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Version finale

29th Legislature, 1st Session
(June 9, 1970 au December 19, 1970)

Tuesday, October 6, 1970 - Vol. 10 N° 30

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Bill 38 - Loi concernant l'industrie de la construction


Journal des débats

 

Commission permanente du Travail et de la Main-d'Oeuvre

Bill 38 — Loi concernant l'Industrie de la construction

Séance du mardi 6 octobre 1970

(Dix heures quarante minutes)

M. BOSSE (président de la commission permanente du Travail et de la Main-d'Oeuvre): A l'ordre, messieurs! Je déclare la séance ouverte.

A l'ordre, s'il vous plaît, messieurs! Je déclare la séance ouverte et la commission va siéger, ce matin, en entendant d'abord les parties non présentes au litige. J'aimerais que ces parties s'identifient immédiatement, et nous allons les entendre jusqu'à épuisement des noms.

M. Pepin, vous désirez prendre la parole?

M. PEPIN: Oui, M. le Président, avec votre permission, je voudrais faire deux remarques. Y aurait-il moyen, à une autre séance, d'avoir une salle qui nous permettrait de travailler un peu plus à l'aise, parce qu'avec toute la documentation qui est ici nous sommes tous entassés les uns sur les autres. Ce ne sont pas de bonnes conditions. Peut-être que ça pourrait régler le problème.

M. LAPORTE: Même si nous songions à agrandir, les problèmes de la construction nous retarderaient peut-être.

M. PEPIN: Cela ne voudrait peut-être pas dire de construire immédiatement, M. le ministre; je sais que ça coûterait trop cher avec l'égalité des salaires. Mais, il y a peut-être, dans un autre lieu, une salle qui serait plus appropriée à nos travaux.

M. LAPORTE: La seule qui soit plus grande, c'est l'Assemblée nationale, le Parlement lui-même, et il n'est pas question que nous y aillions, quant à moi.

M. PEPIN: L'ancienne salleduConseil législatif ne serait-elle pas plus appropriée, ne pensez-vous pas? Je ne sais pas.

DES VOIX: C'est rouge. Cela aveugle pas mal.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le Grand Théâtre.

Ordre du jour

M. PEPIN: De toute façon, c'est la première chose. Voici la deuxième chose que nous aimerions connaître, si possible: Quel est le programme de cette semaine? Nous voudrions déterminer, nous aussi, notre ordre du jour pour le reste de la semaine.

M. LAPORTE: Disons que l'ordre du jour que je vais suggérer aux membres de la commission, dans quelques minutes, va partiellement être fonction du nombre de ceux qui veulent se faire entendre et qui ne sont pas une des sept parties à la table des négociations. Si on me le permettait, M. le Président, je suggérerais une réponse à la question de M. Pepin dans quelques minutes seulement, quand les gens se seront identifiés.

M. DUMAIS: La ville de Montréal, Claude Dumais.

M. DESILETS: L'Association des entrepreneurs de travaux mécanisés, Ubald Désilets.

M. GRAVEL: Le Syndicat de la construction de Montréal, André Gravel.

M. BRUNET: Catalytic Entreprises limitée et Canadian Vickers, Yves Brunet.

M. PERRAULT: Conseil du patronat, du Québec, Charles Perrault.

M. KENTZINGER: Gérard Kentzinger,...

M. LAPORTE: Comment cela s'écrit-il étant donné que nous n'avons pas un président sténographe?

M. KENTZINGER: Gérard Kentzinger, Corporation des entrepreneurs en réfrigération.

M. LAPORTE: Votre nom, s'il vous plaît? M. BELLEFEUILLE: Gilles Bellefeuille.

UNE VOIX: Industrie du pétrole de Montréal-Est.

M. DUMESNIL: Fédération des commissions scolaires, Mario Dumesnil.

M. LAPORTE: Un instant! Cela va trop vite. M. JOLIN: Paul Jolin. Le groupe Reynolds,

le groupe Marine, Belolt, Sorel et Engineering Products.

M. MARCHESSAULT: Jacques Marchessault. Le groupe Alcan, les distilleries Melchers, Lines Brothers Canada, l'Association provinciale des propriétaires de camions-citernes, Cresswell-Pomeroy, Sido Limitée, Beaconing Optical and Precisions Limited, Klockner-Moeller Limited, Alva Craft Limited, Direct Motor Express Limited et la Compagnie de transport Richard, Inc.

M. BRUNELLE: Jean Brunelle. Centre des dirigeants d'entreprise du Québec.

M. DUROCHER: Jacques Durocher, HydroQuébec.

M. LE PRESIDENT: Dans quel ordre, est-ce qu'on commence? A l'ordre!

M. LAPORTE: M. le Président, messieurs, la salle est petite; on vient de nous le faire remarquer. H y a beaucoup de monde. Alors, est-ce qu'on pourrait demander, d'abord, pour le bon entendement et la compréhension de toutes les choses qui seront dites ici, qu'il n'y ait qu'une seule réunion à la fois?

Je sais que cela sera difficile, que le travail sera long, que l'atmosphère peut devenir moins sereine de temps à autre, mais je fais appel à tous pour que nous procédions tout à fait dans l'ordre.

Nous avons devant nous un bon nombre d'associations qui ont demandé à être entendues. Deux problèmes se posent: le problème de l'ordre dans lequel ces groupes, ou ces individus, seront entendus. Je suggère que cela soit dans l'ordre où ils se sont identifiés. Deuxièmement, le problème de certaines associations; certains groupes peuvent, à notre avis, être déjà membres de l'une des parties en cause. Sur ce point de vue, personnellement, j'ai l'intention d'être très large, afin que chacun ait l'impression qu'il a pu se faire entendre, mais nous ne voudrions pas que l'une ou l'autre des parties au dossier ait deux ou trois fois l'occasion de se faire entendre, alors que d'autres ne parleraient qu'une seule fois.

Ces deux problèmes posés, M. le Président, je suggère que nous siégions jusqu'à midi et demi, puis que la séance reprenne à deux heures et demie jusqu'à six heures, et enfin, que nous siégions de huit heures à dix heures, ce soir. Et demain, nous siégerons de dix heures à midi et demi, de trois heures à six heures. J'imagine qu'à ce moment, nous pourrons avoir terminé l'audition des différents mémoires qui nous sont proposés ce matin. Nous ajournerions mercredi soir pour entreprendre, jeudi matin, l'audition des plaidoiries des sept parties au dossier. Jeudi, nous aurons également trois séances et nous aurons aussi des séances vendredi.

Ceux qui ont prétendu que le gouvernement voulait se traîner les pieds auront peut-être une opinion différente, j'espère; devant le rythme de nos séances, je pense qu'il est normal que nous agissions de la sorte.

Si nous terminions ce soir, par exemple, l'audition des personnes qui nous font l'honneur de nous visiter ce matin, nous pourrions ajourner à jeudi matin pour que les députés aient le temps de prendre connaissance des mémoires qui leur sont soumis. M. le Président, c'est le rythme que je suggère, pour le travail de cette commission; j'espère que mes collègues le trouveront acceptable et qu'il en sera de même pour les personnes qui nous visitent aujourd'hui.

M. LE PRESIDENT: Auriez-vous des remarques sur la procédure? Le député de Bagot.

M. CARDINAL: Est-ce que je pourrais demander au leader parlementaire de rappeler les heures de la journée de demain, si nous devons siéger?

M. LAPORTE: Nous siégerons demain de dix heures à midi trente. Comme il y aura séance du comité de législation d'une heure trente à trois heures, je demanderais que l'on puisse siéger ici de trois heures à six heures. Il n'y a pas théoriquement de séance prévue pour demain soir, mercredi, mais, si nous n'avions pas terminé le travail quant aux messieurs qui ne sont pas l'une des parties au dossier, nous devrions siéger demain soir.

Des mémoires ont été déposés. Je ne crois pas que cette commission exige ou même souhaite que nos amis de l'autre côté de la barre lisent en entier tous ces mémoires. Nous aimerions mieux qu'ils soient résumés dans leurs points essentiels et commentés. Cela nous permettrait, ensuite, de poser des questions sans que nous ayons à lire in extenso tous ces mémoires, dont j'ai eu l'occasion de prendre connaissance partiellement, et qui peuvent, je pense, se résumer assez brièvement. Cela répond à votre question?

M. CARDINAL: Oui, merci.

M. LE PRESIDENT: D'autres questions des membres de la commission sur la procédure?

M. DEMERS: Quant à nous, nous acceptons de bonne grâce l'échéancier et l'horaire que le leader du gouvernement vient de proposer. Si on pouvait se mettre à la tâche le plus tôt possible — parce qu'il y a énormément de travail à faire — cela nous permettrait non seulement de cerner le problème, mais d'en sortir un jour.

M. LE PRESIDENT: Avant de procéder à l'audition des parties hors litige, Je tiens à remercier les parties qui, elles, sont au litige d'avoir procédé aussi rapidement à la présentation de leur mémoire. Je crois que cela fait suffisamment de travail pour les députés. Il y en aura pour quelques jours, du moins. Nous allons commencer immédiatement l'audition des parties, en procédant selon l'ordre d'identité, c'est-à-dire la ville de Montréal, d'abord.

Si vous vouliez vous identifier à nouveau avant la lecture de votre mémoire, les membres de la commission l'apprécieraient.

Ville de Montréal

M. DUMAIS: Mon nom est Claude-René Du-mais, avocat de la ville de Montréal, membre du contentieux de la ville de Montréal, chargé des relations industrielles.

Je pense que, comme le disait le ministre du Travail, il n'est pas nécessaire pour nous de répéter tout ce que nous avons dit là-dedans. Tout ce que la ville de Montréal désire, c'est ce qu'elle avait jusqu'ici, c'est-à-dire l'exclusion, pour les travaux qui sont faits par ses travailleurs permanents, du décret de la construction.

Jusqu'à présent et, autant que je me rappelle, jusqu'au mois de mai, et même cela a été continué en partie par l'ordonnance numéro 12 jusqu'au 1er novembre, dans le décret 613 du district de Montréal, 11 y avait une exemption pour les cités, villes et corporations municipales pour ce qui est des travaux de construction, réfections, réparations et autres, faits par leurs propres employés.

Evidemment, nous remarquons que le bill 290, chapitre 45 des lois de 1968, ne spécifie pas exactement de quoi il s'agit lorsque l'on parle d'entretien. Pour la ville de Montréal, ceci pose un problème énorme car nous avons entre autres près de 3,000 employés qui s'occupent à temps partiel, si l'on veut, de construction. C'est notre propre construction qui se fait et nous ne sommes pas en concurrence dans nos travaux avec les divers organismes de constructeurs. Nous avons même des employés tellement spécialisés qu'ils n'existent pas ailleurs.

Si l'application d'un décret devait leur être imposée, c'est très simple, ils ne seraient absolument pas capables de passer l'examen pour obtenir les cartes de compétence nécessaires à l'ensemble d'un métier.

De la sorte, — et je dois le dire sans qu'il y ait là aucune trace de menace — nous serions forcés de mettre à pied plusieurs employés à la ville de Montréal à cause de l'application d'un décret qui, au fond, vient d'une loi qui ne s'applique pas à des corps qui, comme nous, ne sont absolument pas en concurrence sur le marché, entre constructeurs.

Si l'on regarde — on n'a pas besoin d'aller loin pour ça — les origines de la Loi des conventions collectives qui ont donné ensuite lieu à la loi de 1968, et surtout le chapitre 45, au sujet des relations dans l'industrie de la construction, nous nous apercevons de ce que ceci touche spécifiquement et veut éviter. La première loi avait été votée en 1938, je pense, sous l'égide de M. Tremblay et d'autres; elle avait pour but d'empêcher une concurrence malhonnête par des baisses ou des hausses de salaire, etc., entre les divers constructeurs vis-à-vis d'une soumission.

Or, dans le cas de la ville de Montréal, il n'en est absolument pas ainsi. Nous faisons nos propres travaux. Lorsqu'il y a de gros travaux, — je suis prêt à dire ceci en toute déférence à votre commission — ces travaux sont donnés à l'extérieur. Il y a ensuite — il ne faut pas l'oublier — nos conventions collectives qu'il nous faut respecter, entre autres — et le président de la centrale en sait quelque chose — les fameuses clauses de contrat à forfait. Nous serions très mal foutus vis-à-vis de ces clauses-là si nous devions, du jour au lendemain, être aux prises avec le décret.

Pour toutes ces raisons-là, nous croyons donc qu'à l'article 5, entre autres, qui est actuellement en discussion et qui doit être discuté par les parties qui ont été jugées représentatives par le chapitre 45, nous croyons, dis-je que notre problème ne doit pas être sujet à un décret, et que la ville de Montréal devrait avoir le droit de faire elle-même ses propres travaux sans être touchée par les décrets. N'oubliez pas que lorsqu'elle fait des travaux qui sont supérieurs ou des travaux d'un ordre tel qu'ils ne peuvent être faits par nos employés, — et, je suis prêt à en donner ici toutes les preuves — ils sont toujours donnés par soumissions à l'extérieur.

Nous, ce que nous voulons garder, c'est le droit pour nos employés permanents de faire les travaux que nous avions déjà le droit de

faire et qui étaient exclus du décret de la région de Montréal. Je ne vois pas — et aucune partie n'a soulevé jusqu'à maintenant une raison qui nous empêcherait d'y être exclus — une raison nouvelle qui nous en empêcherait.

C'est à peu près tout ce que j'ai à dire. S'il y a des questions dans l'assemblée, je suis prêt à y répondre également au nom de la ville de Montréal.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Dumais.

M. LAPORTE: Pour que ce soit très clair, vous dites dans votre document: Le décret a été abrogé parce que tous les décrets ont cessé d'avoir force à ce moment-là; mais cette clause dont vous parlez a été prolongée par une ordonnance...

M. DUMAIS: L'ordonnance numéro 12.

M. LAPORTE: ... de la Commission du salaire minimum, comme toutes les autres prescriptions de ces décrets. Vous êtes encore couverts par ces prescriptions-là...

M. DUMAIS: C'est exact.

M. LAPORTE: ... et vous voudriez que dans le prochain décret ces exclusions demeurent.

M. DUMAIS: D'ailleurs vous, comme ministre, pouvez le faire en vertu, je crois, de l'article 58 du bill.

M. LAPORTE: Ces vertus-là, monsieur, c'est aussi inquiétant que réjouissant.

M. DUMAIS: Je ferai remarquer à M. le ministre, si mon souvenir est bon, que l'ordonnance numéro 12 ne vaut que jusqu'au 1er novembre 1970. Je prie tout le monde pour que ce soit réglé pour ce temps-là, si possible.

M. LAPORTE: II y a le bill 38 qui est là pour prolonger ce qui existait...

M. DUMAIS: D'accord. C'est vrai.

M. LAPORTE: Autrement dit, nous avons pris des dispositions à l'Assemblée nationale pour que, à aucun noment, nous ne soyons pris de panique, ou obligés de régler dans des délais trop courts un travail qui puisse, autant que possible, satisfaire tout le monde.

M. DUMAIS: Je vous remercie beaucoup, M. le ministre. Je vous remercie, messieurs.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Dumais... M. LAPORTE: Est-ce que vos collègues...

M. LE PRESIDENT: Un instant, s'il vous plaît. Il y aurait peut-être d'autres membres de la commission qui désireraient poser des questions.

Il n'y a pas d'autres questions, donc, au suivant.

D'autres personnes dans la salle désirent poser des questions.

M. DESJARDINS: Je voudrais seulement apporter à l'attention de la commission parlementaire que, la ville de Montréal apporte certains problèmes lorsque l'on parle d'entretien...

M. LE PRESIDENT: Auriez-vous l'obligeance de vous identifier?

M. DESJARDINS: André Dejardins, directeur de la FTQ, porte-parole aux tables des négociations.

Lorsque la ville de Montréal veut parler de l'entretien, etc. — prenez, par exemple, lorsque commencent les travaux de l'Expo — que ce soit pour l'entretien ou pour la construction, elle emploie des centaines d'hommes supplémentaires dont elle a besoin, réellement, pour faire les travaux réguliers. Ces gars-là sont rémunérés, non pas au prix de la construction. Par contre, ce sont des gars de la construction et ces gars-là sont seulement temporaires. Après, quand vient le temps de fermer l'Expo — ils voient à ce que l'Expo soit fermée complètement à cause du gel, etc. — ces gars-là retournent dans la construction et perdent toutes les conditions qu'ils avaient au préalable, telle que l'assurance-santé-salaire, tels que les fonds de pension qui étaient déjà établis dans la construction...

Alors, on demanderait aux députés de veiller à ce que la ville de Montréal, dans ses revendications... Nous croyons sincèrement, par exemple, que le mot « entretien » est très large pour elle. Elle ne voit pas la différence entre le mot « entretien » et remplace parfois complètement un pavillon.

M. LE PRESIDENT: Le député de Maskinongé.

M. DUMAIS: Est-ce que je peux répondre, avec votre permission? Tout simplement, c'est qu'après six mois un employé a sa permanence. Etant donné que ces employés sont représentés par la FTQ, vous devriez savoir effectivement

qu'ils l'ont. Pour moins de six mois, ceci est très difficile, et je pense que tout le monde connaît le caractère de l'Expo.

M. LAPORTE: M. le Président, je veux bien que M. Desjardins et M. Dumais s'expliquent, mais cela ne tournera pas en assemblée contradictoire, là!

M. DESJARDINS: Du tout.

M. LAPORTE: Je vais vous en poser une question, moi. Les abus que vous craignez mis de côté, êtes-vous en faveur de ce qu'il y a déjà dans la loi?

M. DESJARDINS: Leur fameuse période de six mois, ils renvoient l'employé au bout de cinq mois et demi. Après cela, ils disent: On va te réengager. Là, il y a une autre période de six mois qui commence.

M.LAPORTE: Oui.

M. DESJARDINS: C'est ça que je voulais porter à l'attention de la commission.

M. LAPORTE! M. Desjardins, cela ne répond pas à ma question.

UNE VOIX: Enlevez les abus.

M. LAPORTE: Si la période de six mois cesse d'être floue, êtes-vous en faveur de ce qu'il y à déjà dans la loi?

M. DESJARDINS: S'il reste réellement employé à l'entretien de la ville et non pas comme supplémentaire, comme ça se fait présentement.

M.LAPORTE: Je prends votre réponse pour un oui et je le mets au compte de votre prudence connue.

M. LE PRESIDENT: M. Dumais, vous aviez quelque chose à ajouter?

M. DUMAIS: Non, J'ai répondu simplement à la question. Je ne veux pas entrer dans la polémique, ainsi que nous le demandait M. le ministre.

M. LE PRESIDENT: D'autres questions des membres de la commission? Alors, si vous voulez, nous allons passer au deuxième orateur. Mais auparavant, je voudrais aviser la commission que Me Guy Gagnon, de l'Association de l'industrie du verre plat du Québec, désire se faire entendre par la suite.

Le deuxième orateur est M. Gravel.

UNE VOIX: De quelle maison?

M. LE PRESIDENT: II va nous le dire.

M. GRAVEL: André Gravel, du Syndicat de la construction de Montréal.

Syndicat de la construction de Montréal

M. LE PRESIDENT: Je crois que votre syndicat est affilié au Conseil central de Montréal.

M. GRAVEL: C'est bien ça. Nous avons un point de vue particulier à présenter à la commission parlementaire. Nous avons préparé un texte de quelques pages et qui est très court. Si la commission le permet, après mon intervention, nous pourrons le distribuer i tous les membres.

M. LAPORTE: Une première question préliminaire, M. Gravel: Est-ce que vous vous sentez représentés par la partie syndicale CSN à la table des négociations? Etes-vous couvert par cette unité de négociations ou pas?

M. GRAVEL: Pas exactement. C'est pour ça qu'on a présenté un point de vue autonome et qu'on voudrait se faire entendre par la commission parlementaire. Nous représentons 7,000 membres à Montréal. Nous avons des problèmes particuliers. Nous aimerions prendre quelques moment de votre temps pour faire valoir notre point de vue.

M. LAPORTE: Mais, est-ce que par la convention collective qui sera signée par les sept parties ou par le décret qui sera publié dans la Gazette officielle, vous serez liés?

M. GRAVEL: Exactement, oui.

M. LAPORTE: Est-ce que vous êtes actuellement, par la CSN, par ses négociateurs, même si ceci ne concorde pas toujours avec vos vues, légalement représentés?

M. GRAVEL: En fait, c'est la question qu'on se pose parce qu'à la suite des bills 290 et 38 notre situation devient floue, étant donné nos relations au sein de notre mouvement.

Aussi, sur certaines conditions de travail, nous avons cru plus simple de nous adresser directement à la commission parlementaire pour faire valoir notre point de vue.

M. LAPORTE: Je laisse à la commission le soin de décider si l'on doit ou l'on ne doit pas vous entendre. Encore une lois, remarquez bien que nous voulons être très...

M. DEMERS: Est-ce que c'est une répétition?

M. GRAVEL: Non, non, d'aucune façon. M. LAPORTE: Bon, alors... M. DEMERS: Et la CSN n'a pas d'objection? M. PEPIN: Aucune objection.

M. LAPORTE: Je ne m'attends pas à des objections de la CSN. Evidemment, si la CSN trouvait le tour de faire entendre les quinze syndicats qu'il y avait autrefois, j'ai l'impression qu'elle n'aurait pas d'objection. C'est aux autres qu'il faut demander cela.

M. PEPIN: J'ai répondu à la question qu'on m'a posée.

M. LAPORTE: C'est cela.

M. DEMERS: Je comprends. Je ne vous ai posé que cette question.

M. LE PRESIDENT: Nous entendrons la deuxième voix de la CSN.

M. GRAVEL: Messieurs les membres de la commission, le Syndicat de la construction de Montréal est directement intéressé aux résultats qui émaneront de votre commission. Le Syndicat de la construction de Montréal existe et représente des travailleurs de la construction dans la région de Montréal depuis plusieurs dizaines d'années. Actuellement, nous représentons plus de 7,000 travailleurs qui ont mis leur confiance en nous et nous croyons sincèrement que c'est à eux de choisir leurs représentants et pas à d'autres. Pour nous, la liberté synci-cale n'est pas un vain mot. Pas plus le législateur que d'autres ne devrait imposer de carcan aux travailleurs. Nous désirons prendre position devant vous sur les différentes clauses en litige, énumérées dans le document parlementaire numéro 71. Plus particulièrement, nous nous attacherons à certains points essentiels.

Il y a d'abord la question des droits acquis. Des années de lutte et de pratique syndicales ont acquis aux travailleurs de la construction de Montréal le premier droit, c'est-à-dire la reconnaissance. Le premier des droits acquis est sans conteste la reconnaissance.

La démarche, l'évolution actuelle de la négociation — si on peut toujours parler de négociation dans le cadre actuel — va dans un sens dangereux qui ferait qu'en pratique notre syndicat serait complètement expulsé du processus légal.

Dans le cadre des nouvelles législations, le syndicat perd en fait tout droit de parole et de représentation.

Nous avons notre existence légale depuis toujours et nous tenons à la conserver. Par ailleurs, notre existence de fait durera, quoi que fassent les lois.

Les militants de notre syndicat sont disposés à se battre pour conserver leur droit d'association et ce qui en découle. Nous tenons trop à notre existence et à notre liberté pour disparaître du jour au lendemain de la main du législateur de manière directe ou indirecte. On n'efface pas par une loi des années de lutte. La réalité est plus forte que tous les artifices.

Le Syndicat de la construction de Montréal est une entité propre qui existe par la volonté des travailleurs. L'Importance numérique et la détermination de notre « membership » représentent un état de fait qui ne saurait être écarté du revers de la main si nous recherchons réellement un esprit de démocratie et de saines relations patronales-ouvrières.

Nous demandons donc que notre organisation soit reconnue formellement comme les représentants authentiques des membres actuels et futurs du Syndicat de la construction de Montréal avec tous les droits et privilèges que cela confère.

L'article 1.11 du document parlementaire 69 ne répond pas du tout à la réalité de fait que nous vivons. Il faudrait remplacer cet article par: « Le Syndicat de la construction de Montréal ayant siège social au 7333 Saint-Denis, Montréal. »

Encore dans les droits acquis, il y a la question du comité conjoint.

En second lieu, l'outil légal d'application de la convention-décret qu'est le comité conjoint est trop important pour que nous le sacrifiions.

Le comité conjoint de l'Industrie de la construction de Montréal est le plus ancien des comités conjoints de la province. A travers les années, nous en avons amélioré l'efficacité (pensons à l'étude Price Waterhouse, aux cas de la sécurité au travail, etc. ). Nous avions un certain contrôle sur lui.

Nous sommes opposés à ce qu'il soit assassiné pour être remplacé par une superstructure provinciale, sur laquelle nous n'aurions, en fait, aucun contrôle parce que trop éloignée des travailleurs. Craignons le gigantisme. La

taille et le mandat du comité conjoint actuel sont adéquats pour assurer l'efficacité que nous sommes en droit d'attendre. Un immense comité aurait pour conséquence de diluer l'efficacité actuelle. Nous favorisons donc un comité conjoint par région de décret.

Pour ce qui est des autres droits acquis, il suffit de consulter les conventions sources et les autres documents de négociation pour y retrouver les différents éléments. Il va sans dire que nous trouvons inacceptable toute soustraction aux trop peu nombreux avantages que nous avons acquis à travers les années, sous prétexte d'uniformisation provinciale.

Voyons maintenant la question des frais de déplacements. Pour les frais de déplacements, chambre, pension et repas, cette clause doit être rigide afin d'éviter que certains entrepreneurs puissent la contourner par des artifices. Ces frais sont très importants étant donné la grande mobilité qui existe dans cette industrie.

Quant au quantum et à la formulation, nous suggérons que la commission se réfère à la demande syndicale, CSN, FTQ, du 17 février 1970.

Pour la clause d'ancienneté, le principe de l'ancienneté de mise à pied devrait être retenu. L'application de cette ancienneté aurait pour conséquence de stabiliser la main d'oeuvre et de mettre un peu de chair au squelette des propositions du juge Allan b. Gold. Nous croyons que cette question de l'ancienneté est très liée à tout le problème de la sécurité d'emploi. Une petite remarque: Des informations que nous avons prises au comité conjoint de Montréal nous permettent de penser que ce système-là peut difficilement être mis en oeuvre. Alors, cela va avoir énormément d'implications sur la clause d'ancienneté et il faudrait que ce soit étudié sérieusement.

Les contremaîtres doivent être assujettis de plein droit à la convention collective; entre autres, à la sécurité syndicale. Plusieurs facteurs influent dans ce sens. D'abord, le bill 290 ne les exclut d'aucune façon. Ensuite, de fait, et cela depuis plusieurs années, la plupart d'entre eux sont déjà syndiqués. De plus, plusieurs contremaîtres alternent du poste de contremaître à celui d'ouvrier. Une telle solution est apte à simplifier de beaucoup l'application de la convention-décret.

Le Syndicat de la construction de Montréal souscrit entièrement à la revendication de parité salariale à l'échelle provinciale. Nous sommes entièrement solidaires des travailleurs des autres régions. Nous croyons que, pour un même travail, il doit y avoir un même salaire. Nous avons aussi des intérêts à promou- voir cette revendication. Un salaire uniforme limiterait l'afflux de travailleurs de la province vers Montréal à la recherche d'un salaire supérieur. Aussi, grâce à la parité salariale, nos membres, lorsqu'ils iront à l'extérieur de notre région, ne subiront pas de baisse de salaire.

Quant à la qualification professionnelle, nous voulons souligner le danger que pourrait représenter la division des travailleurs en catégories: les bons, les moyennement bons, les pas bons, etc., par le biais de la qualification. Pas plus que les ghettos géographiques, les ghettos à l'intérieur d'un métier, dans une même région, ne sont acceptables.

Quant à toutes les autres clauses actuellement en litige, nous ne pouvons malheureusement les traiter en détail ici à la commission, parce que c'est assez long. Par ailleurs, les documents syndicaux de base sont très clairs et exprimant bien les besoins minimaux des travailleurs. Nous endossons toujours, pour notre part, ces revendications.

Messieurs, nous osons croire que vous saurez tenir compte des droits des milliers de membres de notre syndicat. Par ailleurs, soyez persuadés que nous espérons avec impatience le jour où, enfin, nous pourrons voir à nos affaires nous-mêmes. Nous allons continuer à travailler d'arrache-pied pour rapprocher ce grand jour.

Je vous remercie. Si c'est le désir de la commission, je peux remettre ces quelques feuilles.

M. LE PRESIDENT: La commission désire que vous déposiez le mémoire. Si vous voulez demeurer à la disposition des membres de la commission, nous allons faire déposer le document.

Le député de Maisonneuve.

M. BURNS: M. Gravel, je ne veux pas entrer dans un problème de régie interne ni quoi que ce soit avec la CSN. On a dit tantôt que vous étiez une partie représentée par la CSN. Pour le bénéfice des membres de la commission, est-ce que vous pouvez, sans élaborer, dire exactement quelle est votre situation par rapport à la CSN? Vous dites que vous n'aviez pas droit de parole aux négociations ou quelque chose de ce genre-là.

M. GRAVEL: Notre syndicat a affronté des difficultés, au cours de la dernière année, au sein du mouvement et plus particulièrement quand la commission parlementaire a endossé — cela nous cause des problèmes juridiques

directement — le document parlementaire 69 qui contient, entre autres clauses, celle qui définit le mot « syndicat ».

Elle le définit de telle sorte que pour être reconnu, il faut être un syndicat; la définition de syndicat comprend un organisme, etc. qui est affilié à la Fédération nationale du bâtiment et du bois et 3. la Confédération des syndicats nationaux.

Or, actuellement, nous avons été radiés de la Fédération nationale du bâtiment et du bois. Notre cause est en appel, mais nous considérons que cela peut causer des préjudices aux membres actuels et futurs du Syndicat de la construction de Montréal, parce que, de cette façon, ils ne seront plus représentés. Pour nous, nos membres ont choisi librement d'adhérer au Syndicat de la construction de Montréal pendant les délais légaux prescrits au bill 290. Leur liberté a joué à ce moment-là et elle devrait s'exercer jusqu'à la fin de la convention, qui est de trois ans.

Je voudrais aussi faire remarquer à la commission que la CSN, dans la région de Montréal, a acquis la représentativité au sens du bill 290, par notre intermédiaire. Dans la région de Montréal, ce sont les membres du Syndicat de la construction de Montréal qui ont donné, en fait, le droit de représentativité à la CSN.

M. LE PRESIDENT: Y a-t-il d'autres questions de la part des membres de la commission?

M. BURNS: Au sujet du rapport Gold, M. Gravel, dois-je comprendre que vous trouvez le rapport Gold insuffisant pour vous protéger au niveau de l'ancienneté, ou quoi? Vous avez parlé du rapport Gold, disant qu'il fallait y mettre de la chair dessus, ou quelque chose comme ça.

M. GRAVEL: A ce sujet-là, toute la question de la sécurité d'emploi par la voie des bureaux de placement est une revendication que le Syndicat de la construction de Montréal a poussée depuis des années. Mais malheureusement, à travers les événements, il a été transformé de telle sorte qu'aujourd'hui, il n'assure pas la sécurité que nous sommes en droit d'attendre pour les travailleurs de la construction.

Actuellement, entre autres choses, le système du juge Gold dit que pour être reconnu comme régulier, il faut avoir travaillé 800 heures dans la dernière année ou 2,400 heures dans les trois dernières années. Si les travailleurs ont moins d'heures que ça, ils sont classés temporaires. Effectivement, a notre connaissance, il n'y a personne qui a les informations suffisantes pour déterminer le nombre d'heures des travailleurs.

Etant donné que le comité conjoint de Montréal a été inopérant pendant une période de six ou sept mois l'année dernière et d'un mois ou un mois et demi cette année, le trou d'informations que nous retrouvons à cet endroit-là, pour nous, rend ce système inapplicable parce que n'importe quel individu ou groupe d'individus se sentant désavantagé par la division des travailleurs en catégories pourrait contester l'application de ce système qui deviendrait en fin de compte inopérant par suite d'un manque d'informations, de bases sérieuses de travail.

M. LE PRESIDENT: Le député de Chicoutimi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je voudrais poser une question à M. Gravel. Dans la dernière page de son mémoire, au dernier paragraphe, il dit ceci: « Par ailleurs, soyez persuadés que nous espérons avec impatience le jour où nous pourrons voir à nos affaires nous-mêmes ». Qu'est-ce que veut dire exactement ce « nous pourrons voir à nos affaires nous-mêmes »? Qu'est-ce que cela signifie en termes de relations avec la centrale dont vous faites partie?

M. GRAVEL: Dans cette phrase, nous avons voulu souligner le fait qu'a notre sens il n'est pas normal que ce soit une commission parlementaire, que ce soit le gouvernement qui tranche une négociation entre les parties syndicales et la partie patronale. C'est ce que nous avons voulu souligner et nous espérons de tout coeur, de grand coeur, revenir à des négociations directes avec nos patrons.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Merci.

M. LE PRESIDENT: Y aurait-il d'autres questions de la part des membres de la commission? Non?

Merci, M. Gravel de ces explications.

J'inviterais donc M. Yves Brunet...

Catalytic et Vickers

M. BRUNET: Yves Brunet, avocat du bureau Ogilvy-Cope, de Montréal; je représente Catalytic Entreprises limitée et Canadian Vickers limitée.

M. LE PRESIDENT: Le député de Bagot.

M. CARDINAL: Le rapport écrit que vous aviez l'intention de présenter?..

M. BRUNEI": Les rapports écrits, M. Cardinal, ont déjà été soumis à la fois par Canadian Vickers et par Catalytic Entreprises limitée. Ils ont été envoyés au ministre du Travail.

M. LAPORTE: On va d'abord débrouiller cela si vous permettez.

M. LE PRESIDENT: Si M. Brunet veut attendre un petit instant, on va essayer de déblayer.

M. CARDINAL: Ma question à M. Brunet est la suivante. Il avait été convenu, à la première séance de cette commission permanente, que tous les rapports qui seraient présentés — je pense que vous n'étiez pas présent — passeraient par une seule voie, qui serait la voie du secrétariat de la commission, de façon que les députés soient informés, en même temps qu'il n'y ait pas de réponses d'une partie par rapport à une autre. Cela n'est pas un blâme à votre égard, mais une demande d'éclaircissement pour les députés, parce que présentement...

M. BRUNET: Est-ce que je peux préciser certaines choses?

M. CARDINAL: Certainement.

M. BRUNET: Est-ce que j'ai la permission de parler?

M. LE PRESIDENT: C'est votre droit.

M. BRUNET: Merci. En ce qui concerne la convocation à la commission parlementaire de ce matin, nous avions, depuis fort longtemps déjà, soumis des mémoires, par écrit, aussi bien de la part de la Canadian Vickers que de celle de Catalytic Entreprises limitée. Nous avions reçu des accusés de réception, de même, et nous avons été convoqués à l'assemblée de ce matin, par pur hasard, hier, durant la journée; si bien qu'on a essayé de s'informer parce que, malheureusement, excusez notre ignorance, nous ne savions pas ce que M. Cardinal vient de nous mentionner, à savoir que nous devions soumettre, ce matin, une reprise, ou une réduction nouvelle, des mémoires que nous avions déjà soumis.

M. LAPORTE: Excusez. Ça va très bien, votre affaire, mais j'aimerais bien préciser certaines choses. Vous avez envoyé votre mémoire au ministère du Travail.

M. BRUNET: C'est ça.

M. LAPORTE: Le ministère du Travail était censé faire polycopier les documents puis les envoyer à tout le monde.

M. BRUNET: M. le ministre, si on avait su... Je suis prêt maintenant à donner ma place à un autre et à revenir à la fin de cette assemblée.

M. LAPORTE: La seule chose, vous n'avez pas de mémoire, ce n'est quand même pas un crime, mais je ne voudrais pas que ce soit le ministère du Travail qui soit responsable du fait que vous n'ayez pas de mémoire ce matin.

M. BRUNET: Non, mais M. le ministre, je pense qu'étant donné que nous avions soumis un rapport écrit et que vous avez demandé, ce matin, aux tiers, non partie des associations représentatives, de venir vous faire connaître, à la commission parlementaire, leur savoir et leurs dires quant au prochain décret de la construction, eh bien, nous, si nous avions su à l'avance qu'il fallait le soumettre... Je vois que plusieurs autres, ce matin, le savent déjà, nous, malheureusement, par défaut de communications, peut-être que ce défaut-là est de notre côté, je ne le mets d'aucun côté. Nous n'avons pas pu soumettre les mémoires en question, si bien que c'est pour cette raison, M. le ministre, que je vous demande s'il est possible de remettre à plus tard ce que j'ai à vous dire concernant le décret proposé. A ce moment-là, je pourrai arriver devant la commission parlementaire avec les documents dactylographiés et...

M. LAPORTE: Je pense bien que cette commission serait d'accord pour vous inviter à résumer votre mémoire et à vous demander d'avoir l'obligeance de nous le faire parvenir ensuite dans les meilleurs délais.

M. BRUNET: Parfait. J'ai entendu, dans les branches, que c'était cent copies, est-ce bien la situation? J'aimerais le savoir clairement, de manière à ce que je puisse agir en conséquence.

M. LE PRESIDENT: Vous êtes sur la bonne branche.

M. BRUNET: Merci, M. le Président. Maintenant que je suis branché sur la bonne branche, je vais vous faire valoir les commentaires que j'ai, ce matin, à présenter au nom de Catalytic Entreprises limitée et de Canadian Vickers. Vous connaissez sans aucun doute la Canadian Vickers mais vous ne la voyez pas venir faire des représentations dans le domaine de la construction. Les représentants...

M. LE PRESIDENT: On la voit de moins en moins,

M. BRUNET: Merci, M. Bossé, c'est ça! Mais il demeure quand même que l'élargissement du décret, tel que présenté, nous a justement présenté certains problèmes dans la définition du mot « construction ». Je vais vous dire immédiatement que le but de nos remarques, aussi bien en ce qui concerne Catalytic que Canadian Vickers, se limite strictement au champ d'application industriel, la base centrale de l'argumentation étant une industrie de l'entretien industriel. Ce mot-là, pour certains, peut paraître nouveau parce que, dans la province de Québec, l'entretien industriel, comme entreprise séparée de l'entreprise qui fait ses propres produits, est assez nouveau.

Mais dans le monde, aussi bien aux Etats-Unis que dans les autres provinces, ce n'est pas une situation nouvelle. J'aimerais définir brièvement ce qu'est une industrie de l'entretien industriel. L'industrie en question se rapporte à l'entretien de l'équipement mécanique et autre qui se trouvent à l'Intérieur d'une industrie. Si on prend un exemple, le cas de la Canadian Vickers — malheureusement, il faut mentionner des noms — mais dans une raffinerie d'huile, on fait l'entretien de l'équipement et non pas de la construction.

Ces services qui sont rendus ne sont pas des services de construction, mais des services d'entretien généraux. Ces services ont été rendus nécessaires avec le temps, à cause de la qualité et des exigences de l'équipement qui est dans ces industries. Précédemment — vous le savez fort bien — les entreprises faisaient leur propre entretien industriel de leur propre machinerie. Il est arrivé un moment où la croissance dans les difficultés des machines et leur complexité ont rendu nécessaire la formation d'une nouvelle industrie, c'est-à-dire l'industrie de service, un service particulier, l'entretien industriel.

Ce sont pour des raisons de qualité et aussi des raisons de moindres coûts que cette industrie a été formée. Elle existe au Québec depuis 1963. Il y a environ six compagnies dont je n'ai, malheureusement, pas tous les noms, mais les deux compagnies que je représente devant vous, ce matin, sont membres de cette nouvelle industrie de service.

Je tiens à vous faire remarquer, en passant, que cette industrie emploie au Québec entre 500 et 1000 employés à l'heure actuelle, et c'est une industrie qui est appelée à se développer à mesure que la complexité de l'équipement grandit.

A l'heure actuelle, les raisons de notre comparution devant vous sont simples. Lorsqu'on lit le bill 290, que vous connaissez sans aucun doute par coeur, — étant donné mon absence de présomption, je lirai quand même l'article...

M. LE PRESIDENT: Vous ne le connaissez pas par coeur?

M. BRUNET: C'est pour éviter, M. Bossé, qu'on puisse me dire que fais dire au texte des choses qu'il ne dit pas.

M. DEMERS: C'est une sage précaution. M. BRUNET: Merci.

M. LAPORTE: Vous réussirez peut-être cela quand même.

M. BRUNET: M. le ministre Laporte, je pense que cela arrive de temps à autre dans notre profession.

M.LAPORTE: C'est vrai.

M. BRUNET: D'ailleurs, on se fait accuser par d'autres représentants, ici, de se faire des choses comme celle-là.

Dans le bill 290, chapitre 45, je vous référerai à l'article 1-e) où on définit les travaux de construction. On dit: « Les travaux de construction sont les travaux de fondation, d'érection, d'entretien — j'attire particulièrement votre attention sur celui-là — de rénovation, de réparation, de modification et de démolition de bâtiments et d'ouvrages de génie civil exécutés sur les lieux mêmes du chantier et à pied d'oeuvre... » Etant donné que je ne suis pas spécialiste dans le domaine, j'ai lu le texte anglais pour savoir ce que signifiait « à pied d'oeuvre », c'est « dans l'entourage », « in vicinity ». Je continue: « ... y compris les travaux préalables d'aménagement du sol. » Donc, c'est la définition qu'on donne au mot « construction », et le bill 290 porte là-dessus.

A l'article 1-r) dans ce même bill 290, on définit, en tenant bien compte de la signification du mot « construction » que l'on vient de définir, « le salarié permanent d'entretien». C'est « tout salarié préposé habituellement à des travaux d'entretien de bâtiments ou d'ouvrages de génie civil ». Et je vous fais grâce de la suite. Je lirai le dernier article que j'ai à vous citer, dans le bill 290, c'est-à-dire l'article 2: « La présente loi s'applique aux

employeurs et aux salariés de l'Industrie de la construction; toutefois, elle ne s'applique pas aux exploitations agricoles ni aux salariés permanents d'entretien embauchés directement par un employeur autre qu'un employeur professionnel. »

Le but du décret, à notre humble avis, est de couvrir des travaux de construction tels que définis à l'article 1 -e). Et lorsqu'on parle d'entretien dans cette définition de l'article 1-e) et que par suite on en parle à l'article 1-r) et à l'article 2, on n'a pas voulu, aussi bien à l'article 1 -r) qu'à l'article 2, élargir par le fait même le sens donné au mot « construction » dans l'article 1-e), c'est-à-dire toujours exécuté sur le lieu du chantier et à pied d'oeuvre, c'est-à-dire dans les alentours.

C'est ma première remarque pour maintenant vous amener à ces précieux documents que j'ai lus avec plaisir et qui s'appellent les documents 69, 70 et 71. Je vais en particulier attirer votre attention — nécessairement, c'est mon point — sur le champ d'application ou de juridiction industrielle. Pour ce qui est de ce champ d'application industrielle, dans le document 71, proposition syndicale, l'article 1.02, on définit le chantier de construction comme étant « le lieu où s'effectue tout travail régi par la convention ». Et, par la suite, on définit à l'article 5.00 tout le champ d'application. Lecture éminemment difficile à faire dans les onze pages de nomenclature sans fin qu'on trouve dans cet article. Et tout particulièrement l'article 5.04 où on lit enfin dans la proposition syndicale que « ces travaux du présent article sont couverts — et j'attire votre attention là-dessus — qu'ils soient exécutés sur chantier ou en atelier. Cependant, le travail de production en série exécuté dans les boutiques, usines et fabriques n'est pas couvert ». Or, immédiatement à la vue de cet article 5.00, généralement — parce que si j'entrais dans le détail de chacun des paragraphes je pourrais vous tenir longtemps et je ne pense pas que ce soit le but — 1e voudrais vous démontrer, par ce paragraphe 5.04, qu'on se trouve immédiatement à étendre la juridiction industrielle du décret.

On me répondra que, dans les anciens décrets, avant que le bill 290 ne devienne loi, cela existait. Je suis bien d'accord là-dessus; je ne le contesterai pas. Cependant, le bill 290 régit l'industrie de la construction et non pas les travaux exécutés en atelier. D'ailleurs, il exclut expressément par l'article 1-e) les travaux qui sont exécutés hors du chantier ou dans ses alentours, puisqu'il faut procéder à contrario à partir de cet article 1-e.

Ici, avant de quitter cette proposition syndi- cale, je tiens simplement à faire remarquer d'abord à la commission parlementaire mon doute profond quant à l'article 5.00 qui énumère des choses. On ne sait plus où on s'en va lorsqu'on le lit. Je pense que, si on veut couvrir toutes les situations, justement on s'adonne à couvrir — et là j'arrive à mon point — l'entretien industriel d'où je suis parti tout à l'heure.

Je vais vous faire le lien immédiatement, mais je fais d'abord une parenthèse sur l'article 1.02. On définit le chantier, — je vous l'ai dit tout à l'heure — comme étant le lieu où s'effectue tout travail régi par la convention collective. Or, ce travail régi par la convention collective, on le définit comme étant un travail de construction exécuté sur le chantier de construction. Je ne sais pas si je parle trop vite, mais vous voyez un peu qu'on fait une comparaison entre un élément et un autre et qu'on les définit l'un par l'autre dans le même document sans préciser ce que cela veut dire. Cela arrive justement à la solution à laquelle on est arrivé dans l'extension du champ d'application industrielle, c'est-à-dire à couvrir l'industrie de l'entretien industriel.

J'arrive donc à mon point, qui est le point final, après vous avoir introduits dans l'industrie qu'on appelle l'entretien industriel dans ce bill 290, avec les projets qui sont ici, et je vous soumets — c'est ma soumission au nom des deux compagnies que je représente ce matin — que ce décret devrait exclure expressément les travaux d'entretien industriel. Je pense en effet que personne ne contestera que le décret qui va être adopté, même si c'est à la suite d'une loi d'exception qui s'appelle le bill 38, il demeure que ce doit être dans le champ d'application industrielle du bill 290 et non pas quelque chose d'autre.

Précédemment, on n'avait que la loi des décrets de convention collective. On faisait des décrets par rapport à cette loi et, les parties ou les associations représentatives établissaient leur propre lit, c'est-à-dire qu'on établissait ceci et l'industrie dont nous sommes les parties représentatives.

Or, le bill 290 est un bill qui porte sur une industrie en particulier et non pas sur toutes les industries qui peuvent être connexes, parallèles, disons, qui peuvent former tout un grand contour. Si on voulait couvrir ici toute la table par le bill 290, on se trouve, par le décret, à couvrir toute l'assemblée qui est ici. Je dis donc que c'est une prolongation qui est — soumettons-le respectueusement — sans aucun doute, ultra vires, en dehors de l'application du bill 290.

Maintenant que j'étudie ce sujet-là, il faut

peut-être préciser un peu, pour la commission parlementaire, que les conditions de travail sont différentes dans l'industrie de l'entretien industriel par rapport à l'industrie de la construction. D'abord, comme j'ai mentionné au tout départ, il est bien clair que l'industrie de la construction n'est pas une industrie de service dans le sens où on l'entend normalement. C'est-à-dire que l'industrie d'entretien industriel vient rendre un service, une fois terminée, la construction d'une usine, c'est-à-dire au moment où l'usine a commencé à fonctionner. A ce moment-là, on entretient l'équipement de l'employeur.

M. LE PRESIDENT: Un instant, je vais vous aider, un peu de silence, s'il vous plaît, pour permettre à M. Brunet de finir son exposé.

M. BRUNET: Merci, M. le Président, il semble qu'on ne veuille pas m'écouter avec un bien vif désir. Je vais parler encore plus fort.

M. LE PRESIDENT: Vous auriez peut-être intérêt à abréger,

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'aimerais faire une observation, si vous me le permettez, et demander à M. Brunet de nous donner une description exacte de ce qu'est cette industrie de l'entretien. Jusqu'à présent, — j'estime avoir une intelligence moyenne — j'avoue ne pas avoir saisi exactement ce qui différencie cette industrie de l'entretien. Est-ce que vous faites de la construction ou si vous n'en faites pas? Expliquez-nous cela d'une façon rapide pour qu'on saisisse, en nous donnant un exemple.

M. BRUNET: Eh bien, l'industrie de l'entretien, j'allais justement, monsieur... j'ai failli vous appeler M. le ministre...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Merci.

M. LAPORTE: Faites-le, cela leur faitplai-sir, et cela ne change rien.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Allez-y, allez-y, c'est une anticipation.

M. PAUL: C'est parce que vous parlez d'expérience!

M. BRUNET: Merci.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous vous recyclez tranquillement.

M. CADIEUX: Votre affaire allait bien, ne la gâtez pas.

M. BRUNET: Je m'appliquais justement à faire comprendre ce que j'ai qualifié d'industrie de service par rapport à industrie de construction et entrer dans le détail de ce qu'est l'industrie d'entretien industriel. Vous avez la construction d'une usine, je parle particulièrement ici d'usines chimiques et d'usines de produits huiliers. La Compagnie Catalytic Entreprises s'occupe spécialement dans la province de Québec d'usines qui font des produits chimiques et le Canadian Vickers s'occupe des industries de produits huiliers.

Une fois que — l'installation, c'est de la construction — toute l'usine est construite, que tout l'équipement est installé, normalement, comme je l'ai dit au départ, le propriétaire de l'entreprise entretiendrait son propre équipement à son compte, par son employé. Qu'est-ce qu'entretien veut dire? Eh bien, ça veut dire huiler, réparer, etc. Comme je l'ai dit au départ, étant donné la complexité des machines qui se trouvent à ces endroits, une industrie de service s'est créée, une industrie hautement spécialisée, qui engage des hommes de métier, spécialisés dans l'entretien d'équipement chimique. C'est très particulier, et, à ce moment-là, — c'est l'industrie dont je vous parle — ils font, en fait, ce que l'employeur faisait précédemment lui-même. Or, l'employeur n'a jamais, lorsqu'il faisait son propre travail d'entretien industriel, été couvert par un décret de construction. Personne n'aurait pensé à cela, et personne n'oserait d'ailleurs dire que cela en est. Mais, le jour où cela devient une industrie séparée et que cela se développe — à l'heure actuelle, depuis 1963, comme je vous l'ai dit, on est rendu à peu près à 1,000 employés dans l'industrie — à ce moment-là, puisque c'est une industrie indépendante, on veut, par le biais de l'article 5 des propositions du décret, couvrir cette industris-là. Si on lit toute cette nomenclature, — moi aussi, je suis d'intelligence moyenne, j'ose l'espérer — je ne suis pas capable de deviner si cela l'est ou ne l'est pas, parce que, quand on énumère une suite de mots, on se trouve finalement à se demander où on s'en va et c'est en plein le cas.

M. CARDINAL: M. le Président, si vous me le permettez, je voudrais apporter une précision de plus. Les employés de cette industrie de service qui ont remplacé les employés permanents de l'industrie principale, si on peut ainsi l'appeler, sont membres de quel syndicat présentement?

M. BRUNET: Je vais vous dire ça immédiatement.

M. CARDINAL: Y en a-t-il plusieurs ou un seulement?

M. BRUNET: Cela dépend. Ecoutez, ils sont syndiqués par usine. Nécessairement, ils peuvent être indépendants les uns des autres et il peut y avoir, en principe, plusieurs syndicats qui les représentent, parce que ces employés-lâ sont ni plus ni moins les employés de l'industrie de service. Ils forment une unité de négociation par eux-mêmes et sont représentés par des syndicats.

M. CARDINAL: Je vais préciser ma question.

M. BRUNET: Vous voulez avoir le nom exact, je vais vous le donner.

M. CARDINAL: Ce ne sont pas les noms exacts. Si vous me le permettez, je vais poser la question autrement.

M. BRUNET: Oui.

M. CARDINAL: Est-ce que ces unités syndicales-là font partie des unités syndicales de la construction?

M. BRUNET: Cela peut arriver. M. CARDINAL: Bon, très bien.

M. BRUNET: Pour répondre à la question de M. Cardinal, il ne faut pas oublier que le bill 290, c'est quand même quelque chose de nouveau. Je vais vous donner l'exemple d'un endroit où j'ai eu le plaisir de négocier. Dans la même industrie, comme il arrive très souvent dans l'industrie de la construction, vous avez, d'autre part, ceux qui sont soumis au bill 290 et, d'autre part, ceux qui demeurent sur le chantier pour extraire de la roche et tout ça. Par cette aile qui les rattache à la construction — j'entends leur bras du côté du bill 290 — ils sont couverts et font partie des associations représentatives syndicales, mais il n'empêche que, de l'autre côté de la barrière, ces mêmes syndicats-là représentent des employés qui sont accrédités au sens du code du travail et qui possèdent un certificat d'accréditation.

M. CARDINAL: Si vous me le permettez, ce n'est pas pour vous harceler...

M. BRUNET: Non, non, allez-y, cela me fait plaisir.

M. CARDINAL: ... mais pour comprendre vraiment. Quand vous dites: Il peut arriver que certains de ces employés fassent partie d'une unité syndicale qui tombe sous ce qu'on appelle la construction — on sait que, dans ce do-maine-là, ces unités sont nombreuses — dites-vous « il peut arriver » parce que vous ne savez pas exactement si ça arrive ou si c'est parce que c'est déjà arrivé ou parce que ça pourrait arriver?

M. BRUNET: Je parle au présent, mais je pense aussi parler pour l'avenir. Donc, âl'heu-re actuelle, il y a certaines unités de négociation qui sont déjà accréditées au sens du code du travail depuis 1967 et qui appartiennent à des syndicats. En 1967, eh bien, étant donné que le bill 290 n'existait pas, ces syndicats-là faisaient partie, de ce qu'on appelle aujourd'hui des associations représentatives syndicales. D'autre part, je dis que, dans l'avenir, il se pourrait très bien que ça ne soit pas le cas. C'est pour ça que je réponds à votre question en disant qu'actuellement il y a certaines unités de négociations qui sont accréditées et que les syndicats sont membres d'associations représentatives syndicales.

Toutefois, il faut bien s'entendre là-dessus, il demeure que ce sont des hommes de métiers spécialisés, mais, à l'intérieur de n'importe quelle entreprise, vous avez des — excusez le mot anglais; je ne trouve pas le mot français — « pipe-fitters ». Vous en avez dans la construction, mais vous en avez à plein dans l'industrie.

M. CARDINAL: Si vous me permettez une dernière intervention, je pense que le ministre du Travail verra immédiatement où je veux en venir. Votre situation est différente de celle de la ville de Montréal tantôt où ce sont des employés permanents. Laissons de côté la question des cinq mois et demi ou de six mois. Il s'agit là d'une industrie ancillaire de service qui peut être répartie entre diverses sociétés ou diverses compagnies...

M. BRUNET: C'est ça.

M. CARDINAL: ... et dont les membres peuvent faire partie de diverses cellules syndicales. Le problème pour le gouvernement, s'il préparait un décret — ce que personne d'entre nous, dans le fond, ne souhaite; tant

mieux s'il y avait entente avant — serait de faire des distinctions à partir de la thèse que vous présentez ou à partir de la réalité syndicale. Je ne sais pas si le ministre du Travail...

M. BRUNET: M. Cardinal, s'il fallait partir de la réalité syndicale, on pourrait englober à peu près n'importe quelle industrie, parce que ça dépend de la constitution interne d'un syndicat. J'ai vu des syndicats de fonctionnaires de la province de Québec représenter des employés de l'industrie privée. Ma première objection en tant qu'avocat au niveau de l'accréditation a été nécessairement: Eh bien, je doute que vous n'ayez les pouvoirs. On m'a répondu: Notre constitution nous permet de représenter aussi bien les fonctionnaires que les employés d'une entreprise ordinaire. Si bien que si dans votre question au ministre, vous partez de ce que vous appelez la réalité syndicale, à ce moment-là, ça veut dire que vous faites fi complètement de la loi de base qui s'appelle le bill 290.

M. CARDINAL: Pardon, si c'est ce que vous comprenez, j'ai été mal interprété. Ce que je veux dire, c'est que le critère de distinction qu'il pourrait y avoir dans un nouveau décret pourrait être fondé sur l'une ou l'autre des choses. Je ne me suis pas prononcé sur le fond de la question. Il y a des situations...

M. BRUNET: Je me suis prononcé.

M. CARDINAL: ... oui, évidemment, vous...

M. BRUNET: J'ai soumis, respectueusement, à la commission parlementaire...

M. CARDINAL: ... c'est votre devoir de le faire. Ce n'est pas la première fois que nous avons des situations aussi farfelues. Il existait autrefois au Parlement du Québec une loi rendant obligatoire l'enregistrement des volumes, de quelque nature que ce soit, et cela se faisait au ministère de l'Agriculture.

M. BRUNET: Comme conclusion — je ne voudrais quand même pas prendre le temps de votre commission, quoique j'estime que le problème que je vous soumets est d'une importance capitale. J'ai, ce matin, représenté deux compagnies, mais je pense que, pour le bien-être du décret, c'est-à-dire son avenir intra vires, les remarques que j'ai à vous faire sont importantes. Je complète brièvement en vous donnant un exemple qui concrétise un peu ma pensée dans le domaine du bill 290.

J'ai dit tout à l'heure que, dans le cas de l'employeur qui recourt à ses propres employés pour faire l'entretien de son équipement, personne n'a douté que cet employeur était dans l'industrie de la construction. Quand cela devient une industrie de service, à ce moment-là on se dit: Là, il y a un doute.

Je vais vous donner un exemple que je viens de vivre auprès de votre ministère. C'est l'exemple du décret du camionnage de la région de Montréal. C'est très semblable au cas que je vous expose. Jusqu'à récemment, il y avait, couverte dans le décret du camionnage, une industrie qui s'appelait l'industrie de la location, même si les employeurs louaient des camions pour transporter leur propre marchandise. Je ne veux faire de publicité pour qui que ce soit, mais prenons un magasin bien connu de Montréal ou de Québec qui, au lieu d'acheter ses propres camions, les louait à un tiers pour transporter sa propre marchandise. Jusqu'à récemment, on a eu l'idée que l'employeur qui achetait ses camions n'était pas découvert par le décret du camionnage. Mais l'employeur qui louait — parce que, là encore, c'est une industrie de service — à la compagnie de location ses camions pour transporter sa propre marchandise, se trouvait à ce moment-là, pour ses employés seulement, couvert par le décret du camionnage.

C'est ici la même chose. Je vous l'ai dit tout à l'heure, j'ai des doutes quant à l'article 5, parce que c'est si long qu'on ne peut rien voir, on ne couvre pas, d'une part, l'employeur qui fait son propre entretien, mais quand il s'agit d'une industrie de service, on le couvre.

Le résultat du décret du camionnage a été récemment à l'effet de mettre de la clarté dans cette affaire-là et d'éliminer toute location parce que, sur la base suivante, selon le bill 290, si le décret du camionnage s'adresse au camionnage, c'est-à-dire le transport pour autrui moyennant rémunération, la construction s'applique à la construction et non pas à quelque chose d'autre, même si c'est connexe. A ce moment-là, en effet tout est connexe à l'édification d'un édifice, parce qu'on y travaille dedans une fois qu'elle est faite.

Je soumets respectueusement que, pour fins de clarté, au moins dans le décret — parce que nos représentations s'adressent aussi au bill 290 — il faudrait exclure expressément du champ d'application industrielle les entreprises ou les travaux d'entretien industriel.

Comment définir les travaux d'entretien industriel? Puisqu'on parle de construction, — je pense que, dans un domaine aussi difficile, il est préférable d'aller par négation, quoique cela

ne clarifie pas la situation, mais l'article 5 ne clarifie rien non plus par sa nomenclature — ce seraient des travaux d'entretien autres que des travaux d'entretien faits pendant une construction. Je pense en effet que, tout le monde s'imagine bien ce que c'est qu'un chantier de construction. Si quelqu'un peut s'imaginer que si une compagnie fait l'entretien de son propre matériel, à l'intérieur, par un service extérieur, c'est de la construction, et bien, je soumets que c'est complètement en dehors du champ d'application du décret. Je soumets aussi que, pour fins de clarification et pour empêcher le décret de se trouver en dehors des cadres du bill 290, il faudrait avoir cette précision-là dans le décret.

Les représentations que j'ai soumises ce matin, comme je vous l'ai dit au départ, sont à la fois pour Catalytic Entreprises et Canadian Vickers, qui sont toutes les deux dans la même situation quant à une partie de leur ouvrage, c'est-à-dire le service d'entretien industriel.

Si ces messieurs ont des questions, je suis prêt à y répondre avec plaisir.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Brunet. Les membres de la commission ou des députés présents ont-ils des questions? Le député de Bagot.

M. CARDINAL: Ce n'est pas une question. Il y a, dans l'exposé de Me Brunet, qui a été fort convaincant, une chose que je n'accepte quand même pas pour des raisons de purisme, même si je ne suis pas le ministre des Affaires culturelles.

M. BRUNET: Pour des raisons de...

M. CARDINAL: De purisme ou de sémantique. « A pied d'oeuvre », cela me paraît impossible que ce soit traduit par « in the vicinity ». Enfin, il me semble que, selon le génie de la langue française, c'est quand on parle du début; ce serait « from the rock-bottom», si vous voulez, ou quelque chose du genre. Si la loi est ainsi traduite, je pense bien qu'il y a une coquille ou une erreur qui ne nous permet pas d'interpréter le texte français par le texte anglais.

M. BRUNET: Ecoutez, je n'ai pas lu les clauses d'interprétation, à la fin.

M. CARDINAL: Ah non, je ne vous demande pas de recommencer tout ça.

M. BRUNET: Non, non. Mais je pense que les clauses...

M. CARDINAL: J'aimerais apporter cette précision, parce que ça me paraît brouiller la clarté de vos explications. Je ne voudrais pas revenir sur la question. Je voudrais simplement que, pour les fins des travaux de la commission, l'on n'accepte pas cette traduction comme étant nécessairement une traduction...

M. BRUNET: Est-ce que je serais obligé... M. CARDINAL: ... fidèle.

M. BRUNET: ... de me mettre à douter des traductions?

M. CARDINAL: Oui.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, oui.

M. LAPORTE: Vous devez douter d'autant plus des traductions que, si par hasard la traduction anglaise n'est pas conforme au texte français, c'est le texte français qui a préséance.

M. BRUNET: C'est très bien.

Etant donné que « à pied d'oeuvre » est une expression du métier, je pense, je croyais que le traducteur, pour le moins, avait suivi, sinon le mot véritable, du moins le sens qu'on a voulu donner à « à pied-d'oeuvre ». Je me ferai un plaisir d'étudier longuement le sens de « à pied d'oeuvre » pour la commission. Je l'étudierai très bientôt. Je ferai parvenir les documents.

M. LAPORTE: Me Brunet, je pense que, fondamentalement, la thèse que vous nous avez présentée ce matin est: Est-ce que l'entretien, c'est de la construction? Si c'est de la construction, dites vous, ceci devrait normalement être partie au décret. Mais comme à votre avis l'entretien n'est pas de la construction, ceci ne devrait pas être inclus dans le décret.

M. BRUNET: M. le ministre,...

M. LAPORTE: Et que ce soit dit très clairement, suggérez-vous.

M. BRUNET: ... j'ai tout simplement une dernière remarque à faire. Je ne prétends pas que l'entretien exécuté sur les chantiers de construction, tel que défini au sens...

M. LAPORTE: Cela, d'accord.

M. BRUNET: ... de 1-e), n'est pas couvert par le décret.

M. LAPORTE: C'est clair.

M. BRUNET: Je prétends que l'entretien qui n'est pas exécuté sur les chantiers de construction n'est pas expressément couvert par le décret.

M. LAPORTE: Disons que c'est une des décisions qui devront être prises. Mais, je voudrais vous faire remarquer combien ce n'est pas facile. Vous représentez un client, vous l'avez fait avec beaucoup de talent et de conviction, mais ce n'est pas aussi simple.

M. BRUNET: Je le sais, M. le ministre.

M. LAPORTE: Puis-je vous faire remarquer que récemment nous avons eu, et ce n'est pas tout à fait réglé encore, à résoudre un problème. A l'intérieur de l'usine, à cause de transformations qui arrivent à tous les ans dans ce genre d'usine, il y avait des travaux de construction à faire. Or, les ouvriers de la construction se sont adressés au patron pour dire: Si nous ne faisons pas ces travaux de construction, nous allons piqueter l'usine, faire une grève. Et les ouvriers qui étaient à l'intérieur ont dit: Si vous acceptez les ouvriers de la construction, c'est nous qui faisons la grève.

M. BRUNET: C'est pour cela que ce matin, M. le ministre, je suis venu prétendre qu'il y avait des clarifications à y mettre, parce que...

M. LAPORTE: Oui.

M. BRUNET: ... justement, lors des problèmes qui se sont présentés au cours des mois de mai et juin 1970, dans les entreprises qui me concernent, les employés se sont mis en grève en même temps que les autres, prétendant qu'ils étaient couverts par l'industrie de la construction, au sens du bill 290.

Plus tard, lorsque l'avantage a été de l'autre côté, on a prétendu que c'était plutôt la convention...

M. LAPORTE: Autre question... M. BRUNET: ... que le bill 290.

M. LAPORTE: ... que nous devrons nous poser, Me Brunet: Est-ce qu'il y a une différence entre la compagnie...

M. BRUNET: Catalytic etCanadianVickers? M. LAPORTE: Est-ce qu'il y a une différence entre la compagnie X qui, avec son propre personnel, ses propres employés, fait ses travaux d'entretien et vos deux sociétés qui se sont incorporées partiellement pour faire de l'entretien à profit? Est-ce qu'il y a une différence entre les deux, à votre avis?

M. BRUNET: A mon avis, aucune, parce que...

M. LAPORTE: Aucune différence.

M. BRUNET: ... ce qu'on regarde, M. le ministre, je le soumets respectueusement, ce n'est pas si c'est à profit ou si c'est pour soi ou pour autrui qu'on le fait, mais bien le sens que l'on donne à la loi, c'est-à-dire: Est-ce de la construction ou pas?

M. LAPORTE: Bien oui, tout le problème se ramène à ça, évidemment.

M. BRUNET: M. le ministre, j'ai donné l'exemple du décret ducamionnage, tout simplement pour expliciter cette même question. C'est-à-dire que la question centrale est que ce n'est pas de la construction, soumettons-nous, de la même façon que la location n'était pas du camionnage, même si cette location était faite à des personnes qui transportaient leur propre marchandise.

Parce qu'on l'appelle camionnage, cela se détruit peut-être, j'ose l'admettre, beaucoup plus facilement que la construction, mais je ne pense pas, par ailleurs, que l'article 5 tel qu'il apparaît au document parlementaire 70, proposition syndicale, et même proposition patronale — parce que je l'ai lu — soit très convaincant. Eh bien, on élargit, sans aucun doute, le champ d'application industrielle pour couvrir ce qui n'est pas de la construction, si bien que la question que je pose, que je soumets — je propose ma solution, nécessairement, je suis ici pour proposer certaines choses à votre attention — est que cet entretien industriel n'est pas de la construction. Que cela soit fait par l'employeur ou par un tiers, cela ne change pas l'aspect du problème.

M. TREMBLAY: (Chicoutimi): Vous nous obligez à prendre le problème à pied d'oeuvre.

M. LE PRESIDENT: Le député de Bagot.

M. CARDINAL: M. le Président, ce n'est pas une question à M. Brunet. C'est une réponse à la suite de l'intervention du ministre du Travail. Il restera quand même, M. le Ministre, je pense, deux questions.

Nous avons eu le cas, tantôt, de la ville de Montréal qui a ses propres employés d'entretien. Nous avons le cas, maintenant, d'une société séparée de la société mère qui, à profit, fait dos travaux dits d'entretien. Même si le gouvernement réussit à distinguer ce qui est construction et entretien, il restera quand même cette différence entre les employés d'une maison qui fait son propre entretien ou sa propre construction et les compagnies séparées comme dans le cas du camionnage. C'est-à-dire que je pense qu'on ne peut pas dire qu'il n'y a qu'une seule question. Les deux questions se poseront.

M. LE PRESIDENT: Merci. Est-ce qu'il y aurait d'autres questions de la part des membres de la commission ou d'autres intervenants? Vous avez une question?

M. DESJARDINS: Permettez-moi de me présenter: André Desjardins, directeur, entre autres, et en même temps...

M. LE PRESIDENT: Vous vous représentez.

M. DESJARDINS: ... tel que M. Degré l'a dit, spécialiste « pipe-fitter » ayant travaillé pour la Canadian Vickers pendant quatre ans à son usine d'entretien. Par contre, je n'ai pas pu remplir ma fonction pendant quatre ans à l'entretien, étant donné que souvent, on me transférait à la construction pour la Canadian Vickers. Je revenais à l'emploi de la Canadian Vickers à l'usine de construction de temps en temps... Il peut le voir, même, à l'emploi de ses hommes; mon numéro de sécurité sociale est 202 809 331.

UNE VOIX: M. Villeneuve, de la Canadian Vickers, vous reconnaît.

M. DESJARDINS: Il dit justement que M. Villeneuve, de la Canadian Vickers, me reconnaît.

En ce temps-là, lorsque j'étais à l'emploi de la Canadian Vickers, souvent il est arrivé de la construction neuve à l'usine de B.P. Refinery. Alors, on demandait un prix à beaucoup de compagnies, dont la Canadian Vickers, qui était sur place. Elle soumettait un prix et me disait : André, à partir de demain matin, avec trois autres hommes, tu n'es plus sur l'équipe telle et telle de l'entretien; tu travailles pour la construction. On faisait des lignes neuves à l'intérieur de la B.P. Refinery, à pied d'oeuvre ou à une « facilité », comme vous voulez l'entendre.

Nous avions, en même temps, des gars qui prenaient de l'âge. C'est pour cela que les compagnies ont commencé à engager des gars de la construction. Parce que des gars de 50 ans, 55 ans ou 60 ans, ce n'est pas trop vieux pour l'entretien, mais pour la construction, au froid, vu que c'est dehors et qu'ils ne peuvent plus monter haut, elles les remplacent par des jeunes. Voilà l'avantage pour les compagnies B.P, Shawinigan Chemicals, tout cela; voilà pourquoi elles emploient maintenant des gars de la construction. Elles ne sont plus obligées de garder à leur emploi ces gars qui, parfois, ne sont plus capables de bouger. Il y a également, toujours, à toutes les années, ce qu'on appelle des « shut down ». L'usine est complètement fermée et on remplace tous les conduits, on nettoie tous les conduits concernant la même raffinerie. Et dans ce temps-là, la Canadian Vickers, justement au mois de mai, avait à l'entretien au moins environ 300 ou 400 hommes de plus que ses hommes d'entretien, et s'il veut savoir si ces gars appartiennent à un syndicat plus qu'à un autre, eh bien, il y en a aucun qui n'appartient pas à un syndicat de la construction depuis 1931. Aucun dans tous ceux-là. Plus que cela, dernièrement, à la Shawinigan Chemicals, donc Catalytic que monsieur représente, il y a eu une explosion, trois hommes sont morts et on a eu pendant à peu près un mois et demi 400 ou 500 hommes de plus au travail. Et cela, on disait encore que c'était de l'entretien.

Alors, l'entretien, où arrête-t-il quand ces gars demeurent toujours au sein de la même compagnie, avec de l'ouvrage garanti? C'est impensable. Dernièrement, il y a un de mes membres, un monsieur Maranda — cela faisait un bout de temps qu'il était pour la compagnie — parce qu'il n'a pas voulu monter pas mal plus haut que les autres, la compagnie l'a remercié de ses services.

Je crois bien que, tant que c'est de l'entretien, si un gars n'est pas capable de monter très haut, bien, on devrait lui donner de l'ouvrage ailleurs, vu son ancienneté: Si vous croyez vraiment que ce n'est pas de l'entretien, je me demande quand et comment cela sera de l'entretien. N'oubliez pas, souvent, ils m'envoyaient à la Canadian Oil ou à la Shell Oil remplir des fonctions de « pipe-fitter » ou de « foreman », etc., pas toujours «foreman », je ne veux pas me vanter, mais, par contre, au sein de la Canadian Vickers, je faisais des travaux de construction, en dehors de la ville, à part ça. Alors, si la Canadian Vickers est une compagnie d'entretien seulement, je ne vois pas comment ces gars-là seraient couverts pour leurs fonds de pension, leur assurance-santé-salaire, etc, s'ils n'étaient pas, comme ils

l'ont toujours été, protégés par le décret de la construction. Merci beaucoup.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Desjardins.

M. BRUNET: Est-ce que vous me permettez de répondre très brièvement?

M. LE PRESIDENT: Oui, vous pouvez répondre brièvement. Maintenant, il ne faudrait pas commencer des marathons.

M. BRUNET: Non, cela va être, un, deux, trois, simplement.

M. LE PRESIDENT: Très bien.

M. BRUNET: D'abord, monsieur vient de parler des difficultés de savoir quand on passe de construction à non-construction. Je vous ai donné, tout à l'heure, l'exemple de l'entreprise qui prend une personne à l'intérieur pour travailler dans sa carrière et qui, un jour, l'envoie à l'extérieur travailler sur le chantier. A ce moment-là, elle se trouve à faire la même chose. C'est très connu de la part de nous tous, ici, que, lorsqu'un individu passe de la carrière au chantier de construction i l'extérieur, il passe d'un certificat d'accréditation sous le code du travail à des conditions de travail sous le bill 290. Donc, le problème ici est de savoir si, parce qu'on passe de l'un à l'autre, eh bien, on ne doit pas distinguer. Moi, je dis que non.

J'arrive immédiatement à mon deuxième point. Je demande à la commission parlementaire si le fait d'avoir des difficultés ou de problèmes à distinguer entre entretien et construction fait que la commission parlementaire et le gouvernement par la suite se doivent de dire: Etant donné le problème, je me ferme les yeux et j'inclus tout, moi, je soumets que non. Justement, si la commission parlementaire s'est réunie et s'il y a autant de représentants des tierces parties qui viennent vous faire des représentations, c'est précisément parce qu'en ne distinguant pas on finit par englober toutes sortes de choses. Je vous dis ici, ce matin, que, malgré les difficultés, il y a lieu de distinguer. Ce ne sont pas ces difficultés qui doivent arrêter la distinction. Il s'agit de difficultés que je connais bien. C'est tout, je n'ai pas d'autre remarque.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Brunet. Maintenant j'inviterais M. Ubald Desilets que, par inadvertance, j'ai omis d'appeler à son tour. Alors, si M. Desilets veut s'approcher.

Les entrepreneurs de travaux mécanisés

M. DESILETS: M. le Président, je représente l'Association des entrepreneurs de travaux mécanisés. Ce sont de petits entrepreneurs. L'association groupe 350 membres. Ces personnes vivent dans les centres ruraux principalement ou les très petits centres urbains. Leur représentation, ce matin, n'a pas l'intention d'attaquer en détail toutes les clauses qui restent en litige. De façon globale, nous sommes de la catégorie des employeurs. Nous adoptons le point de vue qu'ont défendu les associations représentatives. Nous voulons, cependant, soumettre des considérations sur deux points.

Le premier, très sommairement, c'est la parité salariale. Les entrepreneurs de travaux mécanisés s'opposent à la parité salariale dans la province pour la raison qu'il leur semble évident qu'il y a dans la province plusieurs marchés de travail différents. Il y a des régions économiques différents. Nos clients sont dans les régions pauvres. Les membres estiment qu'ils n'ont pas les moyens de payer, dans leur milieu, les mêmes salaires que dans les régions les plus riches.

M. PAUL: Vous n'avez pas la sécurité d'emploi.

M. DESILETS: Non. Nous n'avons pas la sécurité d'emploi pour les employés et nous ne l'avons pas pour nous, non plus. Nous avons le sentiment net que la parité salariale accroîtra l'insécurité d'emploi parce que plusieurs de nos travaux peuvent être faits par le client lui-même et qu'il cessera d'avoir recours à nos services. J'ai dit « généralement, » parce qu'il y a aussi cet aspect à considérer.

Les travaux que nous faisons se résument comme ceci: ce sont des travaux de drainage, d'ameublissement des fermes, de déneigement, d'excavation. Evidemment, ce sont des travaux qui sont demandés, payés et exécutés sur place. Nous ne pouvons pas les exporter dans des régions plus riches et obtenir un transfert de revenus. Une parité salariale nous acculera à une réalité plus dure; nos clients seront plus pauvres et nous aussi.

Quant au régime patronal qui est inséré dans la convention collective, il nous inquiète. D'abord, la fixation d'une cotisation patronale ne devrait pas être faite dans la convention collective. Il n'appartient pas aux centrales syndicales et à un certain groupe d'associations patronales, qui ne représentent pas, estimons-nous, la majorité des entrepreneurs de la pro-

vince, de convenir dans un contrat de la cotisation patronale.

Il n'appartient pas aux patrons, non plus, de fixer la cotisation des syndicats. Evidemment, sur le principe d'être cotisés, nous sommes d'accord. Les relations de travail sont une nécessité; c'est un service important et ça coûte de l'argent. Nous trouvons raisonnable que tous les entrepreneurs de la province soient cotisés. Il n'appartient pas à un petit groupe ou à un groupe plus ou moins étendu, soit les membres des associations patronales représentatives, de payer tout seul. Nous sommes d'accord pour payer, mais nous disons que ce que nous devons payer ne doit pas être fixé par la partie syndicale en accord avec un certain nombre d'associations patronales. Cela devrait être fixé dans la loi pour échapper à certaines fluctuations qui pourraient être intéressées, discriminatoires et abusives aussi. Cela pourrait être fixé dans la loi dans le décret, mais dans une clause qui relèverait de l'initiative et de la responsabilité du ministre du Travail.

Pour nous, cette cotisation a une fonction précise. Elle doit rendre un service, pas tous les services dont les entrepreneurs ont besoin. Les entrepreneurs qui se groupent en association le font pour plusieurs motifs. Il est possible de s'associer pour une seule raison, mais, généralement, les entrepreneurs se groupent en association pour défendre plusieurs intérêts: des intérêts économiques, des intérêts professionnels. Les relations de travail sont un intérêt. Il est important, mais ce n'est pas le seul. Nous ne devrions pas nous épuiser en contributions seulement pour celui-là. La contribution patronale, par conséquent, doit être payée par tout le monde, mais sa norme doit correspondre au coût des négociations et de l'application des conventions collectives. Pour ça, ça devrait être fixé dans la loi et par le ministre.

En outre, nous ne devrions payer qu'une seule cotisation, pas dix. Quand un entrepreneur creuse un trou, si dans le trou on érige un pilier, il faudrait payer à une des cinq; si c'est une maison, un solage, on paye à une autre des cinq; si c'est un édifice commercial, nous allons payer à une troisième des cinq. Nous estimons, M. le Président, que ça n'a pas de sens. Nous ne devrions payer qu'une seule cotisation patronale.

Cette cotisation devrait être minimale et elle doit être distinguée de l'adhésion. Je' le dis parce que j'ai lu sommairement les mémoires. Chacune des cinq se tranche un champ de juridiction. Il y en a même qui appellent ça le gâteau.

C'est sûr que c'est un gâteau parce que depuis un an et demi tous les entrepreneurs de la province, y compris nos membres, ont été sollicités par tout le monde en disant: Nous avons le privilège d'être un des cinq, et puis, il y a la police en arrière qui nous oblige à rentrer puis à payer. Alors, évidemment, c'est un partage de gâteau qui ne nous rassure pas beaucoup.

Nous ne devrions pas être obligés d'appartenir, pour le moment du moins, plus tard c'est autre chose. Les associations se développeront et deviendront... Elles sont déjà concurrentes. Pour solliciter la clientèle des entrepreneurs, elles nous feront peut-être des règlements, des conditions qui nous assurent qu'on y entrera selon les principes démocratiques, parce qu'on a été sollicité. On a demandé déjà de rentrer dans certaines associations, mais on ne nous donnait pas de représentation. On posait comme condition de laisser mourir notre association, puis on prendra vos membres, par exemple.

Alors, pour le moment, nous estimons que cette contribution devrait être minimale et distincte de l'allégeance, ou de l'adhésion obligatoire à une des cinq associations représentatives. Mais si on n'entre pas, on paiera cette contribution dans un fonds patronal commun qui pourrait être administré sûrement par les cinq, mais par d'autres aussi.

Il y a trop de conflits d'intérêt actuellement, ce n'est pas assez rodé. Il faudrait la présence d'autres pour s'assurer que la contribution que nous versons répond au besoin que nous voulons servir, c'est-à-dire le coût de la négociation et de l'application des conventions collectives. Voilà, en résumé, notre position.

M. LE PRESIDENT: C'est tout ce que vous aviez à dire, M. Desilets.

M. DESILETS: C'est ça.

M. LAPORTE: Un seul point. Vous avez parlé de la parité salariale, n y a uns chose qui revient de temps à autre dans divers mémoires. Je voudrais bien que l'on puisse élucider ce point ensemble. Vous dites, page 2 : Le gouvernement a consacré ces faits, il y a des disparités économiques dans le Québec que chacun imagine, je pense. Vous dites: Le gouvernement a consacré ces faits en décrivant une dizaine de régions économiques. Est-ce que le gouvernement n'a pas plutôt décrit une dizaine de régions administratives, sans qu'on ne se réfère, à aucun moment, aux problèmes économiques, ce qui est très différent, vous en conviendrez.

M. DESILETS: Depuis deux ou trois ans, dans toutes les discussions d'associations que nous formons, on nous parle de régions économiques. C'est peut-être au texte du décret ou de la disposition: Est-ce par décret, est-ce par loi, est-ce que c'est une règle du ministère de l'Industrie et du Commerce? Ecoutez, je n'ai pas vu le texte original, mais c'est de notoriété publique que l'on parle des régions économiques proposées par le gouvernement. C'est pour cette raison que j'ai dit cela dans ce texte.

M. LAPORTE: II serait bon que les employeurs, d'une façon générale, n'utilisent pas, comme parole de l'Evangile, une affirmation qui n'est pas exacte. J'ai ici, devant moi, le document et on décrit très en détail des régions administratives avec capitales régionales, avec des sous-centres, afin que le gouvernement, lui, puisse regrouper autour d'une capitale locale certains services pour promouvoir le développement économique.

Je n'accepterais pas, personnellement, par exemple, si nous devions ne pas avoir la parité salariale, que l'on dise: Vous avez là dix régions économiques qui sont divergentes les unes des autres, parce que le gouvernement en a décidé après étude. En 1966, le gouvernement a décidé — d'ailleurs, le document a chevauché des administrations; celui que j'ai devant moi a été rendu public en août 1966 — qu'il y avait lieu de décrire, pour le développement harmonieux du Québec, dix régions administratives. Quant aux disparités économiques qui peuvent exister, je pense bien que c'est un autre problème. Mais, je vous connais suffisamment pour savoir que vous n'aimez pas vous appuyer — comme argumentation — sur des documents qui ne sont pas conformes à ce qu'on vous a dit.

M. DESILETS: ' Je le dis bien franchement, je n'ai pas vu le texte. Mais ce que je dis et je le reprends à mon compte — je ne m'appuie pas sur le gouvernement — je dis: II y a des marchés de travail différents dans la province, il y a vraiment des régions économiques différentes dans la province. Et — je vous laisse de côté — lorsque Ottawa parle des zones sous-désignées, cela doit être pour autre chose que pour l'administration. Cela doit avoir un sens économique.

M. LAPORTE: Disons que vous nous transportez rapidement...

M. DESILETS: Non, non...

M. LAPORTE: ... ailleurs.

M. DESILETS: Ecoutez...

M. LAPORTE: Oui, oui.

M. DESILETS: Je ne réponds pas...

M. LAPORTE: Non, non, votre argumentation est raisonnable...

M. DESILETS: Oui.

M. LAPORTE: ... lorsque vous parlez de disparités économiques...

M. DESILETS: Vos remarques...

M. LAPORTE: Cela fait plusieurs fois que je lis dans des mémoires: Le gouvernement nous a d'ailleurs donné raison en disant qu'il y avait dix régions économiques; or, ce n'est pas le cas. Ce n'est pas un argument acceptable pour cette commission, parce que le gouvernement a décrit des régions administratives. Si vous voulez maintenant faire la preuve que ces dix régions administratives correspondent à dix régions économiques bien différentes, c'est un autre problème.

M. DESILETS: Je comprends, je comprends.

M. LE PRESIDENT: Entendez-vous développer cette thèse?

M. DESILETS: Pardon?

M. LE PRESIDENT: Entendez-vous développer cette thèse?

M. DESILETS: Le ministre l'a développée.

M. LE PRESIDENT: S'il y a d'autres membres...

M. DESILETS: Les gens en prendront note, le gouvernement n'a pas consacré des régions économiques, il a consacré des régions administratives. Je n'entreprendrai pas ce matin — d'ailleurs, je fausserais mon mandat — de décrire exactement s'il y en a dix, onze ou douze, certains nous parlent de dix-sept; moi, je dis simplement que la réalité est qu'il y a des régions différentes. En tout cas, nos clients sont plus pauvres. Cela coûte sûrement plus cher d'enlever un pied de neige sur la rue Sainte-Catherine qu'en face de la maison du rang Saint-Emilien. C'est sûr.

M. LE PRESIDENT: S'il y a d'autres membres de la commission...

M. DESILETS: L'individu va sortir sa pelle chez nous et, là-bas, il ne le fera pas.

M. LE PRESIDENT: Y a-t-il d'autres membres de la commission qui désirent poser des questions à M. Desilets? Pas d'autres questions?

M. LAPORTE: C'est clarifié.

M. LE PRESIDENT: On remercie M. Desilets au nom de l'association qu'il représente. J'avais M. Charles Perrault comme suivant, mais, comme il reste à peine dix minutes, je préférerais qu'on l'entende cet après-midi. S'il y avait d'autres associations ou d'autres groupes représentatifs qui pouvaient nous faire leurs représentations brièvement, en moins d'une dizaine de minutes, nous serions heureux de les entendre à ce moment-ci. Je crois bien que M. Perrault ne voit pas d'inconvénient à ce qu'on le remette à cet après-midi. Très bien.

M. PERRAULT: Je peux y aller, ce ne sera pas tellement long.

M. LE PRESIDENT: Très bien.

UNE VOIX: Je ne sais pas, il s'identifiera comme les autres.

M. KENTZINGER: Mon nom est Gérard Kentzinger, président de la Corporation des maîtres-entrepreneurs en réfrigération.

M. LE PRESIDENT: Vous êtes dans les choses froides?

M. KENTZINGER: Exactement. Nous essayons de les réchauffer actuellement, mais nous ne savons pas si nous réussirons. M. le ministre, messieurs...

M. LE PRESIDENT: M. Kentzinger, avez-vous présenté un mémoire?

M. KENTZINGER: Oui.

M. LE PRESIDENT: Très bien, merci. Allez-y.

Les entrepreneurs en réfrigération

M. KENTZINGER: Merci, M. le Président. M. le ministre, messieurs, membres de la commission, la raison de la présentation de notre mémoire est l'omission de notre profession hautement spécialisée dans le bill 290. Nous ne sommes pas contre l'esprit du bill 290 que nous trouvons très louable, mais contre la structure patronale. Et j'ouvre ici une parenthèse en me demandant comment il se fait qu'il y ait 5 associations patronales de nommées dans le bill 290 quand, pour le reste des associations patronales, c'est: Débrouillez-vous, les « boys », essayez de vous « fitter » là-dedans.

Ce critère d'être obligé d'appartenir à une association patronale du bill 290, nous le trouvons injuste. Nous croyons qu'il faudrait refaire cette structure, non pas nécessairement le bill 290, mais cette structure patronale. Notre corporation est une corporation communément appelée ouverte. Les compagnies de réfrigération ne sont donc pas tenues d'y appartenir, mais malgré cela notre corporation compte 80% des compagnies frigorifiques de la province de Québec. Cela prouve une volonté d'association, une volonté d'identification très personnelle.

Messieurs, si la majorité d'un corps professionnel s'exprime ainsi, nous pensons que cela est la preuve irréfutable qu'il y a un malaise. Notre profession a été trop longtemps confondue avec d'autres. H est temps qu'elle soit reconnue, comme il se doit. Imaginons pour un instant que soient appliqués les 15 jours de vacances du mois de juillet, en pleine saison frigorifique et d'air climatisé. Je n'ai pas besoin d'énumérer les conséquences; c'est aussi impensable qu'un cultivateur qui prendrait ses vacances au moment de sa récolte.

S'il n'est pas possible d'être adéquatement représentés au bill 290, nous vous suggérons la solution inscrite dans le mémoire que vous avez devant vous, messieurs.

J'aimerais vous rappeler que, pendant les quinze ans où l'industrie de la réfrigération négociait avec la section réfrigération du syndicat, il y a eu une semaine de grève. Le bill 290 existe depuis à peu près un an, et nous avons trois semaines de grève. J'aimerais porter à votre attention qu'à l'exception de Montréal, les comités paritaires de la province ne reconnaissent pas notre profession comme faisant partie de la construction. Ils refusent les cotisations que nos membres veulent leur verser.

Messieurs, je vous remercie de m'avoir écouté. La Corporation des maîtres-entrepreneurs en réfrigération de la province de Québec espère que ce mémoire vous permettra d'étudier son cas et d'en arriver à une solution pour

le bien de l'Industrie de la réfrigération et de la climatisation.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Kentzinger. Y a-t-il des questions de la part des membres de la commission? Pas de questions. Donc, nous vous remercions, M. Kentzinger.

M. KENTZINGER: Merci.

Reprise de la séance à 14 h 32

M. BOSSE (président de la commission permanente du Travail et de la Main-d'Oeuvre): A l'ordre, messieurs! La séance est ouverte. Il appartient maintenant à M. Charles Perrault de faire ses représentations.

M. PERRAULT: M. le Président, avec votre permission, je présenterai mon plaidoyer d'ici et je resterai assis, puisque je relève d'une attaque virulente qui m'a terrassé durant quelques jours.

M. LE PRESIDENT: Lorsque vous êtes assis, M. Perrault, vous êtes à ma hauteur.

M. PERRAULT: J'ai déjà dit ici qu'il ne fallait pas confondre la grandeur et la longueur, M. le Président.

UNE VOIX: C'est Napoléon qui a dit ça.

Le Conseil du patronat

M. PERRAULT: M. le Président, messieurs les membres de la commission, le Conseil du patronat du Québec a déposé, la semaine dernière, devant vous, deux mémoires: un traitant de la parité salariale et, le deuxième, du champ d'application industriel. Je les commenterai dans cet ordre. Permettez-moi, au départ, de vous rappeler que le Conseil du patronat est une confédération d'une soixantaine d'associations patronales qui oeuvrent au Québec. Le conseil détient le mandat bien précis de faire valoir les intérêts généraux du patronat québécois tant auprès des pouvoirs publics que des agents de la vie économique et de l'opinion publique. Nous ne sommes pas ici en tant que porte-parole des cinq associations patronales parties à la négociation en cours, mais en tant que représentants des soixante associations et de la presque totalité des employeurs du Québec.

Parité salariale

M. PERRAULT: La parité des salaires est sans contredit une des questions clés des négociations actuelles dans le secteur de la construction. Il s'agit, en effet, d'une des demandes essentielles de la CSN afin que soit établie la parité des salaires pour tous les travailleurs de la construction sur l'ensemble du territoire québécois.

Nous soumettons, dans notre mémoire, qu'une telle parité aurait une influence considérable sur le coût de la main-d'oeuvre de la construction dans les régions éloignées de Montréal, les régions qui seraient affectées par une telle parité.

A son tour, cet accroissement des salaires serait reflété dans un accroissement important des coûts de la construction avec certaines conclusions économiques que nous pouvons prévoir. Et notre mémoire développe également l'effet sur le développement régional d'une telle décision pour autant qu'on puisse l'évaluer en fonction des chiffres dont nous disposons.

Finalement, il y a à craindre les distorsions qu'une telle parité entraînerait vis-à-vis d'autres secteurs de la vie économique, vis-à-vis d'autres entreprises qui oeuvrent dans les régions en dehors de Montréal.

Nous avons effectivement établi, dans notre mémoire, certains principes. Premièrement, que la construction est une industrie à forte intensité de main d'oeuvre. Donc, une industrie où l'accroissement du coût des salaires est reflété, dans une large mesure, dans le coût des services rendus. Deuxièmement, nous établissons que cette proportion qui varie d'une sorte de construction à l'autre peut être déterminée en fonction des écarts de salaires qu'il s'agirait de combler, si la parité était accordée. Enfin, l'accroissement de productivité dans la construction, c'est-à-dire les moyens par lesquels on peut réussir à surmonter des coûts additionnels de main-d'oeuvre, sans augmenter proportionnellement le coût des services, cet accroissement de productivité, dis-je, est faible. Et tout cela, en se rappelant que la construction est une industrie concurrentielle.

Les services vendus par les entrepreneurs le sont le plus souvent à la suite de demandes d'offres et le contrat est adjugé à celui dont les prix sont les meilleurs.

Pour en venir à l'augmentation des coûts, disons que le coût de la main-d'oeuvre dans la construction, comme je le disais tout à l'heure, représente de 20% à 30% du prix de revient dans la construction lourde et de 40% à 50% dans la construction résidentielle.

M. LE PRESIDENT: M. Perrault, excusez-moi. Je demande un peu d'ordre, s'il vous plaît, un peu de silence pour qu'on puisse entendre M. Perrault.

M. PERRAULT: Merci, M. le Président.

M. PEPIN: Pas le comprendre, mais l'entendre!

M. PERRAULT: Un peu de compréhension, c'est bien aussi.

M. LE PRESIDENT: Qu'on l'entende, en fait. Je m'excuse.

M. LABERGE: Moi, je vous entends et je vous comprends.

M. PERRAULT: Merci, M. Laberge.

Si on applique l'augmentation des coûts de main-d'oeuvre que nous estimons nécessaires pour amener la parité des salaires dans toute la province aux proportions que je viens de donner concernant la quantité de main-d'oeuvre dans différents contrats, nous concluons que l'augmentation des prix conséquente à la parité des salaires serait d'environ 15% dans le secteur de l'habitation, de 12% pour les constructions industrielles et commerciales et de 10% à 15% pour les travaux municipaux, la construction routière et les grands travaux de génie civil.

Nous soutenons, M. le Président, qu'à la lumière de la nature concurrentielle de la construction, de tels accroissements de coûts sont impossibles & absorber par l'entrepreneur. Il n'est pas besoin de vous rappeler que le secteur de la construction est un de ceux où on trouve le plus grand nombre de faillites commerciales ni de souligner que nous vivons une période où la construction connaît un marasme tout particulier.

C'est donc dire que si les coûts d'opération sont augmentés pour l'entrepreneur, comme je viens de l'indiquer, il n'a de choix que de faire reporter ces coûts sur ses clients. Ses clients, à leur tour, peuvent accepter de payer ces coûts accrus ou peuvent refuser de le faire. Il est difficile de prévoir dans quelle mesure l'une et l'autre de ces éventualités primera, mais on peut prévoir qu'il y aurait une certaine réduction du volume d'affaires, qui voudrait dire, à son tour, que certains entrepreneurs disparaîtraient comme tels, probablement les plus faibles, et qu'un certain nombre d'emplois, consé-quemment, disparaîtrait à son tour.

La plus forte partie de l'augmentation se retrouverait payée par les usagers des services; il faut donc mesurer l'effet d'une telle politique sur les différents acheteurs de services de la construction pour se faire une idée de ce que cela pourrait représenter.

Essentiellement, messieurs, vous avez trois catégories d'acheteurs des services de la construction. Vous avez l'acheteur individuel, qui est surtout préoccupé par la construction résidentielle; vous avez l'acheteur commercial et in-

dustriel, et vous avez enfin l'Etat, les différents paliers de l'Etat et les travaux qu'il fait exécuter pour la collectivité par les entrepreneurs.

Examinons, si vous le voulez, les trois cas séparément. Le cas de la construction résidentielle est celui où on frappe, comme je l'ai dit, l'individu le plus fortement. Il s'agit ici d'un marché essentiellement local. Il s'agit de vendre des maisons à ceux qui habitent la localité. Le fait d'augmenter le coût de la construction à Matane ou à Val d'Or se fait ressentir par les gens de cette région qui ont des maisons à acheter là et ont tendance, si les maisons deviennent plus coûteuses, à s'en passer, à payer un loyer plus élevé, ou à se satisfaire d'une accomodation inférieure.

Et 11 est peut-être utile de faire ressortir, ici, un point sur lequel nous avons appuyé dans notre mémoire. Les travailleurs de la construction sont déjà, d'après les statistiques, parmi les mieux payés au Québec et, généralement, parmi les mieux payés, région par région. C'est-à-dire que, dans le cas de l'acheteur individuel, on demande effectivement à la moyenne de la population, moins bien payée que les travailleurs de la construction, de subventionner une certaine catégorie de travailleurs qui ont une force de négociation peut-être meilleure, ou certains mécanismes de négociation meilleurs, et de payer à ce groupe, déjà favorisé, des salaires plus élevés.

Passons maintenant au cas de la construction industrielle et commerciale. Ici encore, la construction industrielle est très souvent une question locale. La construction commerciale l'est presque toujours. L'entretien commercial est à peu près toujours confié à des entrepreneurs locaux. Toutes ces activités seraient donc, dans leur accroissement de coûts, portées par la collectivité locale, par le marchand, par le chef d'entreprise, par l'entreprise locale qui — comme vous le savez et comme j'en parlerai un peu plus loin — dans des régions éloignées de Montréal, connaissent le plus souvent des conditions de fonctionnement plus marginales que celles que l'on retrouve dans la métropole.

Il y a, enfin, l'effet de cette majoration sur les pouvoirs publics. On a laissé entendre que, parce que environ 45% des contrats dans la construction étaient octroyés par les pouvoirs publics, on pouvait facilement se servir d'un tel mécanisme pour justifier une parité de salaires en faisant une comparaison avec certaines politiques gouvernementales de salaires égaux dans certains services.

Je vous soumets, messieurs, que cette comparaison est boiteuse et qu'il y a des différences importantes à souligner. La première, c'est que les dépenses de l'Etat, en termes de construction, n'émargent pas toutes, loin de là, au budget du gouvernement provincial. Il y en a, en effet, une bonne partie qui est la responsabilité des gouvernements locaux. Or, ces gouvernements locaux dépendent, dans une très large mesure, d'une assiette d'imposition locale.

Vous n'êtes pas sans savoir que l'assiette d'imposition locale des municipalités est très largement constituée par la taxe foncière qui est, à son tour, une taxe sur le logement. Donc, la partie des dépenses gouvernementales assumée par les autorités locales ne saurait être répartie sur toute la population de la province, comme c'est le cas pour certaines dépenses d'éducation et de bien-être. C'est la population locale d'une ville, qui doit faire faire des travaux d'égout ou d'aqueduc, qui est obligée de financer ces travaux à même l'impôt foncier principalement. C'est, d'ailleurs, un de leurs griefs importants, et vous le savez.

Mais, ce sur quoi j'insiste, c'est que l'accroissement du coût de ces travaux revient sur la taxe foncière qui est probablement l'impôt le plus régressif que nous connaissions.

Par contre, il est entendu que la partie du coût additionnel des travaux de l'Etat provincial pourrait, si l'Etat en décidait ainsi, être répartie sur toute la population.

Cependant, il s'agit d'un montant très considérable pour lequel, à ce que nous sachions, il n'y a aucune prévision budgétaire.

Il s'agirait d'une dépense de l'ordre de $40 millions à $50 millions par an, selon les chiffres que nous avons, qu'il faudrait trouver quelque part dans un budget provincial déjà étiré et ce, messieurs, toujours en fonction de la redistribution des revenus vers un groupe de travailleurs qui est un des mieux traités de la province.

M. PEPIN: Sauf les spécialistes.

M. PERRAULT: Examinons un instant, si vous me le permettez, l'effet d'une telle politique sur l'expansion régionale ou la croissance des milieux en dehors de Montréal. Je ne suis pas sans savoir que la réduction des disparités régionales dans la province est un des buts visés par le gouvernement et c'est un but absolument essentiel pour le renforcement économique de la province.

Je vous soumets cependant que la réduction des disparités régionales est un problème extrêmement complexe qui dépend de la possibilité économique de chaque région et qui ne peut être réglé par simple décret. Il serait très facile, par exemple, d'appliquer, par la loi du

salaire minimum, une ordonnance comme quoi les salaires de la Gaspésie ne seraient pas inférieurs à $3 l'heure. Vous savez qu'une telle décision n'affecterait en rien l'état économique réel de la Gaspésie. De la même façon, messieurs, le fait d'établir, pour un certain groupe de travailleurs de la construction, des salaires qui ne correspondent pas aux exigences du marché est de nature à créer des distorsions locales et à augmenter le coût des travaux locaux.

Ces résultats entraîneront non pas une réduction de la disparité régionale, mais tendrons à l'accroître. Nous avons, en effet, une législation qui prévoit que le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial peuvent octroyer, à des entreprises qui s'établissent dans les régions excentriques du Québec, des sommes importantes pour faciliter l'implantation de nouvelles industries.

Une politique de parité salariale, en accroissant le coût de la construction de ces usines ou de ces Industries dans les régions éloignées de Montréal, irait diamétralement à l'opposé de cette politique d'incitation à la décentralisation industrielle.

Il ne faut pas négliger dans l'étude de cette question l'effet d'entraînement sur les autres secteurs industriels que cause une telle décision. Puisqu'une décision de créer la parité salariale ne serait appuyée d'aucune façon sur des critères économiques, il en résulterait des distorsions importantes avec les entreprises déjà établies dans la région, pour ne parler que de celles-là et ne pas mentionner celles qui pourraient s'y installer plus tard. Il a toujours existé, comme vous le savez, des points de comparaison entre les salaires de la construction et ceux payés dans l'industrie, notamment à certains métiers d'entretien qui s'y rapprochent.

Dans le passé, certains facteurs ont réussi à maintenir un écart quelconque entre ces salaires en faveur de la construction puisque ce travail, en général, était moins stable, mais il y a quand même eu des rapports qui ont toujours été appliqués. Ce que nous craignons, c'est que l'augmentation importante de salaires dans la construction qu'entraîneraient la parité ait tendance à se répercuter dans les autres secteurs qui sont actuellement, dans bien des cas, aux prises avec des difficultés graves.

Encore une fois, cette distorsion ne résulterait pas d'un mouvement appuyé par des forces économiques, mais tout simplement par des salaires décrétés. Je me permets, à ce moment-ci, de souligner qu'il ne semble pas y avoir, dans la demande de parité salariale, d'insistance sur l'absence de main-d'oeuvre. Ce n'est pas pour attirer la main-d'oeuvre qu'il serait nécessaire d'avoir la parité salariale dans toute la province, mais plutôt pour obtenir une égalité avec un autre secteur qui est Montréal.

Pour terminer, M. le Président, il est utile de rappeler les ententes déjà prévues entre les parties, que je ne rappellerai pas d'une façon extensive, mais pour souligner qu'il y a, dans les ententes, des références à des certificats de qualification qui n'existent pas encore et qu'il y a dans la loi sur la formation professionnelle certaines prévisions en fonction de la reconnaissance de certificats déjà existants.

Tout cela, pour dire simplement, que les ententes existantes, la loi sur la qualification professionnelle et son article 55 pourraient mener à une parité salariale que le législateur n'a pas prévue et contre laquelle nous nous érigeons pour exactement les mêmes raisons. C'est-à-dire que si la parité salariale ne doit pas être consentie, pour des raisons que nous avons énoncées, par la porte d'en avant, elle ne devrait pas non plus se faire par la porte de côté.

Messieurs, je crois qu'il serait sage de séparer la présentation des deux mémoires afin de répondre aux questions que vous pourriez avoir sur cette première tranche et ne pas mêler les deux questions.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Perrault, pour cette brève tranche. J'inviterais les membres de la commission qui ont des questions à poser à M. Perrault de le faire immédiatement.

Le député de Bagot.

M. CARDINAL: J'en aurais une. Il y a une chose qui ne me paraît pas tout à fait claire, au tout début. Vous avez mentionné très précisément que vous n'étiez pas le porte-parole des cinq ou sept associations patronales qui étaient à la table des négociations, mais, si ma mémoire est bonne, que vous représentiez 60 associations patronales. Ma question précise est celle-ci: Est-ce que, parmi ces 60, se trouvent quand même les 5 ou 7 qui se trouvent à la table?

M. PERRAULT: Il s'en trouve trois, M. Cardinal, trois sur cinq.

M. CARDINAL: Merci.

M. LE PRESIDENT: Le député de Maisonneuve.

M. BURNS: M. Perrault, dans votre mé-

moire, à la page 5, votre conseil dit « qu'il est convaincu tant en principe qu'en pratique que la parité salariale absolue pour les travailleurs de la construction était économiquement indéfendable », sauf erreur. Je ne sais pas si vous êtes au courant d'une certaine publication du professeur Jean-Guy Loranger, économiste, qui lui, ne semble pas avoir le même point de vue que vous là-dessus et je me réfère en particulier à la page 64 de son petit bouquin. Je ne sais pas si vous avez eu la chance de le lire.

Je cite la page 64: « A notre avis, il est plus raisonnable de penser que l'égalité des salaires avec Montréal provoquerait une hausse moyenne du coût de l'habitation nettement inférieure à 10% pour les trois prochaines années, ce qui représenterait une hausse moyenne inférieure à 3% par année. » Est-ce que vous êtes au courant de cet énoncé? Est-ce que vous êtes en mesure d'infirmer cela ou...?

M. PERRAULT: Moi, je n'ai pas vu le document que vous avez en main. Je crois que cela reflète un peu ce qu'on retrouve dans le document jaune, mais je ne l'ai pas.

M. BURNS: De toute façon, l'énoncé que je vous fais, est-ce que cela vous frappe comme étant une hérésie?

M. BEDARD: Ce n'est pas exact, c'est beaucoup plus considérable que ce qui est mentionné là.

M. PERRAULT: Excusez-moi, je ne sais pas si nous sommes ici pour discuter du mémoire de la CSN.

M. BURNS: Je ne discute pas du mémoire de la CSN, M. le Président, sauf que je discute, je pense, avec une autorité en main. Qu'est-ce que vous voulez, vous avez un économiste de London School of Economics, professeur à l'Université de Montréal et je ne suis pas économiste. Je suis donc obligé d'avoir des sources.

UNE VOIX: Vous êtes tombé sur celui-là.

M. BURNS: Je suis tombé sur celui-là parce qu'il semble contredire...

M. LE PRESIDENT: La question est opportune ici, si M. Perrault peut y répondre évidemment.

M. BURNS: M. Perrault, je ne vous dis pas cela pour vous embêter. Je vous pose cette question parce que, tout au long de votre mémoire, de votre exposé, on sent chez vous des préoccupations d'ordre économique, je pense. D'abord, je ne pense pas qu'il y ait quelque chose d'idéologique dans votre affaire; du moins, on ne la pas senti. C'est pour cela que je vous pose ces questions.

M. PERRAULT: M. le Président, en réponse à cette question, il est clair que nous étions particulièrement sensibles, lorsque nous avons préparé notre argumentation, à la possibilité que cela puisse sembler un argument en faveur du maintien des disparités régionales et que le fait d'accorder la parité salariale dans la construction soit un pas, si petit soit-il, vers une telle réduction des disparités régionales.

Le Conseil du patronat tel quel ne s'est jamais prononcé là-dessus, mais personnellement je suis favorable à la réduction des disparités régionales non seulement dans la province, mais dans le pays, dans la plus grande mesure possible. On peut bâtir tout un argument là-dessus à partir de raisons économiques sans même toucher aux questions sociales. Cependant, je crois que l'opinion que j'ai énoncée quant à l'effet possible de la parité salariale serait partagée par un bon nombre d'économistes. J'en ai consulté quelques-uns, mais je ne peux pas les amener ici à la table avec moi. Je me permets de citer ceux qui ont préparé un mémoire qui est déjà devant vous, je crois, et qui a été commandité par la Corporation des maîtres électriciens du Québec. C'est un mémoire qui est signé par trois économistes de l'Université de Montréal: MM. Lacasse, Raynauld et Marion.

On y trouve, à la page 27, les mots suivants: « Par conséquent, de quelque point de vue que ce soit, l'établissement, par l'autorité provinciale, de la parité des salaires dans l'industrie de la construction ne peut être considéré, au mieux, que comme moyen très inefficace de réduire les inégalités régionales et, de façon plus réaliste, comme une politique allant à l'encon-tre de cet objectif ».

M. BURNS: Comme ça, vos sources admettent, M. Perrault, que la parité régionale ou l'augmentation dans d'autres régions que Montréal au taux de salaire de Montréal pourrait être un facteur de stimulation économique dans les régions défavorisées? Est-ce ça que je dois comprendre?

M. PERRAULT: Bien, quand vous parlez de stimulation économique...

DES VOIX: Ah!

M. BURNS: Bien, je pose la question à M. Perrault, qu'il me réponde.

M. DEMERS: M. le Président, est-ce que je pourrais faire remarquer que l'on s'éloigne peut-être en voulant se rapprocher trop?

M. LE PRESIDENT: II faudrait s'en tenir, autant que possible, au sujet et limiter les débats à l'intérieur de l'enceinte.

M. BURNS: Je ne fais pas de débat, M. le Président, je pose une question à M. Perrault.

M. LE PRESIDENT: Non, ma remarque s'adressait plutôt à ceux des auditeurs qui semblaient engager un débat entre eux. La parole est au député de Maisonneuve.

M. BURNS: Je suis bien d'accord pour le laisser répondre, c'est d'ailleurs pour cela que j'ai posé la question.

M. PERRAULT: Est-ce que vous voulez que je réponde à votre question?

M. BURNS: Bien oui.

M. PERRAULT: M. le Président, il est entendu que vous stimulez l'activité économique en créant simultanément certaines distorsions. C'est-à-dire que vous augmentez les revenus d'un certain nombre de personnes, les travailleurs de la construction mais vous faites payer cette augmentation largement par les personnes de l'endroit et vous n'avez pas effectivement de stimulation économique. Cette argumentation, d'ailleurs, est quantifiée dans l'étude que je viens de citer. Là, je vous la donne simplement en grands termes, mais elle est quantifiée, ici.

M. BURNS: Je me réfère encore au petit bouquin, M. Perrault, justement sur ce problème de stimulation. Je ne sais pas si vous êtes familier avec la démonstration du fonctionnement du multiplicateur qui se trouve à la page 100 de ce petit document.

M. LE PRESIDENT: On pourrait peut-être en remettre une copie à M. Perrault.

M. BURNS: Je l'ai reçu ce matin. Il n'est pas tellement volumineux, il est très concis.

UNE VOIX: On vient de l'avoir.

M. PERRAULT: Je voudrais poser une question. Est-ce que M. Burns a une copie de notre document?

M. BURNS: Oui, j'ai une copie du vôtre. Moi, je veux être éclairé sur les deux positions, M. Perrault. J'ai entendu la vôtre et je veux savoir ce que vous pensez en regard de l'autre position qui nous est offerte.

En somme, le principe, d'après ce que j'ai pu comprendre — les économistes dans la salle me corrigeront si je me trompe — la démonstration que le professeur Loranger... Vous m'écoutez, M. Perrault?

M. PERRAULT: Je vous écoute.

M. BURNS: La démonstration que le professeur Loranger semble vouloir nous faire, si je l'ai bien comprise...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, me permettez-vous, je m'excuse auprès du député de Maisonneuve.

M. LE PRESIDENT: Le député de Chicoutimi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je m'excuse auprès du député de Maisonneuve, mais je pense que nous avons là entre les mains un document qui demanderait que nous requérions l'avis des experts, ne serait-ce que pour nous expliquer la signification des graphiques et des tableaux statistiques.

M. LAPORTE: Nous expliquer leur contradiction.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je veux bien que M. Perrault réponde à ces questions, mais nous allons nous engager dans une discussion qui va nous obliger à demander les services de tous les économistes qui ont pu travailler pour l'une ou l'autre des parties qui sont ici représentées. Nous avons là l'avis d'un économiste et il y en a des centaines d'autres. Le premier ministre en est un, nous dit-on, alors il va nous falloir les demander tous.

M. BURNS: C'est ce qu'on dit du moins, que le premier ministre en est un...

M. LE PRESIDENT: J'admets que...

M. BURNS: Ecoutez, M. le Président, je comprends très bien ce que le député de Chicoutimi veut dire par là, peut-être que lui-même

ne se sent pas prêt à digérer immédiatement ce document. Je le comprends très bien, d'ailleurs.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ce n'est pas une question de digestion.

M. BURNS: Je n'allègue pas, personnellement, l'avoir digéré au complet, sauf que j'ai vu quelques points qui semblent être en nette contradiction avec ce que M. Perrault nous dit.

Je pense qu'il serait dans l'intérêt de cette commission de savoir exactement ce que M. Perrault peut penser de certains avancés.

M. DEMERS: Ici, on s'attend qu'il y ait de la contradiction.

M. TREMBLAY: Voici, M. le Président...

M. DEMERS: C'est la place de la contradiction.

M. BURNS: On s'y attend mais, écoutez, je suis bien d'accord...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je veux bien acquiescer à la requête du député de Maisonneuve. Toutefois, après, je me réserve le soin de demander au député de Maisonneuve, ou à M. Perrault, ou à quelqu'un qui est ici, membre des parties représentées, d'expliquer la relation de comportement: grand R égale petit a, plus petit b; grand R plus grand A, c'est-à-dire grand R égale crochet 1, mois 1, moins B; entre parenthèses, a plus grand A. Alors...

M. DEMERS: Voilà pourquoi votre fille est muette.

M. LE PRESIDENT: II faut admettre que le document est assez complexe, quoiqu'il requerrait quand même certaines explications...

M. BURNS: Jusqu'à maintenant je n'ai pas fait référence à des équations savantes. J'essaie tout simplement... Il y a des énoncés de principe quand même, dans ces textes-là qui, peut-être, pour des économistes, sont appuyés par ces grands A et ces petits b, ces deltas et tout cela. Je me réfère à cela et, d'après cette démonstration, du moins, le professeur en arrive à une conclusion qui me fascine un peu. C'est en relation directe avec la question précédente que j'ai posée à M. Perrault, c'est-à-dire sur la stimulation d'une région sous-développée ou économiquement faible.

M. LAPORTE : M. Burns, je pense bien que nous avons en main les deux documents. Nous pouvons bien demander à M. Perrault de nous donner son avis; nous pourrons ensuite demander à M. Loranger de nous donner le sien. Ce qui va en sortir, malheureusement, c'est que, sur un même point, est-ce que la parité salariale va stimuler l'économie? Vous avez un groupe d'experts, tout à fait savants, que je respecte beaucoup, qui disent oui. Vous avez un autre groupe d'experts, tout à fait aussi savants, que je respecte autant, et qui disent non. Ce qui, hélas! ne simplifie pas le problème pour nous. Est-ce M. Loranger qui a raison, ou est-ce M. Raynaud? J'ai du respect pour les deux et nous sommes obligés de décider quand même. Que voulez-vous que nous disions?

M. BURNS: Ecoutez, est-ce que nous sommes venus ici pour nous faire éclairer, ou si nous sommes venus ici tout simplement pour écouter les parties, attendre que le délai se passe et ensuite que le lieutenant-gouverneur en conseil fasse son arrêtté en conseil?

M. LAPORTE: M. Burns, vous avez l'habitude de réagir de façon plus intelligente que cela.

M. BURNS: C'est votre opinion, M. le ministre.

M. LAPORTE: Si vous pensez qu'on veut vous empêcher de parler, bien, mon Dieu! allez-y et prenez tout l'après-midi.

M. BURNS: Je ne sens pas qu'on veuille m'empêcher de parler. Je me demande tout simplement si, quand on évite les vrais problèmes... Parce que tout au long du mémoire du Conseil du patronat, on entend parler d'arguments économiques.

M. LAPORTE: Vous nous aideriez davantage...

M. BURNS: C'est là-dessus que cette commission parlementaire...

M. LAPORTE: ... en tentant de départager les deux. Que va-t-on décider? Est-ce Loranger ou Raynaud qui a raison?

M. BURNS: Je n'essaie pas de départager les deux, j'essaie de m'éclairer personnellement. C'est cela mon problème actuellement.

M. LAPORTE: D'accord.

M. BURNS: Je ne suis pas un économiste, malheureusement.

M. LE PRESIDENT: Ayant devant moi les deux documents, je permettrai que l'on donne les explications mais aussi brièvement que possible; ne pas entrer dans la théorie complexe. Je pense que les membres de la commission pourront consulter les documents.

M. BURNS: M. le Président, j'aimerais bien que vous me disiez à quelle place je suis entré dans des théories bien complexes jusqu'à maintenant.

M. LE PRESIDENT: On s'en vient bien.

M. BURNS: Je me suis justement bien gardé de faire cela. D'ailleurs, j'en serais totalement incapable.

M. LE PRESIDENT: J'en suis très heureux. Donc, procédez.

M. BURNS: Bon. Je veux tout simplement demander à M. Perrault et c'était la question que je voulais poser au début, je me suis référé à des termes techniques, ce qui a amené les hauts cris chez certaines personnes... Mais, la conclusion à laquelle le professeur Loranger semble arriver est que, si vous augmentez, dans une région économique, les revenus moyens, ces résultats — grâce à un calcul que moi, personnellement, je ne serais pas capable de faire — sont cinq fois plus grands sur l'économie en général de cette région; si je comprends bien.

Je lis à la page 101, en tous cas: « On voit donc que lorsque la propension marginale à consommer est de .8, une hausse autonome de la consommation entraîne une augmentation cinq fois plus grande sur le revenu ». Alors, c'est là que vous ne comprenez pas, mais, quant à moi, cela me fait dire que c'est exactement en contradiction avec l'énoncé de principe fait par le Conseil du patronat à savoir, premièrement, que si vous augmentez les salaires, cela va diminuer la vente des maisons, ou des domiciles, cela va diminuer la construction dans un coin.

C'est cela que je me pose comme problème, tout simplement. J'aimerais bien avoir les commentaires de M. Perrault là-dessus.

M. LE PRESIDENT: M. Perrault, la parole est à vous.

M. PERRAULT: M. le Président, brièvement, je crois que nous sommes, comme le disait M. le ministre du Travail, dans le champ des experts en économique et je me défends bien d'en être un.

Je crois cependant que la réponse à la question de Me Burns se retrouve dans le document des trois économistes, que j'ai cité tout à l'heure. Je vous lis rapidement les paragraphes qui s'y rattachent et qui ne comportent pas de formule très longue, M. Tremblay. On dit ceci: « Augmentation de la demande régionale. Dans le premier cas, on doit comparer la stimulation de la demande régionale aux augmentations de coût qu'entraîne également la parité. Ces hausses ont été passées en revue dans les sous-sections précédentes. On peut maintenant situer l'ordre de grandeur de la stimulation de demande régionale qu'entraîne la parité. « Prenons le cas le plus favorable à cette hypothèse, celui de la région où l'augmentation de salaire serait la plus forte; 34.4% à Rimouski. En supposant que les travailleurs de la construction représentent 5%, maximum, de la main-d'oeuvre et du revenu total de la région, la hausse de demande globale sera de 1.7%. Or, cette demande accrue ne se fera pas entièrement pour les biens et services produits dans la région. Si, pour l'ensemble du Québec, on estime que le secteur « importations » est de 50%, on pourrait croire que pour des entités économiques aussi restreintes que nos régions, ce coefficient se situe au moins à 75%. « Ainsi, la hausse de revenu nominal qui se fera sentir dans la région du fait de la parité serait de 1.7% multiplié par 1/4, soit 0.42%, environ 2/5 de 1%, et ce dans la région où la parité entraînerait les augmentations de salaires les plus fortes ».

Les auteurs concluent: « Bref, même dans les circonstances les plus favorables, l'effet possible de l'augmentation des revenus nominaux dans la construction est négligeable comme stimulus à l'activité économique régionale. »

UNE VOIX: Est-ce assez clair?

M. BURNS: Est-ce assez clair? J'ai votre point de vue, c'est celui de M. Raynauld.

M. DEMERS: Là, on comprend. M. BURNS: Là, vous comprenez? M. DEMERS: Là, c'est clair. M. BURNS: Là, c'est clair!

M. DEMERS: Oui. M. BURNS: Bon.

UNE VOIX: M. le Président, un autre mémoire.

M. BURNS: Dernière question, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Je vous en prie.

M. BURNS: Dans votre mémoire également, M. Perrault, à la page 24, vous affirmez que l'incidence de la parité sur le budget gouvernemental se chiffrera entre $40 millions et $50 millions. Encore une fois, je vous réfère au petit livre qui, lui, arrive à des conclusions différentes à la page 90 du volume du professeur Lo ranger.

Il en arrive à la conclusion que ceci devrait entraîner une revision budgétaire de $12 millions, $14 millions ou $16 millions, selon les trois hypothèses déjà envisagées, parce que le chiffre duquel il part est variable. Selon certaines hypothèses, il arrive à $12 millions, $14 millions ou $16 millions, ce qui est assez différent des $40 millions et $50 millions que vous citez. Est-ce que vous seriez en mesure de nous dire à partir de quelle base vous en êtes arrivé à ces calculs quant au gouvernement?

M. PERRAULT: Est-ce que je peux me permettre de vous suggérer que cette question soit posée au représentant de l'Association des constructeurs de grandes routes. Cela fait partie de leur plaidoyer. Ils doivent paraître devant vous et ils ont toute la documentation qui a servi de base à ce calcul.

M. LE PRESIDENT: Si je comprends bien, vous préférez qu'on remette la question...

M. BURNS: Je la posais à M. Perrault parce que...

M. LE PRESIDENT: Je demanderai au député s'il est satisfait de cette réponse.

M. LAPORTE: M. Perrault, étant donné que j'aime bien que les situations soient claires, les constructeurs de routes auront l'occasion de nous donner leur avis. Mais les chiffres de $40 millions et $50 millions pour les routes seulement, je me permets de vous dire en toute amitié que c'est de la haute fantaisie.

S'il vous plaît! Quand on dit des choses... Cela a été révisé. Ils sont partis de ce chiffre.

En collaboration avec les fonctionnaires du ministère de la Voirie et ceux du ministère du Travail, disons qu'on en arrive aujourd'hui à des chiffres qui me paraissent à moi plus réalistes et qui seront exposés un jour.

Mais je tiens pour acquis votre affirmation que la parité des salaires entraînerait certainement une augmentation des salaires. Quant à ses dimensions, on pourra l'établir d'une autre façon, mais ce n'est certainement pas de $40 millions à $50 millions.

M. LE PRESIDENT: Le député de Bagot.

M. BURNS: Je n'avais pas d'autre question, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!

Un instant, s'il vous plaît. La parole est au député de Bagot d'abord. Par la suite, vous aurez l'occasion de poser toutes vos questions.

M. CARDINAL: Ce n'est pas tellement une question; c'est une constatation que je veux soumettre à cette assemblée. C'est que moi-même, lorsque nous avons discuté, en deuxième lecture, du projet de loi 38, j'ai souligné que le gouvernement se rendrait responsable des conséquences budgétaires dans le cas où lui-même serait partie contractante parce qu'il serait responsable de l'augmentation, ce qui ne serait pas le cas dans le domaine strictement privé.

Mais, même en retenant cette affirmation que je continue à croire exacte, les chiffres que l'on pourrait établir — je suis d'accord avec le ministre — peuvent varier infiniment. Si l'on considère le phénomène des commissions scolaires, on voit que la subvention vient en partie d'un accord fédéral-provincial, par exemple, en partie d'un financement local, en partie, parfois, d'un effort local, dans le cas de dépenses non subventionnées. Si l'on considère le cas de la voirie, qui est tout à fait différent, où le gouvernement est un agent direct; si l'on considère les travaux publics où le gouvernement est un agent direct; si l'on considère maintenant que, dans d'autres cas, les ministères agissent à travers des offices, lesquels ont eux-mêmes des accords avec des offices d'un autre gouvernement — c'est le cas de la construction des foyers de vieillards, des centres pour personnes inadaptées, etc. — je suis d'accord avec le ministre qu'on peut établir, à ce moment-là, 25 chiffres différents et que chacun d'eux prouvera tout simplement qu'on a pris des bases différentes, en ne tenant pas compte de tous les éléments pour les établir.

Je ne pense pas que c'est sur ce cas, en particulier — avec tout le respect que j'ai pour Perrault et pour le député qui a posé la question — que l'on pourra décider d'un décret ou de la substance de ce décret. Ceci est une question qui regarde, d'ailleurs, le gouvernement directement et qui n'a rien à voir avec les conséquences que cela peut entraîner sur le plan régional, local ou autre. Dans ces cas, il l'assumera, soit directement, soit par des offices et lui seul a probablement en main les critères qui lui permettent de l'établir.

J'ajouterai un seul autre détail, c'est que le gouvernement peut poser un autre geste. D'ailleurs, cela a été souligné à l'occasion du débat sur le même projet de loi qui est devenu une loi. Il peut, dans la préparation de son prochain budget, tout simplement diminuer des travaux et, par conséquent, ne pas obérer davantage le budget. On est donc dans des hypothèses lorsque l'on se base sur ces chiffres.

M. LE PRESIDENT: Merci. Maintenant, M. Gagnon avait demandé la parole. Voulez-vous vous approcher du micro?

M. GAGNON; M. le Président, notre fraternité a déposé un mémoire. Nous le commenterons plus tard. Pour le moment, je veux strictement poser deux questions.

M. LE PRESIDENT: A M.Perrault, je crois? M. GAGNON: A M. Perrault.

M. LE PRESIDENT: Pourriez-vous vous identifier?

M. GAGNON: Henri Gagnon, Fraternité internationale des ouvriers en électricité, FTQ, M. Perrault nous a donné des chiffres et il nous a dit qu'il y avait trois catégories dans la construction résidentielle, commerciale et industrielle et l'Etat. J'aimerais, pour ma part, savoir quel est le pourcentage des salariés dans chacune d'elles.

Alors, vu qu'on parle de disparités salariales pour des vivants qui sont dans ces catégories-là, il serait bon de savoir quelle est la portion.

J'ai une deuxième question, pour ne pas revenir, parce que c'est loin, je reste à l'autre bout. Je lui demande comment il peut concilier les paragraphes 3 et 4 de la page 10, qu'il a lui-même écrits, avec son opposition à la parité salariale. Après tout, nous vivons dans une province à 80% de salariés, si je ne me trompe, si on prend l'ensemble de la province.

Il nous dit, à un moment donné, que le tout dépend de la capacité: Or, la capacité de payer dépend dans une large mesure des conditions économiques locales, plus exactement des revenus locaux disponibles.

Or, quels autres revenus locaux sont disponibles en dehors des salaires, dans une population de 80%? Je crois que cette parité salariale et cette augmentation... Je suis d'accord avec ces deux paragraphes qui sont la base de tout le développement économique, à savoir que la parité salariale, si j'ai bien lu ce qu'il a dit, est la base de tout le développement économique et que, en même temps, cela dépannerait la province.

Moi, je maintiens que la disparité régionale est un empêchement à la croissance économique de la province. Je dis non seulement que la parité salariale est possible, mais qu'elle est réalisable. Je dis que c'est devenu une nécessité pour l'ensemble de la province. De toute façon, vu que c'est une question, je vous inviterais à relire ceci, à la page 10 du document de M. Perrault, aux paragraphes 3 et 4.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Gagnon. M. Laberge.

M. PERRAULT: Est-ce que vous voulez que je réponde, M. le Président?

M. LAPORTE: Ah! il y a deux questions.

M. LE PRESIDENT: Oui, je pense que ce serait opportun que vous répondiez.

M. LAPORTE: Je n'avais pas remarqué les points d'interrogations, mais ils y étaient.

M. PERRAULT: Quant à la première question, M. Gagnon, nous demande si nous avons la proportion des travailleurs de la construction impliqués dans chacune des catégories? La réponse est non. Nous avons produit des chiffres statistiques basés sur le coût des travaux, mais certains entrepreneurs vont dans plusieurs de ces catégories, comme vous le savez, et je ne sais même pas si on pourrait retrouver des chiffres valables établissant comment cela se situe... D'ailleurs, les travailleurs de la construction vont, fréquemment, dans toute une gamme d'activités, ils sont mobiles et leurs employeurs sont mobiles à cette fin. On pourra donc peut-être trouver ces renseignements-là quelque part, nous ne les avons pas.

Quant à la seconde question, celle d'établir une contradiction, dans les paragraphes 3 et 4,

de la page 10, je n'en vois pas du tout. Quand, dans notre texte, nous parlons des clients et que nous parlons des revenus locaux, nous parlons de toute la population. Nous ne parlons pas seulement des travailleurs de la construction, ces quelques pour cent des travailleurs qui seraient affectés par une telle mesure. Or, si la parité salariale entraîne une hausse de revenus pour une petite proportion des travailleurs, c'est quand même le reste de la population, y compris la très grande partie des travailleurs, qui doit subir cette augmentation de coût. C'est essentiellement ce que cela veut dire.

Dans l'argumentation des trois économistes de l'université de Montréal, on établit que les hausses de salaires et de prix — conséquence de l'établissement de la parité — auraient tendance à réduire les quantités de services, et, dans la mesure où la sensibilité de la demande par rapport aux prix est la même pour toute l'industrie, on peut croire que, du seul fait des réductions dans les quantités demandées de biens produits par l'industrie de la construction, la parité entrafnerait des baisses d'emploi dans la construction de 4 1/2% à 17.7% selon les régions.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Perrault. C'est terminé, je crois? M. Laberge.

M. LABERGE: Louis Laberge, FTQ. Je demanderais à M. Perrault si le conseil du patronat est au courant de la théorie qui a déjà été exprimée, il y a quatre ou cinq ans, par l'expert en économique des deux gouvernements précédents, Jacques Parizeau, qui, lui, préconisait la disparition des différences dans les salaires, la disparition des zones au Québec, la modernisation des moyens de transport et le fait qu'aujourd'hui les insdus-tries, qui étaient éloignées de leur marché, étaient rapprochées de leurs produits bruts. Il disait que par rapport à cette modernisation dans les transports, les raisons qui ont peut-être, à un moment donné, justifié des disparités salariales dans les régions — là je ne parle pas que de la construction, mais en général de toutes les industries — étaient disparues. S'il y a des coûts additionnels pour transporter un produit fini pour un manufacturier qui est éloigné de son marché, il y a par contre des avantages: des terrains à meilleur prix, le rapprochement du produit brut. Le Conseil du patronat est-il au courant de cette théorie?

M. LE PRESIDENT: Vous voulez une réponse immédiatement?

M. LABERGE: Oui.

M. LE PRESIDENT: M. Perrault, pourriez-vous répondre immédiatement?

M. PERRAULT: M. le Président, je ne sais pas si le Conseil du patronat est au courant, mais je connais les thèses de M. Parizeau; nous avons siégé ensemble à de nombreux organismes, nous avons croisé le fer à maintes reprises. Je connais ses théories et une théorie que je ne partage pas.

M. LABERGE: Une autre question. Le Conseil du patronat pourrait-il nous donner le pourcentage du coût de la main-d'oeuvre dans la construction d'une habitation, prenant en considération, encore une fois, le coût des terrains, qui est moins élevé dans de petites localités que dans de grandes localités, le rapprochement, de la construction, du produit brut? Je pense que le pourcentage du coût de la main-d'oeuvre dans la construction d'une habitation est quelque chose que les députés devraient connaître. Moi, je ne vous parlerai pas de A plus petit b moins grand B. Il est bien évident que ce bouquin-là ne s'adressait ni au Conseil du patronat ni aux députés; c'est évidemment pour les gars de la construction, qui, eux, comprendront ça.

M. CROLSETIERE: C'est fort. M. DE MERS: C'est la plus forte. UNE VOIX: C'est la meilleure. M. CARDINAL: M. le Président,...

M. LE PRESIDENT: Pendant que le Conseil du patronat cherche la réponse, je permets au député de Bagot de poser une question.

M. CARDINAL: Merci. Ce n'est pas pour poser un problème. Je veux simplement en appeler aux gens, pour que les dévoués employés du journal des Débats puissent quand même écrire ce que nous sommes en train de dire aujourd'hui.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Nous allons demander à M. Laberge de nous expliquer le petit livre, aussi.

M. le Président, allez-vous nous permettre, tout à l'heure, de demander à M. Laberge de nous expliquer ça?

M. LE PRESIDENT: Je suis certain qu'il le fera habilement.

M. Desjardins, préférez-vous l'expliquer vous-même?

M. DESJARDINS: Je pourrais poser une autre question au Conseil du patronat.

UNE VOIX: II n'a pas encore répondu.

M. LABERGE: Qu'il commence par répondre à la première question.

M. LE PRESIDENT: Je comprends, M. Desjardins, que vous n'ayez pas eu le temps de vous préparer pour nous l'expliquer. Alors, je demande au Conseil du patronat de nous donner la réponse.

M. PERRAULT: Les chiffres que nous citons dans notre étude, M. le Président, quant au pourcentage de la main-d'oeuvre dans la construction, sont obtenus à partir des index de construction Southam, que nous citons dans notre rapport.

Nous, nous établissons entre 40% et 50% du coût de la construction résidentielle l'apport de la main-d'oeuvre. Dans l'étude préparée par les économistes de l'Université de Montréal, on se sert de 37.5%, ce qui serait apparemment la pondération utilisée par le Bureau fédéral de la statistique. Voilà l'ordre des chiffres. Dans nos calculs à nous, il nous a semblé que c'était de 40% à 50%. Les économistes de l'Université de Montréal se servent de 37 1/2% et se basent sur les chiffres du Bureau fédéral de la statistique.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que ça répond à votre question, M. Laberge?

M. LABERGE: Oui. Autre question, est-ce qu'il y aurait aussi le pourcentage du coût du terrain, du coût des matériaux? Je pense en effet que c'est extrêmement important, lorsqu'on parle de construction domiciliaire.

M. PERRAULT: Les pourcentages de matériaux sont établis sur le même tableau, Louis; je ne les ai pas comptés, mais ils ont été tirés de la même source.

M. LABERGE: Je ne suis pas bien fort sur les tableaux.

M. PERRAULT: Il faut que tu travailles un peu.

M. LABERGE: Si le président me le permet, nous avons travaillé assez fort lors de la préparation de notre mémoire. Vous nous posez des questions nous vous donnerons des réponses. Nous espérerions la même chose.

M. LAPORTE: Vous n'êtes pas d'accord, M. le Président?

M. LE PRESIDENT: Pour le moment, ça répond à la question.

M. PERRAULT: Je permettrais maintenant à M. Pépin, de la CSN, de prendre la parole.

M. PEPIN: Marcel Pepin, de la CSN. Je voudrais tout simplement faire une remarque préliminaire. Comme nous aurons à commenter éventuellement le mémoire du Conseil dupatro-nat, je souhaiterais ardemment que le président du conseil soit ici, parce que, pour ma part, j'ai l'intention de l'attaquer suffisamment et je n'aime pas à attaquer quand les gens n'y sont pas. S'il pouvait rester avec nous jusqu'à vendredi ou jusqu'au moment où on attaquera son mémoire, si sa santé le lui permet, j'aimerais beaucoup qu'il y soit.

J'ai seulement quelques questions à poser pour essayer d'éclairer moi aussi ma lanterne. Vous avez affirmé dans votre mémoire, à la page 20, M. Perrault, que, quant à vous, le volume de la construction est en nette régression au Québec et particulièrement pour les six premiers mois de cette année, si vous le comparez aux six mois de l'an dernier. Il me semble, dans votre mémoire, si je l'interprète bien, que vous en imputiez la cause à la hausse des salaires dans cette industrie.

M. PERRAULT: Non, non.

M. PEPIN: Ce n'est donc pas à cause des salaires, s'il y a eu une baisse des investissements.

M. PERRAULT: Nous ne l'imputons à ça nulle part.

M. PEPIN: Donc, ce n'est pas à cause de ça.

M. PERRAULT: Je n'ai pas dit ça. J'ai dit que nous ne l'imputons pas à ça.

M. PEPIN: L'imputez-vous ou si vous ne l'imputez pas?

M. LABERGE: Il l'impute à cela en partie.

M. PEPIN: Est-ce que c'est une des raisons ou si ce n'est pas une des raisons? C'est ça que j'essaie de découvrir.

M. PERRAULT: Je ne sais pas quelles sont les raisons.

M. PEPIN: Donc, vous ne le savez pas. Quand vous écrivez quelque chose, vous ne le savez pas.

M. PERRAULT: Je dis que c'a baissé d'une année à l'autre et que c'est contre une industrie en regression qu'il faut étudier les questions qui sont devant nous, celles d'une parité salariale d'un bout de la province à l'autre.

M. PEPIN: Indépendamment des salaires, ça, il n'y a pas de raison de s'occuper de ça, ce n'est pas relié à ça, pour vous.

M. PERRAULT: Pas nécessairement.

M. PEPIN: Pas nécessairement, mais aussi nécessaire que Mackenzie King.

UNE VOIX: A peu près.

M. LE PRESIDENT: Excusez-moi, mais est-ce que c'est bien à la page 20, sous la rubrique: Effets de la parité sur les acheteurs?

M. PEPIN: C'est à la page 20 du mémoire du conseil du patronat, M. le Président. Donc, s'il n'y a pas de relation, quant à eux, M. le Président, entre la hausse des salaires et le volume des investissements. Je prends acte de la déclaration de M. Perrault; j'en suis heureux, parce que j'aurais aimé, à ce moment-là, faire la relation avec d'autres provinces, dont l'Ontario. Je n'ai qu'un seul autre point, j'aurai à y revenir éventuellement devant vous, l'égalité a été admise, pour beaucoup d'employeurs qui sont membres du Conseil du patronat du Québec. Je pense à l'aluminium, je pense à l'acier, je pense au papier, à beaucoup d'autres secteurs. Je crois qu'ils défendent une thèse à laquelle leurs membres mêmes font opposition.

M. LE PRESIDENT: Merci. Maintenant, M. Desjardins.

M. DESJARDINS: Je demanderai au patronat si la hausse des salaires est un empêchement à l'investissement. Prenez, par exemple, la construction, si vous allez dix ans en arrière, lorsqu'il y avait besoin de dix hommes, par exemple, pour remplir une telle tâche.

Maintenant, avec les nouveaux produits et la nouvelle machinerie, cela prend cinq hommes pour accomplir la même tâche. Alors, ce que cela prenait en salaires il y a dix ans, c'est la même chose aujourd'hui. Je peux vous le prouver n'importe quand, pour n'importe quelle industrie, que cela soit dans la construction domiciliaire ou industrielle. Si cela coûtait $3. en main-d'oeuvre, il y a dix ans, maintenant, c'est $5, avec les nouveaux produits comme je vous l'ai dit.

Par exemple, avant on filetait les tuyaux; maintenant, c'est de la tuyauterie en cuivre et c'est deux fois plus vite. Alors, le gars qui prenait quatre heures pour faire de la tuyauterie auparavant le fait maintenant en deux heures. C'est la même chose pour les divisions et pour tout le reste du matériel qui a été installé dans la construction.

M. LE PRESIDENT: M. Perrault a quelque chose à répondre à cela, M. Desjardins.

M. PERRAULT: M. le Président, c'est une affirmation que nous entendons de temps à autre de différentes personnes. Plusieurs l'ont reprise, surtout du côté syndical. On nous affirme régulièrement que la main-d'oeuvre dans la construction a baissé régulièrement à la suite de toute une série de choses.

L'étude de l'index de construction que nous rapportons aux tableaux B et B-2 de notre mémoire prouve effectivement le contraire: la part des salaires dans le coût total de la construction est restée sensiblement la même.

M. LE PRESIDENT: M. Perrault, je crois que vous avez à nous faire part d'un commentaire sur la deuxième tranche. Voulez-vous le faire immédiatement ou préférez-vous attendre?

M. PERRAULT: S'il vous plaît, M. le Président, si cela vous convient.

M. LE PRESIDENT: Allez. Cela nous convient.

Champ d'application industriel

M. PERRAULT: M. le Président, la deuxième question dont nous avons à traiter est peut-être plus complexe que la première et les intérêts se divisent bien autrement. Si vous me le permettez, je m'inspirerai largement de notre mémoire puisqu'il s'agit d'une question assez complexe.

Le document parlementaire 71, déposé à l'Assemblée nationale lors de la convocation de

cette dernière le 7 août dernier, mentionnait que la clause numéro 5 du projet de convention collective, clause portant sur le champ d'application industrielle du décret à venir, n'avait pas fait l'objet d'une entente globale. Il n'y a pas eu d'entente globale depuis.

Même si cette clause est toujours considérée comme étant en litige, il n'en reste pas moins que plusieurs des articles qui la composent ont déjà été paraphés par les parties en cours des négociations. Ce sont ces ententes, déjà paraphées, que le présent mémoire entend remettre en cause, compte tenu du cadre juridique de la loi 290.

La Loi des relations du travail dans l'industrie de la construction, sanctionnée en décembre 1968, consacrait dans ce secteur économique un régime de relations du travail tout à fait particulier. Elle remplaçait, dans cette industrie, le code du travail et la Loi des décrets des conventions collectives qui ne s'y appliquent plus, sauf dans la mesure où la nouvelle loi y fait référence.

Il n'est pas dans notre intention de porter quelque jugement que ce soit sur cette loi.

Tout au plus voulons-nous établir nettement que l'intention du législateur en établissant une loi spécifique des relations du travail en ce secteur était d'établir pour les partenaires sociaux du secteur de la construction des règles particulières de négociation qui tenaient compte des conditions inhérentes à leur genre d'activité économique. Quelles que soient ces règles cependant, elles s'insèrent à l'intérieur d'un cadre juridique bien établi au premier chapitre de la loi.

M. LE PRESIDENT: Je m'excuse, je ne voudrais pas vous brimer de votre droit de parole, mais je me demande s'il ne serait pas possible que vous commentiez votre document — il est évident que tous les membres de la commission l'ont en main — que vous commentiez brièvement sur chacun des sujets que vous trouvez opportun. Je pense que cela pourrait retenir l'attention des membres de la commission et des principaux intéressés, beaucoup plus que de le lire.

M. PERRAULT: Je vais le faire autant que possible, M. le Président. Le document est quand même assez dense. Disons que dans la loi elle-même le législateur a tenté de préciser le champ d'application au moyen de toute une série de définitions. Et cette orientation est confirmée à l'article 2, chapitre 2, de la loi lorsqu'on énonce qu'elle ne s'applique qu'aux employeurs et salariés de l'industrie de la cons- truction. Donc, il semble bien au départ que la loi n'autorise pas les parties à s'immiscer dans d'autres domaines que ceux qui leur sont réservés, et il n'aurait pas été possible de faire autrement sans consulter les tiers.

Maintenant, une étude des ententes déjà paraphées à l'égard du champ d'application industrielle indique le contraire, c'est-à-dire qu'il y a dans les articles paraphés un champ d'application qui est en contradiction flagrante avec les dispositions de la loi. Je vous réfère évidemment aux article 5.02 et 5.03-8 des ententes paraphées que je ne lirai pas, mais qui étendent l'application de la construction à l'entretien, à la machinerie, à l'équipement et à une foule d'autres champs qui étaient préalablement exclus.

Nous avons donc dans le cas actuel, M. le Président, d'abord des objections de principe. C'est qu'une loi conçue pour prévoir des relations entre certaines parties en fonction d'une économie particulière engage ces deux parties et elle ne saurait régir les conditions de travail des tiers d'autres entreprises en dehors du secteur en question. Quand un secteur prépare des lois, c'est pour lui, ces lois-là; ce n'est pas pour le voisin, ce n'est pas pour les autres. Cela ne peut être pour eux que si les autres personnes ont le droit de se faire entendre et de faire valoir leurs droits lorsque ceux-ci sont brimés.

Maintenant, nous avons également des objections précises au champ d'application industrielle projeté et ces objections, brièvement, sont celles-ci: Cette loi conduirait à une multitude de conflits en relations industrielles et elle créerait effectivement un chevauchement de deux régimes où il y aurait une multitude de conflits et de problèmes qui seraient à l'encon-tre de l'intérêt tant des travailleurs que des employeurs.

Il est essentiel que chaque entreprise ou service puisse compter, à l'intérieur de ses propres cadres, sur un personnel spécialisé et compétent. C'est une question d'efficacité et de rendement élémentaire. Il serait inconcevable que l'entreprise doive aller à l'extérieur pour trouver une certaine qualité de personnes et que ceci lui soit imposé par une réglementation venant de l'extérieur. D'ailleurs, si cela se faisait — comme certains l'ont fait valoir ce matin et comme d'autres le feront sûrement valoir par la suite — cela entraînerait au sein des entreprises industrielles des mises à pied et des gestes qui iraient à l'encontre de conventions collectives déjà signées avec les syndicats industriels en place.

Il est entendu que le champ d'application in-

dustriel projeté augmenterait les coûts de production puisque les salaires prévus dans la construction sont généralement plus élevés que ceux prévus dans l'industrie manufacturière et de service. Ceci aurait des effets désastreux sur la position concurrentielle des entreprises du Québec et sur la possibilité pour le Québec d'attirer d'autres entreprises. Enfin, les conflits intersyndicaux possibles et le champ d'application industriel proposé ouvrent la porte à toute une série de conflits éventuels d'interprétation entre entrepreneurs et syndicats.

Nous avons donc, M. le Président, formulé certaines recommandations pour vous aider à ce stade-ci et en fonction de ce problème bien particulier qui fait partie de la masse.

Considérant la loi 290 et son cadre juridique;

Considérant le champ d'application industriel en partie convenu par les parties;

Considérant que ce champ d'application dépasse les cadres du bill 290 et interfère dans les activités des secteurs industriels et de service;

Considérant que de telles interférences, volontaires ou pas, son préjudiciables aux secteurs industriels et de service qui ne sont pas parties à la négociation et conduiraient à de nombreux conflits dans le domaine des relations industrielles notamment par la juxtaposition de deux lois fondamentales distinctes;

Nous considérons que la seule façon, sur courte période, de régler cette question est de faire en sorte que la clause actuelle relative au champ d'application industriel soit rayée comme telle de la convention collective ou du décret à venir, et que la convention collective ou que le décret à venir ne comporte dans cette question du champ d'application industriel qu'une référence globale aux chapitres I et II de la Loi sur les relations du travail dans l'industrie de la construction.

Il appartiendrait alors au ministère du Travail, en vertu de l'article 58, chapitre 12, de ladite loi, d'émettre une réglementation pertinente avec les objectifs recherchés par la loi.

Cette réglementation, émise après entente des parties au bill 290, des tiers, et du Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, permettrait de résoudre une question d'une telle importance.

Il est clair qu'une telle orientation impliquerait, à compter de la signature de la convention collective, une réglementation générale transitoire. Cette réglementation transitoire ne devrait également être émise qu'après entente des parties, des tiers et du Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre.

Nous considérons, cependant, que même si cette orientation permet, sur courte période, de résoudre les problèmes que soulevé actuellement la détermination du champ d'application industriel, certaines difficultés n'en continueront pas moins à se présenter.

Il importe donc, à plus ou moins brève échéance, d'apporter des amendements majeurs à la loi 290, de telle sorte que cette loi puisse être viable et atteindre ses objectifs sans risque d'interférence dans les activités des secteurs industriels et de service.

Ces amendements devront être réalisés après consultation véritable de tous ceux qui peuvent être touchés de près ou de loin par cette loi.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Perrault, de ces explications.

M. LAPORTE: Merci.

M. LE PRESIDENT: Les membres de la commission ont évidemment le document et l'étudieront très sérieusement avec les autres. Avec la permission de MM. Bellefeuille, Du-mesnil et Jolin, je permettrais à ce moment-ci à l'Hydro-Québec, représentée par M. Jacques Durocher, de nous présenter immédiatement son mémoire, avec ses commentaires; c'est apparemment assez bref. Si j'ai donc la permission de MM. Bellefeuille, Dumesnil et Jolin, ce sera ensuite M. Marchessault, qui doit partir pour des raisons très particulières.

M. LABERGE: Je n'ai pas voulu interrompre M. Perrault dans le deuxième mémoire du Conseil du patronat, traitant du champ d'application, mais vous savez qu'il y a une commission, la commission Mirault, qui siège justement pour essayer de trouver une solution à ce problème du champ d'application. Ma question: Est-ce que la commission parlementaire entend décider de cette question ou si la commission va être chargée de continuer ses travaux?

M. LAPORTE: La commission parlementaire, M. le Président, si je peux m'autoriser la permission de parler en son nom, va entendre des gens comme M. Perrault, dans quelques jours, des gens comme vous, M. Pepin, et d'autres représentants patronaux et syndicaux. A ce moment-là, nous aurons certainement des commentaires à faire quant à la mission de M. Mirault. Jusqu'à nouvel ordre, ce travail continue et nous avons ferme espoir qu'avec la collaboration de tout le monde le travail pourra être conduit à bonne fin. Les mem-

bres de la commission ou l'un quelconque d'entre vous ne doivent pas tenir pour acquis que le problème est réglé. Vous êtes bien autorisés à en discuter devant nous.

M. LABERGE: Je voulais tout simplement mentionner qu'en ce qui concerne les travaux de la commission, nous n'avons absolument rien préparé sur cette question du champ d'application.

M. LAPORTE: Disons qu'il serait fort intéressant que les sept parties en cause nous disent la même chose, parce qu'elles ont accepté la mission Mirault. Mais, si elles ont une autre attitude à exprimer, elles sont bien libres de le faire.

M. LE PRESIDENT: Alors, je permettrai donc à l'Hydro-Québec de présenter immédiatement son mémoire et, par la suite, ce sera M. Marchessault.

Hydro-Québec

M. BOULANGER: Je voudrais, tout d'abord, m'identifier. Mon nom est Jean Boulanger, je suis avocat à l'Hydro-Québec et directeur du contentieux. Sont avec moi, ici présents, pour répondre aux questions des membres: M. Alexandre Beauvais, directeur général du personnel; M. Jacques Durocher, directeur des relations syndicales, et M. Antoine Rousseau, directeur, coordination et contrôle, à la direction générale du génie.

Disons, en premier lieu, que nos représentations cet après-midi couvriront principalement le point du champ d'application industrielle, qui cause à l'Hydro-Québec le plus de difficultés. Dans notre mémoire, nous avons expliqué ce qu'était l'Hydro-Québec. Nous avons souligné principalement que nous étions avant tout, non pas une entreprise de construction, mais une entreprise chargée d'assurer un service aux citoyens de cette province. Nous utilisons à cette fin environ 12,000 employés permanents et aussi, au besoin, nous avons des employés de la construction pour nos grands chantiers.

Notre entreprise est déjà fortement syndicalisée. Nous avons des conventions collectives de signées ou en voie de négociation avec des syndicats tant de la CSN que de la FTQ. Ces différentes conventions ou négociations sont plus amplement décrites dans notre mémoire. Nous mentionnons, quant à ce problème de la description de l'application du champ territorial, que nous avons déjà eu un problème similaire lors de l'application des décrets. En 1963, l'Hydro-

Québec avait présenté un mémoire au Conseil supérieur du travail et, présentement, nous sommes exemptés de l'application des décrets par mention spécifique dans chacun de ces décrets.

Notre idée du bill 290, c'est qu'il constitue — nous nous référons ici aux notes explicatives du bill 290 — un code du travail particulier pour les employés et les employeurs de l'industrie de la construction. Dans la mesure où il empiète sur d'autres secteurs de l'industrie ou des services publics ou parapublics, il dépasse le champ qui avait été prévu par le législateur.

A l'Hydro-Québec, les activités de construction comme telles ne constituent qu'un moyen d'atteindre nos objectifs qui sont de fournir de l'énergie électrique.

Je voudrais distinguer principalement les activités de construction proprement dites de l'Hydro-Québec et les activités d'exploitation. Dans les activités de construction, nous bénéficions déjà par la loi elle-même — et je réfère les membres à l'article 69 — d'une exception pour nos chantiers actuels. Notre mémoire donne les raisons qui justifient cette exception et nous pensons qu'elle devrait être maintenue et même qu'elle devrait inclure les chantiers futurs de l'Hydro-Québec, peut-être, qui sait, celui de la baie James.

IL y a bien, actuellement, dans le bill, une exception à l'article 26 qui permet, pour des travaux d'envergure de l'ordre de $25 millions et plus, de faire des ententes particulières. Mais, cette exception nous paraît un peu illusoire, parce que, d'abord, il nous faut le consentement de toutes les parties en cause — tant patronales, syndicales que le propriétaire lui-même — que les conditions ne seront déterminées que s'il y a lieu et, enfin, qu'à défaut d'entente les discussions ne peuvent aller au-delà du stade de la conciliation.

J'en viens plus particulièrement aux activités d'exploitation. C'est ici que nous voudrions expliquer aux membres les difficultés réelles que nous affrontons.

Le bill 290 s'applique aux employeurs et aux salariés de l'industrie de la construction. Il ne s'applique pas, et c'est une exception contenue à l'article 2, aux salariés permanents d'entretien embauchés directement par un employeur autre qu'un employeur professionnel. Nous pensons, d'après les objectifs que nous poursuivons, que nous ne sommes pas un employeur professionnel, donc que nos employés salariés permanents, d'après l'état actuel de la loi, ne sont pas visés par la loi.

Or, ces employés s'identifient principale-

ment à nos employés de métier, au nombre d'environ 4,300, auxquels on peut ajouter aussi quelques techniciens et certains employés de bureau. Ces employés exécutent pour l'Hydro-Québec, dans sa fonction d'exploitation, des tâches variées, toutes les tâches qui sont requises pour maintenir en bon état nos centrales, nos postes de transformation, nos réseaux et aussi pour assurer un service constant aux abonnés.

Ces tâches sont variées. Je vous laisse le soin d'en imaginer. Quelques-unes sont citées dans notre rapport. Elles sont souvent entremêlées et difficiles à distinguer. C'est ainsi, par exemple, que des équipes affectées aux lignes souterraines peuvent être appelées indifféremment à faire de l'entretien, du remplacement et aussi de l'installation de nouveaux câbles souterrains. Il s'agit, évidemment, d'un travail extrêmement spécialisé qui demande des gens qui ont de l'expérience. Toutes ces activités, que ce soient des activités d'entretien ou des activités de reconstruction ou de construction, sont confiées au personnel permanent d'exploitation de 1'Hydro-Québec, déjà lié avec cette dernière par des conventions collectives de travail qui leur garantissent des droits chèrement acquis.

L'application du bill, si l'on doit strictement isoler les fonctions de construction des fonctions d'entretien, fait en sorte que les mêmes employés pourront être régis par deux régimes de conditions de travail entièrement différents: celui des conventions collectives et celui du décret de la construction.

On peut même imaginer qu'un ou plusieurs employés pourront, dans la même journée, passer d'une tâche à l'autre et être régis, le matin, par leur convention collective de travail et, l'après-midi, par le décret de la construction.

Nous croyons qu'il s'agit là d'une situation difficile qui devrait être évitée et que l'on devrait empêcher que de tels imbroglios puissent causer des injustices aux employés de 1'Hydro-Québec.

On a mentionné tantôt l'extension donnée dans les négociations en cours par l'article 5.01 ou 5.02. Si on lit cet article, on verra toutes les implications qu'il peut avoir pour l'Hydro-Québec à l'égard de ses employés d'exploitation. Il s'agit, en fait, de deux régimes de relations de travail destinés à répondre aux besoins particuliers d'industries de types différents. Les conditions qui en résultent sont nécessairement différentes.

Ainsi, par exemple, dans le secteur hydroélectrique, comme aussi dans le secteur in- dustriel, le facteur de la sécurité d'emploi joue un rôle primordial dont l'importance se concrétise par la proportion considérable qui est attribuée aux bénéfices marginaux. Chez nous, les bénéfices marginaux représentent une rémunération additionnelle d'environ 30%.

Par contre, dans la construction, le caractère saisonnier des emplois offerts est compensé par des taux de salaires horaires plus élevés.

Il y a — ils sont énumérés dans le rapport — un grand nombre d'autres points qui sont différents dans nos conventions collectives de travail et dans les décrets de la construction. Nous pensons que l'on devrait éviter les conflits de juridiction possibles et que l'on devrait conserver aux employés qui sont déjà bien protégés, les employés de l'exploitation, le mécanisme de relations de travail qu'ils ont présentement.

Nous suggérons tout simplement de faire comme on a fait pour les décrets, d'exclure l'Hydro-Québec de l'application du champ industriel de l'industrie de la construction. D'ailleurs, cela serait conforme à l'attitude déjà prise par le gouvernement lui-même à l'égard des fonctionnaires et des ouvriers de la fonction publique, ce qui a été fait par un amendement à la Loi de la Fonction publique en 1969.

Il serait possible également, si on ne veut pas aller aussi loin que cela, de limiter les modifications pour protéger simplement les employés de l'exploitation eux-mêmes et non tous les employés de l'Hydro-Québec.

C'étaient là les principaux points que nous voulions vous expliquer cet après-midi.

M. LAPORTE: Est-ce qu'on peut s'imaginer que le point de vue que vous exprimez est analogue à celui que la ville de Montréal nous a présenté ce matin?

M. BOULANGER: Je n'ai malheureusement pas pu entendre les représentations de la ville de Montréal, mais je présume, ayant déjà travaillé à la ville de Montréal, que la situation comporte de grandes analogies.

M. LAPORTE: La ville de Montréal a suggéré à cette commission que les employés qui travaillent pour la ville de Montréal, à l'entretien et même à la construction, qui sont déjà syndiqués ailleurs, ne soient pas partie de l'unité de négociation.

M. BOULANGER: Je pense que ce serait une très bonne solution au problème.

M. LAPORTE: Je demande si c'est la même chose.

M. BOULANGER: C'est à peu près dans le même sens.

M. LAPORTE: Parce qu'on pourrait facilement me faire tirer des conclusions, vous savez.

M. LE PRESIDENT: Je remercie M. Boulanger. Pour ne pas faire d'exception, évidemment, s'il y a des brèves questions à poser, je les permettrai. S'il n'y a pas de questions de la part des membres de la commission, je remercie M. Boulanger.

M. LAPORTE: Merci, M. Boulanger.

M. LE PRESIDENT: J'invite M. Marches-sault à nous faire son bref exposé.

M. Desjardins, auparavant, a une question à poser.

M. DESJARDINS: A entendre toutes les parties, présentement — nous avons eu la ville de Montréal; après cela, nous avons eu le représentant de la compagnie Catalytic et de la Canadian Vickers, nous avons eu, après, le mot « machinerie » qui veut dire beaucoup de choses, tel que les machines à papier que l'on veut exclure de la construction; maintenant, nous avons l'Hydro-Québec — nous pourrions demander au ministère du Travail: Où nos ouvriers se recycleront-ils pour aller travailler quelque part? Ce serait peut-être une question...

M. LAPORTE: Vous semblez oublier, monsieur, que ce sont des représentants patronaux. Bientôt, nous entendrons la FTQ et la

CSN.

M. DESJARDINS: Très bien, mais, comme c'est là, étant donné qu'il y a beaucoup de préfabrication qui se fait en usine, il ne restera pas grand-chose pour les ouvriers de la construction.

M. LAPORTE: Je vous ai connu moins nerveux que cela. Je ne sais pas ce que vous avez aujourd'hui.

M. DESJARDINS: C'est parce que j'ai part à la décision, justement.

M. LE PRESIDENT: Soyez sans crainte, M. Desjardins. M. Marchessault.

Alcan, Melchers, etc.

M. MARCHESSAULT: Jacques Marchessault. Je représente le groupe Alcan, Compagnie Aluminium du Canada, les Distilleries Melchers, Cresswell-Pomeroy, Sido, Beaconing Optical, Klockner-Moeller, F.P.E. & Marlou — les six dernières compagnies font partie d'un groupe de manufacturiers de la ville de Granby — la compagnie Lines Brothers de Waterloo, — qui fait partie du même comté est mieux connue du député de Shefford que je vois ici et qui reconnaîtra sûrement les gens du patelin — la compagnie Alva Craft Limited et les compagnies de transport suivantes: Direct Motor Express, la compagnie de transport Richard et l'Association provinciale des propriétaires de camions-citernes.

Malheureusement, la convocation de M. Jean Boily, qui nous est arrivée très tardivement — je ne lui en fais pas de reproche — ne nous invitait pas à présenter de mémoire. J'ai ici une copie du télégramme. Si on veut bien m'en dispenser, je pourrai produire par la suite un mémoire en bonne et due forme pour compléter votre dossier.

M. LE PRESIDENT: Dans quel délai pouvez-vous produire un mémoire?

M. MARCHESSAULT: Je pourrai le faire d'ici la fin de semaine.

M. LE PRESIDENT: D'ici la fin de semaine, très bien. Vous pouvez procéder.

M. MARCHESSAULT: Parlons d'abord de l'Alcan qui, avec ses subsidiaires, compte quinze usines au Québec et emploie 10,000 employés, dont environ 3,500 sont uniquement préposés à l'entretien. Il faut distinguer dans nos remarques les travaux accessoires des travaux de la construction. Alcan ne fait pas de construction majeure, mais participe dans une quantité de travaux qui sont connexes. Par exemple, vous avez dans le champ d'application industrielle certains travaux de décrits qui ne sont pas strictement de la construction, mais qui sont nécessaires chez Alcan pour parer à des bris, pour maintenir les constructions ou pour assurer le bon fonctionnement des usines.

A Arvida, il existe une usine d'un mille et demi de long et de trois quarts de mille de large. Ce qui peut en surprendre quelques-uns et qui nécessite un système de tuyauterie, de transport d'énergie, un système de routes, de transport de matériaux de route, un système de voies ferrées et d'entretien de voies ferrées, de transport de minerai à l'intérieur des usi-

nes pour transformation. Ceci implique évidemment l'entretien de toute la machinerie et de tout l'équipement requis aux diverses phases des opérations de cette compagnie.

Pour tous ces travaux, l'Alcan dispose depuis nombre d'années d'un personnel régulier et permanent, qui est spécialement entraîné et qualifié. D'ailleurs, dans ces fonctions, les employés sont déjà assujettis à des conventions collectives qui leur assurent la sécurité d'emploi.

M. LE PRESIDENT: Silence, s'il vous plaît, pour permettre à M. Marchessault de nous expliquer son point de vue.

M. MARCHESSAULT: Je disais donc que ces employés sont déjà assurés de leur sécurité d'emploi et que l'employeur est obligé de faire exécuter ces travaux par ses propres employés plutôt que de les confier à des sous-traitants. C'est là où j'expliquerai tout à l'heure qu'il nous arrive un problème majeur dans le cas de cette cliente.

Au risque d'être fastidieux, qu'il me soit permis de vous référer à la page 3 du document très court que j'ai eu le temps de vous mettre à la poste et qui énumère en somme certains travaux qui sont faits tous les jours par 3,500 employés de l'Alcan. Ceci inclut des machinistes, des tôliers, des ferblantiers, des soudeurs, des nettoyeurs, des ajusteurs, des outilleurs. L'énumération apparaît dans le court fascicule que j'ai déjà envoyé à M. Jean Boily. Maintenant, lorsqu'on parle d'entretien de chemins de fer, comment pouvons-nous imaginer qu'on pourrait se référer aux métiers de la construction pour aller y chercher les employés qui seraient qualifiés pour faire ces travaux d'entretien?

Ce qui nous concerne ensuite spécifiquement, c'est l'entretien à l'intérieur des usines de l'Alcan où, dans 90% des cas, l'employeur doit se soucier du procédé continu. Ce sont des opérations qui, par leur nature, ne sont pas susceptibles d'arrêt. Il faudra nécessairement prévoir des exclusions. Il faudrait y penser parce qu'à notre avis, ce serait punir indirectement cette industrie que de lui imposer de faire appel aux travailleurs de la construction pour effectuer ces travaux. En effet, quand, dans la majorité des cas, les problèmes suivants se poseraient.

D'abord, la non-disponibilité de la main-d'oeuvre requise, le manque d'expérience particulier pour une foule de tâches qui doivent être accomplies sur le champ par des hommes de métier et, enfin, le dommage important qui pour- rait résulter d'un arrêt inévitable de la production.

La paix industrielle, on en a déjà parlé, mais permettez-moi de souligner que l'Alcan, dans ses quinze usines, a déjà subi les pressions du syndicat qui a fortement insisté pour que, précisément, tous les travaux d'entretien soient faits exclusivement par les employés syndiqués de l'Alcan. La compagnie Alcan s'est même engagée à ne pas traiter avec des sous-traitants et de faire faire ses travaux à l'intérieur de ses usines, après une série d'arrêts de travail dont quelques-uns d'entre vous sont sûrement au courant.

Maintenant, à titre d'exemple, la réparation de supports de cuve d'électrolyse est un cas typique. Depuis cinq ans, ces travaux sont de plus en plus effectués à l'intérieur de l'usine. D'ici trois mois, ils seront tous réintégrés pour être faits par les propres employés de l'Alcan. La compagnie ne pourrait évidemment pas céder, en même temps, aux pressions de l'intérieur, de la part des gens syndiqués sur place, et de l'extérieur, à ceux qui viendront du domaine de la construction.

Tout le monde est d'accord sur le principe du bill 290, si on veut par là assurer la sécurité d'emploi. Il serait dommage, cependant, qu'une loi précisément pour atteindre cette fin réussisse à assurer la sécurité d'un groupe d'employés au détriment d'un autre groupe qui a quand même, par ses conventions collectives; négociées depuis moult années, des droits chèrement acquis, comme on l'a déjà souligné.

En terminant, j'aimerais souligner le problème de certaines définitions. La disparition de la définition de l'employeur professionnel, par exemple, pourrait créer à l'intérieur de l'usine certains problèmes majeurs. Vous seriez peut-être surpris d'apprendre que, à l'Alcan, il y a des milliers de carreaux de fenêtres qui doivent être remplacés par année soit par vétusté, par bris ou par contamination. Peut-on imaginer quel problème cela poserait que de faire appel à des employés de l'extérieur chaque fois qu'il s'agit de poser un carreau, de changer une serrure ou de faire l'assouplissement d'une porte? Cela semble des détails, mais si on les multiplie à l'infini, comme c'est le cas pour les quinze usines que j'ai l'honneur de représenter, on peut facilement imaginer l'ampleur du problème.

L'usine d'Arvida qui est la plus grosse usine de réduction d'aluminium au monde, est quand même située dans une petite ville. Il serait impossible de recruter de l'extérieur une main-d'oeuvre qualifiée pour satisfaire à des besoins et à des exigences aussi divers.

Si on pouvait s'arrêter une seconde sur la définition de salariés permanents d'entretien, n'est-il pas d'abord essentiel de faire une distinction entre la fonction elle-même et l'employé? La fonction, elle, est permanente mais l'employé ne l'est pas nécessairement et cela est typique au temps des vacances. Il faut imaginer que durant la période des vacances à l'Alcan, on doit faire la recherche de substituts dont le nombre peut atteindre de 500 à 600 seulement pour Arvida. Multipliez avec les autres usines, on peut donc, facilement en arriver à un nombre dépassant 3,000. Chaque été, ces employés savent à l'avance qu'ils ne sont pas permanents. Ils agissent en qualité de substituts durant la période de vacances.

Il serait fastidieux, comme je l'ai déjà dit, d'énumérer et de se replanter dans toutes les descriptions qui apparaissent au champ d'application industrielle. Mais il me semble que, peut-être, une solution que j'ose humblement suggérer pourrait être étudiée aux termes de la loi 290, au chapitre 45, si en regardant le champ d'application, au paragraphe deuxième, on éliminait un mot et on en ajoutait un autre pour y lire en somme, au lieu de :« La présente loi s'applique aux employeurs et aux salariés de l'industrie de la construction. » Comme les employés de la construction sont déjà définis dans cette loi au sous-paragraphe « r », ne pourrait-on pas dire, messieurs: « La présente loi s'applique aux employeurs professionnels et à leurs salariés?

Je crois qu'ainsi on pourrait éviter de confondre ce que mon prédécesseur appelait une codification juxtaposée au code du travail.

Je répète, M. Bossé; le texte que je suggérerais bien humblement se lirait simplement comme suit: La présente loi s'applique aux employeurs professionnels et à leurs salariés. Si vous lisez l'article 2, c'est ce qu'il veut dire en somme, mais il le dit de façon négative: « La présente loi s'applique aux employeurs et aux salariés de l'industrie de la construction — ils sont déjà définis dans la loi — toutefois, elle ne s'applique pas aux exploitations agricoles ni aux salariés permanents d'entretien embauchés directement par un employeur autre qu'un employeur professionnel.» Or, comme les mots « employeur professionnel » sont disparus des bills 38, 49 et 51, de façon à éviter toute possibilité de mêler et de juxtaposer deux lois qui pourraient gêner, dans leur application, les relations ouvrières de toute une province, je suggère respectueusement que nous pourrions avoir des documents additionnels à déposer, si on voulait nous entendre de nouveau. Mais, pour le moment, nous avons la sugges- tion ci-haut énoncée, que nous vous soumettons respectueusement.

Pour ce qui est des autres employeurs que j'ai l'honneur de représenter, je leur fais toutes les remarques que j'ai faites pour Alcan au sujet des travaux d'entretien. Il s'agit des compagnies que j'ai énumérées dans le secteur des Cantons de l'Est, le comté de Shefford. Pour ce qui est des compagnies de transport que je représente, celles-ci s'inquiètent de l'aspect juridictionnel en ce qui concerne deux choses: d'abord, l'entretien et la réparation des machineries évidemment, mais également cet article qui est décrit au paragraphe 27, je crois, relativement au transport de matériaux.

Une des compagnies, la compagnie de transport Richard, qui détient un permis de la Régie des transports du Québec, a spécialisé son transport de façon à donner un service de tout point à tout point dans la province de Québec, pour les matériaux de construction. On peut voir facilement comment le syndicat de cette compagnie viendrait immédiatement en conflit pour un cas d'espèce, si on n'excluait pas de son domaine les employés de la construction.

Je terminerai en disant que la distillerie Melchers m'a souligné l'importance d'avoir son propre personnel, qui constitue 40% de sa main-d'oeuvre totale, qui est tout à fait spécialisé pour une machinerie très spéciale et qui est sujet aux restrictions d'accise que vous pouvez imaginer, parce que tout le monde ne peut pénétrer sur les lieux. Les difficultés seraient multipliées dans son cas. Je déposerai au nom de Melchers le document que je viens de recevoir seulement hier soir, pour compléter le mémoire que je fais pour mes gens. Je vous remercie.

M. LE PRESIDENT: Je vous remercie, M. Marchessault. J'inviterai maintenant, avec la permission de MM. Bellefeuille, Dumesnil et Jolin, M. Brunelle, qui nous promet d'être très bref et qui doit partir, malheureusement, immédiatement.

M. BELLEFEUILLE: M. le Président, est-ce que je peux avoir la parole?

M. LE PRESIDENT: Certainement.

M. BELLEFEUILLE: Gilles Bellefeuille. Ce que j'ai à présenter ne devrait pas prendre plus de dix minutes et j'aimerais bien le présenter maintenant, s'il y avait moyen.

M. LE PRESIDENT: Prenez vos dix minutes immédiatement, M. Bellefeuille.

M. BELLEFEUILLE: Merci beaucoup. Je suis Gilles Bellefeuille, le porte-parole de l'ensemble des industries pétrolières et pétrochimiques de Montréal-Est.

M. LE PRESIDENT: M. Bellefeuille, vous n'avez pas de mémoire. Est-ce que vous entendez en produire un?

M. BELLEFEUILLE: Je m'excuse, nous n'avons pas de mémoire présentement, mais nous pouvons en produire un d'ici une semaine. Nous allons vous le faire parvenir dans les plus brefs délais.

M. LE PRESIDENT: Très bien.

Industries pétrolières et pétrochimiques

M. BELLEFEUILLE: ... L'industrie du pétrole et l'industrie pétrochimique de la région de Montréal a déjà fait des représentations auprès des entrepreneurs et des associations d'employeurs dans le but de faire disparaître certaines dispositions que nous considérons discriminatoires à son égard et qui sont contenues dans les différentes conventions collectives et dans les décrets qui régissent l'industrie de la construction.

Notre point de vue peut se résumer de la façon suivante. Nous ne sommes pas partie à la négociation dans l'industrie de la construction, bien que nous soyons des donneurs d'ouvrage et que nous soyons affectés en tant que donneurs d'ouvrage par les dispositions des décrets et des conventions collectives.

Deuxièmement, nous sommes à la merci des ententes conclues à l'unique table des négociations où les deux parties établissent des conditions particulières à certaines catégories de clients.

Troisièmement, les conventions collectives qui régissent différents métiers de la construction, par exemple les électriciens, les tuyauteurs, les soudeurs, etc., contiennent des dispositions spécifiques aux travaux exécutés dans les « raffineries, usines chimiques, métallurgiques, sidérurgiques et les moulins à papier ». Ces dispositions spécifiques ont trait par exemple au temps de déplacement. De façon générale, dans la région de Montréal on dit qu'il n'y a aucune obligation pour l'employeur de payer le temps de déplacement dans un rayon de 25 milles de la ville de Montréal, mais à l'exception des raffineries, usines chimiques, etc., ce que j'ai énuméré précédemment.

Ces dispositions ont aussi trait à la prime de temps supplémentaire. En temps supplé- mentaire on paie généralement la somme de $0.15 l'heure. Dans l'industrie pétrolière, pétrochimique, etc., c'est 15%. Il y a donc une différence considérable entre $0.15 l'heure et les 15% qui peuvent souvent équivaloir à $0.60 ou $0.70 l'heure. Il y a aussi les dispositions que nous considérons discriminatoires pour ce qui est de la prime... Je m'excuse, ce que je viens d'énumérer, les $0.15 et les 15% s'appliquent a la prime d'équipe. Pour ce qui est de la prime de temps supplémentaire, les deux premières heures sont généralement payées à temps et demi et l'excédent est payé à temps double dans le cas de l'industrie pétrolière et pétrochimique. Encore une fois pour les industries qui y sont associées dans les décrets, le temps est toujours payé à temps double à partir de la première heure.

En plus de cette convention collective, certains décrets relatifs à l'industrie et aux métiers de la construction transposent ces mêmes dispositions que nous jugeons toujours discriminatoires.

Enfin, nous avons vu tout récemment dans le document parlementaire numéro 70, qui s'est appuyé, je crois, sur le même principe, une réglementation particulière qui s'applique aux délégués syndicaux dans l'industrie du pétrole. Cette recommandation dit que, de façon générale, dans n'importe quelle industrie, les délégués syndicaux doivent être choisis parmi les employés de l'employeur, sauf dans l'industrie pétrolière, pétrochimique etc., où ces délégués syndicaux peuvent être choisis parmi des gens qui ne sont pas nécessairement des employés des employeurs.

Quoique nous comprenions qu'il est raisonnable que des primes soient payées dans certains cas, il nous est difficile d'admettre que les employés de la construction soient traités de façon différente à cause du genre d'industrie où ils doivent travailler. En ce qui nous concerne, nous ne voyons aucune explication logique et raisonnable pour ceci. Nous soumettons respectueusement à la commission la recommandation que ces dispositions que nous jugeons discriminatoires soient retirées des décrets, du document parlementaire et du bill 38 et que le gouvernement déclare inacceptables les dispositions de conventions collectives particulières qui traitent les tierces parties de façon discriminatoire. Ce sont les remarques que j'avais à vous adresser cet après-midi. Je vous remercie beaucoup.

M. LE PRESIDENT: Je vous remercie de votre brièveté. Pour ne pas faire d'exception, y a-t-il des membres de cette commission

qui désirent poser des questions? Sinon, je vous remercie et j'invite maintenant M. Brunelle à nous communiquer ses commentaires.

Dirigeants d'entreprises

M. BRUNELLE: Jean Brunelle, Centre des dirigeants d'entreprise.

M. le Président, à cause de son envergure, il est évident que tout ce qui se passe dans l'industrie de la construction affecte inévitablement tout l'ensemble de l'économie. Nous sommes un peu portés à croire que l'industrie de la construction approche — si elle ne l'a pas atteint — ce que les Anglais appellent le point de « diminishing return ». Le danger est grave étant donné le nombre de personnes qui y travaillent. Il est évident que tout taux de chômage important dans la construction devient une responsabilité sociale et affecte l'ensemble de la communauté.

Mais, voici qu'à la faveur des dernières négociations l'industrie de la construction a pris des décisions qui affectent, comme on le sait maintenant, l'ensemble du monde patronal et la province en général.

On a mentionné déjà la parité salariale. Je pense que les économistes — notre mémoire le mentionne — qui sont en faveur de la parité salariale prônent également, d'ordinaire, l'application d'un mécanisme d'aide aux entreprises qui permettrait aux plus faibles d'entre elles qui seraient affectées outre mesure par une politique de parité de recevoir des subventions afin de pouvoir passer le cap et de s'adapter à des conditions nouvelles.

Quant au champ d'application industriel, je n'ai pas l'intention d'insister, si ce n'est pour appuyer entièrement le mémoire qui a été présenté sur le sujet par le Conseil du patronat. Nous avons eu souvent l'occasion, dans le passé, de protester contre les projets d'extension juridique de conventions collectives. Je pense que le même problème se pose en principe et nous sommes totalement opposés à cette mesure.

Selon le CDE, M. le Président, il semble bien que le bill 290 lui-même devra être modifié en ce qui concerne l'extension juridique. Premièrement, au paragraphe r) de l'article 1, je pense qu'il faudrait définir « salariés d'entretien permanents. » Je connais nombre d'entreprises qui se font un devoir de maintenir au travail douze mois par année des employés qu'elles pourraient limoger. Il est évident, comme on l'a déjà souligné, que les conventions particulières contredisent dans la plupart des cas l'extension du champ d'application.

Nous suggérons également, à l'article 2, une modification selon laquelle il devrait être reformulé de façon à préciser que le bill s'applique uniquement et exclusivement aux employeurs professionnels. Dans un autre domaine, nous proposons que les organismes publics: municipalités, corporations publiques et parapubliques, soient soustraits à l'application du bill 290. L'application se traduirait inévitablement par des augmentations de coût considérables et le Québec, étant taxé comme il l'est, nous pensons que c'est un luxe inutile qu'il ne peut pas se payer.

Dans un autre domaine, nous pensons qu'il existe à la table des négociations un certain déséquilibre. La partie patronale, évidemment, a toute sa stratégie, mais il arrive que les cinq associations patronales engagées dans le conflit sont limitées dans leurs intérêts au domaine de la construction. Or, nous venons de constater que leurs gestes ou leurs décisions sont en voie d'engager l'ensemble des patrons du Québec, c'est-à-dire la population elle-même. Nous pensons qu'il faut rétablir là un équilibre qui manque. Pour rétablir un équilibre patronal d'ensemble, nous ne voyons pas d'autre moyen — nous nous excusons de le proposer nous-mêmes devant le Conseil du patronat, mais je pense que nous sommes justifiés de le faire — que de demander que le Conseil du patronat soit invité à siéger à la table des négociations à titre d'observateur privilégié. Nous ne suggérons pas qu'il remplace les parties dans la négociation, mais qu'il représente là les intérêts de l'ensemble du monde patronal.

Il faut donc, à nos yeux, éviter de traiter le conflit de la construction comme un phénomène isolé. Il faut le considérer dans l'ensemble de la situation socio-économique du Québec qui peut être affectée dangereusement si cet équilibre-là n'est pas assuré. Nous pensons également que le CCTM, qui est un organisme paritaire, pourrait être accommodé par la formation d'une commission spéciale et invité à régler le conflit de la construction. Evidemment, on peut songer — ce qui arrive souvent — à une intervention de l'Etat qui, d'autorité, réglerait le problème. Je pense qu'il se pose ici un problème de concertation extrêmement grave.

L'organisme que je représente pense qu'il faut faire aux gens du milieu une confiance minimale, quitte, s'il le faut, à leur lancer des défis. Les négociations ont déjà duré un an et demi et nous ne sommes pas près, semble-t-il, d'une solution. Nous avons l'impression qu'en créant, au sein du CCTM, une commission qui rassemblerait tous les éléments principaux, tous les gens intéressés: Etat, syndicats et patro-

nat, dans un même organisme, on aurait la possibilité de mettre sur la table les véritables problèmes et de les régler une fois pour toutes. Même s'il fallait un délai un peu prolongé, nous avons le sentiment très net que ce serait plus profitable que de procéder par l'intervention de l'autorité.

Pour mémoire, je tiens à souligner ici, au nom da l'organisme que je représente, une vieille marotte...

M. LAPORTE: Si je peux me le permettre, M. Brunelle, aimez-vous mieux terminer avant qu'on vous pose des questions? Terminez donc et j'aurai quelques questions après.

M. BRUNELLE: J'avais simplement l'intention, M. le ministre, de dire que, dans l'absence d'un conseil de planification, nous assistons au Québec à une confusion des voix et à l'impossibilité, semble-t-il, d'établir un consensus entre les corps intermédiaires. Nous faisons la recommandation que le conseil de planification soit créé le plus tôt possible.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Brunelle. Je crois que le ministre a quelques questions à poser.

M. LAPORTE: Vous suggérez la création d'autres organismes où l'on pourrait plus facilement s'entendre. Vous dites que, même là, cela pourrait prendre un certain temps. Est-ce que vous avez une opinion sur les délais que l'on pourrait accorder avant qu'une autre autorité intervienne ou si l'on devrait laisser le climat se détériorer comme c'était le cas récemment?

M. BRUNELLE: Est-ce que le statu quo, M. le ministre, ne pourrait pas être prolongé pour une période, disons, de six mois et les parties fortement invitées à mettre les véritables problèmes sur la table? Vous savez comment les négociations se passent. Siégeant ensemble, peut-être qu'il serait plus facile pour elles, collectivement, d'arriver à une entente qui, actuellement, n'est pas près de se produire.

M. LAPORTE: D'accord. Les humains étant ce qu'ils sont, avec toute l'amitié que je peux avoir pour tout le monde, j'imagine que l'on prolonge de six mois et que, pendant que la négociation continue, certains avantages nouveaux ne sont pas accordés. Est-ce que vous croyez qu'il n'y a pas des parties qui auraient intérêt à ce que la discussion dure?

M, BRUNELLE: Evidemment, vous posez un problème. Je pense qu'il faudrait les envisager à la table des négociations. Est-ce que l'on pourrait procéder à des modifications en cours de route? Je pense que c'est le groupe lui-même qui pourrait apporter des réponses à ces difficultés-là.

M. LAPORTE: M. Brunelle, ce sera ma dernière question, ou suggestion. J'avais demandé — je vais le faire disons plus officiellement à la fin de notre étude — aux sept parties en cause actuellement, vu la difficulté de la négociation, que chacune suggère à cette commission quels pourraient être, à son avis, les amendements à apporter au système pour que l'on puisse atteindre des résultats meilleurs plus rapidement. Il serait peut-être intéressant que les gens que vous représentez nous suggèrent dans un mémoire, des amendements, soit à la loi, soit à la façon de négocier, soit à la constitution de l'unité de négociation, pour qu'on puisse arriver à des résultats. Je crois que vous nous rendriez service en le faisant.

M. BRUNELLE: Nous le ferons avec plaisir, M. le ministre.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Brunelle. Un instant. Le député de Bagot a une question à vous poser.

M. CARDINAL: M. Brunelle, deux questions. Nous avons entendu le représentant du Conseil du patronat du Québec déjà. Vous représentez le Centre des dirigeants d'entreprise du Québec. Peut-on savoir quelles sont les différences, les relations ou la nature de ces deux organismes, l'un par rapport à l'autre? Le Conseil du patronat du Québec est une espèce de fédération; si je me trompe, on me corrigera. Comment situerait-on le Centre des dirigeants d'entreprise du Québec? Est-ce qu'il existerait entre les deux groupes ou entre le Centre des dirigeants d'entreprise du Québec et certains des patrons à la table des négociations — en français, on appelerait cela des chevauchements — des « overlaps »?

M. BRUNELLE: Bien, cela donne peut-être l'impression, de l'extérieur, d'être des chevauchements. Nous sommes membres du Conseil du patronat. J'espère ne pas être contredit par les gens du Conseil du patronat en disant que les relations sont amicales. Par ailleurs, nous ne sommes pas contraints, puisque nous ne sommes pas une fédération, au devoir de coordination

auquel est soumis le Conseil du patronat. Vous me direz que nous aurions pu discuter avec les gens du Conseil du patronat des recommandations que nous vous faisons aujourd'hui. Cela n'a pas été possible pour toutes sortes de raisons. Nous nous sommes permis de faire la suggestion que je viens de proposer au ministre en espérant qu'elle pourrait constituer une contribution acceptable à votre commission.

M. CARDINAL: Merci.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Brunelle. Pas d'autres questions de la part des membres? Le député de Maisonneuve.

M. BURNS: M. Brunelle, dans son mémoire, à la page 2, le CDE soutient qu'une hausse immodérée des salaires dans l'industrie de la construction aurait pour effet de provoquer des augmentations injustifiables des prix, des produits et des services. Est-ce que ça veut dire que, dans votre esprit la parité de salaires, telle que demandée par les syndicats, c'est une hausse immodérée de salaires?

M. BRUNE LLE : Bien, tout dépend de la hausse globale qui justifierait l'augmentation. Je pense qu'il faut faire la distinction. Quand nous parlons de hausse immodérée des prix dans le texte que vous venez de citer...

M. BURNS: Dans le texte que je cite, vous soutenez, semble-t-il, qu'une hausse immodérée des salaires dans l'industrie amènerait une hausse des produits et des services.

Ce que je veux savoir, c'est, vu que vous en parlez, à propos de parité des salaires, si vous soutenez que la parité telle que demandée provoquerait une hausse immodérée des salaires.

M. BRUNELLE: On sait qu'au cours d'un conflit récent 300 ou 400 entreprises ont dû fermer leurs portes, dans le domaine de la construction. Je pense que c'est un indice assez révélateur des marges extrêmement petites, limitées, dans lesquelles fonctionnent un grand nombre d'entreprises.

M. BURNS: Est-ce que vous pouvez nous assurer avec certitude que c'est à cause des salaires que ces entreprises ont fermé leurs portes ou si c'est autre chose?

M. BRUNELLE: Ecoutez, avant de répondre de façon affirmative à une pareille question, j'aimerais faire des recherches plus poussées. Mais il est clair que, depuis déjà quelques années, par exemple, depuis 1965, certains entrepreneurs en construction concluent avec leurs employés des contrats de travail à des prix inférieurs aux taux officiels, parce que la clientèle manque. Vous savez comme moi que la clientèle de la construction est coincée au Québec: Ou elle acceptera des prix, ou elle s'interdira de donner des contrats. Je sais déjà, depuis plusieurs années, que des gens manquent de contrats précisément parce que les taux de salaires sont trop élevés.

M. BURNS: C'est votre conclusion là-dessus.

M. BRUNELLE: C'est une connaissance de faits qui m'a été donnée par des gens du métier.

M. BURNS: Je dois donc comprendre que votre affirmation s'applique à la parité de salaires. Vous voulez dire que s'il y a parité de salaires, tel que demandé, cela serait une hausse immodérée? Est-ce cela?

M. BRUNELLE: Etant donné la marge de base, oui; dans certaines régions, ce serait une hausse immodérée.

M. BURNS: Et vous avez étudié, dans ces régions spécifiques, les effets que cela pourrait avoir?

M. BRUNELLE: Ce sont des informations qui nous sont données par des gens du métier.

M. BURNS: Bon. A la page 2 de votre mémoire, vous nous dites également que la parité de salaires dans l'industrie de la construction constituerait un précédent. Est-ce que vous êtes au courant que le précédent est déjà créé actuellement dans le secteur public, en grande partie, hôpitaux, fonctionnaires, même à l'Alcan?

M. BRUNELLE: C'est un danger que nous avions prévu depuis longtemps. Le secteur public déborde sur le secteur privé. Je pense que cela crée un état de confusion assez grave.

M. BURNS: Est-ce que vous concevez que cette situation de parité qui a été créée dans le secteur public a mis la province dans un marasme économique?

M. BRUNELLE : Je pourrais vous retourner

la question: Trouvez-vous que nous sommes dans une situation économique satisfaisante?

M. BURNS: Cette situation est améliorable, sûrement, mais est-ce que...

M. BRUNELLE: Le problème que j'ai soulevé justifie, je pense, de croire qu'on pourrait examiner tous ces problèmes et les peser les uns contre les autres, de façon ordonnée, à l'intérieur d'un mécanisme approprié.

M. BURNS: Je vous pose cette question parce que, dans votre texte, il semble que le gros problème soit partout celui des salaires. C'est cela qui cause le problème.

M. BRUNELLE: Dans notre texte, nous traitons des salaires. Il aurait évidemment fallu plus qu'un mémoire de quatre pages pour régler d'une façon plus complète les problèmes que vous soulevez. Je le reconnais très sincèrement.

M. BURNS: Une dernière question, M. Brunelle. Je me réfère encore, peut-être au désagrément de mes collègues, sans citer des grands A et des petits a, au volume du professeur Loranger. Il semble affirmer, dans son volume, que l'égalité de salaires serait justement un des moyens pour aider les régions défavorisées économiquement.

M. DEMERS: Quelle page?

M. BURNS: A compter de la page 48. Une chance que je le savais!

Vous semblez, vous, d'autre part, soutenir le contraire. Sur quelle base pouvez-vous réfuter cette thèse sur le plan économique? Est-ce que vous avez étudié cela sur ce plan ou si c'est intuitivement?

M. BRUNELLE: Nous avons des contacts fréquents avec les entreprises. Cela ne repose pas sur une étude scientifique appropriée au problème que vous soulevez, mais nous savons qu'une marge excessive de salaires, dans certains cas, rend impossible la survie de l'entreprise. Nous savons, moi comme tout le monde, qu'un tas d'entreprises, dans le secteur, doivent disparaître. Celles qui sont rentables dans des conditions données, est-ce que ce n'est pas mieux de les laisser fonctionner dans ces conditions, à des conditions de travail inférieures, plutôt que de créer un chômage qui est déjà suffisamment élevé?

M. BURNS: Vos études vous portent à conclure que celles qui sont rentables, actuellement, et efficaces, disparaîtraient avec cela?

M. BRUNELLE: Ecoutez, il faudrait distinguer beaucoup. Votre question est lourde de toutes sortes de sens.

M. BURNS: Vos affirmations aussi, M. Brunelle. C'est pour cela que je pense qu'il faut s'y arrêter sérieusement. Ce sont des affirmations lourdes de conséquences.

M. BRUNELLE: Vous vous rendez compte comme moi qu'il faudrait une enquête extrêmement complexe pour régler de façon objective les questions que vous posez. Il faudrait commencer par mettre d'accord les économistes, ce qui me parait à peu près impossible.

M. BURNS: De toute façon, si je comprends bien, votre affirmation là-dessus n'est pas basée sur une stricte conclusion scientifique.

M. BRUNELLE: Non. Elle est basée, comme je vous le dis, sur des renseignements qui nous viennent de personnes engagées dans l'entreprise.

M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres questions de la part des membres de la commission? Alors, je vous remercie, M. Brunelle. J'inviterais M. Dumesnil à faire l'exposé pour le groupe qu'il représente.

Commissions scolaires

M. DUMESNIL: M. le Président, Messieurs. Mon nom est Mario Dumesnil. Je représente la Fédération des commissions scolaires et la Commission des écoles catholiques de Montréal. Nous n'avons pas pu présenter de mémoire et nous aimerions avoir une semaine pour vous en produire un très court. Mon intervention est très brève. Nous demandons tout simplement l'exclusion, pour les commissions scolaires, pour les travaux faits aux immeubles scolaires, travaux de réfection, de réparation et de construction, par leurs propres employés permanents pour tout contrat d'une valeur de $25,000 et moins, incluant matériaux et main-d'oeuvre, pour un travail donné, dans un lieu donné, bien précisé. C'est la position des commissions scolaires et elle est fondée sur des facteurs très pratiques que je développerai dans le mémoire que je vous soumettrai.

D'une valeur de $25,000 et moins. Pourquoi $25,000? Nous nous appuyons sur l'expérience

passée. Nous avons colligé tous les décrets qui avaient de telles exclusions. Ils étalent tous de $25,000, ni plus, ni moins. C'est tout ce que j'ai à dire. Je vous remercie.

M. LE PRESIDENT: Ce fut très bref. Je vous remercie. Maintenant, si vous voulez attendre un instant, le député de Bagot désire vous poser une question.

M. CARDINAL: Est-ce que j'ai bien compris?

UNE VOIX: On n'entend pas du tout, quand ceux qui sont au micro parlent.

M. LE PRESIDENT: Nous demandons aux gens qui vont au micro de s'exprimer plus fortement.

M. CARDINAL: Alors la question que je pose est celle-ci: je voudrais savoir si j'ai parfaitement compris, Me Mario Dumesnil. Vous ne parlez d'exception que pour les employés permanents des commissions scolaires et non pas...

M. DUMESNIL: Exact.

M. CARDINAL: ... pour tout le travail de construction, en général, fait par les commissions scolaires, membres de la fédération ou de la CE CM.

M. DUMESNIL: Pas du tout.

M. CARDINAL: Dans le fond, c'est une position semblable à celle, par analogie, de la ville de Montréal.

M. DUMESNIL: Pas tout à fait semblable. Nous ne demandons pas l'exemption totale.

M. CARDINAL: Non, vous avez votre limite, votre marge de $25,000.

M. DUMESNIL: Pour les menus travaux. $25,000 et moins.

M. CARDINAL: C'est-à-dire qu'au lieu de définir ce qu'est une construction ou un entretien, vous dites, c'est bien simple: Si on fait faire les travaux par des employés permanents qui sont à définir et que c'est moins que $25,000, ce sera considéré comme entretien, au-delà, ce sera considéré comme construction.

M. DUMESNIL: Pour les menus travaux rapides qui doivent être faits dans une commission scolaire et qui ne peuvent pas attendre.

M. CARDINAL: Vous ne craignez pas qu'à ce moment-là il se fasse une certaine déviation du décret ou de la loi, en ce sens qu'il serait facile de faire deux contrats pour un travail de $50,000 pour que chacun ne vaille que $24,500?

M. DUMESNIL: Pas du tout. Nous avons dit: pour un travail donné, dans un lieu donné et bien précisé. Nous demandons que ce soit très bien précisé pour éviter tout échappement possible.

M. CARDINAL: Remarquez que ce n'est pas la bonne foi, ni du représentant des commissions scolaires, ni de la fédération. Mais comme le disait tantôt le ministre du Travail, la nature des hommes étant ce qu'elle était, le nombre des commissions scolaires étant ce qu'il est et le nombre des commissaires étant encore évidemment plus élevé et variable d'un endroit à un autre, et la nature des travaux étant très variable d'une commission scolaire à une autre... L'école de Saint-Théodore-de-Bagot, ce n'est pas la même chose qu'une école polyvalente dans la ville de Montréal. C'est pourquoi je vous pose ces questions pour que le problème soit vraiment cerné et que l'exception que vous demandez, sans la juger, nous en sachions les limites très précises.

M. DUMESNIL: Nous voulons qu'elle soit précisée de façon très claire, très nette. Nous ne voulons aucun échappatoire et nous voulons exactement ce que nous demandons pour les travaux mineurs de $25,000 et moins, pour les menues réparations, construction dans les écoles, les affaires urgentes et autres, par nos employés d'entretien. Nous n'avons aucune objection à ce que ce soit très bien cerné. Aucune.

M. CARDINAL: Est-ce qu'on peut vous demander les raisons précises de cette demande d'exception limitée?

M. DUMESNIL: n y en a plusieurs. D'abord, cela va soulever un problème de comptabilité assez difficile. Parce que vous allez avoir un employé permanent qui va faire le travail de construction, mais s'il prend 1/5 de son temps, s'il prend une demi-heure dans sa journée, s'il prend une heure dans sa journée pour faire un travail de $45 à $50, cela va nous amener à une comptabilité extrêmement difficile. Je passe rapidement.

Deuxièmement, vous avez le problème de deux conventions collectives. Parce que tous ces employés sont déjà couverts par la convention collective. Alors vous allez avoir le chevauchement du décret, le chevauchement de notre pro-

pre convention collective, lesquelles peuvent être contradictoires pour dix ou quinze minutes de travail, une heure de travail dans une semaine par tel et tel employé. Vous avez des commissions scolaires qui ont 400 à 500 employés, d'entretien comme la CECM.

Alors, ça va demander un contrôle impossible, une comptabilité impossible. C'est pour ça que nous demandons que le problème soit cerné. Nous n'avons aucune objection à ce qu'il soit très bien cerné. L'autre problème, c'est que, si nous n'avons pas l'exemption, nous serons obligés de faire des soumissions pour des contrats de $1000, $2000, $3000 ou $4000, avec les retards et les délais. Quand il faut réparer quelque chose à une école et le faire rapidement, nous n'avons pas le temps de demander des soumissions pour un montant de $500 ou de $600.

M. CARDINAL: Ai-je compris que vous avez l'intention, au nom des deux groupes que vous représentez, de déposer un mémoire?

M. DUMESNIL: Oui. Nous n'avons pas eu le temps de le faire vu que nous avons été convoqués il n'y a que deux ou trois jours. Alors, ça nous a été impossible. Mais, nous allons vous soumettre un mémoire, avec des chiffres et des arguments à l'appui.

M. CARDINAL: Merci.

M. LAPORTE: Votre argumentation m'invite à ajouter à ce qu'a dit le député de Bagot. Dans le mémoire que vous allez nous présenter, je voudrais que vous insistiez sur un point. On est venu nous dire, ce matin, que l'entretien n'est pas de la construction et qu'à cause de cela nous devrions confier à des gens qui ne sont pas soumis au décret de la construction les travaux d'entretien. La ville de Montréal, l'Hydro-Québec et vous-même venez de nous le dire, pour vos clients, sans vous prononcer sur le principe. Pour les travaux d'un montant de $25,000 et moins, nous demandons à être relevés du décret et, pour les travaux de $25,000 ou plus, nous serions soumis au décret. C'est un principe nouveau. Reconnaissez-vous, quant à vos clients, que l'entretien peut, à un certain moment, être classé comme de la construction et que vos gens soient soumis à toutes les clauses du décret de la construction? Est-ce le montant qui détermine cela? J'aimerais bien, sans que nous élaborions cet après-midi...

M. DUMESNIL: Sans élaborer, nous vous disons franchement que nous reconnaissons que des travaux faits par nos hommes d'entretien sont des travaux de construction. Nous le reconnaissons, mais nous vous disons: C'est impossible d'application, à cause des faits que je vous ai donnés.

M. LE PRESIDENT: Le député de Bagot.

M. CARDINAL: Tout ce qui vient d'être dit est très important. Me Dumesnil...

M. LAPORTE: Je comprends.

M. CARDINAL: ... étant avocat, le ministre de la Justice aussi, l'on sait comment il est difficile — là, je prends un exemple par analogie — pour les techniciens en certaines matières de distinguer, dans la vie civile, selon le code civil, entre ce qu'on appelle des gros travaux et de petits travaux, pour savoir si, par exemple, c'est le locataire ou le propriétaire qui doit le faire. Toute cette section du code civil, qui vient distinguer par des principes, fait que, dans la réalité des choses, les avocats ont beaucoup de travail, non pas pour clarifier les principes de nos codificateurs, mais...

M. LAPORTE: Pour les embrouiller.

M. CARDINAL: ... pour essayer de les mettre en pratique. Depuis ce matin, nous avons assisté à deux phénomènes, je pense: d'une part, le procès de la loi 290 beaucoup plus que les négociations qui sont en cours depuis une année et demie; d'autre part, beaucoup de demandes d'exception. Là, pour la première fois, quelqu'un nous dit bien franchement: La différence entre l'entretien et la construction est tellement ténue que tenter d'en faire une définition serait illusoire. Mettons donc un cran d'arrêt et nous pourrons partir de là pour établir des exceptions, ce qui a été fait, d'ailleurs, dans plusieurs lois sous forme de statuts quand on n'a pas pu établir des distinctions qui pouvaient dans la pratique s'appliquer.

Je tiens à le souligner parce que je pense que, pour le gouvernement — je ne dis pas que j'accepte le montant de $25,000 ou le principe — il y a quand même un tournant qui vient de se faire depuis les auditions de ce mâtin.

M. LAPORTE: Oui. Dans le même ordre d'idées, ce que vous dites est fort important.

M. DUMESNIL: Je vais vous donner un cas. La CECM a environ 400 écoles. Alors, il faut de l'entretien, il faut des réparations qui sont de leur nature des petites réparations. L'année pas-

sée, la CECM a donné pour $25 millions de contrats à d'autres, mais, à l'intérieur de la CECM, par exemple, vous avez eu, dans ces écoles-là, environ $350,000 à $400,000 de réparations de la nature de constructions qui ont été faites par les employés de la CECM, qui sont 700 ou 800 dans environ 400 écoles ou autres immeubles.

Alors, c'est de la construction, mais c'est de la menue construction. Ce sont des montants de $100, $200, $1,000, $1,200, mais c'est fait par des employés de la CECM qui sont syndiqués, qui ont une convention collective et qui ont le métier de menuisier ou d'autres métiers.

M. LAPORTE: Est-ce que vous suggérez que les contrats, appelons-les d'entretien pour qu'on puisse se bien comprendre, que vous donnez à l'extérieur, d'un montant de moins de $25,000, ne soient pas soumis au décret?

M. DUMESNIL: Non, nous ne donnons aucun contrat. Quand je parle de moins de $25,000, il faut bien me comprendre. Ce sont les travaux d'une commission scolaire. Cela peut être $25,000 pour une commission scolaire comme la CECM, $8,000 ou $1,000 pour une autre commission scolaire. Ces travaux sont faits par les employés permanents de la commission scolaire. Quand je parle de l'exclusion de $25,000 et moins, c'est pour des travaux faits par les employés permanents de la commission scolaire.

M. LAPORTE: Très bien. C'est clair. Dans votre mémoire, puisque vous reconnaissez, disons presque sans discussion, le principe que les travaux d'entretien sont analogues à des travaux de construction, il va maintenant falloir que vous nous expliquiez — c'est une question véritable — en vertu de quel principe les ouvriers de la région de Montréal, même à partir de $1, seraient privés des avantages et soumis aux inconvénients du décret. Pourquoi $25,000 plutôt que $2, puisque c'est de la construction?

M. DUMESNIL: Nous avons corrigé, nous avons ici les exemptions, nous avons tous les décrets depuis 1963-1964. Le montant de $25,000 est pas mal le montant permanent.

Ce que nous voulons faire comprendre, c'est que nos employés permanents qui font de l'entretien en font pour les quatre cinquièmes de leur temps. Un cinquième de leur temps peut être consacré à des travaux de menue construction de $400, de $350, par exemple. Ce sont ces travaux qui, dans une commission scolaire donnée, peuvent se chiffrer par $10,000 par année, $11,000, $200 ou $2,000. Comme c'est fait par nos employés permanents, nous demandons l'exemption. Comme je vous l'ai expliqué, je ne veux pas me répéter...

M. LAPORTE: Je sais que vous êtes un garçon fort intelligent et que je connais depuis très longtemps, mais je veux savoir pourquoi $25,000, pourquoi la convention cesserait-elle de s'appliquer à $24,900? Si vous admettez que c'est de la construction, pourquoi la règle ne s'appliquerait-elle pas à la commission scolaire de Montréal? La ville de Montréal vient nous dire: Ce n'est pas de la construction, c'est de l'entretien. L'Hydro-Québec vient nous dire: Ce n'est pas de la construction, c'est de l'entretien. Là, au moins, on décide que oui ou non, mais on a quelque chose. Vous nous dites, vous: Quant à nous, nous admettons que c'est de la construction, mais, en bas de $25,000, nous voudrions être soustraits du décret.

M. DUMESNIL: Oui, nous allons vous dire pourquoi; c'est parce que nous avons nos employés permanents liés par une convention collective et payés pour les travaux. Ils sont déjà amplement protégés, ils ont toute la protection voulue.

M. LAPORTE: Vous aviez ça, disons, dans toute la province de Québec, vous aviez diverses conventions. A un moment donné, est arrivé le bill 290, est arrivée une convention unique qui a couvert tous les ouvriers qui s'occupent de construction.

M. DUMESNIL: Non, ce n'est pas la même chose.

M. LAPORTE: C'est ça que je vous demande de nous expliquer.

M. DUMESNIL: Ce n'est pas la même chose.

M. LE PRESIDENT: Le député de Chicoutimi, d'abord.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Dumesnil, pour bien comprendre cette question de distinction entre travaux d'entretien et travaux de construction et à partir de ce barème de $25,000 dont vous parlez, supposons qu'au début de l'année, pour des raisons urgentes, vous ayez besoin d'aménager le bureau du directeur ou du proviseur du collège. Est-ce de la construction, à votre avis, ou de l'entretien?

Disons que ça va coûter éventuellement

$8,000, $10,000; est-ce de la construction ou de l'entretien?

M. DUMESNIL: II peut y avoir pour moitié de la construction, pour moitié de l'entretien. Nous autres, nous ne nous acharnons pas au montant.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Bien voici, vous ne vous acharnez pas aux...

M. DUMESNIL: Ce que je veux dire, c'est ceci; par exemple, dans une école donnée, vous avez des réparations à faire, mais les réparations, ça peut être de la réfection. De la réfection et des réparations, pour moi c'est de la construction. C'est mon idée. L'entretien, ce n'est pas ça. L'entretien, ce sont tout simplement des choses ordinaires qui ne demandent pas de corps spécialisés pour le faire.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Dumesnil, vous n'avez pas répondu exactement à ma question. Le ministre l'a souligné tout à l'heure, ça nous préoccupe, ce problème. Vous demandez une exemption, je vous pose une question très précise. Au début de l'année, comme ça se fait chaque année dans les écoles, on a besoin d'aménager des bureaux. Et votre conseil de l'école estime que, pour aménager le bureau du directeur, ça va coûter $8,000 ou $10,000. Est-ce que vous allez demander à requérir les services des employés permanents ou si vous allez confier ça à un entrepreneur en construction? Si ce sont les employés de la commission scolaire ou quelqu'un de l'extérieur qui le fait, est-ce que ces gens-là font de la construction ou non?

M. DUMESNIL: Pour répondre à votre question...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je ne parle pas de déplacer des ampoules et quelques fils électriques.

M. DUMESNIL: Non, non. Si la commission scolaire le fait faire par les employés permanents, il est évident qu'il va y avoir une partie de ces travaux qui vont être de la construction, de la réfection et une autre partie qui vont être des travaux normaux de réaménagement d'un bureau qui ne demandent absolument rien. Et la commission scolaire, si elle n'a pas les moyens de le faire, si elle n'a pas le personnel pour le faire, elle pourra y aller par appel d'offres et alors, cela pourra devenir un contrat de construction. Mais ce qui arrive, c'est justement cette difficulté de départager, dans un travail donné, par les employés permanents, ce qui est entretien proprement dit et ce qui est construction proprement dite dans ces menus travaux, dans ces travaux courants: réparations d'une porte, bris d'ascenseur, des choses comme cela. C'est la difficulté de répartir dans les petits travaux, dans les menus travaux, ce qui est entretien proprement dit et construction. Prenez, par exemple, un employé qui va vérifier un système donné dans une école. L'entretien va demander qu'il vérifie et qu'il répare, à un moment donné, mais en faisant ce geste-là, il se peut qu'il y ait une parcelle qui soit de la construction proprement dite. C'est cela que l'on veut éviter; ce sont des difficultés d'application. On ne nie pas qu'il y ait une certaine partie qui soit de la construction, on ne le nie pas, au sens que vous l'entendez, pas du tout. C'est la difficulté d'application. Sur cinq heures, il peut y avoir une heure de construction proprement dite; le reste, c'est quatre heures. Mais cela n'est pas divisé en une heure et quatre, c'est ensemble et de là, la difficulté, pour les commissions scolaires.

C'est pour cela que nous demandons l'exemption. Nous avons dit $25,000; le montant de $25,000 est basé sur les décrets antérieurs. Nous n'y tenons pas plus que cela à ce montant de $25,000. Que ce soit un montant plus bas que $25,000, aussi près que $25,000 que possible. Le montant de $25,000 n'est pas un montant qu'on a pris en l'air, c'est un montant basé sur les anciens décrets que je déposerai avec notre mémoire.

M. LE PRESIDENT: Le député de Maisonneuve.

M. BURNS: M. Dumesnil, je voudrais savoir, quand vous parlez du $25,000, si vous voulez dire $25,000 par année ou pour chaque contrat de $25,000.

M. DUMESNIL: Je veux dire au moins $25,000 par travail donné, dans un lieu donné, dans une école donnée, dans un endroit donné.

M. BURNS: Dans le cas que vous nous citiez tantôt, par exemple la CECM qui donne pour $450,000 de travaux à l'extérieur.

M. DUMESNIL: Non, non, la CECM se trouve à avoir, par exemple, dans une année, entre $300,000 et $400,000 de travaux faits à ces 400 écoles environ, par ses hommes d'entretien. Mais ce montant-là n'est pas totalement

pour de la construction. Il peut y en avoir trois quarts pour l'entretien et un quart pour la construction, la réfection et la réparation.

M. BURNS: Je m'excuse, j'avais mal compris.

M. DUMESNIL: Elle a le personnel voulu pour ça et c'est déjà couvert, tout est là. Ce serait très difficile de départager...

M. BURNS: Prenons ces $300,000, chaque travail pourrait, s'il était de moins de $25,000 et si votre suggestion était acceptée, être fait en dehors de la juridiction du décret...

M. DUMESNIL: C'est ça qu'on aimerait entendre.

M. BURNS: ... et de façon...

M. DUMESNIL: C'est ça; pour des raisons que nous expliquons: difficulté d'application, difficulté de comptabilité, chevauchement de la convention collective, clauses contradictoires dans les conventions collectives et cotisations syndicales qui peuvent être différentes. Alors, il faudrait calculer les 10 minutes que prend un employé pour un contrat de $800, ce qui est vraiment au décret, l'extraire et le payer selon le décret tandis que pour les 50 autres minutes il sera payé suivant la convention collective.

M. LE PRESIDENT: ... Silence, s'il vous plaît pour que l'on entende M. Dumesnil.

M. DUMESNIL: C'est la difficulté d'application tout simplement. Nous ne demandons aucunement une exemption totale pour les commissions scolaires. Le montant de $25,000, je le répète, est le montant qui avait été fixé par le législateur auparavant, aussi récemment que 1969; depuis 1961, je les ai tous ici, on les a tous colligés.

M. LE PRESIDENT: Le législateur en tiendra compte. Le député de Bagot.

M. CARDINAL: J'aurais deux remarques, M. le Président. La première il y a un député qui vient de la faire à voix basse, je lui en donne le crédit, c'est le député de Terrebonne — c'est que, à ce moment-là, c'est une distinction purement pragmatique qui n'est fondée que sur des questions de réalités.

M. DUMESNIL: Oui.

M. CARDINAL: Mais, cependant, cela conduit à des conclusions qui sembleraient, parce que l'on part d'une prémisse pragmatique, à des conclusions qui seraient fonctionnelles mais qui, au contraire, vont devenir irrationnelles. Je prends trois cas différents. Vous avez une commission scolaire qui fait faire des travaux en deça de la somme de$25,000 par des permanents, parce qu'elle en a. Cela échappe au décret. La commission scolaire voisine, parce qu'elle n'a pas de permanents, fait faire le même genre de travaux, pour le même prix et cela tomberait sous le décret. Troisièmement, si le ministère de l'Education accepte le projet RAS après les études IRNES, — pour ceux qui ne saventpas ce que c'est, c'est le projet qui permet de construire des écoles par modules y compris les murs, les plafonds, le système d'éclairage, le chauffage, l'aération, etc. — ceci veut dire qu'à tout moment, à chaque année ou à tout moment dans une année donnée, on pourrait modifier dans ces écoles, déplacer les modules.

A ce moment-là, est-ce que ce serait de la réfection, de l'entretien, de la construction! Cela nous donne trois situations différentes.

M. DUMESNIL: M. Cardinal, c'est pour ça que nous vous disons que nous sommes d'accord, que ce soit bien cerné, bien précisé. Nous ne voulons pas d'échappatoire. Quant au cas que vous donnez, celui d'une commission scolaire bien organisée au point de vue de l'entretien, puis d'une autre, cela ne change pas le problème.

Le problème, c'est la commission scolaire, qui a des employés d'entretien avec lesquels elle a une convention collective, avec des clauses précises. C'est cette commission scolaire qui va être frappée; pour l'autre, ça ne change rien, elle ira sur le marché, elle fera ses appels d'offres, puis elle acceptera la ou les meilleures. Cela ne change rien.

M. CARDINAL: Mais vous acceptez que, entre, par exemple, les commissions scolaires locales et les commissions scolaires régionales et les commissions scolaires immenses, les conséquences seront différentes, parce que les locales, qui sont en très grand nombre, n'ont pas le personnel d'entretien suffisant, même pas pour agrandir la cour d'école.

M. DUMESNIL: Ces commissions scolaires seront soumises au décret, il n'y a pas de problème. Mais ce sont les commissions scolaires qui sont déjà constituées avec leur propre...

M. CARDINAL: C'est-à-dire que le fait qu'il

n'y ait pas de problème, c'est ce qui me paraît être le problème. Remarquez, je ne critique pas votre thèse. Je l'ai dit tantôt, ç'a été un tournant dans la discussion aujourd'hui, mais je pense que vous avez exposé clairement ce que vous vouliez, qu'il n'y a pas absence de problème, mais que le problème est cerné.

M. DUMESNIL: C'est ça.

M. CARDINAL: Evidemment, le gouvernement décidera, maintenant qu'il a décidé...

M. DUMESNIL: Mais, je tiens à le répéter, le problème est cerné et nous voulons un texte clair et précis pour éviter toute échappatoire. Nous avons des commissions scolaires très bien charpentées avec un personnel d'entretien capable de faire ces menus travaux. Le montant de $25,000, je le répète, c'est puisé dans une législation déjà existante ou autrefois existante; le montant n'a pas d'importance. Nous disons que, quand il s'agit de $25,000 et moins, mais aussi près que possible de $25,000, il faut laisser faire ça par les commissions scolaires pour éviter des difficultés d'application, des difficultés de comptabilité, de vérification et de chevauchement, de contradiction aussi entre les clauses du décret à venir et les clauses de la convention collective nous liant et existant entre la commission scolaire donnée et ses employés.

M. CARDINAL: J'aimerais bien que le ministre de l'Education soit ici pour nous dire s'il va rester seulement 180 commissions scolaires au lieu de 1,200 l'automne prochain, car cela changerait les conséquences de votre thèse.

M. LAPORTE: Vous communiquerez avec lui, quand vous en serez rendu là.

M. LE PRESIDENT: Le député de Rouyn-Noranda désire vous poser une question, M. Dumesnil.

M. SAMSON: M. le Président, j'aimerais poser une question à M. Dumesnil. Vous avez mentionné tantôt que vous aimeriez profiter d'une exemption de $25,000 pour chacun des contrats. Est-ce bien ça?

M. DUMESNIL: C'est-à-dire que ce n'est pas pour les contrats, mais pour les travaux. Prenez, par exemple, la CECM, qui a un travail à faire dans une école; ce travail peut se chiffrer les coûts par $1,800. Elle fait faire le travail de $1,800; ce peut être un travail de construction, de réparation ou de réfection, même ce qui tomberait sous le décret autrement. Elle peut faire faire ce travail, elle a les moyens de faire faire ce travail par ses propres employés. Vu que ça ne coûte que $1,800, ce serait alors la convention collective de la CECM qui régirait le travail et non pas le décret. C'est ça qu'on veut dire.

Quand on dit $25,000, c'est que si c'était un travail ou une réparation ou quelque chose qui demanderait un montant supérieur à $25,000, nous irions alors en appel d'offres comme tout le monde et nous ferions appel aux soumissions parce que ce serait un travail considérable.

M. SAMSON: Mais, dans votre optique à vous, qui pourrait être appelé à en faire le contrôle pour que ça se passe dans les normes?

M. DUMESNIL: Disons que ce seraient les autorités responsables du décret. Là-dessus, nous n'aurons aucune objection à tout contrôle possible; les livres sont ouverts, ce sont des livres publics. Les livres seraient ouverts en tout temps et on pourrait vérifier combien dans telle école a coûté tel travail de réfection; nous avons nos comptables, qui donneraient les chiffres. En cela, nous n'avons aucune objection à tout contrôle possible. Au contraire, nous vous le disons, nous demandons d'être exempt, et nous demandons que la clause soit bien faite pour qu'il n'y ait pas d'échappatoire, avec tous les contrôles possibles.

M. SAMSON: Pourrait-il arriver, par exemple, qu'au lieu d'entrevoir des travaux de $48,000 d'un seul coup vous prévoyiez de faire deux fois des travaux de $24,000 pour échapper à ça?

M. DUMESNIL: II y a peut-être là un danger, mais on ne peut pas présumer que les connussions scolaires feraient ça. S'il y avait vraiment quelque intention de contourner la loi, que les punitions et les sanctions s'appliquent. Donnez des dents à votre décret pour punir la commission scolaire qui se permettrait un truc comme celui-là.

M. SAMSON: Nous sommes d'accord avec vous qu'on ne peut pas présumer. Mais nous prenons bonne note de ce que vous venez de dire à l'effet qu'il y a un danger.

M. DUMESNIL: Que votre décret nomme aussi ceux qui vont jouir d'exemptions; qu'ils soient punis sévèrement s'ils essaient de contourner la loi par le truchement d'une exemption. Cela ne peut pas être plus clair. C'est notre position.

M. LE PRESIDENT: Merci bien, M. Dumesnil. Je crois que quelqu'un veut poser des questions à M. Dumesnil. Voulez-vous rester disponible, M. Dumesnil.

M. LEFEBVRE: Mon nom est Claude Lefebvre. Je représente l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec. Plutôt qu'une question, ce serait une autre considération pragmatique sur les $25,000 mentionnés par M. Dumesnil. Cela représente dans notre domaine quelque chose comme deux maisons d'habitation unifamiliale. Cela représente aussi 50 contrats de plomberie pour 50 maisons. Si l'on figure le taux à 40% de main-d'oeuvre, sur $25,000 de travaux, cela représente, $10,000 de salaires et si vous calculez un salaire à $5 de l'heure, cela représente quand même 2,000 heures d'ouvrage.

Or, la demande de Me Dumesnil dit toujours: Bien voici, il est difficile de calculer. Je conçois avec lui que, pour une commission scolaire, calculer deux, trois ou quatre heures d'ouvrage, cela peut devenir difficile au cours d'une semaine de 40 heures. Mais lorsque l'on parle de travaux de l'ordre de $25,000, cela correspond au minimum à 2,000 heures de travail. Je pense qu'à ce moment-là, il est facile pour une commission scolaire comme pour un simple entrepreneur de le calculer.

M. LE PRESIDENT: M. Desjardins.

M. DESJARDINS: Dans le bill 290, à l'article 26, il y a la même exception, mais c'est pour des travaux au-dessus de $25 millions. Voici maintenant ce qui arrive. Prenez par exemple l'aéroport de Sainte-Scholastique. Il y a des travaux qui sont commencés. Etant donné qu'ils sont donnés par tranches, il n'y a eu aucune rencontre avec les autorités fédérales et les travaux de $25 millions n'ont pas encore été donnés. Dernièrement, lundi passé, j'ai rencontré le représentant d'une compagnie qui a un contrat en province. Le contrat total est de $100 millions. La première tranche est seulement de $10 millions. J'ai demandé s'il y aurait une rencontre, tel que l'article 26 le stipule. Il a dit: II ne s'applique pas à nous; notre contrat est de seulement $10 millions. C'est seulement une partie du contrat. Il y a donc un gros danger que la somme de $25,000, tout le monde joue avec elle, comme c'est le cas présentement pour l'aéroport et comme beaucoup d'entrepreneurs le font.

M. LE PRESIDENT: Le suivant, pourriez-vous vous identifier, s'il vous plaît?

M. CAMPEAU: Aimé Campeau de la CECM, directeur des relations industrielles. Sans revenir sur ce que M. Dumesnil nous a présenté tantôt, j'aimerais ajouter que pour ce qui est de la CECM seulement, la définition qui existe actuellement et qui a été négociée entre les parties peut causer, à mon avis, d'énormes difficultés à un employeur comme la CECM, comme cela en causait, vous l'avez vu cet après-midi, à la ville de Montréal, à l'Hydro-Québec, etc. Je suis surpris de ne pas voir des employés de syndicats d'entretien venir ici donner leur point de vue. Cela me surprend énormément. Est-ce qu'ils viendront plus tard? Peut-être. Mais je pensais les voir aujourd'hui.

Je pense par exemple à des cas pratiques que vous allez peut-être trouver ridicules, mais qui pourraient très bien se produire. Quand un homme d'entretien fait pendant deux heures de la journée un travail qui est censé être un travail de construction, même si on s'entendait sur le fait qu'il en fait vraiment, de la construction, qu'est-ce que l'on va faire au point de vue de l'employeur? Est-ce que l'on va avoir un petit nègre pour le suivre afin de savoir s'il a travaillé une heure et demie ou deux heures pour le payer à un taux différent? H pourrait fort bien arriver également — et cela serait au détriment des employés — que le taux que l'on devrait payer à un employé pour de la construction serait inférieur à un moment donné à ce qu'on le paie actuellement pour de l'entretien. Ce serait peut-être un problème qu'il faudrait examiner.

Il y a un tas de choses qui peuvent se produire et je pense qu'il y a assez d'experts autour de la table pour les deviner aussi. Un bonhomme qui se blesse au travail pendant qu'il fait de la construction, est-ce que l'on va lui donner des journées de maladie comme à un homme d'entretien ou est-ce qu'on va le payer d'après ce qui est prévu dans le décret de la construction dans ce cas-là? Quant à la caisse de retraite, est-ce qu'il va verser à deux caisses de retraite? Je pense que s'il n'y a pas une définition aussi précise que possible, disant ce qu'est un travail d'entretien ou donnant la permission à certains employeurs tels que la CECM de les exclure pour des raisons qui ont été expliquées par d'autres, cela pourrait causer énormément de difficultés, et ce n'est pas applicable.

M. LE PRESIDENT: Merci. D'autres représentations? Auriez-vous l'obligeance de vous approcher du micro, s'il vous plaît?

M. BRUNET: Yves Brunet. Je viens de

faire quelques commentaires. Je pensais que c'était une période de questions. Mais comme c'est une période de commentaires et que j'ai eu le plaisir de passer le premier et non maintenant, je voudrais faire quelques commentaires.

La base monétaire, pour faire la distinction entre entretien et construction, me semble tout simplement farfelue. Le meilleur exemple de cela a été le représentant des habitations, si je ne me trompe, qui a dit, justement, que l'on peut construire plusieurs maisons en bas de$25,000, comme on peut faire plusieurs travaux de plomberie en bas de $25,000. Donc, la solution proposée, basée sur un certain montant d'argent, à mon point de vue, est une solution farfelue. On essaie d'éviter, à ce moment-là, une distinction qui, au fur et à mesure des représentations qui sont faites, s'impose entre entretien et construction. Cette distinction — je l'avoue avec tout le monde qui est ici — est difficile à faire. Mais, encore ce matin, j'ai dit à la fin et je le répète maintenant: Ce n'est pas parce que la distinction entre ce qui peut être construction et ce qui peut être entretien est difficile à faire qu'il faut dire: C'est trop difficile; nous allons nous asseoir là et laisser les parties s'amuser par la suite.

Je prends comme exemple, l'industrie que je représente aujourd'hui. Pour ceux qui n'étaient pas ici, c'était cette industrie de services qui s'appelle Catalytic et Canadian Vickers. En ce qui concerne l'industrie de services à l'extérieur, eh bien, $25,000, pour nous, cela ne veut rien dire, puisque nous avons un contrat permanent d'entretien de l'équipement à l'intérieur d'une usine qui appartient à un tiers qui est, en fait, le client du client que je représente. S'il s'en va faire, dans son usine, des travaux purement d'entretien, est-ce que ces travaux sont évaluables à $25,000? Ce n'est pas une question d'évaluation. On fait un contrat à l'année — j'aurais dû préciser, ce matin, que ce sont des contrats même plus longs que cela; cela peut aller jusqu'à cinq ans - où notre client, Catalytic aussi bien que Canadian Vickers, s'en va travailler à une autre usine pour entretenir la machinerie et l'équipement en général, pour une période de cinq ans. A ce moment-là, est-ce $25,000, est-ce $30,000, est-ce $10,000? Cela n'a aucune importance puisque, pour moi — je le soumets respectueusement aux membres de la commission et aux députés présents — la distinction entre l'entretien et la construction ne peut pas être faite sur une base monétaire, mais plutôt selon le genre de travail effectué.

Je pense qu'il est difficile d'arriver immé- diatement avec une définition de l'entretien, mais je suis prêt à offrir mes services où que ce soit, à qui que ce soit, sur quoi que ce soit pour essayer de travailler sur le sujet. Je pense que c'est un sujet d'importance et qu'on le laisse de côté sous prétexte de difficulté.

Je soumets respectueusement, encore une fois, que cette distinction est essentielle.

M. LE PRESIDENT: Merci. Cependant, je ne voudrais pas que vous gardiez l'impression qu'il y a quelque chose de laissé de côté ici.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, non seulement nous n'avons pas laissé de sujets de côté, mais nous avons demandé à M. Brunet, ce matin, des précisions. Je suis encore à me demander s'il est capable de nous dire exactement ce qu'est l'entretien et ce qu'est la construction, particulièrement dans le cas évoqué par la CECM.

M. BRUNET: Me Cardinal a fait une distinction entre les réparations locatives et les réparations de propriétaire. Cette distinction, elle existe depuis une éternité. Il y a eu des thèses d'écrites sur chacun des sujets et on ne le sait pas encore. Pourtant, on a quand même maintenu cette distinction. Je m'excuse...

M. LAPORTE: Oui, disons que...

M. BRUNET: Tout à l'heure, j'essayais d'écouter ce qu'on disait, avec intérêt. Je me prenais les oreilles par en avant, mais, malheureusement, je n'entendais pas.

M. DE MERS: Maintenant, nous allons nous boucher les oreilles.

M. BRUNET: Je vais baisser la voix.

M. LE PRESIDENT: La commission a très bien compris ce que vous vouliez lui expliquer.

M. BRUNET: Eh bien, c'est qu'une question m'était posée. On me demandait de définir l'entretien. J'ai commencé à faire la distinction entre les réparations locatives et les réparations de propriétaire. Cette distinction, je le soumets, peut être acceptable entre entretien et construction. Il est clair qu'on passe imperceptiblement par ce qu'on pourrait appeler une zone grise entre entretien et construction, mais je suis loin d'admettre que construction égale entretien. Bien au contraire. Mais, comme dans la réparation locative et la

réparation du propriétaire, on passe une zone grise imperceptible qui est, à un moment donné, de la réparation du propriétaire et, à un autre moment, de la réparation locative. C'est la même distinction qui s'impose ici. Je pense que, si elle est difficile, elle l'est autant au point de vue du code civil. Elle devrait être faite dans le cas présent. Merci.

M. LE PRESIDENT: J'inviterais maintenant M. Jolin à faire des représentations.

M. JOLIN: Je m'excuse auprès des membres de la commission de n'avoir pas pu déposer un mémoire. Un malentendu, qui n'est que ma seule responsabilité, a eu comme résultat que j'ai été dans l'impossibilité de le faire et je demanderais de pouvoir le faire d'ici un maximum d'une semaine.

M. LE PRESIDENT: Permission accordée. Maintenant pourriez-vous vous identifier?

M. JOLIN: Oui, mon nom est Paul Jolin, avocat. Je représente le groupe Beloit, le groupe Reynolds et le groupe Marine, qui comprend les industries de Marine, Volcano, Forano, Fo-resteel et autres.

M. CARDINAL: M. le Président, avant que le représentant ne s'exprime, à plusieurs reprises, depuis le début, certains mandants ont exprimé le désir de présenter un mémoire, ce qui est fort louable, et ont demandé un délai d'une semaine. Ce matin, nous avons parlé d'une cédule de travail qui nous conduisait à vendredi. D'après certaines rumeurs, que les journalistes pourraient peut-être nous confirmer, il semblerait qu'il y aurait d'autres événements qui attireraient notre attention, qui réclameraient notre travail la semaine prochaine. Je ne voudrais pas que les mémoires de ceux qui se présentent devant nous arrivent après que les travaux de la commission seront terminés. Comme le ministre du Travail n'est pas présent, je ne demande pas à M. Jolin de répondre à la question, mais j'aimerais que la question soit référée au ministre du Travail et qu'il nous donne le point de vue du gouvernement à ce sujet.

M. LE PRESIDENT: II semble avoir été admis, tout à l'heure, qu'un délai maximum de cinq jours était suffisant pour permettre la présentation des mémoires.

M. JOLIN: D'accord en ce qui me concerne, en cinq jours, je serai en mesure de soumettre un mémoire.

M. CARDINAL: Mais il faudra que cela s'applique à tout le monde. C'est surtout cela que je veux dire. Parce que nous avons eu le même problème à la première réunion où nous ne savions pas si ça devait être le 1er octobre, ou le 2 octobre; finalement cela a été entendu pour le 6 octobre, pour la tenue de la commission. Je pense qu'il faudrait avoir la même convention pour que les gens soient tous égaux dans leurs discussions, leurs répliques et leurs exposés.

M. LE PRESIDENT: D'accord. Un délai de cinq jours est suffisant en ce qui vous concerne?

M. JOLIN: On fera l'impossible.

M. LE PRESIDENT: Comme d'habitude. Merci.

M. CARDINAL: Vous ferez comme nous, vous travaillerez en fin de semaine.

M. JOLIN: Cela arrive, M. Cardinal.

Groupes Reynolds, Beloit et Marine

M. JOLIN: J'aimerais vous soumettre, Messieurs, certaines considérations pratiques, parce qu'il serait un peu prétentieux de ma part de revenir sur les exposés assez complets qui ont été faits jusqu'à maintenant, considérations pratiques qui, je crois, pourraient s'appliquer, sans que j'en aie le mandat nécessairement, à tous ceux qui oeuvrent dans le secteur industriel et manufacturier.

Le groupe Beloit, pour vous permettre de vous situer, s'occupe de fabriquer des machines destinées à fabriquer le papier, des pompes pour fins industrielles et commerciales, et, éventuellement, de fabriquer, si le marché le permet, et compte tenu de certaines dispositions législatives, des machines-outils. Le groupe Reynolds, comme vous le savez sûrement, s'occupe de la transformation de l'aluminium sous toutes ses formes pour fins industrielles, commerciales et domestiques. Quant au groupe Marine, ses activités sont fort connues et très variées. Elles vont du dragage à la construction maritime, en passant par la construction et l'installation de turbines et je dirais aussi à l'entretien de turbines et à toutes les autres activités qui peuvent se situer en de ça de ces limites.

Tous les employés des clients que je représente sont actuellement liés par une convention collective en vigueur. Tous, sans exception. Quand j'entends tous, ce sont ceux qui pour-

raient éventuellement être liés par le décret, si on conservait la juridiction industrielle que les parties ont actuellement négociée. Quand je parle des parties, je parle des parties contractantes.

Nos clients, en aucun temps, sauf en de très rares exceptions, ne font ce qu'on appelle généralement de la construction. Lorsqu'ils en ont à faire, ils retiennent les services d'entrepreneurs spécialisés, ou s'assujettissent aux divers décrets, comme la loi l'exige, paient les taux de salaires et maintiennent les conditions de travail exigées par les décrets. Ce ne sont pas des employeurs professionnels au sens de la loi et ils constituent, dans le domaine industriel, un secteur important, puisqu'ils emploient environ 6,000 à 6,500 employés.

Ce qui a surpris mes clients, c'est qu'on a voulu les assujettir à des dispositions législatives conçues dans un contexte de construction, donc un contexte économique démographique totalement différent de celui où ils oeuvrent généralement. Nous ne faisons aucune construction; nous procédons à l'occasion, évidemment, à l'installation d'équipement et de machinerie, ce sur quoi je reviendrai dans quelques instants.

J'avais prévu entretenir les membres de la commission de l'aspect ultra vires de certaines dispositions de la législation actuelle et de ce qui a été négocié par les parties; je m'en abstiendrai pour faire miens les commentaires de Me Brunet et du Conseil du patronat, là-dessus.

Au point de vue pratique, que voulons-nous? Nous voudrions qu'on exclue du mot « construction » ce qui suit: d'abord, toute fabrication en atelier quelle qu'elle soit; deuxièmement, tous travaux d'entretien, avant tout. Je suis parfaitement conscient du problème que soulève cette distinction qu'on doit établir entre ce qu'est la construction et l'entretien, mais, encore là, je ne vois pas d'autre moyen plus utile, plus facile ou plus adapté dans les circonstances que de retenir les distinctions que le code civil a déjà faites en ce qui concerne les améliorations locatives, les réparations mineures ou majeures. Je suis parfaitement d'accord qu'il n'y a aucun texte de loi, si sages soient nos législateurs, pour régler tous les problèmes et il restera cette zone grise où il y aura des litiges qui se soulèveront à l'occasion.

Je soumets respectueusement que la position que Me Dumesnil a prise est juridiquement absolument intenable et qu'elle ne concerne que ses propres clients. Je crois que nous sommes ici devant la commission non pas pour régler un problème particulier — je fais exception maintenant de cas comme l'Hydro, par exemple, la ville de Montréal ou ceux sous l'empire de la Loi des cités et villes — mais pour régler le cas d'une collectivité, le secteur industriel et manufacturier en regard du secteur de la construction.

Alors, j'ai dit: Exclure la fabrication en atelier, tous travaux d'entretien, de rénovation ou de réparation effectués par un employeur non professionnel, par ses propres employés et pour son propre compte. J'exclus ainsi, en ce qui concerne le secteur industriel, de vouloir effectuer des travaux de réparation pour autrui. Je voudrais exclure aussi l'entretien, la réparation de machinerie, d'équipement et de machines-outils. Si vous lisez bien et comprenez comme je l'ai compris la juridiction industrielle que les parties ont bien voulu se donner, vous y verrez qu'on a voulu inclure cet entretien.

L'érection et le montage en usine ou à pied d'oeuvre de machinerie et d'équipement de toutes sortes.

Pour les employeurs du groupe Marine, il faudrait absolument exclure, d'abord, les travaux de dragage — ce n'est pas de la construction — les travaux de construction maritime qui requièrent un équipement et un personnel hautement spécialisés et pour lesquels la plupart des requérants, sauf exception, n'ont pas l'équipement nécessaire; il faudrait aussi exclure la construction navale, parce que ça n'a rien à voir avec la construction, au sens où on l'entend généralement, et tous les travaux effectués avec de l'équipement naviguant et flottant, en tenant pour acquis que cette généralité n'inclut pas la description que j'ai faite précédemment.

Au point de vue pratique, de quelle façon, à notre avis, devrait-on procéder pour pouvoir inclure, à un moment donné, ces exclusions?

Nous soumettons respectueusement qu'actuellement les dispositions telles quelles du décret et du bill 38 rendent la légalité des dispositions trop délicate pour que nous puissions nous engager dans des modifications.

Nous suggérons que vous adoptiez le décret tel quel, mais la seule référence que vous pourriez faire à la juridiction industrielle serait d'y répéter les articles 1-e) et 2 de la loi 290 dans le décret.

Amender la loi 38 pour permettre au ministre de donner des avis, c'est-à-dire d'abord une publication et des avis d'audition pour, par après, adopter une réglementation selon la représentation que les parties auront bien voulu lui faire.

En conclusion, je crois qu'on a voulu, avec le bill 290, faire une tentative de planification et de pacification d'un secteur, avec des résultats plus ou moins heureux selon les circonstances. Je peux assurer l'assemblée que, si

les exclusions dont je vous ai fait part ne nous sont pas accordées, j'ai l'impression que vous allez créer un autre problème qui va se soulever au niveau d'un conflit entre les syndicats qui représentent les ouvriers du secteur industriel et commercial et ceux qui représentent les ouvriers du secteur de la construction. La guerre est déjà commencée; moi-même, j'ai été témoin d'un conflit survenu à Trois-Rivières où, à cause d'une certaine difficulté d'interprétation, il y a eu une guerre intersyndicale entre des gens de la construction et des gens du secteur de la fabrication ou de la transformation.

Vous voulez la paix; nous aussi, nous voulons la paix. Nous voulons oeuvrer dans un secteur pacifique, rentable. Nous voulons être en mesure d'offrir nos produits à des taux qui sont comparables pour nous permettre de faire face à la concurrence tant sur le marché local que sur le marché étranger. Merci.

M. LE PRESIDENT: Merci, Me Jolin. Maintenant, l'honorable député de Maisonneuve.

M. BURNS: M. Jolin, juste une question. Vous nous avez dit que vous ne vouliez pas élaborer sur certaines dispositions que vous considériez ultra vires de diverses lois. Sans élaborer, est-ce que vous pourriez... Est-ce que j'ai bien compris quand...

M. JOLIN: Je me suis peut-être mal exprimé. Je prétends que le bill 290 ne peut permettre aux parties de définir leur propre juridiction industrielle parce que ceci ne constitue pas, à mon humble avis, une condition de travail. Donc, ce faisant, ça devient, à mon avis, ultra vires.

M. BURNS: Ah bon! Vous ne vous référiez pas au bill 290 qui était ultra vires à certains égards ?

M. JOLIN: Pas encore.

M. LE PRESIDENT: D'autres questions de la part des membres de la commission? Alors, je vous remercie Me Jolin, et nous invitons, Me Guy Gagnon à faire ses représentations.

Industrie du verre plat

M. GAGNON: M. le Président, messieurs les membres. Guy Gagnon, avocat. Je représente l'Association des employeurs de l'industrie du verre plat du Québec. Nous avons soumis un mémoire à votre commission qui ex- prime le point de vue de l'association d'employeurs qui groupe 80% sinon 90% de tous les employeurs de l'industrie du verre dans la province de Québec et dont les salariés sont tous assujettis à des conventions collectives de travail, en vertu de certificats d'accréditation accordés depuis plusieurs années par la Commission des relations ouvrières du temps.

Voici une autre industrie qui vient vous demander l'exclusion du décret de la construction. Evidemment, je suis conscient, arrivant à la fin de la journée comme ça, que les exclusions qu'on vous demande semblent nombreuses.

Je me suis demandé pourquoi il y avait tant de réactions dans ce sens-là, pour quelles raisons il y avait tant d'industries qui venaient ici s'adresser à vous pour obtenir une exclusion spécifique dans le décret.

Je pense que la raison fondamentale résulte de la façon dont les parties à la table des négociations ont tenté d'élargir leur juridiction industrielle et d'y englober non pas simplement les juridictions qui avaient trait exclusivement à leur domaine, c'est-à-dire à l'industrie de la construction, comme l'exige le bill 290, mais à un ensemble d'industries satellites qui, à l'occasion, se rendent sur les chantiers de construction.

Je pense qu'une distinction qui ne semble pas avoir été faite jusqu'à maintenant, ici, c'est la suivante: Dans la construction d'un immeuble, s'il y a, d'une part, des industries qui sont attachées directement à cette construction et qui sont conditionnées par le chantier, où l'employeur et le salarié sont conditionnés par le chantier de construction lui-même, il y a une foule d'industries satellites qui, elles, fabriquent en usine et ensuite vont faire l'installation sur le chantier de construction.

Les problèmes de ces deux secteurs de l'industrie sont complètement séparés et distincts. Dans le cas des industries qui sont centrées sur les chantiers de construction, il va de soi que ce phénomène d'être attachées au chantier de construction en toute circonstance joue un rôle prépondérant dans l'élaboration de la convention collective. Il va de soi également que les parties contractantes qui se sont assises à la table pour négocier étalent essentiellement des parties qui représentaient ce secteur essentiel de la construction. Toutes les industries satellites qui n'ont pas de représentation substantielle dans l'industrie — prenez par exemple l'industrie du verre qui groupe un maximum de 3,000 ouvriers dans toute la province de Québec; il n'y a aucun moyen pour les employeurs

de prétendre représenter les 20% prévus dans la loi pour être assis à la table des négociations — toutes ces industries, dis-je, se trouvent, par la force des choses, éliminées de la table et ne peuvent pas exprimer le point de vue qu'elles doivent exprimer.

Il s'ensuit également que toutes ces industries, qui ont généralement des conventions collectives, se trouvent à participer à un régime mixte de relations ouvrières qui n'a pas grand sens. D'une part, on tente en tout cas, en vertu des textes des conventions proposées, de les assujettir à un régime où il n'y a pas de certificat d'accréditation, où il n'y a pas de convention particulière et où le salarié ne vit qu'en fonction d'un chantier de construction. Par ailleurs, elles-mêmes ont des salariés qui sont assujettis à un régime de convention collective, qui sont assujettis à des certificats d'accréditation et qui sont appelés a aller, de temps à autre, à l'extérieur de l'usine, soit en chantier, soit i des endroits qui ne sont pas des chantiers.

L'application pratique de ces deux régimes à la même entreprise s'avérera certainement impossible. Dans les circonstances, pour ce qui est de l'industrie du verre, nous avons soumis un mémoire exposant d'une façon très précise les motifs pour lesquels l'industrie peut être considérée comme une industrie qui n'est pas l'industrie de la construction. Le bill 290 dit à l'article 2, que la présente loi s'applique aux employeurs et aux salariés de l'industrie de la construction. Or, le lieutenant-gouverneur en conseil, en 1963 ou 1964, par le décret no 2051, a reconnu que l'industrie du verre était une industrie distincte et a consacré cette reconnaissance en établissant une juridiction professionnelle et industrielle qui a trait à tout le travail exécuté par un employé ou un employeur de l'industrie du verre, que ce soit dans son usine ou à l'extérieur, en chantier ou non.

Je soumets respectueusement qu'il faudrait maintenir cette distinction, qu'il faudrait exclure l'industrie du verre du décret de la construction — et cela ne pose pas de difficulté quant à l'application du bill 290 — et maintenir le décret de l'industrie du verre qui ne devrait pas être affecté.

M. LE PRESIDENT: Merci, Me Gagnon. Maintenant, je ne veux pas déroger i la tradition. Y a-t-il des questions? Pas de question?

Le député de Chicoutimi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je voudrais simplement poser une question à Me Gagnon. Les entreprises que vous représentez fabri- quent du verre. Vous voulez naturellement qu'on exclue ces entreprises du décret. Maintenant, vous fabriquez et d'autre part vous installez également...

M. GAGNON: Par les mêmes salariés.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Et ce sont les mêmes gens qui font ce même travail. Ils fabriquent et ils installent. Evidemment, il y a des catégories spécialisées à l'intérieur de ces industries. Mais à partir du moment où on installe une devanture de magasin, etc., est-ce que c'est de la construction, à votre avis, ou non? Si je fais faire chez moi, par exemple, un portique en verre, est-ce qu'on fait de la construction, à votre avis?

M. GAGNON: Evidemment, c'est une activité qui ressemble étrangement à de la construction, puisque c'est une activité qui consiste à travailler sur un immeuble. Mais si cela participe de la construction, cela n'appartient pas à l'industrie de la construction comme telle. C'est la distinction qui doit être faite, je pense. L'inconvénient de ce qui se passe actuellement, dans l'esprit en tout cas des gens qui sont assis à la table des négociations, c'est qu'ils veulent assujettir des personnes qui ne sont pas là et qu'ils veulent assujettir des activités qu'ils ne font pas, avec le résultat évident qu'ils vont imposer des conditions inapplicables. La raison de toutes les objections que vous avez eues jusqu'à présent, si vous les analysez, la raison fondamentale est toujours celle-là. Ces gens disent: C'est très bien tout ce que vous dites, mais cela ne s'applique pas chez nous; ce n'est pas possible, il n'y a aucun moyen de le faire.

Je peux vous donner un exemple concret dans l'industrie du verre. Il y a une question de limitation d'heures de travail, je pense, dans le décret de la construction qui ferait qu'il n'y aurait pas possibilité de faire du travail en dehors des quarante heures. Bien, dans l'industrie du verre, c'est impossible. Quand une vitrine est cassée la nuit, il faut la réparer. Vous avez eu les événements du 7 octobre l'an dernier. Si l'industrie du verre avait été incapable de répondre aux besoins de cette situation, cela aurait été tragique. Vous avez le problème de la mobilité de la main-d'oeuvre. Les salariés spécialisés se trouvent groupés à Montréal et à Québec. Si on a besoin de faire un travail à Sherbrooke — malheureusement, il n'y a pas de salariés spécialisés pour faire ce genre de travail à Sherbrooke — on ne peut pas, en vertu de l'article 16, imposer aux sa-

larlés d'aller à Sherbrooke s'ils ne veulent pas le faire. Il est clair que c'est une application absolument impossible.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Gagnon, poussons ça à la limite. Vous nous demandez une exemption pour un type d'industrie bien caractérisée. Mais prenons chacune des industries qui fabriquent un matériau qui entre dans la construction, est-ce que ces entreprises n'en viendront pas à nous demander pareille exclusion? Prenez les fenêtres d'aluminium, par exemple. On fabrique à un certain endroit des fenêtres d'aluminium...

M. GAGNON: Cela fait partie de notre industrie.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Bon. Qui est-ce qui les pose? Et au moment où on les installe, est-ce que les gens qui les posent sont des employés, des ouvriers de la construction ou si ce sont des employés de la manufacture?

M. GAGNON: Ce sont les employés de l'Industrie du verre et il n'en a jamais été autrement.

M. LAPORTE: II peut arriver avec le développement technique qu'un immeuble en verre ait encore plus de verre que jamais et que ce ne soit pas de la construction.

M. GAGNON: Bien, je soumets que si ça appartient à une Industrie spécialisée qui peut être facilement distinguée de l'industrie de la construction, il n'y a aucune raison de...

M. LAPORTE: Très bien. Alors là, on va pousser le raisonnement, si vous voulez. H y a des gens qui vont maintenant faire de la préfabrication, du précontraint, des murs complets et tout ce qu'il y a c'est un mur complet et du verre parce que ces deux fabrications qui sont des spécialités, ce n'est pas de la construction au sens de la loi, à votre avis?

M. GAGNON: Evidemment, moi, je m'attache exclusivement à ce qui intéresse mes clients qui est l'industrie du verre.

M. LAPORTE: Mais si demain...

M. GAGNON: Il serait difficile pour moi de parler d'industries autres que celle-là.

M. LAPORTE: Est-ce que je peux imaginer que si vous veniez demain nous parler du précontraint, vous auriez une autre attitude?

M. GAGNON: Je représente certaines compagnies dans le précontraint. Je doute qu'elles veuillent manifester le même point de vue, parce que le problème n'est pas du tout le même. Dans l'industrie du verre, il y a toute une foule d'activités que le même salarié exécute...

M. LAPORTE: D'accord.

M. GAGNON: ... en dehors de l'usine et qui ne se déroulent pas dans un chantier de construction.

M. LAPORTE: J'ai l'impression que si on enlevait de la construction tout ce qui n'est pas de la construction, la construction ne serait pas terminée.

M. GAGNON: Evidemment, il n'y a rien à dire.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Me Gagnon...

M. GAGNON: Cela n'empêche pas les salariés d'être protégés par des conventions collectives.

M. LAPORTE: Oui.

M. GAGNON: Cela n'empêche pas les régimes de sécurité syndicale et de sécurité d'emploi d'agir.

M. LAPORTE: Sur cela, je suis d'accord qu' ils ont une autre protection. Mais quand le législateur décide — il est évidemment facile de constater aujourd'hui que cela ne se fera pas sans heurt et que c'est très complexe — de regrouper autant que possible en une seule unité tout ce qui est construction, cela pose un problème différent de celui que vous soulevez. Ce n'est pas tellement la protection de l'ouvrier ou de l'employeur, mais c'est l'unité.

M. GAGNON: Oui, évidemment, mais ce que je soumets là-dessus, c'est que la distinction que la loi permet de faire, et qui permettrait de résoudre plusieurs de ces problèmes, n'est pas faite présentement. Si cette distinction était faite, je pense qu'il y aurait davantage possibilité de régler les problèmes que vous avez devant vous, parce que les parties concernées auraient un mot à dire dans l'élaboration des conditions de travail qui les concernent. Cest ce qui fait présentement défaut

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Gagnon, j'ai encore deux observations ou questions à vous poser. Supposez, par exemple, qu'on veuil-

le faire disparaître toutes les fenêtres qu'il y a ici et qu'on les remplace par une immense panoramique, et qu'on fasse appel aux services des entreprises que vous représentez. Est-ce qu'à ce moment-là l'installation de la panoramique est de la construction?

M. GAGNON: C'est de la construction dans le sens large du mot. Cela n'appartient pas à l'industrie de la construction comme telle. C'est ça la distinction qu'il faut faire.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je vais vous poser une autre question en partant d'un exemple que je connais bien. Il y a dans la région de Chicoutimi un ingénieur qui a mis au point un système de fabrication — appelons cela des briques, si vous voulez, des blocs de plastique — au moyen duquel on pourra construire des maisons comme un enfant bâtit n'importe quoi avec un jeu de blocs. Cest au point, c'est approuvé et n'importe qui pourra emboîter ces blocs et construire une maison.

Cette entreprise vient donc ici devant nous et nous demande exactement la même exemption. Or, le but de cette entreprise, c'est de construire des maisons. Est-ce que cette entreprise serait une entreprise de construction ou non, ou simplement une entreprise de fabrication? Vous voyez. Je vous donne cet exemple...

M. GAGNON: D'accord.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... et je ne vous demande pas d'avis là-dessus. Je connais bien le problème là-bas. Mais je vous donne cet exemple pour faire sentir aux membres de la commission qu'il est extrêmement difficile de considérer toutes ces demandes d'exemption ou d'exclusion à partir des critères que vous avez défendus très brillamment et dans une langue dont je vous félicite, M. Gagnon. Cest extrêmement difficile pour le législateur, pour le gouvernement, d'acquiescer à votre requête, si chacune des entreprises fait une demande analogue prétendant que ce qu'elle fait relève exclusivement de la nature de son entreprise, et, même si ça doit prendre place dans de la construction, ce n'est pas de la construction.

M. GAGNON: Est-ce que vous me permettez de faire un commentaire?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je vous en prie, M. Gagnon.

M. GAGNON: Dans le cas que vous avez soulevé, je pense qu'il est assez clair que l'ac- tivité essentielle de l'industriel est le chantier de construction. Dans le cas de l'industrie du verre, cette affirmation n'est pas possible. Le chantier de construction n'est qu'une partie infime de son activité. La pose du miroir, par exemple, ne peut pas être considérée comme de la construction. La réparation d'une vitrine ne peut pas être considérée comme de la construction. Elle ne l'a jamais été.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): La pose d'une vitrine...

M. GAGNON: La pose d'une vitrine...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... fait partie de la construction d'un magasin, par exemple.

M. GAGNON: Cela fait partie d'un immeuble mais ce n'est pas de la construction, n y a une distinction très importante à faire, je pense.

M. LE PRESIDENT: Le député de Maisonneuve.

M. GAGNON: C'est parce que cette distinction n'est pas faite — je vous le soumets avec tout le respect que je vous dois — que les problèmes se posent. Parce que, à ce moment-là, on élimine de la négociation les parties qui ont un intérêt à négocier et qui savent de quoi elles parlent.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Le député de Maisonneuve, d'abord.

M. BURNS: M. Gagnon, vous avez dit que le travail, en somme, se partageait en deux parties: une partie en atelier, c'est-à-dire la fabrication, et une partie plus proprement dite, dans les chantiers, lors de la pose du verre, etc. Est-ce que vous êtes en mesure de nous dire quelle est la proportion de l'un et de l'autre qui est faite par ces employés?

M. GAGNON: Non, malheureusement, pour une raison très simple. Sur les 250 employeurs qu'il y a dans l'industrie du verre, il y en a peut-être trois ou quatre qui sont de grandes entreprises et qui, elles, pourraient techniquement diviser leur travail de manière que des gens soient exclusivement dans les chantiers de construction. Cela serait pensable parce que l'orientation de leur travail pourrait permettre une distinction comme celle-là. Mais l'ensemble de l'entreprise et celle qui souffre le plus de la situation présente et qui est menacée de disparition, ce sont tous les petits

entrepreneurs qui, eux, font en somme du service. Ils iront peut-être jusqu'à ce qu'on appelle la devanture de magasins; ils n'iront certainement pas à d'autres formes de travail. Tous ces gens se trouvent dans une situation absolument désespérée parce que le même salarié doit, nécessairement, travailler à tous les niveaux de l'entreprise. Les divers degrés de salaires, les régimes mixtes dans lesquels ils se trouvent plongés rendrent la tâche absolument impossible. Ils ne sont pas capables de contrôler les heures de travail de ces salariés qui travaillent souvent seuls et sur lesquels il n'y a aucun moyen d'exercer un contrôle.

M. BURNS: Vous n'avez pas le moyen de nous dire qu'elle est la proportion d'heures faites, disons, dans le cas où vous avez les mêmes salariés qui feraient le travail du début à la fin. Vous ne pouvez pas nous dire la proportion des heures faites en atelier et à l'extérieur?

M. GAGNON: Je regrette. Je peux vous en donner une idée mais...

M. BURNS: Non, non, d'accord.

M. GAGNON: ... cela serait de la haute fantaisie.

M. BURNS: Maintenant, quand vous nous dites que cela participe à l'industrie de laconstruction mais que cela n'est pas un travail de l'industrie de la construction, en quoi cela n'est-il pas de la construction?

M. GAGNON: Bien, si vous considérez tous les décrets jusqu'à maintenant, dans l'industrie de la construction...

M. BURNS: En fait, c'est une raison historique que vous nous donnez.

M. GAGNON: Bien c'est une raison qui s'impose des faits. Lorsqu'on nie les faits, on finit par les payer chèrement. Si on fait l'historique des décrets de construction, tous les décrets se sont toujours appelés des décrets relatifs aux métiers de la construction. C'était une orientation de convention collective par métiers, sur chantier de construction. Tout ce qui conditionnait ces conventions de travail était précisément le chantier de construction. Lorsqu'on arrive avec un concept industriel, comme dans le cas de l'industrie du verre, toutes les relations patronales-syn- dicales se placent sur un plan complètement différent et il n'y a pas moyen de mêler les deux. C'est le problème majeur auquel nous faisons face depuis plusieurs années et particulièrement depuis que le bill 290 semble s'appliquer à une partie de nos activités.

M. BURNS: Bien, justement, je relie votre réponse à l'absence de réponse antérieure, si vous voulez. Je comprends bien que vous n'ayez pas les chiffres en main, mais, s'il advenait, par exemple, que la majeure partie du travail, c'est-à-dire la partie importante du travail, à cause d'une meilleure mécanique pour fabriquer votre verre, soit faite sur les chantiers, à ce moment-là, en quoi pourriez-vous défendre le point de vue que ce n'est pas de la construction?

M. GAGNON: Ce serait indéfendable. Je n'ai jamais prétendu le contraire. C'est sûr que, si l'activité essentielle de l'employeur et du salarié est le chantier de construction, on n'a rien à dire. Mais, ce n'est pas le cas, précisément. Les cas d'exception ne devraient pas régler le problème de l'industrie.

M. LE PRESIDENT: M. Lefebvre.

M. LEFEBVRE: Monsieur s'est plaint tantôt que ses employeurs n'étalent pas représentés, je pense, à la table des négociations. Est-ce que vos employeurs, monsieur, ont été refusés parmi les associations patronales représentatives?

M. GAGNON: Bien, je peux vous dire là-dessus qu'ayant été avisés, par le ministère qu'il était possible que notre décret soit affecté par le bill 290 et par les circonstances qui l'entourent, nous nous sommes adressés immédiatement à la fédération pour dire: Nous avons un intérêt particulier et très facilement définissable. Auriez-vous l'obligeance de nous recevoir parmi vos membres et de nous déléguer à la table des négociations, pour que nous puissions faire les représentations qui s'imposent? Cela nous aurait permis évidemment, de préserver le caractère industriel de nos activités.

Cette demande a été refusée et nous ne sommes pas à la table des négociations. Nous protestons depuis toujours, mais ça ne donne pas de résultats efficaces.

M. LEFEBVRE: Mais ma question était; Avez-vous fait la demande pour adhérer aux associations patronales représentatives, comme le veut l'article 404 des décrets actuels?

M. GAGNON: C'est précisément la réponse qu'on nous a donnée: Appartenez à deux associations, la vôtre et la nôtre; là, vous aurez l'occasion de nous faire vos représentations et nous irons à la table pour vous. C'est précisément ce que nous ne trouvons pas acceptable, parce que ça nous impose en fait d'appartenir à deux associations et de payer des cotisations — qui sont assez lourdes merci — dans les deux associations.

M. LE PRESIDENT: Le député de Laurier.

M. MARCHAND: M. Gagnon, dans le cas d'une maison d'appartements de 100 à 120 étages, nous voyons souvent les camions de vos industries sur les lieux, une, deux ou même trois semaines, tailler, recouper et placer le verre. A ce moment-là, c'est comme un madrier ou un feuille de contreplaqué qu'on coupe, qu'on découpe et qu'on replace. Je pense que ça devient un peu de la construction.

M. GAGNON: Remarquez que je n'ai pas nié que l'activité elle-même participe de la construction. Ce serait une erreur monstrueuse. Ce que je dis, c'est que l'activité elle-même n'appartient pas à l'industrie de la construction. La loi no 290 nous dit que les employeurs et les salariés de l'industrie de la construction sont couverts. Notre prétention, c'est que, d'accord, nous avons des activités qui à l'occasion s'apparentent à la construction, sont de la construction, mais ce n'est pas comme employeurs de l'industrie, et comme tels, il est relativement facile de nous exclure puisqu'on n'a pas voulu nous permettre de faire les représentations appropriées en temps voulu. Les conséquences pour nous sont désastreuses. Si nous sommes assujettis maintenant, l'avenir est imprévisible. C'est quand même 2,500, 3000 employés qui sont en cause et qui travaillent douze mois par année, contrairement au caractère saisonnier du travail de la construction.

M. MARCHAND: Ils sont répartis en combien de compagnies?

M. GAGNON: A peu près 250.

M. MARCHAND: Toutes ces compagnies fabriquent-elles le verre?

M. GAGNON: Aucune de ces compagnies ne fabrique le verre comme tel, dans le sens que le verre n'est pas coulé chez elles; elles le travaillent.

M. MARCHAND: Elles le taillent pour la construction.

M. GAGNON: Elles le taillent, elles font des châssis, des comptoirs, des miroirs. Elles font une multitude d'objets.

Evidemment, je n'ai pas toute l'industrie en tête, mais elles fabriquent une multitude de produits qui sont généralement destinés à l'immeuble, mais qui peuvent être destinés à d'autres activités ou à d'autres fins.

M. LE PRESIDENT: Le président de la FTQ. UNE VOIX: IL est six heures.

M. LABERGE: Non, non, non, je vais être très bref. Si j'ai bien compris la thèse de M. Gagnon, vu que ça prend plus de temps pour fabriquer le verre plat dans l'usine que pour l'installer sur le chantier, ça ne devrait pas être de la construction. A ce moment-là, est-ce que M. Gagnon appuierait la thèse suivante: vu qu'il ne faut que cinq minutes pour installer une poutre d'acier, extraire le minerai, le charrier au four, le faire fondre et en faire une poutre, ça ne devrait pas être de la construction?

M. GAGNON: C'est apparent que c'est du « charriage ». C'est le cas de le dire. Je soumets que poser la question, c'est y répondre puisque M. Laberge parle de plusieurs industries et non pas d'une seule. L'extraction du minerai est faite par une industrie; le « processing » se fait par une autre. Je ne pense pas qu'on parle de la même chose.

M. LE PRESIDENT: M. L'Heureux, je crois, avait une question à poser. Si vous voulez vous approcher.

M. DION: Michel Dion, de la fédération. Je ne voudrais pas engager un débat avec une autre partie patronale, mais seulement souligner certains problèmes auxquels M. Gagnon a fait allusion. D'abord, sa demande de reconnaissance au niveau de la fédération.

Vous savez que l'industrie du verre plat a obtenu, il y a, je pense, deux ou trois ans, une reconnaissance pour négocier son propre décret. Nous n'avons pas d'objection à ce que l'industrie du verre plat négocie ses conditions de travail en ce qui concerne les travaux d'atelier. Comme fédération, c'est clair que nous ne pouvons pas admettre que l'industrie du verre plat, en tant que faisant des travaux sur chantier, à pied d'oeuvre, soit exclue de l'industrie de la construction. Or, il semblait que l'une des exi-

gences de cette association-là, c'était qu'une fois admise au sein de la fédération, la fédération la défendrait pour exclure l'industrie du verre plat des décrets de la construction.

Alors, disons que c'était déjà, quant à nous, un empêchement à reconnaître cette association-là. Le deuxième problème est le suivant: il faut quand même avouer qu'en faisant l'installation de leurs produits sur les chantiers, la majorité de leurs membres sont membres de nos associations régionales. Alors, nous ne croyons pas avoir pu, à ce moment-là, causer de préjudice à l'association. Il faut quand même avouer, à ce moment-ci, que la fédération — je pense que le ministre du Travail est au courant en vertu d'un mémoire qu'on lui a soumis — étudie des modifications à ses structures de façon à pouvoir agrandir son champ de représentativité à l'égard de groupements tels que celui-là. C'est clair que ça fait tousser des gens. H est clair que nous n'aurons jamais l'intention...

M. LAPORTE: Pouvez-vous m'expliquer ce rhume collectif qui vient de s'installer en arrière?

M. DION: Je vous demande pardon, M. le ministre, mais je n'ai pas compris.

M. LAPORTE: Ecoutez ce rhume collectif.

UNE VOIX: Cela vient de techniciens qui sont au courant.

M. DION: C'est parce qu'il y a tellement peu de parties qui ont pu se mettre au courant du mémoire.

Messieurs les membres de la commission, même si, à un moment donné, nous modifiions nos structures, pour admettre les gens du verre plat, pas plus que les gens du fer ornemental ou d'autres industries, si ce sont des travaux de construction, ils ne pourraient être exclus du décret de la construction. Ils devront, quant à nous, être inclus dans le décret de la construction parce que ça fait partie d'un tout, du travail de la construction.

Je veux, quand même, vous souligner un dernier problème. Il n'y a pas tellement longtemps, on a eu affaire aux gens de l'association du verre plat qui sont en grande majorité situés dans la région de Montréal. On leur a offert de former une section du verre plat à Montréal de façon à leur donner un droit de parole valable. Il est clair que tous et chacun des individus dans la province ne peuvent pas demander d'avoir une place à la table des négociations. Alors, on a tenté de trouver un mé- canisme qui leur permette un droit de parole valable. Ce droit de parole, au niveau de l'association de Montréal, ils l'ont refusé. Je ne voudrais pas qu'on laisse la commission avec l'impression que la fédération a tenté d'éliminer les gens du verre plat de l'industrie de la construction.

M. LE PRESIDENT: Je voudrais corriger d'abord votre identité, M. Dion.

M. DION: Michel Dion, de la Fédération de la construction.

M. GAGNON: Si vous me le permettez, j'aimerais juste faire deux commentaires là-dessus. Le premier, c'est que nous avons demandé de devenir membres de la fédération comme association, pour être admis à la table des négociations. Ce n'était donc pas pour en être exclus. Deuxièmement, lorsque M. Dion affirme que nos membres sont membres des associations régionales, je pense qu'il exagère légèrement. Il y a peut-être quelques membres qui ont dû, par nécessité, devenir membres de certaines associations de construction régionales, mais, la plupart sont strictement membres de l'Association de l'industrie du verre.

Quant au refus de faire partie d'une section, la condition sine qua non était de devenir membre comme individu de l'Association de la construction et non pas comme association. A ce moment-là, par solidarité, tous les membres de l'industrie du verre ont refusé ça catégoriquement. Cela fait des années que l'Association de la construction de Montréal veut nous manger; nous sommes habitués.

M. LE PRESIDENT: Je vous remercie, Me Gagnon. Quant à moi, ceci termine la longue liste des organismes non impliqués dans la négociation, qui avaient à faire des représentations.

M. DELAGE: Puis-je intervenir? Mon nom est Pierre Delage, de l'Association des manufacturiers canadiens.

M. LE PRESIDENT: M. Delage, vous pouvez procéder, malgré...

M. LAPORTE: Est-ce le dernier? Si nous n'avons que M. Delage à entendre, nous allons l'entendre; autrement, nous allons ajourner la séance à huit heures. Si M. Delage est le dernier qui veut être entendu, je pense que cette commission serait d'avis que nous prenions quelques minutes pour que nous puissions ensuite passer toute notre veillée à lire les nombreux mémoires qui nous ont été remis.

M. GAGNON: J'ai un document que je voudrais présenter au nom de la fraternité. J'aimerais passer tantôt, j'ai une élection municipale à gagner à Montréal. Vous comprenez ça.

M. LAPORTE: Nous ne sommes pas des électeurs, là!

M. LE PRESIDENT: En définitive, il y aurait deux représentations à faire, si je saisis bien?

UNE VOIX: Deux courtes. On est aussi bien de régler ça tout de suite.

M. LE PRESIDENT: M. Delage, vous êtes invité à prendre la parole.

M. DELAGE: M. le Président, messieurs les membres de la commission, il se fait très tard et je sais que ce que j'ai à dire a déjà été dit à maintes et maintes reprises. Je ne voudrais pas le répéter.

M. LE PRESIDENT: Voulez-vous, s'il vous plaît, vous identifier ainsi que votre association.

M. DELAGE: Pierre Delage, de l'Association des manufacturiers canadiens.

M. LE PRESIDENT: C'est de la construction ça, M. Laberge.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ou de l'entretien.

Manufacturiers canadiens

M. DELAGE: Nous avons deux points que nous voulons traiter ici. Le premier est la juridiction, le champ industriel, qui est proposé dans le décret de la construction; le deuxième est la parité salariale.

La juridiction, il en a été traité, on en a dit beaucoup là-dessus, je n'ai aucunement l'intention de répéter ce qui a été dit. Je fais miennes les opinions qui ont été données par le Conseil du patronat, par les différents avocats qui sont ici présents. Des situations sont créées par cet élargissement, si vous voulez, des situations intolérables chez les industriels, donc chez nos membres, les manufacturiers.

Vous allez prendre connaissance, dans le mémoire, des répercussions pratiques. Je voudrais aussi parler des objections juridiques qui ont également été discutées aujourd'hui. Il ne me semble pas nécessaire de le faire encore, c'est-à-dire il me semble que le champ d'application qui est proposé est ultra vires, si l'on considère les définitions données dans le bill 290 concernant la construction.

Messieurs je vous fais donc grâce de cette argumentation. Vous avez le texte devant vous. Finalement, puisque nous avons déjà un mécanisme qui est le bill 290, qui permet grâce au lieutenant-gouverneur en conseil, d'accepter ou de refuser le champ d'application industriel qui est proposé, je ne vois pas comment il serait nécessaire de proposer autre chose. Il appartient aux gens, aux parties contractantes de négocier le champ d'application et de le soumettre, et ils peuvent le faire en vertu du bill 290. Je suggère donc que ce mécanisme qui existe soit maintenu.

J'aurais aussi une autre recommandation. L'entretien qui est visé et qui est le propre, je crois, de l'industrie manufacturière, n'appartient pas à l'industrie de la construction et il ne devrait pas être considéré comme tel. Il y a peut-être des différences à faire pour décider ce qui est de l'entretien ou de l'industrie de la construction. Je pense qu'elles sont claires et assez évidentes. Toutefois j'offre mes services, si jamais il était décidé que l'on veuille faire une définition; je serais prêt à offrir ma collaboration.

Ainsi, si l'entretien n'est pas inclus aux termes du bill 290, — et c'est ce qui est bien indiqué dans la loi — je crois qu'il serait permis de préciser ici le voeu que l'association formule, c'est-à-dire de façon — là, je traite d'un problème très particulier à l'industrie manufacturière — à donner une garantie adéquate de fonctionnement, et qu'il soit permis aux manufacturiers de machinerie et d'équipement — et je parle de ceci parce qu'il est bien question dans le décret proposé qu'on inclue la machinerie et l'équipement — de faire faire l'installation et l'entretien, s'il y a lieu, s'ils le désirent, par leurs propres employés.

J'en viens finalement à la parité salariale. Eh bien, je vous réfère encore au document que vous avez devant vous. Nous craignons les répercussions qu'il pourrait y avoir, si la parité salariale était accordée dans l'industrie de la construction, puisque ceci se réfléterait évidemment dans l'industrie manufacturière. Nous nous opposons donc à la parité salariale pour les raisons que vous avez dans le document.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Delage. Je ne sais pas s'il y a des questions de la part des membres de la commission. Sinon, nous vous remercions.

Nous invitons M. Gagnon, même si cela va

à l'encontre de la procédure prévue, à s'exprimer le plus brièvement possible.

M. DELAGE: M. le Président, j'aimerais vous faire part du fait que je représentais ici, en même temps, M. Alex Harper, du Board of Trade, qui était avec moi. Je vous remercie.

M. LE PRESIDENT: Nous vous remercions de votre brièveté.

Nous invitons M. Gagnon à ne pas frapper trop fort.

Ouvriers en électricité

M. GAGNON: J'essayerai d'être bref. Je comprends que tout le monde est pressé, moi aussi. On a discuté longuement, ici, d'économie. Tout le monde a semblé se perdre. Il y avait des raisons. C'est que la science économique développe ses propres lois au fur et à mesure du développement. Or, on ne peut pas employer les barèmes employés en 1900 lors de l'accumulation primitive du capital et les transporter tout simplement dans une situation où les monopoles jouent un rôle important.

Je trouve qu'il est un peu osé, pour ne pas dire stupide, de nous demander: Etes-vous pour la parité salariale absolue ou non? Aussi bien nous demander tout de suite si nous sommes pour la vertu absolue ou non? Essayez de répondre à celle-là et vous pourrez répondre à l'autre question.

Il est évident que ce sont des objectifs humains que l'on place devant nous. Je suis pour une situation ou le gouvernement et les parties intéressées maintiennent l'objectif de la parité salariale. Je dis, en plus de cela, qu'il est non seulement possible mais absolument nécessaire d'appliquer immédiatement la parité salariale. Je dis — plus que cela — qu'elle est déjà réalisée en grande partie, dans l'industrie lourde de la construction, dans là proportion d'à peu près 95%. Notre devoir n'est pas de restreindre cela, mais de l'élargir. C'est cela, un objectif humain.

Il est faux de penser que les humains, en 1970, sont simplement des esclaves de quelques barèmes économiques...

Les humains sont plus armés que ça à l'heure actuelle. Il ne faudrait pas oublier, lorsqu'on parle de ça, que nous vivons dans une province de fournisseurs de matière première, une province où les investissements américains et autres ont une large part. Et cela va influencer et cela influence sans aucun doute, à savoir si on est en Afrique ou bien dans la province de Québec, dans un contexte donné. Je dis qu'on est dans une province qui dépend largement des investissements étrangers, une province de fournisseurs de matériaux. Qui va maintenant essayer de maintenir, après qu'on a fait le point, que nous sommes dans des grands ensembles internationaux? Qui pourrait maintenir que la parité salariale à Saint-Romuald va ébranler le cours de la Bourse à New-York? Mais, c'est de la folie furieuse, cette affaire-là! Cela ne tient pas. C'est, cependant, le genre d'arguments qu'on a. Que la parité salariale à Baie-Comeau va faire monter soudainement le prix du Boston Daily Paper, cela ne tient pas plus. Il va falloir arriver en ville, en 1970, et s'apercevoir qu'il y a autre chose en économique. C'est pour l'industrie lourde.

Cest à peu près la même chose pour les autres secteurs. On a parlé du secteur commercial. Qu'est-ce qui arrive dans le commerce? Ce sont des centres commerciaux qui s'établissent un peu partout dans la province. Quels sont ces commerçants? C'est Steinberg's, Zeller's, Dominion Stores. Est-ce qu'ils vendent moins cher à ces endroits qu'ils vendent à Montréal? Alors, comment justifier cette disparité? Elle n'a plus de sens. Elle n'a plus de sens dans la mesure où c'est en train de se monopoliser, et on trouve cela dans les quatre coins de la province.

En ce qui concerne le gouvernement, messieurs, je vois difficilement un gouvernement qui perçoit à peu près les mêmes taxes partout faire une différence entre ses contribuables. Ils doivent être placés au même diapason, sans compter que, dans la mesure où on n'aura pas de parité salariale, je ne vous vois pas recevoir des gros montants en taxes de la Gaspésie. Cela va plutôt coûter cher en assistance publique. On a le choix, à un moment donné: ou rester dans l'«arriérisme » le plus complet et ne pas sortir du pétrin dans lequel on est à cause des disparités salariales, ou prendre le boeuf par les cornes, pour vous donner une image de style, et avancer dans la bonne direction.

Moi, je crois que l'objectif que s'était donné le bill 290 est bon. Je ne dis pas qu'on va l'atteindre telle semaine, mais je dis qu'il doit être maintenu, et qu'il doit être étendu partout où c'est possible.

Mais je m'aperçois ici, par exemple, qu'il y a un fort groupe de gens qui ont peur. Nous disons, nous, que c'est un stimulant, mais il y a par contre un autre gros groupe de gens qui ont une peur irraisonnée de cette parité salariale possible, même dans des domaines qui ne sont pas le leur.

Quels sont les arguments devant les nôtres? Je dis les nôtres, c'est par extension, car je voudrais en avoir un tort groupe avec moi. L'argument principal, c'est que cela perturbera l'économie. Moi, je maintiens que cela perturbera les bas salaires et il est temps qu'on le fasse. C'est la première des choses. Quant à l'autre argument clé, ou qui semble être un argument clé, il nous dit ceci: D'autres voudront l'avoir. Et là, nous allons arrêter tout cela, parce que d'autres voudront l'avoir. Mais ce n'est pas un barème scientifique, cela. Moi, je peux bien désirer votre salaire, messieurs, mais cela ne change rien. C'est un désir, c'est une émotion, mais il n'y a rien de scientifique là-dedans. Alors aussi bien déclarer tout de suite qu'à force de voir un singe grimper dans un poteau, nous allons devenir les meilleurs grimpeurs du monde! C'est cela, l'effet de l'entraînement, en somme. Il n'y a rien d'autre chose que cela.

Or, il y a d'autres lois que cela — ne riez pas trop fort, car je suis pressé, et vous me dérangez — il y a d'autres lois que ça. Il y a le fait que les salaires s'équilibrent selon des lois économiques. Or, dans les métiers de la construction, moi qui représente les métiers mécaniques, je dois vous dire que la seule base qu'on peut prendre pour expliquer pourquoi un électricien reçoit tant et pourquoi un député reçoit tant aussi, c'est que les heures de travail sont déterminées par la somme d'efforts qu'on fait. Cela veut dire concrètement que, dans l'heure de travail d'un électricien, on inclut, les dix ans où il a été obligé d'apprendre sans rien retirer, les cinq ans d'apprentissage durant lesquels il a retiré très peu.

C'est de même que s'établissent les heures de travail et non pas simplement par l'effet d'entraînement. Les médecins ont jusqu'à un certain point, très petit, raison de dire qu'il est difficile d'oublier qu'ils ont 14 ans, 16 ans et 20 ans d'études. Autrement, tout le monde refuserait d'être député pour être charbonnier, parce qu'on commence à recevoir de gros salaires tout de suite. Il n'est pas gros, le salaire.

Il y a ici tout le problème du travail simple et du travail complexe dans lequel entrent d'autres catégories d'énergies. Ceux qui veulent changer pour devenir des gars de la construction, qu'ils se préparent à quelque chose de sérieux, à travailler à peu près cinq ou six mois par année. C'est bien beau de venir nous dire: Les gars de la construction gagnent $150 par semaine en général, mais il n'y a pas de général. Il n'y a pas d'hommes riches chez nous. Il y a des gars qui chôment six mois par année. Alors, prenez les $153, puis divisez ça en deux, vous allez avoir un maudit beau portrait de l'affaire. Et c'est de même d'un bout à l'autre! Sans compter qu'on peut être député peut-être jusqu'à 60 ans, messieurs, mais qu'on ne peut pas être électricien sur la construction jusqu'à 60 ans.

La vie active d'un électricien diplômé, c'est entre 20 ans et 25 ans; ensuite, c'est un homme fini. Une dernière chose pour attirer votre attention sur le fait que, dans les problèmes connexes qu'apporte notre mémoire, on a découvert ceci, c'est que, dans la région de Montréal, avec l'aide des gouvernements passés, on a 8,000 permis d'électriciens en circulation, plus que dans le reste de la province. Il va falloir faire quelque chose pour changer certaines lois. Il y a 8,000 permis d'électriciens dans le décret 613 et à peu près 7,000 dans le reste de la province. Sans compter que, sur les 15,000 là, d'un bout à l'autre, il y en a au moins 3,000 de trop. Alors, on vous demanderait d'arrêter de nous en « pitcher » par la tête plus vite qu'on peut en digérer.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Gagnon de cet exposé original. Je crois que ceci met fin aux auditions. La séance est ajournée à demain après-midi trois heures.

M. LAPORTE: M. le Président, oui, à demain après-midi, trois heures. Disons que nous allons siéger demain après-midi pour entendre les sept parties à la table des négociations, dans un ordre qui n'est pas encore déterminé. Nous pourrions peut-être nous entendre sur ça demain matin.

Nous ne siégerons pas demain soir. Nous allons siéger jeudi matin, jeudi après-midi, jeudi soir et vendredi matin, si cela est nécessaire. Comme certains collègues me posaient la question tout à l'heure, il est déjà prévu, puisque le premier ministre l'a annoncé tout à l'heure, que le Parlement va siéger lundi à 3 heures pour s'occuper d'un problème que vous imaginez déjà.

M. le Président, demain après-midi, trois heures.

M. LABERGE: Je voudrais poser une question. Etes-vous au courant que le café du Parlement est fermé demain?

M. LAPORTE: Oui, M. le Président. Vous ferez comme nous, vous apporterez votre boîte à lunch.

UNE VOIX: Il est fermé jusqu'à mardi. M. LAPORTE: Réparations d'urgence.

(Fin de la séance: 18 h 23)

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