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Version finale

31st Legislature, 2nd Session
(March 8, 1977 au December 22, 1977)

Thursday, December 15, 1977 - Vol. 19 N° 290

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude du projet de loi no 45 — Loi modifiant le Code du travail et la Loi du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre


Journal des débats

 

Etude du projet de loi no 45

(Onze heures quarante minutes)

Le Président (M. Clair): A l'ordre, madame et messieurs!

La commission permanente du travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration est réunie pour continuer l'étude, article par article, du projet de loi no 45 intitulé: Loi modifiant le Code du travail et la Loi du ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

Les membres de cette commission sont M. Bellemare (Johnson), M. Bisaillon (Sainte-Marie), M. Brochu (Richmond), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Chevrette (Joliette-Montcalm), M. Couture (Saint-Henri) remplacé par...

M. Chevrette: M. Godin de Mercier.

Le Président (M. Clair): ... M. Godin (Mercier). M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes), M. Forget (Saint-Laurent), M. Gosselin (Sherbrooke), M. Johnson (Anjou), M. Jolivet (Laviolette), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Laplante (Bourassa)...

M. Chevrette: Remplacé par M. Mercier de Berthier.

Une Voix: II était dans le corridor tantôt.

Le Président (M. Clair): M. Laplante (Bourassa), M. Lavigne (Beauharnois), M. Mackasey (Notre-Dame-de-Grâce), M. Marois (Laporte) remplacé par M. Mercier (Berthier).

M. Chevrette: Par M. Mercier (Berthier).

Le Président (M. Clair): M. Pagé (Portneuf) et M. Roy (Beauce-Sud).

Au moment où nous avons ajourné nos travaux hier, nous en étions à l'étude de l'article 28 du projet de loi.

M. Chevrette: M. le Président...

Le Président (M. Clair): Oui, M. le député de...

M. Chevrette: J'aimerais avoir une directive, M. le Président. Est-ce qu'on a le droit de remplacer quelqu'un à la reprise des travaux, dans l'après-midi?

M. Forget: Non, c'est au début de la séance seulement.

M. Pagé: Voulez-vous remplacer M. Roy?

M. Chevrette: Dans ce cas-là, on va faire tout de suite une substitution. Cela va être M. Gosselin qu'on va remplacer. M. Mercier (Berthier) par M. Gosselin...

M. Johnson: M. Mercier de Berthier remplace M. Gosselin de Sherbrooke.

Le Président (M. Clair): M. Marois (Laporte) n'est pas remplacé pour les fins de cette séance. Cependant, M. Gosselin (Sherbrooke) est remplacé par M. Mercier (Berthier). Vous aviez une demande de directive?

M. Chevrette: C'était cela. C'était pour voir si...

Le Président (M. Clair): Au moment où nous avons ajourné nos travaux, nous en étions à l'étude de l'article 28. Le député de Saint-Laurent nous avait annoncé une motion d'amendement concernant le paragraphe 38 de l'article 28. M. le député de Saint-Laurent.

Retenue de cotisation syndicale

M. Forget: Exactement, M. le Président. Je vais commencer par faire la lecture de l'amendement en même temps qu'on en fait la distribution, si vous voulez.

Motion d'amendement à l'article 28. "Que le paragraphe 38 de l'article 28 soit modifié en ajoutant l'alinéa suivant: Lorsqu'une association de salariés déclare une grève sans se conformer aux dispositions de l'article 46 ou lorsqu'une telle association ne prend pas tous les moyens nécessaires, compte tenu des circonstances, pour faire cesser un arrêt de travail ou un ralentissement de travail déclenché par des membres de l'association et alors qu'une grève n'a pas été autorisée en vertu de l'article 19b, l'employeur peut, par une requête motivée adressée au tribunal, obtenir une ordonnance ayant pour effet de suspendre pour quatre mois l'application du présent article. Cette requête doit être faite par écrit et copie doit être adressée au ministre et à l'association".

Le Président (M. Clair): Messieurs, je désire vous donner une petite directive. Au fur et à mesure qu'il y aura des motions d'amendements, si quelqu'un entend soulever une question sur la recevabilité d'une motion d'amendement, il devra le faire immédiatement après cette motion d'amendement, puisque je sais que les questions de recevabilité dans ce cas-ci se posent surtout quant à savoir si on remet en cause un principe du projet de loi.

Dans ce sens, le président a besoin d'être éclairé et s'il n'y a personne qui soulève la question de la recevabilité, même immédiatement après la lecture ou dans les quelques minutes qui suivent, rapidement, si le président ne l'a pas déclarée irrecevable proprio motu, il ne recevra pas d'intervention sur la recevabilité des motions.

M. Pagé: D'accord. C'est très judicieux cela.

Le Président (M. Clair): M. le député de Saint-Laurent, sur la motion.

M. Johnson:... stratégie, M. le député de Portneuf. Il accomplit son devoir.

M. Pagé: C'est cela, purement et simplement et il le fait bien son devoir.

Le Président (M. Clair): Je vous en remercie, M. le député de Portneuf.

M. Pagé: On est assuré que cela va continuer comme cela.

Le Président (M. Clair): Passons maintenant à la motion d'amendement du député de Saint-Laurent. Y a-t-il des intervenants sur la motion d'amendement du député de Saint-Laurent?

M. Forget: Je vais intervenir, M. le Président, dès que les circonstances le permettront.

Le Président (M. Clair): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Merci, M. le Président. Il y a dans l'article 38 un droit nouveau qui est instauré. Il apparaît que c'est un emprunt qui est fait à une théorie du financement des activités syndicales en vertu de laquelle, de par la loi, on rend tous les salariés membres d'unités de négociations responsables du paiement de la cotisation syndicale.

Une autre partie de la même théorie veut que ceux qui veulent se prévaloir d'une loi — en ce cas-ci c'est le Code du travail — satisfassent également aux autres obligations de cette même loi, qui a une correspondance devant exister entre, d'une part, les bénéfices, les avantages, les droits que l'on retire d'une loi, que nous confirme une loi et, d'un autre côté, l'obligation de respecter les autres dispositions de la même loi, de manière qu'il y ait correspondance, que nul ne puisse se prévaloir d'une loi qu'il ne respecte pas lui-même.

Historiquement, on connaît la formule Rand qui a souvent été mentionnée dans le contexte des amendements proposés par le ministre au Code du travail, à l'article 38; on sait qu'il s'agit d'une décision d'un juge qui, en 1946, est intervenu dans le règlement d'un conflit, en énonçant un certain nombre de règles. Le précompte syndical n'est qu'une des règles qu'il a énoncées à ce moment. Il y en avait beaucoup d'autres qui étaient destinées à accompagner le prélèvement obligatoire des cotisations syndicales.

Je pourrais le faire, mais je ne citerai pas tous les éléments de cette décision; on sait qu'elle en contient plusieurs. Elle en contient cinq ou six. Quelques-uns sont probablement tombés en désuétude et reflètent une conception qui est probablement dépassée des relations du travail. Il demeure que, si on veut se détacher de la formule Rand pour un instant, il n'apparaît pas pour autant justifié d'en retenir un seul élément, le seul élément qui accorde des droits nouveaux à l'organi- sation syndicale; il y a aussi un certain nombre de responsabilités du même organisme qui doivent être soulignées dans le même souffle.

D'ailleurs, l'expérience a démontré qu'à moins d'avoir, à l'intérieur même des dispositions du Code du travail, une espèce d'équilibre des droits et des obligations des parties, il est assez douteux de faire reposer tout cet édifice sur des interventions de caractère pénal. Nous avons eu l'occasion déjà, au moment où nous étudiions la partie du projet de loi qui traite des scrutins, lors des votes de grève, lors des décisions pour accepter ou rejeter les conventions collectives, que c'était un roseau bien fragile que de faire reposer l'application de la loi sur des poursuites pénales et des amendes.

C'est une conception du droit du travail qui tend à criminaliser, en quelque sorte, les infractions, alors que ce n'est pas du tout cela dont il devrait être question. Il devrait être question, à l'intérieur de chaque règle, d'un ensemble de mécanismes qui s'appliquent, en quelque sorte, eux-mêmes, par leur mécanisme propre, un mécanisme interne, une cohérence interne qui fait qu'on ne peut pas bénéficier des avantages de la loi à moins de la respecter également soi-même.

Dans l'amendement que nous soumettons, c'est essentiellement ce point de vue que nous développons, alors que les trois permiers paragraphes font une obligation de la retenue syndicale pour tous les membres de l'unité de négociation, syndiqués ou non, que l'association de salariés qui veut continuer de bénéficier de cet avantage — et ce doit être un avantage, puisque le législateur se donne la peine de le décréter — devrait respecter, par ailleurs, les obligations que la loi lui impose quant à certaines procédures clefs dans son fonctionnement.

Nous viendrons, un peu plus loin, lors de nos délibérations sur les mécanismes d'acquisition du droit à la grève. Dans ce mécanisme, on sait qu'il y a toute une série de procédures simplifiées heureusement par la loi 45. Nous n'aurons rien à objecter à cela, mais il y a malgré tout des règles minimales de savoir-vivre, si on veut, pour que la négociation se déroule dans un cadre civilisé.

Si une association de salariés décide, et c'est son choix de le faire, je pense que cela ne vaut pas la peine d'avoir des interdictions de ce côté. Ce serait même mieux de supprimer totalement le caractère pénal d'infractions à ces dispositions. Si une association de salariés décide de passer outre aux dispositions de la loi, quant aux délais, aux procédures et aux étapes qui doivent être normalement franchies, il serait normal, par ailleurs, qu'elle cesse de bénéficier de dispositions qui présument, — qui sont basées sur l'hypothèse implicite au moins — que les procédures normales sont suivies et utilisées.

Les deux circonstances que l'on vise, c'est l'acquisition du droit de grève, comme je l'ai indiqué tout à l'heure, et également des circonstances qui seraient susceptibles de se développer. — J'espère qu'on ne dérange personne. — Ce qui serait susceptible de se développer...

Une Voix: Est-ce qu'on pourrait suspendre? Est-ce qu'on devrait suspendre?

Le Président (M. Clair): Non, monsieur. A l'ordre, s'il vous plaît! Je suis convaincu...

M. Forget: On peut suspendre, M. le Président.

M. Pagé: Le leader du gouvernement est en train de faire des arrangements sur les heures de travaux de cette commission. On pourrait suspendre quelques minutes.

M. Burns: M. le député de Saint-Laurent, je sais que c'est très désagréable quand on parle...

M. Forget: Je comprends qu'il y a des... M. Burns: Je lui fais amende honorable.

M. Forget: II n'y a pas d'offense, M. le Président. C'est tout simplement que c'est une question de commodités pour tout le monde.

Le Président (M. Clair): M. le député de Saint-Laurent, vous avez la parole.

M. Forget: Le deuxième aspect, c'est qu'en dehors des actions officielles du syndicat, il peut y avoir des actions dites "spontanées", il peut y avoir ce que les Anglais appellent le "wild cat strike", des grèves sur le tas, comme on dit en France, je pense, des phénomènes spontanés de la base qui court-circuitent les procédures normales, internes du syndicat.

Bien sûr, on peut dire: C'est un phénomène de la nature, une espèce d'acte fortuit, de force majeure. La responsabilité de personne n'est en jeu. Il ne faudrait pas enclencher un mécanisme, certainement pas un mécanisme pénal, vis-à-vis de l'association de salariés.

Néanmoins, si on doit avoir, comme le souhaitait le député de Joliette-Montcalm, une certaine répression de l'anarchie possible dans le domaine des relations du travail, on doit supposer que l'exécutif syndical, le syndicat dans son ensemble, doit prendre les moyens pour que sa crédibilité ne soit pas mise en doute. S'il y a des actions intempestives qui sont prises spontanément par ses membres, on doit au moins demander au syndicat de prendre les moyens nécessaires pour vider cet abcès, pour régulariser les choses. S'il y a une pression tellement intense au sein d'un syndicat qu'on souhaite faire la grève, je pense qu'il y a des moyens, par des convocations d'assemblées, d'essayer de faire comprendre qu'on ira éventuellement en grève, mais qu'il faut le faire à l'intérieur de certains délais et que ceci ne préjudicie en rien aux droits de ceux qui veulent aller en grève.

Il y a une certaine obligation morale. Je n'irai pas jusqu'à dire qu'il y a une obligation qui doit être sanctionnée par des pénalités dans la loi, mais au moins une obligation morale d'agir pour le syndicat de manière que sa volonté officielle ne soit pas mise de côté et que sa crédibilité vis-à-vis de l'employeur en particulier demeure intacte, parce que c'est un élément essentiel dans la conclusion d'une convention collective.

Dans ces deux circonstances, soit une grève officielle qui doit se faire selon certaines étapes, soit une grève non officielle qui doit, à ce moment-là, être "contrôlée" et qui doit faire l'objet de certaines mesures pour la ramener dans le giron de la légalité, de la régularité des procédures internes du syndicat, il y a des obligations morales de la part du syndicat de faire des gestes, de poser des actions ou de s'en abstenir, qui devraient entraîner que, si cette obligation n'est pas honorée, si le syndicat ne s'en préoccupe pas — c'est une liberté que le syndicat devrait avoir de ne pas s'en préoccuper — on aille au-delà des procédures normales, on les ignore, on choisisse délibérément de les ignorer. Cela peut être une bonne procédure, cela peut être une bonne stratégie. Il ne faut pas exclure, M. le Président, que, dans certains cas, on puisse vouloir se placer délibérément en marge de la stricte légalité. Pourquoi pas?

Cela s'est fait dans le passé, dans tous les pays, sous tous les régimes. Parfois, cela a été une bonne stratégie de la part d'un syndicat. Je pense qu'il est odieux d'envisager des mesures pénales. A ce sujet, je pense qu'il faudrait réviser les dispositions pénales de la loi de manière à ne pas leur faire porter un poids plus considérable qu'il ne le faut.

De la même façon qu'on pourrait réviser les procédures pénales, d'un autre côté, il y a des règles du jeu qui doivent exister. Si un syndicat décide de se placer en dehors des règles du jeu, croit que c'est de bonne stratégie de le faire, tant mieux, bonne chance pour lui. D'un autre côté, il ne devrait pas continuer à bénéficier d'autres dispositions de la loi qui sont destinées à l'avantager. C'est tout simplement la règle que, si on veut mettre, temporairement au moins, le Code du travail de côté, on le fait, mais avec les implications qu'on ne pourrait pas en bénéficier pendant ce moment. On retrouvera, après un certain délai, d'ailleurs, qui n'est pas exagéré... Le juge Rand, je crois, suggérait six mois de suspension de ces choses; on dit quatre mois, mais enfin, on n'est pas à cheval sur les délais. Si trois mois paraissaient suffisants pour le ministre et qu'il voulait nous en convaincre, je n'aurais pas d'objection non plus. Ce n'est pas tellement une question de durée, c'est une question de principe; je pense que nul ne devrait pouvoir réclamer l'avantage d'une loi qu'il ne respecte pas.

C'est dans cet esprit qu'on fait un amendement qui découle tout naturellement de la première partie de l'article 38; un droit entraîne des obligations. C'est assez normal, cela existe partout comme principe général dans les lois, on ne fait de cadeau à personne. Je pense que, même avec un préjugé favorable, sans vouloir revenir là-dessus, il reste que le préjugé favorable n'est pas nécessairement une bonne approche législative. J'avais toujours entendu dire que le législateur devait au moins donner l'apparence de l'impartialité

pour vraiment jouer son rôle de façon normale. Un législateur n'est pas une faction. Ce n'est pas la prise de contrôle du pouvoir par des intérêts particuliers, normalement, et, même quand cela l'est— malheureusement, la démocratie produit de ces accidents, à l'occasion—ordinairement, les gens ont la décence de ne pas s'afficher publiquement comme étant partiaux et prévenus.

Les styles évoluent avec le temps. Probablement que nos valeurs, notre crise des valeurs dont tout le monde parle prend des aspects insoupçonnés, même dans notre vie publique, et nous fait considérer comme acceptables des comportements et surtout des attitudes qui auraient été jugés, à leur face même, condamnables, il n'y a pas tellement longtemps, dans la plupart des pays civilisés. Encore une fois, il faut faire la part du feu, probablement; du moins, c'est probablement le raisonnement que tiennent certaines personnes dans la vie publique de nos jours. Il faut faire la part du feu. Il faut savoir sacrifier ce que, de toute façon, on ne pourra pas défendre et avoir l'air d'être d'accord. Je ne veux pas faire de procès d'intention. Je veux faire simplement des réflexions sur une certaine façon de présenter les choses, une façon que nous ne cherchons pas à contrer par une autre, une attitude correspondante et en sens opposé. Nous voudrions simplement voir, dans nos lois du travail en particulier, et c'est sérieux, une approche qui n'est pas, évidemment, biaisée dans un seul sens, qui représente une appréciation équitable des devoirs et des obligations que tout sujet de droit doit avoir. Il ne peut pas y avoir des lois qui créent seulement des avantages ou seulement des obligations. Il doit y avoir un équilibre.

C'est dans une disposition comme celle-ci, dans un amendement comme celui-ci, qu'on devrait voir, qu'on devrait sentir l'équilibre de façon très visible et de façon très manifeste, et surtout de façon très effective. Ce n'est pas suffisant de faire appel à de bons sentiments, à la confiance, etc. Il s'agit que l'équilibre en question soit un équilibre réel, un équilibre qui ne dépend pas des bons sentiments, mais qui soit concret. Il nous semble qu'une mesure comme celle-là est concrète. Elle n'est pas punitive. Comme je le dis, elle pourrait se substituer avec avantage à plusieurs mesures pénales qu'on retrouve dans la loi, mesures pénales qui n'ont pas leur place, dans le fond, dans les relations du travail, à strictement parler, et dont l'inefficacité, d'ailleurs, a été abondamment démontrée dans le passé.

Le Président (M. Clair): Le ministre du Travail.

M. Johnson: M. le Président, je n'ai pas à argumenter sur la recevabilité de cette motion, bien que l'introduction d'une référence à l'article 19b, à mon avis, rende probablement cette motion discutable quant à sa recevabilité. Evidemment, l'effet du respect ou du non-respect de l'article 19b...

On a bien dit, quand on a présenté ce 19b, qu'il s'agissait d'une mesure qu'on considère, au chapitre de la démocratie syndicale, comme devant s'appliquer partout, même si on sait que, de façon générale, elle est respectée. C'est pour cela qu'on a restreint les conséquences de sa non-observation. Or, l'amendement du député de Saint-Laurent introduit une extension des effets de la non-observation de 19b, y compris d'ailleurs l'avis d'information envoyé au ministre quant à la décision de prendre une grève, ce qui n'est, dans le fond, véritablement qu'une formalité pour les fins de renseignements du ministère, et qui entraînerait des conséquences assez désastreuses pour le syndicat.

Quant au rattachement — et je pense que c'est là l'essentiel de l'amendement du député de Saint-Laurent — de la cotisation syndicale à l'article 46, c'est-à-dire au respect des délais prévus pour la grève, en d'autres termes, on vise toute grève qui ne respecterait pas entièrement les dispositions du code, je pense qu'il s'agit d'une sanction qui, selon l'esprit du député de Saint-Laurent, traduit peut-être une conception des relations du travail qui est un peu loin de la réalité concrète de ce que sont les relations du travail. On sait qu'à l'occasion, même s'il ne s'agit pas de les inciter, la grève dite illégale, qui ne respecte pas l'article 46, peut donner lieu à des accommodements, à des arrangements, dans un contexte d'entente mutuelle des parties quant à leur règlement, et que l'introduction d'une telle disposition risquerait d'être abusive contre le syndicat, risquerait finalement de mettre le syndicat et l'entreprise dans une situation de fait où elle ne cherche pas le règlement concret et l'harmonie suite à un débrayage illégal qui pourrait avoir été causé, comme on le sait, dans certains cas, par un abus du pouvoir de gérance ou comme cela peut être fait pas de si bonne foi de la part du syndicat. Cela peut être aussi dans un climat dit de provocation ou dans un climat d'insatisfaction généralisée et fondée parfois qui donne lieu, justement, à un arrangement entre les parties après cette forme d'avertissement que lance le syndicat à l'employeur.

Or, l'effet de la motion du député de Saint-Laurent il est, à mon avis, regrettable qu'il soit si sévère. Finalement, on formalise au plus haut point les relations entre les parties. Encore une fois, ce n'est pas cela, l'économie du Code du travail. L'économie du Code du travail, ce n'est pas l'interventionnisme, la multiplication des infractions, la multiplication des recours possibles. Le Code du travail, ce sont des balises générales données à des parties pour que, librement, elles consentent et évoluent dans un contexte. Le contexte est plus ou moins bien défini selon l'évolution de la société, et je pense qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances, de formaliser l'article 46. Quand on en arrivera au Québec, un jour, peut-être, à définir ce qu'est véritablement une grève légale, puisqu'on n'a pas de telles définitions dans le code et que ce qu'on a, c'est que la légalité dépend finalement des délais prévus à l'article 46, mais il ne se réfère pas à autre chose, il y aura peut-être lieu, dans notre société, de se poser la question de ce qu'est une grève légale, qu'un lock-out légal, au-delà du simple respect mécanique de certaines dispositions du code quant à des

délais. Quand on arrivera là, on pourra peut-être penser à des mécanismes de sanction. Je pense que c'est...

M. Forget: Si vous me permettez, on ne pourra pas faire cela au nom du non-interventionnisme.

M. Johnson: Absolument, effectivement, mais si notre société décidait, en revoyant l'ensemble de ses lois du travail, et si l'évolution dans notre société nous amenait à considérer que l'Etat doit être interventionniste dans les relations du travail plutôt qu'être un peu un support, à ce moment-là, on pourrait considérer le type de sanction qu'évoque le député de Saint-Laurent. Mais, justement, ce que je dis, ce n'est pas cela l'économie du Code du travail, ce matin. Ce n'est pas cela la réalité des relations du travail au Québec. Pour ces raisons, M. le Président, je demanderai qu'on rejette la motion d'amendement du député de Saint-Laurent.

Le Président (M. Clair): Le député de Joliette-Montcalm, le député de Johnson et le député de Mont-Royal.

M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Bellemare: Je n'ai pas demandé la parole.

Le Président (M. Clair): Je vous l'offrais. Alors, le député de Joliette-Montcalm et le député de Mont-Royal.

M. Chevrette: Je voudrais attirer l'attention des membres de la commission sur un fait. On laisse, au tribunal, le soin d'apprécier la légalité ou l'illégalité de la prise du vote secret, en disant au troisième paragraphe de l'article 19b: "compte tenu des circonstances". Si on laisse apprécier les circonstances par un tribunal, comment peut-on, dans un article subséquent, en arriver à dire: Ceux qui ont une suspension de quatre mois pour la cotisation syndicale, ceux qui ont été illégaux. Cela voudrait donc dire que cette suspension pourrait venir, dans le concret, combien de mois après que le tribunal aura jugé des circonstances? C'est irréaliste.

Je vous donne un exemple pour me faire comprendre. Je suppose qu'un vote se prend de façon assez rapide et que les 48 heures du préavis n'ont pas été respectées, selon le troisième paragraphe de l'article 19b. Il y a un plaignant et c'est le seul salarié dans le cas où le procureur général peut se plaindre. Il y en a un qui se plaint; ça s'en va devant le tribunal et ça traîne pendant trois ou quatre mois. Est-ce que l'amendement du député de Saint-Laurent aurait pour effet d'attendre le jugement du tribunal avant de dire que la suspension des cotisations se produit? Théoriquement, ça pourrait être ça. Je trouve que, sur le plan concret, ça ne tient pas, ça ne résiste pas à l'analyse.

Deuxièmement, je me demande pourquoi on profite du précompte syndical pour essayer de régler la question d'une grève inégale. Si on voulait, théoriquement — je ne suis pas intervenu au niveau de la recevabilité — j'aurais dit qu'elle est prématurée. Qu'il attende au chapitre des grèves; il traitera de la légalité ou non des grèves avec ses pénalités.

Ce sont deux raisons que je voulais ajouter pour montrer que c'est irrecevable.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président, l'article 38 permet ou impose l'obligation, à un employeur, de retenir sur le salaire de tout salarié le montant qui est spécifié par cette association. C'est donc une protection pour une association de salariés; c'est un certain droit qui est créé pour cette association. Tout droit comporte une responsabilité. On ne peut pas seulement créer des droits sans avoir une responsabilité correspondante.

L'amendement du député de Saint-Laurent veut préciser que le droit qui est créé ici, que la protection qui est créée pour l'association, doit comporter certaines responsabilités de la part des salariés, de la part de cette association, et cette responsabilité est de se conformer à la loi. C'est une responsabilité très minime, ce ne sont pas des responsabilités additionnelles, ce ne sont pas de responsabilités onéreuses! On n'impose pas d'amende! On n'impose pas des choses qui sont difficiles ou impossibles à mettre en vigueur! C'est le respect de la loi. Je pense que c'est élémentaire. Si on ne fait pas ça, on crée un déséquilibre, on donne certains avantages, on crée certains droits et on dit: Vos droits vous les avez, qu'importent les conséquences de vos actions, qu'importe si, délibérément, vous refusez, même intentionnellement, à vous conformer à la loi.

Pour cette raison, je pense qu'il est tout à fait normal de dire à l'association que, si elle veut avoir ce droit, elle doit respecter la loi. C'est ce que dit l'amendement du député de Saint-Laurent. Je ne comprends pas les arguments du ministre du Travail en ce qui concerne la déclaration ou le pouvoir de définir une grève illégale. S'il y a une entrave à un des articles, et que les parties ne s'entendent pas, c'est pour cela que nous avons des tribunaux, M. le Président; et si l'employeur agit d'une façon où lui, a abusé de son droit, il va être amené à se conformer à l'article 38 et à l'amendement, même si c'est rétroactivement.

Il n'y a aucun doute que certains cas de grèves illégales peuvent être douteux, mais il y a d'autres cas où c'est absolument clair que l'association ne s'est pas conformée aux dispositions de la loi. Je ne pense pas que l'Etat doive favoriser une association, un secteur de la population aux dépends de l'autre. J'appuie le principe qu'on devrait être, autant que possible, impartial et donner le même avantage à toutes les parties de notre société. S'il y a des abus, c'est à ce moment-là que l'Etat peut promulguer certaines lois pour corriger ces abus.

Quand le ministre dit que l'Etat n'est pas interventionniste, je pense bien que je ne peux pas accepter qu'on soit interventionniste. Regardez

toutes les lois, regardez toutes les procédures, toutes les interventions de l'Etat. L'article 38 même que le gouvernement propose, c'est une intervention. Il est interventionniste. Ce n'est pas un argument, le ministre dit: Je veux intervenir seulement dans certains cas. Il ne peut pas dire que l'Etat ne doit pas être interventionniste, il l'est. Son interventionnisme, dans l'article 38, est déséquilibré. Il va créer des avantages, il va créer des cas d'abus, des possibilités d'abus, il va créer des situations où il peut y avoir du chantage, où une association peut dire: Ecoutez, je suis protégée. J'ai tous les droits, d'après l'article 38, d'après la loi que le gouvernement vient de promulguer. Je n'ai rien à perdre à créer d'autres pressions, en ne respectant pas la loi dans d'autres secteurs parce que mon droit, à l'article 38, est protégé.

Ce n'est pas une question de favoriser le patronat ou de ne pas le favoriser, c'est une question de justice et d'équité, et même pour protéger le syndiqué lui-même. On ne devrait pas créer des situations où une association peut créer des abus, parce que si les dirigeants sont dans une position pour créer des abus, cela ne veut pas nécessairement dire que cela va favoriser le patronat, cela peut aller à l'encontre des intérêts du syndiqué lui-même. Alors, une fois que l'Etat a pris la décision d'intervenir, il a pris la décision, d'après l'article 38, de créer cette protection pour l'association. Je crois qu'elle ne peut pas aller à mi-chemin et elle doit compléter cette intervention, elle doit compléter l'intervention du premier paragraphe de l'article 38.

Et pour compléter cette intervention, le corollaire, c'est l'amendement qui est proposé par le député de Saint-Laurent. Si l'association se conforme à la loi, il n'y aura pas de problème. Je pense que c'est l'intention du législateur que les lois soient respectées. Est-ce que cela peut être l'intention du ministre du Travail que la loi ne soit pas respectée? S'il veut que la loi soit respectée, il ne doit pas faire une loi incomplète. Il ne doit pas créer certains droits sans les responsabilités correspondantes. Si on n'accepte pas l'amendement du député de Saint-Laurent, on encourage le manque de respect de la loi. On encourage une association à agir de telle façon que respecter la loi n'est pas pour elle.

M. le Président, je crois que le gouvernement a un devoir. Non seulement le gouvernement a un devoir d'essayer de remédier à certaines situations, mais un devoir de donner l'exemple de ses intentions. Le gouvernement ne peut pas créer des situations qui pourraient être anarchiques. Le manque de respect de la loi, c'est un principe fondamental, c'est la base de notre société même. Si le gouvernement ne se conforme pas, par sa législation, à ce principe, quelle sorte d'encouragement, quelle sorte d'exemple donne-t-il? Il ouvre la porte à toutes sortes d'abus.

Alors je trouve, M. le Président, que l'amendement du député de Saint-Laurent est tout à fait raisonnable. Il protège le syndiqué; ça, c'est important aussi. On accorde une protection à l'association, dans le premier paragraphe de l'article 38, on dit que l'employeur doit faire certaines choses pour la protection de l'association; mais il faut empêcher l'abus possible de cette association, vis-à-vis de ses membres, vis-à-vis les autres membres de la société.

Cela peut être une petite entreprise, ça peut être dans des secteurs qui sont assez importants pour la société, pour le public en général et si on ouvre la porte à ce genre d'abus, à quoi cela va-t-il mener? C'est le restant de la société; je ne parle pas de l'employeur. Qui sont ceux qui vont subir les conséquences de ces abus, ça va être le public; ce n'est pas seulement l'employeur. Dans plusieurs cas, l'employeur, ce n'est pas le premier qui est assujetti aux pressions de l'association. C'est faux de dire: On va donner certains droits aux syndiqués pour qu'ils puissent négocier, obtenir certains droits vis-à-vis de l'employeur.

Dans plusieurs cas, c'est le public qui en subit les conséquences. L'employeur est là et il attend, lui. La plupart des conséquences sont subies par le public. Là, le gouvernement ouvre la porte et l'association ne respectera pas la loi; c'est le public qui va en subir les conséquences, pas l'employeur nécessairement. Dans certains cas, ça peut causer des pressions sur un employeur, mais dans plusieurs cas et dans les cas les plus importants, c'est le public en général qui va en souffrir.

Alors, c'est pour ça qu'on dit qu'on ne peut pas accepter ce principe, M. le Président, à la commission, du respect de la loi. Quelle sorte de législateurs sommes-nous, quelle sorte d'exemple est-ce qu'on donne? Quelle sorte de loi est-ce qu'on va promulguer? On ne veut pas enlever aucun droit à cette association accréditée, cette association d'employés. On veut les protéger. On accepte le principe de l'article 38, on est en faveur. On croit que c'est le temps de donner cette protection: obliger l'employeur à retenir sur le salaire de tous les salariés, ces sommes qui sont dues.

C'est une protection. Mais on dit: Ecoutez, vous allez dans une direction, ça comporte des responsabilités. Et pour compléter cette protection, non seulement pour l'employeur, même dans mon esprit, c'est un peu secondaire. Je suis plus préoccupé par les effets de l'abus... du premier paragraphe... d'une grève illégale, que de la non-conformation aux dispositions de la loi. Je suis plus préoccupé des effets sur la société.

De plus en plus, on est interdépendants. Une association, par ses gestes, par ses actes, par ses décisions, va affecter toute la société, non seulement l'employeur. Pour ces raisons, M. le Président, je crois que l'amendement du député de Saint-Laurent est tout à fait logique et il est juste. Il ne favorise pas un plus que l'autre, mais protège plutôt. C'est dans ce sens que le ministre devrait comprendre. On veut protéger aussi les syndiqués par cet amendement. Parce que le respect de la loi va protéger tout le monde. Et il va être bien content, un jour...

M. Johnson: Contre qui?

Le Président (M. Clair): A l'ordre, M. le ministre.

M. Johnson: Protéger les syndiqués contre qui?

M. Ciaccia: Contre eux-mêmes... M. Johnson: Ah, voilà!

M. Ciaccia: ... contre les lois injustes, contre la possibilité d'abus. Il ne faut pas créer de situations d'abus. Vous allez... Ce sera peut-être toutes sortes de situations qui seront illégales. Il va venir un jour où ce principe, vous allez regretter de ne pas l'avoir appuyé, le principe du respect des lois. Ce n'est pas assez de faire des lois électorales, essayer d'avoir l'appui et de donner une certaine couleur. Il faut que vous alliez à la base de la loi, il faut regarder les effets.

Peut-être que ce sera pour les protéger, même contre le gouvernement; ça dépend des cas, ça dépend des situations. Si vous ne croyez pas qu'une loi doit protéger, pourquoi avoir présenté la loi 45? Il y a certaines protections, je pourrais lui demander la même chose, pour qui, ces protections, dans tous les articles de la loi 45?

Je pourrais lui retourner la question, et je pense qu'il ne pourra pas donner une réponse seulement dans un paragraphe parce que le projet de loi no 45, s'il est juste, si on le comprend et si on analyse l'économie de notre loi, certains articles doivent protéger certaines situations et d'autres articles doivent prendre en considération d'autres situations.

M. le Président, je pense que le ministre, par sa question, a répondu lui-même à la nécessité de l'amendement du député de Saint-Laurent. Le gouvernement a le devoir de faire...

Le Président (M. Clair): A l'ordre! Le député de Mont-Royal a la parole. Messieurs, s'il vous plaît, à l'ordre! La parole est au député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Le gouvernement n'a pas le droit de placer aucun secteur de la population hors de la loi ou lui permettre de se placer hors de la loi. S'il refuse d'accepter l'amendement du député de Saint-Laurent, il ouvre la porte à des abus qui, un jour, se tourneront possiblement même contre ceux qui ont introduit le projet de loi. Pour ces raisons, M. le Président, je crois que nous devons accepter et appuyer l'amendement du député de Saint-Laurent.

Le Président (M. Clair): Le député de Johnson.

M. Bellemare: Oui, oui.

Le Président (M. Clair): Vous avez demandé la parole, M. le député.

M. Bellemare: Comme je voudrais être conséquent avec ce qu'on a dit en Chambre, en deuxième lecture.

Le Président (M. Clair): M. le député de Johnson, voulez-vous approcher votre micro, s'il vous plaît?

M. Bellemare: Comme je voudrais...

M. Ciaccia: Excusez-moi de vous interrompre. M. le Président, est-ce qu'il est permis, durant les travaux de la commission, de signer des cartes de Noël?

M. Bisaillon: On appelle cela...

M. Ciaccia: Je voulais simplement savoir.

Le Président (M. Clair): A l'ordre!

M. Bisaillon: Voyons donc, vous vouliez seulement savoir! voyons donc!

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Ciaccia: Non, mais vous ne pouviez pas faire ça à votre bureau?

M. Bisaillon: II est même permis de niaiser.

Le Président (M. Clair): Messieurs, il n'est pas question de règlement...

M. Bisaillon: Si le député de Mont-Royal avait été ici depuis le début...

Le Président (M. Clair): ... ni de directive là-dessus. Le député de Johnson a la parole. M. le député de Johnson.

M. de Bellefeuille: M. le Président, vous me permettrez une phrase, puisque j'ai été visé.

Le Président (M. Clair): Absolument pas...

M. Ciaccia: Je n'ai pas précisé que c'était le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: Je veux simplement dire que, comme je sais mon nom par coeur, j'ai suivi l'intervention du député de Mont-Royal très attentivement.

M. Ciaccia: Je ne vous ai pas mentionné.

Le Président (M. Clair): S'il vous plaît, messieurs!

M. Bellemare: M. le Président, avant l'arrivée...

Le Président (M. Clair): M. le député de Johnson.

M. Bellemare: ... de ce député, tout était dans le calme et on pouvait faire des réflexions qui ne nous semblaient pas déraisonnables. Mais on n'at-

taquait pas la vie personnelle de qui que ce soit, ni ses occupations. Ce matin, il est ici pour la première fois; après avoir siégé des heures et des heures, nous sommes rendus à une vingtaine d'heures...

M. Johnson: 29 heures.

M. Bellemare: ... 29 heures, alors je ne pense pas qu'il vienne nous troubler par ses...

Le Président (M. Clair): M. le député de Johnson, s'il vous plaît! Je vous en prie!

M. Bellemare: C'est choquant, M. le Président, de se faire déranger par un député qui pense faire le fin-fin. Ecoutez une minute, il y a une limite, on n'est pas des pee-wee ici.

M. le Président...

Une Voix: Pourrais-je soulever une question de règlement, M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Johnson, je vous en supplie, sur la motion d'amendement du député de Saint-Laurent, et je vous remercie d'avance. M. le député de Johnson.

M. Bellemare: Quand on regarde l'article 46: "Si l'intervention du conciliateur est infructueuse, le droit de la grève ou de lock-out est acquis 60 jours, ou s'il s'agit de la conclusion d'une première convention, 90 jours après la réception, par le ministre, de l'avis prévu à l'article 43, à moins que les parties ne soumettent le différend à un conseil d'arbitrage". La reconnaissance d'un droit aussi important, M. le Président, à notre avis, laisse l'imposition d'un certain nombre d'obligations correspondantes. C'est indiscutable.

Dernièrement, dans le journal La Presse, le 6 août 1977, il y avait à ce sujet, et particulièrement pour le précompte, un article sur les conditions oubliées de la formule Rand. C'est vrai, M. le Président, qu'on prend dans la formule Rand d'aujourd'hui, après avoir appliqué, en maintes circonstances, l'épouvantail... etc, et on a réussi dans 90% ou 91% des cas des industries à l'imposer la formule Rand.

Dans les grandes centrales et surtout dans les grandes compagnies, il n'y a pas de trouble possible. Mais il peut y en avoir dans les petites unités de négociation. Maintenant, il reste une chose certaine, c'est que la formule Rand date de 1946, et jamais on a appliqué une des conditions sine qua non à la décision du juge Rand. On a repris le précompte et on l'a appliqué, mais toutes les autres conditions qui avaient été énumérées dans le jugement... Vous allez sûrement me dire que c'est passé dû, et qu'on aurait dû l'appliquer dans le temps, mais il y avait certaines objections, d'accord. Mais une chose qui reste sûre, c'est que le juge Rand recommandait que le syndicat devait répudier toute grève ou cessation de travail concertée par un groupe ou par un certain nombre de travailleurs qui n'ont pas été autorisés.

Donc, c'est une grève illégale, qu'il doit déclarer illégale et n'engageant aucun membre du syndicat pour tout piquet de grève établi à l'occasion de cette grève. C'est encore bien vivant aujourd'hui dans notre jurisprudence et particulièrement dans l'application qu'on en fait.

Le juge Rand, M. le Président, dans des grèves illégales, disait surtout qu'il fallait appliquer de sévères sanctions. Parce que ces arrêts de travail concertés, qui sont illégaux, produisent l'effet que notre Code du travail ne vaut plus rien. Combien y a-t-il de conventions collectives aujourd'hui qui étaient signées pour deux ans, parfois trois ans? Au bout de six mois, un syndicat, pour une peccadille, un manque d'entente avec un contremaître, déclare tout de suite grève illégale. Qu'est-ce que fait le gouvernement, qu'est-ce qu'on fait du Code du travail qui applique des sanctions sévères? Rien. C'est bien beau d'établir le précompte; c'est sûr et j'en suis fortement convaincu, parce que je trouve qu'on est rendu à 90-95% peut-être de ceux qui sont assujettis à cette formule Rand. Mais qu'est-ce qu'on fait véritablement si on ne prend pas les moyens nécessaires pour protéger l'employeur qui, à ce moment-là, est pris dans une situation où il a signé de bonne foi une convention collective avec ses employés et qui, à cause d'une décision administrative, arrive et bloque complètement toute la production? Combien y a-t-il eu de grèves illégales, même dans mon temps? J'ai essayé par tous les moyens de réprimer cet abus par des conventions collectives dans lesquelles on pouvait presque prévoir tous les desiderata des syndicalistes.

L'amendement d'aujourd'hui qui semble apporter beaucoup de sagesse, je ne sais pas si le ministre est de mon avis, il le sera peut-être dans une couple d'années, présente pour que, s'il y a des grèves illégales, on puisse véritablement avoir au bout une espèce de sanction qui va prolonger, pour certaines gens qui sont venus pour briser cette entente, briser le contrat signé. Il y a certaines précautions qu'on prend qui seront revues, c'est sûr, dans la réforme générale du Code du travail. Parce qu'obtenir du tribunal une ordonnance simplement pour n'importe quel sujet, non. Mais quand il s'agit d'une grève illégale, que le patron obtienne une ordonnance de suspendre pour quatre mois, soit 120 jours, l'application des articles qui sont en cause.

Ecoutez, M. le Président, on n'est plus des enfants d'école non plus. On vit dans un siècle où la transformation des relations du travail s'est opérée à une vitesse vertigineuse. Ce qu'on fait aujourd'hui, demain d'autres le déferont. Le Code du travail a été établi en 1964. Pendant vingt ans auparavant, on a vécu mollo, sur des relations du travail, sur des commissions de relation du travail, sur toutes sortes de choses.

Mais à un moment donné, en 1964, le Code du travail s'est écrit. J'ai apporté 62 amendements dans ce code. Par la suite, quand j'ai été ministre, je l'ai refait et six mois plus tard, j'ai été obligé de revenir avec quasiment autant d'amendements pour corriger à nouveau, à cause de la situation.

II y a là, je pense, dans la motion que le député de Saint-Laurent apporte, une certaine règle de sagesse. Si on détruit la poule, si on la fait cuire, le lendemain, les oeufs vont être rares. Il faut essayer de penser aussi à celui qui subit une grève illégale. Que fait-on, en somme, pour empêcher ces grèves illégales? Comment les punit-on? On a eu un exemple épouvantable du gouvernement qu'on a devant nous. Je ne le dis pas pour faire de la peine à qui que ce soit. Mais devant l'illégalité de certains gestes qui ont été posés, il y a eu des amendes jusqu'à $50 millions qui ont été imposées et qui ont été levées, d'un seul trait. Cela n'avait pas de bon sens. Les cours de justice se prononcent. Cela n'appartient à aucun député de dire s'ils ont raison ou non. Vous avez 24 heures pour critiquer votre sentence, c'est tout.

Une chose qui reste sure, M. le Président, c'est qu'une grève illégale, ce n'est pas pour le bien commun, ce n'est pas pour l'intérêt général. Cela ne va pas avec notre Code du travail. Mais c'est rendu aujourd'hui que ce sont des us et coutumes qui sont entrés dans nos moeurs. On voit souvent des débrayages, des grèves illégales. On se sacre de ce qu'on a signé, on dit: II n'y a pas de danger, tel patron a été nommé, tel gars... A la Presse, cela a commencé comme cela. Cela a commencé par une grève illégale. Si on avait eu cet article, pensez-vous que la Presse serait rendue où elle est? Pensez-vous franchement qu'on serait dans un tel état?

Que le ministre trouve l'amendement... c'est qu'il n'y a pas pensé, parce que c'est sûr et certain que c'est lui qui l'aurait apporté. Suspendre pour quatre mois l'application du présent article. Je vous garantis que lorsqu'on regarde l'article 46, M. le Président...

On n'a aucun moyen devant l'évolution rapide qui se fait aujourd'hui dans le monde du travail... Je ne suis pas un antisyndicaliste. Au contraire, j'ai été pendant des années et je suis encore un syndicaliste, avec ma carte dans ma poche...

M. Forget: Un bon cheminot.

M. Bellemare: Oui, un bon "brakesman". Je dis et je répète qu'il y a des abus qui ne sont pas dus souvent à des chefs de grandes centrales, mais à certaines personnes qui, sous la poussée de la violence, ou de l'amertume, ou de la rancoeur, peuvent apporter contre l'industrie, contre l'employeur, une entrave qui, au point de vue économique, nous paralyse et puis les conventions collectives, cela ne vaudra plus rien bientôt. Il va falloir changer de méthode. Il va falloir trouver autre chose que les conventions collectives. Cela ne tient plus.

Il y a dix ans, quand on a fait le Code du travail, en 1964, on avait trouvé cette formule des conventions collectives extraordinaires. C'était pour un an; ensuite, on l'a amendée pour deux ans; et là, on est rendu à des conventions collectives de trois ans.

Mais combien y en a-t-il de conventions collectives qui sont illégales, qui tombent dans l'illé- galité? Quelles sanctions y a-t-il? Le juge, avant de finir, dit: Ecoutez, le protocole d'entente pour le retour au travail. Vous allez faire disparaître les sanctions que vous avez prises contre ceux qui ont causé l'irrégularité, qui ont manqué à la loi.

A East Angus, un jour, on avait intenté des actions de $1000 pour vingt gars. On avait demandé une sanction de $20 000 au syndicat pour que ceux qui avaient tiré de la carabine sur les machines à papier, puissent être véritablement condamnés, parce que c'était un geste criminel de massacrer leurs outils de travail. On a réglé cela. Quand on en est arrivé pour signer le protocole d'entente et le retour au travail, ils ont dit: M. le ministre, vous allez nous enlever cela. Jamais! ai-je dit; Jamais! mon cher monsieur. C'est une chose criminelle, cela va suivre son cours. Entre ce que j'ai comme mandat en tant qu'administrateur et la justice, il y a toute la différence.

C'est M. Beaupré, le président de la Domtar, qui m'arrive un jour, après un mois et demi ou deux, en me disant: M. Bellemare, y aurait-il moyen pour acheter notre paix de faire une concession et d'enlever cela? J'ai dit: Non, M. le Président. Ne me demandez jamais des choses comme cela. Vous allez détruire mon influence personnelle, vous allez détruire la validité des articles du Code du travail.

Le Président (M. Clair): M. le député de Johnson, je vous invite à parler encore plus précisément sur la motion d'amendement.

M. Bellemare: Je finis. C'est l'illégalité que je veux vous prouver. Une chose qui est arrivée, c'est que la cour s'est prononcée; ils ont tous été condamnés à $1000 d'amende et le syndicat a été condamné à $20 000 d'amende. Cela a été un bon exemple qu'on a donné. Toutes les fois où une autre grève illégale arrivait, qu'ils me demandaient... Ils ne me demandaient plus d'enlever les sanctions ou les jugements pour les actions au criminel! Dans cela, il y a une bonne prudence. Le ministre devrait comprendre que c'est un article qui va aider. Ceux qui savent que ce sera dans le Code du travail maintenant, que l'employeur aura le droit à une requête motivée devant le Tribunal du travail pour obtenir une ordonnance ayant pour effet de suspendre pendant quatre mois... Vous allez en avoir moins de grèves illégales. Vous allez commencer par faire respecter le contrat qui a été signé entre les deux parties.

Sinon, vous allez devenir, comme moi, ridicules, comme je l'ai été, promené partout et décoré de tous les titres, comme de vendu et de tout ce que vous voudrez, parce que je n'ai pas toujours fait plaisir aux centrales syndicales. J'ai essayé d'être juste pour tout le monde. La motion présentée, je la trouve pleine de bon sens, sage de l'expérience de tout ce qu'on a vécu. Pour l'employeur, c'est son argent, c'est sa vie au point de vue économique, c'est tout cela. Il se fie... Il fait une programmation de tout son établissement. Comment ses vendeurs vont-ils vendre? Combien est-ce que cela va produire?

A un moment donné, du jour au lendemain, clac, tout arrête: grève illégale. Comment l'employeur est-il exposé à cela? Quelle est sa garantie, peut-on dire, qu'il pourra faire appel à quelque part pour pouvoir leur dire: Vous n'avez pas le droit! Vous avez signé un contrat. Un contrat, mon cher monsieur, c'est sacré. Il y en a bien qui ne respectent pas cela, aujourd'hui, les contrats. Nous de l'Union Nationale, en tous les cas, sommes allés, en deuxième lecture, dans ce sens. On n'a pas donné notre version au point de vue des détails dans la motion d'amendement, mais je voterai pour l'amendement. N'en déplaise au ministre, je suis obligé de lui dire que cela a du bon sens, au point de vue du droit commun. Vous allez voir si vous ne reviendrez pas dans la réforme générale avec cela. Vous allez voir, vous allez voir cela! Eh oui! Je vais y être à la réforme moi aussi pour demander que, si ce n'est pas dans ces termes-là, cela visera à peu près l'objectif qu'on recherche. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Mackasey: Merci, M. le Président. Je veux d'abord souligner que l'amendement du gouvernement à l'article 38, je pense, est très important. C'est peut-être l'amendement le plus important depuis le début de nos travaux.

Je reviens quelques instants à l'amendement du député de Saint-Laurent. Il est important, parce que le ministre essaie de faire des amendements au Code du travail. Ce n'est pas une réforme générale, ce n'est pas une nouvelle loi, ce n'est pas un autre Code du travail, ce sont des amendements à un Code du travail qui, à l'heure actuelle, existe. C'est une tâche difficile. Je suis convaincu que si tous les membres de l'autre côté de la table, qui se pensent favorables au concept des syndicats et des ouvriers ne font pas attention, nous arriverons avec un Code du travail amendé, mais moins efficace que si on n'avait pas essayé au début de faire des changements à ce Code du travail.

Pour revenir encore à quelque chose que j'avais dit en deuxième lecture, au lieu d'essayer d'amender le Code du travail, il eût mieux valu commencer, même si cela prenait un an ou deux ans, à établir un Code du travail entièrement nouveau qui refléterait la tendance de cette province à être plus industrialisée qu'auparavant.

Je reviens à l'amendement. Je dois d'abord parler de l'article 38, je n'ai pas encore pris avantage de cela, peut-être que je vais le faire. Je veux souligner encore une fois que si mon cher ami a été un "brakesman", moi, j'ai été un apprenti au CNR...

M. Bellemare: Cheminot et aussi ministre.

M. Mackasey: ... je suis encore membre de l'IBW. On parlait de la Brotherhood l'autre soir, la Brotherhood a fait bien des choses pour les Québécois autant que pour les autres Canadiens. Je suis encore membre actif de cette organisation, si vous voulez; je suis donc pour les syndicats et pour le syndicalisme. Quand nous sommes pour le syndicalisme et les ouvriers, il faut protéger les ouvriers. Si le ministre avait, au début, fait des amendements ou une section de la loi préconisant exactement les responsabilités générales des syndicats, les clauses, par exemple, qui devraient être dans la constitution pour protéger les membres... On parle d'un vote secret, par exemple. Qu'est-ce que c'est, un vote secret? Un vote secret, selon la constitution d'un syndicat, peut changer d'un syndicat à l'autre. D'accord? Je sais que les amendements ne peuvent pas toucher toutes les choses. Dans cet article toutefois, un changement radical est nécessaire au Code du travail. C'est l'application, M. Bellemare, peut-être pour la première fois, d'une version abrégée de la formule Rand. Si cela avait existé avant la United Aircraft, il n'y aurait pas eu cette maudite grève qui a fait tort à tout le monde, à l'économie, à l'industrie, aux gouvernements, aux ouvriers. Il y a eu de la violence. Cela a dressé le public contre le syndicat, sans raison, tout simplement parce que cette industrie multinationale ne voulait pas de la formule Rand. Je me suis toujours demandé durant ce temps si vraiment c'était leur cause, ou si on voulait fermer la United Aircraft et retourner tout l'ouvrage aux Américains. J'ai appuyé le concept, mais ce n'est pas la formule Rand. Ce n'est même pas la philosophie de la formule Rand.

M. Bellemare: Oui.

M. Mackasey: Le juge Rand, dans la formule...

M. Bellemare: II y a eu des sanctions dans la formule Rand.

M. Mackasey: Oui, mais le juge Rand, comme vous l'avez souligné tout à l'heure, a été bien plus loin...

M. Bellemare: Oui.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, je vous ai donné le droit de parole sur la motion du député de Saint-Laurent.

M. Mackasey: Je demande...

Le Président (M. Clair): Je vous l'indique seulement. Vous avez la parole.

M. Mackasey: D'accord, M. le Président. Je vous demande si j'ai été plus loin que mon collègue à côté de moi. Je ne pense pas; je pense avec raison que nous avons un peu d'expérience et qu'il est nécessaire de l'exprimer. Il faut d'abord avoir un petit peu de tolérance envers les vieillards, si vous voulez. Nous avons dépassé la quarantaine.

M. Bellemare: L'âge d'or!

M. Mackasey: II faut que les jeunes aient un peu plus de patience. Quand on arrive à l'article 38...

M. Bellemare: ... des vieux radoteux!

M. Mackasey:... on impose à l'employeur une responsabilité qui n'existait pas auparavant. C'est évident, je pense à 38b, on mentionne, pour les membres ou les non-membres, que c'est la formule Rand qui s'applique sans mentionner autrement toutes les autres responsabilités que le juge a évoquées dans la grève de General Motors, les responsabilités du syndicat. Nous avons donc, dans cet amendement du gouvernement, cinq alinéas qui traitent des responsabilités de l'employeur. Mais quand un syndicat agit illégalement, il me semble illogique de dire à l'employeur, qui est innocent dans cela — quand c'est entendu que le syndicat agit illégalement — Dans le cas où vos salariés ou leur syndicat agissent de mauvaise foi, contre la loi, illégalement, la responsabilité qu'on vous avait donnée est suspendue pour une certaine période de temps. Le député de Saint-Laurent a parlé de quatre mois, je suggérerais à mon collègue — je ne sais pas s'il m'écoute, pour le moment, il travaille fort, et je dis cela sérieusement—qu'on puisse dire "up to", jusqu'à quatre mois. Ce ne serait pas tellement arbitraire. On peut dire: Pendant la grève illégale...

M. Bellemare: Ou le lock-out illégal.

M. Mackasey: Mr Minister, I may come back to my own language, just to be precise. Do you want to end up with Bill 45 before Christmas? I do.

M. Johnson: Good!

M. Mackasey: I did not say what year.

M. Johnson: O.K. Not so glad to hear that.

M. Mackasey: I hope it is this year. But, in order to do that, I want a bill that will not cause labour unrest in this province at a time when we must become more industrialized. This is not your fault, rightly or wrongly, Quebec has the reputation for violence, for illegal strikes, for a lack of appreciation of the law, from both sides.

Avec votre permission, because I just come off radio and television to discuss the postal strike, we have an illegal strike right across Canada caused by 384 maoists, 384 out of a unity of 36 000. O.K.? C'est inutile de dire que everything the syndicat does is right! On brime les droits fondamentaux des ouvriers des bureaux de postes qui ne travaillent pas à l'heure actuelle à cause du geste de 384 membres d'un local de Toronto. Une assemblée de 600 membres a voté une grève illégale, invoquant des arguments qui devraient être réglés, selon la loi, par l'arbitrage ou par a grievance procedure. Je ne sais pas comment on dit cela en français.

M. Bellemare: Négociations. M. Bisaillon: Mesures de grief.

M. Mackasey: Merci. Alors, because I am going to learn; the only reason I came in Quebec is to learn French. On va l'avoir, avec Pierre, qui va m'aider.

M. Bellemare: Vous allez voir.

M. Johnson: You seem to have learned it up to now, so, are you going somewhere?

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Mackasey: C'est fort possible.

Le Président (M. Clair): Le débat porte sur la motion d'amendement du député de Saint-Laurent. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, vous avez la parole.

M. Mackasey: Alors, I am coming back to the amendment. So, what I am saying, because we are working under basic restrictions, these restrictions are the best we can do here, they amend certain sections of the Code.

Une Voix: That is right.

M. Mackasey: Sans que nous ayons l'occasion de toucher d'autres articles qui, à la suite de l'amendement, devraient être amendés aussi. Quand on impose à l'employeur, au patron, des obligations vis-à-vis de l'article 38, et si, en même temps, cela crée plus d'injustice, si, dans une autre section du code, on donne plus de protection à l'employeur quand une grève est illégale parce qu'on vient de lui imposer des responsabilités qu'on veut qu'il maintienne même quand la grève est illégale. Ce n'est pas juste et si les employeurs n'acceptent pas vos changements, pas plus que les syndicats, vous aurez toujours des problèmes jusqu'à ce que ce soit amendé à nouveau.

M. le Président, en terminant, comme je l'ai dit en deuxième lecture: If the amendments to Bill 45 are designed — and I think they are — to improve the industrial climate in Quebec, the end results of this Bill must be acceptable, not only to the Unions, not only to their members, but also to the employers. This is not a Unions' Bill, it is not an employers' Bill, it is the general rules under which employers and employees must work for industrial peace and harmony. When you say to an employer: Because we believe in the Rand formula — we all do — you have one, two, three, four, five additionnai responsibilities on a check-off, in order to turn over to the Union, not only Union dues of recognized members, but Union dues of those who are not members of the Union; and if the Union ignores section 46 and goes on strike illegally, c'est logique and normal that the additionnai responsibilities that you have

imposed on the employer should be rescinded, amended, at least for the period that the illegal strike exists. Anyway, you cannot collect the turnover...

M. Johnson: There are no salaries, they are on strike.

M. Mackasey: All right, then, why is there objection to what the Minister says? All the member from Saint-Laurent is doing, and doing responsibly, is saying: Please! There are two parties in this thing. The employers have some responsibilities and some rights. One of their rights is to protect themselves in the case of an illegal strike, which I am sure you do not want. So, for goodness sake, what is wrong with this thing? The only thing I question is that this is not necessarily the right place to put it in. But, since you are coming in with amendments and not a revision of the code, there are very few places where we can "bootleg" in an amendment to protect the employer. If you want to give us the permission to suggest other areas of the code that we can open up for amendments, which would make a much better dialogue and would let us finish faster and make some of these amendments appear more logical, if they were in the right "chapitre ou division, si vous voulez". Peut-être que ça ne devrait pas être ici, mais ça devrait être quelque part dans le code. On ne peut pas décider parce que ce n'est pas une révision entière du code, ce sont seulement quelques amendements qui y sont apportés. Alors, on impose, ici, une chose qui n'est peut-être pas nécessairement à l'endroit où ça devrait être placé dans le code, mais quand même, on n'a pas le choix. Comme le député de Johnson a dit... Je ne peux pas comprendre pourquoi le ministre n'a pas, je ne dirai pas le courage, mais au moins que ses fonctionnaires prennent en considération la responsabilité qu'ils ont envers le ministre de ne pas toujours trouver le "easy way out", et protéger le droit de l'employeur qui fait face à une grève illégale. On parle seulement du cas de la grève illégale mais, s'il y a une grève illégale qui coûte très cher à l'employeur, qu'il n'ait pas ces responsabilités durant — peut-être pas quatre mois — mais au moins la période de la grève illégale.

Je suggérerais à mon ami de Saint-Laurent de modifier un peu son amendement pour qu'il dise: "up to", jusqu'à...

M. Bellemare: Je pense que ce serait très bien.

M. Mackasey: Un autre peut dire trois mois, selon la nécessité. En terminant, M. le Président, je dirais au député de Joliette-Montcalm, qui est très impartial, qui n'est pas ici pour faire seulement le travail du syndicat — on sait ça par son travail sur la commission Cliche — c'est un homme impartial, au-dessus d'une vue partisane, que c'est à l'avantage du ministre, à l'avantage des ouvriers, à l'avantage des syndicats, à l'avantage des petits employeurs. Si le projet de loi 45, après amendements, n'est pas accepté par les patrons, vous aurez plus de trouble qu'avant d'avoir commencé. Je suggère fortement que l'amendement du député de Saint-Laurent soit adopté.

M. Johnson: M. le Président, je demanderais, en vertu du règlement, à l'article 153, la suspension de la séance.

M. Forget: Une suspension de...

M. Johnson: II y a un caucus qui doit avoir lieu dans quelques minutes.

Le Président (M. Clair): Etant donné qu'il y a un caucus, ici même, dans cette salle; la commission du travail et de la main-d'oeuvre suspend ses travaux jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 12 h 55)

Reprise de la séance à 15 h 10

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs!

La commission permanente du travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration est réunie pour continuer l'examen, article par article, du projet de loi no 45. Lorsque nous avons suspendu nos travaux, nous en étions à l'étude d'une motion d'amendement à l'article 28, présentée par le député de Saint-Laurent. Le député de Notre-Dame-de-Grâce n'avait pas terminé son intervention, cependant, il ne lui restait que trois minutes.

M. Johnson: II avait terminé.

Le Président (M. Clair): II avait terminé, mais...

M. Johnson: II avait terminé...

Le Président (M. Clair): II avait terminé, me dit-on, mais de toute façon il ne lui restait que trois minutes de temps disponible. J'avais en lice le député de Portneuf qui malheureusement est retenu ailleurs.

M. Johnson: La motion du député de Saint-Laurent est-elle adoptée?

Le Président (M. Clair): S'il n'y a pas d'autre intervenant, j'appelle immédiatement...

M. Forget: M. le Président, je crois que le député de Notre-Dame-de-Grâce avait suggéré un sous-amendement, ou est-ce que c'est...

M. Johnson: ... M. le Président. Il avait laissé entendre que peut-être il suggérerait un sous-amendement, cependant il n'avait pas suggéré de sous-amendement.

M. Forget: Effectivement, si on voulait l'incorporer, je n'ai pas d'objection personnellement à l'incorporer comme j'avais indiqué dans mes remarques préliminaires une modification à la question des délais.

M. Johnson: Le député de Saint-Laurent a bien dit qu'il acceptait que le sous-amendement évoqué et non pas présenté par le député de Notre-Dame-de-Grâce soit incorporé à sa proposition?

M. Forget: Oui, je n'avais pas de difficulté là-dessus.

M. Johnson: Excellent. Alors, j'accepte qu'il l'intègre et je demanderai, M. le Président, si l'amendement du député de Saint-Laurent est adopté?

M. Bellemare: II n'y a aucune réponse, de la part du ministre?

M. Forget: II n'y a aucune réponse, M. le Président?

Le Président (M. Clair): La motion d'amendement du député de Saint-Laurent incorporant la suggestion du député de Notre-Dame-de-Grâce se lit comme suit: "Que le paragraphe 38 de l'article 28 soit modifié en ajoutant l'alinéa suivant: Lorsqu'une association de salariés déclare une grève sans se conformer aux dispositions de l'article 46 ou lorsqu'une telle association ne prend pas tous les moyens nécessaires compte tenu des circonstances pour faire cesser un arrêt de travail ou un ralentissement de travail déclenché par des membres de l'association, et alors qu'une grève n'a pas été autorisée en vertu de l'article 19b, l'employeur peut, par une requête motivée, adressée au tribunal, obtenir une ordonnance ayant pour effet de suspendre jusqu'à quatre mois l'application du présent article. Cette requête doit être faite par écrit et copie doit être adressée au ministre et à l'association. Cette motion d'amendement est-elle adoptée?

Des Voix: Rejeté.

M. Forget: Sur division.

M. Bellemare: Je constate avec beaucoup de chagrin que...

Le Président (M. Clair): Rejeté sur division.

M. Johnson: L'article 28 est-il adopté, M. le Président?

Le Président (M. Clair): L'article 28 est-il adopté?

M. Bellemare: Non, j'ai un amendement à faire. M. le député de Saint-Laurent, d'abord. J'ai des cartes à signer.

M. Forget: J'ai un amendement, M. le Président.

Le Président (M. Clair): M. le député de Saint-Laurent.

M. Ciaccia: Maintenant qu'on sait qu'on peut signer les cartes...

M. Bellemare: On peut faire cela, oui.

M. Forget: Sur une question de procédure, M. le Président, j'ai un amendement au paragraphe 38a. Je ne sais pas si le député de Johnson a un amendement qui viendrait antérieurement à celui-là dans l'ordre des paragraphes...

M. Bellemare: Oui, c'est cela, j'en ai un là aussi.

M. Forget: A 38a?

M. Bellemare: A 38a, oui.

Le Président (M. Clair): Est-ce qu'on peut considérer que nous avons terminé l'étude du paragraphe 38 de l'article 28?

M. Forget: Oui, M. le Président, je crois que c'est terminé.

M. Bellemare: Le 38 est terminé pour moi, les trois paragraphes.

Le Président (M. Clair): Alors, je déclare l'étude de l'article 38 close, nous passons à 38a. Je pense que cela peut être utile pour ne pas...

M. Bellemare: On ne reviendra pas certain.

Le Président (M. Clair): Non, pour qu'on sache sur quoi porte l'entente.

M. Johnson: M. le Président, afin de faciliter et d'accélérer les travaux de cette commission— je suis sûr que le député de Saint-Laurent s'en voudrait de ne pas accélérer les travaux de la commission — est-ce qu'on pourrait s'entendre pour savoir si le député de Saint-Laurent a l'intention d'apporter des amendements à 38a, b), c), d), e), f), pour qu'on sache ou qu'il nous dise qu'il a des amendements, par exemple, à trois de ceux-là, ou à deux de ceux-là, ou à cinq de ceux-là, pour qu'on puisse savoir comment aborder de façon générale.

M. Forget: Je n'ai pas des amendements à tous, M. le Président, mais j'ai des amendements à trois, je pense, trois ou quatre de ces paragraphes, effectivement. Alors, je pense qu'une discussion est plus ordonnée si on va par paragraphe, parce que les introduire tous en bloc, ce serait une source de confusion considérable; d'autant plus que, selon l'évolution de la discussion, le fait qu'ils sont acceptés ou rejetés entraîne, très souvent, des modifications dans la façon de les présenter ou même dans leur libellé.

M. Chevrette: Avant que le député de Saint-Laurent ne commence, étant donné qu'il y a, je ne sais pas combien de paragraphes, cinq ou six, que cela fonctionne par paragraphe, je n'ai pas d'objection, mais comment est-ce que cela va fonctionner en terme de temps?

M. Forget: Cela va fonctionner selon les règlements.

Le Président (M. Clair): Cela fonctionne selon les règlements, l'article 160 que j'ai lu hier... A l'ordre, messieurs!

M. Chevrette: J'ai demandé une directive, pour ne pas se ramasser avec cinq fois vingt minutes.

Le Président (M. Clair): Je relis l'article 160 de notre règlement: "Lorsqu'une commission étudie un projet de loi ou des crédits, un député peut prendre la parole sur le même point aussi souvent qu'il lui plaît, à condition de ne parler plus de vingt minutes en tout sur un même article, un même paragraphe, une même motion ou une même ques- tion d'ordre ou de règlement". Autant de motions d'amendements, autant de vingt minutes pour chacun des membres de la commission. C'est le règlement qui...

M. Bellemare: Oui, mais là, M. le Président, en tout, vingt minutes en tout...

Le Président (M. Clair): Oui, oui.

M. Bellemare: ... sur une motion, sur...

Le Président (M. Clair): Sur une même motion d'amendement, un député n'a droit de parole que pendant vingt minutes. Mais il n'y a rien qui limite le nombre de motions d'amendement qu'un député peut présenter.

M. Bellemare: C'est bien.

Le Président (M. Clair): M. le député de Saint-Laurent.

Etats financiers

M. Forget: M. le Président, dans ce premier paragraphe, on retrouve le premier d'une série d'amendements, disons, d'avant-dernière heure, mais modifiés à la dernière heure par le ministre, puisque nous avons eu, dans presque tous ces paragraphes, une rédaction nouvelle déposée par le ministre à 22 h 30 hier soir et nous retrouvons dans ces modifications, à la fois des améliorations et des détériorations. D'ailleurs, ça ne va pas toujours dans le même sens, M. le Président, et ça illustre très bien la difficulté, pour les Oppositions, de procéder à l'étude de ce projet de loi, étant donné que, dans les amendements déposés hier soir en particulier, se sont incorporées des modifications qui ne sont certainement pas des améliorations, à notre point de vue.

En particulier relativement à l'article 38a, nous avons une motion d'amendement qui vise, pour une part, à restaurer des mots qui ont été biffés par le ministre hier soir et à introduire des précisions qui sont de nature à clarifier l'obligation qui est ainsi faite par ce paragraphe 38a.

Je fais tout de suite la lecture de la motion d'amendement au paragraphe 38a, qui est évidemment une motion d'amendement à l'article 28, "que le paragraphe 38a de l'article 28 soit modifié en ajoutant, dans la deuxième ligne du premier alinéa, après le mot "financiers", les mots "dûment contrôlés", et en ajoutant, dans la deuxième ligne du deuxième alinéa, après le mot "financiers", les mots "ces états financiers doivent contenir une répartition des dépenses encourues pour la négociation, l'interprétation ou l'application de la convention collective, d'une part, et les dépenses encourues pour toute autre fin, d'autre part".

Le paragraphe amendé se lirait comme suit: "38a, une association accréditée doit divulguer chaque année à ses membres ses états financiers dûment contrôlés. Elle doit aussi remettre au

membre qui en fait la demande une copie de ses états financiers. Ces états financiers doivent contenir une répartition des dépenses encourues pour la négociation, l'interprétation ou l'application de la convention collective, d'une part, et les dépenses encourues pour toute autre fin, d'autre part".

M. le Président, il y a essentiellement deux points dans ce projet d'amendement. Le premier ne figurait pas dans notre projet d'amendement jusqu'à hier soir, 22 h 30, puisqu'il se retrouvait dans la version que le ministre avait déposée devant la commission parlementaire, il y a environ 10 ou 15 jours.

M. Chevrette: M. le Président, sur la recevabilité.

Le Président (M. Clair): Le député de Joliette-Montcalm, sur la recevabilité de la motion.

M. Chevrette: M. le Président, je pense, très honnêtement, que la première partie pourrait l'être, je ne m'y opposerais pas, même si c'est vrai qu'elle introduit des mots qui y ont déjà figuré, mais la deuxième partie de la proposition introduit un amendement par un moyen détourné qui a été battu à deux reprises, jusqu'à maintenant.

Une Voix: Lequel?

M. Chevrette: Les dépenses encourues lors de l'interprétation ou de l'application des conventions collectives. Cela fait deux fois que c'est battu. Par toutes sortes de moyens, on cherche à réintroduire cette dimension...

M. Forget: Bien voyons!

M. Chevrette: ... du détail qui vise toujours le précompte syndical et pour démontrer que l'argent ne doit pas servir a autre chose qu'à l'application ou l'interprétation. Qu'on regarde les propositions d'amendement d'hier soir, c'est du pareil au même, par un moyen détourné, arriver encore ici. Je demanderais, au moins, de rendre irrecevable la deuxième partie, si vous voulez recevoir la première.

M. Forget: Sur la question de recevabilité, M. le Président...

Le Président (M. Clair): Le député de Saint-Laurent.

M. Forget: ... hier soir, il y a eu des mots qui se sont retrouvés dans d'autres résolutions, mais dont le sens était complètement différent, étant donné le contexte. Quant à ça, les mots "est", "et", "a", les verbes "être, avoir", conjugués à différents temps, se retrouvent dans plusieurs amendements et ce n'est pas simplement en essayant de faire le décompte des mots qui sont déjà apparus dans des amendements qu'on peut savoir si une motion est recevable ou non.

Un amendement a été rejeté hier dont le sens était de limiter le pouvoir d'un syndicat de percevoir, à certaines fins, une cotisation syndicale auprès de ses non-membres. Le but de l'amendement rejeté hier était d'introduire une limitation au pouvoir d'aller chercher, chez les non-membres, certaines sommes d'argent à certaines fins. ici, il n'est plus du tout question de cela. On ne parle plus de la cotisation du tout. Cela ne fait pas l'objet de l'amendement, ni même de l'article dans sa rédaction antérieure ou actuelle. Il s'agit d'états financiers. Il s'agit d'information. Les informations, sur les états financiers, on ne fait qu'expliquer ce que cela veut dire.

M. Chevrette: Pour abréger le débat, je vais le retirer, parce qu'on va arriver avec une motion de fond, de toute façon, et on va s'engager dans un débat sur le fond pendant dix minutes. Les "fili-bustes" ne m'intéressent pas.

Le Président (M. Clair): De toute façon, messieurs...

M. Bellemare: Hier, l'article 38 était un peu ce que dit le député de Saint-Laurent, ce n'était pas tout à fait pareil.

M. Chevrette: On va le retirer.

Le Président (M. Clair): De toute façon, je juge la motion recevable.

M. Forget: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Clair): M. le député de Saint-Laurent, sur la motion d'amendement.

M. Forget: Merci. Le premier point de cette motion d'amendement vise à restaurer les mots "dûment contrôlés". Sur le plan du libellé, M. le Président, nous avons utilisé les mêmes mots qu'avait utilisés le ministre, soi-disant avec un avis juridique approprié. Il est peut-être vrai — et là-dessus, je ne ferai pas querelle au ministre s'il veut suggérer un libellé différent — qu'on devrait employer une référence à la vérification, étant donné que le mot "vérifier" est d'usage plus courant que "contrôler".

Ce que l'on veut dire, c'est qu'une opinion professionnelle, indépendante devrait être apportée à des chiffres qui sont donnés par les intéressés, à même leur propre comptabilité. C'est "dûment vérifiés" qui serait normal, mais pour ne pas chicaner sur les mots, j'ai employé les mots que le ministre lui-même avait choisis.

Mais, de toute façon, c'est une question de libellé. Sur le fond, je crois qu'il est élémentaire, dans le cas où on exige le dépôt de rapports financiers, dans une optique de contrôle des élus par les électeurs — et c'est bien de cela qu'il s'agit, puisque ce sont des états financiers donnés aux membres par ceux qu'ils ont élus à des postes de direction au bureau ou au conseil d'administration d'un syndicat — de leur donner une comptabilité de leur gestion durant l'année.

II est normal, dans ces cas-là, d'imposer que des vérificateurs externes, des comptables publics, viennent dire que ces chiffres représentent la vérité, qu'ils ont fait quelques sondages, qu'ils ont vérifié l'existence des pièces et que tout ceci leur paraît conforme.

On pourrait citer des dizaines de lois et de règlements qui font des obligations analogues à toutes sortes d'organismes, à ou sans but lucratif, des organismes très importants comme des sociétés commerciales ou industrielles, ou alors des organismes très modestes, tels que des clubs ou des organisations sans but lucratif à des fins humanitaires ou charitables. Toujours, quand on demande à des gens de rendre compte de leur gestion, on s'assure que les comptes qu'ils rendent sont exacts et que quelqu'un peut vérifier ou attester de leur exactitude. C'est une exigence de sérieux tout simplement. Il n'est pas suffisant que les choses soient faites correctement. Il faut qu'il apparaisse évident qu'elles ont été faites correctement. Si on veut véritablement protéger les membres, je pense qu'on peut leur donner cette garantie.

On nous objectera peut-être, comme on le fait d'habitude, que ces exigences, dans les cas de syndicats de six ou de sept membres, seraient anormales ou trop onéreuses. A ce moment-là, les gens se connaissent tellement bien et les montants en jeu sont si faibles que cela n'a pas d'importance.

M. le Président, si le ministre veut nous suggérer un seuil inférieur en disant que tout syndicat qui a plus de 50 membres est tenu à cette obligation et que les autres en sont exclus, ou que tout syndicat qui a plus de 25 membres choisira lui-même la limite qu'il veut imposer à cela, pour ne pas créer un fardeau excessif et une charge financière déraisonnable aux petits syndicats, j'accepte d'avance son amendement là-dessus.

Mais pour ce qui est des syndicats de 1000 membres, dont il nous parle aussi à l'occasion quand il parle des difficultés de vérifier un tas de choses, par exemple, le numéro d'assurance sociale ou la date de naissance des membres, si des syndicats ont 100 membres ou 500 membres, ils sont probablement capables de payer un honoraire professionnel de $125 pour faire vérifier leurs chiffres, leurs données annuelles, d'autant plus que les finances annuelles d'un organisme comme celui-là ne sont pas difficiles en soi à vérifier, et comportent peu d'éléments.

Là-dessus, je pense qu'il s'agit d'une règle de simple bon sens qui est dans l'esprit de la recommandation principale qui fait l'objet du paragraphe 38a).

Il y a un deuxième paragraphe qui spécifie un peu quels peuvent être la forme et le contenu minimal de l'information que doivent contenir les états financiers. En effet, dans des états financiers, il y a des pratiques comptables établies pour les banques, pour les coopératives, pour les sociétés à but commercial. Il y a des patrons, il y a des usages bien établis, mais, même dans ces cas-là, certaines lois désignent des informations qui doi- vent, de toute nécessité, apparaître de façon distincte dans les états financiers.

L'extrême raffinement de ces règles apparaît dans les réglementations sur les institutions bancaires ou financières, où tout ceci doit se faire avec un luxe de détails très considérables. Mais, même dans les organisations plus simples, on a quelques exigences et parfois des exigences très considérables; tout dépend de la nature de l'entreprise, l'entreprise dans le sens très large du mot, de l'organisme en question. Il serait normal que, lorsqu'on parle de l'état financier d'un syndicat, il ne s'agisse pas évidemment d'un bilan des profits et pertes, d'un état des profits et pertes ou d'un bilan, puisqu'il s'agit d'un organisme qui, essentiellement, a des revenus très simples; ce sont les cotisations. Il n'y a pas beaucoup de raffinement à avoir de ce côté-là. Mais d'autre part, sur le plan des dépenses, il y a des informations qui doivent être rendues disponibles aux membres, puisqu'il y a une distinction entre les activités proprement syndicales et les activités ancillaires ou connexes à l'activité syndicat, lesquelles sont beaucoup plus des activités facultatives ou optionnelles pour un syndicat. Il me semble que c'est une articulation, une ventilation minimale de ce en quoi consistent les dépenses syndicales.

Il est clair que les dépenses encourues pour verser à une centrale syndicale sa cotisation, la cotisation du syndicat local à la centrale, toutes les dépenses qui peuvent résulter directement de l'engagement d'experts, de conseillers techniques ou autres pour la négociation d'une convention collective, l'arbitrage, le grief, et différentes autres formalités qu'implique l'action devant les tribunaux, d'une façon ou d'une autre, sont des activités et des dépenses proprement syndicales. D'autres activités qui ne le sont pas cependant, c'est la constitution de fonds sociaux pour des entreprises coopératives au sein des employés, caisses d'économie, activités récréatives ou sociales, etc.; elles appartiennent à un autre ordre. Je crois qu'il est utile aux membres qu'ils sachent comment se distribue, entre ces deux catégories, l'ensemble des activités sur le plan financier de leur syndicat. C'est un minimum. Ce n'est pas un minimum très exigeant, parce qu'on pourrait imaginer des ventilations beaucoup plus complexes et je suis sûr que, déjà, les syndicats sérieux font une comptabilité qui leur permet d'évaluer où ils s'en vont, parce qu'il y a bien peu d'organismes qui peuvent le faire sans un minimum de telles informations.

Ce n'est pas une exigence nouvelle. Je suis sûr, comme dans bien des cas, comme dans le cas des votes, etc., sur lesquels on a émis des messages, parce qu'essentiellement on se disait que l'immense majorité, déjà, avait ses procédures, qu'on va trouver que l'immense majorité des syndicats gère déjà ses finances de façon responsable et en respectant certaines règles élémentaires d'information financière de leurs membres.

En tenant compte de cela, c'est un article qui ne fait que consacrer une réalité générale de tous les organismes qui sont administrés de façon efficace et de façon responsable et que, pour les

quelques exceptions où cela ne se ferait pas, on situera, là aussi, un message, une incitation, une exortation à des pratiques plus conformes à une saine information de leurs membres et à une saine orientation des délibérations autour des finances syndicales.

On a eu, de ce côté-là, un certain nombre de difficultés et ceci, —j e terminerai là-dessus, M. le Président — nous indique malgré tout que c'est une disposition importante dans le but de protéger le mouvement syndical lui-même.

On a tous eu connaissance, au cours des dernières années de syndicats qui en venaient à des situations extrêmement précaires sur le plan financier, qui vivaient littéralement de crédits bancaires, de prêts de toutes sortes, ou qui allaient puiser à même leur fonds de grève, donc à même ce qui constitue une espèce d'assurance pour les membres, de protection au cas où ils voudraient exercer jusqu'à ce point, voudraient revendiquer jusqu'à ce point l'amélioration de leurs conditions de travail; on a vu qu'ils grevaient leur fonds de grève — si on peut employer ce pléonasme, en quelque sorte — pour financer leurs opérations courantes.

Il me semble que, si l'on veut éviter que le mouvement syndical se place lui-même dans une situation intenable où le fonds de grève est entièrement épuisé ou largement grevé de charges qui ne devraient pas exister contre un tel actif, on est mieux de prendre des précautions et de s'assurer que dans l'enthousiasme d'assemblées générales, on ne pousse pas les membres à faire des dépenses qui, dans le fond, dépassent la capacité financière de leur association, qu'ils soient bien informés de ces conséquences, par une information susceptible de faire ressortir les dangers d'une action qui, encore une fois, dans le feu, dans l'enthousiasme d'une assemblée générale, peut, face à la force de persuasion de permanents ou d'officiers de syndicats, peut encourager des dépenses que le syndicat n'est pas vraiment en mesure d'assumer, et aux dépens, encore une fois, de garanties telles que le fonds de grève.

C'est toujours une tentation. Comme c'est une réserve, c'est un fonds qui est là et en dehors des moments de conflits syndicaux, cela a l'air de l'argent qu'on a accumulé pour rien, étant donné que la mémoire est courte souvent, et c'est bien humain. On peut être tenté de dire: On a quelques dizaines ou centaines de milliers ou millions de dollars, dépendant de l'envergure des organismes et il est bien tentant d'utiliser cela comme garantie ou même d'épuiser très largement en se disant: On remboursera cela plus tard quand cela ira mieux. On a été frappé par du maraudage, etc. Nos cotisations ont baissé. On se retrouve devant la situation où on ne veut pas réduire les dépenses courantes de fonctionnement.

Ce sont des dangers que tout organisme public ou privé peut courir. Le vrai remède à cela, ce n'est pas l'intervention de l'Etat pour empêcher des situations comme celles-là, d'ailleurs personne ne peut intervenir là-dedans, c'est l'information adéquate des membres.

Cet article est extrêmement important, étant donné surtout que, comme on l'a vu plus tôt, il n'y a pas de loi constituante, il n'y a pas de loi cadre du syndicalisme. Il y en a une, mais elle n'est pas utilisée. Comme son utilisation est facultative, les syndicats ne sont pas tenus par autre chose que cette mesure, dans la très grande majorité des cas, à produire les états financiers sur lesquels les membres seuls peuvent se baser pour porter des jugements informés.

J'inviterais le ministre à ne pas diluer sa proposition initiale et à souscrire à l'amendement qui permettrait de donner un instrument minimum aux membres pour se retrouver dans des situations concrètes où leur intérêt même, à plus long terme, est en jeu.

Le Président (M. Clair): M. le ministre du Travail.

M. Johnson: M. le Président...

M. Bellemare: Si vous me permettiez, j'aurais seulement deux mots à ajouter...

M. Johnson: Oui, très bien. Allez-y!

M. Bellemare: ... et vous allez pouvoir... Ce n'est pas grave.

Le Président (M. Clair): M. le député de Johnson.

M. Bellemare: Je serais en faveur, parce qu'il y a eu des précédents qui ont fait office de loi. Dans nos lois, il faut de temps en temps vérifier les lois qui ont été adoptées pour retrouver certaines phrases qui seraient corollaires à cela. J'avais cherché dans l'Office de la construction, un document que j'ai ici devant moi: "Tout syndicat ou groupement visé par l'article 33b, doit déposer à l'office au cours du mois de mars de chaque année une copie de ses états financiers de l'année précédente, certifiés conformes par un comptable agréé résidant au Québec". C'est la première chose que je voudrais demander dans l'amendement qui est fait. Pour qu'il y ait un corollaire, qu'il y ait une chose qui corresponde exactement à cela, on pourrait peut-être dire: Une association accréditée doit divulguer chaque année à ses membres ses états financiers dûment certifiés, au lieu du mot "contrôlés". Cela existe déjà dans la Loi de la construction.

Mon deuxième, je serais prêt à accepter la première phrase de l'amendement du député de Saint-Laurent, comme il est dit ici dans le texte de la loi, et j'ajouterais le mot: "Elle doit aussi remettre "gratuitement" au membre qui en fait la demande la copie de ses états financiers — parce que cela existe déjà dans la Loi de la construction, cela avait été recommandé par la commission d'enquête Cliche. Elle disait que tout membre a le droit d'obtenir gratuitement de son syndicat... C'est déjà dans la loi. Le reste, "ces états financiers doivent contenir..."

M. Johnson: Si vous permettez, M. le Président, je fais faire mienne l'introduction du mot "gratuitement" que nous propose le député de Johnson. Donc "doit aussi remettre...

M. Bellemare: ... gratuitement...

M. Johnson: ... gratuitement, au membre qui en fait la demande, une copie de ses états financiers.

M. Bellemare: Je pense que le reste n'est absolument pas nécessaire. "... ces états financiers doivent contenir..." Si un gars s'occupe de son syndicat, il va en prendre connaissance, c'est certain, par l'offre de les lui remettre gratuitement. Mais, dans la première, je ferais bien attention pour ne pas laisser échapper le "dûment contrôlé" ou "dûment certifié" ou dûment vérifié". Je comprends qu'on s'est adressé au ministère de la Justice pour savoir s'il y avait des termes qui seraient moins onéreux, mais on nous a dit: Ecoutez, à part "contrôlé, certifié, vérifié", il n'y a pas à en sortir; il y a un de ces mots qui peut être employé.

L'argument qui a été employé par le député de Saint-Laurent disant qu'il y a de petits syndicats, c'est vrai. Mais, même dans les petits syndicats, on trouve parfois des failles qui ont été relatées dans une certaine enquête publique qui a montré que, si cela avait été contrôlé, vérifié ou certifié, cela ne se serait pas produit. A cause de la jurisprudence établie dans certaines lois, je ne pense pas qu'on puisse faire autrement, dans le Code du travail, que de suivre ce que le ministère du Travail a déjà fait imprimer sur le projet de loi 47 que j'ai en main, sur la Loi de la construction, dans l'industrie de la construction, c'est-à-dire autre chose que les mêmes termes qui sont là pour les mettre dans le Code du travail. C'est le Code du travail amendé qui va servir à tout le monde. Je dis qu'à cause du précédent établi à l'article 33c et 33d de la Loi de la construction qui est une loi provinciale, qui est une loi que tout le monde peut consulter, je serais porté à dire, dans le premier alinéa, après "financier", "dûment certifié", "dûment vérifié", "contrôlé", peut-être... Pourvu qu'il y en ait un de ces trois-là. Dans l'autre cas — je remercie le ministre de l'avoir accepté, il me fait énormément plaisir pour la deuxième fois — "elle doit remettre gratuitement au membre qui en fait la demande..."— troisième fois, c'est vrai — "... une copie de ses états financiers".

Le Président (M. Clair): M. le député de Joliette-Montcalm. Le ministre? M. le ministre.

M. Johnson: Rapidement, sur les différents éléments de l'amendement du député de Saint-Laurent. D'abord, en ce qui a trait à la dernière partie de son amendement, pour que ces états fassent état des dépenses encourues quant à la négociation et la mise en application de la convention collective, je pense que je n'ai pas tellement à revenir là-dessus. Si on prend une unité de 20 personnes, comment peut-on faire ce partage en pratique?

Deuxièmement, dans la logique interne même de l'amendement du député de Saint-Laurent, dans le cas où on aurait une copie contrôlée — et cela m'amènera dans une seconde à discuter de la raison du retrait de la notion de contrôler — on pourrait avoir affaire à un cadre bien spécifique qu'on donne aux comptables, on force une tenue des livres en fonction des critères de la négociation et des dépenses afférentes à la négociation et à la convention collective. Cela m'apparaît absolument superfétatoire.

M. Bellemare: Nécessaire. M. Johnson: Nécessaire, oui.

M. Bellemare: Oh! Oh! Aujourd'hui, dans le mouvement ouvrier tel qu'on le connaît, cela devient plus impératif que jamais.

M. Johnson: Bien oui... Les raisons pour lesquelles je rejetterai l'amendement proposé par le député de Saint-Laurent sont les suivantes. Quant au "dûment contrôlé" — et c'est la modification qu'on a apportée hier soir au texte qui était devant la commission — le "dûment contrôlé" semble poser des problèmes dans certains esprits. La terminologie classique utilisée pour se référer à la notion de comptable agréé, c'est "vérifier". La notion de contrôler... Si on regarde au dictionnaire, le dictionnaire laisse entendre que "contrôler", c'est "vérifier", et on pourrait arriver dans des situations où, finalement, on force une unité d'accréditation de 5 ou 6 personnes à adopter des procédures qui exigent la présence d'un comptable, et se mettent à faire des exceptions pour dire: l'unité qui a moins de 50, plus de 50 etc; ça m'apparaît un peu complexe, étant donné que ça peut varier d'une année à l'autre, qu'il y ait plus ou moins de membres dans l'unité ou dans le syndicat. Pour ces raisons, on ne voulait pas non plus "désinci-ter", ce qui est une pratique de plus en plus courante, particulièrement dans certains syndicats, de former un comité de gestion ou un comité de supervision ou un comité de révision financière, de surveillance financière, qui est habituellement composé de membres de l'assemblée générale des syndiqués qui revoient.

M. Bellemare: Comme les caisses populaires.

M. Johnson: C'est ça, un peu comme les caisses populaires, comme le Parti québécois, par exemple, dans chacune de ses...

M. Bellemare: Comme l'Union Nationale s'il vous plaît!

M. Johnson: ... du Parti de l'Union Nationale également et, en fait...

M. Bellemare: Oui, monsieur.

M. Chevrette: Maintenant!

M. Bellemare: Maintenant et toujours.

M. Johnson: En fait, la notion de contrôler à l'avenir, la notion de...

M. Chevrette: Vérification tout de suite!

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Chevrette: All the time, all the way!

M. Bellemare: Je n'ai jamais eu peur de dire comment c'était administré.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. le ministre du Travail.

M. Johnson: Etant donné l'ambiguïté possible qui subsistait avec le mot "contrôler", étant donné qu'on considère que ça pourrait donner ouverture à une interprétation qui dit que contrôler... D'autant plus que c'est le mot qui a été utilisé par la Corporation des comptables agréés du Québec, quand ils sont venus témoigner sur la loi no 2 sur le financement des partis politiques. Ils ont parlé du mot "contrôler" et en fait, dans leur esprit, contrôler, c'était comptable agréé. Cela éliminait donc les CGA, et donc, une procédure domestique interne.

Une autre raison, c'est peut-être une raison de connaissance de ce qui se fait dans ces milieux, mais habituellement, ou plutôt souvent, on considère qu'une assemblée syndicale, devant un rapport certifié, contrôlé ou vérifié par un comptable, aura tendance à tenir pour acquis le contenu, alors que, dans le fond, on sait très bien que ce n'est pas le rôle d'un comptable de vérifier le contenu. Le rôle du comptable est de vérifier si les pièces justificatives correspondent bel et bien aux postes des dépenses...

M. Bellemare: Connues des municipalitées...

M. Johnson: ... et c'est ce qui donne toujours lieu à ces notes introductives aux différents bilans préparés par des maisons de comptables ou des vérificateurs. Nous avons eu des pièces justificatives qui nous ont été démontrées, nous avons vu les livres en banque et nous considérons que les pièces justificatives et les dépenses et revenus correspondent. Cela a souvent comme effet de produire un phénomène de confiance démesurée puisqu'on tient pour acquis que, si un comptable agréé a signé cela en termes de contenu, c'est exact, alors que, finalement, l'opération comptable est formelle. En supprimant l'expression "dûment contrôlé", on permet que, entre autres, cette pratique de formation des comités de surveillance des finances soit là et que, effectivement, ça donne lieu aux questions en assemblée générale sur ça.

Pour l'ensemble de ces raisons, M. le Président, quant au "dûment contrôlé", il n'est évidemment pas question qu'on accepte ce qu'on avait décidé de supprimer hier... Quant au reste, je pense avoir bien établi que nous considérons qu'il est inutile et superfétatoire de prévoir que le type de bilan présenté tiendra compte des dépenses affectées à tel poste... Pour ces raisons, je demanderais de rejeter l'ensemble de l'amendement du député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, je n'ai jamais vu pareil patinage de fantaisie de la part d'un ministre pour justifier son attachement au laisser-faire le plus complet.

Le Président (M. Clair): M. le député de Saint-Laurent, il y a en liste le député de Joliette-Montcalm, le député de Mont-Royal et ensuite vous-même, si vous manifestez le désir d'intervenir.

Le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: Je voudrais surenchérir un peu ce que le ministre a dit et montrer la pratique qui se vit dans les syndicats. Si vous assoyez un comptable en avant d'une assemblée générale pour donner un bilan, pas de question. Il lit ses séries de chiffres et c'est l'absolution la plus totale. Ce sont des membres du syndicat qui présentent le bilan du syndicat et ils le questionnent. A quoi cela a-t-il servi? Comment se fait-il qu'il y a $4000 là? Comment se fait-il qu'il y ait $5000 utilisés à tel endroit? C'est là qu'on arrive avec des propositions de la salle pour rééquilibrer des dépenses l'année suivante. Cela je l'ai...

M. Bellemare: Le 1er mai... Toutes ces questions...

M. Chevrette: ... vécu au sein d'un syndicat, à plusieurs reprises et j'ai vécu au sein de d'autres conseils, des rapports d'éminents comptables; il y a vraiment une nuance énorme entre les deux... Même pas une nuance! Il y a vraiment deux attitudes différentes...

M. Forget: Ils sont vraiment nuisibles; on va abolir les comptables, ils sont nuisibles.

Le Président (M. Clair): A l'ordre! Vous avez la parole, M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: Deuxièmement, il y a des coutumes d'établies et M. le député de Johnson vous dira que ça se fait dans des centrales syndicales. Je donne l'exemple de tous les syndicats d'enseignement de la Corporation des enseignants du Québec qui peuvent faire contrôler...

M. Bellemare: ... qui peuvent dernièrement? Le Président (M. Clair): A l'ordre.

M. Bellemare: Les enseignants, parmi eux, oui.

M. Chevrette: ... qui font vérifier leur comptabilité par le comptable agréé ou les comptables de la CEQ et ce ou ces derniers leur envoient une let-

tre disant: Nous avons vérifié; tout est parfait. Alors que... si on marquait d'une façon très expresse ici, dans le bilan contrôlé, on est aussi bien d'aller au bilan audité. On peut pousser le terme au bout et faire faire des dépenses épouvantables aux syndicats qui ont plus ou moins les moyens financiers. Donc, à partir de là, je rejetterais cela.

Le Président (M. Clair): Le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: C'est incroyable, quelquefois, les arguments qu'on entend pour justifier l'inaction ou le refus d'agir du gouvernement. Je pense qu'il aurait été mieux de dire non, on ne veut pas que ces dépenses soient certifiées. Si vous n'aimez pas le mot "contrôlées"..., je suis d'accord que peut-être "contrôlées" cela peut laisser la porte ouverte à certaines interprétations. Contrôlées par qui? Tandis que soit "certifiées", soit "vérifiées", ce sont des termes d'usage parmi les comptables agréés ou les CGA, mais dire que, s'il y a un comptable on va en savoir moins que s'il n'y en a pas, c'est un argument un peu difficile à avaler.

Je voudrais signaler, M. le Président, que c'est le gouvernement qui a introduit la notion, à 38a, à savoir qu'une association accréditée doit divulguer, chaque année à ses membres ses états financiers. Alors, une fois que le gouvernement impose cette obligation, il y a une raison pour'qu'il l'impose. Je suis certain que vous ne voulez pas donner l'impression que vous faites quelque chose sans le faire. Ou cela veut dire quelque chose, de divulguer des états financiers, ou cela ne veut rien dire. Vous l'avez réalisé vous-mêmes, parce que quand vous avez introduit la notion "dûment contrôlé", c'est vous qui l'avez introduite. Alors, je suppose qu'il a dû y avoir certaines pressions ou certaines questions. Je ne veux pas prêter des intentions, mais on peut s'imaginer que c'est par suite de pressions ou c'est une question juridique.

Mais le fait demeure que l'introduction de la notion "d'état financier" est totalement incomplète à moins qu'on dise que ces états financiers doivent être ou vérifiés ou certifiés — utilisez les paroles ou l'expression que voulez — il faut que cela ait une signification. Vous pouvez prendre des exemples non seulement dans certains syndicats, mais dans tous les genres d'entreprises.

Vous avez eu un document qui est préparé soit par un propriétaire, soit par un dirigeant d'entreprise, ce n'est pas la même chose que s'il faut certifier que ce document est exact. Autrement, pourquoi le gouvernement exige-t-il certaines vérifications auprès d'autres entreprises, auprès d'autres organismes? C'est pour que cela ait une signification. Je soumets, M. le Président, que les deux parties de l'amendement proposé par le député de Saint-Laurent vont ensemble. On ne peut pas en prendre une et laisser l'autre. Il faut absolument que, si ces états financiers doivent avoir une signification, qu'ils comprennent les articles énumérés dans le deuxième alinéa de l'article 38a tel que proposé par le député de Saint-Laurent.

Encore une fois, c'est pour protéger les syndiqués, pour prévenir certains abus et pour assurer que le membre de cette association reçoive toutes les informations pour éviter le camouflage, pour éviter certains abus. Je ne dis pas qu'il y a des abus en général; je ne dis pas que tout le monde va faire des abus. Mais une fois que vous introduisez une certaine notion, que cette notion est incomplète, à vous ouvrez la porte à des abus. A ce moment-là, vous causez des problèmes aux membres.

Si la notion de divulgation veut dire quelque chose, il faut spécifier ce qu'on doit divulguer. Autrement divulgation... Vous pouvez avoir un état financier qui dise: dépenses, x dollars; revenus, x dollars; solde, tant. Est-ce que c'est ça que vous voulez faire? Vous ne voulez pas accorder plus de protection que cela aux membres? Est-ce que vous vous attendez que tous les membres soient comptables?

M. Johnson: Est-ce que le député de Mont-Royal me permet une question? Qu'est-ce que c'est, pour lui, les états financiers?

M. Ciaccia: Les états financiers peuvent être produits de différentes façons...

M. Johnson: Un état financier certifié?

M. Ciaccia: ... à moins que vous insistiez sur ce qui doit être contenu dans les états financiers. Je vous dis que le paragraphe 38a est inutile. C'est inutile de dire qu'on doit divulguer ses états financiers. C'est totalement... qu'est-ce que ça va donner? Cela ne va pas assez loin. Ou vous voulez introduire cette notion de divulgation, cette notion de protection pour les membres, ou vous ne le vouiez pas. Je ne pense pas qu'on doive vous permettre, nous, les membres de l'Opposition, de donner l'impression d'avoir fait quelque chose.

Vous avez introduit l'obligation de divulguer. Tout le monde va dire: C'est un bon ministre, c'est un bon gouvernement, voyez ce qu'ils ont fait pour les syndicats. Mais ça ne veut rien dire, cette divulgation, à moins que vous ne spécifiiez, pour le membre qui n'est pas comptable, qui n'a pas les connaissances de M. le député de Joliette-Montcalm, le membre ordinaire qui a à voter, qui a à prendre une décision et qui veut savoir ce que fait son syndicat... Est-ce péché d'exiger ça? Je ne comprends pas vos réticences, je ne sais pas ce que vous voulez cacher. Avez-vous peur de dire que ces gens doivent savoir...

M. Chevrette: Voyons donc, procès d'intention.

M. Johnson: Voulez-vous rappeler le député de Mont-Royal à l'ordre, s'il vous plaît?

M. Ciaccia: ... ce qui se passe. Est-ce que ça fait...

M. Chevrette: Procès d'intention.

M. Forget: Ah oui, ils doivent cacher quelque chose sûrement.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît, messieurs! M. le député de Mont-Royal, vous avez la parole sur la motion d'amendement du député de Saint-Laurent à l'article 28.

M. Ciaccia: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Je vous en prie.

M. Ciaccia: J'apprécie le fait que vous protégiez mon droit de parole.

Le Président (M. Clair): A condition que vous parliez sur la motion d'amendement.

M. Ciaccia: Je parle sur la motion, assurément. J'essaie d'expliquer pourquoi il est absolument essentiel d'avoir certains détails, premièrement, sur la façon dont ces états financiers doivent être certifiés, contrôlés ou vérifiés, c'est-à-dire l'obligation de donner un état financier vérifié. Deuxièmement, il faut qu'il y ait des contenus dans ces états financiers. Vous pouvez prendre différents états financiers, actifs, passifs; si on ne donne pas de détail, je vous défie de dire ce qui se passe dans cette entreprise.

Si le bilan, si l'état financier n'est pas vérifié et s'il ne contient pas certains détails absolument essentiels au fonctionnement de cette association, ça va prendre plus qu'un comptable, ça va prendre, comme on dit en anglais, un "Philadelphia lawyer" pour être capable de savoir ce qui se passe. Si vous voulez ouvrir la porte à ce genre de camouflage, ça, c'est votre responsabilité, mais c'est notre devoir de s'y opposer et de vous demander...

M. Johnson: C'est bien connu, en six ans de pouvoir, le Parti libéral y a vu.

M. Ciaccia: ... d'inclure dans le projet de loi un minimum d'honnêteté. Ne faites pas semblant de faire quelque chose quand vous ne le faites pas. Au moins, soyez assez honnêtes pour le dire.

M. le Président...

M. Chevrette: M. le Président, question de règlement...

M. Ciaccia: Question de règlement... M. Chevrette: Question de règlement.

Le Président (M. Clair): M. le député de Joliette-Montcalm soulève une question de règlement. M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: On fait des procès d'intention... on n'a recommandé à aucun syndicat de détruire ses états financiers après un certain événement.

M. Ciaccia: Quel article du règlement, quel règlement?

M. Chevrette: Je commence à être tanné des procès d'intention.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît...

M. Forget: Quel numéro?

M. Chevrette: Le numéro qui vous plaira, M. le député de Saint-Laurent.

M. Bellemare: On n'a le droit d'imputer de motifs à personne.

M. Chevrette: C'est ça.

Le Président (M. Clair): M. le député de Joliette-Montcalm...

M. Ciaccia: Allez lui dire à lui s'il a quelque chose à cacher...

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Ciaccia: ... pas à moi.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Ciaccia: J'essaie, M...

Le Président (M. Clair): M. le député de Mont-Royal, vous savez fort bien qu'on n'a pas le droit de prêter de mauvaises intentions ou de ne pas prendre la parole d'un député, en commission parlementaire comme en Chambre. Je vous demande simplement d'être respectueux de ce règlement. Je compte sur votre collaboration pour ce faire et je vous donne à nouveau la parole sur la motion du député de Saint-Laurent. M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Sur la question de règlement, j'invoque l'article 96.

Une Voix: La décision est rendue.

M. Ciaccia: J'invoque l'article 96, pas sur la décision du président. Je ne contredis pas sa décision, vous vous faites tous des "instant presidents", cet après-midi. Je ne veux pas qu'on détourne non plus les paroles que j'ai dites. Je ne veux pas imputer personnellement à qui que ce soit, certaines intentions, mais j'ai le droit, M. le Président, quand je vois des paragraphes incomplets, de dire ce que cela peut susciter dans mon esprit de voir ces paroles incomplètes, ces articles incomplets et les effets de ces articles. Je crois que j'ai le droit de dire cela. Je vais continuer.

Le Président (M. Clair): Continuez, M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président, si vraiment on veut introduire une loi pour protéger non seule-

ment une minorité dans un secteur ouvrier, non seulement une des parties, mais si on veut être objectif, si on veut vraiment protéger la population, si on veut protéger les syndiqués qui ont le droit eux aussi d'être protégés, j'avais l'impression—peut-être que je me trompe — que le projet de loi no 45 était en partie pour cela, pour promouvoir les relations entre le patronat et les ouvriers mais aussi protéger les individus, les membres de ces associations.

Dans toute association, que ce soit une association patronale, une association de syndiqués, il y a la possibilité d'abus, et quand on dit cela, on n'est pas antisyndical, c'est la nature humaine. Il y a des possibilités d'abus dans tout. Mais c'est le devoir du gouvernement, une fois qu'il introduit une notion, de s'assurer qu'il n'y aura pas d'abus, de s'assurer que tous ceux qui sont affectés par cette loi et tous ceux qui seront régis par cette loi auront la protection. Sans imputer de motifs, M. le Président, il ne faut pas donner l'impression non plus—et c'est l'impression que cela donne — qu'on prétend faire quelque chose et qu'on ne le fait pas.

Si, vraiment, le gouvernement est de bonne foi et dit: Oui, on veut imposer une obligation à une association accréditée de divulguer, chaque année, à ses membres ses états financiers, si on arrête là, on n'a rien dit. Vous pouvez demander à n'importe quel comptable, vous pouvez même demander aux juristes, ils vont vous dire la même chose, cela ne veut rien dire. A moins que ces états financiers soient certifiés. Je vous soumets, M. le Président, que certifié ne veut pas nécessairement dire par un comptable agréé. Cela veut dire que quelqu'un certifie, sur affidavit; il est responsable du contenu. Si c'est nécessaire d'avoir un comptable... Ecoutez, on impose cette obligation à de petites entreprises. On essaie d'exagérer le coût de la préparation de ces états financiers. On a certaines lois qui régissent nos corps professionnels, incluant les comptables agréés, les CGA, et je crois que le membre de cette association a droit à sa protection. En plus, il a droit à la divulgation de ce qui arrive avec son argent. Le député de Joliette-Montcalm parle de certaines pratiques. Soyons aussi honnêtes, il y a parfois des pressions. Une personne sent qu'elle ne peut pas poser la question, qu'il y a certaines pressions faites autour d'elle, qu'elle ne devrait pas questionner celui qui est en tête, à la table, ou à côté d'elle. Ce que le député de Joliette-Montcalm veut dire, c'est: oui, on veut continuer ces pressions. Si quelqu'un a peur de faire cela, il continuera parce que les informations ne sont pas données.

M. le Président, pour éviter ces pressions et pour éviter les abus, qu'on oblige que les informations soient données, pour éviter qu'un individu soit dans l'obligation de se lever et de dire: Qu'avez-vous fait avec les $4 000 ou $5 000? Cela sera écrit dans l'état financier, ce qu'il aura fait avec. Je pense que ce sera une pratique beaucoup plus honnête. C'est ce qui est suggéré par l'article tel que rédigé par le côté ministériel. Je crois que si le gouvernement veut montrer sa bonne foi, sans être pour ou contre aucun groupe ou aucun secteur, aucune association, qu'il accepte de bonne foi la motion d'amendement du député de Saint-Laurent.

Le Président (M. Clair): Le député de Johnson.

M. Bellemare: Comme le député de Mont-Royal a demandé l'article, c'est l'article 99, neuvièmement. Un député n'a pas le droit, il est interdit à un député qui a la parole d'imputer des motifs indignes à un député ou de refuser d'accepter sa parole. C'est simplement pour vous dire que c'est le règlement, tel qu'il est fait.

Mon intervention...

Le Président (M. Clair): II n'y a pas de question de règlement...

M. Bellemare: Non, il a posé une question... M. Ciaccia: Je n'ai imputé aucun...

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Ciaccia: ... pour votre information.

M. Bellemare: C'est sûr.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Johnson sur la motion d'amendement du député de Saint-Laurent.

M. Bellemare: Dans une réforme générale qui aura lieu très prochainement, on devrait prévoir un comité de gestion. On ne l'a pas défini, et il faudrait le définir. Cela serait très long. On pourrait peut-être retenir cette suggestion, qui serait dans une révision générale, qu'il y ait un comité spécifique de gestion, qui pourrait s'ajouter... doit divulguer chaque année à ses membres, ses états financiers, dûment acceptés par un comité de gestion. Et on définirait au commencement de la loi ce qu'est un comité de gestion. Cela protégerait, comme disent certains députés, l'intérêt public.

Mais je reviens simplement avec un mot. Cela ne sera pas plus long que cela. On oblige les compagnies, en vertu de la loi des consommateurs et des institutions financières, à faire des rapports qui doivent être certifiés; c'est sûr. Vous allez me dire: Oui, mais, d'un autre côté, ce sont des gens qui font des profits. D'accord. Mais qui vous dit que les unions n'en font pas? Quand on voit, dans certaines places, des rangées de maisons qui appartiennent à des unions, des hôtelleries qui appartiennent à des unions... Je n'ai pas besoin de vous citer des cas que je connais et que vous connaissez, et qui ont fait la manchette de plusieurs journaux.

Les centrales syndicales, un certain temps, ont acheté, ont bâti et ont entretenu des grands hôtels.

M. Jolivet: Les soeurs Grises aussi.

M. Bellemare: Les pères Oblats...

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît! Messieurs, je veux rappeler à l'ensemble des membres de cette commission que, si on s'amuse à s'interrompre à qui mieux mieux, il devient très difficile pour le président de tenir la durée du temps de parole de chacun de ses membres.

M. le député de Johnson, vous avez la parole.

M. Bellemare: La seule remarque que je voulais faire, c'est que les officiers de l'honorable ministre retiennent que cela serait peut-être une très heureuse suggestion qui serait admise, qu'un comité de gestion soit celui qui pourra divulguer à ses membres ses états financiers dûment contrôlés ou certifiés par le comité de gestion...

L'autre remarque est très simple. Je ne vois pas la persistance... Quand on a dit que l'amendement n'était pas accepté de la part du gouvernement, vouloir persister, quand même trouver des arguments qui ne pourraient pas changer... On perd un temps considérable à répéter et à répéter les mêmes choses.

D'ailleurs, notre règlement est assez clair quand il traite d'une question qui a déjà été décidée. C'est dans notre règlement. S'il faut argumenter sur des choses, on perd un temps considérable. Cela fait au moins 30 minutes que nous sommes sur les mots "certifié", "contrôlé" ou "vérifié". J'ai dit que je l'abandonnais parce qu'on dit qu'un comité de gestion pourrait peut-être être pensé dans une réforme générale.

C'est tout ce que j'ai dit.

Le Président (M. Clair): Le député de Mercier avait demandé la parole.

M. Bellemare: Oui, notre amendement est présenté.

M. Godin: Je voudrais dire, M. le Président, les raisons pour lesquelles je suis contre la proposition ou l'amendement proposé par le député de... Est-ce que c'est de Mont-Royal, Saint-Laurent?

M. Bellemare: Saint-Laurent.

M. Godin: L'intervention du député de Mont-Royal là-dessus montre qu'il ne connaît probablement à peu près rien de la conduite des affaires d'un syndicat et de la façon dont annuellement un syndicat se réunit et prépare son budget de l'année qui vient et analyse les états financiers de l'année écoulée.

La différence fondamentale entre une entreprise qui fait un rapport certifié au gouvernement et un syndicat, c'est qu'un syndicat a des membres qui sont là justement pour vérifier que les règles les plus élémentaires de transmission ou d'information soient respectées.

Pour avoir assisté ou participé à un grand nombre d'assemblées syndicales, je peux vous dire que la rigueur... que les questions qui sont posées par les membres sur $0.25 ou même $0.10 dépensés par un syndicat, cela va beaucoup plus loin que ce qu'on peut voir dans une assemblée d'actionnaires de la Compagnie Asbestos Corporation où j'ai l'honneur, comme vous le savez d'avoir également des actions.

Cela me frappe que même si ce ne sont pas des états financiers vérifiés ou certifiés dans un syndicat alors que cela l'est à Power Corporation ou à Asbestos Corporation, les renseignements sont aussi complets et il y a beaucoup plus de questions qui sont posées sur la portée de chacune des dépenses qui sont faites. Le député de Johnson peut en témoigner, lui qui est membre d'un syndicat depuis de nombreuses décades.

M. Bellemare: Brotherhood.

M. Godin: C'est pour cela que je ne vois pas l'intérêt qu'il y aurait à préciser, dans les détails, tout ce que ce document devrait contenir, puisque la coutume veut que ce soit connu généralement.

D'autre part, si vous vous mettez à imposer des états financiers vérifiés ou certifiés à chaque syndicat, vous avez souvent de très petites unités syndicales...

M. Bellemare: Aux unités d'accréditation. M. Godin: ... qui n'ont pas les moyens...

M. Ciaccia: Me permettez-vous une question, M. le député?

M. Godin: Certainement, M. le député.

M. Ciaccia: Si ce que vous dites est vrai, pourquoi introduire l'article 38a, pourquoi ne pas parler du tout de l'obligation?

M. Godin: Parce que... Puis-je vous répondre? Puis-je vous répondre tout de suite?

M. Ciaccia: S'ils le font... Oui.

M. Godin: C'est parce qu'il y a eu certains abus dans certains syndicats que je ne nommerai pas, mais qui sont connus, où la direction syndicale ne déposait pas les états financiers et où il fallait un effort particulier et spécial de la part des membres pour mettre la main sur ces états financiers. Cet article règle ce problème. Mais, ce n'est pas la peine, d'après notre expérience, d'aller dans les détails et de préciser qu'il faut que ce soit certifié, qu'il faut qu'il y ait tel détail, tel renseignement très précis.

Je peux vous dire, pour avoir été dans une entreprise qui était subventionnée en partie par le Conseil des arts du Canada—c'est une politique générale pour l'ensemble du Canada — que les éditeurs qui reçoivent des subventions n'ont pas à remettre de rapport certifié ou "audité". Le Conseil des arts fait confiance...

M. Bellemare: Est-ce que le député me permet...

M. Godin: ... aux entreprises qui font de tels rapports, que c'est dans les règles. Si...

M. Bellemare: Seulement une petite question.

M. Godin: Un instant! M. le député, j'achève. Si...

M. Bellemare: Ce n'est pas parce que vous achevez, c'est parce que je veux compléter.

M. Godin: ... tel n'était pas le cas, il existe d'autres recours, il y a un tas d'autres recours pour parvenir à mettre la main sur un syndicat qui fournirait des états financiers incomplets, ou faux, ou truqués, ou frauduleux. La loi générale s'applique dans un tel cas. Mais l'expérience nous apprend que c'est exceptionnel.

M. Bellemare: Une petite question.

M. Godin: C'est aussi exceptionnel que les gens qui brûlent les feux rouges.

M. Bellemare: II y a une grande différence entre un syndicat et une unité d'accréditation, une association accréditée. On parle d'une association accréditée. C'est une grande différence, contrairement aux syndicats qui sont obligés.

M. Godin: De toute façon, ce que je dis s'applique également...

M. Bellemare: A l'association accréditée.

M. Godin: ... à ce que vous venez de dire, effectivement.

M. Bellemare: C'est toute la différence.

M. Godin: C'est mon intervention, M. le Président.

Le Président (M. Clair): La motion d'amendement du député de Saint-Laurent est-elle adoptée?

M. Bellemare: Non, il y a un amendement, il y a le mien, gratuitement.

M. Johnson: Gratuitement, oui, mais je l'ai fait mien, M. le Président.

M. Bellemare: Vous le faites vôtre, je vais perdre mon amendement. Cela ne fait rien, je vous concède de l'avoir trouvé.

Le Président (M. Clair): Effectivement, le texte proposé par le ministre est modifié en ajoutant au deuxième alinéa du paragraphe 38a de l'article 28, le mot "gratuitement", après le mot "remettre", de sorte que le deuxième alinéa se dit comme suit: "Elle doit aussi remettre gratuitement au membre qui en fait la demande une copie de ses états financiers".

La motion d'amendement du député de Saint-Laurent est-elle adoptée?

M. Forget: M. le Président, je vais demander un droit de parole pour quelques minutes, je ne vais pas y revenir longtemps, mais on a entendu un genre de raisonnement qui me fait sourire, parce qu'il me rappelle un genre de raisonnement qui a été tenu dans bien des domaines.

Effectivement, ce que le ministre et l'adjoint au ministre ont soutenu, c'est essentiellement le genre de raisonnement qu'on entendait dans bien des secteurs, probablement, il y a 30 ou 40 ans vis-à-vis de l'entreprise. C'est un raisonnement essentiellement basé sur la confiance, en disant: Ecoutez, ces gens sont, en général, corrects et honnêtes; faites-leur donc confiance; si on ne leur impose pas trop de réglementation, tout va être plus simple, cela va mieux aller et cela va entretenir un climat de bonne entente. Evidemment, on est sorti de ce Moyen Age, il y a pas mal longtemps vis-à-vis de l'ensemble de la société, mais encore dans un passé récent vis-à-vis des organismes parapublics, par exemple, les hôpitaux.

Je me souviens d'une époque où les gens n'osaient pas soulever la question d'une réglementation pour les états financiers des hôpitaux, et même la production de rapports financiers vérifiés. On disait: Ecoutez, ces gens, malgré tout, sont des bénévoles. Ils ne font pas de profit. Ce sont des gens qui sont bien intentionnés. Normalement, ils se posent les questions qu'on doit poser vis-à-vis les états financiers. Il y a eu des années pendant lesquelles, même si la loi le prévoyait théoriquement, la réglementation n'a jamais été adoptée, parce qu'on ne voulait pas choquer les gens, on ne voulait pas les insulter ou démontrer une absence de confiance à leur égard. C'est un raisonnement qui est un raisonnement médiéval vis-à-vis des organismes publics qui se financent à même des contributions des citoyens ou des membres.

Ce n'est pas faire injure à qui que ce soit que de dire: Vous êtes comptable de votre administration. Il faut que cette comptabilité soit faite selon des normes rigoureuses et objectives. C'est un soulagement considérable pour les membres que de mettre ces dispositions dans la loi, parce qu'ils n'ont pas eux-mêmes à soulever des questions de conscience vis-à-vis les gens qu'ils élisent à des postes de responsabilité, à soulever des questions qui sont toujours embarrassantes quand elles s'adressent à des individus. Quand c'est dans les lois et règlements, c'est acceptable. Ce sont les règles du jeu. C'est connu de tout le monde et cela ne fait pas de tort à tous ceux qui sont honnêtes, qu'il y ait 99,9% des gens. Et vouloir réécrire la Loi professionnelle des comptables en disant: Ils vont gêner l'opération de tout le monde... ce genre d'argumentation basé sur une espèce de peur d'offenser, une espèce de sentiment de dames pa-tronnesses vis-à-vis de l'ensemble du mouvement syndical, à mon avis, est quelque chose d'absolument médiéval. C'est un patinage qu'on n'a pas le droit de faire de nos jours, à moins qu'on ne veuille se moquer du monde.

M. Johnson: Je pense que le temps du député de Saint-Laurent est écoulé.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Saint-Laurent, il vous reste à peine une minute, puisque vous avez pris la parole au départ sur votre motion d'amendement, de 15 h 12 à 15 h 30. J'ai déduit de cela une minute parce qu'il y avait eu une question de règlement très brève. Votre droit de parole est, à toutes fins pratiques, expiré. Vous avez une dernière phrase pour conclure.

M. Forget: M. le Président, j'avais conclu, effectivement, par les derniers mots que j'ai prononcés. C'est se moquer du monde que d'employer un raisonnement comme celui-là, de vouloir réécrire les lois professionnelles en nous expliquant, par exemple, que la présence d'un comptable agréé à une réunion syndicale va geler le monde. Les vérificateurs qui vérifient les états financiers ne sont généralement pas présents aux réunions. Ils attestent par écrit qu'ils ont fait les vérifications requises. C'est un genre de cinéma qu'on nous a fait, qui est absolument antique, mais pas vénérable, contrairement à bien des traditions qu'on veut changer.

Le Président (M. Clair): Votre droit de parole est expiré. M. le ministre.

M. Johnson: Le mien n'est pas expiré, je pense?

Le Président (M. Clair): Non, le vôtre n'est pas expiré.

M. Johnson: M. le Président, pour conclure au moment où je vais demander de rejeter l'amendement du député de Saint-Laurent, indépendamment de ses ironies et des sarcasmes et de ce qui ressemble parfois à des procès d'intention, je n'ai jamais prétendu que la présence de ÇA gelait le monde dans une salle. J'ai seulement prétendu qu'un état financier vérifié par un comptable agréé, à sa face même, dans une assemblée syndicale, habituellement, suscitait peu de questions, parce qu'on tenait pour acquis que quelqu'un avait posé des questions, alors que de fait, l'intervention d'un comptable agréé n'est que formelle. C'est une constatation formelle de vérification des pièces en fonction des encaisses et des dépenses, d'une part.

Deuxièmement, je ferai remarquer au député de Saint-Laurent que ce projet de loi et ces articles ne s'appliquent pas aux syndicats, au sens de la CSN, la FTQ ou la Brotherhood ou quelque chose. Ils s'appliquent à l'association accréditée pour une unité spécifique. Or, on sait que la majorité des unités sont de petites unités au Québec et qu'effectivement, ce serait les taxer lourdement...

M. Forget: Exemptez-les!

M. Johnson:... que de leur imposer une vérifi- cation comptable à $150 au minimum, alors qu'on sait que certaines unités comprennent quatre membres. En fonction de cela, il me paraît évident que ce qui semble résulter d'un peu de confiance peut-être par un peu de connaissance des traditions syndicales, particulièrement dans les petites unités, venant du député de Saint-Laurent, éclaire peut-être le contexte dans lequel le député de Saint-Laurent a présenté cet amendement que je vous demanderai, M. le Président, d'appeler immédiatement quant à son adoption.

Le Président (M. Clair): La motion d'amendement à l'article 28, soit plus précisément au paragraphe 38a) de l'article 28 présenté par le député de Saint-Laurent est-elle adoptée?

M. Forget: Sur division.

Le Président (M. Clair): Rejeté sur division.

M. Forget: M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Saint-Laurent.

M. Bellemare: Je mets, moi, mon consentement. Je ne suis pas dissident à ça, parce que je ne voudrais pas que dans le journal des Débats, on dise que j'ai été dissident à ce qu'on remette gratuitement au membre qui en fait la demande copie des états financiers...

M. Forget: Non...

M. Johnson: "Gratuitement" est intégré au texte.

Le Président (M. Clair): "Gratuitement" est intégré au texte, tel que vous le souhaitez, M. le député de Johnson.

M. Laplante: On va le dire dans votre comté, M. le député de Johnson.

M. Bellemare: Ah, sainte bénite! Vous n'aurez pas besoin de voyager pour essayer de... Non...

Le Président (M. Clair): M. le député de Saint-Laurent.

M. Bellemare: ... ça.

M. Forget: M. le Président, j'aimerais soulever une question de règlement et vous faire une demande de directive relative à l'article 38b.

On se trouve en face d'une proposition...

Le Président (M. Clair): M. le député de Saint-Laurent, dois-je comprendre qu'il y a consentement unanime pour que nous considérions que l'étude du paragraphe 38a) est terminée?

M. Johnson: Oui.

M. Forget: Quant à moi, oui.

Le Président (M. Clair): ... auparavant?

M. Johnson: Pour les fins de la discussion.

Le Président (M. Clair): Pour les fins de la discussion de 38a...

Recours d'un salarié M. Johnson: 38b.

Le Président (M. Clair):... nous passons à l'article 38b.

M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: On retrouve dans ce paragraphe, M. le Président, l'équivalent français de ce que le ministre a qualifié de "duty of fair representation". Je ne sais pas... On peut me corriger si je n'en-ploie pas la bonne expression.

M. Johnson: ... de l'Ontario.

M. Forget: C'est un principe qu'il a apporté au moment des amendements apportés fin novembre, je pense, ou début décembre, au projet de loi no 45, et qu'il a défendus en alléguant qu'il s'agissait là d'un principe qui faisait la contrepartie de l'obligation universelle au précompte syndical.

C'est un sujet sur lequel je ne veux pas me prononcer pour le moment sur le fond, sauf pour dire qu'il n'y a rien, à notre avis, auquel on trouve objection, au contraire. Mais il demeure, M. le Président, pour ce qui est de la correction de nos procédures, qu'il s'agit là d'un nouveau principe inscrit dans la loi à un stade ultérieur à la deuxième lecture.

Il est, je pense, de commune renommée aujourd'hui, que les règles parlementaires relatives à l'insertion, dans un projet de loi, au niveau de la deuxième lecture, d'un principe qui n'y figurait pas au moment de la deuxième lecture, constituent une raison suffisante pour écarter l'amendement et le référer, selon les règles sur lesquelles je ne veux pas me prononcer, à la considération de l'Assemblée nationale. En effet, un principe— c'est la base de notre règlement à l'Assemblée nationale—ou ce qui peut être considéré comme un principe, est suffisamment important, par opposition à des modalités ou à des détails d'application, pour que tous les membres de l'Assemblée nationale puissent se prononcer sur ce principe. Or, nos travaux en commission parlementaire privent du droit de parole, sur une question comme celle-là, l'immense majorité des membres de l'Assemblée nationale.

Si nous laissions passer une chose comme celle-là, nous prêterions le flanc à une critique de la part de personnes qui appartiennent à quelque formation politique que ce soit et qui n'ont pas eu l'occasion de débattre cette question. Même sur le plan de l'opinion publique, M. le Président, tout le monde sait que les travaux de l'Assemblée nationale sont rapportés de façon plus complète et avec plus de préavis avant l'adoption que ne le sont les travaux de l'étude article par article en commission parlementaire.

Cela fait beaucoup de sens que cette règle selon laquelle les principes s'insèrent dans une loi au niveau de la deuxième lecture, et ne s'insèrent pas dans une loi au niveau de l'étude en commission parlementaire après la deuxième lecture. D'ailleurs, sans vouloir faire référence à d'autres décisions de façon extensive, il reste que, comme je le disais tout à l'heure, il est de commune renommée qu'une autre commission parlementaire qui fonctionne en parallèle avec celle-ci, a jugé... un de vos collègues d'ailleurs, président de commission, a jugé qu'effectivement il y avait des principes que l'on ne pouvait pas insérer à ce moment-là.

Encore une fois, M. le Président, je le fais dans un souci de rectitude, du point de vue de nos méthodes et de nos règles de procédure. Il est évident que, sur le fond, nous n'avons aucune espèce de désaccord avec cette mesure, mais nous ne pourrions pas, malgré tout, nous montrer d'accord étant donné que les privilèges des membres de cette assemblée sont en jeu. Il se trouve que, parfois, certaines dispositions qui sont introduites en deuxième lecture ne font pas l'affaire de l'Opposition. Il se trouve, à d'autres occasions ou aux mêmes occasions, que ces principes qui pourraient être introduite lors de l'étude, article par article, ne font pas l'affaire de membres du public. Dans cette situation en particulier, il se peut très bien qu'il y ait même des membres de la majorité ministérielle qui ne soient pas d'accord avec certains principes nouveaux inscrits à ce stade-ci de nos travaux plutôt en deuxième lecture. Ce seraient des membres de la majorité qui, à ce moment, seraient brimés dans leur droit, mais peu importe l'intention du gouvernement, qu'il veuille berner l'Opposition, le public ou ses propres membres, peu importe ses intentions, il reste que c'est une procédure que nos règlements excluent et je vous demanderais, M. le Président, de prendre en considération de façon très sérieuse l'objection que je formule relativement à l'insertion, à ce stade-ci, de l'article 38b.

Que peut-il arriver si vous jugez cet article non recevable? J'imagine que le ministre voudra s'en informer, mais il semble que la règle veut que le reste du projet de loi soit étudié, à l'exception de cet article qui est réservé. Je présume que, lors de l'étude du rapport, de la prise en considération du rapport, selon une procédure qui reste à déterminer — cela n'a pas eu lieu très souvent à l'Assemblée nationale — l'Assemblée nationale, dans son entier, délibérera sur ce sujet et en viendra à des conclusions qui permettront ou non l'insertion du paragraphe en question dans le projet de loi dans sa forme finale.

A tout événement, M. le Président, quelle que soit la procédure ultérieure, il reste que, même s'il ne devait pas y avoir de procédure ultérieure permise, c'est une disposition totalement nouvelle et

importante. Il ne me semble pas que ce soit une modalité d'application. En effet, le premier paragraphe dit: La cotisation syndicale obligatoire et universelle peut s'appliquer sans la moindre difficulté, sur le plan technique, sans qu'on fasse une obligation au syndicat de représenter sans discrimination tous les salariés d'une unité d'accréditation ou tous les salariés d'un même employeur. Cela n'a rien de commun. C'est, bien sûr, sur le plan philosophique et dans l'esprit du ministre, un quiproquo ou une contrepartie, sur le plan des principes, mais c'est un principe qui en balance un autre. Ce n'est pas une modalité d'application du premier ministre, l'autre étant une modalité fiscale ou parafiscale, qui se tient sur ses propres pieds, indépendamment de ces dispositions.

Peut-être devrais-je aborder, incidemment, quoique je ne veuille pas bouleverser l'ordre de nos travaux, les autres éléments qui, évidemment, ne font que tirer les conséquences de 38c, 38d, 38e et 38f. Cependant, M. le Président, je vous laisse le soin de déterminer de quelle manière tout ceci doit se faire. Je pense que le premier alinéa où le problème se pose est 38b. Pour ce qui est du reste, nous sommes disposés à suivre vos directives quant au sort qui pourrait être réservé aux autres paragraphes. Il pourrait être suffisant que votre décision ne s'applique qu'à 38b et que, malgré tout, la commission parlementaire poursuive ses travaux sur les autres alinéas, en quelque sorte, sous réserve. Je vous laisse le soin de préciser comment interpréter la chose, à moins que mes collègues, d'un côté ou de l'autre de la table, n'aient là-dessus des opinions précises. Toutefois il me semble clair que nous sommes en face d'un principe nouveau qui est inadmissible et irrecevable à ce stade-ci de nos procédures.

M. Johnson: M. le Président, sur la question de principe, si vous le permettez?

M. Bellemare: Non, sur le règlement.

M. Johnson: Moi, aussi. Je peux bien laisser aller le député de Johnson.

Le Président (M. Clair): Sur la question de règlement...

M. Bellemare: J'avais demandé la parole au président.

Le Président (M. Clair): ... M. le député de Johnson avait manifesté son désir d'intervenir auparavant. M. le député de Johnson.

M. Bellemare: Si on veut faire de la procédu-rite, on n'a pas fini, M. le Président, et on n'en sortira pas vivant. Ce n'est pas parce qu'une commission a obtenu hier une décision différente de...

M. Forget: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Clair): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le député de Johnson s'est élevé contre de prétendues allégations d'intentions, tout à l'heure. Je pense qu'il vient de faire exactement la même chose.

M. Bellemare: Non, je n'interprète personne. Je respecte cela, je n'interprète rien et je ne vous prête pas d'intentions parce que j'en n'aurai jamais le retour, mais je dis par exemple que quand il lit le règlement et qu'on veut le comprendre un tant soit peu, le législateur qui a formulé de nouveaux règlements avait certainement à l'idée les mots "qui ne s'oppose pas au principe affirmé". Si ce que vous dites est vrai, M. le député de Saint-Laurent, pourquoi avoir adopté 38a? C'est exactement pareil. Pourquoi ne pourrait-on pas discuter 97c? On va être pris, parce que c'est relié, indirectement, et cela ne s'oppose pas, comme dit notre règlement, à l'amendement, quand ce n'est pas étranger à l'objet du projet, premièrement, c'est cela, et, deuxièmement, qui ne s'oppose pas au principe.

Cela ne peut pas s'opposer aux principes déjà établis parce qu'on est ici justement pour essayer d'obtenir du gouvernement et de tous ceux qui composent la commission parlementaire un agrément et quelque chose qui va bonifier la loi, sinon, vous allez nous donner des critères impossibles et ce n'est pas ce que le législateur a voulu dans la loi de la procédure. La commission peut amender un projet de loi, nous pouvons amender un projet de loi pourvu que l'amendement ne soit pas étranger à l'objet du projet. Est-ce étranger à l'objet du projet, quand cela le bonifie? Est-ce que ce serait étranger à l'objet du projet de loi, quand on arrivera à 97c? M. le Président, c'est inconcevable et cela ne peut pas être un argument valable quand on sait qu'on bonifie énormément par les articles b), c), d) et e) le projet de loi qui nous a été soumis. En vertu de l'article 154, M. le Président, c'est formel, la commission peut amender un projet de loi pourvu que l'amendement ne soit pas étranger, c'est-à-dire complètement en dehors du projet de loi dont on parle, complètement en dehors des conventions collectives, complètement en dehors des propos qu'on a tenus sur les associations accréditées, que ce soit dûment contrôlé ou vérifié. On vient d'en faire un, c'est un exemple.

Le Président (M. Clair): M. le député de Johnson. Je comprends bien votre argumentation concernant les articles 154 et 70. Je vous indique seulement que je devrai également tenir compte de l'article 158 dans la décision que j'aurai à rendre et j'aimerais vous entendre là-dessus.

M. Bellemare: M. le Président, si vous prenez une proposition qui a déjà été acceptée par l'Assemblée et que vous dites que ce n'est pas étranger à l'objet pour lequel on est réuni, aujourd'hui, on est réuni justement pour bonifier, pour essayer d'amender la loi. C'est permis en vertu de l'article 154 de notre règlement, la commission peut modifier dans son principe une proposition qui a déjà été acceptée par l'Assemblée, mais c'est l'ensemble du projet, sinon, on n'a qu'à prendre nos livres

et s'en aller. M. le Président, on est ici pour apporter notre collaboration, on est ici pour donner notre point de vue. Déjà, on a amélioré, dans bien des détails, peut-être même en profondeur certains articles, mais, parce que les amendements pleuvent comme des clous sur la tête du gouvernement, on va prendre cela comme un argument. Hier il y a eu un précédent de créé. Je ne peux pas concevoir qu'on soit ici simplement pour écouter le gouvernement, qu'on n'ait pas le droit de proposer des amendements. Rien ne nous empêche, si c'est possible, si cela ne s'oppose pas au projet de loi, d'amender certains règlements.

Le Président (M. Clair): Sur la question de règlement, M. le ministre.

M. Johnson: M. le Président, je ne veux évidemment pas prêter d'intentions au député de Saint-Laurent. Je constate qu'après 3 h 30 de débats nous sommes toujours à l'article 28. Quant à la question de règlement qu'il soulève, tout d'abord, l'article 154 nous dit effectivement qu'on peut présenter des amendements à condition qu'ils ne soient pas étrangers à l'objet du débat, deuxièmement, qu'ils ne s'opposent pas au principe établi en deuxième lecture. Premier argument.

Deuxième argument, quant à l'article 158, on nous dit qu'un amendement ne peut modifier dans son principe... Or, M. le Président — et cela me semble être fondamental — je vous soulignerai que le projet de loi 45 prévoit le précompte syndical obligatoire à son article 28 modifiant l'article 38 du Code du travail. Je considère que, dans ses modalités, il y a des obligations qui sont imparties aux syndicats et que les dispositions de 38a découlent directement de 38.

De plus, cela m'apparaît fondamental, M. le Président, quant à l'objet, effectivement, du projet de loi 45; je vous rappelle que l'article 46 du projet de loi 45, prévoit une modification à l'article 88 du Code du travail et affirme clairement la propriété collective du grief. Or, affirmant la propriété collective du grief, on peut constater que l'article 38b devient une modalité d'application et des conséquences de la propriété collective du grief, c'est-à-dire qu'advient-il quand on est dans le contexte de la propriété collective du grief? Les articles 38b et suivants sont les modalités qui prévoient les exceptions, les tempéraments, les conséquences, finalement, de l'article 88 du Code du travail, tel que modifié par l'article 46 du projet de loi 45.

Le Président (M. Clair): Sur la question de règlement, le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Mackasey: M. le Président, je veux simplement souligner que nous ne sommes pas contre la formule Rand, ni la section, du tout. Je pense que ce que le député de Saint-Laurent veut souligner ou demander par son amendement, c'est la décision que, si vraiment ou non nous acceptons le principe de cette section, nous établissions le fait que c'est un nouveau principe qui n'existait pas auparavant dans le Code du travail et dont on n'a pas parlé, au fur et à mesure, en deuxième lecture. Nous sommes complètement d'accord avec les amendements que le ministre propose. C'est le gouvernement qui propose des amendements, nous ne sommes pas contre les amendements. On veut tout simplement, peut-être pour les amendements à venir, demander si vraiment ça tombe ou non dans le domaine de jurisprudence que l'autre commission a établi hier soir.

M. Bellemare: Ce n'est pas pareil. Hier soir, c'était en vertu d'une autre loi qui était adoptée, la loi 49. Elle a fait un amendement pour cette loi.

M. Mackasey: Je comprends.

M. Bellemare: Ce n'est pas pareil du tout. Ce n'est pas ça qu'on dit. L'amendement était rejeté parce que ça attaquait une autre loi. Ce n'est pas pareil.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît, M. le député de Johnson. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, vous avez la parole sur la question de règlement.

M. Mackasey: Simplement pour souligner, encore une fois, que nous ne sommes pas contre les amendements. Nous ne sommes pas contre le principe, nous ne sommes pas contre la protection pour ceux qui ne sont pas membres d'un syndicat, mais qui payent quand même le syndicat. Nous ne sommes pas du tout contre le principe. On veut tout simplement, par cet amendement, établir vraiment de votre part une directive si à votre connaissance, après avoir écouté les arguments du député de Johnson, le ministre et d'autres, si vraiment ce principe que nous voulons nous-mêmes est acceptable ou non.

Parce qu'on ne peut pas arriver en Chambre et qu'un député de votre parti ou un autre parti prétend que cette section n'est pas acceptable parce qu'elle était introduite à la commission en deuxième lecture. Ce n'est pas plus compliqué que cela. On ne discute pas de la substance, on discute seulement de la procédure adoptée par le gouvernement pour introduire ces amendements.

Le Président (M. Clair): M. le député de Mont-Royal, sur la question de règlement?

M. Ciaccia: Oui.

Le Président (M. Clair): Et M. le ministre entendait-il parler sur la même question de règlement?

M. Johnson: C'est ça.

Le Président (M. Clair): Le député de Mont-Royal sur la question de règlement.

M. Ciaccia: M. le Président, l'article 38b crée une nouvelle obligation. Sur les associations ac-

créditées qui n'étaient pas inclues dans le projet de loi en deuxième lecture, quand le ministre dit que ça découle de l'obligation qu'un grief devient la propriété collective de l'association, je vous soumets très respectueusement, M. le Président, premièrement, que cet article 38b ne se trouve pas après l'article qui parle des griefs, soit l'article 46, et deuxièmement, l'article 38b est beaucoup plus large dans son étendue que sur la seule question de griefs. Il parle sur la question d'agir de mauvaise foi ou de manière arbitrale ou discriminatoire; ce n'est pas limité seulement à la question de griefs. Cela peut être dans toutes sortes de situations.

J'irai même plus loin, peut-être — à moins que j'aie mal compris le député de Saint-Laurent — en parlant des articles 38c, d et suivants, pour dire que ces articles aussi se réfèrent nécessairement à des obligations à l'article 38b. Nous soumettons que l'article 38d n'est pas recevable à cause du principe qui est inclus dans 38b, les obligations n'étaient pas contenues dans le projet de loi en deuxième lecture. L'Assemblée ne s'est jamais prononcée sur autre chose que le précompte syndical obligatoire et seulement dans son aspect financier. Elle ne s'est pas prononcée sur cet aspect de 38b qui est étendu, qui peut couvrir tous les aspects, toutes les opérations de l'association accréditée. Ce n'est pas limité à un grief, ce n'est pas limité à un précompte. La portée de 38b, d'après ce que je lis, est globale. Une telle obligation n'a jamais été affirmée, car l'Assemblée ne s'est pas prononcée sur une telle obligation.

Je vous soumets que 38b n'est pas recevable à ce stade-ci. C'est important, même si nous sommes d'accord avec le principe de 38b, il faut conserver les principes de notre procédure. On ne peut pas laisser passer et créer un mauvais précédent en acceptant en commission un amendement à un article sur un principe créant des obligations sur lesquelles l'Assemblée ne s'est pas prononcée en deuxième lecture. Je pense que c'est un principe que nous devons garder, nous devons y porter une attention particulière, parce que cela peut créer des précédents dangereux dans d'autres domaines, non seulement dans ce projet de loi.

En terminant, je crois que cet article va au-delà des principes qui ont été acceptés en deuxième lecture et, conséquemment, il n'est pas recevable. J'irais plus loin, je dirais que les articles qui suivent 38b et qui se réfèrent spécifiquement aux obligations de 38b devraient eux aussi à mon humble avis être déclarés irrecevables.

Le Président (M. Clair): En vertu de l'article 43 de notre règlement, le président se prononce sur les questions de règlement au moment où il le juge à propos, j'ai donc l'intention d'exercer ce droit...

M. Johnson: Si vous permettez, M. le Président, comme vous m'aviez accordé le droit de parole au moment où vous avez effectivement reconnu le député de Mont-Royal, j'aimerais quand même pouvoir...

Le Président (M. Clair): Je vous accorde ce droit, mais vous serez le dernier intervenant.

M. Johnson: Je soumets que votre décision doit tenir compte de l'article 158. La question que la présidence se posera sera sans doute la suivante: Est-ce que cette commission modifie dans son principe la proposition qui a été acceptée par l'Assemblée en deuxième lecture?

M. Bellemare: C'est là la formule Rand.

M. Johnson: Je soumets que le principe adopté en deuxième lecture est double. D'une part, celui qui découle de l'article 28 du projet de loi, actuellement, modifiant l'article 38 du code, c'est-à-dire l'introduction du précompte syndical obligatoire, et, deuxièmement, l'article 46 du projet de loi, ce qui m'apparaît fondamental dans les circonstances, qui lui, affirme la propriété collective du grief. Or, M. le Président, dans un deuxième temps, vous aurez à considérer l'article 154 et vous devrez vous poser la question de savoir si la commission amende ainsi le projet de loi par quelque chose qui est étranger à l'objet du projet de loi ou qui s'oppose au principe affirmé en deuxième lecture. Je soumets que c'est très clair dans le cas de 154, que nous respectons les dispositions de 154, paragraphe 2.

Finalement, dans le contexte de l'analyse de l'article 46 du projet de loi modifiant l'article 88 du Code et affirmant le principe de la propriété collective du droit de grief, je soumets que l'article 38b est effectivement un énoncé de principe général, mais est suivi d'une procédure précise à partir de 38c, qui se réfère effectivement au non-respect du droit au grief d'un individu en matière de sanction disciplinaire ou de renvoi et qu'il s'agit effectivement du problème, de la situation que peut créer la propriété collective du droit de grief prévu à l'article 47.

On pourra peut-être invoquer que l'article 38b est mal placé; je ne le pense pas. Je pense qu'il est aussi connexe à 38 qu'il ne l'est à 88. En ce sens, M. le Président, j'espère que vous accepterez la modification que j'ai proposée à cette commission.

Le Président (M. Clair): Messieurs, l'article le plus restrictif, en ce qui concerne les possibilités d'amendement à un projet de loi lors de l'étude en commission parlementaire, m'apparaît être l'article 158 qui se lit comme suit: "Une commission ne peut modifier dans son principe une proposition qui a déjà été acceptée par l'assemblée." Dans son principe. La première notion qu'il faut dégager de cet article 158, c'est celle de principe. Qu'est-ce qui constitue un principe dans ce projet de loi et qu'est-ce qui ne le constitue pas? Je pense que, si on interprétait très restrictivement l'article 158, à la limite, on paralyserait complètement le travail en commission parlementaire, puisqu'un mot peut, à toutes fins pratiques, constituer un principe. Je me réfère à la comparaison entre le mot "peut" et le mot "doit"; il y a eu déjà plusieurs amendements qui ont été acceptés et

qui, pourtant, changeaient pas mal le sens d'une disposition législative. Il faut donc exercer, au niveau de la présidence, un certain jugement de valeur quant à ce qui constitue ou ne constitue pas un principe du projet de loi et, pour ce faire, il faut, à mon sens, dans le cadre de l'article 158, faire appel aux articles 154 et 70, dans le but de mieux cerner ce que peut faire la commission parlementaire à propos d'un principe.

Mais j'ai bien dit que la première chose à faire, c'était de dégager d'abord le principe sur lequel l'amendement est proposé. Exerçant mon jugement, qui est certes limité, il m'apparaît qu'à l'article 28 du projet de loi 45, le principe en cause est le principe du précompte syndical obligatoire. Interprétant l'article 158 à la lumière des articles 70 et 154, on lit, à l'article 70: "un amendement est irrecevable si son effet est d'écarter la question principale sur laquelle il a été proposé". Il m'apparaît que le paragraphe 38b, dont l'adoption est proposée par le ministre, n'écarte pas la question principale qui est celle du précompte syndical obligatoire.

D'autre part, en ce qui concerne l'article 154, au deuxième alinéa, on y lit: "La commission peut amender un projet de loi pourvu que l'amendement ne soit pas étranger à l'objet du projet de loi". Il ne m'apparaît pas...

M. Bellemare: Mais qu'il ne s'oppose au projet de loi.

Le Président (M. Clair): M. le député de Johnson.

M. Bellemare: Excusez-moi, c'est vrai.

Le Président (M. Clair): II m'apparaît que l'amendement proposé par le ministre du Travail, en incluant un paragraphe 39b, n'est pas étranger à l'objet du projet de loi. D'autre part, on mentionne, à l'article 154: "que l'amendement ne doit pas s'opposer au principe affirmé en deuxième lecture". Encore une fois, il m'apparaît que le principe affirmé en deuxième lecture, dans le jugement que j'exerce comme président, était celui du précompte obligatoire et que l'article 38b, tel que proposé par le ministre, ne s'oppose pas au principe affirmé en deuxième lecture qui, encore une fois, était celui du précompte syndical obligatoire. Il m'apparaît que l'article 38b ne constitue qu'une précision, qu'il modifie peut-être l'article 38a ou qu'il le précise — je retire le mot "modifie"— qu'il précise l'article 38a, mais qu'il ne s'oppose pas à ce principe, qu'il n'y est pas étranger et qu'il n'a pas pour objet, non plus, en vertu de l'article 70, de l'écarter.

Pour ces raisons, je juge recevable la motion d'amendement du ministre du Travail touchant le paragraphe 38b, ainsi que les suivants d'ailleurs, quoique la question de règlement, messieurs, porte sur l'article 38b. Je ne peux rendre de décision sur l'article 38c, 38d et 38e.

S'il y avait des questions de règlement que d'autres députés pensaient soulever, je suis convaincu qu'ils tiendront compte de la décision que je viens de rendre, mais je pense que, au point de vue de notre règlement, la question de règlement concernait le paragraphe 38b et je déclare recevable la motion d'amendement du ministre du Travail, en ce qui concerne le paragraphe 38b, à l'article 28, du projet de loi 45.

M. Forget: Vous avez parlé d'un amendement. On n'est pas en face d'un amendement; on est en face du projet de loi.

M. Bellemare: Je soulève un point de règlement. L'article 43 est clair, deuxièmement, et lorsque le Président rend sa décision, il indique ce qu'il a vu et ce qu'il dit. Il l'a rendue, il l'a justifiée. Il n'est pas permis ni de critiquer...

M. Forget: M. le Président, on n'a pas besoin de commentaires du député de Johnson ici.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît.

M. Bellemare: ... ni de revenir sur la question. Il n'est pas question de revenir sur la question décidée.

M. Forget: ...

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît; à l'ordre, s'il vous plaît.

M. Bellemare: Non, M. le Président, c'est notre règlement et vous allez le suivre et c'est certain. Vous essayez de nous passer des bois, cela ne passera pas de même.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît. M. le député de Johnson.

M. Bellemare: Pas le droit de revenir sur la question décidée.

Une Voix: Qui préside?

Le Président (M. Clair): M. le député de Johnson, vous avez tout à fait raison.

M. Forget: On a deux présidents, je crois, M. le Président. Est-ce que c'est une promotion de l'autre côté?

M. Bellemare: Une promotion, moi, je cherche une promotion? Ah! non, moi je ne suis pas de ces gens-là.

Le Président (M. Clair): ... j'espère que les propos que vous avez tenus à l'effet que la décision du Président était partiale et enregistrée.

M. Bellemare: Je ne me présenterai pas à la chefferie libérale, c'est certain.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs, s'il vous plaît.

M. Bellemare: C'est correct.

M. Mackasey: ... où il faut rester ensemble.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît. Nous en sommes donc à l'étude du paragraphe 38b de l'article 28 du projet de loi 45. Y a-t-il des intervenants sur ce paragraphe?

M. Bellemare: Oui.

Le Président (M. Clair): M. le député de Johnson.

M. Bellemare: M. le Président, en vertu de l'amendement qui est apporté par le ministre, je trouve assez extraordinaire qu'il ait fait sauter un bout de phrase: celui qui disait: "pour tout ce qui concerne la négociation, l'interprétation et l'application de conventions collectives". Quant à l'interprétation, quant à l'application de la convention collective, je n'y vois pas d'objection. Mais quant à la négociation, là, par exemple, j'y vois un danger. Si on regarde ici dans notre description de la Loi du Code du travail: "griefs: toute mésentente relative à l'interprétation, à l'application d'une convention collective". Si je réfère, par la suite, au paragraphe e) qui dit: "Et si le tribunal estime que l'association a violé l'article 38b, il peut autoriser le salarié à soumettre sa réclamation à un arbitre nommé par le ministre en position, selon la convention collective...", quand il s'agissait d'un grief.

Vous faites disparaître un mot qu'il serait très important de garder, en ce qui concerne toute la négociation. L'interprétation et l'application, je peux m'en passer. Mais en ce qui concerne la négociation, c'est important vis-à-vis de la loi, quand il s'agira de relever, comme on dit si bien dans l'article 38e, la notion du grief. Parce que la négociation, vous savez, on ne peut pas la faire sauter n'importe quand, n'importe comment. L'interprétation et l'autre terme qui dit l'application, on peut l'enlever; cela ne me dérange pas. Mais quand il s'agit de la négociation, peu importe qu'il soit membre ou non, en tout ce qui concerne la négociation. Point. Cela me satisfait énormément parce qu'on ferait justement dans le 38... Correct, allez-y.

M. Johnson: M. le Président...

M. Bellemare: Est-ce que j'ai été trop long?

M. Johnson: ... voici, si le député de Johnson me le permet. J'aimerais clarifier les raisons qui nous ont amenés à cela. On a eu des discussions longues et compliquées avec nos juristes là-dessus. Je suis d'accord avec le député de Johnson quand il affirme que 38f évoquant la notion de grief, en disant que: "Si une réclamation est déférée à un arbitre en vertu du 38e, l'employeur ne peut opposer une observation par l'association de la procédure des délais prévus à la convention collective par le règlement des griefs". Donc, on se réfère à la notion de grief et on dit: C'est toute mésentente relative à — au début du code — l'appli- cation ou l'interprétation de la convention collective. Donc, la notion d'interprétation et d'application de la convention collective est considérée comme comprise, puisqu'à 38f on réfère à l'arbitrage et puisque cet arbitrage découle... et que la notion de grief est comprise.

M. Bellemare: C'est pas une raison pourquoi vous ne voulez pas laisser la négociation dans le paragraphe.

M. Johnson: Maintenant, il reste la notion de négociation. La raison pour laquelle nous avons supprimé la notion de négociation, c'est que, d'une part, la notion de négociation ne fait pas partie de la définition de grief. Deuxièmement, et je vais donner un exemple — je sais que le député de Johnson a une longue expérience du syndicalisme...

M. Bellemare: Non, non, ce n'est pas nécessaire.

M. Johnson: ... le député de Johnson sait très bien, comme moi, que lors d'une négociation, certaines catégories d'employés, à cause du poste qu'ils occupent, à cause de leurs fonctions dans l'entreprise, à cause de l'importance...

M. Bellemare: Parce qu'ils sont nos membres.

M. Johnson: ... c'est cela.

M. Bellemare: Oui, on vient de le dire.

M. Jonhson: Non, enfin, le problème ne se pose pas à ce niveau-là, au niveau de la négociation, certaines catégories d'employés peuvent faire l'objet, et le député de Johnson sait très bien, comme moi, que, dans toute convention collective, puisqu'il s'agit d'un donnant donnant entre employeur et l'association accréditée, il y a quelque part quelqu'un, des personnes, des catégories ou des actes qui font l'objet de demandes qui sont inférieures à celles d'autres personnes, actes ou catégories d'objets. Par exemple, prenons les employés de commerce. L'exemple le plus récent que j'ai à l'esprit, c'est Dominion. Les syndiqués ont donné un vote quasi unanime en faveur de leur dernière convention collective il y a environ un mois et demi. On sait que, chez Dominion, sur les quelque deux mille employés représentés par l'unité en question, par l'association accréditée en question, il y avait un groupe d'une centaine ou de 200 employés occasionnels ou à temps partiel, qui étaient quand même couverts par l'unité d'accréditation, qui faisaient partie de l'association accréditée et qui considèrent, au bout de la ligne, que la négociation a amené pour eux des conditions qui ne sont pas suffisantes comparativement à l'ensemble des autres travailleurs de l'unité de négociation.

Par définition, cela fait partie de ce que c'est qu'une négociation. Le syndicat en cours de route, va décider qu'il demande $1.85 d'augmentation

pour tel groupe, mais $1.25 pour tel autre groupe, compte tenu de leurs fonctions, de leur importance, etc. Si on ouvrait cette notion à négociation, on pourrait donner ouverture littéralement à un sabordage de ce que représente le mandat d'un syndicat en négociation, puisqu'une personne ayant eu des conditions inférieures à ses collègues, pourrait invoquer que cette négociation a été discriminatoire à son égard. Ce n'est évidemment pas l'objet de l'amendement que nous avons apporté au projet de loi 45. L'objet est d'imposer une obligation au syndicat de traiter de façon égale, non discriminatoire, non arbitraire et sans mauvaise foi, l'ensemble des salariés, qu'ils soient compris ou non dans l'unité. Il faut le lire avec 38c et les suivants puisque, finalement, 38c parle d'un recours; ce recours se réfère lui-même à la non-observation de 38b par l'association accréditée, et permet ce recours aux salariés qui se considèrent lésés. L'exemple de cela, c'est le renvoi ou la sanction disciplinaire comme, par exemple, la suspension.

Si un individu considère que le syndicat a agi de façon discriminatoire, arbitraire ou de mauvaise foi en choisissant de ne pas le défendre, il peut, à ce moment-là, avoir recours aux procédures qu'on retrouve aux articles 38c et suivants.

Pour ces raisons, M. le Président, nous avons supprimé la notion de négociation et nous maintenons le reste.

M. Bellemare: Ils m'ont dit que les formalités...

Le Président (M. Clair): M. le député de Johnson.

M. Bellemare: Quans vous finissez l'article 38b, vous dites: "qu'elle représente, peu importe qu'il soit membre ou non", c'est de là que vient le problème. C'est là que pour tout ce qui concerne la négociation, membre ou non, on aurait le droit de se servir de 38b. C'est pour cela. Quant à l'interprétation et à l'application, les non-membres n'ont pas affaire à cela, mais, par exemple, en négociation, ils auraient certainement un droit acquis de le faire et vous l'enlevez. Cela a été mis là par des juristes qui connaissaient probablement le Code du travail et qui l'avaient étudié et vérifié avec le tribunal. A un moment donné, des pressions se sont peut-être faites; chez nous, il y en a eu. Dans mon cas, des gens sont venus me dire: Ecoutez, la négociation, on ne devrait pas l'enlever, sauf l'interprétation et l'application, à cause des griefs, je pense qu'on devrait laisser la négociation.

Je ne veux pas forcer la main au ministre mais, dans ses premiers amendements, il était bien écrit: "La négociation, l'interprétation et l'application de la convention collective"... Pourquoi est-ce qu'il arrive, à un moment donné, et biffe tout cela? Je ne dis pas qu'il a été vu et qu'il a été pressuré. Non, mais les légistes qui l'ont mis là avaient dit au ministre du temps: C'est bien important que cela y soit. A un moment donné, on reçoit un nouvel amendement et cela n'y figure pas. C'est complètement enlevé. Pourquoi? Il y a une raison. Il faudrait se montrer prudent, je le pense.

M. Mackasey: Je pense, M. le ministre, que vous savez autant que moi la raison. Vous l'avez mentionné en parlant de la Commonwealth, c'est occasionnel. Les syndicats n'aiment pas cela un occasionnel. C'est normal, parce que, pour eux, cela représente une menace du nombre d'employés permanents. En temps normal, avec la formule Rand surtout, ils sont obligés de payer une cotisation au syndicat. Mais, souvent, les syndicats à la table de négociation ne sont pas tellement intéressés d'améliorer le sort des "occasionnels". Au contraire.

Je n'aime pas parler de mon expérience. Dans votre domaine, au provincial, je n'ai pas d'expérience, mais je sais que, souvent, dans un bureau de poste, par exemple, même si les occasionnels sont membres du syndicat, le syndicat ne peut pas protéger les occasionnels, ne veut pas donner le droit...

M. Bellemare: ... à la négociation.

M. Mackasey: ... au même salaire. On ne veut pas" encourager l'engagement d'occasionnels, même si c'est souvent nécessaire dans une entreprise où c'est impossible d'organiser une productivité sans eux. Vous êtes obligés de travailler pendant 24 heures pour sortir le courrier de la poste.

Vous avez ici le changement fondamental par lequel vous permettez aux syndicats, encore une fois, de ne pas agir de bonne foi, envers les occasionnels, de ne pas protéger les droits des occasionnels. On veut par exemple que, chaque mois, les occasionnels payent une cotisation au syndicat, mais qu'ils ne viennent pas à la table de négociation trop souvent.

J'ai eu l'occasion de m'en rendre compte quand moi-même j'étais obligé de défendre les occasionnels, mais pas les syndicats. Vous savez cela, M. Chevrette.

Notre rôle ici est de protéger tous les employés, pas seulement ceux que le syndicat veut voir protégés. La première recommandation du ministre était juste, logique et honnête, soit de protéger les occasionnels qui ont le droit de vivre aussi, qui sont membres d'un syndicat et qui ont le droit, à la table de négociation, d'être défendus, d'être protégés par le syndicat, au même niveau et avec la même intensité que tous les membres permanents.

Là, vous avez changé 38b, je crois, dans le sens que, si un occasionnel se plaint qu'il n'est pas protégé par le syndicat de la même façon que les employés permanents, il peut faire une plainte au commissaire ou à vous.

Mais là, qui va protéger l'occasionnel, si, à la prochaine négociation, même à la Commonwealth, le syndicat ne veut pas aider les occasionnels?

M. Johnson: Dominion. Pas Commonwealth. It sounds like Commonwealth.

M. Mackasey: Anybody attended it. What I want to say, I may come back to my own language, let us talk about unions in general, quite often there are three classes of workers in a company, let us talk about les "débardeurs", if you like. There are full time workers, there are part time workers and there are occasionals. They are covered by the same collective agreement. They do not all have the same protection. They are not on the same "liste d'ancienneté, seniority list?

M. Bellemare: C'est cela.

M. Mackasey: A brakesman in a train may be used to be? OK.

So, il y a une nuance, the occasionals from unions are tolerated. Unions want their dues. They do not want the obligations. I protected them with a degree of integrity, that they should, because these casuals are paying into the union for protection. And you have admitted, M. le ministre, the obligation of the union, very narrowly, you have eliminated from your amendment the obligation of the union to protect the casual workers at the bargaining table, in fighting for their rights. Oh yes! Yes, you are; I am sorry. Exactement.

M. Bellemare: Yes.

M. Mackasey: I can understand the Unions for making representations to the minister and saying: We do not really want casuals, because that cuts down on the number of full-time employees. If a company abuses of the use of casuals, if you hire too many casuals, if you hire too many part-time workers, you are cutting down on the number of permanent workers.

Je comprends que les permanents n'aiment pas les occasionnels. Cela représente, pour eux parfois, par exemple, une diminution de temps supplémentaire, "overtime in weekend work" mais, "we cannot have it both ways".

Avec la formule Rand, on demande à quelqu'un qui n'est même pas membre du syndicat de payer. Je suis complètement d'accord avec cette philosophie, mais il faut quand même que le syndicat rende à cette personne qui ne veut pas être membre du syndicat, peut-être à cause de ses convictions religieuses, si vous voulez, tous les services qui sont rendus à des membres permanents ou à des membres qui sont membres du syndicat et non pas seulement des salariés dans l'accréditation.

Comme vous avez changé les responsabilités des syndicats, dans votre première suggestion ou recommandation, par l'amendement que vous venez d'apporter, c'est sans doute parce que les syndicats ont dit au ministre du Travail ou peut-être à vos fonctionnaires:

The best you can expect us to do is to tolerate the casuals. Do not ask us to go up to the bargaining table and fight for their rights, because they are a necessary evil, "malheureusement".

I am saying that we have an obligation in this place, not to the Unions but to the workers, including the casual workers, including the part-time workers, including the non unionized workers who, through the Rand formula or personal convictions, are paying their dues. And you are limiting the legal responsibility of the Union by this amendment. I am disappointed in you, Mr minister, very disappointed in you.

M. Johnson: M. le Président, si le député de Notre-Dame-de-Grâce me permet, je voudrais référer au fait qu'il s'agit de droit qu'on peut considérer comme du droit nouveau — c'est une expression que je trouve galvaudée.

M. Forget: Le Président l'a dit tantôt.

M. Johnson: La plupart des dispositions du projet, plusieurs dispositions du projet de loi 45 sont considérées comme du droit nouveau. Cependant, l'article 60 de la loi ontarienne prévoit exactement les mêmes dispositions.

Deuxièmement, le fait d'avoir supprimé...

M. Mackasey: Ce sont des arguments qu'on a là.

M. Johnson: Oublions... Si j'avais présenté ce texte à l'origine, sans présenter un premier texte où on référait à la notion de négociation, interprétation et implication de la convention collective, je suis à peu près sûr que le député de Notre-Dame-de-Grâce n'aurait pas fait l'exposé qu'il vient de faire, parce qu'étant donné qu'à l'article 38b, on ne spécifie pas qu'il s'agit de l'application, de l'interprétation ou de la négociation, dans le cas de la convention collective, cela couvre en principe l'ensemble.

Quelle est la conséquence de l'existence de l'article 38b? C'est du droit nouveau au sens où on impose une obligation qui n'existait pas pour les syndicats. En ce sens, c'est un progrès considérable.

Deuxièmement, on prévoit une obligation précise, à l'article 38b, ce qui, en principe, peut donner un recours en dommages-intérêts pour celui qui se sentirait lésé.

Troisièmement, à l'article 38c et suivants, on prévoit un recours spécifique qui peut conduire à l'arbitrage du grief de façon expéditive par un arbitre unique, dans les cas précis où il s'agit effectivement de ce qui aurait pu faire l'objet d'un grief.

Or, la négociation d'une convention collective et l'attitude présumément discriminatoire qu'un syndicat pourrait avoir à l'égard d'un syndiqué ou d'un groupe à l'intérieur de l'unité, ne peut jamais faire l'objet d'un grief en soi. Au moment où on se parle, au Québec, l'occasionnel peut-il se plaindre du fait qu'il a été moins bien traité que ceux qui sont les employés à temps plein ou les employés à temps partiel dans un syndicat? Il n'a aucun recours. On lui donne au moins ici un recours en

dommages-intérêts, s'il peut en faire la démonstration.

Finalement, le seul fait d'imposer cette nouvelle obligation au sens de notre droit du travail et non pas au sens du projet de loi 45, puisqu'elle découle de l'article 46, quoique puisse en penser le député de Saint-Laurent, c'est, à mon avis, un progrès considérable.

Je pense que cet article ne donnera sans doute pas lieu a beaucoup de réclamations pour les mêmes raisons qu'en Ontario, en cinq ou six ans d'application, le "duty of fair representations", n'a donné lieu qu'à moins de dix, je pense que c'est sept poursuites dont deux ont été maintenues devant le Labour Relations Board de l'Ontario.

En ce sens, c'est l'affirmation d'un principe clair d'où peuvent découler des dommages et intérêts dans le cas de la négociation et qui protège les droits en matière de griefs de celui qui n'est pas membre de l'unité, ou qui est membre de l'unité sans être membre du syndicat ou même un membre du syndicat, mais qui voit son syndicat de façon discriminatoire ne pas exercer les recours en matière de griefs qui appartiennent maintenant au syndicat.

M. Mackasey: Une petite réplique, M. le ministre. Votre premier amendement suggérait — et je ne suis pas pour le lire, vous le connaissez mieux que moi, peu importe — qu'il soit membre ou non..., pour tout ce qui concerne la négociation, l'interprétation ou l'application de la convention collective. Maintenant, vous avez éliminé pour tout ce qui concerne les négociations ou l'interprétation ou l'application de la convention collective. Peut-être que cela n'est pas apparu dans votre premier amendement, nous n'avions pas tellement de soupçons sur votre deuxième amendement qui ne touche plus ou ne mentionne plus maintenant les négociations, l'interprétation, l'application de la convention collective.

Il faut revenir aux négociations. J'ai assisté à tellement de négociations, pas comme ministre du Travail, mais comme employeur dans les postes; un autre rôle, je n'étais pas ministre du Travail, j'étais employeur. J'étais obligé, comme employeur, de protéger les employés, parce que le syndicat n'avait pas le courage... Il ne voulait pas protéger leurs employés occasionnels, parce qu'il ne voulait pas d'occasionnels au bureau de poste. Il était prêt à prendre leur argent, par exemple. Ils étaient membres du syndicat, ils étaient membres de l'unité. C'était moi qui étais obligé de défendre les employés, parce que le syndicat n'en voulait pas.

C'est cela le changement dans l'amendement. Cela enlève au syndicat l'obligation morale de protéger tous les membres salariés dans cette unité, pas seulement dans la question de négligence grave à l'endroit des salariés, mais aussi à la table de négociations. Au sujet de l'interprétation ou de l'application de la convention collective, qui va faire cette application ou cette interprétation si ce n'est pas un "shop steward" ou quelqu'un dans le local, qui va faire l'interprétation de la convention collective dans le même sens pour un occasionnel que pour un permanent? Nous sommes ici pour rendre justice aux travailleurs, pas seulement aux syndicats. Si le ministre est content publiquement... Je vais vous faire, je vous le jure, un discours en troisième lecture sur ce point. Tous les employés dans la province de Québec vont le comprendre, parce que par ce changement le ministre est prêt à appuyer quelques syndicats — il n'y en a pas tellement — qui sont prêts à discriminer, à faire de la discrimination aux membres de leur syndicat, quand ces membres sont des employés à temps partiel, quand ce sont des occasionnels, parce que finalement, un syndicat, logiquement, préférerait aucun occasionnel, aucun travailleur à temps partiel, c'est seulement les employeurs qui sont forcés à cause des caractéristiques d'une telle industrie comme dans le cas des débardeurs, des postes ou dans le domaine professionnel... bien d'autres entreprises.

Vous permettez encore la discrimination par le syndicat contre quelques salariés dans les unités de négociations. Maintenant, c'est encore plus dangereux, parce qu'avec la formule Rand, à part des occasionnels, à part des travailleurs à temps partiel, vous avez des membres de cette unité qui ne sont pas membres du syndicat, mais qui prennent l'avantage de la formule Rand.

M. le ministre, je vous demande, au nom de ceux que je viens de décrire, les occasionnels, les "casuals", les "partiels", de ceux qui prennent avantage de la formule Rand, de les protéger dans les négociations qui se tiennent tous les ans ou tous les deux ans, dans l'interprétation et même dans l'application des conventions collectives. Sérieusement, je ne peux pas comprendre pourquoi vous avez perdu, peut-être est-ce vos fonctionnaires, le courage d'appliquer l'article 38b comme vous l'avez soulevé au début de l'amendement.

Ce n'est certainement pas un argument de la part des patrons qui vous fait suggérer le changement à ce deuxième amendement. C'est pour faire plaisir à qui? Pour accommoder qui? Ceux qui veulent faire de la discrimination? S'ils n'en veulent pas, il n'y a rien dans le premier amendement qui est regrettable ou ne fait pas l'affaire d un syndicat qui veut vraiment protéger tous les membres, que ce soit des "casuals", des "partiels", ou des permanents.

Le Président (M. Chevrette): Qui était le suivant?

M. Mackasey: Je ne sais pas si je parle...

Le Président (M. Chevrette): Je m'excuse, mais mon président est parti et il ne m'a pas donné la liste des intervenants. Est-ce qu'il y en a un...

M. Johnson: Est-ce que le député de Joliette-Montcalm veut prendre la parole?

Le Président (M. Chevrette): II passera son tour.

Le ministre du Travail.

M. Johnson: M. le Président, je pense avoir exposé les raisons qui m'ont amené à présenter cet article tel qu'il est. Deuxièmement, tout en retenant les propos du député de Notre-Dame-de-Grâce, je considère que c'est un pas considérable. Il ne faut pas oublier une chose, et ce qui nous a inspirés dans la rédaction de ces articles, c'est que ce n'est pas parce qu'un individu est syndiqué qu'il perd ses droits comme citoyen. Il y a peut-être une tendance, parfois, dans l'interprétation qu'on veut donner à la législation du travail — et venant parfois de ce qu'on appelle les "establishments " syndicaux, mais les gens qui vivent à longueur de journée dans ces préoccupations et qui ont raison d'être particulièrement obsédés par le droit du travail — il y a peut-être une tendance, à un moment donné, à considérer qu'un syndiqué vit dans un régime complètement à part du reste de la société et, en ce sens-là, les articles 38a et suivants sont l'affirmation qu'un syndiqué, c'est aussi un citoyen et qu'il doit être respecté comme n'importe quel citoyen. Et quand on se réfère à des attitudes arbitraires de mauvaise foi ou discriminatoires en s'inspirant, entre autres, de la loi ontarienne, je pense que c'est un pas considérable dans la législation du travail au Québec. Dans le contexte du précompte syndical, ça s'impose. Dans le contexte de la propriété collective, de l'arbitrage de griefs, ça s'impose également. Pour ces raisons, M. le Président, je demanderai si l'article 38b est adopté, ou enfin, pas l'article 38b, puisque... Est-ce que la discussion est terminée sur l'article 38b?

M. Forget: Non, M. le Président. M. Mackasey: Terminée...

M. Johnson: Puisqu'il ne s'agit pas d'adopter l'article 38b, il s'agit d'adopter l'article 28 du projet de loi...

M. Mackasey: M. le Président, il faut...

M. Johnson: ... est-ce qu'on pourrait passer à l'article 38c?

M. Mackasey: ... insister auprès du ministre, avec gentillesse et politesse que je suis membre d'un syndicat depuis 41 ans, d'accord? Alors, ce n'est pas nécessaire de me dire encore les choses fondamentales, élémentaires, à savoir que quelqu'un qui est membre d'un syndicat est encore citoyen. Moi, ça fait 41 ans que j'ai une telle compréhension, je parle du syndicalisme. Vous dites encore, par exemple, que ce ne sont pas tous les syndicats, pas plus, d'ailleurs, que toutes les entreprises, que tous les députés, que tous les médecins...

M. Jolivet: M. le Président...

Le Président (M. Clair): Le député de Laviolette sur une question de règlement.

M. Jolivet: Je ne voudrais pas être irrespec- tueux envers le député de... De telle sorte que je me pose la question: Est-ce que c'est un dialogue que l'on a actuellement ou s'il a épuisé ses 20 minutes sur l'ensemble de la question? Sans cela, ça n'a pas de bon sens...

M. Laplante: 24 minutes. M. Jolivet: Parce que là...

Le Président (M. Clair): Malgré les difficultés du président de tenir le temps de parole de chacun des députés, si je fais le total des bouts d'intervention du député de Notre-Dame-de-Grâce, parce qu'il a posé des questions et qu'il a eu des réponses et qu'il a été interrompu, j'en arrive à un total de treize minutes jusqu'à maintenant, de sorte qu'il a encore sept minutes...

M. Mackasey: ... M. le Président... M. de Bellefeuille: ... bénédiction.

M. Jolivet: Ce que je voudrais éviter, M. le Président, c'est que ça devienne un dialogue.

M. Mackasey: M. le Président, je suis prêt à faire un dialogue avec le député...

M. Jolivet: Non, je ne veux justement pas avec vous.

M. Mackasey: Alors, qu'il reste tranquille et apprenne quelque chose. Cela va vous faire du bien.

M. Jolivet: Moi aussi, je suis syndiqué, M. Mackasey, mais...

Le Président (M. Clair): A l'ordre!

M. Jolivet: ... M. le député de Notre-Dame-de-Grâce...

M. Mackasey: J'ai seulement demandé des observations au ministre. Ce n'est pas un débat avec le ministre. On discute...

M. Jolivet: On est syndiqué du moment, pas depuis 41 ans.

Le Président (M. Clair): Rien n'interdit...

M. Johnson: On devrait peut-être aller souper ensemble, M. Mackasey.

M. Jolivet: Oui, ce ne serait pas pire.

M. Johnson: Ce serait peut-être plus simple, je pense, pour les membres de cette commission.

M. Mackasey: M. le Président, on peut avancer très facilement.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Mackasey: On peut adopter cette loi demain. Moi, je suis prêt à suggérer au caucus libéral...

M. Jolivet: Faites-le!

M. Johnson: Bravo! We will see if you have class.

M. Mackasey: Oui, mais... Wait a minute, I am prepared to go on television, radio and in the Assembly and say: We are wasting our time because with any amendment we bring here, we are talking to the deaf.

M. Johnson: Non!

M. Mackasey: Non, écoutez...

Le Président (M. Clair): M. le député de Notre-Dame-de- Grâce...

M. Mackasey: J'ai droit à mes 20 minutes, n'est-ce pas?

Le Président (M. Clair): Vous avez droit à vos 20 minutes, mais, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce...

M. Mackasey: Sans les interventions des députés.

Le Président (M. Clair): Exactement, c'est en plein ça, M. le député, je vous demande de ne pas tenir compte de l'intervention du député de Laviolette.

M. Mackasey: Je vous félicite, M. le Président, mais est-ce possible de dire aux députés que j'ai, à ma disposition, 20 minutes, que c'est rare que je prenne mes 20 minutes, mais s'ils m'interrompent, je prendrai mes 20 minutes à chaque article, à chaque amendement et ce, d'ici à Noël l'an prochain, si vous voulez.

Le Président (M. Clair): Ce serait votre droit, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Vous avez encore six minutes.

M. Mackasey: C'est un point fondamental pour moi que le changement, dans cet amendement; c'est de la discrimination contre quelques membres d'un syndicat, que ce soit, dans un syndicat, les membres qui travaillent à temps partiel, dans un autre syndicat, ceux qui travaillent comme occasionnels. Les syndicats ont toujours une tendance, à la table des négociations, de ne pas protéger ces occasionnels et ceux qui travaillent à temps partiel, avec la même vigueur qu'ils défendent les droits des permanents. Le premier amendement était un amendement progressif parce que c'était une déclaration du ministre ou de son ministère que tous les membres d'un syndicat, que ce soit un homme qui est obligé de travailler à temps partiel les samedi et dimanche parce que, avec notre niveau de chômage, il a besoin d'argent, ou un occasionnel, pour la même raison, pendant les fêtes ou quelque chose de la sorte, ce sont des personnes, ce sont des citoyens. Le ministre, dans son premier amendement, a souligné aux syndicats — et je pense que la plupart des syndicats n'ont pas besoin de cette suggestion; ce n'est pas un reproche, mais une observation — qu'ils ont une obligation morale et maintenant légale de prendre en considération les besoins de tous les membres, soit ceux qui sont importants comme les permanents et ceux qui sont moins importants comme les occasionnels. C'était le but du premier amendement. Maintenant, quelqu'un a suggéré au ministre: Ce n'est pas l'affaire des syndicats si un occasionnel ou un travailleur à temps partiel va se plaindre que, à la table des négociations, il n'est pas bien représenté. Peut-être qu'on n'a pas insisté pour le temps double, pour un occasionnel qui travaille le dimanche ou temps et demi s'il travaille le samedi. On l'a fait seulement pour les permanents, les occasionnels et les autres, pourquoi aller combattre pour le temps double s'ils travaillent le dimanche? C'est ce que le premier amendement voulait dire. Si le ministre — ce n'est pas pour retarder les travaux de l'Assemblée — est content — d'abord c'est sa réputation qui est mise en jeu du fait qu'il vient maintenant de dénier, à quelques membres des syndicats ou quelques membres salariés dans une unité accréditée, les mêmes droits ou les mêmes obligations que les autres ont dans le syndicat. Légalement, pas seulement moralement. Si le ministre n'a pas la même considération pour quelques syndicalistes ou pour ceux qui prennent avantage de la formule Rand, je ne peux pas le faire changer d'idée; son idée est fixée, on le voit, mais qu'il pense aux conséquences d'avoir fait le débat publiquement.

Le Président (M. Clair): Peut-on considérer que l'étude de l'article 38b est terminée?

M. Jolivet: Terminé.

Le Président (M. Clair): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, je dois souligner, après avoir entendu patiemment les explications — ou ce qui se présentait comme telles — pour le morceau de législation qui est devant nous, qu'il est à peu près inconcevable de se retrouver dans un débat où, à l'intérieur de la même heure, des affirmations si nombreuses et contradictoires nous sont fournies. Le ministre, fidèle en ça à lui-même, M. le Président — parce que là on commence à reconnaître un style commun dans l'ensemble des dispositions et, à ce point de vue, tous les articles sont des modalités, des variations sur un thème connu — se borne à lancer des messages, faire des symboles et nous servir la face du symbole qui est la plus propice à son argumentation du moment. Il nous a dit: On a enlevé les mots "négociation", "application " et

"interprétation" des conventions collectives parce que cela pourrait causer des difficultés. Il ne faut pas que cela s'applique à la négociation. Cela va être difficile si cela s'applique à la négociation. On va trouver toutes sortes d'enfarges, dans le processus des négociations, basées sur des prétentions à la discrimination. Quand on lui a dit qu'il fallait qu'il s'occupe de tout le monde, que le syndicat devait s'occuper de tout le monde dans la négociation, il a dit: Ah! Oui. Cela va s'appliquer même dans la négociation. Le même projet de loi, le même article va s'appliquer et ne s'appliquera pas au même sujet.

M. Johnson: M. le Président, si vous permettez, sur une question de règlement.

M. Forget: Non, M. le Président. J'ai la parole, j'ai écouté le ministre patiemment...

Le Président (M. Clair): A l'ordre, M. le député de Saint-Laurent. Le ministre du Travail soulève une question de règlement.

M. Johnson: Je pense que je suis à même d'apporter une clarification des faits puisque le député de Saint-Laurent affirme des choses qui sont inexactes.

M. Forget: Ah non. C'est dans la transcription. Vous vérifierez.

M. Johnson: Si j'ai effectivement affirmé que le fait de ne pas spécifier qu'il s'agit de négociation, application ou interprétation de la convention collective, j'ai bien dit qu'il fallait le lire avec l'article 38c qui lui, prévoit un recours spécifique.

M. Forget: C'est la modalité d'application, le recours, mais le champ d'application est déterminé à l'article 38d.

M. Johnson: Effectivement, oui.

M. Forget: Et on nous a dit, à un moment donné: on a enlevé ces mots-là pour ne pas que cela s'applique à la négociation, et quand on vous a fait l'objection que cela ne s'appliquait pas à la négociation vis-à-vis de certains employés, vous avez dit: Oui, cela va s'appliquer là aussi. Vous ne pouvez pas le nier, c'est dans la transcription.

M. Johnson: Quant à l'article 38c, quant au recours qui est impliqué.

M. Forget: Le recours va s'appliquer si l'article s'applique. Mais s'il ne s'applique pas le recours sera inutile. On nous a donc dit, d'une part, que cela s'appliquait et d'autre part que cela ne s'appliquait pas. Et tout le byzantinisme qu'on veut faire autour de cela démontre clairement que c'est un exercice de relations publiques auquel on assiste. De la même façon qu'on a eu droit, de la part du ministre, à l'argumentation que ce n'était rien de nouveau...

M. Johnson: Comme l'obstruction.

M. Forget: ... et que c'était, d'autre part, l'affirmation d'un principe nouveau et du droit nouveau.

M. Johnson: Comme l'obstruction du député de Saint-Laurent au bon fonctionnement de cette commission.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Forget: Laissez faire l'obstruction! On va faire de l'obstruction à un projet de loi qui est aussi mal conçu et qui est défendu de façon irresponsable.

M. Johnson: Quatre heures sur le même article.

M. Forget: Pourquoi pas huit heures aussi?

M. Mackasey: Votre article est mal fait et vous ne voulez même pas discuter d'amendements pour l'améliorer! On peut prendre quatorze heures si vous voulez.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît !

Si j'essaie d'interpréter, à la lumière de notre règlement, ce qui était en train de se dérouler, c'est que le ministre tentait d'exercer son droit de parole, prévu à l'article 96, qui mentionne: "Le député qui prend la parole pour donner des explications sur le discours qu'il a déjà prononcé ne peut le faire que lorsque le discours qui les provoque est terminé" — et à ce que je sache le député de Saint-Laurent n'avait pas terminé — "à moins que celui qui le prononce ne consente à être interrompu".

M. Forget: Ce n'est pas encore fait. M. Johnson: Mes excuses.

Le Président (M. Clair): M. le député de Saint-Laurent, vous avez la parole.

M. Forget: Je crois qu'au-delà du fond, et je l'ai indiqué tout à l'heure, le principe qu'on semblerait vouloir incorporer dans l'article 28b n'est pas un principe mauvais, pourvu que la réaction soit telle qu'effectivement on s'assure qu'il s'applique à quelqu'un et ce, avec efficacité, et que les recours qu'on va ouvrir plus tard ne sont pas des recours futiles, applicables à un si petit nombre de cas qu'on aurait été mieux de ne rien faire. A mon avis, au-delà de ce principe qu'on pourrait peut-être vouloir lire dans l'article 38b, il reste que la façon dont on le circonscrit, à la fois dans les recours, parce qu'on y viendra tantôt, et à la fois dans l'interprétation que le ministre en donne, démontre clairement qu'on est en face, comme dans le cas des votes, comme dans le cas de plu-

sieurs autres dispositions, de messages de relations publiques ou de messages politiques, mais pas du tout d'une modification importante et efficace du projet de loi. On se sert d'arguments, à l'intérieur du même discours du ministre, complètement contradictoires pour dire que tantôt c'est nouveau, tantôt ce n'est pas nouveau, selon ce qui convient pour les besoins de la cause. C'est un peu désolant de voir le ministre se livrer à des exercices comme ceux-là. Il nous a dit tantôt que cela découlait de principes déjà adoptés, qu'il n'y avait rien de nouveau là et dans le même souffle il va nous dire que c'est là du droit nouveau, que c'est là un principe fondamental qu'on établit dans nos lois... Alors, le jupon dépasse un peu trop et on veut nous faire croire qu'on fait là quelque chose de considérable...

M. Johnson: ... mettre en question...

Le Président (M. Clair): M. le ministre du Travail, je vous en prie. Si...

M. Forget: On veut nous faire...

M. Johnson: Le député de Saint-Laurent est en train de remettre votre décision en question.

M. Forget: J'ai la parole. Je ne mets aucune décision en question.

Le Président (M. Clair): A l'ordre. Si vous soulevez une question de règlement, M. le ministre, je vous accorderai la parole.

M. Johnson: Oui, M. le Président, je vais soulever une question de règlement, puisque le député de Saint-Laurent veut s'adonner à ce genre d'attitudes. M. le Président, le député de Saint-Laurent est en train de remettre en question, puisqu'il a même, de son siège, affirmé que vous étiez partial au moment où vous avez rendu votre décision sur la recevabilité de l'article 38b, de façon détournée, votre décision. En ce sens, il ne respecte ni l'esprit ni la lettre du règlement. Je vous demanderais de rappeler le député de Saint-Laurent à l'ordre.

M. Forget: Pas du tout. Sur cette question de règlement, M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le député de Saint-Laurent, sur la question de règlement.

M. Forget: Tout en respectant votre décision, et je vais vous donner une preuve de mon respect de votre décision, c'est que nous discutons de l'article 38b. Si nous n'acceptions pas votre décision, la seule façon de vous le démontrer serait de nous abstenir complètement d'en discuter. Comme nous acceptons d'en discuter, c'est que nous acceptons que la motion soit effectivement receva-ble et que cela fasse partie du projet de loi. Ceci ne veut cependant pas dire qu'une fois cette décision acceptée, on doive accepter toutes les ratio- nalisations et la rhétorique que le ministre nous sert pour justifier le contenu de cet amendement. Il nous a servi une rhétorique contradictoire vis-à-vis de l'exclusion des mots que l'amendement comportait à l'origine, et il nous a servi une rhétorique contradictoire relativement au caractère nouveau ou non du projet de loi. Vous avez tranché cette question, mais il reste que le ministre s'est contredit après que vous ayez prononcé votre jugement.

Le Président (M. Clair): Fort du respect que vous me garantissez de la décision que j'ai rendue, je vous redonne la parole sur le paragraphe 38b de l'article 28.

M. Forget: Je serai bref sur ce... Effectivement, il ne doit pas y avoir plus de trois ou quatre autres minutes que j'ai pris la parole sur cette question. Comme vous voyez, je ne veux pas abuser, mais il m'apparaît absolument essentiel de soulever ce genre de raisonnement qui ne repose en rien sur une analyse des textes qui sont devant nous, mais qu'un appel à l'opinion publique, mais qu'un appel à l'image, à une rhétorique, à des messages. On nous a dit — et le ministre l'a avoué lui-même — qu'il lançait des messages dans cette loi. Il ne lance que des messages. L'étude qu'on va faire des autres dispositions va nous démontrer que ce ne sont que des messages.

Nous sommes d'ailleurs avertis d'avance. On invoque un grand principe dont on va faire état sur bien des tribunes, à travers le Québec, au cours des prochains mois en disant: On a inscrit un principe de non-discrimination alors qu'on nous dit que dans une province voisine — et je serais curieux de voir si la rédaction est exactement la même dans l'autre province — on nous dit et on admet que dans une province où c'est dans les lois depuis des années, où il y a des millions de travailleurs, cela n'a pas été invoqué plus d'une demi-douzaine ou peut-être une douzaine de fois.

C'est une démonstration éloquente qu'une mesure qui est rédigée de cette façon n'est pas vraiment destinée à être appliquée de façon efficace. On ne nous fera pas croire que des exemples de discrimination n'existent pas en nombre plus grand et j'en ai eu comme député, dans des plaintes qui m'ont été adressées comme député dans mon comté. Seulement cet automne, j'ai eu trois plaintes de discrimination vis-à-vis des associations de salariés à l'occasion de griefs où on alléguait la discrimination basée sur l'origine raciale. Il ne s'agissait pas de questions de francophones ou d'anglophones, c'était autre chose. C'était des francophones, mais non natifs du Québec. Et les trois se sont plaints et ils ont dû recourir à toutes sortes de procédures en dehors du Code du travail puisque, bien sûr, ils ne les avaient pas. Je suis convaincu qu'ils n'auraient pas pu s'en prévaloir, mais de toute façon on va revenir à l'article 18c et aux autres articles subséquents. Les recours qu'ils ont utilisés étaient fort différents et ont engagé de leur part des dépenses importantes.

Mais qu'on ne nous dise pas, si dans un comté il y a trois syndiqués, dans une même saison, qui se plaignent de discrimination, qu'on a affaire à une législation qui est efficace, quand on nous dit que sur un certain nombre d'années il y eu seulement douze plaintes et là-dessus il y en a seulement eu deux qui ont eu gain de cause. Véritablement, ces dispositions et les modalités qui les entourent sont insuffisantes parce qu'on ne me fera pas croire qu'on a réglé le problème aussi facilement et aussi rapidement.

De toute façon, s'il était possible, en améliorant— et c'est ce que nous tentons de faire — les modalités, de donner sens véritable au principe de non-discrimination de 38p, nous serions heureux de le faire.

Je voulais simplement souligner que le ministre, selon les apparences et selon les arguments qu'il utilise, ne me semble pas— c'est une opinion personnelle, bien sûr — ne me semble pas y croire vraiment lui-même.

Le Président (M. Clair): Le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Je voudrais demander au ministre si d'après lui l'article 38b tel que rédigé, le nouveau 38b, qui interdit à une association d'agir de mauvaise foi, de manière arbitraire, etc., tous les cas spécifiés dans 38b, est-ce que, d'après lui, cela s'applique pour tout ce qui concerne la négociation, l'interprétation ou l'application de la convention collective? Est-ce que cela s'applique dans ces cas?

M. Johnson: Pour les fins des recours prévus aux articles suivant 38b, non. Et c'est très clair puisque 38c nous dit que, si un salarié a subi un renvoi ou une sanction disciplinaire, croit que l'association a violé 38b... On établit donc le cadre dans lequel l'association doit agir à l'égard de tous les syndiqués. Deuxièmement, on dit que, si elle n'agit pas dans ce cadre de non-discrimination, dans le cas d'une suspension ou d'un renvoi ou d'une sanction disciplinaire, il y a une procédure spécifique prévue au niveau du Tribunal du travail. La cause peut être déférée en arbitrage. Cependant, au niveau de l'affirmation générale de 38b, puisque nous vivons dans un contexte constitutionnel qui ne permet pas toujours, malgré toutes les précautions verbales qu'on peut prendre, de soustraire à un texte de loi de cette nature les recours civils habituels, il est bien clair qu'il y a là une obligation générale. Comme la notion de négociation n'est pas explicitée et comme elle n'est pas non plus exclue par le fait que nous y inclurions l'interprétation et l'application de la convention collective, je présume qu'un syndicat qui agit de façon discriminatoire à l'égard d'un salarié, quel qu'il soit, ou de façon arbitraire ou de mauvaise foi, indépendamment de l'objet, sera évidemment soumis au recours de droit commun qui veut qu'il puisse y avoir une poursuite en dommages et intérêts. C'est aussi simple que cela et je ne vois pas comment le dé- puté de Saint-Laurent y voit une attitude contradictoire. Je pense, d'autre part, que cette attitude relève vraiment d'une conception éthérée, bureaucratique et complètement flottante de ce qu'est, de fait, la réalité syndicale.

M. Forget: Est-ce que ce sont des termes parlementaires, M. le Président?

M. Johnson: Oui. Ethérée, flottante et bureaucratique, sûrement, d'autant plus qu'ils s'appliquent fort bien au député de Saint-Laurent.

M. Forget: II devient personnel, M. le Président.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît! Je suis convaincu que nous n'avancerons pas plus vite dans nos travaux...

M. Forget: Le ministre s'emporte.

Le Président (M. Clair): ... si on s'emporte de part et d'autre. Plutôt que de soulever des questions de règlement...

Une Voix: Soyons calmes.

Le Président (M. Clair): ... sur ces sujets, j'invite le député de Mont-Royal à continuer son intervention. C'est lui qui avait demandé la parole.

M. Ciaccia: Merci, M. le Président. J'avoue que c'est peut-être tard dans la journée et nous sommes peut-être tous un peu fatigués, mais je n'ai pas compris votre réponse. Non, non. Cela s'applique...

M. Johnson: Que voulez-vous que j'y fasse, mon vieux!

M. Ciaccia: C'est bien simple...

Le Président (M. Clair): ... toujours au président, messieurs.

M. Ciaccia: M. le Président, c'est bien simple. M. Pagé: Veuillez réitérer votre invitation.

Le Président (M. Clair): Et le président n'est pas vieux.

M. Ciaccia: ... ou l'article 38b interdit ces actions de mauvaise foi, arbitraires, la discrimination, en ce qui concerne la négociation, l'interprétation de la convention collective. Si oui, pourquoi ne pas l'écrire? Si ce n'est pas votre intention d'interdire cette discrimination par l'association dans ce domaine de la négociation, ou de l'application de..., c'est de le dire aussi. La façon dont 38b est rédigée et spécialement si on prend le processus des amendements, quand quelqu'un viendra pour interpréter un article — si je comprends bien, le ministre a une formation juridique, il est avocat;

alors, il doit comprendre la méthode d'interprétation de nos textes législatifs — pour présenter un argument, quant à l'interprétation de 38b... Supposons que je sois un membre — prenons l'exemple du député de Notre-Dame-de-Grâce, je suis un occasionnel et je veux me prévaloir de 38b pour dire que l'association a agi de mauvaise foi.

M. Johnson: En quelle circonstance?

M. Ciaccia: Dans n'importe quelle circonstance. Quant à l'interprétation de la convention collective, quant à la négociation, parce qu'elle me représente, d'après 38a, je paie ma cotisation, vous avez imposé une nouvelle formule que nous avons acceptée, alors, même si je ne suis pas membre de cette association, pour une raison ou pour une autre, elle me représente, elle doit négocier, dans les négociations de la convention collective, elle doit me représenter. Je prends l'article 38b et je dis: Cette association agit de mauvaise foi, en fait, elle est coupable de discrimination quant à la négociation de mes droits. Evidemment, il va y avoir un avocat de l'autre côté de la table et son argument, M. le Président, va être que 38b n'impose pas cette obligation, parce que, dans un texte antérieur, elle était incluse mais on l'a enlevée. Alors, cela démontre une intention du législateur...

M. Johnson: Le texte antérieur n'a jamais existé pour les fins de la loi.

M. Ciaccia: Un instant! Le texte antérieur, les discussions peuvent être rapportées pour démontrer l'évolution, la pensée, oui.

M. Johnson: Non, ce sont des histoires.

M. Ciaccia: M. le Président, je soumets respectueusement que cela s'est fait dans d'autres cas et que cela peut se faire ici.

Le Président (M. Clair): Vous pouvez faire allusion à des documents qui vous ont déjà été distribués. A titre de documents qui ont été distribués, seulement.

M. Ciaccia: Exactement, ils ont été distribués. C'est un document public. Alors, l'avocat de la partie adverse, qui a sans doute une copie de ce document, va dire: Non ce n'est pas l'intention, parce que si cela avait été l'intention du législateur d'interdire la discrimination dans tel cas, il n'aurait pas enlevé ce mot-là dans cette version. Alors, pourquoi ouvrir la porte à cette ambiguïté, à ce genre de litige? Est-ce que ce ne serait pas plus facile, plus clair d'inclure dans 38b une obligation très claire, réinsérer les mots que vous aviez dans votre...

M. Johnson: Elle est là.

M. Ciaccia: Non, elle n'y est pas, pas dans celui que je lis. Peut-être que je n'ai pas la bonne version.

M. Johnson: Est-ce que le député de Mont-Royal me permet, M. le Président, est-ce qu'il consent à ce que je lui pose une question là-dessus? Ce n'est pas pour lui tendre un traquenard. C'est seulement pour qu'on se comprenne, pour qu'on parle de la même chose.

M. Ciaccia: Oui.

Le Président (M. Clair): Consentez-vous, M. le député de Mont-Royal?

M. Ciaccia: Oui.

M. Johnson: D'abord, ie fait qu'il a été retranché d'un bout de texte qui, à un moment donné, a été donné, n'a aucune pertinence dans la mesure où ce n'était pas un texte de loi, c'était un projet de loi. Donc, si 38b était adopté comme il l'est là, étant donné qu'il n'est pas restrictif, il signifie que toute activité, y compris le syndicat, par exemple, qui déciderait, parce qu'un individu est de race noire, de ne pas l'admettre dans le club de pêche du syndicat, aurait une attitude discriminatoire.

Une Voix: II n'y en aura plus.

M. Ciaccia: Pas d'après l'article 38b. Il va se prévaloir des droits...

M. Johnson: Voyons donc! Il n'y aura plus de clubs de pêche. D'accord. Club de ski.

M. Ciaccia: ... de la Charte des droits de la personne. On parle de cet article-ci.

M. Johnson: Bon.

M. Ciaccia: Oui, mais ce n'est pas ce que vous faites. Je ne parle pas de se fier à d'autres lois contre la discrimination, parce que ce sont des cas très spécifiques de discrimination de race, de religion, orientation sexuelle, d'après le nouveau... Ce n'est pas une discrimination aussi claire que dans le cas de différentes classes d'ouvriers ou catégories d'ouvriers. Je ne crois pas, que, dans la Charte des droits et libertés de la personne, une personne pourrait contester les négociations d'un syndicat par ces motifs et même s'il le pouvait, pourquoi? C'est ce que j'essaie de comprendre. Pourquoi voulez-vous écarter le recours, l'obligation les droits? Pourquoi ne pas les inclure d'une façon nette et claire dans ce projet de loi?

Evidemment quelqu'un l'avait à l'idée quand on a rédigé l'article 38b originellement. La négociation et l'application de la convention collective sont des situations de base très importantes dans le processus du syndicalisme. Alors, il me semble, M. le Président, qu'en retranchant ces paroles et en référant à des sections très spécifiques, soit les paragraphes c), d) et e), on limite, parce qu'on peut donner une autre interprétation, on peut dire que l'article 38b réfère à certains actes discriminatoires, mais pour spécifier quel acte discriminatoire et dans quel sens cet article s'applique, on va regarder les paragraphes c), d) et e). Dans aucun

de ces paragraphes, nous ne voyons la question de la négociation, de l'interprétation ou de l'application de la convention collective. Nous voyons seulement des situations spécifiques.

Il me semble, M. le Président, que si c'est vraiment l'intention du gouvernement que cela s'applique, s'il pense que ces mots inclus auparavant sont restrictifs, il pourrait les ajouter sans restreindre la généralité de la portée de cet article, plus spécifiquement en ce qui concerne la négociation, l'interprétation. Vous pourriez dire cela. Il n'y aurait aucun doute, ce serait clair. Personne ne pourrait soulever l'argument que l'article 38b va s'appliquer seulement dans les cas des paragraphes c), d) et e). Actuellement la situation est assez confuse.

Je ne pense pas que personne ne puisse comprendre et personne ne va pouvoir se prévaloir de l'article 38b dans les circonstances que vous avez décrites.

Le Président (M. Clair): Oui, M. le député de Portneuf.

M. Pagé: M. le Président, seulement quelques mots pour ajouter ma voix à celle de mes collègues. Je vous dirai d'abord que j'ai été quelques jours absent des travaux de cette commission, étant retenu en haut à l'Assemblée pour étudier différents projets de loi relatifs aux taxations multiples mises de l'avant par le nouveau gouvernement.

J'ai été surpris, M. le Président, de constater et l'attitude du ministre et l'attitude de la majorité ministérielle dans les remarques qu'ils ont eu à formuler depuis ce matin relativement aux amendements présentés par l'Opposition officielle ou encore...

Le Président (M. Clair): M. le député de Portneuf, je vous invite à parler sur le paragraphe 38b.

M. Pagé: Bien oui, j'y arrive, j'y arrive, M. le Président. J'ai été...

Le Président (M. Clair): Je comprends qu'on puisse y faire une brève introduction, mais je vous incite à y arriver le plus directement possible.

M. Pagé: Bien oui, mais M. le Président, j'ai été absent de deux ou trois séances. Je suis quand même en droit d'exprimer la surprise que j'ai. On était convaincu que des commentaires comme ceux qu'on a formulés ce matin, au début de l'après-midi, recevraient non seulement l'approbation, mais l'approbation enthousiaste du ministre et de ses collègues.

Pour en arriver, M. le Président, à l'article 38, lequel prévoit un principe auquel nous avons souscrit, auquel nous souscrivons, le précompte syndical, et différentes mesures, obligations ou devoirs de part et d'autre, par la suite, à l'intérieur des amendements qui sont présentés pour l'adoption par le gouvernement.

M. le Président, mon collègue de Saint-

Laurent a dit tout à l'heure, ça n'a assurément pas plu au ministre, que c'était tout simplement mettre quelque chose de l'avant sans l'étoffer, sans permettre ou faire en sorte qu'on puisse assister à une application éventuelle de cet article. C'est le cas, c'est ça qui est le problème. C'est beau de formuler des voeux, d'écrire de belles choses, de faire naître des droits, mais toujours faut-il qu'ils soient applicables et qu'il y ait des moyens de sanction.

A l'article 38b, on prévoit plusieurs cas où une association accréditée ne doit pas agir de mauvaise foi, de manière arbitraire ou discriminatoire et ce, relativement aux négociations, à l'application ou à l'interprétation de la convention. Ce qui me surprend... et je ne m'explique pas que le ministre du Travail qui, par surcroît, est avocat, en arrive à l'article 38c, qu'on ne peut pas discuter immédiatement, mais, quand même, mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce, qui semble être en caucus actuellement, en a fait état tout à l'heure, en a discuté, en parlant du droit de recours qui est conféré à un salarié en vertu de l'article 38c.

L'article 38c, M. le Président, dans sa rédaction, même si cet article se limite à une sanction disciplinaire seulement, le ministre, le gouvernement, par son amendement, va jusqu'au bout, en prévoyant une sanction qui est déterminée, qui est précisée dans les articles 38c et suivants.

Je ne m'explique pas, M. le Président, et je fais miens les commentaires que mon collègue de Mont-Royal a formulés tout à l'heure. Pourquoi le gouvernement ne profite-t-il pas des échanges qu'il a eus avec l'Opposition depuis une heure? Nos représentations ne s'inscrivent pas dans le cadre d'un "filibuster" ou d'une démarche qui viserait ou qui pourrait essentiellement viser...

M. de Bellefeuille: On n'aurait jamais pensé cela.

M. Pagé: Je suis heureux de vous l'entendre dire.

Le Président (M. Clair): M. le député de Portneuf, vous avez la parole. Si quelqu'un veut vous poser des questions, il doit vous le demander et je ne pense pas que vous ayez l'intention de poser des questions à d'autres qu'au ministre.

M. Pagé: Non, M. le Président, je suis rendu à un stade...

Le Président (M. Clair): Je vous redonne la parole sur le paragraphe 38b.

M. Pagé: ... où moi, je m'en pose. Peut-être que tantôt j'en poserai.

M. Laplante: Qu'est-ce que c'est qu'un "filibuster ", on n'a pas vécu cela encore?

M. Pagé: C'est possible, c'est possible...

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît.

Une Voix: Demandez à ceux qui étaient là avant...

M. Pagé: M. le Président, je suis prêt à céder mon droit de parole au député de Bourassa...

M. Laplante: Non, non, vous autres. On va voir jusqu'où votre intelligence peut porter le "filibuster".

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît, messieurs. A l'ordre.

M. Pagé: Pardon?

M. Laplante: On va voir jusqu'où votre intelligence peut porter le "filibuster". Continuez comme cela.

M. Pagé: Ils vont vous dire ce qu'est un "filibuster".

M. Laplante: Montrez-nous le, on veut le voir.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît.

M. Mackasey: ... ce soir, on va faire un "filibuster"...

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît.

M. Laplante: D'accord.

M. Mackasey: D'accord, c'est fait; je vous jure que je vais parler 20 minutes sur chaque article.

M. Laplante: D'accord, ça marche. M. Mackasey: D'accord.

M. Pagé: Ils veulent te provoquer, ne le fais pas.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît. Je comprends que tout le monde veut manifester son désir de voir ses droits respectés en vertu du règlement; c'est ce que je tenterai de faire. M. le député de Portneuf.

M. de Bellefeuille: La messe de minuit sera au Salon rouge.

Le Président (M. Clair): M. le député de Portneuf, vous avez la parole sur le paragraphe 38b du projet de loi. M. le député de Bourassa.

M. Laplante: Oui, monsieur.

M. Pagé: M. le Président, vous avez vu la position sage. Je suis toujours soucieux du règlement, vous savez; je suis le seul, M. le Président, qui n'ait pas parlé pendant que tout le monde parlait. Vous devriez...

M. Pagé: Et c'est moi qui avais le droit de parole.

Une Voix: M. le député de Mont-Royal, touchez-le.

Le Président (M. Clair): M. le député de Portneuf, je vous félicite d'avance de revenir à la pertinence du débat.

M. Pagé: M. le Président, je respecte le règlement, du premier au dernier mot, d'un couvert à l'autre, intégralement. Demandez-en autant au député de Bourassa et même...

Le Président (M. CSair): A l'ordre, s'il vous plaît, M. le député.

M. Pagé: D'accord, M. le Président, je reviens et, entre parenthèses, je serais prêt à lui céder mon droit de parole pour quelques minutes s'il veut participer au débat.

Le Président (M. Clair): De toute façon, le règlement lui permet de l'exercer.

M. Pagé: J'espère qu'il l'exercera d'ailleurs. J'y arrive, M. le Président, merci. Je disais que les commentaires qu'on formule visent essentiellement à bonifier le projet de loi, purement et simplement. On a discuté, ce matin, le ministre nous a dit qu'on aurait éventuellement un autre projet de loi qui viendrait définir toute une foule de choses: qu'est-ce qu'une grève légale? Ce n'est pas opportun, je pense, pour un gouvernement de se rabattre derrière une étude qui est présentement commandée par le ministère du Travail, de se rabattre derrière un éventuel projet de loi pour, somme toute, présenter des amendements qui ne constitueront, dans la pratique, que de l'ambiguïté additionnelle.

M. le Président, j'aimerais entendre le ministre une dernière fois nous dire pourquoi il est impossible de prévoir une sanction particulière à l'application de l'article 38b, comme il le fera tout à l'heure dans l'application de l'article 38c. Vous énoncez...

M. Johnson: Vous avez posé une question, vous voulez une réponse.

M. Pagé: Oui, vous énoncez un principe qui est très bien en soi, de prime abord, à sa lecture. Mais dans son application, qu'est-ce que ce sera quand la loi 45 sera adoptée, dans quelques mois? Ce sera quoi dans son application? Concrètement et spécifiquement. Quel sera le droit de recours qui sera laissé aux salariés? D'accord, on peut dire: II y a une action en dommages et intérêts. Mais cela va régler quoi?

M. Johnson: M. le Président, le député de Portneuf me pose-t-il une question ou si c'est une formule rhétorique?

M. Pagé: Non, non; c'est une question.

M. Johnson: Ah! bon.

M. Pagé: Je me la pose et je vous la posé.

M. Johnson: Parce qu'on est habitué aux formules rhétoriques du député de Portneuf.

M. Pagé: M. le Président, je considère comme non avenus les commentaires...

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît, à l'ordre, s'il vous plaît.

M. Johnson: Oui, c'est un compliment évidemment.

M. Pagé: M. le Président, on ne discutera pas des défauts ou des qualités.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît.

M. Pagé: Tout ce que je veux essentiellement; j'ai des travailleurs dans Portneuf qui auront à vivre avec cette loi.

Une Voix: Dis-moi pas.

M. Johnson: Répétez votre question.

M. Pagé: Je suis pas mal plus sensible aux préoccupations des travailleurs de mon comté que plusieurs d'entre vous peuvent l'être. Avez-vous défendu les gars de la Wayagamack? Comment les avez-vous défendus, les gars de la Wayagamack au Cap-de-la-Madeleine? M. le Président, j'arrête parce que mon règlement...

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît.

M. Mackasey: Quelle sorte de syndicat appuyez-vous? On verra...

Une Voix: C'est pour cela que vous avez changé depuis novembre.

Une Voix: Les gars de Lapalme.

Le Président (M. Clair): A l'ordre. M. le député de Joliette-Montcalm. Je suis convaincu que votre ministre est en train d'oublier la question qu'on lui a posée.

Une Voix: Je reprends mon calme. Le Président (M. Clair): M. le ministre.

M. Johnson: M. le Président, la question du député de Portneuf est simple bien qu'elle résulte d'un raisonnement tortueux, avec des considérations qui n'ont rien à voir avec ce débat, et qu'elle se situe dans un contexte qu'on connaît fort bien, puisque nous serons maintenant dans la sixième heure du débat sur l'article 28.

M. Pagé: ... règlement parce que le ministre veut nous imputer des motifs. Je préfère qu'en commission ici, on prenne six heures pour le régler le problème plutôt que d'avoir des travailleurs qui prendront des mois et des mois à se chercher dans tout cela. Vous ne pensez pas que c'est un peu plus opportun qu'on en prenne six ou qu'on prenne sept, ce n'est pas grave, on est payé pour cela. Et on peut être ici jusqu'au 24 décembre, probablement qu'on va l'être...

M. Johnson: Entre Noël et le Jour de l'An.

M. Pagé: ... on va être ici le 27, le 28 et vous n'êtes pas sortis du bois.

Des Voix: Vous autres, non plus.

M. Pagé: On est prêt.

Une Voix: C'est là qu'on va avoir du "fun".

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît.

M. Mackasey: Oui, mais il n'a pas dit le chemin.

M. Pagé: On est prêt et on va sacrifier des congés de la période des Fêtes...

Une Voix: II n'y a pas de congé là.

M. Pagé:... et on ne se limitera pas à six heures dans l'étude d'articles comme celui-là. Ce n'est pas le cas. On est mieux de prendre 20 heures, s'il le faut, mais le régler de façon spécifique avec des éléments de solution qui ne créeront pas d'ambiguïté comme vous vous apprêtez à en créer si on adopte votre article tel quel.

M. Johnson: M. le Président, le député de Portneuf m'avais posé une question...

M. Pagé: Continuez.

M. Johnson: Est-ce que je dois y répondre?

Le Président (M. Clair): Effectivement, vous avez le droit...

M. Pagé: Vous pouvez y répondre.

M. Johnson: Est-ce que je dois attendre qu'il dépose son bulletin de présentation à la chefferie libérale?

M. Pagé: ... parce que le règlement ne vous oblige pas à y répondre.

Le Président (M. Clair): Vous avez le droit d'y répondre, M. le ministre. A l'ordre, messieurs, s'il

vous plait. Messieurs, je vous rappelle tous à l'ordre pour la première fois. Merci. M. le ministre.

M. Johnson: M. le Président, la question que j'ai cru saisir à travers les méandres de la pensée du député de Portneuf est la suivante: Pourquoi n'inclut-on pas à 38b la notion de négociation de conventions collectives, d'application de conventions collectives et d'interprétation de conventions collectives? La règle est fort simple, M. le Président. L'objet de cette section découlant de l'article 46 qui confie un droit collectif au grief, est de prévoir les modalités d'application de celles-ci. Or, il faut voir 38c. C'est cela, l'article clé de cette série. 38c dit que: "si un salarié qui a subi un renvoi ou une sanction disciplinaire, croit que l'association accréditée viole à cette occasion 38b, il doit, s'il veut se prévaloir de cet article, porter plainte au ministre, etc." Il y en a un recours spécifique pour l'individu...

M. Pagé: Est-ce que vous me permettez une question?

M. Johnson: ... non, pas tout de suite. ... pour l'individu qui considère qu'il a fait l'objet de discrimination d'une attitude arbitraire ou de mauvaise foi, qu'il soit membre ou non de l'unité; un membre qui considère qu'il a fait l'objet effectivement d'une telle attitude. Il y a là un recours précis. De quoi se plaint-il? Il se plaint de quelque chose et ce quelque chose-là, c'est la non-application de 38b. Est-ce que c'est clair? Le recours du salarié devant le Tribunal du travail est limité dans les cas qui sont assimilables à ce que serait un grief, en vertu de 46, c'est-à-dire renvoi ou sanction disciplinaire, donc incluant suspension. Ce qu'on veut créer, c'est cela. A quoi réfère-t-on? Quelle est l'infraction qui serait commise par son syndicat pour qu'il exerce ce recours? C'est l'infraction qu'on voit à 38b.

D'autre part, comme on le disait tout à l'heure, dans tous les autres cas, étant donné que 38b n'est pas restrictif, il permet ce qui est un recours de droit commun de dommages-intérêts. Est-ce que c'est si chinois que cela à comprendre? Voyons donc...

M. Pagé: Vous l'aviez dit et on le comprend cela, mais la...

M. Johnson: II ne faut quand même pas faire semblant de ne rien comprendre quand on veut faire de l'obstruction; il faut avoir l'air un peu plus fin que cela.

M. Pagé: M. le Président, le ministre démontre un calme qui ne caractérisait pas, soit dit en passant, son père. Soyez calme, soyez sage, soyez serein. Il faut être calme; vous savez, la période des Fêtes s'en vient. Une chose qui est certaine, c'est que la non application de 38b ne se limite pas nécessairement aux sanctions disciplinaires; c'est cela le problème.

M. Johnson: C'est vrai, mais le recours prévu, c'est dans le cas des sanctions disciplinaires et du renvoi.

M. Pagé: Mais dans les cas autres qu'une sanction disciplinaire, dommages et intérêts...

M. Johnson: II n'y a pas de recours spécifique devant le Tribunal du travail, il y a les recours habituels...

M. Pagé: C'est cela ma question. Pourquoi ne pas avoir un recours spécifique?

M. Johnson: D'accord. Là je vais demander au député de Portneuf qui semble être un homme très versé dans !a vie syndicale et dans ce qui se passe concrètement, ce que cela signifie avoir un syndicat dans notre société. Quand il y a un syndicat qui est formé en vertu du Code du travail, on confère à ce syndicat non pas une personnalité juridique, mais on lui confère des attributs juridiques, on lui confère des pouvoirs, on lui confère des responsabilités et on lui confère également des obligations.

Prétendre systématiquement à autre chose que ce qu'on vise précisément et qui peut faire l'objet de discrimination, c'est-à-dire des choses aussi fondamentales que le renvoi et la suspension comme mesure disciplinaire, à n'importe quoi d'autre du syndicat, c'est en fait nier l'existence même de ce que signifie se regrouper collectivement et décider d'avoir une vie syndicale.

La convention collective fait l'objet d'un vote par l'ensemble des membres et je pense que le député de Portneuf nous démontre qu'il a fort peu de connaissances de ce qu'est l'économie du Code du travail au Québec.

M. Pagé: Le ministre du Travail tentera de mettre en cause l'expérience de quiconque ou de qui que ce soit, ce n'est pas là le débat.

M. Johnson: Etes-vous satisfait de la réponse?

M. Pagé: Des arguments comme ceux-là, amenez-en tant que vous voudrez, ce n'est pas cela qui va m'énerver et ce n'est pas grave. J'ai probablement plus de pratique en droit que vous en avez eu dans votre vie et que vous n'en aurez jamais.

Le Président (M. Clair): Messieurs, nous nous éloignons du sujet. A l'ordre!

M. Pagé: Une chose qui est certaine, c'est que vous avez répondu — vous avez encore noyé le poisson purement et simplement — et vous ne répondez pas à la question. Le député de Notre-Dame-de-Grâce tantôt nous a apporté des cas précis; si je les avais repris, vous m'auriez taxé de faire du "filibuster" et de vouloir strictement passer le temps.

Vous n'y avez pas répondu, on vous a fait nos commentaires, on vous a fait nos recommandations, on espérait et on souhaitait que vous pourriez bonifier le projet de loi. Vous ne voulez pas et

vous aurez à vivre avec. Vous allez probablement venir avant longtemps avec des amendements spécifiques suite à l'application concrète de cet article.

Le Président (M. Clair): Peut-on considérer que l'étude de l'article 38b est terminée?

M. Johnson: Oui. Une Voix: Non.

M. Johnson: Vous avez tous pris vos vingt minutes.

Une Voix: II n'a pas pris ses vingt minutes.

Le Président (M. Clair): Le député de Mont-Royal a pris douze minutes.

M. Pagé: II lui reste huit minutes. M. Forget: Et moi sept minutes.

Une Voix: Est-ce vous qui tenez le chronomètre?

M. Johnson: Cela paraît tellement long! Une Voix: Qui préside?

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît... Messieurs, j'ai posé une question.

M. Ciaccia: C'est parce que vous n'écoutez pas...

Le Président (M. Clair): Soit celle de savoir si on considérait que l'étude de l'article 38b était terminée.

M. Johnson: Oui.

M. Ciaccia: Non. Pas pour nous.

Le Président (M. Clair): Du côté de l'Opposition officielle, qui entend exercer son droit de parole?

M. Ciaccia: M. le Président, je voudrais...

Le Président (M. Clair): Le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: ... prendre les mots du ministre et essayer de comprendre que l'intention du ministre ou du gouvernement et l'interprétation que le ministre donne à l'article 38b se traduisent dans les paroles du 38b. Corrigez-moi si je me trompe dans mon interprétation. Vous dites que l'article 38b inclut... s'il y a une discrimination en ce qui concerne la négociation; cela fait partie du droit commun. Alors, pour qu'il n'y ait pas d'ambiguïté — parce que je vous assure, malgré que plusieurs du côté ministériel croient qu'on essaie de faire un "filibuster"...

M. Jolivet: On le sait.

M. Ciaccia: Ce n'est pas seulement nous. L'Union Nationale a eu le même problème à cet article. On ne peut pas créer des problèmes qui n'existent pas. Il existe le problème. Si ce que vous dites est exact, seriez-vous prêt — je n'en fais pas un amendement immédiatement, peut-être, dépendant de votre réaction — à ajouter, après 38b...

Une Voix: D?

M. Ciaccia: B, comme dans Boubou.

Et sans restreindre la généralité de ce qui précède, pour tout ce qui concerne la négociation, l'interprétation, l'application de la convention collective.

Une Voix: Qu'est-ce qu'il y a de drôle?

M. Ciaccia: Le but de mon intervention et de cet amendement proposé, suggéré — peut-être que je ferai un amendement formel — c'est pour traduire la pensée, l'interprétation que vous avez donnée en terme clairs, sans ambiguïté. L'article 38b fait partie du droit commun. Nous allons dire: Très bien.

Nous n'allons pas interpréter l'ancien 38b, votre premier amendement, d'une façon restrictive, parce que vous pouvez dire que la discrimination, c'est seulement pour la négociation, l'interprétation, etc. Mais cela doit s'appliquer à tout. Alors, on dit que, sans restreindre la généralité de ce qui précède, cela fait partie du droit commun, cela souligne, et je crois que c'est important de créer cette obligation dans cette loi-ci, pas seulement de la laisser dans la Charte des droits de l'homme ou faisant partie du droit commun, de dire aux travailleurs...

M. Johnson: Est-ce que le député de Mont-Royal me permet une question?

M. Ciaccia: Oui.

M. Johnson: J'aimerais seulement lui poser une question sur 38b? Je sais qu'il est à la Législature depuis beaucoup plus longtemps que moi, il a donc une expérience des textes administratifs que je n'ai pas. Est-ce que l'article 38b, tel que rédigé et proposé par celui qui vous parle, est restrictif?

M. Ciaccia: II peut être interprété comme restrictif parce qu'il y a les paragraphes c) d) et e). Quelqu'un peut vous dire: Oui, c) d) et e) qualifient 38b.

M. Johnson: 38c est restrictif. Cela il n'y a aucun doute là-dessus.

M. Ciaccia: c) d) et e) qualifient... Il peut y avoir une interprétation que cela qualifie 38b. Pour enlever cette possibilité d'interprétation, parce que s'il peut être interprété comme cela, quelqu'un va le faire, si c'est vraiment votre intention, je présenterais...

M. Johnson: il est dix-huit heures. Une Voix: On va revenir... Une Voix: Le président se lève.

Le Président (M. Clair): Messieurs, il est dix-huit heures. Il y a au menu de la salade et des poissons. Je vous conseille d'en prendre de tout côté, cela diminue l'agressivité, je pense.

Une Voix: L'adrénaline.

Le Président (M. Clair): La commission ajourne ses travaux sine die. Non, je m'excuse, suspend ses travaux...

Une Voix: Sine die! C'est fait! Merci!

Le Président (M. Clair): ... à vingt heures ce soir.

(Suspension de la séance à 18 h 2)

Reprise de la séance à 20 h 15

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît!

La commission permanente du travail, de la main-d'oeuvre et de l'immigration est réunie pour continuer l'examen article par article du projet de loi no 45.

Au moment où nous avons suspendu nos travaux à 18 heures ce soir, le député de Mont-Royal avait la parole.

M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Merci, M. le Président.

M. Forget: II faudrait qu'on se réunisse pour la prière au début de nos travaux, M. le Président.

M. Johnson: M. le Président, si je me souviens bien, c'est au moment où nous avons suspendu nos travaux à 23 heures hier, que nous étions à l'article 28, si je ne m'abuse.

M. Forget: C'est exact. Le ministre a une bonne mémoire, parfois.

M. Ciaccia: Je n'étais pas là.

M. le Président, je voudrais proposer un amendement à l'article 28. Je vais immédiatement proposer ma motion, et j'expliquerai mes raisons en faveur de cet amendement après la présentation.

Je propose que le paragraphe 38b de l'article 28 soit modifié, en ajoutant dans la 5e ligne, après le mot "nom " les mots "et sans restreindre la portée générale de ce qui précède, pour tout ce qui concerne la négociation, l'interprétation ou l'application de la convention collective ". Le paragraphe amendé se lirait comme suit: "38b. Une association accréditée ne doit pas agir de mauvaise foi ou de manière arbitraire ou discriminatoire, ni faire preuve de négligence grave à l'endroit des salariés compris dans une unité de négociation qu'elle représente, peu importe qu'ils soient des membres ou non, et sans restreindre la portée générale de ce qui précède, pour tout ce qui concerne la négociation, l'interprétation ou l'application de la convention collective".

Le Président (M. Clair): Y a-t-il des interventions sur la recevabilité de la motion?

M. Brochu: Je veux tout simplement souligner que, compte tenu des interventions faites précédemment par le député de Johnson avant la suspension de nos travaux ce soir, nous allons appuyer la motion présentée par le député de Mont-Royal.

Le Président (M. Clair): Cela ne porte pas sur la recevabilité de la motion.

M. Brochu: Je m'excuse.

Le Président (M. Clair): II n'y a pas de quoi. La motion est recevable. M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: M. le Président, la raison pour laquelle on devrait appuyer le vote en faveur de cette motion est précisément pour donner effet à l'interprétation que le ministre nous a expliquée de l'article 38b. Il a dit, premièrement, que c'était un article d'application générale du droit commun et que, s'il y avait une restriction ou une discrimination concernant la négociation, l'interprétation ou l'application de la convention collective, un syndiqué, membre ou non d'une association, un travailleur, aurait le droit de se prévaloir du droit commun.

Aussi, on enlève l'ambiguïté et la possibilité d'interpréter l'article 38b, avec les restrictions des paragraphes 38c), d), et e). En plus de cela, ce que nous faisons, c'est que nous donnons, pour ces matières, juridiction au Tribunal du travail pour un sujet qui pourra faire l'objet de l'article 38b par un travailleur. D'après l'explication du ministre, même si on interprétait l'article 38b comme faisant partie du droit commun, ou si un travailleur devait se prévaloir de la Charte des droits de l'homme pour se plaindre ou prendre les mesures nécessaires pour faire respecter ses droits, je crois qu'il devrait le faire dans ce cas, si cela fait partie du droit commun, devant les tribunaux civils.

En l'incluant spécifiquement dans l'article 38b, on enlève premièrement l'ambiguïté, on précise et on assure que ce sera le Tribunal du travail qui aura juridiction dans ces matières. Je pense que c'est dans l'intérêt de l'économie de cette loi que ce soit le Tribunal du travail qui puisse déterminer les plaintes, les griefs que quelqu'un pourrait avoir contre une association, pour que ce soit déterminé, décidé sans les délais normaux qu'on pourrait avoir devant les tribunaux civils.

Pour le moment, M. le Président, ce sont les raisons que j'apporte à l'appui de cet amendement.

Le Président (M. Clair): M. le ministre du Travail.

M. Johnson: Nous avons longuement discuté, pendant deux heures cet après-midi, et un peu plus, sur cette question. Je pense qu'au niveau du fond, j'ai dit ce que j'avais à dire; je ne le répéterai pas et ce sera, je pense, la seule intervention, du moins de ma part — je présume aussi la seule intervention du côté des députés gouvernementaux étant donné qu'on a déjà fait le tour de cette question.

Le Président (M. Clair): D'autres intervenants sur la motion d'amendement du député de Mont-Royal? La motion d'amendement... Le député de Notre-Dame-de-Grâce sur la motion d'amendement du député de Mont-Royal.

M. Mackasey: L'amendement du député de Mont-Royal a pour but d'assister le ministre afin d'arriver à la philosophie du Code du travail surtout sur les amendements qui ont été apportés jusqu'à date. Je crois vraiment que c'est mieux, autant que possible, de laisser les syndicats et les salariés régler leurs affaires selon le Code du travail et pas nécessairement par les Cours civiles.

Le ministre a mentionné avec raison, cet après-midi, la relation entre les articles 38b et 38c — vous me permettrez un peu de parler des deux — parce que cet après-midi lorsqu'on discutait du dernier amendement ou du deuxième amendement apporté à l'article 28 par le gouvernement — je pense que je l'ai avec moi quelque part ici — on a au moins limité un peu l'amendement original. Le député de Johnson a attiré notre attention, avec son expérience dans le domaine provincial, sur le fait que la différence entre l'amendement original et le deuxième amendement était de limiter le premier, si vous voulez, en éliminant la phrase "pour tout ce qui concerne la négociation, l'interprétation ou l'application de la convention collective". Cela revient à la motion de mon collègue de Mont-Royal. Si nous avons accepté, cet après-midi, l'amendement apporté par le ministre, cela laisserait l'article 38b, à un moment donné, pour le gouvernement, très vague parce que cela laisserait à un autre organisme, soit la Cour civile, le Code civil, de décider qu'est-ce que c'est vraiment que la discrimination. Qu'est-ce que le ministre pense être une manière arbitraire. Quel est le critère de mauvaise foi? Qui va décider de la définition de la mauvaise foi? Comment va-t-on décider ce qui est vraiment une manière arbitraire et discriminatoire?

Je ne pense pas — peut-être que je me trompe — qu'il y ait une section dans le code qui est devant nous... Peut-être que par les règlements, si vous voulez, quelqu'un du ministère ou le ministre lui-même va décrire ce qu'est vraiment la discrimination, ce qu'est vraiment une manière arbitraire. Si on avait accepté l'amendement de cet après-midi que le député de Johnson, l'ancien ministre du Travail du Québec, a suggéré, cela laisserait l'article 38b très vague et il faudrait, à ce moment-là, s'il y avait un membre d'un syndicat ou un non membre, mais qui quand même, à cause de la formule Rand, prétend qu'il a droit aux services de l'association accréditée, leurs responsabilités, l'initiaitve, si vous voulez, d'aller en Cour civile ou à la Cour du travail, pour avoir une définition de la discrimination, pour qu'un juge, qui n'a pas d'affaires normalement dans les relations industrielles, si possible, décide ce qu'est la discrimination. Qu'est-ce que c'est une manière arbitraire?

Le député de Johnson a souligné que si l'article 38b était un petit peu plus à point, si vous voulez; on peut dire au moins que la discrimination et la manière arbitraire relèvent de la manière dont l'association accréditée représente ses salariés dans le domaine des négociations, dans l'interprétation d'une convention collective, dans l'application de la convention collective. Dans ce sens, c'est à l'avantage du syndicat. Sans cette section qui est maintenant éliminée, et que le ministre veut faire accepter par nous, cela laisse aux cours, aux juges et a d'autres de décider par jurisprudence, qui peut prendre finalement trois, quatre et cinq ans à établir, ce qu'est vraiment la discrimination, ce qu'est la manière arbitraire et dans quel sens.

Souvent les juges n'ont pas tellement d'expérience dans les relations industrielles; ils ne comprennent pas, ce que plusieurs députés ont souligné aujourd'hui, l'expérience dans le domaine syndical. Qu'est-ce que c'est que la discrimination selon l'article 38b? Il ne peut pas nous le dire, et c'est pour cette raison que l'amendement est défectueux. Je pense que s'il y avait une autre section, si c'était une révision complète du code, nous aurions une section qui préciserait exactement ce qu'est la discrimination. Au CCRO vous connaissez — le député sait fort bien comme avocat qui se spécialise dans ce domaine — ce qu'est la discrimination, les droits pas seulement de l'individu, mais du salarié. La définition de la discrimination, c'est clair; cela ne prend pas un avocat, ça prend quelqu'un qui a dans sa poche sa convention collective. Normalement, il connaît la page, l'alinéa et tout; vous savez cela autant que moi, M. le député.

Mais si un pauvre salarié, un individu prétend qu'il y a de la discrimination contre lui, à qui va-t-il s'adresser pour savoir s'il y a vraiment de la discrimination? Est-ce qu'il va aller à l'officier, est-ce qu'il va au "shop steward ", est-ce qu'il va aller au président du local, est-ce qu'il va aller au ministère? Non, il est obligé d'aller en Cour et cela peut coûter $500, $5000 et cela peut prendre trois ans. Cela peut aller en appel. Il faut que quelqu'un décide si c'est un geste discriminatoire contre ce salarié dans cette unité de négociation. C'est pour cela que j'insiste pour qu'au moins on restructure, on précise pour ce salarié. Quand on parle de discrimination, quand on parle d'une manière arbitraire, quand on parle d'une association qui agit de mauvaise foi, on parle du domaine syndical des choses qui touchent les négociations, l'interprétation d'une convention, l'application, si vous voulez, les griefs, les choses normales. Mais sans la définition d'un geste arbitraire ou discriminatoire, le pauvre salarié est obligé, s'il en a vraiment le courage, s'il a les moyens à sa disposition, d'engager un avocat, aller en Cour, passer six mois, un an, deux ans pour avoir gain de cause contre un geste qu'il pensait être discriminatoire.

Ce serait plus simple, M. le ministre, si on avait accepté aujourd'hui la suggestion du député de Johnson qui, au moins, établissait une relation valable, réaliste entre un geste discriminatoire, une manière arbitraire et un domaine des relations industrielles, le domaine de la négociation, de l'interprétation d'une convention collective, de l'application d'une convention collective. En l'absence de cette précision, de la façon que le désire le ministre, à 38b actuellement, il n'y a aucune précision. Qu'est-ce que la discrimination? Je répète la question. Je dis cela en toute sincérité pour aider le député; c'est une question sérieuse. Comme le dit le ministre, c'est possible; je sais qu'il veut faire adopter la loi; moi aussi, je veux qu'elle soit adoptée.

Mais demandez au député de Joliette ce qu'est un geste discriminatoire à l'endroit d'un salarié qui est peut-être là parce qu'il prend avantage de la section progressive de la formule Rand.

Pouvez-vous me dire ce qu'est un geste discriminatoire?

M. Chevrette: Vous me posez la question? M. Mackasey: Oui.

M. Chevrette: En rapport avec l'imposition de la formule Rand?

M. Mackasey: Non, non. Les salariés qui sont maintenant membres d'une association accréditée, membres dans le sens qu'au moins ils paient tous les mois un montant à l'association accréditée. Même s'ils ne sont pas membres, ils ont droit aux services de ce syndicat; vous savez cela autant que moi. Ils prétendent, selon 38b, que c'est défendu d'agir contre cet homme-là d'une manière discriminatoire. Admettons que je sois la victime d'un geste discriminatoire, à qui dois-je m'adresser pour savoir si vraiment il y a eu de la discrimination? Est-ce que je vais m'adresser au syndicat?

M. Chevrette: Si un salarié paie sa cotisation conformément au précompte obligatoire, tel que prévu aux trois premiers paragraphes de l'article 38, je pense qu'il a le droit d'être traité tout comme un membre qui paie le précompte syndical mais qui est en règle avec son syndicat. S'il est traité d'une manière différente d'un autre membre, il y a là un acte discriminatoire. C'est purement cela.

M. Mackasey: Dans quel domaine?

M. Chevrette: J'aime mieux la formule large parce que le global comprend la partie. Si on dit que tu as droit d'être traité comme un salarié même si tu n'es pas membre en règle du syndicat, mais que tu paies ton précompte syndical; si tu dis que tu dois le traiter d'une façon non discriminatoire, je pense qu'à ce moment-là cela veut dire que le gars est en mesure, le salarié est en mesure, dis-je, d'exiger le même traitement que tout autre salarié.

M. Mackasey: Oui, d'accord, mais pourquoi alors éliminer la question de la négociation, de l'interprétation ou de l'application de la convention collective? Pourquoi ne pas préciser, pour les raisons que je ne veux pas répéter... J'ai donné comme exemple cet après-midi... et les occasionnels, ce n'est pas le meilleur exemple, vous le savez autant que moi.

M. Chevrette: Oui.

M. Mackasey: Ceux qui travaillent à temps partiel, si vous voulez, 20 heures par semaine... Par exemple...

M. Chevrette: Me permettrez-vous de répondre à cela? Vous avez affirmé cet après-midi avec beaucoup de force et de vigueur que les syndicats n'étaient pas portés à défendre les occasionnels.

M. Mackasey: Quelques syndicats.

M. Chevrette: Quelques syndicats. Mais vous avez quand même affirmé cela avez assez de vigueur.

M. Mackasey: J'en ai précisé un, oui.

M. Chevrette: Je vous dirai que la presque totalité des syndicats que je connais ne sont pas enthousiastes devant les emplois occasionnels, précisément parce que les gens cherchent à obtenir des postes permanents.

M. Mackasey: D'accord.

M. Chevrette: Ils essaient d'avoir des programmes de travail pour des personnes permanentes. C'est dans ce contexte que les gens disent: Eliminez les postes temporaires; par exemple, plutôt d'engager 20 personnes à titre occasionnel, engagez donc 10 permanents.

M. Mackasey: Je suis d'accord.

M. Chevrette: C'est la raison fondamentale. Cet après-midi, vous n'avez pas sorti cet argument. Je ne l'ai pas relevé, mais je pense que c'est l'argument fondamental.

M. Mackasey: C'est évident, mais quand même, il y a quelques entreprises qui ont besoin d'occasionnels, d'emplois à temps partiel, à cause du rythme de la productivité. Votre réponse est très valable, mais pour continuer, même si ces personnes travaillent à temps partiel, elles sont quand même membres de l'association accréditée; elles paient normalement le même montant; elles ne paient pas moins qu'une autre. Selon l'esprit de l'article 38b, même si les syndicats acceptent ces montants, les membres, surtout, ne sont pas nécessairement contents. Prenons par exemple ceux qui travaillent à temps partiel— car c'est un niveau un peu plus permanent que celui des occasionnels—l'association prend quand même l'argent et en l'acceptant, elle prend aussi la responsabilité de rendre les mêmes services à ces travailleurs partiels qu'aux travailleurs permanents, n'est-ce pas?

M. Chevrette: Je vais à nouveau tenter une réponse. Le travailleur suppléant ou occasionnel— la définition même du mot occasionnel dit que c'est un type...

M. Mackasey: Prenez donc l'exemple, cela va aller mieux, de celui qui travaille 20 heures par semaine, au lieu de 40.

M. Chevrette: Je pense qu'on ne s'entend pas, justement, sur les termes. Si on dit: "permanent", c'est un gars qui travaille à une tâche complète, prévue dans une convention collective. Vous avez "partiel" ou "occasionnel", dans certains cas— mais "occasionnel", au vrai sens étymologique du mot, ne devrait pas être le terme qu'on uti- lise dans nos conventions collectives; ça devrait être "partiel". La personne accomplit une partie d'une tâche. Si on planifiait le vocabulaire des emplois, on aurait moins de problèmes —"Occasionnel", réfère à la personne qui, à l'occasion, vient remplir une tâche parce qu'il y a quelqu'un de malade, ou vient dans un temps où l'industrie a un surplus d'ouvrage. A ce moment, je vous dirai que, si on avait planifié notre vocabulaire, les conventions collectives et l'ensemble des syndicats, je pense, négocieraient des conditions spécifiques pour le travailleur partiel, et le travailleur occasionnel. Je pense, par exemple, à tout le secteur de l'enseignement que je connais un peu plus. L'employé à temps partiel a des conditions de travail prévues dans un contrat; il a des participations à des bénéfices marginaux...

M. Mackasey: II travaille parfois le samedi et le dimanche, et c'est à temps régulier, pas nécessairement à temps double, je le sais.

M. Chevrette: C'est exact. Mais, il y a aussi des salaires horaires de prévus pour l'occasionnel.

M. Mackasey: D'accord, mais quand même, et selon la formule Rand, parce qu'il travaille dans une association accréditée, il lui faut verser un montant au syndicat.

M. Chevrette: Oui. Me permettez-vous seulement une petite parenthèse sur cela?

M. Mackasey: Oui.

M. Chevrette: Le type qui est cotisant dans un syndicat a le droit de vote tout comme un membre permanent.

M. Mackasey: Je comprends cela.

M. Chevrette: Donc, il se présente à son assemblée générale, et il peut faire introduire... en tout cas, je l'ai déjà vu, de mes yeux vu! J'ai vu des gens faire introduire la procédure de grief dans une convention collective, faire introduire des salaires horaires, et même une participation mitigée de l'employeur aux bénéfices marginaux, proportionnellement à la partie du travail qu'il fait, comparativement à une tâche permanente.

M. Mackasey: D'accord, j'accepte cela parce que c'est évident. Quand même, je prétends que le syndicat a l'obligation de protéger cet ouvrier sans discrimination, n'est-ce pas? Prenons un autre cas. Celui d'une personne qui travaille de façon permanente, qui travaille 40 heures par semaine à $7 l'heure, mais contre qui, peut-être pour des raisons religieuses — il y en a au moins en Ontario une secte qui paie — il peut y avoir une discrimination; il est permanent! Je félicite le ministre de ne pas vouloir cette discrimination. Le but de l'article 38b, c'est de dire qu'il n'y aura pas de discrimination.

Moi, je dis que c'est nécessaire de cotiser dans les secteurs surtout de la négociation, de

l'interprétation et l'application de la convention collective. Parce que c'est là que nous avons de la discrimination normalement. C'est cela qui est important. Le ministre, cela va lui faire du bien, va en apprendre aussi, pas seulement dans les livres, mais par expérience.

Alors, comme le ministre a parlé de 38c cet après-midi, cela m'a fort surpris parce que 38c est encore restrictif, dans le sens qu'on parle des sanctions disciplinaires. M. le ministre a attiré à notre attention les sanctions disciplinaires aux paragraphes b) et c) qui ont une relation. On prend seulement les sanctions disciplinaires. Par exemple, on impute une amende à quelqu'un qui décide de retourner au travail, malgré une grève légale, ou qui travaille sur les lignes de piquetage; c'est une sanction!

M. Johnson: ... l'employeur... Simplement pour fins de précision. Si la sanction disciplinaire qui serait imposée par un employeur ou...

M. Forget: Je pense oui.

M. Johnson: C'est cela, si j'ai bien compris ce que disait le député de Notre-Dame-de-Grâce, il parlait d'une sanction disciplinaire que le syndicat imposerait à un salarié; il n'est pas question de cela. Remarquez que, à la rigueur, cela pourrait être interprété comme cela.

M. Forget: Oui.

M. Johnson: Mais si un salarié a subi un renvoi ou une sanction disciplinaire, quand on parle de la notion de renvoi, c'est le renvoi "par l'employeur". Ne me dites pas qu'on est là-dedans depuis deux heures et que le problème était à ce niveau!

M. Mackasey: Non, non.

M. Johnson: Ce que 38c évoque, ce n'est pas la sanction disciplinaire prise par le syndicat contre un de ses salariés! c'est la sanction disciplinaire, c'est ce qui pourrait faire l'objet d'un grief en vertu de la convention collective.

M. Forget: C'est à 38c, 38b c'est l'autre.

M. Mackasey: Je le crois, mais cela peut être interprété des deux façons. Pourquoi, comme avocat, ne précisez-vous pas davantage que, lorsqu'un salarié a une sanction disciplinaire, celle-ci a été imposée par l'employeur "ou" par le syndicat? Si c'est évident que c'est l'employeur, pourquoi ne l'écrivez-vous pas que c'est l'employeur?

Pour revenir au point principal, je pense que le but de l'amendement du député de Mont-Royal est de laisser la charge de la discrimination, et de régler ceci par le Code du travail, par les fonctionnaires à la disposition du ministère, par les commissaires, au lieu d'aller en cour civile pour avoir une décision si un tel geste est de la discrimination ou non. Pour revenir à 38c, malgré que je ne sois pas très intelligent, il serait mieux aussi d'y préciser: le salarié à qui une sanction disciplinaire est imposée par le syndicat et aussi par l'employeur. Parce qu'un syndicat peut imposer une sanction disciplinaire à un membre, qui par exemple, dresse des lignes de piquetage ou décide de retourner au travail avant que la grève soit terminée. Cela arrive souvent après qu'une grève soit terminée de déterminer une amende de $100, $200, $500 contre un membre du syndicat parce qu'il a décidé de retourner au travail même si le syndicat était encore en grève. Ça, c'est une sanction disciplinaire. Est-ce qu'il y a, en fait, une autre protection? Certainement que c'est quelque chose d'important. Supposons que le syndicat décide d'imposer une amende de $500, c'est une sanction disciplinaire, contre quelqu'un qui a décidé de retourner au travail, ce peut être seulement $300 pour un autre. Je parle encore par expérience. Dans un autre cas, il est décidé d'établir à $200 une amende, alors que dans un autre cas, il n'y aura aucune sanction.

M. Chevrette: Voulez-vous me permettre une question?

M. Mackasey: Oui.

M. Chevrette: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, je vais vous poser la question, et je vais vous faire une petite hypothèse. Vous avez quatre techniciens à l'intérieur d'une unité accréditée qui se présentent en assemblée générale et disent: Nous, les techniciens, sommes des travailleurs à part, qualifiés. Ils présentent une motion pour que le syndicat aille négocier un taux horaire du double de la masse des salariés. La négociation s'entreprend.

De toute façon, pour ce qui est des demandes, ce n'est pas un problème, ils en mettent. Ils mettent $8 l'heure alors que c'est $4 pour la masse. En négociation, ils négocient à quatre ou six. Les quatre se retournent et disent: Discrimination? Avec votre clause?

M. Mackasey: Non. Les différents niveaux de salaire sont basés sur la classification. Si c'est un technicien et que les techniciens n'ont presque rien en commun avec la masse des salariés, ils ne devraient même pas être dans l'unité. Moi, je parle...

M. Chevrette: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, vous savez qu'un syndicat peut se présenter au Québec et loger une demande d'accréditation pour tous les salariés, au sens du Code du travail. Ce qui veut dire qu'à la minute où on a 50% plus 1, on peut couvrir des postes qui viendront s'ajouter plus tard, indépendamment des professions.

M. Mackasey: Je saisis autant que vous, mais il y a quand même ceux qui sont, d'après la définition de votre consoeur, des professionnels, comme gérants, si vous voulez. Ils ne sont pas dans la même unité d'accréditation que l'ouvrier, je le sais autant que vous. Mais j'ai vu des cas où

un syndicat, après une grève, décide d'appliquer des sanctions disciplinaires contre les membres d'un syndicat, après une grève, décide d'appliquer des sanctions disciplinaires contre les membres d'un syndicat pour des raisons que le syndicat pense valables. Je vois là de la discrimination. C'est pour cela que c'est vague un peu.

M. Johnson: M. le Président, est-ce que le député de Notre-Dame-de-Grâce me permet?

M. Mackasey: Oui.

M. Johnson: II me dit qu'il connaît des cas comme ceux-là. J'en connais spécifiquement un à cause d'une plainte qu'on a reçue au ministère il y a quelques mois, d'un salarié qui se plaignait que son syndicat lui avait imposé une amende de $300 parce qu'il avait choisi de retourner au travail sous le coup d'une injonction et que la majorité des salariés, dans cette entreprise, n'y était pas retournée.

M. Mackasey: D'accord.

M. Johnson: Ils ont donc choisi, allègue-t-il. Je ne peux pas tenir pour acquis que tout ce qu'il dit est exact, mais l'allégation, c'est cela. Ce que le ministère peut faire dans ces circonstances — oublions le projet de loi no 45 et regardons le Code du travail, regardons ce qui existe en Ontario au niveau du code canadien, ou ailleurs — ce que le salarié peut faire...

M. Mackasey: Parlons du Québec.

M. Johnson: ... c'est une plainte au ministre. Le ministre a, en vertu de la loi du ministère, les pouvoirs d'envoyer un enquêteur mais, si c'est de nature assez vague, c'est ce qu'on appelle le service des enquêtes spéciales au ministère du Travail qui est, en fait, du "fact finding" bien plus qu'autre chose, ils n'ont pas de pouvoirs coerci-tifs, ils n'ont même pas de pouvoirs d'assignation des personnes, etc. Ce qu'on fait, c'est qu'on le constate. On peut constater qu'effectivement, il semble que monsieur ait été traité injustement. Il n'y a pas de sanction, c'est vrai. Cependant, le député de Notre-Dame-de-Grâce comprendra que, à mon avis, le Code du travail n'est pas la loi qui doit faire l'objet de l'application de sanctions quand quelqu'un ne respecte pas les règles de sa propre association.

On n'a qu'à regarder le droit des compagnies. Il peut arriver qu'à l'intérieur d'une corporation, un actionnaire se sente lésé dans ses droits. Ce n'est pas la Loi des compagnies qui prévoit que le ministre des Consommateurs, Coopératives et Institutions financières va venir faire une enquête qui va prendre une ordonnance précise à ce sujet. La Loi des compagnies prévoit des recours pour un actionnaire, ce sont les recours de droit commun, ce sont ceux de la "Common Law" dans le cas des provinces canadiennes.

Dans le cas précis qui nous occupe, au projet de loi no 45, avec l'article 38d, ie pense que c'est le principe général de la non-discrimination qui s'applique. Il est là, fondamentalement — comme je l'ai dit, ce n'est pas un article restrictif — pour initier le mécanisme prévu à l'article 38c. D'accord? Or, le mécanisme prévu à l'article 38c, j'en conviens, est restrictif cependant...

M. Mackasey: M. le ministre...

M. Johnson:... dans le cas du renvoi ou d'une sanction disciplinaire imposée par l'employeur et non le syndicat.

M. Mackasey: Oui et la plainte du salarié, selon lui, c'est que le syndicat ne prend pas soin de...

M. Johnson: Lui-même?

M. Mackasey: ... l'intérêt des salariés vis-à-vis de l'employeur qui a imposé...

M. Johnson: C'est cela.

M. Mackasey: ... une sanction disciplinaire.

M. Johnson: C'est cela.

M. Mackasey: Je comprends. Je dis encore que ce qui manque ici, c'est — that is a word I cannot get my tongue around — la définition de mauvaise foi, manière arbitraire et discriminatoire, mais surtout, c'est ce que le député de Mont-Royal veut — et je pense que c'est dans l'intérêt de tout le monde — c'est, autant que possible, régler ces conflits selon le Code et selon les commissaires et les tribunaux du travail et non aux cours civiles. C'est la différence.

Si vous ne précisez pas plus, à l'article 38b, dans quel secteur, quand nous sommes craintifs d'une manière arbitraire ou discriminatoire, le salarié n'a d'autre choix que d'aller en cour civile. Il engage un avocat, passe six mois, un an, deux ans, trois ans, dépense $1000, $2000 ou $5000 pour établir si, vraiment, il y a de la discrimination ou non. C'est cela le point, c'est le but de l'amendement. C'est clair, c'est simple. Tout ce qu'on veut faire c'est, autant que possible, arriver avec un code où les conflits qui arrivent à tous les jours soient réglés au fur et à mesure entre le patron, l'employé et le syndicat, sans qu'on soit obligé d'aller en dehors des tribunaux du travail.

C'est le but de l'amendement du député de Mont-Royal. Ce n'est pas plus compliqué que cela.

Le Président (M. Clair): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, je vous indique que, de toute façon, votre temps est expiré, soit les 20 minutes. Alors, je suis bien heureux que la coïncidence arrive ainsi.

M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, je n'ai pas l'intention de revenir sur tous les arguments qui ont été exposés par mes collègues. Mais essayons de se placer du point de vue dans lequel le ministre ou

le rédacteur d'une loi doit se placer au moment où il décide d'introduire, dans une loi comme celle-ci, le principe nouveau de la non-discrimination. Essentiellement, il y a trois possibilités entre lesquelles il doit d'abord choisir pour éliminer la discrimination dont peuvent être victimes des salariés face à une action d'une association de salariés dont, peut-être, ils ne sont pas membres.

Une première possibilité qu'on pourrait envisager, c'est de modifier la Charte des droits et libertés de la personne pour ajouter un motif nouveau de discrimination, c'est-à-dire une source nouvelle de discrimination, comme on le fait par un autre projet de loi qui est actuellement devant l'Assemblée nationale, dans le cas de l'orientation sexuelle. On pourrait ajouter au sexe, à la religion, à la langue, etc. l'appartenance ou la non-appartenance à une association de salariés. C'est le premier chemin qui pourrait, théoriquement, être suivi. A ce moment-là, on a comme recours, un recours relativement facile d'accès, peu coûteux, informel, qui est constitué par la Commission des droits de la personne. D'ailleurs, il faut noter que, si on avait choisi cette voie, on aurait créé une possibilité intéressante de faire intervenir la commission lorsque la discrimination est le fait non pas d'un syndicat mais d'un employeur. C'est une possibilité. Je la mentionne pour montrer que c'est un choix qui aurait pu être fait, mais qui n'a pas été fait. Cela nous permet d'évaluer, évidemment, le choix auquel le ministre s'est éventuellement arrêté.

Une autre possibilité qui aurait pu être adoptée, eût été de situer, à l'intérieur même du Code du travail, et en totalité, le problème de la discrimination. C'est-à-dire qu'on aurait pu dire: Voici, s'il y a de la discrimination dans les relations du travail, attribuable à la non-appartenance ou à l'appartenance au syndicat, déjà, dans le cas de discrimination qui est le fait d'un employeur, congédiement pour appartenance syndicale ou activité syndicale, on sait qu'il y a une procédure dans le Code du travail, avec une possibilité d'appel au Tribunal du travail. C'est une voie qui est déjà utilisée, qui est bien rodée. D'ailleurs, dans d'autres dispositions, on a ajusté les pénalités et on s'est assuré que, dans la question où il y a une réintégration forcée d'un travailleur qui est congédié pour raison d'activité syndicale, les compensations, les indemnités soient mieux appropriées, et que la période pendant laquelle elles s'appliquent soit mieux définie.

Donc, on est en face d'un terrain connu, d'une procédure accessible aux travailleurs, de possibilités d'enquête qu'un tribunal ordinaire n'a pas; c'est là une chose qui paraîtrait normale, mais qui n'a pas été retenue, sauf dans un cas bien précis dont traite l'article 38c. Nous y reviendrons éventuellement.

Ou enfin, et c'est plutôt l'approche qui a été retenue par le ministre, quant au problème général de la discrimination, c'est de dire: On va faire une précision, dans le fond, à l'article 1053 du Code civil. On va dire que la responsabilité civile d'une association de salariés est engagée par un acte de discrimination, une espèce de quasi-délit—cela n'est peut-être pas strictement 1053, mais c'est dans les quelques articles suivants— qui, de toute façon, engage la responsabilité civile et ce sont les tribunaux de droit commun qui devront en être saisis. A ce moment-là, on renonce à l'accessibilité facile de la Commission des droits de la personne ou des mécanismes du Tribunal du travail, et on renonce très certainement aux possibilités d'enquête facile; l'enquête est à la charge, à ce moment-là, financièrement parlant, de la partie en cause, c'est-à-dire de la demanderesse, qui doit s'arranger pour avoir les témoins, faire son enquête, engager un avocat, payer les frais de cour, etc. C'est donc la moins accessible des procédures qui aient été choisies, sauf, bien entendu, dans le cas prévu par 38c.

Finalement, quand on fait le tour de ces trois possibilités, évidemment, on peut toujours inventer plusieurs combinaisons possibles qui résulteraient d'une méthode mixte où on aurait un peu du Code civil, un peu du Tribunal du travail et un peu de la Commission des droits de la personne. C'est un peu une méthode mixte, bien sûr, qui a été retenue par le ministre, mais une méthode mixte qui, quant à l'ensemble du problème, encore une fois, est la moins accessible quant au tribunal et quant aux procédures d'enquête, qui est la plus différente des autres occasions où la législation la plus récente amène les citoyens à pouvoir faire vider une question de discrimination, c'est-à-dire soit la Charte des droits et des libertés de la personne, soit le Code du travail. C'est donc une espèce de recul que de se référer au Code civil dans un domaine de discrimination; c'est une approche qui n'est plus retenue, qui est abandonnée partout. Même dans des domaines nouveaux autres que le Code du travail, on n'aurait pas l'idée de référer des gens, qui se plaignent de discrimination, surtout des travailleurs, à une procédure de droit commun simple. Les autres structures ont été inventées et mises sur pied justement pour surmonter les obstacles que cela place dans le chemin d'une personne qui a à se plaindre de discrimination.

Bien sûr, les cas ne sont peut-être pas nombreux, mais, à force d'en discuter, on se rend compte que tout le monde a eu connaissance, et souvent dans un passé relativement récent, d'un, deux, trois ou quatre cas. C'est comme n'importe quoi, M. le Président; s'il y avait des recours plus faciles, on se rendrait compte que c'est le sommet de l'iceberg; il y a 10% des cas dont on a connaissance dans le moment; dans la plupart des cas, les gens se résignent à leur sort parce qu'ils savent très bien que c'est un peu trop compliqué.

Dans l'ensemble, c'est ce qui fait que l'amendement qu'on propose — que notre collègue de Mont-Royal propose — vise à situer un peu plus les questions de discrimination dans le ton commun des considérations du travail. Encore une fois, c'est dans ce contexte qu'on règle les problèmes de discrimination quand ils sont causés par le fait de l'employeur; il semblerait normal de les situer dans ce cadre-là quand ils sont causés par le fait du syndicat. C'est, en soi, une discrimination que de ne pas traiter les deux types de dis-

crimination, les deux sources de discrimination de la même façon.

Peut-être que, par cet amendement, on obtiendrait une précision un peu plus grande et une possibilité d'intéresser le Tribunal du travail et c'est ce qui en fait la justification.

En terminant, M. le Président, le ministre, tout à l'heure, a fait un parallèle avec la Loi des compagnies. Il dit: La Loi des compagnies renvoie au droit commun. Strictement, cela n'est pas vrai.

Bien sûr, elle renvoie aux tribunaux de droit commun. Mais elle ne renvoie pas au droit commun parce que tout un développement du droit des compagnies, au cours du dernier demi-siècle, a été de protéger les actionnaires minoritaires. Le droit à la dissidence de gens qui sont en minorité a été jugé comme quelque chose de très important parce que, justement, il y a eu des abus. Des gens ont usé de leur situation majoritaire pour écarter et spolier des intérêts minoritaires.

M. Johnson: Ce sont des recours, vraiment, de droit commun devant les tribunaux de droit commun.

M. Forget: Devant les tribunaux, non, ce ne sont pas les recours de droit commun.

M. Johnson: Ce sont des recours de type injonction.

M. Forget: Ce sont les recours statutaires en vertu de la Loi des compagnies...

M. Johnson: D'infractions précises.

M. Forget: ... ce ne sont pas les recours de "Common Law". Ce sont les recours de droit statutaire qui s'exercent devant les tribunaux de droit commun. Mais il y a une grande différence. Pouvoir alléguer du droit statutaire plutôt que, par exemple, du Code civil ou du "Common Law", c'est toute une différence. C'est là, dans une certaine mesure, mais avec des difficultés d'interprétation, à mon avis, puisqu'on ne va pas tellement loin dans les détails.

Enfin, M. le Président, je ne veux pas céder à la tentation à laquelle le ministre nous invitait, soit de ne pas céder. C'est lier un long débat sur cette question puisqu'il invitait ses collègues à beaucoup de retenue de ce côté. Je vais terminer là-dessus en espérant que notre motion sera adoptée. Est-ce trop espérer?

Le Président (M. Clair): Le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: Je veux juste apporter un argument au député de Notre-Dame-de-Grâce. J'ai l'impression que toute l'approche qu'on a tenté de développer, par des échanges de questions, pourrait être reprise dans le cadre de l'établissement d'un chapitre spécial, dans le cadre d'une démocratie syndicale avec toute la dimension "discrimination". Je pense qu'apporter des amendements à court terme pour classifier des choses qui sont des situations de fait, ce serait s'engager dans un débat beaucoup trop long qui risquerait d'être déclaré contraire au règlement. On ne peut pas apporter de principes nouveaux.

M. Mackasey: M. le Président, le député de Joliette-Montcalm a parfaitement raison. Je suis absolument d'accord que ce que je cherche depuis le début de mes interventions, c'est exactement ce qu'il vient de comprendre. Il faut, quelque part dans le Code du travail, ou ailleurs, une définition d'une bonne constitution de ce que devraient être les droits des membres. Vous ne l'avez pas, par exemple. Nous sommes obligés de travailler dans ces quelques amendements au Code du travail. Selon moi, si vous faites un amendement à l'article 15, ou à l'article 20, souvent il devient nécessaire de changer les articles 25, 35, 40 ou 45. Mais comme le ministre ne pouvait pas changer cet article, nous sommes mal pris parce qu'on ne peut pas aller chercher... Alors, pourquoi des changements partout? Je veux dire, en ami, que, si on continue dans cet esprit, amendements ici et là, nous arriverons avec un Code du travail amendé qui n'aura pas la compétence, la force, la vigueur, l'intégrité du code tel qu'il existe avant les amendements. Personne ne sera content, ni les syndicats, ni les patrons, ni les ministères, ni les fonctionnaires. On essaie encore d'améliorer ce qu'on a obtenu quand ce qu'on a besoin, c'est autre chose complètement nouveau, différent.

Ce serait plus avantageux pour le ministre, et il n'est pas trop tard, de décider d'annuler tout ce qu'on est en train de faire. Attendez le rapport qui va arriver dans un, deux ou trois mois, le rapport Martin. Je pense que ce serait un geste logique de la part du ministre d'attendre le rapport Martin et de recommencer, de renouveler complètement le Code du travail. Essayer — le député de Joliette-Montcalm l'a souligné mieux que moi — de faire ceci et cela donnera comme résultat que le Code du travail ne rendra justice à personne.

Les syndicats sont déjà craintifs, le patronat est déjà mécontent, le ministre a de la difficulté à s'expliquer; il est obligé de venir avec des changements, à chaque séance. Cela n'est pas croyable. Je pense que le député de Joliette, dans son intervention brève, mais brillante, a touché exactement le problème fondamental. J'aimerais parler des amendements, M. le Président.

Le Président (M. Clair): M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, tantôt, je vous ai indiqué que votre droit de parole était expiré sur l'amendement.

M. Mackasey: Je m'excuse.

Le Président (M. Clair): Je vous ai quand même permis quelques minutes...

M. Mackasey: Non, non, M. le Président, je veux collaborer entièrement avec vous...

Le Président (M. Clair): ... puisque le député de Joliette-Montcalm...

M. Mackasey:... je dis cela en toute sincérité. Le Président (M. Clair): Je vous remercie.

M. Mackasey: Non, c'est un homme compétent. Tassez-vous et travaillez avec le Président. Et vous aussi. Apprenez quelque chose comme votre ami ici.

Le Président (M. Clair): Messieurs, la motion d'amendement du député de Mont-Royal, pour que le paragraphe 38b de l'article 28 soit modifié, en ajoutant dans la cinquième ligne, après le mot "nom", les mots "et sans restreindre la portée générale de ce qui précède pour tout ce qui concerne la négociation, l'interprétation ou l'application de la convention collective", est-elle adoptée?

M. Brochu: Adopté.

Des Voix: Adopté.

Le Président (M. Clair): Rejeté?

M. Forget: Oui, M. le Président, rejeté sur division, mais...

Le Président (M. Clair): Rejeté sur division. Considérons-nous la discussion close sur le paragraphe 38b?

Des Voix: Oui.

M. Forget: Vous avez demandé si c'était terminé?

Le Président (M. Clair): Oui, étant donné l'entente que nous avons conclue. Nous convenons que l'étude de l'article 38b est terminée. Sur l'article 38c, y a-t-il des intervenants?

M. Forget: M. le Président.

Le Président (M. Clair): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Un instant, que je me retrouve. Cet article contient les clauses restrictives relativement aux possibilités de plainte ou de correction, de redressement d'une discrimination, puisque 38c spécifie très bien qu'il s'agit simplement de discrimination à l'occasion d'un renvoi ou d'une sanction disciplinaire.

Je propose donc que cette restriction soit éliminée en vertu de l'amendement suivant: "Que le paragraphe 38c de l'article 28 soit modifié en retranchant dans la première ligne les mots "qui a subi un renvoi ou une sanction disciplinaire" et en retranchant dans la deuxième ligne les mots "à cette occasion". Le paragraphe amendé se lirait comme suit: "38c: Si le salarié croit que l'association accréditée viole l'article 38b, il doit, s'il veut se prévaloir de cet article, porter plainte par écrit au ministre dans les six mois. Le ministre nomme un enquêteur qui tente de régler la plainte à la sa- tisfaction de l'intéressé et de l'association accréditée".

M. le Président, nous souhaitons, par cet article, rendre accessible le mécanisme prévu par 38c indépendamment de la restriction qui y apparaît. C'est un mécanisme qui n'est pas parfait et nous aurons, bien sûr, des remarques à faire à ce sujet, notamment à l'article 38d et à l'article 38e. Mais il reste que c'est un mécanisme qui s'inscrit dans le contexte du Code du travail qui est accessible, qui est familier aux travailleurs et qui devrait permettre de redresser des torts qui sont constatés par des salariés non membres d'une association de salariés. L'article...

M. Chevrette: M. le Président, le député de Saint-Laurent va sans doute me permettre une petite question?

Le Président (M. Clair): M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: Etant donné que c'est lui qui présente l'amendement, je voudrais lui demander, avant de vous poser une petite question sur la recevabilité, si le fait d'adopter cet amendement n'a pas le même effet que d'avoir adopté l'amendement à l'article 38b.

M. Forget: Est-ce que je pourrais expliquer?

M. Chevrette: Brièvement, je ne veux pas un discours non plus.

M. Forget: Mais est-ce que vous pourriez expliquer en quoi cela aurait le même effet?

M. Chevrette: La question est assez précise: Le fait d'accepter votre amendement à l'article 38c n'aurait-il pas le même effet que celui d'avoir adopté au préalable votre amendement à 38b?

M. Forget: Non, je ne crois pas, M. le Président, puisqu'on nous a dit — et il faut prendre la parole du ministre — que l'article 38b est un article formulé de façon générale mais qui, essentiellement, a pour but d'ouvrir un recours de droit commun devant les tribunaux, pour toutes sortes de causes non spécifiées et qui ne relèvent pas nécessairement du Code du travail ou qui ne s'inspirent pas nécessairement d'une disposition précise du Code du travail.

Par ailleurs, 38c traite d'un recours dans le contexte du Code du travail. Etant donné qu'on a présumément, en terminant la discussion de 38b, en quelque sorte, comme virtuellement adopté 38b, il faut donc comprendre que, maintenant, on se situe dans le contexte où il existe un recours de droit commun sur toute matière présentant les apparences d'une discrimination, quelle qu'elle soit et de façon très large, indépendamment du fait qu'il s'agisse de prescriptions ou d'interdictions contenues dans le Code du travail, et cela dans un sens très large.

Ici, c'est quelque chose de plus spécifique. On dit: Indépendamment de l'existence ou de l'inexis-

tence d'un recours de droit commun—et on sait qu'il existe déjà en vertu de 38b—il y a aussi un recours en vertu du Code du travail, en vertu d'un appel au ministre et d'une enquête, etc.

Donc, cet article 38c, s'il était amendé tel qu'on le suggère, dit essentiellement qu'une fois le recours de 38b accordé, un recours général, un recours complet aux tribunaux ordinaires, il y a aussi, indépendamment de cela, et dans le contexte des règlements, des critères et des dispositions du Code du travail, un recours, dans le contexte du Code du travail, au ministre du Travail et au Tribunal du travail.

Donc, les modalités de ce recours, son extension, l'ouverture plus ou moins grande qu'il peut avoir, ce sont des modalités qui ne pouvaient évidemment pas figurer dans un article antérieur ou avoir le même effet, puisque c'est prévu à partir de 38c seulement. C'est seulement à partir de 38c qu'on peut faire appel au ministre. Qu'on ait dit quoi que ce soit à 38b, cela ne pouvait pas avoir le même effet, puisque cela n'impliquait pas, de la même façon, un appel au ministre pour nommer un enquêteur, la possibilité, à 38d, que si aucun règlement n'intervient entre les parties, que l'association soit alors forcée, par le tribunal, etc., de déférer au tribunal d'arbitrage, etc. Toute cette procédure, qu'on ait apporté quelque amendement qu'on ait voulu à 38b, on n'avait pas moyen de l'enclencher. Tout ce qu'on aurait pu faire, c'est de s'adresser directement au tribunal du travail. Mais là, il y a toute une procédure; il y a toute une procédure à plusieurs étapes. On dit: Cette procédure, même s'il y a des recours de droit commun, elle devrait aussi exister. Peut-être en parallèle, peut-être pour les mêmes sujets. A ce moment-là, il y aurait un choix. Il n'y a rien de mal là-dedans.

Mais cela ne limite certainement pas la recevabilité. C'est nettement un autre objet. C'est un autre type de recours, un autre type de procédure.

Le Président (M. Clair): M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: M. le Président, sous réserve de votre permission, je voudrais interpréter ce que le député de Saint-Laurent m'a dit, pour voir si j'ai bien compris. Après cela, je déciderai ou non de... Est-ce que vous me permettez d'abord de faire l'interprétation? Cela sera très bref, une phrase seulement.

Le Président (M. Clair): Oui, allez-y.

M. Chevrette: Est-ce que j'interprète bien en disant que toute plainte de discrimination ou de représailles, de quelque nature que ce soit, en vertu de l'amendement que vous apportez, sera nécessairement acheminée à l'enquêteur nommé par le ministre?

M. Forget: Non.

M. Chevrette: Si vous enlevez les mesures disciplinaires...

M. Forget: Oui.

M. Chevrette: ... cela déborde donc le cadre, cela crée un cadre beaucoup plus large, aussi large que celui prescrit à 38b. Oui ou non?

M. Forget: Ah oui! mais c'est un autre recours, ce n'est pas le même recours. Ce n'est pas un recours de droit commun; ce n'est pas un recours devant les tribunaux civils, c'est un recours devant le ministre...

M. Chevrette: D'accord, mais...

M. Forget: ... par l'arbitrage et au Tribunal du travail. C'est un autre "ball game" comme on dit.

M. Chevrette: Je comprends, mais...

M. Johnson: Non, c'est le ministre, le tribunal d'arbitrage.

M. Forget: Oui, d'accord, c'est dans cet ordre, excusez-moi...

M. Chevrette: Non, mais, à ce moment...

M. Forget: Mais c'est un autre "ball game", c'est l'enclenchement d'une autre procédure qui n'était pas du tout envisagée à l'article 38b. L'article 38b va exister de toute façon. L'article 38b prévoit déjà le recours de droit commun. Ce que l'article 38c et les suivants disent, c'est un autre type de recours.

M. Chevrette: Pourquoi l'article 38b existerait-il, à ce moment-là, si, automatiquement, toute discrimination est acheminée selon le mécanisme de l'article 38c?

M. Forget: Ce n'est pas à nous à répondre à cette question.

M. Chevrette: Non, mais je veux le savoir.

M. Forget: Nous, on visait à ne pas avoir un recours de droit commun.

M. Chevrette: Vous l'éliminez avec cela. M. Forget: Pas du tout, il y a le choix. M. Johnson: Ah! le choix entre les deux. M. Forget: Le choix entre les deux.

M. Johnson: Sur le plan de la rédaction, probablement qu'il y a le choix.

M. Chevrette: Je ne m'opposerai pas à la recevabilité, pour permettre au moins le débat sur cela.

Le Président (M. Clair): Je déclare, de toute façon, l'amendement recevable.

M. Forget: Merci, M. le Président. Je pense bien qu'en discutant de la recevabilité, on a quand même un peu préparé le terrain, M. le Président.

Le Président (M. Clair): J'aurais presque envie d'inclure votre temps.

M. Forget: Mais, strictement parlant, ce n'est pas possible. De toute façon, je n'abuserai pas, M. le Président. Il s'agit simplement d'attirer l'attention de la commission sur le fait qu'il y a un recours aux articles 38c, 38d et 38e, mais cela commence à l'article 38c. Il y a un recours de caractère familier et accessible. Pour celui qui se plaint, il y a la possibilité d'avoir seulement à se plaindre, c'est-à-dire de formuler par écrit, dans les six mois, au ministre, l'objet de sa plainte et de laisser à d'autres le soin de faire les enquêtes, de découvrir les faits, de rassembler les témoignages, etc.

C'est un très grand avantage que de pouvoir bénéficier d'un canal comme celui-là pour acheminer une plainte et l'acheminer jusqu'à sa conclusion ultime qui est une ordonnance et un arbitrage et une décision. C'est très précieux. C'est si précieux que, dans le fond, une grande partie, presque la moitié des dispositions du Code du travail permettent d'enclencher un tel mécanisme d'enquête, d'adjudication par une voie de tribunaux ou d'officiers à fonction quasi judiciaire, avec un minimum d'exigences de la part de celui qui enclenche le mécanisme et, ordinairement, c'est dire qu'il veut que cela s'enclenche, parfois par écrit, parfois même pas par écrit, et d'avoir un minimum de coûts, effectivement aucun coût. Il n'a pas besoin de s'engager un procureur; il n'a pas besoin de faire une enquête coûteuse en engageant des gens pour dresser un dossier. Tout ceci se fait, au moins jusqu'à un certain point, parce qu'on y reviendra après, à l'article 38d... On se rend compte qu'après l'article 38d, il peut y avoir quelques frais, mais on y reviendra plus loin.

Mais, au moins, au départ, tant qu'il n'y a pas un coût initial qui est donné, il y a un recours facile. Nous nous disons: Pourquoi le restreindre de cette façon au renvoi ou à une sanction disciplinaire? Il n'y a vraiment pas de raisons qui nous apparaissent déterminantes. Il y a bien des choses qui peuvent se produire, dans des cas comme ceux que les articles 38c et 38b, antérieurement, soulevaient, les cas de discrimination. Il peut y avoir, à ancienneté égale — l'ancienneté est un peu technique et peut-être s'applique-t-elle seulement à des membres de l'association d'employés — pour une période égale de présence au sein d'une entreprise, il peut y avoir, au niveau d'une promotion, par exemple, une préférence discriminatoire qui est accordée.

M. Johnson: Le mot "discriminatoire", il faut s'entendre sur la notion.

M. Forget: Oui.

M. Johnson: Je suis sûr que le député de Saint-Laurent va me permettre...

M. Forget: Elle est toujours discriminatoire, bien sûr, parce que, quand on choisit quelqu'un, on fait une discrimination. Mais, ce qui est important dans un choix comme celui-là...

M. Johnson: Reconnaissez-vous que... Oui.

M. Forget: ... par exemple, parce que l'analogie se pose dans les cas de préjugés raciaux, religieux, il faut pouvoir prouver que le choix qu'on a fait ne repose pas sur le sexe...

M. Johnson: Sur l'élément de discrimination.

M. Forget: ... sur la race, sur la langue, etc. Si l'employeur est capable de démontrer qu'il a pris un soin raisonnable, qu'il a interviewé tout le monde et qu'il avait, dans des dossiers préparés sur les différents candidats, suffisamment de données pour au moins créer une prépondérance de preuves en sa faveur, on écarte la présomption, enfin, c'est presque une présomption de discrimination.

Dans le cas de promotion, si on peut prouver que la non-appartenance à une association de salariés n'est pas le facteur déterminant parce qu'il y en avait d'autres, il n'y aura pas de discrimination. C'est bien clair que cela se pose. C'est d'ailleurs pour cela que longtemps on a résisté, du côté des employeurs même et de la société en général, à ce qu'il y ait des chartes des droits de l'homme et des commissions des droits de l'homme, parce qu'on se disait: II faut quand même qu'il y ait des choix qui se posent dans la vie. Ces choix, forcément, sont discriminatoires. Comment présumer que la discrimination est illégale plutôt que légitime?

Je pense que le fonctionnement des commissions des droits de l'homme a démontré que ce n'était pas impossible de le faire à l'aide de quelques présomptions et de quelques règles de preuve.

Donc, le renvoi et la sanction disciplinaire sont des mesures extrêmes. Il y en a d'autres qu'on peut facilement imaginer à partir d'expériences vécues, les promotions en sont une, le choix des périodes de vacances, etc., et presque toutes les décisions. Il y en a des centaines qui se prennent dans une entreprise. Elles peuvent être l'occasion de dire: II y a de la discrimination. Pourquoi ne serait-ce pas accessible de façon simple par la procédure? Envisager, comme le fait l'article 38b, de prendre des poursuites en dommages et intérêts devant la Cour supérieure, oui. C'est un déni de justice dans le fond, parce que qui va faire cela? Personne ne va le faire. On va dire: Je vais prendre mon trou. Je suis né pour un petit pain ou quelque chose de ce genre. Ce n'est pas une réponse. La seule réponse peut se trouver dans une procédure simplifiée, telle que l'envisage l'article 38c.

Il faut, en conséquence, au moins sérieusement, de notre côté, poser la question au gouvernement: Pourquoi cette restriction? Je ne suis pas convaincu qu'elle soit valable. La seule argumentation qu'on a entendue était au niveau de la négociation de la convention collective, la question

des catégories d'emplois, etc. De la même façon que, lorsqu'on fait un engagement ou on donne une promotion, on peut faire la preuve de critères objectifs, il est évident qu'un syndicat qui va recommander un taux double pour les techniciens par rapport aux syndiqués ordinaires, va pouvoir dire: Ecoutez, le taux double auquel M. Untel n'est pas admissible parce qu'il n'est pas technicien, ce n'est pas parce qu'on ne l'aime pas, ce n'est pas parce qu'il n'est pas un de nos membres, c'est tout simplement parce qu'entre les techniciens et les non-techniciens, il y a des différences objectives. C'est une classe accessible à tous ceux qui ont des préqualifications, qui ont subi un entraînement donné, qui ont un niveau d'éducation ou une expérience donnée, une ancienneté donnée dans l'entreprise. Si M. Untel se qualifie à cela et qu'il n'est pas syndiqué, il va quand même se qualifier à ces taux de salaire.

Donc, ce n'est pas plus une objection radicale que l'objection que pourraient faire des employeurs d'être forcés, par exemple, quand ils engagent des hôtesses de l'air, à employer des femmes. C'est quelque chose d'impossible, etc. C'est le même genre de raisonnement. Si on veut le justifier dans un cas, on va pouvoir justifier des décisions syndicales également dans l'autre cas, et peut-être plus facilement d'ailleurs. C'est une question de preuve, bien sûr. Cela peut engendrer des difficultés techniques. S'il y a des plaintes, il va falloir que les gens se défendent. Ou on reconnaît des droits ou on ne les reconnaît pas. On ne peut pas trancher cette poire en deux indéfiniment. Si des droits existent, il va falloir que les syndicats, qui sont l'objet de plaintes, se défendent devant le Tribunal du travail, devant le ministre, etc. Il n'y a rien de mal là-dedans. Ou on proclame ce droit ou on ne le proclame pas. Ce n'est pas faire des difficultés de preuve qui soient insurmontables. Ce n'est pas en faisant allusion à ces difficultés de preuve qu'on démontre que l'élargissement de ce recours n'est pas utile — il est très certainement utile — ni même qu'il n'est pas possible. Il peut engendrer des difficultés et des coûts, certes, mais il n'y a pas de droit sans obligation correspondante de la part des autres personnes, des tiers qui doivent respecter les droits. C'est clair que ceux qui doivent respecter les droits — je vois cela comme un asservissement, un coût, un fardeau, etc. — qui ne correspondent à aucune obligation d'autrui, ce ne sont pas des droits réels, ce sont des droits sur papier. Ce sont des voeux pieux. Il me semble, pour ces raisons, qu'il n'y a aucune espèce de justification aux restrictions que l'article 38c instaure.

Un dernier point qui est le plus technique, c'est la signification du mot enquêteur. Il y a dans le Code du travail, un usage curieux des mots, il me semble. On ne retrouve pas ça dans les autres législations. Cela laisse supposer qu'il y a toutes sortes d'enquêteurs identifiés avec des étiquettes sur le front, enquêteurs en vertu de l'article 38c, enquêteurs en vertu de tel autre article. Normalement, on ne nomme personne enquêteur. On nomme des personnes pour faire enquête. On ne nomme pas des enquêteurs. La distinction n'est pas simplement une distinction de mots, c'est qu'elle laisse soupçonner, quand on lit le Code du travail, une multiplicité de corps d'emplois, des gens qui font des enquêtes en vertu de tel ou tel article, avec des restrictions et des dispositions particulières.

Il me semblerait, moi, que, comme dans toutes les autres lois, on dit: Le ministre fait faire enquête, nomme un enquêteur. On voit tout de suite le bonhomme avec son képi, "enquêteur", en vertu de l'article 38c. Ce n'est pas vraiment ça. C'est quelqu'un du ministère qu'on envoie s'informer des faits. C'est une rédaction très vieillotte. C'est un autre exemple de la rédaction très antique, de style de rédaction antique de toutes les lois du travail où on nommait des officiers de la reine ou quelque chose dans ce genre. C'est un peu dans ce style, avec le képi approprié et la couleur d'uniforme qu'il faut. Je pense que ça devrait être éliminé pour un style un peu plus moderne.

M. Johnson: M. le Président...

M. Bellemare: M. le Président...

M. Johnson: Le député de Johnson...

M. Bellemare: Je m'excuse de ne pas avoir été ici. J'avais un devoir bien consciencieux à remplir en Chambre, et j'ai été obligé de remplir l'heure à laquelle mon parti avait droit.

M. Mackasey: J'espère que vous avez réglé la Chambre à mesure.

M. Bellemare: Non, mais j'ai fait un très bon discours, parce que la réaction...

M. Mackasey: ... le gouvernement...

M. Bellemare: ... que cela a produit contre moi a été unanime.

M. Chevrette: Si vous le dites, on le croit.

M. Bellemare: Oui, mais...

M. Mackasey: Par qui? Par le gouvernement?

M. Bellemare: Contre moi, les gens qui m'écoutaient...

Une Voix: Pas l'Opposition.

M. Bellemare: Non, non. Ils ont trouvé ça bien long.

Alors, M. le Président, sur l'amendement, écoutez bien! Il y a seulement une chose que je voudrais que vous me disiez: Est-ce qu'un salarié dont le renvoi ou lors d'une sanction disciplinaire va être obligé d'aller devant les tribunaux de droit commun ou devant le Tribunal lui-même?

M. Johnson: Dans le cas d'un renvoi ou d'une sanction disciplinaire? On parle de ça, là?

M. Bellemare: Dites-moi oui ou non, et je vais continuer.

M. Johnson: Non, ça ne va pas devant les tribunaux de droit commun. Il demande au ministre de nommer un enquêteur. Le ministre nomme un enquêteur. Ils essaient de concilier. Si ça ne concilie pas, ça s'en va devant le Tribunal du travail.

M. Bellemare: Oui, correct. Mais quand on parle strictement de renvoi ou de sanction disciplinaire, moi, M. le ministre, je ne partage pas votre opinion. Je pense qu'on est obligé d'aller devant les tribunaux de droit commun, parce que là, ce n'est plus une question de litige, ni de grief.

Je continue. L'amendement qu'a apporté le député de Saint-Laurent, comme le vôtre, d'ailleurs, pèche par des termes qui ne sont plus employés. Quand vous dites: Le ministre nomme un enquêteur qui tente de régler la plainte, c'est faux, ça. Parce que dans l'article 1 qu'on a adopté, on a dit que ça n'existait plus, des enquêteurs. On a dit, par les expressions "commissaire général du travail", "commissaire du travail" et "agent d'accréditation" respectivement, que le mot "enquêteur" disparaissait complètement. Alors, pour vous et pour le député de Saint-Laurent, en vertu de l'article 1 qu'on a adopté, le mot "enquêteur" doit disparaître.

M. Johnson: M. le Président, dans la loi du ministère, ce genre de procédure peut être prévu. Ce n'est pas en vertu du Code du travail. On a changé les appellations, etc., mais l'enquêteur, il existe en vertu de la loi du ministère, si je ne m'abuse. C'est ça?

M. Bellemare: Pourquoi, d'abord, à l'article 1, avoir fait changer complètement ces termes d'enquêteurs, de commissaires-enquêteurs...

M. Johnson: Pardon?

M. Bellemare: ... et tout ça, pour que ça s'appelle des "agents d'accréditation", respectivement? Là, on dit: Le ministre nomme un enquêteur. Si ce n'est pas selon...

M. Johnson: Cela devrait être: "Le ministre nomme une personne pour enquêter".

M. Bellemare: La concordance...

M. Johnson: On se comprend? C'est ça...

M. Bellemare: On se comprend, mais celui qui va avoir à le lire va dire: Voici, à l'article 1, on dit le contraire d'agent...

M. Johnson: C'est ça. On va dire: M. le ministre, nommez un enquêteur. Le ministre va aller au service des enquêtes spéciales du ministère, où il y a des personnages qui font des espèces de "fact finding", qui essaient d'aider les gens et de les dépanner. Ils n'ont pas de véritables pouvoirs...

M. Bellemare: Pourquoi ne commence-t-on pas à l'article 1, qu'on ne recommence pas tout ça?

M. Johnson: C'est parce que ça nous a pris 29 heures pour arriver à l'article 28.

M. Bellemare: Là, on n'a plus de concordance, c'est sûr et certain. Et quand on dit: Le ministre nomme un enquêteur qui tente de régler la plainte, c'est ça? Mais si vous me dites, M. le ministre, que le salarié qui a subi un renvoi, une sanction disciplinaire peut comprendre tous les autres facteurs d'incrimination sur les griefs, je dis que cela ne couvre pas assez... Laissez-moi donc finir. Vous aimez interrompre, mais je ne me choque pas.

M. Johnson: D'accord. Je pensais que vous me posiez une question. Je m'excuse.

M. Bellemare: Non. Je n'en pose pas, je récite mon mémoire.

M. Johnson: D'accord.

M. Bellemare: J'essaie de me comprendre moi-même parfois. Je ne veux pas vous embêter. Mais je dis que l'amendement qu'apporte le député de Saint-Laurent est plus clair parce qu'il couvre tous les sujets. Il couvre tous les sujets, pas seulement le renvoi, pas seulement la sanction disciplinaire, il couvre tout. Il dit: Si le salarié croit que l'association accréditée viole l'article 38b, l'article 38b dit exactement qu'il y a un recours, alors, il a le droit, s'il veut se prévaloir de cet article, de porter plainte par écrit au ministre, mais dans les six mois. L'enquêteur qui est nommé, puisqu'on tient au mot "enquêteur", je trouve que ce n'est pas tout à fait le bon terme, le ministre nomme l'enquêteur qui tente de régler à la satisfaction des parties, de l'intéressé et de l'association accréditée. Je trouve que la limitation que vous faites en spécifiant les mots "renvoi" et "sanction disciplinaire" est trop poussée. Si on prend l'amendement du député de Saint-Laurent, si le salarié croit que l'association accréditée viole l'article 38, on couvre tous les cas possibles, et il n'y a pas de discrimination. S'il veut se prévaloir de cet article... Je n'ai pas à dire au ministre quoi faire. Il a une équipe de peut-être quinze hommes derrière lui qui peuvent...

M. Johnson: Et une femme. M. Bellemare: Madame... Oui.

M. Johnson: Quatre hommes et une femme, pour être précis.

M. Bellemare: Dans votre ministère, je pense que...

M. Mackasey: Ils disent qu'une femme est plus intelligente que tous les hommes ensemble.

M. Bellemare: Si le ministre me dit qu'il n'y a pas de danger que le salarié qui se croirait attaqué, vilipendé dans ses droits, à part d'être renvoyé et à part de subir une sanction disciplinaire, est couvert dans tous les autres cas, je voudrais bien entendre la réflexion du ministre. Je ne suis jamais long, moi, M. le Président. J'espère que je ne serai pas accusé de longueur!

M. Mackasey: C'est un bon amendement.

M. Bellemare: C'est clair. Je vais l'écouter et ensuite je vous le dirai.

M. Mackasey: Ecoute cela, je ne veux pas faire perdre toute cette journée.

M. Johnson: Prenons d'abord 38b et 38c pour ce qu'ils disent et je vais laisser mon adjoint parlementaire, après que j'aurai dit quelques mots, élaborer une notion qui m'apparaît fondamentale, qui est tout ce qui se rattache au droit au travail; il pourra expliquer des choses assez intéressantes dans cette perspective. Je m'occuperai de parler d'autre chose. L'article 38b prévoit de façon non restrictive qu'un syndicat ne doit pas agir de façon discriminatoire envers ses membres ou des membres de l'unité qu'il représente, discriminatoire, arbitraire, etc. L'article 38c prévoit, tel qu'il est rédigé en ce moment, que si un salarié, qu'il soit membre de l'unité seulement ou qu'il soit membre du syndicat en plus d'être membre de l'unité, considère que son syndicat a eu une attitude de mauvaise foi, discriminatoire ou arbitraire à son égard, il peut à ce moment demander au ministre de nommer une personne qui vient voir ce qui se passe. On ne s'enfargera pas dans les mots pour le moment. C'est de nommer une personne qui vient voir ce qui se passe, qui a quinze jours pour essayer de régler le problème entre le salarié et son association, faute de quoi, s'il n'y a pas de règlement...

M. Bellemare: II fait rapport au ministre.

M. Johnson: Non, il ne fait pas rapport au ministre, le salarié à ce moment-là...

M. Bellemare: II s'en va au tribunal.

M. Johnson: II peut décider d'aller au tribunal. Que fait le tribunal? Il ne statue pas sur le fond du grief, parce qu'on parle vraiment d'un grief, en pratique, un renvoi ou une mesure disciplinaire, ce qui ferait normalement l'objet d'un grief en vertu de la convention collective. Le tribunal ne décide pas que la suppression de deux semaines de vacances du chèque de paie de M. Untel est injustifiée. Le tribunal dit: Le syndicat n'a pas défendu M. Untel au sujet de sa paie.

Or, je considère que le syndicat, en faisant cela, a agi ou n'a pas agi de façon discriminatoire. S'il dit: Le syndicat a agi de façon discriminatoire parce que M. Untel était originaire de Laponie et qu'on n'aime pas les Laponais, il peut considérer que c'était discriminatoire. Il décide à ce moment de référer le fond du problème, c'est-à-dire la question des 15 jours de suspension, à l'arbitre qui, lui, en vertu des autres amendements qu'on a apportés — et qu'on verra à 88 — doit rendre une décision dans...

M. Bellemare: Je comprends ça, mais je ne comprends pas pourquoi il limite ça à deux choses: au renvoi et à la peine disciplinaire. C'est seulement cela qui me trouble parce qu'il y a énormément d'autres choses qui peuvent arriver et on n'aura pas le droit...

M. Johnson: D'accord, si on ne le limite pas — je suis très sensible à ce que vous dites et je dois dire honnêtement que c'est probablement l'amendement qui m'a le plus ébranlé parmi les amendements présentés par le député de Saint-Laurent jusqu'à maintenant en plus de celui... mais pas encore suffisamment et je vais vous expliquer pourquoi. Je comprends que l'intention du député de Saint-Laurent, derrière ça, est de permettre à tout salarié qui se sent lésé, que ce soit par son syndicat, par le fait d'une action contre lui, par exemple, lui imposer une amende parce qu'il a fait telle chose, que ce soit par l'employeur, mais aussi par le fait du syndicat — puisque le syndicat ne l'aurait pas défendu — bref, toutes ces circonstances où un individu se sent lésé. C'est là l'intention du député de Saint-Laurent en présentant cet amendement.

Je pense qu'il est important qu'on réfléchisse à ce problème chez nous. Cependant, les conséquences pratiques de tout ça... d'abord qui cela devrait-il concerner: le commissaire-enquêteur? la Commission des droits de la personne? un tribunal? un fonctionnaire? L'ensemble de ces choses, pour moi, je vous le dis honnêtement, n'a pas fait l'objet d'une évaluation que je considérerais sérieuse.

Le deuxième problème qui se pose est l'évaluation très concrète de ce que ça peut signifier. Si on regarde la loi de l'Ontario à cet effet, le premier article de notre loi, 38b, est rédigé exactement comme la loi de l'Ontario, sauf que, après ça, dans la loi de l'Ontario, il y a quatre pages qui définissent la procédure en question. Cela devient très spécifique et d'application générale. Ce que nous avons, nous, c'est un article, mais qui le limite finalement, concrètement, à ce qui, normalement, devrait faire l'objet d'un grief et le syndicat ne défend pas la personne sur ce grief. Ce grief, est bien particulier, c'est celui qui relève de ce qu'on pourrait appeler: le droit au travail; ce qui est fondamentalement différent, au niveau des principes, de ce que représente, par exemple, l'absence de trois heures de temps supplémentaire sur le chèque de paie; même un problème de promotion, d'une certaine façon, mais, fondamentalement, le renvoi ou la sanction disciplinaire est rattachée au droit au travail. Ça, c'est fondamental.

Je pense que le Québec, pour la première fois, légifère dans ce domaine et que c'est un premier pas. En ce sens, je pense qu'il est valable. Ouvrir la porte toute grande à toute forme d'action, étant

donné que je me sens totalement, en l'espace de quelques heures, incapable d'en mesurer toutes les conséquences, de choisir — et je pense qu'il faudrait analyser, entre autres, la loi ontarienne, la loi de la Colombie-Britannique qui ont des dispositions à cet effet — d'en analyser concrètement l'application. Quel est, finalement, le mécanisme à la fois le plus expéditif et le plus juste?

D'autre part, il faut évaluer dans quelle mesure ce type d'article n'ouvre pas la porte à la remise en cause constante de ce qu'est le mandat d'un exécutif syndical dans certaines circonstances. On veut qu'il n'agisse pas de façon discriminatoire. Cependant, le syndicat qui a, en réserve, après une grève qui a été difficile, $2000 dans son fonds, mais qui est pris avec 200 griefs... Quand on sait que la procédure de grief, avec l'arbitrage, coûte des cents, à un moment donné, on est obligé de faire un choix sur les arbitrages.

De façon générale, comme l'expliquait — en tout cas dans les syndicats de l'enseignement — le député de Joliette-Montcalm, c'est en assemblée générale qu'on va décider d'aller se battre sur tel grief plutôt que tel autre. On va laisser, par exemple, le temps supplémentaire, disons les $23 qui manquent sur un chèque de paie, alors que l'arbitrage va coûter $50, $60, $70 et peut-être $200, et on va choisir le cas d'un renvoi, d'une suspension injuste ou qu'on considère comme... etc.

M. Bellemare: Cas de maternité.

M. Johnson: Le cas, par exemple, du non-respect d'un congé de maternité etc.

Est-ce que dans sa rédaction actuelle, tel qu'il le présente, l'amendement du député de Saint-Laurent n'ouvrirait pas toute grande la porte, dans tous ces cas finalement qui sont réglés de par l'existence d'un syndicat, d'une assemblée générale qui tranche sur les choix, etc. En ce sens, M. le Président, je terminerai, tout en voulant être sympathique et comprendre l'idée, l'objectif qu'il y a derrière l'amendement du député de Saint-Laurent, je conclurai en disant que je demanderai qu'il soit rejeté, en ajoutant ceci, cependant: Cela m'apparaît une des choses fondamentales qu'il faut regarder au Québec, quand on sait le progrès qu'ont connu des lois comme la Charte des droits et libertés de la personne, et quand on sait que, dans l'administration publique, par exemple avec le protecteur du citoyen, on donne également d'autres types de recours contre les gens qui subissent des conséquences fâcheuses de la mécanique bureaucratique. Je me dis que ce n'est pas parce qu'on est membre d'un syndicat qu'on n'est plus un citoyen. Et cela, c'est important. Sauf que je considère que ce n'est pas opportun, en ce moment, d'aller plus loin que ce qu'on veut viser par ceci, ce qu'on veut viser étant rattaché fondamentalement au droit au travail.

M. Forget: ... une brève intervention.

Le Président (M. Clair): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: J'apprécie d'abord la bonne perception qu'a eue le ministre de mes intentions en présentant cet amendement. Je crois qu'il a vu juste. J'apprécie également la difficulté des problèmes qu'il soulève quant à une vision d'ensemble, d'avoir développé une vision d'ensemble de tout le problème de la discrimination et des plaintes fondées ou non, en tout cas des plaintes que les gens devraient avoir le droit de faire et de faire entendre dans ce domaine. Il reste que le problème se pose ici et maintenant, et c'est un peu embêtant cela, mais aussi vis-à-vis de l'exercice par le syndicat d'un certain pouvoir de décider ce qui est important et ce qui ne l'est pas, peut prendre dangereusement l'aspect d'une défense très générale, très englobante du pouvoir de gérance du syndicat. Dans le fond, c'est en changeant ce qui doit être changé c'est à peu près le même genre de raisonnement; c'est le pouvoir de gérance. Evidemment, on sait que c'est une notion qui est élastique, extensible, compressible et, qu'en soi, ce n'est pas un argument final, puisque le pouvoir de gérance se définit dans un contexte donné et que ce qu'il faut définir, c'est le contexte.

En plus de cela, si le pouvoir de gérance relatif à des griefs, comme l'indique le ministre, est un geste d'une majorité quelconque. Le propre des majorités, c'est qu'elles sont juge et partie. Je pense que c'est le seul endroit où on légitime le conflit d'intérêt. On dit: Une majorité a toujours le droit de choisir pour elle-même ce qui l'avantage et ce qui fait son affaire, et s'il y a un grief parmi tous les griefs qui sont soumis, il y a des fonds limités, il y a des chances que le grief qui implique le plus grand nombre d'individus dans une majorité qui vote va être celui qui, comme par hasard, sera prioritaire. Supposons qu'on a, de façon prédominante, un syndicat masculin, et qu'on a quelques employées non syndiquées fiminines, et que le problème est de respecter un congé de maternité, on se rend un peu compte, à moins d'avoir affaire à des hommes qui sont singulièrement larges d'esprit là-dessus, altruistes, et tout ce qu'on veut, avec de beaux principes modernes, qu'on risque fort de pouvoir prédire d'avance comment le vote va se terminer. Je pense que c'est là, qu'on ne peut pas se défendre sur le pouvoir de gérance ni le pouvoir sacré ou légitimant d'une majorité. Il reste que le problème de discrimination apparaîtrait à tout le monde de façon flagrante et malgré que toutes les règles auraient été respectées. C'est cela, dans le fond, qu'un article comme celui-ci veut prévenir et veut donner à une minorité "minoritaire" et "minorisée" le pouvoir d'être entendue malgré tout. C'est clair qu'il y a des limites financières aux syndicats. Ils ne peuvent pas défendre tout le monde tout le temps et pour toutes les causes, mais ce sont là des règles de bon sens. Si les recours sont suffisamment simples et n'entraînent pas de frais excessifs eux-mêmes, je pense que ce serait important que ce soit le cas. Mon Dieu, ils pourront alléguer qu'ils ne peuvent pas tout faire et qu'il y a des priorités qui sont des priorités véritables et qui ne sont pas le fruit d'une discrimination. Je termine là-dessus.

Le Président (M. Clair): Dans l'ordre, le député de Joliette-Montcalm, le député de Mont-Royal et le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Ciaccia: Sur le même sujet, je voudrais seulement poser une question...

M. Mackasey: ... cela va aller avec votre réponse.

M. Ciaccia: Sur le même sujet, très brièvement. Quand le ministre a dit que vous craigniez, avec l'amendement suggéré par le député de Saint-Laurent, que ça crée une ingérence dans les décisions qui pourraient être prises par l'exécutif ou par l'association, est-ce que vous n'avez pas ouvert la porte à ce principe, par l'article 38b? Parce que c'est l'article 38b qui donne vraiment le droit à un salarié de se plaindre d'une décision de l'association. Une fois que vous avez ouvert cette porte, ce n'est pas une question à ce moment-ci de dire: le salarié n'aura pas le droit ou ne devrait pas avoir le droit où vous craignez qu'il peut aller à l'encontre d'une décision de l'exécutif.

Tout ce que l'amendement du député de Saint-Laurent fait, c'est en faciliter l'application. Parce qu'une fois que vous avez ouvert la porte, vous rendez plus difficile l'exercice de ce droit. Vous créez le droit à l'article 38b, mais vous dites: Non, je veux créer le droit, mais je ne veux pas que le salarié puisse vraiment utiliser ce droit, à moins qu'il aille aux tribunaux civils et là ça peut prendre du temps, etc.

M. Johnson: Je peux répondre? M. Ciaccia: Oui.

M. Johnson: Cela rejoint ce que je disais tout à l'heure, que l'article 38b, effectivement, est ce qui est le substrat, si on veut, de ce qui serait la base de la récrimination ou de la plainte de celui qui prétend être atteint de discrimination, d'attitude arbitraire ou de mauvaise foi. L'article 38c, cependant, limite la possibilité d'un recours particulièrement expéditif et exceptionnel, d'utiliser l'article 38b pour les seules fins de quelque chose qui a trait au droit au travail. C'est-à-dire le renvoi ou la sanction disciplinaire.

C'est vrai qu'il ne l'ouvre pas pour les autres, ce recours expéditif. Comme je dis, peut-être devrait-il l'ouvrir. Sauf que je pense que cela a besoin d'être pas mal plus mûrement réfléchi que ce qu'on peut faire en commission parlementaire actuellement. Quand on regarde la loi ontarienne à ce sujet, on se rend compte que ce sont des procédures assez longues, assez complexes, on définit des situations, parce qu'il faut tenir compte de contraintes que j'évoquais tout à l'heure. Ce n'est pas au niveau du principe de l'ingérence proprement dite. Encore une fois, je réitère que ce n'est pas parce qu'on est syndiqué, qu'on appartient à un syndicat qui nous représente, qu'on n'est plus un citoyen. De temps en temps, le syndicalisme, dans un contexte parfaitement explicable, a tendance, puisqu'il a été l'objet de tant de batailles, et qu'il a été obligé de gagner constamment, par des batailles, des droits, a tendance à considérer que ce qu'il a acquis, est une chose qui doit être inviolable.

L'évolution du syndicalisme dans notre société, quand on sait ce qui s'est passé jusqu'à il y a à peu près vingt ans, nous permet de comprendre que le syndicalisme a une tendance à conserver jalousement ses prérogatives et que toute modification, tout changement à ce niveau implique des questions qui relèvent des attitudes, des mentalités et de la reconnaissance de ce qu'est le pouvoir d'une assemblée générale de syndicat, par opposition à un geste qui est posé par l'exécutif syndical, etc.

Finalement, et c'est un argument que donne une des centrales, à l'encontre même du paragraphe tel que nous l'avons formulé, aussi restrictif soit-il, je pense qu'à ce niveau, c'est plus une demi-vérité qu'autre chose. C'est une atteinte au pouvoir suprême du syndicat. Je ne pense pas qu'un syndicat ait un pouvoir suprême. Il a un pouvoir conféré en vertu de la loi, l'assemblée générale est souveraine, mais aux fins des instances syndicales, comme l'est l'assemblée générale ou le congrès général du Parti libéral ou son conseil nationale ou régional. Mais c'est aux fins, finalement, de l'application de ses propres statuts. Ce n'est pas face au reste de la société qu'il est souverain.

Le syndicalisme, dans ses efforts de lutte devant ce qu'il qualifie d'intrusion du gouvernement ou de l'Etat dans ses affaires internes, a peut-être tendance, à un moment donné, à affirmer une souveraineté qui va au-delà de ce qu'elle est réellement.

C'est pour ces raisons, encore une fois, bien que je sois parfaitement sensible à l'argumentation du député de Saint-Laurent, que je considère qu'il y a déjà un pas considérable qui est fait dans la législation québécoise, avec cette notion de l'utilisation d'un recours expéditif dans le cas d'un renvoi ou d'une sanction disciplinaire et que, quant au reste, je pense que cela mérite fondamentalement une réflexion importante et profonde. Ce n'est pas parce que je veux tout renvoyer là, mais peut-être que la Commission de révision du droit du travail, qu'on va créer d'ici quelques mois, va avoir à y réfléchir. Et je suis sûr qu'elle aura à y réfléchir.

Le Président (M. Clair): Le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Mackasey: M. le ministre, je vais prendre 5 minutes. Peut-être que je répète un peu les arguments du député de Mont-Royal, mais je reviens encore à l'article 38b, sans discuter de l'article 38b. Je l'accepte tel que vous l'avez proposé. D'accord?

M. Johnson: D'accord.

M. Mackasey: Mais quand nous arrivons à l'article 38c, on parle de deux cas spécifiques: L'action d'un employeur qui renvoie un salarié ou

qui prend des sanctions disciplinaires contre un salarié. Le salarié prétend, avec raison ou non, que le syndicat n'a pas agi en conséquence. Je vois que le paragraphe c le complète; cela décrit les cas de renvois, de sanctions disciplinaires et ça dit exactement ce que le salarié doit faire. C'est simple, il doit écrire au ministre. Dans une période de six mois, le ministre peut nommer un enquêteur et c'est lui qui va décider si vraiment le salarié a raison ou non. D'accord?

M. Johnson: ... c'est le Tribunal qui décide.

M. Mackasey: Alors, le salarié va essayer de régler le conflit, un peu comme une conciliateur, si vous voulez. Sinon...

M. Johnson: ... au Tribunal.

M. Mackasey: ... cela va aller au Tribunal. D'accord.

M. Johnson: Qui lui, va l'envoyer à l'arbitrage, s'il y a lieu.

M. Mackasey: D'accord. Finalement, cela va être réglé, la procédure est claire, les cas sont précis. Au moins, le salarié a tous les moyens à sa disposition pour avoir justice. Peut-être qu'il ne sera pas content lorsqu'il aura la conclusion, mais quand même.

Quand on revient à l'article 38b, on parle aussi d'autre chose qui ne sert pas le salarié. Je parle encore de la mauvaise foi, de la manière arbitraire, de la discrimination. Cela revient à cela.

Mais ce n'est pas complet comme l'article 38c. Cela laisse en suspens l'action que le salarié devra entreprendre. Je pense que vous avez l'obligation de compléter l'article 38b. L'amendement fait justement cela.

M. Johnson: M. le Président, je pense que ce que le député fait, alors que c'était normalement au député de Joliette à prendre la parole, c'est qu'il reprend toute son argumentation depuis le début. Je pense que j'y ai répondu tout à l'heure.

M. Mackasey: Cela n'a pas été répondu à ma satisfaction.

M. Johnson: II me le pose sous forme de question, mais c'est une question un peu rhétorique.

M. Mackasey: Je pense que l'article 38b est défectueux dans le sens...

M. Johnson: Et il est dix heures.

M. Mackasey: Je sais que vous regardez l'heure, mais cela ne presse pas. Vous êtes jeune, vous êtes capable de rester debout jusqu'à dix heures le matin, et je serai debout à cinq heures, mais pour moi c'est difficile. Quant à moi, je suis prêt à travailler pour l'amour de ma province.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs! M. Chevrette: Mon pays...

M. Mackasey: Je suis un grand ami de Gilles Vigneault, parce qu'il a choisi sa chanson parmi les Irlandais de Gaspé.

Alors, l'article 38b est défectueux dans le sens que, si comme le député de Johnson l'a souligné, nous avons le courage ou l'esprit d'expérimentation pour dire que les problèmes qui se posent dans l'article 38b peuvent être traités exactement dans le même sens qu'à l'article 38c... Selon la suggestion de l'amendement, pourquoi non?

Prenez donc un enquêteur qui a peu d'intelligence, non pas qui est quelqu'un pour les patrons, quelqu'un d'expérience, compétent, avec une formation, qui aura assez d'expérience pour régler les problèmes de tous les jours, non pas seulement les questions de renvoi ou les sanctions disciplinaires, mais qui fera aussi des recommandations ou essaiera peut-être de régler un conflit entre le salarié et le syndicat, quand il pense qu'il y a vraiment de la discrimination pour le salarié.

Pourquoi ne demandez-vous pas au même enquêteur, qui est à la disposition du salarié, de prendre les mêmes responsabilités concernant les problèmes qui se posent à l'article 38b?

M. Chevrette: M. le Président, je voudrais un peu reprendre, au départ, une argumentation utilisée par le ministre, que je considère... Je vais comparer plutôt, au départ, la mise à pied pour activités syndicales. La mise à pied pour activités syndicales, dans le cadre du Code du travail, c'est le commissaire-enquêteur qui y pourvoit, précisément parce qu'on joue avec le droit au travail de l'individu.

Quand on a amendé l'article 38c et qu'on a placé "renvoi et sanction disciplinaire", c'est aussi parce que c'était relié directement au droit au travail. Quand vous embarquez plus largement et que vous dites que l'ensemble des discriminations possibles devrait être traité par le commissaire-enquêteur, vous pourriez apporter l'argument selon lequel, en Ontario, la loi du "duty of fair representation" dit précisément que c'est un... Je ne sais pas quel terme on emploie, si c'est enquêteur; je ne me souviens plus du terme. Elle traite de toutes les discriminations.

Il faut faire une nette distinction... Je vais utiliser un terme que plusieurs n'aimeront peut-être pas. Mais je pense que le contexte idéologique du mouvement syndical ontarien est très différent du contexte idéologique du syndicalisme québécois.

Je voudrais vous expliquer une situation qui pourrait se produire. On est en pleine négociation. Il y a un groupe minoritaire qui voudrait défendre que la priorité soit mise sur l'échelle salariale, dans un cadre de syndicalisme d'affaires dont on parle dans les syndicats, alors que d'autres individus et ce, majoritairement, disent: Nous, ce ne sont pas les questions salariales, c'est une question d'heures de travail.

M. Bellemare: D'heures de travail.

M. Chevrette: Le comité de négociation prend le mandat majoritaire et va défendre les heures de travail. Il en résulte qu'il y a une faible augmentation de traitement, mais une bonne amélioration des conditions de travail. Ces gens se retournent de bord et disent: Nous sommes minoritaires, nous sommes discriminés.

A ce moment-là, vous placez, chaque fois, un enquêteur du ministère du Travail dans l'obligation d'aller vérifier sur place, de faire un arbitrage pour dire: Vous n'êtes pas discriminés ou vous êtes discriminés. Si vous forcez ce groupe minoritaire à aller devant les tribunaux de droit commun, il va réfléchir avant d'y aller parce que ça lui coûtera quelques sous, quelques dollars, alors que la structure de l'Etat ne lui coûte rien. C'est très différent.

M. Bellemare: Est-ce qu'on me permet? Seulement une chose. N'oublions jamais qu'on est dans le précompte.

M. Chevrette: Oui, je n'ai jamais oublié qu'on est dans le précompte.

M. Bellemare: C'est-à-dire, parce qu'on est dans le précompte, qu'il faut assurer aux salariés qui paient le plus de services possibles.

M. Chevrette: Exactement. C'est là que je veux en venir, M. le député de Johnson. C'est exactement ce que je veux démontrer, en relation avec le pouvoir d'une structure syndicale.

Jouer avec le droit au travail, je n'accepte pas cela, c'est pour cela que j'ai adhéré très facilement à l'article 38c. On ne peut pas jouer avec le droit au travail d'un individu, je pense qu'on s'entend tous sur cela autour de la table, mais, quand on arrive dans des choix de priorités, c'est une structure démocratique qui prend la décision. Le ministre a donné l'exemple tantôt d'un groupe de techniciens qui pouvaient se sentir pénalisés parce qu'ils sont minoritaires, mais il reste que, dans n'importe quelle structure, c'est une majorité qui décide. Que tu paies ou que tu ne paies pas ta cotisation, le groupe qui paie se réunit, à un moment donné, et il y a une décision qui se prend. S'il y avait une décision formelle selon laquelle ce sont les non-membres en règle qui sont discriminés, c'est différent, mais, quand une association syndicale décide de défendre prioritairement les griefs de renvoi au détriment des griefs concernant quelques cents supplémentaires manquant aux chèques, c'est une priorité qui a été prise en assemblée générale.

Je pense que qui trop embrasse mal étreint. A partir de là, on est peut-être mieux d'essayer de mettre à l'épreuve le droit au travail, ce qui rn'ap-paraît indispensable, quitte à le raffiner avec les ans, mais à mieux encadrer, et je reviens à ce que je vous ai dit, tout comme le ministre, je suis très ébranlé. J'ai même hésité tantôt. A un moment donné, je me demandais si je n'allais pas l'accepter ou suggérer l'acceptation. Mais, dans un contexte où rien n'est défini, je pense, ce serait un peu suicidaire et on risquerait de se retrouver avec une avalanche de plaintes de discrimination parce que rien de précis, rien de défini...

M. Mackasey: Je m'excuse, pour un moment. Vous avez complètement raison. Vous parlez aussi de l'absence d'une définition de discrimination; il n'y en a pas dans notre code.

M. Chevrette: Non, mais je veux...

M. Mackasey: C'est le défaut du code. Nous sommes en train de...

M. Chevrette: Ce n'est pas seulement l'absence, c'est le type de discrimination.

M. Mackasey: Nous sommes en train d'améliorer le code.

M. Chevrette: Prenons un exemple, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Si on parlait de discrimination individuelle, par exemple, de race, de religion. Même si vous définissiez le mot "discrimination", on peut avoir une définition commune du mot "discrimination", mais ce que je veux dire, c'est qu'un groupe peut se sentir victime de discrimination à cause d'une décision majoritaire. C'est une différence fondamentale qui existe par rapport à la discrimination individuelle en raison de choses qui se produisent.

M. Bellemare: M. le député, est-ce que vous ne trouvez pas que la formulation de l'amendement va plus loin en couvrant tout ce que vous dites?

M. Chevrette: Non.

M. Bellemare: Quand le député de Saint-Laurent dit "si le salarié croit que l'association accréditée viole l'article 38", au lieu de dire simplement dans tel ou tel cas qu'il viole l'article 38, là, par exemple, il peut s'en prévaloir et porter sa plainte dans les six mois. Le ministre envoie l'enquêteur et, après cela, il y a une décision qui sort, puis il présente sa requête, si c'est refusé.

M. Chevrette: Le député de Saint-Laurent...

M. Bellemare: Cela couvre plus que les deux choses, le renvoi et la discrimination.

M. Mackasey: Est-ce que l'enquêteur va être obligé d'y aller pour sa...

M. Chevrette: Non, je pense qu'on se comprend mal.

M. Bellemare: On se comprend bien.

M. Chevrette: Non, on se comprend mal. Je vais l'expliquer, parce que le député de Saint-Laurent avait compris dans le premier cas, et il a compris aussi dans le deuxième, mais, dans le premier amendement qu'il a présenté, le député de Saint-Laurent était limitatif par rapport à

l'amendement qu'il vient de déposer. Dans son premier amendement, à l'article 38b, le député de Mont-Royal avait circonscrit la discrimination à trois thèmes, à la négociation...

M. Ciaccia: Le problème de la généralité, la portée générale de l'article...

M. Chevrette: Au lieu de dire "notamment". Ce n'est pas comme cela que je l'avais interprété, excusez-moi.

M. Mackasey: La raison pour laquelle nous sommes...

M. Chevrette: Ce que vous n'avez pas clairement démontré à mes yeux, et je suis vraiment mal pris et je ne peux pas y adhérer à cause de cela...

M. Bellemare: Non... Vous, mal pris?

M. Chevrette: Oui, je suis mal pris, parce que je comprends le sens...

M. Mackasey:... vous n'avez rien fait.

Le Président (M. Clair): A l'ordre, messieurs, s'il vous plaît! Le député de Joliette-Montcalm a la parole.

M. Ciaccia: II est mal pris.

M. Bellemare: J'avais raison, encore une fois.

M. Chevrette: Ce que je veux faire comprendre, c'est que si on l'interprète dans un sens aussi large que celui proposé dans l'amendement, on ne rend pas service. On prête flanc à des abus, parce qu'on ne fait même plus la distinction entre une discrimination qui serait relative à un individu à cause d'une situation bien précise, et une discrimination je dirais artificielle, uniquement à cause d'un petit groupe minoritaire qui se sent victime de discrimination, mais suite à la décision d'une majorité dans un contexte démocratique.

M. Bellemare: Tant mieux, si on peut faire valoir nos droits.

M. Chevrette: On ne peut pas accepter, sinon on nie toute démocratie à l'intérieur d'une structure. Là-dessus, je ne marche pas.

M. Ciaccia: Vous encouragez la discrimination, d'après votre...

M. Chevrette: Est-ce que c'est discriminatoire qu'un gouvernement soit élu majoritairement?

M. Ciaccia: Si ce n'est pas discriminatoire...

M. Chevrette: Ce n'est pas plus discriminatoire que quand un groupe de syndiqués décide de prendre telle orientation plutôt que telle autre.

M. Ciaccia: Ce n'est pas discriminatoire.

M. Mackasey: II y a de la discrimination si ce gouvernement majoritaire impose des lois discriminatoires. Je pose seulement une question ici. A l'article 38b, un salarié, pas une minorité des salariés, un homme seul ou une femme seule, est obligé d'aller en Cour supérieure pour savoir si vraiment il y a eu de la discrimination.

Sur quoi le juge basera-t-il sa décision? Sur les définitions dans le Code du travail? Sur quoi? Sur quelle jurisprudence? Le problème que nous avons ce soir, que vous avez, c'est qu'on essaie d'améliorer le Code du travail par de petits amendements, ici et là, sans toucher les problèmes fondamentaux. Il y a un manque de définition. Vous le savez autant que moi. Vous avez parlé de la loi on-tarienne qui, vous le savez, a probablement six pages de définitions... En l'absence de définition ici, on dit au pauvre salarié: Allez devant la Cour supérieure. Vous n'aurez pas de définition de la discrimination dans notre code. Mais allez devant un juge de la Cour supérieure. La première question qu'il va poser, lui: Où vais-je trouver la définition de discrimination dans le domaine des relations industrielles? Il va être obligé de regarder dans votre Code du travail, il va être obligé de regarder dans la jurisprudence, il va être obligé de téléphoner au ministère, il va être obligé d'en discuter avec un enquêteur. Cela, c'est vrai. Vous savez ça autant que moi.

Comment voulez-vous rendre justice à un salarié dans ce cas? Ce n'est pas possible. Vous feriez mieux de "scraper" l'article 38 complètement.

M. Chevrette: Non, je vais dire que c'est un choix politique, et le choix politique, il s'est arrêté au droit au travail. Comme l'a dit le ministre tantôt, dans le cadre d'une réforme plus globale, on définira tout ça, on tâchera de délimiter des principes plus précis...

M. Mackasey: Pourquoi...

M. Chevrette: ... que de s'embarquer... Je m'excuse... immédiatement dans quelque chose qui peut nous conduire dans un cul-de-sac duquel on ne peut pas sortir à court terme.

M. Pagé: Simplement une question au député de Joliette-Montcalm, s'il me le permet.

Le Président (M. Clair): M. le député de Portneuf, vous avez la parole non seulement pour une question, mais vous avez la parole en général sur l'amendement, puisque vous aviez demandé le droit de parole il y a longtemps déjà.

M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Oui, j'ai 20 minutes, M. le Président. Je me limiterai à poser une question, parce que je veux être bien convaincu qu'on se comprend bien, qu'on parle de la même chose.

M. Bellemare: Si vous parliez devant le micro, moi, le vieux, je pourrais entendre mieux.

M. Pagé: Je m'excuse, M. le député de...

M. Bellemare: Je commence à avoir l'oreille dure.

M. Pagé: C'est une question, M. le Président, au député de Joliette-Montcalm.

M. Mackasey: ...

M. Pagé: Je me limiterai à une question au départ.

A l'article 38c, dans l'amendement qu'on a déposé, quand il est dit: Le salarié croit que l'association accréditée viole l'article 38b; il doit, s'il veut se prévaloir de cet article.

Est-ce que vous l'interprétez comme mettant de côté le recours prévu à l'article 38b devant les tribunaux de droit commun?

M. Chevrette: Absolument pas! Mais je peux vous dire une chose, c'est qu'entre les deux, il est bien évident que le salarié portera toujours plainte au ministre du Travail, parce qu'il y va de ses sous.

M. Pagé: Oui, mais, en affirmant ça, M. le Président, le député vient confirmer qu'il est difficile pour le salarié de se prévaloir des mécanismes prévus à l'article 38b.

M. Chevrette: C'est-à-dire que ça évitera, à mon sens, les plaintes farfelues ou des rancunes passagères qui seraient logées, à ce moment-là, à un coût nil, par rapport à un déboursé. J'y crois à cela, fondamentalement, dans l'économie de nos lois, qu'on ait quelque chose, à un moment donné, qui fasse penser à un type qu'il ne loge pas des plaintes pour le plaisir de les loger.

M. Pagé: Oui, mais le député, M. le Président...

M. Mackasey: ... ce n'est pas seulement pour les riches.

M. Pagé: ... ne croit-il pas que si la plainte, pour utiliser son expression, n'est pas recevable ou est farfelue, ou peu importe, immédiatement l'enquêteur qui sera nommé par le ministre, va statuer? Cela va quand même coûter moins qu'il n'en coûtera au salarié pour aller devant les tribunaux.

M. le Président, c'étaient quelques questions que je voulais poser pour ajouter ma voix à ceux qui m'ont précédé, mon collègue de Saint-Laurent, de Notre-Dame-de-Grâce et de Mont-Royal, et il est encore temps de dire oui, vous savez. M. le ministre nous disait tantôt qu'il était ébranlé et, d'ailleurs...

Le Président (M. Clair): On va le savoir immédiatement, M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Si le ministre juge opportun qu'on sursoie à l'étude de l'article, on peut le faire.

M. Johnson: Seulement pour vous rassurer, est-ce que l'amendement du député de Saint-Laurent est adopté, M. le Président?

Le Président (M. Clair): A l'ordre, s'il vous plaît! La motion d'amendement du député de Saint-Laurent, à l'article 28, selon laquelle le paragraphe 38c de l'article 28 soit modifié en retranchant, dans la première ligne, les mots "qui a subi un renvoi ou une sanction disciplinaire" et en retranchant, dans la deuxième ligne, les mots "à cette occasion", est-elle adoptée?

M. Johnson: Rejeté. M. Pagé: Adopté.

M. Forget: M. le Président, une minute! Est-ce qu'on me permettrait une très brève intervention, de manière à voir...

Le Président (M. Clair): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: ... s'il n'est pas possible de trouver une formulation. Je n'en fais pas une motion formelle. Etant donné particulièrement les exemples ou les contre-exemples que nous ont donnés le député de Joliette-Montcalm et le ministre, exemples qui étaient basés sur des problèmes de priorité au moment des négociations, et sous réserve que l'article 38b demeurerait intact, donc conserverait, si c'est utile, des possibilités de recours aux tribunaux de droit commun, si on disait quelque chose dans ce genre, ce qui pourrait devenir un alinéa additionnel à 38c, "toutefois, la priorité accordée à l'amélioration de certaines conditions de travail lors de la négociation d'une convention collective, n'est pas un motif de discrimination, au sens du présent article." Il me semble que cela éliminerait le problème qui a été soulevé à plusieurs reprises par le député de Joliette-Montcalm, et que, — si c'est l'attitude du ministre, je n'en fais pas d'autres cas — il me semble que c'était la réponse aux objections qui ont été soulevées.

Le Président (M. Clair): La motion d'amendement du député de Saint-Laurent dont je viens de donner lecture il y a quelques minutes, est-elle adoptée?

M. Bellemare: Vote. Une minute. Je veux un vote enregistré.

Le Président (M. Clair): Le vote enregistré est demandé.

M. Bellemare: Oui, certainement je le demande, car je vote pour.

Le Président (M. Clair): Je relis la motion...

M. Mackasey: On peut noter ceux qui sont contre les syndicats...

M. Pagé: Le vote est appelé.

Le Président (M. Clair): Messieurs, si vous voulez être informés de ce sur quoi vous allez voter, la motion d'amendement à l'article 28 du dé-

puté de Saint-Laurent se lit comme suit: "Que le paragraphe 38c de l'article 28 soit modifié en retranchant dans la première ligne les mots "qui a subi un renvoi, une sanction disciplinaire" et aussi en retranchant dans la deuxième ligne les mots "à cette occasion". M. Bellemare (Johnson).

M. Bellemare: Pour l'amendement.

Le Président (M. Clair): M. Bisaillon (Sainte-Marie).

M. Bisaillon: Contre.

Le Président (M. Clair): Contre. M. Brochu (Richmond).

Une Voix: II n'y est pas.

Le Président (M. Clair): M. Ciaccia (Mont-Royal).

M. Ciaccia: Pour.

Le Président (M. Clair): M. Chevrette (Joliette-Montcalm).

M. Chevrette: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Godin (Mercier).

M. Godin: Contre.

Le Président (M. Clair): M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes).

Une Voix: II n'y est pas.

Le Président (M. Clair): M. Forget (Saint-Laurent).

M. Forget: Pour.

Le Président (M. Clair): M. Mercier (Berthier)... M. Johnson (Anjou).

M. Johnson: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Jolivet (Laviolette).

M. Jolivet: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Lacoste (Sainte-Anne). M. Laplante (Bourassa).

M. Laplante: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Lavigne (Beauharnois).

M. Lavigne: Contre.

Le Président (M. Clair): M. Mackasey (Notre-Dame-de-Grâce).

M. Mackasey: Pour. Je suis pour le syndicalisme, pas contre. Pour.

Le Président (M. Clair): M. Pagé (Portneuf). M. Pagé: Pour.

Le Président (M. Clair): M. Roy (Beauce-Sud). Pour la motion, cinq, contre; sept. La motion est rejetée.

M. Bellemare: C'est un avertissement.

Le Président (M. Clair): Messieurs, pouvons-nous considérer que l'étude de l'article 38c est terminée?

M. Forget: Oui.

M. Bellemare: ... était un homme extraordinaire.

Le Président (M. Clair): Le paragraphe 38d de l'article 28.

M. Forget: D'accord. Nous tombons maintenant dans la mécanique de cette procédure, puisque nous avons là la description de l'étape du règlement de faire intervenir l'enquêteur, et, dans le cas d'échec, dans les quinze jours il y a possibilité, pour le salarié, d'un nouveau recours, et cette fois-ci, devant le tribunal. Comme l'article en question ne fait aucune allusion au problème des frais, il nous paraît approprié d'inclure une mention à cet effet, de manière que, lorsque le salarié se trouve en face d'une fin de non-recevoir à la suite de l'intervention de l'enquêteur, il y ait, à ce moment-là, une présomption qui devrait être utilisée et jugée favorable au plaignant, de manière à minimiser, dans toute la mesure du possible, le coût additionnel qu'on lui impose pour faire valoir ses droits.

C'est la raison pour laquelle je présente cette motion d'amendement, à l'article 28, qui se lit comme suit: "Que le paragraphe 38d, de l'article 28, soit modifié en ajoutant, dans la sixième ligne, après le mot "arbitrage", les mots "les frais de cette requête doivent être assumés par l'association." Le paragraphe amendé se lirait comme suit: "38d Si aucun règlement n'intervient dans les 15 jours de la nomination de l'enquêteur ou si l'association ne donne pas suite à l'entente, le salarié doit, s'il veut se prévaloir de l'article 38b, faire une requête au tribunal, dans les 15 jours suivants et demander, à ce dernier, d'ordonner que sa réclamation soit déférée à l'arbitrage. Les frais de cette requête doivent être assumés par l'association."

M. le Président, il semble qu'on ait là une règle qui est retenue, par le ministre, à l'alinéa suivant, mais seulement lorsqu'on arrive à l'étape de l'arbitrage. Cependant, comme le ministre du Travail est déjà impliqué dans la procédure, par l'intervention de l'enquêteur, on peut présumer que, dans sa sagesse, l'enquêteur, qui n'est pas seulement là pour faire un constat des faits, mais qui est, un peu comme l'a décrit tout à l'heure mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce, qui intervient un peu comme un médiateur ou un conciliateur entre l'individu qui se plaint et son association, va

utiliser ses pouvoirs de persuasion et le rôle dont il dispose de par le fait qu'il est un personnage neutre pour décourager un plaignant qui ferait une plainte futile et évidemment sans fondement.

D'ailleurs, puisque l'intervention du tribunal se fondera éventuellement sur le rapport de l'enquêteur, le plaignant qui insisterait pour aller au-delà, malgré tout, serait, dans le fond, dans une situation extrêmement délicate.

Donc, on peut prévoir que, lorsqu'il n'y a pas entente ou lorsque l'association, après avoir donné son accord, refuse d'y donner suite dans les faits, il y a une bonne présomption déjà et qu'on n'est pas en face d'une plainte futile; et s'il doit y avoir une requête au tribunal, ce sera une requête qui commence déjà bien pour le plaignant, dans un certain sens.

Mais, cependant, lorsqu'on se présente devant un tribunal, et même si on se présente devant le tribunal du travail, surtout dans le cas où l'association n'a pas donné suite, volontairement, au rapport de l'enquêteur, aux conclusions de l'enquêteur, à l'entente dans laquelle il est intervenu ou a refusé d'y faire partie, on peut présumer que l'association va intervenir en s'engageant un procureur ou en demandant à son procureur d'intervenir pour elle, ou un agent d'affaires ou un conseiller technique qui a une longue expérience de ce genre de travail, qui est familier avec le tribunal, ses procédures, qui n'est pas intimidé par tout l'appareil quasi judiciaire...

M. Johnson: M. le Président, si vous me le permettez. Sur la recevabilité de la motion du député de Saint-Laurent.

M. Forget: Oui, monsieur, je vous écoute.

M. Johnson: Je pense que ce que recherche le député de Saint-Laurent est compris dans le texte de 38e, en ce sens que le député de Saint-Laurent est en train de nous dire, par sa motion d'amendement, qu'à partir du moment où l'enquêteur a fait une suggestion de règlement, et que l'association de salariés ne respecte pas cette suggestion de règlement, on dit que le salarié a droit à une requête devant le Tribunal du travail.

Or, si on va un peu plus loin, que fait le Tribunal du travail? Si le tribunal estime que l'association a violé 38b, il peut autoriser le salarié à soumettre sa réclamation à un arbitre nommé par le ministre pour décision sur la convention collective comme s'il s'agissait d'un grief. Les articles 88 à 89j s'appliquent mutatis mutandis. L'association paie les frais encourus par le salarié; ce sont donc les frais encourus par le salarié dès le début et ça nous permet de faire en sorte qu'on ne pénalisera pas un syndicat devant une requête qui pourrait être futile, venant d'un individu. On attend qu'un tribunal ait jugé que, effectivement, 39b s'appliquait, qu'il y a eu violation de 39b et, à ce moment, le tribunal, dans son ordonnance, non seulement défère à l'arbitrage pour qu'un arbitre se prononce, mais, également, il dit que l'association paie les frais encourus par le salarié, donc, les frais de la requête et les frais de l'arbitrage.

En ce sens, M. le Président, je pense que l'amendement, je ne sais pas en vertu de quel article, ne peut pas avoir pour effet de répéter quelque chose qui est dit d'ailleurs, d'une certaine façon.

M. Bellemare: J'avais un droit de parole, vous me l'aviez donné, je respecte le ministre qui vient de nous aider à faciliter notre réponse. Nous disions ceci...

Le Président (M. Clair): M. le député de Johnson, seulement pour préciser, parce que j'ai été distrait une seconde, sur la recevabilité de la motion, ni plus ni moins, ce que le ministre nous dit, ce que le député de Saint-Laurent propose, c'est au prochain paragraphe.

M. Bellemare: C'est sur ce que vient de dire le ministre.

Le Président (M. Clair): Oui.

M. Bellemare: Mais j'aurais le droit de donner mon opinion sur la recevabilité, si vous me l'accordez.

Le Président (M. Clair): Sur la recevabilité, oui, je vous l'accorde.

M. Bellemare: Je suis bien "écoutant", vous savez. C'est parce que, sur la recevabilité, le ministre m'a enlevé de la bouche, en vertu de 38e, c'est bien spécifié que les frais encourus ne seront pas payés par les salariés. C'est l'association qui paie les frais. Sur la recevabilité, M. le Président, il peut y avoir des requêtes folichonnes, qui sont simplement pour faire de la distraction, et il peut y avoir une pression inutile aussi qui est faite pour essayer de faire payer quelqu'un et, troisièmement, il peut y avoir un désaccord qui serait voulu sciemment et d'après l'amendement qui a fait les frais de cette requête, ce serait assumé par l'association dans ces trois cas-là. Quant à 38e, on le trouve depuis le commencement et cela résume. L'amendement, pour moi, ne serait pas nécessaire, s'il n'y avait pas 38e. J'avais lu 38e et je me disais que c'était bien, mais quand j'ai vu arriver l'amendement, c'était pareil, jusqu'aux frais de cette requête qui doivent être assumés par cette association. On retrouve cela, pas seulement à partir du moment où le tribunal va se prononcer, mais depuis le commencement de l'enquête. Alors, M. le Président, je suis contre.

Le Président (M. Clair): M. le député de Saint-Laurent, avez-vous quelque chose à dire sur la recevabilité de la motion ou si vous la retirez?

M. Forget: Oui et non, M. le Président. Il y a deux choses. Evidemment, le ministre a raison pour une partie de son affirmation, de même que le député de Johnson. C'est vrai que si le tribunal estime que l'association a violé l'article 38b, l'association va être condamnée à payer les frais. Même si ce n'était pas dit, cela irait de soi, parce

qu'il est normal qu'un tribunal adjuge les frais au perdant dans n'importe quelle cause. Alors, cela va de soi. Il reste que l'amendement que je propose à 38d se situe à une étape antérieure. Il y a des frais de présentation d'une requête, quand la requête est présentée, seulement si le tribunal juge que la requête est fondée. Il y a donc là...

M. Johnson: S'il juge qu'elle n'est pas fondée, la requête n'était pas fondée...

M. Forget: Attention! Sur la recevabilité et non pas sur le fond, il y a malgré tout une différence que le ministre constate en même temps qu'il me répond ou m'interrompt. S'il y a paiement des frais par l'association, même avant d'avoir l'assurance qu'on a gagné la cause, on n'est pas en face du même amendement et de la même disposition. On pourrait argumenter au mérite à savoir si, dans tous les cas, l'association devrait payer les frais de la requête, mais c'est très différent de dire qu'elle doit le payer dans tous les cas, ce que l'on ferait à 38d, ou de dire qu'on la paiera seulement dans certains cas, ce que l'on fait à 38e. Donc, à mon avis, sur le plan de la recevabilité, il s'agit de deux propositions différentes, et si l'on paie dans tous les cas, à plus forte raison, on va payer quand on gagne. Mais ce ne sont pas deux choses pareilles.

Le Président (M. Clair): Me permettez-vous une question, M. le député de Saint-Laurent? Dans l'amendement que vous proposez, les frais de cette requête doivent être assumés par l'association. Ce n'est pas sur décision de qui que ce soit, mais c'est dans tous les cas.

M. Johnson: Ce n'est jamais sur décision. Le Président (M. Clair): Tandis que... M. Forget: C'est cela, c'est ce que je dis.

M. Johnson: Car le Tribunal du travail n'a aucun pouvoir d'adjudication de frais parce que, finalement, ce qu'il entend de façon générale, ce sont des appels sur une décision du commissaire-enquêteur, etc.

M. Forget: Non, ce n'est pas ce que le président a dit.

Le Président (M. Clair): Ce n'est pas ce que je veux dire. Ce que je veux dire, c'est que... Jusqu'à maintenant, la façon dont je comprends l'amendement du député de Saint-Laurent, c'est que dès qu'il y a présentation d'une requête, les frais de cette requête sont automatiquement assumés par l'association, tandis que l'article 38e, ce qu'il semble déterminer selon moi, c'est plus de dire que si le tribunal estime que l'association a violé l'article 38b, donc après avoir fait son enquête, l'association paie les frais encourus par le salarié. Est-ce qu'il n'y a pas...

M. Johnson: Sur la recevabilité... Je pense qu'on se comprend fort bien finalement. A ceci près que j'argumenterai à ce moment-là sur la recevabilité que l'amendement du député de Saint-Laurent, à moins qu'il ne soit de nature purement dilatoire, n'est pas recevable pour la raison suivante: C'est que ça va à l'encontre des principes généraux qui font qu'on ne peut pas présumer que quelqu'un est coupable, a priori, et que dans son amendement, il présume que l'association a été négligente, alors que justement la raison pour laquelle on va devant le tribunal, c'est pour permettre au tribunal de décider, si oui ou non, l'association est contrevenue à l'article 38b. L'effet de cela est qu'on pourrait avoir des requêtes parfaitement futiles après un rapport d'enquêteurs.

Il n'y a pas d'entente entre les parties, l'enquêteur vient et ne parvient pas à concilier...

M. Forget: M. le ministre, vous argumentez sur le fond, vous argumentez sur le fond.

M. Johnson: ... il y a une requête futile et l'association paie.

Le Président (M. Clair): En supposant que je prenne ce que vous dites au pied de la lettre, je ne vois pas en quoi ça peut restreindre la recevabilité de la motion.

M. Ciaccia: Vous allez au fond.

M. Johnson: C'est parce que, M. le Président, ce serait considérer que... Oui, mais c'est parce que cet amendement, M. le Président, je ne veux pas faire de procès d'intention au député de Saint-Laurent, mais s'il n'est pas dilatoire, c'est pour le moins ce que le code Morin appelle les motions futiles, ou je ne sais plus, il y a quelques autres mots qu'on assigne à cela.

M. Forget: Non, mais vous argumentez sur le fond, parce qu'encore là, on va revenir tantôt sur l'aspect des demandes futiles.

M. Johnson: D'accord.

M. Forget: Je comprends que c'est l'objection que vous allez soulever.

M. Johnson: Oui, et vous pourrez avoir quatre fois vingt minutes pour défendre ce type d'amendement.

M. Forget: On n'en abusera pas, M. le Président, mais c'est un point de procédure assez important malgré tout, que ce point de vue de l'accessibilité à la justice.

Le Président (M. Clair): Messieurs, tenant compte, d'une part, que l'article 38e n'a pas encore été adopté et d'autre part, que, même s'il n'a pas encore été adopté, il me semble, au meilleur de mon jugement, que la motion d'amendement du député de Saint-Laurent vise un but légèrement différent de celui visé par l'article 38e. Je considère la motion recevable.

M. Forget: Je vous remercie, M. le Président. Alors voilà. On nous fait, bien sûr, l'objection — et je pense que c'est peut-être l'essentiel sur quoi devraient porter mes remarques — des demandes ou des plaintes, futiles.

Retenons quand même une chose. C'est que, dans le domaine général de l'accès à la justice, il y a une loi, adoptée par l'Assemblée nationale, qui s'appelle l'aide juridique. En adoptant la Loi de l'aide juridique, personne n'a présumé que ceux qui s'en prévaudraient étaient nécessairement dans leur droit, au contraire, et donc que ceux contre qui il logeait des plaintes étaient nécessairement dans leur tort. Si on avait pu faire cette présomption, il n'y aurait pas eu besoin d'aide juridique, parce que toujours ceux qui gagnent vont pouvoir récupérer leurs frais de ceux qui perdent.

C'est donc qu'on a présumé dans l'aide juridique qu'il y avait des gens qui n'avaient pas les moyens d'aller devant les tribunaux, mais que ces mêmes gens, dans un certain nombre de cas, perdraient leur cause, et que c'était pour couvrir, pour assurer les gens qui perdraient leur cause, tout en n'ayant pas les moyens de les intenter, qu'on a prévu l'aide juridique.

Car dans le cas des gens qui gagneraient leur cause, le problème pourrait être résolu par des règles peut-être légèrement modifiées quant à la taxation des frais devant les tribunaux de justice. Donc, le problème d'accessibilité aux tribunaux, ou d'accessibilité à un processus de redressement des torts ou des griefs, est un problème complètement différent des problèmes de présomption, de faute, de culpabilité ou de bon droit.

Ceci étant dit, il reste qu'il y a une objection qui peut être sérieuse puisque là, contrairement à l'aide juridique, ce sont les finances d'une association qui sont mises à contribution plutôt que le trésor public. Je peux comprendre que cela pourrait donner lieu à une procédure de harassement, à moins que déjà la procédure qui est envisagée par l'article 38d ne comporte pas des barrières suffisamment sérieuses pour empêcher des actions purement futiles.

Comment s'engage effectivement la procédure aux articles 38c, 38d et 38e? Ce n'est pas simplement une plainte que l'on dépose aux greffes du tribunal et qu'on a fait accompagner d'une déclaration, d'un exposé des motifs. Il y a une intervention du ministère où on fait intervenir un enquêteur qui essaie de produire, par sa seule intervention, une entente et le règlement de l'affaire. Ce n'est pas une simple procédure de dépôt de plaintes.

Quand il y a une simple procédure de dépôt de plainte, il peut, bien sûr, y avoir toutes sortes de plaintes et toutes sortes de motifs pour présenter des plaintes. A ce moment, on peut redouter le harcèlement, on peut redouter la mauvaise foi, mais quand on fait intervenir le ministère, ce doit être parce qu'on prévoit que cette intervention va permettre d'éliminer les plaintes factices, les plaintes de mauvaise foi, les plaintes futiles. Comme il y aura un rapport de l'enquêteur du ministère dans tous les cas, rapport qui constituera — il ne faut pas se le cacher — l'élément principal sur lequel le tribunal va se baser, il y a là tout un phénomène d'incitation ou de désincitation à des plaidoiries purement futiles, purement de mauvaise foi.

A cause de l'existence de cette étape intermédiaire entre le tribunal et le plaignant, de cette espèce de filtrage, où la majorité des plaintes va se régler, présumément, parce que, autrement, on ne prévoirait pas cela, c'est une espèce d'entrave, d'enfarge qu'on mettrait dans le processus de recours au tribunal, on prévoit que la majorité des choses va se régler là. Celles qui ne se régleront pas là, seront, au moins pour une part — et le texte de l'article 38d est clair — des cas où l'association est entrée dans une entente — ceci peut se faire dans des contextes divers — et décide, tout à coup, de ne pas donner suite à l'entente, peut-être parce qu'elle se réfugie dans un certain juridisme, à ce moment, parce qu'il y a des problèmes d'équité, de bonne foi et d'interprétation juridique rigoureuse.

M. Johnson: Elle a peut-être raison.

M. Forget: Elle a peut-être raison, sur un plan strictement juridique.

M. Johnson: Même sur un plan...

M. Forget: Mais il y a quand même eu une entente, M. le ministre.

M. Johnson: S'il y a eu une entente.

M. Forget: C'est le cas dont je discute dans le moment; nous discuterons l'autre cas tantôt, si vous voulez. Mais si l'association a participé à une entente et qu'elle ne lui donne pas suite, malgré tout, pour le plaignant qui doit aller devant le tribunal, il y a des frais, et il y a dans son esprit au moins, si ce n'est ailleurs, une incertitude, un doute, donc une "désincitation", un découragement de se prévaloir d'un droit que, pourtant, il a presque acquis parce qu'il y a eu une entente avec l'intervention du ministère du Travail et, tout à coup, cela lui échappe des mains comme le sable à travers les doigts. Il se dit: Je l'avais et je ne l'ai plus! Une espèce de phénomène de disparition, tout à coup; il avait sa solution et il ne l'a plus, parce que, peut-être, quelqu'un a trouvé que, sur un plan juridique, ou à cause de circonstances extérieures, de l'effet de précédent, etc., toutes sortes de raisons qui peuvent être très valables sur un plan de principe et de stratégie, au niveau d'une association, mais qui peuvent résulter, effectivement, dans le fait que la plainte n'aura pas de suite positive. On se dit tout simplement, comme dans les cas d'aide juridique: II me semble au moins dans ce cas qu'on peut s'entendre que s'il n'y a pas eu respect de l'entente, l'association devrait payer la requête. C'est combien? Ce n'est pas une fortune, de toute façon. Ils ne se poseront pas de question pour payer leur partie des frais et envoyer quelqu'un les représenter. Dans le fond, c'est une question du petit vis-à-vis du gros, ou du minoritaire vis-à-vis du majoritaire. Il n'y aura pas de question de demander une cotisation spéciale

pour payer les frais de représentation de l'association pour contester la plainte de l'individu qui est seul et qui n'est aidé d'aucune façon.

Il me semble qu'au moins dans ce cas, cela me semble assez clair. Dans les cas où il n'y a pas eu de possibilité d'entente, malgré l'intervention de l'enquêteur, on peut se poser des questions, bien sûr. Pourquoi n'y a-t-il pas eu entente? Encore une fois, dans les cas où il n'y a pas eu entente, et où le plaignant sait qu'il n'y a pas eu entente et que le rapport de l'enquêteur lui est défavorable, peut-on vraiment supposer que dans ces cas il y aura une situation telle, qu'on voudra poursuivre? Poursuivre pourquoi? Pour faire du harcèlement, etc. Cela ne bloque rien tout cela. Ce sont des procédures, dans le fond..., contrairement aux autres procédures du Code du travail, il n'y a rien qui est subordonné au règlement de cette affaire. Il n'y a pas un droit de grève qui est suspendu, il n'y a rien de suspendu. D'accord, il faut éviter les procédures et il ne faut pas encourager l'esprit des plaideurs, mais, dans un cas comme celui-là, qu'est-ce que cela donnerait de vouloir multiplier les poursuites? Affamer le syndicat, etc. Il va falloir beaucoup de ces plaintes pour produire un effet sensible et les gens seront épuisés avant d'avoir épuisé le syndicat, parce que, par définition, il s'agit d'un individu contre un groupe. La disproportion des forces est telle qu'on va courir longtemps avant de trouver un exemple où un individu seul, à force de procédure, devant le tribunal du travail, avec des rapports de l'enquêteur du ministère qui lui sont toujours défavorables, va réussir à remporter le gâteau.

C'est vraiment un déséquilibre tel, qu'il me semble que dans ce cas-là, un peu en s'inspirant des principes d'accessibilité à la justice, on ne ferait de tort à personne en acceptant l'amendement.

M. Johnson: M. le Président...

Le Président (M. Clair): M. le ministre.

M. Johnson: Je réitère les arguments que j'avais commencé à évoquer. Je vais essayer de le faire brièvement et j'espère qu'on pourra disposer de cet amendement rapidement.

A sa face même, l'amendement du député de Saint-Laurent pose un problème. On va prendre quelques scénarios possibles. 38c dit que le salarié qui considère que l'association l'a lésé, d'une certaine façon, dans ses droits, en ne respectant pas 38b quant à ses droits de non-discrimination, etc., porte plainte au ministre qui envoie un enquêteur. L'enquêteur est un fonctionnaire. Il n'est pas une personne qui est investie de pouvoirs judiciaires ou quasi-judiciaires. C'est un enquêteur comme les enquêteurs du service spécial qu'on a au ministère.

De deux choses l'une, ou il parvient à réconcilier les parties, ou il ne parvient pas à réconcilier les parties. S'il les réconcilie, il n'y a plus de problème. S'il ne parvient pas à les réconcilier, il y a peut-être un problème pour le salarié, parce que, effectivement, il subit de la discrimination. C'est le premier morceau d'alternative.

Le deuxième bloc de l'alternative, c'est le suivant: L'enquêteur peut également constater que la revendication du salarié est parfaitement futile, dérisoire et issue d'un esprit troublé. Or, ce même esprit troublé pourrait décider quand même de procéder par une requête devant le Tribunal du travail, pour demander au Tribunal de prendre sa décision sur l'absence d'entente intervenue, par définition, si l'enquêteur constate cela.

L'effet de l'amendement du député de Saint-Laurent serait quand même de pénaliser l'association à cause d'un recours parfaitement futile d'un individu troublé, ce que l'enquêteur aurait pu constater.

Dans la deuxième hypothèse, il y a une entente qui n'est cependant pas respectée par l'association. Disons que l'association ne respecte pas l'entente, mais de bonne foi, parce qu'elle considère qu'elle a des faits nouveaux, etc. D'autre part, elle peut considérer que l'enquêteur était particulièrement mal luné ce jour-là. C'est un fonctionnaire qui a également droit à ses sautes d'humeur, tout comme les juges, sauf qu'il n'en a pas l'immunité présumée.

L'association décide de ne pas procéder à l'apparence d'entente qu'il y avait, ou considère que le rapport de l'enquêteur ne vaut rien. Cela peut être bien fondé. Encore une fois, on la pénalise parce que l'individu s'en va devant le tribunal et qu'au bout de la ligne, il sera considéré comme n'y ayant jamais eu droit, ne donnant pas droit à sa requête en vertu de 38c, en se référant à 38b. On a encore une fois pénalisé l'association pour rien.

Mais en admettant qu'effectivement, on a affaire à une association qui est de mauvaise foi et qui décide de ne pas respecter l'entente dans laquelle elle est entrée avec le salarié, grâce à l'espèce de conciliateur-enquêteur qu'on envoie, il reste toujours le recours aux services d'un avocat de l'aide juridique pour celui qui veut faire sa requête au Tribunal du travail. Il fera sa requête, et l'adjudication des frais, de toute façon, en faveur de l'aide juridique — et ce n'est même pas une adjudication des frais, c'est l'effet de la loi — sera, si sa requête n'est pas futile, de faire en sorte qu'il n'ait rien à débourser. S'il décide d'aller à un avocat en pratique privée, sans avoir recours à l'aide juridique d'une façon ou d'une autre, quant à son financement, il pourra être remboursé. Ce que cela aura impliqué, c'est qu'il aura déboursé $200 de sa poche. S'il n'a pas les moyens de le faire, il va aller à l'aide juridique. Donc, il n'aura pas de problème.

M. le Président, je considère que cet amendement n'apporte en aucun des cas, quelque amélioration que ce soit au texte.

Le Président (M. Clair): Le député de Richmond.

M. Brochu: Une remarque, M. le Président. Si je reprends un peu, à partir de l'exemple que le

ministre vient de donner... Supposons qu'un type porte plainte et écrit au ministre, selon les dispositions de la loi; le ministre, à ce moment-là, nomme son enquêteur auquel il fait allusion, l'enquêteur a son délai de quinze jours pour arriver à une entente. S'il n'y a pas d'entente, d'un côté, ou supposons que l'association ne respecte pas l'entente, à ce moment-là le salarié demande de référer son litige au tribunal, qu'il juge digne ou non d'arbitrage. Si oui, il n'y a pas de problème, mais sinon, dans le cas où on accepterait l'amendement du député de Saint-Laurent, il faudrait que la requête soit payée par l'association.

Je serais tenté de demander au député de Saint-Laurent ceci: Est-ce que ce serait juste, à ce moment-là, que l'association paie pour toutes les requêtes non fondées? Deuxièmement, est-ce qu'il n'y aurait pas, en même temps, le risque de multiplier les requêtes en ce sens? J'aimerais que le député de Saint-Laurent m'indique de quelle façon il voit cela, parce qu'il me semble qu'il y a un danger évident de ce côté-là. Je vais reprendre, pour le bénéfice...

M. Forget: ... pour la discussion, je m'excuse, mon attention était partagée.

M. Brochu:... du député de Saint-Laurent. A la suite de la situation à laquelle donnerait lieu votre motion d'amendement, si elle devait être acceptée et devenir force de loi, je me pose la question suivante et j'aimerais que vous m'apportiez certaines précisions sur votre façon de voir la chose: Considérez-vous qu'il serait juste que l'association, à ce moment-là, paie pour des requêtes non fondées? Deuxièmement, n'y aurait-il pas le risque, si on devait accepter votre amendement tel que vous le proposez, qu'on assiste parfois à des multiplications de requêtes jugées non fondées, de sorte que l'association se trouverait contrainte de faire les frais de cette espèce de jeu?

Le Président (M. Clair): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: Le ministre a un peu donné la réponse en mon nom tantôt, parce qu'il a dit — cela est vrai d'ailleurs, c'est peut-être une précision intéressante — que, de toute manière, le plaignant va toujours pouvoir utiliser l'aide juridique. Quelle que soit la futilité des plaintes, au minimum, l'association va être obligée de se défendre. Dans cette mesure, ce n'est pas par des artifices de procédure internes au Code du travail qu'on va réprimer des abus possibles de l'esprit de plaidoirie chez les salariés. Il va toujours y avoir cette obligation.

Mais, d'un autre côté — c'est là que ce genre de raisonnement n'est pas vraiment persuasif — il est vrai que, dès qu'on crée un droit et qu'on ouvre un tribunal, on peut toujours dire qu'on encourage l'esprit de plaider inutilement. Il est toujours vrai que, si tout le monde était de bonne foi, parfaitement renseigné et parfaitement raisonnable, il n'y aurait aucun procès parce qu'il y a toujours une des parties qui perd; donc elle a tort. Dans cette mesure, tous les procès sont inutiles. Mais ce n'est pas la façon de raisonner habituelle. Il y a des procès; il y a des poursuites; il y a des plaintes. Après coup, on peut juger qu'elle était futile. Mais concernant la proportion de ces poursuites et de ces plaintes qui sont effectivement futiles, est-ce que, vraiment, on peut citer des chiffres qui nous démontrent que les gens se livrent à ce genre d'activité pour le simple plaisir de le faire et parce qu'ils sont déficients mentaux ou pas fins, etc.? C'est très rare.

M. Brochu: Par contre, devant les tribunaux, si vous me le permettez, la personne qui a tort paie les frais.

M. Forget: Pas toujours, parce qu'avec l'aide juridique on a supprimé, pour un certain nombre, à peu près 20% ou 25% de la population, ce frein. Il n'y a même pas de ticket modérateur dans l'utilisation des tribunaux. On n'a pas vu une croissance démesurée et déraisonnable des poursuites dans tous les domaines. Les gens sont plus raisonnables que cela.

Là où il y a des abus de procédure et de procès, sauf les querelles de clôtures traditionnelles dans les villages pour le bornage, etc., parce que, finalement, quand on ne s'aimait pas, on finissait par utiliser ce moyen pour se le dire... C'est une forme de communication sociale peut-être, mais ce n'est vraiment pas un problème juridique, dans le fond. Jamais on a voulu amender le Code civil pour empêcher les voisins de se poursuivre en bornage. Mais c'est un fait qu'il y a des abus de procédure. La plupart du temps, les abus de procédure sont motivés par d'autres exigences.

Par exemple, le patron qui multiplie les procédures pour s'opposer à une demande d'accréditation en alléguant X, Y, Z raisons, ce n'est pas, dans le fond, parce qu'il a seulement le goût de plaider, c'est parce qu'en plaidant il empêche un certain nombre de choses de se réaliser. Mais dans ce cas-ci, on peut faire 20 000 plaintes de discrimination et on n'empêchera pas le monde de tourner. La terre continuera de tourner. La nuit suivra le jour de façon aussi régulière qu'autrement. Il n'y aura rien de changé, sauf que les plaintes devront être entendues.

Dans un contexte comme celui-là, comme il n'y a rien d'externe à la plainte elle-même qui pourrait la motiver, parce que cela ne favorise rien et cela ne gêne rien, je me dis que cette objection n'est pas plus sérieuse qu'elle ne pourrait être sérieuse dans l'aide juridique ou ailleurs. Ce n'est pas vrai que les gens ont le goût de se plaindre tout le temps et d'aller devant les cours pour le dire.

M. Johnson: II y en a qui le font.

M. Forget: II peut y en avoir une infime fraction, comme il y a une infime fraction qui abuse des médicaments. On ne ferme pas les pharmacies pour autant...

M. Johnson: C'est pour cela qu'il y a l'aide juridique.

M. Forget: Avec des abus de 0,2%...

M. Johnson: Cela prend apparence de droit.

M. Forget: ... on peut, évidemment, abolir toutes les lois et dire: Les gens ne sont pas assez intelligents pour s'en servir.

M. Johnson: Une question au député de Saint-Laurent.

M. Forget: A mon avis, c'est une question de fait. Combien y a-t-il d'abus? Est-ce qu'il y en a beaucoup? Ma prétention, c'est que c'est une crainte injustifiée. Il n'y en aurait pas tant que cela.

M. Johnson: Sauf que vous voulez vous assurer que dans tous les cas où il y aura abus, on pénalisera l'association de salariés. C'est ce que je trouve absurde dans cet amendement.

M. Forget: Quel est l'abus le plus grave? Est-ce que c'est l'abus qui résulte en décourageant une plainte qui peut être justifiée à cause de la crainte que les gens ont d'encourir des frais?

M. Johnson: Qu'ils aillent à l'aide juridique!

M. Forget: Cela peut être beaucoup plus général. Ils ne sont pas tous admissibles. Ils ne sont pas tous à l'intérieur des critères d'admissibilité de l'aide juridique. Il y en a qui dépassent cela.

M. Johnson: Ceux qui le dépassent ont les moyens de payer la première requête de prendre le risque...

M. Forget: Oui, un père de famille qui a $12 000 ou $14 000, qui a quatre enfants, il a vraiment les moyens de s'engager des avocats et de s'en aller devant les cours.

M. Johnson: $150 ou $200, c'est seulement cela.

M. Forget: C'est cela.

Le Président (M. Clair): Messieurs, la motion d'amendement du député de Saint-Laurent, à savoir que le paragraphe 38d de l'article 28 soit modifié en ajoutant à la sixième ligne, après le mot "arbitrage", les mots "les frais de cette requête doivent être assumés par l'association", est-elle adoptée?

M. Johnson: Rejeté.

Le Président (M. Clair): Rejeté sur division.

M. Johnson: L'article 28 est-il adopté?

M. Forget: Non, je crois qu'on a encore quelques observations sur...

Le Président (M. Clair): Le paragraphe 38d, considère-t-on qu'on en a terminé l'étude?

Une Voix: Oui, c'est réglé. M. Forget: Sur 38e...

Le Président (M. Clair): Nous avons donc terminé l'étude de 38d, nous passons à 38e. Le député de Saint-Laurent.

M. Forget: C'est vraiment une question de formulation. Il serait peut-être suffisant de le signaler au ministre pour qu'il en vienne à faire une correction. C'est à la deuxième ligne. Je vais le lire depuis le début pour que le sens soit continu. "Si le tribunal estime que l'association a violé l'article 38b, il peut autoriser le salarié à soumettre sa réclamation". Il nous semble que plutôt que de laisser soupçonner un pouvoir discrétionnaire du tribunal, qui n'est pas nécessairement voulu comme tel, on pourrait dire: "II autorise le salarié". Parce que dans le fond, l'action du tribunal là-dessus, c'est de constater si l'association a violé ou non l'article 38b. S'il le constate, il l'autorise.

M. Johnson: M. le Président, si vous permettez c'est parce que le mot "peut" est attributif de juridiction dans le cas d'un tribunal.

M. Forget: Oui.

M. Johnson: II implique donc "doit" au sens du texte.

M. Forget: Si les conseillers juridiques du ministre affirment cela catégoriquement, je suis bien prêt à accepter la parole du ministre.

M. Johnson: C'est ce qu'on affirme catégoriquement. Il y a, par exemple, le commissaire-enquêteur, même chose à l'article 14.

M. Forget: Oui, mais...

M. Johnson: C'est attributif de juridiction.

M. Forget: C'est vrai. Quand on dit cela, est-ce qu'on veut dire tout simplement la même chose qu'il autorise, ou si on suggère une nuance distincte? C'est attributif d'un pouvoir discrétionnaire, le mot "peut".

Or, le pouvoir discrétionnaire dans le cas du tribunal visé à 38e, c'est de juger si oui ou non, il y a violation de l'article 38b. Si le tribunal juge qu'il y a eu violation de l'article 38b, est-ce qu'il y a un pouvoir discrétionnaire même dans ce cas, pour des raisons circonstancielles de ne pas autoriser le salarié à soumettre sa réclamation à un arbitre? C'est un processus à deux paliers. Il y a une constatation d'une violation ou d'une non-violation. S'il y a non-violation, évidemment, le reste de l'article n'a pas d'importance ou presque, enfin, il y a les frais et tout. Mais s'il y a constata-

tion, le mot "peut" est attributif d'une compétence, mais à ce niveau, est-ce que c'est un pouvoir discrétionnaire même de refuser de présider?

M. Johnson: M. le Président, je citerai au député de Saint-Laurent, par Me Louis-Philippe Pigeon, CR, qu'il a sûrement très bien connu à l'époque... Non?

M. Forget: Non, je ne l'ai pas connu du tout, mais j'en ai entendu parler.

M. Johnson: Dans les notes extraites de sa "Rédaction et interprétation des lois", cours donné en 1965 aux conseillers juridiques du gouvernement du Québec, à la page 23, au deuxième paragraphe de la deuxième section, on remarque, en effet... Je m'excuse, "On serait porté à croire que cet article" — on parle d'un article où l'expression "peut" est utilisée dans un cadre judiciaire — "dont on trouve d'ailleurs l'équivalent dans la plupart de nos lois canadiennes d'interprétation, règle la question et que "doit" est toujours impératif et "peut" toujours permissif. Malheureusement, cela n'est pas exact. "Peut" est souvent impératif, d'une certaine manière. En effet, "peut" est impératif quand il est attributif de juridiction judiciaire ou quasi judiciaire." Il faut bien noter "attributif de juridiction judiciaire ou quasi judiciaire" et non pas "administrative". "L'expression "judiciaire ou quasi judiciaire" s'oppose, en quelque sorte, à "administratif", quand donc "peut", est attributif de juridiction judiciaire ou quasi judiciaire, il est impératif."

Je présume que l'honorable juge de la Cour suprême, Louis-Philippe Pigeon, fait sans doute autorité en cette matière et, pour cette raison, M. le Président, je demanderai au député de Saint-Laurent s'il tient absolument à continuer ce débat qui ressemble un peu à de la casuistique juridique.

M. Ciaccia: M. le Président, je voudrais poser seulement une question au ministre.

Le Président (M. Clair): Le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Qu'est-ce qu'il y a dans l'article 38e pour indiquer que le mot "peut" est attributif de juridiction?

M. Johnson: Parce qu'il s'agit du Tribunal du travail.

M. Ciaccia: Mais oui, mais on peut interpréter l'article 38e à savoir que le "peut" ne traite pas de questions de juridiction. On ne dit pas "quant à la juridiction, etc.", on dit: Si le Tribunal estime... On présume qu'il a juridiction. Alors, le "peut" peut être interprété d'une façon discrétionnaire de ses pouvoirs. Evidemment, il a juridiction, parce que, s'il n'avait pas juridiction, il ne pourrait estimer que l'association a violé l'article 38b. Je pense que l'argument du député de Saint-Laurent est bien fondé.

M. Johnson: M. le Président, je comprends que le député de Mont-Royal se sent, ce soir, en verve pour discuter avec le juge Pigeon de la Cour suprême sur la notion du "peut" en droit administratif canadien. Cependant, je pense que le député de Mont-Royal comprendra qu'il s'agit clairement, à l'article 38e, d'un organisme judiciaire...

M. Forget: Judiciaire, le Tribunal du travail?

M. Johnson: Quasi judiciaire, pardon! Je m'excuse...

M. Forget: Quasi judiciaire et administratif...

M. Johnson: Judiciaire et quasi judiciaire, il s'agit d'un tribunal. Et des extraits que j'ai cités, il s'agit du droit administratif québécois.

Deuxièmement, le Tribunal du travail se voit attribuer ici la juridiction de déférer à l'arbitrage le grief dont il est question.

M. le Président, ça me semble clair, limpide, clair, M. le Président, Michel Clair, et ça m'apparaît limpide, et je pense que toute discussion au sujet du "peut" ou du "doit" a quelque chose qui me fait penser à une discussion qui a un but dilatoire, et vous me permettrez, M. le Président...

M. Forget: ... discuter de cela.

M. Johnson: ... de ne même pas faire de procès d'intentions là-dessus.

M. Forget: Peu importe.

Le Président (M. Clair): Messieurs, consi-dère-t-on que...

M. Ciaccia: On a posé seulement une question. On n'a pas fait de grand discours là-dessus. On pose seulement une question.

M. Forget: On avait même une motion qu'on ne présente pas.

Une Voix: Ah oui?

M. Forget: Mais on se borne...

Le Président (M. Clair): Messieurs, considère-t-on que l'étude de l'article 38e est terminée?

M. Forget: Non, j'ai une autre question.

M. Ciaccia: Maintenant qu'il nous a refusé les doutes dans nos esprits, on va lui poser des questions davantage.

M. Forget: Puisque le ministre est en verve de citations juridiques, M. le Président, on va lui demander un autre cours de droit pour savoir justement quelle est la distinction entre les tribunaux

administratifs et les tribunaux judiciaires... non, plus sérieusement, pour connaître les motifs, sûrement d'un ordre juridique élevé, qui se trouvent en arrière de l'élimination de l'ex-deuxième alinéa de l'article 38e, qui semblait contenir une disposition intéressante et qui est disparue de l'amendement déposé hier soir.

M. Johnson: M. le Président, c'est qu'à l'article 38e, tel que modifié dans le dernier texte qu'on a fourni, on ne fait plus référence à la notion d'arbitrage prévue à la convention collective. Mais on dit que le tribunal défère à un arbitre qui est nommé, lui, par le ministre et pour la raison suivante: C'est que si vous avez affaire au tribunal d'arbitrage prévu dans la convention collective, vous aurez donc trois arbitres. Il y a là-dessus, entre autres l'arbitre de l'association qui ici fait l'objet de la requête devant le tribunal.

On a donc décidé qu'il n'était pas question de déférer ce grief devant ce tribunal d'arbitrage puisqu'il risque d'avoir une forme de conflit d'intérêts et bel et bien d'aller prendre un des arbitres choisis à même la liste des arbitres qui peuvent être nommés par le ministre dans le cas des différends ou des griefs qui est soumise par la CCTMO. Donc, le deuxième paragraphe de 38e devenait donc inutile puisque c'était une précaution dans le cas de ce qui était prévu à 38e originalement et qu'on a supprimé.

M. Forget: Cette explication-là a du sens.

Le Président (M. Clair): Nous considérons que l'étude de l'article 38e est terminée?

M. Johnson: 38f, M. le Président? Le Président (M. Clair): 38f. M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Clair): L'article 28 du projet de loi 45 est-il adopté?

M. Johnson: Adopté. Des Voix: Adopté.

Le Président (M. Clair): Adopté tel qu'amendé.

M. Johnson: II s'agit, à l'article 29 que j'appelle immédiatement, de l'abrogation de l'article 39 du Code et on se souviendra que cette question a déjà fait l'objet, dans le cadre d'un amendement qu'on voulait apporter à un autre article au sujet de la possibilité pour un commissaire-enquêteur d'obtenir les statuts, et je pense que cette question, quant au fond, a été vidée à ce moment-là. Est-ce que l'article 29 est adopté, M. le Président?

M. Forget: M. le Président... Non.

Le Président (M. Clair): M. le député de Saint-Laurent, sur l'article 29.

M. Forget: Au risque de décevoir le ministre, il semble que, comme vient de le dire le ministre, je crois — quoique je consultais mes notes au moment où il a parlé — mais il a déjà fait allusion à cet article 39 du Code du travail dans le passé. Si ma mémoire est bonne, il nous a dit que la raison pour l'abrogation de cet article était qu'il n'avait jamais été appliqué. C'est une raison comme une autre et ce serait assez amusant de réviser nos lois avec ce critère-là à l'esprit. On produirait sans aucun doute des lois fort originales si on éliminait tous les articles non appliqués, mais c'est peut-être une bonne méthodologie de départ. Mais ce n'est pas suffisant en soi pour justifier l'abrogation d'un article.

En effet, avant de se demander s'il doit être abrogé, il y a une autre question qui se pose: Est-ce qu'il est d'ordre public qu'un article qui n'a pas été appliqué soit abandonné ou s'il est plutôt d'ordre public que, finalement, il soit administré conformément à sa rédaction et à son intention originale? Cette deuxième façon d'aborder le problème nous amène à constater qu'il y a une raison qui est alléguée par le ministère pour ne pas avoir appliqué l'article. C'est essentiellement que la connaissance des faits, qui normalement est prévue comme devant découler de l'application de l'article, est déjà accessible au ministère par un autre moyen.

On nous a dit, en particulier, qu'un très grand nombre de syndicats sont affiliés à des centrales et qu'il n'est pas nécessaire d'avoir 1500 copies des statuts et règlements de la CSN pour chacun des syndicats affiliés à la CSN et ainsi de suite. C'est un raisonnement qui est valable mais, évidemment, ceci supposerait que toutes les associations de salariés sont affiliées à une centrale connue et cela supposerait aussi que l'information qui est entre les mains du ministère du Travail, au sujet même des statuts et des règlements des centrales syndicales, soit une information dont il dispose de façon officielle.

Il est assez rare qu'on puisse justifier, au niveau d'un ministère, de la connaissance des faits, simplement en disant: Les gens lisent les journaux. Il n'y a rien qui assure que la lecture des journaux ou les communications informelles entre un milieu donné, que ce soit un milieu syndical ou autre, et le gouvernement, sont suffisamment régulières, fidèles, complètes, pour que, effectivement, on puisse présumer qu'à tout moment le gouvernement a la connaissance complète des faits qui lui est nécessaire pour l'application des lois; c'est présumé nécessaire pour l'application des lois puisque la loi prévoit qu'ils doivent disposer de cette connaissance.

Alors, il serait possible d'envisager que, sans laisser tomber l'obligation de communiquer au ministère les renseignements pertinents, on articule cette obligation de manière à tenir compte de la réalité, pas seulement de la réalité de la non-application, mais de la réalité à laquelle s'applique la demande d'information et l'obligation d'informer le gouvernement. Ceci pourrait se faire très facilement, M. le Président, en prévoyant que, au lieu de produire les documents qui sont prévus

par l'article 39, un syndicat qui est affilié n'a qu'à déposer une déclaration d'affiliation. Ce serait relativement facile et simple à faire, ce serait sur une seule page et ce serait tout simplement une référence à des statuts et règlements qui, par ailleurs, et dans une deuxième partie du même article, devraient prévoir—ce serait la première fois dans le Code du travail, mais pourquoi pas, puisque ça existe—qu'on reconnaîtrait les centrales syndicales, leur existence, en disant: Les centrales syndicales peuvent déposer leurs statuts et règlements et ce dépôt vaut pour tous leurs syndicats affiliés, dans la mesure où ils ont eux-mêmes déposé une déclaration d'affiliation. Ceci permettrait de répondre entièrement à l'objection basée sur le fait que de petits syndicats ne devraient pas être astreints à des obligations comme celle-là...

M. Johnson: M. le Président, si vous le permettez, avant que le député de Saint-Laurent ne continue, je vais avoir une objection sur la recevabilité de l'amendement qu'il nous annonce.

M. Forget: Mais, je n'ai pas encore annoncé d'amendement, je parle sur le fond de l'article qui dit que tel article est abrogé.

Le Président (M. Clair): Effectivement, M. le ministre, M. le député de Saint-Laurent dispose d'un droit de parole de 20 minutes sur l'article 29.

M. Forget: M. le Président, pour revenir à ça, on reviendrait donc à une situation où un article relativement simple, en deux parties, pourrait prévoir à la fois le fait que des syndicats sont affiliés, des syndicats qui peuvent être modestes en nombre et en ressources financières... Mais qui est trop pauvre pour coucher sur une seule feuille de papier la déclaration selon laquelle le syndicat Un-tel, accrédité à telle date, en vertu de...— il y a peut-être un numéro de certificat, mais c'est le maximum des informations qui seraient requises—déclare être affilié à la Confédération des syndicats nationaux du Québec et signée par le président et le secrétaire du syndicat, ceci constituant la preuve et satisfaisant, en tout point à la loi? Il informe ainsi officiellement le ministre qu'il y a une telle affiliation, ce dont on ne peut être au courant autrement que par des rumeurs, des informations verbales, la lecture des journaux, etc., ce qui est une façon assez curieuse, pour un ministère, de compléter ses dossiers.

Par ailleurs, la centrale syndicale qui, elle, ordinairement, ne manque pas de ressources pourrait, sans aucun doute, envoyer en deux ou trois copies ces... Ou même en une seule copie, laissant au ministère le soin de faire des photocopies de ces statuts et règlements. On aurait ainsi une disposition, dans la loi, d'information officielle du ministre; c'est la seule qu'il a — il ne faut peut-être pas le priver de cette ressource; ça peut être utile un jour, sait-on jamais?— de pouvoir vérifier et de pouvoir faire état, de façon officielle, qu'on connaît quelque chose.

Par ailleurs, dans tous les cas de syndicats indépendants — il y en a quand même quelques-uns et on me dit que c'est une tendance qui est en croissance — l'article 39 demeurerait tel qu'il est. Je pense que là, il est nécessaire, parce qu'il n'y a pas d'autres moyens de connaître cette information.

M. Johnson: M. le Président, est-ce que vous permettez? Peut-être que ça évitera au député de Saint-Laurent de même penser à apporter une motion d'amendement ou de continuer à discuter sur l'article 29, en vue d'abroger l'article 39 du Code du travail, étant donné que la première annexe au Code du travail prévoit des règlements édictés en vertu de 155, c'est-à-dire que la requête doit indiquer le nom exact de l'association, en précisant, s'il y a lieu, la section locale ou l'organisme auquel elle est affiliée.

Donc, en pratique le problème ne se pose pas à ce niveau. Le ministère possède, à son greffe du commissaire-enquêteur, les statuts et règlements des grandes associations auxquelles peuvent être affiliés les syndicats locaux...

M. Forget: En vertu de quel article?

M. Johnson: II les possède de fait.

M. Forget: Ce n'est peut-être pas suffisant.

M. Johnson: Les statuts des United Steel Workers sont là au ministère; celui-ci peut les demander en vertu d'un article que nous avons adopté, il y a quelques jours, dans lequel on disait que le commissaire général du travail pouvait, en tout temps, demander à une association de déposer ses statuts et règlements. Donc, si c'est l'information que recherche le député de Saint-Laurent, cette information est là. Deuxièmement, nous avons le pouvoir de l'obtenir.

M. Forget: II reste que, dans le cas d'une centrale syndicale, on n'a aucun pouvoir d'obtenir quelque document que ce soit. Même si la requête doit contenir une mention d'affiliation — j'en prends acte — il reste que, si le ministère doit faire la preuve un jour, dans une procédure quelconque, dans une intervention quelconque, d'une connaissance officielle des statuts et règlements, et cela peut se trouver, il serait plus simple de prévoir un mécanisme qui l'en informe officiellement plutôt, à ce moment-là, que d'être obligé de mettre en marche un mécanisme de preuves spécifiques. On devra peut-être, aussi, plaider ignorance puisque, si aucune centrale syndicale n'est astreinte à un devoir de déclaration, il pourra y avoir des moments où on ne se sera pas renseigné de facto, où l'information n'aura pas été transmise de facto et où, par conséquent, on sera dans une espèce de vide sur le plan juridique, sur le plan des obligations des gens de communiquer de l'information.

M. Johnson: Si le député de Saint-Laurent me le permet, M. le Président, les centrales syndicales, de deux choses l'une: ou elles sont des associations qu'on pourrait qualifier de bona fide, exis-

tantes, ou elles sont incorporées en vertu de la Loi des syndicats professionnels. Si elles sont incorporées en vertu de la Loi des syndicats professionnels, elles suivent donc les dispositions de la loi; si elles sont des associations de type bona fide, on obtient leurs statuts quand on demande à une association accréditée affiliée le dépôt de ses statuts et règlements, les statuts du syndicat affilié étant les statuts qu'on retrouve au niveau de la centrale.

M. Forget: M. le Président, je n'insisterai pas davantage. Je ne suis pas parfaitement satisfait des réponses que fait le ministre parce que ce sont des réponses de convenance. Je ne pense pas qu'elles soient aussi rigoureuses que l'argumentation qu'il nous présentait tout à l'heure en provenance de celui qui est maintenant le juge Pigeon. Mais, de toute manière, comme c'est une question essentiellement administrative et qu'il s'en déclare satisfait, je n'ai certainement pas l'intention de prendre plus de temps qu'il n'en faut sur cette question.

Le Président (M. Clair): Sur l'article 29, le député de Richmond.

M. Brochu: Brièvement, M. le Président, simplement une remarque. Cet article pourrait faire en sorte de ne plus obliger les associations de salariés à informer le commissaire des changements à leur constitution. En ce qui nous concerne, on s'interroge toutefois sur l'opportunité d'enlever cet article 39. Nous croyons plutôt qu'il aurait été normal d'exiger le dépôt de leurs statuts et règlements annuellement et ce en vue de s'assurer que les statuts et règlements des associations de salariés répondent à ces normes d'ordre public. Je pense d'ailleurs que le député de Johnson, qui m'a précédé à cette tribune, a clairement fait valoir son point de vue à ce sujet lors de l'étude de l'article 23. Je pense qu'il a fait valoir largement son opinion éclairée sur cette question. D'ailleurs le ministre connaît aussi notre opinion et il ne sera donc pas surpris si, en ce qui nous concerne, on lui demande même de retirer cet article.

Le Président (M. Clair): Messieurs, l'article 29 du projet de loi 45 est-il adopté?

M. Johnson: Adopté. M. Forget: Adopté sur division. Le Président (M. Clair): Adopté sur division. M. Johnson: L'article 30, M. le Président... Révision ou révocation d'une décision

Le Président (M. Clair): Le ministre du Travail, sur l'article 30.

M. Johnson: ... que j'appelle donc immédiatement, modifie l'article 39a du code en le remplaçant. Le nouvel article énumère en fait les motifs de révision et ae révocation. La loi actuelle, on le sait, dit simplement que le commissaire peut réviser ou révoquer pour cause. L'énumération qui est nouvelle ici s'inspire de celle du Code de procédure civile qu'on rencontre dans le cas des jugements, des révocations. Elle correspond également à la jurisprudence des commissaires du travail. Quant au dernier alinéa M. le Président, il s'agit d'une précision qui est là pour éviter les discussions oiseuses, par exemple — mon Dieu, nous devrions nous en inspirer — si un commissaire écrit 100. au lieu de 1,00, 100 versus 1000 ou l'année 1973 au lieu de l'année 1974, en d'autres termes les fautes de copiste qui peuvent se glisser dans une décision.

Le Président (M. Clair): L'article 30 est-il adopté?

M. Forget: Une question de détail. On me signale, quoiqu'on me fera probablement l'objection qu'il ne s'agit pas d'un texte officiel, mais malgré tout, pour la concordance, on me dit que dans le texte anglais, je ne l'ai pas vérifié, il y a une traduction qui semble incorrecte, parce que dans le premier alinéa de l'article 39a, à la sixième ligne, on parle de "décision ou de l'ordre et que le tribunal n'ait pas encore disposé de l'appel", ce serait "or " en anglais.

M. Johnson: Vous avez parfaitement raison. Effectivement, c'est une erreur de copiste qui avait été soulignée par le Barreau dans son mémoire. Il s'agirait de dire, "brought to the court from the decision or order and the court has not yet disposed of the appeal". Il s'agirait M. le Président, pour les fins du journal des Débats, à l'article 30 du projet de loi 45, modifiant l'article 39a du Code du travail... En fait, au premier paragraphe, au sixième alinéa, que les mots "decision or order or the court" soient remplacés par "the decision or order and the court..."

M. Forget: Je pense que c'est un point de règlement... Evidemment, on n'adopte plus que le texte français, mais je pense qu'une commission parlementaire serait mal avisée, si elle détecte une erreur, de ne pas la signaler au secrétariat des commissions.

M. Johnson: L'article 30 est-il adopté, M. le Président?

Le Président (M. Clair): L'article 30 est-il adopté?

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Clair): Adopté.

M. Johnson: L'article 31, M. le Président, qui modifie l'article 39b du code est en fait un amendement de concordance, avec le nouvel article 39a qui énumère les causes de révocation et de révision. On enlève donc les mots "pour cause".

Le Président (M. Clair): L'article 31 est-il adopté?

M. Forget: Adopté. M. Brochu: Adopté. Le Président (M. Clair): Adopté. Article 32.

M. Forget: Le ministre est en train de monter son "batting average", M. le Président.

Le Président (M. Clair): Article 32. Le ministre du Travail.

M. Johnson: L'article 32 du projet de loi, M. le Président, modifie l'article 39c du Code. Ce nouvel article a pour objet d'ajouter une précision que tout le monde a oubliée parce qu'elle était naturelle, à savoir que l'agent d'accréditation doit déposer également les décisions qu'il rend en matière d'accréditation. Cela a pour effet de modifier légèrement la rédaction de la phrase, ce que nous avons fait. On précise également que le greffier est celui qui transmet une copie de la décision d'un commissaire du travail ou d'un agent d'accréditation par opposition au commissaire-enquêteur.

L'article 32 est-il adopté, M. le Président?

Le Président (M. Clair): L'article 32 est-il adopté?

M. Forget: Oui, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Adopté, tel qu'amendé. Article 33.

M. Johnson: M. le Président, pour l'article 33, nous sommes en train de distribuer un nouveau texte, ce sont strictement des modifications de forme. Il s'agit, en fait, de combler une omission faite dans le code, au moment de l'abolition de la CRT, en 1969, de façon à prévoir un moyen quelconque de faire des copies conformes des décisions rendues par les commissaires du travail et les enquêteurs. Il est arrivé ainsi qu'un juge de la Cour provinciale a demandé qu'un commissaire se présente devant le tribunal pour établir que le document produit était bel et bien une copie conforme à l'original.

On veut éviter ce genre de chinoiseries à l'avenir; c'est la raison pour laquelle nous avons modifié l'article 39d.

M. Forget: M. le Président, je ne resterai pas longtemps là-dessus, le ministre cite justement la raison pour laquelle des organismes officiels doivent être officiellement informés de tous les documents. C'est pour éviter, dans des procédures, d'être obligé d'en faire la preuve. Ce n'est pas plus compliqué que ça. C'est pourquoi quand on parlait de l'article 39, on disait que quelque part, le ministre soit officiellement saisi des documents sans être obligé de convoquer tout le monde pour dire: Est-ce que ce sont bien vos documents et est-ce que ce sont bien vos statuts? C'est tout.

M. Johnson: L'article 33 est-il adopté, M. le Président?

Le Président (M. Clair): L'article 33 est-il adopté?

M. Forget: Adopté. M. Brochu: Adopté. M. Forget: Oui, adopté.

Le Président (M. Clair): Adopté, tel qu'amendé. Article 34. Le ministre du Travail.

Avis pour la conclusion d'une convention collective

M. Johnson: Concernant l'article 34, M. le Président, il faut se référer, en fait, aux modifications que nous avons déposées. L'article 34 du projet de loi no 45 modifie donc l'article 40 du Code du travail, en remplaçant les deuxième et troisième alinéas par ceux que nous avons ici. On biffe donc le premier alinéa de l'article 40, qui est introduit par l'article 34 du projet de loi, pour revenir au texte actuel de l'article 40 du Code du travail. Cela veut dire que l'avis de négociation devrait être de huit jours et qu'il devrait indiquer la date, l'heure et le lieu de la rencontre qui est projetée. Ce changement, suggéré par des juristes, a pour effet de rendre possible une plainte pénale au cas d'un refus de négocier de bonne foi de la part de l'employeur.

Au deuxième alinéa, à des fins d'homogénéité, on remplace "une partie de la convention collective" par "l'association accréditée ou l'employeur". A l'article 40b, à la suggestion du Barreau également, on biffe la dernière phrase. En effet, si les parties ont prévu, par exemple, une convention de deux ans, sans préciser la date de l'entrée en vigueur...

M. Forget: Est-ce que le ministre me permet? M. Johnson: Oui.

M. Forget: M. le Président, est-ce qu'on adopte l'article 34a? Est-ce que tout cela fait partie de l'article 34 ou est-ce qu'on adopte...

M. Johnson: Oui, tout fait partie... M. Forget: Bien non.

M. Johnson: ... de l'article 34 mais cet article disait...

M. Forget: L'article 34 du projet de loi no 45 prend place d'abord et puis...

M. Johnson: C'était dans l'article 34a du projet de loi.

M. Forget: C'est cela.

M. Johnson: A l'article 34, j'ai terminé mes énumérations.

Le Président (M. Clair): L'article 34 se divise en paragraphes 40, 40a et 40b. Est-ce qu'on les discute...

M. Forget: Non, non. Non, non. C'est cela le problème, M. le Président.

Le Président (M. Clair): Ah! bon, d'accord.

M. Johnson: L'article 34 du projet de loi modifie simplement l'article 40 du Code du travail, en modifiant les deuxième et troisième alinéas de l'article 40 du Code du travail, par les deux que je viens de citer.

Le Président (M. Clair): Bon, ça va.

M. Forget: Bon, alors...

Le Président (M. Clair): Sur l'article 34.

M. Johnson: Adopté, M. le Président?

M. Forget: Adopté, oui.

Le Président (M. Clair): Article 34, adopté.

M. Mackasey: Je pense que vous passez de 60 jours à 90 jours, n'est-ce pas? C'est le but du changement. Le commencement de la négociation: "L'association accréditée avise par écrit l'employeur, etc." et "Une partie à une convention collective peut donner cet avis dans les quatre-vingt-dix jours précédant..." au lieu de 60.

M. Johnson: C'est cela.

M. Mackasey: C'est normal. La seule raison pour laquelle je souligne ce changement, c'est que, plus tard, je vais discuter d'autres procédures qui se rattachent à cela.

M. Johnson: Tout cela réfère à...

M. Mackasey: Le but des 90 jours, c'est d'arriver à une entente aussi rapidement que possible et même, en espérant, avant la fin de la convention collective déjà existante. Mais j'y reviendrai plus tard. Je voulais simplement souligner à la commission la raison des 90 jours: c'est d'arriver à une convention collective avant la fin de la convention existante. Alors, si c'est là la philosophie, toutes les autres sections devraient être abonnées à l'idée d'une convention collective avant la fin, si possible. Cela veut dire pas trop de retard légalement après le commencement. D'accord? L'introduction d'un conciliateur, etc. On parlera de cela tout à l'heure.

Le Président (M. Clair): Messieurs, sur la technique législative, est-ce qu'il y a bien consentement unanime pour qu'on ajoute un nouvel article au projet de loi no 45, qui s'appelle l'article 34a, parce que c'est différent de parler de l'article 34 qui se divise en plusieurs paragraphes, au point de vue de l'article 40a, b et c. Ce sont deux choses différentes. Si je regarde l'article 70, je préfère demander le consentement unanime pour qu'on ajoute un article 34a.

M. Forget: Je n'ai pas d'objection, M. le Président, c'est plus clair.

M. Brochu: D'accord.

Le Président (M. Clair): Merci.

M. Johnson: Alors, l'article 34 est-il adopté, M. le Président?

M. Forget: Adopté.

Le Président (M. Clair): L'article 34 est adopté.

M. Brochu: Adopté.

Entrée en vigueur et expiration d'une convention collective

M. Johnson: On introduit donc l'article 34a. Comme j'ai commencé à le dire tout à l'heure, il s'agit d'introduire, dans le Code du travail, l'article 40a et l'article 40b. A la suggestion du Barreau, M. le Président, on biffe la dernière phrase, à l'article 40b.

En effet, si les parties ont prévu, par exemple, une convention de deux ans sans préciser la date de l'entrée en vigueur ou sa date d'expiration, le tribunal devrait conclure que sa convention est de deux ans à compter du dépôt, même si le dépôt était fait plusieurs mois après la signature. D'accord?

Il est donc préférable de laisser plus de latitude au Tribunal du travail. D'ailleurs, par une modification apportée à 60, c'est-à-dire l'article 40 du projet de loi qu'on va voir demain ou après demain, on précise que le dépôt aurait un effet rétroactif au jour prévu dans la convention ou à la date de la signature de la convention, s'il n'y en a pas de prévu. Il s'agit là, d'ailleurs, d'un changement avec lequel plusieurs juristes sont d'accord. Voilà, c'est l'objet de l'article 34a du projet de loi 45.

Le Président (M. Clair): M. le député de Saint-Laurent.

M. Forget: M. le Président, relativement à cette nouvelle règle de présomption... — et mes remarques, pour l'instant du moins, s'adressent surtout à 40b, puisque j'imagine qu'on va discuter l'ensemble de l'article de façon globale.— Dans les mémoires qui ont été préparés à ce sujet, il semble y avoir un certain nombre de divergences ou certaines divergences, relativement à l'opportunité d'introduire une telle présomption.

Je commencerai par la fin parce que c'est peut-être là qu'est la question la plus simple et sur

laquelle il serait le plus facile de s'entendre. Je m'inspire carrément de deux mémoires qui ont été présentés: celui des comités du Barreau canadien et du Québec et celui de Me Barré. On dit essentiellement que le quatrième alinéa de 40b n'est pas nécessaire, parce que, semble-t-il — c'est ce qu'on peut faire en le lisant ensemble — les articles 53 et 54 du Code du travail actuel règlent le problème qui est envisagé dans le quatrième alinéa. Le quatrième alinéa dit: En tout temps, le commissaire du travail peut, sur simple demande de tout intéressé, déterminer la date d'expiration de la convention collective, lorsque cette date n'y est pas clairement indiquée. Or, l'article 53 dit: La durée d'une convention collective est d'au moins un an et d'au plus trois ans. L'article 54 dit: Est présumée en vigueur pour la durée d'une année la convention collective ne comportant pas de terme fixe et certain. Par ailleurs, il y a une autre disposition qui dit que si on ne sait pas à quel moment cela a commencé, il y a une date qui peut être déterminée par une autre procédure.

Donc, il semble qu'on répète ici des règles qui se retrouvent ailleurs au Code du travail en leur donnant un sens différent et des modalités différentes. Le Barreau — ce sont les objections que Me Barré fait qui semblent valables, du moins pour un non-expert — par ailleurs, souhaite que le Tribunal du travail puisse avoir plus de flexibilité dans la détermination de ces moments, parce qu'on fixe des limites assez rigides dans le quatrième alinéa — je m'excuse, c'était dans la version originale. Dans la version amendée, le ministre a donné suite aux représentations du Barreau, effectivement.— Mais il reste que l'objection que je mentionnais tout à l'heure sur les articles 53 et 54 semble demeurer, et j'aimerais entendre les commentaires du ministre à ce sujet.

M. Johnson: M. le Président, au dernier alinéa de 40b, on prévoit qu'en tout temps le commissaire du travail peut, sur simple demande de tout intéressé, déterminer la date d'expiration de la convention collective, lorsque cette date n'y est pas clairement indiquée. C'est une date extrêmement importante, la date d'expiration de la convention collective, si on pense au délai, quant à la période de maraudage ou de requête en de certification, etc. Donc, il faut avoir une date précise d'expiration. Or, il peut arriver — et on me dit qu'au Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, cela a fait l'objet de longues discussions lors du projet de loi 24 soumis par le ministre Cournoyer — des circonstances où la date d'entrée en vigueur de la convention collective n'est pas très claire.

Or, à ce moment-là, l'application des présomptions des articles 54 et 55, quant à la durée, ne règle pas le problème dans la mesure où il faut savoir quand elle commence pour savoir qu'elle se termine un an ou deux ans plus tard. Donc, on peut présumer de l'expiration plutôt que de la date d'entrée en vigueur puisqu'on peut être dans une situation où on est plus près de l'expiration que du début.

M. Forget: Oui mais l'article 60 dit qu'une convention collective ne prend effet qu'à compter du dépôt. Si elle prend effet à compter du dépôt et qu'elle peut durer pour un an ou trois ans, alors on a déjà suffisamment de règles pour déterminer quand elle se termine.

M. Johnson: M. le Président, dans les amendements que j'ai déposés, on modifie l'article 60 tel qu'il figure. Me Barré et le Barreau ont fait leur mémoire à partir du premier texte du projet de loi no 45 et non pas à partir des amendements. On modifie et on dit que l'entrée en vigueur d'une convention collective peut être rétroactive si les parties le décident...

M. Forget: Oui mais...

M. Johnson: ... à l'article 60. M. Forget: Oui mais c'est cela.

M. Johnson: Elle n'est pas en vigueur à partir du dépôt. Elle peut être considérée rétroactivement en vigueur. Or, il peut arriver que la clause de rétroactivité ne soit pas très claire; à ce moment-là, il faut donc fixer une date précise pour savoir quand survient l'expiration de la convention collective.

M. Forget: Oui, mais si la date n'est pas claire, elle va devoir être fixée indépendamment puisque cela sera assez important de savoir jusqu'à quelle date elle est rétroactive. Une fois qu'on a fixé la date de rétroactivité, de l'entrée en vigueur, les articles 53 et 54 vont nous permettre de déterminer la date d'expiration.

M. Johnson: Non, c'est que la rétroactivité... Evidemment, c'est très simple, si la rétroactivité est sous forme... Par exemple, on signe la convention collective le 1er avril; on la dépose quinze jours plus tard mais on fixe la rétroactivité à six mois et non pas à une date précise. On ne dit pas qu'elle est rétroactive au 1er janvier; on dit qu'elle est rétroactive de cinq mois et demi ou de six mois, sans fixer une date précise. Il peut y avoir un problème d'interprétation quant à l'expiration de cette convention collective présumée de deux ans, disons, si on ne sait pas si c'est le 1er janvier ou, encore, le 15 janvier qu'elle commence. Donc, on permet au commissaire-enquêteur, au moment où il a devant lui des parties qui demandent une accréditation, dans ce qu'on présume être les délais légaux pour faire ce maraudage, de décider que, effectivement, la date d'entrée en vigueur était le 1er ou le 15 janvier, selon le cas, et donc que l'expiration, deux ans après, a lieu le 1er ou le 15 janvier, et de compter les délais de 90 et 60 jours en fonction de l'expiration qu'il détermine en appliquant les articles 54 et 55.

M. Forget: Oui, bien.

M. Mackasey: ... la première convention collective?

M. Johnson: Pardon?

M. Forget: Non, non...

M. Mackasey: Comment se fait-il qu'on ne connaisse pas le commencement et la fin d'une convention collective qui est déjà en vigueur? Il y a une ambiguïté: le 1er janvier ou le 15 janvier. La prochaine convention commence toujours à l'expiration de l'ancienne convention collective.

M. Forget: Pas nécessairement.

M. Mackasey: II n'y a jamais un hiatus de deux semaines. Quel serait le salaire des employés pendant ces deux semaines? L'ancienne convention s'applique, voyons!

M. Forget: II me semble que l'ancienne convention s'applique et elle peut s'appliquer après son expiration formelle.

M. Mackasey: C'est... Il y a toujours le salaire rétroactif; il y a toujours une différence. Si cela prend trois mois de négociations à cause, peut-être, que le patron traîne les affaires, ce n'est pas juste vis-à-vis des salariés. Si cela prend six ou sept mois de négociations, l'augmentation de salaire s'applique à la fin de l'ancienne convention. Sinon, le patron va traîner cela pendant un an et demi, si vous voulez.

M. Jolivet: D'une façon ou de l'autre, on signe toujours une clause en conséquence, pour la rétroactivité.

M. Johnson: Ce n'est pas en fait, au début de l'application de la convention collective que le problème se pose. En pratique, il ne se pose pas comme cela. Mais il se pose deux ans après sa mise en vigueur, quand le commissaire-enquêteur est obligé d'apprécier si oui ou non une association requérante est dans les délais, pour savoir si la convention collective contient une clause qui dit, par exemple: La présente convention collective sera en vigueur pour deux ans. Elle est signée le 1er avril, déposée le 15 avril. L'expiration, est-ce que c'est le 1er avril, deux ans plus tard, ou le 15 avril, deux ans plus tard?

M. Mackasey: ... à l'expiration de la convention que nous sommes en train de discuter à nouveau.

M. Johnson: C'est cela que je dis, c'est que...

M. Mackasey: Si cela se termine le 31 mars, c'est le 1er avril que commence la nouvelle convention.

M. Johnson: Ce que je dis, c'est qu'il n'y a pas de date fixée pour l'expiration, dans cette convention. On dit: La présente convention collective est en vigueur pour deux ans. Les parties ne fixent pas un terme précis. Elles ne disent pas c'est le x avril 1979 ou 1980. Elles disent: Elle est en vigueur pour deux ans.

Or, on a deux dates. On a la date de la signa- ture, puisque les parties signent à un moment donné et qu'il y a une date, et on a une date de dépôt, puisqu'on peut présumer que les parties ne le déposent pas habituellement le même jour qu'elles la signent.

M. Forget: Oui, mais l'objection du député de Notre-Dame-de-Grâce, c'est que normalement, ce sera deux ans à partir de l'expiration de la précédente convention collective.

M. Johnson: Pas nécessairement. Absolument pas. Pas nécessairement.

M. Forget: Voyons donc.

M. Johnson: Pas nécessairement. Il peut très bien y avoir eu, dans cette convention collective antérieure, aucune disposition de reconduction. La période de négociation, dans le contexte de la conciliation volontaire, entre autres, peut avoir duré, pour un tas de raisons, six mois ou un an. On peut décider d'une rétroactivité des conditions au niveau de la nouvelle convention collective. Ce n'est plus en fonction de l'échéance de la première convention collective qu'on fixe l'entrée en vigueur, mais en fonction aussi de sa signature ou du dépôt. C'est là que la chose n'est pas claire.

Si, en plus de cela, dans cette deuxième convention collective, on détermine une période plutôt qu'une date d'échéance, c'est là qu'on a le problème.

M. Mackasey: Je vous ai demandé si on discutait la première convention entre le patron et le syndicat. Je vois la conclusion. Mais pour la deuxième, la troisième ou la quatrième convention, si une convention se termine le 31 décembre et si on ne commence pas les négociations réelles avant le mois de mars, et si on ne termine pas une autre convention collective avant le mois de septembre...

M. Johnson: Oui.

M. Mackasey:... les conditions s'appliquent le 1er janvier.

M. Johnson: Je veux bien que les conditions s'appliquent le 1er janvier, mais cela ne nous dit rien sur la date d'expiration de cette convention collective.

M. Mackasey: La date d'expiration est fixée dans la convention dont on discute. Voulez-vous me dire qui est le syndicat?

M. Johnson: On peut signer, le 1er septembre, une convention collective, avec des dispositions de rétroactivité de conditions de six mois et fixer la période de la convention collective à deux ans. Est-ce deux ans à partir de la période de rétroactivité? Deux ans à partir de la signature? Ou deux ans à partir du dépôt? On ne le sait pas. Ce n'est pas clair. Ce qu'on dit, c'est que le commissaire-enquêteur, là-dedans...

M. Mackasey: ... selon la loi, cela devrait être le lendemain de l'expiration de la convention collective dont on discute. C'est impossible, M. le ministre, d'avoir une convention collective, ou une relation entre le patron et le syndicat, où, pendant deux ou trois mois, aucune convention n'existe. L'ancienne existe jusqu'à la fin de la négociation d'une nouvelle.

M. Johnson: Voyons donc.

M. Mackasey: Cela s'applique toujours à la date de l'expiration.

M. Forget: Si vous avez des procédures de griefs au moment où l'ancienne convention expire et qu'il n'y a plus de convention collective, cela pourrait risquer de faire tomber tous les griefs en cours. Il n'y aurait pas moyen de les ressusciter après.

M. Chevrette:... dans la convention collective, qui sont prévus en conséquence.

M. Forget: Oui, s'ils sont prévus. Mais s'ils ne sont pas prévus, il faudrait que la loi prévoie qu'il y a une continuité.

M. Johnson: Si une grève dure quelques mois, après la grève, les parties peuvent très bien décider d'une nouvelle convention collective. Et il s'agira, dans cette nouvelle convention...

M. Mackasey: Permettez-moi de parler en anglais pour le moment.

M. Johnson: O.K. Go ahead.

M. Mackasey: If a strike is legal — and you can have a legal strike, we're talking about a legal strike or a legal lock-out — there is still a relationship although people are not working. You are still employees of company A.

M. Johnson: Yes.

M. Mackasey: ... because of a collective agreement. You are not earning any money, you are not earning any salary, you are not doing any work, but you retain your seniority, you retain your rights, because all you are doing is applying your legal right to strike. Finally, when you come to a conclusion, there may be no retroactivity, depending on the wages, depending on your ability to negotiate. You may, if you have a very difficult employer, be told that the increase in wages, which may be of $0.20 an hour, is not retroactive from the date of the last convention. But the new convention still starts from that date even though one of the provisions may not be retroactivity.

Then, you have a period from the old convention to the new one, where your legal relationship... Then all your seniority is gone, Mr. Minister...

M. Johnson: Not necessarily. Maybe it is so under the federal law, but it is not so under the Code du travail.

M. Mackasey: No, let us forget about the federal law, let us talk about the Québec law. You cannot have a hiatus. You cannot eliminate for two or three months a relationship. Otherwise, you lose your seniority, you lose your pension rights, you lose everything because the relationship disappears. I do not care what the law says, the law may be an ass, it is not my fault. Improve it. Damn it, there is a continuation, all the time between the employer and the worker, voyons donc.

M. Johnson: M. le Président, effectivement, à l'article 47, on prévoit qu'il y a le maintien des conditions.

M. Mackasey: Sûrement, la convention existe.

M. Johnson: Cela ne veut pas dire qu'il y a le maintien de la convention.

M. Mackasey: Non.

M. Johnson: C'est fort différent.

M. Mackasey: Si ce n'est pas cela le règlement, M. le ministre — do not be too impatient — si ce n'est pas selon les conditions de la convention "there would be no seniority and there would be no relationship." You would have nothing, you would have no rights to be even an employee of that company, no rights other than what is in the collective agreement. Voyons donc.

M. Johnson: Non. Cela existe, un vide juridique, au niveau d'une convention collective.

M. Mackasey: Sûrement.

M. Johnson: Peut-être que le député de Sainte-Marie pourrait m'éclairer sur ce qui est arrivé à la United Aircraft. Cela a duré 22 mois. Les 22 mois de la situation juridique... C'était une grève légale, si je ne m'abuse.

M. Mackasey: Vous parlez d'une grève légale.

M. Johnson: Oui, c'est cela. A la United Aircraft cela a duré 22 mois. Pendant ces 22 mois, il n'y avait pas de convention collective entre les parties. Quand elles ont signé une convention collective, la rétroactivité était de quel ordre?

M. Bisaillon: Pour ce qui est de la rétroactivité, M. le Président, je ne pourrais pas répondre dans ce cas précis, mais pour ce qui est de l'ancienneté, par exemple, les clauses de la nouvelle convention collective prévoyaient que ceux qui étaient là... Autrement dit, les clauses d'ancienneté repartaient depuis le début...

M. Mackasey: Laissez-moi vous poser une question.

M. Bisaillon: ... peu importe la durée de la grève.

Par ailleurs, M. le Président, je pense qu'il faudrait se pencher sur une partie de l'argumentation du député de Notre-Dame-de-Grâce, parce qu'effectivement, il pourrait y avoir, dans certaines clauses de conventions collectives, un vide. Mais dans les clauses généralement reconnues, comme l'ancienneté et ces choses-là, cela rétroagit toujours, puisque, quand on parle d'ancienneté...

M. Mackasey: Je poserais une question au député de Sainte-Marie. Je pense que nous sommes sur la même "wave length".

Une Voix: II ne faudrait pas aller jusque là.

M. Mackasey: Maybe we are not. Si une grève dure 22 mois et que vous signez une entente qui dure 24 mois, "when did your new negotiations begin"? Deux mois après, non pas 24 mois après la signature. Deux mois après.

M. Johnson: Ce n'est pas automatique. M. le Président, si vous permettez...

M. Mackasey: Voyons donc. Then, you have a termination of 46 months, not 22 months.

M. Johnson: M. le Président, si vous permettez, je vais citer un article de Me Rivest, qui commente, dans le McGill Law Journal, septembre 1974, no 3, volume 20, page 488, une décision du juge Victor Mélançon du Tribunal du travail où il conclut "qu'un employeur ne peut pas modifier les conditions de travail prévues à une convention collective qui est expirée." La convention collective connaît une extinction, ce qui n'empêche aucunement...

M. Mackasey: Quand elle est remplacée par une autre.

M. Johnson: Non, la convention collective est expirée. Ce sont les conditions de travail qui sont maintenues, ce qui est fort différent, sur le plan juridique.

M. Mackasey: Maintenues, selon quel règlement? Selon la convention collective en vigueur.

M. Johnson: Quant au contenu, je suis entièrement d'accord avec lui. Quant à la date, cependant, cela change, puisque la convention collective expire. La preuve qu'elle expire c'est qu'on a des articles, dans le Code du travail, qui prévoient qu'une convention collective a une durée de trois ans, maximum. Au bout de trois ans, qu'est-ce qui arrive? Il y a une expiration de la convention collective, sans cela il n'y aurait jamais de période de maraudage, il n'y aurait jamais de changement d'allégeance syndicale.

M. Mackasey: M. le Président, s'il y a une possibilité qu'il n'y ait aucune convention collective existant entre le patron et les employés, pen- dant 22 mois, le patron peut faire ce qu'il veut durant cette période. Il peut baisser les salaires, il peut éliminer le...

M. Johnson: Non.

M. Mackasey: Pourquoi pas?

M. Johnson: Non, parce que...

M. Mackasey: Je sais qu'il n'en sera pas capable.

M. Johnson: Pourquoi?

M. Mackasey: Parce que les conditions dont je parle ne relèvent pas du Code du travail, mais de la convention collective signée.

M. Johnson: Non, c'est en vertu du Code du travail qu'on dit que les conditions de la convention collective demeurent en vigueur, mais on ne dit pas que la convention collective continue.

M. Mackasey: D'accord.

M. Johnson: On dit que les conditions prévues à la convention...

M. Mackasey: The Labour Code said...

M. Johnson: That is what the Labour Code is about.

M. Mackasey: ... that the conditions of any existing collective agreement shall continue to remain in force until there is a new collective agreement. It is the continuity, which is what I am saying. There will never be appeal when it is broken. The conditions will always remain in force until there is a new collective agreement. C'est simple. Alors, la date s'applique.

Le Président (M. Clair): Le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: M. le Président, je pense qu'on mélange peut-être deux choses, c'est-à-dire des conventions collectives qui expirent, mais qui contiennent une clause de reconduction ou de prolongation dans leur contenu, et des conventions collectives qui ne contiennent pas de telles clauses. Je pense que le député de Notre-Dame-de-Grâce parle plutôt du deuxième type de convention collective, c'est-à-dire celles qui ne contiennent pas de clauses de prolongation.

Dans ces cas, il est clair que lorsque le droit de grève est acquis ou le droit au lock-out est acquis, normalement, l'employeur est dégagé de son obligation d'appliquer les mêmes conditions de travail, s'il n'y a pas de clause de prolongation. Par ailleurs, le syndicat est en négociation, à ce moment. S'il est en grève et que la grève dure, par exemple, vingt mois et qu'au bout de la grève, on règle une convention collective de deux ans, on peut fort bien décider que la convention collective

va prendre effet à la date où la grève se termine pour une période de deux ans, comme on pourrait tout aussi bien décider que la convention collective de deux ans prendra effet un an avant la fin de la grève et pour l'année qui suit.

Dans le deuxième cas, il y a la question de rétroactivité à régler, évidemment, comme le député de Notre-Dame-de-Grâce l'a souligné...

M. Mackasey: C'est ce que je dis.

M. Bisaillon: II y a aussi l'autre facteur, c'est qu'il y a, effectivement, dans ces cas, un trou, un vide, mais qui ne couvre, dans le fond, et à toutes fins pratiques, que les obligations de faire qui ont été dépassées. Pour ce qui est des clauses d'ancienneté...

M. Mackasey: La convention déjà en existence, pour six mois ou huit mois. C'est une extension de la convention en existence. Cela peut protéger le syndicat.

M. Bisaillon: II y a un trou qu'on pourrait appeler une extinction de convention collective, sauf une chose, c'est que les clauses de convention auxquelles référait le député de Notre-Dame-de-Grâce sont réglées par la nouvelle. S'il y a dans la nouvelle convention, une clause d'ancienneté, il est clair que par définition, quand on parle d'ancienneté, on va remonter à la date d'embauche de l'employé, et que dans la clause d'ancienneté, comme dans toutes les clauses d'ancienneté, on a des clauses qui disent: On peut conserver son ancienneté, on ne perd pas son ancienneté à telle ou telle condition. Dans la majeure partie des clauses de convention collective, le temps de grève ne fait pas perdre l'ancienneté. Ce sont des choses qui sont déjà prévues dans le contenu même de la convention collective.

M. Forget: M. le Président, je pense que cela éclaircit un peu les choses, mais il reste que même s'il y a des réponses, et le député de Sainte-Marie vient de donner des réponses. Ce ne sont pas des réponses qui sont inacceptables, à mon avis. Il peut y avoir un vide juridique, mais le vide va être récupéré, en quelque sorte, par la deuxième convention collective.

La question se pose malgré tout à savoir si ce vide devrait exister ou si, dans le fond, on ne devrait pas prévoir que l'ancienneté, enfin tout ce qui n'est pas couvert pas l'article 47 qui prévoit que les conditions de travail sont les mêmes, que dans le fond, on prévoit une continuité plus large. C'est une question, mais ce n'est pas la question que je veux soulever.

Le problème est bien posé. Il y a un problème d'absence de continuité juridique. On dit: Cela peut se régler par la convention collective. Cela pourrait aussi ne pas se régler. Il se pourrait que le Code du travail veuille régler ce problème en étant beaucoup plus explicite qu'il ne l'est dans le moment. Ce n'est pas la proposition que nous fait le ministre. Il va dire: C'est pour la Commission de refonte des droits du travail. Je ne m'oppose pas à cela. Je pense que pourvu qu'on a fait réaliser qu'il y a véritablement un problème, un vide juridique, on aurait peut-être intérêt à s'y pencher.

Il y a un autre problème qui me paraît être de nature beaucoup plus mécanique. C'est un problème simplement logique. Vous avez une convention collective. Elle a trois éléments au point de vue de son étalement dans le temps. Elle a un point de départ. Elle a un point de terminaison. Elle a une durée. Or, on peut trouver dans le Code du travail une règle qui va déterminer dans les cas où il y a des doutes sur son point de départ, une règle qui va déterminer dans le cas où il y a des doutes sur sa durée, et une troisième règle qui va déterminer son point d'arrivée ou sa terminaison. On se rend compte tout de suite qu'on n'a pas besoin de plus de deux de ces règles. On peut choisir n'importe quelle des deux. On n'a pas besoin des trois.

Si on a un processus légèrement différent pour déterminer le départ, la durée et l'arrivée, on peut très bien prendre des décisions qui ne soient pas conséquentes ou cohérentes les unes avec les autres. On se rend compte tout de suite qu'on voudrait avoir une paire de règles pour déterminer ces trois choses et ça serait bien suffisant.

Il s'agit de déterminer le départ et la durée pour avoir automatiquement la fin, ou de déterminer la fin et la durée pour avoir le point de départ, ou alors de déterminer le point de départ et le point d'arrivée et, automatiquement, on va avoir la durée. Mais, d'avoir trois règles pour déterminer une chose où il y a deux degrés de liberté, pour parler en termes tout simplement logiques, on court le risque de s'enfarger dans les règles et d'arriver à des décisions qui, prises dans des instances différentes et pour des raisons différentes, vont aboutir à des choses qui ne tiennent pas debout, où il y aura une durée qui ne sera pas consistante avec le point de départ et le point d'arrivée.

Il y a une durée limite, par exemple, qui se trouve à l'article 54, qui ne peut être plus de trois ans. Il se peut, si on prend les règles de départ et qu'on détermine la date de début, qu'on prenne les règles séparées et une procédure séparée pour déterminer la fin et qu'on en arrive à plus de trois ans. Qu'est-ce qui arrive, là? Il y a quelque chose de pas cohérent. Il me semble qu'on a une règle de trop, et la règle de trop, elle se trouve — ce n'est pas par hasard qu'on soulève ça — à l'article 40b.

On a déjà une règle pour dire le début, une règle pour la durée et là on veut nous donner une règle pour la fin. Bien, mon Dieu! Il me semble qu'on en met un peu trop, pas parce qu'on n'est pas d'accord avec la façon de déterminer, mais c'est simplement une de trop qui peut, à l'occasion, aboutir à des contradictions.

M. Johnson: M. le Président, si vous permettez. Je comprends le raisonnement du député de Saint-Laurent. Mais quand on dit que le commissaire peut décider, il doit nécessairement se conformer aux règles, sauf qu'il peut arriver... M. Auclair me soulignait qu'à un moment donné cela

peut être un problème d'écriture. Est-ce que c'est, par exemple, le 11 ou le 17? Le 1 et le 7 peuvent, à un moment donné, paraître les mêmes, parce que c'est écrit à la main. Il devra déterminer, parce qu'à un moment donné il peut y avoir une association qui demande une requête en accréditation et qui dise: Moi, je veux savoir et je veux être sûr qu'il n'y aura pas un refus de ma requête, parce que je ne suis pas dans les délais. On demandera au commissaire-enquêteur, pour fins d'informations: Cette convention, qui expire dans deux ans, elle expire dans deux ans à partir du quoi, du 11 ou du 17? Ce n'est pas clair.

Il faut, à un moment donné, qu'il tranche quelque part.

M. Forget: Oui, mais c'est ça qu'il faut déterminer. Si le départ n'est pas clair, qu'on le clarifie, mais qu'on ne prenne pas une autre règle pour déterminer la fin, parce que ça pourrait ne plus marcher avec ce qui avait été déterminé par ailleurs.

M. Johnson: Oui, mais il va être obligé...

M. Forget: Le problème peut être réel, mais la solution, ce n'est pas d'avoir une troisième règle pour déterminer une troisième date...

M. Johnson: Non, je pense...

M. Forget: ... c'est de clarifier la date qui n'est pas claire.

M. Johnson: ... C'est bien évident que le commissaire-enquêteur ne peut aller au-delà de ce que dit le code. Il faut qu'il se réfère à l'article 60, à l'article 54, à l'article 57, etc., il est obligé de faire ça.

M. Forget: C'est ce qu'on dit.

M. Johnson: Sauf qu'à un moment donné, sur une question d'erreur d'écriture, il faut lui donner la possibilité de se prononcer. Il faut, à un moment donné... Cela peut être le chiffre impliquant la date d'expiration de la convention collective qui ne soit pas clair comme ça peut être la date de la signature qui ne soit pas claire, s'il est question d'une durée plutôt que d'une date fixe.

M. Forget: Oui, mais, à ce moment-là, ce que fait le commissaire, ce n'est pas déterminer la date de la fin, c'est interpréter la fin qui est inscrite dans la convention collective. Ce n'est pas la même procédure. Quand on dit à un tribunal: On a une date qui est ici écrite, les parties se sont entendues et on n'est plus capable de la lire. Ce n'est pas la question d'avoir le pouvoir discrétionnaire de fixer la fin, c'est simplement d'essayer, par toutes les preuves possibles, de déterminer quelle est la fin qui a été fixée par d'autres.

M. Johnson: Voilà!

M. Forget: Ce n'est pas tout à fait la même chose.

M. Johnson: C'est ce que dit le texte, justement. Il peut, en tout temps...

M. Forget: Non, il détermine la date d'expiration. Il n'interprète pas la convention collective, il détermine la date.

M. Chevrette: Cela, c'est...

M. Johnson: Lorsque cette date n'est pas clairement indiquée.

M. Chevrette: Mais, de toute façon, dans une convention collective, il y a toujours une clause finale qui dit que la convention vaut de telle date à telle date. C'est fait et signé à... tel jour. Cela peut être moins clair...

M. Johnson: Quand elles sont bien faites.

M. Chevrette: Quand elles sont bien faites, mais la grande majorité des conventions collectives...

M. Johnson: Cette règle vaut dans le cas où elles ne le sont pas, justement. C'est pour les cas d'imprécision.

M. Forget: Bien sûr que, quand tout est clair, on n'a besoin d'aucune règle.

M. Chevrette: Bien oui, mais si c'est pour déterminer si c'est le 10 ou le 12, cela ne doit pas être bien grave.

M. Forget: M. le Président...

M. Chevrette: De toute façon, les prescriptions du code...

M. Forget: ... enfin, je pense qu'on s'est fait comprendre et qu'il y a, sur le plan logique, quelque chose de trop dans le Code du travail qui peut, à l'occasion, et très rarement, causer des problèmes. Ce n'est pas un débat de fond sur de grands principes. C'est simplement une question de problème de rédaction. Il me semble qu'il y a un illogisme à la rédaction qu'on nous propose. Si on veut absorber l'illogisme et en prendre la responsabilité, je n'ai pas l'intention de parler toute la nuit sur cela.

Sur le sujet cependant, et là on vient à quelque chose de peut-être un peu plus substantiel, il y a la présomption que l'avis a été donné. Je pense que c'est plus sérieux parce que c'est vraiment du droit nouveau. Cela introduit une règle nouvelle et ce n'est pas une question de structure et de logique du Code, c'est vraiment une règle de jeu nouvelle. On dit, d'autres que nous l'ont dit — et on prend simplement le témoignage qui a été rendu dans certains mémoires — que si on adopte une telle présomption, quand il n'y a pas eu d'avis, on présume, à cause de l'écoulement des délais, que l'avis a été donné. On produit une situation où la preuve de bonne foi va être beaucoup plus difficile à établir en ce sens qu'une partie qui aurait dû

donner un avis et qui ne l'a pas fait, ou une partie qui, ayant donné un avis qui n'a pas été suivi d'une action par l'autre, si on veut donner avis — et je sais que le ministre a fait des interventions publiques, à ce sujet, en disant qu'il ne fallait pas se moquer de la bonne foi — C'est une notion qu'on aurait mérite à creuser et à explorer, parce qu'il y a un problème de bonne foi dans certaines négociations collectives. Dans les cas de présomption, la preuve de bonne foi va être difficile à faire. Il n'y aura pas eu d'avis. Comment démontrer que l'autre partie n'est pas venue négocier au moment où elle était convoquée, qu'elle n'a pas eu d'avis? C'est simplement l'écoulement des délais. N'est-ce pas une objection qui mériterait d'être examinée un peu?

M. Johnson: Je comprends la préoccupation du député de Saint-Laurent. Cependant, c'est strictement pour les fins de la computation du délai du droit d'acquisition de grève, parce qu'on est en conciliation volontaire. Il faut donc présumer que, quelque part, à un moment donné, comme on est en conciliation volontaire, le droit de grève, comme on sait, va être acquis automatiquement en fonction de différents délais qui n'ont rien à voir cependant avec un avis demandant un conciliateur. Il faudra savoir, à un moment donné devant une grève, par exemple quant à l'application des dispositions antibriseurs de grève, s'il s'agit bel et bien d'une mesure qui s'applique quand les délais prévus à 46 ont été respectés. Or, il s'agit de savoir si oui ou non les délais de 46 ont été respectés. Il s'agit de savoir si c'est une grève légale ou pas. On présume donc qu'il y a eu avis de négociation à telle date pour déclencher automatiquement le chronométrage, le compte à rebours du droit de grève. C'est la seule fin de cela.

M. Forget: Dans ce cas-là, je suis d'accord avec le ministre. Il s'agit de faire une constatation. C'est blanc ou noir. Il y a eu un avis et les délais ont couru ou pas. C'est clair. Mais par exemple, quand on revient aux autres dispositions, qu'on verra un peu plus loin, sur la négociation d'une première convention collective et où, spécifiquement, le texte dit: En fonction du comportement des parties et de leur bonne foi, ou quelque chose à cet effet, où la bonne foi est un élément qui va servir à l'évaluation et à l'appréciation des circonstances, si on s'enlève les moyens objectifs d'essayer de voir par exemple: Là il n'y a pas eu bonne foi, voyez! Il y a eu un avis et l'autre partie ne s'est pas rendue! C'est une des indications parmi d'autres. Mais dans la jurisprudence américaine, où on a été beaucoup plus loin qu'au Québec pour essayer de circonscrire des signes extérieurs de bonne foi — parce qu'il faut quand même se rabattre là-dessus, on ne peut pas demander aux gens s'ils pensent qu'ils étaient de bonne foi — il faut avoir des signes extérieurs qui révèlent tous les gestes qu'une personne de bonne foi fait normalement.

Or, la non-réponse à un avis a été interprété par les tribunaux américains comme une preuve extérieure, une des preuves, pas la seule bien sûr, mais une des preuves que la bonne foi n'était pas là. Et comme la bonne foi joue un rôle, selon le ministre, et je suis un peu d'accord avec lui, on devrait peut-être essayer de lui donner un peu de contenu, à cette notion, un contenu opérationnel, en faisant cette présomption: c'est vrai qu'on va avoir la décision blanc-noir; les délais sont courus; mais on le saurait de toute façon que les délais sont courus. Mais là, on s'enlève peut-être un instrument. Cela a été souligné par Me Barré dans son mémoire. Quant à moi, quand je l'ai lu, j'ai trouvé cela persuasif. Ce n'est peut-être pas un gros instrument, mais il n'y en a pas beaucoup d'instruments pour vérifier la bonne foi. Qu'est-ce que cela va être? Il n'y a pas de témoins à toutes les négociations préliminaires pour savoir comment les parties se sont comportées. On perd alors cet instrument.

M. Johnson: Cela nous prive effectivement d'un des éléments qui pourraient, comme le disait le député de Saint-Laurent, être un signe extérieur de bonne foi. Cependant, c'est fondamental que le délai de grève puisse commencer à courir à partir d'un certain moment donné.

M. Forget: Pourtant personne ne se donne la peine de donner un avis; ce n'est pourtant pas compliqué.

M. Johnson: Non, mais d'autre part, disons que... D'accord, il pourrait arriver un cas où personne ne se donne la peine de donner un avis. Cependant, il pourrait aussi arriver la situation — puisqu'on parle d'une association de salariés nouvellement accréditée — où l'avis, pour une raison ou pour une autre, ne peut se rendre ou ne s'est pas rendu et on est rendu à plus de 90 jours de la date de l'accréditation. Si, par exemple, notre collègue, ancien ministre des Postes et du Travail, était au prise avec une grève dans le secteur des postes et des télégraphistes, on pourrait arriver à une situation où il y a impossibilité d'envoyer l'avis. Alors, on les pénaliserait, en ce sens qu'on les empêcherait de pouvoir faire courir leur droit de grève.

M. Forget: Non, écoutez, M. le ministre, vous avez aussi 40a et, dans 40a, l'avis n'est pas envoyé. On ne peut pas imaginer des situations où il est physiquement impossible de communiquer entre patron et employés, c'est quand même assez difficile à imaginer, mais là, la copie est envoyée au ministère et on peut imaginer que l'avis envoyé au patron se perd, ou vice versa, par hasard, mais, au moins, l'avis envoyé au ministre ne sera pas subtilisé, j'imagine, et là, il y a un accusé de réception.

M. Johnson: Honnêtement, je pense qu'il y a plus de risques de se perdre au ministère que chez l'employeur!

M. Forget: Peut-être, mais, apparemment, vous êtes en train de vous organiser, avec un greffier, etc. Le ministère, de toute façon, va donner le

signal qu'il ne l'a pas reçu parce qu'il est obligé d'avertir les parties de la date où il l'a reçu, et la partie qui l'a donné, si elle ne reçoit pas l'avis, va se douter qu'il y a quelque chose de pas correct qui s'est passé; elle va en envoyer un deuxième ou elle va faire quelque chose. C'est que le danger, semble-t-il, n'est pas seulement de perdre un signe extérieur de bonne foi, c'est de se retrouver, dans le fond, dans une situation où les deux parties peuvent engager des hostilités assez grandes: la grève ou le lock-out, alors que, dans le fond, ni l'une ni l'autre n'a fait, n'a posé le moindre geste pour engager le dialogue. C'est paradoxal.

M. Johnson: M. le Président, encore une fois, je comprends la préoccupation du député de Saint-Laurent, mais on me souligne une autre raison qui m'apparaît fondamentale. Le délai de maraudage, comme on le sait, peut être constaté dans la mesure où on a un délai d'expiration de convention collective ou encore un délai en vertu de la conjonction de 60, 41, 46 et 21, une conjonction du délai de l'acquisition du droit de grève. Or, il pourrait arriver la situation suivante: Un syndicat est accrédité et, 15 ou 20 jours plus tard, il meurt de sa belle mort, il n'envoie jamais d'avis, mais il demeure un syndicat qui, étant donné qu'il n'y a pas d'acquisition du droit de grève qui commence à courir à partir du 90e jour de son accréditation, il est un syndicat qui empêche le maraudage parce qu'on sait que le maraudage — pour qu'un autre syndicat vienne prendre sa place — dépend de l'acquisition du droit de grève et de cette date. Donc, on pourrait, en d'autres termes, accréditer une association de salariés qui traîne dans le décor pendant trois mois, six mois, un an, n'envoie jamais d'avis et, en fin de compte, une autre association essaie de se former pour représenter ces salariés; elle ne le peut pas parce qu'on n'a jamais obtenu le droit en question.

M. Bisaillon: M. le Président.

Le Président (M. Clair): Le député de Sainte-Marie fulmine à l'autre bout!

M. Forget: Mon intervention ne sera pas tellement longue, ça va être de 30 secondes. C'est que, quand le ministre dit cela, il a raison, dans le contexte de la fenêtre étroite dont on parlait hier et, à cause de l'étroitesse de la fenêtre — que j'au- rais voulu élargir — dans le cas où on n'a qu'à constater l'inexistence d'un syndicat, pour les raisons qu'il vient de mentionner, on crée une situation beaucoup plus générale où la déclaration des hostilités précède même une tentative d'avoir une conférence de paix. Il me semble que l'effet dépasse de loin les causes voulues.

Le Président (M. Clair): M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Ce sera plus rapide que ça n'aurait dû l'être, M. le Président, mais on ne réglera évidemment pas ça ce soir.

Ce que je veux souligner, c'est que, dans le premier cas soulevé par le député de Saint-Laurent, je ne pense pas que ça devrait être retenu. Dans le deuxième cas, cependant, il me semble qu'on pourrait peut-être, effectivement, se poser la question, quand bien même ce serait uniquement en termes de manifestation par les parties.

Par ailleurs, dans le dernier exemple que vient de donner le ministre et qui pourrait se justifier en pratique, il me semble qu'on a là un exemple parfait de collusion entre un employeur et un syndicat fantôme et que le syndicat qui voudrait, par exemple, regrouper les travailleurs aurait la plus belle preuve de collusion entre un employeur et une organisation syndicale, ce qui pourrait...

M. Johnson: Cela pourrait encore être carrément de la négligence ou l'absence des personnes, etc., mais cela pourrait être aussi de la collusion. Pardon?

M. Bisaillon: A ce moment-là, l'employeur pourrait lui-même dénoncer.

M. Johnson: D'accord. Alors, M. le Président, je demande l'ajournement de nos travaux sine die.

Le Président (M. Clair): Est-ce que vous savez si, demain matin...

M. Johnson: La Chambre siège. On ajourne.

Le Président (M. Clair): La commission permanente du travail ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 0 h 1)

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