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Version finale

31st Legislature, 4th Session
(March 6, 1979 au June 18, 1980)

Monday, December 17, 1979 - Vol. 21 N° 244

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude du projet de loi no 17 - Loi sur la santé et la sécurité du travail


Journal des débats

 

Projet de loi no 17

(Seize heures trente minutes)

Le Président (M. Bordeleau): A l'ordre, s'il vous plaît!

La commission parlementaire du travail et de la main-d'oeuvre reprend ses travaux. Pour rendre la correction technique plus formelle, je voudrais simplement mentionner que, lors de l'arrêt des travaux vendredi dernier, on a fait état d'une suspension qui devrait se transformer finalement en ajournement étant donné que la session n'a pas repris.

Pour la séance d'aujourd'hui, les membres de la commission seront: M. Brochu (Richmond) qui remplace M. Bellemare (Johnson); M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Lefebvre (Viau) qui remplace M. Chevrette (Joliette-Montcalm); M. Jolivet (Laviolette) qui remplace M. Gravel (Limoilou); M. Marois (Laporte! qui remplace M. Johnson (Anjou); M. Lavigne (Beauharnois); M. Forget (Saint-Laurent) qui remplace M. Mailloux (Charlevoix); M. Pagé (Portneuf), M. Perron (Duplessis).

Les intervenants seront: M. Forget (Saint-Laurent) qui est remplacé par M. Mailloux (Charlevoix); M. Gosselin (Sherbrooke), M. Laplante (Bourassa), M. Paquette (Rosemont), M. Springate (Westmount) et M. Samson (Rouyn-Noranda).

L'employeur Obligations générales (suite)

Nous en étions, je pense, à l'ajournement des travaux, à l'article 55, à ce qu'on m'a dit — c'est bien cela? — qui avait été appelé, d'ailleurs. Je rappelle donc l'article 55. M. le ministre? Non. M. le député de Portneuf, l'article 55 sera-t-il adopté?

M. Pagé: M. le Président, le ministre était à répondre à mes questions.

M. Marois: M. le Président, je pense avoir répondu. Je n'ai pas d'autre chose à ajouter à ce que j'ai dit l'autre jour.

Le Président (M. Bordeleau): L'article 55 sera-t-il adopté?

M. Pagé: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté. L'article 56?

M. Pagé: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): L'article 56 adopté. L'article 57?

M. Pagé: Quelle sera la consultation, M. le Président? Les associations de construction seront-elles consultées avant l'adoption de règlements comme ceux-là?

M. Marois: Ce n'est pas notre intention d'imposer la consultation. C'est notre intention de la favoriser au maximum, puisque aussi bien les parties patronales que syndicales seront représentées au conseil d'administration de la commission. Nous présumons bien que les parties, en conséquence, forcément, quand seront présentés des projets de règlements à la commission les concernant ou concernant certaines tranches ou blocs de leurs membres, feront en sorte, de part et d'autre, de procéder aux consultations qui s'imposent.

Le Président (M. Bordeleau): L'article 57 sera-t-il adopté?

M. Pagé: Adopté, M. le Président.

Le programme de prévention

Le Président (M. Bordeleau): Adopté. L'article 58? L'article 58 sera-t-il adopté?

M. Pagé: Quelle sera l'assistance fournie par la commission pour aider ou guider l'entreprise et son comité paritaire dans l'établissement du programme de prévention?

M. Marois: Une assistance technique, le cas échéant.

M. Pagé: Dans les cas où ce sera requis. M. Marois: C'est cela, ou demandé.

Le Président (M. Bordeleau): L'article 58 est donc adopté. L'article 59?

M. Pagé: Vous pourriez le suspendre jusqu'à ce que l'article 113 soit adopté. "Il doit notamment contenir, en outre du programme de santé visé dans l'article 113 et de tout élément prescrit par règlement..."

M. Marois: Oui. Il va devoir contenir cela en outre de ce qui sera contenu dans le programme de santé — quels que soient les ajustements, le cas échéant, s'il devait y en avoir au programme de santé — visé à l'article 113.

M. le Président, comme cela a été évoqué aussi bien par des députés de l'Opposition que par des représentations qui nous ont été faites en commission parlementaire, la dimension d'hygiène industrielle est de bien arrimer à la fois la dimension purement ou plus strictement de santé avec la dimension de l'environnement même du milieu de travail.

M. Pagé: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): L'article 59 est adopté. L'article 60?

M. Pagé: M. le Président, l'article 60 évoque assez bien les dangers d'une lourdeur administrative qui risque de rendre pratiquement inopérants ou de mettre en cause les résultats qu'on peut escompter de la réforme qui est proposée. Si on lit l'article 60, M. le Président, c'est relatif au programme de prévention qui est particulier, qui est propre à chacune des entreprises. Il dit: "Lorsque le comité de santé et de sécurité a pris connaissance du programme de prévention ou d'une mise à jour, une copie du programme ou de cette mise à jour doit être transmise, accompagnée des recommandations du comité, s'il y a lieu, à la commission selon les modalités et dans les délais prescrits par règlement."

C'est donc dire que non seulement le programme de prévention devra être effectué, devra être rédigé par les intervenants à l'intérieur de l'entreprise, c'est-à-dire l'employeur et le comité paritaire, mais que ce programme devra être soumis pour l'approbation de la commission et que même sa mise à jour, en ce qu'elle pourra venir modifier quelque élément spécifique que ce soit à l'intérieur du programme, devra être non seulement envoyée, mais ratifiée par la commission. Cela m'a l'air d'une question qui est très générale. Vous avez prévu combien de milliers de personnes de plus à la commission?

M. Marois: On évalue présentement qu'il y aurait 400 personnes au maximum pour la commission. Evidemment, je ne tiens pas compte des inspecteurs, bien sûr.

M. Mailloux: Est-ce 400 personnes de plus ou si c'est le personnel qu'on a déjà?

M. Marois: C'est une évaluation qu'on fait présentement.

M. Mailloux: Le personnel de la CAT est forcément...

M. Marois: A la nouvelle commission pour les fins d'administration de la présente loi, excluant, bien sûr, le personnel d'inspection. On est loin de milliers de personnes de plus.

Je voudrais simplement rappeler aux députés, M. le Président, qu'une lecture attentive de l'article 60 tel que reformulé n'implique pas que le programme est transmis pour approbation par la commission. Il est transmis pour information à la commission.

M. Pagé: La commission a le pouvoir d'ordonner de le modifier.

M. Marois: II est transmis pour l'information à la commission. Si la commission se rend compte que le programme ne permettra pas, à la lumière des commentaires des uns et des autres, d'en arriver à un respect sur une certaine période des normes et des règlements, c'est son devoir d'intervenir, premièrement. Deuxièmement, on a même ajouté un élément de souplesse additionnel qui apparaît aux trois dernières lignes du deuxième paragraphe. "Elle peut même accepter que les programmes d'adaptation de l'établissement aux normes prescrites par les règlements prévoient des délais d'adaptation autres que les délais de mise en application que peuvent prévoir les règlements." En d'autres termes, c'est un élément de souplesse additionnel.

Troisièmement, je voudrais dire que cette façon de procéder, mutatis mutandis, est sensiblement la même que celle qui a été adoptée en Saskatchewan depuis quatre ou cinq ans et qui fonctionne drôlement bien, puisque le programme de prévention est retransmis avec un formulaire bien simple qui est signé par les deux parties et qui permet à chacun de mettre ses commentaires dessus, ce qui évite de multiplier les recours, les procédures, les papiers, etc., en tenant compte du fait que la commission, forcément, serait régionalisée.

M. Pagé: Une entreprise qui se voit placée dans une difficulté particulière afin de pouvoir respecter un règlement applicable particulièrement à elle pourra, en vertu des dernières lignes de l'article 60, bénéficier d'un délai pour s'adapter et c'est la commission qui jugera du bien-fondé ou non d'une demande d'extension de délai.

M. Marois: Exact.

Le Président (M. Bordeleau): Cela va, l'article 60 sera adopté?

M. Pagé: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté. Article 61?

M. Pagé: Adopté, M. le Président. Accidents

Le Président (M. Bordeleau): Article 61 adopté. Article 62?

M. Marois: A l'article 62, M. le Président, je voudrais présenter un amendement pour être sûr qu'il n'y ait pas d'ambiguïté en particulier sur ur mot. Je vais transmettre le texte, je pense qu'il y a des copies pour tout le monde. C'est l'article qui est ajusté suite à des recommandations qui nous ont été faites en commission parlementaire pour que ce soit collé au texte de la Loi sur les établissements industriels et commerciaux. Je voudrais d'abord indiquer que, dans l'article tel que formulé présentement, il y a deux changements par rapport à la Loi sur les établissements industriels et commerciaux. Au point 4 dans la loi actuelle sur les établissements industriels et commerciaux, les dommages matériels de $10 000 et plus, cela n'a pas été rajusté et indexé depuis de nombreuses années; donc, on pensait qu'il y avait lieu d'ajuster cela. Egalement, au paragraphe deux, si ma mémoire est bonne, le délai de la Loi

sur les établissements industriels et commerciaux est de 17 jours; on l'a porté à dix jours ouvrables.

Cela étant dit, pour l'essentiel, les amendements qui apparaissent, c'est pour éviter toute espèce d'ambiguïté quant à l'utilisation du mot "accident". Le mot "accident", évidemment, réfère à la définition d'accident, forcément. La définition d'accident, telle qu'elle apparaît à l'article 1 sur lequel on aura à revenir, réfère à la Loi sur les accidents du travail. Le mot "accident" tel qu'on l'a reproduit dans l'article 62 modifié dans la réimpression et tel qu'il apparaissait avant, était utilisé dans la Loi sur les établissements industriels et commerciaux, dans le sens d'un événement, au sens plus large que strictement un accident qui donne lieu à une compensation. S'enchaînaient, donc sur cette définition d'accident au sens d'événement, des paragraphes impliquant ces notions de dommages matériels de $50 000 et plus. Il se peut fort bien qu'un accident, au sens de la Loi sur les accidents du travail, n'implique pas nécessairement des dommages matériels. Donc, on propose, pour éviter quelque ambiguïté que ce soit, de remplacer le mot "accident" où il apparaissait par le mot "événement".

Au dernier alinéa, "Copie du rapport de l'employeur doit être transmise au comité", il n'y avait pas de délai. On introduirait la notion "dans les plus brefs délais". Le texte se lirait comme vous l'avez devant vous, M. le Président, contenant les deux amendements que je viens d'évoquer.

Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que vous voulez le relire vous-même? Je peux le faire également. Je vais lire d'abord la motion d'amendement: "Retrancher, dans la troisième ligne du premier alinéa, les mots "d'un accident"; remplacer dans la cinquième ligne du premier alinéa le mot "accident" par le mot "événement"; dans le troisième alinéa, retrancher les mots "de l'accident" à la première ligne et remplacer le mot "accident" par le mot "événement" dans la troisième ligne. Dans le quatrième alinéa, ajouter les mots "dans les plus brefs délais" après le mot "transmise".

Alors, je relis le nouvel article 62 tel qu'il serait libellé: "L'employeur doit informer, par le moyen de communication le plus rapide, l'inspecteur-chef régional et, dans les 24 heures, faire un rapport écrit à l'inspecteur-chef régional selon la forme et avec les renseignements exigés par règlement de tout événement entrainant: 1° le décès d'un travailleur; 2° des blessures telles à un travailleur qu'il ne pourra probablement pas accomplir ses fonctions pendant dix jours ouvrables; 3° des blessures telles à plusieurs travailleurs qu'ils ne pourront pas accomplir leurs fonctions pendant un jour ouvrable; ou 4° des dommages matériels de $50 000 et plus. (16 h 45) "L'employeur informe également le comité de santé et de sécurité et le représentant à la prévention. "Les lieux doivent demeurer inchangés pour le temps de l'enquête de l'inspecteur, sauf pour empêcher une aggravation des effets de l'événement ou si l'inspecteur autorise un changement. "Copie du rapport de l'employeur doit être transmise dans les plus brefs délais au comité de santé et de sécurité, au représentant à la prévention et à l'association accréditée."

M. Marois: Je vous signale simplement qu'il y a une faute d'orthographe au paragraphe 3°: "des blessures telles à plusieurs travailleurs qu'ils", qu'ils est au pluriel.

Le Président (M. Bordeleau): Au paragraphe 3°, on ajoute un "s" à ils: "qu'ils ne pourront". Est-ce que l'amendement, d'abord, sera adopté?

Une Voix: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté. Le nouvel article, tel qu'amendé, sera adopté également?

M. Pagé: M. le Président, c'est certainement une amélioration dans le sens des représentations qui ont été faites et qui ont été formulées en commission parlementaire, entre autres, en ce qui concerne l'augmentation des dommages matériels, d'une part. D'autre part, on stipule au deuxième paragraphe "des blessures telles à un travailleur qu'il ne pourra probablement pas accomplir ses fonctions pendant dix jours" comparativement au texte original qui prévoyait une journée. C'est où?

M. Marois: C'était l'ancien article 51, mais il n'y avait pas de délai, si ma mémoire est bonne. Mais dans l'ancien article de la Loi sur les établissements industriels et commerciaux, c'était sept jours ouvrables.

M. Pagé: D'accord, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Le nouvel article 62 est donc adopté tel qu'amendé.

M. Pagé: Lorsqu'on dit: "Les lieux de l'accident doivent demeurer inchangés pour le temps de l'enquête de l'inspecteur", est-ce que ça touche les équipements? Je vais donner un exemple: supposons qu'un travailleur, dans une usine de pâtes et papiers, est à réparer un équipement ou une pièce d'équipement qui est essentielle à la marche d'une des machines à papier. Il se blesse avec cet équipement au "machine-shop". A ce moment, même si la blessure est telle que ça peut nécessiter plus de dix jours ouvrables d'arrêt, est-ce que ça implique que d'autres ne pourront continuer à travailler et à réparer la pièce en question? Quand vous dites que les lieux ne doivent pas être changés, ça couvre quoi comme intention?

M. Marois: Cela peut impliquer un certain nombre de choses notamment, mais non exclusivement ce que le député de Portneuf vient d'évo-

quer, M. le Président, mais sous réserve de ce qui est mentionné à l'avant-dernier paragraphe, soit que les lieux doivent demeurer inchangés. On comprend pourquoi; il s'agit de procéder à l'enquête normale, soit l'enquête de l'inspecteur. On a ajouté "sauf pour empêcher une aggravation des effets de l'événement" ou si l'inspecteur, en arrivant, autorise les changements requis. C'étaient les procédures normales appliquées en vertu de la Loi sur les établissements industriels et commerciaux avec des ajustements de modernisation qu'on a évoqués tout à l'heure.

M. Pagé: Dans un cas comme celui-là, l'accident n'est pas le résultat d'un problème relatif à l'état ou à la salubrité des lieux, à des objets qui traînent ou à je ne sais pas quoi. Dans le cas particulier où un travailleur est à préparer un équipement essentiel à la bonne marche d'un autre équipement qui, lui, est plus gros, l'inspecteur pourra, en arrivant, libérer la pièce et autoriser que cet équipement puisse être réparé par un autre.

M. Marois: Ce qu'il fait très souvent, d'ailleurs.

Le Président (M. Bordeleau): Cela va? L'article 62, tel qu'amendé, est adopté? Adopté. Article 63?

Le fournisseur

M. Pagé: Combien de produits sont mis sur le marché chaque année? Le ministre en a fait état dans son discours de deuxième lecture.

M. Marois: Si ma mémoire est bonne — je n'ai pas les chiffres en mémoire; je les ai cités au moment du débat de deuxième lecture — ça peut être quelque chose comme 200 produits chimiques au minimum qui peuvent entrer sur le marché à des fins d'utilisation industrielle. Evidemment, il y en a plus par année, mais qui sont intégrés sur le marché, dans le sens d'insérés dans des procédés de fabrication ou utilisés à des fins industrielles, c'est quelques centaines par année.

M. Pagé: Ces produits, avant d'être mis sur le marché, devront recevoir l'approbation de la commission?

M. Marois: Non, ce n'est pas ça. L'article 63 — il faut, d'ailleurs, le lire en relation avec d'autres articles, en relation avec l'article 64 notamment — ne dit pas textuellement ce que vient d'évoquer le député de Portneuf. Donc, on ne peut pas faire telle ou telle chose, à moins que ces produits ne soient sécuritaires, conformes aux normes prescrites par règlement. Mais il faut lire ça aussi en relation avec les articles qui suivent, notamment l'article 64. Donc, l'article 63 est l'article général. L'article 64, c'est dans le cas où ce n'est pas compris dans les listes déjà établies. C'est dans le cas de l'article 64 qu'il faut un accord préalable.

M. Pagé: Oui. "Sauf à des fins de recherche dans un laboratoire affecté exclusivement à ces fins ou sur un lieu de travail lorsque la commission le permet, nul ne peut fabriquer, fournir, vendre, louer, distribuer ou installer un contaminant ou une matière dangereuse autres que ceux compris dans la liste dressée en vertu du paragraphe 3° de l'article 223, à moins d'en avoir préalablement avisé la commission conformément au règlement." L'article 63 dit: "Nul ne peut fabriquer, fournir, vendre, louer, distribuer ou installer un produit, un procédé, un équipement, un matériel, un contaminant ou une matière dangereuse à moins que ceux-ci ne soient sécuritaires et conformes aux normes prescrites par règlement."

M. Marois: C'est ça.

M. Pagé: Je suis d'accord avec vous, ça ne veut pas dire que le produit doit être approuvé par la commission, mais ça veut quand même dire que le produit doit être conforme aux normes et au règlement?

M. Marois: C'est ça, il doit être sécuritaire, conforme.

M. Pagé: L'Association des manufacturiers canadiens vous avait formulé, entre autres, une demande bien particulière pour que l'éventail de produits ne soit pas indéfini.

M. Marois: Je voudrais signaler une chose, M. le Président. Je ne voudrais pas induire les membres de la commission en erreur, mais, pour l'essentiel, c'est exactement ce qu'on retrouve dans la loi ontarienne. C'est la seule façon, encore une fois, de pouvoir suivre sur le marché l'utilisation, l'entrée en vigueur d'un procédé de fabrication et, dans les procédés industriels, des matières dangereuses et des contaminants. Apartir du moment où on définit un certain nombre de choses, si elles sont dans les listes prévues, elles doivent être sécuritaires, ce qui est l'article 63; ou, alors, c'est quelque chose de carrément nouveau et, à ce moment, c'est l'article 64. Ce sont les articles 19 et 20 de la loi ontarienne.

M. Pagé: Dans quel délai la commission peut-elle s'adjoindre et avoir à son service tout le personnel pour contrôler la qualité, les dangers, peu importe le vocable qu'on peut utiliser à l'égard de ces produits, et aussi tous les équipements techniques et mécaniques pour être capable de contrôler lesdits produits?

M. Marois: Ce que je peux dire au député, c'est qu'il est, évidemment, hors de question de mettre en vigueur des articles comme ceux-là tant et aussi longtemps qu'on ne sera pas assuré que la mise en application, de façon opérationnelle et concrète, puisse être pleinement assumée, le cas échéant.

D'une part, j'attire l'attention sur le fait que les entreprises seront mises à contribution aussi bien

que l'état des travaux de recherche. Encore là, il ne faut pas s'imaginer qu'on invente les boutons à quatre trous. Il y a énormément de recherches qui ont été faites, notamment en Ontario qui a pris de l'avance sur nous depuis un certain nombre d'années puisque ce genre d'articles existe déjà dans la loi ontarienne. D'autre part, j'invite les membres de la commission à lire l'article 65 qui permet de commander l'expertise sur un procédé, un équipement, un matériel, etc. Pour l'instant, c'est ce que je peux dire là-dessus.

Le Président (M. Bordeleau): L'article 63 est-il adopté?

M. Pagé: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté. L'article 64.

M. Pagé: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): L'article 64 est adopté. L'article 65?

M. Pagé: L'article 65, M. le Président... On a les articles 63 et 64 qui semblent être assez rigoureux. A l'article 65, on dit: "L'inspecteur peut faire effectuer une expertise sur un produit, un procédé, un équipement, un matériel, un contaminant ou une matière dangereuse afin de déterminer les dangers pour la santé ou la sécurité... Le coût de cette expertise peut être réclamé d'un ou plusieurs fabricants, fournisseurs ou utilisateurs qui doivent le payer."

Cela veut donc dire que l'inspecteur devra ou pourra, à certains moments, juger du caractère dangereux d'un produit ou non, puisque celui-ci pourra décider une bonne journée que, face à tel produit, il n'est pas opportun de faire effectuer une expertise ou autre.

M. Marois: Non, ce n'est pas l'inspecteur qui, de façon arbitraire, pourra décider de cela. L'inspecteur le décidera si: 1. Il n'est pas dans la liste; 2. Il n'existe pas d'expertise connue sur ce genre de produit à quelque part où il est possible d'en obtenir. Déjà, vous avez une bonne quantité de ce genre de produits qui sont déjà inclus dans ce que je viens d'évoquer. Pour le reste, c'est exactement pour l'essentiel, avec les ajustements requis de la reproduction de l'article 20, paragraphes 2 et 3, de la loi ontarienne.

M. Pagé: D'accord, j'en conviens, mais cela ne veut pas dire que la loi ontarienne est nécessairement bonne à tous les égards. Ce que je dis, c'est ceci et vous venez de me le confirmer: Un produit, un contaminant quelconque, il est sur la liste ou il ne l'est pas. Il est sur la liste, il y a une norme qui s'applique avec laquelle l'inspecteur pourra évoluer. Le produit n'est pas sur la liste, ou encore, ce produit n'implique pas de connaissances ou de recherches qui ont été faites sur ce produit, n'est pas normalisé. C'est marqué à l'ar- ticle 65: "L'inspecteur peut faire effectuer une expertise". Cela veut donc dire qu'il peut ne pas en faire. Ce n'est pas marqué: L'inspecteur doit faire effectuer, mais "peut". Non seulement en principe, mais dans les faits, il pourrait arriver que, pour un produit qui n'est pas sur la liste et tout, l'inspecteur juge qu'il n'est pas opportun de faire une expertise.

M. Marois: C'est théoriquement exact. Qu'est-ce que vous voulez qu'on mette? Que l'inspecteur devra?

M. Pagé: Non, je dois, M. le Président...

M. Marois: La loi ontarienne a introduit cet élément de souplesse. Des inspecteurs, dans cette perspective, sont forcément accrochés à l'ensemble d'une politique de prévention. Ils seront appelés à connaître l'état actuel des recherches, des connaissances technologiques, des recherches scientifiques qui sont faites. Notamment, on aurait intérêt à regarder ce qui s'est fait en Ontario, aux Etats-Unis.

M. Pagé: Cela veut donc dire, M. le Président, qu'il faudra s'assurer que l'inspecteur ait les qualifications requises pour apprécier l'expertise en question, de par le libellé de l'article 65; vous lui demandez beaucoup.

M. Marois: Le député a parfaitement raison et c'est pour cela qu'il est prévu, à l'article 180, paragraphe 7, qu'un inspecteur puisse "se faire accompagner par une ou des personnes de son choix dans l'exercice de ses fonctions", l'idée étant d'ouvrir la porte à une participation d'un certain nombre d'experts qualifiés, compétents dans ce domaine.

Le Président (M. Bordeleau): L'article 65 sera-t-il adopté?

M. Pagé: Même s'il y a une porte ouverte, oui, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté. L'article 66. (17 heures)

M. Pagé: L'article 66 prévoit que la commission peut ordonner que la fabrication, la fourniture ou l'utilisation de toute activité susceptible d'émettre un contaminant en question qui est jugé dangereux par la commission puisse être prohibée ou restreinte aux conditions qu'elle détermine. Quels sont les mécanismes que la commission prévoit pour pouvoir entendre soit le fournisseur ou le fabricant du produit en question?

M. Marois: Cela va essentiellement tenir de la formulation de la réglementation de base. Pour en arriver à l'établissement de cette réglementation, je rappelle que la composition du conseil d'administration est comme une immense table de concertation qui va mettre à contribution les parties,

des représentants du monde patronal, donc, des employeurs, des producteurs et des représentants du monde syndical.

Le Président (M. Bordeleau): Cela va, est-ce que l'article 66 sera adopté?

M. Pagé: Oui, les fournisseurs en question devront s'en remettre à leur représentant sur le conseil de la commission.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: Ceci veut dire que si tel produit, tel contaminant ou une matière dangereuse était prohibée par la commission, il appartiendrait au fabricant ou au fournisseur en question de faire la preuve, s'il veut prétendre à l'effet contraire; ce sera à lui d'en faire la preuve.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Charlevoix, est-ce que je peux vous suggérer d'approcher votre truc.

M. Pagé: Ce n'est pas un truc, M. le Président, c'est un microphone.

Le Président (M. Bordeleau): Un microphone, pardon. Merci de votre collaboration. L'article 66, adopté?

M. Pagé: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté. Article 67?

M. Pagé: Le ministre s'est assuré qu'il y avait concordance avec les lois sur l'étiquetage, oui?

M. Marois: Oui.

Le Président (M. Bordeleau): Article 67, adopté?

Une Voix: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté. Article 68?

Les comités de santé et de sécurité

M. Pagé: M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: On touche la question des comités de santé et de sécurité, tout le chapitre. On a eu l'occasion d'échanger souventefois et régulièrement, en présence de chacun des intervenants à la commission parlementaire, sur le rôle que seraient appelés à jouer les comités de santé et de sécurité. Ces comités existeront dans plusieurs entreprises au Québec où il y a plus de vingt employés et où la demande en sera faite, possiblement dans des entreprises où il y a moins de vingt employés, mais où ce sera décrété par règlement. Ces comités seront paritaires, avec certains pouvoirs qui sont prévus à l'article 78 et à l'article 79 notamment. Est-ce que le ministre pourrait nous indiquer en quoi le projet réimprimé, qu'est-ce que le nouveau texte du projet de loi no 17 vient changer par rapport au texte initial? Sur la foi de ces commentaires, il y aura d'autres questions.

M. Marois: Très rapidement, parce que j'ai évoqué l'essentiel lors du débat de deuxième lecture. Premièrement, le député a mentionné le premier morceau qui est un changement important, cela ne s'appliquera pas à une entreprise sauf dans les cas d'exception où la commission juge que c'est nécessaire pour cause de gravité de situation, de détérioration de situation dans les entreprises de vingt employés et plus, mais tombant sous la coupe des secteurs prioritaires décrétés par règlement, ce qui devrait plaire au député de Portneuf puisque l'idée des priorités est accrochée à cela.

Deuxièmement, les pouvoirs du comité de santé et de sécurité ont été revus, ce qui devrait, je présume, répondre en partie aux demandes du député de Portneuf notamment, mais non exclusivement parce que c'est venu de d'autres aussi. Ses pouvoirs sont accrus parce qu'il verra à approuver le programme de santé, ce qui n'était pas le cas antérieurement; deuxièmement, le programme de prévention lui sera soumis pour examen, non pour fins décisionnelles comme je l'ai évoqué, mais pour lui permettre quand même de faire valoir son point de vue, participer à l'évaluation, l'examen des postes de travail, les caractéristiques de ces postes pour s'assurer qu'ils ne présentent pas de danger ou qu'on puisse identifier les dangers.

Le troisième et dernier morceau substantiel de l'ajustement, c'est un élément de souplesse, c'est venu d'une demande d'un bon nombre de parties, de faire en sorte et là, il faut recouper l'ancien article 280 qui maintenant revient sous le numéro, je ne me souviens plus.

Dans le cas de comités qui existent, dans des entreprises où il y a des comités qui existent, qui fonctionnent bien, dont les gens seraient satisfaits, il est prévu une procédure beaucoup plus simple, si les parties consentent à continuer à procéder comme elles fonctionnaient antérieurement. On penserait aux représentations qu'on a eues de l'Alcan. Je ne me rappelle plus, on a évoqué 32 comités qui fonctionnent bien, qui sont contents; si les parties sont d'accord, elles peuvent faire une demande conformément aux articles 82, 83, quelque part par là. Elles pourront continuer à procéder comme c'était le cas antérieurement. Si leur comité ne bénéficie pas des pouvoirs prévus dans la loi automatiquement, elles se trouvent à bénéficier de ces pouvoirs.

Dans les cas où il y a une unité d'accréditation à l'intérieur d'une entreprise, qu'il y a plusieurs unités d'accréditation à l'intérieur d'un même

établissement ou d'une même entreprise, il sera possible d'avoir plusieurs comités paritaires, si c'est ce que les parties désirent. Donc, c'est selon leur volonté, selon leur choix, et quand il y a plusieurs associations de différentes allégeances syndicales, sur la base d'une entente entre elles, à la condition que, dans ces cas — et c'est sur la base des règlements qui seront établis par la commission — il y ait au moins un comité de chapeautage pour s'assurer qu'il y a un certain nombre de choses qui sont choisies par un seul comité. Quand il y en a 32, il ne peut pas y en avoir 32 qui interviennent pour choisir le médecin; il ne peut pas y en avoir 32 qui interviennent pour approuver le programme de santé, par exemple. Donc, les parties s'entendent entre elles pour en arriver à définir leur façon de procéder, à défaut de quoi, si les parties ne pouvaient pas s'entendre, la commission pourra intervenir le cas échéant. Mais, pour l'essentiel, je pense que ce sont là les morceaux: accroissement de pouvoirs, déplacement vers le haut quant à la base de l'établissement des comités, introduction des secteurs prioritaires et la possibilité d'avoir plusieurs comités dans l'entreprise avec un comité de chapeautage.

M. Pagé: Dans l'esprit du ministre, une entreprise qui a plus ou moins vingt travailleurs, mais qui embauche des employés peut-être d'une façon régulière selon les périodes de l'année, selon les activités de l'entreprise, est-ce qu'à ce moment-là ils sont considérés comme des travailleurs à plein temps? Vingt travailleurs, c'est basé sur quoi?

M. Marois: La notion, c'est le niveau atteint de vingt travailleurs sur une base annuelle. La loi ne fait pas de distinction entre occasionnel et permanent, ainsi de suite. C'est le niveau moyen de base de vingt et plus pour la période de l'année.

M. Pagé: Une entreprise pourrait avoir...

M. Marois: Si on introduisait des notions comme celle-là, vous seriez les premiers à me dire...

M. Pagé: Hum, hum!

M. Marois: ... qu'on commence à compliquer la vie du monde, cela n'a pas d'allure, les formules, les formulaires et vous auriez bien raison.

M. Pagé: Comme c'est souvent le cas.

M. Marois: Des fois, vous avez raison; des fois, vous n'avez pas raison. De toute façon, au nombre d'éléments intéressants au niveau des ajustements que semblent constater depuis le début de nos travaux, M. le Président, les porte-parole de TOpposition, ce sera intéressant de voir le...

M. Pagé: M. le Président, on est seulement à 68 sur 338.

M. Marois: ... débat de troisième lecture. Il y a des fois des choses qu'on découvre en discussion de commission parlementaire qui peuvent amener des rajustements. Quand on arrivera aux discussions de troisième lecture, on va voir si les positions des partis évoluent, si l'Union Nationale a obtenu ses garanties, si le Parti libéral a obtenu suffisamment de souplesse.

M. Mailloux: L'honorable ministre a écouté M. Normand Girard hier.

M. Marois: J'avoue honnêtement que... Non, je n'ose pas dire ce que j'ai fait.

M. Mailloux: M. le Président...

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: ... est-ce que le...

M. Marois: De toute façon, ce n'est pas de vos affaires, ce que j'ai fait hier.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: Quand on dit que dans toute entreprise où il y a vingt employés et plus, un comité de santé peut être mis en place...

M. Marois: A condition de tomber dans les secteurs prioritaires.

M. Mailloux:... qu'est-ce qui arrive dans le cas d'entreprises de vingt employés et plus qui ne sont pas des permanents, qui sont en partie des occasionnels?

M. Marois: La réponse est la même que si la base avait été de dix, on ne peut pas commencer à introduire des notions comme celle-là, des distinctions comme celle-là. La base est de vingt. Comme vous savez, la définition de travailleur ne fait pas de distinction entre un occasionnel, un temporaire, ainsi de suite, mais c'est l'idée d'une base, au moment où l'entreprise atteint une base de vingt qui commence à présenter un caractère d'opération sur cette base, sur une période d'un an, par exemple.

M. Mailloux: Et même que les activités seraient non pas annuelles, mais saisonnières, est-ce que cela changerait quelque chose?

M. Marois: Cela ne change rien; si c'est saisonnier, le comité sera saisonnier si, par définition, les activités de l'entreprise sont saisonnières.

Le Président (M. Bordeleau): Alors, cela va pour l'article 68?

M. Mailloux: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté. M. le député de Duplessis.

M. Perron: Merci, M. le Président. En ce qui a trait au comité de santé et de sécurité qui serait formé, par exemple, j'aimerais que le ministre explique aux membres de la commission qu'on devrait former un comité de santé et sécurité dans un établissement où il y a plus de vingt travailleurs, disons une cinquantaine, mais où il y a trois ou quatre accréditations syndicales. Vous avez, disons, dans un hôpital, la cuisine, la buanderie, les employés qui font le ménage, qui peuvent avoir différentes accréditations.

M. Marois: Je pense que le député trouvera la réponse à sa question à l'article 82. L'approche de base qui introduit le mécanisme de souplesse prévu tient compte de deux facteurs. Il y a des cas très concrets d'entreprises qui ont été évoqués devant nous; vous avez une entreprise où, pour l'essentiel, il y a un syndicat de base majeur. A ce moment-là, il y a différentes formules. Je me souviens du témoignage de l'Alcan, je me souviens du témoignage de la CIP, si ma mémoire est bonne, ou du cas qui a été évoqué de la CIP: dans un cas il y en avait un syndicat et dans l'autre cas, il y en a deux. Dans un cas où il y a un syndicat, vous avez 32 comités. Dans un cas où il y a deux syndicats, il y a un seul comité.

En d'autres termes, l'approche de base c'est qu'il n'y ait qu'une unité ou qu'il y en ait plusieurs... S'il y a plusieurs associations accréditées, d'abord, cela suppose que les parties syndicales elles-mêmes, entre elles, cherchent à s'entendre quant au comité chapeau, ce qui n'exclut pas qu'il puisse y en avoir plusieurs. Si les unités syndicales s'entendent entre elles, d'une part, elles en viennent à une entente avec l'employeur. Si elles ne peuvent pas y arriver — c'est l'ancien article 280 retransformé — s'il y a une situation qui est telle, qui fait l'affaire de tout le monde — on évoquait le cas de l'Alcan, par exemple; analogiquement, cela peut valoir pour le secteur hospitalier — les parties syndicales en arrivent à une entente entre elles, c'est la première étape, et elles en arrivent à une entente avec l'employeur. Ce sera accepté et sanctionné comme tel: Allez-y, marchez sur cette base, à condition qu'il y ait un comité chapeau puisqu'il ne pourra pas y en avoir 32, par exemple, pour le choix du médecin. Tout le monde comprend cela. C'est donc l'idée de souplesse qui est introduite dans la loi.

Si les parties n'en arrivent pas à une entente, par exemple, parce que les parties syndicales n'arrivent pas à s'entendre entre elles, ou parce qu'il n'y a pas d'entente entre les parties syndicales et l'employeur, la commission tranchera sur la base du pouvoir réglementaire qui lui est donné dans ce sens.

Je pense qu'il est extrêmement important que...

M. Perron: C'est prévu à l'article 72.

M. Marois: L'article 72 fait plus précisément référence au choix du représentant à la prévention. Je m'excuse. C'est cela, l'article 72, c'est la règle générale. L'article 72, il faut le lire avec l'article 82.

Nous pensons, évidemment, qu'il est possible d'en arriver à une entente entre les parties syndicales et entre les parties syndicales et l'employeur, dans lequel cas la commission tranchera.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Duplessis.

M. Perron: Merci.

Le Président (M. Bordeleau): Alors, l'article 68 est adopté?

Une Voix: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté. Article 69.

M. Marois: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté?

M. Marois: Oui.

Le Président (M. Bordeleau): Article 69, adopté. Article 70. (17 h 15)

M. Pagé: A l'article 70, M. le Président...

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: ... il est possible et même probable que la commission édicte que certaines entreprises de moins de vingt employés doivent avoir des comités paritaires, parce qu'à l'article 71 on confère à la commission le pouvoir de déterminer le nombre de membres qui doivent siéger au comité paritaire, alors pourquoi ne pas laisser le soin aux parties d'établir ce nombre plutôt que d'obliger la commission, subséquemment, à adopter des règlements très particuliers pour certains secteurs et une foule de règlements sur le nombre qui, somme toute, peuvent entraîner de la confusion pour ceux qui auront à vivre avec cela?

M. Marois: Encore une fois, il s'agit essentiellement d'une norme minimale de base. Evidemment, forcément, il faut tenir compte des secteurs, il faut tenir compte des tailles d'entreprises, cela doit varier. Donc, on ne peut pas tout mettre cela en détail dans une loi, ce n'est pas possible. Il y a des...

M. Pagé: Ce n'est pas ce que je vous demande.

M. Marois: Non, non, je comprends très bien, j'en profite en même temps pour le mentionner.

Partant de là, rien n'empêche les parties de convenir de plus d'un ajustement, le cas échéant, qui serait convenable. C'est l'idée de base, de partir d'une espèce de norme minimale selon le nombre d'employés dans un établissement, selon la taille de l'entreprise, selon les secteurs, ainsi de suite. On verra analogiquement la même chose, par exemple, dans le cas des représentants à la prévention et quant à la banque de temps de libération. C'est évident que le problème ne se pose pas dans les mêmes termes à General Motors, à Sainte-Thérèse, que dans une entreprise où il y a 25, 30 travailleurs.

Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que l'article 70 est adopté? Adopté.

M. Marois: II est peut-être important de signaler une chose. C'est important de prévoir une norme minimale parce qu'il faut penser que, dans certains cas, vous avez des syndicats qui peuvent négocier, s'asseoir et négocier du plus; vous avez, par ailleurs, de petites unités syndicales qui ont plus ou moins de force de négociation, où la force de négociation est plus faible et vous avez surtout le gros bloc des travailleurs qui ne sont pas syndiqués. Si on n'établit pas une norme minimale de base, cela pourrait causer des problèmes.

Le Président (M. Bordeleau): Alors, l'article 70 est adopté. Article 71.

M. Pagé: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté. Article 72.

M. Marois: C'est un des morceaux qu'on invoquait tantôt, M. le Président, dans la discussion.

M. Pagé: Oui.

M. Perron: M. le Président...

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Duplessis.

M. Perron: ... lorsqu'on parle, au troisième alinéa, les derniers mots "selon les modalités déterminées par règlement", si je comprends bien, c'est la commission qui met en application les règlements.

M. Marois: Les...

M. Perron: Qui doit voir à ce que les règlements soient appliqués.

M. Marois: Qui doit voir à ce que les règlements soient appliqués, c'est vrai en bonne partie, plus les mécanismes qui font que les représentants à la prévention, les inspecteurs qui peuvent être appelés, sur demande, par l'une ou l'autre des parties; en d'autres termes, la commission n'a pas le monopole. Elle doit voir à ce que les règlements soient appliqués, mais elle n'a pas le monopole parce que vous avez d'autres instruments, d'autres moyens, d'autres recours permettant de s'assurer que les règlements soient respectés et appliqués.

M. Perron: Donc, la commission — si je reviens à l'article 68 — elle-même devra faire l'application du règlement s'il y a mésentente entre les parties où il y a plusieurs accréditations. Ces règlements vont être très précis dans de tels cas.

M. Marois: Oui, c'est exact. M. Perron: Merci.

Le Président (M. Bordeleau): Cela va? Article 72, adopté?

M. Pagé: M. le Président, est-ce que le ministre...

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: L'interrogation que je soulève n'aurait peut-être pas lieu d'être soulevée, mais le ministre pourra répondre. La définition de travailleur, on ne l'a pas à l'article 1. Oui?

M. Marois: Si ma mémoire est bonne, oui.

M. Pagé: Bon, "une personne qui exécute, en vertu d'un contrat de louage de services personnels ou d'un contrat d'apprentissage, même sans rémunération, un travail pour un employeur, y compris un étudiant dans les cas déterminés par règlement, à l'exception: 1. d'une personne qui est employée à titre de gérant, administrateur..." N'y aurait-il pas lieu de s'assurer que le travailleur qui pourra agir sur le comité paritaire soit un travailleur permanent de l'entreprise, qui aura terminé sa période de probation au sein de l'entreprise? Parce que selon la définition de l'article 1, cela voudrait dire que, dans certaines entreprises, même un travailleur qui travaille pour la période de l'été, ayant le statut d'étudiant, pourrait être membre du comité paritaire.

M. Marois: Peut-être que c'est une formule qui pourrait théoriquement être envisagée mais pensez que ce serait extrêmement difficile d'appliquer une chose comme celle-là. Vous auriez une variation incroyable puisque la simple notion — et c'est dans les cas où il y a une convention collective — de permanence, d'acquisition de permanence, c'est-à-dire la fin d'une période de probation, varie, comme vous le savez, d'une convention à l'autre. Alors, quoi?

En plus, vous avez les contrats. Il faut, encore une fois, ne pas perdre de vue non plus tout le bloc des travailleurs qui ne sont pas syndiqués. Là, les notions de permanence, dans certains cas...

M. Pagé: C'est assez fragile.

M. Marois: ... sont terriblement aléatoires. M. Lalande: M. le Président...

Le Président (M. Bordeleau): Un instant, s'il vous plaît. Je voudrais juste permettre au ministre de répondre. Cela va?

M. Pagé: D'accord. De toute façon, on verra.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Maisonneuve.

M. Lalande: En complément du député de Portneuf, je me demande s'il n'y aurait pas lieu de fixer de droit ou de fait une période qui équivaudrait à une permanence. Au lieu de prendre le concept général de ce qu'est un permanent, il faudrait peut-être essayer de le fixer.

M. Marois: Alors là...

M. Lalande: Je veux dire avec un minimum. Qu'est-ce qu'on veut éviter au fond? Est-ce que c'est l'occasionnel qui s'ingère là? Comprenez-vous le sens de ma question?

M. Marois: Je comprends très bien le sens de votre question. Je soumettrais modestement, M. le député, que vous examiniez cette question à votre prochaine réunion de caucus. Si je retenais un amendement comme celui-là, vous seriez le premier — peut-être pas vous — à me reprocher l'ingérence de l'Etat, de la bureaucratie, la lourdeur administrative, une supermachine qui intervient pour enrégimenter tout le monde, qui ne respecte pas les libertés individuelles, les comportements démocratiques, les ententes de base normales entre les parties, et j'en passe. Alors, ma réponse, c'est non, je ne suis pas prêt à retenir cela.

Le Président (M. Bordeleau): Alors, l'article 72 est adopté?

M. Marois: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté. Article 73. Adopté?

Des Voix: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté. Article 74, adopté?

M. Pagé: Le ministre devra convenir qu'une fois par trois mois c'est le strict minimum.

M. Marois: Encore une fois, le projet de loi n'a pas la prétention d'être la convention collective la plus parfaite et la plus absolue qu'il soit possible d'établir. Le projet de loi...

M. Pagé: Vous reprenez là le langage de votre...

M. Marois: ... est un plancher de base.

M. Pagé: Vous reprenez là le langage de votre collègue du Travail lors de l'étude de la loi sur les conditions minimales de travail.

M. Marois: Je ne sais pas si je reprends son langage ou pas, je vous le dis comme je le pense. D'aucuns auront beau prétendre que c'est le PDG actuel de la Commission des accidents du travail qui a fait tout le projet de loi, comme je l'ai vu dans le journal récemment, très très très récemment, ce n'est pas exact du tout. Je m'en suis occupé personnellement de ce projet de loi.

M. Pagé: Je ne pense pas que dans l'article... M. Marois: Enfin, j'ouvrais une parenthèse.

M. Pagé: Là, vous la fermez tout de suite. Je ne pense pas que dans l'article il ait été dit, par les personnes qui ont fait l'article...

M. Marois: Quand les choses sont fausses, je dis que les choses sont fausses. Je ne dis pas que le journaliste a mal fait son travail; il a rapporté, d'après ce que j'en sais, fidèlement ce que d'aucuns ont dit.

Le Président (M. Bordeleau): Alors, l'article 74, adopté?

M. Pagé: Vous donnez l'impression d'un homme qui a des comptes à régler.

Une Voix: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): Article 75.

M. Mailloux: ... ce que Normand Girard disait hier, c'est pour cela qu'il voulait davantage avoir l'unanimité lors de la deuxième lecture.

Le Président (M. Bordeleau): Alors, l'article 75 est adopté?

M. Pagé: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Article 76, adopté?

M. Pagé: La convocation des réunions, je conviens qu'ils doivent se réunir au moins une fois par trois mois. Je conviens qu'il y aura différents mécanismes de prévus, c'est dans le règlement; sur appel de qui, dans quels délais la réunion pourra-t-elle se tenir?

M. Marois: D'abord, les parties en conviendront elles-mêmes. On va les laisser déterminer leur façon de se convoquer, de se présider, et le reste. S'il arrive en cours de route qu'il faille émettre une directive dans le genre minimal, on le fera, ce n'est pas exclu. Laissons-les d'abord fonctionner.

M. Pagé: Est-ce à dire que...

M. Marois: L'attitude de l'Opposition officielle m'étonne beaucoup, M. le Président. Elle semble vouloir aller vers quelque chose d'universel, de global, et que le gouvernement dicte tout. Ce n'est pas notre intention, ni notre approche.

M. Pagé: M. le Président, c'est l'attitude du ministre qui a changé depuis vendredi.

M. Marois: Oh non! Je n'ai certainement pas changé le texte de loi depuis vendredi.

M. Pagé: Je n'en doute pas. Mais son attitude était plus sereine. Elle avait une pointe d'agressivité de moins, certain. Je ne sais pas. Peut-être que le ministre...

M. Marois: Non, M. le Président, je n'ai pas ajouté une pointe d'agressivité. J'ai ajouté une pointe d'humour.

M. Pagé: Peut-être qu'il est à se motiver pour son discours en troisième lecture.

Le Président (M. Bordeleau): Article 76, adopté?

M. Marois: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté. Article 77.

Des Voix: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté. Article 78.

M. Pagé: Attendez un peu.

Le Président (M. Bordeleau): D'accord, M. le député de Portneuf.

M. Pagé: M. le Président, l'article 78 prévoit les pouvoirs du comité de santé et de sécurité. Si on les lit bien, il y a quatre pouvoirs qui sont assez importants qui ont été numérotés un, deux, trois, quatre, soit celui de choisir, conformément à l'article 118, le médecin responsable des services de santé dans l'établissement, approuver le programme de santé élaboré par le médecin responsable en vertu de l'article 112, établir, au sein du programme de prévention des programmes de formation et d'information en matière de santé et de sécurité au travail et choisir les moyens et équipements de protection individuels qui, tout en étant conformes aux règlements, sont les mieux adaptés aux besoins des travailleurs de l'établissement.

Pour le reste, M. le Président, c'est, pour beaucoup, la possibilité pour le comité de participer à des travaux, à l'identification de certains problèmes, à des évaluations, de recevoir des avis, de faire parvenir des avis, etc.

Un, deux, trois, quatre, c'est l'aspect le plus contentieux à l'intérieur du comité entre les représentants de l'employeur et les représentants des employés. Le ministre a prévu, par l'article 79, en cas de désaccord au sein du comité de santé et de sécurité quant aux décisions que celui-ci doit prendre conformément au paragraphe 1° à 4° de l'article 78, que les représentants des travailleurs adressent par écrit leurs recommandations aux représentants des employeurs qui sont tenus d'y répondre par écrit et, si le litige persiste, il peut être soumis par l'une ou l'autre des parties à la commission, dont la décision est exécutoire.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Portneuf, est-ce que je peux adopter l'article 78?

M. Pagé: Non, on va adopter les deux en même temps, M. le Président, tantôt.

Le Président (M. Bordeleau): D'accord.

M. Pagé: Est-ce que les parties pourront se faire entendre? Ces quatre paragraphes ont été l'objet de plusieurs commentaires, de beaucoup de réserves exprimées par les parties. Le ministre peut soutenir que des pouvoirs sont donnés aux comités paritaires, j'en conviens. C'est vrai, mais le ministre devrait aussi ajouter que c'est la commission qui va décider ultimement. Adéfaut d'entente entre les parties, c'est la commission qui va agir d'office et qui, elle, va statuer. Quels sont les mécanismes prévus pour que les gens puissent faire valoir leurs points de vue autrement que par écrit?

M. Marois: La réponse à la question du député apparaît au paragraphe 37 de l'article 223 qui permet à la commission d'établir, forcément en discutant — la partie patronale, la partie syndicale et le gouvernement — les règles de preuve, de procédure et de pratique applicables à l'examen, à l'audition et à la décision des affaires sur lesquelles un inspecteur, un inspecteur chef régional ou la commission ont compétence ou sur lesquelles des personnes, le comité administratif ou les bureaux de révision ont compétence en vertu de l'article 172. Donc, en d'autres termes, les règles applicables à l'examen, à l'audition et la décision des affaires sur lesquelles l'une ou l'autre de ces personnes doit intervenir. Donc, la réponse à la question posée par le député est oui. Les parties pourront se faire entendre et il y aura des règles d'audition, de preuve et le reste, ce qui est déterminé.

M. Pagé: D'accord, mais si les parties ne s'entendent pas sur le choix du médecin...

M. Marois: Oui.

M. Pagé: Ce qui est peut-être non seulement possible, mais probable dans certains cas.

(17 h 30)

M. Marois: Cela pourrait arriver.

M. Pagé: On sait que l'aspect professionnel de la médecine dans ce dossier a fait l'objet encore une fois de beaucoup de représentations. La commission, à partir de quel critère, à partir de quelle étude, sur quoi se guidera-t-el!e pour choisir le médecin à l'intérieur d'une entreprise quelconque, dans une région de la province qui est industrialisée, où le comité de santé s'est réuni, où l'entreprise, par exemple, propose Jos Bleau comme médecin et le représentant des travailleurs, au sein du comité paritaire, propose Pierre X? Quels sont les critères sur lesquels va se guider la commission pour choisir le médecin? Est-il possible que, dans un cas de désaccord sur le choix du médecin et dans un cas où deux médecins, ou même un médecin, ont été recommandés par une partie ou l'autre, et tout de suite le désaccord est arrivé, la commission puisse recommander l'embauche de ce médecin s'il faisait l'objet d'un désaccord au sein du comité?

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Marois: Pour y arriver, comme vous le savez — cela paraît à d'autres articles du projet de loi — la commission doit prendre avis, consulter le département de santé communautaire. Bien sûr, à partir de la liste soumise aux parties des noms de médecins qualifiés, reconnus comme compétents par les procédures normales — on ne changera rien à cela — des normes de compétence pour l'obtention, comme ils disent dans leur jargon médical, du privilège de pratiquer tel type de médecine ou tel autre type de médecine. Les parties ne s'entendent pas, la liste est là, il y a ce que je viens d'évoquer, le paragraphe 37 de l'article 223, les parties pourront se faire entendre. La commission va entendre, en région toujours, les commentaires des parties, va consulter le département de santé communautaire et va en arriver, sur la base des témoignages entendus, des preuves, des dossiers de compétence, des expériences des divers médecins, à une conclusion. Je présume bien que la pratique va l'amener à établir un certain nombre de critères de comportement, d'attitude dans ces cas, l'idéal étant de faire en sorte de susciter un consensus entre les parties. C'est certainement la meilleure formule.

Dans l'hypothèse où il n'y a pas d'entente ou de consensus... D'ailleurs, le simple fait qu'un tiers, une commission, même si elle est accrochée à cette table ronde que j'évoquais de représentation des parties... La pratique va certainement — je serais porté à en faire le pari — amener dans les faits peut-être des déductions qui pourraient être plus longues dans certains cas entre les parties mais certainement qu'elles seront appelées à reconnaître tranquillement que, dans une pratique, il est préférable d'en arriver à une entente à la base.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Charlevoix.

M. Pagé: Vous n'avez pas répondu au deuxième volet de ma question.

Le Président (M. Bordeleau): Un instant.

M. Pagé: Asavoir si la commission...

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Portneuf, on peut terminer la question et la réponse.

M. Pagé: Asavoir si le médecin, la commission peut en principe...

M. Marois: Théoriquement ce n'est pas exclu, je ne peux pas juger à la place de la commission aujourd'hui.

M. Pagé: En principe, choisir un médecin qui aura fait l'objet d'un refus d'un des groupes au comité paritaire.

M. Marois: Théoriquement ce n'est pas exclu, vous ne me demandez sûrement pas de rendre jugement pour la commission aujourd'hui, elle va le faire en consultation avec le département de santé communautaire et en entendant les parties. Tranquillement, vont se développer des règles de pratique.

M. Pagé: En posant ma question, je ne fais pas mien tout ce qui est prévu plus loin sur le département de santé communautaire. Est-ce que le rapport du département de santé communautaire à la commission sera déposé au comité paritaire?

M. Marois: Nous ne sommes pas allés jusque dans ce genre de détail dans le cadre...

M. Pagé: Quant à avoir un brassage de paperasse.

M. Marois: Tout ce qui est prévu à l'article 118, c'est la consultation. La consultation n'implique pas nécessairement la paperasse qui circule, pour reprendre l'expression du député de Portneuf, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Cela va, M. le député de Portneuf?

M. Marois: Pour autant qu'on peut l'éviter la paperasse.

M. Pagé: Oui, on va passer au député de...

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: M. le Président, ce n'est pas mon intention de prendre à mon compte les prétentions qu'a le président du Collège des médecins, parce que je suis de ceux qui croient qu'être cadre d'une entreprise et être juge et partie, c'est être placé

dans une situation conflictuelle drôlement inquiétante.

La question que je voudrais poser au ministre est la suivante. Il y a des médecins qu'on pourrait presque accuser d'avoir été à la solde de certaines entreprises qui les engageaient et les payaient. Par contre, dans d'autres secteurs, il est également prouvé que certains de ces médecins ont acquis une compétence vis-à-vis de certaines maladies industrielles et autres dont les résultats sont aujourd'hui prouvés. Dans son discours de deuxième lecture, le ministre d'Etat au Développement social a donné un exemple assez frappant, DuPont de Nemours qui a la hantise d'accidents qui peuvent se produire. J'imagine que, dans une compagnie comme celle-là qui est quand même une multinationale, le record doit correspondre, dans des secteurs où il y a parfois des matières dangereuses, aux moyens qu'elle a pris avec les médecins en question pour arriver à des résultats heureux. Dans le cas des médecins, il ne faudrait quand même pas faire table rase des résultats heureux qu'on a eus dans certaines activités. Mais voici que les deux parties — gardons en tête l'entreprise DuPont de Nemours — et l'ensemble des syndicats qui pourraient être partie à la formation de plusieurs comités.

Sur le choix d'un médecin, les deux parties ont voix égale. On peut dire: Si les résultats ont été favorables dans le passé, on ne voit pas pourquoi le médecin en question ne serait pas gardé pour continuer les résultats heureux qu'on retrouve aujourd'hui. Mais, pour toutes sortes d'autres raisons, il est également possible de penser que les travailleurs en question voudront demander à la commission et au département de santé communautaire de choisir un autre médecin.

Je voudrais dire ceci avant qu'on fasse table rase du travail bien fait qui a été fait par certains médecins. Il n'y a pas moyen de faire du globalis-me là-dedans. Il y en a eu des mauvais, il y en a eu qui ont été conditionnés et il y en a d'autres qui ont eu des résultats dont la Commission des accidents du travail, je pense, a les chiffres aujourd'hui. Vu qu'il appartient à la commission et au département de santé communautaire de choisir le médecin qui devrait oeuvrer dans l'avenir, comment pourrait-on faire pour garder et retenir les résultats heureux qu'on a eus? Il n'y a aucune assurance que cela pourrait être conservé.

M. Marois: Si le député fait état de l'ensemble des services de santé qui peuvent être donnés présentement dans une entreprise, il va trouver la réponse aux articles 130 et suivants, dans la section V — c'est complètement nouveau par rapport au projet de loi initial — qui permet la reconnaissance de services de santé qui existent présentement ou, si on retourne rétroactivement au dépôt du projet de loi no 17, qui existaient alors dans les entreprises. Cependant, cela n'implique pas les médecins comme tels. Cela implique le personnel infirmier, les infirmières, etc.

Deuxièmement, ou alors les parties trouvent que le service est bon et valable. On a cité des noms d'entreprises et, évidemment, on n'a pas à préjuger des décisions que prendront les représentants des travailleurs et les représentants des employeurs. Dans l'hypothèse où le médecin qui est là est reconnu par le Conseil des médecins et dentistes comme étant qualifié, compétent pour faire du travail en médecine du travail, son nom pourrait vraisemblablement paraître dans la liste des noms qui serait soumise aux parties. Si alors ça va si bien que cela, il y a une hypothèse qui existe que les gens pourraient en arriver à la conclusion: On est d'accord, on le garde. Ou les gens pourraient en arriver à la conclusion qu'ils ne sont pas d'accord et qu'ils ne veulent pas le garder, qu'ils veulent plutôt un autre médecin. Dans cette dernière hypothèse, la commission prendra la décision ultime sur la base de la consultation auprès du département de santé communautaire.

Dans l'hypothèse ultime où le médecin en question qui était là ne serait pas retenu par les parties, il y a, en plus, l'article additionnel du projet de loi, l'économie d'ensemble du projet de loi, qui n'empêche absolument pas des entreprises de retenir les médecins comme médecins-conseils. Je l'ai entendu évoquer depuis le début de nos travaux par certaines entreprises, qu'elles étaient en train de regarder cette possibilité si l'hypothèse ultime qu'on vient d'évoquer devait se produire.

Enfin, j'ajouterais ceci en terminant: Table rase, je ne peux pas acheter cette expression parce que je ne pense pas qu'on puisse plaider table rase avec les amendements qui ont été introduits.

M. Mailloux: M. le Président, j'accepte l'argument par lequel le ministre me dit que, malgré qu'ils ne pourraient pas s'entendre, ces médecins ayant obtenu, semble-t-il, de bons résultats pourraient être associés à la médecine préventive en continuant leurs activités. Ce n'est quand même pas une forte assurance que ces médecins pourraient être invités au moment où les deux parties ne s'entendraient pas, malgré, évidemment, que le médecin aurait donné satisfaction suite aux résultats compilés à la Commission des accidents du travail. Au moment où il y aurait eu dissidence et qu'on n'aurait pas accepté assez facilement que le résultat heureux doive être continué au point qu'on dise à la commission: Veuillez donc nommer un médecin parce que, forcément, il n'y a pas eu d'entente, je crois qu'en raison du préjugé supposément favorable qu'on aurait à l'endroit des travailleurs on hésiterait à la commission à recommander un médecin dont on aurait mis le travail en doute. Je pense qu'à ce moment-là il ne faudrait pas penser que ce médecin pourrait, comme le disait le ministre, être ajouté comme médecin-conseil par la compagnie si ses résultats ont été heureux. Je ne pense pas que ce soit la commission qui, à ce moment-là, le retiendrait, étant donné que les travailleurs n'auraient pas été d'accord.

M. Marois: Je suis certain que la commission y penserait très sérieusement, qu'elle examinerait les remarques qui ont été faites.

M. Mailloux: Quitte à irriter les travailleurs qui n'auraient pas été d'accord?

M. Marois: Que ce soit l'une ou l'autre des parties, parce que ce sont les parties qui interviennent. En plus, dans les hypothèses que j'ai évoquées, il y en a une quatrième qu'il ne faut pas rejeter, non plus. Il y a des témoignages que j'ai eus personnellement, encore une fois, sans m'étendre, car je ne veux pas reprendre tout ce que j'ai déjà évoqué. Il ne faut pas se raconter d'histoires, des médecins oeuvrant à temps plein, présentement, dans les entreprises, sur la base des chiffres mêmes de l'Association de médecine industrielle du Québec qui est venue témoigner en commission parlementaire, il y en a, au maximum, l'équivalent, à temps plein, de 100. Les chiffres de ceux qui peuvent être là à temps plein, cela ne défonce pas 70, 75, au maximum.

J'ai reçu personnellement— et là, c'est purement ma parole et je ne vais sûrement pas dévoiler les noms — des témoignages de médecins qui sont présentement des salariés d'entreprises, les uns disant qu'ils étaient opposés à la réforme; d'autres venant me dire: Enfin, il est temps et nous, on est d'accord dans la mesure où on va retrouver notre pleine et entière liberté d'être capables de pratiquer la médecine sans avoir ce lien de dépendance qui mine notre crédibilité. Aussi, j'ajoute — mais là, c'est purement ma parole et les témoignages que j'ai entendus; cela vaut ce que ça vaut — les témoignages de représentants syndicaux de certaines entreprises, où il y en a disant: Si le nom arrive et s'il est reconnu comme étant compétent, nous, on sera d'accord. Dans certains cas, ça va être oui, dans certains cas, ça va être non. Dans l'hypothèse où ce serait non alors que la personne serait jugée compétente et qualifiée, rien n'empêcherait, par ailleurs — parce que les ressources, dans ce domaine, cela ne court pas les rues; il faudra faire un effort colossal de formation — qu'elle soit affectée, le cas échéant, à d'autres entreprises, qu'elle soit soumise sur une liste à d'autres entreprises.

M. Mailloux: Cela règle le problème

Le Président (M. Bordeleau): Cela va? Un instant, s'il vous plaît, M. le député de Maisonneuve. Avant de vous laisser la parole, je veux seulement vous souligner que vous n'êtes pas membre de la commission et que ça me prendrait un consentement des membres pour vous permettre de vous exprimer.

Des Voix: Consentement.

Le Président (M. Bordeleau): Allez-y, M. le député de Maisonneuve.

M. Lalande: Merci, M. le Président.

M. Pagé: J'ai deux autres questions à poser. Le Président (M. Bordeleau): D'accord.

M. Lalande: Si je comprends bien, l'effet combiné des articles 78.1 et 118 pourrait faire qu'un médecin qui aurait été refusé par les deux parties, s'il n'y a vraiment pas de consentement à le garder au sens de la loi, pourrait être ramené grâce à une intervention de la commission. Théoriquement, est-ce que cela peut arriver?

M. Marois: Théoriquement, oui. Pratiquement, le député de Charlevoix a évoqué tantôt les raisons pour lesquelles, certainement, la commission y penserait deux fois avant de faire une chose comme celle-là.

Le Président (M. Bordeleau): Cela va? M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Le ministre, a comparé à plusieurs reprises cette loi à la loi ontarienne. Evidemment, on a le tableau du premier libellé de la loi, de la réimpression et tout cela; on n'a évidemment pas le tableau de la loi ontarienne à côté. En quoi les dispositions relatives au comité de santé et de sécurité à l'intérieur de l'entreprise, selon le projet de loi réimprimé ici, sont-elles distinctes de ce qui existe en Ontario en termes de pouvoirs qui sont accordés à ces comités? (17 h 45)

M. Marois: Si on me l'avait demandé au préalable! J'ai souvent offert aux partis d'Opposition de ne pas se gêner et de nous contacter, en disant qu'on était tout le temps prêt à vous fournir ce qui pouvait vous être utile pour alimenter vos réflexions. Je pourrais toujours vous fournir le tableau comparatif des pouvoirs que ce soit avec l'Ontario ou avec d'autres provinces. Je ne sais pas si on y arrivera en 24 heures ou en 48 heures. Ne me demandez pas l'impossible. Si on l'avait demandé avant, on aurait toujours pu le faire.

M. Pagé: Je ne vous demande pas cela à l'égard de l'ensemble de la loi, mais, entre autres, à l'égard des pouvoirs accordés aux comités de santé.

M. Marois: En tout cas, en ce qui concerne les pouvoirs des comités de santé en ce qui concerne en particulier, je présume, le bloc des services de santé...

M. Pagé: Oui.

M. Marois: ... il y a le Code canadien du travail, article 84, paragraphe 1; il y en a dans a) jusqu'à I) des pouvoirs. Il y a bon nombre de morceaux, pour l'essentiel, qui se recoupent dans l'une ou l'autre des lois provinciales ou dans le Code canadien du travail. Là où on va plus loin — d'ailleurs, cela a été évoqué et demandé en particulier par les interventions, fondées à mon avis, puisque je partageais aussi cette opinion et

que nous partageons cette opinion, du député de Portneuf — c'est qu'on a ajusté des morceaux à la suite des recommandations, vous vous en souviendrez, de la Commission des droits de la personne qui nous demandait d'aller plus loin dans les pouvoirs décisionnels accordés aux comités paritaires pour que ce soit autre chose que des comités de placotage où on prend du café. Donc, on va plus loin, s'ajustant à la réalité sociale et économique du Québec, que ce qui se fait dans d'autres provinces, notamment par certains pouvoirs décisionnels et, en particulier, par le fait qu'en ce qui concerne tout le domaine de la santé au travail, forcément,1 il a fallu réaliser un ajustement à notre réalité vraiment à nous sur la base des réformes qui ont été faites, par l'ancien gouvernement soit la mise en place et le développement, en particulier, du réseau public.

M. Pagé: Toujours sur le choix du médecin, M. le Président, on sait que, dans l'ensemble du projet de loi — puisque c'est quand même une réforme de mécanismes ou de structures — on favorise, par les comités de santé et de sécurité, le plus de concertation possible chez les intervenants à l'intérieur du milieu le plus immédiat du travailleur, du danger ou peu importe. Plusieurs des mécanismes prévus sont fondés sur un fonctionnement régulier, de bonne foi des comités de santé et de sécurité. C'est ainsi que plusieurs responsabilités sont conférées aux comités de santé et de sécurité. Entre autres, en ce qui a trait aux programmes de prévention, à l'identification et à l'évaluation des risques, le comité de santé et de sécurité est placé au coeur même de plusieurs échanges avec la commission provinciale, la grosse commission de santé et de sécurité. Il a des rapports à fournir, etc. Ce comité de santé et de sécurité aura à discuter évidemment avec le représentant à la prévention au sein de l'entreprise. Occasionnellement le comité pourra rencontrer un inspecteur, un enquêteur ou une personne nommée par lui pour venir enquêter sur un contaminant ou un danger quelconque, sur un équipement de protection collectif ou autre. Tout est basé sur le fonctionnement peut-être pas le plus expéditif, mais le plus conséquent possible du comité de santé et de sécurité. Qu'est-ce qui arrivera si ça accroche — comme on le dit dans le jargon — sur le choix du médecin? Au cas où la Commission de la santé et de la sécurité déterminerait que le médecin responsable au sein de l'entreprise, c'est M. Jos X, décision qui devient exécutoire, qu'est-ce qui arriverait si les représentants de l'employeur ou les représentants des travailleurs au comité de santé disaient: Nous, on ne siège plus au comité tant et aussi longtemps que ce n'est pas notre médecin qui est désigné? Et ils mettraient la roche dans l'engrenage.

La très grande majorité des mécanismes prévus, des objectifs à atteindre ou la façon d'atteindre certains objectifs que doit établir ce comité est basée sur l'efficacité du travail dudit comité. Même si le comité doit se réunir seulement à tous les trois mois, on peut présumer que, dans la pra- tique, au moins pour les deux ou trois premières années, le comité sera susceptible de se réunir beaucoup plus souvent que ça. Qu'est-ce qui arrive si une partie, patronale ou syndicale, dit: C'est regrettable, on ne siège plus? La pression qu'on exerce sur la partie adverse, c'est qu'on ne siège plus au comité de santé et de sécurité, qu'on ne participe plus aux travaux du comité de santé et de sécurité. On n'endosse aucune décision adoptée par ce comité, évidemment. On ne contresigne aucun document à faire parvenir au comité de santé et de sécurité. On ne participe à aucune réunion, et on ne souscrit pas à toute l'activité du comité tant qu'on n'aura pas gagné notre point avec le médecin. Qu'est-ce qui arrive dans ces cas?

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Pagé: C'est ce qui va arriver, c'est théoriquement possible.

M. Marois: C'est théoriquement possible, bien sûr.

M. Pagé: Cela peut arriver.

M. Marois: Dans cette hypothèse, M. le Président, je voudrais rappeler d'abord que, contrairement aux lois des autres provinces où ils sont obligatoires, les comités ici sont volontaires ou facultatifs. C'est l'état des législations des autres provinces. Chez nous, cela part de l'initiative de l'une ou l'autre des parties; c'est donc volontaire et du volontaire qui devient obligatoire à partir du moment où la demande est reçue. C'est l'économie générale de la loi. Donc, déjà, la base de départ est bien différente. Personne ne l'a signalé, mais je profite de l'occasion pour le signaler. On n'a pas voulu l'imposer, sauf le cas exceptionnel prévu dans la loi où, pour cause, la commission jugerait pertinent de... Mais c'est l'exception par rapport à la règle de base.

Dans l'hypothèse où l'une ou l'autre des parties dit: Moi, je "buck", cela vient de s'éteindre, je ne participe plus, cela veut dire que l'une ou l'autre des parties rejeterait l'économie générale de la demande. Partant de là, la commission exercera les pouvoirs qui lui sont dévolus dans les cas où il n'y a pas de comité paritaire. Je présume que les parties voudront garder leurs représentants de part et d'autre, que ce soit leur représentant à la prévention ou le représentant de l'employeur.

M. Pagé: M. le Président, le ministre acceptera avec moi que c'est bien de dire que c'est facultatif et tout. Le ministre est conscient que, dans une entreprise, sans en nommer, qui a peut-être 400 ou 500 employés où il y a des accidents, des risques de maladies industrielles, il serait impensable de fonctionner sans comité de santé et de sécurité.

Une Voix: II y en a actuellement qui n'en n'ont pas.

M. Pagé: Oui, mais on parle en fonction du projet de loi. Je ne voudrais pas que cela accroche. Je voudrais que cela accroche le moins possible si cela a à accrocher. C'est possible que cela accroche là-dessus, qu'un groupe dise, surtout au début: C'est regrettable, tant que nous n'aurons pas gagné notre point... Compte tenu des représentations qui ont été faites et des griefs déjà formulés, on peut présumer et il n'est pas faux de prétendre que là où cela risque d'accrocher le plus, c'est le choix des médecins. C'est le premier pouvoir du comité de santé et de sécurité en vertu de l'article 78. Alors, on peut présumer que la première chose que le comité paritaire va faire, ce sera de choisir le médecin. Cela peut accrocher à ce moment et un des groupes peut dire: Nous, c'est "just too bad", c'est regrettable, on ne participe à rien, c'est les roches dans l'engrenage tant qu'on n'aura pas notre médecin. Le ministre nous dit: La commission peut intervenir, la commission peut faire sauter l'agent de prévention, etc. Qu'est-ce qui va se passer concrètement?

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Marois: M. le Président, peut-être que le député a une proposition très précise à formuler. Si le député n'a pas de proposition précise à formuler, je suis certain qu'il ne nous suggère pas de revenir à l'économie générale, pour ne pas dire au désastre général de la situation actuelle.

M. Pagé: Ne présumez pas de...

M. Marois: Je ne présume rien. Je regarde les hypothèses.

M. Pagé: J'aurais facilement pu dire tantôt, M. le Président, approuvé. Là, je vous mets un cas sur la table qui risque de mettre du sable dans l'engrenage; c'est un élément sur lequel une grande partie des articles ou des dispositions du projet de loi est basée. Je vous demande concrètement quels sont les recours possibles par la commission. Concrètement, qu'est-ce que la commission va faire?

M. Marois: II y a un certain nombre de recours et de possibilités, M. le Président.

M. Pagé: Allez.

M. Marois: Je rappelle, encore une fois, qu'on fait un pari. Ce ne sera pas sans difficultés. Je n'ai pas dit que ce n'était pas un gros défi à relever; j'ai souvent évoqué que c'était un défi que d'autres avaient relevé avant nous et qu'il était possible d'arriver à le relever au Québec comme ailleurs, d'autant plus qu'on ne part pas des boutons à quatre trous qu'on invente. On est parti d'exemples très concrets, d'une lecture de la réalité où des choses existent déjà dans certaines entreprises et fonctionnent sur la base de comités paritaires. Dans cette hypothèse, la commission prend sa décision, il y a un médecin qui est là, et on fonctionne ou, alors, ça signifie qu'à l'intérieur de l'entreprise on décide qu'on ne veut pas le comité paritaire.

Je pense qu'il faut aussi tenir compte de chacun des volets de la loi qui implique, entre autres, la mise en place — bien sûr, on n'y arrivera pas en deux jours — des associations sectorielles. C'est pour ça qu'il faut regarder chacun des morceaux ensemble pour voir qui peut donner un coup de main pour favoriser au maximum le climat qu'évoquait le député et qui correspond à l'économie générale du projet de loi. L'association sectorielle peut, notamment — comme vous le savez, c'est l'article 101, premier paragraphe — aidera la formation et au fonctionnement des comités de santé et de sécurité. A l'association sectorielle, là aussi, vous aurez une représentation à la fois des représentants du monde patronal et des représentants du monde syndical d'un secteur économique donné.

Nous, on pense qu'il y a l'ensemble de ces mécanismes, plus le fait qu'avant d'arriver à des décisions formelles et que la hache tombe, etc., la commission encore une fois, sera une table ronde où les parties auront leurs représentants qui pourront toujours intervenir pour discuter avec les parties, les rencontrer, examiner les possibilités, etc. En d'autres termes, avec, il me semble, un minimum de bonne volonté de base, il y a moyen d'y arriver. Tenant pour acquis ce qui a été évoqué comme situation par le député de Portneuf, si telle devait être la situation, ce seraient forcément des cas marginaux. Cela ne se présentera certainement pas tous les jours, à cause de la situation d'où on part qui fait qu'il y a un médecin pour 1500 entreprises, qu'il y a 90% des entreprises où il n'y en a même pas. On ne va pas se chicaner pour savoir si on garde l'ancien ou pas; il n'y en a même pas. On part avec quelque chose de neuf dans la majorité des cas.

Le Président (M. Bordeleau): Cela va, M. le député de Portneuf?

M. Pagé: Pour premièrement, oui, M. le Président. Aquatrièmement, "choisir les moyens et équipements de protection individuels qui, tout en étant conformes aux règlements, sont les mieux adaptés aux besoins des travailleurs de l'établissement", quand vous dites "conformes aux règlements", ce sont les règlements adoptés par la commission ou...

M. Marois: D'une part, M. le Président, les règlements qui peuvent déjà exister.

M. Pagé: Ils vont être tous sous la coupe de la commission éventuellement?

M. Marois: Eventuellement, oui. D'une part, les règlements qui peuvent déjà exister présentement en fonction des catégories d'établissements, des chantiers de construction, etc., et, d'autre part, éventuellement, des ajustements qui pourraient être apportés à ces règlements.

M. Pagé: Un comité de santé et de sécurité, par exemple, ne pourra pas décréter ou se donner comme règlement interne à l'intérieur de l'entreprise de ne pas porter tel type d'équipement de protection, même si tout le monde est d'accord, lorsque le règlement de la commission prévoit que, dans tel cas — par exemple, lorsqu'un travailleur est confronté à X décibels — il doit porter un équipement?

M. Marois: Bien sûr, il faut que ce soit conforme aux règlements, à moins que — c'est ça, l'objectif ultime et ce n'est pas théorique puisqu'il y a un cas très concret à Québec, pas besoin de chercher bien loin — l'ensemble des mécanismes jouant normalement, on n'ait réussi à réduire ce problème à la source. Je pense à une entreprise très précise, dont j'ai le nom en tête, à Québec où les travailleurs portaient les équipements. Maintenant, allez voir, ils les ont enlevés. Pourquoi? Parce qu'il y a eu un programme de prévention et d'adaptation de l'entreprise qui fait que le bruit a été à ce point considérablement réduit que maintenant ils n'ont plus besoin de porter les équipements requis. (18 heures)

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Laviolette.

M. Jolivet: L'article 78 est-il adopté?

M. Pagé: Non, c'est un gros article, vous allez en convenir.

M. Jolivet: Oui, mais c'est simplement parce qu'on se posait la question à savoir à quel moment on ajournerait.

M. Pagé: Entre 18 et 19 heures.

Chacun des comités paritaires du Québec devra fournir un rapport annuel à la commission, en vertu du paragraphe 8.

M. Marois: Oui.

M. Pagé: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): L'article 78 est adopté. Je vous signale qu'il est maintenant 18 heures. Si vous voulez adopter l'article 79 qui va quand même assez...

M. Mailloux: M. le Président, je voudrais vous faire une suggestion, on pourrait adopter le chapitre IV.

Le Président (M. Bordeleau): Jusqu'à l'article 86? Est-ce que cela irait?

M. Marois: L'article 79, M. le Président, c'est l'article dont on vient de discuter en regard de l'article 78.

Le Président (M. Bordeleau): Si la suggestion du député de Charlevoix était retenue...

M. Marois: On terminerait.

M. Pagé: L'article 79 est adopté. On va continuer.

M. Marois: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): On va continuer?

M. Pagé: Suspendez l'heure, M. le Président, retenez les aiguilles.

Le Président (M. Bordeleau): II y a consentement? On peut continuer quelques minutes?

M. Marois: C'est cela. M. Pagé: Oui.

Le Président (M. Bordeleau): L'article 78 est adopté. L'article 79?

M. Marois: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté?

M. Pagé: Oui.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté. L'article 80?

M. Pagé: Je trouve curieux le libellé de l'article 80, M. le Président.

M. Marois: Si vous trouvez curieux le libellé de l'article 80, allez jeter un coup d'oeil à l'article 84, paragraphe 1, du Code canadien du travail.

M. Pagé: C'est possible, ils ne sont pas exempts d'erreurs eux non plus.

Le Président (M. Bordeleau): L'article 80 est-il adopté?

M. Pagé: "L'employeur doit afficher les noms des membres du comité de santé et de sécurité dans autant d'endroits de l'établissement visibles et facilement...". J'aurais préféré, quant à moi: "L'employeur informe les travailleurs du nom des membres du comité de santé et de sécurité au moyen d'affiches visibles et accessibles ou par tout autre moyen jugé utile." De toute façon, on n'en fera pas un amendement, M. le Président, on nous taxerait de faire des "filibusters".

Le Président (M. Bordeleau): L'article 80 est-il adopté?

M. Pagé: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté.

M. Marois: En fait, ce n'est pas l'intention, M. le Président.

M. Pagé: Est-ce à dire que c'est vous qui l'avez?

M. Marois: Quoi?

M. Jolivet: Jamais!

M. Marois: L'intention?

M. Jolivet: La "filibustique".

M. Pagé: Non, mais...

M. Marois: Je prête rarement des intentions, j'affirme.

Le Président (M. Bordeleau): L'article 81.

M. Pagé: Parfois, c'est plus prudent de prêter des intentions.

M. Marois: C'est vrai.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Charlevoix.

M. Marois: Je n'aime pas parler à travers mon chapeau, M. le Président, alors j'affirme quand je suis sûr de mon coup.

M. Mailloux: Je me demande si, à l'article 81, on n'a pas déjà tenté, dans des articles précédents, de définir ce qu'était exercer une fonction de façon abusive.

M. Marois: Cela, c'est la reprise.

M. Mailloux: Les deux derniers mots de l'article 81.

M. Pagé: "L'employeur ne peut imposer à un travailleur une mise à pied, un congédiement, une suspension, un déplacement ou une mesure discriminatoire ou disciplinaire en raison de l'exercice par ce travailleur de ses fonctions au sein d'un comité de santé et de sécurité. "Toutefois, l'employeur peut imposer un congédiement, une suspension, un déplacement ou une mesure disciplinaire si une fonction est exercée de façon abusive."

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Marois: C'est l'application des mots mêmes de l'article 30.

M. Mailloux: Ce n'est pas aussi clair que de définir la façon dont cette fonction peut être abusive.

D'accord, cela va.

Le Président (M. Bordeleau): L'article 81 est adopté?

Des Voix: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté. L'article 82?

Une Voix: Sur division.

Le Président (M. Bordeleau): Sur division? L'article 81 est adopté sur division. L'article 82.

M. Pagé: ... on ne prête pas d'intentions, mais toi non plus.

Le Président (M. Bordeleau): L'article 82? M. Pagé: M. le Président...

M. Perron: Cela a été exprimé dans un autre article antérieurement, M. le député de Charlevoix.

Le Président (M. Bordeleau): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Pagé: M. le Président, le député de Charlevoix ne devrait pas s'interroger là-dessus, cela va nous passer, comme je le disais déjà, sur le dos. L'article 82.

Le Président (M. Bordeleau): L'article 82.

M. Pagé: Au sein d'un établissement. Cela reprend ce qu'on a dit au début.

M. Mailloux: ... au fur et à mesure.

Le Président (M. Bordeleau): L'article 82 est-il adopté?

M. Pagé: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté. L'article 83? Adopté?

M. Pagé: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté. Article 84? Adopté. Article 85? Adopté.

M. Pagé: Oui.

Le Président (M. Bordeleau): Article 85, adopté. Article 86?

M. Pagé: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté. La commission suspend maintenant ses travaux jusqu'à 19 h 15.

Suspension de la séance à 18 h 6

Reprise de la séance à 19 h 45

Le Président (M. Bordeleau): La commission permanente du travail et de la main-d'oeuvre continue ses travaux. Nous étions rendus, au moment de la suspension, à l'article 87.

M. Pagé: M. le Président...

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: D'abord, M. le Président, je tiens à m'excuser un peu du retard. C'est évident que, d'habitude, on a deux heures pour le dîner. Ce soir, on s'était, de bonne foi, donné un peu moins de temps, pour compenser ce qu'on a perdu malheureusement vendredi soir dernier. Je tiens à m'excuser d'être en retard; on aura une autre commission, on l'a appris il y a quelques minutes, qui siégera ce soir, la commission parlementaire de l'énergie, pour entendre les parties relativement au conflit d'Hydro-Québec. C'est ce qui explique mon retard et c'est ce qui expliquera que je devrai vous quitter. Je ne sais pas si vous allez en être peines, mais, de toute façon, je devrai vous quitter vers 21 heures.

Une Voix: ...

M. Pagé: Pardon? Oui, oui. Je devrai vous quitter vers 21 heures environ. Vous avez appelé, M. le Président...

Le représentant à la prévention

Le Président (M. Bordeleau): J'ai appelé l'article 87.

M. Pagé: Article 87.

Le Président (M. Bordeleau): Vous avez des commentaires, M. le député de Portneuf?

M. Pagé: Oui, certainement. M. le Président, relativement à l'article 87, le chapitre V prévoit des dispositions relatives au représentant à la prévention. Pendant les travaux de la commission parlementaire, il n'a pas beaucoup été question du représentant à la prévention. De façon incidente, il y a eu des commentaires généraux ou une approche générale, des commentaires qui ont été formulés en ce qui concerne cette personne qui est quand même placée à l'intérieur de la structure, qui est appelée à jouer un rôle important au chapitre de la prévention, de la santé, de la sécurité et de l'action immédiate pour soutenir les actions ou les initiatives qui pourraient être prises par une partie ou par une autre.

J'aimerais demander au ministre dans quelle perspective... Je conviens qu'il a libellé la loi, il présente la loi aujourd'hui, même si, cet après-midi, il nous fait référence que personne d'autre n'a contribué à la rédaction de la loi. J'aimerais qu'il nous dise, dans son esprit, comment il entrevoit le travail d'un représentant à la préven- tion au cours d'une semaine normale. Je sais qu'il aura beaucoup d'attributs, beaucoup de pouvoirs, et je me suis permis, en deuxième lecture, d'émettre des réserves.

Vous savez, c'est la personne qui, par les pouvoirs prévus au projet de loi, est en mesure d'assister tout travailleur qui en a le besoin ou qui est placé face à une situation dangereuse et autre. Ce sera généralement le premier interlocuteur avec le représentant de l'employeur sur les lieux lors de l'application du droit de refus, etc. J'aimerais demander au ministre dans quelle perspective il voit que le travail du représentant à la prévention pourra se faire. J'aimerais aussi qu'il nous dise quel genre de bonhomme ça devrait être au sens de l'entreprise. Est-ce que c'est un bonhomme qui devra avoir beaucoup d'expérience au sein de l'entreprise, est-ce que c'est un bonhomme qui pourra arriver comme ça, compte tenu de son expérience dans d'autres secteurs d'entreprises?

Il faudra évidemment que ce soit un salarié de l'entreprise en question, je présume, le ministre pourra me le confirmer, écartant ainsi toute possibilité qu'un représentant syndical puisse agir d'office comme représentant à la prévention, ce qui, je pense, n'est pas l'objectif recherché dans le projet de loi.

Il y a aussi un autre élément; comment le ministre peut-il s'assurer que les représentants à la prévention seront invulnérables à tous les égards? Je pense que le ministre me comprend bien. Pour être un peu plus explicite, je fais une référence. On a eu des problèmes, comme société; on a eu une commission qui a siégé, qui a constaté malheureusement des problèmes dans certains secteurs, entre autres dans le secteur de la construction. On a eu des délégués de chantier, au Québec qui, je pense, ne remplissaient pas les devoirs ou les obligations relatives à leurs fonctions, tout le temps. C'est ce qu'un certain rapport, celui de la commission Cliche, a indiqué.

Quant au représentant à la prévention, même si l'objectif est tout à fait louable et si le libellé du texte est assez clair, jusqu'à certains égards, on peut quand même exprimer des réserves, on peut... J'aimerais tout au moins que le ministre réponde aux craintes que j'ai et, si je n'ai pas de motif d'avoir des appréhensions ou des craintes, tant mieux. Cela n'ira que mieux dans l'opération du système.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Marois: Rapidement, je ne veux pas revenir sur ce que j'ai évoqué lors du débat de deuxième lecture, il est certain qu'à partir du moment où on faisait passer la base, pour l'établissement des comités paritaires, sauf les exceptions prévues par la loi, dans les établissements où il y avait non plus dix mais vingt travailleurs, ce n'était pas sans avoir un effet secondaire sur la façon d'en arriver à établir ou à reconnaître le droit à un représentant de la prévention.

D'autre part, le fait, à la demande de bon nombre de parties qui se sont présentées devant nous en commission parlementaire, qu'on ait

réduit le nombre d'étapes pour en arriver à la solution des problèmes soulevés par l'exercice d'un droit de refus, cela aussi, ce n'était pas sans avoir des effets en conséquence puisque, comme vous le savez, on a éliminé l'étape de l'intervention du comité paritaire. Quand il y a un comité paritaire, forcément, le représentant à la prévention y siège. En éliminant cette étape, on fait intervenir tout de suite en première étape le représentant à la prévention.

Ce sont les premières modifications. Tout cela demeure fondamentalement accroché à cette idée qui colle à la réalité déjà existante. Dans certaines conventions, vous avez déjà ces représentants à la prévention, dans les législations étrangères, vous avez ces représentants à la prévention, ils existent dans la loi ontarienne, ils existent dans d'autres lois provinciales ou étrangères aussi.

Vous vous souvenez des témoignages en ce sens-là d'un certain nombre de groupes, en particulier de groupes patronaux qui ont des entreprises non seulement au Québec, mais dans d'autres provinces, à ce sujet.

Ceci étant dit, fondamentalement il s'agit, comme idée de base, de reconnaître un minimum de temps de libération susceptible de permettre le commencement de contrepoids au temps de libération que des représentants de l'employeur ont pour accomplir leur travail dans ce domaine. Cela pour faire en sorte que non seulement les travailleurs puissent être informés, tout au long du déroulement normal d'une journée quotidienne de travail, de leurs droits, mais qu'ils soient assistés aussi à l'occasion de l'exercice de l'un ou l'autre des droits prévus. Et, comme on l'a vu tout à l'heure, le représentant à la prévention dispose du même type de protection que celui qui est accordé à l'un ou l'autre des travailleurs qui exercent l'un ou l'autre des droits qui leur sont reconnus par la loi, avec la protection dans la mesure où... Avec le cas d'exception où il est possible de faire la preuve, auquel cas les sanctions sont prévues, le cas d'abus de droit.

Egalement une modification additionnelle a été apportée pour éclaircir un certain nombre d'ambiguïtés qui apparaissaient, notamment à l'article 90, concernant les fonctions du représentant à la prévention, cela, à la demande de groupes qui se sont présentés devant nous. De quelle façon seront-ils préparés, équipés? Bien sûr, il est prévu le soutien financier normal permettant d'assurer la meilleure formation possible de base à laquelle il soit possible d'arriver et, d'autre part, comme le signalait le député de Portneuf — cela paraît d'ailleurs très clairement à l'article 87 — le représentant en prévention doit être désigné parmi les travailleurs d'un établissement donné.

M. Pagé: ... de formation.

M. Marois: Des programmes de formation sont prévus, puisqu'on prévoit, le cas échéant, qu'il peut disposer de temps pour suivre notamment les cours de formation qui seraient organisés; c'est l'article 91 si ma mémoire est bonne. Il pourra participer à des cours de formation dont le contenu et la durée seront approuvés par la commission.

M. Pagé: Le temps passé dans une journée, j'espère que cela ne sera pas prévu par règlement de la commission.

M. Marois: Cela ne peut pas faire autrement que d'être prévu par règlement, d'une façon ou d'une autre, pour une raison bien simple, puisqu'il faut prévoir la libération de tant d'heures-homme. Cela ne peut pas faire autrement que de varier selon les secteurs économiques, selon la taille des entreprises, forcément. C'est la seule façon d'y arriver. Pour un certain nombre de fonctions sauf les fonctions...

M. Pagé: Pourquoi ne pas laisser cela au comité de santé et de sécurité?

M. Marois: Sauf les fonctions qui sont prévues aux paragraphes 2, 6 et 7 de l'article 90. Là, il y aura une banque de temps... Je m'excuse, c'est l'article 92, plutôt. Celui-ci prévoit qu'il peut s'absenter le temps nécessaire pour exercer un certain nombre de fonctions prévues par la loi. Par exemple, quand un inspecteur se présente, quand un travailleur exerce un droit de refus pour inciter la compagnie, plus une banque de temps comme...

M. Pagé: Un minimum, l'article 92.

M. Marois: ... minimum de base, laissant aux parties, comme le prévoit le deuxième paragraphe de l'article 92, le soin de déterminer, compte tenu des règlements, le temps que peut consacrer le représentant à la prévention à assumer ses fonctions.

M. Pagé: A l'article 87, vous dites qu'il est possible...

M. Marois: A l'article 87, c'est dans le cas où il y a un comité; à l'article 88, c'est dans le cas où il n'y en a pas.

M. Pagé: A l'article 87, il est mentionné que plusieurs personnes peuvent agir comme représentants à la prévention.

M. Marois: Encore une fois, selon la taille des entreprises.

M. Pagé: La taille de l'entreprise. Dans votre esprit, cela devrait être quoi à peu près, sans présumer du règlement?

M. Marois: II y a des bases. Je n'ai pas les chiffres en tête. Si ma mémoire est bonne, il me semble qu'on avait évoqué un certain nombre d'hypothèses sur la base de données concrètes, d'expériences concrètes nées dans le livre blanc, en regardant les expériences vécues par les au-

très, que ce soit en Ontario, que ce soit en Saskatchewan, et aussi en regardant les expériences déjà vécues au Québec dans le cas des entreprises au moyen des conventions collectives qui prévoient ce genre de fonction.

M. Pagé: Mais n'avez-vous pas d'indications sur... Pourriez-vous nous fournir ces documents-là?

M. Marois: Sauf les indications de base qui paraissaient dans le livre blanc, si ma mémoire est bonne...

Le Président (M. Bordeleau): Cela va, M. le député?

M. Marois: ... ou dans un document additionnel. Il me semblait que c'était dans le livre blanc. Je donne cela sous réserve. Cela pouvait être aussi dans des documents additionnels. On peut toujours voir s'il y a possibilité de sortir ce qui se faisait ailleurs et, le cas échéant, essayer de vous les fournir dans les meilleurs délais.

Le Président (M. Bordeleau): Cela va, M. le député de Charlevoix?

M. Mailloux: M. le Président, quand on parle du représentant à la prévention, je sais peut-être un peu d'avance quelle réponse va me donner le ministre, parce que, si le Conseil du patronat et les entreprises contestent les coûts afférents pour l'ensemble des suggestions qui seront faites — je comprends qu'elles seront vérifiées par le comité de santé et de sécurité — je ne crains pas tant le coût que l'entreprise aura à payer parce qu'on sait pertinemment que les coûts des entreprises sont normalement refilés à l'ensemble des contribuables. Le ministre me dira ultérieurement: Si l'on regarde quels sont les coûts socio-économiques de l'ensemble des accidents actuels, évidemment, on a déjà donné les sommes astronomiques que cela signifie.

Par contre, quand je regarde, à l'article 90, l'ensemble des tâches qui seront dévolues aux représentants de la prévention, si de fortes entreprises peuvent se payer, dans le but d'éviter des accidents et des maladies, sans être en difficulté, un ou des représentants à la prévention suivant les secteurs de l'activité, aussi dangereux soient-ils, quand on est devant des entreprises de la taille de vingt, quarante et cinquante employés, c'est indiscutable qu'à l'instant où on ajoute le coût d'un salaire dont les affectations pourraient être sensiblement de remplir toutes les tâches qui sont dévolues par l'article 90, à ce moment-là — probablement que l'expérience de l'Ontario est connue — y aurait-il un danger qu'au moment où les coûts seraient assez élevés, certaines entreprises deviennent moins concurrentielles avec d'autres entreprises de la province et principalement des provinces voisines?

M. Marois: Je ne me souviens pas si le député de Charlevoix était présent en commission parlementaire, M. le Président, au moment où on a entendu, par exemple, l'Association des manufacturiers canadiens, l'Institut canadien des textiles. On a eu les témoignages de ces entreprises-là, à la suite des questions qui ont été posées. Je me souviens très bien d'en avoir posé de très précises pour voir comment ces gens évaluaient les choses sur la base du fait qu'ils vivaient présentement avec cette réalité en Ontario, quelle que soit la taille de l'entreprise. Quand ils évoquaient des difficultés, je leur ai demandé en quoi cela pouvait causer des problèmes dans le cas du Québec. Vous vous souviendrez que les réponses là-dessus ont été très précises. On était incapable de pointer de façon très précise les choses qui nous amèneraient à conclure que, forcément, ce sera différent au Québec.

Cela dit, il faut bien voir que ce n'est pas le coût d'un salaire ou de deux salaires additionnels qui est refilé à l'entreprise, puisqu'il s'agit d'une base de délibération, d'une banque de temps ou d'heures-homme de délibération pour faire une fonction qui n'implique absolument pas 24 heures par jour, 7 jours par semaine. En d'autres termes, ce n'est pas un salaire complet, c'est une partie de salaire. (20 heures)

M. Mailloux: C'est quand même, pour le représentant à la prévention, le parallèle avec le délégué de chantier qu'on a connu sur les chantiers de construction. C'est quand même un peu le parallèle avec le travail, non pas dans tous les objets qu'on donne, que faisait le délégué de chantier sur les chantiers de construction. Il agissait comme une espèce de délégué.

M. Marois: Le délégué de chantier, vous vous y référez à l'époque de la commission Cliche. L'ensemble de ses fonctions était de voir à l'application de la convention collective, ce n'est pas du tout la même chose.

M. Mailloux: Et autres fins et autres fonctions.

M. Marois: Non. Le député convient avec moi que, dans ce sens, c'était bien différent.

M. Mailloux: Je ne dis pas que ça va se produire, je dis que le pouvoir que va détenir le représentant à la prévention va être tel qu'on agira, j'espère, avec toute la bonne foi. Espérons que ces gens agiront de bonne foi, pour la protection des employés, qu'on n'ira pas au-delà des prérogatives qui leurs sont accordées dans les tâches qui leurs sont confiées.

M. Marois: S'il y a des abus, des sanctions peuvent être prises.

Le Président (M. Bordeleau): Alors, ça va, l'article 87 sera-t-il adopté?

M. Marois: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté.

M. Pagé: Pardon?

Le Président (M. Bordeleau): L'article 87 est adopté?

M. Pagé: Oui.

Le Président (M. Bordeleau): Article 88.

M. Marois: II y a un amendement, on va distribuer le texte.

M. Pagé: De forme, de fond, non?

M. Marois: A la quatrième ligne, le texte qui suit le chiffre 223 est refait; au lieu de prévoir que c'est 10% des travailleurs qui peuvent demander que soit désigné un représentant à la prévention, le nouveau texte prévoit que "un représentant peut être désigné sur avis écrit de l'association accréditée et, s'il n'y en a pas, sur avis écrit de 10% des travailleurs".

Au fond, c'est la transposition de la formule qui était établie à l'article 69. Vous avez le texte reformulé que ça donne.

Le Président (M. Bordeleau): Le nouvel article 88, avec les amendements suggérés, se lirait donc comme suit: "Quel que soit le nombre de travailleurs d'un établissement appartenant à une catégorie d'établissements au sein desquels un comité de santé et de sécurité peut être formé selon le règlement adopté en vertu du paragraphe vingt-deuxième de l'article 223, une ou des personnes sont désignées parmi les travailleurs de cet établissement pour exercer les fonctions de représentants à la prévention, sur avis écrit transmis à l'employeur par une association accréditée ou, s'il n'y en a pas, par au moins 10% de ces travailleurs. Une copie de cet avis doit être transmise à la commission."

L'amendement à l'article 88 sera-t-il adopté?

M. Pagé: Le représentant est membre du comité de santé.

M. Marois: S'il y a un comité.

M. Pagé: Oui. Il a droit de vote?

M. Marois: Comme les autres, c'est-à-dire...

M. Pagé: Sauf le médecin qui n'a pas le droit de vote.

Le Président (M. Bordeleau): L'amendement à l'article 88 est adopté?

M. Pagé: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté. Le nouvel article 88 tel qu'amendé est donc adopté. Article 89.

M. Pagé: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté. Article 90.

M. Pagé: Ah! Cela, c'est un peu plus long, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Toute la gamme des pouvoirs auxquels je faisais référence tout à l'heure qui sont prévus comme appartenant au représentant à la prévention. Il va faire ça presque à temps plein, M. le ministre?

M. Marois: Pas nécessairement. Encore une fois...

M. Pagé: Ah oui, écoutez, regardez les pouvoirs qui sont là, il y en a beaucoup.

M. Marois: Je rappelle au député, encore une fois, la réponse que je lui ai donnée tantôt; je pense qu'il faut lire les articles les uns par rapport aux autres. J'attire votre attention à nouveau sur l'article 92, premier paragraphe, deuxième paragraphe. Si vous avez une entreprise de très grande taille, ce n'est pas impossible, ce que vous évoquez.

M. Mailloux: Les contraintes...

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: ... qui sont aux articles que mentionne le ministre, ça va être difficile de les faire appliquer à la lettre, ça va prendre encore de la bonne volonté. Cela va prendre la bonne foi des deux parties.

M. Pagé: M. le Président, ce que veut mettre en relief mon collègue de Charlevoix, c'est le danger, compte tenu des pouvoirs prévus à l'article 90. Nous ne sommes pas contre les pouvoirs qui sont prévus là, les pouvoirs qui lui sont attribués, au contraire. Je pense que ce qui est là, c'est bien. Mais le danger, c'est que ce qui est bien ici, de par le comportement de la personne qui aura ces attributions en vertu de la loi...

On a vu au début — et je pense que tout le monde se le rappellera — que, lorsque le principe des délégués de chantier a été énoncé dans le secteur de la construction, les objectifs recherchés étaient tout à fait louables. On a vu ce que cela a fait dans certains cas. Il y a quand même un danger. Il ne faudrait jamais que le représentant à la prévention devienne plus sensible ou plus préoccupé par certains sujets ou certaines actions à l'intérieur de l'entreprise, en pleine période de négociations. Il ne faut pas que cela devienne un agent syndical parce qu'à ce moment-là, tout le débat aurait été faussé et l'intention du législateur n'aurait pas été atteinte du tout.

La mise en garde que je faisais et l'appréhension que j'énonçais ici... Je me demandais quelles sont les dispositions à l'intérieur du projet de loi qui peuvent garantir et les travailleurs... Parce que ce n'est certainement pas dans l'intérêt des travailleurs ni de l'employeur non plus. Ce n'est dans l'intérêt de personne que cette personne, qui a des pouvoirs en vertu de l'article 90, déborde le cadre de l'objectif pour lequel sa fonction est mise sur pied.

Quand on lit tout cela, M. le Président, il y en a. Entre autres, j'aimerais demander au ministre s'il peut nous assurer qu'en aucun temps, le représentant à la prévention ne pourra se faire remplacer ou assister par une personne de l'extérieur.

M. Marois: Mais où et sur quoi? M. Pagé: Je vous le demande.

M. Marois: Sur quoi le député de Portneuf, à la lecture du texte de loi peut-il même appuyer la formulation d'une question comme celle-là?

M. Pagé: On a vu tout à l'heure que l'inspecteur peut se faire accompagner d'une personne s'il le juge opportun. C'est mentionné comme tel. Mais je vous le demande. Dites-moi non.

M. Marois: Non.

M. Pagé: En aucun temps, le représentant à la prévention ne pourra se faire accompagner d'une personne de l'extérieur. C'est non.

Le Président (M. Bordeleau): Cela va? M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: M. le Président, je pense bien que le ministre ne répondra pas à mon interrogation, concernant cet article ou un autre. Cela concerne le représentant à la prévention. La grande interrogation que je me pose est la suivante. Quand on parle d'obligation qu'on pourrait faire à l'ensemble des sociétés, industries ou autres, où il y a vingt personnes et plus, où il pourrait être demandé par un syndicat ou des employés de nommer, au comité de prévention, un représentant à la prévention, pourquoi le ministre, dans tous les cas — on a mentionné les banques en particulier; ce n'est pas parce que je veux protéger les banques, elles sont capables de se défendre, mais il y a d'autres activités où il n'y a pas plus de danger que cela — laisse-t-on une porte ouverte, comme cela, dans toutes les activités où il n'y a jamais eu d'accidents ou à peu près, où il n'y a jamais eu de maladie? On ne leur fait pas l'obligation d'avoir un représentant à la prévention. On leur permet d'en demander un. Vous allez amplifier tout le travail qu'aura à effectuer la commission que vous allez mettre en place, qui devra s'occuper non seulement des secteurs prioritaires où il faut que le gouvernement intervienne... Nommez-moi un syndicat, même dans une banque où il y a vingt employés, même s'il n'y a jamais eu d'accident ou de maladie, qui ne demandera pas d'être couvert par la loi 17. Trouvez-moi un syndicat et je me retire de la table. Cela va être demandé partout, créant — excusez l'expression — des emmerdements là où il n'y a pas eu de maladie et d'accidents.

C'est un peu là le sens des réflexions qu'on a faites en Chambre. Qu'on aille vers les secteurs prioritaires, je pense qu'il n'y a personne qui s'oppose à cela. Et ils sont tellement nombreux que la commission ne pourra jamais, malgré les effectifs que vous allez lui accorder, aller au fond des choses et nettoyer la place. Là, on donne une permission; avec une ouverture semblable, partout où il n'y a pas eu de problème, pas de maladie, les syndicats vont l'exiger immédiatement.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Marois: M. le Président, je pense que j'inviterais les députés à relire attentivement les articles 87, 88, 123, paragraphe 22, etc. A l'article 87, lorsqu'il existe un comité de santé et de sécurité... Il existe un comité de santé et de sécurité, à moins qu'il n'y en ait déjà un qui soit en place, que prévoient des dispositions transitoires, quand une entreprise tombe dans l'un ou l'autre des secteurs prioritaires déterminés par règlement de la commission, en concertation avec le monde patronal et le monde syndical.

Deuxièmement, l'article 88, dans le cas où il n'y a pas de comité paritaire: "Quel que soit le nombre de travailleurs d'un établissement appartenant à une catégorie d'établissements au sein desquels un comité... peut être formé selon..." C'est donc un établissement tombant dans la liste des entreprises des secteurs prioritaires. Je l'ai souvent dit, c'est évident que les problèmes qui apparaissent dans la grosse banque machin ou à la grosse caisse populaire unetelle seront en commune mesure avec les problèmes d'une fonderie. On va démarrer en concertation avec le monde patronal et le monde syndical, comme on l'évoquait à la page 271 du livre blanc, par les coins où, forcément, il y a des taux d'accidents et des maladies qui sont devenus quelque chose d'inacceptable.

En d'autres termes, ce qu'évoque le député de Charlevoix, c'est comme cela que les choses vont se passer dans les faits.

M. Mailloux: M. le Président, je comprends le ministre et je voudrais que ce soit seulement dans les secteurs prioritaires où il y a des problèmes. Mais tel que le projet de loi est rédigé, le comité de santé et de sécurité, le représentant, n'importe quelle industrie, une banque ou autre, aura le droit de le mettre en place. Où est-ce que c'est exclu? Dans quel article est-ce exclu?

M. Marois: Puisque c'est déterminé par un règlement qui définit les secteurs prioritaires pour les fins de mise en place d'un comité de santé et de sécurité...

M. Mailloux: Bon.

M. Marois:... à l'article 87, comme c'est le cas d'ailleurs pour les représentants à la prévention à l'article 88; cela s'infère sur une base strictement juridique des textes tels qu'ils sont présentement libellés.

Si, par ailleurs, comme c'est déjà le cas dans certaines entreprises — il n'y a pas de loi 17 — il existe une convention collective, les travailleurs l'ont négociée et l'ont obtenue et l'employeur est d'accord, vous n'allez quand même pas nous dire que vous voulez que, par la loi 17, on leur enlève ce qu'ils ont déjà d'acquis.

M. Mailloux: Non.

M. Marois: Indépendamment des secteurs prioritaires qui pourraient être déterminés, si des parties conviennent, à côté, parallèlement, de se donner ce mécanisme, elles se le donnent et c'est sur une base librement consentie entre les parties.

M. Mailloux: Je viens de comprendre du ministre que c'est par règlement et non pas par la loi qu'on pourra faire des exclusions. J'aurais de beaucoup préféré, en raison de la connaissance qu'a la CAT des années antérieures, que, dans une loi, non pas par règlement, soient exclues des catégories où il n'y a jamais eu ni accident, ni maladie. Je fais confiance au ministre pour les règlements, mais il demeure quand même que les hommes politiques passent et que les règlements restent.

M. Marois: Je voudrais simplement, en terminant, ajouter ceci, M. le Président: Nous avons opté, sur la base de l'acceptation de la recommandation ou de ce qui semblait être en tout cas un des consensus qui ressortaient encore une fois du premier sommet socio-économique où les parties, aussi bien le monde patronal que le monde syndical et le gouvernement, se sont dites d'accord que l'ensemble non seulement de la préparation de la réforme, mais de l'application d'une réforme comme celle-là puisse se faire en concertation avec elles. Il y a une possibilité d'approche et c'est le gouvernement qui vient déterminer les priorités. Alors, on s'assoit à une table et on en discute ensemble. Cela se transpose dans un projet de règlement. En terminant, je rappellerai au député qu'ultimement, il n'y a pas un règlement adopté sans qu'il le soit, en fin de compte, par le gouvernement.

Le Président (M. Bordeleau): L'article 90 sera-t-il adopté?

Une Voix: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté. L'article 91.

M. Pagé: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté. L'article 92.

M. Pagé: L'article 92, c'est au cas où ils ne s'entendent pas sur le temps à consacrer à ces activités. C'est le règlement qui le détermine selon la catégorie de l'entreprise.

M. Marois: C'est cela.

Le Président (M. Bordeleau): L'article 92 est-il adopté?

Une Voix: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté. L'article 93.

Une Voix: Adopté.

M. Pagé: Quel genre d'avis doit être donné? Il est indiqué, à l'article 93: "Le représentant à la prévention doit aviser son supérieur immédiat, ou son employeur ou son représentant, lorsqu'il s'absente de son travail pour exercer ses fonctions."

M. Marois: L'avis verbal au sens des avis généraux, comme c'est le cas, conformément à l'économie générale des relations de travail.

Le Président (M. Bordeleau): L'article 93 est-il adopté? Adopté. Article 94. Adopté. (20 h 15)

M. Pagé: Ici, on fait présomption... Cela va en fait avec les pouvoirs du représentant à la prévention. Il est, entre autres, indiqué ceci, à l'article 90, M. le Président, vous me permettrez de les citer, parce que ce sont quand même des pouvoirs assez exorbitants et c'est ce pourquoi d'ailleurs elle a insisté sur la compétence de participer à l'identification et à l'évaluation des caractéristiques concernant..." Non, c'est plus haut. Identifier les situations qui peuvent être sources de danger pour les travailleurs, faire les recommandations qu'il juge opportunes, assister les travailleurs, porter plainte, participer à l'idendification et à l'évaluation des caractéristiques concernant les postes de travail. Cela va demander beaucoup de compétence.

D'ailleurs, il est explicable qu'à l'article 94, vous demandiez de fournir des instruments ou appareils dont il peut raisonnablement avoir besoin, mais il faudra s'assurer que ce seront des gens compétents. J'ai hâte de voir comment on va faire pour s'en assurer.

Le Président (M. Bordeleau): Article 94. Adopté?

M. Pagé: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Article 95.

M. Pagé: La consultation des parties, c'est par la parité au sein de la commission?

M. Marois: Par le biais des associations sectorielles, les parties sont aussi présentes.

Le Président (M. Bordeleau): Article 95, adopté. Article 96.

M. Pagé: On l'a déjà dit, je pense, M. le Président, le ministre pourra me corriger, à l'article 96, on dit: "Le représentant à la prévention est réputé être au travail lorsqu'il exerce les fonctions qui lui sont dévolues." On a déjà dit que le temps qu'il devait prendre pour remplir ses fonctions était rémunéré, était pris à même son temps de travail; on l'a déjà dit, je pense? Pourquoi créer une présomption?

M. Marois: C'est exactement la reproduction de la même disposition que pour la participation des travaux au comité de santé.

M. Pagé: Au comité.

M. Marois: Concordance.

M. Pagé: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): Article 96. Adopté. Article 97.

M. Jolivet: II ne posera pas de question. Avec division.

M. Pagé: Article 97, vous allez être sur division.

Le Président (M. Bordeleau): Article 97, adopté sur division.

M. Pagé: C'est lui qui le dit.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté sur division.

M. Perron: Pour les raisons que vous avez données la semaine dernière.

M. Pagé: L'autre jour, oui.

Le Président (M. Bordeleau): Article 98.

M. Pagé: On vous aide. Il aurait passé comme ça sans que vous n'enregistiez votre dissidence si on ne vous l'avait pas dit. Vous ne pourrez pas dire qu'on n'est pas contributif.

M. Marois: Ce qu'on ne peut pas entendre!

Le Président (M. Bordeleau): Je vous rappellerais, M. le député de Duplessis, qu'il faudrait peut-être que vous demandiez la parole pour paraître au journal des Débats.

M. Perron: Merci, M. le Président.

M. Mailloux: M. le Président, je pense que, si le député de Duplessis apporte sa dissidence à l'article 97, je voudrais de nouveau apporter ma dissidence sur le fait qu'on ne m'a jamais expliqué, de façon parfaite, ce qu'est exercer de façon abusive.

M. Jolivet: On ne vous a pas expliqué de façon abusive.

M. Mailloux: Non, on ne m'a pas expliqué ça, comment cela allait être interprété.

Les associations sectorielles

Le Président (M. Bordeleau): Article 98. M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Qu'est-ce qu'il y a eu de changé? La réimpression n'a rien apporté de nouveau concernant les associations sectorielles.

M. Marois: Oui, on a précisé, à l'article 98, qu'il n'y a qu'une seule association sectorielle qui peut être constituée par un secteur d'activité, cela n'était pas prévu dans le texte antérieur.

A l'article 99, on établit la concordance, pour les fins de relations de travail dans l'industrie de la construction, avec l'article 98. L'article 100 n'est pas changé. L'article 101, les fonctions pour l'essentiel, c'est au paragraphe 2 qu'on a modifié la façon de dire les choses.

Le Président (M. Bordeleau): Oui, M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: Le fait qu'une association sectorielle puisse mettre en place un comité de santé et de sécurité n'exclut pas l'obligation que chacune des industries, à l'intérieur d'une telle association sectorielle, doit également, dans chaque entreprise, avoir le même comité de santé.

M. Marois: Si elle tombe dans les secteurs prioritaires déterminés par règlement. L'association sectorielle ne met pas sur pied un comité de santé et de sécurité. L'association sectorielle, c'est le regroupement, le représentant, le porte-parole du monde des travailleurs, du monde patronal, à l'intérieur d'un secteur économique donné. C'est pour un certain nombre de fins évoquées notamment à l'article 101.

M. Mailloux: Cela va.

M. Marois: Elle peut aider, comme on l'a évoqué tantôt, à la mise en place, au fonctionnement...

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Les associations sectorielles, je présume, seront un interlocuteur privilégié pour la commission lorsque ce sera le temps d'édicter des normes particulières à certaines catégories d'entreprises.

M. Marois: C'est tout à fait exact que ce seront des interlocuteurs privilégiés. D'ailleurs, l'article 101, paragraphe 3...

M. Pagé: Formation, information, recherche et conseil.

M. Marois: Troisièmement de l'article 101, ses fonctions.

Le Président (M. Bordeleau): Cela va? Est-ce que l'article 98 est adopté?

M. Pagé: Adopté, M. le Président. Le Président (M. Bordeleau): Adopté.

M. Pagé: A l'article 99, M. le Président, je demande la suspension, afin qu'on y revienne lorsqu'on touchera plus spécifiquement le secteur de la construction.

M. Marois: Vous pensez qu'il y a lieu? Pour l'essentiel, c'est l'article 98. En pratique, si vous regardez le décret de la construction, le paragraphe 26.10, pour l'essentiel, vous avez là la base de l'article 99.

M. Pagé: Lorsque j'ai demandé de suspendre l'article 99, je voulais l'aborder en même temps que l'article 194 qui est un chapitre spécifique au monde de la construction, le chapitre XI; compte tenu du caractère général des dispositions de l'article 99, il y aurait peut-être lieu de les adopter quand même.

M. Marois: Mais c'est déjà prévu, comme je l'indique, à l'article 26.10. C'est la base du décret. Dans ce cas-là, c'est obligatoire.

Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que l'article 99 est adopté?

M. Pagé: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté. Article 100.

M. Pagé: De toute façon, on va y revenir aux articles relatifs au secteur de la construction.

Le Président (M. Bordeleau): Article 100.

M. Pagé: Acombien évaluez-vous les subventions qui pourront être versées aux associations sectorielles?

M. Marois: Tout dépend du rythme d'implantation. Vous savez qu'il y a déjà un certain nombre d'expériences, relativement limitées en nombre, de mise en place, de commencement de mise en place d'un certain nombre d'associations sectorielles. Il y a l'ébauche qui est là. Je pense que, pour l'instant, c'est prématuré. Honnêtement, je ne suis pas à même de répondre de façon très précise.

M. Pagé: Ces fonds proviendront d'un fonds spécial ou du fonds général de la commission?

M. Marois: Cela proviendra des fonds généraux de la commission, provenant des ajustements de cotisation en conséquence, pour les fins de prévention.

Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que l'article 100 est adopté?

M. Pagé: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté. Article 101.

M. Pagé: Vos amendements au secteur de la santé nous obligeraient presque à suspendre l'article 101, compte tenu de l'article 101.

M. Marois: Vous voulez amender quoi?

M. Pagé: On aura des amendements après l'article 106. A l'article 107, notamment, et les suivants. Cela nous amènerait presque à suspendre l'article 101, présumant que le ministre pourrait accepter nos amendements, compte tenu qu'on dit, à l'article 101, que l'association sectorielle a le pouvoir de collaborer avec la commission et les chefs de département de santé communautaire à la préparation des dossiers ou d'études sur la santé des travailleurs et sur les risques auxquels ils sont exposés.

On peut l'adopter et accepter d'y revenir si besoin en est.

Le Président (M. Bordeleau): Alors, on suspendrait l'article 101?

M. Marois: On ne le suspendra pas. On y reviendra s'il y a lieu.

M. Pagé: Sous réserve d'y revenir s'il le faut.

Le Président (M. Bordeleau): L'article 101 est donc adopté, sous réserve d'y revenir, s'il y a lieu. Article 102. Adopté? Adopté. Article 103.

M. Pagé: "103. Une association n'a aucun droit d'intervention ni de consultation au niveau des relations de travail. "Elle ne possède aucun pouvoir de cotisation ".

Entre autres, lorsque j'exprimais des réserves tout à l'heure sur l'association sectorielle dans le secteur de la construction, c'est qu'au sens de la loi, l'association d'employeurs qu'est l'Association des entrepreneurs en construction du Québec, l'ACEQ, n'a qu'un rôle de négociation. Je me demande, lorsqu'on sera arrivé à l'article 194, si on pourra, compte tenu de la loi constitutive de l'AECQ, lui donner d'autres attributions que celle-là sans modifier pour autant la loi constitutive de l'AECQ et la Loi sur les relations de travail dans l'industrie de la construction.

M. Marois: Je pense qu'il faut bien faire une distinction entre ce que vient d'évoquer, M. le Président, le député de Portneuf et l'association sectorielle comme telle. Un certain nombre de fonctions sont dévolues à l'association sectorielle. A ce moment-là, il est important de distinguer ce qui est du domaine des relations de travail qui est prévu par ailleurs dans d'autres lois et décrets et ce qui est prévu ici.

Le Président (M. Bordeleau): L'article 103 sera-t-il adopté?

M. Pagé: Adopté, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté. L'article 104. Oui, M. le député de Portneuf.

Les associations syndicales et les associations d'employeurs

M. Pagé: L'article 104, M. le Président, c'est la possibilité pour la commission d'accorder des subventions pour la formation et l'information de ses membres dans les domaines de la santé et de la sécurité du travail. Je trouve que c'est assez général. Ce sont seulement trois articles, les articles 104, 105 et 106. Cela peut impliquer des sommes importantes. C'est une responsabilité qui serait importante, soit la formation et l'information. Je trouve que le législateur ne parle pas beaucoup. Le législateur établit le principe purement et simplement sans aucune autre obligation.

M. Marois: Oui.

M. Pagé: Aucune obligation n'est faite à des organismes qui pourraient recevoir des subventions éventuellement à l'obtention de résultats. De quelle façon pourra-t-on s'assurer que ces sommes seront dépensées dans le cadre du programme pour lequel elles ont été accordées? Je trouve que c'est assez général, les articles 104, 105, 106.

M. Marois: La réponse à la question posée par le député de Portneuf, c'est l'article 106 qui la donne.

M. Pagé: Oui, c'est le moins...

M. Mailloux: Pourquoi ne devrait-elle pas, ne donnerait-elle pas l'obligation?

M. Pagé: ... qu'on puisse exiger à l'article 106. "La Commission peut en tout temps exiger d'une association syndicale ou d'une association d'employeurs des renseignements sur l'utilisation des montants accordés." Cela voudrait donc dire que la seule obligation qu'il y a, c'est d'exiger des renseignements, non pas d'exiger des résultats.

M. Marois: En conséquence, cela lui permettra par la suite, sur la base de l'évaluation de ce qui a été fait, d'ajuster ses politiques.

Une Voix: Un instant!

M. Marois: Cette tranche-là du budget de la commission, je le rappelle, sera forcément discutée. Il s'agit des grandes politiques. Les grandes politiques feront l'objet de discussions au conseil d'administration de la commission. Encore une fois, le conseil d'administration de la commission est composé des représentants du monde patronal et des représentants du monde syndical, la partie gouvernementale étant représentée par le président-directeur général. En d'autres termes, vous avez là un certain nombre de balises de base qui sont inhérentes à la composition même de la commission.

M. Pagé: Est-ce que vous avez demandé les commentaires du Vérificateur général sur la possibilité d'une telle disposition?

M. Marois: II existait — le député de Portneuf s'en souviendra sûrement — et il existe toujours, jusqu'à l'adoption du présent projet de loi, des dispositions analogues dans la Loi de la Commission des accidents du travail. Sous réserve, si ma mémoire est bonne, ce sont les articles 110 et 111.

M. Pagé: Oui. (20 h 30)

M. Marois: Forcément, le Vérificateur général qui procède à l'examen des livres chaque année a amplement et largement regardé ces choses et vous avez le rapport du Vérificateur général chaque année. De plus, vous avez aussi l'article 165 qui stipule que les livres et les comptes de la commission sont vérifiés annuellement par le Vérificateur général et, en outre, chaque fois que le décrète le gouvernement, le certificat du vérificateur doit accompagner le rapport annuel de la commission.

M. Pagé: Je suis d'accord à l'égard de la commission, mais non pas nécessairement à l'égard des organismes qui auront reçu des subventions.

M. Marois: Forcément aussi des budgets qui sont octroyés, de l'utilisation des budgets, de l'évaluation qui en est faite à partir des rapports qui sont remis.

Le Président (M. Bordeleau): Cela va, M. le député de Portneuf?

M. Marois: Et ces subventions s'adressent aussi bien aux associations représentant les travailleurs qu'aux associations de travailleurs.

M. Pagé: Oui, mais ce n'est pas parce que...

M. Marois: L'APAI, par exemple, le député sait fort bien que l'APAI a bénéficié de subventions plus ou moins substantielles de la Commission des accidents du travail du Québec. Tout ça était vérifié par le Vérificateur général, il y avait des évaluations qui étaient demandées et le reste.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: M. le Président, mon collègue en arrière me fait signe que l'article 106 n'est même pas nécessaire parce que la Loi de l'administration financière fait obligation à tout syndicat ou association qui reçoit des subventions de faire rapport annuellement. Si ceci est la vérité, je n'ai pas l'assurance, d'après l'expérience passée, que rapport est fait de toutes les subventions de tel type accordées, je n'ai pas cette assurance. Je ne suis pas certain de ça.

Quant à laisser l'article 106, pourquoi ne met-on pas simplement "doit"? "La commission doit exiger en tout temps d'une association syndicale ou d'une association d'employeurs des renseignements sur l'utilisation des montants accordés." De toute façon, si la Loi de l'administration financière en fait obligation, ce n'est pas "peut", c'est "doit". Sinon, l'article n'a pas sa raison d'être.

M. Marois: Ce qui est prévu, d'après mes renseignements, sur la base de la Loi de l'administration financière, c'est qu'il y a obligation qui est faite d'exiger, annuellement, une chose; on n'a pas à reprendre ce qui est dans la Loi de l'administration financière. Ce qui est évoqué ici, c'est un élément additionnel, de plus, qui permet, "peut en tout temps exiger"; donc, ça surajoute à ce qu'évoquait votre collègue en vous glissant un petit mot de la banquette arrière.

M. Mailloux: Le ministre me dit que c'est simplement une addition qu'on fait pour permettre à la commission qui sera en place d'avoir les renseignements. Si la Loi de l'administration financière fait déjà obligation, annuellement, il ressort que la commission pourrait, à ce moment-là... Et elle reçoit, en fait, les renseignements que lui fournit le Vérificateur général. Amoins que le législateur ne veuille dire par là qu'elle peut en tout temps, en cours de route, non pas seulement lors des rapports annuels...

M. Marois: C'est exactement ça, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Duplessis.

M. Perron: Merci, M. le Président, ce serait dans un cas bien précis, où il y aurait une espèce d'enquête ou d'étude à faire par la commission, si je comprends bien.

M. Marois: Pardon?

M. Perron: J'ai dit que l'article 106 servirait, à un moment donné, si la commission voit une faille ou quelque chose comme ça, qui pourrait amener une mauvaise répartition ou une mauvaise utilisation des fonds; on peut alors s'en servir en tout temps pour appeler l'association, soit le côté patronal ou l'autre côté, devant la commission, pour faire rapport.

M. Marois: C'est exact, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que l'article 104 sera adopté?

Des Voix: Adopté.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté. Article 105.

M. Mailloux: Adopté...

M. Pagé: A l'article 105, M. le Président, la commission peut, en outre, accorder une subvention à une association syndicale ou à une association d'employeurs. Association syndicale, si on se réfère à la définition qui n'est pas adoptée encore...

M. Marois: C'est l'article qu'on a laissé en suspens.

M. Pagé: Oui. C'est un groupement de salariés au sens du Code du travail.

M. Marois: Oui.

M. Pagé: Et une association d'employeurs? Une association d'employeurs au sens du Code du travail, cela ne peut pas être un employeur unique.

M. Marois: On y verra plus clair quand on reviendra à l'article qu'on a laissé en suspens. Notamment, on proposera un amendement à la définition d'association d'employeurs, pour qu'il soit très clair que c'est un groupement d'employeurs, une association de groupements d'employeurs ou une association regroupant des employeurs et des groupements d'employeurs qui ont pour but, etc.

M. Pagé: L'article 104 a-t-il été adopté?

Le Président (M. Bordeleau): L'article 104 a été adopté.

M. Pagé: Sur division.

Le Président (M. Bordeleau): Sur division.

M. Mailloux: La vraie division.

M. Pagé: Oui, la vraie division.

Le Président (M. Bordeleau): La vraie division. Je rappelle que l'article 104 est adopté sur division. Et l'article 105 serait suspendu?

M. Pagé: L'article 105 est adopté sur division.

Le Président (M. Bordeleau): L'article 105 est adopté sur division. Article 106?

M. Pagé: Sur division.

Le Président (M. Bordeleau): L'article 106 est adopté sur division. Article 107.

La santé au travail

Programmes de santé et contrat type

M. Pagé: M. le Président, on a sept chapitres adoptés. On touche au chapitre VIII qui concerne la santé au travail, les programmes de santé et le contrat type à la première section, le médecin responsable, le programme de santé spécifique à un établissement, le chef du département de santé communautaire, la reconnaissance de certains services de santé.

Je dois vous dire qu'à l'égard de ces articles, d'une part, mon collègue, le député de Saint-Laurent, a eu l'occasion de se pencher plus spécifiquement sur la teneur des dispositions prévues à ces articles. Et, d'autre part, compte tenu que je devrai m'absenter d'ici quelques minutes pour participer à la commission parlementaire de l'énergie sur le conflit à Hydro-Québec, je laisserai donc le soin à mon collègue, le député de Saint-Laurent, de commenter et de proposer des modifications, le cas échéant, sur les articles 107 et suivants.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, j'aimerais poser une question au ministre, s'il me le permet. Il y a, dans le premier article de ce chapitre VIII, une expression qui me semble mystérieuse parce qu'elle n'est expliquée nulle part, ni dans un article, ni dans les définitions initiales. J'apprécierais que le ministre nous dise ce qu'il comprend par l'expression "programmes de santé au travail"; quel est le contenu d'un tel programme; qu'est-ce que cela vise exactement et en quoi un programme de santé au travail se distingue des règlements qui seraient adoptés par la commission en vertu des articles subséquents qui traitent des pouvoirs réglementaires, au nombre de 42 ou quelque chose du genre. L'article 180; non, c'est un peu plus loin, je m'excuse.

L'article 223: La commission peut faire des règlements pour (et là, il y a une liste de 42 pouvoirs réglementaires); on ne mentionne nulle part, dans les 42 pouvoirs réglementaires, le programme de santé. Il faut donc présumer que le programme de santé a un contenu qui est distinct et différent des 42 règlements prévus, ce qui laisse peu de place à l'imagination, M. le Président. Nous sommes donc doublement impatients de connaître quel est le contenu de ces programmes de travail, à qui ils s'adressent exactement et quelle espèce de programmation le ministre a en tête.

S'agit-il d'un programme global, d'une espèce de plan quinquennal ou d'un plan probablement de dix ans de travail pour la commission elle-même ou est-ce que ce sont des prescriptions obligatoires qui s'adressent aux départements de santé communautaire ou qui s'adressent aux établissements? Exactement, de quoi parle-t-on?

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre. M. Marois: M. le Président, la réponse à la question posée par le député apparaît à l'article 113.

M. Forget: Si je comprends bien le ministre, la commission va élaborer des programmes de santé qui sont confiés à la responsabilité du médecin responsable des services de santé, parce qu'à l'article 113, on dit que le programme de santé spécifique à un établissement doit prévoir un certain nombre de choses. Il est élaboré, en vertu de l'article 112, par le médecin responsable. Le médecin responsable va-t-il se borner à faire une photocopie du programme de santé ou y a-t-il d'autres éléments? On a quand même l'impression qu'on donne des responsabilités, à l'article 112, au médecin responsable des services de santé et, un peu plus loin, on donne d'autres responsabilités au chef du département de santé communautaire. Y a-t-il effectivement une discrétion qui est laissée à ces deux personnes ou n'ont-elles, encore une fois, qu'à copier pratiquement mot à mot le programme de santé qui a été déterminé par la commission?

M. Marois: Elles n'ont pas à copier, M. le Président, elles ont à respecter le minimum de base qui est déterminé dans les programmes-cadres, sur la base des contrats types qui sont déterminés et de s'assurer de l'ajustement, de l'adaptation, à la lumière des problèmes qui ont pu être dépistés dans tel ou tel établissement, de s'assurer qu'un programme de santé spécifique à un établissement doit prévoir un certain nombre de choses en s'ajustant à la réalité de ces établissements-là. D'ailleurs, le député aura sans doute noté, M. le Président, conformément à des recommandations qui ont été faites en commission parlementaire, notamment par bon nombre de professionnels de la santé qui sont intervenus devant nous, d'autres groupes et de remarques de députés aussi qu'on a ajouté, pour que ce soit très clair, à cette notion de programme de santé, toute la dimention de l'hygiène industrielle.

M. Forget: M. le Président, je reviens à ma question, parce que le ministre n'y a pas répondu. Finalement, il dit: II y aura des adaptations d'un minimum qui sera contenu dans le programme de santé émis par la commission. C'est très joli de parler de modifier ou d'ajouter à un minimum, mais encore faudrait-il nous dire en quoi consiste ce minimum. Pourrait-il nous donner des exemples, pour qu'on comprenne ce qu'il a à l'esprit? Encore une fois, il y a d'ailleurs des règlements. Est-ce que ces programmes de santé vont contenir des règlements? Est-ce que les règlements vont précéder les programmes de santé? Comment cela va-t-il s'enchaîner dans des cas précis? Qu'il prenne, s'il le veut, l'exemple précis d'une industrie, que ce soit une carrière ou que ce soit une fonderie, ou que ce soit n'importe quoi. Qu'est-ce qui va figurer dans le programme de santé? Est-ce que ce seront les règlements? Ces règlements seront-ils publiés avant que les programmes de santé soient publiés, de manière qu'on puisse se

référer aux règlements? Encore une fois, quel en sera le contenu?

M. Marois: M. le Président, je pense encore une fois que, d'une part, il y a une logique dans ces choses-là, il y a une logique qui tient au fait que, dans un premier temps, la commission, conformément à ce qui est mentionné à l'article 107, premier paragraphe, va élaborer des programmes de santé au travail devant s'appliquer sur les territoires ou aux établissements ou catégories d'établissements qui seront déterminés. Il y aura aussi un contrat type...

M. Forget: Oui, je suis capable de lire; j'ai vu cela dans le texte.

M. Marois: ... indiquant le contenu minimal des contrats qui devront intervenir entre un certain nombre d'intervenants. Partant de là, il y a des responsabilités de base qui laissent la marge de jeu normale. Il s'agit de professionnels de la santé présumément qualifiés et compétents, reconnus comme tels selon les mécanismes normaux de reconnaissance de la qualification professionnelle, d'une part, et, d'autre part, les professionnels sont choisis conformément aux procédures qui seront établies, connues, courantes, par le conseil des médecins et dentistes. Ces gens-là devront avoir la responsabilité de s'assurer que sera mis au point, en conséquence, à partir de la base définie par les programmes de base de la commission, un programme spécifique à un établissement, de s'assurer que ce soit adapté à la réalité de l'établissement en tenant compte de l'ensemble des problèmes qui ont pu être dépistés dans une entreprise donnée et conformément à la procédure prévue à l'article 113. (20 h 45)

M. Forget: On n'ira pas à la procédure tout de suite, M. le Président, j'attends encore une indication concrète de ce minimum. Le ministre insiste en disant que cela va être modifié, que cela va être appliqué par des gens compétents. Je veux bien comprendre cela; d'ailleurs, c'est traité par les autres articles, on va les attaquer un par un, les articles; j'aimerais savoir ce qu'il va y avoir dans un programme de santé. Quelles sont ses exigences minimales que la commission va formuler vis-à-vis des carrières, vis-à-vis des fonderies, vis-à-vis des tanneries? Est-ce que c'est une description du contenu minimum de leur examen médical de préembauche? Est-ce qu'on va avoir un profil, en quelque sorte, de la surveillance médicale à exercer dans le milieu de travail? Est-ce que ce sont des normes minimales visant l'environnement, le contrôle et la façon de mesurer des qualités données de l'environnement, que ce soit le niveau de bruit, etc., qu'on va utiliser tel appareil, tel système de mesure, qu'on va le faire avec telle fréquence, etc.? Qu'est-ce qu'on a à l'esprit?

Est-ce qu'on va se référer tout simplement à une réglementation de caractère général qui aurait été élaborée précédemment? J'imagine que toutes ces hypothèses ont été explorées par le ministre avant d'en arriver à une expression aussi mystérieuse que "programme de santé". Je veux bien croire que cela va être appliqué par des gens compétents, mais j'imagine qu'on va leur dire quelque chose dans le programme de santé, non pas simplement les féliciter d'être compétents et d'avoir été nommés. Qu'est-ce qu'on a à l'esprit comme programme de santé, comme minimum exigé dans un secteur ou dans une catégorie d'établissement?

M. Marois: Je suis certain, M. le Président, que le député ne veut pas que je me substitue ici ce soir à la commission pour commencer à décider, sur un coin de table, ce que sera, de façon concrète, le programme de santé pour le cas des carrières, pour reprendre son expression.

M. Forget: Ce n'est qu'un exemple. Peut-être n'en avez-vous aucun à l'esprit, mais cela nous aiderait d'être un peu plus concret; c'est tout ce que je vise dans les questions au ministre.

M. Marois: Je laisse le soin, M. le Président, au député d'assumer la responsabilité des intentions qu'il veut prêter à qui il voudra. C'est sa responsabilité. Je dis simplement ce qui en est. Si je pouvais répondre de façon aussi concrète et précise dans le cas des carrières ou dans quelque cas que ce soit, le député nous dirait sans doute, peut-être pourrait-il nous dire que tout a été élaboré d'avance et qu'à nouveau, le gouvernement vient d'en haut imposer l'ensemble, toute une série de programmes déterminés jusque dans le détail le plus concret, que ce soit pour les carrières ou pour les mines, ou pour je ne sais trop quel autre secteur et qu'en conséquence, on a enlevé toute espèce de liberté en ne reconnaissant pas la compétence de base et la marge de manoeuvre normale qui doivent être dévolues à un professionnel de la santé dans ce domaine. Ce n'est pas du tout notre intention de procéder de cette façon.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, je pense que la réponse du ministre est éclairante par son ambiguïté ou son silence, elle est éloquente à bien des égards. Je suis persuadé, d'après la réponse, le tournage autour du pot auquel on vient d'assister, que, dans le fond, il n'y a de contenu d'aucune sorte dans l'esprit du ministre lorsqu'il emploie l'expression "programme de santé au travail". J'aimerais bien croire le contraire, mais on n'a pas été capable de me dire, même par référence à un exemple hypothétique, en quoi cela pourrait consister. Ce ne sont probablement pas des normes... On peut peut-être déduire avec un peu d'imagination de la réponse du ministre que ce ne sont sûrement pas des normes de caractère professionnel. On ne dira pas aux médecins et aux infirmières comment faire le travail. Si ce n'est pas cela, cela doit être autre chose qui n'est pas déjà dans

la réglementation, et ce ne sont pas des normes relatives au milieu de traval comme tel. Cela ne peut être que les exigences relatives à je ne sais quoi, parce qu'il reste que le contenu, le concept me semble extrêmement vague. Au niveau de l'établissement, on peut et on fera même des suggestions au ministre pour lui donner un contexte plus précis, de façon qu'on puisse vraiment se comprendre, parce qu'au niveau de l'établissement, on est dans une situation concrète où il y a des choses concrètes qu'on peut vérifier.

Encore une fois, cela demeure mystérieux; "programme de santé au travail", cela a l'air très joli, cela suggère toutes sortes de choses, mais rien en particulier. On nous dit: II faut donner ce pouvoir à la commission. Ce n'est pas très intelligent pour les législateurs de dire: On donne un pouvoir, on ne sait pas ce qu'il va en être fait. Et peut-être que rien ne pourra en être fait, parce qu'on est incapable de nous donner un exemple concret de son utilisation.

N'ayant pas réussi à trouver de réponse à cette question, on peut peut-être la mettre entre parenthèses, pour l'instant. Il y a un autre mot, dans ce premier paragraphe, qui m'étonne. Je ne sais pas si, pour ce mot, il y a au moins une explication. Ce sont les territoires. Jusque-là, on semble être devant une loi qui s'applique uniformément à tout le monde. Quand on parle de santé au travail, on parle de la santé au travail de tout le monde ou, du moins, quand il est question d'une catégorie, il n'y a pas de mineurs, de travailleurs de carrière, ou de travailleurs de la construction qui ont droit à un certain niveau de santé et de sécurité dans la région 03, mais qui n'en auraient pas besoin ou qu'il n'y aurait pas de garantie dans la région 04 ou 05. C'est avec une très grande surprise qu'on se rend compte que la commission peut élaborer des programmes de santé au travail seulement sur certains territoires au Québec et pas sur d'autres, ou faire des règlements, des normes, des programmes de santé — "whatever it means", comme disent les Anglais — mais différents d'un territoire à l'autre, à l'intérieur du Québec. Je ne sais pas ce qu'on vise avec cela, mais je serais intéressé à l'apprendre. Cela me semble une idée assez neuve dans le domaine de la santé et de la sécurité au travail que de faire des distictions sur le territoire.

M. Marois: M. le Président, cela peut paraître neuf au député de Saint-Laurent, mais il y a bien des choses qui vont lui paraître neuves parce que, dans le domaine de la santé, je me permets de lui rappeler qu'il y a 90% des entreprises où il n'y a pas de neuf, il n'y a rien du tout. Il y a l'équivalent d'environ un médecin par 1500 entreprises au Québec. Oui, c'est neuf. On démarre, il n'y a rien de fait.

M. Forget: Ne vous excitez pas. Répondez à la question.

M. Marois: M. le Président, je pense que j'ai écouté le député, je n'ai pas eu l'habitude de l'interrompre. Je lui demanderais d'avoir simplement le minimum de respect équivalent et, après, il pourra formuler les commentaires qu'il voudra.

M. Forget: Trop bien.

M. Marois: Je voudrais enchaîner... C'est votre point de vue. Vous avez droit à votre opinion. M. le Président, si le député veut accepter le minimum de respect des règles. Je ne pense pas l'avoir interrompu. Je suis prêt à l'écouter aussi longtemps qu'il voudra, jusqu'à une certaine limite. Je m'attendrais que l'inverse soit aussi vrai.

Ce qui existe présentement dans bon nombre d'entreprises, M. le Président, je suis sûr que le député, informé comme il l'est, le sait fort bien. Pour l'essentiel, les programmes de santé dans les entreprises se sont résumés à des programmes médicaux de préembauche. Cela s'est résumé à des programmes de premiers soins. Pour l'essentiel, cela a été centré sur du curatif. En d'autres termes, on n'a pas développé une médecine du travail qui soit accrochée à cette notion définie notamment par l'Organisation mondiale de la santé et qui veut qu'on arrime bien ensemble une notion de médecine du travail qui cherche... Bien sûr qu'il faut maintenir les services de premiers soins, les services curatifs, mais qu'on accroche enfin une approche épidémiologique fondamentale si on veut s'attaquer à la racine des problèmes. Cela suppose que c'est en relation directe avec ce qu'on appelle toute la dimension de l'hygiène industrielle, c'est-à-dire du milieu même du travail.

Ceci étant dit, on va prendre ce qui était au début. La commission pourra définir des programmes-cadres de base de santé, des contrats types pour fins d'adaptation à des établissements. On a introduit, c'est vrai, une notion de territoires. On a introduit une notion de catégories d'établissements et d'entreprises parce que, avec les nuances qui s'imposent, dans certains territoires, le député sait fort bien qu'on a affaire à des entreprises de type, qui sont plutôt du secteur minier. Dans d'autres cas, si on est dans le Bas-Saint-Laurent, en Gaspésie, les problèmes sont bien différents. Par la nature même des entreprises, des secteurs industriels qui sont développés, ce n'est pas du tout la même chose que dans d'autres régions.

Il est certain qu'un programme de santé au travail, dans la perspective que je viens d'évoquer, forcément, ne peut pas faire autrement, si on veut coller à la réalité, que de contenir des dimensions qui sont bien différentes selon qu'on traite, encore une fois, du secteur minier, du secteur des pêcheries, des pâtes et papiers, du secteur des forêts, etc. En d'autres termes, il nous faut introduire cette notion de territoire, de catégories d'entreprises, si on veut pouvoir se donner la souplesse pour ne pas arriver à quelque chose qui soit dans le genre: Voici le beau petit plan parfait, universel, sans tenir compte de la réalité. Il doit y avoir possibilité de s'ajuster aux réalités qui varient

selon les territoires et les secteurs industriels mentionnés, d'où la nécessité d'introduire les notions que le député relevait, M. le Président, au début de son intervention.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, on voit que la question que j'ai posée sur les programmes de santé était extrêmement pertinente et on se rend compte, d'après la réponse du ministre, que les programmes de santé ne seront pas des programmes de santé spécifiques à un secteur industriel, parce que, si ce sont des programmes de santé spécifiques à un secteur industriel, la dimension territoriale à laquelle vient de faire allusion le ministre n'a pas de raison d'être. Si on fait un programme de santé type pour l'industrie chimique ou l'industrie qui produit de la soude caustique, si on veut se limiter à cela... Je ne sais pas à quel niveau de généralité la commission va fonctionner et j'ai désespéré de l'apprendre ici ce soir. Mais qu'on le fasse au niveau d'une industrie ou d'un sous-groupe industriel, l'un ou l'autre, j'imagine qu'une usine de soude caustique en Gaspésie et une à Montréal vont être soumises aux mêmes normes. Je pense qu'au moins, on pourrait être d'accord là-dessus.

Je veux bien croire qu'il y a bien des inégalités et bien des endroits où il n'y a pas de services. Mais j'imagine qu'on n'est pas en train de faire la loi pour ratifier la situation actuelle, mais pour l'améliorer. Si on veut l'améliorer, on veut soumettre le même procédé industriel où qu'il soit pratiqué, que ce soit dans le Grand-Nord, dans la ville de Sherbrooke, en Gaspésie ou dans le Nord-Ouest du Québec, aux mêmes normes de santé, aux mêmes programmes de santé. A ce moment, si c'est cela qu'on veut dire par un programme de santé, je ne comprends pas la notion territoriale, parce que la notion territoriale suggère qu'il y a un recoupement, qu'on va faire des programmes de santé pour l'industrie de la soude caustique en Gaspésie et qu'on va faire un programme de santé pour la même industrie à Montréal. Là, je ne suis pas le ministre. Evidemment, à force d'être vague sur les mots, il pourra toujours me dire qu'avec des gens compétents et de bonne foi, ils pourront tout faire de toute façon, que ce sera bien et qu'on n'aura pas besoin de s'en occuper. Mais, à ce moment, on n'a pas besoin d'avoir un projet de loi de 275 articles. On pourrait dire: La commission de la santé va s'occuper de la santé au travail et on verra dans cinq ans si cela a marché. Mais si on prend le soin d'articuler 275 articles, c'est qu'on doit avoir des idées, des concepts clairs à l'esprit. Si on a des concepts clairs à l'esprit et si on s'adresse à des catégories d'établissements ou à des procédés industriels identifiés, on n'introduit pas la notion territoriale ou alors les programmes de santé sont des programmes de santé pour le Bas-du-Fleuve et il y a un autre programme de santé pour la Mauricie. Est-ce que c'est cela qu'on veut dire? C'est pour cela que je posais la ques- tion tantôt. On veut savoir au moins quelle est la géographie des activités de la commission.

M. Marois: M. le Président, je ne veux pas revenir sur ce que j'ai dit. Le député peut qualifier mon intervention de la façon qu'il le veut. C'est son plus libre droit et son choix. J'ai bien expliqué qu'il fallait introduire la notion de catégories d'établissements pour les raisons que le député vient lui-même de relever. Deuxièmement, j'ai aussi évoqué la nécessité et les premières raisons pour lesquelles il nous faut introduire la notion de territoire... D'autant plus que, si on veut que l'article 109 trouve application, je n'ai pas besoin de rappeler au député... Il le connaît encore mieux que moi, parce que c'est lui qui, pour l'essentiel, avec d'autres qui l'ont précédé, mais je pense qu'il a apporté une large contribution personnelle en vue de faire en sorte que les CHDSC et les DSC fonctionnent à l'intérieur d'un territoire délimité. Il nous faut donc introduire cette notion de territoire, forcément. Ce n'est pas le fait d'introduire une notion de territoire qui fait que, par exemple, sur un problème spécifique donné — il évoquait le cas de la soude caustique — c'est bien certain que, si ce problème est relevé dans un certain nombre de régions du Québec, dans un certain nombre de catégories d'établissements, il n'y a certainement pas 32 façons d'aborder le problème et il n'y aura certainement pas de variation par région ou par territoire donné, bien sûr, cependant, pour fins d'application de l'article 109, il faut qu'on introduise la notion de territoire. (21 heures)

M. Forget: M. le Président, je voudrais introduire un amendement qui se lit comme suit:...

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: "1. Remplacer les mots...

Le Président (M. Bordeleau): A quel article?

M. Forget:A l'article 107, je vais vous en distribuer copies, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Merci.

M. Forget: "1. Remplacer les mots "sur les territoires" par les mots "aux procédés d'exploitation des ressources naturelles, aux procédés de transformation ou de fabrication"; le premier alinéa ainsi amendé se lirait ainsi: "1. des programmes de santé au travail devant s'appliquer aux procédés d'exploitation des ressources naturelles, aux procédés de transformation ou de fabrication ou aux établissements ou catégories d'établissements qu'elle détermine;"

Je viendrai au deuxièmement tout à l'heure. Remplacer les mots "pour entente, au ministre des Affaires sociales" par les mots "pour avis, à l'association sectorielle intéressée par un programme de santé" et ajouter l'alinéa suivant:

"Le projet de programme de santé, accompagné de l'avis émis à son sujet par l'association sectorielle, doit être publié dans la Gazette officielle au moins 90 jours avant d'être présenté au gouvernement pour approbation."

M. le Président, je pense que j'ai expliqué suffisamment la raison qu'il y aurait d'être plus précis dans le premier alinéa, de manière à pouvoir bien circonscrire les pouvoirs de la commission à des cibles identifiables, sans controverse. En effet, la commission peut trouver opportun d'identifier certains procédés industriels, puisqu'elle veut procéder par ordre de priorité. Il peut se faire que, dans des établissements donnés, elle cherche, dans un premier temps, non pas à couvrir tous les travailleurs de l'établissement; il peut s'agir d'entreprises énormes où seulement un procédé apparaît comme une source de risque grave; elle pourrait ainsi vouloir préciser son programme de santé en disant: Tel procédé, étant donné le risque qu'il comporte, est une priorité, donc nous allons le réglementer avant les autres. Ceci peut valoir pour des procédés d'extraction de ressources naturelles, des procédés de transformation des ressources ou de fabrication proprement dite; je pense qu'on embrasse toutes les phases possibles de production de biens qui peuvent donner ouverture à des risques.

En éliminant "territoires", on élimine une possibilité de discriminer entre les régions au Québec, puisqu'il n'est pas du tout nécessaire, contrairement à ce que prétend le ministre, d'adopter un mot comme celui-là, d'inscrire un mot comme celui-là dans le mandat de la commission. Je comprends qu'elle doit transiger ou conclure des contrats avec des départements de santé communautaire qui ont une juridiction ou une compétence territoriale, mais ça, c'est leur problème à eux, ils vont quand même appliquer des programmes de santé uniformes pour des secteurs industriels ou des procédés de fabrication qui ont été identifiés comme prioritaires par la commission. Cela va de soi qu'ils vont le faire dans le territoire sur lequel ils ont juridiction et que si, dans leur territoire, il n'y a pas un tel procédé industriel ou un tel établissement, ils n'auront pas besoin de s'en occuper. Mais on n'a pas besoin de faire de la redondance et d'introduire — ce qui est très grave — des possibilités de restrictions territoriales en disant: Dans le Grand-Nord, les coûts des entreprises sont tellement considérables qu'on va les exempter de satisfaire à certaines normes de sécurité. Je pense que c'est là un précédent dangereux et regrettable, je pense que les règles doivent être uniformes dans ce secteur.

Pour ce qui est de la deuxième partie de l'amendement, M. le Président, je pense que la question du programme de santé, il n'est pas crucial qu'elle soit soumise au ministre des Affaires sociales. Après tout, le ministre des Affaires sociales, dans l'ensemble de cette loi, n'a aucune espèce de responsabilité. Donc, pourquoi serait-il consulté? Par définition, son ministère ne s'occupera pas de cette question de santé, ça va être l'apanage exclusif de la commission et il vaut beaucoup mieux, me semble-t-il, faire un lien avec les autres instances qui sont créées par la loi et qui, dans le cas des associations sectorielles, ont fort peu de mots à dire dans l'ensemble du débat.

Pour les consulter officiellement, on veut en faire des partenaires, les associations sectorielles; du moins, j'imagine que c'est là l'esprit qui anime le ministre. Ce ne sont pas simplement des exécutants des politiques gouvernementales, ce sont aussi des participants aux décisions. Il me semble qu'il faudrait les consulter de manière qu'il puisse y avoir officiellement, au moment où le Conseil des ministres prend la décision d'entériner un programme de santé pour tel ou tel secteur industriel, pour tel ou tel procédé industriel qui est créateur de risques, qu'il ait, à ce moment, l'avis de ce comité paritaire sectoriel qui puisse lui dire: "Ce programme de travail est insuffisant ou il place l'accent au mauvais endroit et, par conséquent, on suggère au lieutenant-gouverneur en conseil ou au gouvernement de ne pas l'adopter, mais de le retourner à la commission pour qu'elle le corrige, pour qu'elle lui fasse subir une étude plus approfondie parce qu'il ne répond pas aux besoins". Il me semble que c'est à ce moment, juste avant la décision, et en donnant également un certain avis au public, parce que cela touche des entreprises, cela touche des syndicats qui ont pu ne pas être impliqués formellement dans tout le travail d'élaboration. Cela se trouve, au niveau gouvernemental, que, parfois, il y a des gens qui ne sont pas systématiquement consultés. En donnant un avis de 90 jours, on donne à tous ceux qui ont l'occasion de s'en inquiéter un temps suffisant pour réagir. C'est un délai que l'on trouve dans certaines lois sociales adoptées il y a plusieurs années et donc, qui ne créerait pas un précédent par rapport à la législation sociale; c'est le délai standard pour la réglementation dans le domaine social.

M. le Président, il me semble que ces propositions sont faites dans un esprit de collaboration. Il me semble qu'elles amélioreraient l'article 107. Elles ne corrigent pas, il est vrai, la difficulté que j'ai soulignée au point de vue des programmes de santé; je pense que le programme de santé demeure une idée très vague. A ce niveau, au niveau de l'établissement, de l'usine, etc., on peut lui donner — et je fournirai des exemples et je fournirai des suggestions au ministre au besoin — un contenu très concret. Au niveau de la commission, cela demeure pour moi un mystère entier, ce qu'il va contenir. Mais, qu'il contienne n'importe quoi, j'imagine que d'autres auront plus d'imagination que moi là-dessus; à mon avis, il devrait être uniforme pour un secteur industriel ou au moins pour un procédé de fabrication ou de transformation. Et, encore une fois, on devrait faire une consultation avec l'association sectorielle, étant donné qu'elle existe pour cela, pour être consultée et non seulement pour faire des programmes d'information, non seulement pour être un exécutant.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Saint-Laurent, je n'ai pas voulu vous interrompre, mais disons que j'avais déjà statué que votre

amendement serait recevable. Je le reçois donc. Avant de donner la parole à M. le ministre, je voudrais demander à la commission si elle accepterait de substituer le nom du député de Charlevoix à celui du député de Portneuf.

Une Voix: Cela va.

Le Président (M. Bordeleau): Cela va, consentement unanime? M. le ministre d'Etat.

M. Marois: Oui, M. le Président, je vais commenter très rapidement. Je vais commencer par la proposition d'amendement concernant le deuxième paragraphe, c'est-à-dire de remplacer les mots "pour entente" par "pour avis à l'association sectorielle intéressée par un programme de santé", en ajoutant un alinéa qui nous amènerait un avis émis par l'association sectorielle, publié dans la Gazette officielle 90 jours avant la présentation au gouvernement, etc. Ce que je dirai, c'est que, pour l'essentiel, je crois que, sous réserve de revenir sur le fait de biffer les mots "pour entente", ce que propose le député de Saint-Laurent quant à toute cette partie, pour l'essentiel, se retrouve déjà aux paragraphes trois et quatre de l'article 101 qui prévoient que l'association sectorielle, non seulement peut faire des recommandations relatives aux règlements et normes de santé, mais également, quatrièmement, collaborer avec la commission et les chefs de département de santé communautaire à la préparation de dossiers ou d'études sur la santé des travailleurs et sur les risques auxquels ils sont exposés; en d'autres termes, les consultations requises pourront se faire et vont se faire avec les associations sectorielles.

Cela étant dit, je ne serais pas d'accord pour qu'on accepte l'amendement tel que libellé; je pense qu'on va tomber à nouveau dans le panneau des avis, des papiers, des consultations lourdement bureaucratiques, sans compter que cela nous mène jusqu'à des publications dans la Gazette officielle 90 jours avant d'être présentés au gouvernement, etc.

Donc, je pense que pour l'essentiel, l'esprit, l'économie générale, l'objectif qu'a en tête le député de Saint-Laurent par son amendement sur ce point se trouve déjà aux paragraphes 3 et 4 de l'article 101.

Quant à retirer les mots "pour entente", je ne serais pas non plus d'accord, parce que, fondamentalement, le ministre des Affaires sociales conserve sa responsabilité dans le domaine large de la santé publique et il nous a semblé normal... D'ailleurs, les témoignages qu'on a reçus en commission parlementaire en ce sens nous incitaient à ajouter cette expression "pour entente" au projet de loi 17. Elle ne paraissait pas dans la première version. En plus, il est prévu que le ministère des Affaires sociales ait le droit d'avoir un représentant en permanence au conseil d'administration de la commission. Le ministère a quand même une responsabilité. D'ailleurs, cela revient ultérieurement dans les cas où des ententes, notamment dans le secteur d'une amplification de la recher- che, impliqueraient que ça suppose la mise à contribution de ressources humaines, d'équipements nouveaux dans les centres hospitaliers. Il ne faut pas écarter du revers de la main le ministre des Affaires sociales de ce côté.

Quant à la première partie, qui vise à remplacer les mots "sur les territoires", si cela n'était que pour lever la crainte qu'a exprimée le député de Saint-Laurent que cette expression nous amène à assister à une forme quelconque de discrimination sur un territoire par rapport à un autre, en d'autres termes, en retenant ultimement son argumentation, qu'on n'a pas besoin de ces mots pour s'assurer de l'application de l'article 109, peut-être que je me rendrais à son argumentation.

Cependant, je ne peux pas me rendre à cette argumentation pour la raison suivante: notamment, quand on lit le paragraphe 6 de l'article 127 qui concerne les responsabilités qui sont dévolues au chef du département de santé communautaire, le paragraphe 6 qui a l'air de rien dit: "Effectuer des études épidémiologiques". Le député sait fort bien que les études épidémiologiques sur tel type de lien possible entre tel ou tel contaminant, telle ou telle matière dangereuse et donc un environnement donné de travail et un état de santé donné, cela nous amène à conclure, à cerner, au fur et à mesure qu'évoluent la science médicale et les connaissances technologiques, que de telles études épidémiologiques, que ce soit sur le plomb, pour reprendre son exemple, la soude caustique ou je ne sais trop quoi, on ne procède pas — cela n'est pas une forme de discrimination — à déclencher l'étude épidémiologique dans tous les établissements en même temps où pourraient se trouver les éléments clés susceptibles, si la recherche était concluante ou l'étude épidémiologique était concluante, de nous amener à dire: Apartir de maintenant, sur la base des connaissances acquises, il va falloir procéder à tel ou tel ajustement, procéder à des vérifications additionnelles, s'assurer que lors d'examens en cours d'emploi, on tente de déceler s'il n'y a pas tel ou tel taux de plomb, parce que cela amène à telle ou telle conclusion sur le plan de l'affectation et de la santé des travailleurs. On procède à des études épidémiologiques à l'intérieur d'un territoire donné, souvent en choisissant, à partir d'un certain nombre de critères, tel ou tel établissement ou telle ou telle entreprise. Par exemple, je pense qu'il y a — je donne cela sous réserve — des ententes qui sont intervenues entre l'Alcan et le syndicat où — je donne cela sous réserve, si la Commission des accidents du travail n'est pas intervenue dans ce dossier pour soutenir, d'une façon ou d'une autre, l'étude qui était amorcée — on a déclenché ou mis en marche une étude épidémiologique à partir du concret dans un territoire donné qui était, dans ce cas, l'Alcan. Partant de là, il n'est pas possible d'arriver à cela, si on n'introduit pas et si on ne maintient pas la notion de territoire qui est évoquée au début de l'article 107.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: L'argument que vient de développer le ministre, on l'accepterait volontiers et il serait merveilleux si nous étions en train d'examiner une loi sur l'environnement. C'est vrai que si on étudie un problème d'environnement, on va s'attacher à une étude épidémiologique aussi, mais basée sur l'exposition à un risque dans un lieu donné des gens qui résident à tel endroit. (21 heures)

Lorsqu'on parle de santé au travail, on ne parle pas d'environnement en général, on parle d'exposition à un risque qui dépasse le risque ambiant. C'est un risque particulier à un poste de travail. Si on fait une étude épidémiologique dans le cadre de la santé au travail, et non pas dans le cadre de l'environnement, la base de calcul, la base de référence, la population de référence, elle est fournie par la mention qui apparaît au paragraphe 8 de l'article 113 où on dit: "L'établissement et la mise à jour d'une liste des travailleurs exposés à un contaminant à partir des registres tenus par l'employeur". D'ailleurs, c'est comme cela — le ministre le sait probablement — que les risques relatifs à l'utilisation ou à la transformation de l'amiante ont été découverts parce qu'on a retracé des employés, même provenant d'entreprises qui avaient fermé leurs portes aux Etats-Unis, depuis plusieurs années, on a retrouvé le registre des employés, des travailleurs de ces entreprises, on est allé les voir, on a même regardé leur déclaration médicale de décès dans un certain nombre de cas, étant donné que cela faisait 20 ans, dans le cas d'une de ces entreprises, qu'elle avait fermé ses portes, et c'est par rapport à une population pas seulement dans une région, parce que les gens se dispersent après. Un travailleur qui peut être à l'Alcan cette année ou être là pendant cinq ans et subir une atteinte à sa santé, dans dix ans, il va se retrouver à Montréal, il va se retrouver ailleurs, et c'est la population qu'il faut suivre si on veut faire une étude épidémiologique des risques relatifs à la présence près des cuves à Arvida. Il ne faut pas seulement étudier la population d'Arvida dans son ensemble ou même un échantillon stratifié de la population d'Arvida. On va trouver un problème d'environnement, mais ce ne sera pas un problème de santé au travail pour les gens qui décollent les trucs dans les cuves; celui-là, c'est un autre problème.

C'est pour cela que même à l'égard des études épidémiologiques — j'espère qu'on va en faire effectivement, c'est la raison d'être de l'implication des départements de santé communautaire là-dedans — la référence au territoire n'est pas appropriée. C'est une autre sorte de référence qui est déjà prévue ailleurs dans le projet de loi et j'inviterais sérieusement le ministre à considérer que dès qu'on parle de distinctions territoriales, cela va avoir des conséquences. Si vraiment il ne doit pas y en avoir, il ne faut pas mettre ce mot à cet endroit parce qu'il n'a pas d'application ici.

Le Président (M. Bordeleau): S'il n'y a pas d'autres intervenants, est-ce que l'amendement suggéré...

M. Lavigne: M. le Président...

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Beauharnois.

M. Lavigne: Sur la question du terme "territorial", je ne suis pas un expert là-dedans, mais il me semble qu'il pourrait y avoir des distinctions à faire entre différents endroits même au Québec. On connaît nos écarts de température entre le Grand-Nord, le Nord-Ouest du Québec et le Sud-Ouest du Québec. Peut-être que des écarts énormes de température dans un procédé quelconque pourraient faire en sorte que si on appliquait les mêmes normes de santé, ou on avait le même programme de santé à Beauharnois, par exemple, où on est dans une région chaude du Québec, que dans le Nord-Ouest québécois, cela pourrait apporter des distinctions. C'est peut-être hypothétique mon affaire, mais je me dis que ce sera aux médecins de la région d'évaluer quels sont les dommages possibles et quels programmes de santé on doit appliquer sur un territoire plutôt que sur un autre. Il peut aussi y avoir des distinctions à apporter au niveau du type de bâtisses dans lesquelles se pratiquent ces activités. Une bâtisse avec un plus grand cubage d'air, parce que les plafonds sont plus hauts, amène peut-être moins d'inconvénients que les mêmes procédés pratiqués dans un type de bâtisses différent.

Je n'ai pas de données précises, mais cela ne m'apparaît pas stupide de présenter le terme "territoire" parce que ce sera, à ce moment-là, je pense, aux médecins de la région d'évaluer, dans tel ou tel cas, de préparer des programmes de santé. S'il se révélait, en cours de route, qu'effectivement, il y a des distinctions à apporter entre la pratique d'une opération dans un coin de pays plutôt que dans un autre, ce sera aux médecins territoriaux de voir à appliquer, à administrer ou à suggérer des programmes de santé qui conviendront d'une façon plus adéquate à la région dans laquelle est pratiquée l'opération.

Je me dis que le terme "territoire" peut avoir sa place dans le libellé de l'article 107. C'est ce que je voulais dire au député de Saint-Laurent.

Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que l'amendement suggéré par le député de Saint-Laurent sera adopté?

M. Marois: Non.

Le Président (M. Bordeleau): Rejeté? L'amendement est rejeté. Est-ce que l'article 107 tel quel sera adopté?

M. Forget: Sur division.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté sur division. L'article 108?

M. Forget: C'est un article qui n'est pas long, M. le Président...

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: ... mais cela ne veut pas dire qu'il est sans problème. Nous trouvons, à la suite d'avis juridiques dans d'autres lois qui sont présentées, à l'heure actuelle, par le gouvernement, une qualification; quand on dit que telle ou telle chose, tel ou tel projet de règlement est présenté au gouvernement pour approbation, il y a une mention qui ne se trouvait pas dans les lois il y a quelques années, à savoir qu'on dit explicitement que le gouvernement, à ce moment-là, a des choix: II a le choix d'approuver, de rejeter le règlement ou de le modifier. Dans ce cas-ci, étant donné qu'il s'agit encore du mystérieux programme de santé de la commission, on peut présumer que le gouvernement ne choisira pas de le modifier de son propre chef. S'il advenait que le gouvernement, dans sa sagesse, informé de l'insatisfaction de certains groupes, du caractère sommaire de la consultation de l'avis de certains ne voulait pas simplement appliquer son tampon encreur, son "rubber stamp" sur le projet qui lui est envoyé, on ne dit pas ce qui arriverait.

Etant donné que le législateur québécois a pris l'habitude de préciser ce qui arriverait s'il n'était pas d'accord avec un projet de règlement, il serait prudent de prévoir une procédure. La procédure que je suggérerais au ministre prendrait aussi la forme d'un amendement à l'article 108 qui consisterait à ajouter, à la fin de ces deux lignes, les mots suivants: "Le gouvernement, avant d'approuver un programme de santé, peut retourner à la commission le projet qu'elle lui a soumis afin d'en obtenir des précisions additionnelles ou des corrections. Le gouvernement peut, à cette occasion, demander à la commission de tenir à ce sujet des audiences publiques." S'il y a effectivement une demande pour que soit débattues publiquement des décisions qui peuvent être très délicates et très difficiles, dans des situations hypothétiques, que la commission sera amenée à trancher d'une façon qui apparaîtrait contestable, il me semble que c'est là un sujet qui intéresse les gens et cela devrait se faire publiquement. La commission a un statut assez autonome, présumément, vis-à-vis du gouvernement, pour pouvoir siéger un peu comme un comité d'enquête, à ce moment-là, pour entendre les parties et trancher, en retournant, par la suite, au gouvernement un projet corrigé ou non corrigé, mais avec ample occasion fournie à tout le monde de faire porter sur la décision finale le poids de ses convictions et des preuves, des indications scientifiques ou autres qui auraient pu être écartées en cours de route dans l'étude de la commission.

Le Président (M. Bordeleau): Je juge receva-ble l'amendement suggéré à l'article 108. M. le ministre.

M. Marois: Evidemment, M. le Président, on essaie de regarder ça au fur et à mesure que les morceaux tombent sur la table; ça aurait facilité grandement le travail si l'Opposition, le député de Saint-Laurent avait bien voulu procéder de la même façon qu'on l'a fait à l'égard de nos collègues de l'Opposition, en les avisant assez longuement à l'avance de tous les amendements qui s'en venaient; ça nous aurait donné le temps de les examiner et de les regarder.

Une Voix: ...

M. Marois: Non, on ne suspendra pas trop, on veut aboutir!

Ma première réaction à l'amendement tel que formulé n'est pas sans me rappeler... Je vais y songer, parce que c'est avec beaucoup de réticence, si je devais arriver à cette conclusion, que je serais appelé à le retenir, pour la raison suivante. On a vu tout à l'heure que forcément les associations sectorielles seront consultées, les départements de santé communautaire aussi; la commission même sera composée de cette espèce de table ronde de base où seront représentés les porte-parole des parties patronales et des représentants des travailleurs, sans compter le gouvernement, et des représentants du ministère des Affaires sociales qui seront là. Donc, il y aura déjà là, au préalable, une large discussion et forcément chacune des parties qui y siège va consulter les uns et les autres. En partant de là, il y a déjà une consultation de base.

Ce qui m'amènerait à être extrêmement prudent, avant d'accepter un amendement comme celui-là, c'est l'examen de ce qui s'est passé aux Etats-Unis; vous savez qu'aux Etats-Unis, il y a deux organismes, il y a NIOSH et il y a OSHA. Or, l'un des organismes, qui est OSHA, devait — — effectivement, il l'a fait — au préalable, avant de retenir une réglementation quelconque, tenir des audiences ou des auditions publiques. Cela a donné lieu à des choses absolument incroyables; non seulement des délais où des gens intervenaient pour allonger les audiences ou les auditions, simplement comme procédure dilatoire, mais on a là-dessus des témoignages, des études très précises qui ont été rendues publiques, en particulier dans de récentes analyses produites, notamment, mais non exclusivement, dans la revue Fortune. Dans certains cas, cela a donné lieu à des blocages complets où il a été impossible de procéder pour s'assurer de l'application d'un certain nombre de programmes dans des secteurs donnés. Cela a ajouté une lourdeur considérable dans tout le déroulement de cette pratique. Je comprends que c'est un pouvoir qui est donné de retourner, le gouvernement "peut", ce n'est pas une obligation, et il peut aussi, de façon additionnelle, demander à la commission de tenir des auditions publiques. Mais je ne vous cacherai pas que l'expérience dont on a pris connaissance, de façon très attentive, de façon très serrée, de ce qui s'est passé aux Etats-Unis, de ce qui a été vécu aux Etats-Unis, quand on compare les deux, fonctionnement du groupe OSHA et l'autre bloc qui est NIOSH, moi, ça m'amène à jeter sur la table un élément de prudence extrême.

Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que l'amendement à l'article 108 sera adopté?

M. Forget: M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: J'aimerais réagir un peu aux remarques du ministre. Il dit: Cela va compliquer la vie de la commission d'avoir cette histoire-là...

M. Marois: Ce n'est pas juste à la vie de la commission que je pense, comme je l'ai évoqué. (21 h 30)

M. Forget: Quels que soient ceux dont ça complique la vie, il reste que je trouve paradoxal qu'on fasse reposer le programme de santé sur la décision irrévocable et unilatérale de la commission. C'est finalement un organisme humain, ce ne sont pas des demi-dieux qui vont siéger là-dessus, ne nous faisons pas d'illusions. Si c'est dans la foulée de la performance de la Commission des accidents du travail, on peut se poser de sérieux doutes, en plus de tous les troubles qu'ils ont déjà, ils vont en avoir à peu près trois fois plus à faire que ce qu'ils étaient incapables de faire avant. C'est déjà beaucoup leur en donner.

Dans ces circonstances, il m'apparaît paradoxal qu'on fasse reposer toute la pyramide qu'on met sur pied, sur la responsabilité de l'Etat. L'Etat devient effectivement le seul agent de santé et de sécurité dans le milieu de travail. En définitive, c'est l'Etat qui décide de tout de façon ultime, c'est lui qui détermine les normes, c'est lui qui donne les services, c'est lui qui fait les contrôles, c'est lui qui fait l'inspection, c'est lui qui finance même la participation. Il présume que les associations d'employeurs et de salariés n'ont pas une motivation suffisante pour assurer leur participation; il se croit même obligé de financer leur participation aux comités sectoriels, dans les articles qu'on vient d'adopter, ce soir. C'est une chose absolument invraisemblable, à mon avis, qu'on présume que, à moins d'un financement gouvernemental, il n'y a pas un chat qui va s'intéresser à cela si ça lui coûte un sou.

Tout repose sur l'initiative gouvernementale, toute la responsabilité appartient, en définitive, au gouvernement. C'est un signal très clair, dans cette loi, on dit à tout le monde: Arrêtez de vous préoccuper de cela, faites ce qu'on vous dit, faites ce que papa gouvernement vous dit de faire dans le domaine de la santé et de la sécurité, laissez faire le reste, ce ne sont pas vos oignons. Quand on arrive à des programmes de santé qui sont censés être un des pivots de toute cette loi, on donne cela à une commission en disant: Cette commission va présenter des projets et le Conseil des ministres, tout ce qu'il aura à faire, c'est de dire: Oui, monsieur, cela, ce sont vos règlements, maintenant. On ne peut même pas les retourner, on ne peut même pas les modifier.

Si j'en crois ce que le gouvernement lui-même a fait dans les différentes loi qui ont été adoptées depuis deux ou trois ans à l'Assemblée nationale, quand il y a un projet de règlement, maintenant, on prend la peine de dire: Le gouvernement n'est pas obligé de l'adopter dans cette forme, il peut le modifier. Là, on ne dit même pas cela. Ou on approuve le programme de santé comme il vient de la commission, ou on le laisse sur la table. C'est tout ce qu'on aura à faire avec. Je n'imagine pas que le Conseil des ministres va se mettre à rédiger des programmes de santé; j'espère que cela ne lui viendra pas à l'esprit. Si cela ne lui vient pas à l'esprit, il n'a même pas le pouvoir de le renvoyer; il a le pouvoir de le laisser sur la table plus ou moins longtemps, jusqu'à ce que la commission décide de changer d'idée. On dit: Cela, c'est beaucoup plus souple et ça va aller beaucoup plus vite que des audiences publiques pour permettre au gouvernement et lui donner un pouvoir positif, s'il choisit de l'exercer, de renvoyer la balle à la commission et de dire: Mesdames et messieurs, vous avez fait votre travail d'une façon qui n'est si évidemment pas acceptée, qu'on a des représentations de toutes parts, on a une pile de télégrammes haute comme cela à savoir qu'il ne faut pas adopter cela, reprenez votre travail et si vous n'êtes pas capables de le faire tout seuls, consultez publiquement des gens de manière que l'opinion publique soit éclairée sur la façon dont vous le faites.

C'est important, cette affaire-là. Je ne comprends pas l'excuse que prend le ministre pour rejeter cet amendement qui est de dire: On va être moins efficace, cela va aller moins vite. Je ne suis pas du tout convaincu que ça va aller moins vite, et la vitesse de l'approbation n'est pas un critère pour quelque chose qui joue un rôle de pivot dans l'application d'une loi sur la santé et la sécurité parce que, dans le fond, c'est cela l'argumentation: Cela va être lourd, ça va prendre du temps, ça va ajouter des délais. S'il y a des raisons qu'il y ait des délais, c'est que le projet est mal fait et il vaut peut-être mieux l'étudier deux fois que d'approuver automatiquement par un "rubber stamp", un projet mal fait. Dans le fond, l'objectif, est-ce que c'est d'aller le plus vite possible ou si c'est de faire le travail convenablement? Il me semble que la réponse s'impose d'elle-même.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Marois: Je vais simplement ajouter ceci: Le député de Saint-Laurent interprète — c'est son choix le plus libre — mes propos. Je n'ai jamais fondé l'argumentation sur le fait que cela allait être moins efficace, j'ai dit simplement qu'on n'inventait pas les boutons à quatre trous, qu'il y en avait d'autres qui avaient fait des choses avant nous et, dans ce temps-là, cela vaut la peine de regarder ce qui s'est passé ailleurs. J'ai donné l'exemple des modes de fonctionnement et l'expérience qui a été menée, en particulier, regardez l'opinion du monde patronal en ce qui concerne le fonctionnement de OSHA aux Etats-Unis. Je pense que cela a été regardé drôlement.

M. Forget: Ce n'est pas une référence.

M. Marois: Deuxièmement, plus j'écoute le député, M. le Président, plus je suis en train de me convaincre que je ne dois pas — en tout cas, en ce qui me concerne — retenir l'amendement, pour un certain nombre de raisons. La première, c'est que, de plus en plus, en l'écoutant, je suis en train de voir à quelle sorte de résultats cela pourrait nous mener si on retenait une chose comme celle-là, en le formalisant comme tel dans la loi, d'autant plus que la loi n'exclut pas la possibilité pour le gouvernement sur la base aussi, parce que je rappelle que le représentant du ministère des Affaires sociales va être présent à la commission...

M. Forget: ... comme observateur.

M. Marois: Comme observateur, oui, mais pour entente aussi. Vous vouliez me faire biffer les mots "pour entente" tantôt, et nous les maintenons. A ce moment, le gouvernement tranchera ultimement, mais il n'y aura pas que l'expertise des uns et que l'expertise des autres. On aura une batterie d'expertises permettant, le cas échéant... Ce n'est pas exclu par la loi. Ce qui n'est pas exclu par la loi, il n'y a rien qui interdise de le faire, le cas échéant, de retourner cela en commission en disant: Vous allez recommencer votre travail. C'est mal fait; ce n'est pas au point. On a demandé des expertises additionnelles et on vous demande de regarder ces expertises et d'en tenir compte. De là à conclure, en plus, que le projet de loi mène à la situation où c'est le gouvernement qui va décréter: C'est le gouvernement qui vous dit ceci. Vous allez vous en tenir à ce que le gouvernement vous dit... Je ne veux pas revenir là-dessus et reprendre le débat pour l'instant; on le verra plus loin, mais ce n'est pas du tout ni l'économie générale de la loi, ni la philosophie derrière le projet de loi, ni la lettre du texte de loi.

Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que l'amendement à l'article 108 sera adopté?

M. Jolivet: Rejeté.

Le Président (M. Bordeleau): Rejeté.

M. Marois: M. le Président, on pourrait peut-être profiter de ce moment pour adopter l'article...

Le Président (M. Bordeleau): Oui, mais on pourrait peut-être adopter auparavant l'article 108.

M. Forget: Sur division.

Le Président (M. Bordeleau): Article 108, adopté sur division. Je voudrais maintenant, avant de continuer à l'article 109, vous prévenir qu'on doit libérer le local et qu'on devrait suspendre l'assemblée pour quelques minutes pour nous permettre de déménager à la salle 91-A pour la tenue d'une autre commission. La commission suspend ses travaux pour quelques minutes.

Suspension à 21 h 37

Reprise à 21 h 49

Le Président (M. Bordeleau): La commission permanente du travail et de la main-d'oeuvre reprend ses travaux. Nous en étions à l'article 109. J'appelle donc l'article 109. Est-ce qu'il sera adopté? M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: C'est un contrat qu'on a à l'esprit. Là encore se pose le problème de savoir quelle est la portée d'un tel contrat. Est-ce qu'il s'agit d'énumérer les ressources ou de spécifier les résultats auxquels on s'attend? Tout à l'heure, pour justifier l'implication du ministre des Affaires sociales, le ministre a dit: Cela peut requérir des équipements. Est-ce qu'il faut comprendre que le contrat implique...

M. Marois: Si le député me le permet, j'ai bien dit, au moment où j'ai évoqué cela, que cela concernait en particulier — et c'est mentionné de façon très spécifique dans le projet de loi — les cas de recherche, d'équipements nouveaux.

M. Forget: Les contrats visent essentiellement à la recherche?

M. Marois: Non. Quand le député, M. le Président, évoque le fait que j'ai mentionné notamment la nécessité d'intervention du ministre des Affaires sociales dans les cas en particulier où certaines choses pouvaient supposer des ressources humaines additionnelles, de l'équipement nouveau, je faisais, à ce moment-là, référence à la recherche. C'est ce que j'ai voulu dire. C'est l'article 168.

M. Forget: L'article 168. D'accord. Il y a des contrats de recherche, si je comprends bien, visés à l'article 168. On en reparlera quand on sera rendu à l'article 168.

Les contrats en question à l'article 109 sont des contrats pour autre chose que la recherche. Quelles sont les contreparties que cela implique? Ordinairement, dans un contrat, une partie s'engage envers l'autre et vice-versa. Quels sont les engagements réciproques qui sont envisagés par un contrat comme celui-là?

M. Marois: Ce qui est évoqué à l'article 109.

M. Forget: Cela n'aide pas beaucoup. On se réfère aux dispositions du contrat type. Dans le contrat type, on ne sait pas ce qu'il y a dedans non plus.

M. Marois: M. le Président, pour poursuivre ma réponse, avant d'être interrompu par le député de Saint-Laurent, je disais donc que cela fait référence à ce qui est mentionné de façon spécifique à l'article 109:... "un contrat aux termes duquel le centre hospitalier s'engage à assurer"; quelle est l'obligation? Elle est là: Le centre hospitalier "s'engage à assurer les services nécessaires à la mise en application des programmes de santé au travail sur le territoire délimité par le

contrat ou aux établissements ou catégories d'établissements qui y sont identifiés."

M. Forget: D'accord, c'est un contrat qui est un peu "open and dead" si je comprends bien, autrement dit, qui implique pour les centres hospitaliers en question un engagement minimal, mais à peu près n'importe quoi au-dessus du minimum. Si je comprends bien, le contrat doit satisfaire au contenu du contrat type, mais les programmes de santé, ce n'est pas seulement le programme minimal décrété par la commission, c'est également le programme de santé spécifique à chacun des établissements dans le territoire du département de santé communautaire. Or, le ministre a dit qu'il appartient à chaque médecin responsable des services de la santé d'un établissement en particulier d'ajouter des choses. Donc, le département de santé communautaire s'engage à exécuter non seulement les obligations du programme de santé général, mais les obligations découlant des programmes de santé spécifiques à chacun des établissements. Est-ce que c'est cela?

M. Marois: Tantôt, M. le Président, en réponse à une autre remarque, aux questions du député de Saint-Laurent, je n'ai pas dit d'ajouter, j'ai dit d'adapter le programme à l'établissement. D'autre part, je pense qu'il faut lire intégralement l'article 109, notamment le deuxième paragraphe, et aussi l'article 122 qui prévoit que là où s'établit une relation, un lien de collaboration entre le médecin responsable et le chef du département de santé communautaire, ils doivent, ensemble, en collaboration, procéder à l'évaluation des ressources professionnelles, techniques et financières requises pour les fins de la mise en application d'un programme de santé spécifique à un établissement. C'est prévu à l'article 122. Egalement, à l'article 109, si on y revient, bien sûr que le contrat de base doit être conforme aux dispositions du contrat type, cela va de soi, mais il peut également prévoir les priorités en matière de santé au travail applicables au territoire ou aux établissements ou catégories d'établissements qui y sont identifiés, compte tenu des fonctions qui sont dévolues aux divers organismes du réseau qui sont présents en région, comme c'est évoqué à l'article 109.

M. Forget: Bon, si...

M. Marois: Donc, on voit bien, si le député le permet, comme c'est mentionné à l'article 122 qui dit qu'au moment où le médecin responsable voit à la mise au point, à la préparation du programme de santé pour un établissement et que cela peut supposer une adaptation, un ajustement à la réalité même des problèmes d'un établissement donné et d'une entreprise donnée, il doit agir en collaboration, comme l'évoque l'article 122, avec le chef du département de santé communautaire pour procéder à l'évaluation des ressources professionnelles, techniques, financières qui peuvent être requises pour les fins de mise en application du programme de santé propre à un établissement donné.

M. Forget: Si je comprends bien ce que vient de dire le ministre, l'article 109 parle du contrat et mentionne les obligations des centres hospitaliers dans l'exécution des programmes de santé. Pour l'instant, tenons-nous-en aux prestations exigées des centres hospitaliers qui ont un département de santé communautaire. Si je comprends bien, ils recevront une enveloppe financière déterminée par la commission. On exigera d'eux qu'ils satisfassent aux obligations minimales définies par le programme de santé publié par la commission. Mais, s'ils veulent adapter, sans que ça coûte plus cher, ce programme de santé uniforme, provincial de la commission pour répondre à des besoins particuliers d'un établissement pour donner suite aux pouvoirs qu'on donne aux articles 112 et 113, ils pourront le faire pourvu qu'ils respectent les minimums et que cela ne coûte pas plus cher. Donc, c'est une discrétion très étroitement définie. Il faut, d'abord, que les minimums soient respectés, que les ressources ne soient pas plus considérables que celles nécessaires pour satisfaire les minimums. Mais, d'un autre côté, d'une façon assez mystérieuse, on peut adapter cela, pourvu que ça ne coûte pas plus cher, aux besoins d'un établissement en particulier. Donc, c'est une enveloppe et il n'est pas question, ensuite, à l'article 122 ou quand on parle des responsabilités du médecin en charge des services de santé à l'article 112, de dire: Vous devez remplir certaines obligations. Vous avez certaines discrétions dans la loi. Non, ils ont des ressources qui leur sont données et ils doivent se débrouiller avec cela.

M. Marois: M. le Président, je pense que c'est une interprétation plus que très restrictive que donne le député de Saint-Laurent à l'article 109, puisque cet article prévoit bien la possibilité, d'une part, non seulement d'un conrat de base conforme aux dispositions d'un conrat type, ce qu'il appelle le minimum, mais "il peut également prévoir les priorités en matière de santé au travail applicables au territoire ou aux établissements ou catégories d'établissements qui y sont identifiées. Ceci indique bien qu'il peut y avoir des problèmes propres à certaines catégories d'établissements d'un territoire donné qui peuvent d'ailleurs recouper des priorités d'établissements d'autres territoires et qu'en conséquence, au-delà de l'enveloppe de base, peuvent s'ajouter les ressources financières, techniques, professionnelles requises pour être à même de répondre à ces priorités. On a vu tantôt à l'article 122, les articles s'interprétant les uns par rapport aux autres, que cela répond même aux besoins propres à une entreprise donnée.

M. Forget: Oui, je suis content que le ministre dise que les articles s'interprètent les uns par rapport aux autres, parce que mon problème, en essayant de comprendre l'article 109, c'est qu'il est suivi de l'article 110. A l'article 110, on ne parle plus de contrat. On parle d'une relation d'autorité entre la commission et les établissements hospitaliers qui ont des départements de santé communautaire. On dit: "La commission établit chaque

année un budget pour l'application du présent chapitre." On ne dit pas dans un même article qu'il y a un contrat qui détermine à la fois les obligations des centres, des DSC et l'obligation correspondante de la commission de payer pour les services qui font partie de ce contrat. Autrement dit, ils ont un contrat qui comporte des obligations seulement pour une des parties. L'autre partie a un pouvoir dans la loi de déterminer sa contrepartie unilatéralement. Elle dit: Vous allez vous engager envers nous à rendre des services sur tel territoire de telle et telle façon, mais, quant au coût de ça, on va le déterminer tout seul et on a l'article 110 qui nous donne le pouvoir de le déterminer tout seul.

Il me semble que, si on voulait être logique et si on tient à parler de contrat plutôt que d'ordonnance, parce que, dans le fond, c'est presque des ordonnances à l'article 109, dans un contrat il y a un quid pro quod, il y a un échange de quelque chose. Le centre hospitalier dit: Messieurs de la Commission de la santé du travail, vous nous demandez de faire telle ou telle chose. Vous nous donnez le pouvoir d'évaluer nos priorités et de distinguer des besoins particuliers. La facture, c'est tel prix; là, on négocie et on signe le contrat.

(22 heures)

Mais non, ce n'est pas cela qui va arriver. La commission va arriver à un centre hospitalier et va dire: Ecoutez, on va signer un contrat pour vous lier envers nous à donner des services. Une fois que vous aurez signé cela, nous, on va déterminer quel montant on vous donne en vertu de l'article 110. Il y a une asymétrie que je ne comprends pas. C'est ce qui m'amenait à dire que, finalement, la décision, elle est au centre. On sait très bien ce qui arrive lorsque le gouvernement se donne le pouvoir d'attribuer des budgets. Il les attribue à sa façon, en fonction de ses priorités et c'est tout à fait légitime. La loi lui dit de le faire. Il serait bien fou de ne pas le faire, et même il pourrait encourir des reproches s'il faisait autrement. Et après, il essaie de faire accepter la pilule aux DSC en disant: On va vous permettre de signer un contrat pour faire ce que vous pouvez faire et pas plus, parce qu'on ne vous donnera pas plus d'argent, on vient de le décider.

Est-ce qu'au moins, sur le plan de l'élégance, il n'y aurait pas la possibilité de rendre les choses un peu moins inégales entre les DSC et la commission, étant donné que "the one who pays the piper calls the tune", pour employer ce vieux proverbe anglais, celui qui paie le violoneux choisit la "toune ". C'est un peu cela. Celui qui va payer va déterminer les priorités et c'est la commission. On met donc sur place toute une grosse affaire de consultation et de responsabilité à tous les niveaux et, finalement, la décision va être prise à un seul endroit, à la commission qui va déterminer les budgets.

M. Marois: Conformément à une demande répétée, répétée et redite — j'allais utiliser une formule qu'a déjà utilisée un de mes collègues — par l'Opposition, notamment par l'Opposition libérale, voulant que la loi ne soit pas de portée universelle et nous mène à un nivellement par la base, mais demandant qu'on établisse des priorités correspondant aux secteurs économique, industriel où les taux d'accidents et de maladie sont vraiment à un niveau inacceptable, précisément une des premières fonctions de la commission, conformément à l'article 167, premier paragraphe, c'est de voir à établir des priorités d'intervention en matière de santé et de sécurité au travail.

Nous sommes d'accord avec cette logique des priorités du côté gouvernemental, à la seule différence que nous ne voulons pas, comme gouvernement, imposer d'en haut les priorités. Nous formulons une hypothèse de priorités qui apparaissaient très clairement à la page 271 du livre blanc. Cette hypothèse de priorités ou de secteurs prioritaires sera soumise à cette table de concertation, qui est, au fond, le conseil d'administration de la commission, où siégeront, encore une fois, les parties, les représentants du monde des employeurs, du monde des travailleurs et le gouvernement, notamment par son président-directeur général et aussi par un représentant du ministre des Affaires sociales.

Les priorités étant définies, sachant que tout ne pourra pas être fait en même temps, qu'on ne pourra pas arriver à avoir des services de santé dans toutes les entreprises au point de départ, c'est impossible, la logique veut que, pour y arriver, et le bon sens aussi, on procède par priorités. Nous avons proposé une façon d'arriver à l'établissement de ces priorités. Partant de là, forcément, il y aura un budget à la commission, ce que dit l'article 110. Ce n'est pas sans limite. Forcément, il y a un budget. On part avec un certain nombre de ressources financières qui sont là.

Partant de là, partant des priorités, forcément, des contrats seront établis, convenus, avec les départements de santé communautaire, dans les secteurs où cela correspond précisément aux priorités, pour en arriver à répondre aux besoins d'un coin où c'est le plus urgent, au point de départ. Par la suite, on pourra procéder par phases pour ouvrir davantage.

Ces budgets, comme on l'a vu, visent à réaliser des programmes de santé dans les entreprises, avec la souplesse requise pour être capable, à partir d'un programme-cadre, de s'ajuster à la réalité changeante, différente, diversifiée, selon les secteurs industriels et dans certains cas, à l'intérieur d'un même secteur industriel, selon les établissements.

Sur cette base, sur la base des programmes qui pourront être établis, partant de là, la commission, forcément, va attribuer— il faut bien qu'elle le fasse — les budgets aux divers centres hospitaliers où il existe un département de santé communautaire conformément aux contrats qui seront intervenus avec l'un ou l'autre des centres hospitaliers où il y a un département de santé communautaire.

Ce qu'on dit, c'est que le contrat, de toute façon, devra prévoir l'application du programme de base, mais, en plus, le cas échéant, permettre, comme c'est évoqué à l'article 109, de préciser un certain nombre de priorités qui pourront forcé-

ment varier selon qu'on est dans les secteurs prioritaires ou que les problèmes qui ont été décelés sont plus importants dans une région, parce que, précisément, cela correspond à un coin où, dans les secteurs économique ou industriel retenus, il y a une concentration plus grande de ces entreprises qui tombent dans les secteurs prioritaires. Forcément, il y a des morceaux qui vont devoir s'ajuster. C'est l'économie et l'approche de base retenues.

M. Forget: Je voudrais demander au ministre, M. le Président, quel va être le rôle des conseils régionaux des services de santé et des services sociaux qui sont mentionnés au deuxième alinéa de l'article 109, dans le contexte qu'il vient de décrire?

M. Marois: Essentiellement, il nous semblait qu'il ne fallait pas perdre de vue les fonctions qui sont déjà dévolues à ces conseils en vertu de la Loi sur les services de santé et les services sociaux. Les conseils régionaux possèdent déjà une responsabilité au niveau de la définition des priorités en matière de santé. Par le projet de loi 17, on a voulu éviter de créer un réseau parallèle de distribution de services de santé. Il est apparu nécessaire, à ce moment-là, d'inclure, au niveau des deuxième et troisième alinéas de l'article 109, cette notion de concordance avec la Loi sur les services de santé et les services sociaux.

Bien sûr, M. le Président, le député de Saint-Laurent le sait fort bien, cela recoupe aussi, en même temps, la perspective de décentralisation et également le fait qu'il existe déjà présentement ce qu'on appelle les fameuses tables de concertation accrochées à ces conseils dans les régions au Québec.

M. Forget: Tout cela est très difficile à suivre, M. le Président. On donne des coups de chapeau à gauche et à droite à toutes sortes de notions, mais on ne voit vraiment pas comment on peut articuler des choses aussi compliquées, des structures aussi compliquées que celles qui apparaissent dans la loi. Une référence comme celle qu'on voit aux CRSSS, aux conseils régionaux des services de santé et des services sociaux m'apparaît complètement gratuite. Me semble-t-il, on ose même parler de décentralisation dans tout cela — cela prend un certain cran — alors que le pouvoir de décision, c'est très évident, est à l'article 110. La commission décide des budgets, elle va décider des priorités et elle va savoir les imposer aux établissements. Il ne faut pas se faire d'illusions là-dessus. Ce n'est pas de la décentralisation. C'est même à peine de la consultation. En donnant des coups de chapeau à droite et à gauche, comme cela, aux CRSSS ou à d'autres organismes, on ne se lie à rien on ne s'engage à rien de spécifique.

On crée simplement l'impression qu'on a la solution à tous les problèmes et à toutes les coordinations, ce qui est évidemment purement verbal. Il faut bien se rendre compte que le conseil régional, dans un système comme celui-là, n'apparaît d'aucune façon significatif, n'a aucun pouvoir et n'aura aucune compétence, non plus, pour intervenir là-dedans, parce qu'il n'est pas dans l'action, il n'est pas impliqué. C'est vraiment d'une pure gratuité, cette histoire; cela ne se rattache strictement à rien. Je trouve tout cela déplorable, mais, de toute façon, comme c'est purement verbal, on peut présumer que c'est un bout de phrase qui va tomber rapidement en désuétude. Je ne m'attarderai pas plus longtemps à en parler.

Ce qui m'apparaît beaucoup plus sérieux dans cet article-ci, c'est véritablement un article qui véhicule une notion fondamentale de la vision du gouvernement actuel dans tout le domaine de la santé et de la sécurité — c'est véritablement la prise en charge par le secteur hospitalier de toutes les ressources actuelles modestes, mais, à venir, énormes de distribution de services dans l'ensemble des établissements industriels au Québec. Et cela, c'est un précédent assez extraordinaire et c'est une tentative qui n'est pas susceptible de réussir en soi, parce qu'on centralise de façon très considérable à ce moment-là des services qui, par leur nature même, doivent être dispersés dans des établissements industriels. On va, d'ailleurs, y revenir un peu plus loin, à l'article 115, où on a des affirmations absolument abracadabrantes là-dessus. Il s'agit de donner des services dans des entreprises industrielles. Il ne s'agit pas de centraliser dans trois ou quatre départements de santé communautaire, par région économique ou par région administrative, une espèce de bureaucratie médicale et paramédicale de services de santé.

Ce qui est plus grave encore, c'est que le rôle sur lequel le ministre nous a fait tantôt de vibrants témoignages, en parlant d'études épidémiologi-ques et de contrôle comme ingrédients essentiels de la responsabilité de la santé publique, on le sacrifie là-dedans complètement, parce que ces gens-là, au département de santé communautaire, vont être absorbés, et à 150%, dans la tâche de donner des services dans des établissements. Et après, on va leur demander de s'auto-évaluer par des études épidémiologiques, etc. C'est évidemment le parent pauvre. On va avoir, évidemment, une grosse machine qui va donner beaucoup de services, qui va faire des examens, du dépistage, etc., et qui va se vanter de son gros volume de travail. Il va y avoir une charge de travail où on va avoir des statistiques faramineuses. On a trois millions de travailleurs au Québec. Si on examine tout ce monde-là une fois par année et deux fois par année pour certaines fonctions respiratoires et autres, on va produire des statistiques ébouriffantes. Cela va vraiment être très impressionnant. On va pouvoir justifier un recrutement également ébouriffant. Si on s'en tient aux standards hospitaliers québécois là-dedans, vous allez vous amuser avec les examens et les tests de routine. Cela va être une explosion absolument fantastique dont vous ne semblez pas vous rendre compte.

Quand il va falloir vraiment vérifier si, au point de vue épidémiologique, ce qu'on fait a du sens et cela soutient l'analyse, on n'aura tout simplement plus le temps, plus l'énergie et plus le goût, de

toute façon, de s'évaluer soi-même, parce que toute cette aventure est une magnifique aventure bureaucratique vraiment excitante, avec des chefs, des sous-chefs et des adjoints aux sous-chefs en nombre infini. Il faut se rendre compte de ce dans quoi on s'embarque. Je pense bien qu'il n'y a pas d'illusions à se faire là-dessus. On va avoir une structure très ramifiée. Et on parle de professionnels, avec tout ce que cela implique. Alors, le parent pauvre dans tout cela, cela va être la fonction de santé publique, de contrôle et de surveillance. Elle ne se fera pas ou elle va continuer de se faire à la petite semaine, quand on a le temps, quand on y pense et quand il reste un fond de tiroir quelque part parce qu'on a oublié d'engager quelqu'un dans la troisième sous-division sud-ouest du district. Là, on dit: On a peut-être $50 000 qu'on peut utiliser et on va payer cela à un professeur d'université pour nous faire dire qu'on a bien fait notre travail durant l'année.

Ce n'est pas sérieux, on va manquer le bateau sur l'essentiel. C'est dans cet article que vraiment le crime s'accomplit. C'est par là qu'on dit: On prend tout cela en charge, c'est à nous autres, ce sont nos employés, ce sont les employés du secteur public. On fait les normes, on donne les budgets, on engage le monde et, là, on "run le show". Mais n'oubliez pas qu'en fin de compte on est responsable. Le même "on" est responsable. Si la santé et la sécurité ne s'améliorent pas dramatiquement après avoir dépensé un certain nombre de dizaines de millions de dollars, on va être dans un joli pétrin; le même "on", toujours. Et cela ne sera peut-être pas réversible, cette histoire-là.

C'est un pari fantastique que le gouvernement prend par cette loi et il le prend dans l'article 109. Rien ne lui permet de croire qu'il est capable de relever ce défi, rien, absolument rien. Il ne s'agit pas d'avoir du personnel sous supervision immédiate. Il ne s'agit pas, j'imagine, de faire venir les travailleurs à l'hôpital. Il va falloir aller dans l'entreprise. On a donc affaire à des milliers, des dizaines de milliers, des centaines de milliers de points de service, selon l'expression traditionnelle et chère au secteur des affaires sociales. On sait ce que cela a donné dans d'autres établissements qui ont essayé de multiplier leurs points de service: L'éclatement de la structure, la multiplication des hiérarchies administratives et, finalement, la paralysie totale de certains systèmes de distribution que je ne mentionnerai pas ce soir pour ne pas faire de jaloux. C'est vers cela qu'on se dirige et j'espère qu'on se dirige vers cela les yeux ouverts. (22 h 15)

C'est une prédiction que je vous fais. Je ne vous la souhaite pas, cette affaire-là. De toute façon, vous ne serez peut-être plus là pour la vérifier, parce que cela va prendre des années, et nous autres, non plus, on ne sera peut-être plus là pour la vérifier, personne qui est ici dans la salle. Cela va prendre des années avant qu'on puisse vraiment prendre un certain recul et dire: Est-ce que cela a marché? Le pari, est-ce qu'on l'a gagné ou si on l'a perdu?

Je vous fais une prédiction ce soir, "on the record": Cela va être un échec. C'est une vision pour laquelle vous n'avez pas le moindre début de l'ombre de la queue du chat d'une preuve que cela peut marcher parce que cela n'a fonctionné nulle part sous cette forme. C'est une innovation. C'est très bien d'innover. Je suis bien pour cela. Mais il faut au moins avoir une petite indication que cela peut marcher. Cela ne marchera pas. Vous en avez pour dix ans à tâtonner là-dedans. C'est dommage parce que ce n'est pas nécessaire au projet de loi. Le projet de loi pourrait contenir 99,9% de tout ce que vous avez là-dedans, sauf l'article 109. Vous auriez un meilleur projet de loi parce que vous engageriez des gens, à ce moment-là, et vous les feriez payer par le gouvernement, pour être bien sûr que, là-dessus, on surveille ce qui se passe et qu'on fait justement les études épidémiologiques, les examens de contrôle. On n'impose pas seulement de faire des examens à l'embauche et des examens périodiques sur certaines fonctions sur les fonctions respiratoires par exemple, là où il y a des poussières, mais on va en faire avec notre propre personnel, de temps à autre, pour vérifier s'ils sont fiables, les examens qu'on nous rapporte.

Est-ce que cela suppose un double système? Est-ce que cela suppose qu'il va y avoir, à l'intérieur du système public, des gens qui vont surveiller d'autres gens dans le système public pour voir s'ils le font consciencieusement et rigoureusement? Je pense que ce serait nécessaire.

Vous ne pouvez pas vous fier que vous allez avoir, à l'intérieur du même réseau, des gens qui vont faire une tâche et, après cela, qui vont changer de chapeau et qui vont se transformer en inspecteurs de leur propre travail. C'est du "whitewash", comme disent les Anglais; cela va être constamment du tournage autour du pot. Ah, bien oui, là, cela n'a pas marché parce que, parce qu'on n'avait pas les budgets, parce qu'on n'avait pas notre cadre, parce que notre organigramme n'avait pas été approuvé par le Conseil du trésor, parce que, parce que... C'est le chat qui court après sa queue, et, finalement, il n'y a jamais personne de responsable.

Il y a le conseil régional, il y a le comité truc et il y a le comité machin, et le gouvernement, qui a approuvé le programme de santé, n'a pas le pouvoir de le changer, même s'il n'en est pas content. Il faut qu'il le "rubber stamp" etc. Finalement, personne ne sera responsable, on va tous avoir des alibis longs comme le bras. Cela va être parfait. Cela va toujours être la faute de l'autre qui n'a pas consulté à temps ou qui n'a pas protesté au bon moment ou qui a fait une erreur. C'est un système où il n'y a plus de responsabilités. Et c'est une bureaucratie gigantesque à l'intérieur d'un système qui est déjà affaibli dans ses capacités administratives.

Est-ce que nos hôpitaux fonctionnent si bien qu'on puisse leur donner un gros paquet comme cela, en disant: La santé et la sécurité au travail, on s'en est occupé? Je ne serais pas celui qui ferait l'affirmation. Quand je dis cela, je ne pose pas un jugement injuste, injustement sévère sur

nos institutions publiques qui font ce qu'elles peuvent et qui se sont améliorées au cours des années. Est-ce que les départements de santé communautaire sont juste assis sur le bout de leur chaise en disant: On veut faire cela, on veut faire tout cela et on vous promet qu'on va réussir? J'aimerais bien les entendre si c'était vrai, mais je serais très surpris d'entendre un témoignage comme cela. Evidemment, on espère beaucoup. Quand on donne quelque chose sur un plat à des structures administratives, elles ne sont pas pour dire: Non, je n'ai plus faim, merci. Il y a, quand même, une certaine tentation.

Mais, sérieusement, est-ce qu'on pense que cela va marcher? Je vous dis, avec l'expérience que j'ai eue avec le cas des établissements qui sont chargés de cette responsabilité, qu'on les détourne de leur véritable fonction qui est de surveiller la santé publique, de surveiller que les autres assument leurs responsabilités par l'impact qu'ils ont justement sur l'état général de la santé, plutôt que d'essayer de donner les services soi-même. On leur fait donner les services eux-mêmes, on renverse tout leur ordre de priorités et on s'assure que le parent pauvre, cela va être les activités de contrôle de santé publique.

Je suis désolé, M. le Président, mais je ne peux pas faire autre chose que voter contre cet article. Sur le plan du principe, il y a cela, mais, sur le plan de la modalité, vous avez un contrat qui n'en est pas un. C'est un contrat-ordonnance avec un budget décrété par la commission. Cela va donner ce que cela va donner, mais cela va donner n'importe quoi d'autre que ce qu'on nous décrit que cela va être, c'est-à-dire un ajustement souple en fonction des priorités locales, etc. Jamais de la vie!

On n'a pas voulu nous dire ce qu'étaient les programmes de santé. Je vous promets que, lorsque les programmes de santé vont être définis par la commission et quand elle aura défini les budgets qu'elle est prête à y consacrer, la petite marge de décision qui restera, qu'on divise entre le chef du département de santé communautaire, les conseils régionaux, les médecins d'établissement, ils sont trois à se diviser les 2% qui restent à décider, ils vont pouvoir se battre là-dessus, il n'y a pas d'erreur, mais ils auront à peu près seulement 2% de marge de manoeuvre, ils n'auront pas 100% de marge de manoeuvre. Les grandes décisions seront déjà prises d'avance au centre, à Québec. C'est la conclusion qui s'impose.

Le Président (M. Laberge): M. le ministre, avez-vous un commentaire?

M. Marois: Je veux juste ajouter un tout petit commentaire sur l'état actuel des faits. Je ne sais pas trop quoi conclure de l'intervention de près de 20 minutes du député de Saint-Laurent sur cet article, si ce n'est de prendre acte de son pessimisme. Cependant, si je suis d'accord avec lui sur un point, que c'est un très gros défi, je suis plus optimiste que lui sur la base des expériences vécues. Le député n'est peut-être pas au courant — je comprends que cela fait déjà trois ans qu'il n'a pas l'information quotidienne qui vient du fait qu'on assume la responsabilité du pouvoir — des résultats qu'ont donnés les ententes intervenues entre le DSC de Beauceville et le CH de Thetford, des ententes intervenues entre le département de santé communautaire de Maisonneuve-Rosemont et le CLSC du coin qui ont permis, non seulement de mener des études mais d'ouvrir des services de santé, en particulier, tout autour de la question de la soudure, on mentionnait un cas.

Deuxièmement, je comprends que le député a éclaboussé les murs en chefs et en sous-chefs et en trois millions de travailleurs. Je reviens à ce que le Parti libéral évoque depuis le début, l'idée fondamentale qui est inscrite, non seulement dans l'économie générale de la loi mais qui ressortait très clairement du livre blanc sur lequel j'ai eu l'occasion de revenir à plusieurs reprises. Il est évident qu'il va falloir y aller avec une certaine prudence, par phases, en commençant pas les coins où il y a non seulement absence de services dans bon nombre de cas, de services de santé, mais également où il y a nécessité d'intervenir non seulement parce qu'il n'y a rien, mais parce qu'il y a des priorités qui sont urgentes. C'est certain qu'au point de départ cela n'implique pas toute une kyrielle, une batterie de chefs et de sous-chefs et les trois millions évoqués par le député de Saint-Laurent. Cela étant dit, c'est certain qu'il y a des limites aux ressources budgétaires et que tout ne pourra pas être fait en même temps, il faudra établir des priorités et s'entendre avec les parties concernées. C'est l'économie de ce qui est proposé. On peut bien faire le procès du réseau public; le réseau privé, contrairement à ce qui a été évoqué et dit, on n'en fera pas table rase et il n'est pas exclu, loin de là. Mais, s'il avait donné ses résultats aussi miraculeux, on ne serait peut-être pas aujourd'hui dans la situation dans laquelle on se trouve, non plus que les hommes et les femmes qui sont au travail et qui sont concernés directement au premier chef.

M. Jolivet: Adopté sur division. M. le Président, adopté sur division.

Le Président (M. Laberge): Article 109, adopté sur division. J'appelle l'article 110. Cet article 110 sera-t-il adopté?

M. Forget: M. le Président, je vais être très bref sur l'article 110. Je demanderai au ministre, quant au financement exclusif qu'il envisage par la commission, s'il n'y aurait pas lieu de l'élargir pour permettre au ministère des Affaires sociales de continuer à financer ou à développer le financement des activités propres à la santé publique dans ce secteur. Je fais une très nette distinction encore entre la prestation de services sur place dans les établissements, examen de préambauche, examen en cours d'emploi, évaluation de certains postes de travail, information aux travailleurs sur les risques qui sont inhérents à leur santé, etc., l'activité quotidienne et routinière qu'impliquent

les services de santé en milieu de travail pour des fins de prévention, de contrôle et de surveillance. D'autre part, l'activité d'évaluation de ce qui se fait, de l'impact, la découverte de problèmes qui sont insoupçonnés, etc., ces activités, de second degré en quelque sorte, réflexives qui s'apparentent énormément à des activités de recherches, c'est de la recherche épidémiologique dans un certain sens et une activité de contrôle ou de second regard sur ce qui se fait en première ligne. Est-ce que ce n'est pas une fonction gouvernementale dans le sens fort du mot et qui pourrait continuer à être assumée par le ministère des Affaires sociales — qui devrait, à mon sens — au moins au niveau du financement de manière qu'il y ait, en quelque sorte, un budget protégé, qu'on s'assure que ces fonctions ne sont pas reléguées finalement... Vous savez, c'est le genre de chose qu'on fait quand on a un peu plus de fonds. Le Conseil du trésor dit: C'est dommage, mais on ne peut pas. Parce que ce n'est pas de la première ligne. Personne va s'en apercevoir demain que cela n'existe pas. Sauf que, cinq ans après, on se rend compte que l'on ne sait pas si les services qu'on donne sont bons ou pas, sont efficaces ou pas. Mais on les sacrifie parce que ce n'est jamais dans une priorité budgétaire à court terme.

Si on permettait au ministère des Affaires sociales de maintenir une présence dans ce secteur, il me semble qu'on assurerait que le principe n'est pas oublié et que la responsabilité du ministre des Affaires sociales... Ce sur quoi le gouvernement s'appuie pour solliciter son entente avant que le gouvernement n'approuve des pro-grames de santé et des contrats types, que cela puisse s'appuyer sur une véritable implication pratique, pas simplement sur quelque chose de théorique, c'est-à-dire que le ministre des Affaires sociales, en vertu de la loi constitutive du ministère, est chargé de la santé publique du monde, et que cela lui vient par une science infuse. Je pense que, si administrativement et budgétairement, son ministère n'est pas impliqué, il va cesser de s'en préoccuper à toutes fins utiles. Il y a quand même des choses telles que les priorités quotidiennes — pour un ministre cela existe aussi, je suis sûr. Une chose dont on n'est pas responsable autrement qu'en vertu de la littérature qui sert de préambule à la loi du ministère, cela vient très loin derrière. Les choses dont on est responsable administrativement et financièrement, je pense que c'est bien connu. Alors, pourquoi ne pas lui garder une présence à ce ministère, mais une présence réelle? D'autant plus que cela se fait dans les établissements dont il est le ministère de tutelle.

Si on lit aux articles 109 et 110, on l'évince. On évince le ministère des Affaires sociales de ce champ à toutes fins utiles. On dit: Vous n'avez rien à faire là-dedans. C'est désormais la juridiction exclusive de la commission. Il me semble qu'on n'a pas besoin de faire d'exclusivité contre qui que ce soit là-dedans. Le ministère des Affaires sociales peut faire sa priorité de la responsabilité de contrôle au point de vue de la santé publique et peut peut-être servir de second regard au gouvernement lui-même en disant: Ecoutez, nos épidé-miologistes et nos médecins de santé publique regardent ce que la commission fait par ses budgets et ses priorités et l'avis qu'on reçoit c'est que, dans tel ou tel secteur, ils ne sont pas forts. Ils sont tellement faibles que cela commence à nous inquiéter. Ce serait bon qu'au gouvernement il y ait un deuxième regard et une seconde opinion. On parle, dans les assurances-maladie américaines, d'une deuxième opinion chirurgicale. Je pense que, dans le domaine de la santé publique, il y a un peu l'équivalent. Surtout que, là, on est pris dans un système adversaire. Ce n'est plus le service de santé du patron qui va être attaqué par le syndicat. On se situe dans le royaume éthéré des services gouvernementaux. C'est peut-être bon d'avoir un second regard, d'avoir un processus adversaire au moins à ce niveau parce que les autres vont se sentir drôlement impuissants quand la commission, dans sa sagesse, va avoir décidé. Ils sont mieux de prendre leur trou dans la plupart des cas si on en juge par les expériences qu'on connaît ailleurs. On est peut-être aussi bien de laisser au gouvernement au moins la chance de différer d'opinion avec lui-même. C'est peut-être une garantie qu'on donnerait aux travailleurs pour leur santé. Ce n'est pas seulement ceux qui ont des problèmes budgétaires à régler, mais il va aussi y avoir d'autres gens qui vont regarder de plus près.

M. Marois: M. le Président, je pense que le député de Saint-Laurent a peut-être conclu trop vite à partir de deux articles du projet de loi, notamment 109, mais il en a mentionné un autre à l'exclusion du ministère des Affaires sociales.

Vous allez voir qu'à l'examen d'un certain nombre d'articles son affirmation ne résiste absolument pas à l'analyse. Deuxièmement, parce que nous partageons sa préoccupation non seulement de maintenir le ministère des Affaires sociales dans le paysage, conformément aux responsabilités qui lui sont dévolues quant à son rôle dans le domaine de la santé publique en général, mais, en même temps, parce que, précisément, il est important qu'il soit là, pour reprendre l'expression du député de Saint-Laurent, comme un second regard. (22 h 30)

Notamment — c'est là que son affirmation d'exclusion ne résiste à l'analyse — l'article 107 du dernier paragraphe prévoit que le projet de programme de santé ou de contrat type doit être soumis pour entente au ministre des Affaires sociales, ce que le député de Saint-Laurent voulait enlever tout à l'heure au ministre des Affaires sociales. Deuxièmement, l'article 167 précise un certain nombre de fonctions de la commission. Au paragraphe 9, "analyser en collaboration, s'il y a lieu, avec le ministre des Affaires sociales, les données recueillies par les différents organismes et personnes oeuvrant dans le domaine de la santé et de la sécurité du travail et en extraire des

statistiques." Paragraphe 16: "Soumettre des recommandations au ministre des Affaires sociales afin qu'il coordonne la réalisation des programmes de santé et s'assure de la qualité du personnel employé, de l'équipement et des locaux utilisés aux fins des services de santé du travail." Paragraphe 12: "Concevoir et réaliser en collaboration, le cas échéant, avec le ministre des Affaires sociales, des campagnes d'information visant la protection de la santé, de la sécurité et de l'intégrité physique des travailleurs." Je n'ai fait là que relever quelques articles jusqu'à maintenant, pour confirmer que nous partageons cette idée du ministère des Affaires sociales de pouvoir rester de façon active dans ce domaine.

M. Forget: M. le Président, étant donné que le ministre a cité des exemples, cela me fait penser au coup de chapeau de tantôt. Ce sont des coups de chapeau au ministère des Affaires sociales. Mais franchement, entre nous, lisons un de ces paragraphes parmi d'autres. On pourrait faire la même chose avec les autres. "Concevoir et réaliser en collaboration, le cas échéant, avec le ministre des Affaires sociales, des campagnes d'information visant la protection de la santé, de la sécurité et de l'intégrité physique des travailleurs." Pense-t-on vraiment qu'on a cerné quelque chose qui est vraiment un problème important et qui donne une ouverture à une expertise du ministère des Affaires sociales? Ce sera les deux directions des communications qui vont organiser ensemble un programme de publicité à la télévision, etc., sur le plan du contenu. Mais, vraiment, comme enracinement d'une implication du ministère des Affaires sociales dans le domaine de la santé et de la sécurité, cela ne porte pas à grande conséquence.

S'il n'y a pas, du côté du ministère des Affaires sociales, autre chose que des trucs de ce genre — les autres sont du même acabit — ce n'est pas sérieux. Je ne serais pas assuré que le ministère va vraiment s'impliquer. Il va s'impliquer au niveau de quelques fonctionnaires qui font des communications, qui vont dire: Nous faisons une campagne de publicité au printemps. Faites donc la vôtre à l'automne. Comme cela, on va avoir un effet continu sur l'opinion publique. Ce n'est pas sérieux. Bien sûr, on dit: Un coup de chapeau. Oui, on va consulter le ministère des Affaires sociales. Mais au niveau où cela va se faire, l'expertise, étant impliquée, cela ne répond pas vraiment à la préoccupation que j'ai exprimée.

On dit à l'article 168: La commission ne peut accorder un contrat de recherche, sans l'approbation du ministre des Affaires sociales. Je sais très bien ce qu'il y a dans cet article. On veut permettre au ministère des Affaires sociales de s'assurer que les coûts de la recherche, quand elle se fait dans les établissements des affaires sociales, soient assumés totalement par la commission. On ne veut pas se faire passer un sapin par la commission qui paierait 10% et qui laisserait le reste au ministère des Affaires sociales. C'est une règle de bon voisinage financier. Mais, encore une fois, cela n'implique pas une responsabilité centrale au plan de la santé publique pour le ministère des Affaires sociales. Je n'en vois pas dans les autres non plus. J'ai analysé les chiffres fournis. Amoins qu'on veuille dire qu'il y a véritablement une responsabilité au ministère des Affaires sociales de surveillance sur le plan de la santé publique de ce qui se fait à la commission, il n'y aura tout simplement pas l'expertise qu'on devrait consulter.

On peut dire dans cet article: On va consulter ces gens. Mais le ministère va dire: Comme on n'a aucune responsabilité administrative financière, on n'a pas maintenu une équipe de chercheurs juste pour le plaisir que vous pourriez peut-être un jour venir nous consulter sur les chiffres que certains organismes ont amassés là-dessus. Ce n'est pas de l'amateurisme dont on parle. On parle d'un engagement profond, continu et permanent du ministère des Affaires sociales ou pas. Je pense qu'il n'est pas là, malgré qu'il y ait des coups de chapeau à droite et à gauche.

M. Marois: M. le Président, je n'allongerai pas la discussion. Le député de Saint-Laurent, je présume, ne veut certainement pas dire que, par exemple, c'est un simple coup de chapeau lancé au hasard, le fait que — il le sait fort bien — par exemple, la campagne d'information publique — il a l'air de rejeter cela du revers de la main — entre autres sur tout le domaine de la nutrition a été conçue... Il a l'air de dire que ce sont simplement des ententes entre deux gars des communications qui font des bricoles avec du temps d'antenne, et on y va. Il sait fort bien que cette campagne d'information a été conçue et basée à partir de recherches, d'études et précisément accrochée à la responsabilité de santé publique du ministère des Affaires sociales dans le domaine, en particulier, de la nutrition et de l'état actuel de la situation des Québécois dans ce domaine.

M. Forget: Le ministère se sentait responsable de la nutrition, mais vous lui dites, dans cette loi, qu'il n'est plus responsable de la santé au travail. Il n'accumulera pas une expertise dans ce secteur. Ceux, parmi ces professionnels, à la planification ou ailleurs qui sont intéressés à la santé du travail, ils vont demander d'être mutés à la commission; cela tombe sous le sens commun. Vous ne lui laissez aucune place. Ceux qui sont intéressés à ces problèmes vont aller là où est l'action, pas là où un pouvoir occasionnel de consultation, si jamais on y pense. Il n'y a, nulle part, une responsabilité qui reste au ministère des Affaires sociales. Je ne veux pas en faire un plat, je note que, à la fois sur le plan de conception d'ensemble et sur le plan de l'articulation législative, le ministère des Affaires sociales n'a plus rien à faire dans le domaine de la santé au travail sauf si, par hasard, quelqu'un s'y intéresse en faisant autre chose; on pourra le consulter au passage, mais ce n'est rien d'autre que cela.

C'est une option, mais, au moins, qu'on nous la présente pour ce qu'elle est, qu'on ne nous dise pas: On va consulter tout le monde, même les conseils régionaux; j'ai bien hâte de voir cela. On

les consultera peut-être pour constater qu'ils n'ont rien à fournir et, après cela, on dira: On les a consultés et ils nous ont dit: Ecoutez, on ne connaît pas cela, alors faites donc votre travail comme la loi vous y oblige.

M. Marois: M. le Président, je vais mettre mon dernier mot là-dessus. J'écoute très attentivement le député de Saint-Laurent depuis un bon moment, on en conviendra tous. On l'écoute très attentivement pour essayer de comprendre la logique, ses points d'appui sur ses nombreuses affirmations. A l'analyse de ses affirmations, il ressort une chose avec laquelle nous ne sommes pas d'accord, une chose qui est fondamentale. Toute l'analyse qui sous-tend l'intervention du député de Saint-Laurent semble marquée au coin d'une conception dichotomique du ministère des Affaires sociales, d'un côté, et de tout le réseau, d'autre part, comme si c'étaient des morceaux complètement séparés, alors que l'approche que nous retenons ne fait pas cette dichotomie, mais vise essentiellement à utiliser au mieux un élément du réseau qui est le département de santé communautaire, en maintenant la présence du ministère des Affaires sociales, en ne lui enlevant absolument pas sa responsabilité dans le domaine de la santé publique, en l'amenant même, jusqu'au plus haut niveau, à siéger et à avoir des représentants au niveau de la commission, en lui permettant même d'intervenir, puisque c'est une des clés essentielles, pour entente sur des choses qui sont fondamentales, ce qui nous permet de compléter un volet essentiel de la santé publique, le domaine de la santé au travail en utilisant au mieux ce qui est là, au lieu d'avoir une approche complètement dichotomique comme si les morceaux étaient répartis séparément dans le paysage.

Le Président (M. Laberge): L'article 110 sera-t-il adopté?

M. Forget: De façon dichotomique.

Le Président (M. Laberge): Adopté avec dichotomie... sur division. J'appelle l'article 111.

M. Marois: C'est bien ce que je disais. C'est la philosophie du député de Saint-Laurent. A l'article 111, M. le Président, je voudrais proposer un amendement; on va vous distribuer le texte. On voudrait, pour répondre à la demande qui nous est venue notamment, mais non exclusivement, des optométristes, remplacer, dans la troisième ligne, les mots "les autres médecins" par les mots suivants: "les autres professionnels de la santé au sens de la Loi sur l'assurance-maladie" et, à la fin, forcément, par concordance, remplacer les mots "la Loi sur l'assurance-maladie" par les mots suivants: "cette loi".

M. Forget: Est-ce que je peux poser une question au ministre, M. le Président?

Le Président (M. Laberge): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: On fait une référence ici aux ententes conclues en vertu de la Loi sur l'assurance-maladie. Comme il y a eu des difficultés dans l'application du nouveau régime d'assurance automobile parce qu'on a présumé de l'existence d'ententes, alors qu'elles n'existaient pas sur ce point-là, et que cela a causé des retards sérieux d'application de la loi, au niveau de ceux qui avaient besoin d'expertises médicales, est-ce que le ministre a saisi son collègue des Affaires sociales qui sera responsable de cette négociation de la nécessité de prévoir des ententes particulières ou des ententes additionnelles, intérimaires, pour pouvoir mettre en application le régime envisagé par la loi 17? Je comprends bien qu'on ne peut pas tout simplement, par référence, présumer étendre le champ d'application des ententes sans les renégocier.

M. Marois: M. le Président, la réponse à la question c'est oui.

M. Forget: En attendant la négociation de pareilles ententes, quelles sont les intentions du gouvernement; Est-ce que ça va être rendu public ou cela a-t-il déjà été rendu pubic? Est-ce qu'on va conclure une entente intérimaire pour déterminer des tarifs ou si on va les imposer unilatéralement?

M. Marois: M. le Président, c'est déjà en négociation.

M. Forget: C'est déjà en négociation?

M. Marois: Oui. Les ententes se terminaient le 1er novembre dernier.

M. Forget: Oui, je sais qu'elles se terminaient, mais ça peut prendre un certain temps, comme on le sait, entre la fin d'une entente et son renouvellement. Dans le cas des ententes existantes, il y a une clause, en quelque sorte, de reconduction, mais on ne peut pas reconduire des éléments qui n'existent pas dans l'entente originale.

M. Marois: Oui et, deuxièmement, jamais le gouvernement n'a-t-il prétendu que le présent projet de loi, étant adopté avant Noël, entrerait forcément en vigueur dans les deux mois qui suivent.

M. Forget: Le cas échéant, il pourrait y avoir une entente intérimaire, j'imagine.

M. Marois: Je n'exclus rien. Une Voix: Adopté.

M. Forget: Non, M. le Président, au sujet de cette question de la rémunération des professionnels de la santé et du médecin responsable des services de santé dans les établissements, on dit qu'ils sont rémunérés par l'assurance-maladie. Il me semble plus logique de les faire rémunérer par l'employeur. C'est une responsabilité sociale de l'employeur d'assumer le coût du personnel en

entier me semble-t-il, nécessaire à l'application des programmes de santé, y compris le personnel professionnel au sens de la Loi sur l'assurance-maladie. Je ne vois vraiment pas ce que nous avons à gagner collectivement à faire assumer par l'ensemble de ceux qui cotisent au régime, soit par leurs impôts, soit par des cotisations imposées aux employés et aux employeurs, le fardeau particulier des services de santé en milieu de travail. Est-ce que ce n'est pas une obligation qui devrait appartenir en totalité à l'employeur? Etant donné que les services, présumément — encore une fois, nous allons revenir là-dessus — sont fournis dans un établissement pour les employés d'un établissement identifiable, il semblerait plus approprié qu'ils soient assumés directement par l'entreprise.

Il y a une très grande signification qui s'attache au lien financier immédiat. Je comprends que tout le monde paie des impôts et qu'à ce moment on pourrait distribuer gratuitement les aliments à tout le monde, dans le fond on dirait: On va se rembourser par les impôts, mais il reste que le lien financier direct est très important, parce qu'il faut conserver la conscience auprès des prestateurs de services qu'ils ont une obligation, pas seulement envers les supérieurs hiérarchiques au niveau gouvernemental éventuellement, mais qu'ils ont une obligation de services face à un établissement, face aux employés de cet établissement. (22 h 45)

Je pense que le lien financier direct a une grande signification. Il véhicule un message très concret qu'il y a une obligation de services là, et pas juste une obligation d'être disponible à toute une population de travailleurs dans un territoire.

Il y a un autre élément, c'est que si l'approche prioritaire est conservée, le gouvernement nous dit qu'il a accepté la philosophie que certains secteurs sont prioritaires. Quelle espèce d'équité y a-t-il à ce que tout le monde paie des taxes identiques, y compris les taxes sur les travailleurs eux-mêmes et sur les entreprises elles-mêmes, alors que seulement certaines catégories prioritaires reçoivent la protection? Il y a là un transfert très important entre citoyens et qui n'est pas du tout un transfert en fonction de critères d'équité normale pour un gouvernement. On donne des services à certains secteurs, qu'on juge exposés à des risques particuliers, mais pas simplement parce que ce sont des risques très élevés, c'est aussi parce que, étant donné la limitation des ressources, on ne pourra pas tout couvrir d'un coup. Il y aura donc des secteurs qui se qualifieraient de prioritaires durant les premières années, si on avait les ressources supplémentaires, mais qu'on ne pourra pas desservir. Malgré tout, face à ces gens, on va leur imposer les mêmes impôts qu'à tout le monde et on va être très conscient qu'on ne leur donne pas ce à quoi ils ont droit, parce que les ressources sont limitées, mais c'est une espèce de double injustice qu'on fait à leur égard. Il me semble que si on s'écarte du principe que, dans le fond, le bénéficiaire paie, on est amené à adopter une solution globale qui va rendre très réelles et très con- crètes les pressions dont sera la cible le gouvernement et la commission pour tout faire tout de suite. Or, tout faire tout de suite, à la limite, c'est peut-être possible en coupant les coins sur le plan financier, mais je pense que le ministre sera d'accord avec moi que même si la commission veut tout faire tout de suite il n'y a tout simplement pas au Québec, sur le plan des ressources humaines, suffisamment de gens pour tout faire tout de suite, ça va prendre un bon nombre d'années avant qu'on soit dans cette situation.

Si on veut à tout prix tout faire tout de suite, on va engager n'importe qui pour faire tout de suite n'importe quoi, à peu près. Cela s'est produit aussi dans certains secteurs où on a voulu tout faire tout de suite et, après ça, étant donné la sécurité d'emploi — c'est tout un régime public que l'on connaît bien — on va être pris pendant 30 ans avec des gens qu'on a engagés sous pression, parce qu'on faisait face à des problèmes d'équité très réelle, qui n'étaient pas compétents, qui n'étaient pas qualifiés. On les a pris faute de mieux et, une fois qu'ils sont entrés dans le système, ils sont là jusqu'à leur retraite. Il faut être conscient de ça, on l'a vécu dans le système de l'éducation, on le vit encore; on a voulu donner l'équité à tout le monde tout de suite, on leur a donné l'équité à un certain niveau. C'était tout ce qu'on pouvait faire et, après ça, c'est un phénomène de crémaillère. On est gelé à ce niveau pendant 20 ans, 25 ans, 30 ans, parce que forcément ces gens qu'on a engagés sous pression pour donner tout, tout de suite, à tout le monde, ce sont ceux qui ont le moins de choix et ce sont ceux qui se trouvent dans une situation privilégiée par rapport aux choix qui leur sont offerts.

Alors, c'est un coût considérable, mais quand on a à coeur d'améliorer la santé des travailleurs — pas demain, parce que demain, on ne pourra pas faire beaucoup mieux qu'hier, en termes de trois jours, on ne peut pas tout changer — dans le fond, la question de temps est très importante. Si on essaie de tout faire tout de suite, on va tout faire tout de suite, mais très mal. Si on se donne le temps, on va pouvoir faire beaucoup mieux et ça c'est très important parce que, finalement, si on a attendu cinq ans, dix ans ou quinze ans pour en venir là, c'est peut-être la peine d'y mettre encore quelques années pour être sûr qu'on ne handicape pas, par un développement inconsidéré, pratiquement une génération complète.

Or, le système de financement est au coeur des incitations que crée le gouvernement. En créant un système de financement comme celui-là, il rend maximales les pressions pour aller vite, parce que tout le monde va payer le même prix et n'aura pas les mêmes services. C'est très joli de dire qu'on va y aller prioritairement, mais pendant combien de temps sera-t-on prioritaire ou mettra-t-on les priorités au bon endroit? Les gens vont dire: On y a droit, nous, on paie les mêmes taxes que les autres, sommes-nous des citoyens de seconde zone? Regardez ce qui nous arrive, il y a des risques, etc. Si vous dites: On a des gens en

formation, etc., vous savez très bien que cette explication ne passera pas; on y a droit tout de suite et pourquoi attendrait-on?

C'est un autre pari qu'on prend avec la patience des gens. On sait que les gens, à la fin du XXe siècle, ne sont pas très patients. Evidemment, cela fait très bonne figure dans le moment, on dit: Un système uniforme, universel, gratuit, en fait, toute l'histoire. Etant donné qu'on le fait, en plus, dans le secteur public, c'est un "locking-in effect". On entre du monde dans le système pour satisfaire à des pressions à court terme et on va être pris avec en l'an 2010, on va encore avoir des gens qu'on a engagés en 1982, qui n'étaient pas bons, on savait qu'ils n'étaient pas bons, mais il fallait absolument engager des gens pour faire taire un certain nombre de groupes. On va les engager et, après cela, on va dire: Eux, ils sont déclarés compétents, et ils restent là jusqu'à ce qu'ils meurent.

C'est cela qu'on est en train de créer encore dans un autre secteur. Encore un autre secteur où on va donner à nos enfants un héritage, dans le fond, beaucoup moins bon que celui auquel ils pourraient prétendre autrement. On ne dira pas, après: Qu'est-ce que vous voulez? C'est comme cela, c'est la vie. Pas du tout, la vie n'est pas comme cela nécessairement, c'est parce que, à un moment donné, on a créé un système qui a sa propre logique — le ministre est fort sur la logique des systèmes, alors il va très bien comprendre ce que je lui dis — c'est un système du secteur public, avec des pressions où l'argument d'équité domine le développement, toujours; on l'a toujours fait, il faudrait bien vivre une expérience différente, et je ne vois pas quel facteur on a pour croire que cela va être différent. Cela va être tout de suite tout d'un bloc. C'est physiquement et humainement impossible, alors, avec la logique du système, on va produire, pour tout le monde, un bon système médiocre, et on va être pris avec longtemps.

M. Jolivet: Niveler par la base.

M. Forget: J'inviterais le ministre à réviser sa position là-dessus et à laisser porter à ceux qui en bénéficieront, dans les industries qu'on aura déclarées prioritaires, tous les coûts. Là, on les répartit également pour tout le monde, alors les ré-partissant également pour tout le monde, parce que ces coûts sont défrayés par l'assurance-maladie, ils sont défrayés par des cotisations qui ne reflètent pas du tout les niveaux de services relatifs et de risques. Regardez le régime de cotisation de la Commission des accidents du travail, qui est une des incitations à l'envers du début à la fin. On va perpétuer un régime comme celui-là? J'aimerais avoir les explications du ministre là-dessus.

Le Président (M. Laberge): M. le ministre.

M. Marois: M. le Président, le député de Saint-Laurent va être servi, cela fait 20 minutes qu'il parle. Ou bien le député de Saint-Laurent n'a vraiment pas recouru aux bons services du recher- chiste du député de Portneuf, ou il n'a pas lu la loi, mais il nous fait des affirmations, longues comme l'ensemble des tables ajoutées bout à bout, qui ne correspondent pas du tout au texte même de la loi. Je veux bien discuter sur le fond, mais en s'accrochant aux faits. Je ne sais pas si je suis fort en logique, mais il y a une chose aue je sais, c'est que, premièrement, si elle a eu un commencement, le premier commencement de l'ombre du bout de commencement de pointage de visibilité de la queue du fameux chat qui avait été amorcé par les gouvernements qui nous ont précédés, on ne serait pas devant rien, on serait devant quelque chose, on commence.

Le député, M. le Président, encore une fois, j'ai eu le respect de base minimum de l'écouter patiemment et attentivement; je lui demanderais simplement d'avoir le même minimum de respect. Je veux bien me faire servir à longueur de journée l'arrogance à l'Assemblée nationale, comme toujours, un argument qui serait notre lot, mais je pense que, parfois, concrètement, je voudrais bien obtenir du député de Saint-Laurent le même minimum de respect quand je prends la parole.

Deuxièmement, le député a dit, si j'ai bien compris l'ensemble de son exposé, que la rémunération devrait être assumée directement par les employeurs. Si le député veut dire par "directement" que les médecins, notamment, devraient demeurer des salariés de l'entreprise, la réponse est non. En ce qui nous concerne, notre choix est fait et je ne reviendrai pas là-dessus. Si le député veut dire par "la rémunération assumée directement par les entreprises" que des cotisations en conséquence devraient être perçues par les employeurs pour assumer les coûts de cette partie du régime, il va trouver la réponse très précisément à l'article 247 du projet de loi qui prévoit précisément cela.

Troisièmement, quand le député fait comme dernière affirmation que les coûts vont être répartis — et là, on peut tomber dans des iniquités et des injustices — de façon uniforme à l'ensemble des entreprises, je pense bien qu'il y aurait lieu que ses recherchistes lui fournissent un certain nombre de notes concernant la façon d'établir les taux de cotisation, avec l'introduction, en plus, du système de points mérite-démérite présentement en vigueur, à l'intérieur du régime de la Commission des accidents du travail. Il saurait que les taux sont établis, d'une part, sur la base de ce qu'on appelle dans le jargon de la CAT, des classes ou des catégories d'entreprises, d'autre part, ce qui n'exclut pas du tout, en vertu de la loi actuelle, qui n'est pas modifiée par le présent projet de loi, la possibilité — le cas échéant en particulier à cause de l'introduction du facteur mérite-démérite — en plus, de facturer l'unité. Partant de là, il est sûr qu'il y a un certain pari qu'on prend avec la patience du monde qui va demander les services de santé partout en même temps. C'est évident que la patience du monde commence à être à bout quand on regarde le constat actuel qui fait que dans 90% des entreprises il n'y en a pas présentement.

Le pari que nous faisons, c'est qu'à partir du moment où il devient possible de s'asseoir ensemble, encore une fois, avec les représentants du monde patronal et les représentants des travailleurs pour définir un certain nombre de priorités, il va de soi — bien sûr, il peut se manifester une certaine impatience dans les secteurs qui ne seraient pas couverts de façon prioritaire — que dans l'actuel des ressources budgétaires et simplement des ressources humaines, des compétences dans ce domaine, il va falloir établir des priorités. Tout ne pourra pas être fait en même temps et c'est ce que prévoit le présent projet de loi no 17, avec la possibilité de répartir sur ceux qui tomberont dans les catégories prioritaires — je parle des secteurs industriels — des employeurs, de faire en sorte qu'ils assument le coût de ces services par le biais des cotisations qui seront versées, comme le mentionne l'article 247, à la commission qui verra à établir des remboursements requis à la Régie de l'assurance-maladie du Québec.

Le Président (M. Laberge): Le texte du nouvel article 111 présenté par le ministre sera-t-il adopté? M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: Je ne voudrais pas intervenir dans la savante discussion de mes deux collègues, sauf que quand le ministre, faisant état de l'absence de législation — non pas pour protéger le travailleur — parle du petit bout de queue de chat qui n'était même pas commencé, je me suis souvenu, à ce moment, que le ministre ne s'était pas rappelé de deux témoignages qu'on a eus à la commission parlementaire: l'un qui venait de M. Leclerc, de la FTQ, et de M. Chartrand qui a parfois un langage très vert, mais qui avaient fait référence à l'inobservance complète des lois existantes. Je pense que le gouvernement qui est en place depuis trois ans, quand il fait un reproche aussi amer à l'ensemble du gouvernement qui a précédé, il doit faire son propre mea culpa, si la situation a perduré dans le temps. Atravers toute la loi, aussi compliquée soit-elle, que veut apporter le ministre, je pense que tout le monde souhaite qu'elle apporte des correctifs à la situation actuelle. Mais aussi bonne que soit la loi, si le même phénomène se retrouve, suivant des exemples qu'on nous a donnés, on ne sera pas tellement plus avancé si les lois actuelles n'ont pas été respectées et si celle-là, aussi chargée soit-elle d'implications n'est pas respectée davantage.

M. Marois: M. le Président, les interventions du député de Charlevoix sont souvent très pertinentes. C'est vrai que, quant à l'application de l'une ou l'autre des sept lois et des 20 règlements existants, le gouvernement a sa part actuelle de responsabilités de la non-application, du non-respect de certaines normes et de certains règlements. J'évoquais, bien sûr, la nécessité d'en arriver, de façon urgente, à une réforme. C'est une des clés. Ce n'est pas la seule. Mais il y en a au moins deux; une double clé, je dirais. (23 heures)

La première, c'est que dans le fouillis actuel de l'émiettement des services d'inspection... Intervenu personnellement, en particulier dans le fameux dossier de la compagnie Ballast Metal de Laprairie, je vous assure que ce n'était pas facile d'en arriver à mettre ensemble des morceaux d'administration de services d'inspection, qui étaient complètement émiettés dans le paysage, ce qui m'a de plus en plus convaincu de la nécessité de réorganiser, de regrouper, de régionaliser pour assurer une présence permanente, en région, des services d'inspection, notamment, qu'il faut moderniser. Il faudra injecter plus de ressources, avoir plus de gens qualifiés, compétents, mais aussi s'assurer que c'est présent de façon permanente et que c'est regroupé. On connaît mon opinion quant à l'opportunité ou non du rattachement de tels services à la commission, éventuellement pour que tous les morceaux soient ensemble.

Deuxièmement, de plus, comme vous le savez — je ne veux pas revenir longuement là-dessus — l'une ou l'autre, les unes et les autres des sept lois et des 20 règlements avaient réussi le tour de force de faire en sorte qu'on ne mentionne à peu près jamais le mot "travailleur" dans ces lois. Pourtant, il s'agissait de leur santé et de leur sécurité. En d'autres termes c'était comme si on pensait que, par une certaine conception, si on laisse tout à l'employeur, on va arriver à la solution des problèmes ou comme si on pensait que si on passe tout à l'Etat, on va arriver à la solution des problèmes. Non, on va croire qu'on va y arriver en se mettant ensemble, l'ensemble des agents socio-économiques, en précisant un certain nombre de pouvoirs et en reconnaissant des droits qui n'étaient pas reconnus par le passé. On pense que certaines interventions pourraient fort bien venir de la simple dynamique du milieu, entre autres, qui est pris avec ces problèmes quotidiennement.

L'expérience — et je terminerais là-dessus — vécue très récente, plus récente en Ontario que celle de la Saskatchewan, par exemple, l'a déjà montré et nous permet de conclure aussi. Je ne vois pas pourquoi ce serait différent au Québec puisque c'est vrai aussi dans le cas de la Saskatchewan, que c'était vrai en Suède, que c'était vrai en Allemagne, après un certain nombre d'années, mais en Ontario, il y avait déjà des indications dans ce sens après très peu de temps, après une période d'un an ou un an et demi des premiers morceaux de leur réforme, qu'il y avait moyen de procéder à des corrections de façon importante, réformes auxquelles il n'avait pas été possible d'arriver antérieurement. Mais, là-dessus, il y a du vrai dans ce que dit le député de Charlevoix.

Le Président (M. Laberge): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: J'aimerais réagir un peu, très brièvement à certains propos du ministre. Je comprends son agacement et je suis désolé de contribuer à la fatigue nerveuse de tout le monde, ici, mais il reste que je pense qu'on peut assumer notre rôle d'Opposition sans intimidation, même

morale, de la part du ministre. Il m'a vraiment effrayé, M. le Président, c'est pour cela que je parle d'intimidation. Quand il a dit que notre recherche était déficiente, je me suis dit: "Mon Dieu, j'ai probablement mal lu la loi". Cela arrive à tout le monde, mais j'ai été aussitôt, je ne dirai pas rassuré, parce que ce n'est pas rassurant de la lire, mais j'ai été replacé dans mes sentiments antérieurs en lisant le chapitre no 15, que je n'ai certainement pas l'intention de relire ici, et les articles 247 et suivants où on parle du financement. Si c'est tout ce qu'on a à opposer au raisonnement que je tenais tout à l'heure, encore une fois, je ne suis pas rassuré parce que c'étaient des propos alarmistes si on veut, mais je suis confirmé dans mes affirmations parce qu'il n'y a dans ces articles sur le financement rien, absolument rien qui puisse, de quelque façon que ce soit, contredire ce que j'ai affirmé tout à l'heure. Il n'y a rien là. Cela ne permet pas de faire les distinctions que le ministre indiquait. J'irais même au point de dire que si la commission s'avisait de faire des distinctions, elle pourrait être rappelée à l'ordre par les tribunaux parce que le langage qui est utilisé ne lui permet pas de faire des distinctions, ne lui permet pas de faire des charges distinctes selon les groupes. C'est très global et c'est un mécanisme très sommaire, très unilatéral, ce qui aussi nous montre très bien qu'on n'a pas l'intention d'articuler cela de façon très complète. D'ailleurs, ce serait contre l'intérêt de la commission elle-même dans un certain sens, contre la logique d'un organisme administratif qui a une responsabilité, qui a l'intention de l'assumer et qui n'a certainement pas l'intention, ce n'est pas son habitude à moins d'y être tenu, d'empêcher ces subventions indirectes de catégories de citoyens envers d'autres catégories de citoyens. Il y a déjà assez — un très grand nombre — d'organismes québécois qui se livrent à cette opération avec des dispositions à peu près analogues à l'article 247 et suivants. On n'est pas du tout rassuré là-dessus.

M. le Président, j'aimerais présenter un amendement à l'article 111 qui viserait essentiellement à remplacer tous les mots...

M. Jolivet: Avant d'aller plus loin, est-ce qu'on accepte l'amendement?

M. Forget: II est ordinairement accepté d'office quand il est présenté par le ministre, M. le Président. Donc, je n'ai pas...

Le Président (M. Laberge): J'ai considéré que l'amendement était inclus. J'ai demandé si le nouveau texte, c'est-à-dire l'ancien article amendé, était adopté. Maintenant, c'est resté ouvert pour le moment.

M. Jolivet: Cela va.

M. Marois: M. le Président, je voudrais relever juste une chose, inviter le député de Saint-Laurent à lire l'article 248. L'article 248 dit: "La commission exerce à cette fin — de financement — tous les pouvoirs et devoirs que lui reconnaît la Loi sur les accidents du travail pour la détermination et la perception des cotisations..." C'est précisément la Loi sur les accidents du travail qui permet de faire ce que j'ai évoqué tout à l'heure, c'est-à-dire d'y aller par classe, par catégorie et même par unité.

M. Forget: Oui, c'est cela. Cela confirme ce que je disais que ce n'est pas une réponse vraiment spécifique.

M. Marois: Ce sont les nuages.

M. Forget: On n'est pas pour discuter de la Loi sur les accidents du travail, mais j'ai là-dessus les plus sérieuses réserves. Comme c'est une autre loi, je pense qu'on doit la considérer comme une donnée du problème. Les procédures de tarification de la Commission des accidents du travail ne sont certainement pas un modèle à citer en exemple.

Mon amendement, M. le Président, se lit comme suit: Remplacer tous les mots après le mot "rémunérés" par les mots "par l'employeur". Je demanderais un vote enregistré.

Le Président (M. Laberge): Remplacer le mot "rémunérés", à la cinquième ligne...

M. Forget: A la quatrième ligne.

Le Président (M. Laberge): A la quatrième ligne. Avec l'amendement, cela devient la cinquième ligne. A la fin de la quatrième ligne, remplacer tous les mots qui suivent le mot "rémunérés" par les mots "par l'employeur". Est-ce que l'amendement sera adopté?

M. Jolivet: Vote enregistré demandé par le député de Saint-Laurent.

Le Président (M. Laberge): J'appelle...

M. Marois: M. le Président, je ne peux pas accepter cet amendement. Cela a l'air subtil et très fin, mais s'ils sont rémunérés, au sens juridique du mot, par l'employeur, cela veut dire qu'ils sont salariés de l'employeur. Je ne peux pas accepter cela.

Le Président (M. Laberge): J'appelle le vote. M. Brochu (Richmond). Absent. M. Bisaillon (Sainte-Marie).

M. Bisaillon: Contre.

Le Président (M. Laberge): M. Lefebvre (Viau).

M. Lefebvre: Contre.

Le Président (M. Laberge): M. Jolivet.

M. Jolivet: Contre.

Le Président (M. Laberge): M. Marois. M. Marois: Contre.

Le Président (M. Laberge): M. Lavigne. M. Forget.

M. Forget: Pour.

Le Président (M. Laberge): M. Mailloux.

M. Mailloux: Abstention.

Le Président (M. Laberge): M. Perron (Duplessis).

M. Mailloux: M. le Président, en raison de ce que j'ai déjà déclaré ce soir, à savoir que j'avais certaines réserves à l'esprit quant à la rémunération par l'employeur, en ce sens que je croyais qu'à ce moment on pouvait quand même douter qu'il pourrait être juge et partie, je voudrais m'abstenir.

Le Président (M. Laberge): J'enregistre votre abstention. La motion du député de Saint-Laurent est rejetée comme suit:

Pour: 1 — Contre: 4 — Abstentions: 1

L'article 111, nouvelle rédaction, sera-t-il adopté?

M. Forget: Sur division.

Le Président (M. Laberge): Adopté sur division.

Le programme de santé spécifique à un établissement

J'appelle l'article 112. Une Voix: Adopté.

Le Président (M. Laberge): L'article 112 est adopté. J'appelle l'article 113.

M. Forget: M. le Président.

Le Président (M. Laberge): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: J'ai évidemment pris connaissance de cet article et il me semble que la description qu'il contient — pour ceux qui n'ont pas le texte devant eux, il s'agit du programme de santé spécifique à un établissement — que les dispositions, dis-je, qu'il contient auraient avantage à être présentées avec plus de précision parce qu'il semble difficile d'interpréter ce texte, dans une certaine mesure. On ne sait pas exactement quelles sont les obligations. Il pourrait facilement y avoir controverse sur les obligations du médecin d'établissement face à la détermination d'un programme de santé pour l'établissement. Je ne sais pas si j'ai bien compris l'intention de l'article parce que, encore une fois, il faut interpréter assez souvent le texte qui nous est soumis.

Je pense l'avoir interprété correctement en lui donnant le sens suivant, et je présente les choses dans un ordre un peu différent. Il s'agit d'abord de vérifier pour chaque poste de travail, me semble-t-il, ou pour chaque catégorie de poste de travail dans un établissement donné, trois choses: Premièrement, les risques particuliers pour la santé de la personne qui occupe ce poste ou un poste de cette catégorie. Deuxièmement, les caractéristiques de santé ou les exigences fonctionnelles particulières nécessaires pour occuper un tel poste ou un poste de cette catégorie. J'imagine que ce qu'on a à l'esprit, c'est une acuité visuelle particulière ou une dextérité manuelle supérieure à la normale pour éviter des accidents, etc. Je pense qu'on vise quelque chose dans ce genre, mais je n'en suis pas sûr, je pense que ce serait important d'être bien précis sur ces obligations parce que, dans le fond, ce qu'on fait là-dedans, c'est qu'on semble donner un pouvoir au médecin d'établissement, mais on lui trace en même temps un programme d'action. Troisièmement, le nature, l'objet et la périodicité des examens de surveillance médicale de la personne qui occupe ce poste et un poste de cette catégorie.

Ce sont trois choses qu'on demande au médecin de déterminer dans son programme d'établissement relativement au poste de travail: les risques particuliers, les exigences particulières pour le travailleur qui doit l'occuper et des examens de surveillance médicale, de contrôle médical ayant une certaine périodicité et un certain contenu. Je pense que ce serait des obligations qui, si c'est vraiment de cela dont on parle, mériteraient d'être précisées avec beaucoup plus de soin, en mettant les points sur les "i".

Deuxièmement, il me semble que cet article fait également une obligation au médecin vis-à-vis des travailleurs eux-mêmes. Vis-à-vis du travailleur lui-même, on semble lui demander — encore là, on ne l'explique pas avec une grande clarté — de vérifier trois choses. D'abord, établir son état de santé initial au moment de son embauche, établir en quelque sorte un "base line", une base de référence pour pouvoir mesurer subséquemment si sa santé est stable, si son état de santé s'est détérioré. Je pense que c'est cela le but de l'examen d'embauche, ce n'est pas simplement de voir s'il n'a pas le rhume ou quelque chose du genre, mais c'est d'établir une base de référence; il faudrait peut-être le préciser.

Deuxièmement, d'identifier les caractéristiques de chaque travailleur susceptibles d'améliorer son adaptation à un poste de travail particulier ou de diminuer les risques qui peuvent découler de son occupation d'un poste particulier par une meilleure adaptation entre des emplois qu'on a déjà identifiés comme comportant peut-être des risques particuliers et, du côté du travailleur, des aptitudes ou des déficiences qui doivent mettre en garde l'employeur dans son affectation du travailleur en question.

Troisièmement, on lui fait une obligation vis-à-vis de chaque travailleur de mesurer l'impact sur sa santé de son exposition à certaines conditions propres à son milieu de travail que l'on précise. Il y a, en premier lieu, des obligations relativement à chaque poste de travail; deuxièmement, des obligations relativement à chaque travailleur. Il semble qu'il y ait, troisièmement, des obligations qui devraient être faites quant aux informations essentielles qui doivent être portées à la connaissance des travailleurs de façon à diminuer les risques à leur santé, le cas échéant, et des informations plus particulières lorsque les risques sont eux-mêmes particuliers. Evidemment, comme on a identifié les postes en fonction des risques, cette information est corrélative.

La raison pour laquelle je fais cette énumération, c'est que je pense que c'est extrêmement important, parce que, contrairement au programme de santé émis par la commission, on a là un effort de définir des obligations minimales. Je pense qu'il faudrait absolument être très clair et formuler cela dans un langage qui, loin d'être un langage qui ouvre la porte à toutes sortes de possibilités, y compris des possibilités de faire moins, soit très spécifique. Il s'agit, en quelque sorte, d'imposer des obligations, de faire au moins cela. (23 h 15)

Je pense que, si on l'exprime de façon un peu plus systématique, on sait exactement de quoi on parle et, s'il faut en ajouter, on peut en ajouter, mais il n'y a plus de doute, il n'y a plus d'interprétation, ou, du moins, la place pour l'interprétation est réduite de beaucoup.

Un des avantages de ceci, M. le Président, c'est qu'on pourrait également éviter des conflits. J'en prends pour témoin le paragraphe 2 de l'article 113; le paragraphe 2 de l'article 113 donne au médecin, responsable des services de santé dans l'établissement, le rôle de faire des activités d'information du travailleur, de l'employeur, ainsi que, le cas échéant, du comité de santé et de sécurité de l'association accréditée sur la nature des risques du milieu de travail et des moyens préventifs qui s'imposent.

Or, si on se réfère à l'article 78, troisième alinéa, on se rend compte qu'on a déjà donné ce rôle au comité paritaire de santé et de sécurité de l'établissement. Au paragraphe 3: "établir, au sein du programme de prévention, des programmes de formation et d'information en matière de santé et de sécurité au travail." Il y a là un rôle qu'on donne, en même temps, à deux personnes, une personne morale, si on veut, ou presque, le comité paritaire, et le médecin responsable des services de santé d'un établissement. Ce sont des gens qui sont dans une relation presque quotidienne; ils vont regarder la loi et ils vont dire: Qui fait quoi? Bien sûr, ils peuvent tous les deux s'occuper de la même chose, mais il y a le risque, si la loi n'est pas plus précise, qu'on développe ainsi un climat de difficulté ou de tension entre le médecin et le comité qui doit le choisir et le renommer périodiquement, selon d'autres dispositions de la loi.

Il me semble que ce que l'on demande au mé- decin, ça ne devrait pas être de recommander les façons de communiquer l'information, ça ne devrait pas être la responsabilité de déterminer qui fait quoi, qui, du comité, de l'employeur, du syndicat, etc., va donner l'information, mais quelle est l'information essentielle à la diminution des risques qui doit être communiquée aux travailleurs, par des moyens qui seraient déterminés par le comité paritaire.

D'un côté, il y a des exigences strictes sur le plan professionnel; on dit: Etant donné que le médecin aurait identifié des postes où il y a un risque particulier — par exemple, un procédé où il y a une chaleur importante qui est dégagée ou des substances toxiques — dans un coin de l'établissement, il a déjà identifié ce risque et il fait une obligation au comité de prendre les moyens appropriés pour que l'information pertinente soit communiquée aux travailleurs qui reçoivent une formation pertinente, en vertu de l'article 78.3.

Si on mélange les deux rôles, on pourra se renvoyer la balle presque indéfiniment. Je pense que ça, c'est l'illustration de la nécessité, au moins la très grande utilité, d'être très précis dans l'énu-mération des obligations sous l'article 113.

A titre de suggestions au ministre, je lui ferai tenir une série de suggestions pour formuler, de façon plus précise, les obligations qu'il cherche à instaurer, les devoirs et les obligations du médecin d'établissement. Je pense qu'on ne sera jamais assez précis là-dessus, parce que, encore une fois, c'est là-dessus, je pense, que repose en grande mesure l'activité strictement de surveillance de la santé dans les établissements. Je pense que, si on le fait dans l'article 113, on répond implicitement à la question que je posais à l'article 107, c'est-à-dire qu'on fournit un contenu type d'un programme de santé. A ce moment, le programme provincial pourra s'en inspirer pour établir des normes générales.

Ce n'est qu'une suggestion que je fais au ministre, dans un esprit de collaboration, parce que j'ai lu ce texte avec un regard un peu neuf et je me suis dit: Comment pourrait-on être bien sûr qu'on se comprend dans l'adoption d'un texte comme celui-là? Je n'ai rien voulu retrancher de ce que j'ai cru percevoir comme étant l'intention du ministre; s'il veut aller au-delà de ça, il est évidemment tout à fait libre de le faire.

M. Jolivet: C'est l'article 113?

M. Forget: L'article 113, oui.

M. Jolivet: Donc l'article 112 serait adopté?

M. Forget: Oui, ça fait longtemps.

M. Jolivet: Non, mais c'est que j'en ai perdu un bout; à vous suivre comme ça, je ne vous mettrais pas à un comité de santé et de sécurité au travail!

M. Marois: Comme je l'ai évoqué, M. le Président, on va prendre connaissance du texte.

Pendant qu'on prend connaissance du texte... Encore une fois, comme je l'ai évoqué, s'il avait été possible de procéder comme nous l'avons fait, en soumettant les textes à l'avance, le plus vite qu'on a pu, pour que l'Opposition puisse disposer des documents les plus complets possible, pour qu'il n'y ait pas de surprise et que chacun ait le temps de se préparer en conséquence. Là, les textes nous tombent au fur et à mesure. Quand c'est deux pages sur des articles aussi importants que ceux-là...

Je ne sais pas s'il y a des copies pour tout le monde. Est-ce qu'il serait possible, M. le Président, de suspendre deux minutes pour qu'on ait le temps de regarder ce texte? On veut bien improviser sur un coin de table.

M. Mailloux: M. le Président, je suis d'accord avec la suspension, sauf qu'à l'autre suspension, quand on a changé de salle, le ministre avait fait référence à la promesse qu'avait faite mon collègue de Portneuf de lui soumettre au préalable ses amendements. Il s'excuse d'avoir oublié ceux de la partie qui concernaient mon collègue de Saint-Laurent, parce qu'il a parlé principalement des siens...

M. Marois: Bien sûr, je comprends. Une suspension de deux minutes.

Le Président (M. Laberge): La commission suspend ses travaux pour quelques minutes.

Suspension à 23 h 22

Reprise à 23 h 37

Le Président (M. Laberge): A l'ordre, messieurs.

La commission parlementaire reprend ses travaux, nous sommes à discuter l'article 113 et M. le député de Saint-Laurent a porté à la connaissance des membres de la commission une proposition d'amendement, mais qu'il n'a pas rendue officielle. M. le ministre.

M. Marois: M. le Président, pendant la période de suspension, on a pris connaissance le plus attentivement qu'on peut — il est quand même 23 h 35 pour tout le monde — du texte que vient de nous soumettre le député de Saint-Laurent. L'examen le plus attentif possible, dans les quelques minutes qu'on a eues, je comprends que cela nous est soumis vraiment dans un esprit de collaboration, c'est comme cela que je le comprends, il faut vraiment essayer de cerner au maximum les diverses notions inhérentes à l'article 113. Il s'agit d'un réaménagement, d'une façon qui peut sembler aux yeux du député plus logique, d'un certain nombre de fonctions qui apparaissent à l'article 113, ou plutôt d'éléments inhérents à un programme de santé.

Cependant, l'examen le plus attentif possible de chacun des morceaux de la proposition d'amendement m'amène à dire que si on retenait ce texte, j'ai peur peut-être pas qu'on fasse disparaître, mais à tout le moins qu'on dilue l'aspect de surveillance de l'environnement du milieu de travail. C'est pour cela qu'à l'examen je préférerais, pour avoir regardé cela le plus attentivement possible dans les quelques minutes qu'on a eues, qu'on s'en tienne au texte et au libellé de l'article 113 tel que proposé.

Je voudrais rappeler que l'article 113 a été introduit, suite aux travaux de la commission parlementaire, sur recommandation d'un bon nombre d'intervenants qui nous ont soumis le fait qu'il leur semblait que tel que le texte était libellé ou que la notion de programme de santé apparaissait dans le projet de loi no 17 déposé en première lecture, cela semblait ne pas tenir compte de toute la dimension de l'hygiène industrielle et, en conséquence, de ne pas être conforme aux recherches qui ont amené l'Organisation mondiale de la santé à définir ce que devaient être la base même et la conception la plus large possible des services de santé en milieu de travail.

En conséquence, on nous a recommandé, plusieurs groupes, plusieurs intervenants, notamment des professionnels de la santé, notamment des hygiénistes industriels nous ont recommandé de revenir à ce qui était évoqué dans le livre blanc aux pages 238 et suivantes. C'est ce qu'on a fait en introduisant l'article 113 pour bien arrimer la double dimension, à la fois de la surveillance de l'état de santé des humains et également de ne pas laisser de côté toute la dimension de la relation très étroite qu'il doit y avoir avec la surveillance de l'environnement même du milieu de travail. C'est donc sur cette base et en se collant le plus possible — en le transposant dans le jargon juridique, bien sûr — au texte qui apparaissait aux pages 238 et suivantes du livre blanc qu'on a conçu l'article 113. Comme vous le savez, le texte du livre blanc était lui-même accroché à la définition retenue par l'Organisation mondiale de la santé.

En conséquence — je ne voudrais pas être injuste, parce que, encore une fois, je comprends que c'est soumis dans un esprit de collaboration après l'examen qu'on a pu faire du texte dans le laps de temps qu'on a eu pour le faire, j'aurais peur, qu'en retenant le texte, on se trouve à diluer une des dimensions extrêmement importantes d'un programme de santé qui est, en particulier, l'aspect de la surveillance de l'environnement même du milieu de travail.

Le Président (M. Laberge): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, j'aimerais poursuivre dans la même veine pour bien m'assurer qu'on se comprend. Le ministre veut qu'apparaisse quelque part la notion — je ne sais pas quel mot utiliser — d'hygiène du milieu industriel. J'imagine que c'est ce qu'il veut dire par l'évaluation de la

qualité du milieu de travail. Ce ne sont pas des mots... Cela apparaît ailleurs?

M. Marois: Oui. Toute la dimension de surveillance et d'évaluation de la qualité qui apparaît au paragraphe premier...

M. Forget: La surveillance et l'évaluation de la qualité du milieu de travail. Ce bout de phrase, c'est cela qui fait... Je n'aurais pas d'objection à...

M. Marois: C'est notamment.

M. Forget: ... et autre chose. Quoi d'autre dans les autres paragraphes?

M. Marois: En ce qui concerne les autres morceaux qui sont reliés, forcément les paragraphes 3, 4 et bien sûr le deuxièmement, dans une certaine mesure, parce que c'est accroché à tout cela.

M. Forget: On établit des obligations. C'est "doit". Le programme de santé spécifique à un établissement doit... Je pense qu'il y a une différence entre un article qui établit des obligations dans une loi, une échéance de nature dans le fond, entre un texte comme cela qui établit des obligations et un texte d'intentions générales au niveau des politiques gouvernementales qui fait la description d'une philosophie, d'une source d'inspiration. La différence c'est que, quand on parle d'une source d'inspiration, d'une philosophie, on veut orienter la pensée du lecteur, on veut lui donner une impression d'un champ d'activité ou d'un certain nombre d'idées générales. Evidemment, le lecteur n'a pas à passer un examen après pour dire qu'est-ce que cela voulait dire exactement.

Dans le cas d'une obligation légale, il y a des gens qui vont être assis dans leur bureau, pas tellement longtemps, et qui vont dire: Qu'est-ce que la loi m'oblige à faire? On va les évaluer sur leur performance. Est-ce qu'ils ont rencontré leurs obligations ou s'ils ont fait défaut? C'est dans ce but que mes remarques étaient destinées. Je n'ai pas d'objection à ce qu'on mette ce cinquième paragraphe qui ferait une obligation de mettre sur pied un programme d'hygiène industrielle, si on est capable de le définir — je pense que cela devrait être possible — mais il est bien important qu'on s'accroche à des notions extrêmement précises. Si on laisse trop à l'interprétation de chacun, on ne sera jamais capable d'établir clairement qui vit à l'intérieur des obligations que la loi lui impose et qui les a interprétées de telle façon qu'on pense y satisfaire, mais on n'y satisfait pas vraiment. (23 h 45)

C'est pour cela qu'il y a un degré de précision plus considérable et nécessaire. Il y a des tâches à attribuer aux médecins lors des examens périodiques qui, si on veut qu'elles se fassent, si on veut qu'elles comportent un minimum, par exemple la fonction respiratoire dans les endroits où il y a de l'empoussiérage, je pense que la loi devrait suggérer de façon assez précise que le programme de santé d'un établissement où il y a des poussières doit comprendre la périodicité des tests respiratoires. Il me semble que le législateur doit aller dans ce degré de précision pour être bien sûr qu'un médecin d'établissement n'oublie pas que ce n'est pas suffisant d'avoir un examen de préembauche à tous les cinq ans pour regarder si les gens sont emphysémateux ou quelque chose du genre. Il faut peut-être le faire à tous les six mois, peut-être à tous les neuf mois, peut-être à tous les 18 mois, je n'en sais rien, mais la notion de périodicité du contrôle est importante je pense et il faut la situer précisément, si vraiment on croit qu'elle est importante.

C'est pour cela qu'il me semble que quand on est en face d'un texte qui dit "doit" et qui s'adresse potentiellement à des centaines de personnes, il ne faut pas laisser ouvrir trop largement la porte à des interprétations très personnelles. Et si on veut créer une obligation d'y inclure la surveillance du milieu qui dépasse les examens des travailleurs eux-mêmes, qui dépasse l'évaluation spécifique de telle ou telle tâche mais qui, un moment donné, devient difficile, je ne suis pas un hygiéniste du travail, je suis sûr qu'ils ont des concepts précis dont ils pourraient faire part au ministre de manière qu'il puisse les traduire très précisément dans des obligations que tout le monde va comprendre.

C'est là mon souci, je pense avoir fait mon "home work" sur les choses que j'ai pu deviner. Mais j'inviterais le ministre, s'il le veut bien, d'ici au moins l'étape du rapport, à se pencher sur le problème mais vu du côté de celui qui doit appliquer la loi dans un établissement à 300 milles de Québec et qui doit immédiatement, en lisant cet article dire: D'accord, je sais ce que la loi me demande de faire comme minimum absolu, j'en ajouterai si cela me tente et si j'ai les ressources, et au moins je vais pouvoir me défendre que j'ai vraiment rempli mes obligations. C'est un secteur contentieux, il doit apparaître devant le comité paritaire, il doit pouvoir justifier son programme de travail en fonction des exigences de la loi et il doit aussi se justifier vis-à-vis du chef du département de santé communautaire, éventuellement vis-à-vis d'autres personnes qui, au nom de la commission, font des inspections. Tout cela sur un terrain raisonnablement solide parce qu'on lui ouvre un peu plus loin certaines chausse-trappes et que si les gens ne sont pas contents de lui, on le laisse tomber. Alors, il faut quand même être raisonnable aussi lui dire, d'ailleurs c'est un principe de droit assez universel, que, quand on crée une obligation ou qu'on impose une taxe, on le fait en termes précis pour que les gens sachent à quoi s'en tenir. Ceci sur le plan général parce que je pense qu'on ne peut pas vraiment rédiger un article comme celui-là en comité, mais j'inviterais le ministre à se pencher à nouveau sur ce problème de rédaction, je pense qu'il y a énormément de mots qui portent à plusieurs interprétations là-dedans.

Au paragraphe 2°, j'ai soulevé un problème de concordance. Le paragraphe 2° de l'article 113 dit explicitement que le programme de santé doit

prévoir les activités d'information, il ne doit pas prévoir le contenu de l'information, les informations dont le travailleur doit disposer par des programmes d'information mais les activités d'information. Autrement dit, on dit soit à l'employeur, soit au comité: vous tiendrez des séances d'information, vous ferez ceci et cela de telle et telle façon avec telle périodicité ou à tous les mois ou à tous les six mois, ou vous allez reprendre ce travail pour que les gens ne l'oublie pas, etc. Mais on n'insiste pas, c'est curieux parce que cela vient du médecin, sur le contenu que ces messages doivent véhiculer. Autrement dit, celui qui travaille à haute température, près d'un four, il va falloir lui indiquer quel est l'effet sur sa santé de l'exposition à une chaleur élevée, et lui faire comprendre pourquoi il doit porter des vêtements protecteurs ou pourquoi il doit éviter de se déshydrater ou Dieu sait quoi, prendre certaines précautions. Le contenu est beaucoup plus pertinent à ce que le médecin fait comme programme de santé que de dire au comité paritaire qui, par ailleurs, a ce pouvoir lui-même: vous allez faire des séances de telle et telle façon, vous allez vous livrer à des activités d'information. Il ne devrait pas, à mon avis, c'est mon humble avis, se mêler de cela. Il devrait laisser la libre disposition des moyens à ceux à qui la loi fait une obligation de faire les activités d'information. Mais il devrait s'efforcer, à titre de professionnel, d'expert, de dire: "Voici le contenu minimum que vous devrez adresser soit à l'ensemble des travailleurs, soit à des travailleurs que je vous désigne. Ceux qui occupent tel ou tel poste, il faut qu'à tous les six mois vous leur rappeliez que et que et que..."

A ce moment, le comité s'organisera avec cela et il aura au moins un contenu minimal qui vient d'une source autorisée. Ce genre de précision dans la rédaction éviterait qu'il y ait des conflits, que le médecin prenne sur lui d'organiser les séances d'information et que les comités disent: En vertu de l'article 78, cela nous revient. Là, le diable est pris, parce que la loi leur donne à tous les deux ce pouvoir:

M. Marois: Très rapidement sur le 2° de l'article 113, M. le Président, bien sûr, il s'agit des activités d'information. Mais si on regarde un peu plus loin, on lit: "les activités d'information du travailleur, de l'employeur, ainsi que, le cas échéant, du comité de santé et de sécurité et de l'association accréditée sur la nature des risques du milieu de travail et des moyens préventifs qui s'imposent."

Donc, déjà, il ressort clairement, me semble-t-il que le médecin qui est responsable — d'ailleurs, le cas échéant, ce qui n'est pas exclu par la loi — pour en arriver à mettre au point un programme comme celui-là, va devoir mettre à contribution d'autres types de professionnels, d'autres types de compétences, notamment des hygiénistes industriels, des ingénieurs, des techniciens, comme ces choses doivent se faire normalement.

De plus, la question qu'évoquait le député était très pertinente: ce qu'il a appelé la périodicité, notamment, de certains examens de santé en cours d'emploi, selon la nature des problèmes qui sont décelés. C'est ce qui ressort du paragraphe 6 prévu par règlement. Evidemment, on ne peut pas mettre toute une batterie de détails dans la loi, selon qu'il s'agit de tel ou tel type de problème ou que la périodicité doit être de telle ou telle fréquence. Cela ressort très clairement. Au lieu d'une notion de périodicité, on a utilisé une notion de fréquence.

Au paragraphe 13° de l'article 223, on dit: "exiger, dans les circonstances qu'elle indique, un examen", etc., "ou des examens de santé en cours d'emploi, déterminer le contenu et les normes de ces examens, leur époque ou fréquence et la forme et la teneur", etc., parce que la fréquence ou la périodicité va forcément varier selon le type de problème qui se pose dans un établissement par rapport à un autre, par exemple, où se présentent des problèmes d'un type bien différent. Malgré l'adoption de l'article 113, je suis bien prêt à demander à l'équipe de continuer à regarder cela, sur la base du texte qui a été soumis par le député, d'ici la prise en considération du rapport. Cela laissera le temps de scruter cela un peu plus à la loupe, parce que je ne voudrais pas, encore une fois, qu'on soit injuste sur la proposition d'amendement. Mais, en toute honnêteté — c'est peut-être mon réflexe de juriste; on a chacun nos déformations — je me méfie un peu toujours des textes qui... Quand on est appelé à se prononcer sur un coin de table, comme l'évoquait le député lui-même, souvent cela suppose une certaine réflexion. D'autant plus que, maintenant, on s'est imposé des règles très strictes. Avant d'adopter un amendement en commission parlementaire — en tout cas, je parle du côté gouvernemental — qui peut ou non impliquer des ajustements substantiels, le cas échéant, si c'est le cas, je dois retourner au Conseil des ministres. Si ce n'est que purement technique, qu'un réaménagement, je dois retourner devant les légistes du comité de législation. Donc, je ne peux pas accepter sur-le-champ un truc comme celui-là, mais sous réserve d'une adoption, quitte à le regarder, je pourrais prendre l'engagement de demander à l'équipe de regarder le texte qui nous a été soumis de façon plus approfondie.

Le Président (M. Laberge): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Je ne voudrais pas être méchant, M. le Président, mais j'avais cru remarquer qu'il y avait des règles très strictes pour accepter les amendements, leur effet étant que vous n'en acceptez aucun. Mais, pour ne pas être méchant...

M. Marois: Non, M. le Président, je suis certain que le député ne veut pas être méchant, ni rien du tout. On a eu l'occasion de travailler ensemble à d'autres commissions parlementaires. Je n'ai pas l'habitude d'avoir une attitude braquée. Ce n'est pas pour intimider.

Je hausse le ton, quand je pense que je hausse le ton, ça vient, je dis les choses comme je les pense, le plus honnêtement du monde, mais quand je pense, honnêtement, que des choses peuvent être fondées, je pense que le député admettra — pour avoir travaillé ensemble à d'autre commissions parlementaires — que j'essaie de garder suffisamment d'ouverture d'esprit pour être capable, le cas échéant, d'évaluer au mérite les amendements qui peuvent être soumis en cours de route.

M. Forget: Oui, M. le Président, j'avais cru remarquer ça anciennement, mais je pense qu'il y a de l'eau qui a coulé sous les ponts depuis cette période.

M. Marois: Ne soyez pas injuste!

M. Forget: J'aimerais revenir très brièvement, M. le Président, à l'article 113, deuxième alinéa.

Le Président (M. Laberge): J'allais simplement faire remarquer que les amendements que vous avez proposés au ministre n'ont pas été portés officiellement à la connaissance de la commission; donc, je n'ai pas à les approuver.

M. Forget: Non, j'ai bien dit que c'était... D'ailleurs, techniquement, ce ne sont pas des amendements, parce que ça ne change en rien le sens et la portée de l'article, mais ça vise à en préciser le sens. Evidemment, si le ministre ne souhaite pas les considérer, il est entièrement libre, mais j'aimerais faire une dernière remarque relativement au paragraphe 2.

Le Président (M. Laberge): Au paragraphe 2.

M. Forget: Ce qu'il y a dans le paragraphe 2, ce n'est pas une description des risques particuliers sur lesquels les travailleurs doivent être informés, ce sont les activités d'information qui font l'objet du programme de santé de l'établissement. C'est comme ça que la phrase commence et le reste n'arrive que pour qualifier les informations dont il s'agit. Le médecin en question pourrait effectivement se décharger de son obligation ou prétendre se décharger de son obligation en établissant tout simplement un calendrier de sessions d'information et en disant: Pour ce qui est du contenu, débrouillez-vous, il y a des publications là-dessus, et n'exprimer aucune opinion sur le contenu, parce que les éléments suivants, ce sont les activités d'information; évidemment, la phrase se continue: "les activités d'information sur la nature des risques", mais ce sont les activités d'information qui font l'objet du programme de santé et non pas la nature des risques.

M. Marois: Peut-être que ça ne répondra pas à l'examen, après que le député aura regardé l'article sur lequel je voudrais attirer son attention, peut-être qu'il conviendra, en fin de compte, après réflexion de son côté, que ça ne répond pas nécessairement, quoique, je pense, peut-être que oui, quand on conjugue les deux textes, le deuxième paragraphe et l'article 124. "Le médecin responsable informe le travailleur de toute situation l'exposant à un danger pour sa santé, sa sécurité ou son intégrité physique ainsi que de toute altération de sa santé". Indépendamment donc de toute la batterie de programmes qui pourrait venir de l'information, là, en plus, provenant du médecin responsable, une information est prévue, s'a-dressant directement au travailleur, de toute situation qui pourrait l'exposer à un danger pour sa santé, sa sécurité ou son intégrité physique ainsi que de toute altération à sa santé. Je pense que ça ajoute quand même, c'est certainement le pas en dichotomie par rapport aux suggestions du député. Enfin, j'attire tout simplement son attention, au passage, sur ce paragraphe.

Le Président (M. Laberge): L'article 113 sera-t-il adopté?

M. Forget: Sur division.

Le Président (M. Laberge): Adopté sur division; j'appelle l'article 114.

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté. J'appelle l'article 115.

M. Forget: M. le Président.

Le Président (M. Laberge): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: II y a ici une affirmation, dans cet article; il m'a fallu relire l'article plusieurs fois, je n'en revenais franchement pas. On semble confondre des préoccupations administratives avec des considérations purement de prestations ou d'accessibilité aux services.

Ce que l'on veut dire, dans le fond, on ne le dit pas du tout dans l'article, mais on dit quelque chose d'autre qui est assez extraordinaire et vraiment inapproprié, pour ne pas employer même un mot plus fort.

Je lis le premier paragraphe: "Les services de santé pour les travailleurs d'un établissement sont fournis dans un centre hospitalier, un centre local de services communautaires ou dans l'établissement lui-même." C'est invraisemblable; je suis sûr que ce que l'on veut dire, c'est plutôt la chose suivante: Les services de santé pour les travailleurs d'un établissement sont fournis dans l'établissement lui-même. Toutefois, ils peuvent être organisés sous la responsabilité de..., de..., de... et de... Je ne crois pas qu'on puisse vraiment prétendre qu'on va donner des services de santé aux travailleurs en leur demandant de se rendre à l'hôpital. Il y a la surveillance du milieu. (Minuit)

Le ministre vient de nous parler de la surveillance du milieu, il vient de nous parler de

l'évaluation au point de vue des exigences ou des risques particuliers pour la santé des travailleurs de certains postes de travail, de certaines tâches. Cela ne se fait pas à l'hôpital, la surveillance du milieu industriel ne se fait pas à l'hôpital, le maintien d'un registre et d'un service d'urgence, cela ne se fait pas à l'hôpital ou au CLSC, ou au département de santé communautaire, cela se fait seulement sur place, cela ne peut pas se faire ailleurs. Il faut que les ressources en question se déplacent, qu'elles soient physiquement sur place, à moins — j'hésite à peine à soulever l'hypothèse — que le gouvernement ne prétende vraiment que les services de santé au travail vont se donner dans ce qu'on appelle, selon la Loi des services de santé et des services sociaux, les établissements d'affaires sociales, dans les établissements de santé, qu'on va avoir là des cliniques médicales où les travailleurs vont se rendre en autobus scolaire pendant que les enfants sont à l'école. C'est assez difficile à imaginer; pourtant, c'est ce que l'article 115 dit. Les services sont fournis dans un centre hospitalier, dans un centre local de services communautaires, et on fait une très généreuse concession, ou dans l'établissement lui-même.

M. le Président, je suis persuadé qu'il faut amender cet article pour lui donner un sens acceptable, en supprimant tous les mots qui font référence à des lieux physiques, dans lesquels les services sont fournis, autres que l'établissement lui-même. Il s'agit de rendre ces services accessibles aux travailleurs; il ne s'agit pas de leur dire: On va fermer vos cliniques médicales, ce n'est pas assez bon et, de toute façon, à certains endroits, il n'y en a pas, vous allez aller à l'hôpital, au dispensaire. Je suis sûr que ce n'est pas ce que le ministre veut; donc, il doit amender son article en conséquence.

A ce moment-là, le ministre doit supprimer également le deuxième paragraphe. Le deuxième paragraphe est là pour lui donner une discrétion d'accepter que cela se fasse à l'hôpital, parfois ailleurs, dans un autre local. Il ne s'agit pas de cela du tout, me semble-t-il. Cependant, l'article est très nécessaire parce que, comme on fait dépendre tous ces gens des établissements publics de santé, des hôpitaux, la tendance normale serait d'installer son bureau à l'hôpital ou dans un édifice qui appartient à l'hôpital, de l'autre côté de la rue, et de dire: Cela, c'est la clinique de santé au travail pour le district de... Je n'ai pas l'impression que c'est cela que le gouvernement veut, peut-être pourrait-il nous détromper. Il me semble que, s'il ne veut pas cela, il doit faire une obligation que les services soient fournis dans les établissements eux-mêmes, de façon générale.

Je pense qu'il y a d'autres articles qui traitent de l'organisation, du rattachement administratif et financier; donc, on n'a pas besoin des références générales aux endroits où peuvent se rattacher ad-ministrativement les prestateurs de services. On parle, dans cet article, de l'endroit où sont fournis les services. Là, ils sont fournis, à mon avis...

Il y a une seule exception que je pourrais imaginer, c'est l'examen de préembauche pour les petites et moyennes entreprises. On pourrait dire: Comme les gens, de toute façon, ne sont pas au travail, pourvu qu'il y ait un endroit où ils puissent aller, je dirais, à ce moment-là, dans un deuxième alinéa: Tous les services, en général, sont fournis dans l'établissement et, par exception, ceux prévus au paragraphe 6 de l'article 113 peuvent être fournis dans un autre local désigné par le chef du département de santé communautaire, et ce local peut être n'importe quoi. On peut louer un endroit et toutes les petites et moyennes entreprises qui font de l'embauche peuvent s'y référer. On pense, par exemple, aux régions rurales, j'imagine qu'il va y avoir des espèces de sous-districts, cela pourrait s'imaginer.

Est-ce que c'est utile d'avoir un bureau seulement pour les examens de préembauche alors que tout le reste se fait dans l'entreprise? C'est une question qu'on n'a pas besoin de trancher ici, mais c'est bien la seule exception que je vois; pour tout le reste, à mon avis, on doit faire une obligation, particulièrement parce qu'on fait cela dans le secteur public, d'aller livrer les services sur place, non pas de faire venir les gens à eux. Il me semble que c'est élémentaire.

J'ai un amendement à apporter là-dessus, M. le Président, si c'est nécessaire, mais j'imagine que le ministre va tomber d'accord avec moi spontanément pour supprimer le deuxième alinéa et supprimer tous les autres mots, sauf "dans l'établissement lui-même", qui sont dans le premier alinéa.

M. Marois: Je ne sais pas si je serais d'accord pour supprimer le deuxième paragraphe. Ce que je voudrais dire sur le premier paragraphe... D'abord, je suis certain que cela a échappé, en cours de route, au député de Saint-Laurent et que ce n'est certainement pas le fond de sa pensée. Il a laissé entendre, tout gentiment, entre deux phrases, que cela risquait de mener... Je ne veux pas être injuste à son égard, je ne peux pas le citer au texte, mais cela m'a frappé. Il ne s'agit pas de fermer ce qui existe puisqu'on verra tantôt qu'il y a un certain nombre d'articles qui, au contraire, sur la base des recommandations qui nous ont été faites, visent à ouvrir une perspective de maintien de ce qui est déjà là.

Il est bien certain que les choses — c'est l'idéal et l'objectif à atteindre — peuvent facilement être atteintes dans des entreprises d'une certaine taille ou d'une grande taille, l'objectif étant de faire en sorte que l'essentiel — et même le détail — des services soit vraiment assumé et distribué dans l'établissement. Cela, je crois que c'est très clair. Cependant, dans les cas où vous avez... Au Québec, on a un grand nombre de petites entreprises — on en est rendu dans le jargon; il y a non seulement des PME, mais il y a des PPE et des PPPPE, petites, petites, etc. — où il va falloir donner des services sur la base de multientreprises. C'est beaucoup plus difficile d'en arriver— je voudrais bien être compris pleinement — à l'ensemble de la gamme des services de santé inhérents au

programme de santé dans l'établissement. Dans le cas des grandes entreprises, le problème ne se pose pas dans les mêmes termes. Il y aura sûrement moyen d'en arriver à s'assurer que l'essentiel est fait sur les lieux même de l'établissement.

Je pensais à d'autres entreprises de plus petite taille, de moyenne taille ou à des petites petites entreprises. Dans un certain nombre de cas — simplement pour reprendre, je ne veux pas revenir à nouveau sur toute la liste, mais on peut très bien comprendre qu'il y a un certain nombre de morceaux — il y a des choses qui supposent un équipement de base. Par exemple, pour des examens de radiologie. Notamment, le député a évoqué lui-même les examens de préembauche. J'enchaînerais en disant: Non seulement des examens de préembauche, mais cela peut se poser aussi pour des examens médicaux en cours d'emploi selon une fréquence qui doit être déterminée selon la nature des problèmes posés. En d'autres termes, cet équipement de base, il est à peu près impossible de le localiser. Pensez à un parc industriel où vous avez de petites entreprises, ou plutôt des PME. Il peut être extrêmement difficile de le localiser en ces lieux. En d'autres termes, dans ces cas, il fallait trouver une autre formule. Vous savez comme moi que j'ai évoqué tantôt des ententes intervenues entre certains départements de santé communautaire, certains centres hospitaliers, pour commencer à distribuer les services. Effectivement, il y a des expériences très concrètes et intéressantes sur bien des plans. Elles ne sont pas sans faille, sans faiblesse, etc., mais intéressantes comme perspectives qui sont données, accrochées parfois... Par exemple, pensez aux travailleurs de l'est de Montréal: C'est un cas qui m'a frappé, je suis allé voir. Il y a eu des ententes de négociées entre le centre hospitalier, le département de santé communautaire et un CLSC. Là, c'est donné, pour toute une batterie de travailleurs de l'est de Montréal, autour des raffineries en particulier, dans un CLSC. Je comprends que ce n'est pas dans l'établissement comme tel dans ce cas, mais il a semblé pertinent à l'ensemble des parties que cela puisse être localisé. Il fallait un minimum d'équipement.

De toute façon, l'article 125 s'appliquera toujours. L'article 125 prévoit que, de toute manière, le médecin doit visiter régulièrement les lieux de travail et prendre connaissance des informations nécessaires à la réalisation de ses fonctions. C'est dans cet esprit. Egalement, il nous a semblé important de maintenir le deuxième paragraphe pour faire en sorte que quand cela s'avère nécessaire, parce qu'il n'y a pas de disponibilité d'autres locaux, les services puissent être fournis ailleurs que dans les endroits visés au premier paragraphe.

Et les commentaires qu'on a eus en commission parlementaire à ce sujet, ceux, en particulier, qui s'opposaient le plus et qui semblaient voir dans l'ensemble des mesures qui étaient proposées — pour reprendre l'expression qui devient consacrée de plus en plus dans les commentaires qu'on entend — la crainte d'une table rase voyaient là — c'est vrai — la possibilité que les ententes puissent être négociées avec un groupe de cabinets privés, par exemple, pour être capable de distribuer sur place, là où il y aurait l'équipement de base, un certain nombre de volets, certains éléments du programme de santé. Donc, là-dessus, je ne crois pas qu'il faudrait enlever le deuxième paragraphe de l'article 115.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, dans sa réponse, le ministre confirme qu'il y a deux aspects complètement distincts.

M. Marois: Concrètement. A l'usine de Parent, par exemple, les services sont donnés et assumés par et au département de santé communautaire présentement.

M. Forget: M. le Président, le ministre, dans sa réponse, démontre clairement la vérité de ce que je disais. Il y a deux aspects qui sont mélangés dans cet article. Il y a l'aspect du lieu de la prestation des services et il y a l'aspect de l'organisation des responsabilités administratives pour l'organisation. Ce sont deux aspects totalement différents. Un service peut être organisé dans un autre pays par un organisme qui n'est même pas ici et il peut se donner localement. Cela n'a rien à voir. Ce sont deux aspects bien différents: là où le service est donné et par quel organisme il est organisé.

Vous avez déjà un endroit approprié dans l'article 109. Vous faites des contrats et j'imagine que dans le contrat on fait référence seulement au département de santé communautaire. Le département de santé communautaire est responsable et doit fournir lui-même toutes les ressources. Alors, là, on ferme un peu la porte et on ne laisse la place à aucune autre organisation. On pourrait le mentionner là. Il me semble que ce serait plus dans la nature des choses, ou il pourrait y avoir un autre article.

Mais il reste que nulle part, sauf à l'article 115, ne trouve-t-on une indication quant à l'obligation de donner les services sur place. Le ministre donne l'impression que cela est très optionnel, que cela peut être bien commode de pouvoir donner les services à l'hôpital. Mais relisons l'article 113 qu'on vient d'adopter sur division. Il n'y en a pas beaucoup, dans la liste des huit choses à faire, qui peuvent être faites dans un hôpital. Je regrette, mais ce n'est pas moi qui ai fait cette liste. "Les mesures visant à identifier les risques pour la santé auxquels s'expose le travailleur dans l'exécution de son travail", cela ne se fera pas à distance. Il faut que ça se fasse sur place. C'est le paragraphe 1°. Deuxièmement, "les activités d'information du travailleur, de l'employeur, etc.", là-dessus, je présume que si on veut informer les travailleurs, on va aller les informer là où ils sont, plutôt que leur dire: Allez vous déplacer et allez assister à des séances d'information. J'imagine qu'on peut le faire sur place. A la limite, j'imagine qu'on pourrait

louer la salle paroissiale et les convier là. Je ne sais quoi. Il me semble que c'est sur place qu'on a le meilleur environnement pour leur indiquer pas simplement des connaissances abstraites, mais, en fonction de l'environnement dans lequel ils vivent, leur donner vraiment une formation très concrète sur leur environnement à eux. Il me semble que ce sera efficace ainsi et non sur la base d'un exposé théorique qu'on va prendre dans un manuel sur la sécurité au travail et qu'on va faire dans une salle qu'on a louée aux fins de la cause. Cela doit se faire sur place. C'est un entraînement qui doit être individualisé ou, autrement, on n'aura rien d'autre que ce qu'on a toujours fait: distribuer des brochures, etc. Même, on va distribuer les brochures sur place. Il me semble qu'on ne demandera pas aux gens d'aller les chercher à l'hôpital.

Troisièmement, "les mesures visant à identifier et à évaluer les caractéristiques de santé nécessaires à l'exécution d'un travail", c'est les caractéristiques d'un poste de travail, un poste de travail qui demande à quelqu'un de ne pas avoir le vertige, par exemple, parce qu'il doit travailler en hauteur. On va se rendre compte sur place que c'est un poste élevé. Si c'est un opérateur d'une grue qui est obligé de grimper pour aller se nicher dans son poste de commande, on va probablement en faire une condition. Il va falloir aller la constater sur place; cela ne se fait pas de l'hôpital.

Je suis d'accord sur les mesures visant à identifier les caractéristiques de chaque travailleur pour son affectation. Si on examine le travailleur, probablement qu'on peut le faire à l'hôpital. On peut le faire dans une clinique et on peut le faire n'importe où. (0 h 15)

De même, la surveillance médicale des travailleurs, tout dépend de la surveillance médicale, mais si ce sont des fonctions qui sont affectées, elles peuvent l'être à court terme, on pourra probablement constater l'impact sur certaines fonctions vitales, sur place. S'il s'agit de mesurer l'impact, l'exposition à la chaleur, l'exposition au bruit, etc., il serait peut-être mieux de le faire sur place. Je n'en sais rien, mais il y a quand même un doute. On est déjà rendu à trois mesures qui se font nécessairement dans l'établissement.

Le maintien de services adéquats de premiers soins pour répondre aux urgences, je veux bien croire qu'il y a des petites et des moyennes entreprises, mais un service d'urgence qui est à l'hôpital, ça n'aidera pas grand-monde. Les services doivent être fournis d'une certaine façon, peut-être qu'on n'a pas l'argent pour engager une infirmière à temps plein pour être au poste d'urgence, à ce moment-là, il faudrait peut-être entraîner un des travailleurs pour les premiers soins et qu'il y ait une trousse d'urgence sur place. Les services vont être fournis sur place, ils ne seront pas fournis à l'hôpital.

Enfin, la mise à jour d'un registre, je ne vois pas l'hôpital qui se met à compiler dans ses archives des registres sur les travailleurs qui sont dans toutes les entreprises de son district. Cela va se faire dans l'entreprise, donc, il va falloir un bureau, il va falloir un local où le médecin de l'éta- blissement peut assurer la compilation et la mise à jour de ces données. Alors sur huit, on a cinq fonctions qui doivent se faire dans l'établissement, nécessairement. Il me semble qu'il serait normal d'en faire une obligation et de considérer les autres comme des exceptions, parce que même pour les autres, dans un grand nombre d'entreprises, il serait préférable que ça se fasse sur place, ne serait-ce que pour une question d'accessibilité. Qui les organise? C'est une toute autre question, cela n'a rien à voir avec l'article 115, qui les organise. Là, on parle d'un emplacement physique, ça peut être organisé par le pape, par les Nations Unies, par la commission, par n'importe qui, il s'agit de savoir où ils vont donner les Jupiter de services en question: Chez eux ou chez les travailleurs. On ne le dit nulle part. On ne fait même pas une obligation à l'employeur de fournir des locaux, si vous remarquez, l'obligation n'apparaît que dans la reconnaissance, à la section V, de certains services de santé de l'employeur, ou privé, je ne sais pas quoi. Là, il y a une obligation de fournir des locaux, mais c'est limité à cette section. Quand ce sont des services publics organisés par un centre hospitalier, l'employeur n'a aucune obligation de fournir des locaux, ça me semble très suggestif. D'abord, on dit que ça peut être fait à l'hôpital et l'employeur n'a pas l'obligation de fournir de local. "The writing is on the wall", ce qu'on a à l'esprit. C'est un service hospitalier, à l'hôpital.

M. Marois: Très rapidement, je pense que, quant à l'objectif ultime, autant que faire se peut, compte tenu des réalités, des diverses possibilités que les services soient, pour l'essentiel, je pense que le député admet lui-même qu'un certain nombre d'éléments... Il donnait un excellent exemple, d'ailleurs, d'un travailleur qui pourrait possiblement avoir des problèmes de vertige. Vous voyez tout de suite qu'il y a deux dimensions. C'est évident qu'il faut se déplacer pour aller examiner sur place le poste de travail, c'est une chose.

Il se peut fort bien, qu'il s'agisse d'une petite ou d'une moyenne entreprise, qu'il ne soit pas possible — on n'a pas les équipements qu'il faut et le reste, simplement pour permettre au médecin d'être capable de faire convenablement son travail — quant à l'évaluation — comment dirais-je? — plus individuelle du problème de santé. Vous avez les deux volets de problèmes. Donc, il se peut fort bien que dans certains cas, ce ne soit pas possible de faire en sorte que cette partie des services soit administrée dans l'établissement.

Le député a parfaitement raison d'évoquer le fait que l'article 115 fait référence au lieu. Quand on évoque le centre hospitalier, bien sûr, c'est le DSC et ses différents points de service. Par ailleurs, si on regarde l'article 115 à la lumière de l'article 116, l'article 116 fait davantage référence à l'administration de ces services. Enfin, les ententes...

Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que l'article 115...

M. Forget: Je suis tout à fait d'accord que ça fait référence à l'organisation, à l'article 116, mais ça ne résout pas le problème de l'article 115, c'est dans ce sens que je disais que je suis tout à fait d'accord.

Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que l'article 115 sera adopté?

M. Forget: J'aurais un amendement que je ferais circuler, comme il est prêt et comme il rend très explicite l'intention que j'ai exposée. C'est essentiellement ce que j'ai dit: Supprimer les mots "dans un centre hospitalier, un centre local de services communautaires ou" et d'ajouter à la fin de l'alinéa "toutefois les services visés par l'article 113, sixièmement, peuvent être fournis en tout autre endroit approprié et aisément accessibles aux travailleurs auxquels ils sont destinés", en supprimant le deuxième alinéa.

C'est essentiellement l'examen de préembauche pour lequel j'admets, a priori, une exception. Pour le reste, je pense que ce sont tous des services qui, a priori, doivent être fournis dans l'établissement, encore une fois, s'il y a des difficultés techniques. Mais le problème ne se pose pas vraiment là. Il s'agit de consacrer un principe et une obligation pour les départements de santé communautaire de se rendre à la clientèle plutôt que de demander à la clientèle de venir à eux. C'est la montagne qui se déplace, autrement dit.

M. Marois: M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Un instant, M. le ministre; je voudrais seulement mentionner que l'amendement est recevable. On verra. M. le ministre.

M. Marois: Je pense qu'on vient d'avoir une assez longue discussion sur l'article 115. Je propose donc l'adoption de l'article 115, tel que formulé, avec, cependant, la même réserve. J'avoue que sur l'objectif fondamental de faire en sorte que — pour reprendre l'expression du député de Saint-Laurent — ce soit la montagne qui se déplace, je pense que c'est un objectif fondamental. Là-dessus, je suis parfaitement d'accord avec lui.

Je propose donc que l'article 115 soit adopté tel que libellé dans l'édition réimprimée. De notre côté, on va procéder à l'examen de l'amendement qui a été proposé pour voir s'il n'y aurait pas plus qu'une discussion là-dedans, s'il n'y aurait pas effectivement des rajustements requis.

M. Forget: Je pourrais faire une suggestion qui pourrait peut-être inspirer. Cela va être très bref, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Si, dans l'article 115, on remplaçait "dans" par "par", on éviterait l'interprétation que j'ai donnée, c'est-à-dire que les services de santé sont fournis par un centre hospitalier, par un centre local de services communautaires. Il y a une contradiction. Il y a deux idées dans ce texte. Ce n'est pas par l'établissement lui-même, par définition, il est exclu de cela. Et quand on le met sur le plan du local, cela ne marche plus non plus. Ce sont deux notions qui sont mélangées dans la même phrase. Il y a deux notions complètement différentes d'organisation et de localisation. Enfin...

M. Marois: II faudra regarder cela, M. le Président.

Le Président (M. Bordeleau): Est-ce qu'on l'adopte quand même? M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: M. le Président, je comprends, en écoutant les interventions, que des deux côtés, on dit des choses qui se ressemblent. Est-ce qu'il ne serait pas plus prudent tout simplement d'attendre avant d'adopter l'article 115, de passer à l'article 116 et demain, quand le ministre l'aura réétudié, il pourra nous donner ses orientations et nous dire s'il laisse l'article 115 comme tel. Mais je vois difficilement comment on peut adopter l'article 115 tel quel, et, par la suite, voir si on doit l'améliorer. Il me semble que ce serait plus logique de déposer ou de suspendre l'étude de l'article 115 et d'y revenir demain.

Le Président (M. Bordeleau): Est-ce qu'on serait d'accord pour suspendre?

M. Marois: M. le Président, je ne sais pas si le député de Sainte-Marie était avec nous tantôt, mais on a analogiquement adopté la même procédure à l'article 113 qu'on s'apprête à faire pour l'article 115. J'ai dit — et on va le faire avec la meilleure bonne foi et le temps qu'on peut avoir dans les nuits, de ce qui va rester — qu'on va examiner vraiment attentivement au mérite. L'article 113, il a fallu le regarder — c'est un gros morceau — vite sur un coin de table. On s'entend sur l'objectif fondamental.

Je proposerais qu'on adopte les articles 113 et 115, sous réserve qu'on ait le temps de les regarder, le cas échéant, au moment de la prise en considération. Il est toujours possible, le cas échéant, de revenir pour apporter les corrections qui pourraient s'imposer.

Le Président (M. Bordeleau): Est-ce que l'amendement proposé par le député de Saint-Laurent sera adopté?

Une Voix: Rejeté. M. Forget: Reçu.

Le Président (M. Bordeleau): Oui, on l'avait reçu. L'article 115 tel quel sera-t-il adopté?

M. Forget: Sur division.

Le Président (M. Bordeleau): Adopté sur division. Article 116. M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Ici, M. le Président, comme le ministre l'a très bien souligné, c'est l'article d'organisation. On ne parle plus de l'endroit, on dit qui peut organiser les services.

Comme il avait mentionné que le deuxième alinéa de l'article 115 avait été inséré pour prévoir une possibilité d'organisation même par des cabinets privés, à mon avis, c'est dans cet article 116 que l'élargissement doit intervenir si le ministre maintient son intention de rendre possible de conclure un contrat entre un département de santé communautaire et un cabinet privé pour la prestation de services dans certaines circonstances où cela semble approprié au département de santé communautaire. Là, on mentionne le centre hospitalier, un CLSC. On pourrait toujours, tout de suite après, "ou un cabinet privé un contrat de service aux termes duquel ce dernier s'engage à fournir des services de santé spécifiques à un établissement". C'est là que cela devient pertinent, je pense.

Le Président (M. Bordeleau): M. le ministre.

M. Marois: Si on acceptait, M. le Président, l'amendement du député de Saint-Laurent, on retomberait à nouveau dans le travers, en tout cas dans les ambiguïtés qu'il croyait déceler, sous réserve de revoir au mérite sa suggestion, dans l'article 115. En voulant faire référence à l'article 116 aux cabinets privés, il s'agit d'un lieu. Or, l'article 116 ne concerne pas les lieux, mais il concerne l'administration comme telle de l'organisation de distribution des services en question.

M. Forget: Est-ce que ce n'est pas la responsabilité du DSC dans tous les cas? Est-ce qu'il délègue sa responsabilité d'organiser les affaires? Il reste responsable dans son territoire, j'imagine.

M. Marois: Oui.

M. Forget: S'il reste responsable, à ce moment-là, c'est une question de savoir qui donne les services dont il est responsable. C'est un contrat de fourniture de services. A ce moment-là, il n'y a pas de problème.

M. Marois: A l'article 115, on évoque le lieu. Le dernier membre de phrase de cet article, qui dit "dans les endroits visés" et "lorsque cela s'avère nécessaire à cause de la non-disponibilité des autres locaux", veut dire que cela peut être fourni ailleurs. Ce qui est évoqué là, le deuxième paragraphe de l'article 115, c'est précisément qu'un de ces lieux pourrait être, notamment, un cabinet privé.

Cependant, quand on arrive à l'article 116, il s'agit là de l'organisation, de l'administration et de la responsabilité de coordonner l'organisation en question. Ce n'est pas là qu'il faut introduire le lieu en question qui pourrait être le cabinet privé; c'est, comme c'est fait d'ailleurs, au deuxième paragraphe de l'article 115. Ce qui est évoqué dans l'article 116, c'est: Un C'H où existe un département peut conclure avec un autre centre ou un centre local "un contrat de service aux termes duquel ce dernier s'engage à fournir des services de santé spécifiques à un établissement".

Par ailleurs, si on retourne à l'article 115, quant au lieu de prestation des services, là, il est prévu que le chef du département de santé peut accepter que les services soient fournis ailleurs que dans les endroits visés au premier paragraphe, donc notamment, mais non exclusivement dans les cabinets privés.

M. Forget: M. le Président, le ministre me mystifie.

M. Marois: Ah! bravo! Je ne pensais pas que je réussirais un tel tour de force, M. le Président!

M. Forget: L'interprétation qu'il vient de donner de l'article 115 dépasse en ingéniosité tout ce que j'aurais pu imaginer. Ce qu'il nous dit, c'est que, dans le fond, à l'article 115, on envisage la situation où le département de santé communautaire, dans tous les cas, est celui qui rend des services, mais qu'il loue des locaux. C'est simplement une question de lieu, de disponibilité de local. Je me demande à ce moment-là pourquoi on se limite à un centre hospitalier et au centre local de services communautaires. N'importe quel local va faire l'affaire. (0 h 30)

Si ça demeure toujours sous la responsabilité directe du département de santé communautaire, il peut louer une gare de chemin de fer désaffectée, si ça fait l'affaire. Pourquoi se limiter seulement aux centres locaux de services communautaires et aux centres hospitaliers? Si on fait référence à des institutions, c'est parce qu'on veut non seulement leur louer un local, des pieds carrés, mais qu'on veut louer tout ce qui va avec, c'est-à-dire qu'on envisage que ce sont eux qui donnent les services non seulement dans leurs locaux, mais avec leur personnel. C'est différent si on dit que ce sont vraiment des services donnés dans l'hôpital, par l'hôpital, pas seulement dans des locaux qui par hasard sont la propriété d'une corporation hospitalière.

Cette dernière interprétation que fait le ministre est vraiment une source de mystification pour moi, je n'avais jamais compris ça. Il aurait pu dire un centre commercial aussi, tant qu'à faire. Si le lieu est entendu dans ce sens, pourquoi le limiter? Cela peut être plus commode d'aller dans un centre commercial, dans une gare ou n'importe où. Je ne peux pas comprendre ça, je vous l'avoue franchement. J'invite le ministre à relire ça, il me semble que ça n'a pas de bon sens.

M. Marois: M. le Président, une vieille gare, tiens, je n'avais pas pensé à ça! Peut-être.

M. Forget: Bien oui, il y en a plusieurs; il y a des lignes de chemin de fer qu'on ferme.

M. Marois: Bien tiens!

M. Forget: On pourrait prendre une vieille gare, un entrepôt...

M. Marois: Une vieille école.

M. Forget: ... n'importe quoi. C'est seulement un local à ce moment-là.

M. Marois: Non, M. le Président. C'est peut-être l'heure qui incite le député à mettre un peu d'humour dans nos propos, histoire de faire en sorte...

M. Forget: Qui m'a inspiré.

M. Marois: ... que le bon climat se perpétue jusqu'à la fin de nos travaux. Vraiment, il sait fort bien que, lorsqu'on fait allusion à d'autres locaux, donc, forcément, l'ouverture sur les cabinets privés, ça ne peut pas être la gare, ça ne peut pas être n'importe quoi, puisqu'il faut le minimum de base d'équipements requis pour des fins de prestation de services dans le domaine de la santé et du travail. Je pense que lui-même va admettre que c'était sans aucune doute pour mettre un peu d'humour dans nos travaux.

M. Forget: On le fait dans l'établissement lui-même aussi et ça, c'est une usine à priori.

M. Marois: Oui. M. Forget: Alors...

M. Marois: Certaines choses — on en a tous convenu — peuvent et doivent être faites sur place, dans les établissements. On a tous convenu aussi — on peut se chicaner sur deux ou trois paragraphes de l'article 113; à la pratique, on verra — qu'un certain nombre de choses, en particulier dans les entreprises de petite taille, ne pourront pas être faites sur les lieux mêmes du travail parce qu'elles supposent un équipement qui n'est pas là et le reste, mais qui, par ailleurs, s'il n'y a pas de disponibilités autres, pourraient se retrouver, le cas échéant, en cabinet privé. C'est la porte qui est ouverte à l'article 115. Cela étant dit, l'article 116 est vraiment l'article qui permet au centre hospitalier de conclure, que ce soit avec un autre centre hospitalier, que ce soit avec un CLSC, "un contrat de service aux termes duquel ce dernier s'engage à fournir des services de santé spécifiques à un établissement".

Je pense qu'il faudrait peut-être élargir légèrement la discussion, pas l'ouvrir inutilement, pour qu'on ait le tableau complet. Lorsqu'on a laissé entendre que les médecins qui sont dans le domaine de la médecine privée, qui sont en cabinet, étaient automatiquement exclus de la réforme, j'ai souvent répété que c'était inexact. Quand on manque de ressources, comme c'est le cas présentement au Québec, les médecins qui sont qualifiés par leurs pairs, selon les procédures établies par les conseils des médecins et dentistes, pourront pratiquer la médecine du travail.

Bien sûr, il faut un minimum de coordination; il faut la placer quelque part, cette responsabilité. Forcément, pour l'essentiel, on l'a accrochée aux départements de santé communautaire et aux CHDSC. On déferait complètement l'économie de l'article 116 si on plaçait là les cabinets privés.

M. Forget: M. le Président, il me semblait qu'on avait une distinction claire à l'article 115 pour savoir: Est-ce que la montagne se déplace pour aller au client ou si le client se déplace pour aller à la montagne? Il peut y avoir des raisons techniques pour se déplacer dans des endroits spécifiques où il y a non seulement un équipement, mais il y a un personnel, etc., d'accord.

Quand on arrive à l'article 116, on vise des ententes, justement, qui permettent de faire cela, qui permettent de s'entendre avec un centre hospitalier qui n'a pas de DSC pour que certains services soient fournis dans son local, par son personnel, parce que c'est plus approprié pour faire certaines tâches.

Il reste que ce contrat est un contrat à deux. Le département de santé communautaire, j'espère, va conserver la responsabilité qu'il a en vertu de la section suivante, la section IV. Le chef du département de santé communautaire qui va signer ce contrat avec un CLSC, il ne déléguera pas sa responsabilité. Il n'en a pas le droit. La loi ne lui donne pas le pouvoir de déléguer sa responsabilité. Le département de santé communautaire et son chef vont demeurer responsables de ce que fait le CLSC. Donc, le CLSC n'assume pas l'organisation et la gestion des services sur son territoire ou vis-à-vis de certains établissements industriels. Il ne fait qu'exécuter des tâches en fonction d'un contrat qu'il a avec le DSC. La même chose pour un centre hospitalier qui n'a pas de DSC et qui accepte de remplir cette tâche également.

Je ne vois pas en quoi un cabinet privé, par exemple, une polyclinique quelconque qui regroupe quelques médecins qui donnent des services à la petite et moyenne entreprises dans un territoire où il n'y a pas de centre hospitalier à la limite, ne pourrait pas avoir de contrat avec le DSC où ils s'engagent justement à réaliser un contrat tel que prévu. Ils vont le réaliser dans un lieu qui va être leur cabinet où ils vont avoir un appareil de radiologie, etc., et en partie dans les établissements eux-mêmes conformément aux termes du contrat, la responsabilité demeurant toujours celle du DSC. Ce n'est pas en soi différent de la situation qui va les lier à un CLSC. Le DSC va rester responsable.

La loi ne lui permet pas de dire: II n'est responsable que pour les territoires où il n'a pas délégué sa responsabilité aux CLSC. Il n'y a aucun article dans le projet de loi qui permet de déléguer la responsabilité. Donc, elle reste toujours au département de santé communautaire, quels que soient ceux qui effectuent les tâches. Si ce sont des employés du DSC, la responsabilité est immédiate et directe. Si ce sont les employés d'un

CLSC ou d'un autre hôpital, la responsabilité est indirecte, mais elle n'est pas moins réelle et elle s'articule dans un contrat. Le contrat, il peut être signé avec n'importe qui. Je comprends que le ministre peut choisir de ne pas mettre dans la loi qu'ils peuvent en signer avec les cabinets privés, mais, à ce moment-là, ce n'est en raison d'aucun principe général de la loi. C'est en fonction d'un choix particulier relativement à qui peut effectivement assumer des tâches, et non pas des responsabilités, en vertu d'un contrat avec un DSC.

S'il a ouvert la porte à l'article 115, logiquement, il doit ouvrir la porte à l'article 116 également. Autrement, il n'y a pas de correspondance. Cela peut se faire dans des lieux autres que des centres hospitaliers et des CLSC, sauf qu'on ne prévoit pas qu'il peut y avoir de contrats avec ceux qui vont donner des services dans ces lieux autres. Alors, il y a un vide.

M. Marois: Bien non, M. le Président. Encore une fois, je rappelle que les médecins qui sont en pratique privée, qui se verraient reconnus comme compétents, qualifiés, qui obtiennent ce qu'on appelle, dans le jargon, le privilège de, comme c'est le cas dans d'autres domaines, par leurs pairs et par le Conseil des médecins et dentistes, qu'ils soient en cabinet privé ou qu'ils soient en clinique privé — je vais en reparler, je vais en glisser deux mots, des cliniques privées — pourront devenir des médecins responsables dans le domaine de la santé. Mais tout cela va devoir être coordonné. Cela ne peut pas être n'importe quoi, n'importe comment. On le voit, le résultat, aujourd'hui. Donc, forcément, ils vont se trouver rattachés d'une façon ou d'une autre aux départements de santé communautaire. Bon. Qu'on ne dise pas qu'il n'y a pas de lien. Il y a forcément un lien en partant.

M. Forget: De quelle nature?

M. Marois: Ce que je viens d'évoquer, le programme de base, la responsabilité du département de santé communautaire dans une région donnée, enfin tout ce qu'on a évoqué tout à l'heure concernant les secteurs, les établissements, etc. Je ne veux pas reprendre tout cela. Les morceaux ne sont pas disséminés sans lien les uns par rapport aux autres. Là, il s'agit des humains et de leur compétence.

En plus, l'article 115, quant au lieu, ouvre, le cas échéant, la possibilité en cabinet privé. Le cas échéant, quant au lieu, cela peut être aussi la clinique, mais les cliniques privées, j'ai trop des doigts d'une main pour les compter présentement au Québec dans le domaine de la santé au travail. Quand vous avez tenu compte de Thetford, CRARY, vous avez deux groupes qui sont plutôt sur la base d'équipes volantes, la Clinique de médecine occupationnelle de Québec, celle de Montréal et après? En d'autres termes, il n'y en a pas une pochetée.

M. Forget: II n'y en a dans aucun domaine, de toute façon, dans le secteur public non plus, quant à cela.

M. Marois: On démarre, bien sûr. M. Forget: Oui, bien sûr, c'est cela.

M. Marois: Mais si le secteur privé avait fait des miracles dans ce domaine-là... Ce n'est pas un jugement de valeur que je porte en faisant une affirmation comme celle-là. Si on veut entreprendre des choses, enclencher des choses, il est certain qu'on ne peut pas faire autrement que mettre à contribution, pour la coordination et pour la prestation de services, le réseau. On ne peut pas le négliger complètement et dire: II n'y a rien là, on va se rabattre uniquement sur le secteur privé. Cela ne m'apparaîtrait pas responsable.

En plus, l'article 116 vient préciser — je voudrais le rappeler — comme le fait l'article 87, si ma mémoire est bonne, de la Loi sur les services sociaux et les services de santé, que les services de santé au travail prévus par la loi 17 pourront aussi être mis en oeuvre grâce à la collaboration de divers établissements du réseau des affaires sociales. C'est extrêmement important de le formuler en ces termes-là. C'est ce que prévoit notamment l'article 116.

M. Forget: On va adopter cela sur division, parce que je suis convaincu qu'il y a un trou dans le projet de loi, M. le Président.

Le médecin responsable

Le Président (M. Bordeleau): L'article 116 est adopté sur division. J'appelle l'article 117. L'article 117 sera-t-il adopté?

M. Forget: J'aurais des observations à faire qui sont peut-être plutôt formelles que substantielles, mais la façon dont est libellé l'article 117 m'apparaît un peu curieuse. On parle du département de santé communautaire qui reconnaît à un médecin "le privilège d'exercer sa profession dans le domaine de la médecine du travail". Je sais ce qu'on veut faire; il y a des analogies à cela, mais, de la façon dont c'est exprimé, cela a beaucoup l'air pratiquement d'un certificat de spécialiste en médecine du travail, ce qui n'existe pas encore, je pense, formellement. Amon avis, ce n'est pas tout à fait la façon dont on devrait l'exprimer pour être en concordance avec des dispositions analogues de la Loi sur les services de santé et les services sociaux.

Je pense en particulier à une formulation alternative que j'ai formulée sous la forme d'un amendement — je pense que le plus court et le plus simple, surtout à cette heure-ci, c'est de le lire — qui viserait à remplacer les mots "assure ces services lui a reconnu le privilège d'exercer sa profession dans le domaine de la médecine du travail" par les mots "a compétence sur le territoire où se trouve l'établissement a accepté sa demande d'admission au Conseil des médecins et

dentistes de ce centre hospitalier à titre de médecin d'établissement en vertu de la Loi sur les services de santé et les services sociaux".

Le texte amendé se lirait comme suit: "Un médecin peut être nommé responsable des services de santé d'un établissement si le centre hospitalier dont le département de santé communautaire a compétence sur le territoire où se trouve l'établissement a accepté sa demande d'admission au Conseil des médecins et dentistes de ce centre hospitalier à titre de médecin d'établissement en vertu de la Loi sur les services de santé et les services sociaux".

Ce que cela fait, je pense, c'est en substance la même chose que veut faire le ministre, c'est prévoir qu'à l'intérieur d'un centre hospitalier où il y a un département de santé communautaire il y aurait en quelque sorte un département de médecine du travail dont devraient faire partie tous les médecins qui veulent exercer leur profession à titre de médecins d'établissement. La procédure d'admission serait essentiellement la même que celle qui est prévue par la Loi sur les services de santé et les services sociaux. (0 h 45)

Le Président (M. Laberge): L'amendement que vous proposez semble recevable à sa face et, pour discussion, il est reçu.

M. Forget: Je vous remercie, M. le Président. Encore une fois, à la façon dont c'est formulé, il semble que, dans la formulation actuelle, le département de santé communautaire pourrait reconnaître des privilèges à des médecins qui ne sont pas membres de son Conseil des médecins et dentistes. C'est une espèce de permis de pratique qui se greffe au permis de pratique médicale, qui est d'un ordre plutôt administratif que professionnel et qui se greffe de l'extérieur en quelque sorte aux mécanismes de contrôle professionnel. Quand on s'assure qu'il est membre du Conseil des médecins et dentistes, on s'assure en même temps d'une chose, c'est qu'il y aura, comme dans n'importe quel département hospitalier, des méthodes de contrôle interne, de vérification interne sur le plan professionnel et médical. Il y aura certaines règles qui seront crées, il y aura une inspection ou une évaluation par les pairs des critères et des normes de pratique de tous les membres du Conseil des médecins et dentistes qui ont ce type de privilège.

Il me semble que c'est une prudence additionnelle et cela évite de créer un précédent qui ne manquerait pas, autrement, de créer des doutes, parce que le département de santé communautaire, ce n'est pas seulement une partie du Conseil des médecins et dentistes, c'est une unité administrative aussi.

M. Marois: M. le Président, je m'excuse auprès du député. Je veux moi-même m'astreindre à ce que j'ai déjà évoqué antérieurement. Alors, je m'excuse d'interrompre le député. Apremière vue, la proposition d'amendement du député de Saint-Laurent parraît intéressante. Il y a peut-être quel- ques coins qu'il faudrait gratter; par exemple, l'expression médecin d'établissement, c'est peut-être à retravailler un peu. Mais, pour l'essentiel, cela me paraît, à première vue, intéressant comme proposition d'amendement.

Spontanément, sous réserve de ce qu'on pourra gratter, dans ce cas-là, vraiment sur ce point, je serais porté à recommander de suspendre l'examen de l'article 117 pour que je puisse, au cours de la nuit ou demain matin, je ne sais trop, le faire examiner. Comme je l'ai évoqué, on doit s'astreindre à la règle de soumettre tout amendement que le ministre serait porté à retenir provenant de l'Opposition aux légistes du comité de législation. Je voudrais bien qu'ils puissent le regarder. Je ne peux pas faire autrement. Aussi, il y a peut-être quelques ajustements qui ne modifieraient pas le fond de la proposition. Dans ce sens, je serais porté à prendre ça en considération très sérieusement. Donc, je proposerais qu'on reçoive l'amendement, mais qu'on suspende la discussion sur cet amendement et qu'on puisse l'examiner d'ici à demain. J'espère pouvoir apporter une réponse demain.

Le Président (M. Laberge): L'amendement est reçu...

M. Forget: Avant de vous prononcer de façon définitive, j'aimerais fournir un élément additionnel de réflexion. Je comprends que le titre médecin d'établissement peut faire frissonner certains de nos amis d'en face à cause des connotations patronales qu'ils y verront sans aucun doute ou qu'ils craindront que d'autres y voient.

M. Marois: Non, non.

M. Forget: Le sens d'une expression comme celle-là ou d'une autre équivalente, c'est d'éviter de concrétiser ou de consacrer dans un texte de loi une expression aussi ambiguë que médecine du travail. Ambiguë sans être ambiguë, c'est-à-dire que, ordinairement, les départements d'un centre hospitalier correspondent à des spécialités médicales — dans le cas du département de médecine générale, on ne peut pas dire que c'est une spécialité — à des catégories scientifiques et professionnelles comme la chirurgie et les différentes branches de la chirurgie, etc.

Là, par une loi, on crée une espèce de spécialité administrative. Quand on accole ça au mot médecine, ça peut être très mal compris. Effectivement, il y aura — j'en ai peur — dans un grand nombre de cas, des médecins qui seront acceptés pour être médecins d'établissement, à défaut d'un meilleur titre, qui n'auront aucune formation ou très peu de formation spécialisée dans la médecine du travail. On va apprendre en travaillant, dans une large mesure. Et il n'y a pas d'examens spéciaux prévus par la corporation professionnelle.

C'est donc vraiment une classification administrative. Mais il faudrait éviter de lui donner un titre qui serait prématuré. Il y aura peut-être un

jour des médecins du travail avec un certificat de spécialiste. On ne le sait pas. Mais on n'en est pas là, je pense, sauf erreur, à moins qu'il y ait des développements récents. Je pense qu'il va falloir faire attention, au niveau du vocabulaire, pour ne pas créer de faux titres. C'est tout, M. le Président.

M. Marois: M. le Président, je voudrais juste ajouter une chose. Quant à l'expression médecin d'établissement, mes réticences, ce n'est pas pour les raisons qu'a évoquées le député de Saint-Laurent, mais c'est qu'on introduit une notion nouvelle par rapport à l'ensemble de l'économie de la loi; sur le plan juridique, cela peut avoir des conséquences quant à l'interprétation. Peut-être qu'il faudra que cela se lise — j'improvise, je l'avoue — de médecins responsables des services de santé d'un établissement. Parce que, dans les autres cas, c'est lui qui est le responsable de l'équipe de médecins qui travaillent avec lui. On me dit que, dans les autres cas, ce n'est pas nécessaire que la demande d'admission soit acceptée au Conseil des médecins et dentistes, selon les procédures établies en vertu de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, tout cela étant dit sous réserve d'un examen plus approfondi d'ici à demain.

Le Président (M. Laberge): L'amendement du député de Saint-Laurent proposant de remplacer des mots a été reçu et laissé en suspens. L'article 117 est aussi laissé en suspens. J'appelle l'article 118.

M. Forget: M. le Président.

Le Président (M. Laberge): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Mes remarques sur l'article 118 vont se borner à être une mise en garde à l'adresse du ministre et du gouvernement qui ont adopté, relativement à la désignation du médecin, une procédure adversaire, essentiellement, qu'ils espèrent être coopérative, mais qui est une procédure essentiellement adversaire de deux parties en force égale qui désignent conjointement un médecin.

Pour résoudre les conflits, les impasses, plutôt, qu'on anticipe déjà au niveau de la désignation, on fait intervenir un tiers, une espèce de Deus ex machina, qui descend du ciel pour régler les problèmes des mortels. Ce qui est remarquable, c'est qu'on le fait vraiment descendre du ciel, de la partie la plus élevée du firmament administratif. On s'attendrait, à lire les quelques articles qui précèdent, que cela va être le chef du département de santé communautaire qui, à défaut d'une entente entre les parties patronale et syndicale, en quelque sorte, ou ce qui revient à peu près au même, va prendre la décision, parce que c'est lui qui est responsable, dans cet établissement, de la santé du travail.

Mais non, on le met de côté, à ce moment-là, de façon très curieuse, lui qui est responsable dans le territoire, qui fait des contrats et qui s'arrange pour que tout fonctionne et dont on dé- crit abondamment le rôle à la section IV à l'article 127. On lui donne neuf responsabilités.

Pourtant, quand, dans son territoire, il y a un établissement où on ne réussit pas à s'entendre entre patrons et salariés sur la désignation d'un médecin qui va être un de ses mandants, un de ses mandataires, un de ses employés, dans une très large mesure, il n'a aucun rôle. On fait intervenir un arbitre qui siège à Québec et qui va décider pour les parties.

Donc, il y a le choix du tiers intervenant et il y a le choix de toute cette procédure, procédure qui, à mon avis, ouvre la porte à des conflits presque innombrables. Cela va être l'occasion par excellence pour ne pas s'entendre, la désignation du médecin. C'est prévisible. Dans le fond, personne n'a intérêt à s'entendre là-dessus.

Il vaut beaucoup mieux protéger ses arrières en disant: De toute façon, le médecin qui est responsable dans l'établissement, il nous a été imposé par la commission. On ne l'avait pas choisi. Ne nous blâmez pas si cela ne marche pas. Si jamais on s'entend — de toute façon, il va y en avoir un qui sera nommé — il y a la renomination qui revient périodiquement qui sera à chaque occasion un ballon qu'on va se lancer avec un grand plaisir, avec toutes les occasions de chantage possible, bien sûr, d'un côté comme de l'autre. Dans tous ces domaines où on parle tellement de sécurité d'emploi, ce n'est pas un poste de sécurité d'emploi. De part et d'autre, on pourra toujours dire: Ecoute, si tu ne fais pas ceci ou si tu ne fais pas cela, ta renomination revient dans quatre ans. Nous mettons notre veto. Dans les grandes villes, il n'y a pas de grands problèmes, ils vont se replacer ailleurs, mais, dans les endroits éloignés, dans les petites localités où il y a des établissements industriels, un médecin va venir s'installer, va s'acheter une maison, va placer ses enfants à l'école et, au bout de la quatrième année, il sait très bien qu'il faut qu'il soit acceptable. Cela ne sera pas des postes confortables. Si on a refusé des congés de maladie, si on a été strict dans l'interprétation de ce que sont des absences de maladie, si on a été strict au point de vue du patron dans la détection de certains problèmes de santé, on peut se faire bien des ennemis dans ce rôle-là, sur une période de quatre ans, si on joue vraiment son rôle. Les problèmes n'apparaîtront pas de la même façon aux deux parties. Chaque décision sera irritante pour une partie et sera considérée comme allant de soi pour l'autre. Il y a énormément de difficultés à envisager, tellement de difficultés qu'à mon avis la règle va rapidement devenir la nomination par la commission. Il y a un pas de plus qu'on va avoir à faire dans l'engrenage, on va avoir affaire partout à des médecins désignés par l'administration, des médecins-fonctionnaires qui vont s'organiser pour obtenir la sécurité que la loi ne leur donne pas. Donnez-leur quelques années et vous allez voir ce que vous allez voir, mais les gens ne se feront pas ballotter par le système trop longtemps. Ils vont s'organiser pour qu'il y ait un peu de stabilité qui revienne là-dedans. Vous savez, la nature humaine ne changera pas. Elle est

prévisible. Vous allez avoir une situation qui a l'air d'une situation participative très largement ouverte où on cherche le consensus et la crédibilité, alors que dans le fond les deux parties ont intérêt à ne pas s'entendre là-dessus et le médecin lui-même, finalement, a aussi intérêt à ne pas être désigné par les parties. Il a aussi intérêt à dire: Je dépends de la commission et la commission va me régler mon problème, mon problème de sécurité d'emploi, mon problème de continuité, etc. Dans le fond, dès qu'on va comprendre cela — cela ne sera pas long — on va se dire: On va susciter un désaccord sur les nominations, parce qu'à ce moment-là on est sûr d'obtenir l'appui, le "backing" de la commission. Comme il y a quand même un nombre limité de médecins qui sont capables de faire ce travail à cause de leur intérêt et de leur expérience, etc., on va être bien pris avec un corps de médecins du travail qu'il va bien falloir nicher quelque part. La commission va s'en charger. Encore une fois, c'est le pied dans l'étrier pour un système qui, dans les faits, sera très différent de celui qu'on nous annonce, et rapidement. Indépendamment de la volonté du gouvernement, les événements vont suivre leur cours d'une façon qui est prévisible. Cela fait partie de la philosophie. Le gouvernement contrôle la machine. Le gouvernement, dans dix ans au Québec, sera le seul et unique responsable de la santé et de la sécurité du travail, le seul et unique responsable. S'il y a quelqu'un qui se fait tuer dans une usine, s'il y a des maladies tout à coup qui deviennent préoccupantes dans une industrie, ce ne sera que la faute du ministre responsable de l'application de cette loi-là. C'est cela la situation qu'on va produire. Ne vous faites pas d'illusion, c'est exactement cela la situation qu'on va produire. On produit le même genre de phénomène que dans l'industrie de la construction où, par la centralisation du mécanisme de négociation... C'est le ministre du Travail qui, en définitive, règle la convention collective, les conditions de placement, tout ce qui ailleurs se règle différemment. (1 heure)

La responsabilité repose maintenant en un seul endroit, c'est gouvernemental et c'en est une des clauses. J'en ai souligné quelques-unes au passage, c'en est une, cela a l'air très beau. Il est évident qu'il y a un problème de crédibilité pour un médecin, dans le milieu de travail, étant donné le passé, etc. C'est un magnifique bouc émissaire, on peut dire: Ah oui, les médecins, etc. Mais ils travaillaient dans un environnement où les lois étaient imparfaites, les orientations étaient mal connues et mal précisées, mais il reste que ce sont de magnifiques boucs émissaires. C'est tout le système de responsabilité de l'employeur, c'est un magnifique cadeau qu'on fait dans le fond aux employeurs, dans un certain sens; on va leur faire payer assez chèrement, d'ailleurs, mais, de toute façon, ils vont se retourner du côté de leur clientèle, ils vont repasser tous leurs coûts — il ne faut pas s'imaginer qu'ils vont le payer eux-mêmes — dans leur prix, dans la mesure où ils sont capables.

La partie qu'ils ne seront pas capables de passer, ça va se régler tout seul, par des diminutions de production, etc.

Mais, essentiellement, on leur fait un magnifique cadeau en leur disant: Vous n'avez plus besoin de faire d'effort, ce n'est plus votre problème, ce n'est plus votre responsabilité, c'est la responsabilité gouvernementale, on va nommer les médecins, on va déterminer les normes, on va les appliquer, on va faire l'inspection, on va tout faire. Donc, le gouvernement va être responsable. Mais ça, c'est un article clé.

M. le Président, je pourrais bien formuler des amendements là-dessus, mais nous ne perdrons pas notre temps sur cet article pivot. C'est un faux principe, c'est un principe qui va donner des résultats contraires à ceux que le gouvernement annonce et attend de ses voeux, et c'est probablement une situation irréversible que l'on crée. Enfin, comme le gouvernement insiste et qu'il a le pouvoir d'imposer ses volontés, on n'est pas pour perdre notre temps là-dessus. Vous allez voir ce qui va se passer, c'est inévitable. Et je le regrette.

M. Marois: M. le Président, je ne veux pas reprendre la discussion de fond qu'on a eue là-dessus, je pense, avant l'arrivée en commission parlementaire, dans le cadre de nos travaux ce soir, puisqu'on avait eu l'occasion d'aborder ça, avec notamment le député de Portneuf, le député de Charlevoix; on a évoqué effectivement l'article 118. Donc, je n'ai pas l'intention de revenir sur tout le débat.

Cependant, j'attire l'attention du député de Saint-Laurent sur un certain nombre d'éléments. Le premier, c'est le fait que présentement, dans un hôpital, quand on nomme un directeur des services professionnels, c'est un médecin; c'est prévu dans la Loi sur les services de santé et les services sociaux. Il s'agit là d'un médecin qui est nommé pour une période n'excédant pas, avec renouvellement, un maximum de quatre ans.

En plus, advenant le cas où il n'est pas renouvelé dans ses fonctions, il est prévu des mois de congés sabbatiques plus ou moins longs selon, si ma mémoire est bonne, l'ancienneté de travail dans cette fonction. Donc, en ce qui concerne la période de quatre ans comme telle, ce n'est pas particulièrement un élément nouveau, puisque ça existe, par ailleurs, en vertu de la Loi sur les services de santé et les services sociaux.

Deuxièmement, si ma mémoire est bonne — on va procéder à un relevé systématique des témoignages qu'on a entendus en commission parlementaire — il est arrivé qu'on a entendu les témoignages de quelques médecins, quelques-uns, rares à vrai dire, et je les comprends, qui nous ont dit, si ma mémoire est bonne, en commission parlementaire, effectivement, quant à certaines décisions qu'ils ont été appelés à prendre: Le fait de notre relation salariale avec l'entreprise ne nous permet pas de conclure que nous disposions de notre pleine et totale liberté professionnelle.

Ils disaient effectivement: On comprend que, dans certains cas, cela n'ait pas été sans entacher — non pas la compétence, il n'y a pas une équation automatique avec la compétence — la perception que des hommes et des femmes au travail ont de ces gens-là, ce qui, dans un bon nombre de cas — on est obligé de dire les choses comme on les a entendues depuis maintenant plus de deux ans — minent la crédibilité.

On a eu des témoignages analogues d'autres professionnels au sens très large du domaine de la santé ou même de certains agents de sécurité aussi, qui allaient dans le même sens. J'ai aussi entendu — je ne vais certainement pas dévoiler des noms — des témoignages d'un certain nombre de médecins que j'ai rencontrés personnellement, des médecins qui, présentement, exercent dans des entreprises sur une base salariale. Et là, les opinions étaient partagées, je dois le dire, tels qu'on me les a communiqués, ces témoignages. Certains, en particulier des gens qui ont quelques années, un certain nombre d'années d'ancienneté, qui ne sont plus jeunes, nous disaient: Enfin, on va pouvoir retrouver notre liberté, vraiment notre liberté la plus totale possible d'agir sur le plan professionnel. Je vous donne les témoignages tels qu'ils m'ont été communiqués.

Chez d'autres par ailleurs, il y avait des inquiétudes, je dois le dire exactement comme cela a été dit. Il y a les appréhensions du député de Saint-Laurent. Par ailleurs, des témoignages entendus, encore une fois, tendaient à dire que, le jour où des médecins, notamment, sont acceptés par les parties, il y a là une crédibilité de base qui ouvre une perspective de travail que certains médecins n'avaient pas antérieurement, dans l'état actuel des faits, dans certaines entreprises.

C'est le pari qu'on fait. Je ne crois pas que cela mène à une "déresponsabilisation" des entreprises. Je pense qu'il y va certainement de l'intérêt des entreprises, comme il y va de l'intérêt des travailleurs, de suivre de très près le processus de nomination, à partir d'une liste de noms reconnus, de gens qualifiés et compétents, pour choisir et s'entendre.

L'expérience semble montrer que dans ce genre de situation, en général, les gens sont portés à en arriver à une entente entre eux, parce qu'on préfère en arriver à une conclusion entre nous, plutôt que de voir quelqu'un, de l'extérieur, venir trancher, sous une forme quelconque d'arbitrage, plus ou moins.

Je ne veux pas m'étendre plus longuement, M. le Président, et je ne veux pas reprendre non plus la discussion qu'on a eue en début de soirée. Je prends note de ce que le député de Saint-Laurent nous a dit, qu'il s'agissait de remarques, de commentaires, de mise en garde qu'il entendait présenter à la commission à ce moment-ci. Donc, je prends note de ses commentaires.

Le Président (M. Laberge): M. le député de Charlevoix.

M. Mailloux: M. le Président, je ne voudrais pas non plus revenir sur certaines constatations que j'ai faites en cours de route, sauf que je me suis porté tantôt en dissidence quant au vote qui était demandé par mon collègue. Je pense que j'ai expliqué à ce moment-là le reproche assez constant que dans le passé on a fait aux médecins qui, souvent, cadres de l'entreprise ou nommés par l'entreprise, pouvaient être en conflit d'intérêts, malgré leur professionalisme.

Par contre, j'avais également dit, dans le cours de la journée, qu'au moment où des comités paritaires ne s'entendent pas la commission doit décider. Mais il y aurait un préjugé favorable de la commission à l'endroit des travailleurs. Dans presque tous les cas, ce serait quand même la commission qui, ayant ce préjugé favorable, nommerait un médecin, dans le sens que je viens de l'indiquer.

Mais voici où je trouve que le ministre fait une erreur lamentable à l'intérieur de tout ce projet de loi et là je rejoins mon collègue de Saint-Laurent; je ne sais pas si c'est le président du Collège des médecins, le Dr Augustin Roy, qui m'en a soufflé un mot; on pourra me corriger, si je fais erreur. En France, voici ce qui se passe quand il y a mésentente, que les deux parties ne s'entendent pas à voix égales et que la commission de la santé doit décider du choix du médecin. Si on ne veut pas que pas plus les patrons que la commission, qui a un préjugé favorable, soient accusés par la suite d'avoir penché pour l'un ou l'autre, on pourrait former un tribunal — je ne sais pas quelle est l'organisation en France — qui déciderait de la valeur du médecin qui devrait être désigné. A ce moment-là, ce ne serait pas plus le patron que le syndicat ou les employés qui auraient à décider du choix du médecin qui aurait à offrir les meilleurs services de santé possible. Qu'on le veuille ou pas, il ressort que le couloir dont parlait tantôt mon collègue de Saint-Laurent, l'issue possible de cela, dans tous les cas, malgré l'espoir du ministre que les parties s'entendront... Je ne vois pas cela non plus. Je suis convaincu que d'ici quelques mois, on se retrouvera avec des médecins qui voudront forcément satisfaire à certaines exigences pour tâcher de devenir en permanence. Le ministre, avec la batterie de fonctionnaires avec lesquels il a étudié ce projet de loi, aurait pu penser à une formule par laquelle on aurait été dégagé d'autres conflits d'intérêts qu'on verra poindre à l'horizon prochainement, non pas de la partie patronale, mais de l'autre partie. Je pense que cela aurait été évidemment espérer de meilleurs résultats pour la santé et la sécurité des travailleurs qu'aller dans l'optique dans laquelle on va pour la désignation du médecin qui sera faite forcément par une des parties. Chaque fois que la commission se prononcera, elle aura un préjugé favorable pour l'opinion qui sera émise par la partie syndicale. Je ne suis pas certain que cela va donner les meilleurs résultats qu'on peut espérer. Si la formule qui a été exploitée en France ou ailleurs, soit un tribunal indépendant des deux parties possédant toutes les connaissances requises — a donné des résultats, on aurait pu, avant que le projet de loi soit adopté en troisième lecture, vérifier si cela n'aurait pas donné les

résultats qu'espère le gouvernement. C'est ce que j'avais à dire, M. le Président.

Le Président (M. Laberge): L'article 118 est-il...

M. Forget: Je voulais ajouter seulement deux mots, M. le Président.

Le Président (M. Laberge): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: C'est vrai qu'il y a des problèmes de conflit d'intérêts, qu'il y en a eu. Cela ne sert à rien de nier ce phénomène. C'est tout à fait humain et naturel qu'il y en ait, surtout dans un contexte où il n'y a pas de contrôle, ni de normes d'application générale. Or, justement, le nouveau projet de loi, en donnant la prestation des services aux départements de santé communautaire, à mon avis, va amener les activités de contrôle véritable à passer au second plan. Là-dessus, la faiblesse qu'on a connue persiste pour d'autres raisons, mais elle persiste.

Sur le plan des conflits d'intérêts, les conflits d'intérêts vont demeurer. Ils vont cependant changer de forme. Le conflit d'intérêts ne peut pas être éliminé dans une situation où, présumément, l'intérêt du médecin c'est de voir sa nomination renouvelée après l'expiration des quatre ans. C'est au moins ce qu'on peut présumer, parce que, s'ils étaient si désintéressés maintenant, ils l'étaient présumément hier aussi ou ils le seraient dans un autre régime qui ferait de toute manière l'obligation à tous les employeurs de fournir des services de santé en fonction de normes gouvernementales strictes. Le problème n'est pas différent. Il y a une suggestion à la volonté des parties en présence. Rien ne nous permet de croire que le médecin nouvellement nommé en vertu de ce processus va se désintéresser de l'opinion qu'ont de lui l'une ou l'autre ou les deux des parties, mais encore une fois pas nécessairement sur les mêmes points. (1 h 15)

A ce moment-là, ce que le régime permet de faire, cependant, c'est que, comme il n'est plus un préposé de personne, que personne n'est plus responsable, de la négligence ou des gestes déplorables qu'il a à poser et, certainement, son employeur n'est plus responsable, il n'est plus son préposé. C'est la commission elle-même qui devient responsable de la négligence ou des actes erronés qu'il peut poser. On perd une responsabilité sans pour autant supprimer le conflit d'intérêts qui demeure tant et aussi longtemps que les gestes qu'il pose peuvent avoir un effet sur sa nomination ou sa renomination. Le projet de loi le confirme, tant et si bien que les parties vont rapidement se rendre compte qu'il est dans leur intérêt de ne pas laisser l'autre partie à ce comité paritaire avoir un rôle dans la nomination — donc, de bloquer la voie paritaire — de faire les nominations et de laisser la commission décider, en l'absence de toute entente, selon l'intérêt de l'une ou l'autre partie à ce que la commission adopte une telle attitude.

Cela va dépendre, comme mon collègue le disait, de ce qui sera perçu comme étant l'inclinaison de la commission. Si la commission, à un moment donné à une inclinaison syndicale, évidemment, on va avoir un certain comportement de l'une des parties au comité paritaire. Si elle devient une inclinaison patronale, dans 20 ans, avec l'évolution, ou plus rapidement, peu importe, on va voir l'autre partie au comité paritaire développer une stratégie en conséquence. C'est bien clair que le conflit d'intérêts demeure et ce n'est pas en supprimant des responsabilités qu'on le règle. Au contraire, on le rend plus diffus, on rend sa perception plus confuse. De toute façon, les gens ne sont jamais si mauvais qu'on craint ni si bons qu'on espère; ce n'est jamais aussi marqué que cela, quel que soit le régime. Il reste que cela ne change pas tant de choses que cela, si ce n'est que cela crée une incitation vers la centralisation des décisions.

Alors, adopté sur division, M. le Président, je pense que c'est la conclusion qui s'impose.

Le Président (M. Laberge): M. le ministre.

M. Marois: M. le Président, je veux bien accélérer, ce n'est pas moi qui vais bloquer le déroulement des travaux. Mais dans l'état actuel des choses, parce qu'on parle d'une supervision qui serait plus lâche dans le secteur de la santé au travail qu'ailleurs, quel est le type de supervision présentement dans les hôpitaux, en ce qui concerne la pratique des médecins? Sous réserve des mécanismes de recours, de plaintes au Conseil des médecins et dentistes, sous réserve des appels possibles et des interventions de la commission des affaires sociales, analogiquement, il y a cette situation qui est évoquée, qui m'apparaît très claire dans le cas des hôpitaux. Même pour un citoyen, je pense que le député de Saint-Laurent l'admettra, un citoyen qui veut se plaindre, je pense qu'on constate tous, dans nos bureaux de député — je parle d'un médecin en hôpital — que ce n'est pas particulièrement simple et facile de traverser tous les dédales pour arriver au bout et, le cas échéant, obtenir justice. Il y a la corporation qui est là aussi et a quand même une responsabilité: s'assurer de prendre les mesures pour faire en sorte que soit protégé l'intérêt public et non seulement l'intérêt de ses membres. Analogiquement, la corporation est là un peu comme le Barreau est là, en ce qui concerne les avocats, pour voir d'abord à la protection du public. Ce n'est pas un syndicat ou une fédération syndicale de professionnels qui va d'abord promouvoir l'intérêt de ses membres. Il y a de prévus les mécanismes normaux avec, en plus, des éléments additionnels plus précis prévoyant, le cas échéant, des recours qui peuvent être exercés et qui viennent un peu plus loin dans la loi.

Il n'y a pas une formule qui est parfaite dans ce domaine. Par définition, il s'agit d'humains et il y a un certain nombre d'intérêts, c'est évident. On a essayé de trouver la formule. Après y avoir longuement pensé, l'avoir longuement mûrie, a-voir eu l'occasion d'en discuter avant même la

publication du livre blanc, après la publication du livre blanc, avec des fédérations, la FMOQ, la FMSQ, on a eu l'occasion d'en discuter aussi avec la corporation, son célèbre représentant, etc.

Par la suite, on a aussi regardé parallèlement les travaux, les expériences qui ont été menées ailleurs — le député de Charlevoix évoquait la France tantôt — pour arriver à la conclusion — sans avoir inventé les boutons à quatre trous — que la formule qui était peut-être la plus susceptible de nous permettre d'en arriver à quelque chose qui avait un certain sens, qui est un défi, c'est vrai, c'était celle qui était proposée.

Le Président (M. Laberge): L'article 118 sera-t-il adopté? Adopté sur division. L'article 119?

M. Forget: Je reviens sur un point. Pourquoi la commission et pas le chef du département de santé communautaire? Parce que c'est également mentionné dans l'article 119. Il y a les deux possibilités. Pourquoi, lorsqu'il n'y a pas accord, étant donné que c'est lui qui peut faire la nomination s'il n'y a pas de comité paritaire, pourquoi ce n'est pas lui qui fait la nomination si le comité paritaire ne peut pas s'entendre? Pourquoi monter jusqu'à Québec pour cette décision?

M. Marois: M. le Président, si j'ai bien compris la question du député, c'est pourquoi des délais de deux types.

M. Forget: Pas des délais, mais pourquoi l'intervention comme tiers, dans le cas où le comité paritaire ne réussit pas à s'entendre? On dit que dans ce cas, c'est la commission qui fait la nomination. Mais d'un autre côté, s'il n'y a pas du tout de comité paritaire, il y a des cas où il n'y a pas de comité paritaire, c'est le chef du département de santé communautaire qui fait la nomination. Pourquoi deux règles différentes? Dans le fond, soit qu'il n'y ait pas de comité ou que le comité existe mais ne peut pas s'entendre. A toutes fins utiles, c'est comme s'il n'y avait pas de comité à ce moment-là. Il ne fonctionne pas, dans le fond, pour cette fin, au moins. Vous ne pouvez pas en arriver à une conclusion. On fait comme s'il n'y avait pas de comité pour cette fin. C'est le chef du département de santé communautaire qui est près de la place, qui connaît son monde, qui sait ce qui est acceptable et ce qui n'est pas acceptable, alors qu'on fait remonter la décision à Dieu le Père.

M. Marois: La raison est la suivante. Dans le cas où il y a un comité, le chef du département de santé communautaire étant appelé à travailler régulièrement avec les parties, le problème est bien différent que lorsqu'il n'y a pas de comité comme ceux-là. Alors qu'on pouvait voir poindre des problèmes, on a eu des témoignages en ce sens, notamment des départements de santé communautaire. Dans les cas où il y a un comité, ces problèmes disparaissent à partir du moment où il n'y a pas de comité de santé et de sécurité. C'est pour cette raison.

Le Président (M. Laberge): C'était une réponse que vous demandiez à l'article 119.

M. Forget: A l'article 119, on fait aussi la distinction. La question était également pertinente à l'article 119.

Le Président (M. Laberge): L'article 118 a été adopté sur division. L'article 119 est-il adopté?

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Laberge): Adopté. L'article 120. L'article 120 est-il adopté?

M. Forget: L'article 120, oui.

Le Président (M. Laberge): L'article 120, cela va? L'article 120 est adopté. J'appelle...

M. Marois: Juste un moment, M. le Président.

Le Président (M. Laberge): II n'est pas adopté. L'article 120 est toujours ouvert.

M. Marois: M. le Président, si le député de Saint-Laurent me permet une question. Est-ce que le député entend soumettre un amendement analogue à celui qu'il a proposé tantôt concernant l'article 117? Là, il y a un problème de concordance, dans l'hypothèse où on retiendrait son amendement, parce qu'on utilise...

M. Forget: Oui, il faudrait faire la concordance.

M. Marois: ... au deuxième paragraphe, la notion de privilège, d'exercice de la profession puisque ces mots se trouvent biffés dans la proposition d'amendement du député.

M. Forget: D'accord. Disons que je fais confiance au ministre, s'il adopte une version définitive, pour faire la concordance. Je n'ai pas préparé — je m'en excuse — des amendements de concordance parce que, comme on ne sait jamais le sort qu'on fait au premier amendement d'une série, il semble, pour l'Opposition, parfois, un travail inutile que de faire des concordances.

M. Jolivet: II ne faudrait pas toujours...

M. Forget: Non, mais la nature humaine étant paresseuse, par essence...

Le Président (M. Laberge): Est-ce qu'il y a d'autres commentaires sur l'article 120?

M. Forget: Oui, il y en a d'autres.

M. Marois: On pourrait l'adopter sous réserve de concordance, si cela devait se présenter.

M. Forget: II y a ici un précédent que je me voudrais de ne pas signaler, à l'article 120, le fait qu'une plainte à la Commission des affaires socia-

les peut prendre comme origine une action de citoyen alors que, jusqu'à maintenant, il s'agissait là d'un appel qu'on permettait au médecin à qui on refusait de renouveler ses privilèges. Là, on inverse complètement le mécanisme et on donne à toute personne, s'il y a des motifs de se plaindre d'un médecin, de mettre en marche le processus de destitution. C'est un précédent. Je pense qu'il faut certainement le noter parce que c'est un mécanisme qui a été prévu comme un mécanisme de défense, une espèce de mécanisme de sécurité d'emploi pour les médecins.

C'est comme si, dans la convention collective des enseignants, il y avait une procédure d'arbitrage suivant laquelle, si l'employeur prétend une incompétence grossière et congédie un enseignant, l'enseignant peut demander, par un arbitrage, d'être restauré dans ses droits, faire un grief et dire qu'il appartient à son employeur de démontrer qu'il y a juste cause pour le renvoi. C'est comme si, dans le cas d'un enseignant, on permettait aux parents de s'adresser au conseil d'arbitrage, en vertu de la convention collective, et dire: Là, vous allez demander le renvoi du professeur Untel pour raison d'incompétence, en court-circuitant le principal d'école et la commission scolaire. On donnerait ce droit aux citoyens face au professeur d'école d'invoquer la convention collective et la procédure d'arbitrage pour renvoi, et on forcerait le professeur ou l'instituteur en question à se défendre devant un conseil d'arbitrage à l'effet qu'il n'est pas incompétent. C'est cela qu'on fait; je pense que je viens de le dire, c'est le seul mécanisme qu'on met en marche.

Je comprends que la procédure de grief est dans une loi, elle n'est pas dans une entente signée par le ministre des Affaires sociales avec les fédérations, les syndicats médicaux. Dans le fond, comme il y a un certain arbitraire entre les choses qui sont dans les conventions, les ententes qui sont dans les lois, ce n'est pas absolument logique, la ligne de démarcation. Je pense que tout le monde va être d'accord avec moi là-dessus, il y a une espèce de zone grise, il y a des choses qui apparaissent dans les lois et d'autres choses apparaissent dans les ententes et, dans le fond, cela pourrait être l'inverse, dans certains cas. Il reste que c'est un mécanisme de grief pour les médecins, et on le renverse complètement; le début devient la fin et la fin devient le début.

J'aimerais bien entendre la philosophie qui inspire cela parce que cela peut amener à des applications intéressantes. Je suis sûr qu'il y a des tas de domaines où la demande du public... dans le domaine de l'éducation, par exemple, combien de parents entend-on dire: Ce professeur, c'est une vraie plaie d'Egypte, il est complètement dépassé par les événements, il ne comprend plus les jeunes, mais parce qu'il enseignait il y a 20 ans et qu'il n'est pas rendu à l'âge de la retraite, il faut l'endurer; il était en 4e année l'an dernier et ça n'a pas marché, les parents ont tellement protesté qu'ils l'ont mis en 5e année et ce n'est pas mieux. On a tous vécu cela comme parents, je pense. Si on pouvait donc mettre en branle une procédure d'arbitrage et se plaindre, comme parents, de l'incompétence des enseignants, je sais bien ce qui arriverait, mais ce serait un grand renversement des règles du jeu. Je suis sûr qu'on aurait une grève générale à la CEQ.

Il ne faudrait pas s'étonner si le même procédé, de la part du législateur, appliqué dans ce cas, suscite certaines surprises. Je pense que cela vaut quelques minutes de discussion, même si nous sommes arrivés, si je comprends bien, à ce qui était convenu comme heure de terminaison de nos travaux.

M. Jolivet: II n'y a rien qui nous empêche de continuer...

M. Forget: II n'y a rien qui nous en empêche, sauf que la fatigue se fait sentir, rendus à 1 h 30 du matin.

M. Jolivet: C'était simplement pour dire que rien ne nous empêche...

M. Forget: Oui, sauf ce facteur.

M. Mailloux: Si on me permet, je pense qu'on a respecté notre parole: mais l'autre problème qui se pose est le suivant, c'est que la commission a suspendu pour quelques minutes, de l'autre côté. Je pense que mes collègues comme nous-mêmes aurions peut-être avantage à voir ce qui va se produire tantôt dans le déroulement de l'autre commission. C'est un problème qui concerne tout le Québec, également. (1 h 30)

M. Marois: M. le Président.

Le Président (M. Laberge): M. le ministre.

M. Marois: Si on me permet simplement de commenter très rapidement le commentaire que vient de formuler le député de Saint-Laurent. C'est vrai qu'il y a une différence importante. Mais j'ajouterais qu'il y a une différence importante aussi — j'ai cru comprendre que le député établissait une certaine forme de comparaison avec les mécanismes, par exemple, d'arbitrage en matière de relations de travail — dans les cas d'arbitrage en matière de relations de travail. L'économie générale c'est qu'il y a renvoi, il y a congédiement et, par la suite, il y a un mécanisme de recours, mais le renvoi est là.

Dans le cas présent, tel que l'article est libellé, au lieu, dans une première étape, d'un renvoi, on peut porter plainte en conséquence — enfin, "plainte" entre guillemets — mais, en même temps, il y a une garantie qui est accordée au médecin qui pourrait être entendu pour faire valoir pleinement son point de vue par un tribunal — en fait c'en est un — qui est celui qui entend généralement en dernière instance ce genre de chose, qui est la Commission des affaires sociales.

M. Jolivet: Juste pour revenir à l'exemple des enseignants, il est toujours possible, pour un co-

mité d'école, de demander, auprès de la direction de la commission scolaire, le congédiement d'un enseignant. La commission acceptera ou refusera de le faire, mais il y aura toujours le droit d'appel prévu par le tribunal d'arbitrage de la convention collective en ce qui concerne le grief et l'arbitrage qui s'ensuit. Mais la comparaison n'est alors pas la même.

M. Forget: Oui, vous avez raison, mais, là, ce n'est pas comme si on disait: II faut d'abord que les travailleurs s'adressent au département de santé communautaire pour obtenir le renvoi du médecin qui, après, pourra se plaindre, en vertu de la procédure de grief. On dit: 10% des travailleurs peuvent directement enclencher le mécanisme, mais à l'envers; au lieu que ce soit le médecin qui se plaigne d'un renvoi, ce sont eux qui demandent le renvoi. Alors, il y a une différence.

C'est comme si, dans une commission scolaire, on disait: Une pétition signée par 100 parents permet d'aller directement à l'arbitrage qui va décider du renvoi du professeur. C'est une autre paire de manches que la situation que l'on a, je pense que vous l'admettrez. Mon analogie était bonne dans ce sens, c'est que l'arbitrage, c'est une procédure de grief à l'option d'un salarié qui se prétend injustement congédié. Et la disposition analogue, dans la Loi sur les services de santé, c'est une procédure de grief, mais sur laquelle on a légiféré, à la disposition du médecin qui se voit privé de ses privilèges, selon lui, injustement. Il y a une analogie parfaite jusque-là, et c'est seulement quand on introduit la possibilité que 10% des travailleurs, sans même demander son renvoi, mais agissent directement; ça, c'est innovateur.

M. Marois: C'est dans le cas où il n'y a pas d'association accréditée.

M. Forget: Mais il y a tout de même un patron, il y a le DSC.

M. Marois: Oui.

M. Jolivet: II ne faut pas oublier une chose, c'est que, dans la loi qui est présentée, le comité paritaire, c'est celui qui accepte— à moins que ce ne soit le directeur du département de santé communautaire ou la commission, selon les cas — le médecin au départ. Il y a une différence avec ce qu'on connaît du comité de parents versus la commission scolaire.

M. Forget: Oui, d'accord, ça va. On ajourne, M. le Président?

M. Marois: Est-ce que l'article 120 est adopté avant l'ajournement?

Le Président (M. Laberge): L'article 120 est-il adopté ou si...

M. Forget: Gardons-le donc en suspens. On va y réfléchir durant la nuit; ce ne serait peut-être pas mauvais.

Le Président (M. Laberge): L'article 120 demeure en suspens.

La commission ajourne ses travaux sine die.

Fin de la séance à 1 h 35

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