le rapport du juge Lippé, il est bien spécifié que, dans une région, on devrait d'abord régionaliser le nombre des camions par région et le limiter?

M. BERNIER: Oui.

M. BELLEMARE: Il faudrait bien qu'on s'entende sur ça, pour que, si Jamais on vient à le limiter, on n'ait pas votre opposition.

M. BERNIER: Notre opposition. Vous aurez notre concours, M. le Ministre.

M. BELLEMARE: Merci, je suis content de vous l'entendre dire.

M. BERNIER: Je vous le garantis.

M. BELLEMARE: D'ailleurs c'est pour ça qu'on a enregistré ça ce matin.

M. PINARD: Vous voyez que le ministre est un bon conciliateur.

M. BERNIER: M. le Ministre, je comprends que vous me soulignez que c'est enregistré pour que je ne revienne pas avec le contraire. Que le gouvernement nous l'accorde, mais j'espère qu'il n'accordera pas seulement une partie, qu'il va accorder le tout de ce que je vais dire.

M. BELLEMARE: Je ne vous ai pas donné mon témoignage, je prends le vôtre.

M. BERNIER: C'est ça.

M. PINARD: Heureusement que vos revendications sont aussi enregistrées!

M. BERNIER: J'ai bien confiance au comité, parce que je sais qu'il a été constitué avec un souci d'examiner le problème et de tenter de trouver une solution. Alors, je disais donc qu'il importe, et pour ma part, en tout cas, je ne crois pas qu'il faille modifier le code du travail pour couvrir l'artisan. Ce n'est pas pour couvrir le mot « artisan » parce qu'à ce moment-là on restera avec un conflit de droit insoluble. Deuxième problème, quant à nous, il va sans dire qu'au point de vue des contrats du gouvernement, nous sommes en faveur du maintien de la cédule des justes salaires qui ne pose toutefois...

M. BELLEMARE: Faisons donc une remarque, M. Bernier, je m'excuse de vous interrompre souvent mais...

M. BERNIER: Il n'y a pas de quoi.

M. BELLEMARE : ...commençons donc à utiliser l'expression exacte. Cela s'appelle aujourd'hui les tableaux des normes de travail. Cela, c'est changé, parce que l'affaire des justes salaires, ça sonnait mal. On a décidé que les camionneurs méritaient plus que ça. On a dit: On va établir pour eux comme pour d'autres des normes et on a appelé ça le tableau des normes du travail.

M. BERNIER: Alors, au point de vue du tableau des normes du travail, nous sommes favorables au maintien du système actuel quant aux artisans et, pour ce qui a trait aux contrats du gouvernement, il y a seulement un problème immédiat qui nous touche et c'est le suivant.

Le rapport Lippé souligne d'ailleurs avec raison une situation absolument intolérable qui existe au point de vue du tonnage, si je peux m'exprimer ainsi, des camions qui circulent sur les routes de la province et plus particulièrement, évidemment vous avez l'arrêté en conseil 1045. S'il fallait appliquer intégralement l'arrêté 1045, nous en arriverions actuellement à des injustices flagrantes au point de vue de la rémunération des artisans.

M. BELLEMARE: Ce fut passé le 27 mai 1964.

M. BERNIER: Oui, c'est ça. Mais c'est l'arrêté en conseil actuel.

M. BELLEMARE: Il a été amendé le 24 décembre 1964. Le 2484 a été amendé de nouveau le 9 avril 1965 par 783. Les amendements ont été demandés par des gens bien intéressés, bien intéressants, qui ont fait déroger un peu le projet initial de l'arrêté ministériel et ont réussi à passer à côté. C'est ça que vous voulez dire.

M. BERNIER: Oui. Sauf, M. le Ministre, que, au point de vue du tonnage proprement dit, évidemment, c'est l'arrêté du 1045 en fait qui est demeuré tel quel au point de vue du tonnage.

M. BELLEMARE: Les autres amendements qui sont venus ont été faits pour passer à côté un peu.

M. BERNIER: Alors ce que je veux dire par là, c'est que si on l'appliquait, ces taux...

M. PINARD: Ce qui s'est produit à ce moment-là, pour justifier l'amendement de l'arrêté ministériel original, c'est qu'il y avait quand même toute une industrie de fabrication de camions à protéger. Il y avait la fabrique de camions Sicard à Ste-Thérèse, qui avait une commande pour plusieurs millions de dollars, et qui, à cause de l'application intégrale de l'arrêté ministériel proposé, aurait été obligée de fermer ses portes et de refiler les commandes à une entreprise compétitrice. Alors à ce moment-là, le gouvernement était pris devant des problèmes quasi insurmontables, évidemment des camionneurs-artisans d'une part et d'autre part les demandes justifiées, légitimes à mon sens, des fabricants de camions, des manufacturiers de camions. C'est quand même une entreprise canadienne-française florissante qu'il fallait nécessairement protéger. Mais on a imposé un moratoire.

M. BELLEMARE: Le bill 783 lui, était pour augmenter de 5,000 livres sur chaque essieu, sur un essieu et de diminuer sur deux essieux.

M. PINARD: C'étaient des camions fabriqués au Québec à ce moment-là et les fabricants et les acheteurs demandaient une protection. Nous avons dit: Très bien, pour ne pas vous placer dans des difficultés financières considérables. Mais nous allons vous proposer un moratoire et, à partir de telle date, il ne s'en fabriquerait plus au Québec, nous demanderons le même statut qu'en Ontario, de façon à ne pas surcharger les routes de la province qui, dans la plupart des cas, ne sont pas capables de supporter les charges qu'on leur impose.

M. BELLEMARE: Cela, c'est dans le rapport Lippé.

M. PINARD: Alors, il faut être juste là...

M. BELLEMARE: Une surcharge excessive à tous les camionneurs. Quand ils arrivent aux balances, il y a un jeu qui se fait là.

M. PINARD: On a fait bien des recommandations mais, à ce moment, il y a eu un manque de contrôle. Je ne veux pas imputer de responsabilité à personne aujourd'hui. J'ai été ministre de la Voirie pendant six ans, et j'ai vécu ces problèmes de façon très aiguë. Nous avons essayé de régler les situations avec les moyens du bord, de la façon la plus satisfaisante et la plus juste possible, tout en se dégageant de ce fameux patronage politique dont le ministère a toujours été imprégné et moi, je n'ai aucune objection à le dire et à l'admettre: S'il y a un ministère qui a été imprégné de patronage, c'est bien celui du ministère de la Voirie, depuis que les gouvernements se sont succédé; il y a quand même eu un coup de barre qui a été donné à partir de 1960 et aujourd'hui nous en avons la preuve, c'est qu'il y a eu une commission Lippé qui a été formée pour étudier tout ce problème. Les recommandations sont claires et nettes. Il s'agit d'être d'accord sur certaines ou sur l'ensemble des recommandations et je pense que tout le monde devra avoir assez ce souci de justice, pour admettre qu'il s'est fait quelque chose de valable et que si nous sommes aujourd'hui devant le comité des Régies industrielles, eh bien, c'est que quelqu'un s'est aperçu qu'il y avait quelque chose d'irrégulier qui se passait dans la province de Québec et que ça devait cesser. Alors je ne voudrais faire le procès de personne. Je ne voudrais pas non plus que quelqu'un fasse mon procès ou fasse le procès de l'administration que j'ai dirigée pendant six ans.

M. BELLEMARE: Ce n'est, M. le Président, aucune imputation de motif ni de blâme que j'ai voulu faire, mais j'ai pensé que le témoignage qu'apportait ce matin M. Bernier, en vertu de l'arrêté ministériel 1045, était un témoignage qui, justement, va venir rencontrer son premier argument, celui du camionneur-artisan, à cause de la surcharge qui est tolérée et qui est, actuellement, une cause de non-emploi dans biens des cas. Et ça, c'est l'argument qu'est en train de fournir M. Bernier, je pense. Il va finir par dire que, dans le rapport Lippé, il a été constaté qu'il y a des gens qui arrivent aux balances, qui font chanter les préposés à la balance et qui continuent à surcharger les camions, ce qui enlève du travail à d'énormes quantités de camionneurs qui pourraient travailler si la réglementation concernant la pesanteur était suivie et appliquée.

M. PINARD: Je pense que c'est une question de taux qui se pose là. Si les camionneurs ont fait des surcharges, c'est parce qu'ils se sont considérés mal payés et ils ont voulu gagner la différence en surchargeant leurs camions. C'est le problème fondamental. A ce moment-là, c'est un problème de surveillance et de contrôle et un problème de taux.

M. BOUDREAU: A la fin, personne n'était gagnant avec cela. Ceux qui surchargeaient leurs camions voyaient leur camion périr plus vite que celui des autres.

M. PINARD: L'usure n'est pas considérable.

M. BELLEMARE: Le ministère de la Voirie a été obligé de dépenser $10 millions par année pour la réparation de nos routes. Les gens sont obligés de payer cela en taxes. M. Bernier...

M. BERNIER: Alors, je n'ai pas évidemment l'intention de discuter tous les faits qui ont été apportés devant la commission Lippé. Je voulais purement et simplement, quant à moi, référer précisément à cette question que l'honorable juge Lippé a soulignée, à savoir qu'il faudrait établir des charges minimales suivant le genre de camion et que la loi soit respectée. Je dis ceci et je demande au gouvernement de ne pas appliquer intégralement, pour le moment, l'arrêté en conseil 1045. D'ailleurs l'honorable juge Lippé dit qu'il ne devrait être appliqué que lorsqu'il aura été revisé et, deuxièmement, quand on aura considéré le taux juste et équitable proportionnel à la tâche. En résumé, c'est cela.

Je dis au gouvernement que cette charge qui devrait être normale et qui doit être établie, nos gens entendent la respecter en autant, évi-

demment, qu'ils obtiendront justice sur l'ensemble de leurs problèmes. Actuellement, si on prend des charges fantastiques, c'est pour avoir un revenu à peine raisonnable. Avant de le mettre en vigueur en même temps que l'appliquer, il faudra nécessairement que le gouvernement — et je le demande encore ici - revise les taux de la cédule des justes salaires. Et pour notre part, nous considérons en fait que ce devrait être au moins, pour un revenu à peine vital, en fait dans l'état actuel de l'économie, de $0.30 le premier mille et de $0.10 pour les milles subséquents. C'est au point de vue de l'ordonnance. Quant au point de vue essentiel de la représentation...

M. BELLEMARE: Vous dites $0.30, au lieu d'être $0.20 et $0.05 ou $0.20 et $0.06?

M. BERNIER: C'est ça. Au lieu d'être $0.20 et $0.05 ou $0.20 et $0.06, comme vous dites, suivant...

M. BELLEMARE: Ce serait combien? J'ai mal entendu.

M. BERNIER: $0.30 le premier mille et $0.10 les milles subséquents. Quant au problème essentiel...

M. BELLEMARE: Me permettez-vous, M. Bernier — parce que...

M. BERNIER: Certainement.

M. BELLEMARE: ... vous avez touché un point extrêmement capital dans la discussion quant au tarif — de revenir à l'accusation que semblait vouloir accepter pour lui l'ancien ministre de la Voirie, M. Pinard? Ce n'est pas l'ancien ministre dont il était question quand on parlait de patronage. J'espère bien que lui non plus ne parlait d'aucun membre de ce comité et d'aucun député. Parce que dans le rapport Lippé, il y a une page pour le patronage politique, page 46. Il ne donne pas la responsabilité du patronage politique rien qu'au gouvernement, ni à ceux qui étaient là ni à ceux qui sont ici. Il a dit que les associations professionnelles de camionneurs aussi, font du patronage entre elles.

M. PINARD: C'est global.

M. BELLEMARE : C'est bien important que cela soit dit. Le patronage a bien des échelons. Cela peut se faire du côté des camionneurs comme cela peut se faire d'autres côtés. Malgré que le mot commence à être tabou.

M. PINARD: Non, mais est-ce que le ministre me permettrait? C'est précisément pourquoi j'ai fait l'intervention tantôt. C'est que m'étant aperçu que seul le gouvernement en place à l'époque avait à supporter tous les péchés d'Israël, dans ce domaine, alors que je savais pertinemment bien que du patronage s'exerçait complètement en dehors des députés et du gouvernement et peut-être de façon plus considérable qu'au gouvernement, j'ai décidé de recommander au gouvernement, àl'époque de créer la commission Lippé pour aller au fond des choses une fois pour toutes et pour bien déraciner le mal, si mal il y avait.

M. BELLEMARE: Le rapport Lippé dit: « En fait, la principale difficulté de quelques-unes des associations, depuis un certain nombre d'années et jusqu'à maintenant, a été leur étroite intégration des formes de patronage dont le comité ne peut faire autrement que de les déplorer et en condamner l'extension. Tant que certaines associations professionnelles de camionneurs se soumettront aux impératifs de patronage politique, elles ne pourront éviter d'être considérées comme suspectes par un certain nombre de camionneurs ». Cela, c'est bon que ce soit dit aussi. C'est parce qu'on est quelquefois porté à dire comme — je ne reproche pas à M. Dufour d'avoir fait un grand discours dernièrement — mais il a dit dans un journal, qu'il se faisait du patronage. Je pense bien que M. Dufour est un homme qui va nous rendre justice. Il n'y a pas seulement d'un côté qu'il se faisait du patronage. Cela peut aussi se faire du côté des camionneurs. Comme je l'ai déjà dit I M. Dufour, il y a aussi parfois des bobos qu'il faut aller chercher loin dans votre association, avant de trouver des causes et des effets.

M. BERNIER: C'est précisément, M. le Ministre du Travail, le point suivant auquel je voulais en arriver. Je n'ai pas l'intention de parler évidemment du patronage, au sens politique et habituel du mot. D'aucune façon. D'autant plus que j'en serais absolument incapable parce que j'ignore les faits.

M. BELLEMARE: Est-ce que le mot « patronage » veut dire protection?

M. BERNIER: Voici, J'y arrive dans un instant. Ce qui arrive, c'est que cela vient évidemment de certains de nos membres ou des gens qui voudraient l'être. Je parle de ce fait-là et j'ignore les autres, parce que je ne suis pas au courant. Il arrive qu'éventuellement des gens délaissent notre association,

qui est pourtant tout de même représentative de 2,500 membres, et c'est là qu'on touchera le problème de l'accréditation de la représentation pour, à un moment donné, entre eux, décider qu'avec les contrats du gouvernement dans tel comté ou dans tel endroit, ils vont s'organiser un petit syndicat et puis, évidemment, ils vont faire de l'argent.

Cela est condamnable en fait. C'est condamnable, parce que l'artisan au sens où on l'a défini, c'est celui qui veut vivre précisément de son camion et c'est lui qu'il importe de protéger. Alors si par patronage, c'est cela qu'on entend, c'est vrai que cela a existé, c'est vrai que ça existe encore. Cela ne cessera d'exister que le jour où nous aurons trouvé un mécanisme de représentation qui vraiment permettra aux véritables camionneurs-artisans de faire valoir tous leurs droits tant auprès du gouvernement qu'au point de vue des négociations dans le secteur privé. On arrive au problème essentiel qui est après tout celui de l'accréditation. Je peux vous dire que ces gens-là sont venus me consulter hier après-midi. Alors cela ne m'a pas donné grand temps pour examiner tout le problème dans son ensemble. Cependant, je me suis demandé et je le soumets au comité, s'il n'y aura pas possibilité d'envisager au point de vue de la représentation la solution suivante — je reviens à ma définition d'abord, camionneurs-artisans, ceux tels que définis antérieurement.

Deuxièmement, en ce qui concerne l'enregistrement provincial, émission de plaques particulières aux camionneurs-artisans. Peu importe la lettre, qu'ils aient une lettre qui leur appartienne en fait.

Troisièmement, une représentation par l'entremise, ici je parle de syndicat professionnel. On pourrait évidemment discuter des coopératives comme le fait l'honorable Juge Lippé, mais pour le moment je crois que ce n'est pas nécessaire.

Quatrièmement, amendement à la Loi des syndicats professionnels, parce que c'est purement et simplement une loi concernant la représentation des groupements de syndicalistes, c'est-à-dire la défense des intérêts socio-économiques et moraux etc., de façon que les artisans puissent se grouper en syndicat. Se grouper en syndicat sur la base régionale, je suis d'accord, tel que suggéré par l'honorable juge Lippé dans son rapport, régionale au sens des régions établies par le gouvernement en fait. Et autant de syndicats qu'il y a de régions, couronner le tout par une fédération de ces différents syndicats. Comment maintenant les reconnaître? Evidemment par l'émission d'une plaque d'enregistrement matricule particulière aux artisans. Il faudrait que le ministère du Travail trouve à ce moment-là un mécanisme, pour voir si le syndicat en question est vraiment représentatif de la majorité des camionneurs-artisans de telle région. Ce n'est qu'au moment où le syndicat représenterait vraiment la majorité absolue des camionneurs-artisans d'une région, qu'il pourrait en quelque sorte détenir une incorporation au sens de la loi et partant une représentation.

Et vous avez ici l'avantage de permettre, par un mécanisme de délai et d'ouverture, la liberté. C'est-à-dire que si, à un moment donné, les camionneurs-artisans ne sont plus satisfaits de tel syndicat régional, ils pourraient faire appel au gouvernement dans des délais qu'il s'agirait de déterminer — comme je vous l'ai dit, je n'ai pu envisager le problème sous tous ses angles — de façon à remplacer l'ancienne association comme groupe incorporé et en quelque sorte mandataire de tous les camionneurs-artisans de la région donnée.

M. BELLEMARE: M. Bernier, vous avez dans votre argumentation, développé un point au sujet de la Loi des syndicats professionnels. La Loi des syndicats professionnels, dans son premier article, dit qu'au moins quinze membres du même métier, faisant la même occupation, peuvent, eux, s'organiser en syndicat professionnel. Et dans cette Loi des syndicats professionnels, vous retrouvez dans les pouvoirs que détient un syndicat professionnel organisé, en vertu du chapitre 146, tous ces pouvoirs d'actions. Et en particulier, au sous-paragraphe 9 de l'article 9, vous voyez: « Passer avec tous les autres syndicats, avec toutes les autres sociétés, avec toute autre entreprise ou toute autre personne des contrats ou même des conventions qui peuvent être des conventions collectives au point de vue normatif ou au point de vue salarial ». Cela vous est donné en vertu de la Loi des syndicats professionnels qui existe. Plusieurs se sont groupés en vertu de ces syndicats professionnels et sont actuellement des associations. Mais là où je ne vous saisis pas, c'est dans les pouvoirs additionnels — des pouvoirs ancillaires, ce sont des grands mots, je ne connais pas ça — qui donneraient plus de force à la Loi des syndicats professionnels.

M. BERNIER: En somme, M. le Ministre, qu'est-ce que la Loi des syndicats professionnels, surtout depuis qu'on l'a amputée de la troisième partie? C'est tout simplement l'établissement, au sein d'un groupe professionnel, d'une corporation délimitée. Pas une corpora-

tion au sens du barreau, du médecin, ou d'un autre. C'est l'organisation d'un groupe qui veut prendre la défense de ses intérêts. Donc l'un des moyens est, suivant le paragraphe 9, la négociation de convention collective. Ce n'est pas nécessairement le même, même en vertu de la loi actuelle, mais ça peut en être un et ça peut en être un qui ne nuirait en aucune façon à la suggestion que je vous fais, parce qu'un camionneur-artisan pourra éventuellement négocier une entente, passer une entente avec une entreprise pour faire le camionnage de cette entreprise. Cela peut se faire et ce n'est qu'un point du problème. Parce que, remarquons bien, comme je l'ai dit tout à l'heure, je n'ai touché jusqu'ici qu'un seul des deux aspects au point de vue de notre association. Il y a évidemment le fait de la représentation au point de vue du gouvernement, en regard des contrats. Je parle précisément des normes de salaire.

M. CHOQUETTE: M. Bernier, est-ce que vous me permettez de vous interrompre?

M. BERNIER: Oui.

M. CHOQUETTE: A la suite de la question qui vous a été posée par le ministre du Travail, je pense que le ministre voulait souligner la difficulté pour votre association ou vos gens de vous intégrer parfaitement à l'esprit de la Loi des syndicats professionnels. J'ai compris la question du ministre dans ce sens et c'est sûr que la question se pose. Mais je veux vous signaler tout simplement l'exemple suivant. Prenez les barbiers-coiffeurs qui sont, soit groupés en syndicats professionnels ou autrement, ou enfin qui sont sous un décret, on règlemente non seulement leurs conditions de travail, mais les conventions collectives de barbiers-coiffeurs règlementent les tarifs qu'ils chargent au public, leurs heures de travail. C'est vous dire qu'actuellement, on voit une espèce de...

M. BELLEMARE: C'est en vertu de la Loi des conventions collectives qui veut que, par régions, on puisse établir un décret qui se négocie entre les parties contractantes. Ce n'est pas pareil, ça.

M. CHOQUETTE; Non...

M. BELLEMARE: Là, pour nous, c'est ce qui reflète et de bon droit, c'est d'avoir une représentation provinciale qui serait, en vertu de la loi des syndicats professionnels, par régions.

M. CHOQUETTE: Oui. Je voulais simplement signaler que, malgré tout, on est un peu... En fait, dans le passé, les conventions collectives se sont appliquées seulement aux conditions de travail.

M. BELLEMARE: Cela ne veut pas dire que les barbiers ne s'arrachent pas les cheveux quand même dans les décrets.

M. CHOQUETTE: Non! Parfois on s'arrache les cheveux avec vous, à part cela.

M. BELLEMARE: Ah, oui!

M. CHOQUETTE: Je voulais signaler simplement que ce que disait M. Bernier, était plein de sens, et dans ce sens qu'il ne fallait pas rester limité aux simples conditions de travail, qu'on pouvait aller dans d'autres conditions qui concernent les tarifs et les heures...

M. BELLEMARE: Ils ont le droit, en vertu du syndicat professionnel.

M. CHOQUETTE: Oui.

M. BELLEMARE: Ils ont le droit de faire tout cela, dans l'article 9. Ils ont le droit d'y voir pour leurs membres, imposer un certain tarif par régions, cela c'est en vertu de l'article 9, et tous les sous-articles: « Etablir et administrer des caisses spéciales de régime... Affecter une partie de leurs ressources à la création d'habitations... Créer et administrer des bureaux de renseignements... Créer, administrer et subventionner des oeuvres professionnelles... Subventionner et aider les sociétés coopératives... Acheter pour les revendre, prêter ou répartir entre les divers membres, tous les objets nécessaires... Prêter leur entremise pour la vente de leurs produits... Déposer leur marque... Passer avec tous les autres syndicats, sociétés, entreprises des conventions collectives... »

M. CHOQUETTE: Oui, je remercie le ministre de me signaler cela. Je lui signale aussi la cause de Steinberg, récemment, où je crois que la cour Suprême a décidé que le décret ou la convention collective pouvait réglementer...

M. BELLEMARE: Ah, là ce n'est pas pareil! M. CHOQUETTE: ... d'autres...

M. BELLEMARE: Là, c'est en vertu... Ils ont attaqué la juridiction de l'application d'un décret provincial...

M. CHOQUETTE: Oui.

M. BELLEMARE: Nous dire qu'ils avaient outrepassé... mais en vertu, pas de la convention du syndicat professionnel, mais en vertu d'un décret provincial qui vient d'une loi qu'on appelle la convention collective. Ce n'est pas pareil. Il y a une grosse différence.

M. CHOQUETTE: Mais je pense que c'est dans cet esprit-là que M. Bernier faisait les observations...

M. BERNIER: Si vous me permettez, je ne voudrais pas prendre plus de temps qu'il en faut pour ma part, étant donné qu'il y en a d'autres qui veulent parler. C'est évident, qu'actuellement...

M. BELLEMARE: Pourtant c'est vous qui avez le problème.

M. BERNIER: Pardon?

M. BELLEMARE : C est vous qui avez le plus gros problème.

M. BERNIER: Oui, je ne voudrais pas être accusé de prendre tout le temps, parce que je sais qu'il y en a d'autres qui voudraient parler. Je voudrais leur donner la chance. C'est évident qu'actuellement lorsque nous incorporons un syndicat en vertu de la loi des syndicats professionnels, il y a tous les pouvoirs qui sont prévus à la loi. Cela ne fait aucun doute. Mais, je cherchais un mécanisme d'accréditation ou de représentation. Et c'est dans ce sens que je crois que la loi des syndicats professionnels devrait être amendée pour permettre, dans le cas des camionneurs-artisans, une incorporation qui équivaudrait en même temps à une accréditation, c'est-à-dire à une représentation au sens de la loi basée sur le caractère représentatif majoritaire dans une des régions.

M. BELLEMARE: C'est là le problème, c'est d'obtenir dans votre requête que le syndicat professionnel qui sera régionalisé dans cette région-là, soit, lui, le seul.

M. BERNIER: C'est le porte-parole.

M. BELLEMARE: Là, par le fait même, vous empêchez tous les autres...

M. BERNIER: Momentanément, parce qu'il faut penser, évidemment, qu'il est possible, M. le Ministre, que les...

M. BELLEMARE: Oui.

M. BERNIER: ... gens ne soient pas satisfaits. Nous sommes épris de l'esprit de liberté.

M. BELLEMARE: C'est assez évident, puisque vous voulez avoir ça tout seul en partant.

M. BERNIER: Non, nous le demandons en autant que nous serons représentatifs des camionneurs-artisans dans une région, si on appliquait la loi telle quelle.

M. BELLEMARE: Qui va établir la prépondérance?

M. BERNIER: Bien, c'est précisément cela... M. BELLEMARE: Nous?

M. BERNIER: ... c'est là que j'ai parlé d'une enquête par le ministère du Travail, ou un autre organisme, d'accord, au point de vue de la représentation majoritaire parmi les détenteurs de plaques d'immatriculation portant, disons, la lettre A, pour artisan.

M. BELLEMARE: M. Bernier, vous avez trop d'expérience probablement en relations de travail pour savoir comment cela s'organise un syndicat. Moi, je signe d'un côté et le lendemain matin, mon ami vient me voir et je signe de l'autre côté. Mon affaire va bien. Mais, quand on arrive pour établir la prépondérance, on dit: Comment se fait-il que vous avez signé là? Qui est-ce qui l'a? Alors, c'est nous qui sommes obligés de décider.

M. BERNIER: On fait un vote. Or, de toute façon, comme je vous dit, j'ai jonglé à cela depuis hier après-midi, seulement, mais je crois que nous respecterions de la sorte la liberté, M. le Ministre, parce qu'en prévoyant une représentation pour une durée déterminée disons, un an ou deux ans, peu importe, s'ils ne sont pas satisfaits, le même mécanisme pourrait s'appliquer en intervenant à ce moment-là.

M. BELLEMARE: Cela veut dire que ça aurait la valeur d'un décret pour une certaine période de...

M. BERNIER: C'est cela.

M. BELLEMARE: Mais, je pense que c'est une formule qui serait assez difficile d'application... Il y aurait peut-être une autre solution qui serait plus...

M. BERNIER: Peut-être. Je n'ai pas pensé à avoir la seule solution possible. J'ai cru devoir vous l'exposer. Maintenant, au point de vue des camionneurs-artisans, comme je le disais tout à l'heure, il ne faut pas oublier qu'il y a deux choses: il y a la question de la représentation de ces gens-là à l'endroit des contrats publics, des contrats du gouvernement en suivant, évidemment, les normes du juste salaire, mais il y a aussi leur représentation à l'égard des employeurs qui les emploient de temps à autre. C'est là que notre association ou une association dûment accréditée par le moyen que je vous soumettais tout à l'heure, ou encore par un meilleur, comme le soulignait tout à l'heure M. Bellemare, permettrait également d'atteindre cet autre secteur après avoir atteint le public, le gouvernemental, d'atteindre le secteur privé. Comment? Il n'y a rien qui ne nous en empêcherait, parce que nous serions incorporés en vertu de la Loi des syndicats professionnels et avec tous les pouvoirs qui sont là, et également avec le pouvoir éventuellement de négocier avec un ou des employeurs certaines conventions collectives, et nous retournons à l'honorable juge Lippé sur ce point-là, et de procéder dès lors par la voie de l'expansion en vertu de la Loi de la convention collective, c'est-à-dire du décret, toujours, autant que possible, sur la base régionale. Je pense que ce sont là les quelques représentations que je désirais vous faire valoir au point de vue de mes clients. Je vous remercie évidemment...

M. BELLEMARE: M. Bernier, je ne voudrais pas que vous repreniez votre siège sans me donner une information supplémentaire. Dans le rapport Lippé, il y a une recommandation particulière sur 75-25, 90-10. J'aimerais bien savoir à quelle adresse vous vous logez?

M. BERNIER: Moi, je suis encore au 75-25. M. BELLEMARE: Merci, monsieur.

M. BROWN: Mr. Bernier, I have a couple of questions that I would like to ask relative to this matter of artisans. We will say that in a region you have some people with one truck and some with two trucks. Do they have to belong to two different organizations?

M. BERNIER: Oui, nécessairement, parce que, pour moi, l'essence même du problème se greffe exclusivement sur l'artisan. Je ne dis pas par là que les autres n'ont pas de problèmes, remarquez bien, je ne dis pas que ceux qui opèrent deux, trois, cinq ou dix camions n'ont pas de problèmes mais je dis, par exemple, que tant et aussi longtemps que nous allons confondre l'artisan, au sens que je le définissais tout à l'heure, avec l'autre camionneur propriétaire de plus d'un camion ou de plusieurs camions, nous resterons toujours avec des problèmes quasi insolubles en fait.

M. BROWN: Well, now, Mr. Bernier, in the case of nine brothers who live in the same village or town, who might possibly live close together and park their trucks all in the same yard, will they be artisans or would they be in the other association?

M. BERNIER: Cela dépendra exclusivement si nous définissons l'artisan celui qui est propriétaire de son camion, qui l'opère lui-même et qui en tire sa principale source de revenu, et que c'est nécessairement une seule personne à la fois. Si les camions sont exploités par les neuf frères, comme vous disiez tout à l'heure, ça ne peut plus être à ce moment-là des artisans.

M. BROWN: Well now, you say principal source of revenue, we will say, for instance, that I have one man that owns an hotel, who is losing money and I have a farmer who is also losing money and each has a truck and each claims he is an artisan because he is making its principal source of revenue from having the hotel or the farm. In the case of Mr. A who owns the hotel, he is losing money or breaking even, in the case of the farmer, we will say, all of a sudden, he gets a sale of 30 cattle and now does he discontinue to be an artisan the day he sells the cattle?

M. BERNIER: Je dois vous dire là-dessus, évidemment, que, quand je mettais comme un des éléments essentiels de la définition du mot « artisan » qu'il en tirait ou que c'en était la source principale de son revenu, je ne me suis pas arrêté définitivement à cette expression.

Je crois que ce devrait être beaucoup plus une question d'occupation, parce que, pour rejoindre les deux autres éléments, son camion, il l'opère, et c'est lui qui doit l'opérer pour être artisan.

M. BELLEMARE : II y a une autre raison aussi, M. Bernier, c'est qu'habituellement, dans un cas comme celui que vient de signaler l'honorable député de Brome, Partisan n'est pas incorporé. En partant de là, s'ils sont neuf, il y a certainement une incorporation, c'est quelque chose.

M. BERNIER: II y a une société quelconque, nominale ou autrement.

M. BELLEMARE: Ce n'est pas le but que vous recherchez. L'artisan, lui, gagne sa vie, fait son impôt lui-même et n'a pas besoin d'appartenir à une corporation, à une incorporation ou à une société. Quand ils sont 9, ils sont incorporés, ils ont chacun leur propre camion.

M. BERNIER: Autrement dit...

M. BELLEMARE; Et à part cela, c'est bien rare qu'il mène son camion lui-même.

M. BERNIER: Au lieu de source principale de revenus, il serait possible de dire, par exemple, que ce serait la principale occupation...

M. BROWN: May I ask another question? We would say it does'nt matter whether the fellow owns a hotel, a store or whatever it is. It is his principal source of income. Who makes the decision within the region? Who makes the decision when this first who qualifies to be an artisan ceases to be one due to the decrease or the decrease of the different resources he might have? Because there are very few artisans and I know of, that don't have a sideline.

M. BERNIER: C'est précisément ce que je soulignais tout à l'heure à savoir que quand on a dit la principale source de revenus, ce n'est peut-être pas tout à fait exact. Il faudrait trouver beaucoup plus l'occupation d'un camionneur que la question du revenu proprement dit.

M. BROWN: Than, would you consider that anybody with a sideline cannot be an artisan?

M. BERNIER: Pas nécessairement, parce qu'en fait il n'est pas pour en être décidé à leur mérite. Remarquez bien, M. le Député, que je serais bien heureux de vous arriver avec une solution exhaustive qui ne créerait plus de problème mais je pense évidemment que c'est une utopie. Enfin, quels que soient les problèmes, qu'on les résolve, que le gouvernement les résolve. Il fait de son mieux, mais on trouve toujours certaines exceptions particulières ou des amendements aux lois. Ce cas, il faudrait l'étudier séparément, c'est difficile de...

M. BELLEMARE: C'est évidemment pour cela qu'on est ici ce matin. S'il n'y avait pas de problème, il n'y aurait pas de comité. Il y a une autre raison. Quand il y aura une association professionnelle, en vertu des pouvoirs qui lui sont confiés, même s'ils ne sont pas assez forts, on pourra leur en ajouter, ils auront le droit de faire une réglementation de régie interne et de voir à faire des conventions qui seront suivies dans l'ordre avec des intéressés qui prévoiront ces cas particuliers.

M. BERNIER: Alors, merci, messieurs.

M. PLAMONDON; Devant l'association des propriétaires, en fait des artisans, est-ce qu'on doit conclure que vos 2,500 membres ne possèdent qu'un seul camion?

M. BERNIER: Voici, malheureusement, je vais être bien franc, vu l'état actuel de la situation, vu l'état que nous avons cru devoir résoudre, à savoir la protection de ces petites gens ici et là dans la province, nous n'avons pas, pour le moment, négligé celui qui était propriétaire d'une couple de camions. Nous les avons pris, en toute honnêteté, on vous le dit, même les garagistes, mais par exemple, nous avons vu à ce que le médecin et le garagiste ne se servent de leur camion que quand les autres ont été utilisés.

M. BELLEMARE: Bravo!

M. BERNIER: Alors éventuellement, nous voulons une association d'artisans, c'est précisément au point de vue du transport le groupe social le plus ignoré et le plus maltraité. Alors c'est ça qu'on veut, on veut le protéger et on est prêt à coopérer avec vous pour vous faire des suggestions.

M. PLAMONDON: Si je comprends bien, vous n'avez pas de membre qui soit propriétaire de flotte, d'une vingtaine de camions.

M. BERNIER: Non.

M. PLAMONDON: Quelle peut être la proportion des membres qui ne posséderaient qu'un seul camion?

M. BERNIER: C'est la très grande proportion qui ne possèdent qu'un seul camion, la très très grande proportion. Au moins les trois quarts et beaucoup plus, même, me dit-on.

M. PLAMONDON: M. Bernier, votre intervention est terminée, est-ce que M. Dufour le président, voudrait faire quelques commentaires? Mais nous reconnaîtrons à l'avance que votre avocat vous a brillamment défendus.

M. DUFOUR: M. le Président, MM. les Ministres et Députés, il me fait plaisir d'être ici aujourd'hui pour représenter le groupe de camionneurs, à titre de président provincial. Voila déjà deux ans que j'ai l'occasion d'être en avant pour battre la marche. Je n'ai pas besoin de vous mettre au courant qu'il a coûté beaucoup de sueurs et beaucoup de démarches pour essayer de se rendre où nous sommes actuellement, avec 26 comtés d'enregistrés au Secrétariat de la province.

Un problème que nous avons vécu et assez grave aussi, c'est qu'à titre de camionneurs-artisans, nous ne sommes pas des avocats, des officiers de loi, vu que les fonds sont assez restreints quand on va chercher ça dans la poche d'un camionneur qui n'en a pas déjà suffisamment pour faire vivre sa famille, nous nous sommes privés assez souvent des services d'hommes de loi. Mais, rendus au stade où nous sommes, nous avons été obligés de nous en procurer parce que nous étions rendus aux dernières étapes du mouvement, à savoir si nous étions à réussir quelque chose, oui ou non.

Je tiendrais à remercier plus particulièrement, M. Mailloux, d'avoir bien voulu épauler notre cause, parce que dans l'ensemble général, J'ai fait plusieurs démarches auprès de plusieurs députés et ministres, mais pas trop intéressés à notre bateau, parce que cela fait plusieurs fois que ce bateau-là coule en plein océan. Alors M. Mailloux a décidé d'épauler notre cause et nous sommes convaincus que c'est du fait qu'il est un travailleur lui-même. Il a vécu ce que c'est que de charger de la pâte à papier dans un camion et dans un bateau, c'est le cabotage, si l'on peut dire.

Je remercie d'ailleurs M. Bellemare d'avoir bien voulu accepter la proposition de M. Mailloux. Ensuite pour ne pas être trop long, Je vais essayer de vous expliquer de quelle manière on procède dans l'ensemble général du mouvement.

Je sais qu'il y a plusieurs problèmes qui n'ont pas été très très avantageux dans l'idée de gens assez intéressés, comme les députés ou les autorités. Mais quand on n'est pas un homme de loi et qu'on essaie de se naviguer dans une province, je vous assure qu'à plusieurs reprises, il aurait fallu que je sois avocat moi-même pour être capable de déterminer les causes avec le plus de légalité possible. Nous admettons avoir fait des erreurs. Soyez-en assurés. Mais, par contre, nous avons tenté toujours dans le milieu, d'avoir le plus d'artisans possible. Mais, quand on arrive dans un comté où il y a 112 camionneurs et plus précisément dans le comté de Charlevoix, où je suis né, nous avons pris tous les camionneurs à la demande de notre député. Le gros problème du mouvement, actuellement, dans la province de Québec, si on revient...

M. BELLEMARE: Vous avez pris les camionneurs pour travailler, à la demande de votre député?

M. DUFOUR: A la demande de notre député, lorsqu'il a été question de former un mouvement. Si on dit, par exemple...

M. MAILLOUX: M. Dufour, si vous le permettez, pour donner une explication supplémentaire à M. Bellemare. C'est qu'en 1965, quand l'Association des camionneurs-artisans de Charlevoix a été fondée, j'avais dit aux camionneurs que, s'ils signifiaient l'intention de s'organiser en association syndicale et que cela groupait l'ensemble des camionneurs, je serais prêt à consentir à recommander à tous les ministères de transiger avec l'association. Il y a eu une première réunion qui a groupé environ 70% de tous les camionneurs. C'était déjà un pourcentage acceptable. J'ai, à ce moment-là, demandé à M. Dufour de permettre à tous les gens qui ne croyaient pas à l'Action syndicale mais qui avaient des droits acquis — tantôt nous avons parlé de garagistes qui pouvaient posséder un camion ou d'autres personnes, cultivateurs, peu importe leur allégeance politique — alors je leur ai demandé de respecter les droits acquis de tous ceux qui ont actuellement un camion et je pense que l'association a permis que les 112 propriétaires d'un camion, quelle que soit leur allégeance politique puissent joindre les rangs de l'association.

C'est dans ce sens-là que ma demande a été faite, pour éviter toute discrimination à l'endroit de qui que ce soit, qui pouvait avoir des droits acquis dans le camionnage.

M. BOUDREAU: Mais alors ça ne peut pas être des artisans.

M. MAILLOUX: M. Boudreau, la définition d'un camionneur-artisan, au départ, je pense que c'est assez difficile à faire. Il y avait des personnes qui avaient des droits acquis, mais Je demeure convaincu que, dans l'avenir, les associations pourront promulguer leurs propres règlements et permettre que seuls puissent être acceptés les gens qui font du camionnage leur principale source de revenus.

M. BOUDREAU: C'est pour cela que Je demandais à M. Bernier de limiter le nombre d'entrées avec des garanties possibles.

M. MAILLOUX: Bien au départ, il est difficile de...

M. LE PRESIDENT: En parlant de droits acquis, M. Dufour en parlait, si vous voulez continuer, l'heure avance et il y a d'autres personnes qui voudraient se faire entendre.

M. DUFOUR: Je vais continuer. On n'a pas le droit, on n'est pas capable d'amener une dictature à qui que ce soit. Celui qui a déjà un camion, dans le malaise qui existe dans toute la province, il faut accepter qu'il soit propriétaire d'un camion. On ne peut pas le mettre sur un tas de roches et le faire sécher, le gars. Il faut l'accepter dans les rangs, dans l'ensemble général. Mais il reste toujours un fait que nous, avec le but artisan, c'est que l'artisan était de préférence sur le chantier. Il y a celui qui devient garagiste, par exemple, le médecin et ensuite le maître d'école, comme on en a dans les rangs, d'après des enquêtes approfondies que nous avons faites. C'est que tout à l'heure, en s'apercevant que l'ouvrage est restreint dans le comté, il ne viendra pas trop souvent sur le chantier. Automatiquement, il prendra lui-même sa décision. Soit qu'il reste camionneur ou qu'il abandonne ce métier. C'est là que le nombre des camionneurs diminuera graduellement, selon la décision du propriétaire. C'est notre point de vue. Pour le moment, nous ne sommes pas capables de restreindre le gars et dire: Mon ami, il n'y a pas de travail pour toi, tu vas rester sur un tas de roches. Nous ne sommes pas capables de le faire.

C'est la raison pour laquelle nous avons plus de camionneurs actuellement que nous en aurions si on s'en tenait réellement à ce que sont nos intentions.

Il reste un fait, comme on le disait tout à l'heure. Un député disait de quelle manière on pourrait restreindre l'entrée des nouveaux camions. Dans le moment, nous sommes incapables de faire quoi que ce soit. Dans le comté de Charlevoix, nous aurons encore cinq nouveaux camionneurs dans quelques jours. Il y en a déjà trois d'entrés. Nous n'avons pas de point de loi, nous ne sommes pas capables de réaliser quoi que ce soit.

M. PINARD: Ils viennent d'où, ces camions-là?

M. DUFOUR: Ce sont des camionneurs qui vont s'infiltrer par le fait qu'il y a un autre mouvement syndical qui est arrivé. Lui, il va se recruter des membres pour avoir une certaine majorité tout à l'heure, il vend de nouvel- les cartes. Nous, nous n'en vendons plus de cartes.

M. PINARD: Pourquoi forment-ils un syndicat rival du vôtre?

M. DUFOUR: Comme on en parlait tout à l'heure, cela devient une question de politique. C'est justement ce qui arrive. C'est parce qu'on a peur de perdre les ristournes qu'on avait probablement anciennement et là, nous, nous n'en faisons pas. La version de plusieurs camionneurs, je vais vous la donner ici. Le mouvement nous a reproché qu'à $8 c'était dispendieux notre association. Il est regrettable de dire que, selon la version de plusieurs camionneurs, $8, cela leur ferait plaisir de le donner seulement pour ôter le rouge et le bleu dans l'association, dans le domaine du camionnage. Il arrive que le reste des services, ils l'ont gratuitement. Ce n'est pas aussi dispendieux que ça. Les gens tiennent à ce que nous ayons un mouvement indépendant en ce sens que l'on ne doit pas faire de la politique comme le disait M. Bellemare tout à l'heure, à savoir que les mouvements avaient pu en faire. Qui ne se trompe pas dans la vie! Il n'y a pas d'erreur, nous arrivons dans un comté, nous prenons une équipe de gens qui sont intéressés à former le noyau. Il peut arriver que parmi eux il y ait des politiciens. Cela peut arriver. Mais par contre, il y a toujours la possibilité qu'à l'élection prochaine on enlève le gars. On change l'administration. Mais il reste quand même un fait que...

M. BELLEMARE: Me permettez-vous une question?

M. DUFOUR: Oui, M. Bellemare.

M. BELLEMARE: Etes-vous d'avis que les camionneurs sont caractérisés rouges ou bleus, ou si les camionneurs sont camionneurs avant d'être rouges ou bleus?

M. DUFOUR: Il y a l'équivalent à peu près des deux côtés.

M. BELLEMARE: Bien moi, j'ai l'impression qu'un camionneur, c'est ni rouge ni bleu. C'est un camionneur. Il veut travailler. C'est surtout ça.

M. DUFOUR: Oui, justement!

M. BELLEMARE: Il n'est pas question d'un rouge ou d'un bleu dans mon comté. J'en ai des associations. Il n'est pas question de rouge et de

bleu, il est question de camionneur. Je pense que ça ne se tire plus la ligne en 1968 d'un rouge ou d'un bleu. Il ne faut pas prendre ça comme argument, pour dire qu'il se fait du patronage. Ce qui existe aujourd'hui, le malaise qui existe, c'est un malaise de camionneurs. Ce n'est pas un malaise parce que c'est un gouvernement qui est rouge ou parce que c'est un gouvernement qui est bleu. C'est un malaise de camionneurs. Si on essaie de régler la question du problème qui est actuellement aigu chez vous, en disant bien: C'est parce que c'est un problème de rouge ou c'est un problème de bleu, on n'arrivera jamais nulle part. Si l'on se donne comme point d'appui l'intérêt public et l'intérêt des petites gens qui ont besoin d'être protégés parmi les camionneurs, quelle que soit leur couleur, nous arriverons à quelque chose.

M. DUFOUR: Je suis 100% de votre dernier avis.

M. BELLEMARE: J'aimerais faire remarquer aux gens que vous n'avez pas le droit de manifester. Seulement dans le temps des élections!

M. DUFOUR: II reste quand même un fait, M. Bellemare, c'est qu'actuellement nous vivons un malaise dans douze de nos vingt-six comtés qui sont victimes de patronage. Que vous le vouliez ou non, je le vois à la grandeur des comtés et dans les comtés où si on peut dire, le député ou le ministre n'a pas le sens de cette organisation, cela tourne rond à merveille. Cela fait qu'on a des comtés qui, dans l'espace d'un mois...

M. BELLEMARE: Je vais être obligé de vous interrompre, M. Dufour, vous êtes certainement très sympathique, d'ailleurs vous connaissez mon impression...

M. DUFOUR: Justement!

M. BELLEMARE: Vous connaissez d'ailleurs mon amitié, je vous l'ai maintes fois manifestée.

M. DUFOUR: Cela me fait plaisir à part ça!

M. BELLEMARE: Seulement, regardez, monsieur, quand il s'agit de formation syndicale, il n'est pas de type plus frappant que ce qui existe dans les grandes centrales syndicales FTQ et CSN, même CEQ. Il n'est pas question de rouge et de bleu quand, dans une entreprise ou dans une région, la CSN décide d'aller prendre tel groupe plutôt que tel autre.

Il est question de syndicalisation.

M. DUFOUR: C'est ça.

M. BELLEMARE: Et le FTQ pareillement, entre dans un autre comté ou entre dans un autre genre d'industrie, là où il y a la CSN, en vertu du code du travail, il y a des limites de temps où le maraudage est permis, où on peut faire une espèce de conquête en vertu du code du Travail, c'est 60 jours, et ils ont le droit de le faire. Cela n'est pas une question de rouge et de bleu. Si on se mettait dans la tête qu'il existe un problème de camionnage et que ceux qui sont à la tête de ces mouvements de syndicalisation prêchent plutôt une syndicalisation qu'un esprit de parti, ce serait beaucoup mieux pour les camionneurs. Enlevons-nous donc de la tête que c'est un problème de rouge et de bleu. Ce ne peut être ça. Que ceux qui sont à la tête de mouvements soient assez forts pour vendre leur marchandise de syndicalisation et avec ça, on pourra atteindre un but

M. MAILLOUX: M. le Ministre du Travail, si vous permettez, je voudrais dire deux mots pour donner un exemple sur ce que vient de dire M. Dufour. Je pense que l'action syndicale dans Charlevoix était bien structurée et que les gouvernements et les entrepreneurs se devaient de transiger avec la seule association qui groupait d'ailleurs 100% de tout le camionnage. Tantôt, M. Dufour a dit qu'il se faisait un certain patronage et il a nommé mon comté. Je connais le ministre du Travail comme un syndicaliste depuis toujours. Si le ministère de la Voirie n'avait pas accepté chez nous l'association fantôme qui comprend 17 camionneurs...

M. BELLEMARE: Comment le ministère de la Voirie peut-il accepter ça?

M. MAILLOUX: Le ministère de la Voirie refuse à l'association qui groupe tous les camionneurs du comté, le droit de désigner sur les travaux les camions qui doivent s'y diriger et elle permet qu'une association de 17 camionneurs ait le seul droit de travailler. Je dis au sous-ministre de la Voirie que M. Dufour va...

M. BELLEMARE: Quels que soient les intéressés, M. le Député, ça va peut-être loin, je dis que c'est un non-sens.

M. MAILLOUX: C'est pour ça que je veux...

M. BELLEMARE: C'est un non-sens. Que le ministère de la Voirie accrédite seulement une représentation vis-à-vis d'un groupement, c'est un non-sens, quels que soient les intéressés. C'est ce que j'avais à dire.

M. MAILLOUX: Est-ce un fait, M. Dufour, que seuls ces 17 camionneurs ont droit de regard sur les travaux de voirie?

M. DUFOUR: C'est un fait.

M. BELLEMARE: Le sous-ministre de la Voirie qui est ici, M. Monette, transmet une information. Si le comité n'a pas d'objection, il n'a pas le droit de parole, mais il pourrait peut-être la donner, cette information, qu'elle soit de lui-même et non de moi? Alors, M. Monette, qu'est-ce que vous dites?

M. PINARD: Ce qu'on pourrait faire c'est établir les faits clairement, pour la Voirie dans Charlevoix.

M. MONETTE: A toutes les demandes qui nous sont faites, M. Dufour le sait d'ailleurs, je lui ai répété plusieurs fois, la Voirie fait affaires avec les associations, ma réponse a toujours été la même: Nous ne pouvons pas donner d'instruction à nos subalternes de faire affaires avec les associations, sans que celles-ci soient approuvées par le gouvernement, le Conseil exécutif. Alors, si, dans un endroit donné, la chose s'est faite, c'est en dehors de notre connaissance.

M. BOUDREAU: Vous avez la preuve, M. Dufour, vous vous rappelez et tous vos officiers, qui sont venus à mon bureau, j'ai la preuve, dans mon bureau, comme quoi j'ai recommandé votre association au ministère de la Voirie pour des travaux qui se faisaient en dehors de mon comté même.

M. DUFOUR: C'est dans le sens général, mais il y a des exceptions. Entre autres, on ne nommera pas qui que ce soit nulle part, mais j'en dirai quelques mots seulement, on voudrait savoir s'il serait préférable...

M. MAILLOUX: Je voudrais savoir, M. Dufour, si j'ai dit la vérité?

M. DUFOUR: La vérité, oui.

M. LE PRESIDENT: Maintenant, étant donné que la vérité a ses droits, le ministre de la

Voirie est présent et, si tout le monde a droit à sa vérité, il l'a quand même lui aussi.

M. LAFONTAINE: Dans ce comté-là, il y a deux associations. A ce moment-là, est-ce que c'est un problème qui relève de la Voirie ou un problème qui relève des camionneurs, comme le disait si bien tout à l'heure le ministre du Travail? Ce n'est pas une question de rouge ou de bleu. Je tiens à vous dire, comme ministre de la Voirie que parfois, cela devient ahurissant lorsqu'on voit d'un côté un groupe et de l'autre côté un autre groupe. Nous avons eu un exemple frappant dans le comté de Lotbinière. Avant 1966, pour faire partie d'associations, les membres étaient sélectionnés. Et ce n'était pas n'importe qui qui pouvait embarquer dans l'association.

Passé 1966, il y a eu une autre association de formée, et lorsque ces gens-là sont venus me trouver au bureau, j'ai dit: S'il y avait seulement une association, nous n'aurions pas de problème. Mais nous sommes confrontés avec deux associations et ce sont les camionneurs eux-mêmes qui ne s'entendent pas, en fait.

M. MAILLOUX: Pour répondre au ministre de la Voirie, d'abord, Je vous dirai que J'avais promis à M. Bellemare, en Chambre, de ne pas faire de politique avec le problème des camionneurs-artisans et je ne voudrais pas que cela tourne dans ce sens-là, d'aucune façon. D'ailleurs, dans mon discours en Chambre, j'avais pris la peine de dire que le problème des camionneurs-artisans joignait tous les régimes politiques et à chaque fois qu'il y a eu un régime politique en place, des gens, malheureusement, mal intentionnés, s'étalent servis du camionnage pour arriver à des fins politiques.

J'ai rejoint, à ce moment-là, autant les rouges que les bleus. L'Association de Charlevoix, cela ne groupait pas une partie des camions de Charlevoix, cela groupait tous les camions à 100%. C'était la seule, cela marchait, tel que M. Monette le disait, à venir à jusqu'à il y a un mois et demi. Il n'a jamais eu un problème depuis 1965. Je ne m'en suis jamais mêlé, autant votre prédécesseur que vous-même avez eu la paix, avez dirigé leurs travaux en raison des besoins des camionneurs qui avaient le plus de charges de famille ou ces choses-là, tel que le disait M. Bellemare, l'autre jour. On a eu 1a paix.

Mais depuis un mois et demi, il demeure que pour une raison particulière, quelle qu'elle soit, une personne s'est mise en tête de former une association fantôme, groupant 17 camionneurs, et c'est celle-là qui actuellement est accréditée

pour servir sur tous les travaux de voirie.

M. LAFONTAINE: C'est justement là qu'est la fausseté, M. le Président, il n'y a aucune association d'accréditée au ministère de la Voirie, et, personnellement, à titre de ministre de la Voirie, Je tiens à vous dire ceci: A chaque fois que l'on parle de l'Association des camionneurs-artisans, nous mettons toujours le ministère de la Voirie en cause et jamais les compagnies forestières. Par exemple, elles peuvent engager les camionneurs dont elles ont besoin, ceux qu'elles veulent choisir. Mais à chaque fois qu'il y a un problème de camionneurs-artisans, on dirait qu'on prend le ministère de la Voirie, tant du temps de mon prédécesseur que du mien et le ministère de la Voirie est toujours celui qui subit tous les préjudices et toutes les critiques.

Et je tiens à vous dire qu'à titre de ministre de la Voirie, comme je l'ai demandé à tous mes officiers, et le sous-ministre l'a dit tout à l'heure: il n'y a aucune association qui est reconnue présentement. Que les camionneurs commencent à s'organiser par eux-mêmes. Je tiens à dire ceci par exemple: Ce n'est pas parce qu'il va y avoir une association de camionneurs dans un comté que cela va donner plus de travail dans le comté. On a tenté, dans certains coins, de faire croire aux gens que s'ils se mettaient ensemble, qu'il y aurait plus d'ouvrage pour les camionneurs. Moi, je dis non. Cela ne change pas le quantum du travail, excepté que cela peut peut-être faire une rotation.

Je sais que dans mon comté, le comté de Labelle, il n'y en a pas d'association de camionneurs. Je ne suis jamais intervenu pour faire accepter ou faire travailler aucun camionneur. Je n'ai aucune critique qui vient de mon comté. Tout le monde a le droit de vivre.

Si un médecin a le droit de vivre avec ses instruments chirurgicaux, un camionneur a le droit de vivre avec son camion. C'est aussi clair que cela. Mais il ne faut pas toujours faire porter sur le dos du gouvernement en place ou du ministre en place, les difficultés que les camionneurs peuvent avoir entre eux.

Je me souviens que, l'an passé ou il y a deux ans, dans le comté de Lotbinière, quand les ennuis ont commencé parce qu'il y avait deux associations on bloquait les carrières de gravier.

Il y a assez de demandes au point de vue des travaux de la voirie, dans toute la province, que si les gens, dans une région, ne veulent pas avoir de travaux de voirie, nous les ferons ailleurs.

Mais, je pense que le problème n'existe pas à la voirie, il existe chez les camionneurs eux-mêmes.

M. MAILLOUX: Je voudrais poser une question.

M. LAFONTAINE: ... s'ils veulent s'organiser au lieu d'avoir comme dans votre comté, où vous dites justement, il y a deux associations, la première que j'ai formée et la deuxième qui est fantôme...

M. MAILLOUX: Non, non, je n'ai pas formé d'association.

M. LAFONTAINE: Vous avez aidé à la former.

M. MAILLOUX: J'ai demandé cela...

M. LAFONTAINE: Vous avez accordé votre collaboration à la formation de la première association.

M. MAILLOUX: Que tous les droits acquis de toute personne possédant un camion dans le comté.

M. LAFONTAINE: D'accord. Maintenant il y a une deuxième association fantôme dont c'est la première fois que j'entends parler, qui comprend...

M. MAILLOUX: La question que jepose... M. LAFONTAINE: ... dix-sept camionneurs.

M. MAILLOUX: Est-cequejepourraisposer une question au ministre de la Voirie?

M. LAFONTAINE: Dans cette association fantôme, il y a tout de même 17 personnes qui sont dissidentes de la première association.

M. MAILLOUX: Est-ce que je pourrais poser une question au ministre de la Voirie? Depuis 1965, existe l'Association des camionneurs-artisans dans le comté. J'ai dit que le ministère de ce temps, dirigé par M. Pinard et vous-même, aviez tout de même donné des ordres, puisque les divisionnaires, à chaque fois qu'il y a un travail dans le comté — cela n'exigeait pas qu'il n'y en ait plus, parce qu'il y a une association — s'adressaient au bureau de direction de l'association des camionneurs qui les groupait tous.

Depuis un mois et demi, on ne s'adresse à

l'association que dans des cas déterminés, mais on s'adresse plutôt à une autre association pour d'autres travaux. Pourquoi? C'est là qu'est la situation.

M. LAFONTAINE : L'expérience que je peux vous donner, c'est l'expérience du comté de Lotbinière où, pendant un bout de temps, il y avait deux associations et puis à un moment donné — Je me souviens que les journalistes étaient dans mon bureau — on m'a dit: S'il n'y avait pas de deuxième association, est-ce qu'il y aurait un problème? J'ai dit: Peut-être que non. S'il n'y avait pas de première association, il n'y aurait pas de problème non plus.

Alors, cela veut dire que les deux associations devraient se fendre en une seule association et, à ce moment-là, ce n'est pas le problème du ministre ou du sous-ministre de la Voirie. Notre premier mandat à nous, c' est de donner des chemins à la province de Québec et les meilleurs chemins possibles. Quand nous étions de l'autre côté de la barrière et que M. Pinard était le ministre de la Voirie, il y a eu des grèves de camionneurs. Ils ont bloqué des bancs de gravier. Je ne crois pas que c'est une méthode de résoudre le problème parce qu'à ce moment-là le premier devoir du ministre de la Voirie, c'est de donner des chemins, la meilleure voirie possible.

C'est plus un problème de relations entre les camionneurs eux mêmes, qu'ils doivent...

M. LE PRESIDENT: Puis-je faire remarquer aux membres du comité et à ceux qui font une intervention que le comité des relations industrielles s'est réuni ce matin pour discuter la cédule des justes salaires? Il est bien entendu que chacun des membres du comité a vécu ou vivra des problêmes à l'échelle des comtés en ce qui a trait à l'organisation du camionnage. S'il vous plaît, reportons-nous-en à l'esprit du comité qui veut que nous discutions de la cêdule des justes salaires. M. Dufour, s'il vous plaît.

M. DUFOUR: Voici, M. le Président, cela me fait plaisir. Ce n'est pas réellement l'intention de politiser la réunion. Au contraire, je suis très heureux qu'on ait obtenu qu'elle ait lieu, pour pouvoir discuter des problèmes.

Tout à l'heure, M. Bellemare en avait dit un mot en parlant de l'ensemble général de la discussion, des malaises qui existaient.

M. BELLEMARE: Vous pouvez venir chez nous, vous savez comment on les a réglés.

M. DUFOUR: Justement.

M. BELLEMARE: On a eu trois grèves de suite, la même année. A la fin du compte, j'ai dit: L'intérêt public est en jeu. J'ai demandé aux responsables de me rencontrer et j'ai dit: Ecoutez, là, M. Jasmin est allé lui-même, un conciliateur du ministère, pour essayer de faire la paix et cela n'a pas réussi.

J'ai dit: II y a toujours des limites. Le ministre de la Voirie donne de la voirie chez nous et fait dépenser de l'argent et personne ne travaille. Ils font des grèves. J'ai dit à M. Dufour, j'ai dit à M. Cournoyer: II y a toujours une limite, on va s'entendre. Et deux hommes se sont rencontrés, ils ont fait un « gentlemen's agreement » qui va pour le mieux.

Seulement, si vous pouviez faire la même chose dans Charlevoix, il y aurait peut-être moyen de s'entendre. Ce matin, on était, comme dit le président, venu pour tâcher de définir l'application des justes salaires, ce qui regarde l'artisan, le salarié, la régionalisation, la syndi-calisation, l'accréditation ou la formation de syndicats professionnels. Mais, chose certaine, les chicanes de camionneurs, vous n'avez pas fini d'en voir même avec une seule association, vous verrez cela.

M. DUFOUR: Je ne sais pas, je ne suis pas réellement de votre avis avec une seule association.

M. BELLEMARE: Ce n'est pas tout le monde qui va vous aimer, c'est comme moi, vous.

M. DUFOUR: C'est entendu. Mais, seulement, ce que je donne aujourd'hui ici, c'est la version des comtés qu'on représente actuellement. Là où nous voudrions avoir une association, là où il y en a une deuxième, il n'yapas d'erreur, c'est une discussion, c'est un problème qui se pose. Moi, je calcule, par exemple, que la deuxième qui est supposée se fermer en vertu d'une demande, d'une requête, je n'ai pas d'objection à cela. Nous allons tous pouvoir demander quelque chose qui peut nous appartenir. Mais, il me semble, à titre de suggestion, que s'il y avait une enquête faite sur place,...

M. BELLEMARE: Cela, c'est un problème particulier, M. Dufour. On n'est pas pour aider le cas de... Si vous avez un problème particulier qui touche les relations de travail, je suis entièrement à votre disposition. D'accord?

M. DUFOUR: Oui.

M. BELLEMARE: Cela, c'est un cas particulier. Restons donc sur la grande question pour laquelle on est réuni ce matin...

M. DUFOUR: Justement

M. BELLEMARE: ... discuter le problème de tout le monde.

M. DUFOUR: C'est cela.

M. BELLEMARE: Parce qu'autrement, si nous nous mettons tous à discuter seulement d'un cas particulier, on n'en finira pas.

M. LE PRESIDENT: M. Dufour, je vous ferai remarquer qu'on grève le temps des autres.

M. DUFOUR: Là, brièvement, on pourrait peut-être dire un mot sur la clause de 75-25, par exemple. C'est que la clause 75-25, nous, nous tenons justement, comme M. Bernier l'a expliqué tout à l'heure, à ce que ce soit reconnu sur le transport, sur le tonnage parce que si nous ne sommes pas reconnus sur le tonnage, quand on considère déjà que la forme du chemin appartient à l'entrepreneur, il reste seulement l'emprunt et le gravier qui appartiennent à la clause 75-25.

M. BELLEMARE: Le volume.

M. DUFOUR: Justement, la quantité, les tonnes. Car si l'on regarde un entrepreneur qui a quatre camions, par exemple, des camions de dix roues, des gros camions, si l'on fait la répartition suivant le nombre de camions, la quantité va augmenter. On va en perdre sur la quantité. Je serais d'accord que ce soit réparti en ce sens-là. Ensuite, pour revenir à ce que M. Bernier expliquait tout à l'heure, seulement un mot en passant, c'est une chose certaine qu'on est intéressé à ce qu'un statut particulier soit reconnu pour l'artisan, pour qu'on ne puisse pas encore débattre un nombre indéterminé d'années sans savoir si demain on va obtenir quelque chose.

M. BELLEMARE: II y en a qui ont perdu leurs élections avec cela!

M. DUFOUR: Alors, avec ce point de vue, j'ai terminé. Pour le moment, je pense que c'est à peu près tout ce que j'ai à dire. Je vais laisser la parole à un autre. Merci beaucoup.

M. BELLEMARE: Très bien.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Dufour. M. Raymond Roy, représentant des constructeurs de routes et des grands travaux du Québec.

M. ROY: M. le Président, messieurs les ministériels, messieurs de l'Opposition, messieurs les fonctionnaires, l'Association des constructeurs de routes et des grands travaux du Québec remercie le comité des relations industrielles de l'Assemblée législative de nous avoir permis de transmettre notre opinion sur le problème du camionnage.

A la suite du climat de violence qui existait durant l'année 1965, le gouvernement d'alors instituait une commission d'enquête pour étudier les problèmes du camionnage. Notre association, à la suite d'une assemblée générale spéciale de ses membres, présentait à la dite commission un mémoire dans lequel les deux solutions suivantes avaient été adoptées. Premièrement, que les taux de transport par camion soient enlevés définitivement de la cédule des justes salaires parce que ces dispositions sont contraires au principe de la libre entreprise. Deuxièmement, qu'aucun pourcentage de camions locaux ne soit imposé à l'entrepreneur. A la suite de nombreuses recherches de la part de la commission...

M. BELLEMARE: Est-ce que j'ai bien compris M. Roy, parce que ça va être bien important tout à l'heure? Premièrement, vous voulez faire disparaître de la cédule des normes du travail les $0.20 et $0.05.

M. ROY: Exactement.

M. BELLEMARE: Complètement?

M. ROY: Complètement.

M. BELLEMARE: Deuxièmement, vous voulez que 75-25 disparaisse complètement?

M. ROY: Absolument.

M. BELLEMARE: Ah, bon! alors il n'y aura pas besoin d'enquête Lippé là-bas.

M. ROY: Voici, M. le Ministre, ça, c'était notre position en 1965.

M. BELLEMARE: Cela n'a pas de bon sens.

M. ROY: Premièrement, on vivait dans un climat de libre entreprise. Quand le gouvernement est arrivé au pouvoir en 1960, on a institué un régime de soumissions publiques, de libre entreprise, la libre conférence. Alors, en 1962, les grands travaux ont commencé et il nous a fallu user de tous les moyens possibles pour arriver à concurrencer les gens qui

voulaient couper les prix. Il nous a fallu alors recevoir des taux d'entreprises de camionnage qui, elles, pouvaient soumissionner en bas des prix déjà fixés. Alors c'était notre position, à la commission Lippé en 1965. Je continue. A la suite de nombreuses recherches de la commission, les parties contractantes ont été entendues, les parties qui sont représentées aujourd'hui ici ont été entendues, par la commission Lippé. On se demande si aujourd'hui on ne recommence pas à nouveau la commission. Nous nous sommes donc fait entendre, les camionneurs se sont fait entendre à la commission Lippé et, dans le rapport de la commission, on dit: La commission Lippé recommande que les entrepreneurs et les sous-entrepreneurs puissent utiliser sans restriction leurs propres camions.

M. MAILLOUX: Est-ce que vous pensez que si, à la suite de cette recommandation de la commission Lippé, on permettait aux entrepreneurs et aux sous-entrepreneurs d'utiliser tous leurs propres camions, il resterait bien des artisans dans la province après une telle permission?

M. ROY: Je crois qu'il faudrait faire une distinction entre les grands travaux, les travaux pour des millions de dollars et les petits travaux marginaux qu'on fait dans les comtés. Il me semble qu'il y a une distinction à faire au début.

M. BELLEMARE: Les graines pour les pauvres et les piastres pour nous. Parce qu'en Ontario, vous avez peut-être vu ça, ce sont des taux minimum, mais ils sont plutôt basés sur des taux réalistes. C'est bien différent, parce qu'il y a des contrôles qui sont imposés par l'Ontario qu'on n'a pas nous dans la province de Québec. Tant que cela ne sera pas changé, que nous n'adopterons pas le taux minimum, que nous n'irons pas à des taux réalistes, je pense — je ne suis pas seul dans le comité — mais vous ne m'aurez certainement pas.

M. ROY: M. le Ministre, à cause des grands travaux de 1962 à 1967, on a forcé les entrepreneurs à s'équiper avec de gros équipements, des camions à bascule et ces gens-là les ont encore, ils veulent les utiliser.

M. BELLEMARE: C'est ce qui est arrivé dans les régions où, à un moment donné, il s'est fait beaucoup de travaux et puis, le lendemain matin, tout le monde est parti, il ne restait plus rien, et les artisans sont restés là. Ils n'ont pas été utilisés pendant ce temps-là.

M. ROY: Oui remarquez bien que... je ne nie pas aux artisans le droit de vivre. Laissez-moi continuer. A l'article 8 du rapport Lippé, on parle de protection locale: « La protection locale applicable aux camions utilisés pour des contrats gouvernementaux s'applique dorénavant au niveau des grandes régions administratives, mais qu'elle soit totale ». Alors, notre association maintient toujours en 1968 les positions qu'elle avait transmises à la commission Lippé.

Bien plus, la commission Lippé reconnaît le bien-fondé de nos allégations, au paragraphe 4 de son rapport, lorsqu'elle déclare que le système de protection locale s'est avéré « totalement irrationnel au point de vue des besoins de l'économie, et une source d'encombrement et de désorganisation du marché. » C'est textuellement dans l'article 4 de la commission Lippé.

Alors, c'est la première fois, aujourd'hui, depuis que nous avons déposé le rapport, que nous avons l'occasion d'exprimer notre opinion. Nous en profitons pour déclarer que les entrepreneurs ne demandent pas mieux qu'un climat de bonne entente entre les entrepreneurs et les camionneurs, entre les camionneurs-artisans et les camionneurs de toute autre catégorie. Parce que les grèves qui ont commencé en 1965, c'étaient des grèves entre camionneurs-artisans et camionneurs qui avaient plusieurs camions. Ce n'était pas contre les taux ou contre la manière dont les entrepreneurs traitaient leurs camionneurs.

M. MAILLOUX: Il y a eu les taux aussi.

M. BELLEMARE: C'est peut-être pour cela aussi, à cause des taux, qu'est venue cette crise de grèves. J'aimerais dire M. Roy, je pense que de ce mal que sont les grèves, est né un mouvement syndical peut-être assez propice aujourd'hui pour protéger les intérêts de ces petits qui étaient sans défense.

M. MAILLOUX: D'accord.

M. ROY: Oui, oui, d'accord. Maintenant, pour parler des taux uniformes dans une région donnée, les messieurs de la voirie sont ici et on peut discuter des facteurs qui peuvent varier pour établir un taux. Si vous transportez du sable de Saint-Germain-de-Grantham à Laurier-Station, sur une belle grande route, il n'y a pas de problème à $0.03 1/2

et à $0.04 le mille. Sûrement, les entreprises arrivent à $0.04 et $0.04 1/2. Elles font du profit. Mais, par contre, je suis d'accord avec les camionneurs-artisans.

M. BELLEMARE: Cela dépend de la charge que vous en mettez dans votre camion, aussi.

M. ROY: Dans le rapport de la commission Lippé, on a exprimé toutes les possibilités qui pouvaient faire varier un changement de taux à un moment donné dans une région donnée. Cela peut varier de 100% ce taux. Tout dépend des conditions dans lesquelles on travaille. Maintenant, si le gouvernement constate qu'il existe un problème, il doit agir. Mais, si le gouvernement pour des raisons bien précises décidait qu'un pourcentage de volume de transport doit être accordé aux camionneurs, artisans ou non, il ne devrait pas mettre ces taux en compétition. Il devrait fixer ces taux au bordereau des soumissions publiques. En autant que l'entrepreneur soit payé pour ce qu'il doit accorder aux autres, nous sommes d'accord à négocier une entente...

M. BELLEMARE: Là, je suis avec vous.

M. ROY: Il ne faut pas forcer l'entrepreneur à payer des taux que lui-même ne reçoit pas du ministère. C'est actuellement le noeud du problème. Notre association est cependant d'accord pour qu'une régie soit instituée pour limiter le nombre de camionneurs, avec des lettres avec des préfixes bien spéciaux afin d'enrayer cette hémorragie, ce problème. Nous sommes d'accord avec les camionneurs là-dessus. Alors, si vous avez d'autres questions, je suis prêt à vous répondre.

M. BELLEMARE: Vous savez, M. Roy, vous avez manifesté votre opinion. Ce n'est pas parce que nous la contredisons que nous ne vous admirons pas, que nous ne sommes pas prêts à rendre témoignage que votre association mérite sûrement une considération dans l'ensemble du problème. Mais il faut partir du point que le problème n'est pas à votre niveau. Le problème est plus bas que cela. Il est parmi les petits. C'est ça, le problème. Maintenant, il y a bien des facteurs, vous en avez suggéré un excellent, celui de prévoir la fixation des taux dans les normes, je suis d'accord que cela pourrait régler une foule de problèmes. Mais cela nous aiderait peut-être, avec votre coopération, à en régler d'autres qui sont adjacents à celui que vous mentionnez en disant: Nous, le 75-25, nous n'en voulons pas, et plus encore, le $0.20-$0.05 cela ne fait pas notre affaire. Il ne faudrait pas partir de là et dire que c'est ex cathedra, et qu'il n'y a plus moyen de discuter à part cela. Parce que là nous aurions de la misère à nous entendre tout à l'heure.

M. ROY: Comme je le disais, M. le Ministre, si vous avez un problème que vous voulez régler, nous sommes prêts à négocier, à discuter de bonne foi pour qu'il y ait un climat d'entente à travers la province. Parce que, quand l'entrepreneur a des travaux à exécuter et des délais à rencontrer, il ne peut pas permettre que des carrières lui soient fermées et qu'il ait des bâtons de baseball dans les camions. Je pense qu'il y a autre chose à faire que cela. Alors, nous sommes prêts à nous entendre, le tout sujet à une approbation de notre assemblée générale pour arriver à une entente avec les camionneurs.

M. PINARD: M. Roy, si le gouvernement décidait de déterminer les taux de transport, de façon que tous les entrepreneurs qui sont appelés à soumettre des prix sur un projet gouvernemental, soient sur le même pied, de façon qu'ils ne se fassent pas compétition sur le transport de matériaux, croyez-vous que ce serait une formule qui serait viable, qui serait efficace pour aider à résoudre le problème qu'a en ce moment l'Association des camionneurs-artisans? Il est arrivé, il faut l'admettre, que les entrepreneurs se sont fait concurrence sur le transport lui-même. Dans certaines soumissions que j'ai étudiées par exemple, il y avait 12 soumissionnaires. Il y en avait qui avaient soumissionné à $0.04 le mille pour, disons, le transport de la pierre, du gravier et du sable. D'autres avalent soumissionné à $0.06, d'autres à $0.07, d'autres à $0.08. Certains entrepreneurs voulaient aller chercher leur profit sur le transport des agrégats, d'autres pensaient êtres capables d'aller chercher leur profit sur un autre article du contrat. Tous ne se faisaient pas concurrence sur les mêmes articles d'une soumission. Mais si les taux étaient normalisés, déterminés, de façon à mettre tout le monde sur un pied d'égalité, croyez-vous que ce serait efficace pour résoudre le problème que nous avons en ce moment?

M. ROY: Je répondrais au député de Drummond que...

M. LAFONTAINE: M. Roy, tout simplement pour clarifier une situation, le rapport Lippé a duré un an, avec beaucoup de personnes, di-

sons des technocrates de valeur, j'ai demandé au ministère de la Voirie d'en faire une analyse objective. Le rapport Lippé comprend 100 pages. La critique du rapport Lippé que j'ai, qui est un rapport préliminaire présentement, en comprend 140 pages. Si vous me permettez, relativement...

M. PINARD: Cette critique du rapport Lippé est faite par qui?

M. LAFONTAINE: Par le service de la recherche du ministère de la Voirie.

M. PINARD: Bon! C'est daté de quand? M. LAFONTAINE: C'est daté du 2 juillet. M. PINARD: De cette année?

M. LAFONTAINE: De cette année. C'est un groupe de travail. C'est un rapport préliminaire. Ils l'ont fait...

M. PINARD: Mais là, est-ce que le ministre répond à la question précise que je viens de poser à M. Roy, ou s'il fait des remarques générales? J'aimerais avoir une réponse et peut-être que le ministre pourrait intervenir à la fin.

M. LAFONTAINE: C'est parce que dans le sens de cette chose, j'aurais aimé lire ce que les gens pouvaient dire, je pense.

M. PINARD: Mais est-ce qu'on ne serait pas mieux de laisser répondre M. Roy sur la question précise que je lui ai posée? Le ministre pourra intervenir tantôt.

M. ROY: Il n'y a pas d'erreur, M. le Député de Drummond a raison quand il dit que sur les bordereaux de soumissions, si les taux qu'on est obligé d'accorder aux camionneurs étaient fixés, il n'y aurait aucune excuse pour l'entrepreneur de ne pas payer ces taux-là. Us n'auraient absolument aucune excuse.

M. BELLEMARE: Il y aurait moins de camions aussi.

M. ROY: Pardon?

M. BELLEMARE: Il peut y avoir moins de camions, c'est beaucoup d'ennuis pour vous.

M» ROY: Absolument. Le montant qui est investi dans les camions, il pourrait l'être avantageusement ailleurs.

M. BELLEMARE: Laissez la place pour les autres.

M. ROY: Mais, antérieurement, il y avait seulement un contrat d'un seul côté. L'entrepreneur est obligé de prendre le camionneur-artisan, mais le camionneur-artisan n'est pas obligé de retourner au travail. Alors ce qui arrive, c'est que souvent l'entrepreneur a des difficultés, dans une journée, de faire le tonnage qu'il avait désiré faire. Le camionneur arrêtait à quatre heures et il disait: Mol, je n'y retourne plus à la pelle. Alors, l'entrepreneur a une pelle de deux verges et il y a des bulldozers qui sont là pour l'épandage et les camionneurs ne sont plus là. Alors s'il y avait...

M. BELLEMARE: Je pense, M. Roy, que c'est justement ce que voulait dire le ministre de la Voirie, à la suite de la question qu'avait posée l'honorable M. Pinard, c'est justement ce qu'il a dans son outil de travail, dans son rapport ministériel.

M. LAFONTAINE: Je lis ce que j'ai fini de lire cette nuit à trois heures. C'est la clause de protection locale, 75-25. La clause de protection locale annexée au contrat de voirie est la suivante: « Lors de l'exécution du présent contrat, le nombre de camions utilisés par l'entrepreneur et ses sous-traitants, pour le transport des matériaux granulaires de mélange bitumineux devrait être composé en tout temps d'au moins 75% des camions appartenant à des camionneurs-artisans de la région. Ces camions seront rémunérés suivant la cédule des justes salaires du ministère du Travail de la province de Québec tant pour le transport à la tonne ou à la verge cube que pour le tarif horaire. « Cette clause fut originellement appliquée par le ministère de la Voirie aux contrats inférieurs à $150,000. Elle a été par la suite étendue par cas d'exception à quelques contrats inférieurs à $500,000, à cause de son caractère irrationnel et de la majoration de coût qu'elle peut entraîner, le gouvernement fédéral ne l'accepte pas sur les contrats partiellement subventionnés par Ottawa. »

UNE VOIX: Dans le cas de fixer des taux...

M. LAFONTAINE: Maintenant, si jamais on arrivait avec ça, cela voudrait dire une augmentation, une dépense additionnelle de 20% pour le ministère de la Voirie. Il faudrait majorer les taux de transport de 20%. Alors je me ra-croche un peu à ce que vous disiez tout à l'heure, quand vous faites du transport sur une grande route, c'est probablement moins cher.

Les demandes de soumissions sur le bordereau, si tout le monde s'entendait là-dessus, ce serait peut-être un solution pour mettre tout le monde sur le même pied. Lorsqu'on soumissionne, avec une extension à l'effet que le transport de matériaux granulaires ou bitumineux pour les travaux de voirie seraient à prix fixe à être fixés par le gouvernement, cela ferait l'affaire et des camionneurs-artisans et des camionneurs de l'Association des entrepreneurs.

Cela ne ferait peut-être pas une chicane, mais la tension diminuerait définitivement. Parce qu'à ce moment-là, tout le monde soumissionnerait sur le même tarif et je pense que les entrepreneurs auraient moins d'avantages à avoir leurs propres camions, à moins des seuls à l'exception des camions affectés au transport de matériaux généraux. Je pense que ça ferait l'affaire de tout le monde.

M. HOY: J'aurais peut-être un mot à ajouter sur la clause 75-25. Elle existe depuis environ deux ou trois ans. C'était 75% du nombre de camions et on demande le tonnage. Maintenant, notre association croit que les 75% du volume sont un peu exagérés. On voudrait essayer de s'entendre peut-être pour 50% du volume. Celui-ci équivaudrait probablement à la même chose, parce que peu à peu, beaucoup d'entrepreneurs n'ont pas de camions à leur disposition. Alors, tout le tonnage irait au complet aux camionneurs. Et puis, peu à peu, les entrepreneurs disposeraient de leurs camions et atteindraient facilement les 85%. Parce qu'on croit que c'est un peu draconien de partir, du jour au lendemain, de la recommandation du rapport Lippé que l'entrepreneur peut prendre tous ses camions et d'aller du Jour au lendemain à 75-25 du tonnage. Alors, peut-être qu'en y allant par paliers, on pourrait s'entendre sur 50-50.

M. BELLEMARE: Cela resterait à fixer après les rencontres qui pourraient avoir lieu entre les parties.

M. LE PRESIDENT: M. Marc Tougas, de l'association de Missisquoi.

M. TOUGAS: Je crois que notre association a préféré donner la place à une autre association.

M. LE PRESIDENT: Merci. M. Rosaire La-montagne, Association nationale des camionneurs-artisans Inc.

M. LAMONTAGNE: M. le Président, je crois que je n'en aurai pas beaucoup à dire là-dessus. D'accord, comme M. Bellemare l'a dit tout à l'heure, quand on aura une association reconnue dans le comté, ça va régler pas mal les premiers problèmes. J'aimerais répondre à M. Roy qu'à propos de ce qui vous a amené tout à l'heure à dire des camionneurs qui ont demandé les services voulus, je peux vous dire qu'à propos de ça, les camionneurs n'ont jamais eu d'ennuis des entrepreneurs à ce sujet. Ce qui a causé cette situation, c'est que les entrepreneurs font promener les camionneurs dans le chemin durant une ou deux journées, en prétextant qu'ils ne peuvent remplir car leur pelle est brisée. On se promène donc dans le chemin une couple de jours et, la troisième journée, on n'est pas prêt à partir le matin à sept heures pour retourner voir si l'entrepreneur est prêt! Cela fait que lorsque sa pelle est réparée, qu'il est aux environs de trois heures, trois heures trente et qu'il nous appelle pour qu'on retourne charroyer, ce qui nous oblige à faire trois ou quatre milles, souvent on n'y va pas. Cela fait deux jours qu'il nous fait attendre, qu'il attende son tour à demain matin. C'est là qu'est le problème.

M. LAFONTAINE: Je pense bien que vous allez admettre qu'à ce moment-là ce sont des cas particuliers qui sont liés certainement avec la pratique des soumissions publiques. Si l'entrepreneur n'était pas obligé de rencontrer des charges fixes et les données de son contrat, je pense bien qu'il ne serait pas assez sans coeur pour ne pas dire de s'en aller pour trois ou quatre heures. L'entrepreneur est pris avec son contrat, lui. S'il ne fait pas d'argent avec son contrat ou s'il en perd, il ne sera pas entrepreneur bien longtemps et je pense bien qu'on ne peut blâmer personne de travailler pour ses intérêts.

M. LAMONTAGNE: Au volume, cela règlerait le problème.

M. LAFONTAINE: Maintenant, voici les conclusions d'un chapitre, si vous me permettez. « Une majoration de 20% des taux est à prévoir sur le contrôle des charges qui sont appliquées. Certains camions, les plus gros, seront durement touchés par l'application du contrôle des charges et, troisièmement, une majoration du taux de transport de 20% créera un déboursé additionnel de $3 millions au ministère de la Voirie.

Mais ce même déboursé aurait cependant dû être fait sous forme de réparations, si l'estimation actuelle était maintenue. Cela veut dire que, si l'on renouvelait les charges, on aurait une économie de quelques dizaines de millions. On a vu cela dans le rapport Lippé et

certains journaux l'ont répété à satiété. Cela veut dire que, si on contrôle les charges, ça coûte plus cher au ministère de la Voirie, mais ça coûte moins cher en réparations. Si on endure les charges telles qu'elles sont présentement, ça coûte moins cher directement en taux de transport, mais, par contre, ça coûte plus cher en réparations et les deux s'équivalent au bout de l'année. Alors, ce n'est pas une économie de $10 millions, comme on l'a prétendu en certains milieux.

M. LAMONTAGNE: Je suis d'accord avec vous, M. le Ministre, parce que la grosse charge, vous savez, elle ne paie pas pour personne. Cela va équilibrer, si vous voulez, si un gars peut travailler avec son camion. Et savez-vous qu'un entrepreneur, et ça, je peux le prouver, j'en ai fait l'expérience, fait plus d'argent avec des camionneurs à charges contrôlées qu'avec des camionneurs avec des charges non contrôlées. Parce que vous savez — il y en a qui prennent cela, si vous voulez, comme si n'importe qui pouvait être camionneur — je peux vous dire que pour faire un bon camionneur, cela prend plusieurs années, parce qu'il faut que le gars réalise tout ce qu'il peut faire avec son camion, sans le briser et vivre avec cela. Ils vivent avec cela, à cause de leur expérience de dix, quinze, vingt ans. Tandis que le nouveau qui arrive sur le marché et qui cause des problèmes tout le temps, par rapport aux unions que nous avons, et nous n'étions d'ailleurs reconnus nulle part, celui-là amène toutes les chicanes, parce que lui, il n'a pas d'expérience. C'est comme si, demain matin, je vous donnais $100 par jour, avec votre camion, et que vous arriviez chez vous et que vous disiez: J'ai gagné $100 aujourd'hui. Mais vous n'aurez pas compté que vous l'avez brisé pour $100 ou $125. Tant que vous avez voulu travailler, votre camion a charroyé. C'est là, et la charge, nous ne sommes pas contre cela.

Ce que M. Roy disait tout à l'heure, il y a une chose contre laquelle, c'est l'affaire de 50%. Nous, ça fait déjà des années que nous nous défendons pour avoir le charroyage du gouvernement à 75%, et là maintenant que nous réussi-sons un peu à défendre notre cause nous la donnons aux entrepreneurs. Je crois que ce n'est pas Juste, pour notre part, de laisser aller cela de cette façon.

C'est comme pour l'affaire des gros camions à $0.04 brut. Les gros camions limitant la charge à $0.04 et $0.05 brut on ne devrait plus parler de cela. Cela n'a plus de sens. C'est un problème qu'il ne sert à rien d'entamer, parce que cela n'existera plus. Ce qui arrive justement sur la charge, le gros entrepreneur, dans l'affaire de 50-50, ce qui arrive normalement, il fait ce qui est bon, et le reste, il le laisse aux petits. Lui, il va charroyer du concassé il va prendre son gros camion, c'est payant et il peut charger tant qu'il veut, mais, sur le moment, vous ne le verrez pas, il va être parti sur un autre travail.

Je vous remercie M. le Président, de m'avoir accordé la parole.

M. LE PRESIDENT: Merci M. Lamontagne. L'honorable député de Charlevoix.

M. MAILLOUX: Au sujet de ce que le ministre de la Voirie avait dit tantôt, pour faire suite au travail fait par les officiers du ministère, cela coûterait à peu près $3 millions de plus pour les 75% qui seraient accordés sur l'article transport. Je pense qu'il y a un montant qui devrait être ajouté à cela. C'est que en dehors des $3 millions qu'il en coûterait en supplément pour promulguer des taux que devraient respecter les entrepreneurs, j'imagine mal que le camionneur, artisan ou autrement, puisse continuer à oeuvrer si le respect des pesanteurs, des charges...

M. LAFONTAINE: Voici, les 20%, c'est justement si on appliquait les pesanteurs. A ce moment-là, cela demanderait au ministère de la Voirie une dépense supplémentaire. Autrement dit, il faudrait majorer les taux de 20% pour rendre justice aux camionneurs, qu'ils soient artisans ou autres, parce qu'ils vont charger moins pour donner un salaire équivalent. Et après cela, disons qu'à ce moment-là, cela va économiser nos revenus et nous allons faire une économie substantielle. Par contre, cela va coûter cette somme additionnelle à la Voirie, $3 millions par année. Alors, d'après les officiers du ministère de la Voirie, nous n'avons aucune économie, disons, sur l'entretien pour le ministère de la Voirie. Cela ne coûte rien de plus.

M. PINARD: II faudrait des études scientifiques pour savoir ce qu'il en coûte de plus pour entretenir les routes à cause des surcharges des camions. Il faut faire le « Benkelman test », pour savoir la capacité de support des routes par rapport à telles charges qui leur sont faites. C'est très technique, mais je pense bien que ça saute aux yeux que ces surcharges augmentent beaucoup plus le coût d'entretien au ministère de la Voirie que les charges normales. L'Ontario a fait ces enquêtes et ça été révélateur.

M. LAFONTAINE: Disons que nous sommes pris présentement avec les arrêtés ministériels qui sont passés entre 1960 1965 et Je pense que, pour la limitation de certains camions, ça va être Jusau'en 1971, ce qui a été accepté par l'arrêté ministériel moratoire.

M. LE PRESIDENT: Au comité siégeant pour la fixation des normes des justes salaires, le juste poids sera discuté au cours d'une prochaine séance. M. Gaston Cournoyer, de l'Association régionale de la Mauricie, s'il vous plaît, est-ce que vous avez des commentaires?

M. COURNOYER: M. le Président, MM. les Ministres, Gaston Cournoyer est mon nom, président de la Fédération des associations des camionneurs de la Mauricie. Je crois que l'on a élaboré beaucoup sur le grand malaise du camionnage au Québec. Evidemment, on a toujours parlé des travaux en relation avec le gouvernement provincial. Le camionneur au Québec ne retire pas toute sa source de revenus uniquement à même le gouvernement du Québec. Je crois que M. le ministre de la Voirie tout à l'heure a touché quelques mots vis-à-vis des grandes entreprises forestières et ça ne se limite pas là. Malheureusement, on ne voit pas beaucoup de réglementation pouvant permettre aux camionneurs de se bien situer dans le monde du travail. On a discuté évidemment de camionneurs-artisans. La fédération que je représente ne représente pas directement l'artisanat, les camionneurs-artisans, malgré que 70% ou même 75% de nos camionneurs soient des camionneurs-artisans.

A plusieurs reprises, j'ai eu l'occasion de discuter du problème du camionnage avec M. Bellemare qui, entre autres, à un moment donné, nous a favorisé des possibilités de discuter justement vis-à-vis de ces entreprises forestières. La Mauricie est située au plein coeur du Québec, en pleine forêt si l'on veut. C'est là où nos camionneurs retirent en grande partie leur gagne-pain. C'est assez facile pour ces compagnies de pâte à papier, si vous voulez ou pour ces exploitants forestiers d'utiliser les camionneurs pour toutes sortes de tâches, eux aussi, comme l'association des transports routiers a ses camions. Ils les utilisent ordinairement dans les meilleures conditions possibles. Et quand ils ont un vrai bon trou, justement c'est là qu'on envoie ces camionneurs, ces pauvres bonhommes qui n'ont pas tellement de possibilités ou qui n'ont pas encore cette voix de représentation.

Malheureusement, les camionneurs ont une tendance trop marquée à vouloir situer leurs problèmes uniquement à l'échelon du gouvernement provincial. Il y a aussi d'autres formes de problèmes qui se posent à l'échelon du gouvernement fédéral qui vient faire des travaux ici au Québec, et les camionneurs n'ont aucune possibilité de défendre leurs droits.

En foret, ils n'ont aucune possibilité non plus de discuter de la question de taux, de la question d'organisation, de rendement. On envoie nos hommes sur des distances de plus de 100 milles en forêt, sans aucune protection, absolument rien du tout. On ne leur donne aucune chance. La seule chance qu'ils ont, c'est de crever ou bien de passer.

Bien entendu, la question de compétition entre les camionneurs, ce n'est pas une mince affaire. Ces messieurs, pour pouvoir survivre, sont obligés ou ont estropié cette fameuse norme des justes salaires, dans le passé. On s'est servi souvent des camionneurs — je ne dirais pas les entrepreneurs, ils s'en sont servis, les entrepreneurs des routes du Québec - je dirai que des entrepreneurs se sont souvent servis des camionneurs pour pouvoir faire de meilleures affaires. C'est bien certain.

Nous ne croyons pas, nous de la Fédération, pouvoir ou même avoir les qualités requises pour pouvoir résoudre le grand problème du camionnage au Québec. Nous sommes probablement du groupe des braillards. Nous avons créé pas mal de problèmes. Certainement un manque d'expérience nous a obligés à créer ces problèmes. Il y a certainement d'autres facteurs aussi qui ont contribué évidemment à créer ces fausses situations.

Je suis favorable, avec mon ami M. Dufour, à la création ou à l'organisation d'une grande organisation de camionnage à l'échelon de camionneurs-artisans au Québec. C'est sûrement ou probablement un moyen pour aider au travail ou au programme d'organisation, de correction de tous ces problèmes. Je ne désire pas allonger le discours ici... Oui, monsieur...

M. MAILLOUX: Relativement au problème du transport du bois en forêt, qui représente peut-être au-delà de 50% des sources de revenu des camionneurs, est-ce que dans la région de la Mauricie, comme dans d'autres endroits du Québec, on respecte le mesurage? Est-ce qu'on vous donne bien les mesures exactes sur vos charges ou si vous avez des difficultés de ce côté-là?

M. COURNOYER: II est bien entendu que la question de la réglementation ou de la question du mesurage, cela se fait à peu près de n'importe quelle façon. Il se transporte chez nous

de grandes quantités de bois par camion. Et, j'ai remarqué dans votre exposé, dans les débats, cette mention des extensions ou des foulages de longueur de cordes. Cela se pratique aussi bien chez nous, je ne dirais pas d'une façon plus élaborée, mais cela se pratique « au coton ». Cela ne se pratique pas uniquement dans le transport du bois de pâte, cela se pratique aussi sur le transport des grumes, des billots...

M. MAILLOUX: Le transport des...?

M. COURNOYER: Des grumes, des billots. On utilise aujourd'hui, la grume de façon beaucoup plus rationnelle. C'est-à-dire qu'il y a une quinzaine d'années, on utilisait peut-être la grume à 60% ou à 50%. Aujourd'hui, on peut l'utiliser jusqu'à 90%. Alors, le camionneur qui doit en faire, lui, le transport n'est pas justement rémunéré en rapport avec la quantité ou le volume de bois transporté.

Je n'irais pas dire, par exemple, que les organisations de mesurage ou les réglementations de mesurage ne sont pas correctes, mais il y aurait certainement des corrections à apporter sur ce côté-là. C'est quelque peu indirectement avec le gouvernement mais c'est certainement en grande partie une responsabilité du gouvernement.

Si vous me le permettez, M. Mailloux, je voudrais mentionner ici, par exemple, un autre genre de travail où les camionneurs ont aussi à oeuvrer au Québec. C'est que le long du fleuve Saint-Laurent qui coule sur une assez bonne distance dans le Québec et c'est chez nous dans le Québec, le fleuve Saint-Laurent, le gouvernement fédéral fait des travaux majeurs qui sont ordinairement rémunérés à $0.03, $0.04 et assez rarement à $0.05, net.

M. PINARD: Le mille?

M. COURNOYER: Le mille, naturellement.

M. PINARD: La tonne-mille?

M. COURNOYER: Bien c'est-à-dire, oui. Evidemment, parce que, voyez-vous, il n'y a pas de réglementation là-dessus.

Je veux ici remercier M. Bellemare qui nous a grandement aidés à commencer, si l'on veut, à discuter et à trouver une solution à ce problème. Je pense que nous sommes encore loin d'une solution mais nous avons quand même amorcé quelque chose dans ce sens-là. C'est un très grand problème, parce que je comprends que, si les camionneurs du Québec paient des taxes au Québec, ils en paient aussi à Ottawa et nous aurions quand même le droit, de temps en temps, de recevoir quelque chose. Et comme c'est chez nous, dans le Québec, il me semble qu'il pourrait se faire quelque chose dans ce sens-là. Nous ne sommes pas des législateurs. Nous ne sommes même pas, comme M. Dufour l'a dit tout à l'heure, des avocats. Les lois, nous ne les connaissons pas à fond, mais nous aimerions bien ça, de temps en temps, si ça nous revenait, notre part de travail. Je crois bien que, toujours piétiner sur le gouvernement du Québec, c'est une partie, mais il y a d'autres formes de travail aussi, et je pense qu'il est maintenant temps pour les camionneurs de prendre aussi leurs responsabilités, car il ne leur faut pas toujours demander aux autres de régler leurs problèmes, il faut qu'ils apportent, eux aussi leur contribution et, autant que possible, une contribution assez franche. Cela arrive de temps en temps qu'ils se penchent sur leurs problèmes mais ne les regardent pas toujours comme étant les problèmes d'un autre. Alors, je crois que ce serait suffisant comme ça, M. le Président.

M. BELLEMARE: Je voudrais dire, M. Cournoyer, qu'à la suite de votre intervention, je suis personnellement entré en scène pour demander aux autorités fédérales, à tous ceux qui demandent des soumissions publiques dans les différents ministères, de changer les normes pour que ne se répète pas chez nous cette odieuse exploitation à laquelle se livrent certains entrepreneurs, parce qu'ils obtiennent des travaux de quais ou des travaux de remplissage qu'ils paient, comme vous le dites, $0.02, $0.03 et $0.04 et là, ça devient une surenchère et il s'établit une discrimination extraordinaire visà-vis du camionneur qui, lui, est obligé d'accepter le taux que lui impose l'entrepreneur.

Nous avons communiqué avec le ministre des Travaux publics à Ottawa et nous avons reçu une lettre que je voudrais bien rendre publique pour vous démontrer comment ces honorables messieurs se fichent bien de notre problème du camionnage. J'ai d'ailleurs envoyé une copie à votre association et vous avez dû prendre connaissance de la teneur de. cette lettre qui ne répond pas du tout à un besoin et que surtout, n'aide pas à trouver une solution pour guérir un mal.

Nous allons continuer et je m'en vais, dans quelques minutes, après votre intervention, annoncer une nouvelle quant aux discussions qui ont eu lieu ce matin et qui pourront peut-être faire le sujet d'une étude particulière.

M. COURNOYER: M. le Ministre, si vous

me le permettez, la Fédération des associations maintient le 75-25, privilège des camionneurs dans la localité, c'est une chose extrêmement importante, c'est une question de survie pour plusieurs de ces individus.

M. BELLEMARE: De volume. M. COURNOYER: De volume. M. BELLEMARE: D'accord!

M. COURNOYER: C'est une question de survie. Je vous remercie, messieurs.

M. BELLEMARE: M. le Président, messieurs les membres du comité, messieurs les fonctionnaires, messieurs, je n'ai pas besoin de vous dire combien a été enrichissante pour nous, ce matin, cette démonstration et surtout, ces plaidoiries qui ont été faites pour bien établir, à la suite du rapport Lippé, les besoins réels de tout un secteur de l'administration des gagne-petit en particulier, des camionneurs-artisans qui sont, depuis plusieurs années, laissés sans défense. C'est grâce au dévouement inlassable de quelques-uns parmi vous qui ont décidé, envers et contre tous, malgré certain chantage qu'on aurait pu faire à leur endroit, de demeurer comme des gens qui prêchaient une nouvelle doctrine, celle de la syndicalisation des artisans. Je tiens ici à leur dire merci et surtout à leur faire des félicitations.

Les témoignages que nous avons entendus ce matin, les rapports qui nous ont été faits, de part et d'autre, prouvent que le problème est immense, que les solutions sont loin d'être trouvées, qu'il y a des problèmes qui méritent d'être examinés plus intensément. Il y a des solutions qu'on a trouvées dans le rapport Lippé qui ne s'appliquent pas ou presque pas. Je pense qu'un rapport comme le rapport Lippé, qui contient bien des recommandations — il y en a onze ou douze - qui couvrent tout un secteur particulier, mérite une attention toute particulière. Et je crois que ceux qui pourraient le mieux nous les formuler, maintenant que le rapport est déposé et que le ministre de la Voirie a en main l'outil de travail qu'est l'étude faite par ses officiers pour connaître l'application du rapport Lippé, nous incitent aujourd'hui à vous recommander la composition d'un groupe de travail qui devrait à mon sens être assez actif d'ici le premier septembre.

Nous sommes en juillet, ce groupe de travail devrait se réunir au moins une fois par semaine, si possible, au Delta, au ministère du Travail, pour approfondir l'accréditation, le mot « sa- larié », les implications quant au 75-25, quant aux taux à être établis, quant au transport, quant à la limite, quant à la régionalisation, quant à tout l'ensemble du problème. Avec les outils qui nous ont été fournis par les études bien faites du rapport Lippé et les mémoires déposés et aussi avec l'outil de travail qu'a le ministère de la Voirie, nous pourrions peut-être avec l'aide de ce comité, arriver en septembre avec une solution pratique.

Ce comité pourrait être formé de deux membres, par exemple, du ministère de la Voirie, de deux membres du ministère des Transports et Communications, de deux membres du ministère du Travail, de deux députés du gouvernement, de deux députés de l'Opposition et de cinq membres des associations. Nous serions prêts, nous, à vous donner les noms des députés et des fonctionnaires qui en feraient partie. Il s'agirait maintenant de vous entendre, vous, pour désigner les cinq autres membres qui seraient appelés à travailler sur un approfondissement de ces données qu'on a en main maintenant pour les diriger vers une législation. C'est extrêmement prudent, il ne faut pas léser les droits acquis, il ne faut pas non plus tenir pour acquis les droits qu'on n'a pas. Et ceux qui sont déjà dans le champ du camionnage savent comme c'est sensible, le droit de l'autre ou le sien.

Or, nous pourrions vous suggérer les noms de M. Jean Laporte, conseiller technique au ministère des Transports et Communications, M. Laurent Cantln, Transports et Communications; à la Voirie, M. Gédéon Legault, qui est le directeur général des travaux de Voirie et qui était un membre de la commission Lippé; M. Jean Normand, de la Voirie, conseiller en recherche à ce même ministère; M. Léopold Jasmin, du ministère du Travail, qui était secrétaire de la commission Lippé; M. Roland Auclair, qui était officier au ministère du Travail, avec M. Boisseau, qui est le directeur des normes du Travail.

Nous pourrions, peut-être, vous recommander du côté du gouvernement, M. Roy, le président de notre comité ce matin et un autre député, M. Plamondon, qui a une région où il y a beaucoup de camionnage, de camionneurs, et de l'autre côté, on s'est entendu pour le nom d'un ancien ministre de la Voirie, M. Pinard, et M. Mailloux.

Si vous étiez prêts à nous donner vos cinq noms, nous pourrions convoquer le plus tôt possible une réunion, — une fois par semaine, oui M. Roy — ...

M. ROY: Est-ce qu'on pourrait porter de cinq à six le nombre de ceux qui sont en dehors

du gouvernement, pour qu'on ait trois entrepreneurs et trois camionneurs?

M. BELLEMARE: Bien voici, si vous mettez trois entrepreneurs contre trois camionneurs, vous laissez de côté toute une série d'autres gens, comme ceux qui font partie d'une autre association, Association des camionneurs, l'Association des artisans, la fédération indépendante. Je pense qu'il ne s'agirait pas d'essayer d'avoir des majorités.

M. ROY: Non, non.

M. BELLEMARE: D'ailleurs, devant les fonctionnaires qui sont là et les députés qui font partie du comité, je pense que cela va se faire dans un bel esprit comme ce matin, sans politiser le problème, mais objectivement pour trouver, enfin, une solution. Ce que nous voulons? Nous voulons une solutionpratique...

M. ROY: Est-ce qu'on pourrait être au moins deux?

M. BELLEMARE: ... c'est-à-dire qui ne brûle aucune liberté.

M. ROY: D'accord.

M. BELLEMARE: Alors, si...

M. ROY: On voudrait être au moins deux de l'association, un entrepreneur et moi-même, pour faire la continuité.

M. BELLEMARE: Alors, ce que l'on peut faire, on pourrait peut-être nommer deux entrepreneurs et cinq camionneurs. Pourquoi, est-ce que vous avez peur de cela?

M. ROY: Non, non, pas du tout.

M. BELLEMARE: Au contraire, c'est justement là que cela va se régler. Si on met seulement deux-deux, il n'y aura pas de vote, c'est sûr.

Alors, est-ce que vous seriez prêts à nous donner les noms de vos deux entrepreneurs?

M. MAILLOUX: M. Bellemare, est-ce que je pourrais suggérer que, dans votre comité, relativement aux fonctionnaires, il y ait un fonctionnaire du ministère des Terres et Forêts étant donné les implications avec la forêt?

M. BELLEMARE: On pourrait les convoquer si l'on veut.

M. MAILLOUX: Oui.

M. BELLEMARE: On pourrait les convoquer ceux-là et les faire venir.

UNE VOIX: Le comité se réserve le droit de convoquer?

M. BELLEMARE: Oui, oui, le comité, bien entendu, se réserve le droit de convoquer tous ceux qu'il voudra entendre, toutes les parties, même le ministère de la Justice qui a la responsabilité des balances pour les surcharges. On pourra bien, nous aussi, dire que nous voulons être représentés. On pourrait là, les faire venir et les entendre, leur demander leur point de vue.

Alors, M. Roy, vous seriez peut-être prêt à nous donner les noms, vous, de votre association.

M. ROY: Disons, M. Marcel Bédard... M. BELLEMARE: M. Marcel Bédard.

M. ROY: ... qui est président du comité de camionnage chez nous.

M. BELLEMARE: M. Marcel Bédard. M. ROY: ... et moi-même.

M. BELLEMARE: Raymond Roy. Alors, M. Jasmin pourra servir, lui, comme secrétaire du comité, M. Boisseau est membre, lui, représentant du ministère du Travail.

M. Jasmin vous allez faire les convocations, vous allez prendre les noms, les adresses de ces messieurs-là. Je vous donnerai, ici, ceux des fonctionnaires et des députés. Est-ce que l'Association des camionneurs...

M. BILODEAU: Voici, M. le Ministre, d'abord nous voudrions savoir si les associations ont droit à un membre, un représentant ou plus d'un représentant?

M. BELLEMARE: Un représentant, ce serait suffisant.

M. BILODEAU: Bon, alors pour l'association du camionnage, M. Roméo Blouin.

M. BELLEMARE: Roméo Blouin, d'accord.

M. BILODEAU: Pour les artisans, l'avocat Bernler.

M. BERNIER: Voici, je pense que le président va en dire un mot, je pense qu'il est obligé de consulter son exécutif, M. le Ministre.

M. DUFOUR: Pour le moment, comme nous n'avons pas été prévenus de la chose, je pense que nous pourrions consulter l'exécutif et en même temps probablement consulter M. Cournoyer. Il me faisait signe tout à l'heure.

M. BELLEMARE: Est-ce que, pour partir ce matin, on ne pourrait pas inscrire votre nom, celui de M. Cournoyer, ça en ferait toujours trois? Alors M. Dufour et M. Cournoyer, il resterait encore deux autres qui pourraient être... Mais vous n'êtes pas obligés de les donner aujourd'hui. Vous communiquerez avec M. Jasmin, qui est le secrétaire de ce groupe de travail, et là vous pourrez être entendu, M. Bilodeau.

M. BILODEAU: Je réprésentais également le Syndicat des camionneurs de Lévis, représenté ici par M. André Viens, qui serait disposé à faire partie du comité.

M. BELLEMARE: C'est une association indépendante, c'est un syndicat professionnel. C'est de comté ça. Ce n'est pas provincial?

M. BILODEAU: C'est de comté. Nous soumettons son nom si...

M. BELLEMARE: Si on commence par tous les comtés, je vais nommer le mien chez nous. Un nommé Clément Bordeleau et je vous dis qu'il est bon. Ce n'est pas parce qu'il est de l'Union Nationale qu'il est bon, c'est parce qu'il est bon camionneur.

M. SAINT-GERMAIN: Cela aide un peu.

M. BELLEMARE: Je ne dis pas qu'il y a des petites tendances, là.

Alors il restera pour les autres camionneurs deux autres postes à combler; est-ce que ça vous satisferait Messieurs les membres du comité, cette décision de...

M. DUFOUR: Oui, mais d'un autre côté, à mon avis, je crois qu'on aurait satisfaction, d'après l'ensemble des membres. Là, il nous resterait une liste de noms qu'on pourrait utiliser, nous, à dresser dans le domaine forestier, qui est un domaine assez...

M. BELLEMARE: Vous donnerez les noms à M. Gosselin et ils vont s'entendre.

M. DUFOUR: Justement.

M. BELLEMARE: Maintenant, la première réunion aura lieu jeudi prochain au Delta.

Il ne sera pas question de pêche, il sera question de travail. Les camionneurs ont besoin d'être entendus et on va les entendre. Alors la première réunion aura lieu jeudi prochain qui se trouve à être le 11 juillet et le travail devrait être terminé pour la première semaine de septembre, au plus tard. D'accord?

M. BERNIER: Merci beaucoup, M. le Ministre.

M. BILODEAU: Est-ce que l'heure est déterminée, M. le Ministre?

M. BELLEMARE: Dix heures, chambre 1006. Le numéro de téléphone 693-4810.

M. TOUGAS: M. le Ministre, j'aurais une question à poser ici.

M. BELLEMARE: M. Tougas, si vous voulez me permettre, il y a un monsieur en arrière qui a levé la main.

UNE VOIX: C'était seulement pour savoir l'heure.

M. BELLEMARE: II est bien entendu que le comité siège à huis clos. Il est bien entendu que ce n'est pas pour la publicité non plus, c'est un groupe de travail. Il n'est pas question de faire de communiqué de presse. Il n'est pas question non plus de dire ce que nous allons réaliser. C'est un groupe de travail.Nous n'imposons le bâillon à personne, mais je dis aux honorables messieurs de la presse de nous donner la chance ensemble de régler notre problème de famille. Après cela nous ferons une grosse conférence de presse et on va tout annoncer cela.

M. DUFOUR: Je remercie le ministre, c'est une idée que l'on avait suggérée depuis longtemps.

M. BELLEMARE: Mais pas de conférence de presse et pas de déclaration, comme vous en avez déjà faites en dehors, mon cher monsieur. Elles ne sont pas alléchantes et surtout dans le patronage, nous n'aimons pas beaucoup cela.

M. PINARD: Les faits sont les faits.

M. BELLEMARE: Les faits sont contre-

dits. D'ailleurs, monsieur l'a dit. Nous ne sommes pas pour recommencer cela, ce matin.

M. TOUGAS: J'ai ici en main, onze factures pour transport de gravier qui n'ont pas été payées de la firme PCL Saint-Jean, M. Ouimet, du 3 mars 1967, et il refuse de les payer.

M. BELLEMARE: Je ne comprends pas votre question.

M. TOUGAS: Ce sont onze factures pour transport de gravier...

M. BELLEMARE: Oui, mais je ne comprends pas pourquoi cela vient ce matin. C'est un cas particulier.

M. LAFONTAINE: Ecoutez, si le ministre me le permet, dans un cas semblable, envoyez cela au ministère de la Voirie et le ministère de la Voirie ne paie pas entièrement l'entrepreneur sans qu'il ait acquitté ses comptes. Mais, encore là, il faut que le ministère de la

Voirie le sache. Et je pense bien que la plupart des entrepreneurs le savent.

M. TOUGAS: Parce que, actuellement, il refuse complètement de les payer.

M. LAFONTAINE: C'est un cas particulier, envoyez cela au ministère de la Voirie.

M. LE PRESIDENT: Messieurs, juste un instant. Je voudrais remercier tous ceux qui ont participé au comité des Relations industrielles et je voudrais mentionner aux gens qui ont assisté et qui ne connaissent pas la procédure, que ceux qui veulent se procurer le journal des Débats qui a été imprimé aujourd'hui, s'adresseront à M. Benoît Massicotte, responsable du journal des Débats. Il y en a qui voudront relire ce qui s'est passé ici, s'en servir comme cahier de travail, alors c'est disponible au bureau du responsable du journal des Débats, M. Benoît Massicotte. Merci beaucoup.

(12 h 50)

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