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Version finale

41st Legislature, 1st Session
(May 20, 2014 au August 23, 2018)

Tuesday, February 20, 2018 - Vol. 44 N° 180

Clause-by-clause consideration of Bill 157, An Act to constitute the Société québécoise du cannabis, to enact the Cannabis Regulation Act and to amend various highway safety-related provisions


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Table des matières

Étude détaillée (suite)

Intervenants

M. Richard Merlini, président

Mme Lucie Charlebois

M. Sylvain Pagé

M. Simon Jolin-Barrette 

Mme Martine Ouellet

Mme Lise Lavallée

M. Marc Bourcier

M. Marc H. Plante

M. Serge Simard

M. Germain Chevarie 

Mme Caroline Simard

M. Yves St-Denis   

*          M. Gabriel Roy, ministère des Finances

*          M. Marc Grandisson, idem

*          M. Jean-François Lord, idem

*          Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats

(Quinze heures huit minutes)

Le Président (M. Merlini) : À l'ordre, s'il vous plaît! Ayant constaté le quorum, je déclare donc la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je demande à toutes les personnes présentes dans la salle du Conseil législatif de bien vouloir éteindre toute sonnerie de tout appareil électronique.

La commission est réunie cet après-midi afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 157, Loi constituant la Société québécoise du cannabis, édictant la Loi encadrant le cannabis et modifiant diverses dispositions en matière de sécurité routière.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements cet après-midi?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. Mme Vallières (Richmond) sera remplacée par M. H. Plante (Maskinongé); M. Turcotte (Saint-Jean), par M. Bourcier (Saint-Jérôme); et M. Paradis (Lévis), par M. Jolin-Barrette (Borduas).

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, Mme la secrétaire.

Étude détaillée (suite)

Lors de l'ajournement de nos travaux, jeudi dernier, nous procédions à l'étude d'un sous-amendement proposé par M. le député de Labelle à un amendement de la ministre à l'article 23.2 introduit par l'article 5. M. le député de Labelle, vous avez d'autres commentaires. Et, en passant, M. le député, juste pour le bien du débat, nous en étions rendus... le sous-amendement, il vous restait 12 min 45 s.

M. Pagé : Oui. Je vous remercie, M. le Président. Alors, effectivement, on a laissé nos travaux jeudi, jeudi, 18 heures, c'est bien ça, oui? À un moment donné, on a de la difficulté à se retrouver là-dedans. Effectivement, nous étions sur l'amendement sur le «doit» par rapport au «peut», donc un sous-amendement que l'on proposait à l'amendement déposé par la ministre. Attendez que je le retrouve. Est-ce que je pourrais, M. le Président...

Bon, d'une part, je veux remercier la ministre de nous avoir fourni... en arrivant, j'ai vu qu'on avait déjà de nouvelles feuilles de travail, dans le cahier de travail. J'imagine que ce qui vient de nous être fourni, ça remplace des feuilles que nous avions dans le cahier de travail, alors ça complète. Alors, je la remercie.

Mme Charlebois : ...

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre, oui.

• (15 h 10) •

Mme Charlebois : ...sur son temps, c'est juste pour l'informer. En fait, vous savez, il y avait un article où il y avait eu une erreur la semaine dernière. Il y en a un déjà que c'est la nouvelle version, il manquait des mots, je ne me souviens plus trop. Et, pour les autres aussi, il y a des petites coquilles. Alors, ce n'est pas des nouveaux amendements, c'est vraiment juste des corrections de sémantique, là.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre, pour cette précision. M. le député de Labelle.

M. Pagé : Oui. Et si c'est possible, peut-être, d'en avoir une copie supplémentaire pour notre recherchiste, s'il vous plaît.

Mme Charlebois : Bien sûr.

M. Pagé : Puis, tant qu'à être dans des petits éclaircissements, je vous avais fait part la semaine dernière qu'il y avait une première série d'amendements qui nous avait été proposée et qui comprenait... et une deuxième série par la suite. Et, à l'amendement... — attendez que je le retrouve, j'avais deux copies différentes, donc là je ne la retrouve pas. Ah! je pense qu'elle est ici — je me demandais quelle version qu'il fallait prendre, et c'était sur l'article 12(84.1). Alors, j'ai posé la question la semaine dernière, si jamais les gens peuvent nous informer... Parce que la première version était plus courte, la deuxième version qu'on nous a fournie, pour le même article... la version un peu plus longue. Mais, bon...

Mme Charlebois : Je me souviens de ça, oui, vous avez raison. Mais on n'est pas rendus là, mais, oui, il y a des gens qui vont...

M. Pagé : On n'est pas rendus là, mais juste pour, éventuellement, savoir, là, exactement sur quel pied danser.

Bon, pour revenir au «doit» par rapport au «peut»... Je veux juste faire un petit mot, M. le Président, avant de commencer, pour la poursuite de nos travaux. Je vais vous dire, j'étais malheureux en fin de semaine, je vais vous expliquer pourquoi. On a fait un débat la semaine dernière justement sur différentes façons de voir les choses, et, à un moment donné, en tentant d'expliquer le plus correctement possible pour quelle raison on souhaitait, entre autres, aller plus loin quant à, je dirais, l'endroit où la SQC va s'approvisionner... et là il y a un débat qui s'est enclenché avec certains collègues, et notamment avec le collègue du comté de Dubuc, et j'ai réagi de façon très prompte. Et je tiens à vous dire que je regrette. Je regrette parce que, les travaux que nous avons à faire ici, je pense qu'ils doivent se faire dans le respect de tous et chacun, et surtout par rapport à ce que nous avons à faire.

Parce que c'est un grand défi que nous avons. Et je reconnais que ça va être long. Ça va être long, mais nous avons la volonté d'atteindre l'objectif d'adopter cette loi en temps et lieu. Mais on veut faire notre travail le plus correctement possible. Et, pour les gens qui nous écoutent, il faut savoir... Puis les collègues... évidemment, peut-être, ceux qui ont toujours été au gouvernement ne le savent pas aussi bien que nous, mais la seule arme que nous avons afin de négocier quoi que ce soit, c'est d'argumenter, de prendre le temps d'argumenter le plus correctement possible. Et je veux le faire le plus correctement possible, je veux le faire en toute sérénité, et je veux, dans le temps, que nous soyons tous très à l'aise à continuer d'argumenter et d'utiliser notre temps, par pour faire du temps, je tiens à la répéter. Je veux que nous adoptions la loi en temps et lieu, mais la meilleure loi possible. Et je sais que mes collègues qui sont du côté de cette table partagent aussi cette opinion, on s'en est parlé à quelques occasions. Il n'y a personne ici qui souhaite faire du temps pour faire du temps.

Alors, bon, j'ai eu une réaction la semaine dernière, et ce n'est pas dans mon habitude, j'étais malheureux, je vous le dis, alors c'est la raison pour laquelle je tenais à vous le dire. Parce que je ne veux pas qu'il y ait d'ambiguïté dans l'esprit de personne autour de cette table, même si on passe du temps à argumenter, c'est parce qu'on souhaite convaincre le gouvernement et parce que nous croyons qu'on est capables de bonifier le projet de loi. Maintenant, avec nos échanges, bien, on arrivera au meilleur compromis possible, mais vous savez comme moi, M. le Président, que notre seule possibilité pour faire... pas fléchir, mais que le gouvernement accepte d'aller un peu plus loin dans son projet de loi, même si je reconnais qu'entre le départ et aujourd'hui il y a quand même des bouts de chemin importants qui ont été faits, bien, c'est d'argumenter, et c'est ce que nous faisons, et nous voulons le faire le plus correctement possible.

Cela dit, je prends l'engagement de continuer à essayer de faire nos débats dans le plus grand respect de tous et chacun, et je suis désolé d'avoir eu une réaction par rapport au député de Dubuc la semaine dernière.

Le Président (M. Merlini) : M. le député, vous allez me permettre une observation. J'apprécie énormément votre propos parce que c'est quelque chose que j'avais soulevé au début. Et il ne faudrait pas voir... Je n'aime pas utiliser le terme que la seule arme que l'opposition, que les partis de l'opposition ont, c'est le temps, ce n'est pas une arme. Je préfère d'utiliser le temps nécessaire pour faire les débats. Et c'est important de prendre le temps nécessaire pour faire ces débats, et d'argumenter, et d'arriver au meilleur compromis, comme vous le dites, c'est préférable prendre le temps nécessaire que d'utiliser des fusils et des bombes comme ça se fait ailleurs dans le monde. Alors, je ne vois pas le temps que vous prenez, ni aucun autre parlementaire ici, autour de cette table... je ne vois pas ça comme une arme, mais plutôt l'expression de notre démocratie qui est saine, et que ce que je disais, mon souhait, c'est que les Québécoises et les Québécois qui nous regardent voient notre travail, apprécient notre travail et comprennent l'importance que nous y accordons de le faire, comme vous le dites, de la façon la plus respectueuse et avec grande civilité.

Alors, sur ce, je vous redonne la parole pour votre sous-amendement.

M. Pagé : Merci, M. le Président. En fait, j'utilisais l'expression qu'on utilise assez souvent en disant : L'opposition, la seule arme qu'elle a pour réussir à convaincre le gouvernement, c'est de faire du temps, pas pour faire du temps, mais de faire du temps à tenter, par toutes sortes de moyens, d'essayer de convaincre le gouvernement qu'on peut améliorer... mais qu'on peut améliorer, mais, si le gouvernement trouve qu'on n'améliore pas avec nos propositions, bien, effectivement, ils pourront en décider autrement. Mais notre démocratie est faite de telle sorte qu'ils ont une majorité parlementaire, et ils peuvent, au final, adopter ce qu'ils veulent, indépendamment de nos arguments. Mais, quand nous sommes presque unanimes de notre côté qu'il faille aller dans une certaine direction, bien, on se dit : Bien, continuons d'argumenter, peut-être qu'à un moment donné on arrivera à un compromis.

D'ailleurs, d'ailleurs, il y a déjà eu une avancée sur l'article 23.2 de l'article 5, où la ministre nous a proposé de faire un bout de chemin qui allait dans le sens de ce que nous souhaitions. Sauf que, le bout de chemin qui est fait, l'amendement se lisait ainsi, en disant : «L'achat de cannabis par la filiale peut être effectué prioritairement auprès de producteurs situés sur le territoire du Québec», et ainsi de suite. On comprend que le «peut», ce que nous disions, c'est que ce n'était pas une obligation, mais le «doit» nous permettait d'aller plus loin. Alors, on a argumenté beaucoup la semaine dernière, on ne reprendra pas tout le débat.

Alors, moi, j'aimerais savoir de la part de la ministre, maintenant, est-ce que la fin de semaine lui a permis, je dirais, de regarder, avec les gens autour d'elle, et de voir s'il est possible d'aller un petit peu plus loin avec le «doit» par rapport au «peut», et c'est le sous-amendement que l'on proposait à son amendement.

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Alors, M. le Président, effectivement, le projet de loi n° 157 a occupé beaucoup de mes pensées en fin de semaine, j'ai fait beaucoup de lecture. Je me suis à nouveau renseignée et je suis désolée de dire au député de Labelle que, non, juridiquement, nous considérons toujours que c'est mieux le «peut» et qu'en vertu des accords commerciaux, en vertu aussi de l'accessibilité au produit, l'aspect concurrentiel, comme on a expliqué la semaine dernière, malheureusement, je dois lui dire que je considère que le «peut» est plus approprié que le «doit».

Et ce n'est pas pour le contrarier, tout au contraire, je comprends les débats. Et qu'il soit sans crainte, je n'avais pas de mauvaises pensées à l'endroit du député de Labelle, je n'ai pas vu... Ça nous arrive d'être passionnés, M. le Président, et c'est humain, ça me rassure de savoir qu'il est humain autant que moi. On est tous humains sur cette terre, puis il arrive parfois qu'on est très passionnés, enflammés dans nos propos. Et je ne vous en tiens pas rigueur, au contraire, quand l'inverse arrivera, parce que ça peut arriver, bien, on fera de même, je m'excuserai à mon tour.

Mais tout ça pour revenir au «peut» et au «doit». Après, vraiment, là, avoir examiné toutes les facettes de cela avec les gens qui m'accompagnent, de différents ministères, nous devons considérer, en vertu des accords, et tout ça, que le «peut» doit demeurer.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. M. le député.

M. Pagé : Bien, compte tenu qu'on a argumenté, je pense, assez longtemps jeudi dernier, compte tenu aussi que la ministre nous dit qu'elle a pesé les pour et les contre, à ce moment-ci, moi, je n'irai pas plus loin dans la discussion, compte tenu qu'on a déjà fait le débat assez largement jeudi dernier. Je ne sais pas si... Alors, on pourra disposer du sous-amendement, à moins qu'on soit...

Le Président (M. Merlini) : Est-ce que j'ai d'autres interventions sur le sous-amendement de M. le député de Labelle? M. le député de Borduas.

• (15 h 20) •

M. Jolin-Barrette : Bonjour, M. le Président. Bon mardi. Sur le sous-amendement du député de Labelle, on l'a soulevé dès le départ, là, sur le «peut» et le «doit», je comprends que la ministre a fait des vérifications en fin de semaine, mais, relativement aux explications que nous avons eues la semaine dernière, moi, ça ne m'a pas du tout convaincu, M. le Président. Je comprends qu'il y a eu une négociation d'un texte d'un accord commercial interprovincial. Par contre, il n'y a rien avec le libellé actuel qui lie les mains du gouvernement du Québec de ne pas mettre un «doit», au lieu d'un «peut» dans sa législation. C'est un choix gouvernemental, il n'en revient qu'au gouvernement... Il va falloir que le gouvernement vive avec les conséquences de faire ce choix-là. Et je ne peux que déplorer le choix du gouvernement de ne pas favoriser les producteurs québécois. Il a une possibilité de le faire. Il n'y a aucun accord commercial qui lie présentement le gouvernement du Québec en lien avec le cannabis. Ils se sont engagés à en discuter éventuellement. Donc, ce n'est pas une position liante.

Alors, si, sur tous les textes de traités où est-ce qu'il y a des énoncés d'intention, ça n'a pas de valeur juridique formelle actuellement, alors la ministre a la latitude et son gouvernement a la latitude de faire des choix qui vont avoir un impact sur la société. Donc, dans le fond, la légalisation du cannabis, c'est une modification importante de la relation qu'on a avec la drogue, avec le cannabis. C'est un choix fédéral, mais encore faut-il que le gouvernement provincial réalise que les retombées économiques devraient s'appliquer dans toutes les régions du Québec.

Alors, le «peut» n'est pas suffisant, c'est ce que je dis à la ministre. Et je trouve ça dommage qu'elle n'indique pas le «doit», parce que les arguments qui nous sont soulevés, c'est de dire : Bien, éventuellement, on va renégocier l'accord commercial. Et on devrait se soucier des producteurs québécois, dans un premier temps, M. le Président, à ce niveau-là.

Alors, ça va être mes commentaires pour le sous-amendement.

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, M. le député de Borduas. Est-ce que j'ai d'autres commentaires sur le sous-amendement de M. le député de Labelle? Mme la ministre.

Mme Charlebois : Honnêtement, juste un petit peu rassurer le député de Borduas, avec le «peut», on peut aussi favoriser l'achat de produits québécois. Alors, je rassure les Québécois : Nous allons favoriser l'achat de produits québécois au niveau du cannabis. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, Mme la ministre. M. le député de Borduas, une intervention?

M. Jolin-Barrette : Bien, écoutez, M. le Président, le libellé de la ministre, c'est des voeux pieux. «Peut être effectué», c'est une possibilité, comme c'est une possibilité que le P.D.G. de la Société québécoise du cannabis ou de la SAQ, il ne le fasse pas. Il n'y a rien qui va l'obliger. Ça lui dit, là... Quand tu dis à quelqu'un : Tu peux le faire, bien, c'est à sa discrétion. Il n'y a aucune obligation. Dans le fond, lui, il va regarder la loi, il va dire : Bien, qu'est-ce que je fais? Oui, je pourrais le faire, mais, si je ne le fais pas, y a-tu des conséquences? J'ai-tu une obligation de le faire? La réponse, c'est non.

Alors, avec le libellé actuel, ça laisse énormément de latitude. On comprend que la ministre souhaite aller dans cette direction-là, d'avoir le plus de latitude possible, ne pas lier le P.D.G. de la SAQ, ne pas lier le P.D.G. de la Société québécoise du cannabis. C'est un choix assumé par le gouvernement libéral de ne pas vouloir favoriser les producteurs québécois, de favoriser l'industrie québécoise. Alors, si jamais, au cours des prochaines années, il n'y a pas ce développement-là sur le territoire québécois, il n'y a pas de retombées économiques sur le territoire québécois, bien, M. le Président, on en aura discuté en commission parlementaire, on pourra retourner dans les débats parlementaires puis on pourra voir très clairement que le gouvernement a fait un choix de ne pas favoriser les producteurs québécois.

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Borduas. Est-ce que j'ai d'autres interventions sur la proposition de sous-amendement? Mme la députée de Vachon.

Mme Ouellet : Oui, je voudrais, en termes d'interprétation, que la ministre puisse peut-être nous... Puis c'est en lien un peu avec le «peut» et le «doit» aussi, là, avec le quatrième point, là, de 23.2 : «Autoriser une personne à faire le transport, incluant la livraison, et l'entreposage du cannabis qu'elle vend, pour son compte.» J'aimerais qu'elle nous explique cet alinéa-là parce qu'on a eu plusieurs questions en commission parlementaire, particulièrement des syndicats, concernant cet élément-là, et je voulais savoir c'était quoi, son interprétation. Qu'est-ce que ça veut dire, cette phrase-là, avec un «peut» et qu'est-ce que ça voudrait dire avec un «doit»?

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : En fait, M. le Président, le «peut» et le «doit» s'appliquent plutôt à l'achat. Et je veux juste dire à la députée qu'on est sur l'amendement... le sous-amendement en ce moment, et ça touche le premier... on appelle ça alinéa, ça touche, en fait, le premier alinéa, le «peut» et le «doit». Alors, le quatrième point, au transport, on pourra y arriver quand on va étudier l'article 23.2 dans son entièreté, si vous voulez bien.

Le Président (M. Merlini) : Tout à fait. Mme la députée de Vachon, sur le sous-amendement.

Mme Ouellet : Je comprends qu'effectivement, ce que répond la ministre, le «peut» s'applique seulement, là, qu'à l'amendement qu'elle a formulé concernant, là, de favoriser majoritairement auprès des producteurs québécois. Et donc, en mettant seulement qu'un «peut», ça fait très faible, parce que, premièrement, il y a le «majoritairement» aussi. Je ne comprends même pas, moi, qu'ici on ne discute pas actuellement que ce ne soit pas 100 % des fournisseurs québécois. Les producteurs de serre du Québec sont venus nous dire qu'ils étaient capables de fournir complètement le marché s'ils avaient un avis au mois de mars. On n'est même pas encore rendu le mois de mars. Donc, je ne comprends pas qu'ici, au Québec, dans un nouveau marché comme celui-là, on ne favorise pas que ça soit produit 100 % au Québec. Je pense qu'on a tout à fait la capacité de produire toutes les diversités nécessaires au Québec puis que nos producteurs de serre sont tout à fait capables de le faire.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la députée. Commentaires, Mme la ministre? Non? Ça va? Est-ce que j'ai d'autres interventions sur le sous-amendement? M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Écoutez, M. le Président, je vais proposer une ultime suggestion à la ministre. Dans le fond, dans son amendement, c'est : «Doit être effectué». Est-ce que la ministre serait à l'aise, M. le Président, d'avoir «doit favoriser» au lieu de «doit être effectué»... au lieu de «peut être effectué»?

(Consultation)

Le Président (M. Merlini) : Souhaitez-vous une suspension, Mme la ministre?

Nous allons suspendre quelques instants.

(Suspension de la séance à 15 h 27)

(Reprise à 15 h 28)

Le Président (M. Merlini) : Nous reprenons donc nos travaux. Mme la ministre a fait des vérifications auprès de ses groupes... ses légistes. Mme la ministre, à vous la parole.

Mme Charlebois : Alors, après vérification avec les juristes du ministère des Finances et de la Justice — c'est ça? non, des Finances, aussi de la Justice — alors ce n'est pas possible, malheureusement.

Le Président (M. Merlini) : Ce n'est pas possible. Très bien. M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : M. le Président, j'essayais de trouver une voie de passage, encore une fois. Est-ce que ce n'est pas possible ou on ne souhaite pas le faire? Je reviens à mon argumentaire, là. C'est possible de le faire, mais il n'y a pas de volonté d'aller dans ce sens-là, c'est plus ça, la question.

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : M. le Président, là, on peut diverger d'opinion. À leur avis, il serait possible, au mien, il ne l'est pas, suite aux conseils de mes juristes. Alors, c'est divergence d'opinions. Je respecte leur opinion, mais ce qu'on m'indique, c'est qu'il est préférable de ne pas aller là pour toutes les raisons que j'ai invoquées la semaine dernière.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. M. le député de Borduas. Ça va? Mme la députée de Vachon.

Mme Ouellet : J'aimerais que la ministre puisse nous dire quels sont les accords commerciaux intergouvernementaux qui pourraient être touchés par l'amendement.

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Est-ce que vous permettez à mon juriste de répondre à cette question-là? Mais on a déjà touché ces questions-là jeudi dernier, effectivement.

Le Président (M. Merlini) : Oui. Est-ce que j'ai le consentement des membres de la commission pour permettre à Me Roy d'adresser la commission? Alors, Me Roy, veuillez encore une fois vous identifier, pour les bienfaits de l'enregistrement.

M. Roy (Gabriel) : Oui. Gabriel Roy, avocat au ministère des Finances. Merci, M. le Président.

Donc, c'est l'Accord de libre-échange canadien.

Mme Ouellet : O.K. Puis les accords internationaux?

M. Roy (Gabriel) : Pour l'instant, ils ne sont pas... ils ne couvrent pas... ça ne couvre pas le cannabis en ce moment. Donc, on parle principalement de l'Accord de libre-échange canadien.

Mme Ouellet : Quels articles, dans l'Accord de libre-échange canadien, qui sont touchés pas la loi qu'on est en train d'étudier?

• (15 h 30) •

Mme Charlebois : On l'avait la semaine dernière. Donnez-moi juste une seconde. On peut le récupérer, ce ne sera pas long. Parce qu'on l'a tout lu la semaine dernière, deux, trois fois, mais on peut vous en refaire part.

(Consultation)

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Alors, à l'article 1206 de l'Accord du libre-échange canadien, c'est stipulé : «Les parties engagent des négociations sur l'application du présent accord aux mesures concernant le cannabis utilisé à des fins non commerciales dès que la législation fédérale sur le cannabis utilisé à des fins non médicales aura reçu la sanction royale.» Et c'est déjà dans le présent accord, mais ça va... Les intentions de négocier sont là, mais on ne pouvait pas le faire parce que ce n'était pas encore légal, ça fait qu'ils sont déjà stipulés à l'article 1206.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. Mme la députée de Vachon.

Mme Ouellet : Oui. Et cet accord, il est disponible sur le site Internet, j'imagine, il est disponible publiquement?

Mme Charlebois : Bien, avec l'Accord de libre-échange canadien, oui.

Mme Ouellet : Ça fait que sur le site Internet du ministère des Finances.

Mme Charlebois : Bien, vous allez l'avoir aussi au fédéral...

Une voix : ...sur Google, vous allez le trouver, là.

Mme Charlebois : Oui, c'est ça.

Mme Ouellet : Parfait. Puis, si on ne le trouve pas, on vous le demande, il n'y a pas de problème.

Mme Charlebois : Bien, vous allez le trouver sans problème.

M. Roy (Gabriel) : Il est sur le site du Secrétariat du commerce intérieur.

Mme Ouellet : Secrétariat du commerce intérieur.

Le Président (M. Merlini) : Autres interventions? Oui, Mme la députée de Vachon.

Mme Ouellet : Oui. Toujours ma question : Pourquoi... Parce que je comprends qu'on vient changer le «peut» du sous-amendement par le «doit», mais pourquoi est-ce qu'on parle de «prioritairement»? Pourquoi est-ce qu'on ne dirait pas «devrait s'approvisionner ou être effectué — là, ce n'est pas grave le vocabulaire — complètement par des producteurs situés sur le territoire du Québec»?

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Parce que, comme je l'ai indiqué la semaine dernière, il y aura, dans un premier temps, probablement des carences en produits québécois, il va falloir faire la transition. Deuxièmement, il va falloir aussi s'assurer d'être compétitifs. Troisièmement, ce sera peut-être les consommateurs qui demanderont des produits d'ailleurs, alors il faudra vérifier l'intention des consommateurs. Ça, c'est comme le vin, hein? Il y en a qui aiment les vins français, il y en a qui aiment les vins italiens, bien, ce sera peut-être comme ça aussi pour le cannabis.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. Mme la députée.

Mme Ouellet : Oui. Bien, sur les carences de produits québécois, ça nous a été confirmé, ce n'est pas une raison qui se tient, parce que ça a été confirmé par Les Producteurs de serre du Québec qu'ils étaient capables de fournir 100 % des besoins québécois. Donc, ça, je pense que ce n'est pas une raison qui se tient.

Et, sur la raison des consommateurs, écoutez, je ne suis pas une spécialiste des plants de cannabis, mais je crois que, de faire pousser un plant de cannabis ou un autre, les producteurs québécois sont tout à fait capables de fournir la diversité nécessaire. Donc, je ne comprends pas qu'on soit obligés d'aller s'approvisionner ailleurs et pourquoi est-ce qu'on ne ferait pas en sorte que ça crée des emplois au Québec. Je suis très, très surprise! Et il y a d'autres provinces qui ont eu vraiment le réflexe de vouloir dire : On va créer des jobs chez nous. Je ne comprends pas du tout la timidité, la frilosité du gouvernement libéral à se créer des emplois au Québec. Voyons donc! C'est à ça que sert justement, au gouvernement. Et, comme on légifère à partir de zéro, bien, c'est aussi bien de tout de suite commencer à légiférer correctement. Donc, je pense que c'est essentiel que l'ensemble des achats se fassent complètement au Québec.

Puis j'aimerais ça savoir, dans l'interprétation de la ministre, «prioritairement», ça veut dire quel pourcentage, ça.

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Alors, il y aura une période de transition. Il faut que la députée sache qu'il faut que les compagnies soient autorisées par le gouvernement fédéral. Et, à ce moment-ci, si la légalisation était faite aujourd'hui, on n'aurait pas 100 % de produits québécois, tout simplement parce qu'on ne serait pas capables de l'avoir, M. le Président. Dès qu'on aura une capacité... Quand on dit «prioritairement», c'est parce que ceux qu'on a déjà choisis, il y a, comme je le disais la semaine dernière, une capacité de produire 73 % ou 76 % au Québec.

Et je n'ai pas de doute, là, sur la qualité du travail des producteurs de serre. Et loin de moi de penser, M. le Président, que... Je ne sais pas où veut amener la députée de Vachon cette commission, mais là on est sur le «peut» et le «doit», on a expliqué les raisons juridiques. J'ai expliqué les défis d'approvisionnement pour la période de transition. Je lui ai déjà dit que l'intention du gouvernement était liée au fait qu'on souhaite que la filiale s'approvisionne... C'est écrit «prioritairement». Il n'y a pas de pourcentage attaché au mot «prioritaire». Si elle va dans le dictionnaire, il y a zéro pourcentage attaché à ça, mais «prioritairement», ça veut dire beaucoup plus que le minimum.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. Mme la députée de Vachon.

Mme Ouellet : Oui, je ne sais pas si j'ai bien compris, là, elle a dit : Prioritairement... la ministre a dit : Prioritairement, ça veut dire beaucoup plus que le minimum?

Mme Charlebois : Bien, vous voulez un pourcentage, je n'en ai pas, de pourcentage, à vous donner. On vous dit «prioritairement» parce que c'est eux autres, les produits québécois, qu'on veut favoriser. Je comprends que vous ne voyez pas ça comme ça. Je l'ai expliqué la semaine dernière, vous voulez le voir moitié vide, moi, je le vois à moitié plein. On va favoriser les productions québécoises en priorité. Alors, voilà tout ce que j'ai à dire.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. Mme la députée.

Mme Ouellet  : M. le Président, le problème, ce n'est pas comment la ministre voit les choses. De toute façon, ce n'est même pas elle qui va être responsable de la Société québécoise du cannabis. Ça fait qu'elle voie les choses d'une façon ou une autre, c'est bien qu'elle nous le démontre, mais c'est ce que dit le texte juridiquement. Et ce qu'on essaie de comprendre, c'est qu'est-ce que dit le texte juridiquement par «prioritairement». Et, quand qu'elle me dit : C'est plus que le minimum, j'ai l'impression que ça ne veut rien dire, M. le Président. Ça fait que moi, j'essaie... Parce qu'ici notre travail, ici, c'est d'avoir les intentions du...

Le Président (M. Merlini) : Excusez-moi, Mme la députée de Vachon. Mme la ministre, question de règlement.

Mme Charlebois : Bien, juste une question de directive, en fait. On a tout expliqué ça la semaine dernière. Est-ce qu'à chaque fois que quelqu'un va s'ajouter à la commission il va falloir reprendre l'analyse de l'article?

Le Président (M. Merlini) : Bien, la députée prend son temps de parole et pose les questions...

Mme Charlebois : Ah! O.K.

Le Président (M. Merlini) :...qui lui semblent pertinentes au sous-amendement proposé.

Mme Charlebois : O.K., merci.

Le Président (M. Merlini) : Alors, effectivement, c'est libre à vous d'y répondre. Mme la députée de Vachon.

Mme Ouellet : Oui. Donc, notre travail de parlementaires ici, c'est de bien confirmer l'intention du législateur, et pas d'une personne en particulier, parce que, de toute façon, dans ce cas-ci, c'est le ministre des Finances qui va se retrouver à prendre des décisions une fois que le tout va être voté, et c'est de savoir juridiquement qu'est-ce que ça veut dire, «prioritairement». Et, quand on met des mots dans une loi, c'est parce qu'ils ont une signification, une signification juridique, et non pas juste perceptuelle, là. Ce n'est pas une question du verre à moitié plein, à moitié vide, de sa perception à elle comme ministre, c'est de savoir qu'est-ce que ça veut dire juridiquement.

Donc, moi, je voudrais savoir... C'est bien beau mettre du verbiage dans une loi, mais encore faudrait-il que ça ait un impact. Donc, ça veut dire quoi, «prioritairement»? Est-ce que ça veut dire que ce sera 50 % et plus de la production qui sera auprès des producteurs situés sur le territoire du Québec? Est-ce que c'est ça, l'intention du législateur, de dire que c'est 50 % et plus de la production qui devra être faite sur le territoire du Québec?

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Bien, ce n'est pas en termes de pourcentage, comme je l'ai dit, c'est en termes de priorité. «Peut être effectué prioritairement», bien, ça dit ce que ça dit. On peut chercher le mot «prioritairement» ensemble dans le dictionnaire. Puis ça dit ce que ça dit puis il n'y a pas de pourcentage attaché au mot «prioritaire». M. le Président, ça donne une indication forte. Maintenant, la députée peut me requestionner une autre fois, je vais encore lui dire qu'il n'y aura pas de pourcentage d'attaché au mot «prioritaire». Voulez-vous qu'on le cherche ensemble sur Google, «prioritaire»? Je n'ai pas d'autre réponse à donner, M. le Président.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. Mme la députée de Vachon.

Mme Ouellet : Quand on établit des priorités, c'est en fonction de certains critères. Ça va être une priorité en fonction de quels critères? En fonction de quels critères la priorité va être donnée aux fournisseurs sur le territoire du Québec?

Mme Charlebois : Les critères, c'est tout simplement, le texte le dit, on va le lire pour le bénéfice des Québécois : «L'achat de cannabis par la filiale peut être effectué prioritairement auprès [des] producteurs situés sur le territoire du Québec — alors, la priorité sera donnée aux producteurs situés sur le territoire du Québec — dans la mesure permise par les accords commerciaux intergouvernementaux et internationaux conclus par le Québec ou auxquels il s'est déclaré lié en application de la Loi sur le ministère des Relations internationales (chapitre M-25.1.1).»

Alors, sur quels critères? Bien, je réponds : «Auprès de producteurs situés sur le territoire du Québec».

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. Mme la députée de Vachon.

Mme Ouellet : Oui, merci, M. le Président. On est capables de lire, nous aussi, je pense que Mme la ministre, elle s'en fait pas mal trop pour nous. On est capables de faire la lecture tout comme elle et de comprendre le texte qui est écrit. Tout ce qu'on demande, c'est des explications.

Et je vais demander une autre série d'explications, M. le Président. Parce qu'ils disent : «Dans la mesure permise dans les accords commerciaux intergouvernementaux». On a compris que, dans les accords internationaux, il n'y avait rien qui concernait le cannabis, ça fait qu'il n'y a pas rien qui interdit que ça soit même 100 % sur le territoire québécois. Est-ce que, dans les accords... dans l'accord, que je n'ai pas encore eu l'occasion de lire, le libre-échange canadien...

Le Président (M. Merlini) : Mme la députée de Vachon, je vais vous rappeler qu'on est sur le sous-amendement de M. le député de Labelle, qui porte sur un changement au texte, de «peut» à «doit», et ensuite, après avoir disposé, nous retournerons à l'amendement de la ministre, auquel, à ce moment-là, ces questions-là pourront être plus pertinentes, à ce moment-là. Parce que je ne vois pas l'objet de vos questions qui se rapporte au sous-amendement du député de Labelle en ce moment.

• (15 h 40) •

Mme Ouellet : Bien oui, ça a un lien parce que, si ça devient «doit», bien, il faut voir c'est quoi, les impacts des accords commerciaux intergouvernementaux. Et, si on vote pour le «doit» et que j'ai d'autres sous-amendements pour dire «effectué non pas prioritairement, mais complètement auprès de producteurs québécois situés»... Tout ça est lié, là. Si c'est un mot qui est dans le texte, bien, il faut avoir les impacts sur l'ensemble du paragraphe.

Donc, en fonction des accords intergouvernementaux tels qu'ils sont libellés actuellement, est-ce qu'on pourrait écrire «doit», donc «doit effectuer complètement auprès des producteurs situés»? Est-ce qu'il y a quelque chose, dans les accords commerciaux intergouvernementaux — en fait, il y en a juste un touché, à ce que le conseiller, à côté, m'a dit, qui est l'Accord de libre-échange canadien — qui pourrait faire en sorte qu'on ne pourrait pas donner 100 % de la production auprès des producteurs québécois? Est-ce qu'il y a quelque chose, dans cet accord-là, qui nous l'interdirait?

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : J'aimerais ça si on pouvait faire intervenir le sous-ministre aux Finances, M. Marc Grandisson, pour répéter ce qu'on a déjà dit la semaine dernière pour le bénéfice de la députée de Vachon.

Le Président (M. Merlini) : Alors, est-ce que j'ai le consentement pour permettre à M. Grandisson d'adresser la commission? Consentement. Merci. Alors, M. Grandisson, veuillez prendre place et, encore une fois, pour les bienfaits de l'enregistrement, veuillez vous identifier.

M. Grandisson(Marc) : Oui. Bonjour. Donc, Marc Grandisson, sous-ministre adjoint au ministère des Finances.

Oui, donc, sur les accords de commerce, ce qui a été discuté la semaine passée, c'est qu'on pourrait, dans les... c'est la possibilité ou non de négocier dans le futur un mandat de restreindre le marché que chaque province protège, sinon d'exclure le cannabis des accords de commerce. C'était ça qui était discuté. Et donc c'est un peu prendre... c'est prendre position que c'est ça qui est le mieux pour l'économie du Québec, de fermer le marché et de dire que chaque province va fabriquer son propre cannabis puis fournir son propre marché sans possibilité d'expansion à l'extérieur du Québec. C'est un choix qui peut être fait. Je pense que l'idée, c'est que les négociations vont avoir lieu à l'été prochain ou l'automne prochain et qu'on croyait qu'il n'y avait pas lieu là de prendre position d'avance sur qu'est-ce qui est le mieux pour l'économie du Québec, dans le contexte du cannabis, soit un marché fermé par province ou d'avoir de la compétition entre les provinces, et les producteurs québécois auraient la chance de compétitionner sur les autres marchés aussi.

L'autre chose qu'il y a, c'est que c'est un marché, justement, qui est encore fragile, qui n'existe pas encore à 100 %, que, si on restreint trop la capacité de la société de s'approvisionner... Ça peut faire monter les prix s'il n'y a pas assez de compétition dans le marché. Et ultimement c'est ça qui était l'objectif du projet de loi, c'est de dire : Là, légaliser, c'est... une fois que c'est légalisé, que le marché légal soit compétitif par rapport au marché illégal. Donc, le plus de producteurs qui peuvent faire des offres à la société, meilleures sont les chances que le prix de vente au final soit compétitif par rapport au marché illégal.

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. Grandisson. Mme la députée de Vachon.

Mme Ouellet : Oui. Donc, ce que je comprends de ce que M. Grandisson nous dit, c'est que c'est leur intention, mais c'est une position politique que vous nous donnez, et non pas une position juridique, parce qu'au niveau juridique on aurait tout le loisir, ici, de pouvoir... comme l'entente n'est pas signée, on aurait tout le loisir de dire que nous, notre choix ici, c'est celui que ce soit produit au Québec.

Et, concernant vos craintes sur le marché qui est fragile, etc., puis les producteurs qui pourraient produire en dehors du Québec, bien là, vous savez, là, on parle des producteurs qui sont des producteurs de compagnies inscrites en bourse, financées par les paradis fiscaux — je veux juste le rappeler, parce que je pense que c'est bon de se le rappeler — financées par les paradis fiscaux, qui sont... eux autres ont des fonds qui sont peut-être financés par les mains criminelles.

Donc, on pourrait décider de faire le choix ici que ce n'est pas ça qu'on veut, qu'on ne veut pas que ce soient des compagnies inscrites en bourse, spéculatives, qui font du 100 % à 300 % de profit, financées par des fonds des paradis fiscaux peut-être financés par les mains criminelles, mais qu'on voudrait que ce soient les producteurs de serre du Québec. Et eux autres, ils nous l'ont confirmé... Quand vous dites : Le marché est fragile, puis on ne sait pas à quel prix ça va produire parce que la compétitivité, il faut qu'il y ait plusieurs joueurs, je comprends tout ça. De toute façon, actuellement il ne l'a pas, la compétitivité, puis actuellement je peux vous dire qu'ils se parlent, ces gens-là. Ça fait que, quand on dit : La concurrence pure et parfaite, ce n'est pas le cas dans le marché actuellement, en tout cas, très clairement, du cannabis thérapeutique, et que le gouvernement canadien gère très serré les permis, on se demande d'ailleurs pourquoi... Mais on pourrait décider que c'est les producteurs de serre du Québec qui nous fournissent, ils sont tout à fait capables à produire à coûts très compétitifs, encore moindres que ce que les producteurs inscrits en bourse nous ont dit jusqu'à présent.

Donc, ce que j'entends de ce que vous me dites sur les accords intergouvernementaux, c'est une position politique où vous voudriez vous garder la marge de manoeuvre de pouvoir négocier tout ça, mais que, juridiquement, il n'y aurait aucun problème. C'est ce que je voudrais me faire confirmer. Est-ce que, juridiquement, il y aurait un empêchement à ce qu'on décide ici, au salon rouge, de faire en sorte que ce soit une production qui soit produite complètement sur le territoire québécois? Est-ce qu'il y a un empêchement juridique?

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Oui. Mes conseillers juridiques... — pas M. Grandisson, parce qu'il est sous-ministre — les conseillers juridiques nous l'ont indiqué la semaine dernière. Ils ont donné les explications qui allaient avec ça. Je comprends que ce n'est pas l'appréciation de la députée de Vachon et je respecte son opinion, tout comme j'ai respecté l'opinion du député de Borduas et du député de Labelle.

Maintenant, je n'ai pas d'autre information à donner, malheureusement, à la députée de Vachon, bien que... Là, tout ce qu'on doit faire, c'est choisir pour le mot «peut» et «doit» dans le texte. Tout le restant du débat pourra être fait dans l'article tantôt. Mais, si elle veut poursuivre le temps, il n'y a pas de problème, on va... Moi, je veux juste lui dire, lui indiquer que, oui, il y a une orientation politique, parce que j'ai déposé un projet de loi. Nous faisons le gouvernement. On en discute. Mais il n'en demeure pas moins qu'il y a l'orientation politique de faire en sorte que nous puissions être compétitifs avec le marché criminel, qui est là en ce moment, pour des raisons de santé publique. Si on n'arrive pas à enlever les consommateurs des mains des criminels, bien, je regrette, Mme la députée de Vachon, on va avoir passé à côté de l'objectif de santé publique.

Je sais que vous allez me parler de tout autre chose qui a affaire avec le marché criminel, mais ici on doit choisir entre le «peut» et le «doit». Alors, je ne sais pas combien de temps il reste à la députée de Vachon, je suis prête à respecter le temps, mais je n'ai pas d'autre explication à donner. Et, si elle est disposée à voter, nous pourrions voter.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. Mme la députée de Vachon, une autre intervention?

Mme Ouellet : Oui, merci, M. le Président. La ministre vient de nous affirmer ici, au salon bleu, qu'il y a un empêchement juridique. Bien, si c'est le cas, j'aimerais ça qu'elle nous l'explique parce que moi, je ne le vois pas. Et on est ici pour comprendre ce qui se passe. Donc, c'est important, ce qu'elle vient d'affirmer. Il y a un empêchement juridique. J'aimerais ça le connaître, cet empêchement juridique là, et j'aimerais ça qu'on puisse me dire cet empêchement juridique là relève de quelle loi, de quel traité, de quelle entente et quel article, qu'on puisse apprécier aussi bien que la ministre pourquoi qu'il y a effectivement un empêchement juridique. Parce que moi, des informations que j'ai, je ne le vois pas, l'empêchement juridique.

Il peut y avoir une opinion politique différente, et ça, je comprends tout à fait, M. le Président. Mais, un empêchement juridique, c'est important que les membres de la commission en soient informés, et je pense qu'on a tout à fait la capacité de compréhension qu'elle puisse nous expliquer ça découle de quelle loi et d'où est initié cet empêchement juridique.

Mme Charlebois : Alors, ça va me faire un grand plaisir de le répéter une autre fois, parce que, jeudi dernier, nous avons fait ça tout l'après-midi jusqu'à 6 heures. Nous étions ici jusqu'à 18 heures et nous avons donné toutes les explications. Mais, pour le bénéfice de la députée de Vachon, qui est ici aujourd'hui — demain, on verra — mon conseiller juridique pourrait lui expliquer, M. le Président, avec gentillesse le pourquoi, ce qu'on a déjà expliqué la semaine dernière.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. Me Roy, à vous la parole.

M. Roy (Gabriel) : Oui. En fait, c'est simplement qu'étant donné que les négociations sous l'égide de l'Accord de libre-échange canadien n'ont pas encore eu lieu on ne souhaite pas lier d'avance l'issue de ces discussions-là et la position qui va être prise. Alors, c'est simplement pour cette raison-là.

Mme Ouellet : ...M. le Président. C'est ce que j'avais compris plus tôt. Et donc vous me confirmez qu'il n'y a pas d'empêchement juridique. C'est un souhait que vous souhaitez qu'il n'y ait pas... que vous n'ayez pas les mains liées pour cette négociation-là, mais...

Mme Charlebois : ...juridique qui fait en sorte qu'on va respecter nos accords.

Mme Ouellet : Non, non, ce n'est pas une... Non, il n'y a rien de signé dans l'accord, là. Il faut faire attention, Mme la ministre, on ne peut pas dire des choses qui n'existent pas. Il n'y a rien de signé dans l'accord, il n'y a rien de négocié dans l'accord. Et ce que j'entends de votre conseiller, c'est qu'ils souhaitent avoir de la marge de manoeuvre pour négocier. Mais on pourrait... Dites-moi oui ou non : Est-ce qu'on pourrait décider ici que c'est complètement le marché québécois? Que vous ne le souhaitiez pas, c'est une autre chose. Mais est-ce qu'on pourrait décider que c'est complètement le marché québécois?

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : En fait, elle veut faire de la politique. On va en faire. Je suis en forme. On est mardi, la semaine commence.

Le Président (M. Merlini) : Et mon livre de règlements est ouvert.

• (15 h 50) •

Mme Charlebois : Oui, puis vous êtes mieux de le tenir ouvert. Là, on a un accord de libre-échange qui est signé, qui nous parle d'un article que j'ai lu la semaine dernière. Effectivement, on ne peut pas avoir une entente confinée parce que le cannabis n'est pas légal. Alors, chers citoyens... vous comprenez ça, cannabis pas légal, donc on ne peut pas avoir l'entente finale.

Cependant, à l'article 1206 de l'accord de commerce, vous allez pouvoir trouver à :

«1. Le présent accord ne s'applique pas à une mesure adoptée ou maintenue par une partie concernant le cannabis utilisé à des fins non médicales;

«2. Les parties engagent des négociations — ça veut dire que, hein, c'est assez présent — sur l'application du présent accord aux mesures concernant le cannabis utilisé à des fins non médicales dès que la législation fédérale — mot qui irrite les oreilles à Mme la députée de Vachon — sur le cannabis utilisé...

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre...

Mme Charlebois : ... — non, non...

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre...

Mme Charlebois : ...c'est toujours dans la loi et les règlements, j'ai parlé de ses oreilles et...

Le Président (M. Merlini) : L'article 35.7° ne vous permet pas d'utiliser des propos de la sorte envers la députée de Vachon.

Mme Charlebois : ...bon, en tout cas, ça ne lui fait pas plaisir — à des fins non médicales aura reçu la sanction royale.» Alors, à partir de ce propos...

Le Président (M. Merlini) : Un instant, Mme la ministre. Un instant, Mme la ministre. Mme la députée de Vachon a une question de règlement.

Mme Ouellet : Bien, oui, vous aviez tout à fait raison, M. le Président, qu'il y a des propos qu'elle ne peut pas dire. Est-ce qu'elle peut les retirer?

Le Président (M. Merlini) : J'ai demandé à Mme la ministre de faire attention à l'utilisation de propos, je n'ai pas demandé à Mme la ministre de les retirer. Veuillez poursuivre, Mme la ministre, en prenant soin...

Mme Charlebois : Bien, je lui ai lu l'article 1206, M. le Président, et, honnêtement, je comprends que... C'est drôle parce que c'est toutes des choses qu'on a discutées la semaine dernière, pour lesquelles on a tout donné les arguments. Et là on a une position qui fait partie de l'histoire du Québec. Elle ne veut pas l'entendre. C'est son choix. Moi, je respecte les orientations, mais, quand on parle de ton... Vous remarquerez qu'avec les autres députés j'ai toujours un ton très restreint. Mais son ton m'amène à avoir un ton. Je suis toujours dans le verbatim très parlementaire, M. le Président.

Alors, ici, là, ce qu'on dit, c'est qu'on ne veut pas contrevenir à l'Accord de libre-échange canadien, M. le Président, O.K.? Le cannabis non thérapeutique va en faire partie, qu'il ne lui en plaise ou pas. Et ce que je dis, c'est qu'il y aura une entente qui va être signée, et, dans ce sens-là, mes juristes m'indiquent que la position du Québec, habituelle, va dans le sens que je prône.

Maintenant, je ne sais pas... Combien de temps qu'il reste à la députée de Vachon? Pourriez-vous m'indiquer ça?

Le Président (M. Merlini) : Je vais m'informer auprès du secrétariat. Continuez, Mme la ministre.

Mme Charlebois : Bien, j'ai terminé pour ce qui est là, puis je veux... j'en appelle au vote. Si on ne peut pas voter parce qu'il lui reste du temps, bien, qu'elle en parle.

Le Président (M. Merlini) : Il reste neuf minutes à votre intervention, Mme la députée...

Mme Charlebois : Bien, je suis prête à écouter neuf minutes de temps, M. le Président.

Le Président (M. Merlini) : ...sur le sous-amendement du député de Labelle.

Mme Ouellet : ...la ministre, elle peut très bien faire rappel à mon temps aussi souvent que ça lui fera plaisir, M. le Président. Je pense que c'est notre travail de parlementaires ici. Et ce que je comprends, c'est que, les explications qui sont données, tant par son conseiller juridique que par le sous-ministre aux Finances, il n'y a aucun empêchement juridique à ce que nous prenions une décision. Et, si elle dit autrement, ça n'a jamais été confirmé par son conseiller juridique et ça n'a jamais été confirmé par le sous-ministre aux Finances. Elle ne le souhaite pas. Ça, c'est une autre histoire. Mais il n'y a aucun empêchement juridique. Ça fait qu'il faut faire attention à ce qu'on dit ici pour dire des choses qui sont exactes, M. le Président.

Donc, on aurait tout à fait la possibilité de dire que c'est complètement... les achats doivent être effectués complètement sur le territoire québécois, mais, ce faisant, M. le Président, on donnerait déjà une orientation aux négociations qui devraient avoir lieu sur le cannabis. Parce qu'il n'y a rien de signé sur le cannabis, ce n'est pas négocié. Mais on pourrait tout à fait décider ici, si le gouvernement libéral était d'accord, que la position du gouvernement du Québec, la position de base quand il arrive en négociation, est que cette partie-là n'est pas négociable. Mais ce que j'entends, c'est qu'il ne souhaite pas ça parce qu'il souhaite avoir de la marge de manoeuvre pour négocier, mais on pourrait tout à fait légitimement décider que 100 % de la production est produite au Québec. Il n'y a aucun empêchement juridique qui nous l'empêche, parce que, quand la ministre, elle nous réfère à l'accord de commerce intergouvernemental, bien, il n'y a rien de signé là-dessus puis il n'y a rien de négocié là-dessus, donc ce n'est pas exact.

Il faut faire attention. Moi, je pense qu'il faut faire attention de ne pas induire les gens en erreur et je pense qu'ici on est là pour comprendre. La ministre, elle a tout un groupe d'experts qui est avec elle, puis c'est normal qu'on réfère à ces gens-là pour avoir les informations, mais il ne faut pas, après ça, mal interpréter ce qu'ils nous ont dit. Le monsieur à côté d'elle — je ne me rappelle pas votre nom — a bien dit... Hein?

Le Président (M. Merlini) : Me Roy.

Mme Ouellet : M. Roy a bien dit qu'il souhaitait avoir de la marge de manoeuvre. Il n'a jamais confirmé qu'il y avait un empêchement juridique. J'en déduis donc qu'il n'y a pas d'empêchement juridique, parce que, sinon, il m'aurait confirmé noir sur blanc qu'il y a un empêchement juridique. Et donc il souhaite, c'est un souhait, et ça, c'est une position de négociation, une position politique, ce n'est pas une position qui est, à ce moment-là... où il y a un empêchement juridique.

Donc, je comprends qu'on pourra décider ici de faire en sorte que 100 % de la production soit faite au Québec pour créer des emplois au Québec. Et je pense que ce n'est pas compliqué de nous dire, de l'autre côté... C'est juste d'être transparent, de nous dire : Oui, c'est possible de le faire, mais ce n'est pas ça qu'on veut faire.

Donc, moi, tout ce que je veux savoir... Puis c'est ce que je comprends, c'est que, oui, c'est possible de dire que c'est 100 % au Québec. Ce que je comprends, pour toutes sortes de raisons que je ne qualifierai pas pour le moment, ce n'est pas leur souhait, ce n'est pas leur volonté. C'est correct. On peut avoir des opinions différentes. Mais ce qui est important de comprendre ici, autour de la table, c'est : Est-ce qu'on a des empêchements juridiques? Si on en a, est-ce qu'on peut les défaire? Si on ne peut pas les défaire, pourquoi? Puis de comprendre c'est quoi... qu'est-ce qu'on peut faire au salon bleu... au salon rouge.

Donc, ce que je comprends, c'est qu'on pourrait avoir 100 %. Il n'y a rien qui nous l'empêche actuellement, étant donné qu'il n'y a rien de négocié. Ça fait que, justement, on est dans le bon moment, M. le Président, contrairement à ce qu'affirme la ministre, on est exactement dans le bon moment pour donner des orientations au gouvernement pour ces négociations dans le cadre du traité de libre-échange canadien, donc pour faire en sorte... Parce que la section sur le cannabis, il n'y a actuellement rien de négocié, rien d'écrit. C'est à faire. On est justement au bon moment pour leur donner des orientations pour leur dire : Bien, nous, ce qu'on souhaite, c'est ça.

Et, moi, ce que je vous dis, c'est que je pense que ce qui serait souhaitable pour les producteurs de serre du Québec, ce qui serait souhaitable pour les emplois au Québec, c'est que 100 % de la production... de l'achat de cannabis fait par la Société québécoise du cannabis soit fait auprès de producteurs situés sur le territoire du Québec. Éventuellement, j'y arriverai, là, ça serait des producteurs pour les producteurs de serre. Donc, on y arrivera.

Mais, pour l'instant, on est dans l'amendement de la ministre avec le sous-amendement qui est «doit», et donc je suis en appui sur le «doit». Je crois qu'il est essentiel. Parce que «peut» dans un texte juridique comme ça, ça ne veut rien dire. Il n'est pas lié du tout et il n'y a aucun recours à... Par exemple, si la société décidait de ne pas le faire, il n'y a aucun recours, de personne. Puis ça donne une intention, mais ça ne donne aucun recours et ça ne lie d'aucune espèce de façon. Donc, je suis tout à fait d'accord avec le député de Labelle, il faut absolument changer le «peut» par le «doit être effectué», parce que, sinon, ça risque de rester des voeux pieux.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la députée de Vachon. Mme la députée de Repentigny.

• (16 heures) •

Mme Lavallée : Écoutez, c'est sûr qu'on en a parlé, la semaine passée, beaucoup, puis je reviens à ce que j'ai déjà dit, on revient sur les mêmes sujets parce qu'on ne règle pas comme il faut les discussions qu'on a eues à date.

Tout à l'heure, j'ai entendu les termes «l'impact sur l'économie», «il ne faut pas limiter les possibilités d'expansion», «s'assurer d'être compétitifs», puis ça, j'ai de la misère à entendre ces mots-là parce que ça vient en contradiction avec notre volonté d'encadrer, mais de ne pas encourager. Puis, quand j'entends ces mots-là, c'est là qu'est le malaise, c'est là que vient ce malaise-là, c'est qu'on dirait qu'il y a comme un double discours. On parle d'être compétitifs, on parle d'expansion de marché, on parle d'économie, alors que ma seule préoccupation, c'est la santé publique. Et, si on pense actuellement qu'il faut régler les problèmes de compétition avec les autres, le seul compétiteur qu'on a à régler, c'est le milieu criminel.

Vendredi passé, les sénateurs ont fait une sortie. M. Joyal a dit qu'il avait parlé avec un membre de la GRC et qui a expliqué que, quand on parle de crime organisé, ça le dit, «organisé». Si on pense qu'on va aller chercher les jeunes qui font affaire avec le milieu criminel puis qu'ils vont s'en venir parce qu'on a des SQDC, je pense qu'on rêve en couleurs, parce qu'on n'offrira pas les taux de THC qui leur donnent le buzz dans ce réseau-là.

Puis là il y a quelque chose qui ne marche pas. Moi, ces mots-là, d'«économie», «expansion» puis «compétitifs», ça me heurte parce que ce n'est pas le... Le gouvernement, son rôle, c'est de sensibiliser la population, c'est de sensibiliser les jeunes et de faire de la prévention. Puis d'ailleurs on devrait être déjà en train de faire de la prévention. Le cannabis n'est pas apparu voilà un an. Ça fait au-dessus de 40 ans qu'on en entend parler. Moi, j'ai parlé avec une chimiste il y a à peu près 10 ans, puis elle parlait des taux de THC. Là, tout d'un coup, il faut tout régler vite. Il faut faire tout ça vite, alors qu'on ne s'en est jamais préoccupé depuis les 40, 50 dernières années.

Puis, quand on parle d'économie puis de compétition, bien, je trouve qu'on se contredit comme gouvernement puis on envoie un message qui n'est vraiment pas clair. Pour moi, il n'est pas clair. Puis, s'il n'est pas clair pour moi, il n'est pas clair pour la population. Et la population, je le regrette, mais elle est en phase avec les inquiétudes de l'opposition actuellement. On veut faire de ce projet de loi... le mieux possible. Et je comprends mal que des termes apparaissent à l'étude du projet de loi.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la députée de Repentigny. M. le député de Labelle.

M. Pagé : Oui. Je veux juste bien comprendre. Je vais prendre l'exemple de la SAQ. Est-ce que, la SAQ, il y a des restrictions? Parce que, là, il va y avoir des comparaisons à faire avec la SQDC, là. Est-ce que la SAQ a un pourcentage de produits étrangers qu'elle est obligée d'acheter? Il n'y a aucun pourcentage de produits étrangers?

Mme Charlebois : Bien, dans le projet de loi de la SAQ, non. Mais, dans celui qu'on met pour la Société québécoise du cannabis, non plus, sauf qu'on parle de l'«achat du cannabis par la filiale peut être effectué prioritairement auprès de producteurs situés sur tout le territoire du Québec». Et, M. le Président, j'ai fait venir, je ne me rappelle plus de votre nom...

Une voix : Jean-François Lord.

Mme Charlebois : ...Jean-François Lord, qui est juriste au ministère de la Justice et des Finances et qui pourrait réexpliquer pourquoi on ne peut pas utiliser le «doit», parce que je pense qu'on a perdu ça de vue de la semaine dernière. Alors, ramenons donc l'argumentaire pour expliquer entre les accords qui ne sont pas signés, qui vont être signés, puis qu'est-ce que ça va faire, puis la période intérimaire. Puis je pense que ça peut remettre tout le monde sur le même niveau et informer la députée de Vachon du même coup.

Le Président (M. Merlini) : Est-ce que j'ai votre consentement pour permettre à Me Lord d'adresser la commission?

Des voix : Oui, consentement.

Le Président (M. Merlini) : Consentement. Merci. Me Lord, veuillez, s'il vous plaît, encore une fois vous identifier pour les bienfaits de l'enregistrement.

M. Lord (Jean-François) : Bonjour, M. le Président. Jean-François Lord, directeur des affaires juridiques au ministère des Finances.

Alors, la référence aux accords de commerce... Puis, pour revenir sur ce qui a été dit un petit peu plus tôt, aujourd'hui, si on prend vraiment dans la journée où on se parle, effectivement le commerce du cannabis n'est pas régi, Mme la ministre l'a expliqué, parce qu'évidemment il n'y a pas de légalité au niveau du commerce de ce produit-là à des fins récréatives en ce moment-ci. Et, dans la facture de ce qui a été émis dans l'Accord de libre-échange canadien, c'est une perspective, évidemment, qui arrivera à partir de la sanction royale du projet de loi fédéral. Donc, même si on mettait un marché... si on prévoyait une disposition pour restreindre le marché aux producteurs québécois entièrement aujourd'hui, théoriquement ça pourrait fonctionner pendant quelques mois, mais, dans une perspective long terme, ça ne fonctionne pas, parce que, même s'il n'y a pas de... même si les textes ne sont pas encore écrits, il reste quand même que c'est un accord dont la philosophie de base repose sur la libre circulation des biens à l'intérieur du Canada.

Ça, c'est un des éléments qui fait en sorte que, pour du moyen à long terme, le «doit» nous amènerait à dire deux choses contradictoires dans la même phrase. Donc, un «doit restreindre au marché québécois dans la mesure permise par les accords», ça nous amène dans un cul-de-sac.

Un autre élément qui est à considérer aussi, et là, bon, il y aurait des vérifications que je devrais faire pour être peut-être plus précis, mais actuellement, évidemment, même... D'ici à la sanction royale, certainement pas, mais peut-être à partir de la sanction royale, est-ce que le Canada permet ou permettra l'importation de cannabis? Là, ça, je n'ai pas la réponse. Mais, dans la mesure où ce serait permis, les accords internationaux ne prévoient pas de disposition similaire à l'article 1206 qu'on a lu plus tôt, où on dit : Ça ne s'applique pas. Et, le jour où ça s'appliquera, on aura des discussions. Ce qui me fait dire que, dans la mesure où le Canada permettrait une importation, sur le territoire canadien, de cannabis, à ce moment-là, il y a... La libre circulation entre les provinces au terme des accords internationaux nous amènerait, là aussi, en violation, sans égard à ce qui serait négocié sur le marché canadien. Donc, il faut aussi tenir compte de cette dimension juridique là.

Le Président (M. Merlini) : Merci. M. le député de Labelle.

M. Pagé : J'entends bien ce que vous nous dites. Mais dans quelle mesure... Bon. Je comprends que, quand il y a des accords, il faut laisser la chance à tous les coureurs de pouvoir participer à ces transactions d'affaires, hein, c'est essentiellement ce que ça dit. Mais, à partir du moment où les producteurs québécois arrivent avec un prix moindre, s'il était le cas — et moi, je pense que ça sera le cas, compte tenu des arguments que j'ai énumérés la semaine dernière, que je ne reprendrai pas — alors, est-ce qu'il pourrait arriver qu'on pourrait faire la démonstration : Écoutez, nous, on achète 100 % de notre cannabis au Québec, parce qu'on est capables de faire la démonstration qu'il n'y a personne dans le reste du Canada qui est capable d'accoter ces prix-là, la qualité y est, puis on a tout ce que l'on souhaite en termes de qualité de produit? Est-ce que cela pourrait arriver et qu'on pourrait très bien se défendre par rapport aux accords et dire : Écoutez, vous ne pouvez pas plaider qu'il n'y a pas de libre concurrence, on a fait des appels d'offres, on a vérifié, et c'est les producteurs québécois qui ont les meilleurs prix? Est-ce que, théoriquement, cela pourrait arriver? Parce que, dans le fond, c'est ce que l'on souhaite, que la Société québécoise du cannabis fasse travailler les Québécois, parce qu'ils vont produire au Québec, puis c'est ce que l'on souhaite. Alors, est-ce que cela viendrait contrevenir à nos accords à partir du moment où le directeur général de la... le P.D.G. fait la démonstration : Écoutez, la raison pour laquelle j'achète 100 % québécois, c'est qu'il n'y a personne qui accote ces prix-là? Est-ce que ça pourrait, en théorie, arriver?

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Bien, il peut le faire sans nécessairement avoir un «doit», là. Il va y aller sur un marché compétitif et de qualité. Le P.D.G., ce ne sera pas un fou, là. Il va y aller là-dedans, mais il ne sera pas tenu obligatoirement, parce qu'il y a une période de transition. C'est juste pour la période de transition, notamment. Mais il y a aussi tout un effet de compétitivité, là. Alors, s'il y a les meilleurs prix au Québec puis la qualité supérieure, pourquoi il irait ailleurs? Mais le «peut» ne l'empêchera pas de faire ça, là, si c'est ça, le sens de la question.

M. Pagé : Oui. Mais ma question, ce n'était pas ça. Alors, je ne sais pas s'il peut répondre à ma question, s'il vous plaît.

Le Président (M. Merlini) : Me Lord.

M. Lord (Jean-François) : Merci, M. le Président. Le P.D.G... Là, vous parlez de la SAQ ou de la SQDC? La SQDC. En fait, rien n'empêche effectivement l'achat de cannabis au Québec par les producteurs québécois. C'est-à-dire que, là où on est dans la limite de ce qui est permis par les accords, c'est justement si, comme entreprise commerciale d'État, la SQDC prend une décision basée sur des considérations commerciales. Et, dans l'hypothèse que vous avez soumise, si j'ai bien compris, il y aurait donc un marché plus favorable chez les producteurs québécois pour l'achat du cannabis. À ce moment-là, oui, le marché se justifie, et il n'y aurait pas de problématique au niveau des accords parce que c'est une décision basée sur une considération commerciale qui, dans un rapport de libre concurrence, donnerait l'avantage aux producteurs québécois. Donc, c'est une décision d'affaires qui se défend parfaitement.

Là où on a un problème avec le langage législatif, c'est que, si on a une mesure qui dirige l'achat à l'avance vers ce marché-là, sans égard aux rapports concurrentiels de ce produit-là ou des producteurs, à ce moment-là c'est la mesure elle-même qui est en... bien, pour l'instant potentielle, mais, je dirais, en violation d'un engagement d'assurer la libre circulation et donc la libre concurrence, là, entre les producteurs à l'intérieur du Canada.

Le Président (M. Merlini) : M. le député de Labelle.

M. Pagé : Alors, toujours pour la bonne compréhension de toutes ces ententes intergouvernementales ou internationales, donc, a contrario, si effectivement le P.D.G., parce qu'il priorise le Québec et qu'il arrivait des concurrents ontariens ou encore de Colombie-Britannique qui auraient un prix moins élevé, qui pourraient dire : Écoutez, le P.D.G. au Québec, là, achète exclusivement québécois quand je suis capable de faire la démonstration que je pouvais fournir le même produit à un moindre coût... Donc, c'est là que la SQDC pourrait être, je dirais, contestée juridiquement, de quelque façon?

Le Président (M. Merlini) : Me Lord.

• (16 h 10) •

M. Lord (Jean-François) : Tout dépendrait... Bien, tout dépendant effectivement de la mesure ou de l'étendue, là, des engagements. Là, on parle plus, évidemment, des acquisitions dans une dynamique de marché public, là, de la SQDC. Il faudrait voir, là, justement dans la mécanique de marché public, là, à quoi elle serait exactement assujettie. Là, c'est un peu difficile de voir dans... Bon. Tu sais, je vous avais dit quand même «un même produit». Parce que j'allais vous dire : Effectivement, ce n'est pas qu'une question de prix, il y a aussi une question, effectivement, au niveau des différentes qualités intrinsèques du produit et des besoins du marché, et donc il y a une série de considérations qui peuvent entrer dans une décision, sur des bases commerciales, là.

Le Président (M. Merlini) : Ça va, M. le député de Labelle?

M. Pagé : Oui. Ça va.

Le Président (M. Merlini) : M. le député de Saint-Jérôme, vous avez demandé la parole, à vous la parole.

M. Bourcier : Oui, oui, tout à fait, M. le Président. Bien, bonjour, premièrement, c'est la première fois que je vous parle directement aujourd'hui. La députée de Repentigny me fait souvent réagir — puis ça va être probablement ma seule intervention, là, justement, concernant ce point-là — et je reviens toujours avec le fameux malaise fédéral. Parce qu'on est là, là, encore une fois, et ce qu'on a comme discussion actuellement, c'est la possibilité de choisir un mot, «doit», ou l'autre, «peut», pour favoriser les producteurs québécois. C'est le fond de notre discussion.

Je rappelle que j'ai été discuter avec des gens du Nouveau-Brunswick, et on a eu la visite des gens de l'Ontario, qui nous ont parlé en particulier de certains aspects dont on discute actuellement, dont les responsabilités fédérales et provinciales par rapport au cannabis. Et eux, je regarde dans un document qui s'appelle Approche ontarienne sur la légalisation du cannabis, dans un diagramme, on nous explique que le gouvernement ontarien a laissé toute la responsabilité au gouvernement fédéral pour ce qui est de la culture et de la transformation du cannabis. Par contre, ils se sont gardé certains secteurs, entre autres, comme la santé publique, l'éducation, les taxes. La culture à domicile s'enligne complètement sur le fédéral, etc. Mais je reviens, pour apporter un peu plus au débat, que l'Ontario a laissé le champ libre à Ottawa de décider ce que nous, on est en train de discuter actuellement. Pour ce qui est du Nouveau-Brunswick, dans les discussions de leur groupe de travail, je n'ai pas rien vu de tel à ce qu'on est en train de discuter actuellement dans le projet de loi, ils laissent aller les affaires. La seule, probablement, recommandation, c'est : «Des personnes estiment en outre qu'il s'agit là [...] de garder les profits dans la province, au bénéfice des propriétaires de petites entreprises», dans le sens qu'ils voudraient — c'est un voeu — qu'il y ait des producteurs qui produisent le cannabis directement au Nouveau-Brunswick pour les gens du Nouveau-Brunswick. Alors, ça, c'étaient les discussions de ces deux provinces-là.

Mais, en conclusion à mon propos, puis je reviens souvent sur le malaise fédéral, c'est que le fédéral, selon les discussions qu'on a eues, va contrôler les importations et exportations selon certains règlements. L'accord de libre-échange est non valide au sujet du cannabis, il n'y a pas d'accord actuel de signé sur le cannabis parce qu'il n'est pas régi. Au final, puis ça a été toujours mon propos envers Ottawa, là, parce qu'il nous donne 100 % des troubles, mais, comme la mafia, bien, ils se gardent 25 % des profits, bien, on ne se tient pas debout devant Ottawa, on plie, on accepte, de peur de se faire rebiffer.

Et là je cite M. le juriste tantôt : On ne souhaite pas lier d'avance le Québec — là, je continue — car il semble y avoir un vide juridique de l'article sur le libre-échange, 1206, où on nous dit qu'il y a une possibilité de contradiction. Je ne me trompe pas en disant ça, là, ou... je suis à peu près autour de la vérité. Alors, nous, bien, on veut favoriser les producteurs québécois, contrairement aux autres provinces où je vous ai cité... pas du laxisme, mais c'est parce qu'eux, ils n'ont pas de malaise fédéral, ils aiment ça, eux autres. Mais nous, on veut être un petit peu plus fiers et donner l'exemple aux autres avec notre projet de loi.

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Saint-Jérôme. Mme la ministre.

Mme Charlebois : M. le Président, est-ce que le député, qui fait partie d'une formation politique qui prône l'indépendance du Québec, est en train de me dire qu'il ne conclurait pas d'accord avec l'ensemble des provinces du Canada? Est-ce que c'est ça qu'il est en train de nous dire quand il nous parle du malaise fédéral? Bien, si vous aviez un accord, vous auriez exactement les mêmes articles, bien que vous seriez un supposé État indépendant. Est-ce que vous êtes en train de me dire que la députée de Repentigny a le même genre d'allégeance que vous? Je ne pense pas, je ne pense pas. Je ne pense pas. Je ne pense pas qu'elle parle du malaise fédéral, et, si tel est le cas, je l'invite à se joindre à votre formation politique, parce qu'eux autres ce n'est pas leur orientation, de ce que j'ai déjà entendu, quoique il faudrait demander à M. Legault, qui vient de la vôtre, votre formation... euh! du chef de la deuxième opposition, excusez-moi.

Alors, pour revenir au «peut» et au «doigt», bien, je pense qu'on veut peut-être faire voir que, de ce côté-ci, on ne veut pas favoriser les producteurs québécois, mais on peut très bien faire ça avec le «peut», M. le Président, c'est là tout l'enjeu. Alors, on peut m'imputer toutes sortes de façons de voir les choses, mais moi, je persiste à dire que je veux que nous respections et que nous ne soyons pas en contravention avec l'accord de libre-échange, et je persiste à dire que le «peut» doit être là, et non pas le «doit». Et malheureusement je n'ai pas d'autre argumentaire.

Parce qu'on a beau en parler, en parler, en parler, j'ai beau faire tout le plaidoyer, mais, M. le Président, tout ce qu'on retrouve à dire, c'est que je ne veux pas appuyer la culture québécoise. Ce n'est pas ça, là. Ça n'a rien à voir, là. Ça n'a rien à voir. Parce qu'on en parle dans le texte, là : «Peut être effectué prioritairement». Puis, M. le Président, je ne vois pas pourquoi on n'appuierait pas notre marché québécois, là, sincèrement, là. Il faut qu'ils aient des permis, il faut qu'ils aient fait toute la liste des choses à faire. Mais, ceci étant dit, avec le «peut», on peut tout faire ça, M. le Président. Il ne faut pas qu'on pense que je ne veux pas aider le marché québécois, on n'est pas là du tout, du tout, du tout. On peut aider le marché québécois, mais on ne fera pas... l'économie du Québec, ça ne sera pas une économie de cannabis, comme certains pourront vouloir le faire.

Nous, ce qu'on souhaite, c'est ramener les clients du marché illégal vers un marché légal. Puis je prends la peine de le spécifier, parce qu'encore là on essaie de faire un agrandissement du cercle, là. Tout ce qu'on veut faire, c'est ramener les clients qui achètent sur un marché illégal vers un marché légal. Et, quand ça va être possible, M. le Président, ça va être assez surprenant de voir combien il y a de personnes qui consomment qui ne le disent pas en ce moment. Parce qu'on ne les voit pas. Le marché criminel ne nous fait pas la liste de ses clients, M. le Président. Jamais il ne nous envoie ses états financiers, jamais il ne nous parle de l'état de santé de ses clients, jamais il ne nous dit combien il y en a, de clients. Mais j'imagine que, s'il continue encore de vendre du cannabis, c'est parce qu'en quelque part ils en vendent. Bon, bien, ceux qui sont déjà sur le marché illégal, on va les ramener vers un marché légal. C'est tout ce qu'on vise à faire.

Puis, vous savez, on a réduit le taux de tabagisme. Je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas arriver à faire la même chose avec ça, tout en ayant des produits québécois. On ne veut pas développer un nouveau marché, M. le Président. Je le répète, là. Je le répète, même si on veut prétendre ça. On ne veut pas développer un nouveau marché, on veut juste ramener les gens du marché illicite vers un marché licite, donc illégal vers légal. C'est tout ce qu'on cherche à faire ici, M. le Président. C'est important que je le répète parce que je ne veux pas que les citoyens du Québec pensent que je veux faire du Québec une économie de cannabis. Ce n'est pas ça qu'on veut faire. Ce qu'on va faire avec l'argent du cannabis, c'est le cannabis qui va payer pour le cannabis, pour faire de la prévention, puis là je le sais, qu'il y en a qui vont prendre mes mains, là, il y en a qui aiment ça. Mais l'économie... l'argent qui va... la rentabilité qui va avoir été là va servir pour la prévention et pour les services qui se rattachent au cannabis, et ça ne sera certainement pas pour faire des revenus, faire de l'État du Québec une économie de cannabis. Ce n'est pas là qu'on est. Il y a des provinces qui font ce choix-là. On respecte ça, c'est leur choix. Nous, on n'est pas là, au Québec. Et je ne pense pas que mes collègues parlementaires, pour la plupart, ont cette intention-là non plus.

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, Mme la ministre. M. le député de Labelle, il vous reste deux minutes.

• (16 h 20) •

M. Pagé : Bien, en fait, à partir de ce que la ministre vient de dire, puis des propos aussi de la députée de Repentigny, à l'effet qu'on ne souhaite pas de toute façon faire la promotion du cannabis, on ne souhaite pas... mais en même temps on souhaite qu'au moins... bien, si on est pour en consommer, aussi bien avoir une économie québécoise florissante. Par contre, est-ce qu'on pourrait dire que... Est-ce que ça serait possible, dans nos accords intergouvernementaux, interprovinciaux, de dire : Bien, pour cette économie-là, nous, on s'exclut, on exclut le cannabis de ces accords? Et ça voudrait dire que nos producteurs québécois vendraient à la SQC mais n'auraient pas cette opportunité-là de vendre à l'extérieur du Canada. Est-ce qu'on pourrait s'exclure? Parce qu'à partir du principe... Un peu comme la députée de Repentigny disait tantôt, c'est qu'on veut faire de la prévention, on veut même souhaiter en diminuer, mais en même temps on est en train de se faire des guerres de prix pour dire : Bien, est-ce qu'on va pouvoir en vendre plus? À quelque part, ce n'est pas ce que l'on souhaite. Est-ce que c'est possible d'imaginer que le cannabis soit exclu des accords canadiens? Est-ce que c'est possible de l'imaginer, pour qu'on puisse se dire : Bien, commençons juste avec une production québécoise pour les Québécois et on verra dans quelques années si on a envie d'en vendre à l'extérieur du Canada... à l'extérieur du Québec ou même à l'extérieur du Canada? Est-ce que ça serait pensable? Est-ce que c'est faisable?

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Bien, écoutez, dans la vie, tout est possible, mais ce que je vais dire au député de Labelle, c'est que, même si on s'exclurait d'en vendre ailleurs, il n'en demeure pas moins que, si... On n'en a pas assez pour fournir notre marché en ce moment, dans la période de transition. Là, on extrapole loin, mais c'en... Honnêtement, là, l'accord de libre-échange, là, c'est, oui, possible, mais ce n'est pas ici qu'on va décider ça, parce que ce n'est pas la Société québécoise du cannabis qui signe l'accord de libre-échange, d'une part, puis, d'autre part, moi, tout ce que je cherche à faire, c'est approvisionner, approvisionner le marché québécois, approvisionner les jeunes Québécois de 18 à 22 ans, qui sont majoritairement les consommateurs, et je veux m'assurer qu'on ait suffisamment de produits.

Je ne suis même pas inquiète. Je ne suis même pas inquiète que les producteurs québécois vont être capables de vendre à la Société québécoise du cannabis à un prix compétitif. Mais, advenant le cas où le marché n'est pas compétitif, ça va régulariser le marché. Parce que, sincèrement, il faut y penser. Si on veut enlever les gens du marché criminel, il va falloir qu'on le soit, compétitif. Et, pour ça, au départ, si on manque de produits, mais c'est... Parce qu'on a les tarifs électriques — vous l'avez dit vous-même la semaine passée, là — les meilleurs, là. Ça fait qu'on va sûrement être parmi les meilleurs, là, sinon le meilleur producteur, mais est-ce qu'on veut en faire un agrandissement, comme vous le dites? Pas nécessairement. Mais ça, ça sera négocié ailleurs, l'accord de libre-échange. Tout ce qu'on vient dire, c'est : Ne nous mettons pas des bâtons dans les roues. Puis, vous avez raison, peut-être que, dans trois ans ou même dans un an et demi, deux ans, si les législateurs décident de réouvrir cette loi-là puis ils veulent changer ça, ils le changeront. Mais, pour le départ, ne nous mettons pas des contraintes qui ne sont pas utiles pour la période de transition.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. Votre temps, malheureusement, M. le député de Labelle, est écoulé. Est-ce que j'ai d'autres interventions sur le sous-amendement de M. le député de Labelle? Mme la députée de Vachon, vous me faites signe, vous avez deux minutes.

Mme Ouellet : Oui. Je voudrais savoir de monsieur...

Une voix : Lord.

Mme Ouellet : Or?

Une voix : Lord.

Mme Ouellet : Lord, de M. Lord. Effectivement, la question de mon collègue est très pertinente, parce que vous dites que ça serait une violation à la libre concurrence, mais on aurait quand même le choix de dire que nous, le marché du cannabis, on ne le soumet pas à la libre concurrence et on demande à ce que la SQC s'approvisionne exclusivement du côté de producteurs québécois, sur le territoire québécois.

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Bien, en fait, je permettrai à M. Lord de répondre.

Le Président (M. Merlini) : Me Lord. Me Lord, à vous la question.

M. Lord (Jean-François) : C'est un peu délicat de répondre à la question, parce que j'essaie de ne pas déborder la frontière du juridique et ne pas tomber dans la dimension politique, effectivement, qui relève de vous. Une position comme ça, comme je l'ai dit la semaine passée, pourrait théoriquement être possible mais serait en rupture avec la position du Québec des 30, 30 quelques dernières années en matière de libre-échange.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Me Lord. Mme la députée de Vachon.

Mme Ouellet : On a donc notre réponse très claire : Elle pourrait être possible. Je comprends que c'est en rupture, mais ce n'est pas souvent qu'on légalise un marché aussi grand que le cannabis, de plusieurs milliards de dollars, on n'a pas fait ça dans les 30 dernières années, je crois. Et on a déjà fait ce choix-là pour d'autres produits au Québec, l'hydroélectricité particulièrement, on a décidé que l'hydroélectricité était produite sur le territoire québécois, et c'est l'hydroélectricité qu'on avait, et on fait le choix de savoir où on va le produire, parce qu'on a donné à Hydro-Québec le monopole complet. Donc, oui, c'est possible. Moi, c'est la question que je voulais avoir.

Je comprends que c'est différent, je comprends que c'est une autre avenue, mais on peut décider, pour un produit comme celui-là qui est très spécial, qui a beaucoup d'impacts sur la santé, qu'on ne veut pas qu'il soit géré en fonction des profits puis du rendement, donc qu'on veut avoir une vision complètement différente de ce produit-là. On pourrait décider, en rupture avec la politique des 30 dernières années, vous me le dites, et je peux très bien le soupçonner, de dire que, oui, on décide de garder ce marché-là. Ça fait que, juridiquement, c'est possible...

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, Mme la députée de Vachon. Malheureusement, votre temps est écoulé sur le sous-amendement de M. le député de Labelle. M. le député de Saint-Jérôme, vous me faites signe, vous voulez intervenir.

M. Bourcier : Et ça sera très bref. J'ai deux mots : Pourquoi pas? C'est tout.

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Saint-Jérôme. M. le député de Borduas.

Mme Charlebois : Bien, juste dire...

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre. Excusez, excusez-moi, oui?

Mme Charlebois : ...au bénéfice de mes collègues, quand on parle d'électricité, on l'a nationalisée, c'est vrai, mais on en vend ailleurs, hein? En vertu d'accords, pas en vertu de l'Accord de libre-échange canadien, mais en vertu de d'autres accords, on vend notre électricité.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. M. le député de Borduas, vous voulez prendre la parole?

M. Jolin-Barrette : Oui.

Le Président (M. Merlini) : Sur le sous-amendement?

M. Jolin-Barrette : Oui, sur le sous-amendement, mais, sur l'hydroélectricité, c'est du gré à gré aussi avec nos partenaires, et d'ailleurs il y a une entente qui a été signée dernièrement avec le Massachusetts. On souhaite que ça va se réaliser, mais ça demeure toujours du gré à gré dans ces cas-là.

Je serais juste curieux... Parce que j'ai entendu des explications de Me Lord, de M. le sous-ministre également, aux Finances. Je voudrais juste faire le parallèle avec l'alcool, au niveau de l'approvisionnement, dans le fond, interprovincial. Dans le fond, il y avait des barrières. Ça, c'est tombé avec cet accord-là, les barrières avec l'alcool, au niveau de l'approvisionnement interprovincial?

M. Lord (Jean-François) : En fait, les barrières auxquelles vous référez, c'est... dites-moi si je me trompe, mais je crois que c'étaient les restrictions d'importation personnelle.

M. Jolin-Barrette : Oui, les restrictions d'importation personnelle.

M. Lord (Jean-François) : ...qui ont été modifiées, là, par des changements règlementaires il y a quelques...

Une voix : ...

M. Lord (Jean-François) : Il en reste encore, mais, je pense, c'est ça, il y en a beaucoup qui ont été enlevées. Au niveau du commerce à l'échelle interprovinciale, on a maintenu la possibilité d'avoir des sociétés d'État et des monopoles, donc, d'importation et de commercialisation des boissons alcooliques. Ça, ça a été maintenu. Ça existait avant et ça peut toujours exister maintenant.

M. Jolin-Barrette : Sauf que ce n'était pas possible pour une personne de commander d'une autre province, supposons, du vin d'un producteur... Supposons, vous ne pouviez pas commander du vin de la vallée de l'Okanagan au Québec. Vous deviez passer par la Société des alcools du Québec.

Le Président (M. Merlini) : Je crois qu'on s'éloigne ici, un peu, du sous-amendement, là.

M. Jolin-Barrette : Bien, pas...

Le Président (M. Merlini) : Arrivez... Je vois peut-être un lien, là, mais j'aimerais que vous le précisiez un peu plus, là, par rapport à la SQDC et l'approvisionnement de cannabis, là.

M. Jolin-Barrette : Je pense que vous le voyez très bien, M. le Président. Je veux établir un parallèle entre les deux.

Le Président (M. Merlini) : Je le vois très bien, mais, pour le bénéfice de nos auditeurs, peut-être qu'il faudrait être un peu plus...

M. Jolin-Barrette : Mais j'y viens, j'y viens, M. le Président. J'y viens avec ma question.

M. Lord (Jean-François) : Alors, la restriction dont vous parlez existe toujours. On ne peut toujours pas commander du vin de la vallée de l'Okanagan et le faire livrer. Ce qui a été assoupli, c'est ce qu'on importe avec soi quand on traverse les frontières... bien, les frontières, il n'y a pas de frontières entre les provinces, là, mais quand on change de territoire.

M. Jolin-Barrette : Donc, les Québécois, désormais, peuvent aller à la LCBO à Ottawa, acheter leurs bouteilles de vin à la LCBO, dans un Beer Store, et par la suite traverser la Gatineau... traverser la rivière Outaouais, et maintenant le faire de façon légale, mais ce n'est pas possible de commander interprovincial.

M. Lord (Jean-François) : Puis, quand on le fait en personne, c'est avec une quantité limitée.

M. Jolin-Barrette : Puis quelle est cette quantité? Savez-vous?

Mme Charlebois : Je ne me souviens pas, mais...

Le Président (M. Merlini) : Là, M. le député, là, je vais vous rappeler à l'ordre, parce que, là, vous vous éloignez, là, de la nature de notre sous-amendement ici, là. Je vous ai demandé, pour le bénéfice surtout de nos auditeurs, d'arriver au point où vous voulez aller avec ce questionnement-là. Je vous demanderais de le faire, s'il vous plaît, toujours en ligne avec le sous-amendement.

Mme Charlebois : C'est quoi, le lien avec la quantité? C'est ça qu'il te demande.

M. Jolin-Barrette : Bien, je croyais que Me Lord voulait...

Mme Charlebois : Non, non, on veut entendre...

Le Président (M. Merlini) : Non, non, là, j'ai intervenu parce que, là, je me demandais, là... On n'est pas dans les quantités, là, ici, là, dans la question du sous-amendement. Je vois ce que vous voulez faire, le parallèle avec la SAQ, qui est la société mère de la SQDC, selon le projet de loi, mais j'aimerais que vous arriviez à la question qui serait pertinente ici au sous-amendement, dans votre raisonnement, là. Je vois votre ligne de raisonnement, allez-y, pour le bénéfice de nos auditeurs, parce qu'on n'est pas en termes de quantité, là, ici, on parle d'approvisionnement de la SQDC.

M. Jolin-Barrette : Bien, c'est de l'approvisionnement dans les deux cas, au niveau, ultimement, du consommateur, M. le Président. Alors, ce qu'on constate, c'est qu'il y a une certaine forme de protection du marché de la Société des alcools du Québec.

Alors, durant nombre d'années, il y a eu de la protection de marché. Alors, je suis curieux de savoir, un, c'est quoi, la quantité qui est autorisée maintenant puis durant combien d'années il y a eu de la protection de marché pour le monopole de la SAQ associé au niveau du transport interprovincial de boissons alcooliques, et, deuxièmement, bien, c'est ça, combien ça... Ça fait combien de temps que c'est en place, puis la quantité?

Mme Charlebois : M. le Président.

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Juste pour clarifier les choses ici, on parle des achats de la filiale et non pas des achats personnels. Ça fait que je pense qu'effectivement on n'est pas dans la même dimension.

Moi, si je vais m'acheter... Parce que mon comté est limitrophe à l'Ontario, je pourrais traverser et aller en chercher, mais je ne suis pas la SAQ. Je suis Lucie Charlebois, hein? Alors, ici...

Une voix : ...

Mme Charlebois : La députée de Soulanges, excusez-moi, M. le Président. Alors, ici, on parle de la filiale. La filiale ne traversera pas la ligne. Ce n'est pas comme ça que ça fonctionne. C'est une personne morale, ce n'est pas une personne physique comme moi, avec deux jambes, deux bras et une tête. Alors là, on n'est pas dans les mêmes eaux, on n'est pas dans le même type d'achats du tout, du tout, du tout.

Mais, pour répondre à votre question, on n'a pas le détail de tout ça ici, mais on pourra vous revenir puis vous fournir le renseignement, mais ça a été modifié l'année passée, je pense. Ça ne fait pas longtemps que ça a été modifié. Les Québécois ne savaient même pas qu'ils n'avaient pas le droit d'aller acheter dans une certaine quantité du vin d'une province à l'autre. Ils l'ont su quand on a fait le changement.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre, pour cette précision. M. le député de Borduas.

• (16 h 30) •

M. Jolin-Barrette : Bien, pour le lien, M. le Président, je pense que c'est pertinent, parce qu'on parle d'approvisionnement, puis, malgré le fait que la Société québécoise du cannabis soit une personne morale, bien, elle va s'approvisionner, puis ça a l'air qu'elle va s'approvisionner avec de l'interprovincial. Alors, moi, je trouve qu'il y a un lien parce que, si... Ce qui est bon pour pitou, d'habitude c'est bon pour minou aussi. Alors, si on dit à la Société québécoise du cannabis : Vous pouvez aller vous approvisionner dans les autres provinces... là, on va dire aux consommateurs québécois : Bien, vous vous approvisionnez uniquement au Québec, alors qu'à la SAQ, à la société mère, bien, durant des années on a assuré la protection de ce monopole-là.

Alors, je suis quand même curieux, dans un souci de faire et de protéger... bien, en fait, de favoriser les producteurs québécois, en matière de cannabis, sur un nouveau marché, de voir quelles mesures législatives peuvent être mises en place pour favoriser le développement de ces entreprises-là sur le territoire québécois. Et il y a plusieurs façons de le faire de façon législative. Si on a interdit à la SAQ de commander par Internet d'une autre province directement et que, jusqu'à tout récemment, on interdisait aux gens de prendre leurs véhicules ou de prendre l'avion, d'amener des boissons alcooliques d'une façon interprovinciale, nécessairement il y a une raison pour ça, c'est pour favoriser le monopole d'achat de la SAQ, pour que les retombées tombent à la SAQ.

Alors, nous, on va plus loin que ça puis on dit : On devrait peut-être favoriser les producteurs québécois. Au-delà de favoriser, dans le fond... L'achat va être à la Société québécoise du cannabis, mais, par la bande, le producteur ultime, on veut qu'il soit en territoire québécois, on veut qu'il soit en sol québécois. On veut faire en sorte que, le gouvernement du Québec, s'il a des retombées économiques, bien, ça reste au Québec.

Alors, c'est le sens de tous nos propos depuis le début, à la fois du député de Labelle, du député de Saint-Jérôme, de la députée de Vachon, de la députée de Repentigny et moi-même. Alors, j'ai proposé plusieurs voies à la ministre, de passage, pour vraiment dire : Bien, on devrait le mettre, le «doit», dans le sous-amendement, et, à date, moi, je vous le dis, malgré les explications, moi, ça ne me convainc pas qu'on ne peut pas le mettre... et qu'on doit le mettre.

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : M. le Président, «l'achat de cannabis par la filiale — la filiale qui est la Société québécoise du cannabis — peut être effectué prioritairement auprès des producteurs situés sur le territoire du Québec». Je n'ai pas d'autre mot à dire que... Moi, en raison de tout ce qu'on a dit, là... Puis on parle des achats de la filiale. Alors, en raison de toutes les explications qu'on a données... Je comprends que je n'arrive pas à satisfaire mes collègues, mais j'en appelle au vote.

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, Mme la ministre. M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Des fois, M. le Président, on se retrouve dans des situations qui sont, comment je pourrais dire... ça n'a pas vraiment de bon sens, hein? Je vous donne un exemple. Jusqu'à tout récemment, vous pouviez aller aux États-Unis puis ramener deux bouteilles de 750 millilitres de vin. À la frontière, vous déclarez ces deux bouteilles-là. Mais vous ne pouviez pas aller chercher deux bouteilles de 750 millilitres de vin en Ontario puis les ramener au Québec. Pourquoi? Bien, le législateur a fait un choix de protéger le monopole d'achat de la SAQ.

Là, ce qu'on demande à la ministre, c'est de favoriser les producteurs de cannabis au Québec. On a des propositions législatives. Le collègue de Labelle en a déposé une. Moi, j'en ai déposé une. Et là on se retrouve dans une situation où le libellé qui est proposé par la ministre, c'est un libellé qui est ferme mais qui ne veut rien dire, dans le fond. C'est possible de le faire. Mais tout est possible dans la vie! Tout est possible. Puis je l'ai exprimé à la ministre la semaine dernière. Le P.D.G., là, quand il est assis, là... La ministre nous dit : Ça ne sera pas un fou. Mais ce n'est pas une question d'être fou ou non, c'est une question d'orientation, de directives gouvernementales.

Écoutez, M. le Président, le Centre des congrès à Québec, O.K., il aurait pu aller en appel d'offres, il aurait pu utiliser plusieurs fournisseurs. Mais, non, ils ont décidé de choisir toujours le même fournisseur depuis 25 ans, toujours. Mais il aurait pu...

Mme Charlebois : ...

Le Président (M. Merlini) : Le député de Borduas se sert d'un exemple récent pour illustrer son point de vue d'approvisionnement de la SQDC. M. le député, s'il vous plaît, ramenez ça vers l'amendement, le sous-amendement, s'il vous plaît.

M. Jolin-Barrette : Bien oui, puis vous le dites bien, M. le Président, c'est de l'approvisionnement. D'un côté, c'est de la bouffe, hein, l'autre côté, ça va être des substances à consommer. Mais c'est juste pour vous dire que, quand on est avec des organismes qui ont un lien avec l'État québécois, que ce soit paragouvernemental, société d'État, filiale de société d'État, ce n'est pas parce que le gouvernement, en haut, dit : Vous devriez le faire qu'ils vont le faire.

Et le meilleur exemple, c'est l'autre bord de la rue, c'est au Palais des congrès... au Centre des congrès, pardon, puis au Palais des congrès, à Montréal. Puis qu'est-ce qu'il a fallu qui arrive? La ministre du Tourisme, elle a dit : Bien, écoutez, on a écrit une lettre puis on souhaite que vous vous approvisionniez... que vous alliez en appel d'offres. Puis qu'est-ce que le P.D.G. a dit, du Centre des congrès? Il a dit : Non, non, ça ne nous intéresse pas. Puis là qu'est-ce que la ministre a décidé de faire? Bien là, il leur a envoyé une directive très clairement, puis ils vont procéder à la modification.

Alors, ça, c'est une illustration concrète de l'importance de l'écrire directement dans la loi et de ne pas se fier nécessairement au bon vouloir des gestionnaires de la filiale de la société d'État. Tout le monde est présumé de bonne foi, M. le Président, mais, quand on est assis... dans le quotidien, de gérer une filiale ou de gérer une entreprise commerciale, de gérer un business, autant soit-elle une filiale d'une société d'État, paragouvernementale, ou tout ça, il y a différents impératifs qui se posent. Puis les décisions qui sont prises, bien, si ce n'est pas écrit dans la loi, bien, il va y avoir une certaine latitude, et, moi, ça m'inquiète.

Alors, je réitère mon point, et je ne peux pas, je pense, donner un meilleur exemple que ça, sur l'importance de l'indiquer très clairement. Et d'ailleurs la ministre du Tourisme n'était pas contente, l'a fait savoir, puis elle a rabroué le président du Centre des congrès, et au vu et au su de tout le monde. Et d'ailleurs, je dois dire, c'est à cause du député de La Peltrie qu'on a fait ce gain-là.

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Borduas. Est-ce que j'ai d'autres interventions sur le sous-amendement de M. le député de Labelle?

Mme Charlebois : Rapidement...

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Rapidement, juste dire au député de Borduas, qui est juriste, qu'il y a une différence entre un achat individuel puis un achat d'une société d'État pour des produits à revendre. Là, quand il me parle du Centre des congrès, c'était dans sa loi constitutive, là, ça fait qu'ils sont en train de changer ça, effectivement, mais ça... Une chance que vous existez, parce que la planète arrêterait de tourner! C'est tellement d'une évidence même, les citoyens vont en juger à un moment donné.

Mais sincèrement, là, revenons donc, revenons donc à l'amendement, là. On ne peut pas parler d'achat d'une bouteille, deux bouteilles d'un particulier puis comparer les achats d'une filiale. Ça n'a rien à voir. Ça n'a rien à voir avec le projet de loi, et il le sait.

Alors, M. le Président, j'ai entendu tout leur argumentaire. Moi, je persiste à dire, malgré tout ce qu'ils m'ont dit, que leur argument ne nous a pas convaincus de ce côté-ci. Alors, j'invite les collègues à passer au vote, M. le Président.

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, Mme la ministre. M. le député de Borduas, il vous reste cinq minutes.

M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. Dans un premier temps, je tiens à remercier la ministre de faire l'apologie de notre formation politique. On en est très reconnaissants, et je comprends qu'elle reconnaît la pertinence, et les idées, et tout le travail qu'on accomplit pour les Québécois. Alors, je suis fier de l'avoir convaincue et que notre formation l'ait convaincue. Alors, j'en suis très heureux.

Le Président (M. Merlini) : Je vous en prie. Mme la ministre, question de règlement.

Mme Charlebois : Est-ce qu'il y a une règle qui parle du sarcasme parfois? C'était sarcastique, l'affirmation que j'ai faite.

Le Président (M. Merlini) : Non, malheureusement, il n'y a pas de question de règlement sur ce...

Mme Charlebois : Ah! O.K., excusez.

Le Président (M. Merlini) : ...sur ce point-là. Par contre, il y a l'article 32 qui parle du décorum que nous devons maintenir au sein de nos travaux. Ce que je souhaite ardemment. M. le député de Borduas, si vous avez une autre intervention sur le sous-amendement du député de Labelle.

M. Jolin-Barrette : Certainement, M. le Président. Écoutez, je suis un peu déçu parce que la ministre fait toujours référence à ma formation de juriste, et un des principes de base qu'on apprend lorsqu'on est juriste, c'est que la bonne foi se présume, et je présumais de la bonne foi de la ministre et de ses propos, alors je les ai peut-être mal interprétés, mais je croyais que c'était...

Le Président (M. Merlini) : M. le député, vous avez une question de règlement.

M. Plante : Bien, en formulant sa phrase, le député de Borduas indique ou propose des propos indignes à la ministre. Il lui prête des intentions, parce qu'en disant qu'il pensait qu'elle était de bonne foi mais finalement que ce n'était pas ça, c'est comme de dire qu'elle n'est pas de bonne foi, tu sais. La langue française est belle et... mais, tu sais, il faudrait que les gens de la coalition comprennent un petit peu qu'on est sur la terre aujourd'hui et qu'on voudrait avancer. Et on est contents qu'il nous fasse l'apologie de son C.V., mais on aimerait juste avancer et voter le sous-amendement du député de Labelle.

• (16 h 40) •

Le Président (M. Merlini) : On ne transformera pas l'étude du projet de loi n° 157 en festival de l'article 35, là. Mais, effectivement, l'article 35.6°, c'est très clair qu'il faut accepter la parole que chacun des députés donne à cette table. Il ne faut pas laisser interpréter les propos d'une autre façon que d'accepter la parole qui est donnée, soit par la ministre, ou un député de l'opposition, ou un député ministériel.

Alors, M. le député de Borduas, avez-vous une autre intervention sur le sous-amendement du député de Labelle?

M. Jolin-Barrette : Oui, mais, M. le Président, je demeure convaincu que nous devons adopter le sous-amendement avec l'utilisation du mot «doit», ce serait la chose à faire si on veut favoriser la production québécoise. Et ultimement, et j'ai entendu les représentants du ministère des Finances, on est sur une base hypothétique, et il y a plusieurs modèles économiques qui peuvent s'appliquer. Alors, il s'agit d'une question de choix à ce moment-ci, et je ne partage pas le choix qui est fait du côté du gouvernement.

Alors, pour la suite du projet de loi, M. le Président, je souhaite qu'on réussisse à trouver plus de terrains d'entente, parce que c'est quand même au coeur du développement. Et d'autant plus qu'avec la fin de la semaine dernière, les développements qu'il y a eu au niveau fédéral, avec le Sénat, on se retrouve dans une situation où il y a lieu... Bien, le projet de loi va être probablement modifié au fédéral, et il y a lieu de mettre toute la pression requise et nécessaire sur le gouvernement fédéral pour faire entendre les revendications du Québec, pour faire entendre les revendications des autres provinces aussi par rapport au projet de loi.

Et on a l'opportunité, là, présentement, aujourd'hui, dans les jours qui viennent, de vraiment arriver avec une pièce législative qui va répondre à la volonté des Québécois. Et la ministre a une opportunité, là. On était peut-être un peu coincés par le temps précédemment, mais là on a une fenêtre d'opportunité aussi pour envoyer un message clair. Parce que le gouvernement fédéral doit négocier, doit négocier avec le Sénat, mais doit négocier aussi avec les autres provinces. Alors, je lui tends la main, M. le Président, pour...

Des voix : ...

M. Jolin-Barrette : ...«doit», «doit». Je lui tends la main afin de modifier son amendement.

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, M. le député de Borduas. Alors, ne voyant pas d'autre intervention sur le sous-amendement du député de Labelle, je mets donc le sous-amendement aux voix.

M. Pagé : Par appel nominal.

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Labelle. L'appel par vote nominal est demandé. Pour, contre, abstention. Mme la secrétaire.

La Secrétaire : M. Pagé (Labelle)?

M. Pagé : Pour.

La Secrétaire : M. Bourcier (Saint-Jérôme)?

M. Bourcier : Pour.

La Secrétaire : Mme Charlebois (Soulanges)?

Mme Charlebois : Contre.

La Secrétaire : M. H. Plante (Maskinongé)?

M. Plante : Contre.

La Secrétaire : M. Simard (Dubuc)?

M. Simard : ...

La Secrétaire : M. Simard?

M. Simard : Contre.

La Secrétaire : Pardon. Excusez. Je ne vous ai pas entendu.

M. Chevarie (Îles-de-la-Madeleine)?

M. Chevarie : Contre.

La Secrétaire : Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré)?

Mme Simard : Contre.

La Secrétaire : M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Pour.

La Secrétaire : M. Merlini (La Prairie)?

Le Président (M. Merlini) : Abstention. Alors, le sous-amendement est donc rejeté. Nous revenons donc à l'amendement proposé par Mme la ministre à l'article 23.2 introduit dans l'article 5. Est-ce que j'ai des interventions? M. le député de Labelle, pour vous informer qu'il vous reste — je ne veux pas me tromper — 14 minutes.

M. Pagé : O.K. Je n'ai pas l'intention de parler très longtemps, mais, juste pour la bonne compréhension des choses, je pense que, l'objectif ici, là, qui est clair pour tout le monde, on souhaite qu'il y ait le plus possible de producteurs québécois qui puissent fournir, alimenter la SQDC. Ça va créer de l'économie au Québec, ça va permettre à des Québécois de travailler. L'association des 900 producteurs en serre au Québec, là, ils sont venus nous le dire : Nous, là, si on a cette opportunité-là, s'il y a une facilité aussi à autoriser, on souhaiterait pouvoir produire puis on a la capacité de le faire.

Partant de ce principe-là, partant aussi du principe que plus les portes sont ouvertes, plus on risque d'avoir des mégaproducteurs, qui va probablement défavoriser les petits producteurs... C'est plus difficile de compétitionner contre un mégaproducteur, une grosse multinationale qui est financée, en plus, de façon qu'on pourrait dire peut-être douteuse. Alors, ma question est la suivante : Est-ce qu'il y a une possibilité, dans le projet de loi... Je réfléchis tout haut, là, parce que j'essaie de voir de quelle façon on pourrait favoriser le développement de la production pour une filiale très québécoise de petits producteurs. Et est-ce que ce serait possible — je demande aux juristes, là — d'inclure, là, quelque part dans loi, de limiter le nombre de tonnes que la SQDC pourrait s'approvisionner chez x, y fournisseurs?

Je m'explique. Je sais que la ministre va me dire : Oui, mais il faut que j'en aie en quantité suffisante dans les prochains mois. Je comprends ça. Je comprends ça, mais en même temps, dans les prochains mois, il ne va y avoir qu'une quinzaine de succursales, ensuite une quarantaine. Et, on nous dit, d'ici deux à trois ans, il y en aura peut-être 150, 200, on ne sait pas combien. Bon. Mais, dans les prochains mois, avec 15, ou 20, ou 40 succursales, on n'a pas besoin d'avoir une quantité de producteurs si importante. Mais, si on veut favoriser le déploiement de petits producteurs, est-ce que légalement il serait possible de limiter le nombre de tonnage acheté de la part de la SQDC auprès de nos producteurs? Alors, ce qui ferait en sorte que si...

Parce que, là, je pense qu'il y a des ententes, là, qui sont faites, où on parle de 20 000 tonnes, 30 000 tonnes, je ne sais plus combien. Mais on comprend que c'est difficile, là, pour les petits, là, d'aller compétitionner. Puis on le sait que, si on favorise, là, les gens de l'UPA, là, puis des producteurs de serre du Québec, là, ils vont vouloir faire de petites productions plus à saveur du terroir, disons-le comme ça. Parce qu'il y en a qui sont venus nous dire : Bien, si c'est une production qui est plus de l'Estrie, dans le coin des pommes, ça va peut-être être différent qu'une production du coin du Saguenay—Lac-Saint-Jean avec des saveurs de bleuets. Bon. Mais, bon, je ne dis peut-être pas n'importe quoi, parce que peut-être qu'un jour on verra cela, hein, peut-être qu'un jour on verra cela. Mais, pour cela, compte tenu qu'on est au jour 1 et qu'on veut laisser une chance aux petits producteurs, bien, ils risquent de ne pas avoir de chance si c'est vraiment bar ouvert et que les mégaproducteurs ont cette capacité-là finalement de quasiment couper l'herbe sous le pied aux petits producteurs qui voudraient voir le jour, là.

Parce que, là, cette réalité-là, là, moi, là, déjà chez moi, sur le terrain, là, dans mon comté, je la vis, des petits producteurs qui me disent : Je suis en train de monter un projet, là, mais je regarde les gros, gros, gros, là, qui sont en train de s'approprier du marché, et là qui me disent : Bien, si on ne me laisse pas une chance d'intégrer le marché, bien, éventuellement, il n'y en aura pas, de projet. Et ces projets-là vont se retrouver chez qui? Chez quelques mégaproducteurs, puis en plus, on le sait, qui... souvent, les profits ne resteront pas au Québec, parce que les propriétaires ne sont pas Québécois. Ils vont créer des jobs ici. Tant mieux. Mais on aime mieux avoir des propriétaires dont l'argent va être investi au Québec, parce que les propriétaires sont ici, au Québec.

Alors, est-ce qu'il y a possibilité dans la loi, est-ce que ça serait légal de le faire, que d'obliger de restreindre la SQDC à une limite de tonnage quant à son approvisionnement? On pourrait même dire que ça pourrait entrer en vigueur, cette limite de tonnage, dans deux ans, dans trois ans à la limite. Parce que je comprends l'inquiétude de la ministre de nous dire : Il faut que, dans un premier temps, je sois capable de compétitionner, il faut, dans un premier temps, que je sois capable de répondre à la demande. Ça, j'en conviens, là. J'en conviens, mais cette question-là m'apparaît fort pertinente, parce que, sinon, là, ce qui est en train de se produire, là... Puis, chez nous, moi, je le vis, là, il y a des producteurs qui me disent : J'avais envie de monter un projet, mais je vois aller les gros, là, puis je n'en monterai pas, de projet.

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

• (16 h 50) •

Mme Charlebois : Honnêtement, je peux faire vérifier en vertu des accords internationaux. Mais, au-delà de tout ça, ne sachant pas l'ampleur du marché et comment le marché va se déployer, ce n'est pas souhaitable, d'une part, à mon avis. Et, deuxièmement, ça, ça pourrait être fait à l'intérieur de règlements. Ça pourrait être fait par des règlements ultérieurement, mais pas à l'intérieur de la loi, limiter des quantités, ne sachant pas où va être le marché. Ça pourra peut-être être fait ultérieurement, à la révision de la loi. Mais, en attendant, on pourrait le faire très bien par règlement. Je ne souhaite pas voir ça apparaître dans la loi. En tout cas, notre parti, le gouvernement, là, l'ensemble de nous autres, les parlementaires du gouvernement, on ne souhaite pas voir ça atterrir dans la loi. Parce que, si on savait exactement le marché québécois, je pourrais vous répondre. Mais on ne l'a pas. Puis je n'ai pas fait vérifier encore l'Accord de libre-échange canadien seulement, là.

Le Président (M. Merlini) : M. le député.

M. Pagé : En fait, la prémisse derrière votre réponse, c'est : je ne connais pas le marché, donc je ne veux pas mettre de limite, je ne connais pas la quantité de ce que l'on va vendre. Alors, j'en conviens. C'est pour ça que, dans l'argumentaire que je présentais, je disais : Cet article-là pourrait entrer en vigueur dans deux ans, dans trois ans, pour permettre de répondre à la demande. Parce que sa préoccupation, «je veux être capable de répondre à la demande, que les succursales soient suffisamment approvisionnées et qu'on soit compétitifs», on convient tous de cela. Je n'ai pas de problème avec ça. Mais, à terme, si on veut laisser une chance à des petits producteurs de voir le jour... Elle me dit : Peut-être que ça pourrait se faire par règlement. Alors, si peut-être ça peut se faire par règlement, pourquoi qu'on ne le mettrait pas dans la loi?

Parce que j'aimerais ça qu'on évalue ce que ça veut dire, éventuellement, le tonnage déjà, là, qui est attribué par lettre d'entente, là, avec certains producteurs, là, j'aimerais ça qu'on évalue ce que ça va représenter comme chiffre d'affaires de dizaines, de dizaines et de dizaines de millions de dollars. Et qui vont enrichir qui? Quelques producteurs qui sont financés dans des endroits douteux et qui, dans plusieurs des cas, ne sont pas des producteurs québécois. Donc, oui, ils vont faire travailler des gens ici. On est bien contents de ça. Mais les profits vont s'en aller ailleurs, et on ne favorisera pas le déploiement de petits producteurs au Québec.

Alors, si la ministre me dit : Bien, je pourrais être ouverte à le regarder dans la réglementation, déjà, pour moi, c'est un gain. Déjà, pour moi, c'est un gain, mais pourquoi on ne pourrait pas le mettre dans la loi? Même si on pouvait inscrire... même si je suis ouvert à l'inscrire, cet article entrera en vigueur, par exemple, dans un an, dans deux ans, le temps de laisser le cours des choses et qu'on puisse mieux évaluer la situation.

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : En fait, depuis le début, M. le Président, ce qu'on souhaite, c'est de se donner le maximum de souplesse parce que c'est un nouveau phénomène que la légalisation et, par voie réglementaire, ça nous permet d'ajuster les choses rapidement, et dans tous les sens du terme, là, quand je dis «ajuster». Et je pense que, quand il y aura révision de la loi, on aura une meilleure connaissance du marché, et à ce moment-là on pourra prendre d'autres décisions.

Mais, à ce moment-ci, je pense que de se limiter ou de se mettre dans un carcan... Puis ce n'est pas parce que je ne veux pas qu'on favorise les petits producteurs, ça n'a rien à voir, c'est plus dans le sens où il faut être capables de voir le grand portrait, voir ce sera quoi, le marché québécois. Parce que c'est ça qu'on va faire, nous autres, on va faire du marché québécois. Alors, on va voir quelle sera l'ampleur du marché québécois, puis, comme je vous dis, à la révision de la loi, là on va être plus en mesure de... on va avoir vu évoluer, on va avoir des données, on va savoir où on s'en va exactement. Ça va être plus facile. Mais, en ce moment, se mettre des quantités limitées... Parce qu'une fois que c'est dans la loi... Vous le savez, c'est un cadre qui est rigide. Réglementaire, c'est plus facile d'apporter des aménagements, en quelque sorte, bien qu'il faut qu'ils soient justifiés, là. On s'entend, on ne peut pas arriver d'une journée à l'autre pour changer un règlement juste parce que ça nous tente de changer le règlement. Ce n'est pas comme ça que ça fonctionne. Mais il n'en demeure pas moins que ça serait plus facile de le faire par règlement ce dont vous me parlez. Mais il faut d'abord avoir un estimé du marché, puis ça, je pense qu'on pourra être fixé au fil du temps, puis, par règlement, on pourra toujours donner des indications à la Société québécoise du cannabis.

M. Pagé : Bon, j'entends bien l'ouverture, mais, dans ce qui s'en vient, là, qui est gros comme un ballon de plage, là, c'est qu'il y a tellement d'argent à faire là-dedans qu'on le voit venir, là. Et ceux qu'on voit venir, bien, c'est les gros... c'est les multinationales, ce ne sont pas les gens qui sont venus nous dire en commission parlementaire, ici, là : Nous sommes 900 producteurs de serre ici, au Québec, on voudrait avoir notre part du marché. Et présentement, compte tenu, là, que c'est tellement évident que ce qui s'en vient, c'est une grosse manne pour des mégaproducteurs financés dans des endroits obscurs, il y a un découragement, déjà — je l'ai déjà entendu la fin de semaine dernière — un découragement des petits producteurs qui disent : Bon, pfft! écoutez, s'il n'y a pas des moyens pour nous permettre d'être compétitifs... Et là moi, j'essayais depuis un certain temps d'essayer de voir quels sont les moyens qu'on pourrait mettre en place pour favoriser le déploiement des petits producteurs. Bien là, c'est clair qu'on favorise, finalement, les gros. Présentement, c'est ce qui est en train d'arriver. Ce sont les gros producteurs financés, qui ont vu venir le bateau déjà depuis un certain temps.

Au Québec, on a été très frileux. On a été très frileux depuis le début de cette histoire-là. Il n'y avait à peu près pas de producteurs au Québec. Là, il commence à y en avoir quelques-uns. Mais ceux qui sont des producteurs québécois, il y en a combien dont les actionnaires sont 100 % Québécois puis qu'on connaît la provenance du financement à 100 %? Il n'y en a pas beaucoup. Je pense qu'il y en a cinq ou six présentement qui sont autorisés, là, et à part celui des tomates, là, dans les Basses-Laurentides, là, qui...

Une voix : Les Serres Bertrand.

M. Pagé : ...Les Serres Bertrand, là, qui sont des actionnaires à 100 % du Québec, dont on peut identifier leur financement, je ne sais pas s'il y en a d'autres. Et, à partir du moment où ce marché de production va être vraiment monopolisé, vraiment monopolisé par des mégaproducteurs, ça va être très difficile à mon petit producteur de serre du Québec, là, qui voulait agrandir, qui voulait modifier puis qui me dit : Regarde, à partir du moment, là, où ces gros-là, là, vont avoir vraiment... vont s'être accaparés de ce marché-là, pour moi, il est trop tard.

Alors, si on veut partir au jour 1 tout le monde sur le même pied d'égalité... Et là il faut retourner en arrière pour voir le jour 1, là. Parce qu'il y en a qui ont vu venir cela, puis, compte tenu qu'ils sont très bien capitalisés, très bien financés, bien, vraiment, ils ont mis les bouchées doubles pour prendre les devants avant tout le monde. Alors, je cherche le moyen pour favoriser nos petits producteurs québécois. Je cherche les moyens de favoriser ce que les producteurs en serre... et l'UPA est venue nous dire ici. Et, à date, la seule façon dont je peux imaginer, ce serait de limiter le nombre de tonnage en termes d'achats de la part de la SQDC, en lien avec les producteurs.

Peut-être qu'aujourd'hui la ministre ne pourra pas nous le dire, mais j'entends son ouverture par rapport aux règlements, parce que je pense qu'on va encore discuter quelques heures de tout le dossier, est-ce qu'elle pourrait éventuellement nous rassurer, même si... Elle nous dit : Bien, je ne me vois pas le mettre dans la loi, mais, par voie réglementaire, ça pourrait être possible. C'est déjà un pas dans la bonne direction. Est-ce qu'elle pourra éventuellement nous revenir en nous disant : On a fait l'évaluation, là, voilà, on pourrait vous rassurer, M. le député de Labelle, là, par voie réglementaire, ça pourrait ressembler à ça? Aujourd'hui, elle me dit : Il y a une ouverture. Mais je ne sais pas quelle est cette ouverture-là, jusqu'où elle serait prête à aller, jusqu'où le gouvernement serait prêt à aller.

Parce qu'à mon avis je ne vois pas... puis, s'il y a une autre façon, qu'on me le dise, qu'on me le dise, mais je ne vois pas autre façon, autre manière pour réussir à répondre aux préoccupations non seulement des producteurs en serre du Québec, de l'UPA du Québec, mais des Québécois. Parce que les Québécois nous le disent aussi : Bien, tant qu'à consommer, maintenant que ça va être légal, maintenant qu'on va consommer du cannabis, bien, aussi bien qu'il soit produit au Québec le plus possible. Mais là, présentement, là, on s'enligne pour qu'il soit produit au Québec, en bonne partie, mais financé avec des propriétaires de l'extérieur puis avec, donc, les profits qui vont quitter le Québec.

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Labelle. Mme la ministre.

Mme Charlebois : Bien, j'entends le député de Labelle. Honnêtement, je ne peux pas prendre un engagement formel pour les règlements. Je suis assez honnête et franche pour vous dire ça, là. Vous me connaissez assez pour savoir que je ne prends pas des engagements à la légère. Quand je les prends, je les tiens. Et, à ce moment-ci, je vous dis que je pourrais voir, regarder ça. Mais ce qui est sûr, c'est qu'il faut retenir l'élément «ne pas faire en sorte que les prix du cannabis soient à la hausse».

Mais il y a d'autres dispositifs où les producteurs de serre et les petits producteurs pourront avoir accès. Je pense qu'ils sont assez intelligents pour savoir où ils peuvent s'informer. Ils font partie de l'UPA, que je sache, les producteurs de serre. L'UPA peut très bien les amener à aller voir où c'est possible d'avoir de l'aide, des programmes, toutes sortes de choses. Mais ce n'est pas dans la loi sur la Société québécoise du cannabis. Sauf qu'il y a certainement des dispositifs qui vont faire en sorte que ces gens-là peuvent être aidés. Mais, dans quelle mesure, je ne peux pas, encore là, vous répondre parce que ce n'est pas moi qui s'occupe de ces programmes-là.

Mais, tu sais, ma préoccupation, c'est toujours faire en sorte qu'il n'y ait pas une pression qui s'exerce pour faire en sorte que les prix soient à la hausse. Ceci étant dit, ma préférence va toujours à favoriser le marché québécois, et notamment ça fait partie des producteurs québécois, les petits producteurs. Mais, comme vous le dites, il faut trouver le moyen de les aider, mais ce n'est pas à la société québécoise... ce n'est pas sa mission. C'est ailleurs qu'il faut qu'ils aillent chercher de l'aide. Les producteurs de serre, c'est un producteur de serre. Je n'ai pas besoin d'en dire plus. Déjà, il y a une tarification électrique, les producteurs de serre, que d'autres producteurs n'ont pas, là.

Le Président (M. Merlini) : M. le député de Labelle, il vous reste deux minutes.

• (17 heures) •

M. Pagé : Bien, vous entendez bien ma préoccupation je pense qu'elle est partagée par plusieurs personnes aussi, pas seulement d'avoir un prix compétitif, mais de favoriser le déploiement de petits producteurs au Québec. Et, quant à la compétition à l'égard des prix, donc, les prix que la SQDC va pouvoir obtenir, je pense que, si on favorise le déploiement de plusieurs producteurs sur le territoire québécois, c'est justement une garantie que la SQCD puisse obtenir une meilleure compétition, à l'égard des prix, entre chacun des producteurs. S'il y en a une cinquantaine, une centaine déployés sur l'ensemble du territoire québécois, je vais vous dire que la SQDC, là, elle va avoir plusieurs producteurs chez qui elle va pouvoir aller vérifier les prix et la qualité. Mais, s'il n'y en a que quelques-uns... Parce qu'il y en a, là, on le sait, là, ils se préparent depuis deux ans, là, puis il y a tellement d'argent là-dedans, là, qu'il y en a qui sont vraiment bien préparés, et vraiment bien financés, et qui sont vraiment en train de couper de l'herbe sous le pied aux producteurs québécois. Et c'est ça qui est ma grande préoccupation, puis je sais qu'elle est partagée par un très grand nombre de producteurs québécois.

Alors, j'entends qu'il y a toujours une ouverture, il n'y a pas une garantie, je l'ai entendu, mais il y a une ouverture, alors, moi, je vous demande, à vous et à votre équipe, Mme la ministre, de nous revenir éventuellement pour nous dire de quelle façon on pourrait essayer de garantir cela. Parce que, là, présentement, la seule garantie, là, c'est que le monopole de la production québécoise, là, ça va être entre les mains de gens dont les propriétaires sont essentiellement de l'extérieur du Québec et qui sont financés aussi de façon parfois fort douteuse.

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Labelle, ça conclut le temps que vous disposiez pour l'amendement de Mme la ministre. Est-ce que j'ai d'autres interventions à l'amendement proposé par Mme la ministre? Je vois M. le député de Borduas qui veut intervenir. M. le député de Borduas? Vous cédez donc à Mme la députée de Vachon... À vous la parole.

Mme Ouellet : Merci, M. le Président. J'aurais un amendement à déposer, un sous-amendement.

Le Président (M. Merlini) : Oui, allez-y pour la lecture de votre sous-amendement.

Mme Ouellet : Et, en fait, il va être en deux volets, même si les deux volets sont indépendants. Pour gagner du temps, M. le Président, je les présente dans le même amendement.

Donc, remplacer le mot «prioritairement» par «exclusivement» et rajouter, après «territoire du Québec», «qui ne reçoivent pas de financement provenant de paradis fiscaux».

Le Président (M. Merlini) : Merci, nous allons faire les copies nécessaires et la distribution aux membres de la commission.

Je suspends donc quelques instants.

(Suspension de la séance à 17 h 3)

(Reprise à 17 h 11)

Le Président (M. Merlini) : Nous reprenons donc nos travaux. Nous avons une proposition de sous-amendement de Mme la députée de Vachon. Alors, à vous la parole pour nous expliquer votre proposition de sous-amendement. Mme la députée.

Mme Ouellet : Oui. Bien, merci, M. le Président. En fait, avec les discussions de cet après-midi — des fois, ça vaut la peine de continuer à discuter — ça nous a permis de constater qu'il n'y avait aucun empêchement juridique à ce qu'on donne, là, toute la production au Québec, contrairement à ce qui avait même été affirmé ici, M. le Président, je tiens à le préciser, des fois il faut faire attention. Donc, on a vraiment compris qu'il n'y avait aucun empêchement, mais qu'effectivement ce serait en rupture, c'est le mot qui a été utilisé, en rupture avec les 30 dernières années — je dois vous avouer, qui étaient assez néolibérales — de discussions avec les autres provinces, mais que c'était tout à fait possible.

Donc, si c'est tout à fait possible, je pense qu'avec un produit spécial comme celui-là, avec autant d'argent à faire... Et on ne veut pas que ça serve à faire de l'argent et on veut favoriser les producteurs de serre du Québec. Et on sait très bien que, si on laisse le libre marché, ce ne sera pas eux autres qui vont avoir leur part du gâteau, ça ne va être que les grosses compagnies. Donc, c'est pour ça le «exclusivement». Donc, la compagnie pourra... parce que, malheureusement, le «devra», on l'a perdu, mais pourra... ça lui donne un vrai pouvoir, elle pourra s'approvisionner exclusivement au Québec.

Donc, ça lui donne le pouvoir de le faire. Ça ne veut pas dire qu'elle va être obligée de le faire, mais ça lui donne le pouvoir de le faire, ce qui va avoir comme conséquence, il faut se le dire ici, M. le Président, que le gouvernement du Québec, quand qu'il va aller négocier pour ses accords canadiens, là, libre-échange canadien, le gros accord... Accord de libre-échange canadien... J'en ai profité pendant la pause pour aller le faire imprimer, 350 pages... 367 pages, excusez, un peu plus précis. Donc, dans cet accord-là, je veux juste dire aux gens de la commission puis à ceux qui nous écoutent qu'il y a déjà plein d'exclusions. Il y a déjà plein d'exclusions, pour le Québec, qui sont prévues pour les choses existantes puis pour les choses futures.

Juste vous expliquer, M. le Président, parce que c'est important qu'on décide ici en toute connaissance de cause, qu'il y a déjà des exclusions qui sont prévues pour le transport maritime, pour des services récréatifs, culturels et sportifs, courses de chevaux... je ne sais pas trop qu'est-ce que c'est comme services récréatifs, en tout cas, voilà. Il y a des exclusions qui sont prévues du côté des services des pompes funèbres. Il y a des exclusions qui sont prévues — il y en a quand même quelques pages — pour le secteur des fonds de chasse et pêche, piégeage, pour les pêches. Il y a des exclusions qui sont prévues pour la foresterie. Il y a des exclusions qui sont prévues pour les boissons alcooliques. On commence à se rapprocher pas mal de notre sujet, M. le Président. Il y a des exclusions aussi qui sont prévues, deux fois, pour les boissons alcooliques, pour les services sociaux, pour les produits chimiques, pour l'énergie... — il m'en manque-tu? — l'énergie encore, et les autres sont plus... services d'agences de voyages et d'organisation de guides touristiques, les exclusions qui sont prévues. Donc, on pourrait ajouter une exclusion, M. le Président, pour le cannabis.

Ça fait que, si nous votons ensemble cette proposition-là, ça veut dire qu'on donne implicitement le mandat au gouvernement du Québec de dire : Bien, nous, on veut faire ajouter une exclusion à l'Accord de libre-échange canadien pour ajouter dans les exclusions le cannabis Ce n'est pas plus compliqué que ça, M. le Président. C'est tout à fait normal, il y en a déjà plein qui existent, on peut décider d'en rajouter une. Donc, premièrement, M. le Président.

Deuxième volet, c'est celui de paradis fiscaux. Et je sais que mon collègue, qui me disait, là, qu'il avait déjà déposé un amendement concernant les paradis fiscaux, qui, malheureusement, a été battu... Mais peut-être que, cette fois-ci, placé puis dit de façon différente, ça pourra intéresser le gouvernement. Mais je ne peux pas croire, M. le Président, que nous, ici, là... Moi, je vous le dis, là, ça me ferait honte un peu que nous, ici, nous décidions de voter contre un amendement concernant les paradis fiscaux, et qu'on laisserait les compagnies de cannabis se faire financer par les paradis fiscaux, et que ça deviendrait donc, indirectement, une belle façon pour le crime organisé de blanchir son argent. On inventerait la machine à blanchiment de centaines de millions de dollars, voire de milliards de dollars, puis on ferait ça, nous autres, ici? Moi, je n'en reviendrais pas. J'aurais un petit peu honte de nous autres. Puis pas un petit peu, je pense que j'aurais pas mal honte de nous autres.

Donc, ça prend absolument, à une place dans la loi... si ce n'est pas ici, ça peut être ailleurs, mais il faudrait que la ministre m'indique maintenant où ailleurs, pas qu'elle me dise : On va en discuter plus tard, on va en discuter plus tard. Elle nous dit ça tout le temps, là, c'est tannant. Si elle veut qu'on le mette ailleurs, qu'elle nous dise exactement où ailleurs, puis à ce moment-là on pourra dire : Cette place-là est correcte ailleurs. Mais il faut absolument qu'il y ait une place, dans la loi, où on empêche toutes les compagnies de cannabis de pouvoir profiter du financement des paradis fiscaux. Parce que, sinon, là, l'objectif de base de légaliser puis d'enlever ça des mains des criminels, là, bien, on passe complètement à côté. Et ça, ce serait une honte qu'on permette ça ici, nous autres, les élus de l'Assemblée nationale.

Donc, c'est pour ça que je vous disais : Deux affaires complètement différentes, mais, je crois, tout aussi importantes : un, pour s'assurer que nos producteurs de serre du Québec puissent participer, puis même pourraient faire 100 %... moi, je ne vois pas ce serait quoi, le problème, je ne vois pas pourquoi que ce n'est pas eux autres qui pourraient faire 100 % de la production de cannabis; et s'assurer que les compagnies, s'il y a des compagnies cotées en bourse, bien, ils ne profitent pas de financement des paradis fiscaux, qui souvent est une façon de blanchir de l'argent.

Peut-être que j'aimerais ça demander à la ministre, parce qu'on en discutait plus tôt... Parce que je regardais l'entente, là... Parce que tout est là, là, hein? Elle nous disait : Ce n'est pas possible à cause des ententes. Ce n'est pas vrai, les ententes peuvent le permettre, c'est à nous autres de le décider. Mais, dans l'Accord de libre-échange canadien, j'ai regardé un peu ce qui se faisait au Nouveau-Brunswick pour le cannabis puis... mais peut-être que l'équipe de la ministre a regardé ça dans plus de détails que moi, j'ai l'impression, mais je n'ai pas vu la confirmation, mais j'ai l'impression, M. le Président, qu'eux autres, ils ont décidé que ce serait produit complètement au Nouveau-Brunswick pour le marché du Nouveau-Brunswick. Est-ce qu'ils peuvent me confirmer s'ils ont vu ça passer, s'il y a de la législation ou des intentions dans ce sens-là qui ont été annoncées de la part du Nouveau-Brunswick?

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Je vais y aller pour la première partie. La deuxième partie, bien, j'étais en train de m'informer sur quelque chose, j'ai juste entendu la fin de sa question sur le Nouveau-Brunswick.

Alors, remplacer le mot «prioritairement» par «exclusivement», bien, c'est les mêmes raisons que «peut» et «doit», là, on ne pourra pas aller là parce qu'effectivement, en raison de l'accord de commerce, juridiquement c'est impossible, parce que nous voulons respecter l'accord de commerce entre... Comment ça s'appelle? L'accord de libre-échange... l'entente de libre-échange Canada et tout. Alors, c'est la même raison. Alors, on ne pourra pas accepter cette partie-là.

Pour la deuxième question, il va falloir me la répéter, s'il vous plaît.

Le Président (M. Merlini) : Mme la députée de Vachon, si vous voulez bien répéter la question, la deuxième partie de votre question, concernant le Nouveau-Brunswick.

Mme Ouellet : Concernant le Nouveau-Brunswick, en fait, ce que je disais, c'est que, des consultations que j'ai faites de ce qui se passe au Nouveau-Brunswick, j'ai l'impression, mais j'aimerais que les équipes de la ministre puissent me confirmer, ils doivent suivre ça de façon beaucoup plus détaillée que moi, que le Nouveau-Brunswick aurait — je le mets au conditionnel — décidé que l'ensemble de sa production... que l'ensemble des produits consommés au Nouveau-Brunswick seraient produits au Nouveau-Brunswick. Je veux savoir si l'équipe de la ministre a fait des validations de ce qui se passait au Nouveau-Brunswick et s'ils peuvent me confirmer cette orientation-là du Nouveau-Brunswick.

Mme Charlebois : On va faire les vérifications. Je ne suis pas capable de répondre à ce moment-ci. Mais on a un tableau comparatif. Je vais vous revenir là-dessus.

Le Président (M. Merlini) : Mme la députée.

Mme Ouellet : Sur le premier volet, quand la ministre, elle dit : On ne peut pas aller là, ce n'est pas vrai qu'ils ne peuvent pas aller là. Je veux juste qu'on fasse attention ici à ce qu'on dit. Elle ne veut pas aller là.

Mme Charlebois : M. le Président.

Le Président (M. Merlini) : Oui, Mme la ministre.

Mme Charlebois : Je n'apprécie pas le ton et je n'apprécie pas qu'on me prête des motifs, là. J'ai bien dit clairement dans ma phrase, là... je n'ai pas... Là, là, de me dire qu'est-ce qu'elle vient de dire, là, ça n'a aucun bon sens, là, M. le Président, là.

Le Président (M. Merlini) : Effectivement...

• (17 h 20) •

Mme Charlebois : Parce que j'ai bien signifié le pourquoi ce n'était pas possible en regard des accords que nous voulons garder. Il faut aller jusqu'au bout de ma pensée, là. Alors, si vous, vous ne voulez pas respecter les accords de libre-échange, c'est votre affaire, et je respecte ça, mais ne dites pas... Mettez l'ensemble de a, b, plus...

Mme Ouellet : M. le Président, si la ministre me laissait terminer ma phrase...

Le Président (M. Merlini) : Allez-y, Mme la députée, et en faisant attention à... faire attention...

Mme Ouellet : Non, non, que...

Mme Charlebois : Parce que c'est tellement agréable.

Le Président (M. Merlini) : ...aux mots qui sont choisis.

Mme Ouellet : Oui, oui, je fais tout à fait attention. Je fais tout à fait attention, je pense que la ministre devrait faire de même. Entre le «peut» et le «veut», il y a une différence. Et, quand elle me dit : C'est impossible juridiquement à cause des ententes qu'on a, ce n'est pas vrai. On vient de se faire confirmer par son conseiller aux Finances, M. le Président, on vient de se le faire confirmer ici, devant tout le monde, devant les micros, que, oui, c'était possible, mais que ce serait en rupture avec ce qui s'est fait depuis 30 ans.

Mme Charlebois : ...

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre, s'il vous plaît. C'est Mme la députée de Vachon qui a la parole.

Mme Ouellet : Mais c'est possible, ce n'est pas impossible. Donc, il faut juste faire attention, c'est possible de le faire, et on peut décider de prendre cette décision-là ici. Ça fait qu'elle ne peut pas nous dire que, juridiquement, c'est impossible. Juridiquement, c'est possible, et il n'y a rien, dans les accords, qui nous empêche de le faire. On peut le faire, et ça fera juste en sorte que le Québec inclura, dans l'accord, une exception additionnelle à celles qui existent déjà, sur le cannabis. Et c'est tout à fait possible de le faire, les provinces peuvent inscrire les exceptions qu'elles veulent.

Donc, on ne peut pas affirmer ici qu'on ne peut pas parce que c'est juridiquement impossible. Cette affirmation-là n'est pas exacte. On peut dire : On ne veut pas, on ne souhaite pas, on n'est pas d'accord, parce qu'on veut être en continuité avec tout ce qui s'est fait dans les accords, du néolibéralisme des fois un petit peu à fond de train, dans les 30 dernières années, mais ce n'est pas impossible, juridiquement, c'est notre choix, à nous, ici. Il faut juste faire attention. Ca fait que...

Mme Charlebois : C'est exactement ça que j'ai dit.

Mme Ouellet : Non, ce qu'elle a dit...

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre, s'il vous plaît.

Mme Ouellet : Puis on peut aller rechercher les galées, je l'ai écrit, elle dit : On ne peut pas aller là, car, juridiquement, c'est impossible. Ce n'est pas vrai que c'est impossible juridiquement. On peut ne pas vouloir aller là, juridiquement c'est possible, c'est tout à fait possible de le faire juridiquement. Politiquement, ils ont une autre position, ça leur appartient, ça, hein, les questions d'opinion... Puis je respecte l'opinion. Mais on ne peut pas dire que c'est juridiquement impossible. Ça fait qu'il faut juste faire attention ici, M. le Président, je pense qu'on se doit de dire les choses telles qu'elles sont. Et, comme dit la ministre, il faut choisir ses mots, donc je l'invite également, elle aussi, à choisir ses mots pour dire des choses qui sont exactes. Parce qu'on va faire le maximum ici pour ne pas dire des choses inexactes, hein?

Donc, on a fait toute une discussion préalable, on est allés chercher les informations de ses conseillers juridiques justement pour avoir la confirmation de ça. Ça a pris un petit peu de temps, mais on a réussi à avoir la confirmation que ce n'était pas impossible de donner tout le marché aux producteurs québécois, mais que ça avait comme conséquence d'être en rupture avec ce qui s'est fait dans les dernières années. Mais on peut décider, pour un produit comme le cannabis, que ça fait tout à fait notre affaire et qu'on est tout à fait à l'aise d'être en rupture, parce qu'on pense que ce produit-là n'est pas un produit comme les autres et que ce n'est pas un produit qu'on veut laisser aller au libre marché, dans le marché du néolibéralisme, ce n'est pas ça qu'on veut avec le produit du cannabis. Donc, on est tout à fait capables de dire : On assume ça.

Donc, je pense qu'il faut juste, juste, juste faire attention. Donc, je voulais corriger parce que... pour ne pas laisser les gens sur une fausse impression, donc de corriger par rapport aux informations qu'on s'est données.

Le Président (M. Merlini) : Je dois vous rappeler, Mme la députée de Vachon, en vertu de l'article 35.6° aussi, que nous devons accepter la parole qui est donnée, même si on n'est pas d'accord avec le propos qui est dit. Alors, c'est ça qu'il faut faire attention. Vous pouvez ne pas être d'accord avec qu'est-ce que la ministre a dit par rapport au respect de l'Accord de libre-échange du Canada, et vous l'avez illustré dans votre point, ce que je dis simplement : Vous ne pouvez pas cependant dire que ce que la ministre a dit n'était pas factuellement vrai, parce qu'il faut accepter sa parole. Vous pouvez exprimer des points de vue, que vous avez fait, et vous le faites très bien jusqu'à présent, je ne fais qu'un rappel de dire — même chose des deux côtés de cette table, de cette étude détaillée — qu'il faut accepter la parole qui est donnée, même quand on n'est pas d'accord. Nous avons des discussions, il y a des différences d'opinions sur les articles du projet de loi, j'en conviens. Gardons-les, ces discussions, là où elles le sont depuis le début, comme le député de Labelle l'a dit en début d'étude cet après-midi.

Mme Ouellet : Question de directive, M. le Président.

Le Président (M. Merlini) : Oui. Oui, Mme la députée de Vachon.

Mme Ouellet : Même si on doit accepter la parole donnée... Quand c'est sur des questions d'opinion, je n'ai aucun problème. Mais, quand c'est sur des choses factuelles — puis, peu importe, là, je ne reviens pas à ce qui a été dit précisément — s'il y a une erreur factuelle qui a été donnée... Si, par exemple — puis là je suis complètement hors contexte — je vous dis : Le mur, en arrière de vous, il est bleu — il est rouge — le mur en arrière de vous, il est bleu, c'est factuellement inexact. Est-ce qu'on peut faire corriger parce que c'est factuellement inexact?

Le Président (M. Merlini) : Est-ce qu'on peut faire corriger ce qui est factuellement inexact? Vous pouvez reposer une question, si la question que vous avez posée n'a pas obtenu la réponse que vous souhaitiez ou que vous croyez avoir reçue comme réponse, vous pouvez reposer la question à nouveau, et à ce moment-là il y a des vérifications qui se font. C'est pour ça que Mme la ministre est entourée de juristes, pour vérifier l'exactitude des choses.

Alors, effectivement, tantôt, on a eu des précisions d'ordre légal des différents juristes et du sous-ministre aux Finances, qui nous ont parlé par rapport au «peut» et au «doit», et je pense qu'on y faisait référence à ce moment-là. Comme j'ai déjà dit, c'est sûr qu'il va arriver des fois où on va trébucher sur des mots, dans la langue française, ils sont nombreux. Moi, je souhaite simplement souhaiter la collaboration de tous autour de cette table, de respecter la parole qui est donnée, même s'il arrive une erreur qui est glissée. On peut la souligner, l'erreur, je n'ai pas de problème à ce qu'on souligne une erreur, mais, de là à en faire une interprétation où est-ce que, là, c'est, comment je peux dire... que c'est porter, c'est donner une interprétation fausse ou ça donne une intention dans le propos qui est donné, il faut faire attention. C'est là que je veux dire, par rapport à l'article 35.6°, de respecter la parole qui est donnée.

Vous soulevez l'inexactitude, c'est correct. Vous reposez la question, ça donne une chance, à ce moment-là, à la ministre ou aux juristes d'y répondre d'une autre façon ou d'essayer de répondre aux propos que vous soulevez. C'est là que je voulais faire ce rappel. Voilà.

Mme Ouellet : Je suis tout à fait d'accord avec vous, M. le Président, et c'est pour ça que je soulignais l'erreur dans l'affirmation de la ministre lorsqu'elle disait que c'est juridiquement impossible. On s'était fait confirmer exactement le contraire précédemment par ses conseillers juridiques. Donc, je soulignais justement cette erreur-là pour ne pas — parce que je pense que c'est important, il y a des gens qui nous écoutent — laisser une erreur se glisser dans nos discussions, comme celle-là. Et je pense que la ministre aura l'occasion de pouvoir peut-être s'exprimer sur ça, mais peut-être de dire aussi les choses autrement. Parce que peut-être qu'elle ne le savait pas, moi, je ne le savais pas non plus avant d'avoir eu la confirmation de ses conseillers juridiques, mais, maintenant qu'on le sait, on ne peut plus affirmer que c'est juridiquement impossible. Donc, je voulais juste le souligner.

Et donc, lorsque la ministre me donne comme argument qu'elle n'accepte pas notre modification parce que c'est juridiquement impossible, bien, cet argument-là n'est pas valable, ne tient pas la route, étant donné que le conseiller, plus tôt, nous a confirmé que, oui, c'était possible. Donc, ce n'est pas un bon argument. Je ne sais pas c'est quoi, ses arguments pour être en désaccord avec le fait qu'on veuille faire en sorte que ce soit produit au Québec, je n'en ai pas entendu d'autres, des arguments, autres que des arguments, finalement, on s'est rendu compte, qui n'étaient pas des arguments qui étaient fondés.

Donc, je veux juste rappeler ça. Parce que je pense qu'on fait des efforts ici, de ce côté-ci de la table, d'une façon ou d'une autre, hein? Puis vous voyez, on essaie, là, de différentes façons... Et ça nous a été demandé, et on est au Québec, et ça serait bien fou de faire en sorte qu'on ne s'organise pas pour que les emplois soient créés au Québec. Donc, il y a différentes façons qu'on essaie que les emplois soient créés au Québec. Et, l'amendement que j'ai déposé, la ministre peut être contre parce qu'elle ne veut pas se donner des outils pour faire ça, ça, ça lui appartient, mais elle ne peut pas invoquer l'aspect juridique parce que ce n'est pas exact.

Donc, je pense que cet élément-là, pour le premier volet, dire que c'est «exclusivement au Québec», bien, c'est vraiment une façon qui nous permettrait de favoriser les producteurs du Québec puis moi, je souhaiterais, particulièrement les producteurs de serre.

Et, bien, pour le deuxième volet, elle pourrait aussi nous donner son opinion, mais je ne sais pas si elle a eu le temps de se renseigner, là, sur ce qui se passe au Nouveau-Brunswick, si effectivement au Nouveau-Brunswick ils ont annoncé leur intention... parce que c'est ma perception, mais qu'ils ont annoncé leur intention que le marché du Nouveau-Brunswick serait produit au Nouveau-Brunswick.

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup. Mme la ministre.

• (17 h 30) •

Mme Charlebois : Alors, revenons donc à la possibilité juridique, je vais aller jusqu'au bout de ma phrase, M. le Président. Je dis que c'est impossible juridiquement parce que nous voulons conserver nos accords de libre-échange et la philosophie et l'esprit qu'a le Québec depuis les 30 dernières années dans ces accords-là. Alors, vous voyez qu'il y avait une longue phrase. Puis c'est impossible juridiquement si on veut respecter ça. Bon, je comprends que son choix est autre, je respecte son opinion, mais il ne faut pas dire juste le début de mon affirmation. Il faut dire dans quel contexte j'explique cela. C'est clair? D'accord.

Pour la deuxième partie, M. le Président... Et je persiste à dire que nous ne souhaitons pas changer la philosophie des 30 dernières, du Québec. Pour ce qui est de la deuxième partie, on m'indique ici qu'il y a deux producteurs autorisés pour le cannabis thérapeutique et qu'ils sont en discussion pour avoir quatre producteurs supplémentaires qui viendraient uniquement... qui viendraient de là-bas, du Nouveau-Brunswick. Je n'ai pas d'autre indication à ce moment-ci. Moi, je légifère au Québec. Alors, bien que nous ayons des échanges et que nous ayons des comparables, je n'ai pas toutes les intentions législatives de toutes les provinces, M. le Président. Je suis vraiment branchée sur ce qui se fait au fédéral puis, versus notre champ de compétence, sur ce que les Québécois nous ont demandé lors des consultations qui se sont tenues au préalable, avant la rédaction du projet de loi, qui s'est... les consultations qui ont été faites l'été dernier, mais aussi lors des consultations qui se sont tenues sur plusieurs jours ici, en commission parlementaire. Alors, voilà.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. Mme la députée de Vachon.

Mme Ouellet : Oui. Je posais cette question-là, M. le Président, parce que regardez dans quelle situation on pourrait se retrouver. On entend la ministre toujours invoquer l'Accord de libre-échange canadien... Parce qu'on se rend compte que, finalement, il y a rien que celui-là, là, il n'y en a pas, d'accords internationaux. Quand elle a évoqué tantôt, un petit peu plus tôt, encore les accords internationaux, alors qu'on nous avait dit qu'il n'y en avait aucun... Juste vous rappeler... Il n'y a aucun accord international qui empêche quoi que ce soit sur le cannabis. Donc, ce seul accord-là, ce serait quand même un peu paradoxal de voir à quel point la ministre est réfractaire concernant cet...

Le Président (M. Merlini) : Mme la députée.

Mme Ouellet : Non, réfractaire au changement...

Le Président (M. Merlini) : Mme la députée.

Mme Ouellet : ... dans cet accord-là, pour dire qu'on en rajouterait. Écoutez...

Le Président (M. Merlini) : Je vous demande de faire attention aux propos. De dire que la ministre est réfractaire...

Mme Ouellet : Réfractaire, elle est contre.

Le Président (M. Merlini) : Dire que la ministre est réfractaire, c'est lui prêter une intention, clairement.

Une voix : ...

Mme Ouellet : Non, non.

Le Président (M. Merlini) : Je ne dis pas que c'est antiparlementaire, je dis simplement que c'est un... De dire que la ministre est réfractaire, c'est, selon moi, un prêt d'intentions. Alors, allez-y, allez-y. Allez-y sur votre point, je vois le point qui s'en vient, allez-y.

Mme Ouellet : Que la ministre est réfractaire, qu'elle offre de la résistance, je ne sais pas quoi, qu'elle est contre, hein? Je vais vous trouver des synonymes, là. Le fait d'ajouter une exception à l'entente de libre-échange canadien, ce serait assez paradoxal de voir que le Nouveau-Brunswick, lui, arriverait à la table de négociation puis lui, il la rajouterait, parce qu'il dit : Moi, je veux que ça soit au Nouveau-Brunswick. Et c'est tout à fait possible que c'est ça qui soit en train de se préparer, M. le Président.

Donc, je trouverais ça assez paradoxal de voir que nous autres, au Québec, on ne veut pas protéger les emplois au Québec puis qu'au Nouveau-Brunswick, eux autres, ils ne se gênent pas pour protéger les emplois au Nouveau-Brunswick.

Une voix : ...

Mme Ouellet : Ils peuvent bien m'interrompre quand ils veulent.

Le Président (M. Merlini) : M. le député de Maskinongé, vous avez une question de règlement?

M. Plante : Bien sûr, M. le Président. Mais il faut faire attention. Puis la députée de Vachon prête des intentions sur l'intention du législateur, donc, en disant que la ministre ne veut pas, qu'elle est réfractaire, que le gouvernement n'est pas ouvert, qu'on veut laisser la porte... Je l'ai laissé aller longtemps, M. le Président, pour ne pas interrompre son envolée, qui était tout à fait sentie. Et j'aimerais rappeler, M. le Président, que je pense qu'il n'y a pas personne ici qui veut faire de la politique sur ce dossier-là. Tout le monde veut le faire dans le bien des citoyens. Il faut prendre la parole du gouvernement.

L'intention gouvernementale, je crois, a été exprimée à plusieurs reprises, tant par la ministre que par les légistes, que par le sous-ministre. Donc, je demanderais à la députée de Vachon de faire preuve de compréhension et de respect envers le gouvernement et l'intention législative, M. le Président.

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, M. le député de Maskinongé. Mme la députée de Vachon, veuillez poursuivre.

Mme Ouellet : M. le Président, quand la ministre, tantôt, elle nous a clarifié son vocabulaire d'«impossible juridiquement» — je crois qu'encore ce n'est pas juridiquement, c'est politiquement — elle a très clairement affirmé qu'elle ne souhaitait pas et qu'elle... elle souhaitait continuer dans la même philosophie que dans les 30 dernières années. Elle ne souhaitait pas faire de rupture. Parce qu'elle nous a dit que ce n'était pas impossible, on pouvait être en rupture, elle a dit : Non, nous, on souhaite continuer dans la même philosophie, donc dans la philosophie de ne pas faire d'exception. Quand qu'elle dit : La même philosophie, c'est laquelle philosophie? C'est de ne pas faire d'exception, de laisser le libre marché et la libre concurrence des biens.

Donc, c'est ça qu'elle nous disait, là. C'est elle-même qui l'a dit, là. Je ne l'invente pas, M. le Président, c'est elle-même qui l'a infirmé ici, en cette Chambre, hein, qu'elle voulait continuer exactement dans la même philosophie des accords et c'est pour ça qu'elle refusait le «exclusivement», parce que le «exclusivement» amenait à faire une... à avoir une position où on demanderait une exception et qu'elle ne veut pas demander d'exception. C'est ça que ça veut dire, indirectement. Quand qu'elle dit : Je veux être dans la même philosophie, bien, ça veut dire que je veux continuer dans le libre marché. Donc, ce que je dis, c'est exactement ce que la ministre a affirmé.

Et, quand je vous dis qu'elle a de la résistance à faire en sorte... — si vous n'aimez pas le mot «réfractaire» — de la résistance au fait de faire en sorte qu'on puisse écrire une exclusion dans l'Accord de libre-échange canadien, bien, c'est effectivement le cas. C'est elle qui l'a affirmé, là. Je ne lui prête pas d'intentions. Elle nous l'a dit ici, en cette Chambre, on pourra aller chercher les galées, lorsqu'ils seront écrits, M. le Président, elle dit ça très clairement.

Parce que, si la ministre était d'accord de dire : Bien, on va ajouter une exception dans l'Accord de libre-échange canadien pour le cannabis, ce qui est tout à fait possible étant donné qu'actuellement, là, ce n'est pas couvert nulle part, le cannabis, ce n'est pas légal, bien, à ce moment-là, on pourrait écrire le «exclusivement» sans aucun problème. On peut décider ça aujourd'hui. On a ce pouvoir-là, nous, ici, aujourd'hui. On peut ne pas vouloir, mais on a le pouvoir. On peut. Est-ce qu'on veut? C'est une autre question. Mais on peut. Et ce que je vous disais, c'est que ce serait assez paradoxal que le Nouveau-Brunswick, eux, le fasse et qu'ici le gouvernement libéral le refuse. Et c'est ce qu'on propose dans cet amendement-là.

Sur la deuxième partie, est-ce que la ministre est d'accord pour faire en sorte qu'aucun des producteurs ne devrait bénéficier de financement des paradis fiscaux? Parce que, sinon, c'est très clair qu'on passerait du crime organisé au potentiel crime organisé.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la députée de Vachon. Mme la ministre.

Mme Charlebois : M. le Président, concernant le Nouveau-Brunswick, j'ai vu deux annonces passer, on vient de me montrer ça, des articles de journaux qui... une entente d'approvisionnement chez Canopy Growth, un producteur qui est basé en Ontario, et ils ont aussi une lettre d'intention avec... — mon Dieu! Comment ça s'épelle, ça? — Nuuvera, dont le siège social est à Toronto. C'est des articles qui proviennent de Radio-Canada. Alors, je ne pense pas qu'il y ait d'exclusivité, mais, de toute façon, ça... Le Nouveau-Brunswick peut légiférer comme il l'entend, le Québec fait comme il l'entend. Alors, pour moi, ce n'est pas nécessairement un argument de taille. Voilà.

Le Président (M. Merlini) : Mme la députée de Vachon.

Mme Ouellet : À ma connaissance, M. le Président... et il faudrait que j'aie en référence les articles de la ministre, mais, à ma connaissance, avec Canopy Growth, c'est avec une obligation de construire une usine au Nouveau-Brunswick pour que la production soit au Nouveau-Brunswick, même si le siège social... Et d'ailleurs je ne pense pas que c'est... Je suis d'accord avec la ministre, ce n'est pas nécessairement... Tant qu'à faire, moi, je pense que ça devrait être une entreprise qui est du Québec. Mais, au moins, eux, ils demandent. C'est pour ça que moi, je dis : Ça devrait être la Société québécoise de cannabis qui elle-même assure la production à travers des contrats de sous-traitance, mais amendement qui a été refusé la semaine passée. Mais, au moins, ils font le minimum, de s'assurer que les emplois soient au Québec.

Donc, à ma connaissance... C'est pour ça que je demandais si l'équipe de la ministre... Puis je suis quand même assez surprise que l'équipe de la ministre ne suive pas ça avec tout le détail, parce que c'est assez important, ce qui est en train de se passer, même dans les autres provinces. À ma connaissance, la volonté du Nouveau-Brunswick, même s'ils signent des ententes avec des compagnies avec des sièges sociaux dans d'autres provinces, ils exigent que la production soit au Nouveau-Brunswick. Et ils ont fait tout un plan, et ça a été annoncé comme ça, tout un plan de création d'emplois. Ils veulent en faire quelque chose d'aussi important ou même de plus important que les centres d'appels. Vous vous rappelez, là, tous les centres d'appels qui se sont implantés au Nouveau-Brunswick? Bien, c'est avec la même philosophie de création d'emplois qu'ils veulent s'assurer de la création d'emplois au Nouveau-Brunswick.

Et, quand elle dit : Le Nouveau-Brunswick peut bien faire ce qu'il veut, on n'est pas obligés de faire pareil, c'est vrai. Mais, lorsqu'elle parle de l'Accord de libre-échange canadien puis qu'elle ne veut pas changer la philosophie de l'Accord de libre-échange canadien, moi, tout ce que je dis, c'est que ce serait assez paradoxal que cette philosophie-là soit changée par le Nouveau-Brunswick, qui, elle, déciderait d'inclure des exceptions, parce que les exceptions sont par province, alors que le Québec refuserait de faire la démarche d'inclure une exception pour le cannabis puis, sous ce prétexte-là, refuserait de mettre des clauses comme ce qu'on veut mettre actuellement sur le «exclusivement».

Et je n'ai toujours pas de réponse sur les paradis fiscaux. M. le Président, j'ai mis les deux amendements dans la même proposition pour essayer de gagner du temps. Mais, voyant que la ministre ne répond pas à ma question, je pense que, la prochaine fois, je la présenterai en deux amendements pour m'assurer d'avoir une réponse de la part de la ministre. J'aimerais ça quand même avoir une ministre. Est-ce qu'elle est d'accord pour faire en sorte que nos entreprises, nos producteurs de cannabis ne puissent pas être financés par les paradis fiscaux?

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

• (17 h 40) •

Mme Charlebois : M. le Président, pour répondre à la deuxième partie de sa question, ce que nous faisons, c'est que les producteurs doivent être des producteurs qui sont dûment autorisés par le gouvernement fédéral, et c'est au gouvernement fédéral de faire ces vérifications-là, d'une part.

D'autre part, je veux indiquer à la députée de Vachon que, dans les lettres d'intention qu'a signées la Société des alcools du Québec, il y avait au-delà de 70 % de production au Québec, tel qu'elle me mentionne pour le Nouveau-Brunswick. Et, en ce qui concerne le Nouveau-Brunswick, ils ont des lettres d'intention, ce n'est pas des mandats d'exclusivité qu'ils ont signés, à ce qu'on en sait.

Et je pense que j'ai une équipe compétente qui m'entoure, qui sont... Oui, j'ai du personnel politique, mais j'ai aussi une armée de fonctionnaires qui ont certaines compétences, et je pense que personne ne peut discréditer la compétence des fonctionnaires qui m'entourent. Je m'excuse, mais, par respect pour eux, je me devais de signaler cela. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. Mme la députée, il vous reste une minute.

Mme Ouellet : Bien, toujours pas de réponse sur... pas vraiment de réponse sur les paradis fiscaux. Elle dit : Ça, je laisse ça au fédéral. C'est drôle parce que son collègue ministre des Affaires intergouvernementales, quand il est rendu quatre plants, moins de quatre plants, plus de quatre plants, il dit : Ah! nous autres, on va décider comme on veut, peu importe ce que décide le gouvernement canadien.

Moi, je pense qu'on a le pouvoir au Québec, puis on a ce pouvoir fiscal là aussi de dire : Non, nous, les entreprises financées par les paradis fiscaux, on n'en veut pas. Ce n'est pas un pouvoir qui appartient au Canada, ça, c'est un pouvoir qui appartient aussi au Québec. Ça fait que je suis assez surprise de voir à quel point elle se déresponsabilise et se désintéresse de ce volet-là, qui est un volet essentiel, parce que de faire passer de l'argent du crime organisé... des mains du crime organisé à potentiellement encore le crime organisé, je ne pense pas qu'on va se rendre bien, bien service, comme société, M. le Président.

Et j'aimerais ça savoir si les lettres d'entente signées par la Société des alcools du Québec avec des entreprises de production de cannabis... si, dans ces entreprises-là, il y en a qui bénéficient actuellement des paradis fiscaux, dans tout ce qui a été sorti.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la députée de Vachon. Ça termine votre temps de parole sur votre sous-amendement. Mme la ministre.

Mme Charlebois : Bien, tout ce que j'ai à dire, c'est : Effectivement, nous, l'approvisionnement de la Société québécoise du cannabis sera fait à partir de ceux qui ont obtenu des permis du gouvernement fédéral. D'autre part, je l'indique à la députée de Vachon, en tout respect, M. le Président, ce n'est pas à la Société québécoise du cannabis de faire ces recherches-là, il y a des instances qui sont prévues pour ça. Et je l'invite à communiquer avec le ministère des Finances pour voir comment le ministère des Finances travaille avec le gouvernement fédéral afin de voir comment on gère cette situation-là. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. M. le député de Labelle.

M. Pagé : Merci, M. le Président. Effectivement, on a fait un bon débat jeudi dernier sur tout cet aspect-là des paradis fiscaux. Je n'interviendrai pas longtemps, mais je ne peux pas ne pas appuyer ma collègue de Vachon par rapport à cette préoccupation parce qu'elle est... c'est une préoccupation qui est partagée par un très, très grand nombre de Québécois. Et, la semaine dernière, vous vous souvenez, j'ai ramené le rapport de la Commission des finances, effectivement, sur les paradis fiscaux. J'ai lu une partie des conclusions, le rapport aussi qui avait été fait par le ministère des Finances pour préparer ce rapport de la commission où il nous mettait en garde, effectivement, ou comment se prémunir des paradis fiscaux pour toutes les raisons que l'on connaît.

Le seul point que je vais faire pour, une fois de plus, tenter de convaincre la ministre qu'il nous faut trouver quelque part dans la loi de quelle façon nous allons nous prémunir de ces entreprises qui sont financées via les paradis fiscaux... Et je vais faire parler Mario Dumont, qui écrivait, le 24 janvier dernier, et je n'irai même pas sur le volet... parce qu'il fait référence dans son article... les amis du premier ministre du Canada, bon, la famille et ses amis. Je n'irai même pas sur ce volet-là, je vais rester seulement sur le volet des paradis fiscaux, où il écrit : «Le dossier [...] sur l'argent des paradis fiscaux qui est dirigé vers l'industrie du cannabis, [c']est ahurissant. 165 millions!» Et ça, c'était le 24 janvier, et, la semaine dernière, le 14 janvier, bien, on apprenait que c'est rendu à 277 millions.

Une voix : ...

M. Pagé : Pardon? 14 février. J'ai dit 14 janvier? C'est d'ailleurs le texte que j'ai même distribué à l'ensemble de mes collègues avant de faire ma présentation de l'amendement, qui a été battu la semaine dernière, pour que tout le monde prenne bien conscience du scandale qui est en train de se passer sous nos yeux et de quelle façon, nous, nous pouvons, ici, au Québec, réagir à ce scandale.

Alors, il dit : «Opaque, impossible de savoir de qui il s'agit. Des étrangers? Des Canadiens qui ont contourné l'impôt? Des gens du crime organisé? Des vendeurs de drogue sur la rue qui veulent profiter aussi de la manne du pot légal? Impossible à savoir.

«Pas loin de la moitié de toutes les entreprises qui se sont vu attribuer des permis de production ont bénéficié d'argent en provenance des paradis fiscaux — Ce n'est pas rien, ça, là — il faut le faire! Au gouvernement fédéral — et ça, je trouve ça bien, ce qu'il dit — personne ne semble s'en inquiéter. Tout baigne. Sont-ils déjà gelés?»

Alors, moi, je me dis : Si le gouvernement fédéral ne souhaite pas... Puis on le sait, au fédéral, là, présentement, là, à tous les jours, allez sur Twitter puis allez dans les articles un peu partout dans les médias sociaux ou ailleurs, à tous les jours, il y a des gens qui manifestent pour qu'on fasse quelque chose à l'égard des paradis fiscaux. Et, devant l'énormément mégapotentiel d'argent lié à la production de cannabis, il y a un gros doute qu'il est en train de se passer quelque chose sous nos yeux. Et d'ailleurs je citerai ce que j'avais... la grande question, qui était la suivante : «Le scandale politico-financier de la prochaine décennie est-il en train de se déployer sous nos yeux?» C'est ça, M. le Président, qui m'inquiète et c'est ce qui inquiète les Québécois, c'est ce qui inquiète la députée de Vachon, et je suis convaincu que la deuxième opposition aussi est énormément inquiète par cela. Et il faut que nous trouvions le moyen...

Bon. On a rejeté un amendement presque similaire la semaine dernière. Alors, on a entendu la semaine dernière : «Via peut-être des directives», je pense, quelque chose comme ça qui nous a été dit. Est-ce que ça peut être via des règlements? Mais je demande et j'insiste pour que la ministre nous indique, à un moment donné, à l'intérieur... que l'on va avancer dans ce projet de loi, de quelle façon on va tenter de se prémunir. Parce que le fédéral ne fait pas son travail là-dedans. Le fédéral pourrait faire son travail là-dedans. Alors, le fédéral, compte tenu qu'il ne fait pas son travail et qu'on a un scandale qui risque de nous passer sous les yeux, je pense que nous avons cette responsabilité de trouver de quelle façon on va se mettre à l'abri de ces grands producteurs financés via les paradis fiscaux.

Alors donc, je vais appuyer évidemment l'amendement de ma collègue, et, si jamais l'amendement était rejeté, ce que je doute qui va arriver, parce que ça ressemble franchement à ce que nous avons présenté la semaine dernière, j'apprécierais que la ministre nous dise de quelle façon on va réussir à essayer de se prémunir de ce qui est devant nous, là.

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Labelle. Mme la ministre.

Mme Charlebois : Alors, M. le Président, ici, on est en train de créer la Société québécoise du cannabis, qui va s'approvisionner de compagnies qui vont avoir été dûment autorisées par le gouvernement fédéral, comme je l'ai dit au préalable, qui auront reçu ces permis, parce que c'est comme ça. Et j'invite mes collègues députés... Parce que je n'ai pas la prétention de dire que c'est important ou pas important, là. Ce que je dis, c'est qu'on n'est pas à la bonne place pour discuter de cet enjeu-là. Alors, moi, j'invite les collègues, quand il y aura une commission qui fait appel au ministre des Finances, qui, lui, a des conversations avec le gouvernement fédéral, qui... J'invite aussi à discuter avec le ministre des Affaires intergouvernementales. Il y aura certainement des pistes de solution et des choses qui peuvent être mises en place par ces instances-là. Ici, on est en train de créer et de faire l'encadrement sur la consommation du cannabis au Québec suite à la législation faite par le gouvernement fédéral. Et ce n'est pas à la Société québécoise du cannabis de faire ces travaux-là, il y a de l'expertise dans d'autres ministères. C'est pour ça qu'on est un gouvernement, il y a plusieurs ministères, chacun a son champ de compétence, mais chacun peut certainement interagir pour l'autre. Alors, moi, j'invite le député de Labelle à aller faire des représentations aux deux instances dont je viens de vous faire mention, M. le Président.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. M. le député de Labelle.

• (17 h 50) •

M. Pagé : Bien, j'entends bien ce que la ministre nous dit. Mais elle parle aussi au nom du gouvernement. Elle a des contacts avec ses collègues qui sont aux affaires interprovinciales, entre autres. Je ne sais pas si, ce soir, elle va participer au Conseil des ministres, alors je l'invite à discuter avec son collègue qui est responsable des Affaires intergouvernementales canadiennes et d'essayer de trouver la voie de passage qui va répondre. Je suis convaincu qu'elle a les mêmes préoccupations que les miennes. Je suis convaincu de ça. C'est juste qu'elle nous dit : De l'insérer à l'intérieur du projet de loi, ce n'est peut-être pas le bon véhicule. Je suis prêt à l'entendre. Je suis prêt à l'entendre.

Maintenant, compte tenu que je suis convaincu que nous partageons tous ces grandes préoccupations de ce financement obscur — puis là je pense que le mot est encore très léger — de ce financement obscur, est-ce qu'elle peut... Et je lui demande de parler à ses collègues le ministre des Finances, le ministre des Affaires intergouvernementales canadiennes et qu'elle revienne pour nous rassurer, afin de nous dire : Écoutez, M. le député de Labelle, Mme la députée de Vachon, là, on pense qu'on a trouvé quelque chose qui va être capable de vous rassurer. On va suspendre dans quelques minutes, là, alors si c'était possible éventuellement de nous revenir pour nous rassurer. Parce que ce n'est pas très intéressant d'entendre dans les médias à tous les jours ce que je viens de vous lire.

Je le sais, qu'il y a plein de collègues qui sont très, très préoccupés à cet égard-là. Je sais qu'il y a plein de collègues qui ont entendu parler du rapport sur les paradis fiscaux, un travail qui s'est échelonné sur plusieurs mois de travail, où il y avait des conclusions très, très claires, avec une motion unanime, unanime à l'Assemblée nationale, nous avons tous voté pour cela, sur trois volets. Le premier qui disait : «Que l'Assemblée nationale condamne la pratique liée aux paradis fiscaux». Nous avons tous voté pour ça, de condamner la pratique liée aux paradis fiscaux. «Que l'Assemblée nationale rappelle que tous les contribuables doivent payer leur juste part d'impôt.» Nous avons tous voté pour ça. Mais, si la SQDC continue à encourager ces entreprises-là, bien, on ne répond pas à la volonté de l'Assemblée nationale où unanimement nous avons tous voté pour ça. Alors, il faut qu'à quelque part nous soyons rassurés et que la ministre puisse nous revenir.

Si elle me dit : M. le député de Labelle, ce n'est pas dans la création, mais on va trouver une façon de le faire parce qu'effectivement on a des valeurs au Québec, là. Je pense qu'au Québec c'est probablement l'endroit où on est allés le plus loin à l'égard des paradis fiscaux. Mais, compte tenu qu'il y a une grande partie où on dépend du fédéral, alors, hein, donc, on ne peut pas aller plus loin que cela. Maintenant, j'invite la ministre à nous revenir avec une solution pour essayer de répondre à ces grandes préoccupations, qui ne sont pas juste les miennes, là. Les chroniqueurs, à tous les jours, présentement, ont cette préoccupation-là, et la population du Québec a cette préoccupation également.

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Labelle. Juste pour informer les parlementaires que le député de Saint-Laurent est ministre responsable des Relations canadiennes et de la Francophonie canadienne. Alors, c'est le titre de son ministère. Mme la ministre.

Mme Charlebois : Oui, bien, ça revient au même, mais c'est un titre différent. J'entends les préoccupations du député de Labelle. Je vais avoir des échanges avec mes collègues. Il le sait, qu'il y a eu une commission parlementaire qui a siégé à cet effet-là. Il y a eu déjà des pistes de solution, je pense, d'élaborées dans ce rapport-là. Je n'en ai pas pris connaissance, de votre rapport, honnêtement. Je sais qu'il est public, mais honnêtement ma tête est comme occupée à faire plein de choses, dont l'encadrement sur le cannabis.

Alors, ce que je veux dire au député de Labelle, les paradis fiscaux, là, j'entends ça, mais est-ce qu'il peut me dire si c'est illégal d'avoir des actions dans une compagnie... une compagnie qui a des actions dans un paradis fiscal, est-ce qu'il le fait en toute illégalité ou légalité?

Le Président (M. Merlini) : M. le député de Labelle.

M. Pagé : Présentement, ce qui est évident pour tout le monde, c'est que ce n'est pas parce que c'est légal que c'est moral, et...

Mme Charlebois : Oui, je comprends.

M. Pagé : Et la raison pour laquelle il y a eu un rapport au Québec, c'est que nous avons tous les mêmes doutes à l'égard des paradis fiscaux, et la raison pour laquelle nous nous sommes dotés de ce rapport-là, c'est qu'on veut que tous les contribuables, tous les citoyens québécois ou canadiens paient leurs impôts au Québec.

Alors, présentement, c'est légal parce que le fédéral ne fait pas son travail. Alors, ce n'est pas parce que le fédéral ne fait pas sa job que nous, on ne puisse pas trouver un moyen pour essayer de renforcer cela et d'au moins essayer de ne pas encourager ces entreprises qui ne sont pas capables de nous dire qui sont leurs actionnaires. Qui les finance? Moi, je n'ai pas envie que ma SQDC encourage une entreprise dont on ne connaît pas le financement et dont on peut avoir des grands doutes que ce financement dans des paradis fiscaux, bien, c'est justement des ex du crime organisé. Alors, il ne faudrait pas que, justement, ce financement-là maintenant soit fait par des bandits à cravate, là, hein? Ce n'est pas ce que l'on souhaite.

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Je comprends, M. le Président, que le député de Labelle reconnaît que c'est encore légal. Et moi, je nous invite tous à la prudence, non pas que je veux favoriser cela, mais ce que j'ai le goût de vous dire, c'est que... Faisons attention parce qu'il y a des grandes entreprises au Québec qui ont investi beaucoup d'argent dans les compagnies qu'il y a des paradis fiscaux. Il y a des entreprises que vous connaissez très, très bien qui ont investi là-dedans, que je ne nommerai pas ici parce que ce n'est pas le but de la commission. Je n'ai pas le goût d'aller jouer dans ça, ce n'est pas ma nature de commencer à... Mais soyons prudents. Je vous entends, je ne suis pas sans entendre. Puis moi aussi, je suis... Moi, je paie tous mes impôts, puis je vous entends. Mais, une fois que je vous ai dit ça, je vais en parler au ministre qui s'occupe de ces choses-là avec le gouvernement fédéral... les deux ministres, en fait, que je vous ai nommés. Et, voilà, ce n'est pas ici qu'on va régler ça, mais je vais certainement adresser votre message au bon ministre.

Le Président (M. Merlini) : M. le député de Labelle.

M. Pagé : Bien, je remercie la ministre de bien entendre et de livrer le message auprès de ses collègues, parce que, oui, j'ai dit que c'est légal, mais j'ai aussi dit que c'est non moral, c'est immoral. Et ça, je pense que c'est l'avis d'à peu près tout le monde. Alors, il faut aussi mettre cet aspect-là, et de plus en plus de pays sont en train justement de serrer la vis pour éviter l'évitement fiscal, pour que tout le monde paie ses impôts, comme tout le monde ici, autour de la table.

Et, s'il y a des entreprises autour de nous et que ce sont des gens que l'on connaît, les entreprises québécoises ou des Québécois eux-mêmes qui en profitent, bien, ils passeront dans le tordeur comme les autres, non? Aucun problème avec ça. Moi, quand je défends que l'on encourage les entreprises qui se financent à partir des paradis fiscaux, je défends l'ensemble des Québécois. Alors, c'est ce que je souhaite et que j'espère qu'on trouvera le moyen...

Alors, je salue l'ouverture de la ministre d'aller parler à ses collègues afin de nous revenir avec un message ou un encadrement quelconque qui pourra nous permettre de répondre à la préoccupation d'un très grand nombre de Québécois. Et je suis convaincu aussi que le ministre des Finances va apprécier, parce que, si on est capables de ramener, justement, ce financement-là chez des producteurs québécois, qui paient leurs impôts au Québec, au final, on va tous y gagner. Et c'est la raison pour laquelle on a travaillé très fort pour se donner des mesures. Mais force est de constater que, bien, c'est le fédéral qui le contrôle. Et le fédéral, évidemment, fait preuve de beaucoup de laxisme. Et c'est bien peu dire.

Le Président (M. Merlini) : Oui. Merci, M. le député de Labelle. Mme la ministre.

Mme Charlebois : Je n'ai rien à ajouter, je pense qu'on a eu un bon échange là-dessus, M. le Président.

Le Président (M. Merlini) : Mme la députée de Repentigny.

Mme Lavallée : Bien, je partage les propos de mon collègue de Labelle. Puis ça fait comme deux semaines... on s'enligne vers une deuxième semaine où on revient sur cette discussion-là. M. Joyal, sénateur au fédéral, est revenu avec ce dossier-là vendredi puis il a dit : «"On sort le crime organisé par la porte avant [et] il est déjà revenu par la porte arrière"[...], précisant que les profits de ces investissements [sont] vraisemblablement placés à l'abri de l'impôt.» Donc, il a la préoccupation... Il y a des policiers de la GRC, ce n'est pas rien, là, qui disent de faire attention parce que le milieu criminel va passer par cette porte-là pour blanchir leur argent, et s'en venir dans la légalisation du cannabis, puis profiter de ces entrées de fonds là importantes. Puis on ne peut pas banaliser ça, puis, si on ne le met pas dans la loi qui va encadrer ça, bien, j'ai l'impression que ça va être long.

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, Mme la députée de Repentigny.

Compte tenu de l'heure, la commission suspend ses travaux. Je vous rappelle que nous tiendrons une séance de travail dans quelques instants à la salle RC.171 et que l'étude détaillée du merveilleux projet de loi n° 157 reprendra dans cette salle à 19 h 30. Merci.

(Suspension de la séance à 18 heures)

(Reprise à 19 h 34)

Le Président (M. Merlini) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons donc reprendre nos travaux. Je vous rappelle que le mandat de notre commission est de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi n° 157, Loi constituant la Société québécoise du cannabis, édictant la Loi encadrant le cannabis et modifiant diverses dispositions en matière de sécurité routière.

Je demande à toutes les personnes présentes dans la salle du Conseil législatif de bien vouloir éteindre la sonnerie de tout appareil électronique.

Lors de la suspension de nos travaux, nous étions rendus à l'étude du sous-amendement proposé par Mme la députée de Vachon, un sous-amendement à l'amendement de la ministre à l'article 23.2 introduit dans l'article... proposé dans l'article 5. Est-ce que j'ai des interventions sur la proposition de sous-amendement? M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Oui. Bien, écoutez, je n'avais pas parlé sur ce sous-amendement-là qui était proposé par la collègue de Vachon. Deux éléments. Le premier, c'est «prioritairement» par «exclusivement». Le deuxième, c'est «sur le territoire du Québec qui ne reçoit pas de financement provenant des paradis fiscaux». Je pense que c'est un enjeu qu'on a abordé à quelques reprises au niveau du financement. Je pense que c'est important d'avoir un financement qui bénéficie d'une acceptabilité sociale.

Tout au long de la discussion tantôt, j'entendais la ministre nous dire : Écoutez, il y en a, des entreprises... vous seriez surpris des entreprises qui ont investi dans les paradis fiscaux, puis des entreprises québécoises que vous connaissez. Bien, s'il y en a qui ont investi dans les paradis fiscaux, là, qu'on les nomme, qu'on le dise, puis les Québécois diront : Bien, moi, je décide de ne plus aller faire affaire chez eux, puis ce n'est pas vrai que je vais encourager des gens qui ne paient pas leurs impôts au Québec, puis qu'ils n'ont pas les retombées économiques. Alors, moi, je n'ai pas de gêne à les nommer. Donc, si la ministre veut les nommer, bien, faisons-le.

On a mis en place une commission parlementaire, sur laquelle mon collègue pour la CAQ, le député de Beauce-Sud... Beauce-Nord, pardon, siège, je pense que le député de Montmorency aussi, qui présidait ça, qui est président de la Commission des finances publiques, je pense, le collègue de Rousseau également, qui était présent sur cette commission-là, ils ont travaillé fort. Et on se retrouve dans une situation où il y a un rapport, et là le gouvernement, là, a ça entre les mains. Il y a des éléments qui peuvent être mis en place, mais on se retrouve dans une situation où c'est au vu et au su de tous qu'il y a de l'argent qui provient des paradis fiscaux, qui a été envoyé là-bas, on a de la difficulté au niveau de la traçabilité. On a de la difficulté au niveau de la traçabilité puis on sait, là, que c'est une nouvelle industrie qui devient illicite. On sait qu'il y avait des groupes criminalisés qui contrôlaient le marché : les Hell's, la mafia, le crime organisé asiatique. On le sait, là, tout ça, c'est documenté par la police, par la SQ.

On a lutté durant des années pour aller chercher les revenus des produits de la criminalité, pour aller saisir l'argent, pour lutter contre eux, puis là on se retrouve dans un phénomène où le fédéral se dépêche à vouloir légaliser, où est-ce qu'on voit qu'il y a des gens qui sont près du parti au pouvoir, dont les sources de financement sont douteuses, à tout le moins ça soulève des questions. Ça fait qu'on se ramasse avec une nouvelle industrie qui était criminalisée auparavant et que, là, on légalise. Et là c'est d'autant plus important de s'assurer que les joueurs, c'est des joueurs qui sont propres, qui ont une probité. Parce qu'on me dit : On passe d'un marché illicite, un marché au noir, un marché qui ne prenait pas en compte la santé des gens, on amène ça... on sort ça de l'ombre, mais là on se dit : O.K., mais ce n'est pas grave si les compagnies, les grosses compagnies qui font la production ont fait des rondes de financement avec de l'argent dont on ne peut pas faire la traçabilité.

• (19 h 40) •

Vous savez, M. le Président, là, quand vous passez les douanes, là, si vous avez 10 000 $ cash dans vos poches, il faut le déclarer. Mais là on ramène de l'argent des paradis fiscaux, on ne sait pas comment elle est allée, on ne sait pas comment qu'elle revient, on parle de millions, puis là ça va servir à financer, par des apports en capitaux, des sociétés qui se lancent dans le marché. Avouez qu'il y a un certain malaise à avoir là-dessus.

Et je suis convaincu, du côté gouvernemental aussi, que ça ne leur fait pas plaisir de se retrouver dans cette situation-là où... Bien, ils visent, eux aussi, à lutter contre l'évasion fiscale, contre l'évitement fiscal aussi. Parce que la ministre nous disait : Écoutez, bien, parfois c'est légal puis c'est de l'évitement fiscal. Soit, mais toutes les démocratiques occidentales, là, ont la même problématique. Donc, si on a des outils pour lutter contre ça ou au moins faire échec à ça par une voie législative, bien, on devrait prend l'opportunité qui nous est présentée, là, aujourd'hui et de l'inscrire directement dans la loi pour faire en sorte qu'on va réussir à tracer l'argent.

Puis je comprends qu'il y a des organismes internationaux, ou il y a des organismes canadiens, ou des organismes québécois qui travaillent à faire ça. Mais, si on peut leur donner un petit coup de pouce, je pense que ça serait notre responsabilité de le faire, et surtout que... Et ce que je proposais au niveau de la probité des administrateurs ou de l'organisation, par le biais de l'AMF ou par le biais de l'Autorité des marchés publics, ça, ça serait une solution raisonnable qui permettrait de réussir à accrocher... de le tenir d'une façon législative par notre bout.

Parce que, quand la ministre nous dit : Bien, écoutez, bien, il y a déjà des organismes, puis moi, je ne peux pas le faire dans mon projet de loi, je comprends qu'il y a une certaine difficulté. Je comprends que ça touche les Finances. Je comprends que ça touche les Relations intergouvernementales canadiennes, ou l'autre nom, là...

Le Président (M. Merlini) : Les Relations canadiennes.

M. Jolin-Barrette : ...les Relations canadiennes. Ça change de nom de façon périodique. Alors, les Relations canadiennes. Bien, ici, on a l'opportunité au niveau local, là, de réussir à évaluer, nous, au Québec... comme on le fait pour d'autres entreprises, que ça soit au niveau des contrats de construction avec le MTQ, de routes, des firmes d'ingénierie, de s'assurer que, les cocontractants avec qui l'État ou la société paragouvernementale va faire affaire, on va réussir à au moins avoir ce filtre-là pour faire en sorte qu'on puisse s'assurer d'une certaine probité de l'organisation. Parce que ça ne fait pas plaisir à personne qu'il y ait des paradis fiscaux, que ça soit financé à même de l'argent qui provient des paradis fiscaux.

Alors, l'amendement de la députée de Vachon est justifié, comme l'était notre amendement qu'on a déposé, comme l'était celui du collègue de Labelle qu'il a déposé. Et je dis à la ministre : Il faut trouver une voie de passage. Il faut trouver une façon, un, de favoriser les producteurs locaux, les producteurs québécois, les entreprises dont le financement est licite, dont le financement est légal, dont le financement est socialement acceptable. Et, d'un autre côté, il faut faire en sorte qu'on ait des mécanismes dans la loi qui vont permettre d'accréditer ces sociétés-là, ces compagnies-là. Et tout à l'heure, lors du débat entre la ministre et la collègue de Vachon, et par la suite avec le collègue de Labelle, j'ai entendu la ministre nous dire : Bien, écoutez, adressez-vous au ministre des Relations canadiennes et au ministre des Finances. Nous, on s'adresse à eux le plus souvent qu'on peut. On n'a pas les mêmes opportunités que la ministre, elle a. Ces opportunités-là, c'est comme ce soir, lors du Conseil des ministres. Vous savez, c'est un conseil restreint, M. le Président.

Une voix : ...

M. Jolin-Barrette : Oui, effectivement. Peut-être que la ministre a des réponses suite au Conseil des ministres de ce soir, ou non?

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Borduas. Mme la ministre.

Mme Charlebois : J'attendais. Il a-tu fini son intervention, là, le député de Borduas?

Le Président (M. Merlini) : Il a terminé son intervention, de ce que je comprends.

M. Jolin-Barrette : En fait, c'est une question, M. le Président.

Le Président (M. Merlini) : Je l'ai bien senti.

Mme Charlebois : Bien, c'est une question, mais est-ce que je peux maintenant élaborer, ou si vous allez reprendre, ou...

M. Jolin-Barrette : Bien, en fait, la question, c'était : Est-ce que vous avez des nouvelles de la part du Conseil des ministres, relativement à vos deux collègues des Relations intergouvernementales et des Finances, en lien...

Mme Charlebois : ...ce n'était pas à l'ordre du jour du Conseil des ministres ce soir. J'ai eu des discussions avec mes deux collègues, effectivement. Puis, honnêtement, ils sont d'accord avec moi qu'ici ce n'est pas la place pour faire l'arbitrage des questions dont on parle. Ceci étant dit, s'il y a une place où les choses doivent se faire, c'est d'abord au fédéral. Et, si le voile corporatif doit être levé, c'est là que ça commence. Et on veut des noms derrière les entreprises. Et je pense qu'il y a des gens qui le demandent déjà. Puis ici, au gouvernement, on n'est pas désincarné de l'ensemble des élus du Québec et de la population. Ça fait que, ça, si vous vouliez l'avoir clarifié dans le micro, vous l'avez, là.

Mais je vous dis et je répète que ce n'est pas à la Société québécoise du cannabis de faire ce travail-là. Effectivement, il y a d'autres instances. Et là on demande au gouvernement fédéral de lever le voile sur ces entreprises corporatives là et de nous dire qui sont les personnes qui sont derrière ça. On veut savoir ça pour ceux qui ont des permis et pour ceux qui auront des permis dans le futur. Parce que nous, on prend les compagnies qui ont des permis, qui sont autorisées par le gouvernement fédéral et on veut s'assurer qu'il y a une probité derrière tout ça. J'espère que vous n'avez jamais douté de ça.

La seule affaire que je passe mon temps à vous dire, c'est qu'on n'est pas dans le bon véhicule, il y a des instances pour faire ça, il y a le gouvernement fédéral qui peut faire ça, puis il y a aussi... comme vous le dites, il y a des instances au niveau du gouvernement du Québec. On est en train de valider certaines affaires, mais je ne peux pas vous répondre ce soir pour ce qui est du gouvernement du Québec. Mais ce n'est certainement pas à la Société québécoise du cannabis de faire en sorte d'examiner tout ce qu'il y a dans les corporations, dans ces entreprises-là. Il y a des instances appropriées pour faire ça. Et nous allons nous en occuper, nous, mais d'abord on demande au gouvernement fédéral de faire son travail de façon appropriée, qu'il donne des permis aux gens mais qu'il nous dise les noms derrière les numéros de compagnie. C'est-u plus clair, ça?

M. Jolin-Barrette : Bien, sur la notion de voile corporatif, il peut être soulevé aussi par le provincial. Et, lorsqu'on est en matière d'entreprises, ça se fait des deux côtés. Et j'ai un peu ma réponse par rapport à ce que je disais la semaine dernière, j'ai demandé à la ministre, très clairement, M. le Président, de négocier une entente administrative avec le gouvernement fédéral pour que ce soit le Québec qui émette les permis. Ça se fait en matière d'immigration, ça se fait en matière de pêche, depuis un bon bout en matière de pêche, ça se fait dans plein de domaines.

Mme Charlebois : Pas pour la drogue.

M. Jolin-Barrette : Bien, la ministre nous dit : Pas pour la drogue. Bien, on peut le négocier. Le gouvernement provincial peut négocier avec son homologue fédéral pour dire : Sur le territoire québécois, le gouvernement du Québec va être celui qui va chapeauter, par le biais d'une entente administrative, les permis. Mais il faut que ça soit la position du gouvernement provincial, il faut que ça soit la position du ministre des Relations canadiennes. Mais c'est sûr que, si le gouvernement du Québec ne demande rien à Ottawa par rapport à ça, bien, ils ne vous le donneront pas! Ça fait que, si on s'assoit puis on ne demande pas ça, bien, on ne l'aura pas.

Puis, si on se fie juste à Ottawa, par rapport à l'accréditation, puis qu'on n'exige rien en tant qu'Assemblée nationale, bien, il y a un problème, il y a un problème parce qu'on voit, manifestement... Puis la ministre le sait très bien, là, dans le processus de légalisation du cannabis, là, elle n'est pas satisfaite, on l'a vu au cours... depuis l'année passée, elle l'a exprimé publiquement à plusieurs reprises, et, sur certains éléments, on s'est rejoints, sur le financement, sur les plants à domicile, sur le report de l'entrée en vigueur. Elle a même appuyé une motion que j'ai présentée.

Alors, moi, ce que je lui dis, c'est qu'on doit réussir à aller chercher le plus de pouvoirs possible mais aussi s'assurer que, si on veut qu'il y ait des retombées économiques sur le territoire québécois, pour les Québécois, suite à cette légalisation-là, il faut tout faire en sorte pour que les outils à la portée du Québec soient mis en place, et l'arrangement administratif, c'en est un. Mais, si on ne le demande pas, on ne pourra pas l'avoir. Et, si les collègues de la ministre, des Finances et des Relations canadiennes, disent : Ce n'est pas le bon véhicule, bien, le véhicule qui est ouvert présentement, par voie législative, c'est le projet de loi n° 157. Puis on ne dit pas que c'est à la SQC d'évaluer la provenance. Nous, on voulait le donner à l'AMF ou à l'AMP, à l'Autorité des marchés publics. Alors, il y a de la place, là, pour le faire.

Moi, ce que je dis à la ministre, c'est qu'on peut suspendre cet article-là, on peut passer aux autres articles, avancer dans le projet de loi, s'il faut qu'elle obtienne la validation du gouvernement, et, comme ça, on pourrait progresser. Parce que c'est sûr qu'à partir du moment où il y a énormément d'informations qui sont inquiétantes relativement au financement de ces sociétés-là, relativement à la mise en place de la légalisation du cannabis, relativement aux retombées économiques qu'il peut y avoir pour le Québec, bien, je pense qu'il y aurait lieu d'avoir une certaine réflexion.

• (19 h 50) •

Et, dans le cadre du projet de loi, là, actuellement... Il faut que le projet de loi soit adopté avant l'entrée en vigueur du projet de loi fédéral, je suis d'accord avec elle, et on va travailler en ce sens-là. Mais entre-temps est-ce qu'on peut apporter des modifications au projet de loi de façon à ce qu'il représente davantage ce que la population souhaite? Parce que je l'ai entendue, la ministre, elle nous a dit : Le projet de loi, il n'est pas parfait, on va travailler ensemble. D'accord. C'est ce qu'on essaie de faire, là. Mais il faut faire preuve un peu de souplesse aussi.

Et je suis convaincu que ça la dérange aussi, la ministre, que ces sociétés-là soient financées par des paradis fiscaux, et qu'on ne sache pas qui se cache derrière, puis qu'il y a une pointe de questionnement qui est soulevée relativement à la provenance des fonds. Est-ce qu'on veut enrichir des personnes qui étaient dans le marché illicite? C'est ça. Le fin mot de l'histoire, là, c'est ça, la question au niveau du financement. Comment est-ce qu'on finance ces sociétés-là qui vont avoir un marché... C'est le Klondike, là. Les estimés du ministère des Finances relativement au marché canadien, relativement au marché québécois, on parle d'un grand marché, on parle d'un marché qui vaut plusieurs millions de dollars, des quantités importantes. Puis la ministre nous disait tantôt : On sous-estime les gens qu'on va voir dans les SQC, des gens qui étaient peut-être gênés de consommer et qui maintenant vont aller s'approvisionner dans les sociétés québécoises du cannabis parce que ça va être licite. Alors, on parle d'un immense marché illégal qui devient légal.

Pourquoi est-ce qu'on ne fait pas en sorte de vraiment développer tous les outils, tous les mécanismes pour le faire, pour faire en sorte de l'encadrer correctement, pour faire en sorte qu'on va réussir à ne pas abdiquer nos responsabilités et à dire : Moi, comme gouvernement national, là, ça m'intéresse d'avoir le plein contrôle là-dessus? Ça m'intéresse de le gérer de A à Z, puis je ne m'en remettrai pas uniquement au gouvernement fédéral. Parce que je donne l'exemple du médicinal, bien, sur le médicinal, ça devrait se retrouver en pharmacie. La ministre est d'accord avec ça. On a entendu l'Ordre des pharmaciens. Ils ont cheminé, eux, par rapport à ça. C'est un médicament. Alors, il y a des outils qu'on peut utiliser.

Alors, moi, je dis à la ministre : Si ça prend plus de temps pour arriver à un consensus, ultimement, on pourrait suspendre, passer à un autre article et avancer dans le projet de loi sur ce qui n'est pas litigieux. C'est la proposition que je fais. On a fait quelques propositions d'amendement, de sous-amendement également. Mais il y a une chose qui est sûre, c'est que le gouvernement provincial a la possibilité maintenant de dire : Nous, on va prendre le leadership sur le dossier puis on va dire au gouvernement fédéral ce qu'on veut. Parce que c'est tout aussi important que le respect de la compétence du gouvernement du Québec d'interdire la plantation à domicile. Même, je vous dirais, c'est fondamental aussi, parce qu'on parle du financement, des retombées économiques aussi.

Parce que l'autre élément aussi, la question, c'est de savoir... la question du financement, de l'actionnariat, les fonds, mais aussi les profits, quand ils vont ressortir, les profits, là, ils vont-u s'en aller à l'étranger? Il n'y aura pas de retombée ici? Et, quand qu'il y a un nouveau produit qui est légalisé, qui devient licite, bien, c'est des opportunités d'affaires importantes qui s'y prêtent, mais on a le devoir de l'encadrer. Puis, à chaque fois qu'il y a quelque chose de nouveau, bien, il faut que le gouvernement s'adapte. Puis des fois ils sont un petit peu lents à réagir, les gouvernements, dans différents domaines. Ça peut être la technologie, ou autres. Alors, moi, je pense qu'il y a lieu de continuer à travailler sur ces articles-là.

Alors, je soumets ma proposition à la ministre, de suspendre l'article, de passer à autre chose puis d'y revenir quand que tout le monde sera prêt et qu'on aura des réponses du gouvernement.

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Borduas. Mme la ministre.

Mme Charlebois : Bien, je vais faire rapidement, M. le Président, puisque depuis jeudi dernier que nous sommes à l'article 23.2, qui traite de «l'achat de cannabis par la filiale [qui] peut être effectué prioritairement auprès de producteurs situés sur le territoire du Québec, dans la mesure permise par les accords commerciaux intergouvernementaux et internationaux conclus par le Québec [et] auxquels il s'est déclaré lié en application de la Loi sur le ministère des Relations internationales (chapitre M-25.1.1)».

On a eu plusieurs échanges, effectivement. Il y a eu plusieurs propositions d'amendement sur divers sujets. On ne peut pas me dire que je n'ai pas fait preuve d'ouverture, à plusieurs égards, sur certains articles depuis le début, dont celui-là, parce que c'est un amendement que j'ai déposé pour justement tendre vers la volonté des oppositions. Là, on est en train de débattre d'un sous-amendement de la députée de Vachon — ah! je n'ai pas le droit de le dire, qu'elle n'est pas là. O.K. — qui vise à remplacer le mot «prioritairement» par «exclusivement» et ajuster, après «territoire du Québec», «pour ceux qui ne reçoivent pas de financement dans...» Bon.

Honnêtement, là, je vais revenir à la base. On est aussi préoccupés qu'eux autres, là, même si on a tenté de toutes les manières de faire voir qu'on avait des points de vue divergents. La production relève... Il faut qu'on fasse affaire avec les compagnies qui obtiennent un permis du gouvernement fédéral, permis qui doit satisfaire plusieurs conditions. Dans ces conditions-là, nous, on s'attend du gouvernement fédéral, quand c'est une compagnie, qu'il nous dévoile les noms, derrière cette compagnie-là, des individus. Je ne peux pas être plus claire que ça, là. On s'attend à ça du gouvernement fédéral. On va le signifier encore plus clairement, si ça peut vous satisfaire.

Mais, ceci étant dit, ce n'est pas à la Société québécoise du cannabis de faire ce travail-là. Il y a d'autres instances, vous l'avez dit. Le ministre des Finances est très sensibilisé à la question. Il travaille là-dessus en ce moment, et vous le savez, il y a eu une commission parlementaire qui a siégé là-dessus. Il y a des voies de passage qu'ils sont en train d'élaborer, mais ce n'est pas dans la Société québécoise du cannabis. Alors, pour l'amendement qui est déposé par la députée de Vachon, pour lequel nous pourrions passer au vote, moi, je propose le vote, M. le Président, et qu'on revienne à l'article 23.2 et...

Là, revenons à la mission sociale qu'aura la Société québécoise du cannabis. On va s'assurer que, les gens qui sont derrière les sociétés qui vont produire le cannabis, on soit capables de savoir les noms. Mais il y a des lieux, il y a des places pour faire ça. Il y a, un, le gouvernement fédéral puis, deux, vous le savez, vous m'en avez nommé, des instances qui viennent d'être créées. On va travailler là-dessus pour s'assurer qu'on peut le faire correctement, nous aussi, de notre côté. Mais d'abord assurons-nous de la créer, cette Société québécoise du cannabis là, qui va s'approvisionner prioritairement de produits situés sur le territoire du Québec.

Et, comme je vous le dis, nous allons reformuler la demande au gouvernement fédéral, comme d'autres l'ont formulée. Il n'y a pas personne qui est plus parfait que personne sur ces choses-là. Il n'y a personne qui aime ça, là, qu'on ne sache pas si, par la porte d'en arrière, on ne refait pas la même chose que la porte d'en avant, là. C'est la même affaire pour le gouvernement. S'il y a quelque chose, on est encore plus irrités par ça. Mais, je vous le dis, ce n'est pas le bon endroit.

Alors, je ne peux pas accepter votre demande de report. Je suis désolée. Moi, je veux qu'on vote l'amendement, à moins qu'ils veulent encore en discuter... Je lui laisse libre cours, mais je n'ai pas d'autre point à ajouter à ça, sauf que de... Votons l'amendement de la députée de Vachon qui... C'est ça.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. Merci, Mme la ministre. M. le député de Borduas, il vous reste trois minutes.

M. Jolin-Barrette : Bien, M. le Président, je dois dire que je suis déçu. La ministre, lorsqu'elle nous dit : Bien, ce n'est pas l'endroit, il y a d'autres outils, le ministre des Finances est là-dessus, bien, il est là-dessus en général, sur les paradis fiscaux, là, mais pas principalement sur le cannabis.

Là, actuellement, on crée la société, on crée les règles applicables au marché, on a une occasion en or, là, de faire oeuvre utile et de mettre en place les structures, juridiques notamment, qui nous permettraient d'arriver à contrôler, à faire en sorte que les entreprises aient la probité nécessaire.

La ministre, lorsqu'elle nous dit : Bien, c'est au fédéral à faire la levée du voile corporatif, oui, entre autres. Mais ça ne veut pas dire que le gouvernement du Québec n'a pas sa job à faire non plus là-dedans. Ça fait que ce n'est pas parce que... On n'attendra pas toujours après le fédéral pour qu'il fasse de quoi là-dessus quand que nous, on a certains leviers.

Alors, moi, je pense que c'est à l'endroit approprié. Je pense que c'est là qu'on devrait agir, au début du projet de loi, on devrait l'indiquer. J'avais proposé que l'approvisionnement se fasse majoritairement sur le territoire québécois et que l'AMF soit impliquée pour la probité des entreprises. La députée de Vachon a fait référence aux paradis fiscaux, je pense que c'est important de le souligner. On a voté une motion à l'Assemblée nationale sur le fait que les entreprises devaient avoir un financement socialement acceptable.

Alors, tout le monde donne l'opportunité à la ministre de dire : Bien, prenez la balle au bond, Mme la ministre, puis on vous appuie là-dedans pour mettre des règles claires pour faire en sorte que le marché soit ouvert aux producteurs québécois, que, si vous voulez vous partir un business dans ce domaine-là, bien, vous puissiez le faire, puis vous allez pouvoir partir sur la ligne de départ en même temps que tout le monde.

Pour ce qui est du commerce interprovincial, bien, je pense qu'on a eu la démonstration qu'il n'y avait pas d'accord liant sur ce sujet-là spécifiquement. Alors, ça devient encore une fois une volonté gouvernementale. Et, s'il n'y a pas d'action, on ne peut que le déplorer.

• (20 heures) •

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Borduas. Un commentaire, Mme la ministre?

Mme Charlebois : Non. Sauf que de dire qu'il y a des instances appropriées et au fédéral et au provincial, puis il le sait, il a fait partie des commissions parlementaires. Alors, il y aura des instances qui vont faire le travail, qui vont lever le voile corporatif, qui vont nous dire c'est qui, les personnes derrière ça. Mais ce n'est pas à la société québécoise de faire ce travail-là. Alors, je n'ai pas d'autre commentaire.

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, Mme la ministre. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? M. le député de Labelle, vous disposez de 7 min 50 s sur le sous-amendement.

M. Pagé : Oui. Toujours l'échange là-dessus parce que c'est une grande préoccupation, je pense, pour l'ensemble des collègues ici, puis je sais que c'est une préoccupation aussi pour la ministre. C'est plutôt dans les moyens pour répondre à nos préoccupations où là on sent qu'il y a un peu comme un cul-de-sac.

Je vais vous poser une question simple, ou plutôt plus à vos conseillers juridiques. Est-ce que légalement il y a quelque chose qui nous empêcherait d'inscrire dans la loi que la SQDC, avant de faire l'achat auprès de ses fournisseurs, doit obligatoirement s'informer du financement des entreprises? Est-ce qu'il y a quelque chose qui nous empêche d'écrire cela dans la loi pour forcer... les gens qui veulent nous vendre, bien, vous allez nous dire par qui vous êtes financés? Est-ce que légalement on aurait le droit de faire ça?

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : M. le Président, tout est possible légalement. Mais ce que je dis, c'est qu'on ne va pas multiplier les instances appropriées. Il y a une instance qui est développée... — excusez-moi, j'ai comme un chat dans la gorge — qui est développée au gouvernement fédéral. Il y en a aussi au gouvernement provincial. On ne va pas multiplier l'expertise. L'expertise qui est déjà là va s'assurer de faire le travail pour la Société québécoise du cannabis et pour les autres sociétés d'État, parce que ce que nous ne souhaitons pas, c'est exactement ne pas savoir qui il y a derrière ces compagnies-là. On veut avoir les noms. On va les avoir. On va prendre les moyens pour, que ce soit par le gouvernement fédéral, et, s'il faut qu'on ait d'autres moyens... On en a d'autres, moyens, ici, au Québec, on va les prendre. Mais ce n'est pas à la Société québécoise du cannabis... Alors, même s'il pose la question aux juristes, la volonté de la ministre n'est pas là.

Le Président (M. Merlini) : M. le député de Labelle.

M. Pagé : Bon. Alors, j'entends que légalement on pourrait demander à cette nouvelle corporation, cette nouvelle entité, cette personne morale qui va représenter le gouvernement du Québec dans l'acquisition de cannabis auprès de ses fournisseurs, légalement on pourrait demander, exiger que tous les fournisseurs fournissent la liste de qui les finance. Alors, on me dit : Oui, ça serait possible. Puis en même temps on me dit : Bien, on ne l'inscrira pas dans la loi, on va le mettre... on va s'y prendre autrement. Bon, ce n'est pas tout à fait clair, là, «autrement» comment on va le voir.

Mais je vous reviendrais bien amicalement, Mme la ministre, sur ce que vous avez dit tantôt, quand vous avez dit : Ce n'est pas sa mission sociale. Et là c'est vrai que, dans la mission, on a inscrit : «La société a également pour mission d'assurer la vente [de] cannabis dans une perspective de protection de la santé...» Mais, dans tout le contexte que nous connaissons, avec tout le travail que nous avons déployé dans les dernières années afin de contrer l'évitement fiscal, les paradis fiscaux, je pense que, comme société d'État, il y a une responsabilité sociale, il y a une mission sociale.

Je ne sais pas combien de fois il va falloir le répéter, ce qu'il va falloir déployer comme argumentation pour réussir à convaincre que, oui, ça fait partie de la mission sociale. D'autant plus que ce qu'on va vendre, ce n'est pas des balayeuses, là, ce n'est pas des boulons, là, c'est ce qu'on... Vous avez parlé de drogue tantôt, bon, qui va être rendue légale, mais ce n'est pas banal. Et on sait que qui était derrière le marché qui était illicite, c'était le crime organisé. Et il y a des fortes chances qu'il essaie d'entrer maintenant par la porte de côté.

Alors, moi, je pense que, si on ne veut pas parler de mission sociale dans le cadre de la création de cette nouvelle société d'État, parlons par contre de responsabilité sociale. Notre société d'État a une responsabilité sociale, et, dans cette responsabilité-là, il y a celle du financement acceptable, socialement acceptable, qui nous est demandé par tout le monde et pour lequel on a voté une motion à l'unanimité la semaine dernière. On disait qu'on souhaitait qu'il soit financé par un financement socialement acceptable.

Alors, je suis obligé d'exprimer, moi aussi, ma déception d'entendre que, oui, ça va nous préoccuper, mais on ne veut pas l'inscrire dans la loi. Alors, je m'attends, et nous demandons, puis on le demande depuis jeudi dernier, à ce qu'on puisse voir éventuellement, là, très concrètement, ce que ça va vouloir dire de la part du gouvernement, compte tenu qu'ils ne veulent pas l'inscrire dans la loi. Mais je suis convaincu, Mme la ministre, là... On va se reparler demain, on va se reparler encore demain jusqu'à vendredi, faites un sondage autour de vous, vous allez voir que... Demandez aux Québécois, demandez à vos collègues, demandez à qui vous voulez, demandez-leur : Est-ce que vous voulez que la Société québécoise du cannabis s'approvisionne auprès de producteurs, un, québécois, parce qu'il y a ça aussi derrière les motions, hein, et, deux, d'entreprises qui ont un financement clean, aucun financement dans les paradis fiscaux? Je suis convaincu que vous allez avoir un 99,9 % de oui. Puis je ne veux pas qu'on gère à partir des sondages, là. Moi, je déteste gérer à partir des sondages. Moi, je pense qu'il faut qu'on gère à partir de convictions, hein? Mais là c'est parce que les sondages sont aussi directement liés aux convictions des Québécois. Les Québécois n'en veulent pas, du cannabis financé par des entreprises qui sont dans les paradis fiscaux.

Alors, on va disposer de l'article, mais je redemande, encore une fois, compte tenu qu'elle ne veut pas accepter la proposition de mon collègue de Borduas qui souhaitait suspendre et qu'on revienne ultérieurement... On va disposer de l'amendement de la collègue de Vachon, mais il faut qu'on trouve le moyen d'inscrire quelque part ce que l'on débat depuis jeudi dernier, parce que je pense que la volonté est claire, autant de notre côté que de l'ensemble de la population, à cet égard.

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Labelle. Est-ce que j'ai d'autres interventions sur le sous-amendement de Mme la députée de Vachon? M. le député de Borduas, je crois qu'il vous reste à peine 30 secondes.

M. Jolin-Barrette : D'accord. Mais simplement pour dire : Lorsqu'on lève le voile corporatif, là, c'est une structure qui est parfois compliquée aussi. Puis j'ai fait la démonstration l'autre fois, là, avec l'entreprise à Gatineau, là, dans le fond, on était rendu à la quatrième compagnie, puis il n'y avait aucune personne physique dans les actionnaires. Alors, avant d'arriver au processus, au bout de la ligne, à savoir qui est le véritable, ça peut prendre un petit bout de temps. D'où l'importance de s'assurer d'avoir un mécanisme qui va être en place au Québec pour faire en sorte que la probité de l'entreprise va être assurée, pour faire en sorte que la légalisation du cannabis ne profite pas à des intérêts qui ne devraient pas... en fait, qui ne peuvent pas en profiter actuellement parce que c'est illégal, même s'ils sont déjà dans le marché.

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, M. le député de Borduas. Votre temps est écoulé pour le sous-amendement de Mme la députée de Vachon. Est-ce que j'ai d'autres interventions? Je n'en vois pas. Je mets donc le sous-amendement de Mme la députée de Vachon aux voix. Est-ce que cette proposition de sous-amendement est adoptée?

Mme Charlebois : Rejeté.

M. Pagé : Appel par vote nominal.

Le Président (M. Merlini) : Vous demandez l'appel par vote nominal, alors...

M. Pagé : Le vote par appel...

Le Président (M. Merlini) : Le vote par appel, oui, oui. «L'appel par vote nominal». Mme la secrétaire, pour, contre ou abstention.

La Secrétaire : Mme Charlebois (Soulanges)?

Mme Charlebois : Contre.

La Secrétaire : M. H. Plante (Maskinongé)?

M. Plante : Contre.

La Secrétaire : M. Simard (Dubuc)?

M. Simard : Contre.

La Secrétaire : M. Chevarie (Îles-de-la-Madeleine)?

M. Chevarie : Contre.

La Secrétaire : Mme Simard (Charlevoix—Côte-de-Beaupré)?

Mme Simard : Contre.

La Secrétaire : M. St-Denis (Argenteuil)?

M. St-Denis : Contre.

La Secrétaire : M. Pagé (Labelle)?

M. Pagé : Pour.

La Secrétaire : M. Jolin-Barrette (Borduas)?

M. Jolin-Barrette : Pour.

La Secrétaire : M. Merlini (La Prairie)?

• (20 h 10) •

Le Président (M. Merlini) : Abstention. Alors, le sous-amendement de Mme la députée de Vachon est donc rejeté. Nous revenons donc à l'amendement proposé par Mme la ministre à l'article 23.2. Est-ce que j'ai des interventions? M. le député de Labelle, vous n'avez plus de temps à l'amendement de Mme la ministre à 23.2. Vous avez écoulé votre temps imparti à l'amendement. Est-ce que j'ai d'autres interventions à l'amendement de Mme la ministre? M. le député de Borduas, vous disposez de 11 minutes.

M. Jolin-Barrette : Merci, M. le Président. M. le Président, je vais réitérer... Je comprends que la ministre ait tenté de faire un effort avec l'amendement qu'elle nous a déposé. Par contre, la façon que c'est libellé, il n'y a aucune obligation pour le P.D.G. de la SQC de se diriger vers le territoire québécois. C'est une possibilité. Et je veux juste qu'elle en soit bien consciente, qu'il n'y a aucune obligation et qu'on aurait pu aller un petit peu plus loin que ça. On change un mot puis on a un deal, comme on dit.

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Borduas. Mme la ministre, un commentaire, une observation?

Mme Charlebois : M. le Président, c'est fascinant travailler en commission parlementaire avec le député de Borduas.

Une voix : ...

Mme Charlebois : Oui, mais avec le député de Borduas c'est particulier. C'est particulier parce que parfois... Il est plus jeune que mes enfants. Ça fait que parfois il me fait sourire.

M. Jolin-Barrette : Dans le plaisir?

Mme Charlebois : Non, mais mon fils a quand même 35 ans, là. Alors, c'est ça. M. le Président, j'entends sa proposition, mais «no deal».

Le Président (M. Merlini) : Est-ce que j'ai d'autres interventions sur l'amendement de Mme la ministre? M. le député de Borduas.

M. Jolin-Barrette : Vous savez, M. le Président, c'est «no deal», mais on va continuer de tenter de convaincre la ministre. L'offre est refusée. Vous savez, le tableau, des fois, il change suite aux refus, puis là on se retrouve dans une situation où on voit nos opportunités. Alors, si je peux l'amener à voir d'autres opportunités... Je pense que ça suscite quand même des réflexions.

Et, l'autre élément, à partir du moment où on aura passé cet article-là, il va falloir se questionner sur la suite du projet de loi. Parce que les arrangements interprovinciaux ne nous l'interdisent pas, on nous le permet, alors pourquoi ne pas profiter de cette opportunité-là pour le mettre puis d'envoyer un signal clair?

Parce que je dis juste à la ministre, là... L'année prochaine, là, peu importe le gouvernement qui va être là, si on se rend compte que le P.D.G. de la SQC, il s'approvisionne juste à l'extérieur du Québec, qu'est-ce qu'on va faire? On va se rasseoir ici? On va venir modifier la loi? Ou on va laisser... on va dire : Bien, on souhaiterait qu'il s'approvisionne auprès des producteurs québécois, on souhaiterait qu'il favorise, dans le fond, le développement de ces entrepreneurs-là qui vont décider d'intégrer le marché? Bien, c'est ça, le risque auquel on est assujettis.

Alors, M. le Président, je pense que j'ai dit pas mal tout ce que je pouvais dire pour convaincre la ministre. Je pense qu'elle sait très bien l'importance de modifier le «peut» par le «doit» et que, si elle ne change pas d'idée, bien, elle fait son choix en toute connaissance de cause.

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, M. le député de Borduas. Commentaires, observations, Mme la ministre?

Mme Charlebois : ...je n'ai pas de commentaire. Excusez-moi.

Le Président (M. Merlini) : Je vous en prie. M. le député de Borduas, vous avez une autre intervention?

M. Jolin-Barrette : Oui. Bien, M. le Président, juste avant de voter, je tiens à vous dire qu'on souhaite que les producteurs québécois soient favorisés, et on va voter contre l'amendement de la ministre parce que ça ne va pas assez loin.

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Borduas.

Mme Charlebois : Alors, si je comprends bien, M. le Président...

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : ...le député de Borduas va voter contre un amendement qui dit : «L'achat de cannabis par la filiale peut être effectué prioritairement auprès des producteurs situés sur le territoire du Québec», et tout le reste qui vient à la fin de l'article? J'en ai pris bonne note.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. Je comprends donc que nous pouvons donc passer au votre... au vote — pardon, wow! — passer au vote sur la proposition d'amendement de Mme la ministre. Est-ce que cette proposition d'amendement est adoptée?

Des voix : Adopté.

Une voix : Rejeté.

Le Président (M. Merlini) : Donc, c'est adopté sur division.

Mme Charlebois : Est-ce qu'on fait un vote par appel nominal ou... On fait-u ça?

Le Président (M. Merlini) : Il est trop tard, Mme la ministre.

Mme Charlebois : Ah! il est trop tard? C'est dommage.

Le Président (M. Merlini) : Le vote a été appelé et il a été donné. Alors, la motion... la proposition d'amendement est adoptée sur division. Nous revenons donc à l'article 23.2 proposé dans l'article 5 tel qu'amendé. Est-ce que j'ai des interventions? M. le député de Labelle, vous me faites signe.

M. Pagé : Oui, M. le Président. Alors, si on n'a pas réussi à aller aussi loin, on va aller un petit peu moins loin que ce dont nous avons discuté jusqu'à maintenant par rapport aux paradis fiscaux, mais je proposerais l'amendement suivant :

Modifier l'article 23.2 de la Loi sur la Société des alcools du Québec (chapitre S-13) inséré par l'article 5 du présent projet de loi par l'insertion, après «producteur de cannabis», de «ayant démontré que son financement est socialement acceptable et».

Le Président (M. Merlini) : Merci. Nous allons faire les photocopies et en faire la distribution.

Je suspends les travaux quelques instants.

(Suspension de la séance à 20 h 16)

(Reprise à 20 h 20)

Le Président (M. Merlini) : Nous reprenons donc nos travaux. La copie de la proposition d'amendement de M. le député de Labelle a été distribuée à tous les membres, ils en ont pris connaissance. M. le député de Labelle, pour vos explications, à vous la parole.

M. Pagé : Oui. Je vous remercie, M. le Président. Alors, bon, depuis maintenant un bon nombre d'heures, nous sommes sur l'article 23.2. Pour quelle raison? Parce qu'à 23.2 on définit... Ça commence en disant : «La filiale a pour objet de réaliser la mission de la société portant sur la vente du cannabis. À cette fin, elle peut notamment...» «Elle peut notamment...» Et le premier point, c'est quoi? C'est acheter du cannabis et acheter des produits à des fins commerciales par des producteurs de cannabis. Alors, peut acheter, peut exploiter, elle peut vendre, elle peut mandater. Alors, il y a quatre picots, quatre éléments sur ce qu'elle peut faire.

Tout le monde, depuis des semaines, nous fait part de leur grande préoccupation du financement à l'égard de ces entreprises qui, de semaine en semaine, on apprend, là... de plus en plus, on parle de centaines de millions, on approche le 300 millions qui viendrait de financement occulte. Alors, la semaine dernière, j'ai personnellement déposé une motion à l'Assemblée nationale, pour laquelle nous avons demandé un vote par appel nominal, et le score a été de 110 à zéro, 110-0, et qu'est-ce que disait cette motion?

«Que l'Assemblée nationale réclame de la Société québécoise du cannabis — donc, la SQDC, l'Assemblée nationale réclame de la SQDC, là, la SQDC, on est en train de la créer — qu'elle fasse en sorte de s'approvisionner majoritairement auprès de producteurs québécois de cannabis et s'assure que ses fournisseurs présentent un financement socialement acceptable.»

Nous sommes allés plus loin, quand nous sommes revenus de cette motion, en voulant l'inscrire dans la mission, à l'article précédent. On l'a rejeté. Nous sommes revenus à l'article 23.2, avec la députée de Vachon, en disant qu'il faut justement aller plus loin que la motion que nous avons votée en inscrivant très clairement de ne pas s'approvisionner auprès d'entreprises qui sont financées dans les paradis fiscaux. Nous avons nommé les paradis fiscaux, ce que ne faisait pas la motion.

Par contre, ce soir, cet amendement que je propose ne va pas aussi loin que de dire : «Financement auprès de paradis fiscaux». Ce soir, l'amendement reprend mot à mot la motion que nous avons votée unanimement la semaine dernière, à 110 contre personne, contre aucun. Personne ne s'objectait à cela, que l'Assemblée nationale réclame de la SQDC qu'elle s'assure que ses fournisseurs présentent un financement socialement acceptable.

Alors là, honnêtement, là, je ne pourrais imaginer qu'on refuse cela, parce que la façon dont le premier alinéa de 23.2 se lirait, si on acceptait l'amendement que nous proposons... Et la ministre, depuis le début, nous dit : On a travaillé en collégialité, donc je vais faire preuve d'ouverture. Alors, je réclame ce soir vraiment cette ouverture. Je pense que ça plairait vraiment à beaucoup de gens, même si ça ne va pas aussi loin que ce que nous avons souhaité jusqu'à maintenant, mais, quand même, je pense que ça montrerait un pas dans la bonne direction, dans la direction, en tout cas, que non seulement de ce côté-ci de la table nous souhaitons, mais que l'ensemble des Québécois souhaitent.

Alors, le premier picot, là, il se lirait de la façon suivante... premier alinéa, pardon. Ça, c'est mon collègue François... le député d'Abitibi-Ouest, il parle toujours comme ça, alors, des fois, compte tenu que je vais devenir un des doyens bientôt, là, ou presque, alors je commence à parler comme mon collègue. Alors, le premier alinéa, alors ça se lirait, si on acceptait l'amendement que nous proposons, de la façon suivante : «Acheter du cannabis...» Donc, la société «peut notamment acheter du cannabis produit à des fins commerciales par un producteur de cannabis ayant démontré — c'est ce qu'on ajoute — que son financement est socialement acceptable et qui possède les qualités», comme finit... comme le projet de loi est présenté.

Alors, on peut clore ce débat très, très, très rapidement si la ministre nous fait signe que, oui, il y a une ouverture, puis, oui, on a bien compris le message, puis on... J'ai entendu depuis jeudi dernier jusqu'à quel point c'est votre préoccupation, mais jusqu'à quel point ce n'est pas juste une préoccupation parlementaire, jusqu'à quel point c'est une préoccupation dans la population. J'ai entendu les chroniqueurs, j'ai entendu la population, j'ai entendu les messages qui me sont livrés d'à peu près tout le monde. Alors, même si on ne va pas aussi loin que nos premiers amendements, je sollicite maintenant l'ouverture de la ministre pour que nous puissions donner vie à l'amendement que nous avons voté, que vous, M. le Président, que la ministre, que tous les parlementaires qui sont assis autour de cette table et de côté-ci, nous avons voté la semaine dernière puis, je répète, qui va encore beaucoup moins loin que le rapport que la commission sur les paradis fiscaux avait déposé, là, ça va moins loin. Et c'est large, le financement acceptable, c'est plus large, c'est beaucoup plus doux comme appellation. Alors, maintenant, j'entendrais volontiers la ministre, en la suppliant d'accepter.

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Labelle. Mme la ministre.

Mme Charlebois : C'est presque de la torture, M. le Président, se faire demander ça de même. Bon, j'entends, encore là, la proposition du député de Labelle, mais je vais le ramener... Parce que, là, on est au tout début du projet de loi, mais, si vous allez dans la partie II, qui parle de l'édiction de la Loi encadrant le cannabis, là on fait la loi qui encadre le cannabis, et non la loi qui constitue la société d'État, à l'article 19, on parle de production de cannabis. L'avez-vous? Et là on pourrait trouver une voie de passage à ce que vous proposez, parce que c'est là où on va parler de production. Puis ça va nous donner le temps de réfléchir comme il faut à la voie de passage, si ça vous convient. Prenez le temps d'y penser, là, je le propose.

Le Président (M. Merlini) : M. le député de Labelle, vous permettez le député de Borduas d'intervenir pendant que vous regardez?

M. Pagé : Bien, en fait, effectivement, je trouve très séduisant ce qui nous est... l'ouverture qui est faite de la part de la ministre, mais je lui rappelle bien amicalement, toujours, que l'article 19 dit : «Il est interdit à quiconque de produire du cannabis à des fins commerciales au Québec». Bon, alors là, on s'adresse aux producteurs québécois. Et ce que nous proposons, c'est le financement des entreprises qui vont fournir la SQDC. Et les entreprises qui vont fournir la SQDC, il n'y a pas que des producteurs québécois.

Alors, j'entends bien l'ouverture, mais je voudrais qu'elle me rassure. Si elle me dit : Je prends l'engagement d'intégrer votre amendement ou le sens de votre amendement dans l'article 19, dans la section IV, dans le chapitre IV, si elle prend cet engagement, je retire mon amendement tout de suite, M. le Président, et je vais être bon joueur, puis on va avancer, on va avancer. Mais il faut que je sente qu'il y ait vraiment cet engagement solennel, là, de l'inclure, mais pas seulement pour des producteurs québécois, là, mais vraiment : l'ensemble des entreprises, qui peuvent être transformateurs ou producteurs, qui vont faire affaire avec la SQDC doivent présenter un financement socialement acceptable. Si j'ai son engagement solennel qu'à un article ultérieur nous allons le libeller pour que cette volonté soit clairement exprimée dans la loi, je vais collaborer immédiatement.

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

• (20 h 30) •

Mme Charlebois : Je pense qu'on progresse, M. le Président. Alors, à l'article 19 : «Il est interdit à quiconque de produire du cannabis à des fins commerciales au Québec», vous avez raison, alors on est prêts à introduire la notion de produire ou vendre du cannabis, de produire ou vendre du cannabis à des fins commerciales au Québec, O.K.?

Pour ce qui est de la dernière partie de ce que vous me parlez, de financement socialement acceptable, je ne suis pas, comment vous dire, je cherche la meilleure voie de le formuler... en ce sens que, comme je le disais tantôt, là, quand on parle, là, de... on veut savoir les noms derrière, etc., les entités, c'est tout ça, là, qui... Puis je cherche la meilleure façon de le formuler, comprenez-vous? Je ne suis pas en train de vous dire que ce n'est pas bon, mais on aura peut-être quelque chose qui va être plus approprié, plus précis, c'est juste ça que je veux dire. Je ne suis pas contre, là.

M. Pagé : Mais j'entends bien, je salue l'effort. En même temps, en même temps, ce que je présente comme motion, plus j'y pense, plus je me dis : C'est à 23.2 que nous devons l'inscrire, pour la bonne raison qu'on définit les rôles que devra jouer la SQDC, et on lui définit dès le départ quatre rôles : acheter, exploiter, vendre et mandater une personne, bon, pour l'entreposage, le transport. Alors, quand on lui définit ces rôles, on lui dit : Bien, quand tu vas en acheter, là, assure-toi donc que tes fournisseurs montrent un financement socialement acceptable. Il me semble que c'est le bon endroit.

Parce que, quand vous me ramenez au chapitre IV, «Production de cannabis», là, je ne suis pas tant dans la production, je suis dans le financement de ceux qui produisent, ce qui est très différent. Alors, c'est pour ça qu'il me semble... On va discuter, là, puis, si on arrive à trouver que c'est mieux sur 19, aucun problème, on va le mettre à 19. Mais il me semble, à ce moment-ci, que, quand il pose son premier geste d'acheter, ça devrait être écrit clairement dans son mandat lors de l'achat, il me semble. À moins, comme on a suggéré un peu plus tôt, de suspendre 23.2 pour cette partie, et qu'on revienne ultérieurement, puis, quand on aura passé à 19, on verra lequel des deux est le meilleur endroit pour aller inscrire cette notion, là, qu'on veut inscrire dans le projet de loi.

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : C'est parce que tout est lié à 23.2 pour la suite des choses, M. le Président. On est en train de constituer la Société québécoise du cannabis, on ne peut pas sauter des articles qui la constituent. Et le paragraphe 23.2, c'est ce qu'on m'indique, nous réfère directement à l'article 19, c'est ça qui est le plus drôle : «Acheter du cannabis produit à des fins commerciales par un producteur de cannabis qui possède les qualités et satisfait aux conditions déterminées par règlement du gouvernement pris en application du premier alinéa de l'article 19 de la Loi encadrant le cannabis», ce dont je vous parle.

Je comprends la préoccupation du député, là, mais je pense que ce serait plus approprié à l'article 19, là, du...

Une voix : Chapitre V.

Mme Charlebois : ...oui, du chapitre V, de la partie II, qui est l'édiction de la Loi encadrant le cannabis. Il y a beaucoup de titres là-dedans, hein, puis des chapitres, puis des ci puis des ça, là, alors il ne faut pas se mêler. Mais voilà, c'est...

Là, on est en train... Puis je comprends sa préoccupation, mais en même temps je persiste à dire que c'est peut-être plus quand on va parler de production à 19 qu'on va pouvoir dire là qu'ils vont devoir...

Le Président (M. Merlini) : M. le député de Labelle.

M. Pagé : Mais c'est parce qu'à 19 on parle de la production, mais on ne définit pas qui va jouer ce rôle-là, là, dans 19, là, d'aller vérifier si le financement de ces producteurs-là est socialement acceptable. Alors, je ne vois pas... Ou à moins que... Bon. Si la ministre souhaite qu'on suspende un certain moment et de travailler tout de suite sur un amendement qui pourrait s'intégrer à 19, puis, quand on arrivera là... puis qu'elle nous dise : Bien, voici, là, intégré de cette façon-ci, on est capables de répondre aux attentes. Parce qu'à 19, là, quand je le lis rapidement, là, il faudrait que je le relise encore, là, mais je ne vois...

Mme Charlebois : Non, mais il a besoin d'un amendement, 19, là. Oui.

M. Pagé : ...je ne vois pas qui procède à cette vérification-là, à moins qu'on vienne introduire dans 19 : «La SQDC aura aussi le mandat d'aller vérifier...» Bon.

Mme Charlebois : Bien, peut-être pas dans le sens où vous le dites, là.

M. Pagé : Mais, étant donné que, justement, on définit... À 23.2, c'est clair, là, c'est la SQDC. Alors, c'est clair, la SQDC achète, vend, fait ci, fait ça. Bon. Bien, en même temps, quand tu achètes, vérifie donc, le financement de tes entreprises avec qui tu fais affaire, s'il est correct.

Alors, écoutez, à la limite, on peut le suspendre un moment, si vous le souhaitez, pour qu'on essaie de bien voir si on s'enligne correctement. Mais je salue le fait, là, qu'on travaille dans la même direction, là. J'entends ça.

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre, une brève suspension?

Mme Charlebois : Bien, juste avant qu'on suspende, juste pour clarifier pour le député de Labelle, je ramène l'élément que «la filiale a pour objet de réaliser la mission — ta, ta, ta : 1° acheter du cannabis produit à des fins commerciales par un producteur de cannabis qui possède les qualités et satisfait aux conditions déterminées par un règlement du gouvernement pris en application du premier alinéa de l'article 19». Alors, «aux conditions déterminées par règlement pris en application de l'article 19», ça nous réfère là. Je veux juste dire que, là... Mais je ne suis pas en train de vous dire que ça ne nécessite pas un amendement à 19, là. Ce n'est pas ça que je veux dire, là. On s'entend?

M. Pagé : Mais, en lisant, Mme la ministre, vous venez de me convaincre encore plus que c'est à 23.2 qu'il faut le mettre pour la raison suivante, c'est qu'acheter du cannabis produit... commerciales par des producteurs de cannabis qui possèdent les qualités et satisfait aux conditions x, y, là, alors, justement, on établit là, à cet article 23.2, au premier alinéa, qu'il doit y avoir des qualités, qu'il doit satisfaire à des conditions. Alors, si c'est là qu'on le nomme, bien, nommons justement le fait qu'on veut qu'il soit financé de façon socialement acceptable. Parce qu'on a pris la peine de le nommer là. Alors, vous venez de me convaincre. En le lisant, vous m'avez convaincu encore plus que c'est là que ça...

Mme Charlebois : ...M. le Président : «Règlement du gouvernement pris en application du premier alinéa de l'article 19». Il faut m'entendre jusqu'à la fin, là. Non, mais ça nous ramène là. Les conditions vont être déterminées là. C'est ça que je veux dire. Ce n'est pas parce que je ne veux pas qu'il y en ait, là. Ce n'est pas ça que je dis, là. C'est juste qu'on peut le mettre à 19. C'est ça que je veux vous dire.

Le Président (M. Merlini) : M. le député de Labelle.

M. Pagé : Bien, en fait, si elle me dit : On pourrait le mettre à 19, bon, soit qu'on suspende puis qu'on essaie de voir, bon, comment on pourrait l'intégrer, ou bien, si elle a déjà une proposition, bien, j'aimerais l'entendre pour qu'elle me dise : Bien, à 19, là, ça va se lire de telle façon. Alors, à partir du moment où elle va me faire la démonstration qu'à 19 on atteint absolument l'objectif, je retire tout de suite mon amendement. Alors, est-ce qu'on suspend ou bien elle nous présente de quelle façon on jouerait ça à 19?

Mme Charlebois : Bien, je regarde si on ne peut pas faire un ou deux articles puis revenir demain avec quelque chose, là. Mais je ne peux pas vous donner ça là, maintenant, à 19, là.

Le Président (M. Merlini) : Ce qu'on peut faire...

Mme Charlebois : On travaille en ce moment, là, là-dessus, là. Ça fait que je n'ai pas...

Le Président (M. Merlini) : Ce qu'on peut faire pour le moment, c'est de suspendre l'étude de la proposition d'amendement et d'aller à 23.3. Mme la ministre propose de revenir demain avec possiblement quelque chose, et on pourrait reprendre, avec consentement, l'étude de la proposition d'amendement ou le faire à la fin de l'étude de l'article 5, c'est-à-dire après qu'on soit rendus à l'article 23.45. Alors, est-ce que c'est le souhait de la commission? Est-ce que j'ai votre consentement pour suspendre l'étude de la proposition d'amendement du député de Labelle?

Mme Charlebois : Donnez-moi une suspension de deux minutes, là. Je vous reviens avant qu'on fasse une suspension de l'article.

Le Président (M. Merlini) : Alors, je suspends donc les travaux quelques minutes.

(Suspension de la séance à 20 h 38)

(Reprise à 20 h 56)

Le Président (M. Merlini) : Nous reprenons donc nos travaux après cette suspension, où les membres de la commission ont pu échanger sur la proposition d'amendement de M. le député de Labelle. Suite à ces échanges, il semble y avoir une entente entre les parlementaires. Je vais laisser la parole à M. le député de Labelle.

M. Pagé : Oui. Alors, avec le consentement, M. le Président, je demanderais de suspendre, pas de retirer, mais bien de suspendre l'amendement que j'avais proposé, qui parlait de financement socialement acceptable. Alors, à ce moment-ci... et ce serait conforme, je pense, aux échanges que nous avons eus hors micro.

Le Président (M. Merlini) : Alors, est-ce que j'ai votre consentement pour suspendre l'étude de la proposition d'amendement de M. le député de Labelle?

Des voix : Consentement.

Le Président (M. Merlini) : Consentement. Alors, l'étude de cette proposition d'amendement est suspendue. Nous revenons donc à l'article 23.2 tel qu'amendé. Il reste des temps. Est-ce que j'ai des interventions? M. le député de Labelle.

M. Pagé : Oui. Je tiens à dire, pour les gens qui nous écoutent : La suspension de ce que nous venons de faire, ce n'est pas une mauvaise nouvelle, au contraire, c'est parce qu'il y a une volonté de tous les partis d'en venir à définir et à inclure dans le projet de loi ce que nous souhaitons, soit un financement socialement acceptable. Alors, là-dessus, je salue la volonté de la ministre, son ouverture à trouver le modus operandi qui va nous permettre d'inscrire dans la loi ce que nous recherchons.

Alors, pour reprendre le débat sur 23.2, tel qu'amendé, parce qu'il y a déjà un bout qui a été fait, le quatrième alinéa, «mandater une personne pour entreposer et transporter le cannabis qu'elle vend», compte tenu que le temps passe rapidement, je vais proposer tout de suite un amendement, M. le Président, qui se lirait comme suit :

Modifier l'article 22.3 de la loi sur...

Une voix : ...

M. Pagé : 23.2. Il commence à être tard, on a commencé de bonne heure ce matin.

Modifier l'article 23.2 de la Loi sur la Société des alcools du Québec (chapitre S-13) inséré par l'article 5 du présent projet de loi par le remplacement, dans le quatrième paragraphe — ce n'est pas le quatrième alinéa, effectivement, c'est le quatrième paragraphe —  du premier alinéa, de «une personne» par «la société ou une autre société d'État».

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député. Nous allons faire les photocopies, en faire la distribution.

Et je suspends quelques instants.

(Suspension de la séance à 20 h 59)

(Reprise à 21 h 1)

Le Président (M. Merlini) : Nous reprenons donc nos travaux après cette brève suspension. Les membres ont reçu copie de la proposition d'amendement de M. le député de Labelle, à qui je laisse la parole pour ses explications. À vous la parole.

M. Pagé : Oui. M. le Président, l'amendement que nous proposons répond, entre autres, à des interrogations qui nous ont été soulevées, je pense, par la CSN et la FTQ, si ma mémoire est bonne — c'est bien ça? — et qui tente d'une part à préciser un peu mieux le «une personne», parce que la proposition d'amendement, c'est de retirer le «une personne» dans la phrase et de la remplacer par «la société» — on s'entend, quand on parle de la société ici, dans le projet de loi, ça a été dit en amont, on parle de la SAQ, la filiale, c'est la SQDC — donc la SAQ, «ou une autre société d'État».

Alors, le paragraphe 4° se lirait : Mandater la société ou une autre société d'État pour entreposer ou transporter le cannabis qu'elle vend.

C'est d'autant plus, je dirais, cohérent d'inscrire cela... ça nous apparaît d'autant plus cohérent... À moins qu'on nous arrive avec des arguments contraires et qu'on nous convainc que la cohérence est plutôt avec le mot qui avait été choisi. Mais d'une part le mot «une personne» est très vague et très large, et j'ai hâte d'entendre la définition de «une personne», mais je pense que c'est très large et pas suffisamment précis.

Et ce que j'allais dire, c'est que la SQDC, c'est une filiale de la SAQ. Alors, il faut qu'aux endroits où c'est possible, où ça ne contrevient pas à la mission de l'une et de l'autre, soit la société et la filiale... Il faut mettre à profit les avantages de la filiale à l'intérieur de la SAQ. Et, s'il y a un endroit où ça ne contrevient pas à la mission de la SQDC, qui est de vendre du cannabis, mais tout en faisant attention à la santé publique, en faisant de la prévention... Quand on va faire le transport, l'entreposage, évidemment ce n'est pas à ce moment-là que va se faire l'opération, en fait, la mission d'avoir une attention particulière à la santé publique, à la prévention. Alors, à cet égard-là, nous pensons qu'on devrait profiter de tous les avantages que peut offrir la SAQ, sans contrevenir à la mission de la SQDC, et notamment, bien, tout le matériel roulant, le matériel immobilier, le matériel... les bâtiments, bon. Alors, quand on parle d'entreposage et de transport, vous avez compris que «matériel roulant», tout le parc immobilier, bien, fait partie de cela et c'est déjà à l'intérieur de la SAQ. Alors, voilà la raison pour laquelle on souhaite clarifier, en enlevant le «une personne», par la «société ou une autre société d'État».

Le Président (M. Merlini) : Merci beaucoup, M. le député de Labelle. Mme la ministre.

Mme Charlebois : Alors, M. le Président, juste comme ça, dans la Loi de la Société des alcools, à l'article 17, paragraphe g — je pense, c'est de même qu'on dit ça, paragraphe g? — il est stipulé «d'autoriser, aux conditions qu'elle détermine, toute personne à faire la livraison de boissons alcooliques et à procéder et garder à cette fin, pour le compte de la société, ces boissons alcooliques, sauf s'il s'agit [d'une] livraison à un titulaire d'un permis d'épicerie». C'est le même genre d'article, puis c'est la société mère.

Le Président (M. Merlini) : M. le député.

M. Pagé : Donc, ce que vous me dites, c'est que, dans la loi qui est constituante de la Société des alcools... À quel article, Mme la ministre?

Mme Charlebois : G.

M. Pagé : 17g.

Mme Charlebois : Oui.

(Consultation)

M. Pagé : Est-ce qu'il faut comprendre que le «toute personne», dans ce cas-là, c'est des employés directs de la SAQ?

Mme Charlebois : Bien, de ce que je comprends, puis peut-être que mon juriste peut me confirmer ça, est-ce que c'est... Ce que je comprends, c'est : personne physique et morale, n'est-ce pas?

Une voix : Ça peut être un des deux.

Mme Charlebois : Ça peut être un des deux, oui, ou les deux.

Le Président (M. Merlini) : Me Lord.

M. Roy (Gabriel) : Oui, ça peut inclure les deux.

Le Président (M. Merlini) : Me Roy, pardon. Excusez.

M. Roy (Gabriel) : «Une personne», ce n'est pas défini, ça pourrait être physique ou morale.

Mme Charlebois : Puis c'est dans la loi constitutive de la Société des alcools, c'est...

M. Pagé : En fait, ce que je comprends, c'est que la SAQ fait son transport elle-même.

Mme Charlebois : ...

M. Pagé : Pardon?

Mme Charlebois : Pas toujours.

M. Pagé : Pas toujours?

Mme Charlebois : Je m'excuse, pas toujours. Quand tu as des importations privées, non.

M. Pagé : Oui, j'imagine que, pour le vin qu'elle va chercher à l'extérieur, bon, probablement que...

Mme Charlebois : C'est juste une facturation ou un transit, je ne sais pas comment vous dire ça, là, le bon mot, exact, là.

M. Pagé : À partir du moment où ça arrive au port de Montréal, par exemple, j'imagine que, là, c'est les camions de la SAQ qui vont chercher et qui font le transport dans les entrepôts, et ensuite...

Mme Charlebois : Bien, souvent, je ne suis pas sûre que ça passe même par les entrepôts, sincèrement, là. Non, mais il y a une facturation qui se fait par le biais de...

M. Pagé : ...

Mme Charlebois : Bien, je ne suis pas dans... en tout cas, on n'opère pas des SAQ, nous autres, là, dans notre vie de tous les jours, mais il n'en demeure pas moins que je connais du monde qui ont acheté du vin d'importation privée, puis ce n'est pas la SAQ qui vient livrer, là, c'est même la personne de qui tu commandes qui va chercher le stock et vient te le livrer.

M. Pagé : On s'entend que... Je ne pense pas qu'il va y avoir de l'importation privée de cannabis. Il va peut-être... il va y avoir de la vente en ligne, ça, on le sait, hein? Ça, c'est un autre grave problème, là. Mais est-ce que... J'aimerais mieux comprendre ou qu'on m'explique pourquoi on l'écrit comme ça, là, «toute personne». Parce que, quand la CSN et la FTQ sont venues, ils nous ont dit : Non, il ne faut pas l'écrire comme ça, parce que c'était la filiale. Alors, je veux être sûr qu'on réponde bien aux questions qui ont été soulevées. À partir du moment où vous me dites : Non, non, il faut absolument l'inscrire de cette façon pour telle, telle raison, ça va, mais les...

Le Président (M. Merlini) : Me Roy.

M. Roy (Gabriel) : Bien, écoutez, c'est la façon la plus large possible de l'exprimer, donc ce serait possible, théoriquement, parce qu'il y a une habilitation réglementaire à 23.37 qui permet au gouvernement de déterminer les conditions auxquelles devront satisfaire les personnes autorisées à faire la livraison, le transport et l'entreposage du cannabis. Donc, ça permet d'aller viser les personnes en tant que personnes morales, qui sont les entreprises qui pourraient être autorisées. Ça pourrait éventuellement viser les employés de ces personnes morales là. Donc, le libellé est assez large pour englober toute personne, donc je pense que, je veux dire, ça devrait répondre à...

Le Président (M. Merlini) : M. le député de Labelle.

• (21 h 10) •

M. Pagé : Donc, ce que ça veut dire, c'est que ça ouvre la porte à une forme quasiment de... je ne dirais pas de sous-traitance, là, mais... Je veux me partir une entreprise de transport, et que je veux soumissionner auprès de la SQDC pour faire du transport de cannabis de l'entrepôt jusqu'aux succursales, alors je n'ai pas besoin d'être un employé de la SQDC ou de la SAQ. C'est carrément ça que ça veut dire. Alors, on sort tout un volet de l'opérationnel, qui est l'entreposage et le transport, on le sort des employés de la filiale, et là ça peut être offert à n'importe quel privé, dans le fond, là. Et là on s'entend qu'on transporte du cannabis, là, alors on essaie de faire ça de la façon la plus sécuritaire possible. Alors, c'est ce qu'on me dit, là.

Mme Charlebois : C'est pour ça qu'on va avoir une habilitation réglementaire pour déterminer et encadrer ça comme il faut. Mais, tu sais, c'est déjà ça pour la Société des alcools puis ça n'a jamais soulevé... Puis, tu sais, la boisson, le crime organisé aimerait ça autant que le cannabis, là.

M. Pagé : On va convenir que partir avec quelques caisses de boissons dans ma voiture, ça peut valoir quelques centaines de dollars. Mais bourrer ma voiture de cannabis, quand on sait que, les petites enveloppes, au prix qu'ils vont se vendre, là, ça va valoir des milliers, et des milliers, et des milliers de dollars. Donc, en termes d'encadrement, je pense que ça mérite d'être le plus, je dirais, sécuritaire possible, le plus encadré possible, et d'avoir, je dirais, le meilleur contrôle possible sur le personnel qui aura à entreposer et à transporter. Alors, c'est pour ça que ça me soulève des questions, là.

Le Président (M. Merlini) : Mme la ministre.

Mme Charlebois : Donnez-moi une suspension, M. le Président, là.

Le Président (M. Merlini) : Je suspends donc quelques instants.

(Suspension de la séance à 21 h 12)

(Reprise à 21 h 18)

Le Président (M. Merlini) : À l'ordre, s'il vous plaît! Nous reprenons donc nos travaux après cette brève suspension. Mme la ministre, c'est vous qui aviez la parole au sujet de la proposition d'amendement de M. le député de Labelle.

Mme Charlebois : Bon. M. le Président, pour répondre au député de Labelle, c'est une clause miroir — c'est-u de même qu'on appelle ça? — article miroir, qui est de la Société des alcools vers la Société québécoise du cannabis. La Société des alcools a le même article, s'est prévalu de faire à sa manière son transport. La société québécoise pourra faire la même chose et faire ses choix en fonction de la relation du coût et du prix de vente sur le marché. Alors donc, si la Société québécoise du cannabis juge que, pour des raisons de prix de vente, il serait préférable que, je ne sais pas, moi, il utilise une personne pour transporter ou... une personne physique ou morale, là, pour transporter le cannabis vers les entrepôts, pourra le faire. Sinon, il peut faire exactement ce que la Société des alcools du Québec fait. Mais il y a la même disposition, c'est une clause miroir à ce qui se fait pour la SAQ.

Le Président (M. Merlini) : M. le député de Labelle.

M. Pagé : J'essaie de comprendre. Quand la ministre dit : Elle peut faire... Comment?

• (21 h 20) •

Mme Charlebois : Elle peut faire ses choix en fonction de la relation du coût et du prix de vente pour ramener, tu sais... Parce que c'est toujours une question de prix de vente au détail pour être compétitif avec les autres marchés, le marché noir, finalement, là. Alors, ce choix-là s'est fait par la Société des alcools, puis ils ont pris leur propre flotte, hein? Bien là, pour le cannabis, la Société québécoise du cannabis pourra faire ses choix, mais on lui donne la clause miroir telle que la Société des alcools a. Vous pouvez vérifier dans la Loi de la Société des alcools. Mais l'entreprise qui est la SQDC... la société d'État plutôt, ce n'est pas une entreprise, la société d'État qu'est la Société québécoise du cannabis pourra faire ses choix dans la latitude qu'il a là, mais il pourra aussi utiliser son propre transport. Ça sera à eux de décider. C'est une clause miroir. On n'a rien... Ce n'est pas du droit nouveau, là, c'est exactement dans la législation qui a constitué la société... comment est constituée la Société des alcools du Québec.

M. Pagé : Oui. Par contre, c'est ça, ma question, c'est que j'essaie de comprendre le lien avec les coûts... — comment on a dit? — avec les coûts... avec les prix et les coûts...

Mme Charlebois : En fonction de la compétitivité, si ses coûts sont trop élevés en prenant, je ne sais pas, tel type ou tel autre type de transport, que ce soient ses employés ou les employés d'une personne morale, c'est à eux autres d'évaluer qu'est-ce qui sera le plus avantageux. Mais la Société des alcools, manifestement, a l'opportunité de faire autrement, puis ils ont leur propre flotte. Ça fait que ça ne veut pas dire que la Société québécoise du cannabis peut faire autrement, mais donnons-lui la marge de manoeuvre, comme on a fait pour... C'est une clause miroir.

M. Pagé : Je comprends la marge de manoeuvre, mais on s'entend de... Je ne dis pas que ça va prendre des camions de la Brink's, là, mais on s'entend qu'on voit passer le camion de la SAQ, je ne suis pas si certain que ça que les gens ont envie de faire un hold-up, mais tu vois passer un camion plein de la SQDC, je peux vous dire que ça va valoir une fortune...

Mme Charlebois : C'est vrai si c'est de la compagnie d'État et/ou un autre transporteur, là. Ça va être vrai dans les deux cas.

M. Pagé : Oui. Mais le fait de pouvoir compter sur des employés qui sont toujours les mêmes, qui ont la formation requise, avec la flotte de camions sécurisés, avec les entrepôts sécurisés, m'apparaît comme... Parce que je ne pense pas qu'on va négocier ça souvent, là. Le transporteur, on ne va pas se lever un matin : Ah! O.K. Y a-t-il quelqu'un qui est capable de me faire le transport Montréal—Val-d'Or à moins cher cette semaine, là? On n'enverra pas ça dans n'importe quel genre de camion, puis il faut en plus qu'il soit... bon, le bon taux, j'imagine, d'humidité ou de réfrigération, ou je ne sais trop. Parce que j'imagine que le produit ne peut pas être entreposé ou transporté n'importe comment. Alors, ça va prendre une certaine qualité de camions avec des certains équipements, même chose pour le niveau de l'entreposage, puis même chose au niveau de l'entreposage et de la sécurité.

Et, à cet égard-là, je vais laisser, avec votre permission, M. le Président, la parole à mon collègue de Saint-Jérôme, qui justement m'amenait un argument solide qui milite en faveur d'un encadrement assez serré. Je vais lui laisser la parole...

Le Président (M. Merlini) : Le député de Saint-Jérôme.

M. Bourcier : Oui, écoutez, M. le Président, on parle d'une personne — je comprends la définition de Mme la ministre aussi — pour entreposer et transporter le cannabis qu'elle vend, je parle de la SQC, mais, cette personne-là, puis je reviens aux propos de mon collègue le député de Labelle, c'est une question de sécurité. Ça ne devrait pas, selon ce qu'on en connaît, ça ne devrait pas être une organisation privée ou une personne choisie... je ne dis pas de manière aléatoire puis de manière un petit peu frivole, ce n'est quand même pas Chich & Chung qui vont transporter le matériel, là, on s'entend, mais ça ouvre la porte à toutes sortes d'organisations qui pourraient faire le transport et l'entreposage du cannabis. Et le député de Labelle disait tantôt que la valeur de ce produit-là est quand même beaucoup plus importante que des bouteilles de vin. On s'entend-u qu'on est ailleurs que le jus de raisin?

Sécuriser la substance aussi, la mettre en lieu sûr, puis c'est l'exemple que je voulais vous apporter ici, ça prend des mesures de sécurité supplémentaires. Ça doit être mis de l'avant. Puis je prends l'exemple des Serres Mirabel, juste au sud de Saint-Jérôme, où, pour rendre conformes les 500 000 pieds carrés de serres, à Mirabel, aux exigences de Santé Canada, on parle d'un investissement privé de 15 millions de dollars. J'imagine que ce n'est pas entièrement dévolu à la sécurité, mais on parle de construction d'une voûte en béton, ce n'est certainement pas dans des «baggies» ou dans des sacs à vidanges qu'ils vont entreposer ça. Et la transformation du centre de distribution, évidemment, là, va coûter très cher. On parle de caméras de surveillance puis de gardiens de sécurité.

Alors, si on est pour le transporter, on est peut-être dans une zone de droit nouveau où il va falloir aborder ça d'une manière différente, c'est du jamais-vu au cours des 30 dernières années. Alors, je voulais supporter l'argumentaire de mon collègue député de Labelle à ce sujet-là.

Le Président (M. Merlini) : Merci, M. le député de Saint-Jérôme. Mme la ministre.

Mme Charlebois : Alors, M. le Président, juste rappeler... Je comprends, là, qu'on parle de drogues, mais elles sont déjà sur le marché, les drogues. Il ne faut pas en faire toute... Je comprends tout le monde, là, mais, mon Dieu Seigneur! il y a déjà des usines de production pour du cannabis thérapeutique. Il n'y a personne qui arrive là-dedans avec des mitraillettes, là, M. le Président, là. C'est contrôlé. C'est encadré. Il y a des règles de sécurité. Pour ce qui est du transport, ça va être la même chose, là. Tu sais, on n'est pas tatas à temps plein, là. J'ai toute une équipe qui m'accompagne.

À 23.37, M. le Président, ça dit : «Le gouvernement peut, par règlement, déterminer les normes d'achat et de vente de cannabis par la filiale; déterminer les conditions auxquelles doit satisfaire une personne pour pouvoir être autorisée par la filiale à transporter [et] à entreposer...»

Alors, par règlement, on va tout faire ça. C'est sûr qu'on ne prendra pas un petit gars en bicycle à pédales pour transporter du cannabis, là. On n'est pas nonos à temps plein, là, hein? Même à temps partiel, on ne ferait pas ça. Je vous dis ça de même, là, O.K.?

Alors, il faut quand même penser qu'on est assez sérieux, là. Je comprends que vous avez des inquiétudes, mais, à un moment donné, là, il va falloir qu'on puisse avancer. Puis, si ça a été vrai... Tu sais, il fut un jour, avant qu'on crée la Société des alcools, là, on va se dire la vérité, là, la boisson, c'était de l'alcool frelaté. Moi, mon père m'a conté des histoires. Je n'ai pas vu ça de mes yeux, bien que j'aie un certain âge, mais j'ai entendu parler de gens qui ont perdu la vue, de gens qui sont morts d'avoir consommé des boissons alcooliques non réglementées, mais, pire que ça, qui n'étaient pas... je ne sais pas si on peut dire «potables», là, mais, en tout cas, qui étaient vraiment nuisibles à la santé.

Là, on est en train de faire une loi où on va avoir du cannabis qui va avoir été identifié. On aura les propriétés. On va avoir contrôlé la qualité, M. le Président. Et il vient d'une usine où il va y en avoir eu une quantité astronomique. Puis ils vont en produire pour d'autres, pas juste pour la Société québécoise du cannabis du Québec. Puis là on est bien inquiets de savoir... Tu sais, je comprends l'inquiétude, mais, à un moment donné, il faut s'en sortir puis il faut faire confiance, là. Je ne laisserai pas ça... Puis le gouvernement puis tous les parlementaires que nous sommes, on ne peut pas mettre des virgules, des points, des accents circonflexes puis des accents graves. Je comprends qu'on veut, mais il y a un pouvoir réglementaire. Puis savez-vous pourquoi on fait ça? Pour se donner de la souplesse pour s'ajuster, justement, au cas où.

Mais c'est une clause miroir à la Société des alcools, là, ce n'est pas du nouveau droit, là. Puis il fut un temps où l'alcool, là, c'était aussi pire qu'aujourd'hui on parle du cannabis, là. C'était la même, même, même patente dans le temps. Puis ça, je pense que tout le monde comprend ça, là, un Québécois, là, quand je parle de patente, là, c'était le même droit.

Alors, moi, j'entends bien, mais, s'il faut qu'à chaque article on pense que le gouvernement n'a pas des bonnes intentions, ça me fait un petit peu mal au coeur, M. le Président. Je vous le dis, là, ça me fait un petit peu mal au coeur. Quand je dis que c'est une clause miroir, bien, Seigneur, c'est parce que... Qu'on aille la voir, la clause miroir.

Puis, de deux, je vous le dis, on va édicter des règles, on... Il va falloir qu'ils satisfassent à certaines normes, là. On ne mettra pas la Brink's, mais effectivement ça ne prendra pas n'importe quelle sorte de transport, puis peut-être que ça va être un transporteur, tu sais... Puis ils vont être aussi visés, même si c'est la société d'État qui transporte, que si c'est une autre, là, entreprise, une personne morale. Ceci étant dit, il va falloir qu'il y ait des normes qui encadrent ça, puis on va le voir à 23.37.

Moi aussi, je pense que je commence à être fatiguée. Il va falloir que je m'excuse demain, hein? O.K.

Le Président (M. Merlini) : Merci, Mme la ministre. Je regarde l'heure avancée. J'aimerais informer les parlementaires que ce soir nous avions eu la présence d'étudiants en première année de droit à l'Université Laval, qui ont suivi nos travaux de leur présence ici ce soir, au salon rouge. Alors, bienvenue et bonne chance, bonne continuation dans vos études.

Compte tenu de l'heure, la commission ajourne donc ses travaux sine die. Bonne fin de soirée.

(Fin de la séance à 21 h 30)

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