(Neuf heures trente-trois minutes)
Mme Dufour : Bon matin. Merci
d'être ici un vendredi.
Je suis ici pour interpeller la ministre
aujourd'hui. Je vais l'interpeller sur la situation du logement. Je suis venue
déjà à deux reprises mentionner à quel point la situation, elle est
critique pour le logement au Québec. Le 1er juillet, c'est dans trois mois
et, malheureusement, c'est un secteur qui est actuellement très négligé par le
gouvernement, particulièrement dans le dernier budget. Alors, c'est pour ça que
je parle d'un gouvernement caquiste désengagé en matière de logement. Je
rappelle qu'il a été annoncé seulement 1 500 nouvelles unités et du
logement abordable seulement en cinq ans. Donc, pour les cinq prochaines
années, on parle de 1 500 unités.
Pendant trois ans, ils ont nié l'existence
de la crise du logement. On a perdu beaucoup de temps. Puis, aujourd'hui, il
faut quand même rappeler que le gouvernement est là depuis cinq ans, là.
La ministre, cette semaine, disait que ça faisait un an de mandat, là. Ça
ne faisait pas un an de mandat, mais je pense qu'elle a oublié que le gouvernement
était là depuis cinq ans. Et donc toutes les nouvelles unités qu'on
entend, c'est toujours du recyclage, il y a beaucoup de chiffres.
Par contre, je rappelle que le
gouvernement, la CAQ présente toujours la situation en cherchant des coupables.
Et là ils ont... La ministre a accusé les organismes de ne pas aller assez
vite, les... Le premier ministre, lui, a parlé des villes, que c'était... Les
délais étaient dans les villes. Et, de façon générale, à toutes les questions
que j'ai posées dans les derniers mois, on a rappelé l'arrérage des 15 000 unités
du Parti libéral du Québec.
Alors, je voudrais revenir sur ces
chiffres-là. Je voudrais prendre la balle au bond, là, parce qu'on a reçu ces
attaques-là à maintes reprises. Et je voudrais décortiquer un peu les chiffres
et je vais tout simplement vous présenter un petit tableau qu'on va présenter,
que je vais présenter aujourd'hui pendant l'interpellation.
Et là, ici, ce qu'on voit, ce sont des
chiffres qui viennent de la Société d'habitation du Québec et qui ont été, là,
présentés dans le rapport prébudgétaire du FRAPRU. Et là le FRAPRU... là, l'acronyme,
je m'excuse, je ne me rappelle pas de tous les détails, mais le Front... Bref,
vous le trouverez. Je m'excuse. Écoutez, donc, on voici ici, là, quand le
provincial a repris en main le logement, ça a commencé, le logement social en
particulier. Ici, en jaune, là, ce qu'on voit, là, c'est les annonces, c'est ce
qui a été annoncé, financé, et en bleu, c'est ce qui a été construit. Et là on
voit, là, que déjà, ici, c'était le gouvernement du Parti québécois, qui avait
des annonces de 6 000, 6 500 qui ont été annoncés. Mais, évidemment,
ça prend quelques années avant de se construire. Alors, quand le gouvernement
libéral est arrivé au pouvoir, il y avait déjà un arrérage de
8 000 unités. Cependant, je ne critiquerai pas ça, là, parce qu'il y
avait de l'ambition, il y avait beaucoup d'ambition, et ça a permis à du
logement de se construire.
Et le Parti libéral a continué à avoir de
l'ambition, ils ont continué à annoncer beaucoup, beaucoup... Je n'étais pas là
à l'époque, mais il avait de l'ambition, il y avait des 3 000 par année
qui étaient annoncés. Et, même si je vous avoue que ça aurait été bien qu'on en
fasse plus, je le concède, on aurait aimé en faire plus, du logement social,
mais on en a... C'est quand même le Parti libéral qui en a fait le plus au
Québec dans les dernières années.
Et ce qui est le plus impactant dans ce
tableau-là, là, je vous demanderais de regarder, c'est l'ambition de la CAQ,
qui est absolument nulle. Il n'y a plus de logement social annoncé du tout, du
tout par le gouvernement de la CAQ. Évidemment, ce qui se construit, bien, c'est
des annonces qui avaient été faites par le Parti libéral au préalable. Donc, il
n'y en a plus, de logements sociaux, sous la CAQ. C'est le manque d'ambition.
Alors, ça, c'est ce que je vais parler aujourd'hui.
Et par ailleurs je voudrais aussi rappeler
que la ministre a dit cette semaine que ce n'était pas dramatique, ce n'était
pas si dramatique que ça, là, qu'il y ait juste 1 % à 2 % de
logements HLM barricadés. Mais ça, je voudrais lui rappeler que c'est des HLM
qui sont existants. Tout ce qui manque, c'est de les rénover, et, si on les
rénove — et c'est beaucoup plus rapide de rénover que de construire — si
on les rénove, là, c'est des logements qui rapidement, rapidement peuvent
revenir sur le marché. Mais, malheureusement, encore une fois, on voit un
désengagement dans la rénovation, il y a seulement 105 millions pour cette
année en rénovations. C'est trop peu et ce n'est certainement pas ça qui va
nous ramener des HLM sur le marché.
Donc, c'est de ça que je vais parler
aujourd'hui. Je pense que le gouvernement manque d'ambition, doit en faire
plus. Merci.
M. Laberge (Thomas) : Qu'est-ce
que vous espérez obtenir précisément aujourd'hui de la part de la ministre? Des
engagements?
Mme Dufour : Peut-être un
réveil, un réveil de la... Écoutez, c'est trois... dans trois mois, le 1er juillet.
J'ose espérer que, lorsque... il y aura peut-être un nouvel appel de projets.
L'année passée, là, il y a eu un appel de projets, là, qui était un peu
inattendu pour le PHAQ, il y a eu des sommes additionnelles. Donc, peut-être,
c'est quelque chose qu'on pourrait voir arriver, qu'elle puisse convaincre ses
collègues de l'urgence d'agir. Écoutez, c'est un cri du cœur, là, que je fais
aujourd'hui, là.
M. Carabin (François) : Dans
les annonces du budget, il y avait 500 places réservées au privé dans la
construction des logements. Dans le premier appel de projets, c'était aussi
ouvert au privé...
Mme Dufour : Tout à fait.
M. Carabin (François) : ...mais
il n'y avait pas eu d'intérêt de la part du privé. Mais est-ce que c'est une
bonne chose que le public... que le gouvernement fasse appel au privé pour
construire des logements abordables?
Mme Dufour : Écoutez,
normalement, on pourrait dire que ce n'est pas mauvais. Mais l'enjeu ici, c'est
qu'il y a seulement 1 500 nouvelles unités d'annoncées. Donc, quand
on met en compétition le privé... Le privé ne fera pas du logement social. Donc
là, on vient dire, dans le fond, là, que c'est... sensiblement, ça ne va être
que de l'abordable, et de l'abordable dans le haut... la plus haute bracket de
l'abordable. Donc, malheureusement, c'est... il est là, l'enjeu, là.
Comme je vous dis, en temps normal, si on
avait... on parlait de 5 000 unités à l'année, qu'on mélange ça avec
du privé, il n'y aurait pas d'enjeu. Mais là, comme on se limite à seulement 1 500 unités...
puis ce n'est même pas par année, là, c'est pour les cinq prochaines
années, alors, ça, ça fait sensiblement que les groupes communautaires, ceux
qui font du logement social ne se qualifieront pas, là, il va y avoir tellement
peu d'unités. Donc, dans cet appel de projets là, nous, on est... on croit que
ça aurait dû être réservé aux groupes de logement, là, définitivement.
M. Lecavalier (Charles) : ...pensez-vous,
même si cette cible-là, elle est insuffisante à vos yeux, que ça va vraiment se
faire? Parce que, dans la...
Mme Dufour : C'est une bonne
question.
M. Lecavalier (Charles) : ...dans
le premier déploiement du programme, il y a juste 10 % des unités qui ont
été faites par le privé. Le gouvernement veut que, dans cette deuxième
vague-là, ça soit le tiers, puis ça va être une enveloppe fermée juste pour le
privé. Donc...
Mme Dufour : Bien, je vais
vous dire en toute franchise, actuellement, ce qu'on entend, c'est que même les
unités annoncées l'année dernière ne sortent pas de terre présentement. Les
groupes, peu importe lesquels, actuellement, n'arrivent pas financièrement.
C'est ce qu'on entend. Alors, je suis loin d'être convaincue, là.
Là, les enveloppes ont été augmentées, on
a vu, dans le fond, qu'on parle des unités à 200 000 $ la porte. Donc là,
on est probablement autour du 50 % de la valeur, mais ce n'était pas le
cas dans le premier appel de projets. Donc, il va falloir qu'ils investissent,
d'après moi, des sommes supplémentaires pour que les 1 700 de l'an passé
sortent de terre.
M. Laberge (Thomas) : Est-ce
que vous allez interpeller la ministre sur la clause F?
Mme Dufour : Non, je ne
traiterai pas de ça aujourd'hui. Mais on va revenir avec des propositions, là,
pour revoir l'ensemble du bail.
M. Laberge (Thomas) : C'est
quoi, votre position là-dessus? Vous êtes favorable?
Mme Dufour : Bien, en fait,
on l'a déjà annoncé, la position, là. Ça a été assez clairement énoncée, là,
que nous, dans le fond, ce qu'on souhaitait... parce qu'il y avait eu un débat
là-dessus, ce qu'on souhaitait, ce n'est pas de l'abolir tout de suite, mais
plutôt de réfléchir à comment on peut le faire sans qu'il y ait un effet
boomerang puis que, finalement, ça monte encore plus vite, les loyers. Parce
que, si vous êtes un propriétaire d'un logement sur le bord de sortir de terre,
par exemple, puis que vous savez que la clause F va sortir, bien, vous
n'allez pas étaler sur cinq ans vos hausses, vous allez le faire tout de
suite d'avance.
Des logements, actuellement, là, en
passant, là, qui se louent, là, dans le marché, là, neufs, là, c'est du 2 400 $
par mois, ce qu'on voit actuellement, qui sortent de terre pour que ça soit
rentable. Alors, ça ne va pas... en faisant sauter la clause F, comme ça, sans
trouver une façon de contrôler d'une autre façon les loyers, ça risque de juste
créer une hausse encore plus... plus importante. Les propriétaires vont à
quelque part... devant l'incertitude des taux d'intérêt, et tout ça, ils vont
se protéger. Puis, au lieu d'être à 2 400 $, les nouveaux loyers,
bien, ils vont peut-être sortir à... à 2 008 $, vous comprenez?
Donc, c'est... Il faut vraiment être
prudent quand on fait juste une clause. Il y a beaucoup d'éléments que, quand
on agit vite sans réfléchir, bien, ça l'a des effets boomerang. Alors, c'est
important de réfléchir. C'est ce qu'on demandait, d'avoir un comité qui se
penche... avec tous les acteurs du milieu, pour voir comment on peut mieux
contrôler les loyers sans créer d'effet boomerang.
M. Denis (Maxime) : Mme Dufour,
un mot ce matin, au nom du Parti libéral, sur les six corps repêchés dans
le Saint-Laurent.
Mme Dufour : Écoutez, c'est
malheureux, c'est une situation épouvantable. Évidemment, on ne connaît pas les
circonstances, on ne connaît pas d'où viennent ces gens, mais on n'a pas de
détail, mais c'est certain que, tu sais, on... C'est vraiment un drame
incommensurable, là, qu'on ne voudrait pas avoir à commenter.
M. Denis (Maxime) : C'est la
faute de la fermeture du chemin Roxham ou c'est...
Mme Dufour : On ne peut pas
prétendre ça, là. On n'a aucun détail à ce stade-ci.
M. Lecavalier (Charles) : ...c'est
une crainte? C'est-à-dire qu'une des craintes qui a été évoquée avec la
fermeture du chemin Roxham sans qu'on revoie l'entente des tiers pays sûrs,
c'est qu'il allait avoir des passages illégaux un peu partout puis que ça
allait mettre en danger les migrants. Je comprends qu'on ne peut pas tirer une
conclusion pour ce cas-là, mais il me semble que c'est quand même une crainte
qui a été évoquée, là, qu'il allait avoir des vies humaines de perdues.
Mme Dufour : Tout à fait,
c'est une crainte qui a été évoquée de... que la fermeture du chemin puisse
créer d'autres mini-chemins. Mais il n'y a pas de lien à faire. Présentement, on
ne peut pas faire de lien avec ce qui est... les corps repêchés. Malheureusement,
on n'a aucun détail, là.
M. Carabin (François) : Juste
sur le fait que le gouvernement écarte, pour le moment, l'idée de lancer une
enquête publique sur l'incendie, là, de... dans le Vieux-Montréal. Comment vous
l'expliquez?
Mme Dufour : On est déçus, on
est vraiment déçus parce que c'est... Je pense que la lumière doit être faite,
c'est ce qu'on pense aussi, comme... C'est ça, pour la famille, pour tous ceux
qui sont impliqués là-dedans, c'est important de faire la lumière sur la
situation. On ne veut pas qu'une situation comme ça se reproduise, un drame
comme ça se reproduise. Donc, on est vraiment déçus, puis on espère que le
gouvernement va revoir sa position.
Une voix : Merci beaucoup.
La Modératrice : Merci, tout
le monde.
Mme Dufour : Merci beaucoup.
(Fin à 9 h 44)