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Commission permanente du Travail,
de la Main-d 'Oeuvre et de l'Immigration
Industrie de la construction Etude de
l'arrêté ministériel no 2711
Séance du mardi 12 septembre 1972
(Dix heures seize minutes)
M. SEGUIN (président de la commission permanente du travail, de
la main-d'oeuvre et de l'immigration): A l'ordre, messieurs!
Tout de suite au début, je souhaite la bienvenue aux personnes
qui se présentent devant la commission pour faire part de leurs vues sur
les décrets de la construction. Vous aurez, chacun à votre tour,
l'occasion d'exprimer la pensée de vos associations respectives.
Avant de commencer à entendre des commentaires sur les
différents mémoires que nous avons reçus, je voudrais
établir, pour le journal des Débats, la liste des membres de
cette commission.
Ces membres sont les suivants: MM. Caron (Verdun), Veilleux
(Saint-Jean), Bossé (Dorion), Vaillancourt (Stanstead), Cournoyer
(Chambly), Marchand (Laurier), Harvey (Chauveau), Perreault (L'Assomption),
Carpentier (Laviolette), Lacroix (Iles-de-la-Madeleine), Mailloux (Charlevoix),
Faucher (Yamaska), Assad (Papineau), Burns (Maisonneuve), Croisetière
(Iberville), Demers (Saint-Maurice), Guay (Dorchester), Vincent (Nicolet),
Tremblay (Chicoutimi).
Nous avons, messieurs, plusieurs mémoires dont trois ici, en
tête de liste: Fédération de la construction du
Québec Association des entrepreneurs en construction de Brome,
Missisquoi, Shefford, Inc: Commission de l'industrie de la construction.
Débutons par ces trois mémoires et entendons, si vous le
voulez bien, les représentants de la Fédération de la
construction du Québec. Sont-il présents?
Alors, passons.
M. DEMERS: Un excellent mémoire.
M. LE PRESIDENT: Association des entrepreneurs en construction de Brome,
Missisquoi, Shefford Inc. Est-ce qu'il y a un représentant ou un
porte-parole du groupe?
Commission de l'industrie de la construction...
Commission de l'industrie de la construction
M. MORIN: Fernand Morin.
M. LE PRESIDENT: M. Morin. Je vous en prie, allez-y.
M. MORIN: M. le Président, nous avons déjà
présenté un rapport d'analyse de l'inventaire de la construction,
quant au marché du travail, au mois de mai. Maintenant, nous venons vous
présenter un deuxième rapport vu sous un angle différent
et complétant le premier.
On sait que l'arrêté en conseil no 2711, relatif au
contrôle quantitatif de la main-d'oeuvre, porte sur deux points. Le
premier: L'obligation de détenir un permis de travail pour oeuvrer dans
la construction. Le deuxième point: La tenue permanente d'un inventaire
de la main-d'oeuvre, je dirais qualitativement et quantativement. Est jointe
à l'arrêté en conseil la constitution d'un comité
ayant pour mandat d'inventorier et de préciser les différentes
hypothèses à retenir ou à être retenues en vue de la
stabilisation du revenu des travailleurs de la construction.
Quant à l'émission des permis, en vertu d'amendements
apportés à l'arrêté en conseil, au mois de mai, nous
devons, d'ici à la fin du mois de septembre, soumettre au ministre du
Travail un ensemble de critères relatifs à l'émission des
permis. Nous avons déjà soumis au ministre un plan ou les
coordonnées du plan général retenu pour fins
d'étude. Le plan lui-même, le projet sera soumis d'ici à la
fin du mois. On peut le dire immédiatement, même si les
détails ne sont pas arrêtés, ce plan voudrait, bien
sûr, retenir l'obligation de détenir un permis pour oeuvrer dans
la construction, élément essentiel si on veut exercer un certain
contrôle, savoir au moins qui est travailleur de la construction et
permettre, si vous voulez, un double permis, le permis, disons, annuel et le
permis temporaire.
Ce plan, et c'est un élément qui est retenu jusqu'ici par
la commission, va vouloir et je pense que, tout à l'heure, on va
comprendre la raison d'être de ce point que je veux souligner
immédiatement ce nouveau régime voudrait, si vous voulez,
être décentralisé.
Il ne devra pas donner l'apparence et ne pas être aussi, en fait,
centralisé dans un appartement ou une pièce quelconque à
Montréal, mais se coller à la réalité
régionale qui est différente. Justement, nous voudrions mettre
sur pied un système qui pourra répondre aux besoins particuliers
de chaque région.
De plus, ce plan montrera et proposera la nécessité de
mettre sur pied un comité de recherche bien précis afin de mieux
savoir où on va et où on peut aller l'an prochain, en 1973-1974.
Donc, sur cette question du permis, la Commission de l'industrie de la
construction ne présentera absolument aucune donnée
particulière aujourd'hui. Nous pourrons répondre, bien sûr,
à toute question quant à notre administration pour
l'année, mais non pour l'avenir puisqu'on a à donner un projet
d'ici â la fin du mois.
Quant à ce qui devrait exister comme régime, je laisse le
soin, bien sûr, aux associations syndicales et patronales de donner leur
opinion. Ce n'est pas à la Commission de l'industrie de la
construction de le faire. La commission administre seulement et voit
à l'exécution des décisions prises; elle n'a pas à
les prendre pour les parties.
Donc, ce rapport se limite au deuxième pôle de
l'arrêté en conseil, soit à l'inventaire proprement dit.
Cet inventaire met en lumière un certain nombre de faits et conjugue
également certaines données pour illustrer la situation dans
l'industrie de la construction. De là, on pourra tirer les conclusions
qu'on veut, selon l'angle de vue de chacun.
Je proposerais, M. le Président, si vous croyez que c'est
nécessaire ou utile, de passer en revue très rapidement le
mémoire que nous vous avons préparé.
Ce mémoire donne je suis à l'introduction
les sources de nos données qui sont au nombre de trois: la
première, les rapports mensuels des employeurs, la deuxième, nos
registres au sujet de la main-d'oeuvre, contenant des données sur
l'histoire des travailleurs depuis leur premier enregistrement, il y a à
peu près cinq ou six ans pour certains; la troisième source nous
vient du ministère quant aux données qualitatives,
c'est-à-dire tout le contrôle de la qualification professionnelle
des travailleurs de la construction.
Ce mémoire est basé sur les données d'une
période de 18 mois, au plus, et, dans certains cas, compte tenu de la
qualité des données et de leur vérification
préalable, nous avons été obligés de nous
restreindre à une période de douze mois. Dans chacun des cas,
nous le soulignons expressément.
Il y a, bien sûr je pense que c'est une mise en garde qui
vaut pour éviter des extrapolations dangereuses des
données de l'information qui nous semblent assez sûres et d'autres
moins complètes. Par conséquent, à chacun des cas, nous
l'avons souligné.
Ainsi, lorsque je traiterai de la masse salariale, de la population et
de son identification, de son domicile, du salaire gagné dans la
construction et de la répartition de cette masse entre les
salariés, c'est suffisamment pour ne pas dire plus
précis.
Quant au problème de la qualification professionnelle, quant au
métier qu'exercent les salariés, ces données sont moins
précises ou moins complètes puisque, comme nous l'avions dit au
mois de mai, le programme de dépistage des travailleurs non
qualifiés, pour leur faire subir l'examen à deux ou trois
reprises, n'est pas encore terminé. C'est un plan qui doit, bien
sûr, aboutir pour décembre. Par conséquent, nos
données sont incomplètes. Nous n'avons à peu près
que 38,000 fichiers sur ce point, compte tenu de la masse totale des
salariés, qui est de 105,000.
En premier lieu, traitons des conditions générales du
marché du travail. Pour les douze derniers mois, il s'est payé,
dans la province de Québec, $550 millions en salaires,
c'est-à-dire, en arrondissant les chiffres, pour 110 millions d'heures
de travail.
Le premier point à remarquer, c'est qu'on atteint, dans certains
mois de pointe, $60 millions, en octobre 1971, tandis qu'aux périodes
creuses, nous tombons à $35 millions. Déjà, on voit une
variation fort impressionnante. Je souligne également que ces
données s'arrêtent à 1971 et que la masse salariale montre
une hausse sensible pour les trois ou quatre premiers mois de l'année
1972, hausse qui est de plus de 20 p.c. par mois, comparativement à
celle des mois équivalents de 1971.
Le tableau de la page 5 montre un peu la courbe des salaires
payés par mois, et vous voyez les variations entre les régions.
Nous avons choisi, pour fin d'unité dans le rapport, Québec et
Montréal, qui sont deux pôles importants, on le verra, et les
autres régions. Vous voyez que les variations à Montréal
et à Québec ne sont pas tout à fait les mêmes que la
courbe générale de la province.
Quant aux effectifs, on peut dire qu'il y a eu dans la province environ
120,000 personnes qui ont oeuvré dans la construction à un moment
ou à un autre. Ici, un danger nous guette lorsqu'on parle des effectifs,
et c'est une mise au point que je voudrais faire. Il y a facilement
même pour les statisticiens confusion possible entre un
détenteur de permis et un travailleur de la construction. Un travailleur
pas nécessairement actif, mais disponible.
C'est même un des problèmes dont vous allez entendre parler
ces jours-ci, même pour les employeurs, à savoir quel est le
bassin réel de main-d'oeuvre disponible. On ne peut se limiter et se
fier au nombre de détenteurs. C'est si vrai que dans l'opération
de changement d'administration entre le ministère et la commission pour
l'émission des permis, de cartes d'identité ou permis de travail,
il y avait à l'arrêté en conseil une simple règle
bien minime, à savoir que pour avoir un permis il fallait avoir
travaillé durant les 18 derniers mois.
Simplement par cette règle de 160,000 cartes d'identité,
on a passé à 120,000. Donc, il n'y a pas eu là je
le souligne au tout début 40,000 personnes privées de
travail parce qu'elles n'avaient pas un certain papier, mais simplement 40,000
personnes qui n'avaient pas touché à un marteau si je peux
dire durant 18 mois, du moins officiellement touché à un
marteau.
Autre précision sur les effectifs disponibles. Aux 105,000
détenteurs de permis, on ajoute les 10,000 détenteurs d'une carte
d'identité émise par le ministère au tout début de
l'été, plus un certain nombre de personnes qui, on le
découvre après coup, travaillent dans la construction sans
détenir une carte ou un permis.
Autre point ou caractéristique pour bien comprendre
l'échiquier, c'est la répartition des détenteurs dans
notre province. Vous avez 50 p.c. de ces détenteurs dans la
région de Montréal, 20 p.c. dans la région de
Québec et les autres 30 p.c. dans les autres régions de la
province.
D'ailleurs, si vous alliez à l'annexe 2 du
rapport, vous verriez pour chacun, ça peut être
intéressant la répartition par comté. Vous pouvez
savoir exactement quel est l'effectif réel par comté. Autre
remarque sur les effectifs, qui constitue un point fondamental pour pouvoir
travailler et réfléchir sur cette question, c'est le fait suivant
je suis au centre de la page 8 que 63 p.c. des détenteurs
ont travaillé d'une façon relativement régulière au
cours de 1971: 63 p.c. de 115,000, soit 72,000 personnes.
Déjà là, on pourrait conclure certains
pourraient conclure; vous voyez que j'essaie simplement de mettre des
barrières ou d'arrêter des extrapolations hâtives
qu'il n'y a pas dans la construction 72,000 emplois, douze mois par
année. On ne pourrait pas, non plus autre danger diviser
d'une façon mathématique et froide la masse totale des heures,
110 millions, par ce que peut faire une personne normalement dans une
année, soit 2,000 heures, et dire qu'il y a 55,000 emplois à
plein temps dans la construction.
Ce ne serait pas comprendre les données et, je dirais,
l'économie de l'industrie. Encore là, ce sont des dangers
à éviter compte tenu des fluctuations de l'offre et de la
demande, dans la construction. Par région, ça varie; il y a des
gens qui sont moins mobiles. Il y a aussi la courbe saisonnière et
cyclique, comme on le verra tout à l'heure.
De toute façon, même lors des périodes de pointe
où on engage le plus de monde dans la construction, soit vers octobre,
pour ce court laps de temps, il n'y a que 75 p.c. des détenteurs actuels
de permis, qui sont engagés et dont on retient les services. C'est pour
vous montrer que la question de savoir quel est le nombre total de personnes
qui peuvent oeuvrer dans la construction, qui y oeuvrent effectivement et qui
devraient avoir un permis est fort complexe.
On ne peut pas, par une formule mathématique, arriver à un
chiffre précis. Il nous faut bien sûr c'était ma
conclusion pratique, du moins sur le plan personnel toujours avoir un
système souple qui va se mouler à la région. C'est ce que
nous allons proposer au ministère du Travail très
bientôt.
Si on prend maintenant la répartition de la masse salariale entre
ces effectifs, en d'autres termes si on conjugue le premier point, la masse
salariale, avec la population, on pourra voir comment chacun a reçu de
la construction. On a pu, pour fins de démonstration, regrouper en cinq
familles les travailleurs. C'est un regroupement pour satisfaire la raison, ce
n'est pas, bien sûr, une démonstration à tous points de vue
conforme à la réalité. Il y a des nuances à
apporter. En divisant en cinq groupes les travailleurs, on s'aperçoit
que, dans le premier groupe, 36 p.c. de l'ensemble des détenteurs,
46,000 travailleurs ou 46,000 détenteurs pour l'instant, ont
travaillé moins de 500 heures par année pour un gain maximum de
$2,500 et, selon nos données, pour une moyenne générale de
$1,250.
La deuxième catégorie, qui comprend 20 p.c. des
travailleurs soit 26,000 salariés, travaille à peu près
entre 500 et 1,000 heures, ce qui leur donne une moyenne de $3,750. Dans la
troisième catégorie, 18 p.c. ou 24,000 travailleurs, vous avez
des gens qui ont travaillé dans la construction entre 1,000 et 1,500
heures. Dans la quatrième catégorie, 18 p.c. ou 24,000
travailleurs, ils ont travaillé entre 1,500 et 2,000 heures. La
dernière catégorie, 7 p.c. ou 8,000 travailleurs, a
travaillé pour plus de 2,000 heures. Donc, en gros, 56 p.c. des
travailleurs ont travaillé à peu près pour 28 p.c. des
heures, soit quatre mois ou moins. A l'autre extrémité, vous
voyez l'inverse des chiffres: 25 p.c. des effectifs ont oeuvré pour 46
p.c. des heures, ils ont à peu près travaillé durant 11
à 12 mois.
Vous avez donc deux extrêmes, une faible minorité, 25 p.c,
qui oeuvre d'une façon assez régulière, onze mois et plus,
et un fort pourcentage de ces détenteurs, 56 p.c, qui oeuvre moins de
quatre mois.
Ce que je viens de dire est illustré d'une façon plus
détaillée aux pages suivantes.
Maintenant, au chapitre 2, page 18, nous essayons de démontrer,
d'une façon rapide, quelques données particulières de
l'économie de cette industrie. Si on faisait une loi, un
règlement, à l'encontre de la réalité, bien
sûr ce serait la réalité qui vaincrait, comme toujours. On
ne peut, en aucune façon, pour légiférer, pour
réglementer, pour décider, méconnaître, si vous
voulez, ces données particulières de l'économie de la
construction.
La première veut simplement démontrer que dans la
construction, il n'y a pas une augmentation d'année en année du
nombre d'emplois, bien au contraire. Je vous amènerai directement au
tableau qui est suffisamment indicatif, à la page 21, où vous
voyez que, contrairement à la courbe toujours montante du nombre
d'emplois disponibles dans la province, vous avez une courbe,
particulièrement depuis 1966, toujours descendante et assez rapide, du
nombre d'emplois dans la construction.
Donc, la construction ne peut, bien sûr, recevoir tous ceux qui,
momentanément, temporairement, malheureusement, sont disponibles parce
que, dans les autres industries, il y a des licenciements ou il y a un repos ou
un calme.
Autre élément qu'on ne peut négliger dans
l'économie de l'industrie, ce sont les fluctuations saisonnières.
Entre le mois le plus actif, le mois d'octobre, et le mois le plus faible, le
mois de janvier, on a vu que la masse salariale varie de $25 millions, c'est
énorme. Les travailleurs peuvent donc facilement trouver de l'emploi
à certains mois et immédiatement après, ils sont
libérés pour un temps indéfini.
Si vous prenez le tableau à la page 24, vous verrez la courbe
abrupte de la masse salariale par rapport à une moyenne de 45 millions.
Si
on prend zéro comme base, vous voyez les fluctuations
plutôt brutales.
Autre remarque pour montrer les fluctuations saisonnières, et
également régionales qui sont différentes les unes des
autres, vous pouvez les constater pour aller plus rapidement au
tableau de la page 27. On prend les variations régionales comme base, en
fait le point zéro.
On prend les variations dans la région de Québec et dans
la région de Montréal, mois par mois, par rapport à celles
de la province et vous voyez encore des variations tout à fait
différentes. L'ensemble est une chose, la région en est une autre
tout à fait différente. Ce n'est pas simplement pour faire
quelques variations pour faire plaisir à un professeur mais c'est une
grossière réalité qu'il nous faut accepter et sur laquelle
il nous faut baser tout système.
Quant à la mobilité de la main-d'oeuvre, nos
données sont assez surprenantes. C'est à la page 29. Peu de
travailleurs restent dans leur région; 15 p.c. seulement ont
oeuvré dans leur région. Au moins 40 p.c. des effectifs oeuvrent
dans plus d'une région. Ceci démontre que les travailleurs
doivent nécessairement se déplacer pour aller chercher du
travail. Une caractéristique qui est importante, lorsqu'on arrivera au
permis de travail, le permis de travail ne peut pas, lui, être
régional. Il faut qu'il soit provincial, parce que le travail est
à l'échelle de la province. Un jour, c'est à Sept-Iles. Le
lendemain, ce sera à la baie James ou en plein centre de la ville de
Montréal, selon les activités des uns et des autres.
C'est une donnée qui n'est pas encore suffisamment précise
pour qu'on en ait fait un tableau, mais peut affirmer sans erreur qu'un bon
nombre de nos travailleurs doivent changer d'employeur quatre à cinq
fois par année. Ceci démontre qu'on ne peut rien faire à
l'échelle d'une entreprise, contrairement à d'autres
régimes, mais qu'il nous faut oeuvrer à l'échelle
industrielle. L'existence même de la Loi sur les relations du travail
dans l'industrie de la construction, le bill no 290, en est le monument.
Quant à la formation et à la mobilité
professionnelles, nous n'osons pas pour l'instant, tel que dit tout à
l'heure, apporter des précisions ou des tableaux complets puisque nous
n'avons pas toutes les données pour faire les variations utiles. Ce
serait simplement vous induire en erreur. Selon les données statistiques
du Canada, on sait que le salaire moyen dans la construction est de $5,175,
tandis que chez nous il est de $4,054. Ceci fait qu'il y a des ajustements ou
des précisions à établir. C'est pour ça que notre
rapport sur les salaires, selon les métiers, est donné de
façon globale sans entrer dans les détails pour l'instant.
Lorsqu'on voit ces quelques chiffres, il est évident qu'un grand
nombre de travailleurs viennent dans la construction chercher un revenu
d'appoint, en attendant autre chose. Il y a ce qu'on a appelé les
"noctambulistes". Il y a des gens en repos ou en chômage pour un temps
dans d'autres industries, qui viennent dans la construction. Il y a
également des gens qui ont d'autres sources de revenus, telles les fonds
publics. Nous allons nous avons déjà commencé
faire une étude comparative entre notre banque de données
et les abonnés au bien-être social, à
l'assurance-chômage et à d'autres sources pour savoir exactement
d'où ils viennent et quelles sont les sources de revenus et de
subsistance à ce moment-là, il faut parler plus de sources
de subsistance que de revenus des travailleurs. Mais une chose est
certaine, c'est que le système actuel ne permet pas, à moins
qu'on n'y mette certaines contrai-tes, certaines barrières pour mieux
voir à l'intérieur, de même savoir la disponibilité
de la main-d'oeuvre dans la construction. Il ne permet certainement pas de
mettre sur pied, à moins de faire de l'amateurisme, graduellement,
progressivement, avec les mises en garde et l'information voulues et la
participation de tous les corps intéressés, un régime
tendant à une certaine stabilisation du revenu et de l'emploi des
travailleurs de la construction.
Il faut d'abord circonscrire le groupe intéressé pour
pouvoir s'y intéresser nous-mêmes, pour pouvoir oeuvrer dans le
domaine. Sans un certain contrôle, il n'y a rien à faire. Il
faudrait presque dire et sur ce point, ce ne sont que des paroles tout
à fait personnelles que l'industrie est une industrie absorbante
pour les hauts et les bas des autres industries.
C'est là, je pense, la question vitale â laquelle tous ceux
qui s'intéressent à l'industrie de la construction doivent
trouver des éléments de réponse.
Merci, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Morin. Est-ce qu'il y a des questions, M. le
ministre?
M. COURNOYER: Je n'ai pas de question.
M. LE PRESIDENT: Votre exposé a été si clair qu'il
n'y aura pas de question.
M. DEMERS: Vous auriez mieux fait de le féliciter.
M. LE PRESIDENT: Peut-être. Nous avons déjà
appelé les représentants de la Fédération de la
construction du Québec. Est-ce qu'il y a des représentants ici?
Nous avons aussi appelé l'Association des entrepreneurs en construction
de Brome, Missisquoi, Shefford Inc. Est-ce qu'il y a quelqu'un ici,
représentant l'association? Voulez-vous vous adresser à la
commission? Je pense qu'on pourrait peut-être faire une place à la
table pour ce monsieur.
M. DAIGLE: Est-ce qu'il serait possible de présenter notre
mémoire seulement cet après-midi? Il manque des gens ce
matin.
M. LE PRESIDENT: Vous demandez un délai pour votre exposé.
Votre nom, monsieur?
M. DAIGLE: M. Jacques Daigle.
M. COURNOYER: Il y a un mémoire qui vient de la
Confédération des syndicats nationaux. Etes-vous prêt
à le lire ou à le présenter, M. Pepin?
M. LABERGE: M. le Président, pourrions-nous vous demander combien
il y a d'associations qui doivent présenter des mémoires ou se
présenter devant la commission? Cela nous aiderait à nous
enligner,
M. LE PRESIDENT: C'est qu'il y en a un certain nombre qui ont
indiqué leur intention de se présenter ici, par exemple la
Centrale des syndicats démocratiques, la Chambre de commerce de la
province de Québec, l'Association de la construction de Montréal
et d'autres associations, mais, pour le travail d'aujourd'hui, ce sont les
trois que j'ai mentionnées. Je sais qu'il n'y a pas de
représentants, présentement, pour les trois que je viens de
nommer, soit la Chambre de commerce de la province de Québec,
l'Association de la construction de Montréal, etc. Il s'agit ici
d'essayer d'entendre des gens qui sont déjà sur place.
Nos séances sont prévues pour les trois prochaines
semaines. Beaucoup de personnes ou d'associations nous ont signalé leur
intention de paraître, mais nous n'avons pas les mémoires. Les
gens ne sont pas ici ou n'ont pas été prévenus, à
ce jour, de se présenter. Il s'agit pour nous, je pense, si des gens
sont prêts, ici, de les entendre. Cela sauvera du temps pour tout le
monde.
M. LABERGE: M. le Président, rien qu'une autre question sur la
procédure. Une fois qu'une association aura présenté ses
vues, soit verbalement ou par écrit, est-ce que les autres associations
pourraient revenir poser des questions ou, enfin, soulever certains points?
M. LE PRESIDENT: Non. Nous ne voulons pas créer de débats
de ce genre.
M. LABERGE: A ce moment-là, M. le Président, je vous
soumets bien humblement qu'il serait normal de tirer au sort l'ordre dans
lequel les associations pourraient présenter leurs points de vue.
M. LE PRESIDENT: Nous essayons de les présenter au fur et
à mesure que les mémoires nous parviennent. Le premier
mémoire arrivé prend place à la tête de la liste.
C'est l'ordre que je suis. C'est l'ordre de l'arrivée des
mémoires au secrétariat des commissions.
Pendant que nous en sommes aux informations et aux
éclaircissements sur la procédure, je voudrais vous dire,
à tous et chacun, que nous suspendrons nos travaux à midi,
aujourd'hui, pour les reprendre à deux heures trente jusqu'à cinq
heures trente. Nous ne siégerons pas ce soir. Demain, la reprise des
travaux se fera à dix heures. Nous essaierons de commencer à dix
heures et non à dix heures vingt, comme ce matin.
M. Pepin, de la CSN.
Confédération des syndicats
nationaux
M. PEPIN: Marcel Pepin, Confédération des syndicats
nationaux. M. le Président, messieurs les membres de la commission, M.
le Ministre...
M. LE PRESIDENT: Un instant, s'il vous plaît. Nous attendons la
distribution.
M. PEPIN: M. le Président, MM. les membres de la commission, nous
désirons traiter aujourd'hui, d'une manière très
particulière, la question de la sécurité d'emploi des
employés du bâtiment et de la construction. Pour ce faire, nous
avons pensé que ce qu'il y avait de plus utile pour les membres de la
commission, même si certains d'entre vous, dont le ministre, sans doute,
ont déjà les documents, c'était de les distribuer.
Il s'agit de l'entente intervenue à la suite d'une grève
dans l'industrie de la construction au mois de juillet 1969, et aussi faisant
suite à cette entente du 10 juillet 1969, le rapport du juge Gold sur la
sécurité d'emploi, qui a donné lieu par la suite à
divers arrêtés ministériels, dont celui intitulé
4119, lequel a été amendé par le 2711 que vous discutez
présentement.
Si nous n'avons pas cru approprié de revenir avec un long
mémoire ou d'autres études sur cette question, c'est que nous
considérons que l'entente de juillet 1969, faite par toutes les parties
qui étaient alors représentatives, ou présumées
l'être en vertu de la loi 290, était encore d'actualité et
nous permettrait, nous semble-t-il, d'en arriver à un régime qui
permettrait une meilleure sécurité d'emploi aux travailleurs du
bâtiment.
Bien sûr ce n'est pas cette entente, ni d'ailleurs vos
délibérations, ni les conclusions de ces
délibérations qui vont fatalement donner de l'ouvrage dans la
construction. Cela, je pense que tout le monde l'admet. Il s'agit de voir
comment, lorsqu'il y a tel volume d'ouvrage ou de travail, les travialleurs
professionnels de cette industrie auront une priorité d'emploi et
pourront être placés, avoir du travail avant les occasionnels, ou
avant ce qu'on appelle des réservistes.
Je me permettrai, avec votre permission, de vous livrer les grandes
lignes de l'entente du 10 juillet sur cette question. Je vous rappelerai
qu'elle a été signée par la Fédération des
travailleurs du Québec et la Confédération des syndicats
nationaux pour ce qui est des parties syndicales. Elle a été
singée par la Fédération de la construction du
Québec, l'Association provinciale des constructeurs d'habitation du
Québec Inc., l'Association des constructeurs de routes et grands travaux
du Québec, la Corpora-
tion des maîtres électriciens et la Corporation des
maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec, pour ce qui
est des parties patronales.
Cette entente je voudrais aussi que vous vous en souveniez
a été réalisée par l'entremise du ministre du
Travail du temps, l'honorable M. Bellemare, qui a participé à
toutes les négociations, du moins à celles qui se sont
déroulées pendant le conflit, assisté d'ailleurs par
plusieurs sous-ministres, et M. Mireault, je pense, était aussi
présent. Il y avait M. Lachapelle qui était un médiateur
spécial du gouvernement en l'occurence.
Dans cette entente, nous avons jeté les bases de ce que nous
croyons être cette forme de sécurité d'emploi à
laquelle nous croyons encore, et j'essaierai d'expliquer un peu plus tard
pourquoi l'entente n'a pas eu de suite.
Je vous rappelle donc, à la page 6 du premier document, que les
parties ont accepté d'abord de continuer l'étude de ce
problème au sein de la Commission consultative mixte, commission qui
était prévue à l'article 47 de la Loi des relations de
travail dans l'industrie de la construction.
Je vous rappelle que nous avions accepté d'élaborer une
classification de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction selon
des critères mixtes, non seulement d'ordre quantitatif, mais aussi
d'ordre qualificatif. L'arrêté en conseil 2711 traite presque
exclusivement du critère quantitatif, et non pas qualifitatif.
Les parties déterminent dès à présent deux
catégories de travailleurs, celle des permanents, soit les
professionnels, et celle des réservistes, les non-professionnels. On
donne des critères pour établir cette dernière
classification, soit les heures de travail dans l'occupation du travailleur, sa
compétence. On subdivise en trois classes: la classe des travailleurs
permanents, détenteurs d'une carte de compétence provinciale; les
travailleurs permanents détenteurs d'une carte de compétence
régionale; et la classe des travailleurs permanents dont l'occupation ne
requiert pas présentement de carte de compétence selon la
loi.
On a accepté d'élaborer un système de
contrôle de l'embauchage. On a accepté l'enregistrement
obligatoire de tous les travailleurs et de tous les employeurs. On a
accepté de dire, au paragraphe b) à la page 7, et je pense que
c'est important de le souligner, la catégorie des travailleurs
permanents professionnels.
Les travailleurs de cette catégorie sont libres de s'adresser aux
centres de main-d'oeuvre du Québec décrits ci-après pour
obtenir de l'emploi. Ils sont libres également d'utiliser tous autres
moyens d'embauchage, y compris les bureaux syndicaux de placement.
Les employeurs peuvent embaucher librement des travailleurs de cette
catégorie sur le marché du travail. Cependant, les parties
reconnaissent qu'une priorité d'emploi doit être accordée
aux travailleurs régionaux de cette catégorie qui sont
enregistrés auprès de l'orga- nisme de contrôle d'emploi.
La commission consultative détermine si cette catégorie de
travailleurs est soumise ou non à un système obligatoire de
contrôle de l'embauchage, ainsi que l'extension et la restriction de la
priorité d'emploi accordée aux travailleurs régionaux de
cette catégorie.
Je pense qu'il faut que vous reteniez que la base même de toute la
recherche qui a été faite dans le temps était d'assurer
qu'il y aurait une priorité régionale lorsque les travailleurs
étaient compétents et qu'il y en avait de disponibles. On a
prévu des régimes d'exception au paragraphe e) pour les
salariés réguliers permanents qui sont exclus de tout
système obligatoire de contrôle. Dans tous les cas l'employeur
doit toujours être le seul juge de la compétence de ces
salariés dans un délai raisonnable à être
déterminé par la commission, sous réserve des dispositions
que peuvent contenir, bien sûr, les conventions collectives.
Il y a un régime d'exception syndicale au niveau des bureaux
syndicaux de placement et on prévoit que le centre de main-d'oeuvre est
le pivot essentiel pour faire fonctionner tout le système. Il y a
l'enregistrement obligatoire, l'orientation professionnelle, l'administration
des tests de qualification, l'émission des permis, les liaisons avec les
entreprises, le placement des travailleurs, etc.
Je passe assez rapidement parce que je présume que, dans
l'ensemble, les députés sont déjà au courant de ce
document. Je désire le rappeler uniquement pour bien mentionner qu'il
s'agissait d'une entente unanime de toutes les parties en juillet 1969. Je
voudrais surtout que vous sachiez que nous avons décidé alors que
s'il n'y avait pas entente sur l'application, il devait y avoir un arbitrage
ce sera le deuxième document que je tenterai d'expliquer, le
document Gold et que le mandat de l'arbitre était fort bien
explicité au paragraphe 8 de ladite entente. Il était aussi
clairement dit que l'arbitre, lorsqu'il prend la décision, se trouve
à faire la loi des parties et que c'est considérer la
décision du juge Gold comme étant la décision de la
commission consultative mixte qui était formée alors en vertu de
l'article 47.
Suite à cette entente de juillet encore une fois, c'est au
cours d'une grève que cela a été convenu, cela a
été un règlement de grève où nous pensions
alors, avec ce système, mieux protéger les travailleurs du
bâtiment, leur assurer une meilleure sécurité à tout
le moins comme il n'y a pas eu accord à la commission
consultative mixte, nous avons eu recours aux services du juge Gold; toutes les
parties, pour faire arbitrer le différend et vous voyez la
décision Gold qui est décrite ici et statue sur chacun des
points. Elle permet aux centres de main-d'oeuvre d'exister et aux bureaux de
placement de poursuivre leur but, pour autant que chaque fois qu'un centre de
placement ou qu'un bureau de placement place un travailleur, il en
prévienne le centre de main-d'oeuvre, que
les données soient les mêmes. Je crois que les
critères retenus étant indiqués à la page 3 du
jugement Gold, vous pourrez voir qu'on qualifie comme professionnels ceux qui
ont au moins 800 heures l'année précédente ou 2,400 heures
pendant les trois dernières années.
Vous pouvez voir toutes les modalités entendues ou
expliquées par le juge Gold, les façons de compiler les heures de
travail, les critères et normes du système de contrôle de
l'embauchage, les compilations des heures de travail, les permanents
réservistes. Il statue sur chacun des points. Bien sûr qu'il n'y a
peut-être aucune partie ni la CSN, ni les autres qui
était complètement en accord avec le jugement Gold, mais
c'était une décision d'un arbitre et, quant à nous, cela
nous a paru être un compromis acceptable qui pouvait permettre,
évidemment, une meilleure sécurité d'emploi pour ces
travailleurs du bâtiment.
Le jugement est paru. Le ministre du Travail ou le lieutenant-gouverneur
en conseil devait, par la suite, édicter un règlement; cela a
été fait. Il y avait une période de six mois entre le jour
où le jugement Gold sortait et l'application du régime.
L'arrêté en conseil 4119 a été basé en bonne
partie sur le texte du jugement Gold et sur notre entente du mois de juillet
1969. Les députés qui étaient ici s'en souviendront, je
pense que c'est en novembre 1970 ou quelque chose comme cela que le ministre
actuel du Travail est arrivé, en disant: Nous n'appliquerons pas
immédiatement l'arrêté en conseil 4119; nous le reportons
à janvier 1971.
Nous étions alors en commission parlementaire pour donner suite
au bill 38. J'avais, à ce moment-là, indiqué aux
députés que c'était quelque chose d'inacceptable pour
nous, puisqu'il y avait, quant à nous, une certaine violation des
ententes de toutes les parties, auxquelles ententes le gouvernement du temps,
l'Etat était mêlé. Le ministre actuel, M. Cournoyer, nous a
dit: C'est partie remise; on n'a pas eu le temps. Les fonctionnaires ne sont
pas préparés et il nous faut avoir du temps pour l'inscription
des travailleurs. Nous allons le mettre en application en janvier.
Janvier est arrivé. On a commencé à tenter de le
mettre en application. Cependant, on l'a révoqué assez rapidement
dans les mois qui ont suivi, disant que c'était un système
inapplicable. Pourquoi le système n'a-t-il pas été
applicable? Peut-être que les députés et le ministre
devraient rechercher les motifs pour lesquels il y a eu non-application
réelle de cette formule de priorité ou de sécurité
d'emploi. A mon avis, le gouvernement doit prendre une large part de la
responsabilité. D'abord, les centres de main-d'oeuvre du Québec
ne semblaient pas préparés à faire un travail comme
celui-là. Il semble bien aussi que les fonctionnaires
désignés ou affectés à cette tâche
n'étaient pas tellement bien préparés ou n'avaient pas
prévu l'entrée en vigueur du règlement. Il y a aussi le
problème qu'entre les centrales syndicales il n'y a pas eu accord sur
l'application, même si nous étions tous d'accord pour signer le
document du 10 juillet 1969 et pour reconnaître que le jugement Gold
devenait l'entente des parties.
Par la suite, mes collègues de la FTQ ont manifesté leur
désir de ne pas s'enregistrer, ce qui pouvait, jusqu'à un certain
point, pour un certain nombre de métiers à tout le moins, fausser
le mécanisme. Est-ce que cela vaut la peine pour nous, aujourd'hui, de
faire une autre recherche, de vous proposer autre chose? Nous avons
essayé comme CSN, avec les travailleurs qui sont membres chez
nous de faire tout ce que nous pouvions pour que les travailleurs du
bâtiment ne soient pas dans une situation pire que ce que l'on
connaît généralement dans les usines, tenant compte des
exigences propres à cette industrie.
Je pense que nous avons fait d'énormes recherches de ce
côté-là. Nous avons travaillé pour que ce ne soit
pas uniquement des gens qui viennent prendre des "jobs" occasionnellement, qui
prennent la place des travailleurs réguliers, permanents ou
professionnels de cette industrie. Aujourd'hui, nous sommes exactement en face
de la même situation. Est-ce que le gouvernement ou les
députés ont vraiment ce désir et cette intention profonde
d'en arriver à ce qu'il y ait une sécurité d'emploi? Le
fait que l'arrêté en conseil 2711 donne d'abord à la
Commission de l'industrie de la construction le pouvoir d'émettre des
permis et, dans le cas de refus, que le ministre sur appel puisse
décider de les émettre, de même que le fait que le ministre
utilise ce pouvoir qu'il a dans le règlement, qu'est-ce que cela peut
donner aux travailleurs professionnels du bâtiment
généralement?
Il me semble avoir constaté, dans les rapports de la commission
même, que sur les 10,000 permis qu'on aurait pu émettre vers les
mois de mai et juin, peut-être 1,000 ou 1,500 personnes ont effectivement
travaillé.
Pour combien d'heures? Je ne le sais pas. Ce n'est pas dans le document
qui vous a été donné, ce sont des documents de la
commission elle-même.
Le fait pour un député, par exemple, de faire pression
auprès du ministre Untel, donne-lui donc un permis, il serait
disponible pour travailler dans la construction ça peut plaire
à ce travailleur mais est-ce qu'on se trouve à régler
quelque chose dans l'industrie? Tout ce qu'on fait c'est qu'on dit à un
gars: Vas travailler pendant une semaine, tu vas travailler à la place
d'un autre. Au bout de la semaine, peut-être qu'il y aura un autre permis
et on changera uniquement de travailleur sur le chantier.
Depuis des années, dans l'industrie de la construction, tout le
monde s'est entendu pour dire que ce n'était pas une industrie comme les
autres. On a voté une série de lois spéciales. La loi 290
a été proclamée comme étant un chef-d'oeuvre, dans
le temps, par le gouvernement de l'Union Nationale, par M. Bellemarre, par
d'autres partis, les employeurs; c'était le chef-d'oeuvre. Nous, nous ne
pensions pas que
c'était le chef-d'oeuvre; nous l'avons dit dans le temps. Il ne
s'agit pas de venir ici et de vous dire: Parce que nous vous l'avions dit
ça s'est réalisé. Pas du tout. Il y a eu quand même
des bienfaits de la loi sur d'autres aspects mais pas sur l'aspect de la
sécurité des travailleurs. Tout le problème est le
suivant: La députation veut-elle, mais pas uniquement
théoriquement, assurer une sécurité d'emploi la meilleure
possible aux travailleurs professionnels du bâtiment ou
préfère-t-elle que ce soit encore la jungle qui existe? Avec
l'arrêté ministériel 2711, nous sommes d'avis que c'est la
loi de la jungle qui continue.
Je pense que là-dessus vous devriez, et rapidement, faire
l'effort qu'il faut pour assurer une telle sécurité.
Rappelez-vous aussi que depuis longtemps, depuis des années, vous
adoptez des lois, des règlements particuliers dans cette industrie. Vous
avez voté les bills 38, 15 et 58, plus récemment, une
série de règlements pour amender les premiers. Quand le bill 38 a
été adopté, vous avez sorti un premier décret. Vous
n'étiez pas satisfaits, vous en avez sorti un deuxième et un
troisième par la suite. C'est celui-là qui s'applique, même
si légalement en pouvait soutenir qu'il n'y avait toujours eu qu'un seul
décret qui était valide. C'est un autre problème, nous
n'étions pas pour le plaider devant les tribunaux, nous avions assez
d'autres travaux à faire. Vous avez aussi, au niveau de la
sécurité d'emploi, je pense, amendé à deux ou trois
reprises le même règlement pour finalement le changer et en
arriver au 2711.
Quant à nous, nous avons fait récemment une autre
rencontre avec nos représentants syndicaux de toutes les régions.
Pour eux, leur espoir n'est pas tellement grand d'obtenir quelque chose quant
à la sécurité d'emploi. Mais ils disent que c'est quand
même la ou une des formules qui ont été mises de l'avant
qui auraient pu donner des résultats, qui avaient l'accord de toutes les
parties. Il me semble qu'au lieu de mettre ça au rancart on devrait
l'essayer pour vrai, en dépit des difficultés que cela peut
comporter entre les centrales syndicales. Les employeurs, je pense, s'attendent
uniquement à avoir une main-d'oeuvre capable d'exécuter du
travail. Vous allez peut-être me dire: Comme cela s'est passé en
1969, 1970, 1971, il ne sert à rien de revenir là-dessus, trouvez
donc une autre formule.
Je vous avoue que la formule que nous avions trouvée, nous y
avions travaillé pendant des mois et des mois. Elle a été
détruite, comme je le disais précédemment, en bonne partie
par le gouvernement. J'ose croire, MM. les députés, que vous
pourriez revenir à l'examen de ce problème parce qu'il est
crucial. Je pourrais vous parler de liberté syndicale, je pourrais vous
parler aussi des qualifications professionnelles, je sais que c'est dans votre
mandat. Mais, il me semble que le point le plus important pour nous et pour les
travailleurs c'est de savoir si ceux qui ont vraiment acquis un statut dans
cette indus- trie auront la priorité au travail ou si n'importe qui
pourra les remplacer.
Je vous remercie, M. le Président.
M. LE PRESIDENT (Caron): Y a-t-il des questions?
Le député de Chicoutimi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je ne voudrais pas,
comme le soulignait M. Pepin, reprendre tout le débat et faire l'examen
de tous les documents que nous avons à examiner et que nous avons
examinés.
Si vous me le permettez, M. Pepin, j'aimerais vous poser une ou deux
questions concernant non pas le problème de la sécurité
d'emploi que vous avez exposé et qui nous a été d'ailleurs
exposé à maintes reprises et que nous essayons de comprendre de
la façon la plus lucide possible.
Vous avez parlé des permis de travail et de l'intervention des
députés auprès du ministre pour que cesdits permis de
travail soient octroyés à certaines personnes. Je vous pose la
question suivante: Lorsqu'un député est placé dans la
situation qui pourrait être celle-ci, soit celle d'un homme qui se
présente à son bureau et lui dit: Voici, j'ai
déniché un emploi. Nous avons déjà pas mal de
problèmes d'embauche et je ne puis pas y aller parce que je n'ai pas de
permis de travail. Le député et je l'ai fait
moi-même, M. Pepin, je tiens à vous en informer le
député intervient auprès du ministre en disant: J'ai
reçu la requête suivante. Vous serait-il possible d'examiner cette
requête et de faire octroyer au requérant un permis, si cela est
conforme aux dispositions et réglementations de votre
ministère?
Quelle objection avez-vous à ce genre de procédures en
resituant le problème dans le cadre de ces mécanismes que vous
avez déjà exposés et que vous avez évoqués,
ce matin? Je vous pose le problème sur un plan strictement humain. Je
suis en face d'un travailleur qui a trouvé un emploi mais qui ne pourra
l'occuper que s'il obtient un permis de travail qu'il n'a pas ou qu'on lui a
refusé. Quelle devrait être mi. position, mon attitude comme
député?
M. PEPIN: M. Tremblay, pour répondre à votre question,
d'abord j'y répondrai dans le cadre de ce qui existe
présentement, l'arrêté no 2711. Avec l'arrêté
no 2711, je pense que vous avez raison de le faire et vous n'avez presque pas
le choix. Si vous ne le faisiez pas, pour une certaine conception que vous
auriez, pour ne pas inonder le marché du travail trop fortement, il n'y
a rien qui vous dit qu'un autre ne le ferait pas et qui ne passerait pas
nécessairement par le député pour obtenir un tel
permis.
Dans le cadre du régime actuel, comme c'est la jungle totale,
à mon avis, de ce côté-là, je ne peux pas vous faire
de grief que vous le fassiez et que vous recommandiez au ministre, s'il suit
les prescriptions, d'émettre un permis.
Dans le cadre du projet que nous présentons, ce serait
différent. Votre intervention ne pourrait pas avoir de succès
auprès du ministre. Elle pourrait avoir du succès si \i.
commission ou le centre de main-d'oeuvre disait: Je peux émettre un
permis temporaire, parce que dans la région, disons, de Chicoutimi, il y
a beaucoup de travail et on manque de main-d'oeuvre. Il y aurait des permis
temporaires émis et on appellerait cela des "réservistes", comme
les documents le mentionnent. Cela vaudrait pour un temps donné. Si
l'employé a fait tant d'heures au cours de l'année, il
deviendrait permanent.
Votre intervention dans le nouveau régime préconisé
ne serait pas utile. Dans le régime actuel, votre intervention peut
être utile, mais ce qu'elle fait comme conséquence, votre
intervention, c'est qu'elle ajoute un salarié sur le marché du
travail dans l'industrie de la construction, peut-être quelqu'un qui n'y
a jamais travaillé, et peut-être qu'il y a un autre salarié
qui pourrait être disponible et qui, lui, n'a pas cet emploi.
Faisons l'analogie avec une usine donnée, qui a un bloc de
salariés de 1,000 ou 2,000. S'il y a ouverture d'emploi, ils peuvent
parfois même demander aux députés d'intervenir
auprès de la compagnie pour avoir un emploi en autant que les
règles d'ancienneté sont respectées. Ceux qui ont
été mis à pied au préalable ont priorité
d'emploi sur ceux qui n'ont jamais travaillé dans cette entreprise.
Donc, répondant à votre question le plus directement
possible, dans le régime actuel, je vous comprends fort bien. Dans le
nouveau régime, vous n'auriez pas à intervenir.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je remercie M. Pepin
de sa réponse. Vous me permettrez maintenant de me tourner du
côté du ministre du Travail et lui demander ceci.
Est-ce que le ministre du Travail, sans présumer de ce qu'il a
l'intention de présenter comme loi ou amendements à celle qui
existe déjà, a l'intention de revoir ces mécanismes dont
on vient de nous parler afin que cette situation que j'ai décrite d'un
homme qui s'adresse à moi pour que je m'adresse au ministre ne se
reproduise pas et ne vienne pas déranger l'économie
générale du système dont parlait tout à l'heure M.
Pepin?
M. COURNOYER: Vous posez la question d'une façon simple. Est-ce
que le ministre a l'intention de se départir des pouvoirs qu'il s'est
fait donner par le lieutenant-gouverneur en conseil? Je dois vous avouer que
ces pouvoirs sont beaucoup plus douloureux pour moi étant donné
que, malgré tout ce qu'on peut dire, certains buts poursuivis par les
différents arrêtés en conseil sont parfaitement normaux. Je
les conçois comme tels et je suis d'accord avec ces buts. Cependant, je
doit admettre qu'il y a une certaine carence M. Pepin l'a
mentionné tantôt de la part des centres de main-d'oeuvre du
Québec, en particulier du fait que nous n'avons pas je l'ai dit
à plusieurs reprises tous les effectifs requis pour prendre sur
nous la responsabilité totale d'un système comme celui qui avait
été préconisé dans l'arrêté en conseil
4119. Les pouvoirs que le ministre exerce aujourd'hui ressemblent
drôlement aux pouvoirs qui pouvaient être exercés par chacun
des centres de main-d'oeuvre dans chacune des régions.
Compte tenu du genre de pressions que je reçois continuellement
de la part de mes collègues du Parlement, s'il n'en tenait qu'à
moi de le faire, je serais heureux de transporter ce pouvoir sur d'autres
épaules. Cependant, malgré le fait que ces pouvoirs soient
douloureux, parce que la pression se jette totalement sur les épaules du
ministre dans les cas parfaitement humains dont vous avez parlé
tantôt, il me semble que tant et aussi longtemps que nous n'aurons pas
remplacé ce droit d'appel au ministre par un autre mécanisme
aussi je ne dirai pas honnête, parce que je sais que vous ne me
trouvez pas tous honnête humain à la Commission de
l'industrie de la construction, dans les mains des parties conctractantes au
décret, tant qu'on n'aura pas établi ou transféré
ce pouvoir, tant qu'on n'aura pas établi les normes dont M. Pepin parle
sans en parler les normes régionales dont M. Morin parlait
tantôt, normes d'emplois, normes d'émission de permis de travail
tant et aussi longtemps donc qu'on ne les aura pas établies, et
ceci est dû pour le 30 octobre, le ministre doit conserver ces
pouvoirs.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je remercie le ministre. Je voudrais poser une
autre question à M. Pepin.
M. Pepin, vous avez parlé tout à l'heure M. Morin
nous a fourni aussi des renseignements à ce sujet de la
sécurité d'emploi en fonction de la catégorie des
travailleurs: travailleurs permanents, professionnels, réservistes, etc.
Il arrive que des demandes nous soient présentées par des
citoyens qui ont déjà été des travailleurs des
métiers de la construction. Ils se sont occupés, pendant un
certain temps, à d'autres fonctions qui n'avaient rien à voir
avec la construction et, à un certain moment, ils sont mis à pied
et ils veulent revenir à l'industrie de la construction. C'est ce qui
explique que souvent ils s'adressent à nous pour obtenir un permis.
Toujours dans la perspective de ces mécanismes dont vous nous parliez,
comment pourrait-on parvenir à réintégrer ces travailleurs
dans l'ensemble des métiers de la construction, en tenant compte des
catégories professionnelles, permanentes, réservistes, etc?
Lorsqu'ils se présentent à nous, c'est une question pour eux de
primo vivere ; c'est une question de pain et de beurre. Ils ont besoin
absolument d'entrer sur le marché du travail et de trouver un emploi.
Souvent, ils l'ont trouvé lorsqu'ils viennent nous voir. Alors,
j'aimerais savoir comment vous envisagez, à court terme ou à
moyen terme, cette politique de réintégration
des gens qui, ayant travaillé dans un secteur, veulent revenir
dans celui de la construction.
M. PEPIN: M. Tremblay, dans ce problème, il faut bien sûr
fixer des normes. A certains moments, cela peut jouer contre des individus et
en favoriser d'autres. Vous ne pouvez pas avoir un système d'une
souplesse telle que tout le monde y trouvera exactement le compte qu'il
désire y trouver.
Nous avons prévu c'est dans le jugement Gold que nous le
retrouvons que si l'employé a travaillé au moins 2,400
heures dans les trois années précédentes, dans cette
industrie, il peut être considéré comme un permanent. Cela
ne répond pas d'une manière satisfaisante à votre
question. Il peut arriver que quelqu'un soit allé travailler à
Desbiens, dans une usine à papier, pendant, je ne sais pas, cinq ou six
ans et que l'usine ferme. Il veut se réintroduire dans l'industrie. Je
n'ai pas beaucoup de réponses à vous donner parce que c'est
exactement de même essence, si vous voulez, toujours par voie analogique,
au cas de celui qui sort de l'entreprise, pendant une longue période, et
qui voudrait s'y réintroduire. A ce moment-là, il a perdu un
certain nombre de droits, au sein de cette entreprise, et il ne peut pas
réintégrer son emploi ou un emploi dans cette entreprise avant
ceux qui ont conservé leur droit d'ancienneté.
Vous me direz: Qu'est-ce que je fais avec l'individu comme vous
le suggérez, et fort à propos, d'ailleurs qui a besoin de
vivre et qui pourrait avoir un emploi le lendemain? Dans le contexte actuel, il
n'y a pas de problème, c'est bien sûr. Le gars aura son permis et
il aura son emploi. Mais, dans un contexte où il y aura une certaine
planification, je pense que cet individu ne pourra pas réintégrer
le marché du travail de la construction de la même façon
qu'on peut le faire aujourd'hui.
Vous me direz que c'est peut-être un peu sévère pour
ceux qui ont déjà oeuvré dans l'industrie et qui veulent y
revenir. C'est peut-être un peu sévère mais il faut
arrêter, à un certain moment. Si vous vous en allez comme
fonctionnaire, comme pompier ou, peu importe, dans la police, que vous sortez
de là et que vous voulez reprendre votre métier, je pense bien
que vous pouvez au moins considérer comme moi que vous ne pouvez pas le
faire au détriment de certains autres qui, eux, sont restés
professionnels.
Peut-être que ma réponse ne vous donne pas satisfaction
mais je pense que je n'en ai pas d'autres.
M. TREMBLAY (Chicoutimi) : Je vais vous poser une dernière
question, M. Pepin, à ce sujet. Au bout de la course, est-ce que la
conception que vous vous faites de la sécurité d'emploi, dans le
cadre de la construction comme telle, n'aboutit pas à un contingentement
forcé des travailleurs et à une sorte de barrière que l'on
dresserait autour de l'industrie de la construction pour empêcher
certaines gens d'y entrer et que, de ce fait, ces gens se trouveraient
condamnés à un chômage perpétuel? Le problème
que vous signalez, dans l'industrie de la construction, se retrouve dans
d'autres domaines. On le retrouve, par exemple vous en savez quelque
chose dans le domaine de l'enseignement. Est-ce qu'à long terme
ou au bout de la course ce n'est pas revendiquer le droit à un
contingentement des travailleurs de l'industrie de la construction et faire
sanctionner, par le gouvernement, sous forme de décret ou de loi, le
principe du contingentement?
M. PEPIN: Si je comprends bien votre question, est-ce qu'à la fin
tout cela va conduire à ce qu'il y ait un nombre limité de
travailleurs de l'industrie? Possiblement, il y aurait un nombre trop
limité et cela pourrait donner je ne sais pas une plus
grande force à ceux qui sont dans cette industrie? Moi, je peux vous
répondre que la situation actuelle est, à mon avis, très
dommageable. Vous allez peut-être me dire: Ne la remplacez pas par un
système qui pourrait être pire, à nos yeux ou aux yeux des
gens. Je voudrais au moins, pour articuler une réponse à votre
question, commencer par voir la situation présente.
Les chiffres qui ont été fournis par M. Morin,
précédemment, sont assez éloquents, même s'il faut
les prendre avec réserve. On ne peut pas diviser le nombre d'heures par
le nombre de salariés là-dedans, en raison des données que
lui-même a fournies. Mais la situation actuelle est très
déplorable.
Il y a des milliers de travailleurs à qui on donne de faux
espoirs, à savoir qu'ils peuvent travailler dans cette industrie, et qui
effectivement ne le font qu'un certain nombre de semaines ou de mois par
année. Est-ce que le système que nous préconisons va faire
que le nombre de travailleurs sera réduit? Je pense que le nombre de
travailleurs devra être réduit, quel que soit le système
que vous puissiez envisager, à moins que le désir soit de
maintenir la loi de la jungle.
Est-ce que cependant le fait que ce ne soient pas uniquement les parties
qui soient les propriétaires de tout cela... Parce que dans le
schéma préconisé vous voyez que le rôle de l'Etat
existe. L'Etat est présent et il a un rôle réel à
jouer, c'est lui qui est censé s'occuper du bien commun ou du bien
public, alors s'il se rend compte que les parties exagèrent et essayent
de fermer un métier ou quelques métiers d'une manière
telle que les "jobs" ne peuvent pas se faire, je pense que l'Etat a un droit
d'intervention de ce côté-là.
Je veux vous dire que si, par hasard, vous vous imaginiez que nous
sommes peut-être assez machiavéliques pour préconiser un
plan comme celui-là en vue d'en arriver à ce qu'il y ait une
limite telle de travailleurs que les travaux ne pourraient pas se faire, ou
encore d'autres choses pourraient se produire comme des taux de salaire qui
pourraient être demandés d'une
manière très considérable, je dois vous admettre
que tel n'est pas l'objectif que nous poursuivons. Ce n'est pas parce que nous
ne voulons pas avoir de bons salaires. Ce n'est pas du tout l'objet de mon
propos. Mais il me semble que nous n'avons pas le choix à l'heure
actuelle, que nous devons en arriver à un certain contingentement.
La loi 49 est faite aussi pour ça, pour essayer de dire: On ne
formera pas de ferblantiers à la tonne si on n'a pas besoin de
ferblantiers, si ce n'est pas prévisible qu'on en aura besoin.
Si vous me permettez d'élargir aussi un peu le débat, M.
Tremblay et MM. les membres de la commission, je pourrais vous dire que ce
serait le véritable début d'une planification possible de
l'industrie dans le sens suivant je pense que je l'ai déjà
exprimé ici, mais je me permets de le répéter si je l'ai
déjà fait : A l'heure actuelle, les travaux de construction
sont décidés par les investisseurs. Il y a, je pense, 52 p.c. des
travaux de construction qui naissent à un palier gouvernemental ou
à un autre.
S'il arrivait, au moins pour les paliers gouvernementaux, avant de
commencer une construction, qu'une commission qui reçoit une
requête disant: Nous avons l'intention de construire un complexe
disons le complexe G ici en telle année, il serait possible pour
les parties, ayant fait l'inventaire de la situation, de dire: Est-ce que c'est
possible pour le gouvernement de retarder ce travail en 1973, parce que
là l'industrie de la construction dans cette région va être
au maximum? Cela ne veut pas dire au point de départ que ce serait un
ordre, mais au moins un avis. Ce serait une indication.
Et cela aussi pourrait se faire dans le domaine privé, de telle
façon que l'investisseur serait informé qu'il aura plus de
difficultés à avoir de la main-d'oeuvre parce que les
prévisions sont telles que le nombre d'emplois va être trop
considérable par rapport au nombre d'employés.
Est-ce qu'il serait illogique de prévoir une telle planification,
non seulement de la main-d'oeuvre, mais aussi des investissements? Et je pense
bien que ce n'est pas tellement révolutionnaire comme idée, mais
ça permettrait vraiment d'éliminer la loi de la jungle.
J'espère avoir répondu au moins partiellement à
votre question. Le but n'est pas d'en arriver à ce qu'il y ait un nombre
trop limité de travailleurs. Pour nous, c'est d'en arriver à ce
que ceux qui sont vraiment professionnels de l'industrie aient une
priorité d'emploi avant les autres.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Pepin, je vous pose une question ou je la
pose en l'air, de façon théorique: supposons que nous en
arrivions à une forme de contingentement dans l'industrie de la
construction, et que, d'autre part, on examine les problèmes qui se
posent dans les autres milieux de travail, quels qu'ils soient: enseignement,
corporations profession- nelles, etc., est-ce que vous ne pensez pas qu'une
planification gouvernementale parfaitement articulée amènerait un
contingentement des travailleurs de toutes catégories dans tous les
milieux de travail du Québec?
A ce moment-là, il faut poser bien clairement le problème
en termes de planification selon un schème de dirigisme d'Etat qui
ferait que tous les travailleurs seraient dirigés vers tel ou tel type
d'activité économique de par la volonté de l'Etat. Si on
accepte le principe et cela peut être valable, compte tenu des
aspects pratiques de la situation qui vous préoccupe du
contingentement dans l'industrie de la construction, je ne vois pas pourquoi le
gouvernement qui sera appelé à sanctionner des lois qui
consacreraient ce principe ne devrait pas, par la suite, proposer des
législations qui établiraient un contingentement dans tous les
milieux de travail, quels qu'ils soient.
M. PEPIN: M. Tremblay, je ne sais pas si vous étiez en Chambre ou
si vous avez voté pour ou contre la loi 49. Je soutiens que c'est une
loi qui donne justement ce pouvoir à l'Etat. De mémoire, je crois
que c'est à l'article 40 ou 39 que vous allez retrouver cette question
de contingentement. Je pense que c'est autour de l'article 52. Il y a longtemps
que je n'ai pas regardé la loi et je ne sais pas si vous avez
voté pour ou contre, mais ce que je vous dis, c'est que vous avez
vraiment voté, cette fois-là, une loi de contingentement. Cela ne
répond pas à votre problème, c'est simplement pour vous
rappeler que l'Assemblée nationale a déjà voté une
loi exactement dans le sens que vous mentionnez et vous semblez y trouver un
contenu assez mauvais.
Je ne crois pas cependant...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... M. Pepin, je vous corrige tout de suite,
je n'ai pas porté de jugement. J'ai tout simplement posé le
problème en principe.
M. PEPIN: Je retire donc ma dernière phrase. J'avais cru qu'il y
avait un certain jugement de valeur dans votre question. Maintenant, est-ce
que, parce que nous déciderions, dans l'industrie du bâtiment,
d'avoir une certaine forme de sécurité d'emploi, avec les
mécanismes que nous mettons de l'avant, cela conduirait fatalement
à ce qu'il y ait un contingentement tel que les hommes ne seraient plus
libres d'apprendre les métiers qu'ils veulent?
Vous savez, la liberté d'apprendre un métier à
l'heure actuelle, comme la liberté d'aller au CEGEP ou ailleurs, peut
exister, mais ce qu'il est aussi très important de prévoir, pour
le lendemain et lorsque vous aurez appris votre métier, c'est si vous
allez pouvoir travailler. Cela est aussi important, parce que je crois qu'il y
a des germes de révolution quand on n'a aucun ordre dans une industrie
aussi vitale que celle de la construction. Tôt ou tard et cela
arrive par
périodes les gens explosent parce qu'ils se disent: On n'a
pas de sécurité, on n'a rien, puis quand la crise arrive on
trouve des boucs émissaires, comme d'habitude.
Mais il reste, quant à moi, que ce n'est pas uniquement parce
qu'on va appliquer tel mécanisme de sécurité qu'on va
décider d'enrégimenter tous les travailleurs en leur disant: Toi,
tu vas devenir spécialiste dans telle sphère d'activité;
toi, ça va être telle autre sphère d'activité, etc.
De toute façon, je vous rappelle, que vous avez voté
vous-même la loi 49, et, si j'en suis le modèle, elle permet au
ministre du Travail, via le lieutenant-gouverneur en conseil qui adopterait des
règlements, de se rendre jusqu'où vous avez
suggéré, sans qualifier si c'est bon ou pas bon.
Je voudrais vous rappeler que, dans le document que vous avez devant
vous, il y a une annexe qui s'appelle l'annexe 2 qui suit le jugement, qui
était dans le jugement même, et le schéma qui a
été donné dans ce document est un schéma qui
provenait, dans le temps, du ministère du Travail lui-même. Je
pense que personne ne pourra le contester et je crois que les gens du
ministère croyaient à l'époque que c'était
réalisable.
Il me semble que pour protéger une industrie comme
celle-là, protéger les travailleurs, il vaut la peine de faire
les recherches appropriées. Il me semble que cette formule ne doit pas
être rejetée du revers de la main.
Le ministère du Travail et tous ceux qui veulent garder certains
pouvoirs au Québec ont critiqué le fait que les centres de
main-d'oeuvre du Canada soient vraiment les seuls existants, les seuls vrais.
Les centres de main-d'oeuvre du Québec, je pense que personne ne peut
dire qu'ils existent d'une manière valable, même si on doit
dépenser autour de $1 million par année pour maintenir de tels
centres de main-d'oeuvre.
On avait une occasion rêvée d'avoir des centres de
main-d'oeuvre du Québec. Quant à moi, je considère que
c'est vraiment de juridiction provinciale. On en avait l'occasion dans le cas
du bâtiment; on l'avait d'ailleurs aussi dans le cas de la fonction
publique et on verra comment cela pourra se résoudre
éventuellement. Dans le cas du bâtiment, on pouvait avoir des
centres de main-d'oeuvre au Québec vraiment efficaces. On n'a pas saisi
l'occasion, de telle manière qu'aujourd'hui c'est uniquement les centres
de main-d'oeuvre du Canada qui sont en avant. Les centres de main-d'oeuvre du
Québec n'ont pas la même qualité si je peux
m'exprimer ainsi que ceux du Canada.
M. LAURIN: J'aimerais poser une question au député de
Chicoutimi sur sa question. Ne croyez-vous pas que ce contingentement existe
déjà dans l'industrie privée lorsque les industries
changent de technologie, optent pour l'automatisation, ce qui les amène
à licencier un nombre considérable de travailleurs et ce qui
provoque parfois des grèves dont les règlements sont très
longs, comme on l'a vu à la Presse? Ne voyez-vous pas un
parallèle à faire entre la situation qui prévaut au sein
de l'Etat et celle qui prévaut au sein de l'entreprise privée et
des solutions parallèles?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je pense que vous avez raison à
certains égards. Il existe dans l'entreprise privée des formules
qui pourraient s'apparenter au contingement de la même façon qu'il
existe dans la profession des psychiatres des formules qui organisent un
contingentement assez sévère. Cela vaut pour toutes les
corporations professionnelles de la nature de celle à laquelle vous
appartenez; dans le domaine médical, par exemple, dans le domaine du
droit, etc. Ce qui m'intéresse, ce n'est pas de savoir si la chose
existe ou n'existe pas à l'heure actuelle d'une façon
déguisée, tacite ou officielle. Ce qui m'intéresse c'est
de savoir, à moyen ou à long terme, quelle est l'attitude du
gouvernement au sujet de cette politique de contingentement dans tous les
ordres d'activités socio-économiques du Québec.
Pensant à la planification du gouvernement, je m'adresse
finalement au ministre du Travail pour lui demander de nous dire s'il est dans
l'intention du gouvernement d'exercer ses pouvoirs législatifs en vue de
favoriser, selon un échéancier que je ne puis pas
déterminer, la présentation de lois qui établiraient des
contingentements des travailleurs dans tous les domaines.
M. COURNOYER: Je pense être de l'avis de M. Pepin, au moins sur le
bill 49, qui contient les germes du contingentement. On peut dire que tout le
système scolaire vise aussi à un contingentement quelconque
étant donné qu'on peut prévoir d'avance qu'il y aura des
emplois possibles et disponibles dans tel ou tel métier.
On peut cesser, par exemple, tel cours, c'est-à-dire qu'on peut
cesser de donner des cours d'électronique parce qu'on n'aurait plus
besoin d'électroniciens à un certain moment qu'on pourrait
prévoir.
Tout le bill 49 vise à tenter de prévoir, au moins, les
besoins qualitatifs de la main-d'oeuvre et quantitatifs en même temps.
C'est général, ça ne s'applique pas qu'à
l'industrie de la construction. Nous visons à établir les besoins
qualitatifs et quantitatifs de la main-d'oeuvre par le bill 49 et le
contingentement est nettement fonction d'un besoin. Ce que j'excécrerais
et ce que je ne peux pas trouver dans le bill 49, c'est que le gouvernement se
donne le pouvoir de contingenter les besoins. On ne crée pas des besoins
en fonction de la main-d'eouvre qu'on a contingentée. Le dirigisme de
l'Etat peut aller jusqu'à une certaine limite, mais son dirigisme dans
le domaine de la formation professionnelle doit être d'un tel ordre qu'il
ne peut pas
empêcher quelqu'un de suivre le cours auquel ses capacités
lui permettent d'aspirer.
C'est l'antithèse pratique du contingentement. Mais ce qui
arrive, c'est qu'à toutes fins utiles le contingentement devient
naturel. Par voie de conséquence, quand il y a trop de personnes dans un
métier, même si nous avions pris, nous, les mesures
nécessaires pour établir les besoins futurs, si des individus
continuent de vouloir oeuvrer dans ce métier, je pense que ce serait
aller loin que d'empêcher quelqu'un d'apprendre le métier auquel
il aspire. On ne peut pas empêcher quelqu'un d'apprendre le métier
d'avocat. Tout ce qui peut lui arriver, c'est que, s'il y en a trop, à
un moment donné, il y a quelqu'un qui le contingente déjà
à l'intérieur des corporations. Cela peut devenir choquant pour
un esprit démocratique.
M. PEPIN: Ils peuvent le bloquer au Barreau.
M. COURNOYER: Oui ou employer des méthodes différentes,
qui ne sont pas le contingentement. C'est une constatation de fait; certains
disent je n'ai pas la preuve de ça; je ne peux même pas
l'affirmer qu'on a divers moyens de contingenter annuellement le nombre
de personnes qui pénètrent dans une ou l'autre des professions
qui, elles, sont soumises à des lois particulières qui sont
révisées de ce temps-ci dans les différents bills qui sont
étudiés ici.
Quant à moi, au ministère du Travail, il me semble que,
parmi les moyens dont nous disposons ou ceux que M. Pepin voudrait que nous
ayons, nous n'avons pas encore, pour la construction en particulier, le moyen
de planifier les investissements. Les investissements du gouvernement
pourraient être planifiés à condition que les besoins de la
population, eux aussi, soient planifiés. C'est assez difficile de
prévoir ou de planifier les besoins de la population. Elle a ces besoins
ou elle ne les a pas. Quand il s'agit de construire à Québec des
édifices gouvernementaux, c'est une constatation de besoins d'abord, pas
nécessairement une constatation qu'il faut investir ou ne pas investir.
Quand une entreprise décide d'investir dans un projet à
Sept-Iles, je comprends que ce n'est pas tellement gai pour les gens qui ne
sont pas de Sept-Iles d'aller travailler à Sept-Iles s'ils n'aiment pas
ça, mais il reste que je ne pourrais pas facilement empêcher, pour
d'autres fins, quelqu'un de faire l'investissement qu'il veut faire dans une
région.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le ministre, de tout ce que vous venez de
dire que peut-on conclure? Est-ce que la planification du gouvernement va dans
le sens, justement, d'une planification des investissements en fonction des
ressources humaines, physiques du Québec, des besoins du
Québec?
A toutes fins utiles l'exemple de la loi no 250 est assez
éloquent est-ce que le gouverne- ment ne tend pas, justement,
à mettre de l'avant une politique qui aboutira fatalement à un
contingentement?
M. COURNOYER: Je ne peux pas dire que vous avez tort ou que vous avez
raison sur l'aboutissement possible. Je ne le mets pas en doute, du moins dans
certains cas. Dans l'industrie de la construction en particulier, nettement,
nous ne pouvons pas faire autrement, en voyant les chiffres qui nous sont
donnés, que d'arriver à une sorte de contingentement. Autrement,
on arrive à la conclusion du président de la commission
tantôt, c'est que l'industrie de la construction devient, tout simplement
le déversoir de ceux qui ne peuvent pas gagner leur vie ailleurs. Si on
pense que l'industrie de la construction est essentielle au Québec,
qu'elle a besoin de se développer d'une façon normale et que
c'est vrai que, lorsque le bâtiment va, tout va j'ai vu cela dans
un mémoire on peut dire le contraire aussi. C'est que, quand
l'industrie va, le bâtiment va. Le développement industriel se
fait d'abord très souvent par des constructions. Il y a une sorte de
corrélation entre les deux qui fait que c'est une constatation que, si
le bâtiment va, le reste marche, mais c'est aussi parce que le reste
marche que le bâtiment va.
Je ne peux pas penser que particulièrement on puisse assujettir
rapidement les investissements de l'industrie privée en fonction de
l'industrie de la construction. Je suis obligé de retourner cela
à l'envers. C'est nous qui devons planifier le développement de
la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction de manière à
rencontrer des besoins qui sont essentiels et non pas accidentels.
L'industrie de la construction, si j'ai bien compris d'après la
petite expérience que j'ai, c'est une industrie de services. C'est une
industrie qui sert d'autres industries et qui utilise des matériaux qui
viennent d'autres industries. C'est une industrie extrêmement importante,
mais ce n'est pas l'industrie qui présente le caractère de
stabilité dont chacune des régions peut avoir besoin. Par
exemple, prenons le cas de Saint-Joseph-de-Beauce. Je le prends parce qu'il est
récent. Je ne veux pas, non plus, en faire un exemple pour tout. Quand
un incendie détruit une usine où, environ 200 personnes gagnent
leur vie, même si je voulais penser à dire à l'entreprise
ou aux gens de la municipalité: Ne construisez pas votre usine tout de
suite. Voulez-vous attendre, on aura peut-être de la main-d'oeuvre l'an
prochain dans ce domaine particulier, je me trouverais à faire du
dirigisme, même un dirigisme consommé, seulement en
suggérant cela aux gens. Il y a un incendie. Un besoin est
créé, mais le besoin ne peut pas toujours être
planifié.
Si la province de Québec était à la fin de son
développement, ce serait simple, mais nous ne sommes pas à la fin
de nôtre développement. A mon sens, nous ne sommes presque pas
partis
encore. Les chiffres qui sont là sont éloquents. Ils ne
sont peut-être pas complets, comme le dirait M. Morin, mais ils sont
quand même éloquents. Dans cette industrie en particulier,
malgré tous les efforts, malgré les ententes qui sont
restées des ententes, qui sont devenues des non-ententes
l'évolution de cela a été faite il y a déjà
un certain nombre de mois la Commission de l'industrie de la
construction peut, ce matin et dans les jours qui viendront, faire constater
à la population du Québec, qui n'est pas que les syndicats de la
construction, des faits qui sont absolument indéniables.
On n'a même pas à en faire la preuve à moins que ces
faits ou ces chiffres qu'on nous donne soient faussés, ce dont je doute
fort. Ce n'est pas une question de fausser ces chiffres, c'est une question
d'interprétation de ces chiffres. Les chiffres qui nous sont
donnés nous indiquent qu'il ne semble pas possible de gagner
décemment sa vie dans l'industrie de la construction sans qu'il y ait
une réglementation. Et si cette réglementation avait pour effet
un contingentement, c'est un effet que je considérerais comme totalement
secondaire. Dans l'industrie de la construction, pour moi, on doit pouvoir
gagner honnêtement sa vie.
Si cela n'est pas possible, il faut rechercher les causes. Et une des
causes peut être le trop grand nombre d'individus qui y viennent. Mais,
encore là, M. Morin a été assez circonspect en tenant pour
acquis que certains des chiffres pouvaient avoir une certaine allure mais qu'il
fallait faire attention un peu à l'interprétation qu'on devait
leur donner.
Mais, pour la première fois, nous constatons, par les chiffres
qui nous sont fournis, des tendances et des situations qui ne sont pas du tout
pareilles dans la province de Québec. Remarquez que ce n'est
peut-être pas la première fois, mais c'est au pifomètre
qu'on le faisait avant. Aujourd'hui, nous le constatons par des chiffres qui
sont calculés avec toute la machinerie moderne qu'on peut avoir, surtout
à cause du fait que nous avons eu l'arrêté en conseil 4119
et que nous avons encore l'arrêté en conseil 2711.
Si nous n'avions pas ces éléments de base, M. Pepin,
même si c'est encore la jungle je l'admets avec vous nous
ne verrions même pas poindre la petite clairière qu'il y a
peut-être dans la jungle. Je me permets d'espérer que ces
chiffres, utilisés à bon escient, peuvent faire comprendre au
reste de la population qu'il y a lieu de faire quelque chose pour cette
industrie. Si cela arrive au contingentement, je vous assure que dans cette
industrie en particulier et je ne parlerai pas des autres industries
pour le moment en prenant les précautions nécessaires pour
ne pas mettre l'industrie à la merci de ceux qui sont en bas, comme
c'est arrivé ailleurs, en prenant les précautions
nécessaires, dis-je, si cela a comme conséquence un
contingentement dans l'industrie de la construction, je suis d'accord. Mais ce
n'est pas ce que je recherche. Ce que je recherche et ce que nous devons
rechercher, c'est beaucoup plus que les individus qui travaillent dans
l'industrie de la construction par essence, les professionnels de la
construction, une fois qu'on peut les identifier, gagnent décemment leur
vie dans cette industrie.
Peut-être pouvons-nous espérer, une fois que ce noyau
gagnera décemment sa vie dans l'industrie, que les taux de salaire ne
prendront pas l'allure qu'ils prennent, avec toutes les conséquences que
cela a sur le restant de l'industrie au Québec.
Quand un homme gagne bien sa vie, il me semble qu'il est un peu plus
satisfait que lorsqu'il gagne une moyenne de salaire de $2,500 ou $3,000 par
année, avec des salaires horaires extrêmement élevés
par rapport aux autres salaires qu'on retrouve dans l'industrie ordinaire et
pour des gens qui font leurs 2,000 heures par année.
Remarquez que ce sont peut-être des énoncés de
bonnes intentions. Ces choses, le ministre du Travail ne peut pas les faire
seul. Cela prend beaucoup d'éducation. Les séances de commission
parlementaire que nous tenons, avant même qu'il y ait des lois de
proposées ou des arrêtés en conseil de modifiés ou
des annonces de faites par le gouvernement, c'est beaucoup plus pour que nous
recherchions tous ensemble et que nous arrivions au moins au même point
sur les faits qui sont devant nous. Les faits que vous avez devant vous sont
peut-être contestables. Je n'ai pas de raisons de les contester. Les
faits qui viennent de M. Morin, je n'ai aucune raison de les contester. Ils
peuvent être interprétés différemment. Ce que je
recherche, par cette commission parlementaire, pour cette semaine et la semaine
prochaine, c'est d'établir les faits pour qu'un jour, si le gouvernement
et le ministre du Travail se décident à faire quelque loi que ce
soit, ils la fassent sur les mêmes faits, pour tout le monde en
même temps. C'est la seule recherche que j'ai.
Encore une fois, je répète que si, dans l'industrie de la
construction là-dessus, je suis d'accord avec M. Pepin
nous ne mettons pas, non pas le point final à tous les
arrêtés en conseil, mais si nous ne faisons pas ce que,
normalement, nous devons faire, c'est-à-dire trouver le moyen pour
assurer un revenu adéquat, normal, pour un travailleur de l'industrie de
la construction, nous allons maintenir l'industrie de la construction dans
l'état de jungle, dans l'état de marasme dans lequel elle se
trouve.
Je ne mets pas de côté, non plus, l'autre suggestion qui
est intimement reliée à cela. Dans la mesure du possible, les
investissements pourraient être planifiés en tenant compte de la
main-d'oeuvre, dans la construction, mais je ne peux pas dire que cela doit
être le facteur, et le seul, qui me permette de développer mes
investissements. Ce n'est qu'un des facteurs. Par ailleurs, je dois faire en
sorte que je développe
ma main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction, en fonction d'un
certain plan des investissements, s'il est possible d'en faire un.
M. LE PRESIDENT: Je profite de l'instant pour suggérer la
suspension de nos travaux jusqu'à deux heures trente.
M. PEPIN: Pourrais-je savoir s'il y a encore des députés
qui ont des questions à me poser?
M. LE PRESIDENT : Nous y reviendrons, oui. Il y a encore des
questions.
M. PEPIN: C'était pour savoir si j'allais revenir ou non.
M. LE PRESIDENT : Vous en avez encore pour une secousse.
(Suspension de la séance à 11 h 58)
Reprise de la séance à 14 h 34
M. SEGUIN (président de la commission permanente du travail, de
la main-d'oeuvre et de l'immigration): A l'ordre, messieurs!
Le député de Chicoutimi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Rapidement, je voudrais poser encore une ou
deux question à M. Laberge.
M. LE PRESIDENT:M. Pepin.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Excusez-moi, M. Pepin.
M. LE PRESIDENT: Je reprendrai le député chaque fois qu'il
fera erreur.
M. LABERGE: Chassez le naturel et il revient au galop.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'ai hâte de vous interroger M.
Laberge.
M. Pepin, vous avez parlé ce matin des problèmes du
bâtiment, de la construction, de cette jungle qui existe dans ce monde et
au sujet de laquelle on a déjà passablement parlé. Je ne
vous poserai pas la question à vous, vous pourrez faire un commentaire
si vous le souhaitez, mais j'aimerais interroger le ministre du Travail, mon
excellent ami, pour lui demander ceci.
A la lumière de toutes les représentations qui lui ont
été faites, de l'expérience qu'il a acquise dans ce
domaine du travail, particulièrement dans celui de la construction et
des multiples difficultés qu'il a rencontrées, est-ce qu'il est
de son intention après évidemment l'audition des
témoins pour l'examen du problème qui nous occupe actuellement
de préparer une loi qui ferait ou referait la synthèse de
tout ce que nous avons vu, de tout ce que nous savons sur le sujet,
particulièrement ce qu'on appelle en anglais les points chauds, afin de
régler si on peut appeler ça comme ça une
fois pour toutes, mais à tout le moins apporter les
éléments de solution ou de règlement à un
problème qui risque de tramer en longueur, au préjudice de tout
le monde, si l'on ne règle pas les questions qui reviennent constamment
à la surface, et qui nous obligent à siéger comme
nous le faisons aujourd'hui en commission parlementaire ?
M. COURNOYER: L'obligation que nous avons de siéger en commission
parlementaire est placée d'une façon différente de ce que
normalement nous avons dans le système parlementaire. Et
là-dessus, certains m'ont fait la remarque que je n'avais pas de loi,
que je n'avais pas de projet qui pouvait être étudié par la
commission parlementaire et sur lequel les différentes personnes
intéressées dans le mouvement ou dans cette industrie en
particulier pourraient faire des représentations.
Ce dans quoi je voulais situer cette étude et je saurai
gré au député de Chicoutimi de me permettre de la situer.
Ce n'est pas sur un projet gouvernemental, mais sur la recherche des
problèmes qui se posent à cette industrie tels qu'ils sont vus
par ceux qui vivent dans cette industrie et qu'ils peuvent être
jugés par suite d'éclaircissements demandés par ceux qui
auront à se prononcer un jour ou l'autre sur une législation
possible que le gouvernement devrait présenter pour clarifier un certain
nombre de points et éviter ou régler un certain nombre de
problèmes.
Nous vons entendu, depuis le début de cette audition, le
président de la Confédération des syndicats nationaux qui
a été très sobre, j'en conviens, dans la façon dont
il a présenté ses remarques et qui a abordé une seule
facette du problème, c'est-à-dire la sécurité
d'emploi des travailleurs de la construction.
La sécurité d'emploi des travailleurs de la construction,
j'ai l'impression que même si nous ne la résolvons pas de la
manière que le président de la Confédération des
syndicats nationaux voudraient qu'elle soit résolue, nous avons quand
même un espoir que j'ai énoncé ce matin que
les différentes données que possède maintenant la
commission de l'industrie de la construction, ainsi que l'obligation qu'a la
commission de l'industrie de la construction de présenter au ministre du
Travail des normes et dps règles d'accessibilité régionale
provinciale ou seulement provinciale à l'industrie de la construction
sont déjà un commencement de correctif à la situation de
l'emploi dans l'industrie de la construction.
Je n'ai pas dit que cela corrigeait la sécurité d'emploi
pour autant, que cela assurait la sécurité d'emploi aux individus
qui sont dans l'industrie de la construction. J'ai dit que c'était un
commencement de correctif. Je crois que les recommandations qui peuvent me
venir de la part de la commission de l'industrie de la construction sont
susceptibles d'aider à la recherche de ce problème particulier,
c'est-à-dire pas du problème, mais surtout de la solution au
problème.
Il est fort possible que les parties en viennent à la conclusion
que la façon d'envisager le problème ressemble à
l'arrêté en conseil 4119.
La façon dont je me conduis actuellement en matière
d'appels, c'est que je crée des réservistes avec des droits
très limités. Je leur donne un permis de travail temporaire, qui,
s'ils ne travaillent pas, va tout simplement tomber. Ce n'est peut-être
pas bon. Mais il arrive qu'à l'examen des esprits illuminés,
comme ceux de M. Pepin et de la Confédération des syndicats
nationaux, ont, avant même les constatations de la Commission de
l'industrie de la construction, trouvé, eux, la solution. Ils l'ont,
à toutes fins utiles, fait accepter par les représentants de la
Fédération des travailleurs du Québec, les cinq
associations que M. Pepin a nommées ce matin et aussi le gouvernement du
Québec en 1969
Par la suite, nous avons... UNE VOIX: Un instant.
M. LE PRESIDENT: Je demanderais qu'on continue.
M. COURNOYER: Vous demandez de continuer, nous continuons.
M. LE PRESIDENT: Vos commentaires.
M. COURNOYER: Par la suite j'aimerais que ce soit
remarqué, qu'on en parle, qu'on le dise; M. Pepin a passé
rapidement sur cette partie mais il l'a dit cet accord qui existait,
pour se conformer au jugement du juge Gold, n'a pas reçu l'approbation,
dans les faits, d'un certain nombre de parties contractantes qui,
originellement, lui avaient quand même donné un assentiment
signé.
Parce que ceci a existé et devant les carences, les
difficultés constatées au ministère du Travail et de la
Main-d'Oeuvre pour mettre en vigueur l'arrêté en conseil 4119,
nous avons décidé à l'époque de le modifier. Nous
l'avons modifié et nous croyons que la modification apportée
ressemble beaucoup plus à une modification qui met des étapes
dans la recherche de la solution qu'une modification qui abolit la solution qui
avait été trouvée à l'époque.
Nous sommes actuellement devant le contrôle quantitatif et
qualitatif de la main-d'oeuvre. Des constatations de faits nous ont
été rapportées. Nous avons des difficultés, pas
nécessairement cette fois-ci, à l'intérieur parce que nous
avons eu l'intelligence de remettre aux parties ce qu'il convient de leur
remettre.
J'imagine que les parties, se disant habituellement plus intelligentes
que le gouvernement, vont trouver elles-même la solution à ce
problème de la sécurité d'emploi chez les travailleurs de
la construction. Cette solution, compte tenu de l'expérience
antérieure, doit nous venir avant le 30 octobre et nous sommes
aujourd'hui le 12 septembre. Je ne peux qu'espérer que ceux qui se
partagent cette industrie presque d'une façon totale, quoiqu'il en
manque peut-être certains qui viennent régulièrement nous
présenter des mémoires et qui ne sont pas ici aujourd'hui,
pourront, cette fois-ci avec un certain espoir que leurs ententes continueront
d'exister même après que le ministre aura décidé de
convenir que leurs ententes avaient de l'allure, trouver eux-mêmes la
solution à ce problème.
Quant au ministre du Travail, sa fonction consistera à
protéger les tiers et non pas les parties.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je remercie le
ministre de ce qu'il vient de nous dire. Il a répondu, disons,
partiellement à ma question. Il a situé le problème dans
la perspective que la commission a déterminé, à savoir la
sécurité d'emploi. Il reste, cependant, que ce problème
est lié à d'autres facteurs qui
n'ont pas été évoqués explicitement ce
matin, mais qui sont traités dans des documents que nous avons,
notamment dans un document que nous a remis la CSN aujourd'hui même et au
sujet duquel je poserai une question à M. Pepin. Il s'agit des
entrepreneurs, de leur nombre et de la nécessité d'une loi
octroyant des permis à des entrepreneurs. Dans les documents, vous
parlez de la faillite d'un grand nombre d'entrepreneurs qui privent les
travailleurs de salaires auxquels ils avaient droit, qu'ils avaient acquis,
d'ailleurs, par leur travail. Vous parlez également des salaires et
d'une forme de "cheap labour", de main-d'oeuvre à bon marché, qui
s'exerce par des entrepreneurs d'occasion.
Vous parlez également mais c'est, évidemment, un
autre aspect beaucoup plus vaste et qui requerra l'attention de la commission
sur ce point spécifique vous parlez des accidents de travail,
etc. M. Pepin, la question que je voudrais vous poser est celle-ci. Dans votre
optique, est-ce que le problème de la sécurité d'emploi
dont nous parlons aujourd'hui plus spécifiquement est directement
lié à la question du nombre des entrepreneurs, de leurs
qualifications? Est-ce que vous êtes d'avis que le gouvernement, par son
ministère du Travail ou par tout autre moyen, devrait
légiférer dans ce domaine des entrepreneurs, afin d'assurer la
sécurité d'emploi dont vous parliez ce matin et dont vous avez
parlé d'ailleurs à maintes reprises dans les documents que vous
avez déposés antérieurement devant les commissions
parlementaires?
M. PEPIN: M. le député, ce problème que vous
soulevez est relié à la question de l'éventuelle loi no 51
ou de l'ancien projet de loi no 51. Pour des gens qui oeuvrent dans le secteur,
pour les travailleurs, je pense qu'il est incompréhensible que le
gouvernement n'ait pas présenté la loi no 51 cela
s'appellera autrement éventuellement, peut-être et qu'elle
ne soit pas encore adoptée par l'Assemblée nationale.
Quand vous me posez la question : est-ce que c'est lié au
problème de la sécurité d'emploi, je dois vous
répondre, oui, certainement. C'est lié dans le sens que lorsque
des entrepreneurs viennent au monde accidentellement et disparaissent aussi
parce qu'ils font faillite, les employés perdent de l'argent. Il n'y a
pas de statut d'entrepreneur de déterminé dans la loi, sauf,
peut-être, dans certaines réglementations de corporations comme
pour les électriciens ou les plombiers ou les mécaniciens en
tuyauterie.
Le gouvernement a eu ce projet à l'étude, et quand l'Union
Nationale, dans le temps, était au pouvoir, c'est vous qui aviez
présenté le projet de loi no 51. Il y avait eu une commission
parlementaire dans le temps. Nous étions venus faire valoir nos points
de vue. Cela doit dater de trois ou quatre ans, peut-être un peu plus...
peut-être trois ans à tout le moins. Que le gouvernement actuel
n'ait pas reproduit ou n'ait pas ramené devant l'Assemblée
nationale un tel projet de loi, modifié ou le même, je pense que
c'est incompréhensible.
Pour les travailleurs du bâtiment, on remarque que lorsqu'il y a
une crise, que ce soit la crise du bill no 38, la Chambre se réunit,
adopte une loi de retour au travail, avec des sanctions, etc.
La crise de Sept-Iles arrive. Je ne distribue pas les blâmes ou
les mérites. On se réunit, on fait venir les
députés en motoneige, n'importe comment parce qu'il y avait une
tempête et on adopte une loi. Il faut être dur pour les
ouvriers.
Mais, quand arrive un problème comme celui de la qualification
des entrepreneurs, là, on peut prendre du temps. Cela, il faut
l'examiner beaucoup plus à fond et même prendre des années.
Ce problème est, pour moi, relié de fait à celui de la
sécurité d'emploi. Le gouvernement est maître des lois
qu'il a à proposer. Il peut dire: Je ne touche pas aux entrepreneurs,
jamais. Je ne peux m'empêcher de soutenir, quand même, la
thèse de sécurité d'emploi que j'ai soutenue ce matin.
C'est lié, dans le sens que cela irait beaucoup plus facilement si les
entrepreneurs étaient qualifiés et s'il y avait un fonds
d'indemnisation dans le cas de perte de salaire lorsqu'il y a faillite.
Le ministre a répondu à certains points ce matin et
à une des questions que vous avez posées
précédemment lorsque vous lui avez demandé si le
gouvernement avait l'intention de présenter quelque chose. Ce qui me
déçoit peut-être que je suis le seul à
être déçu; vous autres, vous êtes peut-être
très, très contents c'est que le gouvernement ou le
ministre lui-même ne présente rien.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Il ne faudrait pas, tout de même,
présumer de l'opinion des députés. Si je n'ai pas fait de
commentaire sur la réponse du ministre, cela ne signifiait pas que
j'avais approuvé ce qu'il disait.
M. PEPIN: Non, d'accord.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je suis, comme vous, déçu qu'il
ne m'ait pas donné plus de renseignements sur les intentions de son
gouvernement.
M. PEPIN: Je n'ai pas présumé. J'ai dit: Peut-être
que... Mais je ne présume rien de ce côté-là. Vous
nous demandez de nous présenter ici, en disant: Dites-nous ce que vous
avez à nous dire. Cela fait je ne sais combien de fois que nous venons
vous le dire, ce que nous avons à dire. Nous avons des ententes
écrites, des ententes signées. Peut-être que mes amis de la
FTQ peuvent dire: C'est trop vieux, ce sont de trop vieilles ententes. Je
pourrais même sortir un mémoire signé par la FTQ devant le
juge Gold pour soutenir les thèses que je soutiens à l'heure
actuelle. Peut-être qu'ils me diront: Ce n'est plus bon maintenant. Il ne
faut pas retenir
cela. Ils ont le droit, d'ailleurs, de changer d'avis, comme nous avons
le droit de changer d'avis ou comme un député peut changer de
parti. Cela est possible. Cela peut arriver. Cela ne me fait rien. Mais il faut
regarder les choses objectivement, voir comment on peut régler ces
problèmes. Il faut constater que le gouvernement ou le ministère
n'ait pas, à l'heure actuelle, de proposition à soumettre
à la présente commission.
Quand nous avons rencontré M. Tobin, je pense que c'était
le 14 juillet, à la demande du ministre, délégués
par le ministre, à la suite de l'adoption du bill 58 que personne
ne comprend, sauf sans doute le ministre et les députés
nous avons dit à M. Tobin: Pourriez-vous, comme deuxième
requête, demander au ministre de réunir la commission? Bien
sûr, nous y serions. Mais qu'au moins le gouvernement ou le
ministère nous dise ce qu'il en pense. On ne sait même pas ce
qu'il pense, à l'heure actuelle. Nous venons ici défendre nos
thèses, que nous pensons justes et correctes. Mais pour faire avancer
les problèmes dans la construction, peut-on rester constamment sur la
clôture de cette façon? Je vais vous écouter. Je jugerai
dans deux ou trois ans.
Vous vous souvenez peut-être de la dernière commission
parlementaire, le 7 juin. J'en ai relu les notes, hier soir. C'est vous, M. le
ministre, qui aviez répondu au député du comté de
Dorchester, je crois, qui vous disait à la fin de la séance:
Ecoutez, ce problème est urgent, pensez-vous qu'on aura une autre
séance pour le régler? Vous aviez répondu : Sûrement
pas. Cela ne retardera pas, cette affaire-là. Ne pensez pas que cela va
retarder au mois de septembre. Nous nous réunirons avant. Mais nous nous
réunissons le 12 septembre. Je lisais cela hier. Je me disais: Je ne
sais pas comment le ministre va se démêler avec tout cela.
M. COURNOYER: J'ai "de la misère".
M. PEPIN: Vous avez "de la misère". Je vous comprends!
D'ailleurs, je ne suis pas ici pour essayer de faire un débat
théorique, mais je voudrais bien que ce problème soit
réglé.
Ce matin, vous avez parlé du bill 49. Moi aussi, j'en ai
parlé. Je pense que vous lui avez donné une portée
beaucoup plus restreinte que ce que je pense qu'est le bill 49. Le bill 49 vous
permet beaucoup plus de pouvoirs. Vous pouvez ou non les exercer.
J'espère que vous ne les exercerez pas de la façon dont c'est
inscrit dans la loi. Au conseil consultatif du travail, je crois que tout le
monde est au courant que, quant à moi, je me suis battu fortement contre
certaines dispositions du bill.
Quand je vous ai parlé de planification, des investissements, ce
matin, à un certain moment de votre exposé, j'avais l'impression
que vous vouliez un peu rire de ce que je présentais, dans le sens: Eh
bien, il faut suivre les besoins de la population. Je suis d'accord pour qu'on
suive les besoins de la population aussi. Si une usine brûle, il faut
bien la rebâtir. Si quelqu'un pouvait s'imaginer que c'était mon
intention, ce matin, que d'essayer d'empêcher des investissements pour
créer des emplois, ce n'est pas du tout cela. Mais je me disais quand
même que si vous avez un bureau de poste à bâtir ce
n'est pas encore de votre juridiction on peut quand même dire que
le bureau de poste qui vit depuis cinquante ans peut peut-être souffrir
une année de plus. Un édifice gouvernemental, cela peut aussi,
parfois, se bâtir cette année, l'année prochaine ou dans
deux ans, tout dépend des conditions, à savoir si c'est un besoin
réel ou si c'est une amélioration des situations.
Là-dessus, disons que je suis pas mal déçu du fait
que le gouvernement ou le ministère n'ait rien à nous offrir
à l'heure actuelle. Pourquoi n'a-t-il rien à nous offrir? Nous,
nous avons une entente signée. Le gouvernement était
présent à ce moment-là. M. Bellemare était
présent et je pense qu'il représentait le gouvernement. M.
Cournoyer, vous représentiez les employeurs à ce
moment-là.
M. LABERGE: Pourquoi dis-tu "à ce moment-là"?
M. PEPIN: Parce qu'aujourd'hui il est ministre et moi, je respecte
ça.
M. COURNOYER: Qui représentait la CSN dans ce
temps-là?
M. PEPIN: C'était moi.
M. COURNOYER: Il n'y en avait pas un autre avec vous?
M. PEPIN: Oui, il n'y est plus. Bien non! M. COURNOYER: Puis
après?
M. PEPIN: Il a peut-être changé de "capot", lui aussi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Il a changé de parti.
M. LE PRESIDENT: M. Pepin, ça allait très bien.
Voulez-vous continuer, s'il vous plaît?
M. PEPIN: J'essaie de continuer, mais, quand le ministre m'interrompt je
dois lui répondre.
M. LE PRESIDENT: Allez-y.
M. PEPIN: Merci. Donc et je vais conclure là-dessus pour
cette question je me demande pourquoi le ministre et l'Assemblée
nationale ont réuni la commission parlementaire, lorsqu'il n'y a pas de
projet gouvernemental. On peut combattre des projets gouvernementaux. On peut
dire que ça n'a pas de bon sens, quand on
les connaît, mais là, nous n'avons même pas de chance
de vous combattre. L'objectif, ce n'est pas de vous combattre, mais de
régler le problème. A quel moment on va le régler? De
toute façon, je ne veux pas être agressif; je suis un gars qui
généralement ne l'est pas.
M. COURNOYER: Ne soyez pas agressif.
M. PEPIN: Tout ce que je veux vous dire puisque c'est moi qui ai
la parole, d'après l'avis du président de la commission
c'est qu'il me semble qu'il serait plus convenable pour les travailleurs du
bâtiment que vous ayez un projet ou quelque chose pour régler le
problème. Vous avez les chiffres, vous avez des thèses qui
s'affrontent. Décidez donc!
Si nous avons à vous combattre, nous le ferons. Si nous avons
à vous approuver, nous le ferons, comme d'habitude, d'ailleurs.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Pepin. Le député de
Chicoutimi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Si j'ai posé cette question à M.
Laberge, c'est précisément...
M. PEPIN: Si vous voulez faire attention pour quelques minutes. Pour
l'après-midi, n'employez ni M. Laberge, ni M. Pepin; ainsi, vous ne vous
mêlerez pas.
M. LABERGE: Parce que là, si ça continue, c'est de la
provocation.
M. DEMERS: C'est certainement un quiproquo.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je ne sais pas pourquoi, mais en tout cas...
C'est parce que je veux faire un front commun avec vous autres contre le
ministre. Si j'ai posé cette question à M. Pepin et à M.
le ministre, c'est que je sais très bien que la commission qui s'est
réunie fait suite à une demande qui avait été
présentée pour qu'on la réunisse aux fins de discuter le
problème spécifique de la sécurité d'emploi. Quant
à moi, évidemment, j'estime que le problème de la
sécurité d'emploi n'est qu'un aspect du problème
général du bâtiment.
A la suite de la réponse que m'a faite le ministre disons
que je ne m'étonne pas qu'il m'ait fait cette réponse je
puis vous dire qu'en ce qui concerne les députés de la formation
dont je suis membre et, j'imagine, en ce qui concerne tous les autres
députés membres de cette commission à l'issue de
nos travaux ou en conclusion de nos travaux, nous allons demander au ministre
de nous dire exactement quelles sont ses orientations, ses intentions à
court terme et dans quel sens il entend infléchir la politique de son
ministère afin de satisfaire aux exigences non seulement des
travailleurs que vous représentez, mais aussi les parties qui sont
associées avec vous depuis la loi 290.
C'est la raison pour laquelle j'ai posé la question au ministre
et que je vous ai posé la question à vous, M. Pepin, et que je la
poserais à M. Laberge. Merci, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Après un commentaire du ministre, nous allons
passer immédiatement à d'autres qui ont des questions à
poser.
M. COURNOYER: Le seul commentaire que je voudrais faire c'est que cette
commission parlementaire n'est pas le voeu d'un seul ministre. Elle a
été requise par les partis de l'Opposition. Il y a eu une motjon
de la Chambre et le ministre a accepté de la convoquer pour
étudier un certain nombre de problèmes et ils sont
énumérés là-dedans. Alors, plutôt que de
prendre mon attitude, prenons les lois qui existent. Elles sont là les
lois.
Ces lois peuvent vous causer des problèmes à vous qui
vivez continuellement dans ce domaine de la construction. Mais, quand on arrive
au Parlement, ce sont les problèmes des parlementaires que je dois
tenter parce qu'il y a motion de la Chambre de faire expliquer
par ceux qui les vivent et dire pourquoi ils sont venus à telle ou telle
solution qui, pour certains d'entre vous, ne va pas assez loin, mais qui, pour
d'autres, va beaucoup plus loin.
La façon d'étudier le problème des parlementaires,
c'est de dire: Bien voici, il y a un problème, ça fait un bout de
temps qu'on t'achale, comme on dit, dans les corridors du Parlement, en
arrière des sièges avec des petits billets pendant que
l'Assemblée siège. On fait une motion puis on dit: Bien
écoute, toute cette affaire-là, ça semble n'avoir aucune
allure, et pas du tout dans le sens que de ce côté vous pouvez
penser, mais dans le sens contraire.
M. le député de Chicoutimi, tantôt, a frappé
le mot contingentement. Effectivement les représentations qui ont
été faites en Chambre à l'occasion des motions
étaient surtout sur le contingentement, sur le fait que nous
empêchions, par ces règlements, des gens de gagner leur vie. C'est
le fait que nous devions assurer le droit au travail de tout individu au
Québec. C'est ça que j'ai entendu au Parlement à
l'occasion de l'étude d'une motion de convocation de la commission
parlementaire pour étudier les effets de la loi 49 concernant la
qualification, pas seulement dans le domaine de la construction, mais aussi
dans celui des garages. Deuxièmement, il fallait étudier aussi
les autres effets, qu'on voit restrictifs dans certaines régions, de
l'arrêté en conseil 2711, mis à part ceux qui ont
été causés, plus ou moins existants, pendant l'existence
de l'arrêté en conseil 4119.
Alors je dis: Vous voulez entendre les parties, vous voulez savoir
pourquoi nous sommes arrivés à ces conclusions qui vous semblent
trop pas progressistes parce que ça pourrait choquer des oreilles
chastes avancées dans certaines régions, vous voulez
savoir pourquoi le
ministre a pris telle attitude dans le sens de l'avancement et non pas
dans le sens du recul, si vous voulez le savoir, vous allez entendre les
parties qui vivent dans l'industrie de la construction.
J'ai donc accepté, à la suite de la motion, qu'il y ait
convocation de la commission parlementaire pour me faire juger, de même
que mon ministère, par la commission parlementaire. En même temps,
il fallait savoir pourquoi, dans quelles circonstances le ministère et
le ministre du Travail sont obligés parfois, pour régler un
problème, de causer d'autres problèmes. A court terme, ils
peuvent sembler des problèmes mais, à long terme, ils peuvent
être des solutions à d'autres problèmes encore plus
importants que ceux qui existent ou qui sont causés momentanément
par telle ou telle décision gouvernementale.
La discussion de ce matin portait pratiquement là-dessus. C'est
pourquoi j'ai dit à la fin de mes remarques que, pour autant que je suis
concerné, si le contingentement est une conséquence
ça n'est pas ce que nous recherchons ça ne me fatigue pas
les méninges.
Ce n'est qu'une conséquence, et ce n'est pas la recherche que
nous faisons. Ce dont nous avons à nous préoccuper, c'est de
régler le problème des travailleurs de la construction, mis
à part les problèmes qu'ils ont dans les différentes
centrales syndicales qui existent maintenant, c'est un problème de
liberté syndicale à côté. Strictement le
problème reconnu ou observé par les députés de
l'Assemblée nationale sur le droit au travail des individus, c'est ce
que j'ai voulu qu'il soit débattu en public.
Moi, je suis d'accord avec les mesures que nous avons prises, c'est
normal parce que c'est moi qui les ai signées. Elles ne proviennent pas
toujours seulement de mon bureau, elles sont souvent le résultat de
discussions et de consultations multiples qui font qu'à un moment
donné, les gens ne s'entendant pas, le ministre est obligé de
trancher parce qu'il a les pouvoirs et le devoir, souvent, de trancher. Alors,
je tranche. Et les députés ne voient pas d'un bon oeil la
façon dont j'ai tranché. En conséquence, je leur ai dit:
Voulez-vous entendre les mêmes choses que moi pendant un bout de temps?
Voulez-vous voir quels sont les problèmes des gars de la construction
pendant un bout de temps? Si vous voulez les vivre en même temps que moi,
peut-être que vous arriverez à la même place que moi,
peut-être que vous allez courir en avant de moi et je serai obligé
de vous retenir pour trouver les solutions et même mettre en vigueur les
solutions qui ont déjà été trouvées.
M. LE PRESIDENT: On a même déterminé, pour
présider la commission, que le président serait quasi
indépendant. Voyez-vous l'extrême jusqu'où on est
allé pour essayer d'avoir une bonne entente. Passons au
député de Dorchester; avez-vous une question à poser?
M. GUAY: M. le Président, j'ai bien sûr quelques questions
à poser aux personnes qui se sont fait entendre aujourd'hui. La
commission parlementaire qui siège encore aujourd'hui le fait en vertu
d'un mandat qu'elle a reçu de la Chambre d'étudier les lois
existantes dans le domaine de la construction après, bien sûr,
avoir relevé certaines difficultés d'application de certaines
lois, notamment en milieu rural.
Comme vient de le souligner le ministre, cette motion a
été présentée à la Chambre dans le but
d'étudier les lois existantes; cette motion a été
présentée par mon collègue de Beauce, et ceci nous
amène à une commission parlementaire. Je suis d'abord très
heureux de sentir la bonne atmosphère qui règne ici aujourd'hui
permettant non seulement aux membres de la commission d'entendre ce qui est dit
mais également à ceux qui comparaissent devant cette commission
de partager en même temps des problèmes qui sont vécus
surtout dans le milieu rural.
Compte tenu de ce qui a déjà été dit, des
questions qui ont déjà été posées et du
rapport très bien présenté d'ailleurs par M. Morin,
président de la commission de la construction, évidemment, nous
avons certaines révélations. J'ai quand même l'impression,
à la suite des discussions qui ont eu lieu, que le problème se
pose de façon un peu différente en milieu rural, que j'appelle le
milieu le moins bien organisé ou le milieu désorganisé. Je
pourrais citer l'exemple d'un problème auquel on n'a pas trouvé
de solution, des questions qui ont été posées non pas par
un politicien mais par des travailleurs à des fonctionnaires du
ministère du Travail qui ont tenté d'expliquer à des
travailleurs réunis de quelle façon l'application de ces lois
pouvait se réaliser.
Par exemple, quand on parle de sécurité d'emploi ou quand
on parle de solutions éventuelles, de contingentement, le
problème se pose de la façon suivante: on suppose, par exemple,
qu'une municipalité vient d'obtenir un programme d'initiatives locales.
A partir de ce moment-là un échéancier bien
sévère a été établi et les travaux devaient
être terminés pour une date fixe. Dans la localité
où le programme se réalise, le responsable du programme ne
réussit pas, comme la loi l'exige, à trouver des travailleurs
possédant carte de compétence et le reste.
Ce responsable de programmes se dirige vers un centre de main-d'oeuvre
qui ne réussit pas à lui fournir la main-d'oeuvre
qualifiée. Il est donc dans l'obligation de se tourner vers un autre
centre de main-d'oeuvre où on ne réussit pas non plus à
lui fournir le personnel qualifié requis.
Ce responsable de programmes se rend donc à la Commission de
l'industrie de la construction et demande son aide afin de résoudre son
problème. On lui dit tout simplement que ce qui devrait se faire
normalement serait que des carnets d'apprentissage soient demandés dans
les centres de main-d'oeuvre. Par la suite, ces travailleurs obtiendraient une
compétence ou
encore un permis, ce que j'appelle un permis permanent pour travailler
dans la construction.
Quand on analyse le rapport de la Commission de l'industrie de la
construction, à la page 13, on se rend également compte que la
catégorie des travailleurs qu'on appelle permanents, la catégorie
5, c'est-à-dire ceux qui ont effectué plus de 2,000 heures de
travail, se retrouve surtout concentrée dans deux villes ou deux
régions je devrais plutôt dire deux villes pour être
plus exact Québec et Montréal.
Il est très difficile de prévoir, en milieu rural, par
exemple, la construction domiciliaire. Je peux aussi prendre comme exemple une
municipalité purement rurale où il y a eu, en 1970, deux
constructions. En 1971, il n'y a eu aucune construction. Mais, en 1972, il y en
a 8. On se retrouve donc, en 1972, avec une pénurie de travailleurs dans
cette localité. Ceux qui ont réussi â se qualifier sont
soit rendus dans d'autres régions, comme l'a mentionné le rapport
de la commission ou encore placés ailleurs. Donc, on se retrouve en face
d'une situation où nous avons, d'une part, des travailleurs non
qualifiés mais disponibles et, d'autre part, l'absence de construction
étant donné la difficulté pour des travailleurs de se
rendre éligibles ou d'acquérir les permis requis pour faire de la
construction.
Le ministre a souligné ce matin, évidemment, la
difficulté d'essayer de planifier à l'avance. Il arrive toujours
des surprises. Il est entendu que nous sommes obligés de parler pour
notre clocher, mais connaissant très bien le milieu rural, ça
pose de sérieux problèmes. J'aimerais savoir de la CSN si on a
prévu une façon ou une réglementation assez souple pour
permettre, même en milieu rural et si je dis même en milieu
rural, c'est parce que le problème se pose également ailleurs
qu'en milieu strictement rural; il se pose dans le milieu semi-rural de
satisfaire les besoins, advenant, par exemple, ce que j'appelle des cas
d'urgence dans la construction. Pour la localité que je mentionne, on a
construit cette année, huit maisons. Bien sûr, la
nécessité d'embaucher des travailleurs non qualifiés, non
détenteurs d'un permis de travail est la règle qui existe
puisqu'il devient impossible de trouver le nombre de travailleurs satisfaisant
aux conditions requises. Alors, est-ce qu'un mécanisme a
été prévu, assez souple, afin de permettre aux
régions démunies, désorganisées d'obtenir une
main-d'oeuvre suffisante pour combler les besoins qui peuvent se
présenter?
Je pourrais également demander à M. Pepin s'il n'y a pas
des employeurs qui sont actuellement privés de travailleurs, et si, du
même coup, des travailleurs ne sont pas privés d'emploi à
cause de cette réglementation qui semble extrêmement
sévère actuellement.
M. PEPIN: Ma réponse est affirmative.
M. LE PRESIDENT: Un instant, s'il vous plaît. Je reconnais la
question et les commentai- res du député. Je voudrais, tout de
même, faire remarquer que beaucoup des commentaires qui ont
été faits ont été basés sur des statistiques
et des faits qui ont été relatés par une autre personne,
ce matin. Je ne voudrais pas qu'on demande, par exemple, au représentant
de la CSN de faire des observations ou des commentaires qui auraient
directement rapport à des observations d'un autre mémoire
présenté. Je laisse M. Pepin faire le triage voulu, mais je
voudrais que la commission soit bien avisée qu'on se rapporte
réellement, dans votre question, à des commentaires faits par
deux personnes qui se sont adressées à la commission ce
matin.
M. Pepin.
M. GUAY: Je tiendrais à souligner quand même, si vous me le
permettez, M. le Président, qu'il ne s'agit pas pour moi de contester
les chiffres qui apparaissent au rapport de la commission. Loin de
là.
M. LE PRESIDENT: Mais je ne voudrais pas que vous demandiez à
partir de ces chiffres, des commentaires à M. Pepin, à qui vous
adressez la question. C'est aussi clair que cela.
M. GUAY: D'accord.
M. PEPIN: Je vous remercie, M. le Président, de la protection que
vous m'offrez. A la question posée par le député de
Dorchester, je réponds affirmativement.
M. GUAY: Maintenant, est-ce que vous pourriez donner un peu plus
d'explications? Le problème qui se pose en milieu rural semble
différent de celui qui se pose en ville.
M. PEPIN: Vous m'avez demandé uniquement si c'était
prévu; je vous réponds oui. Maintenant, si vous voulez avoir des
explications, je vais vous les donner.
M. GUAY: D'accord.
M. PEPIN: Les explications, je pense que vous pourrez les trouver dans
l'entente signée le 10 juillet et dans le rapport Gold. Vous pourriez
les retrouver aussi dans l'arrêté ministériel no 4119.
Lorsque, dans une région donnée, il y a un manque de
travailleurs considérés comme étant des permanents de la
construction, on peut faire appel à d'autres régions pour savoir
si des professionnels ou des permanents peuvent aller travailler dans une
région rurale ou autre. S'il arrive que tout le monde est occupé,
que tout le monde travaille, il y a la clause des "réservistes" qui
joue. Il est possible de trouver des personnes compétentes parmi les
gens qui ne sont pas des permanents ou des professionnels de la construction
pour remplir les emplois qui sont à combler. Maintenant, si vous me
demandez: Est-ce que cela veut dire que nous allons
préconiser que ce soient des personnes non qualifiées qui
remplissent des fonctions, parce qu'elles n'auraient pas la compétence
pour le faire, je souhaite que, dans aucun cas, nous n'ayons à remplir
les vides par des personnes non qualifiées. Les mécanismes qui
ont été prévus tant dans l'entente du 10 juillet que dans
le rapport Gold et l'arrêté no 4119, je pense, permettaient que
les constructions qui devaient se faire se fassent. Cela ne veut pas dire que
c'est M. X ou M. Y qui pourrait les faire. Mais cela veut dire que ce sont,
d'abord, les professionnels ou les permanents je pense bien que personne
ne peut en avoir contre ça et qu'en deuxième lieu ce sont
les réservistes qui peuvent les faire.
Les réservistes sont-ils autant qualifiés que les
permanents? La réponse ne peut pas être donnée
immédiatement. On ne sait pas si ces gens seront aussi qualifiés
que les permanents. Quant à la planification en milieu rural comme
ailleurs, je sais que ce n'est pas aussi simple à prévoir ou
à faire qu'à dire. C'est plus facile d'affirmer qu'il faut avoir
de la planification que de l'exécuter. Il reste quand même qu'avec
le réservoir de main-d'oeuvre que nous avons dans cette industrie il ne
me semble pas, M. le député, que vous ayez beaucoup de
difficulté à combler les vides que vous avez à combler,
s'il arrivait, dans votre comté ou dans un autre comté, un boum
de la construction.
Est-ce que cela répond de manière satisfaisante à
votre question?
M. GUAY: Cela répond mais, de manière satisfaisante, c'est
autre chose. Partiellement.
M. PEPIN: Quelle partie vous manque, M. le député? Je vais
essayer de répondre.
M. GUAY: Je vais essayer d'ajouter en précisant davantage. Ce qui
se produit actuellement en milieu rural, et vous n'êtes pas sans le
savoir, c'est que les embauches sont surtout temporaires. Cela semble
très difficile, pour ne pas dire impossible, de réaliser de la
construction domiciliaire. Quand je parle de construction domiciliaire, c'est
surtout en milieu rural.
Le problème se pose également d'une autre façon.
Normalement, les travailleurs des comtés ruraux sont plutôt
portés à chercher un emploi dans les villes. Exemple: Chez nous,
dans mon comté, il y a énormément de personnes qui vont
travailler à Montréal. D'autres viennent travailler à
Québec mais très rares sont celles qui partent de Montréal
pour venir travailler à Québec ou encore qui partent de
Québec pour venir travailler chez nous. Je ne sais pas s'il y a un
désintéressement quelconque. Il y a une concentration de
travailleurs dans les grandes villes. J'appelle ça des cas d'urgence
parce que des travaux auraient normalement été faits à
cette époque de l'année. Après avoir rencontré les
responsables, même des dirigeants municipaux, on nous dit: Il est
impossible de réaliser tel type de construction cette année
à cause de la pénurie de travailleurs.
Je veux savoir, pour les régions moins bien organisées,
pour celles qui sont réellement démunies dans le cas de
travailleurs qualifiés, ce qu'il y aura de prévu afin de
satisfaire aux besoins du milieu sans avoir à aller chercher des
travailleurs à Québec, à Montréal. Les gars de chez
nous accepteront mal qu'un employeur aille chercher des travailleurs à
l'extérieur. Peut-être que encore là c'est un esprit de
clocher qui règne mais c'est quand même ce qui existe dans les
faits. En pratique, c'est ce qui se produit actuellement.
M. PEPIN: M. le député, si vous avez des emplois dans
votre région ou dans un autre milieu rural, je pense qu'avec tous les
mécanismes qui sont offerts dans les propositions signées et
acceptées par les parties vous pouvez facilement, s'il n'y a personne
qui veut se déplacer de Montréal ou de Québec au
comté de Dorchester, obtenir que des réservistes aillent faire
les travaux pour les constructions d'aqueducs ou autres. Cela est prévu
d'une manière explicite dans les documents que nous vous avons
remis.
Il n'y a aucun problème de ce côté. Ne demandez pas,
cependant, que cela soit des travaux exécutés par des gens non
qualifiés. Nous ne serons pas d'accord. Je pense bien que vous non plus
ne serez pas d'accord. Cela ne sera pas tellement rentable, ni pour les
municipalités concernées, ni pour personne. Mais avec les
mécanismes qui sont devant vous, M. le député, je suis
convaincu que vous n'aurez pas le problème que vous soulevez à
moins que tous les travailleurs de la construction, que tous ceux qui sont
capables de faire de la construction soient déjà occupés
ailleurs. Ce serait différent si vraiment vous étiez dans une
période où il y a une Expo 67 à la grandeur du territoire
du Québec. Je pense bien que ce n'est pas l'hypothèse que vous
signalez. Je pense que vous avez toutes les protections voulues pour avoir la
main-d'oeuvre dans les documents qui vous sont présentés. Je le
crois de toute façon.
M. GUAY: Quand vous parlez d'ententes, de propositions acceptées
et signées, j'aimerais quand même savoir si c'est ce qui
s'applique actuellement.
M. PEPIN: Non, parce que l'arrêté en conseil 4119, qui a
été accepté par le lieutenant-gouverneur en conseil
à la suite du jugement Gold, le gouvernement, le lieutenant-gouverneur
en conseil, l'a pris et l'a déchiré. Il a fait autre chose. Ce
n'est plus cela qui s'applique. Quand je viens plaider devant vous, je plaide
sur des choses qui ont été acceptées par les sept parties.
Le gouvernement étant présent, nous avons signé cela, tout
le monde ensemble, une certaine nuit, au ministère du Travail à
Montréal. Nous pensions avoir réglé le problème.
Nous
sommes naifs, c'est évident. Après cela, le ministre du
Travail arrive et dit : Cela ne marche pas.
Bang! Je te le déchire. Je te passe le 2711 où là,
je vais augmenter le nombre de travailleurs de la construction à
volonté.
M. COURNOYER: Ah! Ne charriez pas!
M. PEPIN: Alors quand vous me demandez si c'est appliqué, je vous
dis non. C'est ce que j'essaie de vous expliquer depuis ce matin. Mais je vous
demande, à vous, députés, de l'appliquer. Vous avez un
pouvoir de ce côté, messieurs les députés.
M. COURNOYER: S'ils l'appliquaient, M. Pepin, pourriez-vous expliquer
comment je pourrais faire travailler les 200 gars de Saint-Joseph de Beauce?
Demandez donc cela en particulier au député de Beauce, qui est
là. Comment pourrais-je faire travailler les 200 gars qui ont vu leur
usine de maisons détruite?
M. PEPIN: Vous avez, dans les propositions qui sont devant vous, que
vous connaissez aussi bien que moi, prévu une commission pour
l'application de tout cela et prévu des cas d'espèce. Vous le
savez aussi bien que moi. C'est vous, dans le temps je me souviens fort
bien vers le 7 juillet, qui aviez insisté pour avoir cette
disposition au cas où un feu se produirait. Nous l'avons
acceptée. Maintenant, vous me posez la question à moi. Vous le
savez.
M. DEMERS (Philippe): Il va mettre le feu!
M. ROY (Beauce): M. le Président, puisque le ministre s'est
permis de citer un cas particulier, au cours duquel j'ai eu, justement,
à rencontrer les représentants du ministère, la semaine
dernière, prenons le cas type, par exemple, à l'heure actuelle.
Il est évident que la Commission de l'industrie de la construction
n'avait pas pu planifier et prévoir des choses de ce genre. Maintenant,
il y a plusieurs facteurs, je pense, qui entrent en ligne de compte. Il faut
quand même tenir compte des besoins de l'industrie. L'industriel, le
patron, est quand même lié. Je vais prendre ce cas en particulier,
M. le ministre, puisque j'en ai discuté avec votre sous-ministre, la
semaine dernière. C'est qu'ils ont des contrats, des engagements envers
leurs clients. Ils ont des dépositaires. C'est une entreprise. Cette
entreprise, évidemment, a formé son personnel et doit faire face
à des échéances.
Or, si l'entreprise, la municipalité et, de concert, les gens du
syndicat ce sont des gens qui, je pense, étaient affiliés
à la FTQ et les employés de cette industrie se soumettent
à toutes les exigences du décret, avec les délais que nous
connaissons et que vous connaissez, ne pensez-vous pas que prolonger, par
toutes les complications et les techniques administratives, un délai
multiplié par quatre ou cinq, risque que l'entreprise qui a quand
même une concurrence provenant des autres provinces canadienne,
même des Etats-Unis perde une partie de son marché et que
ces mêmes travailleurs, lorsque l'usine sera prête à rouvrir
ses portes, soient obligés de recommencer au point de départ ou
encore recommencer, comme il y a quatre ou cinq ans, alors que l'entreprise se
trouverait à produire à 35 p.c. de sa production?
On a le cas de SOMA, à l'heure actuelle, qui est d'un autre
domaine, mais cela nous démontre quand même que les entreprises,
privées comme gouvernementales, sont soumises aux exigences du
marché.
C'est là que je vous pose la question précise: à
part le mécanisme que nous connaissons et que vous connaissez,
prévoyez-vous qu'il y aurait possibilité d'inclure un
mécanisme, je veux employer le terme ultrarapide parce que, pour les
besoins de la cause, c'est nécessaire? Si l'industrie, elle, ne peut pas
reconstruire dans les délais minimums, il y a risque que l'industrie
parte de la région et s'en aille ailleurs et même sorte de la
province de Québec. A cause de tous ces facteurs, M. Pepin, j'aimerais
bien connaître votre point de vue à ce sujet.
M. PEPIN: Je vous remercie de me poser la question. Je suis convaincu
que ce n'est pas parce qu'il y a eu un feu, accidentel, sans doute, dans votre
région, dans votre territoire, que cela peut remettre en cause toute la
sécurité d'emploi des travailleurs de la construction. Nous
sommes en face d'un cas d'espèce, d'un cas important. C'est
arrivé, alors il faut bien y faire face. Il s'agit de savoir,
maintenant, si ce sont les travailleurs de l'usine qui seront les premiers
appelés, avec le droit de priorité, pour reconstruire leur usine.
Il s'agira de savoir aussi si ces travailleurs ont la compétence pour le
faire. Pour faire certaines fonctions, j'imagine bien qu'ils peuvent être
habilités à les faire mais pour d'autres, c'est peut-être
un peu plus compliqué pour eux.
Mais si on s'en tient uniquement à la sécurité
d'emploi et à la possibilité, pour un entrepreneur, de
reconstruire parce qu'il a peur de perdre ses marchés, etc., je suis
convaincu qu'avec le régime que nous avons offert, que nous avons
accepté, toutes les parties, le gouvernement compris, vous pourriez
avoir la main-d'oeuvre d'une manière rapide, pour faire les travaux.
Encore une fois, j'y mets toujours une réserve.
Si vous êtes dans une période de boom extraordinaire au
plan de la construction. Mais il est bien possible, non pas en raison de la
structure qui est proposée, mais en raison de l'état de
l'économie, que vous n'ayez pas la situation rêvée ou les
travailleurs du jour au lendemain. Quelle que soit l'hypothèse que l'on
formule, qu'il y ait un mécanisme de sécurité d'emploi ou
non, si vraiment le travail est à son maximum, il est possible que, dans
certains endroits, vous ayez à retarder des travaux parce
qu'il n'y a pas de travailleurs pour les exécuter. Cela ne sera
pas en raison de la formule de sécurité d'emploi; ce sera pour
d'autres facteurs.
M. le député, avec tout le respect que je vous dois, j'ai
l'impression qu'avec le système que nous préconisons, la
situation étant celle que l'on connaît maintenant, où il
n'y a pas beaucoup de suremploi, vous n'auriez pas de problème à
reconstruire votre usine. J'imagine bien que vous n'en avez pas à
l'heure actuelle, d'ailleurs.
M. ROY (Beauce): J'aimerais avoir votre opinion là-dessus, quitte
à y revenir. Il faut aller un peu plus loin que les principes que vous
venez d'énoncer. On se rappellera que l'arrêté en conseil
4119 et le no 2711, qui l'a remplacé, ont quand même tenu compte
de certaines modalités, de certaines dispositions. On avait prévu
une période du 1er janvier 1970 au 1er septembre 1971, si ma
mémoire est bonne où une personne devait avoir
travaillé dans l'industrie de la construction en vue de détenir
son permis de travail. Il y a deux choses: le permis de travail et la carte de
qualification professionnelle, mais les deux sont obligatoires.
Et, pendant cette période, je pense que tout le monde admet que
la construction au Québec connaissait un état de crise. Cela a
été une des périodes les plus creuses de l'industrie de la
construction au Québec. On est parti de cette période pour
émettre les permis de travail. Cette année, nous connaissons un
boom dans l'industrie de la construction. Je pense que tout le monde admet
encore qu'avec les élections canadiennes, américaines, dans le
contexte économique actuel, etc., nous ne sommes pas en période
de restriction de crédit; nous sommes en période
électorale. Vous savez que ça influence un peu, ces
choses-là.
A l'heure actuelle, si on prend comme critère que le nombre de
permis de travail doit être exact, en parfaite conformité avec le
décret 2711, alors que nous connaissons un boom dans l'industrie de la
construction, il s'ensuit les complications et les restrictions que nous
avons.
Je ne connais pas tous les problèmes de la région de
Montréal, mais, d'après les représentations qui nous sont
faites et les demandes que nous avons des gens et même des employeurs, il
y a pénurie de main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction dans
plusieurs endroits. Les employeurs se cherchent des menuisiers ayant leur
carte.
Je pense que, si nous faisions un inventaire dans le Québec pour
découvrir tous ceux qui travaillent sans permis de travail et sans carte
de qualification professionnelle, nous aurions peut-être des
surprises.
M. PEPIN: Les chiffres ont été fournis ce matin.
M. ROY (Beauce): Les chiffres ne peuvent pas être complets. Je ne
veux pas revenir sur le rapport, parce qu'il y a trop de données que les
municipalités n'ont même pas dans leurs localités. La
Commission de l'industrie de la construction ne peut même pas, parce
qu'elle n'a aucune référence, avoir toutes les données du
problème, de ce côté-là.
M. PEPIN: Vous suggérez, dans le fond, que la commission ne fait
pas suffisamment bien son travail, parce qu'elle est démunie à
l'heure actuelle, je présume bien. Les chiffres vous ont
été donnés ce matin. Il y a 110,000 travailleurs de la
construction. Il y a 55,000 emplois. Il y a 10,000 travailleurs qui travaillent
sans permis, d'après la commission. Peut-être que ça
pourrait être 10,005 ou 10,500. Mais il y en a un certain nombre qui
travaillent sans permis et la commission elle-même le dit.
Je ne vois pas en quoi cela peut inférer sur notre proposition
d'une formule de sécurité d'emploi. Je pense bien que vous
n'êtes pas contre le fait que ce soient les travailleurs professionnels
de cette industrie qui y travaillent d'abord et avant tout. Vous n'êtes
pas opposé à ça?
M. ROY (Beauce): Sur ce point, nous sommes entièrement d'accord
et nous sommes conscients du problème que pose la sécurité
d'emploi dans l'industrie de la construction. Je ne voudrais pas prendre le
droit de parole d'autres députés. Quand même, je voudrais
dire à la suite du député de Dorchester que, lorsque nous
avons demandé la convocation de cette commission parlementaire, c'est
parce que nous avions des travailleurs compétents qui effectivement
gagnaient leur vie dans l'industrie de la construction depuis de très
nombreuses années. Comme c'étaient des artisans qui travaillaient
pour leur propre compte, ils ne s'étaient jamais soucié et
ça n'avait jamais été nécessaire pour eux
d'avoir leur carte de qualification professionnelle.
Lorsque ces gens se sont adressés à la Direction
générale de la main-d'oeuvre pour obtenir leur carte de
qualification professionnelle, mais il y a eu énormément de
difficultés par suite des examens et de tous les détails qui en
découlent. Il y a donc des gens qui se sont vu refuser leur carte de
qualification professionnelle après 20 années
d'expérience. Ils ont même été poursuivis devant les
tribunaux et condamnés. Ce n'est un secret pour personne.
Vous avez eu la même chose vis-à-vis des permis de travail
dans nos régions, parce que nous avons quand même, dans les
régions du sud-est du Québec, une quantité assez imposante
de travailleurs de la construction qui ont travaillé au Québec
pendant de très nombreuses années, jusqu'en 1969, début
1970, et qui, à cause des restrictions que nous avons connues, sont
allés travailler quelques mois aux Etats-Unis justement pendant la
période requise par l'arrêté en conseil 2711.
Ces gens sont des citoyens du Québec. Ils payent leurs
impôts au Québec, au Canada, leur
famille demeure au Québec puis, à cause de ces choses, ils
ont dû aller travailler aux Etats-Unis pendant une certaine
période. En ce moment, ils ont du travail au Québec, des
employeurs sont prêts à leur donner du travail, ils ont même
signé des engagements, mais ils ne peuvent pas avoir leur carte.
Il y a aussi un deuxième point que je voudrais porter à
l'attention du ministre. C'est qu'il y a des personnes qui travaillaient dans
l'industrie de la construction, qui ont fait des travaux de construction,
travaillant à salaire pour des municipalités. Or, les
municipalités ne sont pas comprises dans les normes
d'éligibilité. Par contre, si une personne travaillait pour une
municipalité, mais pour un entrepreneur qui, lui, avait un contrat avec
la municipalité, la personne n'avait pas de problème de ce
côté. C'est un deuxième problème.
Il y a aussi un troisième problème qui se situe dans le
milieu rural, et cela dans tout le Québec. Vous avez des entrepreneurs,
par exemple, qui vont construire des résidences, des petits
entrepreneurs artisans qui, avec cinq, six ou sept ouvriers, à cause des
besoins de l'agriculture ont travaillé dans la construction de
bâtisses agricoles à un moment donné. Vous avez des
menuisiers qui ont travaillé dans les charpentes de bâtisses
agricoles pendant la période exigée en vertu du décret
2711 et qui reviennent à un moment donné pour faire d'autres
travaux, parce que les employeurs ne travaillent pas seulement dans le domaine
des bâtisses agricoles mais également dans le domaine de la
construction domiciliaire. Ces gens-là ont toujours travaillé
dans l'industrie de la construction. J'ai écrit plusieurs lettres au
ministre à ce sujet. J'ai communiqué avec l'industrie de la
construction.
D'ailleurs, si je ne vous ai pas fait parvenir dix lettres par semaine
depuis le début de l'été, je pense que, je ne vous en ai
pas envoyé une, seulement de ma part.
M. COURNOYER: Oui, seulement vous. On va régler pour douze.
M. ROY (Beauce): Ce sont des problèmes que nous avons
vécus au cours de l'année. Je tiens à dire â
l'intention de tout le monde que si nous avons demandé la convocation de
cette commission parlementaire, c'est que nous sommes conscients que le
gouvernement et les centrales syndicales ont quand même des
responsabilités envers leurs syndiqués et que ceux qui
travaillent dans l'industrie de la construction veulent y gagner leur vie.
C'est normal.
Nous avons donc des gens dans nos régions, dans nos comtés
qui sont également des travailleurs de la construction et qui, à
cause des lois qui étaient moins appliquées dans les
régions semi-rurales et semi-urbaines, n'ont pas satisfait aux exigences
de départ. A l'heure actuelle, ces gens se trouvent lésés.
Tous ensemble, il s'agit de trouver une solution â ce problème, de
façon à ne pas freiner l'expansion économique du
Québec, de façon à ne pas maintenir un état
de crise parce que si on se limite au décret 2711, je dis qu'on
maintient un état de crise au Québec dans l'industrie de la
construction mais à connaître au moins une économie
dynamique.
C'est dans cet esprit que nous avons demandé la convocation de la
commission parlementaire. Tout à l'heure j'ai bien compris vos
remarques nous savions que le gouvernement ne nous présenterait
pas de loi, mais nous voulions quand même discuter avec vous, les
représentants des centrales syndicales, avec les représentants du
gouvernement, les représentants de l'industrie de la construction afin
de trouver une solution au problème global.
J'ai tenu à vous dire que dans le cas de la construction d'une
usine qui brûle comme dans le cas d'une petite municipalité qui
décide de faire un petit développement domiciliaire avec deux ou
trois personnes qui, sans même demander des permis à la
municipalité cinq ou six mois d'avance, procèdent de façon
normale, la Commission de l'industrie de la construction n'a pas de
données.
Elle n'a pas non plus l'inventaire des travailleurs de la construction
qui ont dû aller travailler à l'extérieur du Québec
pendant quelques mois.
M. LE PRESIDENT: Le député de L'Assomption.
M. PEPIN: Excusez.
M. LE PRESIDENT: Oui?
M. PEPIN: Dans l'intervention du député, j'avais
l'impression qu'il me posait une question.
M. LE PRESIDENT: J'avais l'impression que ce n'était pas une
question mais une déclaration. Si vous avez trouvé une
question...
M. PEPIN: S'il n'y a pas eu de question de posée, je n'y
répondrai pas.
M. ROY (Beauce): C'est une question globale.
M. LE PRESIDENT: Une constatation plutôt; c'est pour cela que je
ne pensais pas qu'il y avait de réponse à donner.
M. LABERGE: M. le Président...
M. LE PRESIDENT: Pourriez-vous vous nommer, s'il vous plaît?
M. LABERGE: ... si, selon ce que vous avez dit tantôt, la FTQ ne
pourra pas...
M. LE PRESIDENT: Votre nom, s'il vous plaît. C'est pour le journal
des Débats.
M. LABERGE: Louis Laberge, FTQ, Orsainville Beach.
M. LE PRESIDENT: La dernière partie du commentaire sera
rayée du journal des Débats, j'en suis convaincu.
M. LABERGE: Puisque, apparemment, on n'aura pas l'occasion de
présenter notre point de vue cet après-midi sur le mandat de la
commission parlementaire, que jusqu'à présent on a parlé
de pas mal de choses qui nous semblent être reliées, bien
sûr, mais un peu en dehors du présent mandat de la commission et
que ce qui s'est dit laisse sous-entendre que c'est parce que la FTQ a voulu
boycoter et a effectivement boycoté l'enregistrement des travailleurs de
la construction que le système n'a pas marché, je pense qu'en
toute justice vous pourriez au moins nous donner le privilège de dire
deux mots là-dessus.
M. LE PRESIDENT: D'après le mandat que cette commission a
reçu de la Chambre, on a établi un programme de deux semaines
pendant lesquelles nous nous rencontrons du mardi au jeudi soir. Je pense que
dans les circonstances personne ne pourra dire qu'on n'a pas eu toute
l'occasion voulue de s'exprimer. Je viens d'entendre le député de
Beauce faire des commentaires, on me dit qu'il y avait peut-être une
question. M. Pepin a déjà signifié son intention de
répondre à un commentaire qui a été fait. Le
député de L'Assomption a des commentaires à faire et je
suis certain, M. Laberge, que vous aurez l'occasion, au cours de nos
débats, de revenir même sur ce sujet passé. Je suis
très tolérant, même si les membres de la commission
n'acceptent pas ma grande tolérance habituelle. J'ai été
surpris que le député de Beauce ne me regarde pas de temps en
temps parce que j'ai l'habitude de le couper pas mal; je coupe ça court,
quand je préside mais, cette fois-ci, je n'ai rien coupé, je l'ai
laissé faire ses commentaires.
M. LABERGE: J'ai une question de privilège et je pense qu'elle a
sa raison d'être.
M. LE PRESIDENT: Question de privilège.
M. LABERGE: De la façon que c'est sorti aujourd'hui, les journaux
vont rapporter que le système de sécurité d'emploi qui
avait été mis de l'avant n'a pas marché à cause de
la FTQ. Je pense qu'on est en droit de répliquer sur ce point-là.
Nous ne voulons pas passer en avant des autres, nous voulons bien attendre
notre tour. Si notre tour ne vient que demain ou après-demain, nous ne
sommes pas pressés, nous y serons. Mais je pense que, sur ce
point-là, nous pourrions au moins avoir le droit de
répliquer.
M. LE PRESIDENT: Je vous assure que vous l'aurez. Il y a les
quotidiens...
M. LABERGE: C'est justement!
M. LE PRESIDENT: ... et à chaque jour on rapportera ce qui s'est
dit.
M. LABERGE: M. le Président, quand un journal rapporte une
journée qu'une personne a été arrêtée et est
quasi coupable, si, le lendemain ou trois jours après, il y a un petit
entrefilet qui dit qu'elle n'est pas coupable, il est un peu tard, à ce
moment-là.
M. LE PRESIDENT: C'est votre commentaire, je l'accepte. Je reconnais
votre droit de réplique sur ce qui a pu être dit aujourd'hui, je
le reconnais, je ne vous enlève pas la parole, mais j'ai des demandes de
la part de membres de la commission...
M. LABERGE: Oui. Je ne veux pas le droit de parole immédiatement,
vous me le donnerez dans 15 minutes, je ne suis pas pressé.
M. LE PRESIDENT: Ou dans 24 heures.
M. LABERGE: Pardon?
M. LE PRESIDENT: Ou dans 24 heures.
M. LABERGE: Ce n'est pas la même chose, c'est un autre jour. Je
pense que vous allez comprendre cela.
M. LE PRESIDENT: Le président a établi cet avant-midi
qu'à 5 h 30 nous devions cesser nos délibérations pour la
journée. On m'a indiqué, avant la séance, que certaines
personnes ici présentes devaient s'absenter à quatre heures si
possible. Je respecte les demandes de part et d'autre, et du côté
du public et du côté des membres de la commission. Dans le moment,
la parole est au député de L'Assomption, tout en reconnaissant
les droits de la FTQ, de M. Laberge en l'occurrence.
M. LABERGE: Nous n'avons pas les mêmes procédures
parlementaires. Moi, je pensais qu'une question de privilège,
c'était toujours dans l'ordre...
M. LE PRESIDENT: Je la reconnais.
M. LABERGE: ... et que le président ne pouvait pas la refuser
avant de l'avoir entendue.
M. LE PRESIDENT: Je ne vous la refuse pas; j'ai entendu votre
commentaire et je vous l'ai accordée. J'ai reconnu vos commentaires.
J'ai dit que vous auriez le droit de réplique. Alors, que peut-on avoir
de plus? Le député de L'Assomption.
M. PERREAULT: M. le Président, comme mes remarques s'adressaient
aux deux centrales syndicales, j'attendrai que la FTQ ait comparu pour les
exprimer.
M. LE PRESIDENT: Je vous remercie. Je reviens à l'ordre,
messieurs. Ce matin, vous étiez tous présents lorsque j'ai
appelé, au début de la séance, la Fédération
de la construction du Québec. Est-ce qu'il y a représentation de
cette association ici, cet après-midi? Non.
Deuxièmement, M. Jacques Daigle, parlant au nom de l'Association
des entrepreneurs en construction de Brome, Missisquoi, Shefford, a
demandé d'être entendu cet après-midi. Est-il ici ou est-ce
qu'il y a représentation de la part de son association? Est-ce qu'il y a
quelqu'un qui serait prêt à faire des commentaires en ce qui
concerne votre mémoire? Si oui, approchez-vous de la table; nous
commençons immédiatement.
M. Pepin, je vois que vous vous préparez à sortir.
Serez-vous de retour demain?
M. PEPIN: Je peux revenir, si les députés le veulent.
M. LE PRESIDENT: On me dit qu'il y a certaines questions encore.
M. PEPIN: Pour autant que ce ne serait pas demain matin, parce que nous
devons être à la table centrale de négociations du secteur
public demain matin, à dix heures.
M. LE PRESIDENT: Je pense que la commission et les membres reconnaissent
cela. Demain après-midi et jeudi?
M. PEPIN: Je reviendrai sûrement, avec plaisir.
M. LE PRESIDENT: Pour l'Association des entrepreneurs en construction de
Brome, Missisquoi, Shefford Inc., qui sera celui qui s'adressera à la
commission?
M. DAIGLE: Nous sommes trois personnes. Avez-vous objection à ce
que nous fassions l'énoncé à trois?
M. LE PRESIDENT: Il n'est pas question de lire le mémoire, mais
de le commenter.
M. LABERGE: M. le Président...
M. LE PRESIDENT: Un instant, s'il vous plaît. Dans le cas de votre
mémoire, est-ce qu'il est question que les trois personnes se partagent
la tâche?
M. DAIGLE: Oui.
M. LE PRESIDENT: Il n'est pas question de lire le mémoire, mais
de le commenter, parce que nous en avons des copies. D'accord?
M. LABERGE: M. le Président, avant que vous passiez à un
autre mémoire où il y aura d'autres questions, je reviens
à la charge avec ma question de privilège pour vous dire ce qui
s'est passé sur cette question du régime de
sécurité d'emploi dans l'industrie de la construction et
expliquer la position de la FTQ, parce qu'il y a eu quand même, sinon des
accusations, du moins des remarques qui ont été faites. Je ne
dirai pas qu'elles méritent d'être expliquées.
M. LE PRESIDENT: Vous avez un mémoire.
M. LABERGE: Nous avons un mémoire qui ne traite pas de ça,
parce que nous n'étions pas censés en traiter. Nous traitons de
la sécurité d'emploi, mais d'une autre façon
complètement.
M. LE PRESIDENT: Mais, à l'occasion de la présentation de
votre mémoire, qui sera faite au moment que vous choisirez, vous ferez
vos observations sur ce qui aurait pu être dit auparavant et qui serait
contradictoire à ce que vous présentez. Je pense que c'est
logique.
M. LABERGE: Alors, M. le Président, ce que vous me refusez le
privilège de dire ici, je le dirai tantôt. C'est tout.
M. LE PRESIDENT: Très bien. Nous ne refusons rien.
M. LABERGE: Ce ne serait pas difficile de faire la même chose,
mais enfin.
M. LE PRESIDENT: Nous procédons avec une certaine méthode
et un certain ordre. Tout ce que je demande, c'est la coopération de
tout le monde, ainsi, tout le monde sera entendu.
Messieurs, vos noms, s'il vous plaît, et le nom de votre
association?
Association des entrepreneurs en construction de
Brome, Missisquoi, Shefford Inc.
M. DAIGLE: Jacques Daigle, pour l'Association de Shefford, Brome et
Missisquoi.
M. GREGOIRE: Normand Grégoire, N. Grégoire construction
Inc., vice-président et président du comité des
débats.
M. DAGENAIS: Léo Dagenais, président de l'Association des
entrepreneurs en construction de Brome, Missisquoi, Shefford.
M. LE PRESIDENT: Allons-y.
M. DAIGLE: En ce qui concerne la sécurité d'emploi, depuis
les dernières années, on a augmenté sans cesse le
coût de la construction. Là, nous en sommes rendus à un
point où on se demande si le consommateur a le moyen de se payer les
fruits de notre produit.
Le coût, actuellement, dans la construction, qu'on établit
d'après ce que le consommateur est capable de payer, est très
élevé. Si, par la sécurité d'emploi, nous sommes
obligés d'augmenter encore les coûts, on se demande ce que
pourraient avoir, en retour, du gouvernement, tous les individus ici au
Québec, afin qu'ils
puissent se loger ou qu'ils puissent avoir le droit d'avoir un bureau
pour travailler ou une industrie.
Je crois que c'est la chose la plus importante à discuter
présentement. C'est beau de vouloir adopter des lois, c'est beau de
vouloir donner des avantages sociaux à tout le monde. Mais, par contre,
il faut toujours penser qu'il y a un consommateur. Nous voyons
présentement le décalage entre le taux horaire payé dans
l'industrie manufacturière et celui de la construction. On se demande
où ça va finir.
Au Québec, si on a une industrie qui n'a pas de concurrence
internationale, on peut payer nos hommes $8, $10 ou $12 l'heure, tout en
faisant la même construction. Mais le type qui travaille dans une
industrie de chaussures qui exporte son produit, est-ce que le président
de la manufacture a le moyen de lui donner les $8 l'heure pour qu'il puisse
acheter, en retour, notre produit? Je crois que c'est une question à
laquelle il est assez difficile de répondre.
Ce n'est pas en augmentant toujours les coûts, soit par les
avantages sociaux ou par les taux horaires que je crois qu'on résoudra
les problèmes. On va se réveiller un bon matin où la
construction ne sera plus rentable au Québec à part
peut-être des acheteurs éventuels, comme les municipalités
ou les gouvernements fédéral ou provinciaux.
Mais dans l'entreprise libre, on ne croit pas réellement que les
gens vont pouvoir se payer le luxe d'acheter notre produit.
M. COURNOYER: Juste un instant. J'aimerais poser une question. En quoi
la sécurité d'emploi augmente-t-elle vos coûts, pour le
moment, telle que conçue ou telle qu'aperçue dans
l'arrêté ministériel no 2711?
M. DAIGLE: La sécurité d'emploi, elle-même, c'est
d'assurer aux travailleurs du travail-heure et d'assurer aussi un certain
salaire au bout d'un an.
M. COURNOYER: Mais, dans l'état actuel de la législation
ou des arrêtés ministériels. Je prends
l'arrêté no 2711 qui cherche à identifier qui est
travailleur de la construction, premier but de l'arrêté no 2711.
Comment fait-on pour identifier un travailleur de la construction? Le moyen
qu'on a choisi, c'est de comparer le nombre de ses heures de travail à
celui qui est fourni dans l'industrie de la construction, dans une
période, bien sûr, antérieure au moment où on parle.
S'il a fait 1,200 heures, dans douze mois, cela ressemble à un
travailleur de la construction. Cela n'a pas l'air d'un gars qui est
cultivateur et qui vient faire un tour dans l'industrie de la construction.
Cela n'a pas l'air d'être un occasionnel qui a besoin de travailler. Ce
n'est pas celui-là. On veut identifier les travailleurs de la
construction. Le seul moyen de donner une sécurité d'emploi, en
fait, ce n'est pas de le garder à l'emploi, c'est de lui donner une
priorité à l'emploi sur toute person- ne qui n'est pas un
travailleur de la construction.
Pour commencer, il faut donc identifier qui est un travailleur de la
construction, et une fois ceci fait, on a des mécanismes, à
savoir: quand un travailleur de la construction n'a pas d'emploi, il a une
préférence ou une priorité d'emploi sur celui qui n'est
pas un travailleur de la construction. Qu'il s'appelle réserviste ou
autrement, cela n'a pas tellement d'importance pour le moment. Celui qui n'est
pas un travailleur de la construction ne peut prendre l'emploi de celui qui en
a un et qui gagne sa vie dans la construction.
C'est la priorité d'emploi telle qu'elle est envisagé
à peu près par l'arrêté en conseil 4119 pour donner
une chance aux permanents avant d'en donner une aux réservistes, pour
donner une chance aux réservistes avant d'en donner une aux autres,
l'autre catégorie qu'il y avait. C'était cela la priorité
d'emploi ou la sécurité d'emploi. Ce n'est pas de la
sécurité d'emploi. On a appelé cela sécurité
d'emploi parce que c'est la seule forme de sécurité d'emploi
qu'on peut donner aux gens. On a dit: Priorité à l'emploi quand
il y a du travail. Vous avez priorité parce que vous êtes un
travailleur de la construction. Si vous n'en n'êtes pas un et qu'il y a
des travailleurs de la construction qui ne sont pas au travail, on va faire
travailler d'abord les gars de la construction. C'est la priorité
d'emploi. C'est pourquoi je vous pose la question. Tel que c'est conçu
actuellement ou tel que cela peut être modifié aussi, en quoi la
priorité d'emploi ou la sécurité d'emploi devient-elle un
bénéfice marginal plus coûteux qu'autrement? Vous me dites
qu'on augmente les coûts d'une façon telle que les gens ne sont
plus capables d'acheter votre maison. En particulier, vous vous
référez aux taux de salaires très élevés,
mais vous parliez d'abord et avant tout de la priorité d'emploi. Je vous
pose la question sur la priorité d'emploi. En quoi cette priorité
d'emploi cause-t-elle une augmentation de vos coûts qui n'est pas
déjà causée par une augmentation du coût horaire
très élevé qu'on retrouve dans l'industrie de la
construction depuis particulièrement qu'on a essayé de planifier
ou d'ajuster les salaires au taux de Montréal? Faites-vous une
distinction entre les deux ou si, en fait, c'est le coût horaire qui vous
coûte de l'argent?
M. DAGENAIS: C'est plutôt le coût horaire qui entre en ligne
de compte dans le moment.
M. COURNOYER: Si vous trouviez une méthode pour réduire le
coût horaire, vous seriez heureux?
M. GREGOIRE: Il y a autre chose qui entre en ligne de compte aussi.
C'est la qualification. Supposons que vous ayez cinq ouvriers sur un chantier
et seulement un apprenti. C'est la limite qui a été
donnée. Avoir peut-être trois apprentis pour cinq personnes
qualifiées, cela
abaisserait le coût. Mais, aujourd'hui, on limite les compagnons
sur un seul chantier. Exemple: Une petite maison; c'est plutôt rare que
vous aurez plus de quatre ou cinq menuisiers. Cela veut dire que ce sont
toujours les menuisiers à haut prix qui construisent. Je me demande, de
la façon que cela fonctionne, où nous irons chercher nos gens
qualifiés dans quelques années si nous ne pouvons pas former de
jeunes avec les ouvriers que nous avons à l'heure actuelle à
notre emploi.
M. COURNOYER: C'est la recherche que nous faisons depuis le matin. On
doit planifier notre main-d'oeuvre en fonction des besoins. A un certain
moment, vous pouvez décider que le rapport apprenti-compagnon est
établi de un à cinq. Mais vous pouvez très bien
décider que, compte tenu des besoins de la main-d'oeuvre dans quatre
ans, on est obligé de le mettre un à quatre, un à trois et
un à deux, parce que, effectivement, on a besoin de plus d'apprentis.
Mais sans planification ou sans expectative de ce qui peut se produire dans
telle ou telle région, pourquoi nous donneriez-vous l'obligation comme
gouvernement, de former des individus après quatre ans d'apprentissage
pour les sacrer en chômage après?
M. GREGOIRE: A l'heure actuelle, dans notre région, nous avons
tellement de difficultés à avoir de la main-d'oeuvre que je me
suis référé à vous. J'ai déjà
envoyé un télégramme disant que nous avions besoin de 35
à 40 hommes. Nous n'avons pas pu en trouver dans notre domaine. Il a
fallu attendre et demander des prolongations aux propriétaires. Je pense
que, à l'heure actuelle, c'est une chose assez grave que nous
subissons.
M. COURNOYER: Je comprends cela mais pourquoi cela serait-il l'individu
qui la subirait? Le rôle du gouvernement ici, c'est d'en faire subir le
moins possible aux individus qui composent notre société. Il y a
des individus qui vont travailler dans l'industrie de la construction. Je pense
que cela se découvre dans la province de Québec, les rapports du
comité conjoint sont assez clairs, une différence fondamentale
existe entre les régions urbanisées comme Québec et
Montréal et les régions semi-rurales ou plus
éloignées comme la vôtre en particulier. Il y a donc des
besoins qui peuvent être totalement différents dépendant
des époques. Mais, pour établir ces besoins, nous avons
l'obligation, comme gouvernement, d'avoir au moins un inventaire qualitatif et
quantitatif de la main-d'oeuvre. Jusqu'ici, il n'y a rien qui vous a
empêché de recruter de la main-d'oeuvre sauf que c'est plus
difficile. Obtenir des permis de travail, ceux qui sont ici et qui
représentent des mouvements syndicaux vous diront qu'il n'y a rien de
plus facile. Quand la Commission de l'industrie de la construction ne vous en
donne pas, vous en appelez au ministre et il vous les donne.
M. GREGOIRE: Mais c'est toujours l'entrepreneur qui paie le coût.
Il est obligé d'aller en chercher dans d'autres régions. C'est
une chose qui nous est arrivée assez régulièrement cette
année d'être obligé de faire venir de la main-d'oeuvre
d'une autre région et de payer le transport.
M. COURNOYER: Assez régulièrement?
M. GREGOIRE: ... assez régulièrement, cette année,
d'être obligé de faire venir de la main-d'oeuvre d'autres
régions et de payer le transport, de payer même le logement et
ainsi de suite. Je pense qu'on est toujours pénalisé quand il
s'agit de trouver de la main-d'oeuvre, dans la province de Québec. Si
cela dure deux ou trois ans, ce sera l'entrepreneur qui paiera la note.
M. COURNOYER: Mais avez-vous déjà pensé que
l'individu qui se déplace je ne suis pas en train de faire un
gros débat avec vous qui part de Montréal pour aller
travailler à Granby a aussi des coûts additionnels, parce qu'il se
déplace pour aller chercher la construction là où elle
est? Vous avez un besoin; il a un besoin. Le mariage des deux besoins se fait
suivant un certain coût.
M. GREGOIRE: M. le Président, ce sont tous des facteurs qui
apportent des coûts considérables dans le domaine de la
construction.
M. COURNOYER: D'accord.
M. GREGOIRE: Comme le 'disait mon confrère tantôt, M.
Daigle, cela s'ajoute au salaire horaire, aussi, de l'ouvrier.
M. COURNOYER: D'une façon pénible, quand il s'agit de la
construction résidentielle ou domiciliaire. Ce qui m'a le plus
frappé dans ce que vous avez dit les députés des
régions environnantes de Québec et d'autres
députés, aussi, me l'ont mentionné à plusieurs
reprises c'est que, tant et aussi longtemps que le taux de salaire de
celui qui travaille dans une manufacture de chaussures sera aussi bas qu'il
l'est actuellement, il est impensable d'espérer que cet individu pourra
se permettre d'acheter le produit que vous vendez, vous, comme entrepreneur et
que les individus qui travaillent pour vous sont obligés de vendre, eux
aussi. Lorsqu'ils vendent leurs services, ils les vendent à vous. C'est
ce qui fait la composition de vos coûts. Je viens des
Iles-de-la-Madeleine, mais le député n'est pas ici. Quand le
salaire horaire d'un type qui travaille dans une poissonnerie, aux Iles, est
à $1.63, il ne faut pas s'attendre qu'il soit capable de payer le
salaire d'un plombier, à $6 l'heure, assez facilement. Il dit: J'ai
mangé la moitié de ma semaine.
M. DAIGLE: Ensuite, il y a un autre problè-
me qui sévit là-dedans, c'est que les gens qui ont besoin
d'entretien de maison n'ont plus les moyens de faire venir un entrepreneur chez
eux. Nous passons pour des voleurs, à ce moment-là.
M. COURNOYER: Vous avez une tendance assez marquée
peut-être pas vous à mettre la faute sur le
ministère du Travail: C'est le ministère qui a fait cela, c'est
le décret. C'est le ministre qui exige ces prix-là. Ils sont
venus chez nous et ils m'ont dit que c'était le ministre! C'est aussi
simple que cela. Ils m'ont dit: C'est le ministre qui a fait cela. Avec un
apprenti et un profit au-dessus de cela, un "overhead", c'est $12 l'heure que
cela coûte, un plombier, à Montréal. Ma femme a dit: Cela
coûte bien trop cher. Cela n'a pas d'allure. On lui a dit: Parle de cela
au ministre parce que c'est le ministre qui a fait cela.
M. DAIGLE: Oui, mais pensez-vous que c'est raisonnable qu'un homme
travaille dans une industrie, dix heures dans sa journée, pour faire
environ $18 et, qui, lorsqu'il fait venir un plombier chez lui, avec un
"helper", environ une demi-heure, cela lui coûte $16? A ce
moment-là, il y a quelque chose qui ne marche plus quelque part.
M. COURNOYER: Oui, cela ne marche plus. Nous sommes d'accord tous les
deux. D'accord, c'est clair, pour vous et moi, que cela ne balance plus. Quand
nous tentons de donner une sécurité d'emploi ou une
priorité d'emploi, je vais déclarer, pour la première
fois, ce que je recherche, mais les autres ne le recherchent peut-être
pas en même temps que moi, cependant. Ce que je recherche, c'est un
contrôle, pas de la part du gouvernement, mais de la part des gens qui
négocient, pour dire: Ecoute, les taux de salaire horaire ce sont
ceux que vous exigez de l'individu sont tellement élevés
que cela n'a plus d'allure. Nous ne sommes plus capables de vendre notre
service. Voulez-vous, nous allons les maintenir plus bas?
Je comprends que cela ne fait pas l'affaire de M. Desjardins et des
représentants syndicaux de dire : On va maintenir les taux plus bas. On
ne les descendra probablement jamais. Mais, quand vous aurez l'assurance que
l'individu qui travaille dans cette industrie peut gagner décemment sa
vie, sur une base annuelle, on peut espérer, on peut énoncer le
voeu, comme gouvernement, vous, comme entreprise, et les individus comme
travailleurs tous les individus, pas seulement ceux de la construction
que les coûts horaires auront tendance à se normaliser
quelque part, compte tenu des besoins du marché.
Vous pensez peut-être que c'est de l'utopie. Moi, je dis que cela
arrivera lorsque des individus feront $12,000 par année dans l'industrie
de la construction, ce qui est possible avec les taux de salaires horaires. Un
type qui travaille 2,000 heures, il fait de l'argent. Regardez les chiffres. Ce
n'est pas moi qui ai inventé ces chiffres-là. Regardez-les. Des
salaires horaires même aussi élevés que ceux qui existent
dans l'industrie de la construction ils sont même moins
élevés, et de beaucoup, que ceux qu'on retrouve ailleurs, j'en
conviens ne donnent pas un revenu annuel suffisant pour les gars de la
construction. Par ailleurs, vous allez en trouver qui font $14,000, $15,000 et
$20,000.
M. DAIGLE: Ici, dans les statistiques, je peux vous dire que tous les
"opérateurs" de machinerie lourde, qui travaillent environ quatre mois,
l'été, peut-être deux mois à l'entretien des
machines dans les garages, et peut-être quatre mois au déblaiement
de la neige.
Mais les 2 mois au déblaiement de la neige et les 2 mois dans le
garage lui-même pour réparer la machine pour le printemps suivant
ne paraissent pas dans le décret. Cela ne paraît pas non plus au
ministère du Travail. Ce sont des chiffres...
Ensuite, le relevé, le vrai inventaire, qu'il est possible
de faire pour tous les travailleurs de l'industrie de la construction,
c'est de relever leurs T-4. Vous allez avoir le vrai salaire.
M. COURNOYER: Des 120,000?
M. DAIGLE: Prenez le 1/20 de 70,000 et vous allez voir si les chiffres
que nous avons énoncés ce matin sont réels.
M. COURNOYER: Les chiffres ne peuvent pas...
M. DAIGLE: Moi, si j'engage quelqu'un comme conducteur de bélier
mécanique, il va travailler durant 4 ou 5 mois l'été, mais
il peut travailler dans le garage 2 ou 3 mois pour l'entretien de la même
machine. Ensuite, il peut travailler au déblaiement de la neige pour 3
ou 4 mois. Cela ne paraît pas dans les statistiques de l'industrie de la
construction.
UNE VOIX: M. le Président...
M. LE PRESIDENT: Un instant, s'il vous plaît. Je ne voudrais pas
que la discussion qui est en cours dégénère en
débat enflammé de part et d'autre. Je pense qu'il y a un droit de
l'association qui présente le mémoire de répondre à
ces questions qui sont posées par les membres de la commission.
J'ai une demande de la part d'un autre monsieur assis à la table
devant moi, qui veut faire un commentaire. Pourriez-vous vous nommer, pour le
journal des Débats?
M. DESJARDINS: Mon nom est André Desjardins, de la FTQ. Je crois
que quand j'ai été convoqué ici, il y avait un ordre du
jour. Je n'y ai jamais vu qu'on préparait les négociations, du
tout. Présentement, je crois que c'est un problème de
négociations pur et simple.
M. LE PRESIDENT: Vous avez peut-être rai-
son, mais j'entends quand même la délibération qui
se fait. Et j'écoute attentivement, je vous assure.
UNE VOIX: Il vous a laissé tranquille.
M. DESJARDINS: M. le Président, il ne peut pas m'avoir
laissé tranquille, je n'ai pas parlé.
M. LE PRESIDENT: Tout ce que je demande, c'est qu'on attende chacun son
tour et chacun aura le droit de parler, de faire ses commentaires sur le sujet
qu'il voudra, pourvu que ce soit à l'intérieur des
décrets. C'est ce que je surveille, tout simplement. J'ai enlevé
la parole au ministre, je pense.
M. COURNOYER: Avec toute déférence, M. le
Président, vous aviez raison de m'enlever la parole.
M. LE PRESIDENT: Si vous avez terminé, je passe au
député de Saint-Maurice qui a demandé de faire ses
commentaires.
M. DEMERS (Philippe): Dans la sécurité d'emploi, M. Daigle
vous avez semblé tantôt dire que vous étiez obligé
de garder un employé à l'année. Non?
M. DAIGLE: Pas nécessairement. Il faut que l'employé fasse
un minimum de salaire.
M. DEMERS (Philippe): Oui, mais comment dans ce cas-là, si vous
n'êtes pas obligé de garder l'employé quand vous n'avez
plus d'ouvrage, la sécurité d'emploi peut-elle augmenter le
coût de la construction? Vous avez dit que la sécurité
d'emploi en augmentait le coût. Je voudrais savoir comment elle peut
l'augmenter. Que vous engagiez un homme qui a le droit de travailler ou un
autre qui n'a pas le droit de travailler, vous les payez tous les deux quand
même.
M. DAIGLE: Dans les comtés semi-ruraux, vous avez une
construction qui va être d'environ 80 p.c. supérieure, du mois de
mai au mois de novembre, à ce qui se passe l'hiver. C'est une
mentalité établie chez les gens depuis de nombreuses
années. Pourquoi? Parce que l'hiver, à l0o ou
15o sous zéro, vous n'êtes pas capables de faire une
construction au même coût que l'été. Dans les
comtés semi-ruraux ou ruraux, vous avez surtout de la construction
domiciliaire.
Dans les villes de Québec et de Montréal, on n'a pas le
même problème. Quand vous prenez un édifice en hauteur
comme il s'en fait ici présentement devant le parlement, il n'y a pas de
problème. C'est un contrat de deux ans ou d'un an et demi. Il n'est pas
question de saison. Mais, dans nos comtés, il est question de saison.
Parce que si nous travaillons durant l'hiver, cela augmente le coût et
nous nous apercevons que l'acheteur n'a pas le moyen de payer cette
augmentation. C'est pourquoi nous travaillons plus fort
l'été.
L'été, par exemple, nous avons une pénurie de
main-d'oeuvre, parce qu'il y a un rôle quantitatif à la
main-d'oeuvre que nous voulons établir. Si l'été nous
avons besoin, dans l'industrie de la construction pour nos 3 comtés, de
1,200 hommes et que l'hiver il y a de l'ouvrage pour 200, de quelle
façon pouvons-nous donner de l'ouvrage aux 1,000 autres?
M. DEMERS (Philippe): Mais ça ne vous coûte pas plus
cher.
M. DAIGLE: Cela ne nous coûte pas plus cher, mais seulement...
M. DEMERS (Philippe): Quand les gens ne travaillent pas vous ne devez
pas les payer, je suppose, ça doit être comme ailleurs.
M. DAILGE: Non, mais je croyais que dans les rapports on demandait aussi
d'avoir une garantie de salaire pour les ouvriers de la construction.
M. DEMERS (Philippe): Non, il n'est pas question de ça du tout et
dans le décret non plus.
Le décret spécifie qu'on doit faire travailler les gens
qui sont reconnus qualifiés, enregistrés, et qui ont des cartes
de compétence, un point c'est tout. Puis ça quand il n'y a pas
d'ouvrage, ils ne sont pas obligés de les prendre.
M. COURNOYER: Personne.
M. DEMERS (Philippe): Cela ne coûte pas plus cher, quand un gars
ne travaille pas il n'est pas payé, quand il travaille il produit. Moi
c'est comme ça que je comprends ça. S'il y a une autre raison que
vous pouvez me donner en me donnant des explications, je vais m'y rallier, mais
actuellement, je ne vois pas du tout comment la sécurité d'emploi
peut augmenter le coût de la construction.
M. DAIGLE: Moi je croyais que, dans le bill 49, il était question
de garanties de salaire, je ne sais pas si je fais erreur.
M. COURNOYER: Non. Aucunement. Ce dont il est question...
M. DEMERS (Philippe): Cela peut se faire actuellement avec le front
commun pour autre chose.
M. COURNOYER: Oui, mais ce dont il est question, soyons clairs, dans
l'arrêté 2711, c'est que le comité conjoint étudie
une formule de stabilisation du revenu des travailleurs de la construction,
c'est tout.
M. DAIGLE: C'est parce qu'on vous en
parle, nous, actuellement, plutôt que de recevoir la loi dans six
mois d'ici puis venir vous voir après que la loi sera
adoptée.
M. COURNOYER: Non je n'ai pas d'objection à ce que vous en
parliez, mais si vous me dites, par exemple, que l'intention du gouvernement
c'est de donner la garantie de salaire dans l'industrie de la construction, je
vous dis non.
M. DAIGLE: Cela se fait comment?
M. LE PRESIDENT: Le député de Chicoutimi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'aimerais avoir
quelques renseignements, M. Grégoire, ou l'un de vous, là. Vous
représentez une association, l'Association des entrepreneurs en
construction Brôme-Missisquoi-Shefford Inc. Combien y a-t-il
d'entrepreneurs dans votre association?
M. GREGOIRE: Il y en a 138 d'enregistrés à l'heure
actuelle.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): 138 entrepreneurs. Bon, maintenant, vous avez
parlé tout à l'heure de cette question de coût. Moi je
voudrais savoir, selon les calculs que vous avez faits, puisque vous êtes
venus ici pour discuter de ce problème de sécurité
d'emploi avec nous, vous avez évoqué le problème des
coûts en pourcentage selon les calculs que vous avez dû faire,
quelle peut-être cette augmentation de coût qu'entraînerait
la sécurité d'emploi ou la priorité d'emploi, pour parler
plus exactement? Est-ce que vous avez fait des calculs là-dedans?
M. GREGOIRE: Entre 12 p.c. et 20 p.c. du salaire horaire actuel.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Entre 12 p.c. et 20 p.c. du salaire horaire
actuel. Maintenant, est-ce que votre association accepte les taux qui sont
déterminés par règlement, décret, etc. pour les
diverses catégories de travailleurs du bâtiment?
M. GREGOIRE: Les taux existants à l'heure actuelle, nous sommes
obligés réellement de les accepter, mais de la manière que
ça va là, nous ne sommes pas prêts à accepter de
payer le taux de Montréal et de Québec. La région des
Cantons de l'Est, c'est-à-dire nos trois comtés, ce n'est pas une
région comme les autres. Si la province n'est pas comme les autres, nous
ne sommes pas une région comme les autres. C'est plutôt rare qu'on
va voir des bâtiments agricoles se bâtir sur la rue
Sainte-Catherine, sur la rue Dorchester à Montréal.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, en pratique, ce qui vous
préoccupe, à l'heure actuelle, c'est que lorsque vous avez besoin
de faire appel à une main-d'oeuvre qui vient de l'extérieur, cela
dérange vos projections en termes de coût, et c'est pour ça
que vous parlez d'une augmentation de coût d'un pourcentage de 12 p.c.
à 20 p.c.
Maintenant, je vais vous poser une autre question. Dans le cas des
associations que vous regroupez, quels sont, grosso modo, pour l'année
passée ou pour l'année en cours, vos besoins en main-d'oeuvre et
quel est le pourcentage de main-d'oeuvre que vous devez importer parce que vous
ne la trouvez pas dans votre région?
M. GREGOIRE: Dans les trois comtés, nous avons employé
environ 1,200 à 1,500 personnes, c'est-à-dire qu'il nous a
manqué de 400 à 500 personnes dans les trois comtés, selon
les 138 entrepreneurs qui se sont plaints à l'association de la
pénurie de main-d'oeuvre et de la difficulté qu'ils ont eue
à trouver des menuisiers ou journaliers durant tout le cours de
l'été.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): L'association regroupe, vous avez dit,
au-delà de 100 entrepreneurs. Alors vous faites de la construction dont
notamment de la construction résidentielle, des maisons, et vous
prétendez que cette augmentation de coût, si on appliquait
là les exigences de la priorité d'emploi, vous empêche de
trouver preneurs pour les maisons que vous bâtissez.
M. GREGOIRE: C'est justement la mentalité.
Notre mode de vie à nous dans les comtés ruraux n'est pas
d'habiter dans des maisons en hauteur, des gratte-ciel ou des tours comme on
peut en voir dans la ville de Montréal ou dans la ville de
Québec, mais dans des maisons individuelles. Cette sorte de maison, on
la bâtit pour un travailleur du textile, de la chaussure, du
vêtement. Plus ça ira, plus le coût de la maison sera
élevé. Dans quelques années, d'après les
statistiques, ce sera assez dur pour ces gens-là d'avoir un foyer.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Si je résumais vos propos vous
me corrigerez si je me trompe le problème de la priorité
d'emploi vous préoccupe parce que cela a une incidence importante sur
les coûts, de 12 p.c. à 20 p.c, dites-vous. Cela parce que vous
êtes obligés d'importer une main-d'oeuvre de l'extérieur,
soit des grandes régions de Québec ou de Montréal, et de
payer davantage les employés dont vous avez besoin.
Vous êtes ici, pour nous faire savoir cela, mais j'imagine que
vous n'êtes pas venus ici simplement pour nous informer, mais aussi parce
que vous avez envisagé des solutions que vous proposez à la
commission ou au ministre, au gouvernement. Quelles seraient, selon vous, les
solutions qui permettraient de répondre à vos besoins, de
régler votre problème sans, d'autre part, chambarder tout le
système que,
très péniblement, on est en train de monter pour
régler le problème général de l'industrie du
bâtiment au Québec via le ministère du Travail? Avez-vous
des solutions concrètes à nous proposer aujourd'hui?
M. GREGOIRE: Les villes de Québec et de Montréal comptent
des constructions immenses que le milieu rural ne peut pas se payer. S'il y a
un nouveau décret qui émet de nouvelles conditions sur la
sécurité d'emploi, avec tout le nouveau mécanisme qui
entrera en ligne de compte, les régions rurales ne sont pas prêtes
à le payer; elles ne peuvent pas payer cela.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Cela voudrait-il dire, M. Grégoire, que
vous pensez demander au gouvernement ou à cette commission de concevoir
un système qui serait à deux volets, de telle sorte que
l'industrie du bâtiment aurait des normes pour les grands centres et des
normes différentes pour les centres ruraux, semi-ruraux, semi-urbains?
J'habite une région qui est dite semi-rurale et je sais que des
problèmes analogues se posent, mais est-ce une solution que vous
suggérez au gouvernement? Dans le cas où vous suggéreriez
une solution comme celle-là, comment pouvez-vous l'articuler à
l'ensemble des mécanismes que le gouvernement a commencé de
mettre en place?
M. GREGOIRE: Pourquoi nos voisins des Etats-Unis dans l'industrie
lourde, qu'on peut appeler la grosse industrie, peuvent-ils avoir un
mécanisme plus serré, un mécanisme plus poussé qui
entraîne des coûts énormes, alors que, dans la petite
entreprise, c'est la liberté de l'entrepreneur et de l'individu qui veut
travailler?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je ne comprends pas très bien ce que
vous me dites là. Pourriez-vous expliciter votre pensée? Je ne
comprends vraiment pas l'analogie qui peut exister.
M. LE PRESIDENT: Un instant, s'il vous plaît. Je voudrais qu'on
comprenne dès maintenant que je n'accepterai aucune expression de la
part de l'assistance, soit favorable ou défavorable à des
commentaires. Nous sommes à une commission sérieuse et je
voudrais qu'on s'en tienne aux commentaires entre les personnes qui se
présentent devant la commission et les membres de la commission.
Si quelqu'un dans l'assistance a des idées contraires ou
similaires, il aura le privilège de s'exprimer librement devant les
membres de la commission, mais aucune manifestation, s'il vous plaît.
Sans ça je devrai agir autrement que nous ne l'avons fait depuis
le début.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors je reprends, M. le Président,
avec votre permission, la question que je posais à M. Grégoire.
Vous m'avez parlé d'une situation qui existerait aux Etats-Unis;
pouvez-vous m'expliquer exactement quelle est cette situation et de quelle
façon, par analogie, on pourrait l'appliquer au Québec, dans le
domaine précis de l'industrie du bâtiment?
M. GREGOIRE: Dans le bâtiment résidentiel à l'heure
actuelle au Québec, si nous devons payer dans toutes les régions
le même taux de salaire, c'est là qu'on verra commencer les
difficultés. Si, sur l'île de Montréal, on érige une
grosse bâtisse, un pont, un viaduc au coût de $2 millions ou $3
millions, un chantier peut peut-être absorber les salaires actuels ou
d'autres salaires. Mais je crois que l'industrie de la construction de petites
maisons ne peut pas absorber des coûts uniforme à travers la
province de Québec. Il devrait y avoir une différence entre les
gros et les petits chantiers. Il y a la maison domiciliaire et les chantiers
qu'on peut appeler manufacturiers d'envergure.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Aux Etats-Unis, pour reprendre l'exemple que
vous aviez commencé à donner, quelle est exactement cette
situation qui vous paraîtrait peut-être non pas idéale mais
pouvoir s'appliquer à la situation du Québec? C'est un exemple
que vous avez commencé de donner et je voudrais savoir ce qui se passe
aux Etats-Unis, ce que vous avez observé aux Etats-Unis,
semble-t-il.
M. GREGOIRE: Dans plusieurs Etats voisins, on peut, si on veut,
travailler dix heures par jour dans la petite industrie. Seuls les gros
chantiers sont syndiqués et obligés de payer un salaire suivant
le décret établi, mais la petite entreprise est libre.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que vous mettez en cause alors tout le
problème de la liberté d'association, liberté syndicale,
etc.? Pourrions-nous conclure de vos propos que vous n'êtes pas en faveur
de la syndicalisation des employés lorsqu'il s'agit d'une industrie de
moindre envergure?
M. GREGOIRE: Les chantiers d'envergure, nous ne sommes pas
opposés â ce qu'ils soient syndiqués, au contraire;
ça prend des formalités des deux côtés, soit de
l'employeur et du syndicat. Mais, sur le petit chantier de trois à
quatre hommes, je vois mal le rôle que jouent les syndicats.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Evidemment, vous comprendrez que je ne puis
pas accepter la proposition que vous faites, si c'est une proposition. Vous
remettez en cause tout le problème de la syndicalisation et du droit des
travailleurs à être membres d'un syndicat pour leur protection,
qu'ils travaillent pour une grande entreprise, pour une moyenne ou pour une
petite.
Alors, voudriez-vous être plus explicite là-dessus?
M. GREGOIRE: M. le Président, nous n'avons aucune objection
à ce que l'employé fasse partie d'un syndicat mais qu'il n'y soit
pas obligé.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Sur le plan du fonctionnement de votre
entreprise, en ce qui concerne son financement, sa rentabilité, quels
pourraient être les effets de cette liberté dont vous parlez pour
les syndiqués?
M. GREGOIRE: Les chantiers d'envergure seraient syndiqués mais un
chantier de moindre envergure pourrait prévoir des salaires
inférieurs à ceux de la grosse entreprise, dans le domaine de la
petite construction. A l'heure actuelle c'est comme ça que ça
fonctionne aux Etats-Unis.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Grégoire, je reviens
là-dessus, vous nous avez dit tout à l'heure que vous deviez
importer de la main-d'oeuvre, 400 personnes, je pense, quelque chose comme
ça. Ces 400 personnes, supposons qu'elles viennent de Montréal,
qu'elles sont syndiquées et qu'elles ont droit au salaire prévu
par les conventions collectives.
Que faites-vous des conventions collectives dans le cas de ces
employés que vous importez ou que vous importeriez?
M. GREGOIRE: M. le député, vous touchez justement un bon
point. A l'heure actuelle, on aurait pu remplir le vide de 400 autres
personnes, des chômeurs de chez nous. J'ai même des voisins, carte
en poche, qui n'ont pu se procurer un permis de travail. Je n'ai pu les
engager. Je peux vous en citer et même vous apporter des faits que nous
avons vécus chez nous. Plusieurs d'entre eux sont chômeurs
malgré eux et sont même des assistés sociaux.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, M. Grégoire, je vais vous
poser une autre question. J'espère que ce sera la dernière,
à moins que vous ajoutiez d'autres commentaires. Croyez-vous qu'un
député comme je suis, comme sont tous mes collègues ici,
accepterait, compte tenu de tout ce que vous proposez, que les employés
dont vous parlez et qui sont chômeurs deviennent vraiment, par le
truchement d'un mécanisme que je ne peux pas accepter, vous le
comprendrez, du "cheap labor" et soient obligés d'accepter des
conditions de travail qui ne soient pas, sinon égales, du moins
équivalentes à celles que reçoivent les travailleurs dans
des régions où il y a beaucoup plus de chantiers et des chantiers
de beaucoup plus grande importance?
Messieurs, je n'ai pas de leçon à vous donner, bien
entendu, mais il me parait qu'avant de nous faire une proposition de cette
nature, il serait extrêmement important que vous réflé-
chissiez aux conséquences sociales des propositions que vous nous faites
et des réactions que pourraient avoir un jour les travailleurs qui se
verraient défavorisés par les conditions de travail qui leur
seraient imposées.
M. DAIGLE: Là-dessus, on se demande pourquoi il y a une multitude
de nos menuisiers, de nos travailleurs dans l'industrie de la construction qui
déménagent au Vermont, au New Hampshire, au Massachusetts, pour
aller travailler dans l'industrie de la construction. Qu'est-ce qui arrive
à ces gens-là? Là-bas, aux Etats-Unis, dans le New Jersey,
dans le Vermont ou dans le Massachusetts, ils ne sont pas obligés de
suivre des conventions collectives.
Ensuite, vous avez parlé du taux de salaire. On paie actuellement
des gens plus cher que d'après les taux du décret. On peut vous
en donner la preuve. On arrive présentement devant un manque de
main-d'oeuvre. Cela fait, autrement dit, entre les entrepreneurs
eux-mêmes, une meilleure... Je ne sais pas, mais si on offre un salaire
plus haut pour avoir des hommes parce qu'on a des chantiers à finir pour
telle date, sinon on a des amendes... Nous avons ici même un reçu
d'un entrepreneur briqueteur qui a osé il a seulement osé
engager son garçon pour aller travailler sur un chantier parce
qu'il y avait pénurie d'hommes et voilà qu'on l'amène
à la cour et qu'on lui fait payer $200 d'amende. A un type qui ose
travailler, on fait payer l'amende! Moi, je me demande où on s'en
va.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je suis d'accord avec vous...
M. COURNOYER: J'aurais une question à poser aussi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... c'est un problème. Maintenant,
lorsque vous parlez des ouvriers de votre région qui vont travailler
dans des Etats américains à des conditions de salaires qui sont
inférieures à celles qu'ils pourraient avoir ici, c'est un autre
problème. Si ces gens-là veulent le faire, c'est leur
problème. Mais en ce qui concerne les travailleurs qui sont au
Québec, qui résident au Québec, je doute fort que le
ministère du Travail favorise une initiative qui irait dans le sens de
l'encouragement au "cheap labor". Ecoutez! A moins que les ouvriers veuillent
absolument accepter cela.
M. DAIGLE: On ne veut en aucune façon du "cheap labor". Je vais
vous le dire bien franchement, en aucune façon. Tout ce qu'on veut,
c'est que lorsque les ouvriers de la construction veulent travailler, on les
laisse travailler. On ne demande pas grand-chose. On demande seulement
ça. Vous allez voir que les $2,600 de moyenne auxquels vous arrivez dans
les statistiques vont remonter rapidement. On demande seulement de les laisser
travailler.
Vous savez qu'on a un gros problème. On
marche avec le temps qu'il fait aussi et c'est un gros facteur dans
notre industrie. Ici, dans le parlement, qu'il pleuve demain matin, qu'il fasse
40 sous zéro après-demain, qu'il y ait trois pieds de neige la
semaine prochaine, cela n'empêche pas les gens de siéger. Mais sur
un chantier de construction, s'il arrive une tempête de neige, les
ouvriers n'entrent pas.
Par contre, s'ils peuvent remplacer leurs heures de travail pendant la
période de mai à décembre où ils peuvent travailler
réellement et qu'ils sont prêts à le faire, qu'ils sont
prêts à travailler plus d'heures, à ce moment-là,
ils auront leur salaire annuel et on n'aura tué personne. On va
seulement aider la main-d'oeuvre, ici au Québec. C'est tout ce qu'on va
faire.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je suis bien d'accord et personne ne le
conteste. D'ailleurs, nous nous sommes réunis ici pour discuter de la
possibilité pour un travailleur de trouver un emploi là où
il y a des emplois disponibles. Nous sommes quand même obligés,
à ce moment-là, de situer le problème dans le cadre des
relations patronales-ouvrières, de tenir compte des décrets, des
normes, des taux établis par le gouvernement à la suite de
négociations souvent difficiles. Les propositions que vous nous faites,
pour possibles je ne dis pas valables qu'elles soient en principe
et même en pratique, ne me paraissent pas pouvoir être
intégrées dans le cadre des mécanismes de nos relations
patronales-ouvrières. J'en appelle au ministre pour qu'il nous dise
exactement ce qu'il pense des solutions que vous nous suggérez. Quant
à moi, je vous avoue que, même si je sais que dans ma
région il y a des problèmes analogues à ceux que vous
évoquez, je ne pourrais pas accepter les propositions que vous faites
parce que je sais qu'à la fin du compte ce sont les travailleurs qui
seraient défavorisés.
M. COURNOYER: Je n'ai pas d'opinion, mais j'ai l'impression que le genre
de discussion que nous avons porte beaucoup plus sur le contenu de la
convention collective et le décret lui-même qui ne sont pas encore
négociés. Vous vous souvenez de l'histoire de ce matin, à
l'effet que le bill 38 a été adopté pour mettre fin
à un conflit, que le gouvernement a imposé un décret, un
autre décret, et un autre décret après coup, pour
remplacer la convention que les parties n'avaient pas pu conclure entre
elles.
Ce décret, bien sûr, peut être critiqué par
tout le monde. C'est normal qu'il en soit ainsi. On peut l'aimer ou ne pas
l'aimer. Seulement, la loi qui existe actuellement donne aux parties le
privilège de négocier une autre convention collective. Vous
faites partie, si je comprends bien, de la Fédération de
l'industrie de la construction, même si vous présentez un
mémoire séparé. Or, la Fédération de
l'industrie de la construction, jusqu'à preuve du contraire, est encore
l'une des parties contractantes à une convention collective qui, comme
on peut l'espérer, cette fois-ci, sera faite par les parties et non par
le gouvernement.
A partir du moment où vous faites partie de cet organisme, je
vous entendrais, mais à une autre époque. Cela serait sur le
contenu de la convention collective qui est en train d'être
négociée. Je ne peux pas remplacer ici la partie syndicale ou la
partie patronale. Il n'est pas question pour nous de présenter des
amendements au décret. Pas du tout. Les négociations devraient
normalement reprendre au mois de janvier, si j'ai bien compris, selon la loi
actuelle et selon le texte de la convention ou du décret actuels.
Ces problèmes que vous avez rencontrés pour la
première fois d'une façon sérieuse, il faut que vous les
gardiez en réserve pour pouvoir expliquer aux représentants
syndicaux, lorsque viendra le temps de modifier les conventions actuelles, que
cela a un effet désastreux sur votre industrie. Cette fois-ci, cela ne
sera pas que des affirmations de votre part. Ce sont des constatations. Pour
une fois, les taux de salaires ont été considérablement
élevés dans vos régions, en particulier lors du dernier
décret. Vous n'avez pas, je pense bien, tous rejoint le taux de
Montréal, mais vous vous en approchez tellement sensiblement qu'on peut
dire que c'est la quasi-parité entre les deux. Là, vous en avez
senti, pendant un certain temps, les effets. C'est à cette
préoccupation que vous devez vous attarder lors du début des
prochaines négociations. Ce n'est pas ici, je pense bien, que nous
allons régler la question des taux de salaires ou de la parité de
salaires, même si c'est un des articles à l'ordre du jour de la
commission parlementaire. Les effets des parités de salaire, c'est aussi
là.
Nous en prenons bonne note ici, parce que, de votre côté,
comme entreprise de construction, vous nous avez mentionné certains
effets néfastes des parités de salaire, c'est à dire des
salaires au taux le plus élevé au Québec.
Mais, prenons notre livre, tournons la page et disons: Il vous reste
encore un point, dans votre mémoire, parce que vous vous étiez
mis à trois. La première partie, les salaires. Je pense bien que
nous pouvons nous satisfaire du fait que ces gens, en particulier, ont
énoncé que cela causait des problèmes sérieux, du
fait que les salaires étaient trop élevés. Quant à
l'autre partie, sur la sécurité d'emploi, j'ai nettement eu
l'impression que, du côté de ceux qui présentaient un
mémoire, on considérait la sécurité d'emploi comme
une garantie d'emploi, sur une base annuelle, et qu'un employé qui
commence à travailler chez vous travaillera toute l'année et vous
le paierez au taux de salaire en question pendant toute l'année. C'est
de cette partie que je dis: Cela vous coûte de 12 p.c. à 20 p.c.
de plus, à moins que ce soit une autre explication.
M. DAIGLE: Non. C'est pour la main-d'oeuvre que nous sommes
obligés d'importer.
M. COURNOYER: Ah oui! C'est parce que vous êtes obligés de
payer la pension en plus.
M. DAIGLE: C'est cela.
M. COURNOYER: Les 12 p.c. à 20 p.c., donc, c'est le chiffre du
montant de la pension, lorsque vous êtes tenus d'aller ailleurs. Encore
une fois, ce n'est pas la sécurité d'emploi mais c'est le fait
que, n'ayant pas de main-d'oeuvre à un endroit, vous allez en chercher
ailleurs. Si vous allez en chercher ailleurs, vous payez les frais de pension
et de transport. C'est une disposition du décret que vous avez tout le
loisir de réviser lors de la prochaine négociation. Il n'y a pas
de décision gouvernementale là-dedans. Selon la loi, c'est aux
parties à négocier leurs conventions collectives. Je
répète que, du côté gouvernemental, on ne peut
qu'espérer que le gouvernement n'aura pas encore à régler
par décret une convention collective dans le domaine de la construction.
On peut penser que, de part et d'autre, vous allez vous comprendre.
Quant au reste, il y a une partie que je n'ai pas entendue. S'il y en a
une autre, ce sera parfait.
M. DAIGLE: Notre plus grande peur, au sujet du rôle quantitatif de
la main-d'oeuvre, c'est que cela devienne une espèce de cartel.
M. COURNOYER: Cela, je pense que nous en avons parlé ce matin. Le
gouvernement doit faire en sorte de ne pas mettre dans les mains des individus
qui peuvent, à un moment donné, exercer un égoisme
collectif des armes qui empêchent le développement
économique du Québec. Mais je pense bien que c'est dans ce
sens que le député de Chicoutimi parle nous ne formerons
pas de la main-d'oeuvre pour votre région juste pour le plaisir de la
former. On va espérer, tout le monde, que lorsqu'on aura formé de
la main-d'oeuvre pour vous, pour vos besoins en particulier, cette
main-d'oeuvre puisse travailler et gagner sa vie chez elle, et honorablement
aussi, aussi honorablement que les autres.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, au moment où le
ministre est intervenu et avec raison, d'ailleurs pour resituer
le problème, je n'avais pas, si vous voulez, tenté de distraire
l'attention de la commission mais, par une suite de questions, j'ai
essayé de savoir pourquoi vous vous inquiétez de la
priorité d'emploi. C'est au moment où je vous ai demandé
quelles étaient les solutions que vous envisagez que nous avons
discuté de tout ce problème de l'emploi, de la façon de
payer, de la syndicalisation, etc.
Je retiens et je pense que c'est l'aspect positif de ce que vous
nous avez dit jusqu'à présent que vous vous
inquiétez de ces gens qui ne trouvent pas emploi chez vous et qui le
pourraient s'il n'y avait pas toutes les tracasse- ries qui existent lorsqu'il
s'agit d'avoir des permis de travail. Je suis parfaitement d'accord avec vous.
Par ailleurs, je suis d'accord avec le ministre, lorsqu'il nous dit que nous
avons un certain nombre de jeunes à former, à diriger vers le
marché du travail mais que nous ne pouvons pas poursuivre un
procédé ad infinitum. Nous devons établir des
priorités, des besoins, des échéanciers, afin que ces gens
qui se préparent à exercer quelque métier que ce soit, qui
touche, par exemple, au domaine du bâtiment , ne se voient pas un jour
fermer la porte parce qu'on a établi, ce dont nous parlions ce matin,
certains contingentements.
Mais je retiens et je vous le dis avec beaucoup de sympathie
la proposition que vous avez faite. Plutôt, je retiens
l'expression d'inquiétude que vous avez formulée, à savoir
que vous vous demandez comment vous allez pouvoir donner du travail à
des gens qui pourraient trouver du travail chez vous et qui, à l'heure
actuelle, en sont privés parce qu'ils ne peuvent pas obtenir ces cartes,
ces permis, qui les habiliteraient à travailler dans votre
région? Je pense vous pourrez me corriger que c'est, au
fond, votre grande préoccupation. L'autre partie, salaires, etc.,
relève de ce que le ministre disait tout à l'heure, la
négociation des conventions concernant les salaires et tout ce qui se
rapporte de près ou de loin aux dispositions des conventions collectives
à intervenir.
M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester.
M. GUAY: Très brièvement, j'aurais quelques questions
à poser. Vous mentionniez tout à l'heure qu'il devrait exister
une classification dans les genres de construction. Nous avons
déjà discuté, à une commission parlementaire, de
cette possibilité éventuelle. Classifier d'une façon
quelconque, probablement ce que vous avez soumis, ce serait entre la
construction domiciliaire, industrielle, commerciale, et ensuite ce qu'on
appelle l'industrie lourde dans la construction: complexes ou grandes
routes.
Vous avez également touché la liberté qui est
exercée dans la petite construction aux Etats-Unis. J'aimerais demander
à l'association que vous représentez le genre de construction
bien spécifique que font les entrepreneurs que vous représentez
aujourd'hui? Est-ce en grande partie domiciliaire, commerciale ou si c'est tout
genre de constructions?
M. DAGENAIS: Dans notre région, c'est en grosse majorité
domiciliaire.
M. GUAY: Etant donné que l'aspect climatique joue assez fortement
dans nos régions, j'aimerais avoir une réponse assez
précise: Est-ce possible pour les entrepreneurs que vous
représentez de continuer en période hivernale de faire de la
construction domiciliaire?
M. DAGENAIS: Pas dans la petite construction.
M. GUAY: Cela semble impossible?
M. DAGENAIS: Parce que le coût est trop élevé.
M. GUAY: Qui entraînerait nécessairement une augmentation
du coût de la construction. Les employés qui travaillent pour les
entrepreneurs que vous représentez travaillent combien de mois par
année? J'inclus les travaux de construction, et vous avez
mentionné que pour plusieurs travailleurs ce travail peut se poursuivre
ensuite pour l'entretien de la machinerie. Mais est-ce que vous avez fait une
moyenne des mois de travail pour l'ensemble des travailleurs qui sont à
votre service?
M. DAGENAIS: Il y a 60 p.c. des entrepreneurs qui travaillent à
l'année avec leurs hommes. Sur un potentiel de 1,500 employés, il
peut y en avoir à peu près 700 qui travaillent l'hiver.
M. GUAY: En période d'hiver, ces employés font quoi?
M. DAGENAIS: C'est parce que l'employeur, ayant divers domaines de
construction... Par exemple, chez moi, j'ai deux ou trois divisions et je peux
envoyer un même employé dans une autre division, ainsi je viens
à bout de garder le plein emploi chez nous à 80 p.c, l'hiver.
Mais dans le domaine domiciliaire, c'est très dur de garder nos gens
à l'emploi, à moins d'avoir d'autres divisions pour les y
envoyer.
M. GUAY: Dans votre mémoire qui est très court,
très clair aussi, vous traitez un petit peu de la qualification. Vous
dites: "C'est l'employeur, en l'occurrence l'entrepreneur en construction, qui
peut le mieux juger de la compétence d'un individu à son emploi."
J'aimerais savoir si les entrepreneurs sont habilités
premièrement à porter un jugement de valeur sur les travailleurs
à leur emploi? Et de quelle façon?
M. DAGENAIS: Si vous arrivez sur un chantier, que vous allez chercher de
la main-d'oeuvre extérieure, que vous avez cinq qualifications
supposées, et que nous arrivent des gars qui ne sont même pas
capables de planter un clou mais qui ont leur carte de compétence en
main, je pense que le profit n'est pas très élevé à
la fin du contrat. Au prochain contrat, nous sommes obligés de
soumissionner plus haut, d'augmenter le prix à cause de ces
qualifications médiocres. C'est ça qui se produit à
l'heure actuelle. Peut-être que la théorie dans les écoles
c'est bien, mais la pratique sur le chantier, c'est encore mieux.
Et quand on a enlevé aux apprentis le privilège de
travailler, c'est-à-dire 1 par 5, c'est là qu'on s'est
trompé.
Si nous avions continué d'avoir, au moins, 40 p.c. à 50
p.c. d'apprentis avec des compagnons compétents, on verrait une
main-d'oeuvre plus qualifiée au bout d'un certain temps.
M. GUAY: Croyez-vous vous êtes probablement
habilités à en juger, car vous en avez sans doute connaissance
que le degré de scolarité d'un travailleur de la
construction peut jouer un grand rôle dans l'obtention d'un certificat de
qualification?
M. GREGOIRE: Oui, même si, à l'heure actuelle, je verrais
plus un menuisier aller passer un examen réellement sur l'ouvrage qu'il
fait manuellement et non théoriquement.
M. GUAY: Croyez-vous, d'autre part, que les examens de qualification
sont trop sévères ou pas assez sévères?
M. GREGOIRE: Je ne sais pas quel examen on peut avoir aujourd'hui.
Depuis que j'ai ma carte de qualification, je ne suis pas retourné en
passer un autre.
M. COURNOYER: Dans ce temps-là, comment c'était?
M. GREGOIRE: On passait ça à Sherbrooke, à l'ancien
comité paritaire. On nous faisait tailler un escalier, puis
différentes choses. Il y a plusieurs points grâce auxquels on peut
trouver si un ouvrier est vraiment bon.
M. GUAY: Maintenant, j'aimerais soulever une autre question, surtout
parce que vous êtes dans la construction domiciliaire, dans l'habitation
familiale. Les maisons fabriquées en usine semblent connaître une
expansion assez vertigineuse actuellement. Est-ce que ce genre de construction
peut facilement remplacer le genre de construction que vous faites? D'autre
part, ce genre de construction en usine peut-il le mot est
peut-être fort anéantir, dans un délai plus ou moins
bref, la construction domiciliaire faite par les entrepreneurs que vous
représentez?
M. GREGOIRE: La plupart des entrepreneurs sont obligés d'avoir,
justement, une division pour des maisons préfabriquées,
c'est-à-dire d'avoir une ligne qui répond à la demande du
client et de lui proposer une maison préfabriquée. Sans
ça, je pense qu'il n'y en aurait pas beaucoup qui auraient de l'ouvrage
chez nous, parce que ça entre en ligne de compte assez
profondément.
M. DAIGLE: Pour subvenir aux besoins présentement, on est
obligé d'avoir une usine fermée, comme on l'appelle, pour faire
des
murs préfabriqués ou des choses comme ça parce que
le coût de construction est rendu trop dispendieux pour l'acheteur.
Alors, on nous force à aller en manufacture. D'ici 20 ans, on croit que
80 p.c. de la construction va être faite en manufacture, parce que
ça s'en vient à grands pas. Même pour les édifices
en hauteur en béton, ce n'est plus un problème, parce qu'on
amène cela par boîte.
Plus ça va aller vite dans le domaine de la construction sur les
chantiers, plus que ça va aller vite en industrie. Ici, c'est l'offre et
la demande et il faut être capable de donner ce que les gens sont
capables de payer.
C'est tout simplement ça. Si vous remarquez le nombre
d'industries manufacturières qui se sont établies dans le domaine
de la construction, vous allez être surpris.
M. GUAY: Comme vous le dites vous-même, on vous oblige
pratiquement à faire de la construction en usine. Est-ce qu'il y a une
différence appréciable entre les coûts, par exemple, d'une
maison familiale construite complètement en usine et celle qui est
construite actuellement sur place? Si ma mémoire est bonne, les lois de
la construction ne s'appliquent pas en usine fermée, alors qu'elles
s'appliquent à l'extérieur. Maintenant, ce ne sont
peut-être pas uniquement les lois qui s'appliquent qui viennent
transformer les coûts. Il y a peut-être d'autres avantages pour la
construction. Avez-vous des études de faites sur la différence
qui existe entre le coût d'une maison de même dimension ou de
même qualité construite en usine et sur place?
M. DAIGLE: Premièrement, le salaire que vous allez payer dans une
usine est pratiquement le même que dans les autres usines. Dans la
région des Cantons de l'Est, si on situe ça dans Shefford, Brome
et Missisquoi, les salaires dans l'industrie sont d'environ $2 et $2.50
l'heure. Les mêmes salaires sont versés dans l'industrie de la
préfabrication de maisons. Si ça vous coûte, au
départ, 50 p.c. du salaire payé sur un chantier, sans aucune
perte de matériel, c'est évident que la construction faite en
usine revient beaucoup moins cher que sur le chantier. On ne peut pas s'en
défaire: c'est ça.
M. COURNOYER: Pas seulement le taux de salaire, mais aussi le fait que
vous ne perdez pas de matériaux. Quand vous commencez à couper
vos 2 par 4, vous les coupez tous pareils, avec une belle scie et il y a bien
moins de manutention.
M. DAIGLE: C'est ça. Il y a moins de manutention, puis la vitesse
est doublée aussi pour la production elle-même.
M. COURNOYER: Au point de vue de la productivité, pour le
même taux de salaire, vous sauvez de l'argent en usine.
M. DAIGLE: On est obligé de le faire.
M. COURNOYER: Parce que vous travaillez huit heures franches. Vous
commencez à travailler le matin et vous allez jusqu'au bout, il n'y a
pas de pluie dans l'usine.
M. DAIGLE: Il n'y a pas de pluie et les salaires sont comparables
à ceux de l'industrie de la construction. Si jamais vous voulez voir les
T-4 des employés que nous avons à l'usine et des employés
de la construction, vous allez avoir des surprises.
M. COURNOYER: Quelle sorte de surprises?
M. DAIGLE: Les employés que nous avons à l'usine
présentement et les employés que nous avons sur les chantiers de
construction...
M. COURNOYER: Lesquels des deux font le plus?
M. DAIGLE: Ce sont les employés de l'usine qui font le plus.
M. COURNOYER: C'est ce que je dis depuis le début de la
journée.
M. DAIGLE: Comment peut-on régler le problème? C'est le
consommateur qui n'a pas les moyens de payer.
M. COURNOYER: Je vous ai dit tantôt ce à quoi nous visions
par la sécurité ou la priorité d'emploi. C'est strictement
d'en arriver à un salaire annuel décent pour les individus qui
travaillent dans la construction. Leur taux de salaire horaire est rendu
tellement élevé, compte tenu d'une foule de facteurs qui font
qu'ils ne travaillent pas pendant douze mois...
M. DAIGLE: C'est cela.
M. COURNOYER: ... tandis que les autres, en usine, travaillent, on peut
l'espérer, pendant douze mois... Au moins, quand ils commencent une
semaine de travail, de votre côté, quand il s'agit de faire un
assemblage de deux par quatre, soit pour un mur ou autre chose, ils vont le
finir dans la même journée et il n'y a pas de problème.
Vous avez de la machinerie en usine qu'on n'a pas sur un chantier de
construction et il ne pleut pas dans l'usine, il n'y a pas de neige dans
l'usine. La seule chose qui vous intéresse comme entreprise, c'est de
vendre votre maison, elle est déjà faite.
M. DAIGLE: Il faut satisfaire le client. Pour donner aux gens de la
province de Québec le moyen d'avoir une maison... Je dis qu'il n'y a
aucune sorte d'industrie, quelle qu'elle soit, qui produira quelque chose que
le consommateur n'est pas capable d'acheter.
M. COURNOYER: Vous avez parfaitement raison et c'est pourquoi les
entreprises de construction ou d'habitation tentent de trouver les moyens pour
que le coût soit réduit, par une fabrication différente,
à des proportions susceptibles de faire le marché. Des
manufactures comme celle de Saint-Joseph de Beauce, il y en a un certain nombre
au Québec et je vous crois quand vous me dites que dans les vingt
prochaines années ce sera encore pire. Il faut s'entendre sur le mot
"pire".
M. DAIGLE: On y sera forcé.
M. COURNOYER: Entre vous et moi, on dirait qu'on veut vous y forcer par
des taux de salaire élevés. Ce n'est pas cela. Pensez donc que
nous sommes obligés de penser â l'individu qui gagne sa vie. Comme
ministre du Travail, je suis en face d'individus de la construction mais je
n'ai pas que les gars de la construction, j'ai aussi les gars qui travaillent
dans le soulier, le textile, la mine. Je les ai tous. Dans leur cas, il faut
qu'ils aient la possibilité de se loger parce que s'il y a une chose
essentielle, c'est de se loger et de manger.
Il faut qu'ils aient la possibilité, de se loger; il faut donc
que le coût soit de tel ordre qu'ils puissent acheter un logis. On peut
tourner l'affaire à l'envers et augmenter leur taux de salaire pour
qu'ils puissent acheter votre produit ou on peut réduire le coût
de production, pas nécessairement le taux de salaire. C'est ce que vous
faites et c'est ce que l'industrie vous oblige à faire. Avez-vous
déjà demandé à la Société centrale
d'hypothèques quelle était l'influence des taux de salaire sur le
taux d'augmentation de la construction dans les vingt dernières
années?
M. DAIGLE: La Société centrale d'hypothèques a des
statistiques à travers le Canada et si vous saviez la différence
qu'il y a entre le coût d'un logement qui se bâtit à
Toronto, à Montréal, à Québec et à
Cowansville, les cheveux vous dresseraient sur la tête.
M. COURNOYER: Vous me parliez tantôt de ce qui s'en vient, des
possibilités de fabrication en usine, etc. Regardez le plâtre
qu'il y a en haut aujourd'hui et cherchez-en dans les maisons d'aujourd'hui.
Regardez-le, le plâtre. N'est-ce pas beau, cela?
M. DAIGLE: Justement.
M. COURNOYER: Il n'y en a plus dans les maisons d'aujourd'hui.
M. DAIGLE: Aujourd'hui, demandez à un plâtrier dans
l'industrie de la construction de vous faire une colonne comme celle-là,
pour voir.
M. COURNOYER: Il n'en est pas capable.
M. DAIGLE: Vous appelez cela "qualifié" à ce
moment-là?
M. COURNOYER: Non, ce n'est pas cela. Vais-je lui faire faire des
colonnes que personne ne va acheter?
M. DAIGLE: Non, justement.
M. COURNOYER: C'est le problème. Si ce sont les observations que
vous pouvez faire sur la façon dont nous qualifions les gens, si le
genre de travail qu'ils sont susceptibles de faire pour vous le lendemain est
un travail qui ne se vend pas, je dis qu'il y a quelque chose qui ne va pas
dans mon système de qualification et de formation professionnelle. Je ne
vais pas former des gens qui font des colonnes de plâtre. On n'en
achète plus, de colonnes de plâtre, à cause du taux de
salaire ou d'autres considérations, le changement des goûts...
Pouvez-vous me dire si c'est la brique sur les murs qui est partie ou si
c'est le "curtain wall" qui est arrivé? Lequel des deux est parti?
Est-ce le coût de pose de la brique qui a fait qu'il n'y avait plus de
brique qui se posait un certain temps ou si c'est le fait que la mode
était au "curtain wall" pendant un bout de temps?
M. DAIGLE: Le "curtain wall" coûte certainement meilleur
marché que la brique.
M. COURNOYER: Il coûte meilleur marché mais il y a encore
de la brique qui se pose. Mais, durant un certain temps, il ne se faisait que
du "curtain wall". Aujourd'hui, que so fait-il? Je regarde les grands murs de
brique des grands, grands édifices de Montréal. Ce n'est
peut-être pas la même chose chez vous, parce que vous m'avez dit
depuis tantôt qu'il n'y a pas de gros édifices comme ceux que l'on
construit à Montréal. Mais je regarde les murs de brique de 17
étages d'aujourd'hui alors qu'il y a cinq ans, quand on était en
plein travaux de construction de l'Expo, ce n'était que du "curtain
wall" que l'on avait avec une petite possibilité de précontraint
qui commençait à entrer dans l'industrie dans ce
temps-là.
M. DAIGLE: Je peux vous dire que vous allez avoir de la
difficulté à trouver des briqueteurs pour le 17e étage
avec les inspecteurs de la Commission de l'industrie de la construction.
M. COURNOYER: Pourquoi? Parce que ce n'est pas sécuritaire en
haut?
M. DAIGLE: C'est rendu criminel de monter dans un échafaud.
M. COURNOYER: Pourquoi? Pour un briqueteur de monter dans un
échafaud? Il y en a qui montent à Montréal.
M. DAIGLE: Venez vous informer dans notre coin et vous allez voir que
les briqueteurs ne prennent plus des bâtisses bien bien hautes.
M. COURNOYER: Vous avez des inspecteurs épouvantables! Mais je
retiens cette dernière remarque, compte tenu du fait que je suis un
tueur, pour dire combien nous sommes efficaces.
M. LE PRESIDENT: Je retourne au député de Dorchester.
M. GREGOIRE: M. le Président, pour répondre à une
question qu'a posée le député de Dorchester tantôt,
n'allez pas croire que nous sommes venus ici seulement pour défendre le
point de vue do l'Association des entrepreneurs en construction cet
après midi. Nous défendons autant l'employé qui travaille
pour nous. A l'heure actuelle, chez nous, moi-même, mes collègues
dans une proportion de 60 p.c, nous avons tous une petite industrie à
côté où nous pouvons faire le préfabriqué
nous-mêmes. L'hiver, mes hommes, les hommes de Jacques travaillent dans
l'industrie et ce n'est pas marqué dans les statistiques
apportées aujourd'hui. La plupart de nos hommes chez nous, je le dis
avec preuves à l'appui, se font entre $6,000 et $8,000 par année,
à 90 p.c. la plupart de ceux des comtés ruraux à l'heure
actuelle pensent la même chose.
M. DAIGLE: Nous pourrions, à ce moment-ci, prendre nos
travailleurs dans nos trois comtés, regarder les statistiques que vous
avez ici et les T-4, avec les numéros d'assurance sociale, sans le
nom.
M. COURNOYER: Je suis parfaitement au courant que l'on peut faire tout
ça et qu'il y a des gens qui gagnent leur vie ailleurs que dans
l'industrie de la construction; il y en a un pourcentage assez
considérable. De combien il est, je ne le sais pas. Mais tout ce que je
sais c'est que 120,000 personnes travaillent là-dedans et ce n'est pas
vrai que les 120,000 travaillent à l'année. Il y en a une petite
proportion. Dans vos cas, que feriez vous avec les 500 supplémentaires
dont vous avez besoin cette année? Pouvez-vous leur donner une garantie
qu'ils vont travailler toute l'année, de la même manière
que les autres? C'est du supplémentaire que nous parlons, surtout du
supplémentaire, pas du noyau que vous avez chez vous. Le noyau, vous
faites tout ce que vous voulez et il travaille toute l'année. Je suis
convaincu que vous pouvez les garder sur votre "pay roll", en boutique ou
autrement, durant toute l'année. Mais ceux que vous importez, ceux que
vous rendez accessibles à l'industrie, ceux-là, êtes-vous
capable de leur donner la même chose que vous donnez à votre
noyau?
M. GREGOIRE: C'est justement, il ne faudrait pas être
obligé d'importer des hommes qui, à l'heure actuelle, sont
enregistrés au bureau d'assurance-chômage, soit provincial ou
fédéral; les 400 sont là. Nous pouvons vous le prouver en
tout temps.
M. COURNOYER: Dans votre région?
M. GREGOIRE: Oui, en tout temps. Au moins 400 à 500 de ces
personnes sont aptes à faire l'ouvrage. Nous avons surtout manqué
de journaliers cette année et non pas de menuisiers, c'est-à-dire
que le journalier peut chauffer une pelle à main. Je me demande
pourquoi, à cause d'un permis de travail, on en fait un chômeur ou
un assisté social.
M. COURNOYER: Je pense que je vais retenir seulement cette
dernière remarque. Je vous prie de croire que mon ministère,
malgré les représentations de bien du monde, a émis,
pendant le mois de mai, si je me souviens bien la dernière
question m'avait été posée dans ce temps-là
surtout dans les régions rurales ou semi-rurales, pas tellement à
Montréal et à Québec même, de 6,000 à 7,000
permis pour travailler sur les chantiers de construction au grand
désespoir de ceux qui voulaient arriver à mettre un certain ordre
dans l'industrie.
Encore, pour l'ordre, monsieur, il n'y a pas de problème, mais
dans le cas particulier que vous énoncez, s'il y a eu 400 personnes qui
ont dit qu'elles ne pouvaient pas avoir de permis pour travailler dans
l'industrie de la construction, elles n'en voulaient pas de permis. Parce que
c'était assez facile d'en obtenir et je vous jure que c'était
plus que facile. J'espère qu'on ne dira pas tout ce qu'on pense mais
c'était plus que facile d'obtenir des permis de travail et trop facile,
même. Ils n'en voulaient pas parce que vous avez dit, tantôt,
où ils étaient: à l'assurance-chômage. Ils n'ont pas
le goût de travailler, à l'assurance-chômage. Il y en a de
ceux-là.
M. GREGOIRE: Mais il y en a au moins 200, sur les 400, qu'on a pu
employer.
M. COURNOYER: Mais pourquoi, diantre! n'en entendons-nous parler
qu'aujourd'hui? Vous m'avez déjà écrit...
M. GREGOIRE: M. le ministre, je vous ai envoyé un
télégramme cet été. Je pense qu'il manquait
à peu près 30 à 40 hommes, surtout des journaliers. Je
voulais engager des étudiants. Les inspecteurs se sont mis après
moi et ils m'en ont empêché, ils m'ont menacé de
représailles, amandes etc. Je me suis "tanné". J'en ai
payé, moi aussi, des amendes, et des amendes idiotes, comme on peut les
appeler. C'est plutôt rare qu'un gars qui veut travailler soit
obligé de payer une amende. C'est plutôt le criminel qui devrait
payer une amende, non pas celui qui veut vraiment gagner sa vie. Pourquoi
oblige-t-on un père de famille qui a des enfants, on en a la preuve ici,
qui veut faire travailler ses garçons, à payer l'amende deux ou
trois fois
dans le même mois? Parce qu'il avait un apprenti de trop sur son
chantier.
M. COURNOYER: Monsieur, je vous ai dit tantôt que c'étaient
des conditions qui ont été établies, qui ne tiennent pas
compte de vos besoins particuliers à vous, mais qui doivent tenir compte
du besoin général de la population. A un moment donné, il
y a une responsabilité qui, pour vous, n'est pas la même que la
mienne, mais pas du tout. Remarquez que je peux vous choquer. Je peux choquer
votre voisin. Je peux en choquer d'autres. Je choque tout le temps tout le
monde. C'est normal. Mais quand vous aurez quitté cette commission
parlementaire, j'espère que vous allez comprendre que lorsque nous
prenons une décision ici, ce n'est pas juste pour vous ou pour d'autres.
Il y a des choses qui n'ont pas été dites encore mais qui vont
peut-être être dites. Cela va sortir. Le chat va sortir du sac
bientôt. Il y a des affaires qui vont sortir. Nous sommes calmes, calmes
depuis le matin. C'est peut-être à cause du président, mais
je trouve cela pas mal calme pour une commission parlementaire qui
étudie les problèmes de la construction. C'est pas mal calme.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que le ministre veut rester calme?
M. LE PRESIDENT: Un instant! Avant qu'on commence la chicane, si vous
voulez, on va continuer avec le député de Dorchester.
M. COURNOYER: Vous pouvez vous organiser pour m'envoyer trois ou quatre
pointes...
M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester.
M. GUAY: M. le Président, étant donné que...
UNE VOIX: Ça va bien.
M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester a la parole.
M. GUAY : M. le Président, étant donné que j'ai
été coupé par le ministre, en quelque sorte, j'adresserai
donc mes prochaines questions au ministre...
M. LAVOIE: Cela fait trois fois qu'il dit ça. J'avais compris que
le ministre avait dit "calme". Ce n'est pas quatre, c'est calme.
M. COURNOYER: J'ai dit calme.
DES VOIX: C'est ça.
M. COURNOYER: Jamais je n'aurais dit ça.
M. LABERGE: Bien sûr, on ne peut pas parler.
M. COURNOYER: Chacun sa place; toi, c'est à la
télévision.
M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester.
UNE VOIX: On va où on peut.
M. GUAY: Au sujet de la construction, surtout domiciliaire, en usine,
qui connaît une expansion extraordinaire, j'aimerais savoir du ministre
si les mêmes exigences, les mêmes normes s'appliquent pour les
constructions en usine que pour les constructions sur place, ce qu'on appelle
les chantiers de construction.
M. COURNOYER: Du décret proprement dit, les conditions de
travail, non.
M. GUAY : Les normes de construction?
M. COURNOYER: Mais les normes de construction sont identiques à
celles qui existent dans les codes du bâtiment un peu partout au
Québec. La plupart du temps, avant qu'on arrive avec autre chose, les
règlements municipaux pour la construction sont appliqués dans
les manufactures. De là, d'ailleurs, le besoin d'uniformiser ces
règlements. Cela vient du fait que lorsqu'on en construit une dans un
endroit et qu'on l'exporte dans une autre municipalité, il faut que les
règlements permettent de recevoir cette maison qui est construite un peu
plus loin que l'endroit où elle est installée.
Mais ces règlements ne sont pas identiques partout au
Québec. Les gens doivent se soumettre aux règlements de la
construction pour pouvoir les installer.
M. GUAY: Il y a quand même des inspecteurs du ministère qui
vont faire les vérifications d'usage sur les constructions.
M. COURNOYER: Oui, c'est une autre sorte d'inspecteurs. La Loi des
électriciens, les installations électriques, s'applique de
même que la Loi des plombiers.
M. GUAY: Maintenant, si on prend une construction en
général, est-ce que les arrêtés ministériels
dont on parle s'appliquent aux travailleurs de la construction en usine?
M. COURNOYER: Si vous me parlez, encore une fois, du décret de la
construction...
M. GUAY: C'est cela.
M. COURNOYER: ... qui régit les conditions de travail, la
réponse est non. A moins que l'usine ne soit à proximité
du champ d'installation, comme cela a été le cas pour Habitat 67,
en 1965.
M. GUAY: Est-ce qu'il y a beaucoup de plaintes au ministère du
Travail relativement à
des défauts de construction par des clients propriétaires
de maisons fabriquées en usine?
M. COURNOYER: Non. Premièrement, le ministère du Travail
n'est pas un endroit où on porte plainte. Il s'agit de faire respecter
certaines normes en électricité, en plomberie, en chauffage, de
même que le code du bâtiment. Ce ne sont pas des édifices
publics. C'est réglementé par les codes ordinaires du
bâtiment. Non?
M. DESJARDINS: Non. J'aimerais donc cela jaser! Nous n'avons pas le
droit de parler.
M. COURNOYER: La Loi des électriciens, des installations
électriques s'applique.
M. DESJARDINS: Aucune carte de qualification n'est requise.
M. COURNOYER: Ce n'est pas de cela que je vous parle. Je vous parle de
l'installation électrique. Le décret de la construction ne
s'applique pas. La Loi de la formation professionnelle n'a pas d'application
là-dedans.
M. DESJARDINS: Mais votre carte de qualification n'est pas régie
par le décret?
M. COURNOYER: Non.
M. DESJARDINS: Elle est régie par votre bill 49. Elle ne
s'applique pas partout.
M. COURNOYER: Ces deux lois ne s'appliquent pas.
M. DESJARDINS: Il n'y a rien qui s'applique.
M. COURNOYER: La Loi des installations électriques s'applique.
Elle ne peut pas ne pas s'appliquer. Que voulez-vous? C'est une installation
électrique. On est obligé d'en faire l'inspection.
M. DESJARDINS: Cela doit être la seule qui s'applique dans toute
la construction.
M. COURNOYER: La vôtre ne s'applique pas?
M. DESJARDINS: Non.
M. COURNOYER: C'est parce que vous ne la faites pas appliquer.
Occupez-vous donc de vos affaires un peu, de temps en temps.
M. DESJARDINS: Nous ne pouvons pas parler.
M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester.
M. GUAY: J'aurais une dernière question au ministre. Je vis
encore un problème dans la localité de
Saint-Léon-de-Standon je donne l'adresse au cas où cela
vous intéresserait où un groupe de personnes effectuent des
déménagements de bâtisses. Il s'agit de maisons, de
garages, de granges, etc. Ces personnes se demandent encore quel genre de
qualification professionnelle elles doivent détenir. Actuellement, il
est impossible de les classer parmi les travailleurs en usine. Je pense qu'il
est également impossible de les classer parmi les travailleurs en
construction, puisque ce n'est pas de la construction. C'est une question que
j'ai déjà posée. J'attends toujours la réponse.
Cela fait partie de la loi que nous discutons. Présentement deux de ces
travailleurs sembleraient poursuivis parce qu'ils ne rencontrent pas les
exigences du ministère du Travail ou de la Commission de l'industrie de
la construction.
M. COURNOYER: La Loi 290 a été adoptée par le
Parlement du Québec. Elle nomme un commissaire à la construction
qui établit dans quelle juridiction se trouve telle ou telle
opération. A ce moment-ci, je n'ai pas la dernière
décision du commissaire, M. Bernier, mais, si la décision de M.
Bernier dit que le déménagement, c'est de la construction, c'est
de la construction. Une fois qu'il l'a décidé, c'est
conformément à la loi et c'est sa juridiction. C'est comme si un
juge avait décidé que telle chose doit être
interprétée de telle manière. Tant qu'on n'en a pas
appelé et que cela n'a pas été en cour Suprême,
c'est la loi du milieu. Je ne le sais pas.
M. GUAY: Est-ce que nous pouvons quand même dire à ces gens
de continuer à travailler et qu'il n'y a aucun danger qu'ils soient
poursuivis?
M. COURNOYER: Pas du tout. On ne peut pas dire à ces gens de
poser un acte illégal.
M. GUAY: Est-ce que réellement c'est illégal?
M. COURNOYER: Vous me demandez à brûle-pourpoint si du
déménagement, c'est de la construction. Si c'est de la
construction, le décret s'applique. Si la décision du
commissaire-enquêteur est que ce n'est pas de la construction, le
décret ne s'applique pas.
M. GUAY: D'accord.
M. COURNOYER: Si de son autorité pas de l'autorité
du ministre il décide que cela est de la construction, à
ce moment-là, je ne peux pas dire aux gens: Posez un geste
illégal. Je ne suis pas capable.
M. ROY (Beauce): Pour préciser davantage la question posée
par le député de Dorchester, pendant que nous discutons de toutes
ces choses, qu'est-ce que ces gens doivent faire?
M. COURNOYER: On peut se poser la question suivante: Lorsque nous
discutons du code criminel, est-ce que le code criminel continue d'exister?
Pendant qu'on discute d'amendements au code de la route, est-ce que le code de
la route continue d'exister? Il n'est pas bon, mais il reste là. C'est
celui-là tant qu'il n'est pas changé par le Parlement.
Actuellement, je n'ai pas le pouvoir de modifier les lois existantes qui ont
été votées par un Parlement. Je peux être en
désaccord avec telle ou telle loi, mais, quand elle existe, elle existe
jusqu'à ce qu'elle soit remplacée par un autre acte du
Parlement.
M. ROY (Beauce): Oui, mais que faire dans l'intervalle, M. le ministre?
Je me permets, quand même, de faire une nette nuance, car je pense qu'une
nuance s'impose. Lorsqu'on parle d'un travailleur qui serait de la construction
ou pas de la construction, compte tenu des décisions juridiques qui
peuvent être prises.
Mais, à ce moment-là, on place le travailleur qui gagne sa
vie normalement c'est un droit inné pour l'individu, que de
gagner sa vie au même rang qu'un criminel qui est "enfargé"
avec le code criminel ou encore un type, à un moment donné, qui
viole les lois de la route et qui met la vie des autres en danger, sous
prétexte qu'il y a des conflits juridiques quelque part. Le
problème va jusque là. C'est compliqué, l'affaire.
M. COURNOYER: Oui, mais quand il a été dit dans la loi que
l'amende pour l'infraction était de $200, cela a été
édité par un Parlement. Qu'est-ce que c'est l'autorité
suprême, au Québec? Nous pouvons espérer tous les deux que,
c'est le Parlement. Mais si le Parlement a dit: $200 d'amende, le juge ne peut
pas administrer autre chose que $200 d'amende. Quand je retourne à la
décision du commissaire, c'est le Parlement qui a confié au
commissaire le pouvoir de décider. Je ne dis pas qu'il n'a pas
décidé. Je dis qu'il a peut-être décidé. S'il
n'a pas décidé, c'est une tout autre chanson, mais s'il a
décidé, c'est le pouvoir que le Parlement lui a donné,
à lui, parce qu'on ne voulait pas que le ministre fasse du patronage
s'il avait le pouvoir, lui. On l'a donc donné à un autre. C'est
un autre qui l'a. Ce n'est pas moi.
M. DESJARDINS: C'est un autre qui a le patronage.
M. ROY (Beauce): Justement, M. le Président, c'est que ces lois
ont été adoptées par le Parlement. Les juges sont
liés par une loi et les commissaires sont liés par les mandats
qui leur ont été confiés.
M. COURNOYER: Par le Parlement, toujours.
M. ROY (Beauce): Par le Parlement. C'est pour cela que la commission
parlementaire siège, justement pour trouver des moyens d'éviter
les situations désagréables que nous vivons présentement,
par suite des lois et réglementations qui ont été
adoptées jusqu'à maintenant. C'est pour cela que nous sommes ici
aujourd'hui, en quelque sorte. C'est là qu'on vous démontre
jusqu'à quel point il peut y avoir des problèmes parce que,
justement, on a tenté, par une solution qu'on a jugée la
meilleure pour régler un problème qui se posait, alors que le
problème est resté posé dans son entier et qu'on s'est
retrouvé avec des dizaines et des dizaines de problèmes
additionnels...
M. COURNOYER: Ce que j'essaie de faire comme distinction... Vous allez
me le permettre, je ne suis pas tellement un parlementaire, vous savez que
j'assiste très souvent à la session...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Hélas!
M. COURNOYER: Vous avez remarqué cela?
M. ROY (Beauce): Nous le déplorons, d'ailleurs.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous devriez venir plus souvent.
M. COURNOYER: Je devrais y aller plus souvent. Je comprendrais beaucoup
plus de choses. Mais disons que tel que je conçois, moi, le Parlement,
il a adopté une loi. Bonne ou mauvaise, cette loi doit être
appliquée par les organismes qu'il a délégués pour
la faire appliquer.
M. LABERGE: Il faut respecter les lois. M. COURNOYER: Vous avez compris.
UNE VOIX: La justice a le bras long!
M. ROY (Beauce): Mais lorsque la loi peut être amendée, on
doit travailler à amender la loi.
M. COURNOYER: Oui, mais dans l'intervalle, c'est la première loi
du Parlement qui s'applique. On ne peut pas, par arrêté
ministériel ou par décision du ministre, dire: Je vais mettre la
loi du Parlement en veilleuse. C'est un ordre que je reçois du
Parlement. Vous allez me dire que je sollicite l'ordre. Bien oui, je l'ai
sollicité mais le Parlement me l'a donné. Après cela, je
suis obligé de m'y conformer, comme ministre et comme
administrateur.
M. GUAY: Si je soulève la question, M. le Président, c'est
qu'on vient de conclure qu'il y a de plus en plus de fabrication de maisons en
usines. Toutes ces usines ont des équipes pour transporter ces maisons.
J'ai reçu ces équipes à mon bureau. Selon le décret
de la construction,
je ne suis même pas en mesure de leur dire si cela fait partie ou
non de la construction. Justement, je voulais avoir un
éclaircissement.
M. COURNOYER: Ecoutez, il y a une autre séance de la commission
parlementaire demain. Je vais m'informer auprès du commissaire à
la construction à savoir s'il a pris sa décision. S'il l'a prise,
je demanderai qu'on vous en distribue des copies pour que vous puissiez vous y
conformer.
M. GUAY: Si cela peut vous aider dans vos recherches, je sais que le
ministère des Transports impose certaines exigences. J'ai donc cru que
les transporteurs travaillaient sous la responsabilité du
ministère des Transports.
M. COURNOYER: Je ne parle que des miennes.
M. GUAY: C'est une autre chose, mais il y a peut-être trois ou
quatre ministères qui peuvent intervenir dans ces cas-là. Il faut
reconnaître que ce sont des cas litigieux. Il faudra quand même,
à un moment donné, statuer là-dessus.
M. COURNOYER: Peut-on demander comment les gens d'en face verraient la
solution à ce problème? Peut-être nous donneront-ils la
solution.
M. DESJARDINS: C'est facile. Je vais lui donner ma carte et s'il ne sait
pas si cela va dans la construction, qu'il m'appelle.
M. GUAY: Je pourrais poser la question tout de suite, cela m'exempterait
d'appeler.
M. DESJARDINS: Je promets une réponse.
M. GUAY: Si vous voulez répondre tout de suite, je suis
parfaitement d'accord.
M. COURNOYER: En fait, disons que M. Desjardins n'a aucune forme
d'autorité pour décider ce qui est dans la construction!
M. DESJARDINS: Depuis quand ai-je été limogé?
M. LE PRESIDENT: S'il vous plaît, messieurs!
M. ROY (Beauce): M. le Président, j'aurais des questions à
poser, justement, au représentant de l'Association des entrepreneurs en
construction de Brome, Missisquoi... Peut-être que la question a
été posée tout à l'heure, j'ai dû m'absenter
quelques minutes. J'aurais des questions à vous poser.
Chez vos membres de l'association cette année vous avez
certainement fait des études est-ce que vous êtes en mesure
de dire devant la commission parlementaire si des travaux de construction n'ont
pu être effectués à cause de toutes ces exigences? Est-ce
que les travailleurs que vous avez estimé qualifiés, à
cause du décret, de toute la procédure et des délais que
cette procédure entraîne pour permettre à une personne
d'avoir une carte, n'ont pu travailler? A la lumière de ces faits,
pouvez-vous nous dire s'il s'est fait moins de construction à cause de
cela? Y a-t-il des travailleurs que vous avez été obligés
d'engager sans carte ou d'autres que vous avez été obligés
de refuser parce qu'ils n'avaient pas de cartes?
M. GREGOIRE: Il y a eu plusieurs retards dans le domaine que vous
évoquez. On a été obligé de demander aux
propriétaires d'allonger le programme des travaux, dû à la
pénurie et au manque d'hommes qualifiés dans certains domaines,
etc. Cela a pu empêcher quelques entrepreneurs d'avoir un autre contrat,
en demandant un délai. Si ça a pris un mois de plus, à
cause de la pénurie, ça l'a brimé.
M. ROY (Beauce): En somme, il y a des travailleurs que vous auriez
embauchés et que vous n'avez pas pu embaucher?
M. GREGOIRE: Oui. Il y a eu pénurie de journaliers et nous
aurions pu embaucher des étudiants de la qualité exigée
à l'heure actuelle par le centre de main-d'oeuvre. Plusieurs, dans les
bureaux d'entrepreneurs, sont allés s'enregistrer, mais, n'ayant pas le
permis de travail en poche, ils ne pouvaient pas avoir de l'emploi.
M. LE PRESIDENT: Au tout début de ces commentaires, nous avions
trois représentants qui ont voulu présenter un mémoire en
trois parties. On s'est écarté un peu de cette procédure
au moment des questions. Je vois que l'heure avance. Est-ce que vous avez
complété la présentation de votre mémoire
maintenant? Peut-être pas de la façon que vous l'auriez voulu,
mais avez-vous couvert les différents points? Il y avait une question de
M. Laberge.
M. LABERGE: Cela découle de la dernière question et de la
dernière réponse. Je pense que le ministre du Travail ne peut pas
laisser passer ça. Quand ils disent que dans la construction on a
manqué de main-d'oeuvre qualifiée, c'est qu'on voulait engager
certains gars et qu'on n'a pas voulu engager des gars disponibles. Pour autant
que nous sommes concernés nous, il y en avait au moins de 20,000
à 25,000 de disponibles qui avaient des cartes de compétence,
etc. La question et la réponse, toutes les deux, c'est charrier un
peu.
M. GREGOIRE: Pour aller chercher l'individu qui pouvait travailler dans
une autre région quand on avait un contrat assez serré, qui
aurait payé la note?
M. LABERGE: Vous n'avez pas besoin d'al-
1er les chercher, vous n'avez qu'à les demander, ils vont se
rendre tout seuls.
M. GREGOIRE: Je l'ai fait ça, j'en ai demandé 5.
Après ça, ils se sont servis de la Commission de l'industrie de
la construction pour me faire payer leur transport et leur pension. J'ai des
preuves à l'appui.
UNE VOIX: C'est le problème des négociations.
M. COURNOYER: Je pense que monsieur a parfaitement raison. Quand vous
n'avez pas de main-d'oeuvre chez vous vous êtes obligé de
l'importer et payer les transports et la pension. C'est ça que le
décret dit.
M. DESJARDINS: Cela fait 22 ans que ça existe.
M. DEMERS: C'est la même chose à Montréal; s'ils
n'en ont pas ils vont la chercher ailleurs et ils paient pour.
M. GREGOIRE: M. le Président, je ne trouve pas logique
d'être obligé d'aller chercher de la main-d'oeuvre à
l'extérieur quand on peut en avoir chez nous.
M. COURNOYER: C'est ça le principal problème. Vous m'avez
parlé tantôt de main-d'oeuvre qualifiée du moins, M.
Laberge a parlé de main-d'oeuvre qualifiée quand, en
définitive, vous nous avez dit que vous pouviez avoir des
étudiants et des journaliers.
M. GREGOIRE: Oui, dans le domaine du journalier, pour avoir ce qu'on
appelle un "opérateur" de telle année, je pense que ça ne
prend pas une grosse qualification pour avoir ça.
M. COURNOYER: Non. Justement, il y a une question de qualification dans
ce domaine-là en particulier. Alors, s'il n'est pas question de
qualification, c'est donc de gens non qualifiés que vous aviez besoin,
de gens qui n'avaient pas de carte.
M. GREGOIRE: Non, le permis de travail l'empêchait.
M. COURNOYER: Il faut faire la distinction, encore une fois j'en
ai parlé entre la qualification et le permis de travail. Le
permis de travail, c'est la seule chose qu'on demande à un journalier.
S'il n'en avait pas dans votre cas, je vous ai dit que quelqu'un avait
manqué d'imagination, parce que j'en ai assez émis. Ils
"garrochaient" ça par les fenêtres.
M. DAIGLE: Une chose, cependant, qu'il faut prendre en
considération, c'est qu'on marche dans un système de concurrence.
On vit dans un pays encore démocratique. On a un système de
concurrence. Moi, je demanderais, si c'est permis, à M. Laberge ce qu'on
peut faire... On va expliquer le cas devant la commission.
M. LE PRESIDENT: Adressez les questions ici, puis, si c'est
nécessaire, on ira à M. Laberge.
M. DAIGLE: Un bon menuisier, qui est rendu dans les 45, 48, 50, 52 ans,
mais qui n'est pas encore rendu à sa pension, sur un chantier de
construction, c'est un homme qui est classifié âgé. Il faut
comprendre les faits. Il y a une autre chose là-dedans: s'il arrive un
jeune homme de 26 ou de 28 ans avec une carte de menuisier, puis un homme de 45
ans avec une carte de menuisier, vous savez qui va être
embauché?
M. COURNOYER: Lequel des deux? M. DAIGLE: Celui de 26 ans, c'est
sûr.
M. COURNOYER: Pourquoi donc? Parce qu'il est plus fort, qu'il va plus
vite?
M. DAIGLE: C'est parce qu'il est plus vite, qu'il est plus fort.
Ensuite, un homme qui a travaillé assez durement dans la construction,
je vais vous dire bien franchement, à toutes les températures,
puis aux quatre saisons, à 40 ans, n'a presque plus de reins. C'est un
homme qui a mal dans le dos, c'est un homme qui est plus handicapé qu'un
jeune homme. Qu'est-ce qu'on pourrait faire pour cet homme, nous? On ne tient
pas à le mettre en chômage. Qu'est-ce qu'on pourrait faire pour
cet homme-là? Cela devient tout un problème.
M. COURNOYER: Vous avez parfaitement raison. Ce que j'aime, c'est que
ça vienne de vous, ce qui vient d'être dit.
M. DESJARDINS: M. le Président, on n'est pas venu ici pour faire
rire de nous. Premièrement, on n'en veut pas au salaire de notre
employé, mais à deux ou trois clauses du décret. Le
salaire, on s'en foute. Si personne ne veut nous engager, nous sommes encore
capables de gagner nos trois repas par jour. C'est le syndicat qui est en train
de faire des chômeurs de nos employés.
M. COURNOYER: Revenons à la discussion de tantôt, sur la
nature même du problème du gars de la construction. J'oublie le
syndicat, puis les dernières remarques que vous avez faites. Ce pourquoi
j'ai dit: "Ce qui me fait plaisir, c'est que ça vienne de vous," c'est
que nous constatons assez rapidement qu'un travailleur de la construction n'a
pas la même nature qu'un autre travailleur. Le genre de travail qu'il a
fait et qu'il fait encore aujourd'hui, pour résultat qu'à un
certain âge, beaucoup plus bas
que les autres, il se trouve dans la situation de ne pas pouvoir
facilement gagner sa vie.
De là, un certain nombre de conséquences. Cette personne,
qui est rendue à 53 ans, ni vous, ni moi puis je le dis ni
un syndicat, malgré toutes les opinions que vous pouvez avoir, ne veut
la mettre sur l'assurance-chômage.
M. DAIGLE: Nous non plus.
M. COURNOYER: En fait, ce que nous recherchons tous, c'est ce qu'il faut
faire pour que cet homme-là en particulier si vous me parlez d'un
gars de 52 ans du même genre que celui dont vous m'avez parlé,
d'un type de la construction, d'un professionnel de la construction qui a
gagné sa vie dans la construction on puisse le garder, comment
faire pour qu'il puisse gagner sa vie décemment à un moment
donné, quand il est harassé par le fait que celui qui a 26 ans,
travaillant plus vite, étant plus robuste, prend vite sa place. M. Pepin
n'est pas ici, mais s'il y était, il nous parlerait de
l'ancienneté dans la construction. Les mots que vous avez dits
tantôt, il les aurait sortis comme il les a déjà sortis. Si
Louis avait parlé, il aurait parlé exactement comme cela.
Il vous aurait dit qu'il faut des clauses d'ancienneté dans la
construction car autrement, le gars rendu à 53 ans "pète au
fret".
M. DAIGLE: On revient toujours au même problème, le
problème premier là-dedans. On veut que tout le monde vive. Nous,
on veut que tout le monde ait un toit et qu'il ait le moyen de manger
aussi.
M. COURNOYER: C'est notre préoccupation.
M. DAIGLE: Pourquoi s'acheter une maison, si on n'est pas capable de
sortir ni d'acheter de la nourriture parce que la construction coûte trop
cher? Je verrais bien plus les syndicats revendiquer actuellement, au lieu
d'une augmentation de salaire qu'on va peut-être demander l'hiver
prochain, une diminution du taux d'intérêt. Leurs syndiqués
paient actuellement 9 3/4 p.c., l0p.c. et 10 1/4p.c, ça n'a pas
d'allure.
Si les syndicats défendaient leurs ouvriers et disaient: Vous
allez emprunter à 6 p.c. du gouvernement central pour vous bâtir
une maison, s'ils nous demandent à ce moment-là $0.25 de l'heure
d'augmentation, cela va nous faire plaisir parce que l'acheteur éventuel
va avoir le moyen de payer la maison. Je vois le rôle des syndicats,
à ce moment-là.
M. COURNOYER: Le débat ne porte pas nécessairement
là-dessus aujourd'hui.
M. DAIGLE: On explique notre problème et on voudrait que le
gouvernement se rappelle toujours une chose: C'est beau de faire des lois de
toutes les façons qu'on voudra, mais rappelez-vous toujours que nous
avons le consommateur à servir et il faut qu'il soit capable d'acheter
notre produit. Cela règlerait tout notre problème. Faites les
négociations que vous voudrez, c'est là qu'est notre plus gros
problème.
Comme je l'ai dit tout à l'heure, on n'a pas de concurrence
internationale dans le domaine de la construction. On peut payer nos hommes $10
l'heure, cela ne nous fait rien si le consommateur a le moyen de payer le
produit que nous fabriquons. Que nous soyons avec M. Laberge, M. Pepin ou
n'importe qui et qu'ils nous demandent $1 l'heure d'augmentation, ça ne
nous fait rien de le payer parce que le consommateur va avoir le moyen de
payer. Nous nous battons pour défendre l'homme qui travaille dans
l'industrie, ce n'est pas pour nous défendre nous-mêmes, ce n'est
pas nous que nous défendons ici.
Nous venons ici aujourd'hui pas pour nous défendre. Qu'il nous
arrive 50 lois, nous allons les respecter. Qu'on augmente les salaires de 30
p.c, on va l'augmenter, nous, nous n'avons pas d'objection là-dessus,
mais le consommateur, qui va s'en occuper? Qui va venir défendre le
consommateur ici, dans le domaine de la construction? Est-ce qu'il y a des gens
ici présents qui vont défendre le consommateur du coût
excessif où en est rendue la construction? On parle toujours
d'édifices publics que les gouvernements font; vos ingénieurs
établissent quelquefois à $4 millions le coût d'un projet.
Quand les soumissions sortent, c'est $4,600,000, et on se demande ce qui se
passe là-dedans. Ce sont des faits réels; c'est dû à
quoi? Parce que le gars aujourd'hui n'est plus capable de bouger sur un
chantier. Il y a un inspecteur d'un bord, un inspecteur de l'autre.
L'un a oublié son casque, il va en cour, paie $200, paie $400
pour lui-même. Il va en cour le lendemain matin pour une question de
toilette, le lendemain pour une autre affaire. Dans ces conditions, il faudra
que le gars se protège, qu'il engage plus de contremaîtres ou de
surintendants sur les chantiers pour vérifier les hommes. Quand un homme
ne porte pas son casque de sécurité, ce n'est tout de même
pas notre faute. Tous les hommes ont des casques mais nous payons quand
même l'amende s'ils ne les ont pas sur la tête.
Ce sont des choses auxquelles il faudra faire attention. Je vous dis
bien franchement: Ne tuez pas la construction, essayez de la garder debout. Il
ne faut pas oublier que nous avons eu des parents, des arrières
grand-pères, que le Canada existe depuis 300 ans et que nous sommes
assis ici dans un parlement qui est la même bâtisse qu'avaient ces
gens. Faites la même chose avec les outils qu'ils avaient, vous allez
vous apercevoir que vous allez chercher de la main-d'oeuvre et que de la
main-d'oeuvre qualifiée, vous allez en chercher longtemps, comme vous le
faisiez remarquer tout à l'heure. Aujourd'hui, d'accord, nous avons des
pans de
béton, c'est tout ce que nous avons, la structure n'est pas
compliquée ni l'architecture. Mais regardez où nous en sommes
rendus avec ces choses.
Là-dessus, je pense qu'il faudrait sincèrement regarder
avant d'aller trop loin dans toutes ces choses et vouloir protéger tout
le monde. Je dis qu'un homme qui veut travailler ici au Québec, son
minimum vital de salaire n'est pas $2,600 par année. Il arrive trop
souvent que nous voyons des gens, en décembre ou janvier, arrêter
volontairement de travailler pour retirer leur assurance-chômage. Si vous
faites le compte de tout. Au mois de mai, je me demande si le gars n'est pas
gagnant à ne pas avoir travaillé parce que l'impôt qu'il
aura payé en trop durant ces huit mois de travail plus le montant de
$100 d'assurance-chômage qu'il retire durant la période où
il ne fait rien, vous allez voir que ces chiffres s'équilibrent à
peu près.
Il ne faut pas non plus penser que les gens sont innocents. Si on me
donne le même salaire pour travailler huit mois par année
plutôt que douze, je vais vous dire bien franchement que je vais
hésiter un peu. Tout le monde est pareil, l'être humain est fait
comme ça.
Il ne faut pas penser non plus, comme certains syndicats, que nous
sommes contre eux. Ce n'est pas que nous sommes contre eux, en aucune
façon. Le syndicalisme a apporté bien des choses ici au
Québec, tout le monde s'en aperçoit. Par contre, je pense qu'on
déroge un peu de la mentalité, qu'on s'en va en dehors
vis-à-vis des syndicats. Ce ne devrait pas être nous qui viennent
défendre les ouvriers ici, comme je l'ai expliqué tout à
l'heure, ni venir défendre le coût de la construction. C'est
sûr. C'est pourquoi je disais tout à l'heure que quand on fait des
demandes d'augmentation de salaire on devrait penser aussi à ces autres
syndiqués dans d'autres secteurs, savoir qu'eux aussi devront acheter ce
produit-là.
C'est une chose bien normale. Je dis que ça ne prend pas non plus
trois pages de calculs pour savoir que si dans un syndicat il y a des ouvriers
qui oeuvrent dans un autre domaine et qui sont payés $2.25 l'heure, et
que, quand on arrive aux gens de la construction, on dit qu'on va demander
$1.20 d'augmentation parce qu'il n'y a pas de compétition
internationale, à ce moment-là, c'est une autre affaire. Il
faudrait devenir plus sérieux dans ces sujets.
Aussi toujours considérer l'entrepreneur, comme l'entrepreneur
général, presque comme un hors-la-loi, de la part de tous les
gens qui viennent sur les chantiers, je vous le dis bien franchement, ce n'est
pas rose. Regardez le nombre de constructeurs qui laissent la construction et
qui travaillent ailleurs, vous allez voir que vous allez avoir des
surprises.
Qui va payer pour tout ça bientôt? Je pense que c'est le
consommateur, le peuple québécois qui va être obligé
de payer pour ces erreurs. Il s'agirait d'y penser bien sérieusement.
C'est tout ce que nous demandons. Donnez-nous les salaires que nous aurons
à payer. Nous nous y soumettrons et n'argumenterons avec personne. Mais
pensez plutôt aux travailleurs du Québec et donnez-leur le droit
primordial de manger et d'être logés. C'est tout ce que nous
demandons.
M. LE PRESIDENT: Je pense que c'est justement le thème sur lequel
on devrait terminer nos travaux de la journée.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): D'abord, M. le Président, il n'est pas
tout à fait 5 heures et demi.
M. LE PRESIDENT: Restreindre le député de Chicoutimi
à une demi-minute, c'est presque impossible.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non, vous allez voir que c'est très
possible. Je voudrais remercier les messieurs qui, au nom de l'Association des
entrepreneurs en construction de Brome, Missisquoi, Shefford, ont posé
des problèmes très sérieux, enfin le problème de la
priorité d'emploi. Il y a eu d'autres discussions un peu marginales.
Mais ils viennent de poser un problème très sérieux, soit
le problème des relations entre le constructeur, le consommateur, etc.
C'est un problème extrêmement important. Le problème de
cette main-d'oeuvre qui est là, sans emploi, et qui pourrait trouver de
l'emploi, c'est un autre problème important. Pour terminer, dans ma
demi-minute, M. le Président, encore que j'aie une minute à moi,
je reviens à la question que je posais au ministre et nous allons nous
quitter là-dessus. De quelle façon le ministre entend-il, par
voie législative, régler ce problème qu'ont exposé
les divers participants à la commission aujourd'hui, notamment les
représentants de l'association qui viennent de se faire entendre et dont
les observations méritent une attention particulière? Elles
touchent à des problèmes qui n'avaient pas été
évoqués ou qui ont été présentés dans
une optique nouvelle qui rejoint chacun des consommateurs dont nous sommes
tous.
M. le Président, il est 5 h 30 et je propose l'ajournement.
M. LE PRESIDENT: La commission ajourne ses travaux à dix heures
de la matinée, demain. Nous aurons l'association qui n'a pas pu se faire
entendre cet après-midi, en plus de l'autre qui était absente. M.
Laberge, est-ce que votre mémoire sera prêt demain?
M. LABERGE: Fort probablement, oui.
M. LE PRESIDENT: Si nous avions le mémoire, nous pourrions
procéder.
(Fin de la séance à 17 h 28)
Séance du mercredi 13 septembre 1972 (Dix heures quatorze
minutes)
M. SEGUIN (président de la commission permanente du travail, de
la main-d'oeuvre et de l'immigration): A l'ordre, messieurs!
Pour la séance de ce matin et probablement pour cet
après-midi aussi, les députés suivants sont membres de la
commission: MM. Caron (Verdun), Faucher (Yamaska), Pelletier (Kamouraska),
Burns (Maisonneuve), Croisetière (Iberville), Vincent (Nicolet),
Cornellier (Saint-Hyacinthe), Lacroix (Iles-de-la-Madeleine), Demers
(Saint-Maurice), Guay (Dorchester), Roy (Beauce), Harvey (Chauveau), Marchand
(Laurier) comme rapporteur, Shanks (Saint-Henri), Gagnon
(Gaspé-Nord).
Il y aurait des additions à cette liste qu'on me fait parvenir du
côté ministériel, puisqu'on a le droit, entre les sessions,
à deux fois plus de membres à la commission permanente. Ces
personnes sont: MM. Perreault (L'Assomption), Vaillancourt (Stanstead), Houde
(Fabre), Brown (Brome), Dionne (Compton), Assad (Papineau), Mailloux
(Charlevoix), Carpentier (Laviolette).
Nous commençons nos délibérations, pour terminer la
séance de ce matin à midi et reprendre à 2 h 30
jusqu'à 5 h 30; il n'y aura pas de séance ce soir. La même
chose et les mêmes heures se répéteront demain, pourvu que
nous ayons du pain sur la planche, soit des mémoires ou des commentaires
de la part de personnes qui voudront s'adresser à la commission.
Est-ce que la Fédération de la construction du
Québec a des représentations ce matin? C'est le mémoire
1-M, la Fédération de la construction du Québec. On a
appelé cet organisme deux ou trois fois hier et il n'y avait pas de
réponse; il n'y a personne ce matin, non plus.
Passons donc, pour entendre, si possible, les mémoires
présentés à la commission. J'en ai deux, ici:
l'Association provinciale des constructeurs d'habitations et l'Association des
constructeurs de routes et grands travaux du Québec. Il y en a quatre,
de toute façon, et on doit diviser en deux tranches la
présentation de ces quatre mémoires. Pourriez-vous, s'il vous
plaît, donner le nom de l'association que vous représentez et
votre nom?
Association de la construction de
Montréal
M. GAGNON: Jean-Yves Gagnon, de l'Association de la construction de
Montréal. Nous avons, comme vous l'avez dit, deux mémoires
à présenter: un sur l'arrêté en conseil no 2711 et
un autre sur le bill 49. Je vais présenter celui sur
l'arrêté en conseil no 2711 et mon voisin, M. Lebon,
présentera celui sur le bill 49.
J'ai déposé, hier matin, un mémoire, que vous avez
sans doute en main. Je n'ai pas l'intention de lire ce mémoire mais
j'aimerais attirer votre attention sur certaines choses qui y sont contenues.
Avant de procéder, j'aimerais vous rappeler que le mémoire est
présenté au nom de quatre des cinq associations patronales
reconnues dans le bill 290, soit l'Association provinciale des constructeurs
d'habitations du Québec, l'Association des constructeurs de routes et
grands travaux du Québec, la Corporation des maîtres
mécaniciens en tuyauterie du Québec, la Corporation des
maîtres électriciens du Québec ainsi que l'Association de
la construction de Montréal, qui est affiliée à
l'Association des constructeurs de routes.
Ces associations regroupent sûrement, ensemble, de 80 p.c.
à 90 p.c. des employeurs de la construction, au Québec.
Avant de procéder à l'élaboration de certaines
statistiques et de certains commentaires sur l'arrêté en conseil
no 2711, j'aimerais vous rappeler brièvement, un peu comme l'a fait M.
Pepin, hier matin, l'historique de cet arrêté en conseil. Comme
vous le savez, au printemps de 1969, lors du renouvellement du décret de
la construction, les parties syndicales, en particulier la CSN, avaient
demandé une certaine forme de sécurité d'emploi.
Cette demande avait fait l'objet de plusieurs discussions et finalement
d'une grève qui s'était réglée le 10 juillet 1969
par un mémoire d'entente que vous avez reçu hier parce qu'il
était contenu dans son entier dans le mémoire de la CSN. Dans ce
mémoire d'entente on disait que le tout ferait l'objet d'un arbitrage
par le juge Gold. Cet arbitrage a eu lieu et, au printemps de 1970, la sentence
arbitrale est devenue l'arrêté en conseil 4119 sur la
sécurité d'emploi des ouvriers de la construction.
Cet arrêté en conseil comme l'a dit M. Pepin aussi
hier comportait différentes modalités et divisait les
ouvriers de la construction en trois catégories. Il a fait l'objet
pendant à peu près un an d'une tentative assez sérieuse de
mise en application. Malheureusement, il nous a paru à nous en
tout cas à la plupart des employeurs que l'arrêté en
conseil n'était pas tellement applicable parce qu'il était trop
compliqué et qu'il contenait des modalités qu'il aurait
été, entre autres, très dispendieux de mettre en
application.
On s'est rendu compte, par exemple, que pour placer un ouvrier en vertu
de l'arrêté en conseil 4119, il en coûtait à peu
près $40 au Centre de main-d'oeuvre du Québec pour chaque
placement. Je pense que le Centre de main-d'oeuvre du Québec ainsi que
les parties ont vite réalisé que ce n'était pas tellement
pratique.
A l'été de 1971, à la suite de certaines
représentations par les parties patronales et les parties syndicales, le
ministre du Travail a abrogé l'arrêté en conseil 4119 et
l'a remplacé par l'arrêté en conseil 2711. Cet
arrêté en conseil est comme vous l'avez sûrement
réalisé beaucoup plus simple que
l'arrêté en conseil no 4119. Il stipule simplement qu'il faut
être détenteur d'un permis de travail pour travailler dans
l'industrie de la construction dans la province de Québec.
Si c'était seulement ce qui était contenu dans le no 2711,
je pense qu'il n'y aurait pas de problème. Cependant,
l'arrêté en conseil no 2711 prévoit un contrôle
quantitatif de la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction. C'est
là qu'il devient assez difficile de travailler, parce que pour
contrôler de façon quantitative les ouvriers de la construction,
il faut d'abord connaître ceux qui sont là, le nombre d'heures
qu'ils travaillent, les salaires qu'ils gagnent, etc.
Autrement dit, il faut des statistiques valables. La Commission de
l'industrie de la construction, qui est chargée de l'application de
l'arrêté en conseil, travaille depuis à peu près un
an à essayer de trouver des statistiques valables pour la mettre en
application.
Ces statistiques, comme vous allez le voir à la page 3 de notre
mémoire, nous révèlent certaines choses qui sont assez
précises et certaines autres qui sont peut-être beaucoup moins
précises. J'aimerais attirer votre attention là-dessus. On sait,
par exemple, que 105,000 permis de travail ont été émis
par la Commission de l'industrie de la construction depuis qu'elle est
chargée de l'application de l'arrêté en conseil 2711. On
sait aussi que le ministère du Travail, de son côté, a
émis 9,000 cartes d'identité et ceci, la plupart du temps,
à la suite d'une demande expresse d'un ouvrier ou d'un
député ou de quelqu'un qui se sentait lésé par
l'application de l'arrêté en conseil 2711 par la commission.
On sait aussi qu'en 1972 le volume de construction est plus
élevé qu'en 1971. Il faut en tenir compte lors de
l'émission des permis de travail. On sait, en plus, qu'il y a encore au
moins 7,500 salariés dans l'industrie de la construction, qui
travaillent sans permis de travail. Evidemment, ils ont continué
à travailler il n'y a jamais eu de procédures prises contre ces
gens-là.
Un des gros problèmes en ce qui concerne les statistiques de la
commission, c'est que, pour les statistiques sur les gains
réalisés par les ouvriers là, je suis à la
page 4 il y a une marge d'erreur de 31.9 p.c. La raison pour laquelle il
y a une telle marge d'erreur, c'est que les rapport mensuels fournis par les
employeurs, sur lesquels la commission se base pour trouver ces statistiques,
n'indiquent pas toujours dans quelle région les salariés ont
gagné leur salaire. Alors, concernant les statistiques qui, selon nous,
seraient les plus importantes, soit celles nous donnant le nombre d'ouvrier de
métier dans chaque région et combien d'heures ils ont fait dans
chaque région pour chaque métier, la commission ne peut pas nous
répondre parce qu'il y a une marge d'erreurs de 31.9 p.c. Je prends
ça dans les chiffres de la commission elle-même.
On sait aussi qu'en ce qui concerne le statistiques par métier il
y a une marge d'erreur qui est probablement plus grande que 31.9 p.c, parce que
la commission, dans son travail de dépistage des hommes de
métier, n'a pas réussi à trouver exactement combien
d'hommes de métier il y a actuellement dans la province de
Québec. Les statistiques nous disent qu'il y en a à peu
près 38,000. Cependant, dans certains métiers, par exemple, les
statistiques disent qu'il y a 4,000 électriciens dans la province de
Québec, alors qu'on sait qu'il y en a à peu près
10,000.
Les statistiques disent qu'il y a à peu près 5,000
plombiers et l'on sait qu'il y en a à peu près 10,000. On dit,
entre autres, qu'il y a une vingtaine de mécaniciens d'ascenseurs; on
sait qu'il y en a 300.
Evidemment, on ne peut pas beaucoup tenir compte de ces statistiques et,
selon nous, ça pose un grave problème. Si on ne connaît pas
exactement combien d'hommes de métier il y a actuellement, on est assez
mal placé pour décider à combien de nouveaux hommes de
métier on va émettre des permis de travail. Une autre chose assez
difficile c'est que la commission, du fait qu'elle n'a aucune autre source de
données que les rapports des employeurs, n'a aucune idée du
volume de construction dans la province de Québec. Elle ne peut pas
prévoir à l'avance combien il va y avoir de cgnstruction d'un
mois à l'autre, d'une année à l'autre. Evidemment, c'est
une autre contrainte dont il faut tenir compte lorsqu'on émet des permis
de travail.
Une autre chose que la commission ne connaît pas et qui impose une
contrainte, c'est le fait que la mobilité géographique des
ouvriers n'est pas connue. On ne sait pas, par exemple, combien d'ouvriers dans
chaque métier sont prêts à se déplacer d'un bout
à l'autre de la province pour aller gagner leur salaire. On sait que
cela se fait, on sait que beaucoup d'ouvriers, lorsqu'il y a un gros contrat
quelque part, vont se déplacer, vont faire 500 milles pour aller gagner
un meilleur salaire mais on ne peut pas savoir exactement combien dans chaque
métier le font. Selon nous, pour prévoir dans une région
donnée combien d'ouvriers doivent détenir des permis de travail,
il faut savoir combien il y a d'ouvriers dans cette région mais il faut
aussi savoir combien d'ouvriers vont accepter de venir des autres
régions pour travailler. Cela, on le sait pas.
Une autre chose qui a été mentionnée hier et qui
nous préoccupe beaucoup je crois que cela a été
mentionné par l'Association des entrepreneurs en construction de Brome,
Missisquoi, Shefford c'est que la commission ne connaît pas du
tout les gains que les ouvriers de la construction font ailleurs que dans la
construction. On a mentionné hier le fait qu'en ce qui concerne les
travaux de route, les opérateurs de machinerie surtout, ces
gens-là, souvent, vont travailler dans les garages, dans les cours des
entrepreneurs. Un autre groupe,
l'hiver, va travailler à l'enlèvement de la neige.
Evidemment, c'est un revenu supplémentaire pour les ouvriers, dont les
statistiques de la commission ne tiennent pas compte. La commission ne le sait
pas.
On ne sait pas non plus combien d'ouvriers se retirent chaque
année de l'industrie de la construction.
Combien y en a-t-il qui décident d'aller travailler en usine,
combien y en a-t-il qui se retirent en raison d'âge, de maladie, de
décès? On ne connaît pas non plus les moyennes d'âge
des salariés de la construction. Selon nous, c'est très
important. Par exemple, on nous dit que dans certains métiers, à
Montréal, la moyenne d'âge pourrait être d'environ 45
à 50 ans, parce qu'il y a certains métiers qui ne sont pas
renouvelés et où les jeunes n'acceptent pas d'aller
travailler.
S'il est vrai qu'il y a des moyennes d'âge de 45 ans dans certains
métiers, il faut prévoir la relève et ça, on ne le
sait pas.
Une autre chose qui ne nous a pas paru tellement claire dans les
statistiques de la commission, c'est le fait que la commission nous dit que sur
38,000 hommes de métier, les 38,000 sur lesquels elle a des
statistiques, il y en aurait environ 25,000 qui auraient pratiqué, au
cours de l'année, plus d'un métier. Selon nous, ce n'est presque
pas possible. Nous avons passé deux jours à en discuter à
la commission, il y a environ un mois. Que 25,000 ou les deux tiers des hommes
de métier dans la construction aient travaillé dans deux, trois
ou quatre métiers, ne nous paraît pas possible et, selon nous,
cela devrait être clarifié avant d'aller plus loin.
On sait aussi, d'après les statistiques de la commission, qu'il y
a au moins 16,000 ouvriers dans l'industrie de la construction qui n'ont pas
travaillé en 1971 un minimum de 100 heures dans l'année. En ce
qui nous concerne, pour ces 16,000 on ne verrait pas de grosses objections
à ce que l'on procède tout d'abord à éliminer ces
gens de l'industrie avant de dire qu'on élimine ceux qui font plus de
100 heures. C'est pourquoi, vous le verrez plus loin dans notre mémoire,
nous avons suggéré certains critères d'émission des
permis. Je n'ai pas l'intention d'en parler en détail ce matin mais nous
allons insister beaucoup sur le fait qu'il faut éliminer tout d'abord
les ouvriers marginaux.
On sait, entre autres, qu'il y a beaucoup de pompiers, de policiers, de
fermiers, de bûcherons qui viennent travailler dans l'industrie de la
construction quand ils n'ont pas d'ouvrage ailleurs. Si ces gens étaient
éliminés au point de départ, je pense que ce serait
déjà un gros pas en avant.
M. COURNOYER: M. le Président, parce que je ne voudrais pas que
nous soyons mal placés, quand vous dites éliminés, est-ce
éliminés des statistiques ou du marché?
M. GAGNON (Jean-Yves): Eliminés du mar- ché par le fait
qu'ils n'auraient pas de permis de travail.
Il y a aussi certaines considérations d'ordre
général que nous avons mentionnées dans notre
mémoire, à partir de la page 7, qui ne sont pas
nécessairement des considérations d'ordre statistique, mais dont
il faut absolument tenir compte, selon nous.
La première est la suivante et, selon nous aussi, la plus
importante. Avant de décider de l'émission des permis de travail,
la Commission de l'industrie de la construction doit être en mesure de
connaître exactement, à un moment donné, combien d'ouvriers
se cherchent du travail dans chaque métier et dans chaque
région.
Selon nous, si la commission ne sait pas combien il y a de gens en
chômage, elle ne peut pas décider à combien de nouvelles
personnes elle va émettre des permis. C'est une donnée qui
n'existe pas du tout à la commission et c'est une contrainte très
importante. On pourrait dire aujourd'hui: Nous n'émettons pas de permis
dans la région X parce que, d'après nous, il y en a suffisamment.
Si nous savions qu'il y a 1,000 ouvriers dans la province qui se cherchent du
travail, qui sont sur des listes d'ouvriers en chômage et que ces listes
étaient disponibles aux employeurs, nous pourrions dire: D'accord, vous
avez raison de ne pas émettre de permis. Mais si nous ne savons pas
combien de personnes sont disponibles, cela nous pose un problème et
nous pouvons, nous, les employeurs, dire à la commission: Prouvez-nous
qu'il y en a en chômage, parce que, sans cela, nous irons en chercher
ailleurs. C'est une contrainte très importante.
Un autre problème se pose, je l'ai mentionné plus
tôt. Les statistiques de la commission ne sont pas encore assez
perfectionnées pour tenir compte du nombre d'hommes de métier
dans chaque région qui travaillent ou le nombre d'heures que ces gens
effectuent. Encore une fois, nous sommes beaucoup plus préoccupés
par les besoins d'hommes de métier que nous le sommes par les
occupations.
La distinction pour ceux qui ne la connaî-traient pas, les hommes
de métier sont les gens qui ont besoin d'une carte de compétence
pour travailler dans la construction. Les occupations, ce sont les journaliers,
les opérateurs de machinerie légère. En ce qui nous
concerne, le problème vient du fait que cela prend de trois à
quatre ans pour former un homme de métier, d'après le
système d'apprentissage. Etant donné que cela prend de trois
à quatre ans, il faut prévoir, trois ou quatre ans à
l'avance, combien d'ouvriers on aura besoin.
Pour un journalier, si la prévision n'est pas faite à long
terme, il n'y a pas de problème. On peut partir, demain matin, et aller
engager des journaliers n'importe où. Il n'y a pas de formation et il
n'y a pas d'apprentissage. On va insister beaucoup sur le fait que dans
l'émission des permis, dans le cas des hommes de métier, il
faut faire des prévisions au moins de trois à quatre ans
à l'avance. Sans cela, le système ne fonctionnera pas.
On va se ramasser, à un moment donné, avec une
pénurie d'hommes de métier qui va, évidemment, poser de
graves problèmes, mais je peux vous dire, cependant, qu'actuellement
dans certains métiers, à Montréal entre autres, il manque
déjà de la main-d'oeuvre. Cet été, par exemple, des
menuisiers, des ferrailleurs, des poseurs de gicleurs, des frigoristes, des
cimentiers applicateurs, des couvreurs et des serruriers en bâtiment, il
en a manqué à Montréal. Ce sont tous des métiers.
On ne dira pas qu'il a manqué de journaliers ce serait faux,
parce que des journaliers, il y en a en masse mais des hommes de
métier, il en manque déjà et il faut en tenir compte.
C'est pour ça que, lorsque la commission va décider des
critères d'émission des permis, il faudra peut-être avoir
deux systèmes: un à long terme pour les hommes de métier
et un à plus court terme pour les occupations.
Une autre considération qui, selon nous, est très
importante, c'est le fait qu'avant de prévoir un système de
contrôle quantitatif de la main-d'oeuvre extrêmement rigide,
autrement dit un contingentement très rigide, nous croyons qu'il faut
procéder de façon très lente, c'est-à-dire
commencer peut-être, pour la première année
d'activité, avec un système très flexible. Si on dit, par
exemple, que, la première année d'application du système,
on va éliminer tous les gens qui n'ont pas effectué 500 heures
dans l'industrie de la construction l'année précédente, on
sait tout de suite, d'après les statistiques de la commission, que
ça va éliminer 46,000 personnes dans l'industrie de la
construction. D'après nous, cela n'a pas de sens parce qu'on
connaît les répercussions que ça va avoir.
Donc, les critères qui seront établis par la commission
à la fin de septembre doivent tenir compte de cela. Il faut
procéder lentement, éliminer tout d'abord ceux qui n'ont pas
d'affaire du tout dans la construction et, par la suite, l'année
suivante ou dans deux ans, on procédera au contingentement un peu plus
sévère.
Une autre considération que vous allez retrouver à la page
10, c'est le fait qu'il y a une relation extrêmement serrée entre
le contrôle quantitatif et le contrôle qualitatif de la
main-d'oeuvre. Je crois que personne n'en a parlé encore. C'est beau de
dire qu'on va contrôler le nombre d'ouvriers dans l'industrie de la
construction, mais il faut aussi tenir compte de la durée de la
formation et du rapport apprenti-compagnon. Je crois que M. Daigle, de Brome,
Missisquoi, en a parlé hier. Actuellement les employeurs ont droit
à un apprenti pour cinq compagnons ou cinq hommes de métier.
Cela, c'est pour les menuisiers et pour la plupart de ces métiers. S'il
y a un apprenti pour cinq hommes de métier, il faut se rendre compte
qu'avec un apprentissage de trois ans ou de quatre ans il n'y a pas beaucoup
d'apprentis qui sont formés.
Nous proposerions que le rapport apprenti-compagnon soit réduit
de façon considérable afin de permettre, quand il y en a besoin,
de former des apprentis. S'il faut qu'il y ait un ouvrier pour un apprenti,
pour une période d'un an ou deux ans, tant mieux, on en formera. Au
moment où il y en aura trop, on dira: Non, il n'y a plus de permis de
travail d'émis, il n'y a plus d'apprentis.
Selon nous, il faut faire fonctionner les deux ensemble, le
contrôle quantitatif et le contrôle qualitatif. Le contrôle
qualitatif par le rapport apprenti-compagnon et le contrôle quantitatif
par les permis de travail.
Vous allez voir dans notre mémoire, aux pages 11, 12, 13, qu'on a
suggéré certains critères d'émission de permis.
Je n'en parlerai pas ce matin, parce que la Commission de l'industrie de
la construction n'a pas encore terminé ses travaux là-dessus.
Elle doit étudier cela vers la fin de septembre. C'était
simplement à titre illustratif. Ce sont des suggestions que nous
faisons, dans le mémoire, et que nous ferons également à
la commission. Donc, je vais passer par-dessus cette partie du
mémoire.
A la page 14, on parle d'un pourcentage de réserve. C'est une
autre chose dont il faudra tenir compte, dans le contrôle quantitatif de
la main-d'oeuvre. Je pense qu'il est possible, en vertu des statistiques que
nous avons, de prévoir, jusqu'à un certain point, combien
d'ouvriers sont requis dans l'industrie de la construction mais on ne peut pas
prévoir, pas encore, du moins, les fluctuations du cycle
économique. On ne sait pas combien de grosses industries viendront
investir au Québec l'année prochaine, on ne sait pas combien
d'édifices les gouvernements provinciaux, municipaux et le gouvernement
fédéral décideront de construire en 1973-1974. Alors afin
de prévoir, pour les fluctuations du cycle économique, nous
prétendons qu'il faut absolument que le système de contrôle
quantitatif tienne compte d'un pourcentage de réserve d'ouvriers
disponibles.
Si, à un moment donné, il y a un nombre x d'ouvriers qui
travaillent, selon nous, il faudra qu'il y ait au moins un nombre x, plus,
disons, 20 p.c. de détenteurs de permis. Autrement, il suffit qu'il y
ait une grosse industrie ou un gros édifice qui se construise à
un endroit donné et il y aura tout de suite pénurie de
main-d'oeuvre. Nous prétendons donc que continuellement, il devra y
avoir une réserve de disponible. Ces gens, évidemment, ne
travailleront peut-être pas 2,000 heures par année dans la
construction, mais s'ils travaillent un nombre d'heures raisonnable et s'ils
peuvent avoir un autre revenu ailleurs, tel que c'est le cas actuellement, je
pense qu'il n'y a pas de problème.
La commission nous dit, dans ses statistiques, qu'il y a une
possibilité de 55,700 emplois
à temps plein dans la construction. Je pense que le
président de la commission a dit aussi que ce chiffre de 55,700 est
très théorique, parce que, pour l'obtenir, on a simplement pris
le nombre d'heures effectués dans l'année, on l'a divisé
par 2,000 heures et cela nous a donnés 55,700 personnes, qui
travailleraient 2,000 heures. Mais l'industrie de la construction, ce n'est pas
cela, et tout le monde le sait. L'été, il faut plus de monde que
l'hiver. Dans les routes, on travaille six mois par année. Il faut
peut-être 20,000 personnes qui travaillent dans les routes,
l'été. Ces gens-là, l'hiver, soit qu'ils travaillent dans
des garages, sur la neige ou ailleurs. On n'en tient pas compte dans la
construction. Alors des chiffres comme 55,700, à notre point de vue,
sont des chiffres tellement hypothétiques que je pense qu'on ne devrait
pas du tout en tenir compte.
Une autre chose dont il faudra tenir compte actuellement, nous
n'avons aucune donnée sur cela c'est le fait qu'il y a plusieurs
ouvriers de la construction j'en ai parlé brièvement tout
à l'heure qui quittent l'industrie. Jusqu'à
présent, cela a été une chose connue dans notre industrie
qu'il y a beaucoup d'ouvriers qui ne demandent pas mieux que de quitter
l'industrie de la construction pour aller travailler dans une manufacture, pour
avoir un emploi à l'année. Cela a toujours été un
fait, surtout dans les métiers un peu spécialisés,
qu'aussitôt qu'un ouvrier pouvait se trouver un emploi à temps
plein dans une usine ou dans une manufacture, il sautait dessus. Alors il faut
tenir compte de ces départs. Nous espérons bien qu'à
l'avenir, il y en aura moins. Lorsqu'on pourra leur assurer un meilleur revenu,
ils resteront probablement dans l'industrie plus longtemps.
Mais, ils ne pourront pas rester dans l'industrie de la construction
aussi longtemps que dans une autre industrie parce que, dans l'industrie de la
construction, lorsqu'un ouvrier est rendu à 60 ans, malheureusement il
n'est plus tellement efficace. Dans ce sens, il faudra prévoir des
mécanismes qui vont permettre à ces gens soit de se recycler dans
une autre industrie ou bien d'avoir un système de sécurité
sociale adéquat qui leur permettra de se retirer à 60 ans.
Peut-être même quelques années avant.
Ce sont des contraintes qui n'ont pas été
mentionnées et qui, selon nous, doivent être retenues.
Une autre chose qui s'adresse beaucoup plus aux gouvernements
qu'à n'importe qui, c'est le fait que jusqu'à présent les
gouvernements du Canada n'ont pas fait beaucoup de planification
économique. Il y a très peu de niveaux de gouvernement au Canada
qui planifient 3, 4 ou 5 ans à l'avance leurs investissements dans
l'industrie de la construction.
On sait par exemple qu'en période d'élections il y a
beaucoup de contrats qui se donnent. Quand il y a beaucoup de chômage les
gouvernements vont dire: Nous allons donner des contrats de route parce que
cela emploie beaucoup de monde et va enlever les gens du chômage. Ce sont
des choses qui nous posent de graves problèmes, parce que l'employeur ne
peut prévoir combien de contrats il va avoir l'année suivante. La
Commission de l'industrie de la construction non plus ne peut le savoir, parce
que cela devient des considérations politiques.
Nous demanderions à tous les niveaux de gouvernement, et surtout
à celui du Québec parce que nous nous adressons ici au
gouvernement du Québec de mieux planifier les contrats qu'ils
donnent dans l'industrie de la construction. Cela va nous aider beaucoup
à établir un système de contrôle quantitatif dans
l'industrie de la construction. Si nous savions un an à l'avance que le
gouvernement va donner tant de contrats de route, tant de contrats de
bâtiment, tant d'écoles, tant d'hôpitaux, cela nous aiderait
beaucoup. Malheureusement, nous ne le savons pas. C'est une demande que nous
adressons au gouvernement.
Il y a d'autres considérations dans notre mémoire qui
concernent l'administration du système de contrôle quantitatif. Je
n'ai pas l'intention d'en discuter ce matin non plus, parce qu'encore une fois
cela concerne la Commission de l'industrie de la construction. C'est à
ce niveau qu'il faudra en reparler. C'est pourquoi je me limiterai à
vous dire en terminant que nous sommes d'accord aussi avec une suggestion qui a
été faite par le président de la commission de mettre sur
pied un comité permanent d'étude qui va viser à
établir un contrôle quantitatif pour les années 1974-1975
et les suivantes, parce que comme on l'a dit plus tôt nous
suggérons un système temporaire pour 1973, afin de savoir
exactement ce que cela va donner. Par la suite, nous serions prêts
à accepter un système permanent qui sera peut-être plus
sévère et qui, pour les employeurs, est plus difficile à
accepter, mais nous croyons que cela peut avoir certains avantages. Je pense
que le ministre du Travail les a mentionnés hier. Lorsque les ouvriers
de la construction auront un meilleur revenu dans leur industrie,
peut-être que les demandes des parties syndicales à la table de
négociation seront plus raisonnables.
C'est l'espoir qui nous fait approuver le système de
contrôle quantitatif. Sinon, je pense que nous ne serions pas tellement
d'accord.
Etant donné que c'est assez logique de penser que c'est ce qui va
arriver dans l'avenir, on est d'accord avec un système de contrôle
quantitatif.
Ce sont à peu près mes remarques pour ce matin. S'il y a
des questions, je suis prêt.
M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Maurice.
M. DEMERS: M. Gagnon, d'abord, je vous remercie de votre mémoire
et je me permets de vous poser quelques questions. Je me réfère
à la
page 4 et à la page 3 où vous vous interrogez
sérieusement sur les données qui nous ont été
fournies hier par M. Morin. Il semble y avoir un peu contradiction entre les
énoncés que vous formulez et les chiffres que M. Morin nous
donnait hier. Est-ce que M. Morin peut nous dire aujourd'hui si la
contradiction qui semble se dessiner dans le texte que M. Gagnon nous propose
n'est qu'apparente ou bien si elle est réelle?
Je vois M. Morin en arrière, tous les deux, vous siégez
à la même commission; je crois que M. Gagnon siège à
la commission de la construction. Vous siégez au comité sur
l'arrêté en conseil 2711?
M. GAGNON (Jean-Yves): Oui.
M. DEMERS: M. Morin nous donne des chiffres et, vous, vous les mettez en
doute assez sérieusement et vous en venez à des conclusions qui
sont peut-être un peu à l'opposé des siennes. Nous nous
voulons savoir où est la vérité dans ces deux
affirmations-là. Je ne veux pas que vous engagiez un débat entre
vous, mais je voudrais que vous nous fournissiez, cependant, certaines
explications en faisant un parallèle avec les chiffres de M. Morin, afin
que nous puissions savoir â quoi nous en tenir.
M. GAGNON (Jean-Yves): Est-ce que je pourrais vous demander quels
chiffres exactement, d'après vous, semblent en contradiction avec ceux
de M. Morin?
M. DEMERS: Les données par métier. Lorsque, vous dites,
par exemple, que les 55,700 ouvriers nécessaires, c'est un chiffre
utopique, parce qu'il est le fruit d'une division par 2,000 heures.
M. GAGNON (Jean-Yves): Je pense que M. Morin a mentionné, hier,
qu'il s'agit simplement d'un chiffre hypothétique. Je ne crois pas qu'il
y ait de contradiction dans ce sens-là. Je pense bien qu'il peut
exprimer lui-même son opinion.
M. MORIN: Oui, je vais exprimer moi-même ce que j'ai voulu dire.
D'ailleurs, c'est écrit noir sur blanc à la page 8, en bas du
rapport. On dit justement le contraire, qu'on ne peut pas et qu'on ne doit pas
diviser 110 millions par 2,000. Donc, j'ai voulu dire ce qu'il fallait
éviter. Je n'ai pas voulu dire le contraire.
M. DEMERS: Mais vous n'avez aucun moyen pour trouver le nombre, dans ce
cas-là.
M. MORIN: Pour trouver le nombre exact? M. DEMERS: Oui.
M. MORIN: On ne l'aura jamais, le nombre exact. La conclusion que j'ai
voulu signaler à la fin de ma présentation, M. le
Président, c'est que justement il va falloir mettre sur pied un
système relativement souple pour s'adapter à la conjoncture
toujours changeante dans ce domaine, mais il y a un sommet que l'on sait. Il y
a un seuil également que l'on sait. Alors, il faut oeuvrer entre
ça, avec une mécanique souple. Chose certaine, il faut
éviter de dire que, comme le maximum, c'est 85,000, il n'y en aura pas
plus de 85,000 et, comme le minimum peut-être, à un moment
donné, 50,000, de dire qu'il en faut au moins 50,000.
Je pense qu'on n'aboutit à rien en faisant ça. On
n'aboutit à rien en faisant des divisions mathématiques pures
également, où on arrive à 55,000 en divisant 110 millions
par 2,000.
Ce qu'il faut, c'est un système souple qui va justement prendre
en considération les variations qui sont différentes par
région. Ce qui est vrai à Sept-Iles, compte tenu du bassin de
main-d'oeuvre de Sept-Iles et de ses sources tout à fait
différentes d'une autre région, peut-être tout à
fait faux dans la Beauce ou tout à fait faux pour la baie James et pour
Montréal. D'ailleurs, dans la lettre introductive de notre rapport
à M. le ministre, on disait très bien: Il nous faut mettre sur
pied l'expérience est là, c'est une chose que l'on sait et
qui, je pense, a été admise du côté de la commission
une mécanique souple qui s'adapte aux conjonctures et aux
dimensions de chaque région tout en ayant un système
centralisé de coordination puisque le permis de travail, ce n'est pas un
permis régional mais un permis provincial et qu'on ne doit pas limiter
l'action d'un travailler à une région, au départ.
M. GAGNON (Jean-Yves): M. le Président, je pense que dans ce
sens-là il n'y a aucune contradiction entre notre document et celui de
la commission. D'ailleurs, quand M. Morin dit qu'il faut un système
souple, c'est exactement ce qu'on propose.
M. DEMERS: Pour régler les faits que vous constatez à la
page 4, pour essayer de mettre un peu d'éclaircissement
là-dedans, vous avez des suggestions précises lorsque vous dites,
par exemple: Les données par métier, par occupation sont
pratiquement inexistantes. Est-ce qu'il y a une façon de les
trouver?
M. GAGNON (Jean-Yves): Je crois que la commission procède
actuellement à un relevé et essaie de trouver exactement combien
il y a d'ouvriers dans chaque métier, dans chaque région. Leur
travail n'est pas terminé et il peut y avoir des problèmes parce
qu'il semble qu'on n'ait pas toutes les données. Il se peut que
ça prenne un an avant qu'on ait toutes ces données, c'est une
autre raison qui fait que pour nous le système doit être
temporaire pour le moment.
M. DEMERS: A la fin du même paragraphe...
M. MORIN: Est-ce que vous me permettriez de compléter?
M. DEMERS: Oui.
M. MORIN: On disait justement, à la page 2, au centre de notre
rapport, que les données sur la qualification n'étaient pas
exactes. Si vous vous souvenez, au mois de mai on avait bien dit qu'on entamait
une opération de dépistage. Ce qui se fait de la part de la
commission c'est qu'on trouve sur les chantiers ceux qui, malheureusement,
exercent une activité tout en n'ayant pas le certificat de
contrôle de leurs qualifications, compte tenu de l'activité qu'ils
exercent.
Immédiatement, on leur donne un avis et on les invite fortement
à se rendre au bureau de la main-d'oeuvre. Ceux-ci, par une
équipe appropriée, leur font passer des examens. Actuellement,
ceux qui ne se présentent pas, on les invite à nouveau, par une
mise en demeure, à se présenter, et ainsi de suite dans chacune
des régions. On le fait et on devrait terminer l'opération, si
tout va bien, pour Noël.
M. COURNOYER: M. le Président, en attendant, il y a des
obligations de la part du ministre et il y a des obligations de la part de la
commission de l'industrie de la construction. Est-ce que ces
imprécisions ou ce manque de données constatés par la
commission de l'industrie de la construction, par les observations que vous
avez faites hier comme les observations que je retrouve dans le mémoire
des quatre associations patronales, voulez-vous suggérer je
m'attends à une sorte de recommandation ou recommander de mettre
en veilleuse le 2711?
En vertu de quels critères puis-je refuser d'émettre un
permis à quelqu'un?
M. GAGNON: Vous posez la question à qui, à moi?
M. COURNOYER: A tout le monde, à n'importe qui. Vous
répondrez quand vous voudrez.
UNE VOIX: Je peux vous répondre.
M. COURNOYER: Pas vous tout de suite, attendez, vous!
UNE VOIX: Je vais vous répondre.
M. COURNOYER: Pas tout de suite, dans le bon temps.
M. GAGNON (Jean-Yves): Je peux vous dire qu'en ce qui nous concerne nous
n'avons pas demandé que le décret 2711 soit mis en veilleuse.
Mais, étant donné que les chiffres que nous avons ne sont pas
complets, nous disons que, pour la première année et
peut-être même pour deux ans, il faudra que ce soit très
flexible. C'est ce que nous demandons.
M. COURNOYER: J'entends beaucoup le mot souplesse, le mot
flexibilité et ce n'est pas mon intention d'abolir le 2711, je vous
rassure immédiatement. Seulement les mots souplesse et
flexibilité, je les retrouve dans les faits. Actuellement, il ne me
semble pas qu'il y ait une souplesse, une flexibilité telle dans le 2711
qui me permette d'espérer que ça soit souple et flexible.
M. GAGNON (Jean-Yves): Cela pourrait se décider au niveau des
critères d'émission des permis.
M. COURNOYER: Alors, j'attends donc des critères.
M. GAGNON (Jean-Yves): D'accord.
M. DEMERS: J'aurais une autre question.
M. COURNOYER: Qu'est-ce que je fais avec mon droit d'appel, en
attendant?
M. DEMERS: Vous l'appliquez. M. COURNOYER: Je l'applique?
M. DESJARDINS: Si vous avez une suggestion, faites-la à
Desjardins.
M. DEMERS: M. le Président, je demanderais à M. Gagnon
quelle est son opinion au sujet du contingentement. Est-il d'avis qu'on doive
se limiter à certains métiers, dans nos polyvalentes? On enseigne
la ferblanterie, toutes sortes de métiers et le jeune qui va entrer sur
le marché du travail se trouvera en présence d'un marché
saturé dans certains domaines. Ainsi, hier M. Morin, avec les
statistiques, nous disait qu'il y avait 125,000 personnes qui étaient
enregistrées ou à peu près, qui avaient travaillé
dans la construction alors que le marché peut, si je ne tiens pas compte
de ces divisions par 2,000, en absorber 60,000, 65,000. Que
prétendez-vous que le ministère de l'Education et le
ministère du Travail doivent faire dans le domaine de l'enseignement
pour empêcher ces gens d'aller acquérir un métier de
qualification qu'ils ne pourront jamais exercer?
M. GAGNON (Jean-Yves): Vous avez posé la question de la
polyvalence dans les métiers de l'industrie de la construction et
ça fait plusieurs années que les associations patronales
demandent qu'il y ait beaucoup plus de polyvalence. De plus en plus on
réalise que c'est une chose essentielle.
M. DEMERS: Je crois que vous m'avez mal saisi, je parle des
écoles polyvalentes où on enseigne les métiers. Cela peut
revenir à une polyvalence de métiers.
M. GAGNON (Jean-Yves): Oui, c'est ce que je veux dire. Pour nous, il
faudrait que les
ouvriers de la construction soient polyvalents, par exemple que l'on
n'ait pas un ouvrier qui ne fasse que poser des portes, qu'on n'ait pas un
ouvrier qui ne fasse que poser des tuyaux ronds, mais qu'il soit capable de
poser des tuyaux carrés. Alors, dans ce sens, nous sommes pour la
polyvalence et ça aiderait aussi à leur assurer...
M. DEMERS: Vous venez de me donner un tuyau, là vous.
M. GAGNON (Jean-Yves): ... un plus grand nombre d'heures, si ces
ouvriers étaient polyvalents, s'ils pouvaient passer d'une
activité à une autre.
M. DEMERS: Pourriez-vous, dans l'application, essayer de cataloguer
ça? Vous auriez tant d'hommes dans le domaine de la plomberie qui
pourraient poser de la brique, les mêmes gens, s'ils étaient
polyvalents?
M. GAGNON (Jean-Yves): Non. Si on lit l'arrêté en conseil
3606, sur le contrôle qualitatif, la formation de la main-d'oeuvre, on se
rend compte qu'il y avait auparavant peut-être une quarantaine de
métiers et, maintenant, je crois qu'il y a douze ou treize familles de
métiers. C'est dans ce sens que nous parlons de polyvalence, par famille
de métiers. Il y a les métiers de la truelle, de la tuyauterie,
etc. Dans ce sens-là, il faut assurer une meilleure polyvalente à
l'intérieur d'une famille de métiers, ce qui n'a pas
été fait encore.
M. DEMERS: Vous avez dit, tantôt dans votre exposé,
qu'à Montréal, dans le courant de l'été, dans
certaines disciplines de la construction, vous aviez manqué de
main-d'oeuvre.
M. GAGNON (Jean-Yves): Oui.
M. DEMERS: Me référant à votre
énoncé, comment les gens, par exemple, en milieu semi-urbain,
s'ils n'ont pas de main-d'oeuvre et qu'ils doivent se référer
à la Commission du travail, peuvent-ils se procurer cette
main-d'oeuvre?
M. GAGNON (Jean-Yves): C'est un des gros problèmes auxquels on a
fait face cet été. Il y a eu une pénurie de main-d'oeuvre
et certains travaux ont été retardés à cause de
cela. Nous voyons aussi qu'il y a 7,500 personnes qui ont travaillé sans
permis. Certains employeurs se sont dit: Si nous ne sommes pas capables de
trouver des gens qui ont une carte de compétence et un permis dans leur
poche, on va en engager qui n'ont pas nécessairement de carte de
compétence et de permis. On sait, entre autres, que, sur la construction
de la Transcanadienne à Montréal, on a manqué de
menuisiers cet été. Il y a peut-être certains employeurs
qui ont engagé des journaliers, qui les ont payés au taux des
menuisiers et qui les ont fait travailler comme menuisiers. C'est
inévitable quand il en manque, ou bien on retarde les travaux, ou bien
on trouve des moyens.
M. DEMERS: Mais c'est quasi paradoxal. Il manque de main-d'oeuvre et
vous avez trop d'ouvriers. Il manque de spécialisation?
M. GAGNON (Jean-Yves): Il manque d'hommes de métier.
M. DEMERS: Oui, d'hommes de métier.
M. GAGNON (Jean-Yves): On n'a pas dit qu'il manque de journaliers. Parce
que, pour les journaliers, il n'y a pas de formation.
M. DEMERS: Oui, je comprends.
M. GAGNON (Jean-Yves): Pour les journaliers, que le contingentement soit
peut-être un peu plus sévère, comme nous l'avons dit dans
notre mémoire, je pense que cela ne pose pas tellement de
problèmes.
M. DEMERS: Je vous remercie, M. Gagnon. M. LE PRESIDENT: Le
député de Beauce.
M. ROY (Beauce): M. le Président, j'aurais également
quelques questions à poser à M. Gagnon et à M. Morin
à la suite des propos qui ont été tenus et des faits qui
nous ont été déclarés. Je m'aperçois que,
plus on avance, plus on veut parler de spécialisation et de
qualification. On semble vouloir déboucher un peu vers la polyvalence.
Je me pose de sérieuses questions. Quand on parle du contrôle
quantitatif, on demande un contrôle, mais un contrôle souple qui
permettrait que chaque poste disponible soit comblé par un ouvrier. Je
pense que c'est ça. Sur le contrôle quantitatif, je me pose des
questions.
Vous avez dit, à la fin de votre exposé, que vous
reconnaissiez le principe du contrôle quantitatif de la main-d'oeuvre et,
lorsque vous nous avez donné des détails concernant votre
mémoire, vous nous avez dit que la Commission de l'industrie de la
construction ne pouvait pas, à l'heure actuelle, avoir toutes les
données nécessaires pour assurer un contrôle
adéquat.
Je vais reprendre les points un par un. Vous avez dit, en premier lieu,
que le nombre de travailleurs, actuellement dans l'industrie de la
construction, était inconnu. Le nombre exact des personnes qui avaient
travaillé dans l'industrie de la construction.
M. GAGNON (Jean-Yves): Non, ce n'est pas tout à fait ce que j'ai
dit.
M. ROY (Beauce): Voulez-vous préciser, s'il vous plaît?
M. GAGNON (Jean-Yves): J'ai dit que, dans les statistiques où on
parle des gains réalisés par région, il y avait une marge
d'erreur de 31.9 p.c Ce sont les statistiques de la commission qui le
disent.
M. ROY (Beauce): Mais est-ce que vous êtes d'accord, à
l'heure actuelle, pour dire que la Commission de l'industrie de la construction
aurait en main toutes les données concernant le nombre de travailleurs
de la construction?
M. GAGNON (Jean-Yves): Sans doute, en ce qui concerne le nombre, ils ont
les données, à moins que les rapports des employeurs ne soient
pas bien faits et qu'il n'en manque, mais je ne le pense pas.
M. ROY (Beauce): Je me permettrai tout simplement d'ajouter quelque
chose pour M. Morin. Je lui pose une question. Etant donné qu'il y a un
très grand nombre de personnes qui travaillent dans les régions
rurales et que ce sont des travailleurs artisans, des travailleurs autonomes,
est-ce que vous avez fait un relevé complet, dans toutes les
régions du Québec, des travailleurs autonomes et des travailleurs
artisans qui ont travaillé et qui travaillent encore, du moins, je
présume, dans l'industrie de la construction? Avez-vous tout cela en
main? Il s'agit de gens qui n'ont jamais fait de rapport et qui n'ont à
peu près jamais détenu de carte de qualification professionnelle
et autre.
M. MORIN: En fait, c'est le problème des artisans. Techniquement,
l'artisan est considéré, pour les fins du décret, comme un
salarié. Vous êtes ou employeur ou salarié dans la
construction. Il n'y a pas de troisième sexe, si vous voulez. Par
conséquent, si ces artisans ne font pas de rapport, on ne le sait pas ou
on le sait en les découvrant sur le fait. On en prend plusieurs, bien
sûr.
M. ROY (Beauce): A l'heure actuelle, vous ne pouvez pas dire que le
relevé a été fait de façon complète dans ce
domaine?
M. MORIN: Sûrement pas.
M. ROY (Beauce): Alors, cela veut dire que vous ne connaissez pas
actuellement le nombre total des travailleurs disponibles de la construction au
Québec?
M. MORIN: Sûrement pas.
M. ROY (Beauce): Bon, premier point. Deuxième point, M. Gagnon a
parlé tout à l'heure de prévoir les besoins. Est-ce
qu'actuellement vous pouvez prévoir les besoins de l'industrie de la
construction, je n'irai pas tellement loin, pour l'an 1973?
M. MORIN: Vous me demandez si on est capable de planifier et de
prévoir la construction.
M. ROY (Beauce): A partir de maintenant. M. MORIN: Je vous dirai que non
et que les employeurs seraient particulièrement heureux si on pouvait le
faire.
M. ROY (Beauce): Vous ne pouvez pas prévoir à l'heure
actuelle quelle est la marge, selon vous, selon l'expérience que vous
avez, de jeu qu'il peut y avoir entre des prévisions qu'on pourrait
faire aujourd'hui et la réalité du mois de juillet 1973?
M. MORIN: C'est exactement pourquoi il nous faut mettre sur pied un
système qui va être régional et qui va pouvoir beaucoup
mieux sentir les variations particulières de chaque région. Ce
qu'on peut dire, par exemple, c'est que le coussin si on peut l'appeler
comme ça entre le nombre maximum d'emplois réels et la
marge de sécurité pour qu'il n'y ait pas un manque de
main-d'oeuvre, la marge est différente selon les métiers.
Il y a des métiers, d'après la tradition où c'est
une condition de travail d'être mobile. Il y a des gens dans certains
métiers, comme les électriciens, les plombiers qui voyagent.
Particulièrement ceux de Montréal qui n'ont pas de territoire.
D'autres métiers ou d'autres occupations, au contraire, sont
plutôt de caractère sédentaire. On y a un rayon d'action
c'est normal qui est le comté ou la région. Par
conséquent, le coussin est fort différent et doit être
adapté selon la mobilité régionale de cette main-d'oeuvre
par métier.
C'est pourquoi ce qui a été proposé et qui est
à l'étude je dis simplement ce qui est à
l'étude et non pas encore décidé de la part de la
commission c'est que nous aurions, pour chaque région
à peu près onze régions administratives un
comité qui pourrait se subdiviser en métiers ou en familles de
métiers pour comprendre ces réalités et s'y adapter.
En d'autres termes, le coussin pourrait être, j'imagine, un
chiffre de 20 p.c. dans certaines familles de métiers et simplement de
10 p.c. dans d'autres. Donc, notre émission de permis de travail
temporaire ou initial serait différente, plus libre dans certains
métiers que dans d'autres, justement pour s'adapter à cela. Le
pire à faire dans tout ça, c'est d'avoir un critère, une
règle à l'échelle provinciale. C'est la pire chose
à faire à mon avis.
M. ROY (Beauce): Pour ce qui est de prévoir, ayant établi
tous les critères que vous venez de mentionner et ayant la meilleure
formule de calcul et de prévisions, est-ce que vous seriez prêt
à admettre je ne veux pas vous mettre des mots ou des chiffres
dans la bouche qu'il peut quand même y avoir une variation qui
pourrait aller jusqu'à 25 p.c. et même 35 p.c? A partir
d'aujourd'hui, par exemple, pour pouvoir planifier pour le mois de juillet,
août 1973.
Je m'explique. Vous avez à l'heure actuelle je ne veux pas
passer de commercial, M. le Président des élections aux
Etats Unis, vous
en avez au Canada. Des politiques nouvelles peuvent être
apportées, des politiques d'investissement, des politiques de
resserrement de crédit, notre économie étant tributaire de
l'économie nord-américaine je pense bien que ce n'est un
secret pour personne et advenant le cas, par exemple, que nous aurions
à faire face à une restriction de crédit, à une
nouvelle lutte anti-inflationniste en 1973 tout le monde sait que c'est
toujours l'industrie de la construction qui a servi de tampon pour essayer de
régulariser un peu ce domaine est-ce que vous admettez qu'en
ayant les meilleures données, les meilleurs critères, il y a
encore tellement d'impondérables dus à la dépendance que
je viens de vous mentionner qu'il pourrait y avoir encore une marge de 25 p.c.
de différence?
M. MORIN: Vous avez peut-être raison, je ne le sais pas. Ce qu'on
fait, et c'est comme ça qu'on va arrêter les chiffres à la
commission, c'est dire 20 p.c. et chercher rétroactivement, avec la
banque de données que nous avons, ce que ça donne.
Si on avait augmenté ou réduit la population de la
main-d'oeuvre de 20 p.c. ou de 30 p.c, dans certains métiers, quels
auraient été les résultats si on avait appliqué
rétroactivement ces règles, avec l'expérience et les
données que nous avons de l'an passé? C'est un peu comme cela
qu'on peut agir.
Sur un autre point je pense l'avoir souligné hier
ce qui est parfaitement vrai, c'est que depuis janvier, la masse salariale,
comparativement à l'an passé, augmente de 20 p.c. à 25
p.c. En janvier 1972, il y a à peu près 20 p.c. de plus qu'en
janvier 1971, et ainsi de suite. Actuellement, sur ce point, nous avons des
données seulement jusqu'au mois d'avril.
M. ROY (Beauce): Je vais poser la même question, en quelque sorte,
à M. Gagnon. Etant donné que vous êtes dans le domaine de
la construction, pouviez-vous prévoir, au début de
l'année, que l'année 1972 l'année que nous
traversons présentement connaîtrait ce boom, avec une
augmentation de 25 p.c? Auriez-vous pu le prévoir?
M. GAGNON (Jean-Yves): Nous aurions pu le prévoir, jusqu'à
un certain point, par certains investissements qui étaient
annoncés à l'avance, mais nous ne pouvons pas tout
prévoir. Nous pouvons prévoir, peut-être, à 50 p.c.
Nous savions que l'année 1972 serait meilleure que l'année 1971,
d'après tout ce qui avait été annoncé. Nous
prévoyons que l'année 1973 sera sûrement aussi bonne que
l'année 1972 mais ce n'est rien de précis.
M. ROY (Beauce): Admettez-vous que même en faisait les meilleures
prévisions, tout en étant optimiste ou pessimiste, il peut quand
même y avoir, à l'heure actuelle, selon les meilleures
prévisions qu'on peut faire, une marge de 25 p.c. l'an prochain? Je
prends le chiffre de 25 p.c. mais on peut en prendre un autre.
M. GAGNON (Jean-Yves): Sûrement. Pour une année
donnée, peut-être que 25 p.c, ce ne sera pas assez et pour une
autre, ce sera trop. On mentionne brièvement dans notre texte qu'il y a
les jeux olympiques qui s'en viennent, à Montréal. Alors
peut-être que pour les deux ou trois prochaines années, à
Montréal, il faudra prévoir une marge un peu plus large. Par
contre, dans une région où il semble y avoir une
récession, peut-être que 10 p.c. seront suffisants.
M. MORIN : Si vous me permettez, M. le Président, je vous
inviterais à voir, pour deux raisons, la page 39 de notre
mémoire, où il y a l'annexe 2. Vous partez de là, par
divisions par régions, si vous voulez, et non pas par comtés.
Chaque région regroupe, bien sûr, un certain nombre de
comtés. Vous voyez le nombre de permis par région et le nombre,
par mois, de détenteurs de permis qui ont travaillé. Dans tous
les cas, jamais on n'a eu un excédent. Bien au contraire, il y a
toujours une marge ou un coussin, si vous voulez, entre les deux, qui est assez
inconfortable, dans ce sens, compte tenu du fait que ce sont en grande partie,
des gens qui sont sans travail. Cependant je l'avoue
immédiatement et c'est un de nos problèmes cette
donnée est fausse. Je vous dis bien le nombre de permis. Je vais prendre
la première région. C'est plus simple. Ce sont des chiffres moins
astronomiques: Les Iles-de-la-Madeleine. Vous avez 316 détenteurs de
permis et au plus haut sommet, octobre 1971, on a 191 de ces détenteurs
qui ont travaillé. On pourrait, bien sûr, conclure
immédiatement qu'il y avait encore un bassin de personnes disponibles.
C'est ce qui fausse les données, tant pour la commission, tant pour les
employeurs, à savoir quelle est la main-d'oeuvre disponible. C'est entre
la notion de travailleurs disponibles et de détenteurs de permis qu'il y
a une marge. Il y a des détenteurs qui ne sont pas disponibles.
Si vous avez, disons, un pompier, un policier, un fonctionnaire ou toute
autre personne qui occupe, en temps normal, un emploi mais qui a aussi un
permis, nous le comptons, pour l'instant. Lorsque nous voulons savoir, dans une
région, s'il y a ou non des gens disponibles, nous croyons que oui mais
cette personne ne l'est pas. Il faudra donc, à mon avis, se pencher
d'une façon bien particulière sur une des conditions pour
l'émission d'un permis, c'est une personne qui est disponible. On ne
peut pas dire, non plus, que pour être détenteur d'un permis, il
faut attendre, dans son salon, qu'on soit appelé pour un emploi. Mais
dans le cas d'une personne qui, en raison de la nature de la fonction qu'elle
occupe principalement, on peut prouver là qu'elle n'est pas disponible,
c'est plutôt une preuve de non disponibilité
qu'on peut faire et non une preuve de disponibilité.
M. ROY (Beauce): Puisque nous parlons...
M. LE PRESIDENT: Un instant, monsieur. Je voudrais faire remarquer au
député de Beauce que M. Morin a présenté un
mémoire hier. A la suite de sa présentation, on a demandé
s'il y avait des questions de la part des membres de la commission. On a
ensuite félicité M. Morin de la clarté et de la
précision de sa présentation. Le député de Beauce
n'y étant pas hier, je me demande si on doit revenir sur tout
l'exposé de M. Morin.
Présentement M. Gagnon devrait être questionné sur
le mémoire qu'il a présenté. Je ne voudrais pas faire un
tour d'horizon, revenir chaque fois sur chaque mémoire qui a
été présenté avant. Sans ça nous allons
être ici jusqu'à Noël. Si on pouvait être plus concis
dans les questions, faire moins d'hypothèses, rester avec la
réalité des mémoires présentés, nous
pourrions faire, avancer nos travaux. C'est une observation sans malice.
M. ROY (Beauce): Je vous remercie, M. le Président. Je tiens
quand même à préciser que ce n'est qu'hier avant-midi que
je n'étais pas à cette commission parce que j'étais
à une autre. Aucun de mes collègues n'a pu poser de questions. Et
comme M. Gagnon a présenté...
M. LE PRESIDENT: Non.
M. ROY (Beauce): Aucun de mes collègues, il n'y a que le
député de Chicoutimi, dans l'avant-midi, qui a posé des
questions.
M. LE PRESIDENT: Je m'excuse, je ne parlais pas de ce qui s'est
passé cet avant-midi. J'ai parlé de ce qui s'est passé
hier. Nous avons entendu la présentation de M. Morin, et il n'y eut
aucune question d'aucun membre de la commission, ni du ministre. L'occasion y
était. Ne revenons pas. Passons, si vous voulez.
M. ROY (Beauce): Parfait. M. Gagnon avait dit qu'il était
difficile de prévoir à l'avance les besoins, et c'était
sur ce point précis que mes questions étaient posées.
M. LE PRESIDENT: Le député comprendra que d'autres ont des
questions à poser.
M. ROY (Beauce): Puisqu'on a parlé de la mobilité
géographique et qu'on ne connaîtrait pas la mobilité des
travailleurs, dans quelle proportion ce facteur peut-il influencer les
émissions de permis de travail, déranger l'application du
décret 2711?
M. GAGNON (Jean-Yves): Peut-être que ça ne découpera
pas l'application dans ce sens-là, mais ça va sûrement
être une chose dont il faudra tenir compte. Il faut tenir compte du fait
que certains ouvriers sont prêts à se déplacer et d'autres
ne le sont pas.
Il y en a qui se disent: Ma famille est à Montréal, moi je
reste à Montréal avec ma famille. D'autres, ça ne leur
fait rien. Ils se déplacent régulièrement. Il va falloir
avoir des statistiques plus précises sur la mobilité
réelle des ouvriers, afin d'être en mesure d'émettre les
permis en accord avec les disponibilités de la main-d'oeuvre.
M. ROY (Beauce): Selon vous, ces enquêtes sur la mobilité
ne sont pas suffisantes pour avoir des données précises.
M.GAGNON (Jean-Yves): Sûrement pas. M. Morin, dans son
exposé hier, a mentionné un chiffre global selon lequel un nombre
donné je ne me souviens plus duquel de travailleurs
s'était déplacé dans l'année. Mais ce chiffre est
tellement global qu'on ne pourra pas l'utiliser comme critère quand on
va décider d'émission de permis.
M. ROY (Beauce): Vous avez parlé aussi de 16,000 ouvriers, en
1970, qui auraient eu moins de 100 heures de travail dans l'industrie de la
construction. Lorsqu'on a parlé de 100 heures de travail, est-ce qu'on a
tenu compte, selon vous, des heures de travail qui auraient été
effectuées dans la construction et dans d'autres domaines? Je vais
prendre comme exemple deux cas particuliers. D'abord, le cas de ceux qui
auraient travaillé dans l'industrie de la construction, mais pour les
agriculteurs. Vous touchez toutes les régions rurales du
Québec.
M. GAGNON (Jean-Yves): On tient compte uniquement des heures
effectuées dans la construction pour des travaux régis par le
décret de la construction. Rien de plus.
M. ROY (Beauce): Vous ne tenez pas compte de toute la construction.
Comme deuxième exemple, je voudrais parler des travaux qui se font
à salaire pour les corporations municipales.
M. GAGNON (Jean-Yves): On n'en tient pas compte parce que ce n'est pas
régi par le décret.
M. ROY (Beauce): Admettez-vous que des personnes auraient effectivement
travaillé dans la construction, mais dans l'agriculture, pour les
travaux municipaux, et qui ne seraient pas inclus à l'intérieur
de cela?
Vous avez dit que ces 16,000 personnes pourraient ou devraient
être éliminées de l'industrie de la construction. Comment
pouvez-vous prévoir les conséquences du fait que ces 16,000
travailleurs se trouvent pénalisés parce que, justement, le
secteur de la construction dans lequel ils travaillent n'est pas inclus dans le
décret?
M. GAGNON (Jean-Yves): D'accord, je crois que c'est très
important de faire un commentaire là-dessus. Comme je l'ai
mentionné aussi dans mon exposé, il y a plusieurs ouvriers de la
construction qui travaillent dans des domaines connexes. Toutes les heures que
ces gens-là effectuent dans ces domaines ne sont pas mentionnées
dans les statistiques de la commission, parce que la commission ne dispose pas
de ces données.
Vous parlez des travaux municipaux. Il y a les travaux sur les fermes.
Il y a les travaux dans les mines. Il y en a d'autres qui ne sont pas
régis par le décret de la construction, mais qui sont, en fait,
des travaux de construction...
M. ROY (Beauce): C'est ça.
M. GAGNON (Jean-Yves): ... et qui ne sont pas mentionnés dans les
statistiques. Les personnes qui n'ont pas fait 100 heures dans la construction
en ont peut-être fait 1,000 pour une municipalité quelconque.
Cela, on ne le sait pas et c'est pour ça qu'on le mentionne. Avant de
dire qu'on va établir un système rigide, peut-être qu'il
faudrait le savoir.
M. Daigle, hier, a mentionné qu'il faudrait peut-être faire
une étude en se basant sur les T-4 de chacun de ces ouvriers et nous,
nous pensons que cela a du bon sens. On nous dit aussi que le ministère
du Travail fédéral, je crois, est en train de faire une
étude dans ce sens-là actuellement, puis on a bien hâte de
voir les résultats.
M. ROY (Beauce): Vous avez parlé aussi des travailleurs de la
construction qui, à un certain moment, travaillent comme bûcherons
ou comme cultivateurs marginaux. Il y a beaucoup de cultivateurs marginaux
présentement. Je pense que ce n'est pas un secret que ces gens seront
obligés de quitter l'agriculture, mais qu'ils y demeurent en attendant
de pouvoir se stabiliser ailleurs. Qu'arrivera-t-il si on leur ferme la porte
dans la construction, alors que ce sont des gens qui ont vécu comme
agriculteurs marginaux parce que, justement, l'industrie de la construction ne
pouvait pas leur donner suffisamment de travail sur une période annuelle
ou la majeure partie de l'année? Là, je ne parle pas du milieu
urbain. Je parle du milieu rural, parce que c'est le cas qui nous concerne
particulièrement. Justement, ce qui a déclenché tout le
problème de l'industrie de la construction, c'est lorsqu'on a inclus le
secteur rural, le secteur artisanal à l'intérieur de cela. Alors,
comment concevez-vous pouvoir trouver une solution ou proposer quelque chose en
face de ce problème qui regarde l'industrie de la construction et
l'économie de la province, mais qui est quand même un
problème social?
M. GAGNON (Jean-Yves): Il n'y a pas de doute qu'il y a un grand nombre
d'agriculteurs, probablement des bûcherons, et des pêcheurs qui
sont des marginaux, comme vous l'avez dit, mais il y en a qui sont des ouvriers
de la construction marginaux, qui viennent dans la construction lorsqu'il n'y a
rien ailleurs. Selon nous, ce serait les premiers à éliminer.
M. ROY (Beauce): Ou qui vont ailleurs parce qu'il n'y a rien dans la
construction.
M. GAGNON (Jean-Yves): C'est ça. Il y a les deux.
M. ROY (Beauce): Comment déterminer cela?
M. GAGNON (Jean-Yves): Evidemment, la première chose qu'il faudra
faire lorsqu'on parlera de contingentement sera de commencer par enlever ceux
qui réellement n'ont pas d'affaire là. Avant d'éliminer
les véritables ouvriers de la construction, nous prétendons qu'il
faudra éliminer ceux qui n'en sont pas.
Cela pourra probablement affecter certains agriculteurs, certains
pêcheurs, mais je crois, comme le disait le ministre du Travail hier, que
c'est une conséquence inévitable du système. Il faudra en
tenir compte et essayer de la rendre la moins pénible possible.
M. ROY (Beauce): M. le Président, j'ai seulement une question
à poser. En guise de conclusion, vous favorisez en quelque sorte le
contingentement, le contrôle quantitatif de la main-d'oeuvre, mais vous
demandez beaucoup de souplesse tant et aussi longtemps que toutes ces
données ne seront pas compilées.
M. GAGNON (Jean-Yves): C'est exact.
M. ROY (Beauce): Mais j'ai remarqué également que vous
avez exprimé énormément de doutes sur la
possibilité qu'il y aurait d'avoir toutes ces données. Alors,
comment concilier le tout?
M. GAGNON (Jean-Yves): Pour le moment, j'ai plusieurs doutes, oui, c'est
vrai, mais on a l'espoir que ce sera possible de réaliser quelque chose
de valable quand même. Vous parlez de contingentement, mais j'ai dit,
dans ma présentation tout à l'heure, qu'en ce qui nous concerne
nous acceptons le contingentement à condition que ça mène,
à plus ou moins long terme, à des conditions de travail plus
raisonnables dans l'industrie de la construction.
M. ROY (Beauce): A un contingentement qui visera à donner la
sécurité d'emploi aux travailleurs.
M. GAGNON (Jean-Yves): Oui.
M. ROY (Beauce): Mais si la carte, le permis de travail et le
contingentement de l'industrie de la construction, en supposant qu'il y a
85,000 cartes données cette année, et que, l'an prochain,
il y a une difficulté, une crise qui se produit dans ce secteur,
à ce moment-là, s il y a seulement 65,000 travailleurs qui
pourront avoir de l'emploi, qui va déterminer, et comment,
l'élimination de 20,000 travailleurs?
M. GAGNON (Jean-Yves): Le problème, c'est exactement celui qu'on
va discuter à la fin du mois à la commission, la
détermination des critères d'émission des permis.
Malheureusement, il faudra probablement tenir compte d'un système qui va
être en retard sur la réalité parce que les statistiques de
la commission sont toujours, au minimum, deux mois en retard sur la
réalité parce qu'elles sont basées sur les rapports
d'employeurs qui sont soumis un mois et demi après le mois
terminé. Evidemment, il y aura toujours une marge d'erreurs mais je
pense que c'est inévitable, qu'on ne peut faire autrement.
M. ROY (Beauce): Croyez-vous possible que la Commission de l'industrie
de la construction puisse avoir toutes les données concernant les
besoins de cette industrie dans toutes les régions du Québec? On
a quand même 1,400 municipalités au Québec, 108
comtés répartis dans dix régions économiques.
Est-il possible d'établir un système qui permettrait à la
Commission de l'industrie de la construction de connaître tous ces
besoins afin d'éviter les délais et d'éviter que des
pères de famille, des travailleurs de la construction soient
obligés d'attendre une réponse durant cinq, six, sept ou huit
semaines et de ce fait être en chômage forcé quand ils
auraient un emploi à portée de la main, un emploi disponible
immédiatement qu'ils ne peuvent avoir a cause de tous ces délais
de compilation, de contrôle, d'embêtements? La Commission de
l'industrie de la construction pourrait-elle s'organiser de façon
à ne pas pénaliser les travailleurs dans ce domaine-là,
selon vous?
M. GAGNON (Jean-Yves): Je ne crois pas qu'il soit possible d'avoir un
système parfait, je suis convaincu que ce n'est pas possible.
M. LE PRESIDENT: Le député de Laviolette. J'accepte votre
réponse.
M. GAGNON (Jean-Yves): D'accord.
M. CARPENTIER: M. le Président, à plusieurs reprises,
depuis hier, nous avons entendu répéter qu'il y a un manque de
main-d'oeuvre dans certains territoires du Québec. Une chose est assez
surprenante, c'est que nous avons certains employés, des ouvriers de la
construction, qui seraient prêts à travailler et qui ne peuvent
pas se placer dans certains coins de la province.
Quelle est votre façon de procéder pour faire appel aux
travailleurs de la construction?
M. GAGNON (Jean-Yves): Je ne comprends pas votre question.
M. CARPENTIER: Lorsque vous manquez d'hommes quelque part, quelle est
votre façon de procéder?
M. GAGNON (Jean-Yves): Pour trouver de la main-d'oeuvre?
M. CARPENTIER: Oui.
M. GAGNON (Jean-Yves): Il y a différentes façons,
évidemment.
M. CARPENTIER: Quelles sont ces façons?
M. GAGNON (Jean-Yves): Il y a les bureaux de placement du gouvernement,
les centres de main-d'oeuvre du Québec, les centres de main-d'oeuvre du
Canada, les bureaux de placement syndicaux qui existent encore, la
possibilité pour les employeurs de contacter directement les ouvriers
chez eux, toutes les possibilités voulues parce que dans la construction
il n'y a pas de système de placement obligatoire.
M. CARPENTIER: Comment pouvez-vous expliquer que certains travailleurs,
dans certains coins de la province, vont au centre de main-d'oeuvre du
Québec ou du Canada et qu'on leur répond tout simplement qu'il
n'y a pas de demandes? Cela veut dire quoi?
M. GAGNON (Jean-Yves): Qu'il n'y a pas de demandes de la part des
employeurs, vous voulez dire?
M. CARPENTIER: C'est cela.
M. GAGNON (Jean-Yves): Cela veut dire que probablement dans ces
cas-là les employeurs s'adressent ailleurs.
M. CARPENTIER: Ils s'adressent où?
M. GAGNON (Jean-Yves): Dans certains métiers, ils vont s'adresser
aux syndicats, et dans d'autres ils vont s'adresser directement aux ouvriers
chez eux.
M. CARPENTIER: Il y a certainement quelque chose qui cloche dans ce
domaine-là.
M. GAGNON (Jean-Yves): Bien,...
M. CARPENTIER: Quand je suis à mon bureau, le lundi matin, des
ouvriers de la construction viennent me voir et me disent: Nous sommes
prêts à travailler, nous avons nos cartes dans nos poches, nous
allons au bureau de placement provincial et on nous dit qu'il n'y a pas de
demandes. Vous venez ici, à la commission, et vous nous dites que vous
manquez de personnel; qu'est-ce qui se passe?
M. GAGNON (Jean-Yves): Cela dépend.
M. LAVOIE (Léopold): M. le Président, une question de
privilège. Est-ce qu'on peut savoir le comté du
député, s'il vous plaît, afin de comprendre le
problème?
M. CARPENTIER: Laviolette.
M. LAVOIE (Léopold): Bon, merci beaucoup.
M. LE PRESIDENT: Il n'y a pas de question de privilège
là-dedans.
M. LAVOIE (Léopold): C'était pour éviter de dire:
Je ne veux pas vous répondre.
M. CARPENTIER: Ce n'est pas une question de privilège, il n'y a
rien à cacher dans cela, mon cher ami.
M. LAVOIE (Léopold): C'était un privilège pour
vous, c'est ce que j'ai voulu dire dans ma question. Laviolette, d'accord.
M. GAGNON (Jean-Yves): Je voudrais apporter quelques précisions
en ce qui concerne votre question. C'était un des avantages de
l'arrêté ministériel 4119. D'après nous,
l'arrêté n'était pas tellement applicable, mais un de ses
avantages c'était qu'il y avait un certain contrôle sur le
placement alors qu'actuellement il n'y en a plus, actuellement c'est
volontaire. Les
employeurs s'adressent où ils le désirent pour obtenir
leur main-d'oeuvre.
M. CARPENTIER: Est-ce que certains bureaux de placement relèvent
des syndicats?
M. GAGNON (Jean-Yves): Oui.
M. CARPENTIER: Quel est le pourcentage de références que
vous faites à ces bureaux?
M. GAGNON (Jean-Yves): Cela dépend des métiers. Dans
certains métiers, c'est pratiquement la totalité; dans d'autres,
c'est très peu fréquent.
M. DESJARDINS: Lui, il est contre ça. C'est pour ça qu'il
dit qu'il ne manque pas de main-d oeuvre. Excusez-moi, M. le
Président.
M. CARPENTIER: J'aimerais bien savoir d'une façon claire de
quelle manière on procède pour trouver la main-d'oeuvre
disponible dans tous les secteurs, dans tous les coins de la province, dans
tous les comtés, sans aucune exception, que ce soit la Beauce,
Laviolette, Saint-Maurice ou Gaspé, Verdun, n'importe où. Comment
se fait-il qu'on vienne nous dire qu'on manque de main-d'oeuvre qu'on envoie
nos ouvriers dans des bureaux de placement, des centres de main-d'oeuvre du
Quebec où on nous répond qu'on n'a pas de demande et que vous
nous dites que vous manquez de main-d'oeuvre? Quel est le joint qui manque dans
ça?
M. GAGNON (Jean-Yves): C'est ce que nous avons mentionné dans
notre mémoire. C'est le fait que la Commission de l'industrie de la
construction ne connaît pas du tout qui est disponible au travail.
M. CARPENTIER: Lorsque le gars va s'offrir au bureau de placement
provincial et qu'on lui répond qu'il n'y a pas d'ouvrage, qu'il n'y a
pas de demande, qu'est-ce que ça veut dire?
M. GAGNON (Jean-Yves): Dans son métier à lui si c'est un
journalier, il est bien possible qu'il n'y ait pas de demande parce que des
journaliers, il y en a trop.
M. CARPENTIER: Je vous mentionne des ouvriers avec leur carte...
M. GAGNON (Jean-Yves): De compétence.
M. CARPENTIER: Des menuisiers, des charpentiers.
M. GAGNON (Jean-Yves): Peut-être que dans votre région il
est possible qu'il y ait un surplus de main-d'oeuvre pour les menuisiers, mais
l'on sait qu'à Montréal, il y avait une pénurie.
M. CARPENTIER: Comment cela se fait-il? Les gars sont prêts
à aller travailler à la baie James.
M. GAGNON (Jean-Yves): Est-ce qu'ils ont demandé d'aller à
Montréal?
M. CARPENTIER: N'importe où. Ils veulent tout simplement avoir
une ouverture et le bureau de placement provincial ne le sait pas.
M. GAGNON (Jean-Yves): Je ne critiquerai pas ce bureau de placement
proyincial, mais je pense que le ministre du Travail est certainement au
courant du fait que.
M. CARPENTIER: C'est précisément ça, les organismes
qui ont besoin d'hommes, à qui s'adressent-ils pour avoir leur
main-d'oeuvre?
M. GAGNON (Jean-Yves): Cela dépend des métiers. Dans
certains métiers, ils s'adressent tous aux unions.
M. CARPENTIER: Lorsque je vous parle d'un charpentier-menuisier, c'est
un métier, ça.
M. LAVOIE (Léopold): Pour les députés, les
meilleurs électeurs sont dans les bureaux d'union.
M. CARPENTIER: Dans les bureaux d'union. Ces bureaux ont-ils certains
contacts avec les bureaux provinciaux?
M. LAVOIE (Léopold): M. le Président, je m'excuse, je
retire ce que j'ai dit.
M. GAGNON (Jean-Yves): Dans le cas des menuisiers...
M. DESJARDINS: Je pourrais avoir une réponse.
M. GAGNON (Jean-Yves): Moi aussi, j'en ai une. Dans le cas des
menuisiers, ça varie beaucoup. Des employeurs s'adressent à la
FTQ, d'autres à la CSN, il y en a qui s'adressent aux bureaux de
placement du gouvernement et il y en a beaucoup aussi qui procèdent en
appelant directement les gens. C'est un des métiers où c'est
très flexible.
M. CARPENTIER: Mais croyez-vous qu'il y a une certaine relation entre
les bureaux de placement des syndicats ou des organismes que j'appelle
bureaux de placement et les bureaux provinciaux de placement et les
centres de main-d'oeuvre du Canada?
M. GAGNON (Jean-Yves): Il n'y a aucune relation.
M. CARPENTIER: Il n'y a pas de relation. Pourquoi?
M. GAGNON (Jean-Yves): Je pense que ce serait peut-être soulever
une controverse que de parler de ça, mais les unions aiment bien faire
du placement.
M. CARPENTIER: Ne croyez-vous pas, si on veut vraiment défendre
les intérêts des ouvriers, que ce ne serait pas un point à
régler, au départ?
M. GAGNON (Jean-Yves): Quand on parle de connaître les
disponibilités de la main-d oeuvre dans notre document, je pense que
c'est exactement de ça que nous parlons.
M. CARPENTIER: Mais lorsqu'il y en a des ouvriers dans nos comtés
qui viennent nous voir, qui veulent travailler, des pères de famille,
des garçons de 20 à 25 ans, des gars sérieux, qui veulent
vraiment travailler, il n'y a pas moyen de leur trouver de l'ouvrage parce
qu'il n'y a pas d'ouverture dans les centres de main-d'oeuvre. Est-ce que le
gars...
M. LAVOIE (Léopold): Qu'ils voient d'abord les bureaux d'unions,
c'est leur organisation professionnelle, c'est leur représentant
professionnel. A ce moment, ils vont obtenir tous les services auxquels ils
sont en droit de s'attendre comme citoyens et vous comme député.
Et vous allez acquérir de bons électeurs.
M. CARPENTIER: Précisément, pourquoi ne communiquez-vous
pas? Il faudrait peut-être mettre de l'ordre quelque part.
M. DESJARDINS: Nous appelons M. Ga-
gnon et nous lui disons que nous avons de la main-d'oeuvre de
disponible, mais lui, il ne veut pas de cette main-d'oeuvre. Cela lui prend un
gars qu 'il peut fouetter.
M. CARPENTIER: Mais reconnaissez-vous qu'il devrait y avoir une certaine
liaison, un certain contact entre vos bureaux...
M. LAVOIE (Léopold): Je reconnais qu'il y a une certaine
éducation professionnelle à faire de la députation et des
représentants.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! Continuez vos questions à M. Gagnon.
Je suis convaincu que lorsque l'occasion viendra, M. Desjardins ou un autre
représentant de l'union saura répondre à ces commentaires.
De toute façon, si vous avez d'autres questions, M. le
député, continuez avec M. Gagnon.
M. CARPENTIER: Certainement.
M. DESJARDINS: Juste une chose. Dans ce temps, moi, je vais
répondre, mais lui ne pourra pas répondre et personne ne saura la
vérité. C'est l'histoire. S'il y en a un des deux qui a des
idées, qu'il le dise.
M. LE PRESIDENT: On déterminera autant que possible où se
trouve la vérité, une fois qu'on aura fini les questions.
Procédons avec un peu d'ordre, si vous le voulez. Continuez.
M. CARPENTIER: Vu que je veux rester dans l'ordre, M. le
Président, est-ce que vous considérez mes questions comme hors
d'ordre?
M. LE PRESIDENT: Non, pas pour le moment, pourvu qu'on ne se mêle
pas de répondre à quatre ou à cinq. Je pense que votre
question a été adressée à M. Gagnon.
M. LAVOIE (Léopold): Le député nous a
regardés, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Cela ne veut rien dire. S'il fallait se fier aux
regards!
M. COURNOYER: Il n'a pourtant pas les yeux croches.
M. CARPENTIER: Alors, vous considérez seulement les
réponses comme hors d'ordre?
M. LE PRESIDENT: Les réponses venant de certains secteurs sont
hors d'ordre, oui.
M. CARPENTIER: Voilà.
M. DESJARDINS: Mais le député est très bon.
M. CARPENTIER: J'aimerais avoir certaines précisions de ce
côté-là. Je pense que cela informerait tous les membres de
la commission, très honnêtement.
M. GAGNON (Jean-Yves): J'ai dit, tout à l'heure, dans ma
présentation, qu'il y avait certains aspects positifs à
l'arrêté en conseil no 4119. Selon nous, l'aspect le plus positif,
est cette possibilité d'un certain contrôle sur le placement.
M. CARPENTIER: Est-ce que vous croyez que les organismes syndicaux
auraient une certaine tendance à favoriser certaines régions plus
que d'autres, les grands centres, disons, soit Québec, Montréal,
Sherbrooke, au lieu de favoriser peut-être les centres ruraux où
la main-d'oeuvre est peut-être plus diversifiée, mais en moins
grand nombre?
M. GAGNON (Jean-Yves): Ils sont peut-être mieux organisés
dans certaines régions. Ce n'est pas à moi de dire exactement
s'ils favorisent quelqu'un. Je ne le crois pas. Je pense que c'est simplement
une question d'organisation.
M. CARPENTIER: Ce que je ne m'explique pas et je ne suis pas le
seul, je crois, honnêtement parlant c'est le fait que nous avons,
dans nos comtés ruraux, des ouvriers disponibles, capables de
travailler. Quand ils vont dans les centres de main-d'oeuvre du Québec
et du Canada pour offrir leurs services, on leur répond tout simplement
qu'il n'y a pas d'ouverture dans le moment. Quelle est la solution possible
à cet état de choses? Est-ce qu'il y a une solution? En avez-vous
une?
M. GAGNON (Jean-Yves): On a dit, tout à l'heure, que les bureaux
de placement je pense que le ministre l'a dit hier aussi du
Québec, malheureusement, n'étaient peut-être pas aussi
efficaces qu'on le désirerait. C'est peut-être une des raisons.
Peut-être que ce serait une solution, s'ils étaient plus
efficaces. Peu importe que ce soit ceux du Québec ou du gouvernement
fédéral, s'ils étaient plus efficaces, peut-être
qu'il y aurait plus d'employeurs qui s'adresseraient à eux.
Il y a des employeurs qui ont essayé de s'adresser aux bureaux de
placement du gouvernement et ils ont été un peu
déçus par les services qu'ils ont obtenus. Alors, ils sont
allés ailleurs.
M. CARPENTIER: C'est précisément cela. Pourquoi ne
ferait-on pas appel aux bureaux de placement provinciaux?
M. GAGNON (Jean-Yves): Ecoutez...
M. CARPENTIER: Disons que vous avez besoin d'hommes à
Gaspé, pourquoi ne pas appeler le bureau de placement de
Grand'Mère, dans le comté de Laviolette, ou de Shawinigan,
dans le comté de Saint-Maurice, ou de Louiseville, dans le
comté de Maskinongé?
M. DEMERS: Le député de Laviolette l'a fait transporter
à Grand'Mère.
M. CARPENTIER: C'est couvert par les deux. Merci de l'information, mon
cher collègue.
M. DEMERS: Quand on fait du patronage avec les bureaux de placement,
ça fait cela.
M. GAGNON (Jean-Yves): Je peux vous dire que, le jour où les
bureaux de placement du gouvernement, soit fédéraux ou
provinciaux, pourront donner un bon service aux employeurs, je pense que les
employeurs vont s'adresser à ces bureaux de placement.
M. CARPENTIER: Vous croyez que la seule façon possible, c'est
d'avoir recours aux organismes syndicaux pour le placement des ouvriers en
général, sans passer par les centres de main-d'oeuvre?
M. GAGNON (Jean-Yves): Malheureusement, dans certains métiers,
c'est vrai. Mais, dans d'autres, ce n'est pas vrai. Je le répète:
Si les bureaux de placement du gouvernement étaient plus efficaces, il y
aurait plus d'employeurs qui s'y adresseraient. Dans le passé, il faut
dire qu'ils n'ont pas été très efficaces.
M. CARPENTIER: Mais qu'est-ce qui vous fait dire qu'ils ne sont pas
efficaces, quand ils n'ont pas de demandes?
M. GAGNON (Jean-Yves): Mais les employeurs ont essayé
déjà...
M. CARPENTIER: Si j'ai besoin d'un médecin et que je ne vais pas
le voir, cela ne veut pas dire que le médecin n'est pas efficace. Il
faut s'informer et le demander.
M. GAGNON (Jean-Yves): L'arrêté en conseil no 4119
prévoyait que les employeurs devaient s'adresser aux bureaux de
placement du gouvernement du Québec pour trouver de la main-d'oeuvre. Il
y a beaucoup d'employeurs qui ont essayé. Quand je vous dis qu'ils ont
essayé, ils ont essayé pendant presque un an.
M. CARPENTIER: Mais où ont-ils essayé et de quelle
façon?
M. GAGNON (Jean-Yves): Dans les bureaux de placement du gouvernement du
Québec.
M. CARPENTIER: Ce que je ne peux pas m'expliquer je le
répète encore une fois c'est que, durant tout
l'été, j'ai eu des employés qui sont venus à mon
bureau de député. Je les ai référés au
bureau de placement et moi-même, j'ai communiqué personnellement
avec le bureau, mais ils n'ont jamais eu de demandes.
M. GAGNON (Jean-Yves): Oui, c'est ce que je vous dis.
M. CARPENTIER: Est-ce que ça fait exception dans ce
coin-là ou bien s'il y en a d'autres qui sont comme ça?
M. GAGNON (Jean-Yves): Non, ça ne fait pas exception, c'est
général dans toute la province et les employeurs ne recourent
presque pas au bureau de placement du gouvernement. C'est vrai!
M. CARPENTIER: Pour quelle raison?
M. LAVOIE (Léopold): Si j'ai besoin du député, je
vais voir le député; si le député a besoin de
quelqu'un, qu'il aille voir son organisation professionnelle et il va obtenir
tout ce qu'il veut. Chaque gars a sa place et chaque gars dans sa maison.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. LAVOIE (Léopold): Je m'excuse, je retire ce que j'ai dit, M.
le Président.
M. CARPENTIER: D'après ce que je peux voir, il y en a certains
qui auraient beaucoup de chose à dire là-dessus. Peut-être
que je poserai de nouveau ma question plus tard lorsque ces gens viendront
à la barre. Je vous remercie.
M. LE PRESIDENT: Sur le même sujet, le député de
l'Assomption.
M. PERREAULT: Vous avez parlé de l'inefficacité des
centres de main-d'oeuvre du Québec, et aussi que, souvent, on
s'adressait aux centres de main-d'oeuvre, aux bureaux du syndicat. Ne
croyez-vous pas que la Commission de l'industrie de la construction,
étant donné qu'elle contrôle l'émission des permis
de travail, qu'elle contrôle le nombre, ne pourrait pas servir aussi de
bureau de recrutement?
M. GAGNON (Jean-Yves): Selon moi c'est une suggestion très
intéressante.
M. LE PRESIDENT: Est-ce sur le même sujet? Le député
de Fabre.
M. HOUDE (Fabre): J'essayais de reprendre la discussion à
l'inverse. Je voudrais savoir, pour mon information comme député,
dans la partie est de ville Laval, si les centres de main-d'oeuvre comme
tout le monde l'a dit n'ont à peu près jamais de travail
à offrir aux gens de notre comté qui viennent nous voir, est-ce
que vraiment la meilleure chose c'est ce que disait M.
Lavoie tantôt, de les envoyer à leur corporation
professionnelle?
M. LAVOIE (Léopold): On aime bien ce que tu fais.
UNE VOIX: C'est hors du sujet.
M. LAVOIE (Léopold): Il me pose une question.
M. HOUDE (Fabre): Je pose la question. Pour éviter de perdre du
temps, quand un gars vient vous voir, il a ses papiers ou il est
diplômé du centre d'apprentissage, un des métiers de la
construction, il a un papier, il est plombier, menuisier, il dit: Je cherche du
travail. Nous, presque instinctivement, on dit: Appelle au centre de la
main-d'oeuvre ou on lui fait une lettre, on appelle pour lui. Il revient trois
jours après et il n'a pas d'ouvrage.
M. GAGNON (Jean-Yves): M. le Président...
M. HOUDE (Fabre): Par contre, vous dites que dans la région de
Montréal il en manque. A ce moment-là on ne perdra plus notre
temps à envoyer les gars à gauche et à droite, on va les
envoyer carrément chez vous.
M. GAGNON (Jean-Yves): Je peux vous faire une suggestion: Pourquoi ne
les envoyez-vous pas aux employeurs?
Dans certaines régions, vous connaissez probablement les plus
gros employeurs, ceux qui ont des contrats. Vous savez sûrement qui, dans
votre région, a des contrats de route, alors vous pouvez leur envoyer
directement la main-d'oeuvre.
M. CARPENTER: C'est précisément ça, ce ne sont pas
toujours des gens qui sont prêts à travailler dans notre
région. Notre région est parfois saturée au point de vue
travail. Mais il y a du travail ailleurs. Les gens, par exemple, de la
région de la Mauricie sont prêts à aller travailler
à Gaspé. Qui va nous dire à qui envoyer tel bonhomme
à tel endroit, tel jour, telle date? C'est ce que nous n'avons pas. Plus
précisément, les centre de main-d'oeuvre ont été
fondés pour ça et il n'y a pas de communication entre vos
organisations et les bureaux de placement. N'y aurait-il pas lieu d'avoir un
genre d'organisme qui ferait la liaison entre vos organisations et les bureaux
provinciaux et fédéraux de placement pour qu'on puisse savoir
où envoyer nos gars et leur dire quoi?
M. GAGNON (Jean-Yves): Oui, ça devrait exister, et on est
sûrement d'accord avec ça.
M. CARPENTIER: D'accord. Merci.
M. COURNOYER: Etant donné que c'est un sujet fort brûlant,
et je pense que tout le monde a compris qu'il était brûlant,
qu'est-ce qui vous empêche d'appeler les centre de main-d'oeuvre du
Québec?
M. GAGNON (Jean-Yves): On a suggéré aux employeurs de les
appeler, à plusieurs occasions et il y a des employeurs qui ont
été déçus du service qu'ils ont obtenu.
D'autres, pour d'autres raisons, ont arrêté de les appeler.
Je ne veux pas lancer un débat là-dessus, M. le
Président.
M. LE PRESIDENT: Un instant, s'il vous plaît. C'est pour cela que
je surveille assez étroitement les commentaires, pour ne pas que le tout
ne dégénère en accusations de toutes sortes, de patronage,
appelez cela comme vous voudrez. C'est ce que je surveille très
étroitement.
M. GAGNON (Jean-Yves): C'est pour cela, M. le Président, que je
ne veux pas lancer un débat là-dessus. Je peux vous dire une
chose, c'est qu'on encourage les employeurs à s'adresser aux centres de
main-d'oeuvre du Québec mais, malheureusement, peu le font.
M. LE PRESIDENT: Le député de Laviolette.
M. CARPENTIER: M. le Président, dans le même ordre
d'idées, je pense que c'est une question très litigieuse. Si on
ne la discute pas et si on ne la vide pas, on ne réglera jamais le
problème. Je ne peux pas me faire dire qu'il y a de l'ouvrage, dans la
province de Québec, alors qu'on a des chômeurs dans nos
comtés qu'on n'est pas capable de placer. Quelle est la solution
possible à ce problème? C'est très clair, cela.
M. LE PRESIDENT: M. le député, en ce qui concerne cette
question, on a entendu dire d'un des représentants des employeurs que le
service qu'on recevait des bureaux de placement provinciaux ou
fédéraux mais restons au provincial pour le moment
était défectueux ou non fiable et que les employeurs ne s'y
présentaient pas pour des raisons variées. C'est ce que j'ai
compris, c'est le sens de ce qui a été dit. En ce qui concerne M.
Gagnon, on a épuisé ses réponses en ce domaine. Ces
questions, non pas à cette commission-ci mais en d'autres endroits,
devraient être adressées au ministère du Travail, par
l'entremise du ministre. La question devrait maintenant être
adressée au ministre.
M. DEMERS: Le député de Laviolette pourrait écrire
au ministre et lui dire de rafraîchir ses bureaux de main-d'oeuvre.
M. CARPENTIER: Je retourne la question: Dans quel sens les bureaux des
centres de main-d'oeuvre du Québec sont-ils défectueux ou non
rentables?
M. GAGNON (Jean-Yves): Je peux vous dire qu'un des gros problèmes
qui se posent, c'est que dans l'industrie de la construction, quand on a besoin
de main-d'oeuvre, on ne peut pas attendre. Si un employeur a des travaux
à commencer ce matin et qu'il a besoin de 25 menuisiers ou journaliers,
il ne peut pas attendre une semaine. Il en a besoin ce matin. Dans les bureaux
de placement, en général, on lui impose certains délais.
Ces délais, évidemment, dérangent ses activités. Il
a donc arrêté d'y aller. C'est surtout le problème. C'est
une question de délais. Une autre chose est arrivée assez
souvent. Les bureaux de placement ne connaissaient pas les métiers, ne
connaissaient pas les ouvriers. Les employeurs demandaient des
spécialistes dans la construction, dans certains métiers,
il y a des spécialités, des sous-spécialités
les bureaux de placement ne les connaissaient pas. Le bureau leur envoyait des
gens qui ne pouvaient pas effectuer les travaux voulus. Evidemment, l'employeur
à qui cela arrive deux ou trois fois arrête d'y aller.
M. CARPENTIER: Ecoutez, des gens ont donné leurs noms, dans des
bureaux de placement, le printemps dernier, et n'ont pas été
appelés de l'été.
M. GAGNON (Jean-Yves): Je vous l'ai dit. Les employeurs ne vont pas aux
bureaux de placement.
M. CARPENTIER: Pour quelle raison n'y vont-ils pas?
M. GAGNON (Jean-Yves): Je viens de vous donner deux raisons.
M. CARPENTIER: Pour quelle raison n'y vont-ils pas? Il doit certainement
y en avoir d'autres. Cela ne peut pas être ces deux uniques raisons qui
motivent tous les constructeurs de la province de Québec de ne pas aller
aux bureaux de placement du Québec.
M. GAGNON (Jean-Yves): C'est une raison importante et il y en a
d'autres. Je pense que je suis obligé à ce moment-ci de
répondre de la même façon que le président de
l'assemblée; Peut-être que vous devriez vous adresser au ministre
du Travail pour avoir les réponses à ce sujet.
M. CARPENTIER : Mais vous nous dites que vous avez des problèmes
dans la construction. Nous vous demandons des réponses et vous nous
dites de nous référer au ministre.
M. COURNOYER: C'est parce qu'il n'est pas responsable des centres de
main-d'oeuvre. C'est ce qu'il nous dit. C'est moi qui suis responsable.
M. LE PRESIDENT: M. Gagnon peut défendre des points du
mémoire qu'il a présenté, il peut défendre la
position du mémoire, mais le questionner ou le rendre responsable des
services ou des agissements d'un centre de main-d'oeuvre, je pense que cela
dépasse un peu la raison pour laquelle il est ici.
Je suggérerais que le député pose la question au
ministre. Peut-être à un autre moment qu'à cette
commission, cependant.
M. CARPENTIER: Merci de l'information.
M. LE PRESIDENT: Lors d'un caucus, ou c'est une excellente question
à poser en Chambre.
M. DEMERS: C'est ça.
M. CARPENTIER: Mais est-ce que vous admettez...
M. LAVOIE (Léopold): On peut toujours faire des
représentations auprès du ministre pour que le
député ait un bureau de placement chez lui.
UNE VOIX: Il en a un.
M. LAVOIE (Léopold): Mais chez lui, dans sa maison, à son
bureau de député.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. BURNS: Me permettez-vous toujours de demander au ministre pourquoi
ses bureaux de placement sont inefficaces? Qu'il le lui demande. Je suis bien
d'accord. Cela fait longtemps que je veux le savoir moi aussi. Pas rien que
dans le domaine de la construction, dans les autres domaines.
M. COURNOYER: Cette accusation d'inefficacité que je prends avec
un grain de sel, je vous en prie, est une accusation fort gratuite. Elle vient
des employeurs en particulier...
M. BURNS: Elle ne semblait pas être gratuite venant de M. Gagnon.
Il donne de bonnes raisons précises pourquoi c'est inefficace.
M. COURNOYER: Elle est très gratuite. Je vous dis que c'est un
jugement porté sur une période de temps, et qu'une fois cette
période de temps passée, les employeurs ne sont plus
retournés aux centres de main-d'oeuvre. Qu'ils y retournent aujourd'hui,
il y a un service totalement différent de celui qu'il y avait avant.
M. BURNS: Ils ne sont pas plus efficaces dans les autres domaines que
dans celui de la construction. Il vous donne des raisons additionnelles,
à part ça.
M. COURNOYER: Comment, il donne des raisons additionnelles?
M. BURNS: Ils ne sont pas plus efficaces, vos centres de
main-d'oeuvre.
M. COURNOYER: Mes centres de main-d'oeuvre? Ecoutez, je peux vous faire
la preuve qu'ils sont plus efficaces que vous pensez et que le dit M. Gagnon
actuellement. Ils ont été inefficaces dans un sens précis
parce que pendant tout le temps que nous avons parlé de
l'arrêté en conseil 4119 les gens se sont occupés d'une
foule de choses...
M. BURNS: Ce que le député de Laviolette nous dit pour le
domaine de la construction, on le fait à Montréal pour d'autres
domaines et Dieu sait qu'il y en a des centres de main-d'oeuvre à
Montréal pas pour les travailleurs de la construction. Les gars
sont sur les listes depuis des mois et ils restent là. Et les gars,
finalement se tannent et vont s'embaucher tout seuls.
M. COURNOYER: Si les employeurs n'appellent pas le centre de
main-d'oeuvre, ne demandent pas de personnel, c'est un facteur
d'inefficacité pour mon centre de main-d'oeuvre?
M. BURNS: Vous parlez du domaine de la construction, M. Gagnon nous a
expliqué pourquoi.
M. COURNOYER: Même dans les autres domaines, M. le
député de Maisonneuve...
M. BURNS: Pourquoi? Peut-être qu'ils ne s'y adressent pas dans
d'autres domaines parce qu'ils sont inefficaces, justement. C'est pourquoi on
tourne en rond dans cette affaire-là.
M. COURNOYER: Ils ont pu être inefficaces à une
époque, ils sont peut-être plus efficaces aujourd'hui.
M. BURNS: Alors, prouvez votre efficacité aux employeurs et ils
vont s'adresser à vous. Vous allez voir ça.
M. COURNOYER: Vous avez parfaitement raison, mais encore faut-il que
quelques employeurs au moins s'adressent à nous. Il y en a un certain
nombre qui commencent à le faire et on me disait hier que le taux de
pénétration des centres de main-d'oeuvre du Québec a subi
un accroissement considérable dans la dernière année.
UNE VOIX: Fin de la citation.
M. HOUDE (Fabre): M. le Président...
M. LE PRESIDENT: Un instant.
Cette question, pour cette séance-ci, est close. Passons aux
autres questions. Le député de Frontenac.
M. LATULIPPE: J'aimerais revenir sur la question des familles de
métiers que M. Gagnon a élaborée tout à l'heure.
Est-ce une opinion qui est partagée par vos compagnons de travail du
monde syndical? Deuxièmement, est-ce que vous avez déjà
étudié la possibilité, avec le ministère ou avec
d'autres organismes, d'introduire la théorie des modules pour
l'émission des cartes, théorie qui a été
développée au ministère du Travail?
M. GAGNON (Jean-Yves ): Mon mémoire porte sur
l'arrêté en conseil 2711. Un autre sera présenté sur
le bill 49, spécifiquement sur la formation professionnelle. Je ne veux
pas discuter de ce sujet parce que j'ai un confrère qui va en discuter
tout à l'heure lorsqu'il va parler de formation professionnelle en vertu
du bill 49.
M. LATULIPPE: Dans ce cas-là j'y reviendrai.
M. LE PRESIDENT: Le député de Gaspé-Nord.
M. GAGNON (Gaspé-Nord): Pour revenir simplement sur les
statistiques, vous avez dit tout à l'heure, lorsqu'on a établi
l'effectif ouvrier, qu'on avait pris le nombre total d'heures dans la
construction et qu'on l'avait divisé par la moyenne de 2,000 qu'on
applique à chaque homme. Mais, lorsque vous avez parlé des
statistiques concernant les électriciens, vous avez dit: On dit qu'il y
en a environ 3,000, il y en aurait 10,000. Là je comprends mal parce que
les électriciens, disons que c'est mieux structuré. C'est le
ministère du Travail qui fait passer les examens obligatoires. La
Corporation des maîtres électriciens, je crois, fait passer
d'autres examens et il y a également les assurances. Si quelqu'un
travaille en électricité et s'il n'a pas la compétence
voulue, c'est dangereux au niveau des assurances pour la
propriété. Alors, de quelle façon pouvez-vous
établir qu'on n'a pas pu trouver les véritables statistiques
concernant les électriciens et également les plombiers, qui sont
à peu près dans le même cas?
M. GAGNON (Jean-Yves): Je pense que c'est simplement une question de
temps dans le cas de ces métiers. La Commission de l'industrie de la
construction n'a probablement pas eu le temps encore de dépister tous
les détenteurs de cartes de qualification dans la province de
Québec.
M. GAGNON (Gaspé-Nord): Oui, mais le ministère du Travail
a tout. On n'a pas communiqué avec le ministère du Travail pour
avoir toutes ces statistiques relatives à ces employés qui ont
obtenu des cartes à la suite d'examens?
M. GAGNON (Jean-Yves): C'est parce qu'il y en a qui sont dans la
construction depuis 25 ans. Avant de dépister tout le monde ça
peut prendre un certain temps.
M. Morin a dit, tout à l'heure, qu'il s'attendait d'avoir les
statistiques complètes là-dessus pour Noël. On espère
bien que c'est ce qui va arriver.
M. GAGNON (Gaspé-Nord): Dans un autre ordre d'idées,
êtes-vous au courant qu'il existe un arrêté en conseil qui
dit que tout ouvrier qui veut obtenir une carte de compétence doit avoir
travaillé au moins deux ans dans la construction, c'est-à-dire
pour un total de 6,000 heures?
M. GAGNON (Jean-Yves): Ce n'est pas tout à fait ce que les
arrêtés en conseil disent, à ma connaissance. Il y a des
nombres d'heures ou des nombres de périodes d'apprentissage
prévues dans l'arrêté en conseil 3606; cela dépend
des métiers. Dans certains métiers, c'est 2,000 heures; dans
d'autres, c'est 4,000 ; dans d'autres, c'est 6,000 et, dans d'autres, c'est
8,000 pour obtenir leur permis.
M. GAGNON (Gaspé-Nord): Pendant les deux dernières
années, à partir de 1970, 1971, 1972. C'est ce que je me suis
fait dire par les commissions de main-d'oeuvre ou quelque chose comme cela.
M. GAGNON (Jean-Yves): Les centres de main-d'oeuvre.
M. GAGNON (Gaspé-Nord): Par ailleurs, il y a des décrets
ou des lois au ministère du Travail qui stipulent que la journée
de travail est de huit heures, que la semaine de travail est de 40 heures,
qu'il y a 52 semaines dans l'année, ce qui fait un total de 2,080 heures
et, pour deux ans, un total de 4,160 heures. Comment pouvez-vous marier les
arrêtés en conseil ou les lois qui disent que, dans tel
métier, il doit y avoir 6,000 ou 8,000 heures de faites dans deux ans,
alors que, par ailleurs, le ministère du travail a des lois qui, elles,
empêchent l'ouvrier de faire un tel nombre d'heures durant une
période de deux ans, si vous voulez?
M. GAGNON (Jean-Yves): Ce n'est pas tout à fait cela que
l'arrêté en conseil dit. L'arrêté en conseil parle de
périodes de formation de 2,000 heures; il ne parle pas
nécessairement d'années de formation.
M. GAGNON (Gaspé-Nord): On m'a dit qu'à partir de 1970 et
de 1971 il fallait avoir 6,000 heures au niveau de la construction pour pouvoir
obtenir la carte de compétence. C'est la commission de travail de
Rimouski qui donnait ces informations-là aux ouvriers.
M. GAGNON (Jean-Yves): Quand vous parlez de 6,000 heures...
M. GAGNON (Gaspé-Nord): J'ai même vérifié
avec le bureau du ministre et avec son secrétaire.
M. COURNOYER: Mon secrétaire ne vous a certainement pas dit que
c'était vrai.
M. GAGNON (Gaspé-Nord): J'ai demandé au ministre s'il
changeait quelque chose et c'est à ce moment-là...
M. COURNOYER: Je n'ai rien dit.
M. GAGNON (Gaspé-Nord): ... que le ministre a fait une
déclaration en Chambre, disant: Que les députés m'envoient
les lettres...
M. COURNOYER: Un instant, on va faire immédiatement la
distinction entre la période requise d'apprentissage depuis 1970-71;
elle a maintenant été fixée à 2,000-2,000-2,000,
mais c'est une période d'apprentissage qui va se prolonger durant le
temps que ça prend pour faire 2,000 heures. Il n'y a pas de
problème. Ils vont prendre un certain nombre d'heures pour
acquérir la carte de compétence. L'apprentissage dure au moins
deux, trois ou quatre périodes de 2,000 heures. Dans d'autres cas, il y
a peut-être eu confusion quelque part. Il y avait au moins un certain
nombre d'heures dans les 18 derniers mois pour obtenir le permis de travail.
C'était dans l'arrêté en conseil 4119 et
l'arrêté en conseil 2711 l'a pratiquement reproduit.
Mais quant à la carte de compétence, il y a quelque chose
de totalement différent, c'est un apprentissage qui, depuis 1971-1972,
est passé sur des périodes de 2,000. Ce n'est pas la même
chose du tout.
M. LE PRESIDENT: A la reprise, à deux heures trente, nous
entendrons le deuxième mémoire. Je remercie M. Gagnon pour son
travail.
Un instant, s'il vous plaît. M. Gagnon, serez-vous ici cet
après-midi?
M. GAGNON (Jean-Yves): Oui.
M. LE PRESIDENT: On me dit qu'il y aurait peut-être certaines
questions.
La commission suspend ses travaux jusqu'à deux heures trente cet
après-midi.
(Suspension de la séance 11 h 59)
Reprise de la séance à 14 h 37
M. SEGUIN (président de la commission permanente du travail, de
la main-d'oeuvre et de l'immigration): A l'ordre, messieurs!
La parole avait été demandée par le
député de Maisonneuve, qui voulait poser certaines questions
à M. Gagnon, juste avant que nous suspendions à midi. Le
député de Maisonneuve est absent. Est-ce que d'autres membres de
la commission, désirent poser des questions à M. Gagnon? Il y a
silence; donc, pas d'autres questions à M. Gagnon. Je vous remercie.
M. Lebon.
M. GAGNON (Jean-Yves): M. Lebon devait présenter un
mémoire sur le bill no 49. Il a dû s'absenter pour
l'après-midi et il demanderait de se faire entendre demain matin,
à dix heures, si possible, ou dans la journée de demain.
M. LE PRESIDENT: Il nous fera plaisir de l'entendre dès dix
heures, demain matin.
M. GAGNON (Jean-Yves): D'accord.
Conseil provincial des métiers de la
construction
M. LE PRESIDENT: Je vous remercie. Mémoire présenté
par le Conseil provincial des métiers de la construction, FTQ.
UNE VOIX: Enfin, il va avoir la parole. M. LE PRESIDENT:
Exclusivement.
M. LAVOIE (Léopold): M. le Président, je m'excuse, de ce
temps-ci...
M. LE PRESIDENT: Veuillez vous asseoir.
M. LAVOIE (Léopold): Non, je préfère rester debout;
autrement, je ne suis pas capable. Alors, vous m'en excuserez bien, si vous
n'avez pas d'objection. A moins qu'il n'y ait des règlements qui
interdisent cela.
DES VOIX: Non, non!
M. LE PRESIDENT: Nous vous accordons tous les privilèges.
M. LAVOIE (Léopold): Vous êtes d'une grande
amabilité et d'une grande compréhension, je vous remercie.
D'abord, vous m'excuserez, M. le Président, j'ai des
problèmes de dentition.
M. LE PRESIDENT: Pour vous identifier correctement, pourriez-vous donner
votre nom, s'il vous plaît, et l'association que vous
représentez?
M. LAVOIE (Léopold): Léopold Lavoie, en l'occurrence
porte-parole du Conseil provincial des métiers de la construction.
Je m'excuse, comme je l'ai dit, de ma dentition. Si cela fourche,
j'espère que le ministre démontrera toute sa compréhension
coutumière, surtout quand je m'emporte.
M. COURNOYER: Certainement.
M. LAVOIE (Léopold): Il y a une chose qui est certaine, c'est que
nous n'avons pas l'intention d'abord d'embarquer...
M. LE PRESIDENT: Je ne sais pas, est-ce qu'il y a une difficulté
technique? Non.
M. LAVOIE (Léopold): ... dans de grandes considérations
statistiques. Je pense que d'autres avant nous l'ont fait et je voudrais
éviter de compliquer les problèmes en ajoutant des statistiques
à tout ce qui a été donné.
En ce qui nous concerne, sur l'importance statistique de la
construction, de même que sur la force de travailleurs qui y sont
engagés, nous nous en remettons à toutes fins pratiques, à
ce qui a été déposé par la commission de la
construction. Egalement, nous nous en remettons à ce que les
parlementaires, par la voie de statistiques qui leur ont été
données depuis un an ou deux, ont devant eux.
Si on soumettait d'autre chose, ce serait ajouter à ce qui est
déjà soumis. Il y a plusieurs députés qui ont
parlé avec beaucoup d'éloquence et avec beaucoup de sens des
responsabilités de la défense...
M. LE PRESIDENT: Excusez-moi, M. Lavoie, j'ai négligé
peut-être de le mentionner je vois M. Pepin qui s'avance on
a changé un peu la procédure, c'est-à-dire que la table
sera occupée par les personnes qui présentent des
mémoires, ne vous en déplaise. Continuez, M. Lavoie.
M. LAVOIE (Léopold): Il y a plusieurs députés qui,
avec beaucoup de compétence et beaucoup de sens des
responsabilités face à leurs électeurs, ont posé
à maintes reprises des questions directement liées à leurs
électeurs. Nous avons l'intention cet après-midi de parler au nom
de ces électeurs précisément, comme partie
représentative et reconnue dans les métiers de la construction,
représentant officiellement les travailleurs des métiers de la
construction.
M. le Président, ce qu'on a l'intention de soumettre aux
parlementaires ici, c'est ce que le gars de la rue pense, ce que le gars de la
construction pense par voie de ses représentants d'affaires, par voie de
son organisation syndicale et par voie des responsables qui, à tous les
jours, face à la loi comme face à la négociation
collective, ont la responsabilité de représenter ces
gars-là.
Nous soumettons très respectueusement l'in-
tention de tous ceux qui sont ici, à savoir que nous
représentons le gars de la construction, l'électeur du
député et que nous sommes les seuls, pensons-nous, reconnus en
tant que partie syndicale pour représenter les intérêts de
ce gars-là.
Dans cet esprit, nous avons rédigé ce mémoire, qui
est l'opinion du gars de la construction, de l'agent d'affaires et de l'union
de la construction. Dans certains cas, M. le Président, MM. les
parlementaires, ça va peut-être sembler un peu impératif,
certaines choses, mais on vous dit la vérité toute crue, telle
qu'on la conçoit. On veut que les députés, qui sont les
responsables de la population, qui sont mandatés par elle, comprennent
exactement ce que la population qui est impliquée dans l'industrie de la
construction pense. Ils doivent comprendre ce que les gars désirent et
veulent dire. Les gars donnent, en somme, leur opinion sur tous les
problèmes qui actuellement les confrontent.
C'est l'opinion du travailleur de la construction. On vous le dit afin
que vous compreniez exactement, sans arrière-pensée, sans
préjugé aucun, ce que nous avons dans l'esprit comme
représentants de travailleurs dans l'industrie de la construction. Avec
votre permission, je lirai le mémoire.
Préambule. Messieurs, fort de sa force de représentation
de plus de 70,000 membres, le Conseil provincial des métiers de la
construction est conscient de ses responsabilités face à
l'importance économique et sociale de l'industrie de la construction
dans la province de Québec.
Il ne perd pas de vue le fait que la stabilité de ce secteur
c'est une responsabilité gouvernementale que d'essayer d'aider
à assurer la stabilité des l'industrie de la construction, en vue
d'en permettre sa prospérité est largement liée
à la paix des relations industrielles. Il accepte, en
conséquence, une certaine intervention de l'Etat.
Cette intervention, toutefois, ne doit se faire qu'à la suite de
consultation des parties. Le conseil félicite donc les responsables de
cette commission parlementaire des métiers de la construction et se fera
un devoir de participer à tous ses travaux.
L'industrie de la construction. L'industrie de la construction, dans la
province de Québec, revêt, pour tous ceux qui ont la
responsabilité de bâtir notre société et de
consolider les bases de notre démocratie, une importance primordiale.
Cette importance sera faite au plan économique, au plan social.
L'importance économique de l'industrie de la construction ne peut
être contestée par personne puisque des milliards et des milliards
y sont investis par année. Les statistiques officielles nous
démontrent, par exemple, qu'en 1971, plus de $3 milliards y ont
été investis, dans la province de Québec. Les
prévisions nous indiquent que jusqu'en 1976, la courbe d'investissements
sera ascendante.
Le vieux proverbe dit: Quand la construction va, tout va. Oui, tout va,
surtout si l'on considère les nombreuses entreprises, tant
manufacturières, industrielles que commerciales, qui dépendent
directement ou indirectement de ce secteur industriel de la construction. Ce
secteur industriel, d'autre part, retient une proportion considérable de
la main-d'oeuvre québécoise. En effet, en 1971, l'on compte plus
de 161,000 travailleurs enregistrés, dont 85,000 ont travaillé
d'une façon professionnelle et régulière.
Cette force exceptionnelle de travailleurs soutire des investissements
totaux de plus de $1 milliard en salaires, directs ou indirects. A ces
données de la puissance économique de l'industrie de la
construction, il faut ajouter, il va de soi, des milliers de travailleurs qui
travaillent dans des entreprises d'exploitation de ressources naturelles, de
même que dans celles qui pourvoient aux matières premières
ainsi qu'aux matériaux de construction.
De ce secteur, c'est donc tout près d'un million d'êtres
humains qui vivent à cause de l'industrie de la construction.
Stabilité dans la construction. Le conseil provincial des
métiers de la construction est conscient de ces réalités
sociales et de ces réalités économiques. Il serait
illogique de sa part de ne pas souhaiter cette prospérité
économique, génératrice de paix sociale.
Le conseil provincial veut jouer pleinement son rôle dans la
société et se déclare prêt, à ses titres de
représentant officiel de plus de 70,000 travailleurs et d'au-delà
de 300,000 êtres humains, à collaborer avec tous ceux qui le
veulent bien. Ceux-ci toutefois devront être des interlocuteurs valables
représentatifs des intérêts en cause.
Le conseil provincial est cependant convaincu qu'il ne peut y avoir de
prospérité dans la construction si sa stabilisation n'est pas
assurée.
La paix industrielle. Il ne peut y avoir de stabilité
assurée si la paix industrielle est constamment menacée. La paix
industrielle dans la construction ne peut pas exister à tout prix. S'il
en était ainsi, ce serait, pour le Conseil provincial des métiers
de la construction, pactiser au détriment des meilleurs
intérêts des membres qu'il a le devoir de représenter.
La prospérité de l'industrie de la construction et
nous le répétons avec force est instamment liée au
respect des droits fondamentaux du travailleur professionnel. Il ne pourra pas
y avoir de paix industrielle dans la construction tant et aussi longtemps que
l'Etat ne tranchera pas une fois pour toutes le problème de la
représentation syndicale. Il ne pourra pas y avoir de paix industrielle
dans la construction tant et aussi longtemps que les périodes de
maraudage syndical ne seront pas reconsidérées.
Il ne pourra pas y avoir de paix industrielle dans la construction tant
et aussi longtemps que l'on fera, à cause de toutes sortes
d'influences
et de pressions, des exceptions à la loi des relations du travail
dans l'industrie de la construction et des exceptions au décret
régissant l'industrie et les métiers de la construction.
Il ne pourra pas non plus y avoir de paix industrielle dans la
construction tant et aussi longtemps qu'il y aura, à cause de toutes
sortes d'influences et de réglementations, une concurrence
déloyale sur le marché du travail, de même que dans les
conditions du travail. Il ne pourra pas non plus y avoir de paix industrielle
dans la construction tant et aussi longtemps qu'il y aura deux sortes
d'employeurs professionnels et deux sortes de salariés affectés
au travail de la construction.
Il ne pourra pas non plus y avoir de paix industrielle dans la
construction tant et aussi longtemps que l'Etat interviendra d'une façon
discrétionnaire en surface pour régler des problèmes dont
les causes sont en profondeur.
Il ne pourra pas non plus y avoir de paix industrielle dans la
construction tant et aussi longtemps que l'Etat, pour des raisons
peut-être légitimes, étatisera des avantages financiers ou
autres, avantages durement gagnés à la table de
négociations.
Il ne pourra pas, non plus, y avoir de paix industrielle dans la
construction tant et aussi longtemps que l'Etat, par des tiers ou
fonctionnaires, se substituera à la volonté des parties. Il n'y
aura pas, non plus, de paix industrielle dans la construction a) tant et aussi
longtemps que, premièrement, le travailleur professionnel de la
construction, reconnu comme tel par le précédent, reconnu comme
tel par l'histoire et la compétence, ne sera pas le seul travailleur
à travailler sur des chantiers de construction; b) tant et aussi
longtemps qu'un salaire annuel garanti ne sera pas assuré aux
travailleurs professionnels, par la sécurité et la
stabilité d'emploi. Il n'y aura pas de paix industrielle dans la
construction tant et aussi longtemps que des opportunistes sans conscience
s'improviseront entrepreneurs en construction, déjouant ainsi le jeu de
la concurrence parfaite, tout en menaçant la stabilité de revenu
du travailleur.
Il ne pourra pas y avoir de paix industrielle dans la construction tant
et aussi longtemps que la loi permettra le maraudage permanent. Il n'y aura pas
de paix industrielle dans la construction tant et aussi longtemps que la
procédure de négociations ne sera pas adaptée aux
exigences nouvelles.
Il n'y aura pas de paix industrielle dans la construction tant et aussi
longtemps qu'un seul décret ne prévaudra pas dans toute la
province, uniformisant une fois pour toutes les conditions de travail, les
conditions de salaire, les conditions de sécurité. Il n'y aura
pas de paix dans la construction tant et aussi longtemps qu'il n'y aura pas un
seul travailleur professionnel travaillant dans l'industrie de la construction,
tant et aussi longtemps qu'il n'y aura pas un seul employeur professionnel de
la construction, tant et aussi longtemps qu'il n'y aura pas une seule
définition des travaux de la construction. Il ne pourra pas y avoir de
paix industrielle dans la construction tant et aussi longtemps que ne
disparaîtra pas de la table de négociations le droit de
véto et que ne siégeront pas à cette table ceux qui sont
vraiment en mesure de prendre des responsabilités, de
délibérer et de régler des problèmes.
Enfin, il ne pourra pas y avoir de paix industrielle dans la
construction tant et aussi longtemps qu'une seule représentation
efficace des parties ne sera pas assurée au niveau des différents
comités.
Il faut bien l'admettre, les problèmes sont là. Si
l'autorité gouvernementale veut assurer la paix industrielle, elle n'a
qu'à trouver les solutions. Quant à nous, nous sommes prêts
à collaborer à trouver les solutions qui pourraient
remédier aux causes que nous venons d'énumérer et qui sont
une menace constante à la paix industrielle de la construction.
Maintenant, il est évident, M. le ministre, que, pour la
nième fois, on soumet peut-être des choses qui ont
été dites dans le passé et des situations sur lesquelles
l'attention des parlementaires a été attirée dans le
passé.
Cependant, je pense qu'une fois pour toutes c'est la conviction
profonde du Conseil provincial des métiers de la construction il
va falloir qu'en toute objectivité on regarde les causes qu'on vient
d'énumérer et qu'on essaie d'y trouver des solutions. Comme le
disait hier le confrère Pepin, il est beau de se présenter devant
une commission parlementaire, il est beau de déplorer certaines choses
mais les lendemains doivent être efficaces. Si tout le monde s'est
rencontré pour se dire bonjour, ça ne règle pas les
problèmes le lendemain.
Le travailleur professionnel de la construction continue d'être
là, l'industrie de la construction continue d'être là, les
problèmes continuent d'être là. Avec ce qui s'en vient dans
les travaux de construction dans la province de Québec, avec la
nécessité économique que cette industrie de la
construction fonctionne à plein rendement, rendement garanti par une
stabilité à cause de la paix industrielle, il va
nécessairement falloir, si on veut se donner l'occasion de consolider
une fois pour toutes quelque chose, qu'on prenne des décisions qui
pourront être qualifiées d'audacieuses mais il va falloir que ces
décisions on les prenne.
Dans certains cas, l'Etat intervient et pose un geste qui paraît
audacieux et qui l'est, il le fait. Je pense que dans d'autres cas et dans
d'autres situations, si on veut consolider toute l'industrie de la construction
en réglant les problèmes sociaux, les problèmes syndicaux
comme les problèmes économiques, il va falloir
nécessairement qu'une fois pour toutes on regarde la situation en face
et qu'on arrête de penser que demain ce sera dangereux. Qu'on
arrête d'être des anxieux et qu'on se dise qu'il faut éviter
le pire en prenant des positions pour régler des problèmes qui
sont d'abord humains et qui ont
une importance économique. Autrement, on sera obligé,
tôt ou tard, d'intervenir et ce sera peut-être, comme le ministre
le disait hier, douloureux pour lui. Encore une fois, parce qu'on a à
régler des problèmes, il sera obligé d'imposer des
décisions qui ne sont pas toujours acceptables pour les parties et qui
créent un préjudice à tous ceux-là qui doivent
travailler ensemble, le gouvernement, le patronat et le syndicalisme.
La recherche d'une solution, le rôle des parties. Dans une
société qui évolue et où les rapports sont de plus
en plus difficiles, il est évident que l'Etat se doit d'intervenir non
pas pour protéger les intérêts particuliers mais bien ceux
de la grande masse de la population. Par définition, c'est le seul
rôle de l'autorité gouvernementale et de l'Etat de protéger
le bien commun et l'ensemble de la population sans vouloir protéger des
biens qui, trop souvent, sont particuliers. Ceci ne règle pas les
problèmes de l'ensemble.
Nous admettons l'intervention de l'Etat dans les relations
ouvrières dans l'industrie de la construction, ceci afin, s'il y a lieu,
la preuve devant être faite, d'y mettre de l'ordre en réglementant
les rapports et en protégeant, par des mesures minimums, les
travailleurs.
L'Etat ne doit pas, par ses fonctionnaires ou autrement, pousser trop
loin son intervention. Ce serait alors une atteinte à la libre
initiative des parties qui, généralement, s'y connaissent
beaucoup mieux que les fonctionnaires. Il ne faudrait quand même pas,
à cause d'une évolution radicale dans les relations
ouvrières-patronales dans l'industrie de la construction, trancher d'un
seul trait un passé hautement valable qui n'a pas à son
crédit que des devoirs. En effet, qu'il nous soit permis ici de rappeler
l'expérience bénéfique des centres d'apprentissage, celle
des comités paritaires, l'expérience des bureaux de placement
syndicaux, etc.
Quand je regarde les discussions que nous avons eues hier et que nous
avons aujourd'hui, évidemment, il y a la jungle dans la construction
à cause d'une évolution radicale, rapide et à cause
peut-être, en temps approprié, d'un manque de décision de
l'autorité gouvernementale, et ça sans préjudice et sans
aucune arrière-pensée.
Mais une chose est certaine, c'est qu'avant aujourd'hui, l'industrie de
la construction a existé, avant aujourd'hui, les organisations
patronales de la construction ont existé, avant aujourd'hui, les
syndicats, dans le domaine de la construction, ont également
existé. Ce matin, certains membres de la commission parlementaire
disaient: Nous voudrions avoir telle réponse, telle réponse
à telle ou telle chose. Il ne faudrait quand même pas qu'on impute
toute la responsabilité de la réglementation des problèmes
dans l'industrie de la construction aux groupes intermédiaires et aux
parties qui sont concernées. Dans le passé, des initiatives
valables ont été prises et de ces initiatives valables et de ces
expériences valables, l'Etat en a quand même retiré une
richesse, je pense, très profonde où elle peut puiser pour aider
à régler certains problèmes qui ne sont pas nouveaux, des
problèmes qui ont déjà existé et qui se
réglaient, à toutes fins pratiques. Il ne faut pas non plus
perdre de vue ce point.
Il ne faudrait pas, et je me répète, oublier non plus que
c'est dans la construction que les unions de métiers de même que
les organisations patronales ont fait preuve, à cause de leurs
structures hautement spécialisées, de la plus grande
maturité en matière de relations entre représentants de
syndicats et représentants patronaux.
Nous soumettons qu'il y a présentement trop de lois. Nos gars,
nos agents d'affaires ne sont ni des parlementaires ni des juristes. Tout en
admettant qu'ils doivent se recycler, ils ne doivent certes pas le devenir. Les
représentants syndicaux ne doivent pas non plus devenir des
fonctionnaires au service d'un Etat qui devient de plus en plus omnipotent.
Le rôle de l'Etat n'est pas de remplacer les syndicats, de se
substituer aux parties en matière de relations industrielles. Le
rôle de l'Etat est d'aider, de promouvoir, de suppléer, de
proposer et d'inspirer.
Je pense, M. le Président, et nous le soumettons très
respectueusement, que l'Etat va constamment penser pour ceux qui, en somme,
sont les piliers d'une démocratie. Et ce même Etat, on va le
mettre en danger, parce que le jour où il n'y aura plus de groupe
intermédiaire responsable, le jour où il n'y aura plus de groupe
intermédiaire qui soit capable de prendre des responsabilités, le
jour où on va continuellement essayer de penser à la place de ces
gens-là, on va détruire les piliers de base de la
démocratie, de même que toutes les institutions qui y sont, y
compris les gouvernements qui ont autorité pour agir.
La base de l'organisation syndicale, au point de vue action, c'est un
peu l'agent d'affaires. On ne doit pas faire des agents d'affaires, des
administrateurs de règlements, de lois, d'arrêtés
ministériels, et on ne doit pas faire, des agents d'affaires, des
administrateurs de conventions collectives, de décrets ou d'autres
choses, parce que les gars deviennnet des fonctionnaires. Leur rôle
traditionnel de participants à l'élaboration d'une politique
sociale, dans une démocratie qui se respecte, disparaît. Dans la
mesure où il disparaît, ce sont les piliers de cette même
démocratie qu'on met en danger, et un de ces piliers, c'est le mouvement
syndical fort, dynamique et responsable à l'intérieur du
dynamisme de ceux-là qui le représentent et qui le composent.
Le rôle de l'Etat n'est donc pas de remplacer mais d'aider, de
promouvoir, de suppléer, de proposer et d'inspirer. Avec force, le
Conseil provincial des métiers de la construction, nous nous opposerons
à une intervention additionnelle de l'Etat dans nos affaires. Qu'on
repense
la législation actuelle, d'accord. Qu'on l'amende ou qu'on y
ajoute, afin de permettre la disparition d'une kyrielle de lois ou de
règlements inutiles, d'accord. Cependant, nous estimons avoir les
compétences et l'expérience nécessaires. Qu'on nous laisse
donc, en conséquence, avec les associations patronales et les autres
groupes intermédiaires, régler les problèmes qui, en
définitive, ne regardent que nous.
Recommandations: Dans l'esprit de ce qui précède et afin
d'y atteindre des idéaux communs, nous recommandons,
premièrement, au niveau de la représentation syndicale: Tant et
aussi longtemps qu'il y aura deux syndicats reconnus, prétendant
représenter la force des travailleurs dans l'industrie de la
construction, il y aura source de conflit. Qu'une fois pour toutes l'Etat
insiste afin que les parties syndicales fassent la preuve de leur force. L'Etat
a une responsabilité urgente. Son hésitation à agir le
rend responsable des troubles que nous avons connus et que nous
connaîtrons s'il n'intervient pas.
Nous ne nous opposons pas, évidemment, au principe du pluralisme
syndical. Il ne faudrait quand même pas, sous le prétexte d'une
seule concurrence syndicale, qu'on perpétue plus longtemps un
régime de pluralisme syndical qui n'existe pas dans les faits. Le droit
de parler, la force de parler, le pouvoir de décider n'est pas en
fonction de soi-même, mais bien en fonction de la force que l'on
représente dans les faits. Autrement, l'on crée des
problèmes en voulant s'accrocher à tout prix, en l'occurrence,
problèmes d'organisation, inefficacité dans les
négociations collectives, conflits intersyndicaux, bien souvent
accompagnés de violence, paralysie totale de certains chantiers,
etc.
En regard donc de ce qui précède, le Conseil provincial
des métiers de la construction recommande avec beaucoup d'insistance
qu'un vote d'allégeance syndicale soit décrété sans
délai dans toute la province de Québec parmi les travailleurs de
la construction dûment enregistrés à la Commission de
l'industrie de la construction.
Si l'on n'en arrivait pas à cette conclusion d'un vote
d'allégeance syndicale pour toute l'industrie de la construction, parmi
tous les travailleurs professionnels dans la province de Québec, sans
égard au métier et aux régions, il nous faudrait alors
rechercher une formule de compromis pratique agissante et démocratique
qui donnerait aux parties syndicales représentatives une voix
provinciale forte et agissante.
A cet égard, nous estimons que nul, en vertu de la loi et sur une
base provinciale, ne pourrait représenter les travailleurs de la
construction s'il ne possède pas un minimum de 35 p.c. de la force
provinciale totale des travailleurs professionnels de la construction. Ce
pourcentage, que nous croyons plus qu'équitable, s'appliquerait à
toutes les instances de représentation syndicale, c'est-à-dire
à tous les comités qui travaillent à l'exécution
des différentes lois ou des différents documents contractuels des
parties.
Amendements proposés. Nous suggérons donc ici, je
pense que je n'ai pas besoin de me référer aux lois, vous les
connaissez d'amender l'article 4 au chapitre III, Associations
représentatives, pour que ledit article se termine après les mots
"territoire du Québec" au lieu de "par région". Amender l'article
6 du chapitre III, Associations représentatives, tel que
ci-après: Rayer à la troisième ligne de l'article les mots
"ou dans une région déterminée"; à la
septième ligne, remplacer le nombre de 20 p.c. par 35 p.c; à la
huitième ligne, enlever les mots "suivant le cas"; à la
neuvième ligne, enlever les mots "ou dans cette région".
Si la FTQ ne représente pas 35 p.c. des travailleurs
professionnels de l'industrie de la construction, elle doit disparaître.
Si la CSN ne représente pas 35 p.c. des travailleurs de la construction
dans toute la province de Québec, elle doit disparaître. Si la CSD
ne représente pas 35 p.c. des gars de la construction dans la province
de Québec, elle doit disparaître. Mais, une fois pour toutes, il y
a une seule industrie de la construction dans la province de Québec, il
y a une seule province qui s'appelle la province de Québec, il y a un
seul travailleur professionnel de la construction dans la province de
Québec. Si c'est vrai que tout ça est un, ça doit
être également vrai au niveau démocratique et au niveau de
la représentation syndicale. S'il y a une unité qui
représente vraiment la majorité des travailleurs de la
construction dans la province de Québec, c'est là un
représentant valable vraiment en mesure de régler des
problèmes et un représentant qui aura vraiment l'autorité
de parler au nom des travailleurs de la construction de la province.
Le maraudage permanent. L'exercice de la démocratie ne consiste
pas par la loi spéciale à distribuer des faveurs sans fondement.
Ce petit jeu facile et intéressé pourrait provoquer l'anarchie,
paralysant de ce fait le fonctionnement de la démocratie
elle-même.
A cet égard, le Conseil provincial des métiers de la
construction dénonce le bill 58 (article 33 a) de la loi) et demande
instamment que ledit article soit rayé de la loi. Son existence
constitue une source permanente de provocation qui ne peut qu'engendrer les
conflits.
Le maraudage syndical, article 7, chapitre 3, associations
représentatives. La société, les travailleurs, de
même que J'industrie, voient toujours avec une certaine
anxiété les périodes de maraudage syndical. Si le
maraudage devait demeurer une mesure souhaitable, nous suggérons que
soient changées totalement les périodes d'intervention, afin de
permettre à ceux qui doivent vivre ensemble après des luttes
intersyndicales souvent dures et amères une période de
détente pour, ensuite, mieux travailler à l'efficacité de
la négociation collective.
Amendements proposés: Amender l'article 7, chapitre 3,
association représentative, pour
que les nombres soient tels que ci-après: -La négociation
doit commencer 120 jours avant l'expiration du décret. -Cette
période de négociation serait précédée d'une
période de détente de 10 mois. -Cette période serait
elle-même précédée de 40 jours, soit "période
dite de maraudage".
La solvabilité des employeurs. Le travailleur travaille
essentiellement pour vivre. Son travail complété, il doit
être payé. L'employeur devra ou disparaître, ou faire la
preuve de sa solvabilité avant d'obtenir de la main-d'oeuvre
spécialisée. Il devra faire la preuve de sa solvabilité en
déposant à la Commission de l'industrie de la construction un
bond de fidélité couvrant les salaires directs et indirects
devant être payés à l'ensemble de ses salariés sur
tel ou tel contrat. Son bond de fidélité étant
déposé, la Commission de l'industrie de la construction
décidera alors de sa solvabilité et émettra un certificat
de solvabilité, lequel sera placé bien à la vue du public.
Ce certificat est renouvelable à chaque contrat.
Tous les nouveaux employeurs devront, avant d'opérer, obtenir
leur certificat de solvabilité. Les statistiques nous disent qu'à
tous les ans il y a 4,000 nouveaux venus dans la construction pendant que 4,000
disparaissent. Peut-on indéfiniment, sous prétexte de la libre
initiative, tolérer plus longtemps une telle anarchie économique,
une telle fraude du public, surtout si l'on considère qu'en 1971,
à l'occasion de faillites dans l'industrie de la construction, il s'est
perdu plus de $898,000 en salaires?
Intervention discrétionnaire de l'Etat, bill 15. Le Conseil
provincial des métiers de la construction est profondément
convaincu qu'il y a toujours une relation de cause à effet. L'Etat
protecteur de l'intérêt commun se doit, avant d'imposer des
mesures draconiennes et coercitives dans les conflits sociaux, de rechercher
d'abord et avant tout les causes de ces malaises.
On ne forcera jamais le coeur et l'âme de l'individu. Cela va pour
les parlementaires, comme pour n'importe quel groupe de la
société. On ne forcera jamais, à longue
échéance, la masse à accepter ce qu'elle ne veut pas par
la force. On peut temporairement régler une situation en imposant la
peur. Nous soumettons, cependant, que ce n'est qu'un cataplasme sur une jambe
de bois.
Dans cet esprit, le Conseil provincial des métiers de la
construction déplore l'adoption du bill 15 et, en conséquence,
demande son rappel.
Fonds de pension des travailleurs de l'industrie de la construction
(bill 81). Le Conseil provincial des métiers de la construction soumet
que l'Etat n'avait pas le droit de s'approprier les fonds versés par les
travailleurs pour des fins bien définies, soit le plan de pension.
En se servant de son autorité législative, l'Etat a fait
preuve d'abus d'autorité digne de certains régimes
autoritaristes. Ces sommes appartiennent aux travailleurs de la construction et
doivent servir les besoins économiques et sociaux de ceux-ci. Ils
devraient être les seuls à disposer de ces montants.
Nous reconnaissons, bien sûr, à l'Etat un droit de regard
et de surveillance afin d'éviter certaines erreurs qui ne peuvent
qu'être humaines. Pourquoi ces montants, par exemple, ne serviraient-ils
pas à assurer une plus grande stabilité dans l'industrie de la
construction? Pourquoi ne serviraient-ils pas à la construction de
logements à prix modique à l'intention des gars de la
construction?
Pourquoi cet argent ne permettrait-il pas l'accessibilité
à la propriété des gars de la construction, en fournissant
des prêts sans intérêt? Pourquoi pas des services de secours
financiers sans intérêt pour les gars de la construction, etc?
Nous considérons qu'il y a là, de la part de l'Etat,
usurpation de pouvoir. Le Conseil provincial des métiers de la
construction soumet que ses membres paient des taxes pour l'administration de
l'Etat. L'Etat ne peut pas plus longtemps, en gardant des fonds qui ne lui
appartiennent pas, imposer par voie de conséquence pour ses propres fins
une taxe spéciale indirecte aux gars de la construction.
L'Etat finance ses services avec nos taxes. Qu'on nous laisse
administrer nos services avec notre argent.
En conséquence, nous demandons le rappel du bill 81.
La négociation collective. Il est évident, si l'on veut
assurer la paix industrielle dans ce secteur de la construction, que la
négociation se doit d'être efficace. Si tous les
éléments nécessaires à la réglementation des
conflits n'ont pas leur mot à dire, l'efficacité de la
négociation est absolument impossible.
Le Conseil provincial des métiers de la construction
s'élève contre le droit de veto de certaines associations
patronales à l'occasion des négociations. Nous recommandons que
la loi soit faite de sorte qu'il soit permis, lors des prochaines
négociations: a)une table générale; b)une table
sectorielle.
La table générale aura la responsabilité de
négocier tous les problèmes du travailleur comme tel. La table
sectorielle aura la responsabilité de négocier les
problèmes particuliers à certains métiers, à
certains secteurs.
Les affiliés des associations patronales au niveau de la table
sectorielle devront avoir l'autorité de faire entendre leur voix avec
pouvoir de décision. Un amendement à cet égard doit
être apporté à la loi.
La table générale demeure l'autorité absolue en
matière de procédures et de ratification de contrat. La
représentation à la table centrale ou aux diverses tables
sectorielles est conditionnée par le chiffre de 35 p.c, tel que
déjà mentionné.
Les exceptions (article 69). Le Conseil provincial des métiers de
la construction soumet qu'à cause de son caractère hautement
spécialisé il ne devrait y avoir aucune exception à la Loi
des relations du travail dans l'industrie de la construction, de même
qu'au décret régissant les relations des parties et stipulant les
conditions de travail et de salaires.
Tous doivent demeurer égaux vis-à-vis de la loi. La
responsabilité qui découle de cette même loi doit
être conditionnée: a)par la nature du travail à accomplir;
b)par la compétence de celui qui doit accomplir le travail.
En conséquence, si un entrepreneur quel qu'il soit fait du
travail de la construction, il est régi par la loi et sujet aux
stipulations uniformes du décret. Si un travailleur est
déclaré compétent pour accomplir un travail de
construction, il est sujet à la loi et soumis aux stipulations
générales et uniformes du décret. Par conséquent,
aucune exception à la loi et, en l'occurrence, l'article 69 doit
disparaître.
Le bill 68 (travailleurs occasionnels). Le bill 68, constitue, à
notre sens, une négation complète de toute l'histoire humaine de
l'homme de métier.
Il ne saurait y avoir, en effet, deux catégories de construction
pas plus que deux catégories d'hommes à l'intérieur d'un
même métier. L'homme de métier ne devrait jamais être
le fruit du hasard ou celui des circonstances. L'existence de ce bill
établit une concurrence déloyale et avilit le métier comme
tel. L'existence de ce bill décourage la spécialisation de nos
hommes de métier, crée du chômage, engendre des conflits de
toutes sortes et place les spécialistes de métier dans des
conditions d'absolue insécurité.
L'existence de ce bill ouvre la porte à toutes les influences
indues et permet à des employeurs non professionnels d'embarquer dans un
domaine qui ne leur appartient pas tout en obtenant des privilèges
très substantiels en retenant bien souvent les services d'une
main-d'oeuvre de seconde main à des conditions qui, à toutes fins
pratiques, selon certaines informations, sont inférieures à
celles du décret.
De plus, ce bill protecteur d'une industrie parallèle (employeurs
non professionnels) (employés non spécialisés) dans la
construction remet entre les mains de son fonctionnaire une autorité
discrétionnaire qui a agi et qui ne peut que continuer d'agir que contre
nous.
Avec cette évolution inévitable du
préfabriqué, par exemple, où serons-nous demain ?
Où seront nos plombiers, où seront nos électriciens, nos
menuisiers, nos "millrights", etc.
Tout en acceptant le progrès, nous condamnerons toute
législation qui serait de nature: a)à avilir la noblesse du
métier; b)à établir des métiers parallèles;
c)à engendrer le chômage; d)à provoquer une concurrence
déloyale sur le marché du travail.
Le Conseil provincial des métiers de la construction soumet que
l'existence de ce bill constitue une menace directe et permanente à la
paix industrielle dans l'industrie de la construction. Son rappel est urgent.
10- Sécurité d'emploi et stabilisation des revenus
(règlement 2711).
Ce bill, à notre sens, constitue un des pas les plus
progressistes du législateur en vue de l'avancement et de la promotion
sociale des gars de la construction.
A cause du caractère essentiellement saisonnier de l'industrie,
la sécurité d'emploi du travailleur devient impérative. Il
s'ensuit que les études et le travail doivent s'intensifier afin
d'atteindre l'établissement d'un salaire vital minimum et annuel
garanti.
Pour ce faire a) L'inventaire des ressources humaines doit être
aussi régulière que possible. b)La loi, par tous les moyens, doit
assurer au seul travailleur professionnel détenant un permis de travail
le droit au travail dans cette industrie de la construction. c)L'offre de la
main-d'oeuvre spécialisée ne doit pas être
supérieure à la demande. d)Le permis de travail, qui doit
demeurer la propriété exclusive des parties, constitue le seul
élément de contrôle de la force des travailleurs.
(Amendement au règlement 2711). e)Le permis de travail ne doit
être accordé que par l'organisme désigné par la loi
que dans des cas absolus, là où il y a insuffisance de
main-d'oeuvre pour répondre aux exigences du marché. f ) Le
permis de travail constitue un droit sacré, droit accordé
à la compétence professionnelle de ceux qui gagnent leur vie
exclusivement de l'industrie de la construction. g) Le gouvernement ne devrait
avoir aucune autorité sur l'émission des permis de travail.
En résumé, disons que le règlement 2711 dans son
application doit, à longue échéance, régler le
problème de l'homme au travail dans ce secteur.
Nous estimons que l'existence de ce règlement, pour les gars de
la construction est capitale, à tel point que nous en ferons une
condition sine qua non à la signature de toute convention collective de
travail.
Il est évident que le règlement 2711 dans son application
et dans son apport à certaines questions qui relèvent
effectivement de la négociation collective peut grandement et largement
aider à la réglementation de certains problèmes qui sont
de juridiction de la négociation collective.
Bill 49, formation professionnelle. Le Conseil provincial des
métiers de la construction n'est pas, évidemment, contre la loi
sur la formation professionnelle de la main-d'oeuvre.
Toutefois, nous disons que cette loi ne devrait pas avoir
autorité sur l'industrie qui nous préoccupe. Son existence
amène dans ce secteur une main-d'oeuvre additionnelle que nous ne
pouvons accepter tant et aussi longtemps qu'il n'y a pas preuve de
surabondance.
D'autre part, s'il s'agit d'une intervention d'une tierce partie dans la
compétence professionnelle, nous réprouvons cette
intervention.
Nous nous inspirons toutefois des principes de base du bill 49 en
recommandant la formation d'un comité général de formation
professionnelle des métiers, lequel comité sera sous la
juridiction des parties contractantes.
Conclusion. Disons que chaque fois que l'Etat intervient il doit le
faire surtout et avant tout en vue de protéger la compétence
professionnelle en s'inspirant du principe suivant: Dans la construction, il ne
doit y avoir qu'une seule catégorie de travailleurs. Celui qui
possède la compétence professionnelle, celui qui gagne
régulièrement sa vie, c'est lui le travailleur professionnel qui,
chaque fois qu'il travaille, doit recevoir des conditions uniformes dans tout
le Québec.
Messieurs, je dois vous faire remarquer que ce mémoire est
l'expression unanime de tous les affiliés du Conseil provincial des
métiers de la construction. Il est évident que dans certains cas
nous avons attiré votre attention sur des choses qui, selon la
présentation même, semblent être impératives. Nous
avons à coeur, avec l'autorité gouvernementale et les parties
concernées, de régler les problèmes si on veut assurer la
prospérité d'une entreprise tout en assurant la
prospérité du travailleur professionnel.
Dans cet esprit nous n'avons pas le choix, des positions doivent
être prises. Je vous remercie.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Lavoie. Est-ce qu'il y a des questions?
M. ROY (Beauce): J'aurais quelques questions, M. le
Président.
M. LE PRESIDENT: Le député de Beauce.
M. ROY (Beauce): Je constate que dans le mémoire il y a certains
points sur lesquels nous nous approchons, surtout je le dis sans malice
lorsque vous parlez de prêts sans intérêts et de
revenu minimum annuel garanti. Je pourrai y revenir; il s'agit d'un
mécanisme, M. le Président, pour votre information. Cela commence
là.
D'après le mémoire, la sécurité d'emploi est
le problème no 1, le problème qui vous préoccupe au plus
haut point. Vous admettez quand même qu'il y aurait trois secteurs dans
l'industrie de la construction: le secteur public, qui comprend les
constructions de routes, les constructions gouvernementales; le secteur
commercial et industriel et le secteur privé. Il est évident que
ces trois secteurs connaissent des variations d'une région à une
autre du Québec et le secteur privé a une prédominance
très prononcée dans les milieux ruraux, dans les petits centres
de la province de Québec.
A partir de ces trois secteurs il y a, comme je viens de le dire, trois
milieux différents. Vous avez le milieu exclusivement urbain, le milieu
semi-urbain et le milieu rural. Sommes-nous d'accord sur ces principaux
points?
UNE VOIX: Oui.
M. ROY (Beauce): Il y a dix régions économiques au
Québec, du nord au sud, de l'est à l'ouest. Vous avez 108
comtés dans lesquels se trouvent près de 1,400
municipalités qui ont des problèmes différents les unes
des autres et qui ont également des besoins différents. Le
Québec a une très grande étendue.
Si on admet ces choses, est-ce qu'on est d'accord j'aimerais tout
de même qu'on s'entende sur certains principes de base au départ,
avant d'aller plus en détail que les emplois dépendent
premièrement directement de la demande des consommateurs?
Deuxièmement, il y a les budgets publics, qui conditionnent en quelque
sorte une certaine partie de la construction, et aussi la demande qui vient des
investisseurs. A partir de là, il y a tout de même un
conditionnement qui est imposé par les taux d'intérêts.
D'ailleurs, je pense que M. Laberge l'a mentionné hier, il y a les
politiques monétaires et gouvernementales, les conditions
économiques, en général, et le pouvoir d'achat des
consommateurs, plus les inconvénients du climat que nous avons au
Québec.
Ceci dit, la question que je pose est globale parce que c'est un
problème global:
Croyez-vous sincèrement qu'on peut, à la lumière de
tout cela, régler le problème de la sécurité
d'emploi dans l'industrie de la construction en élaborant un
décret, une convention collective ou autre chose.
M. LABERGE : Oui, très certainement, il n'y a aucune raison pour
que ça ne puisse pas se faire. Quand on parle du consommateur ou de
l'aspirant propriétaire, on se réfère toujours
enfin, hier, il y a une association d'entrepreneurs qui en a parlé
aux salaires des gars de la construction. Le ministre se souviendra
très certainement qu'à l'avant-dernière commission
parlementaire sur l'industrie de la construction les statistiques avaient
été sorties et il était clairement démontré
qu'à Montréal, par exemple, ça coûtait moins cher
qu'ailleurs pour construire. Il y a des raisons à ça. Il y a la
compétence des entrepreneurs aussi et ça, c'est un point bien
important.
Maintenant, si on veut encourager les citoyens du Québec à
devenir propriétaires de leur maison, il y a des moyens que l'Etat se
doit de prendre: arrêter l'exploitation éhontée sur les
terrains, faire disparaître la surtaxe de 11 p.c. sur les
matériaux de construction, s'arranger pour que le capital soit
disponible pour les citoyens du Québec qui veulent devenir
propriétaires de leur maison à des taux d'intérêt
qui ont de l'allure et non pas à 9 p.c., 9 1/4 p.c. et 9 3/4 p.c, comme
c'est le cas aujourd'hui.
Si l'Etat légiférait dans un domaine où il doit
légiférer, où il doit prendre ses
responsabilités, ça aiderait, beaucoup plus que n'importe quelle
autre mesure, les citoyens du Québec à devenir
propriétaires de leur maison et ça assurerait, bien sûr,
beaucoup plus de travail dans l'industrie de la construction, ce qui nous
rendrait beaucoup plus facile l'obtention d'une sécurité
d'emploi.
M. ROY (Beauce): Si j'ai bien compris, vous estimez qu'il y aurait lieu
d'intervenir à l'intérieur d'un décret, d'une loi, mais
qu'il y a, quand même, un problème sur lequel le gouvernement doit
aller plus loin, avoir des politiques qui favoriseraient plus de
stabilité, plus d'investissements dans le domaine de la
construction.
M. LABERGE: Très exactement.
M. ROY (Beauce): Mais nous savons que ces politiques n'existent pas
à l'heure actuelle et qu'il y a quand même je ne sais pas
si le terme serait approprié une espèce de "free for all",
si vous voulez, dans toutes les régions du Québec. A un moment
donné, les conditions économiques le permettent et on a un boom
dans la construction; à un autre moment, les conditions
économiques ne le permettent pas, nous avons des restrictions et des
problèmes dans l'industrie de la construction.
Le problème auquel nous avons à faire face à
l'heure actuelle, c'est beaucoup plus l'arrêté en conseil 2711 que
le décret de la construction lui-même ou encore la qualification
professionnelle. Les problèmes cruciaux que nous avons connus,
c'était dû, justement, à l'arrêté en conseil
2711. On a vu, ce matin, par les statistiques et par les réponses qui
nous ont été données, qu'il manque
énormément de données.
Je vais laisser, tout simplement, les questions dont vous venez de nous
parler relativement aux autres politiques du gouvernement pour en venir
à un décret.
Alors, comment, selon vous, y a-t-il possibilité de concilier
tous les problèmes qui se posent dans toutes les régions du
Québec, en tenant compte de tous les impératifs dont l'industrie
de la construction doit nécessairement tenir compte? Comment
concevez-vous l'élaboration d'un décret et quelle solution
proposeriez-vous, à l'heure actuelle, pour être en mesure de
régler ce problème de façon à permettre aux
travailleurs de la construction d'occuper un emploi lorsqu'il y a des emplois
disponibles, et ce non seulement à Montréal, non seulement
à Québec, mais dans nos régions, dans nos comtés
afin que nous soyons en mesure de faire face aux demandes additionnelles qu'il
y a?
M. LABERGE: Je pense que nous vous le suggérons assez clairement
dans le mémoire. Nous vous disons: Mettez les vraies parties en
présence, à la table de négociations, et nous pourrons
nous occuper de nos affaires, régler nos problèmes. Cela laissera
au gouvernement le temps de régler les autres problèmes qu'il
devrait régler, par exemple, l'exploitation des terrains, les
intérêts éhontés, le taux de location de l'argent,
les surtaxes et tout le reste.
Si vous suiviez nos suggestions de vous retirer d'un domaine qui vous
regarde moins que le domaine d'intérêt public, ça vous
laisserait peut-être plus de temps pour vous occuper des autres
problèmes qui sont d'ordre purement législatif.
Evidemment, les partenaires dans l'industrie de la construction ne
peuvent absolument rien faire. Cela prend de la législation, encore une
fois, pour empêcher l'exploitation éhontée sur les terrains
et régler la question des taxes, la question des surtaxes, le taux de
location de l'argent. Ce n'est pas nous, à la table de
négociations, qui pouvons régler ce genre de choses.
M. ROY (Beauce): M. Laberge, je suis heureux de vous l'entendre dire. Je
pense bien qu'on n'apprend rien à personne en disant que la question des
prêts sans intérêt, de la spéculation sur les
terrains, ça fait longtemps que nous en parlons et que nous demandons au
gouvernement d'agir dans ce sens.
J'espère que le ministre du Travail va prendre bonne note de ces
représentations et qu'il verra, au conseil des ministres, à faire
les recommandations qui s'imposent. Je crois que ce serait dans son
intérêt et que cela lui permettrait de régler beaucoup de
ses problèmes.
M. LABERGE: On va l'écouter avec plaisir.
M. ROY (Beauce): C'est une question qui nous préoccupe au plus
haut point. Cette année, disons qu'il y a 120,000 travailleurs dans
l'industrie de la construction, à cause des conditions
économiques favorables. L'an prochain, s'il y a une restriction dans la
construction, dans différentes régions du Québec, il y en
aura moins. Il y a certaines variations. Si , par suite des études qui
pourraient être faites par la Commission de l'industrie de la
construction, seulement 80,000 travailleurs pouvaient trouver du travail, quel
mécanisme proposeriez-vous pour que des milliers de travailleurs de la
construction ne soient pas brimés de leurs droits? Comment pensez-vous
qu'un mécanisme puisse être organisé de façon qu'on
assure qu'il n'y ait pas trop de discrétion et qu'il n'y ait pas
d'injustice commise?
Je pense qu'on a beaucoup parlé de la paix industrielle dans
l'industrie de la construction. Je suis heureux qu'on en parle, parce que cela
fait partie de ce qu'on pourrait appeler la paix sociale tout court. Mais s'il
y a 20,000 travailleurs qui ont travaillé dans l'industrie de la
construction depuis deux ans et qu'on leur refuse leur permis de travail, quels
sont les problèmes? De quelle façon pourrait-on envisa-
ger de résoudre ces problèmes pour éviter le
pire?
M. LABERGE: Je suis bien heureux que vous me posiez cette question. Vous
me permettrez de vous dire que, quand les députés ou d'autres
personnes se servent de leur influence pour embarquer d'autres gars dans
l'industrie de la construction, cela n'atténue pas le problème,
cela l'accentue. Ce qu'il nous faut absolument, c'est d'arrêter de faire
des hommes de métier, alors qu'il existe déjà un surplus
dans certains métiers. C'est la première chose à
faire.
Bien sûr qu'on ne peut pas arriver du jour au lendemain et dire
qu'il y a 20,000 gars de trop dans la construction, qu'on va en choisir 20,000
de façon arbitraire. On ne peut pas faire cela. Mais on peut
arrêter d'en embarquer à tous les jours des nouveaux dans
l'industrie de la construction et il y a des départs naturels. Il y a
des gars qui, pour toutes sortes de raisons, peut-être par rapport
à leur âge, à leur santé, vont sortir de l'industrie
de la construction. Il y a évidemment l'attrition naturelle. Si on ferme
le robinet au départ, avec le temps, cela va se stabiliser. On ne peut
pas faire cela du jour au lendemain, comme vous le disiez. Il y a des droits
acquis là-dedans. Même si les gars n'avaient pas travaillé
dans l'industrie de la construction l'an dernier pour n'importe quelle raison,
ce sont des gens qui ont gagné leur vie dans la construction, qui ont
des compétences. On ne doit pas, arbitrairement, les empêcher d'y
revenir.
Je pense que les parties contractantes peuvent facilement, entre elles,
trouver des mécanismes qui permettront la réduction graduelle de
la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction, sans causer d'injustice
ou de préjudice à qui que ce soit.
Il est évident que, même la meilleure formule, ne
réglerait pas tous les problèmes. Cela se peut que dans certaines
régions il y ait, à un moment donné, un manque de
main-d'oeuvre dans certains métiers. Là aussi, ce n'est pas
compliqué du tout de trouver des formules qui pourraient combler ce
genre de lacunes, au fur et à mesure qu'elles se
présenteront.
M. ROY (Beauce): Etant donné les problèmes auxquels nous
avons à faire face et les délais qu'il faudrait à la
Commission de l'industrie de la construction pour avoir un inventaire plus
global, plus complet, est-ce que vous accepteriez, pour maintenir la paix
industrielle dans l'industrie de la construction je vais employer le
terme de M. Lavoie, parce que c'est important, en somme d'exclure les
artisans et d'exclure aussi les régions rurales qui n'ont pas une
certaine quantité de population? Je pense que nous sommes tous
conscients que la construction qui se fait dans ces milieux est de type
très artisanal. Ce sont des petits contrats qui n'intéressent pas
les gros entrepreneurs et qui n'intéressent pas les gens.
Il y a de grandes difficultés qui peuvent causer des
préjudices assez sérieux aux employés professionnels qui
travaillent dans la grosse industrie de la construction, que ce soit le secteur
public ou commercial ou industriel. Des problèmes sont amplifiés
par le fait qu'on a tenté de prendre peut-être la bouchée
trop grande, en incluant toutes les régions rurales du Québec et
tous les travailleurs artisans.
Pour avoir plus de paix sociale, pour permettre de franchir une
étape, est-ce que la FTQ serait prête à accepter que les
artisans soient exclus en tenant compte des régions rurales
comptant, par exemple, (je vais mettre un certain chiffre) 3,000 ou 5,000
âmes de l'arrêté en conseil 2711?
M. LABERGE: Quand vous parlez des artisans, vous parlez de la plaie
véritable de l'industrie de la construction. Il n'y a rien de pire que
ça pour l'industrie. Ce sont" des gens qui ne respectent aucun
règlement de sécurité. Quand il arrive des accidents sur
des chantiers, c'est surtout à cause de ces gens-là. Ils font de
la concurrence déloyale parce qu'ils ne respectent pas les taux du
décret, ils font ce qu'on appelle des "jobbines", ils prennent des
contrats à meilleur marché que les entrepreneurs qui veulent
respecter les taux du décret, qui veulent respecter les normes de
sécurité. Ils se dépêchent comme des fous, la
qualité de la construction s'en ressent parce qu'ils prennent des
contrats à tellement bon marché qu'ils sont obligés de
travailler quasi jour et nuit pour les faire et pour gagner au moins un salaire
un peu raisonnable.
Les artisans, c'est la plaie de l'industrie de la construction. Non
seulement on ne serait pas d'accord pour les exclure mais si on pouvait trouver
un moyen pour les empêcher de fonctionner, ce serait bien. Parmi les
4,000 qui apparaissent et disparaissent chaque année, la plupart sont de
ces gens-là qui, parfois, travaillent avec un ou deux autres et qui,
à un moment donné, arrêtent de prendre des contrats, ils
déclarent faillite, et il y a des travailleurs qui y perdent.
Là-dessus, au Conseil consultatif du travail et de la
main-d'oeuvre, unanimement et ce n'est pas souvent que les patrons et
les travailleurs s'entendent au conseil consultatif du travail et de la
main-d'oeuvre on s'est entendu à l'unanimité sur le bill
51 qui essaierait de mettre de l'ordre dans l'industrie de la construction en
ce qui a trait aux entrepreneurs.
On en parle, dans notre mémoire, qu'il devrait y avoir un bon de
fidélité. Dans le bill 51, il y avait une autre formule,
ça n'a pas tellement d'importance, la formule. Ce qui est important
toutefois c'est qu'on mette de l'ordre là-dedans et qu'on s'assure que
ceux qui veulent entreprendre des travaux dans l'industrie de la construction
soient des employeurs responsables. Le bill 51 est prêt depuis trois ans,
en autant que je puisse me souvenir. Vous adoptez beaucoup de lois chaque
année, vous en changez
surtout beaucoup; peut-être bien qu'un jour vous pourriez adopter
celle-là qui réglerait un très gros problème dans
l'industrie de la construction.
M. ROY (Beauce): Vous n'êtes pas d'accord qu'en ce qui a trait aux
artisans il serait quand même bon de faire une distinction entre un
entrepreneur artisan qui va faire de la concurrence aux entrepreneurs dans les
grands centres et le petit entrepreneur artisan dans les régions
rurales. Quand même, je ne suis pas d'accord avec ce que vous venez de
dire que les artisans ont fait de la mauvaise construction dans tout le
Québec. Venez dans la région rurale, venez dans mon comté
en particulier, dans les autres comtés, vous allez trouver de
très belles résidences qui ont été faites par des
artisans.
Le problème est là. Supposons que, à une distance
de 75 ou 100 milles de la ville de Québec, une personne désire se
construire une résidence, un professeur d'école, par exemple, qui
enseigne au niveau primaire dans une petite municipalité; va-t-il faire
venir un gros entrepreneur pour construire la maison? Comment régler le
problème?
M. LABERGE: Le professeur d'école dans une petite
municipalité gagne le même salaire que le professeur
d'école dans une grosse municipalité et il est capable de payer
le même prix pour sa maison.
M. ROY (Beauce): Oui, mais là je pense qu'il y a quand même
l'entrepreneur qui va partir de la ville pour venir construire une maison.
M. LABERGE: Oui, c'est ça.
M. ROY (Beauce): La maison ne coûtera pas le même prix dans
une petite municipalité qu'en ville. Vous avez dit vous-même, tout
à l'heure, que la construction coûte moins cher à
Montréal qu'ailleurs, qu'il y a plus de facilités.
M. LABERGE: Par rapport à la compétence des entrepreneurs
justement. Encore une fois, la plaie de l'industrie, enfin une des plaies de
l'industrie de la construction ce sont les artisans. Les artisans qui vont
aller acheter cinq livres de clous à la fois au lieu d'acheter un baril
de clous, ça ne revient pas au même prix. Et c'est nous qui payons
pour ça. Nous ne sommes pas en faveur de faire disparaître tous
les entrepreneurs ou enlever toute chance à un nouvel entrepreneur
d'entrer dans l'industrie de la construction, mais nous voudrions que tous les
entrepreneurs soient régis par les mêmes lois et soient
obligés de respecter les mêmes règlements que tous les
autres. Il ne devrait pas y avoir de faveur spéciale. On dit justement,
dans le mémoire, qu'il ne devrait pas y avoir d'exception et vous nous
demandez si nous voudrions les exclure. On ne veut pas les exclure, on croit
qu'il y a déjà de l'injustice parce qu'il y a des exceptions. Il
ne devrait pas y en avoir.
M. ROY (Beauce): Quand j'ai parlé de les exclure, c'est en vertu
de l'arrêté ministériel 2711, ce n'est pas en vertu du
décret de la construction comme tel, et ce n'est pas en vertu de la loi
de la qualification professionnelle.
C'est en vertu de l'arrêté en conseil no 2711, relativement
aux permis de travail. C'est uniquement sur ce point, parce que j'avais pris la
peine de dire, auparavant, que le problème que nous avions eu à
envisager surtout et qui avait compliqué tout le problème, dans
tout le Québec, et qui est en train de causer des préjudices
très sérieux aux employeurs du secteur industriel et du secteur
commercial, dans l'industrie de la construction, c'était justement le
fait qu'on avait obligé les artisans, les petits entrepreneurs et les
travailleurs des régions rurales à être régis par le
même décret, alors que la Commission de l'industrie de la
construction admet elle-même ne pas avoir été capable
d'avoir toutes les données pour faire l'inventaire des travailleurs
disponibles ou de ceux qui avaient travaillé.
J'avais proposé cela. Je vous avais demandé si vous seriez
d'accord sur ce point, pas sur la question de la qualification professionnelle,
pas sur la question du décret de la construction, mais en vertu de
l'arrêté en conseil no 2711.
M. DESJARDINS: Cela désiquilibre tout notre système, si
vous admettez que ces gars sont exclus de la construction. Prenez
Montréal, par exemple. Pour 50 p.c, peut-être, et dans certains
métiers, pour beaucoup plus que cela, ce sont des gars des
régions rurales qui travaillent là. Ces gars deviendront des gars
de la construction. Quand il n'y aura plus d'ouvrage, ils s'en viendront
à Montréal avec des droits acquis, ou à Québec, ou
dans les grandes centres. Comment voulez-vous que nous fassions la
rationalisation du revenu si tous les travailleurs de la province de
Québec ne peuvent pas être englobés dans une seule
analyse?
M. ROY (Beauce): A ce moment-là, je reprends vos propos. Si vous
donnez un permis de travail à ce travailleur, parce qu'on a
démontré la nécessité de lui en accorder un,
à ce moment-là, il va aller à Montréal, mais si
vous ne lui donniez pas de permis de travail et si on le laissait travailler
dans les régions rurales, il n'irait pas vous déranger en
ville.
M. LABERGE: De deux choses l'une: Ou bien il sera couvert et il aura des
droits, ou bien il ne le sera pas. S'il est couvert et a le droit de s'en venir
à Québec, à Montréal, à
Trois-Rivières ou à Drummondville et de réclamer son
statut de travailleur de la construction, vous ne pouvez pas, pendant trois,
quatre ou cinq mois, lui dire: Tu es exclu. Il faut qu'il soit ou dedans, ou
dehors.
Nous, nous figurons que, dans l'intérêt des travailleurs
eux-mêmes, il faut qu'ils soient dedans, parce que c'est là qu'ils
établiront leurs droits acquis, c'est là qu'ils en
obtiendront,
pour pouvoir aller travailler ailleurs. Parce que, dans sa
région, le gars aura peut-être une maison à construire,
mais il peut attendre plusieurs mois avant d'en avoir une autre. Il faudra
qu'il aille travailler ailleurs.
Nous ne pouvons pas avoir deux sortes de travailleurs professionnels
dans l'industrie de la construction. Il faut en avoir rien qu'une sorte.
M. ROY (Beauce): Mais en partant encore du milieu rural, pour ce
même travailleur de la construction qui travaille dans un secteur
artisanal du milieu rural, il y a quand même 50 p.c. de la construction,
dans le milieu rural, qui se fait au niveau de l'agriculture, des
bâtisses de fermes et autres. Or, ce n'est pas dans le décret, ce
n'est pas régi par le décret.
M. LABERGE: Ce n'est pas régi.
M. ROY (Beauce): Vous avez quand même énormément de
municipalités qui font des travaux municipaux, qui, à l'heure
actuelle, ne sont pas régis par le décret et dont on ne
reconnaît même pas les heures pour les classifier. J'ai eu à
débattre des cas et à faire parvenir des lettres au ministre. Il
y a des gens qui ont besoin d'un permis de travail pour conduire des camions
dans le secteur de la baie James. Le type a toujours travaillé dans
l'industrie de la construction avec des camions. Il travaillait, par exemple,
pour des municipalités depuis quatre et cinq ans. Il est donc
habitué dans ce domaine. Mais parce que le secteur de la construction
dans ce domaine n'est pas reconnu par les lois, ce type se trouve
pénalisé.
M. LABERGE: C'est en plein ce que je vous disais tantôt. C'est
qu'il aurait dû être reconnu, au temps où il travaillait
dans de petites municipalités. Il n'aurait pas de problèmes
maintenant. Mais parce qu'il n'a pas été reconnu, il a des
problèmes.
Si vous ouvrez la porte toute grande, comment ferez-vous pour
contrôler la main-d'oeuvre dans l'industrie de la construction? Il faut
qu'il y ait un certain contrôle. Je n'ai rien contre le gars qui a une
terre et qui travaille sur sa terre huit mois par année. Mais les quatre
autres mois, quand il vient dans l'industrie de la construction, je n'ai rien
contre cela non plus, sauf qu'il empêche un gars qui gagne sa vie dans
l'industrie de la construction de travailler. Ce n'est pas une question de
donner des chances à quelqu'un. Il y a 60,000 ou 70,000 emplois dans
l'industrie de la construction et il y a 120,000 gars d'enregistrés. Il
n'y a pas d'ouvrage pour les 120,000. C'est aussi simple que cela.
Si on veut essayer un jour de donner de la stabilité d'emploi,
une sécurité d'emploi aux gars de la construction et nous
tenons mordicus à leur en donner il faut qu'on contrôle la
main-d'oeuvre. Pour contrôler la main-d'oeuvre, il faut que tout le monde
qui travaille dans l'industrie de la construction soit régi par la loi
et par le décret qui dirigeront toute l'industrie de la construction.
Autrement, il n'y a pas moyen d'établir de contrôle.
M. ROY (Beauce): Vous parlez d'établir un contrôle de cette
façon, mais vous avez quand même admis, je pense, tout à
l'heure, que lorsqu'il y a du travail dans l'industrie de la construction, on
doit s'efforcer de voir à ce que les gens puissent exécuter ce
travail.
M. LABERGE: C'est bien sûr.
M. ROY (Beauce): A partir de là, le problème se pose au
moment où il y a régression dans l'industrie de la construction.
C'est là que je me demande sérieusement et en toute
honnêteté de quelle façon on va procéder, de quelle
façon les travailleurs pourront être traités avec justice,
le jour où la Commission de l'industrie de la construction, ou le
ministère du Travail, ou la FTQ, ou la CSN, peu importe, dira: Toi, tu
ne travailleras pas parce qu'il y a une restriction mais c'est l'autre qui va
travailler à ta place. Le problème est là.
Vous l'avez souligné tout à l'heure, il faudrait qu'il y
ait des politiques incitatrices...
M. LABERGE: D'accord.
M. ROY (Beauce): ... pour donner une meilleure stabilité et que
l'industrie de la construction ne fasse pas ça, mais qu'elle ait une
courbe ascendante.
M. LABERGE: Moi, je suis convaincu que la Commission de l'industrie de
la construction va pouvoir régler ce problème. Il faut se
rappeler qu'il n'y a pas tellement longtemps ça fait un an et
demi environ vous aviez 14 ou 18 décrets dans l'industrie de la
construction. A ce moment-là, les conditions et les salaires
étaient différents, la mise en application des décrets
variait d'une région à l'autre. Dans certaines régions,
les décrets étaient respectés, tandis que, dans d'autres,
ils ne l'étaient pas.
La Commission de l'industrie de la construction est née, il y a
environ un an et demi. Les 15 décrets sont devenus un. La Commission de
l'industrie de la construction n'a peut-être pas encore en main toutes
les informations nécessaires, mais moi, je suis convaincu qu'elle va les
obtenir. Maintenant, vous avez un seul décret pour le Québec et
vous avez une seule façon d'appliquer le décret. C'est
extrêmement important. Cela ne varie pas d'une région à
l'autre.
Il y a encore, bien sûr, un certain rodage à faire. Il y a
encore des représentants qui ne sont pas, peut-être, tout à
fait expérimentés dans la façon de mettre en application
le décret, mais, moi, je suis convaincu que la Commission de l'industrie
de la construction pourra, dans un avenir très rapproché, nous
donner toutes les informations, nous dire que, dans telle région, il y a
pénurie de tel métier et un surplus de tel
autre métier. De cette façon, on sera beaucoup plus en
mesure de voir à combler ces lacunes et à changer de certains
métiers à d'autres pour essayer de donner une stabilité
dans l'industrie de la construction.
Il y a des formules que nous ne pourrons pas trouver, bien sûr,
cet après-midi, mais nous sommes d'accord qu'un gars qui travaille dans
l'industrie de la construction ne devrait pas être empêché
d'y gagner sa vie parce qu'il a travaillé dans une petite
municipalité. C'est pourquoi nous estimons que tout le monde doit
être couvert. Si nous faisons des exceptions, des exclusions, c'est
là qu'on commence à être obligé d'agir de
façon arbitraire.
M. ROY (Beauce): Alors, de quelle façon suggérez-vous,
à l'heure actuelle, que ce problème crucial que nous vivons
à l'heure actuelle dans nos petites régions puisse être
réglé, de façon à éviter que des personnes
ne soient obligées d'attendre 5 à 6 semaines avant de pouvoir
exécuter le travail pour lequel on est prêt à les engager
maintenant?
M. LABERGE: Cela ne relève pas de nous.
M. DESJARDINS: Si ce sont de nouveaux gars de la construction, ils ont
de la difficulté à entrer dans la construction. Peut-être
que ça leur prend 7 à 8 semaines avant d'obtenir le permis, comme
vous le dites. Par contre, il y a des gars qui, après 6 ou 7 mois, des
vrais gars de la construction, ne sont même pas capables d'entrer, parce
que justement il y en a des nouveaux qui entrent. Et ça, nous en avons
à la tonne.
M. ROY (Beauce): Je comprends, mais il y a un autre point. Je l'ai
mentionné tout à l'heure. Il y a 1,400 municipalités dans
la province de Québec. Allez dans la municipalité de Saint-Y, par
exemple, où il se construit deux résidences. Est-ce que les gens
de l'endroit vont accepter...
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! C'est le deuxième tour avec les 1,400
municipalités. Est-ce que la commission peut accepter qu'il y a une
différence d'opinion entre le député de Beauce et les
représentants de la FTQ, mais qu'il y a accord commun sur les valeurs de
la Commission des métiers de la construction? Nous pourrions continuer.
Nous ne réglerons pas, je pense bien, le problème, à
savoir si les artisans ont une valeur ou s'ils n'en ont pas, s'ils devraient
être inclus ou pas. On en discute, tout le monde est d'accord.
M. ROY (Beauce): Oui, nous en discutons. Pourquoi sommes-nous ici? Nous
avons demandé la convocation de la commission pour discuter de ce
problème.
M. LE PRESIDENT: Il y a un désaccord, c'est admis. Nous le
reconnaissons. Eux ne changeront pas d'idée, vous ne changerez pas
d'idée, non plus. A quoi sert de se répéter?
M. BROCHU: Ce n'est pas une question de désaccord ou d'accord, M.
le Président. Il s'agit de trouver une lumière à travers
la discussion. Je pense que la commission parlementaire a été
convoquée à cet effet.
M. LE PRESIDENT: Cela ne regarde pas la FTQ de prendre la
décision ou de trouver la façon de régler cela. Vous
êtes d'accord que c'est la commission qui doit le faire. Passez donc
à autre chose.
M. ROY (Beauce): Mais je veux savoir de la part de la FTQ, étant
donné qu'elle est...
M. LABERGE : Il faut comprendre que nous, nous sommes ici, à
votre demande, pour vous dire ce que nous en pensons. S'il y a des questions,
nous allons essayer d'y répondre. Ce n'est pas à vous de
régler ce problème.
M. LE PRESIDENT: Oui, la roue tourne, mais elle n'est pas
nécessairement toujours à la même place. Si vous avez
d'autres questions, posez-les. Disons que, pour le moment, il y a un
désaccord, nous le reconnaissons tous. Passez à un autre
sujet.
M. ROY (Beauce): Ce n'est pas une question de désaccord. Je
voulais, tout simplement, préciser et souligner le problème
réel qui explique pourquoi nous avons fait notre motion en Chambre.
C'est moi qui ai présenté cette motion. Je reconnais que
ça ne me donne pas de droit particulier, mais, quand même, nous en
arrivons au point crucial. Il s'agit de la mobilité de la main-d'oeuvre.
Les gens ne veulent pas aller d'une région à l'autre. Les gens du
milieu, qui sont en chômage je parle de paix industriel
n'acceptent pas que des gens de l'extérieur viennent prendre leur emploi
chez eux, alors qu'ils sont justement capables de faire les travaux, qu'ils les
ont déjà faits dans le passé.
Mais, à cause des délais administratifs, on ne
reconnaît pas leur compétence et leurs droits.
C'est tout simplement ça. M. le Président, je termine
là-dessus. Je pourrai y revenir plus tard.
M. LE PRESIDENT: Je suggère, comme je l'ai fait ce matin, de
passer par-dessus le discours de deuxième lecture, le discours de
troisième lecture. Posons des questions, obtenons des réponses
brèves et procédons. C'est ce que je demande. S'il faut faire un
tour d'horizon chaque fois qu'on pose une question, on sera ici jusqu'à
Pâques. Il y en a d'autres qui attendent, c'est une question de respect.
Je regardais tout à l'heure; nous étions pas mal endormis, je
pense. Alors, il faudra peut-être reconnaître les droits des
autres.
M. BROCHU: Il ne faut pas faire de projection.
M. LE PRESIDENT: Non, je ne suggère rien.
M. ROY (Beauce): Nous, nous ne dormons pas.
M. LE PRESIDENT: C'est entendu, vous ne pouvez pas dormir en parlant,
c'est aussi clair que ça. Alors, est-ce que vous avez d'autres
questions?
M. LABERGE: On ne voudrait pas que les députés se
chicanent à l'occasion de notre mémoire.
M. LE PRESIDENT: Non, non. Le député de Saint-Maurice.
M. DEMERS: Merci, M. le Président. A la page 9 du mémoire,
on nous dit qu'il faudrait que le gouvernement prenne position et qu'on
choisisse un représentant syndical.
M. LABERGE: Ce n'est pas tout à fait ce que nous disons.
M. DEMERS: Bien, vous dites...
M. LABERGE: Le gouvernement devrait permettre la tenue d'un vote dans
tout le Québec et ce sont les travailleurs qui choisiront le syndicat
qu'ils veulent avoir, pas le gouvernement.
M. DEMERS: Non, vous voulez que le gouvernement prenne une
décision pour que les parties intéressées puissent voter.
C'est ça que vous voulez.
M. LABERGE: Cela fait au moins trois ou quatre fois que nous avons
l'occasion de le répéter. Nous sommes convaincus que, pour avoir
véritablement une paix durable dans l'industrie de la construction, il
faut qu'il y ait un syndicat fort et véritablement
représentatif.
M. DEMERS: Un seul?
M. LABERGE: Un seul. Nous sommes convaincus de ça. Nous vous
l'avons dit à trois ou quatre reprises. Nous n'avons pas changé
d'idée.
M. DEMERS: Vous voudriez que le gouvernement traite, dans une loi ou un
règlement, les travailleurs de la construction de la même
façon que nous allons traiter les cultivateurs dans la loi 64 en ayant
simplement un organisme représentatif?
M. LABERGE: Vous avez déjà décidé qu'il y
aurait un vote chez les fonctionnaires, par exemple, pour qu'il n'y ait qu'un
syndicat. Soit dit en passant, nous avions été exclus du vote.
Vous avez déjà décidé ça pour les fermiers,
je ne vois pas que ça soit scandaleux que vous décidiez qu'il y
ait un vote dans l'industrie de la construction. Si vous ne le faites pas, nous
sommes en train de le faire nous.
M. DEMERS: Vous considérez que c'est prioritaire qu'actuellement
le gouvernement prenne position?
M. LABERGE: Cela l'est peut-être moins que ça
l'était mais enfin.
M. DEMERS: Oui.
M. COURNOYER: Si je comprends bien, malgré le fait que vous
requérez que le gouvernement fasse la loi qui permettrait qu'il y ait un
vote de représentation syndicale, vous temporisez un peu par rapport
à vos premières opinions en parlant des 35 p.c. qui sont
là. Comment est-ce que je marie un vote avec les 35 p.c? C'est quoi?
M. LABERGE: Pour qu'un syndicat soit représenté à
la table de négociation aux différents comités, il devrait
au moins avoir 35 p.c. des travailleurs. Si on est pour être plus d'un
syndicat dans l'industrie de la construction, si on est pour être deux,
que ce soit deux qui soient au moins représentatifs. S'il y en a un
troisième qui n'est pas représentatif, qu'il ne soit pas
là, qu'on ne l'ait pas dans les jambes toujours.
M. COURNOYER: En fait, est-ce que vous n'arrivez pas à la
même conclusion dans les deux cas? Qu'est-ce qui arrive s'il n'y a pas de
35 p.c? Si j'ai bien compris la diatribe tantôt, le syndicat
disparaît.
M. DESJARDINS: C'est ça.
M. COURNOYER : Donc, ça veut dire que le vote devrait avoir lieu.
Après le vote, ceux qui ont 35 p.c. demeurent à une table de
négociation et ceux qui ne les ont pas décollent.
UNE VOIX: Du tout.
M. LABERGE: On risque de décoller.
M. DESJARDINS: A la table, ah oui, regardez bien ça.
Il y a le maraudage de 40 jours. Après le maraudage, vous comptez
les effectifs de part et d'autre et là vous dites si oui ou non l'un
demeure, qui demeure, ainsi de suite.
M. COURNOYER: Non, mais il disparaît disons...
M. DESJARDINS: Ce n'est pas un vote entre les autres. Après
ça vous allez voir les effectifs de chacune des centrales.
M. LABERGE: Vous n'aimeriez pas prendre cette chance de nous voir
disparaître si on perd les élections?
M. COURNOYER: On s'interroge. M. DESJARDINS: On se sacrifie.
M. COURNOYER: Oh! C'est un gros sacrifice.
M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester.
M. COURNOYER: Vous parlez au nom de combien de personnes?
M. DESJARDINS: Pardon?
M. COURNOYER: Vous parlez avec autorité et démocratie,
mais combien êtes-vous?
M. DESJARDINS: Voulez-vous qu'on aille les chercher? Vous pourrez
même les voir. Laissez-nous faire des appels téléphoniques.
Vous m'avez dit de venir tout seul. Je suis venu tout seul et vous dites encore
que ça ne veut rien dire.
M. COURNOYER: Non, je n'ai pas dit cela. Je demande au nom de combien de
personnes vous parlez.
M. DESJARDINS: Tout à l'heure, dans notre mémoire, nous
avons parlé de 70,000 personnes.
M. COURNOYER: Vous représentez 70,000.
M. DESJARDINS: Nous sommes prêts à vous présenter
nos dossiers n'importe quand.
M. COURNOYER: Je ne veux pas faire la preuve; je veux savoir au nom de
combien de personnes vous parlez. 70,000?
M. DESJARDINS: On représente 70,000 travailleurs.
UNE VOIX: Si vous voulez les rencontrer. M. COURNOYER: Sur 120,000?
M. DESJARDINS: Si vous le dites, ce doit être ça.
M. COURNOYER: J'ai compris ça.
M. LABERGE: 120,000 enregistrés. Il y a une petite
différence. On ne représente pas que des chômeurs. Sur
120,000, il y en a 85,000 qui travaillent. Nos 70,000 ne travaillent pas tous
les jours, toutes les semaines.
M. DESJARDINS: Chez nous, un membre, c'est un travailleur qui paie
continuellement, qu'il travaille ou non. Si le gars ne travaille pas pendant
trois, quatre ou cinq mois, il n'est plus considéré comme membre,
suivant nos statuts. C'est pour cela qu'on dit que ceux qui paient toute
l'année, les cotisants en règle, sont compris dans ce chiffre. On
ne va pas chercher ceux qui ont signé avec nous, mais qui, par contre,
paient seulement lorsqu'ils travaillent.
M. LABERGE: Ai-je besoin de vous faire remarquer, M. le ministre, que
j'étais bien heureux de votre question.
M. COURNOYER: Ce doit être difficile de les réunir tous en
assemblée générale; ça doit prendre une grande
salle.
M. DESJARDINS: On fonctionne par métier. N'importe quand, si vous
voulez rencontrer des métiers particuliers, vous nous le laisserez
savoir et nous vous inviterons.
M. COURNOYER: M'inviter pour aller à votre assemblée
générale?
M. DESJARDINS: Oui, n'importe quand. Parfois, il y a justement des gars
qui se demandent où est Me Cournoyer pour pouvoir lui parler.
M. COURNOYER: Il est visible un peu partout, M. Cournoyer.
M. DESJARINS: A des places particulières. Si vous doutez de leur
nombre, venez les rencontrer.
M. COURNOYER: Je ne doute pas du nombre. Vous représentez 70,000
personnes et je dis que ce doit être dur de les réunir en
assemblée générale, c'est tout.
M. DESJARDINS: D'après nos structures, non. Nous le faisons par
région, par métier.
M. LABERGE: C'est évidemment un peu compliqué, mais c'est
plus facile que de réunir les électeurs.
M. COURNOYER: C'est plus facile de prendre le risque du vote aussi.
Quand on en a 70,000 comme ça, on peut dire: Je prends le risque du
vote.
M. LABERGE: Nous sommes "gamblers", nous.
M. DESJARDINS: On récolte, ça fait longtemps.
M. DEMERS: Cela fait une base. J'aurais une autre question. Sur le
maraudage permanent, il y a à l'article 2: "L'exercice de la
démocratie ne consiste pas, par la loi spéciale, à
distribuer des faveurs sans fondement." Pourriez-vous nous préciser ce
que cela veut dire exactement? Cela veut dire quoi, à la page 10? "Ce
petit jeu facile et intéressé pourrait provoquer...
M. LABERGE: Quelle page?
M. DEMERS: Page 10, le maraudage permanent, article 2, premier
paragraphe. "... l'anarchie, paralysant, de ce fait, le fonctionnement de la
démocratie elle-même? C'est lorsque vous demandez le rappel du
bill 58.
M. LABERGE: C'est la reconnaissance de la LSD.
UNE VOIX: La CSD.
M. LABERGE: Il y avait une procédure établie dans la loi
qui disait à quelle période une autre centrale syndicale pouvait
se faire reconnaître dans l'industrie de la construction. La
procédure est toujours dans la loi. Nous, nous disons: Pas de faveur
spéciale; il y a déjà des procédures
d'établies. On vous suggère de les changer, mais, si vous ne les
changez pas, les centrales syndicales qui veulent se faire reconnaître
devront au moins suivre les procédures déjà
établies par la loi. C'est ce dont on parle, pas de faveurs
spéciales.
M. LE PRESIDENT: Le député de l'Assomption, sur le
même sujet.
M. PERREAULT: Vous avez dit que vous désireriez qu'un seul
organisme représente tous les travailleurs tie la construction. Advenant
ce cas, quel serait le pourcentage que vous demanderiez, 51 p.c?
M. LABERGE: Le pourcentage?
M. PERREAULT: Oui, le pourcentage requis pour être le seul
organisme représentatif.
M. LABERGE: Evidemment, s'il n'y avait qu'un syndicat; il faudrait qu'il
représente au moins la majorité des travailleurs, bien sûr.
Encore là, on ne demande pas un régime de faveur, ni un
régime spécial. Maintenant, 50 p.c. c'est loin d'être trop
fort. C'est pour ça que nous pouvons prendre ce risque.
M. VEILLEUX: C'est pas fort.
M. LABERGE: On ne sait jamais. Vous savez que l'on ne connaît le
résultat d'un scrutin qu'une fois que les votes sont comptés.
M. DEMERS: Est-ce pour ça que vous ne voulez pas qu'il en entre
d'autres?
M. LABERGE: Non, nous ne voulons pas des cotisations...
M. JOBIN: Nous voulons avoir de l'ouvrage pour nos membres à la
place.
M. LABERGE: C'est ça.
M. JORON: C'est très facile de dire: laissez- en entrer; nous on
se bat pour ne pas ouvrir les portes. Par contre, si nous voulions, ça
nous ferait beaucoup plus de cotisations. Mais ce n'est pas des cotisations que
nous voulons.
M. LABERGE: Justement, et je suis bien heureux que vous ayez posé
la question. Si nous étions égoïstes, nous serions sans
doute en faveur d'augmenter le nombre de travailleurs enregistrés dans
l'industrie de la construction. Ce n'est pas ce que nous voulons. Ce que nous
voulons, c'est que les gars, des professionnels dans l'industrie de la
construction puissent gagner honorablement leur vie dans l'industrie de la
construction sans être obligés de s'expatrier, comme ils sont
obligés malheureusement de le faire trop souvent.
M. LE PRESIDENT: Le député de l'Assomption.
M. PERREAULT: Une deuxième question, seriez-vous prêt
à accepter un référendum pour déceler cette
tendance, comme le bill 64, pour prouver que vous avez la majorité?
M. LABERGE: Oui, nous sommes prêts à accepter un vote
référendum, d'accord.
M. LE PRESIDENT: Le député de Dorchester.
M. GUAY: M. le Président, je tiens à dire au tout
début que si tout le monde était d'accord, il est bien sûr
que la commission parlementaire ne siégerait pas aujourd'hui; c'est pour
ça qu'elle siège, parce que nous ne sommes pas tous d'accord.
Ai-je le droit de faire des commentaires, M. le Président, je
vous demande la permission avant?
M. LE PRESIDENT: Non.
M. GUAY: Uniquement poser des questions?
M. LE PRESIDENT: Oui.
M. GUAY: Je le retiens et je me ferai un plaisir de vous l'indiquer
quand d'autres se permettront de faire des commentaires.
M. LE PRESIDENT: Non, posez vos questions.
M. GUAY: M. le Président, vous dites, dans votre mémoire,
que vous acceptez jusqu'à un certain point l'intervention de l'Etat.
J'aimerais savoir, M. Laberge, clairement, où doit commencer et
où doit finir, dans les relations patronales-ouvrières,
l'intervention de l'Etat?
M. LABERGE: C'est-à-dire que quand nous acceptons l'intervention
de l'Etat, là aussi je pense que notre mémoire est assez clair,
nous
disons que l'Etat doit intervenir le moins possible.
Il est évident que l'Etat doit toujours avoir un droit de regard,
de surveillance, nous sommes entièrement d'accord avec ça. Mais
les parties devraient régler elles-mêmes leurs problèmes.
Et une fois le problème crucial réglé, le droit de veto
à la table de négociation, qui rend toute négociation
futile, la représentation syndicale, une fois ces problèmes
réglés, nous sommes convaincus que les parties contractantes dans
l'industrie de la construction pourront régler les problèmes.
Maintenant, nous ne disons pas à l'Etat: Ne vous en occupez pas du tout.
L'Etat, encore une fois, doit avoir un droit de regard, un droit de
surveillance parce qu'il doit surveiller l'intérêt commun.
M. GUAY: Merci.
M. COURNOYER: Dans le même ordre d'idée, M. le
Président, l'intervention de l'Etat n'est pas souhaitée, et je
pense bien que c'est normal de l'entendre dire de la part de ceux qui ont
présenté le mémoire, sauf dans certaines limites. On se
pose la question quand même. Admettons qu'un autre conflit se
dégage, et que vous ne pouvez pas vous entendre malgré l'absence
du droit de veto? Si tout le monde avait la garantie que sans droit de veto
ça réglerait tout! Cela dépend du droit de veto de qui? Il
y a toujours un veto dans cette histoire, il y en a un qui ne veut pas signer
et il y en a un qui veut qu'il signe. C'est comme ça le veto, en plus du
droit de veto à l'intérieur des parties, qui existe dans la loi
actuelle et qui est construit...
M. LABERGE: ... la dernière fois, vous allez comprendre, quand
les constructeurs de routes, par exemple, s'objectaient et usaient de leur
droit de veto, pour empêcher les conditions de travail des constructeurs
d'ascenseurs, ça fait un peu drôle. Les ascenseurs, il n'y en n'a
pas beaucoup sur les routes.
M. COURNOYER: Oui mais ça fait aussi parfois un peu drôle,
semble-t-il, que les constructeurs d'ascenseurs décident comment on
construit des routes, c'est pareil dans les deux cas.
M. LABERGE: Oui, cela n'aurait pas été plus logique.
M. COURNOYER: C'est universel. Mais la question que je veux poser, c'est
quand vous dites non à l'intervention de l'Etat, dans la loi actuelle
des relations de travail, il y a des mécanismes, lorsque vous ne vous
entendez pas, il y a l'intenvention du ministère du Travail, j'imagine,
comme c'est le cas ailleurs.
M. LABERGE: Et c'est pour ça, M. le ministre, que nous n'avons
pas dit aucune intervention de l'Etat. Mais nous disons le moins possible.
D'ailleurs, la dernière fois, si vous vous souvenez, lorsque vous avez
imposé un décret, on a dit que nous n'étions pas d'accord
avec l'imposition d'un décret mais que nous reconnaissions que, dans les
circonstances, il n'y a quasiment pas d'autre solution. On a reconnu cela.
M. COURNOYER: Oui, tout le monde l'a reconnu à plus ou moins
brève échéance, mais il reste que, de toute façon,
ce que nous avons fait a été d'intervenir dans des contenus.
Quand je dis que tout le monde l'a reconnu, je veux dire que les gens ont
accepté l'état de fait du décret sans vouloir accepter
qu'il y ait décret et sans aimer cela, mais on l'a pris.
M. LABERGE: Si on a besoin de vous autres, on viendra vous le demander.
Mais ce qu'on vous suggère, c'est d'attendre qu'on vous le demande.
M. COURNOYER: Oui, mais attendez un peu. Un instant! Un instant! Je
comprends, mais j'ai le droit de penser que vous demandez à l'Etat
d'intervenir lorsque vous n'êtes plus capables de régler vos
problèmes tout seuls.
M. LABERGE: C'est un peu normal, non?
M. COURNOYER: Mais ce que vous recherchez, c'est de les régler
tout seuls, sans intervention de l'Etat?
M. LABERGE: C'est ça.
M. COURNOYER: Mais êtes-vous capables de régler vos
problèmes tout seuls?
M. LABERGE: On va essayer. Ce sera la première fois depuis un
moment que nous serons capables de faire ça.
M. COURNOYER: Si vous aviez l'assurance et la garantie que l'Etat
n'interviendra pas, est-ce que cela vous aiderait à régler vos
problèmes seuls?
M. DESJARDINS: Avec les lois actuelles qui sont
promulguées...
M. LABERGE: Un gars a-t-il le droit de prendre son souffle?
M. COURNOYER: Non, mais avec les lois telles qu'elles sont, je n'ai
aucun pouvoir...
M. LABERGE: Quelle était la question? UNE VOIX: C'était
une bonne question.
M. COURNOYER: Je ne voudrais toucher personne. Je dis: Cette loi, en
fait, si je pouvais m'assurer qu'au prochain voyage il y aura des
amendements, possiblement... Nous sommes ici pour discuter des
révisions possibles aux lois actuelles qui vous régissent, mais
il y a une chose qu'il y a dedans et qui n'y est pas en même temps, c'est
qu'il y a toujours cette possibilité de décret de l'Etat,
à la fin. Ce que personne n'aime, de votre côté, de
façon habituelle, mais ne pensez pas que nous aimons cela de notre
côté.
M. LABERGE: Attendez un peu. C'est un peu différent. Il y a la
possibilité dans la loi que l'Etat finisse par donner le décret
à la demande des parties. Ce n'est pas la même chose.
M. COURNOYER: Oui, mais je ne parle pas de ce décret.
M. LABERGE: Ah bon! D'accord.
M. COURNOYER: Je parle de ne pas régler vos différends par
décret. C'est de cela que je parle. Je ne parle pas de ne pas passer de
décret.
M. LABERGE: Si vous adoptez les amendements qu'on vous suggère et
si vous réglez le problème de la représentation syndicale,
nous sommes convaincus que nous n'aurons pas besoin de votre intervention. On
va régler nos problèmes tout seuls.
M. COURNOYER: A bon entendeur, salut! A ceux qui pensent que j'ai
à coeur la paix sociale au Québec, devant une telle
déclaration de bonne foi et le fait qu'il n'y aura pas de
problème dans la construction au mois de mars ! Je suis placé
dans la drôle de situation de dire qu'en refusant le vote, je m'engage
à ce qu'il y ait une grève au mois de mars. Parce que cela ne se
réglera pas au mois de mars.
M. LABERGE: Non, pas du tout. Non, nous pensons que cela peut se
régler avant.
M. COURNOYER: Vous le pensez. Il y a une autre chose qui me trouble un
peu. J'aimerais savoir ce qu'il y a de si mal dans le bill no 15. Cela fait
deux ou trois fois que je me fais accuser par les différentes parties
syndicales et on me dit qu'il faut que je retire le bill no 15. Qu'est-ce qu'il
y a dans le bill 15? Est-ce la manière dont il a été
adopté?
M. LABERGE: Au sujet du bill 15, il y a eu une situation malheureuse
à un endroit donné au Québec, vous avez adopté une
loi générale censément pour régler ce
problème et vous avez enfargé tout le monde avec le bill no
15.
M. COURNOYER: Dans quel sens?
M. LABERGE: Je vais essayer de...
M. COURNOYER: S'il vous plaît.
M. LABERGE: Le bill 15 empêche directe- ment les gars de la
construction de régler leurs problèmes. Vous connaissez assez
bien l'industrie de la construction pour savoir que, dans l'industrie de la
construction, si quelque chose ne marche pas à un chantier, vous ne
pouvez pas faire de griefs comme cela se fait dans l'industrie ordinaire. Parce
que quand cela fait trois mois que le grief court, le chantier est
terminé ou l'entrepreneur a déjà fait faillite. Cela ne
marche pas comme ça.
Dans plusieurs cas, surtout quand il s'agissait de la
sécurité des travailleurs, le délégué du
chantier faisait des représentations et si la situation n'était
pas corrigée, dans plusieurs cas, il y avait un arrêt de travail,
parce que la vie des gars était en danger. Le bill no 15 nous
empêche de faire ce genre de chose. Encore une fois, ce que nous avons
trouvé de pire dans le bill no 15, c'est que voulant régler un
problème particulier à Sept-Iles, vous avez adopté le bill
no 15 pour tout le Québec, sans aucune consultation, bien sûr.
Pourtant, vous nous aviez donné l'assurance, à plusieurs
reprises, que lorsqu'il y aurait des lois affectant les travailleurs, ce serait
avec plaisir que vous entendriez leurs revendications.
M. COURNOYER: Oui.
M. LABERGE: Mais le bill no 15 a été voté une fois
le problème réglé.
M. COURNOYER: Ah oui?
M. LABERGE: Le chantier était ouvert. Vous avez dû le faire
fermer pour voter votre loi. Vous avez envoyé un
télégramme à la compagnie lui ordonnant de fermer le
chantier. Il était ouvert.
M. COURNOYER: Ah! on est bien! UNE VOIX: Cela, c'est fort.
M. COURNOYER: Est-ce que le problème était
réglé?
M. DESJARDINS: Oui, et très bien à part ça. Bien
plus, l'entrepreneur lui-même, j'étais là, le matin
concerné, pas le matin de la bagarre, parce que j'étais dans
l'avion, j'étais même à Montréal.
Dans vos avertissements, vous disiez: Dédé, reste
tranquille, mais Dédé n'était même pas là.
Avec l'habitude, on entend son nom de même et on dit: C'est ça,
les gens mangent avant de se coucher et ça les porte à
rêver.
Tout en acceptant ça, le matin même, je suis arrivé
environ deux heures après, par avion, et on a rouvert la "job", le
lendemain matin. Cela allait très bien, il n'y avait aucun
problème. Même, il y avait des ouvriers de la CSN et de la FTQ qui
étaient rentrés travailler côte à côte le
matin et il n'y avait plus de bataille. A midi, l'entrepreneur m'appelle et
dit: André, je suis obligé de fermer la "job". Pourquoi?
Qu'est-ce
qu'il y a? Il dit: Je sais que c'est une folie, mais je suis
obligé; j'ai les ordres de plus haut. C'est là qu'on a appris
qu'il y avait eu, le matin, des sorties à l'emporte-pièce,
disant: C'est effrayant; il faut régler l'anarchie de Sept-Iles. Or, il
n'y en avait plus.
M. COURNOYER: Qu'est-ce qui vous a fait régler ça si vite
que ça?
M. LABERGE: Les pompiers arrivaient une fois le feu éteint.
M. COURNOYER: Une chance qu'on n'est pas à un procès; tout
le monde aurait le droit de parler pour savoir s'il était vraiment
réglé, le problème.
M. LABERGE: Nous aimerions ça, malgré que nous ne soyons
pas juristes.
M. COURNOYER: Sans être juriste, là, je suis en train de
m'obstiner avec vous.
M. LABERGE: Est-ce qu'il y a d'autres problèmes à
Sept-Iles présentement? Ce n'est pas le bill 15 qui a
réglé les problèmes.
M. COURNOYER: Il y a d'autres problèmes: les bouts de tuyaux qui
sont coupés, les affaires qui disparaissent.
M. DESJARDINS: Les gars le regrettent. M. COURNOYER: Ils regrettent
quoi?
M. DESJARDINS: Cela ne me donnerait rien de plaider non coupable; vous
ne me croiriez pas.
M. LE PRESIDENT: C'est la vertu qui prédomine. Autres
questions?
M. PERREAULT: Ce bill 15, avec l'article 33 à la fin, ne vous
aide pas en vertu de la qualité de vos services, à recruter la
majorité des membres parmi les travailleurs?
M. DESJARDINS: J'aimerais bien que vous me donniez
l'interprétation de l'article 33 a). On lui donne cette
interprétation et, par contre, de côté, on dit: Ce n'est
pas ça que ça veut dire. Dites-nous que ça veut dire.
C'est l'interprétation que je lui donne, avec la décision rendue
à Hull. Par contre, les parties patronales, par le truchement de leur
avocat, disent que jamais cela ne veut dire ça. On rencontre le
gouvernement et celui-ci nous dit: Ah! Peut-être que ça veut dire
ceci, peut-être que ça veut dire ça. Des patins très
affilés!
M. PERREAULT: Vos avocats, à vous, qu'est-ce qu'ils disent?
M. LABERGE: On pense que c'est couvert, mais on nous dit que non.
M. DESJARDINS: On est des "chums", pourvu qu'on paie.
M. LE PRESIDENT: Autres questions? M. DESDARDINS: M. le ministre... M.
COURNOYER: Oui, mon cher.
M. DESJARDINS: ... pourriez-vous répondre à la question du
député sur l'interprétation de l'article 33 a), s'il vous
plaît?
M. COURNOYER: Je peux toujours vous dire comment, moi, je
l'interprète. Les patins! Je peux vous dire honnêtement comment,
moi, je l'interprète. Maintenant, je ne suis pas juge et vous le savez.
Ce n'est pas sub judice, il n'y a pas de jugement en cours actuellement? Est-ce
qu'il y a des procédures en cours? Je ne voudrais pas tout mêler,
là.
M. DESJARDINS: Vous allez très bien.
M. COURNOYER: Le voilà, mon patin, c'est sub judice. Je ne peux
pas parler.
M. DESJARDINS: Tiens, tiens! Est-ce que ça répond à
votre question, M. le député? Après ça, si on fait
quelque chose parce qu'on pense que la loi veut dire ça, il va dire:
Reste tranquille Dédé, fâche-toi pas, laisse-nous faire
avec nos lois. Ils ne veulent rien dire, seulement quand ça leur
tente.
M. COURNOYER: Ah non!
M. PERREAULT: En admettant que ça rencontre votre point de vue,
ce n'est pas bon pour vous autres, ce bill 15 là?
M. LABERGE: Pour répondre très directement à votre
question, en supposant que ce soit ouvert comme nous pensons que ça
l'est, ça rend la période de maraudage plus longue. C'est le seul
effet que cela a.
M. COURNOYER: Cela vous aide.
M. LABERGE: Nous ne sommes pas contre. S'ils nous disent que ça
compte, ceux qu'on signe présentement, on est correct, on est gras
dur.
M. DESJARDINS: On va vous dire que ce n'est pas la solution, le
maraudage permanent, par exemple. Ce sont des batailles continuelles sur les
chantiers et on ne veut même pas ça. Cela peut nous aider à
aggraver la situation; ce n'est pas ce que nous voulons.
M. COURNOYER: D'accord.
M. DESJARDINS: Même s'il y en a d'autres qui pensent le contraire.
On a dit: Il y a quarante jours. Pourquoi demander quarante
jours un an avant les négociations? Que pensez-vous que vous
faites? Les quarante jours ça finit dans le milieu de décembre.
Le 1er janvier, vous dites aux deux gars: Asseyez-vous ensemble et soyez
raisonnables, ne faites pas les fous. C'est effrayant, les gars, ne pas
s'entendre plus que ça! Ils nous entraînent pour quarante jours.
Belle loi!
M. LE PRESIDENT: Le député d'Iberville.
M. CROISETIERE : A la page treize de votre mémoire, vous demandez
le rappel du bill 81, le fonds de pension des travailleurs de la construction.
Au septième paragraphe, vous mentionnez: Pourquoi ne servirait-il pas
à la construction de logements à prix modiques à
l'intention des gars de la construction et pourquoi cet argent ne
permettrait-il pas l'accessibilité à la propriété
aux gars de la construction, en fournissant des prêts sans
intérêt? Vous demandez pourquoi ces sommes ne serviraient pas.
Pourriez-vous nous dire si vous aviez des projets en veilleuse ou des
programmes d'établis auxquels ce fonds de pension aurait pu servir?
M. DESJARDINS: Nous avions des projets à prix modiques, à
Boucherville. La seule place qu'on peut obtenir de l'argent, c'est aux
prêts hypothécaires. Nous avions notre argent, mais nous ne
l'avons plus. Nos projets sont donc à l'eau. Il faut aller ailleurs.
Ailleurs, ils ne veulent pas.
M. CROISETIERE: Je voulais savoir si vous aviez des projets.
M. DESJARDINS: Oui. Nous avons acheté des terrains, nous avons
tout acheté. Les plans ont été déposés,
ainsi de suite. Nous pouvons vous montrer tous nos projets.
M. LABERGE : Pour votre information, au niveau de la FTQ, il y a un
comité d'habitation, qui avait préparé de très
beaux et de très bons projets, qui ont été refusés
par la Société centrale d'hypothèques. D'ailleurs, nous
allons sortir cela bientôt. Cela fait partie du scandale de la
Société centrale d'hypothèques, qui accepte des projets
épouvantables alors qu'on construit des taudis et qu'on les vend une
fortune. Nous autres, nous avions de bons projets, qui ont été
refusés. D'ailleurs, nous allons sortir cela bientôt.
Dans le bill 81, vous le savez, il y a un comité consultatif des
gars de la construction, qui peut suggérer. Ce que nous voulons, c'est
l'argent des gars de la construction. Pourquoi n'auraient-ils pas le droit de
décider quoi faire avec leur argent? D'ailleurs, je peux vous dire que
la Régie des rentes et la Caisse de dépôt n'ont pas fait
merveille avec cela. Je ne sais pas si le ministre du Travail est au courant
mais, selon le dernier rapport que j'ai eu, il y aurait plusieurs millions
$4 millions, $5 millions ou $6 millions, je ne le sais pas qui
auraient été perçus des travailleurs de la construction et
ils ne savent pas à qui cet argent doit être
crédité. C'est la situation actuelle.
M. DESJARDINS: Dans le bill 81, il était dit qu'une fois par
année le travailleur serait informé de son fonds de pension, des
contributions et de combien elle étaient. Nous n'avons encore rien
reçu d'eux. Rien, rien reçu.
M. CROISETIERE: Pourriez-vous informer la commission du montant qui
était en fonds, lors du transfert?
M. DESJARDINS: Présentement, on n'est pas loin des $100
millions.
M. LABERGE: Présentement, mais, dans le temps, c'étaient,
grosso modo, $50 millions. Cela était seulement pour la région de
Montréal.
M. DESJARDINS: Présentement, dans toute la province, c'est $100
millions. Et nous avons des prêts. Présentement, ils nous
rapportent 6.4 p.c. ou 6.9 p.c. Par contre, il y a 0.5 p.c. qui s'en va pour
l'administration. Nous autres, présentement, nous sommes capables
d'avoir 7 3/4 p.c. et 8 1/4 p.c. en n'importe quel temps.
M. CROISETIERE: Est-ce qu'il y a des personnes que vous aviez
pour...
M. DESJARDINS: Nous avions le Trust général du Canada.
M. CROISETIERE: C'est très bien.
M. LE PRESIDENT: Je m'excuse auprès du député de
l'Assomption, qui n'avait pas terminé. J'avais passé la parole au
député d'Iberville.
M. PERREAULT: J'avais une autre question à poser. On a vu, depuis
le début des auditions, que certaines entreprises ont de la
difficulté à recruter de la main-d'oeuvre. On a vu que certains
vont au Centre de main-d'oeuvre. Cela semble être la minorité. La
majorité va au bureau de placement des centrales syndicales. Quelle est
votre position? Voyez-vous, éventuellement, la disparition de vos
bureaux de placement pour les confier soit au Centre de main-d'oeuvre, soit,
comme je l'ai mentionné ce matin, à la Commission de l'industrie
de la construction?
M. DESJARDINS: Présentement, qu'est-ce qui reste aux unions pour
s'occuper de leurs ouvriers? Le plus beau service que nous puissions donner,
à l'employeur comme à l'ouvrier, c'est de trouver de l'emploi.
Dans chaque métier, il y a environ cinq ou six spécialisations.
Demain matin, si vous mettiez n'importe où des centres de main-d'oeuvre
pour faire du placement, jamais ils ne seront capables d'avoir autant
d'efficacité que nous autres. Je vais
prendre mon métier, par exemple. Il y a à peu près
cinq ou six spécialisations. Pour un gars de 55 à 60 ans, je
connais l'entrepreneur qui appelle, je sais ses besoins à lui. Je ne
peux l'envoyer chez cet entrepreneur parce que deux jours après il sera
congédié et cela lui coûtera un montant d'argent
respectable. Quant à nous, nous gardons nos gars dans leur juridiction.
Cela aide très bien soit le travailleur, soit l'employeur. L'employeur
aime beaucoup mieux nos services. C'est prouvé jusqu'ici.
M. PERREAULT: Je suis bien content de vous l'entendre dire.
Etant donné que je me suis occupé de la baie James un
certain temps, j'ai eu beaucoup de personnes de la région du nord-ouest
qui sont venues me voir pour travailler. Le Centre de la main-d'oeuvre pour
l'Abitibi n'avait pas d'emplois pour elles, alors je les ai
référées à la FTQ et elles ont eu des emplois.
M. DESJARDINS: Je vais vous dire autre chose; je demande à tous
les membres du Parlement, n'importe quand qui voudront avoir la preuve du
fonctionnement de nos bureaux de placement j'espère un jour
qu'ils vont nous dire oui de venir et de s'asseoir pour voir comment
fonctionne notre bureau de placement et nous allons être bien contents de
leur prouver son efficacité. Depuis qu'il y a la chicane entre les
bureaux de placement syndicaux et les centres de main-d'oeuvre, personne n'a
répondu à notre appel. Et nous avons fait cet appel à tous
les niveaux. Venez voir comment ça fonctionne, et nous n'en avons pas
honte. Vous n'avez pas besoin de payer $10 ou $15 pour avoir un emploi.
M. PERREAULT: Pour la construction, dans votre optique, le centre le
main-d'oeuvre pourrait ne pas exister et ce serait aussi bon?
UNE VOIX: Cela équivaut à ça. UNE VOIX: C'est
très clair.
M. BURNS: Ils l'ont dit eux-mêmes, ce matin. Il me semble que j'ai
entendu M. Gagnon dire ce matin que ce n'était pratiquement pas
possible, les centres.
M. MARCHAND: Nous aimons mieux l'opinion de M. Laberge.
M. BURNS: Laissez faire, nous parlons entre gens intelligents, le
député de l'Assomption et moi.
M. MARCHAND: C'est ce que nous faisons actuellement.
M. DESJARDINS: Il est bien entendu que certains employeurs aiment mieux
le centre de main-d'oeuvre. S'il y a un travailleur qui s'est plaint qu'on
avait chargé le temps et demi, ils se disent: Nous sommes mieux d'aller
au centre de main-d'oeuvre parce qu'aux bureaux syndicaux, on va nous envoyer
des gars qui se plaignent des conditions de travail et nous allons être
obligés de les payer suivant le décret. Il y en a, de mauvais
employeurs. Les bons employeurs trouvent très bons les bureaux syndicaux
de placement.
M. LABERGE: Et on peut affirmer que, généralement, les
associations patronales dans l'industrie de la construction sont très
heureuses du service rendu par les bureaux de placement. Certaines peuvent se
plaindre de certaines choses, c'est bien sûr, il n'y a rien de parfait en
ce bas monde; mais de façon générale, elles sont
très satisfaites.
M. MARCHAND: Des vierges offensées, nous en avons assez.
M. COURNOYER: Avant d'aller plus loin sur les bureaux de placement, ce
matin le député de Maisonneuve a posé une question. Il y a
51,000 travailleurs qui ont postulé un emploi aux bureaux de placement
du Québec depuis le mois de janvier. Là-dessus, il y en a 15,000
qui ont été placés par les centres de main-d'oeuvre du
Québec. C'est une pénétration meilleure que l'année
dernière, parce qu'il y a eu les imbroglios, la qualification. Bien
sûr, les gens étant occupés dans les centres de
main-d'oeuvre et vous le savez en particulier, vous...
M. BURNS: Des gens de tous les secteurs? Seulement de la
construction.
M. COURNOYER: Seulement de la construction.
M. BURNS: Il y en a eu 15,000 qui ont été placés
sur 51,000.
M. COURNOYER: C'est le rapport que j'ai ici.
M. BURNS: Est-ce que c'étaient des hommes de métier ou des
journaliers?
M. COURNOYER: Je n'en ai aucune idée sur les rapports que j'ai
ici.
M. LABERGE: Cela vous donne une réponse. Maintenant, nos
informations sont que nous, nous en plaçons à peu près
ça par mois, 15,000. Ce n'est pas de la vantardise. Apparemment, c'est
un fait.
M. PERREAULT: Est-ce que vous ne croyez pas qu'il serait utile de donner
une priorité régionale aux détenteurs de permis de travail
avant de penser à d'autres régions?
M. LABERGE: Nous sommes entièrement en faveur de donner la
préférence d'emploi régionale. Comme vous le savez,
André Desjardins vient de mentionner le métier de plombier. Il y
a cinq spécialisations là-dedans et ça se peut que dans
une région, il y ait un plombier en chômage mais qu'il ne
satisfasse pas aux exigences du poste qui est vacant et il faut prendre un gars
d'en dehors. Mais nous sommes et ça irrévocablement
en faveur d'une préférence d'emploi aux gars de la
région.
M. COURNOYER: Disons que...
M. DESJARDINS: Advenant le cas présentement qu'un métier
spécialisé a besoin d'environ 20 personnes pour Sept-Iles
il y a bien des demandes pour Sept-Iles et est divisé à
travers la province de Québec, deux dans certaines régions
où nous avons des rapports par nos bureaux de placement qu'il y a des
gars à ne rien faire, dépendant de la demande au prorata des
travailleurs régionaux qui sont envoyés dans la région
donnée, nous faisons ça nous-mêmes.
M. COURNOYER: D'autre part, sur la priorité régionale qui
existait dans le no 4119 si je me souviens bien elle avait
été remplacée par l'obligation de payer des frais de
transport et des frais de pension.
M. DESJARDINS: C'est ça.
M. COURNOYER: Ce qui a le même effet, à toutes fins utiles.
Un employeur aime mieux employer les gens de la région parce qu'il ne
paie pas les frais de déplacement.
M. PERREAULT: La critique s'adresse à l'ouvrier artisan qui
travaille seul. J'ai connu des cas, l'an dernier, où je pense qu'on est
rendu à des cas de folie pure. J'ai vécu un cas, chez moi. C'est
une vieille femme qui a fait réparer ce qu'on appelle un comptoir dans
sa cuisine. Elle a employé un menuisier et on l'a poursuivie par rapport
à ça. Alors, quand on va dans des cas de rénovation d'un
montant minime, je crois qu'on va trop loin.
M. LABERGE: Là, évidemment, ça dépend aussi
des règlements, des lois, du décret. Si c'est un cas
particulier... Qui l'a poursuivie? Est-ce que c'est la Commission de la
construction?
M. PERREAULT: La Commission de la construction.
M. LABERGE: On serait bien prêt à regarder les cas
particuliers.
M. PERREAULT: Je crois que, dans l'habitation, les cas minimes
d'entretien et de rénovation mineure ne devraient pas entrer dans le
décret de la construction.
M. LABERGE: Bien, justement, c'est de là que vient la
difficulté. Où est-ce que ça arrête le "mineur"?
M. PERREAULT: Mettez un montant.
M. DESJARDINS: Pas longtemps après, mettons que c'est $500 le
montant, puis c'est un travail de $5,000, on la donne en dix sections.
Jusqu'ici ç'a été prouvé que c'est l'abus
complet.
M. LABERGE: Si vous permettez, on a eu l'expérience de ça
quand il y avait 14 ou 15 décrets. Il y avait des contrats en bas de
$50,000, je pense, qui n'étaient pas couverts. Ce qui arrivait, c'est
que l'entrepreneur général les donnait à dix entrepreneurs
et ça faisait des contrats en bas de $50,000.
M. PERREAULT: Oui, mais il faut distinguer entre un petit cas de
rénovation dans une habitation qui coûte $10,000 une fois
construite. Je ne mentionne pas la construction de la maison; je parle de
rénovation, finir une chambre, finir un comptoir, changer une porte de
place; ce sont des cas de rénovation, j'entends. Et en agissant comme
ça, ce qui arrive, c'est qu'au lieu d'avoir plus d'emplois, on en a
moins parce que les gens en se faisant écoeurer comme ça, ont
dit: On ne fera pas de rénovation.
M. LABERGE: Oui. Quand il y a de la réglementation, il y a
toujours une possibilité d'abus, c'est sûr. Par contre, quand vous
allez voir un médecin, même s'il ne vous soigne pas, il vous
charge le même prix. Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise? Si vous
avez besoin d'un homme de métier pour un petit travail, il mérite
le même salaire pour le temps qu'il passe sur le travail. Si c'est un
petit travail, ça devrait lui prendre moins de temps. Il devrait
être régi quand même.
M. PERREAULT: Je ne nie pas qu'il devrait être régi de
quelque manière que ce soit mais en le régissant comme sur les
gros travaux et en mettant les mêmes restrictions, je crois qu'on va
faire fausse route.
M. LABERGE: Il y a plusieurs milliers de travailleurs qui sont
régis par le décret de la construction mais qui ne font jamais de
construction. Ils ne font que de l'entretien et de la rénovation. Il
faut qu'ils soient régis ceux-là aussi. Il faut les
protéger.
M. LE PRESIDENT: Le député de Maisonneuve.
M. BURNS: J'aimerais revenir avec le ministre à l'article 33 a)
qui a été adopté par le bill 58 et qui semble fatiguer un
peu la FTQ et également la CSN puis les employeurs et en tout cas qui me
fatigue moi aussi.
Quand le ministre a proposé cet amende-
ment au bill 58 reconnaissant ou formant en constitution, en vertu de la
Loi des syndicats professionnels, la Centrale des syndicats
démocratiques, je me souviens que le ministre nous avait promis,
à ce moment, qu'il y aurait une revision de l'ensemble de la
législation et que cette espèce de disposition de l'article 33 a)
était uniquement temporaire, c'est-à-dire jusqu'à
l'automne.
Ce que j'aimerais que le ministre nous dise, en tout cas pour me
rassurer moi, sinon les gens de la FTQ, si ça semble être un
problème pour eux, c'est quand a-t-il l'intention d'introduire une
législation qui va régler ce problème?
Est-ce que c'est à l'automne ou...
M. COURNOYER: Il faudra probablement que ce soit à l'automne,
dépendant de l'urgence de certaines autres matières qui sont dans
les représentations qu'on fait devant nous aujourd'hui mais qui ne sont
pas totales. Si j'ai bien compris les mémoires qui ont été
présentés devant la...
M. BURNS: Plus particulièrement concernant l'article 33 a)...
M. COURNOYER: Disons l'article 33 a) et les autres articles.
Normalement, je me dirige vers une législation cet automne, mais les
parties contractantes, les parties impliquées savent qu'actuellement il
y a un "task force" de chez nous qui les rencontre et qui essaie de trouver un
consensus quelconque dans les amendements à la loi 290 et aux
amendements qui y ont été apportés. Actuellement, il y a
le bill 53 enfin l'article 33 a).
Il y a aussi celle dont on parle dans le bill 68, celle dont on parle
ici, qui modifiait et créait le poste de commissaire à la
construction pour déterminer si c'était de la construction ou si
ça n'en était pas. Des représentations sont faites ici par
la FTQ, pour le moment, mais ailleurs il s'en fait également par les
différentes parties sur les modifications qui doivent être
apportées à ce bill 290 et ses amendements.
Je ne peux pas promettre plus que ce que je peux dire mais, normalement,
il devrait y avoir des amendements au bill 290 pour la prochaine session,
c'est-à-dire celle qui commencera au mois d'octobre ou au mois de
novembre. Il y a certaines choses qui doivent être faites avant que ne se
terminent les négociations qui seront en cours bientôt, à
l'occasion de cette présentation. C'est bien écrit dans l'article
33 a), qui est à côté de la période du
maraudage...
M. BURNS: Le 33.
M. COURNOYER: ... mis à côté de la suggestion de la
FTQ, qu'on devrait faire cela dix mois avant, c'est-à-dire 120 jours de
négociation, 40 jours pour faire une période de maraudage. Il y a
aussi d'autres représentations de la FTQ qui demandent qu'un vote soit
tenu qui élimine, à toutes fins utiles, la
nécessité de l'article 33 a) tel qu'il est écrit. Quand il
n'y aura plus qu'un syndicat là-dedans, si jamais nous acceptions le
vote, qu'est-ce que vous voulez, la liberté n'existe plus, au moins
jusqu'au quarantième jour, et ce n'est que dans cette période
qu'on peut changer de syndicat.
M. BURNS: Est-ce que le ministre est en mesure de répéter,
sans se mêler du sub judice, la présentation qu'il nous avait
faite de l'article 33 a) à l'effet que il me corrigera si j'ai
tort de l'avoir interprété comme cela ...
M. COURNOYER: Non, je n'ai aucunement...
M. BURNS: Laissez-moi terminer, vous me corrigerez si j'ai tort.
M. COURNOYER: Je ne vous corrigerai pas et je ne répéterai
rien, c'est transcrit dans les débats. Cela n'a pas été
prononcé dans la rue.
M. BURNS: On parle du problème de la construction, et les gens de
la FTQ semblent se poser des questions quant à l'article 33 a) aussi.
J'aimerais que vous nous disiez quand vous avez présenté
l'article 33 a) qui, soit dit en passant, n'était pas plus
légal que l'autre amendement que vous avez proposé, mais en tout
cas, avec la bousculade de la fin de la session, ça a passé dans
le paquet; c'est une opinion personnelle comment il se fait qu'on nous
l'ait présenté à ce moment-là c'est
là-dessus que je vous demande de me corriger si j'ai tort comme
étant une précision de l'article 33, c'est-à-dire devant
s'opérer dans le cadre de la période de chasse, de la
période de changement possible qui est prévu à l'article
33. Est-ce toujours votre opinion?
M. COURNOYER: Je maintiens l'opinion que j'ai exprimée en Chambre
au sujet de l'article 33 a).
M. BURNS: A l'effet que 33 a) était...
M. COURNOYER: Je maintiens l'opinion que je vous ai donnée en
Chambre parce que je ne l'ai pas devant moi.
M. BURNS: Est-ce que je me trompe en disant que votre opinion
était que c'était une précision de l'article 33,
étant donné qu'on lui avait justement donné le
numéro 33 a)? Je ne me trompe pas quand je vous dis cela?
M. COURNOYER: Vous ne vous trompez pas.
M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Jean.
M. VEILLEUX: Disons que la dernière fois
que j'ai posé une question à cette commission ç'a
engendré un débat assez houleux. J'espère que ça ne
se reproduira pas.
M. LE PRESIDENT: On va surveiller.
M. VEILLEUX: Pourriez-vous nous donner des exemples, relativement au
bill 68 les travailleurs occasionnels de secteurs ou de
catégories d'hommes que cette loi frappe?
M. DESJARDINS: Prenons, par exemple, une certaine compagnie
d'électricité de Trois-Rivières. Etant donné
qu'elle a une compagnie qui répare des moteurs, elle va, à
contrat, sur des chantiers de construction faire de l'électricité
et elle n'est pas couverte parce que son entreprise principale n'est pas de la
construction. Elle fait cela à $2 moins cher que le décret et
rien ne s'applique.
M. VEILLEUX: Vous mentionnez...
M. DESJARDINS: Je peux vous donner le nom de la compagnie tout à
l'heure, en particulier.
M. VEILLEUX: Non, non!
M. LABERGE: Vous avez d'autres exemples. Mais cela, c'est
réellement une plaie pour l'industrie de la construction. Les
mécaniciens d'équipement lourd, par exemple. Vous avez cela
malheureusement à bien des endroits, alors que la compagnie qui loue ou
qui vend l'équipement envoie de ses hommes sur le chantier de
construction. Nous trouvons que ce n'est pas correct. Cela ne devrait pas
être permis.
M. DESJARDINS: Il faut entretenir cette machinerie-là pour des
contrats qui ne durent pas qu'une journée. Ces travailleurs de la
construction ne sont pas à pied d'oeuvre une journée seulement,
mais pendant quinze mois, 18 mois. Or, ils ne sont pas couverts par le
décret.
M. LAVOIE (Léopold): Pour l'information du député
également, il y a une codification assez considérable des
décisions du commissaire. Alors, fort probablement qu'en
référant au ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre
vous pourriez obtenir toutes ces informations; il y a une infinité de
cas.
M. VEILLEUX: Non, c'était un exemple que je voulais avoir. Vous
mentionnez, à la page 16, au deuxième paragraphe: "Avec cette
évolution inévitable du préfabriqué, où
serons-nous demain? " Je vous pose la question: Est-ce que, dans votre esprit,
ça veut dire que le bill 68 s'applique pour les usines de
préfabriqué?
M. DESJARDINS: Non, l'usine de préfabriqué peut faire ce
qu'elle veut, mais, lorsqu'elle vient installer à pied d'oeuvre ses
matériaux, elle le fait au prix de l'usine, sans aucun rapport avec les
conditions de travail établies au décret.
M. VEILLEUX: C'est parce que j'ai un exemple, dans mon comté. Je
ne nommerai pas l'industrie, mais vous serez capables de la situer. A
Saint-Luc, il y a une usine où l'on fabrique des escaliers en ciment
pour la porte d'entrée. C'est fabriqué en usine. Le
propriétaire me disait que, comme il ne peut pas engager
l'employé à l'usine, à temps plein exclusivement pour
faire des escaliers en ciment, il s'en servait pour faire le transport et
déposer le matériel sur les chantiers. Cela lui créait de
fichus problèmes. Il se demandait même, à un certain
moment, s'il n'y aurait tout simplement pas lieu pour lui de mettre la clef
dans la porte de son usine, compte tenu qu'il se devait soit de payer un autre
salaire au gars en question, lorsqu'il sortait pour aller poser le perron, ou
encore d'engager un gars de la construction à un salaire tellement
élevé pour lui que son usine n'avait plus sa raison d'être.
Ce sont d'autres problèmes et le gars, ce n'est pas un des 4,000 qui
font faillite et qui reviennent. Il est à l'usine et il fait ça
depuis de nombreuses années et ça lui crée un
problème.
M. LABERGE: L'industrie de la construction a changé ses
méthodes énormément, surtout depuis quelques
années. Cela a pour effet, bien sûr, de déplacer l'emploi.
Ce qui se faisait auparavant sur le chantier se fait en bonne partie en usine.
Je peux vous donner l'exemple des armoires de cuisine dont quelqu'un parlait
tantôt. Les armoires de cuisine arrivent toutes assemblées et on
les fixe au mur. Il y a un tas de choses semblables.
Evidemment, les gars de la construction, qui voient leur métier
grugé de jour en jour par cette méthode, essaient, au moins, de
se garder le travail qui doit être fait sur le chantier. Je pense que
c'est normal. Nous ne pouvons pas empêcher le progrès, bien
sûr, et nous ne désirons pas essayer de l'empêcher. Ce qui
se fait en usine, c'est fait par des travailleurs d'usine mais, au moins,
l'installation sur les chantiers de construction, doit relever des gars de la
construction. Les occasionnels, justement, enlèvent pas mal de travail
qui devrait appartenir aux gars de la construction.
M. VEILLEUX: Sans prendre parti pour l'employeur dans le cas que je vous
mentionnais tout à l'heure, je pense que vous admettrez avec moi que,
dans certains cas particuliers, ça peut créer des
préjudices à un type qui est en affaires depuis longtemps, ce que
vous mentionnez là.
D'une part, je vois le problème que ça vous cause, mais,
d'autre part, je pense que vous voyez aussi le problème que ça
peut causer ailleurs.
M. LABERGE: D'accord, comme ça peut
causer préjudice au gars qui gagne sa vie dans l'industrie de la
construction depuis 25 ans.
M. LAVOIE (Léopold): Ce sont des problèmes
inévitables de transition et d'adaptation, auxquels il faut faire face,
de part et d'autre.
M. VEILLEUX: Dans ce cas, je pense qu'il faut se poser la question:
Est-il mieux de faire fermer l'usine du gars ou d'essayer de
prévoir?
M. DESJARDINS: L'industrie de la construction n'est pas une industrie
manufacturière. Les produits, c'est bien entendu que nous ne les
fabriquons pas nous-mêmes. Si toutes les compagnies
manufacturières peuvent venir installer leurs produits sur l'emplacement
de la construction, à leurs conditions de travail, quand
travaillerons-nous? Tous nos gars ont appris des métiers, à
partir de l'apprentissage. Ils ont fait des sacrifices à bas salaires et
ils sont devenus compétents. Les gars ont des fonds de pension, de
l'assurance santé-salaire, tout s'applique. Aujourd'hui, ils voient un
autre qui va voir le commissaire de l'industrie de la construction et qui
obtient, comme travailleur occasionnel, un permis pour aller faire du travail.
Le même commissaire juge la compétence du gars. Comment
voulez-vous qu'il juge la compétence de 20 métiers, quand il n'a
jamais travaillé lui-même sur la construction?
J'espère que vous voyez un peu le jeu.
M. LABERGE : Si vous le permettez, c'est un problème universel.
Cela ne se limite pas seulement à l'industrie de la construction. Vous
avez le même problème dans les usines, alors que les conventions
collectives couvrent les travailleurs d'usines.
Le patron, pour essayer de "sauver" une piastre, essaie de donner cela
en sous-contrat pour échapper aux obligations des conventions
collectives.
M. VEILLEUX: Soit "sauver" une piastre ou sauver son industrie.
M. LABERGE : Bien oui, mais enfin vous pouvez prendre les termes que
vous voulez.
M. LAVOIE (Léopold): Si on exploite quelque part, il faut se
conformer aux documents d'intérêt commun qui existent.
M. VEILLEUX: Non, mais, dans le cas que je vous mentionnais tout
à l'heure, je pense que c'était une condition vitale pour le
propriétaire de l'usine en question.
M. LABERGE: Oui, mais ils arrivent toujours avec des conditions vitales
comme celles-là. Je ne doute pas que c'est peut-être un cas.
Enfin, il y a des cas typiques. Il y a des exceptions à toute
règle. Il y a certaines machines spécialisées, par
exemple, dont l'installation se fait par des ouvriers du fabricant avec les
gars de la contruction. Ce sont des choses qui arrivent.
M. DESJARDINS: Il est même déjà arrivé que le
commissaire est allé voir de nos agents d'affaires pour leur dire
d'arrêter de se plaindre, qu'ils seraient mieux vus du gouvernement. Je
répète très tranquillement. Le commissaire est allé
voit de nos agents d'affaires pour leur dire qu'ils seraient beaucoup mieux
vus, s'ils arrêtaient de se plaindre. Arrête donc, c'est une bonne
manufacture. J'ai offert, comme délégué, lors du bill no
68, d'amener l'individu en question et on m'a refusé tout cela.
M. LABERGE: Il faut se rappeler une chose. Vous savez...
M. COURNOYER: J'espère qu'on n'entrera pas dans un conflit de
personnalités.
M. DESJARDINS: Non, non, mais j'essaie de vous dire que le bill no 68
est une trappe pour les gars de la construction.
M. COURNOYER: Combien de permis d'occasionnels ont été
émis depuis un certain temps?
M. DESJARDINS: Il y a tous ceux qu'on est capable de prendre sur les
chantiers. Mais il y en a qui sont plus vites que nous autres.
M. COURNOYER: Il y en a 250.
M. DESJARDINS: Oui, mais d'autres y vont. Il y a des décisions de
rendues. Cette compagnie n'est pas couverte par l'industrie de la construction
et elle continue à venir sur les chantiers de construction. Le travail
qu'elle fait n'a plus de limite. C'est une décision permanente et on
peut vous en montrer d'autres. Il y a le gars, par exemple, qui travaille 95
p.c. sur le chantier et 5 p.c. sur la construction, pour la même
compagnie, et un autre qui travaille 60 p.c. ou 75 p.c. à l'entretien et
le reste sur la construction. On dit que ceux qui travaillent jusqu'à un
certain pourcentage pour la même compagnie sont couverts par l'industrie
de la construction et les autres ne le sont pas. C'est dans la même
compagnie.
Comment voulez-vous, écoutez bien, que nos inspecteurs de
chantiers surveillent adéquatement les conditions de travail?
M. COURNOYER: C'est difficile, mais il y a une chose que M. Laberge a
dite tantôt. C'est que toute règle souffrait d'exception,
d'accord?
M. DESJARDINS: Pardon?
M. COURNOYER: Une règle souffre d'exception. Vous êtes
d'accord sur ça?
M. DESJARDINS: Oui, ça souffre.
M. COURNOYER: Une règle souffre toujours d'exception, mais qui
détermine quelles sont les exceptions?
M. LABERGE: M. le ministre, je ne sais pas si vous vous souvenez, mais
au bureau de la FTQ...
M. COURNOYER: J'ai pensé à M. Desjardins, à un
moment donné, pour les déterminer mais il y en a qui m'ont dit:
Ne fais pas ça de même.
M. LABERGE: Attendez! ... au bureau de la FTQ, après de
très longues discussions parce que bien sûr on a un gros
secteur dans la construction, mais on a aussi un gros secteur dans l'industrie
on a suggéré un amendement au règlement no 1 qu'on
a fait parvenir, il y a au moins six mois...
M. COURNOYER: Trois mois... M. LABERGE: Non, non, enfin...
M. COURNOYER: Oui, six mois. Réglons donc pour sept, on sera
sûr.
M. LABERGE: Au moins six mois, et cela aurait réglé en
partie ce problème. Enfin, on ne s'obstinera pas pour un mois.
M. COURNOYER : Non, non. Disons que cela aurait réglé en
partie ce problème.
M. LABERGE: ... en partie ce problème. Encore une fois, nos gars
de la construction et nos gars représentant les travailleurs
industriels, se sont entendus sur une formule qui, tout en protégeant
les emplois des gars de la construction, n'allait pas non plus gruger de
l'autre côté. Je pense que c'était une bonne formule.
M. LAVOIE (Léopold): M. le Président, si vous me le
permettez, pour répondre à une question du député,
qu'on soit député ou n'importe qui, il faut quand même se
mettre dans la tête dans la mesure où on vit dans une
société qu'il y a des priorités, qu'il y a des
choses qu'on peut faire si on s'adapte à certaines autres choses. Mais,
parce qu'on veut faire cette chose, on ne peut pas dire qu'on va refuser tout
ce qui est là. L'entrepreneur qui dit vouloir exploiter une entreprise
de telle ou telle chose devra s'informer, avant de partir. Il doit tenir compte
de certaines réalités sociales ou humaines. S'il ne le fait pas,
il ne peut pas être dans le secteur.
M. VEILLEUX: Je suis d'accord avec vous.
M. LAVOIE (Léopold): Une chose est vraie. Je regardais une
décision qui a été rendue dernièrement et
personnellement, même si je ne suis pas du métier, cela me
révolte.
L'affaire du député, ce métier, je pense que
ça ne s'apprend pas du jour au lendemain. On peut devenir du jour au
lendemain député mais on n'est pas bon du jour au lendemain,
c'est avec le temps qu'on devient bon député. C'est la même
chose dans tous les domaines, au niveau professionnel comme ailleurs.
Une chose est certaine, l'homme de métier ce n'est pas le gars
d'hier, d'avant hier, d'il y a un an, deux ans, trois ans qui a dit: Moi, je te
dis que tu es telle personne et que ton titre c'est d'être tel gars, qui
fait tel métier. Ce n'est pas ça, ça s'est établi
avec le temps, ça s'est établi avec l'expérience,
ça s'est établi avec la tradition, avec l'histoire.
En somme, le métier, sur tout le continent nord-américain,
sans donner un cours de métier comme tel, c'est quand même
défini à coup de discussions, à coup de dialogues des
parties, par des gens directement impliqués sur tout le continent
nord-américain. Il y a des volumes exceptionnels qui établissent
la jurisprudence, la juridiction d'un "millwright". Qu'est-ce qu'un
"millwright", quelles sont ses capacités, quelles sont ses
compétences? Cela s'est établi par le temps, par
l'évolution, à la suite d'un paquet de débats, de
discussions sur les personnes directement intéressées.
Aujourd'hui, on rend une décision en vertu d'un bill, dans une
décision qu'on a vue dernièrement et ça ne peut pas
être acceptable, parce que c'est un défi à l'homme
professionnel qui est là, qui est consacré par le temps, par
l'histoire et par la tradition. On dit dans une sentence, dans une
décision qui a été rendue, en se prévalant d'une
autorité conférée par le bill 68: Ecoute, toi, le
"millwright", on connaît ton affaire, tes capacités, tes
compétences, ton habilité, c'est défini, discuté et
entendu depuis des années à la suite de discussions. Un moment
donné, on t'a coiffé de ton titre professionnel, le titre de
"millwright". Un moment donné, un petit employeur qui évidemment
pense s'adapter au temps, ou jouer le jeu de la concurrence déloyale sur
le marché, arrive devant un commissaire qui est en exécution ou
en autorité d'une loi et dit: Monsieur, écoutez, est-ce que je
pourrais, parce que je fais des convoyeurs en usine, faire poser mes convoyeurs
par les gars de mon usine? Bien non, traditionnellement, une des
responsabilités du convoyeur, parce que c'est un travail hautement
spécialisé, ça appartient au "millwright".
Voilà qu'en vertu d'un bill, une personne qui est en
autorité, sans préjudice à la personne qui est là,
dit: Ecoute, l'employeur, je pense que tu as raison; toi, le "millwright" qui
es là, tu es en chômage, reste chez vous. On va dire à
cause des arguments allégués par l'employeur: D'accord. Ton petit
gars que tu paies $2, $2.25 peut faire ça ce travail de
"millwright".
C'est un métier traditionnel, noble et hautement important, mais
on dit: Toi, le "millwright", reste chez toi, reste en chômage. C'est
contre ça que nous sommes. Le travailleur
professionnel, c'est une chose essentielle dans une
société. Si on ne veut pas le respecter, on va tout avilir du
haut jusqu'en bas, on va avilir le travailleur, on va le décourager, il
va disparaître et les premiers qui s'en plaindront seront les employeurs
eux-mêmes. C'est une réalité qui a un horizon beaucoup plus
considérable que la particularité du moment ou que l'exception de
quelques individus qui doivent s'adapter strictement à des
intérêts provisoires et temporaires et qui sont bien souvent
égoïstes.
Les horizons de tout ça, c'est bien plus haut. Il faut qu'on se
mette quand même tout ça dans la tête, tous les gars qui
sont ici, qu'on soit de n'importe quelle parti ou de n'importe quoi, on a le
devoir de travailler ensemble, mais si on n'accepte pas certaines
priorités au départ, tous vont manquer leur coup. Ce n'est pas un
problème d'exception, c'est un problème de respect, une chose
fondamentale.
M. VEILLEUX: Disons qu'en principe, M. Lavoie, avec tout ce que vous
venez de dire, je ne peux pas m'y opposer. Si, aujourd'hui, par exemple, pour
reprendre mon exemple de tout à l'heure, l'usine, je décide de
lancer une usine de perrons de ciment, d'usiner des perrons en ciment, que
j'obéisse au décret et aux lois qui sont là, je suis
parfaitement d'accord avec vous. Si, d'autre part, ça fait dix ans que
je fais ça, que je végète dans mon affaire et que j'arrive
à force de travailler et que mon type à l'intérieur se
rende poser les perrons, est-ce que vous admettez avec moi qu'à ce
moment-là on ne pourrait pas étudier le cas d'espèce?
M. LAVOIE (Léopold): Je n'admets rien, le jour où
ça vient à l'encontre de choses fondamentales, on doit
disparaître plutôt que continuer, parce qu'on transgresse des
choses fondamentales et on nuit à l'intérêt commun. C'est
là qu'on crée des problèmes sociaux et ça se
réflète sur toute la société. C'est bien plus
important que l'individu, avec tout le respect que je lui dois
évidemment, qui réside dans telle ou telle région, dans
telle ou telle chose et qui a son affaire bien à lui.
M. VEILLEUX: C'est ainsi qu'il y a plusieurs propriétaires
d'usines qui s'en vont au bien-être social.
M. LABERGE: Regardez ce qui s'est produit avec le bill 68.
M. LE PRESIDENT: Un instant, je vous demanderais, messieurs, de parler
un à la fois. C'est très difficile de contrôler le
débat lorsqu'on intervient l'un par-dessus l'autre.
M. LABERGE: On prend l'habitude des...
M. LE PRESIDENT: Je me demandais aussi, messieurs, si en
réalité, à la question du député, on avait
déjà obtenu amplement de réponses?
M. LABERGE: Je voudrais juste ajouter deux mots. Je serai très,
très bref. C'est qu'avec le bill 68, vous avez des entrepreneurs en
construction qui ont fondé des compagnies à côté
le même argent, le même gars, un autre nom pour se
permettre de ne pas respecter le décret, justement. Le travail qui
était fait avant par ses employés, selon le décret, il les
fait maintenant faire par ces mêmes employés, mais à
meilleur marché.
M. VEILLEUX: Là, je suis d'accord avec vous que je ne
fonctionnerais pas dans cela.
M. DESJARDINS: Ceux-là sont très bien vus.
M. COURNOYER: Par le gouvernement? M. DESJARDINS: Par le commissaire. M.
COURNOYER: Ah bon!
M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Jean a-t-il
terminé?
M. VEILLEUX: J'ai terminé, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Le député de Fabre.
M. HOUDE (Fabre): M. le Président, j'aimerais savoir de la part
de messieurs Lavoie, Desjardins ou Laberge si la profession soit dit en
passant, j'aime bien l'expression "ouvrier professionnel" ou "travailleur
professionnel" est présentement satisfaite de ceux qui forment
ces professionnels? Je voudrais peut-être donner le fond de ma
pensée. Il n'y a pas tellement d'années, je travaillais pour le
comité paritaire des métiers de la construction, au centre
d'apprentissage, au centre culturel, sur le boulevard Saint-Joseph. A ce
moment-là, il se donnait des cours. On travaillait avec acharnement
à rendre ces étudiants très fiers de leur métier. A
ce moment-là, ma question paraîtra peut-être
naïve il y avait un peu de confusion, à savoir
est-ce le ministère de l'Education, est-ce le ministère du
Travail qui donne des cours?
Avec le début d'une année académique, je lisais
encore hier, dans les journaux, et je lisais également un
dépliant, qu'on a livré à la porte de mon appartement,
d'une régionale de la région de Québec, qui offrait une
multitude de cours. Je n'ai pas compté mais cela arrive sûrement
dans la centaine. Je n'ai jamais vu, dans ma vie, autant de cours offerts qu'en
septembre 1972, par toutes sortes d'organisations: éducation des
adultes, commissions scolaires, CEGEP, écoles privées,
écoles pour la lecture de plans. J'imagine que c'est bien important car
j'en entendais parler quand j'étais au centre d'apprentissage. Mais si
c'est vrai que tous ces gens réussissent à vivre en enseignant
comment lire des plans et des "blue prints"
d'après moi, dans deux ans, toute la population de la province va
être capable de lire des plans. Tout cela me paraît à moi,
en tout cas, un peu confus. C'est peut-être naiï, mais qui est
l'autorité, actuellement, dans la province? Qui donne le diplôme
de menuisier, de plombier, de charpentier? Et vous autres, êtes-vous
contents de cela?
M. LE PRESIDENT: Si le député me permet, sans vouloir lui
couper la parole ou encore restreindre les commentaires, c'est que cet
après-midi, nous devions, avant la lecture du mémoire de la FTQ,
justement traiter de ce sujet de la formation et des qualifications
professionnelles de la main-d'oeuvre.
M. HOUDE (Fabre): On en parle à la page 18, M. le
Président.
M. LE PRESIDENT: Oui, je sais, mais je voudrais vous faire remarquer que
demain matin, je pense, M. Lebon doit revenir.
M. HOUDE (Fabre): Ah bon!
M. LE PRESIDENT: Ce sont les employeurs. On me dit qu'il y aurait une
différence. Je voulais simplement faire...
M. DESJARDINS: Je pense que la FTQ a son opinion sur cela.
M. LE PRESIDENT: Oui, oui.
M. DESJARDINS: L'opinion des employeurs, je la respecte, sans savoir sa
portée. Par contre, nous avons la nôtre dans cela.
M. LE PRESIDENT: Oui, je regrette. Mes commentaires s'adressaient au
député. Puisqu'il n'était pas ici un peu plus tôt,
cet après-midi, je voulais simplement mentionner que ce sujet devait
revenir. Maintenant, la question est posée, quitte, présentement,
à recevoir les réponses que vous pourrez donner.
M. DESJARDINS: Je n'irai pas dire que présentement, c'est une
confusion complète, qu'il y a des problèmes entre le
ministère de l'Education et le ministère du Travail. C'est bien
entendu. J'ai été moi-même président du Centre de
formation Montréal Metro. Présentement, il y a des CEGEP, par
exemple, qui donnent des cours, disons, en "sheet-metal", et ces cours sont
donnés par des professeurs en réfrigération ou vice versa.
Alors n'ayant aucun droit de regard, et ces cours étant donnés
par n'importe qui, je n'ai pas besoin de vous dire que, présentement, on
est loin d'être content de ce qui se passe dans la construction.
Vous avez des CCR, par exemple, qui sont des comités consultatifs
régionaux de métiers. Mais étant donné que nous ne
pouvons pas siéger comme nous le voudrions, il est bien entendu qu'il
n'y a plus aucun métier qui est assis et qui règle ses
problèmes. Nous avons entendu parler, à travers la province de
Québec, souvent, que des personnes disaient: Comment peut-on condamner
un gars qui a une carte de compétence à $200 d'amende quand vous
n'avez rien pour faire passer les examens? Auparavant, on le faisait dans nos
centres d'apprentissage. Si le gars n'avait pas l'éducation
nécessaire, s'il n'avait pas la théorie, il avait la pratique
parce que c'étaient des gars des métiers qui les faisaient
passer.
Nous, nous vous disons que, la journée où nous prendrons
en main notre formation professionnelle, vous pouvez être assurés
que la confusion qui existe présentement va être au
bénéfice de tous les travailleurs. Cela va revenir dans nos mains
et le travailleur lui-même va faire attention. Il va voir à ce
que, s'il a besoin du recyclage, etc., ça lui soit donné suivant
ses besoins.
M. COURNOYER: Est-ce à dire que vous sortiriez du
ministère de l'Education la formation professionnelle qu'on y donne dans
les métiers qui sont représentés dans la construction?
M. DESJARDINS: Certainement. Plus que ça,
Montréal-Métro a déjà pris une injonction contre
certains CEGEP. Vous le savez, M. le ministre.
M. COURNOYER: Je le sais. Et contre certaines commissions scolaires
aussi.
M. DESJARDINS: Pour la même raison.
M. COURNOYER: Nous ne sommes pas sortis du bois.
M. VEILLEUX: D'après vous, il s'agirait de trouver une
autorité, mais une, pas trois ou quatre, pour régler ce
problème.
M. DESJARDINS : On nous a dit, tout à l'heure: Vous avez
l'arrêté en conseil 2711 qui s'en vient. Nous avons dit: Quels
sont les besoins? Si nous organisons dans la province des CCR métiers et
que nous ayons l'autorité, nous allons produire ce dont nous avons
besoin. Si nous avons besoin de poseurs de métal en feuille, de
frigoristes, de plombiers, etc., nous allons voir à ce que les gens
concernés soient en classe suivant nos besoins.
Présentement, étant donné que c'est sous le
ministère de l'Education, ils disent à un gars: Toi, tu t'en vas
dans telle classe, etc. Quels sont nos besoins? Pourquoi faites-vous perdre
trois ou quatre ans à un gars pour apprendre un métier, quand on
ne sait même pas si, oui ou non, il y a des ouvertures pour lui?
M. VEILLEUX: C'est le problème que vous rencontrez dans les
différents métiers. Ce même
problème se retrouve dans tous les autres secteurs.
M. DESJARDINS: Je vous parle du nôtre, présentement.
M. LABERGE: C'est pour ça que, dans le mémoire si
vous permettez, M. le Président ils demandent de reprendre en
main la formation professionnelle. Encore une fois, pourquoi former des
travailleurs de métal en feuille, s'il y en a déjà trop?
Pourquoi créer d'autres plombiers, s'il y en a déjà trop?
Si les parties contractantes avaient la main haute là-dessus,
connaissant les besoins de l'industrie de la construction, puisqu'elles sont
dedans à longueur de journée, elles pourraient décider
quelle sorte de formation on devrait donner.
M. DESJARDINS: Je vais vous donner un exemple. Auparavant, dans mon
métier, celui de plombier, on commençait comme apprenti. Pendant
l'hiver, on était obligé d'aller 140 heures à
l'école pour des cours du soir. Même si quelqu'un suivait les
cours requis pour tomber dans la deuxième classe, s'il n'allait pas
à 85 p.c. au moins de ses cours, il ne pouvait pas tomber dans la
deuxième catégorie, c'est-à-dire qu'il était
retardé. En même temps, il n'avait pas le salaire. Mais, depuis
qu'on a tout perdu, la formation s'en fait sentir, parce que ça n'existe
plus ça. Souvent, on entend des parties patronales nous dire: Les gars
ne sont pas qualifiés. Redonnez-nous nos pouvoirs et nous allons les
qualifier comme nous le devons.
Auparavant, on les qualifiait. Il faut croire qu'on en est encore
capable. N'oubliez pas que nous les dirigions dans des cours
préparés par nous. Le comité, c'était
syndical-patronal. Lorsque vous parlez de l'arrêté en conseil 2711
et de tous vos problèmes, il n'y a rien de nouveau dans ça.
Annuellement, nous nous assoyions tous ensemble et nous calculions combien il y
avait d'ouvrage qui s'en venait et combien il en disparaissait. Nous disions:
Cette année, dans la région de Montréal, on a besoin de 65
apprentis et nous faisions 65 apprentis.
Le manque de qualification de la main-d'oeuvre, c'est un peu à
cause de l'arrêté en conseil 2711 que vous voyez là. Nous
faisions ça il y a cinq ans. Par contre, aujourd'hui, nous sommes
empêchés de le faire par la nouvelle loi. J'irais plus loin que
ça. Je suis prêt à dire que M. le ministre était
là lorsque nous avons négocié notre comité
d'apprentissage.
M. COURNOYER: Bien sûr que j'étais là.
J'étais contre vous, à part ça. Cela fait
déjà quelques années.
M. DESJARDINS: Je le sais. Il n'y a rien de nouveau!
M. COURNOYER: C'est encore pareil aujourd'hui.
M. DESJARDINS: C'est une habitude que vous avez prise.
M. COURNOYER: Mais nous l'avions négocié, sans qu'il nous
soit imposé par décret.
M. DESJARDINS: C'est ça. Mais il y avait un ministre du Travail
dans ce temps-là qui n'a pas imposé de loi. Il nous a
laissés négocier.
M. LAVOIE (Léopold): Remarquez bien que la construction, à
cause des centres d'apprentissage, ne s'en est pas plus mal portée sur
le plan de l'exécution du travail. Nous n'en subissons pas actuellement,
et nous n'en avons pas subi préjudice. Là, on centralise et on
dépersonnalise. A ce moment-là, on ne rend service à
personne.
M. COURNOYER: Est-ce que vous demanderiez au ministère de
l'Education de sortir de ce domaine-là?
M. DESJARDINS: Certainement.
M. LAVOIE (Léopold): Pourquoi y serait-il?
M. DESJARDINS: Avant, il n'y était pas. Nous ne lui demandons pas
de sortir, mais nous lui demandons de continuer ce qu'il faisait
auparavant.
M. LAVOIE (Léopold): Est-ce qu'il y a des raisons
sérieuses, sauf le prétexte de la centralisation et d'un
contrôle étatique? Cela règle quoi?
M. LABERGE: Justement, vous faites de la consultation et, parfois, je me
demande pourquoi.
M. COURNOYER: Moi, j'en fais.
M. LABERGE: Nous avons présenté des mémoires
là-dessus à la commission qui a été chargée
d'étudier ce problème-là.
Dans les mémoires, on disait que le ministère de
l'Education ne devrait pas se mêler de la formation professionnelle, que
ça devait relever du ministère du Travail et de la Main-d
'Oeuvre. On l'a dit très clairement il y a plusieurs années
lorsque la commission a été formée et aujourd'hui on voit
les résultats. Qu'un CEGEP essaye de former des plombiers, c'est bien
beau mais il va être obligé d'aller chercher un gars qui
connaît un peu le métier pour enseigner. Quand on avait ça
ensemble, la formation professionnelle, les métiers, vous savez fort
bien que c'étaient des gars de métier connaissant
l'évolution des métiers. Un gars qui s'est retiré
complètement de l'industrie peut connaître le métier tel
qu'il l'a appris déjà, mais il n'est pas au courant de
l'évolution des métiers.
On forme des gars comme ils étaient formés
il y a quinze ans et on devrait les former selon les besoins de 1973,
1974 et 1975.
M. VEILLEUX: M. le Président, on avait envoyé les
autres.
M. LABERGE: Et il y avait des périodes d'entraînement pour
tous les enseignants.
M. LE PRESIDENT: Le député de Bourget.
M. LAURIN: Une question sur vos recommandations à la page 17, les
recommandations e) f) et g). Les échanges qu'on vient d'avoir
constituent déjà un embryon de réponse à la
question que je voulais poser, mais je voulais aborder ça sous un autre
angle. Est-ce que c'est votre position que la réalisation de ces trois
recommandations e), f) et g) et même ce que vous venez de dire sur la
formation professionnelle exigent qu'il y ait une seule centrale?
S'il y en a trois centrales, est-ce que c'est possible d'appliquer e), f
) et g)?
M. LABERGE: C'est beaucoup plus difficile parce qu'on parle toujours
là d'un comité paritaire. Ce n'est pas le syndicat seul,
ça serait le syndicat et les associations patronales. Evidemment, si
vous êtes deux ou trois syndicats, c'est très difficile. Cela a
déjà assez bien fonctionné dans certains coins mais, dans
d'autres coins, ça n'a pas fonctionné du tout. Alors e), f), g)
ça s'appliquerait avec beaucoup plus de difficultés s'il y a deux
centrales puis encore plus s'il y en a trois.
M. LAURIN : A ce moment-là ça prend presque un organisme
d'arbitrage, un organisme qui est au-dessus des trois centrales. Cela peut
être un centre de main-d'oeuvre, ça peut être un bureau de
placement du Canada, ça peut être une commission.
M. LABERGE : Ces organismes-là nous les jugeons moins efficaces
que les partenaires de l'industrie de la construction, qui vivent à
coeur de jour les problèmes de l'industrie de la construction.
L'industrie de la construction, encore une fois, est une industrie qui est bien
particulière. A moins que ce soit quelqu'un qui s'y connaisse, les
décisions qui sont prises ne sont ni dans l'intérêt de
l'industrie de la construction ni dans l'intérêt des travailleurs.
C'est pour ça que c'est tellement délicat.
Comme ça va là, avec les fameux droits de veto, vous avez
des situations aberrantes. Des comités peuvent être
paralysés pendant des semaines et des mois parce qu'une des parties
s'oppose à ce qu'il y ait des décisions qui se prennent. C'est
courant, ce n'est pas par hasard que ça arrive. Cela arrive assez
souvent.
M. LAURIN: Pour que e), f) et g) soient complètement et
facilement applicables, ça exigerait presque qu'il n'y ait qu'une seule
centrale?
M. LABERGE : Véritablement représentative.
M. LAURIN: Vous parlez de la création d'un comité
général de formation professionnelle des métiers mais vous
ne parlez pas de son mandat, de ses fonctions; est-ce que vous pourriez en
parler un peu plus?
M. DESJARDINS: C'est justement ce que j'ai défini tout à
l'heure par métier, cours patronal syndical par région.
M. LAURIN: Pourriez-vous expliciter son rôle un peu et son
mandat?
M. DESJARDINS: Son rôle serait d'établir les besoins en
main-d'oeuvre et les qualifications requises. Ce serait d'établir aussi
tout ce que comportent leurs besoins, les cours ainsi de suite, la même
chose que les anciennes écoles d'apprentissage. J'ai déjà
entendu souvent des députés dire: Ecoutez, dans nos places nous
autres, qui va nous entendre avec l'étendue immense et le nombre de
villes? Alors je leur dis que, dans toutes les régions importantes, il y
aura des CCR de métier qui centraliseront leurs décisions.
M. LAURIN: C'est ce que vous suggérez pour remplacer les conseils
régionaux de formation professionnelle à toutes fins
pratiques.
M. DESJARDINS: C'est cela.
M. LAURIN: A la conclusion de votre mémoire, vous avez cette
phrase où vous dites qu'il ne doit y avoir qu'une seule catégorie
de travailleurs. Est-ce que je vous comprends bien lorsque je dis que pour vous
il n'y a que des travailleurs spécialisés dans la construction,
qu'il n'y a pas de journaliers?
M. LABERGE: Des travailleurs occasionnels, non. Nous demandons que les
travailleurs de la construction qui ont leur carte de compétence, dont
la compétence est reconnue, soient les seuls qui puissent
travailler...
M. LAURIN : Que ce soit des travailleurs spécialisés ou
non spécialisés.
M. DESJARDINS: Le journalier de la construction est reconnu.
M. LAURIN: Là, ça dépendrait donc du nombre
d'heures de travail qu'il a fait dans le métier de la construction, que
ce soit dans un métier spécialisé ou non
spécialisé.
M. LABERGE: Exactement.
M. LE PRESIDENT: Le député de Frontenac.
M. LATULIPPE: Pourriez-vous me dire ce
que vous pensez du concept des familles de métiers et si vous
entrevoyez la possibilité, comme quelque chose de valable, d'introduire
le système modulaire comme définition pour remettre des cartes de
qualification?
M. DESJARDINS: Bien entendu, avec les nouvelles méthodes de
construction présentement, c'est bien dur de faire des familles de
métiers; par contre, si les gars s'assoient ensemble et voient la
réalité en face, on est assuré qu'à certaines
places il va falloir repenser nos structures, mais pour le moment, on est
prêt à étudier les problèmes qu'il y a en autant
qu'on aura le mandat pour se diriger vers ce point-là.
M. LATULIPPE: Lorsque vous acceptez de régionaliser votre action,
est-ce que vous accepteriez, dans une région où c'est plus
pratique, d'avoir une formule de famille des métiers, de la retenir
alors que dans d'autres régions vous pouvez avoir une diversité
de métiers beaucoup plus accentuée?
M. LABERGE: C'est beaucoup plus difficile parce qu'encore une fois, les
statistiques données par la Commission de l'industrie de la construction
hier matin vous démontrent qu'il n'y a que 15 p.c. des travailleurs de
la construction qui ne sortent pas de leur région; 85 p.c. vont
travailler dans d'autres régions. Si la formation professionnelle
diffère d'un endroit à l'autre, vous allez avoir des travailleurs
qui seront écartés tantôt et qui ne pourront pas remplir
les exigences d'autres régions.
Si cela se fait, il faut que ça se fasse au niveau de la
province, ça ne peut pas se faire par région.
M. LATULIPPE: Donc, à prime abord, vous n'êtes pas contre
mais vous exigeriez une étude plus approfondie de la situation.
M. DESJARDINS: Une étude plus approfondie.
M. LABERGE: C'est très complexe.
M. LAVOIE (Léopold): On ne refuse jamais de discuter.
M. LATULIPPE: Merci.
M. LE PRESIDENT: Y a-t-il d'autres questions?
M. HOUDE (Fabre): M. le Président... M. LE PRESIDENT: Le
député de Fabre.
M. HOUDE (Fabre): ... pour mon information personnelle, est-ce qu'il y a
au conseil quelqu'un qui fait de la recherche? Est-ce que la recherche existe
dans le cas des métiers de la construction pour connaître les
nouveaux procédés, la nouvelle façon de travailler, les
outils?
M. LABERGE: On se fie sur les patrons et je tiens à vous dire
qu'ils connaissent toutes les nouvelles méthodes, parce que ça va
plus vite, parce que, bien souvent, ça coûte meilleur
marché et puis, bien souvent, c'est d'une meilleure qualité
aussi. Je tiens à vous dire qu'ils font cela.
M. LAVOIE (Léopold): Dans nos départements de recherche,
nous avons tous les outils, toutes les revues que nous demandent
l'évolution et les tendances du métier. Le Conseil provincial des
métiers de la construction a quand même un service de recherche
hautement spécialisé sur tout ce qui se fait de nouveau, les
tendances, l'évolution, etc. Quant au contrôle de la main-d'oeuvre
comme telle, on respecte certaines données de la commission par les
pouvoirs du 2711.
M. DESJARDINS: Je vais vous donner un exemple: Lorsque sont sorties les
machines semi-automatiques pour la soudure, aussitôt qu'on a su que
c'était arrivé aux Etats-Unis, par nos confrères, et que
ça s'en venait au Canada, nous avons nous-mêmes acheté des
machines semi-automatiques pour la valeur d'environ $4,000; on les a
installées à l'Ecole d'apprentissage, qui était notre
école dans ce temps-là; cela a été payé par
notre union et on a vu à ce que nos gars se spécialisent
immédiatement.
Quand le produit est arrivé dans le Québec, nos gars
étaient prêts et il n'y a pas eu besoin de main-d'oeuvre
d'ailleurs, nos gars ont fait le travail eux-mêmes, en hommes
qualifiés.
M. LAVOIE (Léopold): Le recyclage est inévitable, il est
là.
M. DESJARDINS: Ce fut payé par nous, même pas par le centre
d'apprentissage, par personne d'autre. On a même donné les
machines au centre d'apprentissage, notre coeur est grand.
M. HOUDE (Fabre): Vous allez me faire pleurer.
M. LE PRESIDENT: Je vous remercie, MM. Laberge, Desjardins et Lavoie,
pour votre présentation. Je remercie les membres de la commission qui
ont voulu participer au débat.
Bien entendu, par exemple, à la suite des commentaires de cet
après-midi, que je devrai permettre à toute autre association qui
voudrait passer une petit commercial de temps en temps de le faire. Puisqu'il
s'en est passé au cours de l'après-midi, nous permettrons aux
autres d'en faire autant.
M. LABERGE: Nous n'avons rien contre ça.
M. LE PRESIDENT: Absolument pas, puisque c'est déjà
fait.
M. LAVOIE (Léopold): ... nous le respectons.
M. LABERGE: M. le Président, au nom du Conseil provincial des
métiers de la construction, FTQ, je tiens à vous remercier ainsi
que les députés pour leur attention. Si ça peut vous
aider, vous éclairer dans une situation qui est quand même fort
complexe, nous sommes bien heureux et s'il y a d'autres informations dont vous
pourriez avoir besoin, nous sommes à votre entière
disposition.
M. LE PRESIDENT: Je vous remercie; le tout pourrait devenir une
association d'admiration mutuelle. La commission ajourne ses travaux à
dix heures demain matin.
(Fin de la séance à 17 h 11)
Séance du jeudi 14 septembre 1972 (Dix heures vingt minutes)
M. SEGUIN (président de la commission permanente du travail, de
la main-d'oeuvre et de l'immigration): A l'ordre, messieurs!
Les membres de la commission pour la séance du 14 septembre sont
les suivants: M. Pelletier, M. Veilleux, M. Brown, M. Cornellier, M. Cournoyer,
M. Marchand, M. Harvey (Chauveau), M. Shanks, M. Perreault, M. Caron, M. Bacon,
M. Carpentier, M. Mailloux, M. Faucher, M. Houde (Fabre), M. Dionne, M. Burns.
On me dit qu'il doit se présenter. M. Croisetière, M. Demers, M.
Roy (Beauce), M. Latulippe, M. Tremblay (Chicoutimi), M. Vincent doit venir lui
aussi, d'ici quelques minutes. Est-ce qu'il y a des membres qui ont
été oubliés?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Faucher.
M. LE PRESIDENT: M. Faucher a été nommé, oui. M.
Marchand est le rapporteur de la commission et il sera ici d'ici quelques
minutes.
M. VEILLEUX: Il est en train de discuter de
déménagement.
M. LE PRESIDENT: Merci pour l'information.
M. VEILLEUX: Il y a des envahisseurs au troisième.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce qu'il déménage ses
outils?
M. LE PRESIDENT: Avons-nous un ou des représentants de la
Fédération de la construction du Québec? Le mémoire
M-l. Alors, pour la troisième fois, c'est non. Nous sommes donc rendus
à entendre les commentaires de M. Lebon, mémoire
présenté à la commission parlementaire du travail et de la
main-d'oeuvre relativement au chapitre 51, bill no 49, Loi sur la formation et
la qualification professionnelles de la main-d'oeuvre. M. Lebon.
Association provinciale des constructeurs
d'habitations
M. LEBON: M. le Président, MM. les membres, tout d'abord, je dois
m'excuser et vous remercier d'avoir bien voulu retarder l'audition à ce
matin, étant donné que j'ai dû m'absenter hier.
On a évidemment effleuré la formation de la main-d'oeuvre
lorsqu'on a discuté de l'arrêté en conseil 2711. Vous avez
devant vous un mémoire que je n'ai pas l'intention de lire. Je vais
essayer plutôt d'en faire un bref résumé.
Tout d'abord, je dois dire que le mémoire est
présenté par les quatre associations mentionnées, à
savoir: l'Association provinciale des
constructeurs d'habitations du Québec, l'Association des
constructeurs de routes et grands travaux du Québec, la Corporation des
maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec et la
Corporation des maîtres électriciens du Québec. Par contre
on a remarqué aussi dans le mémoire de la
Fédération de la construction que, elle aussi, appuie celui que
nous présentons ce matin.
C'est donc dire que c'est tout le patronat de l'industrie de la
construction qui vous présente ce matin ce mémoire.
La formation professionnelle de la main-d'oeuvre a constitué une
préoccupation des gouvernements depuis au moins 20 ans pour essayer de
rendre rentable les investissements faits dans ce domaine. Mentionnons en
passant qu'on investit au-delà de $100 millions par année dans la
formation de la main-d'oeuvre. Dans l'industrie de la construction, il s'agit
d'environ $10 millions. Evidemment, ces sommes incluent les allocations
données aux étudiants et le coût de la formation proprement
dite.
En 1945, le gouvernement du Québec adoptait la Loi de l'aide
à l'apprentissage. Celle-ci permettait aux employeurs et aux
employés de former en commissions d'apprentissage, selon les besoins,
selon les secteurs, des commissions pour voir à la formation et
administrer la formation de leur propre main-d'oeuvre. On avait à ce
moment-là des comités consultatifs de métiers qui
informaient les commissaires au niveau des commissions d'apprentissage des
besoins de chacun des métiers dans chacune des régions.
Malgré les aspects positifs de la loi, il y avait quand même
quelques carences. Il manquait de toute évidence de coordination
provinciale entre les centres d'apprentissage et entre les secteurs. Il y avait
à ce moment-là, avant l'adoption du bill 49, une commission
d'apprentissage de l'industrie de la construction à peu près dans
toutes les régions, commissions d'apprentissage de la chaussure, de
l'automobile, de la coiffure, de l'imprimerie, du verre plat et s'en venait
aussi la commission d'apprentissage en alimentation.
Deuxièmement, il n'existait aucune relation entre les commissions
d'apprentissage et les institutions du ministère de l'Education qui
avaient, elles aussi, leur système de formation professionnelle. En
fait, si nous, les parties, tant syndicales que patronales, nous
établissions, par exemple, le nombre d'apprentis à former dans un
domaine je prends Montréal en particulier disant: Nous
avons besoin de 50 électriciens, nous formons 50 électriciens,
parallèlement, le ministère de l'Education pouvait en former 150,
à côté, sans aucune espèce de consultation avec les
parties.
Le troisième point négatif de la Loi de l'aide à
l'apprentissage, c'est qu'il y avait, de toute évidence, un
désintéressement de la majorité des secteurs, sauf ceux
que j'ai mentionnés tout à l'heure. Pour pallier ces
difficultés, le gouver- nement a adopté, en juin 1969, le bill 49
ou le chapitre 51, Loi sur la formation et la qualification professionnelles de
la main-d'oeuvre. Le but de la loi était évidemment de corriger
les erreurs de la Loi de l'aide à l'apprentissage mais, après
trois ans d'expérience, on doit malheureusement constater qu'aucun des
objectifs qui avaient été fixés par le chapitre 51 n'a
été atteint, principalement à cause de l'approche
irréaliste de cette législation.
Mentionnons, entre autres un seul exemple, si vous voulez
la juridiction qui est donnée aux commissions de formation
professionnelle par le bill 49, à savoir que la formation
professionnelle n'inclut pas seulement les ouvriers, mais aussi jusqu'aux
universitaires. Il s'agit de formation professionnelle des adultes. Cela
voulait dire qu'on englobait, théoriquement, la formation de toutes les
professions et non seulement celle des ouvriers, comme on le faisait avec la
Loi de l'aide à l'apprentissage.
Avec la Loi de l'aide à l'apprentissage, les parties avaient
leurs centres, leurs professeurs, leurs propres programmes de formation. Somme
toute, nous gérions nos propres affaires. Les parties syndicales et
patronales étaient présentes à titre de consultées
et à titre d'exécutantes dans la formation de leur main-d'oeuvre.
Evidemment, cela faisait que notre main-d'oeuvre était formée
selon les besoins du marché du travail.
On pensait que le bill 49 allait améliorer la situation.
Malheureusement, comme je le disais tout à l'heure, après trois
ans, et selon l'application pratique de la loi, les pionniers des centres
d'apprentissages que nous étions, c'est-à-dire les parties
patronales et syndicales de l'industrie de la construction, on ne peut
retrouver, par le biais du bill 49, le strict minimum du rôle que nous
avions lorsque nous avions la commission d'apprentissage.
Théoriquement, le bill 49 prévoyait des comités
consultatifs régionaux qui devaient permettre d'établir un
système de communications entre la formation et le marché du
travail. Ces comités n'ont, à l'heure actuelle, aucune
responsabilité, principalement à cause des raisons suivantes.
Premièrement leur composition est hétérogène
puisqu'elle regroupe des secteurs d'activité. Autrement dit, au lieu
d'avoir des comités consultatifs de métier comme nous avions
avant, nous avons des comités consultatifs de secteurs. Ce qui veut
dire, par exemple, que dans les services on va retrouver un balayeur assis avec
une sténo-dactylo pour essayer de dire ce dont leurs secteurs ont
besoin.
Or, dans l'industrie de la construction, on retrouve, assis autour d'une
même table, les parties syndicales et patronales en nombre limité
et qui peuvent parler d'un métier qui est absent à la table. Le
problème du manque d'homogénéité de ces
comités consultatifs fait qu'ils ne sont pas capables de remplir leurs
mandats.
Deuxièmement, le rôle qui avait été
donné à ces comités consultatifs était
d'établir les besoins quantitatifs et qualitatifs de la main-d'oeuvre,
toujours théoriquement selon le bill 49. Or, ce rôle est tout
à fait aléatoire parce que chaque comité consultatif
aucun devrais-je dire n'a les données nécessaires
pour statuer sur les besoins.
Troisièmement, ces comités consultatifs, au lieu de
relever des commissions comme cela se faisait dans le cas des
commissions d'apprentissage relèvent du ministère du
Travail et ne sont convoqués que sur demande du ministère du
Travail. En trois ans, ces comités ont siégé au maximum
deux fois.
Le quatrième aspect, c'est que ces comités de consultation
ne sont coordonnés d'aucune façon au niveau provincial.
C'est-à-dire qu'une région peut dire: Nous avons besoin de X
individus dans tel domaine, et l'autre région immédiatement
à côté peut dire qu'ils ont besoin de Y individus et il n'y
a aucune coordination au niveau provincial.
Les membres qui siègent à ces comités consultatifs
ne semblent pas, exception faite de la construction, avoir le mandat de leur
secteur. On se rappelle que le CPQ le Conseil du patronat s'est
opposé violemment à la façon utilisée pour nommer
les individus à ces comités consultatifs régionaux.
La base même du bill 49, ce sont les comités consultatifs
régionaux, c'est-à-dire ce qu'on appelle communément les
CCR.
L'autre palier prévu au bill 49 était, évidemment,
la commission de formation professionnelle elle-même. Elle devait, selon
la loi, constituer régionalement l'autorité de dernière
instance pour coordonner toute la formation dans la région. Ce mandat
visait à tenter d'éviter, en fait, les problèmes qu'on
avait rencontrés avec la Loi de l'aide à l'apprentissage et
à essayer de coordonner les travaux faits par les différentes
institutions, qu'elles relèvent du ministère de l'Education ou du
ministère du Travail. Or, le ministère de l'Education n'a jamais
reconnu ce rôle aux commissions de formation professionnelle. Par
conséquent, les commissions de formation n'ont pas pu remplir le mandat
qui leur était théoriquement donné. Pour votre
information, il y a eu sept comités interministériels qui ont
siégé pour essayer d'en arriver à une entente.
Il y en a un septième, d'ailleurs je pense que le ministre
peut le confirmer qui siège à l'heure actuelle pour tenter
d'arriver à une entente entre les deux ministères. Je ne sais pas
si, cette fois, on arrivera à un résultat positif, mais,
malheureusement, chaque fois ces comités ont fait un fiasco. Le bill 49
relevait du ministère du Travail, alors que la formation, selon d'autres
interprétations, relevait aussi du ministère de l'Education, ce
qui fait qu'il y a toujours eu conflit depuis le bill 49 et avant même le
bill 49.
Il y a eu trois ententes interministérielles, mais, quand on
arrivait pour interpréter l'enten- te, les fonctionnaires ne
s'entendaient pas. C'était un autre facteur aussi, je pense, qu'il faut
soulever. En bref, il faut dire que le bill 49 confère à la
commission le rôle de coordonatrice pour éviter les duplications
en disponibilités physiques et humaines. C'est sûr que
c'était, selon nous, nécessaire au niveau d'une région
qu'on établisse un organisme qui puisse décider à quel
endroit on va acheter tel équipement et dans quelle institution on va
engager tel professeur, pour ne pas faire de duplication dans les coûts
de formation.
Conséquemment, on ne peut que constater l'échec total du
bill 49, tant au niveau des consultations des parties syndicale et patronale
que dans l'éxécution des mandats théoriquement
donnés. Si l'on regarde maintenant l'industrie de la construction, cette
loi-là nous a défavorisés complètement, puisqu'elle
nous a enlevé les structures en matière de formation sans
même coordonner et éviter les duplications en ce domaine, au
niveau régional et provincial.
De plus, et selon les dires du Conseil du patronat, elle n'a même
pas pu satisfaire les secteurs autres que ceux de la construction. Globalement,
les objectifs de la loi étaient certainement et incontestablement
louables mais, dans la pratique, ils ont été impossibles à
atteindre à cause d'une situation de fait qui a été
négligée dans l'établissement des prémisses de ces
mêmes objectifs.
Qu'on nous permette, entre autres choses, de souligner encore une fois
l'opposition acharnée du CPQ aux articles 42, concernant la
certification obligatoire, et 45, relativement au licenciement. En ce qui
concerne l'industrie de la construction, en plus des difficultés
précédemment énoncées on souligne les
difficultés que peut nous causer cette loi en établissant, par
règlement, le rapport compagnon-apprenti; ceci constitue un
contrôle quantitatif de la main-d'oeuvre. En même temps, on a
l'arrêté en conseil 2711, qui traite du même sujet.
D'où, évidemment, une superposition de lois pour traiter d'un
contrôle. De plus, on conçoit très mal qu'une loi de
formation statue sur les salaires des apprentis.
C'est brièvement l'historique de la situation. Les parties
patronales se sont penchées sur différentes suggestions et n'en
font qu'une avec des modalités. La recommandation se lit comme suit:
Compte tenu des difficultés d'application du chapitre 51, nous
recommandons que des amendements soient apportés à cette loi pour
permettre de rendre sectorielle l'application de cette loi et pour
régler, une fois pour toutes, les disputes interministérielles au
sujet de la formation de notre propre main-d'oeuvre.
C'est la recommandation globale. Quant aux modalités, nous
suggérons ce qui suit: A) la formation de comités provinciaux de
métiers patronaux-syndicaux qui auraient les mandats suivants: 1)
établir les normes d'apprentissage de ce métier au sein d'un
secteur, ces normes étant provinciales et obligatoirement suivies au
niveau de toutes les institutions de formation, y
inclus les institutions relevant du ministère de l'Education; 2)
établir une méthode de contrôle de la qualité de
formation donnée. A cet effet, ce comité provincial pourrait
élaborer des examens uniformes à travers la province pour un
métier donné et surveiller les émissions de cartes de
compétence ou certificats de qualification; 3) évaluer
provincialement les besoins de perfectionnement de la main-d'oeuvre, incluant
la recyclage et évidemment aussi la polyvalence. 4) coordonner les
besoins quantitatifs de la main-d'oeuvre en fonction des données
régionales et provinciales et compte tenu de la mobilité de cette
main-d'oeuvre au sein de cette même spécialité.
On voit ici qu'on pourrait faire une espèce de carrefour
où se rencontreraient le mandat du comité provincial de
métiers et peut-être l'application des critères de
l'arrêté en conseil 2711 que l'on voyait tout à l'heure,
étant donné que ce seraient les mêmes parties et que les
contrôles quantitatif et qualitatif ne peuvent être
dissociés.
Toujours au niveau provincial, nous recommandons aussi la formation
d'une commission professionnelle de l'industrie de la construction
formée de délégués des comités de
métiers provinciaux, de délégués du
ministère du Travail et de délégués du
ministère de l'Education qui auraient le mandat suivant: 1) Voir
à la coordination des disponibilités physiques et humaines
relatives à la formation dans chaque métier; 2) Octroyer au
niveau régional des commandes de formation selon les besoins
établis dans chacun des métiers. a) Nous recommandons de
coordonner au niveau provincial les disponibilités physiques et
humaines. Qu'on pense, par exemple, au domaine des routes où
l'équipement coûte énormément cher si on
achète des pelles ou de l'équipement lourd, ça coûte
très cher ou il faut une coordination provinciale pour dire que
dans une telle région, dans un district donné on va
s'équiper seulement à un endroit et non pas à deux ou
trois endroits, même si c'est dans des régions économiques
différentes.
Au niveau régional, nous suggérons en fait une structure
parallèle à celle du provincial soit la création de
comités régionaux de métiers relevant directement de la
commission de formation et ayant le mandat de faire rapport au comité
provincial de métiers de besoins de formation existants en
perfectionnement et en recyclage. b) En tenant compte des données de la
commission de l'industrie et des critères régionaux, faire part
au comité de métiers provincial des besoins quantitatifs de la
main-d'oeuvre. Encore là on peut remarquer en fait la parenté
avec l'arrêté en conseil 2711 sur le contrôle quantitatif.
3) Participer directement à la structure de la CFP régionale par
voie de délégation directe au conseil d'administration de
celle-ci.
Toujours au niveau régional, nous suggérons la
création d'une commission de formation professionnelle régionale.
Mais cette commission, contrairement à ce qui existe à l'heure
actuelle, serait premièrement sectorielle, les secteurs qu'ils
désirent.
Si l'industrie de la construction veut une commission, qu'elle en ait
une. Si l'industrie des mines n'en veut pas, elle n'en a pas. Alors, c'est une
situation optionnelle, si vous voulez, soit de former des
délégués des comités de métiers, de
représentants du ministère du Travail et de représentants
du ministère de l'Education.
Cette commission aurait plein pouvoir de coordonner régionalement
l'octroi des cours aux différentes institutions. Selon nous, c'est
ça qui réglerait peut-être le problème, une fois
pour toutes, des disputes interministérielles ou devrais-je dire
peut-être interfonctionnaires. Je ne porterai pas de jugement
là-dessus. Il semble que les ministres s'entendent puisqu'ils signent
des ententes, mais les fonctionnaires ne s'entendent pas.
Deuxièmement, gérer les disponibilités physiques et
humaines de son ressort. On ne suggère pas ici que chaque commission
s'équipe en bâtisses. La commission peut facilement siéger
sans avoir de personnel à son emploi, au point de vue formation, mais
elle constitue l'autorité pour désigner quelle institution va
donner tel cours.
Troisièmement, voir à l'exécution des commandes
émises par la CRP provinciale. Alors, c'est la CRP provinciale qui
dirait à la CRP régionale, vous allez former tant
d'électriciens, tant de plombiers, etc.
Quatrièmement, voir au contrôle de la qualification,
l'émission des certificats en fonction des normes établies
provincialement.
Quelques remarques à ce dernier point. Nous croyons
nécessaire que tout amendement au bill no 49 constitue une
décision concertée des ministères du Travail et de
l'Education, afin d'éviter la répétition de nombreux
conflits que nous avons connus depuis trois ans. En effet, toute
décision unilatérale d'un ministère ou d'un autre ne peut
que créer la confusion chez les fonctionnaires et freiner la
participation du monde du travail par les parties patronale et syndicale.
Nous sommes d'avis que l'industrie de la construction via notre
commission pourrait peut-être, et dans une certaine mesure, participer au
financement des commissions de formation professionnelle régionales,
afin d'éviter que certains secteurs prétendent que notre
industrie est favorisée par l'Etat par rapport aux autres industries. De
plus, cette méthode d'action nous permettrait peut-être une plus
grande autonomie dans nos propres décisions.
Comme on soulignait tout à l'heure les difficultés de la
Loi de l'aide à l'apprentissage, on disait qu'il manquait de
coordination intersectorielle. Pour pallier cette difficulté, nous
suggérons que soient institués des comités intersectoriels
de familles de métiers qui au-
raient comme mandat d'établir des profils de carrières,
d'élaborer des suggestions aux différents comités de
métiers et de chaque secteur, d'établir des programmes de
recyclage en fonction des besoins des différents secteurs et faire part
aux différentes CRP provinciales de leurs recommandations.
M. le Président, il y a, à la fin du mémoire, une
conclusion et un sommaire. Je pense qu'on peut s'en passer. Il y a
peut-être une chose. Je voudrais souligner, c'est la troisième
fois que je le dis, qu'il est nécessaire que le ministère du
Travail et le ministère de l'Education s'entendent avant de faire des
amendements à une loi, parce que les conflits, c'est nous qui les payons
à l'heure actuelle. On ne peut participer nulle part à cause de
ces conflits. Je vous remercie, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Lebon.
M. COURNOYER: Je voudrais seulement savoir où on prend les sept
comités interministériels? Vous avez affirmé tantôt
qu'il y avait eu sept comités interministériels ou six
comités, qu'est-ce que c'est? Est-ce qu'on parle des mêmes
comités?
M. LEBON: Malheureusement, je n'ai pas les dates. J'ai la liste ici.
D'abord, au tout début, il y a eu le comité Savard,
où je siégeais, qui a donné naissance à des
recommandations au CCTM pour l'adoption du bill 49. Le bill 49 a
été adopté. Il y a eu, ensuite, la mission OPFS pour
informer les gens des buts de la loi qui, je pense, sont conformes à ce
que nous disions tout à l'heure. Il y a eu une lettre entre le ministre
Bellemare et le ministre Cardinal; ensuite, il y a eu une entente entre le
ministre Cournoyer et le ministre Saint-Pierre, suivie d'un comité
interministériel et d'un autre comité interministériel
restreint à cause des difficultés du comité
interministériel précédent. Ensuite, un accord est
intervenu entre MM. Cournoyer et Saint-Pierre pour amender l'entente. Il y a eu
un comité du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre pour
l'opérationnalisation de l'accord. Après ça, il y a eu un
comité du ministère de l'Education il avait le même
mandat que le précédent, mais chacun avait sa façon de
concevoir les choses suivi d'un comité conjoint du
ministère du Travail et de l'Education pour unifier le travail et
élaborer ce qui avait été prévu.
M. COURNOYER: Pour élaborer les nouvelles ententes.
M. LEBON: Est-ce que vous en avez assez, M. le ministre?
M. COURNOYER: En masse, en masse! On a la "comitomanie", la comitose,
pardon!
M. DEMERS: C'est cancéreux.
M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Maurice.
M. DEMERS: M. Lebon, je vous remercie et vous félicite de votre
mémoire. J'aurais une couple de petites questions à vous poser
relativement à la loi 49. Est-ce que vous trouvez quelque chose de bon
ou de présentable dans cette loi?
M. LEBON: Théoriquement, M. le Président, je pense que la
loi est excellente.
M. DEMERS: Théoriquement, elle est excellente. C'est la pratique
qui est nulle?
M. LEBON: C'est la pratique qui ne fonctionne pas.
M. DEMERS: Vous nous donnez des suggestions. Est-ce que, d'après
vous, les suggestions que vous formulez dans votre mémoire la rendraient
efficace et effective?
M. LEBON: Je crois que oui. Disons que, principalement, il s'agit de
rendre, au niveau des secteurs, son application possible. Autrement dit, qu'on
n'essaie pas de nous faire croire, par exemple je prends Montréal
parce que je suis président de la CFP de Montréal que moi
et un autre individu représentons tout le patronat de la région
de Montréal métropolitain, c'est faux! On est quatre individus
à un bureau de direction, deux qui représentent tous les
salariés de Montréal et deux qui représentent tout le
patronat de Montréal, pour parler de tous les secteurs. Quand on dit
tous les secteurs, ça englobe deux millions de personnes. Je pense que
c'est absolument théorique et qu'on ne représente rien,
finalement. Au niveau d'un secteur, par exemple celui de la construction, nous
aurions, assis à la même table, des individus de la construction,
qui parleraient des besoins de la construction.
M. DEMERS: Comment envisage-t-on dans le monde syndical les suggestions
que vous formulez?
M. LEBON: Il faudrait peut-être demander ça aux parties
syndicales.
M. DEMERS: C'est encore un autre comité probablement.
M. COURNOYER: Dans un des mémoires, M. le Président, hier,
on avait une suggestion qui ressemblait à celle-là.
M. DEMERS: Cela se ressemblait joliment. C'est pour ça que je
trouve qu'il y aurait peut-être une entente à faire pour qu'on
puisse cohabiter et arriver à quelque chose de concret. Le
voilà.
M. COURNOYER: L'agneau si doux!
M. LEBON: De la part de la FTQ, c'est la première fois dans ma
vie qu'ils me font dire qu'ils sont d'accord.
M. DESJARDINS: C'est la première fois que vous parlez comme du
monde.
M. DEMERS: On voit qu'il y a une compréhension mutuelle; les gens
parlent mieux et les autres entendent mieux. Comprenez-vous, et ça va
nous amener des suggestions pratiques. C'étaient les questions que
j'avais à poser.
M. LE PRESIDENT: Le député de Chicoutimi et, après
le député de Beauce et le député de
Maisonneuve.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Lebon, à la page 4 de votre
mémoire, vous déplorez le fait qu'en ce qui concerne la
juridiction cela englobe non seulement la formation des ouvriers, mais aussi
celle des universitaires. Est-ce que vous pourriez nous expliquer un peu le
problème que cela pose, selon vous?
M. LEBON: Evidemment, je ne voudrais pas me faire poursuivre par le
Barreau; c'est peut-être une interprétation qu'on a faite de la
loi. D'ailleurs, je pense même que le ministre du Travail a fait la
même interprétation. Etant donné qu'il est avocat, je vais
m'y fier.
Le bill 49 porte sur la qualification professionnelle des adultes. Cela
veut dire à partir de l'ouvrier jusqu'au diplômé
universitaire. Je vois mal comment les parties, syndicale et patronale, vont
décider quelle formation un avocat devrait avoir.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): On parle ici de formation universitaire.
Voyez-vous des difficultés dans la formation qui est donnée par
les CEGEP?
M. LEBON: Selon notre expérience je parlerai exclusivement
du secteur de la construction malheureusement, les institutions du
ministère de l'Education n'ont jamais établi de liens concrets
entre les besoins du marché et les idées théoriques que
les professeurs peuvent avoir sur les besoins de ce marché. Par
conséquent, si vous voulez, le produit fini, une fois sur le
marché du travail, ne satisfaisait pas la demande des employeurs, en
tout cas au point de vue de la qualification.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Cela revient à dire que la
détermination des options, par exemple, qui sont offertes dans les CEGEP
est faite sans que soient consultés des organismes comme le vôtre,
ceux que vous représentez ce matin.
M. LEBON: C'est tout à fait juste.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): On établit certaines options, on
définit un profil de formation ou de carrière mais on ne s'occupe
pas de savoir s'il y aura des débouchés pour ces étudiants
qui sont formés en fonction de tel ou tel métier ou profession.
Cela pose une difficulté majeure dans le cas de l'organisation de votre
main-d'oeuvre.
M. LEBON: C'est tout à fait exact. Si vous me permettez, le
problème est double. Il s'agit aussi vous l'avez souligné
du problème quantitatif et du problème qualitatif.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'entends bien que les deux aspects soient
compris. Vous parlez des difficultés, avec le ministère de
l'Education, et de celles que vous avez lorsqu'il s'agit de faire se rencontrer
remarquez que c'est une vaste et douloureuse entreprise les
divers comités ministériels. Vous n'avez pas songé
à suggérer au ministre de créer des centres de formation
des fonctionnaires qui s'occupent des divers comités
ministériels? Ils sont combien de millions ou de milliers, je ne sais
plus. Le ministre le sait peut-être. A ce jour, naturellement. Je ne
compte pas ceux qui seront créés ce matin.
M. COURNOYER: Il y a une progression géométrique par
rapport au nombre de fonctionnaires que nous avons. Les comités ne sont
pas nécessairement intimement reliés au nombre mais il y a une
progression géométrique.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui.
M. COURNOYER: S'il y a 35,000 fonctionnaires, on devrait normalement
multiplier...
M. DEMERS: Indirectement proportionnel à l'efficacité.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Pour revenir à des choses plus
sérieuses, M. Lebon, qu'est-ce qui fait, à votre avis, que ces
comités ne se rencontrent pas? Cela me rappelle une pièce de
Labiche, où deux personnages devaient se rencontrer et, jusqu'à
la fin de la pièce, ils finissent par ne jamais se rencontrer. Cela se
retrouve au gouvernement très souvent. Ayant été ministre,
je le sais. Quelles sont les objections que met, par exemple, le
ministère de l'Education à ce que cela fonctionne, à ce
qu'il y ait des rencontres et à ce que vous établissiez, d'un
commun accord, les besoins quantitatifs et qualitatifs dans le domaine de la
main-d'oeuvre? Avez-vous eu des rencontres récentes, ou il y a quelque
temps, avec les responsables du ministère de l'Education?
M. LEBON: Je dois dire non. Par contre, M. Tremblay, je n'ai jamais
été ministre. Evidemment, je peux pas savoir quelles sont les
difficultés qu'éprouvent les fonctionnaires.
M. DEMERS: Je vous félicite! Moi non plus.
M. LEBON: C'est un problème de juridiction, en fait. Je pense
je vous donne mon opinion personnelle que vous êtes encore
mieux placé que moi pour savoir quels sont les problèmes internes
entre les fonctionnaires. Mais une chose que nous savons, c'est qu'ils ne
s'entendent pas. Ils se rencontrent mais ils ne s'entendent pas.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ils se rencontrent mais ils ne savent pas
pourquoi.
M. LEBON: Chacun a une interprétation de l'entente que son
ministre a signée.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, M. Lebon, je vais m'adresser
à mon excellent collègue, le ministre du Travail. Le ministre
pourrait-il nous dire si, à sa connaissance, il y a eu des rencontres de
ces divers comités interministériels?
M. COURNOYER: Régulièrement.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Avez-vous assisté à ces
rencontres?
M. COURNOYER: Pas du tout.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Avez-vous eu des rapports?
M. COURNOYER: Nous avons régulièrement des rapports.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que vous les avez lus?
M. COURNOYER: Ils se ressemblent les uns les autres. Quand on en a lu un
on en a lu deux.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): En substance, pourriez-vous les
résumer?
M. COURNOYER: Pas du tout. Je pense que M. Lebon les a parfaitement
résumés. Il y a des ententes entre le ministre de l'Education et
le ministre du Travail, et la minute où on vient pour mettre ça
en application, on entre dans deux structures qui sont totalement
différentes. Pas nécessairement opposées, mais deux
structures totalement différentes. Il ne faudrait pas passer sous
silence le rôle que jouent encore les commissions scolaires dans la
province de Québec, le rôle que jouent les CEGEP et qui leur sont
donnés par la loi, de faire de l'éducation. En éducation,
ils ont des options entre le professionnel, etc. Et cela relève du
ministère de l'Education.
De notre côté, nous faisons de la formation professionnelle
à des niveaux d'enseignement qui sont peut-être un peu
différents, peut-être même en dehors de ces niveaux
d'enseignement au collégial et dans les écoles polyvalentes. Il y
a toujours et ça a été vrai avant et c'est vrai
aujourd'hui les conflits de deux structures qui sont parallèles
et qui devraient être convergentes. Le genre d'entente que le ministre du
Travail et celui de l'Education font c'est de tenter de faire des structures
convergentes.
Mais quand, d'un côté, des fonctionnaires disent: Je ne
veux pas qu'elle converge de cette façon-là, il y a des
tournoiements dans la ligne qui font qu'on fait ça comme ça. On
essaie de se reprendre par l'autre bord, mais ça va toujours rester
comme ça tant et aussi longtemps qu'une décision ne sera pas
prise de remettre soit sous l'autorité totale du ministère du
Travail et de la Main-d'Oeuvre ou du ministère de l'Education
l'organisation de l'enseignement professionnel des adultes ou de l'enseignement
professionnel tout court.
Nous avons l'enseignement professionnel aux adultes. Cela relève
du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre. Du ministère de
l'Education, nous avons l'enseignement point, qui comporte aussi de
l'enseignement professionnel, mais qui s'adresse d'abord aux enfants, à
l'élémentaire, au secondaire et au collégial. Il y a des
adultes maintenant qui sont au collégial, mais il reste que l'essence
même de l'opération du ministère de l'Education, ce n'est
pas nécessairement la même clientèle que nous avons. Je ne
parle pas de l'employeur, je parle du ministère du Travail, nous n'avons
pas la même clientèle du tout, quoiqu'on parle souvent de la
même chose.
Si le ministère de l'Education consultait peut-être un peu
mieux que nous consultions les mêmes structures que vous
préconisez pour que le ministère du Travail consulte l'industrie,
les véritables responsables, ceux qui connaissent l'industrie, il y
aurait peut-être moins de problèmes de coordination. Mais le
ministère de l'Education n'a pas les mêmes obligations ou les
mêmes tendances que nous, il n'a pas le même matériel que
nous à éduquer si on peut parler de matériel pour
le moment ce n'est pas le même genre de personnes qu'il
éduque, quoique le produit qui sort au bout sert à la même
place.
Cela c'est la difficulté que nous avons. Le produit qui sort au
bout sert à la même place. Mais actuellement je suis non pas
étonné parce que je suis un peu au courant de ce qui se passe
encore dans mon ministère, je ne suis pas étonné que vous
remarquiez un échec au moins presque total de la théologie du
bill 49 dans la pratique des faits.
Il semble bien que ce dont vous accusez le ministère du Travail,
c'est de peut-être se conduire maintenant comme vous accusiez auparavant
le ministère de l'Education de se conduire.
M. LEBON : A ce que je sache, nous n'avons accusé de rien le
ministère du Travail, sauf de ne pas être capable de s'entendre
avec le ministère de l'Education.
M. COURNOYER: Mais il y en a un autre petit bout qui dit que, par
exemple, il y a eu trois réunions des comités consultatifs
régionaux en deux ans ou deux en trois ans.
M. LEBON : Deux en trois ans.
M. COURNOYER: Si ce n'est pas un blâme, je ne comprends rien.
M. LEBON : C'est une constatation, M. le ministre.
M. COURNOYER: Donc, il n'y aurait pas besoin de réunions.
M. LEBON: Nous autres, nous pensons que...
M. COURNOYER: Vous croyez utile de dire qu'il ne peut y avoir de
réunion que sur convocation du ministère du Travail. Si vous
dites qu'il n'y en a eu que deux dans les trois dernières années,
ce n'est pas un blâme, ça?
M. LEBON : Si vous voulez le prendre comme ça.
M. COURNOYER: Je le prends comme ça. Mais ce n'est pas une
félicitation non plus.
M. LEBON: Ce n'est sûrement pas une félicitation.
M. COURNOYER: Mais à toutes fins utiles vous constatez que ce qui
était prévu théoriquement dans le bill 49, c'était
la consultation. On m'a parlé, quand je suis arrivé comme
ministre du Travail, d'un vaste réseau de comités consultatifs
régionaux de consultation, et qu'on ne ferait plus rien sans consulter
les gens les premiers impliqués en matière de formation
professionnelle. Il doit s'être fait quelque chose pendant les trois
dernières années. Et je n'ai pas consulté grand monde si
j'ai fait des réunions deux fois en trois ans. C'est ça que vous
voulez dire.
M. LEBON: C'est sûr que nous...
M. COURNOYER: Je ne prends pas ça pour un blâme que vous
n'avez pas le droit de faire. Ne vous mêlez pas. Vous avez le droit de le
faire.
C'est une constatation de fait que je constate, moi aussi.
M. LEBON: Le problème ne se situe pas seulement là, quand
même. Il faut réaliser que c'est un aspect. Si des comités
consultatifs avaient siégé plus souvent, on aurait
peut-être été plus satisfait mais même là les
mandats des comités consultatifs étaient trop larges et leur
composition hétérogène, comme on l'a dit tout à
l'heure. Peut-être avez-vous bien fait alors de ne pas les convoquer,
cela n'aurait rien donné.
M. COURNOYER: C'est peut-être pourquoi on en est venu à
cette conclusion à un moment donné.
M. LEBON: C'est ça.
M. COURNOYER: C'est pourquoi je dis que ce n'est pas un blâme.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Bon, si l'on se resitue dans le cadre des
discussions que nous avons eues jusqu'à présent, et pour
lesquelles d'ailleurs la commission a été convoquée, il y
a un problème. C'est la question de la possibilité pour un
certain nombre de travailleurs de travailler lorsqu'ils sont appelés et
d'obtenir le droit de travailler, c'est-à-dire des permis pour
travailler, une carte de travail que le ministre, actuellement, décerne
ou octroie, paraît-il, à un rythme assez extraordinaire. Dans
cette perspective-là, est-ce que les amendements que vous proposez
à la loi 49 pourraient apporter une solution? Vous savez, la commission
est née d'une demande qui a été présentée et
qui a été acceptée par la Chambre pour examiner la
question des gens qui, étant en mesure de travailler, ayant souvent eu
l'occasion de décrocher des emplois disponibles, ne pouvaient pas les
occuper faute d'avoir des permis.
Vous nous présentez ce matin un mémoire qui est d'un ordre
assez général qui est très bien fait, d'ailleurs, sur
l'appréciation du fonctionnement de la loi 49. Mais ce pourquoi la
commission est réunie, c'est pour s'enquérir des moyens de
régler la question des travailleurs qui ne peuvent pas obtenir de permis
de travail à l'heure actuelle. Donc, dans cette optique-là, je
vous pose la question suivante: Est-ce que vous croyez que les amendements que
vous proposez seraient de nature, sinon à faire disparaître
complètement, du moins à atténuer la rigueur de ce
problème qui est posé aujourd'hui à la commission
parlementaire par ses propres membres, les membres de l'Assemblée
nationale.
M. LEBON: Tout d'abord, je pense que la commission parlementaire avait
quand même trois sujets. A moins que je me trompe, M. le
Président, il s'agissait de l'arrêté en conseil 2711 sur
les permis, du bill 49 sur la formation et de la liberté syndicale.
C'est ce qu'on a vu dans les appels d'offres.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Dans les convocations que vous avez
reçues.
M. LEBON: Oui, c'est un appel d'offres.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Excusez-moi, si vous permettez, je vais
préciser. Tout cela, d'accord, a été englobé dans
les objectifs du travail que devait poursuivre la commission ici, mais à
partir d'un problème précis, celui de l'incapacité dans
laquelle se trouvent des travailleurs d'exercer leur métier en raison de
l'absence de permis de travail. Or, vous nous présentez
une critique ou une appréciation du fonctionnement de la loi 49,
mais, dans l'optique que je viens d'indiquer, est-ce que ces propositions
partent d'une préoccupation qui rejoint celle de la commission
lorsqu'elle a été convoquée?
M. LEBON: Evidemment, le mandat que nous avions ici était de
traiter du bill 49, à savoir la formation de la main-d'oeuvre. Par
contre, vous avez pu, je pense, réaliser que nos recommandations
tenaient aussi compte, justement, de l'arrêté en conseil 2711,
à savoir le contrôle quantitatif de la main-d'oeuvre.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui.
M. LEBON: Comme on l'a dit hier et avant-hier, la commission de
l'industrie de la construction siège le 22 et le 25 pour établir
des critères qui pourraient facilement se marier avec les
recommandations qui sont ici.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je vois que vous saisissez bien le
problème. D'ailleurs, vous avez une proposition dite globale voulant que
des amendements soient apportés à cette loi pour permettre de
rendre sectorielle l'application de cette loi 49. Dans les modalités,
vous dites notamment, à la page 12 de votre mémoire: "Voir
à la coordination des disponibilités physiques et humaines
relatives à la formation dans chaque métier" et, ensuite,
"octroyer, au niveau régional, des commandes de formation selon les
besoins établis dans chacun des métiers". Vous posez ici, en
parlant de cette "sectorialisation" si je peux me permettre ce
néologisme qui est familier aux fonctionnaires du gouvernement le
problème de contingentement dans les différents métiers de
la construction ou autres.
Quelle est la conception que vous vous faites de ces "commandes de
formation selon les besoins établis dans chacun des métiers"?
Entendez-vous qu'il faudrait faire un inventaire des besoins régionaux
et, ensuite, demander que les centres de formation appelons-les comme on
voudra tiennent compte de ces inventaires qui établissent
qualitativement et quantitativement les besoins dans les différents
corps de métiers?
M. LEBON: M. le Président, je ne veux certainement pas retourner
au débat sur l'arrêté en conseil 2711; je
répète que les normes et les critères d'émission de
permis seront établis soit par la commission d'ici à la fin du
mois ou par le ministre, si la commission n'en vient pas à une entente.
Je suis peut-être optimiste. Je crois que les parties vont en arriver
à une entente d'ici à la fin du mois pour établir des
critères d'émission de permis.
Quant au quantum de la formation, à savoir le nombre d'individus
qu'on doit former au niveau régional et au niveau provincial, je pense
que, quels que soient les critères, il est évident que le
système de formation doit tenir compte de la quantité d'individus
qu'il faut former dans chaque métier, comme on l'a dit, basée sur
les statistiques de la Commission de l'industrie de la construction qui seront
meilleures, évidemment, d'année en année.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est un objectif à court ou à
moyen terme, appelez-le comme vous le voulez. Il y a, quand même, un
problème pratique qui a fait l'objet des discussions de la commission
depuis le début, c'est le problème des travailleurs qui,
actuellement, ne peuvent pas travailler dans les corps de métiers parce
qu'ils n'ont pas de permis de travail. Vous nous proposez un système,
par voie d'amendements à la loi 49, qui réglerait l'ensemble du
problème de la formation par des relations, mieux suivies entre les
divers ministères intéressés en vue d'en arriver à
établir des quanta de travailleurs dûment formés. C'est
l'objectif que vous poursuivez.
Nous avons un problème pratique et concret qui a
été évoqué à l'envi par tous les
députés qui ont participé à ces discussions, c'est
le problème des gens qui, à l'heure actuelle, sont capables
d'exercer un métier et ne peuvent pas le faire parce qu'ils n'ont pas de
permis de travail. Qu'est-ce que vous répondez à cela?
M. LEBON: Les parties, patronale et syndicale, et le ministre
lui-même ont dit que, si le contingentement était une
conséquence d'un contrôle quantitatif, il fallait le subir. C'est
évident que, pour la formation, ce qui nous intéresse, c'est que
les parties soient consultées pour le qualitatif et qu'il y ait une
certaine coordination sur le quantitatif. Il y avait un député
hier qui ne comprenait pas pourquoi il ne pouvait avoir de main-d'oeuvre dans
une région par rapport à une autre, etc. Est-ce qu'on tient
compte de la mobilité de la main-d'oeuvre quant au système de
formation? Je parle toujours en fonction du système de formation.
Si, par exemple, les électriciens sont mobiles à 90 p.c.,
c'est sûr qu'il y aura beaucoup plus de coordination au niveau provincial
sur le quantum que sur les manoeuvres qu'on sait n'être pas mobiles. Ce
sera un besoin régional dans un métier particulier qui, lui, ne
déménage pas, tandis que, dans un métier où il y a
beaucoup de mobilité, ce sera plutôt des directives émises
au niveau provincial pour ne pas noyer le marché du travail et faire des
chômeurs, c'est sûr.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Lebon, vous avez répondu à
quelques-unes des questions que je voulais vous poser. Votre mémoire se
situe dans la perspective d'amendements à la loi 49. J'aimerais savoir
du ministre c'est la dernière question que je veux poser
ce qu'il pense de ces recommandations qui nous sont faites ce matin et qui me
paraissent pertinentes.
Qu'est-ce qu'il a imaginé pour améliorer la pratique de la
loi 49 dont on a dit qu'en principe c'était une bonne loi?
M. COURNOYER: J'ai demandé, il y a déjà un certain
temps, au Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre de
réexaminer totalement la loi 49. Au moment où nous nous parlons,
vous avez en face de vous l'industrie de la construction et c'est d'abord un
problème de construction que nous discutions aujourd'hui. Mais M. Lebon
a mentionné tantôt que l'une des carences de cette loi
était qu'elle ne prévoyait pas une participation plus forte des
différents secteurs d'activité dans l'industrie sur une base
autonome. Actuellement c'est une commission de formation professionnelle, dont
vous avez décrit tantôt les effectifs. Comme représentants
patronaux, vous êtes deux pour représenter l'ensemble des patrons
du Montréal métropolitain et c'est la même chose pour les
représentants syndicaux qui siègent à la même
commission. C'est une constatation qui m'a amené, moi au moins, à
penser que, malgré toute la bonne volonté de ceux qui ont
conçu le bill 49, certaines choses se découvrent à l'usage
comme pas aussi pratiques, aussi intéressantes qu'au point de
départ on aurait voulu qu'elles le fussent.
J'ai demandé au conseil consultatif une révision de toute
la loi. Les choses qui sont dites au nom de la construction aujourd'hui, il est
possible que dans d'autres secteurs or. dise exactement la même chose ou
le contraire. Le Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre est un
peu mieux équipé, si je peux m'exprimer ainsi, au point de vue de
la représentation que les seuls membres de la construction pour faire un
examen global de ça.
Remarquez que je ne blâme pas le Conseil consultatif du travail et
de la main-d'oeuvre de ne pas avoir commencé encore cette étude.
Il y a l'article 45, dont vous avez parlé tantôt, qu'il est
très important, à mon sens, de modifier bientôt; c'est sur
les licenciements collectifs. L'article 45 a causé beaucoup plus
d'ennuis dans l'industrie que dans la construction. On a parlé de
structure; celle qui est en place actuellement ne semble pas donner
satisfaction aux gens qui vivent dedans, et nous devons réviser cette
loi. Mais quand à savoir comment la réviser, je me passe de
commentaire actuellement, étant donné que j'ai demandé
qu'on la révise et qu'on me fasse des recommandations.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je remercie le ministre de nous dire qu'il a
demandé de réviser cette loi parce que j'estime et je
tiens à vous le dire, M. Lebon, et à ceux que vous
représentez que vos recommandations sont basées sur un
examen lucide et sur une appréciation pratique, concrète de cette
mise en application de la loi 49. Nous sommes d'accord, en principe, avec vous,
il restera à définir les modalités des amendements que
vous proposez. Mais je retiens que vous déplorez d'abord cette absence
de coordination entre des ministères qui devraient se préoccuper
de coordonner leur activité afin que la formation professionnelle dont
vous parlez dans votre mémoire ne soit pas conçue et
organisée au hasard sans tenir compte des besoins actuels du
Québec. Surtout que l'on n'aille pas commettre cette erreur magistrale
de former des gens qui ne trouveront pas emploi. C'est extrêmement
important et je crois qu'il faut retenir cet aspect de votre mémoire. Je
vous remercie de nous l'avoir présenté.
M. LE PRESIDENT: Le député de Beauce.
M. ROY (Beauce): M. le Président, j'ai remarqué, à
la lecture du mémoire de M. Lebon, qu'on a souvent fait
référence à l'échec du bill 49, l'échec des
décrets, l'échec des comités, l'échec des
pourparlers, l'échec des ententes, l'échec dans les tentatives de
collaboration entre les ministères. Ne croyez-vous pas que, si nous en
sommes rendus là, tout ceci découlerait du fait qu'il a
été à peu près impossible à tous les
organismes existants de connaître les données essentielles,
c'est-à-dire les besoins exacts de chaque secteur d'activité,
dans chaque région du Québec?
Est-ce que le problème fondamental ne découle pas de ce
problème de connaître d'abord les besoins de chaque région,
dans chaque secteur?
M. LEBON: Evidemment, me limitant toujours au bill no 49,
c'est-à-dire à la formation professionnelle je pense que nos
recommandations veulent tenir compte des besoins régionaux par la
formation de comités de métiers régionaux.
M. ROY (Beauce): Oui, mais, jusqu'ici, cela n'a pas été
possible, si j'en juge par ce que vous avez dit tout à l'heure.
M. LEBON: Antérieurement, par la Loi de l'aide à
l'apprentissage, nous avions ces comités régionaux. Maintenant,
le bill no 49 les a abolis pour de bonnes raisons. Nous croyions que
c'étaient pour de bonnes raisons. Comme on le dit dans le
mémoire, après trois ans, on se rend compte que cette loi, qui
était théoriquement bonne, est inapplicable.
Nos recommandations tiennent compte, comme vous le dites, des besoins
régionaux par métier.
M. ROY (Beauce): Puisqu'on parle de besoins régionaux par
métier, est-ce que vous pouvez faire des projections pour deux ans
à venir des besoins qu'il y aura dans chaque secteur dans l'industrie de
la construction et cela, dans chaque région? Je ne parle pas sur le plan
du permis de travail. Je parle au niveau de la qualification professionnelle,
parce qu'il y a
quand même de grandes variances dans l'industrie de la
construction, d'une année à l'autre.
On sait que, l'année dernière je pense que vous
l'admettez et que vous le savez encore mieux que nous dans l'industrie
de la construction, cela a été une période de crise, alors
que l'année 1972 connaît une expansion assez considérable.
Est-ce que vous pouvez prévoir quels seront les besoins? Si on parle de
formation professionnelle, au niveau des CEGEP, à l'intérieur du
Québec, il faut pouvoir planifier sur une période de cinq ou dix
ans. J'estime que ce doit être d'au moins cinq ans. Est-ce que vous
pouvez prévoir toutes les conditions économiques, les
fluctuations, les politiques monétaires gouvernementales, les
problèmes que doivent rencontrer l'économie
nord-américaine, l'économie canadienne, l'économie
québécoise, etc?
M. LEBON: Toujours en m'en tenant à la formation professionnelle,
je pense que les parties syndicale et patronale peuvent faire des projections
sur les besoins technologiques de la main-d'oeuvre.
M. ROY (Beauce): Ils peuvent faire des projections, mais elles peuvent
varier.
M. LEBON: Faire des projections sur les besoins de connaissances
techniques de la main-d'oeuvre pour deux, trois, quatre, cinq ans, je pense que
c'est assez facile.
M. ROY (Beauce): Mais avec une variance.
M. LEBON: Je ne parle pas il faut bien s'entendre du
quantitatif. Je pense qu'on a épuisé le sujet hier.
M. ROY (Beauce): Non, je ne parle pas du quantitatif.
M. LEBON: Les besoins de formation en main-d'oeuvre, c'est-à-dire
l'aspect technique de la formation, à savoir les nouvelles
méthodes de construction qui viennent, je pense qu'on peut facilement
prévoir cela, afin de former la main-d'oeuvre pour qu'elle soit apte
à jouer le rôle qu'elle aura à jouer dans un, deux ou trois
ans.
M. ROY (Beauce): Je vais prendre un exemple. Est-ce que vous pouvez
faire une projection, à l'heure actuelle, sur les investissements qu'il
pourrait y avoir au Québec, par exemple, dans le domaine de la
construction industrielle, dans le domaine de la construction commerciale? Si
vous pouvez prévoir ces besoins pour cinq ans à venir, de quelle
marge de variation devez-vous tenir compte pour être le plus juste
possible?
M. LEBON: Je regrette, encore une fois, je pense qu'on tente de parler
indirectement du règlement no 2711.
M. ROY (Beauce): Je ne parle pas du règlement 2711; je parle de
la qualification professionnelle. Cela fait deux fois que je le dis.
M. LEBON: Sur la qualification professionnelle, il est facile de
prévoir cela, oui.
M. ROY (Beauce): Vous pouvez le prévoir! Alors, vous êtes
en mesure de savoir, vous autres, quels seront les investissements qui pourront
se faire au Québec? Vous pouvez prévoir aujourd'hui, au point de
vue qualitatif et sur le plan professionnel, quelles seront les politiques du
gouvernement fédéral, du gouvernement provincial ou encore les
conditions de l'économie nord-américaine! Vous savez que les taux
d'intérêt et les politiques monétaires influent grandement
sur le domaine de la construction. Vous pouvez prévoir tout cela?
M. LEBON: Je pense que j'ai déjà répondu à
la question. Je ne veux pas m'embarquer sur les investissements, parce qu'il
est question de connaissances. Pour ma part, le mandat que j'ai ici, c'est de
parler de formation professionnelle. Les connaissances, je pense, sont facile
à prévoir. Maintenant, dans quelle proportion les investissements
vont tomber en électronique plutôt qu'en je ne sais quoi? C'est
bien sûr qu'il y a une variance et c'est aussi relié au
contrôle quantitatif, qu'on le veuille ou non.
M. ROY (Beauce): Si vous faites des contrôles quantitatifs
à partir des politiques, des connaissances et des données que
vous avez aujourd'hui. A ce moment-là vous risquez... Je prends un
exemple: en supposant que le décret 2711 ce n'est pas pour vous
amener à discuter du décret 2711 ait été
appliqué à la lettre cette année, comment pensez-vous
qu'il aurait été possible de répondre à la demande
dans l'industrie de la construction? Parce que, en somme, il y a aussi la
question des permis de travail qui concerne également les travailleurs
professionnels.
Est-ce que vous avez des données à l'heure actuelle sur
ceux qui sont qualifiés et qui ne sont pas reconnus par les lois de
qualification? Il y en a dans tout le Québec. Je vais parler des
travailleurs autonomes, des travailleurs artisans qui ne sont pas connus, qui
ne sont pas enregistrés ou encore qui ne peuvent se qualifier parce
qu'ils ne répondent pas aux normes établies, mais qui ont quand
même vingt ans d'expérience dans l'industrie de la construction et
qui peuvent être très mobiles. Est-ce que vous avez des
donnés là-dessus?
M. LEBON: Le prérequis pour un individu, dans un métier
qualifié, c'est évidemment d'obtenir son certificat de
qualification. Je ne pense pas qu'on puisse empêcher un individu d'aller
chercher son certificat de qualification. Si l'individu en cause est
qualifié, il n'aura, selon nos recommandations, qu'à aller
chercher son certificat de qualification.
M. ROY (Beauce): S'il ne peut pas l'avoir? Parce que, par exemple, c'est
une question de scolarité au point de départ.
M. LEBON: Evidemment, s'il n'est pas compétent il ne l'aura
pas.
M. ROY (Beauce): Ce n'est pas une question de compétence, je
parle d'une question de scolarité. Ce n'est pas une question
d'arithmétique et de comptabilité, si vous voulez, qui peut
influencer énormément un travailleur, un peintre, par exemple, ou
encore un menuisier ou un autre.
M. LEBON: Monsieur...
M. COURNOYER: Là-dessus, il y a deux choses qui peuvent se
produire. Il y a déjà un avis de publié pour parler
d'attestation de compétence et non pas de certificat de qualification.
Pour ce qui est du certificat de qualification, vous ne me ferez pas dire
à un type qu'il satisfait aux mêmes standards que quelqu'un
d'autre et qui peut s'offir n'importe comment, s'il ne satisfait aux
mêmes standards que quelqu'un d'autre. C'est exactement ce que M. Lebon
dit. S'il n'est pas compétent dans le sens de qualifié suivant
des règlements de qualification, il ne l'aura pas mais on va lui donner
une attestation de compétence qui va être l'équivalent. Il
va avoir le droit de travailler quand même.
M. ROY (Beauce): Il va avoir le droit de travailler, mais est-ce que ce
droit va être limitatif?
M. COURNOYER: Il peut être limité par l'autre
règlement 2711 qui n'a rien à voir avec celui-là.
M. ROY (Beauce): C'est par le règlement 2711 que vous allez le
limiter?
M. COURNOYER: C'est le règlement 2711 dont on a discuté
hier toute la journée et avant-hier aussi, qui traite du contrôle
quantitatif de la main-d'oeuvre une fois qu'un individu a subi avec
succès les examens de qualification ou a reçu l'attestation de
compétence dont il est question dans les amendements au règlement
no 1 ou 2, je ne sais pas lequel, ils ont été publiés dans
la Gazette officielle du 8. Nous voulons reconnaître l'individu qui a une
expérience par une attestation d'expérience. On peut dire: Lui,
c'est un menuisier. On ne lui donnera pas un certificat de qualification pour
autant, on va lui donner une attestion d'expérience parce qu'il ne
satisfait pas aux standards établis pour les autres. Il n'a pas la
neuvième année ou la dixième année, mais il est
capable de travailler quand même, il a travaillé pendant vingt
ans, on va reconnaître ça. On ne peut pas lui donner un certificat
de qualification.
Quant à savoir s'il va travailler sur des chantiers de
construction, quant à savoir s'il va prendre la place d'autres personnes
qui y sont depuis longtemps, c'est le règlement 2711, quantitativement.
Un type peut fort bien avoir son certificat de qualification comme maître
électricien, comme électricien actuellement, et ne pas avoir le
droit de travailler sur un chantier de construction parce qu'il n'a pas
travaillé dans les deux dernières années, si j'applique le
règlement 2711 tel qu'il est rédigé.
M. ROY (Beauce): C'est ça.
M. COURNOYER: S'il n'a pas travaillé, il n'était pas dans
l'industrie de la construction et ce dont on a parlé hier au sujet du
règlement 2711, c'est exactement ça.
M. ROY (Beauce): Est-ce que le ministre pourrait nous dire s'il compte
alors modifier les règlements concernant la qualification
professionnelle de façon qu'on accorde beaucoup plus d'importance
à l'expérience et à la grande expérience dans le
travail pour lequel on qualifie l'ouvrier qu'à des questions
secondaires? Je vais prendre un exemple en particulier pour dire qu'il devrait
y avoir quelque chose de fait, l'exemple une personne qui est reconnue comme
étant un artiste avec 25 ans d'expérience, qui a toujours
été un travailleur autonome et qui se présente au centre
de qualification professionnelle, passe les examens à deux reprises et
les manque. Pourquoi? Parce qu'il y a des détails techniques, on lui a
demandé des choses qui ne concernent pas son métier.
Je vais prendre un autre exemple, M. le Président, dans le
domaine des opérateurs de machinerie lourde puisqu'on parle de
qualification professionnelle en général.
Il y a des gens qui sont qualifiés pour actionner certaines
machines lourdes et leurs patrons les font travailler soit sur un bélier
ou une pelle mécanique. Quant à la qualification, on lui demande
d'être compétent pour faire fonctionner à peu près
cinq ou six machines. Il y a même de ces machines que les entrepreneurs
qui les emploient n'ont pas, n'ont jamais eues. Ils n'en ont pas besoin non
plus. D'ailleurs, vous avez eu des lettres. Il y a eu énormément
de correspondance d'échangée à ce sujet.
Je vous pose donc une question. Il ne s'agit pas d'être cynique
avec ces choses. L'expérience, à ce jour, nous a
démontré que, concernant la qualification professionnelle, il y a
trop de chinoiseries je prends ce terme pour qualifier un homme
compétent.
M. COURNOYER: Là-dessus, disons que l'endroit où vous
êtes assis et celui où je le suis, ce n'est pas tout à fait
la même place. Je suis, comme ministre du Travail, responsable de la
qualification professionnelle. Je suis obligé de prévoir un peu
ce qui va se produire. Toute la philosophie du règlement no 1, c'est la
polyvalence.
M. ROY (Beauce): Mais qu'est-ce que vous faites de la
spécialisation? On veut faire de la qualification au niveau de la
spécialisation. Et, aujourd'hui, on parle de spécialisation et on
nous arrive avec la polyvalence des travailleurs!
M. COURNOYER: Qui a fait quoi au sujet de la spécialisation?
M. ROY (Beauce): On a beaucoup parlé de spécialisation. On
a demandé aux ouvriers de se spécialiser.
M. COURNOYER: Qui a demandé cela?
M. ROY (Beauce): Ils doivent avoir des cartes de qualification
professionnelle et se spécialiser dans tel domaine.
M. COURNOYER: Ces cartes ont justement un caractère de
polyvalence. Actionner de la machinerie lourde, c'est actionner de la
machinerie lourde. Je suis bien sûr que le type qui est capable de faire
fonctionner de la machinerie lourde, avec bien des manettes, est capable
d'actionner celle qui a moins de manettes. Et quand celle qui a moins de
manettes ne travaillera pas, il pourra aller travailler sur celle qui a plus de
manettes. Ce n'est pas être cynique que de dire cela. J'ai pris un
exemple très précis. Quand il y a plus de manettes, cela prend
plus de temps à apprendre le métier. Mais je peux lui donner un
certificat de qualification comme opérateur de machinerie lourde. Il se
présente chez'le même entrepreneur, qui veut l'avoir aujourd'hui,
et il dit: Moi, je suis capable d'actionner de la machinerie lourde. C'est ce
qui est marqué sur mon certificat. Et ce n'est pas vrai, il conduisait
un rouleau compresseur sur la route. Conduire un rouleau compresseur et
conduire un D-8, ce n'est pas pareil. Actionner une grue mobile et actionner
une pelle, ce n'est pas pareil. Il faut que nous donnions des bases
générales. C'est, je pense, ce que nous recherchons un peu
partout. Il faut trouver un métier, l'identifier, faire des modules,
comme on le fera probablement dans l'automobile, et dire: Quand vous aurez tous
les modules, nous vous donnerons un certificat de qualification.
M. ROY (Beauce): Mais en attendant?
M. COURNOYER: En attendant, nous allons vous reconnaître les
capacités dans ce module. Je parle d'attestation d'expérience, je
parle de certificat d'un module. Je dis que ce n'est peut-être pas
facilement applicable dans l'industrie de la construction. Quand on est
menuisier, on est menuisier, mais allez voir la différence. Un
menuisier, c'est un menuisier, pour vous et pour moi. Mais, pour pendre une
porte, il y a des menuisiers à qui je ne donnerais pas de bois. Mais ils
ont le certificat de qualification dans les mains, par exemple. Quand ils se
présentent chez l'employeur, ils demandent le même salaire que les
autres. Ils prennent le salaire de $4.50 ou $5 l'heure et ils peuvent briser
trois portes en les posant. Le président me racontait hier que des
menuisiers, aux Barbades, il n'y en a pas tellement. Quand il a
été aux Barbades le président sort de temps en
temps il y a des gens qui ont posé des pentures et des
poignées de portes sur le même bord ! Cela n'a l'air de rien !
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est arrivé au parlement! Je souligne
au ministre qu'on a posé ma porte à l'envers, au parlement.
M. COURNOYER: Voilà! Ce n'est pas une farce!
M. ROY (Beauce): Etait-on qualifié par votre
ministère?
M. COURNOYER: Aux Barbades, non!
M. DEMERS: Il n'y a qu'un inconvénient, aux Barbades: Il n'y a
pas de bois!
M. COURNOYER: Je pense, M. le Président, que le
député a parfaitement raison de se préoccuper. Ce n'est
pas une question de sourire pour sourire. Vous avez raison de vous
préoccuper. Mais, à la place où je suis assis, je dois me
préoccuper de ce qui arrive avec les changements technologiques assez
nombreux. Si un individu est très spécialisé et que je lui
ai donné un certificat de qualification très
spécialisé, quand il arrive au bout et que son métier
disparaît, qu'est-ce que je fais avec lui? Qu'est-ce que je fais avec les
briqueteurs, aujourd'hui?
M. ROY (Beauce): Je pense qu'il y a un point que nous oublions. C'est
peut-être là une source de confusion. On veut, en quelque sorte,
imposer aux entrepreneurs des individus. Je pense que le problème, c'est
la "contingentomanie".
C'est un grand mot, mais je pense qu'à l'heure actuelle nous
sommes en face d'une querelle de technocrates qui sont atteints de
"contigentomanie". On veut tout organiser l'affaire pour l'avenir envers la
"contingentomanie". Les employeurs ont assez de jugement pour savoir quand un
ouvrier pose les poignées de portes du même côté que
les pentures. Mais est-ce qu'on fait confiance aux employeurs ou si on ne leur
fait pas confiance? Il y a tout de même des contremaîtres dans
l'industrie de la construction...
M. COURNOYER: Oui, très confiance aux employeurs. Mais il y en a
un paquet d'employeurs qui disent: Compte tenu du fait qu'on emploie et qu'on
met à pied dans ça, que quand ils emploient un ouvrier, il est
compétent pour travailler dans le métier qu'il dit qu'il est
compétent pour travailler dedans. C'est en anglais pas mal ça, M.
le député de Chicoutimi?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ce n'est pas du français
exemplaire.
M. COURNOYER: N'oubliez pas qu'il y a des règles dans les
décrets qui ne sont peut-être pas bonnes pour certains individus,
mais qui sont là quand même. Lorsque j'emploie quelqu'un, je le
paie. Quand ça me coûte trois fois plus ou que ça prend
trois gars pour remplir la fonction, que j'en ai payé trois pour pendre
la même porte, je prends mes précautions, et les employeurs sont
intéressés autant que les représentants syndicaux. Il n'y
a pas de problème.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous pendez le gars?
M. COURNOYER: Les employeurs, le système de formation, c'est pour
mieux servir les employeurs. Ce n'est pas pour leur nuire. Mais quend ils
changent d'emploi continuellement, l'individu qui part avec sa carte de
compétence, d'artisan dont vous parlez, probablement extrêmement
compétent, il est compétent pour le client que vous aviez.
C'était parfait. Vous avez expliqué ça hier. Vous avez
dit: Nous autres, nous construisons des granges, des porcheries...
M. ROY (Beauce): Pas seulement ça.
M. COURNOYER: Non, mais un gars qui construit ça il devrait avoir
le droit de faire ça. Si je lui donne le certificat de qualification de
menuisier parce qu'il a construit des granges, c'est normal. Et après
ça il va le vendre à Montréal son certificat de menuisier
et il va dire: Moi je suis un menuisier, employez-moi. Vous avez besoin de
menuisiers à Montréal, on m'a dit qu'il en manquait. Je prends
votre certificat à vous, je prends le type qui n'a aucune forme
d'expérience là-dedans, dont la formation est inexistante, il
n'en a pas de formation. Mais parce qu'il se servait d'un marteau, on le prend
et on lui donne un certificat de qualification. Il se promène avec ce
certificat à travers la province pour chercher de l'emploi, et lorsque
l'employeur l'emploie il le retourne chez lui au bout de trois jours parce
qu'il a perdu de l'argent avec lui. Et moi je l'ai sur les bras.
Il dit: Je suis qualifié, j'ai mon certificat. Trouve-moi un
emploi comme menuisier, Cournoyer.
M. ROY (Beauce): Je pense qu'on vient justement de toucher un point
fondamental. La qualification professionnelle devrait être une chose bien
précise. Nous y croyons et nous sommes d'accord avec la qualification
professionnelle. Mais lorsque la qualification professionnelle veut se
mêler de contingentement, je pense que c'est là qu'arrivent un peu
les difficultés. Je vais prendre un exemple.
Nous avons, dans le sud-est du Québec et pas seulement la
région chez nous, dans plu- sieurs régions plusieurs
personnes, pour ne pas dire des centaines de travailleurs, qui se sont
spécialisées dans le posage de gyproc aux Etats-Unis. C'est un
exemple que je cite à l'intention du ministre. Pour poser du gyproc dans
la province de Québec, ils ont besoin d'une carte de menuisier. Il y a
des entrepreneurs qui sont intéressés à leur faire poser
du gyproc parce que c'est une spécialité. Les cartes de
qualification professionnelle sont en retard sur le développement de la
spécialisation. Il arrive énormément de complications.
Même il y a eu des annonces à la radio récemment,
dans lesquelles on demandait, pour aller travailler dans l'Ontario, des
travailleurs spécialisés dans le posage de gyproc. Il n'y a pas
de problèmes pour aller travailler en Ontario, ou aux Etats-Unis. Mais
lorsque ces gens veulent exercer le même métier dans la province
de Québec, il y a complications par-dessus complications et ces gens
perdent leur temps et énormément d'argent.
Je voudrais revenir à M. Lebon sur ce point. Etant donné
que vous avez fait des études sur la qualification professionnelle,
est-ce que vous prévoyez faire d'autres recommandations par
exemple au ministère du Travail dans ce domaine de façon
à ce que la polyvalence comme disait l'honorable ministre tout
à l'heure empêche la spécialisation d'ouvriers? Je
vais prendre un exemple en vous posant cette question. Vous avez quand
même des menuisiers qui sont spécialisés dans les finitions
extérieures de bâtiment. Et vous en avez d'autres qui sont
spécialisés dans les finitions intérieures.
Si l'employeur se base uniquement sur la carte de qualification
professionnelle et qu'il engage des gens qu'il ne connaît pas, de quelle
façon prévoyez-vous être capables de remédier
à cette situation, pour atteindre les objectifs que vient
d'énumérer le ministre, de façon que vous puissiez offrir
aux employeurs une main-d'oeuvre experte?
M. LEBON: Je m'excuse, mais je représente quand même 20,000
employeurs. Le fait que les employeurs veulent participer à
l'élaboration des normes, c'est sûrement, comme le ministre le dit
aussi, pour nous satisfaire. C'est sûr qu'on ne pénalisera pas les
employeurs qu'on représente. Les comités consultatifs provinciaux
de chaque métier vont avoir à régler toutes les
difficultés qui peuvent survenir dans ce métier, de façon
à bien servir les employeurs, puis en même temps à donner
du travail à ceux qui sont qualifiés.
M. ROY (Beauce): Combien y a-t-il de métiers reconnus, à
l'heure actuelle, dans l'industrie de la construction?
M. LEBON: Vingt-sept.
M. ROY (Beauce): Combien de spécialisations maintenant?
M. COURNOYER: Qu'est-ce que vous entendez par spécialisation?
M. ROY (Beauce): Un poseur de tuile, un poseur de gyproc, une personne
qui va se spécialiser, par exemple, dans les couvertures.
M. COURNOYER: C'est un métier.
M. ROY (Beauce): Oui, il est inclus dans un métier, mais est-ce
que le ministère ou encore votre association ou quelqu'un d'autre a fait
un inventaire de tous les genres de travaux qu'il y a à faire dans
l'industrie de la construction?
M. COURNOYER: Disons qu'il y a les plans de carrière que nous
faisons chez nous. Cela peut vous donner une idée de ce que c'est. Pour
chaque métier, on peut dire quelles sont les opérations ce que
ça prend, pour tous ceux dont les plans de carrière sont
terminés. C'est épais comme ça.
M. ROY (Beauce): Il y en a.
M. COURNOYER: On me dit qu'il y avait 573 classifications avant.
M. ROY (Beauce): Puis, vous voulez entrer 573 classifications dans 25
cadres.
M. COURNOYER: On ne veut pas, c'est fait.
M. ROY (Beauce): En reconnaissant à peu près 25
métiers. Vous voulez entrer 573 spécialisations dans à peu
près 25 métiers. Alors, celui qui se spécialise dans un
domaine, parce qu'il travaille pour un gros entrepreneur, lui n'a pas de
possibilités.
M. COURNOYER: Il se spécialise, mais après avoir acquis
les connaissances de base dans un métier.
M. ROY (Beauce): Oui, mais pourquoi perdre du temps à
étudier pendant cinq ans toutes sortes de choses, vu qu'il peut gagner
sa vie dans un métier? Je vais prendre un autre exemple, M. le
Président; c'est quand même important. Il y a des gens qui se
spécialisent dans le posage de tapis; ils voudraient avoir une carte
pour poser du tapis. Le type veut poser uniquement du tapis, parce qu'il est
vendeur de tapis en même temps. Il est obligé de suivre des cours
pour apprendre le posage de prélart, le posage de tuile, tous les
revêtements mous possibles et impossibles. Il n'en a pas besoin.
M. COURNOYER: Cela va peut-être lui éviter de
découvrir, lorsqu'on passera du tapis à un autre matériel,
qu'il n'a plus rien à faire. Il aura appris un métier pondant le
temps qu'il pouvait l'apprendre; il pourra peut-être se placer ailleurs,
ce qu'il ne pourra pas faire si je le spécialise trop et qu'après
on change de matériau.
Il y a quelqu'un qui a affirmé hier que le
préfabriqué s'en venait à grands pas. Quand on va
être entré dans le préfabriqué de plain-pied, encore
plus profondément que nous y sommes actuellement, bien, le tapis va
être posé en boutique, puis le type ne le posera plus dans la
maison. Il n'y en aura peut-être plus du tout, du tapis, ça change
les matériaux.
M. ROY (Beauce): Oui, mais, à ce moment-là, comment lui
faire suivre un cours pour des produits qui ne sont pas encore connus?
M. COURNOYER: Je lui donne des éléments de base.
M. ROY (Beauce): Vous parlez d'avenir.
M. COURNOYER: M. le Président, je donne à l'individu les
éléments de base communs. On peut bien dire qu'il n'a pas besoin
d'une 10e année pour poser du tapis entre vous et moi. Dès que
vous avez une règle, que vous pouvez mesurer et que vous l'avez appris
techniquement, vous n'avez pas besoin d'une 10e année. Une 2e
année, ça fait; une 3e forte, c'est un peu mieux, mais, à
part ça, ça fait. On n'a pas besoin de ça. Le cultivateur
n'avait pas besoin d'éducation, non plus, pendant un bout de temps. Ce
n'est pas mauvais qu'il en ait.
M. ROY (Beauce): Je n'ai pas parlé de questions
d'éducation ni de 9e année.
M. COURNOYER: C'est le même principe, ça procède de
la même chose. Il n'y a pas de différence pour moi entre instruire
quelqu'un dans un métier; une fois qu'il y a des données de base,
il est plus libre, l'individu. Il est plus libre de subir les avatars
technologiques qui peuvent se produire dans ce qu'il exerce. Il a plus de
formation de base. Si je ne saisis pas les opportunités que j'ai
à ce moment-ci, quand vous serez au pouvoir, vous allez me blâmer
royalement de ne pas l'avoir fait. Vous allez me dire: Il n'a pas
planifié, ce gouvernement-là; regardez ça, le paquet de
menuisiers qu'on a ici. Regardez donc les poseurs de gyproc, par exemple. C'est
sorti depuis pas tellement longtemps, ça fait une dizaine
d'années.
On avait des poseurs de gyproc, on avait des tireurs de joints de
gyproc, on avait toutes sortes de métiers.
A un moment donné on ne tire plus les joints, des planches de
gyproc font le pan de mur; il n'y a plus de joints. Qu'est-ce que je fais avec
mes tireurs de joints, moi?
M. ROY (Beauce): C'est un autre exemple qu'on pourrait vous
signaler.
M. COURNOYER: Je suis au courant de tous ces exemples. Les solutions qui
sont sur la table sont des solutions qui, à court terme, font mal. Je ne
peux pas m'empêcher d'avoir de la
sympathie pour le député quand il me parle au nom d'un de
ses commettants qui gagne sa vie dans une spécialisation très
forte mais, comme ministre du Travail et pas nécessairement à
cause de ceux qui sont en face, je suis obligé aussi de penser à
ceux qui ont étudié, qui ont été
éduqués en vertu d'un système et qui, à cause d'une
spécialisation à outrance, perdent les possibilités qu'ils
ont de travailler.
Entre vous et moi, il y a tellement de choses qui se font au point de
vue technologique aujourd'hui, particulièrement dans la construction,
que ce n'est pas de l'aberration. Ce qui s'en vient, c'est que les gens qui
n'auront pas de base... Regardez la diminution du nombre de salariés
dans l'industrie de la construction malgré tout, le nombre d'emplois en
même temps que l'augmentation des investissements. On augmente les
investissements et on réduit le nombre d'emplois. Pourquoi? Parce
qu'effectivement il y a la technologie moderne. Comme je le disais, il ne se
fait plus de plâtre; on a trouvé autre chose. De la brique, il ne
s'en pose presque plus, on a trouvé autre chose parce que c'est plus
économique, probablement, et le consommateur a des goûts qui
changent.
Les barbiers, ceux qui sont coiffeurs pour hommes, qui sont
spécialisés là-dedans, quand les petits gars ont
décidé que leurs cheveux seraient plus longs que ceux des dames,
en "arrachent" sur le coin de la rue. Ils sont spécialisés dans
cela et on ne leur a jamais demandé autre chose que de coiffer des
hommes. Aujourd'hui, parce que la mode a changé et que les gens ont les
cheveux longs, le coiffeur pour hommes dit: Moi, j'aimerais coiffer les dames.
Le petit gars va se faire friser chez la coiffeuse pour dames. J'ai le conflit
de juridiction actuellement. Ce n'est pas un conte, je ne ris pas de cela. Le
conflit est que les gars vont se faire arranger les cheveux chez le coiffeur
pour dames.
M. DEMERS: Cela fait des hommes forts.
M. COURNOYER: A ce moment-là, il n'y a qu'une façon de
procéder, il faut enlever les culottes en entrant parce qu'ils n'ont pas
le droit de le faire.
M. ROY (Beauce): Mais cela, votre ministère ne l'avait pas
prévu.
M. COURNOYER: Non, monsieur. Alors là, on tente de
prévoir; ne me blâmez pas de le faire.
M. ROY (Beauce): Sur les objectifs que poursuit le ministère et
que tout le monde désire, nous sommes entièrement d'accord. On a
beaucoup parlé du côté théorique tout à
l'heure, mais lorsqu'on touche au côté pratique, il y a un
énorme fossé à combler. Nous essayons, en ce qui nous
concerne, de trouver des solutions pour permettre aux gens qui ont des
familles, qui ont des responsabilités, qui ont la compétence pour
travailler dans l'industrie de la construction de travailler au lieu de les en
empêcher et les obliger à vivre du bien-être social.
Je vous remercie, M. Lebon, du mémoire que vous nous avez
présenté. Nous notons que les remarques que vous avez faites ont
été considérées par d'autres et nous comptons que
vous allez continuer à travailler de façon qu'on puisse
c'est un voeu que j'exprime trouver des solutions pour simplifier un peu
l'affaire. Dans la construction, il y a toujours eu des complications dans la
province de Québec. Plus on avance, plus on a l'impression que c'est
compliqué à un point tel que si on regarde ce qui se fait dans
l'industrie de la construction cette année et les problèmes que
nous avons, nous sommes en droit de nous demander si ce n'est pas le
médecin qui est malade plutôt que le patient.
M. LE PRESIDENT: Le député de Maisonneuve.
M. BURNS: M. Lebon, je ne vous poserai pas de question sur votre
mémoire parce qu'en ce qui me concerne, je le trouve très bien.
Je vous en félicite. Je trouve qu'il contient des suggestions
très intéressantes.
Je voudrais vous parler de quelque chose qui ne se trouve pas dans votre
mémoire et que j'aurais aimé vous voir développer,
particulièrement en matière de recyclage. Tout le monde sait que
le gouvernement fédéral a des pouvoirs plus
particulièrement en matière d'orientation et de sélection
des individus.
Dans une politique globale de contrôle qualitatif et quantitatif
de la main-d'oeuvre, envisagez-vous que vos solutions proposées puissent
avoir autant d'efficacité que vous le désirez si ce pouvoir de
recyclage, ou d'initiation du recyclage qui est actuellement entre les mains du
gouvernement fédéral, continue à exister? Je vous donne un
exemple concret, on parlait tantôt des briqueteurs. Si, par exemple, le
pouvoir de recyclage ou d'orientation et de sélection des individus est
entre les mains d'un autre organisme que ceux préconisés en vertu
du bill 49 et des amendements que vous suggérez, si, par exemple, au
niveau de la sélection et de l'orientation on se met à fabriquer
des briqueteurs, dans un niveau où vous n'avez aucun contrôle,
pensez-vous que vos suggestions peuvent être très efficaces?
M. LEBON: M. le Président, si j'étais député
péquiste c'est la question que j'aurais posée, moi aussi.
M. BURNS: Remarquez que le ministre du Travail la pose, cette
question-là, depuis deux ans dans plusieurs domaines. Il en parle moins
depuis quelque temps mais j'imagine qu'il va repartir en guerre
bientôt.
M. COURNOYER: J'ai décidé de ne pas me mêler de la
campagne fédérale.
M. BURNS: Vous attendez que ce soit fini, vous.
M. LE PRESIDENT: Je pense qu'il faudrait revenir aux métiers de
la construction.
M. BURNS: J'y étais, je pense; M. Lebon aussi y était.
M. LEBON: M. le Président, on ajoute une dimension au
mémoire; on l'a soulignée par une phrase où on parle de la
complexité des ententes fédérales-provinciales au niveau
de la formation. C'est sûr que ça complique davantage le
système. M. Burns n'aimera pas ma réponse, mais à l'heure
actuelle les relations sont assez bonnes, je pense, entre les
délégués des commissions de formatiom professionnelle et
les centres de main-d'oeuvre du Canada dans ce domaine.
M. BURNS: Remarquez que je ne veux pas une réponse qui me fasse
ou ne me fasse pas plaisir, M. Lebon; je veux une réponse qui est
exacte, tout simplement. Une fois que vous et tout le complexe qui tourne
autour de la Commission de l'industrie de la construction les comités
régionaux, les comités de formation locaux, tel que vous le
suggérez, une fois tout ça mis en branle, vous pensez, avec la
collaboration que vous avez actuellement des organismes fédéraux,
que vous seriez en mesure d'imposer vos normes quant au Québec?
M. LEBON: Je pense qu'à l'heure actuelle le fédéral
respecte nos normes. Cela va assez bien, je vous le dis, franchement.
M. BURNS: Je suis bien heureux de l'entendre.
M. LEBON: C'est sûr que la négociation proprement dite
entre le ministère du Travail québécois et le
fédéral, c'est peut-être un peu compliqué. Mais, une
fois qu'on a les sommes d'argent du fédéral pour la distribution,
ça va assez bien, pour les normes aussi.
M. BURNS: Alors, je pose ma question au ministre. Si ça va si
bien dans le moment, si dans le fond c'est au Québec que se prennent ces
décisions, du moins si on donne un peu d'extension à ce que vient
de dire M. Lebon, qu'attendez-vous pour demander que ce pouvoir de recyclage
soit remis entre les mains du ministre du Travail du Québec?
M. COURNOYER: C'est déjà fait.
M. BURNS: C'est déjà fait et quelle est la
réponse?
M. COURNOYER: Il y a du "noui" là-dedans mais...
M. BURNS: Il y a plus de n que de oui.
M. COURNOYER: Disons que je n'ai pas encore analysé toute la
réponse sur le document, que j'avais fait remettre d'ailleurs aux
députés, celui du mois de février qui avait
été proposé et qui disait à peu près ce qui
vient d'être dit mais qui se ferait dans la pratique. On veut tout
simplement faire consacrer cela dans un document et je n'ai pas
analysé...
M. BURNS: Si je pose la question, c'est que je la trouve importante en
vue d'une véritable planification. J'ai l'impression que c'est ce
pourquoi nous sommes ici. Si, véritablement, on veut planifier, sur le
plan quantitatif et qualitatif, la main-d'oeuvre, particulièrement dans
le domaine de la construction, il faudrait que l'organisme qui,
déjà a de la difficulté à se coordonner avec
d'autres organismes on a le même problème entre deux
ministères, cela semble ressortir très clairement de ce document
et le ministre ne le nie pas. D'ailleurs, c'est su et connu de tout le monde.
Ce ne sont pas seulement ces deux ministères, il y en a d'autres, celui
des Affaires culturelles et tous ceux que vous voulez. Même dans le temps
où le député de Chicoutimi était ministre des
Affaires culturelles, il n'avait pas réussi à s'entendre
complètement avec le ministre de l'Education.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Pardon! Pardon!
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Cela s'est gâché depuis que Mme
Kirkland-Casgrain est là. On en parlera dans l'intimité.
M. BURNS: En somme, c'est tout simplement pour vous dire que je ne pense
pas qu'il puisse y avoir de véritables et sérieuses
planifications. Même une fois aplanies les difficultés entre
ministères, si vous avez deux niveaux de gouvernement qui prennent des
décisions quant à la sélection, quant à
l'orientation, si, comme je le disais tantôt, on se met à
fabriquer en série des briqueteurs, alors que le métier est sinon
disparu, du moins en nette régression, vous avez un sérieux
problème, et tous les efforts que vous allez faire du côté
des commissions de formation professionnelle vont être pratiquement
annihilés. Vous aurez vos briqueteurs sur les bras.
M. COURNOYER: Oui.
M. BURNS: Ce que vous raconte concernant les briqueteurs, je ne l'ai pas
choisi comme exemple au hasard, c'est quelque chose qui se
faisait, en tout cas à venir jusqu'à récemment,
où on formait des briqueteurs. C'est absolument ahurissant et
incompréhensible.
M. COURNOYER: Mais il est bien possible aussi qu'on en forme dans nos
commissions scolaires régionales et dans les CEGEP. Je ne sais pas, mais
la liste des métiers ou des options dont on a parlé hier, est une
longue liste. Il doit y en avoir quelques-uns qu'on retrouve. Et la commission
de formation professionnelle trouve peut-être qu'il y en a trop ou qu'il
ne devrait y en avoir là-dedans. C'est à l'intérieur et
remarquez que nous avons nos difficultés. Avec le gouvernement
fédéral, M. Lebon me dit, actuellement, que l'autorité est
dans les mains de la commission de formation professionnelle, à toutes
fins utiles. A un moment donné, s'il y a un conflit, qui gagnera? C'est
à peu près ça.
M. BURNS: C'est ça le problème.
M. COURNOYER: Il n'y a pas de conflit, touchons du bois! Mais, à
toutes fins utiles, ce que nous avons demandé, c'est la
consécration, dans les textes des ententes, de ce qui devrait se faire
et de ce qui se fait. On en fait peut-être l'expérience avant de
le consacrer dans un texte.
M. BURNS: Mais imaginez-vous, si vous ne pouvez pas vous entendre au
niveau des fonctionnaires de deux ministères dans un même
gouvernement, quel conflit est à prévoir entre les fonctionnaires
de ministères différents de deux gouvernements? C'est le
problème que je pose.
M. COURNOYER: Si je prends votre solution, on sépare les
ministères.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, mais il me semble que cela a
été réglé à Hull, avec les
fonctionnaires.
M. BURNS: Oui, cela a été réglé à
Hull mais c'est pour après 74, pas pour le moment.
M. DEMERS: ... jobs qui ont été créés...
M. BURNS: Oui, ne vous inquiétez pas, on s'occupera de cela.
D'ailleurs le ministre du Travail, à ce moment, sera peut-être le
ministre du Travail dans ce cabinet et ça fera son tour du chapeau.
UNE VOIX: C'est de la polyvalence.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Mais le député de Maisonneuve
pourrait nous demander, si, pour élever la muraille autour du
Québec, on aura besoin de briqueteurs.
M. LE PRESIDENT: Je présume que le député a
terminé?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui.
M. LE PRESIDENT: Le député de Frontenac.
M. LATULIPPE: M. le Président...
M. LE PRESIDENT: Ensuite, ce sera le député de Fabre.
M. LATULIPPE: ... j'aimerais demander ceci à M. Lebon: Hier, on a
entendu les gens de la FTQ nous dire qu'autrefois ils avaient fait une
expérience au niveau de la formation de la main-d'oeuvre à
même leurs propres unités et que les employeurs ne s'en
étaient pas plaints, que l'expérience avait été
valable. Est-ce que vous partagez cette opinion?
M. LEBON: Je pense qu'on l'a mentionné dans le mémoire:
Les anciennes commissions d'apprentissage étaient formées non
seulement de la partie syndicale, mais aussi des parties patronales. Nous
collaborions donc pour établir les normes que nous appliquions
nous-mêmes. Evidemment, c'était supérieur à ce qu'on
a aujourd'hui, parce qu'on n'est pas là.
M. LATULIPPE: D'accord, je vous remercie. Le décret est en
quelque sorte le prolongement d'une convention collective entre des patrons,
d'une part, et les syndicalistes, d'autre part. Est-ce que vous concevez que le
rôle du décret peut s'étendre jusqu'à dire
qu'à même les conditions qu'on va stipuler dans le décret
on va en arriver à faire du contingentement? Je trouve que, dans la
construction, le décret qu'on a actuellement fait en quelque sorte qu'on
spécule et sur l'aspect qualitatif et sur l'aspect quantitatif. D'une
certaine manière, on fait du contingentement par le prolongement des
règles de jeu qu'on a introduites dans le décret.
M. LEBON: Si je comprends bien votre question, lorsqu'on parle de
formation professionnelle, il ne s'agit pas d'application du décret,
mais bien d'une collaboration de bonne foi, si vous voulez, entre les parties
syndicales et patronales pour établir des normes d'apprentissage.
M. LATULIPPE: De toute façon, les décrets ne
disparaîtront pas.
M. LEBON: Pour moi, c'est un autre sujet.
M. LATULIPPE: J'estime que le décret devrait se limiter
exclusivement à des questions salariales. D'autre part, les
mécanismes que vous nous avez proposés devraient sans doute
s'appliquer dans le domaine de la construction. Il faudrait qu'il y ait une
nette démarcation, pour qu'à chaque convention collective on ne
puisse pas, par le biais du décret, remettre en cause des
modalités au niveau de ce qui pourrait être
acquis par exemple, au niveau d'un conseil régional qui pourrait
travailler et sur l'aspect quantitatif et sur l'aspect qualitatif de la
main-d'oeuvre.
M. LEBON: Au point de vue qualitatif, c'est sûr qu'on ne pense pas
qu'il devait y avoir des dispositions dans le décret. Comme je le disais
tout à l'heure, il s'agit d'une collaboration entre les parties
syndicales et patronales, pour une meilleure main-d'oeuvre. Partant de
là, c'est sûr que le décret, c'est une chose et que la
formation de la main-d'oeuvre, c'en est une autre.
M. LATULIPPE: Est-ce que, dans les revendications que vous faites,
sous-jacent à ce que vous entendez, vous concevez, pour les
espèces de sociétés régionales que vous voulez
introduire, leur donner suffisamment de pouvoir et d'initiative pour qu'elles
puissent prévoir et exécuter en tenant compte d'une nouvelle
situation qui se produit?
Je vais vous donner un exemple. Dans certains secteurs assez
reculés, en milieu rural, une industrie disparaît par le feu,
comme cela s'est vu assez récemment. On doit reconstruire assez
rapidement. Il n'y a pas, sur place, la main-d'oeuvre requise et il faut agir
rapidement. Concevez-vous que vous pouvez donner suffisamment d'initiative et
de pouvoir aux sociétés régionales que vous voulez
introduire pour être capables à la fois de prendre des mesures au
niveau de la qualification pour introduire certaines normes temporaires et
également d'agir sur l'aspect quantitatif?
M. LEBON: Evidemment, la formation de la main-d'oeuvre, ce n'est pas
comme du café instantané. On ne peut pas dire du jour au
lendemain qu'on forme 50 menuisiers. C'est évident. Si on prend votre
exemple d'un feu, il est sûr qu'au point de vue formation, je pense que
nous n'avons rien à voir là-dedans. Nous parlons, encore une
fois, du contrôle quantitatif de la main-d'oeuvre et de la
mobilité de cette main-d'oeuvre.
Quant à la question à savoir quelle serait
l'autorité de la commission régionale, elle dépend,
évidemment, des comités de métiers qui, eux, statueront
sur les besoins de la formation dans la région en coordination, au
niveau provincial, avec un comité de ce même métier. Ce qui
veut dire que les besoins régionaux seront assurément retenus
avant d'établir des normes quantitatives sur la formation de la
main-d'oeuvre dans la région.
M. LATULIPPE: Je crains qu'un mécanisme trop lourd au niveau
régional, qui n'aura pas de pouvoir et pas suffisamment
d'autorité, ne puisse remplir son rôle et qu'on se retrouve dans
le même processus que nous avons, où c'est l'Etat qui devra
prendre les décisions, où on devra encore aller voir le ministre
pour régler les problèmes pertinents, les situations bien
particulières. Finalement, on n'aura pas assez de souplesse au niveau
régional et le système retombera dans la décadence que
nous avons actuellement.
M. LEBON: Je pense qu'on a souligné dans le mémoire que
les normes à être établies, au niveau de la région,
doivent tenir compte de la mobilité de la main-d'oeuvre. Il est
sûr qu'on ne peut pas se permettre de former en grande quantité
des menuisiers à un endroit, par exemple à Saint-Hyacinthe,
tandis qu'il y en a trop à Montréal. Si on tient compte de la
mobilité de la main-d'oeuvre ce sont les données que nous
espérons avoir au sein de chaque métier, c'est là
que naît le besoin d'une coordination provinciale.
Mais c'est sûr que ça tient compte quand même des
besoins régionaux. A Montréal si on sort des autres
secteurs je pense qu'on ne formera personne pour les mines. Parce que
c'est assez rare les mines à Montréal. Je vous donne un exemple
plutôt simpliste, mais il faut quand même tenir compte des besoins
de la région, c'est sûr.
M. LATULIPPE: Je vais vous donner un exemple pratique. C'est pour
m'éclairer. Disons que dans ma région il se construit une
polyvalente, ça englobe une grosse partie de la main-d'oeuvre.
Parallèlement, il y a encore un petit peu de construction domiciliaire.
On fait appel à des ouvriers, il n'y en a pas de disponibles dans la
région. Il y a d'autres gars qui sont en formation, qui ont une carte
modulaire et qui n'ont pas encore une carte d'ouvrier. Est-ce que vous acceptez
qu'ils fassent un travail pour lequel ils n'ont pas de carte, sur un plan
temporaire, de façon à remplir un besoin bien spécifique?
Des permis temporaires de travail sont accordés actuellement. Mais il
faut se rendre à Québec pour obtenir des choses comme
ça.
M. LEBON: Je m'excuse, mais je pense qu'on glisse encore sur le
2711.
M. COURNOYER: Cela ne relève pas de lui ça. Il fait de la
formation. Vous parlez d'une constatation de fait.
M. LATULIPPE: Oui, mais je veux savoir si le mécanisme qu'ils
veulent introduire a suffisamment de souplesse pour tenir compte de ces
cas.
M. COURNOYER: Le mécanisme dont il parle est strictement pour
organiser la formation professionnelle et prévoir des besoins, et le
député de Beauce, tantôt, demandait s'il était
possible de prévoir cinq ans à l'avance. La réponse c'est
qu'on peut peut-être projeter, mais on ne peut pas prévoir. Si on
savait tous les projets de construction, on saurait exactement le nombre de
personnes dont on a besoin. On a dit hier que c'était pratiquement
impossi-
ble de contrôler et prévoir tout ce qui peut se produire.
Mais ça n'est pas de l'autorité ou de la juridiction du
mémoire qui nous est présenté. Ce sont des
révisions à la Loi sur la formation et la qualification
professionnelles pour permettre une meilleure formation qui servirait mieux les
intérêts de cette industrie en particulier. Et c'est de la
formation.
M. LATULIPPE: Donc, si je comprends bien, le comité
proposé au niveau régional n'irait pas jusqu'à agir. Je
trouve que ce sont deux aspects indissociables, les aspects qualitatif et
quantitatif. Si ce n'est pas le même comité qui régit
ça,...
M. COURNOYER: Après votre polyvalente construire, les gens que
j'aurais qualifiés pour cette polyvalente, qu'est-ce que j'en fais?
M. LATULIPPE: Ils n'auraient pas été qualifiés. Ils
n'auraient eu qu'un permis temporaire pour travailler.
M. COURNOYER: Donc, il s'agit des permis de travail de
l'arrêté en conseil no 2711, celui dont nous avons parlé
toute la journée d'hier et d'avant-hier.
M. LATULIPPE: Je ne peux pas concevoir qu'il y ait un organisme
régional réellement valable, alors qu'on dissocie deux notions,
les aspects qualitatif et quantitatif.
Il faut donc dire qu'un organisme va régler seulement l'aspect
quantitatif, puis qu'un autre organisme provincial va s'occuper de l'aspect
qualitatif. On va se retrouver avec des situations difficiles, puis ça
va être encore lourd d'articulation.
M. COURNOYER: Très bien. Je pense qu'on en reparlera à un
autre moment. On pourra avoir une autre réunion de la commission
parlementaire où on aura une discussion entre nous, remarquez.
Actuellement, ce sont les mémoires des gens. Le mémoire qui est
en face de nous, porte sur la formation professionnelle et sur la façon
de l'organiser pour l'industrie de la construction et non pas sur la
façon d'émettre des permis ou de ne pas émettre des
permis, de consentir que telle personne, vienne travailler dans l'industrie de
la construction ou qu'elle ne vienne pas. Cela, c'est l'arrêté en
conseil 2711 au complet.
M. LATULIPPE: M. le ministre, moi, je voyais cela comme un ensemble, un
tout qui aurait pu être réglé.
M. COURNOYER: Bien disons qu'il y en a un, tout; il s'appelle le
ministre du Travail.
M. LATULIPPE: Il est débordé aussi. M. LE PRESIDENT: Le
député de Fabre.
M. HOUDE (Fabre): M. le Président, je voudrais revenir à
la formation professionnelle et au texte de M. LeBon. On vit dans un
système où on est appelé, qu'on amende ou qu'on conserve
le bill 49 tel quel, à avoir encore de la participation et du dialogue,
qu'on le veuille ou non. J'essaie de comprendre. La base a, depuis quelques
années, voulu améliorer la formation professionnelle. Cela, c'est
acquis par le milieu, syndicats et associations professionnelles.
D'autre part, à un autre échelon, vous avez les hommes
politiques élus qui ont également consenti à
améliorer le système. La preuve, c'est que tout le monde semblait
d'accord il y a trois ans, sur le bill 49. Entre les deux, c'est-à-dire
entre la tête et la base, il y a unanimité. On veut
améliorer la formation professionnelle, en particulier les
métiers de la construction.
Ces deux groupes-là confient un mandat à des
fonctionnaires à qui on dit: Vous autres, faites le travail, mais,
là, ça bloque. Moi, j'ai de la difficulté à
comprendre ça. Je voudrais savoir, de la part de ceux qui ont
l'expérience de ces comités, si par hasard je ne le sais
pas; je ne veux pas blâmer les fonctionnaires parmi les
fonctionnaires qui ont à régler le problème d'une
façon pratique, ceux du ministère de l'Education et ceux du
ministère du Travail par exemple, il n'y a pas trop de
théoriciens et pas assez d'hommes pratiques. Est-ce qu'il en existe des
fonctionnaires qui connaissent le métier, qui ont travaillé
vraiment dans le métier ou si ce sont seulement des intellectuels ou,
encore une fois, des théoriciens?
On ne sait pas si le bill 49 sera amendé. On ne sait pas s'il va
continuer, le bill 49. Mais il y a une chose dont on est certain, c'est qu'il
va falloir continuer à avoir des réunions. Le rapport de M. LeBon
dit que, dans certains cas, il n'y en a pas eu suffisamment et que, dans
d'autres cas, il y en a eu.
On a parlé de milliers de comités
interministériels, c'est vrai. Si on est appelé à avoir
des comités encore pour X années, est-ce qu'il n'y aurait pas un
inventaire à faire parmi ceux qui doivent dialoguer avec le milieu? Je
parle des fonctionnaires. Pour ces fonctionnaires qui doivent dialoguer ou
essayer d'appliquer ce que les ministres ont consenti, ce que la base veut et
ce sur quoi elle est d'accord, il faudrait peut-être réviser
certaines normes, certains critères dans la fonction publique. Il
faudrait donner la possibilité à des ministres d'engager dans
leur personnel des gars du milieu qui connaissent le métier et pas
nécessairement des gars qui ont fait 12 ans ou 20 ans
d'université. Je me pose cette question.
M. LEBON: Je me demande si je peux y répondre. Aux comités
des parties syndicales et patronales, je pense qu'on n'a pas eu de
problème, quand on parlait de formation de main-d'oeuvre. On en a un peu
plus à la table de négociation, c'est sûr. Lorsque vous
parlez de
comités interministériels, je n'y ai jamais
siégé, je regarde les résultats et il n'y en a pas.
Peut-être que vous pourriez vous adresser au ministre de la Fonction
publique ou au ministre du Travail; ils pourraient peut-être
répondre à votre question car je ne suis pas en mesure
d'évaluer le potentiel des individus qui siègent à ces
tables.
M. HOUDE (Fabre): Vous, qui faites affaires avec ces fonctionnaires, que
ce soit à l'Education ou au Travail, considérez-vous que parmi
eux je n'en connais pas un seul, il n'est pas question pour moi de faire
des personnalités il y a trop de théoriciens, pas assez
d'hommes pratiques?
M. LEBON: Selon l'expérience que j'ai personnellement, je peux
dire que le monde du travail s'entend beaucoup mieux avec les fonctionnaires du
ministère du Travail qu'avec ceux du ministère de l'Education;
peut-être que les fonctionnaires du ministère du Travail ont une
approche plus pratique que ceux du ministère de l'Education. C'est pour
cela que nous suggérons que les amendements au bill 49 soient une chose
concertée des deux ministères et non seulement l'oeuvre d'un seul
ministère, parce qu'on va recommencer la chicane. Pour éviter la
chicane, que les deux ministères statuent, une fois pour toutes, sur les
amendements à être apportés au bill 49. Les fonctionnaires
vont suivre ce que la loi va dire.
M. HOUDE (Fabre): Quant à moi, c'est terminé. Je demande
l'ajournement sine die.
M. LE PRESIDENT: A moins qu'il y ait des questions additionnelles, la
commission ne siégera pas cet après-midi et nous ne
siégerons pas la semaine prochaine aux dates déjà
indiquées au calendrier. C'est un manque de pain; nous n'avons pas
d'autres mémoires. Mais je sais que plusieurs organisations ont
exprimé le désir de se faire entendre. Nous allons attendre
d'avoir de leurs nouvelles.
Je pense bien que nous pourrions rappeler la commission. En ce qui
concerne le programme que nous suivons depuis trois jours, il se terminerait
immédiatement.
M. ROY (Beauce): M. le Président, comme cette commission
parlementaire devait étudier également la question des garages,
n'y aurait-il pas lieu d'annoncer une séance spéciale pour
inviter les gens des garages à se rendre à cette commission?
Après en avoir discuté avec quelques uns, tout le monde a
l'impression que la présente commission étudie uniquement la
question de la construction. La motion avait été scindée
en deux, en Chambre, si on se souvient, la première partie concernait
les garagistes, la deuxième partie, l'industrie de la construction. En
ce qui concerne les garagistes, quelle est l'intention du ministère et
le président pourrait-il nous dire quelles sont les intentions du
gouvernement à ce sujet?
M. COURNOYER: Mon intention n'est pas modifiée, il s'agissait
encore une fois, des qualifications chez les garagistes en particulier. J'ai
promis aux députés de la commission parlementaire qu'ils
recevraient, avant que je le soumette au conseil des ministres le
règlement de qualification chez les garagistes. Celui qui a
été publié et au sujet duquel on a reçu des
objections. Une fois que je serai prêt à le présenter au
conseil des ministres, je dois le passer d'abord à la commission
parlementaire, mais je ne suis pas prêt encore à passer ce
règlement-là.
C'est, en fait, ce règlement en particulier que nous devions
discuter. Alors aussitôt que je serai prêt moi-même, parce
que je ne le suis pas présentement, je le ferai parvenir aux
députés membres de la commission, et il y aura réunion de
la commission et auditions s'il y a lieu.
Pour le moment, je dis que je m'en tiens à la résolution,
je n'ai pas de problème.
M. ROY (Beauce): Si je comprends bien, ça veut dire que pour le
moment, il n'est pas question d'inviter les représentants des garagistes
à la commission.
M. COURNOYER: Non, pas pour l'instant, je n'ai pas encore le
règlement mais vous allez le recevoir, et à ce moment-là,
nous les inviterons, s'il y a lieu.
M. ROY (Beauce): Parfait.
M. LE PRESIDENT: Je voudrais remercier tout d'abord les membres de la
commission de leur coopération, ainsi que tous ceux qui se sont
présentés devant la commission ou qui ont contribué
à nos travaux d'une façon directe ou indirecte. Merci et à
la prochaine fois.
(Fin de la séance à 12 h 10)