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Point de presse de M. Andrés Fontecilla, porte-parole du deuxième groupe d’opposition en matière de logement et d’habitation

Version finale

Cette transcription a été réalisée à l’aide d’un logiciel de reconnaissance vocale. Elle pourrait donc contenir des erreurs.

Le vendredi 9 juin 2023, 12 h 28

Salle Bernard-Lalonde (1.131), hôtel du Parlement

(Douze heures vingt-neuf minutes)

M. Fontecilla : Bonjour, mesdames, messieurs. Donc, la ministre Duranceau vient de présenter son projet, un projet de loi très attendu, depuis des mois, voire des années, un projet qui était... en tout cas, beaucoup de gens, au Québec, l'attendaient, là : régler, régler en grande partie les principaux problèmes qui causent la crise du logement au Québec, là.

Malheureusement, malgré les attentes, ce projet de loi ne règle pas grand-chose, il ne règle pas la crise du logement, il ne s'attaque pas aux principales manifestations. Oui, il y a quelques avancées, comme par exemple le changement du fardeau de la preuve concernant les évictions, mais il comporte un recul majeur, un recul majeur, qui est l'impossibilité, si le projet de loi est adopté, là, de procéder à une cession de bail, là, un des outils les plus utilisés pour... par les locataires, là, pour se protéger contre les hausses abusives de loyer, là. Donc, c'est un projet de loi... un projet de loi qui nous déçoit profondément. Et je suis particulièrement inquiet par le fait que la ministre enlève cette possibilité aux locataires de procéder à une cession de bail, là, et empêcher ainsi des abus, là.

D'autre part, ce projet de loi comporte des absences qui brillent, qui constituent, par le fait même... qui ne sont pas considérées par le projet de loi, là, comme un recul majeur, là. Parce que c'était le temps, là, la ministre nous avait promis qu'elle allait légiférer pour régler les principaux problèmes, là, concernant la crise du logement, là. Elle a manqué sa chance, elle a manqué une occasion en plus de nous avoir fait attendre. La crise, le 1er juillet est à nos portes, et la ministre a pris des mois et des mois avant de présenter son projet de loi. Elle le présente à la dernière journée de la session, là. Ce n'est pas la bonne façon de procéder, là.

Il n'y a rien pour encadrer les hausses des loyers ou de rendre exécutoire l'indice d'augmentation du Tribunal administratif du logement. Il n'y a rien, une demande, là, qui vient de toutes parts, pour interdire les évictions, pour faire des Airbnb ou autres plateformes d'hébergement touristique, là. Rien pour protéger les locataires aînés qui sont particulièrement affectés par les pratiques agressives de certains propriétaires, là, pour soit les évincer soit pour augmenter les loyers, là. Rien pour permettre les animaux de compagnie dans tous les logements, une question qui affecte énormément de locataires au Québec, là. Et presque rien pour fixer les hausses abusives des loyers dans les nouvelles constructions, là.

En fait, la ministre, tout ce qu'elle nous dit, là, elle n'enlève pas la clause F, là, ce qu'elle nous dit, c'est que le propriétaire, dès la signature du bail, il pourra annoncer le maximum qu'il va aller chercher dans les cinq prochaines années. Donc, le locataire, avant, il ne le savait pas; maintenant, il sait combien il va payer de plus, là, et ça va dépasser toujours largement les indices d'augmentation du TAL. Donc, il y a toujours la possibilité d'abus, là.

C'est un projet de loi qui déçoit, qui ne s'attaque pas aux racines de la crise du logement et surtout à sa principale manifestation, là, les augmentations abusives des loyers, là. Il n'y a rien ici qui règle ce problème-là.

M. Côté (Gabriel) : Le gouvernement fait un peu le pari à propos de la clause F, là, que le marché va s'autoréguler, parce que les propriétaires ne pourront pas montrer à plusieurs locataires qu'ils vont hausser abusivement les loyers, sinon les locataires ne signeront pas pour y aller, parce que ça leur coûterait trop cher. Donc, le marché va de lui-même inciter les propriétaires à ne pas faire des hausses abusives de loyer. Qu'est-ce que vous pensez de cet argument-là?

M. Fontecilla : C'est de la pensée magique, là, c'est de la pensée magique, là. Tout le système... le système de régulation des relations entre les locataires et propriétaires, aujourd'hui, là, est fondé sur la loi et l'offre de la demande, là, la vieille loi capitaliste, là, mais c'est un marché qui, en ce moment, est complètement détraqué, et ça prend une intervention de l'État, là, pour régler, là. Dans un contexte de pénurie généralisée de logements, là, il y a des locataires qui vont être obligés d'accepter les hausses proposées par les propriétaires des nouveaux immeubles parce que sinon, ils n'auront nulle part où aller, là. Le véritable problème ici, à la source, c'est la pénurie des logements locatifs, et ce, partout au Québec, là. Donc, les locataires vont seulement connaître combien ils vont être haussés dans les cinq prochaines années, là.

Mme Porter (Isabelle) : Vous n'avez pas parlé de la mesure, là, qui vise à faire en sorte qu'un locataire est présumé opposé à une éviction, là, ce qui n'était pas le cas auparavant. Ça, est-ce que vous ne voyez pas là un progrès?

M. Fontecilla : J'en ai parlé brièvement, c'est une des rares avancées de ce projet de loi. C'est quelque chose que j'avais demandé déjà, il y a quatre ans, lorsque la ministre, l'ancienne ministre des Affaires municipales et de l'Habitation, Mme Laforest, là, on a étudié le projet de loi n° 16, si je ne me trompe pas, j'avais soumis cette question-là à la ministre. La ministre Laforest, à l'époque, avait accepté d'étudier. Elle avait fait des consultations même, avec différents acteurs, consultations auxquelles j'ai participé. Et ensuite, après ces consultations-là, elle a décidé de fermer le cahier, et puis il n'y a plus rien qui s'est passé. Aujourd'hui, bon, il faut constater cela, la ministre Duranceau, elle décide d'avancer dans quelque chose qui est... qui tombe du sens, là, une protection, là... une protection fondamentale et primaire pour les locataires, là, c'est-à-dire de renverser le fardeau de la preuve.

Cela dit, renverser le fardeau de la preuve n'implique pas que ça va arrêter l'hémorragie des évictions. Il n'y a aucun changement au Code civil. C'est un changement à la procédure, si vous voulez, là, en quelque sorte. Au lieu que ce soit le locataire qui doit prouver la mauvaise foi d'un locateur qui veut évincer, là, ça va être au propriétaire de prouver que, oui, là, il évince selon ce qui est écrit dans la loi, mais la loi reste pareille, là, il va continuer à y avoir des évictions un peu partout au Québec, là. Il n'y a pas... Il y a un peu plus de protection en termes procédural pour le locataire, là, mais les propriétaires pourront continuer à évincer des locataires, y compris pour faire de la place à Airbnb.

M. Laberge (Thomas) : ...les cessations de bail, là, que vous critiquez beaucoup, on a posé la question à la ministre, elle dit que c'est une atteinte au droit de propriété. Est-ce que, selon vous, ce n'est pas une atteinte au droit de propriété?

M. Fontecilla : Pour moi, c'est, avant tout, un moyen qu'ont trouvé les locataires pour se protéger contre les hausses de loyer abusives, là, et ça a été utilisé par beaucoup de locataires. Et ce n'est pas très largement utilisé, parce qu'on constate qu'il y a une hausse généralisée des loyers de plusieurs points de pourcentage, là. Donc, c'est un outil à la disposition des locataires qui est utilisé de façon, comment dire, très, très minimale parce que les gens ne connaissent pas cet outil-là à la base, là, mais c'est une façon de protéger les loyers à moindre... les loyers plus bas, là. Parce qu'il n'y a aucune garantie, malgré l'existence de la classe... la case G, qui est supposément obligatoire. Il faut remplir obligatoirement cette case-là, les propriétaires ne la remplissent pas. Donc, il n'y a... À part la cession des loyers, il n'y a aucun autre moyen pour les locataires de se protéger contre des hausses abusives, là.

Mme Porter (Isabelle) : Vous dites que ça ne règle pas grand-chose par rapport à l'ampleur des problèmes, l'ampleur de la crise du logement. La ministre se défend en disant : Bien, c'est comme un bloc dans un édifice de mesures que je suis en train de mettre en place, il va y avoir d'autres choses, j'ai déjà fait des investissements. Donc, c'est comme juste... c'est comme une partie d'une réforme. Il y aura peut-être d'autres choses après. Qu'est-ce que vous dites de ça?

M. Fontecilla : Bien, écoutez, ça fait cinq ans que la CAQ est là, ça fait cinq ans d'inaction, là, concernant les hausses abusives des loyers, là. Il n'y a... C'est la première fois que le gouvernement avance, avance ne serait-ce qu'une mesure minimale, et je le reconnais, c'est une mesure minimale, là, mais le fond du problème demeure. Les hausses de loyer abusives vont continuer à exister au Québec, là. La ministre n'a pas introduit ne serait-ce que le début... le début d'une mesure, là, pour contrer les hausses de loyer, là. Il n'y a pas...

Ça fait des années qu'on demande à la ministre d'instaurer un registre des loyers, un outil qui pourrait permettre... qui donnerait un outil supplémentaire aux locataires, là, de contester des hausses de loyer, là. Il y a eu l'organisme Vivre en ville qui lui a préparé un outil clés en main, disponible, là, il a donné en cadeau au gouvernement, là, il y a quelques semaines, quatre... quatre, cinq semaines. Pas la trace d'un registre des loyers dans ce projet de loi. Et surtout elle aurait pu très facilement instaurer un contrôle des loyers, un contrôle des loyers en permettant, par exemple, que les propriétaires aient à prouver toute hausse supérieure à l'indice publié, à chaque année, au mois de janvier, par le Tribunal administratif du logement. Mesure très facile. Elle n'a pas bougé sur ce terrain-là.

Mme Porter (Isabelle) : Je me fais l'avocat du diable.

M. Fontecilla : Allez-y.

Mme Porter (Isabelle) : La ministre dit : Écoutez, il faut quand même faire attention parce que, si on impose trop de contraintes aux propriétaires, dans le contexte actuel, on risque de ralentir les projets de construction, puis, en ce moment, on a besoin de construire des nouveaux logements. Donc, en imposant un registre des loyers, un mécanisme de contrôle des loyers, on ne risquerait pas de se tirer dans le pied à un moment où on a besoin qu'il se construise des projets?

M. Fontecilla : C'est un drôle d'argument, parce qu'on n'instaure pas... pour la ministre, on n'instaure pas un registre des loyers pour... parce que ça pourrait hypothétiquement ralentir la construction de nouveaux logements, mais ce faisant, on pénalise davantage encore les... on pénalise les locataires, on les appauvrit, au fond, là. Et ce qu'il y a ici, c'est une mécanique d'appauvrissement continuel des ménages locataires qui, de façon générale, ce n'est pas tout le monde, évidemment, de façon générale, sont moins nantis que les ménages propriétaires, là. Elle a fait un choix pour, supposément, de façon hypothétique, là, promouvoir, c'est dans sa logique, là, faciliter la construction d'unités locatives, là, mais elle punit... Dans la réalité, actuellement, elle appauvrit des milliers de locataires au Québec, là. Il me semble que c'est une logique complètement viciée.

Et je ne pense pas que, par un meilleur contrôle des loyers, là, on va ralentir la construction de nouveaux logements. Je vous rappelle qu'aujourd'hui, aujourd'hui, ce qui se construit le plus au Québec, là, c'est le secteur locatif. Il ne s'en construit pas assez, j'en suis bien... j'en suis conscient, là, mais c'est le secteur qui construit le plus. C'est dans le secteur locatif, là, mais c'est dans le locatif haut de gamme. Là, il n'y a pas de problème, là, des loyers très élevés, là, les promoteurs privés y vont, et ils vont trouver leur profit, là. Est-ce qu'ils vont trouver leur profit à construire des logements à prix faible pour les ménages à plus faible revenu? C'est là qu'il faut s'attaquer, et ça prend une politique, ça prend une vision.

Et la ministre, de toute évidence, n'a pas de vision, n'a pas de plan, dans sa tête, là, pour faire en sorte de réabsorber le déficit de construction de logements locatifs, là. Elle nous en a promis 11 600. On va voir s'ils se réalisent, là. La CAQ a été incapable de sortir les 15 000 logements sociaux que le gouvernement et que la CAQ avait promis. On attend de voir s'il va réussir à sortir les 11 600, 11 700 logements abordables, dits abordables, et... mais on a des gros doutes, alors que les associations de constructeurs nous disent qu'il nous faut 100 000 logements locatifs par année au Québec. On est loin du compte.

M. Laberge (Thomas) : Sur la manière de faire de la Coalition avenir Québec, donc, vous le demandez depuis longtemps, ce projet de loi là, on vous a répété à de très nombreuses reprises : Ça va arriver d'ici la fin de la session. Finalement, ça arrive la dernière journée. Est-ce que vous vous êtes fait narguer par la Coalition avenir Québec?

M. Fontecilla : Pour moi, c'est une façon d'éviter le problème. Pour moi, c'est une façon de le mettre en dessous du tapis, la dernière session, juste avant que les parlementaires partent dans leurs comtés respectifs. Et l'été commence, les gens se mettent à penser à autre chose, tout à fait normal. Donc, c'est une façon, pour la CAQ, là, d'essayer d'étouffer la question du logement, là, en attendant que les gens... Les gens vont oublier d'en parler pendant la période estivale, là. Est-ce que je me sens... Est-ce que je me sens narguer? Je me sens, en quelque sorte, mais très, très, très déçu, là. Le gouvernement s'arrange pour qu'on en parle le moins possible avec cette façon de faire, présenter un projet de loi à la dernière journée, là, de la session parlementaire. Merci.

(Fin à 12 h 42)

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