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(Sept heures trente-quatre minutes)
M. Arseneau : Alors, bonjour, tout
le monde. Aujourd'hui, on le voit, le gouvernement de François Legault augmente
sa moyenne au bâillon. C'est le huitième bâillon qu'il impose à l'Assemblée
nationale depuis son accession au pouvoir. Et évidemment on aurait pu éviter ce
mélodrame si le gouvernement avait négocié de bonne foi avec les médecins. On a
vu ce mauvais spectacle et cette escalade, qui n'est certainement pas bénéfique
pour les patients et les patientes du Québec.
Cela dit, on va étudier le projet de loi
avec attention parce qu'en fait on ne sait pas exactement ce que le
gouvernement va retenir du projet de loi n° 106 qui a été déposé, vous vous en
souviendrez, au printemps. Et aujourd'hui, là, vraiment, le fardeau de la
preuve repose sur le gouvernement. Il doit nous faire la démonstration que ce
qu'il va inclure dans le projet de loi, là, outre la fin des moyens de pression
des médecins dans l'enseignement, va pouvoir améliorer l'accès aux soins de
santé, la qualité des soins de santé au Québec, comment les pratiques qu'il va
inscrire ou les méthodes de financement, de rémunération, mais, surtout, le
renforcement de la première ligne peut fonctionner avec son approche actuelle.
Et je vous avoue qu'on a un certain scepticisme parce que, lors de l'étude du projet
de loi n° 106... on n'a pas pu commencer à l'étudier article par article, mais,
lors des consultations, les experts étaient unanimes pour dire que le
gouvernement utilisait une méthode qui avait été essayée ailleurs et qui ne
fonctionnait pas : la méthode fast-food, la méthode quantitative, par
volumétrie. Augmenter les rendez-vous, augmenter les... la prise en charge, le
nombre de personnes sur le même médecin, ça ne veut pas nécessairement dire qu'on
va améliorer la qualité des soins et la santé des gens.
Et on apprend ce matin, dans un article
choc de La Presse, que même des fonctionnaires à l'intérieur du
ministère ont levé des drapeaux rouges pour dire : On n'a pas les moyens
de vérifier l'atteinte des objectifs qu'on veut imposer aux médecins.
Alors, on verra ce que le gouvernement va
proposer ce matin, on va faire notre travail, mais on espère... on espère quand
même que le gouvernement aura écouté les experts lors des consultations
particulières et qu'il aura retenu un certain nombre de propositions, qui peut
éviter le chaos qu'on peut imaginer au lendemain de l'adoption d'une loi comme
celle-là, de façon, vous le voyez, là, autoritaire et par bâillon.
Journaliste
: Et les
fonctionnaires qui ont levé des drapeaux rouges ont été congédiés.
M. Arseneau : Absolument.
Alors, on voit que le gouvernement et le ministre Dubé ne tolèrent pas la
dissidence et surtout pas n'est pas... et surtout n'est pas à l'écoute des
propositions à l'interne pour améliorer son projet de loi. Est-ce qu'il le sera
davantage aujourd'hui face aux parlementaires? Bien, c'est ce qu'on verra, mais
disons que c'est mal parti.
Journaliste : Qu'est-ce que
vous pensez des mesures qui semblent être présentes, là, pour empêcher ou
limiter un éventuel exode des médecins?
M. Arseneau : Bien, écoutez,
c'est assez ironique de voir qu'on a adopté un projet de loi il y a quelques
mois, le projet de loi n° 83, qui devait empêcher le phénomène des portes
tournantes, les médecins qui vont pratiquer au privé puis qui reviennent au public.
On devait, donc, endiguer l'exode des médecins vers le privé. On devait aussi
empêcher les jeunes médecins diplômés au Québec d'aller pratiquer ailleurs.
Les statistiques qu'on a sont quand même
révélatrices. Depuis le début... Depuis l'adoption de ce projet de loi là, bien,
l'exode a continué. En fait, sur les 488 demandes qui ont été faites à Santé
Québec pour... par les médecins spécialistes pour aller au privé, il y en a 423
qui ont été approuvées. Si on compare le mois de septembre de cette année au
mois de septembre de l'année passée, donc avant l'adoption de la loi, il y a
davantage de médecins qui sont passés au privé. Il y en a plus de 900 au Québec
qui pratiquent au privé. Alors, ce projet de loi là n'a pas fonctionné.
Aujourd'hui, quelles sont les mesures
proposées par le gouvernement pour que ça fonctionne? On ne le sait pas, mais
on a déjà raté notre coup dans l'adoption d'un projet de loi. Est-ce qu'on aura
des articles aujourd'hui qui pourront empêcher les médecins de changer de lieu
de pratique puis d'aller s'installer au Nouveau-Brunswick ou en Ontario?
Journaliste : Mais votre
argument, c'est que ça ne fonctionnerait pas. Vous n'avez pas d'objection sur
le principe qu'on recourt à ça.
M. Arseneau : Bien, si ça
brime les droits et libertés de la personne, on va avoir des objections. Mais,
si on trouve un mécanisme pour s'assurer que les médecins puissent continuer de
pratiquer au Québec sans brimer le... je dirais, là, les principes fondamentaux,
les droits humains, écoutez, on va l'étudier. Mais, encore là, c'est le
principe de la force. C'est une approche autoritaire. C'est dire aux médecins :
Vous allez pratiquer une médecine fast-food contraire à vos valeurs, contraire
à votre serment d'Hippocrate, mais on va vous forcer à le faire au Québec. C'est...
Encore une fois, là, c'est la mauvaise méthode.
Journaliste : Qu'est-ce que
le Parti québécois va faire, M. Arseneau? Là, hier, ce n'était pas clair, parce
que vous demandiez la levée des moyens de pression. La FMOQ l'a fait. Là, il
reste le 106. Allez-vous voter pour ou contre?
M. Arseneau : Bien, on va
regarder. Vous nous demandez de nous prononcer sur un projet de loi qu'on n'a
pas vu encore. C'est clair qu'on ne répondra pas par l'affirmative ou la
négative. Nous, ce qu'on vient dire, c'est que le fardeau de la preuve repose
sur les épaules du gouvernement, et il doit nous dire ce qu'il veut faire, puis
on en jugera. Ce qu'on dit, c'est que le projet de loi n° 106, dans sa forme
initiale, était inacceptable parce qu'il vise les mauvais objectifs et des
objectifs qu'on ne peut pas mesurer au gouvernement. Il veut du volume. Nous,
on veut de la qualité.
Journaliste : Sur l'idée de
lier la rémunération à des cibles de performance, là, peut-être pas celles-là,
mais sur ce principe-là, êtes-vous d'accord avec ça?
M. Arseneau : Bien, ça fait
fausse route. Le gouvernement a commandé un rapport d'experts, qu'il a
tabletté, là, où on dit que ce qu'il faut, ce n'est pas des cibles
volumétriques puis de la médecine fast-food au Québec. Ce qu'on veut, c'est
améliorer la qualité des soins et la prise en charge, et pour ça, on a une
annexe où il y a cinq pages de critères qualitatifs avec lesquels on pourrait
composer pour améliorer la pratique de la médecine et la première ligne au
Québec. Le gouvernement fait fi de tout ça.
Journaliste : Mais la
capitation pour assurer la prise en charge, ça, ça peut aider?
M. Arseneau : Ah! on est d'accord.
Mais, de toute façon, on a déjà, jusqu'à un certain point, un mode mixte de
rémunération. Il y a un peu de salariat, il y a la capitation, qu'on veut
augmenter, et on est d'accord. Réduire le paiement à l'acte, on est également d'accord.
Mais là l'élément de performance, et de volume, et de productivité basé sur des
indicateurs qu'on ne peut même pas vérifier au gouvernement, les experts nous
disent que ce n'est pas la façon de faire, puis on est un peu d'accord.
Journaliste
: Que
feriez-vous si vous étiez au pouvoir?
M. Arseneau : Bien, en fait,
nous, ce qu'on dit, c'est qu'il faut renforcer la première ligne. S'en prendre
uniquement aux médecins, ça peut avoir un certain effet dans l'opinion
publique, là, mais ça ne règle rien en matière d'amélioration des soins de
santé ou d'accès à des soins de santé de qualité ou à une prise en charge.
Ce que le gouvernement a essayé de faire
aujourd'hui, c'est de dire : Oui, j'ai promis que tous les Québécoises et les
Québécois auraient un médecin avant la fin de mon premier mandat. On est rendus
à la fin du deuxième mandat, et il veut dire : Moi, il faut que les listes
disparaissent, il faut que les gens soient inscrits pour un lieu de pratique,
dans un lieu de pratique. Mais est-ce que ça garantit qu'ils vont pouvoir voir
un médecin davantage qu'aujourd'hui?
Journaliste : ...Parti québécois
donne des augmentations de salaire de 17 % puis 30 % aux médecins, comme
ils demandent?
M. Arseneau : Non, absolument
pas. Bien, on pense que l'enveloppe est suffisante pour pouvoir rémunérer les
médecins et avoir un système qui fonctionne. On n'est pas du tout dans des
augmentations.
Journaliste
: Donc,
zéro, pas d'augmentation?
M. Arseneau : Bien, écoutez,
on n'est pas dans la négociation, là, mais on pense que l'enveloppe est
largement suffisante pour se doter des systèmes de santé de qualité.
Journaliste
: Il a dit
qu'il faisait, dans le fond, ce que Michel Clair avait recommandé au PQ il y a
25 ans. C'est un péquiste.
M. Arseneau : Je pense que M.
Legault confond ce que M. Clair, la commission Clair avait proposé sur
l'organisation des soins de santé... Et là on a invoqué et évoqué le rapport de
Michel Clair à de nombreuses reprises, lorsque le projet de loi 15 a été
adopté. M. Clair était même venu en commission parlementaire. Mais là,
l'identification des moyens dans le projet de loi n° 106 pour augmenter le
volume de personnes qui sont sous la responsabilité d'un médecin ou d'un lieu
de pratique, à ce que je sache, ça ne vient pas de Michel Clair, ça vient de
Christian Dubé, qui n'a pas écouté ses propres fonctionnaires pour nous
enfoncer ça à travers de la gorge aujourd'hui.
Journaliste
: Just your thoughts on the
idea of making doctors stay?
M. Arseneau : We don't know what means they're going to choose. But one thing is
for sure, there was a law, Bill 83, that was adopted a few months ago, and it's
not working. Close to 500 doctors asked to go to private sector, and the vast
majority of them had the permission from Sante Québec. So, what will it change
in this new bill, special bill? What kind of means they'll put forward to
forbid a family to move to another province or another country? I'm curious to
see how they're going to manage that.
Journaliste
: And this bill… what… we don't even know exactly what's in it. But
you're saying this is going to be like a kind of fast-food medicine.
M. Arseneau : That's what experts told us during the consultations. They said:
Well, the Government's way of looking at it is that he wants the lists of
people waiting for a doctor to disappear. So, the list will disappear. Will
they have access to a doctor? Will they have access to the services? We don't
think so. We've seen that kind of system implemented in Great Britain, it
didn't work, among other things. So, will it work in Québec? We don't think so.
But right now, today, we're giving the Government the benefit of the doubt.
Give us what you have, what you think will work, and we'll study it. We only
got five hours to do so, so we're skeptical. But he has to prove that it will
improve the system for Quebecers. Right now, we don't think we're going the
right way about it. Thank you. Merci.
(Fin à 7 h 44)