(Onze
heures quarante minutes)
Le Président (M. Jacques) : Bonjour
à tous. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission des transports et de
l'environnement ouverte.
La commission est
réunie afin de poursuivre les consultations particulières et les auditions
publiques sur le projet de stratégie gouvernementale de développement
durable 2023‑2028.
Mme la secrétaire, y
a-t-il des remplacements?
La Secrétaire :
Oui, M. le Président. M. St-Pierre Plamondon (Camille-Laurin) est remplacé par M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine).
Le Président (M.
Jacques) : Merci. Ce matin, nous entendrons les organismes
suivants : Équiterre et le Centre d'études et de recherches
intersectorielles en économie circulaire.
Comme
la séance a commencé à 11 h 39, y a-t-il consentement pour poursuivre
nos travaux au-delà de l'heure prévue? Consentement? Merci.
Auditions (suite)
Je
souhaite la bienvenue aux représentants d'Équiterre, Mme Colleen Thorpe et
M. Marc-André Viau. Vous avez 10 minutes pour faire votre
présentation. Merci.
Équiterre
Mme Thorpe
(Colleen) : M. le Président, M. le ministre, chers élus, merci de nous
avoir invités à prendre la parole aujourd'hui. Nous tenons d'emblée à souligner
que la production d'une stratégie de développement durable pour l'appareil
gouvernemental représente un travail ardu, et sa mise en oeuvre, encore plus.
Les commentaires et recommandations que nous vous présentons aujourd'hui se
font dans un contexte de dérèglement climatique et d'effondrement du vivant. Le
développement durable de 2023 n'est plus celui de 2008. Pour être ambitieuse et
réaliste, la stratégie de développement durable va devoir s'arrimer avec
d'autres orientations gouvernementales en développement telles que la vision
énergétique 2050 et la Politique nationale d'architecture et d'aménagement
du territoire. Son succès se mesurera par les solutions mises de l'avant et la
volonté politique de les appliquer.
La vision du
gouvernement en matière de développement durable et les grandes orientations du
projet de stratégie sont louables, et Équiterre s'y retrouve. Cela étant dit,
nous sommes d'avis que l'action gouvernementale des dernières années s'y oppose
à bien des égards. Nous sommes intéressés de savoir quelles seront les actions
qui corrigeront le tir afin que l'action gouvernementale soit cohérente et
permette d'atteindre une véritable transition socioécologique. Je passe la
parole à mon collègue.
M. Viau (Marc-André) : Merci, Colleen. M. le
Président, M. le ministre, membres de la commission, j'aimerais mettre
l'accent sur quelques éléments précis de la stratégie, là, qui nous
interpellent chez Équiterre. C'est lié aux constats effectués et à certaines
pistes d'action envisagées.
D'abord, je dois dire
que la façon d'aborder la transition juste met les bases d'une conversation
franche et sur un sujet qui n'est pas évident. On mentionne, à
l'objectif 1.2, que, «sous l'impulsion des politiques publiques relatives
au développement durable, dont celles liées à l'atténuation des changements
climatiques et à l'adaptation à ceux-ci, le marché du travail se transforme et
que, par conséquent, des emplois sont amenés à évoluer, d'autres à acquérir une
nouvelle importance et certains à disparaître». Il faut féliciter le
gouvernement de ne pas tomber dans les mêmes effets de toge que la première
ministre de l'Alberta, qui est dans le déni par rapport à cet enjeu-là. Il
serait cependant pertinent d'élaborer davantage les pistes d'action envisagées
pour cette transition juste, de concert avec les travailleuses et les
travailleurs, et que tout... pour cette stratégie-là.
Dans
un deuxième temps, j'ai été agréablement surpris de la stratégie sur l'enjeu de
mobilité... par un passage de la stratégie sur l'enjeu de mobilité.
Quand on lit dans le document, aux pistes d'action anticipée de
l'objectif 4.2, et je cite : «En
ce qui concerne le transport des marchandises, il est important d'agir pour
diminuer le nombre de véhicules sur nos routes ainsi que le poids et le
volume des camions», eh bien, nous disons félicitations. Cette piste d'action
anticipée doit se réaliser. C'est ça que ça nous prend pour la mobilité. Il
faut réduire la taille et le volume du parc de véhicules, il faut être plus efficace dans notre mobilité. Mais on se
demande pourquoi la stratégie fait un pareil constat en transport de
marchandises, mais pas pour les véhicules personnels. C'est exactement le même
problème : trop de camions légers, trop gros, trop lourds.
Par
contre, il faut souligner que le gouvernement souhaite prêcher par l'exemple
dans ce domaine. Il est rafraîchissant de constater que, parmi les
pistes d'action envisagées à l'objectif 5.8, la stratégie mentionne, et je
cite : «Il est souhaité des ministères et organismes
qu'ils optimisent l'usage des véhicules et les déplacements, ainsi qu'ils
fassent des choix écoresponsables de véhicules, en misant sur des technologies
plus propres, l'électrification et la diminution de la taille des véhicules.»
On trouve donc à deux reprises dans le document l'identification de la taille
des véhicules comme un enjeu problématique. Ça fait du bien de voir qu'on
arrive à la même conclusion du côté du gouvernement que celle à laquelle nous
le sensibilisons depuis maintes années. On encourage le gouvernement à répondre
à ses propres constats par des actions concrètes.
Avant de repasser la
parole à ma collègue, j'aimerais dire un mot sur l'écofiscalité. Dans le
document de stratégie proposé, il est écrit que l'écofiscalité est un outil qui
peut jouer un rôle important et que le ministère de l'Environnement conseille
les ministères et les organismes qui souhaitent être accompagnés dans
l'instauration, la gestion ou l'évaluation d'une mesure écofiscale. À la
lecture de la section sur l'écofiscalité, on ne sent pas que le gouvernement
est emballé par cet outil. Ça contraste pas mal avec la sortie de la stratégie
en 2015. Le gouvernement de l'époque avait même créé un groupe de travail sur
l'écofiscalité.
Disons qu'on était
davantage dans une logique proactive pour voir comment nos outils fiscaux
pouvaient permettre de répondre aux
impératifs du développement durable plutôt que de simplement constater leur
existence en 2023. L'écofiscalité ne doit pas être juste un outil fiscal
qu'on ajoute par-dessus les programmes existants. Il faut revoir le financement
de l'ensemble des programmes pour introduire de l'écoconditionnalité et de
l'écofiscalité. Je repasse la parole à ma collègue.
Mme Thorpe
(Colleen) : Nous sommes d'avis que le projet de stratégie ne fait
qu'effleurer un enjeu de taille, soit notre
système alimentaire. Celui-ci est précaire en raison, entre autres, du
dérèglement climatique. Et, comme nous le savons, l'insécurité
alimentaire est amplifiée avec l'inflation que nous connaissons.
Dès maintenant, nos
récoltes et nos menus doivent nourrir la santé humaine et la santé planétaire.
La stratégie ne fait pas mention de la nécessité de diversifier les régimes et
d'éliminer les aliments ultratransformés, qui sont
une source de gaspillage nutritionnel. En ce sens, nous suggérons de modifier
la définition d'alimentation durable pour y intégrer ces notions. Nous
suggérons également d'adopter un programme universel d'alimentation scolaire
québécois et aussi de protéger intégralement le territoire agricole en tant que
ressource stratégique non renouvelable.
Le
récent bilan de gestion des matières résiduelles nous rappelle à quel point
nous devons changer le paradigme et
que notre société d'État RECYC-QUÉBEC doit se muter en RÉDUC-QUÉBEC. Pour y arriver,
les mesures écofiscales doivent être déployées pour internaliser les
coûts de gestion des matières résiduelles. Nous sommes d'avis que des mesures doivent être intégrées dans les systèmes
de responsabilité élargie des producteurs, notamment pour les appareils électriques
et ménagers, afin de soutenir le réemploi des biens. La stratégie pourrait
également intégrer la durabilité et la
réparabilité dans les critères d'appel d'offres publics et faire des ministères
et organismes un levier pour soutenir les activités de réparation. Nous sommes
ravis de constater que la stratégie prévoit la possibilité qu'il soit apporté
des modifications à la Loi sur la protection du consommateur qui
pourraient porter notamment sur la durabilité des biens de consommation.
Afin
de permettre une mise en oeuvre efficace par l'ensemble de l'administration
publique et, plus largement, de notre société, la formation est la clé
de voûte pour changer les pratiques. Il n'est plus le temps d'aborder le
développement durable uniquement sous la forme de sensibilisation mais via des
réels programmes de formation et d'éducation.
Alors que le secteur de la construction, et de la rénovation, et de la
démolition, et des ICI est responsable de plus de 50 % des matières
éliminées au Québec, il est évident que les métiers de la construction sont peu
ou pas exposés aux pratiques écologiques pour limiter leur impact
environnemental. Il est tout aussi étonnant de constater que la formation
initiale à l'enseignement n'inclut pas de cours obligatoires en éducation
relative à l'environnement rejoignant l'ensemble des étudiants et étudiantes.
La Régie du bâtiment tout comme l'ordre des professions doivent s'impliquer
plus rapidement pour faciliter la mise en oeuvre de ces programmes.
Je passerais la
parole à Marc-André pour conclure.
M. Viau
(Marc-André) : Donc, pour résumer notre propos, là, je dirais qu'à
partir du moment où le gouvernement adopte et conserve des lois, comme celle
concernant l'accélération de certains projets d'infrastructure, qui ont pour principale conséquence d'affaiblir la
réglementation environnementale et les mécanismes de consultation publique, eh bien, à ce moment-là, l'action
gouvernementale s'éloigne des objectifs de développement durable. Comme nous
l'avons fait remarquer, plusieurs constats effectués dans le cadre de cette
stratégie sont pleins de lucidité, mais, si les constats demeurent à
l'état de constats, la stratégie ne remplit pas son rôle.
Comme pour l'avenir
énergétique, dont il est question avec le projet de loi n° 2 et une
éventuelle consultation publique, nous vous
recommandons, d'ailleurs, M. le ministre, de mettre en place un BAPE générique
sur le sujet. Il ne faudrait pas que les dimensions environnementales
continuent de faire les frais du développement. Il ne faudrait pas oublier que,
dans l'expression «développement durable», il y a le mot «durable». Merci.
• (11 h 50) •
Le Président (M. Jacques) : Merci
beaucoup pour votre présentation. Je cède maintenant la parole à M. le ministre
pour le début des échanges pour une période de 16 min 30 s.
M. Charette :
Merci, M. le Président. À vous deux, un plaisir de vous retrouver, malgré
le fait que ce soit à travers les... nos écrans respectifs. Donc, merci à vous,
mais merci également à Équiterre, joueur incontournable au Québec depuis de
nombreuses années sur ces questions-là. Donc, toujours intéressant, là, de vous
entendre.
Un constat que j'ai pu partager avec quelques
groupes depuis le début de la consultation, c'est le suivant, en fait, c'est ce
que je réalise : il y a plusieurs éléments qui ne font pas partie ou qui
ne sont pas écrits noir sur blanc dans la stratégie, mais
qui font l'objet de politiques ou de stratégies à travers le gouvernement. Vous
avez mentionné l'agriculture durable, notamment. C'est vrai qu'il n'y a pas de
long chapitre dans la stratégie gouvernementale de développement durable, mais le ministère de l'Agriculture, à travers
notre collègue, a déposé une stratégie d'agriculture durable qui reprend
d'ailleurs plusieurs des éléments que vous avez mentionnés comme... comme
souhait.
Donc, ma question, c'est la suivante :
Est-ce que, dans la stratégie, on doit reprendre toutes les initiatives ou se référer à toutes les initiatives qui sont
clairement dans l'optique du développement durable, mais qui sont contenues
dans d'autres stratégies gouvernementales?
Bref, est-ce qu'il faut tout répéter ou on peut tout simplement s'y référer
comme étant aussi des pratiques de
développement durable qui font partie de l'action gouvernementale, et des
ministères, et des organismes liés?
Mme Thorpe (Colleen) : On est bien
sensibles à ce défi de ne pas vouloir tout répéter et ne pas tout inclure, parce que ça fait des documents qui sont complexes
et très, très larges. Ce qu'on... Ce qu'on voulait amener avec la question
alimentaire, c'est une espèce de priorisation,
et, compte tenu que c'est un besoin de base des Québécois, compte tenu de la précarité
de notre système, on voulait voir une place plus marquée pour cet enjeu-là, qui
n'apparaît pas actuellement, à ce moment-ci. On est bien conscients qu'il y a
d'autres documents qui adressent ces problématiques.
Pour la question alimentaire, on se dit que,
comme on est en situation d'urgence et s'il devait y avoir des pénuries
alimentaires occasionnées par des ruptures d'approvisionnement, ce qui est...
ce qui est probable, dans les années à
venir, avec les changements climatiques, qu'on devrait voir cette priorité
reflétée dans la stratégie. Et l'agriculture, contrairement à certains
autres domaines, demande un long temps de prévoyance pour changer un système
agricole. Il y a beaucoup d'éléments à changer sur notre système agricole
actuellement, et il faut le prévoir dès maintenant. Et donc on voudrait voir
cette priorité dans la stratégie.
M. Charette : Je le comprends. Et
peut-être vous rassurer, mais... quoique vous aviez eu à commenter la politique
de développement... non pas de développement, mais d'agriculture durable du
MAPAQ, à sa présentation... mais on parle de
souveraineté alimentaire, on parle de protéger le territoire agricole, on parle
d'accompagner les agriculteurs pour
développer des cultures qui soient moins... moins dépendantes des pesticides,
on parle de financement de mesures, bref,
je pense que c'est un volet qui est très, très bien couvert, mais merci, là, de
nous rappeler l'importance de l'agriculture.
Vous avez parlé d'éducation, comme quoi ça
devrait être enseigné dans toutes nos écoles, l'importance de l'environnement, l'importance du développement
durable. J'en suis, et c'est une recommandation, là, qui, normalement,
va s'incarner dans le nouveau cours de citoyenneté qui est en déploiement
actuellement dans nos écoles primaires et secondaires.
Lorsque la réforme a été annoncée, il y a, quoi,
il y a un petit peu plus d'une année, c'est un des blocs qui a été présenté, et ça, c'est une excellente
nouvelle. Déjà, nos jeunes... Je le vois, là, j'ai des jeunes, moi, avec des
écarts d'âge assez importants. Je ne veux pas blâmer ma plus vieille,
qui a 25 ans aujourd'hui, mais, dans son discours, c'était moins présent
parce qu'à l'école c'était moins présent, on en parlait moins. Ma plus jeune a
15 ans, et ça fait partie déjà de ses préoccupations, ça fait partie de ce
qui est enseigné à l'école et ça le sera encore davantage avec le nouveau
cours, là, qui est en implantation. Donc, il y a une très belle évolution chez
nos jeunes, on les sent plus mobilisés, et, oui, l'école aura la possibilité de
jouer un rôle encore plus prépondérant à ce niveau-là.
Je sais que j'ai des collègues qui veulent
intervenir aussi. Je ne prendrai pas tout le temps de parole, mais juste vous revenir sur la question de la mobilité.
C'est clair, c'est important. Les transports, on le sait et on ne le répétera
jamais assez, là, c'est de loin notre
principale source d'émissions. C'est plus de 40 % de nos émissions de GES.
Il faut agir à différents niveaux.
J'aimerais vous entendre au niveau de
l'intermodalité. On a un réflexe, et c'est le défaut des nations avec un vaste territoire, on fait tout passer par le
routier, mais pas suffisamment par le train ou pas suffisamment par le bateau,
deux sources de transport, là, qui sont beaucoup moins émissives. Est-ce que
vous avez une réflexion à nous partager sur autant l'usage du bateau ou des
trains pour limiter nos émissions de gaz à effet de serre?
M. Viau (Marc-André) : Définitivement.
Merci pour votre question, M. le ministre. Il y a définitivement des
optimisations logistiques à effectuer et des pistes à explorer pour que ce soit
le ferroviaire. Pour le transport de marchandises par bateau, il n'est pas sans
conséquence non plus sur la biodiversité, là. On parle d'augmenter la capacité
du port de Montréal, notamment avec la construction d'un deuxième port à
Contrecoeur qui se fait en plein dans
l'habitat du chevalier cuivré, qui va menacer la survie de ce... de ce poisson-là.
Donc, oui pour explorer des pistes alternatives,
mais pas sans prendre en conséquence l'ensemble des conséquences
environnementales que peut arriver... que peut causer un déplacement des
activités d'un mode à l'autre.
M.
Charette : ...défis que nous
avons en matière d'environnement. On a eu l'occasion, entre collègues, de
parler notamment du tramway et du REM. Même lorsqu'on développe des
infrastructures de transport collectif, il y a des incidences, il y a des
milieux plus fragiles, parfois des milieux humides, parfois des milieux avec
des espèces qui sont déjà identifiées comme
vulnérables. Bien d'accord avec vous, il faut prendre ces éléments en
considération, mais toute bonne action en environnement entraîne aussi,
malheureusement, dans bien des cas, des conséquences en environnement qu'il
faut mitiguer, tout simplement.
Parce que le temps est très serré, malgré
l'importance des sujets qui nous occupent, je vais laisser la parole à mes collègues, mais je vous réitère mes
remerciements, puis on aura l'occasion de se reparler, là, pour d'autres collaborations.
Merci beaucoup.
Le Président (M.
Jacques) : Merci, M. le ministre, je cède maintenant la parole au député
de Côte-du-Sud.
M. Rivest : Oui, bonjour. Merci
beaucoup. D'abord, je souligne le volet assez positif de votre mémoire puis de
la façon qu'il est abordé. Puis je tiens à le souligner parce que c'est
toujours intéressant de voir que les idées sont bonnes, puis on rajoute ce
volet-là, d'aller un petit peu plus loin en rajoutant des objectifs «smart» qui
peuvent être vérifiés, validés, tout ça. Je tenais à le souligner puis vous
dire bravo là-dessus.
Vous avez abordé, dans votre présentation, le
volet d'outils fiscaux et vous, dans vos recommandations, vous parlez d'instaurer, de voir la possibilité
d'instaurer de nouvelles mesures écofiscales. Est-ce que vous pourriez élaborer
un petit peu pour nous donner certaines pistes, là, de quel pourrait être ce
volet innovant là, dans l'écofiscalité, que vous pouvez proposer?
M. Viau
(Marc-André) : Bien, il
n'y a pas... on ne va pas réinventer
la roue, là. Il y a... Il y a plusieurs pistes d'action qui ont été déjà
envisagées, que ce soit... la plupart dans le secteur de la mobilité, là, que ce
soit pour la... que ce soit un frais lié aux émissions de GES des véhicules
plus polluants, par exemple. Donc, ça, c'est un principe d'écoconditionnalité
dont il a été beaucoup question dans les dernières années au Québec, dans la
dernière campagne électorale également, faut-il le rappeler. Mais on peut
penser aussi, également, à la révision de l'ensemble des programmes. Et c'est ça qu'on... c'est ça qu'on...
le propos qu'on a fait un peu plus tôt dans l'allocution, c'est de dire :
Bien, on ne doit pas seulement ajouter des principes d'écofiscalité par-dessus
ce qui se fait d'existant. On peut retourner, on peut faire une évaluation des
programmes, voir comment ces programmes-là sont financés et est-ce que ce
financement-là mériterait d'être lié davantage à des objectifs
environnementaux. Et, en pensant de cette façon-là, on peut peut-être arriver à
faire des gains plus significatifs.
M. Rivest : Je comprends.
• (12 heures) •
Mme Thorpe
(Colleen) : Si je peux me permettre d'ajouter, c'est aussi une
question d'analyser l'écofiscalité, c'est-à-dire qu'on est aux
balbutiements de ces outils-là. Si on regarde la redevance à l'élimination, qui
est passée de 10 $, en 2006, à
30 $ en 2022, ce qui est en soi une bonne nouvelle, mais est-ce que c'est
la bonne hausse pour dissuader le recours à l'élimination? On n'a pas vu
d'étude pour nous dire c'est quoi, le bon tarif. Et on sait très bien que
l'élimination est une grande problématique, avec les résultats qu'on a eus du
bilan très récemment.
M. Rivest : D'accord. Merci. Si vous
pouvez me permettre aussi, vous avez mentionné l'idée de vision à long terme, sur cette vision gouvernementale là,
en matière de développement durable. Si on avait une baguette magique
ensemble et quelques minutes devant nous, quelle serait cette vision-là?
Pouvez-vous nous porter quelques éléments que vous souhaiteriez voir dans cette
vision à long terme?
M. Viau
(Marc-André) : Bien, je veux dire, l'énoncé de vision proprement
dit de la stratégie est pavé de bonnes intentions. Donc, il n'y a pas
énormément... il n'y a pas énormément à revoir dans cet énoncé de vision là. Je
pense qu'il aurait à gagner... il gagnerait
à être... à se transposer davantage dans l'ensemble des ministères, ce que je ne crois pas est la
réalité actuellement, quand on regarde certaines actions de certains
ministères. Donc, si on est capable de transposer cette vision-là, mais
non seulement de transposer cette vision-là, et c'est encore un propos qu'on
tenait un petit peu plus tôt dans
l'allocution, c'est qu'on ne doit pas rester à l'état de vision ou à l'état de
constat, il faut matérialiser cette vision-là, il faut matérialiser les
constats.
Or, malheureusement, à certains égards, et pas à
tous les égards, mais à certains égards, il y a certaines politiques
gouvernementales, j'ai fait référence à la politique sur l'accélération des
projets de loi d'infrastructure, on peut penser à des projets également qui
sont en développement, comme le projet de troisième lien, donc, on a un ensemble d'actions gouvernementales qui vont à
l'encontre de la vision qui est proposée. Donc, la vision en tant que telle, elle peut être la meilleure, si elle ne se
matérialise pas en actions concrètes pour refléter cette vision-là, la
stratégie ne demeure qu'une stratégie.
M. Rivest : Merci.
Le Président (M. Jacques) : Merci,
M. le député. Je cède maintenant la parole à la députée d'Argenteuil.
Mme Grondin : Il reste combien de
temps?
Le Président (M. Jacques) : Il reste
environ quatre minutes.
Mme Grondin : Parfait.
Mme Thorpe, M. Viau, bonjour. Merci pour le mémoire que vous avez
déposé. C'est toujours très intéressant d'avoir votre apport dans ces
réflexions-là.
Moi, je voudrais me concentrer... Puis il y a
des mots-clés que je retiens dans le cadre des échanges que nous avons, là,
c'est la notion d'exemplarité de l'État puis toute la question de
l'écofiscalité, donc la nécessité de faire des analyses ou de pousser plus loin
cette réflexion-là d'écofiscalité.
Moi, j'aimerais ça qu'on se concentre sur
l'orientation 2. Vous n'êtes pas sans savoir qu'agir en faveur de la
nature pour la santé, inévitablement, c'est quelque chose qui m'intéresse
grandement. Et vous n'êtes pas sans savoir qu'il y a
comme des engagements en termes de Plan nature, en termes de plan eau, sur la
question de l'eau. Donc, est-ce que vous
avez des éléments dont vous voudriez nous faire part à ce niveau-là, des
recommandations, des mots-clés, une intention de poursuivre les échanges
sur cette question-là?
M. Viau (Marc-André) : Je vais
essayer de répondre à la question, là, je ne sais pas si je l'ai bien comprise,
pour la nature, et pour l'eau, et pour la santé, si on a des recommandations
qui sont liées à l'exemplarité de l'État et l'écofiscalité, c'est bien ce que
je comprends?
Mme
Grondin : Bien, en fait, ça peut. Moi, je retiens qu'il y a
des sujets, comme l'écofiscalité, l'exemplarité de l'État, qui sont très importants. Mais j'aimerais ça qu'on se concentre
sur un des défis prioritaires, qui est l'adaptation aux changements climatiques, qui est aussi la
lutte aux changements climatiques, mais avec la notion de solutions nature.
Donc...
M. Viau (Marc-André) : Oui. Bien, on
est très favorables à l'utilisation des solutions nature, on en a fait, des recommandations. Et d'ailleurs, un peu plus
tôt avec le ministre, on parlait du Plan d'agriculture durable, là. Juste pour
revenir là-dessus, d'ailleurs, nos propositions concernent davantage
l'alimentation que l'agriculture, mais c'est un
autre sujet. Mais on en a fait, on fait la promotion d'une agriculture
régénératrice, chez Équiterre, et ce qui est aussi partagé dans le cadre
du Plan d'agriculture durable, donc on est très favorables à ces solutions nature
là. Vous avez parlé de l'eau, il y a eu une
proposition qui a été faite pendant la campagne électorale, qui devrait se
matérialiser, j'imagine, en pistes d'action.
Ceci étant
dit, on parle de mitiger les conséquences actuelles et non pas nécessairement
de renaturaliser. Et je pense que ça,
c'était un des aspects, peut-être, qui est manquant par rapport... et dont il a
beaucoup été question lors de la dernière COP à Montréal, l'aspect de... donc freiner le déclin de la
biodiversité, mais également renaturaliser. Donc, on doit stopper l'effritement et, après ça, on doit bâtir...
rebâtir les milieux naturels. On a encore beaucoup de projets gouvernementaux
qui vont empiéter sur des milieux naturels, notamment les milieux humides par
la construction d'autoroutes, sur les terres agricoles par des projets
industriels. Beaucoup de terres agricoles qui sont dézonées pour des projets
industriels, pour des autoroutes, c'est très problématique.
Le Président (M. Jacques) : Bien,
merci pour la première tranche d'interventions. Je vais céder maintenant la
parole à la porte-parole de l'opposition officielle, la députée de Notre-Dame-de-Grâce.
Mme McGraw : Merci, M. le Président.
Et merci à Équiterre d'être avec nous aujourd'hui. Merci pour la présentation et le mémoire qu'on vient de
recevoir. Donc, on est en train de prendre connaissance du document. Alors,
j'ai quelques questions. Donc, juste au début, vous parlez des
recommandations... bien, la section qui s'intitule Une hésitation marquée, vous dites que «la stratégie effleure certaines
thématiques, alors qu'elles devraient être davantage mises de l'avant», dont l'alimentation durable.
Mais vous dites aussi que «certains principes du développement durable ne semblent pas être mis de l'avant, dont le
principe de précaution», qui est un principe de base en développement durable.
Alors, est-ce que vous pouvez élaborer sur cette recommandation ou cette
observation?
M. Viau (Marc-André) : Oui. Bien,
pour le principe, bien, l'ensemble des principes de développement durable, je pense qu'il faut... il faut
approfondir leur utilisation. Il faut qu'ils soient davantage intégrés dans les
politiques... dans les politiques qui sont mises de l'avant. J'essaie
juste de retrouver exactement, là, le principe de précaution auquel vous
faites... vous avez fait référence dans notre mémoire. Je ne retrouve pas,
malheureusement, là, la section.
Mme
McGraw : Ça va. C'est à la
page 7. C'était très bref comme commentaire. C'est juste parce que...
Est-ce qu'il y a d'autres... Peut-être la question, c'est qu'à part du
principe de précaution, principe... est-ce qu'il y a d'autres principes de base
qui... Est-ce que vous pouvez peut-être nommer d'autres principes que vous
disez qu'il manque dans cette stratégie, qui ne semblent pas être présents?
M. Viau (Marc-André) : Il y a...
Encore là, puis je ferai un peu le même commentaire, malheureusement, que j'ai
fait précédemment, il y a de bons principes, il y a de bons constats.
L'important, pour nous, c'est qu'est-ce qu'on va faire avec ces constats-là,
qu'est-ce qu'on va faire avec ces principes-là. J'ai parlé, tantôt dans
l'allocution, de réduction de la taille du parc de véhicules. Donc, si on est
dans des principes de réduction, et ma collègue a parlé, bon, de la question de
la consommation, de la circularité, de la réduction à la source, si on est dans
cette logique-là d'action gouvernementale à la suite de la stratégie, on va arriver...
on va arriver à l'objectif. Le problème, c'est que, si on reste à l'état de
stratégie, si on reste... si on ne plonge pas dans les actions, si on ne prend
pas les mesures qui sont nécessaires, on n'arrivera pas aux résultats dont on a
besoin.
Mme McGraw : Parfait. Merci. Et
peut-être on va... Ah! madame, oui.
• (12 h 10) •
Mme Thorpe (Colleen) : Si je peux me
permettre, l'orientation 5, qui parle de créer un État exemplaire, on
parle d'un sous-objectif d'évaluer la durabilité des interventions
gouvernementales. Donc, c'est un sous-objectif, c'est un point majeur, à mon sens, parce qu'il évalue la cohérence, et
il faut trouver une façon de mesurer ça, parce que, comme on l'a mentionné, il
y a des actions gouvernementales actuellement qui ne sont pas en cohérence avec
la stratégie.
Mme McGraw :
Parfait. Merci. Vous avez aussi... vous avez parlé de mesures ou de solutions
écofiscales et vous avez dit que... je ne veux pas mettre des mots dans... mais
que le gouvernement s'éloigne un peu de ça, tandis qu'en 2015 le gouvernement... le gouvernement libéral avait mis
sur pied, justement, un groupe de travail sur l'écofiscalité. Et, dans ce contexte-là, donc, vous avez une bonne
section en transport et mobilité, dans votre mémoire, vous indiquez
qu'on omet de discuter de la taille des véhicules individuels, c'est de
l'actualité, évidemment, d'en parler. Est-ce que vous pouvez élaborer sur les
solutions écofiscales qui sont en lien avec le transport et surtout le
transport individuel?
M. Viau (Marc-André) : Il y en a
énormément, là, des options, des possibilités. Toutes ces options et ces
possibilités-là, tout... le ministère des Finances, le ministère des
Transports, tout le monde les a, tout le monde a les analyses sur les principes d'écofiscalité, que ce soit pour les... une
surtaxe sur les émissions de GES, d'avoir un principe de redevances
remises également à l'achat de véhicules plus polluants, que ce soit de la
tarification kilométrique. Toutes ces
options-là sont disponibles, ont été discutées, ont été débattues. Maintenant,
c'est le temps d'en faire quelque chose.
Mme McGraw : Vous avez parlé aussi
de consommation responsable et de circularité. Vous seriez content d'apprendre
qu'aujourd'hui on a apporté une motion sur l'obsolescence, justement.
Évidemment, ça n'a pas été retenu, mais on va continuer sur ce front-là.
Plusieurs groupes ont mentionné le manque de cibles et d'objectifs de type
SMART, dont la Commissaire du développement durable. Vous proposez, entre
autres, une cible d'indice de circularité
ambitieuse et le plan de mise en oeuvre. Pourriez-vous commenter sur
l'importance d'inclure les producteurs et non... et pas seulement mettre
la responsabilité sur les consommateurs?
Mme Thorpe
(Colleen) : Évidemment, tout changement systémique passe par
toute la chaîne, et les consommateurs
sont au bout de la chaîne, et donc... nécessaire de sensibiliser ces
consommateurs-là. On s'est penché un peu sur la circularité ou le plan de
circularité des Pays-Bas, et RECYC-QUÉBEC
a quand même étudié ce pays-là aussi.
Puis l'étude qui s'est faite au Québec a conclu qu'on était quand même assez
loin de la moyenne nationale de circularité,
donc 3,5 % au Québec, et je pense que la moyenne est à 8 %
ou à 9 %. Et donc un pays comme les Pays-Bas, qui est très
différent, peut-être, du Québec, quand même, pas beaucoup de ressources
naturelles, mais qui a quand même fait un plan ambitieux pour réduire la
consommation des matériaux... Et ce discours, on est au tout début au Québec, et il doit s'amplifier, et il doit
s'amplifier de différentes façons. Donc, oui, des lois sur la... obligeant la
réparation, mais aussi toute la gestion des matières résiduelles sur les
chantiers de construction.
Et, à cet effet-là, le langage utilisé dans
l'orientation 5, c'est vraiment d'améliorer la performance de la gestion
des matières résiduelles de l'État. Je pense que la sémantique est importante
ici, et on devrait beaucoup plus miser sur
un vocabulaire qui parle de diminution de l'empreinte, diminution de l'utilisation
des matériaux. Et, je répète, il est temps qu'on change le nom de RECYC-QUÉBEC,
ça envoie le mauvais message.
Mme McGraw : Oui, vous avez parlé de
RÉDUC-QUÉBEC, je pense, RÉDUC-QUÉBEC, très intéressant.
M. Viau (Marc-André) : Juste pour...
Mme McGraw : Oui.
M. Viau
(Marc-André) : Juste pour compléter rapidement, vous avez fait
référence à l'absence d'indicateurs. Effectivement, le fait qu'ils
seront définis dans la première année après la sortie de la stratégie, ça nous
semble également problématique. Ça devrait s'accompagner. La stratégie et les
indicateurs devraient aller de pair et non pas attendre de sortir une
stratégie, surtout qu'elle a deux ans de retard, avant de développer des
indicateurs.
Mme McGraw : Merci. Je pense qu'il
me reste quelques secondes, même pas.
Le Président (M. Jacques) : Une
minute.
Mme McGraw : Une minute. Donc, il y
a des groupes qui ont parlé d'un secrétariat à l'économie verte ou un mécanisme pour faire en sorte qu'il y a plus de
coordination et d'ambition entre les ministres puis que ça ne soit pas juste l'Environnement, mais tous les ministres,
les ministères qui sont impliqués. Est-ce que vous avez des observations
ou des recommandations dans ce sens?
M. Viau (Marc-André) : Bien, la
gouvernance climatique demeurera... est et demeurera un défi constant dans
l'avenir. Quelle sera la meilleure façon d'y arriver? On est ouverts à discuter
des différentes propositions. Ce qu'il ne faut pas perdre de vue, c'est
l'importance de s'assurer qu'il y ait une adhésion, et donc une participation
publique, comme on le suggère dans le cas de ce qui se fait en matière
énergétique en ce moment. Pour l'instant, c'est réservé à certains ministres et
à la présidente d'Hydro-Québec dans le cadre d'un comité. On doit arriver à
établir des mécanismes de gouvernance plus transparents.
Le Président (M. Jacques) : Merci
beaucoup. Merci beaucoup. Ceci termine les échanges. Donc, je cède maintenant
la parole au deuxième groupe d'opposition. M. le député de Taschereau.
M. Grandmont : Oui,
merci. Mme Thorpe, M. Viau, c'est un plaisir de vous recevoir. Merci
pour votre contribution importante à ce débat. Très intéressant mémoire. J'en
retiens, là, si je veux dégager une impression générale, c'est que les orientations, le diagnostic est très bon, mais
qu'on doit avoir des documents ou des orientations très claires et avec plus de mordant au
gouvernement du Québec, là, pour être capable de mettre en oeuvre les mesures
qui s'imposent aujourd'hui, en 2023.
J'aimerais vous entendre plus particulièrement
sur un élément qui m'apparaissait intéressant. Vous le nommez, on dirait, à
demi-mot, il s'agit du test climat sur les projets d'infrastructure. Est-ce que
vous êtes favorables à l'instauration d'un tel test climat qui nous permettrait
de mesurer l'impact climatique des projets d'infrastructure au Québec?
M. Viau
(Marc-André) : Oui. La réponse est simple, là : oui.
D'ailleurs, je pense que c'est à l'objectif... est-ce que c'est à l'objectif 5 dont on...
orientation 5, donc, placer le développement durable au centre des
décisions du gouvernement et évaluer
la durabilité des interventions gouvernementales. On pourrait penser, par
exemple, à évaluer la durabilité du troisième lien.
M. Grandmont : D'accord. Et est-ce
que... Comment ce genre de test climat pourrait, rapidement, là, dans les grandes lignes, se mettre en opération?
Comment ça pourrait se déployer dans le cadre de processus d'élaboration, de
construction éventuelle, là, de projets d'infrastructure?
M. Viau (Marc-André) : Bien, il faut
que le test climat... Bien, je veux dire, je ne pense pas que c'est la
commission sur le mécanisme d'évaluation ou le mécanisme de test climat, là,
donc on pourrait avoir des discussions ou on pourrait même vous faire parvenir
certaines... ou un test climat que notre organisation a réalisé. Mais donc il
faut que, dans le processus de prise de décision... on doit arriver à tester
par rapport aux impacts environnementaux, par rapport aux conséquences
actuelles, mais également futures, les conséquences du développement de tel ou
tel projet d'infrastructure.
M.
Grandmont : Parfait. Merci. À la recommandation 1.1, vous
parlez de «renforcer la stratégie en y ajoutant des objectifs et des
sous-objectifs quantifiables, mesurables et obligatoires, dont un cadre de
référence du bien-être». J'imagine que vous
faites référence un peu à l'indice de bien-être, là, auquel plusieurs groupes
ont fait référence également. Mais peut-être juste confirmer ou, en tout
cas, comprendre, là, ce que vous entendez concrètement par un cadre de
référence du bien-être.
Mme Thorpe (Colleen) : On fait
référence à la présentation du G15+, dont on fait partie, donc un paradigme
nouveau qui, finalement, mesure les impacts. Donc, on peut avoir des
indicateurs de résultat et, par exemple, mesurer la connaissance du développement durable dans la fonction publique, qui
serait un indicateur de résultat, pour nous, mais on peut aussi avoir des indicateurs plus macro,
des indicateurs d'impact. Et la présentation qu'a faite le G15+ élaborait sur
ces aspects-là.
• (12 h 20) •
Le Président (M. Jacques) : Merci.
Je cède maintenant la parole au député des Îles-de-la-Madeleine.
M.
Arseneau : Merci beaucoup, M. le Président. Alors, merci,
Mme Thorpe, M. Viau. Je vais aller directement droit au but. Vous avez parlé d'alimentation, puis
je voulais juste savoir si vous pensez que le Québec en fait suffisamment pour le gaspillage alimentaire, par exemple.
Est-ce que c'est un élément que vous voyez comme un élément sur lequel
on devrait travailler, adopter des politiques, une loi?
Mme Thorpe (Colleen) : Plusieurs
groupes travaillent sur le gaspillage alimentaire. Équiterre travaille sur la
notion du gaspillage nutritionnel, donc un petit peu plus complexe, mais, quand
même, je vais vous l'expliquer, cette idée-là qu'on prend des récoltes, donc on
utilise des ressources qu'est le sol et des engrais, différentes ressources
pour produire ces aliments qui deviennent des aliments ultratransformés,
ultraemballés, donc qui sont vides de nutriments,
et non seulement ils sont vides de nutriments, mais ils font en sorte que ça
nuit à la santé humaine. Et donc on est assez élevés, assez loin des
objectifs du Guide alimentaire canadien, qui recommande...
M. Arseneau : Mais est-ce que vous
êtes favorables à l'adoption d'une loi par le gouvernement pour réduire le
gaspillage alimentaire? C'est ça, ma question. Est-ce qu'on pourrait aller
plus... ou le gaspillage, ce n'est pas votre rayon, c'est quoi?
Mme Thorpe (Colleen) : Bien oui, on
pourrait adopter une loi pour réduire le gaspillage alimentaire, mais j'irais plus loin que le gaspillage alimentaire.
Encore faut-il... Si on gaspille des chips, ce n'est pas... ça ne solutionne
pas la problématique, c'est-à-dire qu'il faut aller un peu plus loin que le
gaspillage alimentaire, mais je suis en accord avec...
M. Arseneau : Je comprends. Mobilité
et transport, maintenant. Vous avez parlé, tout à l'heure dans la présentation,
des véhicules de transport de marchandises. Puis dans le mémoire, à la
page 9, vous parlez aussi, là, de l'auto
solo. Mais je voulais savoir, est-ce que vous pensez que, justement, le
gouvernement en fait suffisamment assez pour favoriser le transfert
modal pour appuyer le transport collectif à l'heure actuelle? Et puis, quand on
parle d'électrification, c'est bien, mais, si on
électrifie des autobus qui sont vides, on n'avance pas beaucoup. Quel est votre
point de vue là-dessus?
M. Viau (Marc-André) : Il n'y a pas
assez de transfert modal, ça, c'est clair. S'il y avait assez de transfert modal, on ne verrait pas une croissance du parc
automobile comme on la voit actuellement. Est-ce que le gouvernement
doit en faire plus? Oui. Doit financer les opérations du transport collectif,
pas simplement... pas simplement les infrastructures, doit travailler sur
l'offre de services interrégionale également de façon à ce que le transport
collectif ne soit pas qu'une réalité urbaine et doit aussi s'assurer d'un
meilleur partage de l'espace public qui est destiné à la mobilité. De cette façon-là, si on partage mieux
l'espace public destiné à la mobilité, on n'aura pas le choix que d'avoir
un meilleur transfert modal.
M. Arseneau : Merci.
Le Président (M. Jacques) : Merci à
vous deux pour votre contribution aux travaux de la commission.
Et nous allons suspendre quelques instants pour
recevoir le prochain groupe.
(Suspension de la séance à 12 h 23)
(Reprise à 12 h 25)
Le Président (M. Jacques) : Nous
reprenons nos travaux. Je souhaite la bienvenue aux représentants du Centre
d'études et de recherches intersectorielles en économie circulaire,
MM. Normandin et Laplante.
Je vous rappelle que vous disposez de
10 minutes pour votre présentation, après quoi nous procéderons à la période d'échange avec les membres de la
commission. Je vous invite donc à vous présenter puis à commencer votre exposé.
Centre d'études et de
recherches intersectorielles
en économie circulaire (CERIEC)
M. Normandin (Daniel) : M. le
Président, membres de la commission, d'entrée de jeu, merci de nous avoir invités, mon collègue et moi, à commenter cette
nouvelle mouture de la SGDD. Je vais laisser mon collègue Benjamin, donc,
amorcer nos réflexions sur la stratégie.
M. Laplatte
(Benjamin) : Alors, bonjour. Alors, évidemment, on accueille la
proposition de nouvelle SGDD comme
telle, c'est-à-dire une proposition. Et, comme toute proposition, bien, on
estime qu'il s'agit d'un cadre qui est
évidemment perfectible, mais on ne voudrait pas manquer de saluer le travail
des personnes, dont certaines personnes sont ici aujourd'hui dans la salle, qui ont travaillé à la rédaction
d'un document qui est véritablement colossal, dense puis qui représente
le fruit d'un gros travail.
Évidemment, comme plusieurs groupes qui nous ont
précédés et pour reprendre sensiblement les mêmes mots que la Commissaire au
développement durable hier, il est
évident que nous aurions souhaité avoir en main un portrait le plus récent possible de l'état de la progression
de la dernière SGDD et surtout une proposition d'indicateurs et de cibles renouvelée. Parce qu'en effet c'est une SGDD qui
couvre large, on le sent, elle cherche à répondre au plus d'ODD possible, et
c'est une prémisse en soi qui est tout à fait louable.
Cela dit, ça ne devrait pas priver le
gouvernement de faire des choix forts parmi tous ces objectifs, et on va
revenir, pourquoi? Parce qu'il faut accélérer la cadence et identifier avec
précision ce qui est attendu des ministères et organismes comme actions
concrètes le plus rapidement possible.
Donc, à cet égard, on estime que les travaux, on
le comprend, qui vont poursuivre, ces prochains mois, et qui doivent s'intéresser à tous ces aspects
représentent l'opportunité, justement, de peut-être prendre un petit peu de
hauteur par rapport à tous ces tableaux de bord, tu sais, parfois un peu
complexes, puis ça a été avoué par d'autres groupes avant nous.
Prendre de la hauteur, pour nous, ça veut dire
préciser nos ambitions collectives, en tant que gouvernement, mais également à
toutes les autres parties prenantes de la société civile ainsi que les partis
d'opposition. Parce qu'on l'a vu pendant la
pandémie, je pense que, par rapport à des grandes crises et des grands défis
qui nous animent collectivement ou mondialement, on est capable de faire
preuve de solidarité.
De certains de ces objectifs qui pourraient être
les plus intégrateurs possible afin de concentrer nos efforts au maximum, on pense évidemment particulièrement à la
réduction de l'empreinte carbone de toutes nos activités économiques,
sociales, la préservation de la biodiversité, dont on dépend, et surtout
l'accroissement de la circularité du Québec, un enjeu sur lequel mon collègue
Daniel reviendra.
Comme vous l'avait dit hier le Comité consultatif
sur les changements climatiques, auquel participait notre directrice scientifique, face à la double crise
écologique et climatique qui s'emballe, il y a réellement urgence d'agir sur
certains éléments plus que d'autres. Il faut
donc trouver le courage de faire des choix, les assumer et mobiliser l'ensemble
de l'appareil de l'État en partant de sa tête.
À cet égard, la SGDD parle beaucoup de
l'exemplarité de l'État. C'est une occasion de faire en sorte que, comme on le
dit souvent, les babines suivent les bottines... ou les bottines suivent les
babines. Mais, surtout, ce qui est important, c'est que
la SGDD puisse servir de cadre de référence pour influencer ultimement tout
projet de loi, règlement ou politique. Et on doit passer par là, nous n'avons
plus le choix, parce que le modèle économique actuel, majoritairement linéaire depuis 200 ans, nous a menés à une
situation qui est insoutenable sur le plan de l'exploitation des
ressources. On ne peut pas aujourd'hui parler de modèle de développement durable
ou soutenable en l'état actuel des choses.
À cet égard, notre
mémoire s'accompagne d'une infographie qui explique beaucoup en quoi le modèle
qu'on vous propose, sur lequel on propose la commission de s'intéresser, le
modèle d'économie circulaire, est en mesure de répondre à plusieurs défis.
À cet égard, on a
parlé d'urgence, là, puis de mobilisation et, afin d'éviter que vous ayez à
nous poser la question, oui, nous sommes en
faveur de l'assujettissement des municipalités, organismes et réseaux qui
actuellement ne le sont pas, parce qu'on estime que, face aux défis qui
nous concernent tous, chacun doit faire sa part. On l'a vu pendant la pandémie,
ça se fait. Et, si on avait à citer le premier ministre, on dirait : On
est capables.
Donc, en conséquence
de ce préambule, nous allons annoncer nos couleurs tout de suite. Et, comme le
prouve largement notre mémoire, nous sommes ici pour vous parler d'économie
circulaire et nous espérons avoir la chance d'échanger avec vous dans les
minutes qui suivront.
• (12 h 30) •
M. Normandin (Daniel) : Merci, Benjamin. Vous
m'entendez bien? Oui. Alors donc, par rapport à la stratégie précédente, je dirais que l'économie circulaire
occupe une place importante mais encore largement insuffisante.
D'ailleurs, j'étais, en 2015... j'étais invité par la commission à commenter la
version antérieure de la stratégie, et on avait plaidé pour une économie
circulaire forte au sein de la stratégie.
En fait, il faut
savoir que l'économie circulaire est le modèle économique qui permet une mise
en oeuvre concrète du développement durable.
En fait, l'économie circulaire est reconnue par la plupart des grandes
organisations telles que le programme des Nations unies, l'OCDE, le
Forum économique mondial, pour ne nommer que ceux-là, et je dirais que son
déploiement sur le plan mondial est en pleine progression.
En fait, je suis en
train de participer à un ouvrage collectif sur l'économie circulaire, puis j'ai
eu le privilège de regarder un petit peu
l'état de la situation sur le plan international, et je peux dire qu'il n'y a
aucun continent qui n'est épargné dans la transition vers l'économie
circulaire, sauf peut-être l'Antarctique, là, parce qu'il n'y a pas grand monde
qui y vivent, mais on pourrait dire qu'au jour d'aujourd'hui à peu près la
moitié des pays de la planète ont des politiques publiques qui touchent à
l'économie circulaire. Donc, il y a eu, ces dernières années, une accélération
dans l'appropriation, si on veut, de la transition à l'échelle internationale,
l'Europe étant le continent, je dirais, de tête.
Selon nous, en fait,
le cadre économique que représente l'économie circulaire devrait constituer la
colonne vertébrale de la stratégie parce que ça permet de concilier à la fois
les enjeux économiques, dont, entre autres, une plus grande résilience des
chaînes d'approvisionnement, on en a été victimes, tout le monde, évidemment,
durant la pandémie, également les défis environnementaux, dont la réduction des
GES, dont la préservation de la biodiversité, mais également sociaux, avec une
meilleure justice sociale, un plus grand bien-être collectif et individuel.
Pour
faire ça, je dirais que le Québec, et j'en suis très fier, en fait, est
extrêmement bien positionné. Depuis 2014, sous l'impulsion initiale de
l'institut d'environnement, développement durable et économie circulaire du
campus de l'Université de Montréal, que je dirigeais à l'époque, le Québec a
développé, au fil du temps, une posture de leader nord-américain, je dirais,
reconnue, au moins sur le plan canadien, en matière d'économie circulaire.
On a des initiatives
qui se déroulent en ce moment aux quatre coins du Québec. On possède un
écosystème de recherche en économie
circulaire le plus développé, le plus diversifié, je dirais, non seulement en
Amérique du Nord, mais, selon certains commentaires, au monde. On doit
en être fiers, là. On a un réseau de recherche qui regroupe plus de
180 chercheurs, 16 universités, neuf collèges qui participent aux
efforts de recherche de l'économie circulaire. On a également une plateforme
dédiée à l'économie circulaire, une plateforme Web, qui s'appelle Québec
Circulaire.
Ceci dit, le Québec
demeure malheureusement un des plus grands consommateurs de ressources et un
des plus grands producteurs de déchets des pays industrialisés, en tout cas,
per capita. Le point positif, c'est que notre marge d'amélioration est très
grande. Alors, je dirais, pour maintenir notre posture de leader puis
bénéficier des retombées très positives qu'amène l'économie circulaire, mais
qui nous permettrait également d'exporter notre savoir-faire, nos technologies dans le reste du Canada, dans le reste du
monde, on doit effectivement se doter d'une feuille de route ambitieuse
et investir massivement pour la déployer.
Comme le disait
Benjamin, en fait, tous les... je dirais, tous les acteurs de la société sont
interpelés par l'économie circulaire, que ce soient les ministères, les
entreprises, les citoyens. Alors, on espère vivement que cette nouvelle stratégie, en fait, soit la feuille de
route pour la mise en oeuvre de cette économie circulaire ambitieuse qui nous
permettrait, encore une fois, de nous positionner, de conserver notre position
de leader nord-américain. Alors, merci.
Le Président (M. Jacques) : Merci
beaucoup, messieurs, pour votre présentation. Est-ce que j'ai le consentement
pour permettre à la députée de Verdun de
remplacer le député de Taschereau pour le reste de la séance? Consentement. Merci.
Je cède donc la parole au député de Masson pour le début des échanges.
M. Lemay : Merci,
M. Normandin, M. Laplatte, d'être avec nous aujourd'hui. Alors, moi,
j'aimerais vous entendre davantage sur le premier chantier de la SGDD,
justement, le chantier sur la feuille de route en économie circulaire. Vous
avez mentionné un peu dans votre présentation initiale... mais j'aimerais avoir
un peu plus de détails parce que, lorsque
vous mentionnez que ça devrait constituer la colonne vertébrale sur laquelle
s'attachent les quatre autres chantiers, donc, un peu plus d'importance,
là... puis j'ai cru comprendre aussi que vous aviez défini sept jalons pour y
arriver. Donc, si vous pourriez nous donner plus de détails, ce serait
apprécié.
M. Normandin
(Daniel) : L'économie circulaire, c'est un modèle de
production-consommation, hein? Donc, ça touche éventuellement non seulement la
vie des entreprises, mais des citoyens. Donc, si ça devient... En fait, comme
le disait tantôt Benjamin, si on en est aujourd'hui à parler de développement
durable, c'est que ce développement durable n'était pas intégré dans le modèle
économique qui... en fait, qui est en oeuvre en ce moment, qui est le modèle de
l'économie linéaire, en fait, qui existe depuis le début de l'ère industrielle.
Donc, on doit renverser la vapeur. Ça fait que,
si le modèle... En fait, si la durabilité n'est pas au rendez-vous à cause du
modèle économique, c'est le modèle économique qui doit rendre, évidemment,
notre société plus durable. Donc, c'est pour ça que ce qu'on propose, nous,
c'est que l'économie circulaire, qui est le modèle économique ou le modèle de production-consommation reconnu à
travers la planète comme étant durable, permettant d'opérationnaliser le
développement durable, soit la colonne vertébrale de cette stratégie.
Alors, au
niveau des jalons, effectivement, on en a proposé plusieurs dans notre mémoire,
là, que je vous invite évidemment à parcourir. Le premier, évidemment, c'est de
faire un exercice comme le Québec a fait, RECYC-QUÉBEC, donc, où est-ce qu'on en est au niveau de la
circularité de l'économie québécoise, puis on a vu malheureusement que cette circularité était plutôt faible, donc, à
3,5 %. Ce n'est pas du «rocket science», là. Je dirais que c'est une
estimation, et, par rapport à la
moyenne mondiale qui a été dévoilée, en fait, il y a quelques semaines, lors du
forum de Davos, qui est à 7,2 %,
on est quand même la moitié, évidemment, de la moyenne mondiale en matière de
circularité de notre économie.
Le Canada, bon, j'ai participé à un groupe
d'experts pour déterminer également la circularité de l'économie canadienne. On n'a pas utilisé les mêmes
indicateurs en tant que tels, mais on avait une moyenne de 6 %, environ,
pour le Canada. Moi, je pense que le Canada est à peu près au même niveau que
le Québec. Donc, là-dessus, on se compare.
Par contre,
comme le disait tantôt Colleen Thorpe d'Équiterre, il y a des champions, entre
autres les Pays-Bas. Les Pays-Bas, évidemment, ont une cible très, très
ambitieuse. Ils sont actuellement à plus de 24 % de circularité de leur économie. Ils visent 100 % pour 2050.
Ceux qui connaissent la thermodynamique, vous allez me dire que ça ne se peut
pas, là, mais ils tendent à, on va dire, 100 % et ils ont un plan très
ambitieux. C'est vraiment un peu la locomotive sur le plan européen, et
je pense qu'on doit s'en servir comme exemple.
Donc, première chose, l'état de la situation, on
l'a fait, 3,5 %, ça ne va pas très bien, deuxièmement, se fixer une cible ambitieuse. Une cible ambitieuse, ça
veut dire quoi? Bien, je pense que, pour le terme couvert par la stratégie, on
pourrait peut-être doubler, en fait, notre taux de circularité au Québec, ce
serait déjà ambitieux, et viser peut-être quelque chose... de le tripler ou de
le quadrupler d'ici 2040, par exemple, pour rejoindre peut-être les
Néerlandais.
Alors, ça, ça
serait des cibles ambitieuses. Évidemment, pour être capable de faire cette...
de rencontrer, en fait, cette cible-là, il faut, je dirais, mobiliser,
en fait, l'ensemble des chaînes de valeur pour qu'ils y participent. Il n'y a pas de secteurs économiques qui doivent être
épargnés dans la démarche. Donc, tous les secteurs économiques doivent
participer, mais on doit quand même prioriser, en fait, ceux qui, en ce moment,
consomment peut-être le plus de ressources et celles... et les secteurs
économiques qui génèrent le plus de déchets. Donc, on doit prioriser, en fait,
ces secteurs-là, mais, in fine, on doit couvrir l'ensemble des secteurs
économiques, et, pour ce faire, il ne faut pas le faire par une approche «top-down». Il faut le faire par une approche
horizontale, donc essayer de mettre... d'asseoir à la même table tous
les acteurs des chaînes de valeur concernées, identifier les freins à la
circularité, cocréer les solutions et les mettre en oeuvre ensemble pour être
capables justement de faire en sorte qu'on avance rapidement.
Alors, ça,
c'est l'approche que le CIRIEC, en fait, a commencé à mettre en oeuvre. On a
d'ailleurs un dispositif de recherche au CIRIEC qu'on appelle les laboratoires
d'accélération en économie circulaire, et le premier... la première filière qu'on a investie, c'est la
filière de la construction, qui est le plus gros utilisateur de déchets, le
plus gros générateur... le plus gros consommateur de ressources, plus
gros générateur de déchets, puis on a assis à la même table 200 intervenants de toute la chaîne de valeur, de
100 organisations depuis un an et demi, et on est en train de tester
les solutions que ces organisations-là ont
codéveloppées avec les chercheurs du CIRIEC et de d'autres universités. Donc,
c'est un peu l'approche qu'on amène, et on
pense que, donc, cette feuille de route devrait être, je dirais, l'agenda, si
vous voulez, principal de cette nouvelle stratégie gouvernementale de
développement durable.
M. Lemay : OK, merci, c'est
intéressant. Puis je pense que j'ai une collègue qui va justement vous poser
des questions sur ce que vous venez d'apporter sur le volet construction, mais
je reviendrais un peu... Ça veut dire... Dans
le fond, ce que je vois, c'est que, dans vos sept jalons, vous voyez d'une
façon positive, là, qu'on mette sur pied un comité-conseil, justement, pour aller avec... D'accord
de ce côté-là. Puis, dans le fond, le comité-conseil externe, là, dans le fond, ce que vous voyez, c'est que ça doit
impliquer notamment des gens universitaires, collégiaux, chercheurs, experts... puis c'est... experts provinciaux, je
veux dire, puis, c'est ça, en fait, tous ensemble, on met en place les sept
jalons puis on y arriverait. C'est un peu... si je fais un résumé de
votre explication.
• (12 h 40) •
M. Normandin (Daniel) : Tout à fait,
absolument. Benjamin?
M. Laplatte (Benjamin) : En fait, si
on peut développer un petit peu là-dessus, ce n'est pas une idée qui vient de nulle part, c'est que, de un, il faut
prendre acte que, depuis 2014, c'est une transition qui s'est organisée, là, je
dirais, tu sais, par l'entremise de
plusieurs acteurs représentant la société civile et auquel participent certains
représentants gouvernementaux et de ministères à travers le pôle de
concertation en économie circulaire. C'est un groupe qui pourrait tout à fait
être mis à profit, en l'occurrence.
Et pourquoi est-ce qu'on parle d'un
comité-conseil, tu sais, qui pourrait, tu sais, éclairer le gouvernement sur
certaines orientations et aussi participer au suivi puis à l'amélioration continue
de cette feuille de route, c'est, d'une part, parce que, bien, il y a beaucoup
d'expertise qui s'est développée au sein de ce pôle et, d'autre part, c'est
parce qu'on l'a vu dans certaines autres politiques qui
ont des cadres assez larges. Si on fait référence, par exemple, à la Politique
québécoise de mobilité durable, cette dernière avait été élaborée et visait
justement à être évaluée en continu par
l'entremise d'un comité qui représentait toutes les parties prenantes possibles
de la... issues de la société civile. Donc, on s'appuie sur ce modèle pour
faire cette proposition-là parce que, bien, le gouvernement n'est pas tout ça.
M. Lemay : Très bien, merci. Donc,
je cède la parole à mes collègues, qui vont vous entretenir sur d'autres sujets,
notamment sur les laboratoires d'accélération. Ça semblait intéressant. M. le
Président.
Le Président (M. Jacques) : Merci,
M. le député de Masson. Je cède maintenant la parole à la députée de
Châteauguay.
Mme Gendron : Merci, M. le Président.
Bonjour, M. Laplatte. Bonjour, M. Normandin. C'est un plaisir de vous voir ce matin et hier. Vous étiez ici aussi
hier. Je tiens à souligner la qualité de votre mémoire. Vraiment, les schémas, tout
ça, rendent ça très agréable.
En fait, je vais vous amener un peu... Là, on a
frôlé un sujet. J'ai deux questions, la première étant justement la
responsabilité de l'État, en fait, par rapport aux constructions. Comme vous
savez, l'État est propriétaire d'un des plus grands, en fait, plan de
construction ou, en fait, d'immobilier au Québec.
Une voix : ...
Mme Gendron : Exactement. Je voulais
savoir de quelle façon... Vous avez des laboratoires d'accélération. De quelle façon... Quelles pistes de solution
peut-on avoir par rapport au parc immobilier du Québec? Première question.
La deuxième question est encore en lien avec les laboratoires d'accélération.
Je veux savoir sur quel sujet vous vous penchez et j'aimerais savoir... On a
rapidement posé la question, hier, par rapport aux surplus de l'industrie
textile. Est-ce que c'est quelque chose que vous semblez aller aussi vérifier
pour ça?
M. Normandin (Daniel) : Bien, par
rapport à... En tant que propriétaire d'actifs immobiliers, entre autres
d'infrastructures, de façon générale, l'État doit effectivement être exemplaire
au niveau de la circularité de ses infrastructures.
Donc, ça veut dire travailler sur... dès la conception des infrastructures, à
ce qu'elles soient constituées de matériaux qui soient les plus
circulaires possible, faire en sorte que la fin de vie, en fait, soit déjà
prévue, même si les bâtiments ou les infrastructures peuvent durer jusqu'à
150... voire au-delà, s'assurer que ces infrastructures-là sont construites,
sont élaborées pour la circularité. Donc, ça veut dire que ce qui est déjà
bâti... On doit s'assurer que, lorsqu'on démolit, on... En fait, on ne devrait
pas démolir, on devrait déconstruire. On récupère le maximum de matériaux qu'on
peut remettre dans l'économie par la suite.
Et, au niveau des nouvelles infrastructures,
c'est qu'elles répondent à des critères de circularité qui soient les plus
rigoureux possible. Ces critères-là sont en élaboration en ce moment. Juste
pour vous mentionner, l'ETS est en train de mettre sur pied un institut qui va
se pencher exclusivement là-dessus, environnement bâti, circulaire et résilient
aux changements climatiques, parce que les infrastructures actuelles ne sont
pas résilientes aux changements climatiques, le sont peu en tant que telles,
donc, pour toute nouvelle construction, s'assurer qu'elle le soit. Donc, on va développer ce savoir-faire-là au cours des
prochaines années, mais on a déjà une expertise en place qui peut être mise
à contribution là-dessus.
Votre deuxième point, c'était...
Mme Gendron : C'était par rapport à
l'industrie du textile, en fait, vous avez...
M. Normandin (Daniel) : Oui, le
textile, bien, en fait, on a un chantier là-dessus. Bon, le textile, c'est
un... en fait, c'est un peu, je dirais, un
élément mal connu au niveau des impacts environnementaux, mais l'impact du
textile, à l'échelle internationale, est extrêmement important. Donc, on a
effectivement pour objectif de monter un laboratoire d'accélération sur ce sujet-là. Même si, au
Québec, on a quand même perdu, au niveau de notre industrie textile, notre
capacité de manufacturer de façon large, de façon importante, en fait, des
vêtements, bien, ça reste que les gisements de cette industrie-là, on les a
ici, au Québec. Donc, il faut faire quelque chose avec. Donc, on a
effectivement pour objectif de lancer un lab d'accélération sur le textile.
La, troisième question, c'était...
Mme Gendron : Il n'y en avait pas.
M. Normandin (Daniel) : Ah!
d'accord.
M. Laplatte (Benjamin) : Bien, il y
avait peut-être une sous-question, c'est par rapport aux dispositifs.
Évidemment, on s'intéresse à d'autres filières, là, tu sais, telles que les
systèmes bioalimentaires, le déploiement territorial de l'économie circulaire,
la foresterie. Un qui est extrêmement important, là, parce qu'on parle beaucoup
de transition énergétique, mais les minéraux critiques et stratégiques, ce sont
des ressources finies. Il ne faudrait pas faire avec les minéraux critiques et
stratégiques ce qu'on a fait avec les hydrocarbures et s'imaginer que... C'est
une ressource qui est là, et la consommer sans lendemain, ça présente des
enjeux environnementaux qui sont énormes. Voilà, donc, c'est des thématiques auxquelles,
évidemment, on s'intéresse, puis on essaie de faire écho le plus possible
aux grandes priorités et préoccupations gouvernementales.
M. Normandin (Daniel) : D'ailleurs,
juste peut-être pour compléter sur la question des métaux critiques et
stratégiques, il faut changer notre façon de voir ce que c'est, une mine. En
fait, l'extraction de ces métaux-là est extrêmement impactant sur
l'environnement parce que, pour récupérer les faibles concentrations de métaux
et de minéraux qu'on recherche, il faut extraire énormément de matière, à
grands coups d'impacts sur l'environnement, évidemment,
et sur la biodiversité de façon particulière. Alors, il faut changer notre
façon de voir les mines et considérer les mines urbaines comme étant une
source importante... Les mines urbaines, en fait, c'est tous nos produits en fin
de vie qui contiennent des métaux critiques
et stratégiques et qui, malheureusement, prennent la voie du site d'enfouissement.
Alors, ça, c'est une pratique qui devrait
être stoppée, et, avant même d'exploiter, en fait, des gisements sous sol, il
faudrait exploiter correctement nos gisements hors sol. Donc, c'est le
message que je voulais, ici, passer.
Mme Gendron : Merci.
Le Président (M. Jacques) : Merci, Mme
la députée. Je cède la parole à la députée d'Argenteuil.
Mme
Grondin : Merci. Messieurs, c'est rafraîchissant de vous
entendre. Merci, merci. Je retiens des mots-clés : préciser nos
ambitions collectives, faire des choix. Donc, je suis vraiment contente que
vous ameniez toute cette question-là de l'économie circulaire parce qu'à mon
avis ça répond à des grands principes qu'on s'est donnés collectivement puis c'est aussi... Vous n'êtes pas
sans savoir que, chez nous, en termes de revitalisation, dans mon comté,
c'est le choix qui a été pris, de faire de l'économie circulaire en fonction
des matières recyclables, notamment. Donc, c'est
de la musique à mes oreilles, ce que vous dites. Petite question, en fait. Vous
proposez de travailler, ou d'unir, ou de faire des liens entre les
différents chantiers. Pouvez-vous nous en parler un peu plus?
M. Laplatte (Benjamin) : Alors, on
est conscients qu'il s'agit d'une proposition audacieuse, mais on estime que c'est aussi peut-être notre rôle de
challenger, mais c'est parce que, quand vous regardez la définition de ces
chantiers, puis quand on a une compréhension réelle de ce qu'est
l'économie circulaire et de sa portée, vous allez vous rendre compte que les
objectifs qui vont être visés par ces différents chantiers convergent, et, à
cet égard-là, on estime que la feuille de
route en économie circulaire pourrait être un chantier intégrateur. Et, en
disant ça, on ne remet absolument pas en question la pertinence de ces
autres chantiers. Ce qu'on est en train de dire, c'est qu'on aurait peut-être
lieu de faire une espèce de hiérarchisation, de sorte que... Par exemple, un
chantier tel que celui sur la finance durable est extrêmement important. Il
faut intégrer les normes ESG, etc., mais, de plus en plus, la finance durable
est en train de s'intéresser à l'enjeu de l'économie circulaire.
Donc,
pourquoi, à ce moment-là, ne pas faire converger ces forces pour tenter de les
faire travailler sur le même agenda? Il y a un chantier qui vise la
numérisation, tout à fait légitime, mais, là encore, il y a des enjeux énormes
par rapport à la traçabilité des matériaux ou de ce qu'on consomme, par rapport
à l'utilisation de la science des données pour pouvoir prendre des décisions
éclairées. On n'arrête pas de le dire, on a besoin de la science. On a besoin
de la science pour que les gouvernements puissent prendre les meilleures
décisions possible en regard des défis qui nous occupent. Cette contribution de
la science des données, dans un cadre comme celui de l'économie circulaire, est
fondamentale.
Donc, c'est là quelques exemples d'intégration
qui, pour nous, seraient tout à fait, tout à fait légitimes. Ça ne prive pas
que ces autres chantiers ou ces sous-chantiers puissent s'intéresser aussi à
d'autres agendas, mais on essaie d'être conséquents avec ce qu'on a dit
d'entrée de jeu. On n'a plus le temps. Il faut faire des choix. C'est
difficile, mais on n'a plus les moyens de se disperser tous azimuts. Donc, à un
moment donné, travaillons à essayer de faire concentrer les forces, puis les
énergies, et les compétences le plus possible. C'est le sens de notre message.
Mme Grondin : Merci, M. le
Président.
Le Président (M. Jacques) : Merci,
Mme la députée. Je cède maintenant la parole à la députée d'Iberville.
Mme Bogemans : Bonjour. Il me reste
juste une minute, donc ça va être bref. Je voulais savoir... parce qu'à la
page 20 de votre rapport, à la... au jalon 3, finalement, vous disiez
qu'on avait vraiment des filières prioritaires au niveau de l'économie
circulaire. Ça serait quoi?
M. Normandin (Daniel) : Bien, en
fait, c'est celles qui, comme je le disais tantôt, consomment le plus de
ressources et génèrent le plus de déchets. Donc, je pense que, dans les
priorités, il y a le secteur de la construction qu'on a commencé, je dirais, à entamer à travers notre laboratoire
d'accélération, mais le bioalimentaire aussi, les systèmes alimentaires sont également des grands
consommateurs de ressources et également des grands générateurs de déchets.
On pense au gaspillage alimentaire, mais il
n'y a pas que... En fait, tout l'équipement qui est utilisé en agroalimentaire
peut être davantage optimisé au niveau de l'usage. Donc, ce serait un autre des
grands chantiers à...
Le troisième, en fait, c'est tout ce qui touche
les métaux critiques et stratégiques, mais ça vise en même temps une série de
filières différentes. Donc, quand on parle d'électrification des transports, on
a besoin de certains types de matériaux... de métaux et de minéraux. Lorsqu'on
parle, par exemple, des électroménagers ou des produits électroniques, on a d'autres types de minéraux.
Alors, il faut faire un ensemble de... Il faut adresser... c'est un anglicisme,
là, mais il faut investir un ensemble de
filières qui sont des grands consommateurs de ces métaux critiques et
stratégiques.
Donc, ce seraient les
trois premiers que je dirais au départ, mais textile doit venir aussi,
foresterie aussi. En fait, bref, toutes les filières doivent y passer les unes
après les autres.
• (12 h 50) •
Mme
Bogemans : C'est ça, mais, en priorité, la construction puis le
bioalimentaire?
M. Normandin
(Daniel) : Bien, construction, bioalimentaire, métaux critiques et
stratégiques seraient mes trois premiers, oui, voilà.
Mme
Bogemans : Parfait.
Le Président (M.
Jacques) : Merci. Ça met un terme aux échanges avec la partie
gouvernementale. Je cède maintenant la parole à la porte-parole de l'opposition
officielle, la députée de Notre-Dame-de-Grâce.
Mme McGraw : Merci,
M. le Président, et merci d'être avec nous ce matin pour votre mémoire et votre
présentation. Il y a beaucoup de contenu très intéressant. Vos collègues, vous
savez, les Prs Webster et Levasseur, étaient ici hier au sein du Comité
consultatif sur les changements climatiques, et on comprend que... vous l'avez
dit très bien, qu'un pont doit être fait entre la recherche... Puis il me
semble que, si je comprends bien, le Québec, on a vraiment tous les outils au
niveau de la recherche, mais il y a un pont qui doit se créer entre cette
recherche et l'application. Il y a comme une déconnexion, sinon presque une
contradiction avec, tu sais, la recherche au Québec, mais d'être vraiment très
en arrière dans nos cibles. Donc, selon vous, est-ce que la stratégie
gouvernementale sur le développement durable qui est proposée... est-ce qu'elle
ne permet pas cette application ou de créer ce pont-là? Puis qu'est-ce qu'on
pourrait ajouter pour créer ce pont essentiel entre la recherche et
l'application?
M. Laplatte
(Benjamin) : Oui, merci pour la question. Peut-être qu'avant de
laisser parler mon collègue Daniel là-dessus on nuancerait peut-être un peu,
parce qu'au Québec on est chanceux. Il y a un fort dialogue social. Il y a
plusieurs forums qui existent pour favoriser ça, et c'est valable aussi en
recherche et innovation. Donc, on ne dit pas, dans notre mémoire, qu'il y a une
déconnexion, là, tu sais, entre la recherche, innovation d'abord et les milieux
utilisateurs. En fait, quand on parle d'économie circulaire, c'est tout le
contraire, parce que, depuis certaines années, au contraire, il y a beaucoup de
dispositifs d'accompagnement d'initiatives qui se font au niveau local, que ce
soit au niveau entrepreneurial ou que ce soit au niveau industriel, à échelle
locale ou dans différents secteurs d'activité économique.
Je dirais, le pont
est là, ce qui manque, en revanche, c'est une direction, une vision et du
support pour encourager ce maillage le plus possible, qui, actuellement, se
fait grâce à l'aide de financement qui peut revenir de RECYC-QUÉBEC, par
exemple, ou de certains programmes du ministère économique, mais, quand on
regarde objectivement les moyens qui sont assortis à ça, ce n'est pas énorme
comparativement à ce que le gouvernement peut investir dans d'autres chantiers
au niveau économique. Donc, c'est plus un problème de moyens qu'un problème de
dispositifs.
M. Normandin
(Daniel) : Si je peux me permettre aussi, en fait, oui, il y a quand
même de la recherche qui reste sur les
tablettes, là, il ne faut pas se le cacher, mais ce que nous, on propose
souvent, c'est de faire de la recherche collaborative, donc d'impliquer
les acteurs du milieu avec les chercheurs pour cocréer justement les solutions
de manière à optimiser, si on veut, l'appropriation de ces solutions-là. C'est
sûr qu'historiquement l'université, bon, évidemment, on en est. On faisait de
la recherche un peu dans notre tour d'ivoire et, après ça, bon, on essayait
de... on publiait puis on essayait de la
pousser, en fait, de temps en temps sur... dans la société civile, mais, bon,
avec un succès relativement mitigé. Cette approche de recherche collaborative
ou recherche-action, elle est essentielle dans la mise en oeuvre d'une stratégie comme celle-là. Si on veut accélérer les
choses, comme l'a dit Benjamin, on n'a plus le temps, on n'a plus le
temps de... On n'a pas le loisir du temps, en fait, pour rencontrer nos cibles
de développement durable.
Mme McGraw : Donc,
c'est ça, vous avez parlé... au tout début, vous avez parlé de courage, de
faire des choix peut-être difficiles parce que, justement, il faut accélérer...
il faut faire des choix difficiles. On n'a pas le loisir du temps. Donc, dans ce contexte-là, est-ce que
vous... Donc, au niveau de la gouvernance, OK, pour accélérer, justement, parce
que, là, si je comprends bien, c'est une question de volonté, entre autres,
politique et de moyens qui vont supporter cette vision politique puis
cette volonté politique, là, donc vous parlez, au niveau de la gouvernance,
d'un comité interministériel du développement durable et un comité directeur.
Est-ce que vous pouvez élaborer là-dessus? Parce qu'évidemment la gouvernance
est très importante là-dedans.
M. Laplatte
(Benjamin) : En fait, il faut distinguer deux choses. La proposition
qu'on fait de mettre en place, là... puis on ne l'appelle pas nécessairement
«comité directeur», là, ça, on laisse cette prérogative-là au gouvernement,
mais c'est plutôt un comité-conseil et un comité de suivi spécifiquement, tu
sais, pour la feuille de route en économie
circulaire, ça, c'est un fait, parce que, tu sais, on estime que, si on veut se
rendre efficaces collectivement, il faut mettre toutes les forces à
profit et éviter que le gouvernement travaille de son bord pendant que le
milieu travaille du sien. On souffre un peu trop souvent, là, justement, de ne
pas être capables de créer ces synergies-là. Le pôle de concertation en
économie circulaire est un bel exemple d'initiative où on peut faire converger
ces forces.
Par contre, ce qu'on dit
un peu plus tôt dans notre mémoire, et là ça touche vraiment à la structure de
gouvernance de la SGDD, qui vise à mettre en place, effectivement, un CIDD pour
suivre l'évolution des résultats des différents ministères et organismes, ça,
c'est un petit peu différent, ce qu'on dit par rapport à ça, c'est que, si le gouvernement va de l'avant, effectivement, avec ce dispositif spécifiquement pour suivre la SGDD, il faut
absolument que, dans... au sein de la
SGDD, bien, on développe des indicateurs et des cibles qui concernent la
circularité de l'économie québécoise et, à cet égard, on pense que le
CIDD ne peut pas faire l'économie des travaux d'un groupe qui existe déjà. Là, il y a un groupe de travail
interministériel, qui s'appelle le groupe de travail interministériel en
économie circulaire, qui est animé
notamment par RECYC-QUÉBEC puis le Bureau de coordination du développement
durable. Il est clair qu'ici, là, il y
a un forum qui devrait définitivement venir influencer les travaux du comité
interministériel sur le développement durable.
Cela dit,
quand on a dit tout ça, on trouve qu'au niveau de la gouvernance il y a
peut-être un peu de complexité puis, dans le système, on n'a pas toutes
les solutions, mais, une chose est certaine, la direction, la vision doit venir
de la tête. Donc, ultimement, ça doit
interpeler le Conseil exécutif, et, à cet égard, on estime qu'il y a peut-être
un maillage ou un resserrement des liens entre... à faire entre tantôt
le comité de l'économie et de la transition énergétique, tantôt le comité ministériel sur l'économie et
l'environnement, le Conseil du trésor, le Secrétariat aux priorités, tu sais,
qui va avoir la charge désormais de
veiller à ce que tous les plans stratégiques des ministères et organismes aient
une orientation... bien, des orientations de développement durable.
Quand on
vient de dire tout ça, là, je pense, je vous ai déjà écrasés, c'est peut-être
inutilement complexe. On pose la question, en toute naïveté, s'il n'y aurait
pas lieu d'optimiser tout ça, mais, s'il y avait une chose à retenir, il faut amener
l'économie circulaire au niveau de la gouvernance, au plus haut niveau.
M. Normandin (Daniel) : On parle
d'un changement de société, quand même, hein, un projet de société qui est important, de réformer un modèle économique.
Donc, il faut que ça soit porté, effectivement, comme le dit Benjamin, au
plus haut niveau possible dans le gouvernement.
Mme McGraw : Merci. Une autre
question, c'est une de vos grandes propositions, c'est le déploiement d'une
feuille de route pour accélérer la transition vers un modèle économique
circulaire au Québec, nommé FREC. C'est dans le jalon n° 2,
je crois. Alors, quel type d'échéancier et de ressources puis à quelle
fréquence ces objectifs deviendraient... devraient être placés pour l'atteindre
dans nos buts? Alors, est-ce que vous pouvez juste nous parler plus de la FREC
et qu'est-ce que ça va prendre pour faire en sorte que ça devienne une réalité?
M. Normandin (Daniel) : Bien, il y a
déjà une réflexion qui est amorcée sur la FREC. Il faut accélérer le mouvement,
effectivement. Il faut se donner une structure pour être capables de la piloter
comme on vient de parler. Montréal vient de sortir la sienne, hein,
aujourd'hui. En fait, c'est une annonce de ce matin, là, Montréal a sorti sa feuille de route pour commentaires. Montréal,
c'est quand même... L'île de Montréal, là, c'est le quart de la population
du Québec.
Donc, ça va probablement avoir un effet
d'entraînement pour le reste. Je pense que c'est important évidemment de
prendre en compte les travaux de la ville de Montréal dans les propres travaux
du Québec par rapport à cette feuille de route, mais, au niveau de
l'échéancier, c'est maintenant, ce n'est pas dans 10 ans, c'est maintenant
qu'on doit la mettre en oeuvre. On a tout ce qu'il faut pour le faire. On a...
Les acteurs sont déjà mobilisés à l'échelle du Québec, en tout cas, beaucoup
d'entre eux, autant les citoyens, les entreprises. On a fait une tournée avec
la Fédération des chambres de commerce. On a rencontré plus de
800 entreprises dans 17 régions du Québec.
Donc, il y a déjà un travail qui est amorcé, de
sensibilisation, mais il faut le poursuivre. Ce n'est pas tout, là, mais je
dirais que le plus tôt, le mieux. Moi, ce que je... ce qu'on a... En fait, ce
que j'ai dit tantôt, c'est que, si on se fixe une cible, par exemple, de
doubler la circularité du Québec d'ici la fin de la stratégie actuelle, ça veut
dire qu'il faut faire vite. Donc, moi, mon échéancier, ce serait ça, donc,
doublons la circularité d'ici les cinq prochaines années.
• (13 heures) •
M. Laplatte (Benjamin) : Peut-être
un complément au bénéfice des membres de la commission, si je peux, très vite, en 30 secondes. La feuille de
route, en fait, qui est une proposition de la ville de Montréal pour son agglomération,
qui contient des éléments qui sont vraiment intéressants, soit dit en passant,
l'objectif, c'est une conciliation qui s'amène, à terme, jusqu'en septembre. De
pair, si on a bien compris l'agenda du ministre, les prochains mois vont être
consacrés à définir ici les cibles et les indicateurs dont on va vouloir se
doter au niveau de la SGDD. On pense qu'il y
a vraiment un momentum très intéressant, en l'état actuel des choses, pour
pouvoir dire : OK, dans les prochains mois, on les met à profit,
là. On a un an pour faire le travail et le faire correctement.
Le Président (M. Jacques) : Merci.
Nous allons poursuivre nos discussions avec la porte-parole du deuxième groupe
d'opposition, la députée de Verdun.
Mme Zaga Mendez : Merci, M. le Président.
Merci pour la présentation. J'aimerais vous entendre un peu plus sur votre recommandation concernant l'écofiscalité. Hier, on entendait des experts
en sciences climatiques, notre comité consultatif qui nous disait qu'on a un
retard à rattraper. Je voulais vous entendre, si vous partagez le même avis.
M. Normandin (Daniel) : L'écofiscalité,
en fait, c'est essentiel dans une économie circulaire, en fait, c'est essentiel dans toute économie. En ce moment, on ne
paie pas le vrai prix des ressources, donc les impacts environnementaux et sociaux ne sont pas intégrés, internalisés dans le coût
des ressources, et ça fait en sorte qu'on les gaspille, hein, ce qu'on ne paie
peu ou ce qu'on ne paie pas, en fait. Pensez à l'eau, là, on a tendance à la
gaspiller. Donc, l'idée de l'écofiscalité,
c'est... justement, c'est d'internaliser le coût social, le coût
environnemental en plus du coût économique dans le prix des ressources.
Il y a plusieurs
experts, en fait, qui pensent que, si on le faisait, en fait, l'économie
deviendrait probablement automatiquement
circulaire. Bon, évidemment, c'est un immense chantier, là, d'intégrer ou
d'internaliser ces éléments-là dans
le coût des ressources parce que ça... évidemment, on n'est pas... on n'est pas
autarciques au Québec, là, on a des chaînes de valeur qui dépassent nos
frontières, donc, avec des accords commerciaux avec le reste du Canada, mais aussi le reste du monde. Donc, il faut prendre en
compte ces éléments-là. Mais, ceci étant dit, je pense que l'écofiscalité
doit être un chantier, en fait, faire partie du chantier, en fait, donc, je
dirais que ça doit être un travail qui s'effectue en parallèle de l'établissement de la feuille de route pour faire en
sorte qu'éventuellement on arrête de mettre des patchs pour essayer de
circulariser l'économie, mais qu'on a vraiment des signaux très forts qui nous
proviennent, donc, de ce qu'on consomme, donc des ressources,
éventuellement, qui sont transformées en produits puis éventuellement en ressources en fin de cycle qu'on peut remettre
dans le système économique. Alors, oui, la question, c'est... écofiscalité,
absolument.
Mme Zaga
Mendez : Puis, en lien avec mettre au centre le principe de
circularité, mais aussi la contrainte climatique, quel est votre avis par
rapport à avoir des analyses climatiques pour des projets gouvernementaux ou
des analyses de circularité?
M. Laplatte (Benjamin) : C'est une question
intéressante parce que c'est sûr que le temps passe, puis il y a eu la
pandémie, puis on oublie, là, mais, lors de la révision de la Loi sur la qualité de l'environnement, cette question-là s'est posée, là, à
savoir, bien, est-ce qu'on n'est pas rendus à devoir faire un examen objectif,
là, de l'empreinte carbone de certains... de certains projets industriels ou
autres. Et il y a eu des... bien, bien, bien des débats là-dessus, mais pour
dire : Bon, tu sais, si on investit là-dedans... je veux dire, tu sais,
c'est... oui, tu sais, il y a un retour sur investissement
qu'on mesure à grands coups d'indicateurs socioéconomiques, et tout, mais on
oublie, dans le calcul, là, le coût environnemental de cet
investissement. Ça fait qu'il y a définitivement de la place pour ça, et on a,
grâce à la science aujourd'hui, là, la capacité de faire ces évaluations-là.
C'est quelque chose qui, véritablement, devrait être... devrait être
systématisé le plus possible.
M. Normandin (Daniel) : Juste en complément, dans
les études d'experts, en fait, il est impossible de rencontrer nos
cibles climatiques et de préserver la biodiversité si on ne circularise pas
l'économie, impossible.
Mme Zaga
Mendez : Impossible. Bien, je vous remercie.
Le Président (M. Jacques) : Merci
beaucoup. Je cède maintenant la parole au député des Îles-de-la-Madeleine.
M. Arseneau :
Merci, M. le Président. Merci, MM. Normandin et Laplatte. Vaste
programme, celui que vous nous présentez aujourd'hui, surtout qu'on part à
3,5 %, c'est un peu décourageant. Ça me fait un peu penser à la nouvelle
de la semaine dernière où, lorsqu'on parlait de la politique de gestion des
matières résiduelles, bien, plutôt que se rapprocher de notre objectif, bien,
c'est l'inverse qui se produit.
Alors, j'aimerais
savoir... Vous demeurez optimistes, et c'est tout à votre honneur, on veut
partager cet optimisme-là. Mais je veux
revenir sur une question précise où vous dites que c'est l'occasion, en
adoptant une feuille de route, de
corriger plusieurs lacunes du Plan pour une économie verte. Est-ce que vous
voulez élaborer un peu là-dessus?
M. Laplatte (Benjamin) : Peut-être une réponse à
deux volets, parce que vous avez fait référence à la nouvelle qu'on a tous vu
passer la semaine dernière, mais on vous inviterait peut-être à reprendre
connaissance, si vous n'avez pas eu la chance, là, mais du rapport du BAPE
sur les résidus ultimes, qui amène vraiment des propositions... des propositions
intéressantes à cet égard puis notamment à l'égard de la mission de RECYC-QUÉBEC,
etc., il y a des choses vraiment très intéressantes là-dedans. Et le rapport du
BAPE positionne justement toute l'importance, là, de mettre en... de prioriser
le modèle d'économie circulaire spécifiquement sur cet enjeu.
Ensuite,
par rapport aux autres politiques publiques auxquelles vous faites référence,
le PEV en est une, il y en a d'autres
qui sont listées dans notre mémoire, ce qu'on voit depuis les dernières années,
c'est des ministères qui s'intéressent de plus en plus à l'économie
circulaire, et on le salue. Il y a des mesures dans ces différentes stratégies,
programmes et politiques, mais, quand tu les analyses objectivement, c'est ce
que je... on disait plus tôt, les moyens ne suivent pas nécessairement en
termes de... en termes d'investissements. Et, dans le PEV, il y a des choses
qui sont intéressantes, mais qui touchent,
par exemple, là, j'y vais un petit peu de mémoire, là, tu sais, mais les
bioénergies, l'hydrogène vert, la valorisation des matières organiques.
C'est très intéressant, mais souvent on va s'intéresser à des stratégies de fin
de vie, c'est-à-dire qu'est-ce qu'on fait
avec nos résidus puis... pour les réintroduire et leur donner une valeur
économique. C'est superintéressant, mais c'est très réducteur. Donc, on
pense qu'on peut être beaucoup plus ambitieux à cet égard-là. Puis, comme ça a
été dit par la commission hier, l'économie circulaire fait partie intégrante
des solutions qui vont nous amener vers la décarbonisation de notre économie.
Donc, à cet égard, le PEV devrait en tenir compte.
M.
Arseneau : D'accord. Mais est-ce que vous n'avez pas
l'impression qu'on utilise, là, justement, l'expression, là, «économie
circulaire» un petit peu partout, là, on émaille nos documents de ce thème-là,
puis, finalement, c'est un mot à la mode, puis que,
finalement, on n'y travaille pas sérieusement? Et est-ce que la population
comprend vraiment, là, que, si on fait un
parallèle, par exemple, aux changements climatiques, à l'urgence climatique,
que, bien, évidemment, l'économie circulaire, il y a encore de la
sensibilisation à faire?
M. Normandin (Daniel) : Absolument,
énormément, puis il y a des enjeux de dérive, absolument. On l'a vu avec tout
ce qui touche le vert, en fait, ou le développement durable en tant que tel. À
un moment donné, on plantait un arbre, on
créait une job, on faisait du développement durable. Donc, c'est devenu... Ça
fait 30 ans qu'on en fait, du développement durable, on n'a pas
progressé, on n'a... oui, on n'a pas progressé du tout. Alors, il faut
effectivement faire attention avec ce genre de dérive là, l'économie circulaire
devient effectivement un thème qui est à la mode. Je n'aime pas ce mot-là, là, mais... Donc, il faut faire attention aux
dérives. Et il y a effectivement encore une... puis on le propose dans nos jalons, là, une vaste campagne de
sensibilisation-formation pour, évidemment, faire en sorte que tous les
acteurs de la société soient impliqués dans la...
Le Président (M. Jacques) : Merci
pour votre contribution aux travaux. Fort intéressant.
Et nous suspendons nos travaux jusqu'à
14 heures.
(Suspension de la séance à 13 h 08)
(Reprise à 14 h 01)
Le Président (M. Jacques) : Bonjour.
La Commission des transports et de l'environnementreprend ses travaux. Nous poursuivons les consultations
particulières et auditions publiques sur le projet de stratégie gouvernementale
de développement durable 2023‑2028.
Cet après-midi, nous entendrons les organismes
suivants : Nature Québec et Fonds d'action québécois pour le développement
durable.
Je souhaite la bienvenue aux représentants de
Nature Québec et je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, après quoi nous procéderons à la
période des échanges avec les membres de la commission. Je vous invite
donc à vous présenter et faire votre présentation. Merci.
Nature Québec
Mme Vallières-Léveillé (Emmanuelle) : Bonjour,
M. le Président. Mmes et MM. les députés et membres de la commission. Nature
Québec vous remercie de l'invitation à participer à la présente commission.
Je me présente, Emmanuelle Vallières-Léveillé,
je suis coordonnatrice des projets Biodiversité et Forêt chez Nature Québec. Je suis accompagnée aujourd'hui de
trois de mes collègues que je présente rapidement : Anne-Céline Guyon,
chargée de projets, experte Climat;
Emmanuelle Rancourt, également chargée de projets, experte pour Énergie et
biomasse; et Hubert Fortin ici, chargé de projets, programme Milieux de
vie en santé.
Avant de vous
présenter nos remarques et recommandations concernant le projet de Stratégie
gouvernementale de développement durable 2023‑2028, je vous
présente mes excuses, au nom du directeur général par intérim de Nature Québec,
Cyril Frazao, qui ne peut participer aux présentes auditions en raison
d'un empêchement. De plus, face à des délais serrés, nous n'avons pas fait
parvenir de mémoire avant notre participation. Cependant, nous vous ferons
parvenir un résumé de nos commentaires suite à notre... suite à notre passage
aujourd'hui.
Donc, alors, pour commencer, nous souhaitons
souligner quelques éléments d'ordre général. Dans ses prises de position, Nature Québec se base sur la science,
et, concernant les changements climatiques et la crise de la biodiversité,
les scientifiques de l'IPBES et du GIEC nous
disent qu'il faut accélérer le pas, il faut opérer des changements systémiques
et adresser les causes profondes de ces crises.
Malgré
l'engagement du Québec dans le programme 2030 de l'ONU, dont découle la
Stratégie gouvernementale de développement durable, nous devons malheureusement
constater que le développement durable n'a pas rempli toutes ses promesses. Malgré certains efforts mis en
place à l'échelle mondiale et domestique, il est clair que le développement durable
n'a pas permis de répondre adéquatement aux crises environnementales et
sociales, ces dernières continuant de s'aggraver, remettant en cause la survie
même de l'humanité.
Comme plusieurs d'entre vous, Nature Québec
était présent, en décembre dernier à la COP15 et lors du lancement de l'Appel
de Montréal, afin d'appuyer l'importance de s'attaquer d'urgence aux causes
sous-jacentes qui sont communes à la crise de la biodiversité et celle du
changement climatique. Nous tenons d'ailleurs à souligner positivement le fait
que le gouvernement du Québec ait endossé cet appel et, par le fait même, s'est
engagé à poursuivre le dialogue quant aux causes sous-jacentes et aux vraies
solutions à mettre en oeuvre pour y faire face.
C'est dans cette perspective que nous nous
demandons si le projet de stratégie permet au Québec de répondre à cette urgence. Nous croyons qu'il y a un réel
besoin, en parallèle d'une stratégie de développement durable, d'avoir une
stratégie nationale sur la biodiversité afin d'adresser adéquatement cette
crise qui met en péril notre qualité de vie, incluant notre économie. Nous
tenons également à saluer le lien entre la crise climatique et la crise de la
biodiversité, fait dans le projet de stratégie, tout comme l'ajout du volet
santé.
Ensuite, à
l'instar des recommandations du rapport du Commissaire au développement durable pour l'année 2020‑2021 ainsi que d'autres groupes qui ont
participé aux présentes consultations avant nous, les objectifs de la nouvelle stratégie
devraient être précis et accompagnés de cibles quantifiées ainsi que
d'échéances. Par exemple, lorsqu'on parle de bonifier et pérenniser le
réseau d'aires protégées, on pourrait accoler la cible de 30 %, puisque le
gouvernement s'est déjà engagé à l'atteindre.
Ensuite, nous croyons
que la stratégie manque de références aux principes de la Loi sur le
développement durable. Plusieurs de ces
principes sont pourtant très pertinents, nous n'en nommerons que trois :
le principe e, portant sur la participation et l'engagement,
visant, entre autres, à définir une vision concertée du développement; le
principe g, portant sur la
subsidiarité, qui vise essentiellement la délégation de la prise de décision à
l'autorité la plus appropriée, donc souvent plus près des citoyens; et,
pour terminer, le principe m, portant sur le respect de la capacité de
support des écosystèmes.
Il
est pertinent de se rappeler ces principes aujourd'hui, à la suite de
l'entérinement des cibles de 30 % de protection et de 30 % de
restauration de la nature et à la veille des consultations sur la Stratégie
pour les caribous forestiers et montagnards.
Entre le respect de
ses engagements en faveur de la nature et son désir de développer les minéraux
critiques et stratégiques, en plus de devoir
répondre à la demande grandissante en hydroélectricité, nous croyons pertinent
que les principes de développement
durable du gouvernement du Québec apparaissent dans la stratégie afin de guider
l'administration publique et l'action politique.
Pour la suite de nos
commentaires, je laisserais la parole à Anne-Céline Guyon.
Mme Guyon (Anne-Céline) : Bonjour, M. le Président
et membres de la commission. Notre premier commentaire porte sur la place de
l'économie dans la présente stratégie. Selon Nature Québec, le fait même que la
première orientation soit axée sur l'économie verte et l'innovation pour
les entreprises fait en sorte qu'encore une fois c'est l'économie qui est mise
de l'avant, ayant préséance sur tout le reste. Pourtant, c'est d'écosystèmes en
santé dont dépend notre qualité de vie. C'est pourquoi nous aurions aimé voir
comme première orientation la conservation de la nature et que l'économie soit
ramenée à sa place, soit comme un moyen et non comme une fin en soi.
De
plus, la stratégie mériterait de se distancer du regard anthropocentrique que
l'on pose sur la nature et reconnaître sa valeur intrinsèque au-delà des
bienfaits qu'elle nous offre.
Aussi, si dans
l'orientation 3 est nommé que la transition socioécologique réfère à un
modèle... au passage nécessaire vers un modèle de développement respectueux de
la capacité de support des écosystèmes, il n'en demeure pas moins que la stratégie repose encore trop sur un modèle de
croissance économique où on parle de soutenir, favoriser et encourager, mais à
aucun moment n'est évoqué le fait qu'il va falloir urgemment entamer un travail
de réduction, réduire notre
consommation énergétique, réduire l'apport de matières premières dans nos
systèmes de production et réduire notre niveau de consommation.
Deuxième commentaire,
concernant le processus de participation, nous soulignons positivement la
volonté d'assurer une transition
socioécologique juste en favorisant la participation de toutes et tous au
développement durable du Québec. Nous ne pouvons que souscrire au fait
que la transition écologique doit être porteuse de justice sociale. Et les
meilleurs moyens d'y parvenir sont premièrement de reconnaître les impacts
différenciés des crises sur les différents
segments de la population, entre autres les populations les plus vulnérables,
les femmes, les premiers peuples et les personnes issues de la diversité; deuxièmement,
de permettre à ces derniers d'être adéquatement représentés et de participer de façon pleine et entière aux prises
de décision concernant la transition socioécologique; et enfin, concernant spécifiquement
les travailleurs et travailleuses, il ne suffit pas de les encourager à se
diriger vers des emplois verts, mais aussi d'accompagner ceux qui sont dans des
secteurs problématiques à en sortir en les incluant aux tables de discussion et
de décision, comme, par exemple, dans le dossier du caribou et du secteur
forestier.
En
ce sens, il nous semble important de dire que le processus de consultation de
la présente stratégie a échoué à favoriser cette participation pleine et
entière de toutes et tous. Toutefois, l'annonce par le premier ministre d'une consultation
publique sur l'avenir énergétique du Québec sera une occasion concrète de se
reprendre et d'appliquer ces principes. C'est pourquoi nous appuyons la demande
faite par nos collègues d'Équiterre de tenir un BAPE générique, seul processus qui permettra la participation de tous les
secteurs de la société civile québécoise sur un enjeu aussi complexe et
aussi structurant pour l'avenir du Québec.
Troisième commentaire
sur le développement des activités durables, concernant le développement
durable des collectivités, tous les points abordés dans la stratégie sont
évidemment intéressants, mais rien ne bougera tant qu'on ne réformera pas la
fiscalité municipale et tant qu'on ne modernisera pas la Loi sur
l'expropriation.
De plus, nous ne
pouvons nous empêcher de souligner que, s'il est écrit noir sur blanc la
volonté d'accélérer la transition vers une mobilité durable en augmentant la
part modale des déplacements actifs et collectifs tout en réduisant l'intensité
énergétique du transport de personnes et des marchandises, nous sommes
présentement en train de faire exactement le
contraire en continuant de sous-financer ces modes de transport et en refusant
de se doter d'outils tels que des
redevances sur les véhicules énergivores. Nous appelons donc le gouvernement à
davantage de cohérence.
Enfin, dernier
commentaire sur l'exemplarité de l'État. Nature Québec considère que viser
l'exemplarité de l'État est non seulement
nécessaire, mais obligatoire, et doit commencer au plus haut niveau de
l'appareil d'État. En ce sens, nous
sommes très inquiets des constats déposés par la Commissaire au développement durable quant au désengagement des hauts dirigeants envers leur
participation aux différents comités de la stratégie de développement durable.
Nous ne pouvons donc
qu'enjoindre la commission à prendre sérieusement en compte les avertissements
de la commissaire avant l'entrée en vigueur même de la présente stratégie. Et
nous appuyons également la proposition d'assujettir les réseaux parapublics à la
Loi sur le développement durable.
• (14 h 10) •
Concernant
l'objectif 5.3 sur l'investissement durable, nous vous invitons aussi à ce
que la stratégie aborde également le retrait
et l'interdiction dans des activités néfastes. En cela, vous répondriez par le
fait même aux cibles 7 et 18 de l'accord Kunming-Montréal et aussi
de l'Accord de Paris.
Enfin,
pour finir sur l'exemplarité de l'État, sortir le gaz naturel du parc
immobilier est non seulement essentiel, mais devrait être obligatoire.
Conclusion, nous
voudrions souligner aussi que les choix des... le choix des mots est également
important. Tout au long des actions
proposées, les verbes d'action choisis manquent de mordant. Au lieu de
formulations telles que «il est souhaité que», «nous invitons à», le
temps est venu d'exiger et d'obliger. L'urgence l'exige.
Merci, mesdames et
messieurs. Nous sommes maintenant prêts à prendre vos questions.
Le Président (M.
Jacques) : Merci beaucoup pour votre présentation. Nous allons
maintenant débuter les échanges avec la députée... Mme la députée d'Argenteuil.
Mme
Grondin : Bonjour, mesdames
monsieur. Merci pour votre contribution. Par rapport à tous les autres ou
plusieurs autres intervenants, vous y allez assez fort, c'est tout à votre honneur.
Moi,
j'aimerais ça qu'on se concentre, parce que vous avez retenu... dans le cadre
des principes de développement durable,
là, des 16 principes, vous nous amenez vers trois grands principes que
vous aimeriez... pour lesquels on devrait porter une attention particulière, soit la participation citoyenne, le
principe de subsidiarité, le respect de la capacité de support des
écosystèmes.
Moi, vous allez
m'excuser, mais je vais me concentrer sur l'orientation 2, qui est la
nature. Nature Québec, j'ai l'impression que
c'est un peu aussi votre expertise. Évidemment, vous avez mentionné des grands
exemples qu'on connaît tous, l'histoire des caribous, le secteur
forestier.
Outre ça, parce que
je connais certains de vos projets que vous pilotez, en termes de cibles et
d'indicateurs, quand on tombe en termes de participation citoyenne, de
subsidiarité, donc, ce que vous pensez d'élargir, la stratégie au niveau des
municipalités, l'exercice de comment on fait pour respecter la capacité de
support des écosystèmes, est-ce que vous
pouvez nous dire si vous avez des cibles plus précises, outre le 30 % dans
le Sud, de protection? Est-ce qu'il y
a des indicateurs que vous pourriez nous proposer qui nous aideraient à
atteindre les objectifs qui sont identifiés à l'orientation 2?
Mme
Vallières-Léveillé (Emmanuelle) : Dans le cadre du présent exercice,
on ne s'est pas penché dans ce détail-là au niveau des indicateurs. Cependant,
peut-être un petit mot sur la capacité de support des écosystèmes. Notre point,
c'est que, quand on a des grands choix de société, comme, par exemple... on a
mentionné le caribou, il faut agir pour le
caribou, c'est clair, il faut des actions concrètes, je pense que c'est assez
un consensus, là. Par contre, l'idée,
c'est de... parce qu'actuellement on voit que la première pression, c'est le
secteur forestier, sur les caribous. Quand on voit que les populations de caribou déclinent, on ne peut pas dire
qu'on respecte la capacité de support des écosystèmes à ce moment-là.
Puis on voulait
amener le message qu'il faut aussi accompagner dans une transition juste les
communautés forestières, par exemple, dans ce cas précis là. Donc, pour nous,
c'est un point qu'on voulait souligner. Mais, pour les indicateurs précisément,
on n'a pas été dans le détail, là. Tu veux réagir?
M. Fortin
(Hubert) : Oui, si je peux me permettre, je pense, c'est ça, on ne
rentrera pas nécessairement spécifiquement dans les indicateurs, mais,
clairement, je regardais justement l'objectif 4.3, qui est de bâtir des
collectivités dynamiques et innovantes, puis on calcule ça avec l'indice de
vitalité économique, tu sais, c'est assez réducteur, on parle d'un indice mais
qui est strictement économique.
Nous,
ce qu'on dit, c'est que ce qu'on doit faire, c'est plus prendre des indicateurs
qui sont reliés au mieux-être humain puis qui sont reliés à l'environnement,
puis dans le mieux-être humain va peut-être s'intégrer l'économie, là, mais c'est vers ça qu'on devrait s'orienter. Puis
l'IRIS, par exemple, a proposé différents... qui est l'Institut de recherche et
d'informations socioéconomiques, en a proposé différents, indicateurs. Il y a
beaucoup de littérature à ce sujet-là, notamment G15+, qui était là, à la
commission, avant nous aussi, ça fait partie un peu de ce qu'ils ont recommandé
dans leur mémoire, je crois, donc que la société québécoise soit une des
premières en Amérique du Nord à s'être basée sur le bien-être.
Donc, je pense que
c'est vraiment ça, là, l'idée, c'est plus ça qui ressort. Après ça, ce n'est
pas vraiment à nous de définir, je pense,
lesquels sont... c'est plus à la science de voir, avec les limites planétaires,
c'est jusqu'où on peut aller puis c'est quoi, les indicateurs.
Mme Grondin :
Puis merci, là, parce qu'effectivement j'ai tendance à vouloir tenter de...
pour les gens qui nous écoutent, mais, pour
la compréhension de tous puis susciter l'intelligence collective, j'essaie de
rendre les choses un peu plus concrètes. Tu sais, on est beaucoup dans
une stratégie, des orientations, mais, concrètement, ça mange quoi en hiver? Ça
fait que... mais je comprends que ce n'est pas le travail que vous avez fait,
de dire : On va identifier des cibles très concrètes ou des indicateurs.
Je suis contente d'entendre que vous ramenez la question du bien-être comme
peut-être visé, en termes d'indications... d'indicateurs.
Parlez-moi de... Il y
a plusieurs intervenants qui nous ont parlé à travers l'économie, même si c'est
la première orientation, on pourrait en
débattre pendant des jours, mais il reste que c'est... et vous l'avez dit,
hein, c'est au coeur aussi d'une
société, là, toute la question économique. Parlez-moi de ce que vous pensez des
mesures écofiscales. Est-ce que c'est quelque chose...
Mme
Guyon (Anne-Céline) : Bien, l'écofiscalité, évidemment, c'est certain
qu'il faut mettre en place des mesures écofiscales, mais il faut absolument les
compléter, en fait, faire en sorte qu'elles soient justes, donc une écofiscalité notamment progressive, pour
s'assurer, encore une fois, de remplir le pôle social du développement durable.
On a trop tendance à l'oublier.
Donc, pour nous,
c'est essentiel de faire en sorte que les mesures d'écofiscalité, qu'on
sous-estime de manière générale au Québec, alors qu'on pourrait avoir
énormément de pouvoir en les mettant en place, se fassent de manière véritablement aussi à ce qu'elles
permettent de réduire les inégalités sociales au Québec et non pas qu'elles les
accentuent. Parce que des mesures
d'écofiscalité mal pensées pourraient véritablement venir accentuer les
problématiques sociales plutôt que de venir y répondre. Donc, ça, c'est
essentiel, à notre avis, d'avoir la notion d'écofiscalité juste.
Mme Grondin :
Intéressant. Merci. Peut-être
dernière question, je ne sais pas, M. le Président, est-ce qu'il y a... oui, dernière question. Il y a plusieurs
intervenants... Et je vous avoue que je suis un peu d'accord avec cette... pas
cette tendance, mais on a une urgence en termes de changements
climatiques, on a de grands défis dans tous les domaines, que ce soit au niveau
de la santé, la pénurie de main-d'oeuvre, l'éducation, la nature, et donc le
constat est qu'on a une stratégie, une loi depuis 2006, une stratégie, on est à
la troisième version, là, si je me rappelle bien, et le constat du commissaire est qu'on n'avance peut-être pas
aussi vite qu'on voudrait tous faire arriver. Et donc une des approches
qui est proposée dans cette stratégie-là, c'est d'en faire des... de faire des
choix. C'est ce que plusieurs intervenants nous ont dit. On ne peut pas tirer
sur tous les lapins, là, on va choisir, et donc c'est l'exercice qui a été fait
dans le cadre de la stratégie.
Je nous ramène aux
orientations. Est-ce qu'à travers les échanges qu'on a et la lecture de
certaines positions que vous prenez, est-ce qu'on peut s'entendre que les
orientations qui sont choisies dans cette stratégie-là sont intéressantes? Certes, peut-être qu'on n'exige pas
tellement, mais est-ce qu'au moins en termes d'orientations on s'entend
que c'est des bonnes orientations?
• (14 h 20) •
Mme Guyon
(Anne-Céline) : Je pense que les orientations sont bonnes, mais ne se
sont peut-être pas développées... certaines sont peut-être déficientes par
rapport à d'autres. Encore une fois, on voit, dans la première orientation, une
vraie volonté de nous amener vers une économie plus durable et responsable,
mais, encore une fois, on le fait malheureusement trop en incitant... en
voulant déplacer des choses, des capitaux, par exemple, etc., mais on oublie
complètement le côté de dire : Il va falloir qu'on se pose les réelles
questions en tant que société québécoise, qu'est-ce qu'on doit développer, puis
qu'est-ce qu'on doit arrêter de développer, voire même, des fois, qu'est-ce
qu'on doit complètement changer en termes de paradigme, tu sais. Cette
réflexion-là, on ne l'a pas. Or, c'est celle-là qui est essentielle.
On sort d'une COP15
qui est venue nous mettre vraiment en pleine face le fait qu'on n'est pas juste
en crise climatique, mais on est aussi en crise de la biodiversité. Et là on se
trouve face à un momentum où on se rend compte que ce n'est pas juste une
question de switch énergétique, notamment de passer des énergies fossiles aux
énergies renouvelables, mais que les énergies renouvelables aussi peuvent avoir
des impacts au niveau de la crise de la biodiversité. Et on a des vrais enjeux
à venir faire en sorte que les réponses à l'une ne viennent pas aggraver
l'autre. Et c'est notamment le cas dans le secteur minier, notamment, où il va
falloir qu'on se pose des vraies questions et qu'on
prenne peut-être un pas de recul avec un moratoire, le temps de revoir certains
éléments de la loi sur le régime minier. Donc, c'est le genre d'éléments
qu'il faut regarder et travailler.
Je suis complètement
d'accord sur le fait de travailler de manière structurante et d'y aller
peut-être avec des premières mesures où on sait qu'on va poser les bons gestes
et pas qu'on ne sera pas à rétropédaler par la suite en corrigeant des erreurs qu'on aurait très bien pu éviter dès le départ.
Parce qu'on sait, à l'heure actuelle, ce qu'il faut faire, on n'en est
plus trop à se poser des questions, on en est beaucoup à l'action.
Mme Grondin :
Les intervenants avant vous, qui sont spécialisés dans tout ce qui est
économie circulaire, nous proposent justement de mettre l'emphase sur ce grand
défi là de l'économie circulaire. Parce que, dans le fond, le message qui est
derrière, ça rejoint un peu... est-ce que je me trompe, ce que vous... de
réduire la consommation, de profiter de ce
qu'on a déjà produit avant d'aller chercher du nouveau? C'est un peu ça, en
gros, là, je résume pour les enfants, mais je pense que c'est important.
Et donc est-ce que c'est le genre de proposition qui, à travers l'orientation
économique, notamment, est quelque chose qui vous intéresse?
Mme Guyon
(Anne-Céline) : L'économie circulaire, oui, c'est certain. Maintenant,
l'économie circulaire, il va falloir faire
attention à ce qu'elle ne vienne pas verrouiller aussi la production de
certains déchets des uns pour être obligé de fournir d'autres qui vont s'en
servir. Vous me voyez venir, évidemment, avec toute la question du gaspillage
alimentaire, par exemple, qui alimenterait d'éventuelles usines de
biométhanisation pour produire du GNR, pour venir chauffer ou alimenter des
processus industriels. Il y a des limites à ça, c'est-à-dire qu'on ne va pas
faire exprès de produire trop de déchets
alimentaires pour pouvoir après venir produire du GNR. Et c'est vrai pour
beaucoup de choses. C'est vrai aussi pour les ressources naturelles.
C'est pour ça
qu'encore une fois il va falloir qu'avant tout on se pose la question de
qu'est-ce qu'on veut continuer à développer au Québec versus ce dont on peut se
passer et surtout qu'est-ce qu'on peut réduire. Il faut réduire tout à la source à la base. Et ce travail-là, malheureusement,
on ne le fait pas encore assez dans notre réflexion.
Mme
Grondin : ...des collègues qui souhaitent poursuivre? Oui?
Merci. Je vais laisser la chance à mes collègues d'intervenir.
Le Président (M.
Jacques) : Merci, Mme la députée. Je cède maintenant la parole à la
députée d'Iberville.
Mme Bogemans : Merci beaucoup, M. le
Président. Moi, en fait, au niveau du gaz naturel, vous avez dit que vous, vous
souhaitiez vraiment une transition complète dans le but de l'éliminer à
100 %, donc ça veut dire que vous n'êtes pas nécessairement en faveur des
GNR.
Mme Guyon (Anne-Céline) : Le GNR,
malheureusement, est, à l'heure actuelle, beaucoup utilisé pour justifier
l'accroissement du réseau gazier au Québec. Et, encore une fois, on est face à
une forme de verrouillage de son utilisation. Or, concrètement, la science nous
le dit, la production de GNR au Québec, ce sera très difficile de dépasser un 5 %, grand maximum, peut-être un
10 % d'utilisation de GNR dans les gazoducs. Et, pendant ce temps-là, tout le reste, ça va être du gaz et, pour la
plupart, du gaz issu de fracturation, issu des États-Unis. Donc, le GNR,
c'est... Et je pense que c'est une vision qu'on doit avoir, et ma
collègue Emmanuelle pourra compléter, de manière générale, l'énergie, et je ne
parle pas juste du GNR, l'énergie, il va falloir la penser de manière locale.
Ça va être des sources de production
locales, à petite échelle et surtout proches de leurs sources de consommation,
on n'est plus... et ça va être la bonne énergie au bon endroit.
Certaines sources énergétiques vont être vraies pour certaines régions puis pas
pour d'autres. Et donc c'est là aussi où ça
va être extrêmement important d'avoir des dialogues sociaux à l'échelle
régionale pour inclure tous les acteurs locaux autour des transitions
écologiques et sociales régionales.
Mme
Bogemans : OK. Puis vers quelle source de transition
d'énergie vous voudriez passer? Parce que, là, si on n'utilise pas le
gaz naturel, qu'est-ce qu'on utilise en ce moment?
Mme Rancourt (Emmanuelle) : Oui.
Bien, nous, on travaille quand même beaucoup dans le domaine de la biomasse forestière résiduelle, qui est un des
intrants qui est mentionné quand même souvent, là, pour le GNR. Par contre,
quand on l'utilise pour la chauffe directe,
il y a moins de transformation, il y a moins de besoins d'apports énergétiques,
donc le rendement énergétique est toujours plus élevé. Donc, comme ma
collègue disait...
Mme
Bogemans : Excuse-moi, c'est juste... vous voulez dire comme
le brûler en granules, par exemple? Est-ce que c'est ce que vous voulez
dire?
Mme Rancourt (Emmanuelle) : Comme
des granules, comme des plaquettes, c'est ça, mais nous, on parle vraiment à
une échelle locale circulaire. Donc, souvent, tu sais, on parle... une municipalité
qui a quelques bâtiments reliés à un système de chaleur central s'alimente de
la petite scierie du coin, tout ça, là. Donc, on parle d'une échelle vraiment
locale, régionale. Je sais que ça se fait beaucoup, des granules, tout ça, pour
l'exportation, puis on a vu vraiment, là aussi, ce qui s'est passé... je ne
sais pas si vous êtes au courant, en Colombie-Britannique, il y a eu un peu une polémique de ce côté-là, donc on n'est pas
à cette échelle-là du tout. Nous, on parle des petits projets où est-ce que, un peu la circularité, là, les résidus
forestiers d'une industrie peuvent ensuite être valorisés d'une autre façon.
Donc, c'est souvent pour des
bâtiments institutionnels, pour certaines industries. Il y a quand même
beaucoup d'applications à cette énergie-là. Donc, c'est un peu vers ça
qu'on veut recommander, là, en remplacement du gaz.
Mme Bogemans : Bien, c'est certain
que ça fait beaucoup de sens dans un... parce qu'en fait on n'utilise pas non plus d'électricité pour chauffer quand on
utilise ces granules-là, là, c'est quelque chose à considérer, définitivement.
Mais, au niveau de la création de GNR,
comme, par exemple, avec la transformation... tu sais, tantôt on parlait
carrément de vidanges ou de lisier,
de fumier, par exemple, ça... Parce que, là, en ce moment, on est à peine à
1 % de GNR, là, tu sais, puis, en 2030, à 10 %, puis, au taux
de croissance actuel, on ne se rend même pas au 10 %, là. Donc, est-ce que
vous pensez que ce serait bon quand même de
continuer à essayer d'atteindre le 10 % ou ça ne vaut même pas la peine?
Mme Guyon (Anne-Céline) : À
condition que ce soit encore dans une production locale, dans un réseau local. Là, ce n'est pas du tout ce qui est en
train de se passer. Nous avons une entreprise, qui est Énergir, qui, sous
prétexte de développer le GNR, est en train de venir verrouiller
l'utilisation du gaz naturel non conventionnel au Québec.
Le Président (M. Jacques) : Merci.
Ceci met fin aux échanges. Donc, je cède maintenant la parole à la porte-parole
de l'opposition officielle, Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce, pour
12 min 23 s.
Mme
McGraw : Ah! encore plus de temps aujourd'hui. OK, parfait.
Merci, M. le Président. Et merci beaucoup à Nature Québec d'être avec nous
aujourd'hui. On a bien écouté la présentation et on a bien hâte de recevoir
aussi le mémoire pour pouvoir vraiment tout digérer. Alors, merci encore. Il y
a beaucoup de contenu dans votre allocution. Et
j'ai donc plusieurs questions, mais je veux vous laisser faire des commentaires
et vraiment vous donner la chance d'élaborer.
Alors, à la lecture de la stratégie, je... mes
collègues le savent parce que je l'ai dit à plusieurs reprises, vous avez parlé du fait que le développement durable
n'a pas rempli toutes les promesses, surtout en termes d'environnement
et de société, les enjeux environnementaux et sociaux. Et mes collègues
m'ont... je suis ça depuis le Sommet de la Terre
à Rio, ça fait plus que 30 ans, même, on parle de développement durable,
1987 avec la commission Brundtland, et,
oui, je suis d'accord, on a l'impression qu'on n'avance pas assez, et je parle
même souvent de procrastination planétaire, en tout cas. Donc, on est
dans une situation d'urgence. Et moi aussi, j'avais l'impression... j'avais
faim aussi de mots un peu plus exécutants, qui urgent et qui crient à l'action.
Alors,
dans quelle section... est-ce que c'est la stratégie en général ou est-ce qu'il
y a des sections en particulier où vous auriez voulu voir en particulier plus
de vigueur, et plus d'ambition, peut-être, et d'action, des mots d'action?
• (14 h 30) •
Mme Guyon (Anne-Céline) : Bien,
c'est sûr que, de manière générale, on aurait voulu voir beaucoup plus de verbes d'action et de niveaux d'exigence dans
l'ensemble de la stratégie. Moi, c'est vraiment ce qui m'est venu... ce
qui m'a sauté aux yeux en premier lieu. Quand je lisais des verbes, genre, «on
souhaite que», «on va enfin avoir des attentes
envers les ministères et les organismes», je suis tombée en bas de ma chaise.
Ça aurait dû être là depuis le début.
Tu sais, vous le dites très bien, ça fait
30 ans qu'on en parle et ça fait 30 ans que la crise environnementale
continue de s'aggraver. Il y a, je pense, et vous... je vais peut-être vous
faire rire, là, mais je pense qu'il y a des limites à penser qu'avec les mêmes
ingrédients et les mêmes recettes on va goûter un gâteau différent. Tu sais, à
un moment donné, il faut changer de
paradigme et il faut y aller de manière beaucoup plus radicale. Je pense que
c'est rendu que l'ensemble de la communauté scientifique nous le dit et
insiste, le GIEC, l'IPBES, ils ont fait même des rapports communs pour le dire,
c'est d'un changement systémique dont on a besoin, de revoir le paradigme
économique, qui est beaucoup trop axé sur la surexploitation des ressources
naturelles. Tant qu'on n'osera pas adresser la question des causes
sous-jacentes aux crises environnementales, on n'y arrivera pas. Et, oui, ça va
demander du courage politique, mais je pense
qu'au Québec particulièrement la
société québécoise est présente, elle est là, elle est mobilisée autour de
ces enjeux-là, on peut s'appuyer sur elle
pour aller beaucoup plus loin. Ne sous-estimons pas les citoyens et citoyennes
du Québec.
Mme McGraw : Et justement,
là-dessus, vous avez parlé que la stratégie témoigne d'un manque d'écoute ou d'un manque de communication... ou le principe,
justement, parmi les trois principes, trois des principes que vous avez cités
au sein de la Loi sur le développement durable, vous avez parlé, bon,
participation puis engagement au niveau des citoyens. Est-ce que vous avez des
exemples de politiques publiques, de stratégies où ça a été bien réussi?
Quelles sont les meilleures pratiques, au niveau de l'engagement et de la
participation citoyenne, qui pourraient nous donner des indices?
Mme Guyon (Anne-Céline) : Bien,
écoutez le processus qui s'est déroulé autour, notamment, de la réflexion pour
mettre en place le plan d'économie verte était un processus très intéressant.
Il y a eu une consultation, on est partis en région, il y a eu des sous-comités
de travail qui ont regroupé différents thèmes avec différents acteurs
représentant différents secteurs de la société civile. C'est à ce type de
consultation là dont on fait référence.
Et, encore une fois, tu sais, là, on vient de
nous annoncer qu'il y aura une consultation publique sur l'avenir énergétique
du Québec. C'est un enjeu beaucoup trop gros, beaucoup trop structurant pour
l'ensemble de l'avenir du Québec pour juste laisser ça dans les mains d'une
commission parlementaire, avec tout le respect que j'ai pour le travail des
commissions. C'est un véritable débat de société dont on a besoin, et d'inclure
les acteurs régionaux, parce que c'est au
niveau régional que la transition, elle se fait, c'est au niveau local, et on a
besoin d'avoir tout le monde autour de la table pour arriver avec des
visions communes. Et, on le sait, c'est quand on engage les gens qu'après ils
passent à l'action, et qu'ils se sentent concernés, et qu'ils veulent y aller.
Si on impose des choses, ça ne fonctionnera pas. Au contraire, on a un vrai
sérieux risque de «backlash» dans la population.
M. Fortin (Hubert) : ...par rapport
à inclure toutes les... à inclure les régions. Donc, les municipalités ont un
énorme rôle à jouer aussi, là, dans la crise au niveau... sur la lutte aux
changements climatiques et le déclin de la biodiversité, puis actuellement
elles n'ont pas les leviers, elles n'ont pas les ressources, elles sont
vraiment basées sur... Leurs revenus proviennent principalement de la taxe
foncière. Dans plusieurs pays de l'OCDE, dont les pays scandinaves, qui sont des leaders en termes environnementaux, la
majorité des revenus des municipalités proviennent du revenu sur les
impôts...
Une voix : ...
M. Fortin (Hubert) : ...de l'impôt
sur le revenu, pardon, oui, c'est ça, excusez-moi. Donc, est-ce que c'est ça, notre modèle? Je ne sais pas, mais il faut
avoir... il faut discuter de ces modèles-là, il faut réformer en profondeur
notre système fiscal pour aider les municipalités à avoir plus de
pouvoir. C'est eux qui gèrent nos matières résiduelles, c'est eux qui aménagent
notre territoire. Il y a la Loi sur l'expropriation, aussi, qu'on demande qui
soit réformée, justement, parce qu'on
travaille au quotidien, nous, avec des municipalités, puis ce qu'elles nous
disent, c'est qu'elles veulent acquérir des terres pour les protéger,
mais elles n'ont pas les moyens, elles ont peur de se faire poursuivre. Donc, c'est important de... Ce n'est pas de faire
n'importe quoi avec l'expropriation, là, il faut l'encadrer, mais il faut
moderniser la loi aussi.
Mme McGraw : Donc, ça, ça nous fait
penser où vous avez mentionné un deuxième principe, au sein de la Loi sur le développement durable, et c'est celle
de la — et
j'ai toujours de la difficulté avec ce mot-là — subsidiarité. Ah! je l'ai dit. C'est une première. C'est une première. Donc, est-ce
qu'il y a d'autres choses que vous voulez ajouter sur ce principe-là en
termes de... Je vous laisse...
M. Fortin
(Hubert) : Tantôt, on
parlait de l'écofiscalité. C'est sûr que les municipalités peuvent aussi,
maintenant, mettre des mesures écofiscales, puis elles ont un rôle aussi
à jouer à ce niveau-là. Ça, ça doit venir de tous les paliers, là, que ce soit au niveau
de la mobilité durable, donc c'est très important. Puis ça peut être une source
de revenus, aussi, de plus pour celles-ci, là. Donc, peut-être que la
stratégie pourrait donner des incitatifs aux municipalités pour mettre de
l'écofiscalité. Ça a été mentionné aussi dans la stratégie, l'écofiscalité,
mais je ne l'ai pas vue vraiment détaillée à différents endroits, là, ça fait
que ça reste un concept global. Ça fait que ce serait intéressant aussi qu'on
propose des mesures concrètes, au provincial.
Mme Vallières-Léveillé (Emmanuelle) : Peut-être
pour compléter, quels sont les pouvoirs et responsabilités qui peuvent être
délégués au niveau plus régional, par exemple, un peu comme Céline le disait,
ça va beaucoup, pour nous, avec l'engagement
des citoyens. Quelle est la vision concertée, en région, pour le développement?
Parce que, là, on arrive... Par exemple, là, on assiste à un véritable boom
minier, plusieurs projets miniers, probablement, vont vouloir voir le
jour au courant des prochaines années. Là, on crée des fois des situations
inconfortables en région aussi en disant :
Bon, là, il y a une compagnie qui veut exploiter à cet endroit. Mais on n'a
jamais la réflexion plus globale de dire : Bon, il faut accueillir des projets industriels; où ça peut être
possible puis où, au contraire, on doit dire : Non, ça, c'est un
milieu très important pour la région, on le conserve? Donc...
Mme Guyon (Anne-Céline) : Surtout en
regardant les impacts cumulatifs des différents projets. Parce que, si on regarde projet par projet, on ne s'en
sortira pas. Là, on s'aperçoit qu'à l'heure actuelle c'est que, dans une même
région, il y a cinq, 10 projets proposés, puis, tu sais, les uns... chacun
s'ajoute à l'autre, donc il faut absolument prendre en compte les
impacts cumulatifs des projets.
Mme McGraw : Vous avez mentionné
le... je ne sais pas si ça va être une commission parlementaire ou... mais sur
l'avenir énergétique au Québec. Nous, on avait proposé une commission
itinérante qui irait directement dans les
régions parler avec les experts, les groupes, les autochtones, etc. Mais est-ce
que vous... est-ce que... Parce que, là, vous parlez d'être systématique et systémique, quand même, aussi, si
je comprends bien. Est-ce que ce serait l'avenir énergétique? Comment
encadrer ça? Est-ce que... Selon vous, est-ce que ce serait... l'avenir
énergétique, ce serait le développement durable? L'économie circulaire? Il y a
beaucoup de... Si vous aviez... vous pouvez faire le choix vous-mêmes, comment est-ce que vous... ce serait
quoi, votre vision de comment procéder puis comment expliquer un peu aux
gens pour leur faire impliquer? Je ne sais pas si ma question est claire, mais
comment présenter ça aux...
Mme Guyon (Anne-Céline) : Oui. Bien,
je pense qu'il faut tout simplement dire aux gens que... Tu sais, puis je
reviens d'Europe, là, puis je peux vous le dire, là, tout le monde a sur toutes
les lèvres, là, le fait que le temps de l'abondance, c'est fini, en termes
d'énergie, là, et comment on fait pour résoudre ce problème-là, tout en voulant
continuer à vouloir se développer, je pense que... avec le même niveau de
croissance, même, voire l'augmenter.
Et le problème, il est là, et ça, ça va avoir
des impacts sur l'ensemble de nos vies dans tout, tu sais, dans notre manière
de nous nourrir, dans notre manière de nous vêtir, dans notre manière de nous
transporter. Je pense que, justement, il
faut expliquer aux gens à quel point, quand on parle d'énergie, c'est
absolument tous les aspects de notre vie
quotidienne qui sont touchés et que c'est pour ça qu'ils doivent absolument
pouvoir participer à cette conversation-là. Parce que, tu sais, chacun a
son mot à dire, chaque secteur a ses réalités différentes, et on a besoin d'y
aller, vraiment, dans un processus de dialogue social, encore une fois, pour
être sûrs qu'une fois qu'après la stratégie va sortir les gens y adhèrent en
ayant conscience qu'ils ont participé à l'entièreté de la chose. Et
j'insisterai sur... le fait de consulter, c'est bien, mais il faut prendre en
compte ce que les gens vous disent aussi.
Mme McGraw : Je pense, il nous
reste...
Le Président (M. Jacques) : Quelques
secondes.
Mme McGraw : Quelques secondes. Je
vais juste dire que j'ai beaucoup apprécié le point qu'on ne peut pas créer d'autres problèmes sociaux, environnementaux
en essayant de résoudre, même, la crise climatique. Je pense que cette manière de penser nous a amenés où on est
rendus aujourd'hui. Donc, je pense que c'était le point que je retiens.
Alors, merci beaucoup. À moins... (panne de son) ...je vous laisse... M. le
Président?
• (14 h 40) •
Le Président (M. Jacques) : Il reste
très peu, très, très peu.
Mme McGraw : Quelques secondes. En
tout cas, est-ce que vous avez d'autres choses à ajouter avant que ma
collègue... Alors, merci.
Le
Président (M. Jacques) : Merci beaucoup pour l'intervention. Je cède
maintenant la parole à la porte-parole du deuxième groupe d'opposition,
Mme la députée de Verdun, pour 4 min 8 s.
Mme Zaga
Mendez : Super. Merci, M. le Président. Merci beaucoup pour
votre exposé puis pour cet échange. On a parlé rapidement des ressources
naturelles. En regardant la stratégie du développement durable, qui a comme objectif, on va se le dire, avoir une cohérence en
termes d'orientations ministérielles, sentez-vous... quel est votre avis,
est-ce qu'il y aurait, selon vous, des contradictions entre où est-ce que la
stratégie veut nous amener ou devrait nous amener et les visions en termes
d'exploitation des ressources naturelles au Québec?
Mme
Guyon (Anne-Céline) : Oui, des contradictions, il y en a, encore une
fois, parce qu'on dit qu'on veut prend en compte les limites biophysiques des
territoires et, en même temps, on dit qu'on veut continuer à se développer, à
innover, etc., sans avoir une réflexion en profondeur sur, justement, jusqu'où
on peut aller là-dedans. Donc, pour moi, c'est la grande contradiction dans la
stratégie. Et, encore une fois, c'est quand on lie les enjeux, crise
climatique, crise de la biodiversité qu'on comprend véritablement la complexité
du problème.
Et sincèrement, là,
je ne dis pas qu'il y en aura de faciles, mais il serait peut-être temps,
justement, de le reconnaître qu'on ne fera pas face à ces crises-là avec des
réponses faciles. Et qui dit complexité dit justement, encore une fois,
d'inclure le plus de monde possible autour de ces réflexions-là pour permettre,
justement, à tout le monde d'exprimer leur réalité et de se rendre compte des
différents liens qui s'opèrent. Hein, tout est interrelié, aujourd'hui, puis on
ne peut plus se permettre de vouloir résoudre des problématiques en silo. Il
faut absolument que tout le monde se parle.
Mme Zaga
Mendez : Puis c'est un peu... En tout cas, je vous relance là-dessus,
là, parce que c'est un peu ce qu'on a entendu tantôt par rapport aux minéraux
critiques, l'exploitation minière, vous voyez là aussi un enjeu pour l'aligner
avec la cohérence de la stratégie?
Mme Guyon (Anne-Céline) : C'est certain. Écoutez,
on... Pour que le Québec ait meilleure mine, la coalition, a fait sortir
les chiffres, un peu juste avant les fêtes, là, pendant la COP15, c'est
dantesque, le boom minier dans lequel on se
trouve à l'heure actuelle sans véritable encadrement. Encore une fois, ce qu'on
demande, c'est un pas de recul. Prenons le temps de bien y penser, sinon
on va se retrouver avec un Québec qui va véritablement être un fromage suisse,
là, un véritable gruyère, là.
Puis, tu sais, aussi,
c'est toute la concurrence entre les différents usages des territoires dont on
parle, là, parce qu'il y a des régions, tu sais, puis on le voit avec la
sortie, notamment, des MRC, tu sais, qui nous disent : Bien, écoutez, nous, on est en train de développer des
projets de récréotourisme, on a beaucoup de monde, les acteurs locaux
sont mobilisés autour de ces choses-là depuis des années, on met en place des
projets, et là, du jour au lendemain, parce qu'il y a une compagnie qui... à
cause du fait que c'est juste grâce à un clic qu'on peut venir claimer un
territoire, bien, du jour au lendemain, tout ça, ça part en fumée.
Il
y a quelque chose qui ne fonctionne pas. Encore une fois, c'est une question de
cohérence, c'est une question de faire les choses de la bonne façon avec les
bonnes étapes. On ne dit pas qu'il faut arrêter le développement minier,
on dit juste qu'il faut le faire correctement, en respectant les limites
biophysiques des territoires, le fait qu'on n'est pas juste dans une crise
climatique, on est dans une crise biodiversité, et donc c'est essentiel de le
prendre en compte.
Mme Zaga
Mendez : Puis, en termes de prise en considération des communautés,
rapidement...
Le Président (M.
Jacques) : En terminant, oui.
Mme Zaga
Mendez : ...en terminant, vous avez parlé de transition juste puis
rôle des travailleurs. J'aimerais vous entendre un peu plus là-dessus.
Mme
Vallières-Léveillé (Emmanuelle) : Oui, en fait, pour donner un exemple
plus concret, c'était en lien avec la future stratégie caribou. Évidemment
qu'il y a des actions à poser, il y a des territoires à protéger. Par contre,
il faut absolument accompagner les travailleurs. On ne peut pas juste leur
dire : Bien, on protège, puis arrangez-vous. Comment les...
Le Président (M.
Jacques) : Merci beaucoup, ceci termine les interventions. Merci pour
votre contribution aux travaux de la commission.
Je suspends quelques
instants pour se préparer pour le prochain groupe. Merci.
(Suspension de la séance à 14
h 45)
(Reprise à 14 h 51)
Le Président (M.
Jacques) : La Commission des transports et de l'environnement reprend
ses travaux.
Je
demande le consentement pour permettre au député de Taschereau de reprendre ses
fonctions à titre de membre et donc de mettre fin à son remplacement.
Est-ce qu'il y a consentement?
Des voix : ...
Le Président (M.
Jacques) : Consentement.
Donc, je souhaite la
bienvenue aux représentants du Fonds d'action québécois sur le développement
durable. Je vous rappelle que vous disposez
de 10 minutes pour faire votre exposé, après quoi nous procéderons à la
consultation avec les membres de la commission. Donc, je vous donne la
parole.
Fonds
d'action québécois pour le développement durable (FAQDD)
M. Girard (Nicolas) : Merci.
Merci de nous accueillir pour cette consultation parlementaire importante. En
fait, une stratégie 2023-2028 de développement durable qu'on attendait, en
fait, depuis deux ans avec impatience, une stratégie qui est importante de par le caractère transversal
qu'elle a et l'impact qu'elle a sur l'ensemble des ministères et organismes,
en fait, du gouvernement du Québec.
Il y a 20 ans, en fait, 22 ans plus
précisément, le gouvernement du Québec mettait en place le Fonds d'action
québécois pour le développement durable, puis, à l'époque, l'écosystème de
développement durable au Québec était vraiment,
vraiment très différent. En fait, on avait eu la chance d'arriver au tournant
des années 2000 où, là, on finançait le développement d'expertises,
en fait, comment on intègre le développement durable en aménagement du
territoire, en matière d'investissement
responsable, d'approvisionnement, et on développait les premières formations en
développement durable dans les
universités. Donc, une période... Puis on sensibilisait beaucoup. Donc, on a
fait un bout de chemin, c'est intéressant. En fait, j'ai envie de lancer
ce message-là en ouverture. Je sais qu'on est en commission parlementaire, il y a beaucoup de commentaires,
quand même, il y a beaucoup de critiques constructives sur la stratégie
et la... mais, en même temps, on a fait un bout de chemin, et je tiens à le
souligner.
Un bout de chemin, en fait, qu'on a la chance,
nous, de voir, en fait, puis de percevoir au FAQDD, notamment par des collaborations
qu'on a avec différents ministères et organismes. Puis, dans les dernières
années, on voit que les ministères et
organismes vont de plus en plus loin dans l'intégration, en fait, ou dans leur
volonté d'intégrer, en fait, des critères de développement durable. On a
eu la chance, nous, de collaborer, par exemple, avec la Caisse de dépôt et de placement du Québec, qui, en plus de développer toute une stratégie
pour verdir ses investissements, nous demande de travailler à aider des
organisations qui sont, dans leur portefeuille philanthropique, à intégrer des
critères de développement durable,
ministère... des contrats avec le ministère du Tourisme, qui a lancé un premier
plan d'action en tourisme durable, l'an dernier, et également qui a
travaillé à l'intégration de critères écoresponsables dans des programmes d'infrastructures en tourisme qui
n'intégraient pas, en fait, là... qui ne devraient pas, en principe, intégrer
de critère de développement durable. Donc, il y a des avancées intéressantes.
Pour l'exercice aujourd'hui, on a fait un
mémoire qui est un peu plus complet, qui touche à différents... à différents
aspects, en fait, là, du... bien, en fait, de la stratégie. Par contre, on va,
pour le bien de l'exercice, en 10 minutes,
là... on va «wrapper» autour peut-être, là, de l'orientation 1, qui est de
faire, en fait, du Québec un pôle en économie verte.
Pourquoi on veut mettre l'accent, en fait, sur
cet aspect-là, de notre côté? C'est qu'on a travaillé, nous, en collaboration avec le ministère de l'Économie,
dans les cinq dernières années, à un projet qui s'appelle le Fonds Écoleader
et qui vise à aider les entreprises québécoises à intégrer des pratiques
écoresponsables et des technologies propres. Je tiens à en parler aujourd'hui parce que l'initiative est mentionnée dans
le mémoire, en fait, dans le projet de stratégie de développement durable, il est référé en exemple,
et c'est une initiative qui émerge, en fait, de la Stratégie gouvernementale
de développement durable 2015-2020.
Donc, lorsque je parlais, tantôt, de l'impact de cette stratégie-là, il y a un
impact, bien entendu, sur les ministères et organismes, mais il y a un effet
levier aussi sur la société civile, il y a des mesures qui amènent à des
avancées au niveau de la société civile. Cette mesure-là, du Fonds Écoleader,
elle est importante parce qu'elle a joué un
rôle clé pour aider les entreprises québécoises à intégrer des pratiques
écoresponsables dans les dernières années.
Le défi d'un entrepreneur qui veut intégrer le
développement durable aujourd'hui... Puis les entrepreneurs qui veulent le
faire, il y en a de plus en plus. Les entrepreneurs vivent dans le même monde
que nous, voient la crise climatique, la
crise de la biodiversité, on parle de transition verte. On parle de
10 ans, en fait, on parle que les 10 prochaines années vont
être importantes, en fait, pour faire la transition. On veut... les
entrepreneurs le reçoivent, ce message-là, et le niveau de sensibilisation, il
augmente. En parallèle, on voit que l'étau se resserre autour des entrepreneurs
aussi. L'investissement responsable est en croissance à chaque année. On a des
grands donneurs d'ordres qui ont développé des
politiques d'approvisionnement responsable. On a également des... que ce soient
des employés, en fait, la main-d'oeuvre, la main-d'oeuvre qui arrive, on
a une pénurie de main-d'oeuvre, et donc on a des jeunes employés qui arrivent
sur le marché du travail, qui veulent
partager des valeurs avec leur employeur, puis des pressions de la clientèle.
Un étau qui se resserre.
Pourtant, le tissu entrepreneurial, au Québec,
est composé à 88 % d'entreprises de moins de 20 employés, et donc des petites entreprises. Et donc là on a
affaire à des chefs d'orchestre qui doivent maîtriser un paquet d'enjeux, et là
on leur demande de faire du développement durable. Il y a la conscience,
mais comment on les amène à se mettre en action? Lorsqu'on leur pose la
question, souvent, le... la réponse qu'on nous dit... Il y a plusieurs sondages
qui nous amènent... tu sais, qui nous ont amené
aussi cette information-là, les entrepreneurs nous disent qu'ils manquent de
temps, manquent de ressources puis
manquent d'expertise pour se mettre en action. Donc, il faut leur donner un
coup de main.
La stratégie du Fonds Écoleader, en fait, c'est
trois grands chantiers qu'on a mis en place pour aider les entrepreneurs à se mettre en action. Le premier,
c'est une plateforme Web qui répertorie les programmes de financement, les...
l'expertise qu'il y a au Québec, près de... Il y a plus de 450 experts qui
peuvent aider les entreprises à se mettre en action, des exemples d'entreprises
qui sont... qui ont implanté, en fait, des pratiques écoresponsables, des
fiches techniques pour vulgariser les technologies propres.
Mais, on le sait, cette plateforme-là, ce n'est
pas suffisant, tu sais, pour créer le passage à l'action. Tu sais, peu importe
l'outil, c'est un moyen plus passif. Donc, pour s'assurer vraiment que ces
outils-là soient utilisés puis qu'il y ait de l'impact, le deuxième grand
chantier qu'on a mis en place, c'est la création d'un réseau d'agents qui est présent dans les 18... dans les 17 régions du
Québec. On en a un aux Îles-de-la-Madeleine — c'est
un peu là, la déformation. Donc, on a 18 agents et un peu plus sur le territoire, on en a
deux, dans certaines régions, qui agissent comme développeurs d'affaires et qui aident les entrepreneurs à
identifier les bonnes sources de... les sources de financement, les experts qui
peuvent les aider à se mettre en action.
La troisième grande
stratégie, c'est un programme de financement qui permet aux entreprises
d'embaucher un expert pour avoir un diagnostic, construire un plan d'action,
avoir de l'accompagnement pour implanter des pratiques écoresponsables ou se
préparer, en fait, à avoir une étude préalable à l'intégration de technologies
propres. Parce que, du jour au lendemain, je peux, comme propriétaire
d'entreprise, dire : Bien, je veux m'installer un mur solaire. Est-ce que
c'est la bonne technologie, le bon contexte? Ça coûte combien? C'est quoi, la
période de retour sur investissement? C'est
ce que les entreprises... c'est ce que les entrepreneurs se posent comme
question. Et, sans étude, on est devant de l'inertie.
Donc,
on a... on s'est lancé, dans les dernières années, vraiment pour aider les
entrepreneurs. Et cette stratégie-là, donc, nous a permis de financer plus de
800 projets, dans les cinq dernières années, 1 205 entreprises
soutenues, mais plus de 50 000,
en fait, qui ont été rejointes, là, d'une part ou d'autres, par le réseau
d'agents, les stratégies de communication qu'on avait, puis plus de
20 000 qu'on a enregistrées dans un CRM, donc qu'on a accompagnées, avec qui on a une relation d'affaires. Donc, il y
a une volonté de la part... puis on le sent que le timing est bon. Donc, que
cette orientation-là, de faire du Québec un pôle en économie verte, soit
présente dans la stratégie, on trouve ça judicieux, et je crois qu'au
niveau du timing c'est un bon moment pour renchérir sur ce message-là.
Les retombées. On a
des retombées intéressantes, là. Je vous en parlais tout à l'heure, là, il y a
des retombées à différents égards d'une
mesure comme ça, puis ça démontre un peu l'importance de l'économie verte au
Québec. Au niveau des entreprises, on constate que les entreprises qui
travaillent à intégrer des pratiques écoresponsables vont chercher des gains en économies de coûts, beaucoup
vont développer souvent des nouvelles opportunités de marché. Donc,
développement durable, ça peut être payant, c'est intéressant, ça peut être
rentable pour les entreprises.
Pour l'économie du
Québec, bien, on a des entreprises qui évaluent l'opportunité d'intégrer des
technologies propres, qui prévoient des projets d'investissements dans les
prochaines années puis qui ont investi aussi... Parce que, lorsqu'on offre une aide financière avec le Fonds Écoleader, on
paie un expert, mais les entreprises ont, après ça, des dépenses en
équipements, et d'autres honoraires, et autres, donc on est des leviers
financiers. Puis surtout on a aussi
contribué pour près de 30 millions à l'écosystème d'expertise en
développement durable au Québec, donc des gens qui travaillent en
développement durable, qui aident des entreprises, donc, dans les dernières
années.
• (15 heures) •
Des retombées environnementales
aussi qui sont intéressantes. On commence... On a moins... un peu moins... On est rendus à 350 projets de terminés sur
les 800, mais déjà on voit... on sait qu'on a des retombées vraiment, vraiment intéressantes sur le plan environnemental, là.
Vous les avez, là, qui sont projetés, là, qui sont là, donc qui sont, donc, un levier
vraiment important de ce côté-là.
Je voulais parler du
Fonds Écoleader aujourd'hui parce qu'il est là, on veut faire du pôle... on
veut faire, en fait, du Québec un pôle en
économie verte, c'est important de lancer le message. On arrive, nous, à une
période de transition où la première phase du Fonds Écoleader est
terminée, on veut se lancer... on se lance... on veut se lancer dans une
deuxième phase, on est en train de se préparer à se lancer dans une deuxième
phase. Donc, c'est important de répéter le
message, là, vraiment, que le Fonds Écoleader est une mesure extrêmement
importante pour faire du Québec un pôle en économie verte.
Au
niveau des... Il me reste 30 secondes, là. Plus largement, au niveau,
peut-être, du... si je veux peut-être rajouter quelques messages au
niveau de la stratégie gouvernementale, elle est ambitieuse parce qu'elle
couvre très large. Si on veut la rendre plus
efficiente et efficace, je pense que ce qui manque et qui va être important de
faire dans les prochaines années :
du financement. On n'a jamais financé aucune mesure, aucune stratégie en
développement durable au Québec. D'avoir du financement... Parce qu'il y
a des mesures... On comprend qu'il y a certaines mesures qui sont financées par
des plans de certains ministères, et autres. Il y a des mesures qui sont... qui
tombent entre deux craques. D'avoir du financement pour mettre en place cette
stratégie-là, ce serait important. D'avoir les ressources nécessaires, des
objectifs plus clairs, cibles et indicateurs, moi, je pense que c'est les
ingrédients, si je fais le tour général, qu'il serait important d'ajouter à la
stratégie pour s'assurer qu'elle atteigne ses objectifs.
Le Président (M.
Jacques) : Merci beaucoup pour votre présentation. J'invite
maintenant... pour débuter la période de questions avec le député de Masson.
Une voix :
...
Le Président (M.
Jacques) : Oh! le député de Côte-du-Sud.
M. Rivest : Oui,
bonjour. Merci beaucoup. Je me réjouis de vous rencontrer parce que, dans mon
ancienne vie... je fais partie d'un
organisme d'économie sociale qui a profité du Fonds Écoleader, qui a mis sur
pied un plan d'action sur le
développement durable et qui a réalisé une stratégie complète de mise sur pied,
là, de nouvelles pratiques écoresponsables.
J'aurais
1 000 choses à vous partager, peut-être tout à l'heure, pour parler
vraiment de cette stratégie-là puis du Fonds Écoleader, mais j'aimerais ça,
peut-être, justement, au bénéfice de tout le monde ici, de la commission, d'avoir peut-être un éventail du type... Parce que
vous parlez beaucoup de PME, puis c'est parfait. On est un organisme d'économie sociale. On parle aussi peut-être des
autochtones. Pouvez-vous nous faire une catégorisation un peu du type d'entreprises
qui sont sollicitées pour faire des projets à l'intérieur des actifs puis du
Fonds Écoleader?
M. Girard
(Nicolas) : Je vais y aller de mémoire, là, mais, dans les grandes
lignes, il y a des éléments importants dans ce que vous mentionnez. La
clientèle première qui vient vers nous, vers le Fonds Écoleader, à 33 %,
là, c'est des entreprises du secteur de la fabrication dans le secteur
manufacturier. On s'entend que l'entreprise manufacturière, qui ne fait pas de
développement... en tout cas, qui ne s'intéresse pas aux enjeux de
développement durable aujourd'hui, dans 10 ans, ça va être... ça risque
d'être plus difficile.
Dans le
secteur manufacturier, pratiques écoresponsables égalent souvent amélioration
des processus, amélioration de l'efficacité énergétique. Qu'est-ce qu'on
fait, c'est réduire les extrants de production, qu'est-ce qu'on fait avec les
extrants de production, en fait, de... Donc, il y a des gains importants.
Au niveau de l'économie sociale — parce
qu'on cherche à créer de l'inclusivité, et on a eu ce souci-là dès le départ au niveau du Fonds Écoleader — on
estime qu'il y a 11 % des entreprises qui viennent vers le Fonds Écoleader
qui sont des entreprises d'économie sociale.
Ça, on en est bien fiers. Donc, il y a eu une ouverture puis un souci d'avoir
des critères, tu sais, qui permettaient, dès le départ, d'accueillir des
entreprises d'économie sociale.
Au niveau des communautés autochtones, c'est un
défi, puis ça a toujours été un défi parce que l'enjeu, c'est d'aller chercher les entreprises. Et on travaille
vraiment à adapter les critères. On a des projets dans le Nord-du-Québec, en communautés autochtones. Je n'ai pas le pourcentage. C'est sûr
qu'il est modeste, mais il y a toujours un défi d'adapter les critères des programmes gouvernementaux pour
accueillir, en fait, des projets des communautés autochtones, mais...
Puis le tissu entrepreneurial est différent, et tout, mais on y travaille. On a
déjà fait des modifications, puis même dans la relance, c'est des choses qu'on
aimerait bien... bien améliorer aussi.
M. Rivest : ...vous avez aussi
mentionné l'idée d'être un chef d'orchestre à l'intérieur des projets que vous faites. Donc, ça me réjouit de savoir qu'on fait
face à la musique ensemble en se disant que... que lorsqu'on... lorsqu'on met
sur pied cette stratégie-là... puis l'arrêt, comme entreprise, d'être financée
pour mettre sur pied des nouvelles stratégies de développement durable,
il y a certains freins qui se mettent... qui peuvent mettre quelques grains de
sable dans l'engrenage. Est-ce que vous
pouvez me parler un petit peu de votre expérience, justement, avec les
entreprises, de voir quels freins il peut y avoir à l'intérieur, soit de
la promotion, finalement, de la stratégie ou du plan de développement durable, des diagnostics qui sont faits de
rassembler les conseils d'administration, de rassembler l'ensemble de l'équipe
avec cette vision-là? Quels sont les principaux freins qu'on peut retrouver à
la mise sur pied de... d'une stratégie?
M. Girard
(Nicolas) : Le principaux frein, c'est... Le principal frein,
c'est le manque... le manque d'information. On s'entend que les entreprises ont... l'enjeu de la compétitivité est
extrêmement important aussi. Ça reste un élément qui est majeur, donc. Puis, lorsqu'on dit... Notamment, par exemple, on parlait des
technologies propres tout à l'heure. Il
y a une volonté de vouloir bouger. Mais c'est quoi, le retour sur
investissement? Est-ce que ça vaut la peine, et tout? Donc, il y a des
enjeux... il y a des enjeux... Les enjeux financiers sont toujours importants.
Il y a la question des débouchés. Même si, au
niveau des débouchés, on sait que la clientèle demande de plus en plus, en
fait, des produits écoresponsables, par rapport à ça, de s'assurer d'avoir des
débouchés, je pense que c'est important. D'ailleurs, au niveau de la stratégie
gouvernementale, on parle des marchés, de l'accès aux marchés publics. C'est un élément qui est majeur. Majeur,
majeur, majeur. Nous, on en entend parler, ça fait depuis des années. Ça
prend des incitatifs pour les entreprises qui vont implanter des pratiques
écoresponsables. Puis je pense que l'État a un... le gouvernement du Québec a
un devoir d'exemplarité. Les cibles qu'on a atteintes jusqu'à maintenant ne
sont pas suffisantes. Puis là je pense qu'elles sont de 15 % en ce moment
dans la stratégie. Donc, c'est sûr qu'idéalement, pour aider les entreprises qui
veulent, tu sais... je pense, qui font... qui implantent parce que c'est
écoresponsable, d'augmenter cette cible-là, de jouer un rôle... que l'État joue
un rôle en matière d'exemplarité au niveau des marchés publics, ça serait
important.
Mais, au niveau des défis, c'est toujours...
sinon, c'est toujours d'avoir... d'avoir les ressources nécessaires,
l'engagement de la haute direction qui est là, le profil qu'on a. C'est sûr
que, quand on a des projets en PME, c'est assez rare qu'on ne voie pas la haute
direction qui est impliquée dès le départ. Mais c'est sûr que le plan de match
qui est déposé, s'il n'est pas rentable, ça devient difficile. Puis comment il
peut être rentable? Est-ce que c'est en matière de positionnement pour
l'entreprise, d'amélioration de son offre de services ou encore réduction de
coûts? Mais c'est vraiment... La question économique est... elle reste... elle
demeure importante quand même.
M. Rivest : Merci. Peut-être, pour
terminer, pouvez-vous nous dire qu'est-ce que vous pensez... Tu sais, on parle
du Fonds Écoleader, mais, dans la stratégie actuellement, qui traite
particulièrement de mise sur pied de cette stratégie-là,
il y a des objectifs à l'intérieur des propres ministères. Mais, au niveau des
PME, pour terminer, pouvez-vous me
dire si vous voyez d'autres leviers, qu'ils soient techniques ou financiers,
que le gouvernement du Québec pourrait mettre sur pied pour améliorer
l'efficacité des PME?
M. Girard (Nicolas) : Il y a
beaucoup... Comme je le mentionnais tout à l'heure, il y a un écosystème pour
venir en aide aux entreprises au Québec. Le Fonds... je vous parlais, avec le
Fonds Écoleader, d'un répertoire de programmes de financement, répertoire
d'experts. Il y a beaucoup d'expertise, il y a de l'aide financière. Ce que le
Fonds Écoleader a amené dans l'écosystème, ce n'est pas un... je n'aime pas
utiliser le mot «guichet unique», mais, tu sais, on a travaillé ce projet-là,
depuis le départ, en partenariat. On est 18 partenaires. On a Écotech
Québec qui travaille avec nous pour nous aider à vulgariser les technologies
propres, on a un partenaire qui nous aide à travailler avec le réseau régional,
le Centre québécois de développement durable puis 18 partenaires
régionaux. Et ce qu'on... On a développé une solution qui amène les entreprises
dans la boucle à contribuer à l'économie verte. Il y a 77 % des entreprises qui sont venues vers nous, vers le Fonds
Écoleader, qui implantaient des pratiques écoresponsables pour la première fois
lorsqu'ils sont venus au programme de financement.
Ça fait que ce qui
manque dans l'écosystème, c'est ça, c'est cette... c'est cette rampe d'accès,
parce qu'après ça du financement, il y en a
pour... tu sais, pour des projets d'investissement en technologies propres, et
autres. Tu sais, comme, par exemple, chez, anciennement, Transition
énergétique Québec, maintenant... je pense au ministère de l'Environnement, il
y a des programmes pour investir dans les... en investissement. Investissement
Québec, avec Compétivert, offre du
financement aussi. Mais il faut amener les entreprises à se rendre à ces
programmes d'investissements là. C'est pour ça qu'on voulait vraiment
rappeler l'importance du Fonds Écoleader aujourd'hui.
M. Rivest : Merci
à tous les deux.
Le Président (M. Jacques) :
Merci. Je cède maintenant la parole au député de Masson.
M. Lemay : Merci,
M. le Président. Merci d'être avec nous aujourd'hui. Alors, vous avez mentionné
tout à l'heure, là, l'importance du
financement, d'avoir les cibles, les indicateurs. Puis, à la 9 de votre
mémoire, justement, dans le cadre de l'orientation 5, on parle des
objectifs 5.3, 5.4, là, de la SGDD, là, qui est d'«investir de façon
durable au profit des Québécois» et d'«utiliser les marchés publics comme
levier de croissance durable».
Moi, j'aimerais
savoir, là, considérant que, dans le SGDD, là, les pistes d'action envisagées,
là, c'est d'«appuyer efficacement le développement économique du Québec selon
les principes de la finance durable»... Bon, tu
sais, on mise sur trois leviers, donc l'investissement, finance durable, les
obligations vertes puis le soutien financier durable, puis on a aussi le
chantier 3, qui est justement d'établir, là, une feuille de route pour
développer le nouveau écosystème de la finance durable au Québec et la
positionner sur la scène internationale. Donc, considérant ça, moi, ma question, ça serait de savoir, avec vous, là,
si... quels seraient, selon vous, les critères, là, écoresponsables à prioriser
pour accélérer le verdissement des modèles d'affaires
dans nos PME, puis ça, bien, tu sais, tout en minimisant aussi les impacts économiques sur les activités de ces PME
là? Ça fait qu'est-ce que vous pouvez nous entretenir un peu sur ce sujet?
• (15 h 10) •
M. Girard
(Nicolas) : Sur les... excusez-moi, les indicateurs?
M. Lemay : Alors,
ça serait... Dans le fond, ça serait : Selon vous, c'est quoi, les
critères écoresponsables qu'on devrait prioriser pour accélérer le
verdissement? Mais, en même temps, on veut aussi minimiser les impacts
économiques sur les activités de nos PME.
M. Girard
(Nicolas) : Donc, l'idée, c'est de... quels critères
d'écoresponsabilité on peut... on pourrait fixer? Donc, l'idée, c'est d'intégrer les critères d'écoresponsabilité pour
obtenir du financement? Est-ce que je comprends bien votre question? Je
veux juste être sûr.
M. Lemay : Oui.
Oui, exactement. Parce que c'est ça que vous mentionnez à la page 9 de
votre mémoire. Vous dites que vous...
comment... Je vous cite : «Nous commençons à voir apparaître des notions
d'écoresponsabilité dans certains
programmes gouvernementaux», na, na, na. Ça fait que j'aimerais vous entendre
un peu sur, selon vous, ce serait quoi.
M. Girard
(Nicolas) : OK. Bien, nous, ce qu'on a vu, par exemple, avec... Puis
je pense que c'est une initiative... c'est des initiatives isolées qui
commencent à émerger, là, des différents ministères. Nous, on l'a fait, par
exemple, avec le ministère du Tourisme. Par exemple, je peux vous donner
l'exemple, en fait, là, de... donc de... avec le
ministère du Tourisme. On avait un programme d'aide à la relance de l'industrie
touristique, qui était un programme d'infrastructures qui devait...
L'idée, c'était vraiment de donner un coup de pouce à l'industrie touristique
après la COVID, post-COVID. Puis là, bien,
le ministère a décidé d'offrir une bonification de 10 % pour des projets
qui allaient intégrer, en fait, des éléments de développement durable.
Maintenant, c'est un
défi, toujours. Est-ce que... Et là comment on le fait? Est-ce qu'on le met en
écoconditionnalité ou est-ce qu'on le met en... tu sais, en écoresponsabilité,
à intégrer des critères écoresponsables dans
les programmes? Je pense que les deux outils sont très... sont différents.
L'écoresponsabilité, donc, l'idée, c'est... Et là, avec le ministère du Tourisme, on était vraiment... on était vraiment
au niveau d'une bonification, donc on y allait par la positive, donc d'offrir, en fait, un critère. Donc là, les
critères, c'est : Est-ce que, par exemple... Donc, on regardait la
performance environnementale dans un... comme ça, donc, des... donc le choix
des matériaux, quelles étaient les solutions... les solutions d'infrastructure
choisies, les choix énergétiques, et tout, donc des critères qui sont là.
Maintenant, à l'échelle
des programmes en général, donc, c'est... je pense... je pense que c'est de
voir un peu quels sont les critères. Je n'ai pas... On n'a pas de réflexion,
là, sur... tel, tel, tel critère doit absolument être dans les programmes, dans
tous les programmes, là. Ça, je n'ai pas de réponse pour ça, là.
Mme Caron
(Geneviève) : Il faut peut-être aussi juste casser le mythe comme quoi
avoir des critères d'écoresponsabilité, ça peut nuire à la rentabilité. Nous,
c'est ce qu'on observe beaucoup dans le Fonds Écoleader. C'est qu'il y a une
augmentation de la rentabilité, de la profitabilité quand on intègre des
critères de développement durable. Dans «développement durable», il y a
développement, là.
M. Lemay : Merci. Mme la députée
pourrait poursuivre sur un autre sujet.
Le Président (M.
Jacques) : Merci, monsieur...
M. Lemay : ...
Le Président (M. Jacques) : M. le
député de Masson, c'est terminé?
M. Lemay : Oui.
Le Président (M. Jacques) : Oui?
Donc, je cède la parole à Mme la députée d'Argenteuil.
Mme
Grondin : M. Girard, Mme Caron, merci. J'entends
des... J'aime beaucoup ce que je viens d'entendre... pardon, en termes
de démonstration, qu'en intégrant des critères de développement durable on
atteint certains objectifs de rentabilité. C'est de la musique à mes oreilles
parce que c'est du concret, c'est... bon.
M. Girard, merci d'avoir rappelé le chemin
parcouru du FAQDD. Je trouve ça important parce que je trouve que c'est un indicateur du cheminement qu'on a
fait comme société dans nos besoins, notamment de leviers économiques. Ça fait que je trouve ça important parce que,
quand on se rappelle... Moi, j'ai... j'ai déjà demandé de l'aide du FAQDD,
il y a très longtemps, sur la question de l'eau.
Puis je voudrais revenir un peu, parce que vous
avez mis l'accent... puis, je comprends, en 10 minutes, on ne peut pas tout couvrir, puis
je trouve ça très intéressant, toute la question du fonds de... Écoleader, là,
puis le temps qu'on a mis sur... le
temps qu'on doit mettre sur l'accompagnement. C'est un mot que je retiens
beaucoup, qui est fondamental au niveau de nos entreprises, notamment
nos petites PME.
Ma question s'en va sur l'orientation 2,
nature. Est-ce que... En fait, comment le FAQDD pourrait contribuer aux
objectifs qui sont identifiés dans l'orientation 2 en matière d'accès, de
protection à la nature et à l'eau aussi?
M. Girard (Nicolas) : Oui. Pour
l'instant, en fait, on a, nous, entamé des... Il y a des programmes qui sont
récents, là, qu'on a mis en place, qui s'inscrivent un peu dans la lutte contre
le déficit nature, en fait. On sait qu'il y a un
enjeu, hein? On protège ce qu'on connaît. Donc, un jeune qui grandit à
Montréal, qui ne sort pas de l'île de
Montréal avant 18, 20 ans, ne
développe pas nécessairement une sensibilité envers la nature et il ne
développe pas cette... en fait, ce besoin-là ou cette sensibilité-là à
vouloir protéger des écosystèmes. Donc, on a un programme qu'on a lancé l'an dernier, en collaboration avec le ministère de
l'Environnement, qui s'appelle Destination nature, qui vise à amener des
jeunes, donc — et
là on n'est pas dans les jeunes du primaire, mais secondaire, collégial et
universitaire — dans
les espaces naturels, donc, pour justement
être en contact avec la nature. On sait qu'il y a des impacts, oui, on
développe la sensibilité, mais je
pense qu'il y a plein d'études qui démontrent les bienfaits de la nature sur la
santé, autant psychologique que physique. Donc, c'est un programme qui
est très intéressant.
Aussi, on a aussi une collaboration avec le...
c'était le ministère des Forêts, maintenant c'est le ministère de
l'Environnement, atelier faunique, qui est un peu complémentaire, où là on
travaille avec la SEPAQ puis le ministère des Forêts à amener, justement, les
jeunes vers les... vers les ateliers pédagogiques de la SEPAQ, là. On donne
un... Donc, on fait le lien, puis c'est beaucoup ça qu'on fait à la FAQDD, on
met les gens qui ont l'expertise en lien. Donc, il y a de l'expertise à la SEPAQ,
puis ce qu'on veut, c'est amener les jeunes qui... donc qui veulent avoir ce
contact-là à la nature ou on veut le provoquer, ce lien, donc on les amène vers
les activités pédagogiques, vers les services qui sont déjà existants.
Mme
Grondin : Il y a déjà beaucoup de travail à faire juste à ce
niveau-là. Donc, ça serait notamment là où vous voyez la contribution la
plus efficiente en matière de nature de la part du FAQDD?
M. Girard (Nicolas) : Absolument.
Puis je pense qu'on est là. Il y a des classes nature, tu sais, il y a plein de
choses... Je pense qu'il y a des choses qui
peuvent se faire au Québec, là, qui sont... tu sais, où on pourrait être un peu
plus innovants, notamment sur l'enseignement extérieur, des choses comme ça.
Donc, c'est des thématiques, nous, qui nous intéressent.
Mais, au niveau de la protection de la nature,
on est moins dans... il y a moins d'initiatives récentes, là, qui nous amènent
à intervenir dans ces créneaux-là.
Mme Grondin : Puis, si jamais on a
plein d'idées, on peut vous approcher?
M. Girard (Nicolas) : Oui,
absolument.
Mme Grondin : Parfait. Merci
beaucoup.
M. Girard (Nicolas) : Merci.
Le Président (M. Jacques) : Merci
beaucoup. Je cède maintenant la parole à la porte-parole de l'opposition
officielle, à la députée de Notre-Dame-de-Grâce, pour son intervention.
Mme McGraw : Merci.
Le
Président (M. Jacques) : Merci.
Mme McGraw : Merci,
M. le Président. Et merci d'être avec nous aujourd'hui. Merci pour la
présentation et le mémoire. Donc, vous parlez de... Donc, dans le premier
point, les recommandations, vous parlez de consacrer plus de budgets, de
budgets des ressources humaines, nécessairement, à la pleine réalisation de la
stratégie. Quelle serait... Donc, est-ce que
vous pouvez donner plus de détails sur qu'est-ce que vous envisagez ou
qu'est-ce que vous proposez?
M. Girard (Nicolas) : En fait, on n'a pas fait d'estimations budgétaires ou autre. Par
contre, le constat qu'on a, c'est que la stratégie roule depuis... Puis,
comme je vous dis, je pense que les dernières stratégies de développement durable ont amené des résultats quand même
intéressants, mais le constat est que, souvent, il n'y a pas de financement
pour... si on ne rentre pas dans un autre
plan gouvernemental, donc, il n'y a pas de financement. Il y a des mesures qui
sont dures à mettre en place parce
qu'elles tombent entre deux plans gouvernementaux, entre la mission de deux
ministères, et autres, donc de s'assurer qu'il y a un financement pour... un premier
financement pour mettre en oeuvre la stratégie de développement durable.
Depuis deux... Ça
fait 17 ans que la Loi sur le développement durable a été mise en place,
il n'y a jamais eu de financement pour la
mettre en oeuvre. Est-ce qu'on ne pourrait pas... Est-ce qu'on ne pourrait pas,
pour la première fois, mettre un peu un peu d'argent pour s'assurer que
sa mise en application soit plus rapide, déjà?
Quand je parle des
ressources aussi, c'est bien entendu, c'est sûr que c'est... la responsabilité
de la Loi sur le développement durable, c'est une responsabilité partagée entre
les ministères et organismes, puis chacun doit être... doit être mobilisé, doit être engagé. On a quand même un... On travaille
quand même étroitement avec des ministères. On voit, la pénurie de main-d'oeuvre touche les... touche les
ministères, et autres. Je sais que le Bureau de coordination de
développement durable travaille, qui est à l'intérieur du ministère de
l'Environnement. Ce n'est pas une très grosse équipe de travail non plus. Donc,
il y a quand même... il y a quand même des ressources limitées pour la mise en
oeuvre de cette... de cette politique-là. Donc...
• (15 h 20) •
Mme McGraw : Au
niveau des ressources humaines, donc là vous avez parlé du groupe qui travaille
au sein du ministère de l'Environnement sur le développement... Pour la
stratégie, coordination, etc., c'est le ministère de l'Environnement. On a eu des groupes qui ont parlé un peu de... plus de
collaboration à un haut niveau interministériel, parce qu'on sait très
bien que le développement durable, ce n'est pas juste l'environnement.
M. Girard
(Nicolas) : Absolument.
Mme McGraw : Donc, est-ce que vous avez des recommandations ou des observations à
partager par rapport à la gouvernance?
M. Girard
(Nicolas) : Oui. C'est sûr que, par rapport à la gouvernance, plus on
est capables de remonter le développement durable dans les hautes instances,
plus on va avoir des résultats avec la stratégie, bien entendu. Moi, c'est
assurément une recommandation, là, que je vois pertinente puis complémentaire
avec celle que je parlais au niveau des
ressources, parce que, malgré tout, ça prend... ça prend une équipe de base qui
la pousse, la stratégie, qui la mesure,
qui... Donc, ces deux... ces deux recommandations-là peuvent s'emboîter l'une
dans l'autre, là, assez facilement.
Mme McGraw : Au
niveau du Fonds Écoleader, donc, vous avez parlé d'un véritable électrochoc,
c'est le mot qu'on utilise dans le mémoire,
quand il y a eu une mise sur pause et la fin de l'enveloppe du programme. Donc,
ça, je n'étais pas au courant. Donc, est-ce que c'est le cas
présentement, qu'il n'y a plus le financement? Et vous étiez le coordonnateur
national, c'est-à-dire votre fonds a été le coordonnateur. Est-ce que vous
voulez juste nous parler un peu plus de comment ça s'est passé, quand est-ce
que ça s'est passé? Parce que, là, vous recommandez... n° 2,
c'est pérenniser le Fonds Écoleader et que c'est un incontournable.
M. Girard
(Nicolas) : Oui. En fait, le Fonds Écoleader, c'est une mesure qui a
été lancée six mois avant la COVID. Donc, dans les deux premières années, là,
on a roulé... on a roulé un peu en montagnes russes avec des... quand il y
avait des mesures de confinement, il y avait des ralentissements, lorsqu'on on
se déconfinait, on recevait des demandes,
mais il y avait des entreprises, quand même, qui étaient là, qui étaient au
rendez-vous. On avait à peu près 200 demandes par année pendant les
deux premières années, vraiment, d'opération du Fonds Écoleader. Lorsqu'on a vu
un peu les mesures sanitaires puis la crise de la COVID qui prenaient... qui
s'estompaient, là on a eu un véritable raz-de-marée. Entre septembre 2021 puis
mai 2022, on vous a mis la courbe, là, du nombre de dépôts de projets, là,
écoutez, ça a été exponentiel. On a reçu 700 demandes en six mois, alors
qu'on en avait reçu 400 en deux ans.
Les entreprises sont
prêtes à passer à l'action. Il y en a de plus en plus, des entreprises qui
veulent passer à l'action. Là, on n'est juste plus capables de les aider, et
donc c'est pour ça qu'on voulait quand même le mentionner aujourd'hui. Je pense que c'est important. On est
à une période de renouvellement. On n'est pas en train de dire que ça ne sera
pas renouvelé, mais la phase 1 du Fonds Écoleader est presque... se
termine techniquement au 31 mars prochain.
Mme McGraw : Parfait... bien, pas parfait, mais je vous
remercie d'avoir clarifié. Mais votre fonds, est-ce que c'est pérennisé?
M. Girard
(Nicolas) : Non. En fait, le FAQDD... le FAQDD a été mis en place par
le gouvernement du Québec en 2000. Donc, au départ, c'était un fonds de
45 millions, mais c'était un fonds de subventions, pas un fonds de
dotation. Donc, il y a un plan... il y a un plan stratégique qui a été mis en
place dans les premières années, puis, avec
le temps, on a développé davantage un modèle où on gère des... on donne un coup
de main, en fait, en gestion de programme des partenaires
gouvernementaux, publics, maintenant un peu privés aussi. Donc, l'idée, c'est
l'espèce d'aura de neutralité qu'il y avait en... qui est nécessaire en gestion
de programme, gestion de fonds publics qu'on a... qu'on a développée, qui nous
permet de... Donc, c'est du financement par mandat. Il n'y a pas de financement
de base, il n'y a pas de finance statutaire non plus, là, rien de ce type-là.
Oui, c'est par mandat.
Mme
McGraw : Mais vous recommandez de pérenniser le Fonds
Écoleader, mais pas nécessairement votre fonds...
M. Girard (Nicolas) : Ah! puis ce
n'est pas...
Mme McGraw : ...pour avoir plus
d'indépendance ou de...
M. Girard (Nicolas) : Oui, bien,
l'idée, c'était de pérenniser le Fonds Écoleader, donc de s'assurer qu'au moins
on ait une stabilité de cinq ans pour le Fonds Écoleader. Nous, c'est ce qu'on
demande, là, pour clarifier la demande, là.
On a besoin d'avoir un cinq ans. C'est la décennie où... Tu sais, on a
10 ans pour... Il faut donner un coup. Il faut que la transition se
passe. Il faut que les... Les entreprises sont là. On ne peut pas... On ne peut
pas juste dire : OK, on arrête, on fait
d'autres choses à côté. La structure est en place, il y a des partenaires, il y
a 20 partenaires autour. On a développé des tentacules partout en
région parce que les agents ont développé des comités de pilotage en région où
ils sont connectés sur toutes les organisations de développement économique
local. Donc, tout est là, toute la structure est là, donc il faut en profiter,
là.
Mme
McGraw : Avant que je passe à mon collègue, est-ce qu'il y
a... parce que j'ai encore du temps, mais je n'ai pas besoin de tout utiliser le temps. Mais est-ce
que, selon vous, s'il y aurait... évidemment, il y a cinq recommandations, mais s'il y aurait... si vous laissez... vous nous
laissez avec un mot, ou une recommandation, ou quelque chose qui... en tout
cas, que vous pensez qui est vraiment prioritaire, vous avez un peu de temps,
là, donc...
M. Girard (Nicolas) : J'ai parlé
beaucoup du Fonds Écoleader. Moi, je reviendrais sur la question du
financement, financement, puis objectifs, et cibles, et indicateurs plus
clairs. Donc, ça, je pense que c'est important, où est-ce qu'on veut aller.
Mme McGraw : Merci.
M. Girard (Nicolas) : Merci.
Le Président (M. Jacques) : Merci,
Mme la députée. Je cède maintenant la parole au député de la deuxième
opposition. Député de Taschereau.
M. Grandmont : Oui. Merci beaucoup,
M. le Président. J'ai combien de temps?
Le Président (M. Jacques) : Quatre
minutes, et un peu plus.
M.
Grandmont : Parfait. Merci. M. Girard, Mme Caron,
merci beaucoup d'être là aujourd'hui pour cet important exercice. Je connais
bien, moi aussi, le Fonds Écoleader, à l'instar de certains de mes collègues.
Je comprends aussi que vous avez une vision large sur le développement
durable, l'environnement en général aussi. C'est toujours quelque chose que
j'ai considéré une force chez vous. Ayant cette vision très, très large, est-ce
que vous... à la lecture de la stratégie qui est proposée par le gouvernement,
est-ce que vous voyez... est-ce qu'il y a des incohérences qui vous sautent aux
yeux? Est-ce que vous en avez une, ou deux, ou trois, là, qui vous sautent
vraiment aux yeux, là?
M. Girard
(Nicolas) : Des incohérences qui me sautent aux yeux, pas
nécessairement. Je trouve qu'on embrasse large. Les objectifs, les
cibles sont... J'ai vu ce que ça a donné dans le passé puis je vois qu'il y a
une amélioration continue dans chacun des ministères. Tu sais, il y a... Au
niveau des incohérences, non, pas nécessairement.
Il faut dire, par contre, qu'on a eu
10 jours pour se préparer pour la consultation. Donc, c'est sûr qu'on a...
Est-ce que c'est un travail exhaustif? Je ne
peux pas dire que c'est un travail exhaustif non plus de la politique. On a
ciblé en fonction un peu de notre prisme à nous, là, puis des secteurs dans
lesquels on est intervenus dans les dernières années, là, oui.
M. Grandmont : Je vais peut-être
aller plus précis sur un sujet que je connais un petit peu plus là, mais vous
parlez, dans votre recommandation n° 3, là, de miser
sur le contact avec la nature. Vous estimez qu'il y a un déficit nature important dans la population québécoise,
chez les jeunes, chez les moins jeunes. Vous demandez à ce qu'il y ait des actions concrètes pour lutter contre le
déficit nature. Vous en avez nommé, tantôt, quelques-uns qui nous amènent
beaucoup à déplacer les gens vers là où il y a cette présence de la nature,
finalement. Aussi, vous avez parlé aussi, là, de possibilité de donner des
cours à l'extérieur.
En
même temps, ce qu'on remarque sur le terrain, c'est que les espaces naturels
sont un peu pris d'assaut de toutes sortes de manières. Est-ce que vous ne
pensez pas que, par exemple, l'étalement urbain, la multiplication des infrastructures autoroutières pourrait être une
incohérence, finalement, dans le cadre d'une stratégie gouvernementale qui
ferait la place au contact nature?
M. Girard
(Nicolas) : Est-ce qu'il y a une incohérence là? Écoutez, bonne
question. C'est sûr que, pour ce qui est des... dans les grands centres,
l'enjeu, la proximité des espaces naturels est importante. Puis je pense qu'on
doit... on doit préserver, en fait... on doit préserver des... pas des Îlots de
chaleur, là, mais on doit préserver des îlots boisés en secteur urbain. C'est
extrêmement important. On parle d'enseignement extérieur, ça ne nécessite pas
nécessairement d'amener les jeunes dans la nature aussi. Des fois, quand il y a
des boisés tout proches, c'est possible de le faire sans nécessairement avoir
trop de transport.
Mais la question de
garder nos villes, de garder des espaces verts en milieu urbain, effectivement,
de lutter contre l'étalement urbain, ça, on
s'entend que, comme organisation de travail en développement durable depuis 20
ans, on comprend très bien les enjeux
liés à l'étalement urbain, puis c'est sûr que c'est une préoccupation, mais je
n'ai pas regardé la stratégie sous cet angle-là.
M.
Grandmont : Parfait. Excellent. Vous avez parlé tantôt, puis j'étais
bien content de la question de ma collègue tantôt sur qu'est-ce que ça
prendrait, dans le fond, pour améliorer au niveau de la gouvernance. Vous avez
nommé... j'étais content que vous nommiez, en fait, là, les mécanismes de
suivi, tu sais, d'avoir un comité de suivi, par
exemple. En tout cas, j'aimerais ça que vous élaboriez un petit peu là-dessus.
Vous avez parlé d'objectifs, d'indicateurs. Peut-être juste élaborer sur les bonnes pratiques de gouvernance pour
être sûr que la stratégie, dans le fond, là, on puisse la suivre dans le
temps puis qu'on soit sûrs qu'on atteigne les objectifs qu'on se fixe aussi.
• (15 h 30) •
M. Girard
(Nicolas) : Bien, moi, je vais y aller de façon très simple, je pense
que la Loi sur le développement durable prévoit des mécanismes vraiment
intéressants. Il y a une commissaire au développement durable, ce n'est pas
rien, ce n'est pas toutes les stratégies... pas toutes les lois au Québec qu'il
y a un commissaire... tu sais, qui sont
suivies par un commissaire. Donc, il y a un commissaire qui suit à chaque
année. Les ministères sont... doivent faire des plans d'action aux cinq
ans. Maintenant, la commissaire a besoin d'avoir une structure pour suivre
l'état d'avancement de la stratégie. Puis ça prend des objectifs, ça prend des
cibles puis ça prend des indicateurs, ce qui manque un peu dans la stratégie en
ce moment, mais je pense que la structure de base est là pour faire le suivi.
Maintenant, c'est sûr
que, si on ramène puis qu'il y a une structure de gouvernance qui fait en sorte
que cet enjeu-là, de développement durable, est pris en considération par un
comité ministériel... Puis là on sait qu'on a quand même un ministre de
l'Environnement, tu sais, qui en mène... qui en mène quand même beaucoup plus
large qu'historiquement, quand même, donc. Mais d'avoir des ministères-phares
autour de la table, bien, ça peut assurer, justement, l'atterrissage, en fait,
des principes de développement durable dans l'ensemble des ministères puis dans
le déploiement des politiques puis des... puis des programmes, oui.
M.
Grandmont : Merci. Peut-être une petite dernière, si je peux me le
permettre. Oui? Il y a beaucoup de groupes qui nous ont parlé de mesures
d'écofiscalité, d'écoconditionnalité. Peut-être juste vous entendre là-dessus.
C'est revenu vraiment, vraiment souvent. Qu'est-ce que vous pensez, là, de ces
principes qui pourraient, selon ces groupes-là,
être mis en place pour s'assurer, dans le fond, que, bien, ce qui est autorisé
par le gouvernement ou encore les mesures qui sont mises en place soient
toujours un peu forcées d'être assujetties, finalement, au principe du
développement durable?
M. Girard
(Nicolas) : Oui. Ça fait plusieurs années qu'on parle
d'écoconditionnalité. On était loin il y a 20 ans.
On commence à... je pense que le... on commence à être dans... On est dans une
période qui... où je pense qu'on peut commencer à en parler davantage.
L'écoconditionnalité est quand même, je pense... En fait, c'est deux leviers
importants, c'est deux leviers extrêmement importants. Je pense que la société
civile est de plus en plus prête, donc il suffit de voir, mais il faut cibler
quand même des mesures... Il y a des... puis là je n'ai pas des exemples... pas
les exemples en tête, mais, si on met de
l'écoconditionnalité dans tous les programmes, peut-être que ça peut poser des
enjeux. Mais assurément que ça peut être utilisé davantage. Puis d'avoir
des cibles, en fait, à cet égard, ce serait intéressant dans la politique.
Pour
l'écoresponsabilité, bien, on est par la... moi, je suis un petit peu, là,
l'exemple que j'avais tout à l'heure, on est par la positive. Ça, bien,
je pense que c'est intéressant, puis ça peut se multiplier. Maintenant,
effectivement, je pense qu'on est mûrs pour faire un petit tour de roue, un
autre tour de roue de ce côté-là.
M.
Grandmont : Puis est-ce qu'il y en a un des deux qui serait, disons, à
mettre en place plus facilement, plus rapidement, selon vous?
M. Girard
(Nicolas) : L'écoresponsabilité est plus facile à mettre en place.
L'écoconditionnalité est plus... est plus contraignant, est plus... va amener
plus d'impacts aussi à court et moyen termes, assurément.
M.
Grandmont : Merci beaucoup.
Le Président (M.
Jacques) : Merci beaucoup, M. le député. Merci pour votre contribution
aux travaux de la commission.
Compte tenu de l'heure, la commission ajourne
ses travaux à mardi le 7 février, à 9 h 45. Merci.
(Fin de la séance à 15 h 33)