(Onze heures vingt et une minutes)
La Présidente (Mme Maccarone) :
Bonjour
à tous. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des
transports et de l'environnement ouverte.
La commission est réunie afin de poursuivre les
consultations particulières et les auditions publiques sur le projet de
stratégie gouvernementale et de développement durable 2023‑2028.
Mme la secrétaire, y a-t-il des remplacements?
La Secrétaire : Oui, Mme la Présidente.
M. Morin (Acadie) est remplacé par Mme Dufour (Mille-Îles); M. Grandmont (Taschereau) est remplacé par Mme Zaga Mendez (Verdun);
et M. St-Pierre Plamondon
(Camille-Laurin) est remplacé par M. Arseneau
(Îles-de-la-Madeleine).
Auditions (suite)
La Présidente (Mme Maccarone) : Merci.
Ce matin, nous entendons les groupes suivants : la Commissaire au
développement durable et Vivre en ville.
Alors, je souhaite la bienvenue aux
représentants de la Commissaire du développement durable et je vous rappelle
que...
Mme Dufour : ...
La Présidente (Mme Maccarone) : Oui,
Mme la députée de Mille-Îles.
Mme
Dufour : Je m'excuse. J'aimerais faire un point
d'information pour la commission — c'est parfait — afin
de rectifier une information erronée qui a été véhiculée dans un article du Devoir,
ce matin...
La Présidente (Mme Maccarone) : Mme
la députée, est-ce que c'est un appel au règlement?
Mme Dufour : Non, c'est une...
Pardon?
Une voix : ...
Mme Dufour : C'est une question...
La Présidente (Mme Maccarone) : Une
question de règlement?
Une voix : ...
Mme Dufour : Excusez. J'arrive, là.
Question de directive, qu'on me dit.
La Présidente (Mme Maccarone) : Une
question de directive.
Mme Dufour : Donc, je peux y aller?
La Présidente (Mme Maccarone) : Votre
question, est-ce que... c'est par rapport aux auditions?
Mme Dufour : Pardon?
La Présidente (Mme Maccarone) : Est-ce
que c'est par rapport aux auditions?
Mme
Dufour : Oui, tout à fait. En fait, c'est qu'on a pu lire
dans un article ce matin que le ministre soulignait que la durée des consultations est similaire à
celles qui se sont tenues il y a cinq ans, lors de la révision de la précédente
stratégie, mais ça, c'est inexact. Tout simplement souligner qu'en 2015 il y a
eu sept jours de consultations et il y a eu 41 groupes entendus, alors que présentement on parle de quatre
jours et seulement 17 groupes entendus. Donc, on voulait simplement...
je voulais simplement rectifier cette information, Mme la Présidente. Merci.
La Présidente (Mme Maccarone) : M.
le ministre, très courte intervention.
M.
Charette : ...exact, donc je rassure la collègue, au niveau
des délais, on est dans les mêmes délais au niveau de la convocation. Moi, j'ai un petit peu, là, le
calendrier sous les yeux, là : les oppositions ont été invitées à soumettre
la liste de leurs groupes dès décembre dernier; il y a une première motion, le
12 janvier, qui a envoyée aux oppositions;
on a eu consentement à la troisième motion, le 17 janvier dernier, et une
convocation le 31 janvier. Donc, au niveau des délais, c'est
conforme à la dernière fois. Au niveau des groupes, au niveau des groupes
invités, c'est aussi semblable. Cependant, on n'a pas le contrôle sur les
groupes qui acceptent ou qui refusent de se présenter devant nous.
La Présidente (Mme Maccarone) : Merci...
M.
Charette : Donc, les invitations ont été lancées, mais
malheureusement on n'a pas le contrôle et on n'a pas l'obligation
d'imposer une présence à la commission.
La Présidente (Mme Maccarone) : Merci,
M. le ministre. Je vais peut-être demander aux collègues, quand nous allons passer après les auditions, si vous
voulez discuter, vous serez les bienvenus. Mais on va procéder maintenant
aux auditions, nous avons déjà les groupes qui sont en place pour nous aider
avec nos travaux.
Commissaire au
développement durable
Mais on va procéder maintenant aux auditions.
Nous avons déjà les groupes qui sont en place pour nous aider avec nos travaux.
Alors, je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé,
après quoi nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la
commission. Je vous invite donc à vous présenter, et puis vous pouvez commencer
votre exposé. Merci.
Mme Lambert (Janique) : Mme la
Présidente, M. le ministre de l'Environnement, de la Lutte contre les
changements climatiques, de la Faune et des Parcs, Mmes, MM. les membres de
cette commission, c'est avec intérêt que je
participe aux consultations particulières et auditions publiques concernant le
projet de stratégie gouvernementale de
développement durable 2023‑2028. Mme Moïsette Fortin, directrice principale
d'audit, et Mme Julie Grenier, chargée de projet en audit,
m'accompagnent aujourd'hui.
Depuis 2006,
l'approche québécoise en matière de développement durable s'appuie sur la Loi
sur le développement durable et ses
trois piliers, trois piliers qui sont les 16 principes, la stratégie et
les travaux du commissaire. Plus particulièrement, la Stratégie
gouvernementale de développement durable est l'une des pierres d'assise de la
mise en oeuvre de la loi. Elle est le cadre de référence dans lequel le
gouvernement indique la direction qu'il entend prendre et les objectifs qu'il veut atteindre en matière de
développement durable au cours des cinq prochaines années.
Le rôle unique que me confère la loi nous a
permis de réaliser de nombreux travaux sur l'application de la Loi sur le
développement durable, depuis son entrée en vigueur, dont quatre rapports de
vigie sur la révision de la stratégie 2015‑2020 qui a été prolongée
jusqu'en octobre 2022. En nous appuyant sur ces travaux et sur notre analyse du
projet de la stratégie, nous vous présentons dans notre mémoire huit
observations sur des aspects du projet qui, à mon avis, méritent une attention
particulière. Ces observations concernent la portée de la loi, la coordination
de la mise en oeuvre de la stratégie, la
démarche d'élaboration de la stratégie et les mécanismes de mise en oeuvre... de suivi qui sont prévus.
Notre première observation concerne
l'implication des hauts dirigeants dans la coordination de l'action
gouvernementale de développement durable. Un engagement significatif des hauts dirigeants
est essentiel pour accélérer l'intégration du développement durable dans toutes
les sphères d'intervention du gouvernement et pour assurer la réussite de la
mise en oeuvre de la stratégie. Les hauts dirigeants membres des comités
interministériels doivent assurer une mise en oeuvre efficace et cohérente de
la stratégie. Cependant, des lacunes que nous avons observées dans le passé
concernant le fonctionnement de ces comités persistent encore aujourd'hui.
Ainsi, je réitère notre inquiétude quant au
projet de stratégie, puisqu'il ne prévoit toujours pas de structure de
gouvernance forte et transversale dirigée par un organisme proche du pouvoir et
en mesure d'influencer le gouvernement, le secteur privé ainsi que la société
civile.
Notre deuxième observation concerne le champ
d'application de la Loi sur le développement durable. Après plus de 16 ans d'existence de la loi, la
limitation de son champ d'application me préoccupe. En effet, tant que les
organismes municipaux, les organismes scolaires et les établissements de
santé et de services sociaux n'y seront pas assujettis, nous ne pourrons avoir
l'assurance que ces organisations ont réellement entrepris une démarche de
développement durable telle que décrite dans la loi. Même si trop peu de ces organisations
ont volontairement pris le virage souhaité en matière de développement durable,
le projet de stratégie privilégie encore l'adoption volontaire d'une démarche
de développement durable de leur part. Elle incite seulement les ministères
responsables de ces organisations à les appuyer
dans leurs interventions. Pourtant, en raison de leurs responsabilités, de leur
rayonnement et de leur implication dans la société, les organismes municipaux, les organismes scolaires et les
établissements de santé et de services sociaux peuvent exercer un leadership
inspirant en matière de développement durable auprès de la population. L'assujettissement
de ces organisations à la loi est un incontournable pour faire progresser le
développement durable au Québec.
Nos observations 3 et 4 sur la démarche de
révision de la stratégie. Pour la deuxième fois, cette démarche est prolongée,
ce qui retarde l'entrée en vigueur de la nouvelle stratégie. La révision aux
cinq ans de la stratégie est une obligation légale importante pour assurer la
progression des mesures à déployer et inciter l'administration à accélérer l'intégration du développement durable dans ses pratiques de
gestion. Cette fois-ci, non seulement le report maximal de deux ans prévu par
la loi est dépassé, la stratégie risque de ne pas refléter les attentes et les
besoins actuels de la population. En effet,
près de 27 mois se sont écoulés depuis la consultation publique des
citoyens. De plus, au cours des deux dernières années, le contexte
pandémique et la situation économique ont notamment exacerbé plusieurs enjeux
sociaux.
Selon la loi, la stratégie doit refléter
l'éventail des préoccupations des citoyens, des milieux et des conditions de vie au Québec. L'implication de la population
est essentielle pour favoriser son adhésion, elle permet aussi d'ouvrir le
débat sur des idées, des informations nouvelles et de dégager un consensus sur
les moyens à privilégier pour intégrer le développement durable.
• (11 h 30) •
Notre cinquième observation concerne
l'information disponible pendant les diverses consultations tenues tout au long
du processus de révision de la stratégie. Il n'y avait pas de portrait à jour
de l'évolution des résultats de la mise en oeuvre de cette stratégie, ce qui
n'a pas permis d'alimenter adéquatement la réflexion. Pour la présente
consultation, ce portrait a été produit à partir de données qui datent de près
de quatre ans. De plus, le rapport quinquennal sur la mise en oeuvre de la
stratégie, qui devait être publié à l'automne, ne l'est toujours pas. Une
information complète et précise concernant les effets réels de la stratégie sur
les progrès de l'administration et de la société en matière de développement
durable s'avère un préalable essentiel pour une prise de décision éclairée dans
un processus de révision aussi important que celui de la stratégie.
En sixième lieu, nous observons que le projet de
stratégie met davantage l'accent sur la transition vers une économie verte et
sur la transition climatique, notamment par le Plan pour une économie verte 2030.
Bien que ces enjeux soient très importants, la loi fait état du caractère
indissociable des dimensions environnementales, sociales et économiques du
développement. Par exemple, des enjeux sociaux tels que la pauvreté,
l'éducation et même la santé sont peu pris
en compte par certains objectifs. Dans d'autres cas, ce sont les effets des
objectifs sur ces enjeux qui sont peu mis en évidence. Ainsi, le projet
de stratégie ne nous renseigne pas adéquatement sur la voie qu'entend suivre le
gouvernement pour faire face à ces enjeux. Pourtant, le développement durable
est au coeur d'une prise en compte simultanée des dimensions environnementales,
sociales et économiques.
Notre septième observation porte sur les liens
entre les objectifs de la stratégie et les principes de développement durable
énoncés dans la loi. Je m'étonne que les 16 principes de développement
durable ne soient pas liés aux objectifs du
projet de stratégie. Cela aurait permis de démontrer que la mise en oeuvre du
développement durable au sein de l'administration se réalise dans le
respect de ces 16 principes. Cela aurait aussi permis d'informer et
d'orienter les ministères et organismes quant à la prise en compte des
16 principes dans leurs interventions.
Par ailleurs, nous saluons le fait que, pour une
première fois, le projet de stratégie fait le lien entre ses objectifs et ceux
de l'ONU en matière de développement durable. Toutefois, nous regrettons qu'il
ne soit pas précisé de quelle manière les objectifs de la stratégie contribueront
à l'atteinte de ceux de l'ONU.
Finalement, notre huitième observation veut
attirer votre attention sur le manque de précision des objectifs et des
sous-objectifs énoncés dans le projet de stratégie ainsi que sur l'absence des
attentes de participation envers les ministères
et organismes et l'absence des indicateurs et des cibles, ce qui n'a rien pour
me rassurer. Des termes souvent utilisés tels que «soutenir», «favoriser»,
«appuyer» demeurent généraux et ne font pas état de la tendance recherchée.
Une fois de plus, le projet de stratégie ne
permet pas de cibler les résultats attendus ni de vérifier la performance du
gouvernement au fil des ans. Il en résulte que le succès de la mise en
oeuvre de la stratégie demeure incertain, du fait que les ministères et
organismes devant y contribuer ne sont pas informés de la progression
souhaitée. Il serait donc important que les attentes de participation ainsi que
les indicateurs de suivi de la mise en oeuvre de la stratégie soient connus
rapidement des ministères et organismes assujettis, ceci afin de leur permettre
de revoir leurs plans d'action de développement durable respectifs, lesquels
arrivent à échéance le 31 mars 2023.
Donc, voilà
l'essentiel des commentaires que je voulais partager avec vous aujourd'hui.
Nous sommes maintenant prêtes à répondre à vos questions.
La
Présidente (Mme Maccarone) :
Merci beaucoup. Nous
allons maintenant débuter la période des échanges, et je cède la parole
à M. le ministre. La parole est à vous.
M. Charette : Merci, Mme la
Présidente. Mesdames, Mme la commissaire et les collègues qui vous
accompagnent, merci de votre présence ce matin. Merci pour votre mémoire, qu'on
a lu avec attention.
Je ne sais pas si vous avez eu l'occasion de
suivre un petit peu les travaux hier, mais on recevait notamment les unions
municipales, l'UMQ, la FQM, et je leur ai posé la question, parce le groupe qui
les précédait lançait la réflexion, à
savoir : Est-ce qu'on doit assujettir les municipalités à la Loi sur le
développement durable? Naturellement, l'organisme qui les précédait le
souhaitait, les municipalités évoquaient leur leadership. Et c'est vrai qu'il y
a un leadership toujours plus présent, au
niveau municipal, au niveau de la protection de l'environnement, mais, en même
temps, ces deux instances-là disaient essentiellement : On veut
garder notre autonomie et on veut garder la possibilité de s'inscrire
directement dans le cadre de la stratégie ou pas. Question simple que je leur
ai posée : Est-ce qu'on devrait assujettir les municipalités à la Loi sur
le développement durable?
Mme
Lambert (Janique) : Vous savez, lorsque... Je me plais à dire que la
Loi sur le développement durable, c'est
une loi qui a été vraiment bien réfléchie et je la suis, quand même, depuis ses
débuts. Puis, c'était prévu à l'article 4
de la loi, il y a une latitude de donnée au gouvernement que, via un décret...
qu'ils pourront décider d'intégrer, dans le fond, les groupes, autant les
municipalités, les établissements scolaires que ceux de la santé et les
services sociaux, les assujettir à la loi mais leur permettre également
d'avoir peut-être certaines exceptions ou ne pas les assujettir pleinement à
tous les articles de la loi. Ça fait qu'il y a une latitude de laissée, quand
même, au législateur pour intégrer ces organisations.
Les
municipalités, ce sont ceux qui sont les plus près de la population. C'est
certain qu'il y a des municipalités, je dirais, qui font belle figure, qui ont
de l'avance à l'égard de leur démarche au niveau du développement durable,
mais on ne peut pas dire que c'est la totalité des municipalités. Puis c'est un
incontournable, dans le fond, d'intégrer ces acteurs
importants. Mais comme je vous le disais, l'article 4 laisse tout de même
une latitude sur le comment y arriver.
La Présidente (Mme Maccarone) : ...de
vous céder la parole, je veux juste demander le consentement des collègues de poursuivre les travaux au-delà de
l'heure prévue, pour environ 10 minutes. Est-ce que j'ai le consentement?
Merci.
M. Charette : Je connais la
disposition qui permet cette latitude-là, mais c'est difficile à appliquer. On
est assujetti ou on ne l'est pas. Quelles seraient... quelles pourraient être,
justement, les exemptions ou les exceptions qui pourraient être accordées aux
municipalités, selon vous?
Mme Lambert (Janique) : Vous savez,
je vais vous donner une réponse qu'habituellement on donne, au sein du
Vérificateur général : on n'est pas dans les moyens. Ce qu'on vous dit,
les observations que je vous donne ce matin,
c'est de vous dire : Il y a... La loi se voulait d'être progressive, de
dire : On va commencer par assujettir, bon, le gouvernement en soi,
ministères, organismes, l'administration, puis par la suite on va poursuivre
l'assujettissement à d'autres groupes. Et
mes prédécesseurs... Je ne suis pas la première, c'est pour ça qu'on vous a
montré un peu l'historique à chacune des observations. Ce se serait de
dire : Après 16 ans, on est peut-être... c'est peut-être le moment,
là, d'aller un peu plus loin puis d'étendre l'assujettissement à ces trois
groupes à la Loi sur le développement durable.
M. Charette : Au niveau des
municipalités, c'est le chiffre qui nous a été confirmé hier, à peu près le
tiers se sont déclarées liées, si je peux reprendre l'expression, à la stratégie,
ce qui est bien, mais ça veut dire qu'il y en a les deux tiers qui ne le sont pas. Est-ce que c'est des... Certains
évoquaient des plus petites municipalités qui ont peut-être moins
d'expertise, qui ont peut-être moins d'employés, là, capables d'assurer ce
défi-là. D'autres préconisaient tout simplement des avenues qui leur étaient
propres. Pour les deux tiers, d'après vous, ou la lecture que vous en faites,
c'est un manque d'outils, un manque d'accompagnement, un manque d'incitatifs?
C'est quand même beaucoup, un deux tiers des municipalités, là, qui n'ont pas
jugé bon se reconnaître, là, dans cette loi-là.
Mme Lambert (Janique) : Bien, je
m'appuierais sur, plutôt, les observations que j'ai faites sur mes travaux en
lien avec les entités assujetties. C'est rarement les moyens qui font défaut,
c'est souvent la compréhension de l'engagement puis la mobilisation face à cet
engagement. Ça fait que je pourrais... Je n'ai pas fait d'études, de travaux à
l'égard des municipalités, donc c'est difficile pour moi de me positionner, là,
sur votre question.
M. Charette : Et peut-être un...
merci, un élément que vous n'avez pas abordé, mais, si jamais ça peut vous
aider dans la rédaction de votre prochain rapport, concernant les délais,
l'évaluation qui est faite de la stratégie... Je comprends qu'on est en
début 2023, je comprends que le rapport de la dernière stratégie ou, à
tout le moins, de la dernière période n'a
pas encore été publié. C'est une question de mois avant que ce soit le cas.
C'est vrai que c'est long. Moi, le premier, je trouve que ce sont des
délais qui sont longs. Il faut les expliquer, par contre, on est tributaires
des rapports annuels de gestion, les fameux
RAG. Déjà, ça arrive quelques mois après l'échéance, enfin, la fin de l'année. Il
y a aussi le temps d'analyse. Donc, je trouve ça long. Honnêtement, on va
travailler à les raccourcir. Mais je veux aussi rassurer les collègues, là, le
prochain rapport, c'est l'objectif, là, qu'il soit publié au cours des
prochains mois.
• (11 h 40) •
Sinon, vous mentionnez : Il y a du bon, par
contre, à avoir retardé la présentation de la stratégie. Hier, on a parlé un
petit peu du calendrier, le pourquoi de ces reports-là, qui se justifient, là,
aisément. Mais ça nous a laissé le temps de consulter encore davantage les
ministères et organismes. Je les sens plus préparés à assumer la suite, à
assumer leurs responsabilités, je les sens aussi plus mobilisés pour prendre le
relais, et c'est important de les mettre à bord. Je comprends, dans votre mémoire,
et vous l'avez évoqué aussi, vous aimeriez avoir une instance qui s'assure, en
quelque sorte, de la cohésion de tout ça. Mais il y a eu beaucoup de travail
préalable qui a été fait pour, justement, s'assurer de la mobilisation, et je
ne vois pas, à moins que vous ayez une formule à nous présenter, je ne vois pas
comment une instance pourrait... C'est le rôle du ministère de l'Environnement,
et le ministère de l'Environnement va s'assumer, va assurer cette
responsabilité-là. Mais l'instance en question que vous avez évoquée tout à
l'heure, vous la souhaiteriez comment ou vous la décririez comment?
Mme Lambert (Janique) : Bien, je
dirais, comme je vous l'ai dit tantôt, je vais me référer aux multiples travaux
qui ont été faits par mes prédécesseurs et moi également concernant, déjà, le
mécanisme qui a été mis en place. Donc, il y
a des comités interministériels de développement durable. Il y avait le comité
directeur de développement durable. Là, depuis peu, il y a plutôt le
CODIR du Comité interministériel de développement durable. Donc, il y a un
mécanisme qui a été prévu, puis même le Comité interministériel de
développement durable, c'est avant même la Loi sur le développement durable.
Donc, c'est un mécanisme
qui est présent, mais il devrait fonctionner tel que planifié, dans le sens
qu'il est planifié, comme, par exemple Comité interministériel de développement
durable, que ce soient des niveaux sous-ministre adjoint — je
crois que c'est sous-ministres adjoints, là — puis qu'ils se rencontrent au
moins trois fois, trois à six fois par année. Mais ce qu'on voit, c'est que le
mécanisme, bien, ne fonctionne pas tel que supposé. Ça fait qu'il y a des
remplacements qui se font, donc ce n'est plus les personnes qui ont un pouvoir
plus de décision au sein de leur ministère ou un pouvoir d'influence.
Vous savez, le développement durable doit
partir... Je dis toujours que ça... C'est bien qu'il y ait... Puis les gens
travaillent au sein d'un ministère, organisme, y croient, mais il faut que la
tête dirigeante y croie. Ça fait qu'en ayant
ces mécanismes-là puis que les personnes qui doivent y aller puis qui ont un
certain pouvoir de décision, d'influence dans leur ministère devraient y
être puis ils devraient avoir ces rencontres-là pour prendre les bonnes décisions,
à des points stratégiques dans l'année. Ça fait que ce n'est pas seulement pour
adopter une nouvelle stratégie, mais c'est d'autant
plus la mettre en oeuvre. Ça fait que présentement il y a des mécanismes. Je
dirais, bien, peut-être de commencer par faire en sorte que ces
mécanismes-là soient efficaces, ce serait déjà un bon début.
La Présidente (Mme Maccarone) : Merci
beaucoup, Mme Lambert. Je cède la parole à Mme la députée d'Argenteuil.
Mme Grondin : Bonjour. Bonjour,
mesdames. Mme Lambert, rapport, mémoire très, très intéressant, donc ça
m'a amené des milliers de questions. Je vais essayer de me concentrer sur une
seule.
Dans le cadre des conditions de succès que vous
proposez pour améliorer la stratégie de développement durable, dans vos
recommandations, il y a un élément qui touche l'engagement des hauts
dirigeants. Vous venez d'en parler, ce besoin-là de sentir cette volonté des
décideurs d'embarquer dans toute la démarche de développement durable. Vous
soulignez aussi... ou vous questionnez pourquoi, dans le cadre de la présente
proposition de stratégie, on ne revient pas
aux 16 principes de développement durable. Vous proposez aussi que la
stratégie doit couvrir le plus large éventail des défis auxquels nous
sommes confrontés, soit au Québec. Ma question est vraiment, et j'y reviens,
sur la recommandation où vous souhaitez étendre cette loi-là ou cette
stratégie... cette loi-là, aux municipalités.
Moi, je viens d'un comté où
14 municipalités sur 17 ont moins de 5 000 habitants, donc on
peut dire que c'est des petites municipalités. Dans le cadre de mon ancienne
vie, j'ai été... j'ai tenté, comme conseillère en environnement, d'amener toute
la démarche de développement durable au sein d'une MRC et des municipalités
locales. Je trouve qu'il y a des grands obstacles et des défis à ce niveau-là.
Je ne sais pas si, dans le cadre de vos analyses,
la réflexion, vous avez vu des initiatives dans des petites municipalités ou
s'il y a moyen de dire... Vous avez dit :
Il peut y avoir une attitude, au niveau de l'application de la loi, dans les
petites municipalités. Je sais que vous n'êtes pas dans les moyens, mais je
pense que dans le cadre de, tu sais... Pour une petite municipalité, appliquer
les 16 principes, identifier une mécanique où on va faire les
arbitrages au niveau des décisions municipales, donc, ce n'est pas... ça
devient assez complexe. Ça fait que je ne sais pas si vous avez identifié des
endroits, ailleurs dans le monde ou au Québec, où on pourrait encourager les
petites municipalités.
Mme Lambert (Janique) : Pour
répondre à votre question, est-ce qu'on a fait ces travaux, non, on n'a pas
regardé, ce n'est pas un volet, encore, qu'on a regardé dans nos... des
comparatifs à travers... en dehors du Québec. Mais
je vois... C'est certain qu'on a une réalité, au Québec : c'est un grand
territoire avec des réalités régionales différentes d'une à l'autre. Et
c'est le cas pour la majorité des lois qui sont existantes, au Québec, dans le
sens qu'il y a souvent des adaptations possibles pour tenir compte d'une
réalité d'une région plutôt qu'une autre. Ça fait que c'est la seule chose que je pourrais peut-être vous mentionner.
Mais il est certain que des municipalités comme la métropole, qui est quand
même, je me trompe peut-être à peine, 30 % de la population du Québec,
qu'elles ne soient pas assujetties à la loi, c'est quand même
particulier. Vous voyez? Ça fait que ce n'est pas à moi à trouver la solution.
Par contre, il faut qu'il y ait un
questionnement puis une prise de position, je me dis, de dire : On prend
la décision de les assujettir ou non? Jamais ils ne seront assujettis,
bien, encore là.. bien là, il faudra avoir certains... Je vais arrêter là, là,
parce que je pense que je déborde un petit peu mon rôle.
La Présidente (Mme Maccarone) : Merci.
Je cède maintenant la parole au député de Côte-du-Sud.
M.
Rivest : Merci. Dans l'idée de ce cadre de référence là,
dans la stratégie qui est mise, vous avez mentionné les quatre rapports
de vigie par la commission. J'avais une question bien précise, mais, M. le
ministre, vous avez répondu, là, en partie sur les lacunes, vous avez mentionné
les lacunes sur le fonctionnement des comités puis de prévoir, là, les
mécanismes de gouvernance, vous avez quand même donné une bonne partie de la
réponse. Mais j'aimerais peut-être... peut-être... Vous venez de dire que vous
allez peut-être déborder votre rôle, mais quelle serait votre opinion sur les
meilleures façons de faire pour les changements à mettre en place pour la
gouvernance? Premier point. Et deuxième point, pouvez-vous nous donner quelques
éléments sur les rapports de vigie que vous avez mentionnés, quels sont les
éléments qui s'en dégagent d'une façon plus précise et plus...
Mme Lambert (Janique) : Bien,
peut-être... Je vous disais d'entrée de jeu que la stratégie, c'est le coeur de
la loi. Pour mettre en oeuvre le développement durable, au sein du Québec, la
loi a décidé d'utiliser ce véhicule. Ça fait que c'est tellement important que,
dans les orientations stratégiques du Vérificateur général, on s'en est fait
une obligation. On savait que, la stratégie, disons, il restait un an avant le
début de sa révision, parce qu'elle devait se terminer en
2020. Ça fait que, dès 2019, on s'est donné comme obligation de faire un rapport
de vigie à chacune des années, bien, pour aider à la réflexion au fur et à
mesure, pour influencer positivement la rédaction de cette future stratégie,
puis c'est ce qu'on a fait à quatre reprises.
J'y vais de mémoire. Mon prédécesseur, le
premier rapport de vigie qui a été fait, il a recensé les 10 grands
éléments, les 10 grands constats qui ont pu faire... qui ont pu être émis
par le passé, autant par ses prédécesseurs que lui-même, pour dire : Bien,
voici les lumières, on vous donne 10 drapeaux de constats qu'on a on a
formulés par le passé. Puis également il a formulé 10 questions qui
pourraient influencer la rédaction de l'actuelle... du projet de stratégie,
puis le premier, c'était justement l'assujettissement, tu sais, est-ce qu'il
serait le temps d'appliquer le quatrième article, finalement, de la loi. On a
été préoccupés beaucoup par les délais. Parce qu'on a commencé la vigie en
2019, on voyait, on suivait l'état d'avancement puis on est devenus de plus en
plus préoccupés au fur et à mesure que les vigies étaient publiées, finalement.
Également, l'autre élément qui nous préoccupait
puis qui m'a grandement préoccupée, dans le rapport que j'ai publié l'année
dernière, c'est vraiment les consultations. Consultations publiques, c'est...
Le développement durable, c'est une
loi-cadre qui encadre l'entièreté... qui devrait encadrer l'entièreté de toutes
les actions gouvernementales au sein du gouvernement. Ce sont les grands
enjeux de société. Pour les connaître, on doit aller continuer... Désolée.
• (11 h 50) •
La Présidente (Mme Maccarone) : Merci,
Mme Lambert. Nous allons maintenant... Je vais maintenant céder la parole à la porte-parole de l'opposition
officielle, Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce, pour une période de
9 min 50 s.
Mme
McGraw : Merci, Mme la Présidente. Et merci, Mme la
commissaire, de votre présence, et votre mémoire, et votre présentation.
Bien apprécié.
Vous avez dit, vous suivez ça depuis
16 ans, je pense, et même plus. Hier, quand je me suis présentée, j'ai souligné le fait que j'ai été au Sommet de la
Terre, à Rio, donc, lorsque la commission mondiale sur le développement durable
a été lancée. Je suis ça de très près depuis longtemps et je constate qu'il y a
beaucoup de belles paroles depuis longtemps, mais ce qui manque, c'est
vraiment la mise en oeuvre.
Alors, ma
question, ma toute première question, c'est que, dans votre allocution, vous
avez mentionné l'absence de mobilisation au niveau interministériel, avant même
d'aborder... je pense que c'est l'observation n° 1,
avant même d'aborder le contenu de la
stratégie de développement durable. Alors, diriez-vous, donc, que le manque de
coordination et de cohésion interministérielles est l'enjeu numéro un à
l'application en bonne et due forme à la stratégie?
Et aussi on a entendu hier une proposition,
c'est la création d'un secrétariat à l'économie verte, c'est un autre mot pour
«développement durable» — je
comprends que c'est «économie», il y a trois piliers — qui
se rapporterait directement au Conseil... exécutif, je devrais dire.
Mme Lambert (Janique) : Il est
certain que je devais me limiter, hein? Dans le fond, est-ce que c'est le seul
enjeu pour la mise en oeuvre de la stratégie? Je dirais qu'il en fait partie,
il fait partie... Parce que, là, on était plus au niveau du projet de stratégie
et qu'est-ce qu'elle prévoit pour sa mise en oeuvre à l'intérieur du document.
Ça fait que c'est à cet égard-là, dans le
fond, que je me suis positionnée puis que je vous rencontre aujourd'hui, parce
que je crois que les problématiques
de mise en oeuvre sont multiples. Puis vous avez, dans le mémoire... on vous a
fait la liste de tous les travaux
qu'on a faits, puis certainement, dans plusieurs de ces rapports, vous pourriez
voir les causes multiples, là, qui viennent, dans le fond, justifier les
problématiques de mise en oeuvre.
Mme McGraw : Vous avez mentionné,
par exemple, des enjeux sociaux tels que la pauvreté, l'éducation et même la santé. Ils sont peu pris en compte par
certains objectifs. Y a-t-il d'autres enjeux qui vous semblent délaissés?
Ou peut-être, aussi, élaborer sur ces enjeux-là soulignés.
Mme Lambert (Janique) : Bien,
globalement, ce qui... le gros... le grand manque, c'est tout ce qui est lié
aux enjeux sociaux. Puis ce qui me... si je fais le lien en plus avec la
consultation citoyenne qui date de voilà... de plus de deux ans, dans les deux dernières années, la réalité a quand
même évolué, hein? On voit comme les... que ce soit économique, qu'il y
a un impact sur la santé, on voit l'éducation, les grands enjeux. L'éducation,
c'est les citoyens de demain, c'est important pour le développement durable. La
pauvreté, le logement abordable... C'est ça, je pourrais continuer, mais tout
ce volet-là, comme je vous disais, les enjeux qui sont présentés dans la
stratégie, c'est sûr que ce sont tous des
enjeux importants, mais il y a un manque à l'égard de qu'est-ce... La
réflexion, et c'est une réflexion pour les
cinq prochaines années : qu'est-ce qu'on... c'est quoi, la réflexion,
qu'est-ce qu'on veut, vers où on veut aller pour les enjeux davantage sociaux?
Mme McGraw : Une autre question.
Observation n° 7, je pense, un constat très
important, il n'y a aucune démonstration des liens entre les objectifs de la
stratégie et les 16 principes de développement durable de l'ONU énoncés dans la loi. Est-ce que... Je pense que
c'est un constat important. Est-ce que vous pouvez élaborer là-dessus, s'il vous
plaît?
Mme Lambert (Janique) : La prise en
compte des 16 principes... Les 16 principes, ils sont dans la loi,
là, il faut... on doit... ce n'est pas un
choix, c'est pas un «peut», c'est... Dans la réflexion, dans les grandes
interventions, dans les... dans toutes les interventions, dans le fond,
d'un ministère ou de toutes les entités assujetties, ils doivent considérer, prendre en compte l'ensemble des
16 principes. Donc, je me serais attendue, un document si important qu'est
la stratégie de développement durable... fasse la démonstration, qu'il y ait
une prise en compte, qu'il y ait une réflexion
à cet égard-là pour faire le projet de stratégie, et je ne l'ai... je ne l'ai
pas vu. Je ne dis pas qu'il n'a pas été pris en compte, c'est que le
document ne fait pas la démonstration.
Mme McGraw : Une
dernière question avant que je... j'ai ma collègue qui a des questions aussi à
vous poser. Vous avez parlé, dans votre
allocution... vous avez parlé un peu de mise en oeuvre de la stratégie :
incertain, manque de précision, ne pas vous sentir... je ne veux pas
mettre des mots, mais rassurée. Je veux juste comprendre un peu, face à cette
stratégie gouvernementale, quels sont vos... En tout cas, moi, en vous
écoutant, moi, je ne me sens pas rassurée, alors est-ce que vous... Je ne veux
pas mettre des mots, mais est-ce que vous voulez juste élaborer sur cette
attitude, cette réaction face à la stratégie?
Mme Lambert
(Janique) : Oui. Je pense que vous parlez davantage de
l'observation 8. En somme, la stratégie gouvernementale de développement
durable, c'est comme... moi, je dis souvent, lorsque je fais certaines
présentations, c'est un plan stratégique du gouvernement en développement
durable pour les cinq prochaines années. Un plan stratégique... Quelles sont
les bonnes pratiques pour faire un plan stratégique? Bon, supposons, j'irais
aux objectifs, hein, bien, les objectifs
doivent suivre les critères SMART. Après ça, l'objectif, bien, il doit avoir un
indicateur, il doit avoir une cible. Puis même plus, ils disent :
Bien, essayez-donc d'avoir un indicateur qui sont sur les résultats.
Ça fait que, là,
lorsque je regarde la stratégie, c'est sûr que ces éléments-là sont absents,
mais lorsqu'on regarde le libellé, je me
mets à la place d'une entité qui est visée, concernée par la loi, et que je
dois faire un plan d'action, j'aurais de la difficulté à voir c'est où,
quelle cible, vers où je dois aller, qu'est-ce qui m'interpelle puis comment je
peux me dépasser. Parce que l'objectif, c'est d'en faire plus, donc comment,
moi, ministère, organisme, je peux dire, dans mon prochain plan d'action, que
je vais me dépasser? Bien, moi, à la lecture du document seulement, j'ai de la
misère à voir ce... de voir que c'est un outil qui pourrait les aider.
Ça fait que c'est
pour ça que je mentionne, bien : ce sera très important, parce que c'est
sûr qu'il va y avoir certaines attentes qui vont être données spécifiquement à
des ministères, organismes. Mais là je ne les avais pas en ma possession pour
pouvoir me positionner, mais ce sera important de leur donner, ce sera
important de leur donner des indicateurs, des cibles, justement, pour les
mobiliser à faire un plan d'action ambitieux.
La Présidente (Mme Maccarone) : Merci.
Je cède maintenant la parole à la députée de Mille-Îles. Il vous reste
2 min 15 s pour vos échanges.
Mme Dufour : Parfait.
Merci, Mme la Présidente. Merci, Mme Lambert pour votre présence ce matin.
Une question pour
vous : Est-ce que le gouvernement peut atteindre ses objectifs,
réellement, en omettant, dans le fond,
d'assujettir à la stratégie les organismes municipaux, les organismes
scolaires, vous l'avez mentionné, les établissements de santé et services
sociaux? Ce sont trois morceaux énormes, dans le fond, tu sais, du gouvernement,
d'une certaine façon, là, de la société en général. Comment est-ce que vous
croyez qu'il est possible, quand même, d'atteindre la stratégie en ayant tous
ces groupes-là qui ne sont pas assujettis à la stratégie?
Mme Lambert
(Janique) : Bien, il est certain qu'il y a quand même un travail qui
peut tout de même être fait, là, des points d'amélioration pour que les entités
déjà visées par la loi puissent mettre en oeuvre efficacement puis aller vers
un développement durable prometteur pour le futur. Mais, si on en fait
abstraction, des municipalités, le réseau
scolaire, les établissements de santé et services sociaux, c'est une grosse
partie du budget du gouvernement. Je dirais que, juste là, c'est comme
s'il y avait un 40 %, à peu près, qu'on dit que c'est... qu'il n'y a
pas... qui ne seront pas assujettis à la Loi
sur le développement durable. Je dirais, s'il y a quelque chose qui me
préoccupe, c'est davantage ça. Oui, les municipalités, mais ce... je
dirais, ce segment important du budget du gouvernement qui n'est pas assujetti
me préoccupe particulièrement.
Mme Dufour : Tout
à fait.
La Présidente (Mme
Maccarone) : 30 secondes.
Mme Dufour : 30 secondes? Bien, écoutez, je vous remercie
de votre présence, tout simplement, je pense que je n'ai pas le temps de
poser une autre question.
• (12 heures) •
La Présidente (Mme
Maccarone) : D'abord... Merci beaucoup. Nous allons... je vais
maintenant céder la parole au deuxième groupe de l'opposition. Mme la députée
de Verdun, la parole est à vous.
Mme Zaga
Mendez : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci beaucoup, Mme la
commissaire. Il y a... votre rapport et votre mémoire, il est très, très
pertinent. Puis en lisant les observations 3, 4 et 8, en regardant un peu
le processus qui amène à ce projet de stratégie, moi, ma question pour vous,
c'est : En se basant sur la prise en considération des délais, sur comment
le processus de consultations sont pris en compte, est-ce que vous sentez que
le processus respecte l'esprit de la Loi du développement durable?
Mme
Lambert (Janique) : Je crois qu'il faudrait... dans le sens que c'est
certain que les délais sont serrés. J'irais
plus... Je reviens avec le mémoire que je vous ai présenté. La préoccupation,
c'est que la date d'entrée... prévue pour l'entrée en vigueur,
excusez-moi, de la stratégie est prévue le 1er avril. Bien, c'est certain
que, si on se fie sur l'historique, le nombre de mois qui avait été nécessaire
entre les consultations publiques et la date de mise en oeuvre de la stratégie.
Cette fois-ci, je trouve ça quand même assez serré, là, en termes de délai,
pour être en mesure de prendre en considération l'ensemble des points que
différents groupes viennent vous exposer.
Mme Zaga
Mendez : Et quelles sont, selon vous, les conséquences de ce type de
processus?
Mme Lambert
(Janique) : Je crois que ça déborde un petit peu de mon rôle.
Mme Zaga
Mendez : Je comprends.
Mme Lambert
(Janique) : Je crois qu'il faut... Il y a un projet. Il y a un projet.
Le passé, il est où est-ce qu'il est. Là, il y a un projet de stratégie. Il y a
des groupes qui vous présentent des mémoires, des préoccupations, puis c'est de
faire en sorte d'avoir une stratégie de plus grande qualité, c'est à souhaiter.
Mme Zaga
Mendez : Puis, si je peux me permettre aussi, en lisant aussi
l'observation 8, est-ce que vous sentez qu'en l'absence d'indicateurs soit
de performance ou des objectifs avec des cibles... est-ce que la stratégie rate
elle-même sa cible? Est-ce qu'elle aurait la note de passage en ce moment,
telle quelle?
Mme Lambert
(Janique) : C'est très difficile pour moi de me positionner, est-ce
que c'est suffisamment ambitieux ou pas, en l'absence de cette information-là,
puis, peut-être pour mettre un petit peu de... rajouter un petit point sur
votre questionnement précédent, c'est certain que l'enjeu que je vous dis, qui
est un peu... qui est moins... est vraiment moins mis à l'évidence, puis ce
sont les enjeux sociaux, certainement que la stratégie pourrait vraiment être
bonifiée à cet égard-là.
Mme Zaga
Mendez : ...
La Présidente (Mme
Maccarone) :
40 secondes.
Mme Zaga
Mendez : 40 secondes? Puis, en termes de... parce que, là, on est
dans les délais très serrés, et comment vous sentez que l'intégration des
différents avis et consultations... Sentez-vous que c'est réaliste d'arriver
dans quelques mois avec une stratégie beaucoup plus ambitieuse?
Mme Lambert
(Janique) : C'est un bon défi.
Mme Zaga
Mendez : Merci.
La Présidente (Mme
Maccarone) : Et c'est concis, merci beaucoup. Je vais maintenant céder
la parole au député des Îles-de-la-Madeleine. La parole est à vous.
M. Arseneau :
Merci, Mme la Présidente. Mme la commissaire, je salue vos collègues
également, merci beaucoup pour ce recadrage de la stratégie, à quoi ça sert et
comment le gouvernement devrait se saisir de cette stratégie-là pour faire
vivre la Loi sur le développement durable dans toutes les composantes de la
société.
C'est un projet de
société où on voit qu'il y a certains éléments très importants, notamment dans
le budget du Québec, qui échappent complètement, là, à l'assujettissement à
certains objectifs qu'on devrait partager pour le développement durable et dans certaines dimensions que vous avez
mentionnées, qui sont absentes, éducation, santé, etc., mais votre rapport, pour moi, c'est un rapport coup
de poing, là, qui nous ramène sur terre en nous disant... Essentiellement,
c'est comme... On est dans un navire sans gouvernail et on ne sait pas trop
d'où on vient parce qu'on n'a pas de rapport. On ne sait pas trop la direction
qu'on veut prendre, où est-ce qu'on veut aller. On a perdu le cap, on est dans le brouillard, mais là on a
décidé de mettre à fond, là, les machines pour avancer. Alors, l'équipage n'est
pas trop motivé, du moins, pas trop engagé. Il y a des hauts dirigeants qui ne
le sont pas puis il y a certains autres membres à qui on dit : Bien,
ça ne vous concerne pas jusqu'à présent, là, à moins qu'on change d'avis.
C'est un peu
décourageant, le portrait que vous nous faites, mais j'aimerais quand même vous
demander si, au stade où on en est rendus, à votre point de vue, puisqu'on est
si en retard sur les échéanciers puis qu'on n'a pas un bilan de ce qui a été
fait, les dernières années... Stop ou encore, comme disait Plastic Bertrand?
Est-ce que je m'arrête ou je continue? On continue à faire quelque chose sans
savoir où est-ce qu'on s'en va ou on prend plus de temps pour faire quelque
chose qui a de l'allure, selon vous?
Mme Lambert (Janique) : C'est
une question très difficile à répondre. Je vous dirais que je me... Je
reviendrais à ce que j'ai... je vous
ai mis dans le mémoire, les huit observations, puis, par la suite, je pense que
ça... la décision, là...
M. Arseneau : Je m'attendais un peu
à cette réponse-là et je respecte, évidemment, là, votre rôle dans la démarche,
mais, lorsqu'il est question de faire un suivi, est-ce que vous pensez que
les... Je pense que vous l'avez quand même abordé, là,
mais on doit resserrer les processus évoqués tout à l'heure, le fait que les
hauts dirigeants devraient se rencontrer sur une base plus régulière. C'est des
mécanismes de suivi qui manquent à l'heure actuelle, c'est qu'on met une
stratégie en place puis on pense qu'elle va vivre toute seule, alors que ça ne
se fait pas si simplement? Je simplifie, mais est-ce que...
Mme Lambert (Janique) : Nous, de
notre côté, dans le fond, c'est factuel, hein? On regarde... Bon, on regarde
quelles sont les règles, comment ces comités-là doivent fonctionner. On regarde
s'il y a eu des rencontres, est-ce qu'il y a des gens qui se sont fait
remplacer, tout ça. Par la suite, pourquoi qu'ils se sont fait remplacer, on n'est pas allés jusque-là. Dans le fond, c'est
factuel. Il y a un mécanisme qui a été mis en place puis qui a été réfléchi de
telle façon pour que ça fonctionne bien. Dans le fond, il faut s'assurer que ce
soit... que ça suive son cours tel que planifié.
La Présidente (Mme Maccarone) : 30 secondes.
M. Arseneau : 30 secondes?
Donc, si je comprends bien, les mécanismes, vous ne les contestez pas, mais
peut-être qu'on ne les a pas suivis. Il y a des retards, notamment, puis il y a
un mécanisme qui existe, mais qui ne sont pas utilisés à leur plein potentiel,
de façon optimale. C'est ça?
Mme Lambert
(Janique) : Bien, je dirais, de commencer par, dans le fond,
utiliser de façon optimale les mécanismes, puis après on verra.
La Présidente
(Mme Maccarone) : Merci. Merci beaucoup, Mme Lambert,
Mme Fortin, Mme Grenier, pour vos contributions à nos travaux.
Je suspends
les travaux quelques instants afin que nous puissions accueillir le prochain
groupe. Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à 12 h 07)
(Reprise à 12 h 10)
La Présidente (Mme Maccarone) :
Alors, rebonjour. Nous allons reprendre nos travaux, et je souhaite la
bienvenue aux représentants de Vivre en ville. Je vous rappelle que vous
disposez de 10 minutes pour votre exposé, après quoi nous procéderons à la période d'échange avec les membres de
la commission. Alors, je vous invite donc à vous présenter puis à
commencer votre exposé.
Vivre en ville
M. Savard (Christian) : Bonjour à
tous. Mon nom est Christian Savard, directeur général de Vivre en ville.
Mme Robin (Jeanne) : Bonjour, Jeanne
Robin, je suis directrice principale de Vivre en ville.
M. Savard
(Christian) : Merci à la commission de l'invitation pour vous
parler... pour parler de la stratégie de développement durable, toujours
intéressant aussi, là, lorsqu'on est en amont d'un processus, de parler en
commission.
Je suis
maintenant le directeur général de Vivre en ville depuis maintenant plus de
15 ans. Donc, j'étais là en 2007, lors de l'adoption de la
première... du projet de loi et de la stratégie. En 2007, le Québec était, on pourrait
même dire, en avance sur... en matière de développement durable, en adoptant
cette loi-là. On l'avait... Elle avait été adoptée... Aussi, les premières stratégies étaient relativement volontaires,
justement. On y allait progressivement parce qu'on mettait en place un
nouveau projet de société, en quelque sorte, de faire en sorte que le Québec se
mette sur la voie du développement durable et change ses manières de faire.
Malheureusement, force est de constater que nous
avons... que la stratégie, en tant que telle, même si la société québécoise a
tout de même progressé... la stratégie, en tant que telle, elle a fait du
surplace. Elle a souvent tombé derrière
d'autres dossiers qui étaient tout aussi importants. Je vais parler des
changements climatiques, mais difficile de réussir nos efforts de
changements climatiques sans développement durable, sans les changements
profonds de la transition socioécologique, qui sont nécessaires.
Donc, ce qui est... Notre constat, et mon
constat de vétéran du milieu, c'est que, pourtant, l'urgence est encore plus forte aujourd'hui. On avait pris, à la
limite, un peu d'avance. On était bien positionnés, en 2007, et nous ne le sommes plus, et les mécanismes contenus dans la
loi... dans la stratégie et dans la loi, probablement, ne conviennent
plus pour y arriver. Je pense que la commissaire l'a dit, l'a dit juste avant,
que, somme toute, on n'y arrivait pas, et qu'il faut prendre un certain nombre
de virages. Ce n'est pas parce qu'on n'y est pas encore tout à fait arrivés
qu'il faut baisser les bras. Le meilleur
moment de commencer, véritablement, c'était en 2007, le deuxième meilleur
moment, c'est aujourd'hui.
Donc, notre... une des manières d'y arriver,
c'est de se donner des objectifs, d'y aller par résultats plutôt que de manière
volontaire. C'est une de nos recommandations. On est également... On souscrit
également à la stratégie du
regroupement G15+, dont on est un des membres fondateurs, d'insérer et de
les articuler, notamment, avec des objectifs, les 16 principes du
développement durable, d'insérer des indicateurs au coeur de l'État québécois,
d'insérer des indicateurs de bien-être, parce qu'en
quelque part, si on veut le développement durable, c'est également pour assurer
le plein épanouissement des humains.
Donc, on propose... On propose... Effectivement,
on souscrit à cet objectif-là, et c'est un projet de société. On ne peut pas
tout changer au même rythme. Il y a des choses que l'État peut faire pour
modifier les comportements, pour faciliter certaines choses, certains choix
qu'on peut faire collectivement ou individuellement, mais un des aspects où on
a voulu se concentrer dans notre mémoire, parce que c'est toutes des choses que
vous allez... vous avez entendu probablement depuis le début, bien, on a eu le goût,
dans notre mémoire, pour contribuer à vos réflexions, que la stratégie devrait
être très exigeante sur l'exemplarité de l'État. L'État, c'est un gros morceau de la société. C'est un très gros morceau de
l'économie. C'est le plus grand employeur. C'est le plus grand propriétaire
foncier.
Et donc, dans ses propres, dans ses propres
manières de travailler, la stratégie devrait être particulièrement exigeante et contraignante sur qu'est-ce que fait
l'État, et donc parce qu'il y a des choses que, nos citoyens, on peut leur
demander de faire pour atteindre le développement durable, mais il va falloir y
aller de manière plus progressive, mais l'État peut décider, demain matin, de
faire un certain nombre de choses, et puis ne plus faire qu'est-ce qui n'est pas conforme au développement durable, et
malheureusement ça arrive dans ses propres pratiques, comme employeur,
comme acheteur, comme constructeur.
Donc, je vais laisser Jeanne Robin continuer sur
cet aspect en donnant un exemple précis.
Mme Robin (Jeanne) : Oui, merci.
Donc, parmi les leviers que l'État a à sa disposition pour opérer sa gestion...
la gestion durable de ses activités, on a voulu attirer votre attention sur le
levier financier, d'une part, et le parc immobilier, d'autre part, un élément
très important.
Pour ce qui est du levier financier, le projet
de stratégie met assez bien de l'avant le rôle des marchés publics comme levier
de croissance durable. Donc, effectivement, c'est important que, quand l'État
achète, il contribue à appliquer le développement durable sous toutes ses
facettes. C'est également important que, quand l'État finance, il fasse la même chose. C'est pour ça que notre
septième recommandation consiste à adopter des critères d'écoconditionnalité
dans les programmes de soutien financier gouvernementaux, et on recommande que
ce soit particulièrement le cas dans les
programmes de soutien aux infrastructures parce qu'elles vont déterminer la
façon dont le territoire s'organise, et donc avoir un effet
d'entraînement important.
L'autre levier important, donc, c'est le parc
immobilier. Vous le savez, l'État, c'est le principal acteur immobilier au
Québec. Un bâtiment, c'est évidemment sa construction, mais ça va ensuite être
son opération pendant des décennies. Ça va avoir un effet, l'utilisation du
bâtiment, bien sûr, sur l'énergie utilisée pour le chauffer et le climatiser,
par exemple, mais ça va avoir un effet aussi très important sur les
déplacements parcourus pour se rendre dans ce bâtiment-là.
Et d'ailleurs la stratégie met assez bien de
l'avant l'importance de la localisation, puis on va rentrer dans le détail sur
cet élément de localisation, mais, auparavant, préserver le patrimoine bâti, ça
rejoint beaucoup d'objectifs de développement durable, de réutiliser un
bâtiment plutôt que d'en construire un nouveau. Ça a des effets positifs sous
plusieurs aspects. Donc, notre recommandation 8... pardon, notre
recommandation 8.1 serait de privilégier la protection et la valorisation
des bâtiments existants, notamment patrimoniaux, à la construction de bâtiments
neufs. Vous allez d'ailleurs rejoindre plusieurs objectifs de la stratégie de
l'architecture et de l'aménagement du territoire, dont le plan de mise en
oeuvre est en cours d'élaboration.
J'en arrive à la localisation. On invite, à
travers la stratégie de développement durable, à faire un pas réel vers la
localisation écoresponsable des activités de l'État parce qu'elles ont un effet
structurant et à long terme sur la structure urbaine, sur l'utilisation du
territoire, sur les besoins de déplacements et même d'infrastructures et de
services publics. La localisation d'un équipement public, pour être
écoresponsable, devrait tenir compte de son rôle. Il y a des activités de
proximité, comme les écoles, comme les CLSC, qui doivent, bien évidemment, se
situer plus au coeur des quartiers qu'elles desservent, mais il y a aussi des
services qui sont plutôt des services spécialisés.
Quand on pense à un grand équipement public
comme un musée, par exemple, bien, à ce moment-là, son accessibilité va être
davantage pensée à l'échelle régionale. Donc, il devrait être dans une
centralité plus importante, comme un
centre-ville, et, tous les équipements publics qui concentrent une importante
densité d'emplois, on devrait, à ce moment-là, penser leur accessibilité
à la fois dans les centralités, mais aussi aux abords du réseau de transport
collectif structurant, lorsqu'il est disponible. Donc, notre
recommandation 8.2 serait d'adopter des critères de localisation
écoresponsables adaptés au rôle des édifices publics et privilégiant
l'accessibilité et la sobriété foncière.
Enfin, évidemment, on a un objectif de réduction
des émissions de gaz à effet de serre. Ça passe, en priorité, par le fait d'éviter de générer d'autres sources
d'émission. Donc, notre recommandation 8.4 serait de bannir dès maintenant
le gaz naturel des édifices gouvernementaux
neufs — évitons
d'introduire des énergies fossiles dans ce qu'on construit à partir d'aujourd'hui — et
de planifier son remplacement rapide dans les bâtiments existants par des
sources d'énergie renouvelable.
• (12 h 20) •
M. Savard (Christian) : Pour
conclure, évidemment, vous aurez compris que, Vivre en ville, notre passion, notre obsession, c'est comment on bâtit nos
collectivités, nos quartiers, nos villes. Dans ce cadre-là, notre
recommandation n° 3 vise évidemment à assujettir les
villes à la stratégie, et, de manière générale, il faudra les appuyer, et une
des choses qu'il faudra faire à très court terme... et on profite de la tribune
pour mentionner que le financement du
transport collectif, partout au Québec, est un enjeu, et on est en train de
frapper le mur. Donc, il y a urgence de travailler là-dessus, mais
évidemment la future politique nationale d'architecture et d'aménagement qui
est en train... dont on est train de concevoir le plan
d'action, devrait être à la hauteur, et ce sera une manière d'appuyer une stratégie de développement durable pour que les
villes embarquent, et donc on est en train de prendre ces
décisions-là, c'est pour ça que je vous mentionne ces dossiers-là,
notamment à travers des appuis financiers, par exemple un fonds d'aménagement
et urbanisme durables.
Donc, on vous remercie de votre attention. Et on
a réussi en 10 minutes. C'est bon. Merci.
La
Présidente (Mme Maccarone) : Merci beaucoup pour votre exposé. Nous allons
maintenant débuter la période des échanges, et je cède la parole à M. le
ministre. La parole est à vous.
M. Charette : Merci, Mme la
Présidente. Merci à vous deux d'être présents, d'abord, pour nous partager
votre mémoire, mais pour le travail que vous faites. Vous avez mentionné...
c'est plusieurs années, ne serait-ce que vous deux, au sein de l'organisme, et
l'organisme est aussi un incontournable parmi les interlocuteurs en matière de
développement durable.
Deux sujets, pour ma part. Je sais qu'il y a des
collègues qui veulent intervenir aussi. Je vais commencer par le dernier, celui que vous avez abordé, là, il y a
quelques secondes tout juste, au niveau de la future politique en matière
d'aménagement du territoire. À mon sens, il y a trois conditions nécessaires,
sinon gagnantes. Il y avait la question du
premier droit de refus qui a été réglée, là, déjà, le printemps dernier. Il y a
deux autres étapes, par contre, qui demeurent très importantes, c'est la modification de la loi sur tout ce qui est
expropriation, ça étonne toujours des gens lorsqu'on rappelle que ce
n'est pas l'Environnement ou ce n'est pas les Affaires municipales qui
s'occupent de ça, mais bel et bien les transports, mais c'est quelque chose qui
devra se faire rapidement, mais il y a aussi une modification ou des
modifications à la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme.
Le volet expropriation, on sait tous ou on a une
bonne idée où on s'en va, mais les modifications à la Loi sur l'aménagement et
l'urbanisme, je serais curieux de vous entendre quels seraient les
incontournables ou qu'est-ce qui devrait
être fait au niveau de cette loi-là pour éviter un scénario que les villes nous
ont rappelé encore hier. C'est-à-dire, dans certains cas, elles veulent
procéder, mais elles sont très rapidement menacées de poursuites, sinon carrément
poursuivies pour expropriations déguisées.
Donc, je ne sais pas, déjà, nous donner un petit peu votre point de vue, là,
sur ce qui devrait être modifié au niveau de la LAU.
M. Savard (Christian) : De manière
générale, bien, la Loi sur l'expropriation va déjà beaucoup aider. C'est
vraiment un très gros morceau et c'est pour ça qu'il fait l'unanimité, du monde
municipal à toute la société civile, notamment les groupes environnementaux.
Ça, c'est un point important. Le plus important, ça va être que les municipalités qui ne veulent pas jouer le jeu,
parce qu'il y a de plus en plus... C'est vraiment un changement drastique
qu'il y a eu depuis que je suis là, et c'est pour ça que je suis encore là,
parce qu'il y a de l'espoir, de plus en plus de municipalités jouent le jeu,
mais il y en a qui ne jouent pas le jeu puis il y en a qui ne veulent pas faire
du développement durable, qui veulent continuer à bouffer le territoire, à être
des prédateurs de territoire, qui sont un peu,
des fois, trop proches des promoteurs, qui... Ils voient le développement
comme : On va toujours aller toujours plus loin, les milieux
naturels, les milieux agricoles, ce n'est pas important. La loi devra faire en
sorte que tout le monde soit obligé de jouer
le jeu, parce que, sinon, les règles du jeu sont injustes, et les bons joueurs
se retrouvent pénalisés parce qu'on n'y joue pas les mêmes règles, et,
bon, bien, ils se retrouvent avec moins de revenus, des choses comme ça.
Donc, la loi devra faire en sorte que les règles
du jeu soient égales pour tout le monde. La révision des schémas d'aménagement,
il y a des MRC qui ne les ont pas révisés depuis 20, 25 ans, qui sont sur
de vieilles, de vieilles législations,
qui... et ils se disent : Ah bien! C'était permis dans l'ancien schéma qui
s'est fait sous un autre régime qui était moins exigeant. L'obligation, déjà,
de réviser le schéma, en fonction des nouvelles orientations, en raison
des nouveaux objectifs qu'on a, m'apparaît essentielle. C'est une loi qui doit
devenir plus juste une loi de procédure, mais une loi avec des intentions, et
ça, en ce moment, c'est essentiellement une loi de procédure. Donc, donner des intentions à la loi et donner des... un mordant à
la loi de la même manière qu'il faut donner du mordant à la stratégie de développement
durable est essentiel.
M. Charette : La LAU, donc, dans
cette perspective-là?
M. Savard (Christian) : Oui, c'est
ça.
M. Charette : Autre élément, et un
rappel très subtil, je ne sais pas si vous le percevez, mais mes collègues qui
me rappellent qu'ils veulent intervenir aussi, donc je ne prendrai pas trop de
temps.
Vous avez parlé du bâtiment. Ça aussi, c'est
quelque chose qui est souvent méconnu. On parle beaucoup des transports comme principale source d'émissions,
c'est vrai, il faut s'y attaquer. On parle beaucoup de la grande industrie
comme principale source d'émissions, c'est vrai, il faut s'y attaquer. On
oublie beaucoup les trois autres secteurs. Agriculture, dans certains
cas, on peut comprendre, gestion des déchets, on peut comprendre, mais bien des
gens ne réalisent pas que les bâtiments...
le bâtiment est une source importante d'émissions. Vous parlez de l'exemplarité
de l'État. J'en suis. Est-ce qu'on
est rendus prêts à légiférer ou à réglementer au niveau de la transition
énergétique des bâtiments?
M. Savard (Christian) : Je pense
qu'on est prêts. La ville de Montréal a montré la voie, assez fier d'avoir participé à ces travaux-là aussi, donc, a montré
la voie où est-ce que le bâtiment neuf ne sera plus assujetti... Il
ne sera plus possible d'être raccordé, par exemple, au gaz, donc ne
pourra plus émettre de gaz à effet de serre. Il va falloir la transition dans le bâtiment existant. Je profite de
l'occasion, quand même, de rappeler l'importance de la bonne localisation des
bâtiments parce qu'après ça, en matière de besoins en transport, c'est une
bonne manière de réduire à la source, et les
bâtiments gouvernementaux ne sont souvent pas des bons joueurs par rapport à
ça, et, encore une fois, la LAU pourrait être plus exigeante, mais
l'État peut en faire plus par rapport à ça. Les écoles, par exemple, sont
souvent localisées loin des bassins de population. On a fait des améliorations
sur l'architecture des écoles, sur la consommation énergétique. Je répète, il
ne faut pas oublier l'aspect localisation, mais, oui, on est mûrs, et c'est
un... On parle souvent de fruits mûrs en
matière de changements climatiques. Le bâtiment et leur énergie opérationnelle,
là, est un fruit mûr qu'on ne devrait pas hésiter à aller de l'avant...
M. Charette : Merci.
La Présidente (Mme Maccarone) : Merci.
Je cède maintenant la parole à la députée de Châteauguay.
Mme
Gendron : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour, M. Savard, Mme Robin. Merci pour le beau
mémoire, et j'apprécie votre positivisme. Donc, un grand merci d'être là
aujourd'hui avec nous.
En fait, j'aimerais aborder le sujet du parc
immobilier public. Comme M. le ministre disait, donc, oui, l'exemplarité
de l'État, en effet... Par contre, j'aimerais que vous m'en disiez plus
puisque, comme que vous le savez, les villes sont déjà densifiées. Donc, je ne
sais pas si vous parlez de déplacement du parc immobilier public ou, en fait, je ne sais pas si, non plus,
parallèlement à la préservation du patrimoine bâti, on tient compte aussi de la
Loi sur l'expropriation. J'aimerais que vous m'en disiez plus sur le
plan, là, ou de la façon que vous le voyez.
Mme Robin
(Jeanne) : Vous mentionnez que les villes sont déjà
densifiées, puis effectivement la densification des villes est en bonne marche. Cela dit, il reste encore beaucoup
d'espace inutilisé au coeur des villes, et l'enjeu, quand un ministère,
un organisme ou un autre organisme public fait un choix de localisation pour un
de ses bâtiments, c'est que ce qui prime,
c'est souvent deux choses, c'est d'abord le prix du terrain, et on sait que,
dans les centralités, ça coûte plus cher, et ensuite les programmes
fonctionnels et techniques qui obligent à un certain format de terrain,
souvent, pour des questions, par exemple, de
disponibilité de places de stationnement, qui obligent à avoir des terrains
très larges.
Donc, souvent, les organisations publiques
déterminent qu'est-ce qu'elles veulent avoir comme bâtiment, et ensuite elles cherchent sur le territoire où
est-ce qu'on va pouvoir installer ce type de bâtiment là. Ce faisant, on prend
un peu le problème à l'envers, parce qu'avant tout ce qui est important, c'est
de desservir la population. Donc, de regarder d'abord les terrains disponibles
et ensuite de considérer de quelle façon on peut répondre aux besoins de la
population sur un territoire réel, qui est déjà construit, serait sans doute
une démarche plus intéressante.
Et, en ce qui concerne le prix, on oublie
souvent de considérer l'ensemble des coûts collectifs puis toutes les
externalités. Donc, quand on considère seulement le prix d'achat et le prix de
construction du terrain, ce qui conduit, par
exemple, à éviter de s'installer sur un terrain contaminé parce que ça va
coûter cher, la décontamination, on oublie tout l'avantage qu'il y a à
justement réhabiliter un terrain contaminé, c'est un avantage collectif. On
oublie aussi tous les coûts qui pourraient être associés à une installation en
périphérie qui pourrait faire en sorte qu'une congestion automobile... faire en
sorte qu'il faut augmenter, par exemple, la capacité routière, des choix dont
on sait qu'ils ne sont pas efficaces à long terme.
Donc, de considérer l'ensemble des coûts
collectifs à moyen terme ferait sans doute en sorte qu'on réviserait les choix.
Donc, il ne faut pas regarder seulement ce que ça coûte le jour de l'achat et
le jour de la construction, mais vraiment pour la durée de vie du bâtiment et
de toutes les activités qu'il va générer.
• (12 h 30) •
Mme Gendron : Je n'ai pas d'autre
question.
La Présidente (Mme Maccarone) : Merci
beaucoup. Je cède maintenant la parole au député de Masson.
M. Lemay : Merci, Mme la Présidente.
Très content de vous retrouver ici, en commission, aujourd'hui. Et je vais
faire du pouce sur mes collègues ainsi que le ministre et parler de la
décarbonation des édifices publics parce que ça fait une grande partie de votre
mémoire, mais ce qui m'intéresse aussi, c'est quand vous mentionnez les
préoccupations pour la gestion de l'heure de pointe, d'approvisionnement
énergétique et... pour faire du pouce sur la question
du ministre tout à l'heure, là, lorsqu'on mentionnait : Est-ce que vous
voudriez qu'il ait une réglementation ou... tu sais, de faire en sorte
que les nouveaux bâtiments dans... soient assujettis dans... avoir zéro impact
net sur l'heure de pointe. Donc, j'aimerais vous entendre plus spécifiquement
sur ce point.
M. Savard
(Christian) : Encore une fois, par rapport... Vous voulez dire
sur la pointe énergétique... Il n'y a aucune raison, connaissant
l'urgence climatique, qu'on utilise, dans le bâtiment neuf, encore du gaz. Ce
n'est pas... On le sait... On sait que, dans certains bâtiments qui existent,
les équipements ont été installés il y a trois, quatre ans. D'un point de vue de
développement durable, de vouloir toutes les changer d'un coup, surtout avec la
pointe à gérer éventuellement, on sait que ce n'est peut-être pas une bonne
idée. Par contre, lorsqu'on remplace... Et c'est pour ça qu'à titre d'exemple
la biénergie devrait être le plus court possible comme programme, si... Et,
lorsqu'on construit du neuf surtout, il n'y a aucune raison de le faire.
Donc, l'exemplarité
de l'État fait en sorte qu'il faut le faire. Pour l'État, ça devrait être
demain matin que l'instruction soit donnée à la SQI qu'il n'y a plus de
bâtiments avec du gaz dedans. Demain matin, ça pourrait être fait,
là. Ce n'est pas... Ça devrait être ça, l'instruction, mais ça devrait
également devenir une législation à l'échelle... à l'échelle du Québec. Sinon,
on n'y arrivera jamais. Et effectivement, s'il y a bien un enjeu qui ne fait
pas déchirer des chemises dans les chaumières, là, c'est ça. Il n'y a pas...
Les gens veulent juste être chauffés. Que ça soit chauffé au gaz ou à
l'électricité, ça ne leur dérange pas, là. Donc, vraiment, il faut aller de
l'avant avec ça, c'est très important. Mais ça reste quand même des choses
relativement faciles à faire. Et je veux juste mentionner que le développement
durable devra aller plus en profondeur. Je voulais spécifier.
M. Lemay : Puis,
en précision à cette explication-là, je vous vois faire un cas de figure. On
dit : «Tout nouveau bâtiment doit être carboneutre, avoir zéro impact sur
la pointe énergétique», donc développez vos propres systèmes pour justement... Puis c'est pour ça, ma question. C'est à
savoir : Est-ce que vous pensez qu'il devrait y avoir de la
réglementation qui viserait, par exemple, que tout nouveau bâtiment en heure de
pointe énergétique devrait avoir leur propre système pour faire en sorte qu'il
y ait zéro impact sur la pointe énergétique? C'est un peu ça, le sens de ma
question.
M. Savard
(Christian) : Oui. Bien, il va falloir y arriver. Il va falloir y
arriver. Sans être un expert de l'ensemble de la question énergétique, quelle
partie on est capables de faire, quelle partie on n'est pas capables de faire,
mais on est conscients de cet enjeu-là.
M. Lemay :
Parfait.
M. Savard
(Christian) : Donc, oui, il va falloir l'avoir. Mais, première chose à
faire, c'est arrêter d'émettre des gaz à
effet de serre. On sait qu'il va y avoir des stratégies de production
d'électricité. Je ne veux pas rentrer... Il y a un autre projet de loi, il paraît, à étudier en ce
moment là-dessus. Mais, surtout dans le neuf, il faut commencer, lorsqu'on
fait le renouvellement aussi.
Et
je profite de l'occasion aussi, on parlait aussi du recyclage de bâtiments. On
sait qu'on a des enjeux patrimoniaux au Québec. Des fois, le
gouvernement du Québec peut être un très bon joueur pour venir appuyer,
justement, puis venir contribuer à la reconversion, installer des bureaux, des
nouveaux bâtiments au lieu de construire toujours neuf. L'État québécois peut
jouer un grand rôle là-dessus.
M. Lemay : Merci.
La
Présidente (Mme Maccarone) :
Merci beaucoup. Je cède
maintenant la parole à la députée d'Argenteuil.
Mme Grondin :
Il me reste combien de temps, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme
Maccarone) : 3 min et 27 s.
Mme Grondin :
Génial. M. Savard, Mme Robin, bonjour. J'ai grandement apprécié
l'approche que vous avez prise, de dire : On va se concentrer sur
l'exemplarité de l'État. Puis moi, j'irais plus dans l'aspect plus parc
immobilier. J'ai bien aimé, M. Savard, quand vous nous avez expliqué ce
qui vous animait et que vous avez encore de l'espoir après 15 ans parce
que vous voyez que les choses avancent, peut-être pas aussi vite qu'on
voudrait, mais les choses avancent.
Moi, ce que je
voudrais vous dire, c'est ce qui m'anime depuis toujours, c'est la vitalité des
cantons et des municipalités rurales chez nous. Et, dans ce sens-là, j'aimerais
ça qu'on revienne sur la question de l'orientation 2. On parle de parc
immobilier, mais de verdissement. Le terme «verdissement», je vais vous avouer
que ça m'amène toujours à cette notion-là, de : on va restaurer, on va
faire reverdir ou verdir, dans un contexte où vous comprendrez que moi, au
niveau... dans mon comté... Est-ce que vous avez... Dans l'orientation 10,
on parle d'agir en faveur de la nature. Il y a deux objectifs, il y en a un qui
est de préserver et il y en a un qui est plutôt d'améliorer les écosystèmes.
Est-ce que vous avez une position sur qu'est-ce qui est prioritaire l'un par
rapport à l'autre?
M. Savard
(Christian) : Évidemment, ne pas détruire ce qui est déjà vierge
m'apparaît particulièrement prioritaire, des... qui n'a jamais été... C'est là
où est-ce que les services écologiques sont les plus importants. C'est là où
est-ce qu'évidemment il y a déjà des écosystèmes. La restauration, dans la
priorité, hein, on sait toujours que la restauration arrive en deuxième. C'est
pour ça que, notamment à travers les travaux entourant la Politique nationale
d'architecture et d'aménagement, on pense que le Québec devrait viser zéro
étalement net.
Juste
peut-être revenir sur le commentaire : Les villes sont
déjà densifiées. Les villes ne sont pas suffisamment densifiées. Il y a trop de terrains qui sont
sous-utilisés au Québec. Notre utilisation du territoire a augmenté trois fois
plus vite que notre augmentation de la population dans les dernières
décennies. Ça, c'est vraiment un indicateur contraire à un développement durable. Et, s'il y a bien un indicateur qu'on
devrait avoir, là, c'est mesurer ça, parce que... Et, en faisant ça, en
faisant en sorte que notre... qu'on réussit à prendre notre croissance
démographique dans le territoire déjà
urbanisé plutôt qu'en milieu agricole, en milieu naturel, c'est... sur notre
territoire, c'est probablement un des plus grands gains qu'on peut faire en matière de développement durable parce
que c'est une manière de recycler le territoire, il y a quelque chose comme une économie circulaire, mais de préserver ce
qu'il y a actuellement. On a été des prédateurs pour le territoire.
C'est le temps de devenir des réparateurs pour le territoire, et donc ça veut
dire aussi reverdir à certains endroits.
Mme Grondin : Merci
beaucoup.
M. Savard (Christian) : Merci.
La Présidente (Mme Maccarone) : Merci
beaucoup. Je cède maintenant la parole à la porte-parole de l'opposition
officielle. Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce, la parole est à vous.
Mme McGraw : Merci, Mme la
Présidente, et merci, M. Savard et Mme Robin, de votre présence et
aussi de votre mémoire. J'ai beaucoup apprécié la structure, les
recommandations, mais aussi les dossiers urgents.
Donc, juste... Par rapport aux trois premières
recommandations, vous avez parlé d'élargir le périmètre de la stratégie
vis-à-vis les réseaux parapublics, mais aussi les municipalités locales et
régionales, à l'intérieur de ça aussi, les autres ministères, organismes, etc.,
donc au niveau du gouvernement. Vous parlez de... Vous avez parlé d'établir des
attentes fondées sur l'atteinte des résultats, mais... et non seulement la
participation. Donc, la question que je me pose... Donc, il y a tout un défi
d'élargissement, mais aussi, au niveau du gouvernement même, de l'implication
d'autres ministères qui sont concernés par le développement durable, non
seulement en environnement, mais dans tout ce qui est économique et social.
Donc, la question... en termes de résultats,
vous avez parlé de cibles, qu'on n'a pas de cible, puis ça a été noté, il n'y a pas de cible dans la stratégie.
Donc, vous avez mentionné la cible zéro étalement net, par exemple. Est-ce qu'il y a d'autres cibles que vous voulez
souligner? Et qu'en pensez-vous, de cibles intérimaires ou périodiques,
c'est-à-dire pas juste en 2030, 2050,
etc., mais à chaque année, par exemple, ou à l'intérieur d'un mandat d'un
gouvernement, par exemple?
M. Savard (Christian) : L'esprit...
Bien, d'abord, dans les cibles, une des choses... je réitère les indicateurs du
bien-être du G15+, mais on peut... il y a également, par exemple, la Politique
de mobilité durable, parce qu'il faut, à la fin, que tout ça se parle. C'est
une stratégie de développement durable, mais elle ne doit pas dire des choses
contraires aux autres politiques sectorielles. À titre d'exemple, la Politique
de mobilité durable a un certain nombre d'objectifs sur les parts modales, sur
l'accès à du transport actif, transport collectif partout au Québec.
Donc, de manière générale, là, pour Vivre en
ville, il y a beaucoup de politiques gouvernementales qui vont dans la bonne direction, parfois pas assez loin
face à l'urgence, mais, somme toute, si on atteignait déjà ce qu'on s'est
dit, c'est la même chose pour la stratégie,
on aurait progressé. Le problème, c'est qu'on... souvent, on n'atteint pas nos
résultats. Donc, il y a actuellement, dans
l'appareil gouvernemental, un certain nombre de cibles qui sont bonnes, et on
propose que le G15+ plus le fasse également.
• (12 h 40) •
Dans les cibles intermédiaires, et c'est une
des... un message de notre mémoire, c'est... il va falloir être très exigeant
sur l'exemplarité de l'État parce que ça, c'est quelque chose que... l'État a
tous les contrôles. Lorsqu'on demande les
cibles qui concernent le comportement des citoyens, par exemple, on ne contrôle
pas tout, là. Il y a des choses que...
Tu essaies une stratégie, ça ne fonctionne pas. Des fois, ça... Donc, ça, c'est
une autre chose. Puis, les nouveaux organismes assujettis, bien, on ne
pourra pas commencer à être aussi exigeants avec eux que l'État peut l'être
envers soi-même, dans un premier temps.
Donc, effectivement, il y a une gradation. Mais
une chose est sûre, faire qu'est-ce qu'on fait depuis 16 ans par rapport à
la stratégie développement durable est insuffisant et fera en sorte que le
Québec ne fera pas sa part pour relever
l'urgence climatique, l'urgence environnementale. Il y a ce message-là que je
veux passer, parce qu'effectivement il y a des choses qui vont dans la
bonne direction, il y a des bouts où est-ce qu'on dit : Eh! c'est le fun,
on s'en va là, mais on n'y va pas assez vite puis on n'y va pas assez loin, et,
ça, force est de constater que ce qu'ils ont fait depuis 15, 16 ans ne
fonctionne pas au niveau de la stratégie, d'où l'importance des indicateurs et
des résultats pour bien mesurer les choses.
Une voix : ...
M. Savard (Christian) : Que l'espoir
se transforme en résultats concrets.
Mme McGraw : Je voudrais céder mon
temps à ma collègue, s'il vous plaît.
La Présidente (Mme Maccarone) : Parfait.
Alors, je cède la parole à la députée de Mille-Îles.
Mme Dufour : Merci, Mme la
Présidente. Merci. Je ne sais pas si... En tout cas, on se connaît, donc je
vous remercie d'être présents.
Écoutez, vous avez mentionné... vous recommandez
d'élargir le périmètre de la stratégie aux villes et aux MRC. On peut lire, par
contre, dans la stratégie, que, dans le fond, les villes qui ont été... disons,
qui n'appliquent pas de démarche de
développement durable soulignent qu'une partie, c'est le manque de ressources
humaines, le financement aussi. Et donc c'est un enjeu, le financer pour
les villes, particulièrement les plus petites localités qui ont beaucoup moins
de moyens. Vous avez parlé qu'il fallait les appuyer.
Vous avez
mentionné, peut-être, le financement de transports en commun, mais est-ce qu'il
y a d'autres façons? Parce que c'est
quand même... D'amener une stratégie de développement durable a quand même
certains coûts au départ. Il y a généralement des bénéfices à plus long terme, mais qu'est-ce que
vous recommanderiez pour que ça puisse, disons, se faire sans trop de
heurts pour ces petites villes là?
M. Savard
(Christian) : J'irais... Par rapport aux petites villes, il y a un
niveau de gouvernance au Québec qu'on oublie et qu'il va falloir outiller pour
ça, c'est les municipalités régionales de comté, les MRC. C'est vrai que chacune des villes... On a des villages de
400 habitants. Ils n'ont pas... On ne pourra pas... On ne peut pas leur
demander de tout faire ça, là. Donc, la MRC devient finalement un acteur
qui devrait être imputable par rapport à ça. Ça m'apparaît très important.
Et sinon,
effectivement, je l'ai dit, législativement, il faut que les règles du jeu
soient égales pour tout le monde, pas juste les bons joueurs qui se mettent des
contraintes, la stratégie de développement durable devra le faire, mais il
faudra appuyer financièrement, et, en matière de développement du territoire,
un fonds en aménagement et urbanisme durables pour que toutes les dents creuses
qu'on retrouve dans une ville... les bouts de terrain qui sont vacants depuis
25 ans parce qu'il y avait une ancienne usine, parce qu'il y avait un
bâtiment désaffecté et qui sont du gaspillage. Et le gaspillage, c'est le
contraire du développement durable. Et le gouvernement doit donner un coup de
pouce pour que les décideurs, les élus, les urbanistes des villes aient plus le
goût de travailler sur ces terrains-là plutôt
que de faire encore de l'étalement urbain sur nos milieux naturels et
agricoles. Et ça, c'est un coup de pouce qui pourrait venir faire en sorte qu'en matière, par exemple, de
développement des villes, territorial, elles puissent embarquer plus facilement
dans les objectifs... dans les objectifs d'une stratégie de développement
durable.
Mme Dufour : Merci.
Bien, justement, vous avez aussi mentionné des critères d'écofiscalité
notamment municipale, mais... Puis vous
savez sûrement, là, que je viens du milieu municipal. Donc, ce qu'on voit
souvent, les villes qui ont voulu le
faire, bien, ou qui le font deviennent un peu moins attractives parce que ça
ajoute des surcoûts pour les promoteurs, notamment. Et donc ça contribue, des
fois, à l'étalement urbain, donc c'est contre-productif, finalement. Ça a été discuté, je sais, dans le cadre des
travaux, là, de la politique nationale d'aménagement du territoire, de peut-être
être plus, disons... donc que ce soit les mêmes critères.
Mais comment vous
voyez ça, des critères d'écofiscalité, mais qui ne créeraient pas l'effet
contraire de ce qui est recherché?
Mme Robin
(Jeanne) : Bien, c'est pour ça que c'est très important de réviser la
fiscalité municipale, non pas à l'échelle de chaque municipalité, mais bien à
l'échelle nationale, pour s'assurer que les règles soient équitables pour tous.
Parce que c'est sûr qu'en ce moment une municipalité qui souhaiterait mettre en
place l'écofiscalité va probablement être en compétition avec ses voisines pour
l'attraction du développement, et ça crée l'effet pervers que vous avez évoqué. Donc, la fiscalité... la révision de
la fiscalité municipale est quelque chose d'important. Les unions
municipales, d'ailleurs, appellent à cette révision-là. Et donc c'est un
élément dont on ne pourra pas faire l'économie et dont il faut que l'État se
saisisse pour assurer des règles équitables pour toutes les municipalités.
La Présidente (Mme
Maccarone) : 1 min 30 s.
Mme Dufour : Merci.
Il est vrai qu'il y a des demandes en ce sens, mais, en même temps, on entend
beaucoup le discours de l'autonomie et de pouvoir faire ses propres choix.
Alors, comment vous voyez ça, que les deux se concilient?
M. Savard
(Christian) : Les choses ont changé depuis un certain nombre d'années.
Et dorénavant je pense que la plupart des maires pour... sont prêts, pour que
les règles du jeu soient égales pour tout le monde, à en accepter des plus
contraignantes. Il va rester des poches de résistance, des gens qui veulent que
ce soit comme avant, puis «c'est chez nous», puis qui... mais c'est de moins en
moins présent, là. C'est quelque chose que j'entendais beaucoup il y a 10 ans. Je ne l'entends presque plus.
Au contraire, j'ai des gens qui disent : On va appuyer si c'est égal pour tout
le monde. Parce que, là, pour l'instant, ils sont plutôt frustrés de ne pas
pouvoir en faire plus.
Mme Dufour : Parfait.
Merci. Il me reste?
La Présidente (Mme
Maccarone) : 45 secondes.
Mme Dufour : Parfait.
Écoutez, vous avez parlé de décarbonation des bâtiments publics. Vous n'avez
pas évoqué l'efficacité énergétique, par contre, et j'étais curieuse parce que,
bon, vous avez parlé qu'il faut élargir aux écoles
et, bien, tous les parapublics. Le parc immobilier public est principalement
des bâtiments dans la santé, les écoles. Donc, j'aimerais vous entendre
sur l'efficacité énergétique.
La Présidente (Mme
Maccarone) : En quelques secondes.
M. Savard (Christian) : Tout à fait. C'est la
manière, justement, pour réduire l'impact sur la pointe qu'on nous mentionnait.
Il ne faut pas juste changer notre mode énergétique, il faut consommer moins.
Donc, ça en fait partie.
La Présidente (Mme Maccarone) : Merci
beaucoup. Je cède maintenant la parole à la porte-parole du deuxième groupe
d'opposition. Mme la députée de Verdun, la parole est à vous.
Mme Zaga Mendez : Merci
beaucoup. Merci, Mme Robin puis M. Savard. Je voulais développer avec
vous un peu plus l'idée d'écofiscalité, que ce soit au niveau... bien, surtout
au niveau municipal. Avez-vous des exemples de gains concrets qu'amènent des
mesures d'écofiscalité au niveau municipal?
M. Savard (Christian) : Ça va être
un signal. L'écofiscalité a toujours... c'est toujours un signal qu'on envoie aux acteurs économiques, de dire :
Bien, si tu fais le mauvais comportement, ça va te coûter plus cher, et, si tu
fais le bon comportement...
Idéalement, même, tu peux faire un bonus-malus. On pourrait même imaginer,
éventuellement, que le fonds en aménagement et urbanisme durable qu'on
propose soit éventuellement... Pour l'instant, moi, je dirais qu'on devrait y aller avec le Fonds vert,
mais, à plus long terme, bien, pourquoi ne pas... si tu développes sur un
terrain vert, une des manières de
compenser, c'est d'avoir une charge au développement, parce que tu as détruit
la nature, donc tu as un coût à ça, et tu en profites pour finalement
financer les bons comportements, l'exemple du bonus-malus qui peut être appliqué à toutes sortes de choses et
qui lance le signal, finalement, aux acteurs économiques. Et c'est pour ça
que c'est utilisé de plus en plus.
Mme Zaga Mendez : Puis peut-être
pour continuer sur les leviers, soit au niveau municipal, l'écofiscalité,
est-ce qu'il y a d'autres leviers que la stratégie de développement durable
devrait renforcer pour qu'on puisse freiner l'étalement urbain?
M. Savard (Christian) : Il y a une
des choses que j'ai le goût de mentionner. Vous avez parlé d'écofiscalité. Il y
a l'écoconditionnalité qu'on a parlé dans le mémoire. Je vais vous donner un
exemple, là. Le gouvernement du Québec — puis je ne me souviens même
plus c'est quel gouvernement — a aidé à financer le Colisée Vidéotron à Trois-Rivières. À un moment donné, on pensait le mettre au coeur de la ville, à l'Université du Québec à Trois-Rivières.
Finalement, non, non, non, le développeur est arrivé, on a donné... le
gouvernement du Québec a donné de l'argent sur des terrains qui étaient
vierges, sur des boisés et a décidé de faire un nouveau... et donc a appuyé la
création d'un nouveau «power center». C'est le gouvernement du Québec qui a
fait ça. Est-ce que dans... Et maintenant, en ce moment, si vous suivez un peu l'actualité à Trois-Rivières, il y a toute
une question sur les milieux humides autour, et on se rend compte que,
finalement, le gouvernement du Québec, avec son argent, a contribué à
l'étalement de Trois-Rivières et à un
équipement placé au mauvais endroit. C'était vraiment un bel exemple où, bien,
que le gouvernement du Québec aurait
fait une analyse de localisation et, en cinq minutes, aurait dit : Je ne
donne pas d'argent là. Et c'est ça, une bonne pratique de l'État qui
aurait été très facile, et qui fait en sorte que, là, maintenant, on est pris
avec un problème.
• (12 h 50) •
Mme Zaga
Mendez : Puis rapidement, à l'écoconditionnalité, est-ce
que vous serez favorables aussi d'ajouter, par exemple, des tests climat
pour tout projet politique gouvernemental?
La Présidente (Mme Maccarone) : Même
chose, en 20 secondes.
Mme Robin
(Jeanne) : Oui, effectivement, on a recommandé, dans de
multiples consultations, que chaque geste de l'État soit évalué par rapport à son bilan environnemental, et son
bilan carbone, et sa contribution à une meilleure résilience.
Mme Zaga Mendez : Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Maccarone) : Merci.
Je cède maintenant la parole au député des Îles-de-la-Madeleine.
M.
Arseneau : Merci, Mme la Présidente. Bien, tout d'abord, je
veux vous remercier à mon tour, Mme Robin, M. Savard, pour votre présentation, qui est succincte mais droite
au but, et c'est très apprécié. En fait, vous prêchez par l'exemple : pas
de gaspillage. C'est l'exemple d'un développement durable parce que vous
arrivez avec des arguments qui sont forts dans la défense de ce que vous
présentez comme un projet de société et ce qu'on devrait comprendre comme un projet de société, une loi sur le
développement durable, avec une stratégie sur le développement durable, et de
faire participer l'ensemble des composantes de la société.
Donc, on
comprend bien que vous voulez inclure le monde municipal, tout le secteur parapublic,
et moi, je me demande si le fait
d'identifier l'élément «levier financier», ce n'est pas justement la façon
d'aller chercher la collaboration du secteur de la santé, bien entendu,
du secteur de l'éducation, mais également des municipalités. Moi, je présume
que, s'il y a une résistance du côté des
municipalités, ce n'est pas qu'elles ne veulent pas jouer leur rôle, c'est
qu'elles ont besoin du soutien financier, notamment, pour le faire.
Est-ce que vous partagez cette analyse-là?
M. Savard (Christian) : Bien, en
fait, dans toute transition, lorsqu'on passe d'une ancienne manière de faire à
une nouvelle manière de faire, dans tout changement, c'est très... c'est
souvent difficile, c'est souvent : On est habitués de faire ça, puis là
vous nous dites... vous nous arrivez avec des nouvelles contraintes, des
nouvelles législations. Je suis habitué de me développer de telle manière, de
construire de telle manière. Il m'apparaît évident qu'il y a une période de
transition, particulièrement avec des partenaires externes, où l'appui
financier de l'État, c'est un de ses plus grands pouvoirs, est très important.
Je reprends mon exemple de Trois-Rivières. Si on
avait dit à Trois-Rivières : Si vous, vous construisez votre Colisée
Vidéotron là, je ne vous donne pas d'argent, si vous le construisez au coeur de
la ville, sur les terrains de l'université, je vous donne de l'argent, et
peut-être que la bonne décision aurait été prise.
M. Arseneau : Bien,
l'autre élément étant aussi lorsqu'on dit, par exemple, que les municipalités
doivent protéger leurs sources d'eau
potable. Il n'y a pas... Il y a eu un assujettissement qui est obligatoire, là,
c'est la question de la vie et de la
santé des gens, puis des conditions d'hygiène, puis la qualité de l'eau. Mais
le gouvernement, en même temps qu'il applique habituellement ces
règles-là, va mettre en place des programmes de financement qui vont permettre
aux villes d'atteindre ces objectifs-là.
Et je veux toucher la question des ressources
humaines. On va aussi soutenir la portion des ressources humaines à travers les
transferts gouvernementaux. C'est dans cette optique-là. Moi, je pense qu'on
peut tendre la main aux municipalités pour dire : Oui, vous allez être
assujetties, mais vous allez être soutenues aussi. Enfin, j'ai l'impression
qu'on peut dialoguer avec elles.
Maintenant, j'aimerais parler un petit peu du
fonds d'aménagement d'urbanisme durable. Quelles sont les vertus d'un programme
comme celui-là, des exemples que vous pouvez nommer?
La Présidente (Mme Maccarone) : 20 secondes.
M. Savard (Christian) : Oui. Il y a
trop de terrains sous-utilisés au Québec qui ont souvent des obstacles d'ordre
technique, d'ordre financier, d'ordre d'infrastructure. Tiens, Fortissimo à
Drummondville, depuis 30 ans, ça ne lève pas. Si on donnait à la ville de
Drummond... parfaitement positionnée dans la ville, si on donnait le petit coup
de pouce pour que ces urbanistes, au lieu de
travailler à des dézonages, travaillent à développer Fortissimo, à y émettre
250 nouvelles unités d'habitation, elle irait de l'avant.
La Présidente (Mme Maccarone) : Merci.
Merci beaucoup. Merci beaucoup, M. Savard et Mme Robin, pour votre
contribution à nos travaux.
La commission suspend ses travaux jusqu'à
15 h 50.
(Suspension de la séance à 12 h 54)
(Reprise à 16 h 01)
La Présidente (Mme Maccarone) :
Alors,
bonjour. La Commission des transports et de l'environnement... on reprend nos
travaux.
On s'excuse pour le petit retard. Alors, avant
de commencer, je vais demander aux collègues de donner leur consentement pour
aller au-delà de l'heure prévue pour la fin d'environ 15 minutes.
Des voix : Consentement.
La Présidente (Mme Maccarone) :
Parfait, merci. Nous poursuivons les consultations particulières et auditions publiques sur le projet de Stratégie
gouvernementale de développement durable 2023‑2028. Et cet après-midi nous entendrons les organismes
suivants : le Réseau des femmes en environnement et le Comité consultatif
sur les changements climatiques.
Et cet après-midi, je souhaite la bienvenue aux
représentantes de Réseau des femmes en environnement. Alors, je vous rappelle, mesdames, que vous disposez de 10 minutes
pour votre exposé, après quoi nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la
commission. Alors, je vous invite donc à vous présenter puis à commencer
votre exposé.
Réseau des femmes en
environnement
Mme Arcand
(Elyse) : Bonjour. Alors je suis Elyse Arcand, je suis
présidente du... pardon, du conseil
d'administration du Réseau des femmes en environnement. Je suis avec mes
collègues France Levert et Marie-Claude Molnar, et je peux
peut-être tout de suite aller dans nos... dans la présentation. Je ne sais pas
si vous voulez qu'elles se présentent elles-mêmes ou on y... on va avec la
présentation.
La Présidente (Mme Maccarone) : Oui,
si vous le souhaitez, allez-y.
Mme Arcand (Elyse) : D'accord, je
vous remercie. Alors, le Réseau des femmes en environnement a été fondé en
1999, il compte 800 membres individuels et 34 groupes membres qui
représentent... ce qui représente en tout près de 30 000 femmes dans
leur pluralité et leur diversité. Le réseau a 15 employés et
275 clients, là, qu'il dessert annuellement. Sa mission : développer
le pouvoir d'agir des membres, des personnes et des organisations afin
d'améliorer la qualité de l'environnement, la santé et le bien-être. Ce sont
des initiatives de femmes pour le bien collectif. Nos principaux domaines
d'expertise sont les événements écoresponsables, les arts vivants, plateaux de
tournage écoresponsables, le genre, on s'intéresse au genre et aux changements
climatiques. Donc, c'est... on s'attarde à
l'environnement selon une perspective féminine. On s'intéresse à la santé
environnementale et à la consommation et la communication responsables.
Donc, nos activités sont centrées sur le rôle des femmes comme agentes de
changement à la transition socioécologique.
Alors,
à propos de la stratégie, on a des commentaires généraux puis après ça on a
des... on va aller plus spécifiquement au
niveau des questions. Donc, d'entrée de jeu, bien, on salue l'engagement du
gouvernement du Québec à travers sa stratégie de développement durable,
c'est un très bon document de travail.
Au niveau de la
gouvernance, de façon générale, nous proposons que le déploiement de la
stratégie relève du Conseil exécutif. Compte
tenu de l'urgence et des enjeux qui sont des enjeux environnementaux et
climatiques auxquels on fait face, c'est très, très important que ce
soit tout le monde qui mette la main à la roue.
La
stratégie doit refléter... doit réitérer la nécessité d'engagements fermes de
ses parties prenantes. On voyait des paragraphes qui commençaient par
«il est souhaitable», mais nous, on préférerait entendre des termes comme «il
est requis», «il est recommandé», «il est nécessaire».
L'ajout
d'attentes de participation pour les ministères et organismes est une très
bonne nouvelle, mais nous espérons que sous peu des obligations de
résultat concrétisent ces attentes.
On sait que par
rapport aux travaux qui sont faits au réseau, on peut illustrer en quelques
chiffres le lien entre les femmes et le
développement durable. Je vais y aller de quelques statistiques. Les femmes
sont plus préoccupées par l'environnement et les changements
climatiques. On a des chiffres qui appuient ces données-là. Elles sont plus
engagées dans l'action directe et les changements de comportement plutôt que de
miser sur d'éventuelles solutions technologiques. Elles ont une plus faible
empreinte écologique et génèrent moins de GES. Elles subissent davantage les impacts des changements climatiques et
représentent 80 % des réfugiés climatiques. Elles disposent d'ailleurs de
moins de ressources pour s'en prémunir. Elles prennent 80 % des
décisions de consommation des ménages, ce qui constitue une charge mentale
accrue.
Au niveau des
questions qui nous avaient été posées, au niveau des objectifs et
sous-objectifs et des chantiers, répondent-ils aux défis? Nous, on a constaté
que, bon, les objectifs et sous-objectifs qui étaient présentés couvraient
l'ensemble des domaines prioritaires du développement durable, ce qui est une
excellente chose. On avait des questionnements : Quels mécanismes assurent
la convergence de la stratégie, des orientations et priorités du gouvernement? Comment ces choses-là s'arriment
entre elles. Étant donné le caractère hautement évolutif et complexe des
objectifs à atteindre, la stratégie doit, à nos yeux, demeurer à l'affût et
maintenir son adaptabilité.
Au niveau des... si
les objectifs et les sous-objectifs répondent aux défis et besoins de notre
secteur d'activité, on estime que chaque orientation devrait être assortie d'au
moins un chantier, puis, par rapport à nos champs d'expertise, on a pensé
particulièrement à l'orientation 3 : favoriser la participation de
tous au développement durable. On considère qu'un chantier sur les freins à la
représentativité des femmes et des minorités dans la transition devrait être mis de l'avant. Sa feuille de route
pourra d'ailleurs explorer les pistes à poursuivre pour éliminer ces freins.
Un autre point :
assortir de critères d'écoconditionnalité l'octroi de soutien financier aux
événements par les ministères et
organisations visés par la stratégie. On sait d'expérience que Loto-Québec, par exemple, avant d'accorder un
financement à un événement culturel, doit s'assurer qu'il y a un minimum de
critères d'écoconditionnalité qui sont respectés dans la tenue de l'événement
en question. Donc, ce serait très, très, très important que toutes les organisations
et ministères qui sont visés par la stratégie aient la possibilité d'ajouter ça
à leur... à l'octroi à leur soutien financier.
Un autre point :
traiter conjointement et établir les liens de causalité entre les dossiers de
la santé environnementale et de la santé publique, la perte de biodiversité et
des changements climatiques. On a vu, pendant la pandémie, comment c'était
étroitement lié, tous ces points-là.
Décroissance
et sobriété. En plus de consommer localement, il faut consommer moins, diminuer
à la source la consommation d'énergie, de ressources et de biens. Puis
ça, c'est tant à l'échelle gouvernementale qu'individuelle.
Alors, les dossiers
qui nous apparaissent prioritaires, dans les sous-objectifs,
particulièrement... on s'intéresse particulièrement
au sous-objectif 1.2.2, accroître la présence des femmes et de la
diversité dans les secteurs de l'environnement et des technologies, et
l'orientation 3, favoriser la participation de tous au développement
durable. On aimerait que le... qu'on s'assure
que la stratégie se déploie dans les secteurs de l'éducation et de la santé,
qui ont un impact majeur en plus
d'être largement pourvus d'une main-d'oeuvre féminine. On propose de
systématiser l'usage de l'analyse
différenciée selon le sexe et soutenir la recherche de données différenciées et
de s'assurer de la représentativité des femmes dans des postes
décisionnels et d'influence dans leurs communautés... pardon, dans leurs
communautés d'appartenance et leurs milieux de travail.
Quelles actions
pourraient être mises en oeuvre pour relever ces défis? Bonifier l'offre de
programmes de subventions pour les initiatives de femmes en environnement,
notamment au sein des communautés culturelles. Aussi, favoriser l'éducation et
le développement des filles en sciences. Favoriser l'écofiscalité dans les
municipalités comme gouvernements de
proximité. Maintenir et multiplier le financement des entreprises et
organisations québécoises en matière de transition, comme elles ne sont
pas toutes au rendez-vous.
• (16 h 10) •
Finalement, que
pourrions-nous développer en partenariat avec notre secteur... (panne de son)
...pardon, s'attarder à la charge mentale et
les fausses solutions en transition socioécologique, élargir la portée de
l'écoresponsabilité en événements, arts vivants et en tournage, s'attarder à la
consommation et à la communication responsable pour réduire le
gaspillage sous toutes ses formes, notamment, on pense plus spécifiquement au
milieu de la mode qui est la deuxième industrie la plus polluante au monde, et
les produits alimentaires, réduction des emballages, étiquetage, son impact
climat et le coût environnemental des produits et services, travailler sur la
parité entre prix et les produits biologiques locaux à l'épicerie, penser à une
surprime pour les produits d'importation et multiplier la distribution de
produits en vrac.
Alors, voilà en
quelques mots nos... le contenu de notre mémoire à la commission.
La
Présidente (Mme Maccarone) : Merci beaucoup, Mme Levert, pour votre
exposé. Nous allons maintenant débuter la période des échanges, et je
donne la parole à M. le ministre.
M.
Charette : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Merci, mesdames. Et toutes mes excuses, s'il y a
un retard, je suis le seul
responsable. Donc, bien désolé de vous avoir fait patienter. Merci d'être avec
nous cet après-midi malgré la distance qui nous sépare.
Vous apportez des points intéressants. Je vais
peut-être insister sur des éléments qui ont moins souvent été traités, là,
depuis le début de la commission, parce que ça nous amène l'opportunité de
préciser certaines actions.
Naturellement, il y a la stratégie de
développement durable, mais il y a plein d'autres initiatives dans les ministères, dans les organismes, qui font leur
petit bout de chemin sans être pour autant bien connues. Lorsqu'on parle
d'événements, lorsqu'on parle de festivals, lorsqu'on parle de tourisme, il y a
un accompagnement qui est assuré. D'ailleurs,
ma collègue ministre responsable du Tourisme a présenté une politique de
tourisme durable l'année dernière, qui a été bien reçue, très, très bien
reçue d'ailleurs, qui vise à accompagner les gens de l'industrie touristique
dans la mise en place de pratiques durables.
Ça peut être au niveau de l'hôtellerie, ça peut être au niveau de différentes
activités, même au niveau des festivals et événements.
On a eu à collaborer, au cours des dernières
années, auprès du Bureau de la normalisation du Québec. Donc, il y a des références en matière d'organisation
d'événements, et il y a même un gala, le gala Vivats, que je ne connaissais
pas, je vais être très transparent avec vous, donc, la commission me permet de
découvrir de belles initiatives aussi. Et c'est un gala qui vise justement à
reconnaître l'aspect développement durable et encourager ces événements-là
auprès d'organisateurs d'événements. Donc, je le mentionne parce que vous
l'avez évoqué dans votre présentation, mais
il y a des belles initiatives à ce niveau-là. Moi, je ne connaissais pas le
gala Vivats. Je suis curieux, est-ce que vous connaissiez le gala
Vivats?
Des voix : ...
La
Présidente (Mme Maccarone) : Je veux juste vous aider parce que je vois que
vous ne vous voyez pas tous. Ça fait que Mme Arcand, la parole est
à vous.
Mme Arcand (Elyse) : Bien, je vais
laisser peut-être France répondre parce qu'elle est très impliquée dans ce
dossier-là.
La Présidente (Mme Maccarone) : Alors,
Mme Levert.
Mme Levert (France) : Alors, M. le
ministre, c'est... merci de mentionner ces initiatives-là qui sont des
initiatives du Conseil — pour
plusieurs — québécois
des événements écoresponsables. On n'a pas présenté tous les projets et
initiatives du Réseau des femmes en environnement. Le lien n'est pas toujours
nécessairement si évident.
Alors, le Conseil québécois des événements
écoresponsables a été mis en place par le réseau il y a une quinzaine d'années.
Le demandeur de la norme en événements responsables qui a été développée par le
Bureau de normalisation du Québec, qui fait l'objet d'une révision à l'heure
actuelle, c'est le réseau et son conseil qui en a fait la demande, qui a aussi,
avec le BNQ... est allé chercher le financement pour financer cette
démarche-là.
Les Vivats,
c'est aussi une initiative de notre conseil, donc, pour reconnaître les événements,
les organisateurs d'événements, les fournisseurs qui font vraiment des efforts
particuliers. Et le Bureau de coordination du développement durable a
été parmi les premiers partenaires du Conseil québécois des événements
écoresponsables. Très tôt, on avait rencontré le premier directeur du bureau
pour avoir le partenariat, l'appui du bureau sur cette initiative-là qui a été
financée aussi dans la phase de lancement par le Fonds d'action québécois pour
le développement durable.
Alors, on est très, très au courant de tout ça.
On collabore... on avait seulement 10 minutes, alors on n'avait pas le
temps nécessairement de parler de tous les partenariats que le réseau et ses
différentes initiatives ont, mais on collabore en événements, de différentes façons,
comme je disais, avec le bureau qui a soutenu... ou le Bureau de coordination, soutenu le répertoire des
fournisseurs écoresponsables que le conseil a mis en place, RECYC-QUÉBEC, qui aussi soutient l'événement, Les Vivats, pour la catégorie
matières résiduelles. Je donne deux, trois exemples comme ça, donc, et puis on est... on échange à l'heure
actuelle avec, justement, le ministère du Tourisme pour réaliser un mandat, on
espère que ça va pouvoir se conclure. Effectivement, toujours dans la même
direction, on travaille avec plein de municipalités, d'autres organismes et du
privé aussi, pour tous ces volets-là qui sont arts vivants, c'est la culture
dans le développement durable.
Alors, oui, merci de rappeler tout ça. Puis,
bien, on est fiers d'être parmi ceux qui ont permis de faire évoluer ce domaine-là puis d'en faire connaître aussi à
l'extérieur du Québec, au Canada et du côté européen aussi, il y a un intérêt.
M. Charette : C'est la beauté des
commissions parlementaires, on a la possibilité de faire de beaux échanges comme celui qui nous permet de vous entendre cet
après-midi, mais d'apprendre de nouvelles choses. Je ne connaissais pas
Les Vivats, je m'en confesse. Du coup, je ne connaissais pas votre propre
rôle dans l'organisation de ces événements-là.
Donc, merci, merci. Et ça démontre que l'action gouvernementale vient en appui
à différents milieux. Donc, oui, il y a une stratégie, mais il y a
d'autres initiatives, là, qui sont cohérentes avec cette stratégie-là.
Là, je vous amènerais sur un tout autre sujet,
avant de laisser la parole à mes collègues qui auront sans doute des questions
aussi pour vous. Vous avez parlé de l'approche différenciée selon les genres.
C'est un concept qu'on entend de plus en plus, notamment
à travers les COP. J'ai eu le privilège de participer à différentes COP au
cours des dernières années, et c'est un thème qui semble s'installer et prendre
de l'importance, pour lequel la définition ou la façon d'incarner ça n'est pas
toujours... n'est pas toujours précise.
Quelle serait...
quelle serait la façon au Québec de retenir justement une action différenciée
ou une stratégie différenciée selon les genres?
Mme Levert (France) : Elyse, est-ce que tu veux
répondre ou... En fait, ce qu'on a inscrit dans le projet, mais c'est...
Vas-y.
Mme Arcand
(Elyse) : Bien...
Mme Levert
(France) : Bien, en tout cas...
La Présidente (Mme
Maccarone) : Est-ce que c'est Mme Levert qui va prendre la
parole?
Mme Levert
(France) : ...dans le mémoire, là, parce que la présentation, c'est
10 minutes, alors on est allées vraiment... on voulait couvrir tous les
aspects.
Depuis 2006, il y a
une formation, il y a des outils qui ont été développés par le gouvernement du
Québec pour que des analyses différenciées se fassent quand il y a des projets
de politique, de réglementation, des stratégies. Là, le principe, c'était que tout ça soit mis en application quand il y
a un travail qui se fait pour élaborer ces politiques et stratégies-là, donc en faire l'analyse. Et,
quand ça s'y prête, s'il y a un sens de faire une différence hommes-femmes
dans des mesures, par exemple, ou des
actions, que l'analyse soit faite, que la réflexion soit faite pour qu'il y ait
une... qu'il y ait des actions, des solutions qui peuvent être différentes pour
qu'il y ait plus d'efficacité, parce que les hommes et les femmes... puis, bon, avec une vision
aussi... on est différents physiquement, psychologiquement, c'est pour ça qu'on
a présenté quelques éléments sur la perception, les impacts différents
hommes-femmes.
Et,
dans ce sens-là, c'est la systématisation de faire de ces analyses-là, quand le
gouvernement du Québec élabore une
politique, une stratégie ou d'autres éléments comme ça d'orientation, que ces
analyses-là soient faites systématiquement. Ce qui n'est pas le cas à l'heure actuelle. Le gouvernement fédéral
demande que ce soit fait de façon systématique dans le cas de
l'élaboration de documents stratégiques comme celle-là.
Alors, on n'a pas...
peut-être à tort, on a l'impression que ça ne se fait pas de façon
systématique. Alors, le souhait, c'est qu'effectivement ce genre d'analyse là
soit faite et que ça soit inscrit clairement. Puis les outils ont été élaborés,
ça fait quand même bon nombre d'années, pour le Québec, il y a des formations
qui ont été données, donc qu'on soit systématique dans ces analyses.
• (16 h 20) •
La Présidente (Mme Maccarone) : Merci,
Mme Levert. Je vais maintenant céder la parole à la députée d'Argenteuil.
Mme Grondin :
Mesdames, bonjour. Merci, d'une part, d'avoir pris le temps, là, de
contribuer à la réflexion de nos travaux sur
la stratégie de développement durable par le biais de ce mémoire-là que j'ai lu
avec grande attention. Merci aussi de
votre implication pour faire de la culture des événements écoresponsables. Je
sentais toute la fierté dans la présentation que vous nous avez faite au
niveau des Vivats.
Petite question,
parce qu'en fait, dans le mémoire, mais je sais que ça fait partie un peu de
vos principes directeurs, vous soulignez que
les hommes ont tendance à miser plutôt sur les solutions technologiques face au
défi des changements climatiques et de l'adaptation aux changements
climatiques, alors que les femmes privilégient plutôt le changement de comportement. Ça m'interpelle
grandement, parce que c'est ce que je fais depuis 25 ans, le changement de
comportement et l'accompagnement.
La question que j'ai
pour vous... En fait, vous proposez de bonifier l'offre... qu'on devrait
bonifier l'offre de programmes de
subventions pour les initiatives des femmes en environnement, vous proposez de
favoriser l'éducation et le
développement des filles en sciences, notamment. Selon vous, si on souhaite
prendre en compte ces propositions-là dans
toute l'orientation de... comment je pourrais... encourager, structurer le
marché des emplois verts et verdissants, selon vous, quelles disciplines vous pourriez me recommander pour... qui nous
aideraient à faire des changements de comportement pour avoir une
économie plus verte et plus verdissante?
Mme Arcand
(Elyse) : Je m'excuse, j'ai peut-être... La question, ce serait :
Quelles disciplines vous... Je ne sais pas à quoi vous référez à ce moment-là.
Parce que c'est sûr qu'on voit une différence dans l'approche face aux
questions climatiques et environnementales chez les femmes, mais dans plusieurs
secteurs d'activité. Je ne suis pas sûre de comprendre la question.
Mme Grondin :
Bien, en fait, peut-être que... Simplement, vous souhaitez que les femmes
aient plus de place au niveau des sciences?
Mme Arcand
(Elyse) : Oui.
Mme Grondin :
Si on veut affronter les défis
auxquels... au niveau des changements climatiques, de l'adaptation aux
changements climatiques, est-ce qu'il y a certaines disciplines en sciences qui
viendraient répondre davantage à une approche de changements de comportements
plutôt que technologiques?
Mme Levert
(France) : Bien, je peux peut-être, si tu permets, Elyse, amener
certains éléments de réponse, parce que ce
qu'on amène en termes de changements, là, choix technologiques versus
comportements, c'est des études qui sont en arrière de ça... (panne de son) ...résultats du Baromètre de l'action climatique qui est publié,
quatre éditions annuellement, alors, qui arrivent à certains constats.
Mais ce qu'on peut se dire, par contre, des domaines... Moi, j'ai travaillé
longtemps dans le secteur énergétique. Alors, il y a des domaines où... qui ont
des... particulièrement des impacts majeurs
dans le domaine des changements climatiques, où il y a très peu de femmes dans
les postes de décision, ça, c'est une
chose, mais il y en a peu aussi, malgré que ça évolue dans le bon sens, mais il
y en a peu aussi dans les facultés.
Donc, si on
parle du secteur de l'énergie, si on parle du secteur du transport, par
exemple, qui ont des impacts majeurs sur... effectivement, en termes
climat, là, on parle d'ingénierie, on parle de sciences pures, on parle de
domaines comme ceux-là où, en ingénierie, par exemple, autant il y a
30 ans — moi,
j'ai quand même un certain âge — que maintenant... on a eu, il y a
quelques jours, justement, une activité spéciale avec des femmes dans divers secteurs qui ont témoigné dans ce sens-là, alors,
c'est à peu près 30 % de femmes dans les domaines en sciences pures,
en ingénierie aussi.
Puis, dans les postes de décision, on peut
influencer encore mieux dans quelle direction on veut aller. Donc, changer les
comportements plutôt que de faire un choix technologique, c'est un peu la même
chose, il n'y a pas beaucoup de femmes dans
des postes de décision, que ce soient des ministères ou des entreprises privées
dans des secteurs comme ça, c'est encore majoritairement des hommes qui sont
dans ces postes-là. Il y a des données là-dessus très, très claires. Et puis, bien, quand on est en place avec
une certaine vision puis qu'on peut influencer, bien, c'est une bonne chose.
Je sais que les dernières élections, autant au
niveau municipal qu'au niveau... puis je vais m'arrêter là-dessus, que les
élections provinciales, il y a une meilleure représentation des femmes dans
divers postes de... effectivement, de ministre ou de maire. J'espère que ça va
influencer dans le bon sens.
Mme Grondin : Si je comprends bien,
ce n'est pas une question de discipline ou ce n'est pas une question sciences, sciences pures, ou sociologie, ou
culture, c'est plutôt une approche hommes-femmes, c'est ce que je comprends.
Mme Arcand (Elyse) : Oui, si je peux
compléter, moi, par rapport... par rapport à ce point-là, on a tenu récemment,
tout récemment au réseau un webinaire sur la participation des femmes dans les
médias quand on parle d'environnement, quand on fait appel à des experts en
environnement ou en changements climatiques, bien, c'est ça, on a réalisé qu'il
y a à peu près 30 % des intervenants qui sont des femmes, alors que les
femmes représentent 50 % de la
population. Il y a un lien à faire, effectivement, avec le fait que, bon, les femmes...
il y a des étudiantes qui vont... qui s'intéressent aux sciences, mais,
quand elles arrivent dans des postes d'influence, bien, on les voit moins,
elles sont moins là. Il faut qu'on comprenne pourquoi ça se passe comme ça.
La
Présidente (Mme Maccarone) : Merci, Mme Arcand. Merci beaucoup. Nous
allons procéder aux prochains échanges.
Alors, je cède la parole à la porte-parole de l'opposition officielle, la
députée de Notre-Dame-de-Grâce. La parole est à vous.
Mme
McGraw : Merci, Mme la Présidente. Et merci, mesdames,
d'être avec nous aujourd'hui. Très intéressant comme propos. Et je ne
sais pas si vous voulez compléter votre pensée.
Mme Arcand (Elyse) : Bien, non,
bien, je pense que j'avais à peu près fait le tour. Il y a aussi... Ah oui! C'est ça, je voulais... peut-être juste
simplement, en terminant, c'est que je disais : Bon, bien, il faut qu'on
comprenne pourquoi ces femmes-là ne se rendent pas dans des postes
d'influence. Et puis on est en train de travailler avec le comité sectoriel EnviroCompétences
à, justement, déterminer la participation des femmes dans les milieux... dans
les milieux de travail en environnement. On
se rend compte qu'elles ne sont pas très présentes dans les milieux... les
emplois techniques. Donc, c'est quelque chose... on est en train
d'explorer cette piste-là. Voilà.
Mme McGraw : Parfait. Donc, si je
comprends bien, juste pour reprendre un peu le questionnement de ma collègue,
c'est vraiment que les femmes soient impliquées tant au niveau... dans les
postes décisionnels, c'est-à-dire d'influence, mais aussi au niveau comme sur
le terrain technique. Est-ce que c'est bien ça? C'est vraiment à tous les
niveaux puis dans tous les domaines. Mais, si je comprends bien, ce que vous
dites aussi, que c'est... les femmes ont peut-être moins d'impact mais sont
plus vulnérables... plus actives, plus conscientes, plus vulnérables, mais
aussi ont moins d'impact ou... Je ne sais
pas si vous parlez surtout des femmes, par exemple, des réfugiées climatiques.
Est-ce que vous avez des exemples d'ici, au Québec?
• (16 h 30) •
Mme Arcand
(Elyse) : Bien, de manière générale, dans un cas où il y a,
par exemple, un événement climatique, bien, les femmes n'auront pas
nécessairement accès aux mêmes ressources, c'est-à-dire n'ont pas... les
femmes, étant traditionnellement moins... ayant des revenus qui sont moindres,
souvent, par rapport aux hommes, elles n'ont pas nécessairement le même accès aux solutions, là, pour se prémunir des
impacts des changements climatiques, là, de façon très, très générale,
là.
Mme Levert
(France) : Bien, peut-être, Elyse, j'aimerais ça ajouter un
point. Parce que, dans le document, on n'est pas revenues là-dessus, on parle
de l'entrepreneuriat au féminin aussi, on en a... on l'a dit... (panne de son) ...que c'est les femmes, comme
actrices de changement, qui... les décisions des ménages, la majorité des
décisions de consommation, c'est les femmes qui
les prennent. On a plein de membres qui sont des entrepreneures, qui ont leur
entreprise, qui développent des solutions. Et c'est important qu'il y ait des
programmes qui les aident, comme le... (panne de son) ...par exemple, la
stratégie parle de divers fonds pour aider les entrepreneurs, donc les
entrepreneurs femmes aussi ont besoin... arrivent avec plein de solutions
superintéressantes. Et c'est important qu'elles puissent continuer à contribuer
puis peut-être que des programmes comme ceux-là soient maintenus, enrichis,
tout ça, pour soutenir ces initiatives-là qui vont parfois être différentes,
qui vont être dans des domaines où d'autres types d'entrepreneurs ne vont pas
intervenir. On parle du secteur de la mode, par exemple, qui a un impact très,
très important. Je donne... Bien, enfin, nos membres qui sont des femmes
entrepreneures et cheffes d'entreprise, elles sont dans toutes sortes de
secteurs, donc c'est important qu'elles puissent aussi continuer d'avoir un
appui solide, là, je pense que c'est un aspect aussi à ne pas négliger.
Mme McGraw : Parfait. Donc, juste...
Vous avez... Pardon. Vous avez parlé de l'analyse, le... ADS, juste... Est-ce
que vous... Donc, vous avez parlé de ça dans votre mémoire. Est-ce que, dans le
passé... J'ai vu, surtout à l'international, des rapports en développement
durable qui avaient des sections sur ce qu'on appelait, dans le temps, les
groupes majeurs, les jeunes, les femmes, entre autres. Selon vous, est-ce qu'un
rapport ou une stratégie... je devrais dire «une stratégie», cette stratégie-là
gouvernementale sur le développement durable devrait avoir une section femmes, groupes majeurs, entre autres,
peut-être jeunes, entre autres, ou l'analyse à travers la stratégie,
c'est-à-dire intégrée dans la stratégie, ou une section à part, ou les
deux?
La Présidente (Mme Maccarone) :
Mme Levert?
Mme Arcand?
Mme Levert
(France) : Bien, je dirais, peut-être les deux, là. Je ne
sais pas, Elyse, ton point de vue là-dessus, mais l'idée, sans que ce
soit nécessairement complexe... Et comme je disais, ça se fait ici, il y a des
formations qui se donnent, aussi, des municipalités comme la ville de Montréal
qui va systématiser ce genre d'analyse là, aussi, dans son travail
d'élaboration de politiques. Donc, c'est sur une stratégie comme ça de
développement durable, alors une analyse. Mais une analyse, de ce point de vue
là, pourrait faire partie des éléments analysés de façon intégrée. Mais c'est sûr que la stratégie, c'est un... Bien,
c'est... Ça traduit un petit peu tout ce qui se fait dans le gouvernement — j'arrête
là, Elyse, là. Donc, si effectivement il y a ce genre d'analyses là qui
sont appliquées aux différentes politiques qui sont mentionnées dans la
stratégie, ça devrait être à ce niveau-là... puis la stratégie en fasse état et
puis qu'elle-même aussi intègre des constats comme ça, comme stratégie.
Mme Arcand
(Elyse) : Bien, si je peux rajouter, ce n'est pas
nécessairement complexe, ce n'est pas nécessairement une analyse complexe qu'on
doit faire, c'est avoir une sensibilité sur les... le caractère distinctif des
choses ou, en tout cas, la différence qui peut exister. Puis ce qu'on
réalise aussi... Puis, quand on parle d'une analyse différenciée selon le sexe, ou on peut parler selon le genre aussi, ce
qu'on a réalisé au cours de nos travaux à nous, c'est que, quand on améliore...
quand on tient compte des
particularités des femmes, bien, on tient compte... on améliore les conditions
de vie de tout le monde, des minorités, des groupes marginalisés. Puis
c'est... c'est donc...
C'est sûr que, quand on présente ça, là, dans le
cadre de cet exercice-là, on parle des femmes, mais on réalise... on est conscients que c'est... En fait, l'idée, c'est de
tenir compte de toutes les personnes qui vont être visées par quelque
action que ce soit sur laquelle on travaille, là. Mais ça a des impacts
beaucoup plus grands. Puis c'est important
d'inclure tout le monde, là, de toute façon, c'est les lignes directrices de la
stratégie qui vont dans ce sens-là. Et notre apport à nous, bien, c'était de
dire, bien : On devrait systématiser cette analyse-là ou le soin qu'on
doit prendre dans toutes les sphères du développement de la stratégie.
Mme McGraw : Peut-être une... On me
dit que j'ai... il me reste deux minutes. Ah! Pardon?
Mme Levert (France) : ...si on dit
«femme» ou on dit «tous»...
La
Présidente (Mme Maccarone) : Il reste deux minutes à l'échange, je crois que
Mme la députée a une dernière question pour vous.
Mme Arcand (Elyse) : Oui, allez-y.
Mme
McGraw : Une question plutôt technique, sur un point plutôt
technique : Pourriez-vous nous en dire plus sur le lien entre les
femmes et l'écoconditionnalité?
Mme Arcand
(Elyse) : Bien, ça, ce c'est pas nécessairement
l'écoconditionnalité, là, dans le cadre dans lequel on l'entendait. Pour les
événements écoresponsables, ce n'est pas tant dans une perspective homme-femme,
c'est... L'écoconditionnalité d'un événement, bien, c'est de s'assurer que les
fournisseurs soient des fournisseurs locaux, qu'on ait un système de...
ça, c'est complètement autre chose, là, par rapport à la gestion des déchets,
les fournisseurs, l'approvisionnement, s'assurer qu'il y ait des retombées
économiques dans les communautés dans lesquelles se tiennent les événements.
La Présidente (Mme Maccarone) : Une
minute.
Mme Levert
(France) : Il faut comprendre que l'action du réseau, ses différents
projets, ça s'adresse à tout le monde, là. Alors, il y a un volet réseau
femme-homme puis il y a tous les projets, ça s'adresse à tout le monde.
Mme McGraw : Parfait. Juste, il ne
nous reste pas... moins qu'une minute, si vous aurez... si vous choisissez une
priorité qui pourrait faire avancer et l'environnement et les femmes, ce serait
quoi?
La Présidente (Mme Maccarone) : En
30 secondes.
Mme Arcand (Elyse) : Alors, ce
serait de s'assurer de la représentativité des femmes qui ont une vision
particulière, qui vivent de façon distinctive la réalité environnementale et
climatique, là. C'est de s'assurer que tout le monde est entendu, tout le monde
est visé par les actions qui sont prises par... dans le cadre de la stratégie.
Mme McGraw : Merci.
La Présidente (Mme Maccarone) : Merci
beaucoup. Je cède maintenant la parole à la porte-parole du deuxième groupe
d'opposition, Mme la députée de Verdun.
Mme Zaga Mendez : Merci beaucoup.
Merci à Mme Levert, Mme Arcand et aussi à Mme Molnar pour la
présentation puis d'être avec nous, même à distance. Donc, j'aimerais vous
entendre encore un peu plus sur le principe d'écoconditionnalité. Tantôt, vous
parliez du fait qu'on peut l'appliquer, par exemple, pour l'ensemble des...
subventions, pardon, ou de support qu'on donne pour des événements financés par
le gouvernement. Seriez-vous ouvertes également qu'on applique ce principe-là à
l'ensemble d'enveloppes de financement qui est donnée par le gouvernement du
Québec dans le cadre de cette stratégie?
Mme Arcand (Elyse) : Bien, ce serait
une excellente suggestion, parce qu'il y a vraiment une urgence, il faut qu'on
agisse sur tous les fronts. Puis c'est sain pour l'économie, c'est sain pour
l'aspect... au niveau social, là, l'implication, là, pour... Donc, oui,
effectivement, ça a beaucoup de... il y a beaucoup de possibilités
d'application de ça, là. Ça, nous, on s'est concentrées d'abord sur les
événements écoresponsables. Là, on a tout un... un aspect de ce projet-là, on
est en train de travailler beaucoup, beaucoup en culture, là, tout ce qui est
spectacle, tout ce qui est tournées d'artistes, des tournages, on travaille à
l'écoresponsabilité des tournages. Mais c'est quelque chose... ce sont des
principes qui sont applicables dans de nombreux domaines.
Mme Zaga
Mendez : Merci. Puis je vous amène à la page 4, dont
tantôt on discutait, sur l'analyse différenciée puis votre critique sur le fait
que ça reste un outil qui est marginal. Comment, selon vous, on pourrait
bonifier cette stratégie pour que l'approche de l'analyse différenciée soit
déployée un peu plus au sein de tous nos ministères?
• (16 h 40) •
Mme Arcand (Elyse) : Bien, en fait,
ce qu'on indiquait dans notre mémoire, c'est qu'il y a encore... c'est marginal
parce que ce n'est pas très connu, nécessairement, mais c'est aussi marginal
parce qu'on n'a pas... on manque de données, à un moment donné, pour être en
mesure de l'appliquer, l'analyse différenciée. Donc, il y aurait un besoin de
financement de la recherche en cette matière.
Mme Levert (France) : Si je peux me
permettre d'ajouter...
Mme Zaga Mendez : Allez-y.
Mme Levert (France) : Comme je le
mentionnais un petit peu plus tôt, le gouvernement canadien, de façon plus récente, même si... comme le gouvernement du
Québec avait élaboré des outils, il y a quelques années, a quand même ajouté
une forme d'obligation ou un incitatif quand même plus grand pour que, de façon
générale, ces ministères et les
organismes gouvernementaux appliquent... fassent ce genre d'analyse là, tout en
disant que ça peut être quelque chose
de très simple, comme ma collègue l'a dit. Donc, c'est de le prendre en
considération de façon systématique, et ça, c'est quelque chose qui peut
être traduit dans des volontés... (panne de son) ...stratégie comme celle-là,
par exemple, ou ailleurs.
Mme Zaga Mendez : Et très
rapidement, vous faites aussi mention du principe de l'écofiscalité, comment
cette stratégie pourrait mieux intégrer ce principe-là?
Mme Arcand (Elyse) : Ça, c'est plus
ton domaine, France, au niveau des municipalités, là.
Mme Levert (France) : C'est un sujet
qui est vaste, l'écofiscalité, n'est-ce pas, c'est... Différentes instances
constatent que le Canada, puis au niveau du Québec, c'est peut-être un petit
peu différent, là, mais qu'il y a vraiment tout un travail à faire pour que ce
soit intégré, par exemple, dans ce qui se fait au niveau des municipalités. Il
y a vraiment des solutions très intéressantes à travailler avec l'écofiscalité
pour faire avancer que ce soient les dossiers en
environnement, en climat, alors il y a vraiment un travail à faire. Il y a des
chercheurs là-dessus, il y a... La semaine prochaine, il y a... Dans quelques jours, je vais participer à un
webinaire, à une formation sur l'écofiscalité progressive. Alors,
c'est quelque chose qui est en évolution très importante. Puis ça peut intégrer
des considérations, aussi, concernant la
prise en compte des inégalités, aussi, dans les mesures, parce que c'est des
mesures économiques, donc c'est important qu'il y ait déjà cette pensée-là intégrée dans la réflexion sur
l'écofiscalité. Donc, ça permet de faire ça, et c'est vraiment une
avenue importante pour...
La Présidente (Mme
Maccarone) : Merci...
Mme Levert
(France) : ... (panne de son) ...pour faire des choses. Merci.
La Présidente (Mme
Maccarone) : Merci beaucoup, Mme Levert, Mme Arcand et
Mme Molnar, pour votre exposé et la contribution aux travaux de la
commission.
Je suspends les
travaux quelques instants afin que l'on puisse accueillir le prochain groupe.
Merci beaucoup.
(Suspension de la séance à
16 h 43)
(Reprise à 16 h 49)
La Présidente (Mme Maccarone) : Alors,
on reprend nos travaux, et je souhaite la bienvenue aux représentants du
Comité consultatif sur les changements climatiques.
Je
vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, après
quoi nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la commission.
Je vous invite donc à vous présenter et puis à commencer votre exposé.
Comité consultatif sur les changements climatiques
M. Webster
(Alain) : Merci. Je m'appelle Alain Webster, j'ai donc le plaisir
d'être président de votre Comité consultatif
sur les changements climatiques, qui découle de l'adoption de la loi n° 44,
comité, bien sûr, permanent et indépendant, conseillant le ministre dans
l'ensemble de sa stratégie de lutte aux changements climatiques. Et je suis aussi, de façon secondaire ces temps-ci, on a
l'impression, professeur en économie de l'environnement à l'Université de Sherbrooke, puisque j'enseigne ça depuis un peu
plus de 30 ans, là. Je dois être un des doyens de cette salle, ça fait
que... C'est un enjeu fondamental. Merci beaucoup de l'invitation. Avec ma
collègue.
• (16 h 50) •
Mme Levasseur
(Annie) : Oui. Bonjour. Annie Levasseur, professeure à l'École de
technologie supérieure. Donc, je suis aussi
membre du Comité consultatif sur les changements climatiques. Puis mes
thématiques de recherche, évidemment, sont très liées, donc, je suis
titulaire d'une chaire de recherche du Canada sur la mesure de l'impact des
activités humaines sur les changements climatiques — désolé pour la
longueur — puis
je suis aussi directrice scientifique du
CERIEC, qui est un centre de recherche sur l'économie circulaire. D'ailleurs,
mes collègues vont présenter, demain, pour le CERIEC.
M. Webster
(Alain) : Alors, on a choisi de vous faire ça sous une forme
PowerPoint, pas parce qu'on est dans une
période intensive d'enseignement, là, puis qu'on avait l'impression que c'est
encore la formule, mais il y avait deux, trois figures qu'on voulait
détailler un peu plus avec vous, qu'on trouvait que c'était une bonne approche.
On va commencer rapidement puisqu'on n'a que 1 h 30.
Le premier point,
bien sûr, c'est que cette loi nous semble essentielle, et je pense que c'est
important à redire. Qu'est-ce que vous dites, dans l'introduction de la
stratégie? «Réaliser un virage nécessaire pour faire face à ces modes de
développement non viables.» En français, les mots ont un poids, c'est
important, ça signifie quelque chose.
Et on a construit
cette stratégie découlant de la loi adoptée, comme vous le dites si bien, à
l'unanimité à l'Assemblée nationale, pour, comment dirais-je, corriger le tir
de cette boussole économique déficiente qui ne nous permet pas d'avoir des stratégies efficaces, soutenables à long terme
lorsqu'on n'intervient pas adéquatement pour concilier ces enjeux : environnement, économie et
social. Donc, c'était fondamental de faire ça en 2006. Avec comme clin
d'oeil : je faisais la même
chose dans mon université, comme vice-recteur au développement durable, en même
temps, et ça me semblait tout aussi fondamental dans mon établissement
universitaire. Mais c'est évidemment beaucoup plus important à l'échelle de
l'ensemble de l'État.
Quelque 15 à
20 ans plus tard, le constat reste le même, la mise à jour de cette
stratégie reste tout aussi fondamentale et la difficulté de faire une approche
cohérente de l'action gouvernementale reste encore très difficile. Vous essayez
d'intégrer de façon plus explicite les attentes, c'est une bonne idée, puis, en
même temps, comment on est capables
d'intégrer de façon plus globale ces enjeux avec l'ensemble de la société et
ramener ça avec un ensemble d'acteurs, ça reste important.
Il y a quatre ou cinq
éléments qui nous ont semblé très, très pertinents en introduction : la
question de l'écofiscalité,
l'intensification des enjeux climatiques, la prise en compte, évidemment, des
réalités des Premières Nations et des Innus, la contribution au
programme des ODD des Nations unies et puis, bien sûr, la feuille de route pour
l'économie circulaire. On va revenir un peu plus en détail sur chacun de ces
éléments et puis ensuite on mettra quelques
exemples. Mais l'élément central de ce qu'on veut aborder avec vous, et vous ne
serez pas surpris, c'est qu'on a l'impression
que cette stratégie en matière de développement durable, dans la période à
laquelle elle se déploie, devrait être beaucoup plus intégrée, mieux
prendre en compte l'ensemble de cette question climatique.
Parmi les deux figures
qu'on voulait ramener avec vous, il y a celle-là en particulier qui provient du
rapport du GIEC, publié en 2018, sur la nécessité de fixer l'objectif limite en
matière d'augmentation de température à 1,5. Et on fait référence à l'ensemble
des objectifs de développement durable des Nations unies. Le message est
simple : Si on ne réussit pas à
contrôler cette température, on ne peut atteindre aucun de ces objectifs de
développement durable, ces 17 objectifs élaborés par les Nations
unies, incluant bien sûr la question des changements climatiques, qui est
l'objectif n° 13. Et, en même temps, réaliser ces
objectifs de développement durable contribue à faciliter la transition et les
stratégies en matière de carboneutralité parce que ça permet d'intégrer
l'ensemble de la collectivité dans cette correction, dans cette transition
fondamentale pour permettre de faire ces gains en matière de transition.
Donc, la
question climatique est très centrée, bien sûr, sur la question des ODD. C'est
d'autant plus fondamental que la stratégie, elle occupe la période
temporelle 2023‑2028. Et lorsqu'on parle de changements climatiques,
ce qui est essentiel, c'est bien sûr la trajectoire dans laquelle on veut
réduire ces émissions, la vitesse à laquelle on est capables de faire cette
transition, tout simplement parce que le budget global en matière d'émissions
de gaz à effet de serre sur la planète est limité. Et la journée qu'on
dépasse... Reprenant cette figure du GIEC et qu'on a publiée dans l'un de nos avis, l'année passée, bien, la quantité totale
de gaz à effet de serre qu'on peut encore rejeter est d'environ
500 gigatonnes; si on veut que cette température se limite à 1,5,
et donc cet horizon 2050 en matière de carboneutralité arrive très
rapidement, les choix que vous allez faire comme législateurs au cours de ce
quinquennat, si vous me permettez cette expression presque française, sont
fondamentaux pour aligner, finalement, cette transition et permettre de faire
cette accélération en matière de transition. Donc on a l'impression qu'il faut
intégrer plus la question climatique comme étant un axe central de cette
stratégie de développement durable, parce que c'est la période 2028‑2029.
En même temps, on sort d'une importante COP15 à
laquelle, bien sûr, le gouvernement est intervenu de plusieurs façons, à
laquelle on a pu présenter également notre avis sur le lien entre biodiversité
et changements climatiques. Merci,
d'ailleurs, M. le ministre, d'avoir été présent à cette approche qui était
assez intéressante, on pense. Mais globalement ça nous ramène un autre
enjeu. On pense, là aussi, qu'il vaut mieux intégrer ces enjeux en matière de
biodiversité et faire de façon spécifique, dans cette stratégie, un lien avec
la mise en oeuvre de l'ensemble de ce cadre mondial de la biodiversité.
Il faut parler, bien sûr, de la stratégie
d'écofiscalité. Bien, je vous ai dit en introduction que j'enseigne l'économie de l'environnement depuis trente
quelques années. Ça fait trente quelques années que je dis à mes étudiants,
étudiantes : C'est fondamental. On a
commencé ça avec Pigou, il y a un peu plus d'un siècle, en 1920. Il faut
corriger ces enjeux d'intégration par un coût associé à la pollution. Un
siècle plus tard, on a encore de la misère à faire ça à l'échelle internationale. Et le Québec et le Canada font partie des
États, parce qu'on est en Amérique du Nord, qui utilisent peu ces instruments. Donc, vous le présentez en
introduction, mais on a l'impression que ça devrait être plus présent dans
le reste de la stratégie, ça nous semble fondamental.
Évidemment, vous revenez sur l'importance de
prendre en compte les réalités des Premières Nations et des Innus, ça nous
semble aussi quelque chose de fondamental. On avait fait un avis spécifique sur
cette... intégrant cette thématique, pour favoriser une réelle implication des
peuples autochtones, notamment dans ces enjeux en matière de biodiversité et de
climat. Donc, ça nous semble essentiel.
Je vous ai parlé des ODD, c'était une très bonne
nouvelle de les intégrer dans l'ensemble de la stratégie au niveau de ce cadre
mondial international. Par contre, on dit que la contribution de Québec, c'est
notamment dans cette stratégie en matière de
la publication qu'on fait au niveau de l'examen national du Canada. Moi,
j'aurais nettement préféré voir un
examen national du Québec sur cette stratégie des ODD. J'ose espérer que, dans
cette approche, on pourra faire un bilan réel de comment le Québec,
comme État, contribue adéquatement à la mise en oeuvre de l'ensemble de ces ODD, parce que c'est ce que les États font à
l'échelle internationale et qu'il y a un rôle à jouer de façon importante
là-dessus.
Ce qui nous amène à la dimension fondamentale de
l'économie circulaire.
Mme Levasseur (Annie) : En effet,
donc, on juge qu'évidemment la plus grande part des problématiques environnementales qu'on a sont causées par notre système
économique actuel, très linéaire, et que l'idée de l'implantation de la
transition vers une économie circulaire devient un petit peu une colonne
vertébrale pour... parce que c'est un nouveau modèle, une nouvelle façon
d'implanter nos façons de faire qui vont mener à plusieurs des objectifs de durabilité puis qui est aussi essentiel à la lutte
contre les changements climatiques puis à l'atteinte de nos cibles de réduction
de gaz à effet de serre.
Donc, grosso modo, une des conclusions à
laquelle on est venus, c'est qu'évidemment tous les aspects du développement
durable sont importants et sont extrêmement présents dans cette stratégie-là.
Par contre, je pense qu'étant donné les enjeux actuels et les urgences la lutte
contre les changements climatiques devrait tout de même avoir une place qui va
un petit peu au-dessus, un peu avec l'image qu'Alain a montrée, que, si on
n'atteint pas ces cibles-là, bien, malheureusement, on ne sera pas en mesure
d'atteindre aucun des autres objectifs et que... Un peu une idée pour s'assurer
qu'au niveau des ministères, des organismes, bien, c'est que tous les projets
menés par les différents ministères, bien, devraient prendre des indicateurs
comme des bilans GES en compte puis que les projets qui ne permettent pas d'aller en direction de ces cibles-là, bien,
malheureusement, ne devraient pas être mis de l'avant.
Je ne vais pas passer à travers toutes les
prochaines diapos, vous les avez un peu, comme... à titre de notre mémoire. Mais ce qu'on veut montrer un peu, c'est
qu'on a, à date, fait quatre avis scientifiques extrêmement documentés,
évidemment, basés sur la science, dans lesquels on fait des recommandations. Et
ici on a fait un exercice qui voulait regarder les différents objectifs et
sous-objectifs de la stratégie et identifier certaines recommandations qu'on a
déjà faites dans nos avis pour voir lesquels correspondaient. Donc...
M. Webster (Alain) : Par
exemple, dans le premier, si tu me permets, Annie, quand vous dites :
«Faire du Québec un pôle d'innovation et d'excellence...
La Présidente (Mme
Maccarone) : Merci...
M. Webster
(Alain) : ...en matière d'économie verte et responsable», bien, ce
serait fort intéressant d'y retrouver «orienté, bien sûr, vers la
carboneutralité» parce que vous... une...
M. Charette :
...
La Présidente (Mme Maccarone) : Merci.
Oui, vas-y. Le ministre cède de son temps pour que vous puissiez
continuer, alors, allez-y.
M.
Wesbter (Alain) : ...on peut négocier la
dimension temporelle. C'est bon, ça. C'est ça...
Une voix :
...
M.
Webster (Alain) : C'est ça, exactement,
temporelle.
M. Charette :
...de mon temps, oui, à condition qu'il m'en reste un petit peu, quand
même, pour échanger avec vous.
M.
Webster (Alain) : C'est bon, on va être
très brefs, une minute ou deux.
• (17 heures) •
Mme Levasseur
(Annie) : D'accord. Bien, en fait, c'est ça, on parle, par exemple, je
vais donner juste quelques exemples, mais de
soutenir la transition vers des modèles d'affaires durables, bien, on peut
parler d'instaurer des mécanismes d'innovation et d'expérimentation
réglementaires, d'inscrire la démarche des zones d'innovation dans une perspective de carboneutralité et d'encourager
uniquement des zones qui vont permettre d'atteindre ces objectifs-là,
parce que c'est des grandes initiatives très structurantes qui vont nous aider
dans nos objectifs.
En termes
d'aménagement du territoire et de biodiversité, il y a des liens extrêmement
forts aussi, évidemment. Puis, dans notre
avis, on avait parlé de, par exemple, transposer à l'échelle régionale les
objectifs nationaux de conservation. Ce sont des problématiques qui ne
sont pas aussi globales que les changements climatiques et que chaque zone va
vraiment avoir des problématiques différentes et des façons de conservation qui
sont différentes.
On peut parler
d'avoir un vaste programme d'adaptation des forêts aux climats futurs, qui vont
être extrêmement affectés, en particulier
dans la forêt boréale, puisque le réchauffement au nord du Québec va être
beaucoup plus important qu'ailleurs et que les forêts jouent un rôle, évidemment,
pour nous aider... autant de puits de carbone que de régulation du climat.
M. Webster
(Alain) : Dans cette transition socioécologique juste, et le terme est
fondamental, bien, on revient sur
l'importance de l'innovation sociale, il faut mieux la détailler, mieux la
préciser, mieux montrer comment. Parce
que vous faites une reddition de compte de tous les ministères, c'est ça qui
est intéressant, et c'est ce qui distingue la stratégie de développement durable des politiques sectorielles, vous amenez
l'ensemble de l'administration à faire ça. Il faut s'intéresser à ces
enjeux Il faut s'intéresser à ces enjeux d'innovation sociale. Il faut
s'intéresser aux enjeux en matière de
verdissement des villes. Il faut travailler sur les enjeux de mobilité, évidemment,
parce que c'est fondamental et ça va toucher un ensemble d'actions du
ministère. Il faut s'intéresser, bien sûr, à l'ensemble des décisions du
gouvernement par des planifications quinquennales. On revient sur la question
de l'intégration de la vision en matière de transition et de cette stratégie en
matière de budgétisation. Il faut que l'État joue un rôle fondamental d'un
leadership structurant, emballant.
C'est une bonne
nouvelle de parler de développement durable et de carboneutralité. Il faut que
ça soit vu comme étant, dans l'ensemble de l'administration, une bonne nouvelle
et pas juste encore une reddition de comptes. Il faut, bien sûr, maximiser la
contribution de la richesse... de la recherche dans l'ensemble de ces enjeux
parce que c'est un gain de richesse important, cette dimension. Il faut
travailler au profit de l'ensemble des Québécois avec, notamment, les enjeux
financiers. On s'est dit, dans l'avis sur la biodiversité — si
vous ne l'avez pas lu, je vous recommande d'aller les lire, ils sont tous
passionnants — qu'il
faut orienter ce financement public et privé vers ces stratégies de changement
climatique et de biodiversité parce que l'État seul ne pourra pas financer ces
transitions.
Et enfin, me
direz-vous, en conclusion, vas-y, ma chère.
Mme Levasseur (Annie) : Oui. Donc, la Stratégie
gouvernementale de développement durable, évidemment, c'est un outil
absolument nécessaire, qui doit, selon nous, mieux intégrer les enjeux
climatiques, en fait, en faire une priorité autour desquels les autres
objectifs vont pouvoir s'attacher. La démarche de la stratégie doit être
évidemment inclusive pour faciliter sa mise en oeuvre et maximiser les
retombées pour toute la population. Les questions de justice sociale, de
justice environnementale sont très importantes aussi. Puis, comme le mentionne
France Stratégie, donc, la prise en compte
des enjeux de soutenabilité ne sera effective que si elle repose sur une
culture partagée. Ça suppose de l'intégrer dans la production et la
transmission des connaissances, aussi bien à l'échelle de l'ensemble de la
population que pour celle des décideurs publics. Merci.
La Présidente (Mme Maccarone) : Merci.
Nous allons procéder maintenant à la période d'échange. M. le ministre,
il vous reste 12 min 45 s.
M. Charette :
Merci de m'avoir laissé un petit peu de temps, c'est apprécié, mais,
sincèrement, un, merci d'être là cet après-midi, deux, merci pour le travail
que fait le comité consultatif. C'est une instance, pour l'ensemble du Québec,
qui est incontournable par les avis que vous produisez, par l'expertise que
vous partagez. Aussi, merci pour votre dynamisme. On peut parler
d'environnement et de développement durable en y mettant du coeur et de la vie.
C'est ce que vous avez réussi avec beaucoup, beaucoup de brio, encore une fois.
Vous me faites
réaliser une chose, puis j'avais eu un petit peu l'échange avec le groupe
précédent, il y a, naturellement, la
stratégie de développement durable, c'est une chose, mais il y a aussi toute
l'action gouvernementale qui n'est pas toujours reflétée dans le
verbatim ou dans le phrasé de la stratégie. La question : Comment qu'on
réconcilie tout ça? Vous parlez de lutte aux changements climatiques — j'y
reviendrai — de
carboneutralité, de biodiversité, écofiscalité, l'importance des relations avec
les Premières Nations, les Inuits, l'économie circulaire. Ce n'est pas tous des
thèmes qui sont explicités dans le détail dans la stratégie, mais qui sont pris
en charge par d'autres actions gouvernementales.
Donc, comment faire
en sorte que ces actions-là puissent être associées à la stratégie bien
qu'elles soient parallèles à l'étude de la stratégie gouvernementale en
développement durable? C'est la question piège que j'aurais le goût de vous
poser dans un premier temps.
M. Webster
(Alain) : ...question fondamentale, et c'est à cet exercice qu'on
s'est prêtés, comment dirais-je, dans un délai relativement court, néanmoins.
Donc, on n'a pas fait une réécriture parce que le document est, en soi, fort
intéressant, mais on a tenté de faire cet exercice en prenant justement le
premier, là, quand je vous disais : Il ne faut pas juste que le Québec
soit un pôle d'innovation en matière d'économie verte, mais il faut que ça soit
orienté dans une stratégie de carboneutralité.
Donc, lorsqu'on
arrive dans un enjeu de reddition de comptes, ça, c'est la contrainte de cette
stratégie, parce que j'imagine que la Commissaire au développement durable vous
en a parlé un peu, là, puis que c'est tout le temps un débat, dans l'ensemble
des ministères, sur l'ampleur de cette reddition de comptes, mais elle est
fondamentale en même temps, parce que c'est l'occasion pour les ministères de
se dire : Comment je contribue à ces grands enjeux essentiels en matière
environnementale, mais en matière nationale?
C'est
un choix qu'on a fait, au niveau de l'Assemblée, de se dire : Ce
développement ne peut pas faire autrement qu'être durable. Et il faut
donc faire ces corrections parce que le marché n'est pas capable de l'intégrer
tout seul à cause de ces enjeux d'externalité, mais là j'arrête. Le cours
d'économie de l'environnement dure au moins 45 heures. On n'aura pas le
temps, dans ce bref moment là... mais on peut prendre, pour chacun de ces
objectifs que vous avez présentés... amener des sous-objectifs particuliers en
se disant : Voici ce qu'il faut intégrer.
Le
premier, par exemple, sur cette transition vers des modèles d'affaires, bien,
est-ce qu'on intègre davantage le volet écoconditionnalité? Ça suppose
que les ministères devront faire une reddition de comptes sur ces points-là. Est-ce qu'on travaille sur le soutien financier,
le retrait du soutien financier à l'énergie fossile? Vous le faites déjà, par
exemple, dans l'élimination du financement
des autobus scolaires, qui ne sont plus maintenant à essence, qui sont électriques. Il faut passer ce message dans
l'ensemble de l'administration de tous les ministères, de tous les organismes
publics, pour dire : Dans ce que vous avez comme marge de manoeuvre,
comment vous intégrez ces enjeux, en plus de ceux qui sont déjà dans la
stratégie, mais qui ont un poids climatique spécifique pour accélérer cette
transition?
Et
le PEV ne peut pas faire ça parce qu'on fait des mesures particulières, mais on
ne demande pas à l'ensemble des ministères et organismes de faire cette
reddition de comptes globale. Et là on a l'impression, en lisant ça, que la stratégie, comme elle... étant très générale sur
le développement durable, que... C'est essentiel, il faut travailler les enjeux
sociaux, c'est évident, il faut travailler l'ensemble des thématiques en
matière environnementale, l'eau, biodiversité, changements climatiques, mais,
de tout ça, il y a quelque chose, dans cette période de cinq ans, qui est le
plus fondamental, sinon on ne serait pas ici, et c'est la question climatique.
Donc, il faut
s'assurer que, lorsque les organismes font cette reddition de comptes, ils
portent une attention particulière à cette
transition climatique pour que, partout, et pas juste vous, M. le ministre, dans
votre rôle de coordination, mais partout dans l'appareil gouvernemental,
on soit obligés de se dire : On est-tu dans la bonne track? Puis là je me
rends compte que, quand je vais faire ma reddition de comptes, je vais me faire
dire, en termes publics ou en termes administratifs, dans le rapport de la
commissaire, que je ne suis pas à la bonne place. Donc, peut-être qu'il faut
corriger le tir, et c'est à ça que ça sert, donner les grandes orientations,
mais, si elles sont trop générales, en développement durable, on a
l'impression, des fois, que la reddition de comptes devient plus un enjeu
contraignant, administratif, qu'une collaboration à un défi sociétal
fondamental.
Ça fait que c'est
pour ça qu'on se dit : Là, il faut l'aligner plus. Et on a donné quelques
petits exemples sur chacun de ces cas-là. Dans le volet «structurer le marché
des emplois verts et verdissants», bien, il faut revenir sur le volet
spécifique... sur la formation de la main-d'oeuvre dans la transition
climatique. Comment on fait le lien? On est capables de compléter... Ça fait
qu'on ne s'est pas dit qu'il fallait revoir l'ensemble du cadre que vous avez
présenté, avec les objectifs et les
sous-objectifs. On s'est plutôt dit qu'on pouvait avoir une démarche
constructive permettant de rendre beaucoup plus explicite l'essentiel
mandat particulier que vous avez, durant ces cinq ans, sur la question climatique, et on pense que ça va faciliter votre
rôle à titre de ministre qui coordonne l'ensemble de l'action gouvernementale
dans la lutte aux changements climatiques...
La Présidente (Mme Maccarone) : On
va juste donner la parole au ministre. Je crois qu'il souhaite continuer
avec des questions.
M. Charette :
C'est passionnant, en même temps, de vous entendre. Effectivement, c'est
qu'à un moment donné moi, je veux bien vous donner du temps, mais je pense que
les oppositions ne m'en donneront pas. Ça fait que je suis aussi bien de
capitaliser sur le temps qu'il nous reste. Je dis ça à la blague pour les
oppositions, bien sûr. C'est une belle commission, puis on collabore bien
ensemble.
Bien, c'est de voir
qu'est-ce qui doit être repris dans la stratégie qui est déjà un règlement ou
une loi même dans d'autres circonstances. Vous avez donné l'exemple des autobus
scolaires. On n'insiste pas là-dessus dans la stratégie, mais le règlement est
déjà passé. C'est-à-dire, dorénavant, tout nouvel autobus scolaire, si on veut
un financement du gouvernement du Québec, doit être électrique. Donc, c'est
déjà dans la réglementation. La reddition de
comptes se fait systématiquement à travers le ministère des Transports. Donc,
non, on ne l'a pas inclus là, mais c'est un ajout. C'est quelque chose
qui est complémentaire à la stratégie de développement durable, mais je
comprends qu'il faut être en mesure de faire les suivis sur ces différentes
mesures là.
• (17 h 10) •
M. Webster
(Alain) : ...à partir de ce bon coup, pouvoir se dire, pour l'ensemble
des ministères : Dans ce que vous faites comme dépenses spécifiques, bien,
comment vous faites également la même chose, comment vous contribuez à ce
retrait du financement en lien avec le volet fossile? Et ça permettrait
d'identifier l'ensemble de ces approches. Ça fait que ce n'est pas de
dire : Cette mesure est bonne ou pas bonne, on pense qu'elle est très
bonne, bonne idée, mais c'est, dans
l'ensemble de la reddition de comptes du gouvernement, de pouvoir se
dire : Vous avez aussi, au-delà
de chacune des mesures qu'on a prise en compte dans le PEV, dans les mesures
définies par le gouvernement, vous, comme
gestionnaire, comme ministre, comme haut fonctionnaire... vous avez cette
responsabilité aussi de vous poser cette
question. Dans les choix que vous faites, êtes-vous en train d'éliminer le
soutien financier à cette consommation d'énergie fossile? Et le PEV ne
le fait pas complètement, le fait dans certaines mesures, et on les suit, ces
mesures, c'est correct.
Ça fait qu'on n'a
pas... on n'est pas ici sur le PEV et ses mesures particulières. Au contraire,
on se dit : Dans ses mesures particulières, est-ce qu'on peut justement
leur donner une plus grande visibilité, pas sur la mesure comme telle, mais sur
l'orientation qu'elle porte, comme par exemple l'élimination du soutien
financier au volet fossile? Il faudrait que
tous les ministères se disent : Moi, dans mes choix, qu'est-ce que je fais
par rapport à ça, est-ce que je contribue adéquatement à cet objectif
fondamental de la société québécoise? On a l'impression que ce n'est pas très transparent dans la stratégie parce que
ça fait partie de l'un des objectifs en matière de changements climatiques,
et on se dit : On devrait mieux le préciser, comme ça, la reddition de
comptes globale devra intégrer ces questions particulières,
du moins les questions que vous trouverez fondamentales à poser, en matière de
changements climatiques, pour l'ensemble de l'administration
gouvernementale.
M. Charette :
Ça me donne l'idée suivante. On ne sera pas prêts pour le 1er avril
prochain, mais, vous avez peut-être vu, en décembre dernier, on a mis en ligne,
donc, à la disposition tout le monde, le tableau de bord sur les mesures du
plan de mise en oeuvre et du PEV. On a réellement... C'est un superbe exercice
de transparence. Dans certains cas, on voit
que ça va très bien. Dans certains cas, on voit déjà qu'il y a peut-être des
réajustements qui seraient nécessaires.
Est-ce que c'est un outil semblable qu'on pourrait se donner pour l'évaluation
de la stratégie, c'est-à-dire, éventuellement? On ne sera pas prêts à ce
niveau-là pour le 1er avril, je vous le dis tout de suite, parce que ça a
été de longue haleine de mettre ça en place
pour le PEV-PMO. Est-ce que c'est le genre de suivi qui serait non seulement
utile pour les ministères et organismes,
mais pour la population aussi... en mesure de voir : On a une stratégie,
bien, voici où on en est pour ce qui est des différents objectifs?
M. Webster
(Alain) : Je ne sais pas si tu veux y aller, Annie, mais vous
connaissez mieux que moi, bien sûr, l'ampleur de ces stratégies en matière de
reddition de comptes et l'ensemble des démarches qui ont été mises en place année après année au bureau de la
Vérificatrice générale, donc, au niveau du rôle du Commissaire au développement
durable, dans les commissaires antérieurs et
dans la présente. Ça fait que mon objectif n'est surtout pas de commencer
à commenter la stratégie de suivi de la Commissaire au développement durable.
C'est sa tâche de pouvoir discuter avec vous de ces enjeux-là, puis on n'en a
pas parlé dans l'ensemble du comité. Ça fait que j'aurais l'impression d'outrepasser un petit peu, là, ce qu'on aurait
comme discussion, mais on a l'impression qu'au-delà de la reddition de comptes
spécifique pouvoir mieux préciser les objectifs attendus, et donc les
responsabilités attendues des ministères, en lien avec la question climatique
va transposer cette démarche-là dans la reddition de comptes déjà prévue.
Est-ce qu'elle peut être bonifiée? Est-ce qu'elle peut être améliorée? Est-ce
qu'elle peut être intégrée? J'ai l'impression que, si je commence là-dessus, je
vois déborder le peu de temps que j'ai pour vous parler de changements
climatiques.
La Présidente (Mme
Maccarone) : Merci. Je dois maintenant céder la parole à la députée
d'Argenteuil.
Mme Grondin :
Est-ce qu'il reste du temps, Mme la Présidente?
La Présidente (Mme
Maccarone) : Il reste 1 min 43 s.
Mme Grondin : Oh! ça va être
difficile, M. Webster, hein, pour vous. En fait, ma question, elle va
être... Effectivement, vous avez amené trois
mots-clés que moi, je retiens : cohésion, transition, innovation sociale;
transition énergétique,
économique, écologique. Est-ce que, selon vous... Parce qu'on pose la question
au niveau de l'assujettissement au
niveau municipal, ma question est peut-être plus pour Mme Levasseur :
Est-ce que vous pensez qu'on doit assujettir les organismes municipaux
ou c'est plutôt à travers des différents outils, comme des OGAT, comme du
zonage, là, qu'ils vont faire l'exercice durable?
Mme Levasseur (Annie) : Bien, je ne
suis pas familière, nécessairement, avec qu'est-ce que ça peut demander à une
municipalité, mais que les municipalités doivent effectivement se faire des
plans et... Puis moi, je suis tout à fait d'accord avec ça, puis, on le voit,
il y a certaines municipalités qui le font de façon volontaire et qui sont
extrêmement actives, puis je pense qu'en fait c'est un niveau de gouvernement
qui est de plus en plus proactif avec les moyens qu'ils ont, étant donné leurs
pouvoirs, là. Donc, moi, pour ma part, je serais très favorable, comme je dis, sans être familière avec toutes les
questions de reddition de comptes et de mécanismes à l'intérieur, là, mais,
oui...
M. Webster (Alain) : Et, dans l'avis
sur la biodiversité, ce qu'on a mentionné de façon... sur l'aménagement du
territoire, ce qu'on a mentionné de façon spécifique, c'est : Définissez,
c'est votre rôle, à l'échelle nationale, ces objectifs et transposez ça en
matière de reddition de comptes et d'intégration, notamment au niveau des MRC,
pour qu'on puisse l'intégrer dans les schémas d'aménagement. Est-ce qu'on
ramène ça avec l'ensemble de la stratégie de développement durable? J'aurais
tendance à vous dire oui, mais à une condition : si cette stratégie est
emballante.
La Présidente (Mme Maccarone) : ...maintenant
à la porte-parole de l'opposition officielle. Alors, je cède la parole à Mme la
députée de Notre-Dame-de-Grâce.
Mme McGraw : Merci, Mme la
Présidente. Et je voulais... je voudrais qu'il puisse compléter sa réponse par
rapport à la question de ma collègue.
M. Webster (Alain) : Ah! j'ai du
temps de vous aussi, mon doux, c'est emballant, c'est extraordinaire.
Mme McGraw : Bien, écoutez, on verra
après une minute, mais je pense que... complétez votre réponse.
M. Webster
(Alain) : Oui, mais, très rapidement, je faisais un petit
clin d'oeil tantôt sur le fait qu'on a l'impression, vu de l'extérieur,
que c'est parfois vu comme étant une tâche lourde, cette reddition de comptes,
pour l'ensemble des ministères. Il faut donc
que ce soit vu comme étant quelque chose de positif dans les municipalités en
matière de «voici les orientations où on veut aller». Elles sont
claires, elles sont bien précisées, et voici une reddition de comptes simple,
mais qui va permettre de faire des gains en matière de prise en compte
uniforme, sur l'ensemble du territoire, de ces stratégies essentielles,
peut-être en choisir quelques-unes. J'aurais l'impression que je mettrais de
l'emphase beaucoup sur la question des changements climatiques, par hasard,
dans cet exemple-là. Ça fait que, oui, je pense que c'est important de les intégrer, mais il faut que ça soit une
stratégie d'intégration positive, où c'est vu comme étant, au niveau de
l'administration, non pas un rajout en matière de suivi administratif, mais
comme étant un alignement intéressant, socialement convenu, c'est un peu ce
qu'on avait en conclusion, permettant de faire des gains en matière de
transition plus rapidement.
Mme Levasseur (Annie) : Comme le dit
mon collègue, un effet mobilisateur, que ce ne soit pas seulement l'impact de
deux personnes qui ont la tâche de faire avancer les plans d'action de
développement durable dans les ministères et les organismes, mais que ça
devienne une appropriation par les différents organismes.
M. Webster (Alain) : Et, comme on
est très brefs, c'est pour ça que, dans la conclusion, on vous a parlé de
culture partagée. Ça résumait tout ça finalement en deux petits mots.
La Présidente (Mme Maccarone) : Mme
la députée.
Mme McGraw : Merci, Mme la
Présidente. Donc, première question pour le Pr Webster. On comprend très
bien qu'on fait face à une crise climatique, donc, l'urgence, mais, dans ce
contexte-là, quelles mesures économiques devraient être mises en oeuvre de
façon urgente pour adresser et faire face à cette crise et au développement
durable? Donc, dans ce contexte-là, quelles mesures économiques est-ce que vous
prioriserez?
M. Webster (Alain) : OK, c'est, en
soi, une belle question. J'ai combien de temps, donc, pour répondre à...
Mme McGraw : Mais j'ai plusieurs questions,
donc...
M. Webster
(Alain) : Bien sûr, mais là on est dans la stratégie de
développement durable. Ça fait qu'on est moins dans l'application
spécifique d'une mesure, on est plus dans les grandes orientations, mais, en
matière de transition climatique, on vous le redit, il faut parler plus
d'écofiscalité, c'est fondamental, parce que ce marché permet de faire un alignement intéressant, ce qui nous amène, bien
sûr, avec l'ensemble des dimensions sociales et d'équité. On l'a fait à travers la mise en place, bien sûr, du SPEDE, il
y a des années, adopté, là aussi, de façon unanime à l'Assemblée nationale.
Il faut donc se demander qu'est-ce qu'on a comme outils intéressants pour
permettre de faire cette transition.
Et
donc on va revenir sur la cohérence de l'État. Il faut s'intégrer...
s'intéresser à ces outils d'écoconditionnalité, s'assurer qu'on ait une
cohérence de l'État pour que, lorsqu'on finance un organisme, il contribue à
ces stratégies en matière de lutte aux
changements climatiques, et qu'on n'est pas en train, d'un côté, au niveau du
ministère, d'avoir une stratégie d'appui qui va à l'encontre de l'ensemble des
directives que vous tentez de mettre en place dans vos stratégies
environnementales de lutte aux changements climatiques. C'est d'une difficulté
inimaginable, c'est d'une complexité très
grande dans toutes les organisations, et encore plus grande pour le
gouvernement, cette cohérence, et c'est pour ça qu'on dit : Il faut la
centrer sur le volet changements climatiques, et mettre en place des outils en
lien, notamment, avec le financement, et, dans certains cas, définir des
balises particulières.
On a parlé des OGAT tantôt. Il faut que ces
OGAT, que vous discutez à l'interne, et qui vont être publics, j'imagine, dans
les prochains mois, comme prévu, bien, intègrent adéquatement ces enjeux de
biodiversité, intègrent adéquatement ces enjeux de changements climatiques pour
pouvoir aligner l'ensemble du développement à l'échelle locale. Donc, vous devez travailler sur plusieurs tableaux en même
temps, et on pense que la question de l'écofiscalité aura un rôle central, et on pense que les
orientations définies à l'échelle des municipalités seront aussi très
pertinentes pour aligner ces stratégies en matière de développement
local et régional. J'essaie d'être bref.
• (17 h 20) •
Mme McGraw : Donc, je viens de lire
que, donc, dans... je viens de lire... je viens d'apprendre qu'il y a un 20 millions de dollars en subventions
pour réduire les émissions de gaz, de GES, l'aide financière du gouvernement,
ça a été annoncé... en tout cas, un article dans La Presse. Donc, parmi
ces mesures-là, est-ce que... Quelle est votre réaction à ces subventions-là auprès des — un
20 millions de dollars — Suncor,
Rio Tinto et Groupe CRH Canada, trois des plus grands pollueurs de la
province?
M. Webster (Alain) : J'ai ma
contrainte d'habiter à Sherbrooke, ça fait que j'étais en mode déplacement. Ça
fait que si, vous, vous avez lu ça aujourd'hui, malheureusement, moi, je ne
l'ai pas lu, mais ça revient à cette logique de
cohérence, hein? Comment on est sûr que le financement qu'on fait contribue à
nos stratégies en matière de changements climatiques? Est-ce qu'on est
en train de financer un projet particulier, qui se traduit par une réelle
réduction de gaz à effet de serre? Ça serait à voir parce que la stratégie en
matière des entreprises associées à l'énergie fossile n'a pas été... toujours
été extraordinaire en matière de contribution aux luttes aux changements
climatiques. J'essaie de rester poli, et je le suis beaucoup trop quand je dis
ça comme ça, mais, globalement, on est plus dans une stratégie.
Et vous le savez mieux que moi, comment on peut
amener, par un ensemble de contraintes financières associées à ces stratégies d'écofiscalité, un alignement de choix
spécifiques parce qu'on amène une contrainte financière, et, lorsqu'on
choisit de subventionner, bien, c'est un peu le même type d'instrument, mais
c'est plutôt, cette fois-ci, porté financièrement par l'État, bien, il faut
que, là aussi, il y ait une cohérence en matière d'alignement spécifique en
matière de lutte aux changements climatiques. Et puis, comme j'ai déjà fait une
ou deux discussions avec les parlementaires que vous êtes ici, vous m'avez
appris qu'il ne faut pas parler d'une thématique qu'on ne connaît pas très bien
puis d'un sujet particulier comme celui-là. Ça fait que je ne pourrais pas vous
dire si lui, il est bon ou mauvais, mais les
principes restent les mêmes. On contribue financièrement pour faire des gains
en matière de lutte aux changements climatiques. Ça nous semble un enjeu
fondamental dans l'ensemble de la stratégie gouvernementale.
Mme McGraw : Merci. Je n'ai pas pu
résister, mais votre collègue Pierre-Olivier Pineau, il... sa réaction :
«On parle d'entreprises qui bénéficient déjà d'allocations gratuites, droit de
polluer. On leur donne de l'argent pour réduire
leurs émissions de GES, pour lesquelles elles ne paient presque rien.» Je
sentais que, professeur en environnement, en économie... En tout cas, une autre question pour Pre Levasseur.
Les chaires de recherche québécoises sont nos experts et nos expertes.
Selon vous, comment on intègre davantage cette expertise dans nos... notre
processus législatif et au sein de cette stratégie gouvernementale?
Mme Levasseur (Annie) : Effectivement,
c'est sûr qu'au niveau, bien, évidemment, du financement de la recherche puis
des programmes, donc, par les programmes typiques, comme les programmes
soutenus par le FRQ puis de... on avait comme recommandation aussi, évidemment,
de s'assurer d'augmenter les budgets qui vont aller au niveau de la lutte
contre les changements climatiques... autant on soulignait deux aspects très
importants aussi. Oui, il y a du développement technologique, puis je suis
ingénieure, ça fait que je suis entourée de gens qui font du développement
technologique mais aussi une très grande part au niveau de l'innovation
sociale, puis, de plus en plus, en tout cas,
les projets que moi, je fais, des projets où on va vraiment intégrer autant la
partie technologique à la partie sociale, donc, de favoriser ça.
Puis, au niveau aussi des différents ministères,
donc, bien, c'est d'intégrer, je pense, les chercheurs, les experts à
différents niveaux dans le montage de programmes. Moi, je le fais
régulièrement, de par la nature de mon travail, que ce soit avec des gens au
MELCC qui veulent vraiment s'assurer que, sur des bases scientifiques, ils vont
favoriser les bons projets avec la bonne comptabilité carbone. Donc, on peut
vraiment, à travers des initiatives de recherche et d'expertise... d'intégrer
les personnes qui ont ces expertises-là au sein des projets pour s'assurer
qu'on fait... qu'on avance les programmes vraiment en se basant sur la science.
Puis le comité consultatif, évidemment, est un exemple où le gouvernement peut
profiter de l'expertise puis de... pour avoir des recommandations puis ensuite
orienter ses décisions à partir de ça.
M. Webster (Alain) : Et, dans cet
avis sur recherche et innovation, on mentionnait, par exemple, qu'au niveau
européen, dans ses fonds de recherche, on y consacre 35 % de ce
financement sur cette orientation en matière de lutte aux
changements climatiques. L'exemple nous semblait fort intéressant à suivre. On
n'est pas assez au Québec, bien sûr. Donc, le message, c'est d'en faire plus.
Mme
McGraw : Votre dernier point, c'est... Vous parlez
d'intégrer, dans la production et dans la transmission des connaissances, aussi bien à l'échelle de
l'ensemble de la population que dans celle des décideurs publics... Comme
vous savez, récemment, il y a une motion qui a été adoptée unanimement à
l'Assemblée pour que tous les élus fassent une formation en changements
climatiques. Et d'ailleurs je prends... je souligne aussi que notre caucus a
été le premier au Québec de s'engager, le jour avant cette motion-là... Donc,
on est prêts, très prêts à participer. Donc, selon
vous, suite à cette formation-là, quel serait... Qu'est-ce que vous proposez,
en termes de fréquence, de programme, pour que les décideurs... pour que
les décideurs publics soient au courant de la science, l'évolution des
solutions? Qu'est-ce que vous pouvez proposer vis-à-vis les décideurs publics
pour qu'on reste à jour dans les faits, la science, les conséquences, les solutions par rapport aux changements climatiques
au coeur... qui devraient, selon vous, être au coeur de cette stratégie
gouvernementale?
La
Présidente (Mme Maccarone) : Il ne reste pas assez de temps pour votre réponse.
Alors, je vais maintenant céder la parole à la porte-parole du deuxième
groupe d'opposition. Mme la députée de Verdun, la parole est à vous.
Mme Zaga Mendez : Merci beaucoup
pour votre présentation. Je vais poser ma question puis je vous laisserai du
temps aussi pour répondre à la question de ma collègue. On a parlé tantôt de
reddition de comptes. On a parlé de la contrainte climatique, qui est plus
pressante dans notre stratégie. Et, rapidement, vous avez parlé de soit une évaluation, une analyse, d'autres groupes nous
parlent d'un test climat qui devrait être intégré dans l'analyse des...
bien, pas seulement des politiques, mais des grands projets d'envergure du
gouvernement. Je voulais vous entendre un peu plus là-dessus.
Mme Levasseur (Annie) : C'est
vraiment très important, selon nous, parce qu'effectivement on a un... On a le PEV. On a un paquet d'initiatives, puis le
ministre l'a bien mentionné, qui vont être... avec des cibles, avec des
indicateurs de suivi, tout ça. Par contre, évidemment, ce plan-là prend
un peu pour acquis que c'est des réductions additionnelles sur le «business as usual», mais, si on a, à
travers toutes sortes de projets dans les différents ministères et
organismes... qu'on implante des projets qui vont aller en sens inverse puis
augmenter les émissions de GES, donc, à ce moment-là, bien, ça rend, veux veux
pas, moins efficace, évidemment, toutes les initiatives qu'on va faire dans le
cadre d'un PEV.
Donc, nous, on pense, au comité, que c'est
superimportant, effectivement, que les projets, que ce soient des projets
d'infrastructure, peu importe, de construction, donc, que ce soit fait avec un
bilan de gaz à effet de serre afin de voir quelle est la contribution de ce
projet-là. Donc, on commence à le faire, par exemple, à travers les études
d'impact environnemental, à travers les processus d'autorisation par la LQE.
Ça, c'est pour des projets bien précis, mais on pense que, de façon générale, à
travers les différents ministères, ça devrait être appliqué.
M. Webster (Alain) : Et ça se résume
en quelques mots clés, encore une fois, la cohérence de l'État, comment aligner l'ensemble de ces choix dans la
même direction, et la direction fondamentale, dans les cinq prochaines années,
c'est cette transition climatique, selon nous, bien sûr, une transition juste,
tenant compte de l'ensemble des enjeux sociaux l'entourant, mais ça
reste fondamental.
Mme Zaga Mendez : Je pense, j'ai
encore un peu de temps. Rapidement, vous avez parlé aussi d'adaptation aux
changements climatiques, oui, à la contrainte de la lutte aux changements
climatiques, mais on voit peu, dans cette stratégie, l'adaptation. Quel est
votre avis là-dessus?
M. Webster (Alain) : Ça reste une
thématique qui est fondamentale, parce qu'importe ce qu'on réussit à faire d'ici la période 2030‑2040
le climat va continuer à changer, qu'on soit dans une trajectoire contrôlée
vers 1,5° ou dans une trajectoire en train de déraper avec une
température à l'échelle mondiale plus élevée que 3°, la température va commencer d'augmenter jusqu'à
l'horizon 2040 et les impacts négatifs vont être présents. Donc, il faut
absolument développer et déployer, sur l'ensemble du territoire, avec
l'ensemble des intervenants, une stratégie d'adaptation adéquate, et, avec ça, je suis en train de répondre à votre collègue, ça
signifie donc que cette réflexion sur ces enjeux, les incidences, les
impacts, les capacités de réduction en matière d'atténuation, l'importance des
stratégies d'adaptation et les bonnes
stratégies d'adaptation, bien, elles doivent se faire avec les députés, bien
sûr, mais, dans un monde idéal, elles se font avec un ensemble d'autres
intervenants, allant des hauts dirigeants de l'État... allant, bien sûr, avec
un ensemble d'intervenants locaux. C'est pour ça qu'avec mon collègue Alain on
a fait une...
La
Présidente (Mme Maccarone) : Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole au
député des Îles-de-la-Madeleine. La parole est à vous.
• (17 h 30) •
M. Arseneau : Avec une certaine
fébrilité, je vais prendre la parole et avoir le même temps que le ministre,
pour une fois, peut-être la seule fois du mandat. Donc, Prs Levasseur et
Webster, j'ai deux questions, et puis vous prendrez les trois minutes qui
restent pour y répondre.
Quand on
parle d'écofiscalité, est-ce que vous voyez ça comme des mesures à la pièce ou
un gouvernement devrait présenter une espèce de florilège de mesures
dans différents domaines, et tout ça? Comment on applique ça dans la réalité? Est-ce que ça a été fait ailleurs? Puis, pour que
ce soit réaliste, on parle... Qu'est-ce que ça veut dire? Vaste question.
L'autre,
c'est la question de la cohérence. Comment, dans un gouvernement, plusieurs
ministères, des organismes, et tout ça, on assure la cohérence sur le
plan de la gouvernance? On en a parlé beaucoup avec d'autres groupes. Je vous
écoute.
La Présidente (Mme Maccarone) : 2 min 35 s.
M. Webster (Alain) : À l'échelle de
l'écofiscalité, lorsqu'on regarde les données publiées par l'OCDE et l'ensemble
des données du même genre, incluant les travaux que font mes collègues en
fiscalité à l'université, l'Amérique du Nord, et en particulier, bien sûr, les
États-Unis, le Canada, mais également le Québec font partie des États qui
utilisent le moins ces stratégies d'écofiscalité en matière de poids du revenu
provenant de l'écofiscalité sur l'ensemble des recettes de l'État ou sur
l'ensemble du PIB. Qu'importe la mesure que vous prenez, lorsque vous prenez le
graphique, que vous les classez, qu'il soit vers la droite ou vers la gauche,
on est toujours complètement parmi les États qui en font le moins. Pourtant,
c'est les instruments qui semblent fonctionner le mieux et c'est les
instruments qui sont préconisés par l'ensemble des organismes à l'échelle
internationale. On le fait à travers le SPEDE, ça reste un outil privilégié dans
cette lutte aux changements climatiques, mais le message, c'est qu'on devrait
le faire de façon beaucoup plus structurée, dans une vision plus importante,
incluant, bien sûr, l'ensemble des partenaires à l'échelle municipale. Vous
avez modifié les lois en matière, bien sûr, municipale pour permettre à ces organismes, municipal ou régional, d'utiliser ce
type d'approche en matière d'écofiscalité. On ne le fait pas beaucoup non plus
au niveau des municipalités. Dans ces stratégies-là, il faut développer une
vision globale pour qu'on puisse faire des gains rapides dans ces
enjeux.
Puis, en matière de cohérence, bien, c'est vrai
partout, dans tous les gouvernements, ça reste difficile, mais, dans une
réorientation de ce qu'on tente de faire en matière de développement durable et
de façon spécifique en matière de changements climatiques, si vous n'avez pas
une stratégie qui semble cohérente, la population décroche. La population
semble se dire... parce que ces enjeux démocratiques sont de plus en plus
importants, semble se dire : Est-ce qu'on va dans la bonne direction? Vous
avez vu les crises qu'on a vécues en termes, évidemment, sanitaires dans les dernières années. Il faut réussir à
conserver cette espèce de cohésion dans l'ensemble de l'État. Et, au Québec,
on a réussi à faire ça probablement mieux que partout ailleurs, y compris avec
l'ensemble des députés, que je tiens à saluer, parce que vous avez une vision
en matière de carboneutralité passablement plus unanime que ce que vos
collègues font à Ottawa ou ce qu'on observe au sud de la frontière. Donc, on
voit là une cohésion au niveau de cette députation à l'Assemblée nationale,
mais il faut réussir à la ramener dans l'ensemble de l'État pour permettre de
faire cette transition. L'une des façons d'y arriver, c'est cette cohérence de
l'action de l'État et cette prise en compte des enjeux sociaux découlant de
cette transition climatique.
La Présidente (Mme Maccarone) :
Merci,
Pr Webster et Mme Levasseur. Votre passion est contagieuse, puis je
trouve que c'est une belle façon de terminer notre journée.
Alors, compte
tenu de l'heure, la commission ajourne ses travaux au jeudi 2 février
2023, après les avis touchant les travaux des commissions. Merci
beaucoup.
(Fin de la séance à 17 h 34)