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Commission permanente
des richesses naturelles
et des terres et forêts
Audition des administrateurs de SOQUIP
Séance du 25 mai 1976
(Dix heures quarante-quatre minutes)
M. Séguin (président de la commission permanente des
richesses naturelles et des terres et forêts): A l'ordre,
messieurs!
D'après la note que je vois aux procès-verbaux, le mardi
25 mai 1976, la commission élue permanente suivante siégera
à partir de 10 h 30 à la salle où nous sommes: La
commission des richesses naturelles et des terres et forêts
siégera aux fins d'entendre les administrateurs de la
Société québécoise d'initiatives
pétrolières, soit SOQUIP.
Les membres de la commission pour la séance d'aujourd'hui seront
les suivants: MM. Assad (Papineau), Morin (Sauvé), Bellemare (Johnson),
Bérard (Saint-Maurice), Carpentier (Laviolette), Ciaccia (Mont-Royal),
Cournoyer (Robert-Baldwin), Faucher (Nicolet-Yamaska), Lessard (Saguenay),
Malouin (Drummond), Pelletier (Kamouraska-Témiscouata), Perreault
(L'Assomption), Picotte (Maskinongé), Samson (Rouyn-Noranda). Le
rapporteur pour la commission sera, avez-vous...?
M. Morin: Je propose M. Benjamin Faucher.
Le Président (M. Séguin): M. Faucher, de
Nicolet-Yamaska. Adopté.
M. Morin: C'est tout à fait son domaine, M. le
Président. Il fait très bien ses rapports.
M. Cournoyer: C'est qu'il est présent lui. M. Morin:
Présence assidue.
Le Président (M. Séguin): Je dois tout de suite
vous rappeler à l'ordre, messieurs, puisque ce n'est pas dans le
contexte de nos études de ce matin, ni la présence, ni le sujet.
L'ordre du jour est très simple. Il s'agit d'entendre et de poser des
questions au président de SOQUIP. Alors, sans plus de préambule,
je passe la parole au ministre d'abord.
Préliminaires
M. Cournoyer: Je voudrais juste expliquer la présence de
M. Cloutier, qui est le président de la Société
québécoise d'initiatives pétrolières, comme tout le
monde le sait. Il est ici parce que nous l'avons convoqué comme ministre
et nous lui avons demandé de venir aider le ministre à
répondre aux questions que les parlementaires pouvaient avoir lors de la
période de nos crédits, questions d'ordre général
ou d'ordre précis mais qui concernaient particulièrement les
activités de la Société québécoise
d'initiatives pétrolières, dans le Québec, ailleurs au
Canada ou au monde, s'il faut parler de toutes les activités de
SOQUIP.
Je voudrais que les députés tous et chacun d'entre
nous se sentent totalement libres de poser les questions qu'ils jugent
appropriées ou qu'ils jugent d'intérêt au président
de SOQUIP, via le ministre des Richesses naturelles. Je laisse le
président de SOQUIP répondre aux questions qui concernent,
j'espère, plutôt l'administration de SOQUIP et donner les opinions
que le président peut avoir quant à l'avenir de la
Société québécoise d'initiatives
pétrolières et surtout nous expliquer ses expériences
passées. J'aime croire que nous nous servirons de cela au point de vue
de l'information et aussi peut-être de la critique de la politique ou de
l'absence de politique du gouvernement québécois. C'est cet
endroit-ci, j'espère, qu'on va utiliser pour cela.
M. le Président, je laisse la parole à ceux qui ont des
questions à poser. M. Cloutier m'a indiqué qu'il ne faisait pas
de déclaration d'ouverture, cette déclaration étant, bien
sûr, nécessairement contenue dans le rapport annuel de la
Société québécoise d'initiatives
pétrolières qui a été déposé à
l'Assemblée nationale il n'y a pas tellement longtemps.
Le Président (M. Séguin): Merci, M. le ministre. On
comprendra que M. Cloutier, étant assis à la table de la
commission, toute réponse qu'il aura à donner sera, de fait, la
réponse du ministre.
M. Cournoyer: Si j'ai des objections, je les donnerai.
M. Morin: Est-ce absolument nécessaire, M. le
Président?
Le Président (M. Séguin): C'est la pratique.
Normalement, un sous-ministre et les organismes paragouvemementaux et autres
sont situés de l'autre côté de la barre; c'est là
qu'est la distinction.
M. Cournoyer: J'ai refusé cela parce qu'il ne s'agit pas
d'une comparution, ce matin, de M. Cloutier ni des autres présidents de
sociétés qui viendront.
M. Morin: Non.
M. Cournoyer: II s'agit d'une comparution du ministre. Le
ministre est assis à côté ou a demandé de s'asseoir
en arrière il n'y aura pas de problème de
façon qu'on puisse répondre intelligemment aux questions, aux
questions intelligentes toujours, parce que...
M. Lessard: Si je comprends bien, M. le Président, c'est
que...
Le Président (M. Séguin): Je ne fais pas de
distinction, je ne sors pas de la coutume, je reste strictement dans la
coutume.
M. Lessard: Si je comprends bien, M. !e Président, pour le
ministre, il s agit de continuer l'étude des crédits du
ministère des Richesses naturelles.
M. Cournoyer: II s'agit de prendre la méthode des
crédits pour examiner les activités ou le comportement de
certaines sociétés de la couronne qui relèvent du
ministre. Mais les crédits du ministère des Richesses
naturelles...
M. Lessard: Voici, M. le Président, c'est que
lorsque...
M. Cournoyer: ... comprendre...
M. Lessard: ... j'ai demandé à la commission des
richesses naturelles la convocation de la Société
québécoise d'initiatives pétrolières, ce
n'était pas à titre de conseiller spécial du ministre que
je voulais que le président de la société vienne
témoigner ici.
Je voulais, M. le Président, qu'il vienne à titre
d'administrateur de la société, de même que, chaque fois
que l'Hydro-Québec vient témoigner ici. nous avons à
interroger M. Giroux, nous avons à interroger les administrateurs de
l'Hydro-Québec. C'est à ce titre qu'ils répondent. Ce
n'est pas au nom du ministre comme tel. Je comprends, M. le Président,
qu'il y a une responsabilité du ministre, mais, comme parlementaires,
nous avons une responsabilité sur l'administration comme telle de la
Société québécoise d'initiatives
pétrolières. C'est à ce titre, je pense, que nous avions
convoqué, en tout cas, c'était mon intention le
directeur général de la Société
québécoise d'initiatives pétrolières.
Je pense, M. le Président, que nous devrions avoir la
possibilité d'interroger comme tel I administrateur de la
Société québécoise d'initiatives
pétrolières non seulement sur la politique, I'administration
comme telle de la société, mais sur l'avenir de la
société, sur ce qu il entrevoit comme approvisionnements
pétroliers au Québec, comme recherches, comme explorations, etc.
Je ne comprendrais pas que le ministre n'accepte pas que le directeur ou
l'administrateur général puisse répondre comme
administrateur générai de la Société
québécoise d'initiatives pétrolières.
Le Président (M. Séguin): Le député
de Sauvé.
M. Morin: II est très important, M. le Président,
que nous puissions, par la suite, identifier les propos du président de
la Société d'initiatives pétrolières et être
en mesure de bien les distinguer de ceux du ministre. Je ne crois pas que nous
ayons à nous inquiéter du fait que certains propos du
président pourraient être imputés au ministre, mais nous
pourrions peut-être nous inquiéter, étant donné
notre expérience en Chambre, que certains propos du ministre soient
imputés au président de SOQUIP. Personnellement, je crois qu'il
est essentiel que les interventions soient bien dis- tinctes. S'il faut pour
cela que, malheureusement, le président de SOQUIP passe derrière
!a barre, je le propose. Je crois que ce n'est pas la seule façon de
procéder; je préférerais que le président reste a
côté du ministre, mais que ses réponses soient
enregistrées comme émanant de lui et non pas du ministre. Si nous
acceptons ce précédent, nous allons, par la suite, être
pris avec des situations semblables non seulement pour SOQUEM mais
peut-être éventuellement pour d'autres sociétés
d'Etat. Pour ma part, cela me paraît totalement inacceptable comme
précédent.
M. Cournoyer: M. le Président, j'aimerais comprendre une
chose.
M. Lessard: SOQUEM a témoigné...
M. Cournoyer: Ecoutez, vous avez parlé tantôt; c'est
à mon tour maintenant.
M. Lessard: Allez-y.
M. Cournoyer: J'essaie de vous expliquer ma façon de voir
les choses. Lorsque vous me posez des questions en Chambre comme le dit
le chef de l'Opposition vous m'accusez continuellement d'être
responsable de tout ce qui se passe dans les sociétés qui
relèvent de moi. Jamais vous ne posez de questions en Chambre, jamais,
sauf quant à ma responsabilité. Vous dites: L'Hydro-Québec
s'en va sur la "bum", elle est dans des dépenses de fous, c'est votre
faute. M. le ministre.
M. Morin: Nous n'avons pas dit les choses comme cela.
M. Cournoyer: Non. pas de même.
M. Morin: Nous avons posé des questions.
M. Cournoyer: C'est une insinuation aussi simple que
celle-là et quand vous ne faites pas d'insinuations, M. le
Président...
M. Morin: Vous êtes responsable, devant la Chambre, des
activités de ces sociétés.
M. Cournoyer: Et voilà! Voilà donc, la Chambre a
deux façons de s'exprimer. Elle s'exprime au Parlement en haut et elle
s'exprime ici. J'ai une commission de la Chambre qui s'appelle la commission
des richesses naturelles et des terres et forêts c'est son nom
on est ici. comme ministre, pour répondre des activités de
la Société québécoise d'initiatives
pétrolières.
M. Morin: M. Cloutier n'est pas là comme ministre.
M. Cournoyer: M. Cioutier est ici comme président
responsable au ministre et non pas à l'Assemblée nationale. Si
vous développez un contexte qui veut que le président d une
société soit responsable devant l'Assemblée nationale, je
vous dis: Vous allez faire cela ailleurs qu'en ma
présence. Ce sera fait, disons, au Parlement en haut et on dira
au Parlement pourquoi les présidents de sociétés doivent
maintenant relever de la Chambre et non pas relever du ministre qui est
censé être responsable pour eux devant la Chambre
M. Lessard: M. ie Président, lorsque, à
l'Assemblée nationale, nous soulevons des questions sur l'administration
de différentes sociétés ou sur les politiques de ces
sociétés, c'est parce qu'il est vrai que le ministre est
responsable de ces sociétés à l'Assemblée
nationale. Nous n'avons pas d'autre moyen d'interroger le ministre et
d'interroger ou de connaître la politique des sociétés
qu'en passant par le ministre, en interrogeant le ministre.
Mais, M. le Président, nous avons des sociétés qui
ont une certaine autonomie. Nous avons des sociétés qui ont leur
propre administration, autonome et différente du Conseil des ministres
comme tel et du ministère des Richesses naturelles. Ce matin, c'est
exactement la même chose que lorsque nous convoquons
l'Hydro-Québec; est-ce que M. Giroux maintenant va venir en août
ou en juillet je ne sais plus quand à côté du
ministre des Richesses naturelles, au lieu de venir comme directeur de
l'Hydro-Québec et, de l'autre côté de la barre,
répondre aux questions des parlementaires? Lorsque SOQUEM est venue
témoigner il y a deux ans, en commission parlementaire, SOQUEM est venue
témoigner exactement comme l'Hydro-Québec vient témoigner,
à savoir de l'autre côté de la barre. C'est à titre
d'administrateur de SOQUEM que nous avons pu poser des questions à M.
Carbonneau.
Je pense, M. le Président, que ce n'est pas du tout
répondre à notre attente que d'agir comme le ministre veut agir
ce matin. Cela fait cinq ans que...
M. Cournoyer: Je n'ai pas l'intention de répondre à
votre attente non plus. Cela n'a jamais été cela mon
idée.
M. Lessard: Je termine, M. le Président.
Le Président (M. Séguin): Un instant. Ce n'est pas
pour cela.
M. Lessard: Sur la question de règlement.
Le Président (M. Séguin): Je voudrais faire une
mise au "clair", une mise au point immédiatement. Une mise au "clair",
si possible!
M. Lessard: Pointe-Claire!
Le Président (M. Séguin): Pointe-Claire, oui! Ce
n'est ni le ministre... D'ailleurs, je ne lui en avais pas parlé. Je
voulais tout simplement, dans tout cela je ne veux pas faire de
tempête ni dans un verre d'eau, ni ailleurs dire que normalement,
lorsqu'un président de régie ou d'un autre groupe
paragouvernemental vient témoigner de- vant la commission, la place que
cette ou ces personnes occupent est de l'autre côté de la barre
que nous avons là-bas. C'est la tenue normale. Dans le cas où
nous admettons à la table de la commission un représentant ou le
président, en l'occurence, de SOQUIP, je dois faire part à la
commission que cette personne, toujours en demeurant président de
SOQUIP, lorsqu'elle s'exprimerait, ce serait au nom du ministre.
Je ne veux pas créer de précédent, c'est justement
pour cela que j'ai apporté cette rectification. Le ministre a bien
expliqué tout à l'heure que, s'il n'était pas d'accord
avec les réponses de M. Cloutier, il le dirait; ou, si vous voulez faire
confirmer la réponse de M. Cloutier par le ministre, vous êtes
libres de le faire. C'est simplement pour la commodité de la chose que
ce matin, au lieu de placer M. Cloutier de l'autre côté à
30 pieds de la table, on l'a ici tout près. C'est beaucoup plus facile
de s'entendre et de questionner de cette façon. C'est pour cela qu'il
n'y a pas de chicane à...
M. Lessard: M. le Président, je comprends que ce soit venu
de vous et je comprends la façon dont vous interprétez le
règlement. Je pense que vous avez entièrement raison. Mais je
voulais terminer sur cela, M. le Président. Cela fait cinq ans que cette
société...
Le Président (M. Séguin): Ce n'est pas tellement le
règlement, c'est la pratique qu'on a toujours suivie.
M. Lessard: Je suis d'accord. C'est la pratique, c'est la
coutume, je suis d'accord avec vous. Mais cela fait cinq ans que la
Société québécoise d'initiatives
pétrolières est constituée par une loi gouvernementale. Je
comprends que, dans la loi du gouvernement, il n'est pas dit que la
Société québécoise d'initiatives
pétrolières doive venir témoigner en commission
parlementaire et rendre compte de son administration. Elle doit le faire au
ministre.
Mais, M. le Président, il y a une chose. Je pense que c'est la
même chose pour l'Hydro-Québec. C'est une coutume qui s'est
établie de telle façon que l'Hydro-Québec vient devant une
commission parlementaire.
Suite à votre proposition, le ministre nous a soumis la
suggestion suivante, à savoir que les paroles ou les choses qui seront
dites par M. Cloutier le seront au nom du ministre, donc inscrites au journal
des Débats comme étant celles du ministre.
M. le Président, quant à moi, je n'accepte pas cette
procédure; ce serait créer un précédent. Je pense
que ce que nous avons voulu entendre aujourd'hui, ici, en commission
parlementaire, c'est le président de la Société
québécoise d'initiatives pétrolières en tant que
président et administrateur de cette société. La
procédure qui nous est soumise, quels que soient les petits arrangements
qu'on pourrait faire, ne me donne aucunement satisfaction, parce qu'il va y
avoir certainement, à un
moment donné des réponses qui peuvent être confuses,
à savoir si ce sont celles du ministre ou celles du... A ce moment, je
pourrais comprendre aussi ia position très difficile du
président, administrateur de la Société
québécoise d'initiatives pétrolières, parce qu'il
ne saura plus s'il doit présenter la politique du ministère comme
telle ou défendre comme administrateur sa propre politique, ce qui
créera de la confusion. Je ne veux pas mettre un administrateur d'une
société d'Etat qui me paraît aussi importante dans une
telle situation. C'est pourquoi, quant à moi, je refuse cette
procédure et je proposerais d'aller chercher un autre mandat...
M. Cournoyer: Un instant.
M. Morin: On n'a qu'à retourner devant la Chambre.
M. Cournoyer: Vous, vous allez retourner devant la Chambre?
M. Morin: II va bien falloir que nous retournions devant la
Chambre. C'est un précédent...
M. Cournoyer: Attendez un peu, quel est le
précédent?
M. Morin: Je ne pense pas que la commission puisse en
décider.
M. Cournoyer: Y a-t-il moyen de vous parler? M. Morin:
Nous vous écoutons.
M. Cournoyer: Qu'est-ce que c'est, cette histoire?
M. Lessard: On n'est pas venu vous écouter, on est venu
écouter le président.
M. Cournoyer: M. le Président est-ce qu'on doit voter sur
l'ajournement? Dès qu'eux décident qu'on s'en va en haut, on s'en
va en haut? C'est ça, cette histoire?
J'essaie de vous faire comprendre quelque chose. Y a-t-il moyen de se
parler, non, de temps en temps?
Je vous dis: Imaginez-vous la position dans laquelle se trouve le
président de SOQUIP quand vous lui posez des questions d'orientation
politique, alors qu'il ne peut pas en avoir, d'orientation politique, avant que
le gouvernement soit d'accord. Vous pourriez lui demander d'avoir un jugement
essentiellement politique. Ce n'est pas sa fonction. Vous voulez l'interroger
à titre d'administrateur, je suis d'accord. Vous voulez l'interroger?
Bernard allez vous asseoir là-bas, ils vont vous interroger à
titre d'administrateur.
M. Lessard: Alors, on fera la distinction.
M. Cournoyer: Non, il n'y aura pas de distinction. Vous ne me
poserez pas de questions à moi sur les intentions politiques, c'est
clair. Cela ne me fait rien si vous voulez savoir comment est-ce qu'il
administre cela. Il vous a donné un beau rapport annuel puis
demandez-lui pour voir si, effectivement, ce rapport annuel est conforme
à la réalité. Il va vous dire: Oui. C'est lui qui l'a
fait. Cela est clair. Demandez-lui des clarifications sur n'importe quoi qu'il
y a dedans, mais pour autant que je suis concerné, dès qu'il y a
une question sur la politique, l'avenir politique de SOQUIP, M. Clou-tier n'a
pas d'affaire à répondre. Il n'est pas là pour juger le
gouvernement; il est là strictement comme administrateur de la
société. Je croyais être utile en vous suggérant la
procédure de tantôt, disant: Monsieur, quand il s'agira de
politique, vous pourrez me passer la question. C'est ce que cela voulait dire.
Vous ne l'avez pas pris ainsi. M. Cloutier, vous pouvez vous en aller
là-bas.
Je vous aime beaucoup; allez vous asseoir là-bas ou assoyez-vous,
à n'importe quel titre, à n'importe quel endroit ici, ça
ne me fait rien, mais, dès qu'on vous posera une question politique, je
ne répondrai pas et vous ne répondrez pas non plus. On me posera
les questions en Chambre, comme il le faut.
M. Morin: M. le Président...
M. Lessard: C'est quoi, une question politique?
M. Cournoyer: Je ne le sais pas, moi. J'aurais voulu ne pas avoir
à vous dire: Cela me regarde, ça. C'est cela que je voulais
dire.
M. Lessard: M. le Président, est-ce que je pourrais donner
un exemple?
Le Président (M. Séguin): Un instant, sur un
point...
M. Lessard: Je veux poser une question au ministre.
Le Président (M. Séguin): ... de règlement.
Le ministre a demandé si un député ou quelqu'un pouvait
proposer l'ajournement. Le règlement est très clair
là-dessus, à l'article 157, à la fin, où il est
question de commission élue, là où nous sommes ce matin.
"En commission élue", un député peut proposer que la
commission ajourne ses travaux. Ces motions sont mises aux voix, sans
amendement, et elles ne peuvent être faites qu'une fois au cours d'une
séance, sauf par un ministre. Elles ne peuvent être
débattues, sauf qu'un représentant de chaque parti reconnu peut
prononcer un discours de dix minutes chacun à leur sujet ' C'est dire
qu'une fois ces dix minutes terminées la motion est mise aux voix.
Le député de Sauvé, chef de l'Opposition
M. Morin: Merci, M. le Président. Je voudrais bien que le
ministre comprenne que ce n'est pas lui que nous sommes venus entendre
aujourd'hui. Nous avons le plaisir de l'avoir, en Chambre, de-
vant nous, tous les jours, plaisir mitigé, par moments, mais
plaisir tout de même.
M. Cournoyer: Seulement le mercredi.
M. Morin: Si nous avons des questions à lui poser, nous
les lui posons. Je ne me suis pas fait faute, d'ailleurs, de lui en poser
plusieurs récemment. Nous sommes venus entendre le président de
SOQUIP. Nous nous rendons parfaitement compte que, pour ce qui est des options
fondamentales de SOQUIP, ce que le ministre appelle les questions politiques,
il n'appartient pas au président de SOQUIP de répondre. Si nous
avons des questions de ce genre à poser, c'est à vous que nous
les poserons. Mais il nous paraît que ce serait un dangereux
précédent d'autoriser le ministre à procéder comme
si le président de SOQUIP n'était pas le président d'une
société autonome, mais plutôt comme s'il était, en
quelque sorte, un fonctionnaire faisant partie du ministère. Cela, nous
ne pouvons pas l'accepter.
M. Cloutier préside une société qui a
été créée par une loi, une société
qui a son autonomie, qui, bien sûr, rend compte de sa gestion au
ministre, dont le ministre est responsable devant la Chambre nous
acceptons tout cela, même nous en faisons la base de notre argumentation
mais une société qui n'est pas intégrée au
ministère. La pratique, dans le passé, a toujours
été de laisser le sous-ministre ou même d'autres
fonctionnaires, qui sont dans la dépendance immédiate du
ministre, qui font partie de son ministère, répondre au nom du
ministre.
Nous n'avons jamais eu objection, M. le Président, vous le savez,
à ce que ces propos soient enregistrés au nom du ministre dans
les Débats. Lorsque se présente devant nous pour la
première fois, depuis cinq ans, de surcroît, le président
d'une société autonome, on ne doit tout de même pas poser
un précédent. A ma connaissance en tout cas, cela ne s'est jamais
produit de la sorte et je ne crois pas que nous devions commencer
aujourd'hui.
J'irais même jusqu'à dire que ce précédent me
paraît suffisamment important pour que vous-même décidiez
d'obtenir des clarifications de la Chambre, à tout le moins du
président de l'Assemblée, avant que nous procédions de la
sorte. En ce qui me concerne, en tout cas, je proteste contre une
procédure nouvelle, une procédure qui n'a pas sa raison
d'être et qui pourrait, par la suite, nous engager dans des sentiers
glissants, nous faire marcher sur des pelures de bananes. J'ajoute qu'en ce qui
nous concerne, ceia nous paraît totalement inacceptable.
M. Cournoyer: M. le Président, je viens d'accepter la
proposition du chef de l'Opposition, pourquoi est-ce qu'on se chicane? On se
chicane? On se chicane encore sur la procédure. J'ai dit tantôt:
C'est très bien, M. Cloutier allez-vous-en là-bas; dès
qu'il s'agira d'une question politique, vous ne répondiez pas à
ma place, je répondrai moi-même si je désire
répondre. Mais vous allez répondre de votre administration. Le
reste...
M. Morin: Bien sûr, les aspects techniques...
M. Cournoyer: Ah oui! je ne toucherai pas à cela, n'ayez
pas peur.
M. Morin: ... d'administration des explorations gazières
et pétrolières.
M. Cournoyer: Oui, pas de problème là-dessus. Cela
fait partie de l'administration. Mais, par exemple, dès que, pour
quelque raison que ce soit, le président de la Société
québécoise d'initiatives pétrolières a besoin, pour
agir, d'une décision du lieutenant-gouverneur en conseil, à
partir de là c'est une décision politique qu'il appartient au
gouvernement de prendre et non pas au président de SOQUIP.
M. Morin: Ah oui! Nous n'allons pas lui demander de prendre des
décisions pour vous. D'ailleurs, dans son rapport annuel, il ne nous a
pas attendus pour donner son opinion. Nous avons des questions à lui
poser là-dessus.
M. Lessard: M. le Président...
Le Président (M. Séguin): Le député
de Saguenay.
M. Lessard: ... je pense d'ailleurs que la convocation qui a
été faite par l'Assemblée nationale est très
claire. Je vous indique que la commission des richesses naturelles et des
terres et forêts siégera aux fins d'entendre les administrations
de la Société québécoise d'initiatives
pétrolières.
Le Président (M. Séguin): Le mot clé est:
entendre.
M. Lessard: D'entendre, c'est bien cela.
M. Morin: Est-ce qu'on peut considérer que, moralement, la
barre passe entre le ministre et le président de SOQUIP, de façon
qu'il puisse rester assis là? Autrement, nous aurons des
difficultés à l'entendre.
Le Président: A ce moment-ci je...
M. Cournoyer: ... posez-lui des questions, il va s'en aller bien
vite. Il s'en allait en vacances aujourd'hui et je l'ai fait revenir.
Le Président (M. Séguin): A ce moment-ci, je
redeviens technique et je ne voudrais pas regretter demain ce que j'aurai pu
décider aujourd'hui, parce que cette barre ne peut... C'est ce que
j'allais suggérer. Alors, on ne vous...
M. Cournoyer: Quand ce n'est pas un c'est l'autre qui nous
poigne, cela fait trois ou quatre fois que cela nous arrive.
Le Président (M. Séguin): M. Cloutier, on ne
vous chasse pas, on vous invite à prendre place là-bas. La
suggestion du chef de l'Opposition m'intéresserait, c'est-à-dire
une barre fictive, mais je crains que cette barre soit dérangée
à chaque séance et on deviendrait quasi une société
de débat.
Une Voix: ...
Commentaires de l'Opposition
M. Morin: Pas si c'est moi qui ai pris la peine de le
suggérer. Bien, je suis heureux de souhaiter la bienvenue au
président de SOQUIP, en dépit de l'espace qui nous sépare,
et nous sommes très heureux je le dis au nom de l'Opposition
que M. Cloutier vienne se faire entendre devant cette commission.
C'est la première fois, depuis cinq ans, que nous avons
l'occasion d'étudier ensemble les activités de la
Société québécoise d'initiatives
pétrolières. Ce n'est pas trop tôt.
Vous avez, de par la loi, un double mandat. Dans les faits, vous n'avez
exercé que le mandat A) décrit dans la loi constitutive.
J'aimerais vous dire quelques mots, d'abord, de votre mandat qui porte sur
l'exploration.
Depuis sa fondation, SOQUIP a eu comme principal mandat de faire de
l'exploration pétrolière et gazière. Il s'agissait, au
début de vos activités, et il s'agit encore aujourd'hui d'un
mandat particulièrement difficile, puisque aucun gîte commercial
très important n'a jamais été découvert sur le
territoire québécois. Il s'agissait et il s'agit toujours d'un
mandat difficile pour la raison suivante. Le grand cartel international des
sociétés pétrolières ne s'est jamais vraiment
intéressé au Québec de façon suivie.
J'aimerais rappeler, à titre d'introduction, d'exposé
préliminaire, M. le Président, quelques chiffres et statistiques,
chiffres qui émanent du gouvernement fédéral, du Bureau
fédéral de la statistique et de l'industrie elle-même. La
part du Québec, en pourcentage, dans les dépenses d'exploration
j'entends par là aussi bien les relevés géologiques
que géophysiques, les forages exploratoires, etc. dans les
dépenses d'exploration canadienne est ridiculement basse et peut nous
donner une idée des problèmes affrontés par SOQUIP.
En 1974, le chiffre était de 0,6%; en 1973, de 0,4% et, en 1972,
de 1,8%. Si l'on compare ces piètres pourcentages avec les efforts
déployés dans l'Ouest, surtout en Alberta, au Yukon, dans les
Territoires du Nord-Ouest, dans l'Arctique et en Colombie-Britannique, je pense
qu'il n'est pas exagéré d'affirmer que les grandes
sociétés pétrolières ne se sont à peu
près pas intéressées au Québec, à la
recherche sur le territoire québécois. On peut dire la même
chose, je crois, non seulement du sol, proprement dit, du Québec, mais
de la zone "off-shore".
Le deuxième mandat n'a jamais fait l'objet d'une autorisation par
le Conseil des ministres. On sait que, d'après la loi, ce
deuxième mandat ne peut entrer en vigueur que s'il fait l'objet d'un
décret gouvernemental, ce qu'on appelle un arrêté en
conseil. C'est, je vous l'avoue, un sujet d'inquiétude pour nous que de
constater que SOQUIP a été confinée jusqu'ici,
essentiellement dans son premier mandat et non pas dans ce second mandat qui
l'autoriserait non seulement à raffiner le pétrole, mais aussi
à établir des réseaux de distribution.
Dans notre esprit, SOQUIP avait été créée
pour l'ensemble de ces mandats et non pas pour l'exercice du seul premier
mandat.
On pourrait invoquer pour cela de nombreuses raisons dont l'une serait
d'ordre purement économique, c'est que jusqu'ici SOQUIP a
été confinée aux tâches qui coûtent cher,
comme l'exploration, par exemple. Elle n'a pas été
autorisée à s'immiscer dans les domaines qui pourraient
être rentables, qui pourraient être payants, comme, par exemple, le
raffinage et la distribution.
Cela nous apparaît d'autant plus important que le temps nous
semble venu, lorsqu'on compare ce qui se passe au Québec avec ce qui se
passe, par exemple, dans les pays producteurs, pour SOQUIP de prendre une part
croissante dans l'importation et la distribution du pétrole. Il
paraît que, si SOQUIP ne le fait pas, il n'est pas impossible qu'une
société fédérale s'immisce dans ce dossier et
prenne la place qui normalement était dévolue à
SOQUIP.
Permettez-moi de faire allusion à certains passages du message du
président dans le dernier rapport annuel de SOQUIP, celui qui porte sur
l'année 1974/75. M. Cloutier nous dit que, particulièrement dans
le cas du pétrole brut, la sécurité des approvisionnements
implique de plus en plus des accords de gouvernement à gouvernement, mis
en oeuvre par des compagnies nationales au deux bouts, ce qui veut dire aussi
bien du côté producteur que du côté des
consommateurs. La charte de SOQUIP, ajoute-t-il, comprend l'approvisionnement,
le transport, le raffinage et la distribution qu'implique cette mise en oeuvre,
mais son actionnaire ne lui a pas encore demandé de développer
ces activités.
J'ajoute, M. le Président, qu'en termes élégants
ces choses-là sont dites; la réalité, c'est que, non
seulement le gouvernement ne lui a pas demandé de développer ces
activités, mais ne lui a pas permis de le faire, ce qui est la
vérité.
M. le Président, nous voulons, au cours des heures qui viennent,
étudier tous les aspects du mandat octroyé, dévolu
à SOQUIP par la loi constitutive. Nous allons nous en tenir, bien
sûr, aux aspects techniques; nous n'allons pas demander au
président de SOQUIP de prendre des décisions pour le
gouvernement, mais nous allons, quand même, lui demander son avis
technique sur un certain nombre de questions.
La première que je lui poserais, pour lancer la discussion, est
la suivante: A quoi peut-on attribuer ce vide quasi total des investissements
des compagnies étrangères dans l'exploration du territoire
québécois, aussi bien le territoire émergé que les
territoires "off-shore"?
Investissements étrangers
M. Cloutier (Bernard): La réponse est assez simple. En
réalité, je ne crois pas que ce soit un
désintéressement dans lequel on doit lire des intentions que l'on
voudrait juger; c'est simplement pour une compagnie de choisir où la
prospective de profits est la plus évidente. Alors, j'ai
remarqué, au début de votre exposé, que vous reprochiez
aux compagnies multinationales du cartel pétrolier, comme vous
l'exprimiez, de s'être désintéressées du
Québec. Je crois qu'il faut plutôt dire que les chefs d'entreprise
qui ont eu à décider où ils allaient investir dans
l'exploration ont examiné l'opportunité d investir qui se
présentait à eux et ont, en premier lieu, choisi d'investir
là où la probabilité de découvertes était
plus importante.
Je dois avouer, pour ma part, que, dans leur position, il aurait
été mon devoir d'en faire ainsi.
Cependant, dans le cas d'une compagnie nationale comme SOQUIP qui a le
mandat d'explorer les bassins sédimentaires du Québec, notre
situation est un peu différente. On se devait de faire l'inventaire du
potentiel en hydrocarbures du Québec et c'est ce que nous avons
entrepris, sachant très bien et je crois que mon actionnaire
était également bien conscient de ce fait que les
possibilités du Québec étaient moins attirantes, moins
prometteuses que d'autres bassins reconnus comme étant
pétrolifères ou gazifères dans le monde.
Alors, le faible pourcentage d'investissements dans l'exploration au
Québec, par rapport à l'ensemble des investissements dans
l'exploration au Canada, est dû tout simplement à la nature
même des sédiments que nous avons ici qui sont moins prometteurs
qu'ailleurs.
M. Morin: M. le Président, est-ce qu'on peut tenir le
même raisonnement au sujet des territoires "off-shore", par exemple?
Comment se fait-il que la majorité des concessions "off-shore " dans
l'est se trouve sur des territoires autres que québécois? Est-ce
que les bassins sédimentaires ne risquent pas d'être à peu
près les mêmes, alors que, si l'on regarde la carte des
concessions, des explorations, on constate le président et le
ministre connaissent certainement cette carte que cela se fait sur le
plateau continental, en grande partie à l'extérieur du golfe, le
long du Labrador, le long des grands bancs et sur le plateau continental
situé au large de la Nouvelle-Ecosse. Comment se fait-il que le golfe
lui-même n'ait pas fait l'objet de recherches de la part de ces grandes
compagnies étrangères?
Je note que, même dans le golfe c'est surtout autour de
l'Ile-du-Prince-Edouard que les recherches se sont faites.
M. Cloutier (Bernard): Je vois mal votre carte d'ici, mais, si
vous regardez la page centrale de notre rapport annuel, vous avez une image
plus détaillée des permis d'exploration dans le golfe
Saint-Laurent.
M. Cournoyer: Ce sont les permis qui ont été
donnés.
M. Cloutier (Bernard): La couleur orange représente le
domaine minier de SOQUIP. Vous voyez là une région orange et
jaune où les permis étaient détenus par la compagnie Amoco
et SOQUIP en association 50-50; une région verte et orange où
SOQUIP s'est associée avec Texaco 50-50 et la région autour de
l'Ile-du-Prince-Edouard où il y a plusieurs couleurs, où il y a
un consortium comprenant SOQUIP à 25%, Hudson Bay Oil and Gas
à25%, Fina à 25%, Skelly et Getty à chacun 12,5%.
Je pense que le golfe est relativement bien couvert de permis et qu'il
s'est poursuivi là une certaine exploration. Je ne pense pas vraiment
que l'on puisse dire que les compagnies ont une dent contre le Québec et
ne veulent pas explorer au Québec pour une raison ou pour une autre.
C'est strictement une question de choix, disons de probabilités de
découvertes.
Malheureusement, les sédiments au large de la Nouvelle-Ecosse
sont plus jeunes que ceux que l'on trouve dans le golfe et sont plus ou
étaient plus alléchants.
M. Morin: Ne pensez-vous pas qu'on pourrait peut-être
expliquer, tout de même, cette situation en partie par l'existence de la
fameuse guerre des permis?
M. Cloutier (Bernard): En partie, mais la même situation
existe au large de la Nouvelle-Ecosse où, là aussi, il y a un
règlement à effectuer entre le gouvernement au niveau provincial
et le gouvernement fédéral, qui n'ont pas encore
déterminé où doit se situer la juridiction.
M. Morin: Dois-je comprendre que si SOQUIP n'existait pas, il ne
se ferait probablement pas d'exploration dans le golfe Saint-Laurent, par
exemple?
M. Cloutier (Bernard): Si l'on, retrace l'histoire des permis
provinciaux dans le golfe Saint-Laurent, en 1964, le gouvernement avait
accordé un premier permis à l'Hydro-Québec un peu dans le
but de prendre acte de ses revendications sur la juridiction des richesses
sous-marines du golfe. Ce premier permis, en 1964, a été suivi
d'autres permis, créés en 1965, qui ont couvert la
totalité de la superficie du golfe. Parallèlement, !e
gouvernement fédéral a accordé des permis à
d'autres entreprises.
Cette situation faisait que ni l'une ni i'autre des entreprises ne
pouvait investir lourdement, n'étant pas assurée de
récolter les fruits.
M. Morin: En exclusivité.
M. Cloutier (Bernard): En exclusivité, ou même de
récolter les fruits parce que SOQUIP était dans cette situation
comme l'était Amoco. Pour raconter une petite anecdote, j'ai
rencontré les gens d'Amoco au sujet de l'exploration dans le golfe. On a
essayé de déterminer si on pouvait traiter ensemble et de quelle
façon le permis provincial valait plus que le permis
fédéral, quelles étaient les probabilités que l'un
ou l'autre l'emporte. Finalement, pour terminer la discussion, j'ai dit: Si on
s'associe, c'est à 50-50. J'ai pris un billet
de $10 et des grands ciseaux que j'avais dans mon bureau, je l'ai
coupé en deux et dit: Vous avez la moitié d'un billet de $10,
moi, j'ai l'autre moitié. Sans les mettre ensemble, cela ne vaut rien!
Alors, on s'est associés 50-50, Amoco détenant les permis
fédéraux, SOQUIP détenant les permis provinciaux.
Au large de la Nouvelle-Ecosse, la situation a été plus
simple parce que les compagnies qui ont sollicité les permis provinciaux
sollicitaient aussi les permis fédéraux. Il n'y a pas eu ce
problème. Mais cela, c'est la petite histoire.
M. Lessard: C'est une bonne façon de s'organiser et
essayer de corriger certains défauts du système...
M. Cloutier (Bernard): C'est ce qui a permis d'explorer le golfe
parce qu'autrement, ni Amoco, ni nous n'aurions pu, sur un plan strictement
affaires, investir des millions en ajoutant au risque géologique le
risque politique que l'autre juridiction soit reconnue et qu'on ait investi
pour rien.
Conflit dans l'octroi des permis
M. Morin: M. le Président de SOQUIP, pourriez-vous nous
dire brièvement quels sont les territoires où il y a conflit des
compétences entre le Québec et le gouvernement
fédéral pour l'octroi des permis? Est-ce que cela couvre
l'ensemble de la superficie du plateau continental du golfe qui est à
l'intérieur des frontières québécoises ou bien s'il
y a des parties de ce domaine minier qui ne sont pas l'objet de chevauchements
de compétence?
Par la même occasion, pourriez-vous nous dire combien de permis
sont impliqués?
M. Cloutier (Bernard): Sur la page centrale du rapport que vous
avez, vous avez une ligne en traits fermes et pointillés qui
découpe le golfe, selon la convention de Genève, entre les cinq
provinces de l'Est.
M. Morin: Selon l'entente intervenue entre les provinces
également?
M. Cloutier (Bernard): C'est cela. M. Morin: Vers
1958?
M. Cloutier (Bernard): C'est cela, mais selon les principes de la
convention de Genève.
La totalité du golfe est revendiquée soit par le
gouvernement fédéral ou par les provinces à l'exception de
ce qui est contenu, et qui ne paraît pas sur cette carte, du
côté des côtes, à l'intérieur d'une ligne qui
a été appelée la ligne Trudeau, qui a fait l'objet d'une
proposition du gouvernement fédéral aux divers gouvernements des
provinces. Cette ligne Trudeau va de pointe à pointe et en fait ne
concède que relativement très peu de territoire aux provinces.
C'est tellement peu que cela aurait vraiment compliqué la carte de
l'indiquer.
En réalité, la totalité du golfe jusqu'à une
ligne qui irait en gros de la pointe de la Gaspésie vers le nord est
contestée par les deux niveaux de gouvernement.
M. Morin: Je vous arrête un instant, M. Cloutier. Cette
ligne que vous appelez Trudeau, une ligne de cap à cap, comme on
dit...
M. Cloutier (Bernard): Possiblement de cap à cap.
M. Morin: ... ou de promontoire à promontoire, est-ce que
vous parlez d'une ligne qui est située à l'intérieur du
golfe et non pas d'une ligne qui ferme le golfe comme, par exemple, la ligne de
fermeture des pèches?
M. Cloutier (Bernard): Non, c est sur le pourtour.
M. Morin: Sur le pourtour.
M. Cloutier (Bernard): A ma connaissance, quoique je n'ai pas
été partie à cet échange, cette transaction, cette
tractation, dans les propositions du gouvernement fédéral, le
gouvernement fédéral reconnaissait les compétences
provinciales sur une certaine étendue au large du niveau de la
marée haute, si on veut, et cette étendue était
définie par un tracé d'une ligne qui allait sensiblement de cap
à cap avec peut-être un petit écart.
M. Morin: Vous savez que cette ligne droite de cap à cap
existait déjà, depuis de nombreuses années, à la
suite de la proclamation de 1763 et d'une série de décisions
judiciaires et aussi de décisions gouvernementales. Il y avait donc
déjà une ligne de fermeture de cap à cap, par exemple,
allant du Cap des Rosiers à la pointe ouest de l'île d'Anticosti,
fermant l'estuaire du golfe, puis de cette pointe vers le nord, vers
Natashquan, je crois. De même la baie de Gaspé, la baie des
Chaleurs, la baie Miramichi et plusieurs autres baies du pourtour faisaient
partie de ce qu'on appelle les eaux intérieures, les "inland waters" des
provinces. Je me demandais si la ligne que vous appelez Trudeau correspondait
tout simplement à cette ligne historique, cette ligne traditionnelle ou
s'il s'agissait d'un nouveau compromis. Pour le cas où ce serait un
nouveau compromis, y aurait-il moyen d'obtenir la carte de cette ligne?
M. Cloutier (Bernard): Je n'étais pas au courant de la
génèse de la ligne Trudeau, mais tel que vous
décrivez...
M. Cournoyer: Je ne veux pas m'opposer outre mesure, mais je ne
crois pas aue M. Cloutier soit en mesure de discuter cela. M a dit tantôt
qu'il n'était pas présent à ces échanges. S'il y a
quelqu'un à qui vous pouvez poser cette question, j'imagine, qu'il
s'agirait de la poser au ministre des Affaires intergouvernementales, qui est
le président des échanges. Moi-même, je vous assure, M.
le Président, que je ne sais pas... je sais, on m'indique de quel
conflit il s'agit, mais c'est une indication que j'ai qui n'est absolument pas
précise. Et connaissant le souci de précision du chef de
l'Opposition, je lui dis: Peut-être que la meilleure place serait quand
même l'endroit où normalement vous aimeriez qu'on discute des
problèmes constitutionnels...
M. Morin: Oui...
M. Cournoyer: ... de ne pas demander à M. Cloutier surtout
de s'ériger demain matin en expert et dire: Voici, c'est cela. Ce serait
dépasser la responsabilité de M. Cloutier.
M. Morin: Telle n'était pas mon intention. M. Cournoyer:
Je suis sûr de cela, mais...
M. Morin: La difficulté vient du fait que, lorsque nous
tentons d'aborder ces aspects constitutionnels à l'étude des
crédits du ministère des Affaires intergouvemementales, le
ministre, invariablement, nous dit: C'est une question de contenu; moi, je ne
connais pas, allez voir le ministre concerné.
M. Cournoyer: Bon. Alors, adressez vos questions au ministre
concerné et non pas à SOQUIP.
M. Morin: Si vous estimez...
M. Cournoyer: SOQUIP, elle, n'a que les conséquences de
cela dans les mains...
M. Morin: Je pense qu'on peut très bien s'arranger.
M. Cournoyer: ... pas...
M. Morin: Si M. Cloutier estime qu'il n'a pas les renseignements
et que vous les ayez, vous, j'admettrais tout à fait que vous
répondiez à la question. Je n'ai aucune objection. Ma question,
adressée à l'un ou à l'autre, est la suivante: Serait-il
possible de déposer devant la commission la carte portant ce que le
président de SOQUIP a appelé la ligne Trudeau? Ce n'est pas moi
qui l'ai mentionnée, je le dis en passant, c'est le président de
SOQUIP qui a mentionné cette ligne. J'imagine qu'il la connaît au
moins en gros. Il nous l'a d'ailleurs décrite; s'il y avait un moyen
d'en avoir la carte, cela compléterait notre dossier.
M. Cournoyer: Oui, je vais faire cela, je vais la déposer.
Je n'ai aucune forme d'objection.
M. Morin: Bien. Je remercie le ministre. Si nous pouvons
procéder de la sorte, je crois qu'on pourra expédier le dossier
assez rapidement.
Pourriez-vous nous indiquer combien il y a de permis qui se chevauchent
de la sorte? J'entends: Combien y a-t-il de zones où vous avez à
la fois une revendication québécoise et une prétention
fédérale?
M. Cloutier (Bernard): Pour la superficie, en acres, disons que
sur...
M. Cournoyer: II n'y en a aucune.
M. Morin: Ecoutez, c'est une question technique.
M. Cournoyer: C'est très technique, en effet. Demandez-lui
donc s'il a les permis requis pour faire cela dans l'exploration. Les siens,
ses permis, il les connaît, mais il ne sait pas, effectivement, s'il n'y
a pas d'autres permis.
M. Lessard: Dans le rapport de SOQUIP... M. Cournoyer: On dit
quoi?
M. Lessard: ... dans le rapport de la Société
québécoise d'initiatives pétrolières...
M. Cournoyer: Quelle place? Quelle page? M. Lessard: Page 12.
M. Cournoyer: Page 12.
M. Lessard: On parle justement de permis où il y a
chevauchement...
M. Cournoyer: Bien oui!
M. Lessard: ... entre le gouvernement fédéral et le
gouvernement provincial.
M. Cournoyer: Numéro?
M. Lessard: Paragraphe 2, domaines miniers.
M. Cournoyer: Domaines miniers.
M. Lessard: Où on dit que SOQUIP explore, en ce qui
concerne l'exploration, 60 777 626 acres...
M. Cournoyer: C'est cela, de...
M. Lessard: ... de terrains recouverts par des permis
fédéraux et provinciaux.
M. Cournoyer: C'est cela.
M. Lessard: Ce que le chef de l'Opposition demandait,
c'était: Comment cela se répartit-il?
M. Morin: Combien de permis sont en cause?
M. Lessard: Combien de permis sont en cause là où
il y a superposition de permis fédéraux, et est-ce que le nombre
de permis dont on parle ici correspond exactement à la situation
actuelle? Le président de SOQUIP, qui inclut cela dans son
rapport...
M. Cournoyer: C'est bien sûr que le président de
SOQUIP peut répondre à une question comme
celle-là. Il s'agit de soustraire 52 000 de 60 000, c'est dans
son rapport. Des opérations mathématiques, vous avez le don de
faire faire cela à des gars...
NI. Lessard: Je vous demande si la situation est encore la
même.
M. Morin: II pourrait soustraire les acres, mais ce n'est pas
cela qui nous intéresse, c'est le nombre de permis
superposés.
M. Cournoyer: Dès qu'il y a une autre compagnie dedans,
cela fait 30 autres.
M. Morin: Ce n'est pas si simple que cela. En tout cas, laissons
donc le président répondre.
M. Cournoyer: Si vous voulez, M. le Président,
expliquez-leur cela.
M. Cloutier (Bernard): Disons que pour la partie
québécoise du golfe, on identifie environ 33 millions d'acres
comme étant couvertes par des permis du gouvernement du Québec.
Là-dessus, il y a environ 8 millions d'acres qui sont également
couvertes par des permis fédéraux. Nous nous sommes
associés avec les détenteurs de ces permis fédéraux
de façon qu'en ce qui concerne l'entreprise, nous sommes assurés
que la part qui revient à l'entreprise sera partagée entre les
investisseurs de l'entreprise. La question de savoir si les redevances seront
payées à l'un ou à l'autre gouvernement ne nous appartient
pas. Il s'agissait, pour nous, de nous assurer qu'au moins ce qui revient
à l'entreprise soit partagé entre les investisseurs de
l'entreprise.
M. Morin: Bien. Dois-je comprendre que la zone de chevauchement
des permis, sur la carte qu'on trouve au centre de votre rapport, est la zone
hachurée?
M. Cloutier (Bernard): Oui, c'est cela.
M. Morin: La zone hachurée, jaune et bistre?
M. Cloutier (Bernard): C'est cela. C'est-à-dire que c'est
là où il existe... Il y a d'autres permis fédéraux
dans cette région, mais comme nous ne sommes pas associés avec
ces détenteurs de permis fédéraux et que, en ce qui nous
concerne, le permis provincial est nécessaire et suffisant pour nous
permettre de travailler, nous ne tenons compte des permis
fédéraux que là où nous avons une association avec
des détenteurs de permis fédéraux.
Il y a aussi d'autres permis émis dans le golfe sur des eaux ou
sur des régions, où il y a recouvrement avec des permis
provinciaux qui ne nous concernent pas tant qu'on n'a pas décidé
d'y investir.
Exploration de Pétro-Canada
M. Morin: M. le Président, j'aimerais me pencher sur le
problème qui pourrait être soulevé par les projets de
Pétro-Canada qui se propose d'entreprendre un vaste programme
d'exploration en vue de découvrir du gaz naturel sous I "off-shore"
situé dans l'Est canadien. Est-ce qu'à votre connaissance, M. le
Président de SOQUIP, ces projets de Pétrocan viseraient
également l'off-shore" québécois et qu'arriverait-il si
Pétro-Canada faisait une découverte sur un territoire
québécois dont le pouvoir fédéral revendique la
compétence?
M. Cloutier (Bernard): Je pense que les dirigeants de
Pétro-Canada ont été nommés en tant que dirigeants
d'entreprises, ayant des responsabilités financières de gestion,
selon ce que l'on appelle les bonnes règles de l'industrie
pétrolière, et qu'ils seraient dans la même situation qu
était la mienne lorsque je détenais la moitié des $10. Ce
ne serait pas leur responsabilité d'ajouter au risque géologique
un risque politique et, s'ils voulaient faire de l'exploration avec des permis
fédéraux dans le golfe, il serait naturel pour eux de venir
s'associer avec nous, de façon à avoir le recouvrement des deux
permis. La question de la redevance et de la juridiction devrait être
traitée en dehors de l'entreprise, car ce n'est pas le souci normal de
l'entreprise qu'elle soit d'Etat ou privée. Que ce soit
Pétro-Canada ou nous, ils auraient un comportement analogue au
nôtre, je crois.
M. Lessard: M. le Président, suite à cette
réponse qui est donnée par M. Cloutier, je voudrais lui poser la
question suivante: Là où il y a chevauchement, là
où il y a, plus particulièrement, contestation du gouvernement
fédéral vis-à-vis du contrôle de la ressource des
provinces, est-ce qu'on peut envisager la possibilité qu'un permis
provincial d'exploration soit accordé à la Société
québécoise d'initiatives pétrolières et que, par la
suite, après que certaines recherches ont été faites,
etc., le fédéral donne aussi, sur le même territoire, un
permis d'exploration? Je prends un exemple; la Société
québécoise d'initiatives pétrolières a fait
déjà certaines recherches sur tel territoire donné et, par
la suite, Pétro-Canada obtient un permis sur le même territoire.
Vous seriez ainsi forcés de vous associer avec Pétro-Canada,
parce qu'il y a contestation du territoire.
M. Cloutier (Bernard): Ce serait dans l'intérêt des
deux parties.
M. Cournoyer: Hypothèse.
M. Lessard: Bien hypothèse assez grave quant à
l'insécurité de la Société québécoise
d'initiatives pétrolières.
M. Cournoyer: La Société québécoise
d'initiatives pétrolières, là où elle
possède des permis seule je pense bien que c'est
idenfié...
M. Lessard: Ce n'est pas ce que je veux savoir.
M. Cournoyer: ...ne fait qu'exécuter ce que
son gouvernement lui a dit d'exécuter. Vous n'avez pas besoin
d'aller chercher des permis fédéraux, puisque vous appelez
SOQUIP. Il y a un problème lorsque Pétro-Canada ou une autre
compagnie va dire: Je veux avoir un permis ici. Si cette compagnie juge qu'il y
va de son intérêt d'avoir un permis strictement
fédéral vous comprenez là puis si elle ne
veut pas le faire avec SOQUIP, on a un conflit On cherche tous les deux
à la même place, puis on va régler le conflit dans ce
temps-là.
M. Lessard: La guerre du câble.
M. Cournoyer: Bien non, ce n'est pas le cas.
M. Morin: La question que je vous posais de façon plus
précise, M. le Président de SOQUIP, était la suivante:
Est-ce qu'à votre connaissance Pétro-Canada s'intéresse
à l'"off-shore" québécois ou bien si, pour l'instant, cela
se limite strictement au large du Labrador?
M. Cournoyer: C'est quoi, le Labrador? Regardez, ici, le petit
bas de carte. J'aimerais savoir ce que veut dire "off-shore"
québécois ici.
M. Morin: Je voulais dire dans le golfe Saint-Laurent. Il n'y a
pas d'"off-shore" québécois au Labrador. L'"off-shore" du
Labrador...
M. Cournoyer: Ce n'est pas moi qui l'ai dit. M. Morin:
...relève de Terre-Neuve.
M. Lessard: On sait que, de toute façon, vous avez perdu
la bataille.
M. Morin: De toute façon, j'aimerais savoir s'il y a
effectivement un intérêt quelconque de Pétro-Canada pour
les territoires "off-shore" du Québec.
M. Cloutier (Bernard): Disons que Pétro-Canada vient de
s'organiser il n'y a pas longtemps. Ils ont beaucoup d'argent et nous avons
beaucoup de terrains, beaucoup de permis.
M. Morin: ... d'argent?
M. Cloutier (Bernard): Proportionnellement, Pétro-Canada,
effectivement. Mais, nous avons des terrains et une équipe technique qui
est plus considérable que la leur, dans le moment, et une association
serait très naturelle et à notre avantage mutuel. Comme je le
précisais tout à l'heure, je ne crois pas que les dirigeants de
Pétro-Canada utilisent leur société pour créer un
conflit ou pour s'embarquer dans un conflit de juridictions. Bien
sincèrement, je pense que le problème que vous posez est un faux
problème...
M. Morin: Alors, y a-t-il...
M. Cloutier (Bernard): ... de la nature de l'entreprise de
Pétro-Canada.
M. Morin: Y a-t-il une coopération quelconque,
jusqu'à maintenant? Je me rends compte que Pétro-Canada vient de
commencer ses activités mais, tout de même, existe-t-il des
projets de coopération entre SOQUIP et Pétro-Canada? Le
président vient de nous dire un peu comment il entrevoit les rapports
entre cette société fédérale et son propre
organisme. Il a souligné, en passant, la disproportion qui existe entre
le budget de cette société fédérale et celui de
SOQUIP. On parle d'un montant de $l,5 milliard pour Pétro-Canada, au
cours des cinq prochaines années, dont $1 milliard sous forme de
prêts fédéraux, tandis que les investissements dans
SOQUIP... et encore, on parlera des investissements autorisés et
pas des investissements qui ont été effectivement versés,
ce qui n'est pas du tout la même chose. Il me semble qu'il y a là
une disproportion qui devrait inquiéter les respondables de la politique
pétrolière québécoise.
Pourriez-vous nous dire comment vous envisagez la chose M. le
président de SOQUIP?
M. Cloutier (Bernard): Avec Pétro-Canada? M. Morin:
Oui.
M. Cloutier (Bernard): Nous avons, par exemple, participé
c'est dans la page centrale au large de l'île du Cap
Breton; vous voyez un arc-en-ciel de couleurs qui représente un
consortium, dans lequel nous avons une participation de 5% en participant
à des travaux. On a fait un forage en mer qui a été
encourageant, mais aucun des partenaires du groupe, par rapport à ces
opportunités d'investissement propres, ne plaçait un
deuxième forage à un niveau élevé de
priorité.
La compagnie Shell et la compagnie Pétro-Canada ont offert de
continuer les travaux et nous sommes présentement en négociation
avec ces deux compagnies, pour faire faire un autre forage. C'est le genre de
coopération d'entreprises où, dans ce cas-ci, Shell et
Pétro-Canada agissent en prenant les mêmes positions pour
continuer des travaux, de la même façon que nous, ailleurs, avons
pris des affermages d'autres groupes qui avaient déjà investi
dans des régions précises et déterminé suffisamment
d'indices pour éveiller notre attention et intérêt.
M. Morin: Mais, à l'intérieur du territoire
québécois, y-a-t-il eu des tentatives de coopération du
même genre? Vous m'indiquez un territoire qui se trouve, de fait, sous la
juridiction de la Nouvelle-Ecosse, au large du Cap Breton. Y a-t-il des projets
de coopération quelconque entre SOQUIP et Pétro-Canada, à
l'intérieur des frontières du Québec?
M. Cloutier (Bernard): Non, dans le moment il n'y a rien de
particulier en route, si vous voulez.
M. Morin: Ce qui nous chicote, dans ce dossier, c'est que
Pétro-Canada va être financée non seulement par les dollars
fédéraux mais par des dollars fédéraux auxquels les
Québécois auront
apporté leur contribution. Cela va être financé
à même les taxes. Je me demande si, à toutes fins
pratiques, les Québécois vont tirer le moindre avantage des
activités de Pétro-Canada; le moindre avantage autre qu une
concurrence éventuelle entre Pétro-Canada et SOQUIP, plutôt
qu'une coopération qui pourrait être utile. Je suis un peu
inquiet.
Je me demande vraiment si pour les activités de
Pétro-Canada, tout en ne retirant aucun bénéfice de ces
activités...
M. Cournoyer: Là-dessus...
M. Morin: J'aimerais que le ministre réponde à
cette question plutôt que le président de SOQUIP.
M. Cournoyer: ... je pense que c'est politique; c'est
essentiellement politique comme question et aussi comme réponse. Lorsque
j'ai eu le plaisir d'aller en Alberta avec le président de SOQUIP
c'est tout à fait récent pour discuter d'un certain nombre
de choses avec le gouvernement albertain, j'ai eu le privilège, en
même temps, de rencontrer les dirigeants de la compagnie
Pétro-Canada, Pétrocan comme ils l'appellent plus
spécifiquement. Il est évident, selon leurs propres intentions
manifestées, que les gens de Pétrocan veulent entrer en
collaboration totale avec SOQUIP pour chercher soit du pétrole, soit du
gaz dans l'est. Le président de SOQUIP vous l'a dit tantôt: S'il y
va de l'intérêt de Pétrocan et, donc, des Canadiens en
général de faire en sorte qu'il y ait des permis conjoints ou
qu'il y ait exploration conjointe on sait que l'équipement
technique de SOQUIP est en avance sur d'autres dans l'est il est entendu
que le président de Pétrocan m'a indiqué le désir
extrême de participer avec SOQUIP à la recherche de pétrole
et de gaz dans l'est.
Cependant, ce n'est pas nécessairement du pétrole et du
gaz strictement au Québec; il faut comprendre qu'il s'agit de
pétrole et de gaz dans l'est, parce que l'un des buts premiers de
Pétrocan actuellement, c'est de tenter de trouver des sources de gaz et
de pétrole près du marché de l'est. C'est ce qu'on nous
indique comme politique première. Voilà pourquoi l'argent qui est
généré, j'imagine, en grande partie dans la province de
Québec et en Ontario, sert aussi à chercher ou à faire de
l'exploration dans l'est. Même s'il ne sert pas à cela
immédiatement, il semble qu'un certain nombre de dollars ont
été engagés pour cette partie de l'exploration. Les
premiers contacts, j'imagine, ont été faits la
dernière fois, je n'ai pas eu de discussion avec le président de
SOQUIP là-dessus pour une participation ou une collaboration,
plus qu'une collaboration, une exploration conjointe de certaines parties du
territoire entre Pétrocan et SOQUIP.
S'agit-il d'une bonne politique? Je pense que je n'ai pas à
critiquer, à ce moment-ci, ia politique fédérale. Ils ont
créé Pétrocan; nous avons créé SOQUIP.
Pétrocan est une copie de SOQUIP jusqu'à un certain point. Ils ne
sont pas encore entrés...
M. Morin: II ne s'agit pas du même investissement.
M. Cournoyer: Pardon. Non, mais écoutez, j'imagine qu'on
peut parler du montant d'argent que nous avons investi là-dedans. Avec
les indications que le président de SOQUIP vous a données
tantôt, je pense qu'il faut rappeler que nous avons un potentiel minier
considérable dans la province de Québec. Nous avons un budget de
$45 millions pour SOQUEM, alors que nous avons un budget de $100 millions pour
SOQUIP. SOQUIP, jusqu'ici, a fait le travail que l'Etat s'attendait qu'une
société de la couronne fasse, c'est-à-dire le travail que
les autres n'ont jamais voulu faire parce qu'ils n'y voyaient pas
d'intérêt. Je pense bien qu'on va se rendre compte, à un
moment donné, en voyant ce qui a été découvert pour
le montant des explorations qui ont été faites, qu'effectivement,
lorsque nous avons formé SOQUIP le chef de I Opposition le disait
tantôt il s'agissait pour le gouvernement québécois
ou l'Etat québécois de voir si ce que les compagnies
prétendaient était faux ou vrai. Il fallait en faire la
vérification d une façon indépendante. Cela coûte
cher de faire cela, parce que cela ne rapporte pas nécessairement. Quand
on l'a fait...
M. Lessard: On laisse les compagnies faire de l'argent et on
donne à SOQUIP la grande responsabilité de faire de
l'exploration.
M. Cournoyer: M. le Président, je pensais parler d'une
façon intelligente avec ces gens, je ne parle plus.
M. Morin: Bon.
M. Cournoyer: Cela ne vaut pas la peine.
M. Morin: Nous allons essayer de nous entretenir avec le
président de SOQUIP. M. le Président, je voudrais...
M. Cournoyer: S'il pose des questions folles comme cela, ne
réponds pas.
M. Lessard: C'est exact. On va vous parler du deuxième
mandat tout à l'heure. C'est exact, vous laissez les compagnies...
M. Cournoyer: II n'a pas le deuxième mandat et cela
relève de moi.
M. Lessard: C'est cela. Cela relève de vous et vous ne
voulez pas répondre.
M. Cournoyer: Posez des questions intelligentes.
M. Lessard: Oui, mais ce n'est pas au ministre de décider
si les questions sont intelligentes ou pas.
M. Cournoyer: Mais c'est le ministre qui va
vous donner les réponses. Vous allez avoir le même genre de
réponses que je vous donne quand vous posez des questions
imbéciles.
M. Lessard: II devrait êire pas mal plus intelligent
à l'Assemblée nationale et répondre pas mal plus
sérieusement aux questions.
M. Cournoyer: Vous allez en avoir des réponses
intelligentes, mais jamais quand vous posez des questions de petite politique.
Ce sont des commentaires en plus de cela.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre!
M. Cournoyer: Vous ferez vos commentaires en dehors des
questions.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre!
M. Lessard: Vous n'êtes pas capable de répondre
sérieusement aux questions.
M. Cournoyer: Vous n'êtes pas capable d'en poser des
intelligentes.
M. Lessard: Pour vous, il n'y a plus rien de sérieux au
Québec.
M. Cournoyer: Dès qu'on vous répond une affaire,
juste...
Le Président (M. Séguin): A l'ordre! M.
Cournoyer: Pardon, M. le Président.
M. Lessard: Le Travail ce n'était pas sérieux et
là, les Richesses naturelles, ce n'est pas sérieux.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre!
M. Cournoyer: Tu ne l'es pas sérieux et tu ne l'as jamais
été.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre! Au moment du
petit conflit là-dessus, c'était le député de
Sauvé, chef de l'Opposition, qui avait la parole.
M. Morin: M. le Président...
M. Lessard:... capable de répondre aux questions.
M. Cournoyer: Frustré.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre!
M. Morin:... on ne nous fera pas croire qu'une question portant
sur l'avenir de l'énergie au Québec...
M. Cournoyer: On parle de l'avenir, pas du passé. Il n'est
que dans le passé, ton espèce de...
M. Lessard: Ton mandat, le deuxième mandat...
M. Cournoyer: Va-t'en donc au Saguenay, toi!
Le Président (M. Séguin): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Morin: Le ministre...
M. Lessard: Va-t'en dans Saint-Jacques...
Le Président (M. Séguin): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Morin: ... me déçoit parce qu'il sait
très bien que le...
M. Cournoyer: Je n'ai pas à...
Le Président (M. Séguin): A l'ordre!
M. Morin: ... second mandat de SOQUIP est une question tort
importante. Nous l'aborderons tout a l'heure; il n'y répondra pas s'il
ne le veut pas, mais il ne pourra pas nous empêcher d'avoir notre
idée sur les raisons qui empêchent le gouvernement du
Québec de mettre en oeuvre ce deuxième mandat.
Pour l'instant, nous parlons d'autre chose, M. le Président.
J'aimerais poser une question technique au président de SOQUIP.
J'aimerais qu'il l'envisage sur le plan technique. Y a-t-il place au
Québec, à son avis, pour deux sociétés? Etant
donné les dédoublements que cela peut entraîner, dans
l'avenir, y a-t-il place sur le plan technique, je ne parle pas sur le
plan politique pour deux sociétés se chevauchant, dont
l'une est évidemment puissante et va avoir un investissement
considérable et dont l'autre, bien sûr, n'a pas encore tous les
moyens dont elle devrait disposer pour remplir efficacement l'énorme
mandat qui lui est confié par la loi? Sur le plan technique, est-ce que
le président de SOQUIP estime que c'est faisable ou si c'est difficile
ou si, au contraire, cela ne présente aucune difficulté?
M. Cloutier (Bernard): De quelle deuxième
société parlez-vous?
M. Morin: Je parle de Pétrocan et de SOQUIP.
M. Cloutier (Bernard): Ah bon! En ce qui concerne une
réponse tout à fait technique, nous avons été
associés pendant longtemps avec la compagnie Shell, qui a amorcé
l'exploration des basses terres, qui a investi un montant que l'on pourrait
évaluer entre $15 millions et $20 millions et, maintenant, nous
bénéficions de cette association. En un premier temps, nous avons
pris un affermage à 50%. Comme eux avaient d'autres options, d'autres
possibilités d'investissements les basses terres figuraient dans
le bas de leur liste ils ont cédé les derniers 50% contre
une redevance. C'est un cas où nous avons été
associés avec une entreprise qui est autrement plus grande que
Pétro-Canada et nous en avons tiré notre profit.
Je ne crois pas que la taille des entreprises avec lesquelles on peut
s'associer doive nous faire peur. Au contraire, je pense que s'associer avec
une entreprise solide est un garant de relations soutenues et conduites
normalement dans la mesure que l'on joue, de part ei d'autres, les
règles du jeu. Je vois Pétrocan en tant que chef d'entreprise
strictement, seulement comme une autre entreprise avec laquelle on peut faire
des affaires.
M. Morin: Est-ce que vous diriez cela non seulement de
l'exploration mais aussi du raffinage et de la mise en marché? Sur le
plan technique toujours.
M. Cloutier (Bernard): Je vous avoue ne pas y avoir
pensé.
M. Cournoyer: ... vous êtes fin, vous. Si c'était
lui qui posait la question, je braillerais.
M. Cloutier (Bernard): Je vous avoue ne pas avoir envisagé
les implications pratiques d'une telle association alors que, dans le domaine
de l'exploration, cela a été fouillé,
réfléchi et puis notre position est très simple.
M. Morin: Vous savez, M. le Président, que Pétrocan
est également autorisée à faire du raffinage et de la mise
en marché des produits pétroliers. Je ne vous demande pas de
réagir à cela, parce que ce n'est plus technique; c'est au
ministre de réagir si le coeur lui en dit.
S'il fallait que Pétrocan se mêle du mandat qui consiste
à raffiner et à distribuer les produits pétroliers, je
pense qu'on pourrait dire adieu au mandat B) de SOQUIP et que le retard que
vous auriez mis à le mettre en oeuvre serait fatal. Je ne vous demande
pas de réagir à cela, M. le Président de SOQUIP, parce que
je sais que ce n'est plus technique.
Sur le plan technique, je vous repose la question: Est-ce que c'est
concevable d'avoir une intervention à la fois de Pétrocan et de
SOQUIP dans le raffinage et la mise en marché, ou bien s'il vaut mieux
que ce soit l'un ou l'autre? Je ne vous demande pas de prendre la
décision politique de choisir l'un ou l'autre mais, sur le plan
technique, est-ce que c'est faisable à deux ou s'il vaudrait mieux que
ce soit seulement l'un des deux qui entreprenne cette tâche
considérable?
M. Cloutier (Bernard): Sur le plan technique, encore, c'est assez
évident. Il y a dans le moment sept raffineurs distributeurs au
Québec et une multitude de distributeurs. Ils vivent les règles
de l'entreprise en concurrence. Je ne vois pas quel problème cela
créerait qu'il y en ait huit ou neuf en tant qu'entreprises. Il y aurait
une plus grande concurrence, c'est tout.
M. Lessard: En revenant à ce deuxième mandat,
où il pourrait certainement y avoir une certaine concurrence entre deux
sociétés d'Etat, j'aurais une question à vous poser en
faisant juste- ment allusion à une partie de votre message qui
paraît à la page 5 du rapport annuel de la Société
québécoise d'initiatives pétrolières où vous
affirmez, tel que le lisait tout à l'heure le chef de l'Opposition, que
la charte de SOQUIP comprend l'approvisionnement, le transport, le raffinage et
la distribution qu'implique cette mise en oeuvre, mais son actionnaire ne lui a
pas encore demandé de développer ces activités.
A ce moment-là, vous semblez faire une approche assez passive, en
ce qui concerne le deuxième mandat, à savoir la distribution et
le raffinage du pétrole. Lorsque vous dites que l'actionnaire ne vous a
pas encore demandé d'agir en ce qui concerne ce deuxième mandat
est-ce que selon votre point de vue, à vous, vous avez à
attendre que votre actionnaire, à savoir le gouvernement du
Québec, vous demande de remplir ce deuxième mandat ou est-ce que,
de votre propre initiative, vous pouvez demander à votre actionnaire de
vous accorder, tel que prévu par la loi, l'autorisation du
lieutenant-gouverneur en conseil de remplir ce deuxième mandat?
M. Cloutier (Bernard): Là, je ne sais pas si vous faites
le jugement de mes intentions ou celui de mon actionnaire. C'est...
M. Cournoyer: ...entre les deux.
M. Lessard: Vous dites que votre actionnaire, actuellement, le
gouvernement du Québec, ne vous a pas demandé de remplir ce
mandat. Nous savions que cet actionnaire ne vous l'avait pas demandé et
nous doutons qu'il vous le demande.
M. Cournoyer: Là, vous lui demandez s'il devrait l'avoir
demandé
M. Lessard: Est-ce qu'au point de vue de l'avenir de la
Société québécoise d'initiatives
pétrolières, en relation avec la question que vous soulevait tout
à l'heure le chef de ''Opposition, a savoir la possibilité que
Pétrocan aussi s'établisse non seulement dans l'exploration, mais
dans la distribution et le raffinage du pétiole, en relation avec cette
possibilité future, en relation avec la loi constitutive de SOQUIP qui
lui confie un deuxième mandat ou la possibilité d'un
deuxième mandat et en tenant compte de toute la question de ia crise du
pétrole depuis 1973, est-ce que, comme expert parce que c'est un
expert que nous interrogeons vous ne pensez pas qu'il deviendrait important
pour SOQUIP de demander à son actionnaire !a permission de remplir son
deuxième mandat?
M. Cloutier (Bernard): La phrase que vous soulevez est un trait
d'union entre le deuxième paragraphe du message qui dit que ce
développement résulte de la volonté du gouvernement du
Québec d'utiliser sa compagnie pétrolière prioritairement
pour participer à accroître la sécurité des
approvisionnements en hydrocarbures alors que, à l'époque, il
semblait, à la fin de la décennie
soixante, qu'entre le prix et la sécurité, la question du
prix était primordiale et que la sécurité venait en
deuxième lieu.
A la suite des événements que l'on connaît, cet
ordre de priorité s'est trouvé renversé dans l'opinion des
gens en général, et on dit ici: L'augmentation importante du
budget de SOQUIP a été un peu motivée par la prise de
conscience de la question de la sécurité des approvisionnements
en énergie hydrocarbure. Cette phase que vous avez soulevée fait
le lien entre ce constat qui dit que la sécurité devient
maintenant très importante et ia phase qui suit. SOQUIP s'est donc
penchée sur le problème d'augmenter l'approvisionnement gazier du
Québec.
M. Lessard: Je comprends qu'il y a certaines choses qui ont
été modifiées, mais justement à cause de ces
modifications, à cause de ces changements, à cause justement de
la nécessité d'assurer une certaine sécurité
d'approvisionnement en hydrocarbures du Québec, etc...
M. Cournoyer: Pour qui? M. Lessard: Pardon? M.
Cournoyer: Pour qui? M. Lessard: Pour le Québec.
M. Cournoyer: Mais est-ce qu'une compagnie peut assurer ce que
six ou sept compagnies ont de la misère à nous assurer
maintenant?
M. Lessard: Non, voici ce que...
M. Cournoyer: Non, mais vous me posez...
M. Lessard: II n'y a pas de question de...
M. Cournoyer: C'est parce que vous n'avez pas compris...
M. Lessard: II y a juste la difficulté...
M. Cournoyer: Le raisonnement de M. Cloutier est très
simple. Il s'agit de sécurité d'approvisionnement beaucoup plus
que de prix. La sécurité d'approvisionnement c'est une chose,
mais il s'agit peut-être aussi de sécurité pure et simple
de produits énergétiques. Or, M. Cloutier a indiqué qu'il
avait préféré se diriger dans le gaz pour le moment. Il
n'a jamais mis de côté la possibilité de s'en aller dans le
pétrole. Mais dans l'ordre des priorités, ce qui était
prioritaire en 1972, avant la crise que nous avons connue, ce qui était
prioritaire est devenu moins prioritaire. On a parlé d'une
sécurité d'approvisionnement en matière
énergétique. Alors, ce qui arrive, c'est que l'insistance de la
société se dirige beaucoup plus du côté gazier
et c'est une constatation que nous sommes obligés de faire
que du côté pétrolier. Si je prends de l'argent maintenant
pour acheter une raffinerie ou encore pour nationaliser une raffinerie, je
n'améliorerai pas la sécurité pour autant des
approvisionnements. J'améliorerais la sécurité des
approvisionnements de cette société que j'achèterais, mais
pas la sécurité d'approvisionnements en hydrocarbures
québécois. Ce serait en hydrocarbures pour les besoins des
Québécois, mais il faudrait que j'achète toutes les
compagnies, ce qui n'est pas du tout l'intention du Parti
québécois ou du Parti libéral.
D'autre part, si nous avons un montant d'argent limité
puis on a un montant d'argent limité est-ce qu'il n'y a pas lieu
de se diriger davantage vers une diversification de nos produits
pétroliers, de nos produits énergétiques, plutôt que
de garder la proportion actuelle? Or, la proportion actuelle, c'est 72% en
pétrole, 5% en gaz puis 20% en électricité. Ce qui fait
que notre tendance c'est une tendance du président de SOQUIP et
la mienne, jusqu'au moment ou j'aurai changé de président de
SOQUIP et que je ne suivrai plus ses avis, pour le moment je suis les siens
je suis donc placé dans la situation de dire, suivant les
différentes remarques qui me sont faites: Je me dirige plutôt vers
le gaz que vers le pétrole. Puis si j'avais des investissements à
faire et si j'avais un choix à faire, je prendrais du gaz plutôt
que du pétrole.
M. Lessard: Mais il y a des investissements qui sont plus
rentables que d'autres.
M. Cournoyer: Si vous cherchez la rentabilité, c'est une
chose...
M. Lessard: II serait peut-être possible de faire financer
les investissements non rentables par des investissements rentables, à
savoir le raffinage et la distribution.
M. Cournoyer: II y a...
M. Lessard: Tandis que là, vous laissez exclusivement le
champ des profits, le champ de la rentabilité aux grandes majeures
américaines, pendant que notre Société
québécoise d'initiatives pétrolières doit avoir
comme responsabilité d'assurer une certaine sécurité, mais
doit aussi, en même temps, se limiter à son premier mandat qui la
force à investir considérablement sans avoir des espoirs de
retirer, en fait, parce qu'on ne va pas dans les champs qui sont rentables sans
avoir de l'argent.
M. Cournoyer: II y a une question que vous n'avez pas
posée encore au président de SOQUIP.
M. Morin: Cela s'en vient.
M. Cournoyer: Je peux bien vous indiquer quelles sortes de
questions vous devriez poser, parce que, jusqu'ici, vous vous en allez dans le
pétrole, puis on n'y va pas, dans le pétrole, dans le moment.
M. Lessard: On va y aller dans le gaz naturel. M. Cournoyer:
Allez donc dans le gaz.
M. Lessard: Oui, oui, on va y aller dans le gaz naturel.
M. Cournoyer: ... de ce qu'il a trouvé ici. Demandez-vous
donc comment la partie de son mandat est exécutée de trouver du
gaz.
M. Lessard: Oui, on va y aller. M. Morin: On s'en vient.
M. Cournoyer: Qu'est-ce que vous posez comme questions? Ce sont
des commentaires...
M. Morin: Pour l'instant, le député de Saguenay
faisait remarquer que si on met l'accent sur la sécurité des
approvisionnements plutôt que sur le prix, à l'heure actuelle,
vous avez remarqué que le président de SOQUIP lui-même nous
souligne, dans son rapport annuel, que cela entraîne de plus en plus
souvent des accords intergouvernementaux, n'est-ce-pas?
M. Cournoyer: Oui.
M. Morin: Bon.
M. Cournoyer: C'est ce que nous faisons.
M. Morin: Comment ça, c'est ce que vous faites?
M. Cournoyer: On peut décider de les faire, ces accords
intergouvernementaux, sur le gaz plutôt que sur le pétrole. Si je
veux faire un accord, cela suppose que j'ai le privilège de ne pas en
faire.
M. Lessard: Qu'est-ce que le ministre a mangé en fin de
semaine? Nous avons quand même le droit, en commission parlementaire, de
poser des questions pour savoir quel genre d'accords se fait actuellement. Si
SOQUIP, à un moment donné...
M. Cournoyer: Si vous posez des questions comme celle-là,
parfait, mais, quand vous allez lui demander s'il est opportun ou pas de faire
cela, demandez-le moi et je vais vous dire: Je ne vous réponds pas.
M. Lessard: D'accord, on va lui demander. Avant d'aller aux
accords, je vais lui poser une question.
M. Cournoyer: II ne fait pas de politique, il est
président.
M. Lessard: Non, je sais bien.
M. Cournoyer: Vous avez voulu l'ôter d'à
côté de moi, tout à l'heure, il est rendu
là-bas.
M. Lessard: Est-ce que le président directeur ou
administrateur de SOQUIP a déjà demandé au gouvernement du
Québec d'avoir la possibilité de remplir le deuxième
mandat qui lui est dévolu en vertu de la loi constitutive de SOQUIP?
c'est une question directe.
M. Cournoyer: L'avez-vous déjà demandé?
M. Cloutier (Bernard): II y a eu une demande formelle de faite
qui a été accordée à l'été 1970 en ce
qui concerne un montage de quatre sociétés, deux
sociétés françaises, l'ERAP et la CFP, qui, chacune,
était désireuse d'investir 25% dans la distribution, et deux
groupes québécois, la Caisse de dépôt et le
mouvement Desjardins. Une demande a été faite formellement au
Conseil des ministres. La question a été traitée et
l'arrêté en conseil a été autorisé.
Cependant, un des deux partenaires québécois, le mouvement
Desjardins, s'est retiré du projet, ce qui a fait qu'il n'y a pas eu de
suite. Cela a été la seule demande formelle sur un projet bien
constitué.
M. Morin: A l'heure actuelle, M. le président de SOQUIP,
et mis entre parenthèses le problème des investissements, le
problème du financement sur lequel nous reviendrons par la suite, est-ce
que SOQUIP s'estime techniquement capable d'assumer le deuxième mandat,
celui du raffinage et de la distribution?
M. Cloutier (Bernard): Sûrement.
M. Morin: Allons plus loin, maintenant. Est-ce que le
président de SOQUIP a eu l'occasion, depuis l'échec du projet
avec l'ERAP, de souhaiter que SOQUIP puisse assumer ce nouveau mandat?
M. Cloutier (Bernard): II est dans la nature du poste que
j'occupe de souhaiter l'expansion de ma société c'est la
nature même des organismes et l'occupation de tous les champs
auxquels elle peut prétendre.
M. Morin: Donc, techniquement, cela ne soulève aucun
problème. J'imagine que, sur le plan financier, c'est une autre affaire;
nous y reviendrons par la suite. Techniquement, donc, il n'y a pas de
difficulté insurmontable, pour SOQUIP, à assumer ce
deuxième mandat.
M. Cloutier (Bernard): II y a toujours des difficultés,
mais...
M. Morin: Pas insurmontables.
M. Cournoyer: Répondez.
M. Cloutier (Bernard): ... pas insurmontables.
M. Morin: Bien. L'année dernière, dans votre
rapport annuel, vous aviez exprimé la crainte que Pétro-Canada
jouisse de privilèges excessifs. Vous souhaitiez qu'elle n'obtienne pas
de privilèges qui la situeraient en dehors des règles du jeu
auxquel-
les est soumise l'industrie privée puisque vous considérez
que SOQUIP remplit son rôle comme si elle était une industrie
privée.
Puis-je vous demander si vous partagez toujours ces craintes au sujet de
Pétro-Canada ou si le contenu de la loi vous a rassuré sur ces
points? Soit dit en passant, c'était évidemment une
déclaration politique, mais le président de SOQUIP avait cru bon
de la faire; alors, je lui demande si, cette année, il partage toujours
ces mêmes craintes.
Le Président (M. Séguin): M. le
député, un instant, si vous voulez.
M. Lessard: C'est dans le rapport annuel.
Le Président (M. Séguin): Voulez-vous citer ou
donner la source? Vous sembliez lire certaines choses.
M. Morin: Oui, c'était dans le rapport annuel de
l'année dernière et cela a été rendu public
notamment dans la Presse, sous la signature de M. Réal Bercier, un
article du 16 avril 1975.
M. Cloutier (Bernard): Oui. Je pense que je peux vous
répondre de cette façon. Pour un chef d'entreprise, il est
important de connaître les règles du jeu, dans lesquelles il doit
fonctionner, quelles qu'elles soient, et il faut que toutes les entreprises
soient soumises aux mêmes règles. A ce moment-là, on
traite, on s'associe, on négocie et on fonctionne. A l'époque, la
réglementation sur les permis, sur les rendus, les systèmes
d'acquisition de domaines miniers, était bien établie et toutes
les entreprises étaient soumises aux mêmes règles.
Dans ce sens, dans le rapport précédent auquel vous faites
référence et que je dois avoir ici, je disais que je percevais
une entreprise d'Etat comme étant à l'interface entre le
gouvernement et... Il faut citer dans le contexte; pour cela, je vais retourner
un peu en arrière: "La dernière conséquence des
événements mondiaux, celle d'un rôle accru du gouvernement
fédéral dans le secteur de l'énergie à
l'intérieur du Canada, a accentué les divergences
préexistantes entre le gouvernement fédéral et les
gouvernements provinciaux, d'une part, et, d'autre part, entre l'industrie
privée et les onze gouvernements provinciaux et fédéral au
Canada. "La conférence des premiers ministres de mars 1974 a produit des
compromis acceptables à court terme. Il a été
proposé de créer un secrétariat gouvernemental permanent
pour coordonner le rôle respectif des deux ordres de gouvernement, mais
l'interface, entre les instances gouvernementales et l'industrie privée
reste particulièrement tendue pour le moment". Cela a été
écrit en avril 1974 et, effectivement, la situation était
dramatique, parce que les capitaux mobiles sortaient du Canada. L'exploration,
en 1974, a été de 25% moins importante au Canada qu'en 1973 et
à un moment où on prévoyait une pénurie en
particulier dans le gaz naturel.
M. Morin: Vous aviez cela dans votre dernier rapport
également.
M. Cloutier (Bernard): L'interface était vraiment
très mauvaise; elle s'est améliorée depuis "C'est
précisément à cette interface que se situe SOQUIP, qui,
comme nous l'avons exprimé dans un précédent rapport, doit
oeuvrer dans le sens des objectifs de son actionnaire, l'Etat, tout en
fonctionnant comme une entreprise privée avec l'objectif profits.
L'entreprise d'Etat peut promouvoir une meilleure compréhension entre
les instances gouvernementales et l'industrie privée, dans la mesure
où son actionnaire lui attribue un rôle de témoin et de
partenaire actif de l'industrie privée et aussi dans la mesure où
celle-ci accepte de lui laisser jouer ce rôle en collaborant avec
elle."
On ne peut pas vivre seul dans l'industrie; ii faut pouvoir avoir des
partenaires avec qui on peut traiter. C'est dans ce sens que je disais que,
"jusqu'à maintenant, SOQUIP a réussi à remplir ce
rôle au Québec et dans le secteur de l'exploration. Nous
espérons que la future Pétrocan partagera cette optique, sans
jouir de privilèges excessifs qui la situeraient nettement en dehors des
règles du jeu auxquelles est soumise l'industrie privée. "
M. Morin: C'est le passage auquel je me
référais.
M. Cloutier (Bernard): En ce moment, nous accueillons la nouvelle
compagnie fédérale comme une nouvelle potentielle partenaire de
SOQUIP. Effectivement, ce n'est pas encore tout à fait clair, mais il
semblerait que Pétro-Canada jouira de certains avantages en ce qui
concerne l'acquisition de droits miniers.
M. Morin: Vous voulez dire la participation de 25% sur les
concessions existantes, par exemple?
M. Cloutier (Bernard): C'est cela.
M. Morin: Ou encore là où aucune découverte
n'a encore été réalisée?
M. Cloutier (Bernard): C'est cela. C'est cela.
M. Morin: Est-ce que vous ne souhaiteriez pas avoir
vous-même ce type d'avantage, ce type de participation?
M. Cloutier (Bernard): Comme le souhaiteraient toutes les
entreprises. L'important, en ce qui concerne la position de l'entreprise, c'est
que toutes les entreprises soient soumises aux mêmes règles du
jeu. Il est clair que si l'une d'entre elles jouit d'avantages, quels que
soient ces avantages, les autres en auront un ressentiment et
l'intégration de cette entreprise dans l'industrie, essentielle pour son
succès, en sera rendue plus difficile.
M. Morin: Oui, mais, M. le Président...
M. Cloutier (Bernard): Et ceci, dans la mesure où les
autres entreprises admettront ou pas les privilèges consentis à
Pétro-Canada.
M. Morin: Oui, M. le Président, vous admettrez volontiers
que cette participation de 25% sur les concessions où aucune
découverte n'a encore été réalisée ne peut
être un avantage donné qu'à une société
publique et non pas à une société privée. Donc,
vous ne pouvez plus vous situer à l'intérieur d'un raisonnement
entre sociétés privées.
M. Cloutier (Bernard): Je vous donne une réponse technique
de l'entreprise. La dimension politique n'est pas de ma compétence. La
réaction de l'industrie, à ce privilège, si l'industrie
accepte cette situation, tant mieux pour Pétro-Canada qui s'associera.
La raison pour laquelle techniquement je disais cela c'est que les
privilèges vont rendre plus difficile l'intégration de
Pétro-Canada dans le milieu de l'industrie.
M. Cournoyer: M. le Président, dans...
M. Cloutier (Bernard): C'est une question technique; ce n'est pas
une position politique.
M. Cournoyer: M. le Président, puis-je vous poser une
question? Qu'est-ce que cela ferait, avec des permis provinciaux, que vous avez
actuellement, si on divisait cela, que vous devez avoir, vous comme SOQUIP, 25%
de tout ce qui se découvre? Cela ferait quoi?
M. Cloutier (Bernard): Théoriquement, ce serait bien beau,
mais en pratique ce ne serait pas grand-chose, parce que nous sommes les seuls
à explorer au Québec dans le moment.
M. Morin: Oui mais y a-t-il quand même des concessions qui
ont été... Vous êtes les seuls à explorer de facto,
mais il existe tout de même des concessions.
M. Cloutier (Bernard): Nous sommes les seuls à explorer,
parce que, de 1960 à 1973, on a réussi à amener au
Québec des partenaires en leur montrant les possibilités. Mais,
à la suite des modifications fiscales, tant provinciales que
fédérales, de 1973, il y eu une désaffectation très
sérieuse, à laquelle je me référais tout à
l'heure, de l'exploration au Canada en général. Comme l'Est est
moins prospectif, l'effort de l'industrie privée dans l'Est est
tombé à rien au Québec.
M. Morin: Ma question plus précise sera la suivante:
Supposons que le pouvoir fédéral accorde effectivement je
crois qu'il s'apprête à le faire, d'ailleurs une
participation de 25% à Pé-trocan sur les concessions existantes
où aucune découverte n'a encore été
réalisée. Supposons que le pouvoir fédéral, de
surcroît, oblige à des travaux, par les détentrices de
concessions, avant renouvellement des permis et si, par hasard, les travaux
n'étaient pas exécutés, en cas de refus, la
société d'Etat est autorisée à forer
elle-même sur ces concessions. Supposons que cet ensemble d'avantages est
accordé à Pétrocan; souhaitez-vous, sur le plan technique,
que SOQUIP obtienne les mêmes avantages?
M. Cloutier (Bernard): Bon...
M. Cournoyer: Ce n'est pas technique, M. le Président,
c'est...
M. Morin: Ah! C'est technique, parce que... M. Cournoyer:
C'est effrayant!
M. Morin: C'est hautement technique, M. le Président.
J'avoue qu'il y a un aspect politique, mais le ministre pourra intervenir
après sur l'aspect politique.
M. Lessard: Ne parlez pas sur l'aspect technique; sur l'aspect
politique on vous le dira.
M. Cournoyer: M. le Président...
M. Lessard: Après cela, on vous demandera: Si au point de
vue technique c'est nécessaire...
M. Cournoyer: M. le Président, vous le demanderez...
M. Lessard: ... au point de vue politique, le ministre aura-t-il
le courage de le faire?
M. Cournoyer: D'abord, il n'a pas demandé si
c'était nécesssaire, il a demandé si c'était
souhaitable.
M. Morin: Souhaitable.
M. Cournoyer: Deuxièmement, il faudra rester dans le
domaine où le président de SOQUIP a des permis d'exploration. Ces
permis d'exploration sont au Québec. Combien d'autres compagnies ont des
permis d'exploration, ici au Québec? Combien sont avec vous?
M. Cloutier (Bernard): II y en a quelques-uns, mais je pense
qu'on a le bon morceau.
M. Cournoyer: Ils ont le gros morceau.
M. Cloutier (Bernard): Oui, oui, c'est...
M. Cournoyer: Dans le cas où ce n'est pas exploré,
avez-vous des difficultés actuellement?
M. Cloutier (Bernard): Non.
M. Cournoyer: II n'y en a pas. Il est bien sûr que, quand
on compare Pétrocan actuellement, ce sont dans les territoires
fédéraux; il ne s'agit pas de territoires qui sont provinciaux,
si je comprends bien...
M. Cloutier (Bernard): Je crois aussi que l'on doit
préciser...
NI. Cournoyer: ... c'est dans les territoires provinciaux...
M. Cloutier (Bernard): Non, non, mais c'est sur les terres
fédérales.
M. Lessard: ... il y a chevauchement.
M. Cloutier (Bernard): II faut aussi préciser...
M. Cournoyer: Quand il y a chevauchement, on prétend qu'on
est chez nous.
M. Lessard: II y a bien des choses que vous prétendez.
M. Cournoyer: Bien plus que vous autres, bande d'hypocrites!
M. Morin: Voyons donc!
M. Lessard: Cela, c'est intelligent!
M. Cournoyer: Ce n'est pas parlementaire, ce que je viens
dire.
M. Lessard: Regardez cela!
M. Cournoyer: Viens donc m'écoeurer...
M. Lessard: Regardez celai
M. Morin: Cela ne va surtout pas faire avancer le
débat.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre!
M. Lessard: Je ne vous demande même pas de retirer vos
paroles, vous êtes irresponsable.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre! A l'ordre!
M. Morin: M. le Président, y a-t-il moyen que j'obtienne
une réponse technique à ma question technique?
M. Cournoyer: A la question technique, M. le Président, je
n'ai aucune objection, mais répondez techniquement.
M. Lessard: Lavez-vous averti avant qu'il n'entre en commission
parlementaire? Il est capable de savoir quoi répondre à nos
questions.
M. Cournoyer: M. le Président...
M. Lessard: On a assez confiance au président de
SOQUIP...
M. Cournoyer: M. le Président, on a conclu tantôt
qu'on procéderait d'une certaine manière.
M. Lessard:... pour lui permettre de répondre.
M. Cournoyer: Nous procédons de la manière qui a
été choisie par le député de Saguenay et le chef de
l'Opposition. Il répond techniquement, il ne répondra pas
politiquement.
M. Lessard: Vous avez tenté de nous imposer tout à
l'heure que le président de SOQUIP soit un conseiller du ministre en
commission. Nous avons dit: Ce n'est pas le conseiller du ministre que nous
voulons. Nous avons demandé que soit convoqué le président
administrateur de la Société québécoise
d'initiatives pétrolières.
M. Cournoyer: Je réponds que mon administrateur...
M. Lessard: Nous lui disons que, considérant le fait que
Pétro-Canada peut venir au Québec faire de l'exploration, dans
les circonstances la société québécoise ne
devrait-elle pas avoir les mêmes privilèges ou les mêmes
droits que tente d'accorder, actuellement, le gouvernement
fédéral à Pétro-Canada?
M. Cournoyer: M. le Président, le président de
cette société ne me les a pas encore demandés et il ne
sait même pas si, effectivement, je dirai oui à cela. Quand vous
posez une question de cette façon, c'est non seulement une question
hypothétique mais une question qui implique décidément une
décision gouvernementale.
M. Morin: M. le Président, faisons bien la distinction, le
député de Saguenay l'a fait clairement. Ce que je demande au
président de SOQUIP c'est si, sur le plan technique, c'est souhaitable.
Ensuite, pour la volonté politique, et Dieu sait que c'est une toute
autre affaire, nous nous tournerons vers le ministre. Je prends un exemple dans
l'échange qui a précédé. Le président de
SOQUIP nous a dit qu'il serait souhaitable que SOQUIP exerce son second mandat,
mais je sais bien que ce n'est pas lui qui décide. Je sais que si c'est
lui qui décidait, ce serait vite fait. Mais c'est le ministre qui
décide et c'est vers le ministre que je me tournerai
éventuellement pour demander s'il a la volonté politique de le
faire.
Donc, on peut bien distinguer les aeux domaines, je crois que cela ne
prête pas à confusion. Je demande au président de
SOQUIP...
M. Cournoyer: Le président a compris combien il peut
triturer les paroles que vous avez dites; "il serait souhaitable", il a sorti
cela du contexte. Vous avez compris M. le Président, faites attention
quand vous lui répondez, il va s'en reservir dans dix minutes et cela va
être à l'envers.
M. Lessard: Comme administrateur d'une société, il
était d'accord pour son expansion... c'est ce que le
président...
Le Président (M. Séguin): Pourrait-on continuer,
messieurs, s'il vous plaît?
M. Cloutier (Bernard): Je pense que pour l'af-
faire des 25%, à ma connaissance, cette nouvelle disposition doit
s'appliquer aux nouveaux permis. Je n'ai pas vérifié tout
à fait parce que je ne suis pas impliqué dans ces régions,
donc, cela ne change pas les conditions qui sont déjà
accordées. Serait-ce souhaitable pour l'exploration au Québec des
régions où SOQUIP est intéressée? Nous avons les
permis dans le moment, dans les régions où nous sommes
intéressés. M s'agirait hypothétiquement, pour voir
ce que vous voulez dire dans votre question de dire si on prend de
nouveaux permis où d'aucuns prennent de nouveaux permis au
Québec, on devrait modifier la loi. Pour le moment, cela ne change rien
parce qu'en six ans, on a fait un bon inventaire du potentiel au Québec
et nous sommes bien placés, dans les régions qui sont encore
assez chaudes, pour que l'on consente à continuer à investir dans
l'exploration. En pratique, cela ne changerait rien. On a déjà
les permis. On a déjà un bon domaine minier, on a
concentré nos efforts en éliminant les régions qui
étaient moins prometteuses et on sait où on va porter nos efforts
dans les années prochaines.
M. Morin: A l'heure actuelle, il y a peu de concessions sur le
domaine québécois. Vous nous disiez: II y a quelques compagnies
qui oeuvrent au Québec. On a vu, d'ailleurs, au tout début de la
séance, à quel point le pourcentage des investissements canadiens
est réduit au Québec.
M. Cloutier (Bernard): Vous avez l'image des concessions au
Québec dans la page centrale. Tous les permis en vigueur à cette
date sont portés sur cette carte du Québec. Vous avez quelques
permis qui ne sont pas colorés, qui sont en gris; ce sont d'autres
compagnies où SOQUIP n'est pas impliquée.
M. Morin: Et on voit aussi bien, sur cette carte, les permis
fédéraux que les permis provinciaux, n'est-ce-pas?
M. Cloutier (Bernard): Le grisé sur la terre,
voyez-vous?
M. Morin: Oui, oui, oui, oui.
M. Cloutier (Bernard): II n'y a pas de conflit.
M. Morin: Mais moi, je vous parle de l'ensemble de la carte. On
voit aussi bien les permis fédéraux que les permis
provinciaux.
M. Cloutier (Bernard): On ne voit les permis
fédéraux que dans la mesure où il y a association entre
SOQUIP et un détenteur de permis fédéral.
M. Morin: C'est cela. Eventuellement, ne peut-il pas y avoir
d'autres concessions dans d'autres régions à l'intérieur
du Québec?
M. Cloutier (Bernard): Cela se pourrait, mais en ce qui nous
concerne dans le moment, pour les régions qui sont en grisé, nous
aurions pu approcher les détenteurs de ces permis et nous associer avec
eux. Si nous ne l'avons pas fait, c'est que nous pensons que ces terrains
représentent moins d'intérêt que les terrains que nous
avons présentement.
M. Morin: Je reprends ma question: Est-ce que l'ensemble du
territoire québécois, mise à part la question de savoir
si, sous le précambrien, il peut y avoir des dépôts de
pétrole, ne peut pas théoriquement faire l'objet de
concessions?
M. Cloutier (Bernard): Ah! oui.
M. Morin: Bon. C'est dans cette perspective que je vous posais la
question, à savoir si la participation de 25% sur les concessions,
même à venir, n'est par un privilège que vous souhaiteriez
obtenir également, s'il est accordé à Pétrocan?
M. Cloutier (Bernard): Je vous dirais dans ce sens, sur un plan
bien pratique, que pour ce que cela nous rapporterait d'avantages
théoriques futurs, par rapport à l'inconvénient
vis-à-vis de notre intégration dans le milieu industriel, si je
mets les deux dans la balance, je préfère pour le moment ne pas
demander cet avantage et pouvoir me présenter à l'industrie comme
étant sur un pied d'égalité et ne jouissant pas des
avantages de Pétro-Canada...
M. Morin: Dans l'état actuel du dossier...
M. Ctoutier (Bernard): Dans l'état actuel du
dossier...
M. Morin: ... c'est votre choix?
M. Cloutier (Bernard): ... je ne demanderais pas cela.
M. Morin: Bon. Bien. M. le Président, on peut
considérer sans doute que la demie est arrivée. Nous n'avons pas
terminé notre étude du dossier et j'imagine qu'il faudra revenir.
Mais sans doute devez-vous maintenant ajourner sine die?
Le Président (M. Séguin): C'est cela. La commission
ajourne ses travaux sine die. En l'occurrence, et probablement après la
période des questions, soit vers 4 heures ou 4 heures 10, cet
après-midi.
(Suspension de la séance à 12 h 28)
Reprise de la séance à 17 h 5
M. Séguin (président de la commission permanente des
richesses naturelles et des terres et forêts): A l'ordre
messieurs!
La commission commence ses travaux. La commission comprend les
mêmes membres que ce matin, à l'exception de M. Carpentier
(Laviolette) qui est remplacé par M. Tremblay (Iberville).
Je pense que la parole était au chef de l'Opposition, le
député de Sauvé.
Coût du pétrole
M. Morin: M. le Président, j'aimerais aborder un autre
aspect du dossier pétrolier, qui nous intéresse
considérablement. Je voudrais poser mes questions au président de
SOQUIP en tant qu'expert dans le domaine du prix du pétrole.
Ce n'est pas moi qui vais apprendre au président de SOQUIP que,
dans un livre blanc fédéral publié récemment, le
gouvernement d'Ottawa a indiqué sa volonté de hausser d'ici deux
ans le prix du pétrole au niveau international et, selon le rapport
fédéral, cela ferait augmenter le prix de $5 le baril, ou environ
$0.25 le gallon.
Tout d'abord, j'aimerais demander au président de SOQUIP si son
organisme, si la société qu'il dirige a pu étudier ce
dossier, ce livre blanc en particulier, et s'il peut nous donner sa
réaction en tant qu'expert à ce dessein du pouvoir
fédéral.
M. Cloutier (Bernard): Oui. Je vais essayer de distinguer le
contenu politique du contenu technique.
M. Morin: Je ne vous pose la question que du point de vue
technique. Je sais que, dans le passé, vous n'avez pas
hésité à donner votre avis sur ces questions; c'est pour
cela que je prends la liberté de vous les poser à nouveau, pour
que nous puissions faire le point, en quelque sorte.
M. Cournoyer: M. le Président, pour éviter qu'il y
ait un problème dans l'esprit du président de SOQUIP, je vais
tout simplement lui poser la question: Quelle sorte d'avis m'auriez-vous
donné? Et comme je vous l'ai demandé, quai avis m'avez-vous
donné sur ce sujet en particulier?
M. Morin: Je crois que cela peut très bien fonctionner
dans ces termes.
M. Lessard: C'est dans ce sens.
M. Cloutier (Bernard): Cela me met nettement plus à l'aise
pour en discuter. Lorsqu'en janvier 1974, il y a eu une augmentation brutale,
on constate que tous les pays ont, effectivement, suivi le cours mondial. Ce
n'est pas pour rien. Même un pays comme la Mexique, qui est
autosuffisant, qui avait tous les moyens d'adopter une politique analogue
à celle que le Canada a adoptée, ne l'a pas fait, et a
augmenté le niveau de ses prix intérieurs. Je parle du Mexique,
parce que c'est un cas patent d'un pays qui pouvait très librement le
faire. Il avait une production qui dépassait légèrement sa
demande. Il avait une compagnie nationale Pemex, qui couvrait toutes les
activités, donc il n'avait pas eu d'ennui avec aucun organisme, aucune
fuite de capitaux, aucun problème; et même, le Mexique est
allé directement au cours mondial.
Dans un document préparé au cours de l'hiver 1974, M.
Marier et moi et un troisième auteur, qui est l'adjoint de M.
Marier, M. Jean Houde avions pris position voulant que ce serait une
erreur, à long terme, de subventionner la consommation en
général, en maintenant un prix inférieur au cours
mondial.
L'avis que j'aurais donné à l'époque et je
l'ai donné d'ailleurs était qu'on devrait, le plus
rapidement possible, atteindre le niveau des cours mondiaux pour permettre
principalement à notre industrie de développer des technologies
d'utilisation de l'énergie hydrocarbure, ne pas encourager le gaspillage
et stimuler, motiver la conservation.
Le point de vue que j'avais était que, si on veut subventionner
la capacité concurrentielle de notre industrie, il vaudrait mieux
recueillir une partie de la vente et de subventionner, ponctuellement, par des
moyens que nous pouvons imaginer, les industries qui ont besoin d'assistance
plutôt que de subventionner la consommation générale et le
gaspillage.
M. Morin: Autrement dit, dans l'ensemble, vous accueillez la
hausse, si j'ose dire, la réévaluation de cette forme
d'énergie favorablement, parce que cela vous paraissait
reconnaître que les sources d'énergie, de toute façon, sont
limitées, sont épuisables. Même pour certaines d'entre
elles, elles doivent être renouvelées.
Sur le plan d'un point de vue économique général,
la hausse n'était pas nécessairement contraire aux
intérêts du Québec, même si elle pouvait être
perçue comme contraire aux consommateurs en tant que tels. Sommes-nous
sur la même longueur d'onde?
M. Cloutier (Bernard): Hélas! c'est mon opinion. Que je
mette ma casquette, dans le cas de conseiller technique auprès du
ministre qui me pose une question, c'est exactement la motivation de ma
réponse dans ce cas ou que je mette ma casquette de chef d'une
entreprise, là aussi, la hausse du prix et une part plus grande aux
producteurs sont une autre motivation. Il y a les deux motivations.
M. Morin: Pourriez-vous nous dire si la limite supérieure
que vous indiquiez était le prix international ou si ce n'était
pas, comme le ministre nous l'a dit à plusieurs reprises, ce qu'on
pourrait appeler le prix américain, qui en réalité est une
chose assez complexe, puisque c'est un prix moyen qui touche toutes les
composantes du baril de pétrole.
D'après vous, le prix international était-il le maximum ou
s'il ne valait pas mieux s'aligner sur le prix moyen américain?
M. Cournoyer: M. le Président, seulement avant...
M. Morin: C'est une question de technique.
M. Cournoyer: ... d'aller dans le domaine politique, vous lui
demandez quel avis il m'a donné. Je vous dis, seulement avant, que je
vais essayer de repréciser la politique que j'ai.
Quand je vous ai dit, en réponse à vos questions...
M. Morin: Je n'ai aucune objection à ce que vous
interveniez quand vous voudrez.
M. Cournoyer: Dans ce sens, quand vous m'avez posé la
question: Le ministre vise-t-il au prix moyen américain ou s'il vise au
prix international? Je vous ai dit que nous visions au prix international et
que nous visions au prix moyen américain, pour autant que le prix moyen
américain soit égal au prix international et nous pensons qu'il
tend vers le prix international. Je ne voulais tout simplement pas jouer sur
les termes, mais, quand vous me posez la question de cette façon, je
vous dis que nous tendons au prix moyen américain et nous tendons
également au prix moyen international.
Cette partie étant dite, je dis, dans le temps, cependant, sur
une base de quatre ans, le prix moyen américain est nettement
inférieur au prix international. Comme il nous situe dans une position
concurrentielle difficile, nous accepterions mal, actuellement, au
Québec, si l'Ontario continue de bénéficier d'une
politique nationale, que nous dépassions la concurrence, compte tenu du
fait que, malgré certains avis, ie gouvernement fédéral
est impliqué dedans. S'il n'était jamais entré dedans, on
n'aurait jamais ce problème aujourd'hui, mais comme il est dedans, nous
comptons bénéficier d'une progression plus lente vers le prix
international que si nous aurions été brusquement dedans comme
cela a été le cas au Mexique. Entre les deux, pour moi, comme
ministre des Richesses naturelles après vous questionnerez le
président sur la technicité je dis qu'il n'y a pas
d'incompatibilité, il n'y a qu'une question de temps entre les deux.
L'objectif premier étant de rejoindre le prix international, en passant
en dessous du prix moyen américain, tant que le prix moyen
américain ne sera pas égal au prix international.
M. Morin: Je suis heureux des précisions que vous apportez
aujourd'hui. Si vous aviez été aussi clair que cela en Chambre,
nous nous serions peut-être entendus plus vite. L'écart reste
quand même substantiel à l'heure actuelle entre le prix moyen
américain et le prix international.
Le prix moyen américain, $9.50 ou $9.75, je ne sais pas où
vous le situez en ce moment, mais c'est de cet ordre. Le ministre en
convient-il?
M. Cournoyer: La dernière nouvelle que j'ai eue, c'est
après vous avoir parlé, parce que ces choses semblent
évoluer plus rapidement que ma pensée. Effectivement, je
comprends que je suis lent, mais je ne pensais pas que j'étais lent
comme cela. On me fait dire, chez nous: $9.35, mais on me dit: C'était
il y a quatre mois, quand vous avez déterminé votre politique. Le
prix moyen américain, semble-t-il, augmenterait de 1% par mois. Dans la
projection, il subirait une très forte augmentation après les
élections américaines. Si on situe le prix moyen américain
aujourd'hui, il serait de 1% par mois supérieur à celui qu'il
était au moment où on m'a donné l'affaire, au mois de
mars, où on m'a dit $9.35.
M. Morin: En 1975 ou en 1976?
M. Cournoyer: On pourrait dire en 1976, parce qu'en 1975, je n'y
étais pas.
M. Morin: Avec le ministre, il faut toujours être
précis.
M. Cournoyer: Vous avez bien raison. C'est
préférable.
M. Lessard: Oui. Parfois, il parle de politique pour janvier 1976
et on est rendu en janvier 1977.
M. Cournoyer: Mon cher, quand, effectivement, j'ai promis cela,
c'était la première fois que je promettais qu'un de mes
fonctionnaires me remettrait un rapport, comme il me l'avait promis. Ce
fonctionnaire ne me l'a remis que le 4 ou le 5 mars. C'est dommage, je l'avais
promis comme il me l'avait dit, je me suis fait prendre. Je ne fais plus jamais
cela.
M. Morin: Pour revenir à l'écart entre le prix
américain et le prix international' admettons qu'en ce moment il soit de
l'ordre de $9.40, c'est moins que ce que je disais tout à l'heure. Je
pensais qu'il se situait plutôt compte tenu de toutes les
composantes entre $9.50 et $9.75.
M. Cournoyer: Vous êtes plus près de la
réalité à $9.75 qu'à $9.40. Le vieux prix
était $9.35, mais il a augmenté depuis ce temps. Placez-le, comme
vous dites, dans ce coin.
M. Morin: Je suis prudent, je le mets entre $9.50 et $9.75. A
l'heure actuelle, vous le savez, le prix international oscille certainement
quelque part entre $11.50 et $12. Je vois qu'il y a des fonctionnaires qui sont
d'accord avec moi.
M. Cournoyer: Si on prenait les chiffres comparatifs je
fais exprès, je joue là-dessus, comme il faut quand je dis
$11.50, je compare à la tète des puits, je ne mets pas le
transport dedans. Si je mets les transports dedans, c'est $13.30, rendu
à Montréal. Je n'aime pas cela le comparer avec les transports,
parce qu'il y en a un qui part du Moyen-Orient et qui s'en vient ici, et
là-bas, à $8. c'est à la tête du puits; cela ferait
$8.80 que je comparerais avec $13.50. En mettant $8 et $11.50 et le prix moyen
américain sans transport, on compare des choses qui se ressemblent; il
n'y a de transport nulle part et nous sommes toujours à la tête
des puits.
M. Morin: La différence reste très
substantielle
entre le prix USA et le prix international. Le ministre nous dit: Ce
n'est qu'une question de temps. On pourrait appliquer ce critère
à beaucoup de situations économiques où cela fait encore
une énorme différence que, pendant un an, la différence
soit même de 10%. C'est plus que 10% de différence. C'est de
l'ordre de $9.50 à $11.50.
M, Cournoyer: Je n'aimerais pas vous corriger, mais au moins, sur
les chiffres, mes fonctionnaires me disent: Vous avez raison ou tort. Mais,
à un moment donné, je ne voudrais pas que vous partiez et que
nous partions tous avec des choses écrites qui disent: Voici une
situation, et que nous ayons tous l'air d'imbéciles. Quelle est la
comparaison? De $9.50 à... cela fait une différence de 10%.
M. Morin: Je comparais le prix moyen américain de $9.50
à $9.75, avec le prix international qu'on situe, à l'heure
actuelle, entre $11.50 et $12.
M. Cournoyer: C'est $11.50.
M. Morin: Mettons $11.50. On s'attend à un rajustement
prochainement de 5% à 10%.
M. Cournoyer: De $0.75.
M. Morin: De $0.75 à peu près. Cela nous mettrait
donc à $12.25. La différence est substantielle, même s'il y
a augmentation aux Etats-Unis.
M. Cournoyer: Le prix moyen américain est un prix
nettement artificiel, qui subit immédiatement, dès que vous
montez l'autre à $12.25... Le prix moyen américain étant
composé lui-même de 40% des $12.25, dès que vous touchez au
prix international, votre prix de $12.25 vient influer sur la nature même
des $9.50, dans la proportion de 40% d'importation du pétrole
étranger aux Etats-Unis.
Il y a du vieux pétrole qui ne coûte pas cher aux
Etats-Unis et il y a du pétrole neuf qui leur coûte plus cher.
M. Morin: C'est un mélange de deux sortes.
M. Cournoyer: C'est ce mélange qui fait qu'on arrive
à $9.50. C'est totalement artificiel; qu'on ne me dise pas qu'il s'agit
de quelque chose de réel. Le montant de $9.50 qui est ici, on peut le
prendre, si le prix international reste à $11.50. Il n'y a pas de
problème. On compare $9.50 à $11.50, mais lui-même,
étant artificiel, il a produit dans le prix moyen américain une
augmentation mensuelle de 1%. Donc, le prix de $9.50 dont on parle
à moins que j'aie tort n'est plus $9.50. Il a déjà
augmenté de 1% dans la politique de M. Ford.
Il s'agit de projection dans le temps, mais un temps qui n'est pas
tellement éloigné, lorsque vous comparez, par exemple, la
politique du gouvernement fédéral, celle qui a été
annoncée. On compare cela avec le mois de septembre, date de la
première augmentation imposée aux contribuables et la
deuxième augmentation, c'est au mois de mars qu'elle a été
imposée aux contribuables, si je me souviens bien. Si vous calculez, ce
n'est pas tellement loin des élections. Immédiatement
après les élections, il y aura une décision qui sera prise
par le gouvernement américain de rajuster le prix moyen américain
d'une façon différente. La décision est déjà
prise, mais il s'agit de la mettre en vigueur à un moment plus propice,
parce que les Etats-Unis sont aussi en campagne électorale comme le
gouvernement de l'Ontario.
M. Morin: Je vais essayer, maintenant, de bien comprendre la
position que vous avez prise en Chambre à plusieurs occasions et vous
interroger sur cette question où il semblait difficile de cerner votre
pensée.
Si j'ai bien compris la position que vous avez prise tout à
l'heure, vous pensez que, éventuellement, il y a intérêt
à ce que, au Québec, on rejoigne le prix international. Nous
pensons que c'est inévitable je le dis tout de suite et je
pense que le ministre est probablement d'accord avec cela. En attendant que le
prix moyen américain soit rajusté pour tenir compte des nouvelles
internationales et des nouvelles réalités politiques
américaines, vous nous dites que pour des raisons qui tiennent à
la concurrence, on va essayer de tenir ce prix en deçà du prix
moyen américain. Est-ce que j'énonce correctement votre position
de principe?
M. Cournoyer: Dans cette partie-là, oui.
C'est-à-dire qu'il ne faut pas qu'il dépasse le prix moyen
américain à ce moment-ci. Il n'y a pas de problème. Il y a
seulement la partie qui dit que c'est souhaitable, par rapport à vous.
J'ai l'impression que nous devons atteindre le prix moyen américain
tandis que vous, vous dites que c'est inévitable. Il y a une
différence dans les termes, mais pas plus que cela. L'unité
internationale, par exemple.
M. Morin: L'unité internationale, par exemple. Oui.
Evidemment, quand vous parlez du prix moyen américain, il faut ajouter
à cela le transport. Ce qui nous met à peu près à
$13.30.
M. Cournoyer: $13.30 par rapport à un peu plus que $8. Il
faut comparer les choses telles qu'elles sont. Si je compare $13.30, je dois
comparer cela à $8.80.
M. Morin: A $8.80.
M. Cournoyer: Pour le transport de l'autre aussi. C'est toujours
une question de subvention. Elle est basée sur le prix à la
tête des puits, sans le transport par rapport à $11.50, sans le
transport. De $11.50 à $8, cela donne une subvention de $3.50. On me dit
$4.50, cela n'a pas d'importance, les gars n'ont pas de machine à
calculer. Voulez-vous m'expliquer cela une fois pour toutes, pour que ce soit
clair dans mon esprit. Je vais pouvoir communiquer cela aux autres comme il le
faut.
M. Morin: Si vous voulez parler au nom du
ministre, je n'ai pas d'objection, mais parlez dans le microphone pour
que votre intervention soit enregistrée.
M. Cournoyer: II ne parle pas au nom du ministre, il parle
seulement au nom du technicien qui va expliquer comment il arrive à ces
déductions.
M. Morin: Je suis prêt, dans ce cas, à ce que ce
soit enregistré au nom du ministre.
M. Cournoyer: Je vais en prendre la responsabilité.
M. Lessard: Le conseiller spécial du ministre.
M. Cournoyer: C'est assez simple. Il faut comparer pour
comprendre rapidement. Le prix de référence canadien pour
déterminer la subvention est de $8.80. La subvention est
déterminée entre le prix du pétrole importé
à Montréal, ce qui est environ $13.30, cela dépend des
critères de qualité ou de provenance, et le prix à
Toronto, qui, lui, est un prix réel, puisque c'est $8 le baril à
la tête de puits, plus $0.80, jusqu'à Toronto. La
différence s'établit à environ $4.60. Pour éviter
certains problèmes administratifs, on a fixé la subvention
à un montant fixe pour toutes les compagnies, à environ $4.55 ou
$4.60.
De sorte que, si on veut une explication rapide, cela vous donne
à peu près la différence qui existe entre les deux prix.
Si vous comparez le prix de $8.80 avec l'augmentation du 1er juillet 1976 et
celle du 1er janvier 1976, vous allez voir, en fait, que, tout en restant en
dessous du prix américain, on s'approche beaucoup plus du prix
américain qu'on ne l'est présentement et qu'on s'approche
effectivement du prix mondial, puisque le prix américain s'approche lui
aussi du prix mondial.
M. Morin: Vous parlez du prix à Toronto. Quand vous dites
$8.80, c'est le prix à Toronto.
M. Cournoyer: C'est le prix réel à Toronto. M.
Morin: C'est cela, auquel on ajoute $1.75.
M. Cournoyer: Auquel vous ajoutez $1.05 au 1er juillet.
M. Morin: Calculons pour le 1er janvier 1977.
M. Cournoyer: Si vous voulez calculer pour le 1er janvier, cela
vous donne $10.50.
M. Morin: De $10.50 à $10.55.
M. Cournoyer: A ce moment, nous considérons le prix
américain, qui est encore une fois, je pense que c'est important
de le préciser un prix extrêmement artificiel. Il y a des
milliers de transactions. Le pétrole provient de dizaines d'endroits
différents. Il y a des qualités différentes. Il y a du
pétrole arabe et du pétrole du Venezuela, de sorte qu'il est
extrêmement difficile d'administrer le système de subventions
d'égalisation et de façon artificielle, selon la FEA, le Federal
Energy Administration, cela fait à peu près actuellement entre
$9.75 et $10.25. Cela joue là-dedans.
M. Morin: Remarquez que c'est la raison pour laquelle j'ai
interrogé le ministre, il y a quelques semaines, parce que je voyais
bien que nous allions dépasser le prix moyen américain. Il nous
avait toujours dit qu'il ne voulait pas dépasser le prix moyen
américain. Nous sommes en passe de...
M. Cournoyer: D'après les explications qu'on m'a
données, le prix moyen américain, à ce moment, sera encore
supérieur au prix qui est déterminé ici. La
deuxième augmentation, plus $1.75.
Vous pouvez situer au 1er juin 1976 les $10 aux Etats-Unis dont je vous
parle. Il faudrait comparer le 1er juin de cette année au 1er juin 1976,
pour les $10 américains. Quand je vous parle des $10 du prix moyen
américain, c'est $10, cette année. Actuellement, le
pétrole est à $8.80, il y a encore une différence de
$1.20. Si on compare cela au 1er janvier prochain, on considère
qu'à ce moment le prix moyen américain sera aux environs de
$10.75 à $11 le baril, puisqu'il y aura 40% des $0.75 qui seront
absorbés dans le prix moyen américain, s'il y a une augmentation
de 5% à 10% des prix de l'OPEP à la fin du mois. Au 1er janvier
1976, on est encore relativement en dessous du prix américain, mais
très près, en fait, du prix américain, compte tenu que le
prix américain continue d'évoluer vers le prix mondial, on
considère que, l'an prochain, à la hausse suivante, au 1er
juillet 1977, on sera encore...
M. Morin: Qui n'est pas annoncée encore.
M. Cournoyer: Qui n'est pas annoncée, évidemment,
mais qui est prévisible.
M. Morin: Si on prend connaissance du livre blanc, elle n'est pas
impossible. Il s'agit de le faire monter de $5 d'ici 1978, je crois.
M. Cournoyer: Et peut-être plus. Vous parlez du livre vert
du gouvernement fédéral, qui dit dans quatre ans.
M. Morin: Oui.
M. Cournoyer: A l'intérieur de quatre ans, il est possible
que le prix mondial soit supérieur à ce qu'il est actuellement.
Si la récupération est de $5 maintenant, il est possible que ce
soit plus que cela, si le prix mondial monte. C'est théoriquement de
$1.50 par année, jusqu'en 1980. Mais cela dépend de la
conjoncture.
M. Morin: Le président de SOQUIP a-t-il des commentaires
d'ordre technique à ajouter à ce qui vient d'être dit?
M. Cloutier (Bernard): C'est parfait.
M. Morin: Je voudrais maintenant faire un pas de plus. Si on
ajoute aux chiffres que nous venons de mentionner l'actuelle taxe d'accise de
$0.10 le gallon, ou $3.50 le baril, à votre choix, à un prix de
base qui sera de $13.30 à Montréal, on arrive à un total
de plus de $16.50 pour l'essence à des fins non commerciales, bien
sûr. Je l'ai dit au ministre à plusieurs reprises, cela nous
paraît tout à fait inacceptable, puisque l'essence qu'on appelle
rouge pourrait atteindre $1.10 à $1.20 le gallon, selon la marge de
profit des raffineurs, des distributeurs.
La question que je voudrais poser est peut-être technique. Je
devrais peut-être demander au président de SOQUIP je me
rends compte qu'on est aux confins des aspects politiques si la taxe
d'accise en question ne devrait pas diminuer de façon radicale au fur et
à mesure que le prix du pétrole albertain monte.
M. Cournoyer: Avant que le président ne réponde,
j'aimerais qu'on situe exactement les $0.10 dans un baril de pétrole. Le
chef de l'Opposition vient d'affirmer qu'on est rendu, avec les $0.10, pas mal
cher le baril de pétrole. Pour les besoins de la cause, pour les
vôtres comme pour les miens, pour les autres députés du
gouvernement, j'aimerais que le président nous explique quelle est
l'utilisation d'un baril de pétrole brut et laquelle des parties s'en va
en essence, et quelle autre partie n'est pas assujettie à la taxe pour
avant, me permettre de dire si la taxe devrait être là.
M. Morin: Faut-il distinguer encore entre l'essence à des
fins privées et l'essence à des fins industrielles?
M. Cournoyer: Quelle partie est taxable? M. Morin: Ce
n'est pas la même chose.
M. Cournoyer: Quelle partie du baril est taxable?
M. Cloutier (Bernard): Divisez donc cela par trois. Cela va
simplifier au lieu d'entrer dans les détails de sortes de
qualités brutes. Disons un tiers essence, un tiers huile à
chauffage et un tiers mazout lourd. Cela va vous permettre une base de
raisonnement. En fait les $0.10, si vous comptez 35 barils, cela ne revient
plus à $3.50 le baril. Cela fait un dollar et quelques cents.
M. Morin: Vous nous dites $1.10 étant donné que la
taxe en question si on peut l'appeler une taxe ressemble plus
à une rente qu'à autre chose, mais... Ce serait sur un tiers
seulement.
M. Cloutier (Bernard): ... s'applique sur l'essence.
M. Cournoyer: Pas tout le tiers. La partie du tiers sur laquelle
il est possible de l'appliquer n'est pas en consommation par les voitures de
plaisance. Il y en a une partie qui est utilisée à d'au- tres
fins que l'automobiliste pour ses fins personnelles. Sur les 33 1/3%, combien
mettrait-on?
M. Cloutier (Bernard): C'est pour cela que je dis que le tiers
est vraiment une cote mal taillée, parce que selon les régions,
la production d'essence peut être plus importante ou moins importante.
Comme nous n'avons pas les chiffres précis de la répartition en
essence en telle année et dans telle région, nous donnons donc un
tiers et on peut dire que ce n'est pas $3.50, disons que c'est $1.15. C'est un
ordre de grandeur.
M. Morin: Pour le consommateur automobiliste, cela revient au
même.
M. Cloutier (Bernard): Ce n'est pas...
M. Morin: A ce moment, c'est $3.50 pour lui. Vous me parlez de ce
que ceia rapporte si je comprends bien, je vous parle de ce que cela
coûte à l'automobiliste. On se comprend bien?
M. Cournoyer: Oui. Si vous mettez $3.50, il s'agit de multiplier
trois barils. Ce sont trois barils de brut. On parle du brut en ce moment.
M. Lessard: Les $0.10 sont appliqués sur l'essence.
M. Cournoyer: Sur l'essence.
M. Lessard: Pour le consommateur qui achète de l'essence,
il ne fait pas ces distinctions de un tiers, un tiers, un tiers.
M. Cournoyer: Non.
M. Lessard: Le consommateur paie son gallon de
pétrole.
M. Cournoyer: Oui.
M. Lessard: Son gallon de pétrole, à un moment
donné, non seulement il le paie $8 à la tête du
puits...
M. Cournoyer: Ah non!
M. Lessard: ... mais il paie aussi sa transformation et, en plus
de cela, il paie $0.10 le gallon. A un moment donné, qu'il achète
35, 70 ou 90 gallons, ce sont toujours les $0.10 sur chaque gallon d'essence
raffinée qu'il doit payer.
M. Morin: Pour lui, c'est $3.50 du baril.
M. Cournoyer: A ce moment on ne parle pas du brut.
M. Lessard: Non, je comprends qu'on ne parle pas du brut on
parle...
M. Cournoyer: Si vous prenez un baril de brut, $8...
M. Lessard: Combien coûte-t-il une fois raffiné?
M. Cournoyer: Sur le baril plein, combien il y a de taxe de
payée? Il y a $1.50 sur un baril brut. C'est $1.10 ou $1.15 de la...
M. Cloutier (Bernard): Disons $1.15.
M. Cournoyer: Réglons pour $1.15. Cela fait $3.50
divisés par trois, parce que, un tiers s'en va dans l'huile à
chauffage, un autre tiers dans je ne sais pas quoi et l'autre tiers dans autre
chose. Quand vous le prenez en brut, il y a tant d'argent de pris dessus. C'est
$1.15 qui est exigé à cause des $0.10 taxe d'accise sur le brut.
Mais sur un baril d'essence pur, je suis d'accord avec vous, il paie toujours
$0.10. Là on parle de la fixation d'un prix de brut. On ne parle pas du
financement du baril d'essence. On parle du financement d'un baril de brut.
M. Lessard: Sur le gros, cela fait $1.15 qui va en taxe
d'accise.
M. Cournoyer: C'est $1.15 qui sert à financer le total de
barils de brut achetés dans l'Est.
M. Morin: Maintenant, si on essayait de voir ce que cela
coûte à l'automobiliste québécois avec les nouvelles
hausses projetées, de l'ordre de $1.75 d'ici sept mois, soit le 1er
janvier 1977. Le ministre ou son adjoint pourrait-il nous construire le prix du
gallon d'essence vendu à l'automobiliste québécois? Cela
fait plusieurs fois que nous en discutons en Chambre et nous n'arrivons jamais
à nous entendre. Peut-être allons-nous trouver un terrain plus
solide, cette fois.
M. Cournoyer: Je peux peut-être faire une comparaison
auparavant. On peut comparer le gallon d'essence au Canada au gallon d'essence
ailleurs, dans le monde. Si vous faites une relation entre le gallon d'essence
à la pompe et le brut, c'est souvent une comparaison boiteuse, puisque,
au Portugal, par exemple, un gallon d'essence coûte $2.35; de sorte que,
si vous ajoutez l'ensemble des taxes fédérales et provinciales
dans le prix du gallon, vous n'êtes pas en mesure de relier le prix
international ou le prix canadien du brut au prix que le consommateur doit
payer pour son essence.
A $0.90 le gallon d'essence, c'est $31.50 le baril; vous êtes loin
des $8 dont nous parlions tantôt. Pour les besoins du chef de
l'Opposition et des députés, pouvez-vous nous distribuer la
tarte, c'est-à-dire nous expliquer, sur le gallon d'essence, $0.83 ou
$0.93, si on arrive avec une augmentation de $1.05 et de $1.75, qu'est-ce que
cela va faire sur un gallon d'essence pour le contribuable qui va s'en acheter
un à compter du 1er septembre? Admettons que les prix sont gelés
entre le 1er juillet et le 1er septembre et que c'est respecté. Les prix
sont gelés par le gouvernement fédéral, ils ne peuvent pas
être transportés au consommateur avant le 1er septembre.
M. Morin: Nous parlerons de cela plus tard, parce que j'ai
l'impression qu'il y a une question de compétence. Ce n'est pas
sûr que le pouvoir fédéral ait la possibilité
juridique de geler. Il peut peut-être demander que les compagnies le
gèlent volontairement.
M. Cournoyer: Comme il a fait la dernière fois.
M. Morin: Vous savez ce que cela a donné la
dernière fois.
M. Cournoyer: II n'y a pas eu de problème la
dernière fois.
M. Morin: II y en a eu quelques petits. En tout cas, on reparlera
de cela.
M. Cournoyer: II y a eu des problèmes avec l'Ontario, mais
pas ici. Réglons ce problème. Admettons qu'il n'y ait pas de
transport au contribuable avant le 1er septembre, c'est-à-dire trois
mois après le 1er juillet, admettons qu'on s'entende que c'est
l'intention. Au 1er septembre, il y a une augmentation de $1.05 sur le baril de
brut. Comment cela se transpose-t-il sur un gallon d'essence acheté par
un contribuable qui va prendre un gallon d'essence avec son automobile?
Cela se transpose entre $0.03 à $0.35, si le marché peut
l'absorber. Historiquement, depuis 1974, on constate qu'à cause de la
surproduction de raffinage dans l'Est du Canada, il y a un surplus de produits
sur le marché et les vendeurs ne réussissent pas à faire
payer aux consommateurs la hausse découlant de l'augmentation du
brut.
Il y aurait une augmentation théorique d'environ $0.03 à
$0.35 par dollar.
M. Morin: Ce que je vous demande, c'est de la construire, parce
que vous me donnez le résultat.
M. Cournoyer: Vous voulez que je vous construise le prix global
sur $0.80 le gallon...
M. Morin: Par exemple, oui.
M. Cournoyer: ... en taxe ou en revenu aux producteurs, en revenu
aux raffineurs?
M. Morin: C'est cela, partons du début pour arriver
à votre augmentation de $0.03.
M. Cournoyer: Ce sont des chiffres trop précis, j'aimerais
mieux vous les déposer lors de la prochaine séance, si c'est
possible. Nous avons cela en tableau. Il y a $0.19 en taxe de vente
provinciale.
M. Lessard: Peut-on l'avoir au moment de la reprise de la
séance?
M. Cournoyer: Oui, on peut vous le déposer facilement.
N'est-il pas dans les documents qui ont été publiés par la
National Energy Board, dernièrement, la division de la tarte? Combien va
aux compagnies sur un baril?
Nous l'avons en détail, on peut vous donner cela assez
facilement.
Y a-t-il quelqu'un qui pourrait le demander? Cela peut changer le cours
de la discussion. Nous ne sommes pas ici pour deux mois, mais seulement pour le
cours de la discussion; quelqu'un peut-il téléphoner et le faire
transporter ici?
M. Lessard: On peut venir à se comprendre.
M. Cournoyer: Si on calcule l'augmentation à partir d'une
augmentation normale du brut, qui se traduit par le transport, le raffinage, la
distribution, de façon générale, cela fait environ $0.03
à $0.35 le gallon pour chaque dollar, ce qui voudrait dire environ $0.05
le gallon pour $1.75 au 1er janvier.
On constate que, depuis 1974, les augmentations successives de $0.05,
puis de $0.03 à $0.04 à $0.05 le gallon ne se sont pas
transposées au niveau du détail puisqu'il y a de l'essence qui se
vend actuellement à $0.71, $0.72, $0.73 le gallon, alors qu'elle devrait
se vendre normalement à $0.82, $0.83 le gallon, sauf en Nouvelle-Ecosse.
En Nouvelle-Ecosse, est-ce que ce ne se serait pas transposé
directement? En Nouvelle-Ecosse, toute augmentation doit être
intérinée et approuvée par ce qui s'appelle le Nova Scotia
Gas and Energy Board.
M. Lessard: On devrait dire le tribunal d'énergie.
M. Cournoyer: Cela entraîne des prix plus
élevés puisqu'on accorde des augmentations théoriques. On
accorde les augmentations de $0.03 le gallon automatiquement à la
société pétrolière qui les transpose dans ses prix.
Tout le monde paie le même prix, mais cela se transpose dans des prix
beaucoup plus élevés que le marché. La situation pourrait
être différente dans une autre conjoncture, mais compte tenu qu'on
prévoit, au cours des cinq ou six prochaines années, une forte
surproduction d'essence, entre autres, dans l'Est du Canada.
Il y a peut-être un peu de "dumping" de l'Est qui viendra vers
Montréal, vers Québec, de sorte que les produits ont des prix
plus bas qu'ils devraient l'être théoriquement.
M. Morin: Quel est l'impact de la taxe dite d'accise sur
l'automobiliste? Cela va porter à combien le prix du gallon pour
l'automobiliste?
M. Cournoyer: La taxe d'accise n'augmente pas, elle est
déjà incluse dans le prix à $0.10. Cela avait comme
objectif de compenser le déficit du programme de subventions dans l'Est
puisque, avec les réductions aux exportations de pétrole dans
l'Ouest et l'importation de pétrole dans l'Est, il y avait un
déficit de revenu qui devait être compensé d'une
façon ou d'une autre. Le fédéral a choisi de mettre cette
taxe. Selon les informations qu'on a, avec les prochaines augmentations de
l'année courante, le déficit va être à peu
près absorbé de sorte que, dans l'avenir, il est possible, selon
que le ministre en décidera, de renégocier cette taxe d'une
façon ou d'une autre, puisque la taxe va avoir joué son
rôle, elle va avoir absorbé le déficit de subvention dans
l'Est.
M. Lessard: C'est là qu'on rejoint l'automobiliste qui, en
fait, doit payer. Le gouvernement provincial reçoit à un moment
donné une péréquation ou une ristourne du
fédéral pour combler la différence entre $8 et $11.50.
M. Cournoyer: Pas le gouvernement, cela va directement aux
compagnies.
M. Lessard: Cela va directement aux compagnies. Le gouvernement
provincial ne reçoit rien en péréquation.
M. Cournoyer: C'est une subvention aux compagnies. Non, pas
là-dessus. Rien du tout. Il faudrait peut-être ajouter que l'autre
objectif de la taxe d'accise était d'accroître la conservation, de
façon que les gens gaspillent moins.
M. Lessard: Cela va directement à la compagnie pour lui
permettre de vendre au prix qu'elle vend le pétrole.
M. Cournoyer: C'est-à-dire que la compagnie le paie
effectivement $11.50, si mes informations sont bonnes.
M. Lessard: C'est cela.
M. Cournoyer: II est enregistré dans l'Est comme
étant du pétrole importé brut à $11.50.
M. Lessard: C'est cela.
M. Cournoyer: La fixation en Alberta sert à deux fins.
D'abord le prix que l'Alberta vend son pétrole aux Canadiens, donc en
Ontario, car dans mes livres, c'est en Ontario que se vend le pétrole
brut et, en même temps, cela sert de référence pour la
fixation de la subvention aux compagnies dans l'Est. On dit: Pour avoir un prix
unique à $8, dans l'Est, il vous coûte $11.50, avec les
précisions que mon confrère vous donnait tantôt, on finance
tant. On fait donc cela directement aux compagnies, qui ont été
obligées de le payer $11.50 au Venezuela ou au Moyen-Orient.
Quand on l'augmente à la tête des puits dans l'Ouest, on
réduit d'autant l'écart entre les deux. Donc, l'obligation pour
le gouvernement fédéral de financer. Dans ce sens, M. Ruelland
vous disait que, effectivement, le volume dont il est question, par exemple,
d'apport dans les coffres du gouvernement fédéral, par la taxe
d'accise à $0.10 le gallon d'essence vendu au consommateur privé,
c'est-à-dire pour son usage personnel, sera égal entre les deux.
Si, cette année, on avait augmenté le prix de $0.10 le gallon,
normalement, on aurait eu beaucoup plus d'argent et on aurait réduit
davantage la contribution fédérale. On l'a augmenté
seulement de $0.05 le gallon à $1.75. Cela veut dire qu'il au-
rait fallu l'augmenter encore plus pour rejoindre cela.
Ce n'est pas une argumentation totale, je ne fais même pas
d'argumentation. M. Ruelland est prudent quand il dit: On va renégocier,
renégocier dans le sens que nous allons demander une abolition de la
taxe d'accise, M. Ruelland reste prudent à cause du deuxième but
poursuivi par la taxe d'accise, soit une sorte de réduction de la
consommation, sans que pour autant cela enrichisse strictement les compagnies
pétrolières. Mais pour le gouvernement, à l'instar
d'autres gouvernements de pays libres comme, par exemple, l'Angleterre, le
Portugal ou encore la France, pour ce que cela vaut, le prix du gallon de
pétrole n'est pas le prix coûtant du pétrole acheté
au Moyen-Orient. Il y a des taxes qui sont des taxes dites de
découragement.
Disons que, à un moment donné, le gouvernement
fédéral n'a plus la première raison. Nous croyons qu'il
doit se retirer de la deuxième et nous la laisser, et on pourrait
peut-être trouver des utilisations fort intéressantes pour la taxe
d'accise.
Regardez le président de SOQUIP sourire quand je parle de cela.
C'est suffisant pour comprendre qu'il aimerait faire autre chose.
M. Morin: Oui, mais maintenant, si on essaie de franchir un pas
de plus. On nous parle beaucoup, dans le dernier livre blanc
fédéral et dans diverses interventions des
fédéraux, de l'autosuffi-sance du Canada en matière de
pétrole, en matière pétrolière. Quand on sait ce
qu'il va probablement en coûter pour exploiter les sables
pétro-lifères, les sables bitumineux de l'Arthabaska, on peut
prévoir et j'aimerais, sur cela, connaître le sentiment du
président de SOQUIP, avoir son opinion que cette autosuffisance
canadienne va nous coûter très cher par rapport au pétrole
d'importation. Il y a une question que je me pose quand je considère
cela dans une perspective d'avenir. On nous dit: Bien sûr que le prix
international du pétrole va monter et je suis prêt à croire
qu'il va monter aussi tranquillement, au fur et à mesure que l'OPEP va
en décider. Mais est-ce qu'on ne risque pas de se retrouver, d'ici
quelques années, mettons à moyen terme, avec un pétrole
albertain qui va coûter infiniment plus cher que le prix international?
C'est ma première question. Ensuite, il y aura des corollaires qui
découleront de la réponse que vous nous donnerez.
M. Cloutier (Bernard): Je crois que cette question de prospective
des prix mondiaux est à la base de toute réflexion sur la
question qui vous inquiète. A cet effet, la recherche que
différents économistes pétroliers peuvent projeter nous
amène effectivement à constater que l'opinion
générale des gens bien avisés en la matière va vers
une augmentation soutenue du prix du pétrole sur les marchés
internationaux, qui, au moins, compensera l'inflation mondiale. Ce qui veut
dire que les décisions qu'on prend aujourd'hui en ce qui concerne des
dispositions d'approvisionnement pour le Canada n'auront leur portée
réelle que dans dix ans et s'appliqueront à des prix, ou
devraient être comparées non pas au prix actuel, mais au prix dans
dix ans, dans quinze ans. dans vingt ans.
Dans ce domaine, je pense que l'orientation du Canada ou du gouvernement
fédéral, dans le moment, de se donner comme objectif de
réduire la dépendance vis-à-vis du pétrole
importé, découle de son jugement, de la prospective qu'il pouvait
établir, ayant analysé lui-même, comme nous le faisons nous
aussi, l'avenir des prix et de la disponibilité du pétrole sur
les marchés mondiaux.
Cela veut dire qu'une politique d'autosuffi-sance, ou des dispositions
qui représentent la prise de décisions, aujourd'hui, qui nous
permettront de compter plus sur nos ressources en hydrocarbures, sont, dans
l'opinion généralement reconnue des gens qui se penchent sur ces
questions, prudentes et bien indiquées.
Vous avez mentionné les sables bitumineux comme une alternative,
mais il y a aussi le gaz naturel des frontières. Si l'on devait attendre
dix ans pour savoir quel sera le prix du gaz naturel sur les marchés
mondiaux et le prix du pétrole, il sera trop tard. C'est maintenant
qu'on doit, en fonction des meilleures prospectives que l'on peut
générer, prendre des décisions qui feront que Ion aura
à notre disposition du pétrole et du gaz naturel dans dix ans et
dans quinze ans.
M. Morin: La question suivante est peut-être plus
hypothétique, mais elle demeure technique. N'est-il pas probable,
étant donné le coût des sables bitumineux, étant
donné aussi le coût de l'acheminement du gaz ou du pétrole
des frontières vers les régions industrialisées du sud,
qui va être un projet extrêmement coûteux, que le prix
canadien sera dans dix ans supérieur au prix international? N'est-ce
pas, en tout cas, une hypothèse de travail que le Québec se doit
de considérer?
M. Cournoyer: Nous l'avons considérée.
M. Morin: Je ne doute pas que vous l'ayez
considérée, mais j'aimerais que le président de SOQUIP
nous éclaire sur l'aspect technique de cette question.
M. Cournoyer: Avant, M. le Président, j'aimerais qu'on
spécifie, quand même, la différence entre
l'autodétermination dont vous parliez tantôt...
M. Morin: L'autosuffisance.
M. Cournoyer: Oui, l'autosuffisance, parce que
l'autodétermination, c'est pour vous autres.
M. Morin: L'autodétermination, c'est l'autre; c'est le
principe qui s'applique au peuple québécois.
M. Cournoyer: C'est rendu de l'autodétermination.
M. Lessard: Le droit.
M. Cournoyer: Le droit à l'autodétermination.
Ecoutez, l'autosuffisance dont il est question ici, c'est...
M. Lessard: Mais ce n'est pas de celle de M. Drapeau dont vous
parlez?
M. Cournoyer: Non, cela, c'est de la suffisance.
M. Lessard: C'est de l'auto-insuffisance.
M. Cournoyer: Je pense que le chef de l'Opposition a très
bien compris la distinction entre l'autosuffisance et la suffisance, dans les
circonstances. Ce que je veux dire, c'est que l'autosuffisance dont il
était question dans la première élaboration de politique
du gouvernement fédéral a été remplacée par
le "self-reliance", c'est-à-dire "in totai energy". Alors, je pense bien
qu'on doit parler, non pas d'une politique de recherche d'au-tosuffisance dans
le domaine pétrolier ou des hydrocarbures, mais rechercher, non pas une
sorte d'indépendance, mais une sorte de dépendance moindre en
prenant soin de certains secteurs, par exemple, et en augmentant la production
gazière par rapport à la production pétrolière. Si
on ne peut pas avoir une autosuffisance dans le pétrole, diminuons, au
moins, la dépendance vis-à-vis de cette source d'énergie
qu'on appelle le pétrole.
Une foule de décisions sont donc à être prises
à l'intérieur de quatre ans, dans ce programme schématique
qu'on a retrouvé dans le livre qui a été publié par
le ministre fédéral de l'Energie la semaine dernière. En
même temps, il va falloir arriver à une politique des prix des
différentes formes d'énergie les unes par rapport aux autres. Je
veux bien accepter que l'électricité, par exemple, chez nous,
coûte beaucoup moins cher que l'énergie produite à partir
du pétrole, mais jusqu'à quel point serai-je capable de maintenir
le développement hydroélectrique à un "pace", un rythme
qui nous évitera, à plus brève échéance,
d'être poignés avec le pétrole?
M. Morin: On voit que le ministre est souvent à
Ottawa.
M. Cournoyer: Non, je vais rarement à Ottawa. Faites
attention là-dessus, on aura peut-être des avis...
M. Morin: C'est le vocabulaire qui déteint.
M. Cournoyer: C'est parce qu'en définitive je vais plus
souvent à Paris. A Paris, j'entends ce vocabulaire plus souvent que je
ne l'entends chez nous, à Montréal, dans mes bureaux. Le
"self-reliance", on ne l'a pas encore. Le "pace", j'essaie d'avoir le rythme,
mais ce n'est pas pareil. Demandez à une femme si !e rythme et le
"pace", c'est la même chose; elles vont dire quand...
M. Lessard: Le ministre s'écarte.
M. Cournoyer: Pas encore. M. Lessard: Rapprochez-vous.
M. Cournoyer: Ce n'est pas la même chose. Comprenons bien
que, dans la politique fédérale et dans la politique que nous
devrons arrêter nous-mêmes, il faudra penser au prix des
différentes formes d'énergie les unes par rapport aux autres et
il faudra que la comparaison soit soutenue face à un certain nombre de
décisions qui pourraient orienter l'avenir.
M. Morin: Je veux bien.
M. Cournoyer: Bon.
M. Morin: Je veux bien qu'on tienne compte...
M. Cournoyer: En attendant.
M. Morin: ... du contexte. Maintenant que...
M. Cournoyer: En attendant, nous sommes toujours et le
président pourra répondre immédiatement après
à la question que vous lui avez posée d'une façon fort
intelligente, je vous en prie. Pourquoi vous ne me les posez pas de même,
les questions, à moi, en Chambre?
M. Lessard: Parce que vous ne comprenez pas.
M. Morin: Ce sont exactement les mêmes questions
mais...
M. Cournoyer: Ah non!
M. Morin: ... vous vous sentez toujours obligé de faire un
théâtre en Chambre alors qu'ici...
M. Cournoyer: C'est parce que vous...
M. Morin: ... il me semble que vous êtes plus
raisonnable.
M. Cournoyer: Si vous ne les précédiez pas de
commentaires désobligeants à l'endroit de mon gouvernement,
peut-être que je ne serais pas désobligeant envers vous tout de
suite après.
M. Lessard: ... d'autres. Lavez-vous adopté? M. Cournoyer:
Pas encore.
M. Lessard: Parce que là, les sondages sont en train de
virer.
M. Cournoyer: Ah! moi, vous savez.
M. Lessard: Allez-vous retourner à votre pays bleu?
M. Cournoyer: Non, non, non, pas de danger. M. Lessard:
D'accord.
M. Cournoyer: Commence-t-il ou si c'est moi qui commence?
M. Lessard: Non, non, j'arrête, j'arrête. Au moment
où on commence à avoir des réponses, c'est aussi bien
d'arrêter.
M. Cournoyer: C'est cela, tout de suite après que tu as
fait tes petits commentaires désobligeants, cela reste de
même.
M. Lessard: Bien non, je...
M. Cournoyer: Moi, je n'ai plus le droit de te
répondre.
M. Morin: M. le Président, est-ce qu'on pourrait donner la
parole au président de SOQUIP?
M. Cloutier (Bernard): Je vais essayer de développer le
sens de la nuance du changement, de "self sufficiency", "self reliance". "Self
sufficiency", qui était l'orientation initiale, était une
autosuffisance dans le sens qu'on suffisait à tous nos besoins comme le
fait le Mexique maintenant. On s'est rendu compte que ce n'était plus
possible parce que nos réserves en pétrole baissaient alors que
la demande croissait. La nouvelle orientation de "self reliance" et sans
faire de jeu de mots, bien interpréter ce que cela veut dire cela
veut dire "to rely on our own means", cela veut dire en français
cela va vous faire rire de compter sur nos propres moyens, quand
même.
Si on veut compter sur nos propres moyens dans le domaine de
l'énergie hydrocarbure, la première chose à faire c'est
quand même de faire l'inventaire de ces réserves ou ces moyens sur
lesquels on aura à compter, en priorité. On examine le gaz et le
pétrole, on constate que les réserves prouvées de gaz sont
de l'ordre de 53 fois 10 à la puissance 15 BTU, en termes de BTU, et que
les réserves prouvées et probables de gaz sont de l'ordre de 57
fois 10 à la puissance 15 BTU. C'est-à-dire que, dans le moment,
dans la catégorie de réserves sur lesquelles on peut absolument
compter parce qu'on les a, elles sont prouvées, c'est à peu
près du même ordre, nos réserves de gaz et d'énergie
sous forme de gaz ou sous forme de pétrole.
Dans les réserves dites exotiques dont vous parliez tout à
l'heure, du côté du pétrole, si l'on évalue la
partie exploitable des sables bitumineux de l'ordre de 30 milliards de barils,
cela nous donne environ 180 fois 10 à la puissance 15 BTU. Et si l'on
prend les estimations raisonnables et conservatrices du potentiel
d'énergie-gaz des frontières, qui est aussi une source
d'énergie exotique parce que ce n'est pas encore rendu au marché
et ce sera cher, on arrive aussi au chiffre d'environ 180 fois 10 à la
puissance 15 BTU.
Donc, tant dans les catégories prouvées que les
catégories possibles exotiques, on a autant d'énergie en
réserve au Canada, sous forme gaz que pétrole. Mais l'on constate
qu'on consomme le pétrole trois fois plus rapidement que le gaz.
D'ailleurs, je crois que c est inscrit en filigrane dans le livre "A
Canadian Strategy for Energy" qui est le dernier en date, il faudra consommer
moins d'huile et puis consommer plus de gaz, c'est-à-dire augmenter la
part du gaz dans le bilan énergétique canadien.
Comment atteindre ce but de consommer du gaz au lieu de l'huile, et
particulièrement dans l'est canadien, de consommer du gaz canadien au
lieu de l'huile importée? Sur l'ensemble du Canada, si on regarde
l'Alberta, le gaz représente 59% du bilan énergétique de
l'Alberta, donc cela va être plus difficile de l'augmenter en
Alberta.
En Saskatchewan, le gaz représente 44% du bilan
énergétique; 33% au Manitoba et en Colombie-Britannique et
à peu près 29% en Ontario, alors qu'au Québec c'est 5%.
S'il est dans l'intérêt du Canada dans son ensemble d'augmenter la
consommation de gaz et de remplacer la consommation de pétrole par une
consommation de gaz dans la mesure où c'est possible, c est au
Québec, où le gaz ne fournit que 5% des besoins
énergétiques, qu'une politique canadienne de "self-reliance"
devrait, à mon avis personnel, en premier lieu s'appliquer pour
augmenter le rôle du gaz en remplaçant spécifiquement du
pétrole importé, dont on connaît les aléas, par du
gaz canadien.
M. Morin: Quand vous parlez des aléas du pétrole
importé, est-ce que vous vous référez à la
sécurité des approvisionnements, au prix ou aux deux?
M. Cloutier (Bernard): Aux deux. En un premier temps le prix.
Comme je le mentionnais il y a un instant, la plupart des personnes qui se
permettent de faire des projections sur cette question il faut quand
même avoir une certaine audace pour se permettre de prédire
l'avenir dans ce domaine il semble y avoir un consensus que les prix
vont continuellement augmenter à des taux qui, au moins, compenseront
l'inflation mondiale. Cela nous amène, par exemple, à des
chiffres de $25 le baril en 1990.
M. Morin: Vous voulez dire au prix international?
M. Cloutier (Bernard): Au prix international. Alors,
l'aléa prix, on sait que le prix va augmenter. Nous ne sommes pas, je
crois, à l'abri d'un nouvel embargo. En définitive, si l'on veut
parler à plus long terme, on doit considérer l'étendue des
réserves mondiales de pétrole et constater que les experts qui
étudient la disponibilité de pétrole sur le plan mondial
sont aussi d'avis que les réserves mondiales seront
épuisées, surtout si le rythme de croissance de la consommation
reprend, vers l'an 2025 ou aux environs.
Ce qui va se produire, c'est que ce serait épuisé si l'on
pouvait tirer des puits les quantités croissantes qui sont
demandées. En réalité, un puits produit et décline.
Alors, d'autres experts qui ont considéré cette question avancent
qu'au cours
de la décennie quatre-vingt-dix on constatera une tension sur les
marchés mondiaux entre l'offre et la demande.
A ce sujet, je cite je vais vous trouver cela, j'ai fait des
références sur cette question le gérant
d'exploration de BP qui dit dans un papier d'une dizaine de pages: "The
implication of my figures is that we have gone through a phase of supplies
expanding to meet the demand. This phase has lasted from 1959 until recently,
probably until about 1969. We are now in a phase of a rate of increase of
supplies failing to meet demand. My figures suggest that, this phase will last
until late seventies or early eighties when world production starts its
inevitable and slow decline".
Cela veut dire que c'est tout près cela.
M. Morin: C'est d'ailleurs ce qui motive toutes les recherches
actuelles dans les nouvelles formes d'énergie.
Mais la question que je vous posais est celle-ci: Compte tenu de tout ce
que vous venez de dire, n'est-ce pas une hypothèse à
considérer sérieusement, lorsqu'on formule une politique
pétrolière au Québec que le prix du gaz, du pétrole
canadien, des hydrocarbures canadiens étant donné les
réserves disponibles, étant donné le coût de
l'exploitation lorsqu'on va tomber dans les sables bitumineux ou lorsqu'on va
aller chercher les hydrocarbures dans l'Arctique pourrait être pas
mal plus élevé que le prix international, pendant un certain
temps?
M. Cloutier (Bernard): Oui, je crois qu'on doit faire l'exercice,
mais on doit le faire en termes de probabilités. Il faut attacher un
indice de probabilité à divers scénarios, y compris
à celui-là auquel, personnellement, j'afficherais un indice de
probabilité très faible.
Le Président (M. Séguin): Sur le même
sujet?
M. Lessard: Si vous me le permettez, M. le Président. Vous
dites que c'est une hypothèse qu'il faut envisager. C'est, d'ailleurs,
une hypothèse qui est envisagée dans le livre que vient de
déposer le ministre, le livre Marier, en fait...
M. Morin: Le rapport Marier.
M. Lessard: ...le rapport Marier, sur la future politique
énergétique québécoise. Il ne faudrait pas, quand
même, si on s'en va vers une politique d'autosuffisance ou de
"self-reliance", que le Québec soit dans l'obligation de payer plus cher
son pétrole que le prix international.
M. Cloutier (Bernard): Je suis d'accord.
M. Lessard: Cette hypothèse est quand même,
envisagée.
M. Cloutier (Bernard): Je suis d'accord sur bien des parties du
document auquel vous faites référence, mais, sur ce point
particulièrement, je ne suis pas d'accord.
M. Lessard: Vous n'êtes pas d'accord. On verra après
l'ajournement.
Le Président (M. Séguin): Messieurs...
M. Lessard: On va voir sur quelle partie vous êtes
d'accord.
M. Cloutier (Bernard): Je crois que M. Marier et moi avons
affiché des probabilités différentes.
M. Cournoyer: II faut qu'il l'avise.
M. Morin: M. le Président, je ne pourrai peut-être
pas revenir tout à l'heure. Est-ce que je pourrais poser juste une
question de principe, pour être bien sûr que nous nous comprenons?
Cela va prendre une minute à peine.
Est-ce que, sur le plan technique, sur le plan économique, vous
seriez d'accord avec la proposition que le Québec, en tout état
de cause, doit rechercher les sources d'énergie en hydrocarbures qui
sont le meilleur marché pour sa consommation et que cela doit être
le critère de choix entre la solution canadienne et la solution
internationale?
M. Cloutier (Bernard): Comme je l'indiquais ce matin, à la
fin de la décennie 1960, ce critère prix avant tout était
effectivement le premier objectif à atteindre, d'autant plus qu'à
l'époque, comme vous le savez, le pétrole rendu à
Montréal, par le jeu des prix interaffiliés, était
beaucoup plus élevé qu'il aurait pu l'être.
M. Morin: A cause de la ligne Borden, vous voulez dire?
M. Cloutier (Bernard): Non, non, à cause du profit
"off-shore".
M. Cournoyer: Le profit "off-shore" dont vous parliez l'autre
jour.
M. Cloutier (Bernard): Cette motivation prix à
été très présente au cours des années
soixante, mais, comme je l'indiquais ce matin, je crois percevoir que, depuis
les événements de 1974 et la situation actuelle, la dimension
sécurité d'approvisionnement prédomine, surtout si l'on
envisage le long terme, sur la question stricte des prix. Si l'on veut regarder
au court terme immédiat, sans se soucier de la disponibilité
à moyen et à long termes, alors on peut se permettre de donner
priorité au prix.
M. Morin: C'est une des raisons pour lesquelles dans votre
rapport vous disiez que la sécurité des approvisionnements
signifie de plus en plus des accords de gouvernement à gouvernement.
C'est une des conclusions qu'on peut tirer de ce raisonnement que vous venez de
faire. Du moins, c'était une des conclusions que vous tiriez dans votre
rapport.
M. Cournoyer: M. le Président, ce sont des
conclusions d'une façon générale, pas
nécessairement du dernier énoncé de principe que vous avez
fait faire d'une façon tellement diplomate à mon
président.
M. Morin: Là, je m'aperçois que de cette
façon nous ouvrons...
M. Cournoyer: A can of worms.
M. Morin: ...une autre question. Peut-être pourrons-nous y
revenir ce soir, M. le Président.
M. Cournoyer: Si vous n'êtes pas là, je ne serai pas
là, parce que là, on va se chicaner pour rien.
Le Président (M. Séguin): De façon
très diplomate, la commission suspend ses travaux jusqu'à 20 h 15
ce soir.
(Suspension de la séance à 18 h 11)
Reprise de la séance à 20 h 15
M. Séguin (président de la commission permanente des
richesses naturelles et des terres et forêts): A l'ordre,
messieurs!
Le député de Saguenay a la parole.
Pipe-line de Polar Gas
M. Lessard: Nous avons discuté de la détermination
du prix du pétrole, et le chef parlementaire de l'Opposition
étant actuellement à une autre commission parlementaire, je
voudrais continuer un peu dans le même sens. Au cours de la séance
de cet après-midi, le président de SOQUIP nous soulignait qu'une
des directions vers lesquelles, particulièrement pour le Québec,
on devait se diriger, c'était le développement du gaz naturel
parce qu'en fait c'est un élément qui est très peu
utilisé actuellement au Québec; que si on veut en arriver
à sauvegarder les ressources pétrolières, il faudrait
utiliser d'autres ressources énergétiques, et que le
Québec utilisait, je pense, 5% c'est ce que vous aviez
souligné de son énergie sous forme de gaz naturel.
Dans ce même ordre d'idées, est-ce que le président
de SOQUIP pourrait me dire s'il serait avantageux pour le Québec
d'intervenir ou, en tout cas, d'essayer de négocier ou de faire des
pressions pour que le pipe-line qui doit être construit pour transporter
le gaz naturel de Polar Gas passe sur le territoire
québécois?
M. Cloutier (Bernard): Oui, en ce qui concerne, au Québec,
l'intérêt, cumulatif à long terme, mon avis est
qu'après que la disponibilité de gaz étant
donné que cette disponibilité, sera assurée une fois la
priorité accordée et dûment respectée en ce qui
concerne la sécurité de l'approvisionnement on doit
considérer, en deuxième lieu, le coût de cet
approvisionnement. Sans avoir fait d'étude détaillée
là-dessus, je penserais, à mon jugement, que
l'intérêt à long terme, pour le Québec, du meilleur
coût de transport est plus important que les retombées locales
à court terme que pourrait amener un tracé qui traverserait le
Québec.
M. Lessard: Je veux bien vous comprendre. Pour vous, l'important,
c'est d'abord une question de coût plutôt que de retombées
économiques, c'est-à-dire que si, entre les deux
tracés...
M. Cloutier (Bernard): Excusez-moi...
M. Lessard: ... il y en a un qui se dirige vers le Manitoba et
l'autre possiblement vers le Québec...
M. Cloutier (Bernard): La première priorité serait
accordée à la disponibilité de ce gaz, le plus tôt
possible. Sans avoir fait d'étude économique
détaillée sur les montants des retombées locales, pour
Lebel-sur-Quévillon, par exemple, en termes d'emploi pendant deux ans,
pour la durée de la construction de ce pipe-line, je pense que
l'intérêt
cumulatif du Québec sur une période de trente ans serait
plus intéressant, serait plus avantagé si l'on cherchait à
définir un tracé qui permettrait des taux de transport du gaz au
meilleur coût.
Si un tracé passant par le Québec est plus coûteux
qu'un tracé passant par l'Ontario ou par le Manitoba, eh bien! on
construit les pipe-lines pour une période de trente, quarante, cinquante
ans, alors que les retombées ne sont effectives que durant la
période de construction.
M. Lessard: Mais vous convenez quand même que c'est un
secteur qui doit être analysé de façon extrêmement
sérieuse parce que si, en même temps, on peut profiter des
retombées, on peut peut-être aussi avoir des coûts moindres,
quoiqu'il semble, à un moment donné, que les coûts soient
supérieurs.
M. Cloutier (Bernard): C'est pour cela que j'admets, au
départ, ne pas avoir fait l'étude économique, disons, de
la valeur des retombées à court terme pour une période de
deux ou trois ans par rapport à des tarifs que représenterait un
tracé passant par le Québec.
Je vous donne mon opinion, si vous voulez, plus instinctive
qu'analytique. Je vous fournis ce que je peux vous fournir.
M. Lessard: Alors justement dans ce secteur, l'autre jour, le
ministre disait qu'il y avait, je pense, un comité ou, en tout
cas...
M. Cournoyer: Pardon?
M. Lessard: ... la compagnie faisait des recherches, puis il y
avait eu des approches.
M. Cournoyer: Vous aviez la compagnie Polar Gas. C'est une
compagnie formée d'associés et on nous a demandé, nous au
Québec, de devenir un associé de la compagnie Polar Gas. Ils font
de la "feasibility", de la recherche sur la "faisabilité" d'un pipe-line
qui transporterait dans le sud le gaz venant des "Pan-Arctic Findings" dans les
îles de l'Arctique.
Gaz naturel de Saint-Flavien et Villeroy
M. Lessard: Alors justement en parlant de gaz naturel, je pense
que vous venez de faire deux découvertes qui semblent en tout cas
être importantes, soit celle de Saint-Flavien et Villeroy. Est-ce qu'il
est prouvé maintenant, en fait, que ces découvertes peuvent
être commercialisées? Est-ce que vous avez des projets concrets
qui sont envisagés, puis de quelle nature sont ces projets en termes,
par exemple, d'association ou de partenaires d'utilisation et de transport
envisagé vers l'Est du Québec?
M. Cloutier (Bernard): Ma réponse s'adresse à la
deuxième partie de votre question. Ces découvertes ont
été faites sur des terrains qui avaient
précédemment été restaurés par Shell seule.
Nous nous sommes associés avec cette compagnie, dans un premier temps
à 50% et, en un deuxième temps, nous avons repris 100% de la
participation contre une redevance sur ces terrains, c'est-à-dire qu'ils
partageront une partie de la production comme rémunération de
leurs travaux antérieurs avant que nous ayons pris les terrains. Alors
voilà pour la partie participation.
M. Lessard: Alors c'est en association avec Shell maintenant que
vous avez...
M. Cloutier (Bernard): Nous avons 100%, mais nous leur paierons
une redevance, variable selon le débit, sur la production comme
rémunération de leurs travaux antérieurs.
M. Lessard: De quelle valeur, cette redevance?
M. Cloutier (Bernard): Selon le débit des puits, elle
variera de 2% à 10%, selon les accords contractuels, de façon que
si un puits de faible débit justifie pour nous une mise en production,
qu'une redevance élevée n'en empêche pas la mise en
production, et que, si un puits est important, il puisse alors participer plus
largement aux revenus du puits. Ceci pour la deuxième partie de votre
question.
En ce qui concerne la première, si pour développer le
champ de Saint-Flavien on n'avait à amortir que le coût des
forages et le coût du rattachement à une ligne de collecte, ces
puits seraient commerciaux. C'est-à-dire que l'on pourrait, s'il y avait
un gazoduc qui passait le long de l'autoroute 20, se rattacher à ce
gazoduc et les puits seraient d'un débit suffisant pour justifier
l'investissement d'en forer d'autres et d'installer des réseaux de
collecte pour se brancher sur cette ligne principale qui irait de
Montréal à Québec.
M. Cloutier (Bernard): A en faire l'exploration et le
développement, oui.
M. Lessard: Pour autant que le pipe-line est sur la rive sud.
M. Cloutier: C'est cela, oui, mais, dans le moment, pour mettre
ce gaz en production par gazoduc, il faudrait amortir non seulement les
forages, le réseau de "collecte", mais un gazoduc qui irait de
Saint-Flavien à Québec et aussi un réseau de distribution
à Québec.
Dans le moment, nous n'avons pas suffisamment de réserves pour
envisager commercialiser le gaz par gazoduc de cette façon. C'est une
découverte qui, comme je l'ai exprimé dans le communiqué
de presse, serait commerciale s'il y avait un réseau ou une ligne de
transmission entre Montréal et Québec et un réseau de
distribution à Québec
M. Lessard: C'est une décision politique? M. Cournoyer:
Pas nécessairement. C'est une
décision qui me semble totalement économique dans le cas
de SOQUIP proprement dit. On va convenir que, pour les autres
considérations, il s'agit de savoir jusqu'à quel point un
réseau de gaz qui serait susceptible d'être alimenté, non
pas par cette seule source qui n'est pas encore prouvée commercialement,
mais qui pourrait l'être éventuellement, si des revenus
considérables pouvaient amener tout le gaz que vous brûlez
aujourd'hui.
Il faut quand même se rattacher à un réseau
principal. Alors, le réseau principal... Si jamais on arrivait à
la décision, par exemple, celle que je souhaite et que je continue de
souhaiter, publiquement du moins, et quand je dis du moins, cela veut dire que
j'ai déjà lancé cette idée ailleurs qu'ici, celle
qu'on poursuive la Trans-Canada Pipe Lines de Montréal jusqu'au
Nouveau-Brunswick...
Mais la question est de savoir et je pense qu'elle est beaucoup
plus importante que de savoir si le gaz de l'Articque passe au Manitoba
plutôt qu'au Québec pour amener le gaz dans le sud la
question est de savoir: Est-ce que ça passe sur la rive nord ou sur la
rive sud du Saint-Laurent, à cause des retombées, surtout
à cause du puits de Saint-Flavien et de Villeroy; c'est à partir
de là, je pense bien, qu'on est ouvert.
La décision est politique dans le sens de savoir si cela passe au
sud ou au nord, mais elle n'est pas politique dans le sens de savoir si elle
devrait passer. Cela doit passer, pour autant que cela devienne une question de
rentabilité économique, Même pour le gouvernement, cela
doit être rentable et même pour une entreprise gouvernementale,
cela doit être rentable. Pour l'entreprise privée, cela doit
l'être nécessairement, mais j'ai l'impression qu'on doit se
conduire comme si c'était une entreprise privée ici.
M. Cloutier: ... l'importance de la rentabilité possible,
nous avons annoncé, à la conférence de presse, un
débit de cinq millions de pieds cubes par jour.
Bien entendu, les essais de production ne sont pas complets et le
chiffre que nous avons annoncé est, par la nature même des choses,
modeste. Si on met un indice de probabilité là-dessus, on peut
dire qu'on a une probabilité de 90% et plus de pouvoir soutenir,
après les réductions de débit initiales de mise en
production, un niveau de production de cinq millions de pieds cubes par
jour.
Cela représenterait pour la société des revenus de
l'ordre de $2,5 millions par année, soit des revenus largement
supérieurs aux budgets initiaux de SOQUIP qui étaient de $1,5
million par année.
M. Lessard: Toujours en discutant de la question du gaz naturel,
vous aviez exposé, à un certain moment, au cours du mois de
décembre je suis obligé de compter mes mois en
septembre ou en octobre, vous aviez exposé un problème qui
existait entre la Société québécoise d'initiatives
pétrolières et Trans-Canada Pipe Lines Ltd concernant le refus de
cette dernière société d'acheminer au Québec les
trois millions de pieds cubes de gaz qui étaient nécessaires pour
la société SIDBEC.
Le ministre vient de nous dire justement que l'objectif qu'il
poursuivait était de continuer le réseau Trans-Canada Pipe Lines
vers le Nouveau-Brunswick, est-ce que le problème que vous avez
soulevé, à ce moment-là, est réglé et est-ce
que, toujours en tenant compte de vos découvertes, SOQUIP est en
négociation avec la Trans-Canada Pipe Lines pour que ce réseau de
pipe-line puisse être construit?
M. Cloutier (Bernard): Dans I'opinion que j'émettais au
dernier rapport annuel, la sécurité des approvisionnements doit
maintenant primer sur le prix. SOQUIP a entrepris une activité en
Alberta de façon à pouvoir contrôler certains débits
de gaz. Ce, avec l'appui financier de SIDBEC pour laquelle la
sécurité d'approvisionnement est d'importance vitale pour sa
survie et son développement.
M. Lessard: Quand vous dites avec l'appui financier de SIDBEC je
pense que SIDBEC finance une partie des investissements?
M. Cournoyer: C'est ça. Nous avons effectivement
découvert et développé du gaz en Alberta. Nous sommes
allés en Alberta avec l'objectif spécifique de trouver du gaz que
l'on rapporterait au Québec et, ayant fait ces découvertes et ces
développements, nous nous sommes adressés à Trans-Canada
pour le transporter. TCPL a dit, à ce moment-là: Notre politique
est de ne pas transporter pour des tiers parce que nos clients ont besoin de
tout le gaz qui serait disponible à la sortie de l'Alberta. Comme
m'expliquait le président, M. Woods, s'il y a 100 unités de gaz
disponibles à l'exportation de l'Alberta, si j'en transporte 10 pour
vous, ces dix-là ne sont pas là pour moi, pour mes clients
déjà établis, qui, par hasard, sont en Ontario.
Nous avons pris la position vis-à-vis de M. Woods, qui nous
disait: Vendez-nous votre gaz et j'ai dû répondre: Si je vous
vends notre gaz, vous allez le transporter dans l'Ontario. Par le raisonnement
que poursuivait M. Woods, le refus de transporter pour des tiers lui donnait un
monopole de fait, monopsone, d'achat en Alberta, ce qui, selon l'avis de nos
conseillers juridiques nous permettait de les traduire en cour criminelle. Il y
a eu des tractations, des conversations et finalement, tout s'est
réglé à l'amiable, Trans-Canada ayant accepté, il y
a environ un peu plus d'un mois, de transporter environ 15 millions de pieds
cubes par jour pour nous de façon à assurer les besoins de SIDBEC
pour la prochaine année.
M. Lessard: Le problème est réglé et tout
votre gaz naturel en Alberta est...
M. Cloutier (Bernard): Trans-Canada va le transporter ici.
M. Cournoyer: Tout de suite, avant d'aller plus
loin, j'aimerais qu'on précise, est-ce qu'il s'agit de votre gaz
qu'elle transporte ou s'il s'agit du gaz que vous vendez à TCPL, qui le
transporte ici, que SIDBEC rachète ou vous le rachetez rendu aux lignes?
Juste pour les archives, j'aimerais ça que ce soit très
clair.
M. Cloutier (Bernard): En fait, ça devient un peu
compliqué, mais c'est une question de modalités, c'est un peu
amusant, parce que...
M. Cournoyer: Très amusant, en effet...
M. Cloutier (Bernard): Mais ça revient au même,
parce qu'en réalité, on vend un gaz à SIDBEC...
M. Lessard: On sauve les principes.
M. Cloutier (Bernard): En fait, on le fait transporter.
M. Lessard: D'accord.
M. Cloutier (Bernard): Mais la procédure est amusante et,
contractuellement, ça nous fait faire plusieurs contrats. On vend le gaz
à SIDBEC en Alberta, qui le vend à PanAlberta, lequel le
vend...
M. Lessard: ... de notaire, ça.
M. Cloutier (Bernard): ... à Gaz Métropolitain. Gas
Métropolitain contracte avec Trans-Canada pour le transport et contracte
avec SIDBEC pour lui vendre le gaz. Mais l'objectif est atteint.
M. Cournoyer: Comme ça, SIDBEC vous a aidé à
le financer, en l'achetant, comme SOQUIP, à l'autre bout?
M. Cloutier (Bernard): ... mais l'objectif est atteint.
M. Cournoyer: Dès que vous avez aidé à le
financer en l'achetant, vous, comme SOQUIP, à l'autre bout.
M. Cloutier (Bernard): A faire l'exploration et le
développement, oui.
M. Lessard: A chaque étape, est-ce que cela prend des
notaires différents?
M. Cournoyer: Ils sont tous sur la liste.
M. Cloutier (Bernard): C'est marginal.
M. Lessard: C'est marginal, par rapport à l'ensemble de la
transaction, mais pas marginal par rapport aux notaires comme tels.
M. Cournoyer: Ils sont sur la liste.
M. Cloutier (Bernard): Non...
M. Cournoyer: Justement, c'est quelle liste?
La liste d'Alberta, la liste de l'Ontario, la liste du gouvernement
fédéral, la liste du gouvernement provincial, l'Alberta, celle de
Toronto. Ils ont chacun leur liste.
Le Président (M. Séguin): II y a un
député qui a demandé la parole. Maintenant, je ne sais pas
si c'est dans le même...
M. Lessard: Pas de problème, M. le Président.
Le Président (NI. Séguin): Est-ce que
c'était dans le même... Le député de Papineau.
M. Assad: M. Cloutier, quel budget le gouvernement vous
alloue-t-il par année?
M. Cloutier (Bernard): Notre budget a été de $1,5
million pour les cinq premières années. En 1974, il a
été augmenté a $7,5 millions, étant donné
que la capitalisation autorisée est passée de $15 millions
à $100 millions, avec $75 millions fermes, c'est-à-dire
souscrits, et $25 millions constituant une réserve qui nous permettait
une certaine flexibilité pour profiter de l'occasion d'affaires qui,
souvent, se présente très rapidement, et si on n'avait pas cette
réserve, on ne pourrait pas espérer en temps normal obtenir
l'adoption d'une loi en temps utile pour profiter de l'occasion d'affaires.
Notre tentative d'achat dans Panarctic a reposé principalement sur cette
facilité, cette flexibilité. Cela n'a pas réussi, mais
cela nous fournit une certaine souplesse que l'on n'aurait pas si on avait un
budget fixe chaque année. Dans le moment, notre budget ou la vente de
nos actions à notre actionnaire est de $7,5 millions par année.
C'est la base de notre budget.
M. Lessard: Quand vous dites que... Excusez...
M. Assad: Quel pourcentage de votre budget est
dépensé pour des forages actuellement?
M. Cloutier (Bernard): Le budget renferme $6,2 millions environ,
un peu plus de $6 millions en budget d'exploration, qui est principalement
affecté à des forages.
M. Assad: Dans le domaine du raffinage?
M. Cournoyer: Rien.
M. Assad: Dans le moment...
M. Cournoyer: Dans le raffinage, vous n'avez rien.
M. Lessard: Veuillez intervenir auprès de votre
ministre.
M. Cournoyer: II pose une question, cela ne veut pas dire qu'il
fait une suggestion. Il y a une différence entre les deux. Il pose la
question pour savoir jusqu'à quel point ils sont dans le raffinage.
M. Cloutier (Bernard): ... pourcentage... M. Lessard: Que
répond le ministre, lui?
M. Cournoyer: Le ministre dit: Ils sont... Je dis zéro.
Avez-vous vu le signe? C'est comme des zéros.
M. Lessard: Cela dépend.
M. Cournoyer: Ils n'ont pas de raffinage.
M. Cloutier (Bernard): On n'est pas dans le raffinage.
M. Cournoyer: Pourquoi? Qu'est-ce que c'est, cette affaire?
M. Lessard: Pourquoi?
M. Cournoyer: Le ministre a dit non.
M. Lessard: Ecoutez, c'est le ministre qui pose la question.
M. Cournoyer: Le ministre a dit non. M. Lessard: Le ministre a
dit non. M. Cournoyer: Dans le raffinage? M. Lessard: Oui.
M. Cournoyer: Je comprends. C'est écrit dans son rapport
annuel, que l'actionnaire principal ne lui a pas demandé encore de
passer à la deuxième section.
M. Lessard: Quelle est la différence entre...
M. Cournoyer: II n'a pas l'intention de lui demander tout de
suite.
M. Lessard: C'est justement. Il y a une différence entre
affirmer que...
Le Président (M. Séguin): Le député
de Papineau.
M. Cournoyer: Le ministre ne peut pas avoir dit non.
M. Assad: Dans SOQUIP, vous avez trois volets, dans le sens que
vous dépensez un pourcentage dans le forage. Le raffinage, cela peut
venir dans l'avenir, selon les approvisionnements que vous allez avoir.
M. Cloutier (Bernard): Si notre actionnaire nous demande de nous
engager dans ce que je dirais plutôt l'approvisionnement du raffinage de
la distribution, nous n'aurons qu'à effectuer les volontés de
notre actionnaire.
M. Cournoyer: C'est un président de compa- gnie qui se
comporte comme il faut. Vous avez compris ce qu'il a dit? Que tous les autres
présidents de compagnies qui relèvent de moi se comportent comme
cela, et cela va aller bien.
M. Lessard: Je vais vous répondre à propos...
M. Assad: C'est SOQUIP qui s'organise pour faire des
négociations pour les approvisionnements de gaz naturel...
M. Cloutier (Bernard): Le gaz naturel, c'est un peu
différent. Il s'agit d'exploration, de production, de
développement. C'est bien largement couvert dans la partie A de notre
mandat.
M. Assad: Vous n'avez pas de domaine de... Vous n'êtes pas
dans le marketing, non plus?
M. Cloutier (Bernard): Non, nous ne sommes pas dans la
commercialisation, mais la partie A de notre mandat comprend le transport des
hydrocarbures bruts, non raffinés, dont, entre autres, le gaz
naturel.
M. Cournoyer: Continuez.
M. Lessard: Cela allait bien, M. le Président, si vous
permettez...
M. Cournoyer: Vous êtes sur la bonne voie.
M. Lessard: C'était sur...
M. Cournoyer: Vous êtes correct...
M. Lessard: Justement...
M. Cloutier (Bernard): Surtout s'il est assez pur pour qu'il
n'ait pas besoin de traitement avant la mise en marché.
M. Cournoyer: Voilà!
M. Lessard: J'aurais envie...
M. Cournoyer: Continuez!
M. Lessard: ... à partir de ces questions, de parler du
premier rapport...
M. Cournoyer: Remarquez que les questions étaient
intelligentes.
M. Lessard: ... mais avant, étant donné que le
député parlait tout à l'heure de votre capital-actions, en
vertu de la loi du 5 juillet 1974, qui avait pour objectif premier d'augmenter
votre capital-actions à $100 millions et que ce soit versé par
tranches de $7 500 par année...
M. Cournoyer: $7 millions.
M. Lessard: Pardon?
M. Cournoyer: C'est $7 millions.
M. Lessard: Oui, d'accord!
M. Cournoyer: II y a une petite série de zéros.
M. Lessard: $7,5 millions par année. Vous aviez
reçu aussi en disponibilité un montant de $25 millions.
M. Cloutier (Bernard): Depuis la baie James, on peut se
tromper.
M. Lessard: Pardon?
M. Cloutier (Bernard): Depuis les Olympiques et les travaux de la
baie James...
M. Lessard: Ah oui! ... c'est ça.
M. Cloutier (Bernard): Puissance trois ou puissance six, c'est
trompeur.
M. Lessard: Puissance dix comme les BTU et des choses comme
cela.
M. Cournoyer: On allait bien.
M. Lessard: Alors ces $25 millions étaient une somme
additionnelle qui pouvait être utilisée, si ma mémoire est
bonne, lorsque vous faisiez des découvertes importantes ou...
M. Cournoyer: Des opportunités...
M. Lessard: ... que vous aviez une certaine opportunité...
Je ne sais pas, peut-être que le président de SOQUIP, M. Cloutier,
pourrait préciser; mais ce que je voudrais savoir, c'est si ces $25
millions ont été utilisés? Si oui, de quelle
façon?
M. Cloutier (Bernard): Depuis la publication du rapport que vous
avez en main, nous avons puisé dans cette réserve $5 millions
pour accélérer nos travaux dans les basses terres en particulier
dans l'année qui vient de se terminer au 31 mars 1976.
C'est-à-dire qu'il nous reste $20 millions de cette réserve.
M. Lessard: $20 millions. Actuellement, vous avez comme capital
versé...
M. Cournoyer: Est-ce qu'on peut préciser que...
M. Lessard: Oui.
M. Cournoyer: ... au lieu d'avoir $7,5 millions c'est dans
le même domaine, en fait les $6 millions dont vous avez
parlé tantôt, auxquels on doit additionner les $5 millions dont il
a été question, c'est de l'exploration dans les basses terres
québécoises...
M. Cloutier (Bernard): Principalement.
M. Cournoyer: ... ce qui veut dire que l'année
passée, en particulier, c'était $6 millions et $5 millions, donc
$11 millions.
M. Cloutier (Bernard): $7,5 millions et $5 millions.
M. Cournoyer: Vous avez dit tantôt qu'il... M. Cloutier
(Bernard): Ah oui, oui!
M. Cournoyer: ... y avait $6 millions qui avaient
été seulement pour l'exploration proprement dite, donc si
j'ajoute les $5 millions, cela fait $11 millions en exploration proprement dite
dans les basses terres québécoises.
M. Cloutier (Bernard): C'est juste.
M. Lessard: Actuellement, quel est le capital total versé
à la Société québécoise d'initiatives
pétrolières?
M. Cloutier (Bernard): Au 31 mars 1976, c'étaient $27,5
millions.
Rapport Marier
M. Lessard: En revenant aux questions qui étaient
posées tout à l'heure concernant le deuxième mandat qui
était dévolu à la Société
québécoise d'initiatives pétrolières en vertu de sa
loi constitutive, j'aimerais, toujours comme expert et conseiller du
gouvernement en matières énergétiques, vous poser un
certain nombre de questions concernant le rapport Marier. Vous m'avez dit, au
cours de la séance précédente, qu'il y avait des choses
avec lesquelles vous étiez d'accord, qui étaient dans le rapport
Marier, et d'autres avec lesquelles vous n'étiez pas d'accord. Je pense
que c'est tout à fait votre droit d'être d'accord avec certaines
choses et d'être en désaccord avec d'autres.
C'est à ce titre que nous avons désiré vous
interroger aussi en commission parlementaire, puisque la Société
québécoise d'initiative pétrolière, nous l'avons
voulue aussi avec une certaine autonomie, même si, comme je le disais ce
matin, il appartient au ministre de répondre aux questions à
l'Assemblée nationale lorsque vous ne pouvez pas venir témoigner
en commission parlementaire...
M. Cournoyer: Bien non.
M. Lessard: ... et comme c'est la première fois depuis
cinq ans que le président vient témoigner...
M. Cournoyer: C'est grâce à moi.
M. Lessard: ... nous pouvons, à ce titre, comme expert,
lui poser un certain nombre de questions, excepté lorsque nous avons eu
à étudier la loi comme telle. Je pense que c'était la loi
du 5 juillet...
M. Cournoyer: L'augmentation du capital-actions.
M. Lessard: ... 1974. L'augmentation du capital-actions.
M. Cournoyer: Bon. Allons-y. Quelles questions voulez-vous
poser?
M. Lessard: Vous êtes curieux, M. le ministre.
M. Cournoyer: C'est parce que je veux voir s'il y en a.
M. Lessard: II y a un certain nombre de recommandations qui sont
faites et, particulièrement, on souhaiterait, dans ce rapport, essayer
de savoir ce qui se passe dans le secteur pétrolier,
particulièrement dans le raffinage et dans la distribution. Je pense que
ce n'est pas la première fois que nous avons des rapports en ce sens et
je pense même que vous avez participé à certains rapports
qui ont été présentés au gouvernement, puisque vous
étiez considéré un peu comme un expert dans ce
secteur.
Alors, ce n'est pas la première fois, je pense, que nous
souhaitons particulièrement...
M. Cournoyer: Nous? Vous avez dit nous?
M. Lessard: C'est-à-dire que certains fonctionnaires du
gouvernement souhaitent créer un secteur témoin dans le
pétrole. On se rappelle, par exemple, que les premiers rapports qui ont
été préparés à ce sujet parlaient de profits
assez considérables, dans les profits "off-shore" par exemple. En ce qui
concerne les profits "offshore", dans un premier rapport, c'est-à-dire
bien avant celui de 1972 qui avait été préparé par
le ministre, soit dans les rapports précédents, on parlait de $75
millions à $100 millions que devaient payer les Québécois
pour des profits "off-shore ", parce que l'industrie pétrolière
est véritablement intégrée et que si on voyage sous
pavillon international, par exemple, et qu'on exige des frais de transports
assez élevés, on n'a pas à payer d'impôt à
une place ou à une autre, etc.
Pour essayer de régler ce problème et essayer de savoir ce
qui se passe dans le secteur pétrolier, on a toujours parlé un
peu de créer un secteur témoin et le rapport Marier recommande
je comprends que ce n'est pas le rapport du ministre l'achat de
Golden Eagle par l'intermédiaire de la Société
québécoise d'initiative pétrolière pour
créer ce secteur témoin.
Croyez-vous justement, comme expert, parce que c'est l'objet de votre
deuxième mandat, que c'est là une façon de créer le
secteur témoin que beaucoup de fonctionnaires ont souhaité depuis
quelques années?
J'aimerais d'abord que vous répondiez à cette
première question. Il s'agit là d'une question politique, mais il
s'agit aussi d'une question... C'est comme expert que je vous pose la question,
c'est-à-dire que, jusqu'ici, on s'est limité ou que
SOQUIP s'est limitée presque exclusivement à
l'exploration. Est-ce qu'en vertu de cette recommandation, SOQUIP devrait
demander, si son actionnaire ne l'a pas demandé, d'aller au
deuxième mandat possible et en poursuivant la recommandation faite par
le rapport Marier?
M. Cournoyer: Mon collègue et ami le député
de Saguenay vient de poser deux questions qui sont totalement
différentes.
Vous avez posé la première question. Est-ce que c'est une
façon et, après cela, Est-ce que vous devriez? Est-ce que le
gouvernement devrait ou est-ce que votre compagnie devrait?
Pour la première partie, je ne peux être en
désaccord avec vous parce que vous pouvez poser cette question au
technicien.
M. Lessard: D'accord.
M. Cournoyer: Est-ce que le gouvernement devrait... ? C'est
à moi à répondre à cela.
M. Lessard: Ah! C'est une autre affaire!
M. Cournoyer: Ce n'est pas à lui. Et vous avez posé
la deuxième aussi.
M. Lessard: Très bien. Je m'excuse. Donc, je reprends.
Comme président directeur de SOQUIP, croyez-vous que nous devrions
créer un secteur témoin dans le domaine pétrolier?
M. Cournoyer: Ce n'est pas la question.
M. Cloutier (Bernard): Cette question s'adresse au ministre.
M. Cournoyer: C'est à moi. C'est moi, l'expert. Est-ce que
c'est une façon? La question que vous avez posée tantôt,
était très bien, la première mais quand vous vous
êtes expliqué, j'ai compris qu'elle était moins bien. La
question est: Est-ce que d'être dans un secteur ou acheter la compagnie
Golden Eagle, c'est une façon d'être témoin de ce qui se
produit?
M. Lessard: Est-ce que le ministre est en train de filtrer mes
questions?
M. Cournoyer: Non, mais c'est celle-là que vous avez
posée en premier lieu.
M. Lessard: On va s'en tenir au rapport Marier. Est-ce que vous
êtes d'accord avec la recommandation du rapport Marier qui dit qu'on
devrait nationaliser Golden Eagle? Est-ce que le ministre permet
celle-là?
M. Cournoyer: Non. Parce que la question n'est pas posée
comme cela et parce que, posée comme cela, cela prête au rapport
Marier l'intention de proposer la nationalisation de Golden Eagle avec tout ce
qui peut être acheté par...
M. Lessard: D'accord.
M. Cournoyer: C'est justement cela. On va être
précis, c'est écrit ce qui va être écrit ici.
M. Lessard: D'accord, on va être précis, de prendre
le contrôle de Golden Eagle.
M. Cournoyer: II y a une légère petite
différence.
M. Cloutier (Bernard): Si l'on veut, on va situer votre
question...
M. Lessard: ... votre réponse.
M. Cloutier (Bernard): ... dans une autre perspective que
celle-là, et j'y répondrai en deux parties. Cet
après-midi, on a parlé des moyens sur lesquels le Canada pouvait
compter pour améliorer son approvisionnement énergétique
d'hydrocarbure et j'ai cherché à présenter ma thèse
selon laquelle, dans le contexte actuel, la priorité devait revenir au
développement de l'utilisation du gaz naturel.
Je pense que cette question de perspective dans laquelle se pose votre
question est importante, parce qu'il y a une question de dispersion d'efforts
et de moyens et de choix budgétaires auxquels le ministre a
déjà fait référence plus tôt dans la
journée. A mon avis, la priorité devrait clairement être
accordée au développement de l'utilisation du gaz naturel. Je me
permets une parenthèse pour préciser que le développement
de l'utilisation du gaz naturel au Canada, comme je l'ai mentionné cet
après-midi, peut se faire plus aisément au Québec
qu'ailleurs, parce que nos marchés sont moins saturés, en ce qui
concerne la saturation, mais que deux conditions essentielles doivent
être satisfaites. La première est le développement du
réseau et la deuxième est le maintien du gaz à un prix
compétitif au niveau des produits pétroliers que consomment les
individus qui devront faire des milliers de choix individuels pour changer de
l'huile au gaz.
Ceci dit, la deuxième partie de ma réponse concerne le
pétrole et je reviens à ce que j'ai mentionné
précédemment, qu'au cours de la décennie 1960, alors que
l'on étudiait ce problème, il apparaissait que le problème
principal était un problème de prix. Depuis cette époque,
la priorité doit être accordée à la
sécurité de l'approvisionnement et, dans un rapport annuel
précédent, je mentionnais que, particulièrement dans le
cas du pétrole brut, la sécurité des approvisionnements
implique de plus en plus souvent des accords de gouvernement à
gouvernement, mis en oeuvre par des compagnies nationales aux deux bouts. Si on
reconnaît une priorité au développement du gaz naturel au
Québec, secondairement, on doit ou on peut penser au pétrole, non
pas tellement en ce qui concerne l'activité de raffinage comme telle ou
l'activité de distribution comme telle, mais l'activité de
raffinage et de distribution comme le moyen de permettre à l'Etat de
conclure des traités, des accords qui assurent ces approvisionnements
pétroliers.
M. Lessard: Est-ce que je pourrais demander à M. Cloutier
et je voudrais qu'il nous éclaire sur cela, toujours en tant
qu'expert si le raffinage du pétrole, l'établissement d'un
réseau de distribution, même s'il exige un investissement qui peut
être, au début, considérable, ne permettrait pas de
financer les coûts très considérables de l'exploration du
pétrole et du gaz naturel?
J'avoue que je ne suis pas expert et je ne prétends pas
l'être non plus, mais vous, comme expert, pouvez-vous me dire s'il est
exact que, dans le pétrole, dans le secteur du gaz naturel, mais
particulièrement dans le pétrole, ce qui coûte cher, c'est
l'exploration et ce qui est payant, c'est le raffinage et la distribution?
Est-ce que c'est vrai ou non? Ou est-ce que c'est relatif?
M. Cournoyer: A la condition que tu raffines ce que tu as
trouvé.
M. Lessard: Cela dépend. Si tu veux raffiner, où
vas-tu aller chercher? C'est là qu'on va parler d'accords entre
gouvernements tout à l'heure.
M. Cloutier (Bernard): J'apprécie la sympathie dont vous
faites preuve envers le développement de ma société, mais
je dois reconnaître que la conjoncture actuelle, au point de vue de la
rentabilité du raffinage, n'est pas brillante, compte tenu d'une
"surcapacité" de production dans l'Est canadien.
Si vous remarquez le marché boursier et les analyses des
analystes boursiers, ils recommandent principalement à leurs
investisseurs d'investir dans les sociétés de raffinage qui ont
une implication minime dans l'Est canadien et importante dans l'Ouest
canadien.
Au moment où nous nous parlons, compte tenu d'une conjoncture de
"surcapacité" de raffinage dans l'Est canadien, ce n'est pas une raison
principale pour s'intéresser à ce secteur. Néanmoins, en
deuxième priorité et pour les raisons que j'expliquais, il peut
être justifié, dans une certaine optique, de s'y engager, mais
pour des raisons différentes de celles que vous mentionnez.
M. Lessard: Lesquelles?
M. Cournoyer: Je vais vous les donner, moi. Je vous les ai
répétées, la dernière fois, à une
séance de la commission parlementaire concernant les crédits de
mon ministère. J'ai dit que j'admettrais que nous ayons le
contrôle d'une compagnie, je ne dis pas laquelle, mais disons que celle
qui nous paraîtrait la plus plausible serait probablement Ultramar qui
est propriétaire de Golden Eagle, dans les circonstances actuelles,
à la condition que le ministère de l'Industrie et du Commerce,
voulant favoriser l'implantation de pétrochimie au Québec, et
voulant, par le fait même, assurer une sécurité
d'approvisionnement à certains produits ou sous-produits d'une
raffinerie, ait besoin que cette raffinerie garantisse à une usine de
pétrochimie la sécurité dont il est question et que les
autres compagnies canadiennes, québé-
coises ou multinationales ne puissent pas, à cause du fait
qu'elles sont en compétition avec une usine de pétrochimie,
assurer cette sécurité dont on parlait tantôt.
A ce moment-là, je dirai au ministre de l'Industrie et du
Commerce qui me dirait avant: Voici la pétrochimie que nous voulons
installer que cela s'appelle ce que cela voudra, la pétrochimie
nous avons besoin, pour l'installer, d'une sécurité
d'approvisionnement, les moyens sont à la disposition de SOQUIP pour
pouvoir le faire. A ce moment-là, au moins, on a un terminus ad quem qui
est clairement identifié et qui n'est pas la seule existence dans le
secteur, parce que l'existence dans le secteur, si elle était vraie au
moment où les prix étaient fixés par les compagnies
multinationales, n'est plus vrai aujourd'hui, alors que les prix sont
fixés effectivement par les gouvernements étrangers, que ce soit
au Moyen-Orient, par les pays d'Arabie et les autres pays producteurs de
pétrole, par l'OPEP.
Les compagnies n'ont plus à dire ce qu'elles avaient à
dire en 1972 lorsqu'on parlait de secteur témoin. La raison que
j'accepterais pour entrer dans le secteur, c'est celle que je viens de vous
donner. Je vous l'avais dit l'autre fois.
Si le président de SOQUIP a d'autres idées
là-dedans, c'est son problème à lui. Mon problème
à moi, c'est que c'est moi qui contrôle ses finances.
M. Lessard: D'accord. Je savais que le ministre m'avait
indiqué ces possibilités de pétrochimie, mais, pour
arriver à la pétrochimie, il faut commencer par faire du
raffinage, il faut commencer par négocier des contrats pour avoir...
M. Cournoyer: Etant donné...
M. Lessard: ... une certaine alimentation.
M. Cournoyer: M. le Président, étant donné
la position très clairement exprimée par le ministre, il serait
odieux de demander à un des présidents d'une
société contrôlée par le ministre ce qu'il pense de
cette attitude du ministre.
M. Lessard: Non, ce n'est pas cela que je demande.
M. Cournoyer: Parce qu'il va vous dire que c'est bon. Il ne peut
pas faire autrement que de vous dire que c'est bon. C'est une excellente
attitude que j'ai, vous le savez d'ailleurs.
M. Lessard: Non.
M. Cournoyer: Si vous voulez le dire, M. le président,
dites-le, mais je ne vous le demande pas.
M. Lessard: Ne lui tordez pas le poignet, il est libre...
M. Cournoyer: M. le président, si vous ne voulez pas le
dire, ne le dites pas, je vous comprendrai.
M. Lessard: Cela allait bien. C'est parce que le président
de SOQUIP me soulignait tout à l'heure qu'il pouvait y avoir d autres
raisons qu'une question strictement de prix de pétrole comme tel,
d'autres raisons pour lesquelles SOQUIP demande ou souhaite, si vous voulez
bien... Parce que ce sont les termes que vous avez utilisés ce matin,
que vous souhaitiez le développement de votre entreprise, que la
Société québécoise d'initiatives
pétrolières puisse se diriger vers le raffinage. Est-ce que ce
sont les mêmes que celles du ministre? Voyez comme je suis gentil.
M. Cloutier (Bernard): La raison que j'ai présentée
ce matin en ce qui concernait mon souhait était tout simplement qu'il
est normal pour un organisme de souhaiter son expansion. C'était une
raison bien de SOQUIP, si on veut.
M. Lessard: C'est strictement pour ces raisons, il n'y en a pas
d'autres.
M. Cloutier (Bernard): II y en a d autres.
M. Lessard: Les raisons que vous indiquiez tout à l'heure,
c'est-à-dire qu'il pouvait y avoir d'autres raisons valables, ce sont
celles de...
M. Cloutier (Bernard): II y en a d'autres que j'ai
mentionnées, que j'ai touchées, en mentionnant que ce n'est pas
le raffinage en soi ou la distribution en soi qui peut être aussi
importante qu'un outil qui permet de sécuriser les
approvisionnements.
M. Cournoyer: Est-ce que cela ressemble à la raison que je
vous ai donnée tantôt?
M. Lessard: Non.
M. Cournoyer: Je pose cette question au président.
M. Lessard: ...
M. Cournoyer: Je lui pose la question.
M. Lessard: Oui, mais...
M. Cournoyer: Est-ce que cela ressemble à la raison que
j'ai donnée tantôt, une sécurité d'approvisionnement
d'une industrie en particulier?
M. Cloutier (Bernard): C'est cela, oui. C est-à-dire
que...
M. Cournoyer: Donc, le président vient de vous dire que
j'étais intelligent, que j'étais correct.
Le Président (M. Séguin): J'avais l'impression que
toutes les tordeuses étaient dans le bois, mais je m'aperçois
qu'il y en a ailleurs que là.
M. Lessard: M. le Président, pour une fois, vous avez
raison, on tord quelq'un.
Le Président (M. Séguin): C'est cela.
M. Lessard: Mais, comme je connais le président,
c'est-à-dire comme je le connais...
M. Cournoyer: Jamais je n'aurais osé tordre M. Cloutier,
voyons donc.
M. Lessard: ... de réputation...
M. Cournoyer: Comme vous le tordez sur tous les bords, sur tous
les sens pour qu'il dise que je suis un "cave "... Il ne l'a pas dit encore et
il ne peut pas le dire. Il faut donc qu'il ne dise rien et qu'il patine autour
du pot ou qu'il dise que je suis bon.
M. Lessard: Arrêtez donc de vous donner en spectacle.
M. Cournoyer: II n'a qu'un choix. Je ne me donne pas en
spectacle.
M. Lessard: On va vous dire que vous êtes bon.
M. Cournoyer: Je suis excellent, il va falloir que vous le disiez
un jour...
M. Lessard: Cela fait un an que vous êtes nommé
ministre et vous êtes d'accord...
M. Cournoyer: Vous ne savez pas encore compter, ce ne sont pas
des farces, cela fait neuf mois.
M. Lessard: Cela fait neuf mois. Vous demandez encore des
études sur les études que l'autre ministre avait faites, à
la suite des études qui avaient été
préparées par d'autres gouvernements.
M. Cournoyer: Moi, je demande des études, M. le
Président!
M. Lessard: Ah oui!
M. Cournoyer: M. le Président, je ne demande pas
d'études. J'ai seulement besoin de compléter la formation du
député de Saguenay une fois de temps en temps. Il ne sait pas
compter, ce n'est pas de sa faute.
M. Lessard: Bon. En quoi...
M. Cournoyer: II n'a pas sa machine ce soir; avez-vous
remarqué qu'il n'a pas sa machine?
Le Président (M. Séguin): Je suggère aux
transcriptrices du journal des Débats de se plaindre.
Le député de Saguenay, continuez.
Négociations sur l'approvisionnement
M. Lessard: M. le Président, en relation, justement, avec
le deuxième mandat qui, normale- ment, est dévolu à
SOQUIP, mais pour autant que cette société le demande, il faut
aussi, si on discute de ce deuxième mandat, discuter de
sécurité d'approvisionnement comme vous le dites et parler un
peu, je pense, des relations ou des négociations que la
Société québécoise d'initiatives
pétrolières a eu à faire avec certains pays
étrangers, parce que je pense cela a été de
notoriété publique que le président de SOQUIP, en
collaboration avec le ministère des Richesses naturelles, a eu
l'occasion de négocier des possibilités d'approvisionnement avec
l'Arabie Saoudite, l'Iran. Est-ce que ces négociations sont maintenant
rendues au point mort? Est-ce que les réponses sont
négatives?
En plus justement de cette négociation de l'approvisionnement, on
négociait aussi la possibilité peut-être
d'intéresser ces pays à la participation dans une entreprise de
raffinage. Alors, où en est-on rendu?
M. Cloutier (Bernard): Je pense que je me suis peut-être
mal exprimé tout à l'heure, quand j'ai situé la
priorité au développement du gaz naturel. Les questions que vous
posez sont d'un ordre secondaire par rapport à cet objectif principal
qui, à mon sens, devrait nous captiver dans l'immédiat, dans le
temps où on parle. C'est sûr que...
M. Lessard: Actuellement, vous vous dirigez plutôt vers le
gaz nautrel, de telle façon que le reste devient passablement
secondaire?
M. Cloutier (Bernard): Relativement, pour les raisons que j'ai
énoncées cet après-midi. Il n'en reste pas moins, comme je
l'ai exprimé, je crois, assez clairement, qu'un intéressement du
Québec dans l'activité raffinage-distribution pourrait
représenter un outil pouvant sécuriser ces approvisionnements
pétroliers non seulement spécifiquement pour l'industrie, mais
d'une façon générale, pour les raisons que j'ai cru
développer assez clairement si vous voulez des précisions
plus détaillées, je suis prêt à les offrir la
priorité dans le moment n'est pas là.
M. Lessard: A cause des priorités économiques du
gouvernement et de votre budget.
M. Cloutier (Bernard): ... et conjoncturelles au point de vue des
ressources, des réserves d'énergie dont dispose le Canada, sur
lesquelles le Québec peut tirer.
M. Lessard: Si vous aviez la priorité entre un stade
olympique et une industrie pétrochimique...
M. Cournoyer: M. le Président, il est plus
détestable que moi. Je vais y aller, moi aussi.
Le Président (M. Séguin): Bien. Je n'appellerai
pas...
M. Cloutier (Bernard): C'est cela. On peut regarder la queue du
chien, mais il ne faut pas que la queue branle le chien.
M. Lessard: Oui, c'est cela.
M. Cournoyer: Qu'est-ce que vous faisiez, vous là?
M. Lessard: Votre réponse m'apparaît, en fait, plus
ou moins claire. Je comprends que vous avez la priorité sur le gaz
naturel, mais il reste que vous avez quand même, comme
société québécoise d'initiatives
pétrolières par l'intermédiaire ou via le
ministère... il y a eu un certain nombre de négociations qui se
sont faites concernant l'approvisionnement en pétrole et la
participation possible de la société québécoise
d'initiatives pétrolières dans une société d'Etat,
mais aussi avec la collaboration d'un gouvernement étranger et. en
même temps, ceci nous assurait une certaine garantie d'approvisionnement.
Ce que je vous demande, ces négociations, est-ce que c'est tombé
à zéro ou si cela continue?
M. Cloutier (Bernard): N'ayant pas été
personnellement impliqué dans ces négociations, je dois remettre
la question au ministre et à ses conseillers.
M. Lessard: Bon. Comme président de la
Société québécoise d'initiatives
pétrolières, vous n'avez pas eu à participer comme tel et
à vous rendre en Arabie Saoudite ou encore en Iran pour avoir une
discussion ou des négociations avec ces pays?
M. Cloutier (Bernard): Non. M. Lessard: Est-ce que...
M. Cournoyer: Moi non plus.
M. Lessard: Vous non plus, parce que vous n'étiez pas
là. Cela fait neuf mois que vous êtes rendu...
M. Cournoyer: De quelle époque parlez-vous, quant à
ces négociations?
M. Lessard: Juillet 1973/74. M. Cournoyer: Fin de juillet.
M. Lessard: Fin de juillet, 30 juillet, c est cela?
M. Cournoyer: Peut-être le 32 juillet. Farce à part,
je n'étais pas là, mais...
M. Lessard: Vous n'étiez pas là, mais j'ai
soulevé des questions en Chambre à ce sujet.
M. Cournoyer: Bon. Dans ce temps...
M. Lessard: Dans ce temps, justement, on m'indiquait, parce que
j'avais été informé que le président de SOQUIP
n'était pas partie de ces négociations; mais négociations,
il y a eues, je pense.
M. Cournoyer: Ah! Il faut s'entendre sur le mot
"négociation ". Il y en a eu très certainement à un moment
ou à un autre. On peut situer cela avec M. Ruelland qui était,
à l'époque, membre du cabinet de M. Massé et qui peut nous
indiquer, soit par ouï-dire ou autrement, premièrement: Est-ce
qu'il y a eu négociations? Ce sont les questions que j'aimerais voir
poser dans cet ordre. Est-ce qu'il y a eu négociations, M. Ruelland?
Oui.
Est-ce que ces négociations sont terminées?
En autant que je sache, oui.
Elles ont eu lieu, quand?
Avant la crise pétrolière.
Avant la crise pétrolière. Est-ce quelles se sont
terminées à cause de la crise pétrolière?
M. Lessard: Vous préparez votre...
M. Cournoyer: Pas du tout! Non, vous me posez des questions de
cette façon, il me semble qu'on les pose dans l'ordre. Est-ce qu'elles
se sont terminées à cause de la crise pétrolière ou
si elles se sont terminées pour d'autres causes? A cause de la crise.
Alors, voulez-vous expliquer au député de Saguenay pourquoi la
crise a changé les relations entre le gouvernement de l'Arabie Saoudite
et le nôtre?
M. Lessard: Là, c'est le ministre qui interroge
maintenant. Quand M. Ruelland répond, est-ce qu il répond au nom
du ministre?
M. Cournoyer: II répond au nom du ministre, parce que le
ministre n'était pas là dans le temps. Il répond donc au
nom du ministère. Il donne des faits. Il ne donne pas des opinions.
M. Lessard: Oui. C'est parce que là. comme le ministre
interroge...
M. Cournoyer: Vous interrogez.
M. Lessard: ... le ministre s'interroge lui-même.
M. Cournoyer: Voilà! C'est une nouveauté.
Je pense qu'il faut se replacer dans la conjoncture... A ce
moment-là, le ministère des Richesses naturelles avait
déjà reconnu la possibilité, les avantages de
négociations entre gouvernements pour améliorer la
sécurité des approvisionnements. Dans ce contexte, il y a eu deux
voyages d'organisés dans les pays arabes pour voir quelles
étaient les possibilités, les modalités d'ententes qui
pouvaient intéresser autant les pays producteurs qu'un pays consommateur
ou une province consommatrice comme le Québec. Cela s'est
déroulé...
M. Lessard: ... deux voyages. Qui était
représentant du ministère?
M. Cournoyer: Chaque fois, c'étaient des fonctionnaires du
gouvernement, dans les deux
occasions. Je pense que le sous-ministre des Richesses naturelles
faisait partie des deux voyages. Il faut se rappeler qu'à ce
moment-là, avant la crise, et même la crise est survenue à
un moment précis, mais elle avait déjà commencé
à se faire sentir depuis le printemps, il y avait plusieurs
intermédiaires dans le monde pétrolier qui offraient du
pétrole à des pays consommateurs. Compte tenu des
intérêts qu'on avait et des avantages qu'on voyait à une
entente possible entre pays producteurs et un pays consommateur, on est
allé voir, et la crise du pétrole a, évidemment,
précipité les choses. Les choses sont un peu tombées
à l'eau, parce que le poids, peut-être du Québec, dans
l'ensemble des pays qui négociaient à ce moment-là, des
ententes privilégiées au moment de la crise, par exemple, comme
la France et l'Allemagne... nous ne faisons pas le poids avec des pays
semblables qui signaient des ententes bilatérales entre l'Iran et
l'Allemagne, par exemple, et l'Iran et la France. Comme M. Cloutier l'a
expliqué par la suite, tout à l'heure, la conjoncture a
évolué et les priorités ont changé.
M. Lessard: Mais, M. le Président, vous me permettrez de
m'étonner, malgré le fait que le ministre actuel soit là
depuis neuf mois et qu'il ne soit pas le responsable, quand même du fait
ça vient de m'être confirmé que le
président de la seule société québécoise
pétrolière d'exploration n'ait pas été partie de
cette négociation. Je vous avoue que ça me surprend, ça
m'étonne. Il m'apparaît que si une société avait les
possibilités de démontrer son sérieux, puis de
négocier, malgré le changement qu'il y a eu suite à la
crise pétrolière, s'il y avait quelqu'un qui était capable
de démontrer le sérieux d'une entreprise qui est SOQUIP,
c'était bien, je pense, le président d'une société
pétrolière.
On me confirme, ce soir, qu'il ne peut pas répondre à mes
questions, parce qu'il n'a jamais été partie de ces
négociations. Ecoutez! C'est la responsabilité du ministre, c'est
la responsabilité du gouvernement, mais je vous avoue que je m'en
étonne énormément.
M. Cournoyer: J'aimerais poser seulement une question au
président de SOQUIP, parce que là, vous allez très loin en
arrière. Vous retournez avant la crise du pétrole.
M. le Président, avez-vous accompagné le premier ministre
en Iran?
M. Cloutier (Bernard): Oui.
M. Cournoyer: Bon! Que faisiez-vous là, comme
président de SOQUIP ou bien comme le petit ami personnel du premier
ministre?
M. Cloutier (Bernard): Non, j'étais associé
à la mission en tant que conseiller en ce qui concerne les questions
d'énergie et de pétrole.
M. Cournoyer: Le voyage du premier ministre en Iran est
récent. Cela date du début de l'année.
J'étais ministre dans ce temps. Moi, je n'ai pas eu le
privilège d'aller avec vous, si je me souviens bien.
M. Cloutier (Bernard): C'était à l'automne
1975.
M. Cournoyer: A l'automne 1975, vous étiez là. En
fait, vous étiez là à titre de président de SOQUIP,
possiblement pour entreprendre des discussions avec le gouvernement de l'Iran
ou les représentants que déléguerait le gouvernement de
l'Iran une fois terminées les discussions avec le premier ministre.
Est-ce que vous étiez assis sur les genoux du premier ministre quand le
premier ministre a rencontré le gars de l'Iran? Le shah?
M. Cloutier (Bernard): Non.
M. Cournoyer: Non, je suis très sérieux. Il
n'était pas là à ce moment-là. Cela ne veut pas
dire que quand les deux niveaux de gouvernement proprement dits, comme
gouvernements, se rencontrent, le bras exécutif n'aura pas son
rôle à jouer si jamais les rencontres du haut produisent un
certain nombre de résultats. Or, dans le cas de l'Arabie Saoudite, les
informations que je possède, et elles ne sont, bien sûr que du
ouï-dire, parce que quelqu'un me l'a dit, étaient strictement
à l'échelon gouvernemental, d'officiers gouvernementaux, dont le
sous-ministre des Richesses naturelles et peut-être d'autres que je ne
connais pas, mais le sous-ministre des Richesses naturelles était
certainement là, et c'était à ces échelons que les
discussions se faisaient. Cela ne veut pas dire que si ces discussions avaient
produit des résultats, le président de SOQUIP n'aurait pas
été effectivement invité à exécuter, comme
bras du gouvernement, dans le domaine pétrolier ou dans le domaine
gazier, le résultat de ces conversations. Dans le cas de l'Iran, est-ce
qu'il y a eu des développements depuis ce temps qui permettent
d'espérer un certain progrès dans le domaine de vos relations
avec certaines sociétés d'Iran?
M. Cloutier (Bernard): En réalité, il n'y avait pas
de dossier pétrolier en tant que tel dans la mission de l'automne 1975.
Je n'y étais que comme conseiller avec aussi l'intention de maintenir et
développer des relations que j'avais déjà dans ce pays et
d'en développer aussi de nouvelles, mais il n'y avait pas d'objectif
pétrolier propre. Il y a eu des conversations sur les
intérêts pétroliers de l'Iran, sur les
intérêts pétroliers énergétiques du
Québec, mais il n'y avait pas de dossier pétrolier ou de
tractations spécifiquement pétrolières entre l'Iran et le
Québec à ce moment-là.
M. Lessard: Donc, à votre perception, lors de votre voyage
en Iran, quand vous avez accompagné M. Bourassa comme son conseiller
dans le secteur pétrolier, il n'y avait pas, comme telle, de
négociation d'approvisionnement entre l'Iran et le Québec. C'est
en vous basant sur ce fait que vous m'aviez affirmé tout à
l'heure que vous n'aviez pas été partie à la
négociation d'ententes d'approvisionnement qui auraient pu avoir
lieu.
M. Cloutier (Bernard): Les négociations auxquelles vous
faisiez référence étaient antérieures à la
crise. Cette mission à laquelle j'ai été associé,
comme je viens de le dire, ne comportait pas de volet spécifiquement
pétrolier, si ce n'est le maintien de relations, de connaissances,
d'échange de points de vue.
M. Assad: M. le Président, si vous permettez... Vous avez
parlé des négociations qu'il y avait eu avec l'Arabie Saoudite.
Ce n'est pas que je mets cela en doute, mais est-ce que c'était une
tentative de négocier ou si c'était une véritable
négociation?
M. Cloutier (Bernard): Comme toutes les négociations,
c'était une première rencontre pour tà-ter le terrain et
voir dans quelle mesure il était possible de développer des
accords communs, des accords bilatéraux en fonction
d'intérêts communs. On n'était pas les seuls à
entrer en négociation avec des pays producteurs, à ce
moment-là. Sentant le vent tourner, il y avait des pays beaucoup plus
importants que nous qui avaient beaucoup plus d'avantages que nous à
offrir et qui ont peut-être mieux réussi que nous. Même
à cela, dans bien des cas, les négociations ont avorté
entre de gros pays consommateurs et des pays producteurs. La meilleure preuve
est évidemment l'embargo qui a frappé certains pays
soupçonnés d'être alliés ou amis d'Israël.
Or...
M. Lessard: A-t-on considéré le Québec comme
tel?
M. Cournoyer: Comme pays?
M. Lessard: Comme pays ami d'Israël?
M. Cournoyer: Oui.
M. Lessard: Par l'intermédiaire du Canada?
M. Cournoyer: Par l'intermédiaire du Québec,
probablement.
M. Lessard: Des Etats-Unis?
M. Cournoyer: Cela dépend... C'est effrayant.
Le Président (M. Séguin): Je pense qu'on
s'éloigne un peu du sujet. Je vous demanderais, messieurs, de
revenir...
M. Cournoyer: Non, il pensait à autre chose en
passant.
Le Président (M. Séguin): Mais avant que la
situation ne se détériore...
M. Cournoyer: Elle ne se détériorera pas. Vous
êtes le défenseur de qui? Des Arabes.
Le Président (M. Séguin): On a compris. M.
Cournoyer: II va falloir que...
M. Lessard: M. le Président, j'ai terminé. Je pense
qu'on a essayé de faire, avec le président de la
Société québécoise d'initiative
pétrolière, un genre de tour d'horizon sur l'ensemble du secteur
pétrolier. Je sais que la commission s'est peut-être
engagée, ce matin, de façon que le président de la
Société québécoise d'initiative
pétrolière soit un peu pris entre l'écorce et l'arbre,
c'est-à-dire entre le ministre, d'un côté, et les membres
de l'Opposition, de l'autre. Maintenant, je pense que, depuis cinq ans, la
Société québécoise d'initiative
pétrolière a fait une percée assez magistrale dans le
secteur pétrolier et bien souvent, lorsque nous disons et que nous avons
l'occasion de critiquer certaines sociétés d'Etat, nous le
faisons à cause des mauvaises expériences.
Il arrive souvent à l'Assemblée nationale, lorsque nous
avons à parler de ces sociétés d'Etat, que ce soit SOQUEM,
REXFOR, SOQUIP ou que ce soit la Société générale
de financement, nous essayons de démontrer que les
sociétés d'Etat sont, dans l'ensemble, des sociétés
non rentables. Je pense que nous avons l'expérience avec SOQUIP,
malgré que je souhaiterais, quant à moi un peu dans le
même sens que le président l'indiquait tout à l'heure
l'expansion encore plus importante de SOQUIP vers la distribution, le
raffinage du secteur pétrolier. Il reste quand même que nous avons
là une société qui a démontré un dynamisme
depuis cinq ans, et c'est un peu le même cas pour SOQUEM.
Le problème des sociétés d'Etat, en fait, à
savoir qu'on parle bien souvent du certain fonctionnarisme qui créerait
un manque de dynamisme dans ces sociétés, je pense que c'est plus
ou moins vrai, que ce soit une compagnie d'Etat ou une société
privée, le problème de la technostructure ou de la technocratie
existe, parce que. dans l'entreprise privée comme dans les
sociétés d'Etat, il y a des distinctions entre les
propriétaires de capitaux et les administrateurs. Que ce soit dans
l'entreprise privée ou dans les sociétés d'Etat, on vit
exactement le même problème et je pense que nous sommes capables
on a de plus en plus d'exemple de démontrer que nos
sociétés d'Etat sont aussi dynamiques, qu'elles fonctionnent
très bien.
M. le Président, nous avons souhaité que le
président de cette société vienne témoigner devant
la commission parlementaire justement pour constater un peu ce fait. Parce que
ce n'est pas un secteur facile, vous l'aviez indiqué ce matin. Le
domaine pétrolier, comme le domaine minier, est un secteur où les
luttes sont considérablement intenses, non seulement avec
PétroCan, qui s'en vient sur le marché, mais avec les sept
majeures qui sont déjà installées et établies sur
le marché. On a vue la Société québécoise
d'initiative pétrolière et on se demandait où cela irait.
Quant à moi. je suis satisfait. Après cinq ans, c'est important,
un peu comme SOQUEM, qui a réussi à prouver qu'une
découverte... Parce que la moyenne des découvertes, dans le
secteur minier, est de dix ans, et déjà SOQUEM, bien avant que
les dix ans ne soient écoulés, a fait des découvertes, de
même que SOQUIP. Il y a quand même deux dé-
couvertes qui peuvent être assez importantes dans les secteur du
gaz naturel.
On vous rermercie de vous êtes déplacés. Maintenant,
on n'a pas à vous remercier parce que vous devez le faire lorsqu'on vous
le demande par l'intermédiaire du ministre. On vous remercie quand
même des réponses que vous avez données et surtout, quant
à nous, peut-être qu'on veut aller plus vite et que le ministre
est obligé de faire plus attention, de retarder en même temps
votre enthousiasme, mais l'important, c'est qu'il peut se développer un
centre.
Quant à moi, je souhaite que le mandat de SOQUIP puisse
être rempli dans un bref délai, non seulement son premier mandat,
à savoir, faire de l'exploration, mais son deuxième mandat,
à savoir, faire du raffinage et de la distribution, afin qu'elle puisse
s'intégrer dans ce secteur, créer un secteur témoin et
même concurrencer selon la même égalité
les sept compagnies majeures qui, actuellement, constituent, qu'on le veuille
ou non, un cartel qu'il faudra tôt ou tard toucher.
Je vous remercie, M. le Président.
M. Cloutier (Bernard): M. le Président, je vais profiter
de l'occasion, au nom de mes collègues et amis qui constituent
l'équipe qu'est SOQUIP, pour remercier le député de
Saguenay de ses aimables paroles et aussi rendre leur dû à ses
collègues et amis qui sont revenus au Québec, pour la plupart,
des Québécois qui ont fait leur carrière à
l'étranger, animés d'une volonté et d'une certaine foi,
pour structurer, organiser une compagnie qui, après cinq ans, figure
bien dans le monde pétrolier canadien, tant au point de vue de sa
réputation technique que de sa réputation éthique. C'est
en leur nom que je vous remercie des paroles que vous avez prononcées,
elles s'adressent à eux.
M. Assad: M. le Président, si vous me permettez, juste une
réflexion. Lorsque le député de Saguenay a parlé
des compagnies d'Etat, ou de l'étatisation, je crois qu'il a trop
simplifié ce problème, dans le sens que je ne crois pas que des
compagnies de la couronne soient aussi efficaces que des compagnies
privées. On ne peut pas en faire le débat ce soir, mais c'est
assez difficile à avaler.
Je dis que, dans le cas de SOQUIP, c'est peut-être une exception,
mais ce n'est certainement pas la règle.
M. Cloutier (Bernard): Vous me permettrez, à ce
moment-là, de vous répondre spécifiquement. Je viens de
rendre hommage au groupe d'individus qui ont formé l'équipe. Ce
sont des gens qui viennent de l'industrie, qui ont pris leur expérience
dans l'industrie et qui travaillent chez nous, avec la même psychologie,
les mêmes motivations, la même énergie, la même
éthique, la même conscience professionnelle que s'ils
travaillaient pour n'importe quelle compagnie privée. Il n'y a aucune
raison pour que, systématiquement, l'on revienne sur ce mythe de
l'inefficacité, à priori, de l'entreprise d'Etat.
M. Cournoyer: Je ne veux pas avoir de chi- cane entre M. Cloutier
et mon député Assad, il n'y en a pas et il n'y en aura pas non
plus. Dans le cas de la Société québécoise
d'initiative pétrolière, il a été clairement
indiqué par le président, dans le courant de la journée,
que cette société n'avait eu aucun privilège et qu'elle se
comportait totalement comme une entreprise privée, c'est-à-dire
que, même si l'actionnaire principal et unique est l'Etat
québécois, l'attitude de la compagnie, face à la
concurrence, est qu'elle ne veut pas de privilèges que les autres n'ont
pas. Elle veut être traitée exactement comme les autres compagnies
et que les règles du jeu, qui sont applicables à SOQUIP, soient
aussi applicables aux autres, et les règles, qui sont applicables aux
autres, soient applicables à SOQUIP, d'une façon égale.
C'est ce que j'ai compris cet après-midi.
M. Cloutier (Bernard): Si vous le permettez, M. le ministre,
j'ajouterais qu'une entreprise d'Etat a le devoir de poursuivre les objectifs
de son actionnaire, tout en jouant les règles du jeu. C'est une
situation fort délicate qui demande beaucoup de nuance.
M. Cournoyer: II y a une chose que je veux également
mentionner, pour le bénéfice de M. Assad. Cette compagnie SOQUIP
est ce qu'elle est, parce qu'elle est en concurrence avec l'entreprise
privée. Si SOQUIP était seule pour le développement
pétrolier, dans la province de Québec ou ailleurs, si elle
n'avait pas à faire face à une concurrence de l'entreprise
privée, ce ne serait pas cette SOQUIP que nous aurions, ce serait une
autre SOQUIP.
Je pense bien que, lorsque le député Assad parle, il parle
de ces entreprises d'Etat qui sont dans une situation monopolistique, qui ne
souffrent d'aucune forme de comparaison, qui peuvent faire ce qu'elles veulent
et, à ce moment-là, peuvent atteindre le degré
d'inefficacité que l'absence de compétition peut permettre
à une société d'atteindre, justement, parce qu'il n'y a
pas de concurrence.
Je pense bien que SOQUIP et SOQUEM et je les défendrai
tout le temps sont deux sociétés d'Etat qui sont dans le
même bateau que les autres sociétés privées dans la
province de Québec et au Canada, et se conduisent comme telles. Le seul
privilège qu'elles ont, c'est d'être la propriété
d'un gouvernement.
Quant au reste, elles ont les mêmes obligations que les autres et
c'est pour cela qu'elles réussissent.
M. Lessard: Puis-je vous indiquer que le monopole existe non
seulement pour certaines sociétés d'Etat, je ne veux pas engager
une discussion idéologique. Mais Québec Téléphone,
chez nous, a le monopole, et Bell Canada, chez nous, a le monopole. Ce sont
bien souvent exactement les mêmes conséquences, que ce soient des
compagnies privées, que ce soient des compagnies d'Etat. C'est
certain...
M. Cournoyer: J'espère que le député de
Saguenay est plus intelligent que cela, qu'il n'ira pas
comparer un service essentiellement public, qui ne peut pas être
partagé par bien du monde, sur le même réseau de
téléphone ou le même réseau
d'électricité, avec une compagnie qui est en compétition
pour vendre du produit pétrolier que tu peux acheter ailleurs. C'est
cela que je veux dire.
M. Lessard: Ce que je veux vous indiquer, c'est qu'on est aussi
mal pris qu'en Europe. Avec Québec Téléphone, cela prend
trois mois avant d'avoir nos appareils de téléphone, nos
installations et ainsi de suite.
M. Cournoyer: Ce n'est pas une comparaison. Québec
Téléphone n'est en compétition avec personne, que ce soit
du domaine privé ou public.
M. Lessard: C'est cela que je vous dis.
M. Cournoyer: Je vous l'ai dit tantôt; c'est la même
chose. Vous dites la même chose que moi, pour une fois. Traduisez cela
comme il le faut.
M. Lessard: Que ce soit une propriété privée
ou une propriété publique...
M. Cournoyer: C'est du pareil au même. M. Lessard:
C'est du pareil au même.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre! A l'ordre,
messieurs!
M. Cournoyer: M. le Président, cet après-midi, il y
a eu une question et il y a eu une promesse qui a été faite.
C'est la question de distribution du prix d'un baril de pétrole, la
tarte!
Je demanderais à M. Turgeon, qui est responsable de ce secteur
particulier chez nous de nous indiquer, pour prendre des notes, mais surtout
pour les dossiers, pour prouver que nous avons bien fait ce qu'on fait, comment
arrive un baril de pétrole ou un gallon d'essence, chez nous, quand il
est rendu chez nous, qu'on l'achète, ce qu'il y a dedans.
Au départ, je dois dire que l'information qui est
accumulée ici provient de différentes sources. Il y a l'aspect de
notre importation, au tout départ, il y a le pétrole brut. Il y a
le coût du brut qui, présentement, à Montréal, est
le même que celui à Toronto, de $8.80, soit $0.2513 le gallon.
Là-dessus, il y a la part au producteur, qui est de $0.0511 le
gallon. Le coût de production du pétrole brut est de
$0.0186...
M. Lessard: Ces chiffres viennent de différentes sources,
de compagnies privées...
M. Cournoyer: II y en a des gouvernements, il y en a qui font
suite à des analyses de consultants, etc.
M. Lessard: Bien! D'accord!
M. Cournoyer: II y en a même une qui est une analyse de
l'Alberta Department of Energy Resources.
Est-ce que, dans la part du producteur, que vous dites de $0.0511, vous
mettez le coût de production ou si c'est un coût additionnel? Non,
$0.0511, c'est pour le propriétaire.
Ce n'est pas nécessairement un profit, mais c'est sa part du
revenu. Il y a $0.0186 soit le coût moyen de production d'un gallon de
pétrole brut en Alberta. Il y a la part de la province productrice, en
l'occurrence, disons que c'est l'Alberta, les redevances, si vous voulez, de
$0.088. L'Alberta prélève aussi un impôt sur le revenu des
compagnies pétrolières, qui est de $0.0134, pour un revenu total
à la province de $0.1022 le gallon.
Il y a $0.0565 que prélève le fédéral, en
termes de taxe-revenu, ce qui fait un total de $0.2284. A cela, il faut ajouter
le coût du transport. Ici, la plus grosse partie, c'est International
Pipe Lines qui la prend. Elle aussi est imposée, mais on n'a pas cette
partie là-dedans. Ce coût représente $0.0228 le gallon,
pour un total de $0.2513 le gallon, à partir du pétrole brut.
Le brut est raffiné. Il faut parler de l'essence à moteur
régulière. Au raffinage, il y a une réalisation de $0.088.
Cette réalisation comprend les salaires, si vous voulez, les taxes de
propriété, les différents matériaux, les produits
chimiques dont on a besoin pour la production, la récupération du
capital, l'amortissement.
M. Lessard: Je m'excuse, seulement pour ne pas se perdre, j'aime
autant poser ma question tout de suite, dans la première partie des
$0.2513, pour le brut, vous aviez parlé d'un raffinage, si je ne
m'abuse?
M. Cournoyer: Non, ce n'était pas du raffinage.
M. Lessard: Vous avez parlé du coût au producteur,
$0.0511. Pour le deuxième, qu'est-ce que vous aviez donné?
M. Cournoyer: C'est le coût de production. $0.186...
M. Lessard: $0.186. D'accord, c'est le coût de production.
Cela va.
M. Cournoyer: II y a le raffinage et, après cela...
Une Voix: Le transport.
M. Cournoyer: C'est $0.0088 pour le raffinage. Maintenant,
l'aspect du marketing, c'est-à-dire la distribution des produits,
incluant la mise en marché, $0.06. Le fédéral a une taxe
de vente de $0.039 le gallon; la taxe d'accise, de $0.10, ce qui fait au total,
pour ces deux taxes, $0.139. Si on ajoute à cela la part du revenu du
fédéral au niveau du brut, ce qui fait un montant total de $0.195
le gallon pour le fédéral. La taxe provinciale est de $0.19 et la
marge du détaillant est d'environ $0.082 pour un total de $0.81.
M. Lessard: C'est le prix moyen.
M. Cournoyer: C'est le prix moyen au Québec.
M. Lessard: Vous ne faites pas de différence pour le jaune
ou le rouge, vous mettez un prix...
M. Cournoyer: Non, pour le rouge, ce serait supérieur
à cela, de $0.02 ou $0.03.
M. Lessard: Ce serait supérieur. La moyenne au
Québec est...
M. Cournoyer: Présentement, la moyenne au Québec
est de $0.81.
M. Lessard: Comment se fait-il qu'il y ait autant de
différence entre certaines régions du Québec au point de
vue prix? L'Abitibi-Côte-Nord paie le rouge $0.92.
M. Cournoyer: Le gros de la différence, d'abord, il y
a...
M. Lessard: Le transport? Elle entre chez nous avant d'entrer
chez vous.
M. Cournoyer: Au niveau du transport, il y a un coût
additionnel.
Le Président (M. Séguin): Excusez-moi. Vous pourrez
reprendre tout de suite après. Je voudrais faire l'annonce suivante,
parce que nous pouvons être appelés je ne sais pas si c'est pour
un vote ou pour un quorum en Chambre. Cela peut aussi être un vote sur le
discours du budget. De toute façon, voici ce que je veux dire, demain
matin, à dix heures, la même commission siégera à
nouveau, mais pour l'étude des crédits du ministère des
Terres et Forêts. Donc, avis aux intéressés, ici, 10
heures, demain, mercredi. C'est tout. Excusez-moi, M. Turgeon. Vous pouvez
continuer.
M. Cournoyer: D'abord, il y a un élément dans le
coût, et c'est celui du transport. Maintenant, le coût entre
Montréal et la Basse-Côte-Nord ou la Côte-Nord, je devrais
dire Sept-lles, selon les renseignements que nous avons en main, est de $0.02
le gallon. La différence...
M. Lessard: $0.02 de différence.
M. Cournoyer: La différence est au niveau du
détaillant. Le détaillant fait plus d'argent.
M. Lessard: Dans le contrôle des produits
pétroliers, vous n'avez pas...
M. Cournoyer: Pourquoi empêcherait-on le détaillant
de faire plus d'argent dans le bout là-bas, si c'est le
détaillant? En fait, si je vais à Sept-lles, est-ce que le
travailleur ne fait pas plus d'argent que le travailleur de Montréal ou
le travailleur de Gaspé? Il y a une question de capacité, dans le
coin. Pourquoi empêcherais-je le détaillant en question dont le
seul argent vient de ce qu'il fait avec le gallon? Si la compagnie
maîtresse ne fait pas plus d'argent, pourquoi empêcherais-je le
détaillant de vivre au diapason de ce qui se passe dans le bout de
Sept-lles? Je ne dirai pas la même chose dans le cas de l'Abitibi. Est-ce
que je devrais multiplier le nombre de détaillants pour permettre aux
gens d'ailleurs d'avoir un prix identique au leur?
M. Lessard: D'abord, essayez de contrôler un peu le nombre
de détaillants.
M. Cournoyer: Bien, si je le contrôlais, ce serait cent
fois pire.
M. Lessard: Oui!
M. Cournoyer: Bien oui! C'est ce qu'ils ont fait.
M. Lessard: S'ils n'ont pas de rentabilité...
M. Cournoyer: Bien oui, cela se comprend. S'il y a quelque chose
dans...
M. Lessard: M. le Président, là on pourrait
s'engager sur une discussion, et j'en avais parlé avec l'ex-ministre des
Richesses naturelles. On en est rendu avec deux Fina à 1500 pieds l'une
de l'autre et trois Shell à 3000 pieds et, même parfois, moins que
cela, à 300 pieds. On a des faillites et les compagnies déduisent
cela de leur impôt, parce que c'est de l'investissement. C'est
ridicule.
M. Cournoyer: On peut vous répondre sur cela, sur cette
histoire-là. Quel est le jeu du marché là-dedans? M.
Turgeon, combien de stations-service ont été fermées l'an
passé?
L'an dernier, chez nous, précisément, M. le ministre, je
ne sais pas, je n'ai pas le chiffre avec moi, c'est au-dessus de 200.
M. Lessard: 200 qui ont été fermées sur
combien?
M. Cournoyer: Dans le moment on a je me fie à ma
mémoire 8600 débits d'essence de tout type.
M. Lessard: Je voudrais savoir combien "vivotent" aussi et...
M. Cournoyer: On s'intéresse graduellement à ces
questions.
M. Lessard: Oui, je l'espère. De toute façon, M. le
Président, je pense bien que ce n'est pas l'endroit pour en discuter ce
soir.
M. Perreault: A l'étude des crédits de l'an
prochain.
M. Lessard: C'est cela. De toute façon, c'est une
discussion qu'il va falloir avoir tôt ou tard. Merci beaucoup.
Le Président (M. Séguin): Messieurs, la commission
ajourne ses travaux sine die, ce qui veut dire demain, 10 heures.
(Fin de la séance à 21 h 41)