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Version finale

29th Legislature, 4th Session
(March 15, 1973 au September 25, 1973)

Friday, May 25, 1973 - Vol. 13 N° 64

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude des crédits du ministère des Richesses naturelles


Journal des débats

 

Commission permanente

des richesses naturelles et des terres et forêts

Etude des crédits du ministère des Richesses naturelles

Séance du vendredi 25 mai 1973

(Onze heures)

M. HOUDE (Limoilou) (président de la commission permanente des richesses naturelles et des terres et forêts): A l'ordre, messieurs!

La commission des richesses naturelles et des terres et forêts, étude des crédits 73/74 du ministère des Richesses naturelles. L'honorable ministre des Richesses naturelles.

Remarques préliminaire

M. MASSE (Arthabaska): Je vais faire un bref exposé pour tenter de réviser en quelques mots le travail du ministère au cours de l'année écoulée et les principaux projets pour l'année en cours.

L'étude des crédits est, je pense, une excellente occasion pour faire le point sur les activités. En tant que ministre responsable de la gestion d'un certain nombre de ressources naturelles, l'objectif général que nous recherchons est l'apport accru au bien-être de la population du Québec en maximisant les retombées économiques de l'exploitation de ces ressources et en assurant la sécurité des approvisionnements tant au niveau des matières énergétiques que des matières minières et hydriques.

Le secteur de l'eau. Au cours de l'année qui vient de se terminer, mon ministère en tant que responsable de la gestion des ressources hydriques, a analysé les rapports de la Commission d'étude des problèmes juridiques de l'eau et a rédigé un document de politique dans ce secteur. Ce document traitera dans une première partie de l'eau en tant que ressource vitale. Dans une deuxième partie, nous exposerons les données du problème global que pose cette ressource au niveau du Québec. La troisième partie de ce document traitera de l'orientation globale de la politique de l'eau. Cette troisième partie exposera des objectifs généraux et particuliers, de même que des politiques instrumentales nécessaires à l'atteinte de ces objectifs.

Déjà, à la direction générale des eaux, une réforme administrative a été effectuée pour réaliser plus parfaitement nos objectifs en tant que gestionnaires de l'eau. En effet, le service d'hydrogéologie auparavant à la direction générale des mines, a été intégré à la direction générale des eaux. Le nouveau mandat confié à ce service est donc de faire des plans d'inventaires régionaux des nappes d'eau souterraines et ce, pour fins d'alimentation domestique, industrielle et agricole et aussi, pour connaître la qualité de nos eaux souterraines et les protéger contre les actions causées soit au niveau du drainage, de l'enfouissement sanitaire, de l'exploitation des mines, etc.

D'autre part, nous avons mis l'accent sur la recherche d'une meilleure connaissance de la qualité de vie des lacs et rivières du Québec. Ainsi, l'an passé, nous avons analysé à fond dix lacs et avons l'intention d'en faire autant cette année dans les territoires où nous affrontons des problèmes majeurs.

Ce service a également commencé, l'an passé, l'inventaire de la qualité de la vie des lacs et des rivières de la baie James et poursuivra ses études au cours de l'année, compte tenu des modifications susceptibles de survenir dans ce territoire.

Nous avons encore modifié le mandat de la direction de l'aménagement pour lui faire jouer un rôle plus dynamique et plus global face à l'élaboration de plans de gestion de la ressource eau. L'an passé, nous avons fait un plan préliminaire indiquant les principales actions nécessaires à la lutte contre les inondations dans la région de Montréal. Nous poursuivrons cette année ce plan en tentant de le compléter compte tenu de tous les ministères provinciaux, fédéraux, de même que les organismes nationaux et internationaux impliqués dans ce problème.

Encore au niveau de l'aménagement, nous avons, l'an dernier, proposé un plan de lutte aux inondations sur la rivière Richelieu et nous poursuivons cette année au niveau du gouvernement fédéral de même qu'au niveau du gouvernement américain, les consultations nécessaires pour réaliser ce plan.

Face à ce problème complexe que sont les inondations au Québec, nous avons entrepris plusieurs actions qui vont se poursuivre cette année autant au niveau du zonage des plaines d'inondation qu'au niveau des prévisions de crues, de fontes de neige, comme de précipitations, de même qu'au niveau des travaux de protection. En plus, nous poursuivons nos négociations avec le gouvernement fédéral pour tenter de faire modifier les normes sur lesquelles s'appuie le gouvernement fédéral pour rembourser les provinces en cas de désastre. Notre direction de l'aménagement se préoccupe encore de tout le problème de la régularisation du Saint-Laurent, de même que l'érosion côtière dans le golfe et du problème de sédimentation causée par le dragage du chenal.

Enfin, nous avons confié à notre service de domaine hydrique un nouveau mandat pour donner suite aux nombreux problèmes causés par l'occupation des berges dans la région de Montréal. En effet, l'an passé, nous avons pris des injonctions contre plusieurs intervenants et nous entendons bien, cette année, produire des plans d'affectation des berges dans la région de Montréal puisque nous considérons cette région comme prioritaire.

Nous verrons, avec l'étude des crédits qui suivra, les projets à venir dans le domaine des immobilisations dans le secteur de l'eau.

Les mines. Au cours de l'année qui vient de se terminer, mon ministère en tant que responsable de la gestion des ressources minérales du Québec, a mis au point un schéma d'étude devant nous conduire à une connaissance plus exacte de ce secteur pour nous permettre de prendre des décisions qui s'imposent. Dans une première partie, nous analyserons les principales caractéritiques du secteur minier à travers le monde comme au Québec. Dans une deuxième partie, les principaux types de politiques minières à travers les pays producteurs de même que les pays consommateurs et une dernière partie sera une problématique globale, compte tenu des contraintes et des possibilités inhérentes à l'industrie minière.

Bien sûr, ce travail de base est un travail à long terme et ces inventaires et analyses que nous entreprenons devront se poursuivre pendant plusieurs années. Ceci ne signifie pas qu'à court terme nous resterons inactifs. En effet, dès cette année, nous mettrons l'accent sur la recherche de moyens pour augmenter la production de produits finis à base d'amiante faits au Québec. Nous mettrons aussi l'accent sur les moyens nécessaires à l'augmentation de la recherche sur les ferro-aliages et la métallurgie extractive. Nous rechercherons également les moyens pour rendre possible l'exploitation de petits gisements actuellement connus mais qui sont restés inexploités. Enfin, nous voulons mettre l'accent sur l'achat au Québec d'équipements miniers, en collaboration avec le ministère de l'Industrie et du Commerce de même que sur la formation de cadres miniers par les entreprises de ce secteur en collaboration avec le ministère de l'Education.

Tous ces travaux dont je viens de vous donner un bref aperçu sont sous la responsabilité de la direction de l'économie minérale que nous avons mise sur pied l'an passé. C'était certes une nécessité pour le Québec de se doter d'une telle direction.

Au niveau de l'exploration, nous avons mis l'an dernier nos efforts dans le Nord-Ouest québécois comme vous le savez et les résultats ne se sont pas fait attendre puisque des découvertes ont été annoncées comme c'est le cas pour New Insco et Iso Copperfields. Nous avons donc l'intention de poursuivre nos travaux d'exploration non seulement dans le Nord-Ouest mais aussi en Gaspésie et ailleurs. Une mesure importante vient d'être prise, soit d'accorder une augmentation substantielle du capital-actions de SOQUEM. Cette année, en plus des budgets réguliers, nous tenterons, par une législation touchant la révocation de certains droits miniers, d'assurer la venue de capitaux dans ces territoires où des problèmes de droits miniers empêchent, retardent et nuisent à l'exploration.

Au niveau du secteur minier, nous avons entrepris et poursuivrons cette année des négociations avec le gouvernement fédéral pour que la politique canadienne, face à certaines subs- tances minérales, soit la plus favorable possible au Québec.

Enfin, nous mettrons en place les infrastructures d'accueil qui permettront la mise en valeur de certains gisements actuellement connus; les endroits, on pourra les voir à l'étude des crédits des immobilisations. Dans une autre direction générale, c'est-à-dire celle de l'énergie, on a fait connaître la politique énergétique du Québec. Pour ce qui est du secteur du pétrole, nous avons souligné, à quelques reprises, la nécessité d'un port en eau profonde et comptons poursuivre la mission d'une telle politique cette année.

Tout récemment, nous avons mis en place un mécanisme pour la surveillance du commerce des produits pétroliers. De plus, nous avons mis l'accent sur l'incitation à l'exploration et, pour ce faire, nos services des bassins sédimentaires ont accéléré leurs travaux de recherche et ont analysé la possibilité d'augmentation du capital-actions de Soquip.

Concernant le gaz, mon ministère a fait une intervention auprès de l'Office national de l'énergie pour tenter d'éliminer l'augmentation du prix du gaz venant de l'Ouest qui défavorise le Québec. Enfin, nous avons fait plusieurs interventions pour promouvoir l'implantation du gazoduc venant du nord sur le territoire du Québec. Au niveau du secteur de l'électricité, nous avons mis sur pied, avec l'Hydro-Québec, un mécanisme permettant chaque année l'étude du programme de développement de cet organisme pour cinq ans à venir. Nous poursuivrons, au cours de la prochaine année, l'analyse de ce programme et nous avons l'intention d'inclure une étude spéciale de choix alternatifs pour la production d'énergie de pointe.

De façon plus générale, je tiens à préciser qu'au cours de la prochaine année, nous avons l'intention d'intensifier notre réflexion concernant une structure administrative qu'on pourrait appeler un tribunal de l'énergie.

Pour le dernier secteur, c'est-à-dire le Nouveau-Québec, l'an passé, nous avons analysé le mémoire de programme qui avait été commandé par le Conseil du trésor et nous avons élaboré une politique de développement du territoire du Nouveau-Québec ainsi que des populations autochtones qui s'y trouvent. Cette politique sera mise au point et publiée au cours de l'année.

Notre préoccupation, l'an dernier, a été surtout une meilleure qualité des services sur le territoire. En effet, nous avons donné plus d'autonomie aux régionales de Chimo et de Poste-de-la-Baleine. Nous avons augmenté la qualité des services de santé et de sécurité sociale. Nous avons mis sur pied un nouveau service de main-d'oeuvre et nous avons demandé au service de mise en valeur de réorienter son action, en tenant compte des ressources locales aptes à être exploitées par la population autochtone et pour leur bénéfice premier. Ainsi, au cours de cette année et au cours des prochaines

années, nous avons l'intention de mettre l'accent sur l'aide à la petite entreprise dans les secteurs pêche, chasse, artisanat, tourisme et industrie de transformation de base. Enfin, nous projetons, au cours de cette année, d'intensifier la réflexion sur une possibilité... Nous allons tenter de déterminer soit une structure du genre structure municipale ou organisme de regroupement répondant aux aspirations des autochtones de même qu'aux réalités socio-politiques du Québec.

Ce territoire est en effet très éloigné et possède des conditions climatiques très difficiles comme vous le savez, de même que des ressources naturelles limitées et une croissance de main-d'oeuvre extrêmement rapide. Il nous faut donc une politique cohérente de développement global de ce territoire.

Je pense que ces explications préliminaires vous donnent un tableau global des activités de mon ministère et nous permettent, je crois, d'amorcer la discussion dans le plus grand intérêt du Québec.

Merci, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Avant de pousuivre, j'aimerais apporter quelques changements aux membres de la commission. M. Dionne, de Compton, remplace M. Drummond de Westmount, M. Béland, de Lotbinière, remplace M. Tétrault d'Abitibi-Est, et M. Pépin, de Sherbrooke remplace M. Théberge, de Témiscamingue.

Le nom de M. Carpentier de Laviolette, est suggéré comme rapporteur de la commission. Accepté.

L'honorable député de Nicolet.

M. VINCENT: M. le Président, j'apprenais ce matin que j'avais ou que j'aurais le plaisir de m'attarder quelques heures aux crédits du ministère des Richesses naturelles.

Je dis bien que c'est avec plaisir que je le fais, parce que c'est la première fois que j'ai ou que j'aurai l'occasion d'analyser les crédits du ministère des Richesses naturelles.

Pour moi, le ministère des Richesses naturelles a une importance beaucoup plus grande que celle que généralement la population lui donne. Trop souvent, malheureusement, la population de nos régions, surtout du centre du Québec, pense que le ministère des Richesses naturelles sert seulement pour les barrages, les mines de l'Abitibi et c'est tout. On dissocie complètement l'Hydro-Québec du ministère des Richesses naturelles.

Je constate cependant que le ministère des Richesses naturelles est probablement le seul ministère au Québec qui s'occupe d'affaires municipales, d'éducation, d'agriculture, d'industrie et de commerce, même que le ministre mentionnait tout à l'heure d'artisanat; il s'occupe également d'énergie, d'un territoire grand comme le Nouveau-Québec, avec une administration assez considérable et des services en très grand nombre.

Il serait très long de parler de toutes les activités du ministère des Richesses naturelles dans ces secteurs particuliers des mines, des eaux, de l'énergie, le Nouveau-Québec, planification, administration et services. Pour ma part, comme c'est la première occasion que j'ai de m'y attarder, j'ai plutôt l'intention de revenir sur chacune des directions générales, de poser certaines questions, de demander au ministre de donner des précisions sur certaines politiques qu'il a déjà annoncées, qu'il a l'intention de mettre en oeuvre et je pense d'abord à la politique énergétique du Québec. A ce sujet, nous avons reçu un volume il y a déjà trois mois ou quatre mois, je crois, six mois. Je ne pense pas que ce soit encore une politique arrêtée, c'est un projet de politique.

M. MASSE (Arthabaska): Si vous me permettez de situer ce document, c'étaient des objectifs d'une politique énergétique, c'étaient des objectifs très généraux et je pense que, ce qui sera important, ce seront les moyens à mettre en place pour l'atteinte de ces objectifs.

M. VINCENT: D'accord, mais le ministre mentionnait tout à l'heure une politique énergétique telle qu'annoncée ou déposée par le gouvernement du Québec...

M. MASSE (Arthabaska): Objectif politique.

M. VINCENT: ... c'étaient plutôt des objectifs d'une politique énergétique. Je pense bien que le ministre aura tout à l'heure, ou dans les heures qui suivront, à nous donner plus de détails sur ces objectifs et surtout sur les intentions du gouvernement en ce qui concerne cette politique. Egalement, c'est la même chose en ce qui concerne les eaux. On sait que, depuis plusieurs années, il est fortement question de mettre de l'ordre dans toute cette richesse que sont les eaux au Québec. Il y a des relations assez étroites entre les ministères des Richesses naturelles, Agriculture et Colonisation, Terres et Forêts. Nous aurons des précisions à demander, mais un point particulier —je tiens à informer le ministre tout de suite — m'intéresse grandement. C'est lorsqu'il a parlé du gazoduc pour desservir le Québec. Je sais que ce projet est à l'étude depuis plusieurs années, que même certains hauts fonctionnaires s'y sont attardés plusieurs mois.

Nous aimerions, lorsque nous arriverons sur cette question, avoir plus de détails sur la réalisation de ce projet au Québec. Mais en ce qui concerne les services, je crois bien que nous aurons dans chacune de nos régions des problèmes particuliers à soulever au ministre des Richesses naturelles ainsi qu'à ses hauts fonctionnaires, mais, pour ma part, dès le début, je crois que c'est tout ce que je puis dire en nous réservant de revenir sur chacune des directions générales.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): L'honorable député de Lotbinière.

M. BELAND: M. le Président, concernant l'étude des crédits des Richesses naturelles, je dois d'abord préciser qu'un autre député de notre formation politique devait être ici ce matin et qu'il était naturellement préparé en conséquence. Comme j'arrive un peu comme un chien dans un jeu de quilles, il va sans dire qu'à ce moment-là je me limiterai, même si le ministère des Richesses naturelles, à mon sens, est un ministère des plus importants au Québec; les richesses de toute nature y abondent et il va sans dire qu'il doit y avoir une intensification de façon à avoir des politiques valables vis-à-vis de chaque élément que cela peut comporter tant au point de vue du développement des mines, que relativement aux possibilités du potentiel d'eau qu'il y a sur notre territoire. Peut-être que, par ricochet, j'éveillerai l'attention de l'honorable ministre et lui poserai des questions lorsque nous arriverons aux points plus précis à l'intérieur du programme. C'est pour cela que je l'avertis d'avance. Est-ce que nous avons au Canada, sur le plan canadien d'abord et deuxièmement sur le plan québécois, un inventaire assez exact de notre potentiel d'eau par exemple au Québec? Est-ce que ce fut fait ou est-ce qu'il y a des études présentement en cours qui peuvent démontrer avec assez de justesse où nous en sommes à ce sujet, étant donné les grandes possibilités à notre disposition? A-t-on exploité ces possibilités, dis-je, au point de vue, entre autres du développement de l'électricité, etc., etc.?

J'ai pris connaissance au mois de septembre, et plus précisément le 13 septembre 1972, d'une annonce de l'honorable ministre à l'effet qu'il y aurait quelque chose de bien spécifique au point de vue d'un tribunal de l'énergie. Lorsque nous arriverons à ce palier de programme, j'aimerais que nous soyons mis au courant de l'éventail de ce qui est fait, présentement, dans ce domaine, afin de pouvoir nous situer exactement et de pouvoir envisager ce que nous devons entreprendre à partir de ce travail.

Il y a également, entre autres, le domaine — d'ailleurs, l'honorable ministre en a fait mention tout à l'heure — du dragage sur certains de nos cours d'eau, entre autres notre fleuve. Encore là, est-ce qu'il y aurait possibilité, lors de cette étude des crédits, d'avoir un échantillonnage des problèmes majeurs — parce que je sais qu'il y en a — que l'on a ou que l'on peut avoir, que le ministère des Richesses naturelles affronte dans ce travail et savoir ce qu'il y aurait de plus urgent à faire et qui a été perçu par le ministère à ce sujet?

Le ministre a parlé également tout à l'heure, dans son bref exposé, de l'aide à la petite entreprise. Je suis fier qu'il ait abordé ce point car le Québec, je pense, connaît une nette recrudescence dans ce domaine et le ministère des Richesses naturelles doit emboîter le pas de façon très radicale afin de reprendre la place qui nous revient, pas la place des autres — nous ne voulons pas de la place des autres — mais nous voulons garder notre place. Nous voulons qu'au Québec il y ait une possibilité de développement pour tous les genres possibles de petites entreprises. A partir de nos richesses naturelles, il y a tellement de possibilités de développement de ce côté qu'il doit y avoir encouragement de toute nature afin que nos jeunes industriels québécois puissent réellement se lancer en affaires et grâce à toutes nos possibilités, tant aux points de vue minier, pétrolier et autres, avec nos richesses du nord, nos possibilités de développement au point de vue artisanal, par exemple.

Il y a d'immenses possibilités de ce côté qui n'ont peut-être pas été tout à fait assez encouragées dans le passé ou, si ce fut fait, c'est très peu connu du grand public.

On se fait souvent poser des questions à ce sujet et on ne sait trop quoi répondre. Or, à ce moment-ci, lors de l'étude des crédits de 1973, est-ce que l'on pourrait avoir également un aperçu de l'amorce de travail que le ministère envisage de faire au cours de l'année, afin de développer ce côté-là également?

Il fut question tantôt d'un certain travail fait à cause des inondations sur la rivière Richelieu. Est-ce que, de ce côté, nous avons aussi fait des recherches suffisantes pour les autres rivières semblables qui causent des dégâts considérables chaque année, pour pouvoir amorcer un plan d'action concret, comme entre autres, celui amorcé pour la rivière Chaudière... Je pourrais en nommer d'autres. Il y en a dans différents comtés du Québec qui, au cours principalement de la crue des eaux du printemps, causent des dégâts considérables de temps à autre, dégâts qui affectent les propriétaires riverains qui ne sont pas compensés, il va sans dire, pour ces pertes qu'ils subissent à tout moment.

Il va sans dire aussi que, grâce à notre magnifique fleuve Saint-Laurent, il y a possibilité que nous puissions avoir, du côté commercial, à partir de ces richesses naturelles, une amorce d'action pour intensifier le commerce et également le développement d'industries primaires, secondaires et tertiaires sur le bord de ce Saint-Laurent. Ce développement devrait avoir lieu en collaboration avec le ministère de l'Industrie et du Commerce dans une politique globale qui devrait être mise de l'avant. Présentement, il y a quasi uniquement au Québec, une espèce de poussée vers la grosse entreprise. Or, je me demande jusqu'à quel point nous allons subsister de cette façon, jusqu'à quel point il y aura possibilité pour le gouvernement de contrer le mécontement qui existe chez les Québécois.

Or, dans une politique réaliste de développement de nos industries primaires, secondaires et tertiaires, je pense que le ministère des Richesses naturelles devrait, dans son programme d'action, au cours de cette année, faire un effort plus que tangible, mettre l'accent de ce côté-là pour que la population puisse en bénéficier.

II faut ainsi redonner espoir aux Québécois, peut-être principalement aux jeunes qui ont une difficulté, qui ne se qualifie même plus, à se trouver du travail et aux jeunes qui voudraient exploiter une entreprise, qui sont atterrés, qui manquent de motivation présentement parce qu'à peu près rien s'offre à eux pour leur venir en aide, ou tout au moins les stimuler.

Or, M. le Président, je limiterai là mes quelques observations, quitte à revenir au fur et à mesure lors de l'étude programme par programme afin que nous puissions voir davantage clair dans la politique du gouvernement au cours de cette présente année.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): L'honorable député de Saguenay.

M. LESSARD: Alors, M. le Président, malheureusement je ne représente personne sinon moi-même. Nous entamons, je pense bien, M. le Président, l'étude...

M. VINCENT: Vous étudiez...

M. LESSARD: Je dis bien malheureusement, M. le Président.

Je pense bien qu'on commence l'étude d'un ministère particulièrement important. Sous peine de me répéter, je vais insister encore sur des choses dont j'avais particulièrement parlé l'an dernier. Si on demandait aux Québécois ce qui fait la richesse du Québec, je pense bien que tout le monde affirmerait, la réponse serait à peu près toujours la même : Ce sont les ressources naturelles. Pourtant, quand on regarde les revenus, les profits d'exploitation minière au Québec en 71112, on constate qu'elle a rapporté environ $16 millions. Je comprends qu'on va me parler des emplois qui ont été créés, qu'on va me parler à un moment donné des taxes que ces compagnies-là paient, mais toutes les autres compagnies aussi paient des taxes. En fait, pour appuyer cette réponse, probablement qu'on parlerait par exemple des mines de la Côte-Nord, des mines des Cantons de l'Est, des gisements inestimables du Nouveau-Québec, des immenses forêts, des rivières sources d'énergie électrique etc, etc.

Le seul problème qu'on peut soulever, c'est qu'on aurait probablement à peu près la même réponse si on posait la même question aux Brésiliens, aux Péruviens, aux Libanais. Chacun parlerait de ses richesses inestimables en minéraux, en forêt, en pétrole, etc. Pourtant, les Brésiliens comme les Péruviens et les Libanais ont un niveau de vie très bas et font partie de ce qu'on appelle le Tiers-Monde. Par contre si on regarde dans une autre direction, si on regarde le Japon, on constate que ce pays-là a très peu de ressources naturelles et pourtant il est en train de devenir une des grandes puissances mondiales. C'est à se demander justement si, par suite du fait qu'on a trop de ressources, on n'utilise pas nos connaissances, on n'utilise pas à un moment donné notre intelligence pour mieux les développer. Ce qui importe dans ce débat sur les ressources naturelles — et je dis bien sur les ressources naturelles et non sur les richesses naturelles — c'est de bien se rendre compte que le seul fait de posséder des ressources naturelles ne signifie pas nécessairement qu'un pays deviendra riche.

Tout dépend de la façon dont ses richesses sont exploitées. Tout dépend surtout du choix qui sera fait et des bénéficiaires. En fait, c'est à nous, comme peuple, de décider si nous serons des scieurs de bois ou des porteurs d'eau.

C'est le Québec et le gouvernement québécois d'abord qui décidera si nous serons un peuple de "drilleurs" ou de mineurs, incapable de remplir son rôle de propriétaire, administrateur et responsable du développement de ses propres ressources. En fait, je pense bien qu'il y a une étude bien importante qui a été publiée il y a quelque temps et qui a été faite par un ancien libéral bien connu, non révolutionnaire, ancien membre de la Bourse et même ancien président de la Bourse canadienne, et qui nous donne des chiffres assez surprenants concernant l'exploitation de nos ressources naturelles, d'abord au Manitoba puis aussi dans l'ensemble du Canada.

Comme l'écrivait ce "révolutionnaire", entre guillemets, ce n'est pas une question de capitalisme ou de socialisme. C'est simplement une question de savoir quel est le meilleur moyen de développer nos ressources. On ne peut quand même nationaliser, écrivait-il encore, ce qui nous appartient déjà. Il est clair que le sol québécois nous appartient à nous, Québécois. Ainsi, une chose est certaine, c'est que ce ne sont pas les autres, ce n'est pas la responsabilité des autres de faire que nous devenions de véritables propriétaires de nos ressources. C'est le Québécois, en tant que propriétaire des richesses naturelles, qui doit décider de l'avenir du développement de ses richesses. Malheureusement au Québec, je pense bien que nous sommes loin d'avoir retiré tous les bénéfices qui nous reviennent dans ce domaine. Une large part de ces bénéfices, qu'ils soient sous forme d'emplois, de profits ou de connaissances technologiques, ont été drainés à l'extérieur du Québec.

Dans un secteur aussi important que celui des mines, mais où surtout les richesses ne se renouvellent pas, par opposition aux richesses renouvelables, telles la forêt, on peut même affirmer que l'opération exploitation des richesses naturelles a contribué à appauvrir les Québécois. Les quelques bénéfices que ceux-ci ont retirés sous forme de salaire, en tant que mineurs, ou sons forme de taxe minime, versée à leur gouvernement, représentent peu comparativement aux profits accumulés par les grandes entreprises étrangères et aux emplois créés dans les usines de transformation des pays voisins. Ce qu'on a retiré, c'est également peu comparativement à la perte de richesses subie en termes de dépôts miniers épuisés. Je pense que, depuis quelques années, en particulier dans

l'ouest de l'Abitibi, il faut constater comment nos gisements sont maintenant épuisés et quel résultat ça donne, le fait de laisser la responsabilité exclusive aux compagnies de transformer nos ressources naturelles.

Dans bien des cas, le bilan est négatif, l'exploitation de nos richesses naturelles nous a plutôt appauvris qu'enrichis.

Une politique des richesses naturelles au Québec doit reposer sur un seul principe et viser un seul objectif, celui de faire en sorte que les propriétaires de ces ressources, c'est-à-dire les Québécois, en retirent le maximum de profit. Concrètement, cela signifie que celui qui administre la propriété des Québécois, c'est-à-dire le gouvernement, voit à ce que ces richesses soient exploitées selon les règles du jeu établies en fonction de cet objectif. Pour ce faire, il faudrait que les Québécois reprennent le contrôle de leurs richesses naturelles et arrêtent d'en parler, particulièrement dans les secteurs où ils ont le plus laissé à d'autres, particulièrement aux grandes sociétés étrangères ou multinationales, le soin d'exploiter ces richesses à leur propre profit, surtout dans le secteur des mines.

Quant à nous, du Parti québécois, nous avons, je pense bien, énoncé une politique en ce sens, mais nous ne sommes pas différents des autres partis politiques qui, à chaque élection, ont proposé aux Québécois de prendre le contrôle de leurs richesses naturelles. Nous croyons que les ressources naturelles exploitées du Québec doivent être transformées, dans la plus large mesure possible, sur le territoire québécois, de façon que l'activité économique qui en découle demeure aux Québécois. Quand je disais que nous ne sommes pas différents des autres... Il y a quelque temps le ministre des Richesses naturelles écrivait un article et s'exprimait ainsi: L'étape de passer de l'international au national québécois concernant le contrôle de nos richesses naturelles passe d'abord par la transformation plus poussée, au Québec, des produits miniers extraits de son sous-sol. Sans méconnaître les limites d'une telle politique, une transformation des mentalités et des comportements économiques est possible à la longue.

Je pense, M. le Président, que c'est d'abord et avant tout, justement, une transformation de mentalité. Transformation de mentalité, d'abord chez nos hommes politiques qui malheureusement, je crois, n'ont pas la volonté nécessaire pour imposer les règles du jeu aux entreprises.

Si on regarde un tableau général de la transformation des ressources naturelles chez nous on est assez surpris. On constate, par exemple, que 74 p.c. de notre minerai est exporté à l'état brut. Dans le domaine du cuivre, c'est l'un des seuls secteurs où nous transformons plus que ce que nous produisons en ressources brutes. Dans le domaine du zinc, en 1966 nous en transformions à peu près 65 p.c, mais depuis les agrandissements de

Valleyfield, je crois que nous atteignons maintenant environ 80 p.c.

Ce sont là, M. le Président, je pense, les seuls secteurs où les ressources sont transformées dans une large partie au Québec.

En ce qui concerne le minerai de fer, aucune transformation tout au plus la réduction et le bouletage; dans le domaine de l'amiante, domaine où, si on exclut, par exemple, les pays de l'Est, le Québec fournit 65 p.c. de la production mondiale. Une étude du ministère des Richesses naturelles nous démontre que c'est à peu près entre 2 p.c. et 5 p.c. qu'est notre taux de transformation au Québec. J'y reviendrai, M. le Président, parce que je crois qu'il s'agit là d'un des secteurs, en tout cas, où il serait possible de faire quelque chose immédiatement.

Le ministre me dira, comme il me l'a affirmé l'an dernier, que ce secteur de l'amiante doit être transformé... c'est-à-dire, que c'est un produit utilisé dans la fabrication de produits assez lourds, en particulier dans le ciment.

Je pense que cela représente à peu près 65 p.c, mais il y a quand même une différence entre une transformation de 2 p.c. à 5 p.c. et une transformation possible allant jusqu'à 35 p.c.

Une autre chose sur laquelle nous insistons, M. le Président, c'est que l'exploitation elle-même soit faite de plus en plus par les Québécois de façon que les profits directs, profits qui augmentent avec la rareté des ressources, reviennent aux propriétaires et ces richesses c'est-à-dire aux Québécois. Plus particulièrement, l'exploitation doit être faite de plus en plus par les coopératives et les entreprises publiques. Ce genre d'entreprises assure mieux que tout autre que les profits déjà énormes tirés de l'exploitation des richesses naturelles du Québec reviendront à leurs propriétaires.

A ce sujet, M. le Président, je voudrais quand même dire un mot de certaines sociétés que nous avons construites au Québec, c'est-à-dire que nous avons instaurées au Québec et qui, en l'espace de quelques années, ont réussi à nous démontrer en tout cas, que dans le domaine minier, on n'était pas plus bête que les autres, contrairement à ce que l'on pensait malheureusement dans le passé. En l'espace de quelques années, Soquem a prouvé qu'il était possible, par exemple, de faire des profits assez considérables dans le secteur minier. Le dernier rapport financier de Soquem, 71/72 — celui de 72/73 n'a pas été déposé — nous prouve que l'exercice clos le 31 mars 1972 est soldé par un bénéfice net de $858,387 à rapprocher de $1,293,766 pour l'exercice précédent. Il y a des raisons qui expliquent pourquoi ces profits sont inférieurs à ceux de l'année précédente mais l'on sait d'autre part que Louvem est maintenant la propriété exclusive de Soquem et que, je pense, Soquem a dû payer à cause de mauvaises ententes un montant assez considérable pour en conserver le contrôle.

Mais, M. le Président, je me demande si le gouvernement actuel a, comme les gouvernements passés, fait les efforts nécessaires pour donner à ces entreprises, les moyens qui leur permettraient d'étendre leurs activités. Dans le cas de Sidbec, je crois qu'elle n'a tout simplement pas contribué à accroître la part du minerai de fer transformé au Québec, pour la simple raison qu'elle n'a pas pu s'approvisionner en minerai québécois, et peut-être aussi, parce que Sidbec n'a pas voulu le faire. Ou peut-être parce que nous vivons dans ce domaine un peu le même problème que nous vivons dans le domaine des forêts? C'est-à-dire que tous les véritables territoires, les territoires d'exploitation rentable sont concédés aux étrangers et il ne reste plus rien pour nos compagnies à nous.

Depuis ses débuts, la société d'Etat s'approvisionne en effet en ferraille provenant de la région métropolitaine et des Etats-Unis, jusqu'à Chicago, ainsi que de minerai provenant de la Nouvelle-Ecosse. Seule une faible partie de ses approvisionnements est constituée de minerai québécois acheté de la société Iron Ore. Mais cette société est directement en concurrence avec Sidbec. Comment voulez-vous que Sidbec puisse obtenir à des prix justement concurrentiels la matière première dont elle a besoin? Le marché fluctuant de la ferraille, de même que des prix exorbitants de l'acier primaire qu'a dû acheter l'entreprise sur les marchés mondiaux, ont même été la cause, tel que le disait le président, d'une large part des déficits de l'entreprise depuis ses débuts. On peut le constater, par exemple, dans le rapport de Sidbec en 1970.

Dans le cas du minerai, il ne faut pas s'étonner d'une telle situation puisque Sidbec doit acheter, comme je le disais tout à l'heure, son minerai concentré de ses concurrents, particulièrement de l'aciérie Sisco, de la Nouvelle-Ecosse et de la société Iron Ore. Sidbec demeure encore prisonnière du cartel de l'acier qui, lui, s'approvisionne en minerai brut sur son territoire, les territoires qui lui ont été concédés par le gouvernement québécois. Il ne s'agit pas, M. le Président, d'enlever complètement ces concessions, mais comme je l'expliquerai tout à l'heure, il est possible de permettre à Sidbec de s'alimenter sur ses propres concessions.

Quant à l'usage de la ferraille, cette source est un pis-aller, en ce sens qu'elle est à la fois plus coûteuse, plus aléatoire et fluctuante, tout en contribuant à réduire la qualité du produit fini. Actuellement, Sidbec doit négocier avec la puissante aciérie américaine U.S. Steel et sa filiale Québec Cartier Mining afin que cette dernière lui permette d'exploiter le gisement de Fire Lake, près de Gagnon, sur la Côte-Nord, alors que cette compagnie n'utilise pas ce gisement puisqu'elle s'est transportée à 60 milles ou 65 milles de Gagnon pour exploiter les mines du mont Wright. Et dernièrement, je rencontrais justement des représentants de la compagnie Québec Cartier Mining et on me disait que les négociations entre Sidbec et cette compagnie-là étaient à peu près terminées, c'est qu'on s'était plus ou moins entendu. Le ministre pourra m'informer de tout ça tout à l'heure.

Alors les droits exclusifs d'exploitation de Fire Lake appartiennent encore exclusivement à Québec Cartier Mining. Il me semble qu'il y aurait possibilité pour le gouvernement de prendre — et je l'ai déjà soumis au ministre des Richesses naturelles — après un certain temps, si on constate, par exemple, que la compagnie n'exploite pas ses gisements, il me semble qu'on devrait inscrire dans la loi que ces gisements-là reviennent à l'Etat.

D'autre part, Sidbec devra subir la concurrence, d'ici 1974, d'une nouvelle aciérie, Québec Steel Products, dont la production sera en partie identique à celle de Sidbec. Et ça, financé par les impôts québécois. En effet, l'aide fédérale, donc en partie à l'aide des deniers des Québécois, au montant de $2,500,000, est inconditionnelle. Même le gouvernement québécois aidera cette aciérie sous forme de subventions du taux d'intérêt et cette aide sera proportionnelle à la partie de la production qui sera exportée et non déjà fabriquée au Québec. On évalue cette aide à un montant pouvant varier de $1,300,000 à $3,200,000.

En ce qui concerne l'amiante, j'en avais parlé, M. le Président, l'an dernier et, comme il y a un rapport du ministère qui a maintenant paru et qui nous prouve justement que ce que nous disions, le fait que l'amiante était très peu transformée chez nous, est réel, je pense que c'est devenu un problème très important.

Je suis d'accord que le ministre nous dise: C'est là un secteur sur lequel on se penche particulièrement. Ce n'est pas un reproche; je pense bien que je n'ai pas tellement de reproches à faire à ce ministre qui est en fonction depuis trois ans. Je pense qu'il y a eu du travail qui s'est fait au ministère des Richesses naturelles, peut-être grâce au ministre, grâce aussi à ses compétents fonctionnaires, en particulier en ce qui concerne les ressources énergétiques. Mais je pense qu'on doit, dans ce domaine en particulier, arrêter d'avoir peur. Je comprends que, dans le domaine du fer, il y a des problèmes. Je comprends, en ce qui concerne le fer, qu'il y a d'autres ressources. Il y a d'autres ressources de fer dans d'autres pays du monde, qui sont même plus considérables que chez nous et à des coûts de production probablement inférieurs quoique, avant d'évaluer strictement le coût d'extraction de la matière première, il y ait d'autres facteurs tels que l'énergie, la sécurité, les facilités de transport, qui doivent être étudiés.

En tout cas, en ce qui concerne l'amiante, nous avons au moins dans ce domaine un contrôle presque exclusif; par exemple, je pense, 85 p.c. de l'amiante qui est importé aux Etats-Unis provient du Québec. L'amiante se situe au deuxième rang parmi les productions minérales au Québec, après le cuivre et repré-

sente 21 p.c. de la valeur de la production minérale du Québec. De plus, comme je le disais, le Québec bénéficie d'une situation fort avantageuse sur le plan mondial puisqu'il est le premier producteur au monde d'amiante. Sa production équivalait en 1969 à 39 p.c. de la production mondiale. Si on exclut la Russie qui vient au second rang et la Chine, qui ne constituent pas des concurrents aussi acharnés qu'ils pourraient l'être, la production québécoise équivalait à 63 p.c. de la production mondiale. En 1969, 68 p.c. du volume d'amiante importé par les Etats-Unis provenaient du Québec.

Ce que j'avais dit et ce que je répète au ministre, c'est qu'il faut se décider. Hier, suite à une intervention, je pense, du député de Nicolet qui m'expliquait pourquoi René Lévesque n'avait pas augmenté les rentes sur le minerai de fer dans le nord, je disais qu'entre 1948 et 1965, il y avait eu certaines modifications dans le marché mondial du fer. Quoi qu'il en soit, ce que Lévesque a pu faire en 1962 ou 1963, ce n'est pas mon problème. C'est son problème à lui. Maintenant qu'il est bien entouré, on va pouvoir se permettre d'aller plus loin.

Dans ce temps-là, il avait tellement de difficultés à un moment donné qu'il faisait le minimum. De plus...

M. BELAND: Non, mais ils sont drôles, tout de même.

M. VINCENT: Est-ce que le député de Saguenay admet quand même qu'il a déclaré récemment que c'était l'une des meilleures politiques jamais établies par...

M. LESSARD: Cela, c'est son opinion. Maintenant, il reste, comme je le disais, que le marché du fer s'était modifié. En 1948, par exemple, on sortait de la guerre. Il y avait un besoin. D'ailleurs l'un des vice-présidents de la compagnie Iron Ore, U.S. Steel du temps, je pense, déclarait qu'il fallait absolument se trouver des sources de fer parce que les sources américaines étaient pratiquement épuisées à ce moment-là, puisqu'on les avait utilisées considérablement au moment de la guerre.

Entre 1948 et 1962, on avait trouvé d'autres sources, comme je le disais, au Vénézuéla; on en avait trouvé en Afrique. Il y en a partout, à peu près, dans le monde. Notre "bargaining power" dans ce domaine était pas mal moins fort qu'il ne pouvait l'être en 1948. Quoi qu'il en soit, dans le domaine de l'amiante on sait qu'actuellement, en tout cas, on a à peu près 63 p.c. du marché du monde occidental. Selon des données mêmes du Bureau de la statistique du Québec pour l'année 1966 — parce qu'on n'a pas d'autres chiffres pour le moment — moins de 2 p.c. du minerai était transformé chez nous.

Pour ma part, je pense que c'est là une situation absolument inacceptable.

Le gouvernement du Québec devrait, dans le plus bref délai possible, intervenir pour, au moins, forcer, sinon contrôler — parce qu'ils sont bien timides et je ne leur en demande pas beaucoup — cette compagnie à transformer son produit à 30 p.c.

D'ailleurs, je pense que je ne suis pas révolutionnaire en demandant cela parce que le ministre se rappelle, au dernier congrès libéral, qu'une résolution du Parti libéral du Québec demandait que, dans le secteur des mines, on ait au moins une moyenne de 15 p.c. de transformation de minerai chez nous.

Le lendemain, j'avais soulevé une question en ce sens à l'Assemblée nationale en demandant au ministre s'il avait l'intention de légiférer pour forcer les compagnies à le faire et le ministre m'avait répondu qu'il n'en était pas question.

Pourtant, il y a des règles du jeu qui ont été établies par les gouvernements précédents. Par exemple, l'article 13 de la Loi des mines, Statuts refondus 64, chapitre 89, stipule que, dans le cas où des minerais, minéraux ou substances provenant des mines de la province de Québec sont transportés en dehors de la province pour y être traités, il est loisible au lieutenant-gouverneur en conseil d'exiger le triple des droits établis.

Cette stipulation de la loi n'a jamais, à toutes fins pratiques, été appliquée. Comme je le disais, au niveau des principes, je pense que tous les partis politiques s'accordent pour faire en sorte que la transformation de nos produits se fasse d'abord chez nous. C'est au niveau de la pratique que l'on se distingue. On sait qu'à partir de 1960, même avant, en 1956, on a parlé avec M. Lapalme de cette nécessité, mais je pense que, si on faisait des comparaisons entre 1956 et aujourd'hui, on constaterait qu'on est à peu près au même niveau.

Le programme de l'Union Nationale, c'est un peu la même chose. Le programme du Ralliement créditiste aussi. Alors, je pense qu'il importe qu'on arrête d'en parler et qu'on se décide à transformer nos ressources chez nous.

La participation de l'Etat à l'exploitation des richesses naturelles. Une étude fort révélatrice produite par M. Kierans, dont je parlais tout à l'heure, pour le compte du gouvernement du Manitoba révélait que c'est dans le secteur de l'exploitation des richesses naturelles et particulièrement dans celui de l'extraction minière que les sociétés multinationales réalisent les plus hauts taux de profit. Cette étude nous apprend que le taux de profit brut moyen sur les ventes de 177 entreprises engagées exclusivement dans l'exploitation de gisements miniers métalliques au Canada était de 59 p.c. en 1967. Le taux de profit sur le capital investi était de 23 p.c. pour la même année. Ces taux de super-profit, ce que les économistes appellent la rente, ira s'accrois-sant au fur et à mesure que les ressources deviendront plus rares.

C'est évidemment la raison pour laquelle les sociétés multinationales attachent une telle importance au contrôle à long terme des richesses naturelles. C'est dans ce contexte que ce que je proposais tout à l'heure d'accroître le rôle d'exploration et d'exploitation de Soquem, soit de permettre à Soquem d'exproprier les gisements inutilisés entre les mains de sociétés étrangères et aussi d'assurer un contrôle autochtone majoritaire dans un secteur comme l'amiante prend toute son importance.

En ce qui concerne la fiscalité minière, comme je le disais tout à l'heure, l'étude de M. Kierans établissait que les sociétés minières, grâce aux exemptions considérables dont elles sont avantagées, payaient à peu près 15 p.c. d'impôt sur leur profit, alors que les autres sociétés manufacturières, que cela soit dans le papier ou dans d'autres industries, paient de 65 p.c. à 78 p.c.

Il m'apparait que c'est complètement discriminatoire. Le ministre me dira: Oui, mais les montants d'investissements ne sont pas les mêmes.

Mais il y a quand même une disproportion. L'étude de M. Kierans établit également très clairement que les sociétés minières sont les moins taxées en raison d'allégements de toutes sortes. On accorde, par exemple, des exemptions pour épuisement à l'entreprise. Pendant les trois premières années d'exploitation, la nouvelle entreprise n'a pas à payer d'impôt. C'est justement le premier ministre Bourassa qui a été dans ce domaine le meilleur allié des grosses compagnies minières auprès du gouvernement fédéral.

L'étude établit qu'en 1969 les sociétés minières présentaient un revenu imposable équivalant à seulement 19 p.c. de leurs profits; ce qui m'oblige à corriger, j'avais parlé tout à l'heure de 15 p.c. Dans le secteur manufacturier, le même rapport établit qu'il était de 79 p.c. La commission Carter et le projet de réforme fiscale fédérale du ministre Benson enlevaient la plupart de ces privilèges et allégements fiscaux aux entreprises minières. Comme je le disais, le principal allier de ces entreprises a été le premier ministre Bourassa.

Aujourd'hui, il interprète le maintien de ces privilèges fiscaux comme étant une preuve de fédéralisme rentable. L'abolition de ces privilèges fiscaux devrait permettre aux Québécois de récupérer une partie des profits et de la rattacher à l'exploitation des richesses naturelles, selon M. Bourassa.

Un autre domaine sur lequel je voudrais insister, c'est Soquip. Je pense qu'à plusieurs reprises, j'ai demandé au ministre s'il avait l'intention de prendre les mesures nécessaires pour que cette société puisse créer sa propre raffinerie. Les experts s'accordent à dire que nous avons une situation fort favorable actuellement en ce qui concerne la demande des produits pétroliers, situation qui ressemble un peu à celle de 1967, je crois, au moment où la

Golden Eagle s'est établie dans la région de Saint-Romuald. 1969?

M. MASSE (Arthabaska): 1969.

M. LESSARD: Malheureusement, à ce moment-là, des fonctionnaires du ministère avaient fait une étude et cela ne s'est pas concrétisé. Mais, si nous ne faisons rien — nous avons au moins une institution que nous pouvons développer — ce sont d'autres entreprises de raffinerie qui devront agrandir leur entreprise et Soquip devra attendre encore dix ans, parce qu'il semble que cela vienne à peu près à tous les dix ans, la chance que nous avons de le faire. J'invite le ministre, qui a préparé à un moment donné des objectifs de politique énergétique, à intervenir le plus tôt possible ou à agir le plus tôt possible pour que Soquip puisse devenir non seulement une entreprise de raffinage de pétrole, mais de distribution de pétrole, ce qui nous permettrait de casser le cartel financier, en tout cas, de débuter.

Je termine sur un dernier point, c'est le fonds minier. J'aurai probablement l'occasion d'en discuter plus amplement avec le ministre. Suite à une question que j'avais posée en Chambre au ministre à ce sujet, le ministre m'avait répondu: "Les syndiqués ne veulent même pas du fonds minier."

Je pense que le ministre a reçu des réactions de tous les représentants syndicaux, suite à cette question et maintenant que j'ai les documents, je pense que les ouvriers du secteur minier désirent que le gouvernement intervienne pour créer ce fonds minier absolument nécessaire. Je pense que c'est un collègue du Ralliement créditiste qui affirmait en Chambre et j'étais d'accord avec lui — pas souvent, mais cette fois-là — que les compagnies avaient la possibilité de déduire de leur impôt un montant d'épuisement de la mine. Alors, on permet de déduire de l'impôt un montant d'épuisement de la mine, de quelque chose qui est matériel, mais l'épuisement des ouvriers, on n'en tient pas compte et on sait que c'est tout un problème dans le domaine minier.

Etant donné qu'on vit actuellement une situation difficile dans les mines, étant donné la fermeture des mines en particulier dans l'Abiti-bi, étant donné qu'on sait que dans ce secteur c'est toujours temporaire, qu'une mine, cela s'épuise, étant donné que cela fait passablement de temps que les ouvriers du secteur minier demandent l'intervention du gouvernement pour établir un fonds minier, même M. Laporte l'avait promis et travaillait à l'instaurer, je pense que l'une des réalisations qui serait absolument nécessaire, qui serait avantageuse et qui serait électoralement rentable pour le ministre serait d'instaurer ce fonds minier dans le plus bref délai possible.

Or, M. le Président, je vais regarder si je n'ai pas d'autres notes, en ce qui concerne le port pétrolier, je sais que des études écologiques se

font, que c'est absolument important et qu'il faudrait y aller en prenant en considération tous les facteurs. Figurez-vous que, si un superpétrolier avait un accident dans le fleuve Saint-Laurent, on ne parlerait plus trop du Saint-Laurent comme fleuve avec certaines ressources cynégétiques et halieutiques, s'il en reste encore.

M. le Président, j'invite donc le ministre à être extrêmement prudent en ce qui concerne le port pétrolier, il semble que les Américains l'ont refusé mais il semble que le Québec soit aussi une poubelle de l'Amérique du Nord. Alors, il faudrait être prudent. Merci, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): L'honorable ministre des Richesses naturelles.

M. MASSE (Arthabaska): II y a un certain nombre de points qui ont été soulevés par les membres de l'Opposition et qui, je pense, auraient intérêt â être discutés lorsqu'on arrivera aux programmes concernés.

En ce qui concerne les problèmes que l'on retrouve dans le secteur minier ou la situation de possession étrangère dans ce secteur, je pense que j'ai eu déjà l'occasion d'exprimer mes points de vue sur cette question. Je pense que le principe, comme le disait le député de Saguenay tout à l'heure, tout le monde peut être pour, c'est-à-dire que le principe que les bénéfices miniers aillent aux Québécois, je ne pense pas qu'il y ait un seul vrai Québécois qui puisse être contre ce principe-là. Je voudrais souligner l'extrême complexité du secteur. Je pense qu'il s'agit de scruter l'ensemble du secteur minier, — je ne parle pas seulement de l'extraction minière — mais également toute la commercialisation; dans les principales mines que nous avons, telles celles du fer et de l'amiante, c'est à peu près ce qu'il y a de plus complexe en termes de commercialisation. A propos de la connaissance du ministère dans ce secteur-là, en 1970, il faut dire qu'on ne s'est jamais trop attardé à la partie économique du secteur minier, en termes de promotion, en termes de connaissance des marchés et qu'avant d'élaborer ou de prendre des décisions sur une plus grande transformation au Québec, sur des moyens de favoriser la fabrication de produits dans lesquels entrent des matières minières, il est essentiel pour tout gouvernement responsable de connaf-tre les mouvements de minéraux dans le monde, soit à partir des pays producteurs, soit de la part des pays consommateurs, et également de tenter de connaître au maximum les différentes transactions qui peuvent se faire entre société mères, filiales, etc.

En tout cas, comme personne responsable de mon ministère, je ne peux pas dire actuellement, contrairement au député de Saguenay, qu'on devrait exiger des compagnies au moins 30 p.c. du minerai extrait, qui soit retransformé ou réutilisé dans l'industrie au Québec.

M. LESSARD: De l'amiante.

M. MASSE (Arthabaska): De l'amiante. Cela vaut pour tous les minéraux.

M. LESSARD: Etes-vous au moins d'accord pour 15 p.c., tel que le proposaient les libéraux dans...

M. MASSE (Arthabaska): J'ai été contre la résolution, justement pour les raisons que je vous donne. Si, actuellement, le gouvernement imposait aux compagnies minières un pourcentage de transformation, je ne sais pas qui peut dire quelles seraient les conséquences, dans le secteur minier, sur l'économie du Québec. C'est justement ces conséquences qu'il faut savoir. Actuellement, comme je le disais dans mon exposé, avec le ministère de l'Industrie et du Commerce, nous commençons les discussions sur ça. On veut faire l'inventaire de l'ensemble des produits dont une des matières composantes est l'amiante. On a fait un choix. On peut dire: On va procéder sur tous les plans, mais au ministère, on a dit: L'ensemble est tellement complexe, avant la connaissance complète des différents points que j'énumérais tout à l'heure, ça peut prendre plusieurs années. Donc, au départ, je pense que c'est maintenant qu'il faut faire quelque chose. On a fait un choix, on a dit: On va examiner un secteur, celui de l'amiante. Il faudrait peut-être en même temps examiner celui du fer et d'autres métaux, mais, compte tenu des disponibilités de cette nouvelle préoccupation dans le secteur économique du ministère des Richesses naturelles, il est évident qu'on doit procéder par priorités.

Je pense que le schéma de tout ce travail, je l'ai donné tout à l'heure dans l'exposé. Cela ne veut pas dire que je suis contre une plus grande transformation au Québec. Au contraire. Comme j'avais commencé à le dire tout à l'heure, avec le ministère de l'Industrie et du Commerce, nous voulons faire l'inventaire des articles qui sont fabriqués à partir d'une composante de l'amiante et, par la suite, je suis certain que, lorsque cet inventaire sera fait, on pourra dire: Tel article pour lequel nous avons un marché canadien ou même en Nouvelle-Angleterre, il faut promouvoir sa fabrication au Québec. Mais aussi longtemps que je ne connais pas ces produits, je ne peux pas les déterminer, je ne peux pas prendre cette décision, je ne peux pas recommander au gouvernement de la prendre.

On a fait état tout à l'heure du rapport de M. Kierans. Il avance beaucoup de chiffres, mais ne donne pas la preuve de ses données. Au Manitoba, il avait accès à des chiffres confidentiels alors qu'ici, au Québec, à cause de nos lois, ces données ne sont pas disponibles.

M. LESSARD: L'Iron Ore se permet de payer très peu d'impôt au Québec.

M. MASSE (Arthabaska): Non, mais par les

chiffres que le ministère du Revenu possède, il n'y a aucune autre personne ni ministère qui peut obtenir ces données.

M. LESSARD: Us ne sont même pas bons.

M. MASSE (Arthabaska): Je pense qu'il y a un choix à faire, comme le propose M. Kierans, c'est de tenter de tirer le maximum de profits de nos ressources minières, c'est le choix premier. Comment on y arrive? M. Kierans dit qu'il faut nationaliser tout ça. Il faut se lancer dans l'exploration, au niveau de l'exploration. Il ne m'a pas convaincu que son choix était le meilleur. Je pense qu'il y a certains chiffres, comme les $16 millions que donnait le député de Saguenay tout.à l'heure, cela représente pour le Québec les droits miniers, mais il faut ajouter à ça l'impôt sur les corporations, les taxes foncières, les différentes autres taxes. Si vous le savez, j'aurais bien aimé que vous le souligniez.

M. LESSARD: Je l'ai souligné, M. le Président, j'ai prévu la réponse du ministre.

M. MASSE (Arthabaska): En tout cas, le député de Saguenay ne m'a pas convaincu qu'actuellement les Québécois étaient capables, du moins financièrement, de s'accaparer les investissements qui sont déjà faits dans le secteur minier. On parle de milliards. Pour souligner la situation particulière d'investissements dans le secteur minier il existe à part Soquem qui, je pense, va devenir une des grandes entreprises minières au Québec, très peu de compagnies — on pourrait peut-être les limiter à deux ou trois— possédées par des intérêts québécois. Dans l'avenir, je pense que Soquem est appelée à prendre une place de plus en plus importante, surtout avec sa découverte de sel, sa découverte de Saint-Honoré, sa découverte de Saint-Urbain où tout indique que ces gisements pourront devenir des gisements assez exceptionnels. Evidemment, je ne voudrais pas reprendre ou du moins continuer la discussion sur tout ce qui a été soulevé. Je pense qu'au cours de l'étude des différents programmes on aura l'occasion d'y revenir, mais je voudrais souligner que, pour moi, Soquip est l'organisme tout désigné pour profiter actuellement, comme le disait le député tout à l'heure, d'une très bonne situation du Québec dans le secteur pétrolier.

Nous sommes à étudier actuellement une augmentation de dotation de crédits à Soquip pour l'exploration. Nous sommes également à étudier des projets qui permettraient à des intérêts québécois, avec Soquip peut-être, d'investir dans des secteurs du raffinage et de faire des regroupements dans le secteur de la distribution.

Le port pétrolier, comme on le disait tout à l'heure, c'est évidemment un investissement très important pour l'économie du Québec parce qu'il ne faut pas voir seulement les millions qui pourraient être investis mais les avantages de ce projet sur le plan économique, en termes d'approvisionnement de pétrole brut. Je suis également conscient que cela peut amener des problèmes de l'environnement. Mais je voudrais seulement souligner que des experts américains ont émis une opinion à l'effet que les superpétroliers étaient moins dommageables pour l'environnement que les multitudes de pétroliers de moindre tonnage. Si les Américains, jusqu'à aujourd'hui n'ont pas construit de ports pour recueillir des superpétroliers d'au-delà de 150,000 tonnes, je pense qu'il y avait différentes raisons qui n'étaient pas uniquement des questions d'environnement. Comme on a interdit la construction de raffineries depuis dix ans aux Etats-Unis, maintenant on en subit les conséquences.

Je ne voudrais pas qu'on reste avec l'impression, dans un autre domaine, que je suis contre un fonds minier. Evidemment, je suis pour que les travailleurs miniers bénéficient des meilleures conditions. Je pense que j'ai dit qu'il faudrait que les syndiqués se prononcent sur cette question et non pas seulement les leaders syndicaux. A ma connaissance, je peux me tromper, on a donné l'occasion aux syndiqués de se prononcer sur la question du fonds minier uniquement dans le Nord-Ouest québécois.

M. LESSARD: Sur la Côte-Nord aussi.

M. MASSE (Arthabaska): J'aimerais savoir à quelle occasion les mineurs ont eu la possibilité de se prononcer. A ma connaissance, en tout cas, cela n'a pas été fait.

Je pense que c'est également un problème qu'on doit relier à un fonds pour l'ensemble des travailleurs industriels. Evidemment, je n'ai pas personnellement — en tant que ministre et n'ayant pas de juridiction — à être pour, à me prononcer pour ou contre le fonds minier. Je pense qu'il appartient à ceux qui ont la juridiction sur le travail et la main-d'oeuvre de prendre l'initiative dans ce sens.

D'autre part, si le ministère des Richesses naturelles avait à travailler avec le ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre, je pense que c'est une collaboration qui est déjà acquise.

En terminant, je dois dire que, si depuis trois ans au ministère il y a eu des améliorations, ce n'est pas uniquement à cause du ministre. Je pense que tout ce travail s'est fait en collaboration constante avec les hauts fonctionnaires du ministère des Richesses naturelles.

M. LESSARD: Sidbec?

M. MASSE (Arthabaska): En ce qui concerne Sidbec, je pense qu'il y avait eu des pourparlers, comme on le disait tout à l'heure, avec la société Québec Cartier. Je sais également qu'il y a d'autres projets miniers qui pourraient associer Sidbec et, à ma connaissance, en tout cas, il n'est pas encore exclu que Sidbec puisse

s'approvisionner à même le gisement de Fire Lake et encore là, dans tous les cas, lorsque c'est possible, nous tentons avec Sidbec de lui trouver un moyen d'approvisionnement plus certain en termes de gisement minier.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): L'honorable député de Nicolet.

M. LESSARD: En vertu de l'article 97, M. le Président, avant, simplement une petite remarque. Je n'ai jamais parlé d'accaparer tous les investissements des compagnies minières du Québec.

M. MASSE (Arthabaska): C'est l'impression que l'on avait.

M. LESSARD: Non, M. le Président, les recommandations, à un moment donné, qui ont été faites, sont de forcer, soit par des mesures incitatrices dans des domaines bien spécifiques comme l'amiante, par exemple, la transformation des produits chez nous.

Je suis quand même bien réaliste et je n'ai jamais parlé, d'un seul coup d'acheter et de tout nationaliser. Au contraire, sans aller ou sans suivre les traces de ce révolutionnaire qui est M. Kierans, il s'agit d'obliger une transformation plus poussée pour les entreprises, au moins où l'on a un "bargainnig power" assez important et abolir certains privilèges fiscaux qui sont absolument discriminatoires par rapport à d'autres entreprises de transformation...

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): L'honorable député de Nicolet.

M. VINCENT: M. le Président, je voudrais soulever un point qui inquiète présentement tous les Québécois et je suis certain que le ministre a eu l'occasion au cours des derniers mois d'en discuter avec son homologue du gouvernement fédéral, M. MacDonald.

Il s'agit de la rareté du pétrole et des prix assez élevés ou des augmentations assez considérables que les Canadiens du Québec ont eu à payer au cours des derniers mois. Si je prends comme exemple l'huile à chauffage, il y a eu une augmentation de près, si ce n'est pas plus, de 60 p.c. du prix, depuis quelques mois, c'est-à-dire depuis un an et demi, à peu près.

M. MASSE (Arthabaska): Pas tant que cela.

M. VINCENT: Bien, il y a un an et demi, je payais pour ma résidence, à peu près $0.17 le gallon pour l'huile à chauffage et, très récemment, la dernière facturation était de $0.26.4.

M. MASSE (Arthabaska): Vous étiez favorisé si vous ne payiez que $0.17 à ce moment-là.

M. VINCENT: J'ai payé seulement $0.17 il y a un an et demi enviran, ou deux ans, au maximum.

M. MASSE (Arthabaska): Je ne voudrais pas me tromper, il faudrait faire relever les chiffres, mais je ne pense pas qu'il y ait eu plus de $0.05 d'augmentation sur l'huile à chauffage.

M. VINCENT: Depuis deux ans, je suis certain qu'elle a augmenté plus que cela.

M. MASSE (Arthabaska): Disons que cela peut varier selon les régions, parce que je sais que dans ma région, en tout cas, il y a deux ans, c'était au moins à $0.21 et maintenant c'est à $0.26.

M. VINCENT: Je n'ai pas les chiffres, ici, avec moi. Il reste quand même qu'il y a, si on regarde les articles de journaux, depuis quelques mois... je pourrais en citer quelques-uns: Voici, par exemple, on dit: "La gazoline serait rationnée, se vendrait $3. le gallon avant 1978 aux Etats-Unis." Un autre article: "Le prix de l'essence et de l'huile risque de grimper encore bientôt", etc.

Quand on regarde ou quand on discute avec la population du Québec, que ce soient des propriétaires de résidence, que ce soient des propriétaires de voiture, que ce soient des gens dans l'industrie, on se pose des points d'interrogation sur cette hausse éventuelle ou sur cette rareté éventuelle de pétrole au Québec. Au même moment, on nous rassure qu'il n'y a pas de pénurie de pétrole brut pour le Canada et le marché canadien. On nous dit que le Canada peut se suffire avec son pétrole brut pour autant, naturellement, que les exportations seraient contrôlées. On nous dit même que pour exploiter de nouvelles sources de pétrole, le Canada devra dépenser environ $30 milliards d'ici 1985, seulement pour nos besoins domestiques. Mais si le Canada n'impose pas de contrôle sur les exportations, il devrait à ce moment-là dépasser entre $60 milliards et $80 milliards d'ici 1985. Ce sont des chiffres, ce sont des affirmations que nous prenons dans les journaux. Je demandais si le ministre avait eu — il en a certainement eu — des contacts ou des pourparlers avec son collègue du fédéral, M. MacDonald. Je suis certain que pour nous, du Québec, depuis plusieurs années du fait de nous approvisionner en pétrole chez les producteurs de l'Ouest, nous avons certainement payé entre $50 millions et $75 millions de plus par année pour nous approvisionner dans l'Est que si on avait pu s'approvisionner de d'autres marchés. D'ailleurs, même l'Ontario affirme que...

M. MASSE (Arthabaska): Est-ce que vous pouvez répéter? Vous dites que ça coûte $50 millions pour quoi?

M. VINCENT: Si nous, du Québec, étions des consommateurs de pétrole des producteurs de l'Ouest. Or, lorsque nous achetions notre pétrole dans l'Ouest, au lieu de l'acheter sur des marchés étrangers, nous devions probablement payer entre $50 millions et $75 millions de plus

par année pour favoriser les producteurs de l'Ouest. D'ailleurs, j'ai ici l'exemple de l'Ontario. C'est un conseiller du premier ministre de l'Ontario qui déclarait récemment : "A Toronto, un conseiller du premier ministre William Davis a fait remarquer que l'Ontario avait été une bonne cliente des producteurs de l'Ouest du Canada — comme le Québec d'ailleurs..."

M. MASSE (Arthabaska): Oui. Il faut faire une distinction entre le gaz et le pétrole, parce que le pétrole de l'Ouest n'est pas vendu, c'est-à-dire que le marché québécois et des Maritimes est approvisionné en pétrole importé, soit du Moyen-Orient, de l'Afrique ou de l'Amérique du Sud. D'autre part, c'est différent pour le gaz...

M. VINCENT: Oui, le gaz.

M. MASSE (Arthabaska): ... alors qu'il se rend jusqu'à Montréal et c'est du gaz de l'Ouest.

M. VINCENT: Non, mais j'en arriverai au gazoduc ou au pipe-line tout à l'heure. Le porte-parole de l'Ontario disait: "Un conseiller du premier ministre William Davis a fait remarquer que l'Ontario avait été une bonne cliente des producteurs de l'Ouest du Canada, au temps où l'Ouest ne pouvait exporter ses produits pétroliers". Il n'y avait pas d'exportation, et il ajoutait: "Nous devrions maintenant être servis la première à un bon prix". Il ajoutait que l'Ontario avait payé parfois jusqu'à $100 millions de plus par année pour acheter du pétrole de l'Ouest alors qu'elle aurait pu en avoir à meilleur prix à l'étranger. Donc, s'il faut des investissements de $30 milliards pour le Canada pour développer d'autres sources d'approvisionnement, seulement pour suffire le marché canadien, nous sommes rendus à un point ici au Québec où il va falloir définitivement exiger la construction d'un pipe-line pour transporter le pétrole de l'Ouest vers les marchés de Montréal et tout le marché québécois. Le ministre a mentionné tout à l'heure dans son intervention du début que ce projet était toujours à l'étude, mais, sur le plan pratique, est-ce que nous pouvons, c'est ma première question, espérer qu'un tel gazoduc ou un tel pipe-line sera construit au cours des prochaines années, sinon la prochaine année pour le début des travaux pour desservir une partie importante du marché de Montréal?

Deuxièmement, est-ce que nous pouvons être assurés que le gouvernement canadien va, non pas restreindre, mais limiter les exportations de pétrole pour satisfaire le marché canadien à un bon prix, avant de satisfaire le marché américain? Cela ne veut pas dire qu'il faut cesser toute exportation.

Troisièmement, est-ce que le ministre peut nous dire si le gouvernement fédéral entend développer de nouveaux endroits où on irait chercher le pétrole, tel le Grand Nord et les autres endroits? Est-ce qu'il entend le développer seulement pour le service domestique ou s'il entend mettre tout l'argent nécessaire pour en favoriser également l'exportation? A ce moment-là, le ministre pourrait peut-être nous dire si le Canada a l'intention de demander à des sociétés étrangères, sociétés américaines, de venir faire des aménagements sur le plan de l'approvisionnement en pétrole ici, au Canada. Peut-être que, si le ministre pouvait nous éclairer sur ces questions, cela permettrait de rassurer quelque peu la population du Québec au sujet de tout ce qui s'est dit dans les journaux au cours des derniers mois. Nous rencontrons même des profanes comme moi ou comme d'autres qui commencent à se demander si réellement, que cela soit l'huile à chauffage, que cela soit le gaz, l'essence qu'on utilise dans nos voitures, que cela soit le gaz naturel, on en est rendu à se demander si les prix ne doubleront pas d'ici un an, deux ans. Il y a même des personnes qui commencent à penser d'avoir des voitures plus petites, d'avoir des systèmes de chauffage autres que les systèmes de chauffage conventionnels que nous voyons dans nos maisons. Je suis certain que le Québec n'est pas passif devant cette situation. Je suis certain que le Québec a fait des représentations. Nous voulons savoir où en sont rendues ces représentations, auprès des autorités fédérales, et nous voulons savoir quelles sont les prévisions ou les perspectives concernant les prix de ces produits au cours des prochains mois et même des prochaines années.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Le ministre des Richesses naturelles.

M. MASSE (Arthabaska): Je pense que vous avez soulevé un point qui demande évidemment un éclaircissement. Je pense que, quand on a parlé dans les journaux de pénurie de pétrole, d'augmentation des prix, il faut faire une distinction entre la position des Etats-Unis et la position canadienne et québécoise.

Aux Etats-Unis, comme je le disais, je pense, au début, il y a eu des restrictions sur l'implantation de raffineries. Je pense, si ma mémoire est bonne, qu'il y a eu une raffinerie implantée aux Etats-Unis dans les derniers dix ans. Probablement que c'était pour favoriser la production à l'intérieur du pays, la recherche de pétrole à l'intérieur des Etats-Unis. Mais cela a eu comme conséquence, au cours de l'année dernière et au cours de cet hiver, d'amener une rareté des produits pétroliers aux Etats-Unis qui n'étaient pas suffisants pour répondre à la demande américaine. Parce que, dans le fond, on parle de pénurie de pétrole, mais ce n'est pas du tout le cas. Les pays producteurs tels que les pays du Moyen-Orient, d'Afrique, du Vénézuéla, ont des surplus, ont actuellement du pétrole à vendre, autre que celui que possèdent les compagnies majeures.

Au Canada, c'est évidemment voisin des

Etats-Unis, le gouvernement canadien est pressé par cette demande. Les Américains sont prêts à acheter du pétrole actuellement à n'importe quel prix. Ils voudraient s'en approvisionner, autant que possible, une partie au Canada, mais les réserves canadiennes actuellement connues ne serviraient à approvisionner les Etats-Unis, compte tenu de la demande américaine, que pendant six mois si, à un moment donné... C'est une hypothèse que l'on fait.

Vous parliez tout à l'heure de milliards en recherche. Il se fait énormément de recherche, d'exploration, de la part des compagnies de pétrole et il s'en fait de plus en plus parce que les pays producteurs de pétrole qu'on appelle les pays de l'OPEP, qui sont les pays du Moyen-Orient — je vous mentionnais cela tout à l'heure — d'Afrique et du Vénézuéla se sont ligués pour négocier avec les compagnies qu'on appelle majeures, les compagnies de pétrole, des nouveaux contrats d'approvisionnement.

Ils ont décidé maintenant qu'ils devraient en tirer le maximum. Ils ont augmenté la fiscalité. Ils ont nationalisé une partie des avoirs des compagnies. De plus en plus, ils vont prendre le contrôle de ces compagnies pour contrôler leur exportation.

Evidemment, ces mesures des pays producteurs nous affectent et c'est ce qui fait, selon les explications des compagnies, qu'il y a eu une agumentation des prix au cours des derniers mois et c'est ce qui fait aussi que les jeux sont actuellement changés. Les provinces, les Etats consommateurs comme le Québec qui achète la totalité de ses approvisionnements — les Maritimes aussi— des pays producteurs, c'est-à-dire qui importe complètement son pétrole brut, surtout du Vénézuéla mais la tendance s'en va davantage vers le Moyen-Orient parce qu'au Vénézuéla, les réserves sont connues pour à peu près douze ou treize ans actuellement, alors qu'en Arabie Séoudite, entre autres, c'est le pays, actuellement, qui est le plus prometteur...

Nous avons une ligne Borden qui a été établie en 1961 pour préserver le marché du pétrole de l'Ouest. Cela a eu le désavantage de restreindre le développement de nos raffineries qui, à ce moment, pouvaient approvisionner l'Ontario; c'est un marché qui a été coupé avec l'établissement de la ligne Borden. Actuellement, nous avons énormément de demandes de la part de différentes compagnies canadiennes ou d'autres nationalités pour implanter au Québec des raffineries, pour vendre le produit fini aux Etats-Unis.

La politique fédérale, en termes de vente aux Américains du pétrole brut de l'Ouest est, jusqu'à maintenant, de préserver les approvisionnements canadiens dans les années futures avant d'exporter aux Etats-Unis.

M. VINCENT: Oui, mais à un prix spécial, un bon prix ou si c'est simplement de préserver le "gallonnage" ou le...

M. MASSE (Arthabaska): Actuellement, ce sont des ventes qui se font au prix américain, c'est-à-dire que c'est à peu près le prix le plus élevé qu'il peut y avoir.

D'autre part, nous sommes, d'une certaine façon, favorisés parce que nos approvisionnements de pétrole sont à des prix inférieurs à ce que l'Ouest pourrait nous donner comme prix s'il devait nous approvisionner.

M. VINCENT: D'accord. Mais le ministre comprendra que même si nous sommes favorisés à l'heure actuelle — je pense que c'est le ministre qui l'a dit tout à l'heure — les Etats-Unis sont prêts, à n'importe quel prix, à aller chercher du pétrole.

M. MASSE (Arthabaska): Oui.

M. VINCENT: En 1970, les Etats-Unis consommaient, approximativement, toute la production du Moyen-Orient à eux seuls. Si on prend la consommation des Etats-Unis, c'est à peu près tout ce que le Moyen-Orient produit.

M. MASSE (Arthabaska): Non.

M. VINCENT: S'ils sont prêts à aller chercher le pétrole à n'importe quel prix, à ce moment, qu'est-ce qui nous arrive ici au Québec?

M. MASSE (Arthabaska): Je voudrais rectifier parce que les Etats-Unis représentent en termes de consommation seulement 35 p.c. de la production mondiale.

M. VINCENT: Pas de la production mondiale.

M. MASSE (Arthabaska): De la consommation mondiale, pardon. Ils consomment 35 p.c. du total. Ce n'est pas la totalité. C'est le plus gros importateur au monde. Je suis d'accord avec vous, comme c'est un des grands producteurs, également, de pétrole.

M. VINCENT: Ici, on dit: "Les Etats-Unis consommaient à eux seuls en 1970 l'équivalent de toute la production de pétrole des pays arabes, soit 13 millions de barils par jour".

M. MASSE (Arthabaska): Oui, mais ils produisent du pétrole. Ils ne l'achètent pas tout.

M. VINCENT: Ils en produisent mais...

M. MASSE (Arthabaska): C'est un des grands pays producteurs aussi, les Etats-Unis.

M. VINCENT: Mais on dit ici que ses importations devront se multiplier par sept environ pour répondre à une consommation nationale appelée à doubler en 1985.

M. MASSE (Arthabaska): En 1985, c'est cela. Sur ce plan, je pense que c'est un

problème américain, mais à mon avis, cela ne met pas en danger les approvisionnements pour l'Est canadien.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): L'honorable député de Saguenay.

M. MASSE (Arthabaska): Excusez, mais je voudrais continuer. Il y avait trois questions du député de Nicolet. En ce qui concerne l'exploration, je dois dire qu'actuellement, depuis 1970, il y a eu une remontée de l'exploration au Québec pour tenter de découvrir du pétrole. Ce n'est peut-être pas le territoire le plus propice à la découverte mais il y a eu une augmentation assez substantielle. Même si par rapport à l'Ouest, c'est très peu, je pense que l'année passée, il s'est dépensé pour $10 millions en exploration et l'année d'avant, $6 millions. Alors, on voit qu'il y a une augmentation depuis trois ans.

M. VINCENT: Est-ce que cela donne des résultats?

M. MASSE (Arthabaska): Actuellement, tous les forages qui ont été effectués n'ont pas permis de découvertes. Il semblerait que cela soit plus propice entre autres sur les rives du Saint-Laurent, la découverte de gaz...

M. VINCENT: Chez nous.

M. MASSE (Arthabaska): ... que de pétrole. C'est cela. Pour le pétrole lui-même, le bassin qui semble le plus prometteur serait le golfe Saint-Laurent. Quant au gazoduc de l'Artique dont vous parliez tout à l'heure, on a fait des découvertes assez intéressantes aux îles Ellesmere, Christian et à plusieurs endroits, à la société Panartic qui, elle, s'est affiliée avec Trans-Canada Pipeline et CP Investment pour la construction du gazoduc qui devrait acheminer ce pétrole au Sud canadien. Actuellement, je dois dire que des travaux d'étude des sols se font pour tenter de déterminer le meilleur passage au point de vue technique et économique. Il y a deux endroits où ce gazoduc peut passer, au Manitoba ou en Ontario, soit au Québec.

M. VINCENT: Mais ce n'est pas encore déterminé.

M. MASSE (Arthabaska): Pas du tout. C'est encore au niveau des études et on ne pense pas, en tout cas, pour en avoir discuté avec ces compagnies, que les entreprises soumettront avant 1976 leurs demandes à l'Office national de l'énergie pour un tracé possible.

M. VINCENT: Avant 1976.

M. MASSE (Arthabaska): Ce sera probablement en 1976.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): L'honorable député de Lotbinière.

M. BELAND: Sur le même sujet, concernant toujours le pétrole, les produits pétroliers, est-ce que l'honorable ministre a eu le rapport ou a pris connaissance du rapport de tous les endroits où il y a eu effectivement prospection au Québec depuis trois, quatre ou cinq ans? Est-ce que le ministre est au courant véritablement des rapports exacts?

M. MASSE (Arthabaska): Oui. D'ailleurs, à la suite de discussions que j'avais eues avec le député de Lotbinière, surtout sur des endroits très précis, on a ces rapports-là et malheureusement, actuellement, il n'y a vraiment pas eu de découvertes qui puissent être commerciales.

M. BELAND: C'est ce que l'on vous a rapporté.

M. MASSE (Arthabaska): C'est exact.

M. BELAND: C'est entendu, comme vous disiez tantôt avec une phraséologie qui est bien vôtre, avec le jeu de... international d'une part, enfin le jeu de bourse et tout cela, est-ce que, maintenant avec l'expérience que vous possédez, vous pourriez soupçonner qu'il pourrait y avoir au Québec, pas seulement au Canada, mais au Québec, des sources d'approvisionnement de pétrole non exploitées, non déclarées et que l'on s'évertue justement à garder tout simplement comme réserve, ou que certaines compagnies gardent comme réserve, au cas où elles auraient besoin, à un moment donné, d'une façon subite, après que les prix auraient monté suffisamment, selon elles?

M. MASSE (Arthabaska): Je ne pense pas. En tout cas, personnellement je ne peux pas me prononcer sur le plan canadien. Je peux me prononcer en ce qui concerne le territoire québécois. Je suis convaincu qu'il n'existe pas de situation semblable et, d'ailleurs, dans le contexte actuel, ce serait une décision drôlement irrationnelle pour un investisseur de ne pas profiter de la situation du marché actuellement, surtout au prix actuel.

M. BELAND: Je vous remercie quand même de votre réponse. Par contre, je ne veux pas dire que vous n'avez pas les yeux bien ouverts, mais il s'agirait peut-être d'accentuer la surveillance...

M. MASSE (Arthabaska): Disons que je sais la préoccupation du député de Lotbinière. Ce n'est pas parce qu'à un moment donné à un puits il y a un sifflement qui se fait à cause de la pression du gaz qui permet de dire qu'il y a une découverte commerciale, quand on fore un puits. On fait des essais de pression et par ces essais, les spécialistes peuvent calculer l'importance de cette réserve, de cette poche qu'ils ont

pu frapper. Dans certains cas, il y a une compagnie qui a fait des découvertes de poches semblables, mais avec des pressions qui durent peut-être deux heures ou même douze heures et, à partir de ce moment-là, nous au ministère, sommes capables de déterminer l'importance de ces poches de gaz. Mais cela ne veut pas dire qu'il y a une découverte si cela se produit.

M. VINCENT: Cela peut chauffer une maison, mais pas un village.

M. BELAND: Je comprends qu'il peut y avoir à un moment donné une projection subite très intense et qu'elle ne soit pas durable, c'est évident. Maintenant, j'en profite pour poser, peut-être, une deuxième question, parce que cela s'insère quand même dans les recherches à mon sens, qu'on devrait accentuer le plus, étant donné le manque flagrant qu'il y a eu dans le passé, compte tenu de certaines déclarations.

Je relevais tout à l'heure un editorial qui a paru dans un journal fort connu, le 7 juillet 1960, signé par un M. Pierre Vigeant et qui déclarait: Dans un gouvernement bien équilibré, tous les ministères sont importants. Nous ne pouvons cependant nous défendre d'un intérêt particulier pour le futur ministère des Richesses naturelles — qui n'était pas encore formé à ce moment-là — . Ce n'est pas tant à cause de son importance intrinsèque que de la situation déplorable où nous nous trouvons et de l'ampleur de la tâche qui l'attend, qu'il nous apparaît comme le plus gros de tous les ministères, celui qui exigera de son titulaire le plus de fermeté et le plus d'imagination".

Or, cela m'amène à poser la question suivante, relativement au manque qu'il y a eu dans le domaine des recherches sur l'amiante: Etant donné le contrôle ou le monopole qui existe dans ce domaine et qui fait qu'au Québec, il n'y a pas eu tellement de développement de façon qu'il y ait une transformation première et secondaire de ces produits de l'amiante... Est-ce qu'il y a eu, durant le dernier exercice financier ou est-ce qu'il y aura, durant le prochain exercice financier, une accentuation de la recherche dans ce domaine pour le produit comme tel et également concernant les fameux déchets de l'amiante que l'on voit, ces fameuses dunes plus ou moins agréables à regarder, sauf pour celui qui les voit pour la première fois? Est-ce qu'il y aura, au cours de l'année, une recherche intensive dans ce domaine, parce qu'il y aurait quand même des possibilités, selon certains chercheurs? Est-ce que la recherche sera poussée suffisamment loin pour découvrir si c'est rentable de transformer ou d'utiliser une partie, tous ces déchets d'amiante? Je ne sais pas, mais est-ce qu'au point de vue de la recherche, il y aura au cours de l'année une accentuation vraiment rentable dans ce domaine?

M. MASSE (Arthabaska): Oui, d'ailleurs, ce sont des recherches qui sont en cours depuis au moins un an et demi. Pour la recherche sur les rejets d'amiante, il se pose énormément de difficultés dans le sens que chaque rejet — tout dépend des mines — est de composition différente par la nature du sol. Je dois vous assurer que nous allons poursuivre la recherche cette année, d'une façon encore plus intensive et avec la collaboration des compagnies minières. C'est chez nous, au ministère en tant que centre de recherche minérale, que se fait cette recherche.

Quand vous parliez tout à l'heure de la transformation, il faut faire deux distinctions. Il y a de la transformation d'amiante au Québec, si on parle des différentes fibres qui en sont sorties. Ce qu'on veut souligner, ce n'est pas tellement cette transformation comme le fait que l'amiante serve au Québec à développer de nouvelles entreprises, à fabriquer des articles qui n'existent pas actuellement, à partir d'une composante de l'amiante. Comme je le disais tout à l'heure, on commence un inventaire des articles dans lesquels il entre de l'amiante.

Par la suite, je suis assuré qu'on pourra déterminer un certain nombre, peut-être plus important qu'on peut le penser à prime abord, de produits qui pourraient être fabriqués au Québec.

M. BELAND: Est-ce que les compagnies elles-mêmes n'ont pas fait certaines recherches à ce sujet et qu'est-ce que cela a donné comme recherches valables, comme résultats?

M. MASSE (Arthabaska): Dans quel but, cette recherche?

M. BELAND: Dans le but d'utiliser les résidus, ce qu'on appelle communément des déchets d'amiante et qui sont accumulés.

M. MASSE (Arthabaska): L'industrie a fait des recherches, mais à mon avis, elles n'ont pas été suffisamment poussées. On a fait la promotion, à un moment donné, de l'utilisation de la fibre d'amiante dans la pose d'asphalte. Malheureusement pour eux, en tout cas, aux Etats-Unis, à la protection de l'environnement, on a dit que c'était nocif. Ils avaient des raisons. Cette recherche est plutôt assumée par le ministère des Richesses naturelles.

M. BELAND: Oui. En somme, les recherches ont été peu importantes par les compagnies elles-mêmes comparativement, comme vous venez de le dire, aux recherches qui ont été faites par le gouvernement.

M. MASSE (Arthabaska): Oui, et je pense qu'il faut que ce soit fait par nous du fait, comme je vous le disais tantôt, qu'il s'agit de découvrir la technique pour extraire de ces rebuts les différents métaux qui pourraient être utilisables. Ce n'est pas facile parce que cela varie d'une mine à l'autre.

M. BELAND: II semble que, dans certains cas, pas dans tous les cas, comme vous le dites si bien, il y aurait quand même une certaine valeur que l'on pourrait aller récupérer et qui s'en va dans les rebuts.

M. MASSE (Arthabaska): II y a une quantité assez importante de minerai qui pourrait être extraite. C'est de trouver la technique pour l'extraire, à des coûts qui ont de l'allure.

M. BELAND: Tout en demeurant dans le même domaine — je comprends que c'est quelque peu à côté, mais cela touche quand même le ministère des Richesses naturelles qui régit en haut lieu tous ces facteurs — la fameuse maladie, l'amiantose, est-ce que des recherches ont été faites par le ministère des Richesses naturelles dans ce domaine?

M. MASSE (Arthabaska): Là, vous tombez dans le secteur de la santé.

M. BELAND: Est-ce que les recherches on été transférées au ministère des Affaires sociales? Quel est le point? Est-ce que vous pourriez...

M. MASSE (Arthabaska): II y a au ministère des Affaires sociales quelqu'un qui est responsable de ces problèmes de maladies causées par l'exploitation des mines.

Je sais, en tout cas, que les mines d'amiante ont un service assez important dans ce sens mais je dois vous dire que je ne suis pas très familier avec cette responsabilité du ministère des Affaires sociales.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): L'honorable député de Saguenay.

M. LESSARD: M. le Président, on s'est un peu éloigné du sujet. Tout à l'heure, le ministre parlait d'augmentation considérable du prix des produits pétroliers et il expliquait cette situation par le fait que les pays producteurs s'étaient regroupés et plusieurs d'entre eux avaient même nationalisé des entreprises qui appartenaient à des étrangers.

Mais, M. le Président, la dernière augmentation des produits pétroliers, d'après les principaux responsables eux-mêmes, s'expliquait, selon eux, selon les importateurs, par l'augmentation du coût de transport.

M. MASSE (Arthabaska): Selon les importateurs?

M. LESSARD: C'est-à-dire selon les importateurs par l'augmentation du coût de transport. Or, le ministre sait très bien que ces grosses compagnies possèdent leur propre flotte de transport, voyagent sous pavillon international, font des profits en voyageant sous pavillon international, et n'ont pas comme telles à payer des profits sur les coûts de transport à l'un ou l'autre des pays. C'est ce que l'on appelle des profits "off shore". Mais le jeu des compagnies se fait strictement en disant "nous autres"... Je pense qu'il y a eu une étude faite au ministère des Richesses naturelles par des spécialistes à ce sujet c'est-à-dire sur ce sujet connexe parce que c'était l'étude sur l'ensemble des produits pétroliers et les compagnies augmentent considérablement leur coût de transport. Mais comme ce sont strictement les mêmes compagnies sous un autre nom, pour elles, ce sont des profits considérables, d'autant plus qu'elles n'ont pas d'impôt à payer sur ces profits.

Je crois que, ne pouvant pas contrôler justement le transport dans ce domaine-là, eh bien, on évaluait dans l'étude qui a été faite, je pense, à $65 millions par année ce qu'on pouvait perdre sous forme d'impôt. Alors, M. le Président, il est une heure. J'aimerais bien, en tout cas, lors de l'ouverture de la commission, qu'on revienne sur ce sujet-là.

M. MASSE (Arthabaska): Est-ce qu'on pourrait ajourner...

M. LESSARD: Oui, oui, d'accord.

M. MASSE (Arthabaska): ... et laisser la parole à...

M. VINCENT: A quel moment pensons-nous revenir sur les crédits du ministère des Richesses naturelles?

M. MASSE (Arthabaska): Ce serait mercredi matin, à dix heures.

M. VINCENT: Parce qu'on nous annonce que, mardi matin, on siégerait avec le ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche.

M. MASSE (Arthabaska): C'est ça. Ce serait mercredi matin, à dix heures.

M. VINCENT: Mercredi matin, on reviendrait au ministère des Richesses naturelles.

M. MASSE (Arthabaska): Oui, et on pourrait continuer à partir de la question du député de Saguenay.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Alors, la commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h 59)

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