Journal des débats (Hansard) of the Committee on Transportation and the Environment
Version préliminaire
43rd Legislature, 2nd Session
(début : September 30, 2025)
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Tuesday, December 2, 2025
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Vol. 48 N° 4
Consultations particulières et auditions publiques sur le document intitulé : Consultation sur la cible de réduction des émissions de gaz à effet de serre du Québec
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10 h (version non révisée)
(Dix heures vingt-huit minutes)
La Présidente (Mme Nichols) : Alors,
bonjour à tous. Ayant constaté le quorum, je déclare la séance de la Commission
des transports et de l'environnement ouverte. Je vous souhaite bon matin.
La commission est réunie afin de
poursuivre les consultations particulières et les auditions publiques sur le
document intitulé Consultation sur la cible de réduction des émissions de
gaz à effet de serre du Québec.
Mme la secrétaire, y a-t-il des
remplacements?
La Secrétaire : Oui, Mme la
Présidente. Mme Roy (Verchères) est remplacée par Mme Grondin
(Argenteuil); M. Derraji (Nelligan), par Mme McGraw
(Notre-Dame-de-Grâce); et M. St-Pierre Plamondon (Camille-Laurin), par M. Arseneau
(Îles-de-la-Madeleine).
La Présidente (Mme Nichols) : Très
bien, merci. Alors, nous entendrons cet avant-midi les organismes suivants,
soit Vivre en ville et Mobilité électrique Canada, conjointement avec
Propulsion Québec.
Je souhaite maintenant la bienvenue au représentant
de Vivre en ville. Je vous rappelle... bien, je sais que vous avez l'habitude,
mais je vous le rappelle quand même... que vous disposez de 10 minutes pour
votre exposé, après quoi, nous allons procéder à la période d'échange avec les
membres de la commission. Je vous invite...
La Présidente (Mme Nichols) : ...donc,
à vous présenter et à commencer votre exposé.
M. Savard (Christian) : Bonjour,
mon nom est Christian Savard, directeur général de Vivre en ville. Je suis
accompagné de Francis Garnier, conseiller affaires publiques chez nous. Merci
de l'invitation de la commission. Je vais commencer avec une remarque toute
personnelle. J'ai annoncé qu'au début 2026, je quittais mon poste de Vivre en
ville, donc ça sera ma dernière commission parlementaire à ce titre. Et ce qui
est... ce qui est un peu... pas anecdotique, mais quand même un bon coup du
sort, c'est que ma toute première commission parlementaire, c'était en 2009 sur
la cible 2020 du gouvernement du Québec sur les changements climatiques. Donc,
je dois admettre que j'ai une certaine émotion par rapport au décorum de la
chose. Donc, encore merci de l'invitation.
Pour nous, le présent exercice repose
beaucoup sur la confiance que les parties prenantes, les partenaires du Québec,
peuvent avoir en notre gouvernance et en notre leadership climatique. Pour
nous, c'est vraiment le moment où ce qu'il faut réitérer ce leadership-là et
s'assurer de prendre les bonnes décisions pour l'avenir du grand défi que
représente les changements climatiques, mais également l'avenir pour la qualité
de vie des Québécois et notre économie. Donc, d'entrée de jeu, on va par...
j'attaque la question du financement, qui est probablement une des plus
épineuses dernièrement sur la question des changements climatiques. Pour
atteindre nos cibles à court et moyen long terme, il nous apparaît évident que
l'idée de prendre le 1.8 milliard de surplus du FECC pour le mettre au Fonds
des générations n'est pas une décision avisée. Selon nous, justement, on veut y
arriver. On a peur de ne pas y arriver. Il faut réinvestir cet argent-là, et à
mentionner qu'on n'est pas obligé de le réinvestir, là, cette année. On peut
avoir un calendrier de réinvestissement sur plusieurs années pour que, finalement,
on puisse... que ça contribue à aider à nos... aux changements... à la lutte
contre les changements climatiques, mais également établir la confiance avec
nos partenaires et la population. On a dit aux gens qu'il y avait un marché du
carbone et que l'argent du marché du carbone était pour servir à la lutte
contre les changements climatiques, diminuer les gestes et s'adapter. On n'a
jamais dit que c'était pour être mis sur la dette. Donc, selon nous, pour
maintenir la confiance dans ce marché du carbone-là, il faut s'assurer de
réinvestir cet argent-là dans la lutte contre les changements climatiques, donc
ne pas transférer au Fonds des générations.
• (10 h 30) •
D'ailleurs, pour la suite des choses, s'il
y a des surplus de le FECC, tant et aussi longtemps qu'on n'ait pas... on n'a
pas atteint notre cible qu'on n'a pas adapté le Québec, il faut le réinvestir,
les changements climatiques. Et j'oserais même dire qu'il faut considérer
utiliser le Fonds des générations pour investir dans la lutte et la transition
climatique. C'est... ce Fonds des générations-là sert justement pour les
prochaines générations et le climat est un enjeu générationnel. Donc, ce n'est
pas prendre l'argent du Fonds des... du FECC pour le mettre dans le Fonds des
générations. Il faut considérer l'idée de prendre l'argent du Fonds des
générations pour le mettre dans le... dans le FECC, notamment en adaptation.
Ce qui m'amène maintenant à parler de la
cible. On se rallie à la recommandation du Comité-conseil sur les changements climatiques,
qui propose une cible de 37,5 à 45 % à l'horizon 2030. Ce qui veut dire
qu'en quelque sorte, on se rallie à l'idée de maintenir la cible à 37,5 %,
même si on aurait aimé que ce soit 45 %. Donc, le gouvernement doit
maintenir cette cible-là à l'horizon 2030, donc de 37,5 %. C'est une
manière aussi de demeurer cohérent, prévisible et constant. Il ne faut pas
oublier que toute la société, je parle notamment du monde économique, a pris
acte de cette cible-là et contribue. Et on a vu plusieurs représentants le dire
qu'ils étaient d'accord avec cette cible-là. Donc, afin que nos partenaires
également internationaux, qui nous voient comme des leaders climatiques, ce
n'est pas le temps de reculer sur ce genre de choses-là. Donc, nous, on
considère que c'est prudent, raisonnable et équilibré de viser 37,5 % à
l'horizon 2030. Éventuellement, on pourra faire des ajustements sur les cibles
de carboneutralité et soulignerais aussi l'importance de se doter de cibles
sectorielles. N'ayant pas de cibles sectorielles, il y a certains secteurs...
10 h 30 (version non révisée)
M. Savard (Christian) : ...qui
des fois peuvent décider de se traîner les pieds en disant : L'autre va le
faire, l'autre va le faire. Nous, on a mobilisé des gens, notamment dans le
secteur du bâtiment, dans la région de Montréal, autour du partenariat climat.
Eux autres mêmes ont dit : Donnez-nous une cible pour notre secteur. Et il
faut aussi que les transports fassent leur part et l'industrie fasse... fasse sa
part.
Donc, voici les suggestions qu'on fait
dans notre mémoire. On pense aussi qu'il y a certains ajustements à faire avec
notre approche sur les changements climatiques pour probablement la rendre un
peu plus... un peu plus concrète et un peu plus près des gens sur... dans
certains cas. D'abord, il faut revoir l'obsession du coût à la tonne. Il faut
aussi, dans nos analyses, voir quels peuvent être les impacts sur la qualité de
vie, sur la santé, sur la prospérité, sur l'équité. C'est un aspect qui nous...
qui est important et qui va rendre probablement plus près des Québécois l'action
climatique. L'action climatique aussi doit se conjuguer avec l'abordabilité. Il
faut montrer aux gens que ça peut aussi les aider à bien... à bien vivre. Et, à
vivre en ville, on croit que toutes les questions qui entourent l'aménagement
urbain, le développement urbain au sens large, peuvent avoir un impact très
positif sur les questions d'abordabilité, notamment en matière d'habitation et
de transport. L'habitation, on le sait, les enjeux sont immenses. On est... une
crise de l'habitation. C'est... Quand les gens disent que ça coûte... la vie coûte
trop cher maintenant, ils font référence essentiellement à l'habitation et à l'alimentation.
Donc, on pourrait regarder ce qui se fait du côté de nos partenaires
californiens où est-ce qu'à travers le... and invest, là, leur propre programme,
ils investissent dans du logement situé aux bons endroits, donc près du
transport en commun, qui fait en sorte que les gens ne sont pas dépendants de
la voiture, bien adapté aux changements climatiques. Ça a été une manière aussi
de répondre, avec la question des feux de forêt qui a fait... qu'il y a
beaucoup d'habitations qui ont été détruites. Bien, on s'est servi de l'argent
pour les changements climatiques pour donner quelque chose de concret aux gens.
Et donc on pourrait penser aussi à l'accélération
de projets de développement urbain dans des friches industrielles. Donc, les
changements climatiques peuvent avoir... peuvent atterrir concrètement sur le
territoire, mais évidemment, la question des transports, tant et plus qu'on va
rendre les gens moins dépendants de la voiture, plus qu'on va leur donner une
plus grande abordabilité.
Il nous apparaît également important de
lier la question énergétique à la question des changements climatiques. On sait
que le gouvernement du Québec s'en vient avec son plan de gestion intégrée des
ressources énergétiques. On sait qu'on va avoir besoin de beaucoup d'électricité
pour atteindre nos objectifs de réduction de gaz à effet de serre. Donc, moins
utiliser d'électricité va nous permettre d'atteindre nos cibles de gaz à effet
de serre. Donc, mettre la sobriété énergétique au cœur de notre stratégie nous
apparaît également essentiel, donc, et je terminerais, au niveau de l'approche,
avant de conclure, il ne faut pas non plus toute mettre la pression de
réduction de nos gaz à effet de serre sur le ministère de l'Environnement et
sur le FECC. On... Actuellement, on dirait que tout le reste du gouvernement s'intéresse
peu aux changements climatiques. Tout le monde reste dans ses silos, tout le
monde fait ses choses comme ils les faisaient avant, sans considérer que les
changements climatiques existent, ou bien si le FECC peut nous donner de l'argent,
tant mieux, on... donc, et le FECC ne pourra pas tout payer la transition
climatique qu'on a à faire. Parce que cette transition climatique là doit nous
amener à des changements structurels, doit devenir quelque chose à quelque
part, un projet de société qui va miser sur la sobriété énergétique, la
sobriété sous différents aspects.
On a la chance au Québec d'avoir un
relatif quasi-consensus. On regarde, hein, les différentes... les différents
mémoires. On voyait que l'Association canadienne du ciment était favorable au
maintien de la cible. Il n'y a pas... il n'y a pas... il n'y a pas vraiment de
débat autour de ce genre de choses là. C'est sûr que la situation est peut-être
moins facile qu'il y a cinq ans, mais il faut maintenir notre leadership
climatique pour que tous les acteurs qui ont pris ce virage-là... et je pense
beaucoup au monde économique actuellement, mais une bonne partie de la
population aussi, hein, l'appui à l'action climatique est fort de la
population, plus de 80 %. Donc, on pense qu'il faut maintenir notre cible
à l'horizon 2030. Pour y arriver, il faut aller chercher les sous du surplus
plus...
M. Savard (Christian) : ...en
plus du fait que c'est une question de lien de confiance avec la population, et
il faut maintenir notre leadership pour amener aussi une partie du reste de la
planète à suivre. Merci.
La Présidente (Mme Nichols) : C'est
moi qui vous remercie pour votre exposé, M. Savard. Nous allons débuter la
période d'échange et ainsi commencer le premier bloc avec M. le ministre. La
parole est à vous.
M. Drainville : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Rebonjour à tous les collègues. Dernier droit,
donc, de ces consultations. Merci, M. Savard, non seulement pour votre
présentation et votre présence aujourd'hui, mais pour votre engagement citoyen
pendant toutes ces années. Je n'aurai peut-être pas l'occasion de vous le dire
à la fin, donc j'aime mieux vous le dire tout de suite. Vous avez toujours été,
en tout cas, dans mon esprit puis selon l'impression que vous m'avez laissé,
pas juste comme élu, mais comme journaliste et animateur auparavant, quelqu'un
qui souhaitait avoir une approche constructive, et c'est quelque chose de très
apprécié, je dois vous le dire. Vous m'avez toujours fait l'impression de
quelqu'un qui cherchait les voies de passage, et donc... puis votre ton
aujourd'hui, le ton de votre présentation le démontre à nouveau. Donc, merci
beaucoup pour votre engagement en faveur de l'intérêt collectif et de toutes
ces batailles que vous avez menées. Je vous souhaite le plus grand des succès
pour la suite des choses. Je ne sais pas si on sait déjà où vous allez. Si vous
aussi vous le savez, vous n'êtes pas obligé de nous le dire, on l'apprendra en
temps et lieu.
• (10 h 40) •
Cela étant dit, sur le surplus, bon, j'ai
bien pris connaissance de votre position, que je respecte totalement, mais je
veux quand même vous rappeler que selon les projections que nous avons, nous,
pour les années à venir, on ne prévoit pas de surplus ou, en tout cas, on ne
mise certainement pas là-dessus. Et il y en a eu, des surplus occasionnels,
ponctuels ces dernières années, mais on ne parle vraiment pas du même ordre que
ce qui est... que ce dont nous avons hérité auparavant. Cela étant dit, je
comprends très bien votre position, mais je voulais quand même apporter cette
précision-là, parce que notre objectif, ce n'est pas de faire des surplus pour
en envoyer ailleurs, notre objectif, c'est de prendre les moyens que nous
donnent la bourse du carbone et le SPEDE et les investir donc dans la réduction
des gaz à effet de serre et dans l'adaptation climatique. Et d'ailleurs, ça m'amène
à vous parler de... puis vous avez raison de dire qu'il y a un large consensus
au Québec, y compris, comme vous l'avez bien noté, dans certains milieux
économiques.
Je pense qu'il y a des milieux économiques
qui sont un peu peu frileux, mais ils hésitent à le dire ouvertement, je pense
qu'ils ne veulent pas s'exposer à la critique. Mais vous avez raison de dire
que ceux qui se sont prononcés jusqu'à maintenant ont été soit en faveur du
maintien de la cible avec le présent calendrier ou le maintien de la cible avec
peut-être un séquençage, là, comme nous l'a suggéré... ou, enfin, comme s'est
montré ouvert à le faire l'industrie de l'aluminium, là. Ils disaient moins
37,5 % d'ici 2035, ça pourrait aussi fonctionner, nous a dit
M. Simard. Mais, partant effectivement de votre prémisse qu'il y a un
large consensus au sein de la société québécoise, il ne faut jamais perdre de
vue que ce consensus, il est très ambitieux d'emblée. Puis je ne parle pas
juste de la cible, là, je parle aussi du maintien des instruments qui nous
permettent de financer la lutte. Et, comme vous l'avez noté, ces
instruments-là, les autres juridictions autour de nous les abandonnent les uns
après les autres, là. Je ne parle pas juste de Trump, là, je parle de la
politique fédérale de Carney qui a fait sauter la tarification carbone pour les
individus. Il a... Il devait annoncer une cible en matière d'électrification
des transports. Pour le moment, il n'y en a pas. Ça a été suspendu, ça aussi.
Ça a amené la Colombie-Britannique à suspendre... la semaine passée, a annoncé
qu'ils allaient suspendre, eux aussi, la cible d'électrification. L'Ontario
songe ouvertement à ne plus avoir de cibles en matière de réduction.
Alors, nous, pendant ce temps là, on
maintient une tarification carbone, on maintient une bourse, on maintient le
SPEDE, on maintient des instruments qui font de nous, je dirais, un cas unique
et exceptionnel. Moi, j'en suis fier. C'est ce qui nous a permis d'assumer
cette position de leadership. Mais je pense qu'il ne faut pas prendre pour
acquis que ces instruments-là... comment dire? Il faut savoir apprécier puis
reconnaître que ces instruments-là nous donnent déjà une position de leadership
parce que les autres ont tendance à abandonner ces acquis, dans certains cas,
du moins. Et donc la bataille ou le... pas la bataille, mais le débat sur la
cible ne doit pas nous faire oublier que, derrière la cible, il y a toute une
série d'instruments qui font déjà notre leadership et qui font déjà de nous les
chefs de file dans les Amériques...
M. Drainville : ...il ne
faut pas les prendre pour acquis ces instruments-là. C'est ça, dans le fond,
que j'essaie de vous dire. Il ne faut pas les prendre pour acquis parce qu'il y
a des voix qui s'élèvent pour dire : Faisons-les sauter ici aussi. Alors,
soyons très prudents. Dans tout ce débat sur la cible, moi, j'essaie d'avancer
avec prudence, puis j'essaie d'avancer avec équilibre. J'essaie de consolider
nos gains également. J'essaie de consolider nos gains puis j'ai toujours peur que
si on veut aller trop loin, trop vite, on va non seulement mettre à mal notre
compétitivité comme économie, mais qu'on risque d'amener certaines voix à
dire : Heille! Non seulement ils veulent aller plus vite puis mettre à
risque des emplois aussi au Québec, mais ils oublient qu'on a tout ça derrière,
là, puis qu'on est les seuls à l'avoir, là. Ça fait qu'il faut juste faire très
attention que, ce consensus-là, on le maintienne. Puis il faut, il faut le,
comment dire, le manier avec beaucoup de soin puis beaucoup de... beaucoup de
soin. C'est une réflexion.
M. Savard (Christian) :
Vous avez raison et parfois, moi aussi, je m'en inquiète. Et puis, étant un
observateur, justement, je vais jouer mon rôle de vétéran et tant d'observateur
de la chose, j'ai beaucoup observé la situation depuis deux ans pour voir est
ce que... est ce que le Québec était pour passer sur une voie plus... une pente
descendante? Et je constate que c'est assez intéressant, et il existe une
différence québécoise, hein? Et au niveau de l'appui, par exemple, de la
population, ça se maintient. Vivre en Ville durant les... Tu sais, le monde
municipal est un monde qui nous intéresse beaucoup. On a fait un sondage
pendant les élections municipales pour voir si les gens soutenaient l'action climatique
des élus municipaux. La réponse a été très favorable et favorable à 81 %,
donc, est très favorable à 40 %. Il y a un... Mais il y a... Parce que
probablement que les Québécois ont compris qu'il y a moyen que ça ne soit pas
que de la contrainte. Il y a moyen que ça soit du développement économique pour
le Québec, là. Moins consommer d'énergie fossile, c'est bénéfique. C'est
bénéfique sur tous les points de vue. À chaque fois qu'on n'achète pas de
pétrole, on s'enrichit parce qu'on n'en a pas de pétrole. Et en plus, bien, ça
améliore la qualité de l'air puis ça fait en sorte qu'on fait notre part pour
les changements climatiques.
Donc, le... les... Qu'est-ce que ça
pourrait faire comme dommages au Québec est contrebalancé par le fait qu'on est
très bon en électricité. Notre électricité est propre. Donc, là-dessus, il y
avait des... il y avait une partie de la stratégie gouvernementale qui
fonctionnait, là, de miser sur l'électrification. Et il ne faut pas... Il ne
faut pas la lâcher, mais il faut aller même plus loin. Il faut miser également
sur la sobriété pour moins consommer puis qu'on garde notre électricité pour
réussir les changements... la lutte contre les changements climatiques. Mais...
Mais vous avez raison, mais je pense que, parfois, lorsque tu commences à trop
céder, c'est là que tu perds ton consensus parce que les gens disent que ce
n'est plus important. Si ça aurait été... Et c'est pour ça que d'entrée de jeu,
dans mon introduction, j'ai dit : On se rallie à 37,5 %. Fort
probablement que si on se fie 100 % à Paris, on en serait peut-être mieux
de monter à 45 % puis on montrerait un plus grand leadership, mais on
trouve que de maintenir à 2030, 37,5 % est raisonnable, surtout si on va
tourner chercher l'argent qui... du FECC pour contribuer à investir dès
maintenant. Donc, je suis... Je partage votre analyse, mais je suis positif. Je
vois beaucoup de signaux positifs.
M. Drainville : Tout à
fait la même conclusion...
M. Savard (Christian) :
Je n'ai pas la même... Je n'ai pas la même conclusion. Je pense que... Je pense
que ceux qui ont promis de... Puis même je fais une analyse assez politique,
là, j'irais... Aux dernières élections, là, il y a eu des... des candidats avec
des agendas environnementaux très forts qui ont remporté leur élection contre
des candidats qui disaient : On scrape tout ça. Et ils n'ont pas gagné
leur élection. Donc, je ne pense pas qu'il y a d'appétit pour défaire le
leadership et la gouvernance climatique très, très fort, mais il y a... Il y a
de la prudence à avoir. Il y a certains éléments où on voudrait peut-être
aller, qu'on ne sera pas capables d'aller. Mais je pense que le plan de match
qu'on a actuellement est le bon, et il faut le maintenir et le renforcer à
certains égards sur le moyen terme.
M. Drainville : Bon. Mon
enjeu, je l'ai déjà eu... J'ai déjà eu l'occasion de le dire, M. Savard,
en fait, un de mes enjeux, c'est qu'on a mis à peu près... On a mis une
trentaine d'années pour atteindre la moitié de la réduction de 37,5 %. Là,
on est à moins 19 %. Puis là, on mettrait cinq ans pour atteindre l'autre
moitié. Et ça, pour moi, c'est un rythme très rapide. Et quand je crains le
coût économique, c'est davantage à ça que je fais référence, c'est la vitesse
avec laquelle on devra réaliser ces réductions. Je ne doute pas qu'on va finir
par y arriver à ces réductions. Et je ne doute pas que, sur la durée, les
emplois éventuels qu'on perdra, on pourra les recréer dans d'autres domaines...
M. Drainville : ...les
technologies vertes, et tout ça. Tel n'est pas mon propos. Mon propos, c'est
vraiment : Est-ce qu'on veut vraiment imposer à notre société puis à notre
économie d'atteindre la deuxième... le deuxième 50 % en un très court laps
de temps? Est-ce qu'il ne risque pas de se produire des dommages? Est-ce que ça
ne risque pas de produire des dommages économiques qui vont faire mal à notre
population, qui vont faire mal, souvent, à des secteurs déjà vulnérables, dans
des... au sein de populations qui sont déjà fragilisées dans les régions,
notamment les régions ressources? Lesquels dommages pourraient, j'y reviens,
venir affaiblir ledit consensus. Tu sais, il faut vraiment que la population
suive.
Puis je l'ai déjà dit, puis c'est assez,
j'imagine, controversé que de l'affirmer, mais je suis convaincu, M. Savard,
que les Québécois ne sont pas prêts à s'appauvrir dans le cadre de cette lutte
contre le réchauffement climatique. Si on leur dit : Êtes-vous prêts à
vous appauvrir pour lutter contre les GES, je suis convaincu que la majorité va
dire, une forte majorité va dire : Bien, voyons donc, qu'est-ce que tu me
demandes là?
M. Savard (Christian) : Le...
Comme... Bien, d'abord, si je... si on se fie aux documents de consultation, on
ne s'attend pas à avoir d'impact sur le PIB à travers l'atteinte de la cible à
l'horizon 2030, notamment en utilisant... en utilisant le marché du carbone.
Donc, on s'attend à un impact neutre, donc, là-dessus, on peut être rassurés.
Et ça ne veut pas dire que, pour certains secteurs, si, éventuellement, ça a un
impact, qu'ils ont... qu'il n'y a pas des mesures compensatoires autres. Il ne
faut pas défaire l'ensemble de l'édifice, il ne faut pas défaire l'ensemble de
l'édifice parce qu'il y a certains bouts qui ont besoin d'une attention
particulière. Donc, pour nous, ça nous apparaît important.
• (10 h 50) •
Et s'il y a certaines régions qui
souffrent plus, ça ne veut pas dire qu'il ne peut pas y avoir de compensation.
S'il y a des secteurs qui souffrent plus, ça ne veut pas dire qu'il ne faut pas
mettre de l'effort sur ces secteurs-là. Mais il ne faut pas toucher à
l'ensemble du... à l'ensemble de l'édifice de la gouvernance climatique du
Québec.
M. Drainville : Je ne veux
pas entrer dans une guerre de chiffres, on a mieux à faire, mais je veux quand
même attirer l'attention sur... votre attention sur la page 23 du document de
consultation, qui démontre qu'avec... même avec la bourse du carbone, il y a
quand même un coût économique, là, qui est... qui est bien moindre que si on
n'achète pas de... que si on achète, dis-je, des crédits sur la bourse
californienne, là. Mais il y a quand même... si on... si on conserve le FECC et
qu'on continue d'acheter des crédits hors Québec, il y a quand même une
réduction de 1,4 % du PIB réel d'ici 2030. Mais il est bien moindre...
vous avez raison de le dire, il est bien moindre que la projection lorsqu'on
fait l'ensemble des réductions sur... sur notre territoire.
Je voulais vous amener sur les
municipalités, parce que vous êtes un... vous travaillez en étroit partenariat
avec... avec les villes et le monde municipal. Dans ce document de consultation
dont on... dont on parle ici, le document de consultation pour cettedite
commission, il est question de scénarios, par exemple, de diminuer les
distances parcourues avec la voiture à essence, d'installer un système de
rotation, là. Donc, il y aurait des journées dans la semaine ou une journée
dans la semaine où les utilisateurs ne pourraient pas prendre leur voiture à
essence, là. Bon, est-ce que c'est le genre de scénario avec lequel vous, vous
seriez d'accord? Est-ce que vous appuyez ce type de scénario, de dire : On
devrait aller jusque là?
M. Savard (Christian) : En ce
qui concerne la rotation de l'utilisation de la voiture, je ne crois pas que la
société québécoise soit rendue là. On voit ça dans des sociétés qui ont des
graves problèmes soit de congestion immense ou de pollution atmosphérique
immense.
M. Drainville : J'ai vécu ça
à Mexico, moi.
M. Savard (Christian) :
Exactement. Donc, ce n'est pas... ce n'est pas un scénario sur lequel nous...
nous, on tablerait. Il faut, évidemment, tabler sur des scénarios
d'alternatives, donner un maximum d'alternatives aux gens. Ça, ça veut dire
deux... on peut y arriver de deux manières. Bien, d'abord, le transport en
commun classique, hein, améliorer l'offre de services, mais également miser sur
la proximité, la proximité des choses, pour moins avoir besoin systématiquement
de la voiture pour tout. C'est vraiment une des choses qu'on préconise à Vivre
en ville. Et je relisais mon mémoire de 2009, et, si on l'avait fait... plus
fait à partir...
M. Savard (Christian) : ...2009,
on aura peut-être moins d'enjeux à atteindre notre cible aujourd'hui. Donc,
vraiment miser sur un développement urbain plus sobre, et le virage est en
train de se prendre. Il est en train de se prendre dans les villes et le
gouvernement du Québec, à travers, et nous, on propose, hein, depuis des années
qu'il y ait un fonds dédié, qui viendrait du FECC, pour un aménagement urbain
plus sobre en carbone et adapté aux changements climatiques, qui viendrait, en
plus, s'attaquer à la question de l'habitation pour augmenter l'offre de
logements de tous types pour sortir de la crise de l'habitation. Donc, il y a
là un moyen, et c'est quelque chose qu'on retrouve de plus en plus à travers le
monde, lier la question de l'abordabilité, notamment du logement, et les
changements climatiques.
Nous, on croit cette approche-là et tu
investis, par exemple, dans des quartiers où l'école est déjà proche,
l'épicerie est déjà proche. Dans les grandes villes, le transport en commun
structurant est déjà proche. Et là tout d'un coup, tu diminues tes gaz à effet
de serre, mais tu contribues à offrir à la population des milieux de vie
agréables, du logement. Donc, et ça, c'est un virage qu'on a pris un petit peu
au Québec, il y a certaines choses qui s'en viennent de super intéressantes, il
y a des villes très proactives, mais le gouvernement du Québec aurait pu avoir
plus de leadership. On l'écrivait en 2009, lors du mémoire, à cette
commission-là et on continue à l'écrire. Mais là, c'est vraiment la question de
l'habitation qui devient prioritaire, et comme je le disais, ça ne sort pas
juste de notre chapeau. La Californie a décidé d'attribuer une partie de son programme
de Cap-and-Invest, je l'aime beaucoup, cette expression-là, sur des questions
d'habitation. Et nous, on pense que dans les prochaines moutures d'un éventuel
PMO, il faut le faire. Ça va donner, en plus, des exemples concrets à la
population. Les... la population a besoin, aussi, de voir qu'est ce qu'on fait
avec l'argent sur les changements climatiques, on a peut-être un enjeu de
communication par rapport à ça. Donc ce genre de choses là, lié au quotidien
des gens, m'apparaît important.
La Présidente (Mme Nichols) : Je
vous remercie, merci, M. Savard. Nous allons poursuivre la discussion avec la
députée de Notre-Dame-de-Grâce.
Mme McGraw : Merci, Mme la
Présidente, et merci à vous pour votre présence, votre présentation, votre mémoire
et merci, M. Savard, pour votre leadership pour... et on vous souhaite bon
succès pour la... pour la suite. Donc, le ministre, il a commencé, bien, cette
période de discussion avec un petit discours d'à peu près cinq minutes, qui
a... il a parlé de beaucoup de points, il a soulevé beaucoup de points, et
j'aimerais savoir : est-ce qu'il y a des points ou des... certains aspects
que vous n'avez pas eu encore la chance de répondre? Parce que, par exemple, il
a dit : On a peut-être la même analyse mais pas les mêmes conclusions. Il
a parlé d'un consensus qu'on... qui risque d'être fragilisé. Il parlait...
d'aller... On ne veut pas aller trop loin, trop vite. Il y a des coûts
économiques, est-ce que c'est un portrait qui est complet? Donc il a soulevé beaucoup
de points dans son discours de cinq minutes. Est-ce qu'il y a des points en
particulier que vous voulez souligner dans un premier temps?
M. Savard (Christian) : Je...un
aspect important, je crois.... Je pense qu'il ne faut pas sous-estimer, et puis
je l'entends beaucoup autour de moi, là, et je pense qu'on pourrait faire des
ajustements éventuellement, là...le...le... L'effet que... le 1.8 milliard, on
va le mettre dans le Fonds des générations, j'en entends beaucoup parler. Moi,
je... il y a des gens qui m'appellent au téléphone, qui me disent :
Christian, ça n'a pas de bon sens, on ne va pas laisser passer ça. Puis j'ai
peur que ça amène du cynisme auprès des gens, parce que parfois, puis le
ministre semble vouloir donner des garanties pour le futur, je pense que le...
je pense qu'on pourrait renforcer ces garanties-là, le PL-7, selon moi, a
encore trop d'ouverture pour le futur, donc oui, c'est une chose, le futur,
mais le passé, c'est que les gens, là, ça reste... ça donne l'impression que...
heille, dans le fond, là, puis là, je vais être caricatural un peu, on s'en est
servi pour la mauvaise gestion parce que dans le fond, on le met sur la dette.
C'est... c'est ce que les gens peuvent garder en tête et ça fait en sorte que
la... ça fait en sorte que ça a l'air moins rigoureux. Donc, vraiment de
dire : Heille, oui, là, il y a un surplus, puis M. le ministre a raison en
disant que ça ne vient pas essentiellement de l'administration du gouvernement
actuel, là, c'est vrai. Mais tout le monde avait en tête que c'était pour être
réinvesti un jour, c'était ça qu'on avait, tout le monde, en tête. Moi, je
suis... je suis ça depuis toujours, puis je suis... j'avais ça, moi... j'ai...
je me suis... je me sens naïf, aujourd'hui, là. Mais ça, c'est un aspect très
important pour rétablir le lien de confiance, ou en tout cas, ne pas le briser,
je dirais, surtout. Et je dirais : il faut tenter aussi de mettre
davantage d'efforts sur montrer les cobénéfices de la lutte contre les
changements climatiques. Quand... Mon père est gaspésien, je me promène, je
vais souvent en Haute-Gaspésie. Je les ai vus, les...
M. Savard (Christian) : ...les
enrochements qui permettent de... finalement, que la 132 ne soit pas coupée. Tu
sais, c'est utile, là. C'est à ça qu'il sert, l'argent, sur les changements
climatiques, ça fait en sorte qu'on puisse passer de Sainte-Anne-des-Monts à
Gaspé en fonctionnant... Il y a beaucoup de villes, par exemple au niveau de
l'adaptation, où est-ce qu'on peut faire des choses, mais, quand les gens ont
une meilleure offre de transport en commun puis que c'est tagué : Heille!
Ça, on l'a fait grâce aux changements... à la lutte contre les changements
climatiques, les gens le sentent. Donc, tous ces co-bénéfices-là qui ne sont
pas des GES disparus de l'atmosphère, mais qui sont un impact dans le quotidien
des gens, il faut vraiment les mettre en valeur et il faut même prendre une
partie de nos décisions sur ces co-bénéfices-là parfois, et on ne le fait
probablement pas assez.
Mme McGraw : Donc, vous...
juste pour revenir sur le fond, le FECC. Effectivement, donc, vous parlez de la
Fonds des générations, puis ça a été présenté comme ça par le gouvernement,
mais nous, on dit : Carrément, c'est juste pour contrer la dette fiscale.
Et, effectivement, ce qu'on fait, c'est... on déplace cette dette-là vers une
dette climatique. Et je confirme qu'effectivement ce fonds-là, c'était de bonne
foi, c'étaient les grands émetteurs qui investissaient justement pour la lutte
contre le changement climatique. Ça fait que c'est quand même sérieux, ce qui
s'est passé. Et, effectivement, il y avait ce surplus-là et il y avait des
réformes qui ont été suggérées par l'ancien gouvernement libéral qui n'ont pas
été mises en place par le gouvernement de la CAQ. Et, effectivement, il y a ce
surplus-là. Donc, pourquoi il y avait ce surplus? On pourrait se poser cette
question-là. Pourquoi un surplus de 1,8 milliard de dollars en pleine
crise climatique? On aurait eu besoin de ces fonds-là pour l'adaptation, l'atténuation.
J'aimerais vous entendre là-dessus.
• (11 heures) •
M. Savard (Christian) : Oui,
mais, tout à fait, on en a besoin et on en a encore plus besoin parce que le
contexte est un peu moins facile qu'il y a cinq ans, donc... Et je vous le dis,
c'est vraiment aussi une question de perception de la part des acteurs
économiques, qui étaient les principaux, hein? Au début, là, de la bourse du
marché du carbone, là, c'étaient les... c'étaient surtout les acteurs
économiques, les industriels qui payaient. Et donc c'est pour ça que,
maintenant, ils vont aussi au front pour dire : On veut que l'argent soit
réinvesti. Les normes... la question comptable fait en sorte que... Bien, la
vérité, c'est qu'elle a été attribuée à l'année, ça fait que c'était... Nous,
on pensait que c'était caché dans une cagnotte, mais non, c'était dépensé
l'année même. Donc, on s'est fait une dette envers nous-mêmes. Là, il est temps
de la rembourser. Et je pense que ça ne serait pas raisonnable, dans le
contexte des finances publiques actuelles, de dire : On va rembourser
aujourd'hui 1,8 milliard, ça ferait 1,8 milliard de plus dans le
déficit, ça ne serait pas sain, mais est-ce qu'on peut le faire,
300 millions sur six ans, par exemple, pour... Et justement, là, on a des
défis dans les prochaines années. Ça, ça aurait été un plan de match de
dire : Heille! C'est ça, la situation. Ça nous est... Puis le gouvernement
a raison, mais il aurait pu agir avant, hein, de... ça fait quand même sept ans
qu'ils sont au pouvoir. Mais ils ont raison de dire que le surplus, ce n'est
pas leur responsabilité, qu'il a été dépensé avant par un autre gouvernement,
mais trouver la solution, c'est leur solution.
Mme McGraw : Mais,
normalement, un surplus, c'est une... je veux dire...
M. Savard (Christian) : Oui.
Mme McGraw : En tout cas, il
y avait aussi le surplus de 7 milliards $ qui a été laissé par le
gouvernement libéral, mais on poursuit, parce que je sais que ma collègue a une
question. J'aurais une courte question, mais peut-être une petite courte
réponse pour que ma collègue puisse...
M. Savard (Christian) : Parfait.
Pas de problème.
Mme McGraw : Vous avez parlé,
vous avez dit : Si on recule trop, on perd le consensus, en réponse au
ministre qui disait qu'il a peur qu'on perde le consensus si on a des cibles
qui, selon lui, ne seraient pas atteignables ou crédibles. J'aimerais vous
entendre là-dessus et, vraiment, dans l'aspect de comment maintenir l'adhésion
du public face à la crise... la transition climatique.
M. Savard (Christian) : Je
pense qu'il faut maintenir la cohérence de notre approche, la prévisibilité.
Vous savez, en ce moment, puis là je parle beaucoup des acteurs économiques,
ils ont pris des décisions pour atteindre l'objectif, pour contribuer à 37
cinq, puis là on leur dit, aux bons joueurs : Oui, finalement...
finalement, ce n'est pas si urgent que ça. Il y a ça aussi, là, qui a...
qu'on... qui est en ligne... qui est en ligne de compte, là, au niveau des
acteurs économiques, qui eux ont fait les bons choix actuellement. Et on peut
penser aussi aux impacts sur le marché du carbone éventuel, là, de changer trop
notre ligne.
Mme McGraw : Merci.
La Présidente (Mme Nichols) : Mme
la députée des Mille-Îles, deux minutes 30 secondes.
Mme Dufour : Oui. Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Alors, moi aussi, je vais profiter de ma tribune
pour remercier M. Savard pour toutes ces années de service à notre société. On
a eu... on a travaillé ensemble dans le passé et... et, en tout cas, vraiment...
Ma collègue a parlé de leadership, c'est... vous en faites partie.
Une question. Le ministre a dit que les
Québécois n'étaient pas prêts à s'appauvrir pour, finalement, l'atteinte de la
cible du Québec. Un autre groupe nous a parlé au contraire que l'inaction,
c'est ce qui...
11 h (version non révisée)
Mme Dufour : ...qui ferait en
sorte que le Québec allait s'appauvrir, donc, et les Québécois évidemment tout
autant. Donc, j'aimerais vous entendre sur votre position par rapport à ça. Est-ce
que c'est l'inaction qui mène vers l'appauvrissement ou est-ce que l'atteinte
des cibles, c'est plutôt... ça peut être une opportunité de faire des gains,
même économiques.
M. Savard (Christian) : Je
crois qu'il y a vraiment moyen de faire des gains économiques et de contribuer
à régler des problèmes pour les Québécois et à améliorer notre prospérité. Si
ce n'était que du sacrifice, je ne pense pas que, par exemple, le monde
économique embarquerait, je ne pense pas que les Québécois embarqueraient. Il ne
faut pas oublier, je le mentionne encore une fois, tenter de se débarrasser des
énergies fossiles, là, c'est contribuer à améliorer la balance commerciale du
Québec et à garder de l'argent au Québec. Si on n'avait pas ça, peut-être qu'il
y aurait de la menace d'appauvrissement... serait plus grande. Et également, on
peut se servir de cet argent-là pour améliorer la qualité de vie des Québécois,
notamment en investissant dans des solutions qui mènent à une plus grande
abordabilité, comme je l'ai dit. Donc, il y a vraiment moyen de prendre la
lutte contre les changements climatiques, faire du judo, ne pas la transformer
ça en quelque chose comme un sacrifice, mais plutôt comme un tremplin pour s'enrichir
tout en faisant notre part dans le grand défi planétaire qu'est la réduction
des gaz à effet de serre.
La Présidente (Mme Nichols) :
Merci beaucoup. Je cède maintenant la parole au député de Taschereau.
M. Grandmont : Bonjour. Merci
beaucoup d'être là, merci pour votre mémoire, encore une fois, toujours très
pertinent. Puis j'en profite moi aussi pour souligner l'excellent travail de Vivre
en Ville dans les 30 dernières années, puis votre passage à la tête de cet
organisme pertinent aussi. M. Savard, question rapide, là, le ministre dit
souvent, là, qu'on a à choisir entre, en fait, sauver des jobs ou sauver l'environnement,
c'est un peu comme ça qu'il le présente. Est-ce que ce n'est pas à quelque part
un faux dilemme? Non, mais est-ce que ce n'est pas à quelque part un faux
dilemme?
M. Savard (Christian) : Je crois
que s'il y a des secteurs qui sont à risque, il y a moyen d'avoir des
interventions ciblées sur ces secteurs-là. Donc, oui, il peut y avoir certains
secteurs où il y a des enjeux, ça se peut, mais un appui à ces secteurs-là, et
le Québec le fait quand même dans les dernières années, peut contribuer à,
finalement, enlever ce qui pourrait y arriver de pire dans certains secteurs.
Mais de manière générale, il n'y a pas... on ne voit pas de péril en la demeure
sur l'ensemble de l'économie. Donc, c'est normal d'ajuster certaines...
certaines aides, par exemple, ça peut être des aides à la transformation des
entreprises, ça peut être des aides ponctuelles sur les impacts, on en fait,
par exemple, sur... en raison des tarifs américains actuellement, on en a des
aides spécifiques. Donc, comme je le dis, je l'ai dit tantôt, défaire l'ensemble
de l'édifice climatique québécois ou s'attaquer de manière générale, c'est
comme... c'est comme tirer partout au lieu de tirer aux endroits spécifiques
pour venir combler des enjeux à certains endroits. Ça serait... ça serait ajusté
le tir. Parce qu'on ne peut pas nier que peut-être certains secteurs vont avoir
des enjeux.
M. Grandmont : Mais dans tous
les cas, j'entends de votre discours qu'il vaut mieux être ambitieux et de bien
planifier cette transition climatique-là.
M. Savard (Christian) : Oui.
M. Grandmont : Ça, c'est
clair. Il y a... on a reçu les gens de transit, l'Alliance pour le financement
du transport collectif, on va recevoir plus tard... plus tard, Pierre-Olivier
Pineau, que vous connaissez bien, évidemment. Il insiste beaucoup sur deux
secteurs névralgiques : les transports collectifs, particulièrement l'offre
de services de transport collectif et le bâtiment. Considérant votre mission, j'imagine
que vous avez une opinion sur les deux. Est-ce que... est-ce qu'on doit
investir massivement, comme le disent ces deux autres acteurs-là, sur ces
secteurs précis? À court terme, bien évidemment.
M. Garnier (Francis) : Je
peux y aller pour le transport collectif, on travaille étroitement avec l'Alliance
Transit sur divers dossiers. Le transport collectif est vraiment un peu une clé
de voûte pour arriver à des réductions des GES qui sont significatives, pas
juste dans le transfert modal, mais aussi dans la réduction de la congestion et
dans la densification, c'est vraiment au cœur de la réduction des distances,
comme mentionné tantôt. L'idée, ce n'est pas d'avoir une rotation de journée d'utiliser
la voiture, c'est vraiment de réduire le besoin à la source de la voiture. Et
si après ça on a toutes sortes d'autres bénéfices que ça soit la santé publique,
j'ai mentionné la congestion, en ce moment, on met moins d'argent dans le
transport collectif, tant pour l'exploiter que pour le construire, que ça coûte
de congestion dans le Grand Montréal par année. Juste ça.
M. Grandmont : On est rendu à
combien en congestion à Montréal, 6 milliards?
M. Garnier (Francis) : 6
milliards en ce moment, 10 milliards en 2030.
M. Grandmont : Que ça coûte
annuellement. Pour l'ensemble du Québec, 10?
M. Garnier (Francis) : 10
milliards en 2030 pour Montréal.
M. Grandmont : En 2030. En
2030.
M. Savard (Christian) : Et,
très rapidement, la...
M. Savard (Christian) : ...avantage
du transport collectif, c'est que ça réduit aussi notre consommation
d'électricité. Si c'est... On est tous pour l'électrification des voitures,
mais ils vont prendre de l'électricité qu'on ne pourra pas mettre ailleurs ou
qui va nous coûter de plus en plus cher à produire. Donc, le transport
collectif demeure très pertinent. Et en ce qui concerne le bâtiment, c'est un
fruit mûr. Le milieu est prêt et les gens sont très proactifs.
La Présidente (Mme Nichols) : Merci,
M. Savard. La parole est maintenant au député des Îles-de-la-Madeleine.
M. Arseneau : Combien de
temps?
La Présidente (Mme Nichols) :
3 min 30 s.
M. Arseneau : Merci, Mme la
Présidente. Messieurs, bonjour et bravo pour, les quoi, 10, 12 dernières
années. Et bon succès pour le...
Une voix : ...
M. Arseneau : Presque 20! Mon
Dieu, ça passe trop vite! Oui, c'est vrai, vous avez parlé de 2009. Juste pour
revenir sur la première des recommandations, vous dites d'annuler le virement
des surplus passés du Fonds d'électrification et de changement climatique parce
qu'en réponse à votre affirmation, le ministre a dit : Il n'y aura pas de
surplus dans l'avenir. Je veux bien être clair, là, vous dites : La
décision qui a été prise, il faut la résilier, il faut l'abroger. C'est clair.
M. Savard (Christian) : Tout
à fait. Et même qu'il faut colmater certaines brèches qu'on a dans le PL n° 7.
On va faire un mémoire, là, d'ici la fin parce qu'on ne pense pas qu'on doit...
que s'il y a d'autres surplus, que ça doit être transféré au Fonds vert ou...
au Phare, ça doit aller à la lutte aux changements climatiques spécifiquement.
• (11 h 10) •
M. Arseneau : D'accord. Vous
avez sans doute pris connaissance de la déclaration du premier ministre du 10
novembre dernier. En fait, la manchette du Devoir, c'est : Legault reporte
la transition énergétique de quatre ans face aux politiques de Trump. Est-ce
que vous avez l'impression que c'est ce qu'on s'apprête à faire en évoquant la
possibilité de repousser les cibles de plusieurs années tout en gardant la
cible de 37,5?
M. Savard (Christian) : Je
crois qu'on ne va pas repousser la transition si on maintient l'édifice
climatique actuel de réduction de 37,5 à l'horizon 2030 et qu'on récupère
l'argent, justement, pour s'assurer d'y arriver. Là-dessus, je vais être
rassuré. Je veux juste dire que d'après moi le premier ministre parlait
davantage de la filière batterie et de tout ça quand il a fait cette
déclaration-là, plutôt que de la lutte contre les changements climatiques. J'ai
le goût de lui donner le bénéfice du doute. Mais c'est sûr que là si on fait
des... des reculs comme perdre les sous ou repousser la cible, là, il y a un
danger de... de repousser la transition climatique nécessaire.
M. Arseneau : Comment est-ce
que vous réconciliez les déclarations du ministre précédent en juin, lorsqu'il
a déposé le plan de mise en œuvre où il dit : Il faut accélérer la
transition face à ce qui se passe au sud des États-Unis? Je vous lis un extrait
en page 10 du PMO qui dit : «Les analyses d'impact économique menées
par le ministère des Finances démontrent que cette approche a un impact positif
sur le produit intérieur brut du Québec. Selon les estimations, la valeur de
l'effet bénéfique net du PMO 2025-2030 sur le PIB réel au Québec en 2030
se chiffrerait à plus de 700 millions de dollars. Malgré
l'incertitude générée par l'administration fédérale américaine et les récents
changements apportés à l'application de la taxe carbone fédérale au Canada.» Et
là, aujourd'hui, dans... dans les propos du ministre, on nous dit : Bien,
il va y avoir des difficultés économiques, des pertes d'emplois, et ainsi de
suite. Pourtant, le PMO, lui, il est doté de mesures aussi. Quelle... Laquelle
des deux versions gouvernementales faut-il croire?
M. Savard (Christian) : Bien,
moi, celle... celle qui sur laquelle je miserais, c'est évidemment la... la
version pessimiste... pessimiste? Je suis fatigué! Optimiste parce qu'il
apparaît... il m'apparaît évident que, dans le contexte géopolitique québécois
et dans le contexte énergétique québécois, on peut y arriver, que ce soit
finalement des retombées positives et pas négatives. Est-ce que ça veut dire
ouvrir les vannes à fond de train, avoir une réduction de 50 % en 2030?
Non, ce serait... ce serait bousculer les choses. Mais actuellement, si on
ralentit la cadence comme on semble vouloir le proposer, selon moi, on va faire
du dommage, parce que la société québécoise, l'économie québécoise, c'est
orienté dans ce sens-là.
La Présidente (Mme Nichols) : Je
suis vraiment désolée de vous interrompre. Je suis la gardienne du temps, c'est
le rôle le plus difficile. Merci beaucoup de votre contribution aux travaux.
Bonne chance pour la suite.
Et nous allons suspendre le temps
d'accueillir les prochains groupes. Merci.
(Suspension de la séance à 11 h 13)
(Reprise à 11 h 16)
La Présidente (Mme Nichols) : Merci.
Alors, nous poursuivons nos travaux. Je souhaite la bienvenue aux représentants
de Mobilité électrique Canada et Propulsion Québec, qui sont en présentiel avec
nous. Merci d'être parmi nous. Je vous rappelle que vous disposez de
10 minutes pour votre exposé, après quoi nous allons procéder à la période
d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter
puis à commencer vos exposés.
M. Laprés-Paradis (Alexis) : Alexis
Laprés-Paradis, président-directeur général par intérim de Propulsion Québec.
Mme Côté (Marie-Josée) : Bonjour.
Marie-Josée Côté, directrice, affaires gouvernementales et politiques publiques
chez Propulsion Québec également.
M. Breton (Daniel) : Daniel
Breton, PDG de Mobilité électrique Canada.
La Présidente (Mme Nichols) : Merci.
Bienvenue!
M. Laprés-Paradis (Alexis) : Donc,
merci, Mme la Présidente. Bonjour à tous et à tous. M. le ministre, Mesdames et
Messieurs les députés, je suis Alexis Laprés-Paradis, président-directeur
général par intérim de Propulsion Québec. Donc, je suis... accompagné
aujourd'hui avec Marie-Josée Côté, qui est directrice, affaires gouvernementales
et politiques publiques. Nous vous remercions de l'invitation à prendre part
aux consultations particulières sur la cible de réduction des émissions de gaz
à effet de serre.
Propulsion Québec, c'est la grappe
industrielle des transports zéro émission du Québec. Nous couvrons trois
secteurs prioritaires de l'économie québécoise : les transports zéro
émission, l'infrastructure de recharge, la filière batterie de la mine au
recyclage. Puis nous adhérons pleinement l'idée que le développement économique
et la transition écologique sont indissociables.
Depuis 2015, le Québec s'est engagé à
réduire ses émissions de GES de 37,7 %... 37,5 % d'ici à 2030 par
rapport à son niveau de 1990. Nous comprenons que le contexte économique
incertain, les pressions internationales et l'effet des politiques américaines
soient... soient un peu plus difficiles et nous... nous limitent dans nos
progrès, mais nous sommes d'avis que la cible minimale de 37,5 % doit être
maintenue.
Le véritable pragmatisme, à l'heure actuelle,
ce n'est pas de ralentir, mais c'est d'accélérer. Retarder l'action, c'est
accepter davantage de coûts, des vulnérabilités additionnelles et un recul
technologique qui sera difficile à rattraper. Pendant que l'Amérique du Nord
hésite, tangue et recule, l'Europe et la Chine accélèrent massivement
l'électrification. Nous n'avons pas le luxe de prendre le retard si nous
voulons demeurer compétitifs et conserver notre position de leader industriel
dans le secteur.
Au Québec, le... le transport représente
plus de 43 % de nos émissions de GES, c'est le secteur le plus émissif, et
le parc de véhicules ne cesse de croître. Donc, pour atteindre nos cibles, il
faut absolument décarboner le transport, il faut réduire l'auto solo et
diminuer notre dépendance aux énergies fossiles. C'est impératif aussi de... de
miser sur le transfert modal, sur des options de mobilité plus sobres, plus
efficaces, les zéro émission.
La bonne nouvelle, c'est qu'on a tous les
atouts au Québec pour réussir cette transition. On fabrique ici même des
véhicules lourds destinés au transport collectif, des tramways, des systèmes
légers sur rail, des trains, des autobus urbains. On fabrique aussi des
véhicules zéro émission de tout type et on compte des entreprises et des
fournisseurs qui oeuvrent dans les... l'infrastructure de recharge, les
solutions de gestion énergétique, la fabrication, l'assemblage, la récupération
et le recyclage de batteries et de composants critiques, dans les services de
mobilité et de gestion et de parc de véhicules. Donc, on bénéficie d'une
filière qui a tous les ingrédients pour... pour contribuer à une croissance
propre de l'économie. Et, en électrifiant nos transports, on vient réduire
notre dépendance au pétrole importé...
M. Laprés-Paradis (Alexis) :
...on vient valoriser notre hydroélectricité, on renforce notre souveraineté
énergétique puis on crée des emplois de qualité dans un secteur primordial. Le
secteur de l'électrification des transports, c'est plus de
50 000 emplois au Québec à l'heure actuelle. C'est un secteur aussi
où on peut avoir un impact très rapide et très structurant. Par exemple, un
véhicule zéro émission va consommer 80 % moins de GES lorsqu'il est
rechargé avec de l'hydroélectricité qu'un véhicule à essence régulier. On dispose
d'énergie et d'énergies propres au Québec, donc il faut vraiment l'utiliser à
bon escient. Puis un autre impact concret, c'est qu'un camion classe 8, là,
donc un 18 roues qui fait Montréal-Québec à tous les jours va produire
environ 130 tonnes de CO2 par année. Passer à un mode zéro
émission pour ce type de véhicule, c'est vraiment bénéfique pour le Québec,
pour les cibles, puis, aujourd'hui, on a moins de 1 % des véhicules moyens
lourds immatriculés au Québec qui sont électriques. Et quand on regarde les véhicules
de classe 8, c'est 0,1 % de ces véhicules qui sont électrifiés. Il y
a vraiment manière d'avoir des gains rapides dans ce secteur-là.
Donc, au cours des dernières années, le
Québec a fait preuve d'un leadership remarquable en matière d'électrification
de développement de la filière des véhicules zéro émission, le Plan pour une
économie verte, le marché pour le carbone, on a pu investir massivement dans la
décarbonation du transport léger, moyen, lourd, collectif et scolaire. On a
aussi assuré le déploiement d'un réseau de recharge qui fait l'envie des autres
provinces du Canada. Mais pour rentabiliser nos efforts et consolider ce que
nous avons bâti, il faut garder le cap. Les retombées seront majeures, mais
peut-être qu'elles vont prendre un petit peu plus de temps à se matérialiser.
• (11 h 20) •
On invite donc le gouvernement à
poursuivre la transition énergétique de zéro émission en maintenant des
incitatifs robustes, tels que Roulez vert et le programme Écocamionnage dont
nous saluons la relance aujourd'hui même, qui va être extrêmement bénéfique
pour le secteur. Ça va également prendre des réglementations prévisibles et
ambitieuses, une volonté claire de développer ici même une économie résiliente
et porteuse d'avenir pour les générations futures. Les sommes récoltées à
travers le marché du carbone doivent également être absolument utilisées
uniquement pour la lutte contre les changements climatiques.
Puis, en terminant, j'invite le
gouvernement aussi à jouer un rôle d'exemplarité en électrifiant davantage ses
propres flottes, ses parcs de véhicules publics, afin d'envoyer un signal
clair, fort et créer un effet de vitrine pour tous les acheteurs du Québec.
Donc, je vous remercie pour votre attention puis ça va me faire plaisir de
prendre des questions par la suite.
M. Breton (Daniel) : Vous
connaissez tous l'expression «Maîtres chez nous». Celle-ci a été évoquée pour
la première fois en 1933 par le Dr Philippe Hamel, qui fut le premier à évoquer
l'idée de la nationalisation au Québec. C'est cependant en 1962 que l'envol
d'Hydro-Québec s'est amorcé grâce à René Lévesque et Jean Lesage lors de
l'élection référendaire sur la nationalisation de l'électricité. Inspiré par ce
mouvement, j'ai lancé, il y a 20 ans, en 2005, le groupe Maîtres chez nous
au XXIᵉ siècle, dont la mission était de faire l'indépendance des énergies
fossiles grâce, entre autres, à l'électrification des transports. Il y a
12 ans, la première ministre, Pauline Marois, lançait la première
stratégie d'électrification des transports du Québec, la première au Canada, en
fait, stratégie dont j'étais responsable et qui a fait du Québec un leader. 12
ans plus tard, entendre le premier ministre, François Legault, parler de la
diminution de notre dépendance au pétrole, qui nous coûte 1 milliard par
mois et du ministre, Bernard Drainville, parler de souveraineté énergétique,
c'est de la musique à mes oreilles. La source numéro un de notre dépendance au
pétrole, c'est le secteur des transports. Or, la transition vers les véhicules
électriques commence à avoir un effet réel. Entre 2015 et 2024, alors que le
parc de véhicules légers a augmenté de 7 %, les ventes nettes d'essence
pour véhicules légers ont diminué de 10 %.
Un autre aspect important de la
conversation actuelle que les gens oublient et celui de la pollution
atmosphérique causée par la circulation automobile. Selon Santé Canada, son
impact représente plus de 400 décès prématurés et plus de 2 milliards
annuellement au Québec. Cela dit, considérons que le détournement du 1,8 milliard
du FECC vers les fonds des générations est un geste qui est en contradiction
directe avec le plan économique du gouvernement. En effet, il est écrit en
page 19 du plan : «Le Québec a tout avantage à remplacer les énergies
fossiles importées par des énergies renouvelables locales». Nous sommes
100 % d'accord. Alors, pourquoi le gouvernement a-t-il bloqué des
programmes qui a nui à des travailleurs et des entreprises qui travaillent
justement à celle-ci? Prenons par exemple la stratégie québécoise sur la
recharge des véhicules électriques. Un pourcentage significatif des fonds de
514 millions qui devaient être consacrés à la recharge ont été bloqué
depuis le début de l'année, causant ainsi des pertes d'emplois et retardant la
transition énergétique.
Parlons maintenant de minéraux critiques.
Il est important de souligner que le soutien du gouvernement du Canada et du
Québec envers les minéraux critiques oublie complètement le recyclage de
ceux-ci, alors que cela doit faire partie intégrante d'un plan complet. D'ici
2030, 40 000 tonnes de minéraux critiques et stratégiques contenues
dans les batteries recyclées au Québec auront une valeur d'environ
850 millions de dollars canadiens au prix des métaux aujourd'hui. Pour la
période 2035-2040...
M. Breton (Daniel) : ...on
parle d'à peu près 4,5 milliards de dollars. Au Québec, il y a une
compagnie qui recycle les minéraux critiques... technologie, qui est
aujourd'hui à deux doigts de fermer, faute de batteries à recycler en quantité
suffisante, car celles-ci durent plus longtemps que prévu. Si le gouvernement
du Québec laisse tomber... ces minéraux seront récupérés par des entreprises
américaines, ce qu'on voit déjà sur le terrain, ce qui contribuera à la fuite
d'au moins 40 000 tonnes de minéraux critiques d'ici 2031.
Pour bien comprendre ce que ce chiffre de
40000 tonnes représente, on parle d'environ 1,1 million de batteries
de voitures électriques avec un pourcentage de 10 % de... de matériaux
recyclés dans chaque batterie. D'un point de vue économique, écologique et
géostratégique, c'est totalement incohérent.
Voici donc nos six recommandations.
Un : Garder l'objectif de réduction de 37,5 % d'ici 2030. 2 :
Mettre en place des stratégies pour décourager l'auto solo et encourager le
transport collectif, le transport actif, le covoiturage et l'autopartage
électrique. Trois : Garder la norme zéro émission à 90 % en 2035. Ça,
je l'ai dit publiquement, je suis d'accord avec cet objectif-là. On considère
que c'est raisonnable. Cela dit, enlever les véhicules hybrides non
rechargeables des véhicules zéro émission. Au Québec, sur 85 % de la vie
utile d'un véhicule hybride, celui-ci va émettre entre 360 et 1400 fois
plus de GES par kilomètre qu'un véhicule électrique équivalant. Quatre :
Relancer la stratégie des infrastructures de recharge. Cinq : Le cinq,
c'était écocamionnage à relancer, mais c'est fait. Donc, félicitations, je vous
remercie.
Puis six : Faire en sorte que nos
traversiers électriques soient fabriqués au Québec. Parce que là, il y a
200 millions sur la table pour fabriquer des traversiers électriques. Puis
la STQ dit : Nous autres, on n'a pas l'intention de faire un appel
d'offres qui va favoriser le contenu québécois. Ça fait qu'on veut que les
traversiers électriques, qu'ils soient fabriqués ici.
Donc, près de 100 ans après le
premier Maître chez nous du docteur Philippe Hamel, il est plus que temps que
nous bouclions la boucle. Lutter contre les changements climatiques et diminuer
notre dépendance au pétrole, c'est créer des emplois ici, tout en sauvant des
milliers de vies et des milliards de dollars. Merci.
La Présidente (Mme Nichols) :
Merci beaucoup. Merci pour vos exposés respectifs. Merci d'être rentré dans le
temps, dans le temps permis. Je... On va commencer la période d'échange et je
vais céder le premier bloc à M. le ministre pour 16 minutes
30 secondes.
M. Drainville : Merci. Merci
pour vos présentations respectives et pour votre présence. Si je vous comprends
bien, Daniel Breton... puis, si jamais je passe au tutoiement avec M. Breton,
je m'en excuse d'emblée, on a déjà été collègues, alors ça se peut que le
tutoiement revienne au galop puisqu'il est naturel. Mais si je vous comprends
bien, donc, Daniel, vous avez dit... ou M. Breton, vous avez dit : 2035,
la cible de 90 VZE pour 2035, c'est correct, en autant qu'on retire,
disiez-vous, les hybrides branchables...
M. Breton (Daniel) : ...
M. Drainville : Les hybrides
non branchables. Oui, mais les hybrides non branchables, comme vous le saviez,
on les garde, mais pas longtemps, hein? Ils sont là pour deux ans, si je ne
m'abuse.
M. Breton (Daniel) : Trois
ans.
M. Drainville : Il faudrait
que je revoie le calendrier, trois ans, oui, mais, donc, les hybrides
branchables puis qu'on les...
M. Breton (Daniel) : C'est
correct, on est capable de vivre avec ça.
M. Drainville : ...qu'on les
calcule dans la cible, vous êtes à l'aise avec ça.
M. Breton (Daniel) : Oui, ça
fait partie de la définition des véhicules zéro émission. Tu as les hybrides rechargeables,
les électriques puis les hydrogènes.
M. Drainville : J'en suis
fort aise. Donc, si je vous comprends bien, cette cible-là de 90 %,
incluant donc les hybrides branchables, ce n'est pas un obstacle pour arriver à
l'atteinte de la cible de moins 37,5 % en 2030. Parce qu'évidemment, si on
a... on est obligé de ralentir un peu le rythme, si, au lieu d'être à
100 % en 2035...
M. Breton (Daniel) : Bien, on
est à 90 %.
M. Drainville : ...à
90 %, donc on accepte de ralentir un peu le rythme de l'électrification,
mais ce ralentissement-là, à votre avis, ne met pas en péril ou ne sera pas un
obstacle à l'atteinte du moins 37,5 % d'ici 2030?
M. Breton (Daniel) : En fait,
ça va descendre... ça va dépendre des cibles intérimaires. C'est-à-dire que si,
par exemple, en 2030, on dit : On va être à 30 %, c'est certain que
ça va lui nuire. Autrement dit, ça nous prend quand même des cibles
ambitieuses. On était à 85 % initialement. Si on descend un peu, on
considère que c'est correct. Il ne faut pas descendre trop. Ce que certains
représentants de l'industrie automobile traditionnelle préconisent... Il y en a
même qui disent : il faudrait faire disparaître la norme zéro émission
complètement, mais on pense que c'est tout à fait atteignable. Puis il y a une
chose que les gens ne savent pas encore, parce que ce n'est pas encore public,
mais, quand on regarde les crédits zéro émission qui ont été accumulés par les
constructeurs automobiles dans les années précédentes, ils nagent dans les
surplus de crédits, ce qui fait en sorte que leurs obligations de vente des
véhicules électriques à court terme sont assez basses. Parce que, quand on est
à se retrouver à 42 % de ventes de véhicules zéro émission au quatrième
trimestre de 2024, ça fait qu'ils en ont accumulé tellement qu'on se retrouve
un peu dans la situation de la Californie où ce qu'on a vu en Californie, dans
les faits, c'est que les constructeurs avaient tellement trop de crédits que...
M. Breton (Daniel) : ...finalement,
ça ne leur donnait pas beaucoup de pression pour en vendre beaucoup dans les
prochaines mois et années, là.
M. Drainville : Moi, l'enjeu
que j'ai, je ne cesse de le répéter, puis je cherche... je cherche à répondre à
cet enjeu-là, c'est vraiment le temps, le peu de temps qu'il nous reste
jusqu'en 2030 pour atteindre la cible. Et ce que j'entends de la part de
beaucoup de groupes, là... bien, enfin, la vaste majorité des groupes qui
souhaitent que la cible soit maintenue, quand je leur pose cette question-là,
ils ne répondent jamais vraiment à la... à la question. Ils... Ils ne répondent
jamais vraiment à la question du risque économique. Ils... Ils se contentent de
dire : Bien, écoute, si tu ne la maintiens pas, cette cible-là, tu vas
démobiliser.
M. Breton (Daniel) : En
fait...
M. Drainville : Tu sais,
ils... ils ne me disent pas, là : Bien, regardez, là, le 18 %,
19 % qui manque, là, voici comment on pourrait l'atteindre sans causer de
choc économique, là. Ils... Ils ne répondent pas à cette question-là. Ils me disent :
Bien, écoute, si tu renonces à ça, tu renonces au leadership du Québec, si tu
renonces à ça, tu vas créer de l'incertitude, tu vas démobiliser, etc., etc.,
et donc cette démobilisation en aura plus d'impacts négatifs... y compris
d'impacts économiques négatifs, à moyen long terme, qu'est-ce que tu vas gagner
à court terme? Là, je résume un peu grossièrement, là, mais c'est un petit peu
ça, la réponse. Je comprends, je comprends, mais je trouve ça court un petit
peu.
• (11 h 30) •
M. Breton (Daniel) : Bien,
écoute, M. le ministre, ou Bernard, en fait, quand Hydro-Québec dit qu'ils
veulent investir 200 milliards d'ici 2035 pour faire en sorte de se
lancer dans la production d'électricité puis faire de l'efficacité énergétique,
le... pour moi, le vrai défi, ce ne sera pas tant la création d'emplois, ça va
être de trouver des gens qualifiés pour faire ce travail-là dans un temps si
court. Et, quand on regarde l'électrification des transports, puis tu l'as dit,
on est à 50 000 emplois présentement, l'électrification des
transports au Québec, 130 000 au Canada, on parle d'à peu près
350 000 à 600 000 emplois au Canada en électrification des
transports, ça fait que si on dit on ralentit... Puis c'est ce qu'on voit
d'ailleurs au sud de la frontière. Aux États-Unis, le gouvernement a décidé de
laisser tomber la réglementation, de laisser tomber les subventions. GM
dit : À cause de ça, on a mis des gens à pied. Ils ont mis des milliers de
gens à pied parce qu'ils disent : Bien là, maintenant, on n'a plus de signal
fort à court terme dans le sens de l'électrification des transports, ce qui
coûte des emplois aux États-Unis. Donc, pour moi, quand on parle de créer des
emplois et créer de la richesse en faisant de la transition énergétique, on le
rappelle, 1 milliard de dollars par mois que ça nous coûte pour
importer des hydrocarbures, de l'essence et du diésel au Québec, bien, la
réalité, c'est que ce n'est pas que ça va nous coûter des emplois, de lutter
contre les changements climatiques, c'est le contraire qui va coûter des
emplois, et c'est le contraire qui va augmenter notre déficit commercial.
M. Drainville : M.
Laprés-Paradis, je pense que vous souhaitiez ajouter à cela. Non? Je vous
voyais...
M. Laprés-Paradis (Alexis) : Oui,
si je peux me... si je peux me permettre, il y a également un risque économique
à rater cette cible-là. On a mentionné les emplois, mais de passer dans une
dynamique de gestion de crise en termes de... de catastrophes naturelles, ça a
un coût également pour le Québec. Donc, d'être en mode atténuation, de prévenir
plutôt que de guérir, il y a vraiment des avantages concrets dans les
prochaines années, avoir une approche qui est beaucoup plus proactive dans les
prochaines années.
M. Drainville : ...Laprés-Paradis,
si vous me permettez de... des vous interrompre, là. Même si on arrêtait toute
émission de GES au Québec, là, si on décidait, là, qu'on arrête l'économie, on
la met au frigidaire, là, ça ne changerait rien aux impacts météorologiques que
nous allons subir ces dernières... ces prochaines années, là. Ça, à un moment
donné, il faut... il faut se le dire, là. On représente 0.16 % des GES sur
la planète, là. Alors, il faut se garder de laisser entendre aux Québécois...
puis parfois, je trouve qu'il y a un petit peu de ça, là, dans la surenchère
de... de rhétorique. C'est comme si on disait : Si tu n'atteins pas la
cible de moins 37,5, là, il va y avoir encore plus de catastrophes
météorologiques au Québec qu'il y en a déjà, là. Attention, là Attention.
Par contre, là où vous auriez raison,
c'est de dire : Si on n'investit pas suffisamment, par exemple, dans
l'adaptation climatique ces prochaines années, ah bien, là, oui, je pense que
là, il y aura un impact immédiat. Donc, il faut faire attention. Puis je ne suis
pas en train de dire, là, que le Québec doit se désengager, là. Je ne cesse de
répéter qu'on doit rester les leaders, qu'on est numéro un en GES par habitant
puis on va maintenir cette position de leadership. On a notre... notre... notre
part à faire, à contribuer pour la lutte contre les GES, là. Je... J'ai
toujours peur que quelqu'un va prendre un... juste un bout de phrase, là, puis
il va essayer de me dépeindre, comme ça s'est fait déjà, mettons, là, pour une
certaine déclaration. Alors, je... je veux vraiment qu'on... qu'on ne perde pas
de vue, là, que oui, il faut faire notre part, mais même si on cessait de la
faire, là, on vivrait avec, malheureusement... avec l'émission de GES qui sont
déjà présentes dans l'atmosphère....
11 h 30 (version non révisée)
M. Drainville : ...pour de
nombreuses années. Je referme cette parenthèse. Et juste avant, Daniel, vous
vouliez, je pense, compléter?
M. Laprés-Paradis (Alexis) : Bien,
je pense qu'il y a quand même un aspect aussi là, de confort local en termes, là,
d'émissions de GES si on pollue dans nos milieux de vie, si on pollue, par
exemple, dans des villes, c'est un impact qui va se sentir beaucoup plus par
les citoyens qui vivent dans ces villes-là. Donc, en décarbonant les transports
dans les villes, on vient quand même faire...
M. Drainville : Au niveau des
particules, par exemple, là?
M. Laprés-Paradis (Alexis) : Au
niveau des particules, puis Daniel, peut-être, je te laisse...
M. Breton (Daniel) : Bien,
c'est ça. En fait, c'est que les émissions de gaz à effet de serre sont
globales. Les émissions de pollution atmosphérique, c'est local. Et quand on
parle... quand on parle de 400 décès prématurés au Québec par année, à peu près
2 milliards d'impacts économiques, en Californie, ils ont commencé à faire des
analyses, à savoir quels étaient les gains économiques faits par les coûts en
soins de santé, en faisant la transition vers les véhicules électriques. Donc,
ça veut dire qu'on va sauver de l'argent en coûts de santé plus on va
électrifier nos véhicules. Donc, ça aussi, ça fait partie de l'équation lorsqu'il
est question de gains économiques puis de gains en soins de santé. Puis Dieu
sait que des coûts de santé, là, ce n'est pas ça qui manque ces temps-ci. Ça
fait que si on peut aller sauver de l'argent de ce côté-là, ça, c'est un gain. Et
c'est un gain local.
M. Drainville : Le terme que vous
utilisez, c'est pollution atmosphérique versus...
M. Breton (Daniel) : Oui.
M. Drainville : ...émissions...
M. Breton (Daniel) : De gaz à
effet de serre.
M. Drainville : Très bien. Très
bien. Si vous aviez la possibilité, si vous étiez omnipotents, là, puis vous
aviez tous les pouvoirs, puis vous aviez accès à tous les leviers, quelle
serait la mesure ou les deux mesures prioritaires que vous souhaiteriez mettre
en place d'ici... bien enfin, dans les médias, pour possiblement se rapprocher
du -37,5 de 2030? Tu sais, ça vous oblige à prioriser, là. C'est...
M. Laprés-Paradis (Alexis) : Oui.
M. Drainville : Allez-y.
M. Laprés-Paradis (Alexis) : De
mettre tout en œuvre pour électrifier les véhicules moyens lourds, c'est un
secteur qui a une courbe d'adoption, qui est très... qui est très jeune. En ce
moment, on a moins de 1 % des véhicules moyens lourds qui sont électrifiés
au Québec...
M. Drainville : Définissez
qu'est-ce que c'est moyens lourds. C'est les pick-ups, ça? C'est quoi?
M. Laprés-Paradis (Alexis) : Donc,
on part, d'un petit peu en haut...
M. Drainville : VUS?
M. Laprés-Paradis (Alexis) : ...en
haut des pick-ups...
M. Breton (Daniel) : Camions
de livraison. Non, non. Camions de livraison.
M. Laprés-Paradis (Alexis) :
Jusqu'aux 4 à 8.
M. Drainville : OK. Moyens
lourds c'est... on tombe déjà... on est camions, là?
Des voix : Oui.
M. Drainville : OK. Donc,
véhicules légers, ça inclut les pick-ups?
M. Breton (Daniel) : Bien,
c'est parce que, tu as des pick-ups légers, puis tu as des pick-ups moyens
lourds.
M. Drainville : Oui.
M. Breton (Daniel) : F-150 c'est
un... léger. 3-50, 4-50, 5-50, c'est du lourd. Moyen, puis là après ça tu as
les gros...
M. Drainville : Mais la
majorité des pick-ups sont dans le léger?
M. Breton (Daniel) : La
majorité des pick-ups sont dans le léger.
M. Drainville : Les VUS sont
aussi légers?
M. Breton (Daniel) : Oui.
M. Drainville : Ça fait que
quand vous parlez moyens lourds, vous parlez vraiment du camionnage?
M. Breton (Daniel) : C'est ça.
M. Drainville : Donc, la
nouvelle de cette année... de cette année, de ce matin, de ce matin, dis-je
bien...
M. Breton (Daniel) : C'est
une bonne nouvelle.
M. Drainville : Ça, vous êtes
contents, là. Je veux juste vous dire, là, parce que vous, vous le savez...
M. Laprés-Paradis (Alexis) :
On la salue.
M. Drainville : ...vous le
savez, mais le vaste public qui nous écoute n'en est peut-être pas tout à fait
conscient, mais Écocamionnage, là, ça a permis de retirer l'équivalent de plus
de 15 000 véhicules légers des routes du Québec. On comprend maintenant ce qu'un
véhicule léger implique, ce n'est pas juste les voitures, c'est aussi les pick-ups.
Alors, chaque année, Écocamionnage retire l'équivalent de 15 000 véhicules
légers. Ça, c'est le programme Écocamionnage qu'on a renouvelé, qu'on vient de
renouveler. 145.4 millions pour les trois prochaines années. Mme la Présidente,
dans un instant, ce sera le tour de l'opposition qui pourra faire la vague,
tellement ils vont être heureux, n'est-ce pas, de cette nouvelle? Oh boy. Je ne
sens pas beaucoup d'enthousiasme de l'autre côté, c'est bien dommage. Il faut
se... il faut se réjouir, Mme la Présidente, je le dis comme ça, en passant. Il
faut se réjouir lorsqu'il y a des bonnes nouvelles parce que c'est du carburant
pour continuer la marche. Il faut que les citoyens, une fois de temps en temps,
voient qu'il y a des gains positifs. Puis, nonobstant le parti ou le
gouvernement qui est au pouvoir, quand il y a des gains comme ça, il faut savoir,
je pense, les célébrer et les souligner. J'ai... Alors, vous, vous allez sur l'électrification,
donc, des véhicules moyens et lourds. Ça, ça serait votre première mesure?
M. Laprés-Paradis (Alexis) : Ma
seconde mesure, ce serait de réduire l'auto solo.
M. Drainville : Le?
M. Laprés-Paradis (Alexis) :
L'auto solo. Donc, de faire du transfert modal, de réduire le nombre de
véhicules qu'il y a sur les routes du Québec.
M. Drainville : Alors, on
fait ça comment? Dans le document de consultation pour cette commission, il est
question, notamment, d'interdire la circulation pour certaines journées des
véhicules à essence. Est-ce que c'est une mesure avec laquelle vous seriez à l'aise,
vous? De dire à quelqu'un qui a une voiture à essence, je ne peux pas la
prendre une journée par semaine, mettons?
M. Laprés-Paradis (Alexis) : Pas
à ce stade-ci.
M. Drainville : Pourquoi?
M. Laprés-Paradis (Alexis) : Parce
qu'on est encore en train de faire de l'adoption en termes de véhicules zéro
émission. Donc, pour l'instant, nous, ce qu'on veut, c'est qu'il y ait des
incitatifs forts, qu'il y ait des infrastructures de recharge qui soient
déployées, qu'on s'assure que les... que l'utilisation des véhicules zéro
émission soit la plus agréable possible. On n'est pas dans une dynamique où on
veut pénaliser indûment d'autres usagers de la route.
M. Drainville : OK. Alors,
on fait ça comment...
M. Drainville : ...la deuxième
mesure que vous venez de soumettre, là, vous avez dit : on doit réduire
l'auto solo, hein? C'est bien ça?
M. Laprés-Paradis (Alexis) : Donc,
on favorise le covoiturage, on favorise l'utilisation du transport en commun,
on augmente l'offre du transport en commun, on donne des solutions de location
de voiture qui sont plus... qui sont plus faciles à utiliser. Tout ce qui
permet de limiter le fait qu'il y ait un usager dans une voiture, ce sont
des... ce sont des mesures pour lesquelles on va être favorables.
M. Drainville : Vous,
l'augmentation de la taxe sur l'essence, vous en pensez quoi? C'est un exemple,
c'est un exemple qui est donné dans le document de consultation. Ce n'est certainement
pas une option que nous envisageons présentement, je le dis d'emblée pour ne
pas que notre vaste public pense que ça fait partie des options. Mais c'est
dans le document de consultation de la commission, il en est question.
M. Breton (Daniel) : En fait,
personnellement, moi, je suis contre l'augmentation de la taxe sur l'essence
parce que c'est une taxe régressive, c'est-à-dire que les gens qui sont les
moins fortunés sont affectés disproportionnellement et les gens les plus
fortunés s'en foutent complètement. Ça fait que moi, ce dont je parle depuis,
mon Dieu, je ne sais plus combien d'années, là, des décennies, c'est le
bonus-malus, c'est-à-dire un bonus pour se procurer un véhicule plus vert, puis
un malus pour les gens qui achètent ce qu'on appelle des gas guzzlers.
Ça, écoutez, ce n'est pas une nouveauté, on voit ça en Europe. Mais même le
gouvernement conservateur de Steven Harper en 2007 avait fait un bonus-malus
fiscalement neutre qui ne coûtait rien à l'État, où tu avais un 20 % des
véhicules les plus verts qui avaient droit à des crédits et le 20 % des
véhicules les plus polluants qui finançaient l'achat des véhicules les plus
verts. Et ça, c'est... non seulement, ça aide à l'adoption de véhicules
électriques, mais ça décourage l'achat de véhicules polluants. Ça fait que ça,
ce fameux bonus-malus-là, là, écoutez, j'étais ministre, puis j'avais des
collègues qui ne voulait rien savoir de ça parce qu'ils me disaient : dans
mon comté, il y a des gens qui ont des pickups. Bien, là, il y a des pickups
électriques. Ça fait que, tout ça pour dire qu'on devrait aller là. Ça, pour
moi, c'est évident que ça fait partie des solutions. Il y a, quand tu
dis : décourager l'auto solo. Écoutez, l'auto solo, même électrique, ça
cause de la congestion. Donc ça veut dire qu'il faut, effectivement, encourager
dans les régions urbaines, l'autopartage, le covoiturage, le transport
collectif, le transport actif, c'est une évidence qu'on répète à tue-tête
depuis des décennies.
• (11 h 40) •
M. Drainville : Je veux juste
dire, parce qu'il me reste une minute... Daniel. Il y a des représentants des
constructeurs automobiles, hein, qui sont venus ici plus tôt.
M. Breton (Daniel) : Oui,
oui, je les ai entendus.
M. Drainville : ...et qui
nous ont dit qu'au rythme actuel, eux prévoient que l'industrie sera capable de
livrer 37 % de véhicules électriques en 2030, 37 % de ventes
annuelles. Alors, les ventes, c'est...
M. Breton (Daniel) : C'est un
énorme mensonge.
M. Drainville : Les ventes
annuelles représentent à peu près 7 % des ventes du parc automobile chaque
année, hein, chaque année, on renouvelle 7 %, à peu près, du parc
automobile. Et eux disent : de ce 7 % en 2030, ce sera à peu près le
tiers qui seront des véhicules électriques ou électriques branchables. Vous ne
croyez pas ça, vous?
M. Breton (Daniel) : C'est un
énorme mensonge. Pourquoi est ce qu'en Norvège, dans un pays où il y a 5.5
millions d'habitants, ils sont à 98 % de vente de véhicules électriques,
ils sont capables de fournir là, mais ils ne sont pas capables de fournir ici?
Ils vous mentent en plein visage. Là où il y a de la réglementation, ils vont
toujours répondre à la réglementation. Où que ce soit sur la planète, que ce
soit au Québec, que ce soit à B-C, que ce soit en Californie, que ce soit en
Europe. Ça fait que quand ils vous racontent ça, c'est comme s'ils
disaient : bien là, il y a des constructeurs qui vont en offrir moins pour
atteindre leurs objectifs. Bien, s'il y a un constructeur qui en offre moins,
l'autre constructeur à côté, lui, il va en offrir plus et il va prendre ses
parts de marché. C'est ça qu'on a vu partout dans le monde. La norme zéro
émission est entrée en vigueur il y a 35 ans en Californie. Il n'y a pas un
constructeur qui a arrêté de vendre des véhicules en Californie ou qui a
dit : je me retire du marché californien ou du marché norvégien, ou du
marché allemand ou français. Je trouve ça hallucinant qu'il y ait des gens de
l'industrie qui viennent vous raconter des bobards gigantesques comme ça.
La Présidente (Mme Nichols) : Très
bien, merci beaucoup. Alors juste avant de céder la parole à l'opposition
officielle, un petit mot pour dire que j'ai autorisé un photographe, là, il y a
un photographe qui fait un reportage sur notre secrétaire et le travail
atypique. Alors voilà, il est autorisé, je ne voulais juste pas que les
collègues se posent... se pose de questions. Alors je cède maintenant la parole
à la députée des Mille-Îles.
Mme Dufour : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. D'abord, j'aimerais vous remercier, à vous trois, d'être ici
aujourd'hui. On s'est déjà vu dans d'autres commissions parlementaires,
notamment le projet de loi n° 81 où on a, justement, abondamment discuté des
normes zéro émission, incluant les véhicules... les... moyens lourds. Peut-être
juste... on parlait juste avant, là... M. le ministre parlait avec M. Breton
de... de ce que, dans le fond, de... les affirmations, là, qui ont été faites
par l'industrie de la construction automobile. J'ai vu, récemment, M. Breton,
une vidéo que vous avez faite, où vous avez fait la tournée des... des
concessionnaires, exactement. J'aimerais peut-être que vous disiez à notre
commission...
Mme Dufour : ...les
pourcentages de ventes de véhicules électriques qui ont eu lieu cette année,
alors que déjà la... les subventions sont moindres et qu'il n'y a pas celle du
fédéral.
M. Breton (Daniel) :
Merci. Écoutez. Moi, ce que j'ai fait, c'est que je travaille depuis des années
avec les concessionnaires de Saint-Hyacinthe pour faire en sorte qu'on
encourage la vente de véhicules électriques. On forme les gens, on fait un
salon, etc. Ça fait que je leur ai demandé de me sortir les chiffres parce que,
moi, j'étais à la Chambre des communes pour parler à peu près du même sujet il
y a un mois. Et puis, là, il y avait quelqu'un qui disait : Non, non, mais
les ventes de véhicules électriques, ça ne va pas bien. C'est épouvantable.
Puis donc, j'ai fait sortir les chiffres. À Saint-Hyacinthe, ce n'est pas
compliqué, les chiffres, c'est... J'ai demandé au concessionnaire Kia... Non,
Toyota. Il m'a dit : C'est quoi vos chiffres de ventes de véhicules
électriques hybrides rechargeables en octobre 2025? Il dit : C'est presque
20 %. J'ai demandé aux gens de Kia. Ils disent : C'est 20 %. Aux
gens de Hyundai, ils ont dit : C'est 30 %. Aux gens de Ford, ils ont
dit : C'est 33 %. Aux gens de GM, ils ont dit : C'est 40 %.
Puis aux gens de Mitsubishi, c'était 45 %. Ça fait que là, moi, les gens
dans l'Ouest canadien qui, eux autres, disent que c'est impossible de se
promener en voiture électrique en hiver au Canada parce qu'il fait trop froid
puis ça n'a pas de bon sens, je leur envoyais des chiffres. Je leur
disais : Écoutez. En Norvège, ils sont à 98 % puis, à ce que je
sache, la Norvège n'est pas un pays tropical. Ça fait que ça montre que quand
on veut vendre des véhicules électriques, on peut le faire. Pour moi, là,
Saint-Hyacinthe, c'est le parfait exemple de ça.
Mme Dufour : Ça, donc, ce
sont des chiffres qui vont au-delà de la...
M. Breton (Daniel) : Au-delà
de l'objectif de cette année.
Mme Dufour : ...de la
cible de cette année, exactement, sans aide fédérale. Donc, c'est quand même
impressionnant. Merci. J'ai entendu tout à l'heure le ministre aussi parler de
la bonne nouvelle du retour d'écocamionnage. Effectivement...
M. Breton (Daniel) :
C'est une bonne nouvelle.
Mme Dufour : ...c'était
attendu depuis longtemps. Par contre, j'aimerais entendre un ou l'autre, là,
des groupes dire quel a été l'impact de... du, dans le fond, de tous ces
mois-là où ça a été suspendu, où il y avait des groupes qui avaient passé des
commandes et qui étaient en attente, là. Parce que c'est une bonne nouvelle,
mais il y a quand même eu des effets négatifs dans le passé. J'aimerais vous
entendre là-dessus.
M. Laprés-Paradis (Alexis) :
Donc, il y a eu absolument des effets négatifs. L'un de ces effets-là, c'est
qu'on a... qu'on a ralenti sur la cible d'émission de GES qu'on pouvait réduire
pendant cette période-là parce que chaque véhicule moyen et lourd qui est sur
les routes pendant une durée plus longue vient réduire les émissions de GES de
la province pendant ce temps là. Donc ça, c'est d'une part le premier impact.
Il y a eu un impact, évidemment, qui a été financier, que ce soit pour des
concessionnaires de camions qui devaient garder les camions sur leurs terrains,
qui n'étaient pas vendus. Il y a également eu un impact au niveau de la
prévisibilité. Donc, il y a eu des emplois qui ont été... qui ont été perdus
chez certains constructeurs de camions de la province. Également aussi, il faut
savoir que les entreprises du Québec sont beaucoup des fournisseurs aussi des
fabricants de véhicules. Donc, ces entreprises-là subissent les impacts quand
il y a un ralentissement de la vente des véhicules électriques. Donc, ça a été
des... Ça a été assez dommageable pour les pour l'économie de l'électrification
des transports pendant les 15 derniers mois puis... Bien, puis voilà,
c'est vraiment là, les impacts qu'on a vus sur le terrain.
Mme Dufour : Merci.
Donc... Donc, c'est... Oui, madame, allez-y.
Mme Côté (Marie-Josée) :
J'allais juste compléter qu'en fait, quand on parle d'impact économique dans
notre filière, il y a beaucoup d'entreprises qui gravitent dans l'écosystème de
l'électrification des transports. On parlait des fournisseurs, mais il y a...
il y a aussi toutes les entreprises qui sont actives dans les infrastructures
de recharge, qui ont eu des impacts aussi, qui ont eu à installer moins de
structures de recharge, moins de gestion énergétique. Donc, ça a aussi des
impacts sur toute la chaîne, finalement, les reculs de l'électrification et la
suspension de certains programmes.
Mme Dufour : Donc, c'est
15 mois que j'ai entendu que ça a été suspendu. Je n'avais pas réalisé que
ça fait déjà plus d'un an, alors que l'argent, elle était là.
M. Breton (Daniel) :
L'argent était là.
Mme Dufour : Elle était
là, mais on ne la sortait pas. Et ça a finalement eu un impact économique important
pour l'industrie. Donc, est-ce qu'on... Oui.
M. Breton (Daniel) :
Mais si je peux ajouter quelque chose là-dessus, là, c'est qu'une des choses
que tout le monde dans toutes les industries disent, c'est la pire chose, c'est
l'incertitude de ne pas savoir où on s'en va. Ça fait que quand on avance, on
recule, on arrête, on avance, on recule, on arrête, on ne sait pas trop où on
s'en va, c'est toujours un mal de tête épouvantable, que ce soit au niveau des
tarifs, des programmes, etc. Ça fait que, ça, c'est vraiment un vrai enjeu où
on cherche à avoir une certaine prévisibilité pour quelques années, là. Ce
matin, ce qui était annoncé avec l'écocamionnage pour trois ans, là, on
dit : OK. Là, on peut respirer. Pendant trois ans, on va savoir où on s'en
va. C'est de ça dont on a besoin.
Mme Dufour : Mais...
Exact. Et vous avez parlé, M. Breton, plus tôt aussi d'autres argents
bloqués, 500 millions pour la recharge.
M. Breton (Daniel) :
Non, ce n'est pas 500 millions pour la recharge. C'est-à-dire que, sur le
500 millions, les fonds de cette année pour la recharge rapide a été...
ont été bloqués. Donc, il n'y a pas de bornes de recharge qui ont été
financées. Par exemple, le circuit électrique, nous, les fonds, là, pour la
phase 3 des bornes de recharge rapide, là, il n'y a pas d'argent qui a été
débloqué cette année. Donc, on est en attente de ça. Et donc ça nuit à la
planification, ça nuit à l'installation puis ça nuit aux emplois.
Mme Dufour : Mais juste
pour comprendre, ça, c'est c'est dans la planification que cet argent-là...
M. Breton (Daniel) : Et
l'installation.
Mme Dufour : C'est ça,
mais c'est dans la planification qu'est soit...
Mme Dufour : ...que cet
argent-là soit disponible cette année. Est-ce que c'était prévu?
M. Breton (Daniel) : C'était
prévu qu'il y ait de l'argent, puis ça a été bloqué.
Mme Dufour : Ça a été bloqué,
mais, en même temps, tu sais, on entend que le 1,8 milliard de surplus,
lui, va s'en va sans aller au Fonds des générations.
M. Breton (Daniel) : Il n'y a
pas de surplus.
Mme Dufour : Donc, il n'y a
pas de surplus parce qu'on aurait pu dépenser 500 millions.
M. Breton (Daniel) : Il n'y a
pas de surplus. C'est de l'argent pour des programmes qui auraient pu être
planifiés pour le transport collectif, le transport électrique. Moi, là, de
dire que c'est un surplus... de toute façon, c'est de l'argent dédié, c'était
de l'argent dédié.
Mme Dufour : Parfait. Et vous
avez parlé quand même de licenciements, là, que... tu sais, le fait que le
ralentissement pour les bornes de recharge... l'installation de nouvelles
bornes de recharge, en fait, ça a été imposé, finalement, par le manque...
M. Breton (Daniel) : Meilleur
exemple de ça, FLO, qui ont mis des gens à pied, et c'est pour des
infrastructures de recharge.
Mme Dufour : Oui. Et moi,
j'ai souvenir, dans l'étude du projet de loi n° 81,
que l'infrastructure de recharge était essentielle pour soutenir les cibles de
vente de véhicules électriques. Donc, quand on retarde, finalement, le
déploiement de bornes, on n'encourage pas la vente de véhicules électriques
parce qu'on a besoin de jouer sur la confiance du consommateur.
• (11 h 50) •
M. Breton (Daniel) : En plus
de ça, c'est... quand la stratégie de recharge a été mise, a été annoncée par
le gouvernement du Québec, le ministre des Finances avait dit : On va
diminuer les rabais d'achat de voitures électriques pour transférer les fonds
vers les infrastructures de recharge.
Mme Dufour : Exact, mais ce
n'est pas ce qu'il se fait actuellement.
M. Breton (Daniel) : Bien là,
ça a été bloqué. Donc, ça veut dire qu'il y a un enjeu, là. Ça fait qu'on ne
vienne pas parler de surplus du FECC quand tu dis : L'argent qui était
supposé être consacré aux bornes de recharge, bien, ils ne le sont pas cette
année.
Mme Dufour : Parfait. Dernier
point, vous avez parlé des traversiers électriques. Ça, c'est la première fois
que j'en entendais parler. Je sais que le ministre a beaucoup d'intérêt pour la
Davie, mais traversiers électriques, ce que je comprends, c'est qu'il y aurait
un potentiel économique important s'ils étaient construits chez nous. Est-ce
que vous pouvez nous en parler davantage?
M. Breton (Daniel) : Bien,
brièvement, en fait, c'est qu'il y a presque trois ans, il y a deux ans et
demi, la ministre des Transports à l'époque, Mme Guilbault, avait annoncé
200 millions pour deux traversiers électriques. Un serait Saint-Ignace, là
où je demeure et un à L'Isle-aux-Coudres. Et puis là, moi, à cette époque-là,
je disais : Wow, c'est le fun. Bonne nouvelle, on va électrifier nos
traversiers. En 2013, dans la stratégie de l'électrification des transports du
gouvernement, dont j'étais partie prenante, on voulait électrifier les
transports. En 2022, je suis allé en Norvège et quelle ne fut pas ma surprise
de voir que la majorité des traversiers étaient tous déjà électrique ou
presque. Donc, on arrive... on retourne au Québec, j'ai une assemblée publique
avec la Société des traversiers du Québec et je leur dis : Est-ce qu'il va
y avoir de la création d'emplois québécois dans la fabrication de ces
traversiers? Ils me disent : Non, nous autres, ça ne fait pas partie de
nos paramètres.
Donc, moi, je suis sorti sur la place
publique en disant : Écoutez, on a l'expertise au Québec pour faire des
traversiers électriques. On a évidemment des chantiers comme la Davie, comme
Groupe Océan et d'autres chantiers où on peut les faire au Québec et, en plus,
gouvernement fédéral, il dit : Nous autres, on veut du contenu canadien.
Et quand j'ai parlé à Transport Canada, il a dit : Nous autres, on est
prêts à mettre de l'argent sur la table si les traversiers sont faits au
Canada, s'il y a du contenu canadien. Parce BC Ferries, il y a quelques mois,
eux autres, ils ont donné le contrat à une compagnie chinoise. Ça fait que, là,
on dit : Est-ce que la STQ veut reproduire le même problème? La réponse,
c'est : Je pense que c'est une très mauvaise idée parce qu'on peut faire
ça ici et créer des emplois ici, dans la transition énergétique.
Mme Dufour : Exact, on a...
tu sais, on a la capacité de...
M. Breton (Daniel) : On est
capables, absolument.
Mme Dufour : ...de le faire,
et, une fois qu'on développe cette filière-là, après ça, j'imagine, c'est un
marché intéressant.
M. Breton (Daniel) : Partout
en Amérique du Nord, il y a un potentiel pour ça. Et, pour le moment, ceux qui
ramassent les contrats, c'est des compagnies scandinaves et des compagnies
chinoises. On peut le faire.
Mme Dufour : Bien, merci
beaucoup. Je pense que mon temps est presque écoulé.
La Présidente (Mme Nichols) :
Oui, alors...
Mme Dufour : Merci. Merci
beaucoup.
La Présidente (Mme Nichols) :
Merci. Je cède maintenant la parole au député de Taschereau,
3 min 20 s.
M. Grandmont : Merci
beaucoup, Mme la Présidente. Merci pour votre présence aujourd'hui. Vous
représentez quand même un groupe... une grappe industrielle quand même
importante au Québec puis fortement émettrice aussi, en quelque part, des
transports de gaz à effet de serre. Le ministre... on a rencontré plusieurs
autres représentants de l'industrie, puis le ministre a souvent, dans ces
discussions, axé sur la compétitivité. Si on essaie d'atteindre nos cibles de 37,5
en 2030, on risque d'être désavantagés par rapport à l'Ontario, par rapport aux
États-Unis, qui sont nos principaux concurrents économiques. Est-ce que vous
partagez cette vision-là dans le domaine que vous représentez?
M. Breton (Daniel) : En fait,
à savoir si on va être moins compétitifs parce que... En fait, moi, je vais
vous en raconter une très bonne. J'ai regardé le prix du carburant en Ontario
récemment, parce qu'ils ont enlevé la taxe fédérale, le prix du carbone
fédéral, puis eux autres, ils ont baissé la taxe en Ontario sur le prix de
l'essence. Normalement, il devrait y avoir une différence d'à peu près
0,27 $ à 0,28 $ le litre. La différence est de moins de 0,10 $.
Pourquoi? Bien, c'est les pétrolières qui ont récupéré le reste.
Ça fait que, tu sais, si on faisait
l'erreur de baisser le prix du carburant, qu'est-ce que vous pensez que les
pétrolières vont faire...
M. Breton (Daniel) : ...c'est
eux autres qui vont s'en mettre plein les poches. Donc, c'est pour ça que le
fait qui est tellement important, c'est que... l'idée, c'est de faire en sorte
d'aider à faire la transition vers l'électrification des transports. Puis, vous
savez, le gouvernement ontarien, présentement, met beaucoup d'argent sur la
table pour aider l'industrie automobile. Puis, moi, une chose que je veux
souligner, là... je ne sais pas si vous vous en rappelez, mais, en 2009, le
gouvernement fédéral, donc on est Canadiens, donc on doit payer aussi des
taxes, nous avons aidé collectivement GM et Chrysler à hauteur de 13,7
milliards de dollars pour se sortir de la faillite. En... Depuis deux,
trois ans, les mêmes trois constructeurs, Ford, GM, maintenant Stellantis, qui
était Chrysler, 20 milliards de dollars de soutien financier à ces
entreprises-là. Ça fait que, quand on vient me parler de compétitivité,
écoutez, c'est de notre argent qu'on met sur la table pour aider ces
entreprises-là. Puis, en plus, ces entreprises-là ont des exemptions sur les
contre-tarifs américains avec Donald Trump, mais ils ne veulent pas de réglementation,
puis ils ne veulent pas de compétition non plus des véhicules chinois puis ils
ne veulent pas de compétition des véhicules européens. Ça fait qu'ils veulent
les subventions, mais ils ne veulent pas la réglementation puis ils ne veulent
pas la compétition. Ça fait que, quand on parle de compétitivité du Québec,
écoutez, pour le moment, là, on est en très, très bonne position, et c'est pour
ça qu'on n'a pas d'enjeu pour faire la transition du tout.
M. Grandmont : Parfait,
merci. On parlait tantôt de... du programme Écocamionnage, on a essayé de
trouver l'information, mais ça représente combien? L'objectif du programme vise
une réduction de combien de pourcentage de gaz à effet de serre sur l'ensemble
des 43 et quelques pour cent, là, du secteur des transports? En fait, c'est
quoi, l'objectif d'Écocamionnage, si ce n'est réduire les émissions, là, mais
c'est quoi, le chiffre?
Mme Côté (Marie-Josée) : Bien,
en fait, le chiffre, je pense que ça dépend des segments. Mais l'objectif,
c'est vraiment de décarboner le secteur du transport de marchandises. Donc, ça
inclut autant les livraisons de marchandises pendulaires, livraisons
régionales, urbaines, dernier kilomètre, mais aussi le transport lourd. Il y a
des classes 8 qui se...
M. Grandmont : Mais ça
représente combien du total des émissions du Québec, mettons?
M. Laprés-Paradis (Alexis) : Le
secteur du transport lourd représente 30 % des émissions des GES du
secteur des transports.
M. Grandmont : 30 % du
43 %. Donc, on vise une réduction de 37 % de ce 30 % là de ce
43 % là.
Mme Côté (Marie-Josée) : Oui.
C'est environ...
M. Laprés-Paradis (Alexis) :
Si on fait des maths...
M. Grandmont : OK. Parfait.
Mme Côté (Marie-Josée) : C'est
environ 9 %.
La Présidente (Mme Nichols) : Merci.
Merci. Je dois céder la parole au député des Îles-de-la-Madeleine. Trois
minutes 20 secondes.
M. Arseneau : Merci, Mme la
Présidente. Merci à vous trois d'être présents. Je veux saluer à mon tour
l'excellente décision du gouvernement de relancer le programme Écocamionnage
une semaine, jour pour jour, après l'adoption d'une motion unanime que j'avais
déposée pour relancer le programme. Mon seul regret, c'est de ne pas avoir
déposé la motion il y a 12 mois, parce qu'on a attendu 15 mois pour la relance
du programme. On a parlé tout à l'heure des conséquences. Est-ce qu'on ne peut
pas faire un parallèle entre ça et puis justement l'idée de reporter les
cibles, de repousser les cibles? Est-ce qu'on ne risque pas justement d'avoir
le même genre d'effet, où finalement tout le monde est un petit peu en attente
de ce qui va se passer? On le voit également au fédéral avec la question des
rabais sur l'achat de véhicules électriques, qui ne sont pas sans lien,
j'imagine, avec la baisse du nombre de véhicules vendus. Est-ce que ce n'est
pas justement, là, une espèce d'exemple de ce qu'il ne faut pas faire lorsqu'on
est en mode transition énergétique, les reports puis les décisions qui sont
incertaines?
M. Breton (Daniel) : Oui.
Oui.
M. Arseneau : La réponse est
oui? Merci.
M. Breton (Daniel) : Je
pense, c'est assez simple. Tout le monde est un peu tanné de l'incertitude à
tous égards, que ce soit au fédéral, que ce soit aux États-Unis, que ce soit au
Canada.
M. Arseneau : Donc, garder le
cap.
M. Breton (Daniel) : C'est vraiment
infernal de voir à quel point c'est difficile à gérer, les programmes de
subventions, les programmes de réglementation, les programmes
d'infrastructures. Quand tout est sur le... sur pause, là, c'est... c'est le
pire scénario possible.
M. Arseneau : Les véhicules
lourds. Lorsqu'on a rencontré M. Kingston la semaine dernière, qui parlait de
l'industrie automobile, on faisait référence aux véhicules lourds et à la
transition nécessaire, l'électrification, comme étant quelque chose qui ne
semble pas tout à fait à point. On dit toujours que les technologies ne sont
pas au rendez-vous. Vous semblez dire le contraire. Puis là, avec la relance du
programme Écocamionnage, on veut savoir s'il y a des camions lourds qui peuvent
remplacer... électriques qui peuvent remplacer les camions à diesel.
M. Laprés-Paradis (Alexis) : Oui.
Ce qu'il faut savoir, c'est qu'environ 50 % des camions au Québec
parcourent moins de 200 kilomètres par jour... bien, par trajet. Donc, 200
kilomètres, c'est une autonomie qui est tout à fait dans les rangs de ce que
l'électrification des véhicules moyens, lourds peut offrir aujourd'hui. Donc,
il y a une opportunité d'électrifier une grande part du transport moyen, lourd
au Québec.
Puis, Daniel, je pense que...
M. Breton (Daniel) : Rapidement.
Écoutez, dans les années 50, les constructeurs avaient demandé cinq ans de
délai pour pouvoir installer les ceintures de sécurité, puis, après 15 ans, ce
n'était pas fait sans réglementation. Dans les années 70, ils disaient :
Écoutez, on n'y arrivera pas avec les systèmes antipollution, ça ne
fonctionnera pas, on va perdre des emplois. Dans les années 80, c'étaient les
coussins gonflables. Dans les années 90, c'étaient... les normes de
consommation. Dans les années 2000, c'étaient les normes de GES. Puis là on est
rendus en 2025, puis là ils disent : Bien, la transition vers les
véhicules...
M. Breton (Daniel) : ...ce
n'est pas possible. Donc, ça fait trois quarts de siècle qu'ils ne sont jamais
prêts, à moins qu'il y ait de la réglementation. C'est simple comme ça. Ça fait
que, là où je veux en venir, il faut rappeler que moi, j'étais ici le
4 février 2025, avec des camions légers, moyens et lourds, devant l'Assemblée
nationale, et qu'on est allés revirer à -30 degrés à Saint-Félicien, puis
après ça on est revenus à Montréal...
M. Arseneau : En terminant,
parce que je n'ai pas de temps. Est-ce que PACCAR ne veut pas justement se
tourner vers ça?
M. Breton (Daniel) : Bien
oui, absolument. Et PACCAR, et PACCAR a perdu des emplois à cause des tarifs,
et eux, ils veulent faire la transition vers la fabrication de camions moyens
et lourds électriques au Québec, vendus au Québec à travers le Canada. Donc, il
y a une opportunité pour les employés de PACCAR qui est extrêmement important.
M. Arseneau : Mais il y a
déjà eu des pertes d'emploi à PACCAR, mais on pourrait en recréer, se tourner
vers l'électrification du transport lourd.
M. Breton (Daniel) : Exactement.
Oui.
La Présidente (Mme Nichols) : Je
vous remercie.
M. Arseneau : Merci.
La Présidente (Mme Nichols) : Le
temps étant... le temps étant, hein, le temps étant écoulé, la commission va
suspendre ses travaux jusqu'après la période de questions et les avis touchant
les travaux de nos commissions. Je vous remercie de votre présence et de votre
contribution.
(Suspension de la séance à 12 heures)
15 h (version non révisée)
(Reprise à 15 h 32)
La Présidente (Mme Nichols) : Rebonjour
à tous, chers collègues, rebonjour à nos invités. Alors la Commission des
transports et de l'environnement reprend ses travaux. Nous allons poursuivre
les consultations particulières et les auditions publiques sur le document
intitulé Consultation sur la cible de réduction des émissions de gaz à effet de
serre du Québec. Cet après-midi nous entendrons les organismes suivants, soit Énergir
qui sont déjà arrivés, le Conseil patronal de l'environnement du Québec, l'Association
des manufacturiers exportateurs du Québec et M. Pierre-Olivier Pineau.
Alors, je souhaite la bienvenue à nos
invités qui ont été très patients. Merci, merci d'avoir patienté et je vous
rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre exposé, après quoi
nous allons procéder à la période d'échange avec les membres de la commission.
Je vous invite donc à vous présenter puis à commencer votre exposé.
M. Lanthier (Philippe) : Merci.
Mme la Présidente, M. le ministre, Mmes et MM. les députés membres de la
commission, je vous remercie de nous donner l'occasion de contribuer à cette
consultation sur la fixation des cibles de réduction des gaz à effet de serre
du Québec. Je suis Philippe Lanthier, directeur Développement durable,
changement climatique et politique publique, et je suis accompagné de mon
collègue Marc-Antoine Bellavance, directeur exécutif, Stratégie et intelligence
de marché.
À titre de principal distributeur gazier
du Québec, Énergir est pleinement consciente de la responsabilité qui lui
incombe dans la transition énergétique et la lutte au changement climatique.
Nous desservons plus de 210 000 clients situés dans plus de 340 municipalités
avec notre réseau qui fait plus de 11 000 kilomètres. Ce même réseau
jeune, résilient et bien entretenu permet annuellement de distribuer plus...
plus de 220 pétajoules, l'équivalent de plus de 60 térawattheures d'énergie,
tout en offrant une puissance équivalente à 17 000 mégawatts. En
termes de capacité de puissance, cela représente 40 % de celle du réseau d'Hydro-Québec
aujourd'hui. Énergir est présente aussi aux États-Unis dans la production et la
distribution électrique ainsi que la distribution gazière et nous sommes fiers
d'appartenir à des intérêts 100 % québécois, alors que nous sommes détenus
à 80,9 % par la Caisse de dépôt et placement du Québec et 19,1 % par
le Fonds de solidarité FTQ.
En 2022, la combustion du gaz naturel
représentait 14 % des émissions totales des émissions de GES du Québec.
Nous savons que pour atteindre la cible...
15 h 30 (version non révisée)
M. Lanthier (Philippe) : ...la
réduction de 37,5 % d'ici 2030, il faudra agir rapidement et efficacement.
C'est pourquoi Énergir s'est dotée d'une vision stratégique de décarbonation
pour les horizons 2030 et 2050. Développée en 2020, cette stratégie vise à
contribuer pleinement à l'atteinte de la cible 2030 du gouvernement du
Québec par des réductions des GES directement chez nos clients des secteurs
résidentiel, commercial, institutionnel et industriel. Notez par ailleurs que
nous suivons annuellement la progression de cette stratégie avec la publication
de notre rapport sur la résilience climatique.
Essentiellement, la vision d'Énergir
repose sur quatre piliers. La première, c'est l'efficacité énergétique pour
réduire la consommation par des projets concrets chez nos clients, c'est
vraiment le point de départ de notre parcours de décarbonation, et se fait à
des coûts à la tonne très compétitifs. Nous avons récemment célébré nos 25 ans
de projets en efficacité énergétique. Et, depuis 2001, Énergir a permis la
réalisation de 151 000 projets d'efficacité énergétique qui ont
permis de réduire 1,7 million de tonnes. On vise notamment d'avoir 1 million
de tonnes de réduction entre 2020 et 2030 dans notre stratégie.
Le deuxième pilier, l'offre en biénergie,
consiste à électrifier intelligemment le chauffage des bâtiments en partenariat
avec Hydro-Québec. Cette mesure permet de réduire de près de 70 % les GES
des clients du secteur du bâtiment en remplaçant le chauffage au gaz naturel
par l'électricité, sauf en période de grand froid. Le nombre actuel de clients
convertis à la biénergie contribue à des réductions annuelles de 21 000 tonnes.
Et la conversion se poursuit. On vise 300 000 tonnes à l'horizon 2030.
Le troisième pilier, le gaz de sources
renouvelables qui permet de remplacer progressivement le gaz naturel d'origine
fossile. La substitution de 10 % des volumes de gaz naturel fossile par du
GSR engendre des réductions annuelles de 1 million de tonnes de GES d'origine
fossile.
Enfin, le quatrième pilier de notre
stratégie vise la diversification énergétique avec des solutions comme la
géothermie, les boucles énergétiques et la valorisation des rejets thermiques
qui permettront non seulement de favoriser l'atténuation des émissions, mais
également d'amener d'autres retombées intéressantes pour le Québec en matière
de circularité, de gestion de... de la pointe et aussi de développement
territorial.
Ces initiatives visent dans un premier
temps à réduire les volumes distribués. Ensuite, on vient progressivement
décarboner les volumes résiduels et renforcer la résilience du système
énergétique québécois. Car la tentation de tout électrifier est grande, mais
elle comporte des risques, des coûts sociétaux élevés et une vulnérabilité
accrue aux réseaux électriques par rapport aux aléas climatiques.
Les initiatives de la vision stratégique d'Énergir
permettraient de réduire les émissions de nos clients dans le secteur du
bâtiment de l'ordre de 30 % entre 2020 et 2030, et pourrait ainsi
contribuer à la cible gouvernementale de réduire de 50 % les émissions
globales du secteur du bâtiment d'ici 2030 par rapport au niveau de 1990.
Dans le secteur industriel, Énergir ne
dispose pas de cibles spécifiques de réduction des émissions pour ce secteur à
l'horizon 2030, mais elle travaille à soutenir sa clientèle dans ce
secteur dans leurs efforts de décarbonation.
Cela étant dit, nous évaluons qu'à terme,
en 2050, près de 60 % des volumes consommés actuellement dans le secteur
industriel pourrait être réduit grâce à la combinaison de l'efficacité
énergétique et aussi de l'électrification. Il reste néanmoins que certains
procédés requièrent d'atteindre une haute température ou nécessitent une
molécule comme intrant pour lesquels les usages gaziers vont rester très pertinents
à long terme.
Nous croyons avant tout qu'une approche
équilibrée est donc nécessaire, prioriser l'électrification là où elle est
optimale, tout en migrant vers des solutions complémentaires renouvelables. En
ce sens, le réseau gazier souterrain est un atout stratégique pour la sécurité
énergétique du Québec.
Par rapport aux politiques publiques, pour
que le Québec puisse atteindre ses cibles actuelles, plusieurs conditions
doivent être réunies. Il faut maintenir les politiques publiques actuelles et
adopter rapidement les politiques publiques annoncées, notamment de mettre en
marche rapidement l'encadrement du chauffage du gaz naturel qui avait été
annoncé à la COP29 à Bakou en novembre 2024. L'annonce prévoyait l'interdiction
d'installer un appareil de chauffage au gaz naturel dans les nouveaux petits
bâtiments résidentiels, de même qu'un pourcentage croissant de GSR devant être
acheté par la clientèle du secteur du bâtiment jusqu'à l'atteinte de 100 %
à leur... à leur...
M. Lanthier (Philippe) : ...horizon 2040.
Ensuite, on doit maintenir et optimiser les enveloppes et programmes découlant
du Fonds d'électrification et de lutte au changement climatique pour
l'efficacité énergétique, la biénergie et la production locale de GSR. Ces
programmes sont essentiels pour réduire la consommation mais aussi favoriser la
décarbonation à moindre coût. Sans ces mesures, selon Énergir, il sera
impossible d'atteindre les objectifs fixés.
Nous devons aussi rappeler que la cible de
37,5 repose sur le système de plafonnement et d'échange des droits d'émission,
le SPEDE. Il est illusoire pour nous de penser que toutes les réductions seront
réalisées à l'échéance en sol québécois. Le SPEDE est un outil efficace pour
atteindre les objectifs au meilleur coût tout en finançant des mesures
structurantes via le FECC. En 2024, la clientèle d'Énergir a contribué pour
455 millions de dollars au marché du carbone, soit près du tiers des
contributions.
• (15 h 40) •
Un mot aussi sur l'utilisation de ces
sommes. Pour Énergir, il est essentiel qu'elles soient maintenues pour la lutte
aux changements climatiques, tant pour l'atténuation que pour l'adaptation. Le
SPEDE n'est pas une taxe carbone et ne doit pas l'être. Les sommes perçues
doivent être redistribuées pour atténuer les émissions et s'adapter. La
transition énergétique n'est pas qu'un coup, c'est une opportunité économique
et sociale. Le développement du gaz naturel renouvelable et des filières
émergentes génère des retombées locales importantes, on parle ici de 3,4 milliards de
dollars sur 20 ans, près de 477 millions en revenus fiscaux et
environ 800 emplois année. Ces projets renforcent la compétitivité des
entreprises, créent des emplois qualifiés et contribuent à améliorer la
productivité énergétique dans toutes les régions du Québec.
Des projets comme celui annoncé récemment
par la ferme Grenier Gardangeois démontrent de manière éloquente l'impact
positif que peuvent avoir nos régions... pour nos régions, les sommes du FECC,
notamment à travers le programme de soutien aux producteurs de GNR.
Mme la Présidente, Mmes et MM., l'atteinte
des cibles est un choix de société, elle exige des décisions rapides,
cohérentes et ambitieuses. Énergir est prête à faire sa part et elle recommande
aux gouvernements de maintenir la cible de 37,5 d'ici 2030. Pour ce faire, nous
avons toutefois besoin d'un cadre réglementaire stable et prévisible. La
transition doit être ordonnée, pragmatique et inclusive pour que le Québec
atteigne ses objectifs climatiques tout en préservant sa résilience énergétique
et sa compétitivité économique.
Je vous remercie de votre attention, et
nous sommes disponibles pour répondre à vos questions.
La Présidente (Mme Nichols) : Merci
beaucoup. Merci de votre exposé. Nous allons débuter la période des échanges. M.
le ministre, le premier bloc est à vous pour 16 minutes.
M. Drainville : Oui, merci
beaucoup pour votre présentation. Désolé pour le petit retard. Alors, je vais
vous demander, M. Lanthier, puis si M. Bellavance veut se joindre à
la discussion, évidemment, il est le bienvenu. Mais je vous demanderais de...
de faire preuve d'un petit peu de vulgarisation, là, pour les gens qui nous
écoutent et nous expliquer le rapport entre l'électricité et le gaz naturel
dans l'atteinte de la cible 37,5. Si vous deviez résumer votre proposition
d'une manière claire et accessible pour le commun des mortels, ce serait quoi?
Parce qu'on vous écoute, puis c'est étonnant, par moment, on entend Énergir,
distributeur de gaz naturel nous proposer moins de consommation de gaz naturel.
Ça peut paraître contre-intuitif. Or, évidemment, il y a une logique derrière
tout ça, et c'est ce que je vous demanderais de nous exposer, surtout en lien,
je dirais, entre... en lien avec le bâtiment d'un côté et l'industrie de
l'autre. Est-ce qu'il y a moyen de vulgariser ça?
M. Lanthier (Philippe) : Oui,
tout à fait. Bien, rapidement, en fait, on parle... je disais d'entrée de jeu
que notre réseau représente 17 000 mégawatts de puissance installée.
Donc, la raison pour laquelle...
M. Drainville : Sept ou un
sept?
M. Lanthier (Philippe) : 17 000.
M. Drainville : 17 000.
M. Lanthier (Philippe) : Oui.
Donc, ça représente 40 % de la capacité d'Hydro-Québec à l'heure actuelle.
Puis, si on se rappelle leur présentation la semaine dernière, rappelait que...
souhaitait développer... ils souhaitent développer dans leur plan
d'action 2035 11 000 mégawatts à l'horizon 2035, évidemment.
Alors, c'est clair que, dans ce... dans ce qui est proposé par Hydro-Québec, il
y a une part qui va servir à électrifier des usages qui sont actuellement au
gaz naturel, mais ce ne sera pas... ce ne sera pas suffisant. Donc, nous, la
façon dont Énergir se positionne, c'est en lien avec les meilleures pratiques
qu'on voit en ce qui a trait à l'Agence internationale de l'énergie mais aussi
l'impératif de répondre aux cibles gouvernementales du...
M. Lanthier (Philippe) : ...il
faut s'assurer que la consommation de gaz naturel, certainement dans le secteur
du bâtiment, ça puisse se stabiliser et que ça puisse décroître de façon à ce
qu'on puisse électrifier intelligemment le chauffage dans le bâtiment, mais
Énergir et son actif souterrain est en appui au réseau d'Hydro-Québec dans cet
effort d'électrification-là pour dire, bien, en période de pointe, là où est-ce
qu'en fait Hydro-Québec a besoin de différentes options pour desservir la
pointe, bien Énergir est une solution locale et quand même avantageuse pour
Hydro-Québec et l'ensemble de la société québécoise pour répondre à ces
besoins-là.
M. Bellavance (Marc-Antoine) : Donc,
on parle vraiment ici d'une électrification pragmatique. L'idée, c'est pour les
utilisations gazières qu'elles soient limitées aux endroits où que le gaz a une
grande valeur, où que son réseau existant peut déjà apporter une diminution de
pression importante sur le réseau d'Hydro-Québec. Donc, mon collègue l'a
mentionné, c'est l'équivalent de 17 000 mégawatts de puissance qu'on
a, donc venir remplacer cette capacité-là en puissance ce serait à coût énorme.
Donc pourquoi, par exemple, avoir de l'électricité qui vient gérer la fine
pointe pour quelques heures de l'année, une cinquantaine d'heures, une centaine
d'heures d'années quand on a un réseau gazier totalement existant encore là,
jeune, résilient, bien entretenu, qui peut permettre de répondre à ces enjeux
de puissance là, sans aller chercher des investissements additionnels, là, qui
vont au-delà de ce qu'Hydro-Québec prévoit dans son plan.
Donc, c'est vraiment la solution pour le
secteur du bâtiment, pour le secteur industriel, on voit encore une approche
très pragmatique où, comme d'habitude, sur l'ensemble de nos marchés,
l'efficacité énergétique doit prédominer et ensuite aussi de façon à travailler
avec nos clients pour maximiser les opportunités de complémentarité avec
l'électricité lorsque possible et par après là évidemment, le GNR... le GSR,
gaz de sources renouvelables, qui joue évidemment un rôle très important dans
la décarbonation industrielle aussi.
M. Drainville : OK, mais
allons à l'essentiel, là, proposez-vous une augmentation de la consommation du
gaz naturel au Québec ou une diminution?
M. Bellavance (Marc-Antoine) : Notre
plan, évidemment, nous amène à une diminution des volumes distribués de gaz
naturel, encore là pour laisser le gaz naturel là où il a le plus de valeur,
c'est-à-dire pour gérer la pointe de consommation et les usages industriels qui
sont difficilement électrifiables.
M. Drainville : OK. Donc,
vous... Alors, si vous proposez une diminution de la consommation de gaz
naturel, les gens vont se dire : donc ils proposent une diminution de
leurs revenus et éventuellement de leur bénéfice. Est-ce que c'est ça que vous
proposez?
M. Bellavance (Marc-Antoine) : Il
faut... il faut éviter de faire le lien trop rapide entre volume distribué et
bénéfices, là. Évidemment, il y a des mécaniques réglementaires, là, qui gèrent
vraiment le bénéfice d'Énergir en fonction de ces actifs, mais au-delà de ça,
évidemment, on croit que le gaz utilisé en pointe et dans les usages qui sont
difficilement électrifiables, a une grande valeur, une valeur qu'on est capable
d'aller aussi chercher à travers le marché. Donc de cette façon-là, on vient
minimiser l'impact sur, évidemment, la rentabilité de l'entreprise et aussi sur
notre clientèle de façon, donc, à garder nos clients compétitifs, là, dans
cette transition énergétique.
M. Drainville : OK. Puis la
place du gaz naturel renouvelable à l'avenir, c'est quoi?
M. Bellavance (Marc-Antoine) : Donc
évidemment...
M. Drainville : Pour Énergir,
là.
M. Bellavance (Marc-Antoine) : Pour
Énergir, encore une fois, c'est... ce qu'on prévoit, c'est que ça occupe une
place très importante, là, au niveau de la clientèle. Une fois qu'on a réduit
les volumes par... l'efficacité énergétique et la biénergie, en plus d'autres
opportunités de complémentarité, bien, les volumes qui resteront, là, donc,
pourront être décarbonés à l'aide du GSR. Donc on a déjà beaucoup de projets au
niveau local, on a des approvisionnements qui se font aussi à l'extérieur, tout
ça pour venir nous assurer qu'on a des quantités suffisantes pour décarboner
les volumes restants. Donc, encore une fois, c'est important de comprendre que
les volumes prévus à l'horizon 2050 ans et même 2030 sont inférieurs aux volumes
qu'on distribue actuellement. Donc les besoins en gaz naturel renouvelable vont
être moindres qu'ils sont aujourd'hui. Donc c'est tout à fait réaliste avec les
projections qu'on a tant au niveau des quantités disponibles que des prix de la
molécule, d'avoir une offre de GSR compétitive pour décarboner nos clients, là,
jusqu'à 100 %.
M. Drainville : OK, mais vous
proposez une diminution des volumes de gaz naturel que vous distribuez? Est-ce
que vous anticipez une baisse de vos revenus, oui ou non?
M. Bellavance (Marc-Antoine) : On
a encore... encore une fois, donc les... il y a deux éléments, donc on est
capable d'aller chercher, évidemment, une grande... un apport de valeur à
travers des revenus au niveau des revenus de distribution, donc ce qui va...
donc, en travaillant évidemment sur nos mécaniques tarifaires, donc, on va être
capable d'aller chercher un maximum de revenus de notre clientèle pour être
capable de diminuer les impacts chez ces derniers. Maintenant, si on parle de
gaz naturels...
M. Drainville : Mais,
excusez-moi là, mais répondez à ma question. Vous prévoyez, vous souhaitez, en
fait, une baisse des volumes? Je vous pose la question : est-ce que vous
prévoyez une baisse de vos revenus, oui ou non? Si vous me dites on ne prévoit
pas...
M. Drainville : ...une baisse
de revenus, on prévoit une augmentation de nos revenus, bien, je vais vous
dire : OK, donc vous allez vendre moins de gaz, mais vous allez le vendre
plus cher.
M. Bellavance (Marc-Antoine) : Donc,
je vais prendre... je vais prendre un exemple, donc, l'entente au niveau de
biénergie avec... avec Hydro-Québec, donc, où qu'on vient, en gros, donner
70 % de nos... nos volumes consommés pour un client, on les transfère à
l'électricité. Donc... il y a une mécanique présentement en... en place dans
l'entente qui vient compenser, donc, une portion des revenus perdus par
Énergir, donc, qui vient nous permettre de maintenir les... des revenus au
niveau de la distribution, donc diminuer l'impact chez nos clients tout en
diminuant le volume de façon importante et les GES de façon importante aussi.
M. Drainville : Donc, Hydro
récupère une partie de votre clientèle, mais il vous compense.
M. Bellavance (Marc-Antoine) : Oui.
Il y a un mécanisme de compensation qui est mis en place.
• (15 h 50) •
M. Drainville : OK. Encore
une fois, essayons de vulgariser ça, là. Le client type, mettons, qui passe du
gaz à l'électricité, donc c'est un client de moins pour vous. A priori, ce
n'est pas une bonne nouvelle pour Énergir. Quand on perd des clients, en
général, quand on... on est en affaires, ce n'est pas une bonne nouvelle. Vous,
vous me dites : Bien, nous autres, on... on aime ça, on aime ça perdre des
clients parce qu'on est compensés par Hydro. Mais Hydro va vous compenser
pendant combien de temps? Est-ce qu'il vous compense pendant un an, trois ans,
cinq ans? Combien de temps ça dure, cette compensation?
M. Bellavance (Marc-Antoine) : Pour...
Pour l'instant, au niveau des... des détails, là, de l'entente, donc chaque
client a une compensation, là, pour une durée de... de 15 ans, là, selon les
paramètres de l'entente. Mais ultimement, il faut comprendre aussi que ce n'est
pas des clients qu'on perd. Puis c'est ça l'avantage pour Énergir, c'est qu'on
est capables... on continue de valoriser notre réseau parce que le client va
continuer de consommer du gaz naturel, va continuer à être relié à notre réseau
pour l'équivalent d'à peu près 30 % de sa consommation qui s'effectue dans
les périodes les plus froides de l'année. Donc, cette consommation-là, donc,
nous rapporte des... des revenus. Puis, avec les projections qu'Énergir a, donc
on est capables de maintenir une offre compétitive pour nos clients, qui va
rester compétitive face aux alternatives de décarbonation, là, soit
l'électricité. Donc, c'est... c'est vraiment l'objectif d'Énergir. Donc, notre
plan, notre stratégie de décarbonation s'assure de diminuer... diminuer les
volumes tout en maintenant des revenus suffisants pour garder une compétitivité
au niveau de notre clientèle.
M. Lanthier (Philippe) : Et
aussi, l'autre élément pour compléter les propos de mon collègue, c'est :
c'est sûr qu'on va perdre des volumes, mais qu'on va être capables de... de
générer un virage vers une plus grande valeur par rapport à la... à la desserte
de la pointe en période de grand froid, notamment.
M. Drainville : ...qu'en
période de grandes pointes, de grand froid, les gens qui vont utiliser le gaz
vont le payer plus cher. Il va valoir plus cher, le gaz, sinon, je ne comprends
pas le modèle économique.
M. Bellavance (Marc-Antoine) : Notre...
Notre objectif, c'est... évidemment, on regarde la facture totale du client,
donc... une biénergie, donc un client qui aujourd'hui paie 100 $ la
facture gaz, si on l'envoie à la biénergie, si on est capables de le laisser en
bas de 600 $, donc pour nous, on a un modèle économique gagnant pour...
pour le client. Et si... si ça veut dire qu'évidemment Énergir peut aller
chercher des revenus additionnels, tant qu'on reste sous la barre de ce qu'il
payait auparavant, donc c'est un modèle économique qui fonctionne... qui
fonctionne très bien. Donc, l'avantage de la biénergie, le client va payer
beaucoup moins cher son électricité dans les périodes où il fait plus chaud, à
part ça, peut-être payer plus cher la portion gaz qui est en... en période de
grand froid, mais tout... en tout, pour la facture du client, donc ici, on va
avoir une économie, là, pour... pour ce dernier, là.
M. Drainville : OK. Donc,
juste pour être bien clair, un client qui convertit sa consommation énergétique
à l'électricité, qui est encouragé de le faire, va utiliser, mettons,
l'électricité 70 % du temps. Pendant ce 70 % là du temps, vous, vous
avez une compensation d'Hydro-Québec pendant 15 ans. Puis, pour le
30 % restant, bien, période de grand froid, par exemple, là, le... la
consommation de gaz, si le... le client décide de l'utiliser, va lui coûter
plus cher. Mais vous calculez qu'au net sa facture énergétique pour l'année va
rester... en fait, vous visez à ce qu'elle ne... à ce qu'elle n'augmente pas.
C'est... Est-ce que c'est bien résumé, ça, ou pas?
M. Bellavance (Marc-Antoine) : ...vous
le... vous le résumez bien. Je voudrais dire que pour l'instant la consommation
n'est pas plus chère, là. Donc, c'est... Bien, par exemple, on a... on a
l'opportunité, à cause de la grande valeur que le gaz amène et l'espace qu'on a
un niveau compétitif... et donc la facture augmente pour le client, pour la
portion gaz, en gardant une facture totale plus économique pour... pour le
client. Il faut comprendre que tarif biénergie est très, très économique, là,
d'un point de vue électrique, donc ça permet d'en dégager une marge de manœuvre
globale plus importante pour le client.
M. Drainville : Bien, c'est
ce que j'allais dire, là. Ça fait que s'il paie plus cher pour l'énergie au gaz
naturel pendant la période de pointe, mais que la facture reste la même, c'est
donc que la portion hydroélectrique, la portion électricité, elle, lui coûte
moins cher.
M. Bellavance (Marc-Antoine) : Tout
à fait.
M. Drainville : Bon. Puis
cette compensation-là de... de 15 ans d'Hydro-Québec, il arrive quoi après
le 15 ans? Est-ce que c'est...
M. Drainville : ...c'est
terminé.
M. Bellavance (Marc-Antoine) :
Bon, évidemment, pour l'instant, les modalités... actuelles pourraient...
pourraient évoluer dans le temps. Mais c'est clair que la position d'Énergir, je
pense qu'on reconnaît... puis la société reconnaît qu'on amène une grande
valeur avec le réseau gazier. Puis cette valeur-là va être reconnue d'une façon
ou d'une autre par une mécanique, tu sais, qui pourrait être... qui pourrait
être développée, là, dans les prochaines années. Donc, c'est certain que le
service qu'on rend au niveau du secteur énergétique puis de l'écosystème
énergétique, donc, trouverons... trouverons une façon de venir valoriser ces
éléments-là, toujours en évitant d'avoir des impacts négatifs pour la clientèle
et en permettant de rester compétitif.
M. Drainville : Bien, vous
voyez un peu comme un service public, là, vous, là.
M. Lanthier (Philippe) : On
l'a toujours été...
M. Drainville : Parce que...
hein? Ça a toujours été ça, votre optique?
M. Lanthier (Philippe) : On
l'a toujours été, un service public, oui.
M. Drainville : OK, puis,
donc pendant 15 ans, vous êtes compensés. On verra bien ce qui arrivera.
Et puis, donc, la question que j'ai le goût de vous poser, c'est : est-ce
que ce modèle-là, il est soutenable si Hydro-Québec n'augmente pas d'une
manière très importante la consommation... pas, la consommation, la production
d'énergie dans les prochaines années? Parce que si vous dites : Nous
autres, on veut continuer ça, là, on veut continuer à envoyer des clients de...
du gaz vers... vers l'électricité, j'imagine que ça va avec une augmentation de
la production d'Hydro, là. Il faut que l'offre d'Hydro soit au rendez-vous,
n'est-ce pas? Donc, le grand projet, là, le... de 200 milliards d'Hydro
d'ici 2035, je veux dire, vous devez être des... comment dire, des grands
enthousiastes par rapport à ça, là, vous.
M. Bellavance (Marc-Antoine) :
Il faut comprendre que... dans les prévisions qui amènent une augmentation de
la consommation énergétique, là, dans son ensemble, puis c'est... c'est ce à
quoi répond à priori le plan d'Hydro-Québec. L'apport de la biénergie,
évidemment, ce que ça vient faire, oui, ça amène une consommation additionnelle
au niveau électrique. Par contre, le gros avantage des solutions de la solution
biénergie, c'est : on n'envoie pas la pointe de consommation au niveau
d'Hydro-Québec. Donc, ce fameux 17 000 mégawatts là, il est conservé au
niveau du gaz, donc ça prend 9000 mégawatts pour le secteur du bâtiment
uniquement. Donc, en conservant cet élément-là au gaz, on évite la construction
évidemment d'ouvrages très importants. Donc c'est plusieurs, plusieurs fois,
là, la Romaine, là, qui seraient nécessaires pour pallier au besoin auquel on
répond présentement avec le réseau gazier. Un réseau qui est déjà existant,
donc des investissements minimums, là, donc, en termes de... évidemment,
d'entretien du réseau et de maintenance de notre réseau, mais c'est que c'est
un réseau déjà existant, jeune et bien entretenu. Donc...
M. Drainville : Et ce qu'on
comprend, c'est que ce gaz naturel que vous souhaitez continuer à offrir, en
particulier en pointe puis aussi à l'industrie, vous souhaitez qu'il soit
constitué de plus en plus de gaz naturel renouvelable. C'est ce qu'on comprend
également exactement.
M. Bellavance (Marc-Antoine) :
Exactement.
M. Drainville : OK, puis j'ai
noté que vous conservez la même cible. Vous voulez qu'on garde le cap sur le
moins 37,5 % d'ici 2030, mais je n'entends aucune inquiétude, moi, par
rapport à la conjoncture économique actuelle. Les provinces qui... à gauche
puis à droite, le fédéral qui recule. Je n'entends pas ça du tout, là, ce n'est
pas une préoccupation pour vous.
M. Bellavance (Marc-Antoine) :
Évidemment, ça reste une préoccupation très importante pour Énergir, une préoccupation
très importante pour nos clients. Ce qui est important de comprendre, c'est
notre plan, notre stratégie. Donc, on l'a fait sur le long terme. Donc, nous,
l'important, c'est de garder le cap. On a établi un plan stratégique en 2020
qui était appuyé sur les quatre piliers que mon collègue a décrits. Donc, on
pense, c'est important, évidemment, de garder le cap. Oui, il va y avoir un
petit peu de naviguer à travers la turbulence. Mais le plan qu'on a fait, c'est
un plan qui se veut... qui soit durable, là, d'un point de vue être capable de
passer à travers les soubresauts économiques, les soubresauts politiques qu'il
pourrait y avoir dans le temps. Donc, c'est vraiment l'angle qu'Énergir prend.
M. Drainville : D'accord,
merci. Est-ce que... mon temps était écoulé, hein?
La Présidente (Mme Nichols) : Il
restait un petit 10 secondes.
M. Drainville : C'est bien...
La Présidente (Mme Nichols) : Merci.
Avant de commencer le bloc avec l'opposition officielle, il y avait une demande
de la députée de Notre-Dame-de-Grâce.
Mme McGraw : Oui. Merci, Mme
la Présidente. D'ailleurs, conformément à l'article 176 de notre
règlement, je souhaite vous demander dès maintenant de... notre volonté de
demander une séance de travail et de se réunir d'ici la fin de semaine... de la
semaine afin que notre commission puisse déterminer les conclusions, les
observations et les recommandations que nous entendons formuler.
La Présidente (Mme Nichols) : Très...
M. Drainville : ...
La Présidente (Mme Nichols) : Oui,
très bien. Merci beaucoup, M. le ministre.
M. Drainville : ...cette
demande avec ouverture.
La Présidente (Mme Nichols) :
Je prends... oui, je vais rendre un... Oui, oui.
M. Drainville : Oui, je
peux-tu répondre?
La Présidente (Mme Nichols) : Certainement.
M. Drainville : Alors, on est
ouverts. Les leaders se parlent.
La Présidente (Mme Nichols) : Très
bien. Donc, je prends note de la demande formulée par la députée de Notre-Dame
de grâce. Et, conformément au règlement de l'Assemblée nationale, la commission
dispose de trois jours francs pour déterminer, en séance de travail les
observations, les conclusions ou les recommandations qu'elle entend formuler.
Donc, oui, les... en effet, les leaders se parlent pour déterminer
l'échéancier, donc les suivis appropriés seront effectués.
Merci beaucoup. Nous allons compléter...
Nous allons continuer les échanges avec le temps de parole.
La Présidente (Mme Nichols) : ...de
la députée de Notre-Dame-de-Grâce pour 12 minutes. Le temps est ajusté,
donc, pour 12 minutes.
Mme McGraw : Ah! parfait.
C'est bien apprécié. Merci, Mme la Présidente, et merci, M. le ministre, pour
l'ouverture. Donc, juste pour revenir peut-être à la dernière question, vous
avez... Bien, justement, concernant les cibles, la cible, vous avez parlé d'un
choix de société dans vos remarques et que ça va prendre un cadre réglementaire
stable, prévisible, vous avez parlé d'un plan de transition pragmatique,
inclusif. Est-ce qu'on peut vous entendre davantage sur ça? Dans votre mémoire
aussi, vous parlez de mesures, donc vous... de tenir le cap sur la cible, mais,
en même temps, vous soulignez l'importance, même l'urgence d'identifier
l'ensemble des mesures pour atteindre cette cible. On observe, depuis le début
de 2025, beaucoup d'incertitudes relatives à la gouvernance climatique du
Québec, et d'ailleurs on sait que la Commissaire au développement durable avait
parlé d'un peu de naviguer à l'aveugle. Ça fait qu'on est rendu, je pense, à
67 % des cibles... des mesures, je devrais dire, d'identifiées. Est-ce
qu'on peut vous entendre sur la cible, le plan de transition et le cadre
réglementaire?
• (16 heures) •
M. Lanthier (Philippe) : Tout
à fait. Bien, comme on l'expose dans notre mémoire, c'est clair que nous, de
notre côté, pour le secteur du bâtiment, on a une stratégie pour 2030. Dans le
fond, la stratégie qu'on a adoptée en 2020, elle a donné comme point de
destination de paramétrer nos offres de façon à ce qu'on soit en mesure
d'atteindre la cible de 50 % de réduction dans le secteur du bâtiment.
Pourquoi je parle du bâtiment? Parce que plusieurs experts sont venus vous
parler dans cette commission puis ils vous disent que le secteur du bâtiment,
c'est un secteur où est-ce que les technologies sont matures, les solutions
peuvent être déployées et les distributeurs sont capables de collaborer
ensemble. Donc, sur ce point, nous ce qu'on dit, c'est qu'il faut quand même
avoir des assises plus solides pour s'assurer qu'on arrive à la destination de
réduire de 50 % les émissions dans le secteur du bâtiment. Pour ça, ça
prend un maintien des enveloppes en efficacité énergétique.
Je l'ai dit d'emblée, mais il faut
optimiser, il faut vraiment faciliter le passage à l'acte des gens, des ménages
par rapport à l'efficacité énergétique. Parce qu'on vous a parlé du gaz naturel
renouvelable, du gaz de source renouvelable. C'est une molécule qui est plus
chère, elle est huit fois plus chère que la molécule fossile. Puis il y a une
raison pourquoi les molécules fossiles sont aussi répandues dans notre
économie, que ce soit dans le bâtiment ou le transport, mais ce n'est pas la
seule partie qui influe sur notre facture, là, le fait que le gaz naturel
renouvelable soit plus dispendieux. Mais, avant même de penser à migrer nos
clients vers le gaz naturel renouvelable, il faut vraiment travailler à la
sobriété puis l'efficacité énergétique en amont.
Donc ça prend des programmes qui vont être
capables de faciliter l'efficacité énergétique. Nous, c'est quelque chose que
l'on fait, chez Énergir, puis on tend la main, évidemment, au gouvernement,
comme on l'a fait depuis de nombreuses années pour trouver des solutions pour
rendre ça plus attractif pour les ménages, incluant les ménages à faibles
revenus. C'est vraiment important, que la transition soit juste puis qu'on
puisse tous, un chacun, au Québec, être capables d'y participer.
Ensuite de ça, c'est sûr qu'on... ça me
permet aussi de parler de d'autres éléments, d'autres politiques publiques qui
sont importantes. Le règlement concernant le GSR, la substitution de 10 %
des volumes de gaz naturel renouvelable à l'horizon 2030, c'est un signal
majeur pour le développement de cette industrie-là ici, au Québec. Il y a de
nombreux projets qui sont développés au Québec. En ce moment, on a neuf projets
qui sont en injection, on a quatre projets qui sont en construction et
12 projets déjà subventionnés qui vont apporter davantage de circularité,
davantage de retombées économiques en région. On ne fait pas juste réduire les
émissions de gaz à effet de serre d'un côté, on est aussi en mesure de mieux
gérer les matières résiduelles organiques, puis on parle bien de matières
résiduelles, parce que, quand on parle de bioénergie, il va falloir qu'on fasse
ça de façon, évidemment, à respecter la biodiversité puis... puis évidemment
les terres agricoles, notamment. Alors, c'est des préoccupations que l'on a
chez Énergir puis on veut travailler sur ces enveloppes-là pour qu'on puisse
rehausser l'action climatique ici, au Québec.
Mme McGraw : Vous avez parlé
de la biodiversité, j'en profite pour parler des solutions basées sur la nature
et, effectivement, les retraits. Donc, la deuxième question. Dans le...
16 h (version non révisée)
Mme McGraw : ...de
consultation. Donc, je pense que c'est très clair, sur la première question, au
niveau de votre réponse que vous avez dans votre mémoire, la question serait
effectivement qu'est ce que vous pensez, effectivement, de la cible? Ça, c'est
très clair. Merci.
Au niveau de la deuxième question, le
retrait, je pense que vous ne vous êtes pas vraiment prononcés sur les
retraits. On comprend que les retraits via la technologie... puis des technologies...
pas encore fait ses preuves, mais on sait qu'il y a aussi des puits de carbone,
des retraits, effectivement, via la biodiversité, via... via... Puis je sais
que le ministre, c'est un amateur de la nature, de la biodiversité, et on
comprend que les solutions basées sur la biodiversité, c'est très efficace pour...
Une voix : ...
Mme McGraw : Bien, je pense
que... parce que je... Il n'y a pas eu beaucoup de miel, à date, ça fait que je
pense qu'un peu de miel, ça... Mais je sais que ça lui tient à cœur. Et
justement, les solutions basées sur la nature, la biodiversité, c'est très,
très, très... on va dire rentable. En tout cas, tout ça pour dire que j'aimerais
vous entendre sur les retraits et un peu la priorisation... donc, retrait de GES
en territoire... ou réduction, réduction des émissions, réduction au Québec, ailleurs,
retrait au Québec, ailleurs, évidemment, le SPEDE. Donc, un peu le cheminement puis
comment prioriser.
M. Lanthier (Philippe) : Bien,
c'est une excellente question. De notre côté, on a... on a une vision 2030 et
2050. Donc, pour 2030, c'est vraiment des mesures pragmatiques dans le secteur
du bâtiment, des choses qu'on connaît, des technologies matures, des solutions
qu'on est déjà en train d'offrir.
Soit dit en passant, chez Énergir, il n'y
a personne qui vend qui... qui est qui est payé à vendre plus d'énergies
fossiles, c'est... la rémunération incitative de notre équipe de vente est
désormais, depuis 2023, axée sur les économies de mètres cubes qu'on peut faire
chez nos clients en matière d'efficacité énergétique puis la décarbonation de
nos clients. Ça fait que ça, c'est quelque chose qu'on vit quotidiennement chez
nous.
Ça fait que ça, c'est 2030, mais la
question de la séquestration carbone, c'est quoi, la vision sur 2050? On
présente dans notre rapport sur la résilience climatique, à chaque année, une
vision future. Dans notre mémoire, on présente des... en fait, des trajectoires
possibles pour l'horizon 2050. Et c'est clair qu'on voit des solutions comme la
séquestration carbone. On voit l'hydrogène vert, on voit le gaz naturel
renouvelable, le gaz de sources renouvelables être des solutions qui vont
contribuer, à terme. La séquestration carbone, cependant, ce n'est pas quelque
chose anticipe qui va avoir un grand rôle dans les émissions pour la cible de
2030. On est en discussion avec des promoteurs québécois qui développent ces
technologies-là. On pense qu'à terme ça va être important de miser sur ces
solutions-là, mais c'est plus quelque chose qu'on voit au-delà de 2030.
Puis ensuite, au niveau des retraits en
sol québécois, versus au niveau d'aller chercher des réductions à l'extérieur
du Québec, bien, c'est certain que nous, on est une fervente défenderesse, là,
Énergie, là du SPEDE parce que ça permet non seulement, là, d'aller chercher
des réductions d'émissions à meilleur coût mais ça nous permet, là, de générer
des retombées et envoyer aussi un signal prix. Ça, c'est quelque chose souvent
qu'on entend moins du SPEDE, mais, quand on vous parlait de l'écart entre les
solutions fossiles et les solutions renouvelables, bien le SPEDE aide aussi à
envoyer un signal prix qui va rehausser la compétitivité des solutions renouvelables,
du gaz de sources renouvelables, dans le cas qui nous concerne, nous.
Donc, nous, on n'est pas contre le fait qu'il
y ait un mécanisme qui permette des entrées et des sorties de réductions, mais,
cela étant dit, dans le mémoire, à la fin, on indique clairement que c'est
important que les échanges soient bien comptabilisés, transparents, que les
réductions de GES réalisées localement soient bien distinguées de celles qu'on
aurait pu aller chercher de l'extérieur du Québec. Donc, ça, c'est superimportant,
que la question de la comptabilité carbone soit en place dans ces mécanismes-là
pour éviter le double comptage et s'assurer d'une saine comptabilisation des
gaz à effet de serre.
Mme McGraw : D'ailleurs, vous
dites dans votre... dans le mémoire, vous dites... vous êtes... qu'Énergir est
une fervente défenderesse du SPEDE, entre autres parce que c'est... ça offre...
bien, c'est efficace, ça offre une flexibilité qui n'existe pas chez d'autres ou...
des taxes carbone classiques. Donc, ça permet une flexibilité, puis vous parlez
aussi d'outils transactionnels pour vraiment optimiser notre...
Mme McGraw : ...décarbonation
puis effectivement d'atteindre nos cibles. Est-ce que... j'ai d'autres
questions.
M. Bellavance (Marc-Antoine) :
Oui, allez-y.
Mme McGraw : OK, parfait.
Donc, les bâtiments, ça fait que ça, c'est très... ça fait partie des émetteurs
et c'est quand même... ça contribue beaucoup aux GES. Et là, vous demandez...
dans votre mémoire, vous insistez que le règlement interdisant des nouveaux
appareils de gaz... au gaz naturel dans les petits bâtiments soit rapidement
adopté. Quelle est votre position sur... pour les nouveaux bâtiments, juste pas
de gaz naturel? On ne parle pas de petits seulement, mais, de façon générale,
c'est quoi votre position là-dessus? Est-ce que vous êtes favorables? Vous
demandez l'adoption rapide au niveau des petits bâtiments, mais il y a des
appareils... Juste pour vous entendre là-dessus.
• (16 h 10) •
M. Bellavance (Marc-Antoine) : Ce
qu'Energir veut éviter, évidemment, c'est qu'il y ait un accroissement des GES
qui se fasse avec le développement, d'où notre demande à la régie il y a de ça
deux ans maintenant, qui a été... qui a été malheureusement renversée en
février dernier, où qu'on exigeait maintenant de nos nouveaux clients des
nouveaux raccordements, comme un raccordement 100 % renouvelable. Donc,
l'idée c'est évidemment de toujours proposer la biénergie en complémentarité
avec le gaz naturel de sources renouvelables pour justement éviter que ce
nouveau développement là, que ces nouvelles constructions là amènent des GES
additionnels. Donc, c'est vraiment ça, la position d'Energir et, tu sais, on
croit que la stratégie... évidemment, on peut travailler beaucoup sur
l'existant, mais déjà on s'aiderait davantage en évitant d'aller ajouter des
GES sur les nouveaux bâtiments.
Mme McGraw : Peut-être une
dernière question, Mme la Présidente. Donc, vous vous dites que les clients d'Energir
contribuent pour près du tiers des revenus du FECC et que vous voulez que ce
fonds... c'est vraiment essentiel pour la transition. Donc, comment vous
réagissez à ce revirement de fonds FECC pour s'attaquer à la dette fiscale?
La Présidente (Mme Nichols) : En
15 secondes.
M. Bellavance (Marc-Antoine) :
Bien, c'est clair que ça nous affecte parce qu'on vous parlait d'efficacité
énergétique, d'aider nos clients à consommer moins. On ne dit pas que toutes
les sommes qui contribuent devraient revenir à des projets chez Energir, mais
on croit que ces sommes-là sont essentielles.
La Présidente (Mme Nichols) : Merci.
Je cède maintenant la parole au député de Taschereau. Vous avez quatre minutes.
M. Grandmont : Oui, merci,
Mme la Présidente. Merci à vous deux pour votre présence aujourd'hui. Merci
pour votre mémoire, que j'ai beaucoup apprécié. Puis il y a une section que
j'ai particulièrement appréciée, page 3. Vous dites que... bon, vous
parlez de vos réductions, là, que vous avez réussi à opérer, là, une réduction
de 36,1 % des émissions d'origine fossile par rapport au niveau de 90.
Puis, bon, vous êtes une entreprise, bon, détenue par des intérêts québécois,
là, mais qui, dans l'énergie, est fortement émettrice de gaz à effet de serre.
Donc, c'est tout à votre honneur d'avoir réussi quand même à réduire ça. Puis
vous dites que, bien, évidemment, vous allez pouvoir atteindre le 37,5, en tout
cas, en bonne voie d'être capable d'atteindre le 37,5 sous le niveau de 90
2030. Puis vous parlez que des réductions importantes ont été rendues possibles
grâce à une forte volonté organisationnelle, mais aussi à une approche
structurée d'identification, de planification, de mise en œuvre des projets de
réduction, chapeautés par un comité stratégique des GES à l'interne. Moi, je
trouve qu'on a une belle feuille de route ici pour un ministre qui cherche des
façons d'atteindre les objectifs. Donc, toutes mes félicitations là-dessus.
Sinon, après ça, je vais vous poser des
questions sur le double comptage. Vous en avez parlé. C'est la deuxième fois
qu'on entend parler de double comptage d'émissions de gaz à effet de serre. Il
y avait... C'est l'association sur l'aluminium qui en avait parlé. Est-ce que
vous auriez des recommandations à nous faire comme... Éventuellement, on aura
peut-être un comité de travail puis un rapport qui en découlera. Est-ce que
vous avez des recommandations à nous faire concernant le double comptage? Parce
que c'est intéressant.
M. Lanthier (Philippe) : Essentiellement,
ça va être assez rapide là-dessus, mais nos recommandations seraient qu'il y
ait vraiment un regard qui soit fait sur l'ensemble des unités qui sont créées
dans le marché du carbone, qu'on puisse regarder ça de fond en comble, de façon
à s'assurer que c'est bel et bien des réductions qu'on est allés chercher en
Californie puis que ce soit ça qu'on ait rapatrié au Québec pour atteindre
notre cible.
M. Grandmont : D'accord,
merci. Sur le Fonds vert, bon, vous venez juste d'en parler, mais j'aimerais
quand même vous poser la question. Vous dites qu'un tiers des revenus du Fonds
vert proviennent des clients d'Energir. Donc, je comprends qu'à quelque part,
pas l'ensemble des revenus devrait revenir à vos clients, c'est ce que j'ai
compris, grosso modo, de ce que vous avez dit, vous me corrigerez au besoin,
mais sur le transfert au Fonds des générations de cette enveloppe de
1,8 milliard de dollars, vous en pensez quoi et à quoi ça aurait pu
servir auprès de vos clients ou ça devrait... parce que ce n'est pas
officiellement... ce n'est pas encore entériné, mais à quoi ça pourrait servir?
M. Lanthier (Philippe) : Bien,
pour Energir, les sommes mentionnées, là, par rapport au projet de loi n° 7, c'est sûr qu'on aurait souhaité que ces sommes-là
puissent se rendre disponibles pour les raisons qu'elles ont été perçues auprès
des Québécois. Nous, il y a une ligne...
M. Lanthier (Philippe) : ...dans
nos factures depuis janvier 2015. Ça fait qu'on contribue à ça. On a aussi
communiqué avec nos clients sur cette ligne-là pour leur expliquer qu'est-ce
que ça faisait, pour dire que ça va financer des mesures de réduction. On ne
dit pas, effectivement, que toutes les sommes que nos clients contribuent au
FECC doivent leur revenir ou revenir à Énergir, parce qu'on sait que ça peut
aller vers l'électrification des transports, ça peut toucher nos clients de
plein de façons, mais on dit essentiellement que ces sommes-là doivent être
utilisées dans le respect et dans l'esprit de ce qui a... ce qui a fait en
somme... sorte qu'on a pu les percevoir, ces sommes-là. Donc, nous, c'est sûr
qu'on est en mesure d'aller atteindre nos cibles pour 2030, spécifiquement dans
le secteur du bâtiment, si ces sommes-là nous permettent d'aller plus loin.
M. Grandmont : Parfait.
Merci.Puis vous avez parlé d'un autre concept à la toute fin, tout à
l'heure, là, vous parliez de signal prix. Qu'est-ce que vous entendez par là,
au bénéfice de la commission? Puis est-ce que vous pensez que c'est un moyen
qui est sous-utilisé, en fait, au Québec?
La Présidente (Mme Nichols) : En
10 secondes.
M. Grandmont : En 10
secondes.
M. Lanthier (Philippe) : Bien,
oui, il faudrait... Le signal prix, ça va faire en sorte qu'à un moment donné
les solutions renouvelables vont être plus compétitives avec les solutions
fossiles et...
M. Grandmont : Et on devrait
l'utiliser davantage.
M. Lanthier (Philippe) : Oui.
M. Grandmont : Merci.
La Présidente (Mme Nichols) : Merci
beaucoup, M. Lanthier, M. Bellavance. Merci de votre présence. Merci de votre
contribution aux travaux de la commission.
Je vais suspendre quelques instants, le
temps que le groupe suivant prenne place. Merci.
(Suspension de la séance à 16 h 15)
(Reprise à 16 h 17)
La Présidente (Mme Nichols) :
Alors, nous poursuivons nos travaux. Je souhaite maintenant la bienvenue aux
représentants du Conseil patronal de l'environnement du Québec. Merci d'être
parmi nous. Alors, je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour votre
exposé, après quoi nous allons procéder à la période d'échange avec les membres
de la commission. Je vous invite donc à vous présenter puis à commencer votre
exposé.
Mme Lauzon (Hélène) : Bonjour,
Mme la Présidente. Bonjour, M. le ministre, et Mesdames et Messieurs les
parlementaires. Merci pour l'invitation. Je suis Hélène Lauzon, la
présidente-directrice générale du Conseil patronal de l'environnement du
Québec, l'acronyme CPEQ. Je suis accompagnée de mes deux collègues, M. Olivier
Dulude, directeur adjoint au CPEQ, et de M. Louis Germain, consultant
transition énergétique, environnement et également conseiller expert chez TACT.
Le document de consultation nous demande
de répondre à deux questions. La première, c'est : Est-ce que la cible à
l'horizon 2030, la cible de 37,5 %, doit être révisée? Donc, pour y arriver, on
s'est posé la question : Est-ce que le chiffre, le pourcentage 37...
est-ce que c'est assez ambitieux? Puis aussi, on s'est demandé si l'horizon
2030 est réaliste.
Donc, pour ce qui est du chiffre lui-même,
le caractère ambitieux de 37,5 %, nous, on croit qu'on est en territoire,
hein, bien sûr, déjà alimenté à 98 % d'énergies renouvelables, on a un
taux d'électrification de l'économie québécoise bien supérieur à ailleurs sur
la planète, puis nous sommes un leader en Amérique par rapport à nos émissions
par habitant. Donc, c'est quand même assez... assez sévère comme cible. On voit
qu'on est en avance...
Mme Lauzon (Hélène) : ...puis
on croit que la cible, elle est ambitieuse et on ne voudrait pas qu'elle soit
réduite pour quand même envoyer un message indiquant que nous combattons
toujours les gaz à effet de serre. Par rapport au caractère réaliste de la
cible, maintenant. Bon, il y a un contexte politique et économique incertain,
que ce soit de ce côté-ci ou de l'autre côté de la frontière. L'atteint de la
cible à l'horizon 2030 aurait, semble-t-il, un effet négatif présumé sur le PIB
si on dépassait 70 % en territoire québécois. Il y aurait aussi une
réduction de 14 % de la production industrielle. Le dernier bilan de gaz à
effet de serre pour la période 1990-2022 nous indique qu'au Québec, nous avons
atteint 19 % de réduction. Et en territoire québécois uniquement, parce
que le 19 %, c'est avec le marché lié, le fameux marché du carbone avec la
Californie. Seulement au territoire québécois, quand on fait abstraction du
marché du carbone, c'est seulement 7,2 % que nous avons atteint. Donc,
l'inventaire et le bilan nous démontrent qu'il nous reste cinq ans pour
atteindre à peu près l'équivalent que ce qu'on a atteint en 22 ans. Donc, cinq
ans pour réaliser 18,5 % de réduction de gaz à effet de serre. C'est un
défi colossal. On ne veut pas créer de chaos dans l'économie. C'est ce qui nous
préoccupe. Puis le secteur industriel a déjà livré 22,2 % de réduction
depuis 1990. Toutes les mesures économiquement viables ont été réalisées. Ce
qui reste à réaliser, bien sûr, encore de l'électrification, mais aussi des
technologies de rupture qui nécessitent des sommes importantes et plus
qu'importantes, je dirais, du Fonds d'électrification et de changements
climatiques.
• (16 h 20) •
Le gouvernement possède une banque de
données avec les études qui ont été réalisées par les entreprises pour
documenter les projets majeurs qui pourraient être réalisés avec des sommes
substantielles du Fonds d'électrification, le fameux FECC. Donc, le secteur...
le secteur, l'industrie des entreprises est fragilisé en ce moment. Bien sûr,
on continue à travailler avec le marché du carbone et on est prêt à faire cette
part additionnelle avec de l'argent, mais il faut faire attention où on en est.
Les coûts du gaz naturel vont continuer à accroître, puis les coûts de
conformité aux règlements sur les combustibles propres et aux règlements sur
l'intégration du contenu à faible intensité carbone vont aussi augmenter.
Intensité carbone dans l'essence et les carburants.
Malgré le fait que le SPEDE est présent,
on se rend compte que pour les prochaines réductions, bien, ce sont les autres
secteurs qui devront contribuer, et principalement le transport. Ce qui n'est
pas nouveau sûrement pour vous. Mais c'est un... le transport, c'est quand même
pour changer des comportements de façon substantielle, bien, ce n'est pas le
gouvernement, ce ne sont pas non plus les distributeurs de carburants et de...
et de combustibles, et ce ne sont pas non plus les sociétés de transport qui
peuvent avoir un lien direct. Et puis, aussi, c'est dans un contexte où la
vente de véhicules automobiles a réduit... véhicule électrique parce qu'on a
réduit le rabais depuis le début de l'année à 4000, on va le réduire en 2026 à
2000, puis à la fin de l'année, à rien. Donc, on doute que l'horizon 2030 soit
atteignable, donc la cible soit réaliste. À l'horizon 2030, bien sûr.
La loi, elle dit que la cible doit être un
minimum de 37,5, mais elle ne fixe pas d'échéance. Donc, ça donne au
gouvernement la latitude. Si le gouvernement décide de maintenir la cible, nous
croyons qu'un mécanisme d'ajustement devrait être mis en place pour la réviser,
parce qu'en ce moment, ce sont les réductions depuis 1990 jusqu'à 2022. Mais
c'est seulement dans deux ans que nous saurons quelles sont les réductions en
2025. Si le gouvernement maintient sa cible, nous avons, vous le verrez à la page
9 de notre mémoire, énuméré une série de mesures que nous aurions besoin pour
livrer davantage de réductions. Mais bien, alors, avec la profondeur nécessaire
du Fonds d'électrification, les marchés publics, pour qu'on encourage les
entreprises d'ici en se basant sur un critère GES, le potentiel
technico-économique dont on a parlé, la question des délais dans les projets de
règlement.
Alors, maintenant, j'ai traité de la
première question. La deuxième question qui est soulevée dans le document de
consultations, c'est le rôle de la réduction et des retraits, territoire
québécois, ou en SPEDE ou en l'extérieur du SPEDE. Bon, ce qu'on nous on croit,
c'est que pour ce qui est de la réduction, elles doivent être réalisées
maximalement en territoire québécois, mais pas plus de 70 % parce qu'on
sait que ça peut avoir un effet sur le produit intérieur brut. On va avoir la
production d'électricité qui, bien sûr, va être sollicitée beaucoup. C'est un
enjeu important d'ici 2050. Il va avoir de la pression...
Mme Lauzon
(Hélène) :
...donc il y a une nécessité d'avoir de la sobriété et
l'efficacité énergétique, nous appuyons fortement cette mesure. Une nécessité
de déployer, aussi, d'autres sources d'énergies renouvelables : la
biomasse, le GNR dont on nous... dont nos collègues précédents ont parlé,
l'éthanol, l'hydrogène vert. Puis, en termes de retrait de GES, bien, nous
sommes favorables à la question de... de la capture, de l'utilisation, la
séquestration du carbone, puis il y a encore beaucoup de travail à faire pour
arriver à la maturité technologique. Mais je crois que... nous croyons, pas
moi, mais nous, nous croyons qu'il... on peut y arriver et aussi pour des
questions de capture, utilisation, séquestration autres que technologiques,
avec la nature, nous croyons que nous pouvons y arriver, que ce soit le
boisement, reboisement, restauration de milieux humides ou encore séquestration
de produits du bois et nous sommes prêts à continuer à travailler dans le cadre
d'un SPEDE marché du carbone, mais nous ne connaissons pas quelles sont les
orientations du marché du carbone à l'horizon 2030, puisque le gouvernement est
censé les déposer, nous... nous imaginons, en début 2026 et c'est comme ça
qu'on va savoir quelles sont les attentes gouvernementales. Mais comme les
voisins de la Californie ont changé leur marché du carbone récemment, nous
attendons de voir ce qui se passera, donc c'est difficile de nous projeter,
mais dans la mesure où on s'aligne sur ce qui se fera aux États-Unis, en
Californie, bien, on pourra continuer à suivre le dossier et être... continuer
à travailler dans le cadre du marché du carbone. Merci.
Mme Nichols : Merci beaucoup,
Mme Lauzon. Nous allons procéder à la période d'échange. Le premier bloc, M. le
ministre, est à vous pour 15 min, 30 sec.
M. Drainville : Merci
beaucoup pour votre présentation. Je vais aller tout de suite à l'essentiel.
Vous avez quand même utilisé le mot chaos.
Mme Lauzon (Hélène) : ...
M. Drainville : Chaos.
Mme Lauzon (Hélène) : Chaos,
oui.
M. Drainville : Chaos, oui,
c'est ça. Alors... vous avez dit : Écoutez, on a réalisé en 32 ans, depuis
1990, une diminution de 19 %. Il reste cinq ans pour livrer le 18,5 %
manquant, je cite votre mémoire, ici, pour atteindre, donc, la cible de 37,5.
C'est un défi colossal, en cinq ans, nous devons faire attention de ne pas
créer un chaos dans notre économie pour y arriver. Qu'est-ce que vous voulez
dire par chaos?
Mme Lauzon (Hélène) : Bien, ça va
demander de l'injection de sommes majeures, dans le sens... en ce moment, nous
avons le marché du carbone. Et si nous voulons que les entreprises contribuent
davantage que ce qu'elles font dans le cadre du marché du carbone, bien... et
si on n'a pas les... l'aide financière provenant du FECC pour les aider, bien,
à ce moment-là, on va atteindre des... on va avoir des difficultés économiques
majeures pour les entreprises parce qu'elles ne sont pas capables de suivre la
cadence sans aide financière, et ce que je disais, c'est que, pour y arriver,
en ce moment, ce sont toutes les... tout ce qui pouvait être fait à des coûts
et avec des technologies économiquement viables, ça a été fait. Donc ce qui
reste, là, ce sont des... on avait fait faire même une étude auprès de nos
membres : quelle sorte de projet vous pourriez faire avec des... qui
pourrait rapporter des grandes réductions? Puis on nous parle de 32 millions,
de 140 millions, c'est beaucoup plus que ce qu'on peut trouver dans des
programmes comme écoperformance, et donc, si on n'est pas capables d'avoir du
soutien, on ne sera pas capables de procéder à de la modernisation des procédés
industriels, par exemple, si c'est ça qu'on nous demandait, parce que ce sont
des sommes colossales pour y arriver.
M. Drainville : Si elles ne
sont pas capables de le faire, il arrive quoi à ce moment-là?
M. Germain (Louis) : En fait,
je veux simplement ajouter à ce que...
M. Drainville : Placez le
microphone juste un petit peu plus devant vous pour qu'on vous entende bien.
Oui, voilà, c'est ça.
M. Germain (Louis) : Comme ça?
M. Drainville : Oui, c'est
ça.
M. Germain (Louis) : Excusez-moi.
En fait, le Québec, c'est un leader en changements climatiques, tout le monde
le reconnaît. Puis on s'est donné des outils importants pour être capables de
diminuer nos gaz à effet de serre, avec certains résultats, il reste du chemin
à parcourir. Mais ces outils-là, qui sont en place, doivent être maintenus et
doivent être améliorés dans une certaine mesure si on vise toujours la cible de
37.5. Ça fait que quand on parle de chaos, le... le milieu des affaires, le
milieu économique, le milieu industriel a besoin d'avoir une prévisibilité. Si
cette prévisibilité-là est au rendez-vous, il y a des bonnes chances qu'on
évite le chaos et que les outils qui ont été mis en place continuent d'exister
et soient renforcés, parce qu'on dit que la cible est ambitieuse à 2030, mais
si on veut l'atteindre, il va falloir qu'il y ait un coup de roue
supplémentaire qui soit donnée pour faire en sorte que tout le monde puisse
être au rendez-vous.
M. Drainville : Parce que
votre... votre mémoire, il est très clair, là, vous dites : nous doutons
que l'horizon de 2030 soit atteignable. Vous dites, un peu plus tard : il
reste... il ne reste donc que cinq ans pour livrer les 18.5 supplémentaires de
réduction pour atteindre la cible de 37,5, ce qui, a priori, semble...
M. Drainville : ...improbable,
donc vous doutez que ce soit atteignable. Vous dites que la cible est improbable.
Par la suite, vous réitérez : «Nous doutons que l'horizon 2030 soit
atteignable.» Puis, un peu plus tard, vous dites : «Il nous semble
illusoire de croire qu'en cinq ans nous pourrons livrer les 18,5 %
manquants pour l'atteinte de la cible de 37,5 %. En ce sens, bien que la
cible soit ambitieuse, force est d'admettre qu'elle n'est pas réaliste.» Alors,
qu'est-ce que vous proposez, à ce moment-là? Est-ce que vous proposez qu'on la
décale dans le temps?
Mme Lauzon (Hélène) : Bien,
vous avez cette possibilité-là, si vous voulez le faire. Mais, ce qu'on vous
propose aussi, c'est un mécanisme d'ajustement. Et je laisse mon collègue
expliquer en quoi ce mécanisme-là pourrait vous aider.
• (16 h 30) •
M. Germain (Louis) : Bien
oui. En... En fait, quand on... On est ici parce que la loi fait en sorte qu'on
est ici parce qu'il faut se pencher sur la cible de 37,5 % en 2030. Puis,
en regardant l'ensemble de la documentation, y compris l'avis qui a été fait
par le comité d'experts, on s'est dit il y a beaucoup d'incertitude là-dedans.
Ce qui fait qu'on a des données de 2022 qui nous servent à établir que le
niveau de réduction en 2025... ça fait qu'on a trois ans de retard, puis on ne
sait pas ce qui s'en vient dans trois ans. Ça fait que si on avait les données
de 2025 aujourd'hui, on serait où? Est-ce qu'on serait encore à... aussi loin
qu'on est de la cible ou si on serait plus près? Ça fait que, ce qu'on se dit,
c'est : compte tenu qu'il y a un facteur d'incertitude qui est grand,
compte tenu qu'il faut revoir la cible aux cinq ans, est-il nécessaire de
décider aujourd'hui? L'idée d'avoir un mécanisme d'ajustement, c'est d'attendre
de voir venir les choses pour voir comment... où est-ce qu'on se retrouvera
dans... dans deux ans ou dans trois ans, en tenant compte d'un différent nombre
de facteurs, comme, par exemple, l'évolution du bilan, est-ce que le bilan GES
va s'être amélioré ou... ou s'être détérioré, quel va être aussi l'état de
l'économie. On sait que c'est une préoccupation, actuellement, il faut
absolument en tenir compte. Si l'économie du Québec s'améliore, et qu'on a une
bonne croissance, et que le gouvernement du Québec est capable de se donner les
leviers pour intervenir via ses programmes, bien, ça va être un coup de pouce
supplémentaire pour être capables d'atteindre la cible. Ça fait qu'on s'est dit
une fois qu'on a ce meilleur portrait là, bien, c'est plus facile de prendre
une décision. La perception qu'on a, c'est que dans l'état actuel des choses,
la prise de décision est peut-être plus difficile parce qu'il y a trop
d'éléments d'incertitude, on ne sait pas trop vers quoi tend l'économie. On a
vu les chiffres dernièrement au Canada qui fait que la croissance a été quand
même meilleure qu'on pensait, ça fait que ça change un peu la perspective,
nécessairement. Puis, sur le plan de l'évolution du bilan, bien, il y a des
mesures qui ont été mises en place antérieurement, qui vont probablement donner
des résultats qui pourraient nous réserver des... des diminutions de GES.
Une fois que j'ai dit ça, ce mécanisme-là,
pour le mettre en place, bien, il est à la discrétion du ministre. Alors, le
ministre pourrait dire : Moi, je vais recourir au mécanisme d'ajustement
puis, pour le faire, je vais me baser sur de la donnée probante, je vais regarder
quel est... quel est l'état de l'économie, quel est l'état du bilan de GES du
Québec puis, à partir de ça, je vais me faire une tête, je vais consulter des
partenaires de qui je pourrais avoir un avis, comme le Comité consultatif sur
l'environnement, et je rendrai ma décision. Ce qui fait que ça permet d'avoir
une meilleure perspective et... et de prendre une décision avec davantage de
données probantes. C'est ça, l'idée du mécanisme d'ajustement.
Mme Lauzon (Hélène) : Puis il
y a aussi le plan d'action d'Hydro à l'horizon 2035 qui pourrait vous
aider.
M. Drainville : Oui, oui.
Mais alors, la position très claire que vous prenez, c'est : «La cible de
37,5 % cinq est suffisamment ambitieuse et ne... ne devrait pas être revue
à la hausse dans les circonstances.» Encore une fois, je vous cite. Mais, quand
on... on fait la liste des... des constats que vous... que vous faites et... et
le doute qui est très clairement exprimé quant à la capacité que nous avons de
l'atteindre, cette cible, je suis étonné que vous ne proposiez pas, par
exemple, de dire : Écoutez, par exemple, on maintient 37,5 %, mais on
la repousse de... à 2035, par exemple. Pourquoi vous n'êtes pas allés là?
Pourquoi? Vous êtes très clairement favorables à ce que la... la cible ne soit
pas haussée, mais c'est comme si vous... vous faites le constat de la
difficulté d'atteindre, vous dites clairement qu'elle n'est pas atteignable, ou
en tout cas qu'elle sera très difficilement atteignable, mais c'est comme si
vous ne tiriez pas les conséquences ou les... dis-je, les conclusions de votre
constat. Et je... je me pose la question pourquoi vous n'allez pas là.
Mme Lauzon (Hélène) : Bien,
je... je l'ai mentionné dans ma présentation quand je vous ai dit qu'en vertu
de la loi c'est... la cible est à 37,5 %, elle ne peut pas être réduite.
Mais vous n'avez pas d'échéance, donc ça vous permet de... de reporter, si vous
souhaitez le reporter.
M. Drainville : Mais pourquoi
vous ne le recommandez pas, justement?
Mme Lauzon (Hélène) : Ah,
pourquoi on le... Parce qu'il y a le mécanisme d'ajustement aussi, mais... il
n'y a rien qui empêche de... de le recommander, mais... le mécanisme
d'ajustement est là aussi.
M. Germain (Louis) : C'est un
peu ça qui... C'est un peu ça qu'est le principe du mécanisme, c'est de... de
permettre de donner au ministre la souplesse pour être capable d'intervenir au
moment où il jugera opportun d'intervenir...
16 h 30 (version non révisée)
M. Germain (Louis) : ...Ce
qu'on, c'est aujourd'hui en décembre 2025, il manque trop d'éléments pour être
capable de le faire.
M. Drainville : Mais est-ce
que... est-ce que je traduis bien votre position si je dis : En l'absence
d'un mécanisme d'ajustement, vous souhaiteriez que la cible soit repoussée dans
le temps? Est-ce que cela traduit bien votre position?Madame?
Mme Lauzon (Hélène) : En
effet, oui.
M. Drainville : Oui?
Mme Lauzon (Hélène) : Oui.
M. Drainville : Et vous la
repousseriez à quelle date?
Mme Lauzon (Hélène) : Bien, pas
plus que 2035, assurément.
M. Drainville : Pas plus que
2035.
Mme Lauzon (Hélène) : Parce
que le plan d'Hydro est en 2035. Donc, avec le plan d'Hydro, vous allez savoir
où est-ce que vous en êtes aussi en 2035.
M. Drainville : Quand...
quand vous dites «l'industrie a fait de grandes réductions» et vous dites «les
réductions... Je ne dirais pas... Bien, écoutez, je vais le dire comme ça, là,
puis si je le dis mal, vous allez me corriger : Les entreprises ont déjà
réalisé les réductions de GES qui étaient les plus faciles à réaliser. Les
prochaines seront plus coûteuses et plus difficiles. Est-ce que je résume bien?
Mme Lauzon (Hélène) : Oui, je
dirais facile et économiquement viable. C'est la différence.
M. Drainville : Et
économiquement viable. Est-ce que vous pouvez nous donner des exemples de
réductions de GES, justement, que l'industrie a réalisés déjà?
Mme Lauzon (Hélène) : Passer
d'une bouilloire au gaz naturel à l'électricité, modifier la... la façon
d'utiliser le combustible, tout le combustible intrant dans un procédé
industriel, encore là, si c'est... quand c'est possible de passer du mazout au
gaz naturel. Gaz naturel à l'électricité, c'est beaucoup plus compliqué en
sens... puis c'est très dispendieux, c'est ce qui fait qu'en ce moment les
entreprises demandent des fonds, parfois, mais elles... elles ne peuvent pas
aller jusqu'au bout de leurs projets parce qu'ils... elles n'arrivent pas à
obtenir les sommes importantes du... du FECC et pas nécessairement du FECC mais
des programmes. C'est ce que je vous dirais, monsieur le ministre, là, c'est
que les programmes qui existent, là, que ce soit ÉcoPerformance ou encore...
mais surtout ÉcoPerformance, ça avait été majoré à 10 millions, mais 10 millions,
ce n'est rien quand on est rendu à des technologies de rupture pour essayer de
moderniser les procédés industriels.
M. Drainville : Question un
peu plus délicate : Est-ce que... est-ce que j'ai raison de dire que, compte
tenu du consensus quand même pas mal fort qui existe au Québec sur la question
climatique, pour un entrepreneur, ou pour une entreprise, ou pour un
regroupement d'entreprises, de sortir publiquement et de dire : La cible
de 37,5 là, faisons attention, soyons prudents, ne créons pas le chaos, etc., je
vais le dire comme ça, là, mais ça prend un certain courage pour le dire
publiquement? Parce qu'on sait qu'il y aura dans la sphère publique beaucoup de
réactions négatives à un tel propos. Est-ce que je... Est-ce que j'ai raison
d'affirmer ce que j'affirme là?
Mme Lauzon (Hélène) : Vous
avez raison.
M. Drainville : Hein?
Mme Lauzon (Hélène) : Vous
avez raison.
M. Drainville : Est-ce à dire
qu'il y a de vos membres?
Mme Lauzon (Hélène) : Oui, je
l'ai même mis en note de bas de page, hein? Que la position qu'on vous reflète
aujourd'hui c'est la position de la majorité de nos membres.
M. Drainville : Et vous en
avez consulté combien?
Mme Lauzon (Hélène) : 350, mais...
M. Drainville : Combien?
Mme Lauzon (Hélène) : On a
350 membres. Mais il y en a combien qui ont répondu à... à ce mémoire-là
qu'on travaille depuis quand même plusieurs semaines, là, bien, je dirais, une
bonne... c'est très représentatif, là. Ce n'est pas... ce n'est pas une
minorité.
M. Drainville : Mais dites-moi,
dites-nous, une bonne?
Des voix : ...
Mme Lauzon (Hélène) : Il y en
a 300 qui ont reçu le mémoire.
M. Drainville : Il y en a 300
qui ont reçu votre mémoire. Dans les... dans lequel mémoire vous les informer
de votre position.
Mme Lauzon (Hélène) : Oui,
oui, toujours. C'est dans notre gouvernance où on les consulte toujours.
M. Drainville : Mais... mais,
une fois l'avoir reçu, comment savoir qu'ils étaient d'accord.
Mme Lauzon (Hélène) : Mais s'ils
ne se sont pas manifestés contre, c'est donc dire qu'ils acceptaient.
M. Drainville : Oui, je...
Mme Lauzon (Hélène) : On a un
conseil d'administration aussi qui a relu la mémoire. Donc, c'est certain, là, je
ne représente pas la totalité des entreprises du Québec, mais c'est quand même...
Nous représentons le secteur d'affaire du Québec pour les questions
d'environnement et de développement durable. C'est parce que vous remettez en
question. Parce que c'est 300 personnes qui l'ont reçu, vous vous dites :
Ce n'est pas représentatif?
M. Drainville : Bien, je dis :
Ce n'est pas parce que je l'ai reçu que je suis nécessairement d'accord. Puis si
j'étais en... si j'étais un appui, je ne me manifesterais pas nécessairement,
ça, là-dessus, je pense, vous avez raison. On dit souvent ceux qui s'opposent
ont davantage tendance à se... à se manifester...
M. Drainville : ...que ceux
qui sont d'accord. Mais j'aimerais ça que vous me... que vous me donniez
peut-être davantage d'éléments qui font la preuve que vos 300 ou
350 membres sont effectivement pour une bonne part d'accord avec cette
position.
Mme Lauzon (Hélène) : Ah!
bien, je vous dirais... puis je vais me retourner vers... mais je vous
dirais...
M. Drainville : Je me fais
l'avocat du diable, Mme, parce que... Je me fais l'avocat du diable parce que
vous allez devoir... je vous garantis que vous allez avoir des journalistes...
Mme Lauzon (Hélène) : Mais
vous, vous aimeriez ça m'interviewer là-dessus, hein? Mais, écoutez, c'est
l'économie...
M. Drainville : Bien, si vous
connaissez...
Mme Lauzon (Hélène) : C'est
la situation actuelle, hein? C'est l'économie actuelle, c'est la politique
actuelle, on ne sait pas trop qu'est-ce qui nous attend, c'est la question
d'imprévisibilité, c'est... ce qui explique, je pense, que les gens n'ont pas
réagi contre. Je ne sais pas si, Olivier, tu voulais ajouter quelque chose.
M. Drainville : Mais là,
dites-moi-le, là, tu sais, avez-vous eu... Moi, j'ai besoin, là, de... j'ai
besoin que vous me disiez : Regarde, là, j'ai eu... j'ai cinq
entrepreneurs, j'ai 10 entrepreneurs, j'ai 20 entrepreneurs. Ils nous
ont appelés puis ils nous ont dit : Heille! Tu t'en vas en commission
parlementaire, là, j'espère que tu vas le dire, là, que, la situation actuelle,
on vit dans l'incertitude, on ne sait pas ce qui va arriver avec Trump, on ne
sait pas ce qu'il va arriver avec... on ne sait pas si on s'en va en récession
ou pas, on ne connaît pas encore l'impact des tarifs, tu sais. Le chaos, moi,
je trouve, c'est un mot très fort. Pour quelqu'un comme vous, vous me semblez
une femme très posée, que vous utilisiez un mot comme celui-là, je pense que ça
doit refléter...
• (16 h 40) •
Mme Lauzon (Hélène) : L'état
d'esprit de nos membres.
M. Drainville : Bien, je le
pense aussi, mais je veux juste que vous me fassiez cette démonstration-là.
Mme Lauzon (Hélène) : Bien,
c'est parce que ça ne fonctionne pas comme ça, dans le sens, oui, j'ai des gens
qui m'ont appelé pour me le dire, mais c'est très rare. La plupart du temps, ce
qui arrive, c'est qu'on convoque une réunion, on présente le document de
consultation, puis ensuite les gens réagissent, puis nous, dans mes mémoires,
on traduit ce qu'on a entendu en réunion, on leur retransmet pour être certain
que ça traduit bien leur vision et on le transmet au conseil d'administration.
C'est notre gouvernance.
La Présidente (Mme Nichols) : Merci.
M. Dulude (Olivier) : Si vous
me permettez, si vous me permettez, j'ajouterais peut-être que ce que...
Mme Lauzon (Hélène) : Il
reste cinq secondes.
M. Dulude (Olivier) : ...ce
sur quoi les membres nous ont beaucoup interpelés, c'est les mesures
d'accompagnement qui peuvent être mises en place pour les aider à progresser.
La Présidente (Mme Nichols) : Très
bien, merci. Je cède maintenant la parole à la députée de Notre-Dame-de-Grâce.
Mme McGraw : Merci. Donc,
peut-être élaborer sur la dernière question parce que c'est quand même
important. Je comprends, le ministre aimerait souligner le fait que... que vous
soulignez dans votre mémoire, que la cible est quand même ambitieuse puis
peut-être qu'il y aurait des enjeux pour l'atteindre, en même temps vous... Ce
que j'apprécie aussi, c'est que vous êtes très concrets dans les mesures qu'il
va falloir prendre si on garde le cap sur la cible. Je trouve ça très
constructif, très responsable et c'est très détaillé, effectivement. Donc, juste
pour revenir, donc, si le gouvernement décide de garder le cap, j'aimerais vous
entendre plus sur les mesures et dans le cadre du SPEDE, mais aussi dans le
cadre des mesures d'accompagnement. Parce que je veux juste citer quelque chose
que je trouve ça très intéressant que vous dites : Il apparaît paradoxal,
au moment où il faut accroître nos efforts pour atteindre la cible de
37,5 %, que l'on se prive d'un tel levier financier, c'est-à-dire le
FECC... et le surplus du FECC, vous avez le mémoire que vous avez soumis
concernant le projet de loi. Ça fait que c'est important, aussi, de souligner
ce constat, effectivement. J'aimerais vous entendre là-dessus.
Mme Lauzon (Hélène) : Là,
vous voulez m'entendre sur le fait qu'on transfère des surplus ou sur les
mesures qu'on souhaite mettre en place, par exemple, dans le cadre du SPEDE?
Mme McGraw : Bien, on
comprend que les mesures, ça inclut les mesures financées qui vont être
financées, entre autres, par le FECC...
Mme Lauzon (Hélène) : Par le
FECC.
Mme McGraw : ...mais
j'aimerais vous entendre sur les deux. Quand même, j'ai...
Mme Lauzon (Hélène) : Ah!
très bien. Bien oui, mais on s'est opposé, hein, dans le cadre de notre
mémoire. On a aussi signé une lettre qui a été publiée dans La Presse, avec les
collègues du CPQ, la FCCQ, les Manufacturiers et Exportateurs, qui sont ici
après nous, pour le dénoncer, puisque, pour nous, ce fonds a été constitué dans
un objectif de lutte contre les changements climatiques et... D'abord, on ne comprend
pas ces surplus, pourquoi ces surplus se sont accumulés. Pourquoi ces
argents-là n'ont pas été accordés à des gros projets pour les entreprises? Ça,
c'est notre première question. On ne le sait pas. Et, à partir du moment où on
prend ces surplus-là pour les transférer au Fonds des générations, je comprends
qu'on veut essayer de réduire la dette ou autre, mais, pour nous, ça ne
s'inscrit pas dans la lutte aux changements climatiques que de transférer tout
au Fonds des générations. Si on transfère ou au fonds des générations ou au
fameux Fonds du réseau de transport terrestre, bien, là encore, c'est... si ce
n'est pas destiné au transport en commun, ce n'est pas de la lutte contre les
changements climatiques. Donc, dans quel contexte, est-ce que ce serait pour
construire un pont ou autre? Alors, c'est pour ça qu'on le dénonce, parce que
la lutte aux changements climatiques...
Mme Lauzon (Hélène) : ...et
c'est le fondement de ce fonds-là, qui a été constitué en vertu de la Loi sur
le ministère du Développement durable et qui justifie tous ces programmes qu'on
a mis en place au cours des dernières... pas seulement des dernières années,
depuis... depuis l'existence du fonds et depuis l'existence du marché du
carbone. Donc, pourquoi avoir pris... D'abord, pourquoi on a laissé les surplus
s'accumuler puis pourquoi... Alors, on est contre, justement parce que c'est
une période où on doit accélérer. Donc, si on veut accélérer, on a besoin
davantage d'argent, comme je le disais tantôt, surtout pour des projets d'envergure,
comme je le mentionnais. Ces argents... Cet argent-là du 1,8 milliard dont on
parle pour le surplus, c'est énormément d'argent qui aurait pu être utilisé
pour des projets majeurs pour les entreprises.
Mme McGraw : Puis on entend
en consultations des entreprises puis le secteur économique qui nous disent
aussi : Nous, on a participé de bonne foi et là on trouve que les fonds
qui ont été mis dans ce fonds-là, effectivement, c'est utilisé pour une dette
fiscale, mais il y a encore la dette climatique, et on s'enlève des moyens, on
est en train de s'enlever les moyens. C'est pour ça que j'allais... je voulais
aller dans les mesures parce qu'on comprend que le Québec n'a identifié à date
que 67 %, à peu près, des mesures. Ce que... Si je comprends bien, vous
dites : Complétez ces mesures-là, parce que, oui, on comprend qu'il y a
Donald Trump, on ne peut pas contrôler Donald Trump, mais on peut contrôler ce
que nous, on fait au Québec, et là on ajoute des éléments d'imprévisibilité qui
nuit beaucoup à... au milieu économique, si je comprends bien.
Mme Lauzon (Hélène) : Mais il
faut savoir que le fait qu'est alimenté, à raison d'à peu près 1 million...
non, plus que ça, 230, à peu près, 240 millions par ventes aux enchères, il y a
quatre ventes aux enchères par année, ça fait qu'on réussit à l'alimenter
toujours, puis il y a toujours des sommes, mais c'étaient quand même des
sommes... Pardon, je ne devrais pas parler au passé parce que ce n'est pas
encore adopté, le projet de loi, mais c'est une somme importante, le 1,8
milliard, donc... Puis la question pour moi, c'est : Comment ça se fait
que ça s'est accumulé? Donc, il faut continuer à l'alimenter, puis ça va
continuer avec, bien sûr, les ventes aux enchères qui se poursuivent. Mais,
cela dit, ce qu'on ne sait pas, c'est comment le système californien semble...
semble annoncer qu'il y aura une baisse du coût la tonne. On ne sait pas
comment ça se traduit parce que... Est-ce que ça va vouloir dire qu'on va
allouer davantage d'unités d'émission? Je rentre dans du technique, je m'en
excuse, mais ça sera intéressant à voir, parce que le marché californien semble
dire le... qu'ils vont réduire le coût la tonne. L'avantage, s'il y a une
réduction du coût la tonne, c'est qu'on va pouvoir en réaliser... on va pouvoir
faire plus de réduction au Québec.
Mme McGraw : Juste pour
revenir sur la cible, juste pour bien comprendre, donc, vous constatez que ça
va être difficile, même vous parlez de : Est-ce que c'est réaliste ou non?
En même temps, vous dites : Si on garde le cap, voici où il faut aller,
poursuivre les mesures, parce que sinon on se... on est présentés comme avec un
fait accompli. Il y a une cible, mais on ne se donne pas les mesures, on... on
s'enlève des mesures, on s'enlève des moyens, puis là on dit : On n'est
pas capables de le faire, bien que ça fait presque huit ans que le même
gouvernement de ces 22 ans sont au pouvoir, on se comprend.
La cible. Pour nous, la cible, ça inclut
le pourcentage, la date de base, 1990, et la date 2030. Si on change un de ces
éléments-là, on ne parle plus de la même cible, parce qu'on comprend que, si on
met ça en 2035, si on change la date, c'est une manière de baisser la cible.
Est-ce qu'on se comprend là-dessus? Est-ce que vous voyez ça comme ça? Parce
que, si on ne l'atteint pas d'ici 2030, ça veut dire qu'on n'atteint pas d'ici
2030, ça veut dire que ce n'est pas la même cible, c'est une autre cible, c'est
un... je ne sais pas quel pourcentage, en 2030. C'est peut-être pour ça aussi que
les gens ont une petite gêne de dire...
Mme Lauzon (Hélène) : Oui,
mais...
Mme McGraw : Parce qu'on
change la cible, effectivement
Mme Lauzon (Hélène) : ...en
même temps, si on ne l'atteint pas, on n'est pas plus avancés. Donc, pourquoi
essayer de dire : Bien oui, on va... Tant mieux si on réussit à
l'atteindre, là, mais je pense qu'on peut être réalistes aussi. Si on ne
réussit pas à l'atteindre, bien, on va mettre encore plus d'efforts pour tenter
de l'atteindre. C'est pour ça que, moi, l'analogie que je faisais avec le plan
d'action d'Hydro-Québec, je me dis : Bon, on va livrer beaucoup, beaucoup
de réductions avec ce plan d'action d'Hydro, et puis il est à l'horizon 2035,
donc ça devrait nous aider. Mais je ne pense pas que c'est une réduction. Je
comprends ce que vous dites, là, c'est-à-dire que, si ce n'est pas en 2030,
c'est en 2035, mais ça va permettre de l'atteindre si on n'y arrive pas d'ici
2030.
Mme McGraw : Bien, j'apprécie
beaucoup, encore une fois. C'est très franc, c'est très détaillé, puis là on
accepte que, si on garde le cap, voici ce qu'on devrait faire. Puis, je pense,
aussi... Je pense que le ministre, il a parlé le courage puis un peu le...
C'est quoi, la posture que devrait adopter le Québec face à cette incertitude,
à tout ce que fait Donald Trump, tout ce qui se fait ailleurs? Est-ce que c'est
de reculer ou, comme la Californie, de redoubler ses efforts puis de mettre en
place...
Mme McGraw : ...un plan, puis
des mesures qui... qui ont de l'allure.
Mme Lauzon (Hélène) : Mais je
ne pense pas qu'on reculerait... si votre question c'est de dire si on fixe...
on se projette à l'horizon 2035, plutôt que 2030, je ne pense pas que ce
serait un recul, mais ce serait de mettre les efforts pour y arriver si on a
presque la certitude qu'on ne va pas y arriver d'ici 2030.
Mme McGraw : Et juste peut
être une dernière question, vous êtes, et je pense que c'est important, vous
êtes... vous êtes encore tout à fait pour la cible de Carboneutralité d'ici 2050
et est-ce que vous... et absolument c'est là où on veut viser, est-ce que vous
êtes pour des plans au niveau des secteurs? Est-ce que vous êtes aussi pour des
cibles intérimaires? Peut-être nous parler de...
Mme Lauzon (Hélène) : Les
cibles intérimaires, c'est certain que ça fixe des objectifs, mais ça nous met
aussi dans un carcan à l'orée de la cible, à partir du moment où on approche de
la cible intérimaire, là, puis on ne l'a pas, on met de la pression beaucoup,
puis on est... à ce moment-là, on manquerait de flexibilité, donc on n'est
pas... favorable aux cibles intérimaires. Puis là vous parliez de la feuille de
route sectorielle, là, auquel le comité consultatif réfère, mais la feuille de
route sectorielle, ça existe déjà. Je pense que vous avez déjà reçu
l'association du ciment, l'association de l'aluminium. Ces... groupes, ce sont,
ces alumineries, ces cimenteries, se sont déjà dotées de feuilles
sectorielles... feuille de route sectorielle.
• (16 h 50) •
Par contre, je crois que ce que le comité
consultatif a à l'esprit, puis, bon, je ne leur ai pas parlé, je ne le sais
pas, mais j'ai l'impression qu'eux, ce à quoi ils pensent c'est des cibles
selon les secteurs que l'on retrouve dans l'inventaire des émissions de GES,
donc transport, industrie et tout le reste, secteur agricole, matières
résiduelles. Est-ce que ce serait possible? C'est un peu ça que le marché du
carbone fait, hein, d'avoir un budget pour le secteur industriel. Alors, c'est
ce que je dirais. Je ne sais pas si tu veux ajouter quelque chose?
M. Dulude (Olivier) : J'ajouterai,
comme tu le mentionnes, Hélène, que si on se dirige vers des feuilles de route
sectorielles qui sont très larges, industrie, transport, bâtiment, etc., on ne
tient peut-être pas nécessairement compte des subtilités propres à chaque
sous-secteur. On parlait du ciment, de l'aluminium, par exemple, donc si on
allait vers ça, ça prendrait une approche de co-création avec chacune des
industries concernées pour qu'on puisse s'adapter aux réalités de chacun.
Mme McGraw : Peut-être avec
le temps qu'il me reste, peut-être une minute, même pas, est-ce qu'il y a des
points que vous voulez souligner? En conclusion.
Mme Lauzon (Hélène) : Je veux
attirer votre attention à la page neuf, parce que c'est là où se retrouvent les
initiatives que l'on propose si jamais vous maintenez le cap à 2030 en disant,
bon, bien pour le marché du carbone, on nous avait... l'avis de marché qui a
été publié en 2024, qui revoyait les allocations gratuites, qui revoyaient les crédits
compensatoires, bien ça, on s'oppose à cela, surtout si la Californie est en
train de changer son système. Donc il faut contrôler l'explosion des prix si
jamais ces orientations-là étaient reprises, mais espérons qu'elles ne le
seront pas. Le marché public, par exemple. Votre collègue, M. le ministre, est
en train de se pencher sur une nouvelle stratégie des marchés publics, bon bien
peut-être que dans le cadre d'un marché public, on pourrait essayer de
favoriser les entreprises du Québec en ayant un critère GES. Si... nos
entreprises seraient probablement favorisées par rapport à d'autres
entreprises, tout en se conformant au traité de libre-échange, bien entendu.
M. Dulude (Olivier) : Je
pourrais ajouter également, les délais d'approbation réglementaire, qui peuvent
être parfois contraignants quand on est dans un horizon de cinq ans pour
atteindre la cime, c'est sûr que des projets à 40, 50, 100 millions, c'est
des grands projets pour lesquels les délais d'autorisation peuvent être longs,
il y a des processus à faire, puis ça a sa place, mais il faut réfléchir à ça
aussi également si on veut amener les réductions le plus rapidement possible.
La Présidente (Mme Nichols) : Et
bien, merci beaucoup. Je cède maintenant la parole au député de Taschereau pour
3 minutes, 50 quelques secondes.
M. Grandmont : Merci, Mme la
Présidente. Merci à vous trois pour votre présence, puis pour votre mémoire.
J'aimerais revenir sur la question du chaos. C'est important quand même, parce
que, bon, vous parlez sur votre site internet, entre autres, là, la vision
holistique, hein, de l'approche que vous mettez de l'avant, là, auprès de vos
membres, puis dans vos représentations aussi. Et puis quand je vois... tu sais,
vous dites on pourrait, s'il n'y a pas de mesures d'ajustement, si on ne va pas
dans le sens de la liste des recommandations que vous faites en page neuf, on
risque, en maintenant la cible à 2030, on risque d'atteindre une certaine forme
de chaos dans l'économie. Mais en même temps, vous dites : on est quand
même d'accord avec la cible de 2050 pour la carboneutralité.
Moi quand je vois ça, je vois la quantité
de gaz à effet de serre qu'on continue de produire parce qu'on ne les réduit
pas s'accumuler dans l'atmosphère, puis je vois aussi une industrie ne pas
s'ajuster et à l'approche de 2050, devoir prendre des bouchées de plus en plus
grosses à chaque année qui passe parce qu'on vise le 2050. Est-ce que le chaos,
il n'est pas dans le fait de repousser tout le temps plus tard l'action climatique?
Mme Lauzon (Hélène) : Je vais
dire deux choses, puis je vais laisser mes collègues réagir...
Mme Lauzon (Hélène) : ...2050,
oui, si on réussit à atteindre la cible à l'horizon 2030. Si on n'arrive pas à
atteindre la cible à l'horizon 2030, on n'est pas en train de dire que la
carboneutralité ne devrait pas être visée, mais il va falloir quand même
s'assurer qu'on a les mécanismes en place pour y arriver si on n'arrive pas
à... supposons qu'on arrive à 21 % d'ici 2030, bien, il va falloir ajuster
par rapport à 2050. Puis là, quand vous dites : Est-ce que ça veut dire
qu'il va toujours falloir repousser? Non, parce que dans le mécanisme
d'ajustement qu'on propose, c'est cinq ans, ce n'est pas... c'est pas ad vitam
aeternam. Puis je ne sais pas si un de vous deux... ajouter?
M. Germain (Louis) : C'est
certain qu'il faut être capable de savoir où on s'en va. La prévisibilité dont
j'ai parlé tantôt pour le secteur industriel, elle est importante. Puis c'est
avec les cibles qu'on s'est donné qui fait qu'il y a eu des réactions... dans
le mémoire, vous voyez que le secteur industriel a diminué depuis 1990 ses
émissions de gaz à effet de serre de 22 %. Ça fait qu'eux autres ils ont
vraiment livré la marchandise par rapport à d'autres secteurs qui ne l'ont pas
fait. Ça fait que ce qu'il faut s'assurer de faire, c'est d'avoir la
prévisibilité nécessaire pour savoir comment on agit, parce que si on dépasse
trop la cible, qu'on arrive, mettons en 2040 à 37.5 %, la pression, si on
veut aller à 2050 après, elle va être... elle va être énorme. Ça veut dire que
le plus tôt possible, atteindre la cible de 37.5.
M. Grandmont : Moi j'ai quand
même été surpris, là, de votre positionnement sur le 2030 versus 2035, par
exemple, là, parce que bon, on a reçu l'Association canadienne du ciment,
l'Association de l'aluminerie... des alumineries du Canada, la grappe
transports électriques, l'UPA, je ne sais pas s'il fait partie de vos membres,
mais en tout cas, pour moi...
Mme Lauzon (Hélène) : Non.
M. Grandmont : ...c'est un
secteur industriel quand même assez important. On va recevoir les
manufacturiers exportateurs tantôt. À ma connaissance, pour avoir lu leur
mémoire hier, ils sont toujours sur le 37.5 d'ici 2030. J'ai de la misère à
m'expliquer votre positionnement. D'ailleurs, j'ai essayé de chercher aussi qui
sont vos membres, puis ce n'est pas... ce n'est pas... ce n'est pas explicite,
là, sur votre site, là, Internet non plus, là.
M. Germain (Louis) : Bien,
bien peut-être juste un commentaire sur le secteur de l'aluminium. S'ils n'ont
pas tenu mordicus à la cible de 37.5 en 2030, ils ont dit peut-être qu'un
report, dans la discussion ici, M. Simard a dit...
M. Grandmont : Ah, oui, non.
Dans la discussion qu'ils ont dit, un report, on ne serait pas contre
évidemment. Mais...
M. Germain (Louis) : Bien,
oui.
M. Grandmont : ...le mémoire,
puis ce qu'ils ont dit aussi, était très clair, on vise 2030. Nous, on est sur
la bonne voie, d'ailleurs.
M. Germain (Louis) : Oui,
mais on a senti l'inquiétude du secteur en disant 2030, on trouve que...
M. Grandmont : Il y a eu
beaucoup de pression...
M. Germain (Louis) : ...c'est
serré. C'est serré.
M. Grandmont : ...pour qu'ils
répondent 2035. Oui. On est bien d'accord.
M. Germain (Louis) : Oui.
M. Grandmont : Puis peut-être
une dernière question.
La Présidente (Mme Nichols) :
36 secondes.
M. Grandmont : Oui. Merci
beaucoup. Vous aviez fait des recommandations, là, en 2022 sur le Rapport sur l'atteinte
de 2020, en fait, là. Puis vous revenez sensiblement avec les mêmes
recommandations qu'en 2022, dans le fond, quand on avait fait, on avait eu
connaissance du rapport 2020. Est-ce que vous trouvez que dans le fond, que le
gouvernement, puis je vois la liste qui est très longue en page 9, encore une
fois, est-ce que vous trouvez que les gouvernements successifs se sont un peu
assis sur leur main en matière de transition climatique pour qu'on en soit à la
même place aujourd'hui?
La Présidente (Mme Nichols) : Très,
très courte réponse. S'il vous plaît.
M. Germain (Louis) : Il y a
eu beaucoup d'actions qui a été posé par le gouvernement, par les gouvernements
depuis 1990. On ne peut pas le nier. Maintenant, est-ce qu'on est arrivé au
résultat qu'on attendait?
M. Grandmont : Il manquait
des actions structurantes, là.
M. Germain (Louis) : Ce n'est
pas si évident, mais on a mis les...
La Présidente (Mme Nichols) :
Très bien...
M. Germain (Louis) :
...efforts nécessaires pour y arriver.
La Présidente (Mme Nichols) : Merci
beaucoup. Merci beaucoup. Merci de votre présence. Merci de votre contribution
aux travaux de la Commission. Nous allons maintenant suspendre pour procéder au
prochain groupe.
(Suspension de la séance à 16 h 57)
(Reprise à 17 heures)
La Présidente (Mme Nichols) :
Alors, nous continuons nos travaux. Je souhaite la bienvenue aux représentantes
de l'association des Manufacturiers et Exportateurs du Québec. Bien que ce sont
des habitués ou du moins qui connaissent le fonctionnement des commissions
parlementaires, je vous rappelle que vous disposez de 10 minutes pour
votre exposé. Après quoi, nous allons procéder à la période d'échange avec les
membres de la commission. Je vous invite donc à vous présenter puis à commencer
votre exposé.
Mme White (Julie) : Donc,
Julie White, PDG de Manufacturiers et Exportateurs du Québec.
Mme Gagné (Jolyanne) :
Jolyanne Gagné, conseillère principale Affaires publiques et relations
gouvernementales chez MEQ.
Mme White (Julie) : Donc,
merci beaucoup, Mme la Présidente, M. le ministre, Mmes, MM. les députés, ainsi
que toutes les équipes qui vous accompagnent. Ça fait plaisir d'être avec vous
aujourd'hui. Manufacturiers et Exportateurs du Québec, c'est une association
dont la mission est d'améliorer l'environnement d'affaires et d'aider les
entreprises manufacturières à être plus compétitives sur les marchés locaux et
internationaux. Le secteur manufacturier, comme vous le savez, est un des
piliers de notre économie. On est très implantés dans les régions. Les usines
sont souvent le cœur économique des villes et des villages. Ils emploient plus
de 500 000 personnes, représentent 12,3 % du PIB. C'est le
secteur le plus important en termes de part dans le PIB et 86 % des
exportations. Ils comptent sur plus de 13 600 entreprises à travers
la province, de très petites PME jusqu'à de très grandes entreprises
multinationales.
MEQ remercie les membres de la Commission
des transports et de l'environnement pour l'occasion de présenter ses
observations dans le cadre de la consultation portant sur la cible de réduction
des émissions de gaz à effet de serre du Québec. C'est un exercice qui est
important, important pour aujourd'hui, mais aussi pour les années à venir. Depuis
son adoption, cette cible s'inscrit parmi les plus ambitieuses en Amérique du
Nord et s'inscrit aussi dans un plan de carboneutralité à atteindre d'ici 2050.
Elle s'appuie sur le fait que le Québec dispose déjà d'une industrie très
largement décarbonée et affiche des émissions par habitant parmi les plus
faibles sur le continent. Dans ce contexte, chaque réduction additionnelle
exige des efforts significatifs, tant sur le plan financier que technologique.
MEQ partage les objectifs climatiques
globaux du Québec. Nous tenons à rappeler que la transition doit être menée
cependant de manière responsable et prévisible en tenant compte des réalités
opérationnelles, notamment de notre secteur. Notre secteur évolue dans un
environnement exigeant, marqué par une combinaison de facteurs qui complexifie
la mise en œuvre des différents projets et qui ralentit les investissements.
Les tensions commerciales avec les États-Unis créent une incertitude qui oblige
les entreprises à revoir régulièrement leur stratégie d'approvisionnement...
leurs stratégies, leurs approvisionnements, leurs coûts et leurs opérations.
Ces fluctuations exigent des manufacturiers qui s'ajustent rapidement pour
préserver la stabilité de leurs opérations. Parallèlement, la pénurie de
main-d'œuvre demeure l'enjeu numéro 1 pour nos entreprises. Elle freine la
croissance, limite la capacité de répondre à la demande et retarde le
déploiement de projets structurants, y compris ceux liés à la transition
énergétique.
Malgré tout, le secteur manufacturier
demeure engagé dans l'amélioration de sa performance environnementale. Les
entreprises québécoises ont entrepris de moderniser leurs installations, de
revoir l'efficacité de leurs opérations et d'intégrer des solutions de plus en
plus sobres en carbone. Cet engagement démontre que les manufacturiers voient
maintenant réellement la transition comme une opportunité de rehausser leur
compétitivité et leur productivité. Cependant, les limites technologiques et
financières sont bien réelles et empêchent actuellement certains sous-secteurs
de faire des progrès supplémentaires dans la diminution des émissions. Dans ce
contexte, et compte tenu des résultats actuels, nous considérons que les cibles
de réduction anticipées ne doivent pas être augmentées pour l'échéance de 2030
et que le maintien de la cible actuelle serait préférable. Le Québec doit
travailler avec l'ensemble des secteurs pour atteindre l'objectif de
carboneutralité en 2050.
Maintenant, si nous souhaitons réellement
atteindre la cible ou du moins s'en approcher pour 2030, MEQ considère que
certains facteurs doivent être pris en considération, et je vais vous en
souligner trois pour le moment. Le premier, c'est l'équité entre les secteurs.
Le secteur industriel, et les données, là, proviennent du document de
consultation qui a été déposé par...
17 h (version non révisée)
Mme White (Julie) : ...gouvernement
représente 31 % des émissions de gaz à effet de serre. Elles ont été en
diminution de 22 % depuis 1990. C'est un pas qui est significatif mais qui
n'est peu souvent reconnu. On a souvent, dans un discours, l'impression que ce
sont les grandes entreprises industrielles qui portent sur eux tout le poids de
la diminution des gaz à effet de serre, mais, si on regarde le portrait comme
il faut, il faut non seulement reconnaître la part réelle des entreprises
industrielles dans les émissions et la part réelle des efforts qui ont été
faits au cours des dernières années.
Si on regarde les données du gouvernement...
Et ce n'est pas pour critiquer les autres secteurs, c'est juste pour remettre
en perspective, moi, je représente un seul secteur économique, ici, les
transports ont augmenté de 25,6 % leurs émissions, l'agriculture, de
12,6 %. Juste en termes de millions de tonnes, le 7 millions de tonnes que
les industries ont été chercher en diminution, il a été quasiment annulé par le
7 millions de tonnes supplémentaires que les transports ont mis.
Pourquoi je vous représente ça? Comme je
dis, ce n'est pas pour taper sur la tête de d'autres secteurs, c'est juste pour
dire et rappeler que l'effort doit être collectif. On ne peut pas compter
uniquement sur un secteur comme notre secteur pour faire l'ensemble des efforts
dans la transition, bien qu'on soit engagés, ou penser que seulement les
entreprises vont faire une différence. C'est aussi un effort qui est plus grand
et collectif.
Deuxièmement, c'est le financement. L'engagement
du secteur manufacturier est réel, et on voit des améliorations des projets un
peu partout. Toutefois, on doit être accompagnés de manière cohérente,
prévisible et adaptée, notamment par les gouvernements pour y arriver, soutenir
l'innovation, la recherche et le développement, l'adaptation de technologies
propres. On a beaucoup parlé, dans la commission, des technologies de rupture.
Évidemment, ce n'est pas seulement une nécessité environnementale, mais ça peut
le devenir, c'est aussi une condition pour assurer la compétitivité de
nombreuses de nos entreprises alors qu'on parle de diversification des marchés,
beaucoup vers l'Europe, hein? Je me fais dire, à tous les jours ou à peu près :
Mais pourquoi tes entreprises ne vont pas plus vers l'Europe? Bien, il y a des
normes environnementales qui sont différentes aussi en Europe, et il faut l'avoir
en tête dans le contexte actuel.
En ce sens, évidemment que l'utilisation
des sommes du Fonds d'électrification et de changements climatiques pour
rembourser la dette nous a rendus bien perplexes. Ces sommes auraient dû être
investies pour la lutte aux changements climatiques afin de soutenir les
entreprises dans cette transition. Dans les dernières années, on a aussi aboli
le programme pour les utilisateurs du tarif L pour l'introduction de nouvelles
technologies industrielles. On a parlé d'écoperformance, un peu plus tôt, avec
ma prédécesseure. Donc, ce sont toutes des mesures qu'il faut penser à
renforcer. Au-delà de l'aide financière, il faut aussi s'assurer que les
autorisations pour les projets se fassent rapidement. On est... vous le savez, des
fois, c'est long, au Québec, faire avancer des projets. Il faut être là, il
faut être présents.
Et le troisième point que je voulais vous
souligner d'emblée, c'est la question de l'accès à l'énergie. Pour réellement
soutenir le secteur industriel dans la transition... voyons, énergétique, il
faut aussi être en mesure de leur offrir de l'énergie qui est plus propre. Les
ajouts de capacité et le plan d'Hydro-Québec en ce sens est très important pour
nos entreprises, non seulement en termes de diminution que ce plan aura comme
impact sur les GES globalement mais sur la capacité de nos entreprises à faire
des projets. On a été, certains d'entre nous, au projet de loi n° 69, on a
parlé beaucoup de l'octroi des blocs d'électricité. C'est un enjeu encore
majeur pour nos entreprises. Beaucoup d'entreprises qui avaient des projets qui
pouvaient s'inscrire dans la transition, la diminution des GES, qui n'ont pas
eu accès à des blocs d'électricité pour les faire, c'est une question qui est
importante, mais au-delà des blocs d'hydroélectricité ou d'éoliennes, il faut
aussi penser aux autres types d'énergie qui... qui ont un potentiel important
au Québec, que ce soit en termes de biomasse, notamment, en termes de gaz
naturel renouvelable, on a eu Énergir un petit peu plus tôt, de carburants verts,
d'énergie solaire, d'hydrogène, de nucléaire. Il faut regarder l'ensemble des
options qui sont à notre disposition pour soutenir les entreprises et leur
permettre d'avoir le maximum d'énergie pour faire ces projets de transition là.
Évidemment, aussi, le développement des
technologies de séquestration du carbone doit faire partie d'un plan
gouvernemental. Est-ce que c'est la seule mesure? Non, il faut... il faut
diminuer à la source, mais ça doit faire partie d'un ensemble de solutions qu'on
met de l'avant du côté gouvernemental.
En terminant, je vous dirais qu'il faut
avoir de l'ambition si on veut viser l'excellence. Est-ce que la cible va être
dure à atteindre telle quelle? La réponse, c'est oui, hein, je n'arrive pas ici
en vous disant : Ça va être facile, puis c'est sûr qu'on l'atteint, mais
on peut aussi décider de dire : On la repousse, mais, en la repoussant, est-ce
qu'on s'assure de continuer à donner tous les moyens ou mettre tous les moyens
en place pour l'atteindre le plus rapidement possible? C'est une question qu'on
peut se poser, notamment dans le contexte actuel, où on a les débats...
Mme White (Julie) : ...sur le
fond de... bien, sur le FECC. il faut plutôt redoubler, continuer à redoubler
d'efforts, mettre les efforts, travailler avec les entreprises et idéalement
garder nos cibles dans un objectif plus global aussi de carboneutralité en
2050. Plus on reporte la cible, plus c'est difficile d'atteindre le 2050. Il
faut être conscient aussi de cet ensemble-là. Donc, nous sommes un partenaire
dans la transition. Nos membres sont engagés. On voit des exemples très
intéressants sur le terrain. On a beaucoup de choses qui se font, qui sont
pertinentes et on souhaite être capable de poursuivre avec le gouvernement sur
cet élan. Merci.
La Présidente (Mme Nichols) :
Merci beaucoup. Merci de votre exposé. Nous allons débuter la période
d'échange, et la première période pour M. le ministre, pour 15 minutes
45 secondes.
M. Drainville : Oui. Bonjour,
merci pour la présentation. La dernière fois que j'ai rencontré Mme White, elle
était juste en face de moi dans un autre rôle. Alors, bien content de vous
retrouver.
Mme White (Julie) : Moi aussi.
• (17 h 10) •
M. Drainville : Écoutez, je
ne veux pas caricaturer votre position, Mme White, mais c'est comme si vous
disiez... tu sais, quand vous avez dit : Est-ce que la cible est exigeante? La
réponse, c'est oui. Elle va être exigeante, mais ce n'est pas une raison pour
la diminuer. C'est comme si vous disiez : Il vaut mieux avoir une cible
ambitieuse, mais irréaliste ou inatteignable que de garder... que de repousser
la cible pour la rendre plus réaliste et plus atteignable. Puis moi, j'ai un
grand débat, je vous dirais, éthique, je pense. Je pense que le mot s'applique
ici. Je comprends ceux qui disent, ceux et celles qui disent : Même s'il
est difficilement réalisable, il faut garder le chiffre parce qu'il nous tire
vers le haut, quitte à ce qu'on le manque, mais au moins il va nous tirer vers
le haut, il ne va pas briser notre élan, etc., etc. J'entends ça puis je
comprends ça. Mais moi je pense que de fixer une cible quand on sait qu'elle
n'est pas réalisable, c'est de... C'est... Il y a un peu de la poudre aux yeux
là-dedans puis on risque de... d'obtenir le résultat contraire à ce que l'on
vise. Les... le citoyen moyen, il n'est pas... il ne suit peut-être pas la
politique comme nous, on la suit, il est occupé, il travaille, il paie ses
impôts, il s'occupe des enfants, il court partout, mais à un moment donné, il
n'est pas aveugle, là, puis il sait très bien qu'on lui conte un peu une
histoire, on lui monte un peu un bateau en lui faisant croire qu'on va faire la
moitié du chemin en l'espace de cinq ans, alors que ça nous a déjà pris
au-dessus de 30 ans pour faire le moins 19 %.
Je... puis moi, je pense qu'on peut perdre
du monde en chemin quand on... quand on... quand on prend cette approche. Puis
je ne vous... je ne dis pas que c'est la vôtre. Mais ce que je dis, c'est que
ceux et celles qui savent que l'objectif est très ambitieux et qui, dans leur
for intérieur, savent que la cible ne sera pas atteinte, je trouve qu'ils
jouent un peu avec le feu. Et on risque de créer les conditions d'un ressac
dans l'opinion publique et donc on risque de perdre des joueurs en chemin, Des Québécois
qui sont favorables à la lutte contre les GES, mais qui ne veulent pas qu'on
les prenne pour des personnes facilement... faciles à berner puis faciles à
tromper. Vous savez, c'est ça, mon... C'est ça, mon dilemme, moi. Parce que je
le... Je comprends, moi, l'idée de dire : Il ne faut pas lever le pied, on est
les meilleurs, il faut rester meilleurs, il ne faut pas créer de
ralentissement, d'hésitation, il ne faut pas... il ne faut pas créer de
conditions de démobilisation. Tout ça, je comprends ça, mais mautadit que je
trouve qu'on joue avec le feu, là.
Mme White (Julie) : Je
comprends votre... votre réflexion puis je peux vous dire que je la... tu sais,
je la partage en partie. C'est sûr qu'on a... on a comme deux choix, en ce
moment, soit qu'on garde la cible, puis on se dit : Ça va être difficile à
atteindre, mais on garde la tête... tu sais, on essaie d'être un leader
nord-américain, un leader mondial de ce côté-là ou de l'autre côté, bien, on
dit : On la repousse, puis peut être qu'on va plus l'atteindre dans cinq
ans. C'est un choix qui doit être fait entre les deux. Moi, ce que je peux vous
dire, pour le secteur manufacturier, parce que je représente le secteur
manufacturier, c'est qu'on a déjà fait une bonne partie...
Mme White (Julie) : ...une
partie d'efforts. On a beaucoup de gens qui sont en transformation, en
transition, oui, c'est des... pas juste... il y a des choses qui sont assez...
plus de base, là, efficacité énergétique, des... des éléments de base, mais
aussi très loin dans l'innovation, les procédés industriels, les technologies
de rupture, le développement de d'autres éléments. Vous avez reçu l'Association
de l'aluminium, notamment, là, qui vous a parlé des... ça fait partie de ça.
Est ce qu'on gagne, aujourd'hui, à dire pour... pour la transformation des
entreprises et pour... ou on est rendus, est-ce qu'on gagne pour la
transformation des entreprises, à leur dire : on ne le fait plus puis on
ne sait pas trop quand est-ce qu'on va l'atteindre. Je ne suis pas sûre, parce
que les entreprises ont besoin de prévisibilité.
M. Drainville : Non, mais on
le garde, mettons, on garde la cible, moi je... On garde la cible, mais on se
donne plus de temps pour l'atteindre, mettons.
Mme White (Julie) : Bien...
comme je vous dis, c'est que juste une façon différente de voir des choses, on
peut y aller d'un côté ou de l'autre. Moi, je préfère nous dire qu'on est
ambitieux puis qu'on essaie de démontrer ça, puis après ça, à la population, il
y a des choses à expliquer. Tu sais, comme je vous ai dit, on a beaucoup
l'impression, dans l'espace public, c'est toutes les entreprises
manufacturières, les usines qui sont très polluantes, qui sont les pires, qui
font... qui ont le pire bilan de GES, mais quand on regarde le tableau, quand
on regarde les efforts, qu'en fait, on est ailleurs. On peut le choisir d'un
bord ou de l'autre. Moi, je choisis de vous dire, aujourd'hui, qu'on est mieux
de se donner les moyens d'essayer d'accompagner plus les entreprises, de
redoubler un peu ces efforts-là qu'il y a des projets qui sont intéressants, en
passant, des projets de transition, là, qui sont intéressants à la fois pour la
transition énergétique, mais pour la productivité aussi, hein, il y a des
projets qui se recoupent dans beaucoup d'usines où qu'on est capables de parler
de compétitivité aussi, quand on parle de transition énergétique, sur les
coûts, sur les coûts de... d'électricité, sur un paquet d'éléments. Si on est
capable de les travailler, ces projets là, dans un tout, bien, ça a... ça a un
point positif pour les entreprises, et ça va leur permettre de se démarquer
dans les différents marchés. Si ça nous aide à améliorer notre compétitivité,
que ce soit vis-à-vis les Américains, le marché américain ou vis-à-vis d'autres
marchés, ça peut être positif. Donc, est-ce que je suis réaliste, quand même?
Je pense que oui, parce que je vous ai dit d'emblée que ce serait dur puis, tu
sais, que je voyais difficilement l'atteinte des cibles, il faut être réaliste
quand on se parle, mais je pense que de baisser les bras, ce n'est pas idéal.
Au Québec, on a été des précurseurs dans plein de domaines, hein, on est des
leaders sur plein de domaines. Je pense qu'on peut le rester tout en étant
équilibrés dans l'approche avec nos industries.
M. Drainville : Alors, je...
je cite votre mémoire : nous considérons, donc, que les cibles de
réduction ne doivent pas être augmentées pour l'échéance de 2030 et que le
statu quo serait préférable, -37.5, donc. Donc la cible de -45 d'ici 2030, si
je comprends bien, je ne pense pas faire une mauvaise interprétation de votre
propos, la cible de -45 n'est pas une bonne idée?
Mme White (Julie) : Écoutez,
on peut être ambitieux, mais il faut aussi être... tu sais, dans le...
l'ambition et le réalisme, l'équilibre de tout ça, je pense qu'on est mieux de
rester où on est. Maintenant...
M. Drainville : Donc -5...
-45, pas une bonne idée.
Mme White (Julie) : Ce n'est
pas une bonne idée pour nous.
M. Drainville : -55 encore
moins, j'imagine?
Mme White (Julie) : Ça va
beaucoup trop loin. Maintenant, soyons clairs, si vous décidez de reporter de
quelques années, on vous dit : gardez quand même l'objectif de 2050, hein,
il faut être clair. Nous, on vous dit : on préférerait qu'on reste
puisqu'on soit ambitieux, mais si vous décidez de reporter de quelques années,
il faut que ça se fasse quand même dans le cadre Carboneutralité 2050. Il y a
des enjeux de compétitivité importants partout dans le monde, en ce moment,
alors qu'on est en train de revoir toutes nos relations commerciales avec
d'autres pays, oui, les États-Unis vont demeurer notre principal pays, là,
d'exportation, mais on a des opportunités partout dans le monde. Le marché,
notamment, sur la défense, s'ouvre beaucoup vers l'Europe. Tout ça fait que...
nous fait dire qu'on... il faut qu'on soit prêts, hein, on est... on a des
entreprises qui se disent déjà, aujourd'hui : je ne suis même pas sûr
quand... les contrats de défense vont arriver en Europe, qu'on va être prêts
puis que nos produits vont être assez décarbonés pour les normes européennes,
il faut l'avoir aussi en tête, ça. Donc oui, on a un contexte économique,
gardons, tu sais, le principe de base, c'est de garder le 2050 de la
carboneutralité, mais une dose d'ambition, ça ne nous fait jamais de mal.
M. Drainville : Oui. La carbo
neutralité, c'est la finalité.
Mme White (Julie) : C'est la
finalité.
M. Drainville : Oui, bien,
vous venez de parler de l'incertitude qui est causée par la situation aux
États-Unis. Vous qui avez fait, quand même, de la politique pendant de
nombreuses années, puis on peut penser que c'est l'une des raisons pour
lesquelles vous occupez le poste actuel, c'est que vous avez, justement, une
sensibilité politique puis une...
M. Drainville : ...puis une
analyse politique, quand vous regardez le paysage politique, justement, actuel.
Alors, aux États-Unis, recule sur tous les fronts, le climat, la transition
énergétique, les technologies vertes, l'électrification des transports. Et là
on voit des provinces canadiennes qui emboîtent le pas, d'abord on voit le
gouvernement fédéral qui a emboîté le pas en faisant sauter sa tarification
carbone pour les personnes, qui a suspendu sa cible d'électrification des
véhicules alors qu'il devait l'annoncer pour cet automne, la
Colombie-Britannique, qui annonce qu'elle va suspendre ses cibles
d'électrification en disant : On va laisser ça au fédéral, l'Ontario, qui
réfléchit à voix haute sur le fait de faire sauter sa cible de réductions GES.
Ça, je vais vous dire, moi, ça m'inquiète énormément, énormément, parce que
l'Ontario reste notre principal concurrent économique. Et là on a vu... J'ai
donné cet exemple-là la semaine passée, mais un investissement de plusieurs
milliards où l'Ontario et le Québec étaient en concurrence. C'est la région du
Saguenay... Saguenay-Lac-Saint-Jean, dis-je, qui était en concurrence avec une
région en Ontario, et ce qui s'est passé, c'est que l'Ontario a réussi à aller
chercher cet investissement de... si je ne m'abuse, de deux... 2 à
3 milliards avec de l'énergie produite par des centrales au gaz. Ça fait
que, s'ils décident, en plus, qu'ils n'ont plus de cibles de réduction de GES
puis qui se donnent, dans le fond, la politique de produire du de l'énergie à
base d'hydrocarbures sans tenir compte des émissions de gaz parce qu'ils
n'ont... ils n'ont plus de cibles, bien là, on crée des conditions de
concurrence économique qui pourraient nous faire très mal, comme on l'a vu dans
le cas de cet investissement-là.
• (17 h 20) •
Et donc moi, je ne suis pas de ceux qui
disent qu'on ne doit pas rester ambitieux, moi, je suis de ceux qui
disent : Il faut rester ambitieux. Puis je... Le plan de
200 milliards d'Hydro-Québec d'ici 2035, c'est un plan extrêmement
ambitieux qui vise à développer encore plus notre potentiel d'énergie verte.
Donc, je ne propose certainement pas de concurrencer l'Ontario avec de
l'énergie à base d'hydrocarbures, moi, je veux qu'on continue à développer
notre potentiel d'énergie verte, mais, à un moment donné, il faut aussi qu'on
soit capable de concurrencer l'Ontario dans ce cas-ci et donc trouver cet
équilibre pour faire en sorte qu'on ne se retrouve pas dans une situation où,
bien oui, on est les meilleurs en termes de gaz par habitant, bien oui, on a
développé notre potentiel vert, bien oui, on s'est donné la cible la plus
ambitieuse des provinces canadiennes, mais on se retrouve dans une situation où
on a des régions qui perdent des jobs puis on a le Québec, des régions, en tout
cas, dans ce cas-ci, qui perd des investissements très importants. Alors, moi,
je le cherche, l'équilibre, là. Moi, je le veux, là, je veux... Je n'ai pas le
goût... Puis je l'ai dit ce matin, puis il n'y a personne qui m'a challengé,
puis qu'ils essaient pour voir. Moi, je suis convaincu que les Québécois sont
prêts à continuer à être des leaders en matière de lutte aux changements
climatiques, mais ils ne sont pas prêts à s'appauvrir pour y arriver, convaincu
de ça.
Mme White (Julie) : Si vous
me permettez, effectivement que c'est aussi une préoccupation de notre côté,
hein? On n'est pas... On représente le monde économique. C'est sûr qu'on veut
avoir un maximum d'investissements.,C'est sûr qu'on veut s'assurer d'avoir les
gros contrats au Québec, c'est ça qu'on parle à tous les jours. Évidemment, au
Québec, on a déjà des pas importants qui sont faits à cause de notre
hydroélectricité. Maintenant, la question d'attirer des investissements ou pas
de ce type-là, ça repose sur un paquet de facteurs dans l'environnement
d'affaires. On peut faire les efforts, ces efforts-là de diminution des GES.
S'ils sont bien accompagnés avec l'État, ça n'affectera pas la compétitivité ou
le prix des... de production des entreprises. Moi, là, il y a plein de monde
qui me parle d'investissement en ce moment. Est-ce qu'on les déplace aux
États-Unis? Est-ce qu'on va ailleurs? Tu sais, il y a des réflexions en ce
moment, mais je vous dirais que la première raison, ce n'est pas ça. La
première raison, c'est l'absence de main-d'œuvre. La deuxième, c'est
l'environnement d'affaires global, toutes les nouvelles règles qu'on a mis sur
les entreprises dans les dernières années, que ce soit loi 25, etc.
Évidemment que les coûts liés à la bourse du carbone, les plafonds d'émissions,
ça fait partie des réflexions. D'ailleurs, il ne faudrait pas augmenter, là,
les plafonds pour les émissions gratuites, on est du même côté que le CPEQ
là-dessus, mais c'est un environnement d'affaires global. Est-ce que cet
élément-là...
Mme White (Julie) : ...il ne
faut pas qu'ils deviennent plus importants dans la balance de l'environnement
d'affaires, c'est clair. Mais si une entreprise est capable d'avoir le soutien
financier nécessaire du gouvernement, que ce soit par le fait que... que ce
soit par d'autres, tu sais, écoperformances rehaussées, par exemple, pour
implanter des nouvelles technologies qui vont améliorer son bilan en carbone
sans avoir de pression sur ses coûts, on est gagnants. Maintenant, c'est sûr
que si on n'a pas le soutien...
M. Drainville : Bien,
Mme White, si vous me permettez de vous interrompre...
Mme White (Julie) : ...ça va
être... il va y avoir un débalancement.
M. Drainville : Si vous me
permettez de m'interrompre quand vous me dites ça, quand vous dites :
Bien, les entreprises pourront le faire en autant que le gouvernement les aide,
j'ai... puis corrigez-moi si je me trompe, mais la perception qu'on pourrait
avoir, c'est : vous faites porter au gouvernement la responsabilité
d'atteindre les cibles en disant : Bien, si le gouvernement nous aide,
nous, on va être corrects. Je trouve...
Mme White (Julie) : C'est un
effort collectif qui doit être fait, à la fois des entreprises, des
gouvernements, de l'ensemble des entreprises de chaque sous-secteur qui est
identifié. Maintenant, c'est sûr que quand on enlève des moyens pour faire
cette transition-là, ça ne nous aide pas à l'atteindre. Quand on parle
d'expliquer à la population pourquoi on n'a pas atteint telle ou telle cible,
il faut le prendre en considération des choix que le gouvernement fait.
Maintenant, est-ce que c'est uniquement sur les épaules du gouvernement? Non.
Puis on a plein de dirigeants d'entreprises qui sont super engagés dans des
processus qui sont là. Nous, on a des réseaux manufacturiers chez MEQ, là,
10 réseaux sur différents thèmes. Il y en a un sur le développement
durable. C'est un des réseaux qui est très actif. On fait du partage
d'excellence, du benchmarking, on démontre les meilleures pratiques. On a des
partenariats avec Energir, avec Hydro pour aider nos entreprises là-dedans...
La Présidente (Mme Nichols) :
Je vous remercie.
Mme White (Julie) : On
travaille aussi avec Coop Carbone. C'est un élément... un ensemble complet
qu'il faut prendre en considération.
La Présidente (Mme Nichols) :
Je cède maintenant la parole à la députée de Notre-Dame-de-Grâce.
Mme McGraw : Merci, Mme la
Présidente, et merci pour votre présence, votre présentation, votre mémoire.
Beaucoup de questions. Juste pour confirmer que le Parti libéral du Québec
n'est pas pour l'appauvrissement des Québécois. Et d'ailleurs, je souligne
récemment, selon le Economist, des investissements mondiaux en énergies
renouvelables, notamment l'énergie solaire, ont atteint un montant record d'environ
1 000 milliards de dollars canadiens, et ce malgré les facteurs comme
l'incertitude politique aux États-Unis et des baisses d'investissements dans
certains marchés. Donc, la cible et les cibles, éventuellement, la
carboneutralité, peut être vu comme une source de prospérité. Et vous parlez de
la compétitivité, vous parlez... c'est vraiment un enjeu qui est mondial.
Alors, peut-être nous parler de,
justement, quelles seraient les opportunités, prospérité et compétitivité du
Québec, qui est déjà... pas juste perçu, mais qui est déjà un leader qui
pourrait peut-être prendre avantage de cette transition énergétique, climatique
et économique. Est-ce qu'on est bien positionnés pour justement créer de la
richesse et non pas appauvrir les Québécois?
Mme White (Julie) : Oui.
Puis, d'entrée de jeu, avant de répondre à votre question, juste faire un
point. Nos entreprises travaillent fort et essaient le mieux possible... tu
sais, il n'y a personne qui veut avoir un mauvais bilan de GES, là. Il n'y a
personne qui se lève le matin en disant : Ça me fait plaisir d'avoir un
mauvais bilan. Mais c'est sûr qu'il y a des sous-secteurs manufacturiers pour
lesquels il y a des technologies qui n'existent pas encore dans leur processus
industriel. Cette transition énergétique là, c'est aussi une transition
industrielle plus globale où qu'il y a beaucoup de choses à développer et c'est
important de faire la différence. Tu sais, il y a des sous-secteurs qui sont
très avancés puis c'est bon, mais il y en a d'autres qui sont un peu plus loin
puis que les efforts vont être plus importants à prendre. Je pense que c'est
important de le dire puis de le reconnaître.
Maintenant, oui, on a une opportunité
parce qu'on a quand même, au Québec, des acteurs de tout niveau en question, recherche
et développement, en innovation qui sont très forts sur le terrain. Je pense
qu'on peut les mettre à profit. C'est des filières qu'on peut développer avec
nos scientifiques. Mais ce que je vous dirais, c'est surtout de... Tu sais, on
a besoin d'investir en ce moment, là. Nos investissements sont gelés depuis le
début de la crise tarifaire. On essaie de soutenir les entreprises pour les
faire avancer, on leur parle beaucoup de productivité, mais on peut leur parler
de productivité et de transition énergétique en même temps et faire avancer nos
investissements en ce moment. C'est une grande préoccupation que j'ai et c'est
une grande préoccupation du gouvernement aussi, je le sais, de favoriser
l'investissement. Donc, est-ce qu'on va être capables d'investir
nécessairement pour que toutes les entreprises intègrent une nouvelle ligne de
production automatisée? La réponse, c'est non. Mais est-ce qu'on peut... puis
ce n'est pas tout le monde qui a la capacité financière dans le...
Mme White (Julie) : ...le
contexte actuel. Mais, s'il y a des gestes qui peuvent être posés, qui n'ont
pas été posés parce que ce n'est pas tout le monde qui est rendu au même
niveau, on peut-tu les encourager à... à poser minimalement ces gestes-là, à
stimuler l'investissement dans leurs... dans leurs équipements, dans leurs...
dans leurs bâtiments? Je pense qu'on a quelque chose là pour aussi soutenir
plus globalement notre économie, pas juste soutenir notre transition
énergétique.
On a des exemples, là, au Québec d'entreprises
qui sont bien établies, qui sont des exemples, là, de diminution de GES, pensez
à Soprema, notamment, qui fait... non seulement qui récupère, tu sais, via de
l'économie circulaire, plein de matériaux pour faire des produits de la
construction qui sont plus responsables, on a eu aussi... j'étais chez Technion
il y a quelques semaines à Montmagny, une usine de verre qui récupère à peu
près tout, qui... la circularité, les... tous les travaux qu'ils ont faits
pour...
Une voix : ...
• (17 h 30) •
Mme White (Julie) : Oui, oui,
oui. Mais c'est... J'ai visité l'usine de Lévis et l'usine de Montmagny. Mais
c'est l'usine de Montmagny, de verre, où on... on a beaucoup de circularité,
qu'on a fait plein d'efforts pour la diminution. C'est... C'est... On a des
exemples qui sont vraiment porteurs, de ce type-là. Moi, je veux juste qu'on
continue à encourager les entreprises à prendre ça dans la mesure où qu'ils
sont capables aussi de le faire avec le soutien du gouvernement quand c'est
nécessaire.
Mme McGraw : Merci. À long
terme, tout le monde est d'accord. Je pense que sur la... l'objectif ultime,
c'est la carboneutralité 2050. Quel serait l'effet, tant au niveau
symbolique, message, et pratique, si on recule ou on va à la baisse avec la
cible 2030, et l'impact donc pratique sur atteindre la carboneutralité, mais
aussi quel est le message, le... message derrière ça?
Mme White (Julie) : Puis
juste pour dire, tu sais, moi, j'ai beaucoup... avant de venir ici, j'ai
beaucoup réfléchi à... à la position, la dualité que le ministre disait entre
est-ce qu'on donne une cible plus ambitieuse ou on attend, tu sais. On a eu
beaucoup de réflexion là-dessus parce qu'on... je suis une personne
rationnelle, on vit dans un monde économique, on travaille avec des entreprises
qui sont rationnelles. Puis la position, on l'a pris, d'aller sur l'ambition
parce qu'on a une crainte que si on reporte trop, on... on ne soit jamais
capables d'arriver à la carboneutralité. Il faut... Il faut être capables de ne
pas freiner totalement le changement qu'on est en train de faire. Oui, il y a
des investissements sur pause à cause du contexte, que ce soit économique ou de
main-d'œuvre, il y a des... il y a des difficultés déjà en ce moment, mais ce
n'est pas le signal, même au niveau purement économique, en ce moment qu'on a
besoin de dire : Arrêtez d'investir. Tu sais, il faut qu'on continue à
donner ce... ce signal-là.
Maintenant, je vous parle d'ambition, mais
ça veut aussi dire de ne pas se retourner, puis après ça, de dire à l'industrie
manufacturière : Vous n'avez pas fait votre job, on vous tape sur les
doigts, quand on a été à -22 % d'émissions de gaz à effet de serre de...
pendant la période et que d'autres secteurs n'ont pas fait leur... la même...
le même effort, ou ils ont peut-être fait des efforts, je ne veux pas... encore
une fois, je ne veux pas... je ne veux pas taper sur la tête des autres
secteurs, mais il faut être raisonnables dans la façon... qu'on en parle. Et
j'en conviens que c'est un discours public qui n'est pas tout le temps facile à
avoir dans la nuance. Et je... même pour moi aujourd'hui, ce n'est pas
nécessairement facile.
Mme McGraw : En parlant du
22 %, d'ailleurs, vraiment, bravo! Je pense que c'est vrai qu'il y a
beaucoup de Québécois qui ne comprennent pas à quel point le secteur
industriel, qui représente quand même presque un... un tiers de la part de...
de l'activité d'affaires, vraiment, moins 22 %. Puis on compare à
transport, à plus 25 %, donc c'est quand même vraiment louable. Et,
lorsque le ministre parle, tu sais, on... ça nous a pris 22 ans pour
atteindre la moitié de la cible et là il nous reste cinq ans, mais il y a un
effet quand même de boule de neige. Est-ce que, dans votre cheminement du
moins, 22 %, est-ce que ça s'est ralenti? Est-ce que ça... ça a été plus
vite vers les... les années plus récentes? Est-ce que vous parlez un peu de la
cadence des efforts et des impacts?
Mme White (Julie) : C'est sûr
que les, excusez-mon anglicisme... les «low-hanging fruits», il y en a moins
qu'il y en avait, tu sais. On... On ne fera pas semblant que c'est facile pour
tout le monde d'aller chercher des gains très rapides. Il y en a moins qu'il y
en avait, c'est sûr. Maintenant, il en reste. Puis il en reste dans beaucoup
d'entreprises, il y a 13 600 entreprises manufacturières au Québec,
de toutes tailles, il y en a des plus grandes qui ont été plus des leaders
parce qu'il y avait peut-être plus de moyens au départ. On... On est à une
étape où on... on rentre dans le moment le plus difficile, là, de faire
l'avancement. On fera... on ne se cachera pas, là, on ne fera pas semblant
de... de dire la... de... de dire que ça va être facile, la prochaine étape.
Mais c'est d'où l'importance de, par exemple, conserver les sommes dans le FECC
pour qu'on puisse investir puis qu'on puisse trouver des solutions. Il faut
être capables de se donner les moyens de ce côté-là...
17 h 30 (version non révisée)
Mme White (Julie) : ...est-ce
que tout a été fait? Je vous dis, il y a moins de... Mais ça ne veut pas dire
que tout a été fait. Il ne faut pas non plus... Il faut prendre le temps. Puis
je vous parlais un peu à la fin de mon autre intervention, de ce qu'on fait.
Nous, tu sais, on fait beaucoup de partage d'excellence, de benchmarking d'entreprise
en entreprise pour voir comment ça s'est passé chez d'autres entreprises
manufacturières, voir quels types de façons de s'adapter. Dans nos entreprises
manufacturières, là, tout le monde a l'impression... 200 employés, c'est des
grosses entreprises, admettons, mais non, là. Tu sais, quand tu as trois quarts
de travail, là, sur le plancher, tu n'as pas beaucoup de monde à la direction,
tu n'as pas nécessairement un responsable de développement durable dans l'entreprise.
Ça fait qu'on essaie d'amener les entreprises à aller chercher le maximum, mais
c'est sûr que la dernière étape est quand même plus dure que le départ, là.
La Présidente (Mme Nichols) :
Quelques secondes.
Mme McGraw : Est plus
dure. Donc, quelles seraient... Si on... le gouvernement décide de garder le
cap sur leur cible, quelles seraient pour votre secteur les conditions
gagnantes? Quelles mesures, quels moyens, qu'est ce qu'il faudrait mettre en
place, l'aide gouvernementale, pour vraiment s'assurer... Avec peut-être les
deux minutes qui restent, je vous laisse...
La Présidente (Mme Nichols) :
Il vous reste quelques secondes.
Mme McGraw : Ah! Je
pensais que c'était neuf...
Mme White (Julie) : Aide gouvernementale
présente et octroi des blocs de mégawatts en priorité aux entreprises déjà
établies au Québec, contrats publics ou qu'on met des critères pour favoriser
les entreprises qui fabriquent ici et soutenir la production.
La Présidente (Mme Nichols) :
Merci. Je cède la parole au député de Taschereau pour 3 min 10 s.
M. Grandmont : Oui. Merci,
Mme la Présidente. Merci à vous deux pour cet excellent mémoire. J'aimerais
revenir sur... sur un échange que vous avez eu avec M. le ministre. En fait, M.
le ministre disait : Je n'ai pas envie de décourager les gens parce qu'on
ne veut pas les mettre dans un contexte où, finalement, les cibles sont
inatteignables, ce qui fait qu'ils se sentent démotivés, démobilisés. En même
temps, je me pose la question, qui a les moyens d'atteindre ces cibles-là d'ici
2030? Puis, bon, il y a différents secteurs évidemment sur lesquels on peut
travailler, on y reviendra tantôt, mais dans vos propositions, vous dites :
On est d'accord pour maintenir la cible de 37,5 % sur 90 sur 2000... 2030.
Puis vous y allez d'une série de propositions qui disent : Bien, par
exemple, bien, voici des secteurs ou des... pas des secteurs, mais des actions
sur lesquels le gouvernement pourrait agir. Évidemment, il y a du soutien
financier là-dedans, là, mais il n'y a pas que ça. Il y a l'équité entre les
secteurs émetteurs. Parce que vous l'avez souligné vous-mêmes, là, il y a une
baisse. Même si l'industrie demeure quand même un fort émetteur, il reste quand
même qu'il y a eu des gains importants qui ont été faits. Moins 22 %, ce n'est
quand même pas rien.
Après ça, bon, évidemment, il y a des
mesures qui touchent davantage l'industriel elle-même, là. Bon, le soutien
gouvernemental, évidemment, on l'entend, on le comprend. Ça, ça en fait partie,
évidemment. Après ça, la disponibilité de sources d'énergie propres, s'assurer
que les blocs d'énergie soient plus transparents, notamment. Après ça, vous
parlez de l'approvisionnement public. Vous venez d'en parler aussi comme un
levier, notamment sur des critères élargis qui permettraient à l'État de faire
des choix plus responsables pour... pour l'industrie, pour le... au bénéfice du
Québec. Après ça, bien, on parle de différentes mesures à développer aussi,
encourager les technologies de capture... de capture et de stockage interne du
carbone. Bref, il y a plusieurs solutions. Donc, quand moi, j'entends, M. le
ministre dire : Bien, les cibles sont inatteignables, vous me donnez une
liste. À travers votre mémoire, vous me donnez une liste de moyens sur lesquels
il peut agir et rendre ces cibles-là atteignables. Est-ce que ça résume un peu
en quelque part votre... votre pensée?
Mme White (Julie) : C'est
des éléments qu'il faut mettre de l'avant si on veut y arriver. Est-ce que je
peux vous garantir que si on met tout ça en place, on y arrive collectivement
en 2030? Je ne suis pas une experte suffisamment pour vous dire ça, mais je
pense qu'il faut qu'on se donne les moyens. Pour atteindre une cible, il faut
qu'on se donne les moyens. Donc, ça fait partie des solutions. Il y a quelque
chose que je n'ai pas abordé, mais l'État a aussi un devoir d'exemplarité, tu
sais, quand on parle de transparence avec le public. Donc, oui, il y a les
contrats publics, mais il y a toute la question des bâtiments de l'État,
comment les chauffe, comment on fait ces éléments-là. Donc, il y a ça aussi à
prendre en considération. Donc, oui, c'est un... c'est un menu de solutions qui
peut nous amener à être plus proche, minimalement, de l'objectif en 2030.
M. Grandmont : Bien, je
vous remercie en tout cas de les mettre au jeu, parce qu'effectivement vous
dites dans le fond que le ministre et l'État québécois ont des moyens pour
justement rendre ça accessible ou en tout cas tendre vers la cible de 37,5 %
sur 90 d'ici 2030. J'aimerais juste aussi, là, dire effectivement, vous touchez
un point important sur l'exemplarité de l'État. Bon, il y a toute la flotte de
véhicules, évidemment, qui appartient aux différents ministères puis tout ça,
mais il y a aussi le choix de localisation des différents immeubles qui
appartiennent à l'État ou à ces sociétés d'État, la SAQ, par exemple, ou les
hôpitaux, où est-ce qu'on va les localiser, les écoles, où on va les localiser a
un impact, évidemment, sur un autre poste fortement émetteur de gaz à effet de
serre, les transports, évidemment. Donc, merci pour votre mémoire...
La Présidente (Mme Nichols) :
Je cède maintenant la parole au député des Îles-de-la-Madeleine pour trois
minutes...
La Présidente (Mme Nichols) : ...secondes.
M. Arseneau : Merci beaucoup.
Mme White, Mme Gagné, bonjour. Merci pour votre mémoire, merci pour vos
réponses, vos lumières et j'aimerais vous poser la question suivante :
est-ce que... pour vous, là, j'ai bien compris que l'échéance de 2030, quand
vous êtes arrivé ici, là, vous disiez : il ne faut pas le resserrer, mais
on est capable de composer avec si on a le soutien gouvernemental nécessaire et
si le plan qu'on connaît déjà est mis en œuvre, c'est à peu près ça votre
positionnement au départ.
Mme White (Julie) : Environ,
oui. Je dirais juste avec la nuance que c'est sûr qu'on est conscient que le
chemin à faire est très grand, mais qu'entre décider de baisser la cible pour
l'atteindre cinq ans plus tard ou d'être ambitieux, puis que ça nous permette
peut-être de l'atteindre en 2030, sinon en 2031, 2032. On a préféré l'option de
vous parler de...
M. Arseneau : Du statu quo.
Mme White (Julie) : Oui, de
garder cette ambition-là québécoise.
• (17 h 40) •
M. Arseneau : On garde le
cap. Mais vous savez, il y a un document... une petite phrase que je vais vous
lire, un document qui dit : Pour ancrer le Québec dans une économie verte,
décarbonée et résiliente, le Québec mise sur la sobriété et l'efficacité
énergétique tout en valorisant toujours plus son énergie propre afin de réduire
sa dépendance aux combustibles fossiles. La mise en œuvre du présent plan
contribuera à enrichir le Québec. Qui a écrit ça? Le ministère de
l'Environnement et des Changements climatiques et présentés par le ministre
Benoît Charest, ministre de l'Environnement. Plan de mise en
œuvre 2025-2030 pour enrichir le Québec.
Mais, pour enrichir le Québec, il faut
respecter le cap et puis il faut mettre en place des mesures pour atteindre les
objectifs, alors que, là, ce que je comprends, c'est que si on devait reculer
ou prendre une certaine... plus de temps pour atteindre l'objectif 2030,
vous vous dites : Dans tous les cas, il faut que l'objectif de
décarbonation 2050 demeure. Est-ce qu'il est logique pour vous de dire on
va se donner plus de temps pour l'objectif de 2030? Mettons 2040, mais on va
rétrécir la période, donc de 25 ans, on va la rétrécir à 15 ans pour
pouvoir atteindre la décarbonation. Est-ce que ça vous semble une approche, sur
le plan des entreprises que vous représentez, quelque chose de positif qui
apparaît davantage atteignable, de se donner moins de temps pour la
décarbonation que pour l'atteinte des objectifs avec un plan structuré qui a
été déposé en juin dernier.
Mme White (Julie) : C'est sûr
que plus on repousse le 37,5 loin dans le temps, moins on a de temps après pour
faire le pas supplémentaire et là, oui, on parle d'un... tu sais, des impacts
économiques sur les entreprises, mais là, l'impact économique pourra être
beaucoup plus important à terme et atteindre la compétitivité de nos
entreprises. Moi, mon objectif, c'est de garder un environnement d'affaires qui
est le, je veux dire, le plus compétitif possible, de s'assurer que les mesures
du gouvernement ne nuisent pas à la compétitivité de nos entreprises. Donc,
c'est le... dans les deux scénarios, là, le 37,5 c'est le moindre des... les
deux, là.
M. Arseneau : Bien c'est ça,
bien la procrastination par rapport à l'objectif de 2030, vous... vous n'y
souscrivez pas nécessairement parce qu'il va falloir faire le travail plus tard
de toute façon avec moins de moyens et plus de difficultés, plus d'efforts.
Mme Nichols : Je vous
remercie.
M. Arseneau : Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Nichols) : Je
vous remercie, Mesdames, de votre présence et de votre contribution aux travaux
de la commission. Nous allons suspendre quelques instants.
(Suspension de la séance à 17 h 43)
(Reprise à 17 h 46)
La Présidente (Mme Nichols) : Très
bien. Nous poursuivons nos travaux. Alors, je souhaite maintenant la bienvenue
au Pr Pierre-Olivier Pineau. Merci d'être parmi nous. Un habitué aussi des
commissions parlementaires, donc vous savez que vous avez 10 minutes pour faire
votre exposé, après quoi nous allons procéder à la période d'échange avec les
membres de la commission. Alors, je vous laisse vous présenter.
M. Pineau (Pierre-Olivier) :
D'accord. Pierre-Olivier Pineau, bonjour, professeur à HEC Montréal et
titulaire de la Chaire de gestion du secteur de l'énergie. Ça me fait grand
plaisir d'être ici ce soir avec vous. Je remercie la commission pour
l'invitation, c'est très apprécié. C'est évidemment un sujet extrêmement
important. Mon premier sujet d'intérêt, c'est l'énergie, mais l'énergie est intimement
liée aux émissions de gaz à effet de serre. Et donc, depuis plusieurs années,
dans mes travaux de recherche et dans ceux de la Chaire de gestion du secteur
de l'énergie, on s'intéresse aussi aux émissions de gaz à effet de serre. Parce
que les deux sont comme je... comme vous le savez, très, très proches.
L'essentiel de mon propos vise à amener le
gouvernement à cheminer vers une vision différente de la lutte aux changements
climatiques, et c'est basé sur des travaux, c'est basé sur différentes évidences
qu'on a qui... et dont vous pouvez résumer le message de la manière
suivante : Réduire les gaz à effet de serre peut être une source de
création de richesse. On dépense énormément d'argent, en Occident, au Québec,
de manière inefficace et de telle sorte que ça nous amène à émettre des gaz à
effet de serre sans qu'il n'y ait de création de richesse. Et finalement c'est
les émissions de gaz à effet de serre qui nous appauvrissent, alors que, si on
réorganisait différents éléments dans nos habitudes de consommation et de
production, on pourrait réduire nos GES et créer de la richesse.
Et donc la cible est importante, en tant
que tel, ce qui est important surtout, c'est la trajectoire, c'est de nous
mettre sur une réelle trajectoire de réduction des émissions de gaz à effet de
serre. Et comment est-ce qu'on y arrive? C'est en faisant des changements
structurels. Le Comité consultatif sur les changements climatiques, qui peut
conseiller le ministre de l'Environnement, de la Lutte contre les changements climatiques,
de la Faune et des Parcs, a déposé dans son mémoire... dans un... un de ses
avis, le sixième avis, il a... le premier axe d'intervention du gouvernement,
c'était de dire : Il faut amener davantage de changements structurels dans
notre société. Et ce sont ce sont ces changements structurels qu'il faut viser,
qui vont nous amener non seulement à davantage d'innovation, tous les
Québécois, les entreprises québécoises et les Québécois, et aussi une
discipline, une certaine discipline. Et les contraintes, les contraintes que la
lutte contre les changements climatiques... peuvent nous apporter, parce qu'il
ne faut pas se nier, il y a des contraintes qui vont venir avec ça, peuvent
être des contraintes bénéfiques.
Et j'aimerais juste faire une analogie.
Personne n'aime voir sa liberté individuelle être brimée, mais, quand on prend
une voiture, ou une bicyclette, ou même un piéton, on va sur la route, eh bien,
on a les signalisations, les feux rouges, les stops. Ce sont des éléments qui
viennent brimer notre liberté...
M. Pineau (Pierre-Olivier) : ...on
est obligé de s'arrêter. Et ce sont des contraintes qui sont bénéfiques.
Personne ne dit «il faut enlever ces contraintes-là», au contraire, si on
enlevait ces contraintes-là, bien, ce serait le chaos total sur la route et ça
créerait des accidents, ça créerait bien des dommages. Et il y a des
contraintes qui sont des contraintes, en fait, qui nous amènent à être plus
productifs, à nous dépasser. Et ce sont ce genre de contraintes là qu'il faut
viser dans une trajectoire de réduction d'émission de gaz à effet de serre.
Il y a cinq grands secteurs au Québec où
on émet des gaz à effet de serre. Le premier, c'est celui du transport. Et
c'est vraiment en transport où, malheureusement, le Québec et l'Amérique du
Nord d'une manière générale, on n'est pas du tout distincts sur ce point de vue
là, a augmenté ses émissions de gaz à effet de serre. Et pourquoi? Parce qu'au
lieu d'aller vers des transports plus efficaces, on a décidé d'investir
davantage dans des véhicules qui sont sans cesse plus gros, sans cesse plus
lourds, et qui créent sans cesse davantage de congestion.
• (17 h 50) •
Et le grand paradoxe, c'est que les
Québécois en 2024 n'ont jamais dépensé autant d'argent, 26 milliards, pour
acheter des nouveaux véhicules. Ça, c'est une augmentation de 19 % par
rapport à 2023. On dit souvent dans les médias que les Québécois ont... ont des
budgets serrés, ils n'arrivent pas à joindre les deux bouts, mais ils arrivent,
en tout cas, en 2024, à dépenser davantage d'argent pour acheter davantage de
véhicules, des plus gros véhicules qui causent davantage de congestion. Et ça,
la congestion, c'est de la perte de productivité, ça appauvrit directement le
Québec. Être pogné dans le trafic, ça n'enrichit personne. Et en ayant des
véhicules plus gros, eh bien, c'est... la chaussée n'est pas élargie, on a
davantage de véhicules. Ça, il y a des études académiques, scientifiques qui le
démontrent, ça ralentit les débits. Et, depuis 20 ans, on investit dans
des véhicules plus gros, plus lourds qui... qui transportent moins de gens et
on dépense plus d'argent. Ça, c'est l'exemple... En fait, c'est l'exemple le
plus flagrant d'un secteur où on s'appauvrit en émettant des gaz à effet de
serre, où on dépense de l'argent pour acheter des véhicules qui n'amènent
aucune productivité dans la société québécoise, bien au contraire.
Dans les bâtiments, on a un excellent
projet de loi, et je veux féliciter le gouvernement actuel d'avoir mis le
projet de loi n° 41 en place, parce que c'est un projet de loi sur la
performance des bâtiments, et c'est un excellent bâtiment qui pourrait nous
amener... c'est un... qui pourrait nous amener sur une trajectoire de réduction
de la consommation d'énergie et des émissions de gaz à effet de serre dans les
bâtiments. Et ça, c'est le genre de... de projet de loi qu'il faut
impérativement concrétiser à travers des règlements le plus rapidement
possible, pour que, très rapidement, tous les propriétaires québécois, en
suivant la volonté du gouvernement de... dans son... dans son... dans cette loi
qui a été adoptée, eh bien, divulguent leur consommation d'énergie et une
cotation, et éventuellement, troisième stade, entament des rénovations pour
améliorer la performance de leurs bâtiments. C'est structurel et ça peut être
extrêmement bénéfique à court, et moyen terme, et long terme pour non seulement
notre consommation d'énergie, les réductions des émissions de gaz à effet de
serre mais surtout l'adaptation au changement climatique.
Et c'est un autre point sur lequel il faut
insister : bien faire nos activités de réduction de gaz à effet de serre,
en plus de nous rendre plus productifs, ça peut nous permettre de nous adapter
à des changements climatiques qui vont être plus forts à l'avenir. Et pourquoi
ils vont être plus forts à l'avenir, ces changements climatiques? Justement,
comme M. le ministre l'a... l'a précisé à maintes reprises dans ses... dans les
travaux de la commission, eh bien, nos voisins ont un petit peu baissé les
bras. Comme nos voisins baissent les bras, il y aura davantage de changements
climatiques. Si on veut que la société québécoise soit plus performante et
reste performante, il va falloir nous adapter. Et nous adapter, ça veut dire
avoir des bâtiments qui sont plus performants, qui seront moins assujettis aux
aléas du climat. S'il y a des vagues de chaleur, des vagues de froid, on va des
bâtiments performants, électriques oui, mais surtout qui n'ont pas besoin...
Parce qu'il y aura des pannes d'électricité. En cas de panne d'électricité, qu'il
y ait des enveloppes thermiques extrêmement performantes pour garder les... les
fonctions du bâtiment parfaitement en... en place, pour pouvoir utiliser ces
bâtiments-là. Et donc, ça, c'est non seulement de la réduction de la
consommation d'énergie, mais une mesure d'adaptation. Et le gouvernement a dans
les mains le projet de loi qui devrait se précipiter de mettre en œuvre à
travers des règlements le plus rapidement possible, le projet de loi
n° 41. Ça, c'est, à mon avis, ça devrait... une des mesures phares
d'action du gouvernement.
Dans l'industrie, on le sait, il y a des
grands progrès. Si vous prenez dans l'état de l'énergie au Québec qu'on publie
avec... collaboration avec le ministère de l'Environnement depuis une dizaine
d'années, on... on fait un résumé du potentiel d'efficacité énergétique qu'il y
a dans les industries, dans... Et Hydro-Québec, ça, c'est Hydro-Québec, c'est
des chiffres d'Hydro-Québec, c'est 10 TWh qu'on peut aller chercher en
efficacité énergétique rentable dans les industries québécoises. Et le
contexte, malheureusement, n'est pas toujours là parce qu'il faut amener les
industries. Parfois...
M. Pineau (Pierre-Olivier) : ...qu'on
ne fait pas par soi-même. Il faut avoir des encouragements, des petites
contraintes. Les contraintes dont je vous faisais mention au début, c'est des
contraintes qui peuvent nous guider vers des actions productives. En efficacité
énergétique, tout le monde a besoin de certaines contraintes. C'est pour ça
qu'il y a de la réglementation. C'est pour ça qu'il peut y avoir des
incitatifs. C'est pour ça qu'Hydro-Québec demande à la Régie de l'énergie de...
d'avoir des contraintes pour imposer des systèmes de gestion de l'énergie,
parce qu'il y a des gains d'efficacité à aller chercher, parce que, souvent,
les industries, ils ont des taux... ils cherchent des investissements qui sont
rentables dans les cinq prochaines années, mais des investissements qui
seraient rentables sur les 10 ou 15 prochaines années devraient être faits,
mais, malheureusement, parfois, les industries ont de... ont une courte vue
parce qu'ils ont des impératifs de rentabilité à court terme qui les amènent à
ne pas prendre les bons choix. Et c'est là où le gouvernement peut intervenir,
c'est justement pour les amener à faire les bons choix, qui, à long terme, vont
rendre les industries plus productives.
En agriculture, en déchets... et je vais
terminer sur l'agriculture si j'ai encore une minute, on subventionne
l'agriculture. La Financière agricole, si vous regardez le rapport annuel de la
Financière agricole, 600 millions de dollars que les gouvernements donnent
à la Financière agricole. Et il y a un paquet de problèmes environnementaux
liés à l'agriculture. On le sait, le ministère de l'Environnement... si vous
allez à la page agricole... agriculture du ministère de l'Environnement, vous
allez voir l'ensemble des problèmes environnementaux qui sont liés à ça, à
l'agriculture, ce qui veut dire, malheureusement, qu'on subventionne les
pollueurs et les émetteurs de gaz à effet de serre. Mon but ici, ce n'est
absolument pas de blâmer les agriculteurs, qui ont la vie dure, qui ne sont
certainement pas dans un secteur facile, il faut les assister, mais je veux
souligner l'incohérence des incitatifs. Aujourd'hui, on subventionne des gens qui
veulent bien faire mais qui polluent. Et, en agriculture, c'est exactement ça.
Non seulement ils n'ont... ils ne sont pas assujettis par le marché du carbone,
ils ne sont pas assujettis au marché du carbone, mais on les subventionne pour
des pratiques qui, malheureusement, ont... causent des dommages à
l'environnement. C'est ce genre d'incohérences qui malheureusement doivent
être... Bien, «malheureusement»... C'est ce genre d'incohérences qu'il faut
rectifier pour nous remettre sur une voie de la productivité. Et c'est cette
voie-là qu'on n'a pas assez empruntée depuis 20 ans qu'on lutte contre les
changements climatiques.
La Présidente (Mme Nichols) : Merci
beaucoup. Merci, Pr Pineau. Nous allons... débuter le bloc d'échange avec M. le
ministre pour 16 minutes.
M. Drainville : Oui. Merci,
Pr Pineau. Bien content de vous rencontrer, je pense, pour la première fois en
personne. Mais, évidemment, comme beaucoup d'observateurs, j'ai suivi vos
travaux au fil du temps et je reconnais votre contribution exemplaire au débat
public sur plusieurs questions. Donc, merci de votre participation à nos
échanges.
Beaucoup de questions quand je regarde
votre mémoire. Mettons que vous auriez le dernier mot, vous auriez... vous
seriez omnipotent, vous pourriez mettre en place les mesures qui, à votre avis,
sont les plus prioritaires, quelle serait la première ou les deux premières
mesures que vous souhaiteriez mettre en place pour nous permettre, donc, de
réduire rapidement nos GES puis nous permettre de continuer sur le chemin de la
carboneutralité?
M. Pineau (Pierre-Olivier) : Taxe
kilométrique, développement du covoiturage et de l'autopartage. Ce sont des...
Et le ministère des Transports le sait pertinemment parce qu'ils ont fait déjà
des consultations sur le financement de la mobilité durable. La première
recommandation qui était donnée, c'était une contribution kilométrique. Parce
que vous le savez peut-être, mais le FORT, le Fonds pour le transport routier,
est déficitaire. Il faut impérativement changer la manière de financer nos
routes. Et la taxe sur les carburants est en déclin... les revenus de la taxe
sur les carburants en déclin, en plus d'avoir une taxe qui est gelée. Il faut
moderniser la manière de financer les routes et envoyer un signal aux gens qui
prennent la route que c'est une bonne chose d'avoir plus d'un passager dans la
route... dans la voiture et de minimiser les allers-retours. Donc, si on met
une taxe kilométrique, on envoie un signal de prix très, très clair...
M. Drainville : ...taxe
kilométrique?
M. Pineau (Pierre-Olivier) : Ça
peut fonctionner de manière très, très simple. Vous avez un odomètre sur la
route... sur le tableau de bord et vous devriez déclarer le nombre de
kilomètres au jour 1, et après, à la fin de l'année, vous déclarez le nombre de
kilomètres à la fin. C'est ce que... C'est ce que la Suède fait, par exemple.
C'est ce que la SAAQ devrait faire pour suivre le kilométrage des
automobilistes. C'est ce qu'on ne fait pas, malheureusement. Mais ça pourrait
se faire de manière extrêmement simple, avec une déclaration volontaire. Les
assurances le... Certaines assurances le font, ils demandent le kilométrage
pour justement ajuster les assurances au kilométrage des automobilistes. Et ça
permettrait d'envoyer le signal : Si vous utilisez beaucoup le réseau
routier, vous allez contribuer plus au réseau routier et, si vous voulez
contribuer moins parce que vous n'avez pas le goût de payer la taxe, eh bien,
vous allez vous organiser à prendre le transport en commun, faire du
covoiturage, mieux planifier...
M. Pineau (Pierre-Olivier) : ...mieux
planifier vos déplacements pour éviter de faire comme 20 kilomètres, alors que,
parfois, en y pensant un petit peu, bien, on peut faire un peu moins, et
structurellement, à long terme, ça va donner un incitatif à densifier nos
villes. Et ça, c'est un enjeu important en aménagement du territoire.
L'aménagement du territoire, ça va être central si on veut atteindre nos cibles
de 2050. Il faut redensifier les cœurs des villages et villes québécoises.
M. Drainville : C'est ça.
Puis nous... J'ai le goût de vous dire, c'est pour ça que vous êtes professeur
et que nous, on est en politique. Parce qu'honnêtement une taxe kilométrique,
dans le contexte actuel, c'est un vaste programme, notamment pour les gens qui
habitent en région qui vont dire : Heille! Pourquoi est-ce que je paierais
plus cher parce que je vis en région? Le fait que je vive en région, ça ferait
en sorte que je suis obligé de me déplacer sur de plus longues distances,
pourquoi voulez-vous me pénaliser pour ça?
• (18 heures) •
M. Pineau (Pierre-Olivier) : Alors,
ce n'est pas... Donc, c'est un défi de communication, j'en conviens
parfaitement, mais ce n'est pas un défi de charger plus. C'est un défi de charger
différemment, et là la différence est un défi en soi. Mais, aujourd'hui, on
sait qu'on a des revenus de la taxe sur les carburants qui sont en déclin, et
alors il faut... et notamment, si on... ils sont en déclin parce qu'on arrive,
jusqu'à un certain point, à vendre davantage de véhicules électriques et ces
véhicules-là ne contribuent pas à l'usage... à l'utilisation de la route.
Malheureusement, la route n'est pas gratuite. Il faut que quelqu'un paie pour
ça, il faut... et là c'est un problème de... On a trop habitué les Occidentaux
et les Québécois à penser que la route était gratuite. Elle n'est pas gratuite.
On ne la paie pas directement, mais on doit la payer.
M. Drainville : Non, mais
vous faites quoi avec les gens des régions, là...
M. Pineau (Pierre-Olivier) : Alors,
c'est très facile, les gens des régions qui... on peut faire des taux
différents. Parce que, comme je vous ai dit, on sait où la voiture est
immatriculée, quand on déclare son immatriculation, on sait où elle est immatriculée,
on peut faire des taux qui sont différents. Parce que c'est certain qu'être à
Montréal à l'heure de pointe ou être dans le Bas-Saint-Laurent la nuit, ça n'a
pas la même conséquence. Donc, on pourrait faire très facilement des taux
différents pour différentes régions de manière à s'assurer qu'il n'y ait aucune
pénalisation, mais que le signal de prix soit introduit dans la mentalité pour
amener les gens progressivement à s'adapter. Parce que, si on ne fait que
retarder les solutions qui sont recommandées... Prenez le mémoire sur le
financement de la mobilité durable du ministère des Transports de votre
gouvernement. Vous allez voir que c'est le premier élément qui est mentionné,
ils appellent ça une redevance kilométrique parce que le mot taxe, ce n'est pas
populaire, comme vous le savez très bien.
M. Drainville : Et une
deuxième mesure, mettons, qui nous permettrait, selon vous, d'avoir un impact
réel et immédiat sur la réduction des gaz.
M. Pineau (Pierre-Olivier) : Bien,
alors là, comme je le disais, ce qui compte, c'est la trajectoire, la
trajectoire de réduction. Oui, on veut agir rapidement, mais on veut surtout
sur une trajectoire. Le gouvernement avait une excellente idée en 2019, celui
de... Encore une fois, le ministère des Transports avait l'excellente idée,
sous M. Bonnardel, d'avoir une stratégie ferroviaire pour le Québec,
malheureusement la pandémie a eu raison de cette stratégie ferroviaire. Mais le
train, c'est un exemple parfait d'un mode de transport qui consomme 90 %
moins d'énergie pour transporter une tonne-kilomètre pour des marchandises ou
des individus. Vous consommez moins d'énergie et, quand vous regardez le coût
total de transport, c'est moins cher. Et donc, là, ça, c'est un exemple, le
transport ferroviaire de technologie ou de mode de transport qui réduit les
coûts et réduit les émissions de gaz à effet de serre, réduit l'utilisation
d'énergie. Il y a des enjeux logistiques et il y a des enjeux d'infrastructure.
Mais j'aurais tendance à dire au gouvernement : Vous étiez sur la bonne
voie en 2019, vous vouliez faire une stratégie ferroviaire, malheureusement,
elle a été abandonnée. Il n'est jamais trop tard pour se remettre sur la bonne
voie et de faire des choses qui nous amènent sur des changements structurels
pour rendre le Québec plus compétitif, réduire les coûts, réduire les
émissions.
M. Drainville : ...l'étude
d'une stratégie maritime.
M. Pineau (Pierre-Olivier) : Même...Exactement
la même. Vous avez raison, merci de le mentionner. Parce que, stratégie maritime,
stratégie ferroviaire, main dans la main, on n'ira pas forcément en train à
Rouyn-Noranda, mais... je veux dire, en bateau à Rouyn-Noranda, c'est
l'inverse, mais... mais, oui, stratégie maritime et stratégie ferroviaire parce
que les deux modes de transport sont des modes de transport qui coûtent moins
cher, et utilisent moins d'énergie, et sont moins émetteurs par rapport au
transport routier, qui, malheureusement, s'est énormément développé ces
20 dernières années, avec paradoxalement des camions de plus en plus vides
parce qu'il y a tellement de contraintes sur le juste à temps qu'on a des
incitatifs à avoir des camions vides qui vont faire des tournées. Et, encore
une fois, ça, c'est pour la satisfaction de besoins à court terme, mais ce
n'est pas vrai, que ça enrichit le Québec d'avoir son téléphone cellulaire
livré chez soi en 12 heures plutôt que de l'attendre quelques jours de
plus pour qu'il arrive en même temps que d'autres paquets. Et donc on a des
progrès à faire de productivité dans... en...
18 h (version non révisée)
M. Pineau (Pierre-Olivier) : ...énormément.
M. Drainville : Vous avez
parlé de la Suède, là, par rapport à la taxe kilométrique. Est-ce qu'il y a d'autres
pays qui ont adopté ça? Parce que, honnêtement, je n'ai pas observé le cas de
la Suède, mais ça a dû être un débat quand même assez costaud, là, ils ont beau
être très progressistes, là, ça n'a pas dû être évident de mettre ça en place.
Est-ce qu'il y a d'autres pays qui l'ont fait?
M. Pineau (Pierre-Olivier) : Le...
le... donc, pour le transport des marchandises, les camions allemands sont tous
assujettis à une taxe kilométrique. Et ce qu'on a observé avec des camions
allemands assujettis à la taxe kilométrique, c'est qu'ils optimisent bien
davantage leur chargement pour réduire le nombre de kilomètres, au lieu d'avoir
deux camions à moitié vides qui font... Et donc ça, c'est... c'est réel, ça
fonctionne.
M. Drainville : ...au niveau
du transport individuel, il y a juste la Suède, à votre connaissance?
M. Pineau (Pierre-Olivier) : Comme
j'ai mentionné, la Suède, c'était pour la déclaration des... du kilométrage
auprès de l'agence d'immatriculation des véhicules en Suède. Il n'y a pas de
taxe kilométrique à proprement parler pour les Suédois.
M. Drainville : OK, donc il
n'y a personne qui a mis en place, à votre connaissance...
M. Pineau (Pierre-Olivier) : Il
y a des projets pilotes...
M. Drainville : ...une taxe
kilométrique?
M. Pineau (Pierre-Olivier) : Non,
mais par contre, il y a des projets de péages urbains, pas des projets, il y a
des... depuis longtemps, la petite ville de Bergen, en Norvège, a un péage
urbain, donc si vous allez à Bergen, c'est la deuxième ville de Norvège, mais
qui est un peu de la taille de Trois-Rivières, vous... c'est quand vous rentrez
dans Bergen en voiture, si vous rentrez en voiture, vous payez une vingtaine de
dollars. Et la beauté de la chose, c'est que vous n'avez aucun problème de
stationnement, parce que ceux qui font le choix de payer 20 $, ils sont
minoritaires et ils peuvent stationner très rapidement, et il y a la...la
fluidité. Ceux qui font le choix de ne pas payer, eh bien, ils ont... ils ont
des... l'alternative de prendre les transports en commun qui sont bien
développés parce qu'ils sont bien financés et c'est plus productif pour tout le
monde. Ceux qui payent pour utiliser leur voiture, ils ont un service
supplémentaire, celui de la fluidité. Et ceux... et l'argent qu'ils versent,
ils le versent pour, notamment, contribuer au transport collectif qui améliore
la productivité de la ville. Tout le monde est gagnant.
M. Drainville : D'accord,
mais Professeur Pineau, là, vous êtes un chercheur, vous n'êtes pas... comment
dire? Divorcé de la... le contexte d'opinion publique. Vous savez très bien qu'une
taxe kilométrique... je ne sais pas, là, quel serait le résultat d'un sondage,
là, à cette question : souhaitez-vous une taxe kilométrique? Vous savez
très bien que, dans le contexte actuel... ouf, l'acceptabilité sociale serait
un enjeu costaud. Alors, si vous le mettez au jeu tout en sachant cela, vous
devez avoir une réflexion quand même, là, vous devez vous dire : bien, un
jour peut-être, ou comment... comment on fait atterrir une idée comme celle-là
dans une opinion publique qui lui sera très largement réfractaire?
M. Pineau (Pierre-Olivier) : Bien,
c'est certain qu'il faut de la collaboration de tous les parlementaires pour
amener le débat public dans la bonne direction. Il ne faut pas viser vers le
bas, mais il faut viser le haut, il faut faire preuve de pédagogie, il faut
expliquer les raisons pour lesquelles on fait ça. Et je le... j'ai été dans des
stations de radio dans lesquelles vous avez déjà travaillé pour, justement, des
lignes ouvertes sur la taxe kilométrique, et j'ai été directement confronté à
des gens qui ne veulent rien savoir de ça. Ma réponse à ça, c'est de dire :
est-ce qu'on veut faire progresser le Québec? Est-ce qu'on veut dire la vérité
aux Québécois en... des solutions qui peuvent être gagnant-gagnant pour tout le
monde à long terme, ou on veut constamment être en retrait et être à la merci
de l'opinion publique pour ne pas mettre en œuvre les solutions que les experts,
que la communauté internationale dit qu'il faut mettre en œuvre. Et c'est là-dessus
que je dis : il faut faire preuve de courage politique. Pas simplement
vous, mais l'opposition aussi doit faire preuve de courage politique parce qu'il
faut avoir le courage de dire : il y a des contraintes qu'il faut mettre
en œuvre pour amener le Québec à être plus productif. Oui, c'est difficile,
mais il faut faire preuve de courage.
M. Drainville : Juste pour
être clair, là. Vous croyez que c'est possible qu'un jour, quatre partis
politiques dans un parlement s'entendent pour imposer une taxe kilométrique aux
citoyens du Québec?
M. Pineau (Pierre-Olivier) : Oui,
je pense que c'est possible.
M. Drainville : Oui?
M. Pineau (Pierre-Olivier) : J'ai
régulièrement des contacts avec des gens du Parti libéral, du Parti québécois,
de Québec solidaire, de... de la Coaliton Avenir Québec.
M. Drainville : On veut des
noms, on veut des noms.
M. Pineau (Pierre-Olivier) : Et...
et... individuellement, je sens que oui, il y a une ouverture à avoir des
solutions. Maintenant, effectivement, tous les partis politiques sont
confrontés à la difficulté de communiquer le message et tous les partis
politiques sont tentés, par la démagogie, de dénoncer trop rapidement le fait qu'un
gouvernement ou un autre parti politique veut proposer quelque chose qui peut
paraître une contrainte, mais comme je l'ai dit, il y a des contraintes qui
sont positives et qui enrichissent...
M. Drainville : Vous parlez
de captage et de...
M. Drainville : ...séquestration
du carbone. Vous qui suivez quand même avec assiduité les évolutions
technologiques, est-ce que vous y croyez, vous à ce que... à court terme, là,
qu'on puisse faire évoluer les technologies de séquestration pour que ces
technologies deviennent un facteur déterminant dans la réduction des GES, donc
des technologies qui nous permettraient d'aspirer, si je peux dire, là,
d'aspirer du CO2 qui est déjà dans l'atmosphère pour nous aider à ralentir le
réchauffement puis peut-être éventuellement le stabiliser?
M. Pineau (Pierre-Olivier) : Donc,
techniquement, oui, j'y crois parce que ça existe, ça se fait. L'Islande a un
projet de captation de CO2 de l'air, mais...
M. Drainville : L'Islande,
dites-vous?
• (18 h 10) •
M. Pineau (Pierre-Olivier) :
L'Islande, oui, ils ont des installations de captage du CO2 et de
séquestration. Maintenant, je ne crois pas qu'à court terme, à moyen terme, ça
puisse être un élément important dans la lutte contre les changements
climatiques. C'est très important de développer la technologie parce qu'on en
aura besoin pour ultimement... quand on aura réduit nos émissions, on en aura
besoin pour avoir des émissions négatives parce qu'on... et pour... comme vous
l'avez mentionné, pour stabiliser le climat et aussi pour compenser, parce
qu'il y aura certains usages qui vont être très difficiles à décarboner et
auxquels on ne voudra pas renoncer, et il faudra capter du CO2. Mais
ces technologies-là, aussi importantes, seront-elles dans le futur? Elles ne
doivent en aucun cas ralentir nos efforts de réduction parce qu'à court terme
on doit réduire... et non seulement on doit réduire pour un impératif
environnemental, mais on doit réduire comme un impératif économique. Parce
qu'aujourd'hui on dépense trop d'argent pour émettre des gaz à effet de serre
de manière inefficace, et donc il faut saisir cette occasion-là non seulement
pour gagner en compétitivité au Québec, mais pour mieux être adapté dans les
années à venir face aux changements climatiques qui vont être malheureusement
plus sévères que ce qu'on aurait souhaité.
M. Drainville : Vous parlez
également de l'achat de droits d'émissions auprès de partenaires étrangers.
Donc, par exemple, la Californie. Mais vous dites : Si on est pour
poursuivre ce type de pratique, il faudrait que ce soit auprès de partenaires
qui ont les mêmes objectifs ou les mêmes ambitions climatiques que celles du
Québec, sinon on s'expose à une fuite de capitaux. Est-ce que vous êtes
favorables, donc, à l'élargissement du marché du carbone Québec, Californie à
l'État de Washington, par exemple? Est-ce que c'est une bonne nouvelle pour
vous, ça?
M. Pineau (Pierre-Olivier) : C'est
une très bonne nouvelle, absolument, c'est une très bonne nouvelle. On a l'État
de New York qui considère évidemment ces retardés, qui considère aussi de faire
un Cap-and-Invest. Donc, on est très loin d'avoir... aux États-Unis, on est
très loin d'avoir une abdication complète des différents États. Et donc il faut
miser sur ces États-là, qui sont d'excellents partenaires, dans le cas de la
Californie, qui restent ambitieux. Dans le cas de la Californie, on a beaucoup
de droits d'émissions dont le Québec bénéficie parce que, jusqu'en 2020, leurs
objectifs étaient bien inférieurs aux nôtres. Jusqu'en 2020, la Californie
n'avait pas l'ambition de réduire de 20 %. Ils avaient l'ambition de
réduire de 0 % leurs émissions. Ils ont réalisé davantage, ils ont réduit
de 12 % en 2022. Mais ce que ça a créé, ça a créé un surplus de droits
d'émissions qui était essentiellement lié au fait que leur plafond était plus
haut, dans lequel on a été pigés? Et c'est... et donc c'est ce... quand je dis
qu'il faut miser sur un marché du carbone et que c'est acceptable d'acheter des
droits d'émissions à l'étranger, c'est quand on est avec des partenaires qui
ont des cibles équivalentes, et, jusqu'en 2020, ce n'était pas le cas...
La Présidente (Mme Nichols) : Merci.
Je cède la parole à la députée de Notre-Dame-de-Grâce.
Mme McGraw : Merci, Mme la
Présidente, et merci, Pr Pineau, pour votre présence, votre présentation,
votre mémoire, que j'ai lu avec grand intérêt. J'aimerais commencer par vous
citer dans votre... en réponse à la question numéro 1. Vous dites, en
parlant du bilan par habitant, que le Québec a toujours été le meilleur au
Canada, l'a toujours été depuis 1990 et j'imagine bien avant. «Le gouvernement
a toujours su que notre bilan par habitant était meilleur, mais ça ne l'a pas
empêché d'établir un objectif ambitieux. Il est presque...», et je continue
parce que, je vous cite, «il est presque malhonnête d'invoquer maintenant cet aspect
pour expliquer la piètre performance du Québec et demander une cible moins
ambitieuse». Est-ce que je peux vous entendre là-dessus?
M. Pineau (Pierre-Olivier) : Bien,
effectivement, on a la chance au Québec d'avoir une très grande production
d'hydroélectricité et c'est essentiellement ça qui nous amène à avoir des
émissions par habitant les plus faibles au Canada. Donc, c'était... évidemment,
on doit remercier tous les bâtisseurs d'Hydro-Québec et les Québécois qui ont
bâti notre système hydroélectrique. Ce n'était pas dans une optique de lutte
contre les changements climatiques. Ça nous bénéficie maintenant d'un point de
vue économique et environnemental. On l'a toujours su.
Maintenant, dire qu'on a des faibles
émissions, donc qu'on peut attendre que les autres nous rattrapent, ce n'est
pas la bonne approche...
M. Pineau (Pierre-Olivier) :
...pas la bonne approche parce qu'on l'a toujours su. Alors, il faut
continuer... bien, il faut continuer. Malheureusement, je ne peux pas dire le
mot « continuer » parce que je considère qu'on n'a pas fait
énormément d'efforts, du moins pas assez d'efforts structurels pour changer nos
habitudes. Donc, il faudrait commencer à faire des efforts pour
structurellement réduire nos émissions de gaz à effet de serre. Notre... Et les
émissions par habitant sont... évidemment, c'est une source de satisfaction,
mais ça ne doit pas peser dans la balance dans l'établissement de nos cibles,
ou alors, si ça avait dû peser dans la balance, on aurait dû dès le début se
dire : Bien, OK, on retarde, mais on n'a jamais réfléchi comme ça. On a
toujours voulu être leader. Et maintenant... bien, maintenant, malheureusement
qu'on fait le constat que nos plans de lutte contre les changements climatiques
n'ont pas livré autant de résultats que ce qu'on voudrait... Et ça... et ça,
c'est bien avant le gouvernement actuel, ça ne livrait pas les... les résultats
qu'on aurait souhaité observer. Eh bien, il faut faire le bilan un peu froid de
se dire : Notre stratégie jusqu'à maintenant n'a pas bien fonctionné. Il
est temps de la renouveler parce qu'on peut s'enrichir à travers cette
réduction des GES.
Mme McGraw : Bien, c'est
quand même des propos un peu contre-intuitifs dans le sens qu'on se perçoit et
on est perçu aussi comme des chefs de file au sein du Canada mais à
l'international. Et si je comprends bien, vous parlez des mesures, donc,
structurantes qui ont été mises en place, hydroélectricité, ce n'est pas
nécessairement pour contrer les changements climatiques dans le temps, mais
aussi marché carbone. Et, si je comprends bien, au niveau des efforts, le
Québec est en retard, vous dites. Alors là, vous citez, vous dites... en
introduction, vous dites : Toutes les provinces ayant réduit leurs
émissions entre 1990 et 2023 au Canada ont de meilleurs résultats que le
Québec, des baisses allant de 11 % à 31 % contre le 6,3 % au
Québec. Donc, ça, là, vous comptez les réductions sur le territoire québécois,
parce que là, on parle plutôt de 18, 19 %. si on compte marché carbone
hors Québec, etc., le bilan par habitant de la province reste le meilleur au
Canada, mais cet avantage s'érode au fil du temps. Alors là, vous parlez
vraiment de l'effort et ce que vous dites, les propos sont comme contre...
bon... contre un peu le narratif qu'on est vraiment les meilleurs. Parce que,
si je comprends bien, au niveau des efforts, on ne l'est pas ou on ne l'est...
on ne l'est plus.
M. Pineau (Pierre-Olivier) :
...n'ont pas véritablement fait d'effort de réduction de gaz à effet de serre,
on a... on a... on avait une bonne situation, on a continué à être dans notre
bonne situation, confortables. On a malheureusement fait le contraire d'efforts
en transport. On a... on a... On a sombré dans des dépenses supplémentaires
pour acheter plus de véhicules et émettre davantage en transport. Ça, ça nous
pénalise. Autant les ménages et les gouvernements n'ont jamais été autant
endettés, et cet endettement n'est pas une source de richesse, parce que ce
n'est pas pour... Ce n'est pas un endettement qui amène de la productivité. Et
donc on a cette impression qu'on est un des leaders, parce qu'on a des faibles
émissions par habitant et on a mis un marché du carbone. C'est deux très bonnes
choses, mais ce n'est pas des choses qui nous ont amenés à nous dépasser. Et au
contraire, cette perception de leadership nous a amenés à nous asseoir un peu
sur nos lauriers. Et c'est ça que je trouverais très triste, c'est que le
Québec s'assoit sur ses lauriers en n'ayant pas une ingéniosité dans sa lutte
contre les changements climatiques qui lui permettraient de l'enrichir.
Mme McGraw : Vous parlez d'un
6,3 % de réduction sur le territoire québécois. Le ministre, il souligne
le fait que ça nous a pris 22 ans pour atteindre un peu la moitié de la
cible de 2030. Et là, si on arrive avec un 6,3 %, c'est encore, on va
dire, un peu plus décourageant. Si l'idée, c'est d'encourager, puis de
l'ambition, puis il me semble que... Donc, est-ce qu'on est... envisage une
flexibilité? Je comprends que... en réponse à la question numéro deux, où il
faut prioriser un peu la séquence des choses : réduction GES sur le
territoire québécois, réduction hors Québec, SPED, non-SPED, etc., est-ce que
vous pouvez nous parler... votre réponse à la question numéro deux? Quelle serait
un peu la séquence des choses? Où est-ce qu'il faut miser puis comprendre que,
sur le... avec la... les réductions que vous vous prioriser. Puis je pense que
tout le monde priorise les émissions, réduire les émissions sur le territoire
québécois, c'est quand même juste un 6,3 %. Ça fait que d'ici à un
37,5 %, il faut avoir d'autres moyens, j'imagine, pour...
M. Pineau (Pierre-Olivier) :
On est mal partis, effectivement. Mais je le répète, ce qui compte, c'est de
nous mettre sur une bonne trajectoire de réduction, avec des changements
structurels qui nous permettent finalement de croire... de voir qu'on a une
vraie réduction structurelle. En industrie, on a eu une réduction pour
différentes raisons, l'industrie de l'aluminium a fait d'énormes...
M. Pineau (Pierre-Olivier) : ...progrès
de réduction de gaz à effet de serre. Dans les bâtiments, on a eu des progrès
dans les bâtiments résidentiels. On peut continuer à voir des progrès à travers
le projet de loi n° 41, qui est très important. En transport, si on
changeait nos modes de transport comme ça a été discuté, on pourrait avoir des
progrès structurels qui nous enrichiraient, amélioreraient la mobilité des
Québécois et, d'un point de vue social, permettrait d'avoir une meilleure
mobilité, même pour les moins démunis. Parce que moins on se base sur des
véhicules individuels, plus on rend la mobilité accessible. C'est très
important pour les moins fortunés de nos sociétés. Donc, l'important, c'est
d'avoir des changements structurels.
À court terme, il faut garder la cible. On
n'atteindra pas la cible sans achat de droits d'émission, et c'est le choix
qu'on a fait, je n'ai aucun problème à ce qu'on atteigne la cible avec l'achat
de droits d'émission si, de façon structurelle, on est sur une trajectoire qui
nous amène dans la bonne direction, parce que, de toute façon, la cible de
2030, on ne va pas savoir si on l'atteint avant 2032, parce qu'au rythme où
vont les inventaires et les analyses, ça prend toujours du temps. Donc, il ne
faut pas être trop fixé sur l'année 2030. En 2030, personne ne va rien savoir,
mais ce qu'on va savoir, par contre, c'est est-ce qu'on est dans une voie
d'amélioration ou non. Et c'est ça qui compte.
• (18 h 20) •
Mme McGraw : Et le message...
Il y a des groupes qui sont venus nous parler et ont dit : C'est un
message qu'on envoie, la cible, c'est ça... Il y a du concret, évidemment, il y
a des mesures, il y a des moyens, il y a l'ambition, mais c'est un... donc,
mais si la cible... si on ne tient pas le cap avec cette cible-là, vous dites
que... 2030, 2032. Parce que le ministre... Il y a d'autres groupes qui disent,
bon, cette cible-là, peut-être qu'on va la voir plus tard, mais est-ce qu'il y
a un message qu'on envoie si on change la cible, ou si on recule sur la cible,
ou non?
M. Pineau (Pierre-Olivier) : Ah!
il faut... il faut maintenir la cible à 37,5 %. Il faut être clair avec
les Québécois qu'on ne l'atteindra pas avec des réductions seulement au Québec
et qu'effectivement jusqu'en 2030 on va reposer sur des achats de droits
d'émission avec la Californie, ce qui n'est pas fondamentalement une mauvaise
chose, qui est critiquable parce que, jusqu'à maintenant, on s'est reposés
là-dessus et ce n'est pas... Ce n'est pas des réductions matérielles, qu'il y a
eu en Californie, parce qu'ils avaient un surplus de droits d'émission, et ça,
c'est problématique, mais la Californie est plus ambitieuse que nous pour 2030.
Ce qui veut dire que cette non-matérialité de ces droits d'émission
supplémentaires, elle disparaît entre 2020 et 2030 parce que la Californie,
eux, ils visent 40 % de réduction pour 2030.
Donc, on va... on va régler le problème,
là-dessus, ce qu'il est très important de donner aux Québécois et aux
industries, c'est de leur dire : Il y a des solutions pour réduire vos
GES. Et il y en a réellement. Les industries savent comment réduire les GES.
Elles ont besoin d'un cadre, elles ont besoin de support financier, elles ont
besoin de différents éléments, mais ça va les rendre plus compétitives à long
terme. Et elles savent que ce n'est pas un... ce n'est pas un petit soulagement
à court terme qui va les amener sur la prospérité à long terme.
Mme McGraw : Donc, question n° 2,
c'est réduction sur le territoire québécois, ensuite, hors territoire
québécois, en lien avec le SPEDE, etc., et finalement retrait des GES, naturel,
technologique. Vous dites : Il faut que ce soit économique et permanent.
La Présidente (Mme Nichols) :
En terminant.
Mme McGraw : Bon. Voilà.
Désolée, j'ai... continuer.
La Présidente (Mme Nichols) : Merci
beaucoup. Je cède la parole au député de Taschereau. 3 min 12 s.
M. Grandmont : Oui. Merci,
Mme la Présidente. Merci, Pr Pineau, pour votre présence puis votre mémoire,
encore une fois, très éclairant. J'aimerais vous amener d'abord sur la question
de la productivité. L'Alliance Trnasit est venue ici pour nous dire plein de
belles choses intéressantes, parlait beaucoup de transports, évidemment,
parlait de productivité, des coûts de la congestion dans la Communauté
métropolitaine de Montréal, qui sont évalués à 6 milliards de dollars
annuellement, on estime que ce sera 10 milliards en 2030. C'est énorme.
Et évidemment, vous avez parlé de la
taille des véhicules. Vous n'avez pas parlé beaucoup de l'étalement urbain
causé par l'ajout de nouvelles infrastructures. Est-ce que, dans le fond, la
notion de demande induite compte pour beaucoup dans le manque de productivité
qui amène... qui est causé par la congestion, l'achat de véhicules, les gens
qui vont s'installer toujours de plus en plus loin?
M. Pineau (Pierre-Olivier) : Merci
pour cette question. J'ai parlé d'aménagement du territoire et j'ai parlé de
dire qu'il fallait densifier. Donc, effectivement, c'est essentiel de densifier
le territoire québécois, tout le territoire québécois. Il faut que des villes
comme Rimouski se redensifient, il faut que des agglomérations plus grandes,
Sherbrooke, Gatineau se densifient, continuent de se densifier parce que ça
coûte moins cher d'infrastructures. On sait qu'on a un déficit dans le maintien
des infrastructures, donc on n'aura pas les moyens de payer pour des
infrastructures qui continueraient de s'étaler sur le territoire québécois, et
donc il faut recentrer nos modes de vie pour laisser à la nature davantage d'espace.
Parce qu'on sait, on n'a pas juste une crise des changements climatiques, on a
une crise de la biodiversité. Le morcellement du territoire est un enjeu pour
les caribous et pour plein d'autres espèces animales. Et donc il faut réussir à
avoir une vie humaine satisfaisante dans des agglomérations plus denses qui
vont permettre la...
M. Pineau (Pierre-Olivier) : ...mobilité
durable qui va coûter moins cher aux individus, aux familles, aux ménages et
qui vont coûter moins cher aux entreprises, parce que ça va être plus facile de
livrer les services à des... à des ménages qui sont un peu plus densément
localisés.
M. Grandmont : Donc, le
troisième lien. Est-ce que ça aide l'augmentation de la productivité du Québec?
Est-ce que ça aide à atteindre de nos cibles de réduction de gaz à effet de
serre?
M. Pineau (Pierre-Olivier) : C'est
l'exemple même d'argent qui serait jeté à l'eau pour justement plomber le
Québec dans des investissements contre-productifs qui nous ne serviraient à peu
près personne.
M. Grandmont : Parfait.
Merci. Sur la question de la... du marché du carbone, la Californie, vous en
avez parlé, puis... vous en avez parlé, puis je trouvais ça super intéressant.
Vous avez dit : Il y a trop de droits d'émission qui ont été émis. En
fait... puis la valeur de ce... de ce... de ces droits d'émission-là sont... a
diminué. Vous avez nuancé, quand même, en disant : Bien, ils ont quand
même une cible plus élevée pour 2030, donc, cet écart-là devrait se resserrer.
Est-ce que, quand même vous... Est-ce que vous plaidez pour que ça nous
encourage quand même à favoriser les réductions sur le territoire québécois
d'une part, et d'autre part, est-ce que vous nous recommanderiez de... comme en
comité de travail, de bien évaluer la proportion de réductions à l'externe du
Québec qu'on devrait viser dans une... dans l'atteinte de nos objectifs?
La Présidente (Mme Nichols) :
15 secondes.
M. Pineau (Pierre-Olivier) : Je
pense qu'il faut vraiment viser le maximum au Québec, c'est... on veut viser
des changements structurels chez nous, ça doit être vraiment être vu comme des
ajouts temporaires ou ponctuels. Mais il faut vraiment se dire, si on veut
réduire les émissions, c'est au Québec qu'on veut les réduire. Il faut
s'assurer pour le faire au Québec. Ponctuellement, on peut le faire un peu à
l'extérieur, mais ce n'est pas l'idée.
La Présidente (Mme Nichols) : Je
cède la parole au député des Îles-de-la-Madeleine. 3 minutes 12 secondes.
M. Arseneau : Merci. Merci,
Professeur Pineau pour votre présentation, votre présence et vos explications
fort pertinentes. Transports, bâtiments, industries, agriculture, ordures.
C'est là où il faut agir. Beaucoup le transport, c'est 43 % de nos
émissions. Vous avez parlé beaucoup des voitures qui sont plus nombreuses, plus
grandes, davantage de congestions. On déplace moins de monde. Vous avez parlé
du ferroviaire, du maritime. Je ne vous ai pas entendu parler de transport en
commun. Est-ce que... Est-ce que là, on n'a pas échoué lamentablement à
développer une alternative à ceux qui empruntent l'auto solo?
M. Pineau (Pierre-Olivier) : Oui,
bien sûr. On a... Le transport en commun n'est pas suffisamment favorisé et
rendu possible. On a des... On a malheureusement des régressions en transport
en commun. Je suis venu en autobus à la commission, aujourd'hui. Il y a moins
d'autobus Orléans Express en 2025 qu'il y en avait il y a cinq ou six ans. J'ai
habité à Rimouski pendant deux ou trois ans et je pouvais faire aller en train
enseigner à Montréal. Maintenant, c'est à peu près impossible. Donc, il y a...
dans le transport en commun, on a des enjeux qui, malheureusement, sont
exacerbés par cette exagération qu'on a dans nos choix pour le... pour des
véhicules individuels. C'est certain que quand un ménage a investi et s'est
endetté pour acheter un VUS trop gros pour ses besoins, et bien, il va être
moins tenté de prendre le transport en commun et on a les très mauvais
incitatifs qui sont mis en place.
M. Arseneau : J'ai beaucoup
aimé aussi le lien que vous faites entre la réduction des gaz à effet de serre,
le changement de nos habitudes de vie et l'augmentation de la productivité.
Puis ce qu'on voit, effectivement, dans plusieurs villes d'Europe et d'Asie.
Mais j'aimerais savoir si l'Ontario, à cet égard, puisqu'elle performe mieux
que nous pour réduire ses gaz à effet de serre, a commencé cette transition...
Qu'est-ce qui font qu'on ne fait pas au Québec pour avoir réduit de quoi, de
sept tonnes? Euh, oui, sept tonnes...
M. Pineau (Pierre-Olivier) : Donc,
c'est... en Ontario, ça a été clair, c'est qu'ils ont enlevé le charbon de leur
mix énergétique de production d'électricité. Donc, c'est certain que vous avez
une chose facile, mais facile, il faut le mettre entre guillemets parce qu'on
parle des lobbies. Le lobby du charbon était difficile. Et en Ontario, ça n'a
pas été... ça a pris du courage politique pour dire : On va enlever le
charbon. Et après, l'agglomération de Toronto et toutes les villes qui sont sur
le nord du lac, elles sont très bien connectées par du transport en commun.
Donc, il y a de la congestion. Mais il y a aussi un transport en commun qui est
très développé en Ontario. Il y a beaucoup plus de trains en Ontario, donc ça
fait aussi partie des éléments. Ils ont une densité de population dans la
région métropolitaine de Toronto jusqu'à Windsor, là, qui favorise le transport
en commun.
M. Arseneau : Je comprends
que ce qui était facile, c'est peut-être de décarboner la production
d'électricité jusqu'à un certain point, là, ce à quoi correspond probablement
le commentaire du ministre. Mais pour ce qui est du transport, ils ont fait des
gains ou des progrès que nous on n'a pas réalisé, si je comprends bien?
M. Pineau (Pierre-Olivier) : Bien,
il y a certainement des tendances positives en Ontario qu'on pourrait répliquer
là-dessus.
M. Arseneau : Est-ce que j'ai
du temps ou non?
La Présidente (Mme Nichols) :
Il reste 4 secondes.
M. Arseneau : Bien, merci
infiniment.
La Présidente (Mme Nichols) : Merci,
Professeur Pineau de votre présence et de votre contribution aux travaux de la
Commission. La commission va suspendre ses travaux jusqu'à 19 h 25.
(Suspension de la séance à 18 h 29)
19 h (version non révisée)
(Reprise à 19 h 26)
La Présidente (Mme Nichols) : Alors,
nous reprenons les travaux à la Commission des transports et de l'environnement.
Nous poursuivons les consultations
particulières et les auditions publiques sur le document intitulé Consultation
sur la cible de réduction des gaz à effet de serre du Québec. Ce soir, nous
entendrons les organismes suivants, soit Réseau Environnement, qui sont déjà en
présence avec nous et Écotech Québec.
Je souhaite la bienvenue aux représentants
de Réseau Environnement. Je sais que vous avez l'habitude. C'est une
présentation de 10 minutes, après quoi il va y avoir des échanges avec les
parlementaires, et on... on vous cadrera dans le temps, je dis ça comme ça.
Alors, bienvenue. Présentez-vous, et vous avez 10 minutes pour votre
exposé.
M. Laneuville (Mathieu) : Merci,
Mme la Présidente. Merci, chers membres de la commission. C'est vraiment un
privilège pour Réseau Environnement d'être avec vous ce soir. On représente
quand même la plus grande association de spécialistes en environnement au
Québec et on regroupe plus de 3 000 membres, plus de 60 ans d'existence,
dans les secteurs de l'eau, des changements climatiques, air, énergie, des
sols, de la biodiversité et aussi des matières résiduelles, évidemment tous des
secteurs de l'environnement qui sont impactés par les changements climatiques.
Alors, ce qu'on souhaite vous apporter
aujourd'hui, c'est vraiment partager l'expertise de nos membres de façon
constructive à la commission. Je m'appelle Mathieu Laneuville, je suis
ingénieur et président-directeur général de Réseau Environnement, et je suis
accompagné de mes collègues, mon collègue expert Simon Langlois-Bertrand, notre
représentant du secteur air, changements climatiques et énergie, qui est aussi
à l'Institut Trottier, ainsi que de Jeanne Desrosiers, analyste en affaires
publiques.
Alors, notre vision chez Réseau
Environnement, tout comme vous le souhaitez, c'est de réussir la transition
vers un monde durable en se basant sur la science et les meilleures pratiques.
Alors, pour Réseau Environnement, la
transition énergétique et climatique, ça joue un rôle majeur à trois niveaux :
premièrement, augmenter la résilience des entreprises québécoises;
deuxièmement, créer des emplois d'avenir; et, troisièmement, renforcer nos
collectivités. Alors, comment on augmente la résilience des entreprises, mais
en les rendre plus compétitives? On sait qu'il y a des... il y a des pressions
au sud de la frontière, mais il faut se rappeler qu'au sud de la frontière on a
un État tout près de nous, qui s'appelle New York, qui est très proactif, la
Californie aussi, l'Europe et l'Asie le sont. C'est tous des États qui se
décarbonent et développent des technologies pour ce faire.
Et on souhaite aussi que le Québec, on
fasse partie de cette course-là. On ne souhaite pas être en arrière, mais bien
en avant de cette parade, créer des emplois d'avenir aussi, parce que, pour
nous, ce n'est pas un obstacle, mais bien un levier économique, cette occasion
de transition, et aussi de renforcer nos collectivités. Je vais vous mentionner
que, dans les secteurs de Réseau Environnement, il y a aussi l'eau, la
biodiversité. On le voit, les changements climatiques frappent partout sur la
planète, ils frappent aussi au Québec et, souvent, aux plus vulnérables. Alors,
c'est souvent eux qui sont aux premières lignes de ces changements, et on
souhaite, évidemment, bien les protéger.
Le contexte actuel démontre toute l'importance
aussi d'établir des trajectoires et des cibles qui sont claires. Pourquoi on a
besoin de cibles claires? C'est pour assurer la prévisibilité et de la
prospérité pour le Québec et pour nos entreprises, et c'est ça qui va nous
permettre de poursuivre le développement de la science et des technologies
environnementales.
Concernant les questions de la commission,
premièrement, sur la mise à jour de la cible de réduction des émissions de GES
pour 2030...
M. Laneuville (Mathieu) :
...Réseau Environnement recommande non seulement de la maintenir, mais de la
réitérer de manière convaincante. Pourquoi? Parce que pour nous autres, pour
planifier des mesures de transformation structurelle de l'économie québécoise,
c'est de la façon qu'on lui a dit d'y aller, d'y arriver plutôt que par des
mesures incrémentales. Par exemple, on souhaite introduire des mesures aux
systèmes fournissant des services énergétiques. On peut penser au chauffage des
bâtiments, des transports individuels et commerciaux et ainsi que les
transformations industrielles. On souhaite ainsi se concentrer sur des créneaux
où les entreprises québécoises peuvent se tailler une place. Alors, vraiment,
on souhaite allier économie et environnement à travers tout ça. Ne pas
s'engager, cela nuirait davantage que de le faire parce qu'on perdrait... on
prendrait du retard difficilement rattrapable dans des filières clés. Nos
industries perdraient en compétitivité et on deviendrait dépendant des avancés
étrangères en technologies propres.
• (19 h 30) •
Concernant la deuxième question aussi de
la commission sur la trajectoire d'atteinte de la carboneutralité, l'ensemble
des experts et partenaires de Réseau Environnement appuient fortement la
recommandation du Comité consultatif sur les changements climatiques, d'adopter
dans le cadre de la LQE une cible de carboneutralité pour 2050. C'est ça qui va
nous permettre de déterminer une trajectoire globale, une planification
stratégique échelonnée dans le temps, sans quoi notre avancement se ferait à
tâtons. Avec cette cible, on peut comprendre les transformations à accomplir et
développer des mesures progressives et cumulatives dans le temps. D'ailleurs,
au niveau de la réduction des émissions, c'est ça qui doit être l'écrasante
majorité de nos efforts pour atteindre les cibles. Les solutions de retrait
peuvent être développées en appui, mais leur impact serait limité et
insuffisant pour atteindre nos cibles. Elles sont beaucoup plus coûteuses. Donc
Réseau Environnement recommande d'aller déployer où c'est indispensable, soit
prioritairement dans les applications de compensation des émissions qu'on ne
peut réduire, principalement en agriculture.
Concernant le rôle des actions de
réduction des émissions, Réseau Environnement recommande d'adopter une vision
de transformation des systèmes énergétiques et c'est là la valeur ajoutée qu'on
souhaite apporter à cette commission ce soir, c'est vraiment sur ce point-là.
Dans le fond, on peut s'imaginer à quoi ressemblerait le Québec en 2050 avec un
service carboneutre et déterminer les actions en amont à mettre en place en
conséquence. À partir des actions qu'on prioriserait, Réseau Environnement
suggère d'identifier les endroits où les technologies existent déjà, parce
qu'il y en a au Québec, et de déployer des mesures pour créer des marchés et
réduire les coûts la plus rapidement possible pour être compétitif. Par
exemple, on va prendre les thermopompes, je pense que c'est quelque chose que
tout le monde peut connaître autour de la table, on parle que souvent on
finance de façon partielle leur rachat, mais ça demeure quand même un potentiel
limité si on fait juste le faire. Pour réussir la transformation, il faut voir
à comment assurer l'ensemble de la chaîne de valeur. Alors, comment réduire les
coûts d'installation, comment assurer la construction des écosystèmes,
développer des services, comment assurer la maintenance et l'entretien de ces
services-là de la thermopompe, comment assurer les chaînes d'approvisionnement
résilientes pour les appareils et les pièces, comment assurer la réglementation
et aussi le Code de bâtiment pour renforcer l'expansion de ce marché., et aussi
un autre exemple, d'assurer la gestion de l'impact sur la pointe de demande
d'électricité avec Hydro-Québec.
Alors, des fois, on peut penser que juste
le nombre de thermopompes installées, c'est un indicateur de progrès actif,
mais pour être viable dans une trajectoire de transformation énergétique comme
on le souhaite au Québec, on doit aussi suivre le développement de l'écosystème
complet. Dans cet exemple-là des thermopompes, même les thermopompes ne se
feraient pas au Québec, comme beaucoup d'autres choses qui vont arriver
peut-être dans la transition énergétique, ce qui est important, c'est qu'il y a
une majorité de la chaîne de valeur qui se... de l'écosystème énergétique, qui
se ferait au Québec et qui contribuerait au développement économique du Québec,
ça favoriserait la naissance d'industries d'exportation de ces services. Alors,
soutenir l'expansion de ces marchés et l'innovation de ce secteur ou tout autre
créneau que le gouvernement voudrait bien choisir comme priorité, ça aurait des
bénéfices majeurs autant pour l'économie que l'environnement. Et aussi ça
aurait un effet notable sur qu'est ce qu'on souhaite autour de la table,
réduire les gaz à effet de serre.
Concernant le rôle des actions de retrait
d'émission de l'atmosphère, Réseau Environnement, on le sait que c'est une
solution essentielle, mais on sait aussi que c'est dispendieux. On recommande
donc de déployer des efforts pour tester les technologies de captage et de
séquestration à l'échelle commerciale pour confirmer ou infirmer l'évaluation
des coûts. Parce que même en réduisant au maximum les émissions compressibles
actuellement au Québec, le retrait, on sait que ça va être nécessaire pour
environ 10 % à 25 % des émissions actuelles du Québec. Alors, on en a
besoin, mais il faut le cibler. Il faut donc rapidement commencer à tester les
technologies et réduire les incertitudes sur leurs possibles... leurs
possibilités réelles, vu que l'industrie peine à démarrer actuellement. On
recommande ainsi de prioriser le retrait plutôt que le captage en général, ce
qui veut dire des technologies dites à émission négatives, par exemple,
l'extraction directe de l'atmosphère ou la bioénergie avec captage ou
séquestration associée. Mon collègue Simon pourrait vous en donner davantage
d'explication à ce niveau-là si vous le souhaitez.
En plus de miser sur ces développements
qu'on vient de vous parler, là, on souhaiterait le faire aussi en association
avec des secteurs...
19 h 30 (version non révisée)
M. Laneuville (Mathieu) : ...très
développé. Par exemple, la biomasse au Québec, c'est un secteur qui est en
plein essor et, par exemple, pour les résidus forestiers et agricoles. Et on
pourrait miser davantage sur ces filières-là pour nous aider, justement, à
atteindre des cibles.
Mais enfin, pour ce qui est du rôle des
achats de réduction à l'extérieur du territoire et du marché, Réseau
Environnement recommande de la limiter à la compensation d'émissions
québécoises incompressibles, principalement, comme on le mentionnait, en
agriculture. Évidemment, ça n'écarterait pas l'aide en matière de transition
qui doit être faite à l'extérieur du pays pour soutenir nos pays en... les pays
en développement ou vulnérables aux changements climatiques, on le sait bien,
ils ont tout à fait besoin de notre aide dans leur transition et leur
adaptation.
En conclusion, Réseau Environnement, ce qu'on
souhaite, c'est de maintenir les cibles. Pourquoi qu'on veut maintenir les
cibles vraiment? C'est qu'on veut... Ça va nous permettre de mettre en œuvre
toutes les transformations structurelles de l'économie québécoise. On vous a
mentionné l'exemple des thermopompes pour donner un exemple, mais évidemment il
y a beaucoup d'autres applications qu'on pourrait faire.
Réseau Environnement soutient les
recommandations du huitième avis du Comité consultatif sur les changements
climatiques. La science a démontré l'importance de maintenir de façon
convaincante la cible de 37,5 de réduction des émissions de gaz à effet de serre
à partir du niveau de 1990. Pour concilier économie et environnement, il est
tout aussi important de se doter d'une cible de carboneutralité pour 2050
enchâssée dans la Loi sur la qualité de l'environnement.
Réseau Environnement rappelle aussi à la commission
l'importance cruciale de donner un signal clair aux marchés pour prioriser et
structurer une démarche efficace vers la carboneutralité. Et tous les
partenaires et experts et l'ensemble des membres de l'association que je
représente rappellent également la nécessité d'une approche systémique des
changements apportés. C'est nécessaire d'apporter des changements structurels
pour soutenir l'innovation, le développement et l'adoption sur le terrain des
meilleures pratiques auprès de l'ensemble des parties prenantes.
On est conscients qu'il y a un contexte
géopolitique mondiale qui est mouvementé actuellement, mais le Québec a droit à
ses convictions en matière environnementale pour qu'on améliore notre économie,
notre environnement et ainsi notre société. On se doit de s'engager dans une
démarche de transition pour les Québécoises et Québécois d'aujourd'hui et de
demain.
Et Réseau Environnement demeure évidemment
disponible pour vous appuyer dans cette transition. Merci.
La Présidente (Mme Nichols) : Merci
beaucoup. Merci de votre exposé. Nous allons maintenant passer à la période d'échange,
le premier bloc est à M. le ministre pour 16 min 30 s.
M. Drainville : Oui, merci.
Merci beaucoup, Mme la Présidente. Juste avant de... de me tourner vers nos
invités, ça fait quelques fois que je me dis : On remercie souvent les
gens qui sont à la table, les pages, et tout ça, puis on oublie tout le temps
de remercier les gens qui sont à la télédiffusion, qui doivent suivre les
échanges toujours très dynamiques, n'est-ce pas? Et donc s'assurer qu'on suit
et on ouvre, on ferme les micros, on ne manque rien. Non, mais c'est vrai, Mme
la Présidente, on... je trouve qu'on les oublie trop souvent. Et donc je
voulais souligner leur travail, madame, et puis tous ceux et celles qui se
relaient. Et puis il y en a qui se sont en régie également. Comme ça, on ne les
oubliera pas, c'est déjà fait. Bon, s'il y en a qui veulent se joindre à moi,
ne vous gênez surtout pas.
Une voix : Merci.
M. Drainville : Très bien.
Excellent! Très bon réflexe. Bon, merci pour votre présentation. Là, je n'ai
pas trop compris, là, les thermopompes, c'est-tu bon ou ce n'est pas bon? Puis
si c'est bon, qu'est-ce que ça prendrait pour que ce soit définitivement bon?
Parce vous avez dit, vous aviez l'air de dire «oui, mais, oui, mais». Puis là vous
avez rajouté plein de conditions. Tellement qu'on se demande, coudon, à la fin,
il en veut-tu des thermopompes ou il n'en veut pas?
M. Laneuville (Mathieu) : On
en veut des thermopompes. On veut l'électrification au Québec, on veut l'électrification
autant dans nos bâtiments que dans nos voitures électriques. Évidemment, qu'est-ce
qui est important pour nous, chez Réseau Environnement, c'est de le penser, pas
juste à se dire «on donne une subvention». C'est bon de donner des subventions.
C'est bon de donner le bâton, la carotte dans... quand on fait des démarches.
Mais ce qui est important, ce qu'on veut dire, c'est que d'ici 2050 on veut
atteindre les objectifs de carboneutralité puis on veut le penser dans tout l'écosystème.
Parce que, par exemple, les thermopompes, elles ne viennent pas du Québec
actuellement. On a des entreprises... une entreprise qui se développe
actuellement, mais ce qui est important, c'est de développer notre savoir-faire
au Québec en termes de maintenance, d'installations, d'entretien pour que notre
savoir-faire puisse se faire ici et qu'on puisse l'exporter aussi pour
développer...
M. Drainville : Oui, mais
monsieur... M. Laneuville, permettez-moi de vous interrompre, des
installateurs de thermopompe, il y en a, là, des réparateurs, il y en a. Je
veux dire, il y a tout... il y en a un, un écosystème, autour des thermopompes.
C'est quoi... Qu'est-ce qui... qu'est ce qui manque dans notre écosystème? Vous
souhaiteriez qu'on n'importe pas les thermopompes d'ailleurs? Est-ce que c'est
ça, le problème?
M. Laneuville (Mathieu) : On
va parler... Vous faites bien de clarifier. On parle beaucoup de thermopompes
du secteur non résidentiel, évidemment. Le secteur résidentiel est bien en
forme. Je vais laisser mon collègue Simon... Simon pour pouvoir expliciter un
petit peu plus la pensée.
M. Langlois-Bertrand (Simon) : J'allais
ajouter ça. En fait, ce n'est pas... Là, on a le réflexe de penser aux
thermopompes résidentielles, effectivement, on a fait un bout de chemin là-dessus
pour ramener ça à l'échelle...
M. Langlois-Bertrand (Simon) : ...on
veut sur les prochains quatre ans, par exemple, ou d'ici 2035, ça va prendre
pas mal plus vite comme rythme. Oui, il y en a, des installateurs, oui, il y en
a, des réparateurs, mais...
M. Drainville : Puis vous
parlez de thermopompes dans le secteur commercial et industriel, c'est ça?
M. Langlois-Bertrand (Simon) : Oui.
Donc, il y a une partie pour le secteur commercial, entre autres, on continue
de bâtir des gros bâtiments qui vont devoir se chauffer au gaz parce que
l'écosystème n'est pas très bien développé pour aller installer des
thermopompes à bas coûts, malgré le gros gain qui serait fait sur les gaz à
effet de serre. Donc, réussir à structurer ce marché-là. Il y en a, des
acteurs, mais il y en a une poignée, il n'y en a pas suffisamment. Si on est
capables d'encourager ce développement-là, ça a un effet ricochet sur
l'ensemble du secteur. Puis, en fait, ce n'est pas juste au Québec, c'est
partout ailleurs où on essaie de décarboner le bâtiment, cette expertise-là
n'existe pas non plus, là. Donc, il y a vraiment une...
• (19 h 40) •
M. Drainville : Mais elle
existe où, alors?
M. Langlois-Bertrand (Simon) : Elle
existe dans très peu d'endroits. Dans le secteur industriel, ça reste presque
artisanal, là. Donc, il y a des entreprises qui sont capables de le faire, mais
il n'y a pas une économie d'échelle disponible, définitivement pas. Donc, il y
a encore de la place pour tester, là.
M. Drainville : OK. Non, mais
c'est important de le préciser parce qu'effectivement quand vous parlez
thermopompe, on pense résidence, là, c'est notre premier réflexe, là, on ne
pense pas une thermopompe dans une entreprise, en tout cas, ce n'est pas notre
premier réflexe. Alors, vous, c'est très spécifiquement de ça, mais, au niveau
résidentiel, est-ce qu'il y a encore du chemin à faire puis est-ce que vous
l'encouragez? Ce n'est pas tout le monde qui a thermopompe, au Québec, là, puis
je pense que ça peut être très profitable, une thermopompe, non?
M. Langlois-Bertrand (Simon) : Effectivement,
bon, il y a un programme d'Hydro-Québec pour encourager les thermopompes pour
climat froid, là, donc vraiment quelque chose qui fonctionne bien pour la
réalité d'ici. C'est très développé, mais ça reste assez inégal sur l'ensemble
de la province. Donc, il y a des régions où, bon, avoir un réparateur, avoir
même... Vous dites qu'il y a beaucoup d'installateurs, mais il y a beaucoup
d'installateurs qui, historiquement, ont surtout installé des systèmes de
chauffage à base de combustibles fossiles. Donc, ils installent des
thermopompes depuis quelques années, mais leur zone de confort, parfois, c'est
de se retrouver dans les technologies de chauffage à gaz ou même, à une
certaine époque, au mazout. Donc, d'aller vraiment structurer tout ça pour
avoir uniformément, à travers le Québec, là, cette capacité d'installation là
puis réussir à faire baisser les coûts d'installation, qui restent encore, là,
un peu plus chers que dans d'autres endroits qui sont aussi avancés que nous.
M. Drainville : OK, mais il y
aurait du progrès à faire.
M. Langlois-Bertrand (Simon) :
Absolument.
M. Drainville : D'accord.
Très bien. Vous dites : Il ne faut surtout pas lever le pied sur la cible
parce que cela nuirait davantage à notre état, économiquement, dis-je... ou
«dites-vous», plutôt, que de le faire. Alors, je vais la lire au complet, la
phrase, parce que, sinon, ça n'a pas bien, bien de bon sens : «Ne pas
s'engager activement dans une transition climatique et une démarche de
réduction nuirait davantage à notre état économiquement que de le faire, car
ils prendraient du retard difficilement rattrapable dans des filières clés. Ces
industries perdraient en compétitivité, ils deviendraient dépendants des
avancées étrangères en technologies propres.»
Est-ce que vous êtes en train de dire que,
dans certaines filières, à cause justement de la tarification carbone ici, au
Québec, de la bourse du carbone, FECC, des cibles... Est-ce que tout cela a
produit des avancées dans certaines filières qui nous donnent un avantage, un
leadership, actuellement? Est-ce que vous pouvez me donner des exemples si
c'est le cas?
M. Langlois-Bertrand (Simon) : Bien,
la réponse, c'est oui. Donc, on a... on le répète à tout le monde qu'on a
pris... on a une certaine longueur d'avance sur l'électrification parce que,
bon, ça fait très longtemps qu'on a un système électrique très, très développé,
des services électrifiés, et même le chauffage des bâtiments sans thermopompe,
il est déjà électrifié depuis un bon moment. Donc, dans tous ces créneaux-là,
le Québec est en train de se poser des questions sur les solutions pour les
obstacles. Donc, comment je fais pour la pointe hivernale d'électricité?
Comment je fais pour réduire mes besoins en infrastructures, réduire les coûts
beaucoup aussi? Il y a d'autres juridictions autour de nous qui sont encore en
train d'enlever du charbon. Ceux-là, ils doivent faire ça en premier, mais,
après ça, ils vont rencontrer les mêmes obstacles que nous.
Donc, c'est sûr que si le Québec trouve
les solutions en innovant dans certains de ces créneaux-là, après ça, on est
prêts à les vendre à d'autres. Ça peut être d'autres provinces canadiennes, ça
peut être des pays européens en climat nordique qui se posent les mêmes
questions. Donc, il y a quand même pas mal d'opportunités, là, d'aller
là-dedans.
L'autre chose, c'est que cette transition-là,
cette transformation-là, elle se passe, en ce moment, là. Donc, je sais qu'on
en a beaucoup les yeux braqués sur le sud de la frontière, même aux États-Unis,
il y a plusieurs États qui continuent de décarboner, New York, Californie,
etc., et donc plusieurs pays dans le monde aussi, l'Union européenne, la Chine.
Les technologies de demain vont être décarbonées. Donc, c'est ça qu'on veut
dire qu'on dit : Pour ne pas avoir de rattrapage à faire par la suite, il
faut voir où on peut ou on peut innover en ce moment puis se tailler une
place...
M.
Langlois-Bertrand (Simon)
: ...dans cette économie-là.
M. Drainville : Pourquoi
dites-vous que le... les émissions québécoises en agriculture sont plus
difficilement compressibles? En fait, vous utilisez le mot incompressible, là.
Mais pourquoi, pourquoi?
M. Langlois-Bertrand
(Simon) : Bien, incompressible, c'est utilisé dans le sens où on
ne peut pas les... on ne peut pas envisager de les réduire sans réduire la
production. Donc évidemment, pour la production industrielle, ça peut être un
choix, là, mais pour la production agricole, c'est beaucoup plus difficile de
juste considérer réduire la production de, je ne sais pas, 50 %, là, bien
sûr.
M. Drainville : À cause de l'autonomie
alimentaire?
M. Langlois-Bertrand
(Simon) : Oui, donc il y a... il y a une bonne partie, puis après
ça, c'est des choix de société aussi, on veut un secteur agricole développé, on
ne veut pas importer d'ailleurs plus, là, mais donc, ces émissions-là sont
beaucoup plus difficiles à réduire, ce n'est pas des émissions énergétiques,
donc c'est l'équivalent des émissions de procédés industriels, mais pour
l'agriculture, l'utilisation d'engrais, d'autres techniques. On a des... des
voies de décarbonation de ça, mais ils n'arriveraient pas à réduire de
90 %, par exemple, les émissions. Donc il va en rester, même si on pense à
la carboneutralité au printemps 2050, ces zones-là, c'est là qu'il va falloir
compenser par du retrait de l'atmosphère ou... une autre technique, là.
M. Drainville : Alors,
parlons, parlons-en, en du retrait d'atmosphère. Jusqu'à maintenant, je suis un
peu surpris, en fait, jusqu'à maintenant, à peu près tous les témoignages,
sinon tous les témoignages sont à l'effet qu'il ne faut pas vraiment compter
là-dessus, les.. la capacité d'aspirer va être, somme, toute assez minime, puis
moi... Puis c'est drôle, hein, moi, là-dessus, j'ai tendance à faire confiance
à la science. Moi, je pense que la science va de beaucoup accélérer les
capacités technologiques et je pense qu'on va trouver des façons de réduire les
émissions de CO2 qui sont déjà dans l'atmosphère. Moi, je pense qu'on on va
assister à des... à des progrès dans les prochaines années. Tu sais, ce n'est
pas la même chose, là, ce n'est absolument pas la même chose, je prends la
peine de le préciser, là, mais je regarde le rythme avec lequel l'intelligence
artificielle s'est développée en seulement quelques années... Je veux dire,
lorsque l'humanité s'y met, là, c'est... ça peut, ça peut produire des
résultats absolument fulgurants. Et donc, je vous resoumets la question :
est ce que vous, vous faites partie de ceux qui pensez qu'on pourrait,
effectivement, assister à la naissance de technologies qui ne sont peut-être même
pas... qui n'existent peut-être même pas présentement, mais qui pourraient se
développer et qui pourraient nous aider, véritablement, là, à... à réduire les
émissions, puis... puis peut-être à inverser la fameuse courbe, là.
M. Laneuville (Mathieu) : Tout à
fait, puis on se rappelle, là, toutes les études le démontrent actuellement,
là, le retrait... le retrait va être nécessaire pour 10 à 25 % des
émissions actuelles du Québec, parce qu'il y a des émissions compressées, mais
d'autres qui ne le sont pas, ça fait que oui, on y croit, à cet aspect, de
dire : Il faut croire à ça, mais il faut investir, aussi, dans ça, puis
c'est un peu ça, l'objectif qu'on se dit, aujourd'hui en commission, c'est de
se dire : on y croit, nous autres, au 2050, de la carboneutralité, il faut
se donner une feuille de route, il faut, justement, investir dans ces
technologies-là pour qu'on puisse, au Québec, avoir, justement, ce
savoir-faire-là pour pouvoir la développer. Et actuellement, l'industrie ...
Québec, on en a, des membres, puis on ne veut pas en nommer un en particulier,
mais il y en a, des membres, qui s'investissent là-dedans, mais ils ont de la
peine à démarrer, en ce moment. C'est pour ça que je pense que...
M. Drainville : Comme Deep
Sky, mettons?
M. Laneuville (Mathieu) : Ça...
ça peut faire partie de nos membres, chez Réseau Environnement, mais...
l'important, c'est que l'ensemble de ces industries-là et d'autres aussi, on
parle des industries, là, comme Deep Sky, mais on peut en voir dans un paquet
d'autres chaînes de valeur, puis c'est... nous autres, c'est ça qu'on veut
apporter avec ce mémoire-là, c'est de dire : pensons-le de façon macro
pour que l'économie du Québec soit dans ce virage-là puis que, justement, on
ait le savoir-faire et que nos industries soient compétitives avec l'ensemble
de... des autres industries sur la planète.
M. Langlois-Bertrand (Simon) : J'ajouterais
que l'hésitation, peut-être, que vous avez eue, d'autre, c'est que la
technologie existe, elle va sûrement être améliorée, mais ça coûte extrêmement
cher.
M. Drainville : C'est ça,
c'est le modèle économique, le problème, là.
M. Langlois-Bertrand (Simon) : Oui.
Mais c'est... ce n'est pas des réductions, ce n'est pas l'équivalent de
d'autres secteurs où on pourrait dire : bon, une fois qu'on va se mettre à
en faire à l'échelle, bon... les... des... des économies d'échelle
substantielles, là, il y a des enjeux physiques, il y a une quantité d'énergie
très, très, très importante qui est nécessaire pour faire fonctionner ce genre
de technologie là. Ceci étant dit, ce qu'on dit puis ce qu'on dit dans le
mémoire, c'est qu'il va falloir réussir à réduire l'incertitude puis de savoir
une fois pour toutes : qu'est ce qu'on est capable de faire avec ça? Dans
quelle échelle, à quelle échelle? Dans quelle mesure? Est-ce qu'on va être
capable de, vraiment, construire une capacité de quelques mégatonnes de CO2?
Donc...
M. Drainville : Je comprends.
Ce que vous dites, c'est que c'est un espoir, sinon une espérance... on peut
penser que la technologie va finir par arriver, mais comme elle est incertaine,
on ne peut pas se fier là-dessus pour nous aider à se donner un plan de match.
On ne peut pas intégrer ça dans la stratégie parce que ça reste trop incertain,
mais on espère qu'un jour on pourra l'intégrer, mais pour le moment, on en est
pas...
M. Langlois-Bertrand (Simon) : ...Bien,
on n'en est pas là, mais par contre, il faudrait... on pourrait essayer de
clarifier assez rapidement où... où ça peut aller, là.
M. Drainville : Mais comment?
M. Langlois-Bertrand (Simon) :
Bien, avec des projets pilotes, pour voir qu'est-ce que ça donne à l'échelle
commerciale. Deep Sky, d'ailleurs, c'est ce qu'ils essaient de faire en ce
moment, là, vous les avez mentionnés. Donc, être vraiment capables de voir...
est-ce qu'on est capables d'aller dans les plusieurs de mégatonnes... plusieurs
mégatonnes par année de captage, ou ça va rester relativement restreint, puis
là bien, on fera des stratégies à long terme différentes, là? Mais il faut voir,
là, c'est quoi, la réelle contribution qu'on peut faire. Ce qui est sûr, c'est
que ça ne peut pas compenser pour 50 %, 60 % ou 80 % des
émissions d'aujourd'hui.
M. Drainville : D'accord. Bon,
on en revient à l'essentiel. Garder 37,5 et le repousser de quelques années. Ça
changerait quoi? Je pose la question un peu brutalement là, mais je n'ai pas le
goût de... j'ai déjà dit ce que j'avais à dire là-dessus, là. Ça fait que ça
changerait quoi?
• (19 h 50) •
M. Laneuville (Mathieu) : La
prévisibilité, ce qu'on souhaite à travers tout notre plan de match, c'est
d'assurer la... à nos entreprises. On sait que le Québec est actuellement à
7,2 % de réduction de GES par rapport au niveau de 90, on sait que même en
incluant les achats de réductions par le marché, on tombe à peu près à
19 %, ça représente un retard considérable, on le voit bien, mais l'enjeu
pour nous, ça... ce n'est pas juste la cible numérique, c'est plutôt la volonté
de l'atteindre qui est importante, de donner un signal clair à nos entreprises.
Les entreprises ont déjà investi, il y en a d'autres qui veulent investir et je
pense que, comme gouvernement, bien, on souhaite qu'on puisse donner ce signal
clair là.
C'est sûr que pour le moment, l'avancement
est insuffisant, mais la cible n'est pas encore hors de portée, puis au Réseau,
bien on insiste pour que le renouvellement de la cible s'inscrive directement
au sein de la loi, l'engagement concret du gouvernement envers l'atteinte de la
cible pour s'assurer qu'elle ait le statut d'obligation plutôt que simplement
celui de balises pour que vraiment les... règles du jeu soient claires pour nos
industries.
M. Drainville : Mais, M.
Laneuville, la cible dans le scénario que je vous... que je vous évoque, la
cible, il y en a une cible, ce n'est pas comme si on faisait comme l'Ontario,
là, qui réfléchit ouvertement à ne plus en avoir. Il reste une cible, puis je
pense que vous conviendrez avec moi que bon, elle reste atteignable selon ce
que vous dites, mais elle reste très ambitieuse, très très, très ambitieuse.
Alors qu'on maintienne une cible puis qu'on se donne un peu plus de temps pour
l'atteindre, puis qu'on la rende réaliste se faisant, où est le drame?
M. Laneuville (Mathieu) : Bien,
chez Réseau Environement, on est ambitieux. On croit que le gouvernement est
ambitieux aussi, vous avez parlé d'intelligence artificielle qu'on croit qu'on
veut développer le Québec. On connaît les solutions, l'électrification, on
pense qu'il y a encore... il nous reste encore un quatre ans, on croit que si
on garde le cap... on s'est donné un objectif, il y a des industries qui
sont... qui sont arrivées là et à travers notre mémoire, ça, vous le voyez
aussi, pour nous c'est très important surtout de garder la cible de 2050 pour
la carboneutralité. C'est ça qui va vraiment nous donner notre feuille de route
aussi pour qu'on ait des systèmes, des changements structuraux importants.
M. Drainville : Et qu'est-ce
que vous dites aux sceptiques? Parce que... parce que les emplois créés, bon ça
achève, hein? Les emplois créés grâce à cette course vers la réduction ne sont
pas les mêmes emplois qui seront éliminés à cause de cette course ou qui seront
potentiellement éliminés. On ne parle pas des mêmes personnes. Quand on entend
dire : Ah il faut investir là-dedans parce qu'il y a... il va se créer
autant, sinon plus d'emplois. Attention, les gens qui vont trouver l'emploi
dans ces domaines-là, ce n'est pas celui ou celle qui va avoir perdu sa job,
là. Ça fait que là, il faut raccorder tout ça, là. Et moi, je... ceux-là qui
vont perdre leur emploi, je n'ai pas le bout des oubliés, là. Je ne fais pas
partie de ceux qui pensent que c'est de la scrap, là.
La Présidente (Mme Nichols) : Je
vous remercie.
M. Drainville : En tout cas.
La Présidente (Mme Nichols) :
Désolé, le temps est écoulé. Le Bloc qui est à la députée de
Notre-Dame-de-Grâce pour 9 minutes, 54 secondes.
Mme McGraw : Merci, Mme la
Présidente, et merci à vous d'être... pour votre présence, votre présentation,
votre mémoire. J'ai quand même... trois questions, donc pour commencer
j'imagine ma collègue aussi a une question, donc je vais aller vite, vite. Dans
votre introduction, vous parlez de la transition énergétique comme étant un
levier économique et pas un obstacle qui vraiment tend à mettre fin à cette
dichotomie qui oppose économie en environnement. Mais, justement, dans le
contexte un peu, le ministre parle beaucoup de ce qui se passe aux États-Unis,
des autres provinces, les impacts des choses qu'on peut ne pas nécessairement
contrôler, mais ce que nous, on fait au Québec, on peut le contrôler.
Donc, est-ce que je peux vous entendre...
on peut vous entendre plus sur cette dichotomie et comment éviter un peu un
message un peu dépassé effectivement, de cette dichotomie? C'est quoi
vraiment... comment vous décrivez cet... comme un levier économique?
Compétitivité, opportunité pour la...
Mme McGraw : ...l'économie
québécoise, avant-garde, vendre nos technologies et nos innovations aux autres?
J'aimerais vous entendre là-dessus.
M. Laneuville (Mathieu) : Bien,
on le sait, d'ici ma retraite, là, la transition va avoir eu lieu, c'est juste
quand on veut le faire. Actuellement, c'est près de 10 milliards dépensés
annuellement en essence. C'est... Tous les coûts qu'on a à ne pas le faire là,
ça serait des coûts pour notre société et on... c'est pour nous autres. C'est
pour ça qu'on croit dire qu'il faut être ambitieux. Parce qu'on le voit aussi,
qu'il y en a d'autres qui vont beaucoup plus vite que nous, qui sont en train
de se tailler une place sur l'échiquier économique mondial, et ils ne le font
pas juste à cause de l'environnement, ils le font parce que c'est rentable. Et
on croit aussi, chez Réseau Environnement, que l'économie verte, c'est
rentable, on croit que ça peut créer des emplois verts qui sont très
intéressants puis on le croit aussi, en notre capacité d'accompagnement puis de
transformation aussi de notre économie pour être un leader sur la planète.
Puis, pour plus de détails, je vais laisser mon collègue Simon pour ça.
M. Langlois-Bertrand (Simon) : Oui.
Un autre exemple, c'est sur... Je pense qu'il y en a d'autres qui sont venus
vous parler de productivité puis de gains possibles. Donc, évidemment, on a
déjà un retard de productivité à rattraper dans beaucoup, beaucoup de secteurs
au Québec, à l'extérieur du Québec, au Canada aussi. Les endroits ailleurs où
ils continuent d'aller plus vite que nous dans leur hausse de productivité, ils
électrifient. Donc, il y a énormément de ces usages-là, de ces secteurs
industriels là qui passent par la décarbonation pour avoir les gains. Ça peut
être en efficacité énergétique, en productivité, peu importe comment on le
calcule. Et donc, évidemment, il y a cet aspect-là aussi. Ce n'est pas juste
des gains vers la transition, vers la réduction de gaz à effet de serre, c'est
que ça l'a d'autres bénéfices que vous avez dans votre question, là.
Mme McGraw : Puis vous avez
dit dans votre introduction que des cibles claires, ça va favoriser une
prévisibilité et la prospérité du Québec. On pourrait peut-être ajouter un
troisième p, c'est-à-dire la productivité?
M. Langlois-Bertrand (Simon) : Oui.
Mme McGraw : Oui? Parfait.
M. Laneuville (Mathieu) : Tout
à fait. Puis pour... c'est important. Beaucoup de nos membres... dans nos
3 000, c'est le secteur public, privé académique, et beaucoup de joueurs
du secteur privé nous disent : On s'enligne vers un plan, évidemment, nous
autres, on fait plein d'investissements, mais on se tient à ce que ça puisse se
faire, on prévoit aussi notre développement d'organisation de cette façon-là.
Et, je pense, vous avez rencontré d'autres groupes aussi, qui sont membres chez
nous aussi, qui vous ont répété un peu ce même message-là. Ils mettent des
énergies, mais on s'attend aussi à ce qu'on puisse garder cette stabilité-là.
Quand on parle de Trump, souvent on parle d'instabilité, mais ce qu'on ne veut
pas recréer ici, c'est de l'instabilité aussi.
Mme McGraw : Exactement.
Parfait. Donc, pour revenir à la première question du document, la cible, là,
vous, vous dites que la cible numérique, c'est... L'enjeu, ce n'est pas
vraiment la cible, mais c'est surtout la volonté de l'atteindre. Ceci étant, on
a une question, la première question, sur qu'est-ce qu'on fait avec la cible,
et la question, ça rejoint un peu la question du ministre : Quel sera
l'impact symbolique et pratique si on changeait la cible, soit le pourcentage
et/ou la date? Pour moi, les deux font partie de la cible. Quels seront les
deux impacts symboliques et pratiques sur l'objectif de la carboneutralité
d'ici 2050?
M. Laneuville (Mathieu) : Ma
prévisibilité, c'est vraiment... Je pense que c'est ça... on le redit, mais
c'est vraiment ce que nos membres souhaitent, c'est qu'on garde cette
prévisibilité-là autant pour... pour nos actions qu'on va mettre en place puis
qu'on puisse vraiment faire des démarches structurantes. Parce qu'on... ce
qu'on essaie de vous mentionnez, comment qu'on peut structurer puis aller,
justement, économie et environnement, c'est justement en se disant : On
est capable d'avoir cette prévisibilité-là qui est stable. Puis on sait qu'on
fait nos modèles d'affaires dans ce sens-là. C'est sûr que, si ça commence à
changer, bien, ça change nos processus puis ça change aussi nos... comment on
est frileux ou pas à faire ces investissements-là. Ça fait que, pour nous,
c'est pour ça que c'est important de garder le cap sur l'ensemble de nos
mesures. Évidemment, comme toute organisation, moi-même, je fais mes propres
placements personnels, il y a des fois que ça... des années que ça va mieux,
des années que ça va moins bien, mais je ne commence pas à abandonner parce
qu'une année ou deux, ça va moins bien. On regarde sur le long terme, c'est ça
qu'on vise. Évidemment, je pense que c'est important pour nos organisations
qu'on continue de viser le long terme pour être le leader qu'on souhaite être.
Mme McGraw : Et d'ailleurs
vous proposez d'adopter, de façon formelle, la cible de
2050 carboneutralité, de formaliser au-delà des cibles intérimaires. Vous
misez vraiment là-dessus, c'est une de vos recommandations.
M. Laneuville (Mathieu) : Tout
à fait.
M. Langlois-Bertrand (Simon) : ...d'ailleurs,
merci d'avoir ramené ça parce que c'était la question finale de M. le ministre
puis c'était important, là, reporter la cible ou, en tout cas, la décaler dans
le temps, là, on peut appeler ça comme on veut. C'est un report, c'est... J'ai
un peu de difficulté à comprendre. Dans un contexte d'incertitude, je pense
qu'il faut faire attention de ne pas ajouter d'autres incertitudes. Là, en
changeant certains paramètres... bon, il y en a d'autres qui ont été discutés
aussi, il y a toujours ce danger-là. Donc, c'est un choix difficile, là, j'en
conviens, là, mais... mais, quand même, le fait que toutes ces entreprises
aient vu ce cadre-là comme stable puis qu'on peut le réaffirmer maintenant, je
pense que ça peut avoir un effet très bénéfique, là.
Mme McGraw : J'aime beaucoup,
dans un contexte d'incertitude, des choses un peu hors de notre contrôle, on
peut miser sur la prévisibilité, ce qui est dans notre contrôle. Parfait...
Mme McGraw : ...dernière
question, ensuite, ma collègue. Pour revenir à la deuxième question,
c'est-à-dire un peu la séquence de comment est-ce qu'on va... qu'est ce qu'on
va prioriser, dans quel ordre, donc, évidemment, les réductions GES au Québec,
sur le territoire, si je comprends bien. Après ça, c'est réduction GES,
peut-être hors Québec via le marché, et ensuite ce serait les retraits
d'émissions, c'est sûr que retrait, tout ce qui est biologique ou solutions
nature, on comprend que ça, c'est prioritaire. Mais au niveau des retraits
technologiques, vous dites : Il faut investir, parce qu'éventuellement on
n'a pas le choix, ça va être un 10 à 25 %, mais il faut quand même faire
des choix. Ça fait qu'avec des fonds limités, on miserait sur, quand même, les
réductions tout en même temps.
M. Laneuville (Mathieu) :
Évidemment, les réponses sont souvent nuancées. On aimerait ça donner une
réponse claire, mais je pense qu'il faut voir les trois en parallèle parce
qu'on va avoir besoin des trois.
Mme McGraw : En parallèle,
OK.
• (20 heures) •
M. Laneuville (Mathieu) :
Évidemment, ce qui nous intéresse beaucoup, si on a un mot à retenir qui fait
un gros impact, c'est «électrification». Avec électrification, évidemment, on
ne se trompera pas, c'est beaucoup plus efficace. Notre collègue Pierre-Olivier
Pineau vous en a parlé probablement, de la productivité aussi, comment c'est
plus... c'est plus productif aussi. Alors, c'est sûr que ça, on ne fera jamais
de pertes à ce niveau-là. Simon, je te laisse...
M. Langlois-Bertrand (Simon) :
Oui, évidemment, dans cette réflexion-là, puis c'est un peu le point qu'on
essaie de faire dans le mémoire, je comprends que vous vous êtes concentrés sur
la cible de 2030, évidemment, mais il ne faut quand même pas perdre de vue la
forêt derrière l'arbre. Donc, on fait ça pour transformer l'économie.
Transformer l'économie de la façon dont on vise ici, ça ne se fait pas
rapidement, là, en allant chercher quelques points de pourcentage. C'est aussi
un travail plus large de transformation complète. Ça veut dire qu'il y a
certaines des voies qu'on demande de prioriser qui ont un effet à plus long
terme, là, comme le retrait, par exemple.
Mme McGraw : Merci.
La Présidente (Mme Nichols) : Mme
la députée de Mille-Îles, 2 min 20 s.
Mme Dufour : Merci beaucoup,
Mme la Présidente. Je vais revenir sur... Vous avez dit : Les solutions de
retrait ne doivent être déployées que lorsque... qu'aux endroits où c'est
indispensable, puis vous avez mentionné l'agriculture. J'aimerais vous
entendre. Il y a quand même des... des technologies qui se développent
actuellement pour justement réduire les émissions de GES en agriculture. On
peut penser à la biométhanisation, mais j'ai visité aussi une ferme laitière
dans ma circonscription, à Laval, il y a une ferme laitière, et ils font du...
dans le fond, le compostage en litière du fumier, là, des vaches, puis ils me
disaient... C'est ça. Puis, en plus, ça devient un revenu pour eux. Donc, il
existe des solutions qui ne sont pas toutes technologiquement coûteuses. C'est
où que ce serait incompressible en agriculture.
M. Langlois-Bertrand (Simon) :
Oui, bien, en fait, c'est ça, peut-être apporter une nuance sur... ou, en tout
cas, une précision sur ce que j'ai dit tantôt, les... Il y a les émissions en
agriculture qu'on peut, qu'on peut réduire. Il y a les émissions
incompressibles, quand on dit les compenser là où c'est important, où c'est
prioritaire, comme les incompressibles, ça ne veut pas dire physiquement à
côté, c'est vraiment dans le sens où on ne peut rien faire. Les champs sont là,
ils émettent. Même si on change les pratiques, on va être capable de réduire,
bon, en réduisant les fertilisants par exemple, etc., mais on n'arrivera pas à
zéro. Il y a des émissions qui se passent quand on fait des cultures. Donc, ces
émissions-là se retrouvent dans l'atmosphère. Donc, on va... on va en retirer
ailleurs pour compenser, là, ce qui sort de là.
Mme Dufour : OK. Donc, ce
n'est pas dans les processus que c'est incompressible, c'est les terres
elles-mêmes.
M. Langlois-Bertrand (Simon) :
Non. Il y a une partie, évidemment, qui est compressible, ça, il faut le faire.
Mais comme je disais tantôt, ça reste entre 30 et 50 % du total, là, de ce
qu'on connaît aujourd'hui. Évidemment, il peut avoir d'autres pratiques qui
émergent, mais... mais, pour l'instant, il y a un gros morceau qu'on prévoit
qui risque d'être encore là si on maintient cette production-là.
Mme Dufour : OK, parfait.
Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Nichols) :
Merci beaucoup. La parole est au député de Taschereau,
3 min 18 s.
M. Grandmont : Merci, Mme la
Présidente. Bonjour. Merci pour votre présence, pour votre mémoire. Vous avez
parlé, là, des économies qui investissent, on en a entendu parler beaucoup
quand même dans la consultation. Mais rapidement qui sont... quelles sont les
économies, quels sont les pays qui investissent actuellement, qui devraient
devenir... selon toute vraisemblance, parce que l'économie de demain sera
décarbonée, qu'on le veuille ou non. Donc, quels sont les pays qui investissent
et qui sont les leaders de demain?
M. Langlois-Bertrand (Simon) :
Bien, je peux peut-être y aller. C'est sûr que l'éléphant dans la pièce, c'est
la Chine, là. Donc, la Chine a doublé l'apport de l'électricité dans son mix
énergétique en 20 ans, donc... même moins de 20 ans, là. Donc, il n'y
a aucun autre pays dans le monde qui a réussi à faire ça. Puis ils l'ont fait
en structurant l'ensemble de leur économie, ce n'était pas juste pour être
capable de nous vendre des panneaux solaires. Ils ont vraiment prévu des plans
très détaillés. Bon, évidemment, la Chine, c'est... on le voit souvent comme un
cas très particulier, donc, on peut se tourner vers des pays européens qui nous
ressemblent un peu plus, avec un climat similaire, qui partaient à peu près du
même point de départ, certains qui avaient déjà une production hydroélectrique,
par exemple.
Donc ces pays-là ont quand même réussi à
réduire... ce n'est pas juste en enlevant du charbon dans la production
d'électricité, là, ils ont réduit par secteurs certains procédés industriels,
la chauffe des bâtiments. Il y a des pays qui sont rendus...
20 h (version non révisée)
M. Langlois-Bertrand (Simon) : ...à
plus que 50 %, 60 % de véhicules électriques. Donc, avec toutes ces
étapes-là, ils ont été capables de réduire, aller chercher des morceaux un peu
partout dans des transformations qui ne s'arrêteront pas là, donc ce n'est pas
des transformations cul-de-sac, là. Donc, on voit vraiment la suite qui va
venir en quelques années par la suite.
M. Grandmont : Donc, pour des
économies similaires, des climats similaires et des systèmes politiques qui
ressemblent un peu à celui du Québec, on a réussi à faire des avancées majeures
sans chaos économique puis on est devenu des... ils sont devenus des pays qui
exportent aussi ces technologies-là. Est-ce qu'ils... Est-ce qu'ils, dans le
fond, provoquent, dans le fond, des changements? En termes d'exportations,
est-ce qu'il y a un bénéfice, finalement, à ça?
M. Langlois-Bertrand (Simon) : Bien,
ça veut dire que, dans les pays de l'Union européenne, on voit les échanges
entre les pays eux-mêmes, donc, en Amérique du Nord, l'équivalent, ce seraient
quelques États américains, comme New York ou Californie, qui ont fait beaucoup.
Donc, évidemment, on échange avec la Californie, là, mais le contexte est
peut-être un peu différent de cette façon-là. Mais, effectivement, ils exportent
leurs solutions à mesure que...
M. Grandmont : Il y a le
Conseil patronal de l'environnement du Québec qui est venu nous voir en disant :
Il faut éviter de créer le chaos économique au Québec, évidemment. En même
temps, le ministre est très clair, il veut garder la cible de 2050 pour la
carboneutralité. On avait une discussion ensemble tout à l'heure, puis, dans le
fond, ce qu'on disait, c'est que, si on reporte la cible de 37,5 sous 90 en
2035 ou plus loin, en 2040, bien, en fait, plus on se rapproche de 2050, plus
les bouchées à prendre seront grandes. Est-ce que vous ne craignez pas que plus
on retarde cette cible-là, pour laquelle vous appelez à finalement... à la
réitérer de manière convaincante, la cible qui était prévue de 2030? Est-ce que
vous ne craignez pas que, si on retarde ça, les bouchées seront d'autant plus
grandes et le risque pour l'économie québécoise sera d'autant plus grand?
M. Langlois-Bertrand (Simon) : Oui,
c'est... en un mot, oui, effectivement.
M. Grandmont : En un mot,
oui. J'aime ça...
M. Langlois-Bertrand (Simon) : C'est
un risque très élevé.
M. Grandmont : Exactement.
Juste une question un peu rhétorique, là, mais, si... Bien, en fait, c'est
peut-être pratique même, mais, si on reporte la cible de 2030 à 2035, ça veut
dire qu'en 2030 on n'aura pas atteint... on n'aura pas atteint 37,5 sur la
courbe de la carboneutralité. Donc, est-ce que ça ne vient pas, dans le fond,
équivaloir à réduire la cible prévue pour 2030, qui était de... qui était de 37,5,
à plus bas?
La Présidente (Mme Nichols) : En
quelques secondes, parce que le temps est écoulé.
M. Langlois-Bertrand (Simon) : Bien,
je vais vous laisser clarifier ça entre vous, là.
La Présidente (Mme Nichols) : La
parole au député des Îles-de-la-Madeleine. Trois minutes 18 secondes.
M. Arseneau : Merci, Mme la
Présidente. Merci à vous de votre présentation, de votre présence. Vous avez
sans doute pris connaissance du rapport du Comité consultatif sur les
changements climatiques. Non seulement il dit : On devrait maintenir la
cible, comme vous le dites, à 37,5, mais on pourrait même être plus ambitieux
pour 2030 et se garder une espèce d'échelle. Mais, surtout, après on dit :
La cible de décarbonation, ça devrait être 2045. Vous dites 2050. Ça, on
pourrait négocier ça.
Les cibles intermédiaires, j'aimerais vous
entendre là-dessus. Parce qu'évidemment, si on ne retenait pas 2030 pour la
première cible à 37,5, on reporte à plus tard ou on fait porter sur les épaules
des gouvernements à venir ou des générations à venir l'atteinte d'un objectif
encore plus ambitieux pour les prochaines étapes. Si on reporte le 37,5 de 2030
à 2035, bien là, c'est 60 % que nous recommande le Comité consultatif sur
les changements climatiques, puis, cinq ans plus tard, c'est 78 %. Alors,
reportons ça jusqu'en 2040, on a 7 % aujourd'hui, il faudrait monter à
78 % en cinq ans. Est-ce qu'on avance vraiment? Est-ce que c'est ce que
vous vouliez dire, là, quand vous dites : On a besoin de prévisibilité,
mais aussi on a besoin d'un espace-temps qui nous permette de franchir les
étapes une à la fois? Est-ce que je comprends bien votre propos ou je vous mets
des propos dans la bouche?
M. Langlois-Bertrand (Simon) : Bien,
je ne pense pas que... On n'a rien contre les cibles intermédiaires, là. Si ça
prend un mécanisme de suivi, bien, celui du comité consultatif est peut-être le
bon. Je pense que j'ajouterais que j'aimerais ça voir d'autres mécanismes de
suivi en parallèle, parce que, comme on met l'accent... Sur quoi on met l'accent,
donc, dans le mémoire, c'est que ce n'est pas juste une question d'aller
chercher des pourcentages de réduction par-ci, par-là, on n'est plus là, là.
Donc là, c'est des transformations structurelles créées, vraiment, à ça
ressemble à quoi, l'économie carboneutre en 2050? Puis, pour faire ça, c'est
des changements réels, là. Il y a des changements dans la vraie vie qui doivent
se passer.
M. Arseneau : On se comprend.
Mais vous avez mentionné très clairement que l'objectif, ce n'est pas d'avoir
des cibles, c'est de mettre des moyens en place puis une volonté politique pour
les atteindre. Mais, si, la volonté politique, on ne l'a pas aujourd'hui pour
2030, il va falloir beaucoup plus de volonté politique pour un objectif encore
plus ambitieux parce qu'on aura reporté les échéances. C'est bien ce qu'on doit
comprendre.
M. Langlois-Bertrand (Simon) : Oui.
M. Arseneau : Et, pour l'entreprise
ou pour le réseau que vous représentez, ça devient un défi encore plus
important si on repousse à plus tard le gros du travail à faire, parce qu'on l'a
dit tout à l'heure, les fruits mûrs qui sont prêts à cueillir, il y en a de
moins en moins. Et plus on va repousser l'objectif, plus ça va être difficile d'atteindre
nos cibles, nos objectifs et la décarbonation. C'est...
M. Langlois-Bertrand (Simon) : Oui,
l'effort plus tôt risque de rapporter, ça, c'est certain...
M. Arseneau : ...et j'aimerais
savoir, c'est parce qu'on a dit : Est-ce que c'est atteignable? Est-ce que
c'est rentable? Je pense que j'ai bien compris votre message, mais pour vous,
investir dans la décarbonation, dans la transition, c'est rentable sans aucune
espèce de doute.
M. Laneuville (Mathieu) :
Oui.
M. Arseneau : Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Nichols) : Merci
beaucoup, merci de votre présence, merci de votre contribution aux travaux. Je
vais suspendre la commission quelques instants. Merci.
(Suspension de la séance à 20 h 10)
(Reprise à 20 h 13)
La Présidente (Mme Nichols) :
Je souhaite la bienvenue au dernier groupe de la journée. Merci d'être parmi
nous. Alors bienvenue à Écotech Québec. Je vous rappelle que vous disposez de
10 minutes pour votre exposé, après quoi nous allons procéder à la période
d'échange avec les membres de la commission. Je vous invite donc à vous
présenter, puis commencer votre exposé.
Mme Dubé-Côté (Isabelle) : Merci,
Mme la Présidente. M. le ministre, Mmes, MM. les députés membres de la
commission, merci de nous entendre aujourd'hui. Je m'appelle Isabelle Dubé
Côté, je suis présidente et chef de la direction des Écotech Québec, la grappe
des technologies propres. Je suis également vice-présidente du Comité du Canada
Cleantech Alliance.
Je suis aujourd'hui ici en compagnie de
Geneviève Gauthier, qui est présidente du conseil d'administration d'Écothech
Québec, ainsi que Frédérique Dumais, qui est directeur des communications et
affaires publiques.
Écotech Québec est la grappe des
technologies propres, une des 10 grappes industrielles. Elle a été créée
en 2009 pour soutenir le secteur des technologies propres, un secteur...
Mme Dubé-Côté (Isabelle) : ...innovant
qui aide les organisations et les entreprises à être plus efficaces dans leurs
opérations et aussi améliorer leur empreinte environnementale. Nous travaillons
avec tous les acteurs de l'écosystème, incluant les chercheurs, les petites
start-up, des fournisseurs bien établis, des donneurs d'ordres qui souhaitent
améliorer leurs pratiques, acquérant des technologies innovantes.
Dans le cadre des consultations en cours,
il est vraiment crucial de nous attarder au potentiel des technologies propres
comme des solutions incontournables pour répondre aux cibles de réduction des émissions
de GES du Québec. En effet, le GIEC indique que toutes les technologies propres
devront être déployées pour atteindre nos objectifs. De très nombreuses
entreprises québécoises en technologies propres sont actives dans le domaine et
contribuent directement ou indirectement à la réduction des émissions de GES et
leurs solutions sont par ailleurs transversales à l'ensemble des marchés
d'activités et renforcent la compétitivité des entreprises et des
organisations. Le maintien des cibles, ambitieuses certes, mais indispensables
pour contrebalancer le coût de l'inaction possède le potentiel de transformer
en profondeur la société québécoise, notamment en mettant l'accent sur
l'intégration de critères de performance environnementale qui favorisent une croissance
économique à long terme, respectueuse de l'environnement, stimuler
l'innovation, tout en mettant en valeur le savoir-faire québécois dans divers
domaines, dont celui de l'énergie, savoir-faire qui est reconnu à
l'international, assurer une meilleure gestion des ressources, notamment
énergétiques, propulser le Québec dans des secteurs d'avenir liés aux
technologies propres, renforcer la résilience et l'autonomie du Québec,
notamment au niveau énergétique, en diversifiant les sources d'approvisionnement
locales — il s'agit ici d'un véritable enjeu de sécurité nationale — encourager
la population à adopter des comportements plus durables et responsables et
contribuer ainsi à réduire la pression exercée sur le système et les
infrastructures.
On ne peut s'attendre... on ne peut
demander aux gens de faire des efforts ni s'attendre à ce que l'acceptabilité
sociale soit au rendez-vous si la vision globale n'est pas alignée. Certains
principes clés se dégagent lorsqu'on réfléchit à la manière d'atteindre nos
objectifs énergétiques de réduction de GES. Premièrement, miser sur la sobriété
et la réduction à la source. Ensuite, optimiser les procédés et prioriser
l'efficacité avant d'envisager toute production supplémentaire. Ceci inclut
notamment les technologies propres et une approche de circularité. Et
finalement, compenser en dernier recours.
Nous proposons déjà de considérer les
actions nécessaires à l'atteinte de nos cibles comme une opportunité, et, si
elles sont bien réfléchies, comme un investissement plutôt qu'une dépense.
C'est d'ailleurs la position adoptée par de nombreuses instances
internationales. Nous devons donc adopter une vision globale intégrant les
retombées économiques pour les secteurs clés et surtout l'évitement des coûts
beaucoup plus importants liés à l'inaction. En effet, l'Agence internationale
de l'énergie fait presque exclusivement référence aux investissements mondiaux
dans le secteur de l'énergie à faibles émissions, qui devraient atteindre des
niveaux record en 2025. Lorsqu'il s'agit de présenter des technologies propres
comme Innovation verte, il est important de souligner que ces innovations
génèrent des impacts positifs non seulement sur l'environnement, mais aussi sur
la productivité. Au Québec, le récent bilan d'Investissement Québec a révélé
une augmentation de 44 % de la productivité des entreprises ayant investi
dans des programmes d'innovation et de productivité durables.
Le secteur des technologies propres est un
contributeur important et en croissance pour l'économie canadienne. L'emploi y
augmente régulièrement, dépassant celui d'industries plus traditionnelles selon
Ressources naturelles Canada, ce qui montre l'impact large de ce secteur et son
importance pour les politiques publiques. Le secteur offre par ailleurs des
emplois qualifiés et spécialisés partout à travers le Québec. Dans son mémoire,
le Comité consultatif sur les changements climatiques cite notamment l'OCDE,
qui souligne que le secteur des technologies propres crée des emplois qualifiés
et contribue à moderniser l'économie en la rendant plus résiliente et durable.
Les technologies propres constituent un levier clé pour stimuler la
productivité locale et renforcer la compétitivité à l'international. Il est
essentiel de donner à toutes nos entreprises, quel que soit le secteur
d'activité, les moyens d'adopter ces technologies afin de se positionner sur
les marchés internationaux et de collaborer avec des partenaires qui respectent
des standards environnementaux élevés. On peut notamment penser au passeport numérique
de produits, qui sera obligatoire en Europe pour certaines catégories de
produits dès 2027 et qui permet de suivre le cycle de vie de ces produits.
La transition est là pour rester, même si
elle rencontre des vents contraires dans certaines régions...
Mme Dubé-Côté (Isabelle) : ...régions,
nos partenaires se souviendront des positions prises par le Québec. Par
ailleurs, plusieurs initiatives, parfois moins visibles, reflètent clairement
les valeurs des régions clés d'alliés pour le Québec, comme le Climate Alliance
en Europe ou le U.S Climate Alliance aux États-Unis. Il est donc essentiel de
maintenir une solide réputation à l'échelle internationale, surtout quand les
données de ces alliances démontrent que les États membres ont collectivement
réduit leurs émissions de GES tout en augmentant le PIB collectif.
Les technologies propres jouent un rôle
clé tant pour la mitigation des impacts des changements climatiques que pour
l'adaptation. Selon Québec Net Positif, 50 % des entreprises québécoises
ont été touchées par des phénomènes climatiques ou leurs conséquences au cours
des derniers mois et 72 % des dirigeants se disent préoccupés par l'impact
potentiel de ces événements sur leur entreprise. Il est facile de comprendre
que chaque dollar investi en prévention permet de réduire le coût de réparation
et de restauration. Certaines données indiquent même qu'un dollar investi peut
générer des économies à long terme de 13 à 15 $, selon l'Institut
climatique du Canada. Cette approche requiert, donc, d'avoir une perspective à
long terme qui intègre à la fois des solutions établies et des solutions
prometteuses. Assurer une prévisibilité afin que l'entrepreneuriat dans ces
innovations vertes puisse se développer ici et renforcer la compétitivité et l'autonomie
du Québec. Une approche qui doit se faire de manière structurée, avec des
cibles et l'intégration de solutions locales, grâce notamment à l'exemplarité
de l'État et au pouvoir d'achat du gouvernement. Les technologies propres
transversales dans le marché d'application présentent également l'avantage de
s'intégrer parfaitement aux piliers stratégiques du gouvernement, tels que la
défense, le logement abordable, les infrastructures, les minéraux critiques, la
productivité ou l'intelligence artificielle.
• (20 h 20) •
M. Dumais (Frédéric) : Des
exemples de technologies propres pour le logement, par exemple, des entreprises
qui font maintenant des blocs de béton sans ciment, et donc, carboneutres
puisqu'ils n'émettent pas de GES lors de leur production. Les blocs ont les
mêmes propriétés que les blocs traditionnels, presque au même coût. On parle
aussi de modules de bâtiments préconstruits dont certains utilisent des
matériaux innovants. Du bois, de l'aluminium ou des isolants très performants
pour faire des constructions écoénergétiques. Pour les infrastructures,
plusieurs technologies permettent d'accroître la circularité, de mieux gérer
les ressources et les intrants, et donc, de réduire les déchets. Ce sont des
éléments qui permettent des réductions récurrentes et à long terme.
Intelligence artificielle et numérique durable, on a des entreprises dans notre
écosystème qui utilisent l'intelligence artificielle pour comprendre les flux
d'énergie dans des bâtiments existants et qui trouvent les meilleures solutions
pour améliorer l'efficacité énergétique. C'est rapide et peu coûteux pour
réduire les factures de gaz naturel ou d'électricité, de façon récurrente,
également. Et parce qu'on sait que l'intelligence artificielle consomme
énormément d'énergie et que c'est une tendance qui s'accélère, on a même des
entreprises qui se spécialisent dans la récupération de la chaleur des serveurs
pour chauffer l'eau des bâtiments. Quand ce sont des bâtiments chauffés au gaz
naturel, bénéfice est double du point de vue économique et environnemental.
Les minéraux critiques devenus
prioritaires pour plusieurs États dans le monde. On travaille avec des
entreprises qui exploitent la mine urbaine, c'est-à-dire qu'elles sont capables
de récupérer les métaux qui se trouvent dans nos appareils électroniques
désuets. Ça favorise... Ça valorise les ressources qui pourraient se retrouver
dans des sites d'enfouissement et ça met de l'avant une économie circulaire, et
ça évite aussi de multiplier les mines.
Même pour la défense, on a des solutions
qui peuvent, par exemple, aider des bases militaires éloignées non connectées
au réseau électrique. On peut fournir des réseaux autonomes en énergie, en eau,
en matières résiduelles et même en agroalimentaire pour ce type d'infrastructures.
Enfin, un autre pilier stratégique est la
productivité. Presque toutes les technologies propres permettent de gagner en
productivité. Par exemple, elles peuvent générer de l'énergie... elles peuvent
aider à gérer l'énergie des bornes de recharge pour éviter d'accroître la
demande en période de pointe ou accroître la productivité de procédés
industriels, les exemples sont multiples. On le constate, les expertises sont
nombreuses et peuvent aider dans plusieurs secteurs de l'économie du Québec.
L'enjeu consiste à offrir ces technologies... à offrir à ces technologies
propres un environnement d'affaires et les moyens nécessaires pour qu'elles
puissent se développer et se déployer pleinement.
La Présidente (Mme Nichols) : Merci
beaucoup. Merci pour votre exposé. Nous allons débuter la période d'échanges.
M. le ministre, la parole est à vous pour 16 minutes 30 secondes.
M. Drainville : Oui, bonjour.
Merci. Est-ce que le... les reculs des...
M. Drainville : ...voisin du
Québec crée des enjeux de compétitivité pour l'économie québécoise, selon vous.
Mme Dubé-Côté (Isabelle) : En
fait, l'utilisation de technologies propres qui est vraiment le positionnement
qu'on voit comme étant une des solutions, justement, à certains reculs, amène
une compétitivité et une productivité au-delà de l'aspect environnemental.
Donc, je... Tu veux y aller?
Mme Gauthier (Geneviève) :
Après.
Mme Dubé-Côté (Isabelle) : Le
désengagement de certains voisins ne... je veux dire, peut ne pas avoir d'impact
sur la compétitivité locale des entreprises, si on... si on met en place les
bonnes innovations pour être capable de compétitionner de la bonne façon avec
les États voisins. Je suis désolée, je pense que j'ai mal compris la question.
M. Drainville : Non, non,
non, mais ça va, ça va. C'est... Il est 8 h 30 quand même, là. Non,
mais c'est parce que j'ai donné cet exemple-là plus tôt aujourd'hui, puis je
l'ai donné aussi la semaine passée, tu sais, mais ça m'a vraiment mis le feu,
vous savez où, quand j'ai vu que le Québec avait échappé un investissement de
plusieurs milliards parce qu'on n'avait pas d'énergie verte puis que l'Ontario
avait de l'énergie à base d'hydrocarbures puis, eux autres, ils ont été
capables, avec de l'énergie produite par des centrales au gaz, d'attirer chez
eux un très gros... très bel investissement. Et ça, pour moi, c'est la preuve
qu'un État voisin, dans ce cas-ci, principal concurrent économique du Québec,
qui décide de miser sur les hydrocarbures, peut gagner des investissements,
peut créer des emplois, bref, peut nous placer dans une situation où nous ne
sommes pas concurrentiels.
Et donc il faut faire preuve d'un certain
pragmatisme. Moi, ce que j'appelle le pragmatisme vert, c'est-à-dire il faut
continuer à investir dans la réduction. Il faut rester des leaders, à n'en pas
douter, parce qu'à un moment donné ceux qui ont perdu la boule vont,
espérons-le, la retrouver et vont remettre au pouvoir des gouvernements qui
auront le bon sens de remettre l'État, dont ils seront responsables, sur la
voie des réductions. Mais, pour le moment, on est pris avec un contexte qui, je
l'espère bien, nous l'espérons tous, est un contexte de court terme, mais qui
fait des dommages quand même. Puis moi de me faire dire : Occupe-toi pas
du court terme, tu vas voir, tout va revenir à la normale, il ne faut pas
perdre notre leadership, tu sais, on peut se permettre de tenir ce discours-là,
mais nous, là, ici, on a une responsabilité face à des personnes vraies, du
vrai monde, là, qui pourraient subir les contrecoups de cette concurrence
déloyale, parce que nous, on a décidé de maintenir une tarification carbone,
parce que nous, on a décidé de maintenir une taxe... pas une taxe, une bourse,
parce que nous, on a décidé de maintenir un FECC...
Une voix : ...
M. Drainville : ...tout
autour de nous. Alors, moi, être à haut niveau puis dire : Restons calmes,
tout va bien, gardons notre leadership. Un jour, tout reviendra à la normale.
Moi, c'est drôle, je me sens une responsabilité face aux gens qui vont payer le
prix de ces reculs, de ce désengagement, comme vous l'appelez, tout autour de
nous. Puis je ne peux pas croire qu'on n'est pas capable de maintenir une
position de leadership tout en prenant en compte le sort de ces gens-là qui
sont des vrais êtres humains, là, puis qui risquent de payer pour ça. Puis je
suis un peu... je suis un peu, comment dire, désarçonné par... C'est comme si
on n'était pas capable d'envisager à la fois l'environnement et l'économie dans
une même équation. Pourquoi faut-il absolument choisir l'un ou l'autre?
On devrait être capable, comme société et
comme élu, d'être capable de dire : Oui, il faut maintenir nos avancées en
matière climatique, mais il faut prendre en compte la situation économique. On
ne peut pas juste les opposer les uns aux autres, il faut les mettre en
équilibre puis trouver le bon équilibre, la bonne équation.
Mme Dubé-Côté (Isabelle) :
Bien, vous avez... vous avez raison puis, en fait, vous nous avez fait part
d'une vidéo la semaine passée. On avait nos remises de prix, les Eurêka, qui
récompensent des entreprises qui ont adopté des pratiques durables. Et c'est
exactement ce que vous disiez...
Mme Dubé-Côté (Isabelle) : ...et
vous disiez... vous félicitiez, en fait, les lauréats qui étaient présents dans
la salle parce que c'étaient des entreprises qui étaient capables de jumeler
environnement et productivité. Et le fait d'être capable de garder des
initiatives...
M. Drainville :
...technologiques, hein, c'était... Oui, oui, oui.
Mme Dubé-Côté (Isabelle) :
Innovation technologique, c'est ça, avec des impacts à tous les niveaux,
quantifiés au niveau environnemental, au niveau économique. Comme je l'ai
mentionné, ce sont des entreprises qui ont des emplois sophistiqués, des gens
avec des emplois sophistiqués qui sont capables d'adresser des enjeux de
productivité des opérations.
Et, si on garde certaines des initiatives,
nous, ce qu'on vous suggère aujourd'hui, ce qu'on vient mettre de l'avant,
c'est le potentiel des technologies propres. Et le fait qu'on garde, par
exemple, un investissement dans le Fonds vert, donc... le fonds
d'électrification peut servir à investir dans des initiatives qui vont faire
croître ces entreprises en technologies propres là, qui vont faire croître ce secteur-là
et qui va permettre, dans deux ou trois ans, quand on sera revenus, peut-être,
à une nouvelle norme, un niveau normal, de ne pas avoir perdu, de ne pas avoir
pris de recul par rapport aux initiatives que d'autres pays continuent à mettre
de l'avant, comme l'Europe.
Donc, il y a une façon de voir ce qu'on
continue de faire comme une opportunité, un bassin d'investissements pour des
plus petites entreprises qui ne vont peut-être pas se développer en Ontario,
vont se développer ici, ne seront peut être pas aussi grosse que certaines dont
on parle dans les médias, mais qui représentent le secteur, les PME du Québec,
de tout le Québec, avec des gens qui ont des emplois extrêmement importants,
extrêmement sophistiqués.
• (20 h 30) •
M. Drainville : Vous pensez
qu'on... pardonnez-,moi de vous parce qu'on n'a pas beaucoup de temps, mais
vous pensez qu'on mettrait à mal ce des ce développement entrepreneurial, cette
créativité entrepreneuriale, si on décidait, par exemple, de garder la même
cible mais de la reporter de quelques années? Vraiment?
Mme Dubé-Côté (Isabelle) : Bien,
en fait, c'est que ces technologies, cette innovation-là, à partir du moment où
on doit la déployer rapidement parce qu'on atteint certains niveaux, on doit
être capables d'avoir cette autonomie-là et d'avoir développé ces
technologies-là à l'avance. Je prends un exemple, bon, je mentionnais tout à
l'heure de dire qu'on réduit à la source. Ensuite, on est capables d'adapter
nos façons de faire et, finalement, bien, de compenser au besoin. Le secteur du
captage carbone, par exemple, en ce moment, n'est pas du tout mature. Si on
veut être capables, dans quelques années, de dire : Bien, à un certain
moment, on va devoir retirer de l'atmosphère ce qu'on ne peut pas compenser en
faisant... en prenant des pratiques plus durables, cette technologie-là doit
être prête à ce moment-là. Elle ne sera pas si on ne commence pas aujourd'hui à
investir dedans et à tester les différentes technologies pour demain.
M. Drainville : Oui, je
comprends, mais je pense qu'on peut faire... on peut... comme dit l'expression,
on peut marcher puis mâcher de la gomme en même temps. Moi, je... moi, je sens
un besoin, là, profond, là, d'envoyer un signal aux secteurs qui risquent de se
retrouver en difficulté, puis qu'un programme ambitieux avec des cibles
ambitieuses puis tout un appareillage d'institutions climatiques ne secourra en
rien, là, tu sais, là, moi, je... Je suis vraiment, je vous le dis, là, c'est
la fin de la journée puis je n'ai pas le goût de bullshiter, là, je suis
vraiment... je suis vraiment très... je suis sincèrement préoccupé par le sort
de ces gens-là, qui... Eux autres, là, si on leur dit : Écoute,
fais-toi-en pas, là, à un moment donné, là, les Américains vont retrouver leur
sens, puis tu vas voir, là, tous les investissements qu'on a faits, là, ça va
finir par porter fruit, puis on va garder notre leadership à l'international,
puis on va pouvoir concurrencer les Européens puis... Je trouve que, par
moment, on est extrêmement loin de la réalité du quotidien de beaucoup de gens,
là, puis on...
Écoutez, c'est grave, ce qui se passe, là,
c'est grave. Le principal partenaire commercial du Québec a tout fait sauter
son dispositif climatique. Le fédéral a emboîté le pas pour... en partie, la
Colombie-Britannique, qui a toujours été une province, avec le Québec, qui
avait le plus de leadership sur la question climatique, qui est prête à faire
sauter sa cible...
20 h 30 (version non révisée)
M. Drainville : ...d'électrification,
l'Ontario, notre principal concurrent économique, qui dit : Savez-vous
quoi, les cibles de réduction de GES, on va peut-être s'en débarrasser, puis
nous autres, on va faire comme si rien... n'arrivait, comme si cela n'aura pas
d'impact sur nos entreprises, sur nos travailleurs, sur nos familles? Je me dis :
Voyons donc! Ce n'est pas possible, ça! Il faut envoyer un signal d'adaptation,
là. Il faut dire : Écoutez, il faut trouver la... la bonne mesure, le bon
équilibre pour dire : OK, voici ce qu'on va garder, c'est important, parce
qu'on y croit puis on veut le faire pour nos enfants. Puis il y a des... il y a
des enjeux de compétitivité... économiques et technologiques, comme vous le
dites si bien, qui sont en cause, ça fait qu'il faut continuer à investir
là-dedans. Mais, à un moment donné, il faut aussi regarder : OK, le champ
de bataille vient de changer, là, on n'est plus dans le même monde puis, en
attendant que les affaires se replacent... quels gestes on pose pour s'ajuster
à cette nouvelle conjoncture. On ne peut pas juste dire : On fait comme
avant. C'est ce que j'entends beaucoup, moi. J'entends essentiellement :
On fait comme avant, on ne s'en occupe pas, de Trump, on ne s'occupe pas de
Carney, on ne s'occupe pas de l'Ontario, on ne s'occupe pas de
Colombie-Britannique, on maintient le cap comme avant comme s'il n'y avait rien
changé. Bien, voyons donc!
Une voix : ...
M. Drainville : Bien, voyons
donc! J'ai le droit de parler, moi! C'est quoi, ton problème? C'est quoi, ton
problème?
Des voix : ...
La Présidente (Mme Nichols) : Oui.
Non. Oh! je m'excuse. Coupez les micros. Je m'excuse...
Une voix : ...
La Présidente (Mme Nichols) : Je...
Je prends la parole. Je veux juste rappeler qu'on a des invités. C'est des gens
qu'on invite en commission parlementaire pour nous... livrer leur opinion. Tout
le monde a des opinions différentes. Il y a une façon qu'on peut la livrer de
façon convenable.
Une voix : ...
La Présidente (Mme Nichols) : Oui,
vous avez le droit, vous pouvez le...
Une voix : ...
La Présidente (Mme Nichols) : Oui,
merci, M. le ministre. Mais vous pouvez le livrer...
Une voix : ...
La Présidente (Mme Nichols) : Oui.
Vous pouvez le livrer aussi sur un ton plus agréable pour les invités qui sont
ici, à... à l'Assemblée nationale.
Une voix : ...
La Présidente (Mme Nichols) : Je...
Une voix : ...
La Présidente (Mme Nichols) : Présentement...
Une voix : ...
La Présidente (Mme Nichols) : C'est
très bien...
Une voix : ...
La Présidente (Mme Nichols) : Très
bien. Est-ce que c'est une question de règlement?
Une voix : ...
La Présidente (Mme Nichols) : Allez-y.
M. Grandmont : ...et en plus
il m'a insulté, alors c'est un... des... des propos blessants qu'il a tenus à
mon encontre, donc j'aimerais que M. le ministre les retire, s'il vous plaît, Mme
la Présidente.
La Présidente (Mme Nichols) : Oui.
Très bien. Alors, j'ai déjà donné des instructions d'avoir un ton convenable
avec nos invités. Donc, c'est le dernier groupe de la soirée, peut-être des...
des petits caramels pour tout le monde! Alors, très bien, vous pouvez
continuer, M. le ministre.
M. Drainville : ...
Mme Gauthier (Geneviève) : ...oui,
bien, merci. Je vais essayer d'être brève et claire, là, vu qu'il est tard pour
tout le monde. Je... Je partage... votre inquiétude de la... du nuage noir
économique, là, de... qui arrive de la frontière puis des... des différentes
positions gouvernementales. J'aimerais, par exemple, attirer votre attention
que la cible de réduction de gaz à effet de serre concerne essentiellement la
consommation d'énergie, qui est 70 % de l'énergie, et cette énergie
fossile là, qui est à la hauteur, là, je n'ai pas exactement les chiffres,
entre sept et 10 milliards de dépenses au Québec, qui est des fonds qu'on
envoie ailleurs que... qu'au Québec, là. Donc, nous ne sommes pas producteurs
de... de combustibles fossiles. C'est des... de l'argent que nos entreprises
dépensent dans des produits énergétiques qu'ils pourraient réduire grâce aux
technologies propres, grâce à l'intelligence artificielle, tous les exemples
que Frédéric a donnés. J'ai commencé ma carrière dans les pâtes et papiers où c'était
très difficile au niveau économique, concurrence internationale, chinoise. La
réaction qu'ils ont eue, c'est de... de réduire beaucoup leur consommation d'énergie,
de fermer les boucles d'eau, récupérer l'eau, donc de rentrer dans un... une
économie circulaire, qui n'était pas... à l'époque, qui leur a permis de
réduire des dépenses, augmenter, un petit peu, sensiblement leur marge de...
bénéficiaire et de rester en vie et de conserver les emplois. Donc, moi aussi,
ça me fâche de voir qu'il y a des grandes entreprises qui s'installent ailleurs
pour des conditions qu'on pourrait trouver douteuses, ou je ne sais plus les
mots que vous avez utilisés.
Ce qui me préoccupe beaucoup dans ma vie
de tous les jours, je travaille avec beaucoup d'entreprises, c'est aussi le
maintien des emplois d'ici face à la concurrence comme vous l'avez si bien
mentionné. Mais une partie de cette compétitivité-là va passer par une
réduction des coûts d'exploitation. Puis on sait, en industrie, les coûts d'exploitation,
c'est beaucoup la... la consommation énergétique. Et, je le répète, ce n'est
pas de l'énergie nécessairement qu'on produit, c'est l'énergie qui émet des
GES. Donc, pour moi, la... le maintien des... des cibles est... n'est pas du
tout incompatible avec la situation économique actuelle, et pourrait même, avec
une vision forte et un... une vision forte d'un gouvernement puis de reconduire
ce qui existe déjà, ou renforcir ça puis...
Mme Gauthier (Geneviève) :
...permettrait, là, de renforcer la compétitivité des entreprises qui sont déjà
établies en plus d'aider, là, les entrepreneurs dans les technologies propres,
les ingénieurs, l'intelligence artificielle et toutes ces personnes-là. Donc
c'est un autre angle qui est en accord, je crois, là, avec ce que... le... ce
que vous disiez, là.
M. Drainville : ...
intéressant que vous proveniez d'un secteur, justement, les pâtes et papiers
qui a été... qui fait partie de notre histoire industrielle.
Mme Gauthier (Geneviève) : Tout
à fait.
M. Drainville : Et dans le
fond ce que vous nous dites, c'est que vous avez pu observer de l'intérieur la
transformation, en tout cas, d'une entreprise ou de certaines entreprises.
Mme Gauthier (Geneviève) :
D'un secteur, oui.
M. Drainville : Qui ont
réussi à survivre en s'adaptant et en transformant leurs pratiques.
Mme Gauthier (Geneviève) : Oui
et je pense que ce n'est pas bien compris, ce n'est pas bien compris parce
qu'il y a 20, 25 ans, l'environnement n'avait pas le vocabulaire qu'on a
présentement. Les accords de Kyoto, c'était que les érudits qui en
connaissaient la cause, l'économie circulaire, ne faisaient probablement pas
partie du langage commun. Moi, je travaillais à réduire les gaz à effet de
serre, je ne savais même pas que c'étaient des gaz à effet de serre, je
travaillais en efficacité énergétique, je n'avais... j'appelais... on
n'appelait même pas ça comme ça. On appelait ça d'augmenter la productivité de
l'entreprise, les rendre plus rentables, augmenter la marge bénéficiaire.
• (20 h 40) •
Donc je pense qu'il y a quelque chose
quand même à aller chercher, là, comme inspiration pour toutes les autres
industries qui sont au Québec, mais aussi de se servir du... bien à la soirée,
justement, d'éco-rendez-vous, de tous ces entrepreneurs-là qui sont des
emplois. Ce n'est pas 10 000 emplois à une région, mais qui sont plusieurs
emplois dans toutes les régions du Québec, qui développent de l'intelligence
artificielle, des technologies qui vont permettre à nos entreprises d'être plus
environnementales, mais aussi plus économiques et productives. Dans le contexte
actuel, je trouve que c'est tout à fait équilibré.
M. Drainville : Merci.
La Présidente (Mme Nichols) : Merci
beaucoup. Nous allons poursuivre avecMme la députée des Mille-Îles.
Mme Dufour : Oui, merci
beaucoup, Mme la Présidente. Merci à vous trois d'être ici présents
aujourd'hui. On s'était vus dans le cadre du projet de loi n° 81,
justement, où il me semble que vous étiez présent ou, en tout cas, on s'est vu
en parallèle, du moins, assurément. Je veux peut-être juste vous poser une
question, on a entendu, M. le ministre, là, faire un plaidoyer qu'il ne fallait
pas ignorer ce qui se passe au sud de la frontière ou ce qui se passe dans le
reste du Canada, mais si on revient en arrière, au moment où le Québec a fait
le saut, justement, dans tout ce qui est la bourse du carbone, par exemple,
qu'il a mis en place une cible, et tout ça, à ces années-là, c'était Stephen
Harper qui était premier ministre du Canada, puis je ne pense pas qu'au sud de
la frontière non plus, il y avait encore entamé toutes ces démarches-là, donc
ça a été fait avec la Californie, mais à ma connaissance et dans ma mémoire,
c'était la Californie et le Québec. Le reste du Canada n'était pas là, le reste
des États-Unis n'était pas là. Donc, je voudrais juste voir... vous étiez
peut-être... vous êtes peut-être plus au fait, là, de ça. Moi, j'y vais
vraiment dans ma mémoire, mais vous êtes des spécialistes, est-ce que je me
trompe que quand Québec a fait ce saut-là, à l'époque, bien, on était, disons,
avant-gardiste, et des leaders dans le domaine.
Mme Dubé-Côté (Isabelle) : Le
Québec a été avant-gardiste et leader à plusieurs reprises, ce qui nous permet
aujourd'hui d'avoir une longueur d'avance ou d'avoir eu une longueur d'avance
sur des questions énergétiques par rapport à d'autres... d'autres régions.
Aujourd'hui, on a l'opportunité de garder ce leadership-là aux côtés de
certains partenaires et, oui, c'est vrai que notre voisin du Sud dans son
ensemble a pris des positions un peu drastiques, mais il y a quand même
plusieurs États qui travaillent en collaboration, qui continuent de se doter de
mécanismes, de façon de faire pour améliorer leurs performances et il y a aussi
l'Europe avec qui on est très proche et avec qui plusieurs entreprises
souhaitent diversifier leurs marchés.
Et donc, pour accéder à ces marchés-là et
pour continuer de travailler, de collaborer avec ces alliés-là qui sont
peut-être plus au niveau des États ou au niveau de l'Europe, il faut maintenir
une certaine crédibilité à l'international. Et, encore une fois, les
technologies propres permettent de nous positionner sur deux fronts qui sont
critiques : maintenir cette crédibilité-là au niveau environnemental qui
est pour le... bien, enfin, je dirais, le court terme, mais le court, moyen et
long terme, mais également d'avoir un impact au niveau économique pour
plusieurs entreprises. Et je reviens encore une fois à notre événement de la
semaine dernière, on a eu des entreprises qui ont des...
Mme Dubé-Côté (Isabelle) :
...gains incroyables au niveau financier par la mise en place de pratiques plus
durables, donc qui réduisent leurs coûts et qui réussissent à être plus
productives.
Mme Dufour : Donc, ce
sont des investissements qui sont payants pour ces entreprises-là. Ce n'est pas
seulement une dépense.
Mme Dubé-Côté (Isabelle) :
Ce n'est pas une dépense et c'est vraiment, c'est vraiment le paradigme, le
changement qu'on vous propose, c'est vraiment de voir les investissements en
environnement, s'ils sont bien faits et faits de manière structurée, en même
temps qu'ils améliorent la productivité des entreprises comme des
investissements et non des dépenses.
Mme Gauthier (Geneviève) :
...justement, à la soirée des prix Erika la semaine passée, j'ai été étonnée
quand même, j'avais l'occasion de l'animer, donc ça attire les... Les gens
viennent nous parler quand on anime une soirée, il y a... La quantité
d'entrepreneurs qui font affaire aux États-Unis ces temps-ci... Donc, oui,
Trump est très vocal sur le non-respect des seuils, etc. Il faut comprendre
qu'aux États-Unis, ça ne se décide pas seulement au niveau fédéral, c'est au
niveau des États. Et puis ce n'est pas nécessairement très fort, mais d'avoir
un appui, tu sais, pour une économie verte, puis des entreprises fortes qui
nous permettent après de l'exporter, leur technologie, au Texas, tu sais, la
quantité de personnes qui sont allées au Texas vendre leur technologie, le
Texas, ce n'est pas nécessairement un État qu'on penserait le plus vert ou le
plus progressif. Pour moi, ça, je trouve que c'est très important pour l'avenir
économique du Québec puis des entreprises d'ici de conserver nos convictions
fortes et de faire en sorte que ces entreprises-là puissent aller vendre même
aux États-Unis. Alors, Trump ne contrôle pas tout aux États-Unis, là, fort
heureusement.
Mme Dufour : Oui. Merci
beaucoup. Je vais vous poser une dernière question. Ensuite, c'est ma collègue.
Vous... Vous avez parlé des mines urbaines dans laquelle on retrouve des métaux
critiques. Le groupe avant vous aussi a parlé... Il y a un groupe en tout cas,
qui a parlé des métaux critiques, que c'était un enjeu, puis ils nous ont parlé
de lithium, le fait qu'actuellement le lithium est en train de fermer ou a
fermé déjà, ce serait un enjeu majeur pour... pour le Québec, qu'il y avait un
gisement potentiel, là, qu'on perdrait. Donc, j'aimerais juste vous entendre
sur... sur ce cas particulièrement.
Mme Dubé-Côté (Isabelle) :
Nous, on va regarder plusieurs types de minéraux critiques. Et lorsqu'on parle
de mines urbaines, «urban mining», c'est-à-dire comment est-ce qu'on est
capable d'utiliser les minéraux qui sont déjà extraits, qui se retrouvent dans
vos ordinateurs, les téléphones, donc qui sont des déchets mais qui
représentent une valeur lorsqu'on est capable de le récupérer? Donc, déjà là,
au niveau des minéraux critiques, les technologies propres peuvent être
utilisées pour récupérer ces matériaux-là sans devoir creuser de nouveau ou
extraire de nouveau. Mais dans les mines en soi, les technologies propres
peuvent s'appliquer à plein de niveaux pour optimiser les processus, arrêter
les temps, réduire les temps d'arrêt de certains procédés, certaines machineries
de l'abattement de poussière, du traitement d'eau. Oui.
Mme Dufour : On n'a pas
beaucoup de temps. Le lithium, ce n'est pas une mine, c'est vraiment...
C'est... C'est du recyclage de batteries. Donc, je voulais juste... juste être
certaine, mais c'est bon. J'ai... Merci pour votre réponse.
Mme Dubé-Côté (Isabelle) :
C'est parce que vous parliez de minéraux critiques. Je ne sais même pas si vous
vouliez aller jusque là.
Mme Dufour : Oui oui,
mais je parlais vraiment de lithium, qu'on nous avait parlé de l'enjeu de
lithium, mais je vais laisser les dernières minutes à ma collègue. Merci.
La Présidente (Mme Nichols) :
Mme la députée de Notre-Dame-de-Grâce, pour 3 min 18 s.
Mme McGraw : Merci, Mme
la présidente. Donc, peut-être quelques commentaires. Je suis contente
d'entendre le ministre dire qu'il ne faut pas effectivement opposer l'économie
et l'environnement. Mais lorsqu'on parle d'appauvrir le Québec pour atteindre
des cibles, ça, c'est vraiment un discours qui est dépassé, qui oppose ces
enjeux-là importants puisque ce que j'entends de la plupart des groupes, dont
vous-mêmes, c'est il y a des opportunités, c'est la transition climatique,
c'est un levier économique, pas un obstacle. On parle de productivité et de
prospérité, on parle de prévisibilité. Donc... Puis ce n'est pas par naïveté,
on comprend très bien ce qui se passe aux États-Unis et ailleurs au Canada.
Puis il y en a beaucoup qui vont dire c'est le «new normal», ce n'est pas à
court terme, c'est à long terme. Donc, est-ce qu'on va tout changer nos
politiques parce que ça va être peut-être à long terme? Puis ma collègue, elle
parle des décisions courageuses et pas juste courageuses, mais économiques du
Québec, malgré certains gouvernements au pouvoir. Donc, les outils, pour
revenir aux cibles puis les outils, le ministre parle des outils, c'est-à-dire
le SPEDE, le FECC, tout ça, ce sont des outils. Ce n'est pas des fins en soi,
c'est des outils pour un objectif, c'est-à-dire réduire les GES et s'attaquer à
la crise climatique. Ça fait qu'est ce que c'est cohérent de dire : On a
tous ces outils, là, qui nous permettent de dire qu'on est leader, mais ces
outils-là, on ne va pas les utiliser pour continuer à...
Mme McGraw : ...à vraiment
viser des cibles plus ambitieuses. Est-ce que c'est cohérent, ce discours-là de
peut-être confondre les outils québécois et les cibles québécoises? Et
finalement quel serait l'impact symbolique sur la population québécoise mais
aussi à l'international et pratique de reculer sur nos cibles, soit le
pourcentage ou la date sur l'objectif essentiel de carboneutralité d'ici 2050?
Mme Dubé-Côté (Isabelle) : Oui,
je vais y aller avec la première partie. Je vais peut-être vous redemander la
deuxième partie. La bonne nouvelle, on a des mécanismes en place qui sont déjà
en place et qui peuvent servir à déployer des solutions, dont des technologies
propres. Si je pense au Fonds d'électrification, il y a une façon de l'utiliser
pour être capable d'accélérer le déploiement et l'acquisition de technologies
propres au sein d'entreprises, au sein d'organismes. Et il y a une façon pour
l'État d'être exemplaire et d'acquérir ces technologies-là. Donc, la bonne
nouvelle, c'est qu'on a les solutions. La bonne nouvelle, c'est que les
Québécois ont développé des solutions locales de plein de sous-secteurs qui
s'appliquent à tous les marchés d'activités, incluant les priorités
gouvernementales, comme on le mentionnait tout à l'heure au niveau de la
défense, au niveau des minéraux critiques, au niveau du logement abordable.
Donc, on a ces solutions-là. Maintenant, les mécanismes, il y en a en
place. Comment est-ce qu'on les optimise pour être sûrs qu'à travers ces
mécanismes et ces outils-là les solutions sont déployées le plus rapidement?
Nous, on sera... on sera disponible pour vous, pour vous aider dans cette...
dans cette réflexion-là, mais on a les solutions et on a les mécanismes.
• (20 h 50) •
La Présidente (Mme Nichols) : Merci
beaucoup. 3 min 18 s à M. le député de Taschereau.
M. Grandmont : Merci, Mme la
Présidente. Merci pour votre présence. J'ai beaucoup apprécié. En fait, vous
apportez une vision qui ressemble un peu à ce qu'on a eu avant aussi, là, mais,
sous un autre angle, là, une vision qui est très transversale, qui très
circulaire, en fait, dans votre approche. Vous apportez des solutions qui
permettent de conjuguer, évidemment, l'économie et les ambitions climatiques,
comme plusieurs des partenaires ou des gens qu'on a reçus ici, notamment
l'industrie du ciment, l'industrie de l'aluminium aussi, qui vise toujours
37,5 % sous les niveaux de 1990 en 2030 et qui, en même temps, font des
gains importants et réussissent à développer l'économie du Québec. Donc, merci,
pour votre présence. C'est rafraîchissant.
Sinon, je voulais savoir, vous, là, le
plan de mise en œuvre, est-ce que c'est un outil que vous utilisez? Le plan de
mise en œuvre, là, du plan pour une économie verte, là, est ce que c'est un
outil que vous suivez? Est-ce que ça aide vos partenaires, les gens que vous
représentez dans le déploiement des actions qu'ils mènent sur le terrain?
Mme Dubé-Côté (Isabelle) : C'est
un outil qu'on suit, mais je dirais que, pour le faire atterrir concrètement
pour nos... nos partenaires, c'est... c'est peut-être un outil qu'on suit à
plus haut niveau, donc qu'on va suivre à plus haut niveau, mais peut-être moins
au niveau du déploiement et de mise en œuvre. Ça va donner une indication, je
dirais, globale, de la vision, mais ensuite de le... comment ça va se décliner,
on le suit un petit peu moins.
Mme Gauthier (Geneviève) : Si
je peux juste... là-dessus. Nous, on... Écotech Québec, c'est la grappe des
technologies propres, puis le monde des technologies a des entreprises
industrielles, puis eux autres peut-être qu'ils suivent un petit peu plus
certains éléments du plan de mise en œuvre, là, quand ça a été annoncé qu'il y
allait avoir de l'aide pour des plans de décarbonation. À un moment donné, je
ne sais plus, il y avait une enveloppe de quelques millions de dollars dans
plusieurs années c'était suivi. Au niveau des bâtiments, par contre, tout ce
qui était le plan de... d'avoir la réglementation sur la divulgation
obligatoire de la consommation d'énergie et des GES puis après une cotation qui
était dans une itération... excusez-moi, là, une itération du PMO, c'était
quelque chose quand même que l'industrie regardait que certains se préparaient
à soit recevoir la réglementation ou à offrir des solutions pour se conformer à
la réglementation. Ils sont... Ça peut être un peu suivi quand même, là.
M. Grandmont : Donc, c'est un
outilqui est quand même utile, là, pour...
Mme Dubé-Côté (Isabelle) : C'est
utile surtout pour certains programmes qui vont décliner directement comme, par
exemple, les programmes de vitrine technologique en traitement de l'eau, les
défis Innovation Québec. Donc, si on... quand on le décline de manière
concrète, ça peut aider, mais on va suivre, là, de manière globale.
M. Grandmont : Parfait. Merci
beaucoup. Sur le Fonds vert, vers le fond d'électrification et changements
climatiques, là, il y a 1,8 milliard qui a été envoyé au Fonds des
générations. Est-ce que pour l'industrie que vous représentez, est-ce que
c'est...
M. Grandmont : ...est-ce qu'il
y aurait eu une utilité à le garder, finalement, pour les mesures en actions
climatiques?
Mme Dubé-Côté (Isabelle) : C'est
un montant qu'on aurait... qu'on peut, en fait, utiliser pour... pour être
capables de faire croître le secteur des technologies propres, donc avoir un
impact au niveau économique et, en même temps, avoir un impact au niveau
environnemental. Donc...
La Présidente (Mme Nichols) : Merci
beaucoup, je suis désolée. La parole est au député des Îles-de-la-Mallette...
voyons, de-la-Madeleine, 18... 8 minutes... voyons, 3 min 18 s.
Je m'en allais vous donner cinq minutes de trop.
M. Arseneau : Beau cadeau
pour finir la soirée. Merci, Mme la Présidente. Merci à vous, mesdames,
monsieur. Dans... on parlait du plan de mise en oeuvre tout à l'heure. Celui
qui a été déposé en juin dernier par le ministre de l'Environnement de l'époque
disait essentiellement ceci : malgré la conjoncture, là, au sud de la
frontière, puis du retrait des efforts climatiques de l'administration aux
États-Unis, puis une certaine incertitude économique, le Québec fait le choix
de maintenir le cap tout en s'adaptant au nouveau contexte. Et il terminait en
disant : «Nous avons tout à gagner à accélérer cette transition.» Est-ce
que vous voyez un danger à ce qu'on s'ajuste au contexte en réduisant les
efforts plutôt que s'ajuster au contexte, s'adapter et peut-être profiter de
cette opportunité-là pour, justement, s'inscrire non seulement dans la
transition énergétique, mais aller chercher des gains sur le plan économique et
sur le plan de l'innovation?
Mme Dubé-Côté (Isabelle) : Bien,
en fait, je dirais qu'il faut maintenir les cibles en les voyant comme des
opportunités pour investir au bon endroit, et faire les deux en même temps.
Donc...
M. Arseneau : Mais... mais
juste par rapport... Vous parliez du Texas tout à l'heure. Si les États-Unis
décident d'en faire un peu moins, est-ce que le Québec pourrait en faire un peu
plus et se positionner avantageusement, c'est un peu ça, ma question, pour des
entreprises que vous représentez, dans les énergies propres?
Mme Gauthier (Geneviève) : Bien,
si j'y vais d'une réponse courte... il doit rester deux secondes... donnez-moi
deux secondes... je pense que ce qui est le plus difficile pour les
entreprises, c'est les changements de cap, l'incertitude que les changements de
cap induisent, puis l'incertitude crée de l'immobilisme. Est-ce que ça...
M. Arseneau : C'est ça. Mais
nous, si on garde le cap, et que les États-Unis le changent, nous, on peut...
on peut prendre la place qu'ils nous laissent.
Mme Gauthier (Geneviève) : Je
suis convaincue qu'on va réussir.
M. Arseneau : Exact. La cible
2050 de décarbonation, est-ce que vous... vous pensez que c'est... c'est
atteignable, c'est réaliste? Vous l'appuyez? C'est... c'est dans le sens...
c'est le sens dans lequel on devrait s'inscrire? Donc, à partir du moment où,
en 2050... ça a l'air bien, bien loin, mais c'est dans 25 ans... si, pour les
cinq prochaines années, on lève le pied, on baisse les bras, on en fait un peu
moins, est-ce que vous ne pensez pas qu'on risque justement, de mettre aussi à
risque l'atteinte de 2050?
Mme Dubé-Côté (Isabelle) : Bien,
en fait, oui, on risque de mettre... de retarder sur la date de 2050, mais
aussi, on risque de manquer l'opportunité d'investir dans un secteur
extrêmement porteur pour l'avenir.
M. Arseneau : D'accord,
mais... C'est un peu ça, parce que les questions qui se posent à différents
groupes, puis on vous les a peut-être posées, mais je pense que je vais
préciser un peu... c'est parce qu'une des questions qui... qui a été posée
souvent, c'est : Est-ce que la transition, c'est rentable pour le Québec?
Votre réponse? C'est-à-dire, les efforts de transition, les énergies propres,
l'innovation, est-ce que c'est rentable pour le Québec? Parce qu'on semble
dire, du côté... en face de nous, là, que ça va faire perdre des emplois, là,
si on essaie de faire la transition tel qu'on l'avait prévu.
Mme Gauthier (Geneviève) : Bien,
je pense que notre présence ici démontre qu'il y a beaucoup de travailleurs qui
sont déjà dans cette économie-là, là. Donc, on ne peut pas mettre en opposition
environnement puis économie pour ces travailleurs-là. Puis après, une cible,
elle est atteignable si on se donne les moyens...
M. Arseneau : Les moyens.
Mme Gauthier (Geneviève) :
...pour l'atteindre. Puis je pense que... on croit que, si les moyens vont dans
aider nos développeurs de technologies à installer leurs technologies dans tous
les projets d'État, sociétés d'État, les entreprises, oui, on pourrait tirer
notre épingle du jeu puis devenir... en faire une force économique, certainement.
M. Arseneau : Merci beaucoup.
La Présidente (Mme Nichols) : Merci.
Merci de votre présence, merci de votre contribution aux travaux.
Compte tenu de l'heure, la commission
ajourne ses travaux au mercredi 3 décembre, à 15 heures, où elle
poursuivra son mandat sous la présidence du député de Joliette. Merci.
(Fin de la séance à 20 h 59)