(Quinze heures quarante-neuf minutes)
M. Leduc : Bonjour, tout le
monde. Merci d'être là. Deux réactions. La première sur le nouveau projet de
loi du ministre du Travail sur l'encadrement du travail des enfants. On a fait
une première lecture rapide. Somme toute intéressant.
On avait des craintes par rapport aux
exemptions que le ministre pourrait donner sur la question des secteurs du
commerce de détail et de la restauration, qui étaient les deux secteurs où sont
majoritairement présents les adolescents de 12, 13 ans et autres. On avait
différentes craintes. On pensait qu'il ferait cette exemption-là dans un
deuxième temps à travers un règlement qui serait adopté plus tard. Or, le
règlement est à même le projet de loi, un processus qu'il avait déjà fait, là,
dans le cadre du projet de loi n° 59, là, sur la réforme de la santé-sécurité.
Et, dans les exemptions du règlement, on ne retrouve pas lesdits secteurs, là,
de commerce de détail et de restauration. Donc ça, c'est une très bonne
nouvelle.
On avait aussi la crainte qu'il passe à
travers le chemin des tâches légères en disant : Bien, les tâches légères,
c'est moins grave, ils pourront le faire à 12, 13 ans. Notre première
lecture du projet loi ne nous laisse pas penser qu'il a utilisé ce chemin-là.
On va le relire attentivement.
Finalement, il y a un autre chemin qui est
peut-être moins grave en matière de nombre de personnes, c'est les entreprises
familiales. Il y a une exemption pour les enfants qui travaillaient dans des
entreprises familiales, toutes sortes de détails qui sont donnés, qui
pourraient permettre d'avoir des employés de 12, 13 ans et moins. Donc,
ça, c'est à creuser un peu de notre côté parce que ça ne faisait pas partie du
consensus de la CCTM, de faire des exemptions pour les entreprises familiales.
Donc, il y a quand même une crainte ici, un peu, que ça soit utilisé comme
manière pour rentrer par la porte d'en arrière avec le travail des 12, 13 ans,
mais ça ne sera certainement pas de la même ampleur que s'il avait fait l'exemption
pour l'entièreté d'un secteur, comme on le craignait et comme le réclamait l'Association
des restaurateurs.
Donc, de manière globale, pour l'instant,
on est satisfaits du projet de loi. Comme je vous dis, on a encore des choses à
creuser, des angles à travailler, des gens à consulter, mais somme toute, j'ose
crier un peu victoire sur le fait qu'il n'est pas allé dans l'exemption
complète pour les deux secteurs, comme on le craignait, comme le voulait la
rumeur qui était très forte il y a quelques semaines d'ailleurs. Alors, on est
contents d'avoir contribué, peut-être avec nos questions puis nos points de
presse sur le sujet, à ce qu'il n'aille pas dans ce sens-là pour l'instant.
Voilà pour le projet de loi du ministre. Je répondrai à vos questions, bien
sûr, dans quelques instants.
Mais d'abord, une réaction sur ce qu'on
vient de vivre après... à partir de notre motion qu'on a déposée, la motion, je
le rappelle, qui visait à dénoncer les propos difficiles qui ont été tenus, là,
dans les derniers mois à propos, là, de deux caucus, le nôtre en particulier et
celui des libéraux. On avait là l'occasion de faire, je pense, un geste
d'unité, un geste fort de la classe politique. On avait déjà reçu beaucoup de
messages de sympathie dans les derniers jours, notamment directement du premier
ministre, de différents ministres, de différents députés de plein de formations
politiques distinctes et avec ce message-là qu'on voulait, dans le fond,
cimenter, cette ligne qu'on veut tracer. On vit dans un moment où les menaces
concrètes envers les élus se multiplient. Nous avons des familles, des amis, on
a des vies puis on considère que, quand il y a des propos aussi haineux qui
sont dits dans un espace public, des propos aussi violents, bien, ce n'est pas
facile à vivre, et qu'il faut les dénoncer, il faut tracer la ligne.
Malheureusement, le PQ n'a pas accepté d'être consentant sur la motion
aujourd'hui. Donc, moi, je trouve ça extrêmement décevant. Je ne comprends pas
leur motivation. Je ne comprends pas ce qui les a empêchés de nous appuyer dans
cette démarche-là. C'est triste. C'est vraiment triste. On manque une occasion
très claire de faire un message unitaire de la classe politique, de faire un
message que les partis politiques, peu importe leur tendance... On se chamaille
souvent ici, là, hein? On s'envoie des critiques assez salées sur tous sujets
possibles. Mais il y a des propos qu'on ne doit pas tenir dans l'espace public,
des insultes dures, et ça, malheureusement, bien, ça n'a pas été possible
d'avoir un message unitaire. Je remercie les collègues de la CAQ, les collègues
des libéraux de nous avoir appuyés dans cette motion, et, encore une fois, très
déçu de la réaction du Parti québécois.
M. Carabin (François) : Juste
pour être certain, M. Leduc, vous avez décidé, comme parti, de ne pas
porter plainte à la Sûreté du Québec, là. C'est ce que M. Nadeau-Dubois a
dit ce matin. Pourquoi ne pas porter plainte si les propos étaient violents
comme vous le dites?
M. Leduc : L'ambition,
c'était vraiment d'envoyer un message. Ce n'était pas de mettre la police
nécessairement aux trousses de M. Proulx. Le but, c'est de tracer une
ligne collective sur le type de discours qu'on entend. Vous savez, tous les
gens impliqués en politique, qui font notamment du recrutement pour avoir des
nouvelles personnes candidates, vous diront tous la même chose, peu importe les
couleurs partisanes. C'est rendu extrêmement difficile de recruter des
personnes pour se présenter en politique, en particulier les femmes, et tout ce
qu'elles vont... elles vont toutes dire ça. Le climat dans lequel on évolue y
est pour beaucoup. Bien sûr, il y a toutes les formes de sacrifice que ça
implique dans la vie personnelle, mais se faire invectiver, se faire envoyer
promener, se faire traiter de toutes sortes de noms, c'est une chose, surtout
sur les réseaux sociaux, on en reçoit un paquet de manière quotidienne, bien
sûr, encore plus gros quand c'est le cas... quand c'est une femme. Mais là,
quand c'est rendu qu'on a des chroniqueurs qui se permettent ce genre de
langage là, en quelque sorte en toute impunité, là on traverse une zone sur
laquelle, je pense, qu'il faut tracer une ligne. Et c'est ce qu'on recherchait
aujourd'hui à travers la motion des... avec les autres partis. Encore une fois,
je remercie la CAQ et les libéraux d'avoir appuyé la motion et très déçu que le
PQ ait refusé.
M. Carabin (François) : Qu'est-ce
qui... Bien, vous n'auriez pas visé quelqu'un? Est-ce qu'il n'y avait pas un
inconfort chez Québec solidaire de... bon, vous ne le nommez pas dans la
motion, là, mais de viser quelqu'un, de nommer, sans nommer une personne, puis
de faire son tribunal populaire là, pour réutiliser l'expression de M. Bérubé,
sur la place publique?
M. Leduc : Je n'ai pas
compris. Qu'est-ce qu'il a dit, M. Bérubé, un tribunal populaire?
M. Carabin (François) : Il a
parlé d'un tribunal, là. Il a dit...
M. Leduc : Ah! Tantôt, dans
sa réplique.
M. Carabin (François) : ...qu'il
ne voulait pas que l'Assemblée nationale devienne un tribunal. Est-ce que ce
n'était pas exactement ce que vous faisiez en déposant une motion qui mentionne
les propos d'un chroniqueur, qui n'est pas nommé, encore une fois, mais on sait
de qui on parle?
M. Leduc : Les propos qui ont
été tenus par M. Proulx sont publics. Ils ont été entendus en boucle dans
les différents reportages qui ont été faits dans les derniers jours sur le
sujet. On n'est pas dans une situation où on sort de notre chapeau quelque
chose qui aurait été dit la veille, dont l'extrait est difficile à aller
chercher, et qu'on met tout le monde devant le fait établi, et qu'on bouscule
les gens, là. C'est des propos qui sont tenus depuis quand même certains jours,
certaines semaines. Dans le cas des propos envers les libéraux, ça fait
quelques mois, d'ailleurs, si je ne me trompe pas. Ce n'est pas un tribunal
populaire, là. Tout le monde a entendu ça. Ça a été analysé en long et en
large.
Je vais vous le dire, en espérant aller
chercher l'appui du Parti québécois, on n'a même pas fait référence aux fameux
propos, là, qui étaient contestés... achevés, là. Est-ce qu'ils visaient
vraiment les solidaires ou pas? Bon, tout le monde peut se faire son opinion en
écoutant l'extrait, mais on se disait : Bon, c'est sûr que si on met ça,
le PQ ne voudra peut-être pas embarquer. Alors, on ne l'a pas fait. Et, même à
ça, ils n'ont pas voulu embarquer avec à peu près aucune communication avec
nous au préalable, à part de vouloir biffer des extraits presque complets de la
motion et la vider de sa substance. Alors, c'est sûr que, là, on se place dans
une drôle de situation où on n'a pas de dialogue et on est incapables d'envoyer
un message clair de l'ensemble de la classe politique sur le fait que ces
propos-là, des propos, je le rappelle, violents, des propos haineux, ne
devraient pas être tolérés dans un média de l'information.
M. Carabin (François) : Vous
l'expliquez comment, cette réaction du PQ? Est-ce que c'est parce que, par
exemple, M. Proulx a donné son appui public au Parti québécois de Paul
St-Pierre Plamondon?
M. Leduc : Je ne veux pas
entrer dans des hypothèses. Il faudrait leur demander à eux. Tout ce que je
sais, c'est qu'aujourd'hui ils ont manqué une belle occasion de faire un
message unifié, un message unitaire de l'ensemble de la classe politique, qui
aurait pu participer... qui, j'espère, va quand même avoir un effet bénéfique
de baisser les tensions, parce qu'il y en a beaucoup. Et on parle de la
sécurité des élus ici, là. Ils le savent, tout le monde le sait qu'il y a de la
pression, les services de sécurité nous en parlent des fois. Avec la pandémie
dont on a traversé, c'est quelque chose qu'on a vécu. J'en ai vécu, moi,
lorsqu'il y a eu la manifestation au Stade olympique à propos de la vaccination.
J'ai eu des menaces de mort à ma famille directement chez nous. Alors, c'est un
moment où, je pense, on doit se serrer les coudes et on doit comprendre... puis
on doit avoir un rôle à jouer dans l'apaisement du débat public. J'aurais
souhaité que cette motion-là unanime fasse ce rôle-là... d'une autre manière.
M. Robitaille (Antoine) : Mais
j'ai une question au leader que vous êtes. Dans le passé, il y a quand même eu
une motion contre un livre d'André Pratte, il y a très longtemps, là, dans les
années 90, où il traitait tous les politiciens de menteurs sans exception,
puis ensuite, il y a donc motion de l'Assemblée nationale. Après, évidemment,
il y a eu l'affaire Michaud, où l'Assemblée nationale... et le Parti québécois,
notamment, s'est dépêché à appuyer une motion du Parti libéral pour dénoncer
des propos qui étaient incertains, là. Ce n'était pas... ils n'étaient pas
établis clairement, puis ça a... écoutez, là, ça a été, là, une saga devant les
tribunaux, tout ça. Puis la question des parlementaires, à ce moment-là, ça a
été de se dire : Est-ce qu'on est là pour condamner des propos comme ça?
Est-ce que la motion doit servir à ça? Est-ce que ça, ça ne peut pas être
aussi... Il n'y a pas une raison parlementaire derrière le refus du Parti
québécois? Je me pose la question.
M. Leduc : C'est une bonne
question que vous posez, mais moi, je ne vois pas de parallèle du tout avec
l'affaire Michaud. L'affaire Michaud, on a rapporté des propos que personne ou
à peu près dans la salle avaient lus ou entendus ou analysés. On leur avait dit
à l'époque : Il a dit ça, donc il fallait tout de suite se prononcer. On
n'est pas du tout, du tout dans un scénario similaire aujourd'hui, là. Ça fait
plusieurs mois que ces extraits-là sont en ligne, ça fait plusieurs jours, une
fin de semaine complète, d'ailleurs, que cette situation-là est connue. Comme
je le disais tantôt, les extraits ont roulé en boucle dans les médias. M. Proulx
a eu l'occasion de se positionner lui-même par rapport à ça. Donc, on n'est pas
dans un scénario où est-ce qu'on dit qu'il n'a pas eu à faire sa défense, en
quelque sorte. Donc, loin de nous l'idée de vouloir faire de l'Assemblée
nationale un tribunal. L'idée ici, c'était de dire : Il y a un contexte de
rehaussement dangereux de menace envers les élus, tous paliers confondus, hein,
municipal, provincial, fédéral. Là, c'est un moment où ça concernait en
particulier deux caucus sur quatre, j'oserais dire, de l'Assemblée nationale.
On avait l'occasion de se serrer les coudes. Le PQ a manqué le bateau.
M. Carabin (François) : Si je
vous ramène à l'affaire... appelons-la l'affaire Amira Elghawaby, est-ce que
vous pensez qu'il y a un double discours de la part du Parti québécois qui
avait appuyé une motion ou peut-être même déposé une motion condamnant les
propos de Mme Elghawaby, et qui, aujourd'hui, décide de ne pas appuyer
votre motion?
M. Leduc : De mémoire, c'était
la CAQ qui avait déposé la motion, si je me rappelle bien, ça fait quelques
semaines déjà, mais il me semble que c'était le gouvernement. Est-ce que c'est
un double discours? C'est une bonne question. C'est sûr qu'à ce moment-là on
n'a pas eu d'effet de toge de la part du PQ par rapport à ça. Moi, ce que je
sais, c'est qu'aujourd'hui ils avaient l'occasion de nous en parler. Ils
avaient l'occasion de discuter, ils avaient l'occasion, à la limite, de
négocier. Ils ne l'ont pas fait. Ils ont attendu à dernière seconde pour
annoncer leurs couleurs. C'est regrettable. On a manqué une belle occasion
d'avoir une unité politique qui aurait pu baisser les tensions dans l'espace
public.
Des voix : Merci.
M. Leduc : Merci à vous.
Bonne journée.
(Fin à 16 heures)