Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
Commission permanente du travail,
de la main-d'oeuvre et de l'immigration
Etude des problèmes de l'industrie de la
construction
Séance du mardi 14 janvier 1975
(Quinze heures dix-sept minutes)
M. Séguin (président de la commission permanente du
travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration: A l'ordre, messieurs
Etablissement de l'ordre
Le Président (M. Séguin): J'ai
intérêt, comme vous sans cloute, messieurs et mesdames, à
faire commencer nos travaux. Tout de même, je voudrais, dès le
début, même avant de commencer, demander à toutes les
personnes qui n'ont pas de siège de bien vouloir s'asseoir dans la
galerie, au fond de la salle. Les personnes qui sont ici pour
s'intéresser aux travaux, mais sans vouloir y prendre part, celles qui
le désirent, peuvent se rendre à la salle 81-A, au premier
étage, la salle de séance que nous connaissons comme la salle des
bills privés ou salle des commissions, où des haut-parleurs vous
transmettront tout ce qui se passe dans cette salle-ci.
Je n'endurerai pas... je ne commencerai pas tant qu'il y aura des
personnes debout. Les seuls à qui on permettra d'occuper un espace
à l'intérieur de la table à l'avant, jusqu'ici, seraient,
soit des députés, soit des fonctionnaires, ou le surplus de
journalistes qu'il pourrait y avoir ici présents. Je ne veux pas que des
membres ou des personnes qui sont ici, soit pour les syndicats, soit pour le
côté patronal, se placent de ce côté-ci de la table.
Nous commencerons aussitôt que cet ordre sera établi. Donc,
personne debout.
Un instant s'il vous plaît. J'arrive à une seconde phase.
Je sais ce que vous allez me dire après, mais j'arriverai à cette
phase une fois que nous aurons rétabli l'ordre relativement aux
sièges.
Nous suspendons pour quelques minutes, le temps nécessaire pour
que tous se trouvent un siège. Les galeries latérales ne seront
occupées que par des journalistes, d'un côté ou de l'autre;
le public sera dans la galerie du fond, en face de moi.
Je demande aux agents de sécurité de voir à ce que
cette recommandation, ou cette suggestion, soit mise en vigueur.
(Suspension de la séance à 15 h 20)
Reprise de la séance à 15 h 24
M. Séguin (président de la commission permanente du
travail et de la main-d'oeuvre): A l'ordre, messieurs!
Est-ce qu'on pourrait m'indiquer, de la galerie, s'il reste encore des
places libres? Vous en avez encore?
Deuxième phase. Au début des travaux de la commission, je
vais appeler les personnes convoquées qui doivent paraître devant
cette commission. Les représentants des groupes que je vais mentionner
ces groupes ou leurs représentants; pas nécessairement le
groupe, mais les représentants de ces groupes prendront place
à la première table près de la commission.
Il faudra donc, au fur et à mesure que nous appellerons
l'association patronale ou syndicale, que la place se fasse à la table
pour ces personnes. C'est-à-dire que, dans la première
rangée, immédiatement à l'arrière de cette
première table, il faudra que vous soyez prêts à
moins que vous fassiez partie d'une délégation ou de
représentants à vous déplacer. Exception faite de
la première table ou de la table à l'avant, s'il y en a dans la
première rangée qui sont ici comme membres d'une association ou
encore comme spectateurs ou auditeurs, peut-être serait-il bon qu'on
s'occupe de leur trouver une place ailleurs, soit dans la galerie ou à
l'arrière de la salle, s'il reste des places. Je ne voudrais pas, chaque
fois qu'on voudra appeler quelqu'un, qu'on fasse déplacer toute une
série de personnes. On essaie d'établir des règles de jeu
ici, avant de partir, en ce qui concerne la commodité ou la
facilité de se placer.
Les associations ou les groupements seront entendus dans l'ordre
suivant: La Fédération de l'industrie de la construction.
Une Voix: La Fédération de la construction du
Québec.
Le Président (M. Séguin): La
Fédération de la construction du Québec. J'accepte votre
correction. Merci!
Deuxièmement, la Fédération des travailleurs du
Québec; troisièmement, l'Association de lacons-truction de
Montréal; quatrièmement, la Confédération des
syndicats nationaux; cinquièmement, l'Association des constructeurs
d'habitations; sixièmement, la CSD; septièmement, la CME;
huitièmement, les routes et grands travaux; enfin, la Corporation des
maîtres mécaniciens en plomberie.
Ce sont les associations qui ont été appelées
à comparaître devant cette commission. En ce qui concerne la table
en avant, il faudrait qu'on fasse de la place pour permettre à ces
personnes de se faire entendre. Premièrement, la
Fédération de la construction du Québec.
Il s'agit ici de s'entendre un peu, je pense, pour céder une
place et puis vous vous remplacerez, il n'y a pas de difficulté de ce
côté.
A l'ordre, s'il vous plaît!
Je pense que cela peut se faire un peu dans le silence sans qu'il y ait
d'autres commentaires.
Les membres de la commission pour la séance de cet
après-midi sont les suivants: MM. Bellemare (Johnson), Bérard
(Saint-Maurice), Lachance (Mille-Iles), Boudreault (Bourget), Burns
(Maisonneuve), Charron (Saint-Jacques), Bellemare (Rosemont), Cournoyer (Robert
Baldwin), Déziel (Saint-François), Tremblay (Iberville),
Pelletier (Kamouraska-Témiscouata), Gratton (Gatineau), Malépart
(Sainte-Marie), Roy (Beauce-Sud).
Le rapporteur pour la commission, est-ce qu'on a un élu?
M. Gratton: M. le Président, pourrais-je
suggérer...
Le Président (M. Séguin): Je propose M.
Gratton.
M. Gratton: M. le Président, j'allais vous suggérer
que l'honorable député d'Iberville soit nommé
rapporteur.
Le Président (M. Séguin): M. Tremblay (Iberville).
Est-ce, qu'il y a consentement?
M. Burns: Consentement, M. le Président.
Le Président (M. Séguin): Est-ce que le
député accepte?
M. Tremblay: M. le Président, j'accepte.
Le Président (M. Séguin): Merci.
La commission se réunit pour faire suite à une loi
déjà sanctionnée, soit la loi no 201, qui dit: "Le
lieutenant-gouverneur en conseil peut aussi, sur la recommandation du ministre,
prolonger, abroger ou modifier le décret et on s'entend sur le
mot "décret", ce qui veut dire sans le consentement des
associations de salariés ou d'employeurs, quand il est d'avis que, dans
l'intérêt public, cette solution est la seule qui puisse
remédier à la situation existante. "Il ne peut toutefois modifier
le ministre et le lieutenant-gouverneur en conseil naturellement
ainsi le décret sans que les associations représentatives ne
soient invitées à être entendues devant la commission
parlementaire du Travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration, quant aux
raisons motivant l'impossibilité de parvenir à une entente
relativement aux modifications à apporter au décret. "Tout
décret adopté en vertu de l'alinéa précédent
est exécutoire pour tous les employeurs et pour tous les salariés
à compter de la date qui y est indiquée. Il doit être
publié sans délai dans la Gazette officielle du
Québec."
Alors, dans le contexte de cette loi, il y avait pour le ministre et
pour le lieutenant-gouverneur en conseil l'obligation, avant d'appliquer la loi
no 201, et la nécessité d'entendre les parties en cause. Alors,
c'est dans ce contexte que nous siégeons aujourd'hui, pourentendre les
parties responsables ou les parties en cause, soit du côté
patronal, soit du côté ouvrier.
M. Burns: M. le Président, vous me donnez la parole?
Le Président (M. Séguin): Le député
de Maisonneuve, pas un discours.
M. Burns: Un discours, certainement pas, M. le
Président.
Le Président (M. Séguin): Simplement un
commentaire.
M. Burns: Ce n'est même pas un commentaire. Le
Président (M. Séguin): J'ai un ordre à suivre.
United Aircraft et Canadian Gypsum
M. Burns: C'est une question préalable, M. le
Président, préalable non pas au sens technique du mot, mais au
sens préliminaire du mot.
Comme l'Assemblée nationale, en principe, ne devrait pas
siéger avant le mois de mars je ne sais pas à quel moment,
mais, en tout cas, il semblerait qu'elle ne siégera pas avant le mois de
mars comme également c'est la première occasion, M. le
Président, où nous sommes en commission parlementaire du travail
et de la main-d'oeuvre et comme cette commission du travail et de la
main-d'oeuvre a déjà le mandat d'examiner le problème de
United Aircraft et le problème de Canadian Gypsum, je me demande si, au
départ, avant qu'on entre dans le vif du sujet concernant les
problèmes de l'industrie de la construction, le ministre du Travail ou
encore le premier ministre qui est ici, ne pourrait pas nous dire exactement
quelles sont les intentions du gouvernement relativement à ces conflits,
entre autres celui qu'on a commencé à examiner, United Aircraft,
et l'autre qu'on s'est engagé à examiner par la suite, celui de
Canadian Gypsum.
Je pose cette question, M. le Président, étant
donné que c'est la première occasion que j'ai de la poser
effectivement, même si, dans les derniers jours de la session en
décembre, j'avais soulevé le problème. A ce moment, en
l'absence du ministre du Travail, le premier ministre m'avait répondu
que c'étaient des questions que le gouvernement examinait actuellement,
et surtout qu'on attendait l'avis du ministre du Travail.
Le ministre du Travail est là, le premier ministre est là.
C'est le moment idéal, je pense, pour qu'on sache exactement quand on
reprendra les travaux relativement à United Aircraft, à la
commission parlementaire du travail et de la main-d'oeuvre.
Le Président (M. Séguin): J'interviens
immédiatement et je dis au député de Maisonneuve que je ne
saurais recevoir cette question. Je ne permettrai pas non plus, ni au premier
ministre, ni au ministre du Travail d'intervenir ou de répondre à
cette question, puisque déjà d'après
l'énoncé que j'avais fait, il ne s'agit pas là de la
préoccupation de cette commission. Je pense qu'il y a d'autres...
M. Burns: M. le Président, question de
règlement.
C'est la première fois qu'on a l'occasion, M. le
Président...
M. Boudreault: Ou calme!
M. Burns: Oui, du calme. On va en avoir, du calme, certainement.
Je suis parfaitement d'accord,
mais vous avez un conflit qui pourrit et une grève qui a
déjà un an d'existence à United Aircraft.
Le premier ministre, à deux reprises, quand je lui ai posé
des questions, en Chambre, a dit: On va penser à cela et on va soumettre
le problème au ministre du Travail.
M. Boudreault: Une question de règlement, M. le
Président.
M. Burns: M. le Président, on est ici pour exposer des
problèmes. Je suis d'accord que le problème de la construction
est très important.
M. Boudreault: Une question de règlement, M. le
Président.
M. Burns: On va le regarder tout de suite.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre, s'il vous
plaît.
M. Burns: Je pose simplement une question préliminaire. Le
ministre est là et le premier ministre est là également.
Je veux savoir quand la commission a l'intention de siéger relativement
à ce problème. Ne faites pas d'enculage de mouches, M. le
Président, sur des problèmes de procédure.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre, à
l'ordre!
M. Burns: Je demande simplement une chose, bien calmement et sans
me choquer, sans que vous non plus vous m'empêchiez de poser le
problème comme il doit être posé. Est-ce que le ministre du
Travail, avant... Cela ne sera pas long, s'il me répond tout de suite.
Cela va être très court, cela va être très bref.
Après cela, on va écouter les gens de l'industrie de la
construction qui sont devant nous.
Le Président (M. Séguin): Je regrette, M. le
député. Je comprends votre intervention, je suis très
concerné par ce que vous dites. Je crois tout de même que le sujet
que vous avez apporté n'a aucun rapport avec la commission
d'aujourd'hui. Je ne permettrai pas, même au début, cet
écart à notre procédure qui dit qu'on doit demeurer
à l'intérieur du bill 201. Nous sommes ici pour un
problème et non pas les problèmes de United Aircraft ou de
Canadian Gypsum ou d'autres problèmes, parce qu'il y en a beaucoup
d'autres que vous n'avez pas mentionnés.
Je ne le tolérerai pas, je vous le garantis dès le
début, je n'accepte absolument rien, à cette commission, à
l'extérieur du problème qui nous confronte aujourd'hui.
M. Burns: M. le Président...
Le Président (M. Séguin): Je regrette, je n'accepte
pas votre question.
M. Burns: M. le Président...
Le Président (M. Séguin): Vos commentaires, vous
les avez faits.
M. Burns: Je n'ai pas de commentaires à faire, M. le
Président, c'est une question que j'ai posée.
M. le Président, je demande le consentement unanime de la
commission pour que le ministre du Travail ou le premier ministre
réponde à ma question. Si le consentement unanime de la
commission est accordé, M. le Président, votre opinion sera mise
de côté, j'en suis convaincu. Alors, je demande le consentement de
la commission pour que, soit le premier ministre, soit le ministre du Travail
me donne une réponse sur la question que j'ai posée.
Le Président (M. Séguin): Puisque la commission est
maîtresse de ses travaux et que j'ai déjà
énoncé les principes ainsi que l'ordre que nous devions suivre
dans ce qui se dit aujourd'hui, je vais mettre aux voix, immédiatement
et sans autre débat, cette question posée par le
député de Maisonneuve, à savoir pour ou contre la
proposition faite par le député de Maisonneuve. M. Bellemare
(Johnson)? M. Bérard (Saint-Maurice)?
M. Bérard: Contre.
Le Président (M. Séguin): M. Lachance
(Milles-Iles)?
M. Lachance: Contre.
Le Président (M. Séguin): M. Boudreault
(Bourget)?
M. Boudreault: Contre.
Le Président (M. Séguin): M. Burns
(Maisonneuve)?
M. Burns: En faveur.
Le Président (M. Séguin): M. Charron
(Saint-Jacques)?
M. Charron: Pour, M. le Président.
Le Président (M. Séguin): M. Bellemare
(Rosemont)?
M. Bellemare (Rosemont): Contre, M. le Président.
Le Président (M. Séguin): M. Cournoyer (Robert
Baldwin)?
M. Cournoyer: Contre.
Le Président (M. Séguin): M. Déziel
(Saint-François)?
M. Déziel: Contre.
Le Président (M. Séguin): M. Tremblay
(Iberville)?
M. Tremblay: Contre.
Le Président (M. Séguin): M. Pelletier
(Kamouraska)?
M. Pelletier: Contre.
Le Président (M. Séguin): M. Gratton
(Gatineau)?
M. Gratton: Contre.
Le Président (M. Séguin): M. Malépart
(Sainte-Marie)?
M. Malépart: Contre.
Le Président (M. Séguin): M. Roy (Beauce)?
M. Roy: Pour.
Le Président (M. Séguin): Contre: 10. Pour: 3.
M. Burns: C'est bien simple, M. le Président, on ne veut
pas nous répondre sur ce problème. C'est bien clair.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre!
M. Burns: C'est très bien. C'est clair, c'est
réglé.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre! Avant le
début de nos travaux, comme le règlement nous le prescrit, il y a
une procédure à suivre. Un représentant de chaque parti
reconnu peut faire les commentaires d'usage. Je passe donc la parole au
ministre du Travail, le député de Robert Baldwin.
Remarques préliminaires
M. Cournoyer: M. le Président, nous sommes ici non
seulement pour une question de procédure. Le bill 201 a
été voté et ce bill comporte l'obligation, pour le
gouvernement, d'entendre en commission parlementaire les représentants
des associations représentatives sur les motifs du désaccord qui
persiste entre eux.
La seule décision de convoquer la commission parlementaire a
indiqué que le gouvernement était conscient que dans
l'intérêt public, il s'agissait pour lui de la seule
méthode, c'est-à-dire ne pas attendre le consentement des parties
pour régler un différend qui persiste entre les parties. Nous
croyons, comme gouvernement, que l'état actuel des parties, pour toutes
les raisons qu'elles exprimeront, nous a permis de conclure qu'il semblait
improbable, sinon impossible dans les circonstances, qu'elles s'entendent sur
le problème particulier de l'indexation des salaires dans l'industrie de
la construction.
C'est parce qu'il nous a semblé impossible que les parties
s'entendent que nous avons décidé de convoquer la commission
parlementaire et de les entendre sur les motifs de leur désaccord.
J'imagine que chacune des parties explicitera ses positions, face au
problème de l'indexation des salaires dans l'industrie de la
construction.
Je crois bien, M. le Président, que nous devons procéder
à cette commission avec la plus entière liberté pour les
parties qui sont en face de nous, mais tout le monde doit être conscient
du fait que le problème doit être résolu le plus rapidement
possible et que nous avons l'intention de le résoudre.
Je crois bien que j'en ai assez dit pour le moment, M. le
Président, j'attends que les parties aient fait leurs
représentations pour redemander la parole, s'il y a lieu.
Le Président (M. Séguin): Merci. Le
député de Maisonneuve.
M. Burns: M. le Président, nous avons été,
lors de l'adoption du projet de loi no 201, contre ce projet de loi. Il est
maintenant adopté. Je n'ai pas à remettre devant la commission
tous les arguments qui motivaient notre intention de voter contre ce projet de
loi. Nous avons réussi, par notre amendement, à atténuer
les effets nocifs, à mon avis, du projet de loi no 201 en donnant,
à la dernière minute au moins, la possibilité aux parties
représentatives, concernées par l'amendement de ce décret,
pars on abrogation ou par son prolongement, d'être éventuellement
convoquées devant nous pour au moins nous donner les raisons qui
sous-tendent leur objection à ces modifications.
Malgré cet amendement que nous avons fait adopter, nous trouvons
encore aujourd'hui, avec toutes les motivations et toutes les raisons que nous
avons exprimées au moment de l'adoption du projet de loi 201, qu'il y
aurait eu une autre façon de procéder. Maintenant que le projet
de loi 201 est devenu une loi, que cela s'appelle la loi modifiant la Loi sur
les relations de travail dans l'industrie de la construction et que cela a
été sanctionné par le lieutenant-gouverneur en date du 24
décembre 1974, nous serons dans l'attente des commentaires des parties,
tant patronale que syndicale. Nous serons surtout à l'écoute des
solutions miracles que le ministre envisage pour régler le
problème de la construction alors que ce que nous proposions au niveau
de l'adoption du projet de loi no 201, c'étaient, il me semble, des
solutions à plus long terme que des solutions à courte vue comme
on semble vouloir si les journalistes sont plus informés que nous
en apporter aujourd'hui.
J'imagine que, tôt ou tard, dans le courant de la journée,
ou demain, si la commission doit continuer à siéger ou
à une autre date, si la commission ne doit pas siéger demain
le ministre devra nous dire ce qu'il envisage comme solution au
problème de la construction, après qu'on aura eu la
possibilité d'entendre les parties représentatives, tant
syndicales que patronales.
A ce moment-ci, M. le Président, ce sont les seuls commentaires
que je me permets et nous attendrons véritablement que l'exposé
du dossier nous soit fait. A partir de là, nous aurons sans aucun doute
d'autres commentaires à faire, mais j'insiste énormément
là-dessus, c'est le ministre du Travail qui, actuellement, est dans le
"spotlight", c'est le ministre du Travail qui devra nous donner sa solution
miracle à la conclusion des travaux que nous commençons cet
après-midi. C'est le ministre du
Travail qui devra nous dire comment la loi 201, dans sa première
application pratique c'est la première fois et à moins
d'un mois de son adoption, à moins d'un mois de sa sanction et
aussi comment sa façon de l'utiliser vont régler le
problème de l'industrie de la construction actuellement.
Pour le moment, M. le Président, je reste sur ces commentaires et
je me réserve le droit de faire les autres commentaires
appropriés en temps et lieu.
Le Président (M. Séguin): Le député
de Beauce-Sud.
M. Roy: M. le Président, nous nous sommes opposés
également à l'adoption de ce projet de loi 201 pour des raisons
que nous avons fait connaître à l'Assemblée nationale.
Aujourd'hui, nous sommes ici pour entendre les parties qui ont
été convoquées afin que celles-ci puissent s'exprimer et
fassent connaître aux membres de la commission leur point de vue sur le
problème en cause, problème qui est de taille.
M. le Président, mon intervention va être très
courte. Je veux tout simplement dire ceci à l'intention du gouvernement
et à l'intention du ministre: En ce qui nous concerne, nous avons
hâte de connaître les intentions du gouvernement, comment le
ministère du Travail va procéder. C'est la situation que nous
avons à envisager.
Je ne voudrais pas que les travaux de la commission parlementaire se
prolongent pendant deux ou trois semaines et qu'on oblige ces gens-là
à revenir et à revenir devant la commission parlementaire, de
façon à pouvoir gagner du temps.
Je pense qu'il serait extrêmement malheureux que les travaux de la
commission parlementaire se terminent à peu près de la
façon qu'ils se sont terminés dans le cas de United Aircraft. On
a fait promener des gens devant l'Assemblée nationale pendant deux
semaines et jamais les membres de la cornmission je dis bien jamais les
membres de la commission comme tels n'ont eu à se prononcer et
à tirer des conclusions sur les travaux de la commission.
M. le Président, j'avise le gouvernement tout de suite que, si
c'est de cette façon encore une fois que le gouvernement veut noyer le
problème, noyer le poisson, cette fois-ci, nous ne marcherons pas et, en
ce qui me concerne, j'ai bien l'intention de ne pas laisser le gouvernement sur
cette question, procéder de la même façon qu'il a
procédé dans le cas de United Aircraft.
Je ne reviendrai pas sur la motion tout à l'heure, mais il reste
que c'est une perte de temps complète, une perte de temps totale, qui a
coûté de l'argent à la province, aux unions, aux
entreprises et à tous les gens concernés. Je pense que, cette
fois-ci, le gouvernement est en face d'un problème. Cela fait quatre ans
qu'on demande au gouvernement des modifications au code du travail, cela fait
quatre ans qu'on demande au gouvernement de prévoir puisque
administrer c'est prévoir le gouvernement est toujours
arrivé à la dernière minute avec une petite loi de pompier
en nous disant: il faut faire vite parce qu'il y a une conflagration.
Cette fois-ci, même si j'ai des doutes sérieux quant aux
conclusions de la loi 201 parce que le ministre ne pourra pas appliquer
une loi à laquelle personne ne croit j'espère quand
même qu'après avoir entendu les parties intéressées,
on pourra peut-être trouver une autre solution, une autre formule qui
permettrait cette fois-ci de tirer l'épingle du jeu et de faire en sorte
que cette question, pour laquelle les travailleurs et toute l'économie
du Québec sont en otage actuellement, puisse être
réglée à la satisfaction de tous.
M. le Président, j'aimerais, premièrement, avant de
commencer, que le ministre nous dise clairement, avant que la commission ne
soit ajournée sine die, qu'on pourra connaître les intentions du
gouvernement, savoir ce qu'il a l'intention de faire; deuxièmement, que
nous ayons l'occasion de faire des commentaires et de discuter les solutions
que le ministère entend proposer à la commission.
Le Président (M. Séguin): Merci, M. le
député. La Fédération de la construction du
Québec.
M. Dion (Michel): Voici...
M. Burns: Je m'excuse auprès de M. Dion. Je pense que le
député de Beauce-Sud a posé une question très
valable. Si on examine le texte même de l'article 1 du projet de loi no
201, je la trouve tout à fait justifiée. Aujourd'hui, on est
placé vous l'avez dit vous-même, M. le Président
devant un mandat que nous confie l'article 1 du projet de loi no 201, en
particulier, de la deuxième partie de ce texte qui nous dit: "II ne peut
c'est-à-dire le lieutenant-gouverneur en conseil toutefois
modifier ainsi le décret, sans que les associations
représentatives ne soient invitées à être entendues
devant la commission parlementaire du travail, de la main-d'oeuvre et de
l'immigration, quant aux raisons motivant l'impossibilité de parvenir
à une entente relativement aux modifications à apporter au
décret."
J'aurais pensé un peu comme le député de
Beauce-Sud, au moins, avant qu'on invite les associations
représentatives à venir nous dire pourquoi elles ne consentent
pas à un certain nombre de choses, que le ministre nous expose ce
à quoi ces gens ne consentent pas. Il me semble que cela pourrait
être d'un intérêt certain pour la commission de savoir
quelle est la proposition gouvernementale, de savoir aussi, dans
l'intérêt de la Fédération de la construction du
Québec, de la FTQ, de la CSN, de la CSD ou des autres organismes
patronaux qui doivent comparaître devant nous, en somme, il serait dans
l'intérêt de tout le monde que vous nous disiez, M. le ministre,
à ce stade-ci, quelles ont été les étapes
préliminaires à cette commission, comment il se fait qu'il n'y
ait pas consentement et ce sur quoi il n'y a pas eu consentement. Il me semble
que c'est là un prérequis.
M. Cournoyer: C'est aux parties à expliquer pourquoi elles
ne se sont pas entendues, ce n'est pas à moi de l'expliquer.
M. Burns: Non, non, mais il n'y a pas eu consen-
tement. Non, non. Il faut très bien lire le texte de l'article 1
que vous-même, M. le ministre, avez fait adopter à force de bras
à l'Assemblée nationale, sinon à force de bras, à
force de voix: "II ne peut toutefois c'est-à-dire le
lieutenant-gouverneuren conseil, je le répète modifier
ainsi le décret sans que les associations représentatives ne
soient invitées..."
Alors, vous avez nettement et clairement l'intention de modifier le
décret. Comment avez-vous l'intention de modifier le décret?
C'est ça qu'on aimerait savoir, à ce moment-ci. Puis, les
associations représentatives pourront nous apporter une contribution
très constructive, très concrète, relativement au fait
qu'elles ne consentent pas à votre façon de désirer
modifier le décret. C'est pourquoi je trouve que la question du
député de Beauce-Sud a parfaitement sa raison d'être,
à ce stade-ci. Moi, il me semble qu'avant de dire à quelqu'un:
Venez nous dire pourquoi vous ne pensez pas comme moi, il faut au moins que je
m'assure que cette personne sache pourquoi elle doit être en
désaccord avec moi. Elle doit surtout savoir quel est mon point de vue
pour être en désaccord avec moi.
Le Président (M. Séguin): J'ai entendu le
député de Maisonneuve. Il a basé son argumentation sur les
commentaires qui avaient été faits au préalable par le
député de Beauce-Sud. J'ai bien compris le député
de Beauce-Sud lorsqu'il a posé cette question. Il a dit: J'espère
qu'avant que la commission n'ajourne ses travaux sine die, le ministre puisse
faire part à la commission justement des commentaires auxquels le
député de Maisonneuve vient de faire allusion.
Je dois tout de même ici suivre une procédure qui est bien
dictée dans la loi des procédures pour les commissions.
M. Roy: M. le Président...
Le Président (M. Séguin): Un instant, s'il vous
plaît, un instant! On y dit bien ceci: Les étapes de
l'étude d'un projet de loi en commission sont: Premièrement,
l'exposé du ministre. Nous l'avons entendu.
M. Burns: Ce n'est pas un projet de loi. Il n'y a pas de projet
de loi.
Le Président (M. Séguin): 201.
M. Burns: On n'étudie pas un projet de loi, on
étudie en vertu de 201 le non-consentement des parties
représentatives...
Le Président (M. Séguin): Je ne débattrai
pas... M. Cournoyer: A quoi?
M. Burns: Bien, à quoi, on ne le sait pas, j'aimerais bien
que vous nous le disiez.
M. Cournoyer: Entre elles, M. le Président. M. Burns:
Bien oui...
M. Cournoyer: Ce sont elles qui ne se sont pas entendues.
M. Burns: ...c'est à vous de nous dire pourquoi vous nous
convoquez ici.
M. Cournoyer: Je n'ai pas d'affaire...
M. Burns: Vous nous convoquez ici pour modifier le
décret.
Une Voix: Oui, oui...
M. Burns: II n'y a pas d'autre façon.
Le Président (M. Séguin): On est convoqué...
M. Burns: Ce n'est pas ça?
Le Président (M. Séguin): ...pour, avant la
modification, entendre les parties. Bon.
M. Burns: Bon!
M. Roy: M. le Président, sur un point de
règlement.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Roy: Sur un point de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Séguin): Quel article?
M. Roy: Lorsque j'ai terminé...
Le Président (M. Séguin): Quel article?
M. Roy: L'article qui concerne un point du règlement.
Le Président (M. Séguin): Quel article? Donnez-moi
l'article.
M. Roy: M. le Président, il y a des règles de
pratique...
Le Président (M. Séguin): C'est ça.
Donnez-moi l'article.
M. Roy: ... ici.
Le Président (M. Séguin): Je viens de vous le
lire...
M. Roy: Bon.
Le Président (M. Séguin): ... et vous m'avez
interrompu.
M. Roy: Alors, vous avez des règles de pratique...
Le Président (M. Séguin): Pas vous, mais... M.
Roy: ... concernant...
Le Président (M. Séguin):... j'ai été
interrompu pendant que je lisais ces règles.
M. Roy: ... les commissions parlementaires. Vous avez les
articles 1, 2, 3, 4, jusqu'à 10. Ils concernent la procédure et,
si vous voulez me permettre, M. le Président, vous l'ajouterez à
l'article que vous voudrez.
Le Président (M. Séguin): Ah! Ah!
M. Roy: Non, ce que je pose comme question au ministre, et je
veux rappeler à la présidence les derniers propos que j'ai
tenus...
Le Président (M. Séguin): Oui.
M. Roy: J'ai posé une petite question toute simple au
ministre. J'ai demandé une réponse avant qu'on interroge les
parties en cause, à savoir si le gouvernement a l'intention de faire
connaître ses positions devant la commission parlementaire, dès
qu'on aura fini d'entendre les neuf groupes qui sont convoqués, de
façon qu'on nous ne nous arrive pas pour procéder de la
même façon que dans le cas de United Aircraft. Après avoir
entendu le dernier mémoire, on a ajourné les travaux de la
commission sine die et aucun des membres de la commission n'a pu se
prononcer.
Ce que je veux savoir au début, c'est si le ministre a
l'intention de faire connaître à la commission parlementaire les
solutions qu'il entend proposer et, deuxièmement si on aura l'occasion
de se prononcer là-dessus.
Je veux que ce soit déterminé dans la procédure de
la commission, avant qu'on s'engage de ce côté.
Le Président (M. Séguin): Je demande à la
Fédération de la construction du Québec de se
présenter à la table.
M. Burns: Bien, M. le Président, moi, je veux avoir une
réponse à ma question. Je veux avoir une réponse à
ma question. Je veux savoir si le ministre du Travail ne devrait pas nous dire
ce qu'il a l'intention de faire avant qu'on demande aux parties
représentatives de venir témoigner devant nous.
Est-ce qu'il y a moyen...
M. Bourassa: Non.
M. Burns: M. le Président, cela fait deux ou trois fois
que le premier ministre intervient. Je vous demande de vérifier s'il a
le droit de parole à cette commission. Voulez-vous vérifier, s'il
vous plaît, s'il a le droit de parole?
Le Président (M. Séguin): Le premier
ministre...
M. Burns: II a le droit de parole? Oui?
Le Président (M. Séguin): Pas comme membre.
Une Voix: Quel article?
M. Burns: Quel article?
Le Président (M. Séguin): Pas comme membre.
M. Burns: Bon. Alors, je vous dis qu'il n'a pas le droit de
parole.
Le Président (M. Séguin): Bon. C'est très
bien. M. Burns: C'est aussi simple que ça.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Burns: S'il veut avoir le droit de parole, qu'il
représente un de ses "backbenchers" ; c'est à peu
près...
Le Président (M. Séguin): A l'ordre!
M. Burns: ... d'ailleurs le niveau auquel...
Le Président (M. Séguin): A l'ordre!
M. Burns: ... il peut se situer.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre!
M. Burns: Oui!
Le Président (M. Séguin): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Burns: Alors, je pose une question, M. le Président. Je
demande au ministre du Travail...
M. Bourassa: Le président a dit: A l'ordre!
M. Burns: Laissez faire "A l'ordre!" vous, vous parlerez à
une commission où vous avez le droit de parole. Vous n'avez pas le droit
de parole à cette commission-ci.
M. Bourassa: Respectez le président. M. Burns:
C'est aussi simple que ça.
M. Bourassa: C'est le minimum qu'on vous demande.
M. Burns: M. le Président...
M. Bourassa: Respectez le président.
M. Burns: ... est-ce que le premier ministre, le
député...
Le Président (M. Séguin): A l'ordre!
M. Burns: ... de Mercier...
Le Président (M. Séguin): A l'ordre!
M. Burns: Est-ce que le député de Mercier a le
droit de parole à cette commission-ci?
Le Président (M. Séguin): A l'ordre! J'ai dit
que
le député de Mercier n'était pas membre de la
commission.
M. Burns: Ce qui veut dire qu'il n'a pas le droit de parole, M.
le Président, n'est-ce pas?
M. Bourassa: Comme le chef de l'Opposition.
M. Burns: Est-ce que vous avez vu le chef de l'Opposition
intervenir?
Le Président (M. Séguin): Non, non. M. Burns:
Bon.
Le Président (M. Séguin): Vous avez eu votre
réponse sans qu'on y réponde.
M. Burns: Je vous demande simplement... Je demande au ministre du
Travail s'il est capable, lui, le ministre du Travail, avant qu'il soit
"dégommé" de là, de nous dire carrément, une fois
pour toutes, s'il a un projet concret, s'il est capable de nous le donner
avant. Ce n'est que ça que je lui demande.
M. Cournoyer: La réponse, c'est que je suis capable de
vous le donner avant, et je ne vous le donnerai pas avant.
M. Burns: Bon. Cela est brillant. Vous allez demander à
des gens...
M. Cournoyer: Je ne demande pas... M. Burns: ...de venir
s'exprimer... M. Cournoyer: M. le Président,... Le
Président (M. Séguin): A l'ordre! M. Cournoyer: M. le
Président,...
M. Burns: Vous allez venir demander à des gens de
s'exprimer...
Le Président (M. Séguin): A l'ordre!
M. Cournoyer: M. le Président,...
M. Burns: ... sur quelque chose censément...
M. Cournoyer: ...écoutez-le.
M. Burns: ...auquel ils ne consentent pas et vous ne voulez
même pas...
M. Cournoyer: Vous allez lire le bill no 201... M. Burns:
...leur dire quoi que ce soit.
M. Cournoyer: ...que vous avez contribué à faire
adopter.
M. Burns: J'ai voté contre.
M. Cournoyer: Lisez-le le bill no 201.
M. Burns: Oui, j'ai voté contre.
M. Cournoyer: Et le bill no 201, ce qu'il indique, c'est que les
parties doivent expliquer qu'elles ne se sont pas entendues entre elles,...
M. Burns: Sur quoi?
M. Cournoyer: ... pas sur la formule du ministre,...
M. Burns: Sur quoi?
M. Cournoyer: ...ni la formule du gouvernement.
M. Burns: Elles ne se sont pas entendues sur quoi?
M. Cournoyer: Sur les problèmes qu'il y a dans l'industrie
de la construction. Qu'elles expliquent les problèmes qu'elles ont.
M. Burns: Et vous allez...
M. Cournoyer: Les représentants des syndicats sont ici
pour dire qu'il y a des problèmes d'indexation j'imagine...
M. Burns: Et on fait quoi ici?
M. Cournoyer: Les représentants des patrons sont ici
pourdire pourquoi ils n'ont pas été capables de consentir
à l'indexation.
M. Burns: Et pourquoi vous convoquez la commission, sinon pour
modifier le décret?
M. Cournoyer: Pour entendre les motifs de ces gens de ne pas
être capables de s'entendre sur un problème d'augmentation du
coût de la vie.
M. Burns: Donc, vous avez l'intention de modifier le
décret et sur quoi? C'est çaqu'on veut savoir.
M. Cournoyer: II est clair... M. Burns: Sur quoi?
M. Cournoyer: Ah! Là-dessus, M. le Président, il y
a une chose certaine...
M. Burns: Bien, c'est cela.
M. Cournoyer: ...qu'il y a une procédure, et je ne
réponds pas en cela à votre question, à savoir qu'est le
contenu de la formule dont vous avez dit qu'elle était miraculeuse
tantôt. Miracle! Il n'y a pas de miracle là-dedans, je tiens
à vous dire ça, M. le Président. Il n'y a rien de
miraculeux dans la formule que nous avons à proposer, non pas aux
parties, mais parce qu'elles ne se sont pas entendues.
M. Burns: Sur quoi ne se sont-elles pas entendues?
M. Cournoyer: Sur le problème de l'indexation des
salaires. Alors, si vous pensez aux délégués de
chantiers...
M. Burns: Bon.
M. Cournoyer:... il n'en est pas question pour le moment.
M. Burns: Je ne pense même pas à cela, mais je pense
à une chose, par exemple. Je pense que si vous nous convoquez le
président a été très explicite là-dessus
en vertu de la loi 201...
Une Voix: Oui.
M. Burns:... c'est parce que vous avez l'intention de modifier le
décret. Si vous avez l'intention de modifier le décret, il me
semble que cela ne serait que justice pour les patrons et pour les syndicats,
à qui on demande de venir nous jaser de cela aujourd'hui, qu'on leur
dise à peu près où vous vous en allez. Ce n'est que cela
qu'on vous demande, voyons donc! Soyez sérieux, bonguienne!
M. Cournoyer: Moi, tout ce que je demande, c'est que la loi soit
respectéee et que les patrons et les syndicats nous disent quels
étaient leurs problèmes et pourquoi ils n'ont pas
été capables de s'entendre sur ce problème qui a
été soulevé par les travailleurs de la construction dans
la province de Québec.
M. Burns: J'invoque le règlement, M. le Président.
Ce n'est pas cela, la loi 201. C'est notre amendement. On sait drôlement
comment cet amendement est fait.
M. Cournoyer: Lisez-le.
M. Burns: Ils ont le droit de venir nous exposer les raisons
motivant l'impossibilité de parvenir à une entente relativement
aux modifications à apporter au décret. C'est parce qu'il y a des
modifications qui vont être apportées...
M. Cournoyer: ... et dont... Oui.
M. Burns: ... quelles sont les modifications au décret sur
lesquelles ils ne s'entendent pas à moins que vous nous disiez, à
un certain moment, que vous avez l'intention d'en apporter. Ce n'est que cela
qu'on vous demande.
M. Cournoyer: Moi, tout ce que j'ai dit...
M. Burns: Je ne comprends pas du tout votre position
là-dedans.
M. Cournoyer: M. le Président, les modifications...
M. Burns: Autrement, ils n'ont même pas de raison
d'être ici.
M. Cournoyer: M. le Président, les modifications au
décret sont très nettement souhaitées par les parties
syndicales et elles sont refusées par les parties patronales. Quelles
modifications au décret sont refusées par les parties patronales
et quelles sont celles que demandent les syndicats? Pourquoi n'ont-ils pas
été capables de s'entendre ensemble et pourquoi n'ont-ils pas
été capables de s'entendre sur des modifications au
décret? C'est ce qui est l'objet du problème qu'ils ont depuis
déjà un certain temps, M. le Président.
Il faut quand même regarder ce qu'ils demandent. Vous voulez
savoir ce qu'ils demandent? J'imagine que vous en avez quelques doutes. Vous
savez un peu ce qu'ils peuvent demander. De l'autre côté, vous
n'avez peut-être pas entendu le raisonnement des patrons sur la
réaction qu'ils ont à ce genre de demandes qui leur ont
été faites. A partir du moment où ils ne se sont pas
entendus entre eux, le gouvernement devra prendre une décision. Avant de
la prendre, il doit les entendre, du fait qu'ils n'ont pas été
capables de s'entendre, sur les modifications requises, d'une part, par la
partie syndicale, et refusées, d'autre part, par la partie
patronale.
C'est de cette façon que je comprends le bill 201.
M. Burns: Je comprends que...
M. Cournoyer: J'imagine qu'au bout du compte, au nom de
l'intérêt public et c'est pourquoi il y a commission
parlementaire le gouvernement a annoncé son intention de trancher
le litige, parce que, semble-t-il, c'était la seule façon de
trancher le litige au nom de l'intérêt public. Le litige, il vous
est exposé, non pas avec la formule gouvernementale, mais entre les
parties.
M. Burns: Je comprends que vous n'avez donc pas l'intention de
donner, d'avance, la solution miracle que vous voulez apporter au
décret.
M. Cournoyer: C'est votre qualificatif.
M. Burns: Je comprends bien cela? Bon! Est-ce que vous avez
l'intention là, je pense que je fais front commun avec le
député de Beauce-Sud avant la fin des travaux de cette
commission, de nous dévoiler votre solution miracle?
M. Cournoyer: D'abord, ce n'est pas une solution miracle.
Deuxièmement, quand le conseil des ministres aura pris la
décision, qui ne relève pas du ministre du Travail tel que
la loi 201 le dit, cela relève du conseil des ministres le
conseil des ministres me donnera les instructions.
M. Burns: Sur recommandation du ministre.
M. Cournoyer: Oui, mais c'est le lieutenant-gouverneur en conseil
qui prend la décision. Ce n'est pas le ministre.
M. Burns: D'accord! Est-ce que vous avez l'intention de nous dire
quelle va être votre recommandation à vous?
M. Cournoyer: Non.
M. Bourassa: Un peu de sérieux.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Cournoyer: Mon intention...
Le Président (M. Séguin): Ecoutez! A l'ordre!
M. Burns: Vous n'avez pas l'intention...
M. Cournoyer:... je n'ai pas l'intention de vous la dire.
M. Burns: C'est-à-dire qu'on va ajourner les travaux de la
commission et on va s'en aller chacun chez nous...
M. Cournoyer: C'est cela.
M. Burns: ... avec une belle grosse queue de poisson.
M. Cournoyer: C'est ce que vous pensez.
M. Burns: C'est exactement cela que vous nous dites?
D'accord!
M. Cournoyer: Je n'ai pas dit cela.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre!
M. Burns: Les parties vont savoir exactement à quoi s'en
tenir. C'est ce pourquoi je voulais faire établir cela.
M. Roy: Sur la question préalable... M. Bourassa:
C'est cela, la loi.
M. Roy: ... le règlement, M. le Président, ma
question de tout à l'heure était plutôt une question
préalable. J'ai demandé au ministre s'il avait l'intention de
faire connaître, devant la commission parlementaire, les solutions qu'il
entendait proposer pour tâcher de régler le conflit.
M. le Président, c'est une question préalable. C'est une
question fondamentale. Nous sommes venus faire quoi, ici, en commission
parlementaire? Entendre les parties, mais nous sommes venus pour plus que cela,
M. le Président. Nous sommes venus pour entendre la solution ou les
solutions que le ministre du Travail entend proposer et, comme parlementaires,
il serait tout à fait normal que nous ayons le droit et le
privilège de nous exprimer sur les recommandations que le ministre
entend faire.
M. le Président, je constate, à la suite du
député de Maisonneuve, que ce que le gouvernement veut faire est
de convoquer les représentants de neuf groupes pour qu'ils se fassent
entendre devant la commission parlementaire; une fois que le neuvième
groupe se sera exprimé devant la commission parlementaire, celle-ci sera
ajournée sine die, cela vient de finir et on n'a pas un mot à
dire.
Alors, en quelque sorte, on veut se servir de la commission
parlementaire, encore une fois, comme d'une espèce d'écran pour
tâcher de protéger ou de cautionner le gouvernement sans que les
parlementaires et les membres de la commission puissent s'exprimer et exprimer
leur point de vue sur des problèmes, je pense, qui concernent tout le
monde et pour lesquels nous avons quand même, nous aussi, reçu un
mandat de la population.
M. Bossé: Une question de règlement.
Le Président (M. Séguin): La
Fédération de la construction du Québec.
M. Burns: Vous avez une question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Séguin): Le député
de Dorion.
M. Bossé: M. le Président, tout à l'heure,
le député de Maisonneuve a soulevé une question, je crois,
qui est assez importante, celle du droit de parole.
Le Président (M. Séguin): Ce qui s'est dit avant
était irrégulier. J'ai permis la discussion pour essayer
de...
M. Bossé: Mais celle du droit de parole des
députés, justement...
M. Burns: J'invoque le règlement. Je m'excuse
auprès du député de Dorion.
Le Président (M. Séguin): Non, il y a
déjà une question de règlement.
M. Burns: J'invoque le règlement, parce que vous venez de
dire, M. le Président, que ce que j'ai soulevé était
irrégulier. Pas du tout, ce n'était pas irrégulier. Je
soulevais la question pour savoir si le député de Mercier avait
droit de parole à cette commission.
Le Président (M. Séguin): Question d'opinion. M.
Bossé: La question de...
M. Burns: Ce n'est pas une question d'opinion. Est-il membre ou
s'il n'est pas membre?
Le Président (M. Séguin): Je vous ai
répondu. M. Burns: Alors, arrêtez...
Le Président (M. Séguin): J'ai répondu qu'il
n'était pas membre de la commission. Le député de
Dorion.
M. Burns: ...d'essayer de jouer sur des questions de
règlement.
M. Roy: S'il n'est pas membre, il n'a pas d'affaire à
prendre...
Le Président (M. Séguin): Le député
de Dorion.
M. Roy: M. le Président, si le député n'est
pas membre...
Le Président (M. Séguin): Le député
de Dorion, sur un point de règlement.
M. Bossé: Ma question de règlement veut
justement...
M. Roy: II n'est pas membre de la commission, M. le
Président.
M. Bossé:... régler ce problème. En effet,
dans le passé, aux commissions parlementaires, il y a une coutume
établie, à peu d'exceptions près, à savoir que tous
les députés, membres ou non ont droit de parole. Il y a
peut-être une exception à cette règle cependant,
généralement, il est convenu que, même si les
députés ne sont pas membres, ils peuvent assister et, avec
l'assentiment des membres de la commission, ils ont aussi le droit de prendre
la parole.
Le Président (M. Séguin): Sans droit de vote.
M. Bossé: Sans droit de vote.
M. le Président, ma question est dans le sens suivant: Est-ce que
la commission permet aux députés non membres la permission de
prendre la parole? C'est une tradition, je pense, qui a toujours
été respectée.
M. Roy: Non, non!
M. Burns: Une tradition qui n'a pas été
respectée dans le bill 22, qui n'a pas été
respectée...
M. Bossé: J'ai dit à peu d'exceptions
près.
M. Burns:... dans le projet de loi no 87. Je vais vous en nommer
d'autres si vous en voulez.
M. Bossé: J'ai dit à peu d'exceptions près.
Le député de Maisonneuve sait très bien que,
personnellement, je suis déjà intervenu, d'une façon
très large, à son égard, lorsqu'il n'était pas
membre de la commission, afin de lui permettre justement ce droit de
parole.
Le Président (M. Séguin): II y a eu des occasions,
M. le député...
M. Bossé: De multiples.
Le Président (M. Séguin):... où cette
requête ou cette demande que vous faites a été mise aux
voix et, de fait, c'étaient simplement les membres de la commission,
reconnus comme membres de la commission, qui avaient le droit de prendre la
parole.
M. Burns: C'est ça, le règlement.
M. Bossé: Alors, seuls les membres de la commission ont le
droit de parole.
Le Président (M. Séguin): Vous avez fait valoir
votre point, là.
M. Burns: C'est cela.
Le Président (M. Séguin): Vous avez fait valoir
votre point.
Je demande donc à la Fédération de la construction
du Québec de bien vouloir s'exprimer, s'il vous plaît.
M. Dion: Après plusieurs départs, je suis
réellement sur un départ.
Le Président (M. Séguin): Ce n'est pas ma faute.
J'ai essayé depuis longtemps de vous passer.
fédération de la construction du
Québec
M. Dion: Je vois qu'il y a autant d'animation à
l'assemblée des commissions qu'il peut y en avoir parmi les parties
syndicales et patronales.
M. le Président, deux choses avant de commencer. La
première, c'est que, malgré tous les voeux que vous avez pu
énoncer au début, je pense qu'on n'a pas encore réussi
à trouver de la place pour toutes les associations patronales qui ont
à présenter un mémoire ici. Nous sommes encore,
actuellement, devant quatre associations qui n'ont pas leur place à la
table. Je pense qu'il serait totalement justifié de leur trouver une
place à la table, comme les trois autres parties syndicales.
M. Burns: La CSD est en arrière.
M. Dion: Malheureusement, il semble que la CSD jouit du
même privilège que nous.
La deuxième chose, M. le Président et je suppose
que la première a été entendue c'est pour vous dire
que les six parties patronales, qui se résument à cinq parce que
deux des parties patronales sont représentées par un
porte-parole, l'ASECQ, ont un mémoire commun. C'est une brève
introduction aux cinq mémoires qui vous seront présentés.
Nous aimerions, avant de procéder avec le mémoire de la
fédération, pouvoir vous présenter cette introduction.
Le Président (M. Séguin): Malheureusement... Est-ce
que vous adressez vos commentaires à moi directement?
M. Dion: C'est évident qu'on s'adresse à vous, M.
le Président.
Le Président (M. Séguin): Un instant, s'il vous
plaît! C'est que, lors de vos derniers commentaires,
malheureusement, j'étais pris à...
M. Dion: C'était une information et je
préfère que vous reteniez la première, qui nous
apparaît importante. La deuxième c'est d'informer la commission
qu'on a un mémoire préalable...
Le Président (M. Séguin): C'est cela, je l'ai
ici.
M. Dion: ... pour les parties. Non. Avant le mémoire de
chacune des parties, il y a une brève introduction au nom des six
parties patronales. Je suppose que, pendant que je lis, vous faites le
nécessaire pour nous assurer la place.
Le Président (M. Séguin): Je dois faire...
M. Burns: Est-ce que ces six parties vont renoncer à leur
droit d'intervenir étant donné ce préalable ou quoi?
Le Président (M. Séguin): Malheureusement, je ne
l'ai pas fait tout à l'heure en donnant les explications au
début, mais notre règlement, à l'article 8 de l'annexe,
dit que la durée limite allouée à chaque personne ou
groupe pour un exposé sommaire de son mémoire est de 20 minutes
et le temps alloué aux membres de la commission pour la période
des questions suivant le mémoire est de 40 minutes réparties
équitablement entre les parties en cause à la table de la
commission. Ces périodes peuvent être prolongées si la
commission le juge à propos. C'est dire qu'étant donné
l'intérêt qu'on peut apporter à votre mémoire ou
à vos commentaires la commission peut fort bien décider de vous
entendre plus de 20 minutes. Mais, normalement, vous avez une période de
20 minutes pour faire l'exposé de votre mémoire ou vos
commentaires. C'est la réglementation que j'essaie de suivre depuis tout
à l'heure. Allez-y.
M. Dion: Je suppose que le temps qui s'est écoulé
durant vos discussions tantôt ne compte pas dans mes 20 minutes.
Le Président (M. Séguin): Trois minutes.
M. Dion: M. le Président, cela me surprendrait que nous
dépassions le temps qui nous est alloué. Mais, effectivement, je
dois vous dire que nous solliciterons, si nécessaire, le droit de vous
faire connaître nos points de vue sur le problème.
M. le Président, messieurs les membres de la commission, une
commission parlementaire pour étudier les problèmes de
l'industrie de la construction est un événement assez
spécial en lui-même, mais lorsqu'une telle commission est
convoquée, non pas en vue de préparer une loi mais à la
suite de l'adoption d'une loi de la catégorie du bill 201, elle
revêt un caractère bien particulier.
Les quatre associations qui forment le front commun soit
l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du Québec,
l'Association de la construction de Montréal et du Québec,
l'Association provinciale des constructeurs d'habitations d u Québec et
la ration de la construction, ainsi que l'Association des sous-entrepreneurs en
construction du Québec, porte-parole de la Corporation des
électriciens et de la Corporation des maîtres mécaniciens
en tuyauterie, lesquelles représentent tous les employeurs, se sont
vraiment interrogées sur l'opportunité et le mode de
représentation à faire. Devions-nous exposer
généralement les nombreux problèmes que nous connaissons
avant et depuis la requête en indexation? Fallait-il se restreindre
à expliquer nos prises de position en regard de la requête en
indexation? Etait-ce l'occasion de commenter le contenu et les
conséquences de la nouvelle loi? La question est demeurée sans
véritable réponse, sauf que tous nous sentions que le
scénario actuel était monté en regard de la question
d'indexation. Les six associations se sont donc penchées sur cette
question et chacune a rédigé son propre mémoire.
Subséquemment, nous nous en sommes informées mutuellement pour
constater que, de façon tout à fait personnelle, nous cheminions
vers la même conclusion. L'indexation est un problème
créé de toutes pièces par les dirigeants syndicaux et elle
est l'occasion d'une nouvelle démonstration de force contre les
employeurs et même contre l'autorité gouvernementale.
Ceci ne nous surprend pas outre mesure, surtout si nous nous souvenons
des déclarations des chefs syndicaux manifestant leur volonté de
renverser le pouvoir ou encore incitant le travailleur à violer les
lois. Vous pourrez constater par vous-mêmes que les six exposés
s'accordent et se complètent.
L'Association de la construction de Montréal et du Québec
résume l'évolution du conflit sur l'indexation en brossant une
image exhaustive du climat qui s'est développé au cours des cinq
dernières années. La fédération, pour sa part,
analyse les sources du conflit actuel et expose sa position face à la
tête en indexation. L'Association des constructeurs de routes et grands
travaux du Québec traite de la question en fonction de la loi tout
spécialement par l'entremise du principe de la liberté syndicale.
L'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec
démontre que les salariés de la construction sont bien nantis
etqu'il faut rejeter le principe de la violence et de la force comme principale
source pour fixer les lignes de conduite à suivre.
Enfin, l'Association des sous-entrepreneurs en construction traite de la
complexité des relations de travail dans l'industrie et des
fréquentes interventions inefficaces, du gouvernement qui n'occasionnent
que le pourrissement des conflits. Il est donc évident que nous aurions
pu fondre nos représentations dans un seul document. Cependant, les
associations ont préféré exposer dans toutes leurs
particularités les vues de leurs membres. Au nom des six associations,
nous désirons vous confirmer que nous sommes généralement
en accord sur le contenu des documents de chacune des associations, soit
l'Association de l'habitation, l'Association des routes, l'Association de
Montréal, la Fédé-
ration de la construction et l'Association des sous-entrepreneurs en
construction représentant les électriciens et les plombiers, en
tenant compte qu'elles concluent toutes à la non-indexation.
Cependant, avant de procéder, nous croyons qu'il y a lieu de se
poser la question suivante: Est-ce qu'il s'agit d'une tribune où les
parties peuvent valablement se faire entendre ou est-ce une simple étape
à franchir? Le seul fait que la commission entre dans le
mécanisme du bill 201 nous justifie d'être prudents, d'autant plus
que depuis quelques jours, nous pouvons lire et entendre manchette sur
manchette disant que le ministre du Travail s'apprête à imposer un
tel montant d'indexation.
Messieurs de la commission, il n'est pas de notre intention de devenir
inconsciemment les principaux acteurs d'une comédie tragique dont
l'unique conséquence serait, d'une part, faire rire aux larmes ceux qui
ont de toutes pièces inventé ce faux problème et, d'autre
part, être le début de la fin d'une foule d'entreprises qui,
acculées au mur par une indexation quelle qu'elle soit, devront
abandonner le combat. Il serait donc, selon nous, absolument essentiel que le
ministre du Travail fasse immédiatement savoir à cette commission
ses intentions finales. Pourquoi ne pas sauver à tous et à chacun
d'entre nous le fardeau de la participation au massacre de nos dernières
structures? Les nombreuses déclarations faites aux media d'information
sont éloquentes.
Pardonnez-nous cette sincérité, mais il nous faut vous
avouer que nous avons l'impression de venir devant vous avec des documents
basés sur d'excellents et irréfutables principes de logique et de
justice alors que, d'autre part, le scénario semble se compléter.
La partie serait jouée et, à toutes fins pratiques, l'employeur
serait encore appelé à être le dindon de la farce. Cette
fois-ci, messieurs les membres de la commission, il nous faut malheureusement
vous inviter, si c'est encore le temps, à bien peser le geste à
poser, car la mesure est comble et votre geste pourrait être tout
simplement la conséquence d'une augmentation subite du chômage
dans la construction. Les employeurs n'en peuvent plus. Trop, c'est trop! Sans
aucune compensation et sans aucune garantie future, garantie que le
gouvernement devrait nous assurer, mais ne peut et ne pourra jamais offrir car
elle dépend de la bonne volonté et de la bonne foi des parties
syndicales. Or, jusqu'à ce jour, ni l'une ni l'autre de ces
qualités n'ont existé. Nous avons plutôt fait connaissance
avec la violence, l'intimidation, l'illégalité. Si l'on envisage
dans le pseudo-intérêt du public, somme toute, de concourir
à nous forcer le bras, nous vous déclarons que le
véritable intérêt du public est d'arrêter
immédiatement ce système de récompense à
l'illégalité et la fourberie des chefs syndicaux. Car,
individuellement, nos employeurs se chargeront d'éteindre le feu en
prenant les dispositions qui s'imposeront.
Conséquemment, nous avons besoin avant tout d'une mise au point
claire de la part de l'autorité gouvernementale. Cependant, si la
présente commission veut réellement nous entendre pour
évaluer objectivement les problèmes tels les arrêts de
travail illégaux, la non-productivité sur les chantiers, les abus
de pouvoir des délégués syndicaux, l'absence de
liberté syndicale, etc., et chercher de véritables solutions
à ces questions, nous sommes à votre entière
disposition.
C'est signé l'Association de la construction de Montréal,
l'Association provinciale des constructeurs d'habitation, l'Association des
constructeurs de routes et grands travaux du Québec, la
Fédération de la construction du Québec, la Corporation
des maîtres électriciens du Québec et la Corporation des
maîtres mécaniciens en tuyauterie du Québec.
Le Président (M. Séguin): Une simple question, pour
éclaircir un peu. Puisque vous apportez ce document, que vous avez fait
vos commentaires et que vous finissez par cette signature des six organismes,
est-ce que je dois comprendre par là que les cinq autres ne se feraient
pas entendre?
M. Dion: Dans le corps du document, je vous ai fait part que
chacune avait l'intention de présenter ses propres vues.
Le Président (M. Séguin): Est-ce que vous avez
l'intention de présenter des commentai res sur votre mémoire
principal?
M. Dion: Si vous me permettez, M. le Président, j'aimerais
lire ce document-là.
Le Président (M. Séguin): Vous avez encore du
temps, une dizaine de minutes. Le lire au complet, vous n'en aurez pas le
temps.
M. Dion: M. le Président, est-ce que vous pourriez...
Le Président (M. Séguin): A moins que la commission
en décide autrement. Est-ce que vous permettez la lecture, messieurs? A
ce moment-là, on le permet aux autres aussi.
M. Dion: II faudrait comprendre M. le Président, si vous
me le permettez, que la présentation que je viens de faire a
été faite au nom des six associations et que je ne voudrais pas
pour autant pénaliser la fédération que je
représente.
Le Président (M. Séguin): Dans ce
contexte-là, prenez le temps qu'il faut pour lire votre texte.
M. Dion: Merci. Messieurs et je parle maintenant au nom de
la Fédération de la construction du Québec nous
voulons vous remercier de l'opportunité que vous nous accordez
d'expliquer notre position face au conflit actuel. Cependant nous ne croyons
pas qu'il y ait lieu de nous réjouir d'être devant une commission
parlementaire après l'adoption d'une loi.
Nous aurions de beaucoup préféré nous faire
entendre avant, car les positions que nous avons défendues
jusqu'à ce jour sont, quant à nous, d'une part, justes et
honnêtes et, d'autre part, appuyées
sur les vrais principes d'une saine législation en relations de
travail.
Cette commission parlementaire est-elle le signe d'une incapacité
des parties à régler leurs problèmes? Ou est-ce la
rançon d'une accumulation de faits et gestes illégaux qui ont
malheureusement été trop souvent et trop longtemps
tolérés? Bien plus, faut-il croire que les nombreuses
interventions législatives antérieures n'ont jamais remis de
l'ordre, mais qu'elles ont plutôt transformé les problèmes,
les ont extensionnés et même, souvent, elles en ont
créé de nouveaux, malheureusement plus douloureux à subir
par les employeurs.
Des situations difficiles, nous pourrions en vivre bien d'autres si la
loi n'est pas sagement amendée, car, dans son état actuel, elle
n'est plus apte à contrôler les situations.
Conséquemment, elle n'est plus respectée et, à
toutes fins pratiques, il semble à plusieurs plus rentable d'agir sur le
bras. La loi du plus fort domine et triomphe. Il n'est donc pas surprenant,
d'autre part, de voir les employeurs refuser catégoriquement tout
dialogue car il est prévu d'avance que leurs gestes, si raisonnables
qu'ils pourraient être, ne seraient pas suffisants.
Etat de la question. L'industrie de la construction traverse avec une
déconcertante régularité des problèmes d'envergure
qui confrontent les parties entre elles et perturbent, à divers
degrés, l'économie de cette province.
Depuis décembre 1968, nous sommes gouvernés par une
législation spéciale qui devait prendre soin de l'aspect bien
particulier de ce secteur important. Le code du travail ne pouvait
répondre à nos besoins.
Dès la parution de cette loi, il était déjà
acquis que des ajustements seraient souhaitables. Les événements
vécus seraient inutiles à réciter car vous les connaissez.
Mais nous croyons devoir souligner le manque de bonne foi de certaines parties
devant la loi, les nombreuses interventions gouvernementales sans plan
d'ensemble, l'utilisation de la législation pour des fins bien
différentes de celles pour lesquelles elle fut adoptée.
Plus d'un mémoire présenté au ministère du
Travail a été l'occasion pour formuler des propositions en vue de
résoudre en dehors des périodes de fortes crises, les
problèmes épineux de notre industrie. Mais, jusqu'à ce
jour, les réactions ont été nulles.
A coup sûr, plusieurs diront que les périodes sereines ont
été bien rares et que l'ordre n'a jamais vraiment
régné. C'est sans doute en vertu de cette prétention que
le ministère du Travail a présenté amendement sur
amendement à l'Assemblée nationale toujours, comme le mentionnait
M. Burns le 21 décembre 1974, devant l'Assemblée nationale, en
vue de mettre de l'ordre.
D'une fois à l'autre, cependant, le marasme continua ou augmenta.
Combien de fois n'avons-nous pas condamné ces interventions
inadéquates? Spécialement lorsque les règles du jeu
étaient modifiées pendant que la partie se déroulait et
que souvent elle atteignait son point d'intérêt maximum.
Lorsque, lors de l'adoption du bill 38, le législa- teur faussa
totalement le jeu des échanges à la table des
négociations, le bill 9, pour sa part, changea les joueurs et leur donna
des pouvoirs différents, légalisant ainsi tout ce qui
était illégal. Enfin, nous ne parlerons pas ici du bill 14 qui a
introduit un nouveau concept, celui de la rétroactivité.
Jusqu'à ce jour, ces gestes ont été posés
après que les situations eurent longuement pourri, de telle sorte que,
la plupart du temps, les pouvoirs demandés dans ces amendements nous
apparaissaient comme extravagants. Bien sûr, il y a eu quelques
tentatives pour freiner ce système, mais la modestie des gestes n'aura
jamais eu gain de cause.
Aujourd'hui, nous sommes devant un nouveau conflit créé
par une demande d'indexation, appuyé par une foule de gestes
répréhensibles à tous les niveaux. Les jeux se font comme
suit: La FTQ tente de signer des ententes illégales, selon des moyens
bien connus: arrêt de travail, ralentissement des chantiers et
menaces.
L'application des lois existantes est lente et peu efficace. Certains
employeurs ne se sentent plus adéquatement appuyés et
succombent.
En résumé, la situation se détériore et
l'actualité démontre que les moyens d'action des attaquants sont
durs à supporter, à certains niveaux, et trop peu efficacement
réprimés. Le législateur intervient, non pas par une loi
ou des moyens d'action qui permettraient de rétablir l'ordre,
c'est-à-dire la situation qui devrait normalement exister, mais par une
loi qui, à notre avis, annonce, sans l'ombre d'un doute, qu'il pourra y
avoir changement au décret, comme le réclame le
contestataire.
Nous ne pouvons que condamner une telle attitude en tant que partie
patronale la plus représentative, nous rejetons, parce qu'insalubre pour
notre industrie, tout geste posé en vue de régulariser des
situations illégales, sans qu'au préalable des efforts aient
été vraiment déployés pour les prévenir et
les combattre. Il est devenu notoire que les travailleurs ou leurs chefs
peuvent créer des situations illégales collectives, sans
être trop dérangés et, dès qu'ils ont suffisamment
exaspéré l'entourage, ils peuvent espérer gagner leurs
points.
Selon nous, la paix dans la construction ne pourra être
réalisée que par l'acceptation, de part et d'autre, de
règles de jeu adéquates, établies avec le consentement ou,
au minimum, par la consultation des parties, et en toute bonne foi,
expérimentées sans plus d'intervention. Il faut en finir avec les
lois à la dernière minute, lesquelles sont, la plupart du temps,
de faux outils de travail, parce qu'issues de fausses situations, mais aveu la
conséquence qu'elles détruisent lentement tout système qui
aurait pu être valable.
Les principes en jeu. La construction n'est pas un champ
expérimental. Il est insensé de conduire des expériences
sur les détonateurs dans une chambre remplie de dynamite. Même
s'il faut reconnaître que le climat est souvent survolté,
l'industrie de la construction pourrait être civilisée, si tout le
monde voulait bien y mettre l'effort nécessaire, et ceci inclut le
gouvernement.
Il est cependant important, quant à nous, de fixer au
préalable des principes et se donner des
moyens de les faire respecter. Parmi ces principes fondamentaux, il en
est un qui, actuellement, est en jeu: le respect de l'entente conclue,
prolongée par décret.
Evidemment, comment parler de relations de travail valables, si les
intéressés ne se sentent aucunement liés par les ententes
conclues et décrétées? A la moindre occasion, tentation ou
omission, serait-il possible de passer outre que plus rien ne tiendrait? Est-il
opportun de rappeler qu'à notre avis la loi vise à permettre aux
parties de s'entendre sur certaines conditions de travail, que ni l'une ni
l'autre des parties ne peuvent unilatéralement changer? Si nous
n'admettions pas ce principe, il serait inutile de parler de relations de
travail.
Bien plus, dans le projet de loi no 290, nous avions obtenu ce que nous
appelions une règle de non-ingérance. Lors de l'adoption du
projet de loi no 9, c'est-à-dire l'établissement de la
règle de la majorité, il a été prévu que
l'entente des parties pourrait être modifiée, pour éviter,
en quelque sorte, les clauses préjudiciables. Bien qu'il se soit agi
d'une modification au principe antérieurement stipulé, ce droit
nous est paru comme valable. La masse du projet de loi no 201 vient cependant
détruire totalement ce principe de la non-intervention. Le décret
peut maintenant être modifié, amendé, abrogé s'il y
va de l'intérêt public.
Il est à noter que les centrales syndicales sont, à notre
avis, des spécialistes pour créer de toutes pièces des
problèmes, en ce sens qu'elles montent facilement en épingle une
situation, provoque le chaos et oblige le gouvernement, trop souvent
complaisant, à agir dans l'intérêt public.
Le projet de loi no 201 et ses antécédents. Il n'est pas
de notre intention de commenter en profondeur le projet de loi no 201, mais
nous croyons qu'il y a lieu, cependant, de souligner que nous sommes totalement
en désaccord sur l'opportunité de cette loi. Le projet de loi no
201 a-t-il pour but de régler le problème actuel de l'industrie
de la construction? Quel est donc ce problème et quelle est sa
justification? Est-ce l'indexation ou les arrêts de travail, ou la
non-productivité sur les chantiers? Ce sont toutes ces choses à
la fois, mais surtout la première, dont toutes les autres
dépendent.
Pourquoi est-on devant un tel problème? La majorité des
parties patronales ont refusé de modifier le décret pour indexer
les salaires et, dès lors, des représailles syndicales ont
débuté. Il est connu que les actions syndicales ont eu certains
résultats, tout spécialement dans la région de
Montréal, dans certains métiers, chez les électriciens et
les plombiers.
Pourquoi certains employeurs ont-ils donné l'indexation ou son
équivalent, alors que d'autres la refusent? Il serait enfantin de vous
parler de ces "chaleureux moyens" de persuasion utilisés pour convaincre
l'employeur. Il serait inutile de vous rappeler les positions délicates
où sont souvent placés les employeurs vis-à-vis de leurs
donneurs d'ouvrage. Il serait également superflu de vous raconter
l'état précaire où sont placées les entreprises
devant les ralentissements de travail ou les menaces de perte de main-d'oeuvre.
Il est d'ores et déjà connu que certaines entreprises travaillent
suivant des contrats qui ne leur permettent pas de passer la facture.
Enfin, faut-il ajouter que certains croient, malheureusement, que toute
résistance dans un climat de jungle est souvent fatale à
l'entreprise? Nous ne blâmerons sûrement pas ici les entreprises
qui n'ont eu d'autre choix que celui de céder. Il s'agit souvent d'une
évaluation prudente de la situation conditionnée la plupart du
temps par une série d'expériences antérieures. Le patronat
déplore l'absence de support législatif et l'impossibilité
d'exercer ou de réclamer ses droits les plus fondamentaux. S'il y a lieu
de déplorer ces abandons forcés ou volontaires, il y a aussi
nécessité de souligner la complaisance d'une très faible
quantité d'employeurs qui croient acheter ainsi la paix mais ignorent
sans doute qu'ils préparent la guerre.
Le refus d'indexer. Depuis le dépôt de la demande
d'indexation, la majorité des employeurs ont pris position en
déclarant qu'une telle requête n'était nullement
justifiée. Dans un premier temps, les associations, qui les
représentent, se sont demandées s'il était réaliste
de prétendre que les salariés étaient
préjudiciés par l'inflation. Dans un second temps, ils ont
évalué dans quelle mesure, s'il y avait un quelconque
préjudice, il serait normal ou opportun de modifier le contrat.
Or, les conditions salariales sont adéquates.
Pour répondre adéquatement au premier point, nous avons,
à l'aide des chiffres extraits des décrets et d'informations
officielles, recherché dans quelle mesure la requête d'indexation,
uniformément énoncée par les syndicats, était
valable. Bien sûr que les syndiqués peuvent prétendre
à une perte de l'amélioration de leurs revenus. Ce point, nous
l'admettons volontiers. Mais cela est totalement différent que
d'affirmer qu'ils subissent une perte de leur pouvoir d'achat comme tel.
A titre d'exemple, si, le 1er janvier 1974, une personne gagne $100 et
qu'il est prévu que, le 1er juin 1974, elle aura droit à $10
d'augmentation pour atteindre la fin de l'année, il est clair que ces
anticipations d'amélioration de revenu sont de 10%. Or, lorsque
l'inflation provoque en 1974 que le coût de la vie augmente de 5%, il
faut donc, en toute objectivité conclure que l'amélioration de
son revenu subit une coupure de 50% et plus, mais pour autant son pouvoir
d'achat réel n'est pas déficitaire. D'après les calculs
que nous avons conduits au moment de l'évaluation de la demande
syndicale, il nous est apparu absolument évident que la variation
progressive du coût horaire du travailleur était nettement plus
que suffisante pour absorber l'inflation. Encore aujourd'hui, ce
phénomène peut être constaté. Il y a cependant deux
points à considérer et ils sont les suivants: a) l'écart
s'amincit continuellement; b)l'enveloppe de paie est faussée par le
prélèvement des bénéfices marginaux.
Nous ne pourrions pas demeurer objectifs si nous n'admettions pas que,
sur le premier point, la position absolument réaliste que nous avons
défendue en mai 1974 est de plus en plus menacée. Il est, selon
l'interprétation de plusieurs, des plus évidents
que le rythme accéléré de l'inflation gruge le
différentiel rapidement, dans certaines régions. Mais la
situation n'est pas la même partout. Cette admission faite, il faudra
peut-être se demander pourquoi il n'est pas envisagé d'y
remédier. Nous y répondrons plus loin.
Sur le second point, il y a, à notre avis, un malaise. S'il est
vrai de prétendre que le salaire brut de M. X n'a pas subi de pertes
réelles dues à l'inflation, il est cependant honnête de
constater que, dans certains cas, le "take home pay" peut être si peu
amélioré qu'au rythme de son évolution l'inflation
pourrait ou a pu prendre le dessus. A titre d'exemple, si un salarié
gagne $100 et que le contrat prévoit $10 d'augmentation, répartis
comme suit: $5 sur la paie et $5 à un fonds de retraite et que, bien
plus, son allocation en vacances, prélevable hebdomadairement, passe de
5% à 8%, il est, en tenant compte du phénomène de 5%
d'inflation, un travailleur perdant car son enveloppe de paie ne sera pas
maintenue et ce, malgré des avantages salariaux suffisamment
améliorés.
Selon nous, ce cas peut se présenter dans la construction.
L'amélioration des conditions salariales du travailleur a
généralement surpassé le niveau de l'inflation, mais les
différentes attributions de la masse salariale ont provoqué, dans
certains cas, une perte de pouvoir d'achat qui peut être
enregistrée.
Ce problème nous préoccupe encore. Une somme horaire assez
importante est actuellement perçue en vue de procurer aux
salariées un fonds de retraite. A notre avis, l'accumulation de cet
argent ne paraît pas tellement valable. Il est facile de comprendre que
ces cotisations donneront lieu plus tard à une pension plus ou moins
adéquate, mais qui influencera les bénéfices
généraux prévus par les lois fédérales et
provinciales. Or, priver ainsi involontairement les gars de la construction
d'un revenu qui leur serait utile aujourd'hui en vue de leur garantir un
bénéfice qui sera, à toutes fins, inadéquat plus
tard ne nous paraît pas justifié. Ne devrons-nous pas songer que,
pour maintenir la valeur de ce régime, il faudra constamment augmenter
la cotisation et, ainsi, indirectement restreindre de plus en plus le
travailleur sur son salaire horaire? Evidemment, nous tenons compte ici que le
coût horaire, directement influencé par les
bénéfices marginaux du salarié, peut atteindre des niveaux
prohibitifs, alors que le salarié n'en jouirait que partiellement.
Les deux annexes que nous joignons aux présentes parlent par
elles-mêmes. Entre 1969 et 1975, les conditions salariales globales se
sont améliorées au point qu'il est presque ridicule de soutenir
l'argument de perte de pouvoir d'achat devant le public sur le plan provincial
et encore plus sur le plan régional.
En effet, dans certaines régions, on peut constater des
augmentations de 100% et même plus. Ces taux de salaires auxquels nous
nous référons étaient déjà supérieurs
à ceux du salaire minimum et, bien plus, ils étaient, en 1969,
l'équivalent de ce que certains gagnent en 1975. N'est-il pas
réel qu'en 1975 il y ait encore des travailleurs qui, pardes conventions
négociées, gagnent $4 l'heure?
Le décret ne doit pas être modifié. Si dans certains
cas particuliers il devenait évident qu'un léger déficit
se réalise, comme nous l'avons admis antérieurement, il ne
faudrait pas aussitôt sauter à la conclusion et consentir à
modifier le décret. D'autres principes devraient être
considérés.
Les motifs économiques. Le coût brut en salaire horaire
est, selon nous, à un point maximum d'absorption par "Jos Public". Telle
entreprise d'envergure est peut-être en mesure de payer plus, de
même que tous les contribuables de cette province qui, finalement,
paieront les Jeux olympiques. Mais tel industriel moyen ou petit, tel futur
propriétaire d'une maison unifamiliale le peuvent-ils?
Un décret provincial avec des échelles de taux paritaires
était peut-être souhaitable, mais cela a imposé en province
des contraintes dont il faut tenir compte. Plusieurs pourraient avoir envie de
sauter aux conclusions et de dire: Deux ou trois taux selon les secteurs, ce
serait la solution, mais, à vrai dire, il y aurait encore des facteurs
oubliés tels la concurrence intersecteurs au sujet de la main-d'oeuvre
et de la capacité différente de payer des régions
économiques. Sur ce point, peut-on prétendre que le revenu moyen
des résidents de l'île de Montréal, donneurs d'ouvrage en
puissance, est semblable à celui des gens de Rimouski, de Sherbrooke, de
Drummondville?
Ce ne sont là que de simples énoncés qu'un
économiste pourrait sûrement traduire en pourcentage significatif
et qui nous justifient d'être prudents à l'extrême devant
des solutions basées sur des secteurs.
Peut-on envisager le rétablissement des conditions salariales
concordantes à l'économie régionale? Il est malheureux que
l'imposition d'un décret provincial ait comme conséquence
première, actuellement, de faire souvent supporter par la province des
conditions spéciales de la région montréalaise. Il est
évident que le système sera toujours préjudiciable aux
régions économiquement faibles, malgré que, sur une autre
base, il paraisse comme étant la conclusion logique de la
prémisse "A travail égal, salaire égal". Pouvons-nous
revenir en arrière? Au rythme actuel, il le faudrait
peut-être.
A première vue, il peut sembler qu'aucune solution n'est
facilement pensable, mais il nous paraît que, si une législation
favorable et sécuritaire était adoptée avant les
prochaines négociations, ceci pourrait permettre aux
intéressés de s'asseoir et de chercher des solutions
adéquates et objectives pour l'avenir. Nous sommes d'avis que ce n'est
ni opportun, ni juste d'intervenir à ce moment.
Les motifs légaux. De 1969 à 1975, les conditions
salariales se sont modifiées à un rythme tel que, globalement, le
salarié y a son avantage. Au surplus, si, pour quelques sous et quelques
mois, l'inflation devait jouer contre le travailleur assez bien nanti quant
à son taux horaire, nous n'en serions pas pour autant convaincus de
modifier le contrat.
Ceci nous conduit à considérer un point strictement
légal qui, à notre avis, a des conséquences
énormes: le respect, de part et d'autre, des ententes. Globalement, les
employeurs n'ont d'autre choix
que de respecter la loi et le décret, toute dérogation
signifiant pour eux poursuite, grève, ralentissement, etc. Les
syndicats, qui contrôlent plus ou moins démocratiquement les
travailleurs la commission Cliche le prouve ont plus souvent
qu'à leur tour utilisé des moyens illégaux pour passer
outre les conditions des ententes.
Malheureusement, le système a été, à plus
d'une reprise, rentable, de telle sorte qu'il n'y a plus aucun scrupule
à l'utiliser. D'un côté, tous les moyens sont bons et
donnent actuellement lieu à des résultats. De l'autre, la
règle est dure et sévère et la répression facile et
rapide, ne serait-ce que l'arme de la législation qu'à tout coup
l'on brandit contre le patronat.
Dans le problème actuel, pourquoi n'a-t-on pas pensé
à une législation apte à forcer le respect des
règles établies, plutôt qu'un bill 201 donnant le pouvoir
d'amender le décret après maintes allusions à la valeur
réelle de la demande d'indexation?
Conclusion. Notre opinion devant ce conflit demeure inchangée.
L'indexation n'est généralement pas justifiée, mais la
situation a été négligée par les autorités
chargées de veiller au grain. Maintenant, on nous dit: Que faire? Les
gars sont dehors et il n'y a pas d'autre solution. Il faut mettre de
l'ordre.
Messieurs, nous sommes convaincus encore une fois que cette mise
à l'ordre ne sera que le prélude à un nouveau
désordre car ce nouveau précédent, soit celui d'amender le
décret sans le consentement des parties, continuera de
détériorer les relations patronales-syndicales.
Comment l'employeur pourra-t-il, à l'avenir, s'asseoir pour
négocier, s'il retient que, par divers moyens que nous vous
laissons le soin d'apprécier il est possible de modifier le
contrat qui devrait servir de base stable pour donner des soumissions et signer
des contrats?
Messieurs de la commission, il se peut que vous nous questionniez au
sujet de notre position, mais il faudra quand même considérer que
les employeurs que nous représentons font affaires avec les trois
centrales syndicales, que nos employeurs sont majoritairement des entreprises
moyennes et petites, faisant affaires avec des donneurs d'ouvrage souvent
différents des entreprises comme la Société
d'énergie de la baie James, le COJO ou telle raffinerie, que beaucoup de
nos employeurs travaillent presque exclusivement dans des régions
économiquement différentes de Montréal et qu'au surplus
ils sont ainsi plus sensibles aux pouvoirs d'absorption régionaux.
Nous pourrions allonger la liste, mais nous croyons sincèrement
vous avoir exposé suffisamment nos vues pour que vous soyez saisis de
nos difficultés.
Avant de venir vous rencontrer pour bénéficier de cette
pacifique occasion de vous faire connaître nos préoccupations,
nous avons voulu vérifier honnêtement le pouls de nos gens. Les
résultats de cette consultation de dernière heure accompagnent
cette présentation. Nous sommes convaincus que vous y trouverez
matière à réflexion car c'est l'expression des voeux de
près de 4,000 employeurs formant le groupe le plus représentatif
au niveau de toute la province et peut-être, à vous d'en juger, le
groupe majoritaire hors de l'île de Montréal.
Nous vous remercions de nous avoir patiemment écoutés et
sommes à votre disposition pour tout renseignement
supplémentaire.
La Fédération de la construction du Québec.
Signé: le président, M. Clément Fortier.
Le Président (M. Séguin): Merci beaucoup. Une Voix:
Moi, je n'ai pas de question.
Une Voix: Le député de Maisonneuve s'en vient, M.
le Président.
Le Président (M. Séguin): Je n'ose pas faire passer
le député de Beauce avant lui, pour ne pas créer un autre
débat.
M. Roy: Je ne vous l'ai pas demandé.
Le Président (M. Séguin): Non mais... La
période des questions, le député de Maisonneuve.
M. Burns: Le ministre n'a pas de question? M. Cournoyer: Non.
M. Burns: Non? Il est sûr de ce qui va arriver comme
amendement au décret, lui?
M. Cournoyer: C'est-à-dire qu'il est clair que la
fédération souhaite qu'il n'y ait pas d'amendement au
décret.
M. Burns: M. Dion, juste une question, sur le premier document
que vous nous avez lu. C'est l'affirmation que vous faites, que je trouve
grosse, soit dit en passant, énorme même.
Si vous avez lu les débats des derniers jours de décembre
1974, vous avez dû vous apercevoir que la mojorité des
députés ne pense pas comme vous, lorsque vous nous dites que
l'indexation est un problème créé de toutes pièces
par les dirigeants syndicaux. J'ai entendu bien des députés se
plaindre d u fait que l'indexation, c'est un problème réel. Nous
n'avons pas de dirigeants syndicaux qui viennent nous dire quoi faire. Nous
n'avons pas de dirigeants syndicaux qui nous disent: Faites la grève
s'ils ne vous indexent pas. Il y a pourtant un paquet de députés
à l'Assemblée nationale qui, pendant au-delà de trois
semaines, se sont battus pour se défendre, ils ont presque
déchiré leur linge sur la place publique pour montrer comment ils
étaient malmenés vis-à-vis de la perte de leur pouvoir
d'achat.
J'aimerais que vous me disiez un peu plus clairement comment, au nom de
six associations, vous pouvez venir nous dire sans rire, sans faire de blagues,
que l'indexation est un problème créé de toutes
pièces par les dirigeants syndicaux et qu'elle est l'occasion d'une
nouvelle démonstration de force contre les employeurs et même
contre l'autorité gouvernementale, cette même autorité
gouvernementale, M. Dion, soit dit en passant, qui a décidé
de
voter une loi qui haussait eu égard à la perte du pouvoir
d'achat, le salaire des députés. Pour votre information,
seulement pour ne pas vous prendre par surprise, le salaire des
députés était de $15,600 en 1972...
M. Boudreault: J'espère qu'il parle, comme son chef,
à tête reposée. Est-ce que vous parlez à tête
reposée?
Le Président (M. Séguin): A l'ordre, s'il vous
plaît! Je demanderais au député de s'en tenir au
mémoire en question.
M. Burns: Je ne veux pas le prendre par surprise. Le salaire des
députés était de $15,600 en 1972 et il a été
haussé à $21,000 à compter du 1er avril 1974,
rétroactivement, et indexé aussi. J'aimerais que vous me disiez
en quoi l'indexation est un problème créé de toutes
pièces par les dirigeants syndicaux.
M. Dion: D'abord, je dois vous remercier de la longueur de votre
question. Cela m'a donné le temps de reprendre mon souffle.
L'affirmation que nous faisons est dans le sens suivant et elle sera
largement expliquée par chacun des autres mémoires qui vont
suivre. Comme on l'a dit dans notre texte d'introduction, chacun des
mémoires se complète et ils sont en accord les uns avec les
autres. Evidemment, cette question sera effectivement beaucoup mieux
traitée dans le mémoire, entre autres, de l'Association de la
construction de Montréal. Je reprends à partir du début de
la question.
Nous prétendons que le problème est créé de
toutes pièces par les dirigeants syndicaux.
C'est évident que, si on regarde l'état actuel de la
question, certains peuvent prétendre que ce n'est peut-être plus
un problème des dirigeants syndicaux, mais, au départ, nous
prétendons qu'on a offert ou qu'on a prétendu pouvoir offrir, aux
salariés de la construction, de la crème glacée.
Evidemment, comme tout le monde aime la crème glacée, tout le
monde s'est dit: On veut de la crème glacée. C'est évident
que c'est ce qu'on veut prétendre par là. Le problème a
été présenté au départ, non pas à la
suite d'une décision démocratique des syndiqués, mais
à la suite d'une action des chefs syndicaux moussée par des
mouvements de violence et d'intimidation, par des grèves
illégales, par des moyens, qui vous seront clairement expliqués
dans le mémoire de l'ACM, en vue de les convaincre à faire des
arrêts de travail, de la non-productivité, etc.
Evidemment, nous sommes d'accord avec vous, quand on arrive maintenant
au bill 201. On se retrouve aujourd'hui devant des gens à qui on a dit:
II y aurait peut-être possibilité pour vous d'avoir un
suçon. Les gens ont dit: C'est bon des suçons et on veut des
suçons. Les chefs syndicaux ont créé de toutes
pièces, au départ, un problème d'indexation.
Quant au salaire des députés, il ne m'appartient pas d'en
discuter. Je veux quand même vous faire la remarque suivante, non pas que
je sois en accord ou en désaccord sur l'augmentation qu'ont pu obtenir
les députés de l'Assemblée nationale, mais je constate
quand même, par les informations que vous me donnez qu'en 1972 vous
gagniez $15,600, que la prochaine augmentation est venue en 1974 et que vous
avez eu une augmentation d'environ 30%. Je vous dirai que la constatation que
vous ferez dans nos mémoires, c'est que les gens de la construction
n'ont jamais passé deux ans sans avoir d'indexation de leur salaire ou
d'augmentation de leur salaire et que, bien plus, si vous les
députés, avez eu la sagesse de vous contenter de 30% d'indexation
pour deux ans, les ouvriers de la construction ont eu, dans certains cas,
jusqu'à 130% et 140% d'augmentation.
Je vous invite chaleureusement à aller voir les annexes de nos
mémoires, chacun des mémoires donne de l'information de ce
côté. Si, sans étirer le débat, je pouvais vous
reporter entre 1969 et 1975 vous allez peut-être me dire que c'est
cinq ans et non pas deux ans mais si vous regardez en 1969, dans
certaines régions, il y a des salariés qui étaient
à $3 ou $3.50 ou $3.75 l'heure, en vertu de conventions collectives
négociées sur la base des conditions économiques d'une
région. Ces salaires sont rendus à $6 et $6.50 l'heure et les
taux d'augmentation varient d'une région à l'autre entre 50% et
130%.
Moi, au nom de la fédération, je dois vous dire que c'est
nettement supérieur à ce que vous, MM. les députés,
avez eu la sagesse d'accepter.
M. Burns: Autre question...
Le Président (M. Séguin): A l'ordre, s'il vous
plaît! Je voudrais, dès le début... A l'ordre, s'il vous
plaît, à l'ordre!
M. Burns: Je suis convaincu qu'il y a des députés
libéraux qui auraient aimé vous avoir à la commission
quand on a augmenté le salaire.
Le Président (M. Séguin): Je voudrais, dès
le début, si vous me permettez, faire remarquer au public ici
présent qu'à une commission parlementaire nous n'avons pas le
droit ni le privilège de nous exprimer par des applaudissements ou
autres commentaires. Je vous demanderais donc de collaborer. Nous allons
entendre ceux qui se présentent à la table devant la commission,
nous allons entendre les questions des membres de la commission aux
représentants, mais je vous demanderais de ne pas vous exprimer. Un
sourire ne fait pas de bruit mais au moins essayez de vous restreindre à
un sourire, mais pas d'applaudissements, s'il vous plaît, ni autres
commentaires.
M. Burns: Je reviens à ma question, M. Dion, à
laquelle vous avez aussi longuement répondu quand je vous l'ai
posée. En somme, ce que je voudrais vous entendre dire, c'est que...
Avant ça, je veux tout simplement vous poser une question. Vous dites
qu'il y a un autre mémoire qui va traiter de ça; lequel?
M. Dion: J'ai mentionné, entre autres, celui de l'ACM mais
je pense que tous les mémoires sont quand même la pensée
générale, spécialement...
M. Burns: Je n'insisterai pas auprès de vous pour aller
plus loin là-dessus mais si vous me dites sur quel mémoire je
devrais insister...
M. Dion: Je pense que spécialement le mémoire de
l'ACM, comme il est mentionné dans ce texte, va brosser un tableau bien
exhaustif du climat de l'industrie de la construction et de quelle façon
on peut monter en épingle un problème et en faire un
problème censément d'intérêt public.
M. Burns: D'accord. Alors on entendra l'ACM là-dessus.
Maintenant...
M. Dion: Si vous me permettez, M. Burns... M. Burns: Oui, M.
Dion.
M. Dion: ...il y a une partie de votre question à laquelle
j'ai omis de répondre tantôt. Vous me questionnez à savoir
comment je prétends que c'est dû à l'autorité
gouvernementale. Est-ce que vous tenez à ce que je vous
réponde?
M. Burns: Oui.
M. Dion: La loi 290, évidemment, comme on l'a dit, au
départ, avait peut-être quelques lacunes. Elle était
nouvelle, elle devait avoir un essai de bonne foi par les parties. Mais nous
croyons que, de cette loi, nous sommes maintenant rendus à une loi
amendée à la course, malheureusement, amendée sans aucun
plan d'ensemble, une loi ce sera démontré dans certains
mémoires qui a permis la création de certains monopoles,
qui a favorisé également la montée de
l'illégalité comme étant un moyen pour régler tous
les conflits, si on est assez fin pour la créer suffisamment importante
pour impressionner le gouvernement. Or, nous, on dit qu'il y a une
coopération du gouvernement par le moyen d'amendements aux lois, qu'il y
a une coopération du gouvernement par une certaine complaisance devant
les conflits.
Evidemment, je vais vous dire, nous ne sommes pas venus ici pour
attaquer je le dis publiquement parce que c'est peut-être
intéressant le ministre du Travail, on est venu attaquer une
politique; la politique, du côté patronal, ne nous satisfait pas
au niveau des relations de travail dans l'industrie de la construction. J'ai
même dit, avant que la séance de la commission parlementaire
commence, que j'aimais mieux ma place que la sienne.
M. Burns: De toute façon, on se fait la place qu'on veut
bien, à un moment donné. Mais ça, c'est un autre
problème.
Avant qu'on passe à autre chose, vous avez pris la peine
d'affirmer dans ce document c'est d'ailleurs le seul souligné
qu'on y retrouve, donc, vous y avez accordé de l'importance, ce que je
mentionnais tout à l'heure que l'indexation est un pro-
blème créé de toutes pièces par les dirigeants
syndicaux. Est-ce que vous ne voudriez pas dire, dans le fond, que le
problème, ce n'est pas l'indexation, c'est l'inflation? Vous ne nous
avez pas dit que ce problème pouvait être l'inflation, et que
l'indexation n'est qu'une conséquence , dans le fond, de l'inflation.
Moi, je ne vous ai pas entendu parler de cela.
M. Dion: Evidemment, la demande d'indexation est concordante
à une inflation qui se produit dans la province de Québec comme
elle se produit partout ailleurs. Je n'ai pas de cours d'économique
à donner là-dessus.
Il y a de l'inflation. On le reconnaît d'ailleurs je pense
qu'on l'a dit dans le document de la fédération, non pas dans
celui-ci quand on a dit qu'il y a réellement une inflation. C'est
sûr et certain, tout le monde le sent, nous, comme les travailleurs de la
construction.
Ce qu'on a dit, c'est que cette inflation-là, même si elle
gruge une certaine partie de l'expectative d'amélioration de revenu des
gens, n'est pas suffisante pour avoir dépassé cette
amélioration du revenu qui est prévue dans les conditions de
travail. Elle n'est pas suffisante pour justifier une demande d'indexation.
Evidemment, le gars peut prétendre qu'il avait une chance d'avoir
$10 d'augmentation et, à cause de l'inflation, il lui en reste seulement
$2, parce qu'il y a $8 qui sont partis dans l'inflation. Cela peut être
le problème, mais cela ne justifie pas, quant à nous, que
l'inflation soit suffisante pour avoir dépassé les augmentations
consenties et nécessiter un nouvel ajustement par-dessus les ajustements
déjà prévus au décret.
Je voudrais bien éclaircir un point du document de la
fédération. Même si on dit à un moment donné
que l'écart s'amincit, même si on parle peut-être, pour
certaines régions, de quelques sous, on ne peut pas du tout conclure,
d'après le mémoire de la fédération, que nous
sommes favorables à ce que le gouvernement bouge un peu, parce qu'il y a
quand même un petit danger à certains endroits, ou une petite
réalité à certains endroits.
Sur un autre plan, on dit que même s'il pouvait être vrai
qu'il y ait de légers problèmes, pour autant, il n'y a pas lieu
d'amender le décret pour d'autres motifs qui sont des motifs
économiques et légaux.
M. Burns: Je peux vous poser une question en tant que technicien
du domaine du travail, M. Dion. Est-ce que la fédération que vous
représentez considère que, lorsqu'une augmentation de salaire est
décrétée dans une convention collective qui
éventuellement devient décret, il y a une partie qui,
naturellement, est affectée, selon votre philosophie des relations de
travail, à l'augmentation du standard de vie du travailleur? Est-ce
qu'il y a une autre partie qui est accordée à, tout simplement,
une rencontre normale d'une éventuelle augmentation du coût de la
vie?
Je résume ma question. Est-ce que, pour vous, lorsque des
augmentations de salaire sont décrétées dans une
convention collective, quelle qu'elle soit, cela ne tient compte que de
l'augmentation du
coût de la vie ou si, au contraire, cela tient compte aussi
la proportion, je ne suis pas en mesure de vous la dire d'une certaine
augmentation du standard de vie de n'importe quel travailleur?
M. Dion: M. le membre de la commission, une masse salariale
consentie au moment d'une négociation contient, selon nous, à la
fois une augmentation de salaire et une expectative d'inflation. Cela a
toujours été, je pense, le sentiment des gens qui ont
été à la table de négociation.
Dans une certaine négociation, une fois la période du
décret complétée, on peut se rendre compte que
l'expectative qu'on avait eue vis-à-vis de l'inflation et
vis-à-vis des augmentations de salaire a été quelque peu
proportionnée. Par exemple, je peux avoir négocié, en
1972, $1 d'augmentation, prévoyant peut-être $0.25 d'augmentation
du coût de la vie et $0.75 d'augmentation de salaire, il peut
s'être produit que le coût de la vie n'a augmenté que de
$0.20 et effectivement, à ce moment-là, je me dis: L'augmentation
du salaire a été de $0.80.
L'inverse peut également se produire. C'est peut-être,
malheureusement pour le travailleur, la situation en 1974, dans le
décret actuel. Je pense que selon les déclarations mêmes
des chefs syndicaux qui ont été à la table de
négociation, on a prévu une forme d'augmentation de salaire et
une forme d'appréciation de l'inflation.
Je me rappelle encore on était des spectateurs assez
calmes pour l'entendre dire, à ce moment les paroles d'un chef
syndical qui a négocié ces ententes "légales", dire qu'on
a réglé le problème à la fois des augmentations et
du coût de la vie. Je ne me rappelle pas exactement ses mots, mais ce
sont des choses qui ont été dites. Il s'est déclaré
satisfait et cela tenait compte de tout.
Evidemment, il y a aussi le jeu suivant: C'est que je peux
prévoir que $0.80, c'est normal pendant un an et $0.25 d'indexation,
c'est normal; donc, je peux prévoir que $1.05, c'est normal. Je fais un
contrat, à ce moment, comme je fais une soumission, et je signe un
contrat. Je peux prévoir que cela coûte $100,000 pour bâtir.
A la fin, cela me coûte $105,000 pour bâtir. A ce moment, il y a
quelqu'un qui, malheureusement, est obligé de subir le contrecoup d'un
engagement contractuel. Or, il y a tous ces éléments qui, selon
nous, jouent actuellement dans la question de l'industrie de la construction.
Je n'ai peut-être pas prévu suffisamment d'indexation,
peut-être trop d'augmentation, j'ai peut-être mal réparti la
masse salariale, mais, globalement, j'ai donné aux salariés et,
preuve à l'appui dans nos documents, beaucoup plus que ce que
l'inflation peut gruger sur le salaire des travailleurs.
Evidemment, il y en a qui vont peut-être prétendre que,
dans l'enveloppe, il y a un petit problème. Ecoutez, nous, on vous dit,
dans un document et c'est peut-être beaucoup dire : C'est
peut-être vrai, mais pour autant, cela ne veut pas dire que je change le
décret.
M. Burns: Lors de vos négociations, M. Dion, est-ce qu'il
a été question avec les représentants syndicaux de cette
proportion accordée d'une part à l'augmentation du coût de
la vie, et d'autre part, à l'augmentation du standard de vie?
M. Dion: Là, j'ai une réponse plate pour vous.
Malheureusement, aux dernières négociations, nous étions
des spectateurs de la négociation illégale qui se faisait
à ce moment, je dois vous le dire comme d'ailleurs d'autres
parties en ont été également les spectateurs dans
d'autres négociations antérieures. Sur cette base, c'est assez
rare actuellement que les gens disent: On va partager l'augmentation, mais je
pense que celui qui a la formule en tient compte.
M. Burns: Je vous demande si cela s'est fait simplement.
Vous ne savez pas si cela s'est fait ou non.
M. Dion: Si je reprends les déclarations des gens du
côté syndical qui ont fait le règlement, ils en ont tenu
compte, eux, en signant leur règlement.
M. Burns: Sur un autre point, M. Dion, il y a une espèce
de croyance qui a cours dans le domaine de la construction ou du moins de ceux
qui évaluent ce qui se passe dans l'industrie de la construction, selon
laquelle toute hausse salariale peut, à un moment donné ou
à un autre, se transférer au niveau des coûts aux
consommateurs que ce soit un demandeur de fabrication de route comme le
gouvernement ou que ce soit un acheteur d'habitations, que ce soit un promoteur
immobilier qui construit un complexe immobilier, en tout cas, toutes les
situations qu'on peut imaginer. Est-ce que vous avez quelque chose à me
dire sur cette croyance qui existe de la possibilité de
transférer le coût d'une augmentation sur le consommateur
éventuel, sur l'acheteur éventuel?
M. Dion: Je ne voudrais présumer sur aucun des autres
mémoires qui vont être présentés, certains
répondent en partie là-dessus et je pense que le tout finit par
avoir une réponse complète. Je vais simplement vous dire ceci et
je pense que c'est un bref résumé. Les contrats de construction
ne sont pas tous effectués sur la même base. Certaines personnes
vont contracter en vertu d'un pourcentage pour surveillance du contrat, cela
est la gérance, excusez-moi. D'autres vont contracter suivant une
formule de "cost plus". D'autres vont contracter simplement sur la base d'une
soumission à prix fixe. Cette dernière formule est,
habituellement très courante dans l'industrie de la construction.
Spécialement sur cette formule, il est strictement faux de
prétendre que l'employeur, l'entrepreneur quel qu'il soit, puisse passer
la facture. Moi, je pense que, quand vous êtes devant un contrat fixe, et
malheureusement, à moins qu'on interprète ces contrats comme on
interprète actuellement peut-être d'autres contrats, ces contrats,
nous devons les respecter. Il n'y a pas possibilité de les changer. Je
pense qu'il faut aussi tenir compte et cela vous sera souligné
entre autres par l'habitation d'autres lois qui devraient, dans le
problème actuel, être considérées.
Par exemple, je signe une entente pour la cons-
truction d'une maison unifamiliale. C'est quand même, je pense, un
élément très important dans là province
actuellement, la construction de maisons unifamiliales, encouragée par
toutes sortes de méthodes, par les gouvernements, tant
fédéral que provinciaux. Au niveau de l'habitation, quand j'ai
signé un contrat pour la construction d'un immeuble ou d'une maison
unifamiliale, je pense que la Loi de la protection du consommateur m'impose des
bornes, ou des guides, ou des limites qui m'empêcheraient possiblement
là, je ne ferai pas d'affirmation; je laisserai le
représentant de l'habitation la confirmer de passer la
facture.
Donc, dire que dans l'industrie de la construction, même avec les
contrats du gouvernement... Je dois vous dire qu'on en a eu l'expérience
antérieurement, lors d'un bill no 38. Personnellement, je connais
l'entrepreneur qui était le constructeur je ne sais pas si c'est
normal de faire valoir un point aussi particulier d'un édifice
gouvernemental, qui tombait sous la juridiction du ministère du Travail.
Cet entrepreneur, qui bâtissait au moment où le bill no 38 a
été adopté a présenté une demande de
correction de son contrat parce que le gouvernement venait d'adopter un bill
appelé le bill no 38, qui mettait en vigueur, avant que la
négociation soit terminée des conditions sur lesquelles les
échanges n'étaient pas complétés. Or, la demande de
l'employeur n'a pas été admise. Plus d'un entrepreneur
actuellement qui travaille avec les ministères du gouvernement...
M. Burns: Est-ce aussi vrai cela depuis ce temps-là,
depuis le bill no 38?
M. Dion: Pardon. Je n'ai pas compris le début.
M. Burns: Est-ce aussi vrai, ce refus gouvernemental, depuis le
bill no 38?
M. Dion: Ecoutez, je pense que, jusqu'à présent,
les ministères du gouvernement procèdent également sous
forme de soumissions publiques, sous forme de signatures d'un contrat. A mon
avis, jusqu'à présent, selon mes connaissances je ne veux
pas en faire une règle de la Palice ces contrats sont, la plupart
du temps, à prix fixe; ils ne peuvent être modifiés,
même si le gouvernement... Je ne vous dis pas qu'ils ne peuvent ou ne
pourront... Il faut quand même que je fasse attention parce que des gens
pourraient être intéressés, au moment où un
changement des conditions se produit, à exercer un recours et
peut-être que certaines gens pourraient avoir gain de cause, ou
peut-être que le gouvernement pourrait consentir, à ce
moment-là, à donner gain de cause aux gens sans que l'on soit
obligé d'aller les défendre devant les tribunaux.
M. Burns: Maintenant, dans votre réponse
générale, M. Dion, vous m'avez parlé de
possibilités que, dans certains domaines, ce soit le système du
"cost plus", dans d'autres "à prix fixe", etc. Est-ce que vous
êtes en mesure, pour le bénéfice de la commission, de nous
dire s'il y a des secteurs parti- culiers où telle ou telle habitude est
plus en vigueur que d'autres?
M. Dion: Je pense que, lorsque vous parlez de constructions de
grande envergure, de constructions où il y a de la gérance,
à ce moment-là, vous avez des chances de retrouver de la
construction à "cost plus". On s'excuse envers le bill no 22 pour les
mots anglais.
M. Burns: On se comprend, on se comprend.
M. Dion: Mais je pense que vous allez retrouver cela plus dans
les gros contrats; pas les gros contrats généralement,
peut-être dans une certaine classe de gros contrats. Ecoutez, je ne
voudrais pas vous donner l'image que c'est quelque chose qui puisse être
répandu. C'est extrêmement limitatif. C'est un infime pourcentage
des travaux de construction qui peuvent être fait à "cost
plus".
M. Burns: Comme la baie James ou une histoire comme
ça.
M. Dion: Je ne veux pas aller jusque-là. Je vais vous dire
que les seuls détails que je connais de la baie James sont ceux que vous
avez connus suivant les derniers troubles qui ont eu lieu.
M. Burns: Bon. Alors, j'ai encore deux questions, M. le
Président. Je vais me limiter à ça pour ne pas prendre le
temps des autres collègues.
Le Président (M. Séguin): J'allais vous le
direl
M. Burns: Oui, avant que vous me le disiez, M., le
Président.
D'une part, dans l'introduction de votre mémoire, celui de la
fédération, vous nous laissez entendre qu'à toutes fins
pratiques il n'y a pas de dialogue et qu'il n'est pas question qu'il y ait de
dialogue entre les parties, dans le domaine de la construction. Je me
réfère, entre autres, au bas de la page d'introduction de votre
mémoire, lorsque vous dites: "La loi du plus fort domine et triomphe. Il
n'est donc pas surprenant, d'autre part, de voir les employeurs refuser
catégoriquement tout dialogue, car il est prévu d'avance que leur
geste, si raisonnable qu'il pourrait être, ne serait pas suffisant.
Un peu plus loin, dans votre même mémoire, vous affirmez
ceci: "Selon nous, la paix dans la construction ne pourra être
réalisée que par l'acceptation, de part et d'autre, de
règles de jeu adéquates, établies avec le consentement et,
au minimum, la consultation des parties et, en toute bonne foi,
expérimentées sans plus d'intervention".
Moi, j'aimerais que vous me disiez, comme une partie très
importante au point de vue du nombre, au point de vue des gens que vous
représentez, quelle est votre solution, à court, à moyen
et à long termes, d'une saine politique de relations de travail dans le
domaine de la construction, s'il n'y a pas de dialogue, si, d'autre part, vous
dites qu'il va falloir qu'à un certain moment il y ait des règles
du jeu qui soient adéquates et que ces règles soient
établies.
Est-ce que vous avez une solution, vous, eu égard aux
déficiences de la loi 290, eu égard aux multiples et je dirais
aux interventions presque en série de la part du gouvernement, dans les
relations de travail? Est-ce que vous avez une solution à long terme,
à court terme ou à moyen terme encore?
M. Dion: J'aurais envie de vous répondre rapidement: Oui,
j'en ai une. Là, je passerais dans les journaux en disant que je suis un
petit génie.
C'est évident qu'il n'y a pas de solution, comme disait M.
Cournoyer tantôt. Il n'y a pas de solution miracle à tous les
problèmes de l'industrie de la construction.
Il y a actuellement une commission Cliche. Pour nous, la commission
Cliche, c'est une partie de solution. C'est une partie de solution, parce
qu'elle va éliminer l'un des plus importants facteurs du climat malsain
qui existe dans l'industrie de la construction.
Cela peut peut-être paraître contradictoire, nos deux
affirmations dans l'introduction et la page 2, mais voici ce qu'on veut dire
par ces mots. On veut dire qu'en maintes occasions on a amendé la loi,
mais après qu'une situation était rendue à un étal
tel qu'il n'y avait plus moyen d'amender la loi sur des bases de principes
sains. Il fallait amender la loi dans le but de calmer les gens, de faire
rentrer les gens au travail, d'empêcher que cela aille plus mal, de
remettre de l'ordre. Généralement, c'est l'argument courant.
Nous, on a présenté toutes les parties patronales,
même les parties syndicales, je pense, ont fait la même chose
à l'occasion mémoire sur mémoire. On a
répondu à des commissions que je nomme privées, à
ce moment, des commissions comme la commission Tobin-Boily. On a répondu
à des questions, comment on pouvait faire de l'industrie de la
construction une industrie où cela marche, où les gens ne se
tirent pas de cailloux et où les gens réussissent à
s'entendre et à négocier des décrets. Mais toujours,
toutes ces représentations n'ont jamais donné, au moment opportun
et non pas au moment où c'est explosif, des solutions
législatives.
C'est évident que, si on attend, pour amender la loi, que cela
revole en l'air, partout, que les chantiers soient vidés, que les gens
se regardent comme des chiens et des chats, qui ne soient plus capables de se
parler et de s'entendre, c'est évident qu'on ne sera jamais capable de
faire de l'industrie de la construction une industrie où la paix
règne. Il y a des périodes et elles sont courtes. On le dit dans
le document. Elles ont été bien courtes, les périodes
où on aurait pu... Il y a eu, au moins, des périodes où
c'était moins mauvais, où c'était moins explosif,
où on aurait pu, à ce moment, peut-être provoquer un
certain remous, mais préparer peut-être un terrain stable pour
l'avenir, un terrain valable pour l'avenir. On a donné mémoire
sur mémoire, recommandation sur recommandation. On est heureux
actuellement, extrêmement heureux. Moi, je pense qu'on doit remercier le
gouvernement d'avoir mis la commission Cliche en place. On est heureux de voir
que cette partie du problème a la possibilité d'être
réglée, a la possibilité, pourquoi? Parce qu'on es-
père, on croit de tout coeur que le résultat de la commission
Cliche, vous allez en tenir compte d'une façon législative. Je
pense que, déjà, on retrouvera dans ce phénomène
qu'est la commission Cliche une bonne partie de la paix de l'industrie de la
construction.
On fait un nettoyage actuellement. Il y a d'autres endroits où il
y a du ménage à faire. Evidemment, on a vu des
déclarations ministérielles disant que la CIC devait être
nettoyée, etc. Moi, je vais vous dire que des parties font actuellement
des efforts afin de refaire la commission, afin de lui redonner une image, afin
de nettoyer la commission. C'est évident que, pour nous, la mise en
régie de la commission, à ce moment-ci, ce serait encore un coup
en bas de la ceinture. On veut et on demande instamment, on en profite à
la commission, pour demander au gouvernement, aux responsables du
ministère du Travail, de nous donner quelque délai. On va
essayer. Si on manque, on va se tourner vers le gouvernement et on lui dira: II
n'y a rien à faire! Mais nous, on croit actuellement que, là
aussi, il y a quelque chose à faire. Nettoyez la liberté
syndicale, nettoyez la commission, on se nettoiera peut-être aussi. Il y
en a d'autres qui vont venir vous dire tantôt: II y a un petit nettoyage
à faire dans le monde patronal. Si c'est vrai, on se nettoiera, nous
aussi.
Qu'on nous donne la chance, à l'heure actuelle, qu'on nousdonne
une loi mais qu'on nous la donne de façon à pouvoir se parler et
s'entendre. Non pas des coups qui arrivent, tout simplement, non pas des
chaudières d'huile sur le feu, à tout moment. On se retrouve
continuellement, régulièrement, à deux périodes de
l'année et, selon l'évaluation que quelqu'un a faite, je pense
que c'est en juin et en décembre, devant des lois à la course.
C'est presque régulier. Juin et décembre, fins de session, c'est
le coup. On donne la claque. A chaque fois, on donne la claque, malheureusement
sur les employeurs.
Ecoutez, évidemment, quand on négocie des relations de
travail, il y a un gars qui mange la claque. C'est habituellement l'employeur.
Jusqu'à maintenant, les gens qui assistent dans la salle, m'ont
donné la chance d'exposer ce que j'ai à dire et je l'ai beaucoup
apprécié.
M. Burns: Mais juste en terminant, sur ce point j'ai une
dernière question après selon vous, est-ce qu'il y a des
points chauds particuliers qu'il faudrait réviser dans la Loi sur les
relations de travail dans l'industrie de la construction?
M. Dion: Evidemment, écoutez, est-ce qu'on doit reprendre
ici...
M. Burns: Je ne vous demande pas une thèse. Je vous
demande simplement de nous indiquer des endroits. Ce n'est pas le moment,
d'ailleurs.
M. Dion: Evidemment, tout le problème, le régime
syndical, relié à la liberté syndicale, au maraudage,
relié au vote pour déclencher les grèves, tout ce
phénomène, selon nous, qui pourrait peut-être être
résumé en démocratisation réelle des syndicats ou
des parties syndicales, toute cette partie, selon
nous, est une question assez prioritaire dans la Loi sur les relations
de travail dans l'industrie de la construction.
M. Burns: La représentativité des parties
patronales, est-ce que...
M. Dion: Je pense qu'à l'heure actuelle, même si,
entre nous, on a un "fun" noir, je dois vous dire qu'à un moment
donné on finit par se comprendre. En tout cas, je peux vous dire, avec
peut-être beaucoup de joie, que j'ai réussi aujourd'hui,
grâce à la bonne volonté de tout le monde, à vous
lire un texte qui était au nom des six parties patronales dans la
construction.
M. Burns: Vous avez réussi à rédigertrois
pages et un quart au nom de six parties. C'est déjà beaucoup.
M. Dion: Je pense que, quand même, le document a de la
viande.
M. Burns: Ah oui!
M. Dion: Je pense qu'il a réellement de la viande. On
aurait pu écrire une belle lettre, en disant: Vous êtes bien fins
de nous avoir reçus. Mais je pense que le document commun des six
parties patronales a plus de viande que cela. Je pense qu'il y a
réellement une idée dedans. Je pense que, pour plusieurs qui
pensaient que les parties patronales ne pouvaient pas s'entendre, il y a eu des
efforts de part et d'autre pour arriver au moins sur un certain point
d'entente. On est heureux quand même de le manifester à tous ceux
qui s'inquiètent des parties patronales.
M. Burns: Dernière question, M. Dion. Vous vous demandez,
à la page 2 du mémoire commun, auquel vous venez de vous
référer, si vous êtes ici devant une tribune où les
parties peuvent valablement se faire entendre ou si c'est une simple
étape à franchir. En vue de comprendre cela, je vous pose une
question qui est peut-être bien simple mais qui pourrait peut-être
nous donner la réponse à cela. Depuis le 24 décembre 1974,
est-ce que vous avez eu des rencontres avec les parties syndicales ou les
autres parties patronales en vue de discuter entre vous de modifications
à être apportées au décret?
M. Dion: A partir du début de votre question, disons que,
si nous avons mentionné cela, au départ, c'est qu'il n'y a eu
aucune rencontre. Je pense que la dernière a eu lieu avant votre projet
de loi. Cela a été la dernière rencontre avec la partie
syndicale. Cela a été avant les Fêtes, avant Noël. Il
n'y a pas eu d'autre rencontre.
Il faut comprendre, M. Burns et messieurs de la commission, que la
position du monde patronal est telle que, si on nous convoque ou on cherche
à nous convoquer sur l'unique problème d'argent et sur le
problème d'argent parce qu'ils prétendent, de leur
côté, qu'il y a un problème d'argent, c'est évident
qu'il ne peut pas facilement y avoir, même que cela, il ne peut pas y
avoir de dialogue entre les parties, tant et si bien que même des parties
qui pourraient avoir une idée un peu plus conciliatrice que d'autres
je ne veux pas accuser personne même ces parties
reconnaissent, même certains employeurs qui pourraient avoir des
idées plus larges que d'autres, même ces gens reconnaissent
qu'à quelqu'argent que ce soit, on ne réglera pas les
problèmes de l'ind ustrie de la construction qu'on vit actuellement, on
ne réglera pas le problème de la productivité sur les
chantiers, on n'empêchera pas les gars de faire de la violence et de
sortir les gens des chantiers aussitôt qu'on a envie de faire autre
chose. On n'empêchera pas non plus les délégués de
chantiers, dans certains cas, d'abuser de leurs pouvoirs, etc.
Je vous le dis parce qu'on a pu l'entendre, à l'occasion, parce
que c'est démocratique, les gens sont consultés chez nous.
D'ailleurs, nous n'avons pas hésité à vous mettre en
annexe la réponse de nos associations. Vous allez même constater
qu'une de nos associations dit: Donne donc $0.25 et demande autre chose en
retour. On aurait pu le cacher. On ne l'a pas caché, c'est
démocratique. Les gens se sont prononcés. Même s'il y a des
gens qui pensent qu'il y avait possibilité d'envisager un
règlement, ils finissent clairement par penser qu'il n'y a rien qui peut
acheter un règlement dans la construction à l'heure actuelle. On
va peut-être dire: En réglant avec des dollars, cela va amener les
gars à faire que... Je vous dis, et je pense que c'est un peu la
conclusion de plus d'un mémoire que vous allez entendre, qu'on ne
réglera rien. On reviendra vous voir dans peu de temps.
M. Burns: En somme, vous n'avez pas eu de rencontre relativement
à la modification du décret depuis le 24 décembre?
M. Dion: II faut peut-être préciser ceci. A la
dernière rencontre avant le mois de décembre, je ne voudrais pas
être mal interprété, même s'il avait pu, dans
l'esprit de certaines personnes, y avoir une possibilité de rencontre
pour discuter, je dois vous dire que cette journée, la dernière
où on s'est rencontré, nous avons fait face à un
ultimatum: C'est 50%, 25% 25% ou quelque chose de ce genre. On ne nous a
pas dit: On vient négocier l'indexation, êtes-vous prêts
à faire quelque chose? Ils ont dit: Les gars, c'est 50%, 25% 25%
ou à peu près quelque chose de ce genre-là. On a
fermé la porte. Je ne vous dis pas pour autant j'ai voulu mettre
la réserve avant que si on nous avait dit: On s'en vient
négocier, etc.... On n'a pas parlé de négociation.
Evidemment, on a fermé la porte à toute négociation.
M. Burns: II n'y a pas eu de rencontre depuis le 24
décembre. C'est cela?
M. Dion: Non. Vous avez voté le bill 201.
M. Burns: Le 24 décembre. C'est le 24 décembre
qu'il a été sanctionné. Il n'y en a pas eu depuis.
M. Dion: Depuis?
M. Burns: Depuis la sanction de la loi 201.
M. Dion: Non. Je pense qu'il faut peut-être ensemble relire
ce que vous avez I u à l'introduction et à la page 2. Comment
voulez-vous, dans l'état actuel, que des employeurs pensent aller
s'asseoir pour essayer de penser à un règlement?
M. Burns: Je ne vous demande pas que vous me contiez votre vie,
M. Dion. Je vous demande simplement s'il y a eu ou s'il n'y a pas eu de
rencontres avec les représentants syndicaux, depuis le 24
décembre? C'est tout ce que je vous demande. Il n'y en a pas eu.
M. Dion: Absolument aucune.
M. Burns: C'est cela, je n'ai pas d'autres questions.
M. Dion: II y en a eu entre les parties patronales.
Le Président (M. Séguin): Le député
de Beauce-Sud.
M. Roy: A la page 7 de votre mémoire, dans les deux
derniers paragraphes, vous faites référence aux annexes et vous
dites qu'entre 1969 et 1975 les conditions salariales globales se sont
améliorées au point qu'il est presque ridicule de soutenir
l'argument de perte de pouvoir d'achat devant le public sur le plan provincial
et encore plus sur le plan régional. Dans le dernier paragraphe, vous
faites allusion au fait qu'il y a des augmentations dans certains secteurs qui
dépassent 100%. Dans l'annexe 1, dans les deux pages, je remarque que,
si je prends la région de Montréal et que je tente de faire des
comparaisons avec les autres régions du Québec, je constate que,
dans le cas des charpentiers-menuisiers, l'augmentation de décembre 1969
à janvier 1975 a été de 39%, alors que, dans la
région du Bas-Saint-Laurent, elle est de 87%, dans les Bois-Francs et
les Cantons de l'Est 88%, le Nord-Ouest 89%. Mais on dit: Joliette 73%,
Côte-Nord 70% et on se rend compte qu'il y a une énorme
différence entre l'augmentation qu'il y a eu pour la région de
Montréal comme telle avec les autres régions du Québec. Si
je vais plus loin et que je regarde au niveau du métier de peintre, je
constate la même chose. A Montréal, pour décembre 1969
à janvier 1975, il y a eu une augmentation de 40% alors que, pour le
Bas-Saint-Laurent, c'est 89%, le Nord-Ouest 95%, les Bois-Francs et les Cantons
de l'Est 90% d'augmentation. Je pourrais faire la même comparaison avec
les briqueteurs-maçons pour constater que c'est encore Montréal
qui a eu le plus faible taux d'augmentation. Dans le cas de manoeuvres et des
journaliers, c'est la même chose et, dans le cas de ferrailleurs
c'est un problème qui, jusqu'à maintenant, suscite
énormément de questions. Je pense que c'est le point qui
intéresse le plus la commission à l'heure actuelle, pour la
région de Montréal, la hausse n'est que 41% alors que, dans le
Saguenay, elle est de 75%, de 80% et 89% dans les BoisFrancs et les Cantons de
l'Est, 98% dans le Nord-Ouest, 63% sur la Côte-Nord et un peu
partout.
Si on regarde uniquement le cas de Montréal par rapport aux
autres, on constate qu'il s'agit là d'une augmentation annuelle moyenne
de 8% seulement. Et les problèmes, du moins ce que nous en savons
jusqu'à maintenant, sont surtout à Montréal. Est-ce que
cela veut dire que vous avez l'intention de recommander d'une façon plus
précise l'argument que vous avez apporté à la page 8:
"Peut-on envisager le rétablissement de conditions salariales
concordantes à l'économie régionale"? Vous dites, à
la dernière ligne, "Pouvons-nous revenir en arrière? Au rythme
actuel, il faudrait peut-être".
J'aimerais qu'on me dise, premièrement, si, réellement, il
y a eu une augmentation réelle du pouvoir d'achat je vais prendre
le cas particulier des ferrailleurs de la région de Montréal
depuis décembre 1969 à janvier 1975, en tenant compte de
l'augmentation du fonds de retraite auquel vous faites allusion, en tenant
compte des augmentations de l'impôt à la source, provincial et
fédéral, toutes les autres augmentations qu'il y a eues à
la source, en tenant compte du taux de l'augmentation moyenne du coût de
la vie des cinq années. Est-ce que, d'après vous, dans ce cas
particulier, il n'y a pas eu régression réelle au seul niveau du
pouvoir d'achat?
M. Dion: Je vais préciser. D'abord, vous avez deux
tableaux d'échelles de salaires. Le premier tableau ne comprend que les
salaires; ça n'inclut pas les avantages sociaux, fonds de retraite, etc.
Quand vous faites votre extrapolation des chiffres, 39% à
Montréal, entre $4.54 et $6.30, ce ne sont que des salaires. Il faut
aller à l'annexe suivante pour prendre en considération
l'ensemble du coût horaire, c'est-à-dire salaires, avantages
sociaux, vacances, etc. On se rend compte à ce moment qu'au lieu de
$4.54, si on additionne les avantages sociaux, on arrive à $4.91. Si on
additionne également les avantages sociaux en 1974, on est à
$7.38, au lieu de $6.30. A cet endroit, on voit que l'écart est
maintenant de 50%.
La réponse est la suivante: Pourquoi 50%, pourquoi 40%? Il y a un
décalage entre Montréal et le reste de la province. Il y a eu
évidemment le phénomène de la parité salariale. Le
phénomène de la parité salariale, c'est le suivant. Dans
des régions hors de l'île de Montréal, il y a eu, durant
plusieurs années, des conventions négociées qui
n'accordaient pas les mêmes salaires que ceux qui étaient
accordés sur l'île de Montréal. Evidemment, cela a
été une négociation dure, pour la parité salariale,
c'est une chose qui a donné lieu à des augmentations
phénoménales dans certaines régions. Les gens
négociaient une convention collective dans le Bas-Saint-Laurent en
fonction des conditions économiques du Bas-Saint-Laurent et à ce
moment-là on croyait que c'était normal. Les gens étaient
d'accord, signaient des conventions à $3.50 l'heure ou $3.25 l'heure.
Mais le lendemain, on a dit: Ce ne sont plus les conditions économiques
du Bas-Saint-Laurent qui vont s'appliquer dans le Bas-Saint-Laurent, mais c'est
en fonction des conditions économiques de toute la province que vous
allez avoir des taux de salaires. Evidemment, on a eu un phé-
nomène d'augmentation dû à une partie de rattrapage
important en dehors de l'île de Montréal.
Si vous regardez plus loin dans les annexes, vous allez vous rendre
compte, MM. les membres de la commission, que l'indice moyen des prix à
la consommation, basé sur Montréal, de 1969 à 1974
ce sont des chiffres que nous avons tirés de Statistique Canada
est passé de 121 à 154.9. C'est pour le mois de novembre,
évidemment. On n'avait pas le mois de décembre. Nous avons fait
les calculs suivant les méthodes reconnues. Nous arrivons à une
inflation de 27.1%. Même si, sur l'île de Montréal, on vient
prétendre, uniquement sur la base du salaire, sans les avantages
sociaux, que le travailleur est pénalisé dans l'industrie de la
construction, il faut quand même dire que le travailleur est allé
chercher près de 40%, sur la base de ces années et que
l'inflation n'a été que de 27%. Il n'est quand même pas
encore, en théorie et en pratique, défavorisé par
l'inflation. C'est tout le jeu que j'ai voulu vous expliquer en disant:
Certaines années, je mise juste sur l'inflation; d'autres années,
je peux miser mal sur l'inflation mais c'est le jeu d'une négociation,
c'est le jeu de la signature d'une entente entre des parties.
Si je vous dis, demain matin que, pour aller à tel endroit, cela
va nous coûter $5 à tous les deux et que, le lendemain matin, il y
a quelqu'un qui peut intervenir et qui dit: Cela coûte $5.50; si on a
signé un contrat à $5, je pense que, sur la stricte base des
droits normaux des gens, du droit civil, on a un contrat à respecter. Je
devrai peut-être, à ce moment-là, prendre une pilule.
Même cela, selon nous, ne se produit pas actuellement dans la
construction. On pense que tout le monde dans l'industrie de la construction,
à l'heure actuelle, a trouvé peut-être plus d'inflation que
d'augmentation, mais les augmentations qui ont été prévues
dans ces conditions ont pris soin de l'inflation.
Donc, il est faux de dire qu'il a perdu son pouvoir d'achat. Il faut
quand même aussi reconnaître ceci: Si je parle de 25% sur $100 et
si je parle de 20% sur $400, à un moment donné, il faut quand
même comprendre le pourcentage. Si je compare des pourcentages,
simplement des pourcentages, à ce moment-là, je peux fausser une
réalité. Si je prends 10% de $100, cela fait $10, mais 10% de
$200, cela fait $20.
Tout le jeu des échelles d'augmentations, quand je dis à
un moment donné que Montréal a vu un accroissement de 39%, c'est
39% sur $4.54, comme vous avez là. L'autre qui a eu une augmentation de
62% sur $3.89, évidemment, c'est 62% sur un montant moindre.
M. Roy: Je comprends bien. Seulement, vous admettez quand
même que ce sont les travailleurs de Montréal qui ont eu la plus
petite augmentation depuis cinq ans?
M. Dion: Evidemment, parce que les travailleurs de
Montréal, M. Roy, suivant les termes du décret, c'est eux qu'on
rattrapait. Les gens de Montréal ne tentaient pas de rattraper le
Bas-Saint-Laurent, parce que...
M. Roy: J'aimerais savoir, au niveau de votre association, de
votre groupement, s'il y a des pressions qui sont faites de la part des
entrepreneurs des différentes régions du Québec, d'autres
régions économiques. A cause des problèmes
économiques que vous avez soulignés tout à l'heure, est-ce
qu'il y en a qui font pression sur votre association en disant qu'on ne doit
pas augmenter les coûts de la construction, sous prétexte de voir
un marché réduit et, par conséquent, d'avoir un
accroissement du chômage, ce qui aurait pour effet, à ce
moment-là, de paralyser en quelque sorte et de nuire aux
négociations, de façon à assurer aux travailleurs de
Montréal en particulier... On sait que les problèmes sont,
à Montréal, plus aigus qu'ailleurs et que ceci influence la table
de négociations du côté patronal. Est-ce qu'il y a une
influence qui peut venir des entrepreneurs de l'extérieur
puisqu'il y a un principe qui est admis et je ne le remets pas en cause; je
veux que ce soit bien clair, je ne remets pas le principe en cause
compte tenu du fait qu'on veut avoir une échelle de salaires
égale dans tout le territoire du Québec? Est-ce que cela nuit?
Est-ce qu'il y a une influence réelle?
M. Dion: Je pense que vous lisez, avec justesse, entre les
lignes, à plusieurs endroits du document, que les employeurs, en
province, qui font affaires avec certains donneurs d'ouvrage, sont facilement
plus sensibles au problème de quelque augmentation qui peut se produire
lors d'une négociation.
C'est évident que, si je m'en vais avec $1 dans une région
économiquement très forte et si je m'en vais dans une
région sans vouloir pénaliser personne par mes paroles
assez éloignée sur la tête du fleuve, dans le haut
du fleuve, en Gaspésie et même plus loin, et que je parle d'une
augmentation de $1 l'heure, le donneur d'ouvrage de l'endroit ne l'absorbe pas
de la même façon. Si je m'en vais dans une région beaucoup
plus centrale, comme celle de Drummondville, de Sherbrooke, où les gens
travaillent soit dans le textile, dans le meuble, où leur salaire
à eux on a les preuves à l'appui de cela à l'heure
actuelle est nettement inférieur à celui d'un travailleur
de la construction, c'est évident que le pouvoir d'absorption de ces
régions-là est nettement différent de celui d'autres
centres.
C'est sûr et certain que, lorsque je négocie un
décret provincial, cela donne, du côté syndical, l'avantage
peut-être d'avoir des taux de salaires uniformes, parce qu'on se sert du
plus gros et on dit: Tu donnes cela au plus petit.
Du côté patronal aussi, il nous faut considérer que
ce que je donne au gros, je vais être obligé de l'imposer au
petit. De part et d'autre, je pense que les gens devraient tenir compte de ces
choses-là. Je pense que, dans certains cas, les gens en ont tenu compte.
Je ne suis pas ici pour blâmer ce qui a été fait avant. Je
pense qu'il faut réellement en tenir compte. L'absorption
économique d'une région n'est pas la même partout.
Je ne cherche pas à donner des cours d'économique, mais je
dois quand même vous souligner qu'il est clairement établi, par
des statistiques connues et qu'on pourrait illustrer, en faisant
référence, je pense, à la revue Bâtiment que
le tra-
vailleur de la construction, comparativement au travailleur minier,
comparativement au travailleur industriel, comparativement aux gens qui sont
dans les services, est celui qui est le mieux nanti, c'est celui qui a le
meilleur salaire.
Evidemment, je pense que ce sont là des statistiques, mais quand
on parle de $250 par rapport à $230, par rapport à $180, je pense
que c'est significatif. Nous, on pense, actuellement, que le jeu est tel que
l'industrie de la construction, à des taux de $7 I heure, ne pourra pas
jouer tellement longtemps comme cela en montant les taux de salaire, en montant
le coût horaire, parce que le taux de salaire et le coût horaire,
pour nous, c'est différent. Parce que le coût horaire, que je dois
charger au donneur d'ouvrage public, industriel et tout le monde, inclut les
bénéfices marginaux. Evidemment, si je donne $5 à un gars,
puis je mets $4 dans le fonds de retraite à ce moment, le gars a $5 dans
son enveloppe de paye, je suis d'accord, mais moi, je suis obligé
d'exiger quand même $9, plus tous les autres coûts, plus tant pour
cent pour les vacances, plus tant pour cent pour la sécurité
sociale, plus tant pour cent pour les accidents de travail, etc., etc. Dieu
sait qu'on en a un tas de déductions, les talons de chèques sont
rendus longs comme ça. A partir de là, je pense qu'il faut en
tenir compte.
M. Roy: C'est peut-être une question d'appréciation
que je peux vous poser, mais sans remettre le principe en cause, je pense que
ce serait quand même important qu'on puisse le savoir ici à la
commission. Si les associations patronales avaient à négocier des
taux uniquement pour l'île de Montréal, est-ce que ce serait plus
facile pour vous autres c'est une question importante et je dis bien que
je ne remets pas le principe en cause, mais je veux avoir votre point de vue
là-dessus rde négocier de meilleurs taux pour les
travailleurs de l'île de Montréal?
M. Dion: Ecoutez, je pense que vous allez trouver la
réponse dans le mémoire de l'Association de la construction de
Montréal. Moi, je pense qu'on ne peut pas dire que ce serait plus facile
ou moins facile. Il faut quand même dire que l'entrepreneur de
Montréal, entre autres, qui aurait, suivant une négociation
sur laquelle, je dois vous dire, nous ne sommes pas d'accord des
taux supérieurs à d'autres entrepreneurs, quand il promène
sa main-d'oeuvre en province, il serait obligé de maintenir ce taux de
salaire nettement supérieur et, à ce moment, vous vous
retrouveriez encore devant le même problème. On n'est
peut-être pas d'accord, si vous voulez, en pratiaue, en décret, en
chiffres, sur le principe à travail égal salaire égal,
mais en théorie, vous savez, c'est défendable, Les gens l'ont
défendu, en tout cas, que ce soit raisonnable ou non, la chose est telle
quelle aujourd'hui.
Qu'est-ce que vous voulez, moi, je ne peux pas argumenter sur cette
partie. Est-ce que ce serait plus facile pour les gens de Montréal de
prendre une, grosse augmentation? Moi, je dois vous dire que ces gens doivent
avoir considéré le problème de la même façon
que nous, nous l'avons considéré. Est-ce que c'est
justifié de bouger? Est-ce que c'est justifié de modifier le
contrat? Est-ce qu'on a raison de leur dire non? Moi, je dois vous dire qu'ils
vous répondront eux-mêmes tantôt, ils sont arrivés
à la même conclusion que tous les autres.
Je pense qu'il y a une réalité, à l'heure actuelle,
qu'on a faussée par toutes sortes d'agissements illégaux, par des
provocations, des menaces, de la violence, des sorties, des arrêts de
travail, de la non-productivité, on a tout fait cela sur les chantiers
et là on a provoqué un problème, on a créé
un problème. A partir de là, on se retrouve devant une solution
excusez l'expression si, aujourd'hui, on se mettait à tous
se donner des claques sur la baboune, on s'en donne tous ensemble, on regarde
cela et on dit: Tout le monde s'en donne, on va rendre cela légal, tout
le monde a le droit de donner au moins une claque sur la baboune de son voisin,
c'est rendu légal. C'est un peu un jeu de ce genre. C'est que les gens
montent une situation et on dit: Regarde donc cela, tout le monde fait cela ou
presque tout le monde, on va rendre cela légal. C'est cela le
problème actuellement.
M. Roy: Ma question n'était pas sur ce point en
particulier.
M. Dion: Bien, moi, je voulais vous le passer
ceiui-là.
M. Roy: Vous avez réussi. Le point que je voulais voir,
c'est parce qu'on entend dire un peu partout, dans différentes
régions du Québec, que le problème est différent,
les travailleurs se plaignent, dans certaines régions rurales, du fait
qu'il y a un manque de contrats parce que les prix sont trop
élevés, il y a un accroissement du chômage, dans certaines
régions, à cause de cette égalité salariale et
autre. C'est la raison pour laquelle, sans remettre le principe en cause,
personnellement, je voulais bien avoir votre point de vue de ce
côté, pour savoir de quelle façon les associations
patronales envisageaient ou encore étudiaient la question.
Vous avez admis qu'il y avait effectivement des représentations
et des pressions qui étaient faites au niveau patronal, par les
entrepreneurs de certaines régions du Québec. Je pense que c'est
important même si cela se discute devant la commission.
Dernière question, M. le Président. A la page 6, vous
faites référence au second point, lorsque vous parlez du malaise.
"Il est vrai de prétendre que le salaire brut de M. X. n'a pas subi de
perte réelle due à l'inflation." Vous parlez de $5 et vous donnez
un exemple: "A titre d'exemple, si un salarié gagne $100 et que le
contrat prévoit $10 d'augmentation répartis comme suit: $5 sur la
paie, $5 sur un fonds de retraite..." Est-ce que, jusqu'à
présent, vous avez fait des études du côté patronal,
pour savoir quel est le salaire réel net, l'augmentation de salaire
nette que reçoit le travailleur de la construction en tenant compte non
seulement des augmentations de salaire et des bénéfices marginaux
mais en tenant compte également des déductions à la
source? On sait une chose. C'est que nos amis d'en face, le gouvernement ici,
lorsqu'il a augmentation de salaire, ils vont en chercher une partie sous forme
d'impôt sur le revenu. Il y a des augmentations, des majorations
d'impôt. Je suis un peu surpris que, dans votre mémoire, vous ne
faites aucunement allusion à ce phénomène puisque c'est un
phénomène réel, ils sont à pourcentage dans
l'inflation.
J'aimerais savoir si, de votre côté, vous avez fait des
études réelles, des études précises dans ce
sens.
M. Dion: Bien, je vais vous dire que je pense que ces
études se font journalièrement. Les employeurs paient leurs
salariés le taux horaire en faisant les déductions,
évidemment. Il y a des phénomènes qui se produisent.
Ecoutez, on pourrait peut-être essayer d'éviter des questions. Je
pense qu'on est quand même en mesure de vous dire honnêtement la
vérité.
C'est évident que je me rappelle que, lors d'une
négociation, lorsqu'elle a été terminée, on a vu
certaines personnes arriver et se "retourner du bord" automatiquement et dire:
Bien, on va faire un prélèvement de $0.27 l'heure sur le salaire
des salariés. Cela avait comme conséquence automatique que le
gars, après avoir eu des améliorations, trouvait son enveloppe de
paie un peu plus mince.
Ecoutez, une augmentation de cotisation syndicale, évidemment,
cela aussi peut faire diminuer la paie d'un gars. Evidemment, l'augmentation de
l'impôt joue. Il y a eu des demandes de divers groupes de pression et
même de partis politiques à l'effet d'indexer les impôts. Je
pense que cela va être touché par les constructeurs d'habitations
dans leur mémoire. Il y a eu des demandes. Je pense que, à ce
moment-là, il y aurait eu moyen de régler peut-être
généralement dans une province la question de l'inflation. Je
pense que ces choses se produisent. Chaque fois que je donne $1 à mon
salarié et que l'impôt du gouvernement vient chercher un tel
montant, c'est évident que, à ce moment-là, lui aussi
gruge la paie de l'employé, comme l'inflation la gruge. Lui aussi
pourrait peut-être faire l'effort de compenser de ce
côté.
Evidemment, il pourra y avoir des gens qui prétendront que, d'une
augmentation à l'autre, les gens voient leu r salaire baisser. Je vais
vous dire que je ne peux pas répondre, à ce moment-ci. Si vous
voulez la réponse, on en a quand même probablement encore pour
deux ou trois heures avec vous, je pense qu'on pourra faire la recherche et
vous en donner les résultats. Mais je n'ai pas actuellement ces
chiffres.
M. Roy: Alors, il serait peut-être bon qu'on en prenne note
du côté patronal comme du côté syndical d'ailleurs et
qu'on nous fournisse des chiffres à ce sujet. Je pense que ce serait
important pourtous les membres de la commission. Merci, M. Dion. Je n'ai pas
d'autre question.
Le Président (M. Séguin): Le député
de Kamouraska.
M. Pelletier: M. le Président, je demande aux membres de
la commission s'il y aurait possibilité d'annexer au journal des
Débats l'annexe I et l'annexe II du mémoire de la
fédération, puisqu'elles n'ont pas été lues
à la commission.
Le Président (M. Séguin): Est-ce qu'il y a
consentement?
M. Charron: Certainement.
M. Pelletier: D'accord. C'est pour l'information du Journal des
Débats.
Le Président (M. Séguin): Consenti. Le
député des Mille-Iles. (Voir annexes)
M. Lachance: M. Dion, dans le mémoire
présenté par les six associations de la partie patronale,
à la page 1, quatrième paragraphe, vous arrivez à la
même conclusion. Je cite. Je vais vous lire cette partie. "L'indexation
est un problème créé de toutes pièces par les
dirigeants syndicaux, et elle est l'occasion d'une nouvelle
démonstration de force contre les employeurs et même contre
l'autorité gouvernementale". Je continue. "Ceci ne nous surprend pas
outre mesure, surtout si nous nous souvenons des déclarations des chefs
syndicaux manifestant leur volonté de renverser le pouvoir ou encore
incitant les travailleurs à violer les lois".
En somme, c'est une affirmation j'emploie le terme "affirmation"
des six associations.
A la page 3, quatrième paragraphe encore, à la fin du
quatrième paragraphe, on reprend: "Car il dépend de la bonne
volonté et de la bonne foi des parties syndicales".
Je veux exclure la commission Cliche. Dans votre mémoire, les six
associations affirment cela. Vous blâmez la partie syndicale pour ce
qu'on veut actuellement au niveau de la construction. Mais vous affirmez cela
dans un mémoire assez succinct trois pages mais, toujours
en excluant la commission Cliche, vous n'apportez rien de concret. De quelle
façon en est-on venu là?
M. Dion: Ecoutez...
M. Lachance: Je parle toujours de la partie patronale
vis-à-vis de la partie syndicale, parce qu'on blâme quand
même les patrons, les syndicats, le gouvernement. De quelle façon
en venez-vous à cette conclusion?
M. Dion: Disons que c'est évident qu'il s'agit là
d'une couverture à six mémoires qui vont élaborer, en
grande majorité, tous ces points.
Je pense que, quand on parle de déclarations de chefs syndicaux
manifestant leur volonté de renverser le pouvoir, je pense que
pour...
M. Lachance: Oui, mais cela va plus loin que cela.
M. Dion:... tous et chacun des membres de la commission, vous
pouvez vérifier ces choses facilement. Quant à inciter les
travailleurs à violer la loi, je pense, également, que le
gouvernement comme tel, par l'entremise, peut-être, du ministère
de la Justice, est également au courant de ces affirmations. Je ne veux
surtout pas, malgré que je sois avocat, me mettre les pieds dans les
plats; mais je pense qu'actuellement, le ministère de la Justice a, au
minimum, en tout cas, pris certaines actions qui sont en fonction de la
dernière partie "inciter les travailleurs à violer la loi".
Quant à la deuxième partie de votre question... j'essaie
de retrouver le texte...
M. Lachance: Page 3, paragraphe 4, dernière ligne: "II
dépend de la bonne...
M. Dion: "II dépend de la bonne volonté et de la
bonne foi des parties syndicales".
Malheureusement, l'expérience que nous avons vécue, quant
à nous, nous amène à faire cette conclusion. On s'est
quand même rendu compte qu'au fur et à mesure qu'un
problème était réglé, ou qu'une convention
était signée par des mécanismes peut-être souvent
irréguliers, d'autres fois plus réguliers, à partir de ce
moment, les gens ne se collent pas à cette réalité qu'est
la convention prolongée par décret. On s'en est rendu compte, et
je ne veux pas discourir davantage du tout sur ce plan. Je veux simplement m'en
remettre au mémoire de l'ACM, qui va vous décrire
complètement, et je pense, avec d'excellents détails, comment se
développe le climat dans l'industrie de la construction, qui permet de
justifier cette affirmation.
Je pense que c'est un climat qui se développe. Depuis cinq ans,
on voit tout l'agissement qui se produit de ce côté... Evidemment,
certains sont plus responsables que d'autres, mais tout cela va vous être
décrit en détails.
M. Lachance: Est-ce que vous pensez que l'action du gouvernement
vis-à-vis justement de ce que vous avez mentionné est
adéquate?
M. Dion: Que? Excusez-moi!
M. Lachance: Que l'action du gouvernement est adéquate.
Vous avez parlé du ministère de la Justice
vis-à-vis...
M. Dion: Je pense qu'on a mentionné, non pas dans ce
mémoire collectif, mais dans notre mémoire particulier, que nous
trouvions quand même que la réaction du gouvernement
vis-à-vis des problèmes sérieux de l'industrie de la
construction était, à certaines occasions, complaisante; à
certaines autres occasions, la réaction était lente et, à
d'autres occasions, c'était pratiquement inefficace.
Ecoutez, si demain matin on provoque tout un chaos dans une section de
l'industrie de la construction et que la seule résultante est qu'il y a
deux ou trois gars qui se retrouvent peut-être avec quelques petits
problèmes et finissent peut-être, parfois, à s'en sortir,
c'est évident qu'à ce moment-là, soit l'action, soit la
loi ou soit la réaction gouvernementale ne nous paraît pas en
mesure de régler le problème.
On a dit, à un moment donné, dans notre mémoire
que, s'il y a eu des réactions gouvernementales, même
législatives, ces réactions ont été d'une telle
modestie qu'elles n'ont pas réussi à contrôler certains
problèmes.
Pour nous vous allez peut-être dire que ce n'est pas pareil
pour l'autre côté de la clôture quand le
problème se pose, que certains gars font sortir d'autres gars sur un
chantier, évidemment, on n'est pas pour "poigner" tout le monde et les
envoyer en dedans. On n'est pas ridicule à ce point. Mais si, à
un moment donné, on avait ce qu'il faut pour faire comprendre aux gens
que ce n'est pas de cette façon que les problèmes se
règlent! Ce ne sont pas 20 gars qui arrivent en auto- mobile à la
course qui sortent 150 gars d'un chantier. Il y en a qui vont dire: Cela ne se
produit jamais. Disons que cela se produit de temps en temps. On a vu cela. Je
pense que ce sont des méthodes "gracieuses" de faire comprendre aux gens
qu'il vaut mieux se retirer que de se faire casser la gueule. Je regrette
d'être obligé de vous dire cela, mais ce n'est pas moi qui fais la
commission Cliche, à l'heure actuelle. Ce n'est pas moi qui ai
écrit le mémoire de l'ACM. L'ACM a écrit son
mémoire. Les employeurs membres de cette association ont confié
à leur association leurs problèmes, leurs expériences et
tout cela a été compilé dans un mémoire.
Je pense que cela, c'est un problème réel pour les
employeurs. En tout cas, on le vit, actuellement, et je pense que vous en
entendez parler autour de vous.
Le Président (M. Séguin): Le député
d'Iberville.
M. Tremblay: M. Dion, à la page 2 du mémoire de la
Fédération de la construction du Québec, deuxième
paragraphe, vous tentez, en quelques mots, d'établir une synthèse
pour illustrer spécifiquement la nature du problème exact auquel,
selon vous, selon votre mémoire, nous sommes confrontés. Je lis:
"Aujourd'hui, nous sommes devant un nouveau conflit créé par une
demande d'indexation appuyée par une foule de gestes
répréhensibles à tous les niveaux". Vous les
énumérez comme ceci: "Les jeux se font comme suit: "a) La FTQ
tente de signer des ententes illégales selon des moyens bien connus:
arrêts de travail, ralentissements sur les chantiers, menaces, etc.; "b)
L'application des lois existantes est lente et peu efficace; "c) Certains
employeurs ne se sentent plus adéquatement appuyés et
succombent".
Ma question est à deux volets. Vous avez élaboré,
tout à l'heure, sur le a) avec mon collègue des Mille-Iles. Je
saute b) et je passe à c). Je vous demande ceci: Vous dites "certains
employeurs".
D'abord, le mot "employeur" veut-il dire membre de votre association de
patrons et quel sens donnez-vous à votre mot "succombe"? Certains
employeurs ne se sentent plus adéquatement appuyés et succombent.
D'abord, les employeurs sont-ils de vos membres? Ceux de qui vous parlez.
M. Dion: Dans cette partie de mon texte, je traduis une image
provinciale du problème que vit l'industrie de la construction. Certains
de nos employeurs...
M. Tremblay : Vous parlez d'un mémoire. Moi, je vous
demande si vous parlez au nom des employeurs membres de l'association ou si
vous parlez de tous les employeurs dans tous les domaines du Québec.
M. Dion: Non. Je parle de certains employeurs dont certains
excusez la répétition sont membres chez nous, qui
ne se sont plus sentis adéquatement appuyés et cette partie du
texte veut dire
que, ne voyant plus aucun moyen de pouvoir s'en sortir, soit par des
appuis législatifs, soit par une bonne foi de la part de la partie
syndicale, ces gens ont succombé. Le mot "succombé", vous devez
supposer derrière ce mot tous les moyens utiles pour amener un employeur
à ne plus être capable de résister. Cela inclut lui enlever
sa main-d'oeuvre, cela inclut des ralentissements...
M. Tremblay: Cela, vous nous l'avez dit dans le paragraphe a),
mais quand vous dites que les employeurs ont succombé, cela veut dire
quoi?
M. Dion: Cela veut dire tout simplement que certains ont
été obligés d'accorder un certain montant pour
régler le conflit, soit directement à l'heure, soit sous forme
camouflée comme une allocation de temps supplémentaire qui
n'existe pas, soit une allocation de frais de transport, des choses de ce
genre-là. A la fédération, je suis obligé de vous
avouer que c'est une infime minorité des employeurs qui ont
honnêtement succombé et je vous répète encore...
C'est mon document, d'accord, mais, dans mon document, je vous décris
une constatation provinciale. Il y a également une chose qui vous sera
peut-être dite à l'occasion par un autre mémoire, c'est que
certains employeurs sont membres de plus d'une association. Certains employeurs
chez nous sont également membres de l'ACM. Or, certaines entreprises qui
sont membres de l'ACM sont également membres chez nous. Les
problèmes ont peut-être été vécus dans des
régions autres, comme, par exemple, la ville de Québec, mais la
fédération est un organisme provincial. Alors, dans toute la
province, certains de nos membres ont été obligés de
céder au chantage, aux pressions, aux menaces, à la violence, aux
restrictions de main-d'oeuvre, à la non-productivité sur les
chantiers. Toutes sortes de choses comme cela.
M. Tremblay: A votre connaissance, est-ce que ces employeurs, qui
sont vos membres, lorsqu'ils ont finalement décidé de se faire
les complices, jusqu'à un certain point, de négociations
illégales au fond, parce que la grève était
illégale, s'il y avait grève ou chantage comme vous dites, c'est
ce que ces gens ont accordé une certaine indexation des salaires ou des
avantages sociaux en vue de sauver les meubles, lorsqu'un contrat était
en exécution et le reste?
Est-ce que vous avez aussi indiqué peut-être dans vos
autres mémoires, vous me le direz, la nature de l'ampleur de certains
travaux concernés?
M. Dion: J'aime beaucoup l'allusion que vous avez faite en vue de
sauver les meubles, parce que, quand vous dites que nos gens ont
collaboré à ce problème, il faut dire qu'à notre
connaissance, et ce sans jouer à l'autruche, il n'y a pas un seul
employeur qui se soit garroché dans la rue en criant aux gars:
Voulez-vous l'indexation? Je vais vous la donner. Dans tous les cas,
l'indexation a été obtenue soit directement par des actes, soit
indirectement, parce qu'on prévoyait des actes ou qu'on prévoyait
des problèmes.
M. Tremblay: Une dernière question. Dans une occasion
semblable, avez-vous eu connaissance que ces employeurs, par l'entremise de
votre mouvement, ont fait des pressions auprès du gouvernement pour
dire: Dans tel cas précité, nous avons tel syndicat qui nous
accule au mur, qui veut...
M. Dion: Oui.
M. Tremblay: ... absolument avoir une indexation. Ils sont sortis
du chantier illégalement; on est pris peut-être avec une faillite
sur les bras, avec des problèmes majeurs. Est-ce que vous êtes
arrivés au bureau du ministre en disant: Ecoutez, on est pris avec ce
problème, c'est sérieux, faites quelque chose, aidez-nous. Ou,
avez-vous préféré attendre et, vous aussi, n'avez-vous pas
contribué un peu à ce que la situation pourrisse un peu plus, si
vous appelez ça du pourrissement? . M. Dion: Je serais bien
malheureux de vous dire qu'on a contribué. Je pense que la
réponse à votre question se trouve dans le paragraphe b). Quand
on dit: "L'application des lois existantes a été lente et peu
efficace. Cela inclut que, dans pratiquement tous les cas où il y a eu
une force de pression contre un employeur pour atteindre une indexation
injustifiée, il y a eu des plaintes portées conformément
aux moyens qu'on avait, c'est-à-dire aux lois qui nous permettaient
d'intervenir dans ces choses. Evidemment, c'est ce qui nous amène
à demander au paragraphe b), s'il y a assez de mordant dans la loi.
Est-ce que la loi est suffisamment efficace pour réellement contraindre
les gens qui ont cette habitude de passer outre à toutes les
structures?
Il y a eu constamment des réactions. Je pense qu'il faut
peut-être vous souligner que, tout dernièrement, un nombre
impressionnant de poursuites ont été prises par le
ministère de la Justice concernant des ralentissements de travail, des
arrêts de travail ou même contre des signatures de miniententes. Il
reste quand même que nous, comme employeurs, je vous le dis je
suis quand même un porte-parole d'un groupe d'employeurs on a
cette réaction: Maudit! Ça va mal et on n'a aucun outil pour se
défendre. Qu'est-ce qu'on fait? Evidemment, on en a de petits outils,
mais on a l'impression à ce moment-ci que nous sommes avec un couteau
à froid pour abattre un arbre de 10 pouces.
C'est fatigant pour l'employeur, mais c'est cela. On n'a pas la scie
qu'il faut pour couper l'arbre ou, en tout cas, empêcher que tout le
monde nous monte sur la tête, pour se défendre un peu.
Du côté patronal, vous êtes drôlement à
la merci d'un tas de choses actuellement. Malheureusement, c'est vrai, la
situation est telle, à l'heure actuelle, que l'employeur n'est plus en
mesure d'absorber. On vous dit, parce qu'on nous l'a dit, qu'il y a des gens
qui vont tomber. Si c'est bougé, cette chose-là, il y a des gens
qui vont tomber. Est-ce que c'est possible que l'on fasse des choses pour
briser des entreprises? C'est la question qui découle de tout cela. Il y
a des gens qui vont subir le contrecoup de tout geste qui pourrait être
posé. C'est notre prétention. On peut peut-être vous dire:
II y en a 242 qui vont faire faillite. Je ne sais pas si c'est 242, mais il y
en a qui
vont subir le contrecoup. Selon ce qu'on nous dit, cela va être
sérieux. On peut prendre cela pour du bon pain, mais on est
honnête, on vous dit ce qu'on a entendu chez nos gens.
M. Tremblay: Je vous remercie.
Le Président (M. Séguin): La reprise des travaux de
la commission: 20 h 15 ce soir. Nous entendrons dès la reprise...
M. Charron: J'ai des questions à poser à M.
Dion.
Le Président (M. Séguin): Oh oui! vous êtes
membre de la commission. Un instant, s'il vous plaît! M. Dion, vous
êtes reconvoqué pour 20 h 15 parce qu'il y a un
député de la commission qui a des questions à poser.
(Suspension de la séance à 18 heures)
Reprise de la séance à 20 h 21
M. Séguin (président de la commission permanente du
travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration): A l'ordre,
messieurs!
A l'ordre, s'il vous plaît. A l'ordre! A l'ordre!
Le député de Saint-Jacques.
M. Charron: Merci, M. le Président, il nous manque des
joueurs, je pense qu'ils ne sont pas assez payés.
J'ai deux questions à vous poser, M. Dion. La première
tient d'une des affirmations contenues dans le texte conjoint des associations
patronales. Vous avez fait allusion, très discrètement dans le
texte de la fédération et plus abondamment lorsque vous avez
répondu aux membres de la commission qui vous ont interrogé avant
moi sur la commission Cliche, à ce que vous attendiez de la commission
Cliche, les conclusions que vous-même étiez à tirer
à ce moment-ci, avant même qu'elle ait terminé ses travaux,
sur certaines révélations, que je ne contesterai pas d'ailleurs
moi non plus, sur ce qui a été annoncé à la
commission Cliche. Je vous rappelle que la commission Cliche n'a pas fini ses
travaux, qu'il lui reste, à tout le moins, deux côtés du
triangle de la construction à étudier. Le côté
patronal, on n'a pas encore eu le plaisir de le voir examiné à la
commission. Le côté gouvernemental, le moins qu'on puisse dire,
c'est qu'il a beaucoup à faire dans le domaine de la construction, selon
les mots mêmes que vous avez dits. Vous avez affirmé, de par la
commission Cliche et aussi de par l'expérience concrète que
certaines des gens que vous représentez ont vécue, la violence
menée par certains syndicats dans certains chantiers de
construction.
Toutefois, vous affirmez, à la page 3, dans le texte commun des
associations patronales, dernier paragraphe: "Si l'on envisage dans le
pseudointérêt public, somme toute, de concourir à nous
forcer le bras, nous vous déclarons que le véritable
intérêt public est d'arrêter immédiatement ce
système de récompense à l'illégalité et
à la fourberie des chefs syndicaux car, individuellement, nos employeurs
se chargeront d'éteindre le feu en prenant les dispositions qui
s'imposeront." Que veut dire, M. Dion, ce texte?
M. Dion: Le texte a le sens suivant. Jusqu'à maintenant,
on s'en est toujours remis à essayer de se comprendre au sein des lois,
au sein des règlements qui régissent l'industrie de la
construction. On a tenté de se comprendre avec les gens de notre
vis-à-vis, c'est-à-dire les parties syndicales. De plus en plus,
nos employeurs se sont rendu compte que l'utilisation de ces moyens
réguliers et normaux avait comme conséquence que la plupart du
temps ils finissaient par payer la facture alors que, de l'autre
côté, on utilisait toutes sortes de moyens qui ne sont pas, dans
certains cas, illégaux, mais qui sont proches de la clôture et,
dans d'autres cas, qui vont jusqu'à l'illégalité.
Or, il est évident que, de la part des employeurs, il faut quand
même prévoir qu'un jour ou l'autre je pense que ce jour est
peut-être arrivé le
climat ne sera plus tolérable. Il est quand même à
craindre qu'un jour les employeurs disent: La seule façon de pouvoir
régler nos problèmes, c'est peut-être de mettre la clef sur
la porte c'est peut-être de dire que, demain matin, le chantier sera
fermé; c'est peut-être... je ne le sais pas, je ne dirais pas un
lock-out, parce que je ne voudrais pas prétendre à des lock-out,
mais c'est peut-être une situation où notre capital ne peut plus
être mis en jeu, où on ne peut plus fonctionner, où il faut
absolument que les mesures disciplinaires et les méthodes prévues
par les décrets et les lois soient mises de côté et qu'on
prenne d'autres genres de méthodes.
Ecoutez, vous allez dire: Habituellement, le patronat utilise des
méthodes qui sont, je dirais, peut-être beaucoup plus polies que
d'autres méthodes qui sont utilisées. Mais c'est du monde qui, un
jour, ne pourra plus endurer; c'est du monde qui, un jour, va en avoir
soupé de subir les contrecoups des sautes d'humeur de certaines
personnes.
Il est à prévoir et je peux vous dire qu'il ne
s'agit pas là d'une affirmation en l'air que, si les coups
continuent à pleuvoir toujours du même côté, les
employeurs vont se tanner. Je vous dis que toutes les solutions, à
l'heure actuelle, qui auraient pour fonction de faire porter encore le poids
sur les épaules des employeurs, vont être extrêmement mal
reçues. Si jamais elles étaient envisagées par le
gouvernement, elles vont être extrêmement mal reçues par les
employeurs.
Je ne veux pas et je viens de souper causer une
indirgestion. Ce n'est pas du chantage, ce ne sont pas des menaces. On ne
cherche à faire ni du chantage, ni des menaces. C'est simplement,
peut-être, une réalisation plus complète des situations que
les gens ne peuvent plus supporter.
M. Charron: Je retiens beaucoup de l'affirmation que vous venez
de faire. J'ai l'intention de la reprendre tout à l'heure, mais j'en
suis encore à l'éclaircissement de ce qui est contenu dans le
texte que vous nous avez livré au nom, à moins de me tromper, de
toutes les associations patronales intéressées dans la
construction. C'est le premier texte, en tout cas, dans mon expérience,
qui m'est remis entre les mains, aussi unanime de la part de toute la partie
patronale et dans lequel on nous dit je vous répète encore
le libellé de votre texte, puisqu'il me semble avoir été
très bien travaillé "se chargeront d'éteindre le
feu en prenant les dispositions qui s'imposeront."
Vous qui avez présenté ce texte, pouvez-vous indiquer
à la commission, outre le lock-out qui est un moyen bien connu d'action
du milieu patronal, si, quand on dit "prenant les dispositions qui
s'imposeront", cela se limite au lock-out ou s'il y a d'autres dispositions
prévisibles. Je vous demande, en plus, s'il est uniquement à
prévoir, ce genre de chose. Pouvez-vous affirmer vous, ce soir,
qu'aucune de ces dispositions n'a jamais été prise jusqu'à
maintenant, que rien n'a été fait par la partie patronale,
jusqu'à maintenant, face à un certain nombre d'actions dont vous
avez repoussé la responsabilité sur le milieu syndical et sur
lequel nous ne vous questionnons pas pour le moment?
Pouvez-vous nous dire, autrement dit, que le côté patronal,
dans ce genre d'actions, dans ce genre de jungle, puisque c'est le mot que vous
avez employé, est aussi blanc comme neige que vous nous le
présentez dans ce texte?
M. Dion: Vous ne me demanderez sûrement pas, M. Charron, de
nous accuser nous-mêmes. Evidemment, dans un groupe, il peut y avoir des
brebis blanches, des brebis qui sont peut-être un petit peu
tachées. Il peut même y avoir des brebis noires. Je ne vous dirai
pas qu'il y en a plus dans un endroit que dans un autre. Evidemment, il y a des
employeurs qui ont peut-être des moyens qui n'auraient pas dû
être utilisés. C'est sûr et certain. On ne vient pas ici
vous conter des peurs. Il y a de tous les genres chez nous,
évidemment.
Mais il y a surtout, en tout cas, à l'heure actuelle, un groupe
de gens qui en ont assez de la situation, qui, à toute occasion, se
voient continuellement acculés au pied du mur, avec des moyens qui ont
toujours été refusés du côté patronal,
à l'heure actuelle, des moyens peut-être un peu plus
énergiques pour combattre les situations.
Moi, je préfère vous dire que je n'ai pas prétendu,
tantôt, qu'il y aurait des lock-out du côté des employeurs.
Je me permettrai, si vous m'excusez, de ne pas prétendre aux moyens qui
pourraient être utilisés par les employeurs mais je dois vous dire
qu'il est temps, parce que les employeurs veulent que ce soit le temps,
à l'heure actuelle, de changer nos méthodes de réaction.
Effectivement, nous entendons changer nos méthodes de réaction.
Quelles seront-elles? Je pense que, pour le moment, c'est extrêmement
difficile de vous les préciser mais si, à un moment donné,
on voit un employeur peut-être compatissant ou peut-être
compréhensif devant un employé qui produit à 20% sur le
chantier, peut-être que demain, il ne sera plus dans la même
situation. Peut-être qu'il aura une nouvelle réaction.
Je ne sais pas, globalement, quelles seront les réactions mais je
vous dis que l'attitude générale des gens, devant le conflit,
c'est de sentir complètement frustrés, à l'heure actuelle,
et ils se préparent à un esprit de réaction
différent, à des réactions différentes de ce qu'il
y a eu avant.
Remarquez que vous allez peut-être dire: J'ai hâte de voir,
dans quinze jours, ce qu'il va arriver. Est-ce que vous allez sortir les
tomahawks, etc.? Je ne le sais pas. Mais je pense que le climat est tel,
à l'heure actuelle, que les gens en ont assez. On ne peut pas
continuellement taper sur le même gars. A un moment donné, le gars
en a assez.
M. Charron: Mais êtes-vous d'accord avec moi je ne
veux pas, M. le Président, me transposer à la place et au
rôle de la commission Cliche, ce n'est d'ailleurs pas le but de cette
commission, en vertu de la loi 201 pour me dire... C'est parce qu'il y a
certaines affirmations, dans ce texte conjoint, comme dans le texte de la
fédération que vous représentez, qui me semblent excuser
rapidement certaines actions du côté patronal. Puisqu'on est
à discuter de modifications au décret, il serait peut-
être important de bien connaître chacune des deux parties
qui sont en cause. Autant on a dit, par exemple, du côté du crime
organisé, que le crime organisé, par définition, dans son
nom même, n'existerait pas s'il n'y avait pas des gens, des gens bien
placés, qui permettraient cette existence, d'actions criminelles
organisées.
De la même façon, on a pu voir, devant les
témoignages de la commission Cliche et par expérience dans le
domaine de la construction, que, bien souvent, certaines affirmations que vous
faites, à la partie syndicale, absence de démocratie, absence de
liberté, contrôle de fiers-à-bras, etc., n'existeraient pas
et seraient dans l'impossibilité d'exister matériellement s'il
n'y avait, en quelque lieu et place, complicité intéressée
de certains membres de la partie patronale. Seriez-vous prêt à
affirmer ce soir, comme porte-parole de la Fédération de la
construction du Québec, qu'il n'y a pas un patron dans le Québec
un, ce n'est peut-être pas assez qu'il ne s'en est pas
trouvé un certain nombre, à certaines occasions, une certaine
partie des gens que vous représentez ce soir qui n'ont pas
bénéficié, qui n'ont pas profité de cette absence
je ne remets pas en question vos affirmations de
démocratie, de cette absence de liberté, qui n'en ont même
pas fait jouer les mauvais côtés à leur avantage, invitant
une partie à passer outre à une autre, même si la loi ne
l'interdisait pas, en fermant les yeux sur certaines actions, en ne choisissant
pas d'avance quel syndicat allait opérer sur le chantier, même si
eux-mêmes, les patrons, savaient très bien que c'était
contraire à la loi 290 et même au lendemain à la loi 9 et
même aux dispositions du décret?
Me diriez-vous que cette absence de démocratie syndicale que vous
avez affirmée, au député de Maisonneuve, être la
première malédiction du monde de la construction, ce
système qu'on commence à connaître, qui existe et qui a
été révélé par la commission Cliche, me
diriez-vous qu'il n'a que nui à l'industrie de la construction et, en
particulier, qu'il n'a que nui aux patrons de la construction? Pouvez-vous
m'affirmer ce soir qu'il ne se trouve pas parmi les gens que vous
représentez je ne porte pas de blâme sur la majorité,
je ne dis pas l'ensemble de la Fédération de la construction du
Québec mais qu'il n'y a pas des gens, au moment où vous
peut-être et d'autres combattiez ce système, qu'il n'y avait pas
des gens de votre propre fédération qui le soutenaient, qui le
maintenaient, qui le finançaient, qui l'engraissaient parce qu'eux, de
leur côté, à cause de la région où ils
étaient ou du genre de chantier ou d'opérations qu'ils avaient en
profitaient largement? C'est la question que je vous pose.
M. Dion: Je pense que ce serait rêver en couleur de vous
répondre carrément: Non, il n'y en a pas un. Nous sommes tous des
vierges. Nous avons seulement des vertus chez nous. Dans un climat
général qui se développe, dans une industrie, je pense
qu'il peut se trouver des gens qui, voyant le climat et sachant que ce climat
ne fait que se développer se font à l'idée qu'ils devront
vivre avec, qu'ils le veuillent ou non.
Il y a des gens, effectivement, qui finissent par s'asseoir dans le
système et disent: C'est aussi bien d'être dedans que d'être
pris en dehors et de ne rien avoir. Honnêtement, je vais vous dire, c'est
évident que quand je veux faire un mauvais coup, il faut que j'aie un
gars qui veut le faire et un gars qui va le subir. C'est sûr et certain,
vous allez pouvoir affirmer que, demain matin, il y a des employeurs qui ont
peut-être bénéficié d'une certaine manière de
ce marasme dans l'industrie de la construction. Evidemment, à un moment
donné, le gars se voit dans un climat, se voit dans
l'impossibilité d'en sortiret il finit par se dire: II vaut mieux en
tirer le meilleur parti possible. Pourtirer le meilleur parti possible, il a
l'air d'un gars qui devient complice du système. Il y a des employeurs
qui, voyant le voisin qui s'est fait vider son chantier, qui a
été trois semaines de temps à voir de la
non-productivité, qui a perdu $50,000, $60,000, $100,000, il y a un gars
de l'autre bord qui automatiquement dit: Je vais payer les $0.50 et je vais
régler le problème. Je vais devenir peut-être plus efficace
que l'autre. C'est peut-être ça la complicité que les gens
pensent qu'il a pu y avoir chez les employeurs.
Si c'est cela qu'on pense être de la complicité, je vous
dis que ce sont des gens qui, par la force des choses, dans un système
souvent bien trop pourri, n'avaient pas d'autre choix, malheureusement et
involontairement, que de devenir presque des complices d'un genre de
système comme ça.
On va voir, comme vous le disiez tantôt, à la commission
Cliche, certains employeurs, qu'on en voie 10, qu'on en voie 100, se retrouver
devant la commission Cliche pour se faire dire: Vous avez donné des
pots-de-vin; amenez vos livres, qu'on le voie dans vos livres, vous avez
contribué à telle affaire et à telle affaire.
Peut-être. Mais, automatiquement, est-ce que ça veut dire que je
dois leur tirer une pierre? Est-ce que ça ne veut pas dire tout
simplement que ces gens, dans une évaluation juste ou fausse,
peut-être passablement fausse, se sont dit: II n'y a pas moyen de faire
autrement, j'embarque? Une erreur de jugement, une erreur d'évaluation,
il y en a qui ont pu la faire. Je ne voudrais surtout pas que la presse sorte
en disant: Ah! la fédération a dit qu'il y avait des
entrepreneurs malhonnêtes. Ecoutez, on n'est pas tous des saints. Il y a
peut-être des employeurs qui ont eu une chance de profiter du
système. Je vais vous dire: S'il y en a, nommez-les donc, nommez-les!
Parce que je pense que ces gens, si jamais il y en a, font tort à
l'industrie de la construction, tant patronale que syndicale.
A notre avis, il n'y a que des gens, à l'heure actuelle, pris
dans un système, pris dans un climat et qui ont dû le subir. C'est
ça qu'il y a dans l'industrie de la construction. Malheureusement,
certains sont plus faibles que d'autres, évidemment, Succomber est le
mot qu'on a mis dans notre document, j'ai aimé qu'on me demande de
l'expliquer parce que c'est le mot "succomber".
M. Charron: D'accord, M. le Président. J'abandonne ce
terrain parce que je pense qu'il y a des gens beaucoup plus qualifiés
que celui qui vous parle pour continuer à l'approfondir. Je vous dis
tout simplement, M. le Président, que je l'avais sou-
levé, parce que le caractère un peu pompeux de certaines
affirmations de la partie patronale, caractère un peu virginal de la
partie patronale dans ce genre d'affaires, avait quand même
chatouillé mon attention.
M. Dion: Ma fille ne me dira pas qu'elle a perdu sa vertu tant
que je ne m'en apercevrai pas.
M. Charron: II y a une autre question, M. Dion, que je veux vous
poser. Elle fait suite aux questions du député de Maisonneuve.
Vous nous avez informés, comme membres de la commission un peu rompus
à ce genre de choses, que la plupart des entrepreneurs, du genre de ceux
que vous représentez ce soir à cette table, fonctionnent à
prix fixe, lorsqu'il s'agit de contrats par lesquels ils s'engagent et qu'ils
signent; que ceux qui fonctionnent à "cost-plus" sont exceptionnels, et
que toute autre méthode est aussi exceptionnelle. La méthode
générale, nous avez-vous dit et affirmé, est celle du prix
fixe. Si je vous demandais, pour la même construction, le même type
d'édifice, que ce soit public, d'après un contrat avec le
gouvernement ou avec une société de la couronne, ou entreprise
d'habitations unifamiliales, par exemple, comme vous nous l'avez fait
remarquer, ou autres grands travaux et routes; encore une fois, c'est public,
me direz-vous s'il y a eu une progression dans les soumissions, est-ce que les
entrepreneurs eux-mêmes, lorsqu'ils soumissionnaient, depuis le 1er mai
1974, n'ont pas prétexté ou utilisé eux-mêmes le
phénomène de l'inflation et de la nécessité de
l'indexation des coûts pour présenter un coût plus
élevé qu'ils ne l'auraient présenté, par exemple,
au 1er mai 1973?
Je vous donne un exemple: Construction uni-familiale. Au 1er mai 1973,
un citoyen du Québec, n'importe qui, serait allé voir un des
entrepreneurs que vous représentez, dans n'importe quelle région
du Québec. Je fais abstraction des régions. Il aurait dit: Moi,
je veux me construire une maison unifamiliale ici, sur le bord de telle avenue,
dans telle municipalité du Québec, j'ai l'intention d'installer
ma famille là-dedans, je veux être propriétaire de ma
maison, j'ai l'intention de bénéficier d'un certain nombre de
dispositions mises à mon avantage par le gouvernement
fédéral et par le gouvernement provincial comme vous
l'avez vous-même noté tout à l'heure combien me
demandes-tu pour bâtir ma maison?
N'est-il pas exact de dire que, dans une soumission pour le même
genre d'édifice, le prix que vous avez soumis, en juillet 1974, à
ce donneur d'ouvrage n'était pas le même que le prix que vous
auriez soumis, la demande vous fût-elle parvenue en juillet 1973? Mais,
devant le fait que le gars, lui, se disait: Mais voyons donc, tu me demandes
bien trop cher, cela n'a pas d'allure, je ne serai jamais capable de me
bâtir une maison comme cela, vous avez vous-même utilisé
comme argument l'inflation, la hausse des coûts et vous avez dit:
Bonhomme, je te l'aurais peut-être bien fait pour tel prix l'année
passée, c'est vrai, mais là, on fait face à une inflation
galopante incroyable. Les matériaux me coûtent tant, ma
main-d'oeuvre me coûte tant, il me faudra mettre autant, de sorte que,
pour la même maison, par exemple, M. le Président je parle
en profane je t'aurais demandé $15,000 l'année
passée, mais je suis obligé, cette année, de t'en demander
$18,000.
L'inflation, M. Dion, comme on nous l'a bien appris, de la part du
gouvernement, c'est un phénomène qui est aussi psychologique
qu'économique, c'est-à-dire que tout le monde se sent
justifié d'invoquer une hausse nécessaire des prix, en se disant:
Tout le monde s'y attend. Et, de fait, un citoyen qui va se présenter
devant un entrepreneur aujourd'hui, au moment où le lait coûte
$0.50 la pinte où tout a augmenté, est plus ou moins surpris
il peut l'être de voir que le gars, lui aussi, a
augmenté ses prix et, dans l'intervalle, a également
augmenté son profit là-dedans.
Autrement dit, n'avez-vous pas invoqué dans vos prix, à la
demande des donneurs d'ouvrage, l'inflation comme étant un
phénomène qui vous obligeait à demander plus que vous ne
l'avez fait? Si vous me répondez par l'affirmative à moins
d'être complètement ignorant, je crois que ce sera à peu
près le contenu de votre réponse croyez-vous que, lorsque
vous invoquiez cette nécessité d'indexer les coûts, parce
qu'il s'agissait d'indexer les coûts à l'inflation, c'était
un problème créé de toutes pièces par les
dirigeants syndicaux, à ce moment, dont vous vous serviez, à
votre tour, face aux donneurs d'ouvrage?
M. Dion: C'est une question réponse, parce que,
dans votre première question, vous avez fait une réponse qui
n'est pas du tout concordante avec celle que je vais vous donner. Je reprends
au départ, en prenant la maison unifamiliale, et je vous cite en exemple
simplement un rapport provenant d'un employeur. Je vous invite, si cela peut
satisfaire la commission, à demander à un employeur de s'asseoir
ici à la table et de vous vérifier certains chiffres qu'on
pourrait vous donner. Je prends le cas d'un entrepreneur en construction
d'habitations de la région de Sherbrooke qui produit, depuis plusieurs
années, certains plans de maisons qui sont absolument réguliers
d'année en année, c'est le même plan de maison. Evidemment,
il fait plusieurs plans de maisons, mais certains plans de maisons sont
reproduits d'année en année. L'exemple que je vais vous donner
couvre la période de 1972 à 1974. L'employeur est obligé,
pour vendre l'entrepreneur et pour vendre sa maison, assurément de
vendre, en 1974, sa maison à un coût passablement plus
élevé, qui peut laisser supposer à certaines personnes
qu'il inclut dans son prix une espèce d'indexation en prévision
de... etc.
Je vous donne certains chiffres. L'entrepreneur, en 1972, sur un plan
déterminé qui s'appelle un plan G-2 je vous donne le
détail qui n'a peut-être pas de signification, mais qui pourra
vous permettre, si vous le jugez à propos, de vérifier
...
Une Voix: LG-2?
M. Dion: Non, pas LG-2, qui est beaucoup plus dispendieux, dont
ce n'est pas le prix final de toute façon. C'est un plan d'une maison
qui a un carré
d'environ 24 x 32, d'un étage et demi, de 912 pieds carrés
de plancher, avec une chambre finie au sous-sol. En 1972, l'entrepreneur en
question a produit 42 de ces maisons. Sur un groupe défini de
travailleurs, qui ne comprend pas par exemple ceux pour les fondations et qui
ne comprend pas les métiers spécialisés, comme la
plomberie, le chauffage, etc., mais simplement sur la base de l'entrepreneur
général, c'est-à-dire charpentiers, menuisiers et
manoeuvres qui travaillent à faire le carré de la maison, 42
maisons, en 1972, ont pris 9,991 heures de travail, donc une moyenne de 237
heures par maison construite. A ce moment-là, le salaire était de
$4.88, jusqu'à une variation de $5.38 l'heure.
En 1973, sur le même plan, identiquement le même plan,
l'entrepreneur a produit 22 maisons, 5,848 heures pour les produire, une
moyenne de 266 heures par maison, alors que le salaire était
passé de $5.65 à $6.19 l'heure.
En 1974, 23 maisons, du même type toujours, 8,082 heures pour 351
heures de travail, en moyenne, par maison. Le taux du salaire était
rendu à $6.32 jusqu'à $6.87 l'heure.
Ecoutez, je suis peut-être prêt à écouter des
gens qui me parlent d'indexation, parce qu'on peut avoir une indexation, mais
je dois vous parler de production, sérieusement. Parce que, si je fais
une comparaison entre 1972 et 1974, je me rends compte qu'il y a presque le
tiers de moins de productivité.
M. Charron: Juste une question, M. Dion. M. Dion: Oui.
M. Charron: Est-ce que la maison coûte la même chose
en 1974 qu'en 1972?
M. Dion: Non, elle ne coûte plus la même chose. C'est
impossible, je ne peux plus la vendre au même prix.
M. Charron: Elle coûte combien de différence?
M. Dion: Je peux vous dire honnêtement que je passe de
$14,500 à $15,600, à $18,900 et peut-être, par
extrapolation, à quelque $20,000 à la toute fin.
Sur un autre plan de maison, si cela peut aider la commission, j'ai un
peu moins de détails sur le deuxième plan mais on pourra
compléter au besoin; en 1972,huit maisons sont produites selon un plan
qui s'appelle G-5, de 24 x 38, de 912 pieds carrés, toujours dans la
région de Sherbrooke. Huit maisons pour 1,396 heures, soit 174 heures
par maison, en moyenne, au taux de $4.88 à $5.38, toujours. En 1973,sept
maisons pour 1,901 heures de travail, 272 heures en moyenne de travail sur
chacune des maisons. En 1974, treize maisons, 3,875 heures de travail pour 298
heures par maison. Si on compare 1972 à 1974, vous passez de 174 heures,
pour construire la maison, à 298 heures. Ou il y a moins de
compétence, ou il y a moins de productivité. Mais une chose est
sûre et certaine, c'est que la maison coûte plus cher. Elle
coûte plus cher en plus pour ceci: Si, hier, cela me coûtait, pour
une barre d'acier, X, aujourd'hui elle me coûte deux fois et trois fois
le prix. Je n'ai même pas la garantie de la livraison. Je commande et, au
moment où je commande, je ne sais pas combien elle va coûter
lorsqu'elle va être livrée. Cela est comme ça pour tous les
matériaux de construction. Je n'ai pas de cour... Je dois vous dire que
je suis avocat, je suis loin d'être un constructeur.
Mais je pense qu'à l'heure actuelle, les matériaux de
construction ont subi des hausses telles que seulement les hausses de
matériaux de construction justifient tous les changements ou les
augmentations de prix qu'on peut trouver dans l'industrie de la
construction.
Je finis toujours de la même façon. Il y en a
peut-être quelques-uns qui ont prévu X cents. Ecoutez! Il y en a
peut-être, mais il y a surtout des gars qui sont obligés de suivre
l'évolution des coûts de matériaux de construction,
l'évolution de la productivité. Je n'irais pas poser des
questions. Je laisserai le soin aux gars de Montréal de parler de la
production à la place Desjardins. A un certain moment, il faudra
peut-être se poser de nombreuses questions: Combien cela prendrait
d'heures normalement, et combien cela va en prendre?
Le plus honnêtement possible, je suis obligé de vous
répondre que, selon les démonstrations qu'on a, et si cela peut
rendre service à la commission, je n'ai aucune objection à nommer
l'entrepreneur. Il s'est dit prêt à vous démontrer beaucoup
plus précisément ce qui a été lu ici.
Effectivement, je le regrette, mais le fait que vous me posiez des questions,
cela m'amène à prendre la place des mémoires d'autres
parties. Cela me met mal à l'aise un peu. Mais en tout cas, je pense que
c'était essentiel de faire voir au public, à l'heure actuelle,
qu'il ne faut quand même pas... C'est facile de dire: Vous savez, les
gens l'ont prévue, ils la mettent dans leur poche, ils font de gros
profits. Je pense que si les gens de la commission parlementaire
s'arrêtent cinq minutes... Je sais qu'à la commission
parlementaire, il y a des membres qui sont d'anciens entrepreneurs en
construction qui savent, aujourd'hui, quelle est la marge de profit d'une
entreprise en construction. Il y a peut-être eu des temps où les
gens faisaient 15%, 18% et 20%. Mais je vous dis qu'aujourd'hui la marge de
profit des entrepreneurs en construction... Ecoutez! Il y en a qui ont
préféré devenir députés, même des
professeurs...
Une Voix: ... n'ai pas droit de parole!
M. Cournoyer: Seulement une question complémentaire, M. le
Président.
M. Dion: Je ne veux pas que cela fasse partie de mes propos
à la commission.
M. Cournoyer: Quand vous passez de 174 heures à 298
heures, j'imagine que c'est pour le même genre de maison, le même
cubage, la même surface en pieds carrés? C'est le même
modèle.
Est-ce que les entrepreneurs qui vous ont donné ces
renseignements vous ont indiqué quelles étaient les causes de
cette diminution? Parce qu'on
peut parler d'indexation, on peut en parler beaucoup, mais par ailleurs,
vous avez établi, je pense bien, par l'exemple que vous avez
donné, une diminution assez marquée de la production,
indépendamment des coûts horaires. Parce que, si je comprends
bien, malgré tout, la maison ne semble pas avoir augmenté par les
coûts horaires que vous avez mentionnés tantôt. Cette
diminution des coûts horaires dans le résidentiel en particulier,
c'est-à-dire cette diminution de productivité de 174 heures
à 298 heures pour la même maison serait due à quoi, selon
l'entrepreneur en question?
M. Dion: Je préférerais de beaucoup quand
même que la question puisse être posée à
l'entrepreneur qui a fourni les chiffres, mais je me fais le porte-parole de
son interprétation. Il y a un problème j'ai voulu le
souligner tantôt de compétence, il y a un problème
de productivité. Les deux concourent à provoquer une augmentation
aussi sensible des taux horaires nécessaires pour la construction.
M. Cournoyer: M. Dion, j'aimerais, par exemple, rappelerque l'une
des causes affirmées en public de la diminution de productivité,
c'étaient les délégués de chantier. Là
où vous m'arrivez, c'est dans le domaine résidentiel. J'aurais
pensé que les délégués de chantiers avaient
beaucoup plus d'influence dans le domaine industriel que dans le domaine
résidentiel. Est-ce que, dans l'analyse des coûts
différents, par rapport à la somme d'heures requises pour
construire la même maison, on peut mettre le blâme sur les
délégués de chantiers dans le cas du
résidentiel?
M. Dion: Vous connaissez le problème comme ministre du
Travail. Vous savez fort bien que les délégués de chantier
dans l'industrie domiciliaire sont quand même assez rares.
M. Cournoyer: Bon! Mais...
M. Dion: Je dois dire quand même qu'il y a des
problèmes...
M. Cournoyer: ... qu'est-ce qui cause...
M. Dion:... de délégués de chantiers qui ne
sont peut-être pas dans le domaine domiciliaire, du moins sur la base,
peut-être, des...
M. Cournoyer: M. Dion, l'augmentation du coût horaire. Si,
par exemple, il avait été possible d'augmenter le coût
horaire pour arriver à des proportions ordinaires, c'est-à-dire,
qu'on tiendrait compte du coût de la vie; enfin, dans la formule que vous
n'acceptez pas.
Supposons qu'il y ait des syndicats et des individus qui
prétendent qu'ils ont perdu du pouvoir d'achat, si on était
maintenu à 174 heures, est-ce qu'on ne peut pas prétendre que
cela aurait coûté moins cher que 298 heures, pour mettre la
même chose?
M. Dion: C'est évident.
M. Cournoyer: Mais qu'est-ce qui aurait pu causer, par exemple,
cette augmentation dans le résidentiel? Comme je vous l'ai dit
tantôt, je croyais enfin, je croyais, il faut s'entendre sur les
mots "je croyais" que dans le domaine résidentiel, les
délégués de chantier, comme vous l'avez affirmé, ce
n'est peut-être pas là qu'ils ont une influence la plus
marquée pour réduire les taux ou réduire la
productivité, mais dans ce domaine, on est quand même
passé, dans l'exemple que vous donnez, de 174 heures, pour une
construction donnée, à 298 heures. Est-ce qu'il y a une raison,
par exemple? Est-ce parce que les employés travaillent moins? Qu'est-ce
qui aurait été donné comme exemple? Vous avez donné
cet exemple vous-mêmes. De 174 heures, on est passé à 298
heures. Qu'est-ce qui a causé ce passage de 174 à 298, en une
période aussi courte que celle-là?
M. Dion: Je ne sais pas si vous avez de la difficulté
à m'entendre comme j'en ai à vous entendre, parce qu'on jase;
mais j'ai répondu tantôt que, selon l'interprétation de
l'entrepreneur, il y a une baisse de compétence. Cela prend plus de
temps à faire le même ouvrage. Il y a une baisse de
productivité. Ce sont les deux motifs qui ont contribué à
faire de 174 heures, 280 heures environ.
Il faut quand même dire aussi ceci; c'est que même s'il n'y
a pas de délégué de chantier d'une façon aussi
répétée dans l'industrie domiciliaire que dans l'ind
ustrielle, il y a quand même la présence de représentants
syndicaux, qui peut avoir une certaine influence. Mais écoutez, je ne
veux pas, pour l'instant et vous allez me le permettre, je suppose
empiéter trop sur le champ de l'habitation. J'ai tout simplement
voulu illustrer parce qu'on avait pris l'exemple d'une construction
familiale par des chiffres une raison qui pourrait être plus
longuement explicitée, j'ai voulu expliquer les raisons qui font qu'une
maison peut passer de $15,000 à $20,000 en l'espace de deux ans. Je dois
vous dire quand même que la société ou l'Association de
l'habitation pourrait possiblement vous illustrer, avec des chiffres
peut-être beaucoup plus précis, le problème tel quel.
M. Cournoyer: Moi, ce qui m'a surpris un peu, c'est que de 174
heures on passe à 298 heures. Baisse de compétence, avez-vous
dit.
M. Dion: Est-ce que la commission serait d'accord pour entendre
l'employeur?
M. Cournoyer: Ce serait extrêmement difficile, à ce
moment-ci, M. Dion. Ce n'est pas parce que je refuse d'entendre les individus
qui y sont intimement reliés, mais il arrive que vous ête.s le
représentant de l'association la plus représentative du
côté patronal et, en conséquence, vous avez...
M. Dion: On s'était parlé au début de la
séance...
M. Cournoyer:... l'odieux et le fardeau de faire ce que vous avez
à faire. Vous avez affirmé au député de
Saint-Jacques, tantôt, que c'était passé de
174 heures à 298 heures. Cela m'intéresse. Je ne veux pas
en dire davantage. Il s'agit, bien sûr, du carré de la maison. On
ne prend pas en considération la plomberie, le chauffage et, j'imagine,
l'électricité non plus, qui n'est pas incluse là-dedans.
Il s'agit des menuisiers et des maçons.
M. Dion: Disons les menuisiers...
M. Cournoyer: Strictement l'entrepreneur
général.
M. Dion: ... manoeuvres, en gros.
M. Cournoyer: Mais la construction des coûts...
c'est-à-dire la composition des coûts va plus loin que les seules
préoccupations de l'entrepreneur général dans le domaine
résidentiel, comme dans le domaine industriel et le coût final de
la maison dont vous avez parlé tantôt est quand même
construit par l'électricité ou ce qu'on peut appeler, vous et
moi, la mécanique, les métiers mécaniques. Quelle est la
proportion des coûts des métiers mécaniques dans ce que
vous avez dit tantôt?
M. Dion: M. le ministre, je pense que vous m'amenez
réellement à être obligé de discuter du
problème très spécifique d'une construction familiale. Je
dois et, malheureusement, cela...
M. Cournoyer: Vous déclinez.
M. Dion: Je dois céder le micro à des
spécialistes en habitation, pour deux raisons. D'abord, parce que je ne
veux pas prendre... et cela, je pense, doit être une
sécurité pour vous, de la commission, je me refuse à
parler de choses que je ne connais pas. Alors je vous dis qu'à ce jour,
c'est quand même une sécurité. J'ai essayé de parler
de choses que je connaissais. Si vous voulez bien poser la même question
aux gens de l'habitation, ils vont vous répondre.
M. Cournoyer: Aux représentants de l'habitation.
M. Dion: J'ai de la misère à vous comprendre, c'est
effrayant!
M. Cournoyer: Je conviens que la même question peut
être posée aux représentants de l'habitation.
M. Dion: Oui, je pense qu'ils vous répondront. On a
essayé de me donner le tuyau, comme on dit dans la construction.
M. Cournoyer: Ils n'étaient pas capables de vous donner
cela discrètement.
M. Dion: ... mais je préférerais que ce soit eux
qui vous donnent l'explication. Je pense que le tout est justifiable.
M. Cournoyer: Très bien. M. le Président, c'est
très bien. Je pense que vous avez raison, M. Dion.
Le Président (M. Séguin): La commission
reconnaît certainement la réserve que vous apportez.
M. Dion: Je pense que c'est de l'honnêteté pour
vous.
Le Président (M. Séguin): Me Dion, nous vous
remercions beaucoup de vos explications.
M. Burns: Est-ce que je peux poser une dernière question,
M. le Président, une dernière brève?
Le Président (M. Séguin): Allez-y. Le
député de Maisonneuve.
M. Burns: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Séguin): Je ne vous remercie pas
tout de suite, Me Dion, attendez.
M. Burns: On a parlé de compétence ou de
non-compétence de certains employés dans le domaine de la
construction par vos derniers chiffres que vous avez cités. Est-ce que
votre fédération a examiné également, sinon la
compétence, du moins la solvabilité douteuse d'un certain nombre
d'entrepreneurs dans le domaine de la construction et, entre autres, ceux qui
ne paient pas, par exemple, ce qui doit être payé à la
Commission de l'industrie de la construction, que ce soit au niveau des
vacances ou au niveau de tous les autres bénéfices? Est-ce
qu'également vous vous êtes occupés de cet aspect et est-ce
que vous avez pu pondérer, d'un côté comme de l'autre, ces
deux aspects? Est-ce que vous avez examiné cela?
M. Dion: La question est excellente. Je pense qu'elle a
peut-être des relations avec le problème qu'on étudie
à l'heure actuelle. C'est évident qu'on est dans l'entreprise
privée, dans une entreprise où les gens cherchent à vivre
et à faire un profit dans l'industrie de la construction. On n'a pas,
actuellement, dans l'industrie de la construction, de législation qui
nous permette je ne dirais pas de sélectionner parce que c'est
peut-être aller beaucoup trop loin mais qui évite et qui
peut éviter qu'une personne qui n'a pas la compétence sur tous
les plans techniques, solvabilité administrative, on n'a pas dans
l'industrie de la construction une législation qui nous permette de
faire, je reviens au mot "sélection" parce que quand même c'est
celui qui me vient à l'esprit à l'heure actuelle. N'importe qui,
demain matin, devient entrepreneur en construction. Je suis obligé quand
même de vous avouer que, d'une part, devant les prétentions des
parties syndicales a savoir qu'il y a des employeurs qui ne sont pas bons dans
l'industrie de la construction, on peut facilement se défendre en
attaquant le principe que nous n'avons pasde législation pour
régulariser la situation. D'un autre côté, nous disons
quand même depuis douze ans, et ceci a débuté avec monsieur
le ministre du Travail alors qu'il était à l'emploi des parties
patronales, on a commencé par demander une loi de qualification des
entrepreneurs. J'au-
rais aimé qu'il entende parce que quand même cela devenait
des félicitations...
M. Burns: Est-ce qu'il y a moyen...
M. Dion: Je faisais remarquer avec plaisir, M. le ministre du
Travail, que nous, de l'industrie de la construction, du côté
patronal depuis plus de douze ans, nous demandons dans l'industrie de la
construction une qualification des entrepreneurs. Je faisais remarquer que M.
le ministre du Travail, alors qu'il était à l'emploi des parties
patronales, était un de ceux qui avaient écrit un mémoire
disant que c'était la solution pour empêcher des entrepreneurs non
solvables et non capables administrativement et ayant une absence ou une
carence technique de venir dans l'industrie de la construction. Je n'ai rien
contre les barbiers, mais le barbier du coin de la rue chez nous peut
être entrepreneur en construction demain matin, sans aucune
compétence technique, sans aucune solvabilité. Je vais vous dire
que ce n'est pas la première fois qu'on revient sur le sujet. On sait
aussi que les parties syndicales l'ont demandé, peut-être pour
d'autres motifs que les nôtres, mais nous le demandons quand même
pour la protection du public. On l'a toujours demandé pour la protection
du public. Cela fait sourire certaines personnes parce qu'elles disent aussi
pour la bonne concurrence. Evidemment, pour une concurrence saine, qui est une
protection du public aussi, nous avons demandé une loi de qualification
des entrepreneurs.
Je vous dis, que, si la question pouvait s'éloigner à un
certain point de l'indexation, elle ne s'éloigne aucunement des conflits
actuels. Parce que je pense que cela fait partie du conflit actuel.
M. Burns: Justement, c'est ce pourquoi je vous posais la
question, M. Dion. Je vous remercie de votre franchise habituelle, d'ailleurs,
dans vos réponses. Mais, depuis le moment où différents
ministres, les uns après les autres, ont commencé à lancer
le ballon de la non-productivité des travailleurs de la construction,
est-ce que vous ne croyez pas, vous, M. Dion je vous demande de me
répondre avec la même franchise que ces entrepreneurs qui,
à toutes fins pratiques, ne devraient peut-être pas être
entrepreneurs dans le domaine de la construction, ce n'est pas aussi un des
éléments de non-productivité dans le domaine de la
construction?
M. Dion: Ecoutez, c'est parce que...
M. Burns: Si oui, je vous demande si vous êtes en mesure de
nous dire si vous avez fait une étude aussi exhaustive là-dessus
que sur la non-productivité des travailleurs. Parce que, depuis qu'on
parle de non-productivité, c'est toujours sur le dos des travailleurs
qu'on a mis ça. Quand je m'aperçois qu'il y a des gars qui ne
sont même pas capables d'assumer leurs obligations vis-à-vis de la
CIC, vis-à-vis d'engagements qu'ils ont pris pour les vacances de leurs
travailleurs et quand je vois que vous êtes obligés, vous autres
quand je dis vous autres, je parle des entrepreneurs sérieux
d'aller combler certaines lacunes, certaines déficiences
financières, je me pose de très sérieuses questions aussi
sur l'impact que peuvent avoir les espèces d'entrepreneurs bidons qui
sont actuellement dans le domaine et qui peuvent, vous l'avouerez, M. Dion,
avoir leur effet sur la non-productivité alléguée, surtout
depuis quelque temps, par certains ministres, parce que cela pouvait aider
certaines lois.
M. Dion: Ecoutez. Relier le problème de la
non-productivité avec le problème d'employeurs que vous appelez
bidons, que nous appelons chaudrons, je pense qu'il y a quand même une
nuance à faire. Si un entrepreneur, en 1972, a la compétence de
faire produire par ses hommes, une maison de 900 pieds carrés en 174
heures, il faudrait quand même me donner passablement de preuves pour
démontrer que ce gars est incompétent en 1974, parce qu'il ne
peut plus les faire produire en 174 heures. Cet entrepreneur a quand même
fait ses preuves, il a prouvé qu'il était capable de produire, de
rester sur le marché parce qu'il respecte ses obligations. Si, à
côté de cet entrepreneur qui fait une maison de 912 pieds pour
$20,000, j'en avais un autre, un bidon ou chaudron, comme vous voulez, qui,
parce qu'il ne connaît rien dans la construction, fait une même
construction à $22,000, je vais vous suivre. Evidemment, le gars manque
de quelque chose; il manque de direction de son personnel, il manque de
technique, il manque peut-être de connaissances administratives. Mais
l'évolution de la production des employés d'un même
entrepreneur, je pense que ça ne concorde pas.
A l'heure actuelle, le problème de la compétence chez nous
il y a la productivité évidemment aussi se situe au
point suivant: depuis quelques années, on est devant une loi qui
s'appelle le bill 49 dans l'industrie de la construction; on est sujet à
cette loi générale. Comme la loi générale n'a pas
été acceptée par l'industrie en général,
ceux qui voudraient en bénéficier sont handicapés,
à l'heure actuelle, et sérieusement handicapés. On n'est
pas placé à l'heure actuelle comme on pouvait même
l'être il y a X années, avant le bill 49, pour former notre
main-d'oeuvre compétente. On a des centres d'apprentissage qui sont
pratiquement, à l'heure actuelle, utilisés pour faire couper de
la viande ou des choses comme ça, mais on n'est presque plus capable de
former réellement de la main-d'oeuvre compétente dans l'industrie
de la construction ou d'en former en quantité suffisante.
Il y a deux choses; vous pouvez former de la main-d'oeuvre
compétente, parce que vous enseignez bien et vous pouvez former une
certaine quantité de main-d'oeuvre qui provoque, par la
compétition entre les gens, une recherche de compétence. Je pense
que les deux se provoquent.
On doit vous dire qu'on se trouve actuellement devant le problème
d'une loi, comme toutes les lois il ne faut pas être
méchants la loi 290 et la loi 49, qui avaient peut-être
quand même pour but de régler, de faire une bonne situation mais
qui est devenue totalement inopérante. Pour nous, de l'industrie de la
construction, c'est réellement une si-
tuation pire que ce qu'on a pu jamais connaître lorsque les
parties administraient elles-mêmes leur formation de main-d'oeuvre. On
est moins bien servi qu'on ne l'était.
On n'est pas ici pour dire: C'est la faute de monsieur X ou la faute de
monsieur Y. Mais c'est la situation. La faute de monsieur Y, c'est qu'on essaie
de lui dire de l'amender et on veut qu'il l'amende; il faudrait peut-être
qu'il comprenne cela. C'est seulement cela sa faute. La loi n'est pas mauvaise
parce qu'il s'appelle monsieur X; la loi est mauvaise à l'heure actuelle
parce qu'on ne peut pas l'utiliser. On demande de rendre la loi 49 sectorielle,
c'est-à-dire de permettre à une industrie qui veut s'en servir de
ne pas dépendre de l'industrie en général pour pouvoir
s'en servir.
Actuellement, si je veux faire quelque chose avec la loi 49, je
dépends de l'alimentation, des coiffeurs, des gens de l'automobile et je
dépends de tout le monde. Si les autres gars ne veulent plus marcher, je
ne peux plus marcher. J'ai des commissions de formation plus ou moins
effectives, j'ai un organigramme de formation plus ou moins effectif et le tout
ne marche pas bien. En tout cas, au minimum, cela marche moins bien
qu'avant.
Pour nous, la réaction des employeurs, c'est qu'on a moins de
main-d'oeuvre et la main-d'oeuvre est moins bien formée qu'avant. C'est
un problème. Je vous le transmets aussi honnêtement que les
employeurs nous le soumettent. On a des problèmes de main-d'oeuvre.
Le Président (M. Séguin): A nouveau, merci.
M. Dion: Je remercie infiniment la commission et surtout
l'assistance. A un moment donné, on pourra craindre de se voir devant
des situations difficiles. Tout le monde a coopéré, je vous en
remercie infiniment.
Le Président (M. Séguin): Merci beaucoup. Nous
entendrons immédiatement la Fédération des travailleurs du
Québec. Le ou les représentants de la Fédération
des travailleurs du Québec. Voulez-vous, s'il vous plaît, prendre
la place de...
Fédération des travailleurs du
Québec
M. Daoust (Fernand): Ici, cela peut aller, tous mes papiers sont
ici. Cela ne me dérange pas. Cela va ici?
Le Président (M. Séguin): Si cela fait votre
affaire, oui.
M. Daoust: M. le Président, je ne veux pas relever toutes
et chacune des affirmations et déclarations de M. Dion. Il y a des
endroits où nous aurons l'occasion de le faire et nous le ferons
sûrement.
Par ailleurs...
Le Président (M. Séguin): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. Daoust: ...il y a une déclaration qui n'est pas de M.
Dion...
Le Président (M. Séguin): Pour le journal des
Débats, voulez-vous, s'il vous plaît, vous nommer?
M. Daoust: Fernand Daoust.
Le Président (M. Séguin): Merci. Excusez-moi.
M. Daoust: II y a une déclaration qui n'est pas de M.
Dion, mais plutôt du front commun patronal et qui justifie, de ma part,
certains commentaires. Je vais la lire, je ne suis pas le premier à
l'avoir sou levée et je la commenterai par la suite.
On la retrouve à la première page du document que nous a
lu, au tout début de son intervention, M. Dion. "L'indexation est un
problème créé de toutes pièces par les dirigeants
syndicaux et elle est l'occasion d'une nouvelle démonstration de force
contre les employeurs et même contre l'autorité gouvernementale.
"Ceci ne nous surprend pas outre mesure, surtout si nous nous souvenons des
déclarations des chefs syndicaux manifestant leur volonté de
renverser le pouvoir ou encore incitant les travailleurs à violer les
lois".
On trouve dans cette déclaration de principe, M. le
Président, l'idéologie des associations patronales dans le
secteur de la construction. Alors qu'un bon nombre des économies
occidentales vacillent sous le poids de l'inflation, alors que le
président des Etats-Unis s'arrache le peu de cheveux qui lui restent
pour trouver des remèdes à l'inflation, alors que c'est le sujet
des conversations quotidiennes dans tous les milieux, milieux d'affaires,
milieux syndicaux, voilà que le front commun patronal nous accuse d'une
vaste conspiration, prétend qu'on a quasiment inventé de toutes
pièces le problème de l'indexation, nous assimile à des
gens qui veulent renverser le pouvoir et est sur le point de mentionner que la
FTQ-construction, au-delà de toutes les épi-thètes qu'on
connaît à notre égard, serait infiltrée par des
marxistes, des léninistes et des maoïstes.
C'est peut-être ce qui fait qu'on est ici devant vous, ce soir,
c'est que ces gens ont systématiquement, depuis le début,
refusé tout dialogue, afin de trouver une solution au grave
problème de l'inflation dont les travailleurs sont les premières
victimes.
Ce n'est pas d'aujourd'hui qu'on parle du problème de l'inflation
au Québec et ce n'est pas seulement le secteur FTQ construction qui l'a
abordé. Il ne serait peut-être pas mauvais de faire un bref
historique de cette lutte de l'indexation.
Mentionnons d'abord la participation de la FTQ construction au colloque
des trois centrales sur le problème de l'indexation des salaires au
Québec, colloque qui eut lieu ici même dans la ville de
Québec, à la fin du mois de mars. Par la suite, il y a eu une
consultation des agents et des gérants d'affaires de tous les syndicats
affiliés à la FTQ construction. Ceci a été suivi
d'une consultation des membres, à l'occasion d'assemblées, dans
la région métropolitaine. Par la suite, il y a eu
rédaction d'une convocation et formulation de la demande syndicale.
Ont
accompagné ces diverses consultations, d'autres consultations au
niveau des centres éloignés. Le 30 mai dernier, il y avait une
première rencontre avec les employeurs au Ramada Inn. Cela a
été un échec, rencontre au cours de laquelle la FTQ
Construction a présenté ses demandes dans le domaine de
l'indexation des salaires. Début juin, première revendication des
travailleurs sur certains gros chantiers, ralentissement, lock-out, 15,000
travailleurs sont.mis à pied. Par la suite, intensification des
revendications, fermeture de certains gros chantiers, échec et tout cela
c'est un peu la chronologie des événements de
l'intervention du conciliateur du ministère du Travail, Yvon Dansereau,
et création du front commun patronal qui s'est soldé par un refus
de négocier des employeurs et la fermeture de certains chantiers. Par la
suite, réouverture des chantiers et reprise du travail, le 26 juin.
Devant le refus des associations patronales a négocier, il y a eu des
conclusions d'ententes entre certains syndicats et certains employeurs pour
l'obtention de compensations financières. Cette dernière pratique
s'est intensifiée, au cours des mois d'août et de septembre. Et la
situation est redevenue normale sur la plupart des gros chantiers.
Il y a eu par ailleurs des perturbations sur d'autres chantiers,
à cause du mécontentement des travailleurs qui n'ont pas
bénéficié de ces ententes d'indexation. Et la situation
aété quelque peu chaotique. Fin novembre, débrayage des
ferrailleurs. Ces derniers ont réclamé ce que d'autres
travailleurs avaient déjà obtenu. Début décembre,
à la suite de ce débrayage des ferrailleurs, discrète
intervention du ministère et convocation par la FTQ d'une rencontre avec
les employeurs. Le 16 décembre, nouvel échec, les patrons
refusent de s'y rendre. Enfin, le 20 décembre, le ministère
convoque les parties à une rencontre; les employeurs opposent un non
catégorique à toute forme d'indexation. Le même jour, le
ministre du Travail et de la Main-d'Oeuvre, M. Cour-noyer, déposait le
projet de loi no 201, qui était sanctionné le 24
décembre.
A l'égard de ce projet de loi, M. le Président, nos vues
sont connues. Nous n'avons jamais souhaité une intervention
gouvernementale. Nous aurions préféré pouvoir
réglé le problème au niveau des parties. Il aurait
toutefois fallu et nous l'avons répété à
satiété que les associations patronales cessent de jouer
au jeu de l'autruche et manifestent un grand réalisme à
l'égard du problème de l'inflation et de l'indexation des
salaires.
La FTQ l'a toujours dit publiquement, 70% de ses membres à
travers le Québec ont obtenu, tout au cours de cette bataille autour du
problème de l'inflation, cette bataille de l'indexation, des
augmentations de salaire de $0.50 l'heure pour 1974, avec des engagements de
$0.25 l'heure, à compter de janvier 1975 et des engagements de
même type pour un montant identique, à compter de janvier
1976.
C'est donc, un peu et plus qu'un peu, la réalité dans
laquelle nous sommes plongés.
Je vais maintenant vous lire et commenter, avec certains de mes
collègues, le mémoire que nous avons fait distribuer ou qui va
vous être distribué dans quelques instants. C'est fait.
La FTQ construction demande que les travailleurs de la construction
n'aient pas à supporter seuls le fardeau d'une inflation dont ils ne
sont pas responsables. Notre exigence est d'obtenir $0.50 d'indexation à
partir de mai 1974, $0.25 en janvier 1975 et $0.25 en janvier 1976. Cette
indexation doit couvrir tous les travailleurs de la construction au
Québec.
Nous allons vous démontrer la justesse de notre revendication
dans ce document. 1. Le salaire moyen: $5 l'heure. Nous utilisons comme base de
calcul de l'évolution du salaire des travailleurs de la construction un
salaire moyen de $5 en avril 1973. Ce salaire moyen est établi à
partir des données sur les heures travaillées et la
rémunération salariale totale pour l'année 1973, telles
qu'établies par les études de la Commission de l'industrie et de
la construction. La méthode du calcul du salaire moyen est
présentée à l'annexe I.
Je ne pense pas que j'aie à vous lire cette annexe, vous pourrez
la consulter. 2. L'indice des prix de Montréal. Nous avons établi
nos calculs sur l'indice des prix à la consommation de Montréal.
C'est l'indice de référence le plus fréquemment
utilisé par les unités provinciales de négociation. Bien
que l'indice de Montréal ait eu tendance à augmenter moins
rapidement que celui de Québec depuis 1970, cet écart entre les
principaux indices du Québec ne justifie pas la nécessité
d'utiliser deux indices et ceci compte tenu de la forte concentration des
travailleurs dans la région métropolitaine de Montréal.
3.Période de référence: avril 1973. Pour évaluer
l'évolution du salaire réel, c'est-à-dire du pouvoir
d'achat que les travailleurs obtiennent avec leur chèque de paie, il
convient de déterminer une période de référence.
Cette période de référence correspond au salaire et
à l'indice des prix existants du mois précédant
l'entrée en vigueur des nouvelles conditions salariales,
c'est-à-dire avril 1973. C'est à partir de cette période
de référence qu'on établit l'inflation survenue et
à venir durant le décret et la dévaluation du salaire
nominal, c'est-à-dire celui qui apparaît sur le chèque de
paie. 4. Evolution du salaire moyen: $5 à $6.56. Le salaire moyen de la
construction de $5 en avril 1973 augmentera successivement à $6.56 pour
la dernière période du décret. Au graphique I, nous avons
tracé l'évolution du salaire moyen selon les augmentations de
$0.51 en mai 1973, en pourcentage, 10.2%; $0.50 en mai 1974, en pourcentage,
9.1%; $0.35 en mai 1975, en pourcentage, 5.8%, et $0.20 en octobre 1975, en
pourcentage, 3.1%; soit une augmentation de $1.56 ou de 28.2% pour la
durée du décret.
Vous avez le tableau, à la page suivante, qui décrit un
peu ce que je viens de vous lire à la page 2 du document. 5.Contexte
inflationniste de négociation et prévision d'inflation. Comme on
le constate dans le tableau qui suit, le taux annuel d'augmentation de
l'inflation dans les quatre premiers mois correspondants de 1972 se situait
entre 4% et 5%. C'est donc dire que, dans le contexte inflationniste des
négociations du présent décret, les prévisions
d'inflation
de 5% semblaient réalistes pour les négociateurs syndicaux
et c'est une amélioration des conditions de vie (salaire réel) de
5% qui fut recherchée par l'augmentation de 10% des salaires.
Vous avez la croissance du taux d'inflation par rapport aux douze mois
précédents et selon l'indice de Montréal. Je ne vous lis
pas ces chiffres, vous pouvez les consulter.
La prévision d'inflation que l'on peut faire maintenant pour le
reste de la période que doit couvrir le présent décret est
de 11.5%.
Cette prévision est établie à partir de la moyenne
des taux annuels de croissance de l'inflation de mai 1974 à novembre
1974. Ces taux annuels d'inflation sont donnés dans le tableau
ci-haut.
En projetante partir de décembre 1974 un taux d'inflation de
11.5%, ceci nous permettra de préciser jusqu'à la fin du
décret l'évolution du salaire réel moyen de la
construction. 6. Evolution du salaire réel, c'est-à-dire du
pouvoir d'achat. Nous avons établi l'évolution du salaire
réel de la construction, de façon précise, jusqu'en
novembre 1974, et nous avons projeté au taux d'inflation de 11.5%
l'évolution du salaire réel selon la méthode que nous
venons de présenter.
On observe entre autres que la première augmentation de $0.51 fut
entièrement rongée par l'inflation en avril 1974, alors que le
salaire réel avait diminué à $4.98, d'où la demande
immédiate de $0.50 d'indexation; à partir de juillet 1975 et pour
le reste de la durée du décret, le salaire réel sera
inférieur à $5.00, soit le salaire moyen antérieur au
décret.
Ceci est établi dans le graphique qui suit, à la page
suivante. Il y a une note qui indique la formule que nous avons utilisée
pour établir le salaire réel. Le salaire réel, c'est la
ligne qui n'est pas brisée, la dernière ligne. Elle est
déclinante, comme on le voit, alors que le salaire actuel figure sur la
ligne brisée, et on atteint le montant de $6.56.
Le tableau II constitue l'évolution de l'indice des prix de
Montréal, du salaire nominal et du salaire réel des travailleurs
de la construction selon l'hypothèse d'une inflation à 11.5%.
L'objectif salarial pour la durée du décret. Le contexte
inflationniste durant les dernières négociations du
décret, la volonté des parties d'améliorer le niveau de
vie des travailleurs de la construction et la nécessité de
conserver dans l'industrie des travailleurs compétents et
qualifiés sont les principaux facteurs qui ont concouru à fixer
un rythme de croissance d'amélioration du niveau de vie des
travailleurs. Ce rythme est estimé à 5% par année, l'autre
partie de l'augmentation salariale (5%) étant destinée à
couvrir l'inflation.
Les travailleurs des régions à l'extérieur de
Montréal qui ont connu des augmentations supérieures à 10%
ne peuvent être traités différemment. C'est entre autres,
depuis l'adoption du bill 290 en 1968 que l'objectif social de la parité
salariale fut recherché par toutes les parties. La parité
salariale qui sera atteinte à la fin du présent décret est
une opération qui a consisté à redonner aux travailleurs
de la province un pouvoir d'achat et un niveau de vie qu'ils avaient
graduellement perdus au cours des années antérieures. Ce serait
répéter une injustice sociale que de remettre en cause cet
acquis. Le rattrapage visait à compenser une perte antérieure et
accumulée et ne peut, en aucun cas, à ce moment-ci, être
interprété ni utilisé comme une prévision pour
protéger une perte future du pouvoir d'achat, sant: Vous êtes bien
fins de nous avoir
Dans le graphique III, nous présentons l'objectif salarial de 5%
par an pour le présent décret. C'est ainsi qu'il ressort que le
salaire réel ou le pouvoir d'achat recherché était de
$5.25 pour la première année du décret, de $5.51 pour la
seconde, de $5.67 et de $5.75 pour la troisième année.
On remarque dans le graphique précédent, qu'à
partir de septembre 1973, le salaire réel touché par les
travailleurs est inférieur au salaire recherché pour
l'amélioration du niveau de vie et ce, jusqu'à la fin du
décret; qu'à la fin du décret, l'écart entre
l'objectif salarial de $5.75 et le salaire réel de $4.70 sera de
$1.05.
C'est avec cet objectif salarial et le salaire réel que touchent
les travailleurs de la construction que nous pourrons déterminer
l'indexation requise pour préserver l'amélioration du niveau de
5% par an.
L'indexation requise consiste à combler l'écart entre
l'objectif salarial et le salaire réel. Pour déterminer le
montant d'indexation requis pour conserver l'objectif salarial de 5%, il suffit
de calculer la différence existant entre cet objectif salarial et le
salaire réel (pouvoir d'achat) que reçoivent les travailleurs de
la construction. En déterminant le salaire réel moyen et
l'objectif salarial moyen, nous obtiendrons le montant d'indexation requis pour
la période concernée.
A) Salaire réel moyen:
Mai 1973 à avril 1974: $5.20
Mai 1974 à décembre 1974: $5.19
Janvier 1975 à décembre 1975: $4.95
Janvier 1976 à avril 1976: $4.77
Pour chacune des périodes déterminées, ce sont donc
respectivement et pour la pleine période, $0.05, $0.32, $0.68 et $0.98
qui sont requis pour préserver l'objectif salarial d'amélioration
du niveau de vie de 5%. Voyons comment on peut répartir
différemment durant le décret ces montants d'indexation requis.
9.Pondération de l'écart entre l'objectif salarial moyen et le
salaire réel moyen pour la durée du décret.
La pondération des écarts nous permet de déterminer
un montant uniforme d'indexation pour toute la durée du décret.
Nous établissons cette première pondération pour pouvoir
la comparer à celle de notre demande d'indexation. Cette comparaison
nous permettra d'établir la justesse de notre revendication.
Calcul de la pondération des écarts: 1. $0.05 par 36 mois:
$1.80 2. $0.32 par 24 mois: $7.68 3. $0.68 par 16 mois: $10.88 4.$0.98 par 4
mois: $3.92
Total: $24.28, divisé par 36 mois: $0.67 Ce sont donc $0.67 pour
toute la durée du décret qui sont nécessaires pour
maintenir l'amélioration du niveau de vie de 5% recherchée par
les parties lors des dernières négociations. 10. Notre demande
d'indexation est juste.
Nous demandions que les travailleurs de la construction, au
Québec, obtiennent une indexation de $0.50 l'heure à partir de
mai 1974, puis $0.25 en janvier 1975 et $0.25 en janvier 1976.
La pondération de cette demande s'établit ainsi:
Mai 1974, $0.50 par 24 mois: $12
Janvier 1975, $0.25 par 16 mois: $4
Janvier 1976, $0.25 par 4 mois: $1
Total: $17, divisé par 24 mois: $0.71
Nous croyons que notre demande d'indexation est donc tout à fait
justifiée et que les $0.04 qui différencient notre demande sont
une bien mince protection contre l'inflation débridée que nous
connaissons depuis quelques temps. Il faut enfin noter que l'inflation des
derniers mois nous oriente vers un taux de 14% de mai 1974 à mai 1975.
Nos prévisions de 11.5% en ce sens sont conservatrices et nous ne
serions pas surpris qu'elles s'avèrent être sous-estimées
de 1% à 2% pour le reste du décret. Nous maintenons donc
fermement et notre demande d'indexation de $1 l'heure répartie comme
nous l'avons préconisé était juste et
nécessaire.
Je ne vous lirai pas les tableaux 1 et 3, puisque, somme toute, vous
pouvez les consulter. Nous estimons, M. le Président, qu'afin de
rétablir un climat de paix sociale et de rétablir aussi des
relations patronales-syndicales normales et saines, dans le milieu, il est
indispensable que ceux qui auront à prendre une décision
éventuellement nous aurions souhaité, je vous le
répète, qu'elle puisse se prendre au niveau des parties
alors, si éventuellement le lieutenant-gouverneur en conseil, sur les
recommandations du ministre, doit prendre des décisions, nous pensons
qu'on devra tenir compte de ces demandes que nous formulons, demandes qui ont
été obtenues dans l'immense majorité des cas.
Nous devons ajouter qu'une autre condition au rétablissement
normal des relations et d'un climat de paix dans le milieu est
conditionné par un retrait du type de harcèlement que nous
subissons. Je veux être un peu plus précis et vous parler des
multiples poursuites qui découlent de certaines actions qui ont
été posées au moment de la bataille de l'indexation.
Plusieurs de nos syndiqués sont cités devant les tribunaux. Nous
ne croyons pas que cet état de chose puisse être propice à
un climat normal de bonnes relations entre les parties et au
rétablissement de la paix dans le secteur de la construction.
En gros, c'est ce que nous avons à dire à ce moment-ci.
Les travailleurs, quels qu'ils soient, s'ils se sentent lésés
dans leurs droits et s'ils ont le sentiment profond qu'on rejette du revers de
la main leurs revendications salariales et qu'on ne veut rien faire qui soit
véritablement adéquat afin de contrer les méfaits de
l'inflation, les travailleurs je le disais il y a un instant ne
répondront peut-être plus aux mêmes automatismes que ceux
qu'on connaissait dans le passé ou qu'on souhaite dans certains milieux.
Ils ont le sentiment d'être spoliés dans leurs conditions
salariales, d'être victimes d'une espèce de vol dans le fond. Ils
ne portent pas d'accusations. Il ne s'agit pas de dire: C'est tel ou tel
employeur, ou tel ou tel groupe qui est responsable, mais eux en subissent les
conséquences. S'ils n'ont pas le sen- timent qu'on va tout mettre en
oeuvre pour corriger cet état de choses, j'ai bien peur qu'on n'aura pas
réglé grand-chose au Québec et qu'on aura des lendemains
probablement plus chaotiques que ceux qu'on connaît depuis quelques
semaines.
Ce n'est pas du chantage, ce ne sont pas des menaces; c'est un sentiment
profond qui découle de consultations multiples que nous avons faites et
des indications que nous avons reçues; le phénomène de
l'inflation, ils le subissent. Ils ne sont pas les seuls à avoir
bataillé. Ce n'est pas la première fois qu'au Québec il y
a des batailles relativement à l'indexation. On a fait le bilan dans
bien des centrales et chez nous on l'a fait. Ce bilan a été rendu
public. Je pense que les travailleurs de la construction ne doivent pas
être laissés pour compte.
Encore une fois, je rappelle à tous que nous soutenons que 70%
des travailleurs de la FTQ construction ont déjà obtenu ces
montants, et le fait de leur enlever serait interprété comme un
geste de provocation.
Le Président (M. Séguin): Est-ce que vous avez
terminé?
M. Daoust: Oui, monsieur.
Le Président (M. Séguin): Je vous remercie.
Questions de la part des membres de la commission. M. le ministre?
M. Cournoyer: J'aurais peut-être une question. Vous avez
entendu, M. Daoust, tantôt, la prétention de M. Dion voulant que
de 1972 à 1974 la productivité à la construction d'un
bungalow en particulier était passée de 237 heures à 351
heures. Est-ce qu'il serait possible, si nous consentions l'augmentation du
coût de la vie, qu'on retourne à 237 heures?
M. Daoust: Vous citez M. Dion qui a signalé un cas fort
précis, sans aucun doute...
M. Cournoyer: Très précis, très
précis, j'en conviens.
M. Daoust: ...qu'il faudrait examiner à la loupe. Dieu
sait qu'on aurait probablement...
M. Cournoyer: Je n'ai pas été dans le prix.
M. Daoust: ...beaucoup de commentaires à faire si on avait
tous les documents devant nous.
M. Cournoyer: C'est-à-dire que je n'ai pas l'augmentation
du prix, je n'ai pas touché au prix. J'ai juste pris l'exemple que M.
Dion a donné où effectivement, semble-t-il, dans un cas
précis d'un entrepreneur de la région de Sherbrooke, on est
passé de 237 heures a 351 heures pour un bungalow. Il y a probablement
un paquet de circonstances que M. Dion n'a pas eu à expliquer et que
peut-être le représentant de l'Association des constructeurs
d'habitations va expliquer. Parce qu'on va poser des questions tantôt sur
les circonstances qui peuvent faire que ça prend plus de temps. Je ne
veux pas du
tout blâmer le ministre de l'Industrie et du Commerce de
prétendre qu'il y a eu une baisse de productivité. Je pense bien
que vous et moi, M. Daoust, sommes obligés de convenir qu'il y a une
baisse de productivité. On peut mettre la faute de la baisse de
productivité, jusqu'à un certain point, sur les
délégués de chantier.
Or, dans le cas qui m'occupait, il n'y a pas de
délégué de chantier. Donc, on ne peut pas dire que ce sont
les délégués de chantier qui ont réduit la
productivité dans le cas de la construction d'habitations mais il y a eu
baisse de productivité aussi. L'autre raison qui nous apparaît,
c'est que les travailleurs de la construction, se sentant lésés,
comme vous l'avez présenté tantôt, ont décidé
que si, effectivement, ils devaient être les victimes d'une situation
inflationniste comme celle qu'on observe, vous et moi, à ce
moment-là ça coûterait plus cher de toute façon et
ils resteraient plus longtemps sur le même job. C'est passé de 237
à 351 de 1972 à 1974. Est-ce que, si nous réglions le
problème de cette compensation du coût de la vie, il serait
possible, pour tous les gens concernés, d'espérer une
augmentation de la productivité? Je ne veux pas vous faire
répéter ce que vous avez déjà dit ailleurs mais il
serait bon peut-être, pour le bénéfice de cette commission,
que vous répétiez ce que vous avez dit ailleurs à ce sujet
en particulier.
M. Daoust: Je ne veux pas entrer dans le détail de M.
Dion, parce qu'encore une fois je n'ai pas les documents.
M. Cournoyer: De toute façon, c'est un après
l'autre.
M. Daoust: Mais, de façon plus générale,
nous avons déjà déclaré que, selon nous, il y a une
espèce d'équation entre la productivité des travailleurs
de la construction et la bataille de l'indexation. Des travailleurs qui se
sentent lésés et qui ont le sentiment qu'ils n'obtiennent pas sur
le plan salarial ce qu'ils estiment leur revenir de droit ne sont
sûrement pas des travailleurs très heureux, ce sont des
travailleurs mécontents. Je pense bien que de là à
conclure que la productivité puisse en souffrir il n'y a qu'un pas. Je
pense qu'on peut le franchir en toute honnêteté. Si le
problème de l'indexation était résolu de façon fort
satisfaisante, dans le sens des recommandations que nous vous avons soumises
à l'occasion du mémoire que nous avons présenté, je
crois que ce problème serait vite réglé. Moi, en tout cas,
c'est mon sentiment qu'il y a sûrement une corrélation entre les
phénomènes que nous connaissons dans la construction au
Québec et tout le problème de l'indexation des salaires.
Maintenant, est-ce que c'est dans le pourcentage qui a été
mentionné par le ministre de l'Industrie et du Commerce, 30%? Cela
resterait à être démontré.
M. Cournoyer: D'après l'exemple que nous avons, en 1972
là je m'adresse à tout le monde, il n'y avait pas de bill
9 en ce temps-là la productivité était de 237. Elle
est baissée, parce que le nom- bre d'heures observées en 1972
était de 237; en 1973, le nombre d'heures était de 266. A cette
époque, je ne me souviens pas, si on parle de 1972 et de 1973, d'avoir
entendu parler de l'indexation. Il y a eu quand même une baisse de
productivité à cette époque. Mais la baisse de
productivité a été plus forte en 1974 parce qu'on est
passé de 266 à 351 heures. Ce que je vous demande, M. Daoust,
j'imagine qu'on est obligé de le demander d'une façon
générale.
Est-ce que le problème de l'indexation, actuellement, est une des
causes de la baisse de productivité sur les chantiers de construction?
Clairement, selon vous, parce que vous n'êtes pas sur les chantiers de
construction.
M. Daoust: Je pense que oui.
M. Cournoyer: Je n'ai pas d'autre question à poser.
Le Président (M. Séguin): Le député
de Maisonneuve.
M. Burns: Sur le même sujet, M. Daoust, est-ce que vous
avez d'abord vérifié vous-même ce qui a semblé
être une campagne de publicité concertée de la part du
gouvernement relativement à cette baisse de la productivité?
Quand je dis campagne concertée, c'est que j'ai été
très étonné d'entendre même le ministre...
Ça, c'est fort, pour un gars qui a déjà
préparé un mémoire au nom de la Fédération
de la construction, de venir se faire dire cela!
M. Cournoyer: Combien en avez-vous préparé au nom
de la CSN?
M. Burns: Je n'ai jamais préparé de
mémoires, pour aucune des parties qui sont ici.
M. Cournoyer: Aucune? M. Burns: Aucune.
M. Cournoyer: Vous les laissiez préparer par d'autres?
M. Burns: Non, j'ai déjà préparé des
mémoires pour la FTQ et pour la CSN, mais pas dans le domaine de la
construction.
M. Cournoyer: Dites-moi pas qu'on vous aurait exclu de ce domaine
particulier des préoccupations syndicales?
M. Burns: Veux-tu qu'on jase? Est-ce que cela te tente ? Cela ne
me fait rien. Alors, je reviens, M. le Président, à ce que je
demandais à M. Daoust avant cette interruption du ministre. Cela le
fatiguait quand je parlais de cette espèce de concertation
gouvernementale. J'ai même entendu le ministre de la Justice, à
l'occasion de l'examen du projet de loi qui reconduisait, pour une autre
année, la loi concernant la Régie des loyers, affirmer encore
une
fois que la productivité dans le domaine de la construction
était descendue à 30%.
Quand c'est le ministre de la Justice qui est rendu, à l'occasion
de la loi de la Régie des loyers, à dire cela, je me dis: II y a
concertation, surtout que c'est parti depuis longtemps de la part du ministre
de l'Industrie et du Commerce, en passant par le premier ministre qui a mis
également le porte-voix là-dessus; le ministre du Travail s'en
est servi à plusieurs reprises, lui aussi. Je me demande, M. Daoust, si
votre centrale s'est posé la question réelle, à savoir si
vous étiez en mesure de confirmer ou d'infirmer ces chiffres-là.
Deuxièmement, si vous vous êtes penché là-dessus,
est-ce que, dans les discussions que vous avez pu avoir avec le gouvernement,
ce facteur-là a été un élément qui est
entré en discussion avec les représentants du gouvernement?
M. Daoust: Nous n'avons pas les instruments voulus, ni les
renseignements qui nous permettraient de conclure positivement ou
négativement à l'égard des chiffres qui ont
été mentionnés.
Vous avez parlé des négociations. Il n'y a pas eu de
négociation, de cachette. Il n'y a pas eu de négociation, il n'y
a pas eu de rencontre. On a lu les journaux comme tout le monde et on a entendu
parler de diverses formules, mais il n'y a pas eu d'échange de vues sur
ce problème-là avec le gouvernement.
Par ailleurs, pour revenir au problème de la productivité
je l'ai affirmé il y a un instant, mais je ne voudrais pas qu'on
nous accable de tous les péchés d'Israël, par ailleurs
c'est un peu normal, quand on retrouve sur un même chantier des
centaines de travailleurs appartenant à des métiers
différents, qu'il y ait entre eux des échanges multiples sur tous
les plans.
Quand un groupe de travailleurs s'aperçoit qu'il n'a pas eu le
montant qu'un autre groupe de travailleurs a pu obtenir à la suite de la
bataille sur l'indexation, cela crée des tensions et des perturbations.
Tout cela est de nature, par voie de conséquence, à affecter la
productivité d'un chantier. Ceux qui ne l'ont pas vont prendre les
moyens qu'ils ont à leur disposition, les moyens de pression qu'on
connaît tous, afin de l'obtenir.
Ceux qui l'ont de façon pas tout à fait identique à
l'autre groupe j'entends, pas de la même façon et
peut-être pas dans la même dimension vont, eux aussi,
batailler pour améliorer leur sort. Les gens voient les mois venir et se
disent: L'autre montant, à l'égard duquel il y a eu des
engagements, est-ce qu'on l'aura? Ils entendent mille et une
déclarations des associations patronales, ils ont vu l'échec des
négociations aux 16 et 20 décembre, et tout cela a concouru
abondamment au malaise que nous connaissons. Les travailleurs ont, eux aussi,
des intuitions, ils sentent des mouvements qui se préparent et des
attitudes qui se dessinent. Ils ont des moyens de défense qui sont les
leurs. Ils n'ont pas besoin de mot d'ordre, ils n'ont pas besoin qu'on leur
fasse des dessins. Ils sont assez imaginatifs pour avoir recours à des
moyens de pression qui sont fort connus dans tous les milieux de travail.
Cela n'est pas exclusif aux travailleurs de la construction. C'est
pareil dans les bureaux, c'est pareil dans les usines.
Dieu sait que depuis cette bataille qui a débuté au
printemps, dans tous les milieux de travail, en Amérique du Nord
il n'y a pas seulement le Québec les autres provinces, le
Québec, on a connu le même type de phénomènes. C'est
pour cela que je vous disais qu'il y a corrélation entre un
règlement sur le problème de l'indexation des salaires, afin de
contrer les effets de l'inflation et la productivité d'une masse de
travailleurs. Mais est-ce que cette baisse de productivité a atteint tel
ou tel pourcentage? Il n'y a pas eu d'étude réelle faite chez
nous et cela nous prendrait des instruments et des méthodes de
contrôle que nous n'avons pas.
M. Burns: Maintenant, M. Daoust, vous avez mentionné que
déjà environ 70%, je pense, des travailleurs de la FTQ
construction bénéficiaient, à toutes fins pratiques, de
cette demande d'indexation de $0.50 au mois de mai 1974etque promesse
leuraété faite peut-être que c'est
déjà fait pour janvier 1975 et janvier 1976. Est-ce que je
vous ai bien compris là-dessus, que déjà 70% des
travailleurs affiliés à la FTQ construction ont
déjà, comme assurance, ce montant?
M. Daoust: Oui, vous m'avez bien compris. Vous allez
peut-être me demander de quelle façon on a établi ce
chiffre. Il faut vous dire que nous avons procédé à des
sondages à l'intérieur de chacun des 37 syndicats locaux qui,
à leur tour, sont regroupés dans 23 grands syndicats à
l'intérieur de la FTQ construction, sondage, étude et analyse qui
ont été faits sur l'ensemble du territoire
québécois. Les données que nous avons nous permettent de
conclure que l'objectif était évidemment de 100%, mais qu'il a
été atteint par 70% des travailleurs. Dans des cas, le montant
est donné et il est complètement intégré au
salaire, c'est-à-dire que les salariés reçoivent la
rémunération en surtemps, sur ce montant de $0.50 qui s'ajoute au
salaire. Dans d'autres cas, des formules différentes ont
été arrêtées entre les parties. Mais de façon
globale, c'est 70% des travailleurs...
M. Burns: Ce qui veut dire à peu près...
M. Daoust: ... qui sont à l'emploi de multiples
entrepreneurs qu'on retrouve à l'intérieur des six associations
patronales.
M. Burns: Ce qui veut dire à peu près combien de
travailleurs, M. Daoust?
M. Daoust: Environ 50,000. C'est ce qui nous a permis, à
certains moments, de contester la représentativité des
associations patronales qui, ici, viennent nous dire non à l'indexation,
qui opposent une fin de non-recevoir systématique aux demandes que nous
formulons depuis déjà des mois, mais qui représentent des
employeurs ou des entrepreneurs qui, eux, le consentent et ont consenti les
$0.25, depuis le début de l'année.
M. Cournoyer: Septembre? M. Daoust: Oui.
M. Cournoyer: Avant qu'il commence à mouiller!
M. Burns: A part ce groupe-là... Le ministre veut-il
intervenir?
M. Cournoyer: Non. M. Burns: Non?
M. Cournoyer: C'est parce que c'est dans la même ligne, M.
le Président.
M. Burns: Bon. D'accord.
M. Cournoyer: C'est dans la même ligne.
M. Burns: Bon.
M. Cournoyer: Je vous laisse aller, M. Burns, M. le
député de Maisonneuve.
M. Burns: Oui? Bon, tant mieux, merci. M. Cournoyer: Vous
allez bien.
M. Burns: Dans le domaine de la construction, que vous
représentez, M. Daoust, la FTQ construction, et, en particulier, dans
les 70% des travailleurs que vous représentez et qui les ont
déjà, est-ce qu'il y a des secteurs particuliers qui ne sont pas
touchés ou des secteurs qui sont plus touchés que d'autres?
C'est-à-dire est-ce qu'il y a des secteurs qui les ont de façon
quasi uniforme ou qui ne les ont pas du tout? C'est ça que je veux dire.
Par exemple, est-ce que, dans le domaine résidentiel, cela existe autant
que dans le domaine industriel, ou dans le domaine des gros chantiers, ou dans
le domaine des routes? C'est ça que je veux dire. Est-ce qu'il y a des
secteurs particuliers de la construction que vous représentez, ou des
employés de la construction que vous représentez, qui, de
façon beaucoup plus claire, se sont vu accorder ce que vous demandez
dans le fond, ces $0.50, $0.25, $0.25?
M. Daoust: On peut dire, de façon un peu globale, que les
gros chantiers, cela n'a pas créé de difficulté et que,
dans le secteur domiciliaire, il y a eu plus de difficultés.
M. Burns: Alors, s'il y a un endroit actuellement. M. Daoust:
C'est peut-être là...
M. Burns:... des travailleurs que vous représentez, qui ne
les ont pas, c'est peut-être là principalement...
M. Daoust: C'est peut-être là qu'on le
retrouverait.
M. Burns: Maintenant, dans votre mémoire, à la
C'est un peu pour cela que je vous parlais de cette situation qui risque
de devenir extrêmement troublée si le législateur n'en
tient pas compte. S'il fallait qu'il soit obligé de décider
lui-même et Dieu sait que toutes les tentatives que nous avons faites ont
avorté et cela semble probablement inéluctable que le
lieutenant-gouverneur en conseil, sur recommandation du ministre, soit
obligé de trancher le différend.
M. Burns: Est-ce que je fais erreur, M. Daoust, en pensant que,
entre autres, le problème, qui surgit actuellement et qui remonte quand
même à la fin novembre 1974 sur le site des Jeux olympiques
à Montréal, est en grande partie dû au fait que les gens
qui ont débrayé ne sont pas dans les 70%...
M. Daoust: Exactement.
M. Burns: ... que vous avez mentionnés?
M. Daoust: C'est exactement pour ça. Les ferrailleurs
n'ont pas eu les $0.50 et, encore une fois, je n'ai pas à vous faire un
exposé très long...
M. Burns: Non.
M. Daoust:... les autres l'ont. Ils leur montrent leur
chèque de paie. Ils leur disent: Bien, vous...
M. Burns: Les autres... M. Daoust: ... ne valez pas les
$0.50. M. Burns: Sur le même chantier? M. Daoust: Sur le
même chantier. M. Burns: Sur le même chantier.
M. Daoust: Nous, on les a. Alors, les travailleurs se sont fait
faire ça, si vous voulez, pendant des semaines de temps et, une
journée, cela a éclaté.
M. Burns: Alors, si on pense au site des Jeux olympiques en
particulier, à Montréal, est-ce que les $0.50 en question
auprès de ceux qui les ont déjà sont accordés
depuis le mois de mai 1974 aussi?
M. Daoust: Cela peut varier dans certains cas. Il faudrait voir
chacun des syndicats, chacun des métiers. Cela peut être au mois
de juillet, cela peut être au mois d'août, cela peut être au
mois de septembre. Cela peut varier.
Une Voix: Septembre.
M. Daoust: On me dit que c'est septembre dans ce
cas-là.
M. Burns: Septembre.
M. Cournoyer: Revérifiez donc pour voir si ce n'est pas
plus tard que ça.
M. Daoust: Septembre qu'on m'a dit.
page 5, je lis ceci: "La parité salariale... En tout cas, vous
dites que les travailleurs des régions à l'extérieur de
Montréal, qui ont connu des augmentations supérieures à
10%, ne peuvent être traités différemment. Et vous
continuez un peu plus loin: "La parité salariale, qui sera atteinte
à la fin du présent décret, c'est une opération qui
a consisté à redonner aux travailleurs de la province un pouvoir
d'achat et un niveau de vie qu'ils avaient graduellement perdus au cours des
années antérieures. Ce serait répéter une injustice
sociale que de remettre en cause cet acquis."
Je m'attache à cette dernière phrase. Est-ce que cette
dernière phrase a été motivée ou est-ce qu'elle a
été incitée dans votre mémoire parce que vous avez
des indications que ce que s'apprête à faire le gouvernement est
de, à toutes fins pratiques, changer cette parité qui a
été acquise de dure lutte?
Je pense que là-dessus vos chiffres confirment les chiffres qui
apparaissent en annexe de la Fédération de la construction du
Québec qui a témoigné avant vous, où on
s'aperçoit qu'à part, peut-être, deux régions, mais
surtout, principalement, une région, en général, on a,
dans les métiers principaux, peintres, ceux qui sont cités, en
tout cas, dans... Je pense qu'on cite: Peintres, briqueteurs, manoeuvres, les
points de repère dans l'échelle salariale. On a à peu
près atteint la parité salariale, sauf peut-être au
Nord-Ouest québécois et, dans certains cas, dans le
Bas-Saint-Laurent.
Cette phrase, à laquelle je me suis accroché, veut-elle
dire que vous avez des indications suivant lesquelles vous craignez
sérieusement que cette parité, qui était acquise de dure
lutte, soit brisée par des gestes à venir?
M. Daoust: II n'y a pas d'indication très précise,
mais il y a des tentations auxquelles les gens pourraient peut-être
succomber. On a voulu indiquer qu'il serait périlleux et dangereux de ne
pas tenir compte de ces acquis qui découlent de la dernière
négociation, et de ne pas faire disparaître cette justice sociale
qui s'établit sur le plan de la parité des salaires.
Parmi ces principes, cela en est un. Il y en a un autre qu'on a
mentionné, on ne l'a peut-être pas souligné dans le
mémoire, c'est la date d'échéance du décret, ainsi
que, le problème de certains articles, entre autres, celui qui a trait
aux délégués de chantier. Notre position est la suivante:
On estime que le décret doit demeurer inchangé dans chacun de ses
articles, sauf en ce qui a trait aux problèmes de l'indexation des
salaires et aux revendications salariales que nous vous soumettons, et que si,
d'aventure, on se risquait à vouloir chambarder le décret, cela
pourrait être extrêmement dangereux. Ce n'est pas le moment et ce
n'est pas le temps. Cela doit découler des changements au décret
d'une véritable négociation entre les parties et non pas d'un
arbitrage puisque, somme toute, c'est une formule d'arbitrage qu'on retrouve
dans la loi. Que les parties, en temps et lieu, s'assoient et abordent tous les
problèmes, celui de la parité, de l'échéance.
Evidemment, le décret se termine le 30 avril, il faudra bien en
renégocier un autre, et le problème de la productivité
relié aux délégués de chantier comme certains le
font, cela ne peut faire l'objet que d'une véritable négociation
dans le vrai sens du mot, où chacun reprend la force qui est la sienne
et où il y a un véritable rapport de force qui s'établit
entre les parties, duquel naît éventuellement une entente qui
devient un décret par la suite.
Nous, on dit: Ce n'est pas le temps. Il ne faut pas jouer avec les
articles du décret, sinon, on va provoquer des difficultés
insurmontables, à mon sens, et qui vont être loin de
résoudre quelque problème que ce soit.
A l'égard de la représentativité, puisque j'en ai
parlé, il faudrait peut-être mentionner qu'elle se fait de la
façon suivante: Pour chaque entrepreneur, il y a un vote au sein des
associations auxquelles il adhère, de telle sorte que l'importance d'un
entrepreneur, sur le plan du personnel qu'il emploie, sur le plan des contrats
qu'il détient, peut être dix fois plus élevée que
celle d'un autre entrepreneur. Par ailleurs, le vote qu'il aura au moment des
décisions aura exactement le même poids. C'est peut-être
pour cela qu'on voit des contradictions entre la réalité que nous
vivons par les 70%, et l'attitude des associations patronales à cette
table. Cela, je pense bien qu'un de ces jours je ne dis pas que c'est le
temps de le faire il faudra trouver une solution à ce
problème. Cela peut expliquer pourquoi les entrepreneurs ou du moins les
associations patronales se mettent la tête dans le sable aujourd'hui et
refusent de reconnaître une réalité qui est pourtant
tellement évidente.
M. Burns: Une dernière question, M. Daoust. J'ai
comparé votre point de vue, relativement aux augmentations de salaire,
avec ce que m'a donné comme réponse M. Dion, qui a comparu avant
vous. Il me semble que, là-dessus, vous vous entendez sur une chose,
c'est-à-dire que, dans toute augmentation de salaire qui était
prévue dans le décret, il y avait une partie qui devait
être une espèce de prévision avant le coup de
l'augmentation du coût de la vie et une autre partie qui était
tout simplement une augmentation, une amélioration, si vous voulez, du
niveau de vie du travailleur concerné.
Dans votre document, à la page 3, vous parlez de 5%, 5%, si je le
comprends bien. Je peux vous citer le texte: "Des prévisions d'inflation
de 5% semblaient réalistes pour les négociateurs syndicaux et
c'est une amélioration des conditions de vie (salai re réel) de
5% qui fut recherchée par l'augmentation de 10% des salaires" .
Est-ce qu'à votre connaissance j'ignore si vous avez
participé aux négociations, la dernière fois cet
aspect a été discuté de facto à la table de
négociations pour la partie, en tout cas, où il y a eu des
discussions entre les parties, avant qu'un règlement vous soit
imposé de l'extérieur?
M. Daoust: Non, vous savez que je n'ai pas participé aux
dernières négociations, mais il me semble logique qu'on conclue
que c'étaient là les prévisions ou les anticipations
d'augmentation de l'indice des prix à la consommation. C'est ce qu'on
établit dans le document, en se basant sur l'année
précédente, où on avait un taux d'inflation
d'à peu près 5%. De là à conclure qu'on avait
prévu cela pour la durée du contrat, c'est tout à fait
normal et c'est la thèse de fond que nous soutenons à ce
moment-ci pour justifier l'augmentation de $1 l'heure.
M. Burns: D'accord.
Le Président (M. Séguin): Le député
de Beauce-Sud.
M. Roy: M. le Président, j'aimerais revenir sur les 70%
qui auraient déjà obtenu l'augmentation. Ces 70% les
retrouvez-vous surtout sur l'île de Montréal ou si vous les
retrouvez proportionnellement dans les autres régions de la
province?
M. Daoust: C'est sur l'ensemble des gros chantiers qu'on retrouve
au Québec.
M. Roy: Comme les gros chantiers sont particulièrement
à Montréal...
M. Daoust: II y en a sur la Côte-Nord, il y en a dans pas
mal de régions du Québec.
M. Roy: Dans les 70%, est-ce que vous avez la même
proportion de personnes qui ont obtenu l'augmentation... Par exemple, prenons
la question des journaliers, la question des menuisiers par rapport aux
métiers mécaniques, par exemple, comme les plombiers, les
électriciens et autres. Est-ce que la proportion est sensiblement la
même ou si le pourcentage de ceux qui ont obtenu cette augmentation est
plus élevé chez les plombiers, entre autres, ou encore chez les
électriciens?
M. Daoust: Sur les gros chantiers, la proportion est identique.
Ils l'ont tous obtenue.
M. Roy: Et sur les petits chantiers?
M. Daoust: Là, j'ai l'impression que cela peut varier,
peut-être, selon les métiers.
M. Roy: Vous n'avez pas de données statistiques
précises là-dessus?
M. Daoust: Pas à ce moment-ci.
M. Cournoyer: II n'y a pas de distinction entre ces
employés, si je me souviens bien de la façon dont ils se
conduisent habituellement. Si c'est un entrepreneur électricien qui a de
petits chantiers, mais qui a convenu de payer ce que vous dites qu'il a convenu
de payer, il ne changera pas de politique s'il est sur un petit ou s'il est sur
un gros chantier. L'entrepreneur n'est pas identifié à un petit
ou à un gros chantier. Dans mes livres à moi, d'après ma
réminiscence de l'industrie de la construction, c'est un entrepreneur.
Il peut en prendre un petit et il peut en prendre un gros.
M. Daoust: Oui. On me souligne qu'en fait c'est au niveau de
l'entrepreneur. Un entrepreneur qui le consent, il le donne partout.
M. Roy: II y a des entrepreneurs, mais il y a aussi des
sous-entrepreneurs...
M. Cournoyer: Oui.
M. Roy: ...sur des mêmes chantiers. Vous trouvez les deux
catégories.
M. Cournoyer: On parle particulièrement des
sous-entrepreneurs parce que les entrepreneurs généraux... En
fait, disons que ce que vous voudriez savoir, M. le député de
Beauce... Est ou Ouest?
M. Roy: Sud. Ce n'est ni Est ni Ouest, c'est Sud.
M. Cournoyer: En fait, vous aimeriez savoir de quelle
catégorie d'entrepreneurs il s'agit. Je pense bien, par des
conversations que j'ai entendues à la radio à midi, où
certaines personnes qui sont ici étaient présentes, qu'il y a ce
qu'on appelle des sous-entrepreneurs et des entrepreneurs
généraux.
Mais le genre de personnes qui font habituellement affaires dans
l'industrie de la construction et qui règlent ce genre de
problèmes comme entrepreneurs, ce ne sont pas des sous-entrepreneurs;
ils sont des entrepreneurs, mais pas nécessairement des entrepreneurs
généraux, mais des personnes qui ont des sous-contrats quelque
part. Je me réfère, par exemple, à la possibilité
que des entreprises de maîtres électriciens, qui habituellement
sont des sous-entrepreneurs, n'ont jamais de contrats généraux.
Est-ce qu'il y a des maîtres électriciens sans les nommer
parce qu'apparemment c'est une infraction qui ont convenu de payer la
même chose pour les maîtres mécaniciens en tuyauterie, la
même chose pour les entrepreneurs en peinture, qui sont habituellement
des sous-entrepreneurs aussi, mais à la face même, nous avons des
entrepreneurs... Ils ne sont sous-entrepreneurs que vis-à-vis de
l'entrepreneur général. Ils ne sont pas sous-entrepreneurs
vis-à-vis de nous et ces entreprises. Ils sont tous pareils. Les six
associations patronales qui sont ici représentent des entrepreneurs qui
ont des relations entre eux, qui font qu'ils sont sous-entrepreneurs les uns
vis-à-vis des autres.
M. Roy: Je comprends, mais ce que je veux savoir surtout, c'est
dans un gros chantier de construction où il y a un entrepreneur
général et des sous-entrepreneurs, y a-t-il des catégories
de sous-entrepreneurs qui dans les mêmes chantiers de construction,
avaient accordé l'augmentation et d'autres catégories ne
l'avaient pas accordée? C'est surtout pour préciser davantage la
question.
Vous avez cité le cas des ferrailleurs, tout à l'heure,
cela en est un.
M. Daoust: Cela en est un.
M. Roy: Est-ce qu'il y en a d'autres à votre
connaissance?
M. Daoust: II peut y en avoir d'autres, oui.
M. Roy: Mais vous ne pouvez pas, à ce moment-ci, nous
donner des indications précises là-dessus?
M. Daoust: Non.
M. Roy: J'aurais une deuxième question, M. le
Président. Je voudrais demander aux représentants de la FTQ
construction, puisqu'on parle beaucoup d'indexation c'est une formule
qui est très à la mode à l'heure actuelle, d'ailleurs on
en a eu certaines expériences assez récentes en ce qui nous
concerne si au niveau de la FTQ, vous considérez l'indexation
comme étant une formule que vous voulez permanente ou si vous
considérez la formule d'indexation comme une formule à court
terme? Est-ce que vous avez d'autres suggestions? Est-ce qu'il s'est fait
d'autres études à la FTQ pour venir à sortir les ouvriers
les travailleurs du Québec particulièrement, parce qu'en
somme ce sont les travailleurs qui nous concernent à l'heure actuelle
de l'impasse et les sortir du "tournage en rond" dont ils sont les
victimes jusqu'à maintenant? Si je vous pose cette question, c'est parce
qu'on finit toujours par retrouver l'indexation dans les prix et, lorsque le
tour de l'indexation est terminé, on se retrouve exactement au point de
départ. Tout le monde paie des prix plus élevés. Je pense
que tout le monde est d'accord là-dessus. Est-ce qu'au niveau de la FTQ,
au niveau de votre centrale, vous avez poussé des études plus
loin de façon à venir à présenter ou à
demander d'autres mécanismes, d'autres formules, d'autres solutions de
façon que les augmentations de salaire de l'ouvrier il ne les
retrouve pas toujours par le fait dans son augmentation, l'augmentation du
coût de la vie à laquelle il a à faire face puissent
contribuer à lui donner une amélioration du niveau de vie
réelle.
M. Daoust: Dans une période inflationniste, il n'est que
normal qu'une centrale syndicale recommande à ses travailleurs
d'obtenir, au moment des réouvertures de conventions collectives de
travail ou pendant la durée des conventions collectives de travail, des
formules qui vont permettre à ceux qui sont touchés par
l'inflation de pouvoir passer à travers cette période. Depuis
plusieurs mois déjà, depuis le début de 1974, les
batailles autour de l'indexation ont été à la mode
à l'intérieur du mouvement syndical nord-américain. Ce
n'est pas nouveau. Remarquez, certains syndicats ont des formules d'indexation
depuis des années et des années qu'ils ont
développées avec le temps, au cours de négociations avec
les employeurs. C'est entendu qu'au moment des réouvertures des
négociations de conventions collectives, les syndicats ont tenté
d'obtenir des formules très précises qui vont permettre à
ces derniers de pouvoirs passer à travers une période ou une
phase inflationniste.
Il y a donc une politique générale qui s'est
développée chez nous dans le sens que vous avez mentionné,
une formule ou des formules d'indexation dont le principe est essentiellement
le même, mais qui est liée au salaire moyen d'un groupe de
travailleurs donné et qui peut varier d'un secteur à l'autre.
M. Roy: Cela veut dire qu'à ce moment-ci vous vous
êtes limités surtout au problème majeur qui confronte les
travailleurs comme tels ayant à faire face à une inflation qu'on
pourrait qualifier, sans se tromper, de pyramidale, vous avez axé votre
travail au niveau de la négociation pour tâcher de trouver une
formule d'indexation pour parer à l'insuffisance ou à la
dépréciation du pouvoir d'achat, sans aller plus loin dans
l'étude du système ou du régime économique de
façon à venir à présenter ou à exiger
d'autres solutions que celle que nous étudions à l'heure
actuelle. Si je vous pose cette question, c'est que j'en ai une autre
précise à vous poser après.
M. Daoust: C'est-à-dire qu'on s'est livré à
des études des causes profondes de l'inflation, on a poussé des
analyses dans le domaine, on a publié un tas de document, on a
formulé des suggestions, mais aux tables de négociations, ce
n'est pas l'endroit où on peut négocier un changement de
système économique. On va gruger ici et là quelque peu,
mais ce sont des solutions peut-être un peu plus globales auxquelles il
faudra penser et auxquelles on pense afin de trouver une solution un peu plus
permanente au problème de l'inflation.
M. Roy: Si je vous pose toutes ces questions, c'est que je
m'interroge, surtout quand nous avons entendu M. Dion parler de la part des
employeurs qui ont énormément de réticences, voire
d'objections, quand on voit tous les efforts que les centrales syndicales ont
faits, de façon à mener une dure lutte pour tâcher d'en
venir à trouver une formule d'indexation qui est susceptible de
respecter et de garantir la sécurité du revenu du travailleur, et
quand je regarde le résultat que vous avez obtenu... Ce n'est pas un
reproche que je vous fais, c'est une constatation. Je prends, par exemple, le
cas d'un menuisier célibataire qui a obtenu ce printemps son
augmentation de $0.50 l'heure, 40 heures par semaine, $20, et que je regarde de
quelle façon la répartition de ces $20 a été faite,
le montant qui lui est revenu, à toutes fins pratiques, c'est là
que je m'interroge.
J'ai ici des chiffres, je remercie ceux qui m'ont fourni une feuille,
pour me donner des indications. Je vois que l'impôt fédéral
a pris $4.35 sur les $20 c'est bon que ce soit noté
l'impôt provincial, $4; la Régie des rentes du Québec,
$0.40; la Régie de l'assurance-maladie, $0.15; le fonds de retraite, $8;
la Commission de l'industrie de la construction, $0.11. Cela fait $17.01; je
n'ai pas inclus l'augmentation de ce qui est alloué automatiquement par
le fonds de vacances, parce que les surplus que la personne pourra avoir. Mais
sur $20 obtenus avec énormément de difficultés, le
travailleur menuisier célibataire retire $2.99 par semaine de plus et je
n'ai pas compté l'augmentation de contribution à l'union qui est
un service qu'il doit payer normalement.
Je m'interroge à l'heure actuelle, sérieusement. Si je
prends le cas d'un manoeuvre marié, la situation est encore pire. Pour
avoir obtenu $20, il y a
l'impôt fédéral, $4.85; l'impôt provincial,
$4.10; la Régie des rentes du Québec, $0.39; la Régie de
l'assurance-maladie, $0.20; le fonds de retraite, $8, la Commission de
l'industrie de la construction, $0.09; cela fait $17.63; il lui reste $2.37 par
semaine. J'ai vu des travailleurs de Montréal comme d'autres
régions du Québec qui, à cause de cette période
inflationniste, ont été obligés d'assumer une augmentation
de loyer de $15 ou $20 par mois. Cela veut dire que l'augmentation nette de ce
qu'ils ont réussi à obtenir au niveau de l'industrie de la
construction parce que ce sont des travailleurs de la construction
le montant net qu'ils ont reçu par semaine ne leur permet
même pas de payer l'augmentation du loyer seul. Le gouvernement
provincial est plus bénéficiaire en ce qui le concerne de
l'augmentation et de la bataille que les centrales syndicales auront
livrée pour les ouvriers, puisque le gouvernement provincial retire
$4.10 alors que l'ouvrier en retire $2.37. Ne croyez-vous pas que ce serait le
temps je vous pose une question si on veut travailler dans
l'intérêt des travailleurs du Québec, d'exiger qu'il y ait
des modifications au niveau de l'impôt pour qu'il en reste
peut-être un peu plus aux travailleurs?
Quand on rencontre des travailleurs qui nous mettent ces
chiffres-là devant nous, qui nous placent devant cette
réalité à laquelle ils doivent faire face, ils nous disent
tout simplement: On se bat pour changer quatre trente sous pour $1. Encore
faut-il qu'ils fassent les calculs assez serrés.
Le fonds de retraite, je ne le discute pas, mais tout le monde admettra
que le fonds de retraite, les dollars qu'ils donnent aujourd'hui seront des
$0.15 et des $0.20 qu'ils retireront dans 20 ans. parce qu'ils vont être
dépréciés par l'inflation à 8%, 9%, 10% et 11% par
année.
C'est là que je me pose plusieurs questions et je me demande si
cela ne serait pas le temps qu'on commence à examiner pour trouver
d'autres formules que celles-là, de façon que le travailleur,
après avoir lutté, dépensé beaucoup d'efforts,
d'énergie, s'être imposé énormément de
sacrifices et avoir exigé beaucoup des leaders syndicaux je
comprends la situation dans laquelle peuvent se trouver les leaders syndicaux
quand on voit des résultats comme on voit, après avoir fait, de
façon objective, l'analyse des résultats réels je
commence à me poser des questions sérieuses. Je me demande si ce
ne serait pas le temps qu'on commence à faire un examen de conscience de
part et d'autre.
J'ai l'impression réelle qu'une autre augmentation je ne
suis pas contre une autre augmentation, au contraire fera encore en
sorte que le travailleur ne se retrouvera pas plus avancé, nous aurons
gagné quoi? Est-ce que nous travaillons actuellement dans
l'intérêt des travailleurs? Ou si on travaille tout simplement
à provoquer une inflation pyramidale, alors que tout le monde est
victime? S'il y a des victimes, il y a certainement des
bénéficiaires quelque part.
M. Daoust: Votre intervention peut nous faire comprendre,
pourquoi, dans une certaine mesure, il y a une certaine poussée de
militantisme chez les travailleurs pour obtenir des formules et des montants
qui leur permettront de pouvoir se réchapper un peu mieux. Vous avez
soulevé tout le problème de l'indexation des impôts ou de
l'impôt provincial. Nos vues sont connues là-dessus et on
souhaiterait bien qu'un de ces jours il puisse être réglé,
ce problème.
Il n'en demeure pas moins qu'indépendamment de toutes les
déductions qui sont faites, il y a cette perte du pouvoir d'achat qu'il
faut combler. A ce moment-ci, on n'a pas d'autre formule à ce
moment-ci, j'entends bien à suggérer dans
l'immédiat, pour résoudre le problème, que ces formules
que nous vous avons présentées.
M. Roy: Ne croyez-vous pas qu'il serait quand même temps
qu'on travaille pour aller un peu plus loin, de façon que la nouvelle
augmentation qui sera accordée aux travailleurs ne subisse pas le
même sort que celle qui a été obtenue pour un certain
nombre d'entre eux? En réalité, je me suis fait dire...
M. Daoust: Pour indexer l'impôt provincial, cela ferait
cela de pris.
M. Roy: Indexer et relever les exemptions de base.
M. Daoust: Complètement d'accord.
M. Roy: II y aurait certainement des formules, une formule
mitigée, soit relever les exemptions de base en partie et indexer la
différence, mais de façon que l'augmentation qui est
négociée péniblement par les travailleurs puisse
bénéficier aux travailleurs. A ce jour, ils n'ont rien de
l'augmentation.
Je me suis fait dire par les travailleurs de la construction dans
différentes régions du Québec: Cela ne nous a rien
donné. Il nous reste deux ou trois dollars par semaine de plus et quand
on regarde les chiffres, c'est exactement ce que cela donne.
M. Daoust: D'accord. Il y a un problème que j'aurais
souhaité soulever. C'est un peu lié au problème de la
productivité. On en a parlé quelque peu. Il y a des
déclarations qui ont été faites au niveau
ministériel et moi, je vous ai dit qu'on n'avait pas les instruments de
contrôle, les moyens voulus pour établir des données
précises là-dessus. Je pense bien que, dans les chiffres qui ont
été donnés, il n'y a pas eu de preuves tellement
réelles. Cela a été lancé comme cela, à un
moment donné, 30%. Je crois bien qu'il faudrait aller au fond du
problème et établir de façon beaucoup plus précise
les moyens qu'on a pu employer pour en arriver à de telles
données.
Il y a un exemple que je voudrais mentionner, c'est celui du mont
Wright, où on n'a aucune donnée sur la productivité,
puisque, somme toute, l'accès au chantier est complètement
bloqué au syndicat. La compagnie refuse systématiquement que nous
puissions avoir accès à son chantier pour vérifier si les
conditions du décret sont véritablement appliquées. Cela
aussi, dans le climat québécois de
la construction, est un problème qui devrait provoquer une
intervention du ministre, afin que les syndiqués reprennent leurs
droits, que les syndicats puissent avoir accès aux chantiers et puissent
être en mesure de vérifier si toutes les conditions prévues
au décret sont intégralement suivies par les employeurs.
Le Président (M. Séguin): Merci, M. Daoust. Le
député de Bourget.
M. Boudreault: M. le Président, j'aimerais poser une
question à M. Daoust. J'ai pris connaissance du mémoire de la
Fédération de la construction du Québec et je remarque que
toutes les associations d'entrepreneurs s'opposent à l'indexation ou
à l'augmentation. M. Daoust, vous nous affirmez que 70% des employeurs
ont accepté l'augmentation. J'aimerais savoir, afin d'informer aussi
cette commission, quels sont les moyens que vous avez utilisés pour
faire signer les entrepreneurs et leur faire accepter l'augmentation? Ils n'ont
certainement pas accepté cela avec le sourire.
M. Daoust: II y a eu rencontre, il y a eu négociation, il
y a eu échange de vues, il y a eu exposé de la situation, il y a
des documents qui ont été soumis et il y a eu entente dans de
multiples cas.
On aura beau dire, beau faire, et prétendre que les employeurs
ont été pris sous le bras, c'est le genre d'accusations qu'on
nous lance à tout vent, depuis un bon bout de temps au Québec,
à l'égard de ce qui se passe dans la construction. S'il y a des
employeurs qui n'ont pas le courage de dire carrément qu'ils ont
consenti une augmentation et qui se réfugient en arrière de
toutes sortes de rumeurs, ce n'est pas notre faute. Mais, moi, je peux vous
assurer que les moyens auxquels les travailleurs ont eu recours, ce sont des
moyens tout à fait normaux qu'on retrouve dans tous les milieux de
travail.
Vous savez, quand un employeur vole ses travailleurs, ne respecte pas
les conditions de sécurité sur les chantiers ou, comme la
compagnie au mont Wright, empêche les syndicats de vérifier si oui
ou non le décret est suivi, c'est prendre les travailleurs sous le bras.
C'est prendre les travailleurs sous le bras du Québec, quand on leur
refuse une formule d'indexation, c'est les voler je pense que le mot, il
faut l'employer alors cela aussi c'est prendre les travailleurs sous le
bras. Quand on vole quelqu'un et qu'on l'empêche d'obtenir des
augmentations qui lui permettraient de maintenir son pouvoir d'achat, ce sont
des gestes criminels. Mais ces gens, on ne les traduit pas devant les
tribunaux, ces gens, on leur donne des doctorats honoris causa. C'est un peu
cela le phénomène dans notre société. Quand un
groupe de travailleurs se débat que ce soit dans le secteur de la
construction ou ailleurs pour obtenir justice, il y a un tas de gens qui
parlent de violence, de méthodes subversives et qui font des
déclarations démagogiques comme celles que l'on retrouve dans le
premier mémoire qui a été lu par M. Dion: renverser le
gouvernement, et inventer de toutes pièces le problème de
l'inflation. En fin de compte, cela n'existe pas, sauf pour l'ensemble de
l'univers. Il n'y a rien que pour six associations patronales que le
problème de l'inflation n'existe pas. Cela c'est prendre les
travailleurs sous le bras. Quand on va raconter aux travailleurs qu'on va leur
citer la phrase des associations patronales, ils vont se sentir bafoués
et bousculés. Cela est grave dans le contexte social qu'on vit au
Québec.
Le Président (M. Séguin): A l'ordre! Alors,
messieurs, M. Daoust, nous vous remercions de votre intervention, de vos
commentaires, vos explications.
Nous appelons à la table l'Association de la construction de
Montréal.
Lorsque vous serez prêts à commencer, messieurs,
voulez-vous s'il vous plaît vous identifier?
Association de la construction de Montréal et
du Québec
M. Langlois (Jean-Pierre): Mon nom est Jean-Pierre Langlois,
porte-parole de l'Association de la construction de Montréal et du
Québec.
Si vous me permettez, M. le Président, on a une
présentation, je pense que tout le monde ici a eu la copie.
Le Président (M. Séguin): Oui, elle a
été distribuée.
M. Langlois: Je vais en faire lecture.
M. le Président, messieurs. Selon le texte de la loi 201, vous
nous avez convoqués pour nous entendre "quant aux raisons motivant
l'impossibilité de parvenir à une entente relativement aux
modifications à être apportées au décret".
Pour ce faire, nous devons situer la soi-disant bataille de l'indexation
dans le contexte qui est le sien. De cette façon, nous espérons
que vous comprendrez pourquoi les entrepreneurs en construction ont opté
pour ce que certains ont qualifié de ligne dure, face aux demandes
syndicales.
C'est en observant l'essor rapide de la FTQ construction au cours des
cinq dernières années que l'on peut comprendre l'évolution
des relations du travail dans notre industrie jusqu'à ce qu'elles
aboutissent à la jungle que nous connaissons aujourd'hui.
Ce faisant, on assiste à la mise sur pied d'une machine syndicale
puissante, littéralement prise en main par un groupe de dirigeants
syndicaux incapables de mettre à profit sainement les importants
pouvoirs sociaux, économiques et politiques qu'ils s'étaient
donnés.
Les gros chantiers industriels furent les premiers frappés mais
le mal se propagea au point d'atteindre tous les chantiers de moyenne et grande
envergures. Pour les employeurs et aussi pour les salariés, les contacts
avec l'union devenaient synonymes de chantage, d'extorsion, de menaces, somme
toute de violence utilisée comme moyen de pression en relations du
travail.
Croyant, au début, que l'utilisation de ces méthodes et le
non-respect systématique des lois et
des ententes collectives n'étaient que phénomènes
passagers, les employeurs durent se rendre compte, avec le temps, que les
leaders syndicaux avaient créé une machine d'une puissance telle
que même le gouvernement n'était plus en mesure de la
contrôler. Pour les entrepreneurs en construction, les dernières
années furent remplies de frustration alors qu'ils assistaient
impuissants à la détérioration des relations entre leurs
salariés et eux-mêmes.
Administrant un budget annuel de près de $10 millions, qui ne
sert pas de fonds de grève, dotée d'une force de frappe de 250
agents d'affaires et 2,000 délégués de chantier,
contrôlant parfaitement ses 75,000 membres par les bureaux de placement
syndicaux, la clique dirigeante pouvait se permettre toutes les
extravagances.
En avril 1974, la CSN adoptait comme politique générale
l'indexation des salaires de tous les travailleurs. Réagissant à
cette nouvelle, le chef de la FTQ-construction, M. André Desjardins,
déclarait publiquement que le règlement financier qu'il avait
obtenu un an plus tôt était suffisant et couvrait largement les
augmentations du coût de la vie. Toutefois, quelques jours plus tard, la
FTQ déléguait des hommes clés sur les gros chantiers de la
Côte-Nord et on promit aux ouvriers une augmentation de $1 l'heure sans
arrêt de travail. La consultation était faite, les membres de la
FTQ voulaient l'indexation.
C'est à ce moment que les employeurs se virent présenter
cette demande. Réunis en assemblée générale, ils se
voyaient en face d'un nouvel ultimatum. Cette fois, on leur demandait $1
l'heure et, pour la plupart de nos membres, l'expérience n'était
pas nouvelle. Après tout, on leur avait bien imposé des
pénalités de plusieurs dizaines de milliers de dollars pour
l'absence d'étiquette syndicale; on leur avait imposé 185
délégués de chantier qui refusaient de travailler à
Sept-lles; on leur avait imposé des équipes de plombiers pour
assister en spectateurs à la pose des tuyaux d'égout et d'aqueduc
faite par des journaliers. Maintenant, c'était $1 l'heure,
c'est-à-dire $4,000 par semaine pour un entrepreneur ayant 100 ouvriers
sur sa liste de paie.
Aussi, pour le moins dégoûtés par l'usage que la FTQ
faisait de sa toute-puissance, les employeurs décidèrent
d'entreprendre une lutte qui dure depuis ce temps. Bien sûr, ils
étaient conscients que plusieurs d'entre eux auraient à subir des
pressions individuelles et que, fort probablement, ils auraient à
céder. Par contre, ils savaient que le fait d'accorder globalement
l'augmentation en modifiant le décret ne réglerait en rien les
problèmes de base auxquels ils faisaient face depuis plus de quatre
ans.
L'absence complète du respect du décret et de la loi, la
baisse de la productivité, qui atteignait 50% avant même le
début de la bataille pour l'indexation, l'usage abusif fait des bureaux
de placement syndicaux, l'attitude de saboteur de chantier adoptée par
les délégués syndicaux, l'absence de main-d'oeuvre
qualifiée et l'absence de formation professionnelle, la non-utilisation
systématique des structures mises en place pour régler les
conflits provenant de l'application quotidienne du décret et le recours
à la violence pour les remplacer, voilà les problèmes de
base de l'industrie de la construction.
C'est une mentalité qu'il fallait changer et une industrie qu'il
fallait civiliser. Rien, somme toute, qui s'achète avec $1 l'heure.
Les employeurs n'apprirent que plus tard la stratégie
précise de la FTQ.
La bataille de l'indexation visait à détourner l'opinion
publique du saccage de LG-2 et à faire pression sur le gouvernement pour
éviter les foudres d'une commission d'enquête qui irait au fond
des choses. L'élite syndicale en profitait pour repolir son image, car
la cause de l'indexation était bien vue de la presse et du public.
Au milieu de juin 1974, c'est la grève générale. Le
20 juin, le premier ministre demande aux entrepreneurs de retourner sur les
chantiers. Selon M. Bourassa, la FTQ a compris le message et sera, à
l'avenir, respectueuse des lois et du décret. Pendant ce temps, le
ministre du Travail organise une rencontre des parties. Toutefois, la FTQ a une
autre idée en tête, comme nous l'indiquent les propos tenus par M.
André Desjardins à Me Fernand Morin, le 21 juin 1974, et nous
citons: "Mais d'une manière ou d'une autre, quosque j'veux c'é
que le Louis va les contrôler pour qu'y ait ben d'Ia perte de temps
à table de négociations parce que j'ai rien à gagner
à table de négociations. Ben que j'm'en aille par là pour
que j'aille signer des conventions particulières, c'é ben plus
profitable pour moé. J'ai pas d'affaire à aller là
moé. Moé j'ai ainque à crier si s'assisent pas. Si
s'assisent pis sont... pis sont réellement de bonne foi, chu
fourré ben raide". Fin de la citation.
Fait à signaler, dans les semaines qui suivirent, le
ministère du Travail participa à des rencontres privées
entre des entrepreneurs industriels et la FTQ. L'objectif était la
signature de miniententes qui, selon le ministère, seraient suivies
d'amendements à la loi, qui les rendraient légales. Suite aux
pressions exercées, plusieurs miniententes furent conclues, verbales ou
écrites. Dès que certains ouvriers obtinrent les premiers $0.50,
il devint facile de convaincre les autres qu'ils se devaient de l'obtenir eux
aussi. Et les pressions se continuèrent ainsi, pour aboutir à
l'adoption de la loi 201.
Aujourd'hui, le ministre du Travail s'apprête à modifier le
décret de la construction. Devant ce fait et en conclusion à cet
exposé, nous désirons faire les commentaires suivants:
La politique de laisser-faire et de règlements à tout prix
du gouvernement, de même que l'absence de fermeté de ce même
gouvernement dans la mise en application des lois expliquent, pour une large
part, la situation anarchique que nous connaissons. Actuellement, le
gouvernement s'applique à faire respecter toutes les lois sauf celles du
travail parce qu'un conflit ouvrier présente presque toujours certains
dangers d'ordre politique. On feint d'ignorer l'existence de conflits ouvriers,
c'est pourquoi ils pourrissent indéfiniment. En présence de
gestes carrément illégaux, le ministère du Travail, le
ministère de la Justice, les tribunaux et la police se passent le
problème comme s'il s'agissait d'une grenade sur le point de sauter. Ce
disgracieux spectacle devait inévitablement aboutir à la
situation anarchique qui afflige l'industrie de la construction de-
puis des années et qui commence à s'implanter dans
d'autres secteurs. Nous ne sommes pas partisans du légalisme à
outrance. Toutefois, nous sommes fermement convaincus que certaines
règles du jeu devront être respectées pour que des
relations de travail civilisées reprennent place dans l'industrie de la
construction.
Les problèmes fondamentaux que nous avons
énumérés plus haut et, en particulier, celui de la faible
productivité ne peuvent pas trouver remède dans les amendements
que le ministre va apporter au décret. De ce côté, l'espoir
réside dans les futures recommandations de la commission Cliche.
Lorsque le porte-parole de la FTQ affirme que 70% des travailleurs de la
construction ont déjà réussi à s'entendre sur une
forme d'indexation avec leur employeur ici, le porte-parole de la FTQ a
dit tantôt que c'était 70% de ses membres; sans doute que dans
certaines déclarations publiques il y a eu un lapsus, une erreur qui
s'est glissée, du moins, suffisamment de lapsus pourque l'opinion
publique soit convaincue que c'est 70% de tous les travailleurs il
cherche à induire en erreur les travailleurs eux-mêmes et à
influencer le ministre du Travail par de fausses données. Nous sommes en
mesure d'affirmer qu'un maximum de 20% à 25% des travailleurs ont des
conditions de travail supérieures à celles du décret. De
plus, ces traitements spéciaux ne sont pas le fruit d'entente à
l'amiable, mais celui de pressions illégales faites sur les
entrepreneurs.
Si, d'une part, nous constatons, comme tout le monde, une forte
augmentation du coût de la vie en 1973 et 1974, il est également
vrai que les salariés de la construction reçoivent
déjà des salaires beaucoup plus élevés que ceux des
autres industries. En six mois de travail, le salarié de la construction
touchera $7,000 s'il refuse les heures supplémentaires. La plupart des
travailleurs ne gagnent même pas autant en un an.
En plus d'avoir un taux de salai re élevé, l'ouvrier de la
construction bénéficie d'augmentations annuelles
supérieures à celles des autres industries. Au cours des cinq
dernières années, les salaires ont augmenté de plus de 12%
annuellement dans la construction, dans la province.
Puisque c'est le phénomène de l'inflation qui nous
amène ici, il est intéressant de souligner que chaque
augmentation nette des salaires pendant ces cinq années,
c'est-à-dire la partie se situant au-dessus de l'augmentation du
coût de la vie, était accompagnée d'une baisse de
productivité constante.
Il faut aussi souligner le fait que, même si leur rendement est
inférieur à celui des salariés des autres provinces, les
ouvriers de la construction du Québec sont globalement mieux
rémunérés. En effet, hors du Québec, environ 64%
des travailleurs de la construction ne sont pas syndiqués et leur
salaire se situe autour de $1.50 au-dessus du salaire minimum. Au
Québec, la syndicalisation est obligatoire et tous
bénéficient des taux du décret.
La loi 201 donne à l'Etat le pouvoir d'augmenter
unilatéralement les taux du décret et, par conséquent, les
coûts de la main-d'oeuvre. Qu'advient-il cependant des entrepreneurs qui
ont des contrats à prix fixe et dont les soumissions furent
basées sur les taux du décret actuel? Une augmentation de salaire
de $1 l'heure signifie une augmentation des coûts de main-d'oeuvre de
$100 millions à la fin de l'année, et ce chiffre est
conservateur. A cela, il faut ajouter 25% d'avantages sociaux. Qui donc paiera
la note?
Ce qui est plus important encore, c'est que toute augmentation consentie
à ce moment-ci constituera une autre victoire pour les méthodes
fortes de la FTQ construction, prouvera une fois de plus aux ouvriers que le
chantage s'avère un moyen sûr d'obtenir satisfaction etque, plus
le chantierest important, plus on peut être exigeant.
Souvenons-nous que, si le Québec se prépare à
donner des dizaines de millions de dollars par année, il n'obtient en
retour aucune garantie de paix syndicale. Après tout, le Québec,
lui, n'est pas en mesure d'exiger quoi que ce soit de la FTQ construction. Par
conséquent, messieurs, nous nous reverrons bientôt car le ministre
du Travail ne tardera pas à être d'avis, à nouveau, que
l'intérêt public le commande. Merci.
Le Président (M. Séguin): Je vous remercie. M. le
ministre.
M. Cournoyer: Si je comprends bien, d'après l'opinion de
l'Association de la construction de Montréal, la CSN ne demande rien.
C'est seulement la FTQ qui demande quelque chose dans la question
d'indexation.
M. Langlois: Non. Effectivement, le mémoire
spécifie que la CSN a été, en fait, la première
à demander l'indexation, au mois d'avril 1974.
M. Cournoyer: C'est ce dont je me souvenais mais, étant
donné l'insistance sur la FTQ construction, je pensais que vous aviez
oublié que la CSN était aussi partie, et la CSD aussi. Les trois
parties du côté syndical demandent une formule d'indexation. On ne
s'entend peut-être pas, mais elles demandent une formule
d'indexation.
Est-ce que les trois parties demandent cela, du côté
syndical?
M. Langlois: Oui, d'accord.
M. Cournoyer: II y a une question qu'il m'intéresse un peu
de poser au représentant de l'Association de la construction de
Montréal en particulier. Admettons que, pour une raison ou pour une
autre, la FTQ construction n'aurait pas connu l'essor qu'elle a connu avec les
moyens qui sont révélés devant la commission Cliche;
est-ce qu'il n'y aurait pas quand même eu, à cause des formules de
sécurité syndicale, une totale syndicalisation des
employés de la construction?
M. Langlois: La sécurité syndicale, de fait, a
été conclue dans le décret et, effectivement, ce n'est pas
nécessairement le premier qui a amené l'autre mais plutôt
le deuxième qui a amené le premier. C'est-à-dire que le
système du bill 290 a créé, possiblement, je le
répète, une sorte de monstre syndical.
M. Cournoyer: Mais est-ce que ce monstre syndical n'a pas
été...
M. Langlois: Je parle en termes de nombre, évidemment.
M. Cournoyer: Oui, mais est-ce qu'il n'a pas été
créé aussi du côté patronal, le même monstre?
On est quand même en face, en vertu du bill 290, de personnes qui
étaient nommées comme représentants exclusifs, du
côté des employeurs, par un certain nombre d'associations qui y
étaient nommées et, du côté des syndicats, par la
FTQ et la CSN.
A partir de ce moment-là, la première convention qui a
été signée, est-ce qu'elle ne comportait pas que tout ce
monde devait appartenir à l'un ou à l'autre et que, du
côté des syndicats...
M. Langlois: Oui.
M. Cournoyer: ... on convenait que tout le monde devait
être dans la FTQ ou la CSN en vertu des principes de liberté
syndicale qu'on avait établis dans la loi 290. Tout le monde devait
être là. Après cela, on a fait un régime patronal
où tout le monde devait être membre des associations
patronales.
M. Langlois: Effectivement, du côté syndical, il y
avait deux syndicats. Du côté patronal, à ce
moment-là, il y avait cinq associations patronales
représentatives.
M. Cournoyer: Si je suis votre raisonnement, serait-il
préférable qu'il y ait cinq ou six syndicats? Comme cela, ils
seraient bien divisés de l'autre bord. Non?
M. Langlois: Absolument pas. Ce n'est pas le point où nous
voulons en venir.
M. Cournoyer: En fait, vous avez constaté l'augmentation,
non pas éhontée... Je n'ai pas à mettre en doute, à
ce moment-ci, les moyens utilisés pour obtenir des membres. Je pense que
M. Bourdon va s'arranger avec cela tantôt; c'est son problème.
Mais il reste une chose, à l'époque du bill 290, il y avait deux
centrales syndicales qui se partageaient tout le monde ouvrier et il y avait
cinq associations patronales qui se partageaient tout le monde patronal. Le
problème qu'il y ait eu cinq associations patronales à
l'époque, est-ce qu'on peut blâmer les syndicats d'avoir cinq
associations patronales et seulement deux syndicats?
M. Langlois: Premièrement, il y avait cinq associations
patronales et il n'y a pas eu, parmi ces cinq associations patronales qui sont
maintenant six, création d'une structure uniforme ou, si vous voulez,
d'une structure équivalente à la structure syndicale qui se
créait, qui connaissait son essor pour qu'on arrive jusqu'au bill 9
où on a connu les résultats de tout cela, c'est-à-dire 72%
à la FTQ construction et tout ce que cela pouvait...
M. Cournoyer: Avant le bill 9...
M. Langlois: ... impliquer au point de vue du droit de veto et de
tout cela.
M. Cournoyer:... où est-ce que vous étiez, vous de
l'Association de la construction de Montréal?
M. Langlois: Nous avions, à ce moment-là, une
entente avec l'Association des constructeurs de routes et grands travaux du
Québec pour fins de relations de travail.
M. Cournoyer: Mais avant cela, où étiez-vous?
M. Langlois: Avant cela, nous étions une des associations
régionales, bien que je ne tienne pas à m'avancer
là-dessus particulièrement, parce que vous savez que je
n'étais pas là.
M. Cournoyer: Vous ne voulez pas. Votre compagnon de gauche
était là, lui.
M. Langlois: Nous étions, à ce moment-là,
avec la Fédération de la construction du Québec.
M. Cournoyer: Comment se fait-il que vous soyez partis de
là? Vous avez augmenté le nombre d'associations patronales
à ce moment-là, donc divisant davantage le monde patronal.
Pourquoi êtes-vous partis de là?
M. Langlois: Cela n'a rien à voir avec la grosseur,
l'importance, le rôle, la représentativité...
M. Cournoyer: C'est seulement une affirmation. C'est parce qu'il
n'y avait que deux centrales syndicales qu'à un moment donné il y
a eu un monopole à deux. C'est bien sûr que, lorsqu'on se divise
70,000 ou 80,000 personnes, il est possible qu'on arrive au moins à
40,000 de chaque côté, à 50%. Cela est possible. Mais,
quand on se divise 15,000 employeurs en cinq, en six, en sept et en huit, il
n'y a pas de facilité de créer des monopoles de ce
côté, c'est pas mal sûr.
M. Langlois: Ce n'est pas une question du nombre de membres que
la FTQ possède. Cela n'a rien à voir. Elle pourrait
posséder le même nombre de membres et quand même, agir d'une
façon complètement différente. On espère que ce
sera...
M. Cournoyer: M. Langlois, on parle des méthodes et je lis
ceci: "C'est en observant l'essor rapide de la FTQ construction au cours des
cinq dernières années que l'on peut comprendre l'évolution
des relations de travail dans notre industrie jusqu'à ce qu'elles
aboutissent à la jungle que nous connaissons aujourd'hui".
M. Langlois: On fait référence aux méthodes
et non pas...
M. Cournoyer: Maintenant, pourriez-vous me décrire la
jungle qui existait avant le bill 290? Il devait y en avoir une à
l'époque, étant donné que les cinq associations patronales
qui y étaient nom-
mées, les deux centrales syndicales, ont décidé de
mettre fin à la jungle qu'il y avait avant. Qu'est-ce que
c'était, la jungle avant? Nous sommes peut-être dans une autre
sorte de jungle, mais qu'est-ce qu'il y avait avant? Je suis bien sûr que
M. Dion va vous donner la réponse à ma question. Qu'est-ce que
c'était la jungle qu'il y avait avant, M. Langlois?
M. Langlois: Je ne suis certainement pas en mesure de vous parler
de la jungle qu'il y avait avant; je n'étais pas là, je ne l'ai
pas connue. Je l'ai connue à partir de 1970-71.
M. Cournoyer: Ce que j'essaie de vous dire, M. Langlois, ou ce
que j'essaie de vous poser comme problème actuellement, c'est que le
bill 290 qui est exécré par une grande foule de personnes
on peut se regarder, vous et moi, en face et se parler; il est
exécré le bill 290 était une réponse
souhaitée et c'est indépendamment des personnes les unes en face
des autres. Vous n'étiez pas là. Donc, je vous pose comme
problème: Qu'est-ce que voulait faire le bill 290? Il voulait mettre de
l'ordre, avec plus ou moins de succès, j'en conviens, dans une jungle
qui existait.
Aujourd'hui, nous sommes en face d'une autre jungle, selon votre
affirmation. Cette autre jungle, est-ce que vous voulez établir qu'elle
est due aux gens de la FTQ construction? Est-ce que c'est ça que vous
voulez établir actuellement? A leur attitude et à leurs
méthodes?
M. Langlois: Exactement. Mais on a également
souligné le fait que ça prend le respect de certaines
règles du jeu pour qu'il n'y ait pas de jungle et qu'effectivement
l'attitude assez complaisante du gouvernement, règle
générale, face au respect de la loi, a largement contribué
à expliquer la situation de jungle dans laquelle on se trouve
présentement.
M. Cournoyer: D'accord. C'est notre faute. M. Burns: Une
admission.
M. Cournoyer: Non, c'est-à-dire que j'admets qu'il dit que
c'est ma faute. Même pas.
Le Président (M. Séguin): Le député
de Maisonneuve.
M. Burns: Alors, M. Langlois, je ne me lancerai pas dans
l'aspect, je dirais quasiment idéologique de votre mémoire parce
que, en tout cas... Je pourrais vous demander, à vous, comment l'ACM
alors qu'elle reproche aux dirigeants syndicaux d'être incapables
de mettre à profit sainement les importants pouvoirs sociaux,
économiques, politiques qu'ils s'étaient donnés a
fait cela, mais j'ai l'impression que ça ne nous mènerait nulle
part, à moins que vous vouliez absolument y répondre.
M. Langlois: Non, je n'y tiens pas particulièrement.
J'attends vos questions avant d'y répondre.
M. Burns: D'accord. Non, mais je vous dis à quel genre de
questions pourrait prêter votre mémoire, du moins dans ses grandes
lignes. Je vais essayer de m'en tenir simplement à l'aspect factuel de
votre mémoire et principalement à l'affirmation que vous faites
à la page 7 de votre mémoire: "Nous sommes en mesure d'affirmer
qu'un maximum de 20% à 25% des travailleurs ont des conditions de
travail supérieures à celles du décret." Je relis cela
également avec votre affirmation à la page 4 qui dit: "Par
contre, ils savaient évidemment vous parlez des employeurs
que le fait d'accorder globalement l'augmentation, en modifiant le
décret, ne réglerait en rien les problèmes de base
auxquels ils faisaient face depuis plus de quatre ans." En page 4, vous dites
que les employeurs refusent d'accorder ces demandes parce qu'ils savaient que
cela ne réglerait rien; vous dites, à la page 7, qu'il y a
à peine 20% à 25% des travailleurs qui bénéficient
déjà de conditions supérieures au décret
contrairement à ce qu'a affirmé le représentant de la FTQ
devant nous tout à l'heure.
J'aimerais savoir, M. Langlois, où vous prenez vos chiffres de
20% à 25% des travailleurs. Est-ce que vous prenez ça à la
CIC?
M. Langlois: Non, il s'agit de chiffres que nous prenons à
partir de la masse salariale payée...
M. Burns: Est-ce que c'est seulement pour votre association?
M. Langlois: Non, j'y arrive, la masse salariale payée par
les membres de l'ACM et par les membres des deux corporations qui,
jusqu'à maintenant, ont été les seules, à toutes
fins pratiques, à être affectées par la bataille de
l'indexation. A ce moment, selon les consultations que nous avons faites
à l'intérieur de notre organisation et que les deux corporations,
par l'entremise de l'ASECQ, ont faites dans leurs organisations, on arrive aux
chiffres qu'environ la moitié des travailleurs, dans chacune des deux
organisations qui sont à l'emploi des membres des organisations,
reçoivent des taux supérieurs à ceux du décret. Ce
qui veut dire que, dans notre cas, la moitié de 31% et, dans le cas des
deux corporations, la moitié de 20% à 22%. C'est comme ça
qu'on arrive à 20% à 25%. J'insisterais là-dessus, par
contre...
M. Burns: Voulez-vous dire de l'ensemble des travailleurs de la
construction?
M. Langlois: Oui.
M. Burns: Pour l'ensemble.
M. Langlois: Oui, dans mon cas, c'est l'ensemble des travailleurs
de la construction. De ce côté, c'est très évident
que ni du côté de la FTQ, ni d'aucun côté,
actuellement, qui que ce soit ne possède le moyen de savoir avec
exactitude et peut affirmer, autant d'une façon très
précise, et c'est vrai aussi pour mes chiffres, en ce sens que c'est une
consultation qu'on fait à partir de rencontres qu'on a avec des
entrepreneurs, rencontres qu'on a constamment, des réunions de sections
et de sous-sections où les gens viennent, et où on leur pose la
question.
M. Burns: En somme, vous faites une espèce d'extrapolation
sur certaines données que vous avez? Ou bien, au moins, à
l'intérieur de votre association, avez-vous des chiffres précis?
C'est ce que je veux dire.
M. Langlois: Non, on ne possède pas de chiffres
précis sur...
M. Burns: Vous faites une extrapolation tout simplement.
M. Langlois: Je dis que c'est le résultat d'une
consultation qu'on a faite, mais qui ne peut pas donner lieu à des
chiffres précis, en ce sens que jamais on ne saura si l'entrepreneur
nous dit qu'il le paie ou qu'il ne le paie pas. Dans le contexte où l'on
se trouve, il y a beaucoup d'entrepreneurs qui, forcément, vont
être très réticents à donner souvent, même
à nous, des informations.
M. Burns: Justement, c'est l'autre question que je me posais.
Est-ce qu'il n'est pas exact, M. Langlois, que beaucoup des employeurs que vous
pouvez consulter sont réticents à vous donner ou à vous
avouer qu'ils ont accordé cette augmentation parce qu'ils risquent, non
pas du côté syndical pour une fois, mais du côté
patronal, un certain nombre de représailles?
M. Langlois: Cela a pu être vrai pendant un bout de temps,
mais plus maintenant.
M. Burns: Ce n'est plus vrai cela?
M. Langlois: Ce n'est plus vrai du tout dans ce sens que
l'atmosphère a changé considérablement. Cela a
été vrai au début, possiblement, lorsqu'ils ont
commencé à avoir des pressions sur le dos pour payer
l'indexation. A ce moment-là, tout le monde avait peur de tout le monde,
mais aujourd'hui, ce n'est plus le cas.
M. Burns: Est-ce qu'il y avait effectivement de la pression qui
s'exerçait sur les employeurs par vos associations patronales, pressions
qui visaient à ce qu'ils n'acceptent pas d'accorder l'indexation? Et
est-ce que cela ne serait pas une conséquence de vos chiffres
différents de ceux de la FTQ, eux qui se basent sur les salaires qui
je présume que c'est comme cela que la FTQ est arrivée
à ces chiffres sont payés à leurs membres et sur la
connaissance qu'ils ont eue de certaines modifications de conditions de
travail, alors que vous, vous vous basez sur l'information que vous obtenez de
vos entrepreneurs ou constructeurs membres?
M. Langlois: Qui eux, paient les salaires en question et, comme
je vous le dis, non, cette méfiance-là, si elle a jamais
existé dans de rares cas, il n'en est absolument pas question
chez-nous.
M. Burns: M. le Président, je constate qu'il est onze
heures, je vous propose qu'on suspende nos travaux. Non, M. le
Président, je pense que je ne donnerai pas mon consentement si on
dépasse onze heures.
J'ai dit au ministre du Travail, quand il m'en a parlé plus
tôt, s'il était resté à peine une association
à entendre et que cela aurait pris trois quarts d'heure ou une heure, je
n'aurais pas eu d'objection à poursuivre jusqu'à onze heures;
mais par contre, on est rendu à la troisième association, il y en
a encore cinq ou six...
M. Cournoyer: M. le Président, y aurait-il moyen de finir
celle-ci.
M. Burns: Non, je ne pense pas. Lui, il a des questions et moi je
n'ai d'ailleurs pas fini.
M. Cournoyer: Je vous demandais s'il y avait moyen de terminer
avec cette association.
M. Burns: On reviendra demain. M. Cournoyer: D'accord,
d'accord!
M. Roy: M. le Président, je pense qu'étant
donné que les gens vont être obligés de revenir
demain...
M. Cournoyer: D'accord, il n'y a pas de problème.
M. Roy: La commission ne peut pas ajourner sine die ce soir.
M. Cournoyer: Non, on va ajourner demain.
Le Président (M. Séguin): Alors, c'est le
consentement...
M. Cournoyer: C'est-à-dire que c'est le consentement qui
n'est pas obtenu pour continuer. Je ne suis toujours pas pour donner mon
consentement pour ne pas continuer.
M. Burns: Quelle heure, M. le Président? M. Cournoyer: Dix
heures.
Le Président (M. Séguin): Alors la commission
ajourne ses travaux à demain, mercredi, dix heures.
(Fin de la séance à 22 h 59)
Référer à la version PDF page B-55
Référer à la version PDF page B-56