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Version finale

29th Legislature, 1st Session
(June 9, 1970 au December 19, 1970)

Friday, November 6, 1970 - Vol. 10 N° 34

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Bill 38 - Loi concernant l'industrie de la construction


Journal des débats

 

Commission permanente du Travail et de la Main-d'Oeuvre

Bill 38 — Loi concernant l'industrie de la construction

Séance du vendredi 6 novembre 1970

(Dix heures trente-neuf minutes)

M. BOSSE (président de la commission permanente du Travail et de la Main-d'Oeuvre): A l'ordre, messieurs! Je dois vous aviser immédiatement que nous ajournerons à 12 h 30, en tenant compte de certaines circonstances particulières et nous reprendrons les auditions la semaine prochaine. Alors, pour aujourd'hui, nous reprendrons là où nous étions, c'est-à-dire au moment ou M. Pepin interrogeait l'Association des constructeurs de routes. Nous revenons donc à M. Pepin.

Vous pouvez procéder, M. Pepin.

M. PEPIN: M. le Président, lors de l'ouverture de la séance de mardi, le ministre du Travail nous avait indiqué qu'il devait nous fournir une réponse à savoir si la formule de sécurité d'emploi s'appliquerait ou non le 10 novembre.

M. LEVESQUE: M. le Président, j'aimerais intervenir à ce moment-ci. J'ai parlé, il y a quelques instants, à M. Cournoyer qui est présentement absent à cause de l'inauguration du pont Pierre-Laporte. M. Cournoyer sera ici dans une heure environ. A ce moment-là, il fera les déclarations qu'il jugera à propos de faire.

Constructeurs de routes

M. PEPIN: Alors, tel que je l'avais indiqué, j'aimerais interroger M. Curzi, s'il vous plaît, au sujet de quelques points.

M. L'HEUREUX: M. Curzi est retenu à Montréal. Si M. Pepin veut poser des questions...

M. PEPIN: Est-ce que je vais interroger M. L'Heureux au sujet de propos tenus par M. Curzi? C'est plus compliqué. Cela va être fort. Dans le t.t.f.

M. L'HEUREUX: C'est-à-dire que M. Pepin va interroger M. L'Heureux sur des propos tenus par l'association. Alors ça va faire.

M. PEPIN: Non, je pense...

M. LE PRESIDENT: Si M. Pepin n'est pas satisfait des réponses que M. L'Heureux donnera en ce qui a trait aux propos de M. Curzi, ce dernier pourra être présent la semaine prochaine pour répondre lui-même.

M. PEPIN: Toujours la semaine prochaine... Quand M. L'Heureux dit que c'est l'association qui parlait, lorsque M. Curzi parlait, est-ce que cela veut dire que tout ce que M. Curzi a dit a été approuvé à l'avance, mot pour mot, par l'association?

M. L'HEUREUX: C'est exact.

M. LE PRESIDENT: Les propos de M. Curzi sont aussi les propos que vous faites vôtres?

M. L'HEUREUX: Avec la seule erreur que M. Curzi a pu faire, dans le sens qu'il a mentionné, à certains moments, que cela doublerait le coût de la construction. Ce qu'il voulait dire, c'est que cela doublerait le coût de la main-d'oeuvre de la construction.

M. PEPIN: Je vais donc m'essayer. Je vais voir ce qui en est.

Vous avez dit, MM. Curzi et L'Heureux, que les chiffres proposés dans le bouquin de M. Loranger, qui s'appele "L'Egalité", étaient, quant à vous, contestables. En particulier dans le témoignage de M. Curzi, il est rapporté au journal des Débats qu'à la page 84 — je vais vérifier pour voir si j'ai vraiment la bonne page — nous parlons de $98 millions et qu'à la page 86, nous parlons de $94 millions. Or, M. Curzi semblait dire: Je ne sais pas d'où ça vient, ce montant de $94 millions.

Avez-vous pu vérifier pour voir si nous parlons vraiment de $94 millions à la page 86?

M. L'HEUREUX: Je ne sais pas à quoi vous voulez en venir, mais les chiffres que M. Curzi a ici sont de $98 millions et $94 millions, tels qu'ils sont notés aux pages 84 et 86.

M. PEPIN: Pourriez-vous me dire à quel endroit exactement? J'ai le bouquin devant moi, je le cherche.

M. L'HEUREUX: A la page 84, j'ai un montant de $98 millions.

M. PEPIN: Oui. A la page 86, pouvez-vous me trouver le montant de $94 millions?

M. L'HEUREUX: Si vous regardez au bas de la page 85...

M. PEPIN: La page 85.

M. L'HEUREUX: ... C'est ça, ça se continue à la page 86. Pour expliquer le montant de $94 millions, d'après les comptes publics de l'an dernier, à même ce montant, une somme d'environ $12 millions a été payée à des entrepreneurs privés — ça continue ici — pour les routes et les ponts. Nous avons estimé à un tiers la masse des salaires payés par ces entrepreneurs, donc $4 millions.

J'imagine donc que ce que M. Curzi a voulu dire, c'est qu'il déduit ce montant de $4 millions du montant de $98 millions et il obtient $94 millions.

M. PEPIN: Alors, le montant de $94 millions, comme tel, n'y est pas, c'est par une inférence qu'il est arrivé à ce chiffre?

M. L'HEUREUX: C'est-à-dire que si l'on déduit $4 millions de $98 millions, on obtient $94 millions, et c'est à la page 86.

M. LE PRESIDENT: Voulez-vous élever un peu le volume, s'il vous plaît...

M. PEPIN: Je ne parle pas assez fort?

M. LE PRESIDENT: Nous vous entendons difficilement d'ici et les membres de la commission aimeraient saisir vos propos.

M. L'HEUREUX: Est-ce que vous avez saisi ma réponse pour justifier le montant de $94 millions?

M. LE PRESIDENT: Voulez-vous la répéter, s'il vous plaît?

M. L'HEUREUX: A la page 86, on déduit un montant de $4 millions d'après certains avancés de M. Loranger. Si on déduit une somme de $4 millions de $98 millions, ça donne $94 millions.

M. PEPIN: Alors, les $94 millions comme tels ne sont pas inscrits. C'est par référence que vous en arrivez à $94 millions. Est-ce que vous pourriez expliquer à la commission qu'il y a vraiment — du moins, je le pense; vous nous répondrez vous-même, vous êtes le témoin — deux sortes de travailleurs qui peuvent être dans la voirie? Il y a ce qu'on appelle, je crois, la voirie plane et il y a aussi ceux qui travaillent sur des ponceaux, des ponts, etc. Ce que je dis est-il vrai ou faux?

M. L'HEUREUX: C'est exact.

M. PEPIN: Dans le cas de la voirie plane, si je comprends bien, c'est la cédule des justes salaires qui s'applique pour ce qui est de la province, excluant l'île de Montréal. Est-ce exact?

M. L'HEUREUX: Là, je ne sais pas ce que vous entendez par voirie plane. La première fois que j'ai entendu parler de voirie plane, c'est dans l'une de vos demandes. Par "voirie", nous entendons tout ce qui est compris dans l'emprise de la route. Est-ce cela que vous entendez par "voirie plane"?

M. PEPIN: Oui, cela m'a l'air assez exact.

M. L'HEUREUX: Le terme "plane", je ne le comprends pas. Par "voirie", j'entends ce qui est compris dans l'emprise de la route: les ponceaux, les viaducs, les différents travaux qui sont faits à l'intérieur de l'emprise d'une route.

M. PEPIN: Est-ce qu'il y a deux catégories d'employés, soit des gens qui vont travailler sur la route même et d'autres qui vont travailler à la construction de ponceaux, etc.? Les salaires sont-ils différents actuellement? Je ne parle pas de ce qui arrivera dans l'avenir. Est-ce que la cédule des justes salaires s'applique à tous ceux qui font partie de votre association?

M. L'HEUREUX: La cédule des justes salaires s'applique à ceux qui travaillent sur les ponceaux; elle s'applique aux travailleurs de la voirie, à ceux qui posent des clôtures, 3 ceux qui font des travaux de terrassement. J'imagine que vous voulez différencier ceux qui font des travaux de terrassement proprement dits et ceux qui font des travaux manuels. Je réponds que, dans la cédule, on prévoit des taux pour des menuisiers et des manoeuvres. J'imagine que cela comprend la sorte de travaux à laquelle vous référez.

M. PEPIN: Pour vous, il n'y a qu'une catégorie de salaires pour les diverses catégories d'employés, c'est-à-dire qu'on a des salaires différents d'un métier à un autre, mais que les mêmes salaires s'appliquent suivant qu'on exerce un métier donné, que ce soit sur la route même ou pour construire des viaducs, des ponceaux ou pour faire du terrassement, etc.

M. L'HEUREUX: Comme je vous le dis, ce qui est compris à l'intérieur de l'emprise de la route.

M. PEPIN: Bon. Pourriez-vous maintenant, pour que je puisse bien saisir la portée du débat, me dire si c'est vrai ou faux? Pour ce qui est de l'île de Montréal même, la cédule des justes salaires ne s'applique pas. Pour ce qui est du reste de la province, il y a une cédule des justes salaires qui s'applique. Ce que je vous dis est-il vrai ou faux?

M. L'HEUREUX: C'est exact.

M. PEPIN: Ce qui veut dire que dans le cas de l'île de Montréal, ce sont les taux du décret de la construction qui s'appliquent à cette catégorie de salariés.

M. L'HEUREUX: Dans le cas de l'île et non de la région, oui.

M. PEPIN: L'île et la région. Cela comprend la région?

M. L'HEUREUX: Non.

M. PEPIN: Seulement l'île? M. L'HEUREUX: C'est ça.

M. PEPIN: Très bien. A Montréal, pour les salariés de vos entrepreneurs, il y a donc égalité de salaire entre ces salariés et les autres salariés de la construction.

M. L'HEUREUX: Pour l'île de Montréal, oui.

M. PEPIN: Pour l'île de Montréal, c'est exact. Quant aux exemples donnés par M. Curzi pour illustrer sa thèse à l'effet que cela conduisait à plusieurs différences entre les thèses soumises par M. Loranger, est-ce que vous pourriez me dire si M. Curzi et vous avez tenu compte de l'application du bill 38 pour faire vos calculs? En résumé, ou pour bien faire saisir ma question, est-ce que vous avez ajouté les $0.75 l'heure prévus au bill 38 pour établir vos pourcentages?

M. L'HEUREUX: C'est exact. D'ailleurs, M. Curzi a répété à maintes reprises qu'il ajoutait non seulement l'augmentation de Montréal — il l'a dit, dans ses exemples — mais aussi la disparition immédiate de la cédule des justes salaires et la parité intégrale avec Montréal.

M. PEPIN: Quand M. Curzi nous donne des exemples, je voudrais vous suggérer de bien vérifier vos notes. J'ai l'impression qu'il ne tient pas compte des $0.75 offerts et s'appliquant au reste de la province, mais qu'il en tient compte pour ce qui est des taux de Montréal. Pourriez-vous prendre la peine de vérifier ce point?

M. L'HEUREUX: Est-ce que nous pourrions prendre un exemple concret, M. Pepin, pour nous comprendre?

Disons que tout le monde a le mémoire. Prenons l'offre patronale ou la demande syndicale pour un opérateur de pelle mécanique, un des exemples que M. Curzi a donnés. Il mentionne dans la première colonne qu'au 31 juillet 1970, le décret est de $5.08 puis au 1er novembre 1972, de $5.98. Il inclut donc les $0.75, plus l'augmentation des bénéfices marginaux.

M. PEPIN: Pour quelle région?

M. L'HEUREUX: Nous parlons de Montréal.

M. PEPIN: Pour Montréal.

M. L'HEUREUX: Bon. Pour la zone de Québec, il dit qu'au 31 juillet 1970, les taux sont respectivement, pour le décret et la cédule, de $4.21 et de $2.78.

M. PEPIN: Au 31 juillet 1970.

M. L'HEUREUX: Pour ceux qui étaient là avant, on a les dernières augmentations; au 1er novembre 1972, elles seraient, d'après nos offres, de $5.40 pour le décret et de $4.85 pour la cédule. Mais ce qui est demandé effectivement, c'est la parité, soit $5.98. Alors, je vois mal les $0.75 qui vous manquent.

M. PEPIN: II ne me manque rien. J'essaie tout simplement de comprendre et d'éclairer la commission; moi, il ne me manque rien.

M. L'HEUREUX: Bon.

M. PEPIN: J'ai mon salaire au complet. Je voudrais tout simplement vous rappeler l'exemple de M. Curzi concernant les opérateurs de petites pelles mécaniques; il a comparé avec la région de Montréal, non pas avec Québec, pour cet exemple précis.

M. L'HEUREUX: C'est ça.

M. PEPIN: Et si je comprends bien l'explication de M. Curzi, pour la région de Montréal, le taux, ex cl u an t l'augmentation générale de $0.75 sur trois ans, était de $3.65 l'heure; c'est exact?

M. L'HEUREUX: Le taux que l'on a ici et qui est encerclé, c'est $3.91 ; cela inclut...

M. PEPIN: Bon, très bien, j'ajoute immédiatement les 7 p.c. de vacances, soit $0.26, ce qui nous conduit à $3.91 l'heure.

M. L'HEUREUX: Oui. C'est le taux pour la cédule dans la région de Montréal; cela exclut l'île de Montréal.

M. PEPIN: Exact. Le taux prévu au décret de Montréal pour 1972 serait de $5.40; est-ce que c'est bien exact d'après vos chiffres?

M. L'HEUREUX: Encore là, moi, j'ai $5.98; j'imagine que cela inclut le pourcentage de vacances.

M. PEPIN: Alors, 8 p.c. de vacances à $0.43.

M. L'HEUREUX: C'est ça.

M. PEPIN: II y a $0.15 de sécurité sociale, ce qui fait $5.98. Je présume que c'est le taux que vous avez.

M. L'HEUREUX: C'est ça.

M. PEPIN: L'écart entre les $5.98 et les $3.91 donne, si je comprends les choses, $2.07 de différence.

M. L'HEUREUX: C'est 53 p.c. .

M. PEPIN: C'est exactement ça. Maintenant, M. L'Heureux, si nous reprenons le calcul en additionnant au point de départ, non pas les 7 p.c. de vacances, mais plutôt les $0.7 5, tel que prévu dans le bill 38, donc pour la région de Montréal le taux incluant l'augmentation générale sur trois ans partira de $3.65 pour aller à $4.40. Il y a $0.75 de différence.

M. L'HEUREUX: Oui, mais, écoutez, ces $0.75, c'est une augmentation donnée à l'intérieur de la même période.

Qu'elle soit accordée par le bill 38... Le bill 38 a fait simplement consacrer des offres qui avaient été faites par nous et acceptées par vous. Dans ces $0.75 là...

M. PEPIN: Pas acceptées par nous, s'il y a moyen.

M. L'HEUREUX: Bien, disons...

M. PEPIN: Parce que nous ne serions peut-être pas ici.

M. L'HEUREUX: Mais les $0.75 d'offre de base avaient été acceptés par la partie syndicale, ou à peu près. En fait, c'est à peu près la seule partie qui avait été acceptée...

M. PEPIN: C'est une affirmation que vous faites.

M. L'HEUREUX: Alors, ces $0.75 sont une augmentation qui n'existait pas au 3] juillet 1970 et qui va exister au 1er novembre 1972. Il faut donc l'inclure dans une augmentation qui va se faire à l'intérieur de cette période et non l'inclure à partir du 31 juillet 1970.

M. PEPIN: Si je veux arriver à comparer, M. L'Heureux, la différence en pourcentage que j'obtiendrai en 1972, je peux au moins calculer d'après des choses connues. Alors, j'ai un bill devant moi que je n'ai jamais bien aimé, tout le monde le sait. Il est là. Il accorde $0.75. Si j'ajoute donc mes $0.75, pour comparer en 1972, je pars à $4.40 et je dois comparer, quant à moi, à $5.40 qui seront le taux de Montréal. Je n'inclus pas, pour les fins de mon calcul, les bénéfices marginaux — que j'aie tort ou raison là-dessus — mais je ne les inclus pas. Ce qui veut dire qu'il y aura alors un écart de $1 l'heure, prévu par le bill et $1 l'heure en pourcentage, cela signifie 24 p. c. de différence.

M. L'HEUREUX: M. Pepin, est-ce que l'augmentation entre le 31 juillet 1970 et le 1er novembre 1972 va être, comme M. Curzi l'a dit, de $2.07?

M. PEPIN: Je ne sais pas combien elle sera exactement.

M. L'HEUREUX: Ecoutez, vous venez de dire...

M. PEPIN: Je ne calcule pas les bénéfices marginaux, M. L'Heureux.

M. L'HEUREUX: ... vous-même que vous avez obtenu $3.91 au 31 juillet 1970 et que vous obtenez $5.98 au 1er novembre 1972. Alors, quand on parle de l'augmentation du coût de la main-d'oeuvre qui va se réfléter dans le coût des routes, qu'elle soit accordée par le bill 38 ou qu'elle soit accordée par un rattrapage, on ne fait que jouer sur les mots et sur les chiffres. Mais est-ce que la différence entre les deux taux payés au même homme va être de $2.07?

M. PEPIN: L'importance du sujet que je soulève, c'est que M. Curzi a essayé de démontrer, devant la commission, que notre demande conduisait à des augmentations, en pourcentage, très considérables.

M. L'HEUREUX: C'est ça.

M. PEPIN: Je pense que j'ai le droit de démontrer que, en tenant compte de la réalité, ces augmentations, en pourcentage, ne sont pas aussi élevées — je ne parle pas en chiffres absolus, je parle en pourcentage — que ce qu'on a tenté de dire devant la commission.

Or, s'il est vrai de dire, en excluant les bénéfices marginaux, que je doive d'abord additionner les $0.75 — puisque je les additionne pour Montréal, je les additionnerai aussi pour la région de Montréal — j'en arrive, à ce moment-là, à une différence beaucoup moindre, une différence de 24 p c. au lieu d'une différence de 53 p c.

M. L'HEUREUX: Qu'est-ce que vous nous prouvez par là M. Pepin?

M. PEPIN: Je prouve tout simplement ceci, c'est que la crainte qu'on essaie de susciter chez les membres de la commission, à l'effet que cela fait un pourcentage très élevé, ce n'est pas aussi élevé que ce que l'on a affirmé mardi matin.

M. L'HEUREUX: Etant donné que c'est moi qui réponds aux questions, M. Pepin...

M. PEPIN: Bien oui, c'est pour cela que je vous en pose.

M. L'HEUREUX: ... la chose que nous avons voulu démontrer, nous — il ne s'agissait pas de jouer sur les chiffres — c'était simplement que ce qui coûte aujourd'hui, en main-d'oeuvre, $I, au 31 juillet 1970 — c'est-à-dire avant de commencer la présente négociation — en coûtera $2, qu'une partie de ce dollar a été accordée

par le bill 38 qui, encore là, répondait à ce que nous avions négocié. Le fait que l'autre partie soit accordée par rattrapage après le bill 38, mais encore à l'intérieur d'une même négociation, d'après moi, est immatériel. Le fait demeure que cela coûtera le double.

M. PEPIN: L'immatérialité de la question peut être jugée par les membres de la commission. La commission décidera si c'est vraiment "irrelevant" ou si c'est pertinent la question. Il reste que je pensais important de souligner que l'augmentation en pourcentage, telle qu'alléguée — si ce n'était pas important, M. Curzi ne l'aurait sans doute pas dit — n'était pas aussi sensible que celle qui a été avancée par M. Curzi.

Je pourrais d'ailleurs reprendre chacun des trois exemples pour en arriver à des conclusions, non pas égales quant aux pourcentages, mais différentes quant aux pourcentages avancés par M. Curzi. La base même, c'est que, moi, j'additionne d'abord les $0.75 et que vous, vous ne les additionnez pas pour ce qui est des autres régions en dehors de Montréal, de l'île de Montréal même.

Je voudrais maintenant vous poser simplement une autre question. M. Curzi nous a dit: Si vous acceptez la demande des centrales syndicales, vous allez augmenter de $42 millions par année.

M. L'HEUREUX: C'est cela.

M. PEPIN: Si je comprenais bien son témoignage, M. Curzi trouvait que c'était en complète contradiction avec les affirmations écrites de l'économiste Loranger. Dans le bouquin de Loranger, on indique en effet que c'est, pour la première année, une augmentation de $12 à $16 millions.

Je voudrais vous suggérer ceci, M. L'Heureux. Lorsque M. Curzi mentionne son chiffre de $42 millions par année, n'est-il pas vrai de dire que c'est lorsque la parité sera totale?

M. L'HEUREUX: C'est exact. D'ailleurs, je pense qu'il a répété cinq ou six fois que, lorsque la parité sera intégrale et que la cédule disparaf-tra, il y aura $42 millions dans le domaine des routes, dont la grosse partie va être pour la première année, parce que la cédule disparaissant automatiquement, la moitié de l'écart est rattrapée là.

M. PEPIN: S'il est vrai de dire que nous voulons étendre les demandes d'augmentation sur la base des trois ans, est-ce qu'il ne serait pas logique, aussi, de conclure que les $42 millions peuvent être divisés par trois, au moins pour la première année? Nous arriverions autour de $14 millions, soit le chiffre estimé comme étant entre $12 millions et $16 millions par M. Loranger.

M. L'HEUREUX: Ecoutez, M. Pepin. Comme je viens de vous dire, ce que vous demandez, à toutes fins pratiques, c'est qu'il n'y ait plus de cédule des justes salaires. La différence entre la cédule et le taux payé dans le décret de chaque région représente la grosse partie du rattrapage. Ceci disparaîtrait demain. Alors, on ne peut certainement pas diviser l'écart par trois, si la grosse partie est donnée immédiatement; en plus, il y a $0.25 ou $0.30 qui sont déjà accordés. Si je comprends bien, le rattrapage se ferait au tiers, au tiers, au tiers. Alors, la grosse partie des $40 millions — disons que $40 millions est un chiffre annuel — serait en application dès la première année. Je dirais même que ce serait supérieur à 75 p. c. des $40 millions.

M. PEPIN: Ce n'est pas une nouvelle offre que vous faites?

M. L'HEUREUX: Pardon?

M. PEPIN: Ce n'est pas une nouvelle proposition que vous faites?

M. L'HEUREUX: Je ne pense pas qu'on soit ici pour négocier, mais simplement pour expliquer nos vues.

M. PEPIN: S'il est vrai de dire que j'accepterais par hypothèse de répartir sur trois ans, de combler la différence pour la première année, d'après les propres chiffres de M. Curzi, cela voudrait dire $14 millions. Est-ce exact?

M. L'HEUREUX: Bien, c'est-à-dire qu'il faudrait que nous refassions nos chiffres, mais ce serait plus proche...

M. PEPIN: Bien, il m'a dit $42 millions dans son témoignage.

M. L'HEUREUX: Oui, mais encore là... M. PEPIN: Quand la pleine parité existe...

M. L'HEUREUX: Cela ne s'applique pas linéairement. Vous avez des rattrapages qui s'appliquent la première année. Vous avez le système... Il n'y avait aucun bénéfice marginal de sécurité sociale aux routes. Immédiatement on applique $0.15. On payait 4 p. c. de régime de vacances. Immédiatement on en appliquerait 7 p. c. Alors, vous pouvez vous imaginer qu'immédiatement il y a une grosse partie des coûts qui sont là. Cela ne peut jamais être traité aussi...

M. PEPIN: Alors, cela peut varier de quelques millions.

M. L'HEUREUX: Disons que cela pourrait

se rapprocher de $20 millions, de la façon que vous le dites, oui.

M. PEPIN: Très bien. Alors, c'est plus loin un peu des $42 millions. Vous, M. L'Heureux...

M. L'HEUREUX: C'est-à-dire que vos hypothèses changent aussi. A ce moment-là, ce que M. Loranger ne mentionne pas, vous faites l'hypothèse, toujours pour obtenir ce chiffre-là que la cédule est sur trois ans et ne disparaît pas immédiatement.

M. PEPIN: C'est exact, M. L'Heureux. Comme hypothèse, c'est ce que j'ai fait.

M. L'HEUREUX: Cela ne justifie pas les chiffres de M. Loranger. Cela les justifierait si c'était inclus.

M. PEPIN: C'est inclus dedans. C'est proposé de cette façon dans le bulletin de M. Loranger, si vous l'avez lu, et je sais que vous l'avez lu. Vous, M. L'Heureux, comme employeur, dans le cas de votre association, tout votre travail ou à peu près, avez-vous déclaré mardi dernier, est du travail gouvernemental.

M. L'HEUREUX: Au chapitre des routes, oui.

M. PEPIN: Au chapitre des routes. Si le gouvernement décide de maintenir la politique salariale qu'il a essayé d'instaurer dans le cas de la fonction publique, vous, comme employeur, pouvez-vous avoir une objection au chapitre des routes?

M. L'HEUREUX: M. Pepin, je n'ai pas été élu par le peuple pour administrer les fonds publics. Comme employeurs, nous sommes au chapitre des routes, un agent du gouvernement. Nous pensons que, dans le système économique où nous vivons, il est dangereux de payer plus cher pour nos routes que nos voisins, même si nous en avons les moyens. La seule chose que nous avons voulu faire ici, c'est un rapprochement. Nous avons dit ce que ça pourrait coûter de plus, ce que ça coûte ailleurs et nous avons laissé aux élus du peuple le soin de prendre leur décision. Je pense que c'est leur responsabilité et non la mienne.

Tout ce que je peux vous dire, c'est que notre association, même si elle n'est qu'un agent, était prête à faire une grève parce qu'elle calcule que les fonds publics ne doivent pas être administrés de cette façon.

M. PEPIN: Si le gouvernement décide que les fonds publics doivent être administrés de cette façon, êtes-vous prêt à faire un "lock-out" contre le gouvernement?

M. L'HEUREUX: Non.

M. PEPIN: Très bien. Je n'ai plus de question, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Merci. M. Gagnon a une question à poser. M. L'Heureux, si vous voulez demeurer ici.

M. GAGNON: C'est justement pour enchaîner avec ce qui vient de se dire. J'espère que les constructeurs de grandes routes ne se prennent pas pour le gouvernement, parce qu'en définitive, tel que ça vient d'être dit, cette parité salariale coûterait quelque chose au gouvernement.

Alors, nous devons tirer la conclusion — et ça fait chaud au coeur de le savoir — que le but visé par les constructeurs de grandes routes dépend de leur sollicitude vis-à-vis du bien commun.

Puisque les économies locales sont intégrées dans un tout provincial, je lui demanderais ce que coûtent au gouvernement les zones de bas salaires. Comment coûtent les jambes de bois, représentées par les zones de bas salaires dans l'économie québécoise, que nous sommes obligés de tramer depuis des années? N'y a-t-il pas là compensation? N'est-il pas rétrograde de maintenir ces zones de bas salaires au nom d'une économie qui est empêtrée précisément par ces disparités locales? Toujours en vue du bien commun.

M. LE PRESIDENT: Avant de terminer votre question, M. Gagnon, auriez-vous l'obligeance de vous identifier pour le journal des Débats?

M. GAGNON: Mon nom est Henri Gagnon et je représente la Fraternité des électriciens.

M. L'HEUREUX: J'aimerais simplement mentionner que je ne me prends pas pour le gouvernement. Maintenant, je ne crois pas qu'il m'appartienne de répondre à cette question; ce serait au gouvernement. Mais, je vais tenter de le faire, au nom de notre association.

On parle de zones de bas salaires. Nous avons entendu Me Louis Morin mentionner — et ça peut être facilement vérifié — que les employés de la construction sont les mieux payés. C'était vrai en 1961 et c'est encore vrai maintenant.

Alors, lorsqu'on parle de bas salaires, c'est peut-être par rapport aux employés de la construction à Montréal, mais, vu qu'on réduit le tout à un régime d'économie locale à l'intérieur de cette zone-là, je serais très surpris que ceux qui travaillent à la construction de routes soient les moins payés.

M. LE PRESIDENT: Le député de Saguenay.

M. LESSARD: M. le Président, si je comprends bien, c'est plutôt en tant que contribua-

ble que M. L'Heureux ou l'Association des constructeurs de routes soumettent leurs revendications auprès de la commission.

Les questions sur lesquelles je voudrais avoir certaines explications sont les suivantes: Est-ce que le fait de créer la parité de salaires apporterait automatiquement, du côté des constructeurs de routes, une augmentation de la construction des routes comme telle ou du moins une augmentation proportionnelle à l'augmentation des salaires? Est-ce que la productivité, ou l'augmentation de la productivité à ce niveau ne pourrait pas compenser une partie de l'augmentation des salaires?

M. L'HEUREUX: Vous avez fait là une hypothèse et posé deux questions. Dans la première, vous dites que c'est en tant que contribuables que nous faisons nos revendications. Ce n'est pas exact. En fait, ce ne sont pas des revendications. Nous expliquons un cas en tant qu'association dont le rôle est, d'après nous, de faire connaître ce cas. Deuxièmement, vous avez demandé si cela va augmenter le coût. C'est cela?

M. LESSARD: Nécessairement du même montant de l'augmentation des salaires.

M. L'HEUREUX: Comme je l'ai dit ici le soir du 4 ou du 5 août, lors du bill 38 — je pense que vous étiez présent — nous ne croyons pas que le ministère de la Voirie ait un budget élastique. Nous croyons que ce budget est conditionné par le montant mis à sa disposition par le ministre des Finances.

Or, ce montant étant de $160 millions pour cette année, si on accepte l'hypothèse de M. Pepin que les salaires passent de $20 à $40 millions, pour employer ses chiffres, nous jugeons qu'il va se faire moins de routes pour la même somme d'argent. Le bénéfice que l'on tire d'une route sera perdu pour la proportion de route qui ne se fera pas.

Dans votre troisième question, vous avez demandé si la productivité, dans le cas des routes, ne pourrait pas compenser. J'aimerais vous souligner que si vous regardez les coûts unitaires de la construction des routes de 1955 à 1970, vous allez vous apercevoir que le coût unitaire du terrassement n'a pas augmenté. Cela veut dire que l'industrie des routes est l'une des industries qui ont justement le plus contribué à compenser une augmentation de coût par une augmentation de productivité en faisant un meilleur emploi des gens, en faisant un meilleur emploi des nouvelles machines et des nouvelles techniques et en mettant aussi à profit le système de libre compétition que l'on connaît depuis un certain temps. Je ne pense pas, à ce moment-ci, qu'on puisse de nouveau combler une augmentation qui serait du double. C'est ce que nous avons fait depuis 1955, mais il y a certainement une limite à l'augmentation de la productivité qu'une industrie peut fournir. Est-ce que cela répond à votre question?

M. LESSARD: D'accord.

M. LE PRESIDENT: Y a-t-il d'autres questions pour M. L'Heureux? Pouvez-vous vous identifier, s'il vous plaît, et poser votre question?

M. MELOCHE: Robert Meloche, représentant international des opérateurs en machinerie lourde, FTQ. M. le Président, messieurs les députés, j'aimerais, à la suite de l'énoncé du représentant des constructeurs de routes, poser quelques questions à M. L'Heureux — M. Curzi n'étant pas ici — sur les commentaires qui nous ont été faits...

M. LE PRESIDENT: Sur les commentaires de M. Curzi?

M. MELOCHE: ... à ce moment-là par MM. Curzi et L'Heureux, les deux. Ils ont prouvé une chose: que l'on représentait des salariés très mal payés dans l'industrie de la construction. C'est la seule chose dont ils m'ont convaincu. Ici, je parle de la cédule, puis je vais aussi parler de la disparité salariale. La question de la disparité salariale n'a bénéficié qu'à l'employeur. Là-dessus je voudrais citer un exemple: le pont Papineau qui a été construit dernièrement. Là, j'ai moi-même représenté des salariés qui ont commencé à travailler à Montréal, à un taux de $4.48 l'heure, au taux du décret de Montréal dans ce temps-là. Puis, six mois plus tard, ces mêmes salariés sont allés travailler à l'autre bout du pont et ils ont alors eu une diminution de $1.13 l'heure.

D'après moi la disparité n'a pu que bénéficier à l'employeur.

M. LE PRESIDENT: M. Meloche pouvez-vous expliquer devant les membres de la commission, comment il se fait qu'ils ont eu une diminution de $1.13?

M. MELOCHE: Justement, j'aimerais interroger M. L'Heureux là-dessus. Quand on donne un contrat aussi important que celui du pont Papineau, si on tient compte de choses semblables, que les employés doivent changer de salaire à mi-chemin, où il y a des compagnies qui y ont travaillé et qui ont payé le même taux sur les deux côtés de la rivière, et selon le décret de Montréal, et dans la région économique de Montréal...

M. LE PRESIDENT: M. Meloche, ma question est la suivante: Pourquoi y avait-il deux taux différents? Y avait-il deux zones distinctes?

M. MELOCHE: C'est justement la cédule sur

laquelle on s'appuyait. Je voudrais avoir les preuves à l'appui que les contrats ont été réellement négociés de cette façon-là. Des salariés, qui ont travaillé dans la même région économique, ont eu un taux d'un côté, sur l'île de Montréal, puis ils sont allés travailler sur l'autre côté et on a maintenu le même taux. Pourquoi est-ce que les représentants de l'Association des constructeurs de routes... La compagnie même en a bénéficié, vu que la cédule ne s'appliquait pas à Montréal, mais qu'elle s'appliquait à la ville de Laval. A ce moment-là, on est arrivé avec une diminution. Comment expliquer ça à des salariés aujourd'hui? J'aimerais avoir les contrats prouvant que réellement on tient compte de ça...

M. LE PRESIDENT: M. L'Heureux va vous expliquer ça, je crois bien.

M. MELOCHE: Je vous remercie.

M. L'HEUREUX: Je vous remercie de votre confiance M. Bossé.

Premièrement, M. Meloche mentionne que nos employés sont très mal payés. J'aimerais simplement faire remarquer à M. Meloche que des types aussi mal payés que les nôtres, même avec tous les moyens de communication, l'information que nous avons aujourd'hui, ont toujours refusé de se syndiquer. M. Meloche est au courant que dans la compagnie même que je représente, il a été assez difficile de syndiquer des types aussi mal payés que les nôtres.

Là-dessus il faut faire confiance aux gens. Comme on le mentionnait tout à l'heure, un type dont le salaire horaire est très mal rétribué mais qui fait, qui répartit son travail...

Disons que son employeur peut le conserver assez longtemps, lui faire faire assez d'heures, alors il devient un type bien payé.

Le deuxième point qu'il a souligné nous amène un cas très précis. L'autre jour, on a justement charrié M. Dion, de l'autre association, sur un cas précis à savoir s'il était ignoble pour quelqu'un, à Shawinigan ou ailleurs, de payer des taux différents de Montréal.

A ce moment-là l'ignominie n'était pas que l'entrepreneur qui était là soit forcé de payer plus parce que le syndicat importait des gens de Montréal. Ce qui était ignoble, c'est que les gens qui avaient offert de travailler à ce prix-là à ce moment-là ne recevaient pas le même salaire que ces types qu'on était obligé de déplacer. A tout moment, on déplace les questions.

M. Meloche mentionne que le fait, à Montréal, de payer deux taux de salaires sur un pont bénéficie à l'entrepreneur. J'en doute, parce que les cédules sont très bien connues, les conditions dans lesquelles on effectue ces travaux-là sont bien connues et tous les compétiteurs qui font des soumissions les connaissent. A ce moment, on en tient compte dans les demandes de soumissions, on en tient compte quand on prépare les soumissions et ce sont les contribuables qui en profitent.

Pour quelle raison? Prenons un cas particulier, celui d'un pont. Combien de ponts construit-on, dans le cadre d'un décret, entre l'île de Montréal et l'îleJésus? A ma connaissance, il y en a eu deux dans les dix dernières années. Si nous voulons donc centrer un débat comme celui-ci sur un cas aussi précis, d'après moi, nous perdons notre temps.

M. MELOCHE: Je ne trouve pas que ce soit une perte de temps, M. L'Heureux, mais je trouve que vous avez de la difficulté à répondre. Je dis que la disparité est une couverture pour les employeurs, pour exercer un patronage qui existe depuis 1923. J'aimerais vous dire qu'il y a même des entrepreneurs généraux qui ont travaillé sur ce pont-là et qui ont payé les mêmes salaires à tout le monde. Ils ont loué de l'équipement et, vu que ces gens allaient travailler sur ce pont-là, ils ont maintenu les taux de Montréal. Ils n'on pas dit: Quand nous arriverons de l'autre côté, nous allons baisser les taux, parce que nous sommes couverts par la route, par la cédule.

M. L'HEUREUX: Quelle est donc votre question, si tout le monde a payé les mêmes taux?

M. MELOCHE: Pour ce qui est de la route, l'excavation, eux se sont protégés grâce à la cédule. C'est ça que je veux vous dire.

M. L'HEUREUX: Vous voulez dire les approches...

M. MELOCHE: C'est là que la disparité salariale a été favorable à la route.

M. LE PRESIDENT: Pourriez-vous parler un à la fois s'il vous plaît, je préférerais ça.

M. L'HEUREUX: Oui, tout à l'heure, nous parlions d'un pont; maintenant, nous parlons des approches. Nous avons le même cas, ici, à Québec. Des approches ont été aménagées sur le côté sud et sur le côté nord. Il y a peut-être eu des différences de salaires pour des travaux faits d'un côté et de l'autre. Je pensais que nous parlions du pont lui-même, que, à un bout du pont, on payait un certain prix et que, à l'autre bout du pont, on ne payait pas. J'ai peut-être mal compris.

M. DEMERS: Je crois que c'est un peu le même cas que pour le médecin qui opère à Hull et celui qui opère à Ottawa; là, il n'y a pas eu de disparité.

M. LE PRESIDENT: Si vous permettez, avant de terminer, — demeurez disponibles —je permettrai au très honorable député de Chicoutimi de poser une question.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, — je vous laisse le très "honorable"—je voudrais poser une question à M. Meloche sur une affirmation qu'il a faite, qui me paraît sérieuse et au sujet de laquelle je voudrais qu'il nous donne des preuves. Je n'ai pas à prendre parti pour un côté ou l'autre, mais il dit que ces disparités de salaires, notamment dans le cas de la construction du pont Papineau, profitaient nécessairement aux entrepreneurs en construction. Est-ce que vous pourriez, M. Meloche, nous donner des preuves de ça, nous fournir des documents qui établissent que, très nettement, les entrepreneurs bénéficient à ce moment-là d'un traitement qui les favorise au détriment des employés, des travailleurs?

M. MELOCHE: M. Tremblay, j'aimerais vous donner des preuves, mais par contre, j'aimerais que les entrepreneurs et le gouvernement actuel me donnent des preuves à moi aussi que les soumissions sont faites comme ça, que ce ne sont pas des abus de la part des employeurs. S'il faut faire la preuve des deux côtés, je vais vous demander la preuve des données de ces contrats-là.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je pose la question à M. Meloche, quitte à la poser, par la suite, aux autres. M. Meloche, vous avez fait une affirmation devant une commission responsable et vous avez déclaré que les employeurs retiraient un bénéfice additionnel du fait de l'existence de cette disparité salariale. Or, êtes-vous capable de le prouver, oui ou non? C'est la question que vous pose un représentant du peuple afin d'être éclairé sur une situation que vous avez évoquée.

M. LEE PRESIDENT: Je pense que M. La-berge voudrait nous apporter des explications additionnelles.

M. LABERGE: Oui. Je pense, justement, que la commission pourrait s'éclairer là-dessus. Vous n'avez qu'à relever les soumissions faites au ministère de la Voirie. Moi, je n'ai jamais vu une soumission pour un pont, par exemple, demandant un certain taux à un bout du pont et un taux supérieur à l'autre bout du pont. C'est une soumission pour tout le pont.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Mais, M. le Président...

M. LABERGE: Si vous permettez, M. le Président,...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui.

M. LABERGE: ...je pense que le ministère de la Voirie pourrait certainement nous donner des renseignements là-dessus. Ce serait bon pour tous les membres de la commission de les avoir.

M. LE PRESIDENT: Je crois que le sens de la question du député de Chicoutimi était plutôt celui-ci: M. Meloche, à votre connaissance, avez-vous personnellement affirmé ou constaté que des individus aient été payés $1.13 de moins sur une rive que sur l'autre?

M. MELOCHE: Bon, là-dessus...

M. LE PRESIDENT: Vous avez, personnellement, eu connaissance de ces faits?

M. MELOCHE: M. le Président, je peux répondre. Je n'ai peut-être pas compris le sens de la...

M. LE PRESIDENT: C'était la question.

M. MELOCHE: ...question de l'honorable député de Chicoutimi. A ce moment-là, il y a eu des actions, au comité conjoint, pour $1,500,000. Parce que des salariés ont été payés moins que d'autres, on a fait des réclamations de salaires. Cela a tramé en longueur comme toute chose. Cela a tellement traîné que ce sont les salariés que je représente qui ont absorbé la perte. Ils n'ont pas été payés.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je pense que ce n'est pas une réponse à la question que j'ai posée. Je vais la préciser et je vais y revenir, en faisant intervenir un autre facteur. Notamment dans le cas du pont de Papineau — et je précise, M. Meloche, que je ne prends pas partie pour ou contre vous ou pour n'importe qui — vous avez déclaré que, du fait qu'il existait cette disparité de salaire, les entrepreneurs avaient, de cette façon, encaissé des bénéfices additionnels. Nous nous interrogerons et nous interrogerons qui de droit sur la façon dont sont faits les appels d'offres et la façon dont ceux qui présentent des soumissions tiennent compte précisément de ces facteurs de disparité lorsqu'ils présentent une soumission à la suite d'un appel d'offres. Mais ma question est très précise: Puisque votre question à l'endroit de M. L'Heureux était une accusation, est-ce que vous êtes capable de prouver, avec des documents ou par des preuves de circonstances qui aient une valeur quasi péremptoire, qu'il y a eu tel profit additionnel du fait de la disparité de salaire dans le cas de la construction du pont dont vous avez parlé?

M. MELOCHE: Disons, M. Tremblay, que je me suis basé sur les autres ponts construits précédemment, comme le pont Louis-Hippolyte-Lafontaine et le pont Champlain qui ont été faits à un certain taux et on n'a pas tenu compte des approches des deux côtés. Nous avons revendiqué des paies et nous avons essayé d'avoir des copies des contrats. A ce moment-là, nous n'avons pas pu en avoir et nous avons poursuivi l'employeur pour $1,500,000 devant le comité conjoint.

M. LE PRESIDENT: Si vous permettez...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président...

M. LE PRESIDENT: ...M. le député, je pense que la réponse à la question du député de Chicoutimi réside dans la remarque de M. Laberge.

M. MARCHAND: M. le Président, je ne crois pas que la réponse réside dans la remarque de M. Laberge parce que M. Laberge a parlé d'un bout à l'autre du pont. Actuellement, on parle d'approches et de parité de salaire entre les deux secteurs. L'affirmation qui a été faite, c'est qu'un entrepreneur profiterait de la disparité de salaire pour faire plus de profits.

UNE VOIX: C'est ça.

M. MARCHAND: C'est là que monsieur doit s'expliquer parce que c'est une affirmation qui, je pense, engage le gouvernement.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Meloche, pour revenir à la question que je vous ai posée, puisque vous avez évoqué d'autres cas, notamment celui du pont Hippolyte-Lafontaine, je vous repose la même question.

Est-ce que vous avez des documents qui vous permettent d'établir que telle a bien été la situation et que les entrepreneurs ont bénéficié d'un traitement de faveur du fait de l'existence d'une disparité salariale? Etes-vous capable de nous donner des preuves de cela pour que nous, de la commission, nous puissions ensuite interroger le gouvernement sur les méthodes qui sont utilisées lorsqu'on fait des appels d'offres et sur la façon dont les entrepreneurs traitent ces documents afin de présenter des soumissions?

M. MELOCHE: Disons que ces contrats, on a essayé d'en avoir de l'ancien gouvernement et même du gouvernement présent. Or nous n'avons jamais pu en avoir des copies sur lesquelles nous aurions pu nous baser. Nous avons dit: Ces salariés, qui ont travaillé à d'autres contrats, comme le pont Louis-Hippolyte-Lafontaine et le pont Champlain, pour quelle raison ont-ils tous eu le même salaire? C'est la disparité salariale qui amène des disputes. Je ne pense pas que ce soit bon pour l'économie, parce que Montréal a toujours maintenu les mêmes taux de salaires et cela ne l'a pas empêchée d'évoluer, loin de là. Depuis vingt ans, je pense qu'elle a très bien évolué. Mais, la disparité salariale et les couvertures de la cédule sont des choses qui ont nui réellement aux travailleurs.

J'aimerais savoir, aussi, comment on fait pour se procurer une copie de ces contrats et pourquoi, dans certains contrats, on a payé un taux et, dans d'autres contrats, on paie deux taux?

M. RUSSELL: M. le Président...

M. LE PRESIDENT: Un instant, s'il vous plaît. Avant de passer au député de Shefford, je voudrais permettre au très honorable député de Chicoutimi d'aller jusqu'au bout.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'aimerais, M. le Président, non plus poser une question à M. Meloche, mais faire une constatation qu'il pourra contredire, s'il le veut, devant la commission. Il a fait une affirmation. Je lui ai demandé de nous donner des preuves. Or, jusqu'à présent, nous n'avons pas eu telles preuves. Donc, je ne puis pas recevoir l'affirmation que vous avez faite, non plus qu'aucun membre de la commission.

Je laisse la parole à mon collègue.

M. LE PRESIDENT: Le député de Shefford.

M. RUSSELL: M. le Président, M. Meloche a fait des affirmations tout à l'heure en disant qu'il est impossible de se procurer les documents des soumissions. Si je comprends bien, ce sont des soumissions publiques. Donc, ce sont des documents publics dont il peut facilement obtenir des copies à n'importe quel moment. Je ne pense pas que le gouvernement précédent ou le présent gouvernement refuseraient à qui que ce soit une photocopie de ces documents. C'est facile à avoir et je pense même que tout député peut lui donner ces documents.

M. L'HEUREUX: D'ailleurs, M. Russell, si vous le permettez, ces documents, lors de l'appel d'offres, sont mis à votre disposition gratuitement. N'importe qui peut les consulter au gouvernement.

M. RUSSELL: Je voudrais poursuivre ma question pour arriver à demander à M. Meloche si, après avoir fait une telle affirmation, la commission pourrait obtenir de vous des lettres que vous auriez écrites ou que vous auriez obtenues attestant un refus de production de documents?

M. MELOCHE: Justement, je pourrais apporter des preuves. Je me suis peut-être mal exprimé. Je n'ai pas voulu porter d'accusation. Ce sont des affirmations que je voulais faire.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ce sont des affirmations...

M. MELOCHE: Excusez-moi. Je n'ai pas l'expérience parlementaire des députés. Je suis simplement un représentant syndical. J'ai pu commettre des erreurs, mais je peux vous apporter des preuves, attestant que nous avons

essayé d'avoir ces salaires des comités conjoints et que nous avons légalement fait des poursuites.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je...

M. RUSSELL: M. le Président, il s'agit de deux choses bien distinctes. Je pense bien qu'il s'agit de clarifier cette situation pour que la commission soit bien éclairée. Vous avez commencé par parler d'un pont, le pont Papineau. Le pont se donne par un contrat, si je comprends bien — si je fais erreur, je veux qu'on me corrige — et, ensuite, on demande des soumissions pour les approches des ponts, à chaque bout. Est-ce que les soumissions ont été demandées pour les approches des deux bouts à la fois? Est-ce qu'il y a eu un prix global donné pour les approches des deux bouts ou est-ce qu'il y a eu des prix séparés? Est-ce le même entrepreneur? Ce sont des choses assez importantes que la commission devrait savoir avant d'être capable de porter un jugement sur les affirmations que vous avez faites.

Donc, je pense qu'il serait important pour la commission, avant de poursuivre plus loin cette discussion, que vous apportiez ici les documents de refus que vous avez. Ensuite, vous pourriez démontrer à la commission que l'entrepreneur qui a fait cette construction était le même et qu'il n'y avait pas de soumissions séparées, afin qu'il puisse, lui, tenir compte du salaire qu'il était obligé de payer dans un bout parce qu'il était sur l'île de Montréal et dans l'autre bout parce que c'était en dehors du territoire qui est couvert par un décret.

Je pense bien que tous les entrepreneurs en ont tenu compte, s'ils y étaient obligés, parce que normalement — je ne veux prendre parti ni d'un côté ni de l'autre — les entrepreneurs ne paient pas plus cher qu'ils sont obligés de payer.

M. LE PRESIDENT: Le député de Saguenay.

M. LESSARD: M. le Président, je pense que le député de Shefford nous a apporté certaines explications. Ce que je voulais dire tout simplement tout à l'heure, c'est qu'il me semble que M. Meloche a affirmé un fait, à savoir que d'un côté du pont on était payé tel salaire et de l'autre côté tel autre salaire. Il n'a pas affirmé tout simplement que l'employeur profitait de cette situation...

DES VOIX: Non, non, non...

M. MELOCHE: C'est la disparité salariale...

M. LESSARD: ... mais il s'est interrogé sur la question.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'invoque le règlement.

M. LE PRESIDENT: Un instant.

M. LESSARD: II s'est interrogé, à mon sens.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): J'invoque le règlement, M. le Président. Le député de Saguenay interprète à sa façon la question qui a été posée et les observations qui ont été faites par M. Meloche. M. Meloche a catégoriquement affirmé et déclaré que, du fait qu'il existait disparité de salaires dans le cas de la construction du pont Papineau, les entrepreneurs en avaient retiré un bénéfice additionnel au détriment des travailleurs.

M. LESSARD: On vérifiera.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est cette affirmation qui m'a obligé à poser des questions à M. Meloche, auxquelles je n'ai pas eu encore de réponse.

M. MELOCHE: Bon. Si c'est exactement ainsi que j'ai posé la question, je m'en excuse ici devant tout le monde, parce que ce n'est pas réellement le but de ma question. Mais je peux vous citer d'autres faits où des opérateurs ont loué de la machinerie et où des employeurs en ont bénéficié, payant un taux d'un côté et un autre taux de l'autre côté. C'est ce que j'ai voulu exprimer. La disparité salariale jouant au détriment des salariés, je présume qu'elle a joué à l'avantage de l'employeur.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Justement, M. Meloche, ce que vous venez encore d'ajouter à la suite de vos observations est une affirmation qui va dans le sens de celle que vous aviez faite auparavant, à savoir que les entrepreneurs en avaient retiré un bénéfice additionnel. Il faudrait bien s'entendre là sur ce que vous voulez reprocher aux entrepreneurs.

M. LE PRESIDENT: M. Meloche, attendez. M. Laberge sur le même sujet. Je permettrais à M. Laberge d'abord...

M. LABERGE: Sur le même sujet, je vais essayer de passer par l'autre côté, si vous me le permettez.

M. LE PRESIDENT: L'autre côté du pont, M. Laberge?

M. LABERGE: M. L'Heureux doit être au courant de cela. Il disait tantôt, par exemple, que de 1951 à 1970, les coûts d'augmentation de la main-d'oeuvre ont été absorbés par une technique plus développée, à tel point que le prix unitaire des routes était à peu près le même. Est-ce que c'est à peu près cela? Et je reviens...

M. L'HEUREUX: Encore là, j'ai dit des terrassements. Parce que, pour les routes, il y a

des coûts de matériaux qui, naturellement, sont hors de notre contrôle.

M. LABERGE: Oui, oui.

M. L'HEUREUX: J'ai dit que le coût de la main-d'oeuvre et les autres dépenses avaient été contrôlés à un point tel que les coûts de terrassement qui se négociaient entre $0.55 et $0.65, se donnent maintenant à un prix unitaire beaucoup plus bas que cela. Et j'en ai des preuves.

M. LABERGE: Non, non, je ne mets pas cela en doute.

Voici l'autre question que je veux vous poser là-dessus. Est-ce que vous avez des coûts de revient différents des routes au mille? Est-ce que vous avez des coûts différents dans les différentes zones, ou si c'est un coût pour la province?

M. L'HEUREUX: Encore là, je comprends mal votre question.

M. LABERGE: Est-ce que cela coûte aussi cher pour construire un mille de route dans la région de Chicoutimi que dans la région de Montréal, étant donné le même genre de terrain?

M. L'HEUREUX: Vous voulez dire à conditions égales, avec le même entrepreneur?

M. LABERGE: C'est ça.

M. L'HEUREUX: En fait, à ce moment-là, la différence du coût de la main-d'oeuvre interviendrait, naturellement, si toutes les autres conditions étaient identiques.

M. LABERGE: Est-ce qu'on peut trouver cela dans les archives du ministère?

M. L'HEUREUX: Ecoutez, M. Laberge... M. LABERGE: Est-ce que cela revient...

M. L'HEUREUX: Vous venez de dire vous-même que vous voulez comparer deux pommes de même grosseur. Or, vous prenez un contrat dans la région de Baie-Comeau et un contrat dans la région de Montréal. Je me demande où vous pouvez trouver aux archives deux contrats donnés dans des endroits aussi différents, avec des conditions de terrain qui sont probablement différentes, des sources d'approvisionnement qui sont plus loin l'une que l'autre, pour pouvoir comparer des coûts de ce genre. Ce que j'ai voulu dire, c'est que, lorsqu'on construisait un bout de route à Montréal pour $0.50 à $0.60 et qu'on le construit maintenant, les coûts de terrassement au même endroit sont à peu près identiques, ou peut-être inférieurs même, aujourd'hui, à ce qu'ils étaient dans ce temps-là.

Lorsqu'on construit la même route à Baie-Comeau, si, naturellement, dans ce temps-là, elle coûtait 10 p. c. de plus, probablement la même différence existe-t-elle aujourd'hui.

M. LABERGE: Quand vous construisez un pont — encore une fois, je ne sais pas de quelle façon la soumission est faite, si c'est pour le pont entier, si c'est fait différemment pour les approches, mais nous savons une chose, et ça nous nous en rendons compte — la location de la machinerie, que ce soit pour le bout du pont qui touche à l'île de Montréal ou que ce soit pour le bout du pont qui ne touche pas à l'île de Montréal, vous payez le même taux pour la machinerie?

M. L'HEUREUX: Voulez-vous dire la machinerie que nous louons ailleurs ou notre machinerie?

M. LABERGE: La machinerie louée ailleurs. M. L'HEUREUX: A ce moment-là, si...

M. LABERGE: Comme les pelles à $40 l'heure, par exemple.

M. L'HEUREUX: A ce moment-là, si nous louons de la machinerie d'un locateur d'équipement qui voyage et paie son monde à un taux constant, c'est la loi de l'offre et de la demande. A ce moment-là, nous payons...

M. LABERGE: Je ne parle pas de la main-d'oeuvre, je parle seulement de la machinerie.

M. L'HEUREUX: Oui, mais la machinerie que vous louez à $40 de l'heure, vous la louez avec un opérateur.

M. LABERGE: Non, pas toujours.

M. L'HEUREUX: Alors, si vous ne la louez pas avec un opérateur, à ce moment-là, vous la louez d'un distributeur d'équipement qui la loue à un taux fixe. Encore là, je comprends mal à quoi vous voulez en venir?

M. LABERGE: Ce à quoi je veux en venir, c'est simple, c'est que, dans le cas du même pont, s'il y a eu de la machinerie louée à $40 l'heure, que la machinerie ait été utilisée à un bout du pont ou à l'autre, c'était toujours $40 l'heure. Vous avez les mêmes opérateurs, ils ont travaillé aux deux bouts du pont. A un bout, ils gagnent $1.13 de moins qu'à l'autre. Or, on voit que, dans le cas d'autres ponts qui ont été construits, les gars ont retiré les mêmes salaires. Je pense qu'à ce moment-là, nous sommes en

droit de nous poser des questions.

Est-ce que la soumission du pont Papineau a tenu compte qu'on avait payé $1.13 l'heure en moins aux opérateurs à ce bout-là du pont? Je pense que la question est facile et claire.

M. L'HEUREUX: Est-ce que je peux répondre, M. Laberge?

Pour commencer, je pense que vous avez mal compris M. Meloche, ou c'est nous tous qui l'avons mal compris. Il n'a pas mentionné le pont, il s'est repris par la suite, il a mentionné les contrats des approches qui ont été donnés du côté de l'île de Montréal et du côté de l'île Jésus. Il a même mentionné que, pour le pont lui-même, l'entrepreneur avait payé le même salaire sur toute la longueur du pont. Est-ce exact?

M. MELOCHE: C'est l'entrepreneur général qui a payé les mêmes taux de salaires.

M. L'HEUREUX: Bon. D'accord. A ce moment-là, votre question, j'imagine, concerne les approches de l'île Jésus et les approches de l'île de Montréal.

M. Russell, tout à l'heure, a mentionné et a même supposé qu'il y aurait eu trois contrats différents et c'est exact. Un contrat a été donné pour le pont, un contrat a été donné pour l'approche de la rue Papineau et un contrat a été donné pour l'approche du boulevard Leblanc.

M. RUSSELL: Par voie de soumissions publiques.

M. L'HEUREUX: Par voie de soumissions publiques. A ce moment-là, les approches du boulevard Leblanc étaient régies par les taux de salaires payés sur l'île Jésus. Les entrepreneurs ont dû se baser là-dessus ou devaient se baser là-dessus pour proposer le plus bas prix et obtenir le contrat. Ceux de l'île de Montréal ont naturellement été obligés de soumissionner à partir des taux en vigueur sur l'île de Montréal. Ceux qui ont fait les travaux du pont ont payé les taux qu'ils devaient payer. J'imagine que ça devait être spécifié dans les demandes de soumissions.

Ces demandes de soumissions sont faites trois semaines à l'avance et sont publiques. N'importe qui peut y assister. N'importe qui peut se rendre à l'édifice E ici et prendre gratuitement connaissance des documents de soumissions. On ne charge rien à moins qu'on veuille en obtenir des copies.

De plus, notre association met ces documents à la disposition de tout le monde. Donc, lorsque M. Meloche dit qu'on les lui a refusés à bien des endroits, je me demande où il s'est adressé.

M. MELOCHE: Nous nous sommes adressés un peu partout. Nous avions même les inspecteurs du comité conjoint qui s'occupaient de ça.

M. L'HEUREUX: Si je comprends bien, les associations syndicales sont représentées au comité conjoint?

M. MELOCHE: Ainsi que les associations patronales.

M. LE PRESIDENT: Le député de Chicoutimi.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): A qui vous êtes-vous adressés précisément? Donnez-nous la liste des personnes auxquelles vous vous êtes adressés et qui vous auraient refusé lesdits documents dont vous aviez besoin?

M. MELOCHE: C'étaient les inspecteurs; il y avait M. Italiano, du comité conjoint. Au ministère, je ne peux pas me rappeler, il y a déjà deux ans et demi de ça.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): Je ne vous demande pas de noms, je vous demande les organismes auxquels vous vous seriez adressés?

M. MELOCHE: Au comité conjoint, au...

M. DEMERS: II y a eu une correspondance échangée indiquant que vous avez essuyé un refus? Vous avez envoyé une lettre au ministère?

M. MELOCHE: Oui, mieux que ça, ils ont fait des démarches. Je vous ai dit que nous avions des poursuites pour un montant de $1,500,000 concernant les salaires et tout ça, pour toutes les compagnies qui étaient là et pour les salaires qui n'ont pas été payés. Là-dessus, nous pouvons certainement faire des relevés.

M. LE PRESIDENT: M. Laberge, dans la même ligne?

M. LABERGE: Dans la situation présente, vous avez des pouvoirs, M. le Président, comme président de la commission. Faites donc venir les documents et les soumissions du pont Papineau afin que les membres de la commission en prennent connaissance. Nous allons voir comment l'affaire était organisée.

M. LE PRESIDENT: Je pense que si la commission, lorsqu'elle sera réunie, juge à propos de le faire, elle le fera. Je ne vois pas la nécessité de le faire immédiatement.

M. LABERGE: Je vous en fais la demande expresse, M. le Président; nous devrions prendre tous ensemble connaissance de ça, afin qu'on clarifie la situation.

M. DEMERS: Est-ce que l'on pourrait, par la même occasion, avoir une copie de la correspondance que M. Meloche a envoyée?

M. LABERGE: Certainement.

M. MELOCHE: Oui, nous avons cela dans nos dossiers.

M. DEMERS: Si vous vous êtes adressé un peu partout, il doit y en avoir un joli tas!

M. MELOCHE: Certainement.

UNE VOIX: II y a des réponses d'un peu partout.

M. LE PRESIDENT: II y a une question, M. Meloche, de M. Lafontaine, avant de continuer.

M. LAFONTAINE: M. le Président, j'avais des questions à poser dans le sens de celles qu'a posées M. Laberge à M. L'Heureux. Je vous remercie, M. le Président.

M. MELOCHE: M. le Président, j'aurais une autre question à poser à M. L'Heureux concernant l'article 12. 0. 11 de la documentation de l'Association des constructeurs de routes au sujet du deuxième homme sur les grues et les pelles.

M. LE PRESIDENT: Je suis très heureux de voir que l'on change de sujet.

M. MELOCHE: Vous étiez censé donner une explication verbale au sujet des grues et des pelles expliquant pourquoi vous ne voulez pas avoir de deuxième homme sur les machines.

M. L'HEUREUX: Ecoutez, je pense que la question est: Pourquoi devrait-on en avoir deux?

M. MELOCHE: Pourquoi? Ce serait pour remplacer les salariés que vous nous retournez, à un moment donné, parce qu'ils sont trop âgés. Il faut nous préparer en conséquence pour fournir le marché du travail.

M. L'HEUREUX: Alors, pourquoi ne pas en avoir deux sur les camions et sur les tracteurs?

M. MELOCHE: C'est une bonne question. Sur les camions et sur les tracteurs, on pourrait peut-être en avoir un par quatre pièces d'équipement pour lui faire apprendre. C'est de la négociation et c'est une chose qu'on n'a pas pu faire.

M. L'HEUREUX: Pourquoi ne pas en avoir deux? Pourquoi ne pas doubler le taux de la main-d'oeuvre, en avoir un qui attend l'autre, et puis cela jase mieux à deux?

M. MELOCHE: Pas nécessairement. Je vous demande si cela a du bon sens si on met un apprenti sur un tracteur, mettons à 55 p. c. ou 60 p. c. du salaire régulier. C'est cela que vous recherchez tout le temps, du "cheap labor". Pour remplacer nos vieux, il nous en faut; il nous faut penser à cela, dans notre métier.

M. L'HEUREUX: Ecoutez, est-ce que c'est un centre d'apprentissage que l'on fait?

M. MELOCHE: Je parle des pelles.

M. L'HEUREUX: Moi, je vous demande pourquoi les pelles?

M. LE PRESIDENT: M. L'Heureux, un instant. J'ai compris que c'était une demande ou une suggestion, qu'on est à faire de la négociation. Je n'ai pas d'objection à ce que vous négociiez selon les règles que nous avons établies précédemment. Vous allez dans le couloir, vous négociez, vous revenez et vous nous faites valoir ici ce que vous avez réussi à négocier.

Je regrette la remarque qui a été faite. Nous avons compris ce que vous demandiez, M. Meloche, mais je pense qu'il faut s'arrêter là. Si vous avez d'autres questions à poser, nous vous entendrons.

M. MELOCHE: La réponse verbale que M. L'Heureux était censé faire ne me satisfait pas du tout et je vais vous dire pourquoi. Nous demandons deux hommes et nous pouvons apporter des preuves à l'appui de cette demande.

M. COURNOYER. Donnez-les donc.

M. MELOCHE: C'est surtout pour la sécurité.

M. COURNOYER: Expliquez-nous cela.

M. MELOCHE: Je vais vous l'expliquer. Depuis 1923, la cédule des justes salaires existe, et c'est une coutume établie pour plusieurs compagnies qui ont soumissionné et qui ont eu deux hommes sur ces machines-là. A un moment donné, on nous ridiculise parce que nous disons que nous voulons deux hommes. Nous avons donné des grosseurs de pièces d'équipement et, là-dessus, nous aimerions à nous justifier.

Malheureusement, nous perdons de 10 à 15 opérateurs tous les ans, car il y a beaucoup d'accidents. Dernièrement, deux samedis de suite, deux hommes sont morts à Québec. Le 17 octobre, un opérateur s'est fait tuer et, le 24 octobre, une semaine après, jour pour jour, un "rigger" s'est fait tuer. Dans ce cas, je blâme le fait qu'il n'y ait pas eu de deuxième homme, pour la sécurité.

Je vais vous citer l'exemple du premier. On nous a donné l'opérateur Pierre, Paul, Jean ou Jacques pour démentaler la flèche. En langage commun, c'est le "boom". Les types n'étant pas capables de le faire, faute d'expérience, ils n'étaient pas deuxièmes hommes. Il a fallu que l'opérateur descende en bas pour donner un coup de main. Il est arrivé que la mécanique a cédé et puis le type s'est fait écraser. Les messieurs, eux, prétendent qu'il n'y a qu'une certaine grosseur. Ils prétendent que se faire tuer par une Volkswagen ou par une Cadillac ne fait pas de différence. Ils disent: Seulement les grosses machines devraient avoir un deuxième homme. Moi, je pense que, quand on reçoit un morceau de métal sur la tête, que ce soit une petite machine ou une grosse, vous savez, on meurt quand même.

Alors, ils disent: Au-dessus d'une certaine grosseur, on devrait avoir deux hommes. Nous disons: Sur toutes les machines de trois quarts de verge ou bien de 20 tonnes en montant, et nous justifions notre position. Parce que ça prend des gars d'expérience pour démanteler les flèches. Cela, c'est un facteur de sécurité.

Lors du deuxième accident, qui est arrivé le 24, le type a eu des ennuis mécaniques avec sa pelle. Qu'est-il arrivé? Il était en train de poser une poutre alors que sa machine était en marche. S'il y avait eu un deuxième homme, il lui aurait demandé d'aller vérifier sa machine en arrière, et de voir ce qui ne marchait pas bien. Etant seul, il a fallu qu'il laisse sa machine, puis qu'il aille derrière. Pendant qu'il s'est déplacé, la charge est tombée et elle a écrasé la tête de cet homme-là. Je pense que ce sont des choses qu'on peut justifier. La Fédération de ta construction du Québec nous accuse de faire du "featherbedding". Si les gens se font tuer, je ne pense pas qu'on soit ici pour faire du "featherbedding". Mais ce sont des chances qu'on n'a pas prises. On amène ça ici, mais ça aurait pu être fait à la négociation.

Malheureusement, ce sont des questions qui sont restées sur la tablette. Je pense qu'il faut les poser. Quand on perd de douze à quinze gars par année, c'est très important.

M. LE PRESIDENT: La représentation que vous avez faite sur ce point est très bien faite. M. L'Heureux, qu'est-ce que vous avez à dire?

M. L'HEUREUX: D'abord, M. Meloche a dit que, depuis 1923, des compagnies en ont. Alors, ça veut dire que des compagnies ont jugé bon d'avoir un deuxième homme. Ceux qui travaillent pour le ministère de la Colonisation ont une pelle qui travaille seule parfois sur les fermes. Ils sont obligés d'apporter leur carburant et leurs pièces de rechange. Normalement, il y a deux hommes pour une pelle. Pas pour travailler avec la pelle, mais, simplement, pour aider, pour vérifier les piquets d'arpentage, pour faire l'approvisionnement, puis, au cas juste- ment où il y aurait un accident, pour que le type ne soit pas seul là. Ce n'est pas pour prévenir l'accident, mais simplement pour rapporter cet accident-là et pour faire en sorte que le type soit secouru.

La plupart des entrepreneurs qui font des travaux de colonisation ou autres travaux du genre où l'équipement travaille seul ont un deuxième homme. Dans la construction de routes, les pelles mécaniques, les béliers mécaniques, tous les équipements travaillent en équipe.

Il n'y a jamais ou à peu près jamais eu un deuxième homme. On a spécifié en haut de deux verges, parce que ces pelles-là sont surtout employées dans des carrières. Il y a beaucoup d'entretien à faire sur une pelle de deux verges et plus. Un deuxième homme est utilisé comme graisseur, pas pour conduire la pelle, mais simplement pour aider le conducteur de la pelle à faire l'entretien de cette pelle-là.

Maintenant, on mentionne que des conducteurs de pelle ont été tués. C'est fort possible. Je ne suis pas convaincu, cependant, que, si on avait eu un assistant qui se serait promené autour de la pelle, cela aurait prévenu les accidents. Dans notre cas, lorsqu'il y a un câble à défaire et que quelqu'un n'est pas capable de le faire seul, il y a un mécanicien de service qui va aider ce type-là; il a les outils et tout ce qu'il faut pour faire ça. On demande un deuxième homme. Moi, je dis pourquoi. On peut en mettre un deuxième, mais les tracteurs ont aussi des accidents. Il y a des types qui vont tomber d'un tracteur ou qui vont se faire renverser par un tracteur. Alors, pourquoi en avoir un deuxième? Où on en a besoin, on en a dans le moment.

C'est notre avantage d'en avoir un second si réellement c'est utile. Où il n'est pas utile d'en avoir un second, je vois mal qu'on fasse l'apprentissage là. On a des centres d'apprentissage; qu'on fasse l'apprentissage des conducteurs de pelle à cet endroit-là.

M. MELOCHE: M. le Président, vous me permettez de répondre à M. L'Heureux. A Montréal, il est reconnu que, pour une pelle de 40 tonnes et plus, on met deux hommes. La pelle de 35 tonnes, qui est une machine, disons, qui a moins de "boom", contient 190 pieds. Avec la 140 tonnes, on peut en mettre peut-être 210. A ce moment-là, pour une affaire de 20 pieds, on n'a pas de deuxième homme. Prenez une flèche qui est en haut. Le conducteur doit descendre de la machine. Il va s'en aller en bas, il va déplacer ça dans un mauvais terrain. C'est comme ça que les accidents arrivent, par manque de sécurité. La pelle de 40 tonnes, elle, en a deux, puis le type reste en haut et il fait attention aux fils, etc. Il fait l'entretien, puis il fait tout, mais, quant à la sécurité, il y a deux hommes. Il y a le même nombre de flèches. Quand vient le temps de les louer, il y a $5 de

différence entre les deux machines. C'est $35, $1 la tonne. La vie des hommes, je pense que c'est drôlement important.

M. LE PRESIDENT: Je comprends que M. Meloche soutient que, pour des fins de sécurité, on a besoin d'un deuxième homme, M. L'Heureux dit: Non, dans certains cas, ce n'est pas nécessaire. Je sais, d'autre part, que les conciliateurs sont très au courant de ce problème-là. Je me demande donc si c'est opportun d'en discuter plus longtemps. Y aurait-il lieu de procéder à d'autres questions, M. Meloche, si vous en avez, ou d'autres participants?

M. MELOCHE: J'aimerais aussi sensibiliser les conciliateurs. M. L'Heureux dit que la construction de routes, c'est six mois par année. Quant à nous, c'est du 15 avril, la troisième semaine d'avril, jusqu'au 15 décembre. Dans la coupe de pierre, ça travaille à longueur d'année.

Or, l'article 30 stipule "sans limitation des heures journalières". Je pense qu'en 1970, cela devrait être appelé à disparaftre. Nous sommes tous les salariés et nous aimerions bien savoir le matin à quelle heure nous allons commencer nos travaux et à quelle heure nous allons finir. Nous ne sommes pas dans le temps de Caih, bien que la cédule date de 1923, et je pense que là, on l'enlève. Il faudrait arriver à mettre des heures journalières, des limites d'heures pour ces gens afin qu'ils puissent savoir à quelle heure ils doivent se rendre au travail le matin et n'aient pas à attendre sur des chantiers pendant 3, 4 ou 5 heures sans être payés.

M. LE PRESIDENT: M. L'Heureux.

M. L'HEUREUX: La raison pour laquelle on demande qu'il n'y ait aucune limite d'heures journalières, c'est que durant l'été la seule façon de reprendre les heures qu'on perd à cause de la température, c'est de faire une journée plus longue le lendemain. La plupart de nos opérateurs le désirent, dans le sens que ces gens sont loin de leur famille; ils sont en pension, ils sont payés à un taux horaire et le salaire qu'ils apportent chez eux à la fin de la semaine dépend du nombre d'heures qui ont été faites dans la semaine. Lorsqu'il y a une belle journée et qu'ils n'ont pas travaillé la veille, souvent ce sont eux qui nous demandent — je pense être assez proche de mes hommes pour le savoir — d'agencer nos travaux en conséquence pour que le lendemain ils aient la chance de faire un peu des heures qu'ils n'ont pas faites la veille. Les chantiers de construction de routes, la plupart du temps, sont dans des centres éloignés. Les gens sont loin et lorsqu'ils reviennent chez eux, la saison a été relativement courte. M. Meloche mentionne qu'elle dure du 15 avril au 15 décembre. J'aimerais le voir transporter de l'équipement du 15 avril au 15 mai et j'aimerais le voir conduire des décapeuses entre le 15 novembre et le 15 décembre. Nous, nous prétendons que la saison de terrassement et de pavage est relativement courte. Dans certaines régions, elle commence même après le 1er juin et elle se termine avant le 1er novembre.

M. MELOCHE: M. L'Heureux, est-ce qu'il est vrai que dans certains cas on continue à travailler tout l'hiver sur les routes?

M. L'HEUREUX: II est vrai que lorsqu'on a des coupes de roc ou même du transport d'emprunts granulaires qu'on peut faire avec des camions, on peut s'entendre avec les ingénieurs et parce qu'il y a urgence ou des travaux qui ne pourraient pas être recouverts en été à cause d'un sol instable, certains travaux peuvent s'effectuer l'hiver. Mais je dirais que la moitié de la main-d'oeuvre est renvoyée dès le début de décembre.

M. MELOCHE: Merci. C'est tout, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Meloche. Est-ce qu'on aurait d'autres questions à poser à M. L'Heureux. Pas d'autres questions? Nous vous remercions généreusement.

M. L'HEUREUX: Je voudrais demander à M. Pepin s'il tient toujours à ce que M. Curzi vienne ou si les réponses de l'association l'ont satisfait.

M. PEPIN: M. L'Heureux a répondu à la place de M. Curzi.

M. LE PRESIDENT: M. Pepin nous fait signe que c'est bien. Il est satisfait. Nous entendrons maintenant la FTQ, par son représentant...

M. PEPIN: Un instant. A l'ouverture de la réunion, ce matin, j'avais soulevé de nouveau le problème de la sécurité d'emploi...

M. LE PRESIDENT: Voulez-vous le reposer?

M. PEPIN: ... et on avait dit que dès que le ministre serait arrivé, il pourrait fournir la réponse.

Régime de sécurité d'emploi

M. COURNOYER: Tel que promis mardi dernier à la séance de la commission parlementaire, je désire ce matin faire part des tout derniers développements quant à la date d'entrée en vigueur du régime de sécurité d'emploi dans l'industrie de la construction au Québec.

Un arrêté en conseil portant le numéro 4119 a été adopté mercredi dernier par le conseil des

ministres, annulant les effets du règlement 2047 promulgué antérieurement. Ce nouveau règlement stipule que le régime sera dorénavant établi en fonction des sous-régions administratives et qu'il entrera en vigueur le 1er janvier 1971.

D'importantes raisons d'ordre technique engendrent l'extension du délai, lequel est donc porté du 10 novembre 1970 au 1er janvier 1971.

On doit, premièrement, tenir compte du fait que tout le système d'enregistrement des travailleurs de la construction s'établit par des moyens mécanographiques; vu que l'on reconnaîtra désormais les sous-régions, contenues à l'intérieur des grandes régions administratives, la nomenclature de base passe donc de 9 à 30 régions.

Cette décision a été motivée par le fait qu'il peut, par exemple, se produire une ouverture d'emploi dans l'industrie de la construction pour un secteur géographique donné, à l'intérieur même d'une des grandes régions administratives et qu'il est tout à fait juste et équitable que ce soient les chômeurs du secteur concerné qui en soient d'abord les bénéficiaires avant ceux des autres municipalités environnantes même si celles-ci font partie de la même région administratives reconnue dans l'industrie de la construction.

Une autre raison technique du nouveau délai apporté, réside dans le fait que les règlements régissant les normes de qualification et de formation professionnelle des ouvriers de la construction au Québec, seront ainsi établis sur une base particulière.

On sait que la Loi concernant les qualifications et la formation professionnelle de la main-d'oeuvre au Québec (bill 49) décrétait l'adoption, par le conseil consultatif du Travail et de la Main-d'oeuvre, d'une réglementation à formuler dans ce domaine.

Vers la fin du mois d'août dernier, les officiers du ministère du Travail ont effectivement soumis à cet organisme une réglementation générale de qualification, réglementation que le conseil a refusée.

Il fut donc décidé que des règlements particuliers seraient élaborés pour la compétence et la formation professionnelle dans le secteur de la construction au Québec.

Et puisque la loi (bill 49) exige que des consultations à cet égard soient entreprises avec les parties intéressées, dès le 4 novembre, c'est-à-dire avant-hier, le service de consultation du ministère du Travail a commencé à voir à ce que tous les sous-comités soient mis sur pied et que le président, de même que le vice-président dans chacun des conseils consultatifs régionaux, soient convoqués.

Les 16, 17 et 18 novembre, il y aura réunion des sous-comités et des conseils consultatifs régionaux. Les 19 et 20 novembre, il y aura réunion du comité consultatif provincial et, au cours des jours suivants, soit les 21, 22 et 23 novembre, on verra à réviser, s'il y a lieu, les règlements particuliers issus de toutes ces discussions.

Si nécessaire, une réunion spéciale du conseil consultatif de la Main-d'Oeuvre se tiendra le 24 novembre afin qu'on lui présente les nouvelles modalités.

Considérant que le conseil des ministres pourra vraisemblablement être saisi de toute la question le mercredi 25 novembre et qu'il faut tenir compte des 30 jours d'avis pour la publication de cette nouvelle réglementation dans la Gazette officielle du Québec, nous avons dû reporter la date d'entrée en vigueur du régime de sécurité d'emploi dans l'industrie de la construction au Québec, du 10 novembre au 1er janvier prochain.

M. LE PRESIDENT: M. Pepin.

M. PEPIN: M. le Président, je remercie le ministre de nous avoir fait part ce matin, tel qu'il l'avait dit mardi dernier, des intentions actuelles du cabinet des ministres et du ministère du Travail.

Je pense qu'il est inutile, pour ma part, d'insister sur le fait d'une très grande déception, parce que l'arrêté en conseil avait été adopté prévoyant l'entrée en vigueur le 10 novembre, et quant à nous, nous pensions que c'était sérieux. Nos membres, ceux que nous représentons, ont été et avaient été avisés en conséquence. Premier point de déception.

Deuxièmement, lorsque l'actuel ministre du Travail a lui-même proposé au cabinet des ministres du temps, l'entrée en vigueur, c'est-à-dire la réglementation suivant le numéro de l'arrêté en conseil, 2047, je me souviens — et je pense qu'il s'en souviendra lui aussi — qu'il nous avait dit: C'est le jugement Gold; il n'y a pas un iota de changé et il n'y en aura pas à moins que les sept parties, unanimement, en fassent la demande par écrit.

Or, M. le Président et messieurs les membres de la commission, c'est extrêmement important pour moi. Le 10 juillet 1969, en présence du ministre du Travail du temps, nous signions un accord, les sept parties, prévoyant que, s'il n'y a pas entente entre elles sur la formule de sécurité d'emploi, que c'est le juge Gold qui en disposera après avoir entendu les parties. Le juge Gold a dû intervenir parce qu'il n'y a pas eu tel accord, une telle entente. Le juge Gold a rendu son jugement dans les premiers jours d'avril 1970, un peu après le délai qui lui était imparti jusqu'au 31 mars. C'est donc l'accord des parties, le 10 juillet, qui devenait... Le jugement Gold, c'était l'accord des parties. Or, maintenant, sans qu'il y ait eu consultation, avec nous en tout cas, on nous arrive et on nous dit: On publie un autre arrêté en conseil pour défaire l'accord que les sept parties ont conclu elles-mêmes. Qu'est-ce qu'on veut faire? Est-ce

qu'on veut brouiller les accords entre les parties? Jusqu'où veut-on aller dans cette question?

Pour ma part, je dois donc protester le plus énergiquement possible. Je n'ai pas vu, bien sûr, le nouveau règlement, parce qu'il vient d'être adopté, d'après les déclarations du nouveau ministre du Travail. Je pense toutefois que les membres de cette commission doivent au moins constater que, de bonne foi, nous avons conclu un accord le 10 juillet 1969. Si, de bonne foi, l'actuel ministre du Travail nous dit qu'il n'y aura rien de changé — dans le temps de son premier mandat de ministre, nous pouvions au moins nous fier là-dessus — nous ne pouvons plus maintenant nous fier absolument à rien.

A ma connaissance, l'enregistrement des employeurs prévu par le jugement n'est même pas commencé. Les machines — et cela, c'était la responsabilité du ministère, ce n'était pas la mienne — les machines nécessaires qui nous avaient été promises dans le temps de l'étude devant le juge Gold ne sont pas encore installées. Il y a quelques endroits où on commence à les installer.

Il y a, quant à moi, un grave déni de justice dans cette affaire.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Pepin.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président...

M. LE PRESIDENT: Le député de Chicoutimi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... j'ai entendu avec un grand intérêt la déclaration de M. Pepin. Je serais vivement heureux d'entendre le ministre du Travail répondre aux objections et aux griefs que vient de formuler M. Pepin.

M. COURNOYER: Je pense que M. Pepin a indiqué lui-même, vers la fin de son intervention, sur la nature des installations, que l'enregistrement, par exemple, des employeurs n'était même pas commencé...

M. PEPIN: Mais pourquoi? C'est cela qu'il serait important de savoir.

M. COURNOYER: Disons que je ne suis pas en mesure de répondre pourquoi. J'ai découvert que ce n'était pas commencé. J'ai découvert qu'il y avait des raisons techniques. Ces raisons techniques, ce n'est pas moi qui les ai inventées. Je me demande s'il y a lieu de mettre en vigueur le 10 novembre alors que nous ne sommes pas prêts à le mettre en vigueur le 10 novembre. Je n'ai pas à déterminer qui en est responsable. Je n'ai qu'à constater qu'effectivement nous ne sommes pas prêts pour le 10 novembre. Les appareils mécanographiques ne sont pas...

M. DEMERS: Vous réalisez que le gouvernement libéral n'a pas suivi vos recommandations du temps où vous étiez ministre de l'Union Nationale. J'espère que, maintenant que vous êtes là, vous allez corriger cette lacune.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le ministre, nous vous écoutons.

M. COURNOYER: Nous vous écoutons sur quoi?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Nous voulons avoir des explications et la réponse aux griefs formulés.

M. DEMERS: C'est une faiblesse de technique signalée par M. Pepin telle qu'elle est aujourd'hui.

M. COURNOYER: Je vous ai dit tantôt que je ne faisais que constater un état, point. Cet état, c'est que nous ne sommes pas prêts, au ministère du Travail, le 10 novembre, à mettre en vigueur un règlement qui change drôlement, quand même, les attitudes des parties. Si nous ne sommes pas prêts, j'en prendrai la responsabilité, au nom de mon ministère, et je dirai que nous serons prêts le 1er janvier. C'est tout ce que je peux dire.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le ministre, vous n'êtes pas prêts pour des raisons purement techniques, mécaniques.

M. COURNOYER: Oui, monsieur.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que M. Pepin a raison lorsqu'il déclare qu'on l'avait assuré que tout cela serait mis en oeuvre bien auparavant, bien avant la date qui est maintenant évoquée dans le document que vous venez de nous lire?

M. COURNOYER: Je pense que M. Pepin a raison en disant que, lorsque nous avons adopté le premier arrêté en conseil, il y avait un délai de six mois qui nous avait semblé suffisant pour pouvoir mettre en branle le règlement le 10 novembre. Je pense que vous avez raison dans ce sens, M. Pepin.

Je constate cependant que nous ne sommes pas prêts. Il s'agit de savoir si je dois mettre en vigueur un règlement alors que nous ne sommes pas prêts à en assurer l'efficacité. Je dis: Ma responsabilité comme ministre — je comprends que cela choque — ce n'est pas un déni de justice. C'est tout simplement pour éviter qu'il y ait encore dans les chantiers de construction le lendemain matin une pagaille épouvantable qui serait la cause directe, peut-être, du fait que le ministère n'a pas pu remplir, dans les temps requis, les obligations qu'il avait convenu de

remplir vis-à-vis des personnes intéressées, c'est-à-dire des sept parties contractantes.

M. LE PRESIDENT: Le député de Bourget.

M. LAURIN: M. le ministre, est-ce que c'est vrai qu'on avait promis de ne pas changer un iota au règlement concerné sans consultation avec les organismes concernés?

M. PEPIN: Sans acceptation.

M. LAURIN: Si oui, est-ce qu'il y a une raison pour laquelle les modifications ont été adoptées sans consultation préalable des organismes concernés?

M. COURNOYER: Disons que je ne suis pas au courant s'il y a eu effectivement des consultations préalables entre les officiers du ministère.

Je n'ai fait que constater un état de fait, je m'en excuse, je vais m'informer si des consultations ou des discussions quelconques ont eu lieu entre les différentes parties impliquées, particulièrement les mouvements syndicaux, et je vous donnerai une réponse dans quelques instants.

M. LE PRESIDENT: M. Pepin.

M. PEPIN: Est-ce que je pourrais préciser? Au sujet de la question du Dr Laurin, je voudrais que soit bien clair ce que je dis. L'actuel ministre du Travail, qui était ministre dans l'ancien gouvernement, nous a dit: Cet arrêté en conseil, je le propose au cabinet et je vous préviens que je n'y changerai aucun iota — ce n'est pas une question de consultation — à moins d'acceptation des sept parties ou de requête des sept parties. Je voudrais bien voir s'il y a eu une requête des sept parties ou une acceptation des sept parties pour changer le règlement 2047.

M. COURNOYER: II n'y a pas eu de requête des sept parties, M. Pepin. Je ne pense pas qu'il y en ait eu de l'une des parties non plus.

M. DEMERS: Est-ce qu'il y a eu consultation?

M. COURNOYER: II n'y a pas eu consultation non plus.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce qu'il y a changement?

M. DEMERS: II y a malheureusement eu un changement.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce qu'il y a changement du règlement en fait?

M. COURNOYER: II n'y a pas changement du règlement. Il y a des précisions. Disons, M. le Président, que je peux accepter un blâme. J'ai l'habitude d'en accepter. C'est mon privilège, maintenant que je suis ministre du Travail. Je dois vous avouer que les modifications apportées sont des modifications décidées, semble-t-il, par le ministère, mais ces décisions, particulièrement sur l'établissement des sous-régions, auraient été prises à la suite de certains voeux, sans que ce soient des requêtes, à la suite de certains voeux de personnes qui trouvaient un peu épouvantable que les grandes régions deviennent soudainement le centre et que des gens des municipalités ne soient pas employés, même si, effectivement, il y avait un certain renouveau dans la construction dans certaines municipalités, à cause de la grandeur des régions.

M. LE PRESIDENT: M. Laberge.

M. LABERGE: M. le Président, le ministre du Travail vient de nous dire que le règlement a été changé. Cela se peut que ce soient de bons changements, je n'en sais rien. Mais il y a une chose qui est sûre, c'est qu'il y a sept parties qui doivent en discuter et en décider. Alors, je demanderais au ministre du Travail de convoquer les sept parties, le plus tôt possible, pour qu'on regarde le nouveau règlement.

M. COURNOYER: Oui, sur le nouveau règlement, je n'ai aucune forme d'objection à consulter à nouveau les parties et à apporter d'autres modifications s'il y a lieu d'en apporter, à condition toujours, M. Pepin, que les conditions essentielles du règlement, s'il y en a de changées, le soient avec le concours des sept parties. Moi, je ne considère pas que les accidents que nous avons corrigés dans le premier règlement, c'est-à-dire l'établissement de sous-régions, soient des choses de type essentiel. C'est-à-dire, ce que voulait assurer le premier règlement, c'était la sécurité d'emploi des travailleurs de la construction. En mettant des sous-régions, je n'ai pas l'impression qu'on n'assure pas la sécurité d'emploi des travailleurs de la construction. Il voulait aussi leur assurer une certaine indépendance en obligeant les patrons à requérir les services des employés par le truchement, soit du Centre de la main-d'oeuvre du Québec, soit de l'une ou l'autre des deux centrales syndicales. Je pense que c'est ça l'essentiel du règlement, suite aux recommandations du juge Gold, et cela ne sera pas changé, à moins du consentement unanime des sept parties.

M. PEPIN: C'est ça qui est grave, à mon avis. C'est qu'on prend l'accord des parties et on le déchire. On ne les consulte, on ne les prévient même pas à l'avance. On les consultera après. Si on veut troubler les relations industrielles au Québec, que l'on procède de cette façon-là, ça va extrêmement bien. On fait des accords de

bonne foi, et le conseil des ministre dit: Votre accord, je m'en balance, je le déchire. C'est ça que je trouve grave. Et aussi, c'est le fait qu'on n'ait pas pris les moyens pour appliquer le règlement le 10 novembre. Je ne peux pas vous en blâmer, vous n'étiez pas là. Pourquoi les employeurs n'ont-ils pas été requis de s'enregistrer? C'était un des éléments essentiels du régime. On avait le temps, à partir du mois d'avril ou du mois de mai, la date de la parution de l'arrêté en conseil, jusqu'au mois de novembre. Nous, nous avons dit à tous les travailleurs que nous représentons: C'est le 10 novembre, on en a la garantie écrite dans un document du conseil des ministres. Qu'est-ce que vous voulez avoir de plus? Jamais, ils ne pourront nous croire lorsque nous leur dirons: Nous sommes sûrs, le cabinet a fait un arrêté en conseil. Comment peut-on se débattre avec tout ça?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le ministre, est-ce que vous pourriez nous donner une petite idée de la nature de ces changements apportés dans le règlement?

M. COURNOYER: Je vous en ai donné tantôt un aperçu dans la déclaration que j'ai faite.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Pourriez-vous expliciter davantage, parce que ça nous permettrait de comprendre l'objection qu'a soulevée M. Pepin et qui a même provoqué je ne dirais pas sa colère mais son ire.

M. DEMERS: Son indignation.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Son indignation, puisqu'il a parlé de déni de justice.

M. COURNOYER: Je pense, M. le Président, que je ne vois aucune forme d'objection à soumettre, pour votre étude, le règlement lui-même et les amendements, et à remettre copie du premier règlement aux membres de la commission parlementaire, pour qu'ils puissent comparer la nature des changements apportés au premier. Quant à l'arrêté en conseil, je n'ai aucune réticence à le soumettre aux sept parties de même qu'à la commission parlementaire, de façon qu'elles puissent évaluer la nature des changements apportés par le nouvel arrêté en conseil. Par la suite, des représentations pourront être faites et par les membres de la commission et par les sept parties, quoique j'aimerais mieux rencontrer les sept parties conformément à la suggestion faite par M. Laberge tantôt. De toute façon, les membres de la commission parlementaire sont bien avisés de demander copie des deux règlements pour pouvoir juger justement de la valeur des amendements et du contenu des nouveaux amendements.

Cela paraîtra demain de toute façon, mais je pourrais quand même aujourd'hui vous faire faire des copies. A partir de là, nous pourrons discuter d'une façon rationnelle de ce qu'il y a dedans.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le ministre, j'aurais une autre question. Je n'ai naturellement pas l'intention de vous imputer la faute de quoi que ce soit. Du reste, sentimentalement, je ne pourrais pas le faire, vous le comprenez. Mais, pourriez-vous nous dire pourquoi il n'y a pas eu telle consultation dont parlait tout à l'heure M. Pepin, et ce qui est d'ailleurs une des raisons pour lesquelles il s'est indigné de l'attitude du ministère?

M. COURNOYER: Oui, je comprends. Parlez-vous des raisons pour lesquelles il n'y a pas eu de consultation?

M.TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, d'abord.

M. COURNOYER: La raison principale et celle que je reconnais d'emblée, c'est le fait que je n'ai été nommé ministre du Travail que jeudi dernier et que l'arrêté en conseil devait être adopté avant que l'autre arrêté en conseil ne prenne effet, c'est-à-dire le 10 novembre. Or, le 10 novembre, c'est mardi prochain. Comme l'arrêté en conseil doit être publié dans la Gazette officielle pour prendre effet, il devait être adopté mercredi. N'ayant été nommé ministre du Travail que jeudi dernier, — l'arrêté en conseil, semble-t-il, était prêt lorsque j'ai été nommé — j'ai participé aux travaux de cette commission parlementaire et à d'autres travaux également. Je n'ai donc pas pu insister sur une consultation qui aurait peut-être duré le temps qu'il faut mais, effectivement, j'aurais été dans l'impossibilité de faire adopter l'arrêté en conseil avant-hier au conseil des ministres. Cela n'aurait pas pu paraître dans la Gazette officielle de demain et c'est le seul moyen de le rendre effectif.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ce sont des raisons évidemment techniques que vous évoquez là, M. le ministre,...

M. COURNOYER: II n'y en a pas d'autres.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... mais vous avez assisté à la séance du conseil des ministres qui a permis l'adoption dudit arrêté en conseil. J'imagine donc que vous avez eu quelque réticence à donner votre assentiment, votre agrément à tel arrêté en conseil.

M. COURNOYER: Vous savez fort bien que les réunions du conseil des ministres sont d'un secret qui ne doit pas être transgressé.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Absolu. Mais

j'imagine que la responsabilité que vous veniez d'assumer et qui faisait suite, après l'intervalle que nous connaissons, j'imagine que votre habitude des sciences du conseil des ministres aurait dû vous alerter lorsqu'est venu devant vous ce document fort important et qui a provoqué l'indignation de M. Pepin tout à l'heure.

M. COURNOYER: Vous savez, ce n'est probablement pas la première fois que je provoquerai l'indignation de M. Pepin. Cela va peut-être arriver que je provoque l'indignation de M. Pepin. J'ai beaucoup de respect pour lui mais il lui arrive parfois de provoquer la mienne, mon indignation. Je réagis peut-être différemment de lui.

M. DEMERS: C'est un échange de bons propos.

M. L'HEUREUX: M. le Président, mardi, lorsque la commission parlementaire s'est réunie, nous avons mentionné que l'une des choses qui nous paraissait absurde était l'emploi, de la part de la CSN, de termes comme "paix industrielle" ou "entente de bonne foi". M. Pepin est indigné parce que l'une des clauses paraphées de l'entente de juillet dernier, à cause d'accidents techniques, ne peut être mise en application. Il s'en indigne. Mais j'aimerais, ici, dans son mémoire intitulé "L'égalité", en page 40, simplement vous donner un exemple que, selon le cas, on change d'avis. Je lis dans D, page 40: Conclusion: "En conséquence — on parle de l'article de la parité de salaire — même si l'article 7. 01-B a été paraphé de bonne foi, parce qu'au moment de la signature de l'entente les parties ont commis l'erreur de croire dans la possibilité de trouver des facteurs économiques objectifs, la CSN, pour sa part, considère le contenu de cet article comme étant totalement non opérationnel et réaffirme avec vigueur que le seul critère de rationalité pouvant servir à fixer les salaires dans l'industrie de la construction au Québec est celui de l'égalité avec Montréal."

Je voulais simplement souligner ce point pour montrer que, selon différents poids, il y a différentes mesures.

M. PEPIN: Je pense que M. L'Heureux va bien comprendre qu'il parle de deux sujets différents. Il s'agit d'interpréter 7. 01-A et 7. 01-B. On l'a fait depuis le début des travaux de la commission. Quant à l'autre histoire, la formule de sécurité d'emploi, à moins que ce soit M. L'Heureux qui ait exigé du ministère du Travail de ne pas procéder rapidement, c'est peut-être cela qu'il a voulu nous indiquer en voulant protéger le ministère ce matin, tout ce que nous avons fait... Il faut s'entendre, les sept parties, sinon c'est le jugement du juge Gold qui devient la loi des parties. Il n'y a pas matière à interprétation sur ce point. J'ose croire que M. L'Heureux est assez intelligent pour voir les différences de situations et les différences de cas. Le juge Gold a prononcé son jugement et le ministre Cournoyer nous a dit: Ce sera ce jugement-là qui sera appliqué, il n'y aura pas autre chose à moins que vous, les sept parties, vouliez avoir autre chose. Personne n'a demandé autre chose et voilà qu'aujourd'hui on nous dit que cela ne marche plus.

M. L'HEUREUX: M. Pepin, je veux simplement ajouter que, comme vous dites que ce sont deux situations différentes, alors, la CSN emploie deux tactiques différentes.

M. PEPIN: Ce n'est pas une question de tactique ou de stratégie, c'est la question de respecter les accords, les membres et les personnes qui vivent dans l'industrie. Vous, cela ne vous fait rien que les gens meurent dans l'industrie, si j'ai bien compris tantôt, cela ne vous fait rien qu'il n'y ait pas de sécurité d'emploi; il n'y a rien qui vous énerve, je comprends. Nous, nous avons des intérêts, nous avons des membres là-dedans et nous voulons les protéger.

M. LE PRESIDENT: M. L'Heureux.

M. L'HEUREUX: Ecoutez, quand on fait des affirmations telles que cela ne me fait rien que les gens meurent, je vais faire appel à M. Tremblay et vous demander de fournir des preuves.

M. LE PRESIDENT: Un instant, je voudrais quand même clarifier cela. Je pense que M. Pepin se référait à la déclaration de M. Meloche à l'effet que des gens avaient eu des accidents. M. Laberge.

M. LABERGE: J'accepte de bonne grâce les remarques de M. L'Heureux. Il nous a démontré son sens de responsabilité sociale en brossant comme ça du revers de la main des situations qui permettent à douze ou quatorze opérateurs de mourir chaque année.

M. LE PRESIDENT: Le député de Bourget.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non, non, à l'ordre! Le règlement! Il y a ici M. le Président, un règlement. Je crois que même si les parties peuvent être fatiguées et avoir des intérêts divergents, il n'y a pas lieu d'imputer de motifs à qui que ce soit, et j'ai bien l'impression que les propos qu'ont tenus MM. Laberge et Pepin dépassent largement leur pensée. Il n'était pas du tout dans l'intention de M. L'Heureux d'écarter du revers de la main les problèmes très sérieux que posent la sécurité des ouvriers qui travaillent sur des machines, comme on l'a indiqué tout à l'heure Je voudrais bien qu'on

revienne, M. le Président, à l'ordre; que ça ne devienne pas une arène où on s'accuse de part et d'autre et où on s'impute des motifs.

M. LE PRESIDENT: Nous nous en tiendrons donc à faire la discussion sans accusation. Le député de Bourget.

M. LAURIN: M. le Président, si la position de la CSN, est sur un point juste et inattaquable, elle n'en demeure pas moins inattaquable même si l'on réussit à prouver que sur un autre point son attitude n'était pas juste. Il me semble que c'est mêler les choses que de prendre le problème de cette façon.

Mais je voudrais surtout revenir sur l'importance de l'argument présenté par certains, à savoir que dans les circonstances que le Québec traverse actuellement, il est très important que toute la population garde sa foi entière dans les institutions démocratiques, dans les ministères et dans l'action du gouvernement. Et si cette crédibilité a pu être affectée ici par les remarques de certaines personnes, remarques qui ont été prouvées, il me semble qu'on devrait prendre en effet tous les moyens pour corriger cette erreur, afin qu'à une première erreur ne s'ajoute pas une deuxième erreur. En ce sens, je félicite pour ma part le nouveau ministre du Travail d'avoir manifesté son intention de corriger cela par une consultation post hoc, consultation qui aurait dû avoir lieu auparavant. Je le félicite et je le remercie. J'espère que son action permettra à une partie de la population de regagner sa confiance et sa foi dans les déclarations gouvernementales.

M. LE PRESIDENT: Pas d'autres remarques? Voulez-vous vous identifier, s'il vous plaît.

M. CAREY: Oui, Robert Carey, président de la Fédération du bâtiment, CSN. Evidemment, je pense que M. Pepin a relevé certains points qui étaient drôlement importants pour nous, à savoir la sécurité d'emploi applicable le 10 novembre 1970. On peut dire aujourd'hui que techniquement il est possible que ce ne soit pas prêt, mais l'arrêté en conseil 2047 qui devait mettre l'arrêté en conseil 1975 en vigueur le 10 novembre n'a été adopté qu'il y a trois semaines ou trois semaines et demie.

Donc, il y a trois semaines, on aurait dû savoir que ce n'était pas possible techniquement et nous, en tant que représentants des travail- leurs, nous étions obligés de leur dire: Bien, voici. Il y a un arrêté en conseil qui vient d'être adopté et, dans un mois, vous allez avoir la sécurité d'emploi.

C'est ça qui est grave pour nous: nous n'avons pas été consultés. De plus, nous avons essayé de le savoir par des représentants du ministère. Nous nous sommes posé la question, parce que la machinerie n'était pas encore installée, au sujet de cette application de la sécurité d'emploi. Les représentants du ministère nous ont dit: Cela va être en application le 10. Nous disons ça à nos travailleurs et, aujourd'hui, nous sommes obligés de leur dire: Techniquement, ce n'est pas possible. Nous n'avons pas été consultés sur les changements qui vont y être apportés. Je pense que c'est grave pour nous. Vous devez comprendre l'attitude qu'on peut avoir face à cette décision qui a été prise sans consultation avec les parties,

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Carey. Je crois que nous avions dit que nous ajournerions à midi et demi. Il serait peut-être opportun que l'on entende la FTQ lors de notre prochaine réunion. On doit ajourner à mercredi le 18 novembre, à 10 h 30.

M. LABERGE: Pas la semaine prochaine?

M. LE PRESIDENT: Pas la semaine prochaine, l'autre semaine.

M. LABERGE: C'est que vous m'embarrassez en "vlimeux," en reportant ça à l'autre semaine.

M. DEMERS: Alliez-vous à Genève?

M. LABERGE: Non, je ne suis pas député, moi.

M. DEMERS: C'est la meilleure façon de ne pas y aller.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): A plus forte raison, si vous n'êtes pas député.

M. LABERGE: Comme ça, c'est dans deux semaines?

M. LE PRESIDENT: Oui.

(Fin de séance: 12 h 24)

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