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Version finale

42nd Legislature, 1st Session
(November 27, 2018 au October 13, 2021)

Tuesday, May 14, 2019 - Vol. 45 N° 11

Clause-by-clause consideration of Bill 2, An Act to tighten the regulation of cannabis


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Table des matières

Journal des débats

(Quinze heures cinquante et une minutes)

Le Président (M. Provençal)  : Alors, nous allons débuter notre séance. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.

La commission est réunie afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi n° 2, Loi resserrant l'encadrement du cannabis.

Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?

La Secrétaire : Oui, M. le Président. M. Lévesque (Chapleau) est remplacé par Mme Jeannotte (Labelle); Mme David (Marguerite-Bourgeoys), par Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce); M. Zanetti (Jean-Lesage), par M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve); M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), par M. Gaudreault (Jonquière).

Remarques préliminaires

Le Président (M. Provençal)  : Merci. Nous débutons avec les remarques préliminaires. M. le ministre délégué à la Santé et des Services sociaux, vous disposez de 20 minutes. La parole est à vous.

M. Lionel Carmant

M. Carmant : Merci, M. le Président. Je suis heureux que nous amorcions aujourd'hui l'étude détaillée du projet de loi n° 2, le projet de loi resserrant l'encadrement du cannabis.

Je tiens à souligner l'implication de tous mes collègues députés depuis le dépôt du projet de loi, en décembre dernier. Nous avons d'importants désaccords sur plusieurs points, désaccords que nous avons eu la chance de débattre plusieurs fois.

Ce projet de loi vise à défendre les jeunes d'une substance nocive qui a été légalisée par le gouvernement fédéral il y a un peu plus de six mois. Nous agissons dans le meilleur intérêt des Québécoises et des Québécois. C'est cette volonté de protéger la santé des jeunes du Québec qui nous permettra de compléter nos travaux en vue de définir un cadre législatif encore plus adéquat pour l'atteinte de nos objectifs.

L'encadrement du cannabis est un enjeu qui relève d'un choix de société et d'acceptabilité sociale. Resserrer l'encadrement du cannabis répond à une promesse que le gouvernement a faite à la population du Québec.

Je remercie tous ceux et celles qui sont venus témoigner en février dernier. Nous avons écouté attentivement ce que les différents groupes et intervenants sont venus nous dire. Leurs différents points de vue et leurs arguments ont permis d'apporter un éclairage pertinent sur certains enjeux et ont alimenté notre réflexion à tous. C'est pourquoi nous proposons aujourd'hui certains amendements.

Tout d'abord, nous voulons prévoir l'ajout d'un pouvoir réglementaire permettant à une municipalité locale de permettre de fumer du cannabis dans un parc municipal clairement identifié. Cependant, l'interdiction de fumer du cannabis demeurerait dans les parties du parc où se trouvent des lieux et installations destinés aux mineurs ou plus spécifiquement fréquentés par des mineurs, incluant la voie publique.

De plus, l'interdiction de fumer du cannabis demeurerait lors d'événements publics de nature culturelle, sportive ou commerciale, et les municipalités auraient l'obligation d'afficher l'interdiction de fumer lors de ces événements.

Nous voulons également prévoir une disposition transitoire permettant aux préposés de la Société québécoise du cannabis qui sont actuellement âgés de 18, 19 ou 20 ans d'accéder aux points de vente pour qu'ils puissent préserver leur emploi.

Ces propositions témoignent donc de nos efforts afin de bonifier le projet de loi et de répondre à certaines préoccupations qui ont été exprimées, notamment au regard du respect de l'autonomie des municipalités. Le gouvernement reconnaît les municipalités comme des partenaires. Nous croyons que nos propositions répondent à la réalité de ces municipalités tout en respectant ce qui nous tient le plus à coeur, soit la protection des jeunes.

Ensemble, je suis confiant que nous réussirons à mieux sensibiliser la population et à prévenir les conséquences associées à la consommation du cannabis pour nos plus vulnérables, nos adolescents.

Avec ces changements proposés, nous gardons le cap. Nous allons offrir le meilleur encadrement pour contrer un usage précoce du cannabis et une banalisation de la substance et de son usage.

La littérature scientifique et de nombreux chercheurs énoncent les dangers que comporte la consommation de cannabis chez les adolescents et jusqu'à l'âge de la pleine maturation du cerveau. L'accès au cannabis par des personnes âgées de moins de 21 ans et la banalisation de celui-ci occasionnée par son usage sous une forme visible dans les lieux publics constituent des enjeux importants. La proximité des points de vente avec les établissements d'enseignement postsecondaire contribue également à la banalisation du cannabis chez les jeunes adultes.

Je tiens aussi à souligner que le gouvernement agit et investit aussi de façon importante en matière de lutte au marché illicite ainsi qu'en prévention et en promotion de la santé. Le gouvernement a investi 5 millions lors de la mise à jour économique pour la prévention en matière de cannabis. Nous avons également un montant récurrent de 20 millions pour la santé mentale des jeunes.

C'est dans ce contexte de prévention que nous avons poursuivi notre réflexion et amorcerons cette nouvelle étape du cheminement du projet de loi. Nous allons échanger, au cours des prochains jours, sur le projet de loi n° 2 dans la perspective de l'améliorer pour répondre à certains enjeux identifiés. Je suis conscient que nos collègues auront, eux aussi, des propositions à faire et j'espère que celles-ci iront dans le sens du projet de loi. Je les invite d'ailleurs à déposer leurs propositions d'amendement en bloc afin de faciliter le travail de tous dans cet exercice d'étude détaillée.

La légalisation du cannabis est un phénomène relativement nouveau, qui amène son lot d'incertitudes pour notre société. Nous sommes confiants que tous les grands paramètres nécessaires à l'atteinte des objectifs que nous nous sommes fixés seront en place avec les nouvelles mesures du projet de loi n° 2. Nous devrons par ailleurs nous assurer de faire un suivi continu de l'évolution de la situation au cours des prochaines années.

Dans cette perspective, rappelons que divers pouvoirs réglementaires ont été prévus à la Loi encadrant le cannabis. Contrairement à ce que certaines personnes peuvent croire, c'est d'ailleurs ce qui a été prévu dans le projet de loi n° 157 de l'ancien gouvernement concernant les produits comestibles à base de cannabis. Dans la loi québécoise encadrant le cannabis, il est stipulé que le gouvernement peut déterminer par règlement d'autres normes relatives à la composition et aux caractéristiques ou aux propriétés du cannabis, dont celles applicables aux produits de cannabis comestibles ou non. Nous pourrons encadrer ces nouveaux produits par un règlement en vue de leur légalisation, le 17 octobre prochain, et non en modifiant la loi sur l'encadrement du cannabis.

Nous sommes toujours en attente du cadre législatif du gouvernement fédéral. Une fois que ce cadre final sera dévoilé, nous pourrons y aller avec notre projet de règlement pour encadrer la vente des produits comestibles. On pourra donner plus de détails en temps et lieu. Je vais laisser le gouvernement fédéral proposer son propre cadre législatif final avant de me prononcer davantage. Vous comprendrez que cet aspect ne fera pas partie des discussions dans le présent exercice.

Ceci étant dit, M. le Président, c'est avec grand soin que je compte étudier le projet de loi avec l'ensemble de mes collègues parlementaires. J'ose espérer que nous parviendrons à travailler ensemble pour un resserrement de l'encadrement du cannabis permettant de mieux sensibiliser la population, de mieux prévenir et de réduire les méfaits associés à la consommation de cannabis. J'espère que tous ici abordent cet exercice de façon positive et constructive et je souhaite à tous une bonne étude détaillée. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Provençal)  : Merci, M. le ministre. J'invite maintenant le porte-parole de l'opposition officielle et député de Pontiac à faire ses remarques préliminaires. Vous disposez de 20 minutes. La parole est à vous, M. le député.

M. André Fortin

M. Fortin : Merci. Merci, M. le Président. Je salue tout le monde. Bonjour, M. le ministre, bienvenue à... C'est votre première étude article par article? Moi, j'ai aimé ça, je suis certain que vous allez aimer ça. Bonjour, chers collègues. Je ne ferai pas la nomenclature encore une fois, là. Je m'étais préparé la dernière fois, puis là je pense qu'il m'en manque quelques-uns. Je salue mes collègues du côté du Parti libéral, et de Québec solidaire, et du Parti québécois qui sont ici.

M. le Président, juste rapidement, d'entrée de jeu, je veux juste m'assurer, le ministre a fait référence à certains de ses amendements. Est-ce qu'il doit les déposer à ce moment-ci ou est-ce qu'il doit le faire en cours de route, puisqu'il a déjà introduit le concept des amendements qu'il compte présenter?

M. Carmant : M. le Président, je souhaiterais les déposer maintenant.

Document déposé

Le Président (M. Provençal)  : Ça va.

M. Fortin : Très bien.

Le Président (M. Provençal)  : On les reçoit puis on en fera une copie pour tout le monde.

• (16 heures) •

M. Fortin : Très bien. Merci. Merci, M. le Président. J'écoutais le ministre et ses remarques d'introduction. Effectivement, je pense que tout le monde est ici pour travailler — et vous allez l'apprécier, j'en suis certain, M. le Président — de façon positive, de façon constructive, toujours en s'adressant à vous, M. le Président. Et, je pense que c'est important, là, tout le monde est ici pour le bien commun. Bien, effectivement, là, nous, on aborde cette commission parlementaire là, cette étude article par article là, évidemment, en tant que législateurs, pour avoir la meilleure législation possible, mais naturellement aussi en tant que citoyens et en tant que parents, en tant qu'élus locaux qui ont à coeur les représentations qui leur sont faites aussi par leurs élus municipaux, que ce soit dans ma région ou dans une autre.

Je crois qu'au cours des dernières semaines, des derniers mois, on a beaucoup échangé tant sur la forme que sur le fond, disons, du projet de loi. Sur la forme, là, ce n'est pas un secret, M. le Président, je pense qu'on a eu quelques revendications particulières ou quelques enjeux, disons, sur la façon que se sont déroulés... et ce n'était en rien lié au leadership, là, M. le Président, que vous exercez par rapport à cette commission parlementaire là ou au travail du secrétariat de la commission... (Interruption) Pardonnez ma petite grippe, M. le Président. Mais je pense que ce n'était pas un secret qu'on trouvait que la commission aurait pu se dérouler de façon, disons, plus transparente, de façon plus ouverte, de façon à ce que davantage d'intervenants puissent être entendus au cours de la période de consultation, un peu comme ça avait été le cas lors de l'étude du projet de loi auquel a fait référence le ministre, là, celui de Mme Charlebois dans le dernier gouvernement.

Mais aujourd'hui je vous dirais que, pour mes remarques préliminaires, j'aimerais m'attarder davantage, un peu comme l'a fait le ministre, sur le fond des choses, parce qu'effectivement, comme il le disait, on a des points de vue divergents, divergents, très divergents, à certains égards, sur ce qui est mieux d'un point de vue de santé publique, uniquement d'un point de vue de santé publique. Je crois qu'effectivement sur certains points, on peut peut-être être d'accord, sur certains points, on est, de toute évidence, en désaccord avec l'approche qui est préconisée par la Coalition avenir Québec.

Et ce n'est pas, et ça, je l'ai dit à plusieurs reprises, M. le Président, je l'ai répété, ce n'est pas parce qu'on ne savait pas où s'en allait la Coalition avenir Québec. Je crois que, tant... Le député qui est aujourd'hui leader parlementaire du gouvernement avait été très clair par rapport aux orientations que la Coalition avenir Québec se donnait pour le projet de loi n° 157 à l'époque. C'est-à-dire que la position de la Coalition avenir Québec, c'était le cannabis disponible pour la consommation, pour l'achat, pour la possession uniquement 21 ans et pas de consommation dans des lieux publics. Ils l'ont répété en commission parlementaire. Le premier ministre l'a répété en campagne électorale. Le ministre en a débattu avec nous ici, en commission parlementaire, devant les médias. Leur position était claire. Et on n'a jamais tenu rigueur à la Coalition avenir Québec, parce qu'ils avaient toujours dit où ils s'en allaient avec ça.

Maintenant, aujourd'hui, là, je comprends, à la lueur des modifications qui sont proposées par le ministre, et on va les regarder, on va les étudier, on va en discuter ensemble, je comprends cependant qu'un de leurs engagements électoraux, M. le Président, tombe à l'eau. J'entendais, il y a quelques instants encore, le premier ministre du Québec dire : On va respecter 100 % de nos engagements. Bien, 100 % moins un, hein, 100 % moins un parce que c'était très clair dans la plateforme électorale, dans les propos répétés, et répétés, et encore répétés de la part de la Coalition avenir Québec, qu'on parlait d'aucune consommation en public, quelle qu'elle soit. Maintenant, on y reviendra, à tout ça.

Le fond, le fond du projet de loi, si je mets de côté, là, la consommation en public pour un instant, c'est les 18-21 ans. Est-ce qu'on est pour la consommation à 18 ans? Est-ce qu'on est pour la consommation à 21 ans? En fait, je devrais dire : Est-ce qu'on croit qu'il y a moins d'enjeux de santé publique? Parce que je crois qu'on est tous, M. le Président, pour la vertu. On aimerait tous qu'il n'y ait pas de cannabis dans la société, mais, bon, le produit existe. Alors, 18 ou 21 ans, où est-ce qu'on peut limiter davantage l'impact sur la santé publique des Québécois et des Québécoises? Je pense qu'il est là, l'enjeu principal. Et, sur ce point-là, contrairement au point que le ministre vient de déposer en commission parlementaire, ils ont été conséquents avec eux-mêmes. Ils nous ont répété que, pour la Coalition avenir Québec, 21 ans, c'était l'âge idéal.

Où ils ont pris le 21 ans? On a encore des questions. Ce sera un des aspects sur lequel on voudrait élaborer en commission parlementaire, et je vais vous dire pourquoi dans quelques instants. Mais ce point de vue là, que la Coalition avenir Québec a toujours maintenu, là, ils l'ont fait de façon répétée, de façon régulière, de façon soutenue contre l'avis des experts en santé publique, que je pense, M. le Président, à l'Association pour la santé publique du Québec ou à d'autres, qui nous ont dit qu'effectivement... qui sont venus ici, en commission parlementaire, qui nous ont dit qu'effectivement, bien, il y avait 40 % des 18-24 ans qui consommaient au Québec, qui nous ont dit cependant, M. le Président, qu'il était peu probable qu'une interdiction d'achat et de consommation de cannabis pour les 18-20 ans, comme il est indiqué dans le projet de loi n° 2, là, limite considérablement la consommation dans ce groupe d'âge. Je pense que tout le monde convient, tous les experts, que ce soit en santé publique ou autre, pouvaient convenir qu'il pouvait y avoir un impact jusqu'à 25 ans, un impact non négligeable, par exemple, jusqu'à 25 ans, mais jamais on n'a été en mesure de nous dire, jamais on n'a été en mesure de nous prouver, et ça, c'est des gens de l'Assocation de la santé publique, des directeurs de santé publique, des médecins en santé publique qui nous ont dit, qui nous ont répété qu'une interdiction à l'achat, à la consommation, à la possession de cannabis pour des gens âgés de... des adultes âgés entre 18 et 21 ans limiterait la consommation, aurait un impact sur la consommation.

D'ailleurs, les premiers chiffres qui nous ont été présentés par des gens de la santé publique, M. le Président, nous ont dit que les chiffres entre janvier et septembre 2018, avant la légalisation, et les chiffres entre octobre 2018 et janvier 2019, c'est sensiblement les mêmes, c'est la même proportion de jeunes qui consomment du cannabis. Ça n'a pas changé. En fait, ça a même... ça a augmenté un... ou ça a diminué un tout petit peu. Donc, tant la légalisation que l'impact qu'aurait le projet de loi, là, ne semblent pas avoir eu un impact majeur sur la consommation chez les 18 à 20 ans.

Alors, ce qu'ils nous disaient, les gens de la santé publique, c'est : Pourquoi vous n'optez pas pour des mesures alternatives? Pourquoi vous n'optez pas pour des mesures préventives? Pourquoi vous ne faites pas davantage de prévention? Et ça, c'est un des grands pans manquants, disons, du projet de loi qui a été présenté par le ministre. Un des grands pans manquants du projet de loi qu'on s'apprête à étudier, c'est qu'il n'y a rien réellement au niveau de la prévention. Dans le précédent projet de loi, on en avait parlé de long en large, il y avait des fonds qui avaient été alloués, il y avait des engagements pendant cinq ans à ce niveau-là, que le ministre a pu utiliser pour certaines des mesures qu'il met de l'avant. Mais est-ce qu'il y a eu un engagement supplémentaire à ce niveau-là? Pas du tout, M. le Président.

Si je regarde ce qui a été fait, cependant, au niveau de la prévention, on a vu une campagne de publicité, vous l'avez vue, je l'ai vue, on les voit un peu partout dans les bars, les restaurants, on le voit ailleurs au Québec, une campagne de publicité décriée par certains experts en marketing, décriée par certains experts en santé publique, des gens qui disent que cette campagne-là est tellement ridicule qu'elle ne fonctionnera pas. Donc, c'est un peu ce qu'on a vu, point de vue prévention. Alors, quand ces organismes-là disent : On pourrait en faire plus, je pense qu'il y a quand même quelque chose qui vaut la peine d'être entendu dans leur message.

Ce que les gens de la santé publique nous ont dit, et là je ne suis pas encore dans ce que les gens de la Fédération étudiante collégiale du Québec nous ont dit, mais simplement au niveau de la santé publique, là : «L'exclusion des 18-20 ans, qui représentent 100 000 [Québécois] — 100 000 jeunes adultes au Québec, pour utiliser leurs mots — ne ferait qu'envoyer un message bancal voulant qu'ils ne soient pas suffisamment autonomes pour prendre une décision éclairée pour leur santé concernant le cannabis alors qu'ils peuvent consommer [...] acheter du tabac [...] de l'alcool à volonté.» Ça, c'est l'Association de la santé publique qui dit ça. On dit qu'on envoie un message aux gens : Vous n'êtes pas assez autonomes pour prendre une décision éclairée, une décision intelligente, tandis que vous pouvez voter, tandis que vous pouvez acheter de l'alcool, tandis que vous pouvez acheter du tabac, tandis que vous pouvez consommer ces produits-là, vous pouvez en posséder. Vous pouvez vous inscrire pour être dans les Forces armées canadiennes, vous pouvez aller servir votre pays à l'étranger, vous placer en situation dangereuse. Vous êtes assez matures, assez intelligents, assez autonomes pour prendre des décisions à ce niveau-là, mais pas pour la consommation de cannabis ni pour la consommation d'un produit à base de THC ou un produit à base de CBD.

Les gens de la santé publique nous ont aussi dit, M. le Président, et c'est là qu'on a un réel enjeu avec le projet de loi et, disons, la priorisation du projet de loi de la part du gouvernement, nous ont dit qu'il y avait un impact énorme de l'alcool sur la santé publique, qu'il y avait un coût énorme pour la santé publique québécoise de la consommation d'alcool, qu'il y avait un coût énorme pour la santé publique québécoise de la consommation du tabac. Ils nous ont dit qu'il y avait ou coût aussi important pour la consommation de cannabis, mais rien de comparable aux ravages que fait l'alcool et le tabac.

Alors, là où on s'est posé des questions, c'est un peu par rapport à la priorisation du projet de loi par le gouvernement. Mais, comme je vous l'ai dit, ils en avaient parlé, ils avaient été clairs, alors on n'était pas surpris. On était peut-être un peu surpris que c'était le premier projet de loi, étant donné que... ou un des premiers projets de loi, étant donné qu'il y avait peut-être des mesures alternatives qu'on aurait pu prendre et qu'il y aurait peut-être d'autres enjeux, qu'il pourrait y avoir d'autres mesures qui pourraient avoir un impact plus important.

• (16 h 10) •

On a entendu également des chercheurs en commission parlementaire. On n'en a pas entendu beaucoup, mais on en a entendu. Et le ministre nous a dit que c'étaient des chercheurs qui étaient très respectés, et je lui fais confiance là-dessus. Il nous a parlé de la Dre Gobbi, qu'on a tous entendue, qui nous a dit très clairement : La demande qu'on doit se poser... parce qu'elle a fait un bel exposé très recherché qui nous disait essentiellement qu'il y a un impact jusqu'à 25 ans. Mais la demande qu'on doit se poser : Est-ce que la légalisation qui empêche les jeunes de fumer a un effet sur le pourcentage de jeunes qui consomment le cannabis, c'est-à-dire, si on met l'âge 21 ans ou l'âge 18 ans, est-ce qu'on va arriver à diminuer les jeunes qui consomment? La réponse, c'est non. Ça, c'est la chercheure ou une des chercheures... et je pense qu'on pourrait s'entendre pour dire une des chercheures les plus reconnues au Québec, dans ce milieu-là, dans ce domaine-là, quelqu'un qui est respecté, quelqu'un qui est écouté, quelqu'un qui a de toute évidence fait ses devoirs. Elle nous dit que le projet de loi n'aura pas d'impact. Et le ministre lui-même avoue que son projet de loi, là, s'il y a impact nul, c'est une victoire.

Alors, quand je vous dis que le projet de loi va contre l'avis des experts, c'est un peu ce que je suis en train de vous exprimer, M. le Président. Mais ça va contre aussi les avis de ceux qui sont affectés par le projet de loi. Quand je regarde le point de vue de la Fédération étudiante collégiale du Québec, M. le Président, qui nous dit : Bien, voyons! Pensez-vous vraiment décourager les jeunes avec un projet de loi comme celui-là? Il y a quelques mois à peine, là, avant octobre 2018, il était illégal de consommer du cannabis, de posséder du cannabis, et, encore là, on voit que 40 % des jeunes le faisaient quand même. Décision bien malheureuse, on s'entend là-dessus, mais ils le faisaient quand même.

Alors, pensez-vous vraiment qu'une pénalité de 100 $ va arrêter ces jeunes-là, alors que la pénalité était bien plus sévère il y a quelques mois à peine? Ça, ce n'est pas moi qui le dit, c'est la Fédération étudiante collégiale du Québec. Et je leur donne un point, ils sont venus en commission parlementaire. Ils avaient refait leurs devoirs, ils avaient fait leurs recherches. Ils étaient préparés malgré qu'ils avaient eu un jour d'avis.

Et, quand le ministre s'est pointé à une école secondaire pour faire son annonce, il s'est promené dans l'école secondaire, les journalistes se sont promenés dans l'école secondaire, ont dit : Hé! est-ce que c'est difficile de trouver du cannabis ici? Et ce qu'ils ont entendu, c'est : Bien, voyons! Ce n'est pas difficile. Si j'en veux, je fais un appel ou je fais un texto, 20 minutes, j'en ai dans l'agora. Ça ne prend pas de temps. Et à la réponse ou à la question des journalistes : Bien, est-ce que le projet de loi va changer quelque chose?, ça semblait plutôt clair comme réponse, ça semblait plutôt unanime comme réponse comme quoi il n'y aurait aucun impact dans leur vie quotidienne à l'école secondaire.

Alors, si les experts ne suffisent pas, si les personnes concernées, si leur opinion ne suffit pas... On a essayé, M. le Président, avec un peu d'humour. Je vous le dis, on a essayé des exemples concrets, hein? On a parlé de Tito et Steve, on a parlé de... vous ne pouvez pas nous dire qu'on n'est pas créatif, M. le Président, quand même. Mais on a parlé d'un exemple très concret qui était apparu dans une émission d'actualité québécoise, et ce n'était pas compliqué, là : Tito, qui était un jeune Québécois qui consommait du cannabis, et Steve était un pusher qui alimentait, disons, Tito. Peu importe, là, la loi qui est devant lui, Steve alimentait Tito quand même. Que c'était 18 ans, l'âge légal, que c'était 21 ans, l'âge légal, quand on vient du crime organisé, je ne pense pas que c'est ça qui va nous arrêter, M. le Président. Et les revenus pour le crime organisé ne changeaient pas non plus.

Alors, ce sont des aspects qu'on va vouloir étudier en détail dans l'étude article par article. On va vouloir comprendre lesquels de ces articles-là dans le projet de loi, là, vont avoir un impact sur la vie quotidienne de Steve et de Tito, parce que tout ce qu'on a entendu, que ce soit de la part des étudiants eux-mêmes, que ce soit de la part des experts en santé publique, c'est qu'il n'y en a pas, des articles du projet de loi qui vont avoir un impact direct sur la vie, sur le quotidien de ces gens-là, parce qu'ils vont continuer à fumer.

Mais là, ce matin, M. le Président, ce que j'ai entendu du ministre, ce que j'ai entendu, ce que j'ai lu dans le journal, on est un petit peu froissé, là, que ça ne soit pas présenté ici, mais on est passé à d'autres choses, hein, on s'en remet, on est des adultes. Ce que j'ai entendu de la part du gouvernement, c'est : Bien, on reconnaît que les gens vont fumer, hein? On reconnaît, parce qu'il y a des experts en santé publique qui sont tous venus nous dire aussi, ils sont venus nous dire : Ça ne fait pas de sens de forcer des gens à fumer entre quatre murs, hein? Laissons-les aller dehors. Laissons-les aller sur la voie publique, parce que, de toute évidence, entre quatre murs, la fumée est contenue, il y a un impact plus grand sur la santé. Il y a une raison pour laquelle on envoie nos conjoints, conjointes fumer dehors, hein? Parce qu'on veut limiter l'impact sur la santé des personnes qui sont dans la résidence avec nous. Alors, aujourd'hui, le ministre a reconnu que les gens allaient continuer de fumer malgré sa législation. Et là il a ouvert une brèche à ce qu'ils puissent fumer à l'extérieur. Mais, si le ministre reconnaît, M. le Président, que les gens vont fumer quand même, il doit reconnaître que les 18-21 ans vont fumer quand même.

Alors, pour ces gens-là, si c'est mieux pour tout le monde d'autre de fumer dehors plutôt que de fumer à l'intérieur, est-ce que ce n'est pas mieux, pour les 18-21 ans, de fumer un produit qu'on connaît, un produit qui est testé par le gouvernement du Québec, un produit qui est produit par une entreprise québécoise, un produit dont on connaît la teneur en THC, dont on connaît la teneur en CBD, qui est vendu dans un endroit qui est contrôlé, la SQDC? M. le Président, si le ministre reconnaît que les gens vont continuer à fumer, pourquoi ne pas s'assurer de la sécurité de ceux qui veulent acheter le produit en toute légalité?

Sur les amendements du ministre, M. le Président, parce qu'il nous les présente aujourd'hui, on va les regarder, tout le monde va vouloir les étudier, mais, sur les amendements du ministre, on va avoir des questions, parce que les parcs, c'est une chose, mais ce n'est pas exactement ce qui était demandé par l'Union des municipalités, ce n'est pas exactement ce qui était demandé par la fédération des municipalités, ce n'est pas exactement ce qui était demandé par la ville de Montréal. Alors, on va vouloir bien comprendre, hein, encore une fois, dans une logique constructive et positive, bien comprendre ce que le ministre veut faire et voir si on peut peut-être bonifier sa proposition, somme toute intéressante, mais qui ouvre à beaucoup de questions sur cet enjeu-là. Et j'ai compris, à travers les médias, alors le ministre pourra nous le confirmer un petit peu plus tard en commission parlementaire, qu'une des raisons pour lesquelles il fait ça, c'est parce qu'il y a des enjeux d'applicabilité aussi. Il y a des enjeux d'applicabilité qui nous ont été soulevés par les directeurs de police, par des corps policiers à travers le Québec qui nous ont dit : Eh boy! Ça nous prend des ressources pas à peu près! Il n'y a pas eu de compensation de la part du gouvernement. On n'a pas mesuré exactement ce que ça veut dire, mais on sait que ça va être immense.

Alors, M. le Président, ce sont des questions qu'on aura pour le ministre. Mais je l'assure encore une fois qu'on va travailler de façon constructive, qu'on va travailler à faire avancer son projet de loi si, en contrepartie, M. le Président, on peut s'entendre sur certaines modifications, comme celles qu'il a lui-même proposées aujourd'hui, pour qu'on ait le meilleur projet de loi possible. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup, M. le député. J'invite maintenant le porte-parole du deuxième groupe d'opposition et député d'Hochelaga-Maisonneuve à faire ses remarques préliminaires pour une durée maximale de 20 minutes. À vous la parole.

M. Alexandre Leduc

M. Leduc : Merci, M. le Président. Bonjour, M. le ministre. Bonjour, chers membres de l'opposition officielle, chers membres du gouvernement, les gens qui sont de l'équipe ministérielle, les gens de la commission, les gens du service technique. Bonjour à tout le monde.

J'aimerais commencer par saluer mon collègue le député de Jean-Lesage, que je remplace. Il est occupé avec une autre petite loi, là, le projet de loi sur la laïcité de l'État. Alors, on lui souhaite bonne chance. Mais je suis donc venu en renfort pour le remplacer. Ça me fait plaisir. Je suivais de toute façon ce projet de loi depuis le début par un oeil. Donc, ça me fait plaisir de sauter à pieds joints pour l'étape importante qu'est l'étude détaillée. Je veux aussi prendre un petit moment pour remercier ma collègue Claudine qui m'a préparé, donc, pour cet exercice. Et on a bien hâte que ça commence.

• (16 h 20) •

Alors, je suis... j'arrive ici avec une prédisposition d'ouverture. C'est ma troisième étude détaillée depuis mon élection, le 1er octobre dernier. J'ai eu un épisode heureux, un épisode moins heureux avec le projet de loi n° 1. Espérons que celui-ci tombera plus dans la catégorie de l'épisode heureux. Ça s'annonce bien, cela dit, là. J'ai, comme tout le monde, entendu les... J'ai lu ma revue de presse ce matin et j'ai vu qu'il y avait de l'ouverture sur le lieu public. Et là je viens de lire les amendements déposés par la partie ministérielle. Il y en a un qui me fait chaud au coeur. On aura l'occasion d'en débattre pour bien s'assurer du sens, là, mais ça fait référence aux membres du personnel de la SQDC qui ont entre 18 et 21 ans, qui allaient, en tout cas, selon toute vraisemblance, soit perdre leur emploi ou être installés ailleurs, là. On verra si j'ai une bonne compréhension de ce que vous avez déposé, mais semble-t-il qu'ils pourront continuer à faire leur travail comme c'était le cas auparavant. En tout cas, j'espère que c'est ma compréhension, on aura l'occasion de clarifier ça, parce qu'en effet c'était un enjeu qui était important. Étant aussi critique en matière de travail, j'avais été interpellé, là, au mois de décembre, par des collègues du milieu syndical qui étaient préoccupés par la suite des choses quant aux employés de la SQDC, les travailleurs, travailleuses de la SQDC qui avaient entre 18 et 21 ans. Là, le projet de loi arrivait par la suite. Ils avaient été embauchés avant, évidemment, la connaissance du projet de loi. Et là c'était un peu nébuleux, ce qui allait arriver avec leur emploi. D'ailleurs, ce matin même j'ai appris qu'il y avait d'autres personnes qui avaient été embauchées depuis qui sont dans cette catégorie-là. Il y avait un parallèle à se faire par rapport à pourquoi on leur demandait éventuellement de soit quitter leur emploi ou faire d'autres tâches, parce que, dans une situation comparable, par exemple un préposé dans un dépanneur, un commis de dépanneur qui peut avoir, en effet, 16 ans, il peut vendre de l'alcool, il peut même carter quelqu'un qui vient acheter de l'alcool. Mais là on n'aurait pas pu, une personne de 18 ans, majeure, vaccinée, être dans une SQDC et vendre un produit dont il n'y a même pas de dégustation, rien non plus, dans la SQDC. Bref, c'est un parallèle qu'on avait fait. Encore une fois, j'attends de voir, en discussion avec le ministre, si j'ai la bonne compréhension de ce qui nous est déposé, mais, à sa face même, ça semble être intéressant. On verra ça.

Et puis, sinon, pour répondre à l'invitation de M. le ministre de déposer d'avance les amendements, on en a quelques-uns de préparés. On va juste essayer de les finir aujourd'hui puis voir qu'on n'en a pas oublié, puis on va les transmettre, là, à tous les collègues, là, maximum, je pense, ce soir ou demain matin. Mais, dans l'esprit d'ouverture que vous avez envoyé les vôtres, je pense que moi, je suis tout à fait disposé à faire la même chose. Voilà.

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup. Nous en sommes maintenant à... excusez. Est-ce qu'y a-t-il... Excusez-moi. Y a-t-il d'autres membres qui souhaitent faire des remarques préliminaires? Oui, député de Marquette.

M. Enrico Ciccone

M. Ciccone : Merci beaucoup, je ne pensais pas passer si tôt que ça, mais je vais prendre mon temps. Merci. Bonjour, chers collègues, bonjour aux membres de l'opposition. Moi aussi, j'ai pris connaissance des amendements et j'ai hâte d'en débattre, M. le ministre.

Honnêtement, pendant les consultations particulières, j'ai vraiment eu énormément de sympathie, parce qu'il y a des gens qui sont venus ici, qui sont venus donner leur avis, qui sont venus donner leur expertise, et je voyais, là, le ministre délégué à la Santé et Services sociaux tenter de chercher du positif dans tout ça, mais la majorité des groupes qu'on a reçus étaient en défaveur, justement, de ce projet de loi.

Cependant, j'avais de la sympathie parce que, M. le Président, mon père m'a donné un don, c'est d'être capable de reconnaître rapidement le caractère d'une personne. Et, lors de ma première poignée de main avec le ministre délégué, j'ai compris que c'était une bonne personne, j'ai compris que c'est une personne qui était sincère, que c'est une personne qui était vraiment là pour les bonnes raisons. C'est une personne qui a travaillé fort dans la vie, puis, honnêtement, je pense que le CHU de Sainte-Justine a fait une belle prise avec lui, à voir nos enfants qui sont entrepris par le ministre délégué à la Santé et Services sociaux... sont entre bonnes mains. C'est une personne intelligente, c'est une personne qui est qualifiée.

Cependant, quand je vois le dépôt de ce projet de loi là et qu'on donne ça dans les mains, justement, du ministre délégué, je me dis : En tant que scientifique, il y a un débat, il y a un réel débat présentement, mais je pense qu'on ne débat pas sur les mêmes raisons. Je pense qu'il n'y a pas de chicane ici à savoir est-ce que c'est bon, prendre du cannabis. Moi, je réitère, là, puis je vais le redire encore une fois, je l'ai dit ici, je l'ai dit dans le salon bleu, je vais le répéter : Si c'était rien que de moi, ça n'existerait pas. Ça n'existerait pas. Puis là je parle du cannabis avec du THC. Le CBD, qui est plus médicinal, je n'irai pas là, parce que, un, je ne suis pas un scientifique. On semble dire qu'il a des bienfaits pour des douleurs et d'autres maladies, mais ça, je vais le laisser de côté parce que je ne suis pas assez connaisseur dans ça. Cependant, au niveau du THC, quand on peut donner l'occasion à des jeunes de 18, 19, 20 ans de prendre du cannabis, parce qu'ils vont en prendre quand même, du cannabis, puis je pense que ça a été démontré, ça a été prouvé ici par des experts, je pense que savoir que des jeunes vont prendre du cannabis qui est non contrôlé, ça peut être plus dommageable. Et je vais revenir un peu plus tard, M. le Président, justement avec des citations, des questions qu'on a posées à certains intervenants, dont des scientifiques, qui... et leurs réponses, pour justement prouver, mettre un peu plus de poids à ce que je dis.

Moi, vous savez, M. le Président, j'ai été moi-même un sonneur d'alerte à un moment donné, quand je travaillais avec des jeunes joueurs de hockey, au niveau junior, et je vais taire la ligue, là, si vous me permettez. Au début des années 2000, je me suis aperçu qu'il y avait des jeunes qui avaient un plaisir à prendre des produits qui étaient dommageables, des produits dopants, que ça soit de l'éphédrine, autres produits, dont le cannabis. J'ai sonné l'alarme et je fais un aparté, là, si le ministre de l'Agriculture avait été mon patron, j'aurais sûrement payé ma job... j'aurais sûrement perdu ma job, mais, bon, je l'ai fait pareil pour le bien-être de nos jeunes.

C'est sûr que la ligue en question n'était pas contente, c'est sûr que la ligue en question m'a donné du fil à retordre. Cependant, la ligue était assez lucide — ça a pris un mois, là — a été assez lucide pour dire à un moment donné, pour venir me voir puis dire : Sais-tu quoi? Tu as raison. Tu as raison, puis on va faire quelque chose. La ligue en question a décidé par la suite, très rapidement, d'instaurer un politique antidopage puis elle est devenue une pionnière dans la ligue canadienne.

C'est sûr qu'au début on se disait : Mais là on va être défavorisés parce que, là, ils savent qu'on prend des produits dopants. Les jeunes prennent du cannabis. Ce n'est pas ça du tout, ce n'est pas ça du tout. Quand tu décides de régler le problème rapidement, quand tu décides de mettre le doigt sur le bobo et tu décides d'encadrer les jeunes, justement, mais... Là, on va s'apercevoir, les ligues supérieures qui prennent des joueurs dans les ligues en question, parce que je ne veux toujours pas les nommer, M. le Président, là, ils vont se dire : Bien, on va prendre... ils vont prendre ces joueurs-là ici, au Québec, parce que, justement, ils sont propres. On sait qu'ils sont propres, on sait qu'ils n'ont pas de problème, on sait qu'ils ont des tests inopinés. On sait qu'ils sont pris en charge, qu'on prend soin d'eux autres.

Et les deux autres ligues ont suivi par la suite, ont suivi, puis là c'est devenu vraiment une politique antidopage à travers le Canada. Et ce n'est pas pour me donner des tapes dans le dos, mais il y a quelqu'un qui devait le faire, et je l'ai fait. Et aujourd'hui, bien, cette ligue... la ligue en question au Canada va très bien.

Si on part du principe que tous sont contre ce produit qui est néfaste, selon moi, puis je parle encore ici du THC, là... Puis ça... C'est pour ça que je dis que le débat... on débat sur deux problèmes complètement différents. Je suis persuadé que, si on pose la question à tout le monde ici : Est-ce que vous voulez que vos enfants prennent du cannabis?, je pense que 100 %, M. le ministre, vont dire non. Ça, c'est vrai. Et 100 % des parents, moi le premier, non, il n'y a personne qui veut que leur enfant prenne du cannabis.

Et là c'est là qu'on rentre un peu dans le populisme, puis c'est ça qui me dérange un petit peu, parce que, si on pose la question aux parents : Aimez-vous mieux que votre enfant prenne du cannabis à 18 ans ou vous aimez mieux que votre enfant prenne du cannabis à 21 ans?, encore une fois, je pense que 100 % des parents vont dire : Bien là, moi, si tu me donnes le choix, j'aime bien mieux qu'il fume du cannabis à 21 ans. Mais ce n'est pas la réalité. Et ça, ça s'appelle du populisme. On l'a utilisé en campagne électorale, ça a fonctionné. C'est sûr que, quand tu fais peur aux parents comme ça, les parents vont dire : On va régler ça, on va mettre ça à 21 ans.

Le mettre à 21 ans et la réalité n'est pas la même. Il est là, le problème. C'est pour ça que je reviens puis je réitère, je dis : Il y a deux débats, puis là on se chicane sur deux débats complètement différents. Je suis 100 % d'accord avec le ministre qu'on devrait augmenter ça le plus tard possible. Cependant, encore une fois, ce n'est pas la réalité. Des jeunes vont consommer des stupéfiants, bien, pas... ce n'est plus des stupéfiants, là, mais c'est du cannabis avec du THC. Puis ça, c'est un beau cadeau du fédéral qu'ils nous ont fait. Honnêtement, là. La CAQ ne l'a pas vécu, le Parti québécois ne l'a pas vécu, Québec solidaire non plus, mais nous, en tant que libéraux, on l'a vécu pendant la campagne, parce que, quand on rencontrait les gens, les gens nous disaient : Vous autres, avec votre loi sur le cannabis... Mais je disais : Ce n'est pas nous autres, là. Ça, c'est le fédéral, c'est les libéraux fédéraux qui ont amené ça. Ils nous ont mis une patate chaude dans les mains. Puis je pense qu'avec le travail de notre ancienne collègue Lucie Charlebois dans le projet de loi n° 157, elle a fait de l'excellent travail. Il y a plus de 12 000 citoyens qui ont pris la parole, soit ici en commission, ou soit par Internet, ou soit par... Ils ont donné leur voix, on les a écoutés. Plus d'une centaine d'organisations également, une panoplie d'experts aussi pour arriver vraiment... pour pondre quelque chose qui, selon moi, fonctionne. En anglais, on dit : «When it's not broken, don't fix it.» Je pense qu'il va très bien présentement, ça fonctionne présentement.

• (16 h 30) •

Cependant, encore une fois, j'ai énormément de sympathie pour le ministre parce que ça prouve une chose : c'est tout un gars d'équipe. C'est tout un gars d'équipe, parce qu'on lui met une patate chaude dans les mains puis on dit : Va vendre ça, va vendre ça à la population, va vendre ça aussi aux experts, aux organismes, puis il faut que tu fasses passer ça, on l'a promis. On l'a promis en campagne, tu dois absolument le faire passer. Un bon gars d'équipe, il dit : Parfait, je vais le faire. Puis c'est pour ça que j'ai hâte, je commence, là, en politique, le ministre aussi, mais j'ai hâte d'une chose, j'ai hâte à ma retraite, je vais vous dire pourquoi. J'ai hâte que le ministre prenne sa retraite aussi, parce que j'ai hâte d'aller prendre une bière avec lui puis lui demander : Vraiment, là, vraiment, là, vraiment, étais-tu d'accord avec ça? Puis je ne vais pas interpréter les propos puis je vais attendre la réponse, mais je vais peut-être vous dire, M. le Président, je ne le dirai pas aux autres parce que je veux... il y a la réputation du docteur, je vais la protéger, mais peut-être, dans 15 ans, je vous dirai sa réponse, si vous me le permettez.

J'ai posé la question... mais il y a un autre élément aussi que je voulais apporter, c'est que, dans ce débat-là, c'est qu'on veut retarder la prise de cannabis, on veut empêcher les jeunes de 18 à 20 ans de consommer un produit qui est contrôlé, contrôlé par notre gouvernement. Puis on ne veut pas que ces jeunes-là se retournent vers, je ne sais pas, moi, «Tiger» du chapitre Nord ou «Balloune» du chapitre de la Mauricie. C'est ça qu'on ne veut pas. C'est ça qu'on veut éviter. Pourquoi? Parce qu'il y a des bactéries, il y a des bactéries, on a déterminé qu'il y avait des bactéries, il y avait des pesticides, puis c'est ça qu'on donne à nos enfants. Les jeunes ont consommé dans le temps, ils consomment aujourd'hui puis ils vont consommer même si le projet de loi passe.

J'ai posé la question suivante à la ministre et je vais regarder combien de temps qu'il... Mon Dieu! Le temps va vite. J'ai posé la question suivante à la présidente de l'Association québécoise des programmes pour premiers épisodes psychotiques, la Dre Amal Abdel-Baki, j'ai posé la question suivante : Est-ce mieux de consommer un produit d'où nous connaissons la provenance, qui est contrôlé, ou une substance dont on ne connaît pas la provenance et on ne connaît pas sa composition? Je vais vous lire sa réponse : «...ça plaît vraiment à l'esprit scientifique de penser que plus on va savoir ce que les jeunes consomment, plus on peut leur conseiller, s'ils décident de consommer, de consommer des produits à faible teneur de THC, peut-être moins pire sera l'évolution.» C'est des scientifiques, ce sont des gens qui sont des spécialistes dans le domaine, et c'est pour ça encore que je reviens... M. le ministre, délégué en Santé et Services sociaux, est un scientifique lui-même, est un scientifique lui-même, et je me dis : Entre scientifiques, on doit être capable de trouver, je veux dire, un consensus. Je veux dire, c'est la science. Des groupes qui sont venus ici nous ont parlé. C'est sûr qu'il y a des groupes qui sont d'accord pour ce projet de loi : l'Association des médecins psychiatres du Québec, Fédération des médecins spécialistes du Québec, Fédération des médecins omnipraticiens du Québec et le Portage. Mais, encore là, on ne débat pas sur le même sujet. C'est vrai qu'on va tous dire : Oui, il faut retarder la prise de cannabis. On le dit tous. Le problème, c'est : Est-ce que les jeunes vont consommer? Est-ce qu'en mettant une loi les jeunes vont arrêter de consommer? Et c'est ce que semble dire le gouvernement en ce moment.

En résumé, c'est plus facile de bien traiter un épisode de psychose si nous savons exactement ce qui est dans un produit comme un produit vendu à la SQDC.

La représentante, une autre question que j'ai posée, la représentante des psychiatres qui a été entendue à la commission parlementaire, la Dre Gobbi, elle, est un petit peu plus modulée, dans son mémoire, que l'Association des médecins psychiatres du Québec. En effet, elle a dit que c'était dommageable pour le cerveau de consommer et pire jusqu'à 25 ans. Toutefois, elle dit que rehausser l'âge à 21 ans ne changerait rien, car les jeunes de 18 à 21 ans continueraient de s'en procurer sur le marché noir. Un peu ce que je vous ai dit un peu plus tôt. Mais elle a suggéré quand même quelque chose d'intéressant, de changer le titre, justement, du projet de loi, Loi resserrant l'encadrement du cannabis, à la Loi pour la prévention des effets nocifs du cannabis chez les jeunes.

Pour moi, je me dis : Ça, c'est du concret. Si on veut vraiment... quand même un projet de loi n° 157 qui était étoffé, on avait parlé à plusieurs intervenants, plusieurs scientifiques également, on avait pondu quelque chose de solide, si on veut vraiment avancer, qu'on l'avance au niveau de la prévention. À un moment donné, le ministre avait annoncé un 25 millions de plus, là, puis je comprends qu'il s'était peut-être avancé un petit peu trop, mais je me disais... moi, quand j'ai vu ça, j'ai dit : Bon, parfait, il faut en mettre plus. Il faut aider un peu, comme justement l'histoire que je vous contais dans le junior. On disait de mettre à peu près 30 tests par année. Je disais : Non, non, mettez-en 60. Si on veut vraiment faire avancer les choses, si on veut faire de la prévention, s'il faut leur faire peur, on va en mettre 60, puis mettez-en 75, à part de ça, mettez-en plus par équipe. C'est comme ça qu'on fait avancer les choses.

Mme Gobbi... Ah! non, je vais vous parler un peu de... là, je vais parler d'une statistique inquiétante du centre de réadaptation en toxicomanie de Portage. Puis on connaît, là, vraiment, ils n'ont pas leurs preuves à faire, là. Ça fait des décennies que cette maison-là, en réadaptation, fait de l'excellent travail ici, au Québec. Je la cite :

«En tant qu'organisme qui vient en aide aux toxicomanes, nous sommes confrontés quotidiennement aux impacts dévastateurs de l'utilisation abusive du cannabis. Annuellement, dans les cinq centres de Portage qui accueillent une clientèle adolescente à travers le Canada — dont trois situés ici, au Québec — nous recevons environ 500 adolescents entre 14 et 18 ans. De ce nombre, 88 % consomment du cannabis.» Puis ça, c'était avant l'adoption de la loi, en 2018, là. C'était avant, là. Ils n'ont pas commencé il y a quelques mois, là, c'était avant, là. «Tant dans nos programmes jeunesse et adultes, nous constatons les méfaits d'un usage abusif du cannabis et plus spécifiquement sa concurrence avec des problèmes de santé mentale.»

Si le ministre délégué me disait : On va mettre une loi 21 ans puis on va être capable de... ils vont être capables de m'assurer que ça va descendre... On l'a vu au Colorado, on l'a vu dans d'autres... ça ne change pratiquement pas. Si on est capable de me prouver, de nous le prouver ici que ça va réduire considérablement la prise de cannabis chez nos jeunes, je pense que le projet de loi serait adopté pas mal plus facile.

Il me reste une minute, là. Je vais aller un peu plus rapidement. Pardon?

Le Président (M. Provençal)  : Il vous en reste quatre.

M. Ciccone : Ah! il m'en reste quatre? Ah mon Dieu! C'est formidable. Je vais... parce que c'était fait sur quatre mesures, la loi. Je vais passer à la deuxième mesure, si vous voulez bien.

La deuxième mesure, l'interdiction de fumer du cannabis sur la voie publique, dans tous les lieux extérieurs qui accueillent le public et sur les terrains sur lesquels sont situés des lieux fermés, ça, on a vu qu'il y a un amendement qui a été déposé, là. On va en discuter pour avoir un peu plus de précisions, justement, parce que, si on a changé vraiment cette façon de faire là, je suis content, parce que, justement, dans le salon bleu quand on a fait, justement, nos représentations après les consultations particulières, on avait quand même un certain temps. On l'a fait, et quand j'ai eu terminé, moi, en tant que nouveau parlementaire, quand j'ai terminé de parler, je me suis en allé puis je me suis posé la question : Ça a donné quoi que je parle pendant 20 minutes? C'est sûr que tu regardes l'autre côté du gouvernement, puis tout le monde a leur visage dans leur téléphone, tu dis : Bien, il n'y a personne qui écoute. Finalement, quand j'ai vu l'amendement, quand j'ai vu l'article dans le journal ce matin, je me suis dit : Tabarouette! Peut-être qu'ils nous ont écoutés. Peut-être qu'ils sont capables de faire deux choses en même temps, lire sur leur téléphone puis nous écouter. Honnêtement, si ça a fait avancer les choses, bien, tant mieux. Tant mieux, si ça avance.

Troisième mesure, l'interdiction, en sus de celle qui est déjà en vigueur, pour toute personne possédant du cannabis sur les terrains, dans les locaux des bâtiments d'établissements d'enseignement collégial et universitaire. Là, c'est un peu ambigu. C'est un peu ambigu parce que, là, on comprend qu'il y a des résidences, là. Des fois, il faut que tu passes par le campus pour aller dans ta résidence. Ça va coûter cher de drones aux étudiants, M. le Président, ou on va être obligés, je ne sais pas, moi, de se faire un horaire avec des mules, là. Vous savez c'est quoi une mule? À l'aéroport, on va donner la drogue à cette personne-là puis on va dire : Bien, cette semaine, c'est toi la responsabilité. On va prendre celui qui court le plus vite, puis, envoie, dépêche-toi, puis cours, puis dépêche-toi à rentrer justement dans l'appartement. Comme ça, l'appartement, c'est légal. On va être capable... Tu vas être capable de t'en sauver.

• (16 h 40) •

Et la dernière mesure, c'est l'ajout de l'interdiction d'exploiter un point de vente de cannabis à proximité d'un établissement d'enseignement collégial et universitaire. Bien là, je ne vais pas m'opposer pour m'opposer. M. le ministre, si vous pouvez mettre ça aux îles Moukmouk, mettez-les le plus loin possible des universités, des établissements scolaires. Ça, je vais être en faveur là-dessus, le plus loin possible, tant mieux, parce que, je réitère ce que j'ai dit, c'est une cochonnerie, ça ne devrait pas exister ici, au Québec, puis ça ne devrait pas exister nulle part. C'est un beau cadeau du fédéral, on doit s'y faire.

Mais, en terminant, je veux juste dire que le projet de loi n° 157 était étoffé. Il y avait un travail remarquable qui a été fait et des centaines d'heures qui ont été passées sur le projet de loi n° 157. Et, si c'était rien que de moi, on devrait le laisser comme ça. Si on veut le bonifier, qu'on rajoute de la prévention dans tout ça. Et ce qui me fait peur, tout ça, c'est que ça risque d'empirer les choses et la santé de nos jeunes et de les mettre un peu plus en danger. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Provençal)  : Merci, M. le député. Y a-t-il d'autres membres qui souhaitent faire des remarques préliminaires?

M. Frantz Benjamin

M. Benjamin : S'il n'y en a pas d'autre, ce serait mon tour, M. le Président.

Le Président (M. Provençal)  : M. le député de Viau, à vous la parole.

M. Benjamin : Merci. Merci beaucoup, M. le Président. M. le ministre, donc, collègues du Parti libéral, donc collègues de la majorité, Québec solidaire.

Je prendrai la parole aujourd'hui, M. le ministre... M. le Président, puisque c'est à vous que je dois m'adresser, en pensant à l'expérience que j'ai eue au cours des dernières années, une expérience de terrain à travailler auprès des jeunes, auprès de beaucoup de jeunes au cours des 15 dernières années. Mais, avant tout, je veux remercier les différents groupes qu'on a reçus lors de consultations. Expériences diverses, diversifiées, des scientifiques du domaine de la santé, des scientifiques du domaine des sciences sociales, des praticiens du terrain, des intervenants communautaires.

Et, parlant des gens qu'on a reçus en consultation, en fait, une des premières choses que j'ai à déplorer, M. le ministre, voilà un projet de loi qui concerne des jeunes, c'est le peu de groupes de jeunes qui ont été consultés. Et ça, je le déplore. Je le déplore d'autant plus que vous êtes médecin, vous savez qu'au Québec l'âge de consentement légal pour avoir accès aux soins, c'est de 14 ans. Or, voilà un projet de loi qui va changer plein de choses pour des jeunes de 18 à 21 ans. Et on a reçu... il y a eu la Fédération étudiante collégiale, il y a eu Citoyenneté Jeunesse, mais il y a d'autres groupes de jeunes qui auraient aimé être entendus, qui n'ont pas pu le faire. Et ça, je le déplore.

Alors, je me vois dans l'obligation, à ce moment-là, d'être, de parler, de témoigner au nom de ces jeunes, de ces différents jeunes, notamment ceux de ma circonscription, que j'ai rencontrés dans le cadre du Forum jeunesse de Saint-Michel, et ceux aussi de plusieurs régions du Québec, que j'ai entendus et avec qui j'ai communiqué, pour témoigner en leur nom aussi.

Lors des études de crédits du dossier Jeunesse, j'ai échangé avec le premier ministre sur cet enjeu-là pour le sensibiliser sur des impacts qui peuvent être, si ce projet de loi serait adopté tel quel, catastrophiques pour beaucoup de jeunes. Et, lors de ces échanges qu'on a eus avec le premier ministre, j'avais senti une sensibilité. Et il nous avait, presque à mots couverts, il nous avait, presque à mots couverts, annoncé quelque chose d'important que vous allez faire dans ce dossier-là. Donc, on aura l'occasion d'aborder les amendements, mais, visiblement, je pense que c'est peut-être moi qui avais peut-être de trop grandes attentes par rapport à l'attitude ou aux déclarations du premier ministre, mais ce qu'on a devant nous ne me permet pas de revenir, de retourner en fin de semaine à Montréal pour aller rencontrer des jeunes Montréalais, ne me permet pas d'aller dans des régions pour aller rencontrer beaucoup de jeunes pour aller leur dire : Écoutez, le gouvernement vous a entendus. Mais nous allons y revenir, nous allons y revenir.

Je suis porte-parole de l'opposition officielle des dossiers jeunesse. Et je vais me permettre, puisqu'il n'y a pas beaucoup de groupes de jeunes qui ont été entendus, de quand même prendre le temps de citer, de souligner au ministre quelques positions des jeunes. Je vais commencer par Citoyenneté Jeunesse. Citoyenneté Jeunesse, dans le cadre de la préparation des études sur ce projet de loi là, ils ont réalisé un sondage, ils ont fait un sondage auprès des jeunes, auprès de beaucoup de jeunes. Et, si on se fie au sondage, et je cite Citoyenneté Jeunesse, aux répondants de leur sondage : «...la limite de 18 ans, actuellement en vigueur pour l'achat de l'alcool et des produits du tabac, est la plus populaire», auprès de jeunes, soit 56 %.

«Citoyenneté Jeunesse est d'avis qu'en contrôlant la qualité des produits vendus, il serait potentiellement possible d'atténuer les effets négatifs de la consommation de cannabis[...]. Qu'il s'agisse de ne permettre qu'un type de produit contenant un très faible taux de THC...» Et, grosso modo, Citoyenneté Jeunesse invite le gouvernement, suite à cette consultation et au résultat, à maintenir, à maintenir l'âge de 18 ans.

Quand on parle aussi des jeunes, on a reçu la Fédération étudiante collégiale du Québec puisque, lorsqu'on se rappelle que ce projet de loi là, un des premiers aspects de ce projet de loi là, c'est-à-dire l'interdiction de fumer du cannabis pour les 18 à 21 ans, c'est avant tout des jeunes qui sont surtout au niveau d'études collégiales qui seront touchés. Cette fédération, qui regroupe plus de 78 000 étudiants, nous rappelle ceci : S'il est possible d'aller en prison à cause du cannabis et si la possibilité d'aller en prison à cause du cannabis ne créait pas d'effet dissuasif à l'époque, il est peu probable qu'une simple amende intensifie l'effet. La fédération croit fermement que l'âge minimal d'achat et de consommation du cannabis doit correspondre à celle de la population étudiante postsecondaire d'âge adulte, soit 18 ans. Cette fédération, évidemment, s'oppose, s'oppose, à toute augmentation de l'âge. Les 18-24 ans, rappelle la fédération, M. le ministre, au sens de la loi, ils sont majeurs, ils sont tenus responsables de tous leurs actes. Ils peuvent voter, ils peuvent même être à notre place, ils peuvent par le fait même juger des substances qu'ils consomment. Nous nous basons sur la maturité de ces adultes, à savoir si l'utilisation du cannabis est néfaste ou non pour eux.

Comme l'a dit tout à l'heure mon collègue de Marquette, nous n'allons pas nous éterniser sur le caractère nocif de l'usage du cannabis, parce que ce qui nous intéresse dans le cadre de ce projet de loi là est beaucoup plus profond. Ce qui nous intéresse dans ce cadre de projet de loi là, c'est au sujet des droits de personnes. Et moi, si j'étais à votre place, M. le ministre, je considérerais vraiment beaucoup l'idée de retenir le mémoire du Barreau du Québec comme un avis juridique. Je vous le redis encore, M. le ministre, je vous suggérerais fortement de retenir l'avis du Barreau du Québec, le mémoire du Barreau du Québec, comme un avis juridique qui est très clair, donc, autour des éventuelles atteintes que ce projet de loi pourrait avoir par rapport aux droits de la personne qui pourraient être évoquées. Donc, risque de discrimination sur la base de l'âge : «N'importe quelle fixation de l'âge minimal dans une loi est susceptible — et je cite le mémoire du Barreau du Québec, M. le ministre — d'être contestée sur la base d'une discrimination fondée sur l'âge, tant en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés que la Charte des droits et libertés de la personne. Ce droit peut toutefois être restreint par une règle de droit fondée [si] un objectif législatif important et dont la justification peut se démontrer dans le cas d'une société libre et démocratique.»

Je vous inviterais fortement, M. le ministre, à vous pencher pas une fois, mais à deux reprises sur cet avis qui me semble assez fort sur les atteintes aux droits des jeunes personnes majeures en vertu de la loi, de presque toutes les lois du Québec et du Canada. Donc, à 18 ans, ce sont des jeunes adultes avec qui on a affaire.

• (16 h 50) •

Un aspect qui est important aussi pour moi dans le cadre de ce projet de loi là, en septembre dernier, en septembre 2018, j'étais aux assises de l'Union des municipalités du Québec lorsque le futur premier ministre, M. Legault, qui était candidat à l'époque, prenait la parole devant l'ensemble des délégués pour leur rappeler l'importance pour lui du respect des gouvernements de proximité que sont les municipalités. Et j'ai écouté tous les candidats à ce moment-là. Et, pour moi qui étais à ce moment-là encore un conseiller municipal, je m'étais dit : Voilà quelque chose qui est de bon augure pour les gouvernements de proximité, que l'ensemble des candidats au poste de premier ministre s'engagent à respecter les pouvoirs de proximité que détiennent les municipalités pour travailler conjointement avec eux et non pas leur imposer ce qu'ils croient être l'évangile du bien-fondé, l'évangile de la bonne façon de faire les choses pour l'ensemble des Québécoises et des Québécois.

Et visiblement ce projet de loi là est un camouflet, est un camouflet par rapport aux engagements pris par le premier ministre, candidat à l'époque, sur la notion du respect des gouvernements de proximité. Il y avait une loi, il y a encore une loi qui existe, je crois, qui a su respecter cette façon de faire. Il aurait été, à mon humble avis, sage, prudent, d'imiter cette façon de faire dans ce projet de loi pour respecter les compétences des pouvoirs de proximité. Or...

Le Président (M. Provençal)  : M. le député de Viau, je m'excuse, je vais vous redonner le temps. Préalablement, en début de séance, on m'avait informé qu'on aurait besoin de suspendre la rencontre de 15 minutes pour permettre au député d'Hochelaga-Maisonneuve d'aller au salon bleu.

Alors, on va suspendre et on reprendra. Et je vais vous redonner le temps qu'il vous reste, c'est-à-dire 9 min 40 s, pour que vous puissiez continuer à faire votre présentation. Merci.

Alors, suspension.

(Suspension de la séance à 16 h 52)

(Reprise à 17 h 12)

Le Président (M. Provençal)  : Alors, je vais permettre au député de Viau de terminer ses remarques préliminaires. Il vous restait 9 min 40 s lorsque je vous ai interrompu. Alors, je vous cède la parole.

M. Benjamin : Merci, M. le Président. Donc, je parlais justement de cette deuxième déception, en fait, que j'ai, notamment en lien avec le respect des pouvoirs de proximité que sont les municipalités, de la formulation même, de l'articulation même de ce projet de loi.

Et sont venus ici, donc, lors des consultations, d'ailleurs, pour nous le rappeler, le président de l'Union des municipalités du Québec et les élus de différentes villes, dont Gatineau et Montréal. Et permettez, M. le Président, que je rappelle... et, lorsque j'ai posé la question à M. Cusson, le président de l'Union des municipalités du Québec, je ne sais pas si, comme vous, vous vous rappelez de la réponse qu'il m'avait faite quand je lui ai demandé, à la lumière de tout ça, de ce projet de loi là, comment il voit l'avenir pour la collaboration entre le gouvernement et les municipalités. Il n'avait qu'un mot : inquiétant. C'était le mot qu'il avait évoqué, inquiétant. Et, comme lui, je constate que, dans ce projet de loi là, donc, les relations entre le gouvernement du Québec et les municipalités s'avèrent pour le moins inquiétantes pour la suite des choses.

Il y a eu aussi le maire de Gatineau qui est venu, et je vais rappeler aussi... et cette conseillère municipale dont malheureusement j'ai oublié le nom, qui accompagnait le maire de Gatineau et qui a parlé de son expérience de terrain. C'est ça, les élus municipaux. C'est des femmes et des hommes de terrain qui sont là, qui travaillent avec les gens au quotidien, au jour le jour, qui sont en mesure de pouvoir faire remonter ce que les gens vivent, les préoccupations, le quotidien des gens, parce qu'ils baignent là-dedans au quotidien. Et elle nous a parlé de son expérience au cours des dernières années, notamment et précisément sur les questions relatives au cannabis et pour tout le travail qui a été accompli à travers cette table de concertation qui existe dans la municipalité de Gatineau. Et je suis sûr que le député de Pontiac pourra peut-être, lors d'une intervention ultérieure, en parler davantage. Mais, pour moi, c'était très important de souligner justement cette déception par rapport aux questions municipales.

Je parlais des jeunes. Et, puisque je dois parler des jeunes, je vais parler d'un jeune que j'ai rencontré, M. le ministre, il y a une douzaine d'années. Ce jeune-là, lorsque je l'ai rencontré, c'est un jeune homme qui était diplômé en technique collégiale, il avait un diplôme en informatique, en technique informatique. Il avait appliqué, il avait toutes les compétences, il avait appliqué pour travailler pour une commission scolaire. Il correspondait parfaitement, professionnellement, à ce que cette commission scolaire là cherchait à ce moment-là. Mais ce jeune-là, il n'a pas été retenu parce qu'il a échoué les tests de sécurité. Pourquoi a-t-il échoué les tests de sécurité? Parce qu'il avait un casier judiciaire. Et pourquoi avait-il un casier judiciaire? Parce qu'il avait été arrêté en possession d'une certaine quantité de cannabis. Il a eu un casier judiciaire. Et c'est ce que je crois, c'est un des bienfaits lorsqu'on a décriminalisé le cannabis, ça a permis à beaucoup de jeunes, ça a permis à beaucoup de jeunes de ne pas pouvoir se retrouver avec un casier judiciaire. Des jeunes comme ça, j'en connais plusieurs qui se sont ramassés, au fil du temps, avec un casier judiciaire. Et le fait qu'ils ont un casier judiciaire, malgré qu'ils soient formés, qu'ils aient un diplôme, donc, ils ont beaucoup de difficulté à accéder au marché du travail.

Maintenant, aujourd'hui, les données nous le disent, vous êtes un scientifique, M. le ministre, les données nous le disent qu'il n'y a aucune preuve qui dit qu'aujourd'hui ce projet de loi, tel qu'adopté, va réduire le nombre de consommations chez les jeunes. Le risque, évidemment... Le cannabis a été décriminalisé, c'est tant mieux, mais il y a un risque, M. le ministre. Le risque qu'il y a, c'est le risque de judiciarisation. Ce risque-là existe, puisque, lorsqu'un jeune est arrêté une fois, pénalisé, plusieurs pénalités, plusieurs contraventions... moi, je connais des jeunes qui se sont retrouvés judiciarisés pour des contraventions, pour des questions reliées à la sécurité routière, etc. C'est ce risque-là qu'il y a aussi, que beaucoup de jeunes encourent. Et aujourd'hui je trouve que, malheureusement, le projet de loi, tel qu'il est articulé, ne tient pas compte de la réalité de ce que... des données qui nous disent... que nous ont apportées les praticiens sociaux, notamment les gens de la Direction de la santé publique, notamment.

Et, parlant de praticiens sociaux, M. le ministre, je vais vous citer des gens qui sont sur le terrain. C'est des gens qui travaillent au quotidien en termes de prévention et en termes d'accompagnement particulièrement des jeunes qui vivent avec une dépendance. L'Association québécoise des intervenants en dépendance, une association qui regroupe 300 membres, organismes et individus oeuvrant dans le champ des dépendances, soit en prévention, en réduction des méfaits ou en traitement. Et l'association est très claire. L'association nous dit qu'elle croit sa mission évidemment «axée principalement sur le développement des compétences et des bonnes pratiques», croit qu'«en tant qu'association regroupant divers acteurs[...], [ils] se questionne sur la pertinence de modifier les balises actuellement en vigueur au Québec entourant le cannabis. Ces balises ont fait l'objet de consultations [...] d'une commission parlementaire. Elles ont été accueillies favorablement par une majorité d'intervenants.» Donc, c'est avec appréhension qu'ils accueillent ce projet de loi, Loi resserrant l'encadrement, qui consiste, entre autres, à hausser l'âge légal de la consommation du cannabis de 18 à 21 ans.

Et quand on regarde, quand on pense aux praticiens, j'aurais bien aimé, M. le ministre, que vous puissiez... que vous acceptiez d'entendre les gens qui interviennent dans les maisons de jeunes. Les jeunes qui ont un peu plus de difficulté. Ces jeunes-là, qui les a entendus, qui les a consultés, ces jeunes-là? J'aurais aimé que vous les écoutiez aussi, que vous les entendiez. Et aujourd'hui, visiblement, ça n'a pas été fait.

• (17 h 20) •

Un dossier sur lequel j'ai eu à travailler au cours des dernières années, depuis 2003, en fait, 2003, de 2003 à 2005, j'ai coprésidé le premier groupe de travail sur le profilage racial à Montréal. Le profilage racial et le profilage social. D'ailleurs, il y a une consultation en cours, actuellement à Montréal, sur la discrimination. Le profilage racial et le profilage social, M. le ministre, c'est le fait qu'une personne peut être interpellée, détenue ou arrêtée pour un motif autre en se basant seulement sur son apparence. Vous savez, il y a beaucoup de jeunes, beaucoup de personnes, à Montréal et un peu partout, qui ont été victimes de profilage social ou de profilage racial. Et souvent, lorsqu'on les interpelle, lorsqu'on les détient, lorsqu'on les arrête, lorsqu'on leur remet des billets, c'est sur la base de leur apparence, couleur de peau, religion, catégorie sociale dans le cas du profilage social.

Et aujourd'hui le Barreau du Québec, dans son mémoire, rappelle qu'il y a risque de profilage si vous adoptiez votre projet de loi tel quel. Et pas seulement le Barreau du Québec. La Ville de Montréal vous rappelle que ce projet de loi là, vous donnez des leviers pour faire du profilage. Et c'est tellement vrai que même l'Association des directeurs de police — je vous invite d'ailleurs à lire leur mémoire — questionne l'applicabilité de ce projet de loi là.

Donc, je crois que, lorsqu'on fait des lois, on ne les fait pas pour creuser des fossés, on les fait pour abolir les fossés, pour combler les fossés. Et visiblement c'est un projet de loi qui creuse des fossés. Fossé, évidemment... nous allons revenir sur la question des locataires et des propriétaires, fossé entre les locataires et les propriétaires. Sachant que la majorité, la grande majorité des consommateurs, ce sont des jeunes, il y a beaucoup de jeunes qui se plaignent... et de la fédération, d'ailleurs, si vous avez bien lu leur mémoire, viennent rappeler qu'il va y avoir un fossé qu'on va créer entre des jeunes qui sont âgés entre 18 à 21 ans et les autres jeunes.

Donc, je ne suis pas en train de dire que vous avez... Ce n'est pas intentionnel, mais cependant je crois qu'on est ici, dans le cadre de cette étude détaillée, pour tenter, essayer, en tout cas, de corriger...

Le Président (M. Provençal)  : Je vais devoir vous interrompre. Je m'excuse, M. le député de Viau, votre temps est terminé. Alors, merci beaucoup. Y a-t-il d'autres membres qui souhaitent faire des remarques préliminaires? Alors, Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce, je vous cède la parole.

Mme Kathleen Weil

Mme Weil : Merci, M. le Président. Dans un premier temps, je souhaiterais saluer le ministre responsable de ce projet de loi n° 2, et les collègues du gouvernement, et aussi des oppositions à l'Assemblée nationale.

Écoutez, mes commentaires s'entrecroisent avec quelques commentaires que j'ai entendus de mon collègue de Viau, mais ce projet de loi est important. Ça suscite beaucoup, beaucoup de discussions. Moi, je suis entourée de jeunes, j'en ai quatre, mais ils sont des jeunes adultes maintenant. Et notre chez-nous, c'est comme le «party central» un peu, dans le sens qu'il y a beaucoup, beaucoup, beaucoup de gens chez nous. Tous habitent en appartement, mais, quand ils veulent faire la fête, ils viennent chez nous. Alors, beaucoup de discussions. Mais ils sont tous à l'école, à l'université, très scolarisés et très responsables. Donc, je n'ai pas... il n'y a pas d'enjeux par rapport à... d'enjeux précis, mais on discute de tout, de la politique et des politiques publiques qui arrivent ici. Et c'est important d'être connecté avec ces jeunes pour voir comment eux voient les choses. Ils ont quand même des expériences, des expériences par rapport à d'autres, des amis, des collègues, etc.

Et il y a quelques projets de loi, malheureusement... Moi, je crois beaucoup dans les convictions du ministre, c'est évident. Je connais un tout petit peu sa carrière, sa profession, et je sens que c'est vraiment une motivation de protéger des jeunes, des jeunes adultes. Donc, on s'entend là-dessus. Mais, quand on arrive pour faire de la législation, donc, c'est sûr qu'il y a tout un historique. On a adopté un projet de loi il n'y a vraiment pas très longtemps. C'est très, très récent. Donc, c'est d'actualité, en fait. Le projet de loi n° 157 est d'actualité. Donc, le projet de loi a été mis en branle. Évidemment, moi, je n'étais pas dans ce projet de loi, mais, je me rappelle, notre collègue Lucie Charlebois, elle revenait constamment au caucus pour valider des amendements, pour valider des processus, etc. Et, quand on est arrivés sur la question de l'âge, la CAQ, comme peut-être le Parti québécois, comme le Parti libéral, on est, comment dire, on représente la société civile en général. Mais, à un moment donné, on va s'orienter vers une décision ou l'autre, mais en fonction de différents critères, visiblement. Quand on est au gouvernement, c'est différent de quand on est à l'opposition. À l'opposition, avec une élection qui s'en vient, alors il y a des promesses, des promesses qui sont faites. Et, je rappelle, cette question de l'âge avait vraiment suscité beaucoup, beaucoup de commentaires. Et on savait qu'on était dans une situation où il fallait évidemment agir.

Personne... On peut être honnête. Je ne sais pas si vous avez parlé de ça, mais, honnêtement, est-ce qu'on voulait vraiment légiférer en la matière? Non. Je pense que, certainement, les parents... Je vous rappelle, le député de Pontiac, même, je pense que c'était en période de questions qu'il a dit : Avec deux petits jeunes, essentiellement, ça nous inquiète, tout ce qui touche des produits qui pourraient être néfastes, comme l'alcool nous préoccupe, mais on forme bien nos jeunes à un jeune âge, et puis on s'assure que ces jeunes grandissent de façon responsable, parce qu'on a la chance d'être dans des familles et bien dans notre peau. Nos familles, généralement, vont bien aussi. Si on est ici, à l'Assemblée nationale, c'est parce qu'on est motivés par le bien commun et le bien de tous puis on veut s'impliquer parce que, par des politiques publiques qu'on va amener et des lois, on va faire une différence dans la société, on va faire la différence dans la vie des gens.

Et ce projet de loi, donc, je vous rappelle, quand la question était venue sur l'âge, c'est un peu un réflexe de parent qui a vu beaucoup, beaucoup de jeunes grandir... Je pense à... Mes parents sont décédés quand j'ai... il y a longtemps, longtemps, quand j'étais à la Faculté de droit, et eux, ils ont eu sept enfants. Ils avaient... On parle des années 70, imaginez. Mon père, médecin. Donc, on a grandi avec une, comment dire, sensibilité par rapport aux dangers, dangers de la vie, dangers de la vie des jeunes. Donc, discrètement, mes parents prenaient des mesures pour nous protéger et sans qu'ils soient obligés de parler de modération. Je pense que tout le monde a compris le message parce que l'accent était beaucoup mis sur l'école, d'aller à l'université, d'avoir une profession, etc., et de pouvoir faire du bien éventuellement dans notre vie, et que l'important, c'était de faire du bien. Alors, je pense qu'on est tous ici pour faire du bien puis de changer pour le bien des choses.

Mais, moi, la genèse de ce projet de loi, je pense que c'est le contexte dans lequel on est, c'est qu'on a dû faire une loi. Et là il y a eu beaucoup de travail. J'ai été impressionnée par... Je pense qu'on a tous été impressionnés par la bonne volonté, la rigueur de notre collègue Lucie Charlebois, mais aussi, comment dire, son ouverture à beaucoup d'amendements qui ont été apportés au fur et à mesure. Le ministre n'a pas pu nécessairement témoigner de tout ça, mais, quand, donc, on est arrivés sur la question de l'âge, il y avait beaucoup de frustration aussi, beaucoup de frustration, sur l'âge, il y avait... assez rapidement, c'étaient ceux qui... L'âge légal, c'est 18 ans. Et, dans une... Parce qu'on vit, nous, dans une société de droit, et, quand on est ici, au Parlement, c'est tous ces repères qui viennent... parce qu'on... Moi, ça fait 10 ans que je suis là, donc beaucoup de projets de loi, toujours la cohérence de nos actions dans un cadre juridique, dans un cadre législatif, et aussi l'applicabilité des lois. Donc, c'est toujours la préoccupation. Oui, notre bon jugement en tant que citoyens, en tant que parents, en tant que gens qui ont vu des choses et vécu des choses, mais, beaucoup aussi, on apprend, on apprend quand on fait de la législation. Moi, j'ai beaucoup appris par des légistes.

• (17 h 30) •

Et donc, c'est sûr, la première des choses, c'est la Charte des droits et libertés, je vous dirais. J'ai été au ministère de la Justice, et c'est toujours... jamais ils ne vont nous dire ce qu'on peut faire ou ne pas faire, mais ils vont dire un drapeau rouge, par exemple : Voici les problèmes. Voici les obstacles que vous pouvez rencontrer si vous allez dans ce sens-là. Et on nous explique que, bon, par exemple, dans ce projet de loi, c'est l'âge, c'est la discrimination basée sur l'âge qui est un des enjeux dont je voudrais parler, mais aussi la question d'applicabilité. Est-ce qu'une loi est applicable? Dès qu'on a un problème d'applicabilité, là, évidemment, on se rend compte que... Parce qu'on ne peut pas légiférer pour ne rien faire. D'ailleurs, il y a une expression, que le législateur ne parle pas pour ne rien dire, mais on ne fait pas des lois pour ne rien faire non plus. Ça semble tellement cohérent et évident, mais c'est ça, l'applicabilité. Donc, il faut toujours regarder si une loi est applicable, parce que, si elle ne l'est pas et si beaucoup de gens viennent nous dire : Écoutez, nous, on ne sait pas... certainement la police, on l'a entendue, la ville de Montréal qui a dit : Nous, savez-vous, on a des événements, je pense qu'ils ont parlé du festival de jazz, comment voulez-vous... Il a été quand même assez discret et poli, mais il voulait dire 18, 21, 22, il y a beaucoup de choses qui se passent à Montréal, et on a une foule de milliers de personnes. Est-ce qu'on va commencer à demander les cartes d'identification des jeunes? C'était un peu le sens de son propos. Alors, il n'était pas mal à l'aise, mais il nous disait : Faites attention, parce que, nous, dans une grande ville comme Montréal, mais ça pourrait être vrai aussi dans des villes comme Sherbrooke ou Gatineau... Gatineau aussi nous a parlé du problème d'applicabilité sur l'âge, pas encore sur la question des lieux où on peut consommer du cannabis.

Donc, ce contexte de... Alors, je me rappelle, lorsque le gouvernement actuel, la CAQ, était à l'opposition, j'entendais un peu, comment dire, dans les propos de la CAQ, un peu ce que je pouvais entendre dans des conversations que j'avais avec des gens, c'est-à-dire : Ah! bien non! Ah non! On n'a pas envie de faire ça, puis on est fâchés contre le gouvernement fédéral d'avoir fait ça, et puis là ça va nous causer des problèmes. Alors, mettons l'âge le plus tard possible. Là, les médecins disent que c'est dangereux pour le cerveau, 24 ans, et tout le monde embarque, tout le monde embarque parce qu'on n'est pas dans un exercice nécessairement de cohérence puis de regarder les chartes, de regarder la loi, l'applicabilité.

Et c'est quand tout le monde est arrivé dans la commission parlementaire où ils ont pu écouter tout le monde qui est arrivé. Mais les engagements de la CAQ, ils étaient déjà là, donc déjà engagés, si je peux dire, par rapport à l'âge, et ne semblaient pas vouloir bouger là-dessus à l'époque. Ensuite, donc, une élection, une promesse parmi d'autres promesses, et là on arrive au gouvernement, et ce projet de loi n° 2, ce projet de loi n° 2, ça m'a frappée, parce que je me disais : Bien, on n'a pas beaucoup de vécu, il y a eu toute cette consultation avec des gens très crédibles. Qu'est-ce qui fait qu'on change une loi sans avoir des éléments probants, probants, qui nous inquiètent, qui nous disent que, bon, ce que le précédent gouvernement a décidé de faire et ce que l'Assemblée nationale a adopté, parce que c'est toujours... les lois, c'est l'Assemblée nationale qui les adopte, comment ça se fait qu'on vient changer ça?

Donc, ça, c'est un contexte qui fait en sorte que je pense que c'est très important qu'on se penche maintenant sur ce projet de loi n° 2. Est-ce que c'était trop hâtif? Tous les gens de la santé publique, c'est beaucoup ce qu'ils nous ont dit : Écoutez, on a besoin de données, on a besoin de recherches. Et ils étaient un peu comme... et là, vous allez voir, on va être capables d'agir basés sur les données, les recherches qu'on aura. Sur la question du cerveau en particulier, il y avait vraiment deux groupes : ceux qui sont spécialistes de la matière en termes de croissance du cerveau, dommages au cerveau, personne qui contestait leur témoignage, c'est les experts du cerveau, mais, pour ceux qui sont les experts de la prévention et de la promotion de la santé, donc la santé publique, unanimes, basés sur des données qu'eux, ils ont, et des groupes de jeunes sont aussi venus parler de ces groupes d'âge.

Alors, c'est quelque part... à un extrême, c'est entre 12 et 15, là, pour ceux qui... on a compris le profil dont ils nous parlaient, là, Portage, c'est un profil de vulnérabilité que le ministre connaît bien aussi, avec ses nouvelles fonctions, d'ailleurs. Très, très, très difficile comme dossier, donc, la protection de la jeunesse, le ministre est bien sensible à ces questions-là. Donc, quand ils ont... ils ne sont pas allés trop là-dedans, mais moi, j'ai eu l'occasion aussi de siéger sur le conseil d'administration de Batshaw. C'était ma première entrée dans le réseau de la santé. J'ai été à Batshaw pendant longtemps, vice-présidente. Ensuite, on m'a demandé de siéger sur l'Association des centres jeunesse du Québec, et j'ai fait ça pendant assez longtemps aussi. Et là je suis devenue présidente... bien, membre du conseil d'administration de la régie régionale, qui était le prédécesseur de l'agence, prédécesseure de la grande réforme qu'on connaît maintenant, mais qui a duré quand même 10 ans, et je suis devenue présidente. Évidemment, la santé domine, hein? Une fois qu'on est dans un... quand on est dans un ministère, évidemment, de la Santé et des Services sociaux, c'est la santé qui domine, mais on garde toujours ses premiers amours, hein? Quand on est dans un milieu professionnel, les premiers amours, c'est les jeunes et c'est l'épanouissement des jeunes.

Et évidemment la santé publique au Québec, et j'ai pu le constater, le Québec est très précurseur. Et c'est ce que les autres provinces m'ont dit, parce que j'étais aussi... en anglais, c'est CIHI. Le ministre doit connaître. Je ne me rappelle plus de l'acronyme en français, mais c'est eux qui colligent les données à travers le Canada, toutes les provinces, dans tous les domaines qui touchent la santé, les délais d'attente, etc., les urgences. L'institut de recherche en données de la santé, je crois, mais je ne me rappelle plus. En tout cas. Et ils avaient dit que, savez-vous, quand je parlais avec des directeurs de santé publique d'autres provinces, eux, ils sont vraiment dans tout ce qui est vaccination, etc., santé publique, vraiment ce qui touche la santé de la personne, mais que le Québec avait une très forte tradition en santé publique qui touche les conséquences de la pauvreté, par exemple, le développement des jeunes, les enfants qui sont à risque, etc. Et, quand j'ai écouté, donc, les intervenants en santé publique, je veux dire : Ah! on est donc chanceux d'avoir... Et j'étais toujours fière, quand j'allais à des conférences nationales, dont canadiennes, d'être accompagnée, ou d'être proche, ou de pouvoir porter la voix de nos experts en santé publique.

Et qu'est-ce qu'ils nous ont dit? C'est que l'argent qu'on va avoir, et c'est la mission de la société de cannabis, c'est que tout l'argent qu'on va aller recueillir soit investi notamment, si je comprends bien, pour le bien... pour le bien, pour la prévention, la promotion de la santé. Et d'ailleurs on aura l'occasion, sûrement, d'en parler, mais des campagnes, comme quand est-ce qu'on pourra commencer à avoir des campagnes de promotion qui pourraient... qui ont... Et ils nous ont dit... ils ont connu beaucoup de succès pour la campagne contre la cigarette. Et je me rappelle, quand ils l'avaient lancée, je pense qu'à l'époque Philippe Couillard était peut-être même... Non, c'est M. Rochon, peut-être, qui était ministre à l'époque. Mais ensuite il y a eu des renforcements de la loi, mais toujours les campagnes ont continué, ces campagnes de promotion et de protection, de prévention, et aux deux niveaux. C'est sûr que le gouvernement du Canada aussi a beaucoup agi, mais le gouvernement du Québec a vraiment bien réagi, avec des réussites.

Donc, ce qu'ils nous recommandent, c'est au... Parce que le risque est grand. On l'a répété souvent. Je sais que le ministre est bien conscient de ça. On en a beaucoup parlé. Le risque, c'est parce qu'ils sont déjà exposés s'ils sont dans ce milieu-là. L'âge, c'était 15, 16, 17. Mais, à 18 ans, ils sont adultes. Et ce n'est pas en mettant l'âge à 21 ans qu'on aura l'impact. L'impact, c'est vraiment plus précoce. Même, d'ailleurs, il y avait un groupe qui est venu dire : Il faudrait qu'on commence très, très jeune. Et on pourrait, autant pour le message du ministre, du gouvernement, sur la formation du cerveau... Parce que je l'écoutais, je me disais : Je peux imaginer des présentations dans des écoles, dans nos écoles, qui feraient les deux. Voyons le cerveau. Vous allez voir exactement où votre cerveau sera endommagé. Et, par ailleurs, on met l'accent sur la prévention, les bons comportements, la responsabilité de soi.

Il me reste peu de minutes, mais je voulais arriver sur le 18-21 ans. On les appelle les jeunes adultes. Moi, quand je parle de mes enfants, je dis : Bien, c'est des jeunes adultes, un dans la vingtaine et deux dans la trentaine, 30 ans puis 32. Donc, c'est des jeunes adultes. Ça veut dire quelque chose, des jeunes adultes. C'est que moi, j'ai toujours fait confiance en mes enfants, mais, arrivés à cet âge-là, il faut vraiment leur laisser vraiment être indépendants et autonomes, hein? On le sait, ils prennent la voiture, ils s'en vont à l'université, ils quittent la ville, ils sont ailleurs et ils font des gros voyages ici et là. Et il faut, comme parent, se sentir confortables, quand ils vont voler de leurs propres ailes, on est confiants, on leur a bien appris. Ne pas dire : L'apprentissage est terminé, non. Ils reviennent toujours pour des conseils en toutes sortes de matières.

Donc, je pense que l'âge de raison, elle est vraiment... elle commence là, à 18 ans. Et c'est pour ça qu'ils peuvent s'enrôler dans l'armée, on a beaucoup parlé de ça, ils peuvent boire du vin, bien, du vin ou de l'alcool, tout est dans la raisonnabilité de la consommation.

Donc, l'enjeu aussi, dans les quelques minutes, je ne sais pas combien il me reste, M. le Président...

• (17 h 40) •

Le Président (M. Provençal)  : ...

Mme Weil : ...donc là c'est l'effet néfaste. Lorsqu'on augmente l'âge légal, c'est qu'on envoie ces jeunes dans les bras, si vous voulez, les bras bien vicieux de la criminalité et aussi d'un produit certainement pas contrôlé, un produit qui va faire en sorte qu'ils vont peut-être vouloir encore s'approvisionner de ce pusher parce qu'ils ont bien aimé l'effet néfaste, mais, néfaste, peut-être qu'il n'est pas visible pour eux a priori, mais qui va causer... peut causer, bien, va causer... c'est certainement des dommages.

Donc, tous ces éléments-là, on a beaucoup entendu parler de tout ça en commission, lors de la consultation, mais c'est pour ça que je... la réflexion... Ce qui met un doute dans ma tête par rapport à la rapidité... Et moi, j'imagine que, lorsqu'en tant que médecin à Sainte-Justine, avec une magnifique, comment dire, magnifique profession et emploi... Bon, le ministre voulait venir pour faire beaucoup de bien au gouvernement pour les jeunes et utiliser, donc, ses compétences, son expertise. Et il y avait cette promesse, on va toucher la Loi sur le cannabis. Et puis, à quelque part, j'imagine les conversations, parce que beaucoup de Québécois étaient vraiment — ...

Le Président (M. Provençal)  : ...

Mme Weil : ...une minute — dérangés par le fait qu'il fallait faire cette loi, mais là, le soir de la légalisation, on regardait la télévision puis on s'est dit : Bien, c'est pour ça. On a vu les queues, on a vu les files d'attente, on a vu les milliers de personnes «coast to coast» qui sortaient de l'ombre dans la légalité. Alors, on a tout compris, que c'était peut-être prudent. Et là nous voilà en contrôle de cette question-là. Alors, je pense que mon temps est peut-être épuisé.

Le Président (M. Provençal)  : Il vous reste 20 secondes.

Mme Weil : Bon, d'accord. Alors donc, on aura l'occasion d'échanger sur tous ces éléments et encore plus.

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup, Mme la députée. Y a-t-il d'autres membres qui souhaitent faire des remarques préliminaires? Alors, je reconnais le député de Jonquière.

M. Sylvain Gaudreault

M. Gaudreault : Oui. Merci, M. le Président. Alors, je suis désolé d'être arrivé un peu en retard. On essaie d'être partout en même temps, mais je ne suis pas comme le père Noël, là, je n'ai pas le don d'ubiquité en étant à plusieurs endroits en même temps. On y travaille, mais j'ai encore de l'ouvrage qui m'attend.

Donc, bien, écoutez, je ne peux pas dire que c'est avec plaisir qu'on se retrouve à l'étude article par article, parce que, quant à nous, il n'y aurait carrément pas de projet de loi, puis on ne serait pas ici. Donc, je ne peux pas dire que je suis content d'être à l'article par article. On le fait par sens aigu de la responsabilité et par sens du devoir.

On a appris aujourd'hui, par la voix des médias, qu'il y aura des amendements à venir, là, sur la question du lieu de consommation, des lieux de consommation. Alors, on va attendre de voir... J'ai vu qu'il y avait des amendements qui ont été déjà préavisés ou prédéposés, mais on va attendre de voir, rendu à cette étape-là, ce qu'on pourra dire précisément là-dessus, mais c'est sûr qu'il y a, à notre face même, je dirais, du côté du la troisième opposition, des contradictions par rapport à ce que la Coalition avenir Québec disait, lors de l'étude du projet de loi n° 157, sur la question de la consommation dans les lieux publics. Alors, nous, on commence à être habitués déjà, là, à être dans un nuage de contradictions, là, avec le gouvernement, mais on va essayer de faire la lumière là-dessus en temps et lieu. Et c'est une forme d'ouverture. Au moins on peut voir ça d'un point de vue positif. Mais, quant à nous, on voudrait que le gouvernement s'ouvre totalement et qu'il aille jusqu'à revoir l'âge de la consommation, là, qui est le coeur même de son projet de loi.

Évidemment, dans les travaux qu'on commence en étude détaillée, nous, on va tout faire pour réaffirmer un principe qui nous apparaît très, très important, c'est qu'au Québec l'âge légal est de 18 ans actuellement pour la consommation de cannabis, comme ça l'est pour le tabac, comme ça l'est pour l'alcool. Et notre objectif, nous, c'est de maintenir ça. Donc, on va poser des questions, on va intervenir dans les articles du projet de loi dans ce sens-là et éventuellement on pourra s'exprimer par un vote. Mais nous, on est en politique de façon positive et constructive et on espère être capables de convaincre le gouvernement de la nécessité de maintenir l'âge légal à 18 ans.

D'ailleurs, à l'étude des crédits, on a eu l'occasion de rencontrer le P.D.G. de la SQDC, et j'ai bien vu qu'il y avait des députés du gouvernement qui posaient des questions au P.D.G. de la SQDC dans l'esprit, justement, d'essayer de comprendre son rôle, puis c'était tout à fait correct, puis c'étaient des bonnes questions aussi, sur l'importance de limiter, par exemple, le crime organisé puis en quoi la SQDC avait fait son travail en cette matière. Puis c'étaient des vraies questions d'étude des crédits. Donc, on ne peut pas dire d'un côté, aux crédits, des choses puis après ça arriver dans un projet de loi puis dire le contraire. Il faut qu'il y ait un minimum de cohérence.

Alors, mon rôle comme député, puis je pense que ça va être le rôle d'autres députés aussi, ça sera de rappeler, de rappeler le gouvernement à cette cohérence-là quant à un projet de loi quand même qui touche quelque chose d'essentiel, qui est celui de la consommation du cannabis et de l'âge de la consommation du cannabis.

Jusqu'à maintenant, toutes les juridictions canadiennes et américaines ont opté pour le même âge de consommation du cannabis que l'alcool. Donc, on ne voit pas pourquoi le Québec arriverait avec un message incohérent ou un message contraire à cet égard. On ne pense pas qu'il faut envoyer un signal qu'au Québec c'est différent entre la consommation de cannabis et d'alcool ou de tabac quant à l'âge légal pour le consommer. D'ailleurs, on sait très bien que ça ouvre la porte à des contestations sur le plan des chartes, sur le plan des droits fondamentaux, quant à une discrimination fondée sur l'âge. Alors, si on est majeur, bien, on est majeur pour vrai. Puis on fait confiance aux jeunes. Et je pense que c'est dans cet esprit qu'on doit travailler.

Ça ne veut pas dire qu'il faut favoriser la consommation de cannabis, ce n'est pas ça qu'on dit. Dans un monde idéal, il ne faudrait pas en avoir. Mais il faut néanmoins le contrôler. Il faut surtout se rappeler qu'à l'origine la légalisation du cannabis, qui a été refilée ensuite aux provinces par le gouvernement fédéral quant à la gestion sur le territoire provincial, c'est dans le seul objectif de contrôler la croissance ou le marché noir... la croissance du marché noir et le marché noir en lui-même. Donc, on vient contredire ce principe de base là par le projet de loi qu'on a devant nous. Alors, c'est ce qu'on va faire valoir dans cette étude article par article.

Alors, pour nous, c'est absolument important de maintenir l'âge légal à 18 ans pour une question de cohérence. Aussi parce qu'on n'a eu aucune démonstration, lors des auditions publiques, qu'établir l'âge légal à 21 ans viendrait réduire la consommation chez les 18-20 ans. On n'a pas eu cette démonstration-là. Et on pense que de garder ou de maintenir la consommation à 18 ans permet d'intégrer les 18-21 ans dans un marché légal, qui est mieux encadré, qui est mieux contrôlé, avec une meilleure qualité de produits que ce qu'on retrouve sur le marché noir. Donc, pour nous, ça nous apparaît absolument important d'avoir cette cohérence-là.

• (17 h 50) •

Et je pense que c'est aussi important que le gouvernement du Québec soit exemplaire quant à un discours de cohérence. Moi, je crois beaucoup à l'exemplarité de l'État. Par exemple, dans un tout autre domaine, je ne peux pas croire qu'on plaide pour l'électrification des transports puis que le gouvernement du Québec tarde à électrifier sa propre flotte de transport quand on peut le faire. Ça, c'est un exemple d'exemplarité. Ça ne se dit pas, un exemple d'exemplarité, là, mais vous comprenez ce que je veux dire, un cas où l'État doit être exemplaire. Bon, bien, je pense que c'est la même chose quant à la consommation de cannabis. Il faut qu'on soit exemplaires, qu'on soit cohérents. Et là le gouvernement, par ce projet de loi, amène des exemples d'incohérence. Donc, il n'est pas exemplaire. Et, si on veut être, comme État, exemplaire dans le contrôle de la qualité, dans le contrôle également du marché noir, bien, il faut qu'on soit cohérent dans toutes les mesures en cette matière. Et ce n'est pas ce que le gouvernement fait en voulant rehausser l'âge de 18 à 21 ans. Donc, c'est sûr qu'en étude détaillée, je reviens toujours là-dessus parce que c'est là-dessus qu'on est, bien, on va poser des questions, on va demander au ministre de s'expliquer. On est ici, M. le Président, pour avoir l'intention du législateur. Moi, au moment où on se parle, là, l'intention du législateur, le législateur étant le ministre et le gouvernement, elle m'apparaît floue et incohérente.

Ça fait que le minimum qu'on va faire comme législateurs, nous, c'est qu'on va essayer au moins de clarifier cette intention floue du gouvernement. Ça fait qu'on va le faire parler, on va lui poser des questions. Je ne sais pas combien de temps qu'on va être ici, mais on va être ici le temps nécessaire qu'on y sera pour faire notre travail correctement, parce qu'on ne peut pas adopter un projet de loi avec un message puis une intention qui est aussi flou, qui est aussi incohérent de la part d'un gouvernement qui jouit d'une majorité tout à fait importante.

Et je ne suis pas le seul à dire ça. On a déjà eu l'occasion d'en parler abondamment, mais moi, je vais le répéter parce que c'est important que ça se dise à toutes les étapes d'adoption du projet de loi. Il y a plusieurs spécialistes, exemple tiré au hasard, le criminologue Serge Brochu, par exemple, qui est catégorique : Les seuls qui vont applaudir... Il dit, là, puis je le cite : «Les groupes criminels vont applaudir cette mesure.» Bon, nous, on l'a déjà dit, les seuls qui sont contents, là, dans ce projet de loi là, à part le ministre, là, c'est les groupes criminalisés, les bandes criminelles. On aurait aimé ça les entendre ici, ça fait drôle à dire, mais on ne les a pas convoqués. De toute façon, on les aurait convoqués, puis ils ne seraient pas venus, de toute façon. C'est bien clair. Mais ça, c'est les seuls qui sont contents.

D'ailleurs, c'est un peu contradictoire, parce que le gouvernement était très heureux cette semaine d'annoncer l'implantation de nouvelles succursales de la SQDC, dont une dans ma région. J'étais content parce que... Bien, j'aurais aimé mieux que ce soir à Jonquière, ça, c'est mon côté chauvin, mais ce sera à Chicoutimi. En tout cas, bon. Puis on avait... moi, j'avais posé des questions au P.D.G. de la SQDC pour avoir une succursale au Saguenay parce que je ne pouvais tolérer que les régions soient traitées différemment quant à la limitation du crime organisé, quant au... Pourquoi... Si l'objectif de la SQDC, c'est de faire en sorte que les gens s'approvisionnent dans un marché légal, pourquoi ça serait juste vrai pour la grande région métropolitaine, que ce serait juste vrai pour la région de Québec puis ça ne serait pas vrai pour les régions? Alors, moi, je le reprochais à la SQDC, puis je le sais qu'elle avait des problèmes de stock, de gestion de stock puis d'inventaire, mais je reprochais quand même à la SQDC d'envoyer un message discordant : Ce qui est vrai pour pitou n'est pas vrai pour minou, pitou étant les régions métropolitaines, puis minou étant les régions dites périphériques, ou dites éloignées, ou dites ressources, mais les autres régions.

Donc, j'étais content de voir que le gouvernement a pesé sur l'accélérateur pour avoir des succursales de la SQDC, par exemple, au Saguenay. Il va y en avoir également en Abitibi, il va y en avoir dans le Nord-du-Québec, il va y en avoir en Gaspésie. À Sherbrooke, même, il n'y en avait pas non plus d'annoncée. Donc là, on voit un gouvernement qui pèse sur l'accélérateur pour avoir des succursales de SQDC pour que tout le monde, de façon équitable et universelle sur le territoire du Québec, puisse s'approvisionner de façon légale, mais, de l'autre côté, il dit : Bien, pour ceux et celles qui ont entre 18 et 21 ans, là, eux autres, ils pourront continuer d'approvisionner sur le marché noir. Alors, vous voyez, ça, c'est un autre... une autre, plutôt, incohérence, une autre contradiction du gouvernement parmi tant d'autres dans ce dossier-là. Alors, d'un côté, on est content de voir le réseau des SQDC s'étendre sur le territoire puis, d'un autre côté, on dit : Bien là, le gouvernement, il dit deux choses en même temps des deux côtés de la bouche, parce qu'il va permettre aux jeunes de 18 à 21 ans de s'approvisionner ailleurs que dans le marché légal et dans les succursales de la SQDC qui vont ouvrir, qui vont pousser un peu partout sur le territoire. Donc, c'est très, très, très contradictoire.

Maintenant, je reviens avec mon criminologue, qui a dit que «de recadrer l'usage du cannabis légal au Québec est une très mauvaise idée qui ne va avoir aucun effet sur la consommation des jeunes. Elle risque de faire régresser la légalisation de ces substances au Québec en allant même à l'encontre de la loi fédérale en la matière.» C'est toujours le professeur Serge Brochu qui a dit ça, qui est membre de l'Institut universitaire sur les dépendances.

Donc, vous voyez que, pour nous, ça nous apparaît très important de poursuivre dans cette optique, puis on va s'assurer... moi, avec le temps que je vais avoir ici, là, je vais tout le prendre, M. le Président. Ça fait assez d'années que je suis dans l'opposition, là, pour savoir que le temps que les députés de l'opposition ont en commission, il est important. C'est le temps qui nous appartient, puis on va faire se prononcer le ministre puis d'autres députés pour qu'ils nous expliquent puis qu'ils fassent la lumière sur leur incohérence.

Je pourrais vous citer d'autres groupes qui sont venus nous rencontrer ici. Le Barreau, j'en ai fait mention tout à l'heure, qui nous a dit que... Je ne me souviens plus s'ils sont venus. Je pense que non, mais ils ont envoyé le mémoire, hein, le Barreau? C'est ça. Ils n'étaient pas venus ici, mais ils ont envoyé le mémoire. Ils nous disent que toutes les provinces canadiennes ont harmonisé l'âge de consommation applicable du cannabis et de l'alcool. La hausse de l'âge légal fait en sorte qu'une grande partie des consommateurs s'approvisionnent toujours sur le marché noir. La hausse de l'âge de 21 ans induit une discrimination basée sur l'âge en vertu de la charte des droits et libertés canadienne et québécoise, en vertu des deux chartes. Donc, ce n'est pas n'importe qui qui nous a dit ça, c'est le Barreau. Ça fait qu'on va pouvoir se servir de leur mémoire pour que le ministre...

Dans le fond, je donne déjà des arguments au ministre, pas des arguments, mais je donne des préavis au ministre. Donc, qu'il se prépare, là, parce que je lui dis déjà, là, je suis vraiment fin, là, je lui dis déjà ce sur quoi on va travailler puis avec quoi on va poser des questions. Ça fait que ça lui donne le temps de se préparer s'il ne l'a pas fait encore. Mais je sais qu'il doit l'avoir fait. Il a l'air d'un élève studieux. Alors, probablement qu'il va l'avoir fait. Mais moi, le Barreau, là, je veux avoir des réponses, qu'est-ce que le ministre a à dire, parce que, justement, vu qu'on ne les a pas entendus ici, on n'a pas pu voir ce que le Barreau avait à poser comme questions au ministre puis on n'a pas pu voir les réponses du Barreau. Alors, il va pouvoir le faire par notre intermédiaire, M. le Président.

Le Conseil de la transformation alimentaire a dit que, sur l'âge, il... bon, au moins il a proposé une voie de passage, là. Je n'ai pas vu dans les amendements qui nous ont été déposés jusqu'à maintenant est-ce qu'au moins le ministre serait ouvert à avoir une voie de passage par une gradation du THC. Ça, on n'a pas ça encore. Peut-être qu'en voyant les journaux demain on va apprendre quelque chose d'autre, là. Parce que, là, hein, c'est peut-être comme un striptease, là. Là, aujourd'hui, c'était la chemise, tu sais, en disant : Bon, bien, on va revoir la question des lieux de consommation. Bien, demain, ça sera peut-être un autre morceau, ce n'est pas à moi de dire quel morceau, qu'il va dire : Bien là, on va au moins ouvrir la porte peut-être à une gradation du THC. Bon, moi, je lui donne plein d'occasions, là, je lui envoie des ballons de plage, là, pour qu'il dise : Bien oui, on va essayer se sortir d'une position intenable, parce que sa position, elle est intenable à l'heure actuelle sur le plan juridique.

Donc, il y a des voies de passage. Elles sont minces, ces voies-là. Elles sont minces, mais elles existent. Peut-être qu'on serait capable de trouver quelque chose d'intéressant avec une gradation. Donc, de ne pas interdire totalement la consommation de cannabis de 18 à 21 ans, mais de permettre une gradation dans la consommation jusqu'à 21 ans. Moi, je ne vous dis pas que je suis prêt à acheter ça tout de suite, mais je trouve au moins que ça serait une belle base de discussion. Peut-être que, là, on serait capable de faire quelque chose. Ça, c'est une position.

Puis les premiers qui nous en ont parlé, vous vous en souvenez, M. le Président, c'est... de mémoire, en tout cas, les premiers qui nous en ont parlé, c'est l'INSPQ, l'Institut national de santé publique, qui ont dit comme solution d'offrir aux 18-20 ans des produits de cannabis à moindre risque, c'est-à-dire à faible teneur de THC et qui contiennent du CBD. Donc, ce n'est pas n'importe qui, là, c'est l'INSPQ qui a parlé de ça. Alors, moi, je suis toujours bien prêt à faire de la politique de façon positive, de façon créatrice, de façon non partisane. Je suis toujours bien prêt à faire de la législation positive, à être constructif, mais il faut qu'il y ait de l'ouverture aussi. Alors là, du côté du gouvernement, il y a peut-être une autre piste d'atterrissage avec ces propositions-là qui sont faites par d'autres groupes.

Et les directeurs de police du Québec, il me semble que c'est du monde qu'on aurait tendance à écouter, ça, ils nous ont dit que le crime organisé s'imposera auprès de la clientèle des 18-20 ans. Alors, moi, je suis un fils de flic, là. Puis, quand le directeur de police, il passait un message à mon père, là, ça paraissait, on le savait. Ça fait que, là, ils nous disent, les directeurs de police, là, que le crime organisé va s'imposer auprès de la clientèle du 18-20 ans. Il me semble que c'est... on devrait entendre le message comme mon père entendait le message de son boss quand il était policier.

L'Association des intervenants en dépendance du Québec... Oui?

Le Président (M. Provençal)  : On va avoir besoin de votre consentement pour permettre que les deux dernières minutes qui resteraient dans...

M. Gaudreault : ...deux minutes?

Le Président (M. Provençal)  : Oui.

M. Gaudreault : O.K.

Le Président (M. Provençal)  : ...au député de pouvoir terminer.

M. Gaudreault : Ça ne me dérange pas de les faire à 7 h 30 non plus, là.

Le Président (M. Provençal)  : Consentement?

Une voix : ...

Le Président (M. Provençal)  : Il y a un consentement?

M. Gaudreault : Je suis tellement intéressant.

Une voix : ...

Le Président (M. Provençal)  : 7 h 30?

M. Gaudreault : 7 h 30? O.K.

Le Président (M. Provençal)  : 7 h 30? O.K. Il vous restera... Alors, je vous remercie de votre collaboration.

Compte tenu de l'heure, la commission suspend ses travaux à 19 h 30.

(Suspension de la séance à 18 heures)

(Reprise à 19 h 30)

Le Président (M. Provençal)  : ...et être vraiment, vraiment disciplinés.

Alors, lors de la suspension de nos travaux, cet après-midi, le député de Jonquière avait débuté ses remarques préliminaires. Alors, M. le député, je vous cède la parole. Il vous restait 2 min 25 s.

M. Gaudreault : Je sens un peu de pression, M. le Président. Alors, je vais essayer de bien faire ça, mais, quand je parlais de strip-tease, là, je ne faisais pas référence à moi-même, mais plutôt aux amendements qu'annoncent le ministre et le gouvernement dans ce projet de loi aujourd'hui. On a eu celui sur les lieux de consommation, on espère qu'il y en aura d'autres sur la question de l'âge minimum pour acheter et consommer du cannabis.

Écoutez, M. le Président, la seule chose que je voulais dire, c'est qu'avant de venir ici, avant de me remettre dans l'état d'esprit de l'étude article par article, l'étude détaillée, j'ai pris la peine d'aller relire des résumés de mémoires. Puis, comme je vous disais tout à l'heure, on en a parlé de quelques-uns, on a parlé du Barreau, on a parlé du Conseil de la transformation alimentaire, je vous ai parlé des directeurs de police, on a parlé également de l'Institut national de santé publique, je pourrais continuer, la Fédération étudiante collégiale, par exemple, qui a parlé également de conserver l'âge légal à 18 ans, la ville de Gatineau, la ville de Montréal, quand même, M. le Président, la mairesse de Montréal, qui était ici avec le chef de police, ça, je m'en souviens très bien.

Donc, c'est quand même des opinions importantes qui ont été émises, et on va se servir, en tout cas, de ce côté-ci, de l'étude détaillée pour aller plus loin sur ces propositions-là, ou ces suggestions-là, ou ces commentaires, ces opinions qui ont été faites par des groupes, pour voir comment le ministre réagit, répond à ça et comment surtout on peut être capables de bonifier le projet de loi à partir de ces commentaires-là. Bien, le bonifier, il n'y a pas grand possibilités, parce qu'il y a l'histoire de la gradation. Ça, moi, je serais intéressé à voir ce que le ministre peut nous dire là-dessus.

Puis l'autre chose que je considère aussi triste, c'est que nous avons un projet de loi devant nous qui est majeur, parce qu'il vient modifier des droits, comme le Barreau nous le dit, sur la question de la discrimination reliée à l'âge, c'est quand même quelque chose de fondamental dans notre système de droit, mais on ne les a pas entendus puis on n'a pas eu le temps de les questionner. Alors...

Le Président (M. Provençal)  : Je dois vous interrompre, M. le député de Jonquière.

M. Gaudreault : Ah! Déjà?

Le Président (M. Provençal)  : Je m'excuse.

M. Gaudreault : J'étais sur une belle lancée.

Le Président (M. Provençal)  : Oui, effectivement. On aura l'occasion de vous entendre, assurément, lors des articles que l'on va débattre. Alors, merci beaucoup. Y a-t-il d'autres membres qui souhaitent faire des remarques préliminaires?

Alors, je vais simplement vous demander, nous sommes maintenant à l'étape des motions préliminaires. Je suis prêt à recevoir des motions. Est-ce qu'un député souhaite déposer une motion préliminaire?

M. Fortin : Oui, M. le Président, si c'est possible, j'aimerais déposer une motion préliminaire. Je peux la lire, si vous le souhaitez, puis après ça on pourra la distribuer, si ça vous convient. Je ne veux pas prendre votre rôle, c'est vous qui êtes maître de ça.

Le Président (M. Provençal)  : Non, ça va. Vous pouvez y aller.

Motion proposant d'entendre le Barreau du Québec et le
Conseil de la transformation alimentaire du Québec

M. Fortin : Alors, on va déposer une motion préliminaire, M. le Président, et je vais la lire pour le bénéfice de tout le monde. Conformément à l'article 244 du règlement de l'Assemblée nationale, je fais motion afin :

«Que la Commission de la santé et des services sociaux, [tienne] avant d'entreprendre l'étude détaillée du projet de loi n° 2, Loi resserrant l'encadrement du cannabis, [...]des consultations particulières et qu'à cette fin, elle entende les groupes suivants : le Barreau du Québec et le Conseil de [...] transformation alimentaire du Québec.»

Le Président (M. Provençal)  : Alors, je vais suspendre brièvement pour qu'on puisse faire les copies et les distribuer.

(Suspension de la séance à 19 h 34)

(Reprise à 19 h 38)

Le Président (M. Provençal)  : Pourriez-vous débuter pour qu'on puisse céder de façon officielle la parole au député de Pontiac? Je vous cède la parole, monsieur...

M. André Fortin

M. Fortin : Ah! merci. Merci, M. le Président. Bien oui, j'écoutais le député de Jonquière tantôt, hein? Puis je le trouvais bon. Je ne sais pas, c'est peut-être qu'il s'améliore avec le temps. Peut-être que j'ai une meilleure appréciation du bon vin avec le temps, mais je le trouvais très bon...

Une voix : ...

M. Fortin : Ah! O.K. Bien, je le trouvais très bon, le député de Jonquière, et je me disais... oui, oui, en tout respect, je le trouvais excellent, même, et je me suis dit : Bien, je pense qu'il a raison, il a raison, il y a des groupes... et je pense qu'il a terminé avec... c'étaient les premières 18 minutes, hein, mais même les deux dernières minutes valaient le prix d'entrée du billet, M. le député. Mais, pendant ces premières 18 minutes, il nous a dit : Bien, tu sais, il y a des groupes qu'on n'a pas eu la chance d'entendre ici, en commission parlementaire.

Puis ce n'est pas la première fois qu'on en parle M. le Président. Je ne pense pas que je prends qui que ce soit par surprise en disant que j'étais un peu déçu de la façon que les consultations particulières ont eu lieu au cours des derniers mois. Alors, je ne pense pas que je surprenne personne non plus avec la motion préliminaire que je dépose ce soir, là. Et j'avais évité aussi le sujet de la forme des consultations particulières dans mes remarques d'ouverture. Je le sais, vous en avez probablement pris note, comme vous prenez note de nos interventions, M. le Président. Mais j'avais évité la forme, j'avais parlé du fond, mais il y a un enjeu de forme aussi par rapport à la commission parlementaire et de la façon qu'elle s'est déroulée jusqu'à maintenant. Et je pense qu'avant qu'on procède à l'étude article par article, puis on va se rendre sans aucun doute, là, je pense que c'est utile juste de revenir rapidement collectivement sur la façon que s'est déroulé tout ça puis ce qu'on a entendu, mais surtout ce qu'on n'a pas entendu.

• (19 h 40) •

On a entendu, lors des consultations particulières, 16 groupes. Il y a 16 groupes qui sont venus, si ma mémoire est bonne, M. le Président, 16 groupes qui sont venus nous entretenir, plus de groupes qui étaient, disons, en défaveur du projet de loi, mais il y en avait quelques-uns qui étaient en faveur du projet de loi. Il y en avait quelques-uns qui avaient des positions un petit peu plus nuancées, mais, je vous dirais, de façon majoritaire des groupes qui étaient en défaveur du projet de loi.

Il y a des groupes qu'on n'a pas invités, hein, des groupes sur lesquels on s'était tous entendus, qu'on aurait pu entendre, que tout le monde était d'accord pour entendre, puis, tout à coup, ils ont comme disparu de la liste des groupes invités. Puis il y en a d'autres qui se sont rajoutés. On était bien contents pour ceux qui se sont rajoutés, mais on était un peu... on nageait un peu dans l'incompris, à savoir ce qui s'était passé pour les groupes qui ont été désinvités.

Il y a des groupes, M. le Président, et moi, je vous l'ai déjà dit, ça fait cinq ans que je suis ici, je n'ai jamais vu ça, des groupes qui sont invités à 24 heures d'avis. À 24 heures d'avis en plein hiver. Hein, on se souvient, c'était jour de tempête, là, certaines des consultations particulières. Il y a des groupes qui ont appris, à 24 heures d'avis, qu'ils devaient venir présenter en commission parlementaire, donc non seulement préparer un mémoire, non seulement préparer une intervention, non seulement se préparer aux questions des députés, les très bonnes questions des députés et du ministre en commission parlementaire, mais qui ont aussi dû abandonner tout ce qu'ils faisaient. Ils avaient peut-être d'autres choses cette journée-là. Si c'est des organismes qu'on veut entendre, ça veut dire qu'ils font du travail important dans la communauté également.

Alors, il y en a qui ne se sont pas pointés. Il y en a qui se sont désistés. Et vous savez ce qui est arrivé, M. le Président? On s'est retrouvés avec des demi-journées, des quarts de journées, des plages horaires où on voyait un groupe, après ça il y avait un 45 minutes de libre où on ne voyait pas personne. On retournait tous dans nos bureaux, puis après ça on revenait ici, puis on entendait un autre groupe. Donc, il y avait des plages horaires qui ont été laissées vacantes et pourtant il y avait des groupes qui étaient prêts, des groupes qui étaient prêts à être entendus en commission parlementaire, qu'on n'a pas entendus, qui s'étaient dit... le Barreau du Québec et le Conseil de la transformation alimentaire du Québec font partie de ceux-là, là, qui étaient soit ici, dans la salle, hein? Ils étaient à l'arrière, ils ont entendu tous les autres groupes. Ils ont entendu les groupes de santé publique, ils ont entendu les directeurs de police, ils ont entendu les villes, ils ont entendu l'Union des municipalités, la Fédération québécoise des municipalités. Ils ont entendu des organismes communautaires, comme Portage. Ils ont entendu tout le monde d'autre venir témoigner, venir dire ce qu'ils avaient à dire, puis eux, eux, c'était non. Eux, on n'avait pas droit, comme parlementaires... nous, on n'avait pas le droit de savoir, d'entendre, de questionner, d'interagir avec ces groupes-là.

Oui, ils nous ont donné des mémoires, mais, vous le savez comme moi, M. le Président, si on est ici en commission parlementaire, si on fait l'exercice, si on s'assoit autour de cette table-là, si on prend le temps de rencontrer des gens, si le processus parlementaire fait en sorte qu'on prenne le temps, qu'on se dise : C'est important de rencontrer des groupes et non seulement d'avoir leur point de vue, mais pouvoir les questionner, pouvoir interagir, de pouvoir leur poser des questions, de pouvoir dire : Bien, ça, je comprends ça, mais cette partie-là, de votre mémoire, je ne la comprends pas, pouvez-vous élaborer là-dessus un petit peu?, ou : Cette partie-là de votre argumentaire, ça fait du sens puis je vous suis là-dedans... Parce que c'est un peu l'exercice qu'on va faire entre le ministre et les députés de l'opposition, là, mais de le faire avec les groupes, M. le Président, c'est tout aussi important.

Alors, on s'était entendus sur une série de groupes. Le gouvernement a changé ces groupes-là. On a dû négocier pour des groupes extrêmement importants. La ville de Montréal, ça a pris quasiment deux mois de négociations avant d'entendre la ville de Montréal. Puis je suis pas mal sûr que l'amendement que le ministre a proposé aujourd'hui, là, vient, entre autres, de la présentation de la ville de Montréal en commission parlementaire.

Alors, quand le ministre... et je voyais les députés, je pense que c'était en réaction au propos d'entrée de jeu du député de Marquette, qui disait : Bien, quand je parlais tantôt... quand je parlais en Chambre, quand je faisais 20 minutes, puis là je me demandais : Aïe, ça valait-u la peine? Est-ce que le gouvernement écoutait? Puis finalement, je vois un amendement qui ne va pas jusqu'au bout de ma pensée, mais qui en fait peut-être un petit bout de chemin, bien c'est à ça que ça sert. C'est pour ça qu'on demandait la ville de Montréal en commission parlementaire. C'est pour ça qu'on a demandé, qu'on insisté pour la fédération étudiante québécoise... la Fédération étudiante collégiale du Québec. C'est pour ça qu'on a insisté pour la ville de Gatineau. C'est pour ça qu'on a insisté pour d'autres groupes qu'on a réussi à faire rajouter par la suite, mais malheureusement, M. le Président, il y a des groupes extrêmement importants, des groupes qui ont une mission sociale importante, qu'on n'a pas pu entendre, qui ont une expertise qu'on n'a pas pu entendre. Et les deux groupes que je mets sur la liste, ici, là, dans la motion préliminaire que je dépose ce soir, on aurait pu en mettre beaucoup d'autres, mais je vous dirais, M. le Président, que ce sont deux groupes qui ont un point de vue très particulier, qui ont un point de vue qu'on n'a pas entendu. Ce n'est pas comme si on disait : Bien, on a les directeurs de police qui sont venus, puis on veut l'association des policiers. Ce n'est pas deux groupes qui se ressemblent un peu, c'est deux groupes... c'est des groupes, là... Il n'y a pas personne comme le Barreau du Québec, il n'y a pas personne qui peut donner cette expertise-là, ce point de vue là. Le Barreau, c'est le Barreau, puis il n'y en a pas d'autre.

Le Conseil de transformation alimentaire du Québec... On ne demande pas à ce qu'une compagnie privée soit entendue ici. On ne demande pas à ce qu'Hexo ou un autre producteur de cannabis soit entendu ici. Ce qu'on dit, c'est que le Conseil de transformation alimentaire du Québec est un joueur majeur au Québec pour l'économie des régions, un joueur qui se lance dans une nouvelle industrie. Et je le sais que c'est une association qui est respectée par plusieurs des membres du gouvernement. Je les ai vus, ils étaient au cocktail de la... le Conseil de la transformation alimentaire du Québec la semaine dernière. Et je suis certain qu'ils ont entendu, eux aussi, que le Conseil de la transformation alimentaire aurait aimé pouvoir s'exprimer en commission parlementaire ici lors des consultations particulières qu'on a tenues, surtout, M. le Président — je ne veux pas pointer du doigt vers vous, je m'excuse, M. le Président, je sais que ce n'est pas poli — surtout, M. le Président, qu'ils étaient ici, dans la salle, pendant toutes les auditions. Ils étaient assis ici. On était... Si je ne me trompe pas, M. le Président, on était dans cette salle-ci, là. Ils étaient assis dans le fond de la salle patiemment, à attendre leur tour, sachant très bien que des groupes se désistaient parce qu'ils n'avaient pas eu de préavis. Eux avaient préparé leur mémoire, eux avaient préparé leurs arguments, eux avaient préparé leur point de vue à partager, eux étaient prêts à interagir, à se faire challenger, là, à se faire défier sur leur point de vue par des parlementaires, des parlementaires aguerris, avec des questions pointues, puis ils n'ont jamais eu cette chance-là.

Au lieu de passer notre temps en commission parlementaire à entendre le Conseil de transformation alimentaire du Québec, on a retourné à nos bureaux pendant 45 minutes. Je ne veux pas dire qu'on se tournait les pouces, parce que ce n'est pas le travail des députés, on a tous beaucoup de travail, mais on ne faisait pas le travail de parlementarisme et on ne faisait pas le travail sérieux d'étude d'un projet de loi majeur, d'un des premiers projets de loi du gouvernement en se donnant la chance d'entendre l'expertise du Conseil de transformation alimentaire du Québec. Puis eux non plus, ce n'était pas bien, bien plus productif pour eux autres, là. Ils étaient assis dans le fond de la salle. On partait, on revenait 45 minutes plus tard, puis ils étaient encore là. Hein, ils faisaient deux, trois téléphones, ils rappelaient au bureau, ils voyaient comment ça allait, c'étaient quoi, les enjeux de la journée, mais je ne peux pas dire qu'ils étaient aussi productifs que s'ils étaient au bureau ou qu'ils étaient aussi productifs que s'ils étaient assis à la table ici, puis on les entendait parler, puis ils nous disaient leur point de vue.

Alors, M. le Président, c'est pour ça qu'on a déposé la motion préliminaire ce soir, parce que ces deux groupes-là, c'est deux groupes majeurs qui ont un impact important sur l'industrie du cannabis ici, qui est une nouvelle industrie, puis qu'on a, à ma connaissance, là, très rarement eus en commission parlementaire, peut-être une seule fois, si je ne m'abuse, lors de l'étude du projet de loi n° 157. Et, quand on lance une industrie comme ça au Québec, là, une industrie qui va prendre une place majeure dans l'économie québécoise, l'industrie du cannabis, il me semble que la moindre des choses, c'est d'entendre leur point de vue, encore une fois pas le point de vue d'une compagnie ou d'une autre, le point de vue du Conseil de transformation alimentaire du Québec, qui aurait eu, selon le mémoire qu'ils nous ont déposé, là, une panoplie de choses à nous dire, une panoplie d'options à nous présenter, une panoplie de possibilités de bonification du projet de loi, puis on ne les a pas entendus.

• (19 h 50) •

Je reviens au Barreau du Québec. Le ministre, là, la semaine dernière, il y a deux semaines, il y a trois semaines, je ne me souviens plus, M. le Président, on était à l'étude de crédits il y a deux semaines, je pense, nous a dit, sur la question de l'avis juridique autour du 18 ans ou du 21 ans, et je le dis en tout respect pour le ministre, là, mais c'est les premiers mots qui sont sortis en réponse à la question : Avez-vous un avis juridique?, c'était : Non. Ensuite, 30 secondes plus tard, c'était : S'il y en a un, je ne l'ai pas vu. Après ça, c'était : C'est confidentiel. Après ça, c'était : J'ai fait confiance ou j'ai présumé, M. le Président, que tout était correct. Et, deux heures plus tard, je pense qu'après consultation, là, c'est normal qu'on consulte nos équipes dans des situations comme celle-là, deux heures plus tard, c'était : Il y en a un, mais je ne peux pas vous en parler. Ça, c'est normal. Qu'il y en ait un, qu'ils ne peuvent pas nous en parler, je comprends ça. Que le gouvernement ne veuille pas nous en parler, je peux accepter, mais ce que je comprends à travers tout cet enjeu-là, c'est soit que le ministre n'avait pas lu le document en question, l'avis juridique, là...

Et donc ce que je comprends aussi, c'est que le seul vrai avis juridique qu'on a, le seul vrai avis juridique qui est public, le seul qu'on va avoir, parce que, de toute évidence, le gouvernement ne voudra pas qu'on voie l'avis juridique du ministère de la Justice, alors le seul avis juridique qu'on a vraiment, c'est le mémoire du Barreau du Québec. C'est le mémoire que le Barreau du Québec a déposé à la commission parlementaire, qui fait partie des 33 mémoires. 33 mémoires.

M. le Président, 33 mémoires, ce n'est pas une consultation pour un projet comme celui-là. Une consultation pour un projet de cette ampleur-là, ça ressemble habituellement à ce que Mme Charlebois avait fait pour le projet de loi n° 157, c'est-à-dire un processus qui avait pris la forme d'abord d'un forum d'experts sur l'encadrement du cannabis. Je le sais que le ministre croit à des forums d'experts, il en a fait un hier. Alors, il aurait très bien pu prendre la même forme pour entendre les experts sur tous les enjeux de l'encadrement du cannabis, pour savoir si ce qu'il a présenté, est-ce que c'est assez, est-ce qu'on a besoin d'en savoir plus, est-ce qu'on a besoin d'en mettre plus dans le projet de loi, est-ce qu'il y a d'autres pans de l'encadrement ou du resserrement du cannabis auxquels on ne fait pas référence dans le projet de loi qu'on devrait mettre. Ça, c'est ce que les forums d'experts peuvent nous dire.

Le processus de consultation de Mme Charlebois, c'étaient des consultations régionales. Les gens, là, s'étaient déplacés, le forum de consultation s'était déplacé à Rimouski, à Québec, à Saguenay, à Trois-Rivières, à Granby, à Montréal puis chez nous, à Gatineau. Puis je me souviens qu'il y avait du monde, M. le Président. Ce n'était pas une salle de 22 personnes, là. Il y avait beaucoup de monde là-dedans. Il y avait... il y a eu 128 mémoires de déposés par des organisations, puis il y a 570 citoyens qui se sont inscrits aux consultations publiques. 570 citoyens intéressés par la chose, 570 citoyens qui voulaient faire valoir leur point de vue, qui voulaient entendre, eux aussi, des experts, mais qui voulaient faire valoir leur point de vue, qui voulaient dire au gouvernement : Bien, voici comment ça va toucher nos vies, nos communautés, nos quartiers, nos enfants, nos petits-enfants, notre économie locale. Ça, c'est le début d'un processus de consultation. Ajoutez à ça, M. le Président, une consultation en ligne où 12 594 citoyens prennent la parole. M. le Président, ajoutez à ça une commission parlementaire où il y avait eu, quoi, une soixantaine de groupes qui se sont présentés.

Une voix : ...

M. Fortin : Merci, M. le Président, je n'étais pas loin, quand même. Avec un petit plus ou moins de chaque bord, j'étais dans la... oui, la marge d'erreur. Là, on commence à avoir un processus de consultation qui a de l'allure, qui nous permet d'entendre tout le monde qu'on a besoin d'entendre, qui nous permet de savoir ce que tous les experts ont à dire, ce que tous les groupes différents ont à proposer comme alternative au projet de loi, ce que tous les intervenants pensent qui est le mieux pour le Québec, pour les citoyens du Québec, pour la santé publique au Québec, mais, quand on refuse des groupes, ce qui n'avait pas été le cas, en 2017, avec Mme Charlebois, mais qui a été le cas cette fois-ci avec le ministre qui est face de moi aujourd'hui, on n'est pas dans une consultation ouverte, on n'est pas dans une consultation transparente, on n'est pas dans une consultation où les citoyens se sentent à même de participer, où les organismes sentent qu'ils sont écoutés.

Aïe, le maire de Gatineau, M. le Président, vous vous en souvenez, le maire de Gatineau, là? C'était une moyenne tempête, cette journée-là, hein? C'était la pire tempête à Gatineau. Le maire s'est fait varloper, je le dis gentiment, là, mais s'est fait varloper par les animateurs radio chez nous parce qu'il n'était pas dans sa ville le jour de tempête, parce qu'il ne s'occupait pas du déneigement, parce qu'il était ici, parce qu'il voulait nous faire valoir son point de vue sur le resserrement du cannabis. C'était à ce point-là important pour lui, à ce point-là important pour ses citoyens, à ce point-là important pour sa ville. Et non seulement il n'était pas chez eux pendant la tempête, mais il a fallu qu'il se rende ici, là. Puis c'est loin, Gatineau. Moi, je le fais toutes les semaines, là, c'est loin. C'est long. Ça prend du temps, surtout si on respecte les limites de vitesse. M. le Président, ce maire-là a fait ce choix-là de se déplacer ici pour être questionné pendant quatre minutes par le ministre.

Alors, quand je vous dis que le processus manquait de transparence, qu'il manquait de rigueur, c'est pour ça que j'ai utilisé des mots assez fermes, assez directs pour qualifier la commission parlementaire qu'on a eue et c'est pour ça qu'on veut rajouter deux groupes. On n'en demande pas 25, hein, on n'essaie pas de dire : On arrête tout, là, on invite 25 personnes, on recommence, on fait un processus au complet, mais il y a deux groupes qui ont un point de vue très, très, très spécifique. Le député de Jonquière tantôt nous a dit pourquoi c'était important d'entendre ces groupes-là, je suis 100 % d'accord avec lui, parce qu'ils ont des choses à dire que personne ne nous a dit, parce qu'ils pourraient, avant qu'on se penche sur l'étude article par article du projet de loi, avant qu'on négocie — si le ministre est ouvert à une négociation, on verra bien — avant qu'on demande au ministre de faire des compromis sur certains enjeux, peut-être qu'il va nous demander à nous de faire des compromis sur certains enjeux, je n'ai pas de problème avec ça, M. le Président, mais avant qu'on entre dans ce discours-là, dans cet exercice-là, il me semble que l'expertise qui est disponible, qui est prête à être entendue, qui est prête à venir en commission parlementaire, qui veut être entendue et qui, pour l'État québécois...

Si on écoutait ce que le Barreau du Québec a à dire, on pourrait peut-être se sauver bien du trouble, M. le Président. Si on écoutait ce que le Conseil de la transformation alimentaire du Québec a à dire, ça pourrait peut-être, je ne vous dis pas que c'est tout bon ce qu'ils ont à dire, mais ça pourrait peut-être avoir des répercussions économiques majeures pour le Québec, parce que ce n'est pas à toutes les semaines, ce n'est pas à tous les mois, ce n'est pas à toutes les années, ce n'est pas à toutes les 10 années, M. le Président, qu'on a l'occasion de bâtir une industrie légale à partir de rien au Québec. Une nouvelle industrie, des nouvelles innovations, des nouveaux produits, des employés qui passent d'un type de métier à un autre, qui augmentent leur qualité de vie en travaillant dans une nouvelle industrie, ce n'est pas à toutes les semaines qu'on a l'occasion de faire ça au Québec, de le faire comme du monde puis au minimum d'entendre ce que ces gens-là ont à dire, qui vont investir des millions au Québec, qui vont créer des centaines, des milliers d'emplois en région, entre autres, au Québec, ce qui n'est pas toujours facile à faire.

Je me dis qu'on devrait, avant de procéder à l'étude article par article, qui va avoir un impact direct sur leur industrie, qui va avoir un impact direct sur le cadre légal, évidemment, autour du cannabis au Québec, qu'on pourrait entendre ces groupes-là. Parce que, si je prends juste, M. le Président, si je prends juste le mémoire, disons, du Conseil de transformation alimentaire du Québec, j'hésitais entre les deux, je vais prendre celui-là pour l'instant, je n'ai même pas besoin de me rendre en page 2, en page 1, ils ont des recommandations. Ils commencent leur intervention en disant, un, que le CTAQ, c'est une association importante au Québec, ça, tout le monde le sait, mais ils nous disent qu'il y a une perception au Québec sur laquelle on doit travailler. Puis ça, je ne vois pas ça dans le projet de loi du ministre, ils nous disent : «La consommation du cannabis sous forme d'ingestion comporte une notoriété très élevée, est mieux perçue que l'inhalation et est surtout perçue comme étant moins nuisible à la santé. Les consommateurs pensent souvent que manger des produits du cannabis est une façon plus saine et plus simple que de le fumer.» C'est-u vrai, ce n'est-u pas vrai? Je ne le sais pas, le ministre a recommandé à certaines personnes de le faire dans un contexte où il ne pouvait pas fumer. Maintenant, il a fait certains assouplissements qu'il nous a présentés. Est-ce que c'est parce que la solution qu'il nous avait présentée, c'était plus nuisible pour la santé? Je ne sais pas, on va l'entendre en étude article par article, mais c'est une perception, de toute évidence, selon eux, dans la communauté. Est-ce qu'il faut travailler là-dessus? Peut-être. Est-ce que les propos du ministre nous menaient à une banalisation de la consommation de comestibles? Peut-être. Bien, probablement que les comestibles, ce n'est pas non plus un produit banal. Je suis certain que vous allez être d'accord avec ça.

• (20 heures) •

Ils nous disent aussi, et ça, le ministre aurait dû aimer entendre ça de la part du Conseil de transformation alimentaire du Québec, j'ai dit tantôt que les groupes qu'on a entendus étaient de façon majoritaire, M. le Président, en défaveur du projet de loi. Écoutez bien ça, le Conseil de la transformation alimentaire nous dit : «L'industrie de la transformation des aliments considère positivement la proposition du [...] projet de loi n° 2 quant à l'augmentation de l'âge de 21 ans — ça aurait dû vous faire sourire un petit peu d'entendre ça, il me semble que j'aurais aimé ça, à sa place, entendre ça, mais après ça, par exemple, ils disent : uniquement pour les produits intégrant du THC...» Ah! O.K., M. le Président, c'est une proposition comme une autre. Est-ce qu'on l'aime? Peut-être, peut-être pas. Mais est-ce qu'on aurait aimé leur poser des questions là-dessus? Parce qu'ils disent : «...et propose que soit maintenu à 18 ans l'âge de consommation des produits contenant du CBD dans le contexte réglementaire actuel.»

Ce qu'ils nous disent, c'est : On produit. Et ça, c'est eux qui le savent, c'est eux qui produisent ces produits-là, M. le Président, c'est eux qui les manufacturent, c'est eux qui les vendent à la SQDC et peut-être à d'autres provinces, peut-être davantage dans le futur, sait-on? Mais eux produisent deux types de produits puis ils nous disent : Effectivement, il y en a un, là, on est d'accord avec le ministre, 21 ans pour ça, ça a bien de l'allure. Mais il y en a un autre, type de produit qui, dans leur tête à eux... disent : Ce produit-là, là, quand on regarde autour, quand on regarde ce qui se fait à travers le monde, quand on regarde l'impact sur la santé que ça peut avoir, nous autres, on n'en voit pas, d'enjeu avec le 18 ans pour ça.

Ils disent... D'ailleurs, ils nous citent, M. le Président, le Comité d'experts de la pharmacodépendance de l'OMS à Genève. Moi, je ne me souviens pas d'avoir entendu un autre groupe nous citer ce comité-là en commission parlementaire. Je ne me souviens pas que ce point de vue là ait été représenté par un groupe ou un autre en commission parlementaire : «...aucun cas d'abus ou de dépendance n'a été rapporté en relation avec l'utilisation de CBD pur et aucun problème de santé publique n'y est associé.» C'est-u vrai? C'est-u pas vrai? Je ne le sais pas, mais je sais, grâce au Conseil de transformation alimentaire, que le Comité d'experts de la pharmacodépendance de l'Organisation mondiale de la santé trouve que «rien n'indique que le CBD en tant que substance [serait] susceptible de donner lieu à des abus ou à des effets nocifs similaires à ceux des substances inscrites dans les [autres] conventions[...], comme le cannabis ou le THC». Ça, c'est un point de vue qu'on n'a pas entendu, c'est un point de vue de l'industrie, d'une industrie québécoise.

Je ne sais pas si vous avez eu l'opportunité, M. le Président, d'aller dans une entreprise qui produit du cannabis au Québec, mais c'est des entreprises modernes, c'est des entreprises innovantes, c'est des entreprises où les employés, là, de façon générale, là, ils sont heureux, ils sont bien traités, où ils apprécient une industrie comme celle-là. Alors, d'entendre ces gens-là nous dire : Mais il y en a d'autres, solutions, il y a d'autres façons de faire, il y a autre chose que ce qui est présenté, dans le projet de loi, par le ministre, qui peut arriver aux fins du ministre... Si les fins désirées par le projet de loi du ministre, c'est de réduire les méfaits sur la santé publique des Québécois et des Québécoises, il y a peut-être, peut-être, d'autres façons d'y arriver. Puis, si c'est vrai, ce qu'ils nous disent, tant mieux, puis, si ce n'est pas vrai, je suis certain que leur argument aurait croulé sous les questions du ministre délégué à la Santé, M. le Président, mais on n'a pas eu cette opportunité-là de voir le fond de leur pensée.

Mais moi, j'aimerais ça, nous, on aimerait ça, du moins de notre côté, je ne sais pas ce que les autres oppositions en pensent, je ne sais pas ce que la partie gouvernementale en pense, mais j'ai une petite idée, parce qu'initialement ils avaient refusé de les entendre, mais il me semble que d'entendre ces groupes-là, ça nous permettrait à tout le moins d'avoir un argument sur la bonification potentielle du projet de loi au cours des prochaines heures, au cours des prochains jours. Hein, on va se pencher... et on est, là... Ici, là, collectivement, là, on est l'Assemblée nationale du Québec, on est la Commission sur la santé et des services sociaux de l'Assemblée nationale du Québec. S'il y a du monde qui devrait prendre leur job au sérieux, c'est bien nous autres. S'il y a du monde qui devrait savoir que les décisions qu'ils prennent vont avoir un impact sur la santé, la santé publique des Québécois et Québécoises, c'est bien nous autres. Mais il me semble que la moindre des choses, ce serait de faire la job comme monde puis d'entendre ce que le Conseil de transformation alimentaire du Québec a à dire.

Maintenant, M. le Président, le Barreau du Québec. On peut avoir ici, là, dans cette commission parlementaire ou à l'Assemblée, dans le salon bleu, là, on peut avoir des discussions, vous le savez, M. le Président, qui, une fois de temps en temps, contiennent une petite teinte de partisanerie. Hein, ça nous arrive une fois de temps en temps. C'est vrai, hein? C'est vrai. Moi, je l'admets, vous l'admettez, je n'en ai aucun doute, bon. Mais le Barreau du Québec, M. le Président, s'il y a un organisme, là, qui, selon moi, ne fait pas bien, bien de partisanerie, hein, je ne pense pas qu'ils sont reconnus pour leur grand esprit caquiste, leur grande tangente libérale, leur penchant solidaire ou leur histoire péquiste, là, moi, je pense que le Barreau du Québec, en point de vue d'organisme non partisan, il est pas mal en haut de la liste, M. le Président. Alors, s'ils prennent le temps de nous écrire un mémoire puis de nous dire, M. le Président... Ils n'ont pas juste dit : Faites attention, là. Ils ont vraiment dit, M. le Président, ils ont vraiment dit qu'il y avait des enjeux majeurs qui pourraient survenir suite à l'adoption du projet de loi, que la loi, elle est susceptible d'être contestée sur la base d'une discrimination fondée sur l'âge, tant en vertu de la Charte canadienne des droits et libertés que la Charte des droits et libertés de la personne.

Je le sais, M. le Président, que le gouvernement ne semble pas se préoccuper de l'impact de sa législation sur les chartes canadiennes et les chartes québécoises des droits et liberté, on l'a appris au cours des dernières semaines, mais de savoir, de savoir, M. le Président, qu'il y a un risque important, qu'il y a un risque important d'invalidité de cette loi-là, de l'entendre des gens qui sont aussi sérieux que le Barreau du Québec et qu'on ne prenne même pas le temps de leur poser une question ou deux, savoir que cette loi-là pourrait être contestée, que cette loi-là pourrait être invalidée... Et ça, là, c'est le seul avis juridique que, collectivement, on a entre les mains. Peut-être que vous en avez un autre, M. le ministre, mais, collectivement, là, c'est le seul qu'on a, et ils nous font une sérieuse mise en garde. J'aimerais ça être capable de dire au Barreau : Expliquez-nous pourquoi. Pourquoi vous pensez qu'il y a un sérieux risque d'invalidité constitutionnelle? Tantôt, je vais demander au ministre pourquoi — je vous le dis tout de suite, préparez votre réponse — il ne pense pas qu'il y a un sérieux risque d'invalidité juridique. Mais il me semble que la réponse du ministre, ça va être une chose. J'aurais aimé ça, avoir la réponse du Barreau pour me donner l'autre point de vue, parce que le Barreau nous dit, M. le Président : «[Il faut] qu'il y ait une proportionnalité entre l'effet bénéfique de la règle [...] et l'effet préjudiciable sur [le droit garanti].» Le droit garanti, là, c'est qu'il n'y a pas de discrimination basée sur l'âge, que l'âge légal au Québec, c'est 18 ans. Alors, si on fait une discrimination, si on fait un préjudice, il faut qu'il y ait une garantie sur l'effet bénéfique. Et, jusqu'à maintenant, tout ce qu'on a entendu, tout ce qu'on a entendu des gens de la santé publique, tout ce qu'on a entendu des gens qui sont venus en commission parlementaire, tout ce qu'on a entendu de la recherche scientifique, et le Barreau nous l'a expliqué, mais les gens qui sont venus ici nous l'ont expliqué : il n'y a pas de garantie qu'il va y avoir un effet bénéfique de la loi du ministre. En fait, les gens de la santé publique nous ont dit qu'ils ne trouvaient rien de bon dans le projet du ministre. Quand on leur a demandé : Nommez une chose qui va améliorer la santé publique dans le projet de loi, c'était le silence radio, M. le Président.

Alors, c'est pour ça, c'est pour ça. Si le ministre prétend effectivement qu'il restreint le moins possible le droit qui est garanti par les chartes... mais, si le Barreau nous dit : Ce n'est pas le cas, ce projet de loi là, il y en a d'autres, alternatives, on n'est pas obligés de restreindre les droits, on peut parler de prévention, on peut faire autre chose, on peut faire des investissements, M. le Président, je ne comprends pas l'avenue qu'a prise le ministre. Et c'est pour ça qu'on a déposé une motion préliminaire, c'est pour ça qu'on veut entendre ces groupes-là. J'espère que ça va être bien reçu, M. le Président.

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup, M. le député, pour les explications. Alors, nous en sommes maintenant à la... Je vais céder la parole au ministre pour 30 minutes. Selon l'article 209, vous avez droit à 30 minutes pour répliquer, pour répondre ou répliquer.

M. Lionel Carmant

M. Carmant : D'accord. Merci beaucoup. M. le Président, j'entends clairement, là, que le projet de loi n° 157 a fait un départ d'étude assez importante et que tout le monde y a travaillé vraiment très fort. Je sens l'émotion derrière tout le travail qui a été mis dans ce projet de loi là, et je comprends les commentaires des différents porte-parole des différents groupes.

Il faut comprendre que notre point de vue en est vraiment un, là, de... je pense que l'angle qu'on prend pour ce projet-là est différent entre notre parti et le point de vue de ceux qui ont travaillé préalablement sur le projet de loi n° 157. Nous, vraiment, le cannabis, pour nous, c'est un problème de santé mentale qui est associé avec des complications chez les jeunes. Et, quand on parle des jeunes, on parle des jeunes adultes, oui, mais principalement, principalement, c'est chez les adolescents.

• (20 h 10) •

Tout le monde l'a entendu, ceux qui sont le plus à risque de complications, ce sont les adolescents qui consomment et qui consomment beaucoup dès un très jeune âge. On parle de 11, 12, 13 ans, là, tu sais. On ne parle pas de 18, 19, 20 ans. Je suis d'accord, ce sont des adultes, ce sont des adultes, mais il y en a qui consomment à 11, 12, 13 ans. Puis, en fait, les chiffres sont assez clairs. De ceux qui consomment à l'âge de 18, 19, 20 ans, les trois quarts ont commencé à consommer quand ils étaient adolescents. Tu sais, les chiffres sont clairs. 35 % consomment avant l'âge de 18 ans, 45 % consomment après 18 ans ou ont consommé un jour dans leur vie. Donc, clairement, le problème de consommation de cannabis en est un qui commence avant l'âge de 18 ans.

Maintenant, il faut se poser la question. Si on a à coeur la santé de nos jeunes, là, de tous nos jeunes, comment on va faire pour protéger les plus vulnérables? C'est cette question-là qu'on s'est posée de façon extrêmement sérieuse, là. Comment on va faire pour protéger nos plus vulnérables? Puis, si on regarde ce qui s'est fait ailleurs, là, on peut voir que la chose qui aide souvent, c'est d'éviter ce qu'on appelle la consommation par proximité. Donc, qu'est-ce que ça veut dire, la consommation par proximité? Puis pourquoi la santé publique n'en parle pas? C'est que la santé publique prend un peu ce virage, puis un peu comme vous, là, comme je vous entends tous parler, là, qu'avant l'âge de 18 ans, bien, on dirait que personne ne consomme, tu sais. Ça fait que, quand on met du cannabis légal à 18 ans, là, ça va protéger tout le monde.

Mais il y a une autre prémisse qu'il faut être d'accord, là, c'est qu'il n'y en a pas, de bon, il n'y en a pas, de bon cannabis. Tu sais, il y a du... les taux de THC qu'il y a dans le cannabis, là, même qu'on vend à la SQDC, c'est des taux significatifs, significatifs, là. On ne parle pas de 1,5 %, comme elle nous a dit, la dame... la Dre Gobbi, tu sais, qui était le taux progressif que l'on propose, là. Il n'y a rien qui part vraiment en bas de 10 %. Puis la majorité des produits, les produits les plus populaires, là, sont ceux qui sont à 18 %, 19 %, 20 %. Puis la logique derrière ça, c'est que, si on veut enlever les jeunes adultes du marché noir, il faut leur donner quelque chose qu'ils ont l'habitude de consommer et qu'ils consomment depuis qu'ils sont très jeunes, relativement jeunes, vous comprenez? Donc, c'est ça, la prémisse.

Donc, le bon THC... Oui, il n'y a pas de pesticides. Je suis d'accord, il n'y a pas de pesticides. C'est fait dans des endroits très sécuritaires, là. Ils portent des casques, tu sais, des masques, puis ils protègent leurs barbes, pas de bactéries, et tout ça. Oui, mais, quand on regarde les méfaits causés par le cannabisme, M. le Président, il y a juste une chose qui cause des gros méfaits, c'est la concentration de THC. Puis ce qu'on fait, là, c'est un peu la promotion du THC, tu sais. Donc, il faut faire attention à ce qu'on dit quand on parle de protéger nos jeunes et nos jeunes adultes, d'accord?

Maintenant, est-ce qu'il y a des données probantes qui vont nous dire 18 ans versus 21 ans? Tu sais, vous dites tous : Bien, le ministre est quelqu'un qui vient du monde scientifique, neuroscience, na, na, na. Tu sais, est-ce qu'il y a des données probantes? Alors, il y a une chose qui est claire, c'est qu'il n'y a personne qui n'a jamais étudié l'impact de consommer du cannabis à 18 ans versus consommer à 21 ans. Ce qu'on a, par exemple, ce qu'on a de disponible, par exemple, c'est deux pays, deux endroits où il y a eu des législations qui ont changé avant la nôtre, puis la chose à faire, c'est de vraiment utiliser ces endroits-là comme des exemples, et qui ont publié des données probantes sur ce qu'ils ont fait dans le passé. Le Colorado et l'Uruguay. Personne ne parle jamais de l'Uruguay parce que l'Uruguay a décidé de faire comme dans le projet de loi n° 157, de laisser l'âge à 18 ans, mais les données montrent clairement, là... Ils ont publié un seul papier, là, l'Uruguay, après l'introduction du cannabis, c'est que la consommation dans la population a augmenté à tous les âges. Puis, partout, ça va finir par arriver, l'augmentation de la consommation.

Tu sais, on a beau dire que, ah, les libéraux fédéraux nous ont imposé, na, na, na, tu sais, partout où ils ont introduit du cannabis légal, la consommation dans la population en général a toujours augmenté. Qu'est-ce qui fait que le Québec ne montrerait pas la même courbe? C'est sûr que, si on regarde à un mois, deux mois, trois mois, ça ne paraît peut-être pas tant. Mais déjà les derniers chiffres qui sont sortis la semaine dernière, là, on parlait de 37 % ont consommé dans la dernière année, bien, c'est déjà un petit peu plus. Est-ce que ça va se maintenir? On ne sait pas. Mais c'est déjà un petit peu plus. Puis ce qui arrive, c'est que c'est surtout les adultes, évidemment, qui supportent cette augmentation de consommation du cannabis, surtout les adultes, là, je parle... puis on va en parler, là, des caractéristiques de l'âge des consommateurs de la SQDC.

Moi, j'ai été très malheureux, tu sais, que la seule façon qu'on ait l'âge de la clientèle, c'est par le site Web, là, ceux qui consomment en ligne. Moi, je pense que ça aurait été quelque chose de responsable de notre société de demander, tu sais, d'avoir un profil d'âge, parce qu'ils sont cartés à l'entrée de toute façon. Donc, ce qu'on voit, c'est vraiment c'est cette population un peu plus vieille qui entraîne une augmentation, et c'est là que vient le danger de ce qu'on appelle la consommation de proximité.

La consommation de proximité, c'est ce qui fait que, par exemple, moi, j'ai 16 ans puis je me tiens avec du monde de 18 ans, puis cela fait que, parce qu'eux ils vont pouvoir aller s'acheter du cannabis, bien, moi, je vais être exposé ou j'ai un risque accru d'être exposé au cannabis, d'accord? Et c'est comme ça que ça arrive. C'est comme ça que ça arrive. C'est comme ça pour d'autres substances, vous le savez bien. Tu sais, on parle du marché noir, on parle de... comment elles s'appellent les marionnettes, là? Tito et Steve. Mais la réalité, là, c'est que nos adolescents, ils consomment plein d'autres produits, là. Ils ne consomment pas juste du cannabis. Donc, il faut les protéger le plus qu'on peut, le plus qu'on peut.

Puis là on a une chance incroyable, avec l'introduction de ce nouveau produit là, de légiférer de façon relativement stricte, une chance incroyable. Puis, comme vous le mentionniez tantôt, tu sais, on ne peut pas se... on l'a vu avec, par exemple, la fumée secondaire, tu sais, il faut vraiment essayer... Nous, on veut vraiment être très prudents, parce qu'on a dû légiférer, légiférer, légiférer. On a resserré les règles cinq fois à propos de la fumée secondaire pour être rendu là où on est. Puis, encore là, ce n'est pas un problème qui est résolu, là. Voyez ce qui arrive avec le vapotage, tout ça. Il faut vraiment être très prudent quand on fait ces lois-là et si on veut vraiment protéger nos jeunes.

Donc, je reviens aux deux expériences naturelles sur lesquelles on peut bénéficier, qui est celle du Colorado et celle de l'Uruguay. Alors, contrairement à ce qu'on a vu en Uruguay, quand on regarde l'expérience du Colorado, c'est là qu'on a vu qu'il y a eu une certaine stabilité dans la consommation chez les adolescents, même, peut-être, certains disent une petite baisse, là, mais, bon, avec aussi des règlements ou du moins de l'éducation qui a été plus proactive que ce qui a été fait jusqu'à présent.

Donc, avec 21 ans, oui, on n'a pas vu d'augmentation. Puis, tu sais, encore une fois, c'est par cette règle de consommation de proximité. Les Américains sont très conscients de ce phénomène-là parce qu'ils l'ont vécu dans le passé, et c'est toujours ce processus-là qu'ils ont utilisé, d'augmentation de l'âge de consommation légale, pour éviter l'augmentation de consommation chez les adolescents. Donc, eux, ils ont démontré que c'était efficace, et c'est vraiment la seule expérience qu'on a jusqu'à présent.

Maintenant, quant à ce qui est des différents groupes à inviter, là, je vais revenir au point que vous m'amenez, là, la motion préliminaire, moi, je pense que la liste des groupes a été négociée de bonne foi, là, entre les leaders. On est arrivé avec 23 groupes qui ont été invités. J'avoue que la température n'était pas idéale, là, mais les 16 qui sont venus l'ont fait de bonne foi. On les a écoutés. Les autres groupes ont eu la chance, et la plupart en ont profité pour déposer leur mémoire. Les deux groupes que vous nous mentionnez ont déposé leur mémoire. On les a tous bien lus, même certains l'ont relu récemment, et nous comprenons les avis qui sont inclus là-dedans.

• (20 h 20) •

Puis, pour le groupe de transformation alimentaire du Québec, je pense que la proposition qu'ils nous ont faite, tu sais, est valable. Mais déjà qu'on a de la difficulté à accepter qu'on aurait l'âge légal à 18 ans puis l'âge pour... pas consommer nécessairement, mais pour que la SQDC vende du cannabis, là, je pense qu'il faudrait comme voir ça, le problème comme ça, là, l'âge pour que la SQDC vende du cannabis à 21 ans, je pense que ça serait encore plus compliqué s'il fallait séparer CBD et THC. Et, comme on nous a dit également en commission parlementaire auparavant, c'est quasi impossible et inexistant, les produits purs en CBD. Mais encore une fois, tu sais, j'admire leur patience. Ils sont effectivement restés dans la salle. Ils voulaient, ils voulaient, ils voulaient. Mais, en tout cas... Mais on avait lu leur mémoire puis on comprend leur point de vue.

Ce qu'il faut dire aussi qui est important, c'est que, puis ça aussi, je pense que je vais amener ce point-là tout de suite, là, c'est que l'âge de la maturité en Amérique du Nord, là, on est tous adultes, en Amérique du Nord, à 18 ans, tu sais, moi, à ce que je sache, là, que ce soit Canada, États-Unis, Ontario, tout ça, puis il y a certains endroits où l'âge pour consommer du cannabis est différent : 19 ans au Manitoba, 21 ans aux États-Unis. Donc, c'est quelque chose qui est... c'est un concept qui existe, cette différence-là. Puis effectivement la plupart se sont basés sur ce qu'on appelle la cohérence, là. Si c'est tel âge pour l'alcool, ça doit être tel âge pour le cannabis. Si tu consommes une substance qui n'est pas bonne pour toi, bien, ça va être le même âge pour une autre substance qui n'est pas bonne pour toi. Mais, si on regarde, par exemple, le Manitoba, eux, ils ont fait un petit peu différent. C'est l'âge de 18 ans pour l'alcool puis c'est 19 ans pour le cannabis.

Puis, nous, ce qu'on voulait faire vraiment avec le projet de loi n° 2, c'est lever un drapeau, tu sais, lever un drapeau que le cannabis, bien, c'est peut-être un problème différent. Nous, on pense clairement, là, que c'est le produit qui cause le plus de méfaits à nos adolescents. Comme je disais l'autre fois, il n'y a personne qui se promène avec une caisse de 24 dans son sac à l'école, là, mais ce qu'il faut éviter, c'est que... c'est le cannabis qui leur cause du problème. Et c'est le cannabis non seulement qu'ils consomment quand ils sont adolescents, mais qui entraîne des problèmes quand ils sont adultes. Tu sais, on a entendu la psychose qui peut être multipliée de 40 % à 300 %. Le taux de dépression, la chercheure nous a dit qu'il y a 25 000 cas de dépression au Canada qui sont potentiellement liés à l'usage de cannabis quand ils étaient petits... quand ils étaient adolescents.

Il y a également le syndrome amotivationnel, tu sais, qui a un lien, mais qu'on ne comprend pas encore très bien, et puis qu'on a besoin de faire plus de recherche, là, pour essayer de comprendre, là. Puis tout le monde nous rapporte des histoires où ils connaissent quelqu'un, tu sais, qui allait bien, performait à l'école, puis, tout d'un coup, il y a eu un changement dans ses habitudes, puis, tout d'un coup, ses notes se sont mises à dégringoler, il a des difficultés, etc. Donc, tu sais, on se rend compte que c'est vraiment cette consommation chez les adolescents qui entraîne des problèmes quand ils sont à l'âge adulte.

Donc, c'est pour ça que, quand on parle de est-ce que c'est possible de mettre un âge différent, je pense qu'on a d'autres exemples qui sont là. Puis, en fait, je suis même très fier, parce que, si on regarde les plus récents sondages, on voit que les gens, spécialement les Québécois, se questionnent, tu sais, sur l'impact du cannabis. On voit que les Québécois en parlent avec leurs adolescents sur qu'est-ce que c'est, qu'est-ce que ça cause, le cannabis, quand ils vont consommer. On voit un certain vent de débanalisation. Tu sais, on devrait tous être fiers de ça, parce qu'on en a discuté tout le monde ensemble. Puis, comme vous le dites, des fois, on n'est pas d'accord, mais au moins on a relancé un débat qui était très important. C'est quelque chose qui était passé comme sous le radar. Puis je comprends que, oui, tous les travaux avaient été faits, puis toutes les régions, tout ça. Mais, quand même, je trouve que c'est vraiment important, ce qu'on a fait dans ces derniers mois.

Donc, c'est ça. Donc, pour le deuxième groupe, qui est vraiment le groupe du Barreau du Québec, bien, écoutez, ne soyez pas inquiets. Moi, je fais vraiment tous mes devoirs, là, tu sais. Je suis quelqu'un de très studieux, là, puis j'ai tout lu les documents qui ont été mis à ma portée. Les avis juridiques qui étaient dans tous les documents, je les ai lus, là. Donc, ça, c'est fait. Puis je suis, tu sais, convaincu qu'on est dans notre zone pour légiférer et que tout est correct. De toute façon, je pense que, dans le passé non plus, c'est clair que le Parti libéral n'a jamais déposé d'avis juridique, là, lors du projet n° 157. Puis, comme vous le savez, ça fait partie de la prérogative, là, que l'on a ici. Puis, comme vous dites, on a un document qu'ils ont déposé, donc on est capable, tu sais, de voir c'est quoi, leur opinion, et, encore une fois, il y a des choses qu'on a choisi de faire différemment. Comme on a choisi...

Puis, je pense, il ne faut pas en avoir honte, là, tu sais. On est la province... Tu sais, les gens disent : Ah! mais, tu sais, on est la province la plus stricte, là, tu sais. Mais je pense qu'on n'a pas à avoir honte d'être la province qui veut protéger le mieux ses citoyens, ses plus jeunes, ses plus vulnérables. Puis c'est pour ça qu'on est la seule province qui a décidé de choisir une société d'État, puis chapeau, là, pour mettre de l'avant le cannabis. On est la seule province qui a décidé qu'on ne pouvait pas faire, comment s'appelle... pousser du cannabis chez nous, tu sais? Chapeau, là, parce que ça allait créer d'autres problèmes. Puis, tu sais, on l'a vu récemment, avec le cannabis, les licences de médicaments, là, qui entraînent une surenchère, quasiment.

Et là on lève un drapeau sur l'âge de consommation. Moi, je pense que c'est dans la même lignée du message que les Québécois veulent entendre, que les Québécois sont soucieux de la consommation de cannabis à travers la province, dans toutes les régions de la province. Finalement, ce que je dirais, c'est que ça va me faire plaisir, au cours de, tu sais, des prochaines heures, semaines, jours, tu sais, je ne sais pas, là, de partager avec vous sur qu'est-ce qui nous motive, qu'est-ce qui me motive pour ce p.l. n° 2. Puis, encore une fois, nous, on l'a passé rapidement dans la séance parce que c'est un projet qui est très en lien avec la santé mentale de nos jeunes. Et ça, c'est un sujet qui est incontournable pour le gouvernement. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Provençal)  : Merci. Le député d'Hochelaga-Maisonneuve, représentant du deuxième groupe d'opposition, vous avez la permission d'intervenir sur la motion préliminaire.

M. Alexandre Leduc

M. Leduc : Merci, M. le Président. Je ne prendrai pas 30 minutes. Je ne voudrais pas qu'on se ramasse, dans quelques semaines, encore en train de discuter de tout ça. Cependant, je voulais juste vous dire que je vais voter en faveur de la motion. Je pense que c'est des groupes qu'il aurait été intéressant d'entendre. Et je salue la motion déposée par mes collègues de l'opposition officielle. On va voter pour peut-être dans quelques instants ou demain, on ne sait pas trop si on votera ce soir là-dessus. Merci.

Le Président (M. Provençal)  : Ça va? Je cède maintenant la parole au représentant du troisième groupe d'opposition, député de Jonquière, pour son intervention sur la motion préliminaire.

M. Sylvain Gaudreault

M. Gaudreault : Oui. Merci, M. le Président. Alors, la motion préliminaire déposée par le député de Papineau... pas Papineau, Pontiac, nous demande, conformément à l'article 244 du règlement, avant de procéder à l'étude détaillée, donc c'était le bon moment pour le faire, de procéder à des consultations particulières pour les groupes suivants : le Barreau du Québec, le Conseil de la transformation alimentaire du Québec.

Alors, c'est une proposition, je vous le dis tout de suite, là, qu'on va appuyer aussi. Et, tout à l'heure, vu que j'avais mal calculé mon temps, là, dans le deux minutes et quelques qu'il me restait, c'est à ça que je voulais arriver. C'est là-dessus exactement. Alors, c'est dommage que le député de Pontiac ne soit pas plus souvent d'accord avec nous, parce qu'on pourrait faire de grandes choses ensemble. Mais, bon, c'est quand même une forme de rapprochement. Mais là-dessus je suis favorable à ça pour différentes raisons. Je pense que le député de Pontiac l'a bien exprimé tout à l'heure, c'est vrai qu'il y a des gens de ces groupes qui ont été présents ici puis qui attendaient qu'on les invite à s'exprimer. Malheureusement, le gouvernement n'a pas voulu le faire.

 • (20 h 30) •

Et je dois dire que c'est quand même assez fascinant de voir que, sur un projet de loi aussi important pour le gouvernement, il veut peser sur l'accélérateur. Tu sais, c'est le projet de loi n° 2, là, ce n'est pas le projet de loi n° 824, là. C'est le projet de loi n° 2. C'est un projet de loi dont l'objectif a été mentionné, crié, chanté, qui a été mis en valeur de façon importante par la Coalition avenir Québec durant la campagne électorale. Ils en ont fait un projet de loi phare, étant le projet de loi n° 2. C'est le premier projet de loi dans le vaste domaine de la santé, on va dire, la santé publique. De toute façon, c'est porté par le ministre délégué à la Santé, donc ce n'est pas porté par le ministre de l'Économie, ce n'est pas porté par le ministre... un autre ministre, c'est porté par le ministre délégué à la Santé.

Donc, c'est un projet important, je pense qu'on peut s'entendre là-dessus, puis le ministre le plaide de lui-même, à l'effet que c'est un projet de loi important. Mais, quand ça vient le temps de consulter des organisations aussi importantes, qui ont des points de vue à nous communiquer, des points de vue aussi qui sont différents par rapport à ce qu'on a entendu, bien là c'est non, tu sais, c'est non. Puis on pèse sur l'accélérateur, on ne prend pas le temps de bien travailler, on pèse sur l'accélérateur pour adopter le projet de loi le plus rapidement possible. Ce que je comprends, c'est que le ministre veut absolument que ce soit adopté avant la fin de la session. Moi, contrairement au député d'Hochelaga-Maisonneuve, là, je n'ai pas de problème à passer plusieurs semaines ici, aucun problème, aucun problème, aucun problème. Je vois le député de Pontiac, je pense qu'il n'a pas de problème non plus, le député de... voyons, j'oublie le... de Marquette, mais le député de Notre-Dame-de-Grâce, le député de Viau aussi, nous sommes tous prêts à passer l'été ici, s'il le faut, pour étudier le projet de loi. Puis moi, je veux qu'on fasse un travail qui est responsable, mais, pour faire un travail qui est responsable, on va le faire correctement. Alors, ce n'est pas vrai qu'on va faire ça tout croche.

On a deux organisations, ici, qui ont émis des commentaires importants, le Barreau du Québec, le Conseil de la transformation alimentaire du Québec. Le Barreau, dans presque toutes les commissions parlementaires où il y a des projets de loi importants, on entend le Barreau. Moi, il n'y a pas beaucoup de commissions parlementaires, à moins que ce soit vraiment sur quelque chose plus de gestion courante ou qu'il n'y a pas d'intervention législative dans un projet de loi concernant des droits fondamentaux, on n'entend pas le Barreau, mais sinon, dès qu'il y a un projet de loi qui touche le moindrement des droits fondamentaux, qui touche le moindrement des règles juridiques, du droit nouveau, par exemple, ou quelque chose qui sort de l'ordinaire... Puis on s'entend qu'au Québec, là, faire une distinction sur la base de l'âge, ce n'est pas du droit courant, c'est quand même des choses extraordinaires, qui sortent du droit courant. Puis là le gouvernement refuse d'entendre le Barreau.

Alors, moi, je prends la parole du ministre, évidemment, quand il dit : Je suis un élève studieux et je lis tous les documents qui me sont soumis, les avis juridiques. Bien, moi aussi, je suis studieux. Ce n'est pas parce que je suis studieux que je ne veux pas entendre les représentants d'une organisation comme le Barreau qui nous envoie ses documents. Puis je veux bien le prendre au mot, le ministre, là-dessus, mais j'ai besoin quand même d'entendre des représentants du Barreau pour pouvoir confronter un peu les idées puis surtout entendre le ministre lui-même, ce qu'il aurait à répondre sur place aux représentants du Barreau quand il nous dit : Ah! moi, j'ai des avis juridiques que je ne suis pas obligé de vous déposer. On m'a soumis des avis juridiques. O.K., mais on pourrait le tester avec les représentants du Barreau.

Alors, moi, je pense que, ne serait-ce que là-dessus, ce serait important de les entendre. Puis, encore une fois, je ne comprends pas... Tantôt dans mes remarques préliminaires, j'ai fait souvent référence aux incohérences du gouvernement. Bien, il y en a une là aussi. Tu sais, c'est le projet de loi n° 2, c'est le premier projet en matière de santé, puis le gouvernement ne veut pas entendre une organisation aussi importante que le Barreau, qui soulève des drapeaux jaunes importants, voire des drapeaux rouges, sur un projet de loi comme celui-ci.

Donc, moi, je plaide pour qu'on puisse accepter la motion préliminaire déposée par le député de Pontiac, qu'on puisse aller plus loin, qu'on puisse également entendre, et questionner, et entendre leur réponse par rapport à ce qu'ils disent, et que le ministre pourra justement, de façon transparente, à micro ouvert, comme on dit, questionner le Barreau, questionner le Conseil de transformation alimentaire du Québec et se faire donner les réponses qui, s'il le veut, ne seront peut-être pas satisfaisantes, mais au moins on aura clairement devant nous les réponses du ministre.

Je pense que ça vaut la peine quand même de répéter... parce que, visiblement, ce que je comprends de la réponse ou de l'intervention du ministre tout à l'heure, en réponse à l'intervention du député de Pontiac, qui a proposé la motion préliminaire, ce que je comprends, c'est que le gouvernement va voter contre la motion préliminaire. Ça fait qu'on va au moins se servir du temps qu'on a ici pour rappeler un certain nombre d'éléments qui a été prononcé par le Barreau, qui a été proposé par le Barreau, parce que ce n'est pas tout le monde qui nous écoute ou tout le monde qui suit les travaux parlementaires qui vont avoir accès au mémoire ou qui vont prendre le temps de le demander, parce qu'il est déposé dans les documents de la commission, mais je pense que ça vaut la peine. Puis les gens vont comprendre pourquoi ça serait important de l'entendre ici, parce que, je le répète, ce n'est pas du droit courant qu'on fait là, ce n'est pas quelque chose d'habituel, on amène une distinction importante, dans la loi, concernant l'âge. Moi, je n'ai pas d'autre exemple au Québec où il y a cette distinction-là.

On a des distinctions sur, par exemple, le niveau de risque... Par exemple, le Code de la route, on a amené des distinctions basées sur l'âge, par exemple, sur la conduite avec des gens dans la voiture ou en état d'ébriété, évidemment, bon, ces choses-là, mais reliées à l'âge, mais ça n'empêche pas que tout le monde peut conduire un véhicule à partir de 16 ans ou à partir de... forcément à partir de 18 ans, mais il y a des distinctions sur l'âge. Autrement dit, on n'interdit pas la conduite du véhicule, mais on va y amener des interdictions, on va y amener plutôt des restrictions, voilà, c'est le terme que je cherchais, reliées, par exemple, à la conduite la nuit, limitée dans certaines circonstances pour lesquelles les risques sont plus élevés, par exemple quand il y a plusieurs jeunes qui prennent place dans la même voiture.

Ça, c'est des distinctions graduelles, donc ça passe le test des chartes. On n'a pas empêché purement et simplement des jeunes de conduire parce qu'ils sont jeunes, ce que le ministre fait par rapport au cannabis. On leur empêche de consommer un produit légal juste parce qu'ils ont en bas de 21 ans. On pourrait même discuter la base du 21 ans, parce que lui-même dit que l'impact du cannabis peut avoir des conséquences jusqu'à l'âge de 25 ans, bon. Donc, ce que je veux dire, c'est qu'on a trouvé une piste d'atterrissage raisonnable, qui permet de respecter les jeunes, pour la conduite automobile, tout en leur mettant certaines restrictions, puis ça passe le test.

Donc, je répète ce que je disais tout à l'heure. Quand je dis : Jasons de la possibilité, par exemple, d'avoir une gradation dans le THC, jasons de ça, le ministre, à date, il s'est toujours opposé à ça. Bien, ce serait une comparaison boiteuse, vous allez me dire. Peut-être, M. le Président, mais c'est la seule que je peux trouver avec une autre norme de la même nature dans des lois québécoises. Je ne vais pas puiser dans des exemples uruguayens ou dans des exemples du Colorodo, bien qu'ils peuvent nous alimenter, ces exemples-là. Puis c'est correct. Il faut regarder ce qui se fait à l'international. Mais, dans notre propre droit, nous avons des restrictions reliées à l'âge, mais qui ne sont pas totales. On ne dit pas à un jeune : Parce que tu es jeune, tu n'aurais pas un permis avant 21 ans. On dit : Parce que tu es jeune, tu vas pouvoir conduire comme tout le monde, mais, la nuit, tu vas avoir des restrictions, quand tu vas te promener avec plus de jeunes dans ta voiture, tu vas avoir des restrictions pour éviter les accidents de la route. Et souvent les statistiques démontrent qu'effectivement les accidents de la route sont plus élevés chez les plus jeunes.

• (20 h 40) •

Donc, même logique, toute chose étant comparable, par ailleurs, puis il faut faire attention, là, mais vous comprenez, je pense, ce que je veux dire, là. C'est qu'il faut être capable de justifier en soi, dans notre propre droit, de telles restrictions, qui ne sont pas banales. Quand on fait une restriction sur la... plus qu'une restriction dans le cas de la proposition du ministre, une interdiction sur la base de l'âge, on ne peut pas faire ça sur le coin de la table. Avec tout le respect que j'ai pour le gouvernement puis pour le ministre, j'ai l'impression et pas mal la conviction que c'est fait sur le coin de la table, parce qu'il refuse d'entendre, en commission parlementaire, l'institution la plus crédible pour venir nous dire : Attention! Vous êtes en train d'ouvrir une brèche importante dans des droits fondamentaux garantis par les chartes, notamment la charte canadienne. Je veux dire, ce n'est pas rien, M. le Président, ce n'est pas rien.

Donc, je pense que, ne serait-ce que pour ça, on devrait entendre le Barreau, le questionner là-dessus, entendre ce qu'ils ont à dire. Il pourrait exprimer, le Barreau, mieux que je ne le fais cette question de la distinction acceptable en vertu des chartes avec la comparaison, notamment, sur la conduite automobile. D'ailleurs, ils en parlent eux-mêmes, là. Ce n'est pas moi qui me suis réveillé la nuit en pensant à ça, là, c'est le Barreau lui-même qui en parle, de cette distinction pour la conduite automobile à la page 4 de son mémoire quand il nous dit : «Ce choix n'est...» Bon, c'est-à-dire le dernier paragraphe de la page 4 : «Le Barreau du Québec croit qu'une façon similaire de procéder permettra de mieux protéger les jeunes adultes, tout en limitant les impacts sur ceux qui consomment de façon responsable. Ce choix n'est pas sans rappeler les mécanismes mis en place pour les jeunes conducteurs afin de réduire le risque d'accident la nuit.»

Donc, on a au moins déjà des précédents sur lesquels s'appuyer au Québec pour une idée de gradation. Puis, en même temps que je vous dis ça, je ne vous dis pas que je suis nécessairement pour la gradation, je veux au moins qu'on en discute, je veux au moins qu'on soit capables d'en parler, je veux... Puis, en plus, là, je suis vraiment un bon gars, là, parce que je tends la main au ministre pour lui trouver une voie de passage pour un projet de loi dans lequel il s'est peinturé pas mal dans le coin. Il nous en fait une aujourd'hui avec sa proposition qui est sortie dans les médias, et moi, j'aimerais ça, entendre le Barreau pour qu'il vienne nous dire : Est-ce que ça pourrait être une autre voie de passage sur la question de la gradation de la consommation chez les jeunes? Je pense que, là-dessus, on pourrait jaser. Puis moi, j'aimerais ça, en savoir plus, mais je ne peux pas en savoir plus, puis les Québécois ne peuvent pas en savoir plus, puis les députés de l'opposition officielle puis du deuxième parti ne peuvent pas en savoir plus, puis les députés du gouvernement ne peuvent pas en savoir plus parce que le ministre refuse d'entendre le Barreau là-dessus. Puis je les sens plus compétents que moi pour parler là-dessus. Même si je trouve que je ne m'en sors pas si mal, ils sont quand même mieux articulés puis mieux outillés que moi pour nous en parler.

Donc, je le répète, considérant que c'est un projet de loi majeur du gouvernement, il a ouvert son mandat de quatre ans, le gouvernement, avec ce projet de loi, parce que c'est le projet de loi n° 2, donc c'est quand même quelque chose d'important, je pense que ça vaudrait le coup de ne pas faire les choses à moitié, parce que c'est quelque chose qui va marquer ce gouvernement. Alors, moi, je fais une mise en garde. Tu sais, moi, j'ai étudié en histoire, M. le Président. Donc, les historiens du futur qui vont analyser ce gouvernement vont dire : Bien, le deuxième projet de loi du gouvernement, là, c'est parce qu'en l'année de grâce 2018‑2019 ils ont restreint les droits fondamentaux des jeunes. Je pense que moi, j'aimerais mieux laisser ma trace dans l'histoire, comme gouvernement, avec autre chose.

Alors, au moins, entendons le Barreau pour venir nous dire quelque chose là-dessus, quelque chose là-dessus, parce que, sinon, on fait du droit sans avoir les fondements nécessaires, M. le Président. Puis moi, comme législateur, je ne suis pas à l'aise, je ne suis pas à l'aise de faire du droit comme ça, surtout qu'on a des alternatives, surtout qu'on a des alternatives. Avec l'exemple que le Barreau nous amène sur la conduite automobile chez les jeunes, c'est des alternatives qu'on pourrait examiner.

Ça fait que, là, on va le faire pareil. Quand on va arriver à l'étude des articles, on est là pour l'étude détaillée, on va le faire, mais on n'aura pas le point de vue du Barreau. On va être obligés de leur écrire ou de leur parler nous-mêmes derrière des portes closes, parce qu'on ne fera pas ça publiquement, tandis qu'ici ce serait public. On pourrait les questionner jusqu'à quel point la comparaison entre la conduite automobile et la consommation du cannabis, sur le plan de la gradation du processus pour aller jusqu'à une consommation totale, jusqu'à quel point ça, cette comparaison-là, tient la route, c'est le cas de le dire, tient la route et peut être comparable avec le cas qu'on a en l'espèce, c'est-à-dire le projet de loi n° 2 sur la consommation du cannabis. Je dis sur la consommation du cannabis parce que c'est essentiellement l'élément majeur qu'il nous reste sur le projet de loi.

Le Barreau ne nous dit pas que ça. Le Barreau va quand même sur d'autres éléments. Bon, il fait la comparaison en disant que «le choix de l'âge de 18 ans s'inspirait de l'âge légal fixé pour le tabac et l'alcool, des substances légales, mais contrôlées et dont les effets sont aussi nocifs que ceux du cannabis. C'est d'ailleurs l'âge fixé pour la majorité civile du Québec.» Il dit que c'est pour ça que, lors de l'étude du projet de loi n° 157, la Loi encadrant le cannabis, le Barreau du Québec avait accueilli favorablement la proposition qui était faite pour le 18 ans, parce que c'est la norme. C'est la norme. 18 ans, au Québec, c'est l'âge pour voter. Si les gens peuvent voter pour nous, là, les députés, ils peuvent consommer du cannabis, là. Je pense que ce n'est pas un choix plus... C'est un choix mature, c'est un choix important qui relève de la fixation de l'âge de 18 ans pour être majeur. Alors, c'est ce qu'ils nous disent, le Barreau.

Ils nous disent également... ils nous parlent un petit peu des risques de discrimination sur la base de l'âge, puis là je suis toujours à la page 2 de leur mémoire : «N'importe quelle fixation d'un âge minimal dans une loi est susceptible d'être contestée sur la base d'une discrimination fondée sur l'âge», en vertu des deux chartes, la charte canadienne puis la charte québécoise. Et c'est là qu'ils arrivent avec une mise en garde très, très, très importante : «Ce droit peut toutefois être restreint par une règle de droit fondée sur un objectif législatif important et dont la justification peut se démontrer dans le cadre d'une société libre et démocratique.» Ceux et celles qui ont étudié le droit savent très bien que cette règle existe depuis longtemps dans le droit canadien puis dans le droit québécois, dans la jurisprudence, dans la doctrine également des droits et libertés.

Bon, et là le Barreau nous dit : «Cela suppose qu'il existe un lien rationnel entre la règle de droit en cause et l'objectif législatif, que la mesure restreint le moins possible le droit garanti, et qu'il y a proportionnalité entre l'effet bénéfique de la règle pour la société en général et l'effet préjudiciable sur le droit garanti.»

Et là ils font une mise en garde importante, importante au gouvernement, le Barreau, les gens du Barreau. Ils nous disent, toujours à la page 3 : «Il reviendra donc au gouvernement de démontrer que l'âge choisi de 21 ans est justifié dans une société libre et démocratique en prouvant l'existence d'un lien rationnel entre cette règle et l'objectif législatif de la mesure, que celle-ci restreint le moins possible les droits garantis par la charte canadienne et qu'il y ait proportionnalité entre l'effet bénéfique de la règle pour la société en général et l'effet préjudiciable sur des droits garantis.»

Il faudrait que le ministre se prépare, parce que je vais lui poser des questions là-dessus, moi. Quand on va arriver aux articles concernant l'âge, là, je vais lui demander c'est quoi, le lien rationnel entre la règle des droits et libertés et l'objectif législatif du projet de loi n° 2 et que ça restreint le moins possible les droits garantis par la charte canadienne. Je vais lui demander, alors il faut qu'il se prépare, parce que ce qui va arriver, c'est que, le lendemain de l'adoption de la loi, on va se retrouver devant les tribunaux sur la base de la discrimination fondée sur l'âge.

Et là le Barreau continue : «Cette justification du lien rationnel entre la problématique», donc la problématique pour le ministre et pour le gouvernement, c'est le risque accru pour la santé de la consommation du cannabis chez les jeunes. Donc, le lien rationnel entre la problématique et la mesure, qui est de mettre ça à 21 ans, ça doit se faire sur la base de données scientifiques probantes.» Alors, on est en plein là-dedans.

Puis là le Barreau nous dit : «Plusieurs acteurs du domaine de la santé ont fait valoir qu'il n'existe actuellement aucune donnée scientifique permettant de déterminer un âge auquel la consommation de cannabis serait la plus sécuritaire. D'autres études tendent à démontrer qu'il existe un lien entre la consommation de cannabis et le développement du cerveau qui continue à se développer jusqu'à l'âge de 25 ans.»

Ça, c'est l'autre affaire. On en avait déjà parlé ici, puis on en a parlé aussi à l'adoption du principe, puis on en a parlé lors des consultations avec les autres groupes : Pourquoi 25 ans? Pourquoi 21 ans, c'est-à-dire, et pourquoi pas 25 ans? Parce que les études disent qu'ils peuvent avoir des... la consommation du cannabis peut avoir un impact sur le développement du cerveau, qui continue de se développer, ce cerveau, jusqu'à l'âge de 25 ans. Bon, ça fait que, là, le ministre a mis des coupons dans lesquels il y avait un âge, là, dans un chapeau, puis il a pigé, puis il a tombé sur 21 ans. Il aurait pu tomber sur 22. Il aurait pu tomber sur 19, trois quarts. Il aurait pu tomber sur 24 et demi. Puis il a tombé sur 21. Puis moi, je pense que le 21, en tout cas, je ne sais pas, on ne l'a jamais vérifié, mais c'était l'ancienne majorité dans les années, que moi, je n'ai pas connues, là, mais dans les années 60, là. Je me souviens, mon père s'est marié à 21 ans parce que c'était la majorité à 21 ans.

• (20 h 50) •

M. le Président, je ne veux pas imputer rien de vous, mais vous avez peut-être connu cet âge-là aussi, cette règle de droit du 21 ans, quand vous-même, vous étiez jeune, parce que c'étaient vos parents ou autres. Mais c'était l'âge. Ça fait que c'est comme resté un peu dans notre mémoire collective, tu sais. C'est comme un fond, là, qui est resté là, 21 ans. Ça fait que, là, tiens, le ministre avait un âge à fixer. Pouf! Il a dit : Dans les années 60, la majorité était à 21 ans? On va prendre 21 ans. Mais, en soi, à part d'avoir un vieux fond nostalgique du 21 ans, il n'y a pas de raison plus qu'une autre d'avoir 21 ans, parce que, quant à ça, là, le cerveau se développe jusqu'à l'âge de 25 ans. Ça fait que, donc, déjà là, là, par rapport à la mise en garde faite par le Barreau, on ne voit pas le lien rationnel. Ça fait que ça ne va pas bien. Ça ne va pas bien. Moi, j'aimerais ça, entendre le Barreau là-dessus. Mais le ministre, non, il ne veut pas. Il ne veut pas entendre le Barreau là-dessus. C'est juste le projet de loi n° 2 du gouvernement, c'est juste une mesure-phare de ce gouvernement qui va marquer l'histoire de ce gouvernement, puis il ne veut pas entendre le Barreau. Il ne veut pas, bon.

Puis là le Barreau continue à la page 3 : «Nous attirons l'attention sur les propos du groupe de travail fédéral sur la légalisation et la réglementation du cannabis — là, il cite les propos du groupe de travail :

«"Cependant, la science actuelle n'est pas définitive concernant l'âge sécuritaire pour la consommation du cannabis. Par conséquent, on ne peut pas se fier à la science actuelle seulement pour déterminer l'âge légal d'achat du cannabis."» Alors, ce n'est pas bête. Puis là c'est là que le Barreau arrive avec le coup de massue, le bat de baseball. Le Barreau dit : «...il existe un risque sérieux d'invalidité constitutionnelle si le gouvernement établit un âge minimal élevé de 21 ans en s'appuyant sur des études scientifiques qui ne sont pas concluantes, surtout qu'il existe, comme nous l'expliquerons plus loin, des mesures alternatives qui peuvent être employées pour réduire la consommation de cannabis chez les jeunes.»

Donc, c'est écrit noir sur blanc. Puis moi, je l'ai mis en fluo, en bleu, en plus, là, dès l'adoption du projet de loi, go, les poursuites en vertu de la discrimination, go, la contestation judiciaire sur la base de la discrimination fondée sur l'âge. Puis moi, là, j'aurais en bas de 21 ans, là, puis je me demande si ce n'est pas moi qui la partirais, la contestation, parce que ça me choquerait, comme jeunes, d'être considéré comme une classe à part. Moi, ça serait ça. Mais je serais négociable s'il y avait de la gradation dans le THB. Mais le ministre, il n'a pas encore ouvert la porte... J'ai dit le THB? Je voulais dire le THC. Le ministre n'a pas ouvert la porte encore à ça. Peut-être demain on va avoir une nouvelle. Peut-être que, demain, ça va être la poursuite du striptease législatif. On verra, M. le Président.

Donc, moi, je suis d'accord avec cette motion préliminaire du député de Pontiac pour entendre le Barreau du Québec. À la limite, là, on pourrait même s'entendre pour moins long. Vous montrer comment je... Parce qu'on faisait des consultations, je pense que c'était trois quarts d'heure par groupe. On pourrait dire une demi-heure si c'est juste une question de temps, là, qui fatigue le ministre, là. On est ouvert sur plein d'affaires, mais il faudrait que le ministre marque aussi une certaine ouverture sur d'autres choses. Donc, on pourrait faire des consultations plus courtes pour entendre le Barreau.

Ça me prendrait une autre demi-heure, M. le Président, pour parler du Conseil de transformation alimentaire du Québec, parce qu'on n'a pas pu les entendre non plus, malheureusement. Le Conseil de transformation alimentaire du Québec, il nous amène quelque chose qu'on n'avait pas vu ailleurs. Alors, c'est pour ça que ça serait intéressant aussi de les entendre. Ils nous parlent que «les produits alimentaires, les produits topiques et les extraits d'huile [de] base de cannabidiol seraient disponibles en vente directe entre les transformateurs et les détaillants. Parallèlement les produits à base de THC seraient contrôlés par la société d'État avec la création d'une direction similaire à la SAQ alimentation qui s'articulerait autour de la SQDC.» C'est une idée intéressante. Je ne vous dis pas que j'y adhère à la base, mais minimalement d'en parler... Et tout le volet transformation alimentaire, tout le volet des produits alimentaires à base de cannabis ou qui ont du cannabis, c'est quand même un... ça a été un peu l'angle mort des consultations. On ne l'a pas assez abordé.

Donc, moi, je suis d'accord pour ajouter le Conseil de la transformation alimentaire du Québec. Encore là, on pourrait s'entendre pour des auditions plus limitées. Si c'est une question de temps qui fatigue le ministre, là, on pourrait faire ça en 30 minutes, peut-être, là. On serait capable de s'entendre. Au moins avoir le temps d'échanger avec eux. À la limite, moi, ce n'est même pas ma propre intervention avec le Conseil de transformation alimentaire ou le Barreau du Québec qui m'intéresse, c'est d'entendre ce qu'ils vont dire au ministre, moi, c'est surtout ça, puis l'échange entre le ministre puis le Barreau, puis l'échange entre le ministre puis de Conseil de transformation alimentaire. Moi, j'ai appris une chose, là, depuis la 42e législature, je n'ai pas beaucoup de temps dans mes échanges avec les groupes dans les commissions parlementaires. Ça fait que j'aime autant, tant qu'à ça, me servir de ce moment-là pour entendre ce que le ministre a à dire et surtout ce qu'il va se faire dire par les groupes qu'on va entendre, parce qu'après ça, ça nous permet, nous, de nous éclairer comme législateurs, de faire un meilleur travail, un travail plus consciencieux, puis ça permet à la population également d'entendre davantage, là, les différents points de vue puis les différents éléments là-dessus.

On aurait pu en ajouter d'autres, là. On ne le fera pas, parce qu'on veut quand même avancer, mais on aurait pu en ajouter d'autres qu'on n'a pas entendus. Mais je trouve que le député de Pontiac fait preuve d'une suggestion raisonnable avec deux groupes, le Barreau du Québec et le Conseil de la transformation alimentaire, deux groupes qui ont des choses intéressantes à nous dire.

Alors, M. le Président, moi, ce serait là-dessus que j'irais. Je ne sais pas c'est quoi, la suite des réjouissances, là, pour cette motion. J'imagine qu'il y a d'autres députés qui vont vouloir s'exprimer puis je vais les entendre avec plaisir puis avec intérêt. Puis après on va voter. Et moi, je répète que je vais appuyer, là, la motion préliminaire du député de Pontiac. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Provençal)  : Merci, M. le député. Autres interventions? Le député de Marquette. Par contre, vous avez un bloc de 10 minutes.

M. Enrico Ciccone

M. Ciccone : Oui, oui, oui, merci beaucoup, M. le Président. Je ne passerai pas par quatre chemins. Je pense que mes collègues l'ont bien dit, moi, je pense sincèrement que ça a été un grand, mais un grand manque de respect envers plusieurs groupes, et notamment envers le public également, parce que le public a le droit de comprendre, le droit... Il y a du... membres du public qui nous regardent pendant les commissions parlementaires. Il y a des gens qui viennent lire le verbatim également. Il y a des gens qui veulent se faire entendre, surtout pour un sujet et un projet de loi qui a tellement d'importance, qui a tellement d'importance, qui peut avoir vraiment, là, des effets à long terme.

Encore une fois, je le répète, là, c'est un problème qui nous a été envoyé. C'est sûr que c'est le Parti libéral, le dernier gouvernement, qui a mis en place le projet de loi n° 157. Cependant, c'est un sujet, c'est un problème, je l'appelle ainsi parce que je ne changerai pas d'opinion sur le cannabis... Même le ministre en a parlé, justement, avec vigueur, avec vigueur et importance aussi. Vous parliez même d'un problème de pourcentage très élevé avant l'âge de 18 ans. Puis ça, c'était avant le 17 octobre 2018. Alors, c'est important d'être capable d'entendre le plus de spécialistes possible. 16 groupes seulement ont été entendus. C'est ce que je trouve vraiment dommage. Il y a un grand manque de respect pour l'industrie. On parle ici de psychose, on parle de dépendance qui peut se transformer sur des drogues dures. On l'a vu dans le mémoire du Barreau du Québec.

Puis, encore une fois, ce qui me dérange puis ce qui ne me passe pas à travers la tête, c'est qu'on demande à un scientifique de faire fi des recommandations scientifiques. Ça, ça me dérange un petit peu, parce qu'à la base du travail du ministre, avant d'être député, là, sa spécialité, c'était basé justement sur des recherches scientifiques. Peut-être qu'on serait moins durs envers lui s'il occupait d'autres fonctions, s'il n'était pas un spécialiste de la santé. Peut-être qu'on serait moins durs avec le ministre, honnêtement. Mais, en étant un spécialiste, tu dis : Franchement! Il faut être capable de considérer toutes les données puis il faut entendre le plus de gens possible. Puis je suis persuadé que le ministre, quand il faisait ses recherches, il ne prend pas la première étude. Il va en lire une deuxième, une troisième, une quatrième, une cinquième pour s'assurer... puis il va se faire une tête, il va se faire une tête puis il va amener ses recommandations lui-même.

• (21 heures) •

Durant les consultations particulières du projet de loi n° 157, M. le Président, il y a eu 63 groupes qui ont été entendus. 22 groupes dans cette commission ont voulu se faire entendre, qui n'ont pas été entendus. C'est sûr que nous, on a fait des demandes pour entendre des groupes, puis je ne les ai pas inclus, là, parce que peut-être qu'ils nous auraient répondu dans la négative. Peut-être qu'ils ne voulaient pas se faire entendre. Alors, moi, je pense que c'était important. Et je le répète, je réitère : C'est un manque de respect total envers les groupes qui auraient voulu se faire entendre, parce que c'est vraiment un dossier qui est chaud, un dossier qui est important et qui peut avoir des répercussions sur la santé de nos jeunes.

Mon collègue de Pontiac et mon collègue de Jonquière ont bien cité le mémoire du Barreau. Moi, ce que je vais faire, je vais me faire le porte-voix du Conseil de la transformation alimentaire du Québec. On n'a pas la décision encore du gouvernement, là, mais, si on se fie au passé, on croit comprendre qu'ils ne voteront pas pour.

Alors, je vais commencer la lecture du... au moins, ce groupe-là se fera entendre de ma voix : «Le Conseil de [...] transformation alimentaire du Québec est une consolidation des forces de l'industrie de la transformation alimentaire qui représente 11 associations sectorielles et plus de 550 entreprises membres. Le CTAQ regroupe 80 % du volume annuel d'affaires d'une industrie de 29 milliards de dollars par année et [...] près de 70 000 emplois directs.» 70 000 emplois directs, puis on n'a même pas été capables de prendre une heure avec eux autres.

 «Au cours de la dernière décennie, la fabrication d'aliments s'est distinguée par sa performance enviable sur le plan de la croissance de la productivité. Le CTAQ est actif dans la promotion et la valorisation des produits transformés ici, dans le déploiement et la recherche de nouveaux débouchés pour les produits transformés au Québec et au Canada, dans l'accompagnement auprès de ses partenaires gouvernementaux, dans l'accès au financement de la recherche et du développement, [...]dans l'identification des tendances.

«L'agroalimentaire et le cannabis.

«La filière agroalimentaire est souple, représentative et bien structurée pour répondre aux exigences qu'impose la mise en marché des produits alimentaires contenant du cannabis tout en développant une économie ciblée en respect de la santé et de la protection du public.

«La consommation du cannabis sous forme d'ingestion comporte une notoriété très élevée et mieux perçue que l'inhalation et est surtout perçue comme étant moins nuisible à la santé. Les consommateurs pensent souvent que manger des produits au cannabis est une façon plus saine et plus simple que de le fumer.

«Pour assurer la cohérence du message et coordonner les actions de l'industrie alimentaire, le CTAQ a créé un comité de travail qui a identifié les principaux défis qui se présenteront aux entreprises de transformation alimentaire dans l'intégration du cannabis comme ingrédient dans les produits alimentaires, dans les marchés médicaux et récréatifs. Les entreprises qui ont participé à cette première étape sont issues des secteurs de la boulangerie, des protéines végétales, de la confiserie, des boissons et des ingrédients.

«Contexte du p.l. n° 2.

«Dans la séance du 5 décembre 2018, le député de Taillon et ministre délégué [de] Santé et [...] Services sociaux — je vais nommer son nom parce que je cite — M. Lionel Carmant, a déposé à l'Assemblée nationale [un] projet de loi n° 2...» Puis là je vais passer cette place-là et je vais passer aux recommandations, la position de l'agroalimentaire :

«L'industrie de la transformation des aliments considère positivement la proposition du principe du p.l. n° 2 — comme mon collègue de Pontiac disait, ça vous avantageait, M. le ministre — quant à l'augmentation de l'âge à 21 ans uniquement pour des produits intégrant du THC et propose que soit maintenu à 18 ans l'âge de consommation des produits contenant du cannabidiol — CBD — dans le contexte réglementaire actuel.

«Aussi, l'industrie de la transformation des aliments souhaite un réseau de distribution séparé pour les deux produits. Ainsi, les produits alimentaires, les produits topiques et les extraits d'huile à base de CBD seraient disponibles en vente directe entre les transformateurs et les détaillants. Parallèlement, les produits à base de THC seraient contrôlés par la société d'État avec la création d'une direction similaire à la SAQ alimentation qui s'articulerait autour de la SQDC.»

Il me reste combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Provençal)  : À peine trois minutes.

M. Ciccone : Parfait.

«CBD.

«Selon l'Organisation mondiale de la santé, lors de la 40e réunion du Comité d'experts de la pharmacodépendance qui s'est tenue en juin 2018 au siège de l'OMS...» Je vais passer ce passage, parce que mon collègue en a parlé.

«Bien que la littérature indique que le CBD n'est pas un produit ayant une incidence négative sur la santé et n'est pas tributaire d'abus ou de dépendance, le CTAQ supporte, dans le contexte réglementaire actuel, le principe d'un âge minimum de consommation, et propose que l'âge prescrit pour la consommation du CBD sous forme alimentaire reste à 18 ans.

«Vente des produits alimentaires du CBD.

«Actuellement, il est possible de se procurer en vente libre des produits soulageant certaines douleurs comme des maux de tête et des douleurs liées à la migraine, des problèmes arthritiques, des maux de dos et des courbatures — mon Dieu, peut-être que je devrais en prendre, M. le Président. Les produits [domestiques] contenant uniquement du CBD ou avec un très faible pourcentage de THC — de 0,2 % — doivent être considérés comme des aliments fonctionnels qui ont des propriétés bénéfiques pour la santé. Tous les aliments fonctionnels — ...

Des voix : ...

M. Ciccone : ...s'il vous plaît...

Des voix : Ha, ha, ha!

M. Ciccone : ... — ont en commun ont un effet bénéfique sur une ou plusieurs fonctions du corps auxquelles ils s'adressent en particulier.» Il reste combien de temps, M. le Président?

Le Président (M. Provençal)  : 1 min 30 s.

M. Ciccone : 1 min 30 s. Parfait.

«THC.

«La volonté du gouvernement est claire [de représenter] les objectifs qu'il s'est fixés quant à l'augmentation [à] l'âge de consommation du cannabis. Les membres du Conseil de la transformation alimentaire du Québec se sont prononcés en faveur de l'augmentation de l'âge [de] 21 ans uniquement pour des produits intégrant du THC dans une perspective de santé publique et de sécurité.

«Selon l'organisation mondiale — OMS — le THC est considéré comme un produit créant des dépendances et est nocif pour la santé des individus.» Je vais passer aux recommandations de l'industrie :

«Que les produits alimentaires à base de CBD et ne contenant pas plus de 0,2 % de Delta-9-tétrahydrocannabinol puissent être disponibles en vente libre à partir de l'âge de 18 ans.

«Que la vente des produits alimentaires à base de THC et ne correspondant pas à la définition de CBD soit disponible aux individus à partir de 21 ans et soit encadrée par la société d'État sous une direction spécifique à l'alimentation.

«Que les entreprises de transformation des aliments utilisant du CBD et [...] THC dans leurs produits participent à l'élaboration de la campagne de sensibilisation des produits alimentaires à base de cannabis.»

J'espère que j'ai pu être la voix, justement, de la CTAQ, parce qu'on leur a refusé, justement, de venir s'exprimer ici, devant la commission. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Provençal)  : Merci, M. le député. À ce moment-ci, je vais demander s'il y a des gens, du côté du gouvernement, qui veulent s'exprimer sur la motion préliminaire. Non? Est-ce que... Oui. Alors, je vais céder la parole à Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce.

Mme Kathleen Weil

Mme Weil : Oui, je vais peut-être commencer par le dernier point puis, évidemment, revenir sur le Barreau. J'ai manqué les discussions au tout début, j'étais dans une autre commission parlementaire, mais on parlait apparemment de la réglementation, donc la réglementation qui s'en vient du gouvernement fédéral, mais qui va toucher le cannabis comestible.

J'ai compris que le ministre a dit : Bon, bien, on n'a pas besoin vraiment d'intégrer tout cet élément-là dans la loi, parce qu'on le fera par règlement, c'est-à-dire de refléter, faire peut-être des dispositions un peu miroir. Le problème avec un enjeu aussi profond, aussi important, avec des conséquences si importantes, il serait bien mieux... Je trouve un point de vente, là, pour le ministre, pour le convaincre d'écouter tant le Barreau que le Conseil de la transformation alimentaire. Ce serait le temps de les entendre, parce que j'ai écouté, donc, tout ce mon collègue de Marguerite-Bourgeoys a mentionné...

M. Ciccone : Marquette.

Mme Weil : Marquette, excuse-moi. Ça fait longtemps que je n'ai pas lu... bien, ça fait un certain temps que je n'ai pas lu leur mémoire, je vais le relire, mais ça touche des éléments où on pourrait poser des questions, parce que, quand on fait un règlement, il y a une consultation, mais ce n'est pas du tout pareil que lorsque les députés puissent poser des questions, etc. L'autre élément, c'est qu'on pourrait les contacter, voir leurs disponibilités, tout en continuant l'étude et garder cette option ouverte.

Moi, ce qui m'inquiète beaucoup, c'est l'aspect comestible qui s'en vient dans la réglementation fédérale. Et je pense qu'il serait... bien, on en parlera à un autre moment, mais, puisqu'on touche le Conseil de la transformation alimentaire, je ne sais pas comment nous, les députés, et comment tout le monde, on pourra décider de façon cohérente et sécuritaire, comment on va réagir, en fait, à la réglementation fédérale sans pouvoir avoir une consultation là-dessus, une consultation sous cette forme, c'est-à-dire... Donc, idéalement, on aurait reporté la loi, le projet de loi, pour intégrer les recommandations du fédéral, faire des dispositions qui vont le refléter. En tout cas, moi, je trouve ça risqué d'aller par une réglementation sans consultation. Donc, ça, c'est un point.

Alors, au moins, on pourrait les entendre ici, qui pourrait faire en sorte qu'on aurait les dispositions... au moins, le ministre aura entendu leur point de vue lorsque viendra le temps de faire la réglementation. Il y a une consultation qui est faite, c'est sûr, grand public, mais ce n'est pas la même chose que les entendre.

• (21 h 10) •

Alors, pour revenir évidemment au Barreau, le député de Jonquière et mon collègue de Pontiac ont fait de très bons arguments, très, très, très bons arguments, puis on revient là-dessus. Quand on a des projets de loi de ce genre, c'est sûr que l'autre projet de loi, on n'a pas pu entendre le Barreau, évidemment, c'était le projet de loi n° 21, et on a vraiment senti... heureusement qu'il y a beaucoup de grands juristes qui sont venus néanmoins, et la Commission des droits de la personne, donc c'était très bien. Et, pour ce projet de loi, le Barreau, ça aurait été vraiment l'organisation à entendre, parce que même nous, qui ont une formation juridique, on aurait poussé les questions plus loin, bien comprendre, ça aurait été important pour le ministre de les entendre, parce que la logique, comment dire, la logique judiciaire est très différente de la logique de la santé, ce n'est pas comparable. Et les arguments qu'on peut amener en santé, c'est logique, c'est cohérent, qu'est-ce qui est dommageable, qu'est-ce qui peut faire mal, etc., mais, en droit quand on vient brimer des droits, ou enlever des droits, ou amoindrir des droits, puis ici c'est tout le problème, c'est la discrimination basée sur l'âge, alors que, dans toutes les autres provinces, c'est cohérent avec l'âge de consommation d'alcool, donc que ce soit 19 ans ou... je pense que c'est 19. Il y a peut-être des provinces à 20 ans. Mais, en tout cas, c'est le même âge pour éviter toute discrimination. Donc, il n'y a pas une province... Et ça aussi, un tribunal va regarder cet élément-là, pourquoi est-ce que le Québec est allé dans un autre sens. Ils vont regarder tous les arguments, je peux même imaginer tous les arguments qui seront amenés devant les tribunaux là-dessus.

Donc, il faudrait les entendre parce que toute cette question... et c'est là aussi, je pense, que pas juste pour le ministre, mais tous les collègues, tous les collègues qui sont, beaucoup d'entre eux, à leur première — comment dire — expérience où l'opinion juridique vient... ou l'opinion du Barreau peut être extrêmement pertinente pour l'analyse du projet de loi, puis pouvoir faire leur propre tête par rapport à cette question de 18 et 21 ans, parce qu'il faut... c'est des règles jurisprudentielles qui ont été développées, au fil des années, par la Cour suprême qui sont appliquées à chaque fois, et c'est de prouver, lorsqu'on choisit la différence d'âge, 21 ou 18, c'est qu'il faut le justifier dans une société libre et démocratique et prouver l'existence d'un lien rationnel entre cette règle et l'objectif législatif de la mesure et que celle-ci restreigne, je répète ce que le collègue de Jonquière a cité, «le moins possible les droits garantis par la charte canadienne et qu'il y ait proportionnalité entre l'effet bénéfique de la règle pour la société en général et l'effet préjudiciable sur les droits garantis». Donc, ils vont mesurer le pour et le contre, la raisonnabilité. On peut limiter des droits en vertu de l'article 1 de la charte, mais il faut que cette limite... qu'il y ait cette proportionnalité entre l'effet bénéfique et, donc, la règle pour la société en général.

Bon, on revient aussi sur la base de données scientifique probante qui feraient en sorte qu'il y a un bénéfice pour ceux qui subissent l'interdiction, et il semblerait que ce qu'on a entendu, c'est très, très difficile de dire que, pour ce groupe particulier, entre 18 et 21, on serait capable de vraiment cibler les bénéfices en général. Ce n'est pas bon... Ce qu'on a compris du ministre et, je pense, de beaucoup d'experts, ce n'est tout simplement pas bon pour qui que ce soit. Donc, c'est, une fois de plus, spécifique par rapport au groupe qu'on cible, le groupe qu'on cible avec une discrimination essentiellement. Donc, ce n'est pas des preuves, ou des données, ou des recherches, des preuves scientifiques qui diraient que c'est nocif. Quel que soit le produit, de qualité ou moins de qualité, c'est nocif en général, bien, ça s'applique à tout le monde. Donc, ça ne viendrait pas appuyer l'argument du 18-21 ans, c'est-à-dire cette discrimination-là.

Mais, en tout cas, je répète ce que le député de Jonquière a dit : On n'est pas des spécialistes. Mais on entend tout ça, on a besoin de parler à des spécialistes, ça viendrait éclairer. Ça viendrait éclairer le débat public aussi. Et c'est vraiment inhabituel, pour ne pas dire extrêmement exceptionnel, moi, je n'ai jamais vécu, où le Barreau ne viendrait pas, honnêtement, pour quelque chose d'aussi important. Je ne l'ai jamais vécu en 10 ans dans un projet de loi qu'on n'ait pas consulté le Barreau. Le Barreau s'est désisté dans 21, mais le Barreau était parmi ceux qui étaient invités. C'est juste trop important.

Et tout ce grand débat sur le cannabis qu'on le veuille ou non, on est là-dedans. Donc, on veut s'assurer qu'on réussisse le mieux possible. Et tout est possible. Tout est possible dans les mesures qu'on va prendre concernant... L'aspect néfaste, il n'y a rien qui peut empêcher des gens de devenir, c'est-à-dire par un projet de loi, alcooliques, ou dépendants des drogues, ou quoi que ce soit, des mauvaises habitudes de vie. Ça, c'est des problèmes de société très généraux, et on lutte contre ces choses-là par d'autres manières très stratégiques, par des mesures précoces, par l'encadrement, l'éducation à l'école, etc. Mais rarement est-ce qu'une interdiction, certainement entre quelqu'un qui a 18 ans ou quelqu'un qui a 20 ans ou 19 et quelqu'un qui a 21, aussi ciblée que ça qu'on aurait un résultat qui serait miraculeux et qui ferait en sorte : Ah! bien, voilà! On a vraiment fait en sorte de protéger les 18 à 21 ans. Parce qu'on connaît la réalité. On le vit depuis longtemps, on le vit depuis longtemps, et ça commence peut-être assez jeune, bon, comme on l'a entendu.

Donc, je pense que ce qu'on a entendu, et c'est peut-être un peu le gros bon sens, c'est que c'est beaucoup d'autres mesures et c'est un paquet de mesures, c'est un bouquet de mesures, qui vont faire en sorte d'améliorer nos chances de protéger les jeunes et d'instaurer chez eux leur propre, comment dire, protection. C'est-à-dire qu'ils vont développer les bons instincts pour se protéger.

Le Président (M. Provençal)  : Merci beaucoup, Mme la députée.

Mme Weil : Ça complète les...

Le Président (M. Provençal)  : Oui, vous venez de compléter votre 10 minutes.

Mme Weil : Merci, M. le Président.

Le Président (M. Provençal)  : À ce moment-ci, s'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix. Est-ce que la motion préliminaire est adoptée?

M. Fortin : Je veux juste peut-être... J'ai compris le point de vue du ministre puis je ne connais pas la procédure autour de ça, là. Je vais vous demander une question là-dessus, là. Moi, je serais prêt à même à amender la motion préliminaire, là, si ça se fait, s'il le faut, là, pour dire, à la limite, là...

Le Président (M. Provençal)  : Je suis obligé de vous dire, selon les règles de l'Assemblée nationale, on ne peut amender une motion préliminaire.

M. Fortin : O.K. Mais... O.K. C'est correct, là, pour le texte, là. On se comprend, là. Mais, si vous me permettez 30 secondes juste pour qu'on puisse échanger, là, moi, je serais prêt même à dire... Si le ministre ne veut pas qu'on attende, parce que j'ai compris qu'il était en défaveur de la motion, là, c'est correct, mais, s'il ne veut pas qu'on attende, moi, je serais prêt à dire : Bien, pourquoi est-ce qu'on ne commence pas l'étude article par article, quitte à ce que, demain matin, on prenne le téléphone, on appelle ces groupes-là puis, quand ils seront disponibles, là, on prendra une petite pause, on les écoutera puis on reviendra à l'étude article par article.

La dernière chose qu'on veut faire, c'est ralentir les travaux de la commission. Alors, si vous préférez le faire comme ça, moi, je n'ai aucun problème avec ça, qu'on procède de cette façon-là. Comme ça, on pourra continuer nos travaux, commencer l'étude par article, même s'il va nous manquer quelques petits bouts d'information, là, puis, après ça, entendre les groupes qu'on voudra, si ça fait l'affaire du ministre.

Le Président (M. Provençal)  : Alors, je vous ai laissé vous exprimer, puis ça m'a fait plaisir. Maintenant, je reprends ma question : S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder...

M. Gaudreault : ...question de règlement de mon côté aussi, juste parce que je suis moins familier avec les motions préliminaires, là. Est-ce que c'est juste le député qui la propose qui ne peut pas l'amender ou un député autre...

Le Président (M. Provençal)  : En aucun temps, M. le député de Jonquière, on ne peut amender une motion préliminaire. Alors, c'est pour cette raison... Je ne fais simplement que respecter le règlement de l'Assemblée nationale.

M. Fortin : C'est bon. On est nouveaux. Pas de trouble, M. le Président.

Mise aux voix

Le Président (M. Provençal)  : Alors, je répète : S'il n'y a pas d'autre intervention, nous allons procéder à la mise aux voix. Est-ce que la motion préliminaire est...

M. Fortin : ...par appel nominal, M. le Président?

Le Président (M. Provençal)  : On peut procéder par appel nominal. Mme la secrétaire.

La Secrétaire : M. Fortin (Pontiac)?

M. Fortin : Je suis pour.

La Secrétaire : Mme Weil (Notre-Dame-de-Grâce)?

Mme Weil : Pour.

La Secrétaire : M. Ciccone (Marquette)?

M. Ciccone : Pour.

La Secrétaire : M. Benjamin (Viau)... pardon. M. Carmant (Taillon)?

M. Carmant : Contre.

La Secrétaire : M. Thouin (Rousseau)?

M. Thouin : Contre.

La Secrétaire : Mme Picard (Soulanges)?

Mme Picard : Contre.

La Secrétaire : Mme Jeannotte (Labelle)?

Mme Jeannotte : Contre.

• (21 h 20) •

La Secrétaire : Mme Guillemette (Roberval)?

Mme Guillemette : Contre.

La Secrétaire : Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac)?

Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) : Contre.

La Secrétaire : M. Tremblay (Dubuc)?

M. Tremblay : Contre.

La Secrétaire : M. Leduc (Hochelaga-Maisonneuve)?

M. Leduc : Pour.

La Secrétaire : M. Jonquière (Gaudreault)?

M. Gaudreault : L'inverse.

La Secrétaire : M. Gaudreault (Jonquière)? Pardon, je m'en excuse.

M. Gaudreault : Pour.

La Secrétaire : M. Provençal (Beauce-Nord)?

Le Président (M. Provençal)  : Abstention.

La Secrétaire : Motion rejetée.

Le Président (M. Provençal)  : Alors, la motion est rejetée.

À ce moment-ci, je me dois de demander : Est-ce qu'il y a, à cette étape-ci, est-ce qu'il y a un député qui souhaite déposer une nouvelle motion?

M. Fortin : Une motion préliminaire, vous voulez dire, M. le Président?

Le Président (M. Provençal)  : Oui, une motion préliminaire, excusez-moi.

Étude détaillée

S'il n'y a pas de motion préliminaire, nous allons maintenant débuter l'étude article par article.

M. Fortin : M. le Président, à l'article 245, si je peux l'invoquer, M. le Président, à moins d'indications contraires, là, conformément à l'article 245 de notre règlement à tous, nous demandons à ce que le projet de loi soit étudié article par article, alinéa par alinéa et paragraphe par paragraphe.

Le Président (M. Provençal)  : Vous avez... c'est conforme à ce que vous demandez. Alors, ça va être fait dans l'ordre que vous avez spécifié en lien avec l'article 245.

Alors, je prends en considération l'article 1 du projet de loi. M. le ministre, la parole est à vous. Je vous invite à lire l'article 1 et à donner quelques explications.

M. Carmant : D'accord. Merci beaucoup, M. le Président. Donc, article 1 du p. l. 2. L'article 4 de la Loi encadrant le cannabis (chapitre C-5.3) est modifié :

1° par le remplacement, dans le premier alinéa, de «un mineur» par «une personne âgée de moins de 21 ans»;

2° par l'ajout, à la fin du deuxième alinéa, de la phrase suivante : «Il en est de même de la personne âgée de 18, 19 ou 20 ans qui contrevient aux dispositions du premier alinéa en ayant en sa possession dans un lieu public une quantité totale de cannabis équivalant à 30 grammes ou moins de cannabis séché selon l'annexe 3 de la Loi sur le cannabis (Lois du Canada, 2018, chapitre 16), en ayant en sa possession du cannabis dans un lieu autre qu'un lieu public ou en donnant du cannabis.»;

3° par l'ajout, à la fin, des alinéas suivants :

«Dans une poursuite intentée pour une contravention au présent article, il incombe au défendeur de prouver qu'il était alors majeur ou âgé de 21 ans ou plus, selon le cas.

«Aux fins du présent article et des articles 6 et 7, l'expression "lieu public" a le sens que lui donne la Loi sur le cannabis.»

La loi vise donc particulièrement à protéger la santé et la sécurité des jeunes. C'est dans cette optique que l'article 1 du projet de loi modifie l'article 4 de la Loi encadrant le cannabis. L'article 4 est celui qui prévoit l'interdiction pour un mineur de posséder du cannabis ou d'en donner ainsi que l'infraction qui se rapporte à ces actions.

Premièrement, l'article 4 est modifié pour prévoir qu'il est interdit à une personne âgée de moins de 21 ans de posséder ou de donner du cannabis.

Deuxièmement, il est modifié pour ajuster l'infraction aux personnes âgées de 18, 19 ou 20 ans.

Enfin, l'article est modifié par l'ajout de deux alinéas. Le premier alinéa introduit un renversement du fardeau en matière de preuve de l'âge pour faciliter l'application de l'article. Le deuxième alinéa définit ce qu'est un lieu public au sens de la loi, c'est-à-dire que l'expression a le sens que lui donne la Loi sur le cannabis fédéral. La définition se trouvait auparavant à l'article 6, mais est ici ramenée à l'article 4, qui introduit le concept de lieu public. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Provençal)  : Ça va? Je vais vous céder la parole... Ah! excusez-moi, le député d'Hochelaga-Maisonneuve aurait une question.

M. Leduc : En fait, on aurait un amendement à déposer.

Le Président (M. Provençal)  : Bien, en fait, je peux permettre la présentation d'amendements, effectivement, mais, avant qu'il y ait la discussion de l'article, ça dépend toujours... On avait dit qu'on y allait... Je sais que vous aviez annoncé que vous auriez des amendements à déposer. La partie gouvernementale, elle, en introduction, a déjà déposé l'ensemble de ses amendements. Il a été mentionné par les autres groupes d'opposition qu'éventuellement il y aura des amendements qui vont être déposés. À ce moment-ci, je peux permettre la présentation, en lien avec l'article 196 et 197... je pourrais permettre la présentation d'un premier — excusez-moi, l'heure fait son oeuvre — d'un amendement, mais ça va prendre un dépôt écrit, et on fera une copie pour tout le monde.

M. Fortin : Bien, M. le Président, je ne sais pas, peut-être qu'on peut prendre une minute, là, peut-être hors micro, juste pour s'entendre sur la façon qu'on voudra déposer les amendements. Tu sais, on peut le faire tout de suite, là, en partant, ou on peut le faire au fur et à mesure, commencer à débattre de l'article 1, puis, quand le sujet viendra... je ne sais pas c'est sur quel sujet, là, l'amendement du député d'Hochelaga, mais c'est large, l'article 1. Donc, tu sais, moi, j'aurais des concepts à introduire sur l'article 1 puis je suis certain que, quand on y arrivera, il y aura peut-être un moment, ou on peut le faire d'entrée de jeu. Mais il faut quand même débattre de l'article 1 avant de débattre de l'amendement.

Le Président (M. Provençal)  : On va débattre de l'article 1 parce qu'on se doit de permettre le débat sur l'article, effectivement. Ça, vous avez parfaitement raison.

M. Fortin : Mais, si les amendements du député sont prêts puis il veut les déposer, mais on débat quand même de l'article 1 puis, plus tard, on arrivera à son amendement, moi, je n'ai aucun problème avec ça, là, si ça convient, là.

Le Président (M. Provençal)  : Mais ma compréhension des choses, M. le député de Pontiac, c'était que l'amendement portait sur l'article 1... qui était déposé. Alors, c'est pour cette raison que je le jugeais recevable à ce moment-ci.

M. Leduc : Ça va?

Le Président (M. Provençal)  : Oui.

M. Leduc : O.K. Alors, on a des copies. Voulez-vous que je le lise en premier? On le distribue avant?

Le Président (M. Provençal)  : Vous allez distribuer les copies, puis après ça on pourra en...

M. Leduc : Parfait.

Le Président (M. Provençal)  : ...pour que les gens puissent en prendre connaissance.

(Consultation)

Le Président (M. Provençal)  : Alors, est-ce que tout le monde a une copie de l'amendement? Non? Excusez-moi. On va vous en donner une. Et je vous invite à en laisser une supplémentaire pour le député de... Vous en avez une supplémentaire, au cas où? Très bien. Alors... député...

M. Leduc : Alors, vous me pardonnerez, M. le Président, s'il y a des problèmes d'écriture ou s'il n'est peut-être pas à la bonne place, là, on est aussi dans nos premières études détaillées, ici, de notre côté. Je vais vous le lire, puis on verra bien s'il est recevable ou s'il faut y faire des modifications.

Le Président (M. Provençal)  : Oui. Vous en faites la lecture, s'il vous plaît.

M. Leduc : Alors, l'article 1 du projet de loi resserrant l'encadrement du cannabis, qui modifie l'article 4 de la Loi encadrant le cannabis, est modifié par l'ajout au premier alinéa, après «cannabis», de «autres que celui vendu à la SQDC et contenant plus de 10 % de THC et contenant un minimum de CBD, dont la teneur sera déterminée par règlement suite à la consultation du gouvernement d'un comité d'experts indépendants de l'industrie, et qui excède 10 grammes de cannabis séché ou son équivalent sous d'autres formes» et par le remplacement, au deuxième alinéa, de «30 grammes ou moins» par «11 grammes et plus».

Le Président (M. Provençal)  : ...en train de... s'il n'y a pas...

M. Leduc : Là, on a peut-être confusion avec alinéa et paragraphe, là. On n'est pas certains si on l'a bien rédigé, là. On peut peut-être prendre une pause pour clarifier ou, en tout cas...

Le Président (M. Provençal)  : ...compte tenu de l'heure, on... Notre séance se termine à 21 h 30. Écoutez, compte tenu de l'heure, on va suspendre... ajourner, excusez-moi, les travaux, de façon sine die. Mais, en même temps, nous, ça va nous permettre... ça va nous donner du temps pour tout revalider certaines choses lorsqu'on va reprendre. Est-ce que ça vous convient à tout le monde?

M. Leduc : Oui, merci.

Le Président (M. Provençal)  : Alors, je vous remercie beaucoup de votre collaboration.

Les travaux sont ajournés jusqu'à demain.

(Fin de la séance à 21 h 30)

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