Journal des débats (Hansard) of the Committee on Health and Social Services
Version préliminaire
42nd Legislature, 1st Session
(November 27, 2018 au October 13, 2021)
Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.
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Wednesday, November 6, 2019
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Vol. 45 N° 36
Order of initiative – The alarming increase in the use of psychostimulants in children and young people in connection with attention deficit hyperactivity disorder (ADHD)
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Intervenants par tranches d'heure
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Provençal, Luc
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Picard, Marilyne
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Blais, Suzanne
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Sauvé, Monique
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Provençal, Luc
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Sauvé, Monique
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Zanetti, Sol
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Gaudreault, Sylvain
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Guillemette, Nancy
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Tremblay, François
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Tremblay, François
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Provençal, Luc
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Guillemette, Nancy
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Blais, Suzanne
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Picard, Marilyne
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Sauvé, Monique
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Nichols, Marie-Claude
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Zanetti, Sol
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Gaudreault, Sylvain
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Provençal, Luc
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Picard, Marilyne
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Tremblay, François
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Blais, Suzanne
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Picard, Marilyne
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Blais, Suzanne
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Provençal, Luc
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Bachand, André
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Sauvé, Monique
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Zanetti, Sol
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Gaudreault, Sylvain
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Provençal, Luc
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Picard, Marilyne
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Bachand, André
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Blais, Suzanne
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Tremblay, François
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Sauvé, Monique
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Sauvé, Monique
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Provençal, Luc
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Zanetti, Sol
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Gaudreault, Sylvain
11 h (version révisée)
(Onze heures vingt-neuf minutes)
Le Président (M. Provençal)
: Bonjour à tous. Ayant constaté le quorum, je déclare la
séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je vous souhaite
la bienvenue et je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir
éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.
La commission est réunie afin de procéder
aux consultations particulières et auditions publiques dans le cadre du mandat
d'initiative concernant l'augmentation préoccupante de la consommation de
psychostimulants chez les jeunes et les enfants en lien avec le trouble
déficitaire de l'attention avec hyperactivité.
Mme la secrétaire, y a-t-il des
remplacements?
• (11 h 30) •
La Secrétaire
: Oui, M.
le <Président. M. Lafrenière (Vachon) est remplacé par
M. Bachand (Richmond); M. Benjamin (Viau)...
>
11 h 30 (version révisée)
<17829
Le
Président (M. Provençal)
:
...préoccupante de la consommation de psychostimulants chez les jeunes et les
enfants en lien avec le trouble déficitaire de l'attention avec hyperactivité.
Mme la secrétaire,
y
a-t-il des remplacements?
La Secrétaire
:
Oui,
M. le >Président. M. Lafrenière (Vachon) est remplacé par M. Bachand
(Richmond); M. Benjamin (Viau), par Mme Nichols (Vaudreuil); Mme David
(Marguerite-Bourgeoys), par Mme Sauvé (Fabre); M. Arseneau
(Îles-de-la-Madeleine), par M. Gaudreault (Jonquière).
Auditions
Le Président (M. Provençal)
:Merci, Mme la Présidente... Mme la
secrétaire, excusez. Nous entendrons, ce matin, les organismes suivants :
le Centre de psychoéducation du Québec et la Chaire de l'Université du Québec à
Chicoutimi-Cégep de Jonquière sur les conditions de vie, la santé, l'adaptation
et les aspirations des jeunes.
La première présentation se fera par
visioconférence, et on me signale que la personne ne peut nous voir, mais elle
nous entend très bien. Donc, comme spécifié précédemment, la première
présentation se fera par visioconférence. Je souhaite la bienvenue à la
représentante du Centre de psychoéducation du Québec. Je vous rappelle que vous
disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la
période d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite à vous
présenter et à commencer votre exposé. À vous la parole, madame.
(Visioconférence)
Centre de psychoéducation du Québec (CPEQ)
Mme Woods (Geneviève) :
Merci, M. le Président. Bonjour à tous. Est-ce que vous m'entendez bien?
Le Président (M. Provençal)
: Oui, on vous entend très bien.
Mme Woods (Geneviève) :
Alors, je suis heureuse d'être avec vous ce matin, merci. Alors, Geneviève
Woods, du Centre de psychoéducation du Québec. Je vous remercie tout d'abord de
m'accueillir à distance ce matin, le contexte étant que nous attendons
l'arrivée d'un petit bébé d'un moment à l'autre.
Alors, le Centre de psychoéducation du Québec,
notre rôle est de soutenir l'intervention auprès des enfants âgés entre zéro et
six ans. Donc, on soutient les professionnels, tant en milieu de garde qu'en
milieu scolaire, et, en fait, on s'inspire des meilleures pratiques de
recherche, qu'on vulgarise en personne, notamment via le groupe de recherche en
adaptation psychosociale. Et puis tout ce qui est vulgarisé en personne est
aussi accessible en ligne par le Centre d'excellence pour le développement des
jeunes enfants, via une plateforme Web, à laquelle vous avez accès dès maintenant,
qui s'appelle l'Encyclopédie. Alors, tout le contenu dont on va discuter aujourd'hui...
il y a un super beau chapitre sur le TDAH sur l'Encyclopédie déjà.
Je suis heureuse, et c'est un privilège,
de faire le point en petite enfance quant à la question du TDAH et la
médication au Québec. Je crois que vous avez reçu un document, je vous invite à
le consulter. Si vous allez à la page 2, où on parle du développement des
tout-petits, qui est un cerveau en explosion... en fait, c'est que je veux faire
le pont, tout d'abord, dans un premier temps, sur le développement normal du
cerveau. Alors, si vous aviez une animation complète, là, on verrait que le
cerveau qui se développe normalement va doubler de volume dans les trois
premières années de vie de l'enfant, jusqu'à se développer... jusqu'à l'âge de
25 ans. On se rend compte qu'en contexte de TDAH, au niveau des
structures, du volume, de la chimie, il y a des différences déjà qui
apparaissent à la petite enfance et qui se maintiennent dans le temps, tout
comme l'organisation des synapses et puis des réseaux qu'on travaillerait à la
petite enfance, mais aussi des différences en contexte de TDAH.
Si on va au PowerPoint suivant, où est-ce
qu'on voit des courbes… en fait, c'est qu'on dit qu'il y a des fenêtres de
continuité dans le développement normal où il est pertinent de travailler une
certaine sphère. On se rend compte que la raison, c'est une faculté qui se
développe beaucoup plus tard que les émotions, et c'est d'autant plus marqué en
contexte de trouble du déficit d'attention avec ou sans hyperactivité. Alors,
c'est important de s'adapter à ce contexte-là dans l'intervention qu'on va
prendre, avec ou sans médication.
À la prochaine diapo, je mets ici
l'emphase sur amener notre attention sur l'inattention. À rebours, quand le
diagnostic a été émis de déficit d'attention avec hyperactivité, hein, c'est
souvent à l'âge scolaire, bien, on se rend compte qu'il y a des traits qui
étaient déjà présents et observés à l'âge de deux, trois ans. Les éducatrices
en milieu de garde et éducateurs notent souvent les comportements
d'agressivité, des enfants qui mordent, de l'hyperagitation, des enfants qui
sont éparpillés. Puis, ici, je mets <l'emphase, parce qu'on se rend
compte avec le temps que... Est-ce que notre angle est bon de s'attarder
tant...
Mme Woods (Geneviève)T :
...
souvent, les comportements d'agressivité, des enfants qui mordent,
de l'hyperagitation, des enfants qui sont éparpillés, puis ici, je mets >l'emphase,
parce qu'on se rend compte avec le temps que... Est-ce que notre angle est bon
de s'attarder tant au développement des comportements prosociaux puis de
diminuer l'agressivité? Parce que ce que la littérature nous dit, c'est que
l'inattention est une variable de prédiction qui est très, très importante au
niveau de la réussite, la réussite dans la vie globale. Et puis, en fait, c'est
très clair qu'au niveau de déficit d'attention avec hyperactivité, il y a un
enjeu préoccupant au niveau de la réussite académique, mais on se rend compte
que ce n'est pas tant l'hyperactivité puis l'agressivité que l'inattention qui
a un impact plus tard.
Au mois de juin, l'année passée, si vous
allez à la diapo suivante, LaPresse a fait état des données
de notre collègue Sylvana Côté. On dit que, pendant 30 ans, les chercheurs
montréalais ont suivi un échantillon représentatif de la maternelle, que
l'inattention est le problème qui a le plus d'impact 30 ans plus tard,
que, contrairement à des troubles de comportement comme l'agressivité,
l'inattention mine autant les filles que les garçons... les enfants les plus
attentifs, les moins attentifs à la maternelle, mais on se rend compte qu'il y
a des impacts sur le conditionnement, dont sur les revenus, c'est moindre de
20 %, soit de 6 000 $ chez les gens qui ont un diagnostic versus
ceux qui n'en ont pas.
À la diapo suivante, il y a une
persistance, hein? Donc, les faits qu'on observe sur la petite enfance, il y a
une persistance qui continue à l'adolescence et puis à l'âge adulte, avec
d'autres problématiques qui sont très bien répertoriées : consommation de
substances et dépendances, comportements sexuels à risque, des grossesses
indésirables, des visites à l'urgence plus fréquentes, des infractions de la
route et éventuellement la criminalité, qui représentent tous de coûts pour la
population.
À la diapo suivante, quand on se retrouve
avec des enfants avec un TDAH à l'école, il y a un enjeu pour suivre le groupe.
Nos études nous démontrent que le trois quarts des enfants qui ont un TDAH,
surtout dans une classe qui est régulière, ils ont besoin de performer sans
nécessairement avoir la maturité affective ni les ressources disponibles,
notamment au niveau des ratios d'intervention. On se rappelle que toutes les
transitions, c'est des moments qui sont extrêmement perturbants pour les
enfants, qu'ils aient un TDAH ou qu'ils n'aient pas de TDAH et, chez ceux qui
ont un TDAH, ça exacerbe aussi ces symptômes-là.
Donc, ça peut amener des difficultés
d'adaptation qui sont plus importantes pour les enfants qui sont en contexte de
diagnostic puis qui perturbent plus la classe, et donc amènent aussi des
méthodes d'intervention qui sont préoccupantes. Pour les enfants qui ont des symptômes
qui persistent de TDAH, il y a souvent l'enjeu que les parents ont peut-être
compensé à la maison sans le savoir, puis là on se rend compte que l'enfant, on
a un réel besoin sur le plan de l'autonomie, la responsabilisation, la maturité
affective, etc.
Donc, qu'est-ce qu'on fait avec tout ça?
C'est sûr que la médication demeure une première ligne de
traitement — donc là, on est rendus à la diapo la médication, le
TDAH — c'est une première ligne de traitement. Elle est parfois
essentielle, on connaît bien son efficacité. Elle s'inscrit dans les meilleures
pratiques, en combinaison avec une approche qui est psychosociale, idéalement.
Malheureusement, il n'y a pas de recette magique, hein, quant à la médication,
tant chez les petits que chez les grands. Il y a une complexité des cas et des variabilités,
selon l'âge, le sexe, le tempérament qui devient la personnalité, le contexte
de vie peut changer.
À la diapo suivante, je pose la question
suivante : Est-ce qu'on attend que l'enfant soit plus mature ou est-ce
qu'on peut déjà agir tôt en prévention? Je le répète : Lorsque le
diagnostic qui est mis, souvent à l'âge scolaire, hé bien, à rebours, on se
rend compte que des traits étaient présents à la petite enfance. Ces traits-là
sont souvent associés à des difficultés sur le plan des fonctions exécutives,
notamment la mémoire de travail, l'audition, la flexibilité cognitive. Je vais
vous donner des exemples dans les prochaines minutes. On connaît déjà les
outils en prévention. Donc, d'agir en amont, à des fenêtres de temps, hein, des
fenêtres d'opportunité du développement du cerveau qu'on a vues en début de
présentation, sont très claires et où est-ce qu'elles sont... dans un contexte
de présence de symptômes, soit de doute ou de diagnostic d'un déficit d'attention
avec hyperactivité chez nos tout-petits.
• (11 h 40) •
Concrètement, qu'est-ce qu'on peut faire?
Au <niveau des stratégies, toujours dans la ... de jeu ou carrément
d'activités, hein, parce que c'est... Le mobile est le canal de développement
chez les enfants pour l'apprentissage. Ce qu'on va travailler chez nos tout
petits, c'est la même chose qu'on va travailler chez nos plus vieux à l'âge
scolaire : des habiletés de communication, développement de leur confiance
en soi...
Mme Woods (Geneviève)T :
...
au >niveau des stratégies, toujours en ramenant le jeu au
cœur de nos activités, hein, parce que c'est le mobile et le canal de développement
chez les enfants, puis d'apprentissage. Ce qu'on va travailler chez nos
tout-petits, c'est la même chose qu'on va travailler chez nos plus vieux à
l'âge scolaire : les habiletés de communication, développement de leur
confiance en soi, capacité à se faire des amis, entrer en relation, persévérer,
avoir le goût d'apprendre, bref, offrir une expérience qui est positive.
Nos recommandations, concrètement, sont en
trois axes. D'abord et avant tout, continuer de former les enseignants puis les
intervenants. Concrètement, ce qu'on veut dire... faire une formation, c'est
d'assurer une continuité entre la garderie et l'école au niveau de la
sensibilité, au niveau du soutien des jeunes dans leur ensemble et particulièrement
ceux qui sont en contexte de dépistage ou de diagnostic de TDAH. Faire
attention aux plus jeunes, qui, sans même avoir un TDAH, peuvent avoir une
maturité affective plus marquée que les autres et amener des symptômes qui sont
similaires à ceux du déficit d'attention et hyperactivité.
On se rend compte que, parmi les outils,
toutes les techniques de relaxation, de retour au calme, savoir s'arrêter, pour
tous les enfants, c'est bénéfique, et c'est d'autant plus marqué chez les
jeunes qui ont un TDAH. La littérature, elle demeure mince, sauf qu'on a beaucoup
espoir d'avoir des alternatives qui sont externes, notamment en passant par l'activité
physique aussi pour un bien-être global chez les enfants, particulièrement ceux
qui ont un déficit d'attention et hyperactivité.
Notre deuxième axe de recommandation,
c'est de communiquer à grande échelle des lignes directrices, qui sont très
claires...
Le Président (M. Provençal)
: Mme Woods...
Mme Woods (Geneviève) :
...et d'agir tôt.
Le Président (M. Provençal)
: Mme Woods, votre temps est écoulé. On va passer à la
période d'échange. Merci beaucoup. Nous allons maintenant commencer la période
d'échange. Mme la députée d'Abitibi-Ouest, s'il vous plaît.
M. Blais : Merci, M. le
Président. Mme Woods, merci pour la présentation. Est-ce que vous
m'entendez bien?
Mme Woods (Geneviève) :
Oui, bonjour.
M. Blais : Bonjour.
Alors, on parle de TDAH, on sait qu'il y a eu, depuis 20 ans, une augmentation
énorme diagnostiquée au niveau du TDAH. Est-ce que, selon vous, il y a des
facteurs de société, des irritants, l'alimentation... tout ça mis ensemble fait
que nos enfants... on va au plus court, on va voir le médecin, l'enfant est
agité, et on donne une médication. Selon moi... Avez-vous une solution?
Mme Woods (Geneviève) :
Je vois que votre question, elle est double. Dans un premier temps, vous vous questionnez
à l'égard des questions de société. Vous vous questionnez aussi à l'égard
de : Est-ce qu'il y a quelque chose qui a changé depuis 20 ans qui fait
qu'on a plus de cas?
Donc, dans un premier temps,
effectivement, on a une plus grande prévalence, on a une plus grande incidence.
Et puis on a aussi une meilleure connaissance, donc on plus d'outils, hein,
pour mieux comprendre les enjeux qui sont liés avec un diagnostic de déficit
d'attention avec hyperactivité. Donc, il y a comme une roue logique qui se crée
qu'on comprend mieux, on est mieux outillé, donc on est capable de dire :
Bon, bien, il y a peut-être plus de cas, O.K., alors que ces cas-là ont
peut-être été plus présents, même dans le passé, c'est juste qu'on était moins
outillé pour comprendre, donc on... moins bien, dans un premier temps.
D'autre part, à votre réflexion, est-ce
qu'il y a des enjeux de la société, vous avez même nommé des irritants, hein,
peut-être l'alimentation, etc. Bien, c'est sûr qu'il y a des enjeux qu'on dit
environnementaux qui peuvent interférer avec l'apparition et surtout
l'exacerbation des symptômes. Donc, ce que je veux dire concrètement, c'est
qu'on sait très bien que, par exemple, un enfant qui est issu d'une famille où
est-ce qu'il y a un cadre chaleureux affectif, où est-ce qu'il y a réponse aux
besoins dès les premiers instants de vie, même dès les premiers instants de la
conception, de quel milieu est issue la maman, son statut socioéconomique, déjà
là, on peut avoir une interaction… environnement, c'est-à-dire savoir un petit
peu si l'enfant, il va être protégé ou plus à risque d'être dans cet
environnement-là et être à risque de développer, à plus ou moins grande
intensité, des symptômes de TDAH.
Donc, on connaît que, par exemple, s'il y
a un enfant à naître, papa et/ou maman a un diagnostic de déficit d'attention
avec hyperactivité, les traits que cet enfant-là a, les <chances sont
plus élevées que cet enfant-là ait aussi un diagnostic ou, du moins, des
traits. Selon l'environnement dans lequel il va être, est-ce qu'il va être
protégé ou est-ce qu'encore il va arriver des situations de vie qui peuvent
faire naître ces symptômes-là ou encore les exacerber, bien sûr... C'est sûr
qu'il y a des enjeux...
Mme Woods (Geneviève)T :
...les >chances sont plus élevées que cet enfant-là ait aussi un
diagnostic ou, du moins, des traits. Selon l'environnement dans lequel il va
être, est-ce qu'il va être protégé ou est-ce qu'encore il va arriver des
situations de vie qui peuvent faire naître ces symptômes-là ou encore les
exacerber? Bien sûr.
C'est sûr qu'il y a des enjeux
environnementaux puis des questions, vous nommez l'alimentation, on parle
beaucoup des écrans dans les derniers mois, les dernières années, parce qu'on
est très, très préoccupés chez tous les enfants au niveau du développement du
cerveau à l'usage des écrans. Et, en contexte de TDAH, il y a des spécialistes
auxquels il est intéressant de se pencher sur leurs ouvrages, qui se demandent
même est-ce que parfois il peut y avoir des faux cas de TDAH qui sont créés dû
à une surutilisation des écrans. Alors, nous, particulièrement dans un contexte
de développement du cerveau chez les tout-petits, on y va avec parcimonie,
parce qu'effectivement on voit des liens, notamment avec l'impulsivité puis le
développement des fonctions cognitives chez les enfants.
Une voix
: Merci
beaucoup, je laisse la parole à ma collègue.
Le Président (M. Provençal)
: Mme la députée de Soulanges. À vous la parole.
Mme Picard : Bonjour,
j'espère que vous m'entendez bien aussi. Moi, c'est un sujet qui me touche
particulièrement, parce qu'on a un enfant à la maison que, à la garderie, il
était turbulent, on disait que... Il changeait souvent de garderie, il n'était
vraiment pas comme les autres, puis là, plus les temps ont avancé, plus les
gens nous disaient d'aller le faire diagnostiquer, que ça n'avait pas de bon
sens, et tout, et tout. Arrivé à l'école, il a commencé à avoir des
difficultés, puis on s'est aperçu, justement, qu'il avait bel et bien un TDA,
pas un TDAH. Mais, à la suite de ça, on s'est aperçu dans quel dédale du
système on embarquait.
Et moi, je voudrais vous amener
particulièrement sur ce... en fait, toute la trajectoire qu'on a avec une
personne, avec un enfant qui a un TDAH. À partir du moment où la garderie, où
les parents pensent, suspectent qu'il y a quelque chose de pas correct, je
parle d'évaluation, je parle de thérapeute, dans notre programme Agir tôt. Je
veux bien cibler tout qu'est-ce qu'on peut faire pour aider les parents, les
enfants et les éducateurs. Donc, j'aimerais vous entendre vraiment sur cette
trajectoire-là de diagnostic.
Mme Woods (Geneviève) :
Merci pour votre témoignage et votre authenticité, là, c'est très touchant. Je
suis perplexe et votre voix est celle de combien de milliers de parents. Vous
avez nommé… pour reprendre vos mots, il y avait quelque chose de pas correct.
Puis, pour moi, ça devient paradoxal avec votre enfant avec des forces, votre
enfant chantonnait, votre enfant était dans le jeu, dans un contexte de
trajectoire de prise en charge, je pense que, dès la constatation, les
premières manifestations, hein, dans le Agir tôt, c'est de reconnaître les
forces et les intérêts de ces enfants à grandir.
On est dans un contexte de société où les
exigences sont très, très élevées. On parle beaucoup d'anxiété, hein, dans les
manchettes dans les dernières semaines et dans les derniers mois, et tant
mieux. Puis on se rend compte que l'anxiété amène aussi des symptômes
d'inattention ou parfois peuvent mimer ou peuvent s'associer… puis chez les
enfants qui ont un TDA particulièrement, souvent il y a une association, par
ailleurs, bon, curieusement, avec l'anxiété.
• (11 h 50) •
Alors, dans la prise en charge, dans le
continuum de soins, j'ai nommé les intérêts de l'enfant... dans les meilleures
pratiques, toujours une approche qui est multidisciplinaire, donc, comment
transmettre l'information en milieu de garde aux parents de manière à ce que le
parent puisse ne pas agir seul en silo, mais en accompagnement avec d'autres
acteurs. En petite enfance et à l'école, on se retrouve, et je me fais la voix
aussi, ce matin, de nos chers intervenants, qui ont toute la bonne volonté, les
bonnes intentions du monde et se retrouvent avec souvent, trop souvent en fait,
le discours de dire: Bien, il n'y en a pas, d'outil, ou il n'y en a pas, de
ressource, alors que les outils, en termes de lignes directrices, sont si
clairs. Pourquoi est-ce qu'ils ne sont pas connus? Et, nous, notre réseau de la
santé, là, il y en a, <des ressources. Il y en a des... dans la première
ligne, des médecins...
(Visioconférence)
Mme Woods (Geneviève)T :
...de lignes directrices sont si claires, pourquoi est-ce qu'elles ne sont pas
connues? Et, nous, notre réseau de la santé, là,
il y en a >des ressources,
hein, il y en a, dans la première ligne, des médecins, hein, c'est un
processus, c'est un long processus à faire. C'est important de faire connaître
que ce processus-là aussi, ça prend du temps, ça nécessite de prendre du temps
pour le dépistage, l'évaluation, des semaines, voire des mois, pour bien
comprendre, ne pas se tromper, tellement c'est complexe le TDAH. Et l'évaluation
médicale ou finale par un médecin soit en première ligne, donc omnipraticiens,
ou encore en deuxième, troisième ligne, au besoin, d'aller voir des
spécialistes, toujours en combinaison avec une évaluation qui est clinique,
donc psychologues, neuropsychologues, tout ce qu'on peut prendre pour étoffer
la compréhension…
Et, à la lumière de ce qu'on aura
recueilli comme information, eh bien là, on va être plus en mesure de
comprendre comment fonctionne le cerveau de cet individu-là, de ce petit être,
qu'il soit petit ou grand, et donc de prendre une approche qui est la plus
personnalisée possible. Et c'est ça, la réussite au niveau des meilleures
pratiques, la littérature, elle est très claire. Donc, je suis beaucoup dans le
faire connaître. Est-ce que ça répond à votre question?
Mme Picard : Oui, bien
oui. Merci beaucoup. Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Je redonne la parole à la députée d'Abitibi-Ouest.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Nous parlons souvent de TDAH comme un problème, comme un handicap, comme une
maladie, mais ce n'est pas tout à fait le cas. Un enfant qui a un TDAH se sent
très mal, trouve que ça va vite dans sa tête. Comment pouvons-nous canaliser
toute cette énergie qui déborde de nos jeunes afin d'en faire une force et non
une faiblesse? Et, vous savez, lorsqu'on donne certaines médications, on voit
l'enfant qui devient très calme, qui devient amaigri, qui devient même triste,
ses yeux sont tristes. Alors, que devons-nous faire?
Mme Woods (Geneviève) : Dans
un premier temps, le diagnostic d'un trouble déficitaire d'attention avec ou
sans hyperactivité est émis parce qu'il altère avec le fonctionnement global de
l'individu. O.K.? Les symptômes sont persistants, ils ne sont pas expliqués par
autre condition physique ou d'ordre mental ou contextuel. Donc, c'est une
condition qui est neurodéveloppementale. Donc, il ne faut pas minimiser qu'il
s'agit d'un trouble, O.K., qui se retrouve dans plus qu'une sphère de développement.
Donc, l'enfant a des difficultés à savourer la vie, à apprendre en contexte
social, parce que son cerveau est tellement en pleine ébullition, beaucoup plus
que les autres, qu'il fait des crises, par exemple, de colère, puis il n'est
pas capable d'entrer en contact avec les autres ou les autres ont peur de lui
parce qu'ils pensent que c'est un méchant. Mais ce n'est pas parce que c'est un
méchant, c'est parce qu'il n'est pas capable de reconnaître ses propres
émotions puis de s'arrêter, alors qu'un enfant qui n'aura pas de déficit
d'attention avec hyperactivité, il va être capable de le faire parce que son
cerveau lui permet d'avoir ces outils-là. Alors, on dit que c'est incapacitant
de par cet exemple-là, mais plein d'autres exemples, ça va être à l'épicerie,
ça va être chez grand-maman, ça va être à l'école. O.K. Donc, ça, c'est
important de bien comprendre qu'un diagnostic qui est émis, c'est parce qu'il y
a une altération du fonctionnement dans plus que deux sphères de vie du jeune.
Ceci étant dit, vous faites référence au
fait que, bon, ça peut être perçu négativement, une maladie, et puis vous
faites référence évidemment à l'usage thérapeutique, l'usage pharmacologique,
en fait, qui peut changer l'enfant. Bien sûr, la médication, puis j'ai nommé dans
la présentation, demeure la première ligne de traitement, et puis, idéalement,
elle est employée en combinaison avec une approche qui est psychosociale, parce
que la médication, puis je vais laisser mes collègues dans le monde médical
parler un peu plus tard, la médication va venir altérer le fonctionnement
chimique du cerveau, sauf qu'il ne va pas travailler tout seul. C'est comme si
je vous dis : Bien, prenez une pilule, vous êtes toujours en retard le
matin, la pilule ne va pas mettre le cadran à votre place pour vous lever plus
tôt. Ça prend un peu d'aide autour pour commencer à se pratiquer et à faire le
geste de mettre l'heure plus tôt du cadran. O.K.? Ce n'est pas magique.
Quant à votre préoccupation des enfants
qui vont être amaigris, effectivement, l'usage des <psychostimulants
parfois est reconnu pour couper la faim. De là, l'importance d'avoir...
Mme Woods (Geneviève)T :
...mettre l'heure plus tôt du cadran.
O.K., ce n'est pas magique.
Quant à votre
préoccupation des
enfants qui vont être amaigris,
effectivement, l'usage de >psychostimulants
parfois est reconnu pour couper la faim. De là l'importance d'avoir une
approche multidisciplinaire. Quand il y a un diagnostic qui a été émis, ce
n'est pas juste : Bien, ah! diagnostic de TDAH, vas-y mon loup, tu as un
TDAH, on va te donner une médication, puis on va te donner plus de temps pour tes
examens ou quoi que ce soit à l'école. Non, non, c'est important d'avoir un
suivi qui est continu dans les prochaines semaines, les prochains mois, qui
seront déterminants pour trouver, toi, c'est quoi, ta fenêtre de confort
optimal au niveau de ta prise en charge, dans un premier temps.
Puis, pour les jeunes, puis les adultes,
même, qui prennent une médication, moi, de manière vulgarisée, ce que je leur
dis, c'est : Tu ne devrais pas te sentir différent, de prendre une
médication. La médication est là pour t'aider à ouvrir les fenêtres de ta
maison, qui est renfermée depuis super longtemps, puis ça va arrêter ta petite
patte qui va trembler tout le temps. Ça va arrêter ton cerveau, qui est comme
une machine à popcorn à tout moment, mais ça va te permettre d'être toi-même.
Donc, si ça altère la personnalité que tu es, on se pose des questions. Tout de
suite, c'est important d'avoir le contact avec l'équipe médicale qui te suit.
La même chose, si les effets secondaires se maintiennent au point d'altérer ton
poids, bien, c'est de là qu'il est aussi pertinent d'avoir ton équipe médicale
qui te suit pour ne pas qu'il y ait des effets autres qui se maintiennent dans
le temps qui soient négatifs et risqués.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Merci beaucoup. Ma dernière question, c'est : Quels sont les
accommodements mis en place dans les écoles afin d'aider les jeunes atteints de
TDAH?
Le Président (M. Provençal)
: 30 secondes pour répondre.
Mme Woods (Geneviève) :
C'est une bonne question. Alors, c'est très variable d'une école à l'autre et
même d'une garderie à l'autre. On va proposer, selon le cas, des écouteurs pour
bloquer le son, parfois, on va isoler les enfants, malheureusement, du temps de
plus pour faire les travaux. Donc, il y a une panoplie d'outils, mais, de plus
en plus, et puis mes collègues, par exemple, de la Clinique FOCUS ont des super
trousses, je pense, qui gagneraient à être mieux connues pour les
accommodements à être introduits dans le milieu scolaire.
Le Président (M. Provençal)
: Merci. Je cède maintenant la parole à la députée de Fabre.
Mme Sauvé : Merci
beaucoup, M. le Président. Mme Woods, c'est un plaisir de vous entendre.
D'entrée de jeu, je voulais aussi dire que j'ai été sensible au témoignage de
ma collègue, qui est une maman, donc je voulais lui dire ma sensibilité par
rapport à sa situation, sa réalité.
M. le Président, j'ai beaucoup de
questions, alors je vais essayer d'être concise, malgré tout, pour le temps que
j'ai. J'ai une préoccupation liée à l'étape entre... puis je vais parler des
plus jeunes, des enfants d'âge scolaire... J'ai une préoccupation importante
par rapport à ce que peuvent vivre, justement, les parents entre l'évaluation,
parce qu'on ne parle pas de diagnostic par les enseignants, on parle
d'évaluation, d'observation, et le diagnostic qui vient ou qui ne vient pas, et,
s'il vient, par le médecin, le neuropsychologue ou le psychologue, il vient
avec, souvent, un grand délai, parce que, bon, évidemment ce n'est pas...
l'accès n'est pas toujours facile.
Alors, moi, je me préoccupe beaucoup de la
réalité, M. le Président, par rapport à ce que peut vivre le parent entre
l'observation, qui, parfois, malgré la bonne volonté de l'enseignant, peut-être
parce qu'il manque de formation, peut-être parce qu'il est dans ce qu'on
appelle, en psychologie, une généralisation hâtive, il va conclure que,
probablement, les comportements de l'enfant sont liés à un TDAH. Alors, le
diagnostic n'est pas encore posé de façon médicale, mais tout ce temps-là d'attente
entre l'observation et le diagnostic, bien, le parent se retrouve un peu dans
un «no man's land» — excusez l'expression anglaise,
mais... — et se retrouve dans une situation où, finalement, le regard
est déjà porté par rapport à l'enfant, alors que, finalement, bien, on est dans
une, peut-être, une interprétation, peut-être dans une surévaluation, et donc
le diagnostic de TDAH n'arrivera pas.
Alors, je me préoccupe beaucoup de cette
réalité-là, que dénoncent beaucoup, beaucoup de parents. Alors, je voulais
entendre Mme Woods là-dessus.
• (12 heures) •
Mme Woods (Geneviève) :
Merci pour <votre partage...
>
12 h (version révisée)
<16493
Mme Sauvé :
...et donc, le diagnostic de TDAHV n'arrivera pas. Alors, je me préoccupe
beaucoup
de cette réalité-là que dénoncent
beaucoup,
beaucoup de parents.
Alors, je voulais entendre Mme Woods
là-dessus.
Mme Woods (Geneviève)T :
Merci pour >votre partage. Je partage personnellement et
professionnellement votre préoccupation. Je la vis, je la côtoie, et ma vision,
tant personnelle que professionnelle, hein, je suis maman aussi d'un coco qui
vient d'entrer à la l'école, qui a cinq ans, et j'assiste à tous les défis des
parents qui impliquent une transition vers l'école, mais aussi ceux qui ont des
manifestations en trouble de déficit d'attention avec ou sans hyperactivité,
alors je suis aussi sensible de les accompagner là-dedans.
Parce qu'effectivement c'est une réalité,
que le temps est une denrée rare, par contre, une nécessité pour, justement,
prendre le temps de bien observer, de bien comprendre le tableau, d'impliquer
différents professionnels à différents égards pour vraiment avoir un tableau
qui est le plus précis possible, le plus proche de la réalité. Puis ce que vous
nommez, hein, pendant ce temps-là, bien, l'enfant, bien, comment lui se sent,
comment est-il valorisé pas ses pairs, comment est-ce que les parents arrivent
à gérer un peu tout ça puis surmonter les défis qui sont associés au
comportement de leurs enfants ou aux défis...
Dans le processus de dépistage, hein, que
vous nommez, de la peur des enseignants, d'évaluations tant médicales que
professionnelles, cliniques, je pense que c'est vraiment important d'outiller
les parents. Notamment, on... Bon, il y a la psychoéducation, hein, qui est une
approche psychosociale qui est de plus en plus incluse dans la prise en charge
du TDAH, et on se rend compte qu'assez rapidement ça donne des outils tant aux
parents qu'aux enfants. Donc, ça donne aussi l'impression, hein, dans la
perception, aux parents, de se sentir en pouvoir, de contrôler certains aspects
de leur relation avec leur enfant, mais aussi, dans leurs interventions, d'être
plus efficaces. Donc, vous nommez, parfois, au niveau des enseignants, on
pourrait peut-être avoir une meilleure compréhension de la situation, avoir
plus d'outils, bien, c'est aussi vrai pour les parents. Puis je pense que c'est
important de ne pas sous-estimer la consultation et/ou l'intégration d'un
professionnel, tu sais, en psychoéducation pendant tout ce processus de prise
en charge là pour l'évaluation puis le dépistage, qui est fixé, ce
professionnel-là, qui sera dans ce processus-là d'évaluation. Pourrait-il
continuer après l'émission ou non du diagnostic... mais aura un portrait clair
de la réalité de partout, des acteurs qui auront regardé, observé, bien compris
l'état de la situation, pourra continuer, après, avec l'enfant puis la famille,
pour cibler ses interventions puis continuer dans l'efficacité, au profit du
bien-être, là, de la famille et puis de leur enfant.
Le Président (M. Provençal)
: Mme la députée.
Mme Sauvé : Merci, M. le
Président. Merci pour votre réponse. Vous avez nommé, puis il y a plusieurs, entre
autres, le portrait et l'analyse de l'INESSS, mais beaucoup d'autres
documentations mentionnent effectivement que de jumeler la médication avec
l'intervention psychosociale, ça augmente, bien sûr, l'accompagnement qui est
gagnant pour l'enfant qui a le TDAH.
Il y a très peu d'études par rapport à
l'intervention psychosociale seule, sans être jumelée à la médication. Est-ce
que vous jugez que ce serait une alternative qui mériterait d'être poussée,
autant pour le développement des compétences sociales, pour, aussi,
l'adaptation au parcours scolaire? Est-ce que vous jugez que cette alternative
de l'intervention psychosociale prise à part mériterait d'être davantage
documentée, que la recherche devrait s'y intéresser davantage?
Mme Woods (Geneviève) :
Merci pour votre question. Alors, il est certain qu'on connaît les bienfaits
des approches psychosociales. Oui, vous nommez que la littérature, elle est
mince, notamment en ce qui a trait spécifiquement au TDAH et au développement
des fonctions exécutives, notamment quand on parlait de
développement des compétences sociales, compétences émotionnelles, bon, ça fait
partie d'un tout, au niveau des fonctions exécutives à développer. Et puis la
littérature est mince. Puis je pense que, oui, c'est pertinent de s'y attarder,
sauf...
La littérature qu'on a est
tellement claire sur la combinaison, dans un cas de TDAH sévère, la combinaison
avec la médication et l'approche psychosociale, c'est vraiment ça qui <bonifie...
Mme Woods (Geneviève)T :
...de s'y attarder, sauf que la littérature qu'on a est
tellement claire
sur la combinaison. Dans un cas de TDAH, c'est vers la combinaison avec la
médication et l'approche psychosociale, c'est
vraiment ça qui >bonifie.
Aux États-Unis, tu sais, les études du MTA, à Montréal, ici... qui travaille
aussi dans différentes tranches d'âge... on se rend compte que c'est vraiment
une combinaison qui est gagnante.
Alors, moi, je me retrouve, sur le plan
éthique, un petit peu mal à l'aise de dire: Bien, on devrait accorder plus de
temps à uniquement se plonger sur une alternative psychosociale, alors que peut-être
que ça serait au risque... ou ça augmenterait les risques chez un enfant qui en
a réellement besoin, de la médication. Donc, il demeure que c'est vraiment important,
je pense, d'y aller cas par cas, de là l'exploration qui est
multidisciplinaire, pour avoir une vision éclairée.
Parce qu'effectivement ce n'est pas tous
les... puis vous avez nommé les travaux de l'INESSS, puis il y en a d'autres
aussi, que ce n'est pas tous les cas de TDAH qui nécessitent une médication, il
y en a qui vont faire le choix, de manière éclairée, de ne pas prendre de
médicaments. Il y a même des centres hospitaliers de la grande région de
Montréal, près de nous, qui décident, de manière consensuelle, d'essayer sans
médication un certain temps, puis de voir comment ça se passe, et d'essayer
avec une médication un certain temps, voir comment ça se passe, et, après ça,
de faire un choix éclairé, est-ce qu'on la prend, est-ce qu'on ne la prend pas.
Donc, le cas par cas est d'autant plus
justifié dans ce contexte de TDAH et gagnerait, je pense, à être davantage
exploré plutôt que d'essayer d'explorer chacune des alternatives en silo.
Le Président (M. Provençal)
: Mme la députée.
Mme Sauvé : Merci, M. le
Président. Je vais poursuivre un peu dans ce que vous venez de dire par rapport
à l'intervention psychosociale, et je vous entends bien. À défaut de
développer — puis l'intention, ce n'est pas de documenter ou de faire
de la recherche, seulement mettre de côté la notion de la médication, mais c'est
d'explorer un peu plus cette alternative-là, simplement — est-ce que
vous ne pensez pas que, dans le développement des compétences sociales, dans
les différents aspects qui pourraient être inclus dans une approche
psychosociale, on ne doit pas mieux outiller les parents? Parce que je sais que
les enseignants sont formés, pourraient être mieux formés, mais ils ont des
outils à leur disposition. Est-ce que les outils sont suffisamment disponibles
pour les parents?
Mme Woods (Geneviève) :
...la question, en fait, est-ce qu'ils sont suffisamment disponibles, j'oserais
dire qu'ils pourraient l'être davantage. Il y en a, des outils, pour les
parents, il y a des programmes au Québec, si on prend l'exemple de Brindami,
sur le développement des habiletés sociales, dont nous sommes diffuseur, où
est-ce que c'est une modalité... c'est multimodal, comme programme, donc
l'éducatrice en milieu de garde fait l'animation, l'intervention auprès de
l'enfant, ensuite de ça, il y a une modalité pour les parents, puis on...
Brindami et d'autres programmes de développement des habiletés sociales
démontrent leur efficacité quand il y a l'implication des parents. Donc, il y en
a, des programmes, qui sont déjà disponibles à cet effet-là, qui gagneraient à
être mieux connus et à être utilisés dans leur ensemble.
L'enjeu, et pour être sur le terrain
toutes les semaines à accompagner et à soutenir ces intervenants-là au
développement des habiletés sociales chez les enfants, dès qu'ils commencent à
se sentir parfois sous la pression, ça devient un inhibiteur, donc ça arrête un
peu l'élan puis la motivation à essayer de faire le travail. Donc, ce qu'on
leur dit, c'est : Prenez le matériel qui est à votre disposition puis
assurez une continuité de l'information auprès des parents, mais prenez ce qui
fonctionne, parce que souvent ça crée des déceptions, puis les éducatrices puis
les professeurs voudraient avoir plus d'effet auprès des parents, puis de la
réponse, bien, ils n'en ont pas de la part des parents, donc...
Le Président (M. Provençal)
: Merci. Donc, je vais être obligé de vous interrompre pour
céder la parole au député de Jean-Lesage, qui est le responsable du deuxième groupe
d'opposition. M. le député.
• (12 h 10) •
M. Zanetti : Merci, M. le
Président. Merci beaucoup, Mme Woods, pour votre présentation. Selon vous,
quelle est la cause du TDAH?
Mme Woods (Geneviève) :
Selon moi? C'est <une bonne question. Écoutez, je vais me fier à...
M. Zanetti : ...M. le
Président.
Merci beaucoup, Mme Woods, pour votre
présentation.
Selon vous, quelle est la cause du TDAH?
Mme Woods (Geneviève)T :
Selon moi? C'est >une bonne question. Écoutez, je vais me fier à la
littérature, hein, pour répondre le plus adéquatement possible à votre question.
Je l'ai évoqué, un peu plus tôt en présentation, il y a des marqueurs
génétiques et des marqueurs environnementaux qui sont très clairs.
Donc, sur le plan génétique, notamment, on
a des allèles dans l'ADN à certains endroits qui auraient une différence.
Ensuite de ça, il y aurait des débalancements peut-être hormonaux, notamment au
niveau des systèmes de... hein, la fameuse drogue du plaisir. Il y aurait des
différences au niveau de la structure du cerveau quant au volume de la partie
frontale.
Est-ce que c'est expliqué par ce qu'on
mange? Est-ce que c'est expliqué par l'usage des écrans qu'on fait? Est-ce que
c'est expliqué par une molécule dans l'air qu'on respire qu'on ne connaît pas
encore?
Donc, il y a beaucoup de questionnements, toujours,
à savoir d'où ça vient, le TDAH. Il y a toujours des études qui sont en cours,
puis, malheureusement on n'a pas mis le doigt encore... quand je dis «on», là, tous
mes collègues de ce monde, chercheurs qui passent leur vie à essayer de se questionner,
bien, justement, ça vient d'où puis c'est expliqué par quoi, on se rend compte,
dans l'ensemble, que c'est multifactoriel.
Puis je pense que ça serait tellement génial,
hein, de trouver d'où ça vient pour pouvoir trouver peut-être la pilule
magique. Mais, malheureusement, actuellement, c'est encore difficile.
M. Zanetti : Donc, dans
les facteurs environnementaux, il y a l'usage des écrans. Il n'y a que des hypothèses,
là, si je comprends bien. Mettons, il y aurait peut-être l'usage des écrans,
peut-être l'alimentation.
Est-ce qu'il a d'autres facteurs, mettons,
psychologiques dans, je ne sais pas, la famille ou l'environnement social qui
peuvent... qui sont considérés comme des hypothèses dans la littérature
scientifique?
Mme Woods (Geneviève) :
Donc, ce qui est clair, au niveau de la littérature scientifique, c'est, par
exemple, in utero, la nicotine, lors de la grossesse, va augmenter les chances
de symptômes d'hyperactivité de l'enfant à naître, les complications lors de la
grossesse, par exemple, un manque d'oxygène ou l'utilisation de certaines
interventions médicales... sont liés à, hein, donc ce n'est jamais de cause à
effet, mais il y a un plus grand niveau de risque à l'apparition des symptômes
plus tard dans la vie de l'enfant, avec ou sans composante génétique.
Bien sûr, s'il y a la présence de TDAH
dans la famille, donc, premier niveau, donc, au moins un parent, bien, ça
augmente les traits d'irritabilité chez l'enfant à naître aussi.
Au niveau social, ce qui est très clair
aussi, c'est d'être issu d'une famille de milieu défavorisé...
Le Président (M. Provençal)
: Mme Woods, je suis obligé de vous interrompre encore
une fois parce que je suis le gardien du temps. Alors, je cède maintenant la
parole au député de Jonquière, du troisième groupe d'opposition.
M. Gaudreault : Oui.
Merci beaucoup, Mme Woods. Je vous souhaite bonne chance pour
l'accouchement à venir.
Mme Woods (Geneviève) :
...
M. Gaudreault :
Maintenant, moi, je veux savoir... Quelle explication vous donnez quant aux
différences marquées dans la prévalence au Québec versus le reste du Canada? Il
y avait quand même des chiffres assez impressionnants là-dessus qui avaient
été, entre autres... sur lesquels le groupe de pédiatres a mis un focus, là,
très important en début d'année.
Moi, je comprends, là, les raisons que
vous nous donnez, ou les causes, là, plutôt, du TDAH, les gènes,
l'environnement. Je suis très, très préoccupé, entre autres, par les revenus
familiaux, qui sont différents. Mais, quand même, quand on voit les chiffres,
si on prend les six... non, chez les 13 à 17 ans, là, au Québec, on est
plus que le double de la moyenne canadienne. Je veux dire, on n'est pas un pays
beaucoup plus pauvre que le reste du Canada, là. Donc, ce n'est pas juste la
question des revenus familiaux. Bon. Alors, avez-vous une explication pour ça?
Mme Woods (Geneviève) :
Merci pour votre question, M. Gaudreault. En fait, ce sont des réflexions,
des hypothèses de... Pour être dans le réseau du TDAH depuis maintenant plus de
10 ans, les experts, même en termes de ratios dans le Canada, sont très
concentrés au <Québec. Donc, ça fait aussi du sens qu'il y a plus
d'experts, il y a peut-être plus une meilleure...
(Visioconférence)
Mme Woods (Geneviève)T :
...dans le réseau du fédéral...
maintenant plus de 10 heures. Les
experts,
même
en termes de ratio dans le
Canada, sont très
concentrés au >Québec. Donc, ça fait aussi du sens que… il y a plus
d'experts, il y a peut-être plus une meilleure connaissance, donc un plus grand
intérêt. Ils accordent plus d'attention, pour ne pas faire de jeu de mots, mais
il y a une réalité qu'il y a un très gros bassin d'experts hyperqualifiés au Québec,
si on compare aux autres provinces canadiennes. Donc, dans un premier temps, je
pense qu'il peut y avoir un effet. Est-ce qu'il peut y avoir un effet de
l'industrie aussi qui voit ça comme une opportunité aussi, qui peut créer un
biais? Autre hypothèse.
En termes de facteurs socioéconomiques,
votre réflexion, je la partage également, hein, il y a des réalités similaires
dans les autres provinces. Donc, pour moi, ce n'est peut-être pas suffisant
pour expliquer cette prévalence élevée. Donc, j'abonderais plus dans le sens de
la connaissance et de la popularité du diagnostic, à un moment donné, qui a été
comme un effet de société, où est-ce qu'on gagnerait en prévention à venir
adoucir, à calmer cet intérêt-là par une meilleure connaissance de ce que c'est
et que c'est un trouble à ne pas minimiser. Ce n'est pas... mode, là.
Le Président (M. Provençal)
: Mme Woods, je vous remercie pour votre contribution
aux travaux de la commission.
Je vais devoir suspendre les travaux
quelques instants afin de permettre au prochain groupe de prendre place. Merci
énormément.
(Suspension de la séance à 12 h 17)
(Reprise à 12 h 18)
Le Président (M. Provençal)
: Je souhaite maintenant la bienvenue à la représentante de
la Chaire de l'Université du Québec à Chicoutimi, cégep de Jonquière, sur les
conditions de vie, la santé, l'adaptation et les aspirations des jeunes. Je
vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous
procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous
invite à vous présenter puis à commencer.
Chaire UQAC-Cégep de Jonquière sur les conditions
de vie, la santé, l'adaptation et les aspirations des jeunes (VISAJ)
Mme Brault (Marie-Christine) :
Bonjour. Je m'appelle Marie-Christine Brault. Je suis professeure de sociologie
à l'Université du Québec à Chicoutimi et cotitulaire, donc, de la chaire VISAJ
sur les conditions de vie, la santé, l'adaptation et les aspirations des
jeunes.
Donc, chers élus, membres de la Commission
de la santé et des services sociaux, je tiens à vous remercier sincèrement de
vous préoccuper de la situation de l'accroissement de la commission de
psychostimulants chez les jeunes Québécois. Je vous remercie aussi de m'avoir
invitée aujourd'hui à présenter mon point de vue sur le problème. Comme vous le
savez, j'ai déposé un mémoire. Donc, ici, je vais prendre le temps qui m'est
accordé pour vous parler des éléments centraux, qui incluent le problème tel
que je le conçois, des constats tirés d'une recherche que je mène actuellement
puis quelques pistes de réflexion pour guider les actions qui suivront.
D'abord, vous avez raison d'affirmer que
l'augmentation de la consommation de psychostimulants associés au diagnostic de
TDAH pose problème. La consommation de psychostimulants n'est pas sans
conséquence pour les jeunes, car plusieurs effets secondaires y sont associés,
par exemple: de l'insomnie, de la perte d'appétit, perte de poids,
irritabilité, etc. Alors, il faut, à tout prix, s'assurer que seuls ceux qui en
ont vraiment besoin y recourent.
Par contre, je ne voudrais pas que
l'énoncé du problème s'arrête là, car le vrai problème est le diagnostic
médical qui justifie que l'on ait recours à ces médicaments. Donc, le vrai
problème est plutôt l'accroissement du nombre d'enfants et de jeunes qui
reçoivent un diagnostic de TDAH et, je précise, en fait, qui reçoivent ce
diagnostic-là pour les mauvaises raisons.
• (12 h 20) •
Donc, ce sont des jeunes qui reçoivent le
diagnostic mais qui ne devraient pas le recevoir, soit parce qu'ils ont un
autre trouble qui <prendra plus de temps à être identifié, parce qu'ils
vivent des épreuves individuelles qui...
Mme Brault (Marie-Christine)T :
...qui reçoivent un diagnostic de TDAH et je précise... en fait, qui reçoivent
ce diagnostic-là pour les mauvaises raisons.
Donc, ce sont des jeunes qui reçoivent
le diagnostic, mais qui ne devraient pas le recevoir, soit
parce qu'ils
ont un autre trouble qui >prendra plus de temps à être identifié, parce
qu'ils vivent des épreuves individuelles qui se traduisent par des
comportements qui ressemblent aux symptômes du TDAH, parce que leur niveau de
maturité n'est pas au même niveau que celui des autres enfants, parce qu'ils ne
cadrent pas dans les normes sociales attendues, etc.
Il est difficile d'évaluer le nombre de
mauvais diagnostics qui sont associés au TDAH, parce que poser le diagnostic
reste un processus qui est très subjectif. La tâche est d'autant plus complexe
qu'il n'y a ni test sanguin ni test biologique qui confirme le diagnostic de
TDAH, ce qui ouvre davantage la porte aux mauvais diagnostics. C'est
l'évaluation clinique des comportements et des conséquences qu'ils ont qui
détermine la présence du diagnostic, puis on sait que les pratiques en ce sens
sont très hétérogènes.
Les comportements d'hyperactivité,
d'impulsivité et d'inattention sont communs chez les enfants, mais leur
intensité et leur fréquence sont variables. À prime abord, la présence de ces
comportements chez les enfants n'est pas pathologique, même chez ceux qui
démontrent une activité plus forte que la moyenne, il ne s'agit que de
différences individuelles. D'un point de vue sociologique, c'est le contexte
social et normatif qui transforme ces comportements en maladie et qui les
désigne sous un registre de diagnostic pathologique.
Le processus qui mène au diagnostic
implique, dans le cas du TDAH, des normes sociales qu'il nous faut comprendre.
Qu'est-ce qui est de l'hyperactivité, de l'inattention normales? De
l'hyperactivité, de l'inattention pathologiques? Les enfants qui transgressent
ces normes ont-ils des caractéristiques particulières? Il semble que oui, parce
que ce sont principalement les garçons, les jeunes issus d'un milieu défavorisé
et les jeunes qui sont les plus jeunes de leur classe qui sont davantage
identifiés TDAH. On peut aussi se questionner sur qui juge la transgression
comme déviante, dans quel contexte aussi c'est fait puis comment s'effectue le
processus diagnostic.
Le processus qui mène au diagnostic de
TDAH est complexe, mais fait toujours appel au jugement d'un adulte ou d'un
groupe d'adultes à l'égard d'un enfant. Ces adultes, qu'ils soient un parent,
un enseignant, éducateur, intervenant, peu importe, identifie des comportements
qui posent problème puis apposent l'étiquette hyperactif, inattentif, TDAH, qui
devient, par la suite, un diagnostic quand il est validé officiellement par un
professionnel de la santé.
Il y a certains éléments, néanmoins, qui
permettent de faire l'hypothèse d'un nombre trop élevé de diagnostics chez
certaines sous-populations. D'abord, quand on constate qu'il y a un
accroissement de la prévalence ainsi que des distributions inégales de prévalences
basées sur le territoire, on peut se poser des questions. Par exemple, on sait
que la prévalence de la consommation de psychostimulants est plus élevée au
Québec qu'ailleurs dans le Canada. On sait aussi qu'à l'intérieur du Québec, il
y a des différences entre les régions. Entre autres, la région de Montréal a
des taux très faibles, en deçà de la moyenne québécoise, alors que la région où
j'habite, le Saguenay—Lac-Saint-Jean, figure parmi les régions québécoises où
il y a le plus de diagnostics de TDAH.
Et, même à l'intérieur d'un même territoire,
donc au Saguenay—Lac-Saint-Jean, on constate des différences entre les
différentes villes au sein de notre territoire. Par exemple, la ville de La
Baie a des taux moindres que la moyenne québécoise, alors que Jonquière et
d'autres villes au Lac-Saint-Jean ont des taux plus élevés. Donc, on peut se
questionner à savoir qu'est-ce qu'il se passe. Pour l'instant, les facteurs
sont encore méconnus.
Une autre manière de se rendre compte qu'il
y a des mauvais diagnostics, c'est de s'intéresser à la probabilité d'avoir un
diagnostic de TDAH selon le mois de naissance, comparé à la date d'entrée à
l'école. Au Québec, puis ces études-là, sont prouvées, en fait, sont... ces
constats-là sont faits partout dans le monde. Au Québec, on constate que les
plus jeunes, ceux qui sont nés entre les mois de juillet et septembre, ont 1,5 fois
plus de chances d'avoir un diagnostic de TDAH et de consommer des
psychostimulants, comparé aux élèves qui sont nés entre octobre et décembre et
qui sont les plus vieux de la classe. Donc, il y a des questions à se poser
puis il faut savoir si on donne des pilules pour contrer l'immaturité
développementale.
Ça fait longtemps que les études parlent
du rôle de l'école dans le phénomène du TDAH. Par contre, peu l'ont documenté,
et aucune étude québécoise ne s'était penchée sur le sujet avant la mienne.
Depuis 2017, je collecte des données au Québec et en Flandres, en Belgique,
auprès des écoles et des acteurs scolaires, pour mieux comprendre le rôle du
milieu scolaire dans l'étiquetage des élèves sous la catégorie TDAH. J'ai bien
expliqué l'étude dans le mémoire que j'ai déposé, je vais reprendre ici des
constats qui me paraissent les plus importants.
Donc, mon premier constat, c'est de
confirmer que l'école, en tant qu'institution, contribue au problème de
l'accroissement de consommation de psychostimulants pour le <TDAH et
contribue aussi à l'augmentation du nombre de diagnostics. Puis ça s'effectue
de plusieurs manières, entre autres les difficultés scolaires, peu importe,
là...
Mme Brault (Marie-Christine)T :
...qui me paraissent les plus importants.
Donc, mon premier constat, c'est de
confirmer que l'école en tant qu'institution contribue au problème de
l'accroissement de consommation de psychostimulants pour le >TDAH et
contribue aussi à l'augmentation du nombre de diagnostics. Puis cela s'effectue
de plusieurs manières, entre autres, les difficultés scolaires, peu importe
qu'elles soient retard scolaire, faibles notes ou ne pas atteindre son plein
potentiel, constitue souvent un déclencheur du processus diagnostique. C'est le
cas au Québec, mais pas en Belgique. Je tiens à préciser aussi qu'il y a des
énormes différences dans les taux de prévalence. En Belgique, le TDAH est
presque inexistant dans mon échantillon, alors qu'au Québec il est de
17,5 %.
Les enseignantes québécoises, bien, belges
aussi, là, mais les enseignantes québécoises participent, puis quand je dis
«enseignantes», c'est parce que c'est principalement des femmes, c'était au
primaire, donc je l'utilise à titre épicène. Donc les enseignantes participent
à plusieurs étapes du processus diagnostique. Certaines étapes relèvent de
leurs champs de compétence, par exemple faire des observations, identifier des
comportements qui posent problème, mettre en place des stratégies dans la
classe. Par contre, il y en a d'autres, tâches, qui ne relèvent pas de leurs
fonctions, par exemple de discuter de l'avantage des médicaments avec les
parents ou suggérer, même, le diagnostic aux parents.
Les enseignantes, par contre, le font dans
un but de bienveillance. Ils aiment les enfants, ils veulent les aider et ils
sont convaincus de faire ce qu'il faut pour le bien des enfants. Entre autres,
on le constate... les enseignantes le savent, que c'est très long, avoir un
diagnostic, c'est très long, avoir des services. Pour avoir des services, il
faut souvent un diagnostic, alors leur objectif, c'est de contrer ce délai-là
en essayant de dépister le plus tôt possible les problèmes chez les enfants. Mais
ça fait en sorte qu'il y a peut-être des enfants qui reçoivent des diagnostics
trop tôt pour ces raisons-là, parce que c'est important, pour les enseignants,
qu'il n'y ait pas de retard ou qu'il n'y ait pas un écart qui se creuse entre
les élèves et le restant de la classe, en ce qui a trait... en fait, par
rapport aux apprentissages qui sont attendus pour leur âge et leur cheminement.
Le deuxième grand constat que je peux
tirer de mes données, c'est le fait que le problème du TDAH n'est pas seulement
créé par l'école. C'est plutôt un problème qui se situe à l'intersection de la
sphère scolaire, médicale et familiale. J'ai interviewé aussi, en plus des
enseignants, j'ai interviewé aussi des professionnels de la santé, puis ce qu'il
ressort, c'est que les professionnels de la santé sont conscients de contribuer
au problème de l'accroissement de la consommation de médicaments, mais il leur
arrive de baisser les bras et de diagnostiquer et de prescrire quand même parce
qu'ils trouvent que la pression des parents et de l'école est trop forte.
On peut aussi penser que les alternatives
aux médicaments sont rares, coûteuses et peu disponibles.
Les pratiques parentales sont également
très souvent montrées du doigt par l'école et les professionnels de la santé,
puis il est évident que les pratiques parentales ont évolué puis elles ne sont
plus ce qu'elles étaient, notamment en termes de respect de l'autorité, des
attentes aussi qui sont faites à l'égard des enfants, de la discipline aussi. Donc,
tout cela a évolué pour le meilleur et pour le pire, mais je pense qu'il ne
faut pas... Oui, il me reste une minute. Je pense qu'il ne faut pas écarter
cette option de la solution.
Bon, pour conclure, j'aimerais que vous
considériez l'importance de décloisonner le problème, c'est-à-dire d'y
réfléchir en incluant des acteurs de la santé, de l'éducation et de la famille.
Il faut aussi renverser la vapeur en ce qui concerne la médicalisation des
difficultés scolaires et, pour cela, il faut mieux circonscrire le rôle de
l'école et des enseignants dans le problème, mettre moins l'accent sur les
résultats scolaires dans le cheminement scolaire et mieux former les
enseignants, mais aussi les directions d'école aux conséquences d'une
médicalisation et surtout offrir un soutien adéquat en contexte d'inclusion
scolaire. Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Merci pour votre exposé. Nous débutons les échanges avec
la députée de Roberval?
Mme Guillemette : Bien,
tu veux y aller?
Le Président (M. Provençal)
:Oui? Alors, le député de Dubuc.
M. Tremblay : Merci, M.
le Président. Merci, bravo! Je tiens à le rappeler, vous êtes un modèle fort,
unique au Québec au niveau mariage universitaire-collégial...
Mme Brault (Marie-Christine) :
Oui. Merci.
M. Tremblay : ...puis
votre travail est vraiment remarquable. Je le dis comme je le sens, on comprend
qu'il fut un temps où l'apprenant, l'élève, dans sa classe, qui perturbait la
norme pouvait se retrouver dans le coin ou...
Bon, la société a évolué, puis j'ose
imaginer qu'à un moment donné il y a quelqu'un qui... puis vous évoquez, dans
le mémoire, des symptômes, vous présentez des symptômes... donc un premier
élève bougeait les mains, avaient certaines gestuelles qui perturbaient la
norme dans la classe. Puis, à un moment donné, on a créé un échantillon à
partir de plusieurs cas comme celui-là, et puis, finalement, il y a quelqu'un
qui a callé une shot, à savoir qu'on a étiqueté ça comme étant un trouble, un
TDAH. Et puis, finalement, il y a une médication, puis, bon, tout ce qu'on est
train de comprendre à travers tout ça.
• (12 h 30) •
Maintenant, vous évoquez le fait
qu'effectivement c'est plus <large qu'une réalité de santé...
>
12 h 30 (version révisée)
<17917
M. Tremblay :
...comme étant un trouble, un TDAH, et puis finalement
il y a une
médication, puis, bon, tout ce qu'on est en train de comprendre à travers tout
ça.
Maintenant, vous évoquez le fait
qu'effectivement c'est plus >large qu'une réalité de santé, que
d'identifier un élève dans la classe puis dire : Toi, tu ne cadres pas sur
la norme qui nous permet de fonctionner de façon efficiente, on te catégorise,
on va te médicamenter, on va t'évaluer puis on te sort un peu du groupe,
finalement, on te marginalise, ou peu importe. À l'heure actuelle, au Québec,
en 2019, moi, je pense qu'effectivement c'est une réalité qui implique la
famille, la santé, l'éducation. Est-ce que vous croyez qu'on est outillés?
Est-ce qu'on est... est-ce qu'on fait fausse route, par rapport à tout ça, dans
le fond, comme société québécoise? Comment vous le voyez?
Mme Brault (Marie-Christine) :
Bien, je pense qu'à partir du moment où il y a autant d'enfants qui consomment
des médicaments, je pense qu'on fait fausse route, puis ça concerne le TDAH,
mais ça concerne aussi l'anxiété, plein d'autres troubles, là. La santé et le bien-être
de nos enfants est en jeu, en ce moment, parce que je pense qu'il n'y a jamais
eu des taux aussi élevés que ça de problèmes de détresse psychologique et
d'autres problèmes de santé mentale chez les jeunes. Donc, oui, il se passe quelque
chose, puis je ne pense pas que ce soient les médicaments qui règlent la question,
parce que les médicaments, ça reste une solution individuelle, mais là on a un
problème collectif, donc il faut trouver des solutions à d'autres niveaux.
M. Tremblay : J'aurais
une autre question, M. le Président.
Le Président (M. Provençal)
: Allez-y, M. le député.
M. Tremblay : Dites-moi,
et mon collègue de Jonquière, ma collègue de Roberval... Vous évoquiez une
disparité entre La Baie, la communauté d'origine, et puis Jonquière,
finalement, on est des voisins, comment on peut arriver à des réalités aussi
différentes? Le premier réflexe qui me vient: Est-ce que c'est la réalité
d'exposition industrielle ou, peu importe, comment on peut expliquer ça?
Mme Brault (Marie-Christine) :
En fait, c'est encore nébuleux. Je vous dirais, les chiffres que je présente, c'est
ceux de la santé publique, entre autres, du CIUSSS du Saguenay—Lac-Saint-Jean,
et on se questionne encore, parce qu'habituellement il y a une corrélation avec
le statut socioéconomique, mais là, dans les chiffres qu'on observe, il ne
ressort pas nécessairement... ce n'est pas les communautés avec le plus faible
niveau socioéconomique qui ressortent avec le plus de TDAH. En tout cas, la
corrélation n'est pas parfaite, donc on a encore de la misère à s'expliquer ça.
Mon étude, là, c'est des résultats préliminaires, je vais continuer de pousser
mon analyse, mais il y a peut-être quelque chose aussi avec les services au
niveau des commissions scolaires, peut-être, ou les services qui sont mis en
place dans les écoles, parce que... en tout cas, je sais qu'il y a des
cliniques dans la région, des cliniques TDAH qui sont peut-être plus présentes
dans certaines parties du territoire, en fait, comparativement à d'autres.
Donc, j'ai des collègues qui diraient qu'à La Baie ils sont peut-être
sous-diagnostiqués, bon, peut-être, il faut voir. Mais ça reste qu'il y a des
très grandes disparités entre les... bien, dans notre territoire, puis on ne
s'explique pas encore les raisons tout à fait, donc on continue à chercher.
M. Tremblay : Merci. Merci
d'être là.
Le Président (M. Provençal)
:Mme la députée de Roberval.
Mme Guillemette : Merci.
Donc, oui, merci d'être ici. On est très fiers de vous et de la chaire VISAJ.
Donc, moi, dans Roberval, j'ai une pédiatre, Jessica Ricard, qui a développé un
beau modèle, qui est très... en tout cas, jusqu'à maintenant, là, qui est très
porteur, c'est un modèle collectif, elle rencontre les familles, les enfants, il
y a une infirmière, une éducatrice spécialisée. En tout cas, c'est vraiment un
beau modèle, là, pour chez nous.
J'aimerais vous entendre parler un peu du
dépistage. Est-ce que ça peut être là aussi la différence des diagnostics?
Parce qu'à certains égards on m'a dit qu'un dépistage pouvait prendre plusieurs
heures, mais, des fois, on se rend compte que c'est vite fait dans le bureau du
médecin. Donc, j'aimerais comprendre un peu, là, cette dynamique-là.
Mme Brault (Marie-Christine) :
En effet. Bon, il faut dire que je ne me suis pas attardée à cet aspect-là dans
mon étude, mais, de ce que j'ai lu dans la littérature, ce qu'on constate, c'est
qu'il y a effectivement une hétérogénéité des pratiques des professionnels de
la santé à l'égard du TDAH. On dit qu'une bonne évaluation du TDAH devrait
avoir, entre autres, une évaluation faite par un neuropsychologue, ça pourrait
être une évaluation aussi où on prend en compte différents points de vue. Parce
que, quand on pose le diagnostic de TDAH, il faut que les symptômes soient
présents dans au moins deux environnements. Donc, chez des jeunes, on peut
penser que c'est l'école et la famille, ou l'école et les activités parascolaires
ou, bon, etc. Donc, effectivement, moi, j'ai... Ma <prochaine étape sera
d'aller sonder les parents, là, mais j'ai quand même beaucoup d'échos...
Mme Brault (Marie-Christine)T :
...environnement. Donc, chez des jeunes, on peut penser que c'est l'école et la
famille ou l'école et les activités parascolaires ou, bon, etc. Donc,
effectivement,
moi, j'ai... ma >prochaine étape sera d'aller sonder les parents, là,
mais j'ai quand même beaucoup d'échos de parents, de manière non officielle,
qui viennent me voir, et il y en a plusieurs qui me racontent des épisodes de
15 minutes dans le bureau du médecin, qui ressortent avec un diagnostic.
Tu sais, je ne pense pas que ça soit nécessairement la norme.
Je pense qu'il faut faire attention, là,
il y a plusieurs études, aussi, qui indiquent... Bien, en fait, ce qu'il faut
savoir, c'est que, longtemps, le diagnostic de TDAH était réservé, par exemple,
aux pédopsychiatres, était réservé aux pédiatres, puis, maintenant, c'est de
plus en plus les omnipraticiens qui posent ce diagnostic-là. Donc, peut-être
qu'on pourrait... Peut-être que ça contribue au problème, là. Je ne le sais
pas, mais, très certainement, les pratiques diagnostiques sont très hétérogènes
à ce niveau-là.
Mme Guillemette :
Parfait. Dernière question, M. le Président.
Le Président (M. Provençal)
: Oui.
Mme Guillemette : Vers
quel âge on pourrait porter un premier diagnostic?
Mme Brault (Marie-Christine) :
C'est une question intéressante. Dans mon étude, on voit qu'il y a des enfants,
dès deux ans, qui ont reçu un diagnostic puis qui consomment des médicaments.
En termes de consommation de médicaments, les guides de pratique, au niveau des
pharmaciens, disent qu'en deçà de six ans, on ne devrait pas prescrire des
médicaments à un enfant, parce que ces médicaments-là n'ont pas été testés sur
une clientèle, sur une population pédiatrique.
Au niveau du diagnostic de TDAH, bon, moi,
je ne suis pas médecin, hein, je reste sociologue, mais, avec tout ce qu'on constate,
la méprise qu'il y a entre l'immaturité puis les symptômes de TDAH,
personnellement, je ne suis pas nécessairement pour une catégorisation médicale
des enfants, parce que ça fait en sorte que ça les fige rapidement dans une
certaine catégorie. Ça fait en sorte qu'on se restreint, peut-être, ou qu'on
les voit en termes de déficits, aussi, on voit leurs déficits au lieu de voir
leurs forces. Un enfant, ça se développe très rapidement, on le sait, là, ils
évoluent rapidement. À l'intérieur d'un an, il peut y avoir des bonds
incroyables qui sont faits.
Donc, moi, personnellement, je ne
valoriserais pas une approche diagnostique très tôt. Mais, en même temps, il
faut faire quand même une certaine prévention, parce que, oui, il y a des
enfants à qui ça bénéficie d'être pris en charge le plus tôt possible.
Mme Guillemette : Merci.
Mme Brault (Marie-Christine) :
De rien.
Mme Guillemette : Merci,
M. le Président.
Le Président (M. Provençal)
: Mme la députée d'Abitibi-Ouest.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Merci, madame. Ma question est : Au niveau du Québec, vous avez fait un
sondage où il y a le plus de taux de TDAH élevés. C'est la première question :
Quels sont les endroits où ce que c'est le plus élevé? Et est-ce que vous avez
étudié aussi, au niveau du Québec, les communautés autochtones?
Mme Brault (Marie-Christine) :
Merci. D'abord, mon étude au Québec portait sur la région du
Saguenay—Lac-Saint-Jean uniquement, puis je n'ai pas encore regardé les taux,
là, je n'ai pas isolé les taux par secteurs au Saguenay—Lac-Saint-Jean. Par
contre, j'ai fait l'étude comparative avec la Flandre, puis on constate, comme
je l'ai dit tantôt, en Flandre, je pense que c'est 2,5 % de diagnostics de
TDAH dans mon échantillon, là, ce n'est pas représentatif, nécessairement, de
la population flamande ou québécoise, puis, au Québec, c'était 17,5 % de
jeunes, dans mon échantillon, qui déclarent avoir un diagnostic de TDAH. Est-ce
que j'avais des populations autochtones? Pas de manière spécifique, mais il y a
effectivement des autochtones qui ont répondu au sondage et qui se sont
déclarés comme autochtones dans la déclaration, en fait, du groupe ethnique,
puis j'ai regardé très rapidement, mais ils ressortaient avec une prévalence
plus élevée de TDAH que les autres élèves québécois.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Ma dernière question, c'est que, au niveau de votre travail de recherche,
quelle a été votre plus belle réalisation à date?
Mme Brault (Marie-Christine) :
Bien, ma plus belle réalisation, je vous dirais que c'est vraiment d'avoir pu
m'entretenir avec les enseignants. J'ai fait cinq groupes de discussion qui ont
duré au moins 3 heures par groupe de discussion, puis là j'ai fait une
vingtaine d'entretiens, là, avec des enseignants, des professionnels de la
santé en individuel, puis ça m'a vraiment donné, je pense, un beau portrait.
Puis ce que je constate le plus, c'est : oui, l'école contribue au
problème, mais les enseignants le font vraiment de bonne foi. Les enseignantes
se donnent à fond, mais elles sont en train de déchanter, actuellement, je
pense, au niveau de leurs conditions de travail et au niveau aussi du fait
qu'elles pensaient être enseignantes, donc transmettre du savoir, puis elles se
rendent compte qu'elles sont de plus en plus en train de faire de l'adaptation
scolaire, puis ça, ça les dérange.
• (12 h 40) •
Donc, ma plus belle réalisation, c'est de
mettre un bémol aussi au fait de dire : Bien, tu sais, ce n'est pas... en
fait, oui... Donc, ce que je veux qu'on retienne, c'est que, oui, l'école
contribue au problème, mais les enseignantes, il ne faut pas les <accuser
à tort, tu sais, il ne faut pas...
Mme Brault (Marie-Christine)T :
...ma plus belle réalisation, c'est de mettre un bémol aussi au fait de dire,
bien, tu sais... ce n'est pas... En fait, oui, ce que je veux qu'on retienne,
c'est que, oui, l'école contribue au problème, mais les enseignantes font... Il
ne faut pas les >accuser à tort, tu sais, il ne faut pas... En fait,
elles font ce qu'elles peuvent avec les moyens qu'elles ont, là, aussi, à
l'heure actuelle.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Merci beaucoup.
Le Président (M. Provençal)
:M. le député de Dubuc.
M. Tremblay : Oui,
merci, M. le Président. Dites-moi, on est au Saguenay—Lac-Saint-Jean... Par
rapport au Québec, peu importe, si on considère qu'il y a des diagnostics qui
sont donnés en 15 minutes, puis qu'on pourrait croire que c'est rapide, est-ce
que vous pensez que la Santé de la société du Québec devrait renforcer les
protocoles ou les mécanismes de diagnostic, par rapport... Je donne un exemple :
s'il y a un diagnostic qui est donné en 15 minutes, ce qui est quand même
grave, en tout cas, dans la perspective où ça peut être un mauvais diagnostic, est-ce
qu'on ne devrait pas obliger un deuxième diagnostic ou un resserrement du
protocole de diagnostic pour s'assurer finalement de...
Mme Brault (Marie-Christine) :
La validité, oui.
M. Tremblay : Oui, puis
donner de la sécurité à nos enfants aussi par rapport à ça.
Mme Brault (Marie-Christine) :
Bien, c'est intéressant, votre question, parce que je pense que oui, puis les
médecins qui vont venir, que vous allez entendre, je pense qu'ils vont très
certainement vous parler de ça. Je sais que les pédiatres, entre autres, ils
ont soulevé la question, là, d'avoir vraiment des tests de diagnostic peut-être
plus fiables et qui s'appliquent peut-être plus au Québec.
Mais moi, j'ai le goût de vous dire :
Avant d'arriver au diagnostic, il y a plusieurs affaires qu'on peut faire
aussi, hein, s'assurer que tout le monde, là, ait accès à des services. Puis on
essaie de mettre en place une approche inclusive dans les écoles au Québec,
mais faisons-la pour vrai. Donc, je pense qu'en faisant ça on va aider à la
fois les enfants qui ont peut-être des problèmes au niveau du TDAH, on va aider
tout le monde. Donc, j'aurais le goût d'essayer de dire... Oui, c'est ça, donc,
de ne pas attendre d'être arrivé au niveau du diagnostic pour agir, donc de
mettre en place des ressources dès le départ, puis peut-être avoir un milieu
scolaire aussi plus flexible.
Je faisais état, dans mon mémoire, du
rapport qui a été publié par... de l'avis, en fait, qui a été fait par le Conseil
supérieur de l'éducation en 2017. Puis ils ont un chapitre complet sur la
médicalisation des difficultés scolaires, et ce chapitre-là est fantastique. Il
donne plusieurs pistes de solution, et je pense qu'on pourrait essayer ça
aussi, et pas juste faire des actions dans le milieu médical au niveau des
pratiques, qui, bien sûr, doivent être renforcées, mais... C'est ça.
M. Tremblay : Merci.
Le Président (M. Provençal)
: ...
Mme Picard : Moi,
j'aimerais vous entendre sur l'activité physique, comment ça peut aider les
jeunes par rapport à un TDAH. Est-ce que vous avez fait cette évaluation-là?
Mme Brault (Marie-Christine) :
Bien, non. Je n'ai pas étudié ça. Mais, quand même, je pense que l'activité
physique est bénéfique pour tous les jeunes, hein? Qu'ils aient un TDAH, qu'ils
aient, en tout cas, des comportements d'hyperactivité et d'inattention. Moi,
j'ai deux garçons, puis je sais que, quand ils ne bougent pas assez dans leur
journée, ça paraît. Donc, je pense que l'éducation physique, très certainement,
c'est un facteur important, surtout, c'est un facteur important, mais c'est un
facteur aussi qui... Quand on donne le goût aux jeunes de faire du sport, bien,
c'est quelque chose qui continue même à l'âge adulte, puis c'est bon, là, à
tous les niveaux de leur développement, personnel, professionnel, etc. Donc, je
pense qu'il faut effectivement augmenter, bien, l'offre, le temps, la
possibilité aux jeunes de bouger et faire de l'exercice.
En lien avec le TDAH, je pense que ça a
été démontré que ça aidait, que ça pouvait être une solution aussi pour,
justement diminuer la consommation de médicaments. De les faire bouger, je
pense, que c'était associé à une augmentation de... une amélioration de leur
niveau de concentration, entre autres.
Le Président (M. Provençal)
: Merci. La parole est maintenant à la députée de Fabre.
Mme Sauvé : Oui. Merci,
M. le Président. Alors, Mme Brault, c'est un plaisir de vous entendre.
Merci pour les constats éloquents qui viennent de votre recherche très
documentée et très précieuse. J'ai lu, avec beaucoup d'intérêt, votre mémoire
et je suis... Dans le fond, à lire vos constats, et... Bien humblement, je vous
dirais que ça fait écho un peu à ce que j'entends, ce que je vois et ce que je
peux comprendre, avec, bien, sûr toute votre science à vous.
Moi, j'ai entendu des propos que vous avez
nommés, puis qui... au-delà de ce que je retrouve dans le mémoire, qui me
jettent un peu par terre. Quand j'entends que des professionnels de la santé
ont baissé les bras parce que la pression de l'école et des parents est
tellement grande pour aller vers la médication, alors ça me perturbe beaucoup.
Et je voudrais savoir, dans le fond, dans un premier temps, est-ce que... puis
vous avez nommé, bien sûr, que les médecins de famille sont les principaux
professionnels qui font les diagnostics... Auparavant, il y a plusieurs années,
c'étaient <davantage les neuropsychiatres.
Mme Sauvé :
...et je voudrais savoir,
dans le fond,
dans un premier temps,
est-ce
que... Puis vous avez nommé,
bien sûr, que les
médecins de
famille sont les principaux
professionnels qui font les diagnostics. A
uparavant,
ailleurs
plusieurs années, c'étaient >davantage les
neuropsychiatres, qui ont une formation, évidemment. Parce qu'on s'entend que
le TDAH, il n'y a pas de test médical et il y a une interprétation clinique,
mais il y a un aspect subjectif, tel que vous l'avez nommée dans votre mémoire.
Alors, par rapport à la pression qui se
vit des professionnels de la santé, est-ce qu'on n'est pas aussi dans une
compétence qui n'est plus la même dans l'appréciation et la démarche vers le
diagnostic? La démarche vers le TDAH avec un neuropsychiatre, on n'est pas dans
le 15 minutes. Et là, quand on sait que la majorité des diagnostics sont
faits par les médecins de famille, puis, sans faire le procès de personne, mais,
dans les constats, est-ce qu'on ne peut pas se questionner véritablement si la formation
pour le diagnostic du TDAH par rapport aux médecins qui le font... est-ce que
la compétence est au rendez-vous?
Mme Brault (Marie-Christine) :
Oui, vous soulevez un bon... Bien, vous soulevez un bon point. Mais je pense
que les médecins, des fois, ils se disent : Essayons les médicaments. Si
ça fonctionne, bien, le parent va être content, le parent va être soulagé,
l'élève va réussir à l'école, l'école va arrêter de mettre de la pression. Ils
voient ça peut-être comme un moindre mal, je vous dirais.
Ceci dit, je pense qu'il faut se questionner...
puis je reviens en amont, là, des professionnels de la santé, il faut se questionner
aussi pourquoi... Pourquoi on recherche ce diagnostic-là? La question de la
performance scolaire, elle est à la base de ce diagnostic-là. Quand on dit qu'il
y a une pression, bien, les parents sentent de la... les parents veulent que
leur enfant réussisse aussi. L'école veut que les enfants réussissent. On sait
que le fait d'avoir un diagnostic peut amener des services, amène de la
médication qui... En passant, la médication pour le TDAH fait des effets sur tout
le monde, qu'on ait les symptômes d'hyperactivité ou d'inattention... on va
tous être plus concentrés en prenant ces médicaments-là. Donc, il y a très certainement
un bénéfice à prendre ces médicaments-là.
Donc, je pense que les médecins, ils...
comment dire, ils doivent... Tu sais, ils voient ça comme une solution qui peut
être un moindre mal, qui peut être de dire : Bien, écoutez, on va donner
une médication puis après on va essayer de trouver la vraie cause, aussi. Parce
que j'ai vu ça aussi, j'ai eu ce discours-là, dans le sens qu'on utilise souvent
le TDAH aussi comme une première porte d'entrée dans le système, comme une
première... Bon, on règle le TDAH puis, après ça, on va aller creuser davantage
pour voir si ce n'est pas un trouble d'apprentissage, pour voir s'il n'y a pas quelque
chose d'autre en dessous de ça. Donc, je ne sais pas si je réponds à votre question,
mais...
Mme Sauvé : Oui.
Le Président (M. Provençal)
:Mme la députée.
Mme Sauvé : Merci, M. le
Président. Écoutez, dans les autres constats... puis vous avez nommé, et j'en
suis, quand vous dites qu'il y a des suggestions, il y a des recommandations qui
pourraient permettre, entre autres, d'être plus dans une approche globale,
multiprofessionnelle dans les milieux scolaires... En même temps, quand je lis
votre mémoire et qu'on compare la situation en Flandre et au Québec, on voit
qu'en Flandre les professionnels de la santé ne sont pas dans les écoles, alors
qu'au Québec ils le sont. Alors, finalement, il y a déjà une présence, il y a déjà
cette multidisciplinarité-là qui existe au Québec. Alors, pourquoi on n'y
arrive pas, alors qu'on devrait avoir une longueur d'avance?
Mme Brault (Marie-Christine) :
Bien, je pense qu'il y a des très grandes différences entre le Québec et la
Flandre, notamment au niveau des croyances à l'égard du TDAH. J'ai fait passer
un questionnaire aux enseignants qui détermine, justement, s'ils pensent que le
TDAH est dû à l'environnement, à un problème plutôt d'ordre politique, moral,
ou si c'est vraiment lié à des déficits cognitifs, des déficits neurologiques,
etc.
Puis ce qu'on constate, c'est qu'au Québec
il n'y a pas une très grande variabilité dans les croyances des enseignants à
l'égard du TDAH. C'est principalement la vision biomédicale qui domine. Donc,
les enseignants pensent que le TDAH, ça relève vraiment d'un problème
individuel, biologique, donc immuable, presque, alors qu'en Belgique ce
modèle-là ne ressort pas en priorité. C'est vraiment l'environnement, c'est vraiment
des stratégies d'apprentissage, des stratégies dans l'environnement scolaire
qui viendraient expliquer, selon eux, les comportements associés au TDAH. Donc,
c'est très intéressant, je pense, de constater ça, d'une part.
• (12 h 50) •
D'autre part, en Belgique, les <psychologues
ne peuvent pas diagnostiquer le TDAH, alors qu'au Québec ils le peuvent. Et
d'autant plus qu'il n'y a de psychologues scolaires en Belgique. Ils
sont vraiment dans une approche d'inclusion scolaire où ils essaient vraiment
de faire tout en leur pouvoir pour faire des...
Mme Brault (Marie-Christine)T :
...je trouve ça
intéressant, je pense, de constater ça, d'une part.
D'autre part, en Belgique, les >psychologues
ne peuvent pas diagnostiquer un TDAH, alors qu'au Québec ils le peuvent, et
d'autant plus qu'il n'y a pas de psychologue scolaire en Belgique. Ils sont vraiment
dans une approche d'inclusion scolaire, où ils essaient vraiment de faire tout
en leur pouvoir pour faire des stratégies dans la classe, et c'est juste une
fois que les enseignants ont démontré qu'ils ont tout fait qu'ils contactent
une instance qui est comme affiliée au ministère de l'Éducation. Cette
instance-là va même venir dans leur classe vérifier qu'ils ont mis en place
toutes les stratégies possibles et impossibles, et, ensuite de ça, ils vont
faire une recommandation pour que les parents... en fait, ils vont faire une recommandation
aux parents d'aller consulter au médical pour voir pour le problème.
Le Président (M. Provençal)
:Mme la députée de Vaudreuil.
Mme Nichols : Bien, je
trouve ça intéressant, la comparaison, puis évidemment on ne connaît pas ça,
là, on vous écoute, on vous entend. Votre avis, par rapport à la comparaison,
est-ce que vous trouvez que c'est plus avantageux peut-être de la façon qu'ils
fonctionnent en Belgique?
Mme Brault (Marie-Christine) :
Bien, je pense qu'il y a des pour et des contre, puis il y a, sans doute, des
collègues qui diraient que c'est sous-diagnostiqué en Belgique, très certainement,
là, parce qu'il y a toujours des gens qui ont cette approche-là aussi.
Je ne pense pas que ce soit nécessairement
mauvais au Québec qu'il y ait des psychologues dans les écoles, je pense que ça
peut aider plusieurs enfants, ça devrait, en principe, même accélérer, tu sais,
bien, l'aide, de donner les ressources aux enfants, en fait, quand ils en ont
besoin.
Là où je me questionne, c'est qu'au Québec
on est vraiment dans une approche médicale, puis ça, je pense que c'est
problématique, parce que, comme j'ai dit tantôt, ce n'est pas la solution de
donner un diagnostic trop tôt, je pense que ça fige l'élève, ça fige qui il
est, ça peut avoir beaucoup d'impacts aussi d'avoir un diagnostic inapproprié
ou même un diagnostic approprié, mais de l'avoir, ça peut amener une
stigmatisation, ça peut amener des effets sur l'estime de soi, la consommation
de médicaments aussi, ça a des effets secondaires.
Donc, tu sais, je pense qu'il y aurait un
peu des deux. Il faut apprendre de la Belgique, il ne faut pas nécessairement
jeter le bébé avec l'eau du bain, hein, on a un modèle ici qui peut être intéressant,
mais il faut quand même faire attention, je pense.
Le Président (M. Provençal)
: Il reste deux minutes.
Mme Sauvé : Merci, M. le
Président. Je voulais revenir un peu sur la disparité régionale, parce qu'on
essaie de comprendre, hein, on essaie, avec vous, de comprendre davantage ce qu'il
se passe. Et, quand j'entends effectivement la réalité de la prévalence d'une
région à l'autre, c'est quand même assez troublant, parce qu'on regarde la
moyenne par rapport aux autres provinces du Canada et ailleurs, mais, en même
temps, de région en région, ça vient teinter la moyenne. Alors, est-ce qu'on
peut... vous avez nommé un peu ce qui peut être sous-jacent, ce qui peut
expliquer, mais est-ce que ça ne mériterait pas qu'on puisse s'attarder davantage
à mieux comprendre pourquoi, d'une région à l'autre, il y a cette disparité-là
aussi grande?
Mme Brault (Marie-Christine) :
Ah! tout à fait, il faut essayer de comprendre qu'est-ce qu'il se passe, mais je
pense que ça demande quand même plus de recherche. Moi, mon étude que je fais actuellement,
c'est un début, mais je pense qu'il faut mieux comprendre aussi comment l'école
contribue au diagnostic, comment les politiques scolaires, en fait... parce qu'il
y a des politiques scolaires, mais, après, il faut voir comment elles sont
aussi mises sur le terrain, tu sais, comment est-ce qu'elles sont utilisées sur
le terrain, ces politiques-là. Est-ce que certaines écoles, dans une certaine
région, ont des façons de faire qui expliqueraient qu'ils ont moins de TDAH ou
qu'ils en ont plus aussi?
Donc, j'espère que mes analyses, quand
elles vont être poussées davantage, permettront de répondre peut-être à ces
questions-là. Pour l'instant, je ne peux pas vraiment m'avancer parce que je me
questionne quand même, là, à savoir qu'est-ce qu'il se passe.
Le Président (M. Provençal)
: Je céderais la parole au député de Jean-Lesage.
M. Zanetti : Merci, M. le
Président. Merci beaucoup, Mme Brault, pour votre exposé, c'est vraiment
éclairant. Quand j'enseignais au collégial, quand il y avait des étudiantes ou
étudiants qui avaient des diagnostics de TDAH, avec des mesures adaptées, on
m'envoyait une lettre qui expliquait c'est quoi, le TDAH. Puis, dans cette
lettre-là, essentiellement, on disait que c'est une condition... un problème
neurologique. Est-ce qu'à votre connaissance cette façon-là de fonctionner est
largement répandue dans les institutions scolaires, autant présecondaires que
postsecondaires et puis secondaires, primaires, tout ça? Est-ce qu'à votre connaissance,
là, c'est répandu comme façon de faire?
Mme Brault (Marie-Christine) :
Vous voulez dire si c'est répandu, le fait de penser que le TDAH est
neurologique, ou d'avoir des mesures d'adaptation?
M. Zanetti : De le
présenter au corps enseignant comme étant la <vérité.
Mme Brault (Marie-Christine)T :
Ah oui! Oui,
tout à fait,
tout à fait,
tout à fait, là.
Dans mes entretiens avec les enseignants, tu sais, les enseignants, ils me le
disent, là : Bien, le TDAH, c'est génétique, puis ils me disent, hein,
parce que ces petits milieux aussi au
Saguenay—Lac-Saint-JeanT, souvent,
les enseignants connaissent
très, très bien les parents, connaissent
très
bien la famille parce qu'ils les ont...
M. Zanetti : ...la >vérité.
Mme Brault (Marie-Christine) :
Ah! oui. Oui, tout à fait. Tout à fait, là, dans mes entretiens avec les
enseignants... Tu sais, les enseignants, ils me le disent, là, bien, le TDAH,
c'est génétique. Puis, ils me disent... hein, parce que c'est des petits
milieux au Saguenay—Lac-Saint-Jean, souvent, les enseignants connaissent très,
très bien les parents, connaissent très bien la famille, parce qu'ils les ont
comme voisins ou parce qu'ils leur ont enseigné... puis ce qu'ils me disent
souvent, c'est : Bien, on le sait, le parent, il a un diagnostic de TDAH,
donc l'enfant, oui, il en a un. Hein, les chats... Ils m'ont dit : Les
chats ne font pas des chiens ou les chiens ne font pas des chats, là, quelque
chose comme ça. Donc, oui, là, pour eux, c'est vraiment médical.
M. Zanetti : Quel
avantage une société a à dire que ces comportements-là originent d'un problème
neurologique?
Mme Brault (Marie-Christine) :
Bon, moi, je suis sociologue, alors ça m'inquiète beaucoup. Puis, en même
temps, tu sais, je ne veux pas stigmatiser les gens qui ont le diagnostic, là,
bon, ou qui pensent autrement que moi, mais, moi, personnellement, les
étiquettes, je n'aime pas ça, parce que ça oblige, on dirait, d'abord,
l'individu à se conformer à cette étiquette-là. Donc, ça fait en sorte aussi
qu'on recherche une certaine homogénéité dans les comportements.
L'individualité, l'unicité, elle est un peu mise à l'écart, elle n'est pas
valorisée.
Puis aussi je voulais dire... qu'est-ce
que je voulais dire? Ça m'échappe. Mais… oui, mon idée m'a échappé. Mais, bon,
tout ça pour dire que je ne trouve pas que c'est... en tout cas, je ne trouve
pas que c'est une façon de faire. Je ne nie pas qu'il y a des enfants qui ont
besoin d'aide, là, puis pour lesquels ça ne va pas bien, mais je pense qu'il
faut essayer de trouver la cause, en fait, de qu'est-ce qui ne va pas bien.
Puis je voulais juste porter votre attention, ce matin, dans Le Devoir,
hein, c'est la commission Laurent, actuellement, puis ils ont interviewé ma
collègue Delphine Collin-Vézina, qui dit vraiment que le mauvais comportement
est un symptôme plutôt qu'un problème, puis qu'on doit être capable, comme
adulte, d'aller voir qu'est-ce qui se cache derrière ce symptôme-là, puis je
pense que ça s'applique totalement aux symptômes d'hyperactivité et
d'inattention, là. Donc...
Le Président (M. Provençal)
: Merci. Alors, on complète avec le député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui.
Merci. Je suis très fier d'avoir le représentant de la seule chaire cégep,
université, c'est le cégep de Jonquière, donc, côté chauvin très exacerbé ici.
Moi, ça me fait littéralement halluciner,
là, de penser que parce que t'es un garçon né en septembre, dans la MRC
Lac-Saint-Jean-Est, tu as bien plus de chances d'avoir une prévalence TDAH
qu'ailleurs au Québec, ou ailleurs au Canada, ou en Flandre. Je veux dire, il y
a quelque chose de fou là-dedans. Puis, en même temps, pour moi, le point fort
de votre mémoire, c'est que, d'un point de vue sociologique, c'est le «contexte
social et normatif qui transforme ces comportements en maladies et qui les
désigne sous un registre de diagnostics pathologiques». Alors, c'est une belle
façon... bien, belle, en tout cas, c'est une façon très bien exprimée de dire
que d'un comportement sociologique, avec le temps... puis je sais que notre
président est un ancien prof de longue date, directeur d'école... avec le
temps, ça s'est transformé en maladie ou, en tout cas, on l'a perçu comme
maladie. Beaucoup d'enseignements dans ce que vous nous dites.
Là, vous avez la chance unique de pouvoir
vous adresser à des parlementaires en commission sur le TDAH. Il faut qu'on
pense déjà, nous, à nos recommandations à la fin de cette commission
parlementaire. Vous nous recommandez quoi de recommander? Si vous aviez, là, si
vous étiez assise à notre place et vous teniez le crayon, là, ou le clavier de
notre commission, ce serait quoi la première recommandation que vous nous
suggériez?
Mme Brault (Marie-Christine) :
C'est vraiment difficile comme question, O.K., parce que je me suis vraiment
questionnée, je me questionne encore, et je vais sans doute me questionner
longtemps à savoir c'est qu'est-ce qu'il faut faire. Je pense que la première
action, c'est de décloisonner, là, le problème, comme je l'ai dit, c'est-à-dire
d'inclure la Santé, et l'Éducation, puis la Famille dans l'équation. Donc,
quand vous allez réfléchir aux solutions, il faut que ces trois acteurs-là
soient à la table.
Ensuite de ça, je dirais, je dirais qu'il
faut... Je pense qu'on n'a pas le choix, comme société, de réfléchir à
l'importance de la performance dans notre société. Parce que, quand je dis
qu'on a une médicalisation des difficultés scolaires, ça veut dire que, quand
il y a des faibles résultats scolaires, on s'inquiète, puis on lève le drapeau,
puis on pense que ça peut être dû à un problème médical.
• (13 heures) •
Donc, je pense que la première étape serait
de faire des actions dans le milieu scolaire. Il faut faire attention, au
Québec, on a un système à trois vitesses, on a un système scolaire
inégalitaire. Je pense que les résultats scolaires doivent arrêter de limiter
les chances des enfants, puis je m'explique, là, dans le sens qu'au primaire,
puis les enseignants, ils me le disent, c'est important, au primaire, d'avoir
des bonnes notes, parce que les jeunes, ils choisissent, au secondaire, un
certain <profil, puis ce n'est pas tout le monde qui ont les...
>
13 h (version révisée)
< Mme Brault (Marie-Christine)T :
...
je pense que les résultats scolaires doivent arrêter de limiter les
chances des enfants puis je m'explique, là, dans le sens qu'au primaire... puis
les enseignants, ils me le disent,
c'est
important au primaire
d'avoir des bonnes notes
parce que les jeunes, ils choisissent au
secondaire un certain >profil. Puis ce n'est pas tout le monde qui ont
les mêmes chances d'accéder à ces profils-là. Donc, tu sais, si le public
régulier était aussi stimulant que le public enrichi ou que le privé, bien, peut-être
qu'on ne serait pas à la course au diagnostic puis à la course à la médication.
Le Président (M. Provençal)
: Merci. Merci, Mme Brault, pour votre contribution à
nos travaux.
La commission suspend ses travaux jusqu'à
15 heures. Merci beaucoup de votre contribution.
(Suspension de la séance à 13 h 1)
15 h (version révisée)
(Reprise à 15 h 6)
Le Président (M. Provençal)
: La Commission de la santé et des services sociaux reprend
ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir
éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.
Nous poursuivons les consultations
particulières et auditions publiques dans le cadre du mandat d'initiative
concernant l'augmentation préoccupante de la consommation de psychostimulants
chez les enfants et les jeunes en lien avec le trouble déficitaire de
l'attention avec hyperactivité.
Cet après-midi, nous entendons les
organismes suivants : la Clinique FOCUS, représentée par la Dre Annick
Vincent, et le Dr Benoît Hammarrenger. Alors, Madame... Excusez.
Avant, étant donné que, comme la séance
commence à 15 h 6, y a-t-il consentement pour poursuivre nos travaux
au-delà de l'heure prévue, c'est-à-dire jusqu'à 16 h 36?
Des voix
:
Consentement.
Le Président (M. Provençal)
: Merci. Je souhaite maintenant la bienvenue au Dr Annick
Vincent, représentant la Clinique FOCUS. Je vous rappelle que vous disposez de
10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange
avec les membres de la commission. Je vous invite à vous présenter et à
commencer votre exposé. À vous la parole, madame.
Clinique FOCUS
Mme Vincent (Annick) :
Bonjour. Merci de m'avoir invitée. Donc, je suis médecin psychiatre spécialisée
en TDAH. Je travaille à Québec au sein d'une clinique multidisciplinaire. Dr
Michel Sirois, qui est médecin de famille, qui est cofondateur de la clinique,
excuse son absence, il est actuellement à l'extérieur du pays.
Alors, ce qu'on a fait, c'est qu'on s'est
dit : Bon, qu'est-ce qu'on voudrait vous dire, ne sachant pas vos
questions? Alors, dans ce contexte-là, on s'est dit: En premier, ce qu'on
pourrait peut-être faire, c'est mettre la table sur qu'est-ce que le TDAH. Pour
vraiment cibler sur pourquoi c'est si important de le traiter, il faut savoir
qu'est-ce que le TDAH.
Donc, le TDAH, c'est un trouble qui est
neurodéveloppemental, qui entraîne une difficulté de la modulation de
l'autogestion au niveau des idées, au niveau des mouvements, donc la bougeotte,
des comportements, ce qui donne de l'impulsivité, et parfois des émotions, de
l'hyperréactivité émotionnelle.
Pourquoi on en parle? Dans TDAH, il y a un
T pour trouble, et c'est, justement, à cause des impacts fonctionnels qu'il est
si important d'être capable de faire un dépistage au moment opportun, le plus
précoce possible, pour bien outiller la personne à mieux vivre avec son TDAH.
Première chose, le TDAH entraîne des
difficultés importantes au niveau des rythmes de vie, au niveau, ne serait-ce
que mettre des routines en place, d'être capable d'autogérer son temps, son
espace, son organisation. Il y a 75 % des gens qui ont un TDAH qui ont de
la difficulté au niveau de leur sommeil, donc ils retrouvent à être en
déprivation de sommeil. On a aussi des troubles alimentaires associés au TDAH.
Le TDAH est un facteur de risque au niveau de l'obésité, je ne sais pas si vous
le saviez.
On a, du côté de l'activité physique, deux
volets, soit qu'on en fait trop, donc on se blesse et on continue au niveau de
l'hyperactivité physique, si je peux dire, ou on a l'autre volet… de
sédentarité. On peut avoir un problème dans l'autogestion de la consommation,
que ce soit au niveau des boissons énergisantes, du café, du tabac. Le
tabagisme, entre autres, avant l'âge de 12 ans est un facteur de risque
chez ceux qui ont un TDAH de s'en aller vers des problèmes de consommation plus
sévères au niveau de consommation de drogues, consommation d'alcool aussi.
On a de plus en plus de littérature au
niveau du fait que le TDAH est un facteur de risque au niveau de la difficulté
à gérer le temps d'écran. On sait que c'est difficile, gérer le temps d'écran
sans TDAH, mais c'est vraiment plus difficile chez les jeunes et les moins
jeunes qui ont un TDAH. Donc, on a plus de problématiques au niveau de la
gestion des réseaux sociaux, l'utilisation d'Internet, le gaming et puis même
le... addict aux séries. Donc, de la difficulté, donc, à décrocher des écrans.
On a aussi des difficultés financières associées aux dépenses impulsives.
• (15 h 10) •
Si on regarde des autres impacts, on a,
pour la plupart des gens qui ont un TDAH, ces gens-là performent en dessous de
leur potentiel, et ça, ça a un impact majeur autant pour la personne, ses
proches, et sur le plan sociétal. Souvent, on pense TDAH, on pense école, mais
il faut aussi sortir le <TDAH de l'école, penser aussi aux difficultés...
Mme Vincent (Annick)T :
...si on regarde des autres impacts, on a, pour la plupart des gens qui ont un
TDAH, ces gens-là performent en dessous de leur potentiel et ça, ça a un impact
majeur, autant pour la
personne, ses proches et sur le plan sociétal.
Souvent,
on pense TDAH, on pense école, mais
il faut aussi sortir le >TDAH
de l'école, penser aussi aux difficultés relationnelles, aux difficultés
familiales. L'impact que ça peut avoir, la dépense énergétique, pour compenser
les symptômes du TDAH est importante. On a souvent un épuisement au niveau de
la personne elle-même, au niveau de ses proches et au niveau, donc, du milieu.
L'estime de soi, c'est souvent le premier impact sur lequel, je dirais, il y a
un drapeau qui lève et pour lequel on va décider, on s'en va vers un
traitement.
Le TDAH est un facteur de risque au niveau
de développer des troubles anxieux, des maladies de l'humeur, dépression, et
c'est même un facteur de risque associé avec la maladie bipolaire. On ne
connaît pas encore le risque, si c'est génétique ou si c'est un qui impacte
l'autre. On a parlé des problèmes de consommation, la consommation amène aussi
de la délinquance. Si on regarde au niveau de nos prisons, on a un estimé qu'à
peu près 25 % des personnes incarcérées ont un TDAH et autre chose, mais
on sait aussi qu'arriver à traiter le TDAH réduit le risque de délinquance.
J'ai parlé de l'obésité.
Au niveau des accidents, on peut penser au
niveau des accidents de la route comme conducteur, mais c'est aussi comme
piéton. Donc, on a trois fois plus d'accidents chez les gens qui ont un TDAH que
dans la population générale. On a plus de risques d'avoir des traumatismes
crâniens ou cérébraux. D'autres types d'accidents, qui se passent peut-être
plus sur le siège arrière de la voiture, c'est les grossesses non planifiées.
Alors, on a aussi plus de maladies transmissibles sexuellement dans la population
TDAH non traitée. Et pourquoi j'insiste pour le non traité, c'est qu'on a des
études qui nous montrent que, si le TDAH est traité, on réduit ces risques-là.
L'autre chose qui émerge actuellement au niveau de la littérature, avoir un
TDAH et une maladie chronique fait en sorte que la maladie chronique est moins
bien prise en charge. Alors, on a, entre autres, une littérature au niveau du
diabète et au niveau de l'asthme.
Ce que j'aimerais que vous reteniez par
rapport au TDAH : un, c'est un trouble neurodéveloppemental. La fréquence
du TDAH au niveau des statistiques de la prévalence, c'est autour de 5 % à
8 %, peut-être même 10 % chez les enfants, et au moins la moitié
conservent des symptômes assez significatifs à l'âge adulte. On a des impacts,
on vient d'en parler.
Le diagnostic, c'est compliqué, faire un
diagnostic de TDAH. On n'a pas de test médical, comme par exemple un test de
grossesse ou une glycémie pour le diabète. On se base sur des entrevues, sur
des questionnaires, ça demande de l'expertise de la part du clinicien et ça
demande beaucoup de temps. Il y a beaucoup de choses qui ressemblent au TDAH,
il y a beaucoup de choses qui peuvent compliquer le TDAH. Donc, ça aussi, ça
complique la démarche diagnostique. Et pourquoi on traite? C'est justement pour
réduire les impacts associés au TDAH et permettre à la personne d'atteindre son
plein potentiel.
Ceci étant dit, la question qu'on se pose,
c'est : Comment ça se fait qu'on a des augmentations de prescriptions au
niveau des ordonnances pour traiter le TDAH? On ose penser qu'une partie de ça,
c'est qu'on fait un meilleur dépistage de nos jeunes qui ont un TDAH. On a
aussi des meilleures approches thérapeutiques aujourd'hui qu'on avait il y a
20 ans, avec des traitements qui sont mieux tolérés et plus efficaces, ce
qui fait que les gens atteints choisissent de continuer leur traitement par
rapport à avant. On a aussi parfois une combinaison de deux traitements, par
exemple, un longue action pris le matin et un courte action au besoin en fin de
journée pour compléter la journée.
Je crois que ce qui préoccupe les gens
ici, ce n'est pas cette partie-là, c'est : Est-ce qu'on fait un
surdiagnostic et qu'est-ce qu'il se passe dans certaines régions du Québec où
on a un pattern de prescription qui est différent? Par rapport au
surdiagnostic, une des interrogations c'est : Est-ce qu'on passe à côté de
problématiques qui miment ou qui aggravent le TDAH? Et on pourrait se poser la
question sociétale sur est-ce que notre rythme de vie actuellement aggrave les
symptômes de TDAH. Et aussi, dans notre milieu scolaire, est-ce qu'on n'aurait
pas un milieu scolaire qui induit de l'anxiété chez nos enfants, qui challenge
nos enfants peut-être au-delà de ce qu'un enfant dit normal peut atteindre au
niveau performance?
Maintenant, une question qui est
importante, et ça ne touche pas que le TDAH : À quoi ça sert, un
diagnostic? Le diagnostic, il n'égale pas médication. Le diagnostic est pour
identifier le problème, engager la personne et ses proches dans le traitement
et intervenir avec des stratégies spécifiques, démontrées, efficaces, et
j'insiste sur le spécifiques, démontrées, efficaces.
Parce qu'il y a des choses qu'on peut
faire en amont. En amont d'un diagnostic, quelqu'un qui se plaint de fragilité
attentionnelle ou de problèmes de comportement, il y a des interventions non
spécifiques qui peuvent être faites et qui ne devraient pas avoir besoin
d'avoir un diagnostic pour être accessibles à la population québécoise.
Au niveau de la démarche diagnostique, je
vous rappelle que ça prend des gens qui sont qualifiés pour le faire. On a
souvent besoin d'une approche interdisciplinaire pour faire la collecte
d'informations, et un questionnaire dit positif ne veut pas dire TDAH. Donc, il
faut aussi qu'on ait, donc, une démarche diagnostique et d'avoir un regard au
niveau de l'évaluation.
Une fois le diagnostic fait, la première
étape du <traitement, c'est que la personne puisse s'éduquer par rapport
à son TDAH, que ses proches et lui-même puissent...
Mme Vincent (Annick)T :
...questionnaire dit positif ne veut pas dire TDH. Donc, il faut aussi qu'on
ait, donc, une démarche diagnostique, et d'avoir un regard
au niveau de
l'évaluation.
Une fois le
diagnostic fait, la
première étape du >traitement, c'est que la personne puisse s'éduquer
par rapport à son TDAH, que ses proches et lui-même puissent avoir de la
guidance par rapport aux stratégies parentales, par exemple, par rapport à tous
les impacts qu'on parlait tout à l'heure sur les rythmes de vie, les habitudes
de vie, et avoir des stratégies d'autogestion du temps, de l'espace et des
émotions. Il y a des stratégies spécifiques en psychothérapie qui peuvent être
très intéressantes pour les personnes atteintes et il y a des mesures
adaptatives qui peuvent être mises en place au niveau du système scolaire et
aussi en milieu de travail. La place de la médication dans tout ça, c'est quand
ces stratégies-là ne sont pas suffisantes ou encore coûtent trop cher, non pas
en argent, mais en temps et en énergie pour arriver à compenser.
Et c'est là où, du côté médical, on peut
proposer ce que j'appellerais une paire de lunettes biologiques pour aider à
traiter le TDAH. Mes lunettes que j'ai dans les yeux me permettent de voir les
lettres, elles ne me font pas lire. La médication, quand quelqu'un est TDAH,
lui permet d'avoir la stimulation, sur le plan neurobiologique, de zones
cérébrales qui ont une difficulté à s'activer quand on a un TDAH. Ça ne donne
pas les stratégies organisationnelles, ça ne te permet pas de travailler le
côté relationnel, ça ne donne pas des meilleures capacités parentales, O.K.?
Donc, la médication doit être complémentaire. Et j'aime bien, excusez, c'est en
anglais, mais l'expression des anglophones, «pills don't build skills». Donc,
la médication a une place, et les approches non pharmacos ont une place aussi,
et elles ne devraient pas être mises en opposition l'une avec l'autre.
Les stratégies, maintenant, rapido, c'est
vraiment de mettre le jeune au coeur de nos actions, d'adopter un modèle qui
est inclusif, avec un accès précoce au service, une approche qui est
collaborative. Et on se pose la question : Qui va faire quoi et avec
quelles ressources?
Juste vous parler de quelques pistes de
solution, on parle d'un programme qui serait universel, en amont d'un diagnostic
pour le côté information, guidance et soutien, un dépistage qui est précoce. On
évite l'approche en silo, O.K., parce qu'il y a tellement de choses qui sont
concomitantes, on travaille en équipe. Vous allez avoir la présentation du
groupe CIRENE, je crois que c'est quelque chose que... vous devriez porter une
bonne attention. L'INESSS va venir présenter, je suis sur le comité de
rédaction pour le CADDRA, donc, si vous avez des questions là-dessus.
Et je voulais prendre les dernières
secondes pour vous donner les outils qu'on a monté pour la Clinique FOCUS qui
sont disponibles sur le Web. Si ça vous intéresse, je vous invite à aller les
visiter. Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup, Dre Vincent. Nous allons débuter l'échange
avec la députée de...
Une voix
: ...
Le Président (M. Provençal)
: Non, c'est... Chicanez-vous pas, là. La députée de Soulanges.
Mme Picard : Merci
beaucoup pour toute votre expertise dans le dossier, qui va nous être vraiment
profitable. Moi, à la lumière de ce que vous avez dit aujourd'hui, j'avais une question
par rapport à l'estime de soi. Vous avez dit que c'était majeur, qu'il fallait
s'occuper de l'estime de soi. J'aimerais que vous m'en disiez plus à propos, vraiment,
de l'estime de soi des enfants.
Mme Vincent (Annick) :
Alors, au niveau de l'estime de soi, vous savez, le sentiment de compétence, il
y a plein d'éléments qui vont venir affecter notre sentiment de compétence.
Alors, imaginez-vous que vous sentez que vous avez les ressources, mais vous
n'avez pas les outils, vous n'y arrivez pas. Vous vous sentez un peu comme un
imposteur, ou encore on vous reflète : vous n'êtes pas à la hauteur.
Alors, quand quelqu'un sait qu'il a un TDAH, quand ses proches savent qu'il a
un TDAH, ils savent que son cerveau est tricoté différemment. Et ils vont
l'accompagner différemment. Plutôt de dire qu'il est paresseux, qu'il n'écoute
pas, qu'il est... Si vous saviez, là... J'ai une collègue qui est allée
observer en classe. Il y a un jeune, en dedans d'une heure, son nom avait été
mentionné plus de 50 fois. O.K.? Imaginez-vous ce que ça fait sur l'estime
de quelqu'un. Et, en général, les 50 fois, ce n'était pas pour dire :
Wow! Tu es champion. O.K.? Alors, quelqu'un qui vit comme ça au quotidien, avec
le message qu'il n'est pas à la hauteur, ou qui sent qu'il n'est pas à la
hauteur, ça a un impact majeur. Et le traitement pour un manque d'estime de
soi, c'est quoi? C'est le succès. C'est de permettre à la personne d'avoir les
outils pour atteindre son potentiel.
Mme Picard : ...je peux
laisser... Je vais avoir une...
Le Président (M. Provençal)
:M. le député de Dubuc.
• (15 h 20) •
M. Tremblay : Merci, M.
le Président. Bonjour. Merci d'être là. Dites-moi, on parle de TDAH.
Croyez-vous qu'on est dans une réalité optimale de diagnostic? Vous nous
décrivez des réalités de diagnostics très précis, où on aurait tendance à se <dire :
O.K. C'est plutôt clair dans des cas comme ceux-là. Maintenant,
on a entendu ma collègue de Roberval qui questionnait un
autre groupe...
M. Tremblay :
...optimale de diagnostic, vous nous décrivez des réalités de diagnostics très
précis, où on aurait tendance à se >dire : O.K., c'est plutôt clair
dans des cas comme ceux-là. Maintenant, on a entendu ma collègue de Roberval,
qui questionnait un autre groupe, où il était question de diagnostics qui
avaient été donnés en 15 minutes, suite à une rencontre chez le médecin.
Je ne sais pas si ça a déjà été porté à votre attention, ce type de réalité là.
Maintenant, il y a des cas précis. Est-ce que, quand je parle d'optimal, est-ce
qu'on diagnostique... vous avez dit : C'est compliqué, de... si quelqu'un
a un cancer ou une maladie x, il n'y a pas de nuance, c'est clair. Maintenant,
c'est compliqué. Ça veut dire qu'on n'a peut-être pas atteint l'objectif d'être
en mesure de vraiment encadrer tout ce phénomène, puis là on amène la réalité,
en se disant qu'en amont, on devrait travailler avec les familles, le milieu
scolaire pour mieux l'aborder. Est-ce que vous croyez que le TDAH a le dos
large? Est-ce qu'on donne de faux diagnostics, alors qu'on devrait être beaucoup
plus spécifiques? Je ne sais pas si vous comprenez.
Mme Vincent (Annick) :
Bien, en fait, au niveau de la démarche diagnostique, si on regarde dans la démarche
diagnostique en tant que telle, quand la personne se présente dans le bureau
d'un professionnel, il arrive avec des plaintes x, qui amènent le professionnel
à évoquer un diagnostic, que ce soit le TDAH ou autre chose. Pour faire un
diagnostic de TDAH, j'aimerais ça, rencontrer quelqu'un qui est capable de le
faire en 15 minutes, je vais lui demander des trucs, mais c'est peut-être
aussi quelqu'un qui connaissait l'individu puis qu'on en arrive à la conclusion
en 15 minutes, mais après l'avoir vu plusieurs fois et avoir... Tu sais,
un médecin de famille qui suit cette famille-là a beaucoup d'informations en
cours de route, et peut-être que, dans ce 15 minutes-là, à un moment donné,
on arrive à, oui. Par contre, moi, si quelqu'un arrive dans mon bureau, je ne
l'ai jamais vu de ma vie, je peux vous dire que ça ne me prend pas
15 minutes, puis je ne fais que ça, moi, dans mon travail.
Maintenant, il y a des fois où le tableau
est relativement clair, on appelle ça le TDAH simple. Et, la plupart du temps,
le TDAH est complexe parce qu'il est complexifié par d'autres choses qui se
sont ajoutées, par exemple, une problématique, soit de consommation, une
problématique d'anxiété ou d'autres problématiques, et, dans ce temps-là, c'est
encore plus complexe à faire l'évaluation. Ce qui est très complexe actuellement,
c'est tout ce qui est dans le registre du trouble d'apprentissage. Donc, un
jeune, par exemple, qui a des difficultés en classe, qui peut-être ou pas un
TDAH mais qui a vraiment des difficultés académiques, le TDAH peut entraîner
des difficultés académiques, mais, si on a de la difficulté à comprendre le
sens de ce qui nous est donné, ça aussi, ça donne la difficulté à suivre, et là
l'interface est très difficile. Et, en ce moment, les ressources pour être
capable de faire un diagnostic à ce niveau-là, il y a une carence et dans le
public, et dans le privé, c'est majeur.
M. Tremblay : J'ai une
autre question, M. le Président. Vous avez parlé de la médication versus les zones
neuro... vous pouvez m'aider à compléter le terme, mais qui ont été identifiées
comme étant mal stimulées ou sous stimulées.
Mme Vincent (Annick) :
...
M. Tremblay : Bien, dans
le fond, oui, et je me demande : Est-ce qu'il y a une culture scientifique
ou il y a des études qui font en sorte de comprendre ce pourquoi ces zones-là
ne sont pas stimulées puis pourquoi on doit maintenant intervenir pour les
stimuler?
Mme Vincent (Annick) :
En fait, ce n'est pas que la zone n'est pas stimulée, là, mais la zone... bien,
en fait, les zones... Il y a certaines zones dans notre cerveau qui sont un
petit peu comme un agent de circulation ou comme un chef d'orchestre. Ces
zones-là, normalement, s'activent de façon spontanée dans un contexte où, là,
par exemple, on entend plusieurs sons, on a nos propres idées, il y a le ventre
qui nous brasse, ah! il ne faut pas que j'oublie mon idée. Et donc, tout ça, il
y a une espèce de coordination qui se fait de façon presque spontanée par
l'activation de ce circuit-là.
Maintenant, celui qui a un TDAH, ce
circuit-là s'active moins facilement, et ça, on a des démonstrations
scientifiques là-dessus au niveau de groupes de patients. Donc, je ne peux pas
en faire un test diagnostique. Je ne peux pas prendre une personne puis lui
faire passer un scan cérébral. Mais, quand on prend plusieurs personnes qui ont
un TDAH et plusieurs personnes qui n'en ont pas et qu'on compare comment leur
cerveau s'active pendant une tâche attentionnelle, là, on voit des différences.
Et ce qui est intéressant, c'est que, quand on va traiter, avec un
psychostimulant, la personne, et si le psychostimulant fonctionne, on voit que
les zones vont s'activer comme pour la population générale.
M. Tremblay : Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Merci. Mme la députée d'Abitibi-Ouest.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Merci, Mme Vincent, pour votre présentation. Dans un premier temps, deux
questions. Vos études démontrent... Vous avez fait sûrement des études au
niveau du Québec. Est-ce qu'il y a des endroits qui sont plus stratégiques à
avoir des enfants de TDAH? Est-ce que vous avez fait des consultations au
niveau des autochtones?
Mme Vincent (Annick) :
En fait, il ne faudrait pas me mettre sur le... Je cite des études. Je ne suis
pas celle qui a fait la recherche. Or donc, au niveau des statistiques, je vous
inviterais à poser des questions spécifiques à ceux de l'équipe de l'INESSS,
qui vont venir vous voir. Moi, j'étais consultante pour l'INESSS, mais je ne
suis pas celle qui est derrière ces études-là. Donc, je ne peux pas vous parler
d'une prévalence particulière dans une région ou dans une autre.
Je peux vous dire que le fait d'avoir un
TDAH peut attirer quelqu'un dans un certain type de travail, puis <certaines
régions ont peut-être justement ce type de travail là. Une chose qui...
Mme Vincent (Annick)T :
...de l'équipe de l'INESSSV qui vont venir vous voir. Moi, j'étais consultante
pour l'INESSSV, mais je ne suis pas celle qui est derrière ces études-là. Donc,
je ne peux pas vous parler d'une prévalence particulière dans une région ou
dans une autre.
Je peux vous dire que le fait d'avoir
un TDAHV peut attirer
quelqu'un dans un certain type de travail, puis >certaines
régions ont peut-être, justement, ce type de travail là. Une chose qui a été
remarquée, pas juste ici mais dans d'autres pays, par exemple si on regarde nos
militaires, si vous regardez une approche non pharmacologique, pour bien
traiter le TDAH, c'est un cadre avec une structure, des activités stimulantes,
variées, où est-ce que tu sais ce que tu vas faire, mais tu ne t'ennuies pas.
Je vous décris les Forces armées canadiennes. Donc, dans un contexte comme ça,
on va retrouver une prévalence plus élevée de TDAH léger à modéré, peut-être
pas sévère, dans cette population-là. Et, si moi, j'étais, mettons, pédiatre à
côté d'une base militaire, bien, je verrais probablement plus de jeunes que
dans la population générale, vu que leurs parents, hein, sont dans ce coin-là
et qu'il y a un côté génétique très élevé. Donc, il y a certains types
d'industries qui attirent plus aussi les gens qui ont un TDAH, ou encore, si on
regarde... si on travaille en usine, ceux qui ont un trouble d'apprentissage
et/ou TDAH, des fois, il y a des corps de métier où on va en retrouver plus.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Bien, merci. Est-ce qu'on peut découvrir à l'âge de 30, 40 ans un TDAH?
Mme Vincent (Annick) :
80, si vous voulez.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
80?
Mme Vincent (Annick) :
Le cas rapporté qui m'a été... La plus vieille personne dont j'aie entendu
parler qui a consulté pour la première fois, elle avait 85 ans. C'était
l'arrière-grand-mère d'un petit garçon qui venait d'être diagnostiqué puis qui
a dit : Moi, là, les années qu'il me reste, là, j'aimerais ça, être
capable d'avoir un autocontrôle, d'être capable de jouer au bridge avec mes
amis, j'aimerais ça, être capable de... Et ce n'était pas de la démence, là,
c'était vraiment un TDAH. Donc, il n'y a pas d'âge en tant que tel.
Donc, la question, c'est toujours... quand
on fait notre démarche diagnostique, c'est de voir : Comment avez-vous
fait, à date, pour vivre avec votre TDAH? En quoi ça vous a bien servi?
Qu'est-ce qu'il manque? Et c'est là où est-ce qu'on va toujours avoir la
réflexion, à toutes les étapes de la vie, si c'est pertinent ou pas de faire un
traitement pharmacologique.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Très bien. Et les gens qui vous consultent, sûrement, y vont avec une perte de
mémoire. C'est quoi, les diagnostics d'une personne d'un certain âge? On dit:
30 ans et plus. Quel est leur symptôme pour aller vous consulter?
Mme Vincent (Annick) :
Je vous dirais que c'est les mêmes que chez les jeunes, mais c'est le contexte
qui est différent. Souvent, ceux qui n'ont jamais été diagnostiqués avant ont
un TDAH moins sévère, donc de degré léger à modéré, et ont souvent pallié par
toutes sortes de stratégies, dont, entre autres, mettre plus de temps, se
réviser davantage, se donner toutes sortes de stratégies qui demandent du temps
et de l'énergie. Et, tant qu'ils n'avaient qu'eux, eux-mêmes, à s'occuper ou
leurs études, ils vont compenser. Après ça, on va avoir un pic de consultation
quand on arrive à la combinaison travail-famille. On a aussi le passage de
l'école vers le milieu du travail. Pour certains, ça va être aussi la retraite,
quand tu n'as pas... je m'excuse, messieurs, mais... la secrétaire qui va
t'aider à t'organiser, puis madame dit : Non, il n'en est pas question, ce
ne sera pas moi qui vais le faire. Donc, je vois des gens aussi, des jeunes
retraités qui disent : Moi, je voudrais vivre une retraite beaucoup plus
agréable.
Donc, vous voyez, la raison de
consultation va varier. Mais on est toujours en fonction d'où est l'impact.
J'ai vu des chefs d'entreprise qui ont un TDAH, où est-ce qu'à un moment donné
ils ont dit : Dans le contexte où est-ce que... là, je n'arrive plus à
compenser, ce n'est plus suffisant. Donc, ce qu'on appelle le fardeau
compensatoire, dans notre jargon, est très, très important quand on fait
l'évaluation, de voir où ils en sont, comment ils se sont rendus là et
qu'est-ce qu'il manque.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Merci beaucoup.
Le Président (M. Provençal)
: Mme la députée de Soulanges.
Mme Picard : Oui,
rebonjour. Je crois qu'il y a tout un lien à faire avec l'anxiété des jeunes,
avec le système scolaire, qui demande beaucoup pour nos jeunes, avec beaucoup
de pression. Je voulais savoir... J'aimerais que vous m'en disiez plus sur la
trajectoire de services qui serait idéale pour nos enfants.
Mme Vincent (Annick) :
J'aime cette question. Quand j'ai participé avec les travaux d'INESSS...
J'adhère complètement à ce qui a été produit, là, par INESSS, c'est-à-dire
qu'on devrait avoir, en amont d'un diagnostic, des interventions non
spécifiques pour l'ensemble de notre jeunesse. Je crois qu'actuellement nos
jeunes sont mal outillés dans la gestion des émotions en général, que ça
vaudrait la peine d'aider nos jeunes et nos moins jeunes aussi dans la gestion
de l'anxiété, reconnaître c'est quoi, une émotion, comment, quand la vague
d'émotions est trop forte, on peut jeter l'ancre et se déposer. Et, quand
l'émotion est trop forte, on n'arrive pas à se concentrer, hein? Donc, ça,
c'est la base.
• (15 h 30) •
Après ça, des stratégies, je dirais,
d'autogestion au niveau de la fragilité attentionnelle en soi, sur le plan
sociétal, tout ce qui est s'occuper de son cerveau, prendre soin de son cerveau…
Donc, on parle, à ce moment-là, de bien s'alimenter, de politiques globales au
niveau de l'activité physique, par exemple, le sommeil, des stratégies au
niveau, là, d'avoir une bonne gestion du sommeil. D'avoir des services qui nous
permettraient de donner de la guidance parentale aux parents qui en ont besoin,
au moment où ils en ont besoin, et qu'ils ne se retrouvent pas sur une liste
d'attente de six mois à un an. Il y a des approches comme, par exemple, le
programme Équipe, qui est un programme très <intéressant. Vous pourriez
demander au...
>
15 h 30 (version révisée)
< Mme Vincent (Annick)T :
...d'avoir des services qui nous permettraient de donner de la guidance
parentale aux parents qui en ont besoin,
au moment où ils en ont besoin
et qu'ils ne se retrouvent pas sur une liste d'attente de six mois à un an.
Il
y a des approches comme,
par exemple, le programme ÉquipeV, qui est un
programme très >intéressant, vous pourriez demander au Dr Leila Ben Amor
de Sainte-Justine. C'est un programme qui ne coûte pas cher, qu'on peut
installer dans plusieurs milieux, qui ne demande pas un Ph. D. pour
l'administrer et qui... il a été démontré scientifiquement efficace pour aider
des parents en amont d'un diagnostic. Donc, il y a plein de choses qui peuvent
être faites en amont du diagnostic, incluant des approches en classe.
Quelqu'un qui a une fragilité
attentionnelle, pourquoi j'aurais besoin d'un diagnostic pour mettre en place
des stratégies? Donc, ça, c'est quelque chose... si jamais il y a un élément qui
pourrait changer à ce niveau-là... La place du diagnostic, elle devrait être là
quand on a besoin de mettre en place des stratégies spécifiques puis,
peut-être, pour mieux engager la personne dans son traitement. Mais il y a
plein de choses qui pourraient être faites en amont d'un diagnostic. Et je
pense qu'avoir une réflexion plus universelle sur qu'est-ce qu'on peut faire
pour notre société, nos jeunes... Parce que c'est important, hein, nos jeunes,
c'est notre avenir.
Mme Picard : Il y a
beaucoup de stigmatisation, surtout... En fait, on colle l'étiquette d'une
maladie TDAH avec des médicaments. À propos, justement, de la molécule, là, du
médicament comme tel, croyez-vous, selon vous, qu'il y en a trop qui sont
prescrits? Ou...
Mme Vincent (Annick) :
Je suis embêtée. La bonne question serait : Est-ce que les gens qui en ont
besoin ont accès au bon traitement au bon moment dans leur vie? Je pense que
c'est plus ça, la question, que : Est-ce qu'on en prescrit trop? Parce
qu'on n'a pas nos chiffres de... on n'a pas des vrais chiffres de prévalence au
Québec. Ça coûterait une fortune, faire ce genre d'étude là. Mais, quand
quelqu'un a réellement un TDAH, ça lui prend combien de temps dans la
trajectoire de service, en ce moment, pour avoir accès à un diagnostic adéquat
et avoir accès à un traitement adéquat?
La RAMQ a fait, je dirais, un bel exercice
dans la dernière année et a accepté maintenant le traitement avec un
psychostimulant de longue action, plutôt que passer par un longue action en
étape préalable. Et ça, c'est vraiment un gros plus, parce qu'on avait beaucoup
de jeunes qui étaient exposés à du courte action. Dans un contexte comme ça, ça
c'est quand même quelque chose qui est un plus par rapport à d'autres
provinces. Alors, si on se compare… Parce que, souvent, c'est une question qui
revient : Comment ça se fait qu'au Québec on en prescrit plus qu'ailleurs?
Ce n'est pas qu'on en prescrit plus qu'ailleurs, c'est qu'ailleurs ils ne sont
pas remboursés.
Donc, ah! Donc, on est la seule province
où, dans notre programme, d'une façon ou d'une autre, via le programme
régulier, médicaments d'exception ou patients d'exception, nos patients ont
accès à tous les traitements pharmacologiques au Québec. Ce n'est pas le cas du
reste des Canadiens ni le cas des Amérindiens qui sont au Québec, parce qu'ils
sont couverts par un autre programme d'assurance.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
C'est intéressant. Il reste-tu du temps, monsieur?
Le Président (M. Provençal)
: Oui, il reste encore une minute, là. Oui. Monsieur... Oui,
le député de Richmond.
M.
Bachand
:
Je trouve ça très intéressant, ce que vous dites. Donc, vous êtes en désaccord
avec le titre du mandat de la commission, qui est l'augmentation préoccupante
de la consommation de psychostimulants. Vous êtes en désaccord avec le fait que
le Québec a une situation particulière au niveau de son système de santé puis
que l'augmentation n'est pas préoccupante : c'est parce qu'on a un système
de santé qui est différent. Donc, vous êtes en désaccord avec le pourquoi de la
commission aujourd'hui.
Mme Vincent (Annick) :
Non, je ne suis pas en désaccord. Je suis très contente que la commission se
préoccupe du TDAH. Et je ne voudrais pas juste qu'on se préoccupe de la
médication. Je voudrais qu'on se préoccupe de l'ensemble de la trajectoire de
service, en prédiagnostic, les approches pharmacos et non pharmacos.
M.
Bachand
:
Mais le mandat de la commission, c'est l'augmentation préoccupante, donc on se
base sur des études, etc., des articles... Donc vous, a priori, vous mettez,
sans, disons, le nier, vous mettez un bémol.
Mme Vincent (Annick) :
En fait, je dirais, je... Ça reste préoccupant, O.K.. Le mot «préoccupant» est
correct, il est adéquat dans la situation, mais je rajoute la préoccupation à
pas juste la médication.
Le Président (M. Provençal)
: Ça va. Alors, je vais maintenant céder la parole à la
députée de Fabre, s'il vous plaît.
Mme Sauvé : Merci
beaucoup, bon après-midi, M. le Président. Alors, Dre Vincent, c'est un plaisir
de vous entendre et de pouvoir vous poser des questions pour mieux comprendre
ce qu'il se passe. Et je vais me permettre de faire un peu du pouce sur ce que
le collègue mentionnait avant. Dans le fond, on doit, bien sûr, être préoccupé
par la situation de la hausse importante de la médication auprès des jeunes
particulièrement au Québec, mais, en même temps, ce que vous dites, c'est :
Ne pas se préoccuper uniquement du médicament, mais du traitement dans une
approche plus globale. J'entends ça, puis ça me réjouit.
Moi, je vous dirais que j'ai effectivement
des préoccupations quant à la trajectoire jusqu'au diagnostic. On sait très
bien que la majorité des diagnostics sont rendus par des médecins de famille au
Québec. Et vous êtes, bien sûr, psychiatre, et, tantôt, vous avez <nommé,
et c'est un premier élément que je veux souligner, vous avez nommé quand...
Mme Sauvé :
...à la trajectoire jusqu'au diagnostic. On sait
très bien que la
majorité des diagnostics sont rendus par des médecins de famille au
Québec,
et vous êtes,
bien sûr, psychiatre et tantôt vous avez >nommé...
et c'est un premier élément que je veux souligner, vous avez nommé... Quand
vous recevez des clients qui, possiblement, auront le diagnostic du TDAH, vous
recevez une plainte. Vous avez utilisé le mot «plainte» tantôt, et ça m'a
marquée.
Alors, je voulais revenir là-dessus pour
bien comprendre. Quand vous parlez de plainte, vous parlez d'une plainte qui
provient soit de l'école soit des parents, mais... puis je fais le lien avec, évidemment,
tantôt, quand vous parliez de l'estime de soi. On parle non pas d'une demande
de diagnostic sur la base d'observations, c'est véritablement une plainte liée
au comportement du jeune.
Mme Vincent (Annick) :
Si je peux me permettre, le mot «plainte» est utilisé dans le sens : Il y
a une souffrance, hein? Quand on se plaint, c'est qu'on a mal ou qu'on a une
souffrance. Donc, la souffrance, elle peut être au niveau de l'individu, elle
peut être au niveau de ses proches, elle peut être au niveau du système. Mais
donc on a quelqu'un qui arrive dans notre bureau avec un... je dirais, un
drapeau en l'air en disant : Il y a quelque chose qui ne va pas bien.
Des fois, c'est le clinicien qui va
reconnaître, derrière ce qui nous est dit dans le bureau, des symptômes
possibles de TDAH, puis, d'autres fois, ça nous arrive sur un plateau d'argent,
puis ce n'est même pas du TDAH, O.K., et c'est là le travail de détective du
médecin.
Et, moi, ça ne m'inquiète pas, qu'il y ait
des médecins de famille qui fassent un diagnostic. Nos médecins de famille, au Québec,
sont formés, en général, pour faire le diagnostic du TDAH. Ils font beaucoup, beaucoup
de santé mentale, nos médecins de famille, hein? Ça fait des années qu'on a
travaillé en équipe, et que les médecins de famille travaillent aussi au niveau
de la dépression, au niveau de l'anxiété.
Moi, ce qui m'inquiète, c'est qu'ils
travaillent tout seuls. Ils devraient travailler avec des équipes, ils
devraient une approche multidisciplinaire, on devrait mieux appuyer le travail
de nos médecins de famille, et puis, dans un contexte comme ça, le médecin
spécialiste devrait être en appui, mais aussi on devrait avoir accès à des
psychologues, neuropsychologues, quand on en a besoin, je dirais, valoriser le
rôle de l'infirmière dans le rôle de coordination, valoriser le rôle du
pharmacien dans le rôle des conseils et de l'administration de la médication.
Ces gens-là sont là. On pourrait mieux travailler, avoir une approche
collaborative. Ça serait vraiment quelque chose d'intéressant.
Mme Sauvé : M. le
Président, merci pour ces précisions, parce que vous m'avez rassurée.
Dans le fond, je veux juste aussi
ramener... parce que c'est la notion du diagnostic qui me préoccupe encore, et
vous parlez d'une approche très collaborative, et je trouve ça fort
intéressant, parce que, dans les faits, on entend et on a même entendu ce
matin... Il y a des médecins de famille... puis, encore là, ils ont la formation,
ils ont l'expertise, mais il y a des situations que les parents nous nomment,
on l'entend aussi, où la consultation pour l'élaboration du diagnostic, c'est
entre 15 minutes et une demi-heure, alors que, souvent, quand on parle de
démarches par rapport... de démarches qui sont faites auprès d'un
neuropsychiatre ou d'un psychologue... Bien, d'abord, le psychologue ne peut
pas émettre un traitement, il n'est pas médecin, mais tout ça pour dire qu'on
entend, bien sûr, des réalités qui font que bien que l'expertise est au rendez-vous
avec les médecins, qui sont formés, il n'en reste pas moins qu'il y a certaines
démarches qui me préoccupent. Ça, c'est la première chose. Et vous avez parlé
aussi de favoriser l'avant-diagnostic, donc l'avant-diagnostic, qui peut
passer, évidemment, encore là, dans une approche collaborative, soit
multidisciplinaire entre professionnels, mais aussi de l'école vers le
professionnel.
Moi, je vous dirais, puis je ne sais pas,
j'ai... Vous avez parlé qu'il y a des outils qui existent pour les enseignants,
pour les parents. Moi, j'ai mis la main sur un test, entre autres, un test qui
s'appelle le questionnaire Conners. Moi, quand je regarde la définition du
TDAH — puis je vous entends tantôt, puis c'est effectivement avec
toute votre expertise, puis avec beaucoup de respect — quand je
regarde la définition à ce qui est un peu la bible de la définition des
troubles liés à la santé mentale, le DSM, le DSM-V, il y a tous
les symptômes qui sont liés au TDAH, mais il y a la notion d'intensité et de
persistance.
Alors, un enseignant, par exemple, qui
verrait qu'un enfant a tel, tel, tel symptôme, bien, ce n'est pas deux ou trois
symptômes de temps en temps qui font que cet enfant-là a le TDAH. Alors, moi,
quand je relie cette définition-là au DSM puis que je vois que, par exemple,
pour le volet de l'inattention, bien, ça prend une persistance, une intensité
de six ou plus symptômes qui sont nommés là, la même chose pour l'hyperactivité…
• (15 h 40) •
Alors, je regarde ça, je regarde la
rigueur de la définition, je regarde l'expertise qui pourrait bénéficier d'une
certaine formation de plus, entre autres, peut-être avec certains <médecins,
mais je regarde aussi l'avant-diagnostic...
Mme Sauvé :
...de six ou plus symptômes qui sont nommés là, la même chose pour
l'hyperactivité.
Alors, je regarde ça, je regarde la
rigueur de la définition, je regarde l'expertise qui pourrait bénéficier d'une
certaine formation de plus,
entre autres,
peut-être, avec
certains >médecins. Mais je regarde aussi l'avant-diagnostic, je regarde
les outils qui sont en main, je regarde le questionnaire de Conners, entre
autres, qui va avec une liste de symptômes, c'est à la portée des parents et
c'est à la portée des enseignants. On répond «pas vrai du tout», «un peu vrai»,
«assez vrai», «très vrai». Et là je suis un peu inquiète dans l'aspect un peu
arbitraire de l'observation qui peut se faire, alors que c'est tellement important
d'être dans cette rigueur qui va mener au bon diagnostic, comme vous l'avez
dit, au bon diagnostic, le bon médicament ou le bon traitement global.
Mme Vincent (Annick) :
...le doigt sur la problématique qu'on a en santé physique aussi. Je ne sais
pas s'il y en a d'entre vous qui avez déjà étudié, un peu, au niveau, par
exemple, des douleurs au niveau du dos, au niveau de... Donc, on a, des fois,
dans... il y a certaines problématiques en santé mentale et en santé physique
pour lesquelles on n'a pas ce qu'on appelle des marqueurs biologiques. Et, dans
un contexte comme ça, on va faire une démarche clinique la plus rigoureuse
possible, où est-ce qu'on va collecter de l'information. Un questionnaire,
c'est l'équivalent de prendre la température quand quelqu'un nous dit : Je
pense, je fais de la fièvre. O.K.? Donc, ça nous donne une intensité de
symptômes, ça ne nous donne pas un diagnostic. C'est notre rôle de clinicien
d'aller voir qu'est-ce qu'il se cache derrière le symptôme. Quelqu'un, par
exemple, qui a une difficulté à se concentrer pourrait avoir un problème de
sommeil, puis il n'y a une vigilance en cours de journée, pourrait être
anxieux, puis ses idées s'en vont dans une boucle anxieuse, pourrait avoir un
TDAH et ses idées se promènent tout partout et se perdent dans les sentiers, et
c'est notre rôle de faire cette évaluation-là.
Plus on a d'information colligée de façon
structurée auprès de différentes personnes, plus on peut avoir de l'observation
par rapport à ça, plus ça va être facilitant. Il n'y a pas un test en neuropsy,
O.K., qui nous permet de faire un diagnostic seul de TDAH. Si je ne pose pas de
question à mon patient et je lui passe la meilleure batterie de tests neuropsy,
dans 20 % des cas, je ne trompe. Dans 20 % des cas, ceux qui ont un
TDAH ont tout à fait une performance normale aux tests neuropsys, et, dans
20 % des cas, quelqu'un qui n'a pas de TDAH va avoir l'air d'en avoir un
dans un test neuropsy. Alors, les neuropsys vont aussi faire cette évaluation
clinique là, et, quand on fait un test neuropsy, c'est dans un contexte où je
veux raffiner ma démarche pour éliminer, dans mon diagnostic différentiel,
d'autres problématiques comme les troubles d'apprentissage, dont je parlais
tout à l'heure.
Le Président (M. Provençal)
:…poser une autre question, Mme la
députée.
Mme Sauvé : Oui. Merci,
M. le Président. Merci pour les précisions. En fait, effectivement, l'expertise
clinique, elle est au rendez-vous, et la volonté et la bienveillance des
enseignants aussi, et surtout celle, bien sûr, des parents. Mais il n'en reste
pas moins que l'observation, si elle est faite en milieu scolaire, et malgré la
bienveillance de tous, si le regard est posé, et on a nommé le mot
«étiquetage», mais, si l'observation est peu balisée et elle amène déjà à un
presque diagnostic entre le milieu scolaire, et l'enfant, et les parents et
qu'on n'est pas encore dans l'expertise clinique, moi, ça me préoccupe
beaucoup. Et j'entends aussi les parents pour qui c'est une grande source de
préoccupation. Alors donc, oui, l'observation, oui, des outils, mais, sans encadrement,
on peut être dans une surobservation. On n'est pas encore dans le
surdiagnostic, on est sans la surobservation, mais c'est le regard qui est posé
sur l'enfant déjà, et ça m'inquiète beaucoup.
Mme Vincent (Annick) :
...qui est préconisée pas l'INESSS, c'est qu'il y a aussi tout un plan éducatif
par rapport à la population en général, au corps enseignant, au personnel,
aussi, de l'école, aux parents et sur le plan médical, pour, justement, aller
appuyer ça. C'est un peu ce qu'on a essayé de faire avec nos moyens quand on a
fait nos programmes de formation comme TDAH VIP et VIP+. Moi, je rêve du moment
où est-ce qu'un parent qui est à la maison pourrait, au bout de ses doigts, sur
le Web, aller chercher de l'information qui est pertinente, adéquate et en
temps opportun, que la même chose puisse arriver à un enseignant, mais qu'il y
ait aussi, éventuellement, pas juste une interface Web avec un site, mais un
endroit où tu peux aussi avoir de la formation.
Et c'est dans ce contexte-là qu'on a décidé
de faire le colloque l'année prochaine. On reçoit le colloque international en
TDAH ici, à Québec, et on a choisi de l'ouvrir à tous. Il est ouvert au grand
public, il est ouvert au monde de l'enseignement et il est ouvert au monde de
la santé.
Et je pense que c'est par l'éducation, pas
dans le sens éducation école, mais dans le sens enseignement, d'aider les gens
à faire la part des choses entre, justement, la fragilité attentionnelle de
quand je suis fatigué versus est-ce que c'est un vrai TDAH…
On a eu toute cette <dynamique-là,
il y a plusieurs années, par rapport à la dépression majeure. Je ne sais pas si
vous avez assisté, un peu, à ce même genre de débat là. On peut avoir une
humeur triste sans être déprimé, hein? On peut avoir une...
Mme Vincent (Annick)T :
...d'aider les gens à faire la part des choses entre,
justement, la
fragilité attentionnelle de quand je suis fatigué versus
est-ce que
c'est un vrai TDAH? On a eu toute cette >dynamique-là, il y a plusieurs
années, par rapport à la dépression majeure. Je ne sais pas si vous avez
assisté, un peu, à ce même genre de débat là. On peut avoir une humeur triste
sans être déprimé, hein? On peut avoir une difficulté d'attention sans avoir un
TDAH. Donc, on peut prendre cette analogie-là puis voir où est-ce qu'on était
en dépression il y a 20 ans et souhaiter qu'on prenne un petit peu moins
de temps pour se rendre là pour le TDAH.
Une voix
: Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Je vais maintenant céder la parole au député de Jean-Lesage.
M. Zanetti : Merci, M. le
Président, merci beaucoup, bonjour. Le fait qu'il y ait plus de diagnostics de
TDAH au Québec par rapport à d'autres régions du monde, par rapport au Canada
aussi, est-ce que ça s'explique, selon vous, par des facteurs génétiques,
environnementaux ou sociaux, ou toutes ces réponses?
Mme Vincent (Annick) :
Bonne question. En fait, est-ce qu'on a plus de diagnostics ou on a plus de
gens qui sont diagnostiqués et traités? Parce que, là, actuellement, pour...
quand on fait nos travaux, la façon qu'on fait nos études statistiques, et là
l'INESSS serait... Monsieur Lesage vient présenter, hein, Dr Lesage, je
crois? Il pourrait mieux vous expliquer, là, le détail au niveau… Quand on fait
une étude épidémiologique, il faut qu'on essaie de se baser sur des données.
Donc là, actuellement, on n'a pas les données par rapport au diagnostic, on a
accès aux gens traités. Alors, il y a une nuance par rapport à ça. Donc, on
peut se poser la question, sur le plan global, quand on va aux congrès
internationaux en TDAH, ce qu'on voit, c'est qu'il y a des disparités
régionales sur le globe. On a à peu près la même prévalence, c'est-à-dire que
le nombre de personnes atteintes du TDAH, qu'on soit ici, en Asie, en Afrique,
en Amérique du Sud, c'est à peu près le même nombre de personnes.
Maintenant, quel genre de services ces
gens-là ont accès? Comment la société les accompagne, qu'est-ce qu'ils ont
comme traitement disponible, comme ressources diagnostiques, ça, ça varie
régionalement. Il y a même des régions où les gens sont très prêts à aller
chercher les services, mais les services ne sont pas disponibles et d'autres
régions du globe où les services sont disponibles puis les gens ne sont pas
disposés à aller les chercher.
Alors, ici, au Québec, il y a quand même
un gros travail qui a été fait, je crois. Encore, on peut s'améliorer, ça,
c'est clair. Je pense que les gens ont entendu un petit peu mieux parler du
TDAH, il y a eu des émissions de télé comme TDAH mon amour, il y a
quelques années, qui ont eu un gros boum pour essayer de démystifier. Il pourrait
y en avoir d'autres. Au niveau, je dirais, des médias, les médias traitent
mieux maintenant du TDAH qu'avant, je pense qu'on est moins dans les mythes
puis plus qu'est-ce que c'est. Donc, est-ce que ça fait en sorte que des gens
se reconnaissent plus facilement et vont consulter? Peut-être.
Je dirais, là où il y a une grosse
difficulté au Québec actuellement, c'est l'accès aux ressources, l'accès aux
services, autant sur le plan prédiagnostic, diagnostic que post-diagnostic.
C'est dommage, mais à peu près la seule chose qui est disponible, c'est la
médication. Et je ne veux pas dire que la médication n'a pas sa place, la
médication a sa place. Mais la médication ne fait pas tout, et je dirais
qu'actuellement, là où on devrait avoir un gros débat, c'est : Comment ça
se fait qu'on n'offre pas le reste?
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup.
M. Zanetti : Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Je vais céder la parole au député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui,
merci, Dre Vincent. Êtes-vous d'accord avec l'affirmation de notre invitée
précédente, qui disait : C'est le contexte social et normatif qui
transforme ces comportements en maladie et qui les désigne sous un registre de
diagnostic pathologique?
Mme Vincent (Annick) :
Je ne sais pas, parce que je n'ai pas le contexte de toute la phrase, là, mais
ce qu'on peut voir, c'est... Est-ce qu'on peut penser qu'il y a une
médicalisation de comportements normaux? Si c'est ça qu'elle pense, je crois
que, dans certains cas, oui. Si on regarde... Mais, quand on parle de vrai
TDAH, la réponse, c'est non, O.K.? Mais donc, ce qu'il faut voir aussi, c'est :
Est-ce qu'on laisse, par exemple… Qu'est-ce que la bougeotte significative?
Qu'est-ce qui est une impulsivité hors normes, hein? Qu'est-ce que je m'attends
du comportement dit «normal» d'un enfant? Est-ce qu'un enfant devrait être
assis sur sa chaise, aussi immobile que la chaise? La réponse, c'est non, hein?
Alors, ça, c'est clair.
Alors, est-ce qu'on a des attentes
irréalistes? Est-ce que, par exemple, actuellement, on demande à nos jeunes une
capacité attentionnelle qui est hors normes, ce qui fait qu'on a nos jeunes qui
ont un TDAH, qui en arrachent, mais bien d'autres aussi? Ça, c'est une question
qu'on peut se poser, à laquelle je n'ai pas la réponse. Mais ce qu'on voit, par
contre, c'est qu'il y a une médicalisation puis une déresponsabilisation dans
d'autres problématiques. Moi, je le vois, par exemple, en santé mentale adulte,
au niveau des comportements impulsifs, au niveau des... Beaucoup de gens se
ramassent à l'urgence psychiatrique, alors que ce n'est pas une maladie en tant
que telle. Donc, je pense qu'il y a un côté sociétal de ce côté-là.
• (15 h 50) •
M. Gaudreault : Quand on
regarde l'ensemble de, disons, de pays qui nous ressemblent, là, en Occident,
êtes-vous <capable de nous dire ça serait quoi le taux de vrai TDAH ou le
taux normal de vrai TDAH? Ça a l'air drôle de le poser comme ça, là, mais quand
on regarde dans les autres législatures, les autres législations plutôt, à
travers le monde...
M. Gaudreault : ...en
Occident. Êtes-vous >capable de nous dire ça serait quoi, le taux de
vrai TDAH ou le taux normal de vrai TDAH… ça a l'air drôle de le poser comme
ça, là, mais, quand on regarde dans les autres législatures... les autres
législations, plutôt, à travers le monde, les autres pays, ça serait quoi, le
taux normal moyen?
Mme Vincent (Annick) :
Bien, en fait, si on regarde la prévalence, c'est entre 5 % à 10 %
chez les enfants et, pour parler d'une persistance des symptômes à l'âge
adulte, ça dépend de notre définition de la persistance. Donc, si on va jusqu'à
avoir assez de critères pour répondre encore complètement au DSM-V, qui
est passé de six à cinq symptômes dans chaque catégorie, on est, selon les
études, entre 50 % et 75 % de persistance des symptômes.
M. Gaudreault :
...combien?
Mme Vincent (Annick) :
4 % à 5 % des adultes qui ont un TDAH. Maintenant, moi, ce que
j'aimerais vous souligner, c'est peut-être aussi penser à la personne au... Le
jeune qui a un TDAH aujourd'hui, O.K., avec les facteurs de risque dont je vous
ai parlé, si on peut l'aider à ne pas avoir de traumas crâniens, à avoir une
estime de lui qui est solide, à être capable de faire son cursus académique
comme tout le monde, pas mieux, pas pire, mais comme comme tout le monde, à
avoir moins de problèmes de consommation, à avoir peut-être moins d'anxiété,
moins de problématiques relationnelles, bien, ça va faire un adulte qui va être
plus épanoui plus tard, et, même si son TDAH s'atténue plus tard, il n'aura pas
eu les dommages collatéraux en chemin. Et ça, c'est une chose importante, et c'est
une chose qui, vraiment, transcende quand on va aux congrès internationaux, c'est
l'importance d'agir au moment où la personne a son TDAH et a des impacts pour
son TDAH ici, maintenant, en pensant à demain.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup, Dre Vincent, pour votre contribution aux
travaux de notre commission. Je suspends les travaux quelques instants afin de
permettre au prochain groupe de prendre place. Merci.
(Suspension de la séance à 15 h 52)
(Reprise à 15 h 54)
Le Président (M. Provençal)
: Je souhaite la bienvenue au Dr Benoît Hammarrenger. Je
vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, puis nous
procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission. Je vous
invite à vous présenter et à commencer votre exposé. Je vous cède la parole.
M. Benoît Hammarrenger
M. Hammarrenger (Benoît) :
Bonjour. Merci de l'invitation aujourd'hui. Mon nom est Benoît Hammarrenger, je
suis neuropsychologue. Je pratique auprès d'enfants depuis une quinzaine
d'années, directeur d'une clinique, dans les... bien, en fait, de deux
cliniques, Laval et Montréal. J'ai écrit également deux livres, un livre, 10 questions
sur le TDAH, et un livre sur le trouble d'opposition chez les enfants, qui
est souvent associé au TDAH.
Donc, je débute ma présentation aujourd'hui,
où on se rend compte, là, concernant le surdiagnostic ou les taux élevés, en
tout cas, de médications de TDAH au Québec. Peut-être commencer par revoir les
chiffres, là. On a effectivement... il est sorti un taux de médication chez les
adolescents autour de 14 %, vous connaissez ces chiffres-là. Il est sorti
également... l'année précédente, ça a été un petit peu moins médiatisé, là,
mais l'Institut de la statistique du Québec a produit un document où 23 %
des adolescents, là, donc <on est près d'un sur quatre, disait avoir été
diagnostiqué d'un professionnel de la santé du TDAH. Donc, si on se fie à ces
chiffres-là, là, donc près d'un sur quatre adolescents au Québec aurait été
diagnostiqué du TDAH et autour de 14 % serait...
M. Hammarrenger (Benoît)T :
...donc, >on est près d'un sur quatre, disait avoir été diagnostiqué,
par un professionnel de la santé, du TDAH. Donc, si on se fie à ces
chiffres-là, là, donc, près d'un sur quatre adolescents au Québec aurait été
diagnostiqué du TDAH, et autour de 14 % serait médicamenté pour le TDAH.
Donc, ce sont des chiffres qui sont excessivement élevés.
Il y a eu beaucoup de comparaisons, dans
les médias, sur le reste du Canada, hein, on est plus élevés que le reste du
Canada. Je suis un peu Dr Vincent, qui a été avant moi, et... sur le fait de la
prévalence, en fait, on ne devrait pas juste la comparer au Canada, mais à
travers le monde. À travers le monde, on a des chiffres, on a des
méta-analyses, dont une qui assez récente, 2017, là, si je ne me trompe pas,
qui va nous donner un chiffre, là, de 7,2 % de prévalence à travers le
monde, là, Asie, Europe, Océanie, un petit peu partout, on est à 7,2 % de
TDAH. 7,2 %, en comparaison, donc, ça, c'est le taux de diagnostic qu'on
devrait avoir un peu partout dans le monde.
Également, ces analyses-là nous montrent
que c'est assez stable partout dans le monde. Il n'y a pas tellement de
variation d'un pays à l'autre. On ne peut pas se dire : O.K., bien, on
serait dans les pays, là, qui en ont le plus, comme d'autres, et d'autres en
ont moins, ce qui donne une moyenne à 7,2 %. On est à peu près partout
autour de ça, 7,2 %, à part chez nous, où il y a des chiffres qui
commencent à déborder ça. Si on compare le 7,2 % attendu au 23 % de
jeunes qui se disent diagnostiqués, on est comme trois fois, là, au-dessus de
ce qui devrait être attendu.
Je veux donc lancer, aujourd'hui, des
pistes de réflexion sur le rôle de ceux qui posent des diagnostics, en fait.
Donc, il faut conclure que des faux diagnostics, en fait, si le taux devrait
être à 7 % mais qu'on est à 23 %, il faut comprendre qu'il y a plus
de faux diagnostics que de vrais diagnostics de TDAH, et ça, c'est inquiétant.
Il y a plus de faux diagnostics, en ce moment, il y a plus de jeunes qui ont
une étiquette de TDAH et que ce n'est pas vrai, là, c'est un faux diagnostic,
que ceux qui la portent, cette étiquette-là, et que c'est vrai qu'ils l'ont, ce
diagnostic-là. Alors, il faut quand même se questionner. Il faut se questionner
sur, donc, qui pose ces diagnostics-là et quelles erreurs pouvons-nous
commettre? Ça implique un regard sur nous-mêmes, ça m'implique, moi, et ma
profession, les neuropsychologues, ça implique également les psychologues,
psychologues scolaires et les médecins, qui sont les trois grandes professions,
là, pouvant poser ce diagnostic au Québec.
Je commence avec la partie, donc, au
niveau des médecins. Le diagnostic posé par le médecin est souvent basé sur une
liste de symptômes, la liste de symptômes que vous avez dans mon document, page
cinq. On a des symptômes d'inattention, des symptômes d'hyperactivité. Si on en
a six sur neuf, alors on remplit les critères soit d'inattention, soit
d'hyperactivité, soit des deux. Ce qui est bien connu de cette liste de
critères là, c'est qu'il s'agit de critères non spécifiques. Alors, le fait...
je vous en lis un, par exemple, là : ne parvient pas — le premier, là,
de... Ne parvient pas à prêter attention aux détails ou fait des fautes
d'inattention. Ce n'est pas obligatoirement quelqu'un qui a un TDAH qui fait
ça, là. Vous pouvez tous ici, moi-même, avoir des moments, là, où on ne
parvient pas à porter attention aux détails, où on fait des fautes
d'inattention. On peut avoir également... Donc là, je parle de normalité. On
peut avoir également des troubles où ça survient fréquemment. Quelqu'un qui est
dépressif, par exemple, va avoir de la difficulté à porter attention aux
détails puis à soutenir son attention. Il va faire des fautes, des étourderies.
Hein, quelqu'un de dépressif va dire qu'il va avoir de la difficulté à soutenir
son attention sur une lecture, par exemple, qui oublie, au fur et à mesure,
qu'est-ce qu'il lit, qui s'en va à l'épicerie et qui oublie qu'est-ce qu'il
allait chercher. Alors, ces critères-là, qui sont, en fait, des symptômes
visibles... donc, je n'arrive pas à porter attention... ces symptômes visibles,
là, ne sont pas seulement attribuables au TDAH. Alors, ce qu'il se passe, comme
difficulté, c'est, quand on se base sur six sur neuf critères, on risque
d'avoir d'autres problèmes qui ressemblent ou qui imitent très bien un TDAH
sans en être un.
Dans le bureau du médecin, bien, les
médecins vont dire eux-mêmes, ils n'ont pas d'outil pour évaluer l'attention
chez l'enfant. Ce qu'ils doivent faire, c'est de baser sur le rapport d'une
tierce personne, qui est le parent, ou d'une autre tierce personne, qui est
l'enseignant qui a parlé au parent, et le parent qui le rapporte au médecin,
pour poser ces diagnostics-là. Il n'y a pas de mesure possible, dans le bureau
d'un médecin, de l'attention d'un enfant. Il y a une liste de symptômes où on
pose des questions aux parents, et où nous sont rapportés des symptômes de
l'école. Alors, des fois, on va avoir également des listes de symptômes qui
sont à cocher, dans des questionnaires, où les professeurs vont donner leur
avis sur ça, où des parents vont pouvoir donner leur avis et cocher cette liste
de symptômes, mais on est dans une tierce personne qui rapporte les symptômes
de la personne qu'on diagnostique, qui est l'enfant, dans ce cas-ci.
• (16 heures) •
J'argumente, ici, qu'il faudrait, pour
avoir un diagnostic qui est précis, non <seulement...
>
16 h (version révisée)
< M. Hammarrenger (Benoît)T :
...professeurs vont donner leur avis sur ça ou des parents vont pouvoir donner
leur avis et cocher cette liste de symptômes, mais on est dans... une tierce
personne qui rapporte les symptômes de la
personne qu'on diagnostique
qui est l'enfant dans ce cas-ci.
J'argumente ici qu'il faudrait pour
avoir un diagnostic qui est précis,
non >seulement avoir ça qui
me paraît pertinent, mais avoir également une mesure, comme on voudrait pour
n'importe quelle autre maladie, avoir une prise de sang, avoir une radiographie
pour... On voudrait une mesure chez le patient, ce que fait l'évaluation en psy
ou en neuropsy.
Ce qu'on va rencontrer également comme
difficulté… il y a eu une grande médiatisation du TDAH dans les dernières
années, ce qui fait que le... pardonnez-moi l'anglicisme, mais le «spotlight»,
dans notre société, a été posé sur ce trouble-là, parmi tous les troubles qui
peuvent exister chez les jeunes. Il y a en beaucoup, des difficultés qui
peuvent exister qui sont autres que le TDAH et qui peuvent imiter ce qu'est le
TDAH. Le «spotlight» étant tellement posé sur ce trouble-là, ça va faire qu'au
moment où un enfant ne porte pas attention à l'école ou au moment où un enfant
ne réussit pas en classe, ou est agité, ou pousse un camarade dans la cour
d'école, la première chose qu'on pense, c'est là où est le «spotlight». On le
voit, c'est illuminé, alors on va penser TDAH. Le professeur va penser TDAH, le
surveillant dans la cour d'école va penser TDAH, les parents, en regardant les
devoirs, vont penser TDAH, vont se rendre dans le bureau du médecin avec ce
feeling biaisé, parce que c'est ça qu'ils connaissent et qu'ils voient, ils
vont dire: Je pense que mon enfant a un TDAH, donc déjà enligne vers... et ne
rapportent seulement que les symptômes qui fittent dans leur tête et qui ont
été exposés par les médias du TDAH. Le médecin, qui ne dispose que de cette
information-là, dispose, en partant, d'une information biaisée, qui est une
information d'un parent ou d'un professeur qui a le «spotlight», je le répète,
sur le TDAH, d'où l'importance, encore là, pour moi, d'aller faire une histoire
assez complète ce que qui pourrait être autre chose que le TDAH.
Je parle maintenant des psychologues. Les
psychologues scolaires vont faire une évaluation assez complète et qui se
compte maintenant plutôt en heures, donc un peu plus de temps à poser sur ce
diagnostic-là. Mais les ressources dans nos écoles font qu'ils doivent aller
relativement vite et s'en tenir souvent au diagnostic que du TDAH. Et je pense
que ce n'est pas une bonne pratique de dire: Je reçois dans mon bureau un
enfant ou même un adulte et ce que je vais évaluer, c'est que le TDAH. Ça, ça
veut dire souvent ce qu'on va avoir, c'est une évaluation qui est faite avec
l'évaluation du QI et des tests d'attention. C'est déjà bien, on a une prise de
mesure, notre espèce de radiographie ou notre prise de sang, là, qui est faite
sur l'enfant, donc ce sont des tests qui sont passés à l'enfant, de son
attention.
Par contre, il y a moins de temps pour aller
voir, à l'extérieur de ces troubles-là, ce que l'enfant pourrait avoir comme
difficultés. Est-ce qu'il rencontre un trouble d'apprentissage? Pensons-y.
L'enfant qui a de la difficulté à lire en classe parce qu'il présente une
dyslexie et non pas un TDAH, présente une dyslexie… Le nombre de fois qu'un
enfant doit lire en classe, lire ce que le professeur écrit au tableau, lire
dans son cahier, lire des questions d'examen, le nombre de fois où il doit
lire, pour lui, c'est une tâche qui est non automatisée par rapport à ses
pairs, ce qui fait que ça lui draine beaucoup plus d'attention, beaucoup plus
difficile. Cet enfant-là vient vidé de son attention beaucoup plus rapidement
qu'un autre et a l'air de présenter un déficit d'attention. Il ressemble, en tous
points, au jeune qui a un TDAH sans en avoir un. Donc, voilà l'importance
d'aller vers un diagnostic différentiel.
Je termine avec les neuropsychologues,
bien, peut-être deux dernières choses, les neuropsys qui, eux, de leur côté,
ont une certaine pression dans la pratique privée, souvent un neuropsy va
pratiquer en pratique privée, il y a une pression du client payeur, que je
remarque — alors, il y a peut-être quelque chose à réfléchir ici — que
le client qui a payé, ça ressemble à 1 500 $ à 2 000 $, une
évaluation en neuropsy, et qui vient se chercher un diagnostic de TDAH pourra
mettre de la pression et dire : Je le veux, ce diagnostic-là, j'ai payé
pour. Et le professionnel qui se fait payer reçoit une pression à le poser, le
diagnostic. Donc, il y a aussi également des enjeux liés au neuropsy.
Et, en terminant, il y a une certaine
banalisation, pour moi, de ce qu'est le TDAH en ce moment. Quand on parle que
c'est seulement une différence individuelle entre les gens, que ça serait...
Bon, c'est sûr que le TDAH est accompagné de belles forces et que c'est plutôt
un... il y a de la créativité liée au TDAH, à un moment donné, ça devient
presque cool, d'avoir ce diagnostic-là. C'est presque un diagnostic qu'on
recherche, et il y a une certaine banalisation qui fait que, si on s'en tenait
à un trouble, peut-être qu'on réussirait plutôt à s'approcher du 5 % à
7 % de prévalence.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup pour votre exposé. Nous allons procéder
maintenant à la période d'échange, alors la députée de Soulanges.
Mme Picard : Merci
beaucoup <pour votre exposé. J'ai complètement été sous le choc parce que
nous... vous avez parlé d'histoire complète du patient que vous rencontrez.
Nous, on a un petit garçon à la maison qui était très turbulent à la
garderie...
Le Président (M. Provençal)
:
...période d'échange. Alors, la
députée de
Soulanges.
Mme Picard : Merci
beaucoup >pour votre exposé. J'ai complètement été sous le choc, parce
que nous... Vous avez parlé d'histoires complètes du patient que vous
rencontrez. Nous, on a un petit garçon à la maison qui était très turbulent à
la garderie, et tout ça. Rendu à l'école, on s'est aperçus qu'il avait des gros
problèmes et, avant même de creuser à savoir pourquoi il y a... on a tout de
suite mis l'étiquette : Il doit être TDAH, c'est sûr qu'il a quelque chose
ce petit garçon là, il n'est pas attentif, et tout ça. Mais, nous, de notre
côté parent, on le savait, qu'il a une petite soeur qui est supermalade, il y
avait eu une séparation de ses parents, puis là on disait : Bien, pas sûr
que c'est un médicament que ça lui prend. Et puis là, finalement, on a succombé
à la pression de tous, et on est allés faire une évaluation en neuropsy, et
puis on a payé le neuropsy pour avoir exactement le papier qui dit, enfin :
Votre enfant est TDA et non pas est TDAH. Donc là, je suis vraiment interpelée
par votre exposé.
J'aimerais savoir, selon vous, la
trajectoire de service idéale. Qu'est-ce qu'il faut améliorer, qu'est-ce qu'il
faut enlever, dans un portrait global de ce qu'il se passe en ce moment?
M. Hammarrenger (Benoît) :
Bien, je pense qu'on devrait avoir plus systématiquement un travail d'équipe
fait avec le médecin et peut-être le psychologue ou le neuropsychologue, un peu
comme le médecin qui va faire appel à un spécialiste, justement, pour obtenir
des informations pour son diagnostic, aller chercher une radiographie pour
savoir s'il y a fracture. Donc, on envoie, on va chercher une information, et
le patient revient ensuite aller chercher une échographie, voir ce qu'il se
passe au ventre, pour un enfant qui a mal au ventre. Alors, on envoie en psy ou
en neuropsy, passer des tests, donc passer une épreuve sur l'enfant, pour
savoir qu'est-ce qu'il se passe et outiller ensuite le médecin pour son
traitement ou pour la suite des choses.
Donc, on devrait avoir un peu plus une
espèce de façon de faire, de norme de pratique, qui implique un travail comme
ça, fait avec l'enfant, et également une histoire complète, une évaluation
exhaustive, en fait, qui va faire une histoire de l'enfant, une histoire de son
développement, où les parents sont consultés. Il faut savoir, là, d'où ça part.
Vous m'avez parlé de... il y a une séparation à la maison, il y a des
difficultés avec les frères et les soeurs, de la maladie dans la famille. Il
faut le savoir, parce que ça peut très bien imiter, ça aussi, un TDAH, un
enfant qui préoccupé par : mes parents sont en train de se séparer, il
n'écoute pas en classe. Il a l'air d'être inattentif. Il a l'air, mais il ne
l'est pas.
Alors, on veut avoir une histoire
complète. Et on veut avoir un diagnostic qui n'est pas seulement celui du TDAH,
mais un diagnostic différentiel. On veut, je voudrais qu'à chaque diagnostic
qui est posé de TDAH, on me dise, à côté : C'est un TDAH, mais ce n'est
pas de l'anxiété, mais ce n'est pas une dyslexie, mais ce n'est pas... ou ça
vient avec, parce que ça peut aussi venir avec : c'est un TDAH, et il y a
également de l'anxiété. Je veux savoir qu'on l'a évalué, je veux savoir qu'on
l'a regardé, qu'on s'en est préoccupé, et qu'on s'est positionné. Est-ce que ça
l'est, est-ce que ça ne l'est pas?
Mme Picard : Et, concernant
les suivis, est-ce que vous pouvez m'en dire plus? Parce que, souvent, on a des
diagnostics, on a des médicaments qui viennent avec, et puis je ne sais pas si,
au niveau des suivis, si la trajectoire, la procédure est correcte aussi.
Est-ce que vous savez s'il y aurait une amélioration à apporter?
M. Hammarrenger (Benoît) :
Bien, tout à fait. Je pense que, rapidement, une solution rapide et facile est
celle de la médication. Et, parfois, elle est la bonne solution. Par contre,
dans les bonnes lignes de pratique, souvent pour les enfants plus jeunes, avant
six ans, même avant huit ans, un coaching parental peut être une façon très
efficace de faire.
Un coaching parental, ce que ça vise à
faire, c'est, en quelques séances, «quelques» voulant dire deux, trois, quatre,
cinq séances avec les parents, outiller le parent dans sa gestion d'un enfant
qui a des comportements plus difficiles. C'est ça, un enfant qui a un TDAH.
Souvent, à la maison, dans ces âges-là, deux, trois, quatre, cinq ans, c'est
difficile qu'il respecte les routines, c'est difficile de lui faire faire les
devoirs, il va s'opposer à l'heure des repas, il va être impulsif. Comment on
gère bien, on cadre bien cet enfant-là pour essayer de ramener à l'intérieur de
balises disciplinaires, si on veut, là, tout en préservant un bon lien
parent-enfant, qui est important, qui est primordial, mais avoir de bonnes
balises disciplinaires qui guident notre enfant puis à l'intérieur duquel
l'enfant peut fonctionner? Puis j'ai l'impression qu'on a une certaine quantité
de jeunes soit qui sont TDAH ou qu'on aurait pensé qui sont TDAH pour qui cela
sera suffisant.
Le Président (M. Provençal)
: Député de Richmond.
M.
Bachand
:
Merci beaucoup, M. le Président. Merci beaucoup, docteur, d'être ici. Je vais
faire un lien avec celle qui vous a précédé, sur le titre du mandat, et donc :
augmentation préoccupante de la consommation. Et ce n'est pas qu'on est
antimédicaments. C'est loin de là. Mais il reste que, si je... Et, avoir lu
votre mémoire, vous écouter, il y a une augmentation qui est plus que
préoccupante.
M. Hammarrenger (Benoît) :
…commencer à dire alarmante.
M.
Bachand
:
Bien, alarmante. Et c'est nos enfants.
M. Hammarrenger (Benoît) :
Effectivement. C'est...
M.
Bachand
:
Non, mais, c'est nos enfants.
M. Hammarrenger (Benoît) :
Oui.
• (16 h 10) •
M.
Bachand
:
Et puis, pour nous, c'est important. Le mandat de cette commission-là, c'est de
parler de nos enfants, l'avenir de nos enfants, qui sont surmédicamentés pour
la mauvaise chose, à hauteur d'à peu près <6 %, 7 % des
cas. C'est énorme. Qu'est-ce qu'on fait? Il faut, il faut...
M. Hammarrenger (Benoît)T :
...
effectivement.
M.
Bachand
:
Non, mais c'est nos enfants.
M. Hammarrenger (Benoît)T :
Oui.
M.
Bachand
:
Et puis pour nous, c'est important. Le mandat de cette commission-là, c'est de
parler de nos enfants, de l'avenir de nos enfants, qui sont surmédicamentés
pour la mauvaise chose, à hauteur d'à peu près >6 %, 7 % des
cas. C'est énorme. Qu'est-ce qu'on fait? Il faut... On a un maudit problème,
là.
M. Hammarrenger (Benoît) :
Exact, et ça commence, je pense, avec la bonne façon de faire le diagnostic,
parce que c'est suite au diagnostic qu'on trouvera une solution et qu'on
passera à de la médication. Je pense que ça commence par... Il y a trop de
diagnostics en ce moment. Il y a également l'espèce de diagnostic à l'envers,
qui est fait également dans le bureau du médecin, du type : Je ne sais pas
ce que cet enfant-là a, il ne va pas bien à l'école, il a des comportements
difficiles. On va essayer un médicament. Si ça marche, c'était, donc, un TDAH.
Donc, l'espèce de diagnostic qui est fait, on donne le traitement puis on
regarde. Si ça correspond, on vient de faire notre diagnostic. En faisant ça,
on va avoir souvent des parents... Une fois que le médecin a prescrit ou
ordonné une médication, on a des parents qui partent avec ça puis qui partent
pour les 10 prochaines années, là, avec le médicament.
Donc, on veut avoir, au départ, un
diagnostic qui est fiable, qui est rigoureux, et qui est complet, et qui est
long. C'est long, faire un diagnostic de TDAH. C'est comme ça, Qu'est-ce que
vous voulez que je vous dise? Il n'y a pas de raccourci, de «shortcuts».
M.
Bachand
:
Docteur, je suis d'accord avec vous que c'est long, mais, lorsqu'on parle de la
vie d'un individu qui est enfant aujourd'hui, qui... on le sait, ça a été dit
par les professionnels qui vous ont précédé, qu'il y a des conséquences très
graves au niveau de la consommation d'alcool, de drogues et même d'implication
dans des groupes... Exemple, les cadets de l'Air. On va voir souvent, dans les
cadets de l'Air, qu'il y a des jeunes qui ont besoin d'une structure, qui sont
là et qui seront, après ça, dans les Forces armées canadiennes. Mais le coût du
diagnostic par rapport aux coûts liés, coûts humains et financiers liés aux
enfants qui sont mal diagnostiqués, c'est ça aussi, le but de cette commission,
là.
M. Hammarrenger (Benoît) :
Bien, je suis d'accord avec vous. Le coût qu'on va investir, au départ, pour un
bon diagnostic, visant un bon traitement, on va le récupérer. On le prend à
droite, on le récupère à gauche.
M.
Bachand
:
...juste pour terminer, M. le Président. Je ne dis pas que la maladie n'existe
pas. Elle existe.
M. Hammarrenger (Benoît) :
Tout à fait.
M.
Bachand
:
Et les gens qui souffrent de cette maladie-là doivent être suivis, bien
médicamentés pour très, très, très longtemps. Mais ceux qui n'ont pas cette
maladie-là, qui sont mal diagnostiqués, on leur fait mal, et ça, ça n'a pas de
bon sens, ça.
M. Hammarrenger (Benoît) :
Tout à fait. Je vais ajouter une chose, hein? Et ceux qui sont diagnostiqués,
on le dit pour longtemps. Une chose qu'on ne fait pas au Québec, ou pas
suffisamment, c'est de la réévaluation. On sait maintenant qu'on a environ
50 %... vous allez voir les références dans mon mémoire... un sur deux de
jeunes qui ont un TDAH dans l'enfance qui ne l'auront plus rendus à l'âge
adulte. Ce qu'on sait, en fait, sur ces jeunes-là, c'est que c'est un retard de
maturation du cerveau. Au moment où est-ce qu'ils ont huit ans... pas du
cerveau au complet, de la partie qui s'occupe de l'attention... au moment où
est-ce qu'ils ont huit ans, leur partie qui s'occupe de l'attention équivaut à
celle d'un enfant de six ans, et ainsi de suite. On a un retard qui progresse.
Mais, au moment où le cerveau atteint sa
maturation plus finale, eux également arrivent un peu en retard à cette
maturation finale, et qui fait que le TDAH disparaît. Il disparaît
neurologiquement, dans les scans qu'on fait, et il disparaît sur le plan de la symptomatologie,
donc les symptômes disparaissent, un sur deux, donc 50 %. Donc, le jeune
qui a huit ans, démarre une médication pour le TDAH, il faudrait le réévaluer à
l'adolescence et à l'âge adulte pour savoir : Est-ce qu'on continue ou
est-ce que la maturation nous a aidés puis a réglé le problème? Un autre point
important.
Le Président (M. Provençal)
: Merci. Mme la députée d'Abitibi-Ouest.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Merci beaucoup. Vous avez parlé de scans. Vous pouvez voir, par rapport à un
scan, s'il est diagnostiqué... s'il a une pathologie du TDAH, par rapport à un
scanner?
M. Hammarrenger (Benoît) :
Pas vraiment. Ça se fait par groupes d'enfants. Si je prends un groupe
d'enfants qui ont un TDAH et que je moyenne le fonctionnement de leur cerveau,
il sera différent d'un groupe d'enfants qui n'a pas le TDAH. Alors, je peux le
faire de cette façon-là. Je peux... Bien, je peux... ou on peut le faire en
science, là. Ça a été fait de cette façon-là. Par contre, un individu donné, on
n'est pas encore rendus à pouvoir démontrer le TDAH par le scan dans son
cerveau. Il y a trop de variabilités.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Et, lorsqu'on parle de médication, on sait que, bon, beaucoup d'enfants
prennent les médications. On sait qu'une médication peut engendrer des effets
secondaires. Qu'arrive-t-il avec ces effets secondaires là? Parce qu'on sait
qu'il y a des enfants qui n'ont pas le choix, ils doivent être médicamentés et
ils ont des très grands effets secondaires. Alors, que faites-vous à ce
moment-là?
M. Hammarrenger (Benoît) :
Bien, encore là, ça devrait être géré avec le médecin. Mon avis sur ça, c'est
qu'un traitement qu'on va donner pour quelque chose doit régler plus de
problèmes qu'il n'en génère. Alors, si on règle une partie de l'attention, mais
qu'on génère un paquet d'autres problèmes... Par exemple, on a un enfant qui
est assommé, un peu zombie, ou qui devient un peu plus tendu, irritable,
colérique, un enfant qui ne dort plus le soir ou un enfant qui ne mange plus et
qui ne gagne plus en poids et en croissance, on a quand même des effets
secondaires significatifs. Et il faut se poser la question : Est-ce que
notre effet positif, qui est d'améliorer l'attention, en vaut le coup négatif?
Et là il y a un jugement à faire, qui est à chaque enfant, mais, pour moi, il y
a une certaine quantité d'effets négatifs qu'on ne devrait jamais tolérer.
Le Président (M. Provençal)
: M. le député de <Dubuc.
M. Tremblay :
Oui, bonjour...
M. Hammarrenger (Benoît)T :
...significatif et il faut se poser la
question : Est-ce que notre
effet positif, qui est d'améliorer l'attention, en vaut le coup négatif? Et là,
il y a un jugement à faire, qui est à chaque enfant, mais pour moi,
il
y a une certaine quantité d'effets négatifs qu'on ne devrait jamais tolérer.
Le Président (M. Provençal)
:
M. le député de >Dubuc.
M. Tremblay : Oui,
bonjour. Merci beaucoup, M. le Président. Dans le fond, j'entends et puis je me
dis... on argumente sur des diagnostics périphériques qui... mais, finalement,
vous évoquez le fait d'avoir banalisé, presquement folklorique. On a eu un état
de stupéfaction sur ces quatre lettres-là puis on en a fait presquement une
affaire... Est-ce qu'on pourrait dire qu'à l'heure actuelle on est en retard
puis qu'on manque de sérieux par rapport à la réalité du TDAH? Est-ce que les
structures organisationnelles scolaires, la famille, dans le pattern, tu sais,
de l'enfant qui est turbulent, on reçoit un feed-back de l'école. On appelle à
l'école, on va voir le médecin, ça s'enchaîne. Est-ce qu'on est vraiment
outillés pour faire face à cette réalité-là, à l'heure actuelle, par rapport au
constat?
M. Hammarrenger (Benoît) :
C'est une bonne question, est-ce qu'on outillés. C'est certain qu'il y a un
manque de ressources dans le réseau en général, d'où, d'ailleurs, la présence
du privé, qui coûte cher aux parents. Il y a un manque de ressources... il y a
un manque de ressources.
M. Tremblay : Bien...
Le Président (M. Provençal)
: ...allez-y.
M. Tremblay : J'allais
dire, par rapport au privé, si je consulte dans le privé, est-ce qu'on est en
mesure de signifier, au niveau des suivis, que ceux qui auront eu le privilège
d'aller dans le privé pour aller chercher davantage de profondeur au niveau des
diagnostics, ou d'exactitude, est-ce que ça démontre que ces gens-là ont un
avantage par rapport à ce qui est implanté au Québec?
M. Hammarrenger (Benoît) :
Je dirais certainement ça, effectivement. Le fait de pouvoir aller avoir...
chercher une évaluation au privé, auquel des coûts importants sont associés,
offre certainement un avantage : un diagnostic qui me paraît plus précis,
plus fiable, plus complet, plus détaillé, avec plus de temps passé avec
l'enfant et la famille pour le poser, ce diagnostic-là, plus d'investissement
en temps et peut-être plus de recommandations dirigées dans le bon sens pour
aider le jeune.
Le Président (M. Provençal)
:Mme la députée d'Abitibi-Ouest.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Merci, M. le Président. Est-ce possible qu'un jeune ayant un TDAH ait également
un autre trouble, ce qui fait parfois… peut mener à la confusion lors d'un
diagnostic? Est-ce que ça vous est arrivé souvent, cette pathologie-là?
M. Hammarrenger (Benoît) :
Ah! c'est fréquent que des troubles se mélangent ou que l'un a l'air de
l'autre. Je vous dis que certains troubles ont l'air du TDAH, un TDAH a l'air
aussi de certains troubles, et, parfois, les troubles viennent ensemble. Alors,
on peut avoir de la dyslexie, qui... les troubles d'apprentissage qui se
mélangent au TDAH, qui se mélangent à de l'anxiété chez l'enfant, à des difficultés
sociales, à des difficultés familiales qui sont présentes dans la vie de
l'enfant. Je parle pour ma part, en neuropsychologie, pour moi, là, notre
travail, mon travail à moi et à mon équipe, c'est d'aller départager tout ça. C'est
ça, notre job. C'est ça qu'on devrait faire, c'est ça qu'on doit faire.
On doit départager qu'est-ce qui est quoi
et à quel niveau; qu'est-ce qui n'est pas là, qui a l'air, mais qui n'est pas
là; qu'est-ce qui est là; et qu'est-ce qui prédomine. Si je dis : J'ai de
l'anxiété et un TDAH, par exemple, qu'est-ce qui prédomine et qu'est-ce que je
devrais traiter en priorité? J'ai plutôt un enfant anxieux et, secondairement,
TDAH, je devrais travailler sur l'anxiété, inversement. Alors, c'est notre
travail d'aller départager ça.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
…de départager tout ça, prend combien de temps?
M. Hammarrenger (Benoît) :
C'est six heures dans notre cas, là, six heures d'évaluation avec l'enfant. Je
vous dirais que ça ressemble à ça, d'un neuropsychologue à l'autre, là. Six
heures d'évaluation avec l'enfant, incluant une heure avec les parents, là, où
on établit le décours de vie de cet enfant-là, on établit son histoire et on
fait le tour de son profil complet, là.
Et, ensuite, c'est un bon 10 heures
de travail, d'analyse de dossier, là, d'analyse de correction des tests,
analyse du dossier, rédaction de rapport. Nous, on investit environ 17 heures
et demie, en tout et partout : l'évaluation, le temps qu'on la réexplique,
on explique les résultats aux parents, hein, par la suite. On les reçoit, on
leur parle, on leur présente qu'est-ce qu'il faut faire avec l'enfant, les
pistes de solution. On évalue ça à 17 heures et demie par semaine.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
...est-ce que... Les gens veulent vous rencontrer, est-ce que c'est une
clinique privée? Comment ça fonctionne?
• (16 h 20) •
M. Hammarrenger (Benoît) :
Tout à fait. Nous, on est dans une clinique privée. Les gens peuvent accéder
par eux-mêmes ou par référence d'un médecin. Donc, voilà. Évidemment,
déboursent de leur poche ou c'est couvert par les assurances, s'ils ont des
assurances privées, et le processus se déroule, là, dans nos bureaux. C'est un
six heures d'évaluation; le temps, ensuite, de rédaction est à l'extérieur et
on revoit les parents une autre heure, heure et demie pour expliquer les
résultats, les <coacher sur quoi faire avec le TDAH.
Le Président (M. Provençal)
:
C'est terminé.
Merci beaucoup. Je vai
s
maintenant céder la parole à
l'opposition...
M. Hammarrenger (Benoît)T :
...et le processus se déroule, là, dans nos bureaux. C'est un 6 heures
d'évaluation, là. Le temps, ensuite, de rédaction est à l'extérieur, et on
revoit les parents une autre heure, 1,5 heure, pour expliquer les
résultats, les >coacher sur quoi faire avec le TDAH.
Une voix
: ...
Le Président (M. Provençal)
: Merci. C'est terminé. Merci beaucoup. Je vais maintenant
céder la parole à l'opposition officielle, et c'est Mme la députée de Fabre qui
va avoir des échanges avec vous.
Mme Sauvé : Merci
beaucoup, M. le Président. Alors, bienvenue Dr Hammarrenger, un plaisir de vous
entendre. Et, comme mon collègue l'a fait cet avant-midi, je vais me permettre
un petit élan de chauvinisme puisque vous travaillez dans la merveilleuse
région de Laval. Alors donc, magnifique, voilà. Alors, c'est dit.
Moi, écoutez, je vous entends, puis la
première question que j'ai, parce que vous avez des constats assez bien
affirmés, qui reprennent certains constats qu'on a entendu lors de
présentations précédentes, en lien avec le faux diagnostic, le faux diagnostic
important, et vous le liez, bien sûr, aux différentes réalités des
professionnels qui ont ce rôle-là, du diagnostic, que ce soient les
psychologues scolaires, que ce soient les médecins... Moi, je voulais voir, un
petit peu, est-ce que c'est votre grande expertise professionnelle... Sur
quelle base, parce que vous êtes plus que dans une hypothèse de travail, là,
vous êtes dans une affirmation, sur quelle base vous arrivez à ce constat-là
très affirmé?
M. Hammarrenger (Benoît) :
Oui. Ce sont des pistes de réflexions, je vous dirais, basées sur l'expérience.
J'ai 15 ans d'expérience en pratique avec les enfants, des rapports que
j'ai reçus de d'autres cliniques, de différentes... des gens qui m'ont consulté
avec un diagnostic de TDAH déjà posé, et qui remettaient le diagnostic en
question. Donc, j'ai vu une grande quantité de jeunes passer, de professionnels
travailler. Et, comme je l'ai écrit, d'ailleurs, dans mon rapport... et là j'ai
dû précipiter ma présentation dans le temps limite que j'avais... le but n'est
pas, ici, de critiquer ou de blâmer l'un ou l'autre des professionnels, le but
est de s'arrêter, et je le fais avec les neuropsychologues également, de
s'arrêter sur notre pratique et de se dire : Nécessairement, c'est nous
qui les faisons, ces diagnostics-là, là. C'est nous qui les faisons, il y en a
trop, on fait une erreur. Quelle est-elle?
Le Président (M. Provençal)
: …
Mme Sauvé : M. le
Président, merci. Moi, je voulais revenir aussi... parce que, dans le fond,
dans le traitement, il n'y a pas de multiple choix. Il y a, bien sûr, le
médicament, qui est vu, peut-être, puis je pense que vous serez d'accord, qui
veut un peu comme la panacée universelle, bien que le traitement soit efficace
à 60 %, 80 % des... en tout cas, c'est ce que les statistiques
démontrent. Alors, il y a le médicament, il y a le médicament avec des
interventions psychosociales, puis c'est à peu près tout.
Moi, j'ai beaucoup aimé votre notion du
coaching parental, je vous l'avoue, et là je me permets de vous adresser la
question : Est-ce que, face aux possibles faux diagnostics, tel que vous
l'avez expliqué, est-ce qu'on pourrait penser qu'un coaching parental pourrait
peut-être faire un certain grand travail de départager la situation de
l'enfant, et d'orienter, dans le fond, l'évaluation, la première évaluation de
l'enfant, vers un vrai diagnostic? Est-ce qu'il y a un travail en amont avec le
coaching parental qui pourrait être envisagé?
M. Hammarrenger (Benoît) :
Tout à fait. Ça clarifie la suite des choses. On le fait également à notre
clinique, ce coaching-là, et, une fois qu'on a fait quelques séances de
coaching, qu'on a outillé les parents et qu'on a eu ce suivi-là de comment ça
se passe et qu'est-ce que ça donne, finalement, ce coaching-là, on a une
meilleure perception. Et, évidemment, la personne qui a fait le coaching, si
elle peut transmettre ses informations à l'évaluateur en neuropsy, par exemple,
qui serait fait après, ou à un médecin, on a une information pertinente qui est
là.
Mme Sauvé : Je peux
continuer? Merci, M. le Président. Vous avez parlé des différents
professionnels qui font le diagnostic, vous avez peu, bien... à vrai dire, vous
n'avez pas parlé des conseillers d'orientation, qui, depuis quelques années,
ont un rôle, un acte protégé élargi avec la possibilité d'évaluer la santé
mentale. Est-ce que'il y a un rôle que pourraient jouer... parce qu'ils sont
présents, entre autres, dans les milieux scolaires... est-ce que vous
considérez qu'ils peuvent s'ajouter à l'expertise professionnelle en santé?
M. Hammarrenger (Benoît) :
Oui. Tout à fait. Les conseillers en orientation et les... on pourrait ajouter
les infirmiers, infirmières, qui, dans certains cas, peuvent obtenir
l'autorisation de poser ce diagnostic-là. Ce n'est jamais arrivé, dans mes 15 ans
de pratique, que j'ai vu un diagnostic posé par... donc, c'est pour ça que je
n'en ai pas parlé. Est-ce qu'ils pourraient avoir un rôle à jouer? J'ai
l'impression que ces professionnels-là ont d'importants rôles à jouer dans
leurs domaines. Est-ce qu'ils sont les meilleurs pour ce rôle-là? Je n'en suis
pas certain.
Mme Sauvé : Vous avez
mis l'accent <sur l'importance du suivi qui ne se fait pas. Comment on
peut changer cette culture-là? Comment...
M. Hammarrenger (Benoît)T :
...que ces professionnels-là ont d'
importants rôles à jouer dans leur
domaine.
Est-ce qu'ils sont les meilleurs pour ce rôle-là? Je n'en suis
pas certain.
Mme Sauvé :
Vous avez mis l'accent >sur l'importance du suivi, qui ne se fait pas.
Comment on peut changer cette culture-là? Comment on peut faire en sorte que...
Parce que, si le suivi n'est pas fait, et que le diagnostic est là, et que le
traitement est en place avec le médicament, bien, on... alors, l'enfant
grandit, l'adolescence, et puis, finalement, il n'a plus le TDAH.
C'est une culture à changer aussi, là.
Dans la prévalence, là, il y a un élément assez clé qu'il faut peut-être
regarder. Alors, comment on y arrive pour inciter, dans l'évaluation,
l'importance et l'obligation d'avoir un suivi peut-être aux cinq ans, ou peu
importe, là, l'espace-temps qu'on considère?
M. Hammarrenger (Benoît) :
Bien, chacun des professionnels devrait effectivement le véhiculer. Après une
évaluation, il y a un diagnostic. Cette idée-là d'avoir une réévaluation, qu'on
ne part pas avec ce diagnostic-là pour la vie, quand on l'a donné à six, huit
ans, là, même à 10, 12 ans, là, qu'il doit y avoir une réévaluation qui est
faite...
Je dirais, même au niveau des
professionnels, il y a encore beaucoup de professionnels pratiquant autour du
TDAH qui gardent l'idée... et c'est ce qui m'a été enseigné dans mes études il
y a 15 ans, là, on disait : Un TDAH, c'est un trouble
neurodéveloppemental qu'on a pour la vie. Une fois qu'on l'a, c'est pour la
vie. Et cette idée-là est encore assez persistante chez les professionnels de
la santé, alors que nos nouvelles données nous disent plutôt que, dans un cas
sur deux, là, 50 %, bien, ça disparaît, ça s'estompe avec la maturation.
Donc, aussi, une transmission des connaissances... ces connaissances-là auprès
des professionnels seraient nécessaires.
Mme Sauvé : Pour
poursuivre dans votre idée auprès des professionnels mais aussi auprès des
parents, est-ce que ça pourrait être une avenue aussi d'inciter les parents? On
se dit : On va chez le médecin à tous les deux ans ou à tous les ans, peu
importe, on... Il y a vraiment récurrence qui est déjà prévue dans la culture,
et d'y aller de façon régulière. Est-ce qu'on ne pourrait pas aussi inciter les
parents à exercer cette vigie-là au niveau du suivi?
M. Hammarrenger (Benoît) :
Absolument.
Le Président (M. Provençal)
: Vous pouvez y aller.
Mme Sauvé : Je peux
continuer?
Le Président (M. Provençal)
: Il vous reste quatre minutes.
Mme Sauvé : Quatre
minutes. Merveilleux. J'ai beaucoup retenu, dans votre mémoire... et puis vous
en avez parlé tantôt, docteur, de cette réalité-là, qui est de trouver la bonne
mesure. Parce qu'on n'est pas dans une réalité... Il y a un traitement médical,
qui est vraiment mis de l'avant et qui fonctionne quand même bien, même s'il
est peut-être lié à un surdiagnostic. Au niveau de la psychologie, est-ce qu'il
y a des tests psychométriques reconnus qui vous permettent vraiment de faire le
lien direct, une corrélation directe entre le résultat du test et le diagnostic
du TDAH?
M. Hammarrenger (Benoît) :
Aucun test unique n'a cette prétention-là, aucun test unique ne peut le faire,
aucun test unique n'est documenté pour ça, surtout pas les questionnaires, là.
On a parlé des Conners, on a parlé de ces questionnaires-là. C'est insuffisant
pour poser le diagnostic.
Pour moi, ça prend un ensemble de données,
et c'est pour ça que l'évaluation prend du temps, qu'on y met six heures, c'est
parce que ça nous prend beaucoup de données, les données étant des résultats de
tests, les données étant également nos observations de
l'enfant — c'est une donnée subjective, mais c'est une donnée quand
même — les données étant ce que les parents nous rapportent de
l'évolution de cet enfant-là, de ce qu'il se passe à la
maison — c'est aussi une donnée subjective mais une
donnée — les données étant un feed-back du professeur, qui peut être
une lettre écrite, qui peut être un questionnaire rempli — c'est,
encore là, une donnée.
Et ce qu'on veut avoir, c'est une espèce
de nuage de points, un ensemble de données, un nuage de points qui pointent
tous dans la même direction, et, de temps en temps, on va avoir des points
disparates. On va avoir des tests qui vont nous dire : Ah! pas de TDAH, ou
un test qui va nous dire : Oui, gros TDAH, mais qui va être disparate du
reste des données. Et ce qu'on veut, c'est un ensemble de données, un nuage de
points qui pointent dans la même direction, et là on est plus fiable dans notre
diagnostic.
Une voix
: ...
Mme Sauvé : Oui, j'en
aurais une. J'en aurais plusieurs, mais... Je voulais savoir, dans le fond...
Si on suit toute votre réflexion et votre présentation, votre discours, dans le
fond, par rapport à la préoccupation et le mandat qu'on a en cette commission,
si on arrivait à diminuer le faux diagnostic, on serait probablement dans une
médication globale qui diminuerait.
Alors, comment on y arrive, là? Parce que
vous avez fait les constats par rapport aux professionnels, mais comment on y
arrive? Quelles sont des pistes de solution pour diminuer ce faux diagnostic?
• (16 h 30) •
M. Hammarrenger (Benoît) :
Alors, il faudrait probablement s'asseoir pour y réfléchir, peut-être former...
Je pense qu'il faudrait peut-être former un groupe de réflexion sur des lignes
directrices. Ça s'est fait en psychologie, notamment, avec l'Ordre des
psychologues. Je pense... peut-être en association avec le Collège des
médecins, là, pour certains diagnostics, dont les troubles d'apprentissage, la
déficience intellectuelle, le TSA, le trouble de <spectre de l'autisme.
On a des lignes directrices...
>
16 h 30 (version révisée)
< M. Hammarrenger (Benoît)T :
...
peut-être former...
Je pense qu'il faudrait
peut-être
former un groupe de réflexion sur des lignes directrices. Ça s'est fait en
psychologie,
notamment avec l'Ordre des psychologuesV. J
e pense à
peut-être une
association avec le
Collège des médecinsT,
là, pour de certains diagnostics, dont les troubles d'apprentissage, la
déficience intellectuelle, le TSAV, le trouble du >spectre de l'autisme.
On a des lignes directrices pour la bonne pratique de ça.
J'ai l'impression que, si on construisait
des lignes directrices ou... qui seraient suivies et qui devraient inclure une
pratique concertée des médecins et des psychologues, neuropsychologues, une
pratique ensemble... pour des lignes de bonne pratique, finalement, j'ai l'impression
qu'on pourrait s'approcher d'une solution intéressante.
Mme Sauvé : Très intéressant,
merci beaucoup.
Le Président (M. Provençal)
: Merci. Je cède maintenant la parole au député de Jean-Lesage.
M. Zanetti : Merci, M. le
Président. Merci beaucoup pour votre présence et votre présentation. Quelle
forme prend la promotion auprès des professionnels de la santé des compagnies
qui produisent les médicaments utilisés pour le TDAH?
M. Hammarrenger (Benoît) :
Dans le cas des psychologues et des neuropsychologues, ils ne nous parlent pas parce
qu'on ne prescrit pas. Donc, on n'en a pas, de ce genre de pression là. Il
faudrait vous informer auprès de médecins pour ça.
M. Zanetti : Et, même si
vous faites des diagnostics, par exemple, ça ne se passe pas?
M. Hammarrenger (Benoît) :
Ça ne se passe pas... Je mettrais peut-être une nuance à ce que je viens de
dire. Dans les congrès où on va assister à des conférences, on va avoir des présentations
faites par des compagnies pharmacologiques ou pharmaceutiques sur le TDAH, sur
l'efficacité des médicaments. Donc, évidemment, là, il y a un biais chez le
présentateur. Souvent, ce sont des professionnels avec des doctorats qui nous
présentent de façon non biaisée, là, mais... Voilà.
M. Zanetti : Et vous avez
parlé de la pression client payeur. Est-ce que vous pouvez nous décrire le phénomène
davantage?
M. Hammarrenger (Benoît) :
Bien oui, tout à fait. Alors, oui, il y a de gros frais associés à une évaluation
en neuropsychologie. Je disais, tantôt, 1 500 $ à peut-être
2 500 $, les plus chères. C'est beaucoup d'argent. Certains parents
font de vrais sacrifices pour débourser ce montant-là.
Et certains arrivent avec une idée très
claire et préconçue de ce qu'a ou devrait avoir leur enfant, et donc de ce que
leur donnera cette évaluation-là en neuropsy. Ils viennent avec l'idée un petit
peu, là, je ne sais pas si le terme est juste, mais de s'acheter un diagnostic,
donc, de venir avec un certain montant et de dire : Bon, bien je vais
l'avoir enfin, mon papier. Je vais l'avoir, mon diagnostic. Je vais partir avec
ça et, grâce à ça, j'aurai soit accès à un médicament ou accès à des
accommodations à l'école. Parce que notre rapport permet ça aussi, on va
permettre, par exemple, d'avoir plus de temps pour faire les examens, d'avoir...
D'ailleurs, dans les... On disait tantôt : Il n'y a pas beaucoup de
solutions au TDAH, là... Il y a ces autres choses-là aussi, là, d'accommoder le
milieu scolaire, de faire bouger un peu l'enfant. Il y a un paquet de choses qu'on
peut faire. Donc, il y aura des accommodations qu'on peut mettre en place. Et
les parents, donc, viennent chercher ça.
Si, au terme de ça... Les situations les
plus difficiles, c'est si, au terme de ça, notre conclusion est plutôt que,
bien, l'encadrement familial devrait être travaillé... ce n'est pas une réponse
que le parent payeur aime nécessairement entendre. C'est moins facile qu'un
médicament. Si on a, bon, juste un trouble d'apprentissage et que, là, il faut
investir sur de l'orthopédagogie ou de l'orthophonie pour travailler le trouble
d'apprentissage, on a d'autre argent à investir. Là, le parent vient déjà de
payer, il pensait, lui, avoir sa solution, là, hein, à partir de là. Les autres
services sont également payants.
Alors, on a des parents qui... ils ont dit :
Il n'y a pas de TDAH, là. On a des parents, parfois, on l'a vu, là, à notre
clinique, moi ou de mes collègues, où le parent va mettre une pression et dire :
Bien, comment ça se fait? Vous ne l'avez pas trouvé. Ou on entend, des fois :
Vous êtes incompétent, on va vous... on va aller faire une plainte au syndic de
l'Ordre des psychologues. C'est une menace. Ce n'est pas le fun, comme
psychologue, avoir une plainte sur notre tête, hein? Il y a une pression à
recevoir ça.
J'ai eu des parents qui ont été... qui
sont partis pas contents du bureau parce que j'ai dit, il n'y avait pas de
TDAH, ont été dans une autre clinique, réévaluer. L'autre… psychologue,
neuropsychologue, peu importe, là, a dit : Oui, il y a un TDAH. Ils m'ont
rappelé puis ils ont dit : Vous êtes incompétent, l'autre l'a trouvé, lui,
le TDAH. Alors, il y a un de nous deux qui a raison, je ne sais pas lequel, là,
mais...
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup.
M. Hammarrenger (Benoît) :
Voilà.
Le Président (M. Provençal)
: La parole est maintenant au député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui,
merci. Merci beaucoup. J'aimerais savoir, le dépistage et le diagnostic
ailleurs dans le monde, en quoi on pourrait s'en inspirer? Parce que, si nous,
on a le double des taux normaux, disons, de TDAH, ça veut dire qu'il y a
quelque chose ailleurs qui se fait de mieux ou de différent.
M. Hammarrenger (Benoît) :
Oui, ça, c'est une bonne question, puis je pense qu'il y aurait une piste
intéressante de solution à aller voir qu'est-ce qu'il se fait ailleurs puis
qu'est-ce qui fonctionne ailleurs, aller voir également ce qu'il se fait dans
les écoles pour s'adapter à ces jeunes-là. Est-ce que j'ai une réponse pour
vous aujourd'hui? Pas vraiment. Qu'est-ce qu'il se fait de mieux ailleurs, de
plus efficace, je n'ai pas fait cette <recherche-là.
M. Gaudreault : On pourrait
la faire... je veux dire, il y a... puis il y a peut-être d'autres...
M. Hammarrenger (Benoît)T :
...
qu'il y aurait une piste intéressante de solution à aller voir
qu'est-ce qui se fait ailleurs puis qu'est-ce qui fonctionne ailleurs, aller
voir également ce qui se fait dans les écoles pour s'adapter à ces jeunes-là.
Est-ce que j'ai une réponse pour vous aujourd'hui? Pas vraiment. Qu'est-ce qui
se fait de mieux ailleurs, de plus efficace, je n'ai pas fait cette >recherche-là.
M. Gaudreault : On
pourrait la faire, par exemple. Je veux dire, il y a... puis il y a peut-être d'autres
invités qui vont venir dans les prochains jours, qui vont nous permettre
d'aller plus loin là-dessus.
M. Hammarrenger (Benoît) :
Oui, ça vaudrait la peine.
M. Gaudreault : Oui. Vous
parlez, dans votre mémoire, vers la fin, là, à la fin, en fait, de la
banalisation du diagnostic de TDAH. Parlez-nous de ça, puis il y a un lien à
faire, je pense, avec la question de mon collègue, là, sur la pression du client
payeur.
M. Hammarrenger (Benoît) :
Oui. Alors, on a également — et je trouve peut-être davantage chez
l'adulte, mais c'est vrai aussi chez l'enfant — une espèce de
banalisation, où le TDAH n'est véhiculé, en ce moment, plus tellement comme un
trouble — et rappelons-nous que ça s'appelle trouble de déficit de
l'attention, le TDAH, là — plus tellement comme un trouble, mais, des
fois, on entend plutôt : c'est une différence individuelle, c'est une
différence entre des enfants. Puis c'est presque rendu… j'avais cette
discussion-là avec des médecins et psychologues il n'y a pas tellement
longtemps, c'est perçu comme une différence, comme il y en a qui ont les
cheveux blonds, d'autres qui ont les cheveux bruns, il y en a qui ont les yeux
bleus, d'autres qui ont les yeux bruns, il y a en qui ont des difficultés
d'attention puis d'autres qui n'en ont pas. On est dans une différence
individuelle et non plus dans un trouble. On est aussi dans... Ces jeunes-là
ont un ensemble de belles qualités et de belles... de forces au niveau du TDAH,
et c'est des créatifs, etc., et on valorise un petit peu ce que c'est que le
TDAH. Et je me faisais la réflexion que c'est probablement le seul trouble sur
terre, la seule maladie sur terre qui vient avec de belles forces et de belles
qualités et qui vient avec des aspects positifs et qu'on cherche presque à
obtenir comme diagnostic.
Quand on s'arrête à ce que moi, je pense
qu'est un TDAH, je pense que c'est un trouble qui correspond à un handicap. Un
handicap, c'est une situation, là, quand... La ligne de conduite qu'on a à
notre clinique, c'est qu'un TDAH, c'est un trouble qui nécessite des
accommodations tout comme un enfant paralysé des jambes devrait avoir droit à
une rampe pour rentrer à son école. C'est une accommodation qui est nécessaire
en raison du handicap. Sans rampe, si on a juste des escaliers, ce jeune-là ne
peut pas être scolarisé. Alors, notre jeune TDAH a droit à des accommodations,
parce que, sans ces accommodations-là, il ne peut pas être scolarisé. C'est ça,
ma perception de ce qu'est un TDAH. Il ne peut pas être scolarisé ou ne peut
pas faire de liens avec ses... de liens sociaux avec des amis. On a un réel
boulet, de réelles situations de handicap où le jeune vit une réelle détresse
et on n'est pas dans... Puis les parents qui vivent avec un jeune qui a un vrai
TDAH vous diront : Ce n'est pas le fun, ce n'est pas des belles forces, ce
n'est pas quelque chose de positif. Le TDAH, c'est dur, c'est difficile. Et le
fait de banaliser l'espèce d'image du TDAH comme ça et de le voir simplement
comme une différence individuelle, on banalise et on enlève une crédibilité au
vrai TDAH.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup pour votre contribution à nos travaux.
La commission ajourne ses travaux jusqu'au
jeudi 7 novembre 2019, à 8 h 30, où elle accomplira un
autre mandat. Merci beaucoup.
(Fin de la séance à 16 h 38)