Journal des débats (Hansard) of the Committee on Health and Social Services
Version préliminaire
42nd Legislature, 1st Session
(November 27, 2018 au October 13, 2021)
Cette version du Journal des débats est une version préliminaire : elle peut donc contenir des erreurs. La version définitive du Journal, en texte continu avec table des matières, est publiée dans un délai moyen de 2 ans suivant la date de la séance.
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Thursday, November 7, 2019
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Vol. 45 N° 37
Order of initiative – The alarming increase in the use of psychostimulants in children and young people in connection with attention deficit hyperactivity disorder (ADHD)
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Intervenants par tranches d'heure
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Provençal, Luc
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Blais, Suzanne
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Picard, Marilyne
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Blais, Suzanne
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Provençal, Luc
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Picard, Marilyne
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Sauvé, Monique
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Zanetti, Sol
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Gaudreault, Sylvain
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Provençal, Luc
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Lecours, Isabelle
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Tremblay, François
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Bachand, André
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Picard, Marilyne
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Sauvé, Monique
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Zanetti, Sol
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Provençal, Luc
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Gaudreault, Sylvain
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Provençal, Luc
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Tremblay, François
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Lafrenière, Ian
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Lecours, Isabelle
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Picard, Marilyne
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Bachand, André
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Sauvé, Monique
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Sauvé, Monique
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Provençal, Luc
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Zanetti, Sol
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Gaudreault, Sylvain
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Picard, Marilyne
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Bachand, André
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Bachand, André
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Provençal, Luc
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Picard, Marilyne
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Tremblay, François
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Sauvé, Monique
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Nichols, Marie-Claude
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Zanetti, Sol
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Gaudreault, Sylvain
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11 h 30 (version révisée)
(Onze heures trente-six minutes)
Le Président (M. Provençal)
: Bon matin à tous. Ayant constaté le quorum, je déclare la
séance de la Commission de la santé et des services sociaux ouverte. Je vous
souhaite la bienvenue et je demande à toutes les personnes dans la salle de
bien vouloir éteindre la sonnerie des leurs appareils électroniques.
La commission est réunie afin de
poursuivre les consultations particulières et auditions publiques dans le cadre
du mandat d'initiative concernant l'augmentation préoccupante de la
consommation de psychostimulants chez les enfants et les jeunes en lien avec le
trouble déficitaire de l'attention avec hyperactivité.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La Secrétaire
: Oui, M.
le Président. M. Lafrenière (Vachon) est remplacé par M. Bachand
(Richmond); M. Benjamin (Viau), par Mme Nichols (Vaudreuil); Mme David
(Marguerite-Bourgeoys), par Mme Sauvé (Fabre); M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine),
par M. Gaudreault (Jonquière).
Audtions (suite)
Le Président (M. Provençal)
:Merci, Mme la secrétaire. Nous
entendrons, ce matin, les organismes suivants : Mme Anne Hébert,
psychologue, et l'Institut national d'excellence en santé et services sociaux.
Comme la séance a débuté à
11 h 36, y a-t-il consentement pour poursuivre nos travaux au-delà de
l'heure prévue, soit 13 h 6? Consentement. Merci.
Je souhaite maintenant la bienvenue à Mme Ariane
Hébert. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre
exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la
commission. Je vous invite à vous présenter et à commencer votre exposé. Vous
avez la parole, madame.
Mme Ariane Hébert
Mme Hébert (Ariane) :
Alors, bonjour. Je suis Ariane Hébert. Je suis psychologue clinicienne. Je me
spécialise dans l'évaluation de la santé mentale auprès de diverses clientèles.
Donc, traduction libre, je ne suis pas spécialiste, parce que, pour évaluer la santé
mentale, je me dois d'être une bonne généraliste, donc je me dois de connaître
le TDAH, bien entendu, mais aussi les autres troubles pour être capable
d'émettre des bons différentiels.
Alors, je vous ai transmis mon mémoire ce
matin, je viens davantage vous jaser de mon expérience clinique, donc de ce que
je vois, moi, dans mon bureau et de comment j'évalue le sujet qui vous
préoccupe.
Donc, tout d'abord, il faut savoir qu'en
étant en bureau privé je rencontre toutes sortes de clientèles. Alors, en ce
qui concerne le TDAH, par exemple, je vais rencontrer autant les parents qui
viennent se faire interpeler pour une première fois par un enseignant qui a
nommé que peut-être l'enfant bougeait un petit peu plus que la moyenne. Je
rencontre aussi des parents qui… ça fait plusieurs années qu'ils vivent des difficultés,
qui se le font dire régulièrement, qui rencontrent aussi des enjeux importants
à la maison, alors... et, entre ça, bien, ça va du gris pâle au gris foncé, là.
Donc, pour ma part, c'est la clientèle que je couvre.
Ce que je remarque, dans le contact
parent, première des choses, c'est que, comme les parents sont maintenant mieux
informés, hein, on peut aller trouver, sur Internet, les critères diagnostiques
du DSM, donc sur le TDAH, et puis les enseignants aussi, alors, d'entrée de jeu,
c'est plus facile pour eux d'attribuer ce trouble-là aux symptômes qu'ils
observent. Je ne pense pas que ce soit dans une intention malveillante, là, je
me suis diagnostiqué quelques cancers par Wikipédia cette année, alors je pense
que c'est dans cette lignée-là, hein? On sait, on connaît l'information, donc
on tente de poser une étiquette sur ce qu'on sait.
• (11 h 40) •
Maintenant, l'autre chose qui me saute aux
yeux, dans le contact parent toujours, c'est que les gens ont perdu de vue
ou... non, je devrais dire, les gens ne savent plus c'est quoi, la norme, donc
qu'est-ce qui est normal pour un enfant, en 2019, de ce qui l'est moins. Ce que
j'entends par là, c'est qu'aujourd'hui, dans notre vie actuelle, pour les
jeunes à qui on demande d'être dans un service de garde de 7 h 30 à
5 h 30, à qui on <demande d'aller en autobus et de revenir...
en fait, d'aller et de revenir à l'école...
Mme Hébert (Ariane)T :
...Donc,
qu'est-ce qui est normal pour un enfant en 2019 de ce qui l'est
moins? Ce que j'entends par là, c'est qu'aujourd'hui, dans notre vie actuelle,
pour les jeunes à qui on demande d'être dans un service de garde de
7 h 30 à 17 h 30, à qui on >demande d'aller en
autobus et de revenir... en fait, d'aller et de revenir à l'école en autobus,
de dîner à l'école, de rester assis, d'avoir un agenda de président des
États-Unis, on se demande maintenant si... Est-ce qu'un enfant qui n'est pas
capable de rester une demi-heure assis pendant le souper, c'est normal? Donc,
on a un peu perdu nos balises par rapport à ça et, donc, on tire des
conclusions de comportements qui ne sont plus nécessairement adaptées à notre
ère de vie, là. Donc, je reviens encore, là, la normalité s'est perdue en cours
de route, on ne sait plus.
Et puis ça, c'est commun dans les...
auprès des parents, c'est commun aussi auprès des enseignants, puis j'ai envie
de vous dire, quitte à me faire tirer des tomates, c'est aussi commun pour les
professionnels. Il y a beaucoup de professionnels qui ne savent pas, par
exemple, où devrait se tracer la ligne en 2019, qu'est-ce qui constitue de
l'agitation ou de l'inattention. Alors, ça, ça fait partie, je pense, des
causes qui peuvent conduire à un surdiagnostic. Enfin, ce n'est pas la réponse,
mais ça fait partie du problème.
D'autre part, j'ai aussi évoqué, dans mon
mémoire, qu'on manque de ressources pour mettre en place des applications, des
stratégies pour intervenir de façon différente, intervenir autrement que par
médication, c'est vrai. En fait, les parents... vous savez, j'ai écrit un livre
sur le déficit d'attention, il s'est vendu à 75 000 exemplaires au
Québec, il parle des stratégies autres que la médication. Ça fait que moi, je
traduis, par là, une volonté des parents à faire autrement que par la
médication. Mais, en même temps, c'est des parents qui ont souvent des enjeux
eux-mêmes, hein? On sait que c'est une maladie génétique, alors ce n'est pas
rare que les parents eux-mêmes soient atteints du TDAH. Et puis, comme il y a
souvent des comorbidités, le TDAH se présente rarement seul, ça fait que, donc,
il y a des éléments anxieux, il y a des éléments de dépression, il y a plein
d'autres choses... il y a des troubles de comportement, plein d'autres choses
qui viennent avec et qui compliquent, en fait, la mise en oeuvre des
stratégies.
D'autre part, je suis maman d'enfants TDAH
et je suis très bien outillée et, néanmoins, je suis capable de vous dire, puis
permettez-moi l'expression, c'est «tough», ce n'est pas facile de mettre en
place des stratégies et d'assurer un suivi, de personnaliser les interventions,
même quand on a des bonnes connaissances. Ça fait que, donc, oui, c'est sûr que
la médication devient, à ce moment-là, peut-être une solution beaucoup plus...
je n'ai pas envie de dire fragile... bien, facile, dans le sens où les parents
mettent l'éponge, mais, dans le sens où c'est abordable pour eux.
La mère qui arrive, là, avec ses trois
enfants, là, à 5 heures, puis il faut qu'ils soient couchés à 7 h 30,
puis qu'on lui dit : Fais un parcours moteur pour tes enfants, pour les
libérer de leurs tensions de la journée, pour qu'ils puissent apprendre leur
alphabet en sautant dans les marches, elle n'a pas le temps, ce n'est pas
réaliste pour elle. Ça fait que, donc, c'est bien beau proposer des moyens, des
stratégies, mais encore faut-il réussir à aller les atteindre, et ce, à ce que
ce soit réaliste dans leur quotidien. Ça fait que, donc oui, on manque
d'outils, en fait, de stratégies, de ressources pour aider ces parents-là, pour
mettre en place des plans, etc.
Et, finalement, j'ai aussi parlé de la
pression de performance dans mon mémoire. La pression de performance, là, il
faut le voir, en fait, de deux angles : on peut penser que notre société
exige toujours plus, c'est vrai; on peut aussi penser que, maintenant, l'enfant
a pris une place tout à fait différente dans nos familles versus il y a
quelques années. Alors, la lunette est beaucoup mise sur nos enfants. Écoutez,
voilà 30 ans, là, je ne suis pas sûre que c'était commun de trouver deux
parents assis dans une pratique de hockey, à 5 h 30 le matin, pour
assister, hein? C'était la mère qui ramassait les six enfants du quartier. Maintenant
c'est chose commune. Ça fait que, donc, on est vraiment beaucoup plus centrés
sur nos enfants et beaucoup plus fragiles ou… encore là, on détecte beaucoup
plus toute anomalie de comportement et on en tire des conclusions. Parfois, là,
j'ai la chance, si je peux m'exprimer ainsi, de voir des parents qui viennent
s'asseoir devant moi à titre préventif, ils me disent : Écoute, on n'est
pas sûrs qu'il a un TDAH, mais on aimerait ça, ne passer à côté de quelque
chose. O.K., alors, à ce moment-là, décrivez-moi les atteintes qu'a, cet
enfant-là, dans son quotidien. Mais il n'en a pas vraiment, mais s'il fallait
qu'il y en ait?
Alors, on me demande de diagnostiquer un
trouble préventif, mais ça, encore là, ce n'est pas exception, là. Ça fait que,
vous comprenez, l'idée, c'est de dire : On est dans une société où on
refuse toute souffrance à nos enfants. On le voit, d'ailleurs, à travers les
troubles anxieux et pleins d'autres choses, là, mais on ne veut tellement
qu'ils aient mal, on ne veut tellement pas que leur estime soit atteinte, que
les notes descendent, etc. Puis, encore là, ce n'est pas parce qu'on veut en
faire des chevaux de course, c'est parce qu'on a le souci que ces petits êtres là
ne souffrent pas, c'est noble, mais ça vient interférer avec notre jugement,
c'est sûr, O.K.?
Et, tout ceci étant dit, je pense aussi
qu'au <Québec, là, on est vraiment bons. Je pense qu'on est des bons
professionnels, je pense qu'on est des bons parents, je pense qu'on est très
aptes à détecter, à déceler des troubles de comportement...
Mme Hébert (Ariane)T :
...ça vient interférer avec notre jugement, c'est sûr,
O.K.?
Et tout ceci étant dit, je pense aussi
qu'au >Québec, là, on est vraiment bons. Je pense qu'on est des bons professionnels,
je pense qu'on est des bons parents, je pense qu'on est très aptes à détecter,
à déceler des troubles de comportements, des troubles de santé mentale et du
TDAH. Je pense qu'on connaît ça, dans notre communauté scientifique, on en
parle beaucoup, c'est connu aussi dans les médias. Ça fait que, oui, peut-être
qu'il y a du surdiagnostic, oui, peut-être qu'il y a trop de médication. Vous
les avez, les chiffres, moi, je ne les ai pas, moi, je suis une clinicienne.
Mais ce que je sais, c'est qu'on est bons, ça fait qu'il y a certainement de ça
aussi qui vient jouer dans l'augmentation.
Puis, vous savez, tu sais, en 1954,
l'Asperger, là, ou l'autiste, là, ça n'existait pas, il n'y en avait pas, ce
n'était pas encore inventé. Ça fait que, là, maintenant, le TDAH a été inventé,
alors on en voit partout. Peut-être, mais peut-être qu'il y en a réellement
aussi beaucoup. Puis, aujourd'hui, bien, de l'autisme, il y en a un sur 64.
Probablement que vous allez faire une autre commission, dans quelques années,
sur l'autisme, tu sais. Donc, mieux on connaît ça, mieux on peut le
diagnostiquer aussi, ça fait qu'il y a... Je ne suis pas capable de vous dire,
personnellement, est-ce qu'il y a du surdiagnostic. Peut-être, à cause de tout
ce que je viens de vous nommer, mais ça se peut aussi qu'on soit juste bien
bons. Voilà.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup.
Mme Hébert (Ariane) : Je
vous en prie.
Le Président (M. Provençal)
: Je vais maintenant passer la parole à la députée
d'Abitibi-Ouest pour commencer la période d'échange. À vous la parole.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Merci, M. le Président. Merci, Mme Hébert. Vous parlez de... Votre
présentation est faite avec passion, merci beaucoup, on sent que vous aimez ces
enfants-là. Alors, moi, j'aimerais qu'on parle de... Il y a une normalité qui
s'est perdue en cours de route, et vous l'associez à quoi, cette...
Mme Hébert (Ariane) : …rythme
de vie, en fait, là. Tu sais, comme je vous dis, les conditions actuelles,
là... Est-ce que certains d'entre vous avez appris à apprendre en lettres
attachées sur un iPad? Donc, il y a une réalité qui est maintenant là,
actuelle, qui change de façon très, très rapide, et on a du mal, à ce
moment-là, à établir de nouvelles balises sur maintenant, c'est quoi, la norme,
là, tu sais. Écoutez, moi, j'ai des enfants de 18 et 16 ans et, quand je
compare mes vieilles avec les jeunes, qui sont maintenant au primaire, on est
dans deux mondes. Ça fait que... les changements vont tellement vite. Donc, ce
qu'on demande aux enfants aujourd'hui, ça n'a aucune commune mesure avec ce qui
était voilà 15 ans, voilà 10 ans, j'ai envie de vous dire: Voilà
quelques années. Donc, c'est quoi, un enfant normal, maintenant, c'est quoi, un
enfant qui... on devrait s'attendre à quoi d'un petit bonhomme de sept ans, par
exemple, qui a passé la journée à l'intérieur, qui a passé le tiers de son
temps rivé à l'écran, qui est... etc., là, tu sais, vous voyez. Ça fait que c'est
dans cette optique-là que je pense que la norme est rendue confuse.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Vous, en étant clinicienne, tout ça, est-ce que vous avez été capable, avec vos
enfants, de mettre en application certains outils que vous offrez à votre
clientèle?
Mme Hébert (Ariane) :
Oui, bien, en fait, le livre, là, TDA/H—La boîte à outils, ça venait
surtout de cette idée-là, dire : Aïe! Moi, là, je pense que j'ai tout
essayé. Probablement pas, mais j'en ai essayé beaucoup. Et donc je voulais
rendre ça. J'en ai essayé. Malgré tout, mes enfants prennent une médication,
parce que ces belles stratégies là ont leurs limites, alors... Tu sais, c'est
là aussi qu'il ne faut pas se mettre la tête dans le sable, les stratégies
comportementales, là, c'est merveilleux, là, ça aide, puis ça ne devrait jamais
être indépendant de la médication, mais, des fois, ce n'est pas suffisant.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Et, lorsque vous rencontrez certains clients, on parle de troubles préventifs.
Alors, qu'est-ce que vous leur faites et qu'est-ce que vous leur dites?
Mme Hébert (Ariane) : En
fait, là, ça, c'est... Tu sais, j'écoute, bien, entendu, je reçois leurs
préoccupations, mais je leur explique que, pour avoir un trouble, il faut
toujours bien que la personne qui est atteinte en vive des conséquences. Ça
fait que, même si on trouve sur papier que votre enfant a des fragilités
attentionnelles, si, dans la vraie vie, ça ne s'articule pas, on ne peut pas
lui donner un diagnostic de trouble. Par contre, on peut déjà mettre en place
des mesures préventives. Donc, tu sais, tout ce qui est stratégie
comportementale, les coquilles insonorisantes, un coussin lourd pour qu'il
diminue son agitation, faire plus d'exercice, l'hygiène de vie, on n'a pas
besoin de diagnostic pour faire ça, c'est ça, la beauté de la chose. Ça fait
que, donc, on va établir ça, on va... Autrement dit, quand ça arrive, là, je
fais du coaching parental.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
La dernière question
Mme Hébert (Ariane) :
Allez-y.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Au niveau de la médication, trouvez-vous qu'on médique trop les enfants?
Mme Hébert (Ariane) : Je
pense que je suis chanceuse, dans ma région, beaucoup de pédiatres me réfèrent
pour un diagnostic différentiel. Je pense que ce n'est pas comme ça dans toutes
les régions. Alors, je ne jette pas le blâme aux médecins ou à personne, là,
mais c'est possible. C'est possible qu'on attribue des traits d'agitation
rapidement à du TDAH ou des traits de... à l'enfant lunatique, ça se peut, oui.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Merci beaucoup.
Mme Hébert (Ariane) : Je
vous en prie.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Provençal)
: Oui. Mme la députée de Soulanges.
Mme Picard : Bonjour.
Merci pour votre présence ici aujourd'hui. J'aimerais vous entendre par rapport
vraiment à l'écran, ce que ça fait à nos jeunes, selon vous, puis comment on
peut améliorer les choses.
• (11 h 50) •
Mme Hébert (Ariane) : En
fait, l'écran, là, c'est un des <pires ennemis de l'attention, parce que
le cerveau est ainsi fait qu'on a un système de vigilance interne, si vous
voulez, O.K.? Ça fait que, donc, rapidement...
Mme Picard : ...pour
votre présence, ici,
aujourd'hui. J'aimerais vous entendre
par
rapport
vraiment à l'écran, ce que ça fait à nos jeunes selon vous puis
comment on peut améliorer les choses.
Mme Hébert (Ariane)T :
En fait, l'écran, là, c'est un des >pires ennemis de l'attention, parce
que le cerveau est ainsi fait qu'on a un système de vigilance interne, si vous
voulez, O.K.? Ça fait que, donc, rapidement, on va aller repérer, dans notre environnement,
qu'est-ce qui est saillant. Ça fait que, si, disons, là, vous prenez une belle
promenade dans un champ de blé avec les arbres, et tout ça, et, tout d'un coup,
il y a une tache noire qui apparaît, rapidement, c'est ça qui va attirer votre
attention.
Maintenant, les écrans, on est bombardé de
stimuli saillants. Ça fait que ça fait en sorte que, même si on veut se dégager
de ça, notre cerveau, par automatisme, retourne à aller vers les stimuli
saillants. Ça fait que ça, ça nuit à notre entraînement à cibler soi-même notre
attention. Ça fait que, donc, par exemple, là, si, disons qu'on est dans un
environnement à stimuli égal, là, le prof, l'écureuil sur l'arbre, mettons. Je
suis supposée, normalement, d'être capable de faire un «shift», là, je cherche
mon terme français, mais un déplacement d'attention selon mon gré, selon ma
volonté. Mais, par contre, les écrans, ils crient tellement fort dans mon
cerveau que, là, ce changement-là, là, il n'est plus tout à fait dans mon
contrôle. Ça fait que, ce faisant, bien, je perds l'habileté à m'autoréguler
par rapport à mon attention, là. Ça fait que, donc, plus jeune on introduit les
écrans et c'est présent dans la vie des enfants, moins ils sont entraînés à
cibler leur attention.
Mme Picard : Ça me fait
penser, justement, M. le Président, mon fils m'a déjà dit ça : Maman, c'est
plate. Dans la vie, il n'y a pas de gros dragons qui viennent attaquer notre
maison. Il n'y a pas...
Mme Hébert (Ariane) : C'est
exact.
Mme Picard : Il manque
d'action dans notre vie.
Mme Hébert (Ariane) :
Tout à fait.
Mme Picard : Et j'ai dit :
Bien, mon Dieu! Mon petit gars, c'est vrai qu'il n'y a pas de dragon dans la
maison.
Mme Hébert (Ariane) :
Puis vous dites ça puis, tu sais, j'ai envie de vous dire : C'est dur, là,
pour un dragon de rivaliser... C'est-à-dire, c'est dur, pour un prof, de
rivaliser avec le dragon, là, tu sais. C'est ça.
Mme Picard : Voilà. Vous
l'avez bien dit. À propos d'alimentation ou d'hygiène de vie, est-ce que vous
pouvez m'en dire plus, de qu'est-ce qui serait bien pour nos enfants?
Mme Hébert (Ariane) :
Bien, en fait, l'hygiène de vie, là, ça aussi, ce n'est jamais indépendant de
la médication ou des stratégies. C'est-à-dire que... Encore une fois, je dis
souvent aux parents : Vous savez, pilule, pas pilule, là, un enfant qui ne
dort pas, je vous promets qu'il va être inattentif. Ça fait qu'il y a ça aussi
qu'il faut toujours regarder. Donc, si un enfant ne mange pas suffisamment, ne
dort pas suffisamment, il a un rythme de vie effréné, tu sais. Qu'est-ce que
vous faites de vos fins de semaine? Probablement que vous avez une liste
d'activités, parce que chaque enfant en a au moins trois pour bien s'épanouir,
n'est-ce pas? Ça fait que, donc, tu sais, c'est ce rythme-là qu'on impose aux
jeunes qui... On oublie que se traîner les savates un peu puis s'emmerder sur
le divan, ça aussi, ça fait partie des apprentissages qu'ils devraient pouvoir
faire. Ça fait que, donc, quand ils tombent dans la lune, on se dit : Bien
voyons, il est supposé d'être tout là. Le coach de hockey est en train de
donner des instructions, puis, je le vois, il est dans la lune. Il a eu combien
de temps, lui, pour se déposer aujourd'hui? Ça fait que, tu sais, vous voyez,
le rythme de vie puis l'hygiène de vie est hyperimportante, évidemment, là, tu
sais. Ça fait que, oui, il faut... Il y a une préoccupation à ce niveau-là
aussi.
Mme Picard : Est-ce que
vous trouvez que la société met trop de pression sur nos enfants?
Mme Hébert (Ariane) :
Ah! je le répète, là, moi, je pense que ce n'est pas qu'on veut en faire des
chevaux de course, c'est qu'on ne veut pas qu'ils souffrent. Ça fait que, donc,
si tu as des pas bonnes notes, tu risques de te décourager, tu risques d'avoir
une faible estime. Donc, tu sais, tout ça déboule. Ça fait que, donc, je vais
chercher à t'éviter ça à tout prix. Je pense, c'est plus dans cette idée-là, tu
sais, l'idée de dire : Bien, je ne te laisserai pas souffrir si je peux
faire autrement.
Mme Picard : Concernant
l'anxiété, j'ai l'impression que, des fois, on médicamente les enfants qui ont
un problème d'anxiété aussi ou des pressions, comme vous avez mentionné au
début. Est-ce que c'est votre impression aussi? Ou est-ce que... Est-ce que
vous pensez que la majorité des diagnostics de TDAH, c'est vraiment des TDAH
justifiés?
Mme Hébert (Ariane) :
Bien, écoutez, c'est sûr que je peux seulement vous parler de mon expérience.
Ça fait que moi, en bureau, c'est mon travail, de faire un bon différentiel.
Maintenant, est-ce qu'il y a souvent des TDAH qui viennent avec de l'anxiété?
Ça, oui. Est-ce qu'on médique les enfants anxieux? J'ai envie de vous dire :
Je crois que non. En tout cas, dans ma... Encore là, dans ma communauté, quand
j'établis un diagnostic de trouble anxieux, il n'y a pas de pédiatre dans mon
coin qui recommande des médications. Ça fait que hourra pour ça! Parce qu'à cet
âge-là, d'ailleurs, les stratégies comportementales sont hautement efficaces,
là. Mais je ne pourrais pas vous parler pour l'ensemble du Québec, certainement
pas, là.
Mme Picard : Je vous
remercie, M. le Président.
Le Président (M. Provençal)
: Est-ce qu'il a d'autres interventions de la part du
gouvernement? Oui, Mme la députée d'Abitibi-Ouest.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Merci, M. le Président. Votre vision, c'est d'être une référence incontournable
pour éclairer les décisions et les pratiques. J'aimerais que vous élaboriez sur
ce sujet.
Mme Hébert (Ariane) : Je
m'excuse, j'ai perdu un bout de votre phrase. Voulez-vous me le répéter?
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Ah! O.K. Je me disais qu'au niveau de votre vision c'était une vision éclairée
pour les enfants, et des incontournables, et des choses pratiques, des outils
pour eux. Alors, comment on peut élaborer à ce niveau?
Mme Hébert (Ariane) : Je
ne suis pas sûre de vous <saisir...
Mme Hébert (Ariane)T :
...toute votre phrase. Voulez-vous me la répéter?
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Je me disais qu'
au niveau de votre vision, c'était une vision éclairée
pour les enfants et des incontournables et des choses pratiques, des outils
pour eux. Alors, comment on peut élaborer à ce niveau?
Mme Hébert (Ariane)T :
Je ne suis pas sûre de vous >saisir, je m'excuse encore, là. Vous voulez
que je vous parle des stratégies?
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Les stratégies, la vision, la... oui.
Mme Hébert (Ariane) :
Qui sont autres que la médication?
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Oui.
Mme Hébert (Ariane) :
Bien, les stratégies comportementales qui existent, c'est dont... ce vous...
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
S'il vous plaît.
Mme Hébert (Ariane) :
D'accord. Bien, en fait, les stratégies comportementales, premièrement, malheureusement,
elles ne sont pas universelles. Alors, par exemple, on va avoir des stratégies,
disons, pour réduire l'agitation motrice chez les enfants. Souvent, on va passer
par les trucs sensorimoteurs, disons, les coussins lourds, les... Je ne sais
pas si vous êtes familiers avec ça, on a des espèces de lézards qu'on dépose...
ça a un poids, on dépose ça sur les cuisses des enfants, ça permet de diminuer
l'agitation. Mais, comme je vous dis, ces trucs-là ne sont pas universels.
Première des choses, le lézard, dans certains cas, bien, ça devient un
projectile, hein? Dans d'autres cas, le lézard n'a pas cet effet calmant là. Ça
fait que, donc, il faut vraiment... Toutes les stratégies, il faut les essayer
pour voir à les personnaliser puis voir lesquelles correspondent le mieux aux
symptômes qu'on observe.
D'autre part, les stratégies se font quand
même demandantes, c'est-à-dire que tout ce qui est comportemental en termes de
gestion des émotions, par exemple, on ne fait pas ça en... Tu sais, la gestion
des émotions qui est inhérentes aux TDAH, là, ils ont des difficultés à inhiber
certaines émotions et réaction, et donc, là, c'est un long parcours
d'apprentissage de quelle émotion tu peux laisser passer et de quelle façon, et
on n'a pas une balle de stress pour régler ça, là. Donc, c'est vraiment de la
psychoéducation, de l'enseignement, etc. Ça se fait, ça se fait bien, je...
Encore là, je parie que peu d'entre vous avaient un coin doux, dans votre
classe de primaire, pour aller vous apaiser quand que vous vous sentiez en
colère. Alors, c'est de plus en plus en vogue, ça se fait de plus en plus. Mais
ce sont néanmoins des stratégies qui demandent beaucoup d'énergie, et de
connaissances, et de remise sur le plancher, etc. Il y en a plein, il y en a
toute une panoplie. Mais autre chose que je dis souvent aux parents, là: Tous
les trucs et stratégies du monde ne sont adéquats que dans une seule condition,
c'est d'être appliqués, et c'est ça, l'enjeu le plus difficile.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Merci.
Mme Hébert (Ariane) : Je
vous en prie.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Il nous reste combien de temps, M. le Président?
Le Président (M. Provençal)
: Sept minutes.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Sept minutes, parfait. Alors, dans votre document, vous mentionnez que l'usage
des médicaments long terme, lorsque non justifié... Pouvez-vous élaborer sur
les conséquences néfastes de la médication qui est non justifiée?
Mme Hébert (Ariane) : La
médication à long terme, en fait, c'est ça. Ça, c'est le point où, encore une
fois, je le présente souvent aux parents, et il y a des parents qui vont me
dire : Bien, c'est génétique. Mon enfant est TDAH, ça veut donc dire que
probablement moi aussi. Je leur fais toujours la mise en garde, parce qu'il y a
des petits coquins qui essaient les médicaments de leurs enfants pour voir si
eux réagissent bien, hein, à la médication, et si... donc, pourraient en
conclure qu'ils ont un TDAH ou pas. Et je leur dis toujours : Tu sais, si
vous prenez une ou deux pilules de Ritalin, là, vous allez avoir une très belle
journée, vous allez vous sentir efficace, focus, etc. Par contre, après un
mois, vous risquez d'avoir des symptômes qui sont nettement moins agréables,
donc, des symptômes dépressifs, une augmentation de l'agressivité, des traits
anxieux, etc. Ça fait que, donc, c'est comme, tu sais, si vous prenez deux Red
Bullaujourd'hui, là, ça se peut que vous soyez très alerte. Si vous prenez
quatre Red Bull pendant un mois, à tous les jours, votre niveau de vigilance
devrait avoir baissé pour laisser place à d'autre chose. Ça fait qu'on est un
peu là-dedans, là. Ça fait que, donc, quand ce n'est pas justifié, ce n'est pas
adéquat, là, à long terme.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Parce que les effets secondaires qu'on remarque souvent, ce sont
l'amaigrissement, tristesse, anxiété.
Mme Hébert (Ariane) :
Oui, c'est vrai que ça... Par contre, il y a des effets secondaires, comme ça,
où c'est simplement la famille de molécules qui ne correspond pas à l'individu,
là. Alors, il faut faire attention, ce n'est pas... L'amaigrissement, l'effet
coupe-faim du médicament TDAH, c'est le premier effet secondaire qui est
observé dans... je veux dire, à 99 % de la population qui en prend ou à
peu près. Ça fait que celle-là, c'est presque une condition sine qua non, là,
presque.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Et, idéalement, quelqu'un qui prend une médication régulière doit avoir un
suivi clinique à combien de temps, les prises de sang, ces choses-là?
Mme Hébert (Ariane) :
...aux six mois, normalement, là. Une fois que la médication est installée,
bien entendu, dans la période, tu sais, d'installation du médicament...
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Et on m'a déjà dit que, lorsqu'on prend une médication comme ça, on ne doit pas
la couper directement, on ne doit pas la stopper, on doit y aller…
Mme Hébert (Ariane) :
Écoutez, je ne suis pas médecin, et les avis diffèrent à ce niveau-là.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Oui?
Mme Hébert (Ariane) : Oui,
les avis diffèrent. Il y a beaucoup d'adultes qui se permettent de jouer comme
ça avec leur médication puis qui n'en subissent pas de conséquence. Encore là,
le discours que je tiens, de par ce que je sais, c'est auprès des parents, pour
des petits corps pas tout à fait formés encore. Si vous choisissez d'arrêter,
n'arrêtez pas pour une fin de semaine, là. Si vous choisissez d'arrêter,
arrêtez pour la période d'été, peut-être, là. Parce que ça fait beaucoup de
variation, là, dans le système, ça fait que... Mais... Oui?
• (12 heures) •
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Est-ce que les intervenants, au niveau des garderies, des commissions
scolaires, sont avisés de certains comportements dus à une médication, ou…
Mme Hébert (Ariane) :
Non, pas vraiment. En fait, encore là, j'ai envie de vous dire, là, la <majorité
des enseignants...
>
12 h (version révisée)
< Mme Hébert (Ariane)T :
...
peut-être, là, mais...
Parce que ça fait
beaucoup de
variations, là, dans le
système,
ça fait que... Mais...
Mme Blais
(Abitibi-Ouest) :
Est-ce que les...
Mme Hébert (Ariane)T :
Oui.
Mme Blais
(Abitibi-Ouest) : ...intervenants
au niveau des garderies, des
commissions
scolaires sont avisés de certains comportements dus à une médication ou...
Mme Hébert (Ariane)T :
Non, pas
vraiment. En fait, encore là, j'ai envie de vous dire, là, la >majorité
des enseignants que je côtoie connaissent ce qu'ils connaissent par Internet,
par ouï-dire. Ils n'ont pas de cours au niveau de leur bac, par exemple, là,
pour leur parler des symptômes du TDAH ou... ni même des stratégies à mettre en
place, là. Alors, ils se renseignent aussi bien qu'ils peuvent, là, mais c'est
limité.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Et, selon vous, est-ce qu'il y aurait place à information au niveau des commissions
scolaires?
Mme Hébert (Ariane) :
Bien, j'ai envie de vous dire, la quantité de demandes de formation que je
reçois, là, je sens qu'il y a un désir d'en connaître davantage.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Merci beaucoup.
Mme Hébert (Ariane) : Je
vous en prie.
Mme Blais (Abitibi-Ouest) :
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Provençal)
: Oui. Mme la députée de Soulanges.
Mme Hébert (Ariane) :
Rebonjour.
Mme Picard : En fait, j'aimerais
savoir, selon vous, dans le système scolaire, est-ce qu'il devrait y avoir un
ratio personnalisé pour les enfants qui ont un TDAH? Est-ce qu'on devrait...
Plutôt qu'un prof soit avec 25 élèves, est-ce qu'on devrait vraiment plus
cibler les ratios dans les...
Mme Hébert (Ariane) : En
fait, j'ai envie de vous dire, dépendamment des symptômes, là… C'est sûr que ce
n'est pas le... Ce n'est jamais le diagnostic qui détermine les services que
doit recevoir un élève, c'est plus les manifestations qu'il présente. Parce que
le TDAH, je le répète, là, ça va de gris pâle à gris très foncé. Ça fait que,
donc, dans certains cas, oui, ça va être nécessaire, effectivement, d'avoir une
aide supplémentaire ou ça serait bienveillant pour le professeur, qu'elle
puisse en avoir moins dans son groupe, là, tu sais... Parmi les stratégies,
tantôt, je vous disais, tu sais, des fois, je rencontre des profs puis je leur
dis : Bien, ton élève TDAH, essaie de le placer en avant de la classe.
Puis, tu sais, il y a des enseignants qui me disent : Oui, mais, rendu là,
la moitié de la classe va être en avant de la classe, tu sais. Oui, O.K., je
comprends, tu sais. Il y a des enjeux qui se vivent comme ça, qui sont très
difficiles.
Alors, est-ce qu'on devrait attribuer plus
de ressources? Dans un monde idéal, bien entendu, là.
Mme Picard : Merci. Au
niveau des évaluations, la chaîne d'évaluation, du point où la garderie,
l'école, s'aperçoit que l'enfant a peut-être une problématique, un trouble,
jusqu'au moment du diagnostic, voyez-vous une amélioration qu'on pourrait
apporter dans cette chaîne-là?
Mme Hébert (Ariane) :
Bien, en fait, comme je vous disais...
Le Président (M. Provençal)
:…
Mme Hébert (Ariane) :
Pardon?
Le Président (M. Provençal)
: Il va falloir être un petit peu rapide dans la réponse. 30 secondes.
Mme Hébert (Ariane) :
Oui, on pourrait faire une amélioration. En fait, oui, il y a un dépistage qui
pourrait être plus efficace, effectivement, si on connaissait mieux la norme de
ce que c'est, un enfant régulier.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup. Je vais céder maintenant la parole à la
députée de Fabre.
Mme Sauvé : Merci
beaucoup, M. le Président. Merci, Mme Hébert, un plaisir de vous entendre,
vraiment. Et j'ai parcouru, un petit peu, bien sûr, tout ce que vous avez fait
puis les outils que vous avez développés pour les parents, les livres que vous
avez faits, et c'est quelque chose d'assez exceptionnel. Alors, je vais vous
féliciter, d'abord, pour ça.
Tantôt, vous avez abordé la question parce
qu'une commission comme celle-ci, avec un mandat d'initiative comme celui-ci,
ça fait appel aussi à regarder, peut-être, d'autres situations puis des
diagnostics qui sont arrivés de façon un peu massive au fil des décennies,
hein? Vous avez parlé du syndrome d'Asperger tantôt, alors je pense que vous
êtes en faveur d'un mandat d'initiative comme celui-là, qui pourrait aussi, au
niveau de l'anxiété aussi, au niveau des jeunes, des enfants et des jeunes
adultes qui ont... qui souffrent de troubles du spectre de l'autisme, je pense
que vous seriez certainement en faveur de d'autres exercices tels que celui-là.
Écoutez, j'ai beaucoup de questions, alors
je vais essayer d'être assez concise, d'abord. Vous avez parlé... puis je pense
que la nuance est tellement importante. C'est une chose, d'observer. C'est une
chose de dénoter des comportements. Puis je me ramène un peu au DSM, qui est
très rigoureux dans la notion de persistance des symptômes, et les six
symptômes, et pour l'hyperactivité et pour aussi l'inattention. Alors, ce n'est
pas un simple comportement qui n'a pas d'impact sur la vie du jeune qui fait en
sorte qu'automatiquement on doit être dans l'observation vers un diagnostic du
TDAH. J'ai vraiment beaucoup apprécié ce commentaire-là, puis ça... je suppose,
je fais un peu le lien que vous adressez peut-être ce propos-là en lien avec la
notion du surdiagnostic.
Est-ce que c'est effectivement... Est-ce
qu'il y a une corrélation entre l'observation, qui peut être un peu arbitraire,
malgré la bienveillance de tous, là, je le répète, malgré la bienveillance de
tous, et des parents, et des enseignants, mais est-ce qu'on n'est pas dans une
évaluation un peu trop rapide qui est liée à une information et non pas une
expertise?
Mme Hébert (Ariane) :
Bien, en fait, tout à fait, c'est ce que j'ai présenté dans le mémoire ou, en
fait, ce que j'ai essayé de traduire, c'est que le DSM,pour établir le
diagnostic du <TDAH, il nous présente des critères comportementaux. Mais,
du coup, c'est partir d'un comportement subjectif puis en faire un diagnostic
objectif. Alors, il y a beaucoup de gris dans les critères comportementaux, et
c'est pour ça...
Mme Hébert (Ariane)T :
...pour établir le diagnostic du >TDAH, il nous présente des critères
comportementaux. Bien, du coup, c'est partir d'un comportement subjectif puis
en faire un diagnostic objectif. Alors, il y a beaucoup de gris dans les
critères comportementaux et c'est pour ça que c'est l'expertise du professionnel
consulté qui détermine sa capacité à établir le diagnostic. Donc, dans cet
ordre d'idées là, encore là, pas de façon malveillante, mais il y a des parents
qui lisent ces critères comportementaux là puis qui se disent : bien oui,
bien oui, mon enfant parle souvent, bien oui, mon enfant est agité au souper,
bien oui. O.K., mais l'est-il plus qu'un enfant de son âge en 2019? C'est là
que ça devient délicat.
Le Président (M. Provençal)
: ...
Mme Sauvé : Je vais
poursuivre, merci, M. le Président. Vous savez, il y a un des éléments qui me
préoccupe beaucoup puis je sens que ça vous préoccupe avec toute l'expertise
que vous avez et encore davantage. La panacée universelle pour le TDAH, c'est,
donc, le médicament, dans la majorité des cas, prescrit par un médecin, mais, en
même temps, on n'est pas face à des tests sanguins puis on n'est pas en train
de pouvoir évaluer sur la base de test médicaux, alors c'est vraiment l'analyse
comportementale liée à des tests psychométriques, entre autres, et tout ça. Ça
fait qu'on est comme dans un traitement médical, mais, en même temps, on n'a
pas de mesures qui sont liées à la notion médicale. Alors, à mon avis, c'est
peut-être… puis je l'entends de vous, on l'a entendu aussi dans les
présentations précédentes, c'est un peu un problème qui peut être relié… puis
j'essaie de comprendre vraiment, encore une fois, le surdiagnostic, de passer
d'une notion d'observation, peut-être non experte malgré la bienveillance, puis
pas suffisamment vers l'évaluation professionnelle clinicienne, puis
l'aboutissement, bien, c'est le médicament.
Mme Hébert (Ariane) :
Mais, en même temps, n'est-ce pas le cas de la majorité des troubles mentaux? Ce
sont des diagnostics comportementaux que l'on observe et qu'on traite par
médication.
Mme Sauvé : Oui, bien
d'accord. Vous savez, vous avez parlé, tantôt, de la normalité, parce qu'encore
là, avec le diagnostic qui est beaucoup plus accessible du TDAH, on vient
définir qu'est-ce qui est normal, qu'est-ce qui ne l'est pas, qu'est-ce qui est
vraiment une réalité TDAH et des comportements d'agitation, et tout ça, qui ne
méritent pas un tel diagnostic et qui sont certainement liés avec le surdiagnostic.
On parle de la notion, puis il y a des présentations précédentes qui l'ont
nommée, toute la notion de l'environnement de l'enfant qui peut faire qu'il ait
des comportements ponctuels. Il vit une crise à la maison, il vit une situation
difficile à l'école, alors ça peut faire en sorte que, oui, on observe,
l'enseignant ou le parent observe plusieurs comportements, mais on n'est pas
dans le TDAH parce que c'est vraiment circonstanciel, périodique et lié à ce
que l'enfant vit.
D'ailleurs, j'ai vu, dans un des articles,
vos propos, puis, dans le fond, vous répondiez à la question : Quels sont
les plus gros défis des parents d'aujourd'hui? On est bombardé d'information,
de ce qui devrait être la normalité et de ce qui ne l'est pas, et de
comparaisons à travers des réseaux sociaux et des moyens de communication qui
sont beaucoup plus faciles.
On a parlé beaucoup de pression scolaire,
mais est-ce qu'il n'y a pas aussi une pression des médias sociaux, où on est
toujours, l'enfant est toujours dans une comparaison, est toujours dans une
réalité où il faut être dans l'instantanéité? Est-ce qu'il n'y a pas cette
réalité-là aussi qui ajoute à la pression?
Mme Hébert (Ariane) :
Bien, je ne sais pas si c'est seulement les médias sociaux, mais je sais que,
maintenant, l'information circule librement, hein? Alors, par exemple, si je
rencontre des difficultés avec mon fiston, mais je sais que la troisième
voisine a vécu des difficultés semblables et que, maintenant, son fiston est
médicamenté et qu'elle n'a plus besoin de mettre autant d'énergie et d'efforts
dans les devoirs et que lui siffle en allant à l'école, etc., j'ai accès à ça,
maintenant, comme information. Et c'est sûr que je peux regarder ça avec envie,
là, tu sais. Ça fait que, oui, cette notion-là, elle vient jouer, là, les
parents, donc, sont au courant un peu de tout ce qu'il se passe dans le
voisinage et, quand... des fois, on entend parler des histoires d'horreur de la
médication, mais on entend aussi beaucoup les «success stories», et ça donne
envie de vivre la même chose, là.
Mme Sauvé : Vous savez,
vous avez parlé, tantôt, puis c'est un principe que j'aime beaucoup entendre,
le coaching parental. On parle que, dans les solutions pour l'enfant TDAH
diagnostiqué, on a parlé beaucoup de la médication, donc la prévalence qui a
monté en flèche, évidemment, c'est, d'ailleurs, au coeur du mandat qu'on a
aujourd'hui et qu'on a dans les jours qui sont liés à ce mandat-là de la
commission.
• (12 h 10) •
Mais, honnêtement, moi, je crois beaucoup
à la modification du comportement, l'implication des parents, des enseignants,
une approche collaborative entre professionnels, et tout ça. J'y crois
beaucoup, beaucoup. D'ailleurs, j'ai étudié en psychologie en modification du
comportement. Et donc, pour <moi, c'est, je trouve qu'il y a un effort
qui serait mérité et peut-être intéressant de faire valoir davantage l'approche
psychosociale, qui malgré le manque d'études, a fait en sorte qu'on passe par
exemple d'une efficacité...
Mme Sauvé :
...et donc, pour >moi, c'est... je trouve qu'il y a un effort qui serait
mérité et peut-être intéressant de faire valoir davantage l'approche psychosociale,
qui, malgré le manque d'études, a fait en sorte qu'on passe, par exemple, d'une
efficacité du traitement… quand on est dans le médicament, on peut passer de
60 % à 95 % quand on y ajoute l'approche psychosociale. Alors, comme
clinicienne, c'est une approche, bien sûr, que vous mettez en place avec le
coaching parental. Je vois aussi, par exemple, l'institut Douglas, à Montréal,
qui a développé beaucoup, beaucoup cette approche-là, psychosociale. Alors,
est-ce que ça ne mériterait pas, cette alternative, d'être davantage fouillé,
d'être davantage documenté puis d'être un peu mise de l'avant?
Mme Hébert (Ariane) : En
fait, tout à fait, moi, je suis 100 % d'accord avec ce que vous dites, en
mettant toujours le bémol, puis je ne veux pas être négative dans mes propos,
mais en vous rappelant que c'est difficile, c'est beaucoup de travail, parce
qu'on fait face à des familles dont les parents ont souvent eux-mêmes ce type
d'enjeu là, alors ça complique d'autant plus l'intervention. Mais, ceci étant,
on ne baissera pas les bras parce que c'est difficile, n'est-ce pas? Alors,
oui, tout à fait, je suis de cet avis-là.
Mme Sauvé : Une autre
question, d'ailleurs, je l'ai lu dans votre mémoire, vous avez questionné le
fait que le traitement par le médicament à long terme peut amener des effets et
sur la santé et sur le comportement de l'enfant ou de l'adulte. Hier, on a
entendu, de la part d'un autre clinicien, un neuropsychologue qui est venu nous
dire que, finalement, il n'y a pas véritablement de suivi, dans la ligne du
temps, là, il n'y a pas vraiment de suivi, de réévaluation de la situation pour
s'assurer que le médicament mérite encore... parce que, dans plusieurs cas, il
nommait que des enfants diagnostiqués TDAH, rendus à l'adolescence, il y en a
plusieurs qui ne l'ont plus, et pourtant, parce qu'il n'y a pas eu de suivi et
de réévaluation, ils continuent à prendre le traitement. Est-ce que, pour vous,
c'est un élément important qui mériterait d'être corrigé?
Mme Hébert (Ariane) :
Bien, en fait, c'est vrai, j'abonde dans le même sens, là, il n'y a pas
réellement de suivi. Et, même quand les parents vont me dire : Est-ce que
c'est nécessaire de revenir faire réévaluer l'enfant, parce qu'on m'a dit
qu'ultimement j'ai juste à essayer d'arrêter la pilule pour voir s'il l'a
encore ou pas?, je suis toujours un petit peu estomaquée. Donc, oui, on devrait
investir davantage dans ce suivi-là. Là, j'ai perdu le reste de votre question.
Est-ce que j'ai répondu?
Mme Sauvé : Oui.
Mme Hébert (Ariane) :
O.K.
Mme Sauvé : Je pense que
vous avez bien répondu, très bien même. Est-ce que j'ai encore un peu de temps?
Le Président (M. Provençal)
: Une minute.
Mme Sauvé : Très
rapidement, l'apport des tests psychométriques, il n'y en a pas qui sont
directement en corrélation avec le diagnostic comme tel, mais ce sont des
bonnes mesures à défaut d'autre chose. Est-ce que... Parce que j'ai vu aussi que,
dans vos propos, vous disiez que... manque de ressources, et tout ça, vous
n'aviez pas toujours le temps, je ne parle pas de vous, mais de façon
générale...
Mme Hébert (Ariane) :
Oui, oui, je comprends.
Mme Sauvé : ...on
s'entend, que, donc, le test psychométrique n'est pas toujours au coeur de
l'évaluation vers le diagnostic.
Mme Hébert (Ariane) :
Exact.
Mme Sauvé : Est-ce que c'est
important, pour vous, le test?
Mme Hébert (Ariane) :
Bien, en fait, les tests psychométriques, pour ma part, sont hyperimportants,
mais, en même temps, je le répète, ce sont des critères comportementaux,
donc... Et l'autre chose, c'est que les tests psychométriques peuvent montrer
des lacunes qui ne sont pas articulées dans la vraie vie. Alors, c'est là où je
disais : Tu sais, il faut faire attention, là, on ne donne pas un
diagnostic préventif. Donc, même s'il y a des lacunes très importantes au test,
mais que l'enfant siffle, est bourré de bonheur et puis qu'il n'y a pas
d'atteinte dans sa vie, il n'a certainement pas un trouble, cet enfant-là. Ça
fait que c'est dans cette optique-là, là, qu'il faut faire la part des choses
avec les tests.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup.
Mme Sauvé : Merci, Mme Hébert,
merci beaucoup.
Mme Hébert (Ariane) : Je
vous en prie.
Le Président (M. Provençal)
: Je vais céder maintenant la parole au député de
Jean-Lesage.
M. Zanetti : Merci.
Bonjour, Mme Hébert. Merci pour votre présentation. À quel point, selon
vous, doit-on changer la société pour que diminue la pression de performance
qui est imposée aux enfants?
Mme Hébert (Ariane) :
Bien, écoutez, en fait, changer la société, c'est un gros mot. J'aurais envie
de vous dire qu'il faudrait, je crois, outiller les parents ou les aider à
comprendre que la souffrance contrôlée, c'est un processus d'apprentissage
nécessaire. Donc, ce n'est pas nécessaire de mettre son enfant dans une bulle
de verre pour s'assurer de sa réussite, au contraire, ça lui nuit. Donc, dans
cette optique-là, vivre des enjeux, rencontrer des difficultés, surmonter des
embûches, ça devrait faire partie de l'éducation. Puis là je pense que notre
courant va à l'encontre de ça.
Et puis je me fie beaucoup aussi sur
l'augmentation des traits anxieux qu'on décrit aussi dans les médias, hein, et,
encore une fois, dans mon expérience clinique, là, j'ai envie de vous dire,
quand je pose la question aux parents : Est-ce que votre enfant est
anxieux?, une majorité va me dire oui. O.K. Maintenant, comment? Comment
voyez-vous ça? Bien, vous savez, il a <mal au ventre avant sa
présentation orale ou il s'endort tard la veille de la rentrée scolaire. On est
dans de la normalité, là, hein? Donc, c'est...
Mme Hébert (Ariane)T :
...quand je pose la
question aux parents :
Est-ce que votre
enfant est anxieux?, une
majorité vont me dire oui.
O.K.
Maintenant,
comment? Comment voyez-vous ça? Bien, vous savez, il a >mal au ventre
avant sa présentation orale ou il s'endort tard la veille de la rentrée
scolaire. On est dans de la normalité, là, hein? Donc, c'est... Et puis on ne
veut pas intervenir. On veut que, la veille d'un examen, il soit un peu anxieux,
parce que peut-être qu'il va se mobiliser à étudier.
Ça fait que, donc, c'est la même chose ici,
à tous les niveaux, là. Donc, ce constat que je fais dans mon bureau, je pense
qu'il est répandu, là. On cherche à éviter le déplaisir à nos enfants à tout
prix. Ce n'est pas une bonne chose.
M. Zanetti : Donc, c'est
moins dans une optique de les faire avoir le meilleur résultat possible que...
ce que vous sentez, là, c'est qu'on veut leur éviter des difficultés, des
échecs.
Mme Hébert (Ariane) : Exact.
Tout à fait, oui.
M. Zanetti : Le système d'éducation
va aussi un peu dans ce sens-là. Je ne sais pas si j'ai encore des secondes...
Le Président (M. Provençal)
: Oui, il reste 40 secondes.
M. Zanetti : O.K. Dans le
système d'éducation, justement, on a beaucoup parlé de la question des notes,
hein, des notes, qu'on essaie de faire éviter l'échec le plus possible et
éviter de redoubler aussi. Est-ce que, selon vous, cette façon de voir l'éducation
va être un peu dans la même ligne que celle qui veut nous faire éviter...
Mme Hébert (Ariane) : Je
pense que oui. Moi, je ne suis pas de cet avis-là, qu'on ne devrait pas faire
redoubler, tout ça. Puis, encore une fois, l'intention est souvent très
bienveillante, on ne veut pas que l'estime de l'enfant soit fragilisée, etc.,
mais, encore une fois, si je peux me permettre l'expression, là, «life is
tough», puis c'est une bonne chose, de l'apprendre puis d'apprendre à composer
avec ça. Ça fait que, donc, en mettant en sorte… plein d'interventions qui
feront en sorte que l'enfant ne vivra pas ses difficultés, moi, je ne crois pas
qu'on est en train de l'outiller. Au contraire, je crois qu'on peut lui nuire.
M. Zanetti : Merci
beaucoup.
Mme Hébert (Ariane) : Je
vous en prie.
Le Président (M. Provençal)
: Merci. La parole est maintenant au député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui.
Merci, Mme Hébert.
Mme Hébert (Ariane) :
Bonjour.
M. Gaudreault : La question
qui tue : C'est quoi, être normal, aujourd'hui, pour un enfant?
Avez-vous... Si on n'a pas le temps dans le peu de temps que j'ai, vous nous
enverrez une annexe à votre mémoire, mais c'est quoi, la normalité aujourd'hui?
Mme Hébert (Ariane) :
Bien, la normalité, là, c'est... dépendamment de quel âge on parle, première
des choses, là, mais la normalité, ce n'est certainement pas ce que c'était
voilà 15 ans. Ça, je suis capable de vous certifier ça. Maintenant, est-ce
que je suis capable d'établir toutes les balises de ce qui est normal? Bien, peut-être
en fonction d'un déficit d'attention, on pourrait en jaser, mais je n'ai pas la
réponse ultime.
M. Gaudreault : Je m'y
attendais. Mais, je veux dire, la normalité a changé partout : dans le
reste du Canada, en Belgique, on a entendu parler de la Flandre hier par une
autre spécialiste, mais les niveaux de TDAH n'ont pas explosé comme ici, au
Québec. Alors, pourquoi notre normalité à nous ferait exploser le TDAH puis pas
la normalité de d'autres sociétés occidentales comparables à la nôtre?
Alors, moi, je suis bien prêt à dire :
On est bons au Québec, comme vous l'avez dit, peut-être qu'on décèle mieux puis
on diagnostique mieux le TDAH, mais je ne peux pas croire qu'on serait les seuls
à bien faire ça. La normalité a changé partout, là.
Mme Hébert (Ariane) :
Probablement. Mais, vous savez, je suis allée au salon du livre à Paris, là,
puis les gens passaient à côté de moi puis ils me disaient : Mais c'est
quoi, ça, du TDAH?, chose qui n'arrive pas à Montréal, là. Ça fait que je ne
peux pas vous parler de tous les pays, mais, chose certaine, je le redis et je
pense qu'on connaît bien notre sujet au Québec et qu'on est bons. Peut-être,
peut-être qu'on surdiagnostique nos enfants parce qu'on est encore plus
préoccupés que d'autres pays ou d'autres cultures par leur bien-être, ça se
peut.
M. Gaudreault : Il
faudrait parler à un anthropologue.
Mme Hébert (Ariane) :
Exact.
M. Gaudreault : Vous
dites, dans votre mémoire, je pense, c'est vers la toute fin, là, vous parlez
d'un diagnostic — le dernier picot — un diagnostic
rigoureusement posé. C'est quoi, un diagnostic rigoureusement posé? Est-ce que
c'est une contrevérification, est-ce que c'est une double validation?
Mme Hébert (Ariane) :
Bien, pour moi, un diagnostic rigoureusement posé, ça veut dire qu'on a fait le
tour du jardin. Donc, on a observé les comportements, on a pris en note les
comportements, mais on est allé voir plus creux. Donc : votre enfant est
agité à table. O.K., il n'est pas capable de rester assis à table. Comment ça
se passe, le souper, chez vous? Ah! vous êtes sept, en famille recomposée, la
télé est ouverte, la radio joue? Ah! ça, c'est une évaluation rigoureuse. Parce
qu'être agité à table, là, ça ne dit pas grand-chose. Ça fait que c'est pour ça
que je vous dis ça. Dans le fond, ça prend une bonne évaluation psychosociale.
Il faut vraiment faire le tour du jardin.
M. Gaudreault : O.K. Merci.
Mme Hébert (Ariane) : Je
vous en prie.
Le Président (M. Provençal)
: Alors, je vous remercie, Mme Hébert, pour votre
contribution à nos travaux.
Je suspends les travaux quelques instants
afin de permettre au prochain groupe de prendre place.
(Suspension de la séance à 12 h 20)
(Reprise à 12 h 22)
Le Président (M. Provençal)
: Maintenant, je souhaite la bienvenue aux représentants de
l'Institut national d'excellence en santé et services sociaux.
Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes
pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les
membres de la commission. Je vous invite à vous présenter puis à débuter votre
exposé.
Institut national d'excellence en santé et en
services sociaux (INESSS)
M. Boileau (Luc) : Très
bien. Merci beaucoup, M. le Président. Alors, je me présente, Luc Boileau, je
suis le président et directeur général de l'Institut national d'excellence en
santé et services sociaux, qu'on appelle l'INESSS. Je suis accompagnée de Mme Sylvie
Bouchard, qui dirige la Direction du médicament, et de Mme Sylvie
Desmarais, qui dirige la Direction des services psychosociaux... non, des
services sociaux. Parce qu'on a l'esprit psychosocial aussi à l'INESSS.
Alors, permettez-moi, d'abord, de vous
remercier de nous permettre de venir rendre compte de nos travaux que nous
avons faits sur le TDAH et tous les éléments qui s'y associent au cours des
quelques récentes dernières années.
Comme vous le savez sans doute, l'INESSS
est une organisation assez jeune, elle a moins de 10 ans, et elle est le
fruit d'une fusion du Conseil du médicament du Québec et d'une agence
d'évaluation des technologies et des modes d'intervention en santé. Et, dans
l'exercice de ses fonctions, qui ont pour mission, pour l'essentiel, de
promouvoir l'excellence clinique et puis une utilisation efficace des
ressources, d'une façon très, très, très sommaire, elle fait quatre types de
produits. Le premier, ce sont des états de connaissance, donc qu'est-ce qui est
connu sur un sujet. L'autre, ce sont des états de pratique, comment
pratiquons-nous ici, au Québec, ou à travers le monde, mais, mettons, au
Québec, sur tel ou tel domaine? On produit également des guides de pratique
pour les cliniciens, qu'ils soient médecins ou tous autres professionnels de la
santé et des services sociaux. Et on produit également des avis.
Alors, lorsqu'on fait un avis, ce ne sont
pas des avis qui sont faits par le personnel de l'INESSS. C'est soutenu par le
personnel de l'INESSS, mais c'est articulé autour de l'expression de plusieurs
grands experts qui sont mobilisés pour faire ces avis-là avec nous, et que
c'est délibéré, avec plusieurs perspectives qui sont également économiques,
éthiques et, bien sûr, spécialisées.
Alors, dans ce contexte-là et dans le
cadre du chantier de la pertinence clinique, que le ministère mettait de
l'avant il y a quelques années, on a été mandaté pour faire des portraits de
prévalence de l'utilisation des médicaments spécifiques au TDAH au Québec mais
aussi en relief avec ce qu'il se passe au Canada. Puis on a bonifié aussi ces
portraits-là de portraits des services psychosociaux qui sont utilisés dans le
traitement du TDAH pour les Québécois de moins de 25 ans, donc du zéro à
25 ans.
Alors, force de ces constats, on a aussi
produit un avis. Puis c'est ce que je vous disais, un avis, donc, ça va
chercher les opinions d'expertises élargies et avec un processus délibératif
pour, justement, favoriser... ou, en fait, non, un avis sur la trajectoire
optimale des services pour les enfants, les adolescents, mais également les
jeunes adultes qui ont un TDAH. On a aussi fait un état de connaissance sur le
Concerta, qui est très utilisé, puis les médicaments génériques qui y sont
associés.
Et, plus récemment, nos avis ont été
faits, et nos documents... Nos rapports ont été faits en 2017 et 2018, mais,
plus récemment, au cours du printemps, on a remobilisé toutes les données pour
voir s'il n'y avait pas eu une évolution encore plus récente sur, notamment,
l'usage des médicaments dans ce domaine-là.
Alors, le TDAH, c'est un <trouble
très fréquent, vous l'entendez...
M. Boileau (Luc)T :
...nos avis ont été faits et nos documents... Nos rapports ont été faits en
2017 et 2018. Mais, plus récemment, au cours du printemps, on a remobilisé
toutes les données pour voir
s'il n'y avait pas une
évolution
encore plus récente sur
notamment l'usage des médicaments dans ce
domaine-là.
Alors, le TDAH, c'est un >trouble
très fréquent. Vous l'entendez, j'imagine, depuis un certain temps. Ça atteint probablement
une personne sur 20, un enfant sur 20, plus souvent chez les garçons, deux à
quatre fois plus souvent chez les garçons, et ça peut être important. Ça peut
affecter, bien sûr, le développement des enfants, vous l'entendiez, sur le plan
social, émotionnel, intellectuel, en plus de fragiliser, à l'occasion, bien sûr,
des relations avec son milieu ou sa famille. La gravité des symptômes, ça peut
varier beaucoup, et, à l'occasion, bien, ça peut être associé à des
comorbidités, que ce soient des troubles d'opposition, de délinquance ou même
de provocation. Ça en fait, donc, une situation qui est assez complexe puis qui
n'est pas homogène. Et on sait maintenant qu'au moins 50 %, sinon les deux
tiers des enfants diagnostiqués, les symptômes principaux vont se poursuivre
vers l'âge adulte.
De notre côté, les études qu'on a faites
démontrent que l'approche thérapeutique, d'une façon générale, et il y a
plusieurs façons de faire ça, mais, en général, ce qui est recommandé, c'est
d'avoir une approche qui est multimodale, c'est-à-dire qui privilégie non pas
uniquement des approches pharmacothérapeutiques, donc des médicaments, mais qui
le conjugue aussi avec des interventions psychosociales.
De ce côté-là, on a remarqué que
l'approche nord-américaine, d'une façon générale, va privilégier une approche
médicamenteuse, donc pharmacologique, et pour les enfants qui sont pris avec ce
problème de... qui sont âgés de plus de six ans, et puis qui peut être
maintenue aussi en combinaison avec d'autres services, ça va de soi. Par
contre, quand on se dirige vers l'Europe ou en Australie, on va voir que
l'approche pharmacologique est plus retenue pour un deuxième niveau
d'intervention : on va privilégier plus des approches psychosociales comme
point de départ puis on réserve ça pour des TDAH plus compliqués, plus sévères.
Alors, le Québec, comme le Canada, ce n'est pas très surprenant que ça
s'inscrive dans ce mouvement d'une utilisation un peu plus forte du médicament.
Quand on regarde maintenant... Et vous
avez les données, je crois, devant vous. Mais, quand on regarde la prévalence
de l'utilisation des médicaments pour le TDAH, au Canada, elle se situe à
autour de 4 %. En fait, c'est... nos données les plus récentes, qui datent
de 2017‑2018, c'est 4 %. Là, je ne veux pas vous noyer dans des chiffres,
mais ça va être important juste de calibrer ça. C'est 4 %. Trois ans
avant, c'était 3,3 %. Donc, ça a augmenté d'une vingtaine de pourcent sur
la scène canadienne. Quand on regarde, au Québec, les données les plus
récentes, quand on les prend pour 2017‑2018 dans ce programme-là, quand on se
compare au Canada, c'est 8 %. Donc, on est le double de la moyenne
canadienne. Et là je vous parle pour tous les enfants... bien, tous les enfants
et les adultes de 18 à 25 ans, donc du 0-25 ans. Quand on exclut le
Québec du Canada — là, c'est juste pour des questions, là, de
chiffres, là, bien sûr... Non, non, mais je viens juste d'y penser en vous
voyant, là. Mais, quand on exclut le Québec du Canada dans les données, là, ça
change, parce que le Québec a un poids important sur le plan populationnel.
Alors, on arrive à une distinction où, il y a un an ou deux ans, c'était
2,9 % de tout le Canada excluant le Québec et, au Québec, 8,1 %.
Donc, c'est plus que trois fois plus que le reste du Canada. Donc, l'élément
distinctif, ici, marque plus.
Quand on s'en va du côté de notre
programme, ici, le régime public d'assurance médicaments, alors, on voit que,
depuis 2012, 2012‑2013 jusqu'à 2018‑2019, donc le plus récent qu'on a, on est
passé de 5 % à 7,6 %, donc une augmentation de 50 % sur une
période de six ans, sur la médication au complet, là. Je vous parle du nombre
de personnes de 0-25 ans qui reçoivent un médicament comme ça.
• (12 h 30) •
Mais, quand on regarde de façon plus fine
qui a... pas bénéficié, mais qui a... où est-ce qu'on a vu cette croissance-là,
on voit que ça se distingue entre les groupes d'âge. Donc, le zéro à cinq, six
ans, il y a... c'est à peine 1 % ou 0,9 %, il n'y a pas eu de
changement, à toutes fins utiles. Le cinq ans à neuf ans, il y a eu un léger
changement... bien, léger, 12 % de plus sur l'espace de ces six, sept
dernières années. Quand on va sur la cohorte du 16... excusez-moi, du 10 à 12 ans,
on a augmenté de 13 %, et c'est dans ce groupe-là où on le prescrit le
plus. C'est 15 % des jeunes qui reçoivent ça, donc c'est un peu plus qu'un
sur sept. Mais c'est dans le groupe du 13 à 17 ans où là on a vraiment
connu l'augmentation de 50 % dans les derniers six, sept ans et c'est
surtout dans le groupe du 18 à 25 ans où, là, ça a passé du simple au <triple,
O.K.? Donc, le poids de répartition de...
>
12 h 30 (version révisée)
< M. Boileau (Luc)T :
...sur sept, mais c'est dans le groupe du 13 à 17 ans, où là on a
vraiment
connu
l'augmentation de 50
% dans les derniers six, sept
ans, et c'est surtout dans le groupe du 18 à 25 ans, où là, ça a passé du
simple au >triple, O.K.? Donc, le poids de répartition de ces
prescriptions ou ces utilisations-là se différencie selon l'âge. Et, plus le
temps passe, plus on voit que les cohortes un peu plus âgées, là, ce n'est pas
très âgé, là, mais de 13 à 17 et 18-25, vient en reprendre beaucoup plus, le
reste étant en augmentation, mais jamais de l'importance de ces deux autres
groupes là.
Ce qu'on voit aussi au Québec, c'est des
disparités régionales importantes. Donc, on se retrouve avec des profilages qui
nous montrent que, par exemple, le Saguenay—Lac-Saint-Jean, la moyenne globale
du 0-25 est, sur nos dernières données, 2018‑2019, ce sont les plus récentes,
est à 14,2 %; Gaspésie—Îles-de-la-Madeleine, 13 %; le Bas-Saint-Laurent,
autour de 12,9 %; la Côte-Nord, 12 %. Donc, c'est des pourcentages
élevés. Ce que je veux vous faire remarquer ici surtout, pour le bénéfice de
vos études, c'est que Montréal est à 3 point… quelque chose comme
3 %, 3,1 %; Montréal, là, ça se compare tout à fait avec ce qu'il se
passe sur le reste du Canada, l'île de Montréal; Laval, c'est 4,3 %. Donc,
déjà, on passe de Montréal à Laval, on va augmenter de 40 %, là, en
moyenne. Et on traverse puis on s'en va à Lanaudière, là, on tombe à 12 %
pratiquement. Donc, on passe du simple, au triple, au quadruple, en traversant
des rivières. Il n'est pas question ici d'un pont qui change tout ça, mais les
comportements prescriptifs ou les comportements des enfants, ce qui serait
étonnant, se différencient, du moins, dans la perception qu'on a et
l'utilisation des médicaments. Donc là, vous voyez l'expression de variation
régionale importante.
Le Président (M. Provençal)
: Conclusion.
M. Boileau (Luc) : En
conclusion. Je vous dirais qu'on utilise beaucoup le Concerta, très peu le
Ritalin, mais que, surtout, on a fait des études au niveau des services
psychosociaux, puis on a recommandé une trajectoire qui tenait compte de toutes
ces variations-là en, d'abord, centrant une approche sur les besoins et les
jeunes et leurs familles, en amont du diagnostic, l'accès à des programmes
d'entraînement aux habiletés parentales pour les enfants d'âge préscolaire qui
ont des difficultés apparentées au TDAH, l'accès à des interventions sociales à
chacune des étapes, un processus d'évaluation qui prend compte du portrait
psychosocial des enfants, tant le portrait psychosocial, que la santé physique,
psychologique et scolaire, et la mise en place de mécanismes de liaison entre
le milieu scolaire et les services sociaux, et ce, même s'il y a des questions
qui persistent.
Et la dernière touche que je vous dirais,
c'est qu'on le sait, que c'est... 70 %, ce sont des prescriptions faites
par les omnipraticiens qui n'ont pas toujours, comme c'est témoigné,
l'opportunité de faire des diagnostics complets, être appuyés par des
mécanismes de diagnostic qui sont plus disponibles pour ceux qui peuvent se les
payer, parce que le réseau, les réseaux de services sociaux, comme les réseaux
d'éducation, ne peuvent pas le fournir au complet, mais que, malgré tout, dans
nos efforts et avec les experts que nous avons consultés, on n'arrive pas à
dire s'il y a surmédication, surutilisation des médications, mais ce qu'on
sait, c'est qu'on l'utilise beaucoup plus qu'ailleurs. Il y a différentes
hypothèses pour expliquer ça, et ça va nous faire plaisir de répondre à vos
questions. Merci beaucoup.
Le Président (M. Provençal)
: Merci pour votre exposé. Alors, la députée de
Lotbinière-Frontenac va initier la période d'échange.
Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) :
Bonjour. Merci pour votre présentation. Moi, je suis quand même très surprise
de voir les chiffres, puis, concernant les groupes d'âge, là, plus que la
personne avance en âge, plus qu'il y a de la médication, puis aussi les
disparités régionales. Comment vous pouvez expliquer ça?
M. Boileau (Luc) : Si
vous me permettez, M. le Président, la première chose, c'est que, plus on
avance en âge, plus on voit qu'il y a une augmentation de la prescription au
fil du temps, mais il n'en demeure pas moins que c'est le groupe de 10 à 12 ans
chez qui on prescrit le plus.
Ce que nous notons, c'est que les
comportements prescriptifs n'ont pas beaucoup changé au Québec, pas beaucoup
changé pour les enfants de zéro à cinq, de six à neuf, et de 10 à 12, au fil
des six, sept dernières années. Toutefois, pour les 13 à 17 et les 18 et plus,
là on a vu une augmentation de la prescription, donc de l'utilisation de ces
médicaments-là, mais ils demeurent moindres que ceux qui ont 10 à 12 ans,
d'une part. Juste pour <bien clarifier ça, c'est qu'on voit... tu sais,
on dit souvent : Ça augmente sans fin. Bien, un instant, ça augmente, oui,
mais pas pour tous les groupes d'âge. On le voit plus marqué chez les 13, je me
répète, là, du 13 à...
M. Boileau (Luc)T :
...de ces médicaments-là, mais ils demeurent moindres que ceux qui ont 10 à 12 ans,
d'une part. Juste pour >bien clarifier ça, c'est qu'on voit... tu sais,
on dit souvent : Ça augmente sans fin. Bien, un instant, ça augmente, oui,
mais pas pour tous les groupes d'âge. On le voit plus marqué chez les 13 à...
je me répète, là, du 13 à...
Une voix
: 10-12.
M. Boileau (Luc) : Bien,
10-12, non, c'est... ça a augmenté de 13 %, le 10-12, au fil des dernières
années, je crois. Peut-être, ma collègue va dire que j'ai erré, et ça me ferait
plaisir d'être corrigé si c'est le cas, bien, plaisir, c'est un gros mot,
mais...
Alors, le point, c'est qu'on observe des
variations régionales qui sont importantes, on n'arrive pas à mettre le doigt
là-dessus. Y a-t-il des variations chez les enfants d'une région à l'autre? Ce
serait extrêmement étonnant. On parle plutôt de d'autres variables, peut-être
la disponibilité d'autres services, le fait que les familles peuvent vouloir se
restreindre... dans des comportements différents, selon des zones
démographiques, mais on n'arrive pas à mettre le doigt dessus.
Ce qu'on sait, toutefois, c'est qu'on est
capable, sans doute, de pouvoir granulariser ça, donc avoir des données
beaucoup plus fines. Parce qu'une région, c'est grand, hein, et il pourrait y
avoir un groupe, une clinique qui prescrit plus qu'une autre, puis on peut
avoir des moyennes qui s'allongent. Donc, il y aurait moyen d'approcher ça sur
une base plus, je dirais, raffinée, plus locale, ce que nous n'avons pas
l'occasion de faire jusqu'à maintenant, mais nous serions disposés à le faire.
Excusez-moi, M. le Président, mais est-ce
que mes collègues...
Le Président (M. Provençal)
: Maintenant, M. le député de Dubuc.
M. Tremblay : Bonjour.
Merci pour la contribution. Dites-moi, on parle de la gratuité des médicaments
18-25 ans inscrits au régime public d'assurance. Comment, selon vous, on
peut expliquer qu'on arrive à ouvrir le bar? Comment on en arrive,
historiquement, à se dire, comme société, en tout cas, au niveau de la santé
aussi : C'est gratuit? Est-ce que vous comprenez le sens de la question?
M. Boileau (Luc) : M. le
Président, est-ce que... Mme Bouchard, qui est la directrice du
médicament.
Mme Bouchard (Sylvie) :
En fait, les assurés dans le régime public qui sont aux études à temps plein et
qui peuvent le démontrer ont accès à cette gratuité-là, ça fait partie du
régime public d'assurance médicaments. Et ça, c'est une grande distinction, peut-être
que ça peut expliquer des différences, notamment avec d'autres juridictions ou
d'autres provinces canadiennes qui n'ont pas ces mêmes couvertures d'assurance
médicaments.
M. Tremblay : O.K.
Avez-vous répertorié, dans le cadre de votre travail, l'évolution de ce qu'on
pourrait appeler une démarche ou un protocole, peut-être, vous avez les
meilleurs termes que moi pour l'exprimer, mais qui vont nous mener vers des cas
précis ou un échantillonnage jusqu'au diagnostic? On parle de disparités avec
les régions par rapport à des grands centres, par exemple. Est-ce que le fait
qu'en région on ait moins d'effectifs réduise la chaîne de travail qui va nous
mener vers une certaine rigueur de précision? Avez-vous travaillé sur ces
aspects-là?
M. Boileau (Luc) : M. le
Président, Mme Desmarais, qui est la directrice des services sociaux, va
répondre.
Mme Desmarais (Sylvie) :
En fait, dans nos travaux et dans les consultations qu'on a faites auprès
d'experts, auprès de professionnels, gestionnaires et auprès d'usagers, ce
qu'on remarque , c'est... d'abord, ce sont les médecins qui sont consultés dans
un premier temps pour avoir accès à un diagnostic. Alors, c'est sûr que les
familles qui n'ont pas accès à des médecins, déjà là, c'est plus difficile.
Mais, par ailleurs, on remarque aussi, dans le cadre de nos travaux, que la
tendance à la montée du diagnostic et de la médication... l'accès aux services
sociaux n'a pas suivi cette même tendance-là. Alors, dans nos travaux, ce qu'on
a pu relever de la part des familles et des experts, c'est que, très souvent,
après un diagnostic, ça peut prendre jusqu'à... pour 50 % des gens, ça
prenait jusqu'à un an pour avoir accès à des services psychosociaux, et
23 %, ça pouvait prendre jusqu'à cinq ans. Alors, c'est sûr que l'organisation
des services dans les régions… sont très variables également et on a pu le
constater, là, dans nos travaux, et c'est cet accès-là aux services
psychosociaux qui est beaucoup plus difficile, dépendamment des régions aussi.
M. Tremblay : Je
continue?
Le Président (M. Provençal)
: Je reconnais le député de Richmond.
M. Tremblay : Oui.
• (12 h 40) •
M.
Bachand
:
Merci beaucoup, M. le Président, c'est intéressant. Mais, malheureusement, c'est
intéressant. Alors donc, les chiffres que vous nous donnez, c'est négatif. Et
puis, lorsqu'on regarde la courbe, elle s'accentue, et, si on prend comme
prémisse que cette maladie est génétiquement... est dans les gênes, dans 15 ans,
au Québec, on va se retrouver avec, quoi, le tiers de la population qui va être
<médicamentée, si... c'est parce qu'il y a un aspect exponentiel, si on
regarde la courbe et si on prend comme prémisse, encore une fois,
M.
Bachand
:
...comme prémisse que cette maladie est génétiquement... est dans les gênes,
dans 15 ans, au
Québec, on va se retrouver avec, quoi, le tiers de
la
population qui va être >médicamentée, si... c'est parce qu'il
y a un aspect exponentiel si on regarde la courbe et si on prend comme prémisse,
encore une fois, que c'est dans les gênes. Alors, c'est très... c'est
dérangeant et, encore fois, ce n'est pas un médicament sans conséquences
secondaires. Il y a des effets secondaires qui sont majeurs et on en parlait
hier avec d'autres intervenants, entre autres, des conséquences de
l'alcoolisme, l'usage des drogues, etc., après, dans l'âge adulte. Alors, donc,
c'est extrêmement important.
J'aimerais vous entendre là-dessus, sur
un, mais vous avez des recommandations super intéressantes aussi, et ça, je
pense que c'est... Vous en avez plusieurs, alors, j'aimerais aussi que vous
nous parliez des recommandations principales que vous aimeriez voir appliquées,
et ça, bien sûr, à très court terme.
M. Boileau (Luc) : M. le
Président, je vais juste distinguer deux réponses. La première, c'est qu'avec
ce que nous vous montrons, le côté exponentiel, il est juste lorsqu'on
l'agglomère pour le réseau... pour l'ensemble du 0-25 ans, c'est-à-dire,
le mot «exponentiel»», mais une croissance importante, comme vous le soulignez,
50 % depuis les six, sept dernières années. Mais, lorsqu'on le distingue
par groupes d'âge, on voit qu'il y a une augmentation beaucoup moindre chez les
jeunes enfants, le 0-5 ans, les 6-9 ans et les 10-12 ans. Même
le 10-12 ans, ça a baissé un peu dans les deux dernières, là, puis je ne
veux pas dire que, voici, on a tout changé, mais on voit que ça baisse un peu.
Là où ça augmente, c'est sur les 13 ans
et plus, 13 ans à 17 ans, 17 ans à 25 ans, et on n'a pas
fait le 25 ans et plus, et moi, je peux vous assurer qu'il y a de la
consommation de médicaments. Il y en a pour 200 millions actuellement au
Québec, là, pour les 0-25 ans. C'est 200 millions de dollars de
médicaments qui sont dépensés là-dedans, mais il y en a probablement en haut de
25 ans et, si la tendance se maintient, il va y en avoir encore.
Alors, c'est comme si la cohorte des
enfants de 10-12 ans, après 12 ans, on voulait continuer à leur en
offrir, ou à leur en donner... excusez-moi, on ne leur offre pas, mais on leur
donne. Alors, c'est ce qu'on voit, c'est une augmentation de ce côté-là. Et,
après l'âge adulte, ou à l'arrivée de l'âge adulte, on dit : Bien, je
pense que tu en as encore besoin, ça fait qu'on continue. C'est dans ces
groupes-là où on voit cette augmentation. Mais il n'y a pas de signe comme quoi
on augmente de plus en plus pour nos enfants, nos jeunes enfants. Ça augmente
un peu, mais jamais de façon aussi grande que ces deux autres cohortes-là.
Maintenant, nos recommandations touchent
beaucoup la prise en charge, et le diagnostic, et le suivi, et je vais laisser
Mme Desmarais les rendre plus explicites.
Mme Desmarais (Sylvie) :
En fait, dans le cadre de nos travaux, on a fait une revue systématique des
meilleures pratiques aussi à travers le Canada, mais aussi à l'étranger, et nos
recommandations s'appuient vraiment sur les meilleures pratiques qu'on a
recensées. Et ces pratiques-là touchent notamment l'importance d'une évaluation
complète. Je pense que vous l'avez entendu à plusieurs reprises, que le
processus d'évaluation pour arriver à un diagnostic mériterait d'être optimisé,
je vais dire ça comme ça, pour vraiment avoir un portrait à la fois
psychosocial de l'enfant, un portrait scolaire, et un portrait au plan clinique
et psychologique, pour pouvoir établir réellement un bon diagnostic pour les
enfants, et ensuite décider s'il y a nécessité d'avoir médication. Alors, ça, c'est
un premier volet de nos recommandations.
Un deuxième volet aussi qui est ressorti à
la fois dans notre recension, mais dans nos discussions avec les experts, et
les gens du réseau, et les parents, c'est celui d'avoir une fonction de liaison
entre le réseau de la santé et des services sociaux et le réseau de
l'éducation. Cette fonction-là, elle est importante, parce que, parfois, ce
sont des intervenants qui ne maximisent pas la communication et pourraient
davantage profiter d'un système intégré d'évaluation et de prise en charge par
la suite par le milieu scolaire ou par le milieu de la santé et des services
sociaux.
Autre élément dans nos recommandations et
celui d'une détection précoce aussi… Et on sait qu'au Québec, actuellement, il
y a un projet qui s'appelle Agir tôt, là, qui se met en place dans les
différentes régions. Il est espéré que ça permette, justement, une détection
précoce de ce côté-là, mais qu'on puisse, dès lors qu'il y a des difficultés
apparentées au TDAH, qu'on puisse offrir aux parents des programmes d'habiletés
parentales. Actuellement, ces programmes-là se retrouvent dans l'ensemble du
Québec, la plupart du temps, mais sont souvent ciblés pour des clientèles très
vulnérables. Alors, des gens qui présentent certaines difficultés ne sont pas
toujours éligibles à ce type de programme là. Donc, il faudrait assurer une
plus grande accessibilité pour les parents lorsque l'enfant est plus jeune.
Bien sûr aussi, c'est d'offrir des
interventions <psychosociales à toutes...
Mme Desmarais (Sylvie)T :
...Alors, des gens qui présentent certaines
difficultés ne seront pas
toujours
éligibles à ce type de programme là, donc il faudrait assurer une plus grande
accessibilité
pour les parents
lorsque l'enfant est plus jeune.
Bien sûr, aussi c'est d'offrir
des
interventions >psychosociales à toutes les étapes, qu'on
pense à la détection, qu'on pense à l'évaluation, mais aussi en cours de suivi
de la personne ou du jeune qui doit être aussi réévalué et non pas vu dans un
contexte, là, juste d'évaluation et de diagnostic.
L'autre élément aussi, et je sais que la
personne qui était avant nous l'a mentionné, l'importance de la sensibilisation
et de la formation des intervenants à la fois du réseau de la santé et des services
sociaux, mais également du réseau de l'éducation pour vraiment parfaire nos connaissances
autour du TDAH et s'assurer d'avoir une vision commune, ensuite, des interventions
qui doivent être offertes, bien sûr, dans le milieu scolaire, mais aussi par
des intervenants de la santé et des services sociaux… Alors, c'est l'essentiel
de nos recommandations, qu'on espère porteuses.
Le Président (M. Provençal)
: Merci. Mme la députée de Soulanges.
Mme Picard : Bonjour. Merci
beaucoup pour votre présence aujourd'hui. Je me demandais s'il n'y avait pas un
lien entre le fait que le 10-12, il y ait une augmentation assez forte. Est-ce
que vous pensez qu'on peut quelquefois confondre les symptômes, bien, en fait,
les comportements liés à l'adolescence et le TDAH?
Mme Desmarais (Sylvie) :
Je peux me permettre de répondre?
M. Boileau (Luc) : C'est
parce que je pensais à mes enfants, mais allez-y.
Mme Desmarais (Sylvie) :
Alors, peut-être une petite nuance. Oui, il y a une augmentation, mais ce n'est
pas la plus grande augmentation dans cette strate d'âge là. Mais oui les
experts, les parents et les gens du réseau nous ont dit parfois qu'il y a une
confusion entre les différents symptômes et que toute l'importance d'un
diagnostic différentiel aussi, parce qu'on parle beaucoup des troubles anxieux
aussi actuellement chez les enfants, les adolescents, alors ça prend vraiment
un diagnostic différentiel et ça prend les bonnes interventions. Dr Boileau
vous l'a présenté tantôt.
Ici, l'approche, elle est davantage vers
une approche de première intention médicale et de deuxième intention
psychosociale, alors que, peut-être, il faudrait regarder aussi tout le volet
psychosocial dès le départ, pour voir à ne pas surmédicaliser non plus les
enfants à cet égard-là. Alors, ça a été relevé par les parents, cette
inquiétude-là, de différents diagnostics qui amènent une certaine comorbidité
aussi dans certaines situations.
M. Boileau (Luc) : Mais
de façon...
Le Président (M. Provençal)
: Oui, allez-y.
M. Boileau (Luc) :
J'allais dire : On ne soupçonne pas que les enfants au Québec soient
différents des enfants d'ailleurs au Québec ou d'ailleurs au Canada sur ces
comportements, il n'y a pas de logique qui nous permettrait de dire ça. Si
c'est le cas, là, c'est vraiment très bien camouflé.
Mais ici, l'enjeu, c'est : il y a un
accès à la médication qui semble plus rapide. Et puis est-ce que c'est le reste
du Canada qui ne suit pas le pas, est-ce que c'est nous? Ça, les experts...
écoutez, c'est sérieux, là, les experts ne s'entendent pas de façon absolue, de
dire : C'est clair qu'il y a une surprescription. Mais tout le monde
s'entend qu'il y en a beaucoup puis qu'il ne faudrait pas commencer à dire :
Il me semble qu'il en manque, qu'ils en mettent plus. Là, on n'est pas là. Mais
cet espace de diagnostics, entre le diagnostic qui est souvent fait dans des
contextes un peu plus rapides, sans doute, n'est pas outillé avec tout
l'arsenal qui pourrait être pris, et cette tendance à prescrire et à suivre ce
qui peut être remis en question, je crois… et tous les intervenants, très
franchement, que nous avons eu à rencontrer à partir de l'INESSS et à travers
tous les travaux qu'on a faits, sont très ouverts à ça. Donc, il n'y a pas une
résistance à dire : Non, non, non, il faut continuer, etc. Ce n'est pas
ça.
Et, je me répète encore, le 10-12 ans
est relativement stable. Il reste élevé, on est à presque 15 %, donc
94,9 %, là, l'année passée, des enfants de 10-12 ans à travers le
Québec, qui utilisent ça et, bien sûr, il y a des régions que c'est plus
encore, mais... et donc c'est la plus forte cohorte, et l'augmentation, elle
est après. C'est comme si on se disait : Bon, il me semble que ça va bien,
là, alors je pense qu'on devrait le continuer. C'est ça qu'on voit dans le
comportement prescriptif.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup. Nous cédons maintenant la parole à la
députée de Fabre.
Mme Sauvé : Merci
beaucoup, M. le Président. Alors, M. Boileau, Mme Breton,
Mme Bouchard, Mme Desmarais, un plaisir de vous avoir aujourd'hui. À
vrai dire, c'est un privilège de vous avoir à cette commission, parce que votre
expertise et votre portrait ont permis de sonner un peu, en quelque sorte,
l'alarme et puis de nous faire réfléchir collectivement à cette situation et ce
portrait excessivement préoccupants.
• (12 h 50) •
On a eu, depuis <quelques jours,
beaucoup d'éclairages qui nous sont venus des professionnels de la santé et
aussi des cliniciens, et j'aimerais peut-être axer plus mes questions, parce
que vous...
Mme Sauvé :
...sorte, l'alarme et puis de nous faire réfléchir collectivement à cette
situation
et ce portrait
excessivement préoccupant.
On a eu, depuis >quelques jours,
beaucoup d'éclairages qui nous sont venus des professionnels de la santé et
aussi des cliniciens, et j'aimerais peut-être axer plus mes questions... Parce
que vous êtes dans des pistes de solution très concrètes.
Je suis très heureuse, dans ma vie, de
m'être un jour inscrite à un cours de lecture rapide, parce que ça a été très
bénéfique aujourd'hui. Alors, j'ai passé un peu à travers les différentes
recommandations, et, évidemment, ça va dans le sens de ce que vous avez
constaté, mais je voudrais un peu les passer rapidement avec vous, si vous me
le permettez, parce qu'il y en a tellement. Sur les 18, il y en a une grande
majorité qui sont absolument essentielles, puis j'aime beaucoup savoir qu'elles
sont inspirées des bonnes pratiques. Alors, on part de quelque chose qui
fonctionne déjà très bien.
Quand je lisais votre coup d'oeil sur le
TDAH, évidemment, le constat, il était très clair qu'en termes d'approche
collaborative entre les professionnels, les gestionnaires des CISSS et des
CIUSSS et le réseau scolaire il y a quelque chose à vraiment améliorer. Alors,
je pense que c'est au coeur de votre recommandation 1 et c'est
effectivement très important.
La recommandation 2, qui est autour
de la détection précoce, je vous dirais que j'ai une certaine préoccupation, un
certain bémol, parce que j'ai entendu ce que j'ai entendu depuis quelques jours,
et on a bien nommé la question, même tantôt, de la normalité, qu'est-ce qui est
dans la normalité. L'enfant qui vit une situation particulière, ponctuelle, qui
a peut-être quelques symptômes mais pas l'entièreté des symptômes et donc pas
de TDAH... Alors, comme l'observation n'est pas à ce point rigoureuse, malgré
le bon vouloir de tout le monde, moi, la détection précoce, avec ce que j'ai
entendu, sans dire que je suis contre... Je serai toujours pour le principe,
mais, dans les faits, je pense qu'il y a un autre travail à faire pour que ça
se fasse de la meilleure des façons.
La recommandation 3, vous avez parlé
de trajectoire, c'est tellement important, entre le traitement médical, le
médicament et l'intervention psychosociale. Est-ce qu'il n'y a pas là... Pour
que cette recommandation-là puisse se vivre, est-ce qu'il n'y a pas là une
culture à changer? Un médecin de famille, qui va avoir, devant, lui un patient
qui est en dépression sévère, automatiquement... puis qui est à risque de crise
suicidaire, automatiquement, il va avoir une référence vers un psychologue ou
un psychiatre, mais on n'en est pas là par rapport à la référence vers une
intervention psychosociale de la part du médecin de famille... en tout cas, je
ne le pense pas, puis les constats semblent assez clairs là-dessus. Ça fait que
moi, je crois beaucoup à votre recommandation 3 dans une approche globale,
mais, en même temps, il y a un grand travail à faire, je pense.
Je ne sais pas si vous pouvez me clarifier
un peu comment vous voyez l'application directe de cette recommandation 3,
comment on change la culture, comment on fait en sorte que les médecins de
famille vont avoir le réflexe de faire un traitement qui inclut l'intervention
psychosociale davantage.
M. Boileau (Luc) : Je
vais laisser Mme Desmarais expliquer plus à fond, mais, somme toute,
l'idée maîtresse, en arrière de ça, pour la détection, là, si je reprends
l'élément détection, ce n'est pas pour encourager le fait qu'on vient de
trouver quelque chose chez un enfant puis on va le médicamenter, c'est vraiment
pour favoriser un repérage plus facile et une habilitation des parents dans des
contextes qui ne sont pas de stigmatiser les enfants mais plutôt de reconnaître
que: ah! bien, il y a peut-être des habilitations que je peux aller me chercher
pour des situations qui pourraient s'avérer un petit peu plus compliquées.
Alors, Mme Desmarais pourra...
Mais la tendance dans la trajectoire,
c'est vraiment de resserrer les mailles. Elles sont... Il y a un tissu de
services qui est là, sans doute qu'il pourrait être rendu plus visible et plus
accessible dans certaines zones et pour certains cas, mais, de resserrer les
mailles, donc une coordination plus forte, que vous retrouvez à un autre
endroit... mais de faire en sorte qu'il n'y ait pas ces délais très allongés
qui ont été témoignés par les études que nous avons faites, par les témoignages
qu'il y a eu. Et les intervenants qui vous font ces recommandations-là, qui
sont portées par nous mais qui viennent des experts mobilisés là-dessus, jugent
qu'il y a... c'est vraiment ce tissu-là et c'est possible de le faire.
C'est possible de le faire, et on le fait
dans d'autres contextes, soit le diabète type 2, la prise en charge des maladies
pulmonaires obstructives chroniques, qui sont dans toute autre chose, là, mais
c'est possible de le faire ici. C'est l'alliance services sociaux et services,
entre guillemets, médicaux. Là, je ne veux pas faire une distinction massive,
mais ce maillage-là, c'est ce qui est attendu.
Une voix
: Et
scolaires.
M. Boileau (Luc) : Et
scolaires, effectivement, et scolaires.
Mme Desmarais (Sylvie) :
C'est ça. Écoutez, Dr Boileau a très répondu à votre question. J'ajouterais
simplement, par rapport à la détection... Je comprends très bien votre souci.
Ce que les parents, les experts et les gens du réseau nous ont dit, c'est toute
l'importance d'offrir des services dès que se présentent des difficultés ou des
<apparences de difficultés pour vraiment limiter...
Mme Desmarais (Sylvie)T :
...la détection. Je comprends
très bien votre souci. Ce que les parents,
les experts et les gens du réseau nous ont dit, c'est toute l'importance
d'offrir des services dès que se présentent des
difficultés ou des >apparences
de difficultés pour vraiment limiter les dégâts, si je peux m'exprimer ainsi, de
façon... Ce n'est pas d'avoir plus de détection de TDAH, mais bien s'assurer,
justement, qu'on peut offrir, à toutes les étapes, des services dès qu'une difficulté
est repérée pour soutenir les parents et soutenir les jeunes.
Mme Sauvé : Combien de
temps me reste-t-il? Cinq minutes? Je vais accélérer. La recommandation 4,
je voulais juste vous le nommer parce que j'ai une petite préoccupation quand
on parle d'un même processus pour le scolaire puis la santé, partager l'information
clinique. C'est parce qu'au niveau du réseau scolaire on n'est pas dans une
information clinique, à mon avis, ça fait que je voulais juste...
Écoutez, la majorité des recommandations
qui suivent, c'est extraordinaire, mais je voudrais particulièrement vous dire
à quel point c'est important, votre recommandation 7, 8 et 9.
L'intervention pharmacologique, l'approche personnalisée. Puis j'imagine que
vous inspirez de bonnes pratiques, comme vous l'avez dit, dans d'autres
endroits. Donc, c'est excessivement important. La 8, qui parle de faire un
suivi, une révision, je ferais un peu le lien avec votre recommandation 14,
où on dit... La transition vers l'âge adulte, on en a parlé précédemment avec d'autres
présentations, à quel point c'est quelque chose qui est mis de côté pas mal.
Donc, est-ce qu'on peut s'assurer qu'on suit le jeune, le patient, et tout ça,
pour s'assurer qu'il n'est pas surmédicamenté au fil de l'âge? Et donc, ça, je
trouve ça très important. Et, évidemment, la place des interventions
psychosociales, ça revient, ça revient beaucoup.
Moi, je vous dirais que, dans la
recommandation 11, vous avez fait une liste des interventions
psychosociales efficaces et vous avez mis, comme quatrième picot, les
interventions qui ciblent à la fois l'enfant et les parents. J'aimerais
tellement voir ça comme premier picot, parce qu'en même temps... en même
temps... Puis je ne sais pas ce que vous en pensez, mais, quand on est en train
de travailler de façon globale avec l'environnement familial, qui est tellement
important pour l'enfant, est-ce que vous ne trouvez pas que c'est effectivement
une priorité?
M. Boileau (Luc) :
Vas-y.
Mme Desmarais (Sylvie) :
Si je peux répondre à votre question, en fait, vous voyez, la référence aux
quatre petites étoiles, c'est, en fait, qu'on n'a pas pu démontrer, dans cet
énoncé-là, une démonstration scientifique, c'est-à-dire dans la littérature
scientifique. Toutefois, ça a été vraiment un consensus d'experts autour de
cette importance-là d'avoir des interventions qui ne ciblent pas juste les
jeunes non plus, mais les parents. Et, un peu plus tôt, je vous parlais de
l'importance d'avoir accès pour les parents à des programmes qui développent
les habiletés parentales. Bien, c'en est une, manifestation, une intervention
possible.
Mme Sauvé : Merci
beaucoup. Il me reste...
Le Président (M. Provençal)
: Deux minutes.
Mme Sauvé : Deux
minutes. Alors, la recommandation 12, je sais que les données de la
littérature ne vous amènent pas à vous positionner pour des interventions
psychosociales au niveau de l'adolescence, plus en groupes ou individuelles.
Mais ne croyez-vous pas que le fait qu'à l'adolescence la pression par les
pairs est tellement importante, que la crise identitaire, et tout ça, que,
malgré le manque de littérature, l'intervention de groupe pourrait avoir un
effet plus important?
Mme Desmarais (Sylvie) :
On n'a pas pu le démontrer effectivement au plan scientifique, mais c'est des
travaux qui pourraient se poursuivre, parce qu'on le sait, que c'est démontré
aussi dans d'autres types de problématiques. Alors, oui, il y a une possibilité
de voir à mettre en place des interventions à la fois individuelles et à la
fois de groupe. Et, là encore, ça dépend aussi toujours de la situation d'un
jeune. Et parfois c'est préférable qu'il soit en individuel, ou parfois c'est
tout à fait adéquat qu'il puisse avoir une intervention de groupe.
Mme Sauvé : Parfait.
Merci. Alors, les dernières recommandations, comme je n'ai plus de temps, la
15, la 16, donc, l'approche personnalisée, très, très important. Écoutez, je
pense, j'ai fait le tour. J'ai réussi à passer à travers toutes les
recommandations. Quel plaisir de vous entendre. Merci beaucoup pour ces pistes
de solution. Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Merci. Alors, je vais maintenant céder la parole au député
de Jean-Lesage.
M. Zanetti : Merci
beaucoup. Merci pour votre présence. Dans votre mémoire, vous dites qu'il est
impossible d'affirmer qu'on surprescrit. Est-ce qu'on peut affirmer, selon
vous, avec les données que vous avez, là, qu'on surdiagnostique? Et la question
qui suit : Est-ce que, si on surdiagnostique, on ne peut pas conclure,
donc, si on surdiagnostique, qu'on tend à surprescrire? C'est peut-être
compliqué, hein? Je vais recommencer. Non? Ça va? O.K.
• (13 heures) •
M. Boileau (Luc) : En
fait, nos données et les systèmes d'information ne <captent pas des
diagnostics aussi bien que des prescriptions...
>
13 h (version révisée)
<17955
M. Zanetti :
...à surprescrire? C'est
peut-être compliqué, hein? Je vais recommencer.
Non? Ça va?
O.K.
M. Boileau (Luc)T :
En fait, nos données et les systèmes d'information ne >captent pas des
diagnostics aussi bien que des prescriptions, parce que les diagnostics sont
inscrits dans des dossiers cliniques auxquels nous n'avons pas accès de façon
globale au Québec, et l'inscription d'un diagnostic, quand on veut donner un
médicament, on est, des fois, obligé, là, de le faire, et Mme Bouchard
connaît bien ça, alors le diagnostic est moins prévalent quand on va chercher
les données diagnostiques que la prescription.
Ce que je veux vous... ce sur quoi je
voudrais insister, et, peut-être, Mme Bouchard voudra insister encore
mieux que moi, mais c'est certain que, quand on regardait ça, on s'est dit :
Bon, on imagine qu'il y a peut-être une posture de surprescription. Et,
là-dessus, les experts consultés, qui sont de toute nature, ont dit : L'idée,
ce n'est pas de dire qu'il y a une surprescription, il y a des variations
importantes et il y a visiblement une prescription, beaucoup, et plus
qu'ailleurs. Il y a de quoi descendre ça puis de vérifier s'il n'y a pas des
façons autres d'aborder le traitement et l'accompagnement aussi en services
psychosociaux, et donc de ne pas rejeter ça sur le fait qu'on prescrit trop de
ça, parce qu'il y a des occasions où c'est absolument nécessaire, d'autres
qu'il y a plus de doutes. Et là, sur ça, bien, bien sûr que les données ont
tendance à montrer ça, mais je veux quand même vous dire que les efforts de mes
deux collègues pour aller chercher ce consensus-là n'ont pas permis d'être
établis au moment où on les a faits, et je vous parle de 2017‑2018, c'est-à-dire,
surtout 2017.
Si on reprenait le tout aujourd'hui, peut-être
qu'il y aurait des... et surtout à l'issue de votre exercice parlementaire, il
y aurait peut-être des postures qui pourraient s'ajuster. Mme Bouchard.
Mme Bouchard (Sylvie) :
En fait, ce qu'on voit, c'est que tant le DSM-V que les guides de pratique ou
les lignes directrices, notamment canadiennes, sur lesquelles les cliniciens au
Québec se basent beaucoup pour guider leurs pratiques, vont permettre, ou, en
fait, vont suggérer l'utilisation d'un médicament à partir du moment où on a un
diagnostic de TDAH.
On a eu plusieurs échanges, vous l'avez
entendu par d'autres intervenants, toute cette notion de diagnostic, diagnostic
différentiel, diagnostic ponctuel versus quelque chose qui serait plus
chronique, donc il y a probablement quelque chose à faire autour du diagnostic.
Ce qu'on sait, c'est que des personnes qui ont un TDAH, qui ne sont pas
traitées, on connaît les effets délétères, par exemple, des problématiques en
termes d'absentéisme au travail, les taux d'accidents d'automobile,
l'équivalence en termes de diplomation au niveau du secondaire.
Il y a des études avec l'utilisation des
médicaments. Donc, une personne qui a un TDAH et qui est traitée de façon
adéquate peut avoir des gains sur différents éléments, par contre, ce sont
souvent des niveaux de preuve qui sont faibles, et ce qu'il est important de
noter, c'est qu'on n'a pas ces données-là pour le Québec. Donc, est-ce que,
malgré la grande utilisation de médicaments... Puis on ne dit pas : C'est
trop, on dit que c'est plus qu'ailleurs. On voit qu'il y a une grande
utilisation de médicaments. Quels sont les réels impacts pour la population? Au
Québec, ce sont des données que nous n'avons pas. Donc, est-ce qu'effectivement
les enfants ou les personnes avec un TDAH traité ont une meilleure
scolarisation, ont moins d'accidents d'automobile, ont des meilleurs gains, là,
sur différents paramètres qui sont étudiés dans les études?
Le Président (M. Provençal)
: Merci.
M. Boileau (Luc) : Et,
si je peux me permettre, M. le Président, on n'est certainement pas à dire,
avec les données qu'on voit, pour être en corollaire avec votre question, à
dire : On est inquiet, on trouve qu'on n'en prescrit pas assez à Montréal
ou à Laval. Ce n'est pas ça du tout, là. Donc, on ne peut pas jouer à l'inverse
non plus, pour corroborer ce qui est dit.
Le Président (M. Provençal)
:…la parole au député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui.
Merci beaucoup d'être ici, c'est extrêmement, extrêmement instructif. Est-ce
qu'on n'est pas en train de transformer des comportements sociaux au Québec en
maladies?
M. Boileau (Luc) : Il
n'y a pas une autre question, là?
Mme Bouchard (Sylvie) :
Bien, tantôt, on a parlé, peut-être, si je peux me permettre, M. le Président,
on a parlé d'une maladie génétique. Alors, on sait qu'il y a de la recherche en
ce sens-là, on entend beaucoup... on voit beaucoup des enfants qui sont diagnostiqués
puis des parents. On a, d'ailleurs, des humoristes au Québec qui en parlent
largement. Donc, s'il se fait beaucoup de recherches en ce sens-là et qu'on
finit par trouver quelque chose, on aura peut-être des traitements plus
adaptés. Mais on a parlé, avec l'intervenante précédente, de normalité. Je
pense qu'on est dans une culture de productivité. Il y a probablement un beau
mélange de tous ces concepts.
M. Gaudreault : Il y a de
ça là-dedans, oui. Je veux revenir sur le fait que... et là c'est peut-être
plus <Mme Bouchard... que les médicaments comme ConcertaV...
Mme Bouchard (Sylvie)T :
...précédente, de normalité. Je pense qu'on est dans une culture de
productivité.
Il y a
probablement un beau mélange de tous ces
concepts.
M. Gaudreault :
Il
y a de ça
là-dedans, oui.
Je veux revenir sur le fait que... et
là c'est
peut-être plus >Mme Bouchard... que les médicaments
comme Concerta, Ritalin sont couverts par la RAMQ ici au Québec et pas ailleurs.
Est-ce qu'on est les seuls, seuls, seuls, ou le Ritalin, et le Concerta, et
autres médicaments du même genre sont aussi couverts par des régimes
d'assurance dans d'autres juridictions, où on pourrait faire une comparaison?
Je ne sais pas si vous comprenez ma question.
Mme Bouchard (Sylvie) :
En fait, peut-être juste pour corriger ou amener une précision sur ce que vous
amenez, les gens dans le régime public d'assurance médicaments ont une
couverture jusqu'à l'âge de 25 ans lorsqu'ils sont des étudiants à temps
plein. Donc, ça, il y a une gratuité à cette étape-là.
Ce qui est différentiel des autres
juridictions, des autres provinces canadiennes, c'est la couverture des longues
actions. Alors, au Québec, ces médicaments-là sont inscrits. Ce sont des
médicaments d'exception, donc le médecin doit écrire un code ou faire une
particularité avant que le patient puisse se procurer le médicament à la
pharmacie, ce qui est différentiel des autres provinces. Alors, souvent, dans
les autres provinces, ce qui est remboursé, ce sont les courtes actions, alors
qu'au Québec et les courtes et les longues actions sont remboursées. Donc, ça
pourrait peut-être expliquer un usage un peu plus grand au Québec.
M. Boileau (Luc) : Et,
au risque de vous déplaire peut-être, M. le Président, c'est que nous ne
pouvions pas, jusqu'au mois... Jusqu'à cet été, on a recommandé à Mme la
ministre de permettre que les longues actions, les médicaments de longue action
puissent être prescrits en première intention. Parce qu'avant on devait
commencer par des courtes actions. C'est en dehors des cadres de recommandation
au niveau canadien et international. Donc, on favorise même, lorsque
nécessaire, de commencer avec un longue action. Mais on n'encourage pas, dire :
Bien, donnez ça à tout le monde, là. C'est juste : on n'est pas tenus,
maintenant, de passer par une courte action.
Et, quant à la question demandée
préalablement, c'est comme s'il y avait un curseur, là, qui est à placer. À
quel moment ça devient utile, bénéfique, pour l'enfant et pour la famille,
qu'il puisse prendre des médicaments? Bien, il ne semble pas y avoir de moment
où c'est bénéfique tout seul de juste donner ça, pas d'autre intervention. Il y
a toujours un bénéfice à avoir une approche, tu sais, bimodale ou multimodale,
d'une part. D'autre part, il peut y avoir des sensibilités qui vont osciller
d'une famille à l'autre, d'un professeur à l'autre, d'un médecin à l'autre,
bien sûr. Et c'est cette base normative sociale qui mérite d'être surveillée,
bien sûr, et vous le faites, et, sans doute, ramenée. Ou, en tout cas, être
très vigilants sur cette croissance-là et de vouloir ne pas la déplacer pour
faire en sorte que tout, maintenant, qui devient source d'inquiétude... et,
sans doute, c'est légitime pour plusieurs de... Ah! bien, je pense que oui, là,
il mériterait de... que ce serait bénéfique, pour lui. Donc, il faudrait que ce
curseur-là se déplace ou n'ait pas tendance à pousser de l'autre côté. Voilà.
Le Président (M. Provençal)
: Je vous remercie de votre contribution à nos travaux.
La commission suspend ses travaux jusqu'à
16 h 30.
(Suspension de la séance à 13 h 8)
16 h 30 (version révisée)
(Reprise à 16 h 30)
Le Président (M. Provençal)
: Bonjour. La Commission de la santé et des services sociaux
reprend ses travaux. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien
vouloir éteindre la sonnerie de leurs appareils électroniques.
Nous poursuivons les consultations
particulières et auditions publiques dans le cadre du mandat d'initiative
concernant l'augmentation préoccupante de la consommation de psychostimulants
chez les enfants et les jeunes en lien avec le trouble déficitaire de
l'attention avec hyperactivité. Cet après-midi, nous entendrons les organismes
suivants : la Dre Johanne Lévesque, neuropsychologue, et le Mouvement
Jeunes et santé mentale.
Je souhaite maintenant la bienvenue à la
Dre Johanne Lévesque. Je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes
pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange avec les membres
de la commission. Je vous invite à vous présenter et à commencer votre exposé.
Je vous cède la parole, madame.
Mme Johanne Lévesque
Mme Lévesque (Johanne) :
Merci beaucoup. En fait, je suis vraiment très heureuse et honorée d'être ici aujourd'hui
pour vous parler de ma clientèle préférée, les enfants qui ont un trouble
déficient de l'attention avec ou sans hyperactivité. Alors, effectivement, je
suis neuropsychologue, ça fait bientôt 17 ans que je vois des enfants, et
de plus en plus d'adultes, en fait, je dois dire, au cours des sept, huit
dernières années, qui sont aux prises avec cette problématique-là.
J'ai fait, moi, mon stage postdoctoral sur
une technique alternative à la médication qui s'appelle le neurofeedback pour
traiter des enfants qui avaient un TDAH. Ce n'est pas par hasard que j'ai fait
ça, en fait, c'est parce que mon fils avait un TDAH incroyable, il était excessivement
hyperactif et impulsif. Il a 27 ans aujourd'hui puis il s'en est bien
sorti, mais je cherchais une solution pour lui. Et compte tenu de la longue
liste des effets secondaires associés aux psychostimulants, ça... on était au
début des années 2000, là, j'ai eu un peu peur, comme mère, j'ai eu peur,
alors j'ai préféré retarder, le plus possible, cette alternative-là et j'ai
plutôt choisi qu'il fasse partie de mon postdoc et j'ai entraîné son cerveau,
on a corrigé sa situation, puis moi, j'ai poursuivi comme clinicienne au lieu
de devenir chercheure. Donc, ça, c'est mon background à moi, comme mère, mais
aussi comme professionnelle.
Suite à ça, bien, j'ai juste continué à
proposer le neurofeedback à des enfants, à des adultes, pour corriger leurs
problèmes d'attention et d'hyperactivité, avec quand même assez de succès, je
vous dirais, un taux de succès qui tourne autour de 60 %, 70 %, ce
qui est excellent dans ce genre de problématique là.
Pour moi, le TDAH, c'est quelque chose qui
a une composante génétique, donc on vient au monde avec ça, par définition,
mais je pense que le contexte social actuel exacerbe les difficultés que ces
enfants-là vivent, c'est-à-dire que, dès leur plus jeune âge, ils sont soumis à
un rythme de vie, une pression constante qui est inhumaine, d'une certaine
façon, compte tenu de leur âge. Donc, ils sont pris en charge très tôt, du
matin au soir, vont courir sans arrêt d'une activité à l'autre, qui ont l'air
de périodes libres mais qui n'en sont pas vraiment. Alors, il n'y a plus
beaucoup de temps pour ces enfants-là pour apprendre à être patient, à tuer du
temps, à s'asseoir tranquille sans bouger parce que le contexte l'exige, comme
quand moi, j'étais petite. Ça a beaucoup changé, en fait. La société a beaucoup
évolué, et là tout va très, très vite. Moi, j'en suis rendue à un point où je considère...
je pense sincèrement qu'on est en train d'excéder notre capacité d'adaptation
en tant qu'être humain. La technologie nous permet d'aller tellement vite, on
est tellement bombardés que cette surstimulation-là fait en sorte qu'on a
beaucoup de difficultés à s'adapter. Alors, quand on prend quelqu'un qui a déjà
des difficultés à rester attentif, à rester calme, à suivre, puis qu'on ajoute
cette pression-là, bien, on se ramasse avec des enfants qui sont anxieux, qui
est le prochain gros problème auquel il va falloir s'attaquer dans notre
société.
Quand les enfants arrivent au primaire, il
y a une pression qui est là, mais qui est... moi, j'appelle ça une pression
bienveillante, c'est-à-dire que, maintenant, on souhaite que tous les enfants
qui sont dans le système scolaire réussissent. Alors, il y a comme une
obligation de réussir. Tout le monde qui est dans le système scolaire souhaite
que chacun puisse exprimer son plein potentiel puis atteindre ses objectifs.
Alors, ce que ça crée, par conséquent, c'est que tous les enfants qui semblent
présenter une difficulté sont identifiés très rapidement. On va les évaluer
tant bien que mal, ça dépend des régions, ça dépend des ressources disponibles,
et ces enfants-là vont voir un plan d'action, maintenant, qu'on appelle, être
mis autour d'eux pour les aider. Mais ce plan d'action là, souvent, va se
limiter à la médication quand on identifie un TDA ou un TDAH chez ces
enfants-là. Parce que, d'une part, c'est facile, et, d'autre part, il y a quand
même une bonne efficacité à la médication. Il y a des effets secondaires, mais
les effets secondaires... Moi, je ne peux pas vous dire combien de fois j'ai
entendu dire des <parents, et des professeurs, et des orthopédagogues, et
tous ceux qui gravitent autour des enfants dans nos écoles : C'est vrai qu'il
ne mange pas pour dîner, c'est vrai qu'elle a mal à la tête toute la journée,
mais maintenant au moins...
Mme Lévesque (Johanne)T :
...I
l y a des effets secondaires, mais les effets secondaires... Moi, je
ne peux pas vous dire combien de fois j'ai entendu dire des >parents, et
des professeurs, et des orthopédagogues, et tous ceux qui gravitent autour des
enfants dans nos écoles : C'est vrai qu'il ne mange pas pour dîner, c'est
vrai qu'elle a mal à la tête toute la journée, mais, maintenant, au moins, elle
réussit ou il réussit. Moi, j'ai bien de la misère avec ça. Ça me brise le
cœur. Il y a comme une limite à ce que je trouve qu'un enfant devrait endurer
pour réussir.
Ça fait que, comme société, moi, je pense
qu'on doit se questionner à ce niveau-là, parce que des psychostimulants, ce n'est
pas sans conséquence. C'est une faible minorité d'enfants et d'adultes qui en
prennent qui n'ont pas d'effet secondaire à court, à moyen ou à long terme. Ça
fait que ça vient avec ses difficultés, ça fait que ça... Puis, ceci étant dit,
je ne suis pas du tout contre la médication, là, je tiens à l'établir aussi. C'est
un outil parmi tant d'autres, qui est, malheureusement, souvent le seul.
Et le problème qui vient avec ça, c'est
que plus un enfant prend une médication jeune dans sa vie, plus on se ramasse,
maintenant, avec des enfants qui, rendus à la fin du primaire, début du
secondaire, sont au maximum de la dose de la médication qui a fini par marcher
puis donner des bons résultats, c'est-à-dire plus d'effets positifs que
d'effets secondaires, mais là ça ne marche plus, ce n'est pas assez encore,
mais là on ne peut pas augmenter la dose. Alors, ce que le médecin est dans
l'obligation de faire, c'est d'essayer une autre molécule. Mais il y avait une
raison initialement pourquoi cette molécule-là fonctionnait chez cet enfant-là.
Ils ne sont pas tous pareils, les médicaments. Alors, quand on essaie une autre
médication, bien là, des fois, ça ne marche pas. Mais, si on n'a rien fait d'autre
que de prescrire un psychostimulant à l'enfant, qu'on ne lui a pas montré à
s'organiser, à planifier, à avoir une hygiène de vie qui est adéquate, à faire
attention à ce qu'il mange, à limiter le temps de jeux vidéos, qui est
excessivement néfaste pour un cerveau, bien, on se ramasse devant un enfant qui
est complètement démuni, qui n'a pas de ressource et qui est rendu au
secondaire. Donc, ça, c'est vraiment problématique, à mon sens.
Le deuxième volet qui vient avec la prise
de psychostimulants, ça ne concerne pas les enfants d'âge primaire qui ont des
problèmes, ça concerne les étudiants du cégep et des universités qui n'en ont
pas, de problème, mais qui veulent aussi performer. Et ils se procurent un psychostimulant
juste pour ne pas être désavantagés, finalement, par rapport à ceux qui en ont,
qui n'ont pas plus de problèmes qu'eux autres, mais qui peuvent, grâce à ça,
étudier des heures et des heures. Vous le savez peut-être, mais il y a un
énorme marché noir de psychostimulants dans les cégeps, les universités, même
au secondaire, donc, des gens qui ont des prescriptions légales, qui les ont
obtenues, soit en exagérant ou en inventant des symptômes chez leur médecin...
puis, vous savez, les médecins, ils font ce qu'ils peuvent avec ce qu'ils ont.
Ça fait que, souvent, ils vont faire une bonne entrevue clinique, ils vont
faire passer des questionnaires. Les gens n'ont pas toujours les moyens d'aller
en évaluation au privé. Donc, un médecin, devant quelqu'un qui semble en
détresse, va prescrire le fameux psychostimulant. Mais, je peux vous le dire,
n'importe qui peut faker un problème de TDA ou de TDAH, même dans un test
d'évaluation neuropsychologique, là. On a juste à faire des erreurs, hein, ce n'est
pas compliqué.
Alors, c'est vraiment un problème plus
large, en fait, que de juste prendre les psychostimulants pour être attentif.
Une personne que je connais très, très bien, qui était dans le cercle d'amis de
mes enfants, elle voulait que moi, je lui crée un faux problème pour qu'elle
puisse se présenter chez le médecin, parce qu'elle disait : Ma technique
est très exigeante, puis, si moi, je ne peux pas prendre de
Concerta — supposons, un psychostimulant — bien, je suis
désavantagée par rapport à mes collègues qui le font. Ça fait
qu'accepterais-tu, s'il te plaît, de dire que j'ai un TDA ou un TDAH puis que j'ai
besoin de médication? Bien, évidemment, j'ai refusé. Mais ça, c'est courant, c'est
vraiment... Ça arrive tout le temps, je me fais... Moi, je me le fais demander
une dizaine de fois par année, là, par des gens qui me consultent juste pour
ça. Alors, en tant que tel, c'est un problème.
Puis il y a des gens qui soulèvent le fait
qu'il y a le contexte académique qui est peut-être inadéquat aujourd'hui, parce
qu'il y a de plus en plus d'étudiants qui doivent travailler. Il y a des
contextes sociaux qui sont aussi problématiques. La famille est plutôt éclatée.
Les enfants, des fois, ils sont un peu laissés à eux-mêmes aussi, donc ils
s'arrangent avec les moyens du bord. Ça fait qu'il y a comme tout un contexte
socioéconomique qui va faire en sorte que la pression est grande. Ils ont...
Les jeunes n'ont pas juste à aller à l'école, ils ont aussi à prendre soin du
reste de leur vie, puis, des fois, bien, il faut qu'ils le fassent eux-mêmes,
ça fait que, pour s'aider, ils vont vouloir avoir recours à un psychostimulant.
Avant, les gens prenaient du café en masse, beaucoup de café. Mais là,
aujourd'hui, les gens vont aller vers les psychostimulants.
• (16 h 40) •
Pour moi, les solutions, c'est toujours un
ensemble d'éléments. Les psychostimulants, la médication, c'est le dernier item
qui devrait être introduit quand on veut aider un enfant qui est aux prises
avec un TDAH. Avant, la première chose qu'il faut faire, c'est s'assurer que
cet enfant-là a des heures de sommeil adéquates, que son alimentation comporte
toujours un peu plus de protéines que de <glucides, à chaque repas, parce
que souvent ils répondent beaucoup mieux à la présence de protéines que de glucides,
puis là je ne suis pas du tout en train de parler du régime cétogène, là, je
parle juste d'avoir un peu plus de protéines, puis s'assurer aussi que ces
enfants-là bougent ou...
Mme Lévesque (Johanne)T :
...que son alimentation comporte
toujours un peu plus de protéines que
de >glucides à chaque repas, parce que, souvent, ils répondent beaucoup
mieux à la présence de protéines que de glucides, puis là je ne suis pas du
tout en train de parler du régime cétogène, là, je parle juste d'avoir un plus
plus de protéines, puis s'assurer aussi que ces enfants-là bougent ou ont une
activité qui les passionnent, parce que, quand vous aimez ce que vous faites,
même si vous avez un déficit d'attention, vous allez produire naturellement beaucoup
plus de dopamine, et la dopamine est un neurotransmetteur fondamental dans
l'attention, dans le contrôle moteur, mais c'est toujours, toujours associé au
plaisir puis à la motivation.
Le Président (M. Provençal)
: 30 secondes.
Mme Lévesque (Johanne) :
C'est pour ça que, si vous avez appris quelque chose facilement dans votre vie,
c'est probablement parce que vous aimiez énormément ce que vous aviez à
apprendre.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup.
Mme Lévesque (Johanne) :
…plaisir.
Le Président (M. Provençal)
: Nous allons débuter la période d'échange avec le député de
Dubuc.
M. Tremblay : Merci, M.
le Président. Bonjour. D'abord, je ne sais pas si c'est parlementaire, mais...
ouf! C'est ce que j'aurais tendance à dire en tout premier lieu... C'est
parlementaire?
Une voix
: Oui.
M. Tremblay : Merci,
chère collègue. Dites-moi... Bravo! Vous êtes vraiment magnifique. Vous dites
que la surstimulation qu'on vit par rapport à notre réalité de société est en
accéléré depuis un certain temps. On pourrait le croire par rapport aux médias,
par rapport aux communications, tout ce qui s'accélère. On voit nos jeunes qui
sont déjà avec l'appareil, comme ça, où on répète : Mets tes lunettes
ou... Puis on sait déjà que des études se pointent sur le temps d'usage. On
parle de surstimulation, mais nos enfants qui viennent au monde déjà dans l'ère
numérique, est-ce qu'il ne serait pas déjà à-propos, pas de réapprendre à
vivre, mais est-ce qu'il ne serait déjà à-propos d'encadrer tout ça puis de
s'assurer que, s'ils entrent là, ils vont être surstimulés dans pas long encore
plus?
Mme Lévesque (Johanne) :
Absolument.
M. Tremblay : Qu'est-ce
que vous...
Mme Lévesque (Johanne) :
Bien... tout à fait, en fait, puis c'est... Tout ce qui est téléphone, jeux
vidéo, etc., c'est excessivement nocif, ça, ça... Les jeunes, en fait, sont en
train de perdre leur capacité même juste à socialiser. Ils ne sont plus
capables de se parler, ils s'écrivent. Mais, au niveau de l'attention, c'est...
on doit absolument, absolument limiter l'accès à toutes ces plateformes-là parce
que c'est excessivement nocif pour le système nerveux. Ça crée, chez certains
d'entre eux qui ont une propension à devenir dépendants à la dopamine — et,
plus tard, la cocaïne, qui est le même... c'est le même circuit, là, dans le
cerveau — bien, à devenir dépendants de ce téléphone-là ou de cet
outil-là électronique du jeu vidéo.
Puis c'est pour ça que, si jamais vous
avez des enfants qui jouent à un jeu vidéo et que, tout à coup, vous limitez
dans le temps, dire : Bon, O.K., là c'est assez, bien, vous allez voir, il
y a toutes sortes de réactions possibles à ça. Puis ceux qui sont dépendants
vont souvent être beaucoup plus agressifs, un peu comme si on venait de leur
enlever leur plaisir, mais de façon addictive, là, c'est comme, on vient de
leur enlever ce qui leur faisait tant de bien. Il y en a d'autres, quand ça les
affecte beaucoup au niveau attentionnel, vous allez voir, ils sont beaucoup plus
zombies. C'est comme s'ils devenaient léthargiques suite à ça. Ça va leur
prendre une demi-heure, une heure, deux heures, des fois, à s'en remettre.
Puis là je vous le dis, l'antidote, c'est
du sport. Ça fait que, si jamais vous avez des enfants qui font... qui jouent à
des jeux vidéo, vous en avez, là, bien, vous négociez, là, la demi-heure de jeu
vidéo — qui devrait être le maximum par jour pour n'importe quel
enfant du primaire, ça fait que... juste pour donner une idée — avec
au moins une demi-heure d'activité physique, pour refaire les provisions de
dopamine suite à ça. Mais c'est très important, gérer ça.
M. Tremblay : Dites-moi,
vous avez parlé aussi de la réalité des régions. Ce n'est pas la première fois
où on en entend parler. En tout cas, moi, je le réalise, là, puis on se pose la
question, il y a plusieurs hypothèses potentielles. Est-ce que c'est une question
du fait d'être éloigné? Ou on a moins d'effectifs? Ou la culture... Qu'est-ce
qui peut faire la différence entre des enfants dans une région par rapport à
des grands centres?
Mme Lévesque (Johanne) :
En fait, j'étais, pour le plaisir, en fait, dans le coin de Sept-Îles
dernièrement. Et j'ai appris, avec étonnement, qu'il y avait un taux de
prescription qui avoisinait les 30 %, de psychostimulants, et qu'ils
venaient de perdre la dernière neuropsychologue qui travaillait là, qui avait
décidé de revenir dans les grands centres. Alors, ils n'ont tellement pas de
ressource que l'avantage de la médication, quand ça fonctionne, bien, ça fait
que l'enfant va automatiquement être plus attentif puis plus calme. Bon. Ça
fait que, donc, ça fait... On règle un peu le problème quand même, ça fait que
ça devient une solution qui est rapidement utilisée, faute de mieux, faute
d'autres choses.
Puis, pourtant, dans les régions, souvent,
les <enfants ont quand même une...
Mme Lévesque (Johanne)T :
...
parce que, quand ça fonctionne, bien, ça fait que l'enfant va
automatiquement être plus attentif puis plus calme. Bon, ça fait que... donc,
ça fait... on règle un peu le problème quand même. Ça fait que ça devient une
solution qui est rapidement utilisée faute de mieux, faute d'autre chose.
Puis pourtant, dans les régions,
souvent, les >enfants ont quand même une hygiène de vie qui est
meilleure que celle des villes parce qu'ils vont jouer beaucoup plus dehors, ça
fait partie du mode de vie, en fait, d'être à l'extérieur. Mais, après ça,
bien, c'est... moi, je pense qu'il y a un peu d'éducation à faire, pour avoir
donné des conférences dans les différentes régions du Québec, un peu
d'éducation qui... Je dirais que les gens, dans les régions, sont un petit peu
moins informés par rapport à toutes ces choses-là, un peu moins au courant. Ça
demeure plus du domaine de la psycho pop puis du folklore, là, il manque un peu
d'éducation. Ça fait que, des parents, des fois, faute de mieux, vont faire ça
sans trop savoir quoi faire d'autre.
M. Tremblay : Question: Est-ce
que... Il y aura l'éventualité d'un nouveau commissaire à la santé. Croyez-vous
que c'est un mandat qui pourrait être prioritaire, intéressant, pertinent pour
un éventuel commissaire à la santé qui va venir?
Mme Lévesque (Johanne) :
Oui, absolument. Puis, comme je le disais au début, je le ferais
conjointement... ce commissaire-là devrait s'adresser... s'occuper à la fois du
TDAH, mais de sa petite soeur, l'anxiété, qui est dévorante et galopante, en ce
moment, chez nos enfants.
M. Tremblay : Moi,
dernière question en ce qui me concerne, M. le Président. On a parlé de la
rigueur des diagnostics. Il y a une démarche avant d'arriver au diagnostic. Il
y a une réalité, on parle un peu de folklorique ou de... Le parent qui reçoit
l'input de l'école, l'enfant est agité, bon, puis ça démarre. Le médecin, on
nous a dit qu'il y avait des diagnostics qui se donnaient en 15 minutes.
Est-ce qu'on est rigoureux, au niveau des diagnostics, au Québec? Est-ce qu'il
n'y a pas beaucoup de travail à faire pour s'assurer qu'on arrive à une
démarche qui est précise puis qui est efficace?
Mme Lévesque (Johanne) :
Bien, en fait, j'ai 17 ans de recul, ça fait que je peux vous dire, ça
s'est beaucoup amélioré. C'était vraiment pire au début de ma pratique. Les
diagnostics, c'était en cinq minutes que ça se donnait dans un bureau, là,
c'était très, très rapide, là. Ça prenait deux questionnaires, deux, trois
questions, et c'était réglé. Ça s'est beaucoup amélioré, mais il y a encore du
chemin à faire, définitivement. Juste pour vous donner un petit exemple,
quelqu'un qui aurait une hypersensibilité sensorielle au bruit, bien, même si
son attention est parfaite, aussitôt que quelqu'un fait un, vous savez, clic
clic clic, avec un stylo, là, cette personne-là va être complètement,
complètement inattentive, là, va focuser juste là-dessus. Elle ne peut pas
faire autrement, là, elle a un problème d'intégration perceptuelle. Ça fait que
cet enfant-là, mettons qu'il est dans la classe puis qu'il y a du bruit tout le
temps, là, c'est impossible de se concentrer. Puis, même si on lui donne un
psychostimulant, il ne sera pas plus concentré. Ça fait que c'est un problème,
ça fait que, oui, l'évaluation est très importante.
M. Tremblay : Merci.
Mme Lévesque (Johanne) :
Bienvenue.
Le Président (M. Lafrenière) :
Alors, Mme la députée de Lotbinière-Frontenac.
Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) :
Votre présentation était vraiment très intéressante.
Mme Lévesque (Johanne) :
Merci.
Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) :
Tout à l'heure, vous avez parlé d'une meilleure hygiène de vie pour nos jeunes,
puis vous avez parlé aussi du temps que les jeunes passaient sur les appareils
électroniques. Combien de... c'est quoi, le temps idéal, là, que les jeunes
devraient passer par jour?
Mme Lévesque (Johanne) :
Primaire... pour les enfants d'âge primaire, c'est maximum une demie-heure par
jour, secondaire, une heure par jour. Ça fait que, ça, je sais qu'on est loin,
loin, loin.
Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) :
On est très loin de ça, oui.
Mme Lévesque (Johanne) :
Quand moi, je dis ça à des parents là, mon Dieu! Mais je pense qu'il y a un
travail parental à faire aussi, là, il faut sensibiliser les parents aux
impacts négatifs de ça. Vous savez, un enfant... le pire scénario pour un
jeune, c'est: il se lève le matin, ouvre la télé, ou prend sa tablette, ou
embarque sur sa console de jeu vidéo. Il est déjà en train d'épuiser sa réserve
de dopamine. Il s'en va à l'école, revient dîner à la maison, supposons, parce
que sa mère, elle reste à la maison et qu'il y a quelqu'un qui l'attend, peu
importe, mange, embarque à nouveau sur sa console de jeu, sa tablette, peu
importe, continue à épuiser sa réserve de dopamine, retourne à l'école, revient
à la maison, refait la même chose. Bien, cet enfant-là, finalement, n'est
jamais optimal dans ses capacités d'attention parce qu'il a utilisé un appareil
électronique tout au long de la journée. Ça fait que c'est vraiment
problématique, puis il y a beaucoup d'éducation à faire à ce niveau-là. Puis il
faut accepter de passer pour le parent bizarre, je pense, qui refuse l'accès à
un téléphone à son jeune avant 15 ans. Tu sais, c'est... il n'y en a pas,
de problème, là, c'est juste dans notre tête, en fait.
Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) :
O.K. Puis, concernant... comment on fait un meilleur diagnostic? Parce qu'il y
a beaucoup de... les jeunes sont surmédicamentés. Comment on va réussir à faire
un meilleur diagnostic?
• (16 h 50) •
Mme Lévesque (Johanne) :
Oui. En fait, il faut... Pour savoir si quelqu'un a un problème d'attention, il
faut évaluer l'attention. Ça a l'air drôle, dit <comme ça, mais ce n'est
pas toujours fait. Alors, c'est comme ça qu'on arrive avec des diagnostics qui
ne tiennent pas debout, au bout du compte, qui étaient finalement... c'était
l'anxiété. L'anxiété... un enfant anxieux va être très agité, on va...
Mme Lévesque (Johanne)T :
...En fait, il faut... Pour savoir si
quelqu'un a un problème
d'attention,
il faut évaluer l'attention. Ça a l'air drôle, dit >comme
ça, mais c'est parce que ce n'est pas toujours fait. Alors, c'est comme ça
qu'on arrive avec des diagnostics qui ne tiennent pas debout au bout du compte,
qui étaient finalement ceux d'anxiété. L'anxiété... un enfant anxieux va être
très agité. On va penser qu'il est hyperactif, mais il est anxieux.
Donc, il faut que les différentes régions
au Québec, les différents secteurs aient accès à des gens qui ont la capacité
d'évaluer comme il faut les enfants. Les psychologues scolaires peuvent le
faire, les neuropsychologues peuvent le faire. Les médecins, c'est vraiment un
dernier recours, parce qu'eux ne sont pas à même d'évaluer directement les
capacités d'attention, ça fait que, souvent, c'est pour ça qu'ils nous les
réfèrent. Mais, en même temps, voyez-vous comment c'est une boucle qui peut
coûter cher? Moi, au fil du temps, j'ai développé une évaluation, là, juste
pour ça, qui coûte 500 $. Ce n'est rien puis c'est beaucoup, là. Ça dépend
à qui on parle. Mais, comparé à une évaluation globale qui est à 2 000 $,
bien, c'est quand même le quart du prix. Puis, quand les gens ont des
assurances, finalement, ils sont remboursés beaucoup. Mais ce n'est pas tout le
monde qui fait ça.
Puis je pense qu'il y a une réflexion à
faire aussi au sein des neuropsychologues, puis de l'Ordre des psychologues du
Québec, à savoir qu'est-ce qui est vraiment nécessaire et utile pour qu'on
puisse établir hors de tout doute que cette personne-là a un TDA ou un TDAH. Il
y a cette réflexion-là aussi à faire.
Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) :
Parfait. Puis, dernière question, je voulais savoir aussi, tu sais, il y a
beaucoup de diagnostics, mais, après ça, l'enfant, est-ce qu'il y a des suivis
qui sont faits normalement avec le médecin ou on laisse aller ça?
Mme Lévesque (Johanne) :
Ça dépend des fois. Mais ça aussi, ça s'est beaucoup amélioré, je vous dirais
sincèrement. Et, dans un monde idéal, l'enfant reçoit son diagnostic, rencontre
son médecin, se voit prescrire une médication, il y a un suivi qui est fait une
semaine après, deux semaines après, un mois après, parce que la dose doit être
ajustée, il faut savoir c'est quoi, les effets secondaires que l'enfant va
avoir, s'il y en a, et changer de molécule au besoin. Mais ce suivi-là n'est
pas toujours fait. Mais ça devrait être ça. Mais ça, c'est mieux que c'était.
Mme Lecours (Lotbinière-Frontenac) :
Parfait, merci.
Mme Lévesque (Johanne) :
Bienvenue.
Le Président (M. Provençal)
: Mme la députée de Soulanges.
Mme Picard : Bonjour.
Mme Lévesque (Johanne) :
Bonjour.
Mme Picard : Merci
beaucoup pour le témoignage. Ce matin, on a eu quelqu'un ici, en commission,
qui nous a parlé qu'on devrait peut-être revoir la normalité, parce que la
normalité qui est basée sur les tests, et tout, devrait peut-être être revue.
J'aimerais avoir votre impression sur où serait la ligne, ou comment vous voyez
la...
Mme Lévesque (Johanne) :
Oui. Moi, je le vois dans un contexte culturel, en fait. On prend tous les
enfants d'une classe qui ont un TDAH ici puis on les transplante, je ne sais
pas, moi, à Maui, puis... dans une école avec des murs à moitié ouverts, dans
un contexte qui est beaucoup plus relax. Je pense qu'il y a moins de problèmes
déjà. En fait, comme je disais au début, c'est qu'il y a une grosse pression
qui est exercée parce que tout le monde veut que nos enfants réussissent. Mais
ça peut être bien correct aussi de devenir plombier, puis ça peut être bien
correct de finir avocat, puis ça dépend...
Moi, je trouve qu'il va falloir se poser
la question éventuellement : On veut qu'ils réussissent quoi, nos enfants,
au bout du compte? On veut-u qu'ils réussissent leur vie, leur vie
professionnelle? C'est quoi, là, la vraie question qui est derrière ça? Puis,
oui, la normalité, c'est très relatif. Ça dépend beaucoup des contextes.
Mme Picard : Je voudrais
savoir, est-ce que vous pensez qu'on médicamente les jeunes qui dérangent?
Mme Lévesque (Johanne) :
Plus, en fait, puis c'est démontré. Oui. Parce qu'en fait même les filles, là,
ont passé souvent sous le radar parce qu'il y a un peu plus d'hyperactivité
chez les garçons que chez les filles. Alors, la petite fille tranquille, qui
est dans la lune toute la journée, qui a un certain type de TDA plus lunatique,
va regarder droit en avant. Tout le monde pense qu'elle écoute, mais elle n'est
pas là, elle dans sa tête. Elle est ailleurs. Ça fait que, cette enfant-là, ça
va prendre plus de temps avant qu'elle ait... on détecte qu'elle a peut-être un
problème d'attention. Mais le petit gars qui bouge constamment sur sa chaise,
c'est assez rapide, puis oui...
Mais c'est toujours, ça, dans un contexte
de : Qu'est-ce que j'ai comme ressources de disponibles? Puis, vous savez,
il y a comme des petits ajouts qu'on peut faire. Il y a comme un rond en
silicone, qui s'appelle un Disco'sit. Ça se met sur l'assise de la chaise, ça
ne peut pas se lancer, l'enfant peut difficilement jouer avec ça comme un
ballon, mais, quand on est assis là-dessus puis qu'on est hyperactif, on peut
bouger. Et le fait de bouger stimule les mêmes régions du cerveau qui nous
permettent d'être attentifs. Alors, cet enfant-là, naturellement, va être plus
attentif. Ça fait qu'il y a des moyens alternatifs comme ça qui pourraient être
mis en place de façon beaucoup plus générale pour que les enfants tannants
puissent aussi bouger sans déranger.
Le Président (M. Provençal)
: M. le député de Richmond.
M.
Bachand
:
Justement, vous m'amenez sur les enfants tannants, alors je me souviens que
j'étais, il y a plusieurs années, jeune, et beau bonhomme... non, pas vrai. Mais
je vais vous parler des gars, hein? Quand j'étais à l'école, les gars, normalement,
étaient à l'arrière de la classe, les filles en avant de la classe, les
tannants étant vraiment dans la dernière rangée des classes.
Mais, à ce moment-là, on avait un parcours
différent. On avait... En <secondaire III, les enfants, les garçons
ou les filles, pouvaient choisir un parcours long ou court, professionnel ou
pas...
M.
Bachand
:
...l'arrière de la classe, les filles en avant de la classe, les tannants
étaient
vraiment dans la dernière rangée des classes. Mais,
à ce
moment-là, on avait un parcours différent, on avait... En >secondaire III,
les enfants... les garçons et les filles pouvaient choisir un parcours long ou
court, professionnel ou pas, les fameux DEP. Donc, vous parlez de métiers, et
tout ça. Et on a tout sacré ça, hein? Les écoles d'arts et métiers qu'on avait,
par exemple, ça n'existe plus, et, souvent, probablement que des cas qui
aujourd'hui seraient médicamentés se retrouvaient dans... comme plombiers,
comme électriciens, comme ferblantiers, ou tout ça, mais ça n'empêche pas qu'il
y a des cas réels qui existent.
Mais je voudrais vous entendre sur le
parcours scolaire, parce que, souvent... Parce que, par expérience, ce que j'ai
vu, c'est qu'en secondaire II, secondaire III, les cas lourds,
surtout chez les garçons, c'est vraiment frappant. Les décrochages sont là, la
violence est là. Je ne parle pas des petits gars qui se battent dans la
cour — je me suis battu dans la cour, ce n'est pas
grave — mais il y a la violence au niveau des familles, et tout ça. Je
veux vraiment vous entendre sur l'âge, là, secondaire II, secondaire III,
par rapport à cette problématique de TDAH et aussi de parcours scolaire.
Mme Lévesque (Johanne) :
Absolument. Bien, moi, je suis quelqu'un de très idéaliste, à la base, puis,
dans mon monde idéal à moi, les enfants n'ont pas le même parcours, en fait,
ils ont un parcours qui est beaucoup plus individualisé. Puis je suis très
heureuse de voir qu'en ce moment, dans les écoles du Québec, il y a de plus en
plus de programmes particuliers dans les écoles publiques. Parce que ça répond
à un besoin, hein, ce n'est pas... les enfants ne sont pas tous les mêmes, on
n'est plus à l'époque où ma mère, par exemple, pouvait faire 20 heures de
français par semaine à recopier les mêmes phrases pour être sûre de ne pas
faire d'erreur. On n'est plus là, là, il y a énormément d'options, il y a
plusieurs intérêts. Puis c'est un peu ça que je voulais dire tantôt : On
veut qu'ils réussissent quoi, finalement, les enfants, à faire de l'algèbre ou
à réussir leur vie? Ça fait que les parcours scolaires individualisés, pour
moi, font partie de cette clé-là.
Le Président (M. Provençal)
: ...M. le député.
M.
Bachand
:
Très rapidement, parce que... Le titre de la commission, c'est l'augmentation
préoccupante de la consommation des psychotropes... des psychostimulants. C'est
quand même grave. C'est à prendre au sérieux. Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Alors, je vais céder maintenant la parole à la députée de
Fabre.
Mme Sauvé : Merci, M. le
Président. Écoutez, Dre Lévesque, c'est un plaisir de vous entendre,
honnêtement, vous nous avez amené, aujourd'hui, des éclairages qu'on n'avait
pas entendus. Parce que les présentations précédentes ont été excessivement
intéressantes, mais il y a eu, disons, un éclairage plus lié à la petite
enfance, avec la cellule familiale, le rôle d'évaluation, d'observation de
l'enseignant. Là, vous nous amenez une réalité de l'étudiant du collégial,
université. Honnêtement, je suis en bas de ma chaise, là, parce que je trouve
que c'est une réalité dont on doit tenir compte dans toute l'élaboration du
portrait de prévalence de la médication au Québec. Ça fait partie d'un volet
excessivement important, et vous êtes la première à le nommer.
Si je vous ai bien comprise... Vous avez
nommé, avec beaucoup de franchise, et j'apprécie ça, que, finalement, il y a
peut-être un grand problème de société dont on doit maintenant tenir compte si
on veut adresser véritablement la question et des pistes de solution. Et le
problème de société, c'est une pression de performance. Et c'est là où je tombe
en bas de ma chaise, quand j'entends que des étudiants du cégep, de
l'université, vont faker le TDAH pour être capables d'être en compétition et
puis de gagner, finalement, la performance de la journée au niveau des notes,
et tout ça. C'est excessivement grave. Et je ne sais pas comment est-ce qu'on
peut travailler dans des pistes de solution autres que le médicament, par
rapport à ces jeunes-là particulièrement, parce que les parents ne sont plus
aussi près d'eux, hein, ils sont dans l'adolescence, ils sont des jeunes
adultes. Alors, on n'a plus la même prise sur le coaching parental. Alors,
comment on s'y prend pour un peu trouver des pistes de solution pour ces jeunes-là?
Mme Lévesque (Johanne) :
Dans le fond, je pense que ça va être difficile, en fait, parce que c'est un
engrenage qui est mondial, hein, ce n'est pas juste au Québec. Le marché du
travail est excessivement compétitif, les jeunes veulent de l'argent. Moi, ça
m'a frappé d'entendre à quel point, quand on demandait aux... Moi, je demandais
tout le temps... je m'intéresse beaucoup à ce que les gens veulent devenir, ça
me passionne, puis je demandais aux amis de mes enfants : Qu'est-ce que tu
veux faire plus tard? Qu'est-ce qui te tenterait? Ah! je ne sais pas encore,
mais je veux faire de l'argent, ça, c'est sûr. Ça fait que c'était... Puis ce
n'était pas parce qu'on est dans un milieu particulièrement aisé, c'est juste
du monde qui voulait faire de l'argent. Ça fait que faire n'importe quoi pour
faire de l'argent, ça vient avec ça aussi.
Probablement, diminuer la pression,
c'est-à-dire, on est-u vraiment obligé d'avoir deux, trois examens
universitaires, supposons, deux dans la même journée? On peut-u en avoir un par
jour? Est-ce qu'il pourrait y avoir une période de deux semaines sur laquelle
on va échelonner quatre examens au lieu d'avoir une concentration des travaux
et examens?
• (17 heures) •
Juste de la <façon dont les jeunes
sont...
>
17 h (version révisée)
< Mme Lévesque (Johanne)T :
...
c'est-à-dire on est-u
vraiment obligé d'avoir deux, trois
examens universitaires, supposons, deux dans la même journée? On peut-u en
avoir un par jour?
Est-ce qu'il pourrait avoir une période de deux
semaines, sur laquelle on va échelonner quatre examens au lieu d'avoir une
concentration des travaux et examens?
Juste de la >façon dont les
jeunes sont évalués pourrait faire une différence, à mon avis, peut-être dans
une perspective d'atteinte d'objectifs, un peu ce que la réforme scolaire a
voulu faire, et non pas de quantifier nécessairement, arriver à une note. Parce
que la cote R, hein, ils protègent toujours leur cote R, les jeunes, si... ce
qui est dramatique. Même dans mon domaine, en bas de 4,1, sur 4,3, on ne rentre
pas en neuropsychologie, là, ça fait que c'est très dur. C'est des A puis des A
plus tout le temps. Moi, ce n'est pas la voie que j'ai suivie, j'ai fait la
voie de la recherche en premier, mais ceux qui font la vraie voie, c'est très
exigeant.
Mme Sauvé : Justement,
je reviens à ces jeunes-là et la pression de la performance que vous nommez. Maintenant,
aujourd'hui, un jeune en secondaire II se fait parler déjà des choix qu'il
devra faire en secondaire III, pour le IV, et le V, et la suite de ses
études. Alors, dans l'anxiété qu'il a puis dans la performance qu'il doit
avoir, est-ce que ce n'est pas un élément qui fait que les choix pour l'avenir
sont de plus en plus prématurés, beaucoup plus précoces par rapport à ce qu'on
a déjà connu, devant un choix de carrière, devant un choix de métier, alors que
le jeune n'a peut-être pas la maturité émotionnelle pour faire tous ces choix
de vie là?
Mme Lévesque (Johanne) :
Absolument. Absolument. C'est difficile, en fait, puis c'est ce qui est
explique aussi qu'il y a autant de changements de programmes rendus au cégep,
ou du décrochage, puis, bien simplement, les jeunes pensaient que, mais, finalement,
ce n'est pas ça, ils seraient... Moi, je pense que la nouvelle génération a
besoin de le faire, a besoin de le vivre. Moi, j'emploie, personnellement, une
trentaine d'étudiants, puis ces jeunes-là... étudiants universitaires, fins de
bac, maîtrise ou doctorat, puis ils ont besoin de le vivre, ils veulent
l'essayer, ils veulent être exposés.
À toutes les années, moi, j'ai des
demandes de personnes qui veulent juste venir passer une journée avec moi pour
vivre ce que c'est, que d'être neuropsychologue, vivre c'est quoi faire faire
du neurofeedback à quelqu'un, ils veulent comprendre. Ça fait qu'il y a comme
un... ils ont tellement d'options. Moi, il me semble, quand j'avais leur âge,
on en avait moins, des options, mais là c'est fou, ils ont... et, je trouve, ça
manque, ça, dans les écoles. Puis, effectivement, c'est très prématuré,
secondaire II, pour demander à quelqu'un de choisir ce qu'il va faire dans
la vie, là.
Mme Sauvé : On commençait
même à en parler au primaire, alors imaginez. Moi, c'est sûr que je veux savoir
un peu plus... connaître un peu plus tout ce que vous avez développé, dans vos
études postdoctorales, au niveau du neurofeedback, je veux en savoir plus.
J'aimerais ça, que vous nous expliquiez, parce qu'on est oui à faire le
portrait, puis à voir un peu l'ensemble des constats, mais, bien sûr, entendre
aussi des pistes de solution. Et, clairement, ce qui ressort des présentations
qu'on a, c'est que le médicament est le premier traitement et bien au-delà des
autres et bien au-delà des interventions psychosociales, mais il faut peut-être,
justement, valoriser d'autres approches, que ce soient les saines habitudes de
vie... Mais j'aimerais vous entendre, m'expliquer ce qu'est le neurofeedback.
Mme Lévesque (Johanne) :
Bien, en fait, c'est une technique qui a été développée de façon fortuite en
1965-1966 pour traiter l'épilepsie. Alors, je vais vous passer l'histoire parce
que c'est trop long, parce que la technique en tant que telle, c'est déjà assez
compliqué. Mais, si on prend, par exemple, le TDAH, il y a plus qu'une façon
d'avoir un TDAH. Au niveau neuroélectrique, il y a plusieurs types d'anomalies
qui vont être responsables, tu vois associées au TDAH dans notre cerveau.
Le cerveau, vous savez, nos cellules
nerveuses communiquent de façon électrique puis de façon neurochimique. On peut
mesurer, on peut enregistrer l'activité électrique chez… n'importe qui, en
fait, mais, une fois qu'on a cette activité électrique là, on la compare à une
base de données qui existe, une norme, puis on peut voir s'il y a des anomalies
et quelles sont-elles, ces anomalies-là. Une fois qu'on les a... c'est comme
une carte topographique de notre cerveau qui nous montre ce qui marche puis ce
qui ne marche pas sur le plan électrique.
Mais, une fois qu'on a identifié ce qui ne
va pas, bien, on peut l'enregistrer. Donc, je peux mettre une petite électrode
sur la tête de la personne à l'endroit où il y a le problème en lien avec le
TDAH, je vais lier les fréquences que j'enregistre à une chanson, donc quelque
chose qui est à l'extérieur de lui, un stimulus comme une chanson, et une
animation, comme un vidéo, par exemple. Mais, pour que la chanson et le vidéo
se mettent à jouer, la personne, il va falloir qu'elle trouve dans quel état
elle est quand sa chanson joue et que son vidéo bouge. Ça fait que, si elle est
dans la lune, bien, moi, les bandes de fréquences que j'enregistre, au lieu de
diminuer, elles augmentent, ça fait que sa chanson, elle ne joue pas. Aussi, à
ses zones rapides, au lieu d'augmenter, pour remplacer des zones lentes qui
causent le TDAH, bien, si elle n'est pas assez attentive, elles n'augmentent
pas, ça fait que son vidéo ne bouge pas. Ça fait que la personne, elle a comme
un feedback en temps réel de ce qu'il se passe directement dans son cerveau,
puis, en ajustant son état, elle arrive à prendre le contrôle de ça et à le
renverser.
Ça fait que, techniquement, là, c'est de
la neuroplasticité pure, puis c'est une technique qui, contrairement à la
médication, prend du temps, on appelle ça un entraînement, en fait. Pour un
enfant, on parle d'une <quarantaine d'heures, ça fait que ça ne se fait
pas du jour au lendemain. Par contre, il n'y a pas d'effets secondaires, c'est
l'avantage...
Mme Lévesque (Johanne)T :
...son état, elle arrive à prendre le contrôle de ça et à le renverser. Ça fait
que,
techniquement, là, c'est de la neuroplasticité pure, puis c'est une
technique qui,
contrairement à la médication, prend du temps, on
appelle ça un entraînement, en fait. Pour un enfant, on parle d'une >quarantaine
d'heures, ça fait que ça ne se fait pas du jour au lendemain. Par contre, il
n'y a pas d'effet secondaire, c'est l'avantage, un peu de fatigue au début.
Puis, à la fin, tout ce qui est acquis est acquis pour le restant de ses jours,
c'est là où on se distingue de la médication. Puis ce n'est pas parfait, ce
n'est pas une panacée universelle, puis ce n'est pas tout le monde qui réagit de
la même façon au neurofeedback. Moi, j'ai travaillé peut-être avec 10 000 personnes,
depuis le début de ma carrière, puis j'ai un taux de succès, comme je disais,
de 60 %, 70 % de remédiation des symptômes, ça fait que ce n'est
quand même pas négligeable.
C'est encore... sur le plan scientifique,
il y a encore une controverse qui est liée à la pratique, je dois le dire,
parce qu'il y a beaucoup moins d'études où on mesure l'effet placebo, les
études à double insu, parce que c'est très, très dur à réaliser. Si j'entraîne
quelqu'un qui comprend le moindrement ce qu'il faut qu'il fasse puis que je lui
présente l'activité électrique de quelqu'un d'autre, bien, il va se rendre
compte qu'il est dans le groupe... dans le mauvais groupe, que ce n'est pas son
activité électrique. Ça fait que c'est très difficile, mais il y en a, des
études de double insu, qui ont montré l'efficacité, mais il y en a beaucoup
moins que pour les médicaments. Mais, bref, c'est ce que je peux vous dire.
Mme Sauvé : C'est
intéressant. Combien de temps me reste-t-il?
Le Président (M. Provençal)
: ...
Mme Sauvé : Deux
minutes. C'est tellement intéressant. Écoutez, je pense que je vais vous parler
après parce que je veux en savoir encore plus. Est-ce que cette question par
rapport... que je veux vous poser par rapport au neurofeedback : Pour des
jeunes, des très jeunes qui n'ont pas... donc, le développement du cerveau
n'est pas complété, est-ce que c'est approprié?
Mme Lévesque (Johanne) :
On peut commencer à partir de l'âge de six ans, mais pas avant ça.
Mme Sauvé : O.K. À
partir de l'âge de six ans. O.K. Parfait. Vous avez dit, toujours dans les
pistes de solution, que vous avez développé vous-même un outil. Vous parliez
évidemment...
Mme Lévesque (Johanne) :
Une évaluation.
Mme Sauvé : Alors donc,
un outil d'évaluation. Et puis, encore là, est-ce que ce sont des propositions
de pistes de solution? Est-ce qu'il y a des outils, comme celui que vous avez
développé, qui pourraient être mis au service des parents? Est-ce que ce sont
des outils qui pourraient être développés en lien avec le développement des
compétences sociales, aussi l'intégration scolaire, et tout ça? Est-ce que ce
sont des outils qui pourraient faire partie de nouvelles avenues d'intervention
psychosociale?
Mme Lévesque (Johanne) :
Pas directement ce que moi, j'ai fait, mais des choses qui ne coûtent rien, que
tout le monde peut faire, ce serait, par exemple, de faire du sport. La
cohérence cardiaque, tout le monde en a entendu parler, puis, sérieusement,
moi, je trouve ça vraiment plate, comme approche, comme technique, mais c'est
très, très efficace au niveau cérébral. Ça fonctionne pour vrai. Donc, ça amène
automatiquement un «reset» au niveau du système nerveux. Ça apaise et ça oblige
une présence, donc une attention.
Ensuite de ça, la méditation dirigée dans
les écoles, le yoga, pourquoi pas? C'est démontré comme étant efficace. Alors,
c'est quelque chose qui pourrait être fait dans toutes les écoles, pour tous
les élèves, peu importe le milieu, favorisé, non favorisé. C'est assez facile à
implanter, puis ça ne coûte rien du tout.
Mme Sauvé : Merci.
Mme Lévesque (Johanne) :
Bienvenue.
Le Président (M. Provençal)
: Merci. Alors, je vais céder la parole au député de
Jean-Lesage.
M. Zanetti : Merci
beaucoup. En début de présentation, vous avez dit quelque chose que beaucoup
d'autres ont dit aussi, c'est-à-dire que le trouble, là, du déficit de
l'attention et de l'hyperactivité, c'est d'origine génétique. J'aimerais savoir
un peu qu'est-ce qui... C'est quoi, la preuve scientifique de ça? Parce que ça
semble être pris vraiment comme quelque chose pour acquis par tout le monde,
là, mais qu'est-ce qui soutient cette thèse?
Mme Lévesque (Johanne) :
Bien, en fait, c'est qu'il y a des études qui ont démontré que, chez les
personnes qui avaient des difficultés mesurées d'attention et de contrôle
moteur, il y avait des anomalies au niveau de l'expression de certains gènes,
comme, par exemple, le gène D1, D4, en lien avec la dopamine, d'autres
gènes en lien avec la noradrénaline. Donc, c'est ce lien-là, c'est une
corrélation qui a été faite.
Puis, par définition, un trouble
neurodéveloppemental doit être génétique. Donc, ça, c'est un peu comme le chien
qui se mord la queue, là, il faut qu'on arrive à quelque chose qui est inné
pour pouvoir parler d'un trouble neurodéveloppemental. Donc, si c'est inné,
c'est génétique. C'est ça, la fameuse boucle. Oui, c'est ce que je pourrais
vous dire, c'est... La preuve, elle est là, je vous dirais.
Mais, par contre, ce que les études ont
pris beaucoup de temps à essayer de comprendre, puis, à ma connaissance, il y
en a juste trois qui l'ont fait, c'est : O.K., on a un défaut génétique,
mais il vient d'où, ce défaut génétique là? Puis il y a... C'est ça, il me
semble, c'est trois études qui ont été publiées, la première, en 2015, la
deuxième, en 2018, puis, je pense, une dernière, en 2019, si ma mémoire ne me
fait pas défaut, là, qui a montré... qui faisait une liste de 11 produits
chimiques qu'on consomme quotidiennement, soit qu'on les respire, on les mange,
on les boit, et ils ont fait le lien, pour la première fois, avec tous les
troubles neurodéveloppementaux que les enfants ont. C'était la première fois
que c'était fait.
Parce que moi, je trouve que de dire que
c'est génétique, bien... oui, puis? Tu sais, c'est comme... Au-delà de ça, là,
ça veut dire quoi?
• (17 h 10) •
M. Zanetti : Donc, c'est <comme
si, au fond, il y aurait peut-être, à cause de la plasticité, disons, des
gènes, une espèce d'influence environnementale qui peut s'exprimer dans des
anomalies...
Mme Lévesque (Johanne)T :
...moi, je trouve que de dire que c'est génétique, bien, oui, puis? Tu sais, c'est
comme au-delà de ça, là. Ça veut dire quoi?
M. Zanetti : Donc, c'est
>comme si, au fond, il y aurait peut-être, pour… à cause de la plasticité,
disons, des gênes, une espèce d'influence environnementale qui peut s'exprimer
dans des anomalies génétiques.
Mme Lévesque (Johanne) :
C'est ça. C'est que, pendant la conception, soit à travers ce que la mère
consomme ou à la naissance, dans les premiers mois de la vie de l'enfant, bien,
ces éléments-là environnementaux vont façonner ou influencer le cerveau, de
sorte qu'il va se produire un petit déclic au niveau génétique qui va faire que
l'enfant va être inattentif et hyperactif.
M. Zanetti : Donc, le
fait qu'on nous dise... Ah! oui, c'est terminé.
Le Président (M. Provençal)
: ...au député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui, merci
beaucoup de votre présentation. C'est très intéressant. On a reçu, hier, un de
vos collègues, un autre neuropsychologue, qui nous a parlé de la pression du
client payeur, qui payait puis qui voulait un résultat, comme moi, si je veux
m'acheter une auto rouge, je vais chez le concessionnaire puis, si j'ai une
auto bleue, je ne serai pas content parce que je veux une auto rouge. Bon, bien
là, il y a des gens qui paient 2 000 $, 2 500 $ pour avoir
un diagnostic de TDAH, puis ils ne l'ont pas, puis, bon, ils ne sont pas
contents. Alors, est-ce que vous avez aussi senti cette pression du client
payeur?
Mme Lévesque (Johanne) :
Pas du tout.
M. Gaudreault : O.K., pas
chez vous.
Mme Lévesque (Johanne) :
Je n'ai jamais été confrontée à ça, vraiment pas.
M. Gaudreault : Mais vous
avez quand même des témoignages de gens, qui disent : Ah! ça pourrait
m'aider dans mon...
Mme Lévesque (Johanne) :
Oui, en fait...
M. Gaudreault : C'est un
autre genre de pression.
Mme Lévesque (Johanne) :
Oui, c'est une pression, oui, mais pas au sens... pas de parents qui
s'attendaient à avoir un diagnostic. En fait, quand moi, j'annonce aux parents
que leurs enfants n'ont pas de diagnostic, bien il y en a qui sont vraiment
surpris puis là je leur explique pourquoi l'enfant est comme il est, puis là,
bien, ils sont soulagés la plupart du temps. Tu sais, c'est vraiment... Mais,
non, moi, je n'ai pas ça. Les seules pressions que j'ai eues, c'était d'écrire
un faux rapport, dans le fond.
M. Gaudreault : Oui.
Mme Lévesque (Johanne) :
C'est ça.
M. Gaudreault : Maintenant,
je veux revenir un peu sur la question de l'aspect génétique de la chose. Au
moins, est-ce que ça nous permet de déceler plus facilement ou plus rapidement
un TDAH? Parce que je comprends qu'il peut y avoir tous les tests
psychosociaux, les rencontres, etc., mais l'aspect génétique, il n'y a pas un
côté un peu plus mécanique à ça?
Mme Lévesque (Johanne) :
Bien, en fait, à ma connaissance, il n'y a aucun test génétique, en ce moment,
qui existe pour pouvoir dépister ça. Nous, en ce moment, on travaille à
développer, via l'intelligence artificielle, l'identification, justement,
précoce via l'activité neuroélectrique des cerveaux, que j'ai en ma possession,
pour pouvoir le prédire. Mais on n'est pas rendus là. On en a encore, moi, je
vous dirais, peut-être pour un an.
M. Gaudreault : Ah! c'est
à côté. Oui, oui, oui.
Mme Lévesque (Johanne) :
Ça fait que ce n'est pas si loin que ça, mais c'est... oui. Mais ce n'est
pas... on ne voit pas l'aspect génétique, mais on pourrait arriver, avec un
électroencéphalogramme, à dire : Opelaïe! Cet enfant-là est à risque à 92 %
de présenter des symptômes d'un TDAH.
M. Gaudreault : O.K. Il
me reste combien de temps?
Le Président (M. Provençal)
: 30 secondes.
M. Gaudreault : Bon. 30 secondes.
Juste pour vous faire une recommandation d'un roman que vous avez peut-être lu,
Royal, de Jean-Philippe Baril Guérard...
Mme Lévesque (Johanne) :
Non.
M. Gaudreault : ...qui
parle, justement, des étudiants en droit, qui ont énormément de pression à
l'université pour la course aux stages et qui prennent des...
Mme Lévesque (Johanne) :
Des psychostimulants.
M. Gaudreault : ...des
psychostimulants, effectivement, pour être capables de bien performer pour la
course aux stages. Alors, ça me fait beaucoup penser à ça. Alors, c'est en
train de contaminer notre littérature également, ce qui peut permettre de
sensibiliser.
Mme Lévesque (Johanne) :
Oui.
M. Gaudreault : Alors,
voilà. Merci.
Mme Lévesque (Johanne) :
Bienvenue.
Le Président (M. Provençal)
:Merci beaucoup, Dre Lévesque, pour
votre contribution aux travaux de la commission.
Je vais demander à l'autre... suspendre
les travaux quelques instants pour permettre au prochain groupe de nous
rencontrer.
(Suspension de la séance à 17 h 14)
(Reprise à 17 h 16)
Le Président (M. Provençal)
: Nous allons terminer notre séance de travail avec les représentants
du Mouvement Jeunes et santé mentale. Je vous rappelle que vous disposez de
10 minutes pour votre exposé, puis nous procéderons à la période d'échange
avec les membres de la commission. Je vous invite à vous présenter et à
commencer votre exposé. À vous la parole.
Mouvement Jeunes et santé mentale
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Merci.
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
Bonjour. Mon nom est Stéphanie Benoit-Huneault. Je suis coordinatrice du Mouvement
Jeunes et santé mentale.
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Je m'appelle Anne-Marie Boucher. Je suis responsable des communications et de
l'action sociopolitique au Regroupement des ressources alternatives en santé
mentale du Québec et membre du comité de coordination du Mouvement Jeunes et
santé mentale.
On voulait, d'entrée de jeu, remercier les
membres de la Commission de la santé et des services sociaux de nous entendre
aujourd'hui. On est très honorées d'être là. On veut aussi remercier les jeunes
qui militent au mouvement depuis ses tout débuts, en 2016, qui ont livré aussi
leurs paroles pour qu'on l'amène en haut lieu politique. Donc, vraiment, on
remercie chacun et chacune de ces personnes qui ont contribué.
On aurait aimé qu'un jeune ou qu'une jeune
soit présent avec nous aujourd'hui, donc, quelqu'un qui milite avec nous, mais,
compte tenu des délais de convocation, ça a été difficile de faire une
présentation qui aurait été satisfaisante et pleine de sens pour nous. Donc, on
a préféré venir sous cette forme. Donc, bien désolées de ne pas pouvoir les entendre
directement aujourd'hui.
Pour ce qui est du Mouvement Jeunes et
santé mentale, en bref, c'est un mouvement qui existe depuis 2016, qui a été
lancé suite à une grande consultation qui a été menée un peu partout au Québec.
Ce qu'on souhaitait, c'était de comprendre, en fait, ce qui se jouait quant à
la hausse accrue des diagnostics en santé mentale, en général, chez les jeunes,
aussi, la hausse accrue de la prise de médicaments. Et cette préoccupation-là,
en fait, était née suite à un travail conjoint, si on veut, autour du rapport,
en 2009, de la commission de l'éthique sur les sciences et la technologie, qui
traitait de l'usage élargi des psychotropes. On parlait de l'usage de
performance tout à l'heure. Ça faisait partie de ce rapport-là, mais aussi l'usage
auprès des jeunes.
Donc, depuis 2016, on a un mouvement pour,
par et avec les jeunes, qui travaille sur différents champs, sur différents
dossiers. On n'est pas des spécialistes de la question du TDAH à proprement
parler parce qu'on ne travaille pas nécessairement avec les diagnostics, mais
plus largement avec les enjeux de la santé mentale. On travaille évidemment sur
l'enjeu de la médicalisation, des difficultés vécues par les jeunes. Et des
thèmes sur lesquels on travaille fortement, c'est l'enjeu des droits en santé
mentale et aussi les conditions de vie qui sont à la racine souvent des
difficultés en santé mentale.
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
Donc, de prime à bord, on aimerait ça, un peu, définir ce qu'on entend par
médicalisation, qui a tendance à être confondue des fois avec le fait de donner
des médicaments, qui est la médicamentation, deux choses. La médicalisation, en
fait, c'est vraiment le fait d'apposer un diagnostic sur un comportement ou
encore un événement, en fait, qui ne relève pas du champ médical. On pourrait
parler, entre autres, de la souffrance liée à un deuil. Bref, en somme, là, la
médicalisation, c'est vraiment le fait de détourner l'attention de l'environnement
social vers l'individu, en gros.
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Nous, donc, en 2016, c'était vraiment une collecte d'information assez large
sur la santé mentale, mais, pour les besoins de cette commission-ci, à
l'été 2019, on a mené un coup de sonde par des questionnaires en ligne
pour essayer de recueillir une parole plus diversifiée sur l'enjeu
spécifiquement du TDAH. Donc, d'abord, on aimerait vous ramener quelques enjeux
qui sont ressortis de ce coup de sonde là qui a été mené auprès de jeunes
jusqu'à l'âge de 30 ans en lien avec le diagnostic et la médication du
TDAH.
Donc, premier aspect qui est ressorti de
cette consultation-là, c'est que le diagnostic de TDAH, il s'inscrit dans un
contexte social spécifique. On a parlé, tout à l'heure, de pression de
performance, c'est une pression que les jeunes subissent à l'école dans leur
milieu, mais les adolescents, les jeunes adultes et les parents aussi, hein?
Donc, il faut garder vraiment un oeil large sur tous les milieux dans lesquels
les jeunes évoluent.
• (17 h 20) •
Je vous cite un des témoignages qu'on a
reçu : «C'est un retour à l'école, à 28 ans, qui m'a amené à aller
chercher le diagnostic. Avec le boulot à temps plein, les cours du soir,
j'étais incapable de porter attention pendant les heures de classe. Aussi, le
seul temps que j'avais pour faire mes lectures et travaux était pendant les
week-ends. Il m'était littéralement impossible de rester concentré sur la tâche
que je devais faire.» Ça, on a reçu plusieurs témoignages qui <parlaient
de la pression puis la difficulté, en fait, à atteindre un niveau de...
Mme Boucher (Anne-Marie)T :
...chercher le diagnostic : «Avec le boulot à temps plein et les cours du
soir, j'étais incapable de porter attention pendant les heures de classe.
Aussi, le seul temps que j'avais pour faire mes lectures et travaux était
pendant les
week-ends. Il m'était
littéralement
impossible
de rester concentré sur la tâche que je devais faire.» Ça, on a reçu plusieurs
témoignages qui >parlaient de la pression puis la difficulté, en fait, à
atteindre un niveau de réussite ou un niveau de performance suffisant aux yeux
de la personne. Il y a vraiment un lien fort entre le diagnostic de TDAH, je
pense que vous l'avez vu depuis le début de la commission, et le milieu
scolaire, parce que le milieu scolaire, c'est vraiment un révélateur, des fois,
c'est un déclencheur de difficulté et d'anxiété. C'est vraiment en lien avec la
réussite et l'échec scolaire, mais c'est aussi en lien, parfois, avec de
l'intimidation. C'est ressorti beaucoup dans notre coup de sonde, il y avait
plusieurs jeunes qui disaient vivre de l'intimidation à l'école, et c'est suite
à ça qu'ils ont reçu leur diagnostic de TDAH. Donc, quand on parle de
diagnostic erroné, parfois, ça peut être une explication.
Finalement, bien, ce qu'on a vu aussi dans
notre coup de sonde, c'est que, dans certains témoignages, l'école jouait un
rôle dans la médicalisation des difficultés, c'est-à-dire qu'il y avait une
pression de la part du milieu scolaire, que ce soit des enseignants ou de la
direction, pour qu'un enfant prenne une médication. Je cite : «L'école a
forcé mes parents et leur a dit que, si je n'étais pas diagnostiqué, elle
refusait de me reprendre.»
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
Le deuxième aspect qui est vraiment ressorti au niveau du sondage, c'est le
mode d'attribution du diagnostic, c'est-à-dire qu'il est très variable,
c'est-à-dire une variété de professionnels qui peuvent être impliqués, pas
toujours les mêmes, pas toujours des neuropsychologues, les temps de
consultation qui varient de cinq minutes à trois rencontres d'une heure, où on
prend vraiment le temps avec le jeune de parler de son parcours de vie et ce
genre de trucs là.
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Et ça, le moment du diagnostic et de la prescription, ça ressortait beaucoup,
parce que les jeunes, dans notre coup de sonde, nous disaient... En général, ce
qui était rassurant pour nous, c'est qu'ils ont reçu de l'information, hein?
Ils recevaient le diagnostic, ils avaient un peu d'information sur le
diagnostic, de l'information sur leur médication. Par contre, ce qu'on a eu
dans notre consultation, c'est que ce n'est pas tous les jeunes qui avaient de
l'information sur les effets secondaires de la médication. Donc, ça, parfois,
c'était manquant. On se rend compte qu'il y a des jeunes qui prennent la
médication sans vraiment savoir ce qu'ils prennent ni ce que ça peut causer.
Presque tous les répondants de notre coup
de sonde ont fait état d'effets secondaires qui étaient nuisibles, de modérés à
plus graves. Donc, on parle vraiment de perte d'appétit, impulsivité et
troubles du sommeil. Il y a plusieurs répondants qui ont nommé une perte du
sentiment d'être soi. Donc, ce n'est pas à négliger, le sens puis le sentiment
de connexion face à nos émotions. Malgré ces effets secondaires là, qui ont été
nommés par presque tous les répondants, la plupart disaient quand même que c'était
contrebalancé par les effets positifs. Donc, évidemment, ce n'était pas tout
noir, ils se disaient : Il y a plus d'effets favorables que défavorables,
donc je poursuis ma médication. Par contre, il y avait quand même plusieurs
répondants qui parlaient que les effets secondaires étaient plus nuisibles que
les symptômes pour lesquels ils prenaient initialement la médication, et ça, ça
nous interroge quant au suivi médical qui est offert à ces jeunes-là qui vivent
des effets secondaires néfastes importants.
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
Donc, en ce sens-là, au regard de ces constats-là, pour nous, l'enjeu du TDAH
est vraiment indissociable, pour nous, d'une réflexion plus large sur la question
de la médicalisation, la médicalisation des problèmes sociaux vécus par les
jeunes, évidemment. On a parlé, tantôt, d'une consultation qu'on avait menée en
2016 avec 50 organisations, 160 jeunes, 150 intervenants. Je
souhaite vous présenter ici des grandes lignes de ce qu'on nous a communiqué.
Dans un premier temps, les jeunes nous
disent : Le diagnostic tombe trop vite. Le diagnostic a un effet
identitaire qu'on ne doit pas négliger. On parle ici de stigmatisation,
d'étiquetage. La médication est parfois la seule réponse proposée, puis elle
est présentée comme la vraie solution rapide, accessible et efficace. Les
jeunes n'ont pas toujours toute l'information, que ça soit sur le traitement,
les effets, les alternatives possibles, mais aussi sur les interactions entre
la médication et la consommation de drogue et d'alcool. Et, finalement, les
effets secondaires — justement, madame nous l'a nommée précédemment :
la médication peut être incapacitante, voire même dépasser les effets
bénéfiques attendus.
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Ce qu'on avait reçu aussi dans notre coup de sonde en 2016, donc cette vaste
consultation là qu'on a menée à l'échelle du Québec, c'est qu'il y avait plusieurs
jeunes qui disaient qu'ils avaient le sentiment puis la sensation que les médicaments
agissaient, oui, sur des symptômes reliés à un état, mais qu'on ne s'adressait
vraiment pas aux causes, aux conditions de vie dans lesquelles ils évoluaient.
Ça fait qu'il est vraiment question d'élargir le regard. Je vous cite :
«Des fois aussi, ce n'est pas juste les neurones qui ne fonctionnent pas comme
il faut, il y a une raison pourquoi les neurones ne fonctionnent pas comme il
faut. Des fois, c'est que nos parents, ils ont leurs problèmes, eux autres
aussi, puis des fois, nos problèmes, bien, ça vient de là.»
Il y avait aussi l'aspect de l'enjeu de
l'accès aux services psychosociaux, l'attente très longue. On le sait, on n'a
pas suffisamment de professionnels dans les écoles, les services ne répondent
pas toujours aux besoins des jeunes. Il y a des jeunes qui nous ont dit, par
exemple, qu'il avait réussi à avoir un psy, mais très vite il a été dirigé vers
des thérapies de groupe, et ce n'était pas quelque chose qui lui convenait.
Donc, vraiment, l'enjeu d'écouter les besoins des jeunes était toujours central
dans ce qu'on recevait.
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
Donc, ce qu'on souhaite vous transmettre aujourd'hui en termes de
recommandations, c'est quatre grandes recommandations qui touchent, oui,
évidemment, l'enjeu d'aujourd'hui sur la question du TDAH, mais aussi plus
largement la question qui est en lien avec la médicalisation.
D'abord, il faut vraiment un accès qui est
gratuit à la psychothérapie, à l'accompagnement, aux alternatives, de manière à
ce que les jeunes aient vraiment un réel choix face à ces différentes options
là, pas juste les jeunes, mais les familles aussi, et ça, c'est à la fois dans
le réseau de la santé, dans le milieu de l'éducation, mais aussi dans le milieu
communautaire, et ce, sans nécessiter d'avoir un diagnostic. Justement, en
cette journée, là, de mise à jour économique, là, on souhaite vraiment mettre
de l'avant l'importance d'un financement accru des <services publics
et...
Mme Benoit-Huneault
(Stéphanie)T :
...les jeunes aient
vraiment un réel
choix face à ces différentes options-là, pas juste les jeunes, mais les
familles aussi, et ça, c'est à la fois dans le
réseau de la santé, dans
le milieu de
l'éducation, mais aussi dans le milieu
communautaire,
et ce, sans nécessiter d'avoir un diagnostic.
Justement, en cette
journée de mise à jour
économique, là, on souhaite vraiment mettre de
l'avant l'importance d'un financement accru des >services publics et
communautaires pour que les citoyens aient vraiment accès aux services auxquels
ils ont droit.
Notre deuxième revendication, c'est
vraiment de s'assurer d'une participation, en fait, égalitaire des jeunes sur
les questions qui les concernent. Qu'est-ce que ça veut dire? Ça veut dire
d'être à l'écoute de leurs besoins réellement, de leurs aspirations, de leur
compréhension des difficultés qu'ils vivent, mais aussi de leurs idées qu'ils
transportent aussi avec eux pour vraiment transformer les milieux dans lesquels
ils évoluent, mais aussi les politiques qui s'adressent à eux.
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Troisième revendication qu'on porte depuis le début, c'est vraiment de faire en
sorte que l'exercice du droit à l'information, à la participation, au droit à
l'accompagnement et au consentement aux soins libre et éclairé soit respecté et
garanti pour tous les traitements en santé mentale, y compris dans le cas du
TDAH. Par exemple, les effets secondaires doivent être connus et expliqués. La
personne doit pouvoir participer pleinement aussi au suivi médical en étant
entendue, et ce, même quand il fait état d'effets secondaires qui sont
nuisibles à sa qualité de vie.
Finalement, on recommande aujourd'hui
qu'une commission parlementaire plus large soit mise sur pied, de manière à
traiter l'enjeu de la médicalisation, que ce soit chez les jeunes, mais aussi
chez les adultes et les aînés. Il faudra en faire une opportunité pour définir
des solutions avec l'ensemble des acteurs concernés, y compris les jeunes, et
ça, pour le détail, dans notre mémoire, pages 22, 23, vous avec le détail
de ça. On croit qu'on devrait examiner la médicalisation, ses causes et ses
effets, aussi constater que la médicalisation vient gommer les conditions de
vie, les conditions sociales dans lesquelles évolue une personne, parce qu'on
se concentre, de façon très limitée, et notre regard et notre intervention sur
l'individu et sa biologie. Donc, il nous manque une grande partie du tableau.
Le Président (M. Provençal)
: Nous allons débuter la période d'échange avec le groupe du
gouvernement.
Mme Picard :
...permettrait de terminer ses quelques phrases, si vous lui permettez.
Le Président (M. Provençal)
:Oui. Oui, oui. Excusez.
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
On en était à notre conclusion.
Le Président (M. Provençal)
: Allez-y. Excusez-moi.
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
Ah! sans problème. Sans problème. Donc, dans le fond, pour nous, en
élargissant, là, vraiment la réflexion sur la question de la médicalisation de
manière générale, il ne s'agit évidemment pas de nier ici les difficultés
vécues par les jeunes et leur entourage ni même l'apport de la médication que
ça a pour certains jeunes. C'est plutôt, en fait, l'occasion de nous demander
collectivement : Comment on répond actuellement aux difficultés vécues par
les jeunes? Est-ce que ces réponses-là sont adéquates? Comment on peut mieux
faire face à ces problématiques-là dans le respect du vécu des personnes, du
vécu des jeunes, des... oui, c'est ça.
Pour nous, il faut appeler vraiment une
réponse plus large, plus généreuse, qui tiendrait compte des difficultés
sociales, économiques vécues par les jeunes. Il faut s'attaquer, donc, aussi
aux conditions de vie des personnes vivant des difficultés plutôt que de
proposer d'abord et parfois seulement juste le médicament comme solution,
parfois vu comme unique ou magique.
Donc, il faut vraiment procéder à un coup
de barre, de manière à permettre à chaque personne d'exercer ses droits et
d'avoir accès à l'accompagnement et à l'aide dont elle a réellement besoin,
qu'elle nomme qu'elle a besoin. Donc, c'est à la fois un enjeu de santé, mais
c'est aussi un enjeu de justice.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup. Nous pouvons, donc, débuter notre période
d'échange avec le député de Richmond.
M.
Bachand
:
Il y a beaucoup de stock dans ça, hein? Honnêtement, là. J'ai fait une lecture
en diagonale, il y a beaucoup, beaucoup de choses, mais, avec votre accord,
cependant, je vais essayer de ramener ça au mandat qu'on a à la commission
aujourd'hui.
Alors, dans l'expérience et l'expertise
que vous avez au niveau des jeunes, par rapport... et aux chiffres qu'on
connaît maintenant, là, que le Québec est le champion au niveau de la
médicalisation, le Saguenay est le champion au Québec, justement, pour ça
aussi, malheureusement, alors donc qu'est-ce que les jeunes vous disent? Parce
qu'on parle de stigmatisation, et tout ça, mais les jeunes, ils se disent quoi?
Ils disent : J'aime mieux prendre le médicament puis mieux vivre
socialement ou au niveau de la famille? Parce qu'il y a une pression. On
connaît tous des familles qui disent : Mon enfant, là... qui disent au
médecin, ou au thérapeute, ou à un neuropsychologue : Ce n'est pas vous
qui vivez avec mon enfant à tous les jours. Hein?
La quotidienneté des parents fait en sorte
qu'il y a une pression directe ou indirecte par rapport à la personne capable
de faire le diagnostic. Mais les jeunes vous disent quoi par rapport à ça? Parce
qu'on a vraiment un problème. S'il y a une commission aujourd'hui... puis je le
dis depuis le début de la commission, si on a une commission là-dessus, c'est
parce qu'il y a un problème. Il s'agit de le comprendre, de le définir et
d'apporter des éléments de solution, mais... surtout, vous êtes en contact avec
les jeunes. Par rapport à ça, qu'est-ce qu'ils vous disent spécialement,
spécifiquement sur le problème ici?
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Sur l'enjeu spécifique du TDAH, nous, ce qu'on entend, en général, en santé
mentale ou quand on vit des difficultés, c'est sûr que les gens souhaitent
aller bien, ils souhaitent bien s'insérer dans les milieux sociaux, parce qu'on
est des animaux sociaux, on a besoin de se sentir bien intégrés dans nos
milieux, on a besoin de sentir qu'on réussit, qu'on a notre place dans les
milieux dans lesquels on est. Ça fait que c'est sûr qu'en général les jeunes
nous disent qu'ils aimeraient ça que ça se passe bien, ils aimeraient ça
réussir, surtout qu'on est dans un contexte où les écoles sont de plus en plus
compétitives, et ça, tant au primaire qu'au secondaire.
• (17 h 30) •
On parlait des projets particuliers
tantôt, évidemment, il y a des effets positifs à ça, mais ça crée aussi un
effet de compétition scolaire, où il y a une pression <sur les élèves...
>
17 h 30 (version révisée)
< Mme Boucher (Anne-Marie)T :
...qu'en général les jeunes nous disent qu'ils aimeraient ça que ça se passe
bien, ils aimeraient ça réussir, surtout qu'on est dans un contexte où les
écoles sont
de plus en plus compétitives, et ça, tant au primaire qu'au
secondaire. On parlait des projets particuliers tantôt. É
videmment,
il
y a des effets positifs à ça, mais ça crée aussi un effet de
compétition
scolaire où il y a une pression >sur les élèves à performer, parce que,
dès le secondaire, il faut être admis dans les bonnes écoles pour ensuite être
admis dans les bons programmes, et ainsi de suite.
Donc, c'est sûr que les jeunes ressentent
cette pression-là. Et ils veulent, évidemment, être les plus performants, les
mieux insérés possibles. En même temps, il y a une résistance de certains
jeunes qui se disent : Il y a cette norme-là de performance qui est très
étroite. Mais, nous, c'est comme faire un entrer un cercle dans un rond... un
cercle dans un carré, pardon… ça, ça rentrerait… un cercle dans un carré.
Quelle image parlante! Un cercle dans un rond. Mais ils disent : Vraiment,
ce qu'on sent, c'est qu'on est différents. On est tous différents, en fait.
Puis la norme de ce qui est reconnu comme étant non pathologique est de plus en
plus étroite. Et ça, les jeunes, ils nous disent qu'ils se sentent à l'étroit
là-dedans. Ils aimeraient qu'on puisse valoriser différentes façons d'être au
monde, différentes façons d'être à l'école aussi et différentes capacités. Il y
a des personnes qui sont plus manuelles que d'autres. Pourquoi est-ce qu'il y a
des parcours qui sont moins valorisés et qui se terminent en bout de route par
des salaires aussi qui sont très, très bas et qui font en sorte qu'on a de la
misère à faire vivre notre famille ou nous-mêmes? Donc, évidemment, les jeunes,
ils ne sont pas dupes. Ils savent qu'on est dans une société où il y a de la
compétition et des inégalités. Et ils espèrent s'insérer le mieux possible.
Mais, en même temps, il y a cette pression-là, de répondre à la norme.
M.
Bachand
:
Parce qu'il va avoir des cas très lourds qui méritent un médicament. Vous en
connaissez. C'est clair. Mais il y a d'autres façons de le faire. On a
l'impression, aujourd'hui, parce que... Je vais être honnête avec vous. Moi, il
n'y a pas de parent qui est venu me voir pour me dire que ça n'a pas de bon
sens, le nombre de diagnostics qu'on fait au Québec. Des parents, il n'y en a
pas, là, hein? C'est des experts comme vous et des groupes comme vous qui
viennent dire aux politiciens, aux politiciennes : Il y a un problème.
Mais on ne voit pas de... Il n'y a pas 500 000 personnes dans la rue
pour dire qu'on a un problème parce qu'on est deux fois plus diagnostiqués puis
deux fois plus de médicaments au Québec. Est-ce qu'on est en train de banaliser
en quelque part?
Mme Boucher (Anne-Marie) :
De banaliser?
M.
Bachand
:
Banaliser le fait que c'est correct, de prendre ces médicaments-là. En tout
cas... Je sens qu'il y a une problématique réelle, mais, à ce moment-là...
Parce que, si les parents, entre autres, mais c'est tout le monde, là, moi
inclus, tout... Si on se dit : Bah! Vaux mieux ça qu'autre chose… Quelle
est la motivation d'aller chercher autre chose, justement, qu'une médication
éventuellement? C'est ça. Ma crainte, c'est que je ne sens pas un mouvement
populaire très fort, à ce stade-ci, du moins.
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
Bien, je fait, je pense que... Peut-être que des parents se sentent peut-être
rassurés par ce diagnostic-là. Mais, en même temps, je pense que les jeunes
nous parlent aussi des effets que ça a sur eux, tu sais. Puis non seulement ça,
mais on parlait tantôt de la question de l'accessibilité des services. Par
exemple, l'intervenante avant nous parlait de quand elle reçoit des gens en
cabinet. Les évaluations, on parlait tantôt, ça coûte entre 2 000 $,
2 500 $. Quand tu n'as pas accès, quand tu n'as pas le
2 000 $, 2 500 $, et que tu es devant ton médecin de
famille, et que tu dis : Je vis une problématique, mais que, dans le fond,
ta problématique, c'est peut-être qu'il y a des problèmes qui se passent au
niveau de ta famille, mais que... puis qu'il n'y a rien qui est mis en place.
Il n'y a pas de service auquel tu as accès, ou on te dit : Bien, attends
dans un an, deux ans, trois ans. Bien, c'est dommage, parce que tu n'as pas d'argent.
Si tu avais de l'argent, je te dirais : Voici une référence et va
consulter. Mais la réalité est qu'en ce moment les services ne sont pas
accessibles.
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Il y a plusieurs familles...
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
C'est ça, tu sais. On s'entend. Puis ce n'est pas parce que les gens ne veulent
pas les services, au contraire. Les gens veulent les services. Les gens veulent
aller mieux comme... Les jeunes veulent aller mieux, tu sais. Donc, je pense
qu'à ce niveau-là il faut vraiment écouter... Ça, ça a été vraiment quelque
chose qui est ressorti très, très fortement aussi de ce que les jeunes
voulaient, entre autres, particulièrement, des jeunes qui... Puis, des fois, c'est
des problématiques même au niveau de l'accès de base. En santé, par exemple, on
a discuté avec des jeunes, tu sais, qui ont vécu ou qui vivent des situations
d'itinérance. Avoir accès à un médecin de famille, ce n'est pas quelque chose
qui est facile ou de... quand tu es constamment en déplacement, tu sais. De
dire : Oui, je vais te donner ma référence et voici mon numéro de
téléphone… Tu es constamment en déplacement, ce n'est pas quelque chose qui est
nécessairement facile, tu sais.
Donc, il y a des enjeux sociaux qui
traversent tout ça. Il y a des services qui ne sont pas accessibles. Puis je
pense que ce qu'on essaie aujourd'hui de faire, c'est vraiment de vous
transmettre cette parole de jeune là et puis de faire... Il faut agir au regard
de pas seulement ce que les parents ou les experts disent, mais en fait,
principalement, ce que les jeunes disent. Ils disent : On vit des
problématiques et on veut.
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Peut-être que, sur la question de la banalisation, vous avez raison de dire
qu'il y a une culture biomédicale qui est très présente dans notre imaginaire,
au sens où, avant, on disait : Ah! lui, c'est un tannant. Lui, c'est un
petit... C'est un petit snoreau. Mais là, lui, c'est un hyperactif. On a plus
tendance à réfléchir les choses, les divergences de comportements en termes de
diagnostic. Puis ça, ça banalise peut-être un peu l'octroi de diagnostics à des
enfants puis la prise d'une médication.
Et les parents, je pense que, s'ils
avaient accès à des alternatives à la médication qui seraient gratuites,
accessibles <rapidement, je suis certaine que, pas tous les parents, mais
plusieurs parents opteraient pour ces alternatives-là plutôt que, pour la
médication, s'il y avait des aménagements qui étaient plus facilement...
Mme Boucher (Anne-Marie)T :
...l'octroi de diagnostics à des enfants puis la prise d'une médication. Et,
les parents, je pense que, s'ils avaient accès à des alternatives à la
médication, qui seraient gratuites, accessibles >rapidement, je suis
certaine que... pas tous les parents, mais plusieurs parents opteraient pour
ces alternatives-là plutôt que pour la médication, s'il y avait des
aménagements qui étaient plus facilement installés dans les écoles aussi. Ça
fait que c'est... Il y a cet attrait-là, je crois, pour d'autres réponses.
M.
Bachand
:
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Provençal)
:Mme la députée de Soulanges.
Mme Picard : J'aimerais
vous entendre surtout... Vous avez parlé de la pression pour être dans les
bonnes écoles. J'imagine que, dans le temps de mon collègue, il y avait aussi
une certaine pression pour aller dans les bonnes écoles. Qu'est-ce que vous
pensez qui a changé de ces années-ci... le clash des générations, là? Il est
où, le lien?
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Là, je mets mon chapeau de sociologue de l'éducation. Ce qui a changé... En
fait, l'école québécoise a changé énormément depuis les années 80‑90. On
assiste vraiment à une montée et de la concurrence du privé et de la
concurrence des établissements publics entre eux. C'est quelque chose qui a
changé en termes de culture scolaire. Les syndicats le dénoncent depuis des
années, les groupes de parents le dénoncent. Il y a un changement de culture
qui est à l'oeuvre, puis on dirait que là c'est...
C'est quand même dans l'arrière-plan de
l'enjeu du TDAH. C'est que la classe régulière, où les jeunes qui ont plus de
difficultés face à l'école se retrouvent généralement, elle a été écrémée de
40 % à 50 % des élèves qui ont le plus de facilité, et ça, ça rajoute
une pression sur la salle de classe, ça rajoute une pression sur l'enseignante
ou l'enseignant et ça crée une différence en termes de réussite scolaire ou de
décrochage scolaire. Ça fait aussi partie de l'arrière-plan de l'enjeu de
l'échec ou de la réussite, ça fait que c'est... Je dirais ça, en bref.
Mme Picard : Moi, j'ai
entendu aussi certains... J'imagine que vous l'avez déjà entendu, là, qu'un enfant
qui ne se fait pas médicamenter, quand il en aurait peut-être de besoin pour
son TDAH, s'automédicamente avec soit du cannabis ou d'autres drogues. Donc,
ça, ça peut ajouter aussi peut-être une pression aux parents, de dire : Ah!
mon Dieu! Je vais médicamenter mon enfant parce que je ne veux pas qu'il soit
intoxiqué plus tard. J'aimerais savoir, selon ce que vous avez dans votre
entourage, là, votre organisme, qu'est-ce que vous en pensez.
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
Les jeunes ne nous ont pas parlé de cette problématique-là. En fait, ce que les
jeunes souhaiteraient, c'est d'avoir des renseignements. Est-ce qu'il y a des
interactions... Advenant le cas où on me prescrit, par exemple, du Concerta, est-ce
qu'il y a des interactions qui pourraient nuire si, disons, je prends du
cannabis ou autre? Ce qu'ils veulent, c'est l'information.
À ce moment-là, un coup qu'ils ont
l'information, on doit faire confiance à leur jugement, puis, en fait, ils
veulent qu'on leur fasse confiance. Ils veulent l'information. Ils sont comme :
Bien là, je ne veux pas... je veux... On avait l'idée de... Je veux aller bien,
là, mais, qu'on me donne l'information en conséquence, là.
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Mais, tu sais, je pense, il ne faut pas tomber dans un piège, de dire :
Bien, il faut médicamenter pour éviter l'automédicamentation. Je trouve que
l'exposé juste avant le nôtre était très convaincant, à savoir qu'il existe des
alternatives sans effet secondaire nuisible, qui peuvent aider à améliorer la
plasticité du cerveau ou à développer des stratégies pour gérer la question
l'attention, justement.
Donc, c'est de dire : Oui, il faut
qu'il y ait une intervention et un accompagnement qui soient plus généreux dans
les écoles pour que le jeune ne se sente pas constamment défaillant et pas
suffisant face à l'école. Ça fait que c'est sûr que, oui, il y a une nécessité
d'accompagnement mais pas nécessairement seulement la médication.
Le Président (M. Provençal)
: M. le député de Dubuc.
M. Tremblay : Merci, M.
le Président. J'ai une question qui me vient à l'esprit. On parle de revoir le
modèle des écoles. Sans nommer de nom, sur les intentions qui se présentent au
niveau de la société, de revoir... Est-ce que ce nouveau modèle d'école là
n'est pas, selon votre avis, plus cosmétique? Est-ce qu'il tient compte de
cette réalité-là qui nous saute aux yeux, là, ou est-ce que, finalement, le
fait d'avoir une... je ne dirai pas une cuisine mais un bistro, des
aménagements x, y... Pensez-vous qu'on a intégré tout ça dans la démarche qui
est déjà en mouvement?
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
Bien, je dirais... Je vous référerais, en fait, au Conseil supérieur de
l'éducation, qui avait écrit un avis sur... le titre m'échappe...
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Une école riche de tous ses élèves.
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
Voilà, merci bien.... qui parlait, justement, de comment on inclut les jeunes,
entre autres, qui ont... qui sont diagnostiqués TDA, TDAH, puis de comment on
doit... comment il y a des mesures qui peuvent être faites pour, par exemple,
disons, un élève TDAH dans la classe, mais comment ça bénéficie, en fait, à
l'ensemble des élèves, ces mesures-là.
Non seulement ça, mais, dans leur avis,
ils disaient aussi : Il faut faire attention aussi parce que, dans le
milieu scolaire, il y a cette tendance à la médicalisation, justement, parce
que le modèle, il est ça, en classe, ça se passe de cette manière-là, c'est
comme ça qu'on fonctionne, puis, voilà, il faut que tu rentres dans ce
modèle-là, justement, le cercle dans le cercle...
• (17 h 40) •
Une voix
: Le cercle
dans le cercle.
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
...le cercle dans le cercle. Donc, je crois que c'est <possible, même à
l'intérieur des... sans changer nécessairement, là...
Une voix
: Les
bâtiments, là.
Mme Benoit-Huneault
(Stéphanie)T :
Oui...
Mme Benoit-Huneault
(Stéphanie)T :
...médicalisation,
justement, parce que
le modèle, il est ça, en classe, ça se passe de cette manière-là, c'est comme
ça qu'on fonctionne, puis, voilà, il faut que tu rentres dans ce modèle-là
,
justement, le cercle dans le cercle...
Une voix
: Le cercle
dans le cercle.
Mme Benoit-Huneault
(Stéphanie)T :
...dans le cercle dans le cercle. Donc, je crois
que c'est >possible, même à l'intérieur des... sans changer nécessairement,
là...
Une voix
: Les
bâtiments, là.
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
Oui, c'est ça, là. Les bâtiments, je pense que c'est une autre question, mais
l'aménagement à même la formule dans la classe, où, des fois, juste les
affiches dans les salles qui peuvent, des fois, peut-être... quand il y a beaucoup
de stimuli, là, ce genre de truc là, là, ou juste de... O.K., bon, ça fait une
heure qu'on est assis, on va bouger un peu, ou on va présenter les choses de
manière plus interactive, on va travailler en équipe ou on change en fonction
des besoins qui sont présents au sein des élèves de la classe en écoutant ce
que les élèves nous demandent, qui ont besoin aussi, tu sais.
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Ça fait que ce n'est peut-être pas tant, en fait, dans le type de bâtiment
qu'ils vont être élaborés. Mais, par exemple, des mesures comme des cantines
scolaires, ça peut faire une différence. Si les élèves ont un bon repas,
justement, bien protéiné dans leur ventre versus un lunch très sucré, peut-être
que les cantines publiques auraient un impact dans les écoles. Le fait que les
profs, oui, sont sensibilisés au fait de prendre des moments, peut-être, de
méditation, de yoga, c'est sûr, c'est des mesures qu'on sait qui fonctionnent,
puis le fait d'avoir mangé, d'avoir bien dormi puis d'avoir des espaces pour
ventiler pendant la journée, c'est la base.
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
…il y a malheureusement encore beaucoup d'élèves qui vont à l'école et qui
n'ont pas mangé parce qu'on est dans... par exemple, on est dans un contexte
familial où les conditions socioéconomiques ne sont vraiment pas enviables. C'est
une réalité encore aujourd'hui.
M. Tremblay : On a parlé
aussi de l'intervention de la famille, de l'intervention du milieu scolaire, un
réseau d'intervention, finalement, même au niveau de la santé. Est-ce qu'on
pourrait dire qu'il serait à propos de... Si vous aviez à prioriser... qui
devrait recevoir davantage d'outils, ou si ce ne serait pas plutôt en simultané,
ou on doit le voir de façon générale ensemble pour améliorer la situation?
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
…penser qu'on va travailler en silo et qu'on va régler le problème. Je pense
qu'il faut travailler de manière concertée dans l'ensemble de ces milieux-là, c'est-à-dire,
ces problèmes-là sont dans ces différents environnements là et on doit agir
dessus, on doit agir également non seulement... on doit agir de manière
générale sur les conditions de vie des gens, c'est-à-dire sur les questions
d'inégalités sociales, sur les questions, justement, d'aménagement dans les
classes, comme on parlait tantôt.
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Puis, peut-être, en termes de priorisation, c'est sûr, quand on parle des
enfants, bien, évidemment, c'est des enfants qui sont dans des familles, puis
on a tendance, des fois, à dire : Ah! bien, il faut mieux sensibiliser les
parents. C'est sûr que... Disons, comme moi, présentement, moi, j'ai un fils de
11 ans, j'ai une petite de trois ans. Quand je travaille peu, j'ai des
semaines plus allégées, tout ça, j'ai le temps de faire mon épicerie, tout ça,
bien, je suis plus disponible à mes enfants pour avoir des moments de qualité,
lire, aller marcher, aller courir au parc, mais, si j'ai du travail jusque-là, bien,
je vais dire aux enfants : Bon, bien, faites votre écran, là, moi, il faut
que je travaille parce que j'ai une commission parlementaire dans deux jours,
hein? Non, mais, il faut le voir... Quand on parle d'une approche plus
systémique ou globale, c'est aussi de se dire : Bien, parler du TDAH, c'est
aussi des enjeux de conciliation travail-famille, de s'assurer que les familles
aient suffisamment… lorsque les deux parents travaillent pour pouvoir peut-être
ne pas travailler à temps plein les deux, mais penser à des horaires aménagés.
Puis ça, c'est du temps de qualité qu'on se dégage pour être avec nos enfants
puis, justement, pouvoir aller marcher, cuisiner des repas de qualité avec des
protéines, et tout ça. Et tout ça, bien, ça a un impact.
Donc, une approche systémique, là, on a
l'air d'être très... on va vous révolutionner le Québec en son entier, mais,
quand on parle de santé mentale, c'est directement lié aux déterminants sociaux
de la santé. Donc, oui, travailler avec les parents, travailler avec les
milieux scolaires, le milieu de la santé, le milieu du logement, c'est vraiment
transversal.
M. Tremblay : Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole à Mme la
députée de Fabre.
Mme Sauvé : Merci, M. le
Président. C'est un plaisir de vous recevoir. Moi, j'aime toujours, quand je
suis en commission parlementaire, d'avoir l'éclairage un peu représentatif de
l'ensemble des enjeux. Alors, on a entendu beaucoup les professionnels de la
santé, les cliniciens et là on a la voix des jeunes qui s'expriment, alors
merci beaucoup d'être là. C'est très apprécié, la vaste consultation que vous
avez menée, parce qu'effectivement il y a des réalités très importantes qui
sont exprimées.
On revient un peu sur l'aspect... on a
parlé beaucoup de la pression de la performance, mais vous avez beaucoup mis
l'accent aussi sur la réalité de la famille. Alors, donc, il y a... Puis là je
fais appel à votre expertise comme sociologue aussi, cette sensibilité...
Une voix
: ...
Mme Sauvé : Les deux?
Alors, toutes les deux. Donc, c'est évident que, dans l'évaluation de...
l'élaboration d'un diagnostic, ou même à l'étape des observations, on a
beaucoup nommé les différents experts, mais, en même temps, quand il faut
regarder la dynamique de la famille qui peut être au coeur des symptômes de l'enfant
et de l'adolescent, on n'a pas peut-être suffisamment nommé le rôle important que
pourraient avoir, par exemple, les sociologues, les travailleurs sociaux. On ne
les a pas entendus. On ne les a pas nommés. Et, pour moi, c'est une expertise
qui peut être très pertinente parce que... Qu'est-ce qui fait que l'enfant a
ces symptômes? Est-ce qu'on est dans un <épisode ou on est dans une
réalité...
Mme Sauvé :
...suffisamment nommer le rôle
important que pourraient avoir,
par exemple, les sociologues, les
travailleurs sociaux. On ne les a pas
entendus. On ne les a pas nommés. Et, pour moi, c'est une expertise qui peut
être très pertinente
parce que...
Qu'est-ce qui fait que l'enfant
a ces symptômes? Est-ce qu'on est dans un >épisode ou on est dans une
réalité dysfonctionnelle permanente de la famille?
Donc, moi, je trouve que, entre autres,
dans la recommandation que vous faites à la page 19 de parler, bon, oui,
de gratuité mais aussi d'accès à des alternatives et des alternatives psychosociales,
je pense qu'il serait important d'avoir, peut-être, ce regard-là qui est lié
directement à l'observation de la famille. Donc, je trouvais ça important que
vous l'ameniez.
Je voulais aussi vous dire que votre
dernière recommandation phare, je la trouve excessivement importante, parce
qu'il faut prévoir, évidemment, la suite. Cette commission-là, elle est très
importante, mais, en même temps, une fois qu'on a le portrait, une fois qu'on a
les constats, il faut regarder des pistes de solution, on en a déjà eu
beaucoup, et vous amenez, comme je vous l'ai dit, la réalité du vécu des
jeunes.
Moi, le seul bémol que j'aurais par
rapport à cette commission sur la médicalisation, pour moi, il faut juste faire
attention de bien distinguer la réalité des jeunes qui sont dans des troubles
d'anxiété versus le TDAH, parce qu'on est dans des réalités différentes. Donc,
oui, la commission permanente, dans le portrait, les pistes de solution, mais
juste faire attention de ne pas aller dans une globalité qui ne tient pas
compte des spécificités de réalités qui sont liées à ces deux problématiques de
santé mentale.
Écoutez, moi, je salue vraiment votre
intention d'amener... de faire en sorte qu'on est dans une information
accentuée, vous l'avez nommée. Il y a des jeunes qui, clairement, n'ont pas
toute l'information sur les effets de la médication. Je trouve ça excessivement
important d'amener ça. Et je pense qu'on a un défi, puis je veux vous entendre
là-dessus, quand vous voulez qu'il y ait une approche plus globale, plus
psychosociale, ce n'est pas simple d'essayer de mettre ensemble les
professionnels de la santé, le réseau scolaire et l'intervention communautaire
que vous avez nommée. Comment on fait ça?
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Bien, en fait, c'est des choses qui se font déjà. Il y a des collaborations
très, très intéressantes, comme, par exemple, il y a un organisme à Montréal,
Prise II, c'est du communautaire, ils font du soutien aux études pour des
étudiants aux études postsecondaires. Donc, il y a déjà des collaborations
entre établissements, organisations communautaires.
Ensuite de ça, comment on fait en sorte
qu'il y ait davantage de soutien? Bien, c'est peut-être de vraiment être
attentif au besoin qui est exprimé. Puis, justement, des fois, dans le cabinet
d'un médecin, on est très attentifs aux symptômes exprimés. Mais, on le sait, c'est
des témoignages qu'on a reçus des jeunes, les médecins ne font pas toujours le
tour du jardin, hein? La personne est anxieuse, elle est stressée, elle a de la
misère à se concentrer : ah! c'est tel trouble. Il y a des jeunes qui nous
ont dit qu'ils avaient reçu quatre, cinq, six diagnostics, des fois, dans le
courant de certaines... sur le courant de huit, 10 ans. Ces diagnostics-là
restent dans leur dossier. Donc là, ils accumulent diagnostics et médication,
mais, au final, peut-être qu'il n'y a jamais un médecin qui s'est assis une
heure avec eux pour leur demander : Qu'est-ce qu'il se passe vraiment,
dans le fond? Parle-moi de ce qu'il se passe. Peut-être qu'il aurait découvert
des épisodes de violence, des histoires d'abus, des traumatismes, un historique
de pauvreté familiale. Il y a des enjeux qui ne sont pas toujours entendus dans
le cabinet du médecin, mais c'est, des fois, la seule porte d'entrée vers le
réseau de la santé et des services sociaux. Et, s'il n'y a pas une écoute
suffisamment longue, les causes qui sont derrière toutes ces manifestations-là
qui sont vues comme des manifestations de troubles de santé mentale, on ne les
entend pas. Ça fait que, pour nous, c'est vraiment ce souci-là de se dire :
Il faut qu'il y ait un lieu d'écoute quelque part où le jeune peut se déposer,
peut faire le tour du jardin puis recevoir des soins et des services qui sont
vraiment adaptés à ce qui se joue derrière les symptômes qui sont exprimés.
Mme Sauvé : M. le
Président, je vais céder la parole à ma collègue.
Le Président (M. Provençal)
: Oui. Alors, Mme la députée de Vaudreuil.
Une voix
: ...
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
Bien, justement, sur cette question des symptômes, il y a des jeunes aussi qui
nous ont manifesté le fait que, pour eux, le diagnostic n'était pas nécessaire.
Ce qu'ils avaient besoin, c'était d'écoute maintenant. Le diagnostic, c'est une
grille de lecture pour, disons, du personnel médical, mais n'est pas
nécessaire, pas nécessaire en tout temps. Donc, à ce moment-là, je pense que
certains jeunes aussi sont peut-être aussi un peu réticents, là, par rapport
à... justement, quand c'est le troisième diagnostic que tu reçois en trois ans,
tu es comme : Oui, mais je n'ai pas plus accès aux services, je n'ai pas
plus... Ou, des fois, des... Oui, mais tu ne peux pas avoir accès au programme
si tu n'as pas un diagnostic, parce qu'on doit savoir comment te traiter. Puis
tu es comme : Oui, mais ça dépend, moi, peut-être que mon besoin, c'est de
parler à d'autre monde, comme ça se peut que mon besoin, ce soit de parler en
un à un avec quelqu'un, comme ça se peut que mon besoin, ce soit de
l'art-thérapie, ça se peut que... Les besoins sont divers, peu importe le
diagnostic avec ou sans diagnostic, là.
• (17 h 50) •
Mme Nichols : Puis je
rajouterais, ça se peut que ça soit aussi périodique. Vous en avez parlé, là,
un peu plus tôt, vous avez fait <référence à un divorce. Donc, ça se peut
que ça soit une situation familiale, là, qui soit juste...
Mme Benoit-Huneault
(Stéphanie)T :
...les besoins sont divers, peu importe le
diagnostic, avec ou sans diagnostic, là.
Mme Nichols : Je
rajouterais : ça se peut que ça soit aussi périodique, vous en avez parlé,
là,
un peu plus tôt, vous avez fait >référence à un divorce, mais,
donc, ça se peut que ça soit une situation, une situation familiale, là, qui
soit juste un épisode.
Une voix
: Qui est
transitoire.
Mme Nichols : Oui. Donc,
j'imagine que, dans ce temps-là, justement, juste le fait d'en parler ou
d'avoir ces soins-là, de pouvoir consulter, ça fait certainement une
différence.
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
Puis, non seulement ça, mais, quand ça fait... par exemple, dans le cas d'un
deuil, on vit une période difficile, on vient de perdre un être cher, on a peut-être
besoin d'en parler. On n'a peut-être pas besoin d'en parler dans deux ans. Dans
deux ans, ça se peut que la problématique soit rendue pire, ça se peut qu'elle
se soit résorbée, mais, quand le besoin, il est maintenant, des fois, des
problèmes qui traînent ne s'améliorent pas nécessairement de soi. Donc, voilà.
Mme Nichols : J'ai
l'impression qu'on oublie aussi... on parle de deuil, là, il y a quand même des
étapes, hein, dans un deuil, qu'on doit suivre. Je pense qu'on ne doit pas s'en
aller tout de suite vers... tu sais, je pense qu'il y a des étapes que la
personne doit vivre, puis... Souvent, d'être accompagnée, ça peut être une des
pistes de solution, là, plutôt... Bien, tantôt, vous avez parlé : des
fois, une personne a deux, trois, plusieurs diagnostics. Donc, c'est des
diagnostics pour avoir accès aux médicaments ou... vous faisiez référence?
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Pas nécessairement. Au sens où on pourrait, mettons, imaginer un jeune qui a
des manifestations d'intensité ou d'impulsivité, qui se fait diagnostiquer un
TDAH à la fin du primaire, ensuite de ça, il reçoit un diagnostic de la
Tourette, ensuite de ça il reçoit un diagnostic de trouble oppositionnel,
ensuite de ça, il reçoit un diagnostic de trouble de personnalité limite, tu
sais, au sens où c'est... ce n'est pas nécessairement assorti de médication,
mais c'est juste une série de lectures sur des manifestations, mais qui, au
final, ces diagnostics-là, ils s'accumulent, ça ajoute des stigmates aussi dans
le parcours du jeune parfois et ça ne vient pas nécessairement avec une aide
qui est liée à ses conditions de vie, aux causes qui sont derrière toute cette
intensité-là que le jeune peut exprimer.
Mme Nichols : C'est quand
même assez... c'est troublant, hein? C'est troublant, d'entendre ça. Je n'ai
pas d'autres questions. Merci, M. le Président. Merci.
Le Président (M. Provençal)
: Je vais céder la parole au député de Jean-Lesage.
M. Zanetti : Merci. Dans
la commission, on aborde beaucoup, des fois, des enjeux, là, à des causes de la
situation actuelle, qui sont comme le diagnostic, la façon dont on voit cette
chose-là. Mais moi, j'aimerais qu'on parle davantage de la société dans
laquelle on est, de façon macro, là. On sait qu'on est au Québec et on a le
système d'éducation le plus inégalitaire au Canada et on est aussi l'endroit où
il y a la prévalence de consommation de psychostimulants qui est la plus
élevée. Est-ce que vous pensez qu'il y a un lien à faire entre les deux?
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Bien, moi, à ma connaissance, on n'a pas d'étude qui montre une corrélation
claire. Oui, il y a ces chiffres-là qui sont sur un même territoire donné. Il y
a des chiffres qui sont sortis cet automne, là, les chiffres de l'OCDE, qui
nous disent que, oui, c'est un système... le plus inégalitaire. C'est aussi
l'endroit au Canada où il y a le plus de consommation de médication
psychostimulante. Je ne m'avancerais pas à faire une corrélation qui n'est
peut-être pas la bonne, il y a peut-être d'autres causes, tout à l'heure, on
parlait de facteurs environnementaux, l'incidence des pesticides, tu sais, au
sens où... Quelle est exactement la cause? On n'est pas sûr.
Mais une chose est certaine, c'est qu'on a
un système qui fait en sorte qu'il y a davantage de décrochage de la part de
jeunes qui éprouvent déjà de la difficulté face à l'école parce qu'ils ont
moins de chances de réussir que s'ils étaient nés dans une autre province au
Canada. Ça fait que c'est sûr que cette situation-là, oui, peut créer une pression
à ce qu'il y ait une médication de performance qui soit prise pour corriger
cette adversité-là à laquelle les jeunes sont soumis.
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
Pour rebondir sur la question des inégalités sociales, il y a un organisme
communautaire qui s'appelle La Troisième avenue, à Montréal, qui travaille
beaucoup avec, entre autres, des parents issus de l'immigration ou des
personnes racisées, puis ils ont sorti un rapport, ils ont eu des discussions
entre parents sur la question, justement, des diagnostics qui étaient donnés à
leurs enfants, puis ils avaient vraiment l'impression que, au niveau des
différences culturelles, ces différences culturelles là étaient lues sous un
regard, en fait, qui était le regard diagnostique, au lieu de dire : Il y
a peut-être des différentes façons d'exprimer des émotions peut-être
différentes puis que c'est correct. Donc, les parents de ce groupe
communautaire là étaient vraiment préoccupés, en fait, en se disant :
Bien, nos enfants sont... on semble observer que nos enfants sont davantage
diagnostiqués, en fait... justement, c'est une lecture diagnostique sur, en
fait, des...
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Des jeunes qui sont porteurs d'une différence visible, par exemple, ça,
c'est... Il y a des études de Maryse Potvin, entre autres, je crois, qui
travaille spécifiquement sur l'enjeu du fait que, oui, il y a des populations,
des jeunes qui reçoivent davantage de diagnostics que d'autres, là, qu'on pense
aux garçons, aux jeunes qui sont plus jeunes, qui ont une plus grande
immaturité scolaire, les jeunes qui viennent de familles plus pauvres, mais
aussi des jeunes issus de l'immigration.
M. Zanetti : Merci.
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
On avait un témoignage, en fait, une enfant qui, justement, venait <d'arriver
au pays avec ses parents qui venaient de fuir une situation de guerre...
Mme Boucher (Anne-Marie)T :
...plus jeunes qui ont une plus grande immaturité scolaire, les jeunes qui
viennent de familles plus pauvres, mais aussi les jeunes issus de
l'immigration.
M. Zanetti : Merci.
Mme Benoit-Huneault
(Stéphanie)T :
On avait un témoignage en fait, une enfant qui,
justement, venait >d'arriver au pays avec ses parents, qui venait de
fuir une situation de guerre et qui vivait, en classe, des situations
d'anxiété. On aurait pu se dire, là : Ah, voilà! On va lui donner un
diagnostic. Et voilà! Mais, en fait, ce que l'école a permis de faire, c'est: d'accord,
pour permettre une meilleure intégration, on va permettre à son parent d'être
là un certain temps, juste pour que cette figure parentale là, qui est, en fait,
très rassurante pour l'enfant, ça permette de faire cette transition-là entre
sortir d'une situation où c'était la guerre à un contexte scolaire qui est
nouveau, dans un nouveau pays, avec plein de nouveaux codes, avec plein de
nouvelles choses qui se passent. Puis, à ce niveau-là, ça avait vraiment été quelque
chose qui avait vraiment favorisé, en fait, la transition pour cette jeune-là.
C'était tout simplement que son parent puisse être présent pendant quelque
temps. Si elle vivait des épisodes où elle ne se sentait pas bien, elle pouvait
se retourner vers son parent. Puis son parent était là : Ça va. On est là.
Tout est sous contrôle. Et c'était tout simple, en fait.
Le Président (M. Provençal)
: Nous allons compléter cet échange avec le député de Jonquière.
M. Gaudreault : Oui.
Merci. Merci beaucoup. C'est très éclairant, très riche pour notre commission,
ce que vous nous partagez. Je veux poursuivre un peu sur les liens territoire
et revenus familiaux. Pour moi, c'est comme fondamental. Votre mouvement, bon,
découle du Regroupement des Auberges du coeur, le Regroupement des ressources
alternatives en santé mentale, l'association des groupes en défense des droits
en santé mentale partout au Québec. Est-ce que vous sentez cette différence-là
entre à la fois les régions et, sur un autre niveau, sur les revenus familiaux
dans les jeunes que vous avez rencontrés ou que vous avez sondés?
Mme Benoit-Huneault (Stéphanie) :
Tout à fait. En fait, particulièrement les... Si je veux les séparer, ils ne
sont pas nécessairement séparés, mais, si on veut, mettons, les séparer, là, la
question des régions, là, il y a beaucoup de jeunes qui nous disaient :
Bon, c'est bien beau, mais les services, dans ma région, ils sont inexistants.
Ou, encore, on a une psychologue à temps partiel pour six écoles sur un territoire
qui est grand comme ça. C'est impossible de la voir, alors qu'il y a beaucoup
de monde dans l'école qui en aurait besoin. Puis, bon, si on ajoute à ça des questions
d'inégalité sociale, si c'est déjà difficile dans un contexte régional d'avoir
accès à des services et qu'on n'a pas les sous, là, on vient de rajouter d'autres
couches pour avoir accès à des services. Là, on se ramasse vraiment dans une situation
qui est, ma foi, là, en fait, catastrophique, en fait, là.
M. Gaudreault : Oui. C'est
comme si on était quasiment capable de géolocaliser avant qu'il soit
diagnostiqué, tu sais, c'est quoi, un jeune garçon né dans un quartier
défavorisé avec une famille à bas revenu. Puis, en plus, il est né tard dans
l'année, là, on a appris ça hier. C'est quasiment le cas parfait type, là, du
TDAH.
Mme Boucher (Anne-Marie) :
…que vous nommez est intéressant. En fait, c'est le fait qu'il y a des
inégalités face à l'école. Les jeunes n'arrivent pas tous égaux face à l'école.
Et, si on a système qui se veut réellement équitable, bien, il faut accueillir
ces jeunes-là. Sans nécessairement les diagnostiquer, les profs le voient. Les
professeurs le voient très, très rapidement. Quand il y a des élèves qui
éprouvent plus de difficultés, c'est possible, vraiment, de leur donner plus, beaucoup
plus à ces jeunes-là qui arrivent moins favorisés face à l'école et corriger
ces inégalités-là. Mais peut-être que, dans le milieu qui est... dans le système
scolaire québécois, présentement, malgré toute la bonne volonté des enseignants
et des enseignantes, on ne réussit pas, malgré la bonne volonté des
professionnels aussi qui sont dans les écoles, on ne réussit pas à donner assez
à ces jeunes-là pour réduire les inégalités face à l'école. Et le fait d'avoir
de la difficulté face au contenu, d'avoir de la difficulté à se concentrer, à
un moment donné, bien, ça se traduit en diagnostic, alors qu'il aurait pu en
être autrement si le jeune avait reçu davantage d'aide, et ça, je le répète,
sans nécessairement les diagnostiquer. On n'est pas obligé de dépister et de
diagnostiquer à quatre, cinq ans, mais on peut aider sans diagnostiquer parce
qu'on voit qu'il y a un besoin d'aide face à l'école.
M. Gaudreault : Il me
reste un peu de temps?
Le Président (M. Provençal)
: Prenez la minute qu'il reste.
M. Gaudreault : Merci.
Mon Dieu! Je veux juste vous entendre sur les liens entre les médecins en
clinique et les intervenants jeunesse, par exemple, dans le milieu communautaire
ou d'autres types de professionnels. Est-ce qu'il ne devrait pas y avoir un
genre de protocole, un médecin de famille qui reçoit le parent un peu
désorganisé avec son enfant qu'il pense être TDAH, est-ce qu'il ne devrait pas
y avoir un canal de communication direct avec vous autres, quitte à rebondir
plus tard chez le médecin pour avoir un vrai diagnostic? Comment, ça, on
pourrait l'organiser?
Mme Boucher (Anne-Marie) :
Bien, c'est sûr, il y a déjà des systèmes de référence au sens où, souvent,
dans le réseau, on va recevoir des personnes qui sont référencées par le réseau
parce qu'ils se rendent compte qu'un organisme communautaire pourrait davantage
accompagner les personnes, mieux les accompagner. Des fois aussi, il y a une
méfiance à l'égard du réseau de la santé et des services sociaux pour
différentes raisons dans certaines familles.
• (18 heures) •
Est-ce qu'il y aurait un protocole strict?
Je ne pense que ça serait nécessairement la façon de faire, mais de s'assurer
que le réseau et le <communautaire se connaissent mieux...
>
18 h (version révisée)
< Mme Boucher (Anne-Marie)T :
...parce qu'ils se rendent compte qu'un
organisme communautaire pourrait
davantage accompagner les personnes, mieux les accompagner. Des fois, aussi,
il y a une méfiance à l'égard du réseau de la santé et des services
sociaux pour différentes raisons dans certaines familles.
Est-ce qu'il y aurait un
protocole strict? Je ne pense pas que ça serait
nécessairement la façon
de faire, mais de s'assurer que le réseau et le >communautaire se
connaissent mieux, connaissent les rôles de chacun... Nous, on le sait, qu'il y
a des très bonnes collaborations dans certains cas. Dans d'autres cas, c'est
moins heureux. Ça fait que, oui, peut-être qu'on gagnerait à se parler davantage,
parce qu'au final tout le monde est là pour les mêmes raisons, on veut
s'adresser aux inégalités de santé, on veut améliorer la santé des Québécois et
des Québécoises puis, à ce niveau-là, on peut travailler dans la même
direction.
Le Président (M. Provençal)
:Je vous remercie beaucoup pour votre
contribution à nos travaux.
La commission ajourne ses travaux jusqu'au
vendredi 8 novembre, à 9 h 30. Merci énormément.
(Fin de la séance à 18 h 1)