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Conférence de presse de M. Benoît Dubreuil, commissaire à la langue française

Version finale

Wednesday, February 14, 2024, 13 h 15

Salle Evelyn-Dumas (1.30), édifice Pamphile-Le May

(Treize heures dix-neuf minutes)

Le Modérateur : Bonjour à tous. Bienvenue à cette conférence de presse du Commissaire à la langue française sur son rapport concernant l'immigration temporaire. Il est accompagné de Rodolphe... J'ai oublié son nom, excusez-moi. Rodolphe Parent, analyste responsable du dossier. Donc, je vous laisse parler, M. Dubreuil, puis on reviendra avec des questions par la suite.

M. Dubreuil (Benoît) : Merci beaucoup. Alors, bonjour à tous. Je vous remercie d'être avec nous aujourd'hui. Alors, aujourd'hui, j'ai le plaisir de rendre public un rapport portant sur l'immigration temporaire. Alors, c'est un rapport que nous avons décidé de préparer rapidement en raison de la croissance fulgurante du nombre de résidents non permanents au Québec depuis la fin de la pandémie.

Alors, laissez-moi revenir un peu en arrière. À l'automne 2022, la publication des données du recensement nous apprenait qu'il y avait environ 205 000 immigrants temporaires au Québec. Un an plus tard, à l'automne 2023, de nouvelles estimations démographiques de Statistique Canada nous apprenaient que ce nombre dépassait désormais le demi-million. Dans mon premier rapport d'activité, en juin dernier, je soulevais déjà des inquiétudes en lien avec la forte proportion de résidents non permanents qui ignoraient le français et qui travaillaient principalement en anglais. J'ai réitéré ces préoccupations dans le mémoire que j'ai déposé en août à la consultation pour la planification de l'immigration 2024‑2027.

Alors, le rapport que je présente aujourd'hui est une réponse à cette situation. Il vise à éclairer les parlementaires et le public à l'aide d'une analyse de la situation linguistique de l'immigration temporaire. Alors, c'est une analyse inédite qui s'appuie sur des données obtenues de Statistique Canada, d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada, de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié et du ministère de l'Immigration du Québec.

Les trois premiers chapitres du rapport sont de nature descriptive. Donc, nous y présentons une analyse par programmes et sous-programmes de l'immigration temporaire et de sa croissance au Québec. Nous y présentons ce que nous savons de la connaissance et de l'utilisation du français par les immigrants temporaires. Nous montrons que la croissance de la population non permanente qui ne connaît pas le français et qui fonctionne principalement en anglais se concentre dans trois groupes, chez les travailleurs étrangers temporaires, chez les étudiants et les diplômés étrangers et finalement chez les demandeurs d'asile.Au total, nous estimons que parmi les 528 000 résidents non permanents qui étaient au Québec au 1eroctobre 2023, environ les deux tiers connaissaient le français et le tiers ne le connaissait pas. Alors, parmi ceux qui ne le connaissaient pas, la plupart connaissaient cependant l'anglais et utilisaient principalement cette langue au travail, peu importe le secteur où ils travaillaient. Parmi les différents groupes analysés, les étudiants étrangers étaient ceux qui adoptaient le plus souvent l'anglais, suivis des travailleurs étrangers puis des demandeurs d'asile. Dans chacun des groupes, il existe un lien très fort entre le pays d'origine, les connaissances linguistiques à l'arrivée et l'utilisation des langues au Québec. Alors, ainsi, les personnes qui viennent d'un pays où le français est bien implanté connaissent pratiquement toutes le français et l'utilisent autant ou plus que la moyenne québécoise. À l'inverse, les personnes qui viennent de pays où l'anglais joue un rôle véhiculaire, on pense par exemple à l'Inde ou aux Philippines, les gens utilisent l'anglais, je vous dirais, environ neuf fois sur 10 au travail. L'anglais domine aussi largement chez les ressortissants de pays comme la Chine et l'Iran, qui sont par ailleurs les bassins de recrutement importants des universités de langue anglaise au Canada.

Par ailleurs, dans tous les groupes d'immigrants temporaires, les ressortissants de pays d'Amérique latine, principalement du Mexique, du Brésil et de Colombie, avaient tendance à se partager à parts égales entre le français et l'anglais. Alors, considérant la forte proportion de résidents permanents qui ne connaissent pas le français, nous nous sommes aussi demandé quel fut l'effet de la hausse observée ces dernières années sur la situation linguistique. Alors, même s'il n'existe pas de mesure directe, le scénario le plus plausible est qu'entre 2021 et 2023 l'augmentation de l'immigration temporaire aurait entraîné une hausse d'environ un point de pourcentage de la population qui ne connaît pas le français. Celle-ci serait passée de 6,3 % à environ 7,2 %. La hausse de l'immigration temporaire aussi... aurait aussi entraîné une augmentation d'environ un point de pourcentage de la population qui travaille principalement en anglais.

Si nous présentons les choses en nombre absolu, le nombre de personnes qui, au Québec, ne connaissent pas le français aurait augmenté d'environ 50 % depuis 2011, principalement en raison de l'immigration temporaire. Sur le marché du travail, le nombre de gens qui n'utilisent pas principalement le français aurait augmenté d'environ 40 %. Pour évaluer le rythme d'apprentissage du français par les immigrants temporaires, nous avons comparé le nombre de résidents non permanents au Québec au nombre de participants aux cours de Francisation Québec. Ainsi, au 1er octobre 2023, on estime qu'il y avait entre 155 000 et 191 000 immigrants temporaires qui ne connaissaient pas le français au Québec. De leur côté, les données de Francisation Québec montrent que, cette année, environ 50 000 ou peut-être 55 000 immigrants temporaires se seraient inscrits pour suivre un cours de français, soit environ le tiers ou le quart de tous les immigrants temporaires qui ne connaissaient pas cette langue. Parmi ceux qui se sont inscrits, environ 32 000 ont pu suivre au moins un cours, soit environ 60 %. Finalement, parmi ceux qui ont suivi des cours, la plupart ont étudié à temps partiel pour une durée moyenne de quelques mois. En bout de ligne, nous estimons que le nombre d'heures réalisées en francisation cette année correspondrait à environ 5 % à 6 % de celui qui serait nécessaire pour que tous les immigrants temporaires puissent parler français couramment. En l'absence de liste d'attente, donc, si toutes les personnes qui se sont inscrites à Francisation Québec avaient obtenu une place, ce nombre aurait pu atteindre peut-être 10 %.

Alors, la situation s'explique en partie par l'insuffisance de l'offre, mais surtout par l'insuffisance de la demande. Une majorité d'immigrants temporaires ne s'inscrivent pas aux cours de Francisation Québec et ceux qui y obtiennent une place n'y consacrent pas suffisamment de temps pour dépasser le niveau débutant. Pour accroître le nombre d'heures investies en francisation, il faudrait ajouter des sommes importantes, non seulement pour ouvrir de nouvelles classes, mais surtout pour convaincre les gens de s'inscrire et convaincre ceux qui s'inscrivent d'y consacrer davantage d'heures. En effet, hein, vous savez ce qui coûte le plus cher dans l'apprentissage d'une langue, c'est le temps qu'on y met, c'est ce qu'on appelle les coûts de renoncement.

Alors, un des éléments originaux du rapport que nous présentons, c'est d'avoir tenté de chiffrer quels seraient les montants qui devraient être engagés, incluant les coûts de renoncement, pour que tous les immigrants temporaires puissent apprendre à parler français couramment. Nous arrivons à un résultat qui va entre 11 et 13 milliards de dollars. Alors, c'est un montant qui est assez élevé parce que l'apprentissage du français exige beaucoup d'heures, environ une année d'études à temps plein, et parce que les immigrants temporaires parviennent à travailler et à obtenir des salaires non négligeables, même sans connaître le français, particulièrement s'ils maîtrisent l'anglais, ce qui est le cas de la plupart d'entre eux.

Alors, dans le rapport, nous ne disons pas qui devrait couvrir ces coûts, mais quelqu'un devrait le faire. Alors, ça pourrait être le gouvernement, en bonifiant son aide financière, ça pourrait être les employeurs, en libérant les travailleurs pendant leurs heures de travail, ou ça pourrait être les universités, en offrant davantage de bourses. Finalement, ça pourrait être les personnes immigrantes elles-mêmes en coupant le nombre d'heures... leur nombre d'heures travaillées ou encore en coupant sur leurs heures personnelles.

Alors, devant l'importance de ces coûts et l'importance du retard accumulé, notre rapport propose des recommandations concrètes dans le but de réduire la proportion d'immigrants temporaires qui ne connaissent pas le français et adoptent principalement l'anglais. Ces recommandations visent à établir une certaine cohérence ou rétablir une certaine cohérence entre l'immigration permanente et l'immigration temporaire, mais aussi à mieux responsabiliser chacun des acteurs quant aux coûts réels de la francisation. D'abord, nous recommandons au gouvernement de se doter d'un tableau de bord pour mieux suivre l'évolution d'une situation qui change très rapidement. Nous lui recommandons aussi de mieux communiquer aux immigrants temporaires les attentes du Québec en matière d'apprentissage du français. Il devrait également mieux communiquer ses attentes à l'égard des employeurs, des universités et du gouvernement fédéral, notamment en leur expliquant mieux le temps réellement nécessaire à l'apprentissage du français et le niveau de connaissances réellement requis pour réaliser diverses activités sociales et professionnelles.

Dans le cas des travailleurs et des étudiants étrangers, nous croyons qu'il faut renforcer les mesures incitatives pour encourager les employeurs et les établissements d'enseignement à sélectionner, dès le départ, des personnes qui parlent français. Dans le cas de ceux qui ne parlent pas déjà français, il faut des mesures qui amènent les gens à s'engager dès que possible, c'est-à-dire idéalement avant l'arrivée, dans une démarche crédible et réaliste pour apprendre le français.

Ainsi, dans le cas des travailleurs étrangers temporaires, nous proposons d'établir, en collaboration avec les partenaires sociaux, un mécanisme permettant de développer en amont des filières de recrutement et de formation de la main-d'œuvre étrangère francophone dans les professions en demande. Nous proposons aussi d'évaluer la possibilité de verser une aide financière supplémentaire afin de soutenir l'apprentissage intensif du français dans le pays d'origine avant l'arrivée au Québec.

Finalement, pour être certain que l'apprentissage du français s'amorce au bon moment, nous proposons d'exiger une connaissance de niveau 3 à l'oral au moment de l'obtention d'un premier permis de travail dans le cadre du PTET, puis une connaissance du français de niveau 5, toujours à l'oral, au moment du renouvellement du permis, tout cela à l'exception du volet agricole.

Dans le cas des étudiants étrangers, nous recommandons au gouvernement de s'assurer que la formule de financement des universités favorise la connaissance et l'utilisation du français d'une manière cohérente. Nous lui proposons aussi d'entamer des discussions avec le gouvernement du Canada en vue de rendre le droit de travailler hors campus, pour les titulaires d'un permis d'études, conditionnel à l'atteinte d'une connaissance de niveau 3 à l'oral, selon l'Échelle québécoise des niveaux de compétence en français. De même, nous proposons de rendre la délivrance du permis de travail postdiplôme conditionnelle à l'atteinte du niveau 7 à l'oral et du niveau 5 à l'écrit de l'échelle québécoise.

Toujours en lien avec le gouvernement du Canada, nous appuyons la mise en place d'une entente fédérale-provinciale qui prévoirait un mécanisme de répartition des demandeurs d'asile. À cet effet, nous recommandons que cette répartition tienne compte d'abord et avant tout des caractéristiques linguistiques des demandeurs d'asile. Ainsi, nous proposons que ceux qui connaissent déjà l'anglais soient orientés de manière prioritaire vers une des provinces anglophones qui reçoit en ce moment peu ou pas de demandeurs d'asile. Au sein de la fédération, le rôle du Québec devrait d'abord être d'accueillir les demandeurs d'asile qui ont déjà une certaine connaissance du français.

Une telle répartition permettrait de réduire de façon importante les coûts de l'intégration linguistique des demandeurs d'asile, que nous estimons en ce moment à environ 2 milliards de dollars pour le Québec seulement. Elle faciliterait aussi l'intégration des demandeurs d'asile eux-mêmes et contribuerait à améliorer... elle faciliterait à la fois, en fait, l'intégration des demandeurs d'asile et contribuerait à améliorer la situation du français. Une fois en place, cette approche permettrait par ailleurs de mieux cibler le soutien financier à l'intégration linguistique en bonifiant, par exemple, l'aide financière pour les personnes qui en ont le plus besoin, par exemple les demandeurs d'asile qui ne parlent ni français ni anglais.

Alors, prises conjointement, les 12 recommandations que nous formulons dans ce rapport devraient permettre d'accroître de façon importante la connaissance et l'utilisation du français au sein de la population temporaire. Elles permettront aussi d'éviter la croissance continue au Québec d'une population qui ne connaît pas le français et qui est peu susceptible de l'adopter de façon prédominante. Elle contribuerait finalement à réduire le goulot d'étranglement qui s'est formé au moment du passage à la résidence permanente en rétablissant une forme de cohérence dans nos politiques d'immigration. Alors, voilà. Je vous remercie beaucoup et je suis disponible pour répondre à vos questions.

Le Modérateur : Merci. On va passer à la période des questions. Je vais vous laisser poser trois questions, pas plus, parce que je crois qu'on a le temps et que c'est important. Je vais commencer avec Sébastien Desrosiers, Radio-Canada.

Journaliste : Bonjour. Vous proposez, entre autres, d'augmenter les exigences en matière de français pour les travailleurs étrangers temporaires. Donc, selon vos recommandations, je comprends que le niveau 4 que va exiger le gouvernement Legault aux travailleurs étrangers temporaires pour un renouvellement de permis de travail n'est pas suffisant. Pourquoi?

M. Dubreuil (Benoît) : Alors, pour expliquer comme il faut, il faut vraiment essayer de voir, là, concrètement ce que signifie un niveau 4. O.K.? Donc, le niveau 4, c'est le dernier niveau du stade débutant. La personne au niveau 4, elle est capable d'interagir dans des situations qui sont extrêmement simples, avec des phrases courtes. Donc, le nombre de situations dans lesquelles la personne peut interagir est vraiment très, très limité. Sur le marché du travail, il n'y a pas beaucoup d'emplois, là, qu'on peut faire quand on est au niveau 4. On ne peut pas vraiment non plus se faire d'amis au travail, on ne peut pas beaucoup socialiser. Donc, c'est clair qu'il y a un élément de compromis politique, évidemment, dans le choix d'un niveau. On n'est peut-être pas obligé de mettre la barre tellement haute que tout le monde pourrait travailler en français dès l'arrivée. Mais le niveau 4 nous apparaît particulièrement faible, là.

Journaliste : Et la différence avec un niveau 5, ce serait?

M. Dubreuil (Benoît) : Alors, moi, le niveau 5, je le trouve également trop faible. Je l'avais mentionné à la consultation sur la planification de l'immigration l'été dernier. Alors, l'idée du niveau 5, c'est d'avoir une cohérence avec ce qui va être demandé à l'immigration permanente, parce qu'il serait évidemment étrange de demander un niveau plus élevé des immigrants temporaires que ce que l'on demande des immigrants permanents. Mais, à mon sens, le niveau 5 qui va être demandé des immigrants permanents, dans les métiers qui sont peu spécialisés ou semi spécialisés, est probablement trop faible. Il y a des travaux auxquels je fais référence dans le rapport, qui sont menés conjointement par le MIFI et l'Université de Montréal, qui visent à établir un référentiel entre les différentes professions et l'échelle des niveaux de compétences en français. Et ça, quand ça va être terminé, je pense que ça va nous permettre de mieux comprendre qu'est-ce que les gens peuvent réellement faire avec différents niveaux. Et ce que je propose, c'est de peut-être revoir, là, le niveau qui est exigé à l'immigration permanente quand ces travaux-là vont être disponibles.

Journaliste : Mais je comprends que le niveau 4, là, vous dites que le gouvernement Legault, au fond, n'est pas allé assez loin, a fait une forme de compromis.

M. Dubreuil (Benoît) : Bien, forcément. Évidemment, eux, ils ont tous les éléments avec lesquels ils doivent naviguer. Donc, oui, évidemment, c'est sûr qu'il y a des employeurs qui ont pris l'habitude de faire venir des travailleurs temporaires qui ne parlent pas du tout français. Donc, ces gens-là ont investi, hein, dans le recrutement de cette main-d'œuvre. Ils comptent sur cette main-d'œuvre. Donc, il y a comme un enjeu de transition ou de dépendance aussi pour ces gens-là. Je comprends que c'est ça que le... c'est ce que le gouvernement a pris en considération. À mon avis, je pense qu'aujourd'hui on a la marge de manœuvre pour aller un peu plus loin.

Journaliste : Et peut être juste une question, parce que vous avez évalué les coûts de franciser tous les immigrants temporaires à un niveau intermédiaire, mais vous n'avez pas chiffré vos mesures. Comment... Tu sais, parce qu'on demanderait, par exemple, aux immigrants de se former en amont. Donc, avant d'arriver au pays, il y aurait une aide financière qui serait versée. Je veux dire, ça coûterait quand même un certain montant, j'imagine. Est-ce que vous l'avez évalué?

M. Dubreuil (Benoît) : Alors, juste un instant. Donc, les mesures que l'on propose pour l'essentiel n'ont pas de coût, hein, en fait, parce que, dans le fond, il s'agit de rehausser les standards, là, pour le recrutement puis pour l'admission ou le renouvellement des permis. Donc, toutes les mesures que l'on propose visent à diminuer les coûts. L'exception que vous mentionnez, elle est... En fait, ce que vous mentionnez, c'est probablement une des exceptions. Évidemment, le gouvernement pourrait décider de mettre un plafond puis dire : Bien, nous, c'est un service qu'on offre à x milliers, par exemple, de travailleurs, de travailleurs temporaires. C'est comme en ce moment, hein, avec la francisation, il y a l'aide financière qui est permise, en fait, ou qui est allouée, puis ensuite, bien, il faut voir combien de gens la réclament.

M. Parent (Rodolphe) : Dans la recommandation, on évalue la possibilité d'offrir une aide, là. Donc, cette recommandation est encore très floue à dessein, notamment parce qu'on pourrait, par exemple, commencer par un projet pilote dans un pays d'Amérique latine. Et dans ce cas-là, on ne peut pas vraiment chiffrer parce qu'il reste encore beaucoup de choses à déterminer. Mais on voulait inciter le gouvernement à penser à cette option-là.

M. Dubreuil (Benoît) : La difficulté, en fait, c'est de cibler les gens qui vont recevoir l'aide parce qu'on ne veut pas verser une aide à des gens qui, finalement, ne viendront pas. Mais si on a des gens qui vont venir, qui sont en attente d'un permis et qu'on peut les aider à faire trois mois, quatre mois de francisation intensive avant de venir, alors on pense qu'on peut vraiment, là, changer la donne une fois les gens arrivés. Plus particulièrement dans le cas de l'Amérique latine, on a vu, là, que les données étaient plutôt... la situation était plutôt partagée. Si les gens vont prendre de l'avance en français avant d'arriver, on pense qu'il y a plus de chances quand même ensuite d'apprendre le français, oui.

Le Modérateur : Si je peux me permettre, pendant qu'on est sur le sujet du programme des travailleurs étrangers temporaires, le PTET, une des différences de votre proposition avec la proposition qui a été faite par le gouvernement, c'est l'imposition d'exigences en français avant l'arrivée, donc avant le renouvellement aussi. Pourquoi avoir fait ce choix-là?

M. Dubreuil (Benoît) : Pour que l'impact soit plus rapide. Aussi, pour s'assurer justement qu'on a vraiment les bons incitatifs, que les gens sachent véritablement dans quoi ils s'embarquent, hein? Donc, l'idée de dire : On va prendre des gens qui sont au niveau 0, et puis deux ans ou trois ans plus tard, on va leur demander s'ils ont atteint un certain niveau, pour nous, le fait de demander aux gens de déjà faire un certain investissement avant de venir permettra de clarifier les choses. Ça permettra de clarifier le sérieux de la démarche de l'employeur, mais ça permettrait aussi à la personne elle-même de voir si elle a véritablement envie de s'embarquer dans ce type d'apprentissage. Moi, ce que je constate, c'est que ce n'est pas tout le monde qui est habitué d'apprendre une autre langue. Ce n'est pas tout le monde nécessairement qui a une idée précise du type d'effort que ça exige. Donc, on pense que si les gens commencent plus tôt, ils vont faire aussi des choix qui vont être plus informés. Puis en bout de ligne, on va avoir des gens qui vont être mieux préparés pour rejoindre le marché du travail puis on va avoir une meilleure adéquation entre les aspirations des personnes et les besoins du Québec.

Le Modérateur : Merci. On va penser à Thomas Laberge, La Presse Canadienne.

Journaliste : Oui, merci.

Le Modérateur : À moins que tu ne sois pas prêt, je peux...

Journaliste : Je suis prêt. Merci. Bon, vous avez parlé, par exemple, des coûts de la francisation. Ça donne un ordre de grandeur, quand même, du défi qui attend notamment le gouvernement. On a parlé beaucoup de capacités d'accueil dans les derniers temps, plusieurs la définissent... notamment sur la question de la francisation. Avec le portrait que vous tracez actuellement, est-ce que vous considérez que le Québec a une capacité d'accueil qui n'est pas atteinte, qui est atteinte ou qui est largement dépassée?

M. Dubreuil (Benoît) : Alors, ce qui est important, c'est de distinguer, par exemple, la dynamique sur le plan économique, sur le plan du logement et sur le plan linguistique, hein?

Journaliste : Mais juste sur le plan linguistique?

M. Dubreuil (Benoît) : Alors, sur le plan linguistique, ce qui compte, ce n'est pas d'abord le nombre total de personnes, c'est beaucoup plus le profil des personnes à l'arrivée qui est déterminant. Vous me suivez? Donc, si on veut que le français se maintienne, idéalement, ce qu'il faut, c'est qu'on ait la bonne composition d'immigration à l'arrivée. La réalité, on le voit, c'est complexe. C'est quand une personne arrive, à Montréal plus particulièrement, avec une connaissance avancée ou intermédiaire de l'anglais, la force du français sur le marché du travail dans la société n'est pas telle que la personne va être, comme, obligée, là, très, très fortement forcée. Donc, les obstacles qui s'élèvent pour cette personne-là sont trop nombreux. Si les gens viennent, par exemple, pour étudier à temps plein en anglais, pour travailler à temps plein en anglais, on s'aperçoit très rapidement, les gens ne sont pas capables de dégager les 1 000, 1 500 ou 2 000 heures dont ils ont besoin.

Ensuite les gens... ça, c'est l'autre problème, donc les gens travaillent en anglais ou étudient en anglais. Donc, pour eux... Alors, je pense qu'en général, les gens reconnaissent que c'est utile de parler français puis de connaître le français, c'est juste que, s'ils n'en ont pas besoin de façon impérative, bien, ils peuvent aussi repousser à plus tard.

Et l'autre point aussi qui est important, c'est que la plupart des gens qui ne parlent pas français au Québec sont en immersion anglaise. Donc, si vous arrivez, vous connaissez bien l'anglais, vous êtes en immersion anglaise à temps plein et vous faites du français trois, quatre, cinq heures-semaine, si je reviens vous voir un an, deux ans, trois ans plus tard, quelle va être votre langue forte? Celle que vous allez privilégier dans un environnement comme celui de Montréal où, dans les faits, il n'y a pas beaucoup de contraintes à l'utilisation d'une langue plutôt que l'autre.

Journaliste : Juste pour revenir sur ma question. Au fond, ce que vous dites, ce n'est pas la question du nombre, c'est effectivement le nombre qu'on reçoit. Ça, je le comprends, mais vous mettez beaucoup de «si», tu sais, si on avait atteint tel type d'immigrants, mais moi, je vous parle dans la situation actuelle. Vous avez parlé, par exemple, des cours de francisation, où il y a des listes d'attente, il y a peu de gens qui sont francisés. Donc, dans la situation actuelle, on a vraiment l'impression que le Québec n'a pas la capacité d'intégrer les personnes qui sont actuellement présentes sur le territoire.

M. Dubreuil (Benoît) : Oui. Bien, c'est-à-dire que, là, on a accumulé un passif, hein, dans le sens où les gens qui sont arrivés au cours des dernières années, même si on voulait avoir des classes de francisation pour tout le monde, on n'y arriverait pas. Et même si on avait des classes de francisation, il faudrait avoir des incitatifs financiers beaucoup plus forts pour amener les gens à s'inscrire et pour amener les gens à y mettre un nombre d'heures conséquent. Donc, je ne sais pas comment on pense la capacité en lien avec ça, là. C'est sûr qu'on peut toujours mettre l'argent, là, mais est-ce que c'est vraiment ça qu'on veut prioriser? Parce que, là, on a accumulé un passif. Je pense, ça prend une stratégie pour réduire le passif qu'on a accumulé. Je ne sais pas si...

Journaliste : Oui. Bien, je me doutais que vous n'alliez répondre directement, mais je voulais tenter ma chance.

M. Dubreuil (Benoît) : Bien, c'est la meilleure réponse que je peux donner. Je vais y travailler. Je vais travailler ma réponse.

Le Modérateur : Merci. On va passer à Patrick Bellerose, Journal de Québec.

Journaliste : Oui. Bonjour. Peut-être juste vous ramener au début, en fait. Pourquoi est-ce qu'on devrait se préoccuper de cette hausse-là, donc, d'immigrants temporaires? Parce que, bon, à la base, l'immigrant temporaire, c'est temporaire. Une bonne partie risque de quitter le Québec. Et vous dites vous-même que l'impact, c'est 1 % d'augmentation de gens qui ne connaissent pas le français. Donc, pourquoi est-ce que c'est préoccupant, à votre avis?

M. Dubreuil (Benoît) : Alors, la première raison, c'est vraiment celle de l'impact sur la situation du français actuel. Est-ce que 1 % c'est beaucoup? Alors, 1 % de baisse du français au travail, par exemple, en deux ans, alors, historiquement, c'est énorme. En fait, je pense que c'est même incomparable. Alors, évidemment, ce n'est pas un effondrement du français, mais on ne peut pas dire que c'est un petit impact, hein, O.K.? Vous avez vu aussi les données que j'ai présentées sur le nombre de personnes en nombre absolu. C'est quand même une croissance très importante du nombre de personnes qui ne parlent pas le français et qui travaillent de façon prédominante en anglais. Donc, en soi, il y a une préoccupation autour du nombre de personnes et de l'impact que ça a dans la société.

Il y a une deuxième préoccupation qui est celle d'avoir une situation où les politiques d'immigration temporaire sont désarticulées par rapport aux politiques d'immigration permanente. Donc, vous avez des gens qui viennent ici... qui sont ici depuis trois, quatre, cinq, six, sept ans, qui ne se sont pas engagés dans une démarche d'apprentissage du français, qui sont venus avec l'espoir ou l'attente réaliste, pas réaliste, bien informés, mal informés, ce n'est pas à moi de juger, mais qui sont venus avec l'espoir d'obtenir la résidence permanente et qui là se retrouvent un peu dans un cul-de-sac. Et là la tension qui apparaît, qui découle de ça, c'est que nous, on a le choix comme société entre admettre des gens qui vont être peu susceptibles d'adopter le français, donc d'abandonner une partie... de faire un compromis sur la situation du français, ou sinon de se retrouver avec une population qui est quand même là, qui a des aspirations, puis qui, pour une raison ou pour une autre, n'a pas fait l'apprentissage qu'on aurait pu attendre. Et on va se retrouver aussi dans une situation où vous allez avoir des gens qui vont se qualifier pour la résidence permanente, mais parfois en allant chercher le minimum linguistique, donc pas nécessairement en allant chercher toutes les compétences que les Québécois auraient voulues.

Donc, je pense que, quand on prend tout ça ensemble, je pense qu'on a une situation qui n'est pas réellement souhaitable, là.

Journaliste : ...en deux ans, c'est énorme. Je vais venir spéculer un petit peu, mais si on laisse la situation actuelle progresser, on retrouverait quoi d'ici une dizaine d'années?

M. Dubreuil (Benoît) : Je peux vous donner peut-être une référence historique, là. Quand on a commencé à mesurer la connaissance des langues, on était à 11 % ou 12 % de gens au Québec qui ne connaissaient pas le français. Ça a diminué de façon continue. Au début des années 2000, on a atteint la moitié de ça, 5,5 %. On avait stabilisé la situation autour de 5,5, et là on serait repassé au-dessus de 7 %, 7,2 %, peut-être un peu plus. Alors, j'ai de la difficulté à répondre à votre question parce que j'ignore à quel point la croissance actuelle va se poursuivre. Alors, combien réalistement peut-il y avoir d'immigrants temporaires au Québec? À chaque mois, on regarde les statistiques et on a de la difficulté à croire aux données que l'on voit. Il y a la question du logement, il y a la question des infrastructures, il y a la pression.        Donc, est-ce qu'il y a un moment où, par exemple, sur le logement, on va atteindre un point où tout simplement les gens vont dire : Bien, non, moi, je ne veux pas étudier au Canada, parce que c'est impossible de se loger ou... Est-ce qu'on va atteindre ce point-là? Peut-être. Et là peut-être que les choses vont comme un peu se stabiliser naturellement. Mais, déjà, moi, je parle à des démographes puis, déjà, les gens ont de la difficulté à croire les données qu'ils voient. Donc, jusqu'où ça va aller, c'est difficile de le dire.

Journaliste : J'aimerais vous entendre plus précisément sur la mesure que vous proposez, là, pour répartir les demandeurs d'asile à travers le Canada selon la langue qu'ils maîtrisent. Sur papier, je comprends, je comprends l'idée. Par contre, dans la réalité des faits, je vous dirais... un pays, une unité administrative, je vois mal comment on peut obliger des gens à s'installer au Manitoba, par exemple, ou en Saskatchewan.

M. Dubreuil (Benoît) : Ce qu'on ne peut pas faire au Canada, c'est, par exemple, empêcher les gens de se déplacer d'une province à l'autre. Ce n'est pas tant un droit prévu par la constitution pour les non-permanents, c'est plus qu'il n'y a pas de mécanisme, dont le cas qu'on a fait pendant la COVID, là, c'est peut-être l'exception. Mais, non, il n'y a pas vraiment de mécanisme, là, pour empêcher les gens se déplacer d'une province à l'autre. Je vous dirais que le pari, je pense que c'est assez solide, mais je pense que le pari, c'est qu'il y a beaucoup de gens qui arrivent à l'aéroport Trudeau ou à l'aéroport Pearson qui ne viennent pas d'abord au Québec, O.K.? Donc, les gens vont à Trudeau ou Pearson parce que c'est peut-être le billet d'avion le moins cher ou...

Donc, on pense que si un milieu d'accueil... une capacité d'accueil qui est développée dans des villes comme Halifax, St. John's, Edmonton, Calgary, des villes qui reçoivent en ce moment très peu de demandeurs d'asile, on pense qu'il n'y a pas de raison, en fait, que des gens qui sont d'abord anglophones, qui ont déjà des connaissances en anglais, ne voudraient pas être accueillis dans ces villes-là. Moi, ça... écoutez, peut-être qu'on se trompe, mais je pense que ça vaut quand même la peine d'essayer. C'est vraiment un système comme ça aussi que l'Europe est en train d'essayer de développer pour résoudre aussi un problème similaire.

Journaliste : ...

M. Dubreuil (Benoît) : Bien, nous, on fait référence à une étude suisse sur l'impact de se retrouver dans une zone linguistique où les gens parlent une langue proche de la nôtre. Mais, non, je parle du nouveau pacte sur l'asile et l'immigration de l'Union européenne, où il va y avoir des quotas d'accueil de demandeurs d'asile par pays.

Le Modérateur : Hugo Pilon-Larose, La Presse.

Journaliste : Oui. Anticipez-vous que les recommandations que vous formulez au gouvernement pourraient... par exemple, au niveau des exigences linguistiques, là, pour les travailleurs étrangers temporaires ou les étudiants étrangers, pourraient avoir pour effet, au final, de réduire le nombre d'immigrants temporaires au Québec?

M. Dubreuil (Benoît) : Bien, c'est sûr que ça va exercer une pression à la baisse, hein, parce qu'on crée des incitatifs, des mesures incitatives pour réduire le bassin de recrutement puis on augmente les coûts pour les gens qui recruteraient des gens qui ne parleraient pas français. Donc, oui, ça va exercer une pression à la baisse. Par contre, de combien? C'est difficile à dire, parce que, si on regarde les PTET, l'année dernière, on était à quoi, 15 000 environ, et là les données pour cette année, bien, il va falloir que je retrouve les chiffres, mais on était à quoi, 35 000 à peu près. Donc, ça, c'est en une année, on a atteint des chiffres qui sont complètement inédits.

Donc, si, cette année, on avait recruté uniquement des travailleurs étrangers temporaires francophones, on aurait déjà eu une hausse importante. O.K. Donc, c'est dur de prévoir. Alors, si l'objectif du gouvernement, par exemple, c'est-à-dire : Nous, ce qu'on veut, c'est une baisse nette du nombre de temporaires, oui, il peut prendre nos recommandations puis les appliquer, mais il peut aussi faire comme a fait... a proposé, par exemple, récemment, le ministre Miller à l'échelle canadienne et puis dire : Bien, on va plutôt y aller par une approche de plafond, une espèce de seuil. Ça, c'est une autre approche que le gouvernement pourrait choisir s'il voulait réduire le nombre total. Ça, ça donne une certitude sur le nombre de permis qu'on émet.

Journaliste : Ici, à l'Assemblée nationale, l'opposition officielle dit que les immigrants temporaires présentement sur le territoire occupent des emplois, et donc sont nécessaires à l'économie. Si on met des mesures qui baissent leur nombre, est-ce que vous proposez de nuire à l'économie?

M. Dubreuil (Benoît) : Alors, l'économie, c'est un tout dynamique qui s'ajuste d'année en année à travers l'innovation, à travers les prix, à travers les salaires. Donc là, c'est sûr qu'on a créé une situation où il y a un certain nombre d'entreprises, c'est une minorité, une petite minorité de l'ensemble des entreprises au Québec, qui dépendent d'une main-d'œuvre temporaire qui ne maîtrise pas le français. Alors, nous, on souhaite avoir des mesures incitatives pour encourager ces employeurs à sélectionner et à recruter des gens qui vont déjà parler français ou qui vont commencer à l'apprendre avant d'arriver. Donc, il ne s'agit pas de ne pas respecter les permis de travail qui ont déjà été accordés. Hein, c'est clair, les gens qui sont sur des permis de travail ici ou des permis d'étude, ils ont le droit d'être ici, là. Donc, ils ont une date... ils ont une date limite à leur permis, mais ils ont le droit d'être ici. Donc, l'idée, évidemment, c'est de travailler sur les nouvelles embauches pour s'assurer que les employeurs fassent des bons choix et qu'on ne se retrouve pas dans la situation dans laquelle on se trouve actuellement ou qu'on vienne... En fait, ce n'est pas un problème qu'on peut résoudre du jour au lendemain, là. Donc, il faut regarder peut-être sur quelques années comment on peut diminuer le problème pour essayer de rétablir une certaine cohérence dans l'ensemble. C'est un problème qui s'est constitué très rapidement, en deux ou trois ans, mais ça va prendre quand même un certain nombre d'années, là, pour réaligner les choses.

Journaliste : J'ai deux autres petites questions pour vous. Au niveau des étudiants étrangers, vous proposez donc un niveau de connaissance du français si ces étudiants souhaitent travailler hors campus. Or, pour que les universités d'expression anglaise au Québec contribuent au fait français, doivent-elles augmenter la francisation de leurs étudiants sur les campus, même de ceux qui n'occupent pas de travail parce qu'ils ont des bourses ou que leurs parents les financent?

M. Dubreuil (Benoît) : Alors, nous, ce qu'on dit par rapport à ça, c'est... on n'analyse pas, là, de façon très, très précise la proposition gouvernementale que vous connaissez très bien, là, mais ce qu'on dit, c'est qu'on peut encore travailler sur la formule de financement pour qu'une université qui amène sur le marché du travail quelqu'un qui peut fonctionner en français soit toujours favorisée par rapport à une université qui amène sur le marché du travail des gens qui ne peuvent pas travailler en français, qu'on soit au bac, à la maîtrise ou au doctorat, puis qu'on soit avant les études, qu'on soit pendant les études ou après les études. Donc, on pense qu'il y a du travail à faire pour avoir des incitatifs, des mesures incitatives, là, et qui soient cohérentes, là. O.K.?

Ensuite, les universités vont voir dans quelle mesure ils peuvent intégrer, justement, dans les programmes, dans des cours, convaincre les gens justement de faire ces cours de français pour devenir meilleurs. Mais moi, je ne pense pas que ça devrait être impossible. Par exemple, quelqu'un qui dit : Moi, je veux aller à l'université McGill. Le français, ça ne m'intéresse pas. Je suis prêt à payer toutes mes études, puis je vais retourner chez moi après. Hein, on sait qu'il y a beaucoup d'Américains, par exemple, qui viennent ici. Il n'y a pas nécessairement d'intérêt pour le français. Ils veulent retourner après, et tout. Moi, je pense que ça, ça devrait être permis. O.K. Moi, je ne suis pas contre le fait qu'il y ait des gens qui viennent au Québec pour étudier en anglais si leur objectif est de quitter par la suite. C'est une question de nombre, évidemment, là. L'enjeu, c'est à partir du moment où on dit : Bien là, tu as le droit de travailler pendant tes études, après tes études. On crée des passerelles pour une immigration permanente. Si c'est ça... Parce qu'on sait que c'est ça, la raison derrière la croissance du nombre d'étudiants étrangers au Canada depuis 15 ans. Hein, c'est toutes les modifications aux règles d'immigration que je viens de mentionner.

Journaliste : Et ma dernière question, je vais faire appel à vos talents pédagogiques, c'est... Parce que vous avez sorti un gros chiffre aujourd'hui, là, qui est le fameux 13... jusqu'à 13 milliards que ça coûte, que ça coûterait, 12,9 milliards que ça coûterait pour correctement franciser l'ensemble des immigrants temporaires qui ne maîtrisent pas le français et qui sont présents aujourd'hui sur le territoire du Québec. Et si je comprends bien le calcul, vous calculez dans le fond pour que ces gens atteignent le niveau 8. Bon. Mais dans les mesures que vous proposez au gouvernement, vous-même, vous ne proposez pas le niveau 8. Puis j'essaie de trouver la cohérence, là.

M. Dubreuil (Benoît) : Ah! Bien O.K. Bien, je peux... C'est parce qu'il y a plusieurs choses là-dedans. La priorité dans les mesures que l'on propose, c'est de rétablir la cohérence entre le temporaire et le permanent. O.K.? Je reviens un peu sur la réponse que j'ai donnée un peu plus tôt. Le gouvernement a décidé cet été qu'il allait demander le niveau 5 pour les professions peu ou semi-spécialisées et le niveau 7 pour les professions spécialisées. Moi, j'attends de voir les résultats des travaux de l'UDM, mais, personnellement je trouve ça faible. Moi, un diplômé qui a un niveau 5, je ne l'embauche pas, O.K., puis je connais quand même pas mal l'apprentissage des langues, là. On ne peut pas prendre la personne puis la mettre dans une réunion de travail, on ne peut pas la mettre ici dans la salle puis penser que la personne va comprendre ce qui se passe. O.K.? Donc, ça, je pense qu'il faut qu'on garde un oeil ouvert là-dessus puis voir comment on va faire évoluer les niveaux pour l'immigration permanente.

Par ailleurs, je comprends aussi qu'il y a un élément de compromis politique, puis moi, ça ne me dérange pas qu'il y ait un certain nombre d'immigrants qui sont sélectionnés au Québec... qui soient sélectionnés au Québec à l'immigration permanente et qu'ils soient plus anglophone que francophone puis qui s'intègrent plus en anglais. Moi, je n'ai pas de problème à ce qu'un certain nombre d'immigrants s'intègrent plus en anglais puis soient meilleurs en anglais qu'en français. Mais c'est sûr que si c'est 30 %, 35 %, 40 %, bien là, ça va être difficile de maintenir la place du français au Québec. Vous comprenez? Si c'est 5 %, bien là, le français va progresser. Si c'est 10 % ou 15 %, bien là, l'anglais va être à peu près stable. O.K.?

Donc, pour moi, le niveau 8 dont je parle, c'est pour réussir le stade débutant et le stade intermédiaire, et là on peut en discuter. Est-ce que la personne qu'on fait venir, on veut qu'elle atteigne vraiment ce niveau-là? Moi, je vous dis : Si ce que vous voulez, c'est que l'immigrant atteigne un niveau de français, là, que vous allez pouvoir l'inviter à souper chez vous puis discuter, vous allez pouvoir la mettre ici, elle va pouvoir lire l'article que vous allez faire à la suite de cette conférence de presse, ce n'est pas un niveau 5 que ça prend. O.K.? Si vous voulez que l'immigrant vous lise, il faut aller plus loin que ça. Si vous voulez pouvoir l'inviter à souper, qu'il devienne votre ami, il faut plus qu'un niveau 5. Si...

Journaliste : Niveau 8.

M. Dubreuil (Benoît) : Bien, écoutez, c'est toujours... on peut en discuter, mais, évidemment, il y a des gens, des fois, qui ont des problèmes de littératie puis qui peuvent être fonctionnels dans leur vie de tous les jours avec un niveau plus bas de compétences linguistiques. O.K. Mais de façon générale, si vous voulez une personne qui est capable d'être un peu en contact avec la société dans laquelle elle vit puis nouer des relations sociales véritables... Parce qu'au niveau 5, là, si vous essayez de souper avec quelqu'un, là, vous allez sortir, vous allez être brûlé parce que c'est trop d'efforts cognitifs. O.K.? Donc, pour moi, le niveau 8 demeure quand même quelque chose qu'on devrait viser de façon générale pour assurer une intégration sociale. Cela dit, si votre objectif, c'est que la personne puisse vous vendre un café puis vous dire : Ça coûte 4,29 $, bien là, on n'a pas besoin du niveau 8. O.K.?

Journaliste : Merci. Je vais me permettre certaines questions. François Carabin, Le Devoir. Pour revenir sur votre proposition concernant la répartition des demandeurs d'asile, est-ce que c'est possible juste de nous peindre un portrait? Qu'est ce qui, dans la situation actuelle, vous pousse à faire cette recommandation-là, de répartir selon la langue? Est-ce que, par exemple, il y a trop de demandeurs d'asile qui parlent anglais? Et puis, en chiffres absolus, comment ça se traduirait? Je ne sais pas si vous avez ça, là, mais combien de demandeurs d'asile, actuellement installés au Québec, devraient quitter vers d'autres provinces.

M. Dubreuil (Benoît) : Bien... O.K., plusieurs éléments, là. Vous me le dites si j'en échappe un.

Journaliste : Pas de problème.

M. Dubreuil (Benoît) : On n'a pas les données sur les connaissances des langues des demandeurs d'asile qui viennent juste d'arriver. On les a demandées à IRCC et, je crois, 55 %, 60 % des données sont manquantes. O.K.? Ça, ça veut dire que les gens, quand ils arrivent, ils écrivent sur un formulaire s'ils parlent français, anglais, et ensuite ça ne se retrouve pas dans le système d'information. Donc, nous, on ne peut pas savoir... Quand on fait des regroupements avec l'origine des gens puis ce qu'on connaît du recensement des tendances linguistiques, O.K., on arrive à la conclusion qu'il y aurait peut-être 60 % des demandeurs d'asile qui parleraient français, ce qui est cohérent avec ce qu'on a toujours eu historiquement et chez les demandeurs d'asile et chez les réfugiés. Mais vous comprenez, là, qu'on fait un peu des hypothèses.

De ceux qui ne parlent pas français, bien, il y en aurait au moins la moitié, peut-être le deux tiers, qui ont des connaissances de base en anglais qui proviendraient des différents pays que j'ai mentionnés. Ça a beaucoup été le Nigeria, ça beaucoup la péninsule... l'Asie du Sud, hein, donc l'Afrique anglophone, l'Asie du Sud, un peu l'Amérique latine aussi, il y a beaucoup de gens en Amérique latine, veux veux pas, qui ont quand même une bonne connaissance de l'anglais, donc... Puis il y a peut-être un autre, là... entre 15 % et 20 % qui ne parlent ni anglais ni français du tout.

Alors, qu'est-ce que ça veut dire parler? Ça ne veut pas dire nécessairement... On sait que, dans la plupart des cas, ces gens-là n'ont pas des connaissances très, très élevées ni en français ni en anglais, hein? Il y a des enjeux de littératie, mais quand même, les gens vont avoir une base. Si vous avez grandi au Nigeria, par exemple, si vous avez grandi au Pakistan, écoutez, c'est sûr que vous avez été exposé à l'anglais quand même longuement, là, pendant votre scolarité, bon. Là, ensuite, c'est vrai qu'il y a des gens qui ne sont pas scolarisés, mais il y a des enjeux de déscolarisation. Donc, je vous dirais, c'est probablement dans ces ordres-là. Et, quand on regarde la situation à l'échelle canadienne, on arrive à la conclusion qu'il y aurait probablement suffisamment de demandeurs d'asile au Canada qui parlent français pour que le Québec puisse recevoir presque uniquement ces gens-là. Donc, je pense qu'au dernier recensement, c'était quoi, 25, 26 % des demandeurs d'asile à l'échelle canadienne qui déclaraient connaître le français. La plupart d'entre eux étaient déjà... habitaient déjà au Québec, mais ça arrive des fois que le gouvernement fédéral accueille des demandeurs d'asile. On l'a vu pendant la pandémie aussi avec Roxham. On prend des gens qui viennent du Congo puis on les envoie à Niagara Falls. Donc, ça, évidemment, ce n'est pas souhaitable non plus pour ces gens-là, hein? On sait aussi qu'il y a de la migration secondaire. Des fois, les gens peuvent venir ici, penser que ça va bien aller, rester un certain temps, occuper différents emplois, puis là, avec le temps, ils se rendent compte : Bien, finalement, ça parle français au Québec, puis je suis bloqué dans mon développement. Et là ils s'engagent dans une migration secondaire. Puis des fois les gens aimeraient faire une migration secondaire, mais ils ne peuvent pas parce que, là, bon, c'est rendu trop tard. Ils ont trouvé... ils ont fait des liens, et tout ça, donc...

Journaliste : Bien, juste pour l'établir, concrètement, ça signifierait quoi? Je veux dire, est-ce que... bon, est-ce qu'on parlerait de dizaines de milliers de demandeurs d'asile anglophones qui s'en iraient vers d'autres provinces?

M. Dubreuil (Benoît) : Bien là, il faut distinguer les gens qui sont déjà ici des gens qui vont arriver. Donc, la quantité de gens qui vont arriver cette année, de mon point de vue, là, c'est très, très, très imprévisible. Demain matin, il y a un changement aux règles d'attribution de visa, ça peut être diminué par cinq. On l'a vu avec Roxham. On l'a vu avec les changements sur l'attribution des visas. Il y a tellement de variations, c'est difficile de mettre un chiffre. Mais je pense, de manière réaliste, là, c'est sûr qu'il doit y avoir toujours à peu près un 25 %, 30 % des demandeurs d'asile qui arrivent au Québec qui, soit ont des bonnes bases en anglais, soit ont été exposés beaucoup à la langue, ou des membres de leur famille l'ont été, qu'ils viennent plutôt de cultures anglophones. Donc, ça, ça donne un peu un aperçu, oui.

Journaliste : Le gouvernement du Québec demande d'obtenir davantage de pouvoirs en immigration pour justement contrevenir notamment au déclin du français. En quoi, selon vous, l'obtention par le Québec de davantage de pouvoirs en immigration pourrait aider à renverser le déclin du français?

M. Dubreuil (Benoît) : Alors, nous, on ne s'est pas prononcé sur les enjeux qui sont peut-être un peu plus de nature constitutionnelle. Par contre, on est allés voir dans les différents programmes, où le Québec en ce moment n'a pas de rôle, où étaient les endroits les plus préoccupants pour ce qui est de l'utilisation du français. Et la conclusion, c'est dans... Sous le grand chapeau du PMI, dont j'ai parlé, l'enjeu numéro un, c'est le 40 % des gens dans le PMI qui sont sur des permis postdiplômes, qui sont d'anciens... des diplômés du collégial ou de l'université québécoise, et c'est là que l'enjeu principal se trouve pour ce qui est des permis de travail qui sont attribués par le gouvernement fédéral.

Il y a un autre enjeu secondaire, dont on parle beaucoup moins, qui concerne les conjoints d'étudiants ou les conjoints de travailleurs temporaires. Et là on n'a pas proposé de solution, mais là aussi, on sait que le nombre a augmenté beaucoup. On présume que, si on résout des enjeux avec les titulaires principaux, bien là, pour les conjoints, les choses vont se rétablir par elles-mêmes.

Journaliste : Donc, le gouvernement a raison de demander davantage de... par rapport au PMI...

M. Dubreuil (Benoît) : Je vous dirais qu'on reste agnostiques par rapport à ça. C'est sûr qu'il y a un enjeu par rapport au PMI. Techniquement, là, si c'est l'élément technique qui vous intéresse, ça peut être modifié par un changement réglementaire à Ottawa sans que le Québec ait ce pouvoir-là. Donc, il peut y avoir un changement réglementaire très simple, là, où le gouvernement fédéral accepterait que, pour le Québec, il y a comme une condition supplémentaire, ça pourrait être une révision de l'entente Québec-Canada ou ça pourrait être un transfert de responsabilités plus larges, où le Québec obtiendrait le pouvoir d'émettre des CAQ pour les PMI. Alors, nous, on est agnostiques, là, sur la meilleure façon d'y arriver, mais on vous dit : Si, ce qui vous intéresse, c'est le français, il y a certaines catégories, là, auxquelles vous devez être attentifs, au premier chef, les postdiplômes, peut-être les conjoints aussi, dont on a moins parlé. Puis c'est sûr, bien, il y a tout le volet des demandeurs d'asile, je pense aussi, qui intéresse le gouvernement du Québec.

Le Modérateur : Merci. Je crois qu'il y avait certaines...

Journaliste : ...sauter là-dessus. Québec solidaire disait récemment, justement, que le Québec pourrait avoir son mot à dire pour les PMI, là, dans le cadre de l'Entente Québec-Canada, c'est juste qu'on n'exerce pas ce droit-là. Est-ce que c'est la compréhension que vous avez aussi? Est-ce que Québec pourrait justement juste exercer son droit sans rien changer au règlement et à la loi?

M. Dubreuil (Benoît) : C'est délicat et il semble y avoir plusieurs interprétations de la situation sur le plan juridique. Donc, j'aimerais mieux ne pas me prononcer. Je pense que ça laisse une discussion ouverte, oui.

Journaliste : Je vais juste terminer. Sur McGill et Concordia, vous ne vous êtes pas prononcé, là, vous avez évoqué la question. Mais, quand même, je considère que, comme Commissaire à la langue française, vous devez avoir un point de vue là-dessus. Est-ce que la mesure du gouvernement va permettre de réduire le nombre d'étudiants qui parlent anglais au Québec et va permettre d'améliorer la situation pour les francophones?

M. Dubreuil (Benoît) : Alors, sur le nombre d'étudiants final, c'est très difficile à dire parce qu'on est dans un marché, puis un marché, c'est dynamique. Donc, comment le marché va s'adapter? Est-ce que le nombre d'étudiants va diminuer ou pas? Ça, j'ai beaucoup de difficulté à le dire. On sait, par exemple, que McGill a quand même une capacité d'attraction qui est très forte, donc pourrait maintenir ses effectifs. Ce qui me semble évident, c'est que ça va modifier l'intérêt des universités. Ça devient beaucoup plus intéressant maintenant pour une université d'aller recruter un candidat soit qui parle déjà français, soit qui a un intérêt pour l'apprendre. Donc, ça, pour moi, cet élément-là, c'est un élément intéressant de la mesure.

Journaliste : ...comment? Parce que, là, je veux dire, on augmente les tarifs pour les étudiants anglophones hors Québec...

M. Dubreuil (Benoît) : Ah! vous parlez... Oui, ça dépend...

Journaliste : ...mais qu'est-ce qui va faire qu'on va attirer plus de francophones?

M. Dubreuil (Benoît) : Moi, j'étais plus sur le volet des étudiants étrangers et non pas des étudiants qui proviennent des autres provinces canadiennes. O.K.? Donc, pour ce qui est des étudiants étrangers, si vous dites à l'université qu'elle va être pénalisée si la personne n'atteint pas le niveau 5, bien, c'est sûr que si vous allez chercher une personne dont vous savez qu'elle atteindra facilement le niveau 5, vous partez avec une longueur d'avance. Hein, si vous allez chercher une personne que vous êtes presque sûr qu'elle n'arrivera pas, bien... Donc, ça crée un incitatif, en fait, pour changer le marché. Donc, moi, ce que...

Puis ensuite, le nerf de la guerre ou, en fait, la question vraiment fondamentale par rapport à l'efficacité de la mesure, c'est : Quelle sera la pénalité? Hein, est-ce qu'il y aura une pénalité financière qui va être petite, qui pourrait amener les universités à dire : Bien, moi, je vais aller recruter qui je veux puis je paierai la pénalité ou est-ce que la pénalité va être tellement grande que ça va devenir prohibitif d'aller chercher des gens qui n'ont pas intérêt à apprendre le français? Donc, ça, pour l'instant, c'est impossible de le dire parce qu'il va falloir connaître les modalités.

Et moi, ce que je dis, c'est, on pourra discuter des paramètres plus précis. Le principe, moi, je trouve que c'est bien. Il faut que ça soit plus avantageux d'aller chercher quelqu'un qui a plus de chance d'adopter le français et de l'apprendre. Mais peut-être qu'on peut le faire de façon plus cohérente. Par exemple, pourquoi est ce que les gens à la maîtrise ne sont pas... maîtrise, est-ce que c'est concerné? Pourquoi les gens au doctorat, par exemple, ne sont pas concernés? Pourquoi la personne qui atteindrait un niveau 9 ne serait pas encore plus privilégiée? Parce que moi, au niveau 5, je n'embauche pas la personne, mais moi, je veux les embaucher les diplômés de McGill et Concordia. Donc, il faut qu'ils aient les compétences linguistiques, que je puisse les mettre dans une rencontre avec les membres de mon équipe puis que les gens puissent discuter. Et pour ça, il faut aller plus haut. Donc, moi, je veux que ça soit valorisé et reconnu dans la formule.

Le Modérateur : Sébastien Desrosiers.

Journaliste : Oui. Je me demandais simplement pourquoi vous... ne pas avoir traité des seuils d'immigration? Est-ce qu'il ne serait pas judicieux, par exemple, d'imposer un seuil pour ce qui est de l'immigration temporaire, compte tenu des données?

M. Dubreuil (Benoît) : Oui. Bien, la question des seuils pour l'immigration permanente, j'en avais traité dans mon mémoire à la commission cet été en disant, là, que je n'étais pas contre, hein, l'idée qu'on puisse aller accueillir davantage d'immigrants économiques permanents, à condition qu'on avait un bon mix, hein, une bonne composition d'immigration qui nous donnait une assurance que les gens allaient adopter le français dans une proportion que je donnais de 85 % à 15 %. Dans le cas de l'immigration temporaire, on y a pensé, on s'est dit : Est-ce qu'on pourrait avoir, par exemple, une approche, là, de plafonnement, un peu comme... j'y reviens, comme celle que le ministre Miller a annoncée pour les étudiants? Ça devient très difficile, parce qu'à partir du moment où on établit un plafonnement, il faut réfléchir à une distribution de quotas. Et c'est ça, la difficulté en ce moment, par exemple, avec le ministre Miller. C'est quand on dit : En Ontario, bien, l'année prochaine, vous allez avoir tant de permis d'études, là, il faut aller voir comment on va distribuer ces quotas en tous les établissements.

Donc, par exemple, pour les PTET, qui ont augmenté de façon importante, si on veut les réduire, on a deux choix. Le premier, c'est de dire : On va mettre une barrière à l'entrée qui va être plus élevée en vous obligeant à aller rechercher des gens qui parlent français. Le désavantage de ça, c'est qu'on ne sait pas combien ils vont en avoir en bout de ligne. Ou on peut dire : Bien, nous, cette année, c'est 20 000 permis de travail fermés qu'on donne. On pourrait faire ce choix-là. Mais la difficulté, c'est, si on dit : On en donne 20 000, à qui les donne-t-on? Donc là, ça prend un mécanisme de répartition. Et c'est ça qui est difficile. Alors, moi, je ne dis pas que le gouvernement ne devrait pas aller là, mais c'est sûr que ça soulève toutes sortes de questions. Quels sont les secteurs économiques, par exemple, qu'on veut valoriser? Et là il y a comme une réflexion qui dépasse largement la question linguistique.

M. Parent (Rodolphe) : Il y a aussi le fait que le seuil en lui-même, là, n'influe pas sur la situation linguistique du Québec, c'est-à-dire, si vous avez 100 000 immigrants temporaires de plus et que 100 % d'entre eux parlent français et l'utilisent au travail, la proportion qu'on va retrouver dans le recensement va être supérieure pour les gens qui utilisent le français et qui connaissent le français au travail. Donc, du point de vue du Commissaire à la langue française, ce n'est pas tellement le nombre qui compte à la fin, de la même manière que l'immigration permanente, c'est plus sa composition.

M. Dubreuil (Benoît) : Parce qu'il y a déjà une majorité de résidents non permanents au Québec qui parlent français, et qui fonctionnent en français, et qui nous... et j'ajouterais même qui viennent au Québec parce qu'ils savent qu'ils vont pouvoir fonctionner en français souvent.

Le Modérateur : Je vous remercie. Ceci met fin à la conférence de presse. Merci.

M. Dubreuil (Benoît) : Merci beaucoup.

(Fin à 14 h 10)

Participants

  • Dubreuil, Benoît

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