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Conférence de presse de M. Pierre Curzi, député de Borduas

Dévoilement de la nouvelle Charte de la langue française (projet de loi 593)

Version finale

Tuesday, March 27, 2012, 15 h 30

Salle Evelyn-Dumas (1.30), édifice Pamphile-Le May

(Quinze heures vingt-sept minutes)

M. Curzi: Bonjour. Merci et bienvenue à cette conférence de presse là. Je l'ai faite ici parce qu'il y a... dans le fond, c'est pas mal technique, il y a beaucoup d'aspects techniques. Je trouvais ça utile de fournir un certain nombre de documents. Vous avez entre les mains un résumé, vous avez ensuite un document explicatif et vous avez aussi la version de la charte, avec la charte actuelle, avec ce qui a été retranché en rouge et ce qui a été ajouté en jaune.
Je vais vous... Je vais parcourir, disons, le résumé, puis ensuite je pourrai répondre à des questions que vous allez peut-être vouloir poser. Alors, les objectifs, c'était d'abord de rétablir l'équilibre linguistique qui existait dans les années quatre-vingt et quatre-vingt-dix, au moment même où les effets des assauts de la Cour suprême du Canada ne s'étaient pas encore fait sentir. Il faut se souvenir de cette période-là, parce que la loi venait d'être passée, c'était l'affichage unilingue, c'était une période où l'enseignement... les allophones allaient à l'école française, et il y avait, à ce moment-là, une sorte d'énergie dans la francisation des entreprises et un peu partout.
Le deuxième objectif, c'est préserver le caractère unique du Québec en Amérique du Nord. Puis le troisième objectif, c'est faire du français non seulement la langue officielle du travail, de la langue d'enseignement, de la langue de l'entreprise, de la langue du commerce et des affaires, la langue de l'administration, la langue de la justice, mais surtout d'en faire la langue commune de tous les Québécois, et ça, ça a été rajouté. Dans l'article 1 du statut de la langue, on a rajouté non seulement que le français est la langue officielle, mais que c'est la langue commune de tous les Québécois.
Pourquoi on a fait ça? Bien, je vous le résume ou vous le savez déjà, c'est maintenant acquis que le Grand Montréal s'anglicise. On a fait des documents là-dessus et c'est maintenant quotidiennement qu'on découvre l'anglicisation. Le Grand Montréal s'anglicise, puis c'est un phénomène qui a été mis en évidence au moment du recensement qui couvrait la période de 2001 à 2006. On a vu que, jamais dans toute l'histoire des recensements, on avait vu un tel recul du français.
Et ce n'est pas un phénomène qui s'explique uniquement par l'arrivée des immigrants allophones puis ce n'est pas un phénomène passager qui est dû à une conjoncture particulière. Donc, la vitalité linguistique, entre 1986 et 2006, la vitalité linguistique de l'anglais a été plus grande et a progressé plus rapidement que celle du français. Le poids de la langue anglaise s'est accru, particulièrement dans la couronne de Montréal, pendant le dernier recensement, tant au plan de la langue maternelle que de la langue d'usage. Et, si on fait des projections, très bientôt, autant au niveau de la langue maternelle que de la langue d'usage, il y aura de moins en moins de francophones ou de gens qui parlent le français dans la grande région de Montréal.
Ce qu'on a révélé dans les études, c'est que le pouvoir d'attraction de l'anglais demeure terriblement plus important, jusqu'à cinq fois plus attirant que le français. Puis le vrai phénomène, pour savoir qu'est-ce que c'est que l'anglicisation, c'est quand on constate qu'à Montréal il y a 300 anglophones... 300 000 anglophones, 900 000 francophones, donc un rapport de trois pour un au niveau de la langue maternelle, mais, quand on regarde la langue d'usage, on se retrouve dans une proportion de deux pour un. Normalement, la langue d'usage devrait être la même que la langue maternelle, mais, dans les faits, ce n'est pas la réalité, ce qui signifie qu'il y a une grande partie des allophones, qui sont 600 000, une grande partie qui va vers le français, mais, proportionnellement, une très grande partie qui va aussi vers la culture et la langue anglaises.
Les droits de la minorité anglophone. On a pris la peine de le dire, et de le mentionner, et de l'écrire ici, tous les droits de la communauté anglophone du Québec, soit ceux de vivre, de prospérer et de s'épanouir dans leur propre langue sont assurés par la Charte québécoise de la langue française et, de plus, ils sont protégés par la Loi constitutionnelle de 1967 et de 1982. Malgré son caractère unilingue français officiellement reconnu, le Québec accorde des droits personnels étendus à la minorité anglophone. À l'exception de la loi 178 sur l'affichage, la loi de M. Bourassa, les lois linguistiques québécoises n'ont supprimé aucun droit à la minorité anglophone. De plus, environ 135 000 emplois de langue anglaise proviennent des secteurs soutenus par l'État et les administrations publiques, ce qui représente un montant important, 6,2 milliards, pour les travailleurs. Ça signifie que les services offerts en langue anglaise par l'administration publique en éducation, dans les services sociaux et dans les services de santé sont très nombreux. Ce sont des emplois qui, en fait, là, au niveau démographique, s'élèvent à 50 000, ce qui équivaut à des revenus de 2,2 milliards. Alors, dans les faits, la communauté jouit d'une situation sociale tout à fait exceptionnelle pour une minorité.
Dans ce projet de loi, dans cette nouvelle charte, on a tenu compte de ce qui avait été adopté à la fois au Parti québécois et à Québec solidaire. Il y a 17 mesures qui sont inscrites dans le programme du PQ. Il y en a 10 qui sont à caractère législatif et qui pourraient être incluses dans un projet de loi, et, nous, nous en avons inclus... nous avons inclus neuf de ces 10 mesures. Pour ce qui est des autres mesures adoptées par le Parti québécois, elles relèvent soit d'une politique linguistique, soit d'une politique de l'immigration, ou devraient faire l'objet de demandes de transfert de pouvoirs du gouvernement fédéral au gouvernement provincial. Donc, il y en a un certain nombre qu'on ne pouvait pas intégrer au projet de loi de la nouvelle charte. Donc, on peut dire que cette charte-là est très fidèle au programme du PQ.
Il y a 27 mesures sur la langue qui ont été adoptées par Québec solidaire, sur la langue, la culture et l'immigration. Il y en a huit qui étaient liées à une bonification de la Charte québécoise de la langue française. De ces huit mesures, sept font partie de la charte. Donc, je pense qu'on peut dire que la charte tient compte de ce que les militants de Québec solidaire et du Parti québécois espéraient pour voir s'inverser le processus d'anglicisation.
Il y a des statistiques. L'ancienne charte comprend, encore maintenant, 275 articles. Nous en avons... 128 seulement ont été conservées dans leur intégralité dans la nouvelle charte. Il faut dire que, parmi les 275, il y avait plein d'articles qui avaient été abrogés, qui avaient été modifiés. Donc, au total, là, plutôt que d'avoir 275 articles, il y en a 186 articles, au lieu des 275. Il y en a 44 qui ont été modifiés, il y en a 26 qui ont été abrogés et il y en a 11 qui ont été ajoutés.
Je vous signale que la personne qui est à ma droite, Éric Bouchard, a travaillé de très près à toute l'élaboration de cette nouvelle charte, ainsi que plusieurs autres personnes dont les noms sont dans les remerciements.
Si on regarde maintenant la nouvelle charte, si je regarde, j'examine les changements majeurs qui sont dans cette nouvelle charte, quels sont-ils? D'abord, numéro un: aucun droit de la communauté anglophone n'a été touché dans la présente charte. Au contraire, les droits fondamentaux des anglophones, des Amérindiens et des Inuits ont plutôt été inscrits dans la charte comme des droits fondamentaux. On a ajouté, comme droit fondamental, on a ajouté quatre articles. Le premier, on a reconnu comme étant un droit fondamental le droit à l'apprentissage de la langue française. Ça, c'est l'article 7. Ça, ça a été ajouté. Ce qui a été ajouté aussi, c'est que les droits linguistiques fondamentaux s'exercent dans le respect des institutions historiques de la communauté québécoise de langue maternelle anglaise - c'est important - et des droits des Amérindiens et des Inuits de maintenir et de développer leur langue. La loi peut, à cet égard, en fixer la portée et en aménager l'exercice. C'est un ajout. Ce n'était pas un droit fondamental, c'en est maintenant un.
Au point 9, qui est un ajout aussi, on a rendu cette charte-là supralégislative en disant: «Aucune disposition d'une loi, même postérieure à la présente charte, ne peut l'emporter sur les articles 2 à 8.» Et finalement, au point 10, on a quasi constitutionnalisé la charte en lui disant: «Toute modification aux articles 2 à 8 de la présente charte doit être adoptée à la majorité des deux tiers des suffrages exprimés par les députés de l'Assemblée nationale, à condition que la majorité des membres soient présents.» Ça, c'est à la page 30 du document explicatif. Donc, ceci dit, la charte devient donc supralégislative et quasi constitutionnelle.
Ensuite, il y a la langue de la législation et de la justice. Dans ce cas-là, on n'a rien changé parce qu'on est soumis à ce qui existe déjà et on sait que, dans ce cas-là, autant dans la loi que dans la justice, les deux langues sont sur un pied d'égalité, c'est-à-dire que tout le monde peut avoir accès à la fois aux lois et à des jugements en justice dans sa langue. Là où on a apporté des modifications, c'est dans le chapitre IV, la langue de l'administration. Le premier article, c'est l'article 17 qui dit: «Dans ses communications écrites avec les immigrants, l'administration utilise la langue officielle. Elle offre des services d'accompagnement à la lecture et à la compréhension des documents.» Ça, c'est nouveau et ça exprime une volonté ferme que le français soit la langue commune de tous au Québec.
Dans la langue de l'administration, on a aussi reconnu les établissements de services de garde éducatifs et les collèges anglophones. On sait que la langue de l'administration, c'est le français dans toutes ses applications, sauf dans le cas des organismes reconnus. Comme, nous, on veut rendre les cégeps et les services de garde éducatifs... leur donner, leur conférer des droits linguistiques, on est obligés de reconnaître les services de garde éducatifs et les collèges pour qu'ils puissent bénéficier des exceptions de la loi. Autrement dit, dans les collèges anglophones et dans les services éducatifs anglophones, les mêmes mesures vont s'appliquer aux gens qui les fréquentent, ce qu'on a... surtout ceux qui y travaillent aussi, évidemment.
Ensuite, un article extrêmement important, c'est l'article 30, c'est-à-dire la reconnaissance du caractère bilingue des établissements de santé et de services sociaux en fonction du critère de la langue maternelle. Tantôt, je vous ai lu la nouvelle définition, les droits fondamentaux, et ce que nous disons là-dedans, c'est à l'alinéa trois de l'article 30: Un établissement de services de santé et de services sociaux visé à l'annexe, donc est reconnu «un établissement des services de santé et des services sociaux visé à l'annexe lorsqu'il fournit ses services à des personnes en majorité de langue maternelle anglaise.»
Sans doute qu'il y aura des questions là-dessus, mais, en deux mots, c'est apparu au moment où il y a eu la fusion entre l'Institut de réadaptation de Montréal et l'institut Gingras, là, il y a eu une fusion Lindsay-Gingras, et on s'est rendu compte que le conseil d'administration demandait un statut bilingue. Et l'office québécois devait répondre à cette question-là et ne savait pas sur quel critère. Il n'avait aucun critère pour déterminer qu'est-ce qui fait qu'on donne un statut bilingue ou qu'on le refuse. Ils sont donc allés voir au comptoir d'accueil qui demandait des services en français et qui demandait des services en anglais. Alors, c'est évident que ça ne fonctionne pas. Dans ce cas-là, le statut bilingue a été refusé. Il n'y avait pas de critère objectif.
On dit, nous, le critère objectif, ce sont les gens de langue maternelle anglaise qui fréquentent un organisme de services sociaux, de soins de santé, municipalité ou organisme. On reviendra ensuite sur la façon d'y arriver. Bien, en fait, on ne reviendra pas ensuite, c'est expliqué dans l'article 32 et 33. Pour que ce critère-là soit applicable, il faut qu'on ait une information. L'information, on dit : Elle sera régie par soit quand on reçoit ou quand on renouvelle une carte de la Régie de l'assurance maladie du Québec, on va ajouter le critère de la langue maternelle, de telle sorte qu'automatiquement, quand des gens vont demander des services, le fait qu'ils soient d'une langue maternelle ou de l'autre va devenir immédiatement une information accessible sans que les gens ne puissent d'aucune façon être importunés par cet aspect-là.
Troisième chose, dans la langue de l'administration, les obligations de l'administration en vertu de la charte seront étendues aux filiales des organismes gouvernementaux, comme Hydro-Québec ou la Caisse de dépôt et placement. Bien, ça, ça vient du problème que vous connaissez, au moment où il y a eu... on s'est rendu compte que des filiales comme Ivanhoé, une filiale immobilière, échappaient à la loi, et donc on a inclus - et ça, vous allez retrouvez ça dans l'annexe, c'est-à-dire dans la liste des organismes - c'est une phrase qui dit, dans cette annexe, que les filiales d'organismes paragouvernementaux: «Une filiale d'un organisme visé au premier alinéa - c'est-à-dire la définition des organismes gouvernementaux - est un organisme gouvernemental».
Dans la langue de travail. Ensuite, donc, il y a la langue des organismes parapublics, il y a des changements qui sont modestes. Mais, dans la langue de travail, c'est un autre des gros changements. Dans la langue de travail, on accorde des pouvoirs et des moyens accrus à l'office québécois pour ce qui est de la langue de travail. Le gros changement, c'est: avant de publier une offre d'emploi, l'office doit être informé par les employeurs des justifications du niveau exigé de la connaissance d'une autre langue que le français pour l'accomplissement d'une tâche visée. Ça, c'est dans l'article 50. Autrement dit, on inverse ce qui existait auparavant. Dans la charte actuelle, c'est l'employé qui doit porter plainte s'il considère que l'emploi qu'il sollicite n'exige pas la connaissance de l'anglais. Là, on dit: C'est absurde, on va faire le contraire. Avant de publier une offre d'emploi, l'envoyeur envoie un courriel où il dit: Bien, tel, tel, tel emploi, ça exige la connaissance de l'anglais et voici la raison pour laquelle ça exige la connaissance de l'anglais. S'il ne le fait pas, l'offre d'emploi est considérée comme étant accessible à quelqu'un qui ne parle que le français.
Ensuite, l'autre gros changement au niveau de la langue de travail, c'est qu'on a revu la façon dont les comités de francisation fonctionnaient. Comme on voulait viser les entreprises entre 25 et 50 employés, on a dit: Dans les entreprises qui fonctionnent dans d'autres langues que le français, qui ont entre 25 et 50 employés, on va créer un comité de francisation de deux personnes; dans ceux qui ont entre 50 et 100 employés, on va mettre quatre personnes; puis, dans ceux qui ont 100 employés et plus, on va mettre un comité de francisation de six personnes. On a ajouté que, lorsqu'il s'agit de très grosses compagnies, disons, là, en aviation, qui ont plusieurs établissements, la règle doit s'appliquer aussi, c'est-à-dire que, si une compagnie a plusieurs établissements, dont certains ont 50 employés, bien, il y aura un comité de francisation de deux personnes. S'il y a 1 000 employés, il y aura un comité de francisation de six. Donc, la loi du deux, quatre, six s'appliquerait partout. Ça, c'est ce qu'on dit.
Ce qu'on ajoute aussi, ce n'est pas parce qu'on parle de comité de francisation pour les entreprises de 25 à 50 qu'on oublie ceux qui ont moins de 25. Et là c'est expliqué d'une façon un petit peu bizarre, c'est-à-dire qu'on donne à l'office le pouvoir d'appliquer deux critères: celui du nombre ou celui du type de compagnie, tu sais, du secteur d'activité. Et donc l'office pourrait dire par exemple: On va franciser toutes les entreprises de moins de 50 employés en aéronautique, et là elle pourra en avoir cinq, 10, 15, 20. Le nombre n'aurait pas d'importance puisque, la politique, ce serait de pouvoir créer une sous-catégorie qui s'appellerait une section, donc soit, je ne sais pas, moi, l'aéronautique, ou l'hôtellerie, ou ce qu'on veut.
Mais l'office pourrait aussi vouloir dire: Dans une région particulière, il y a un besoin de francisation pour un certain nombre d'entreprises, et on va faire des efforts particuliers dans ce cas-là. Vous voyez, donc, il y a de la souplesse dans l'application des programmes de francisation pour l'Office québécois de la langue française.
Pour que cette politique-là puisse être mise en oeuvre, il faut qu'il y ait aussi non seulement des mesures de soutien et des programmes de francisation, mais qu'il y ait une obligation. Et là c'est l'article 72 qui dit: «Commet une infraction toute entreprise soumise à l'obligation d'obtenir un certificat de conformité à la Charte québécoise de langue française et qui ne possède pas un tel certificat après une période de cinq ans à compter du jour où cette obligation lui est applicable.» Là, il y a deux changements. D'abord, un changement de terme. On arrête de parler de certificat de francisation parce que ça fait 35 ans que les entreprises, en principe, se sont francisées. Donc, on parle maintenant, et c'est un changement général à travers la charte, on parle de certificat de conformité. Est-ce que les entreprises sont conformes à la charte ou elles ne sont pas conformes? Et ensuite on met une limite de temps. On dit: Après 35 ans, les compagnies soit se sont francisées ou ne l'ont pas fait encore. Là, on dit: À partir du moment où c'est adopté, il y aura... vous aurez cinq ans pour devenir conformes à la charte.

Ça fait le tour de la... Ah oui, ah oui! Le dernier article, il ne faut pas l'oublier. L'article 73, c'est que : Toute entreprise sera tenue de posséder un certificat de conformité à la charte, puis pour se posséder... pour conclure un contrat avec l'Administration ou pour recevoir une prime, une subvention, une concession ou un avantage de l'Administration. Quand on dit «l'Administration», c'est le gouvernement et l'ensemble des ministères. Donc, si vous voulez être en relation avec l'Administration, recevoir des contrats gouvernementaux, vous devez posséder un certificat de conformité, sinon ça vous rend inapte. C'est une mesure qui est... Oui. On a eu un exemple dans... On participait à un atelier sur la francisation dans l'aéronautique. On a vu, par exemple, un contrat qui devait... Rolls Royce, ça faisait des années qu'un comité de francisation se battait pour franciser un certain secteur, et on avait toujours les plans et devis en anglais. Le gouvernement, à un moment donné, a dit: Si vous voulez avoir le contrat que nous allons vous donner, ça doit être en français. Bien, ça s'est passé en une semaine. Après 20 ans de travail inutile, en une semaine, tout à coup, les plans et devis sont devenus en français. Là, c'est la mesure où, tout d'un coup, il y a une prise de position claire.
Dans la langue d'affichage, fameuse langue d'affichage, il y a évidemment la... L'éternel problème, c'est: Doit-on avoir de l'affichage unilingue français ou pas? Ce pour quoi nous avons opté, c'est que, sur la devanture des magasins et dans la publicité commerciale, donc ça veut dire dans l'affichage public et dans la publicité commerciale, le nom d'une entreprise doit être en langue française. Il peut comprendre une marque de commerce d'une autre langue s'il comprend également un terme générique en langue française, ce qui veut dire que partout sur la marquise, sur l'affiche, sur la vitrine, il faut qu'il y ait la marque et il faut qu'il y ait absolument un générique français. C'est actuellement ce que l'office québécois fait, elle le fait à partir d'un règlement et elle fait d'une manière incitative. Nous, on dit: Cet article-là doit être inscrit dans la loi et il doit... et vous allez voir plus loin qu'il doit s'appliquer, même si on est assez d'accord avec le fait qu'il y ait des mesures actuellement incitatives pour aider les entreprises à ajouter un générique en français. Donc, ça veut dire que, dans le cas de Canadian Tire, par exemple, il faudra qu'il y ait, comme termes génériques, quelque chose comme «Les magasins généraux Canadian Tire». Par exemple, une compagnie qui s'appellerait Candy Shop, bien, elle pourrait s'appeler «Candy Shop, les magasins de bonbons». C'est le genre d'exemples que j'ai.

Une voix: ...

M. Curzi: Oui, puis, bien... et on pourrait aussi avoir des exemples comme Staples qui décide de franciser son nom, qui s'appelle maintenant Bureau en Gros.

Une voix: ...

M. Curzi: Oui, c'est ça. Bien, d'autres pourraient le faire, c'est ça je veux dire, d'autres pourraient le faire aussi. Puis, pour arriver à atteindre cet objectif-là, parce que... le raisonnement a été le suivant. On ne peut rien faire contre le fait que les marques de commerce soient protégées. Elle sont protégées par l'OMPI, par une entente internationale dont on est, qu'on le veuille ou pas, signataires. On ne peut rien faire contre le fait que des marques de commerce sont enregistrées en anglais. Donc, ce qu'on peut faire assurément, c'est de s'assurer qu'il y a un terme générique.
En plus de ça, ce qu'on dit, c'est qu'il faut que ce terme générique là s'accompagne d'une mesure active, et donc on donne à l'office québécois le pouvoir d'émettre des constats d'infraction, exactement comme quand on se stationne au mauvais endroit en ville, on a immédiatement un billet de circulation, un constat d'infraction de généralement 42 $ - j'en paie pas mal - et, à un moment donné, on se fatigue et on trouve d'autres moyens. C'est la même chose. Là, l'idée, c'est que les gens de l'office québécois auront... auraient le pouvoir de donner des amendes.
On a volontairement diminué le coût de ces amendes-là. Vous allez retrouver cela, on les a mis à des montants très, très peu... des montants modestes, parce que l'idée n'est pas de pénaliser le commerce ou d'attaquer la rentabilité commerciale. L'idée, c'est de dire: À chaque fois que vous ne serez pas conformes, il y aura un constat d'infraction, et on ne perdra pas de temps à judiciariser puis à envoyer au Procureur général une plainte et à vous obliger à engager un avocat. La loi est ça, est celle-là, et vous devez être conformes, et, si vous vous y conformez, très bien. Si vous refusez de vous y conformer, eh bien, il y aura une première amende et, dans un deuxième cas, il y aura le doublement de cette amende-là. Mais on n'ira pas vers des montants prohibitifs. Pour une personne, c'est 50 $ à 100 $, puis, pour une personne morale, c'est entre 250 $ et 1 000 $, qui doublent la deuxième offense. Donc, c'est un pouvoir d'agir qui est donné à l'office. Ça couvre, ça, les principaux changements dans la langue d'affichage.
La langue de l'enseignement et des services de garde. Bien, ça, vous le savez, on a établi aux collèges, aux établissements de formation professionnelle et aux services éducatifs aux adultes, l'application de la loi 101. Donc, les francophones, les allophones devront aller au collège, en formation professionnelle, en éducation aux adultes en français. Les anglophones iront évidemment dans leurs structures en anglais, puisqu'on a prévu ces exceptions-là. De plus... Voilà. Oui. Ah oui, évidemment, et ça s'applique aux écoles privées, c'est-à-dire que là on revient sur les écoles passerelles, dont on voyait justement qu'elles sont de nouveau devenues des écoles passerelles. Il y a déjà, je lisais, 156 personnes qui viennent de franchir le Rubicon du barrage supposé.
Maintenant, autre grande mesure, c'est la langue d'enseignement dans les établissements postsecondaires francophones.

Une voix: ...

M. Curzi: Oui. Ces mesures-là, elles sont déjà dans le programme du PQ. Nous, on les a juste articulées d'une manière législative.
Pour ce qui est des enseignements postsecondaires, donc collèges et universités, ce que nous disons, c'est qu'il devrait y avoir une politique linguistique interne. Pour qu'elle existe, d'abord, il faut qu'elle existe. Ensuite, pour qu'elle soit réelle, on dit que ces établissements-là devraient transmettre à la ministre à tous les trois ans un rapport sur la situation linguistique interne. Comme, de plus, on oblige en quelque sorte, dans cette charte, la ministre à déposer devant l'Assemblée nationale les rapports, ça veut dire que tout le monde en serait informé officiellement et clairement. Dans les établissements francophones offrant l'enseignement collégial et universitaire, l'enseignement de la matière propre au programme offert se donne uniquement en français. Les travaux, les examens, les mémoires, les thèses doivent être rédigés en français. Toutefois, l'enseignement d'une ou de plusieurs autres langues est encouragé. C'est le cas des HEC, c'est le cas de l'Université Laval, c'est le cas de plusieurs universités. On dit: Dans les universités et les collèges francophones, l'enseignement se donne en français et les travaux se font en français.
Finalement, le point 9, c'est l'Office québécois de la langue française. Bon. Pour ce qui est de l'Office québécois de la langue française, à plusieurs endroits, vous allez voir, dans de très nombreux articles, on passe d'un pouvoir donné qui est actuellement au gouvernement et on le donne à l'office. Autrement dit, on augmente de beaucoup les pouvoirs de l'office. On lui donne le pouvoir de réglementer, puis on lui donne le pouvoir aussi de faire... d'avoir des amendes, et on lui donne la responsabilité de faire des rapports devant l'Assemblée nationale. L'office conserve et récupère la mission du conseil supérieur, c'est-à-dire conseiller le ministre responsable de l'application de la présente charte sur toute question relative à la langue française.
Le gros changement aussi, c'est que, bon, les membres, le P.D.G. de l'office québécois et les membres du conseil seraient, sur proposition du bureau du premier ministre, élus aux deux tiers des membres de l'Assemblée. Donc, c'est conférer à l'office un statut semblable à celui du Vérificateur général.
Une autre fonction qui appartenait au conseil supérieur, c'est toute la question des études et des recherches. Nous, ce qu'on dit, c'est qu'il existe déjà, dans la structure de l'office québécois, un comité de suivi qui a ces pouvoirs-là et qui peut commander des études soit à la direction des recherches de l'office québécois ou à d'autres groupes qui sont extérieurs à l'office. Et, en ce sens-là, on s'est rendu compte qu'en donnant tous ces pouvoirs-là à l'Office québécois, c'est-à-dire celui de conseiller et celui d'être élu aux deux tiers de l'Assemblée, celui de faire des recherches et de donner des avis, on vidait en quelque sorte de sa substance le Conseil supérieur de l'éducation. Comme, de plus, on a éloigné du politique l'Office québécois de la langue française et qu'on sait très bien que les nominations au conseil supérieur étaient souvent teintées de partisanerie, on considère qu'il faut abolir le conseil supérieur, ayant remplacé tout ce qu'il avait à faire par des nouvelles responsabilités données à l'office québécois.

Ça fait à peu près le tour du principal contenu. Il y a plusieurs autres articles, dont certains ne sont pas non plus anodins, mais il me semblait qu'il fallait aller vers l'essentiel. Voilà. Alors, s'il y a des questions, je vais essayer d'y répondre.

Le Modérateur (M. Paul Journet): On va passer aux questions. Josée Thibeault, Radio-Canada.

Mme Thibeault (Josée): Oui. Bonjour, M. Curzi.

M. Curzi: Bonjour.

Mme Thibeault (Josée): Vous proposez plusieurs changements. Est-ce qu'on... Qu'est-ce que vous voyez comme situation du français, non seulement à Montréal, mais au Québec, si jamais il n'y avait pas ici de modifications aussi substantielles que celles que vous proposez à la Charte de la langue française?

M. Curzi: Je vois l'augmentation du déséquilibre actuel. Et on sait que, dans les chiffres, dans notre étude, Le grand Montréal s'anglicise, on a clairement établi que, si rien n'est fait, nous allons être très bientôt, je pense, au niveau de la langue maternelle, c'est en 2016, et, au niveau de langue d'usage, c'est en 2031 - en 2031, ça veut dire dans moins de 20 ans - le nombre de personnes dont la langue d'usage sera le français sera tombé à 43 % dans la grande région de Montréal. Autrement dit, la grande région de Montréal sera devenue une région bilingue dans les faits. Il y a urgence d'agir.

Mme Thibeault (Josée): On comprend également que, si vous étiez resté au Parti québécois, vous auriez porté ce dossier-là. Si vous aviez réintégré la Parti québécois, vous l'auriez peut-être... vous auriez souhaité...

M. Curzi: J'aurais souhaité le porter.

Mme Thibeault (Josée): ...le porter de nouveau. Est-ce qu'on peut considérer ça comme votre testament politique?

M. Curzi: D'abord, je ne suis pas mort, loin d'être mort. Comme homme politique, il me reste tout mon mandat comme candidat indépendant, et ça peut être assez long. Et Dieu sait ce que l'avenir nous apportera. Mais, en principe, oui, je ne me représente pas aux prochaines élections.
Ce n'est pas un testament, c'est l'aboutissement de quatre années de travail. Je me suis rendu compte - parce que, moi aussi, j'ai réfléchi à cette question-là - quand j'ai lu le terme «testament», j'ai dit: Mon Dieu! C'est l'annonce de celui qui va mourir. Mais ce n'est pas ça, c'est : J'ai reçu, quand je suis entré... Bizarrement, aujourd'hui, le 27 mars, c'est la date anniversaire de mon élection. Il y a cinq ans, j'étais élu, un 27 mars. Quand Mme Marois est arrivée à la direction du PQ, elle m'a confié le mandat de revoir la loi 101, et c'était il y a quatre ans. Depuis quatre ans, j'ai publié Le grand Montréal s'anglicise, j'ai publié une étude fouillée sur l'obligation de l'application de la loi 101 au cégep. Et, durant tout ce temps-là, avec de nombreux collaborateurs, on a travaillé sur la charte.
J'en suis arrivé à me dire: L'outil, l'outil, un des outils et sûrement le plus important d'une politique linguistique, c'est la charte de la langue. Et il faut, à un moment donné, qu'on propose à l'ensemble de la population des changements réels. C'est une proposition, je la pense... Je pense que, cette proposition-là, c'est une proposition forte, mais c'est une proposition ouverte. Moi, je souhaite qu'il y ait des réactions et que les gens puissent s'exprimer.
Si j'étais entré au Parti québécois, il est très évident que je n'aurais pas pu présenter la charte avec l'ensemble des changements que je viens de vous proposer, puisque ça aurait fait l'objet de débats normaux dans un parti, de droits de vote normaux devant les membres sous forme de congrès. Et donc je trouvais qu'il était maintenant temps de présenter l'outil tel que j'y arrive après quatre ans de travail très sérieux, très sérieux sur l'ensemble des aspects.
Et, là-dedans, il y a une volonté ferme de faire du français la langue commune. Ça veut dire qu'il y a des décisions qui demandent un peu de courage, mais je pense qu'on est rendus là si on veut rétablir l'équilibre et inverser la tendance actuelle. Voilà.

Le Modérateur (M. Paul Journet): Martin Ouellet.

M. Ouellet (Martin): Oui. M. Curzi, qu'est-ce qui vous fait croire que ce bouquet de mesures permettrait justement de renverser la vapeur ou de freiner, là, l'anglicisation que vous remarquez à Montréal?

M. Curzi: Bien, je vous le répète, c'est un outil, mais l'outil touche à la langue d'enseignement. Donc, ce qu'on dit, c'est: Les allophones et les francophones, on les garde le plus longtemps possible dans le système scolaire. La raison, ce n'est pas pour les punir, c'est pour qu'en amont on soit sûr que le plus de gens possible étudient le plus longtemps possible dans la langue, de telle sorte qu'après un passage par l'université, à laquelle on ne touche pas, ils peuvent choisir l'université qu'ils veulent, mais ils vont avoir acquis un bagage de connaissances et d'usages suffisant pour qu'au moment où ils entrent sur le marché du travail ils soient... ils aient tendance à travailler en français, ce qui est de moins en moins le cas actuellement. On le voit, les statistiques sont claires, d'une part.
Ayant en amont essayé de franciser le milieu de travail, là, les efforts qu'on fait dans le milieu de travail, donc rejoindre aussi les petites entreprises, on le sait, où souvent les nouveaux arrivants vont trouver leur premier emploi, et donc ils ont besoin qu'il y ait des mesures de francisation puis des programmes pour franciser les petites entreprises. Si donc des gens arrivent, vont étudier en français, vont travailler en français, travaillent en français, donc déjà on les garde dans ce continuum-là. Ensuite, le caractère visible du quartier dans lequel ils s'établissent, si on peut le franciser au maximum en mettant des termes génériques, en s'assurant que le français a toujours la nette prédominance, donc on envoie un message clair. Si la langue de l'administration, la langue dans laquelle ils reçoivent tous leurs papiers, c'est le français...
Donc, tout ça, ce sont des incitatifs pour aider à amener la majorité des gens qui sont déjà là ou qui arrivent à joindre la langue et la culture francophones, parce que c'est ça qu'on souhaite. Mais je veux juste ajouter que c'est un outil, je ne pense pas que c'est la solution à tout. Je pense que la politique linguistique devra comprendre un volet immigration, puis on reconnaît le droit de l'apprentissage du français, c'est important. On dit: Les gens qui viennent, on s'engage comme état à leur fournir les moyens d'apprendre le français pour ne pas que ça reste virtuel, là, que ça devienne réel. Il y a une belle étude qui vient de sortir là-dessus.

M. Ouellet (Martin): Justement, vous parlez d'un... Ça devra comprendre un volet immigration. Est-ce que vous pensez qu'on devrait revoir les plafonds d'immigration, justement, parce qu'on a de la misère à intégrer ou à franciser convenablement les nouveaux arrivants, les arrivants, en fait? Est-ce qu'on devrait revoir, là, le flux d'immigration au Québec?

M. Curzi: Ce n'est pas l'objet du travail que, moi, j'ai fait.

M. Ouellet (Martin): ...comprends, puis vous dites qu'il faudrait que ça s'accompagne aussi d'un volet...

M. Curzi: Mais, si on mettait ça en place, ça veut dire qu'il va falloir déployer... mettre les moyens puis déployer beaucoup de ressources pour s'assurer que ce droit à l'apprentissage du français, il est réel puis qu'il touche tout le monde, parce qu'on ne peut pas demander à des gens qui arrivent de tous les pays du monde d'avoir instantanément la connaissance d'une langue. Il faut qu'on leur fournisse tous les outils et tous les signes qu'ils vont pouvoir bien s'intégrer, bien travailler, réussir dans cette langue-là et dans cette culture-là.

M. Ouellet (Martin): Juste une petite dernière, très rapidement, sur l'affichage. Vous dites les...

M. Curzi: Termes génériques.

M. Ouellet (Martin): Oui, l'office aurait le pouvoir, en fait, d'émettre des avis d'infraction, des billets, des tickets.

M. Curzi: Oui. C'est comme une espèce de constat d'infraction.

M. Ouellet (Martin): C'est ça, c'est comme la police de la langue, ça, c'est...

M. Curzi: Oui, je savais que ce mot-là arriverait, mais, oui, il y a quelque chose... Ce n'est pas la police de la langue, c'est comme des... comment on les appelle, là, les aubergines, là? Les gens qui distribuent des constats d'infraction. C'est-à-dire que...

M. Ouellet (Martin): ...ces gens-là d'habitude, hein? Les aubergines sont bien gentilles, mais, d'habitude, on ne les aime pas beaucoup.

M. Curzi: Non, je sais qu'on ne les aime pas, mais il y a des choses qu'il faut peut-être faire si... Moi, je ne les aime pas plus que vous quand je reçois une contravention mais, à la longue, bien, je me conforme à ce qu'est la loi. Je me trouve un stationnement, je paie ou je vais, tu sais...
Donc, l'idée, c'est on ne peut pas juste souhaiter que ça se passe. L'office le fait actuellement, puis l'office soutient financièrement les petites entreprises qui veulent le faire. Puis, moi, je trouve ça très bien parce qu'il y a eu beaucoup de laxisme. Mais, à un moment donné, après avoir fait tous les efforts de conciliation et de soutien, il faut, un jour ou l'autre, passer au geste qui dit: Bien, si vous ne vous conformez pas, il va y avoir une pénalité. Et empêcher que ce soit judiciarisé comme ce l'est actuellement. Là, c'est tellement compliqué puis, quand ça va dans les mains du Procureur général, tout d'un coup ça devient... on ne sait plus où ça va, c'est extraordinairement coûteux. Ça n'a pas de sens. C'est une infraction, puis, tout simplement, vous devez vous conformer à cela.

Le Modérateur (M. Paul Journet): Robert Dutrisac.

M. Dutrisac (Robert): Oui. Bon, je suis arrivé un petit peu en retard mais, M. Bouchard, vous êtes...

M. Curzi: M. Bouchard est recherchiste au bureau... dans mon bureau de circonscription, a travaillé sur les différents rapports, Le grand Montréal s'anglicise, tout ça, puis on a travaillé sur cette langue-là. Donc, voilà.

M. Dutrisac (Robert): Bon. Moi, j'aurais une question au sujet, justement, des établissements francophones qui offrent de l'enseignement collégial et universitaire. Vous dites, bon: Les travaux, les examens, les mémoires devront être rédigés en français. Bon, les examens, j'imagine que, si c'est un cours de littérature anglaise, ça va se faire en anglais.

M. Curzi: Bien oui.

M. Dutrisac (Robert): Bon. Bien, O.K, on se comprend.

M. Curzi: Tout ce qui est des autres langues vont être enseignées en autres langues. C'est une blague, hein?

M. Dutrisac (Robert): Cependant, vous avez cité l'exemple des HEC. Or, aux HEC, il y a un bac qui se donne où les cours sont à la fois en anglais... Il y a des cours en anglais, il y a des cours en français, et je crois qu'il est possible pour l'étudiant de passer des examens... de répondre en anglais à des examens qui sont donnés quand le cours est donné en anglais. Est-ce que c'est acceptable, ça, la façon de procéder...

M. Curzi: Nous, ce qu'on propose, c'est qu'aux HEC les cours se donnent en français, que les...

M. Dutrisac (Robert): Parce qu'il y a aussi une maîtrise en anglais... bien, M.B.A. en anglais aux HEC, il y a une maîtrise spécialisée en anglais qui va commencer en septembre. Donc, ce que vous nous dites, c'est que ce genre d'initiatives là seraient interdites.

M. Curzi: Oui. Ce qu'on dit, c'est que ce serait en français. Vous savez, c'est très étonnant. Justement, le conseil supérieur vient de publier une étude. On découvre que 95 % des finissants des HEC sont bilingues. Alors, le problème de l'apprentissage de la langue ou du bilinguisme individuel, ce n'est vraiment pas un problème. À l'université, toutes universités confondues, quand on arrive en maîtrise, 75 % des gens sont complètement bilingues. Et ce n'est pas parce qu'on impose cela qu'on va traduire tous les manuels. On sait très bien qu'une bonne partie de la littérature scientifique... universitaire, disons, dans tous les domaines, c'est écrit en anglais. Les gens qui sont rendus au bac, à la maîtrise, au doctorat, règle... très, très fortement, règle générale, connaissent les deux langues, maîtrisent les deux langues, aux HEC particulièrement. Alors, voilà.

M. Dutrisac (Robert): Bon. Vous avez cité une étude brièvement, là, sans la... De quelle étude parlez-vous?

M. Curzi: C'est l'étude de janvier 2012. C'est le Conseil supérieur de la langue française qui a fait une étude sur... Et là-dedans, dans la conclusion, on parle des étudiants des HEC. Et c'est une étude qui est à la fois un sondage puis des rencontres, et là les gens disent à 95 % qu'ils sont parfaitement bilingues.

M. Dutrisac (Robert): O.K. Il y a le phénomène aussi de... Finalement, vous parlez de l'anglais comme étant une langue... c'est-à-dire que, dans bien des domaines, à l'heure actuelle, en sciences surtout mais pas simplement en sciences dures, là, même en sciences sociales, là, de plus en plus de travaux, de communications sont en anglais.

M. Curzi: Oui.

M. Dutrisac (Robert): C'est un phénomène mondial. Ça existe aussi en France, etc. Il n'y a rien, dans ce projet de loi là qui pourrait interdire ça ou faire en sorte que ça ne se passe pas comme ça. Je pourrais vous parler aussi des colloques qui sont en anglais, les colloques internationaux.

M. Curzi: Mais je le sais, là, les exemples sont nombreux. Donc, on se dit: Par quel bout prend-on cela? Nous, on prend ça par le bout de ce qui relève de l'enseignement collégial et universitaire francophone. Au Québec, bien, ça va se passer en français. C'est le bout par lequel on l'aborde.
Mais je ne me fais pas d'illusion, on ne transformera pas les publications scientifiques qui sont généralement en anglais, mais au moins il est possible d'imaginer que les universités développeraient le plus de compétences possible dans cette langue-là et peut-être que ça leur permettrait d'avoir accès à d'autres clientèles, parce qu'on lisait que les HEC visaient des clientèles, par exemple, chinoises ou... donc où la langue souvent est l'anglais.
Mais il y a quand même 225 millions de francophones sur la planète, alors peut-être que nos universités devraient développer une extrême compétence dans cette langue-là, puisque, même en France, semble-t-il, l'enseignement universitaire commence à se faire, dans certains cas, en anglais. C'est une tendance mondiale, il me semble qu'on peut faire des études universitaires dans plusieurs langues et il n'y a pas juste le français et l'anglais. Les gens étudient aussi en allemand, en espagnol. Il y a des études universitaires très valables qui se déroulent dans toutes les langues du monde. Pourquoi pas en français?

Le Modérateur (M. Paul Journet): Régys Caron.

M. Caron (Régys): M. Curzi, quel avenir voyez-vous pour ce document-là? Vous êtes député indépendant, le PQ va prendre ça au bond, j'imagine?

M. Curzi: Bien, d'abord, si le PQ prend le pouvoir, bien, il y a un document tout prêt qu'il peut présenter le lendemain de sa prise de pouvoir, si jamais il prend le pouvoir. Ils en feront ce qu'ils voudront, mais au moins il y a un ensemble de propositions. Ça, c'est au niveau politique.
Mais, actuellement, l'utilité que j'y vois, c'est d'ouvrir un débat large. Au-delà de la vie parlementaire, il y a plein de gens qui s'intéressent à la situation de la langue actuellement. Et, moi, je dis que c'est une proposition, il y a des aspects qui vont être discutés ou contestés, mais tant mieux. L'idée, c'est de susciter, dans des domaines précis, des débats réels qui sont déjà entamés. À un moment donné, il faut que ça s'incarne, là. C'est quoi le... Qu'est-ce qu'on fait, là, concrètement? Qu'est-ce qu'on fait? Alors, c'est... L'affichage, vous voyez, même entre la ministre de la Culture puis la présidente de l'office québécois, tout d'un coup, il y avait une chicane parce que la ministre semblait dire: Vous ne pouvez pas exiger un générique. Elle peut exiger un générique, c'est dans un règlement de l'office. Nous, on le met dans la loi. Si c'était dans la loi, probablement que la ministre aurait su que c'était dans sa loi. Là, elle ne savait pas que c'était un règlement.
D'ailleurs, je vais l'interpeller, la ministre, vendredi matin, de 10 heures à midi, sur la Charte de la langue française,

M. Caron (Régys): Autre question. Pour les écoles passerelles, là, ce que vous recommandez, c'est l'usage de la clause nonobstant, j'imagine?

M. Curzi: Ah, absolument! Oui, on l'a inscrit dans la loi comme tel. C'est le seul endroit où on utilise la clause nonobstant.

M. Caron (Régys): Et vous prolongez les dispositions, là, sur la langue d'enseignement au cégep?

M. Curzi: Oui.

M. Ouellet (Martin): C'est quoi, la différence vraiment avec le PQ, techniquement?

M. Curzi: Dans ce cas, là, il n'y en a pas.

M. Ouellet (Martin): Non, mais, dans votre document, là, le gros de ce qui vous démarque par rapport à la proposition du PQ, c'est quoi?

M. Curzi: On a fait ce qui nous rapprochait, on n'a pas fait ce qui nous différenciait. Bien, je pense que, dans le PQ, il y a l'affichage qui n'est pas inclus dans les mesures, le pouvoir d'amende, l'abolition du conseil supérieur, la nomination aux deux tiers de l'Assemblée des membres de l'office québécois, les comités de francisation, la langue de travail, là, les deux, quatre, six. Bref, il y a plusieurs mesures, là, qui ne sont pas...

Une voix: ...

M. Curzi: Oui, le pouvoir de... Oui, le pouvoir coercitif pour obtenir des subventions, des... Donc, il faut avoir un certificat de conformité. Il y a tout ça... puis ce n'est pas constitutionnalisé, ce n'est pas supralégislatif, dans le cas de... Bref, il y a beaucoup de différences.

Une voix: ...

M. Curzi: Hein?

Une voix: ...droits des anglophones.

M. Curzi: Oui. Puis, nous, on a rendu comme un droit fondamental le droit des anglophones, les... Oui?

M. Caron (Régys): Qu'est-ce qu'on veut dire par «supralégislatif»?

M. Curzi: «Supralégislatif», ça veut dire que les principes fondamentaux de cette loi-là ne peuvent pas être... le terme, ce n'est pas «modifié», là, il y a un terme de constitutionnalistes qui dit que ces droits-là ne peuvent pas... aucune disposition d'une loi, d'une autre loi, disons, sur le transport, ne peut l'emporter sur les articles 2 à 8. On ne pourrait pas, dans le cas du transport, dire, par exemple: Ça va être tout en anglais ou... Non. Ça va à l'encontre du premier principe qu'on a que tout le monde... la langue commune. Voilà.

M. Journet (Paul): Je m'en permets une rapide avant de passer en anglais. Il y a... M. Curzi, il y a les idées, mais il y a aussi porter ses idées au pouvoir, faire en sorte qu'elles se réalisent. Pour quelles raisons estimez-vous qu'en présentant ça en tant que député indépendant ça sera plus efficace qu'en présentant ça au sein d'un parti qui aurait des chances de former le prochain gouvernement?

M. Curzi: Bien, si j'étais dans un parti, je n'aurais pas pu déposer cette charte-là parce que le Parti québécois, et je le comprends très bien, le Parti québécois s'en va vers des élections. Il n'y a aucune raison au monde pour qu'il dépose, à ce moment-ci, un projet de charte de la langue française. Il y a plusieurs choses dans son programme. On verra ce qu'il va présenter dans son programme électoral, mais c'est certain qu'il n'aurait pas pu. Là, on arrive au moment où, il faut dire: Bien, voici ce que nous proposons concrètement, voici l'outil. Je n'aurais pas pu, au PQ, présenter cet outil-là, puis je trouve que c'est le temps de le faire.

M. Caron (Régys): C'est Mme Marois qui vous l'a demandé, non?

M. Curzi: Oui.

M. Caron (Régys): Donc, elle a remis ça sur les tablettes?

M. Curzi: Non, non. Faites-moi pas dire ce que je ne dis pas. Je veux dire... c'est juste que, moi, j'ai demandé... pour mon retour, j'avais demandé de pouvoir déposer ça comme indépendant. Une charte de la langue française, à ce moment-ci, c'est l'aboutissement de quatre ans de travail sur le français. Moi, je pense que c'est un outil qui a besoin d'être discuté sur la place publique et par tout le monde. Je trouvais que c'était le bon moment pour le présenter. C'est clair que retourner au PQ, ça voulait dire retarder le moment où ce serait présenté et certainement pas dans cette forme-là complètement, puis, ça, je comprends ça.

Le Modérateur (M. Paul Journet): Kevin Dougherty.

M. Dougherty (Kevin): OK. Mr. Curzi, you say that this document should be discussed. Now, you presented this bill today, it was adopted unanimously, even the Premier voted for it, Mme Marois voted for it, Mr... Everyone voted for it...

M. Curzi: The vote for the «depôt» only. It means absolutely nothing.

M. Dougherty (Kevin): But... OK, sorry. But that's the end of it, it's not going anywhere. But...

M. Curzi: Yes, I think it's going to go... Well, you're going to write about it, a lot of people, maybe, and, if there are other forms of debate that I can be part of with this document, I will. I will be very open to the fact that we can discuss every suggestion of that...

M. Dougherty (Kevin): I want to understand. Mme Marois asked you... You know, this was something that was talked about in the 2007, I think, campaign, you know, the idea of a new Bill 101, and Mme Marois assigned you to this. And this is basically the fruit of what you did while you were with the PQ, but with some differences. I'm just wondering what is the difference between what the PQ would present and what you are presenting.

M. Curzi: I don't know. I know that, for sure, that there are some of the measures that are already in the «plateforme du PQ», but I don't know what will be their opinion about a lot of the articles that I've put in that. But I'm not afraid, they'll do what they want. It is...

M. Dougherty (Kevin): ...look a challenge. Is this saying: OK, here is what we should do, and then when... you know, as soon as they win an election, they present their own new Bill 101. If it falls short of that, would you be in the public sphere thing: Well, this is what we should be doing. Is that... Where are you going with this? Just want to understand.

M. Curzi: I think that, if we want to do something, we must adopt very clear articles and be very strong in that debate, so that we are sure we have an effect. So, this is my own proposition, and I'm quite sure that the PQ will agree a lot of the propositions there. I'm not sure if they will agree with every proposition. But I won't be there, so they'll do what they want. But, until that moment, I can't have the debate and I would like and maybe will organize a kind of a tour with that new law, new... to have a discussion. For sure, I'll try to have editorial meetings with the newspaper and... just to explain and to talk about it.
The only goal is maybe to have everybody aware of a real situation, problematic situation. And if we don't do nothing, then we will be in bilingual Montréal. And I don't think it's a good thing for nobody in Québec, and, I am sure, it is not a good thing for English-speaking people. I'm quite aware that it might be very problematic. Maybe it seems all right, but it is not. It's not easy for nobody to... «d'abandonner», to let go a situation without trying to act on it.

Le Modérateur (M. Paul Journet): Maya, CTV.

Mme Johnson (Maya): M. Curzi, a few questions. First of all, just generally speaking, could you describe the main objectives of this bill? What are you trying to accomplish here?

M. Curzi: I'll try, but it's... I've got the text in English. What we are trying to do here is to reestablish the equilibrium that has been existing a couple of years after the adoption of law 101. At that time, there was a kind of... there was a kind of peace, I would say, because the allophones were going to French schools. There was, at that time, only French in the advertising and commercial publicity. And there was a kind of peace. And there has been a lot of attacks from the Supreme Court and there has been also all that action against law 101. And I think it was not a good idea because it has, in a sense, completely mutilated the law. And so everybody was in peace and some... and at some point every body fall asleep, and all the other actions were growing, growing.
And now we are awaken, suddenly we are in a situation that we do not control any more. And I think it is not a good thing. I think we should take that situation in our hands and say: Here, it is what we want and what we want is clear. We want French to be the official language, we want to respect the rights of the English mother tongue community, and I... and we want all the people to have a common language, which is French, because it is a very important condition of the cohesion of a society. And I think that, if we don't do nothing, there will be that gap between what is happening and being lived in Montréal and what is happening in the rest of Québec. And it is already a little bit like that now.

Mme Johnson (Maya): Two more quick questions. I'm just picking up on protecting anglo rights. How would they be protected? Because some Anglos might hear this and sort of feel threaten by it.

M. Curzi: Because it has been written like a fundamental right and it was not before that. Now it is written, it is the number 8 of the fundamental rights. It means that, as we recognize the fact that there are rights for the English-speaking mother tongue people. And those rights, we are saying: This is so fundamental, and «supralégislatif», and almost constitutional that you can't touch to those rights, and the State is obliged to give the services to the minority. This is quite important, I think.

Mme Johnson (Maya): And the impact on educational institutions, what would the French language situation be across the board?

M. Curzi: The impact of those...

Mme Johnson (Maya): On educational institutions, day cares, cégeps, vocational programs, adult education, French has to be the language of instruction?

M. Curzi: Well, the goal is to give education in French to Francophones and Allophones and to respect the rights of the English-speaking people to have their own system of education. Am I answering your question?

Mme Johnson (Maya): I just wanted to be clear on the extension of the law in educational institutions and I'm not sure I understand.

 

M. Curzi:

It will apply to college. So, the same exceptions will apply to English college. It means that Francophones and Allophones will go to French institutions from the - how do you call it - child care...

Mme Johnson (Maya): Day care?

M. Curzi: Yes, from... until the end of the college. After that, well, after that... So, it means that everybody will stay as long as possible in that French education, and I think that it will be very important ahead of the working field. So, it will help to... to have more French use in the working field.

Le Modérateur (M. Paul Journet): Angelica Montgomery...

Mme Montgomery (Angelica): O.K. M. Curzi, you probably are aware of the same poll I'm aware of, in L'Actualité, that shows that Anglophones, young Anglophones, 80% bilingual, have no attachment to the language nor desire to keep it in Montréal. How... If allophones feel the same way, I suspect you might consider that the French language in Montréal could be in real trouble.

M. Curzi: Yes, it is in real trouble.

Mme Montgomery (Angelica): So, how do you use a law to convince these minorities that they like French and that they want it there?

M. Curzi: It's not in a law. It's not that kind of tool.

Mme Montgomery (Angelica): If the law can't do this, then what do you do to convince these minorities?

M. Curzi: Well, it's a linguistic politic that can help, and, in a linguistic politic, there are those phenomenons of... It is not a law that will force everybody to speak French and like French, but you must create, recreate the - how do you say «fierté de...»

Mme Montgomery (Angelica): Pride.

M. Curzi: ... - the pride, the pride of your language and the fact that the conviction for everybody to understand that you can work, you can live, you can love, you can have a lot of distractions, you can do everything you want in that language. And if in French you can do all that and you're not closed on yourself, it's an open language open on the world, there is 225 million of people speaking French in the world, that we're not like in a protection process. We are in a process of affirmation of prideness, be proud of what... the language. If we are, if we can go on creating in our own language, in our own culture, then, slowly, we'll give back to that language his papers of «noblesse», you know.

Mme Montgomery (Angelica): But why would an Allophone or an Anglophone be proud of French?

M. Curzi: Bien, he will be proud when he will... the signs will be clear that it is the common language of everybody and that it is the way to be part of our society, the better way. The Anglophones have understood that for a long time because almost 80% of the Anglophones are bilingual because they know that's the common language. It's the best way to be. Merci.

(Fin à 16 h 27)

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