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(Treize heures vingt minutes)
La Modératrice : Bonjour,
tout le monde, et bienvenue à ce point de presse sur le projet de loi n° 15.
Prendront la parole, M. Guillaume Cliche-Rivard, M. André Fortin, M. Joël
Arseneau, suivis de Mme Nathalie Déziel, de Mme Marie-Michèle Doiron,
de Mme Naélie Bouchard-Sylvain et de Mme Karine Hudon. Je peux vous
envoyer les titres de chacune de ces personnes. Notez également qu'il y a
beaucoup de personnes, de représentants, représentantes d'organisations
syndicales, communautaires, et de travailleuses qui sont disponibles aussi
également pour des entrevues individuelles après. Pour la période de questions,
je vous demanderais de vous en tenir à une question et une sous-question
puisque nos députés doivent retourner siéger au p.l. n° 15 très
promptement après la fin du point de presse. Merci.
M. Cliche-Rivard.
M. Cliche-Rivard : Merci,
Camille. Bonjour, tout le monde. On est réunis ici pour demander au ministre
Dubé de ne pas aller de l'avant avec un bâillon dans le p.l. n° 15. On
parle du deuxième plus gros projet de loi de l'histoire du Parlement, avec des
liasses d'amendements qui sont déposées toutes les semaines. Le projet de loi s'écrit
essentiellement au fur et à mesure. Même ce matin, là, encore ce matin, on a
reçu quelque 115 pages d'amendements qu'il faudra étudier le plus vite
possible, mais ça, c'est encore ce matin, et le ministre, quand on lui a posé
la question, ne pouvait pas exclure qu'il y en aille d'autres, liasses, au
courant des prochains jours.
On est réunis, les trois oppositions, le
milieu communautaire, les travailleuses, les organisations syndicales, pour
demander au ministre Dubé de permettre l'adoption à la régulière du p.l.
n° 15 et de ne pas mettre fin à la belle collaboration qu'on a depuis des
semaines, des mois, en fait, en collaboration, tous et toutes, en commission
parlementaire. Le projet de loi n° 15 ne ramènera pas de travailleuses
dans le réseau, il va donner... il ne donnera pas plus de soins à la
population. Si ça continue comme ça, le legs de Christian Dubé, ce sera une
réforme imparfaite et des urgences qui débordent.
Il y a un front commun contre un bâillon,
contre une adoption hâtive du p.l. n° 15. Ce que je demande aujourd'hui au
ministre Dubé, c'est de nous écouter et de ne pas imposer de bâillon sur le 15.
Merci.
M. Fortin :Bonjour. Bonjour, à tous et à toutes. Merci à tout le monde
ici de s'être déplacé pour envoyer un message clair au ministre de la Santé.
Parce qu'il y a des éléments qui nous unissent, là, les gens ici, aujourd'hui,
d'abord et avant tout le fait qu'on comprend tous que cette réforme-là, qui est
présentée, c'est une réforme qui a été écrite beaucoup trop rapidement, et qu'à
tous les jours de l'étude parlementaire on trouve des erreurs, des oublis, des
enjeux, des coquilles que le ministre n'a simplement pas vus dans son projet de
loi, qui peuvent avoir un effet important sur les travailleurs du réseau de la
santé et l'accès aux soins de santé que les Québécois et les Québécois vont
recevoir suite à l'adoption éventuelle du projet de loi.
Alors, le message qu'on veut passer à
Christian Dubé et au gouvernement aujourd'hui, c'est une réforme comme
celle-là, qui touche tellement d'aspects différents du réseau de la santé, des
groupes communautaires, des syndicats, des employés, et qui va ultimement
toucher les patients du réseau, c'est qu'on ne peut pas la faire trop vite, on
ne peut pas la faire à la va-vite. On ne peut pas faire abstraction de l'étude
complète de chacun des articles de ce projet de loi là. Peu importe la section du
projet de loi, là, le ministre lui-même a admis que son projet de loi, il est
incomplet, en déposant à répétition amendement par-dessus amendement par-dessus
amendement. Et ce n'est pas un processus normal. Ce n'est pas normal qu'en
commission parlementaire, à chaque bloc, à chaque section, un ministre se rende
compte de ses erreurs, de ses oublis, et dise : je vais en ajouter, des
amendements. Ce n'est pas normal qu'après, quoi, quatre, cinq mois d'étude d'un
projet de loi, qu'on arrive encore, à chaque jour, à chaque semaine, avec des
liasses complètes d'amendements.
On demande au ministre, là, parce que, de
un, la détermination ne nous a pas... ou la démonstration ne nous a pas été
faite de l'impact positif de son projet de loi, de prendre le temps de faire
les choses correctement, et, de deux, parce qu'il n'a pas prouvé que ce projet
de loi là est d'assez bonne qualité pour être adopté par bâillon sans étudier
l'ensemble des amendements, de prendre son temps et de nous permettre de faire
le travail pour lequel nous sommes ici, à l'Assemblée nationale.
M. Arseneau : Évidemment, je
vais ajouter ma voix à celles de mes collègues et à celles également des gens
de la société civile et du milieu de la santé et du milieu communautaire. Je
pense qu'on est tous unis ici pour demander au ministre de faire preuve de
collaboration, comme on l'a fait au cours des derniers mois. Je pense qu'on
s'entend sur l'idée que le système de santé est au bord de l'effondrement et
qu'il faut agir.
On était plus ou moins d'accord sur les
moyens qui ont été proposés par le ministre, à savoir le dépôt d'un projet de
loi aussi imposant, qui ne va pas changer effectivement la réalité, là, des
patients et des gens qui travaillent, du personnel de la santé, avant un bon bout
de temps. On a quand même néanmoins décidé de participer, de jouer le jeu et de
voir à la révision complète de la LSSSS, ce qui est extrêmement costaud à
faire.
Le travail se fait, et il se fait bien,
mais il faut qu'il se continue. Là, il ne faudrait surtout pas que le ministre
fasse l'unanimité contre lui dans une réforme dont on sait qu'elle sera
imparfaite, mais ce le sera encore davantage si on termine en queue de poisson
l'étude du projet de loi à mi-chemin du processus. Et c'est ça qui est en train
d'arriver. Puis c'est vrai qu'actuellement les changements sont majeurs, puis
je prends pour exemple, là, il y a deux jours, des changements majeurs sur les
catégories d'emploi, et les gens qui sont touchés au premier chef ne sont pas
au courant. Ils n'ont même pas d'opinion là-dessus parce qu'ils ne sont pas
certains de pouvoir mesurer les impacts. Si les employés que ça touche, les
syndicats que ça touche et le ministère lui-même ne sait pas trop trop quels
impacts ça peut avoir, une modification comme celle-là, imaginez-vous la
décision, à savoir si elle est réfléchie ou non. Puis c'est un exemple parmi
tant d'autres.
Alors, je vous dirais qu'il est important
que le ministre soit à l'écoute, que l'on adopte ce projet de loi en temps
voulu, vraisemblablement dans quelques mois, quand on aura fait la preuve qu'on
a fait le travail rigoureusement et de façon complète. Et, à ce moment-là,
bien, on pourra espérer qu'il donne effectivement des résultats sur le terrain.
Je vais laisser, là-dessus l'animatrice présenter les prochains intervenants.
La Modératrice : Mme Déziel.
Mme Déziel (Nathalie) : Donc,
aujourd'hui, c'est des centaines d'organisations de la société civile, de
groupes et d'associations issues du milieu communautaire, syndical, coopératif
et médical qui s'unissent pour demander au ministère de la Santé, Christian
Dubé, de prendre un pas de recul et de ne pas imposer sa réforme aux
Québécoises et aux Québécois. Cette réforme... nous avons été, encore une fois,
des centaines à le dire et à l'écrire sur toutes les tribunes depuis des
mois... cette réforme risque d'engendrer des impacts dévastateurs au sein du
réseau de la santé et des services sociaux pour les années futures. C'est une
réforme ultracentralisatrice, qui éloigne les prises de décisions du terrain et
qui ouvre la porte à une privatisation sans précédent de nos services publics.
C'est pourquoi nous lançons aujourd'hui la campagne intitulée La réforme Dubé,
tout sauf santé. Il s'agit d'une campagne sans logo, qui a été conçue pour que
tout le monde puisse se l'approprier, et que, tous ensemble, on exige du
ministre qu'il revoie impérativement son projet de loi et, par conséquent, son
calendrier d'adoption.
Ça fait des mois que des experts de tous
les horizons, que les représentants des nombreuses organisations, qui sont
réunis ici aujourd'hui, que l'ensemble des partis de l'opposition et que, même,
six anciens premiers ministres le réclament : il faut revoir en profondeur
le projet de loi n° 15 et, surtout, ne pas précipiter les choses. Les
enjeux qui s'y rattachent sont trop importants pour l'avenir de notre réseau de
santé publique. À quelques jours de la fin des travaux parlementaires, l'heure
est à l'unité. C'est la démonstration que nous faisons devant vous aujourd'hui.
Le ministre a encore la possibilité d'écouter les différents groupes, qui ont
des pistes de solutions porteuses et durables à lui proposer. Le ministre a
encore le choix de ne pas procéder à une adoption hâtive et forcer son projet
de loi. C'est ce que nous réclamons tous ensemble aujourd'hui, car la mouture
actuelle de sa réforme, vous l'aurez compris, est tout sauf santé.
La Modératrice : Mme Doiron.
Mme Doiron (Marie-Michèle) :
Aujourd'hui, nous sommes forcés de constater que le ministre de la Santé,
Christian Dubé, est vraiment déterminé à foncer seul, complètement seul, dans
sa vaste réforme, une réforme qui, selon nous, est tout sauf santé. Il nous
apparaît urgent de faire entendre nos voix. Malgré nos demandes de rencontres,
de consultations, de participation à la commission parlementaire, et malgré
tout ce que nous avons fait valoir, Christian Dubé refuse complètement de
prendre en compte notre point de vue et notre expérience, nous qui sommes au
coeur des soins et des services à la population, nous qui sommes aux premières
loges, les personnes les plus impliquées au sein du réseau public et auprès des
personnes les plus vulnérables de notre société.
Cela fait six mois que nous sonnons
l'alarme. On a l'impression que le ministre choisit consciemment de ne pas nous
entendre. Faut-il être ancien premier ministre, médecin spécialiste ou
promoteur privé en santé pour être reçu et entendu du ministre? Pourtant, ce
réseau n'est rien sans nous. Dans le réseau public, comme dans les organismes
communautaires, nous sommes ces humains qui soignons et soutenons d'autres
êtres humains. Comment peut-on penser une seconde qu'on puisse réussir une
réforme d'une telle ampleur en nous écartant ainsi de la recherche de
solutions?
Le ministre dit vouloir un réseau plus
efficace. Comment peut-on croire que confier la gestion à une agence, qui
deviendra le plus gros employeur au Canada, le rendra vraiment plus efficace?
Comment peut-on croire que de négliger la prévention et l'approche globale en
santé sera plus efficace? Honnêtement, comment peut-on croire que les décisions
prises par une poignée de «top guns», ne connaissant rien à la réalité terrain,
s'avéreront réellement plus efficaces pour notre réseau de la santé et des
services sociaux? Il me semble que se poser la question, c'est y répondre.
La Modératrice : Mme
Bouchard-Sylvain.
Mme Bouchard-Sylvain (Naélie) :
En 20 ans, on aura vécu trois vagues de fusions d'établissements vers des
structures toujours plus lourdes, plus compliquées, moins démocratiques. Nous
n'avons vu aucune amélioration dans les soins et les services aux usagères et
aux usagers. Pourquoi est-ce que ce serait différent cette fois? Le ministre
refuse-t-il de répondre à ces questions parce qu'il sait que sa réforme ne les
améliorera pas? Encore une fois, avec l'agence Santé Québec, il sera plus
difficile que jamais, sur une base régionale, de voir clair dans les choix
budgétaires et stratégiques, sans parler de la reddition de comptes des
entreprises privées subventionnées par l'argent public. Les groupes
communautaires risquent, par ailleurs, d'y perdre leur autonomie.
Enfin, on ne peut passer sous silence
l'intensification de la privatisation des soins et des services inhérents au
projet de loi n° 15. Au lieu de voir la santé comme un bien commun et de
s'attaquer à l'amélioration des services dans le réseau public, le gouvernement
démissionne de ses responsabilités par choix politique, qui n'est pas celui de
la population. Plus que jamais, nous, citoyens et citoyennes, allons nourrir,
avec nos taxes, nos impôts et nos assurances, les profits d'entreprises
privées, qui ne peuvent grandir autrement qu'aux dépens des établissements publics.
Les seuls gagnants de ce virage seront les gens d'affaires, pas la population.
La Modératrice : On va
terminer avec Mme Hudon, ensuite on va passer aux questions.
Mme Hudon (Karine) : Face au
silence du ministre devant ces préoccupations légitimes, il nous apparaît très
clair que la réforme Dubé est toute sauf santé, elle n'améliorera pas les
services et encore moins l'état de santé de la population. Elle n'est pas
démocratique, elle centralise le pouvoir et surtout, il faut le souligner, elle
est complètement inefficace. Nous sommes unis pour dénoncer la réforme Dubé car
elle est tout sauf santé. Devant un tel constat et l'absence évidente de
consensus, nous demandons la poursuite de l'étude détaillée du projet de loi.
M. Dubé doit aller au-delà des amendements cosmétiques et prendre le temps
qu'il faut pour l'améliorer. Il est redevable à la population et ne peut passer
son projet de loi de manière si expéditive. Les conséquences seraient trop
importantes. Et, si le ministre continue de refuser d'ouvrir le dialogue, nous
refuserons de nous taire. L'enjeu est trop grand. Nous avons le réseau public
québécois tatoué sur le cœur. Nous demeurons engagés pour défendre le droit de
toute la population et des soins et services de qualité, accessibles et
universels.
La Modératrice : Merci. On va
passer à la période de questions. Je vous demanderais de vous limiter à une
question, une sous-question, par souci. Merci. Mme Porter.
Journaliste : Oui, bonjour.
Bien, moi, j'aurais une question pour les représentants des groupes, là, vous
déciderez qui répond. Je comprends que vous souhaitez que ce soit prolongé, les
travaux, donc que ce ne soit pas adopté avant Noël, en même temps... bon, on le
sait, là, on connaît votre opposition au projet de loi, il y a eu des critiques
tout l'automne, puis ça n'a pas fait plier le ministre. Alors, qu'est-ce qui
vous laisse croire qu'en prolongeant les travaux après les fêtes vous allez
davantage faire plier le ministre à ce moment-là?
Mme Goulet (Lise) :Alors, bonjour. À titre de présidente de la Coalition Solidarité
Santé, je peux vous dire qu'il y a de plus en plus d'organisations et
d'individus qui saisissent les enjeux en cause et qui veulent se faire
entendre. Et on croit aux approches démocratiques. On invite nos élus à
respecter les principes démocratiques et à prendre les moyens d'entendre ce que
les gens ont à dire. On n'est pas à deux, trois semaines d'une réforme. Je
pense que c'est l'avenir de nos services publics.
Et je vais me permettre un autre
commentaire. Suite à la crise qu'on a connue de pandémie, toutes les grandes
organisations internationales, l'Organisation mondiale de la santé,
l'Internationale des services publics, l'OCDE, le Fonds monétaire
international, demandent aux gouvernements du monde de consolider les services
publics et leurs filets de protection sociale. Et, des crises, il y en aura
d'autres, puis c'est ensemble, collectivement, qu'on doit se préparer à vivre
les prochaines crises et à régler les problèmes actuels. C'est notre destinée.
Ce n'est pas vrai qu'une poignée d'élus qui ont des intérêts économiques
peuvent prendre cette destinée-là... notre destinée entre leurs mains. Alors,
on mise sur la démocratie puis sur la mobilisation citoyenne.
Journaliste : Si je peux me
permettre, c'est intéressant que vous parliez de la pandémie parce que le
ministre, justement, dit avoir été motivé par la pandémie dans cette
réforme-là. Il dit que notre système actuel s'est révélé inefficace, que c'est
avec une agence qu'on saurait mieux réagir à une éventuelle pandémie, vous
dites exactement le contraire.
Mme Goulet (Lise) :
Bien, écoutez, c'est un projet de loi pour plus
d'efficacité en santé. On attend toujours les preuves que le privé fait mieux.
Sortez-les, les études. Nous, on est ouverts à des solutions. Si on nous fait
la démonstration que c'est le privé qui est mieux et qu'on nous en fait une
démonstration à partir de données probantes, on pourra s'asseoir, discuter,
mais on ne les voit pas, les études. Et je ne vois pas comment des gens qui ne
sont pas issus du terrain vont savoir mieux que nous quoi faire. Alors...
Journaliste : ...le privé,
vous référez à quoi?
Mme Goulet (Lise) :Bien, vous regarderez les études de l'Institut de recherche
et d'informations socioéconomiques, notamment, je ne sais pas, moi, les résidences
privées, les groupes de médecine familiale, les gros réseaux qui font de
l'évasion fiscale, et vous regarderez les 200 entreprises de facturation
médicale, au Québec, qui vivent grâce au type de rémunération des médecins. Il
y a plein de joueurs du secteur privé qui s'engraissent avec nos fonds publics,
et c'est autant d'argents qui ne vont pas dans le financement d'autres services
essentiels comme les soins à domicile. C'est une vision, c'est une vision de la
santé. La santé, ce n'est pas un bien qu'on marchandise. Et, tant qu'on va en
faire une occasion d'affaires pour de plus en plus de partenaires économiques,
moins on aura de services à la population. Alors, moi, le privé, je... fait 35
ans que je fais de la défense de droits, je lis pas mal de rapports, et je n'ai
pas encore trouvé de rapport qui me fait la preuve que ça va aller mieux. Ça
fait que je mets au défi le ministre Dubé.
La Modératrice : On va y
aller avec M. Duval, de Radio-Canada.
Mme Goulet (Lise) :Excusez, je suis assez émotive. C'est parce que le droit à
la santé, c'est notre vie, hein? Ça fait que c'est...
La Modératrice : M. Duval.
Journaliste : Encore une
fois, ça peut être quiconque du milieu communautaire ou des représentants des
soignants, peu importe. Il y a quand même eu des consultations au début du...
du travail parlementaire entourant ce projet de loi là. Moi, j'aimerais savoir
sur quels aspects vous n'avez pas été entendus et vous avez encore besoin de
vous exprimer.
Mme Goulet (Lise) :Voulez-vous que je continue? Je peux... Je n'ai pas la
prétention d'avoir toutes les réponses, O.K., il y a beaucoup de monde ici
autour de moi qui ont autant de bonnes réponses à vous donner.
Bon. Première des choses, on a parlé de la
décentralisation, on nous assure que c'est un projet qui vise à décentraliser.
Dites-moi comment on peut faire ça en donnant toutes les responsabilités à une
nouvelle agence qui ne connaîtra rien du réseau? On ne parle pas... Dans le
projet de loi, ce n'est pas de la décentralisation, c'est de la
déconcentration, c'est-à-dire qu'on s'assure que le pouvoir central soit près
du milieu, mais c'est toujours le pouvoir central qui va prendre les décisions
d'orientations stratégiques. En approche populationnelle, on redonne le pouvoir
aux communautés, aux gens des milieux qui connaissent leurs besoins, leurs
défis et qui peuvent proposer les meilleures alternatives. Donc, non, ce n'est
pas de la décentralisation, le projet de loi.
On a parlé également de privatisation. Comme
je vous ai dit, je ne referai pas mon discours sur nous... montrez-nous en quoi
c'est meilleur. Mais il y a tous les enjeux de démocratie. Si l'agence santé -
là, j'emprunte ça d'un de mes collègues - devient une boîte noire où on n'aura
accès à aucun... soit rapport de développement stratégique, entente de gestion,
rapport d'activités, comment on va faire pour surveiller l'efficacité du privé
en santé? Comment on va... À quelles données on va avoir accès? Est-ce que vous
avez accès à tous les rapports d'Hydro-Québec? C'est une... C'est une société
d'État. Bien, dites-vous : Ça va être la même affaire en santé. On est
autant de... de chiens de garde du droit à la santé pour tous, puis,
démocratiquement, on va s'assurer de garder ces... ce pouvoir-là.
Journaliste : Je vais...
Bien... Oui, allez-y.
M. Arseneau : Bien, si je
peux juste ajouter un petit mot, une hypothèse... Pour répondre à votre
question plus spécifiquement : Pourquoi vous voulez vous exprimer
aujourd'hui? Vous avez eu l'occasion de le faire dans les consultations
particulières, il faut quand même convenir que dans les consultations
particulières, même s'il y a eu beaucoup de groupes, il y en a encore beaucoup
plus qui avaient demandé d'avoir voix au chapitre et qui n'ont pas été invités.
Ça, c'est le premier élément. Puis le deuxième élément, c'est que depuis le
mois d'août qu'on y travaille, sur le projet de loi, il a considérablement
évolué, le nombre d'amendements se compte par centaines. Et les gens qui font
le travail en commission découvrent des éléments nouveaux à chaque jour, et il
y a une cote d'écoute, j'oserais dire, qui est très, très importante du côté
des gens qui sont ici puis de la société civile, qui découvrent petit à petit,
session par session, quels seront les impacts du projet de loi. Et je pense
qu'aujourd'hui, s'ils réagissent, c'est parce qu'ils ont suivi les travaux,
puis ils se rendent compte que ce qu'on avait présenté à l'époque comme étant
un projet bénéfique et de décentralisation où les gens auraient une prise sur
leurs soins et sur les services, ce n'est peut-être pas tout à fait ce qui est
en train de se matérialiser.
Journaliste : Bien, ce sera
d'ailleurs ma... question. Justement, dans ces nouveaux amendements qui sont
déposés constamment, lesquels sont si controversés qu'ils nécessiteraient
justement que vous continuiez les travaux parlementaires? Qu'est-ce qui est...
Qu'est-ce qui représente un danger dans les nouveaux amendements qui sont
déposés? Puis ce que je vous demande en fait, messieurs, ce sont des exemples
concrets, là.
M. Cliche-Rivard : Oui. Bien,
je pense qu'André est d'accord aussi, là. Prenons l'exemple des quatre à six
catégories d'emplois. Ça, c'est des choses qu'on a reçues il y a moins d'une
semaine, qui ont été rendues publiques en début de semaine, mardi, et qui ont
été étudiées et adoptées mardi, mercredi. Donc, je veux dire, les gens, la
société civile, les groupes, les travailleurs, les travailleuses qui sont
visés, qui voient leurs groupes d'associations syndicales puis leurs catégories
d'emplois changer, l'organisation du travail changer au complet, ont quelques
heures pour faire part de leurs préoccupations seulement, et on adopte... on
doit adopter, parce que le temps presse puis parce qu'il y a la date limite de
la semaine prochaine, et là, au jour le jour, ils découvrent, ils nous
écrivent, on recevait encore des courriels ce matin de certains groupes
d'emploi qui nous disent : Attends un peu, là, attends, minute! Moi, je ne
suis pas tout à fait d'accord de passer de la 1 à la 6, je n'ai pas eu le temps
de le communiquer. Comment ça se fait? Les inhalos et les perfusionnistes nous
en ont parlé, notamment, qui quittent la catégorie des infirmières pour aller
se retrouver.... Où est-ce qu'elles ont pu faire leurs représentations?
Journaliste : ...c'est
l'exemple que vous avez donné dimanche, puis c'est tout à fait correct, je le
comprends. Moi, ma question, c'est : Est-ce qu'il y a autre chose de neuf
dont on n'a pas discuté? Parce que vous parlez de nouveaux amendements qui sont
déposés constamment, d'autres qui seraient peut-être à venir. Donc, j'entends
tout ça, je le comprends, mais est-ce qu'il y a autre chose de concret?
M. Fortin :Bien, je vais vous le dire comme ça, O.K. L'affaire, c'est
que les amendements du ministre, là, on ne les voit pas venir. On n'a pas vu
ceux sur les syndicats la semaine dernière, on n'a pas vu les 115 pages qu'il
nous a déposées ce matin, juste avant la commission parlementaire. Le ministre
ne cesse de nous surprendre par des choses que lui-même ajoute à son projet de
loi, et pour lesquelles personne n'a l'occasion de se prononcer. Effectivement,
il reste encore 400 quelques, 500 articles au projet de loi, alors je suis
convaincu que lui-même a d'autres choses en tête à présenter si on procède par
bâillon, ce que le ministre a refusé de mettre de côté ce matin, là, il a
refusé de dire qu'on ne procéderait pas par bâillon.
Juste dans la dernière semaine, on a
laissé sur la table, ouverte à la décision du ministre, la question, justement,
des catégories d'emploi et des catégories de représentation syndicale. On a
laissé sur la table, de façon ouverte, pour que... le ministre a suspendu ces
articles-là... sur les services à la population de langue anglaise. On a amené
une proposition au ministre pour s'assurer que les organismes communautaires
autonomes puissent garder leur autonomie, leur financement. Le ministre a
dit : On va vous revenir. Si on procède par bâillon, toutes ces choses-là
qui ne sont pas complétées, qui ne sont pas terminées, c'est le ministre qui va
décider qu'est-ce qu'il va faire. Il n'y en aura plus, de discussions, il n'y
aura pas de consultations, il n'y aura pas de consensus parlementaire autour de
ces questions-là. Et on a besoin d'avoir, au minimum, ces discussions-là. C'est
pour ça qu'on lui demande de faire les choses normalement, correctement, pour
que tous ces enjeux-là, qui sont encore suspendus... Et là je n'ai même pas
touché les articles qu'on a suspendus il y a plusieurs mois, comme la question
des services sociaux. Toutes ces choses-là ne peuvent pas être adoptées sans
avoir la discussion nécessaire.
La Modératrice : Parfait. Mme
Lévesque, LaPresse.
Journaliste : Oui, bonjour à
vous tous. Est-ce que vous avez des indications, en ce moment, que M. Dubé s'en
va vers le bâillon?
M. Fortin :Bien, il a refusé de dire qu'il ne le faisait pas, donc,
moi, ça me dit que c'est pas mal son intention. Il nous a présenté un plan de
match il y a trois semaines, son plan de match, qu'il appelle, depuis, notre
plan de match, mais c'est son plan de match, pour voir comment on va y arriver.
Alors, moi, je comprends, à travers ça, que le ministre Dubé a l'intention de
procéder par bâillon. Il nous rappelle régulièrement qu'il a besoin des
prochains mois pour mettre en place Santé Québec. Nous, ce qu'on lui dit, c'est
que ce n'est pas de faire l'étude correctement, au cours du prochain mois,
prochains deux mois, d'entendre, de parler avec les groupes, de bien comprendre
l'impact que ça va avoir, pas juste l'impact que le projet de loi initial peut
avoir, mais l'impact de tous les amendements qu'il était en train de
proposer... peuvent aussi avoir sur le réseau.
M. Cliche-Rivard : De manière
très simple et limpide, c'était un peu ça, l'objectif de notre motion ce matin,
et tous les partis d'opposition, les députés indépendants inclus, étaient
conjoints sur cette motion-là. On demandait un engagement, là : Est-ce que
vous pouvez vous engager à ne pas imposer de bâillon? Je veux dire, on est à
une semaine, là, de la décision finale. Je veux dire, si, à une semaine
précise, on n'est pas capables de prendre l'engagement, pour moi, la réponse
est claire, donc.
Puis, de l'autre côté, le ministre
présente un plan de match, mais lui-même modifie ce plan de match là en cours
de route, puis il va vouloir nous l'imposer, sur le fait que c'est à cause de
nous. Les 115 amendements de... ou les 115 pages d'amendements de ce matin,
elles ne sont pas dans le plan. Donc là, à un moment donné... D'abord, on
prévoit un plan, on collabore très, très, très bien, là, mais... puis il le
dit, hein, puis il le dit constamment, puis le plan, à la base, il était
difficilement applicable. Rajoutons, là-dessus, des centaines de pages
d'amendements. Je veux dire, on va collaborer, puis on va faire toutes les
heures, puis on va travailler jusqu'au bout, mais, à un moment donné, quand on
fait le calcul mathématique, je veux dire, on ne pourra pas être responsables d'un
plan qui, en plus, se rajoute... puis des catégories se rajoutent, puis des
liasses d'amendements se rajoutent, là.
La Modératrice : ...questions.
Après ça, on va passer en anglais, parce que les députés vont devoir retourner
en commission parlementaire.
M. Arseneau : J'ai presque le
goût de rajouter que ce serait à l'avantage du ministre de continuer l'étude
aussi, parce que ce qu'on sait, c'est que les tractations se poursuivent
toujours avec différents groupes d'intérêts. On a continué de négocier avec les
médecins spécialistes, pendant des mois et des mois, puis on est revenu avec
une proposition. Quand on a parlé des catégories d'emploi, ce qu'on apprend,
c'est que les négociations sont en cours avec certains représentants syndicaux,
et puis, lorsqu'on a décidé d'ajouter deux catégories le ministre semblait dire
que ça émanait de certains groupes, puis on les cherche encore, tout le monde,
ça a été unanime. Alors, quelles sont ces tractations-là en marge des travaux
parlementaires, et quelles sont celles qui restent à mener, ou dont on n'a pas
entendu parler encore?
Journaliste : Quand vous
aviez... Quand on vous a présenté le plan de match, là, il y a une semaine et
demie, vous disiez : On va jouer le jeu, on va voir un peu. Donc là, aujourd'hui,
après une semaine et plus, là, ou quelques jours, à sa face même, pour vous,
c'est clair que, d'ici vendredi prochain, impossible qu'on ait traversé ce
qu'il propose, là?
M. Fortin :Bien, il reste, quoi, juste du projet de loi lui-même, là,
il reste un bon 400, 500 articles à étudier.
Journaliste : ...la
concordance, là, Pour vous, c'est impossible d'y arriver?
M. Fortin :La concordance. Le ministre appelle ça de la concordance,
là, mais honnêtement, ce sont des articles de la LSSSS qu'il choisit de
représenter dans le projet de loi. Il y en a certains pour lesquels il a fait
des modifications importantes, il y en a certains qu'il reconduit, mais, encore
là, à chaque section du projet de loi qu'on a vue, même dans les articles
reconduits, il y avait des choses auxquelles il n'avait pas pensé, il y avait
des choses qu'ils n'avaient pas vues, il y a des choses que lui-même a choisi
de modifier. Alors, de vous dire aujourd'hui qu'on peut adopter 400 articles
comme ça, alors que tous les articles qu'il nous a présentés, presque, ont été
amendés, ou deux tiers des articles ont été amendés, je pense, ce serait de se
mettre la tête dans le sable un peu.
Journaliste : Juste une
précision: Est-ce que vous voulez que la session, en fait, soit prolongée?
seriez-vous prêts à siéger jusqu'à Noël ou revenir plus tôt en janvier ou vous
lui demandez de reprendre en janvier, quand les travaux réguliers reviennent?
M. Fortin :On l'a déjà fait. On l'a fait au mois d'août. On est tous
revenus à Québec pour faire l'étude de ce de ce projet de loi là, de prendre le
temps de faire les choses correctement parce qu'on voyait qu'il y avait 1 200
articles en avant de nous. Le ministre nous disait déjà qu'il voulait l'adopter
aux fêtes, mais ça, c'était sans compter les centaines et centaines
d'amendements qu'il a lui-même introduits. Alors aujourd'hui, est-ce qu'on se
dit: on pourrait continuer à travailler la semaine prochaine, est-ce qu'on
pourrait continuer à travailler après les fêtes, absolument, mais l'idée, c'est
de le faire correctement.
Journaliste : ...semaines ou
mois, à votre avis, si on continue, là?
M. Fortin :Ça va dépendre du nombre d'amendements que le ministre
présente lui-même.
La Modératrice : On va passer
en anglais, puisqu'on doit retourner en commission parlementaire après. M. Authier.
Journaliste
: Mr. Fortin, so, if the bill was not passed by the 8th, by next
week, do you think the Government can wait? What is the big rush to get this
through now, given the impact that… you know, on all of the groups here?
M. Fortin : You tell me what the rush is. I don't understand, other than the
Minister wanting to move on to something else, to put Santé Québec forward and
to start implementing it, I don't know what the rush is.
There is a lot of groups
behind here, there's a lot of workers, there's a lot of people who are involved
day-to-day in the health and social services network, who are saying: Hold on,
this doesn't work for us. I don't know what kind of Health Minister you are if
you don't at least listen to those groups and say: Yes, O.K., I'm going to take
a few more weeks, a few more months, whatever it may be, and actually listen to
the people who are in the health care network.
One of the things we heard
throughout the study of the bill from various groups was that it would
demobilize health care workers. The number one thing we have to work on, it's
how to mobilize health care workers, how to attract them, how to retain them,
how to make sure that they are happy in their profession and can give the level
of care that we all expect as patients. Just that should be enough to pause the
Health Minister.
Journaliste
: Mr. Arseneau, have you… Or…
Des voix : …
M. Arseneau : No, but one at a time.
Journaliste
: Have you ever seen a bill put out like this, with so many
amendments, with so… like every day… I have been following it too, it is… Can a
bill be so flawed that it has to be amended by hundreds of amendments every
day?
M. Arseneau : Unfortunately, I have to say yes, I have seen other bills by «la»
CAQ that were of the same style. For example, the bill on taxi was, you know,
completely overturned, changed from beginning to the end, and of course
Bill 31 is exactly the same. So, that's also a method, a CAQ method too.
But we've never seen such a huge piece of legislation being changed so much,
and that's where we need, you know, to take a small bite at a time in order to
be able to digest the whole thing. And not only us, but also, you know, the
groups, they don't know exactly where the Minister is headed, and that's why we
need to take more time. And one of the virtues of the commission is that we're
getting the Minister and his team to explain where they're headed, and there is
a pedagogical, you know, side to it that we need to keep because we know… we
want to know where we're headed.
M.
Cliche-Rivard : Merci.
Journaliste
: So, the more you see the bill, the more questions you have?
M.
Cliche-Rivard : And my colleague Alexandre
Leduc, this morning, was presenting this board in the National Assembly. We're
seeing the number of amendments and sections that are adopted or proposed
within that bill. That's something quite terrific. We're seeing we're needing a
second page just to demonstrate, compared to the other bills, what's still
being adopted and what's still being voted. And I'll put it available for you,
guys, to take a good photo out of it. But it's a good example, and sometimes,
an image is worth a lot of words, and I think this the right example.
Minister Dubé was given
the chance also to divide his bill. It was supposed or it was completely
possible for him to go step by step and for us, to... per example, everything
as regards the work sphere could have been adopted in a future bill, after
negotiations, after making sure that everybody agrees on this. Minister Dubé
said clearly: This is not going to be adopted or in force right away. First,
there's going to be «la fusion des établissements», and then, there is going to
be the accreditations, and then, there is going to be the new «convention
collective».
So, there is so many
steps before those sections getting into force that there is no reason why
Minister Dubé couldn't go step by step and apply his reform in a democratic
manner.
La
Modératrice : ...I need to wrap this up because «les députés, ils
doivent aller en commission parlementaire».
Merci beaucoup, tout le monde, pour votre
participation.
M. Cliche-Rivard : Merci.
(Fin à 13 h 52)