(Treize heures dix-neuf minutes)
Le Modérateur : Bonjour à
tous. Bienvenue à cette conférence de presse du Commissaire à la langue
française sur son rapport concernant l'immigration temporaire. Il est
accompagné de Rodolphe... J'ai oublié son nom, excusez-moi. Rodolphe Parent,
analyste responsable du dossier. Donc, je vous laisse parler, M. Dubreuil,
puis on reviendra avec des questions par la suite.
M. Dubreuil (Benoît) : Merci
beaucoup. Alors, bonjour à tous. Je vous remercie d'être avec nous aujourd'hui.
Alors, aujourd'hui, j'ai le plaisir de rendre public un rapport portant sur l'immigration
temporaire. Alors, c'est un rapport que nous avons décidé de préparer
rapidement en raison de la croissance fulgurante du nombre de résidents non
permanents au Québec depuis la fin de la pandémie.
Alors, laissez-moi revenir un peu en
arrière. À l'automne 2022, la publication des données du recensement nous
apprenait qu'il y avait environ 205 000 immigrants temporaires au
Québec. Un an plus tard, à l'automne 2023, de nouvelles estimations
démographiques de Statistique Canada nous apprenaient que ce nombre dépassait
désormais le demi-million. Dans mon premier rapport d'activité, en juin
dernier, je soulevais déjà des inquiétudes en lien avec la forte proportion de
résidents non permanents qui ignoraient le français et qui travaillaient
principalement en anglais. J'ai réitéré ces préoccupations dans le mémoire que
j'ai déposé en août à la consultation pour la planification de l'immigration 2024‑2027.
Alors, le rapport que je présente aujourd'hui
est une réponse à cette situation. Il vise à éclairer les parlementaires et le
public à l'aide d'une analyse de la situation linguistique de l'immigration
temporaire. Alors, c'est une analyse inédite qui s'appuie sur des données
obtenues de Statistique Canada, d'Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada,
de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié et du ministère de l'Immigration
du Québec.
Les trois premiers chapitres du rapport
sont de nature descriptive. Donc, nous y présentons une analyse par programmes
et sous-programmes de l'immigration temporaire et de sa croissance au Québec.
Nous y présentons ce que nous savons de la connaissance et de l'utilisation du
français par les immigrants temporaires. Nous montrons que la croissance de la
population non permanente qui ne connaît pas le français et qui fonctionne
principalement en anglais se concentre dans trois groupes, chez les
travailleurs étrangers temporaires, chez les étudiants et les diplômés
étrangers et finalement chez les demandeurs d'asile.Au total, nous estimons que
parmi les 528 000 résidents non permanents qui étaient au Québec au 1eroctobre 2023, environ les deux tiers connaissaient le français et le
tiers ne le connaissait pas. Alors, parmi ceux qui ne le connaissaient
pas, la plupart connaissaient cependant l'anglais et utilisaient principalement
cette langue au travail, peu importe le secteur où ils travaillaient. Parmi les
différents groupes analysés, les étudiants étrangers étaient ceux qui
adoptaient le plus souvent l'anglais, suivis des travailleurs étrangers puis
des demandeurs d'asile. Dans chacun des groupes, il existe un lien très fort
entre le pays d'origine, les connaissances linguistiques à l'arrivée et l'utilisation
des langues au Québec. Alors, ainsi, les personnes qui viennent d'un pays où le
français est bien implanté connaissent pratiquement toutes le français et l'utilisent
autant ou plus que la moyenne québécoise. À l'inverse, les personnes qui
viennent de pays où l'anglais joue un rôle véhiculaire, on pense par exemple à
l'Inde ou aux Philippines, les gens utilisent l'anglais, je vous dirais,
environ neuf fois sur 10 au travail. L'anglais domine aussi largement chez les
ressortissants de pays comme la Chine et l'Iran, qui sont par ailleurs les
bassins de recrutement importants des universités de langue anglaise au Canada.
Par ailleurs, dans tous les groupes d'immigrants
temporaires, les ressortissants de pays d'Amérique latine, principalement du
Mexique, du Brésil et de Colombie, avaient tendance à se partager à parts
égales entre le français et l'anglais. Alors, considérant la forte proportion
de résidents permanents qui ne connaissent pas le français, nous nous sommes
aussi demandé quel fut l'effet de la hausse observée ces dernières années sur
la situation linguistique. Alors, même s'il n'existe pas de mesure directe, le
scénario le plus plausible est qu'entre 2021 et 2023 l'augmentation de l'immigration
temporaire aurait entraîné une hausse d'environ un point de pourcentage de la
population qui ne connaît pas le français. Celle-ci serait passée de 6,3 %
à environ 7,2 %. La hausse de l'immigration temporaire aussi... aurait
aussi entraîné une augmentation d'environ un point de pourcentage de la
population qui travaille principalement en anglais.
Si nous présentons les choses en nombre
absolu, le nombre de personnes qui, au Québec, ne connaissent pas le français
aurait augmenté d'environ 50 % depuis 2011, principalement en raison de l'immigration
temporaire. Sur le marché du travail, le nombre de gens qui n'utilisent pas
principalement le français aurait augmenté d'environ 40 %. Pour évaluer le
rythme d'apprentissage du français par les immigrants temporaires, nous avons
comparé le nombre de résidents non permanents au Québec au nombre de
participants aux cours de Francisation Québec. Ainsi, au 1er octobre 2023,
on estime qu'il y avait entre 155 000 et 191 000 immigrants
temporaires qui ne connaissaient pas le français au Québec. De leur côté, les
données de Francisation Québec montrent que, cette année, environ 50 000
ou peut-être 55 000 immigrants temporaires se seraient inscrits pour
suivre un cours de français, soit environ le tiers ou le quart de tous les
immigrants temporaires qui ne connaissaient pas cette langue. Parmi ceux qui se
sont inscrits, environ 32 000 ont pu suivre au moins un cours, soit
environ 60 %. Finalement, parmi ceux qui ont suivi des cours, la plupart
ont étudié à temps partiel pour une durée moyenne de quelques mois. En bout de
ligne, nous estimons que le nombre d'heures réalisées en francisation cette
année correspondrait à environ 5 % à 6 % de celui qui serait
nécessaire pour que tous les immigrants temporaires puissent parler français
couramment. En l'absence de liste d'attente, donc, si toutes les personnes qui
se sont inscrites à Francisation Québec avaient obtenu une place, ce nombre
aurait pu atteindre peut-être 10 %.
Alors, la situation s'explique en partie
par l'insuffisance de l'offre, mais surtout par l'insuffisance de la demande.
Une majorité d'immigrants temporaires ne s'inscrivent pas aux cours de
Francisation Québec et ceux qui y obtiennent une place n'y consacrent pas
suffisamment de temps pour dépasser le niveau débutant. Pour accroître le
nombre d'heures investies en francisation, il faudrait ajouter des sommes
importantes, non seulement pour ouvrir de nouvelles classes, mais surtout pour
convaincre les gens de s'inscrire et convaincre ceux qui s'inscrivent d'y
consacrer davantage d'heures. En effet, hein, vous savez ce qui coûte le plus
cher dans l'apprentissage d'une langue, c'est le temps qu'on y met, c'est ce
qu'on appelle les coûts de renoncement.
Alors, un des éléments originaux du
rapport que nous présentons, c'est d'avoir tenté de chiffrer quels seraient les
montants qui devraient être engagés, incluant les coûts de renoncement, pour
que tous les immigrants temporaires puissent apprendre à parler français
couramment. Nous arrivons à un résultat qui va entre 11 et 13 milliards de
dollars. Alors, c'est un montant qui est assez élevé parce que l'apprentissage
du français exige beaucoup d'heures, environ une année d'études à temps plein,
et parce que les immigrants temporaires parviennent à travailler et à obtenir
des salaires non négligeables, même sans connaître le français,
particulièrement s'ils maîtrisent l'anglais, ce qui est le cas de la plupart
d'entre eux.
Alors, dans le rapport, nous ne disons pas
qui devrait couvrir ces coûts, mais quelqu'un devrait le faire. Alors, ça
pourrait être le gouvernement, en bonifiant son aide financière, ça pourrait
être les employeurs, en libérant les travailleurs pendant leurs heures de
travail, ou ça pourrait être les universités, en offrant davantage de bourses.
Finalement, ça pourrait être les personnes immigrantes elles-mêmes en coupant
le nombre d'heures... leur nombre d'heures travaillées ou encore en coupant sur
leurs heures personnelles.
Alors, devant l'importance de ces coûts et
l'importance du retard accumulé, notre rapport propose des recommandations
concrètes dans le but de réduire la proportion d'immigrants temporaires qui ne
connaissent pas le français et adoptent principalement l'anglais. Ces
recommandations visent à établir une certaine cohérence ou rétablir une
certaine cohérence entre l'immigration permanente et l'immigration temporaire,
mais aussi à mieux responsabiliser chacun des acteurs quant aux coûts réels de
la francisation. D'abord, nous recommandons au gouvernement de se doter d'un
tableau de bord pour mieux suivre l'évolution d'une situation qui change très
rapidement. Nous lui recommandons aussi de mieux communiquer aux immigrants
temporaires les attentes du Québec en matière d'apprentissage du français. Il
devrait également mieux communiquer ses attentes à l'égard des employeurs, des
universités et du gouvernement fédéral, notamment en leur expliquant mieux le
temps réellement nécessaire à l'apprentissage du français et le niveau de
connaissances réellement requis pour réaliser diverses activités sociales et
professionnelles.
Dans le cas des travailleurs et des
étudiants étrangers, nous croyons qu'il faut renforcer les mesures incitatives
pour encourager les employeurs et les établissements d'enseignement à
sélectionner, dès le départ, des personnes qui parlent français. Dans le cas de
ceux qui ne parlent pas déjà français, il faut des mesures qui amènent les gens
à s'engager dès que possible, c'est-à-dire idéalement avant l'arrivée, dans une
démarche crédible et réaliste pour apprendre le français.
Ainsi, dans le cas des travailleurs
étrangers temporaires, nous proposons d'établir, en collaboration avec les
partenaires sociaux, un mécanisme permettant de développer en amont des
filières de recrutement et de formation de la main-d'œuvre étrangère
francophone dans les professions en demande. Nous proposons aussi d'évaluer la
possibilité de verser une aide financière supplémentaire afin de soutenir
l'apprentissage intensif du français dans le pays d'origine avant l'arrivée au
Québec.
Finalement, pour être certain que
l'apprentissage du français s'amorce au bon moment, nous proposons d'exiger une
connaissance de niveau 3 à l'oral au moment de l'obtention d'un premier
permis de travail dans le cadre du PTET, puis une connaissance du français de
niveau 5, toujours à l'oral, au moment du renouvellement du permis, tout
cela à l'exception du volet agricole.
Dans le cas des étudiants étrangers, nous
recommandons au gouvernement de s'assurer que la formule de financement des
universités favorise la connaissance et l'utilisation du français d'une manière
cohérente. Nous lui proposons aussi d'entamer des discussions avec le
gouvernement du Canada en vue de rendre le droit de travailler hors campus,
pour les titulaires d'un permis d'études, conditionnel à l'atteinte d'une
connaissance de niveau 3 à l'oral, selon l'Échelle québécoise des niveaux
de compétence en français. De même, nous proposons de rendre la délivrance du
permis de travail postdiplôme conditionnelle à l'atteinte du niveau 7 à
l'oral et du niveau 5 à l'écrit de l'échelle québécoise.
Toujours en lien avec le gouvernement du
Canada, nous appuyons la mise en place d'une entente fédérale-provinciale qui
prévoirait un mécanisme de répartition des demandeurs d'asile. À cet effet,
nous recommandons que cette répartition tienne compte d'abord et avant tout des
caractéristiques linguistiques des demandeurs d'asile. Ainsi, nous proposons
que ceux qui connaissent déjà l'anglais soient orientés de manière prioritaire
vers une des provinces anglophones qui reçoit en ce moment peu ou pas de
demandeurs d'asile. Au sein de la fédération, le rôle du Québec devrait d'abord
être d'accueillir les demandeurs d'asile qui ont déjà une certaine connaissance
du français.
Une telle répartition permettrait de
réduire de façon importante les coûts de l'intégration linguistique des
demandeurs d'asile, que nous estimons en ce moment à environ 2 milliards
de dollars pour le Québec seulement. Elle faciliterait aussi l'intégration des
demandeurs d'asile eux-mêmes et contribuerait à améliorer... elle faciliterait
à la fois, en fait, l'intégration des demandeurs d'asile et contribuerait à
améliorer la situation du français. Une fois en place, cette approche
permettrait par ailleurs de mieux cibler le soutien financier à l'intégration
linguistique en bonifiant, par exemple, l'aide financière pour les personnes
qui en ont le plus besoin, par exemple les demandeurs d'asile qui ne parlent ni
français ni anglais.
Alors, prises conjointement, les 12 recommandations
que nous formulons dans ce rapport devraient permettre d'accroître de façon
importante la connaissance et l'utilisation du français au sein de la
population temporaire. Elles permettront aussi d'éviter la croissance continue
au Québec d'une population qui ne connaît pas le français et qui est peu
susceptible de l'adopter de façon prédominante. Elle contribuerait finalement à
réduire le goulot d'étranglement qui s'est formé au moment du passage à la
résidence permanente en rétablissant une forme de cohérence dans nos politiques
d'immigration. Alors, voilà. Je vous remercie beaucoup et je suis disponible
pour répondre à vos questions.
Le Modérateur : Merci. On va
passer à la période des questions. Je vais vous laisser poser trois questions, pas
plus, parce que je crois qu'on a le temps et que c'est important. Je vais
commencer avec Sébastien Desrosiers, Radio-Canada.
Journaliste : Bonjour. Vous
proposez, entre autres, d'augmenter les exigences en matière de français pour
les travailleurs étrangers temporaires. Donc, selon vos recommandations, je
comprends que le niveau 4 que va exiger le gouvernement Legault aux
travailleurs étrangers temporaires pour un renouvellement de permis de travail
n'est pas suffisant. Pourquoi?
M. Dubreuil (Benoît) : Alors,
pour expliquer comme il faut, il faut vraiment essayer de voir, là,
concrètement ce que signifie un niveau 4. O.K.? Donc, le niveau 4,
c'est le dernier niveau du stade débutant. La personne au niveau 4, elle
est capable d'interagir dans des situations qui sont extrêmement simples, avec
des phrases courtes. Donc, le nombre de situations dans lesquelles la personne
peut interagir est vraiment très, très limité. Sur le marché du travail, il n'y
a pas beaucoup d'emplois, là, qu'on peut faire quand on est au niveau 4.
On ne peut pas vraiment non plus se faire d'amis au travail, on ne peut pas
beaucoup socialiser. Donc, c'est clair qu'il y a un élément de compromis
politique, évidemment, dans le choix d'un niveau. On n'est peut-être pas obligé
de mettre la barre tellement haute que tout le monde pourrait travailler en
français dès l'arrivée. Mais le niveau 4 nous apparaît particulièrement
faible, là.
Journaliste
: Et la
différence avec un niveau 5, ce serait?
M. Dubreuil (Benoît) : Alors,
moi, le niveau 5, je le trouve également trop faible. Je l'avais mentionné
à la consultation sur la planification de l'immigration l'été dernier. Alors,
l'idée du niveau 5, c'est d'avoir une cohérence avec ce qui va être
demandé à l'immigration permanente, parce qu'il serait évidemment étrange de
demander un niveau plus élevé des immigrants temporaires que ce que l'on
demande des immigrants permanents. Mais, à mon sens, le niveau 5 qui va
être demandé des immigrants permanents, dans les métiers qui sont peu spécialisés
ou semi spécialisés, est probablement trop faible. Il y a des travaux auxquels
je fais référence dans le rapport, qui sont menés conjointement par le MIFI et
l'Université de Montréal, qui visent à établir un référentiel entre les
différentes professions et l'échelle des niveaux de compétences en français. Et
ça, quand ça va être terminé, je pense que ça va nous permettre de mieux
comprendre qu'est-ce que les gens peuvent réellement faire avec différents
niveaux. Et ce que je propose, c'est de peut-être revoir, là, le niveau qui est
exigé à l'immigration permanente quand ces travaux-là vont être disponibles.
Journaliste : Mais je
comprends que le niveau 4, là, vous dites que le gouvernement Legault, au
fond, n'est pas allé assez loin, a fait une forme de compromis.
M. Dubreuil (Benoît) : Bien,
forcément. Évidemment, eux, ils ont tous les éléments avec lesquels ils doivent
naviguer. Donc, oui, évidemment, c'est sûr qu'il y a des employeurs qui ont
pris l'habitude de faire venir des travailleurs temporaires qui ne parlent pas
du tout français. Donc, ces gens-là ont investi, hein, dans le recrutement de
cette main-d'œuvre. Ils comptent sur cette main-d'œuvre. Donc, il y a comme un
enjeu de transition ou de dépendance aussi pour ces gens-là. Je comprends que
c'est ça que le... c'est ce que le gouvernement a pris en considération. À mon
avis, je pense qu'aujourd'hui on a la marge de manœuvre pour aller un peu plus
loin.
Journaliste : Et peut être
juste une question, parce que vous avez évalué les coûts de franciser tous les
immigrants temporaires à un niveau intermédiaire, mais vous n'avez pas chiffré
vos mesures. Comment... Tu sais, parce qu'on demanderait, par exemple, aux
immigrants de se former en amont. Donc, avant d'arriver au pays, il y aurait
une aide financière qui serait versée. Je veux dire, ça coûterait quand même un
certain montant, j'imagine. Est-ce que vous l'avez évalué?
M. Dubreuil (Benoît) : Alors,
juste un instant. Donc, les mesures que l'on propose pour l'essentiel n'ont pas
de coût, hein, en fait, parce que, dans le fond, il s'agit de rehausser les
standards, là, pour le recrutement puis pour l'admission ou le renouvellement
des permis. Donc, toutes les mesures que l'on propose visent à diminuer les
coûts. L'exception que vous mentionnez, elle est... En fait, ce que vous
mentionnez, c'est probablement une des exceptions. Évidemment, le gouvernement
pourrait décider de mettre un plafond puis dire : Bien, nous, c'est un
service qu'on offre à x milliers, par exemple, de travailleurs, de travailleurs
temporaires. C'est comme en ce moment, hein, avec la francisation, il y a
l'aide financière qui est permise, en fait, ou qui est allouée, puis ensuite,
bien, il faut voir combien de gens la réclament.
M. Parent (Rodolphe) : Dans
la recommandation, on évalue la possibilité d'offrir une aide, là. Donc, cette
recommandation est encore très floue à dessein, notamment parce qu'on pourrait,
par exemple, commencer par un projet pilote dans un pays d'Amérique latine. Et
dans ce cas-là, on ne peut pas vraiment chiffrer parce qu'il reste encore
beaucoup de choses à déterminer. Mais on voulait inciter le gouvernement à
penser à cette option-là.
M. Dubreuil (Benoît) : La
difficulté, en fait, c'est de cibler les gens qui vont recevoir l'aide parce
qu'on ne veut pas verser une aide à des gens qui, finalement, ne viendront pas.
Mais si on a des gens qui vont venir, qui sont en attente d'un permis et qu'on
peut les aider à faire trois mois, quatre mois de francisation intensive avant
de venir, alors on pense qu'on peut vraiment, là, changer la donne une fois les
gens arrivés. Plus particulièrement dans le cas de l'Amérique latine, on a vu,
là, que les données étaient plutôt... la situation était plutôt partagée. Si
les gens vont prendre de l'avance en français avant d'arriver, on pense qu'il y
a plus de chances quand même ensuite d'apprendre le français, oui.
Le Modérateur : Si je peux me
permettre, pendant qu'on est sur le sujet du programme des travailleurs
étrangers temporaires, le PTET, une des différences de votre proposition avec
la proposition qui a été faite par le gouvernement, c'est l'imposition
d'exigences en français avant l'arrivée, donc avant le renouvellement aussi.
Pourquoi avoir fait ce choix-là?
M. Dubreuil (Benoît) : Pour
que l'impact soit plus rapide. Aussi, pour s'assurer justement qu'on a vraiment
les bons incitatifs, que les gens sachent véritablement dans quoi ils
s'embarquent, hein? Donc, l'idée de dire : On va prendre des gens qui sont
au niveau 0, et puis deux ans ou trois ans plus tard, on va leur demander
s'ils ont atteint un certain niveau, pour nous, le fait de demander aux gens de
déjà faire un certain investissement avant de venir permettra de clarifier les
choses. Ça permettra de clarifier le sérieux de la démarche de l'employeur,
mais ça permettrait aussi à la personne elle-même de voir si elle a
véritablement envie de s'embarquer dans ce type d'apprentissage. Moi, ce que je
constate, c'est que ce n'est pas tout le monde qui est habitué d'apprendre une
autre langue. Ce n'est pas tout le monde nécessairement qui a une idée précise
du type d'effort que ça exige. Donc, on pense que si les gens commencent plus
tôt, ils vont faire aussi des choix qui vont être plus informés. Puis en bout
de ligne, on va avoir des gens qui vont être mieux préparés pour rejoindre le
marché du travail puis on va avoir une meilleure adéquation entre les
aspirations des personnes et les besoins du Québec.
Le Modérateur : Merci. On va
penser à Thomas Laberge, La Presse Canadienne.
Journaliste : Oui, merci.
Le Modérateur : À moins que
tu ne sois pas prêt, je peux...
Journaliste : Je suis prêt.
Merci. Bon, vous avez parlé, par exemple, des coûts de la francisation. Ça
donne un ordre de grandeur, quand même, du défi qui attend notamment le
gouvernement. On a parlé beaucoup de capacités d'accueil dans les derniers
temps, plusieurs la définissent... notamment sur la question de la
francisation. Avec le portrait que vous tracez actuellement, est-ce que vous
considérez que le Québec a une capacité d'accueil qui n'est pas atteinte, qui
est atteinte ou qui est largement dépassée?
M. Dubreuil (Benoît) : Alors,
ce qui est important, c'est de distinguer, par exemple, la dynamique sur le
plan économique, sur le plan du logement et sur le plan linguistique, hein?
Journaliste : Mais juste sur
le plan linguistique?
M. Dubreuil (Benoît) : Alors,
sur le plan linguistique, ce qui compte, ce n'est pas d'abord le nombre total
de personnes, c'est beaucoup plus le profil des personnes à l'arrivée qui est
déterminant. Vous me suivez? Donc, si on veut que le français se maintienne,
idéalement, ce qu'il faut, c'est qu'on ait la bonne composition d'immigration à
l'arrivée. La réalité, on le voit, c'est complexe. C'est quand une personne
arrive, à Montréal plus particulièrement, avec une connaissance avancée ou
intermédiaire de l'anglais, la force du français sur le marché du travail dans
la société n'est pas telle que la personne va être, comme, obligée, là, très,
très fortement forcée. Donc, les obstacles qui s'élèvent pour cette personne-là
sont trop nombreux. Si les gens viennent, par exemple, pour étudier à temps
plein en anglais, pour travailler à temps plein en anglais, on s'aperçoit très
rapidement, les gens ne sont pas capables de dégager les 1 000, 1 500
ou 2 000 heures dont ils ont besoin.
Ensuite les gens... ça, c'est l'autre
problème, donc les gens travaillent en anglais ou étudient en anglais. Donc,
pour eux... Alors, je pense qu'en général, les gens reconnaissent que c'est
utile de parler français puis de connaître le français, c'est juste que, s'ils
n'en ont pas besoin de façon impérative, bien, ils peuvent aussi repousser à
plus tard.
Et l'autre point aussi qui est important,
c'est que la plupart des gens qui ne parlent pas français au Québec sont en
immersion anglaise. Donc, si vous arrivez, vous connaissez bien l'anglais, vous
êtes en immersion anglaise à temps plein et vous faites du français trois,
quatre, cinq heures-semaine, si je reviens vous voir un an, deux ans, trois ans
plus tard, quelle va être votre langue forte? Celle que vous allez privilégier
dans un environnement comme celui de Montréal où, dans les faits, il n'y a pas
beaucoup de contraintes à l'utilisation d'une langue plutôt que l'autre.
Journaliste : Juste pour
revenir sur ma question. Au fond, ce que vous dites, ce n'est pas la question
du nombre, c'est effectivement le nombre qu'on reçoit. Ça, je le comprends,
mais vous mettez beaucoup de «si», tu sais, si on avait atteint tel type
d'immigrants, mais moi, je vous parle dans la situation actuelle. Vous avez
parlé, par exemple, des cours de francisation, où il y a des listes d'attente,
il y a peu de gens qui sont francisés. Donc, dans la situation actuelle, on a
vraiment l'impression que le Québec n'a pas la capacité d'intégrer les
personnes qui sont actuellement présentes sur le territoire.
M. Dubreuil (Benoît) : Oui.
Bien, c'est-à-dire que, là, on a accumulé un passif, hein, dans le sens où les
gens qui sont arrivés au cours des dernières années, même si on voulait avoir
des classes de francisation pour tout le monde, on n'y arriverait pas. Et même
si on avait des classes de francisation, il faudrait avoir des incitatifs
financiers beaucoup plus forts pour amener les gens à s'inscrire et pour amener
les gens à y mettre un nombre d'heures conséquent. Donc, je ne sais pas comment
on pense la capacité en lien avec ça, là. C'est sûr qu'on peut toujours mettre
l'argent, là, mais est-ce que c'est vraiment ça qu'on veut prioriser? Parce que,
là, on a accumulé un passif. Je pense, ça prend une stratégie pour réduire le
passif qu'on a accumulé. Je ne sais pas si...
Journaliste : Oui. Bien, je
me doutais que vous n'alliez répondre directement, mais je voulais tenter ma
chance.
M. Dubreuil (Benoît) : Bien,
c'est la meilleure réponse que je peux donner. Je vais y travailler. Je vais
travailler ma réponse.
Le Modérateur : Merci. On va
passer à Patrick Bellerose, Journal de Québec.
Journaliste : Oui. Bonjour. Peut-être
juste vous ramener au début, en fait. Pourquoi est-ce qu'on devrait se
préoccuper de cette hausse-là, donc, d'immigrants temporaires? Parce que, bon,
à la base, l'immigrant temporaire, c'est temporaire. Une bonne partie risque de
quitter le Québec. Et vous dites vous-même que l'impact, c'est 1 %
d'augmentation de gens qui ne connaissent pas le français. Donc, pourquoi
est-ce que c'est préoccupant, à votre avis?
M. Dubreuil (Benoît) : Alors,
la première raison, c'est vraiment celle de l'impact sur la situation du
français actuel. Est-ce que 1 % c'est beaucoup? Alors, 1 % de baisse
du français au travail, par exemple, en deux ans, alors, historiquement, c'est
énorme. En fait, je pense que c'est même incomparable. Alors, évidemment, ce
n'est pas un effondrement du français, mais on ne peut pas dire que c'est un
petit impact, hein, O.K.? Vous avez vu aussi les données que j'ai présentées
sur le nombre de personnes en nombre absolu. C'est quand même une croissance
très importante du nombre de personnes qui ne parlent pas le français et qui
travaillent de façon prédominante en anglais. Donc, en soi, il y a une
préoccupation autour du nombre de personnes et de l'impact que ça a dans la
société.
Il y a une deuxième préoccupation qui est
celle d'avoir une situation où les politiques d'immigration temporaire sont
désarticulées par rapport aux politiques d'immigration permanente. Donc, vous
avez des gens qui viennent ici... qui sont ici depuis trois, quatre, cinq, six,
sept ans, qui ne se sont pas engagés dans une démarche d'apprentissage du
français, qui sont venus avec l'espoir ou l'attente réaliste, pas réaliste,
bien informés, mal informés, ce n'est pas à moi de juger, mais qui sont venus
avec l'espoir d'obtenir la résidence permanente et qui là se retrouvent un peu
dans un cul-de-sac. Et là la tension qui apparaît, qui découle de ça, c'est que
nous, on a le choix comme société entre admettre des gens qui vont être peu
susceptibles d'adopter le français, donc d'abandonner une partie... de faire un
compromis sur la situation du français, ou sinon de se retrouver avec une
population qui est quand même là, qui a des aspirations, puis qui, pour une
raison ou pour une autre, n'a pas fait l'apprentissage qu'on aurait pu
attendre. Et on va se retrouver aussi dans une situation où vous allez avoir
des gens qui vont se qualifier pour la résidence permanente, mais parfois en
allant chercher le minimum linguistique, donc pas nécessairement en allant
chercher toutes les compétences que les Québécois auraient voulues.
Donc, je pense que, quand on prend tout ça
ensemble, je pense qu'on a une situation qui n'est pas réellement souhaitable,
là.
Journaliste : ...en deux ans,
c'est énorme. Je vais venir spéculer un petit peu, mais si on laisse la
situation actuelle progresser, on retrouverait quoi d'ici une dizaine d'années?
M. Dubreuil (Benoît) : Je
peux vous donner peut-être une référence historique, là. Quand on a commencé à
mesurer la connaissance des langues, on était à 11 % ou 12 % de gens
au Québec qui ne connaissaient pas le français. Ça a diminué de façon continue.
Au début des années 2000, on a atteint la moitié de ça, 5,5 %. On
avait stabilisé la situation autour de 5,5, et là on serait repassé au-dessus
de 7 %, 7,2 %, peut-être un peu plus. Alors, j'ai de la difficulté à
répondre à votre question parce que j'ignore à quel point la croissance
actuelle va se poursuivre. Alors, combien réalistement peut-il y avoir
d'immigrants temporaires au Québec? À chaque mois, on regarde les statistiques
et on a de la difficulté à croire aux données que l'on voit. Il y a la question
du logement, il y a la question des infrastructures, il y a la pression. Donc,
est-ce qu'il y a un moment où, par exemple, sur le logement, on va atteindre un
point où tout simplement les gens vont dire : Bien, non, moi, je ne veux
pas étudier au Canada, parce que c'est impossible de se loger ou... Est-ce
qu'on va atteindre ce point-là? Peut-être. Et là peut-être que les choses vont
comme un peu se stabiliser naturellement. Mais, déjà, moi, je parle à des
démographes puis, déjà, les gens ont de la difficulté à croire les données
qu'ils voient. Donc, jusqu'où ça va aller, c'est difficile de le dire.
Journaliste : J'aimerais vous
entendre plus précisément sur la mesure que vous proposez, là, pour répartir
les demandeurs d'asile à travers le Canada selon la langue qu'ils maîtrisent.
Sur papier, je comprends, je comprends l'idée. Par contre, dans la réalité des
faits, je vous dirais... un pays, une unité administrative, je vois mal comment
on peut obliger des gens à s'installer au Manitoba, par exemple, ou en
Saskatchewan.
M. Dubreuil (Benoît) : Ce
qu'on ne peut pas faire au Canada, c'est, par exemple, empêcher les gens de se
déplacer d'une province à l'autre. Ce n'est pas tant un droit prévu par la
constitution pour les non-permanents, c'est plus qu'il n'y a pas de mécanisme,
dont le cas qu'on a fait pendant la COVID, là, c'est peut-être l'exception.
Mais, non, il n'y a pas vraiment de mécanisme, là, pour empêcher les gens se
déplacer d'une province à l'autre. Je vous dirais que le pari, je pense que
c'est assez solide, mais je pense que le pari, c'est qu'il y a beaucoup de gens
qui arrivent à l'aéroport Trudeau ou à l'aéroport Pearson qui ne viennent pas
d'abord au Québec, O.K.? Donc, les gens vont à Trudeau ou Pearson parce que
c'est peut-être le billet d'avion le moins cher ou...
Donc, on pense que si un milieu
d'accueil... une capacité d'accueil qui est développée dans des villes comme
Halifax, St. John's, Edmonton, Calgary, des villes qui reçoivent en ce moment
très peu de demandeurs d'asile, on pense qu'il n'y a pas de raison, en fait,
que des gens qui sont d'abord anglophones, qui ont déjà des connaissances en
anglais, ne voudraient pas être accueillis dans ces villes-là. Moi, ça... écoutez,
peut-être qu'on se trompe, mais je pense que ça vaut quand même la peine
d'essayer. C'est vraiment un système comme ça aussi que l'Europe est en train
d'essayer de développer pour résoudre aussi un problème similaire.
Journaliste : ...
M. Dubreuil (Benoît) : Bien,
nous, on fait référence à une étude suisse sur l'impact de se retrouver dans
une zone linguistique où les gens parlent une langue proche de la nôtre. Mais,
non, je parle du nouveau pacte sur l'asile et l'immigration de l'Union
européenne, où il va y avoir des quotas d'accueil de demandeurs d'asile par
pays.
Le Modérateur : Hugo
Pilon-Larose, La Presse.
Journaliste : Oui.
Anticipez-vous que les recommandations que vous formulez au gouvernement
pourraient... par exemple, au niveau des exigences linguistiques, là, pour les
travailleurs étrangers temporaires ou les étudiants étrangers, pourraient avoir
pour effet, au final, de réduire le nombre d'immigrants temporaires au Québec?
M. Dubreuil (Benoît) : Bien,
c'est sûr que ça va exercer une pression à la baisse, hein, parce qu'on crée
des incitatifs, des mesures incitatives pour réduire le bassin de recrutement
puis on augmente les coûts pour les gens qui recruteraient des gens qui ne
parleraient pas français. Donc, oui, ça va exercer une pression à la baisse.
Par contre, de combien? C'est difficile à dire, parce que, si on regarde les
PTET, l'année dernière, on était à quoi, 15 000 environ, et là les données
pour cette année, bien, il va falloir que je retrouve les chiffres, mais on
était à quoi, 35 000 à peu près. Donc, ça, c'est en une année, on a
atteint des chiffres qui sont complètement inédits.
Donc, si, cette année, on avait recruté
uniquement des travailleurs étrangers temporaires francophones, on aurait déjà
eu une hausse importante. O.K. Donc, c'est dur de prévoir. Alors, si l'objectif
du gouvernement, par exemple, c'est-à-dire : Nous, ce qu'on veut, c'est
une baisse nette du nombre de temporaires, oui, il peut prendre nos
recommandations puis les appliquer, mais il peut aussi faire comme a fait... a
proposé, par exemple, récemment, le ministre Miller à l'échelle canadienne et
puis dire : Bien, on va plutôt y aller par une approche de plafond, une
espèce de seuil. Ça, c'est une autre approche que le gouvernement pourrait
choisir s'il voulait réduire le nombre total. Ça, ça donne une certitude sur le
nombre de permis qu'on émet.
Journaliste : Ici, à
l'Assemblée nationale, l'opposition officielle dit que les immigrants
temporaires présentement sur le territoire occupent des emplois, et donc sont
nécessaires à l'économie. Si on met des mesures qui baissent leur nombre,
est-ce que vous proposez de nuire à l'économie?
M. Dubreuil (Benoît) : Alors,
l'économie, c'est un tout dynamique qui s'ajuste d'année en année à travers
l'innovation, à travers les prix, à travers les salaires. Donc là, c'est sûr
qu'on a créé une situation où il y a un certain nombre d'entreprises, c'est une
minorité, une petite minorité de l'ensemble des entreprises au Québec, qui
dépendent d'une main-d'œuvre temporaire qui ne maîtrise pas le français. Alors,
nous, on souhaite avoir des mesures incitatives pour encourager ces employeurs
à sélectionner et à recruter des gens qui vont déjà parler français ou qui vont
commencer à l'apprendre avant d'arriver. Donc, il ne s'agit pas de ne pas
respecter les permis de travail qui ont déjà été accordés. Hein, c'est clair,
les gens qui sont sur des permis de travail ici ou des permis d'étude, ils ont
le droit d'être ici, là. Donc, ils ont une date... ils ont une date limite à
leur permis, mais ils ont le droit d'être ici. Donc, l'idée, évidemment, c'est
de travailler sur les nouvelles embauches pour s'assurer que les employeurs
fassent des bons choix et qu'on ne se retrouve pas dans la situation dans
laquelle on se trouve actuellement ou qu'on vienne... En fait, ce n'est pas un
problème qu'on peut résoudre du jour au lendemain, là. Donc, il faut regarder
peut-être sur quelques années comment on peut diminuer le problème pour essayer
de rétablir une certaine cohérence dans l'ensemble. C'est un problème qui s'est
constitué très rapidement, en deux ou trois ans, mais ça va prendre quand même
un certain nombre d'années, là, pour réaligner les choses.
Journaliste : J'ai deux
autres petites questions pour vous. Au niveau des étudiants étrangers, vous
proposez donc un niveau de connaissance du français si ces étudiants souhaitent
travailler hors campus. Or, pour que les universités d'expression anglaise au
Québec contribuent au fait français, doivent-elles augmenter la francisation de
leurs étudiants sur les campus, même de ceux qui n'occupent pas de travail
parce qu'ils ont des bourses ou que leurs parents les financent?
M. Dubreuil (Benoît) : Alors,
nous, ce qu'on dit par rapport à ça, c'est... on n'analyse pas, là, de façon
très, très précise la proposition gouvernementale que vous connaissez très
bien, là, mais ce qu'on dit, c'est qu'on peut encore travailler sur la formule
de financement pour qu'une université qui amène sur le marché du travail
quelqu'un qui peut fonctionner en français soit toujours favorisée par rapport
à une université qui amène sur le marché du travail des gens qui ne peuvent pas
travailler en français, qu'on soit au bac, à la maîtrise ou au doctorat, puis
qu'on soit avant les études, qu'on soit pendant les études ou après les études.
Donc, on pense qu'il y a du travail à faire pour avoir des incitatifs, des
mesures incitatives, là, et qui soient cohérentes, là. O.K.?
Ensuite, les universités vont voir dans
quelle mesure ils peuvent intégrer, justement, dans les programmes, dans des
cours, convaincre les gens justement de faire ces cours de français pour
devenir meilleurs. Mais moi, je ne pense pas que ça devrait être impossible.
Par exemple, quelqu'un qui dit : Moi, je veux aller à l'université McGill.
Le français, ça ne m'intéresse pas. Je suis prêt à payer toutes mes études,
puis je vais retourner chez moi après. Hein, on sait qu'il y a beaucoup d'Américains,
par exemple, qui viennent ici. Il n'y a pas nécessairement d'intérêt pour le
français. Ils veulent retourner après, et tout. Moi, je pense que ça, ça
devrait être permis. O.K. Moi, je ne suis pas contre le fait qu'il y ait des
gens qui viennent au Québec pour étudier en anglais si leur objectif est de
quitter par la suite. C'est une question de nombre, évidemment, là. L'enjeu,
c'est à partir du moment où on dit : Bien là, tu as le droit de travailler
pendant tes études, après tes études. On crée des passerelles pour une
immigration permanente. Si c'est ça... Parce qu'on sait que c'est ça, la raison
derrière la croissance du nombre d'étudiants étrangers au Canada depuis
15 ans. Hein, c'est toutes les modifications aux règles d'immigration que
je viens de mentionner.
Journaliste : Et ma dernière
question, je vais faire appel à vos talents pédagogiques, c'est... Parce que
vous avez sorti un gros chiffre aujourd'hui, là, qui est le fameux 13...
jusqu'à 13 milliards que ça coûte, que ça coûterait, 12,9 milliards
que ça coûterait pour correctement franciser l'ensemble des immigrants
temporaires qui ne maîtrisent pas le français et qui sont présents aujourd'hui
sur le territoire du Québec. Et si je comprends bien le calcul, vous calculez
dans le fond pour que ces gens atteignent le niveau 8. Bon. Mais dans les
mesures que vous proposez au gouvernement, vous-même, vous ne proposez pas le
niveau 8. Puis j'essaie de trouver la cohérence, là.
M. Dubreuil (Benoît) : Ah!
Bien O.K. Bien, je peux... C'est parce qu'il y a plusieurs choses là-dedans. La
priorité dans les mesures que l'on propose, c'est de rétablir la cohérence
entre le temporaire et le permanent. O.K.? Je reviens un peu sur la réponse que
j'ai donnée un peu plus tôt. Le gouvernement a décidé cet été qu'il allait
demander le niveau 5 pour les professions peu ou semi-spécialisées et le
niveau 7 pour les professions spécialisées. Moi, j'attends de voir les
résultats des travaux de l'UDM, mais, personnellement je trouve ça faible. Moi,
un diplômé qui a un niveau 5, je ne l'embauche pas, O.K., puis je connais
quand même pas mal l'apprentissage des langues, là. On ne peut pas prendre la
personne puis la mettre dans une réunion de travail, on ne peut pas la mettre
ici dans la salle puis penser que la personne va comprendre ce qui se passe.
O.K.? Donc, ça, je pense qu'il faut qu'on garde un oeil ouvert là-dessus puis
voir comment on va faire évoluer les niveaux pour l'immigration permanente.
Par ailleurs, je comprends aussi qu'il y a
un élément de compromis politique, puis moi, ça ne me dérange pas qu'il y ait
un certain nombre d'immigrants qui sont sélectionnés au Québec... qui soient
sélectionnés au Québec à l'immigration permanente et qu'ils soient plus
anglophone que francophone puis qui s'intègrent plus en anglais. Moi, je n'ai
pas de problème à ce qu'un certain nombre d'immigrants s'intègrent plus en
anglais puis soient meilleurs en anglais qu'en français. Mais c'est sûr que si
c'est 30 %, 35 %, 40 %, bien là, ça va être difficile de
maintenir la place du français au Québec. Vous comprenez? Si c'est 5 %,
bien là, le français va progresser. Si c'est 10 % ou 15 %, bien là,
l'anglais va être à peu près stable. O.K.?
Donc, pour moi, le niveau 8 dont je
parle, c'est pour réussir le stade débutant et le stade intermédiaire, et là on
peut en discuter. Est-ce que la personne qu'on fait venir, on veut qu'elle
atteigne vraiment ce niveau-là? Moi, je vous dis : Si ce que vous voulez,
c'est que l'immigrant atteigne un niveau de français, là, que vous allez
pouvoir l'inviter à souper chez vous puis discuter, vous allez pouvoir la
mettre ici, elle va pouvoir lire l'article que vous allez faire à la suite de
cette conférence de presse, ce n'est pas un niveau 5 que ça prend. O.K.?
Si vous voulez que l'immigrant vous lise, il faut aller plus loin que ça. Si
vous voulez pouvoir l'inviter à souper, qu'il devienne votre ami, il faut plus
qu'un niveau 5. Si...
Journaliste : Niveau 8.
M. Dubreuil (Benoît) : Bien,
écoutez, c'est toujours... on peut en discuter, mais, évidemment, il y a des
gens, des fois, qui ont des problèmes de littératie puis qui peuvent être
fonctionnels dans leur vie de tous les jours avec un niveau plus bas de
compétences linguistiques. O.K. Mais de façon générale, si vous voulez une
personne qui est capable d'être un peu en contact avec la société dans laquelle
elle vit puis nouer des relations sociales véritables... Parce qu'au
niveau 5, là, si vous essayez de souper avec quelqu'un, là, vous allez
sortir, vous allez être brûlé parce que c'est trop d'efforts cognitifs. O.K.?
Donc, pour moi, le niveau 8 demeure quand même quelque chose qu'on devrait
viser de façon générale pour assurer une intégration sociale. Cela dit, si
votre objectif, c'est que la personne puisse vous vendre un café puis vous
dire : Ça coûte 4,29 $, bien là, on n'a pas besoin du niveau 8.
O.K.?
Journaliste : Merci. Je vais
me permettre certaines questions. François Carabin, Le Devoir. Pour
revenir sur votre proposition concernant la répartition des demandeurs d'asile,
est-ce que c'est possible juste de nous peindre un portrait? Qu'est ce qui,
dans la situation actuelle, vous pousse à faire cette recommandation-là, de
répartir selon la langue? Est-ce que, par exemple, il y a trop de demandeurs
d'asile qui parlent anglais? Et puis, en chiffres absolus, comment ça se
traduirait? Je ne sais pas si vous avez ça, là, mais combien de demandeurs
d'asile, actuellement installés au Québec, devraient quitter vers d'autres
provinces.
M. Dubreuil (Benoît) : Bien...
O.K., plusieurs éléments, là. Vous me le dites si j'en échappe un.
Journaliste : Pas de
problème.
M. Dubreuil (Benoît) : On n'a
pas les données sur les connaissances des langues des demandeurs d'asile qui
viennent juste d'arriver. On les a demandées à IRCC et, je crois, 55 %,
60 % des données sont manquantes. O.K.? Ça, ça veut dire que les gens,
quand ils arrivent, ils écrivent sur un formulaire s'ils parlent français,
anglais, et ensuite ça ne se retrouve pas dans le système d'information. Donc,
nous, on ne peut pas savoir... Quand on fait des regroupements avec l'origine
des gens puis ce qu'on connaît du recensement des tendances linguistiques,
O.K., on arrive à la conclusion qu'il y aurait peut-être 60 % des
demandeurs d'asile qui parleraient français, ce qui est cohérent avec ce qu'on a
toujours eu historiquement et chez les demandeurs d'asile et chez les réfugiés.
Mais vous comprenez, là, qu'on fait un peu des hypothèses.
De ceux qui ne parlent pas français, bien,
il y en aurait au moins la moitié, peut-être le deux tiers, qui ont des
connaissances de base en anglais qui proviendraient des différents pays que
j'ai mentionnés. Ça a beaucoup été le Nigeria, ça beaucoup la péninsule...
l'Asie du Sud, hein, donc l'Afrique anglophone, l'Asie du Sud, un peu
l'Amérique latine aussi, il y a beaucoup de gens en Amérique latine, veux veux
pas, qui ont quand même une bonne connaissance de l'anglais, donc... Puis il y
a peut-être un autre, là... entre 15 % et 20 % qui ne parlent ni
anglais ni français du tout.
Alors, qu'est-ce que ça veut dire parler?
Ça ne veut pas dire nécessairement... On sait que, dans la plupart des cas, ces
gens-là n'ont pas des connaissances très, très élevées ni en français ni en
anglais, hein? Il y a des enjeux de littératie, mais quand même, les gens vont
avoir une base. Si vous avez grandi au Nigeria, par exemple, si vous avez
grandi au Pakistan, écoutez, c'est sûr que vous avez été exposé à l'anglais
quand même longuement, là, pendant votre scolarité, bon. Là, ensuite, c'est
vrai qu'il y a des gens qui ne sont pas scolarisés, mais il y a des enjeux de
déscolarisation. Donc, je vous dirais, c'est probablement dans ces ordres-là.
Et, quand on regarde la situation à l'échelle canadienne, on arrive à la
conclusion qu'il y aurait probablement suffisamment de demandeurs d'asile au
Canada qui parlent français pour que le Québec puisse recevoir presque
uniquement ces gens-là. Donc, je pense qu'au dernier recensement, c'était quoi,
25, 26 % des demandeurs d'asile à l'échelle canadienne qui déclaraient
connaître le français. La plupart d'entre eux étaient déjà... habitaient déjà
au Québec, mais ça arrive des fois que le gouvernement fédéral accueille des
demandeurs d'asile. On l'a vu pendant la pandémie aussi avec Roxham. On prend
des gens qui viennent du Congo puis on les envoie à Niagara Falls. Donc, ça,
évidemment, ce n'est pas souhaitable non plus pour ces gens-là, hein? On sait
aussi qu'il y a de la migration secondaire. Des fois, les gens peuvent venir
ici, penser que ça va bien aller, rester un certain temps, occuper différents
emplois, puis là, avec le temps, ils se rendent compte : Bien, finalement,
ça parle français au Québec, puis je suis bloqué dans mon développement. Et là
ils s'engagent dans une migration secondaire. Puis des fois les gens aimeraient
faire une migration secondaire, mais ils ne peuvent pas parce que, là, bon,
c'est rendu trop tard. Ils ont trouvé... ils ont fait des liens, et tout ça,
donc...
Journaliste : Bien, juste
pour l'établir, concrètement, ça signifierait quoi? Je veux dire, est-ce que...
bon, est-ce qu'on parlerait de dizaines de milliers de demandeurs d'asile
anglophones qui s'en iraient vers d'autres provinces?
M. Dubreuil (Benoît) : Bien
là, il faut distinguer les gens qui sont déjà ici des gens qui vont arriver.
Donc, la quantité de gens qui vont arriver cette année, de mon point de vue,
là, c'est très, très, très imprévisible. Demain matin, il y a un changement aux
règles d'attribution de visa, ça peut être diminué par cinq. On l'a vu avec
Roxham. On l'a vu avec les changements sur l'attribution des visas. Il y a
tellement de variations, c'est difficile de mettre un chiffre. Mais je pense,
de manière réaliste, là, c'est sûr qu'il doit y avoir toujours à peu près un
25 %, 30 % des demandeurs d'asile qui arrivent au Québec qui, soit
ont des bonnes bases en anglais, soit ont été exposés beaucoup à la langue, ou
des membres de leur famille l'ont été, qu'ils viennent plutôt de cultures
anglophones. Donc, ça, ça donne un peu un aperçu, oui.
Journaliste : Le gouvernement
du Québec demande d'obtenir davantage de pouvoirs en immigration pour justement
contrevenir notamment au déclin du français. En quoi, selon vous, l'obtention
par le Québec de davantage de pouvoirs en immigration pourrait aider à
renverser le déclin du français?
M. Dubreuil (Benoît) : Alors,
nous, on ne s'est pas prononcé sur les enjeux qui sont peut-être un peu plus de
nature constitutionnelle. Par contre, on est allés voir dans les différents
programmes, où le Québec en ce moment n'a pas de rôle, où étaient les endroits
les plus préoccupants pour ce qui est de l'utilisation du français. Et la
conclusion, c'est dans... Sous le grand chapeau du PMI, dont j'ai parlé,
l'enjeu numéro un, c'est le 40 % des gens dans le PMI qui sont sur des
permis postdiplômes, qui sont d'anciens... des diplômés du collégial ou de
l'université québécoise, et c'est là que l'enjeu principal se trouve pour ce
qui est des permis de travail qui sont attribués par le gouvernement fédéral.
Il y a un autre enjeu secondaire, dont on
parle beaucoup moins, qui concerne les conjoints d'étudiants ou les conjoints
de travailleurs temporaires. Et là on n'a pas proposé de solution, mais là
aussi, on sait que le nombre a augmenté beaucoup. On présume que, si on résout
des enjeux avec les titulaires principaux, bien là, pour les conjoints, les
choses vont se rétablir par elles-mêmes.
Journaliste : Donc, le
gouvernement a raison de demander davantage de... par rapport au PMI...
M. Dubreuil (Benoît) : Je
vous dirais qu'on reste agnostiques par rapport à ça. C'est sûr qu'il y a un
enjeu par rapport au PMI. Techniquement, là, si c'est l'élément technique qui
vous intéresse, ça peut être modifié par un changement réglementaire à Ottawa
sans que le Québec ait ce pouvoir-là. Donc, il peut y avoir un changement
réglementaire très simple, là, où le gouvernement fédéral accepterait que, pour
le Québec, il y a comme une condition supplémentaire, ça pourrait être une
révision de l'entente Québec-Canada ou ça pourrait être un transfert de
responsabilités plus larges, où le Québec obtiendrait le pouvoir d'émettre des
CAQ pour les PMI. Alors, nous, on est agnostiques, là, sur la meilleure façon
d'y arriver, mais on vous dit : Si, ce qui vous intéresse, c'est le
français, il y a certaines catégories, là, auxquelles vous devez être attentifs,
au premier chef, les postdiplômes, peut-être les conjoints aussi, dont on a
moins parlé. Puis c'est sûr, bien, il y a tout le volet des demandeurs d'asile,
je pense aussi, qui intéresse le gouvernement du Québec.
Le Modérateur : Merci. Je
crois qu'il y avait certaines...
Journaliste : ...sauter là-dessus.
Québec solidaire disait récemment, justement, que le Québec pourrait avoir son
mot à dire pour les PMI, là, dans le cadre de l'Entente Québec-Canada, c'est
juste qu'on n'exerce pas ce droit-là. Est-ce que c'est la compréhension que
vous avez aussi? Est-ce que Québec pourrait justement juste exercer son droit
sans rien changer au règlement et à la loi?
M. Dubreuil (Benoît) : C'est
délicat et il semble y avoir plusieurs interprétations de la situation sur le
plan juridique. Donc, j'aimerais mieux ne pas me prononcer. Je pense que ça
laisse une discussion ouverte, oui.
Journaliste : Je vais juste
terminer. Sur McGill et Concordia, vous ne vous êtes pas prononcé, là, vous
avez évoqué la question. Mais, quand même, je considère que, comme Commissaire
à la langue française, vous devez avoir un point de vue là-dessus. Est-ce que
la mesure du gouvernement va permettre de réduire le nombre d'étudiants qui
parlent anglais au Québec et va permettre d'améliorer la situation pour les
francophones?
M. Dubreuil (Benoît) : Alors,
sur le nombre d'étudiants final, c'est très difficile à dire parce qu'on est
dans un marché, puis un marché, c'est dynamique. Donc, comment le marché va
s'adapter? Est-ce que le nombre d'étudiants va diminuer ou pas? Ça, j'ai
beaucoup de difficulté à le dire. On sait, par exemple, que McGill a quand même
une capacité d'attraction qui est très forte, donc pourrait maintenir ses
effectifs. Ce qui me semble évident, c'est que ça va modifier l'intérêt des
universités. Ça devient beaucoup plus intéressant maintenant pour une
université d'aller recruter un candidat soit qui parle déjà français, soit qui
a un intérêt pour l'apprendre. Donc, ça, pour moi, cet élément-là, c'est un
élément intéressant de la mesure.
Journaliste : ...comment?
Parce que, là, je veux dire, on augmente les tarifs pour les étudiants
anglophones hors Québec...
M. Dubreuil (Benoît) : Ah!
vous parlez... Oui, ça dépend...
Journaliste : ...mais
qu'est-ce qui va faire qu'on va attirer plus de francophones?
M. Dubreuil (Benoît) : Moi,
j'étais plus sur le volet des étudiants étrangers et non pas des étudiants qui
proviennent des autres provinces canadiennes. O.K.? Donc, pour ce qui est des
étudiants étrangers, si vous dites à l'université qu'elle va être pénalisée si
la personne n'atteint pas le niveau 5, bien, c'est sûr que si vous allez
chercher une personne dont vous savez qu'elle atteindra facilement le
niveau 5, vous partez avec une longueur d'avance. Hein, si vous allez
chercher une personne que vous êtes presque sûr qu'elle n'arrivera pas, bien...
Donc, ça crée un incitatif, en fait, pour changer le marché. Donc, moi, ce
que...
Puis ensuite, le nerf de la guerre ou, en
fait, la question vraiment fondamentale par rapport à l'efficacité de la
mesure, c'est : Quelle sera la pénalité? Hein, est-ce qu'il y aura une
pénalité financière qui va être petite, qui pourrait amener les universités à
dire : Bien, moi, je vais aller recruter qui je veux puis je paierai la
pénalité ou est-ce que la pénalité va être tellement grande que ça va devenir
prohibitif d'aller chercher des gens qui n'ont pas intérêt à apprendre le
français? Donc, ça, pour l'instant, c'est impossible de le dire parce qu'il va
falloir connaître les modalités.
Et moi, ce que je dis, c'est, on pourra
discuter des paramètres plus précis. Le principe, moi, je trouve que c'est
bien. Il faut que ça soit plus avantageux d'aller chercher quelqu'un qui a plus
de chance d'adopter le français et de l'apprendre. Mais peut-être qu'on peut le
faire de façon plus cohérente. Par exemple, pourquoi est ce que les gens à la
maîtrise ne sont pas... maîtrise, est-ce que c'est concerné? Pourquoi les gens
au doctorat, par exemple, ne sont pas concernés? Pourquoi la personne qui
atteindrait un niveau 9 ne serait pas encore plus privilégiée? Parce que
moi, au niveau 5, je n'embauche pas la personne, mais moi, je veux les
embaucher les diplômés de McGill et Concordia. Donc, il faut qu'ils aient les
compétences linguistiques, que je puisse les mettre dans une rencontre avec les
membres de mon équipe puis que les gens puissent discuter. Et pour ça, il faut
aller plus haut. Donc, moi, je veux que ça soit valorisé et reconnu dans la
formule.
Le Modérateur : Sébastien
Desrosiers.
Journaliste : Oui. Je me
demandais simplement pourquoi vous... ne pas avoir traité des seuils
d'immigration? Est-ce qu'il ne serait pas judicieux, par exemple, d'imposer un
seuil pour ce qui est de l'immigration temporaire, compte tenu des données?
M. Dubreuil (Benoît) : Oui.
Bien, la question des seuils pour l'immigration permanente, j'en avais traité
dans mon mémoire à la commission cet été en disant, là, que je n'étais pas
contre, hein, l'idée qu'on puisse aller accueillir davantage d'immigrants
économiques permanents, à condition qu'on avait un bon mix, hein, une bonne
composition d'immigration qui nous donnait une assurance que les gens allaient
adopter le français dans une proportion que je donnais de 85 % à
15 %. Dans le cas de l'immigration temporaire, on y a pensé, on s'est
dit : Est-ce qu'on pourrait avoir, par exemple, une approche, là, de
plafonnement, un peu comme... j'y reviens, comme celle que le ministre Miller a
annoncée pour les étudiants? Ça devient très difficile, parce qu'à partir du moment
où on établit un plafonnement, il faut réfléchir à une distribution de quotas.
Et c'est ça, la difficulté en ce moment, par exemple, avec le ministre Miller.
C'est quand on dit : En Ontario, bien, l'année prochaine, vous allez avoir
tant de permis d'études, là, il faut aller voir comment on va distribuer ces
quotas en tous les établissements.
Donc, par exemple, pour les PTET, qui ont
augmenté de façon importante, si on veut les réduire, on a deux choix. Le
premier, c'est de dire : On va mettre une barrière à l'entrée qui va être
plus élevée en vous obligeant à aller rechercher des gens qui parlent français.
Le désavantage de ça, c'est qu'on ne sait pas combien ils vont en avoir en bout
de ligne. Ou on peut dire : Bien, nous, cette année, c'est 20 000 permis
de travail fermés qu'on donne. On pourrait faire ce choix-là. Mais la
difficulté, c'est, si on dit : On en donne 20 000, à qui les
donne-t-on? Donc là, ça prend un mécanisme de répartition. Et c'est ça qui est
difficile. Alors, moi, je ne dis pas que le gouvernement ne devrait pas aller
là, mais c'est sûr que ça soulève toutes sortes de questions. Quels sont les
secteurs économiques, par exemple, qu'on veut valoriser? Et là il y a comme une
réflexion qui dépasse largement la question linguistique.
M. Parent (Rodolphe) : Il
y a aussi le fait que le seuil en lui-même, là, n'influe pas sur la situation
linguistique du Québec, c'est-à-dire, si vous avez 100 000 immigrants
temporaires de plus et que 100 % d'entre eux parlent français et
l'utilisent au travail, la proportion qu'on va retrouver dans le recensement va
être supérieure pour les gens qui utilisent le français et qui connaissent le
français au travail. Donc, du point de vue du Commissaire à la langue
française, ce n'est pas tellement le nombre qui compte à la fin, de la même
manière que l'immigration permanente, c'est plus sa composition.
M. Dubreuil (Benoît) : Parce
qu'il y a déjà une majorité de résidents non permanents au Québec qui parlent
français, et qui fonctionnent en français, et qui nous... et j'ajouterais même
qui viennent au Québec parce qu'ils savent qu'ils vont pouvoir fonctionner en
français souvent.
Le Modérateur : Je vous
remercie. Ceci met fin à la conférence de presse. Merci.
M. Dubreuil (Benoît) : Merci beaucoup.
(Fin à 14 h 10)