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Commission permanente du Travail et de la
Main-d'Oeuvre
Bill 38 Loi concernant l'industrie de la
construction
Séance du mercredi 7 octobre 1970
(Quinze heures onze minutes)
M. BOSSE (président de la commission permanente du Travail et de
la Main-d'Oeuvre): A l'ordre, messieurs! La séance est ouverte. Nous
allons siéger cet après-midi jusqu'à six heures. Par la
suite, demain matin, de dix heures à midi et demi puis, de trois heures
à six heures et de huit heures à dix heures, s'il y a lieu,
demain soir.
Procédure
M. BOSSE: La procédure pour entendre les parties est la suivante:
il s'agit, aujourd'hui, ayant les mémoires en main, pour les sept
parties aux négociations, de faire leur plaidoyer, ou de donner les
explications additionnelles de leur mémoire et répondre aux
questions des membres de la commission, des députés
présents, ou d'autres personnes intéressées, s'il y a
lieu. Voilà la procédure que nous suivrons.
Le député de Maisonneuve.
M. BURNS: Simplement au point de vue de la méthode, M. le
Président, hier, c'était très beau, nous entendions les
parties qui n'étaient pas impliquées dans le différend
comme tel et qui nous faisaient valoir leur point de vue d'ordre
général. Maintenant, on va entendre les parties. Il y a quelque
soixante problèmes, je pense, qui sont en litige. Est-ce toujours
ça ou si ç'a changé? De toute façon, la suggestion
que je veux faire c'est que, comme les parties doivent nous faire valoir leur
point de vue, je me demande s'il ne serait pas plus utile de les entendre
individuellement sur chacun des problèmes, les unes après les
autres. Par exemple, s'il y a un problème sur l'ancienneté, qu'on
nous fasse valoir le point de vue des syndicats sur l'ancienneté et
ensuite que chaque partie nous fasse valoir le leur. Parce que je trouve que
nous sommes à toutes fins pratiques ici comme...
M. LAPORTE: Puis-je suggérer, autrement on va être ici
pour... Excusez, je vais proposer une procédure à tous les
membres de cette commission et, si ça ne convient pas, on est toujours
libre d'en suggérer d'autres.
Nous avons déjà devant nous le point de vue des sept
parties en cause. J'ai fait préparer et nous serons en mesure de
le distribuer cet après-midi un tableau comparatif de chacune des
clauses. Il y en a soixante moins dix sur lesquelles il y a entente, il en
reste cinquante.
Sur les cinquante clauses, vous allez avoir la partie patronale, la
partie syndicale et le point de vue des conciliateurs. Cela est un document qui
va permettre de faire une étude.
Est-ce qu'on pourrait suggérer, maintenant que l'on a le
plaidoyer écrit de chacune des parties, que chacun des
représentants nous dise sur quel point il entend, lui, insister? J'ai
rencontré, hier, un des membres; il m'a dit: Moi, ce n'est pas
compliqué, je veux une chose et je vais parler de celle-là. C'est
bien inutile de repasser les 60 clauses, quand, pour certains, il y en a qui
sont plus ou moins importantes. Mais, demandons à chacun de dire
maintenant, oralement, sur quel point il veut impressionner, au sens
littéral du verbe, la commission parlementaire.
Une fois que cela sera terminé, si l'on voulait accorder à
chacun des sept un droit de réplique ou de déclaration
complémentaire de quelques minutes, je pense qu'ensuite la commission
parlementaire serait en mesure de juger. Mais, si l'on doit entreprendre une
assemblée contradictoire sur chacune des 50 clauses qui sont encore en
litige, j'ai l'impression que ça va rapidement tourner à la foire
d'empoigne. Nous allons gaspiller un temps considérable et nous ne
serons pas plus avancés que nous pouvons l'être avec les documents
que nous avons déjà, plus les déclarations qui nous seront
faites par chacune des parties.
C'est la procédure que je suggère.
M. LE PRESIDENT: Le député de Chicoutimi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je pense que mes
collègues sont d'accord. L'autre jour, le député de
Chambly avait proposé qu'on examine d'abord six grandes questions, qui
sont des points en litige. Les parties, évidemment, vont se faire
entendre sur ces points et insister sur ce qu'a dit le député de
Chambly tout à l'heure, à savoir quels sont les problèmes
qui les intéressent au premier chef. Après quoi, nous pourrions
ensuite les interroger, si nous croyons nécessaire de le faire, pour
obtenir d'eux des renseignements additionnels. Autrement, comme le dit le
ministre du Travail, nous allons siéger ad infinitum, ici.
M. LAPORTE: Pour les problèmes, le président de la CSN est
beaucoup plus intéressé pour son syndicat, au problème du
rattrapage que ne l'est le président de la FTQ. Est-ce qu'on va dire:
Maintenant, tous les deux, que chacun insiste sur les problèmes qui? ...
Il s'agirait de s'entendre sur cela, que chacun s'exprime sur les points qui
lui paraissent les plus importants. Nous allons prendre des notes, le journal
des Débats va nous donner le compte rendu exact de ce qui s'est dit.
Quand ce sera terminé - exemple, je m'excuse de ne pas terminer ma
phrase - les gens pourront avoir un droit de réplique.
Quelqu'un, l'un des sept, je ne me souviens plus lequel, m'a
demandé: Est-ce que l'on peut répondre aux assertions qui ont
été faites hier ? Sans doute, c'est un des objets dont on peut
s'occuper aujourd'hui, demain, le temps que nous siégerons. Mais que
chacun soit juge des points qui l'intéressent en particulier.
Les six restent, à mon avis, les plus importants, ceux sur
lesquels nous nous attendons à ce qu'ils s'expriment. S'ils jugent, eux,
que c'est autre chose, que chacun se sente libre. Est-ce que l'on peut accepter
cette procédure?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Quant à moi, je crois que c'est une
procédure non seulement acceptable, mais désirable, sous toute
réserve, naturellement, qu'on laisse aux parties le droit de s'exprimer
sur des sujets qui leur paraîtront importants.
M. LE PRESIDENT: II semble donc que les membres de la commission soient
d'accord pour adopter cette procédure.
M. LAPORTE: Deuxième remarque, le problème de l'ordre dans
lequel devront s'exprimer les diverses personnes peut sembler à certains
important, il l'est en fait. Je sais qu'hier une couple de personnes m'ont dit:
Je ne voudrais pas parler le premier ou je voudrais parler le dernier. Je pense
bien que la commission n'est pas désireuse de trancher ce premier
litige. J'ai écrit ici sur des feuilles de papier les noms des sept
parties.
M. VEZINA: Loto-Québec!
M. LAPORTE: Et pour éviter que l'on puisse accuser qui que ce
soit de favoritisme, je vois parmi... Oui?
M. MORIN: M. le Président, si vous me permettez, je suis Louis
Morin, conseiller juridique de la Corporation des maîtres
mécaniciens en tuyauterie. Est-ce qu'il ne serait pas normal que les
syndicats prennent la parole en premier, étant donné qu'au niveau
d'une convention collective, ce sont quand même les syndicats qui sont en
demande?
M. LAPORTE: Je suis convaincu qu'ils sont parfaitement d'accord avec
vous. Est-ce que vous êtes d'accord sur ça, M. Pepin?
M. PEPIN: D'accord sur quoi, M. le ministre?
M. LAPORTE: Que vous parliez le premier.
M. PEPIN: Je n'ai pas d'objection, M. le ministre, à parler le
premier. Cependant, nous avons reçu de nouveau cet après-midi, un
mémoire qui n'a pas été remis le 1er octobre. Il faut au
moins en prendre connaissance. Que les électriciens nous expliquent donc
ce qu'ils veulent avoir dans leur mémoire avant que nous
puissions...
M. LAPORTE: Alors, vous suggérez vous et je trouve cela
raisonnable qu'ils parlent les premiers.
M. PEPIN: Bien, qu'ils nous disent au moins, M. le ministre, ce...
M. LAPORTE: Est-ce que nous sommes plus avancés qu'il y a deux
minutes?
M. PEPIN: Non, M. le ministre, mais je voudrais au moins vous faire
remarquer une chose.
M. LAPORTE: Oui, oui.
M. PEPIN: Ce mémoire qui devait être remis le 1er octobre,
de l'avis unanime de la commission, a été remis aujourd'hui
même.
M. LAPORTE: Je voulais simplement faire... M. PEPIN: On ne l'a
même pas lu.
M. LAPORTE: ... remarquer au procureur de la Corporation des
électriciens que son avis très clair à l'effet que vous
devriez parler le premier n'est peut-être pas partagé. Ce serait
plus simple de demander, je pense,... Vous avez quelque chose à nous
dire.
M. LEBON: Jean Lebon, Corporation des maîtres électriciens.
Le document que nous avons remis cet après-midi est l'étude
intégrale que les économistes ont faite tant sur la parité
que sur notre proposition de diviser l'industrie en deux secteurs. La
première partie, quant à la parité, était dans
notre document qui a été déposé le 1er octobre.
M. LAPORTE: Bon.
M. LEBON: Donc, au point de vue économique, je pense que cela ne
pose pas de problème à M. Pepin ou enfin cela ne pose pas de
pépin à M. Pepin.
M. LAPORTE: Nous pourrions demander à nos amis les journalistes
de tirer à tour de rôle chacun un nom, et bien que M. Laberge soit
assis à la table des journalistes, je ne le considère pas comme
un journaliste.
M. le Président, très rapidement, voici dans l'ordre: La
Corporation des maîtres électriciens; l'Association des
constructeurs de routes; les constructeurs industriels, le groupe
représenté par M. Dion; la CSN; les maîtres plombiers; les
constructeurs d'habitations et la FTQ.
M. CURZE: Est-ce qu'on peut intervenir un instant, s'il vous plait? Paul
Curzé, de l'Association des constructeurs de routes.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président...
M. CURZE: Je ne suis pas intervenu avant le tirage au sort pour ne pas
demander un régime de faveur. Nous avons un problème très
concret. C'est que le président de notre association est retenu à
Montréal jusqu'à ce soir inclusivement par le Congrès
mondial des routes. Vous comprenez que, comme association des constructeurs de
routes, nous nous devions d'être représentés à ce
congrès mondial. En conséquence, nous ne pourrions pas passer
avant demain matin ou, au plus tard, demain après-midi.
La raison évoquée est, à mon sens, sérieuse.
Ce n'est pas par caprice. J'ai attendu le tirage au sort parce que nous aurions
pu passer les derniers et, à ce moment-là, je n'aurais pas eu
à intervenir. A moins que la Corporation des maîtres
électriciens en ait pour trois heures à parler...
M. LAPORTE: Que vous ayez attendu le tirage au sort, cela ne change
rien, car il n'est pas là. Si vous étiez arrivés les
premiers, dans le tirage au sort...
M. CURZE: Je serais intervenu à ce moment-là, mais, si
nous étions arrivés les cinquièmes, M. le Ministre, je ne
serais pas intervenu.
M. LAPORTE: Je comprends, mais c'est une façon de ne pas prendre
le risque de passer le premier. Enfin, je m'en remets à la
commission.
M. CURZE: Nous serions prêts à passer demain matin. Nous
serions les deuxièmes, probablement.
M. LE PRESIDENT: Si vous me le permettez, d'une part, la commission est
concernée et, d'autre part, les parties qui doivent être
entendues.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, naturellement, chacune
des parties peut avoir intérêt à se faire entendre avant ou
après. Il peut y avoir des raisons de force majeure. Maintenant, nous
avons accepté ce principe du tirage au sort qui ne favorise pas
nécessairement tout le monde. Je comprends l'importance de l'Association
des constructeurs de routes.
J'imagine toutefois que cette association compte, parmi ses membres, des
gens fort réputés, et que le vice-président peut remplacer
le président, ou vice versa, alors, quant à moi, je crois qu'on
devrait s'en tenir à la procédure que nous avions
adoptée.
M. CURZE: Pour répondre à cette objection, je trouve,
personnellement, normal qu'il y ait au moins un officier de chacune des
associations en tout cas, c'est mon opinion qui soit là
pour, à la fois, intervenir et participer au débat. Les
conseillers seront les plus compétents, qu'ils soient là, il
demeure que nous ne sommes pas entrepreneurs, ni membres d'associations. Nous
ne sommes que conseillers et c'est normal, à mon sens, que...
M. LAPORTE: Je suis d'accord. Mais est-ce que vous trouvez anormal, par
exemple, en toute amitié, que cette commission juge également...
Vous avez une association assez structurée pour imaginer que chacun des
groupes va avoir au moins un représentant qui pourra s'exprimer devant
nous.
M. CURZE: Alors, si une association acceptait de passer à notre
place, est-ce que la commission accepterait cela?
M. LAPORTE: Oui.
M. CURZE: Alors, l'Association provinciale des constructeurs
d'habitations est prête à s'exprimer en seconde place et nous
prendrons la place de cette association.
M. LAPORTE: Très bien. Bon, avant que nous ne commencions,
peut-être pourrions-nous demander aux parties en cause de régler
entre elles, non plus un problème, mais de nous donner l'exemple de la
façon dont vous devez régler vous-mêmes ce qui peut
l'être. Il ressort de l'étude des documents que vous nous avez
fait parvenir, ce que nos conciliateurs savaient déjà d'ailleurs,
que sur dix clauses, il y a entente.
Les congés spéciaux, les heures de travail, clause 30.01.
Clause 30.02, ce sont encore les heures de travail. Clause 30.03. Clause 31.01,
temps supplémentaire. Clause 31.04, 32.04, même sujet. Clause
34.01 , temps et frais de déplacement. Clause 35.01, durée de la
convention. Et la clause 80.00, sécurité sociale. Il y a entente
entre les sept parties sur ces dix clauses. Vrai ou pas vrai?
M. CURZE: Est-ce que je dois répéter mon nom? Paul
Curzé, de l'Association des constructeurs de routes. Sur la clause des
heures de travail, en tout cas, à moins qu'il ne soient intervenues des
ententes en mon absence, je ne crois pas qu'il y ait entente entre les parties
syndicales...
M. LAPORTE: Celles que j'ai mentionnées ici. Pas toutes les
clauses qui se rapportent aux heures de travail.
M. CURZE: D'accord.
M. LAPORTE: Mais est-ce que les parties sont disposées la
commission parlementaire
vous le suggère, si vous le permettez, nous allons bien porter
attention à cela à parapher les dix clauses sur lesquelles
il y a entente? Ce qui permettrait à la commission parlementaire de ne
pas intervenir dans vos affaires ce que vous souhaitez pour au
moins ces dix clauses-là.
M. LE PRESIDENT: Les porte-parole de chacun des groupes veulent-ils
répondre immédiatement à cette question?
M. PEPIN: Oui, nous serions prêts à l'examen des textes. Je
pense qu'il y a un travail préparé par les conciliateurs, travail
que le ministre a en main. S'il voulait nous le remettre, nous regarderions
vraiment les textes et s'il y a entente, il n'y a pas d'inconvénient
à la parapher. Nous ne faisons pas des ententes pour le plaisir d'en
faire.
M. LAPORTE: C'est unanime? M. DESJARDINS: D'accord.
M. LAPORTE: II y a 100 copies de ce document qui s'en viennent. Ce
serait, je pense, un excellent début que de commencer par ça.
M. LE PRESIDENT: Dois-je convenir que les cinq parties patronales sont
aussi d'accord?
M. MORIN: Si c'est exact, oui.
M. LAPORTE: D'accord. Merci. Excusez-moi d'intervenir encore. Je devrai
m'absenter dans quelques minutes parce qu'il y a séance d'urgence du
comité de législation pour ce que vous imaginez.
UNE VOIX: Vous allez manquer le bon! UNE VOIX: Vous avez des
problèmes?
M. LAPORTE: Nous avons des petits problèmes.
J'aurai l'occasion de lire dans le journal des Débats ce que vous
aurez dit. Je demanderai à mon adjoint parlementaire, le
député de Beauharnois, M. Gérard Cadieux, de me remplacer
pendant mon absence. Vous voudrez bien m'ex-cuser tout à l'heure.
Merci.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. le ministre. J'invite immédiatement la
Corporation des martres électriciens du Québec à faire son
plaidoyer en ce qui concerne le mémoire qu'elle nous a
présenté.
M. LEBON: M. le Président...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre, s'il vous plaît. Je demanderais, de
grâce, que l'on soit silencieux et que l'on permette à M. Lebon
ainsi qu'aux autres représentants de s'exprimer autant que possible dans
le silence pour que la commission puisse les entendre.
Maîtres électriciens
M. LEBON: Mon nom est Jean Lebon, ingénieur, directeur
général de la Corporation des maîtres électriciens
du Québec.
Pour faire suite à la suggestion du ministre, notre plaidoyer
principal portera sur le rattrapage.
D'abord, pour identifier notre organisme, je pense qu'il est
nécessaire de souligner que la corporation représente tous les
entrepreneurs électriciens de la province de Québec, petits et
gros, sans exception.
Politique salariale
M. LEBON: Je pense tout d'abord, qu'il faut faire un recul sur ce qui
s'est passé l'an dernier, à savoir l'entente consignée,
pour les sept parties; c'est l'entente du 10 juillet. Il s'agit des articles
701a) et 701b) dans lesquels on faisait référence à
l'établissement d'une politique salariale. La partie a) de ce document
disait que les parties convenaient d'accorder la parité salariale aux
ouvriers qui seraient éventuellement détenteurs d'une carte de
compétence provinciale émise en vertu du bill 49. Or le bill 49
n'est pas en application, il n'y a aucune carte de compétence
présentement émise en vertu de ce bill, et, par
conséquent, la partie a) de l'entente ne peut être
appliquée.
On doit donc se référer à la partie b) de
l'entente, qui dit qu'on doit établir des salaires selon des facteurs
économiques objectifs, en acceptant dans le texte qu'il y a une
disparité régionale au sein de la province, d'une région
à l'autre. Il a été mis à la disposition des
parties et des spécialistes, pour tenter d'établir ces facteurs
économiques objectifs.
Malheureusement, comme la commission le sait probablement
déjà, ni les spécialistes, ni les parties n'en sont venus
à une entente quant à la détermination de critères
objectifs qui pouvaient être utilisés pour déterminer les
salaires.
Il y a eu mésentente, on n'a pas voulu discuter là-dessus;
mais, enfin, l'argumentation de la CSN se base sur le fait que
l'objectivité, supposément, n'existe pas. En théorie,
c'est bien vrai qu'il n'y a personne de parfaitement objectif. De toute
façon, étant donné que la partie b) de l'entente de l'an
dernier n'était pas applicable, nous avons fait une consultation
auprès de nos membres pour laisser jouer le jeu de l'offre et de la
demande et des pressions qu'on connaît au cours d'une négociation
normale, qui établit les offres ou les concessions que les entrepreneurs
électriciens considèrent comme ultimes et finales. Ces
propositions sont contenues dans le mémoire qu'on vous a
donné
et se traduisent par l'établissement tacite d'un facteur de
disparité économique.
En prenant Montréal comme 100 p.c, les offres salariales que nous
faisons se traduisent, comme je le disais tout à l'heure, par
l'établissement tacite de facteurs variant de 78 p.c, ce qui est le plus
bas dans la zone 2 de Rimouski, à 100 p.c. à Montréal.
Alors, pour que ce soit inscrit au journal des Débats, je vais tout
simplement en faire la lecture. Abitibi, 82 p.c. de Montréal; Saguenay,
88 p.c; Chicoutimi, 85 p.c; Drummond, 80 p.c; Granby, 85 p.c; Hull, zone 1, 90
p.c; Hull zone 2, 78 p.c; Joliette, 82 p.c; Laurentides, 78 p.c;
Montréal, 100 p.c; Québec zone 1, 85 p.c; Québec zone 2,
82 p.c; Rimouski, zone 1, 82 p.c; Rimouski, zone 2, 78 p.c; Duplessis, 88 p.c;
Cantons de l'Est, 85 p.c; Sorel A, 100 p.c; Sorel B, 90 p.c. et
Trois-Rivières, 85 p.c
M. LE PRESIDENT: A quelle page du mémoire?
M. LEBON: C'est à la page 11, non pas du document que vous avez
devant vous; c'est une étude économique que vous avez. C'est
à la page 11 du plaidoyer de la Corporation des mâitres
électriciens que tous les députés ont lu, sans doute.
Maintenant, devant la sitaution un peu confuse, on a demandé
à une équipe d'économistes d'étudier ce qu'aurait
comme effet l'établissement de la parité salariale. Or, nous
avons avec nous M. François Lacasse qui est l'auteur du document que
vous avez devant vous. Il est économiste et professeur à
l'Université de Montréal. Il a fait ce travail avec, comme
conseillers, M. Gérald Marion, directeur du département
d'économique à l'Université de Montréal, ainsi
qu'André Raynauld qui est aussi un économiste de renom.
On peut souligner quelques aspects fondamentaux de ce texte. Je n'oserai
pas m'aventurer dans des théories économiques comme M. Burns a
voulu le faire hier, à savoir l'interprétation des
équations. Si la commission me le permet, je demanderais que ce soit M.
Lacasse qui vienne répondre aux questions d'ordre technique qui
pourraient être posées quant à l'interprétation de
l'étude.
Etude économique
M. LEBON: Si vous voulez, nous allons essayer de soulever les points
principaux de cette étude. Nous commençons au point de vue des
services. Je veux faire un énoncé de principe avant. Les
entrepreneurs électriciens sont appelés à fournir des
services aux particuliers, services essentiels dans notre société
contemporaine, évidemment, parce que, si l'électricité ne
fonctionne pas, il n'y a pas de chauffage, même si le chauffage est
à l'huile.
Enfin, tout le monde dépend de l'électricité.
Même le micro ici ne fonctionnerait pas ici s'il n'y avait pas
l'électricité.
Or, l'industrie électrique est une industrie particulière.
J'entends des voix, M. le Président. Merci. Je n'entends plus de
voix.
UNE VOIX: Jeanne d'Arc!
M. LE PRESIDENT: Continuez.
UNE VOIX: Attention! C'est dangereux.
M. LEBON: Or, les électriciens sont appelés à
rendre service aux particuliers, là, où c'est le particulier
lui-même qui est appelé à payer, c'est-à-dire Jos.
Public. Contrairement à certains entrepreneurs, comme ceux qui font les
routes, il est assez rare qu'un particulier se fera faire une route
pavée d'une longueur de dix milles. C'est rare. C'est plutôt le
gouvernement qui en est le client, ou les organismes publics ou parapublics.
C'est la même chose, si on parle de fer structural, ou enfin
d'ascenseurs; à part les résidences très luxueuses, les
ascenseurs sont assez rares.
Tout cela pour dire que l'électricité constitue, selon
nous, un service essentiel à la collectivité. Il faut faire en
sorte que le consommateur puisse être en mesure de payer les taux de
service pour avoir une installation électrique parfaitement
adéquate.
Prenons, à la page 6, le tableau 3-1; on voit dans ce tableau
quelle part du service aux particuliers au point de volume d'affaires
représente le volume d'affaires des entrepreneurs. De toute
façon, le tableau suivant est éloquent; c'est, à la page
7, le tableau 3-2, à savoir: Augmentation des taux honoraires minimums
d'appels de service.
M. CARDINAL: Pardon, M. le Président, est-ce que je pourrais vous
interrompre et vous poser une question, juste pour comprendre?
M. LEBON: J'en profiterais pour prendre un verre d'eau.
M. LE PRESIDENT: Le député de Bagot peut poser sa
question.
M. CARDINAL: Merci, M. le Président. On parle du tableau de la
page 6, qui rejoint celui de la page 7. Au tableau de la page 6, on parle des
catégories de firmes dans la première colonne, de $0.00 à
$99,000. Enfin, il y a trois paliers, et il y a ensuite l'ensemble. Puis on
parle de la part du service aux particuliers; 20.5, 7.1, 2.66. J'oublie le
chiffre de 9.3, peut-être ai-je tort. Cela fait environ quelque 30 p.c.
Est-ce que l'on veut dire que le reste représente des services au public
ou si c'est parce que je ne comprends rien?
M. LEBON: Non, à moins qu'un économiste
ne me corrige, je vais tenter de répondre à cette
question.
M. CARDINAL: Bon.
M. LEBON: C'est que pour les entrepreneurs qui ont un chiffre d'affaires
variant de $0.00 à $99,000 par année, on attitre 20 p.c. de ce
chiffre d'affaires au service aux particuliers.
M. CARDINAL: Ça va aller.
M. LEBON: D'accord.
M. CARDINAL: Très bien.
M. LEBON: Parfait, "close the door". Tandis que, de $100,000 à
$500,000, c'est 7 p.c. Evidemment, on s'aperçoit que, plus la firme est
importante, moins on a de service aux particuliers.
M. CARDINAL: Cela veut dire que la différence, c'est le service
pour ce que vous appelleriez le public?
M. LEBON: C'est le service au public, tandis que l'autre, c'est de la
construction.
M. CARDINAL: Oui.
M. LEBON: Cela peut être de la construction.
M. CARDINAL: Attendez un peu. Si on entre dans la distinction de la
construction, et tout le reste, on a fait cela hier.
M. LEBON: Oui, justement. M. le Président, si vous me permettez
de souligner, il y a une différence nette.
M. CARDINAL: Oui.
M. LEBON: II y a sûrement des cas marginaux et difficiles à
établir. Il est sûr que si M. Cardinal appelle un
électricien chez lui pour changer un fusible, c'est du service aux
particuliers; tandis que construire...
M. CARDINAL: Lorsque j'étais ministre, je demandais à ma
secrétaire.
M. LEBON: Excusez-moi...
M.TREMBLAY (Chicoutimi): Cela coûte trop cher, je
préfère le changer moi-même.
M. LEBON: C'est cela. Lorsque vous faites cela, c'est dangereux pour le
feu.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je n'ai pas de système automatique.
M. CARDINAL: Je n'ai pas de fusible, c'est un système de
relais.
M. LEBON: D'ailleurs, M. le Président, j'aurai tout à
l'heure des statistiques pour illustrer les cas de feu et les cas de
mortalité attribuables à l'électricité.
M. LE PRESIDENT: Mettez les membres de la commission au courant.
M. LEBON: C'est ce que j'essaie de faire, M. le Président, sans
les "bosser", je suppose.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Sans court-circuit.
M. LEBON: Je continue. Tableau 3B, la page 7 : augmentation due à
la parité. On peut voir, région par région, le pourcentage
par lequel serait traduit l'augmentation de salaire. Cela voudrait dire qu'en
Abitibi l'augmentation en pourcentage des taux horaires minimaux d'appels de
service serait de 23 p.c; augmentation due au bill 38, 13 p.c; augmentation
totale, s'il y avait parité en 1972, 37 p.c. On remarque, par exemple,
qu'à Drummondville on augmenterait de 50 p.c. le coût d'un appel
de service. Ce qui veut dire que si cela coûtait $5 pour faire changer un
fusible à Drummondville, avec la parité cela en coûterait
$10. On peut faire aussi un petit calcul rapide pour démontrer que quand
on prend la moyenne des salaires, par exemple à Granby ou
Saint-Hyacinthe, qui est de $88.90 par semaine pour le service d'un
électricien et d'un apprenti, une journée, sans compter les
matériaux utilisés je dis bien une seule journée
monterait à $136.
Alors, pour l'individu je parle du consommateur en
général qui a à faire effectuer des travaux de service qui
sont nécessaires pour lui, il faut, je pense, et c'est le devoir du
gouvernement, prendre en considération la protection du consommateur
je le dirai tout à l'heure qui peut évidemment
faire lui-même les réparations, mais mettre ainsi sa vie en danger
et risquer l'incendie. D'ailleurs, comme je l'ai dit tout à l'heure,
j'aurai des statistiques.
M. LE PRESIDENT: Le député de Bagot veut avoir des
éclaircissements.
M. CARDINAL: Encore une fois, ce sont peut-être des questions qui
ne paraissent pas impertinentes, mais candides. Quand vous parlez
d'électricien et que, moi, je parle du consommateur, nous ne nous tenons
que dans ce secteur. Vous avez l'électricien que vous faites venir,
parce que tout à coup votre plafonnier dans la chambre à coucher
ne fonctionne plus.
M. LEBON: Est-ce que vous en avez besoin dans la chambre à
coucher?
M. CARDINAL: Non, non.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Cela dépend des soirs.
M. CARDINAL: J'aime cela quand il fait clair. Je parle de la situation
à la commission parlementaire.
M. LEBON: Ah! excusez-moi.
M. CARDINAL: C'est un exemple. Mais pour être sérieux, le
consommateur, lui, n'a pas une initiation technique qui lui permet de
différencier les genres de techniciens qui viennent chez lui. Je prends
deux ou trois exemples pour expliciter ma question. Si vous avez une machine
à laver la vaisselle, une laveuse, une sécheuse, un plafonnier
qui ne fonctionnent pas, etc., vous faites affaire avec deux sortes de
personnes, semble-t-il. Avec l'électricien directement, que vous trouvez
dans les pages jaunes, ou avec une compagnie qui porte un nom et qui vous a
vendu les produits avec ou sans garantie, qu'elle soit expirée ou non.
Est-ce que dans les deux cas ceci est considéré comme un service
d'électricien au consommateur, ne m'en tenant que dans le domaine de
l'électricité? Ce n'est pas une défectuosité
mécanique, mais une défectuosité électrique dans
des machines, lesquelles sont de plus en plus nombreuses dans les foyers des
consommateurs normaux.
M. LEBON: Disons qu'à ce jour, ni la Corporation des
maîtres électriciens ni aucune autre partie patronale n'a couvert
les compagnies comme Canadian General Electric ou Westing-house qui font
l'entretien comme vous dites de machines à laver, de
sécheuses, etc. à la résidence. On considère qu'il
s'agit d'une installation électrique régie par le bill 290
lorsqu'il est question de débrancher techniquement une machine pour
faire le raccordement. Cela devient une installation électrique
régie par le bill 290.
M. CARDINAL: D'accord, quand vous achetez je m'excuse
d'être si trivial quand vous installez une cuisinière
électrique et qu'il faut la raccorder au 220, c'est un
électricien qui vient.
M. LEBON: C'est ça.
M. CARDINAL: Quand vous la faites réparer après, c'est
quelqu'un de la compagnie qui vous l'a vendue.
M. LEBON: Règle générale, oui.
M. CARDINAL: Là, on arrive au même problème qu'hier,
la différence entre l'entretien et la construction. Parce que, dans le
deuxième cas, c'est de l'entretien et dans le premier cas, c'est de la
construction.
M. LEBON: Non, en fait, entretenir, c'est entretenir quelque chose qui
reste en fonction. Tandis que si on parle d'une réparation, de changer
un élément, d'après nos conseillers juridiques, changer un
élément constitue un travail qui est couvert par le bill 290.
Tandis que, si je vais essuyer un rond de poêle parce qu'il est sale, il
est sûr que c'est de l'entretien.
M. CARDINAL: Je ne vous le demanderais pas.
M. LEBON: Je vais même parler d'essuyer il faudrait que je
me souvienne du terme français, M. Tremblay va me reprendre des
"bus", des omnibus électriques, des "bus bars", en anglais.
Souvent, il faut les entretenir, les essuyer, cela, c'est de
l'entretien, même si c'est électrique, tout est
débranché. On fait de l'entretien. Les contrôles complexes
où il faut...
M. CARDINAL: D'accord.
M. LEBON: ... par exemple, nettoyer les contacts, c'est de l'entretien,
on ne change pas de pièces. Si on change des pièces, cela, selon
nos conseillers juridiques, tombe sous l'effet du bill 290 et c'est de la
construction.
M. CARDINAL: Excusez-moi de poser ces questions, mais ces
tableaux-là ne sont révélateurs que si l'on sait à
quoi ils s'appliquent dans la pratique.
M. LEBON: Je dis donc que le consommateur, en général, va
consulter les pages jaunes et appeler un entrepreneur électricien pour
faire la majorité des travaux. L'entrepreneur électricien
étant un employeur professionnel, qui tombe donc sous l'effet du bill
290, est obligé de faire payer au consommateur les taux du
décret. Autrement dit, c'est quand même assez rare que l'on
appelle la Canadian General Electric pour venir changer un fusible. Je pense
qu'on ne pensera même pas à cela. Si l'installation
électrique fait défaut, a sauté ou a brûlé,
on appellera sûrement l'entrepreneur électricien. S'il y a dans
une maison un commutateur ou des prises de courant à ajouter, c'est
encore l'entrepreneur électricien qui va venir, qui va percer le mur,
qui va faire en entier la réparation. C'est donc l'entrepreneur
électricien qui donne directement les services au consommateur; c'est
à partir de cela qu'on dit qu'il y aurait danger fondamental quant aux
services, s'il y avait des taux excessifs; ça augmenterait le braconnage
et il découlerait de cela une augmentation des dangers d'incendie et
d'électrocution.
Est-ce que cela répond à votre question?
M. CARDIN AL: Bon.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que vous avez fini? Le député de
Chicoutimi a une question à vous poser.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Lebon, j'aurais une question à vous
poser; elle rejoint ce problème d'augmentation des coûts pour le
consommateur, et je voudrais savoir dans le détail ce qui se passe. Je
fais demander un électricien chez moi pour une réparation
importante, on effectue la réparation et je reçois ensuite de la
maison qui est venue un relevé de compte. Il est indiqué tant de
pièces, tant d'autres de travail, plus voyages, transport, ainsi de
suite. D'ailleurs, il arrive très souvent que l'électricien ait
malheureusement oublié quelque chose d'important, il doit retourner, me
recharge à nouveau les frais de transport. Comment se fait par
l'entrepreneur le partage des coûts qui me sont imputés à
moi? Si on dit, par exemple, tant d'heures de travail, $50. Comment est-ce
calculé? Qu'est-ce qui va à l'entrepreneur et qu'est-ce qui va
à l'ouvrier qui est venu chez moi?
M. LEBON: Nous, de la Corporation des maîtres électriciens,
suggérons un taux horaire qui tient justement compte du temps perdu.
Suivant la firme Anderson Price Service de Toronto, le temps perdu dans le
service pour un électricien est de 25 p.c.
M. CARDINAL: Le temps perdu?
M. LEBON: Le temps perdu, c'est le temps où le gars est assis, ce
sont les 15 minutes le matin et les 15 minutes l'après-midi pendant
lesquelles il voyage d'une résidence à l'autre; il faut qu'il
soit payé, il faut que quelqu'un le paie. C'est sûr que ce n'est
pas aux frais de l'employeur. Cette perte de temps est donc répartie sur
tous les clients. C'est une façon. Il y a une autre façon. Par
exemple, certains plombiers de Montréal chargent une demi-heure de frais
de transport à chaque client, indépendamment de la distance. Si
cela a pris une heure et demie dans un cas, il charge quand même une
demi-heure, parce que, dans un autre cas, ç'a pris dix minutes. Cela
dépend de l'entrepreneur. Nous, nous suggérons à nos
membres un taux fixe tenant compte de cette perte de temps, qui est
évaluée d'une façon objective.
UNE VOIX: Vous établissez une parité au niveau du taux
exigé?
M. LE PRESIDENT: Continuez, M. Lebon. M. LEBON: Pas une
égalité, une parité.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je reviens à la question que je vous ai
posée. Si on indique sur ce relevé de compte tant d'heures de
travail représentant un montant de $105, $108, $110, est-ce que ce
montant-là représente exactement ce que vous donnez au
travailleur qui est venu chez moi? Quelle est la part que vous prenez
là-dedans?
M. LEBON: Vous me posez une question très technique, je vais
devoir répondre d'une façon très technique. Dans le calcul
du taux, il y a 15 p.c. d'administration, 10 p.c. de profit à
l'employeur, l'assurance-chômage, le comité conjoint, les vacances
payées, les accidents de travail, l'assurance-groupe,
l'assurance-responsabilité, le fonds de retraite, la
sécurité sociale et la perte de temps. Sous la perte de temps, on
inclut autos, camions, outillage, équipement, facteur économique
régional, etc. Autrement dit, il y a les bénéfices
marginaux, qui sont à peu près de l'ordre de 17 p.c. et il y a
évidemment le taux de base, le profit à l'employeur et la perte
de temps.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Cela répond à ma question.
Merci.
M. LE PRESIDENT: Le député de Laurier.
M. MARCHAND: M. Lebon, les compagnies qui vendent des appareils
électriques ne sont-elles pas affiliées actuellement à des
entrepreneurs électriciens qui font leurs installations et qui vont
faire le service domiciliaire pour ces compagnies? Est-ce que ces
électriciens ont le tarif que vous suggérez, ou le tarif
suggéré par le bill 38, ou par la Corporation des maîtres
électriciens?
M. LEBON: Malheureusement, ces compagnies ne sont pas
protégées par le bill 290, elles ne sont pas membres
d'associations patronales et elles ont un taux différent nettement
inférieur aux taux de la construction.
M. MARCHAND: Oui, mais ce sont des maîtres électriciens
quand même.
M. LEBON: Non, je vous demande pardon; GE n'est pas maître
électricien.
M. MARCHAND: Non, je parle des entrepreneurs électriciens qui
font l'entretien et le service pour la compagnie GE, ou pour la maison Eaton,
ou pour la maison Dupuis & Frères et qui vont dans les maisons
privées, par exemple, pour réparer la cuisinière ou
certains appareils électriques. Je vous demande si ces maîtres
électriciens font partie de la Corporation des maîtres
électriciens.
M. LEBON: Ils sont tous membres.
M. MARCHAND: Mais ont-ils les mêmes tarifs que les autres
maîtres électriciens qui vont dans les chantiers de
construction?
M. LEBON: En fait, ils ont le même taux salarial à payer,
oui.
M. MARCHAND: Alors lorsqu'ils vont dans les maisons pour réparer
une cuisinière, ou quoi que ce soit, ils vont charger le même taux
qu'un électricien qui vient réparer les sorties ou quoi que ce
soit?
M. LEBON: Absolument. Mais regardez, il y a une chose, par exemple, si
on parle de perte de temps, il est sûr que dans le service il y a
beaucoup plus de pertes de temps que dans un chantier de construction. Dans un
chantier de construction, on commence à huit heures et on finit à
cinq heures le soir, il n'y a pas de perte de temps, ou à peu
près pas.
M. MARCHAND: Est-ce que ces compagnies qui font le service n'ont pas de
taux fixes?
M. LEBON: On a des taux suggérés. D'ailleurs je profite de
l'occasion, M. le Président, pour inviter tous les membres de la
commission, s'ils pensent qu'ils se font surcharger, comme on dit, par des
entrepreneurs électriciens, de se plaindre à la Corporation des
maîtres électriciens qui fera enquête dans chacun des
cas.
M. MARCHAND: II n'est pas question de se plaindre, mais d'avoir des
informations.
M. LEBON: Je comprends, M. Marchand, d'autant plus que votre
frère est membre chez nous.
M. MARCHAND: C'est ça.
M. LE PRESIDENT: S'il n'y a pas d'autres questions à ce stade-ci,
vous pouvez continuer, M. Lebon.
M. LEBON: Je continue mon exposé qui sera très bref. Au
tableau suivant, le tableau 3-3, "Coût minimum d'appel de service", on
voit que la parité serait de $10.70 indépendamment de la
région, comparativement au taux actuel suggéré que l'on
voit à la première colonne. Il me semble que M. Laberge a quelque
chose à dire, M. le Président.
M. LABERGE: Puis-je poser des questions?
M. LE PRESIDENT: Oui, évidemment, je pense qu'il serait
peut-être opportun que les questions soient posées au fur et
à mesure.
M. LABERGE: Louis Laberge, FTQ. Je voudrais poser la question suivante
à M. Lebon. Dans sa réponse à M. Tremblay il a pris le
soin de nous dire que dans le taux chargé par l'entrepreneur au client,
il était compris le salaire, les bénéfices marginaux, le
temps de perte, le temps du transport. Est-ce que M.
Lebon peut affirmer, devant cette commission parlementaire, que
l'entrepreneur électricien à Rimouski, par exemple, va être
obligé de charger autant pour le transport de son employé
qu'à Montréal?
M. LEBON: Je ne suis pas astucieux, mais la réponse est:
Evidemment plus, parce qu'il y a beaucoup plus de frais de transport à
Rimouski qu'il peut y en avoir à Montréal. La distance est
beaucoup plus grande. Autrement dit, les clients sont plus
éloignés à Rimouski, en Abiti-bi, qu'à
Montréal. Les clients à Montréal sont l'un à
côté de l'autre.
M. LE PRESIDENT: A votre réponse...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Cela ne se tient pas. M. Lebon,
écoutez, il faut bien s'entendre. Je comprends que si vous partez de
Rouyn-Noranda et que vous allez à Amos, la distance est grande, mais si
vous partez de la rue Racine à Chicoutimi pour aller sur la rue Price,
c'est le même problème qu'à Montréal.
M. LEBON: Cependant, monsieur, il y a 800 entrepreneurs
électriciens dans la région de Montréal. Si vous les
répartissez dans l'aire, ou la superficie, vous allez vous rendre compte
qu'il y en a, à peu près, à tous les coins de rue. Alors
les distances sont courtes; tandis que, dans certaines régions,
malheureusement, je n'ai pas les noms, mais dans certaines municipalités
il n'y a même pas d'entrepreneur électricien, on est obligé
d'appeler la municipalité voisine pour le faire venir afin de faire des
réparations. Voilà pourquoi je dis que, dans les régions
éloignées, règle générale, le temps du
transport est plus long qu'à Montréal.
M. LABERGE: N'est-il pas vrai qu'à Rimouski, par exemple,
où il y a cinq entrepreneurs électriciens, si un client, qui a
besoin des services d'un entrepreneur, le fait venir de Montréal, il va
payer pas mal de transport? Mais, si le gars est un peu sensé, il va
faire appel à un entrepreneur de Rimouski. A ce moment-là, est-ce
que M. Lebon peut continuer d'affirmer que le temps que l'employé va
prendre pour aller de chez son employeur chez le client, ne sera pas moins long
que si le gars part de Verdun pour aller donner du service à
Notre-Dame-de-Grâce, aux heures de pointe, par exemple?
M. LEBON: M. le Président, on ne fait pas de cartes de taux
individuelles. On ne dit pas: Monsieur X, entrepreneur électricien, qui
demeure à 37, Place Rupert, va exiger tant parce que son client est
juste à côté. On fait une carte de taux qui tend à
l'uniformité, pour toute la région, en prenant en
considération la moyenne de transport des employeurs de la
région.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. Lebon, vous ne pouvez quand même pas
soutenir ce que vous avez dit tout à l'heure, à savoir que les
taux peuvent être les mêmes à Rimouski qu'à
Montréal.
Prenez quelqu'un qui est à Montréal; il part de
l'extrémité de la rue Sherbrooke, et se rend à l'autre
extrémité. Cela lui prend autant de temps que ça va lui en
prendre pour aller de Chicoutimi à Roberval, il y a 60 milles. Compte
tenu de la circulation et tout cela, ça va lui prendre autant de temps.
Expliquez-moi cela en répondant à la question de M. Laberge,
parce que là, je ne comprends vraiment pas.
M. LEBON: Vous m'embêtez un peu avec votre question, j'en
bégaie même.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je vais la reprendre.
M. LEBON: II y a sûrement plus de millage, n'est-ce pas?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui. Le millage et le temps. Est-ce que vous
tenez compte des deux facteurs: le temps et la distance parcourue?
M. LEBON: D'abord, il y a perte de temps et il y a aussi, comme on dit,
les frais d'administration. Les frais d'administration, dans les régions
éloignées, sont plus élevés parce qu'on va faire
plus de millage avec un camion. Il y a toutes sortes de petites choses comme
cela qui entrent en considération de sorte que comme je le dis
on fait une carte de taux pour une région et non pas pour un
individu.
Il y a deux régions en particulier, si je ne me trompe pas,
l'Abitibi et Rimouski, où les employeurs, après un relevé,
démontraient qu'il y avait plus de perte de temps qu'il n'y en avait
à Montréal.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Là, je vous pose une question
très simple.
Vous partez de l'est de Montréal et vous allez dans l'ouest,
à l'heure de pointe. Cela va vous prendre une heure et demie à
vous rendre là, compte tenu de la distance qui n'est pas énorme
en milles. Cela peut prendre plus de temps d'aller de cet endroit à
l'autre de Montréal que d'aller de Roberval à Chicoutimi
où il y a 60 milles.
M. LEBON: D'accord. M. Tremblay, vous avez absolument raison. Cependant,
si vous regardez la carte de Montréal, vous allez vous apercevoir que,
dans la région de l'ouest dont vous parlez, il y a peut-être dix
entrepreneurs. C'est là qu'est la solution.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Mais, est-ce à ceux-là qu'on
fait toujours appel, nécessairement?
M. LEBON: Lorsqu'un consommateur cherche dans les pages jaunes, il va
choisir l'entrepreneur le plus près de chez lui, étant
donné qu'il y en a tant à Montréal. Comme je le dis, il y
en a 800, et, dans le reste de la province, il n'y en a pas 1,000. Cela veut
dire qu'il y en a presque à tous les coins de rues. Les distances sont
plus courtes, parce que l'individu a affaire avec un client qui est à
côté.
M. LE PRESIDENT: M. Laberge, je vais permettre cette question-là,
mais, je me demande si, pour ne pas prendre tout le temps de M. Lebon... Je
pense qu'on a quand même clarifié un peu les diverses positions.
Les membres de la commission ont saisi la façon dont les maîtres
électriciens procédaient pour établir le coût de
leurs services au client. Je veux bien permettre une dernière question,
M. Laberge.
M. LABERGE: Je ne prendrai pas tout le temps de la commission. Quand on
parle d'un taux uniforme de $10.70, pour les régions, il faut prendre
tout en considération: le fait que le loyer de la boutique est plus
élevé dans certaines régions que dans d'autres et que le
temps pour parcourir la même distance est certainement beaucoup moindre
dans des régions éloignées que dans les centres populeux.
Je pense que je n'ai pas besoin d'aller plus loin.
La commission a reçu une information tantôt. J'ai
peut-être mal saisi la réponse de M. Lebon; je voudrais lui
reposer la question. Est-ce que M. Lebon connaît des entrepreneurs
électriciens qui vont donner des services sur des appareils
électriques pour des magasins comme Morgan, Dupuis & Frères
et les autres? Est-ce que vous en connaissez? A mon sens, ça n'existe
pas.
M. BOIS: En dehors de Montréal, oui.
M. LEBON: En dehors de Montréal surtout, parce que je
pense que les députés le savent les entrepreneurs des
régions plus éloignées vont faire les réparations
de grille-pain et de n'importe quoi. A montréal, étant
donné la concentration, encore une fois, des appareils
électro-ménagers, ce seront plutôt les grosses compagnies
manufacturières qui vont faire le service elles-mêmes.
M. CADIEUX: Dans des régions en dehors de Montréal, je
crois que plusieurs compagnies requièrent des entrepreneurs
électriciens pour faire leur service. Par contrat avec eux, ce n'est
peut-être pas rémunéré de la même
façon, je ne le sais pas. Mais, c'est confié à des
entrepreneurs électriciens en dehors de Montréal. Je suis
commerçant de meubles et je sais que ceux qui font le service pour les
meubles que l'on vend, s'il y a lieu de les réparer, sont des
entrepreneurs électriciens engagés par la compagnie.
M. LE PRESIDENT: Le député de Sainte-Marie.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. Lebon, je prends comme exemple la maison
Eaton. Le service qu'elle donne, c'est tout simplement lorsqu'elle vend des
appareils électriques. C'est une équipe employée par Eaton
pour aller faire le service, l'entretien en somme, s'il y a une
défectuosité. Les employés n'ont pas le salaire d'un
électricien qui travaille sur la construction. Ils sont payés
à taux fixe, ces gens-là.
M. LEBON: C'est sûr, ils ne sont pas couverts....
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Ils font l'entretien des appareils qu'ils
vendent, quand il y a une défectuosité quelconque.
M. LEBON: C'est ça, ils ne sont pas couverts par le bill 290.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Non, non. Je ne crois pas.
M. LEBON: Je continue, M. le Président?
M. LE PRESIDENT: Vous pouvez continuer.
M. LEBON: Je voulais simplement souligner l'aspect particulier de
l'industrie électrique. D'ailleurs, il a été assez
souligné, je pense. On doit se rendre compte qu'on donne un service aux
particuliers. Alors, toute augmentation de taux, enfin toute augmentation de
salaire, c'est encore sur la tête du petit contribuable qu'elle va se
faire.
Pour citer le rapport de nos économistes, à la page 10,
après l'étude qu'ils ont faite duservice, ils concluent ce qui
suit: On peut affirmer que la parité salariale entraînera une
réduction des quantités demandées de services, hors de
Montréal, et aura de ce fait un effet négatif sur l'emploi. Ces
conséquences de la parité vont se manifester dans les
différentes régions de façons fort diverses. Certaines
régions à faibles revenus seront particulièrement
affectées, telle Rimouski. Concurremment, ce sont les petites
entreprises qui, dans ce domaine, feront les frais de la parité.
Au point de vue du braconnage dans le service, je me
réfère au mémoire de la corporation et je me permets de
vous fournir les statistiques que j'avais promises tout à l'heure.
Des conditions de travail rigides et inapplicables c'est dans le
mémoire à la page 5 qui pourraient être
imposées à la catégorie des entreprises effectuant de la
petite construction ou du service domiciliaire ne peuvent avoir pour effet
qu'augmenter le braconnage dans les installations électriques. Il faut
se rappeler que le législateur a voulu protéger ce même
consommateur contre les installations électriques défectueuses en
créant deux lois, soit la Loi des électriciens et installations
électriques, qui éta- blit des normes d'installation et
d'inspection, et la deuxième loi, la Loi des maîtres
électriciens, qui a pour but d'augmenter la compétence des
entrepreneurs électriciens tout en protégeant le public contre la
possibilité de fraude.
Selon les statistiques obtenues du Commissariat des incendies, il y a
eu, entre les années 1965-1969, un total de 13,454 feux dus à
l'électricité, pour une perte matérielle de $40,759,877.
Notons en passant que le pourcentage total de ces feux va sans cesse croissant,
partant de 10 p.c. des feux totaux...
M. LE PRESIDENT: Excusez, vous nous avez parlé de la page 5 de
quel mémoire?
M.TREMBLAY (Chicoutimi): Pas le document.
M. LEBON: Pas le document.
M. LE PRESIDENT: Pas le document. Ce document n'est pas en la possession
des membres de la commission.
M. LEBON: Pardon?
M. LE PRESIDENT: Les membres de la commission n'ont pas ce document en
main, n'est-ce pas?
M. LEBON: Les membres de la commission ont ce document en main. Ils
l'ont tous lu, mais c'est pour leur rafraîchir la me'moire.
M. CADIEUX: C'est seulement la pagination qu'on n'avait pas.
M. LEBON: D'accord.
M. LE PRESIDENT: M. Lebon.
M. LEBON: Je reprends, M. le Président.
M. CADIEUX: Je pensais que c'était à la page 4.
M. LEBON: Notons en passant que le pourcentage de ces feux va sans cesse
croissant, partant de 10 p.c. en 1966 à 14 p.c. en 1969. C'est une
augmentation de 40 p.c. De plus, selon le Bureau de la statistique du
Québec, il y a eu, au cours des mêmes années, 1,024
accidents dus à l'électricité, causant 83
décès. Parmi ces accidents, on relève 151 cas
d'incapacité permanente.
Ces chiffres, croyons-nous, démontrent clairement qu'il faut
accroître la protection du consommateur contre les installations
électriques défectueuses et éviter, par
l'établissement de coûts exorbitants, que le consommateur effectue
lui-même des travaux électriques ou les fasse effectuer par ce que
l'on appelle, dans le métier, des braconniers incompétents.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je désirerais
poser une question à M. Lebon. Peut-être qu'elle est
prématurée, mais qu'il serait prêt à me donner la
réponse. De ce nombre d'incendies causés par des installations
électriques défectueuses, combien y en a-t-il, à votre
avis, qui avaient été faites par des gens qui n'étaient
pas des maîtres électriciens? Parce que vous êtes parti de
l'idée de braconnage et vous avez ensuite énoncé ces
chiffres. Alors, pour que votre syllogisme soit parfait, il faut que vous
établissiez maintenant la vérité du postulat de
départ, à savoir que ce sont des braconniers qui ont fait les
installations électriques qui ont été la cause de ces
incendies.
M. LEBON: Je serai prêt à fournir à la commission
tout entière des statistiques que je ne possède malheureusement
pas ici pour démontrer, par exemple, que les installations de
cuisinières, lors des déménagements du 1er mai sont de
plus en plus faites par des braconniers. Autrement dit, il y a de plus en plus
de braconniers. Lorsqu'il y a des procès... Je vous réfère
à un procès à Joliette, par exemple. Il y a eu un
procès pour un incendie dû à l'installation
électrique et où il y a eu des morts. Cela avait
été fait par des braconniers.
Evidemment, la question que vous posez, la seule façon dont je
pourrais y répondre, ce serait en vous fournissant des statistiques pour
démontrer que l'augmentation des incendies va de pair avec
l'augmentation du braconnage. Mais comme je vous le dis, si j'étais
député, ce serait le genre de questions que je poserais parce que
vous êtes sûr que je n'ai pas la réponse.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Eh bien voici, M. Lebon, je pense que c'est
assez sérieux. Vous établissez un plaidoyer à partir d'un
postulat. Or, c'est un postulat que vous n'êtes pas capable de
démontrer. Je veux bien vous croire remarquez que je ne mets pas
en doute vos propos mais si vous m'aviez apporté des
statistiques, je me serais dit: II y a vraiment du braconnage et ce braconnage
a causé les incendies dont vous parlez.
M. LEBON: Evidemment, il y a...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Remarquez qu'en disant cela, je veux
défendre votre corporation.
M. LEBON: D'accord. Mais comme je l'ai dit, je serai prêt à
en fournir, des statistiques, pour vous démontrer que le braconnage
augmente, si la commission le désire. Deuxièmement,
évidemment, garder des statistiques sur l'illégalité,
c'est assez compliqué. Si nous savions combien il y a de braconniers qui
font des installations, nous les poursuivrions tous. C'est bien sûr. Mais
nous ne possédons pas l'éventail des messieurs X, Y et Z qui font
des installa- tions qu'ils ne devraient pas faire. Je peux quand même
démontrer, par voie de conséquence, que lors des
déménagements, on ne prend pas de permis d'installation de
cuisinières, ce qui veut dire que chaque cuisinière est
raccordée, soit par le propriétaire ou par des braconniers. Et de
plus en plus. Pourquoi? A cause des taux exorbitants que le consommateur n'est
pas capable d'absorber. Combien d'entre vous, messieurs, avez effectué
vous-mêmes les installations électriques dans votre sous-sol?
DES VOIX: Jamais!
M. LEBON: Je tiens à dire, M. le Président: Moi non
plus.
M. LE PRESIDENT: M. Lebon, il ne faudrait pas prendre, quand même,
les membres de la commission pour des braconniers.
M. Desjardins aurait quelque chose à ajouter sur ce point.
M. DESJARDINS: J'aimerais porter à l'attention des
députés qu'en 1966, il y avait 10 p.c. de
défectuosités électriques qui ont causé des
incendies et en 1969, 14 p.c. Les 4 p.c. supplémentaires, c'est parce
qu'il y a 4 p.c. de plus de maisons bâties qu'en 1966. C'est
peut-être la raison pour laquelle il y a plus d'incendies.
M. LEBON: Je continue, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Les braconniers, est-ce que cela comprend aussi les
apprentis électriciens qui sont en phase d'entraînement?
M. LEBON: Non, absolument pas. Lorsqu'ils sont à l'emploi d'un
employeur, non. Mais évidemment, ces pauvres gars...
M. LE PRESIDENT: Ils ne feraient pas cela en dehors de leurs heures de
travail habituelles?
M. LEBON: De temps en temps, oui, en dehors des heures de travail.
Autant le compagnon que l'apprenti. Comme le peintre, évidemment, qui
ira peinturer par un taux inférieur au décret, c'est
sûr.
M. LE PRESIDENT: Vous pouvez continuer.
UNE VOIX: Pour faire du temps supplémentaire!
M. LEBON: Le matériel, évidemment, on peut l'obtenir dans
les quincailleries. C'est facile, tout le monde le sait.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Lebon, pour ma gouverne personnelle, quand
je fais demander un électricien, alors, il y a un
monsieur qui s'amène, qui m'a l'air d'être le maître
d'oeuvre, et qui me dit: On va installer ceci, cela Puis, cinq minutes
après, je reste avec l'apprenti et c'est lui qui fait le travail. Est-ce
que je peux me fier à cet apprenti-là?
M. LEBON: D'abord, un apprenti est censé toujours travailler avec
un compagnon. Dans ce cas-là, pour votre gouverne, vous pouvez vous
plaindre au comité paritaire qui va voir à ce que l'apprenti soit
accompagné de son compagnon.
M. CROISETIERE: D'ailleurs, le compte est produit pour les deux.
M. LEBON: Pardon?
M. CROISETIERE: normalement, le compte produit couvre le compagnon et
l'apprenti.
M. LEBON: Si l'employeur est voleur, je vous demande de me dire son
nom.
M. CROISETIERE: Non, non. M. LEBON: D'accord.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non, non, ce n'est pas une accusation.
M. LEBON: Est-ce qu'il y a l'immunité parlementaire ici?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): On va le poursuivre.
M. LEBON: Nous allons référer cela à nos
conseillers juridiques.
M. LE PRESIDENT: on revient à M. Lebon. Vous pouvez
continuer.
M. LEBON: Merci. Je continue, M. le Président.
M. VEZINA: M. le Président, j'aurais une question à poser.
Est-ce que vous affirmez devant la commission parlementaire qu'il y a une
relation directe, que vous avez vérifiée, entre le braconnage et
les pertes considérables dues aux incendies causés par
l'électricité dont vous avez mentionné le chiffre
tantôt? Affirmez-vous devant la commission parlementaire qu'il y a une
relation entre les deux?
M. LEBON: Si je comprends bien la question, c'est entre le braconnage et
les incendies?
M. VEZINA: Oui.
M. LEBON: Oui, je l'affirme.
M. VEZINA: Est-ce que votre affirmation est basée sur des
statistiques ou sur des études que vous avez faites ou que vous avez
fait faire par des gens de l'extérieur?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'ai déjà posé la
même question.
M. LEBON: C'est la même question que M. Tremblay posait tout
à l'heure. Comme on dit, c'est assez difficile d'établir des
statistiques sur les gens qui font des choses illégales. Mais, on
procède par l'absurde. Plus ça va, moins on prend de permis
d'installation électrique pour faire tel ou tel travail. Alors, c'est
pour cela qu'on dit; iI y a plus de braconnage, il y a plus d'incendies. Alors,
on fait la corrélation.
M. PEPIN: II l'affirme, mais il ne le sait pas.
M. LE PRESIDENT: Je remercie le député de Montmorency pour
sa question. Vous pouvez continuer, M. Lebon.
M. LEBON: On voulait souligner l'importance des services fournis par les
électriciens. La commission parlementaire a, croyons-nous, un rôle
extrêmement important à jouer, si l'on songe aux
conséquences graves qu'aura l'établissement de conditions de
travail telles que le consommateur ne puisse se payer le luxe d'une
nécessité courante qu'est le service de l'électricien.
J'ai donné, tout à l'heure, l'exemple d'un salaire
hebdomadaire moyen de $88.69 à Granby, Saint-Hyacinthe, alors que, pour
embaucher un électricien et un apprenti, il en coûterait $136 pour
la journée. En faisant cette relation entre le salaire hebdomadaire
moyen gagné à Saint-Hyacinthe et les taux transmis aux clients,
nous en venons à la conclusion que le consommateur moyen, dans ces
circonstances, doit se passer des services d'un électricien ou effectuer
lui-même les réparations qui s'imposent pour lui permettre de
vivre convenablement.
Cet exposé met en relief, nous l'espérons, le
problème particulier du service au consommateur auquel doit faire face
l'entrepreneur électricien. Ce problème demeure entier et, avant
de le résoudre, on doit, pour être juste envers les petites
entreprises et les consommateurs en général, en tenir compte et
accorder un rattrapage des plus restreints. On parlait de service.
Je veux souligner que même si la question de service est
fondamentale, l'aspect premier du plaidoyer aujourd'hui, c'était la
parité salariale.
Je vous réfère maintenant à la page 17 du rapport
des économistes. Celui-là, vous l'avez, comme les autres,
d'ailleurs.
M. VEZINA: Nous l'avons devant nous. M. LEBON: Devant vous, oui.
M. LE PRESIDENT: La section blanche, je présume?
M. LEBON: La section blanche, c'est ça. La première
section porte sur la parité et la deuxième, on le verra tout
à l'heure, sur la question des secteurs.
A la page 17, on voit la conclusion de l'étude qui
précède. Nos résultats apparaissent au tableau 36 et
montrent qu'au moins dans ce cas la protection de l'emploi local est faible
puisque un tiers des électriciens de Montréal seraient dès
aujourd'hui habilités à travailler partout en province. Notons
ici que la parité aurait certainement pour effet d'augmenter cette
proportion en constituant un stimulus aux entreprises de Montréal
à stabiliser leur main-d'oeuvre et à étendre leur
marché.
Si vous me le permettez, là, je vais essayer d'être le plus
clair possible pour voir ce qui se passe.
Nous avons le jugement Gold qui dit qu'un salarié régulier
provincial peut oeuvrer partout en province. Or, un salarié
régulier provincial est un individu qui a effectué 1,500 heures
pour le compte du même employeur.
Advenant la parité, tous ces individus pourraient aller partout
en province avec le salaire de Montréal, comme ils l'ont à
l'heure actuelle. L'étude économique démontre qu'à
Montréal, 33 p.c. des électriciens sont des employés
réguliers provinciaux. Ce qui veut dire que les entreprises de
Montréal iraient effectuer des travaux partout en province et de ce fait
diminueraient les possibilités de travail des ouvriers de la
région.
Avec le jugement Gold, avec l'histoire des permanents et des
réguliers, et avec aussi l'histoire de la parité, cette
proportion de 33 p.c, croyons-nous, aura tendance à augmenter. Ce qui
veut dire que si 75 p.c. des électriciens, tout à l'heure,
deviennent des réguliers provinciaux pour les entreprises de
Montréal, cela veut dire tout simplement qu'ils mettent hors de
marché les entreprises locales et privent la main-d'oeuvre locale
d'emplois qu'elle a présentement.
J'espère que c'est clair, en tout cas, s'il y a des questions
d'ordre technique...
M. LE PRESIDENT: Est-ce que ce n'est pas ce qui se produit à
l'heure actuelle, par exemple, lorsque la compagnie Bédard et Girard qui
a un contrat avec une union va faire des travaux à Grand'Mère,
les électriciens ne sont-ils pas payés selon le taux de
Montréal?
M. LEBON: II y a deux possibilités là je vais avoir
une discussion avec les gars de la FTQ pour un employeur de
Montréal qui va effectuer des travaux à l'extérieur de
Montréal. Soit qu'il prenne sa main-d'oeuvre de Montréal et qu'il
l'emmène en province. Là, il paie le taux de Montréal;
soit qu'il emmène ses hommes clés en province en les payant au
taux de Montréal et en engageant la main-d'oeuvre, évidemment, au
taux de la région. Les deux possibilités se font, de fait. Cela
dépend de la nature du contrat.
Je vais faire plaisir à mon ami André Desjardins. Il est
sûr que, s'il est question de construire une raffinerie, un employeur
aura tendance à emmener à Saint-Romuald, des ouvriers de
Montréal qui ont déjà travaillé dans les
raffineries plutôt que d'engager un électricien qui n'a fait que
du filage de maison. C'est sûr, parce que ce dernier ne sera pas
productif dans le chantier et ça devient plus rentable pour l'employeur
de payer le taux de Montréal parce que ses gars sont
superspécialisés et, de ce fait, c'est pour cette raison que
l'employeur emmène les gens de Montréal. Est-ce que ça
répond à la question?
M. LE PRESIDENT: Oui. Monsieur Desjardins.
M. DESJARDINS: L'objection de M. Lebon dit qu'en étendant la
parité salariale à toute la province, les entrepreneurs de
Montréal emmèneront leur main-d'oeuvre en dehors et que ça
enlèvera aux entrepreneurs locaux du travail qu'ils avaient auparavant.
Si sa thèse est bonne, cela veut dire que, s'il y a un travail à
faire à Rimouski, étant donné que les entrepreneurs de
Montréal paient le même prix, le gars de Rimouski qui veut faire
construire un bungalow, appellera à Montréal et dira: Vu que tu
charges le même prix, viens donc réparer mon commutateur. Est-ce
cela que vous voulez dire?
M. LEBON: Je n'ai pas tellement bien compris la question.
M. DESJARDINS: Vous avez dit que le gars transporterait sa main-d'oeuvre
pour le service...
M. LEBON: Non, non. Pas du tout.
M. LE PRESIDENT: M. Desjardins a voulu caricaturer une situation.
M. MARCHAND: II s'agit de gros contrats, pas des affaires de $5.
M. LE PRESIDENT: Alors, le député de Maisonneuve a une
question à poser.
M. BURNS: M. Lebon, quand un employeur de Montréal emmène
sa main-d'oeuvre; prenons l'exemple que mentionnait M. Desjardins, à
Rimouski, n'a-t-il pas, en plus du salaire à lui payer, des frais de
déplacement, des allocations? Croyez-vous sincèrement que la
parité salariale étant instituée, que cet employeur
préférera encore emmener des gens de Montréal et leur
payer, en plus du salaire, leurs déplacements, leurs dépenses de
repas ou de coucher, je ne sais pas quoi? J'imagine qu'il y a des allocations
qui sont payées.
M. LEBON: Si je peux me permettre de suggérer au
député de Maisonneuve de lire attentivement le mémoire, on
en traite et on dit ceci : Les grosses entreprises ont déjà des
privilèges parce qu'elles achètent beaucoup de matériaux,
elles ont déjà des ristournes de beaucoup supérieures
à la petite entreprise.
Je peux vous citer un cas où un entrepreneur de Montréal
est allé construire la polyvalente des Iles-de-la-Madeleine, qui
n'était même pas couverte par le décret, où on
payait le salaire minimum.
Il a embauché des gars de Montréal, au taux de
Montréal. Il était capable de concurrencer les entrepreneurs
locaux qui n'avaient pas le pouvoir d'achat pour construire une polyvalente.
Ils n'avaient pas le crédit; même s'ils l'avaient eu, ils
achètent tout à la pièce.
Il y a des entrepreneurs qui vont à la quincaillerie acheter un
thermostat avant d'aller le poser dans une maison, tandis qu'un gros
entrepreneur peut en avoir un stock considérable, ayant un pouvoir
d'achat plus élevé, avec des avantages. Tout ça, aussi
à cause de son organisation bien structurée, fait qu'il peut
entrer en compétition, malgré qu'il soit obligé de payer
le temps de déplacement, les frais de pension et le taux de
Montréal. Si on admet la parité salariale, c'est sûr que
ça ne fait qu'augmenter cette possibilité, pour l'employeur de
Montréal ou des grands centres, d'aller à l'extérieur.
M. LE PRESIDENT: Le député de Bagot.
M. CARDINAL: M. le Président, permettez-moi de dire ce qui me
frappe et ce qui, à mon humble point de vue, ne m'a pas encore
convaincu, peut-être ni dans un sens ni dans l'autre. Je reprends une
chose qui a été dite hier, pas textuellement; on a
mentionné que s'il y avait parité dans la construction et que
l'on construisait une maison, je ne sais pas, moi, à Lafontaine, dans le
comté de Terrebonne, ou à Saint-Elie-de-Caxton, dans la Mauricie,
ou à Saint-Tite, la parité de salaire aurait des
conséquences...
M.TREMBLAY (Chicoutimi): A Chicoutimi, un endroit connu.
M. CARDINAL: ... assez formidables. En même temps, on nous a dit,
ce qui me semble aussi vrai, qu'évidemment le terrain sur lequel on
construirait cette maison, dans chacun des endroits, n'aurait pas la même
valeur, les matériaux, à cause du transport, ne coûteraient
pas le même prix. Par conséquent, le produit total, malgré
tous les tableaux que les économistes nous donnent et je ne me
prétends pas du tout économiste ne changerait pas autant
que les chiffres que certains mémoires nous indiquent ce que j'appelle
le produit fini.
Je prends un exemple tiré d'ailleurs pour illustrer ceci. En
vertu de certains décrets ministériels, de certains
arrêtés ministériels comme on dit ici, il existe des tarifs
uniformes dans tout le Québec pour certaines professions, prenons par
exemple les notaires. Que le notaire exerce à Montréal, à
Shawinigan ou à Saint-Tite, s'il y a une vente de
propriété, le taux de ses honoraires est fixé selon une
parité qui est la même partout. Le résultat,
évidemment, est différent, en ce sens que le type qui est notaire
et qui passe à Montréal un contrat de bail commercial entre la
Banque Royale et l'édifice Place Ville Marie va retirer plus
d'honoraires que celui qui va passer un contrat à Saint-Tite, entre Mme
Laframboise et la Banque Canadienne Nationale. Mais, ça va être
quand même la partie quant au taux. Ce que je veux tenter d'illustrer par
ceci, c'est que, jusqu'à présent, on ne nous a pas prouvé
que le total de l'opération change les choses autant que, selon qu'on
est employeur à la table des négociations ou employé, on
le prétend dans un sens ou dans l'autre.
Il est normal que, lorsqu'on défend une thèse, l'on prenne
tous les arguments disponibles Je ne dis pas et ne prétends pas et ne
veux pas du tout laisser entendre que les arguments sont tronqués, mais
j'ai l'impression qu'on nous donne la vérité, d'accord, mais par
pièces détachées, chacun selon sa thèse. Tant mieux
si à la suite des travaux de cette commission, à force d'avoir
des pièces détachées, on finit par remplir le
casse-tête sans qu'il en manque un morceau et qu'on ait réussi.
Encore tant mieux si on n'a pas besoin de trouver tous les morceaux du
casse-tête, puis que vous vous entendiez. Mais, tous ces chiffres qu'on
nous lance, ces tableaux que nous avions hier dans le petit livre de M.
Loranger, ceux que vous nous montrez, aujourd'hui, ceux de M. Raynauld, bien,
c'est normal que des économistes, des avocats se contredisent lorsqu'ils
ont à défendre des thèses différentes, parce qu'ils
ne prennent qu'une partie du problème et non pas ce que j'appellerai le
problème global. En disant ceci, ce n'est pas vous que j'attaque, ce ne
sont pas les parties patronales, ce ne sont pas non plus les parties
syndicales; je me dis qu'il faudrait quand même faire un effort
d'objectivité et de... n'appelons pas ça de la clairvoyance. Je
ne sais au juste comment m'exprimer.
M. LEBON: D'efficacité.
M. CARDINAL: Non, pas d'efficacité. Ce mot a été
trop employé avant le 29 avril.
UNE VOIX: Parité!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Surtout pas réalisé.
M. CARDINAL: De vision totale de l'ensemble. Vous avez fort bien
répondu à une multitu-
de de questions cet après-midi, dont certaines étaient
fort techniques et qui nous ont éclairés davantage. D'ailleurs,
depuis hier, nous, simples députés, avons appris beaucoup de
choses. Mais quand même, tous ces tableaux me font penser à des
consultations juridiques, par déformation professionnelle, où on
peut non pas prouver des contraires, mais où, en ne prenant que certains
éléments d'un tout, on peut prouver quelque chose. Ce que je
recherche, en me disant que peu importe ce qu'on appelle la force de relance ou
l'effet de stimulation il y a un terme plus technique qu'un
économiste emploierait à ma place...
UNE VOIX: Le stimulus.
M. CARDINAL: ... ce qui m'intéresse, dis-je, ce ne sont justement
pas les termes, les catégories. C'est la réalité des
choses. On a discuté cet après-midi de choses qui m'apparaissent
sur certains points fort triviales, quand on a parlé de distance ou de
temps employé pour se rendre à une place ou autre chose. Mais le
débat se limite aux travaux de construction d'abord, je pense.
Deuxièmement, s'il se limite aux travaux de construction, la
parité établie sur un nombre X d'années, que je n'ai pas
calculées personnellement, c'est au gouvernement à
l'établir en tenant compte non seulement de ces facteurs des
électriciens d'une part, d'autre part des menuisiers et d'une autre part
de j'ignore qui. Tout ça forme un total. Je ne sais pas si à la
fin des travaux de cette commission le ministre du Travail n'est pas
là, mais son adjoint y est on pourra finir par l'avoir, cette
synthèse. A force d'avoir des morceaux détachés, on va
nous prouver que la vérité est autant au nord, au sud qu'à
l'ouest. Je ne vous demande pas de trancher le débat. Vous êtes
là pour représenter un groupe. Je vous crois objectifs et je ne
vous demande même pas d'admettre non pas les objections que je fais, mais
les observations que je soumets humblement aux membres de cette commission.
C'est pourquoi c'est avec une certaine...
M. LEBON: Mélancolie?
M. CARDINAL: Non, pas mélancolie ce n'est pas du tout dans
mon style mais avec un peu de réserve et un peu de scepticisme
que tous ces tableaux me frappent. Ce n'est pas une question, ou une
interruption que je voudrais inutile. En supposant que ce soit scientifiquement
prouvé, disons que je le crois, j'affirme quand même c'est
peut-être là que j'ai tort et vous pourrez me répondre
que ça ne donne qu'une partie de l'image et que, par
conséquent, ça ne donne pas le résultat total de
l'opération sur une période de deux ans, trois ans, cinq ans ou
dix ans. Je reprends l'exemple que j'ai donné au début. Pourquoi,
pour les notaires, les avocats, les médecins peut-être tout
à l'heure c'est un autre problème, ne le soulevons pas cet
après-midi on est capable de l'établir, la parité,
et que quand Qn arrive dans la construction, on n'est plus capable? C'est ma
vraie question.
M. LEBON: Est-ce que j'ai la parole, M. le Président?
M. CARDINAL: Le députés aussi sont paritaires, même
s'ils viennent de régions très différentes. Ceci n'est pas
une blague. Les députés qui sont à cette table ont la
même rémunération qu'ils viennent des Iles-de-la-Madeleine
ou qu'ils viennent de Louis-Hébert. Les frais de bureau sont paritaires
aussi, que vous soyez à Montréal, que vous soyez à
Saint-Pie-de-Bagot, que vous soyez à Saint-Tite. Les frais de
secrétariat le sont également. Cela crée des
problèmes, mais ça n'empêche pas que ça marche.
UNE VOIX: On pense que ça marche.
M. CARDINAL: Cette dernière observation, vous n'êtes pas
obligés de l'accepter.
M. MARCHAND: Cela marche mieux qu'avant.
M. LE PRESIDENT: M. Lebon, si vous voulez commenter le discours du
représentant de Bagot.
M. CADIEUX: M. le Président, avant de donner la parole à
M. Lebon, il me semble que tous tant que nous sommes, nous sommes
intéressés à écouter les arguments de tous ceux qui
se présentent et qui présenteront à l'avenir.
Plutôt que d'entrecouper continuellement le discours ou
l'exposé de quelqu'un, on pourrait peut-être réserver ses
questions pour la fin. Je parle ici des gens qui posent des questions de
l'autre côté de la barre. Ici, c'est très bien, c'est pour
notre gouverne, il le faut absolument, parce que nous ne sommes pas tous des
professionnels du métier. Mais, plutôt que de toujours
s'entrecouper, si on notait les questions que l'on veut poser à la fin,
vous ne trouvez pas qu'on hâterait peut-être les travaux parce que,
au rythme où on va, j'ai l'impression qu'on n'avancera pas tellement
vite. C'est une solution que je soumets. On pourrait réserver quelques
questions sur certains sujets. Je parle des gens de l'autre côté
de la barre, parce qu'ici, les députés peuvent avoir à
poser des questions immédiatement à l'occasion d'un
énoncé. De toute façon, les gens de l'autre
côté vont avoir tantôt le privilège de
répondre et de réfuter. C'est à eux de noter ce que dit
celui qui a la parole.
M. LE PRESIDENT: Quant on parle de l'autre côté de la
barre, on réfère évidemment aussi
à ceux qui sont de ce côté-ci de la barre, mais qui
appartiennent à l'autre côté de la barre.
M. CADIEUX: C'est parce qu'il n'y avait pas de place de l'autre
côté.
M. LE PRESIDENT: M. Lebon, vous pouvez y aller.
M. LEBON: Pour répondre à M. Cardinal, il y a deux points
que je voudrais souligner avant de laisser la parole à l'auteur de
l'étude, M. Lacasse. En premier lieu, si on lit le préambule de
ce mémoire de la Corporation des maîtres électriciens
j'aimerais ça que M. Cardinal écoute, si ce n'est pas trop
lui demander... Je vous remercie, M. le député nous
n'avons pas demandé aux économistes de prouver que nous avions
raison ou pas.
M. CARDINAL: Vous permettez? Je n'ai pas laissé entendre
ça, je ne l'ai pas affirmé et je ne le dirai certainement pas de
confrères que je respecte énormément et avec lesquels j'ai
vécu pendant plusieurs années.
M. LEBON: Non, mais ce que je veux dire, c'est que la corporation a pris
une attitude que nous croyons objective. Nous avons soumis à des
économistes que nous considérions comme neutres quel serait
l'effet de la parité salariale, sans leur dire si nous étions
pour ou contre celle-ci. D'autant plus que, dans notre proposition originale
ce à quoi il n'a pas encore été fait
référence la corporation avait suggéré
d'accepter les recommandations des conciliateurs au point de vue
monétaire, à la condition de scinder l'industrie de la
construction en deux secteurs, soit le secteur résidentiel et le secteur
commercial-industriel. C'était dans ce temps-là notre
proposition: Nous avons donné tout ça à des
économistes et nous avons dit : Dites-nous si notre proposition a du bon
sens.
La première chose qu'ils ont suggérée, on le dit
d'ailleurs dans le préambule et je pense que ça vaut la peine, M.
le Président, si vous me permettez, que je le lise: "L'étude qui
suit a été commandée par la Corporation des maîtres
électriciens du Québec. Au départ, la corporation nous
avait demandé d'effectuer des recherches quant au bien-fondé, en
termes économiques, de distinguer deux sous-secteurs dans le domaine de
l'électricité; tout en se rappelant que cette éventuelle
mesure ne se voulait qu'un palliatif, un pis-aller face à une
éventuelle imposition, par le gouvernement, d'une complète
parité interrégionale des salaires dans l'industrie de la
construction. Le sous-secteur résidentiel aurait eu un taux fixé
à 80 p.c. de celui du sous-secteur commercial-industriel. "Après
un premier examen de la question, nous avons cru qu'il était
préférable d'étudier conjointement, non seulement
l'acceptation de la création de sous-secteurs, mais aussi les
conséquences de l'établissement de la parité salariale
dans l'ensemble de l'industrie de la construction à travers le
Québec."
Je pense que c'était tout à fait objectif. Nous avons
remis le paquet à des spécialistes et dit: Est-ce que ça a
un bon sens? On nous a dit, entre nous, que, pour les secteurs, il n'y avait
pas nous le verrons d'ailleurs tout à l'heure deux
marchés distincts, comme nous le croyions. Or, notre proposition des
secteurs, telle que nous l'avions suggérée, ne tient plus, parce
qu'elle n'est pas réaliste selon nos économistes.
Nous nous opposons aussi à la parité salariale parce que,
selon nos économistes, cela va faire du tort non seulement aux petites
entreprises, mais aussi à la main-d'oeuvre de toute la province, sauf
peut-être Québec et Montréal.
Je voulais seulement faire cette mise au point que nous ne sommes pas
des avocats qui plaident une cause. On peut défendre un meurtrier,
même si on sait que c'est un meurtrier, c'est le devoir d'un avocat de le
faire, mais, dans notre cas, ce n'est pas ça, c'est une étude
objective que nous tentons de défendre ici.
M. CARDINAL: M. Lebon, je vous remercie et, comme je l'ai
déjà dit devant cette commission, je me faisais simplement le
notaire du diable.
M. LEBON: II y a une autre chose que je voulais relever aussi, si vous
me permettez, M. le Président, dans le discours de M. Cardinal.
Lorsqu'il dit qu'il s'agit exclusivement de la construction, je tiens à
souligner que justement le service aux particuliers est prévu dans
l'application du bill 290 et fait aussi partie du problème. C'est pour
cela que nous disons que même s'il est question de grosses constructions,
il ne faut pas négliger l'effet néfaste que ça peut avoir
sur l'aspect du service quant aux entrepreneurs électriciens.
M. CARDINAL: Sur ce point, je suis d'accord.
M. LEBON: Je vais demander à M. Lacasse de venir répondre
à quelques arguments de valeur économique que M. Cardinal a voulu
soulever, si le président le permet.
M. LE PRESIDENT: Certainement. M. Lacasse, auriez-vous l'obligeance de
vous approcher d'un micro?
M. LACASSE: Je voudrais simplement répondre à la toute
première question de M. Cardinal, c'est-à-dire celle qui concerne
l'augmentation des coûts et du prix des maisons par suite de la
parité selon les diverses régions. Je vais peut-être le
confirmer dans son scepticisme en explicitant comment nous avons
procédé
pour obtenir les résultats que nous avons. Evidemment, comme vous
l'avez mentionné, le prix final de la maison va dépendre du prix
des matériaux, du terrain et des salaires. Il n'y a pas
présentement de données disponibles par région sur la part
des salaires dans le total des coûts de construction au Québec,
pour des régions plus petites que les provinces. Cela n'existe que pour
les provinces et pour le Canada tout entier.
Nous avons là-dessus c'est le point crucial, en fait, de
votre question au tableau 3 5 dans les pages blanches, pris les
deux seuls chiffres disponibles. Ils n'ont d'autre mérite que
d'être disponibles. Le premier, qui est celui du Bureau
fédéral de la statistique, concerne toute la construction au
Québec. On a simplement fait un rapport de la valeur du travail sur la
valeur totale de la construction. Le second est la pondération entre la
composante salariale et la composante des matériaux, etc., pour faire
l'indice des prix de la construction au Canada. Les deux ne varient pas
tellement; l'une est à 34 p.c. et l'autre est à 37.5 p.c.
Cela circonscrit de façon étroite les limites de la valeur
du calcul; je suis parfaitement d'accord avec vous. On ne pouvait pas aller
plus loin et je ne pense pas qu'il y ait moyen d'aller plus loin en ce moment.
Nous avons demandé au ministère du Travail s'il y avait moyen
d'obtenir des chiffres pour des unités économiques plus petites
que la province et on nous a répondu que ces chiffres n'existaient nulle
part. Alors, je voulais simplement spécifier que ces chiffres-là
ne sont pas idéaux. Les économistes sont à la recherche de
chiffres idéaux et ne les trouvent jamais. Ils n'ont jamais cela
à leur disposition. Nous croyons que c'est l'approximation la meilleure
que nous puissions faire avec l'information disponible.
M. CARDINAL: Si vous me le permettez, M. Lacasse, est-ce qu'on pourrait
dire en termes vulgaires, que ces pondérations vous permettent
d'établir des tendances qui raisonnablement devraient se
réaliser?
M. LACASSE: Dans le cas précis de votre question, à savoir
de combien la parité va hausser le prix final des habitations, on peut
dire que cela nous donne un ordre de grandeur qui est une moyenne provinciale.
Si les coûts de travail sont beaucoup moins élevés comme
proportion dans certains endroits évidemment, nos chiffres sont à
la hausse et vice versa.
M. CARDINAL: Je vous remercie beaucoup, M. Lacasse, et je n'ai pas
d'autre question à poser à M. Lebon ou à M. LaCasse.
M. LE PRESIDENT: Un instant, M. Lacasse, auriez-vous l'obligeance de
rester disponible pour le député de Sainte-Marie?
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. Lacasse, quand nous lisons:
"Régions de décret, base 1972", cela veut dire deux ans ou trois
ans?
M. LACASSE: Non. Je m'excuse. Est-ce que vous pouvez me rappeler
à quelle page?
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): A la page 13.
M. LACASSE: Base 1972. Nous avons voulu calculer l'effet de la
parité en comparant deux salaires: celui qui aurait été en
vigueur en novembre 1972 selon la loi 38 et celui qui aurait été
en vigueur si la parité avait été établie en 1972
aussi.
Alors, ce n'est pas une augmentation sur des années, c'est
l'effet seul de la parité, indépendamment du temps. Je signale
ici que, dans la mesure où l'on travaille en pourcentage, le fait de
procéder ainsi sous-estime l'effet de la parité pour une raison
très mécanique, c'est que si on avait comparé les effets
de la parité à partir de 1970, vu qu'on y a ajouté, par la
loi 38, le même montant au numérateur et au dénominateur,
on aura obtenu des pourcentages légèrement supérieurs.
M. LE PRESIDENT: Le député de Maisonneuve.
M. BURNS: Si je comprends bien, en admettant que la parité se
fasse d'ici à 1972, ce serait le résultat total. Si cela se
faisait par tranches progressives, 1970, 1971 et 1972, ce serait le
résultat total de 1972 que vous me donnez au tableau 3-5. Est-ce
exact?
M. LACASSE: Je dois distinguer une chose. C'est la parité, ici.
Nous avons procédé de la façon que vous avez ici parce
que, selon nous, l'établissement de la parité apportait des
augmentations de salaire et de prix qui étaient d'un autre ordre, que
l'on devait considérer autrement que les augmentations
négociées, ou obtenues, lors de l'adoption de la loi 38.
Dans le premier cas, vous avez une série d'augmentations qui sont
les augmentations auxquelles tout le monde s'attend dans, à peu
près, toutes les industries où il y a des négociations et
même celles où il n'y en a pas.
Alors que la parité constitue un changement unique, c'est un jeu
à un coup qui est final, c'est pour ça qu'on a traduit l'effet
global. C'est un changement dans les niveaux relatifs de prix entre les
régions qui est fait une fois pour toutes. Alors, qu'on le fasse sur
trois ans, ou sur cinq, ou sur deux, ou rien, ou d'un seul coup, à ce
moment-là, je pense, ce n'est peut-être pas la question qui
importe. La question importante, c'est au fond, dans quelle mesure, par une
législation du type parité, va-t-on affecter les coûts
relatifs des régions, exclusion faite de ce qu'on sait
déjà, qu'il va y avoir des augmenta-
tions de salaire qui vont se produire de façon récurrente
dans ces régions?
M. BURNS: M. Lacasse, est-ce que vous avez étudié combien
ce coût de moins de 10 p.c. vous avez de 3 p.c. à 10.6 p.c.
dans le cas de l'hypothèse B et de 3.2 p.c. à 11.8 p.c. dans le
cas de l'hypothèse A ou quelle relation cela peut-il avoir par
rapport à 1 p.c. d'augmentation du taux d'intérêt sur les
prêts, par exemple? Est-ce que vous avez étudié ce facteur
relatif?
M. LACASSE: A ce propos, notre mandat était celui que M. Lebon a
décrit tout à l'heure. Quand nous l'avons élargi pour
tenir compte de la parité, nous nous sommes occupés des effets de
la parité elle-même. C'est que, dans notre esprit, il
n'était pas pertinent de se pencher sur la question que vous soulevez,
pour une simple raison, c'est que si on voulait faire des équivalences
entre, par exemple, ce que telle augmentation de salaire donne sur le prix des
maisons par rapport à tel changement dans les taux
d'intérêt...
M. BURNS: Du coût de la vie.
M. LACASSE: ... ou des choses comme ça, à ce
moment-là, qu'est-ce qui nous retient de faire exactement le même
travail, dans quelle mesure la parité serait compensée si on
abolissait les taxes sur les matériaux de construction, dans quelle
mesure ce serait compensé si le ministère de l'Education assumait
la moitié des dettes des commissions scolaires? Si vous introduisez un
autre facteur pour le comparer, en fait, vous pouvez, légitimement, en
introduire des dizaines qui nous semblaient ne pas être du ressort de ce
qu'on nous avait demandé et, deuxièmement, de la discussion sur
la parité... C'est sûr que si l'on change le taux
d'intérêt, on peut annuler les effets de la parité, comme
si on abolit la taxe sur les matériaux de construction, on peut
éliminer l'effet de la parité, comme si on fait diminuer les
impôts fonciers, municipaux et scolaires.
En fait, il y a moyen d'accorder la parité et de s'arranger pour
que le prix des maisons ne monte pas. Il y a 400 moyens. Alors, on ne voyait
pas l'utilité de sortir tous les 400. Parce qu'il faut dire, quand
même, qu'on a eu un temps limité. On n'a pas eu dix ans pour faire
ça.
M. LE PRESIDENT: Cela répond à votre question? Bon. Le
député de Chicoutimi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Lacasse, à la page 22 du
mémoire, tableau 3-8, on parle des coûts unitaires de construction
de bungalows par région. Lorsqu'on examine les chiffres,
évidemment, les différences sont plus ou moins accentuées
selon les régions.
M. LACASSE: Je m'excuse, je n'ai...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Page 22, tableau 3-8.
M. LACASSE: Oui.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): "Coûts unitaires de construction par
région en dollars par pied carré." Alors, les chiffres de 1969
vous donnent: Montréal, $13.21; Chicoutimi-Jonquière, $13.82;
Côte-Nord, $14.88. Ce sont les écarts, si vous voulez, des
côuts.
Maintenant, vous plaçant du côté des travailleurs,
des usagers de ces maisons et du consommateur en général, quel
rapport établissez-vous entre la position que vous prenez, dans ce
document, sur la parité de salaires et, d'autre part, l'indice
général du coût de la vie par région? Est-ce que cet
indice est beaucoup plus élevé à Montréal qu'il ne
peut l'être dans la région de Chicoutimi, par exemple, que je
représente?
M. LACASSE: Je vais essayer de répondre à votre question.
J'espère que je la comprends correctement.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Si vous me le permettez, je veux dire ceci:
Est-ce que la parité de salaires, telle que vous la concevez ici, tient
compte de l'indice général du coût de la vie par
région? Quels seraient les effets de cette parité de
salaires?
M. LACASSE: A ce propos, sur l'indice général du
coût de la vie par région, je pense que la meilleure chose que je
peux faire, c'est de vous référer au document de la partie
adverse, c'est-à-dire...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le petit livre.
M. LE PRESIDENT: Vous faites suivre le vade-mecum.
M. LACASSE: Page 62. Sur le coût de la vie comme tel, je pense que
je n'ai aucune raison de refaire le calcul de mon collègue. Je n'ai pas
fait le calcul de cette étude et je n'ai aucune raison de croire que je
serais arrivé à des résultats différents. C'est la
réponse à votre première question.
La seconde question, je pourrais peut-être vous expliquer
pourquoi, au fond, ce tableau 3-8 avait été inclus au texte. Il a
été inclus simplement pour donner une indication qui est
partielle, je l'avoue, parce que ces coûts unitaires de construction
n'existent que pour ce type de construction. Cela a donc été
inclus simplement pour montrer que, sans la parité, dans l'état
actuel des choses, déjà les coûts de construction sont plus
élevés dans les autres régions. Je voudrais vous faire
remarquer que ces coûts ne
comprennent pas la valeur des terrains. Alors, c'était tout
simplement pour compléter les tableaux antérieurs qui
établissaient dans quelle mesure les coûts des maisons allaient
être haussés et pour savoir, en somme, non seulement dans quelle
mesure cela remonterait, mais d'où on part, exactement, en termes de
coûts unitaires de construction.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Lacasse, évidemment, la position que
vous défendez ou, tout au moins, que vous avez exposée dans ce
document et que je respecte est celle des gens que vous représentez.
Enfin, c'est un document technique que vous avez préparé à
l'intention des gens qui vous l'ont demandé. Alors, vous ne
défendez pas une thèse ou l'autre. Vous avez donné des
chiffres, selon les règles qui régissent votre discipline
d'économiste. J'accorde toute ma confiance à vous et au document,
mais je me mets dans la situation du public. Je suis un travailleur. J'ai
à acheter une maison. Je travaille dans une région où
n'existe pas la parité salariale. Est-ce que vous avez songé
à ce que ma maison à moi, dans telle région donnée
où il n'y a pas cette parité salariale, me coûte et
à ce que ce coût de ma maison...
Est-ce que vous avez songé à ce que ma maison à
moi, dans telle région donnée où il n'y a pas cette
parité salariale, me coûte et ce que ce coût de ma maison,
ajouté aux autres coûts qui constituent le coût
général de la vie, représente pour moi, salarié qui
ne jouit pas de la parité salariale dans la région du Lac
Saint-Jean, de la Côte-Nord, ou d'ailleurs? Est-ce que votre optique est
un peu l'optique d'une personne vivant à Montréal, ou si vous
avez songé aussi que le coût de la vie, pour un ouvrier de la
construction, peut être souvent plus élevé dans la
région que je représente que dans celle de Montréal?
M. LACASSE: Comme vous avez pu le remarquer dans le texte, nous n'avons
pas considéré cette question. Voici un peu pourquoi nous ne
l'avons pas considérée. Nous avons tenu pour acquis je
suppose qu'il serait relativement aisé de se documenter qu'il n'y
a plus de différences significatives mesurables entre le coût de
la vie des différentes régions de la province. Il y en a
peut-être qui existent. En fait, la seule preuve qu'on peut en avoir,
c'est que, probablement, les gens qui pourraient se déplacer demeurent
quand même dans des régions où les revenus sont plus bas et
les prix au moins aussi élevés qu'à Montréal. S'ils
demeurent là, on présume qu'ils y trouvent leur compte, qu'ils y
trouvent des avantages qui les justifient de demeurer là, surtout
lorsqu'on tient compte des programmes de subventions à la
mobilité de la main-d'oeuvre qui sont déjà en cours depuis
au moins trois ans, je pense.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Mais, si vous permettez que je vous
interrompe, M. Lacasse, ce que vous dites là pour le citoyen moyen ne
s'appliquerait-il pas autant pour les entrepreneurs? Si le coût de la
vie, pour moi, est à peu près le même si je vis à
Montréal, à Québec ou à Chicoutimi, si je suis un
ouvrier ou si je suis un entrepreneur, est-ce que ce n'est pas la même
chose?
M. LACASSE: Oui. Je suppose que ce serait la même chose. Cela veut
dire que ça irait pour tout le monde.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, c'est un argument à la
défense de la parité salariale?
M. LACASSE: Là-dessus, non. C'est là-dessus que je
voudrais terminer, si vous me le permettez, et en même temps, je pense
répondre à votre seconde question. La raison pour laquelle nous
n'avons pas touché à cette question de l'égalisation des
coûts de la vie dans les régions, c'est que, premièrement,
nous considérions que les différences n'étaient pas
significatives, ou si elles Tétaient, n'étaient pas mesurables.
Deuxièmement et c'est là, en fait, ce qui est important
c'est que justement il y a des disparités régionales de
revenus qui sont causées par le fait que si on a les mêmes
coûts de la vie dans toutes les régions, les salaires et les
revenus en général ne sont pas, eux, les mêmes. De ce point
de vue, dire que parce que le coût de la vie est le même, il faut
établir la parité, si on accepte cet argument, on ne peut pas
l'accepter pour une industrie ou pour un sous-secteur seulement. Donc,
s'appuyer sur les seuls coûts de la vie impliquerait que nous aurions
parité de salaires intégrale, mais vraiment dans le sens fort du
terme, c'est-à-dire pour l'ensemble des travailleurs, et telle
parité serait, disons par hypothèse, imposée ou
recommandée par le gouvernement, comme on voudra.
Maintenant, lorsqu'on pousse un peu le raisonnement jusqu'à des
conclusions comme celles-là, on voit qu'on ne peut pas tenir un
raisonnement pareil. Cela voudrait dire, si on pouvait tenir un tel
raisonnement, que par un acte du Parlement, demain matin vous pourriez effacer
les disparités régionales de revenus simplement en
légiférant pour que tout le monde soit payé au même
niveau dans la province parce que les coûts de la vie sont les
mêmes.
De la même façon, on pourrait dire qu'on effacerait la
différence entre l'Ontario et le Québec, au point de vue du
niveau des revenus, simplement en forçant les entrepreneurs à
payer les mêmes salaires. Si une histoire comme ça peut se faire,
c'est de la magie, ce n'est plus de l'économique. Cela n'a plus rien
à voir avec les conditions normales dans lesquelles notre
société fonctionne. Pour que ce soit plus évident, prenons
un exemple où on n'est pas dans le cadre d'un seul marché comme
le cadre canadien.
Supposons que nous effacerions les disparités régionales
par un acte du Parlement canadien. Vis-à-vis des Etats-Unis, les
conséquences seraient visibles, immédiates, alors qu'entre
régions du Canada ça peut prendre du temps. Cela changerait le
taux auquel le dollar canadien s'échange, en dedans de 24 heures; nous
nous retrouverions avec les mêmes salaires nominaux, mais avec des
salaires, en termes de pouvoir d'achat réel, qui seraient tellement
descendus que nous serions dans la même situation qu'avant.
C'est évident quand nous parlons de deux pays
séparés, parce que là il y a un marché des changes
étrangers. Dans le cas de régions ou de provinces à
l'intérieur d'un même marché, ce qui se produit, c'est
simplement, si vous faites l'augmentation générale, soit que tout
le monde réussisse à hausser ses prix, soit tout simplement que
vous ayez des réajustements en quantité, c'est-à-dire
qu'aux endroits où ça représente des augmentations de
coûts les plus élevées pour les entreprises elles
réduisent leur production, perdent leurs avantages de se situer à
tel endroit plutôt qu'à tel autre. A ce moment-là, vous ne
corrigez pas la situation; vous avez des gens qui continuent à
travailler et qui gagnent beaucoup plus qu'avant, mais vous avez moins de gens
qui continuent à travailler dans certaines régions. Alors, au
plan du revenu par famille, par individu, où prendre la moyenne par
région? Nous nous retrouvons gros Jean comme devant.
Ne se baser que sur l'égalité des coûts de la vie
implique que nous nous retrouverons nécessairement avec un raisonnement
qui conduit à la parité absolue imposée, ce qui veut dire
que nous pourrions tout régler d'un coup de baguette. Le fait que nous
nous soyons éreintés depuis quelques années à
établir des programmes de développement régional montre
qu'en général les gens ne croient pas, à juste titre
d'ailleurs, qu'on puisse régler les disparités régionales
de revenus de façon aussi simple et quasi magique.
M. LE PRESIDENT: Le député de Chicoutimi.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): Une dernière question, M. Lacasse. Je
vais vous poser une question qui sera peut-être un peu difficile, mais en
vertu des règles économiques, des règles de votre
discipline qui vous ont aidé à rédiger ce document fort
intéressant, quel est le critère de base qui vous incite à
vous opposer à la parité salariale?
M. LACASSE: Cela me donne, en même temps, l'occasion de reprendre
un peu la mise au point que M. Lebon a faite tout à l'heure. Comme on
l'a dit, on nous a demandé cette étude. En fait, c'est
peut-être la meilleure manifestation que nous ne représentions que
nous-mêmes, quand nous avons écrit cette étude-là;
c'est que nos conclusions, pour la moitié de l'étude, sont
arrivées à l'inverse de ce qu'on nous avait demandé de
démontrer.
L'étude ne s'est pas donné comme objectif de dire: II
faudrait qu'il y ait tel type de disparité pour telle ou telle raison.
L'étude est très limitée dans son objectif, elle a trait
simplement à une question: Si on établit la parité par
voie législative, qu'arrivera-t-il? On a délimité des
influences sur le coût de la vie, l'emploi, la structure de l'industrie
selon les grosseurs des entreprises, par exemple, et la structure de
l'industrie selon l'avantage qu'on accorde aux entreprises des grands centres
versus les autres.
Nous avons établi une série de conséquences. Nous
avons souligné que ces conséquences ne sont pas compatibles avec
la politique avouée du gouvernement de réduire les
inégalités de revenus selon les régions. Notre rôle
se limite là, en ce sens que la discipline ne peut pas aller plus loin.
Nous avons montré les conséquences, nous avons dit que
c'était incompatible, ce que tout le monde peut voir, évidemment.
Ensuite, est-ce qu'on juge que ça vaut le coup quand même
d'établir la parité? C'est une décision sur laquelle un
économiste n'a rien à dire. Et là-dessus je n'ai rien
à dire.
M. LE PRESIDENT: Je pense que M. Lacasse a suscité suffisamment
d'intérêt pour permettre aux deux chefs de centrales, de
s'exprimer. Alors, M. Laberge.
M. LABERGE: J'aurais juste de toutes petites questions, des
"questionnettes". Voici la première. Votre étude tend à
démontrer que, si la parité salariale était
accordée, cela aurait certains effets: augmentation des coûts de
la construction. Pourtant, lorsque je regarde votre tableau 3-8, à la
page 22, je pense qu'il établit de façon très claire que,
même si on paie des salaires plus élevés, il y a des moyens
à prendre pour que le coût unitaire de construction ne soit pas
plus élevé. C'est tellement clair que Montréal, qui a les
salaires les plus élevés et les conditions de travail les
meilleures, arrive en bon deuxième. Alors, admettez-vous que ce tableau
démontre ça de façon très claire?
M. LACASSE: Pour répondre à la "question-nette", je dois
rappeler ici, au juste, comment on procède. Je pense qu'on est d'accord
sur les chiffres; en fait, on les a pris à la même place.
Cependant, sur l'interprétation qu'on fait du tableau, dans le cas de la
discussion ici, il y a probablement une différence. Ce que le tableau
montre, c'est que, déjà, sans la parité, il y a des
différences substantielles. Nous voulions connaître l'influence de
l'établissement de la parité. Même sans parité, il y
a ces résultats-là. Alors, on peut vraisemblablement conclure
c'est la conclusion logique du changement par rapport à la
situation actuelle que le changement qui
s'appelle parité va conduire à un élargissement des
différences qu'on peut observer au tableau 3-8.
M. LABERGE: Votre tableau démontre, quand même, que ce
n'est pas automatique. Il y a d'autres moyens de réduire les
coûts.
M. CADIEUX: M. le Président, il reste une chose, c'est que, si
vous construisez une maison à 100 milles de Montréal, vous devez
faire venir des matériaux. Vous ne pourrez jamais les payer au prix de
Montréal, parce que vous allez toujours avoir le transport à
payer en plus. C'est ce que démontre le tableau; ça coûte
plus cher de construire un bungalow à Valleyfield qu'à
Montréal, parce qu'à Valleyfield il y a 40 milles de transport
à faire. Si on avait la parité...
M. LABERGE: Si tous les matériaux de construction venaient de
Montréal, vous auriez raison, mais Montréal est obligée
d'importer des matériaux d'abord.
M. CADIEUX: On est encore plus loin, alors, ça coûte encore
un peu plus cher.
M. LABERGE: Deuxième "questionnette".
M. MARCHARD: M. le Président, ça pourrait répondre
aussi à la première question de M. Laberge. Je pense qu'un
entrepreneur à Montréal va prendre une série de 40, 60 et
100 maisons et, au lieu de demander $2,000 pour l'électricité, il
va peut-être en demander $1,600.
M. LABERGE: D'accord. Je voulais dire, tout simplement, qu'il y a
d'autres moyens à prendre.
M. MARCHAND: Oui, mais il faudrait que...
M. LABERGE: Les entrepreneurs d'une région éloignée
peuvent se mettre ensemble pour augmenter leur pouvoir d'achat, par
exemple.
M. MARCHAND: Oui, leur pouvoir d'achat. Mais, si, à Chicoutimi,
il va construire 40 maisons et qu'il reste avec 30 maisons sur les bras, il ne
baissera pas tellement son coût, je pense. Il va aller en faillite.
M. LABERGE: L'autre "questionnette"
M. LE PRESIDENT: Pour ne pas perdre le contrôle des madriers,
là, un à la fois, s'il vous plait.
M. LABERGE: Dans le plaidoyer de la corporation, en page 8, il y a un
tableau qui me laisse perplexe et, là, je demanderais, tout simplement,
qu'on m'éclaire. C'est le tableau qui parle du "coût minimum
d'appel de service en dollars". On voit qu'en Abitibi le coût actuel, qui
est de $7.80, monterait à $10.70 avec la parité, et que
l'augmentation de salaires serait, dans ce cas-là, de 25.8 p.c. Moi, je
voudrais bien qu'on m'explique comment il se fait qu'à Chicoutimi, alors
que l'augmentation de salaires, ne serait que de 14.3 p.c, on en arriverait
quand même à $10.70, le coût minimum d'appel. Je trouve
ça fort.
M. LE PRESIDENT: Alors, M. Lacasse.
M. LACASSE: Ici, vous avez les augmentations mises en pourcentage des
coûts. Le tableau 3-3 a été fait à partir de ce que
M. Lebon mentionnait tout à l'heure, à savoir les cartes faites
par la Corporation des maîtres électriciens, indiquant le
coût total d'un appel de service et tenant compte de la
sécurité sociale, du transport, du temps perdu, de
l'administration, etc.
A ce moment-là, les deux chiffres ne sont pas comparables
puisque, dans un cas, il s'agit d'un taux horaire et, dans l'autre, il s'agit
d'un appel de service qui peut durer plus longtemps. Maintenant, ce qui
constitue un appel de service, ce n'est vraiment pas mon rayon et je vous
réfère à M. Lebon, ou à quelqu'un qui connaît
le secteur électrique. Pour ma part, je n'en sais rien. J'ai pris les
chiffres tels qu'ils m'ont été donnés.
M. LE PRESIDENT: Je pense que M. Lacasse a répondu à M.
Laberge.
UNE VOIX: Vous vous verrez après.
M. LE PRESIDENT: La parole est au député de Frontenac.
M. LATULIPPE: Je m'adresse à M. l'économiste. Votre
étude a porté surtout sur les effets de la parité. Est-ce
que vous avez étudié l'effet de la parité sur les autres
secteurs, non pas uniquement sur le secteur de la construction ? L'effet de la
parité du secteur de la construction face aux autres secteurs de
l'économie?
M. LACASSE: Là-dessus, il y a deux façons dont la
construction pourrait avoir un effet. L'une d'elles pourrait être ce
qu'on appelle un effet de démonstration, c'est-à-dire le fait que
les salaires de la construction, montant de façon substantielle
grâce à la parité, les syndiqués d'autres secteurs
seraient plus décidés, plus encouragés, à demander
eux-mêmes des augmentations substantielles. Ces effets de
démonstration, ce que nous en savons maintenant en économique, se
résument à ceci: Nous savons qu'ils existent.Point final. Il n'y
a pas moyen de montrer où ils vont nous entrafner. Est-ce que, s'il y
avait parité, ce fait entraînerait qu'au cours des prochaines
négociations dans la chaussure, par exemple, les gens demanderaient 10
p.c, 15 p.c. ou 100 p.c. de plus que ce qu'ils auraient demandé s'il n'y
avait pas eu la parité?
C'est une question à laquelle il est carrément impossible
de répondre. Cela constitue la réponse à la
première partie de votre question.
Seconde partie. On pourrait aussi tenir compte de l'effet global,
macro-économique. On m'a dit que vous aviez discuté de cette
question, hier. Malheureusement, je suis arrivé trop tard pour savoir
sur quoi avaient porté les discussions. Je m'excuse donc de
répéter des choses qui ont peut-être été
dites. Donc, sur l'effet macro-économique, c'est-à-dire le fait
qu'un certain groupe étant maintenant payé plus cher, cette
augmentation de revenus pour ces personnes va à son tour pouvoir se
transformer en demandes pour les biens et services produits dans cette
région. C'est l'effet de revenus, l'effet de multiplicateur, ou l'effet
d'entraînement, comme vous voulez l'appeler. Nous avons regardé
cette question. Vous trouverez d'ailleurs dans le texte une petite section qui
en traite. C'est la section 3.8 à la page 25 et se continuant
jusqu'à la page 26. Pour résumer, en fait, notre travail
là-dessus, nous avons fait un exemple hypothétique mais dans un
cadre plausible. Si vous voulez connaître, pour une région en
particulier, l'augmentation de la demande pour les autres biens et services
produits dans cette région, il faut tenir compte du fait qu'une partie
des revenus en question va se retrouver en épargne. Alors, les autres
sortes de circuits, pas de problème. Il y a une deuxième partie
et c'est ça qui était le point crucial peut-être
pour lequel on n'a pas poursuivi dans ce domaine parce que ça ne valait
plus le coup qui était que pour des régions aussi petites
que celles dont on traite aujourd'hui, les effets d'importation, les effets
vont se faire sentir sur la demande pour d'autres choses que ce qui est produit
dans la région.
Vous avez, par exemple, un certain nombre de millions de dollars ou de
milliers de dollars de plus donnés dans la région du Lac
Saint-Jean. Sur ce revenu supplémentaire, disons que ça vous
augmente la demande pour les appareils électro-ménagers, pour les
voitures, pour la récréation. Ce sont surtout des ensembles de
biens, et on sait qu'une augmentation de revenu va conduire à une
augmentation de demande assez considérable. Mais tous ces
biens-là, disons pour la région du Lac-Saint-Jean ou des
Laurentides ou n'importe quelle desdites régions ne sont pas produits
localement, ils sont produits ailleurs.
Alors, en fait, nous avons supposé, justement à la page
26, l'hypothèse minimum, mais vraiment la plus défavorable
à ce que nous voulions prouver, c'est-à-dire qu'il y avait
seulement 75 p.c. de cette demande supplémentaire, effective, qui se
manifesterait à l'extérieur de la région, parce que les
régions sont très petites. Pour arriver à ce
chiffre-là, je vous dis tout de suite que c'est un chiffre
hypothétique nous nous sommes simplement
référés aux deux points de repère suivants: pour le
Canada, la proportion est à peu près de 25 p.c. des demandes qui
se manifesteraient à l'extérieur du pays pour un ensemble aussi
vaste que le Canada. Pour le Québec, les estimations qui ont
été faites jusqu'à présent placent le chiffre entre
50 p.c. et 55 p.c. Nous avons donc cru que si, pour le Québec, y compris
Montréal, ça oscillait entre 50 p.c. et 55 p.c, le minimum que
ça pouvait être dans une petite région comme ça
était de 75 p.c. En fait, probablement que si nous avions pris la
Gaspésie comme telle, nous aurions été beaucoup plus
près du total avec 85 p.c, mais je vous dis là-dessus, que avec
75 p.c. si vous m'opposez que ça devrait être 70 p.c, disons que
je ne peux rien dire là-dessus, et que c'est une question
hypothétique d'un ordre de grandeur vraisemblable.
Ce que nous avons donc fait, c'est qu'avec des ordres de grandeur de ce
type-là, nous arrivons à ce que l'augmentation de la demande dans
la région concernée est tellement petite en fait, nous
arrivons, dans le cas le plus favorable, à 0.4 de 1 p.c, 2/5 de 1 p.c.
qu'à ce moment-là nous pouvons considérer ça
vraisemblablement comme négligeable.
M. LATULIPPE: En fait, en résumé, la parité
n'amènera pas nécessairement une augmentation globale des revenus
dans les régions?
M. LACASSE: Non, en fait toute notre étude porte
là-dessus. C'est que, justement, nous considérons que la
parité n'est pas une politique efficace et que même, dans certains
cas, elle peut être considérée une politique perverse du
point de vue strictement économique, c'est-à-dire qui va à
l'encontre de l'objectif énoncé. C'est donc une politique
perverse dans ce sens très restreint du point de vue de l'objectif de
réduire les disparités de revenus entre les régions, parce
que c'est une mesure qui, en même temps qu'elle augmente les revenus de
certaines personnes, augmente aussi les coûts pour l'ensemble. En fait,
c'est là l'essentiel, et disons que par rapport à l'effet
macro-économique de la demande, les régions sont trop petites
pour qu'on puisse en tenir compte.
M. LE PRESIDNET: M. Pepin.
M. PEPIN: Je vous remercie, M. le Président. Je voudrais
simplement poser quelques questions à M. Lacasse pour essayer
d'éclairer et de mieux comprendre le problème. Votre étude
est signée par vous, M. Lacasse. Je comprends que vous avez
été assisté ou conseillé par MM. Marion et
Raynauld, mais je comprends aussi que l'étude est signée
uniquement par vous.
M. LACASSE: Vous avez pu lire, dans le préambule je pense, que
l'étude a été lue par MM. Marion et Raynauld. Ils en ont
discuté avec moi, comme on procède généralement
dans les travaux de ce genre. C'est entendu que le signataire accepte
l'entière et totale responsabilité de ce qu'il y a d'écrit
là.
M. PEPIN: Très bien. Aux pages 14 et 15 de votre mémoire
ou de votre travail, vous référez à des coefficients
d'élasticité, si je comprends bien le terme. Ce sont des
coefficients qui ont été calculés par un
économiste, présumément, M. Lee, et je crois que ça
s'applique aux Etats-Unis, comme vous le mentionnez. Voici ma question
là-dessus: Est-ce que vous avez des raisons de croire que l'on peut
exporter des Etats-Unis ce coefficient d'élasticité et au Canada
et au Québec?
M. LACASSE: Si vous me permettez, je vais répondre en deux temps.
Tout d'abord, je dois simplement mentionner pourquoi nous avons choisi un
coefficient américain; nous ne l'avons pas fait exprès, nous
avons choisi un coefficient américain pour la simple raison que
c'était présentement le seul disponible qui répondait
à la question que nous nous posions.
Je ne sais pas si cela est mentionné ici, mais voici le
raisonnement auquel nous avons recouru pour adopter ceci. Nous nous sommes dit:
Mieux vaut avoir un coefficient américain qui a été
calculé de façon sérieuse et, nous semble-t-il, correcte
que de n'avoir rien du tout et de nous faire une fourchette avec un à
dix pour l'ordre de grandeur. Je réponds ici à la deuxième
partie de votre question: Est-ce que nous croyons que c'est exportable ou non?
Il n'y a rien qui nous dit, qui pourrait nous porter à croire que les
caractéristiques de la demande de logements au Canada soient
suffisamment différentes de celle que l'on trouve pour ce type de
propriété aux Etats-Unis pour que l'ordre de grandeur soit
complètement fichu. Disons comme exemple, que nous avons retenu 1.5
c'est cela 1.5. Le coefficient étant donc de 1.5; disons que je
donne 15 p.c. de chaque côté comme l'intervalle que je crois qu'il
serait raisonnable d'accepter ici. C'est exportable comme ordre de grandeur,
pas comme mesure précise.
M. PEPIN: Pour autant que les autres facteurs sociologiques et autres
peuvent être identiques, on peut arriver, je le présume, à
un certain ordre de grandeur de cette nature.
M. LACASSE: Je voudrais seulement mentionner un point. J'ai
travaillé un certain temps dans le marché du logement, et j'y
travaille encore. Dans le marché du logement, on peut remarquer que
l'Amérique du Nord, comme continent au nord du Rio Grande, a un
comportement tellement caractérisé par rapport à d'autres
régions du monde, au même niveau de revenu que les régions
européennes par exemple, que, à ce moment-là, on peut
croire que d'une région à l'autre, à l'intérieur de
l'Amé- rique du Nord, il y a des différences mais que, vraiment,
nous sommes, somme toute assez près, comme d'ailleurs, c'est
évident, simplement à regarder les villes nord-américaines
et européennes, par exemple.
M. PEPIN: Quand vous référez à une diminution des
quantités demandées de 1.5 et dans l'exemple que vous donniez, 15
p.c, s'il y a 10 p.c. d'augmentation de prix, est-ce que cela ne tient compte
que des bungalows, des maisons unifamiliales, des duplex ou si vous tenez
compte de l'ensemble de la construction, comme les routes, les usines,
etc.?
M. LACASSE: Je pense assez bien marquer ici la limite. Voyez, à
la page 15, juste avant qu'on commence à souligner, un petit bout de
phrase dit ceci: "Dans la mesure où la sensibilité de la demande,
ou l'élasticité de la demande si vous voulez par
rapport au prix est la même pour toute l'industrie. Ici, ce que
j'affirmais, c'est que, dans la mesure où la demande pour les maisons,
pour les petites habitations, possède une élasticité
similaire à celle qu'on retrouve ailleurs, dans cette mesure, on peut
alors affirmer ce qu'on affirme ici.
M. PEPIN: Pour les maisons unifamiliales ou de type...
M. LACASSE: D'autre part, je suis parfaitement conscient que nous ne
savons pas si l'hypothèse que nous faisons en élargissant
l'applicabilité de notre coefficient à toute l'industrie est
juste, nous ne le savons pas. Nous avons fait cette hypothèse-là,
et nous l'avons mentionné, pour que le lecteur sache exactement dans
quelle limite nous pouvons donner cet ordre de grandeur.
M. PEPIN: Je voudrais essayer de comprendre encore mieux. En
économique si les quelques cours que j'ai déjà suivis sont
encore valables, cela m'indiquait que, lorsqu'on augmentait la masse
monétaire ou les revenus, si vous voulez, il y avait une chance que cela
se traduise par une augmentation dans la demande de services et de biens. Si
cette hypothèse est encore valable aujourd'hui et que, dans une
région, j'augmente les revenus des gens, est-ce que je n'ai pas plus de
chance qu'ils cherchent à avoir d'autres biens, d'autres services et
peut-être des maisons?
M. LACASSE: M. Pepin, je pense que j'ai répondu à cette
question pour monsieur, tout à l'heure. Au fond, je suis pleinement
d'accord avec vous. D'ailleurs, c'est en appendice à la publication de
M. Loranger. On donne le modèle habituel où cette chose se
produit. Cependant, ce que j'ai souligné tout à l'heure, ce
pourquoi nous avons regardé cette question et avons décidé
ensuite de ne pas la considérer,
c'est que, pour les unités qui sont en cause ici pour chacune des
régions, cette augmentation de la masse des revenus qui serait produite
par la parité va se traduire par une augmentation de la demande de
biens, d'accord. Mais, cette augmentation va se traduire dans une proportion
tellement grande en faveur de biens produits hors de la région qu'on va
arriver à des pourcentages d'augmentation qui seront très
faibles. Quand on est rendu à calculer à moins de 1 p.c, on
considère cela négligeable, parce qu'à ce moment-là
on ne peut plus le classer. On ne sait plus ce qui est le chiffre et
l'erreur.
M. PEPIN: L'hypothèse que vous formulez, c'est que, si j'ai plus
d'argent, je vais l'utiliser à dépenser pour l'achat de produits
ou de biens qui viennent de l'extérieur et non pas de la
région?
M. LACASSE: Ce n'est pas simplement une hypothèse. Il y a eu
là-dessus de multiples études. Je voudrais mentionner que les
biens dont la demande est très affectée par les augmentations de
revenus, en fait les biens de luxe ou les biens qu'on consomme lorsque l'on a
une augmentation de revenus, sont relativement bien identifiés quant
à leur nature. J'ai mentionné, tout à l'heure, quelques
exemples: les appareils électro-ménagers, les voitures, la
récréation en général, surtout le transport par
avion, les repas au restaurant. Il y en a toute une série. Ce que je
mentionne, c'est que, si les consommateurs de nos régions
québécoises ont un comportement à peu près
semblable à ceux des consommateurs nord-américains en
général, ils désireront aussi des autos, des
sécheuses, ainsi de suite. Or, ces biens-là, par rapport aux
régions concernées, sont fabriqués à
l'extérieur. Ils sont fabriqués, soit à Montréal,
soit en Ontario, soit aux Etats-Unis.
M. PEPIN: Très bien. Vous parliez, il y a quelques moments, des
effets de l'égalité des salaires; est-ce que vous tenez compte,
dans votre étude, de l'effet de multiplication?
M. LACASSE: Oui, nous en tenons compte. C'est justement là
où nous en arrivons. Le multiplicateur, comme M. Loranger l'a
expliqué dans son appendice, hier, joue pour autant que les revenus sont
effectivement redépensés dans l'aire économique
concernée. M. Loranger a mentionné une source qui pourrait
permettre de croire que certains revenus ne seront pas effectivement
redépensés, c'est-à-dire l'épargne. J'en ajoute
à celle-là une autre, qui est "l'importation", si vous
voulez.
M. PEPIN: L'exportation aussi.
M. LACASSE: Je m'excuse, cela ne rentre pas là-dedans.
M. PEPIN: Vous ne le faites pas entrer du tout en ligne de compte?
Très bien. Je n'ai pas d'autre question.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président,...
M. LE PRESIDENT: Un petit moment, s'il vous plaît. Le
député de Terrebonne sur le même sujet.
M. HARDY: Le député de Terrebonne devant les questions si
savantes de ses collègues n'a plus rien à dire.
M. LE PRESIDENT: Alors, j'appelle le député de
Maisonneuve.
M. BURNS: J'ai une seule question, M. Lacasse, relativement au tableau
3-8, à la page 22. Si je vous ai bien compris tantôt, vous nous
avez dit que ces coûts ne comprennent pas la valeur des terrains. Est-ce
ça? Les coûts unitaires.
Est-ce que vous savez si ces chiffres varieraient beaucoup si vous
teniez compte de la valeur des terrains? J'ai l'impression, sauf erreur et
exception, qu'à Montréal le coût des terrains doit
être plus élevé qu'ailleurs.
M. LACASSE: Je vais répondre à la question, si vous me le
permettez, en deux temps. Est-ce que le coût des terrains pourrait faire
varier nos chiffres de façon substantielle? Cela les ferait varier de
façon très nette, mais de façon peut-être un peu
capricieuse. Je vous donne cela de mémoire parce que nous avons exclu
et ce sera la deuxième partie de ma réponse de
propos délibéré, les coûts des terrains.
De mémoire, je pourrais mentionner que, par exemple, le
coût des terrains accentuera le fait que Québec est une des
régions où cela coûte le plus cher, mais diminuera
l'avantage de Montréal, si vous voulez, en termes de coût moindre.
Pour les autres régions, en fait, cela changera l'ordre, mais pas de
façon systématique, en ce sens que cela ne retournera pas
l'ordination à l'envers. Ceux qui étaient premiers, ici...
M. BURNS: Drummondville. M. LACASSE: ... Val-d'Or et... M. BURNS: Ah, le
plus élevé.
M. LACASSE: L'ordination du plus élevé au plus bas ne sera
pas nécessairement modifiée, en fait, pas de façon
systématique. Cela ne sera pas retourné à l'envers. On ne
peut pas dire d'avance: Montréal deviendra sixième ou
cinquième. L'avantage de Montréal sera réduit, c'est
clair. Par contre, le "désavantage" de Québec, avec son
coût plus élevé, sera accentué
par rapport aux autres. Là-dessus, tout ce que je peux faire,
c'est de vous référer à la source, la
Société centrale. C'est le tableau juste à
côté de celui-là.
M. BURNS: A côté de 77?
M. LACASSE: Oui, c'est cela. Juste avant ou juste après, je ne me
le rappelle plus.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que cela répond à votre
question?
M. BURNS: Oui.
M. LE PRESIDENT: Le député de Fabre.
M. HOUDE (Fabre): M. Lacasse, je voulais savoir si, dans une
étude comme celle-ci, on tient compte de la compétence et du
rendement du travailleur, par exemple. C'est bien beau de dire: D'accord, s'il
y a parité, il y a augmentation de revenus chez un individu. Par contre,
cela peut causer une augmentation du coût de la vie dans l'ensemble, si
vous voulez, d'une région. Je me demande si on tient compte, dans ces
études, en tant qu'économiste, de la compétence et du
rendement. Celui qui ne l'a pas, la parité, dans une région,
à mon humble avis, il est susceptible d'être peut-être moins
fort, moins compétent dans son métier que celui qui a un plus
fort salaire à Montréal. On dit: II faut de plus en plus que nos
jeunes diplômés restent dans leur région et travaillent
localement. Est-ce que vous en avez tenu compte? Est-ce possible, aussi, que
cela ait des implications économiques? Dans la construction d'un simple
bungalow, parce que le gars est plus compétent, parce que c'est un
meilleur électricien, il peut, comme le disait M. Laberge tantôt,
épargner du temps, des heures, et des matériaux. Alors, la
compétence, plus le rendement, chez les travailleurs, est-ce qu'on en
tient compte dans les conclusions sur la parité ou la
non-parité?
M. LACASSE: Là-dessus, je dois mentionner que nous aurions,
évidemment, adoré être capables d'en tenir compte de
façon explicite parce qu'évidemment c'est un barème
extrêmement important. Il a été impossible de le faire pour
une raison extrêmement simple. C'est que s'il existe quelques indices de
valeur discutable sur la productivité pour l'ensemble du Canada et pour
des grandes régions à l'intérieur du Canada, il n'existe
aucune donnée, même mauvaise, sur les différences de
productivité des travailleurs dans l'industrie de la construction de
région en région à l'intérieur du Québec.
Donc, c'est le premier point. Nous n'avons pas pu en traiter directement.
Indirectement, nous y faisons allusion lorsque nous mentionnons que le
fait d'accorder la parité favorisera de façon systématique
les entrepreneurs de Montréal qui, on le présume, sont
déjà plus efficaces, ont déjà de la main-d'oeuvre
peut-être plus compétente ou mieux organisée ou mieux
encadrée, en tout cas, plus productive. On ne sait pas au juste pourquoi
elle l'est. De ce point de vue, nous avons souligné que le fait
d'accorder la parité favorise très nettement Montréal. En
fait, disons que, pour un employeur de Montréal, la parité est
sûrement quelque chose d'excellent. Cela lui permettra plus
aisément de concurrencer d'autres entrepreneurs des régions
avoisinantes. C'est donc un premier point.
Deuxième point. Comme vous avez pu le voir, nous avons, pour les
seuls maîtres électriciens, parce que ce sont les seuls
auprès desquels nous pouvions faire un sondage, constaté qu'une
proportion assez substantielle des contrats était effectuée par
les firmes hors de la zone où ils ont leur adresse d'affaires, hors de
la zone de décret où ils ont leur adresse normale d'affaires.
Tout ce que nous pouvons dire, c'est que ces résultats sont compatibles.
On retrouverait ces résultats si, effectivement, il y avait des
différences de compétence et de productivité entre
Montréal et les régions, différences qui seraient,
évidemment, à l'avantage de Montréal.
Maintenant, je veux signaler ici que ce n'est pas une précaution
oratoire que de dire que c'est compatible avec l'hypothèse de... C'est
que cela pourrait être expliqué par d'autres facteurs, mais que,
disons jusqu'à maintenant, en l'absence de toute autre indication, nous
pouvons croire en tout cas que ce n'est pas contradictoire, que
l'hypothèse des différences de productivité, on ne peut
pas la rejeter.
M. LE PRESIDENT: Le député de Mégantic.
M. DUMONT: Tout à l'heure M. Lebon a fait allusion au fait qu'il
y avait des possibilités pour les contrats importants, comme à la
Golden Eagle par exemple, que les maîtres électriciens ou
entrepreneurs de toutes sortes viennent de Montréal. Nous avons vu,
dernièrement aussi, les foyers d'hébergement. Nous avons vu,
entre autres exemples, les polyvalentes et, dernièrement, le
dernier-né dans la Beauce où il y a eu un prêt de $350,000
pour des maisons unifamiliales, un entrepreneur apparemment... Est-ce que, dans
votre pensée, comme économiste, vous n'avez pas tendance à
croire que ce mouvement va s'accentuer et que dans cinq ans nous n'aurons plus
dans nos régions d'entrepreneurs locaux, si le mouvement va en
s'accentuant comme tel?
M. LACASSE: Je m'excuse de répondre brièvement à
votre question. Mais, mon cher monsieur, je n'en sais rien. Je n'ai pas
étudié cette question, à savoir quelle était
l'évolution, dans le temps dans ce sens-là. Je ne peux donc pas
répondre à votre question.
Le seul point sur lequel l'étude a pu porter,
c'étaient les effets de la parité, et ce qu'on pouvait
dire, c'était que la parité allait encourager ou favoriser les
entrepreneurs des grands centres, de Montréal. Cela, on peut le dire.
Maintenant, où l'évolution va-t-elle mener? Je ne peux vraiment
pas répondre à cette question.
M. LE PRESIDENT: Le député de Chicoutimi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Lacasse, je vais vous poser une question
naive. Je m'adresse à un spécialiste, un économiste. A la
page 29 de votre document, vous parlez de la parité
interrégionale des salaires. Vous dites: "Notre examen des diverses
conséquences de l'établissement, d'autorité, de la
parité interrégionale dans l'industrie de la construction nous
conduit inévitablement à considérer cette politique comme
non fonctionnelle eu égard aux objectifs avoués du gouvernement:
plein emploi, stimulation de l'activité économique dans les
régions périphériques et réduction des
disparités interrégionales de revenus." Vous donnez ensuite une
série de conséquences et vous concluez: "Notons enfin
à la page 30 que la parité des salaires dans la
construction est de nature, dans l'avenir, à faire accentuer les
pressions en faveur de mesures législatives de protection de l'emploi
local et régional. Ces mesures tendent évidemment à
balkaniser le marché québécois de la main-d'oeuvre aux
dépens du niveau de revenu réel des consommateurs, etc."
M. Lacasse, quel est votre point de vue à cet égard, si on
parle de parité, en fonction des disparités
interrégionales? Est-ce que vous ne croyez pas que l'objection que vous
faites à l'établissement de la parité salariale est de
nature à maintenir à son rythme actuel et à son niveau
actuel la concentration de l'activité économique dans des
secteurs donnés, soit Montréal, par exemple, aux dépens
des régions qui, elles, demandent une décentralisation
industrielle?
M. LACASSE: Justement, à ce propos, je pense que ma
réponse à la question précédente ou à celle
d'avant je ne me rappelle plus, il commence à y en avoir un
certain nombre indiquait que tout ce que nous avons vu comme effets qui
peuvent être considérés négatifs de
l'établissement de la parité, c'est précisément le
fait que l'établissement de la parité est un moyen inefficace de
réduire les disparités régionales.
Justement, un des avantages pour ces régions, au point de vue de
l'établissement des entreprises, est précisément, pour
l'instant, le fait et c'est peut-être leur seul avantage dans
certains cas que les salaires ne sont pas au même niveau que dans
les autres. Si vous avez égalité de salaires absolument partout,
il n'y a aucun intérêt pour une firme de se rapprocher
essentiellement de l'autre élément qu'elle doit prendre en
considération, c'est-à-dire la proximité du marché.
En fait, on peut dire qu'en gros, sur la localisation d'une entreprise, il y a
deux objectifs que l'entreprise essaie de concilier : avoir ses facteurs de
production au coût le plus bas et, d'un autre côté,
être le plus près possible de son marché de façon
à réduire ses coûts de transport et ses coûts de
distribution, en conséquence.
Si dans le cas présent on égalise les salaires, il semble
bien que pour les entreprises, la seule chose qui joue est la proximité
du marché. La proximité du marché veut dire, de facto,
pour le Québec, se situer dans un axe Montréal-Québec,
à dix milles de chaque côté du fleuve, ou un peu moins, ou
encore dans la grande zone métropolitaine de Montréal, tout
simplement.
Je pense que là-dessus notre seule conclusion était que,
justement, la parité des salaires imposée n'est pas une
méthode pour réduire les inégalités de revenu, une
méthode efficace, qu'on la considère indépendamment de
toutes les autres ou qu'on la compare à des mesures, comme les
changements qui ont été apportés dans la Loi d'aide
sociale, l'an dernier, ou les divers programmes d'implantation du
développement régional, ou de l'Industrie et du Commerce et ainsi
de suite.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): Vous ne pensez pas, M. Lacasse, qu'en inversant
votre argument, on tombe dans un cercle vicieux et que la tendance ira toujours
dans le sens d'une concentration du côté des grandes zones?
M. LACASSE: Non, justement, je pense que la tendance de concentration
dans les grandes villes est une tendance qui est séculaire et qui
vraisemblablement va se continuer, indépendamment de ce que l'on fasse,
que l'on fasse n'importe quoi. Je vous le donne à titre d'opinion, en
dehors de ce débat. Mais, cependant, je pense que si on veut, justement,
retarder ce mouvement, ou si on veut simplement respecter le fait qu'il y a des
gens qui veulent demeurer dans des régions, même si c'est au prix
d'être plus en danger d'être en chômage, d'avoir des revenus
peut-être inférieurs, à ce moment-là on pourrait
suggérer aux gens de se déplacer vers le travail. En fait, que le
travail se déplace vers les entreprises et non pas l'inverse.
Maintenant, je pense que le gouvernement, ici, par ses gestes, semble
avoir opté pour cela en disant: On donne la possibilité aux gens
qui veulent se déplacer en les aidant. Ce sont les prêts à
la mobilité. D'autre part, on respecte aussi le fait qu'il y a des gens
qui ne veulent pas, qui ne peuvent pas se déplacer. On fait alors des
efforts pour implanter, pour faire monter la demande de travail dans ces
régions en implantant de nouvelles entreprises, ou, pour ceux qui n'ont
pas d'emploi, pour faire monter leurs
revenus par des transferts qui sont des transferts évidents et
directs.
De cette façon, on retarde en tout cas, ou on ralentit, ou on
atténue les effets de la tendance à la concentration sur les
populations qui sont dans des régions excentriques. En imposant la
parité, on se trouve à hausser les coûts pour les
entreprises, seulement dans les régions excentriques,
c'est-à-dire qu'on défavorise la demande de travail, seulement
dans ces régions, on spécialise notre intervention, en somme, par
une mesure qui va réduire vraisemblablement la demande de main-d'oeuvre
spécifiquement dans les régions où déjà la
croissance est moins rapide.
Alors, c'est l'ensemble de notre texte qui, justement, va dans ce
sens-là.
M. LE PRESIDENT: Est-ce que cela répond à votre
question?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Merci, M. Lacasse.
M. LE PRESIDENT: Le député de Terrebonne.
M. HARDY: M. Lacasse, à la lumière des opinions
émises dans vos dernières réponses, est-ce que ce serait
bien interpréter votre pensée que de dire que vous
considérez comme un moyen d'atténuer les disparités
régionales votre opposition à la parité salariale;
c'est-à-dire que ce sont les travailleurs de la construction qui, via la
parité salariale, contribueraient, dans une certaine mesure, à
atténuer les disparités régionales?
M. LACASSE: II y a un premier truisme qu'on peut émettre à
la suite de votre question. Pour les gens de la construction, c'est sûr
que ça va atténuer les différences de revenus, pour ceux
qui vont être employés. Cela ça va bien.
Maintenant, ce que nous soutenons, c'est que, justement, le jeu de cette
parité, sur les coûts va avoir des effets sur l'emploi dans ces
régions, soit strictement par réduction des quantités
demandées, soit parce qu'on donne un avantage concurrentiel, à ce
moment-là, à la main-d'oeuvre et aux entreprises des grands
centres, c'est-à-dire essentiellement de Montréal, ici. A cause
de ces deux phénomènes, les effets sur les revenus de l'ensemble
de la région vont être petits, mais négatifs. Cela, je le
crois. Je n'irais pas sortir l'Apocalypse en disant que les gens vont crever de
faim, à cause de ça ou quoi que ce soit, sauf que ce serait une
politique qui irait carrément à l'encontre des autres politiques
qui sont prises pour diminuer les inégalités de revenus entre
régions.
En trois paragraphes, là, c'est l'essentiel de ce que j'ai voulu
dire ici.
M. HARDY: Maintenant, dans la ligne de pensée de la question de
mon collègue, le député de Fabre, vous avez dit
tantôt que vous ne possédiez pas de chiffres exacts pour
déterminer l'indice de productivité ou les différences de
productivité à l'intérieur de la province. Il y a quand
même un fait bien évident. Si vous avez, dans la région des
Laurentides, des maisons d'enseignement ou d'éducation qui
préparent des gens dans différents métiers, à une
compétence x, il est évident que ces personnes qui vont sortir
des maisons d'enseignement, qui possèdent cette compétence, si
elles voient qu'il y a une différence notable de salaires, entre la
région des Laurentides et la région de Montrél, vont
être entraînées dans la région de Montréal.
Vous ne pensez pas, à ce moment-là, que c'est une façon de
diminuer la compétence dans une région donnée; je donne la
région des Laurentides à titre d'exemple. La disparité
salariale diminue dans l'emsemble la compétence des personnes. Diminuant
la compétence des personnes dans ce secteur-là, on entrave, dans
une certaine mesure, le développement économique de la
région.
M. LACASSE: Je pense que ce que vous dites, sur les effets de la
disparité de salaires, est absolument correct. Je pense que c'est
accepté. Cependant, il faudrait voir l'autre côté de la
médaille. On peut concevoir toute une série de facteurs qui vont
faire que la main-d'oeuvre va se déplacer d'une région à
l'autre. Il est reconnu que, plus la main-d'oeuvre, est qualifiée, plus
elle est mobile, généralement.
Dans ces circonstances, il est clair que c'est ordinairement la
main-d'oeuvre la plus jeune et la plus qualifiée qui disparaît le
plus vite des régions, à cause des différences de
salaires. Cependant, les différences de salaires entre les
régions ne sont pas le seul facteur qui va faire se déplacer les
individus qualifiés. Notre argumentation visait à dire qu'il va y
avoir des effets négatifs sur l'emploi. Les risques de sous-emploi, les
risques de chômage, même partiel, ont été, dans les
études de mobilité de main-d'oeuvre, montrés comme
étant des facteurs qui poussent les gens à se déplacer de
façon beaucoup plus rapide, beaucoup plus immédiate que les
seules différences de salaires à chances d'emploi
égales.
Ici, sans me référer à un exemple particulier, je
fais appel à un phénomène qu'on connaît très
bien ici au Québec, au Canada. Vous avez sûrement moins de
mobilité entre Montréal et Toronto ou entre Québec et
Montréal, du seul fait que les salaires sont un peu plus
élevés à Montréal qu'à Québec ou plus
élevés à Toronto qu'à Montréal. Vous avez
moins de mobilité, donc, entre ces zones, où il y a un plein
emploi relatif, qu'entre les campagnes et les villes où les
différences de salaires existent aussi. Mais, ce qui pousse les gens
à partir, c'est le simple fait que le travail existe en moins grande
quantité et qu'il y a des chances de chômage importantes.
En somme, pour résumer ma réponse, ce que vous dites est
exact: La disparité de salaire va entraîner une disparition de ce
personnel compétent. Mais, l'établissement d'un type de
parité imposé par la loi, par ses effets négatifs sur
l'emploi, peut en entraîner autant sinon plus. On pourrait croire au
niveau de l'opinion je le dis sous toute réserve - que les effets
entraînés même par des changements négatifs faibles
dans l'emploi ou dans les chances d'emploi sont plus importants sur la
mobilité de la main-d'oeuvre que les différences de salaires.
Cela répond à votre question?
M. LE PRESIDENT: Le député de Frontenac.
M. LATULIPPE: Je veux revenir à la question de la
productivité. Est-ce que, d'une façon générale, on
ne peut pas argumenter que la productivité est toujours fonction des
quantités demandées? La région de Montréal, par
exemple, sera toujours une région où il y aura beaucoup plus de
demandes qu'une région plus marginale. La productivité sera
toujours plus grande dans le secteur de Montréal, ce qui justifie les
faibles coûts, si on compare avec d'autres régions.
M. LACASSE: II faut dire que la productivité est toujours
liée à l'échelle des entreprises, en quelque sorte. Je
pense que c'est aller un peu vite en besogne. C'est exact dans certains
secteurs. Si vous me le demandiez pour la production de
l'électricité, je vous répondrais oui sans hésiter.
Cinquante études l'ont démontré. Pour le transport
aérien, c'est le même phénomène.
Pour la construction, personnellement, je ne crois pas que ce soit le
seul ni même peut-être l'élément essentiel pour
déterminer la productivité. C'est un des éléments.
En tout cas il est impossible présentement d'établir que ce soit
le moyen numéro 1. En fait, il y a assez d'entreprises gigantesques dans
ce secteur-là qui ont fait faillite pour que, justement, on se pose des
questions à savoir si le gigantisme est nécessairement payant.
Cela peut l'être.
Simplement pour résumer ma réponse qui est un peu
décousue, Montréal n'aura pas nécessairement toujours
l'avantage dans tous les types de travaux. C'est un facteur qui peut jouer dans
ce sens, mais dans l'industrie de la construction, il n'a été
établi par personne, que je sache, que les questions d'échelle
aient une importance extrêmement grande sur la productivité des
employés. En fait, ce qu'on pourrait dire, c'est que vraisemblablement
dans certains secteurs, la mécanique lourde, par exemple, il y aura
vraiment des effets de ce genre qui seront valables et que, dans la
construction des habitations unifamiliales, ce sera probablement beaucoup plus
réduit. On peut faire une "ordination" comme ça, mais on ne peut
pas aller plus loin, je pense, avec ce qu'on sait présentement.
M. LE PRSIDENT: Est-ce que ça répond à votre
question?
M. LATULIPPE: Oui.
M. LE PRESIDENT: Y a-t-il d'autres questions?
M. LAPORTE: Vous avez fait un effort sérieux.
M. LE PRESIDENT: Nous vous remercions et nous sommes bien conscients, M.
Lacasse, de l'immense effort que vous avez dû faire.
M.Lebon.
M. LAPORTE: M. Lebon.
M. LEBON: Je me permets quand même ici de faire un
résumé très bref de la situation relativement à la
parité salariale. C'est pour être clair. Je cite encore des
extraits du mémoire qui a été très bien
expliqué par M. Lacasse à la suite des questions intelligentes
des députés. Je cite quelques extraits pour faire ressortir ce
qui nous apparaît essentiel.
On peut constater que, selon les régions, les augmentations de
salaire varient entre 34 p.c. et 8 p.c. si on accordait la parité
salariale; l'augmentation des prix entre 11.8 p.c. et 3 p.c. Voici la
première conséquence de la parité salariale.
Deuxième conséquence: la parité entraînerait des
baisses d'emploi dans la construction de 4.5 p.c. à 17.7 p.c. selon les
régions. Somme toute, l'établissement de la parité
favorise l'expansion des grandes entreprises, soit celles de Montréal et
de Québec. Ces conséquences seront ressenties avec d'autant plus
d'intensité selon les régions que les salaires y étaient,
plus bas. La hausse de revenu nominal qui se fera sentir dans la région
du fait de la parité sera de 1.7 p.c. multiplié par le quart, ce
qui donne 2/5 de 1 p.c, et ce dans la région où la parité
entraînerait les augmentations de salaires les plus fortes. Bref,
même dans les circonstances les plus favorables, l'effet possible de
l'augmentation des revenus nominaux dans la construction est
négligeable, comme stimulus à l'activité économique
régionale.
Je me permets de lire la conclusion intégrale. " Notre examen des
diverses conséquences de l'établissement, d'autorité, de
la parité interrégionale dans l'industrie de la construction nous
conduit inévitablement à considérer cette politique comme
non fonctionnelle, eu égard aux objectifs avoués du gouvernement,
soit le plein emploi, la stimulation de l'activité économique
dans les régions périphériques et la réduction des
disparités interrégionales de revenus. " En bref, les
conséquences de la parité (et des augmentations de coûts
qu'elle entraîne) vont se manifester, soit par une réduction du
revenu réel des consommateurs (si l'hypothèse
d'élasticité de demande est incorrecte, c'est-à-dire si
les augmentations de prix sont absorbées
par les consommateurs) soit par une baisse d'emploi dans l'industrie de
la construction. " Rappelons que, d'une manière ou d'une autre, l'impact
d'une parité imposée sera très différent selon les
régions et, règle générale, désavantagera
les zones déjà relativement défavorisées. Notons
enfin que la parité des salaires dans la construction est de nature,
dans l'avenir, à faire accentuer les pressions en faveur de mesures
légales de protection de l'emploi local et régional. Ces mesures
tendent, évidemment, à balkaniser le marché
québécois de la main-d'oeuvre aux dépens du niveau de
revenu réel des consommateurs, du niveau réel de vie de la
population et de la croissance économique de l'ensemble de la
province."
A la suite de cette étude, messieurs, nous faisions valoir, dans
notre plaidoyer, qu'aucun gouvernement responsable n'imposera à court ou
à long terme une politique salariale qui pourrait tendre vers la
parité, s'il veut respecter les objectifs du mandat qui lui a
été donné par le peuple.
C'est-y assez fort!
M. LE PRESIDENT: Vous voulez dire qu'un gouvernement qui imposerait une
parité salariale serait irresponsable?
M. LEBON: Je relis le texte: " Nous nous permettons... " Partant de
là, notre organisme ne s'est pas contenté de prendre une attitude
nettement réactionnaire et de dire non à la parité. Nous
avons cherché une méthode qui pourrait satisfaire l'industrie de
la construction ce que j'expliquais tout à l'heure
à savoir la division de l'industrie de la construction en deux secteurs:
le secteur commercial et industriel et le secteur résidentiel. Les
augmentations de salaires dans le secteur commercial et industriel auraient pu
être plus substantielles que celles du secteur résidentiel.
Or, nos mêmes économistes, malheureusement pour nous
parce que nous avions déjà pris position là-dessus
nous ont démontré que, selon la ligne de démarcation que
nous avions faite des secteurs, ce n'est pas viable pour le moment, enfin,
selon la définition qu'on y a donnée.
Je réfère à la page 12 de la partie verte du
document. Il s'agit ici du tableau 1-3.
M. LE PRESIDENT: Je vous réfère au cadran qui indique six
heures.
M. LEBON: M. le Président, je suis prêt à continuer
demain matin; je vais être en pleine forme. Je vais me coucher
tôt.
M. LE PRESIDENT: Nous serons très heureux, M. Lebon, de vous
entendre.
M. LAPORTE: Mais, étant donné que nous serons infiniment
plus heureux de vous enten- dre demain et que tous vos collègues autour
de vous vous envient votre éloquence, est-ce que l'on pourrait vous
suggérer peut-être de vous limiter, quant à la
durée? Qui est-ce que c'était? Etait-ce Boileau qui disait: Ce
qui se conçoit bien...
M. LEBON: ... s'énonce clairement et les mots pour le dire
arrivent aisément.
M. LAPORTE: C'est ça.
M. LEBON: C'est ce que je pense que je réussis à
faire.
M. LE PRESIDENT: Boileau était un homme de lettres et non un
économiste.
M. LEBON: D'accord. C'est que je suis ingénieur et il faut me
pardonner cela!
De toute façon, M. le Président et M. le ministre, je
pense que ce que nous avons à dire est sérieux et je suis
sûr que le ministre du Travail ne veut pas limiter nos interventions.
M. LAPORTE: Non, du tout, mais je me rappelle ce mot qui disait: Pour
laisser un souvenir éternel, il ne s'agit pas de parler
éternellement!
M. LEBON: Je suis entièrement d'accord. Je comprends mal le
ministre qui trouve cela long, parce qu'il s'est absenté assez
longtemps!
M. LAPORTE: Oui, oui, mais en si peu de temps, j'ai déjà
commencé à trouver cela long!
M. LEBON: Cela ne vous intéresse pas, M. le ministre?
M. LAPORTE: Cela m'intéresse.
M. LEBON: Cela vous intéresse, alors je continue.
M. LAPORTE: Pas ce soir, demain matin, à dix heures.
M. LEBON: Demain? Parfait.
M. LE PRESIDENT: Nous ajournons pour vous entendre demain matin,
à dix heures, même salle.
M. LEBON: Avec plaisir. UNE VOIX: D'accord.
M. LE PRESIDENT: Je communique aussi à la commission que la
Commission des transports va faire parvenir un mémoire d'ici lundi.
(Fin de la séance 17 h 58)