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Version finale

32nd Legislature, 3rd Session
(November 9, 1981 au March 10, 1983)

Tuesday, December 14, 1982 - Vol. 26 N° 101

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Dix heures dix minutes)

Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il vous plaît!

Un moment de recueillement. Veuillez vous asseoir. Déclarations ministérielles. Dépôt de documents. M. le leder du gouvernement.

Rapport annuel de l'Université du Québec

M. Bertrand: M. le Président, au nom du ministre de l'Éducation, je voudrais déposer le rapport annuel 1981-1982 de l'Université du Québec.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Document déposé.

Dépôt de rapports de commissions élues.

Mme la députée de Johnson.

Étude du projet de loi no 78

Mme Juneau: M. le Président, qu'il me soit permis, conformément aux dispositions de notre règlement, de déposer le rapport de la commission élue permanente de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation qui a siégé le 13 décembre 1982 aux fins d'étudier, article par article, le projet de loi no 78, Loi modifiant la Loi sur les producteurs agricoles. Le projet de loi a été adopté tel qu'amendé. Merci.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Rapport déposé.

M. le député de Kamouraska-Témiscouata.

Étude du projet de loi no 102

M. Lévesque (Kamouraska-Témiscouata): M. le Président, qu'il me soit permis, conformément aux dispositions de notre règlement, de déposer le rapport de la commission permanente de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation qui s'est réunie le lundi 13 décembre 1982 aux fins d'étudier, article par article, le projet de loi no 102, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant l'inspection des viandes. Le projet de loi a été adopté tel qu'amendé.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Rapport déposé.

Mme la députée de Dorion.

Étude du projet de loi no 96

Mme Lachapelle: M. le Président, qu'il me soit permis de déposer le rapport de la commission élue permanente de la présidence du conseil et de la constitution qui s'est réunie le lundi 13 décembre 1982 aux fins d'étudier, article par article, le projet de loi no 96, Loi sur l'intégration de l'administration du système électoral et l'a adopté avec amendements. Merci.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Rapport déposé.

Pétition. M. le député de Brome-Missisquoi.

Pétition demandant de modifier la Loi sur les petits abattoirs

M. Paradis: M. le Président, à la demande d'un propriétaire de petits abattoirs du comté de Brome-Missisquoi, et en vertu de notre règlement, je dépose la pétition qui suit et qui se lit: "Considérant que l'actuelle Loi sur les petits abattoirs ne permet pas le transfert de la vente de nos abattoirs et de nos comptoirs de vente en détail;

Considérant que les abattoirs B ne peuvent vendre la viande des producteurs aux restaurants, aux épiceries et aux autres institutions;

Considérant que les propriétaires d'abattoirs B désirent que leurs viandes soient inspectées afin d'assurer la qualité du produit mis sur le marché;

Considérant que les exigences actuelles de construction sont nettement exagérées selon des experts dans le domaine;

Nous, soussignés, propriétaires de petits abattoirs, demandons à notre député de déposer la présente pétition à l'Assemblée nationale afin que soit amendée immédiatement la Loi sur les petits abattoirs pour mieux servir les besoins de la population québécoise. "

Le Vice-Président (M. Rancourt): Pétition déposée.

Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi privés.

M. le leader du gouvernement.

Dépôt de rapports du greffier en loi sur les projets de loi privés

M. Bertrand: M. le Président.

Une voix:...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

M. Bertrand: Si le leader de l'Opposition me permet, ce matin, j'aimerais présenter le projet de loi no 284, Loi concernant la Corporation municipale de la paroisse de Saint-Denis. Je lui ai indiqué, hier, que je prendrais des informations pour savoir si ce projet de loi est litigieux. Or, il semble que non, au contraire, et les résidents de la municipalité de la paroisse de Saint-Denis et le conseil municipal sont tout à fait d'accord pour reprendre un terrain qui avait été laissé vacant et qui pourrait servir à un développement dans la municipalité de la paroisse de Saint-Denis.

Alors, le projet de loi no 284, après avoir pris des informations, ne poserait pas de problème et je fais donc motion pour que nous suspendions les règles de procédure afin de permettre que le projet de loi soit étudié en commission parlementaire.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de l'Opposition.

M. Lalonde: M. le Président, vous vous souvenez qu'hier, nous avions remis à aujourd'hui le dépôt de ce projet de loi parce que des avis n'ont pas été envoyés, tel que requis par nos règlements, par les règles de pratique. On nous a informés, comme le leader du gouvernement l'a dit, qu'aucune conséquence ne pourrait s'ensuivre pour ce qui concerne les droits des individus, les droits de propriété, les droits de succession.

Alors, dans ces circonstances, nous allons consentir à suspendre les règles pour permettre le dépôt du projet de loi, tout en vous disant et en disant au leader du gouvernement que nous allons, de ce côté-ci - j'imagine, de l'autre côté aussi - en commission parlementaire, faire preuve d'une vigilance particulière pour les lois qui n'ont pas reçu la publicité prévue par nos règlements.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Donc, il y a consentement.

M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Très bien. Je remercie le leader de l'Opposition.

Il y aurait aussi un autre projet de loi privé, le projet de loi no 276, Loi modifiant la charte de la ville de Saint-Hyacinthe. Dans ce projet de loi aussi, la ville de Saint-Hyacinthe demande d'avoir un certain nombre de pouvoirs particuliers. Là encore, il ne semble pas que ce soit un projet de loi litigieux. On demande, entre autres, de pouvoir imposer des amendes à des nuisances quelconques sur le plan de l'écologie, par exemple, les dépotoirs. On demande de pouvoir instituer un fonds de stabilisation des dépenses de déneigement. On demande le pouvoir d'acquérir des immeubles pour fins de réserves foncières. Si cela peut nous convaincre que c'est un projet de loi qui mérite de recevoir notre approbation, on nous demande aussi d'avoir des pouvoirs particuliers pour avoir un meilleur contrôle sur les salons de massage et les boutiques érotiques.

Des voix: Ah!

M. Bertrand: Je ferai donc motion pour que ce projet de loi puisse être étudié en commission parlementaire malgré le fait que certains avis n'aient pas été publiés à la Gazette officielle.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion est adoptée? Adopté.

Présentation de projets de loi au nom du gouvernement.

M. Lalonde: M. le Président, excusez-moi.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de l'Opposition.

M. Lalonde: À ce stade de l'ordre du jour, au dépôt de projets de loi au nom du gouvernement, si vous me le permettez, j'aimerais poser une question au leader du gouvernement. Le projet de loi no 90 est déjà à l'étude en deuxième lecture et il y a eu plusieurs demandes de division du projet de loi, des demandes de le scinder en deux. C'est à ce stade de nos travaux que le leader du gouvernement pourrait annoncer le dépôt d'une loi qui enlèverait au projet de loi no 90 le chapitre des salaires et pensions.

J'ai entendu le leader ce matin, sur les ondes de Radio-Canada, faire presque une promesse de scission. Je ne parle pas de scission du caucus, mais...

Des voix: Cela existe déjà!

M. Lalonde:... pourrait-il nous annoncer maintenant qu'il y aura effectivement division du projet de loi en deux?

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Non seulement le leader de l'Opposition et moi avons le plaisir de discuter des travaux parlementaires le vendredi matin à 7 h 50, mais je vois que le leader de l'Opposition me suit jusque dans des entrevues que j'ai accordées à un poste de radio. Effectivement, ce matin, dans une entrevue avec M. Lamarche, j'indiquais qu'il ne serait pas impossible que nous réfléchissions sur ce sujet. Cela dépend aussi de certaines discussions que j'aurai tout à

l'heure avec le leader de l'Opposition. Il n'est pas impossible que nous discutions, au sein de notre caucus, de la possibilité de scinder le vote au moment de l'adoption du projet de loi no 90 en deuxième lecture. Dans ce contexte, je préférerais, avant de donner une réponse officielle, avoir quelques échanges avec le leader de l'Opposition, après avoir aussi, bien sûr, consulté le caucus des députés du Parti québécois puisque, tout parrain du projet de loi que je sois, il n'en demeure pas moins que je ne suis que le fiduciaire des pouvoirs que me confèrent le Conseil des ministres et le caucus des députés du Parti québécois.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de l'Opposition.

M. Lalonde: Très brièvement - je ne veux pas prendre plus de temps là-dessus -je remercie le leader de son ouverture d'esprit. Naturellement, nous avons des échanges pour l'organisation des travaux, mais je ne voudrais pas que les propos du leader du gouvernement laissent croire aux membres de cette Chambre qu'il s'agit de négociations. Il me semble que la division du projet de loi est une question de principe. Les autres discussions que nous avons concernent l'organisation de nos travaux. La division de ce projet de loi, en ce qui nous concerne, n'est pas négociable, dans le sens que nous allons parler que tous les députés qui veulent le faire ici exprimeront leur opinion, demanderont le gel des salaires des députés avec autant de vigueur.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Hier soir, après avoir écouté les discours des trois députés de l'Opposition, le député de Marguerite-Bourgeoys, le député de Laurier, et le député de Richmond, j'ai remarqué - j'ai pris des petites notes - que le député de Marguerite-Bourgeoys parlait de scinder, le député de Richmond, de scinder, le député de Laurier, de scinder.

Des voix: Le député de Trois-Rivières aussi.

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaîtl (10 h 20)

M. Bertrand: En tout état de cause, je voudrais indiquer une chose au leader de l'Opposition. Je prends bonne note, évidemment, des remarques qui ont été faites. Non, non, le président de l'Assemblée nationale m'indique, contrairement à ce que peut penser le leader de l'Opposition, qu'il aimerait pouvoir dire son mot sur cette question d'un vote scindé lors de l'étude d'un projet de loi en deuxième lecture. Ce vote permettrait de faire en sorte que nous puissions adopter une partie du projet de loi probablement à l'unanimité - c'est ce que j'ai cru entendre hier - et une autre partie sur division. Là-dessus, je veux simplement, pour le bénéfice du leader de l'Opposition, indiquer que le président de l'Assemblée nationale croit qu'il a un mot à dire non pas sur l'opportunité politique de scinder le vote en deuxième lecture, mais sur le principe même de la scission. Étant donné qu'il y a des règlements qui régissent le fonctionnement de l'Assemblée nationale, le président a un mot à dire et je pense qu'il aimerait bien émettre quelques commentaires relativement à cette question qui est tout de même fondamentale.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de l'Opposition.

M. Lalonde: Je ne voulais pas en faire une discussion. Nous violons tous les deux le règlement depuis quelques minutes. Plus la discussion se développe, plus cela devient incompréhensible. Je n'ai jamais demandé de voter deux fois sur le même projet de loi. Ce serait complètement incohérent de voter contre une partie et pour l'autre; on n'a jamais demandé cela. D'ailleurs, les règlements prévoient que, lorsque cela se présente, on scinde non pas le vote, mais le projet de loi. On en fait deux. C'est pour cela que je me suis levé à ce stade de nos procédures qui prévoient que le leader du gouvernement peut déposer un projet de loi au nom du gouvernement. Je demande de déposer un projet de loi qui enlève du projet de loi no 90 toutes les dispositions concernant les salaires et les pensions. Cela fait à peu près la dizième fois que je le demande.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, je pense que ce serait tout à fait inopportun que nous fassions en ce moment le débat sur le projet de loi no 90. Je veux simplement indiquer au leader de l'Opposition que, si j'ai bien compris les différentes interventions qui ont été faites hier - et là-dessus, je pourrai me référer au journal des Débats - il n'a pas été question de faire du projet de loi no 90 deux projets de loi différents.

Des voix:...

M. Bertrand: Je m'excuse, mais ce dont il a été question, c'est de donner la possibilité aux parlementaires d'indiquer s'ils sont favorables à certains des principes contenus dans le projet de loi no 90 et s'ils sont défavorables à certains autres principes

contenus dans ce projet de loi. La seule façon d'y parvenir; c'est de faire une motion qui propose la division d'une affaire discutée devant l'Assemblée nationale. Si le président juge que cette motion de division est recevable, à ce moment-là, elle est mise aux voix et, partant de là, l'Assemblée nationale étudie, effectivement, une question, mais une question qui est maintenant divisée en deux parties. Il y a un article du règlement qui est très clair là-dessus et qui n'a rien à voir avec ce qu'on peut appeler un vote scindé au moment de l'adoption d'un projet de loi en deuxième lecture.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Présentation de projets de loi au nom des députés. M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, l'article c du feuilleton.

Projet de loi no 276 Première lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): Le député de Saint-Hyacinthe propose la première lecture du projet de loi privé no 276, Loi modifiant la charte de la ville de Saint-Hyacinthe. Cette motion de première lecture est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la commission des affaires municipales

M. Bertrand: M. le Président, je voudrais faire motion pour que ce projet de loi soit déféré à la commission parlementaire permanente des affaires municipales.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Cette motion de renvoi est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: L'article d du feuilleton.

Projet de loi no 284 Première lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): Le député de Verchères propose la première lecture du projet de loi privé no 284, Loi concernant la corporation municipale de la paroisse de Saint-Denis. Cette motion de première lecture est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Motion...

Le Vice-Président (M. Rancourt): Cette motion de première lecture est-elle adoptée?

M. Bertrand: Adopté.

Le Secrétaire adjoint: Première lecture de ce projet de loi.

Renvoi à la commission des affaires municipales

M. Bertrand: Motion, M. le Président, pour déférer ce projet de loi à la commission des affaires municipales.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Cette motion de déférence est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Questions orales des députés. M. le député de Laporte.

M. Bourbeau: M. le Président, j'ai indiqué hier que j'avais l'intention de poser une question au ministre des Transports concernant le prêt de 4 000 000 $ de la Caisse de dépôt à Québecair. Je constate que le ministre des Transports n'est pas encore en cette Chambre ce matin. Doit-il y être ou est-ce qu'on doit...

M. Ciaccia: II a peur de venir.

M. Bourbeau:... penser qu'il ne viendra pas?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: J'ai une indication, M. le

Président, pour le bénéfice du député de Laporte, que le ministre des Transports est retenu pour les mêmes raisons qu'hier, et qu'il sera de retour à Québec seulement vers 14 heures cet après-midi.

Le Président: M. le député de Vaudreuil-Soulanges, sur une question principale.

QUESTIONS ORALES DES DÉPUTÉS

Le rendement de la Caisse de dépôt et placement

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Oui, M. le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances qui nous disait hier que la Caisse de dépôt et placement du Québec avait réussi à amasser un capital de 1 500 000 000 $ de plus, depuis quelques années, étant donné les transactions auxquelles elle s'est livrée sur le marché des actions. Le ministre n'est pas sans savoir qu'il y a plus de 400 firmes spécialisées au Canada qui mesurent justement la performance de certains fonds, de certaines caisses, de certains régimes de retraite. Le ministre sait également qu'à l'égard de trois de ces fonds - soit celui qui a comme déposants les professeurs de l'Université du Québec à Montréal à la Caisse de dépôt, et à l'égard de deux autres fonds qui représentent chacun plus 300 000 000 $ -que les firmes spécialisées font état depuis quelques années d'une détérioration de la performance de la Caisse de dépôt relativement aux autres régimes de retraite auxquels ils sont comparés. On voit les classements qui passent du 8e au 89e, sur une base de 100; du 11e au 82e; du 9e au 81e; du 6e au 85e; du 60e au 94e. Est-ce que le ministre des Finances met en doute la véracité des mesures qui sont maintenant du domaine public?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Parizeau: M. le Président, je mets en doute cependant la véracité de comparer des pommes et des oranges. Ce que j'ai dit hier me paraît fort intéressant sur le plan du débat qui entoure le dépôt de la loi S-31 à Ottawa. Le calcul auquel je me livrais était le suivant: Commençons par le début. Les sommes envoyées par la Régie des rentes du Québec à la Caisse de dépôt avaient, au 31 décembre 1981, à la fin de leurs derniers états financiers, une valeur marchande de 6 400 000 000 $. Imaginons -et c'est facile de faire le calcul - que ces fonds aient été placés, non pas comme le fait la Caisse de dépôt dans tout un éventail de titres, y compris des actions de compagnies, mais que ces fonds aient été placés selon les mêmes normes et les mêmes critères que le Canada Pension Plan, qui s'applique à l'argent des pensions de tous les autres Canadiens. Quelle aurait été la valeur marchande du portefeuille? La réponse est 4 900 000 000 $. Gain net pour les pensionnés du Québec d'avoir fonctionné selon les critères de la Caisse de dépôt plutôt que selon les critères du Canada Pension Plan, comme toutes les autres provinces, 1 500 000 000 $. C'est ce que j'ai dit. Je le compare dans ces conditions essentiellement à une autre chose, le Canada Pension Plan, tel qu'il fonctionne dans toutes les autres provinces canadiennes. Cela me paraît être la meilleure preuve que ce que nous avons fait, il y a maintenant presque vingt ans au Québec, de choisir le placement de l'argent de la Régie des rentes, non pas seulement dans du financement gouvernemental comme partout ailleurs au Canada, mais dans du financement d'entreprises, dans du financement d'entreprises sous forme d'obligations ou d'hypothèques ou d'actions, s'est révélé de très loin la voie la plus rentable. C'est ce que j'ai dit.

Le Président: Question additionnelle, M. le député.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): M. le Président, s'il s'agit de mesurer les choses qui sont comparables, j'en suis. En commission parlementaire, en juin dernier, à l'égard de certains des fonds, d'une partie des fonds que la Caisse de dépôt et placement peut gérer, nous avons demandé au président de la Caisse de dépôt comment, à l'égard de ces trois fonds que j'ai décrits tout à l'heure, pas à l'égard des 14 000 000 000 $ ou de ce qui vient de la Régie des rentes, mais à l'égard des trois fonds que j'ai décrits, deux de plus de 300 000 000 $ et celui des professeurs de l'UQAM, à la lumière du classement qui se détériore depuis trois, quatre, cinq ou six ans - on regardera cela comme on voudra - est-elle capable de "performer". Comment le ministre - ou plutôt c'était le président de la caisse de dépôt qui répondait en commission parlementaire - pouvait-il dire qu'il était évident, je cite, "que si nous regardons sur une période de trois ans et plus, la position de la Caisse de dépôt est au-dessus de la moyenne"? Comment peut-on passer du 8e rang au 81e rang en étant au-dessus de la moyenne? (10 h 30)

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Parizeau: M. le Président, on aborde un tout autre sujet. On va l'aborder, ce n'est pas parce que c'est un autre sujet qu'on ne l'abordera pas. Voyons essentiellement de

quoi il s'agit. Les fonds auxquels on a comparé la Caisse de dépôt dans ce que fait le député de Vaudreuil-Soulanges, sont des fonds qui ont équilibré leur portefeuille depuis fort longtemps, qui normalement investissent en obligations et en actions. On sait très bien qu'à cause de l'augmentation considérable des taux d'intérêt depuis quelques années, les fonds qui détenaient beaucoup d'obligations ont une valeur marchande de leur portefeuille qui forcément est tombée passablement, bien plus que les fonds qui sont investis en actions et en obligations. C'est élémentaire et c'est tout à fait compréhensible. D'où la décision de la Caisse de dépôt, depuis quelques années, d'augmenter la proportion de ses actions dans l'ensemble du portefeuille pour éviter ce phénomène. C'est à cause de cela que la Caisse de dépôt, qui avait, à un moment donné, quelque chose comme 15% seulement de son portefeuille en actions - là, je cite de mémoire, M. le Président - est montée à 22% et à 23% de son portefeuille en actions et cela continue. Mais, si on dit: II faut faire en sorte que la performance de la Caisse de dépôt remonte tout à fait en haut de ces 400 compagnies grâce à des achats d'actions, eh bien, tonnerre de Dieu, par la loi S-31, qu'on ne l'empêche pas maintenant d'en acheter. C'est l'un ou c'est l'autre. Nous devons, pour protéger la valeur marchande des placements de la caisse, acheter de plus en plus d'actions. Il faut donc plaider pour que le gouvernement fédéral nous permette de faire cela et, à ce moment, la Caisse de dépôt retrouvera le genre de performance tout à fait exceptionnelle par rapport à tous les fonds privés dont on parlait il y a quelque temps.

Le Président: M. le député de Vaudreuil-Soulanges.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): En terminant, le ministre trouve-t-il que de la façon dont la Caisse de dépôt se comporte en agissant comme une banque pour financer du fonds de roulement à court terme d'une compagnie déficitaire comme Québecair, est un exemple de la gestion saine qui permet d'avoir des performances formidables?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Parizeau: Nous allons donc aborder à cet égard une troisième question parce qu'en fait c'est un troisième aspect des activités de la caisse. Oui, effectivement, la Caisse de dépôt a fait un prêt à court terme qui vient à échéance dans quelques jours à Québecair, de la même façon que la Banque de Commerce Canadienne Impériale, de la même façon que la Société d'investissement Desjardins, de la même façon que la

Chemical Bank. Oui, effectivement, la Caisse de dépôt est une institution financière.

Le Président: Dernière question additionnelle, M. le député de Vaudreuil-Soulanges.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Sur ce sujet, j'aimerais, évidemment, savoir du ministre si tous les autres prêteurs de la même façon sont garantis également par le gouvernement du Québec et si, surtout, la Caisse de dépôt et placement du Québec s'est comportée comme ces autres prêteurs. C'est-à-dire est-ce de leur propre initiative, après analyse d'un dossier, que les gens de la Caisse de dépôt ont trouvé que c'était une occasion formidable d'investissement de prêter 4 000 000 $ à court terme à Québecair?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Parizeau: M. le Président, nous n'avons pas - et je l'ai dit ici - fait de pressions sur la Caisse de dépôt, à un point tel ' que, quand on me demandait quel canal cela a pris, je me disais: J'imagine que cela a pris le canal des fonctionnaires comme beaucoup de ces transactions. En retournant en arrière, je me suis rendu compte d'une chose; c'est qu'en fait ce prêt a été obtenu pendant que j'étais en vacances et je n'ai...

Des voix: Montrez-nous le passeport!

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît: M. le ministre des Finances.

M. Parizeau: La transaction était terminée quand je suis revenu. Il n'y a rien dans cette transaction qui a été fait de façon curieuse ou bizarre; la Caisse de dépôt a fait un prêt.

Le Président: S'il vous plaît: S'il vous plaît! M. le ministre.

M. Parizeau: Dans trois des quatre cas dont j'ai parlé, il y a effectivement une assurance gouvernementale qui a été donnée de la façon la plus régulière, qui se donne à des institutions privées comme publiques sur la même base, de la même façon. Je ne vois vraiment pas ce qu'on cherche à faire actuellement, parmi tous les prêts qui ont été consentis à Québecair, avec celui-là en particulier.

Le Président: Question additionnelle, Mme la députée de Dorion, par la suite M. le député de Vaudreuil-Soulanges et M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

Mme Lachapelle: M. le ministre, sur le même sujet, pourriez-vous informer cette Chambre à savoir si des compagnies ont dû stopper des projets d'investissement à la suite du dépôt du projet de loi S-31?

Des voix: Oh! Oh! Oh!

Le Président: S'il vous plaît: S'il vous plaît!

M. le leader de l'Opposition, sur une question de règlement.

M. Levesque (Bonaventure): Elle est mal plantée, celle-là!

M. Lalonde: M. le Président, je vous dis simplement et très respectueusement que cette pause commerciale n'est pas une question additionnelle.

Le Président: Mme la députée, je vous reconnaîtrai tout à l'heure en question principale.

M. le député de Vaudreuil-Soulanges.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Le ministre des Finances a dit que trois emprunts de Québecair sur quatre qu'elle aurait contractés ont été garantis par le gouvernement. Je pourrais demander lequel ne l'a pas été ou quels sont les trois qui l'ont été.

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Parizeau: Des quatre que j'ai mentionnés, celui auquel n'est pas attachée une lettre d'engagement véritablement, c'est celui de la Banque de Commerce Canadienne Impériale. Des quatre, c'est celui-là qui n'est pas couvert par une lettre d'engagement. Pardon?

Une voix: De quel montant? M. Parizeau: 3 500 000 $.

Le Président: Dernière question additionnelle, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.

M. Scowen: Est-ce que le ministre peut nous donner la valeur marchande des actions, la valeur marchande, disons, de vendredi dernier, de la Caisse de dépôt, et le coût de toutes ces actions et leur valeur marchande?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Parizeau: Oui, M. le Président, je pourrais donner, pour une date récente, je ne sais pas si ce serait vendredi dernier ou quelques jours avant, une idée du montant de la valeur marchande des différentes catégories d'actions, disons en actions ordinaires ou privilégiées, ou quelque chose comme ça. Je ferai rapport de cela à la Chambre demain, je demanderai... Je ne transporte pas cela dans mes poches. J'en ferai état demain lors de la période des questions.

Je voudrais cependant indiquer d'ores et déjà que... Là, j'invoquerai l'intérêt public pour ne pas donner, pour une période aussi récente que celle-là, la répartition par compagnie parce que le portefeuille de la Caisse de dépôt est tellement considérable que donner des renseignements par compagnie qui seraient tout frais de quelques jours, cela peut avoir un impact sur la façon dont la Bourse fonctionne. Dans ces conditions, je donnerai les agrégats, les totaux.

Le Président: Question principale, M. le député d'Outremont.

M. Fortier: M. le Président, j'ai une question à adresser au ministre de l'Énergie et des Ressources. Le leader du gouvernement m'avait indiqué hier qu'il était allé à New York. Est-ce que le leader pourrait me dire s'il a décidé de continuer son voyage vers le Sud ou s'il remontera vers le Nord avant la fin de la session?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: II faut croire que New York est une ville suffisamment importante où il y a des choses sur le plan économique qui méritent que le ministre de l'Énergie et des Ressources y demeure pour plus d'une journée. Effectivement, il est encore à New York aujourd'hui.

Le Président: Question principale, M. le député de Marquette.

La Régie de la sécurité dans les sports

M. Dauphin: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse au ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. M. le ministre, la Régie de la sécurité dans les sports est en activité depuis le 25 juin 1980 à la suite de l'adoption de l'article 74 de la Loi sur la sécurité dans les sports. Nous apprenions, lors des dernières semaines, qu'il existait un climat de crise à l'intérieur de ladite régie. Nous apprenions également de la bouche de certains membres du conseil d'administration de la régie, dont le vice-président, que ladite régie fonctionnait à peine à 30% de son potentiel. Des employés de la régie nous indiquaient également qu'ils étaient même gênés d'encaisser leur chèque de paie tellement la régie était inefficace à ce niveau-là.

On apprenait également, lors de l'étude des crédits, le 8 avril 1982, de la bouche du prédécesseur du ministre, que la réglementation rendant la régie opérationnelle et opérante serait sur le bureau du ministre à la fin d'avril 1982. Nous nous retrouvons donc maintenant huit mois plus tard et j'aimerais demander au ministre: Premièrement, est-ce qu'il a été empêché par quelque personne que ce soit de la régie ou de son ministère d'endosser la réglementation permettant à ladite régie de devenir opérante. (10 h 40)

Le Président: M. le ministre.

M. Chevrette: M. le Président, tout d'abord, permettez-moi de vous dire que j'ai rencontré le conseil d'administration de la régie le 28 octobre. Dès le 29 octobre, le conseil d'administration était en discussion sur un programme de rajustement ou de redressement du fonctionnement interne. Il y a déjà eu quatre rencontres et un plan de redressement a été définitivement adopté quant au fonctionnement interne. C'est hier soir que j'ai eu l'occasion de rencontrer les membres de la régie pendant quelques heures, ici même, à Québec, et ils m'ont présenté leur plan de fonctionnement qui cadrait exactement avec les discussions que nous avions eues le 28 octobre.

Quant au fonctionnement interne, il est vrai que cela a été exposé sur la place publique. Nous avons vérifié ensemble, hier soir, le bien-fondé de certaines allégations et, déjà, le conseil d'administration de la régie avait pallié l'ensemble de ces lacunes sur le plan du fonctionnement interne, en termes administratifs.

Pour ce qui regarde les règlements, puisque vous faites allusion spécifiquement à la réglementation, la réglementation, le règlement-cadre est prêt. Je devais en faire adopter le contenu par le Conseil des ministres, mais nous avons découvert qu'au niveau du contentieux de la régie comme telle, on avait omis de faire promulguer les articles de loi nous permettant précisément de procéder à la promulgation du règlement-cadre, de sorte que le 22 décembre, le Conseil des ministres sera appelé, premièrement, à promulguer certains articles de loi, ce qui nous permettra immédiatement de promulguer le règlement-cadre qui, lui, nous permettra d'adopter les règlements fédération par fédération. Il y a donc énormément de travail de fait au niveau de la régie comme telle, autant à l'intérieur que dans ses relations avec le ministère lui-même.

J'ai bien confiance de pouvoir annoncer, après les fêtes, conjointement avec les membres de la régie, non seulement une série de règlements adoptés, mais également un plan d'action et une orientation précise.

C'est le désir des membres de la régie et c'est également le désir du ministère de procéder ainsi.

Le Président: Question principale, Mme la députée de Dorion.

L'effet de la loi S-31 sur certains investissements

Mme Lachapelle: M. le Président, ma question s'adresse au ministre des Finances. M. le ministre, pourriez-vous informer cette Chambre si, à la suite du dépôt de la loi S-31, des compagnies ont dû stopper des investissements?

Le Président: M. le ministre des Finances.

Des voix:...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre.

M. Parizeau: M. le Président, nous savons simplement, à l'heure actuelle, que deux financements sont remis en question depuis que la loi S-31 a été déposée, comme on le sait, tard le soir, au Sénat.

On sait que cette loi prévoit qu'un mandataire du gouvernement, comme la Caisse de dépôt, par exemple, ne peut pas acquérir plus de 10% des actions dans une société de transport ou qui a des intérêts dans une compagnie de transport. D'autre part, on sait que si ces actions sont acquises après le 2 novembre, elles ne comportent pas le droit de vote.

Le premier cas, peut-être le plus spectaculaire parce qu'il s'est produit littéralement le lendemain du dépôt de la loi, avait trait à SOFATI. SOFATI est une compagnie qui, comme on le sait, est en train de devenir, à Montréal, une très importante société de transport de containers. Le financement qui était en préparation pour cette société, un financement nécessaire pour elle et important étant donné l'expansion considérable qu'elle prend à l'heure actuelle et qui impliquait la Caisse de dépôt sur une assez grande échelle, est remis en question.

Deuxièmement, nous apprenions, hier matin, qu'un groupe d'hommes d'affaires de Toronto et de Montréal, qui ont obtenu un permis du gouvernement fédéral pour exploiter un service de liaison aérienne entre le centre de Montréal et le centre de Toronto, à partir de cette technique assez nouvelle d'avions à décollage et atterrissage très court, se sont présentés à la Caisse de dépôt pour demander une participation de la caisse de 30% dans leur capital-actions, ce qui est très important dans le lancement d'une nouvelle compagnie. La Caisse de dépôt a été obligée de leur dire que, même

si la loi S-31 n'est pas adoptée, dans la mesure où elle est déposée et comporte cette date limite du 2 novembre dernier, il n'y avait pas d'autre choix pour la caisse que d'acheter 10% des actions et non pas 30%. Même ces 10%, elle ne pensait pas pouvoir les acheter parce que ces actions ne comporteraient aucun droit de vote. On comprend très bien que même si ce n'était que pour la protection des pensionnés au Québec, si la Caisse de dépôt a des actions dans une compagnie, elle veut tout de même avoir le droit de vote qui va avec. Si bien que la réponse, quant à ce financement, a été: Non.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de Taschereau.

M. Guay: J'aimerais simplement savoir, dans les deux cas soulignés par le ministre des Finances, si la question a été portée à l'attention du parrain du projet de loi, l'ineffable ministre fédéral André Ouellet, quant aux conséquences concrètes, précises que son projet de loi a sur l'économie québécoise et sur l'emploi au Québec. Et quelle a été la réaction de M. Ouellet?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Parizeau: Je n'ai pas encore eu l'occasion de voir M. Ouellet à ce sujet. Le premier cas, celui de SOFATI, je l'ai soulevé au Sénat au moment où je m'y suis présenté, il y a quelques jours; quant au second cas, je l'ai appris vers 10 heures hier matin et j'ai eu l'occasion d'en parler au Canadian Club, hier, à l'occasion d'une conférence à 12 h 30. Il est évident, cependant, qu'un certain nombre de représentations vont devoir être faites du côté d'Ottawa pour faire comprendre à ces gens, enfin, ce qu'ils sont en train de faire.

Le Président: M. le député de Vaudreuil-Soulanges, question additionnelle.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): Si je comprends bien le ministre des Finances, il y a des occasions d'investissement, de financement ou encore de faire des affaires pour certaines entreprises qui n'ont pas de suite, parce que la caisse ne pourrait pas investir ou prêter. Est-ce que le ministre veut nous dire que la caisse serait, dans tout le marché financier, la seule intéressée possible à investir dans ces sociétés? N'y aurait-il pas quelqu'un d'autre qui voudrait également saisir quelque chose de formidable comme ça?

M. Bédard: Les Américains.

Le Président: M. le ministre des

Finances.

M. Parizeau: Loin de moi d'imaginer que la Caisse de dépôt est devenue une sorte de condition nécessaire au financement des entreprises. Je n'ai jamais dit cela et je ne le dirai pas, parce que ça ne serait pas exact. Mais pourrait-on comprendre tout de même le rôle majeur que jouent la Caisse de dépôt, la Société de développement industriel et l'ensemble des autres éléments du secteur public au Québec dans le financement des entreprises? Est-ce qu'on se rend compte à quel point des entreprises ont pu voir le jour grâce à cela? Des emplois ont pu être créés, des entreprises qui étaient petites sont devenues plus grandes et ont embauché davantage de monde. Est-ce qu'on se rend compte que ce secteur public québécois de financement des entreprises, qui a été monté depuis vingt ans aussi bien par ceux qui sont de l'autre côté de la Chambre à l'heure actuelle que par les gouvernements qui se sont succédé par la suite et par nous, est fondamental pour le développement des entreprises québécoises et pour la création d'emplois au Québec?

Le Président: Dernière question additionnelle, M. le député de Laporte.

M. Bourbeau: Au sujet de l'impossibilité pour la caisse d'investir dans la société dont vous avez parlé, qui voudrait promouvoir le transport à décollage court et à atterrissage court, entre Montréal, Toronto et Ottawa, êtes-vous au courant que la dernière expérience pilote qui a été faite à ce sujet s'est révélée extrêmement coûteuse et que, effectivement, il y a eu énormément de pertes pour le gouvernement? Ne considérez-vous pas qu'il est heureux que la Caisse de dépôt ne puisse pas se lancer dans une telle expérience?

Le Président: M. le ministre des Finances.

M. Parizeau: Est-ce que je pourrais rappeler à nos amis d'en face qu'en pratique, disent-ils, ce sont eux - je n'y crois pas un seul instant - qui défendent l'entreprise privée? Si des hommes d'affaires croient qu'ils peuvent se lancer dans un projet et qu'ils s'adressent à un organisme du secteur public pour avoir un financement, est-ce qu'on va maintenant leur dire: Nous allons interdire à la caisse de vous avancer de l'argent ou de prendre des actions parce que nous, de l'Assemblée nationale, pensons que comme hommes d'affaires vous faites erreur? Allons donc!

Le Président: Question principale, M. le député de Viau.

Directive de la CSST concernant

les bénéficiaires du programme

de réadaptation sociale

M. Cusano: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse au ministre du Travail. Le ministre peut-il nous confirmer, à la suite d'une directive émise par la Commission de la santé et de la sécurité du travail qui, depuis l'adoption de la loi sur la division des deux ministères, en a maintenant la responsabilité, que les bénéficiaires du programme de réadaptation sociale devront désormais visiter douze employeurs par semaine; à défaut de quoi, l'accidenté se verra privé de ses prestations. (10 h 50)

Le Président: M. le ministre.

M. Fréchette: Je voudrai simplement, d'abord, signaler au député que la loi à laquelle il réfère n'est pas encore adoptée. Nous sommes au stade de la troisième lecture, effectivement. Comme le député, j'ai effectivement entendu parler de cette situation tout récemment; c'était hier, je pense, ou avant-hier. À la suite de l'information que j'ai reçue - je remercie le député de le signaler ce matin - j'ai effectivement demandé plus de renseignements, plus de détails sur la situation qu'évoque le député. Dès lors que ces renseignements me seront parvenus, je les transmettrai sans délai à l'Assemblée nationale.

Le Président: M. le député de Viau, question additionnelle.

M. Cusano: Est-ce que le ministre s'engage formellement à demander à la commission de retirer cette directive, premièrement? Deuxièmement, est-il prêt à émettre des directives au président, le juge Sauvé, d'arrêter ces dépenses folles de rénovation de bureau qui coûtent 210 000 $? Est-ce que le ministre peut nous assurer, premièrement, que cette directive concernant les travailleurs sera retirée, deuxièmement, que M. Sauvé ne fasse pas la même erreur qu'il a faite l'année passée sur les cadeaux de Noël?

Le Président: M. le ministre du Travail.

M. Fréchette: Je voudrai, d'abord, signaler au député que la Commission de la santé et de la sécurité du travail est administrée par un conseil d'administration qui jouit d'une totale autonomie. Le ministre du Travail est chargé de voir à l'administration de la loi. Quant à la demande qui est faite par le député de regarder la possibilité de demander qu'on retire les directives, il faudrait bien auparavant, si encore cela m'est possible en vertu des dispositions de la loi, connaître les tenants et aboutissants de la situation à laquelle réfère le député. Dès lors, encore une fois, que ces renseignements seront complets, qu'ils m'auront été transmis, j'informerai l'Assemblée nationale des dispositions qu'il faut prendre.

Le Président: M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Paradis: Est-ce que le ministre, dans les informations qu'il va communiquer à la Chambre, dans les garanties qu'il serait prêt à nous donner ce matin, peut déjà nous dire que, dans le nombre de recherches d'emplois qui sont exigées, le ministre va tenir compte de la différence entre le milieu urbain et le milieu rural au Québec? Dans nos bureaux de comté, on a des gens à qui on impose un nombre de visites en milieu rural. C'est beaucoup plus dispendieux que de prendre le métro ou le système de transport en commun en ville et cela cause des problèmes à ces gens qui sont parmi les plus défavorisés de notre société. Est-ce que vous pouvez, pour le moins, prendre cet engagement, ce matin?

Le Président: M. le ministre.

M. Fréchette: Je peux, pour le moins, prendre l'engagement de tenir compte aussi de la situation dont parle le député de Brome-Missisquoi. Je vous réitère qu'à ce stade-ci, sans connaître de façon précise cette directive administrative, si encore elle existe, je ne peux prendre aucune espèce d'engagement de quelque nature que ce soit. Je réitère que j'attends de voir le dossier dans son ensemble et, par la suite, j'informerai la Chambre en conséquence.

Le Président: M. le député de Portneuf.

M. Pagé: Une brève question additionnelle au ministre du Travail. Comment le ministre peut-il prendre en considération les propositions qui sont formulées ce matin et souhaiter une influence quelconque si, comme il le dit, l'organisme est complètement autonome?

Le Président: M. le ministre.

M. Fréchette: II y a, évidemment, cette autonomie dont je viens de parler quant au conseil d'administration. Il existe également dans la loi des dispositions qui confèrent d'abord au ministre du Travail la responsabilité de l'administration de la Commission de la santé et de la sécurité du travail et, en même temps, la juridiction de faire procéder à des changements si effectivement le ministre en vient à la conclusion qu'il en faut.

Le Président: Dernière question additionnelle, M. le député de Louis-Hébert.

M. Doyon: On connaît la situation difficile du chômage et de l'emploi à Québec. J'aimerais savoir du ministre du Travail quelles sont ses intentions en ce qui concerne le déménagement du siège social de la CSST et s'il considère que le fait que le président siège à Montréal avec des employés de plus en plus nombreux ne constitue pas dans les faits un déménagement de facto du siège social. J'aimerais qu'il éclaire la population de Québec là-dessus. Le siège social existe sur papier, mais il existe aussi dans les faits. J'aimerais que les faits soient pris en considération par le ministre dans la réponse qu'il va nous donner.

Le Président: M. le ministre.

M. Fréchette: M. le Président, ce n'est pas la première fois que le député de Louis-Hébert et un autre de ses collègues soulèvent cet aspect ou cette question. C'est la première fois ici à l'Assemblée nationale, mais ce député l'a soulevée d'une autre façon à un autre moment donné et, lorsqu'il l'a soulevée d'une autre façon et à un autre moment donné, il a eu une réponse dont j'ai pris connaissance et qui m'apparaissait fort claire. L'information que possédait le député de Louis-Hébert était qu'il y avait effectivement eu un transport de siège social. Je ne sais pas, M. le Président - ce n'est pas ce qui était indiqué dans le renseignement que demandait le député de Louis-Hébert - où il avait pris ce renseignement qui l'amenait à la conclusion qu'il y avait eu un déménagement du siège social, mais il a été informé par la commission elle-même que jamais une semblable décision n'avait été prise et que jamais non plus il n'était question de considérer une semblable possibilité. Je pense que c'est suffisamment clair comme situation.

Le Président: Question principale, M. le député de D'Arcy McGee.

La future prison de LaSalle

M. Marx: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse au ministre de la Justice. Le ministre de la Justice a dit que la construction d'une nouvelle prison à LaSalle aurait l'effet d'alléger le surpeuplement dans les prisons québécoises. Est-il vrai que le bâtiment à LaSalle que le gouvernement a acquis est trop vieux pour être rénové et transformé en prison?

Le Président: M. le ministre.

M. Bédard: C'est faux, M. le Président.

L'immeuble en question, situé à LaSalle, qui a été acquis par le gouvernement peut très bien être rénové. Nous pouvons faire, avec cet immeuble, une institution de détention très appropriée qui représenterait des épargnes énormes par rapport à une autre solution qui serait de construire une prison afin de pouvoir en venir à la fermeture du centre de détention Parthenais et à un réaménagement de tout le domaine de la détention pour l'ensemble de la région de Montréal. D'ailleurs, j'ai déjà eu l'occasion de dire qu'il y a présentement une collaboration entre le ministère de la Justice et le ministère des Travaux publics afin d'en venir à un plan global de réaménagement des institutions pour l'ensemble de la région de Montréal qui ne comportera pas d'augmentation du nombre de places, mais qui, en fin de compte, nous permettra d'arriver à un but que nous nous sommes fixé depuis longtemps, soit la fermeture du centre de Parthenais. Après les fêtes, nous serons en mesure de faire connaître plus clairement nos intentions.

Le Président: Question additionnelle, M. le député de D'Arcy McGee.

M. Marx: M. le Président, quand sera prête cette prison à LaSalle et combien coûteront la rénovation et la transformation de ce vieux bâtiment en une prison?

Le Président: M. le ministre.

M. Bédard: M. le Président, dès que le Conseil du trésor aura pu se prononcer après l'étude du projet dont j'ai parlé tout à l'heure que nous mettons au point avec le ministère des Travaux publics, nous serons en mesure de faire connaître toutes les données ou les réponses aux questions du député de D'Arcy McGee. Mais je suis d'ores et déjà en mesure de dire qu'une solution globale de réaménagement des institutions pour l'ensemble de la région de Montréal comportant le réaménagement ou l'aménagement de l'institution qui a été acquise par le gouvernement à la ville de LaSalle représentera, en fin de compte, des épargnes très importantes et répondra aux besoins que le député de D'Arcy McGee connaît.

Le Président: M. le leader de l'Opposition, question additionnelle.

M. Lalonde: Question additionnelle. On sait que la prison projetée sera située à LaSalle, dans le comté de Marguerite-Bourgeoys. Le ministre peut-il dire qu'il soumettra au Conseil du trésor le refus de la population environnante de voir une prison installée en plein milieu de la ville, sans le consentement de la population?

Le Président: M. le ministre. (11 heures)

M. Bédard: M. le Président, j'aurai l'occasion de rencontrer les autorités municipales de la ville de LaSalle. Le député de Marguerite-Bourgeoys sait très bien que le réaménagement de l'immeuble dans la ville de LaSalle comporterait des épargnes énormes par rapport à la construction d'un nouvel édifice pour répondre aux besoins de détention dans la région de Montréal.

Si nous en venions - et ce sont les intentions que nous avons - à aménager les immeubles que le gouvernement du Québec a acquis dans la ville de LaSalle de manière à en faire un centre de détention, ceci représenterait des investissements très importants pour la ville de LaSalle, représenterait aussi des emplois et, également, une source de financement importante pour les autorités municipales de la ville de LaSalle et pour l'ensemble de la population.

Je voudrais bien que l'Opposition se branche. On nous demande de procéder à la mise en place d'un plan qui répondrait aux besoins de détention pour l'ensemble de la région de Montréal, et lorsque nous trouvons une solution, l'Opposition s'y oppose comme à son habitude. Je pense qu'après des rencontres avec les autorités municipales de la ville de LaSalle, nous pourrons en venir à une solution très raisonnable, qui ne sera peut-être pas acceptée par l'Opposition, mais qui sera mieux acceptée par l'ensemble de la population.

Le Président: Sur une dernière question additionnelle, M. le député de Marquette.

M. Dauphin: Merci, M. le Président. Le ministre nous avait assuré en commission parlementaire qu'il consulterait la population à nouveau. J'aimerais rectifier en disant que ce n'est pas l'Opposition qui est contre cela, c'est la population de la ville de LaSalle. Pour ce qui est d'avoir une prison en plein centre-ville, est-ce que le ministre consultera à nouveau la population plutôt que d'imposer, comme il a toujours l'intention de le faire?

Le Président: M. le ministre.

M. Bédard: M. le Président, ce n'est pas exact. Si je me souviens, je ne me suis pas engagé à consulter à nouveau la population. D'ailleurs, cette discussion a eu lieu lors de l'étude des derniers crédits du ministère de la Justice. J'ai dit que j'étais convaincu que cette solution était la meilleure pour répondre aux besoins urgents de réaménagement de tout le système de détention au niveau de la région de Montréal, que j'essaierais de faire les efforts nécessaires et de donner toutes les explications nécessaires à la population, parce que la décision est prise, pour que cette décision soit bien acceptée.

Le Président: Sur une question principale, M. le député de Gatineau.

Les tests linguistiques

M. Gratton: Merci, M. le Président, ma question s'adresse au ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration et responsable de l'application de la loi no 101, puisque ma question portera sur l'évaluation linguistique des professionnels ayant reçu leur formation au Québec, c'est-à-dire les tests liguistiques.

À la mi-novembre, le ministre a fait une annonce à Montréal sur certains changements qu'il se proposait de recommander au Conseil des ministres d'entériner quant au processus de l'évaluation des capacités linguistiques et professionnelles. Étant donné que ces déclarations n'ont pas été aussi claires que le ministre peut l'être à l'occasion, pourrait-il nous informer très spécifiquement sur ce qu'il se propose de recommander au gouvernement? Et quand?

Le Président: M. le ministre.

M. Godin: M. le Président, présentement, l'office est en train de réviser tous les tests qui touchent la connaissance du français par les professionnels, de manière que la connaissance du français soit celle qui est appropriée au métier ou à la profession des personnes en question. Grâce à cette révision des tests, il y en a déjà probablement de 30% à 40% qui sont en application et déjà, les taux de succès des candidats ont augmenté de 20%. Nous poursuivrons donc cette première opération.

Dans un deuxième temps, nous avons l'intention de confier la responsabilité de la vérification du français ou au système scolaire anglophone d'une part, qui devra lui-même faire la preuve que les étudiants qui sont passés par ses écoles ont une connaissance suffisante du français pour pouvoir occuper des postes comme professionnels ou autres, ou aux ordres professionnels d'autre part, pour ceux qui ne sont pas passés par le système scolaire québécois anglophone; ces ordres professionnels auront le soin de vérifier eux-mêmes la connaissance du français de leurs membres. Donc, cette triple opération est déjà en cours et les contacts sont déjà pris avec mon collègue de l'Éducation. Nous travaillons la main dans la main sur ces modifications ou à la vérification du français des professionnels qui travaillent au Québec.

Le Président: Question additionnelle. M. Gratton: Question additionnelle, M.

le Président. Certains intervenants avaient compris de la déclaration du ministre en novembre dernier que, tel que l'avait promis le premier ministre dans sa réponse au mouvement Alliance Québec, il y aurait une abolition éventuelle de ces tests, tout au moins pour ceux qui reçoivent leur formation secondaire au Québec. Doit-on comprendre de la déclaration du ministre qu'effectivement les diplômés de l'année scolaire 1983-1984 au Québec seront exemptés de tout test?

Le Président: M. le ministre.

M. Godin: On travaille dans ce sens.

Le Président: Question additionnelle.

M. Gratton: Je veux bien qu'on travaille dans ce sens, mais il faudrait que, si on y travaille, on en arrive à une solution avant 1983-1984. Je reviens à la première question que j'avais posée. À quel moment le ministre se propose-t-il de recommander des amendements concrets à la loi 101?

Le Président: M. le ministre.

M. Godin: À la première partie de la question, je vous dirai qu'on travaille dans ce sens, c'est-à-dire que ni le ministre ni moi seuls ne pouvons régler ce problème. Il faut qu'il y ait la collaboration des institutions, des organismes qui font partie de ce système scolaire anglophone au Québec. Par conséquent, nous allons prendre les mesures administratives qui s'imposent pour que le résultat soit là tel que promis par le premier ministre dans sa réponse à Alliance Québec.

Maintenant, à votre deuxième question sur les amendements à la loi 101, j'ai l'intention de faire rapport à cette Chambre au printemps prochain à ce sujet.

M. Gratton: Dernière question additionnelle, M. le Président.

Le Président: M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Le ministre ne conviendra-t-il pas que c'est la responsabilité du ministère de l'Éducation de faire en sorte que, dans le système scolaire anglophone, on donne une instruction qui permette aux diplômés d'écoles québécoises d'avoir une connaissance suffisante de la langue française pour exercer leur profession au Québec? Si cela n'est pas le cas, est-ce que le ministère - c'est peut-être au ministre de l'Éducation que je devrais poser la question - entend consacrer des fonds pour faire en sorte que, le plus tôt possible, on puisse assurer cette connaissance suffisante du français à ces diplômés?

Le Président: M. le ministre.

M. Godin: M. le Président, il est bien certain qu'idéalement il faudrait que les étudiants qui sortent du système scolaire anglophone aient la maîtrise du français. Par ailleurs, ces changements dans les mentalités et les attitudes ne se font pas du jour au lendemain. Par conséquent, pour une période de transition, on doit vérifier nous-mêmes si les professionnels qui travaillent dans les institutions du gouvernement, dans les secteurs public et parapublic, connaissent suffisamment le français pour ne pas pénaliser les consommateurs, les clients, les patients. Par conséquent, tant qu'on n'a pas la certitude que cette connaissance du français est suffisante, nous allons garder un mot à dire là-dedans.

Le Président: Mme la députée de L'Acadie, dernière question additionnelle.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, le ministre de l'Immigration vient d'indiquer qu'il y a une augmentation de 20% des personnes qui réussissent les tests linguistiques. On peut donc en conclure qu'il y a eu une certaine injustice à l'égard d'un certain nombre de ceux qui ont failli aux tests dans le passé. Est-ce l'intention du ministère d'indiquer ou de faire un certain rappel auprès de ceux qui ont échoué à plusieurs reprises dans le passé pour leur donner une nouvelle chance?

Le Président: M. le ministre.

M. Godin: M. le Président, les cas où des gens ont été pénalisés par les anciens tests sont maintenant en grande partie réglés à cause des nouveaux tests précisément. C'est pour cela qu'on les a changés.

Le Président: M. le ministre.

M. Godin: La députée n'est pas satisfaite de ma réponse. Je vous répète qu'à ma connaissance... Elle n'a pas entendu. Est-ce que je suis branché?

M. Gratton: Je sais que vous n'avez pas l'air au courant.

Le Président: M. le ministre.

M. Godin: Efharisto poly. Grattons, grattons, il en restera toujours quelque chose. Ce que je veux dire précisément, en réponse à la question de la députée, c'est qu'à ma connaissance tous ceux qui avaient été pénalisés par les anciens tests, en passant les nouveaux, ont vu leurs problèmes se régler.

Le Président: Fin de la période des questions.

Motions non annoncées.

Enregistrement des noms sur les votes en suspens.

Avis à la Chambre. M. le leader du gouvernement. (11 h 10)

Avis à la Chambre

M. Bertrand: Avant de faire motion, j'aurais besoin de demander un consentement à mes collègues pour faire siéger trois commissions parlementaires aujourd'hui.

Le Président: M. le leader de l'Opposition.

M. Lalonde: Compte tenu du fait que l'une des trois est une commission d'information aux parlementaires sur une directive à la Société générale de financement, il nous fait plaisir de consentir a ce que trois commissions siègent. Je ne pense pas que cela aura pour effet de perturber les travaux du salon bleu.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Je veux en remercier le leader de l'Opposition et ses collègues.

Je fais motion pour qu'aujourd'hui, au salon rouge, la commission de l'industrie, du commerce et du tourisme puisse se réunir et discuter, avec les représentants de la Société générale de financement, de la directive no 3, cela de 11 h 15 à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et on me dit qu'on aurait terminé les travaux de cette commission vers 18 heures. Que, de 11 h 15 à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 24 heures, la commission des institutions financières se réunisse à la salle 81-A pour étudier le projet de loi privé no 283, ainsi que poursuivre l'étude du projet de loi no 85 article par article. Qu'à la salle 91-A la commission des affaires municipales se réunisse pour étudier les projets de loi nos 92 et 103.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce que cette motion est adoptée?

M. Lalonde: Adopté, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Affaires du jour.

Recours à l'article 34

M. Bertrand: Je voudrais me poser une question en vertu de l'article 34, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader parlementaire.

Des voix: Consentement.

M. Bertrand: Je voudrais demander au leader si le ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration a l'intention de répondre à la question qui a été posée par le député de Gatineau et qui était inscrite au feuilleton en date du 30 novembre relativement à des subventions qui ont été versées à des organismes où oeuvrent des communautés culturelles sur le territoire québécois.

J'ai ici une note signée de la main même du ministre. "Cher Jean-François...

Des voix: Ah! Ah! Ah!

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît: S'il vous plaît!

M. Bertrand:... je vais déposer demain, mercredi, la réponse écrite à la question écrite du député de Gatineau en date du 30 novembre. Signé: Godin. " Il y a un petit commentaire, c'est écrit: "Et v'ianl" pour faire allusion à un article qui est paru ce matin. C'est ce qu'on peut appeler du contre-plaqué.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de l'Opposition.

M. Lalonde:... si on est rendu à l'article 34, est-ce qu'il pourrait communiquer et recevoir des notes manuscrites aussi percutantes des autres ministres à qui des questions ont été posées par le député de Jeanne-Mance, le député de Marquette, le député de Hull, la députée de Chomedey, entre autres, sur des listes d'organismes qui ont reçu des subventions de divers ministères?

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: C'est une bonne idée, M. le Président.

Des voix: Quand? Quand?

M. Bertrand: Ouf! Ce sont des questions relativement récentes, tout de même. Vous admettrez que celles-là ne remontent pas au mois de mars ou avril dernier; elles remontent plutôt aux mois de novembre et même décembre. C'était déjà prêt dans le cas du ministre des Communautés culturelles. Lors d'une période des questions, il avait dit qu'il s'engagerait à déposer la liste des subventions accordées à des organismes. Comme cette liste est déjà prête, il la déposera demain.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Vaudreuil-Soulanges.

M. Johnson (Vaudreuil-Soulanges): En vertu de l'article 34, M. le Président. Nous devrons, selon le menu prévu, étudier éventuellement article par article le projet de loi no 93 concernant l'abolition de l'âge de la retraite obligatoire chez les fonctionnaires et modifiant le régime de retraite des fonctionnaires, etc. Nous avons reçu, il y a quelques heures, un essaim de papillons, si cela se dit, soit 72 modifications à un projet de loi qui ne comprend que 137 articles. Il y a des choses très simples, il y a des coquilles, mais il y a des choses qui m'apparaissent, à la suite d'une simple lecture rapide, assez fondamentales. Est-ce que le leader du gouvernement trouve que c'est normal, à ce moment-ci de la session, dans les derniers milles, les derniers kilomètres - je ne veux pas passer à l'amende - d'apporter des changements, des chambardements comme ça en nous présentant d'abord, un brouillon? La loi no 15 sur l'abolition de l'âge de la retraite obligatoire, c'est en juin dernier qu'elle a été adoptée en cette Chambre. Il y avait nécessité de concordance; on le savait à l'époque. Il fallait faire concorder, avec la loi no 15, les régimes de rentes dans le secteur public et toutes les dispositions sur la retraite obligatoire dans le secteur public. Cela fait environ six mois. On nous arrive avec un brouillon et des papillons. Est-ce que le leader trouve cela normal?

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

Une voix: Allez, mon Jean-François.

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît:

M. Bertrand: Je voudrais que le député de Vaudreuil-Soulanges sache que le ministre parrain du projet de loi, dans le fond, pourrait émettre les mêmes commentaires que lui. C'est un projet de loi - à la lecture même d'ailleurs, on s'en rend compte - qui est très technique et qui n'est pas de consommation facile. Mais il est évident que les projets relatifs à des régimes de retraite sont des projets de loi dont la rédaction est particulièrement difficile à faire, l'écriture juridique, et qu'il arrive qu'il faille, en cours de discussion, modifier certains des articles. Maintenant, c'est en commission parlementaire que je pense que le ministre parrain du projet de loi pourra indiquer la portée de chacun de ces amendements qui sont apportés au projet de loi no 93.

M. Dussault: M. le Président...

Des voix: Ah!

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Châteauguay. Une voix: Seigneur!

M. Dussault: M. le Président, j'ai une question qui s'adresse à la présidence. C'est relatif aux procès-verbaux de l'Assemblée nationale. Je vais vous expliquer immédiatement pourquoi je veux vous poser une question à ce sujet. Au cours des derniers jours, trois journaux ont dit que j'étais absent lors du vote en troisième lecture sur le projet de loi no 105. Je voudrais faire la démonstration que j'étais présent. J'aurais besoin du procès-verbal...

M. Lalonde: M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de règlement, M. le leader de l'Opposition.

M. Lalonde: M. le Président, je pense que le député et adjoint parlementaire - on a fait une description ici, hier soir, des adjoints parlementaires, par le vice-premier ministre - pourrait ou devrait savoir - il le sait sûrement - qu'il y a d'autres façons de faire corriger le procès-verbal. Il n'a qu'à s'adresser au bureau du président et faire corriger le procès-verbal.

M. Dussault: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Châteauguay.

M. Dussault:... je voudrais savoir quand sera disponible le procès-verbal du vendredi 11 décembre dernier pour que je puisse faire la preuve que j'étais présent.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Je prends avis de cette question et on vous répondra dans les meilleurs délais, M. le député de Châteauguay.

M. Dussault: Merci, M. le Président. M. Fortier: En vertu de l'article 34.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: M. le Président, les gens de la Côte-Nord s'intéressent beaucoup à la prochaine commission parlementaire que le ministre de l'Énergie et des Ressources leur a promise. J'aimerais savoir du leader du gouvernement s'il a fait des progrès pour établir les règles qui permettraient aux deux partis de s'entendre pour que des commissions parlementaires puissent se tenir à l'extérieur de Québec, puisque nous croyons que la prochaine devrait peut-être être tenue

à Schefferville compte tenu des problèmes immenses que les gens vivent présentement sur la Côte-Nord.

Est-ce que le leader du gouvernement pourrait nous indiquer qu'à titre exceptionnel celle-ci pourrait s'y tenir? Est-ce qu'il a fait des progrès pour donner satisfaction aux demandes du leader de notre formation politique et est-ce qu'une décision a été prise en ce sens qui pourrait nous satisfaire et satisfaire les gens de la Côte-Nord en même temps?

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, je dois indiquer, pour le bénéfice du député d'Outremont, qu'à l'occasion des travaux de notre sous-commission sur la réforme parlementaire nous n'avons pas encore abordé cette question des commissions parlementaires qui pourraient siéger ailleurs qu'à Québec. Nous sommes en train de discuter surtout des différentes commissions parlementaires que nous désirons mettre sur pied et du problème de l'étude des crédits, mais nous n'avons pas encore abordé cette question comme telle.

Je me rappelle - je ne commente pas -simplement qu'il y a quelques semaines, quelques mois, une demande du même genre avait été acheminée à la présidence relativement à la commission parlementaire, si je me le rappelle bien, sur le transport en commun dans la région de Montréal et une autre sur Mirabel. Le ministre des Transports et celui de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation avaient demandé que la commission parlementaire puisse se tenir à Montréal, dans un cas, et dans la région de Mirabel, dans l'autre cas. À ce moment-là, nous avions reçu une réponse, à savoir qu'il conviendrait que nous adoptions, d'abord, un article dans le projet de loi sur l'Assemblée nationale du Québec qui nous permettrait de faire siéger des commisssions à l'extérieur de Québec et aussi, comme l'a dit le député d'Outremont, de trouver des modalités qui permettraient de baliser un peu nos décisions quant au fonctionnement de telles commissions parlementaires à l'extérieur de la ville de Québec. Alors, pour l'instant, il n'y a pas de décision finale de prise.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de l'Opposition. (11 h 20)

M. Lalonde: En effet, nous avons demandé au gouvernement de proposer et de faire adopter un cadre de fonctionnement pour ces commissions parlementaires. Maintenant, c'était en octobre ou en septembre et nous sommes rendus fin décembre. Il y a des régions, comme la région de Schefferville, qui font face à des situations critiques, en fait, tragiques. Pour le bon fonctionnement de cette commission qui devrait normalement, en janvier prochain, dans quelques semaines, étudier la question de la situation sur la Côte-Nord et, en particulier, celle de Schefferville, n'y aurait-il pas lieu pour le gouvernement de se hâter de produire ce document qui nous permettrait de faire fonctionner cette commission et de la faire siéger à Schefferville en particulier?

Par mesure d'exception, si nous n'arrivons pas à une conclusion dans l'adoption d'un tel cadre de fonctionnement, est-il possible - et nous en faisons la demande - de faire siéger cette commission à Schefferville, au nom du besoin des régions éloignées? Pour ne pas distinguer une région éloignée parmi les autres, serait-il possible, en principe, comme mesure d'essai, jusqu'à ce qu'on puisse adopter un cadre de fonctionnement, d'accepter que des commissions parlementaires se tiennent dans les régions qui font partie du groupe 5, je pense, dans le règlement sur le fonctionnement des bureaux de comté des députés? Ce serait, je pense, une façon de tenter l'expérience et de favoriser les régions qui sont plus éloignées et qui connaissent des problèmes considérables actuellement.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: J'écoutais le leader de l'Opposition et j'avais l'impression de m'entendre plaider la cause - non, très sincèrement, Mme la députée - que j'avais défendue lorsque j'avais communiqué avec le lui pour lui indiquer que la demande que nous avions faite relativement, entre autres, à la commission parlementaire sur le transport en commun à Montréal aurait eu également pour objectif de voir comment, pratiquement, nous pourrions arriver à réaliser cet objectif de faire siéger des commissions parlementaires à l'extérieur de Québec. J'avoue que parler du cas de Montréal peut être différent que parler du cas de Schefferville. Mais, tout de même, lorsque j'écoutais le député de Marguerite-Bourgeoys, j'avais nettement l'impression de réentendre des arguments que j'avais moi-même utilisés lorsque je lui avais adressé la même demande relativement au transport en commun à Montréal.

Cela étant dit, je crois qu'il y aurait peut-être lieu que nous songions à la possibilité, avant même de définir un cadre final au niveau du fonctionnement de commissions parlementaires à l'extérieur du Québec, de tenter une expérience pilote qui nous permettrait probablement de mieux saisir les difficultés que cela peut comporter et, en même temps, bien sûr, tous les

avantages que cela peut apporter pour un meilleur fonctionnement de cette institution, c'est-à-dire permettre que la démocratie ne s'exerce pas seulement ici, à Québec, mais dans les régions, dans la mesure où c'est possible, à travers nos commissions parlementaires.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Mont-Royal.

M. Ciaccia: Si vous me le permettez, M. le Président, sur le même sujet.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Sur le même sujet, en vertu de l'article 34.

M. Ciaccia: Oui, en vertu de l'article 34. Est-ce que le leader parlementaire pourrait nous expliquer comment il se fait que le député de Duplessis, à ce qu'on m'a informé, aurait fait des déclarations disant que la commission parlementaire aurait eu lieu à Schefferville si ce n'était pas de l'opposition du Parti libéral. Apparemment, d'après lui, la décision du gouvernement était de la tenir à Schefferville, mais nous nous y opposons. Si je comprends bien les déclarations que vous venez de faire ce matin, le gouvernement n'a pas encore pris la décision de tenir une commission parlementaire à Schefferville. De notre côté, nous vous suggérons de prendre les moyens nécessaires pour que cette commission ait lieu à Schefferville. Pourriez-vous nous expliquer cette contradiction entre ce qu'a dit le député de Duplessis et votre déclaration de ce matin?

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Je pense que seul le député de Duplessis pourrait indiquer au député de Mont-Royal si les propos qu'il rapporte sont exacts ou non. Je ne peux pas invoquer une question de privilège au nom du député de Duplessis relativement à des déclarations qui auraient été faites de part et d'autre.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député d'Outremont.

M. Fortier: J'ai bien entendu les explications, mais je demanderais, étant donné que nous allons partir en vacances bientôt, à quel moment va aboutir la réflexion que le leader va s'imposer.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Avant la fin de la présente session.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

M. Lalonde: M. le Président, excusez-moi.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de l'Opposition.

M. Lalonde: Le chef de l'Opposition me souffle une réaction à la dernière réponse du leader du gouvernement: "Avant la fin de la présente session. " Si la présente session se termine le 23 juin 1983, c'est un peu tard pour nous. Est-ce qu'il veut dire avant le 21 décembre, c'est-à-dire dans les jours qui viennent?

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Si l'Opposition - et c'est déjà assez bien parti à ce point de vue -continue de collaborer comme elle le fait, peut-être même avant le 18 décembre.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Les affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: M. le Président, je vous demanderais d'appeler l'article 9 du feuilleton.

Projet de loi no 90

Reprise du débat sur la deuxième lecture

Le Vice-Président (M. Rancourt): Reprise du débat sur la motion du ministre responsable de la réforme parlementaire proposant que le projet de loi no 90, Loi sur l'Assemblée nationale du Québec, soit maintenant lu la deuxième fois. M. le député de Fabre.

M. Leduc (Fabre): Je voudrais céder mon droit de parole au député de Deux-Montagnes.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Deux-Montagnes.

M. Pierre de Belle feuille

M. de Bellefeuille: Merci, M. le Président. Je voudrais remercier mon collègue de Fabre. Cette question de la réforme parlementaire, dont des éléments importants se trouvent dans le projet de loi no 90, nous intéresse tous à peu près de la même façon puisque nous sommes tous à peu près de la même façon députés, représentant une circonscription du Québec. Tout le monde connaît, je pense, l'évolution récente

de cette question. Les travaux tout à fait remarquables de notre collègue de Trois-Rivières ont mené à la présentation du rapport Vaugeois au mois de janvier de cette année. Par la suite, le conseil des députés ministériels a décidé de mettre sur pied un comité et m'a demandé d'en assumer la présidence. Nous avons travaillé durant l'été et au début de l'automne. J'aimerais, à mon tour, rendre hommage - hier, le leader parlementaire a rendu hommage à plusieurs personnes, y compris à celui qui vous parle -aux députés ministériels qui ont participé aux travaux de ce comité. Ce sont les députés de Nicolet, de Lac-Saint-Jean, de Saint-Jacques, de Charlesbourg, de Dubuc, de Taschereau, de Laviolette, de Gouin et, bien entendu, le député de Trois-Rivières. Nous avons présenté notre rapport final le 12 octobre, à la suite de quoi le gouvernement, le Conseil des ministres, a formulé une proposition qui est maintenant devant une sous-commission de l'Assemblée nationale.

Dans l'intervalle, des éléments importants de la réforme parlementaire avaient été introduits dans le projet de loi no 90. Je voudrais dire quelques mots sur ces éléments de réforme parlementaire qu'on trouve dans le projet de loi no 90. Par exemple, la création du Bureau de l'Assemblée nationale, idée qui a trouvé son origine, je crois, au moins dans l'époque actuelle, dans les travaux du député de Montmorency qui occupait à l'époque votre fauteuil, M. le Président. Le création du Bureau de l'Assemblée nationale, qui doit remplacer le Comité de régie interne, est une étape importante de la réforme parlementaire puisque ce pouvoir qui jusqu'à maintenant a été détenu par un comité composé assez paradoxalement de ministres exclusivement et du président de l'Assemblée sera désormais détenu par un bureau composé de députés et du président de l'Assemblée nationale. Il est beaucoup plus normal que les questions touchant l'Assemblée soient traitées par des députés étant donné que les ministres ont - c'est le moins qu'on puisse dire - beaucoup d'autres chats à fouetter. (11 h 30)

Par ailleurs, il est important de noter que le bureau représentera aussi les partis d'Opposition, alors que, jusqu'à maintenant, ce n'était pas le cas. Donc, les députés de l'Opposition participeront comme les députés ministériels aux travaux de ce bureau qui exercera des fonctions de contrôle, de gestion et de réglementation importantes en ce qui concerne l'Assemblée nationale. En particulier, le président devra ou pourra consulter le bureau avant de préparer les prévisions budgétaires de l'Assemblée. Le ministre des Finances pourra modifier ces prévisions en ce qui a trait aux services administratifs et techniques de l'Assemblée, mais, quant aux prévisions concernant les services professionnels directement reliés aux fonctions et aux responsabilités des députés, l'autonomie budgétaire de l'Assemblée sera complète grâce aux travaux du bureau.

Un autre élément de réforme parlementaire qui fait partie de la loi 90, M. le Président, est la création de la fonction de jurisconsulte. Ce mot fait très savant, mais le jurisconsulte est un personnage ou une personnalité qui jouera un rôle important à l'occasion auprès des députés eux-mêmes comme députés, puisque le jurisconsulte sera appelé à donner des avis aux députés sur des questions juridiques, par exemple, en rapport avec des questions importantes comme celle des conflits d'intérêts et celle des incompatibilités de fonctions. Jusqu'à maintenant, les députés connaissent à cet égard des règles générales. Certaines de ces règles peuvent être édictées par les partis. C'est le cas au Parti québécois où nous sommes soumis, comme députés du Parti québécois, à un certain nombre de règles assez exigeantes et, d'ailleurs, très bien fondées à l'égard des conflits d'intérêts et des incompatibilités de fonctions. Mais il est bon que de façon plus formelle et plus officielle, du point de vue de l'Assemblée nationale, il y ait cette autorité que l'on puisse consulter.

La loi 90 apportera aussi une modification de notre quorum, M. le Président. Hier soir, le leader parlementaire de l'Opposition a fait allusion à cette question du quorum. Ce que la loi nous propose de faire, c'est réduire le quorum, qui est, à l'heure actuelle, de 30 députés quand il n'y a pas de commissions qui siègent et de 20 députés quand il y a des commissions qui siègent, de le réduire à 10%, c'est-à-dire, puisqu'il y a 122 sièges dans cette Assemblée, un quorum de treize députés. Hier soir, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, en rapport avec cette question, parlait d'école buissonnière. Il aurait peut-être pu parler d'Assemblée buissonnière, mais je pense, M. le Président, que l'image est mal fondée, parce qu'une des idées principales derrière toute cette réforme parlementaire, c'est de donner beaucoup plus d'importance et d'autonomie aux travaux des commissions. Si nous proposons de réduire le quorum, c'est précisément pour que les députés aient plus de temps à consacrer aux travaux de ces commissions devenues plus autonomes et s'attaquant à des tâches plus variées et plus importantes que les tâches actuelles de certaines, au moins, de ces commissions.

D'ailleurs, des comparaisons peuvent parfois éclairer les discussions. Ici, nous avons ce quorum, à l'heure actuelle, qui est d'environ le quart; 30 députés sur 122, cela fait 24, 5%. Si on le compare, par exemple, avec le quorum qui existe au Parlement d'Ottawa, le quorum au Parlement d'Ottawa

est de 7, 1%, c'est-à-dire 20 députés sur 282. En ramenant notre quorum à 10%, on voit qu'on demeure, quant à la présence à la Chambre elle-même par opposition aux commissions, plus exigeant que le Parlement fédéral. Il est intéressant de noter, M. le Président, que le Parlement britannique, le Parlement de Westminster, qu'on appelle la mère des Parlements, en anglais "the mother of Parliaments", n'a pas de quorum du tout pour les débats. Il y a, à Londres, 635 députés, mais les seules présences indispensables pour qu'un député intervienne à Westminster, c'est la présence de votre homologue, M. le Président, et, évidemment, la présence de celui qui intervient. Cela peut se faire à deux seulement: le président et celui qui intervient. Généralement, bien entenu, il y a au moins quelques autres députés, mais il n'y a pas de quorum pour le déroulement des débats à Londres. Il y a un quorum, à Londres, pour le vote des députés qui est de 40 députés sur 635, ce qui représente 6, 3%. Là encore, on voit que notre quorum de 10% est plus exigeant que ce quorum de 6, 3% qui s'applique à Londres seulement au moment du vote et pas au moment des débats. Le seul cas où, à Londres, on est plus exigeant - c'est intéressant; on n'y a pas pensé, mais il faudrait peut-être y penser un jour - c'est pour une motion de clôture d'un débat; là, il y a une exigence d'au moins - ce n'est pas vraiment un quorum; c'est une autre règle, c'est une exigence - 100 votes pour. C'est une astuce à laquelle nos amis britanniques ont songé et on pourrait peut-être examiner cela un jour.

Ensuite, la loi no 90 nous amène à modifier, à amplifier les responsabilités des adjoints parlementaires. J'ai été très amusé d'entendre hier soir le leader parlementaire de l'Opposition rappeler des propos tenus par le député de Sauvé qui, à l'époque, dirigeait le groupe du Parti québécois dans l'Opposition, étant donné que le député de Sauvé, aujourd'hui vice-premier ministre et ministre des Affaires intergouvernementales, est le ministre auprès de qui je suis moi-même adjoint parlementaire. Bon. Alors, le député de Sauvé, aujourd'hui ministre des Affaires intergouvernementales, disait d'eux qu'ils étaient des coupeurs de rubans; il parlait de prix de consolation. Quant aux autres citations, je ne sais pas si elles sont du député de Sauvé ou d'un autre député péquiste de l'époque, mais, en tout cas, on parlait "d'ouvreurs de portes, de porteurs de valises" et on disait qu'être adjoint parlementaire, c'était recevoir "un prix coco". Étant donné ce que le rôle d'adjoint parlementaire était sous l'administration libérale qui nous a quittés en 1976, il n'est pas étonnant qu'on ait tenu ce langage lorsqu'on était dans l'Opposition. Mais aujourd'hui, c'est vraiment beaucoup moins vrai. Je sais qu'il nous arrive de faire des choses qui ressemblent un peu à couper des rubans. J'appelle cela faire des ronds de jambe. Recevoir des visiteurs de marque, cela nous arrive, mais c'est indispensable et c'est une tâche dont je n'ai nullement honte; c'est une tâche qui, à l'occasion, est extrêmement intéressante. Rencontrer et recevoir des visiteurs de marque parce que le ministre n'a pas le temps de recevoir tout le monde, c'est une occupation, en elle-même, tout à fait valable.

Par-dessus ces progrès déjà réalisés par rapport à la tâche et à la fonction de l'adjoint parlementaire, la loi no 90 nous apporte une nouvelle étape de progrès puisqu'il sera inscrit dans la loi que l'adjoint parlementaire pourra agir au nom de son ministre lors de la présentation ou de l'étude d'un projet de loi, même si celui-ci engage des fonds publics ou impose une charge pour les contribuables. Alors, c'est une étape de plus dans la réforme, dans l'amélioration de la fonction de l'adjoint parlementaire.

On se pose aussi la question du nombre d'adjoints parlementaires. Je ne pense pas que l'intention du gouvernement soit de les multiplier de façon exagérée. Je suis sûr que le débat reste possible là-dessus et qu'il y aura sûrement une solution de compromis.

Par ailleurs, dans le projet de loi no 90, nous nous proposons de consacrer un changement qui a déjà été fait et qui touche les députés de Taschereau et de Gatineau, c'est-à-dire l'institution, par la loi no 90, de la fonction de leader parlementaire adjoint du gouvernement et de leader parlementaire adjoint de l'Opposition. (11 h 40)

Puisque nous en sommes à la réforme parlementaire, je voudrais revenir brièvement à l'intervention remarquée qu'a faite hier soir en cette Chambre le député de Trois-Rivières. Nous connaissons tous - j'y ai fait allusion tout à l'heure - l'excellence des travaux du député de Trois-Rivières sur toute la question de la réforme parlementaire. Il a donné à cette question un élan qui se révèle irrésistible. Je voudrais, avec votre permission et surtout avec la permission du député de Trois-Rivières, exprimer peut-être un doute ou deux sur une ou deux de ses observations. Par exemple, à propos de la question de la solidarité ministérielle, le député de Trois-Rivières y a fait allusion à juste titre, mais il me semble que la solidarité ministérielle, ce n'est pas la solidarité nécessairement de tous les députés ministériels. C'est la solidarité des ministres. Je pense que cette distinction est extrêmement importante parce que ce sont les ministres qui prêtent un serment d'office particulier et qui sont liés par un certain nombre de règles, y compris le secret ministériel, y compris la solidarité ministérielle, y compris la responsabilité

ministérielle. Ce sont seulement les ministres, ce ne sont pas tous les députés ministériels.

Cette règle de la solidarité ministérielle est très exigeante. Cela veut dire que lorsque le Conseil des ministres s'est prononcé sur une question, tous les ministres doivent se rallier. Je crois que cette règle est sage, puisque, à un moment donné, lorsque toutes les délibérations ont eu lieu, après la pensée, après la parole, après le débat, il faut passer aux actes. Au moment de passer aux actes, il ne peut pas être question de partir dans toutes les directions à la fois. À ce moment, c'est le Conseil des ministres qui apporte par la règle de la solidarité ministérielle cette unicité dans l'action qui, bien entendu, devient indispensable.

Quant aux députés ministériels, en l'occurrence les députés du Parti québécois qui ne font pas partie du Conseil des ministres, ils sont liés, bien sûr, par ce qui me semble être une autre forme de solidarité. C'est une solidarité de parti, semblable à celle qui lie entre eux les députés d'un parti de l'Opposition. Nous connaissons, d'ailleurs, tous l'expression "ligne de parti". Les députés ministériels non-ministres sont liés par ce type de solidarité qui est exigeante, mais peut-être moins strictement exigeante que la solidarité ministérielle et qui permet l'expression de certaines divergences. D'ailleurs, je pense que c'est assez évident. Hier soir, le député de Trois-Rivières nous disait avec beaucoup d'éloquence que ce que nous apportons en cette enceinte, c'est le bon sens. Ce n'est pas la connaissance technique, ce n'est pas l'apport technocratique, c'est le reflet de la volonté populaire. Nous venons ici représenter nos électeurs. Nous apportons le bon sens. C'est très juste. Nous apportons un bon sens qui ne dit pas toujours la même chose. On sait, par exemple, qu'il y a un débat perpétuel sous tous les gouvernements à l'époque moderne entre les députés de certaines localités et de certaines régions qui présentent de belles argumentations - c'est un peu passé - enfin, qui présentaient de belles argumentations pour les autoroutes, alors que d'autres députés, représentant d'autres localités et d'autres régions, présentent des argumentations tout aussi éloquentes pour ce qu'on appelle le réseau de voirie régionale.

Dans ce genre de débat, il faut que tous les points de vue se fassent entendre. Il faut permettre, il faut même souhaiter une certaine variété dans les points de vue. Cette variété dans les points de vue, c'est le sel et le poivre qu'on met dans notre soupe. Je reconnais qu'il ne faut pas y jeter en même temps toute la salière. Je reconnais qu'il y a des limites. Il faut mettre un certain assaisonnement, mais pas toute la salière, parce que, si on y met toute la salière, cela veut dire qu'on coupe les ponts, on rompt. C'est comme cela que le régime fonctionne. Il y a une certaine liberté de parole, mais, si on en abuse, cela veut dire qu'on coupe les ponts.

Ce dont je vous parle, cette nécessité, ce besoin de favoriser l'expression d'une variété de points de vue, c'est, au fond, le droit de parole. Quand je parle de mettre toute la salière, ça veut dire que le droit de parole est passé par la dissidence pour devenir une rupture. Il ne faut pas s'étonner que ce genre de choses puissent survenir dans la vie parlementaire, M. le Président. Nous avons eu, dans l'histoire du Québec, de grandes dissidences: celle de 1934 qui a mené à la création de l'Action libérale nationale; celle de 1967 qui a mené à la création du Mouvement souveraineté-association et, l'année suivante, du Parti québécois; celle de 1969, à l'époque où un groupe de députés de cette Chambre - ils étaient cinq - ont constitué ce qui s'est appelé l'opposition circonstantielle. C'était une opposition au projet de loi no 63, portant sur la question de la langue au Québec. Deux des cinq députés de cette opposition circonstantielle siègent toujours parmi nous, M. le Président, le premier ministre et le député de Saint-Jean.

Je crois que la sagesse, pour les parlementaires, c'est un équilibre que l'on trouve quand tous les points de vue se sont exprimés. Lorsque tous les points de vue se sont exprimés, comme je l'ai dit, il faut passer à l'action et on ne passe pas a l'action dans toutes les directions à la fois; c'est là qu'intervient le principe très exigeant de la solidarité ministérielle.

Je crois que cette question d'équilibre, parce que nos institutions reposent sur des équilibres, surtout les institutions d'inspiration britannique qui sont plus traditionnelles que consignées dans des textes, est fondamentale et que le respect de cette variété de droits, de cette variété d'exigences est l'âme, en quelque sorte, de la vie parlementaire. Cela doit aussi être l'âme de la réforme parlementaire. La réforme parlementaire, ce n'est pas seulement changer des textes de règlements, ce n'est pas seulement adopter des projets de loi; c'est aussi modifier, si besoin en est, nos attitudes, nos comportements afin que le parlement soit vraiment la maison du peuple et que s'y expriment tous les points de vue que le peuple veut y voir exprimés. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Louis-Hébert.

M. Réjean Doyon M. Doyon: Merci, M. le Président. Les

discours que nous entendons dans cette Assemblée qui portent sur le projet de loi no 90 doivent, dans les circonstances, être empreints d'une certaine dignité. La difficulté où on se trouve actuellement, c'est de distinguer ce que j'appellerais un faux angélisme d'avec un désir profond de réformer nos institutions parlementaires. Il est dans l'habitude du gouvernement de nous présenter les projets de loi avec des mots qui, spontanément, si on ne va pas plus loin, emportent notre adhésion. Le problème, c'est que, quand on va plus loin, on découvre des choses cachées, des choses avec lesquelles nous ne pouvons pas être d'accord et avec lesquelles la population, non plus, ne peut pas être d'accord.

Le risque que nous courons toujours et que la population court là-dedans, c'est d'être, pour employer un mot qu'a mis à la mode dernièrement le député de Deux-Montagnes, piégés entre les bonnes intentions que nous partageons et les moyens douteux qui sont mis en oeuvre pour y arriver. Nous risquons, si nous dénonçons ces moyens, d'être pris à partie par les députés péquistes et de nous faire accuser de ne pas vouloir, de ne pas désirer, de ne pas être prêts à collaborer à une réforme de la Loi sur l'Assemblée nationale. Un processus de maquignonnage et d'échange s'engage à ce moment-là qui porte sur le fait que je te consens telle chose et j'attends quelque chose en retour. (11 h 50)

M. le Président, le projet de loi qu'on a devant nous est trop important pour que nous nous prêtions à ce jeu-là. Je pense qu'il est important, nécessaire et essentiel qu'à l'Assemblée nationale nous expliquions les choses telles que nous les voyons, sans complaisance, sans tenter de faire plaisir à qui que ce soit, en tentant tout simplement de rétablir les faits, de montrer ce qui se passe.

Que se passe-t-il, M. le Président? Nous sommes à la toute fin d'une session qui a commencé le 9 novembre, une session qui aurait pu commencer beaucoup plus tôt, compte tenu d'un certain nombre de projets de loi, dont celui-ci qui est important et qui méritait une discussion approfondie, une discussion faite selon des règles normales prévues dans le règlement de l'Assemblée nationale et qui aurait permis que tous les points de vue puissent être donnés alors que nous avons l'esprit alerte, l'esprit clair, et non en pleine nuit, par exemple, comme cela s'est passé hier soir, alors que l'Assemblée nationale a siégé jusqu'à 1 h 30.

Vous allez me dire: On ne peut pas faire autrement, parce qu'on a trop de projets de loi qui doivent être adoptés à telle date, le 21 décembre. Cependant, M. le Président, c'est un autre piège du PQ, parce qu'on nous a fait commencer le 9 novembre.

C'est pour cette raison qu'on est bousculés. C'est pour cette raison qu'on s'en va avec des projets de loi qu'on est obligé d'étudier à la course, à la sauvette, en pleine nuit, en catimini. On ne peut pas accepter cela, M. le Président. On nous présente cette partie de la session de l'Assemblée nationale comme étant une course. Or, on s'aperçoit que, depuis le 1er décembre, on est dans un sprint. Si on considère qu'on a commencé la course le 9 novembre, c'est une curieuse de course que celle où le sprint final dure plus longtemps que la course elle-même. Est-ce qu'on ne peut pas s'interroger sur la nature de cette course, M. le Président? N'est-il pas plus normal qu'une course se déroule sur une certaine distance et que le sprint soit, tout simplement, une partie minime de cette course? Dans le moment, on est en train de sprinter pour plus de la moitié de la course qu'on a entreprise le 9 novembre. Cela fait curieux. Il faut se poser des questions.

M. le Président, il faut, entre autres, examiner le projet de loi que nous avons devant nous. Pour ma part, j'y vois un certain nombre de similitudes avec des choses qu'on a été appelé à faire dernièrement, à l'Assemblée nationale. Il y a deux lois qui me viennent à l'esprit et qui ne sont pas très glorieuses pour les gens d'en face: la loi no 70 et la loi no 105. Le sens de ces lois, c'est que le gouvernement renie sa signature et n'est plus capable de respecter ce à quoi il s'était engagé. Dans le moment, on nous arrive avec un projet de loi dont une bonne partie porte sur un sujet qui ne devrait pas faire l'objet de discussions de la même nature que celles qui doivent s'engager sur la réforme proprement dite de l'Assemblée nationale, c'est-à-dire les salaires et les régimes de retraite. Actuellement, le gouvernement est en train de dire: Voici, il faut réformer les régimes de retraite, il faut ajuster les salaires et il faut faire cela parce que cela coûte trop cher, etc.

La similitude que j'y vois avec les lois nos 70 et 105, c'est que, dans ces lois, le gouvernement avait établi un certain nombre de règles qui étaient connues de tous. Le gouvernement a décidé de ne pas respecter ces règles-là pour des raisons qu'il a tenté de nous expliquer et que la population n'est pas prête à accepter. Maintenant, M. le Président, les députés qui siègent en cette Chambre l'ont fait à certaines conditions qui étaient connues. Il y a eu ce que j'appellerais une espèce de contrat tacite qui s'est établi entre ceux qui ont posé leur candidature pour devenir députés, pour siéger à cette Assemblée nationale. On s'est entendu qu'éventuellement, si on était élu, on gagnerait tel salaire et on aurait droit à telle pension. Ce n'était pas des conditions fondamentales pour les candidatures qui ont été soumises pour siéger à l'Assemblée

nationale, mais c'étaient des conditions qui étaient connues, qui étaient acceptées et qui, fondamentalement, puisqu'on se portait candidat, faisaient l'affaire de tout le monde.

M. le Président, ne doit-on pas se poser la question, à savoir s'il est essentiel de changer ces conditions en cours de route? Est-ce qu'il est normal de se retrouver dans une situation, alors que les règles étaient connues et acceptées de tous, où on dit: Maintenant, ce n'est plus cela; vous ne serez plus payés le même salaire; cela ne se passera pas comme vous pensez que cela devait se passer, et vous n'aurez plus droit à la même pension? Ce n'est pas que je veuille défendre les salaires ou les pensions, M. le Président. C'est simplement le procédé que je désire porter à votre attention, procédé qui a une similitude avec ce qu'on nous a imposé avec les lois 105 et 70.

Cela doit être un sujet d'inquiétude, parce que, si on se met à faire cela, vous rendez-vous compte de l'incertitude qui va s'établir? On ne saura jamais à quoi s'en tenir. On va penser que les règles, dans le domaine des négociations collectives, dans le domaine de la rémunération de la fonction publique et parapublique, sont de telle nature. Tout le monde va s'imaginer qu'on peut se fier là-dessus. Or, les lois nos 70 et 105 sont là pour prouver qu'il n'en est absolument rien. Les députés ont été élus sous certaines conditions, qu'ils ont acceptées. Ces conditions n'ont pas été déterminantes, comme je le disais, bien sûr que non, dans la candidature qu'ils ont posée pour occuper un siège ici, à l'Assemblée nationale, mais c'étaient des conditions connues et il y avait une espèce d'entente tacite: si la population décidait de choisir tel candidat comme son représentant à l'Assemblée nationale, ce sont ces conditions qui s'appliqueraient. Or, on est en train de chambarder tout cela et je trouve cela inadmissible.

Peut-être qu'un des avantages qu'on a quand il n'y a pas longtemps qu'on siège à l'Assemblée nationale, c'est de pouvoir un peu, temporairement - je ne sais pas si cela durera - se scandaliser de ce genre de choses, de protester et de dire: II me semble que ça ne devrait pas fonctionner comme ça. De le dire sincèrement et du plus profond de son coeur parce qu'on le croit. On est encore sous l'illusion que des engagements doivent être respectés. Facta sunt observanda, comme disaient les Romains. On fait des contrats, qu'ils soient tacites ou qu'ils soient explicites, de façon qu'ils soient respectés. S'ils ne le sont pas, à quoi sert d'en faire?

En ce qui concerne la réforme elle-même de l'Assemblée nationale, il faut porter à l'attention de la population que ce qu'on nous propose actuellement, c'est de permettre au gouvernement de faire indirectement ce qu'il ne pourra pas faire directement d'après le projet de loi. Le gouvernement péquiste s'apprête à obtenir de l'Assemblée nationale la permission de nommer 27 adjoints parlementaires. Il y en a 12 actuellement et on veut les faire passer à 27, avec tous les autres postes à la portée du premier ministre pour ses députés. On se retrouvera dans une situation où on aura 27 ministres, 27 adjoints parlementaires, 7 présidents de commissions, 1 président de l'Assemblée, 2 vice-présidents de l'Assemblée, 1 leader parlementaire adjoint, 1 whip en chef, 2 whips adjoints, pour un total de 68. Cela fait qu'il y aura des bonbons pour tout le monde! On pourra contenter tout le monde. À ce moment-là, le droit à la dissidence, que réclame avec raison le député de Deux-Montagnes, sera mis en danger pour une raison bien simple: Si tu es dissident, mon cher ami, tu en as le droit, mais tu en paieras le prix; on t'ôtera ta "job"' d'adjoint parlementaire, on t'ôtera ta petite fiole de whip adjoint, on va te punir. Donc, on va garder tout le monde dans le rang.

Il y a deux objectifs là-dedans: celui de récompenser les bons petits garçons, les moutons, les robots - est-ce cela, la prime à la compétence? C'est ce qu'on s'apprête à donner - et celui de punir les méchants garçons ou les mauvaises filles qui ont l'audace de lever la tête et de dire qu'ils ne sont pas d'accord avec messieurs les ministres, messieurs du cabinet. On ne peut pas, nous de l'Opposition, être d'accord avec cela.

Je pourrais citer le député de Sauvé, le vice-premier ministre et ministre des Affaires intergouvernementales. Ces citations sont incroyables. Il s'élevait avec virulence, avec force contre tout ajustement au salaire des députés. On ne demande pas d'augmentation de salaires, on demande un gel. Que demande l'Opposition? Gelons les salaires. Comment peut-on ne pas être d'accord avec cela? On n'est pas dans une situation économique, on n'est pas dans une conjoncture qui permette aux députés de s'accorder une augmentation de salaires. On ne peut pas se permettre cela.

Ce n'est pas tellement une question de coût. On pourra nous faire de grandes démonstrations, la pension d'un bord, le salaire de l'autre, etc. Un dans l'autre, finalement, le gouvernement y gagne. Ce n'est pas cela, l'important. On a l'obligation ici, à l'Assemblée nationale, de donner l'exemple. Où est l'exemple quand on diminue de 20% les salaires des employés de la fonction publique et parapublique? Il n'y a que quelques jours de cela, ce n'est pas de l'histoire ancienne. C'est récent. Où est l'exemple quand nous autres, les députés, on est amenés par la majorité ministérielle à

considérer des augmentations de salaires? Est-ce que c'est normal? C'est inacceptable, c'est bien certain, à sa face même. D'en parler, c'est indécent. Ce n'est pas acceptable. (12 heures)

Ce qui n'est pas acceptable, non plus, c'est le tripotage des régimes de retraite que nous propose le gouvernement. Il faut que la population sache - j'ai fait quelques petites analyses - qu'avec le régime de retraite que nous propose le gouvernement dans le projet de loi no 90 il y aura, au 1er janvier 1983, 55 députés péquistes sur 75 qui auront droit à une pension de divers montants. C'est cela la situation, M. le Président. Du côté du Parti libéral, chez nous, le proportion sera de 15 sur 42.

Si on veut changer les règles des pensions, elles doivent être changées de façon que tout le monde soit sur le même pied. Comment faire cela? Le seul moyen de faire cela, c'est que la Loi sur le régime de retraite, si on veut rétablir l'équilibre, s'applique au 12 avril 1981, soit une journée avant l'élection du 13 avril. À ce moment, quelle est la différence? Vous allez comprendre pourquoi cette loi, dans les intentions du gouvernement, s'appliquerait simplement le 1er janvier 1983. La différence, si elle s'appliquait le 12 avril 1981, c'est qu'il y aurait 45 des 55 députés péquistes qui auraient droit à leur pension s'ils la prenaient le 1er janvier 1983; il y en aurait 45 sur ceux-là qui n'y auraient pas droit et qui n'y avaient pas droit le 12 avril.

La preuve que tout cela a été pensé, que tout cela a été calculé, c'est que j'ai ici en main un document, intitulé Document présenté à l'attention du cabinet du premier ministre, Québec, le 25 mai 1981, quelques jours à peine après la réélection du gouvernement péquiste. Quelques jours à peine après sa réélection, le gouvernement péquiste s'intéressait, s'inquiétait du sort qui serait apporté aux pensions. C'était une préoccupation. On donnait, pour chacun des députés, le 25 mai 1981, ce que serait leur pension au 15 novembre 1981, quelques mois après. À ce moment, plusieurs d'entre eux, les 55 dont je vous parle ici, auraient droit à leur pension. C'est du maquignonnage, c'est de la finasserie et de l'abus de pouvoir. Ce n'est pas parce qu'on dispose d'une majorité qu'on peut adopter des lois sur mesure. On n'est pas ici à l'Assemblée nationale pour se tailler des vêtements à notre mesure, parce que cela nous convient, parce qu'on a été au pouvoir pendant 60, 61 mois à partir de telle date. Ce n'est pas comme cela qu'on fait des lois. La première caractéristique des lois, c'est qu'elles doivent être générales, qu'elles ne doivent pas être faites sur mesure. On ne doit pas faire cela pour des conditions particulières.

De quoi s'aperçoit-on ici? C'est qu'on fait une loi pour qu'on puisse, pour un bon nombre de députés péquistes, 55, avoir droit à une pension à partir de telle date, quand cela fera six ans qu'on aura été élu, donc, au 15 novembre 1981. Cela n'est pas improvisé. Dès le 25 mai 1981, on y pensait. On préparait un document de plusieurs pages avec tous les noms des députés.

C'est là que nous autres, on a le devoir de protester contre cela. Pour connaître l'importance des pensions, il ne faut pas se boucher les yeux. Regardons, dernièrement, l'espèce d'hécatombe de démissions qui est arrivée au gouvernement. Je pense au député de Charlesbourg qui a démissionné après avoir acquis sa pension. C'est son plein droit. Il a le droit de profiter de cela. Je ne lui fais pas de reproches, sauf que les faits sont là. Le député de Saint-Jacques. Le député de Saguenay-Lac-Saint-Jean. Je parle de la personne que j'ai remplacée dans Louis-Hébert, M. Claude Morin.

Toutes ces choses doivent nous amener à réfléchir. On ne peut pas faire preuve d'angélisme et dire: Le gouvernement veut, tout simplement, la réforme des institutions parlementaires. Le gouvernement, s'il est sérieux dans sa proposition doit scinder, doit diviser en deux le projet de loi no 90: une partie qui nous permettra de nous pencher avec sérieux - pour le peu de temps qu'il nous reste et c'est cela que je regrette profondément - sur les véritables réformes du système parlementaire proprement dit, c'est-à-dire l'utilisation des ressources que nous sommes, nous, les députés, aussi bien du côté péquiste que du côté de l'Opposition. Je suppose qu'on a des choses à faire, des choses à dire et qu'on peut nous utiliser à meilleur escient. Regardons cela à tête reposée, mais ne mélangeons pas tout, par exemple. Ne mélangeons pas les oranges et les pommes. Ne disons pas: II faut en même temps discuter du salaire, de la rémunération, du fonds de retraite et de toutes ces choses, parce que, à tort ou à raison, cela donne un drôle de goût à tout le projet de loi. C'est une loi trop importante pour qu'elle ait un goût dont on n'est pas certain. Il faut qu'on puisse étudier d'une façon séparée la réforme parlementaire. C'est une chose. Il n'y a rien qui nous empêche de regarder cela en profondeur et de faire, éventuellement, des suggestions constructives au gouvernement, parce que nous sommes tous intéressés de faire en sorte que l'Assemblée nationale remplisse son rôle. Mais, dans un deuxième temps, discutons des salaires que nous méritons, des modalités selon lesquelles ces salaires seront calculés, des modalités selon lesquelles nous pourrons accumuler nos fonds de retraite et éventuellement y avoir droit. C'est parfait. Mais ne mélangeons pas les deux. Je pense que leader parlementaire du gouvernement a fait des ouvertures tout à l'heure qui nous

permettent d'espérer cela. Nous le souhaitons vivement. Personnellement, je le souhaite vivement et j'assure le gouvernement qu'il pourra compter sur mon entière collaboration pour participer à une étude de ce genre.

Cependant, je ne pourrai pas me prêter à un exercice piégé comme celui qui nous est présenté par le projet de loi 90. Il faut que ces choses se fassent séparément. Je pense que c'est facile à expliquer et à comprendre. Il n'y a pas de raison pour ne pas le faire. J'invite le gouvernement à regarder cela avec sérieux de façon que la population, l'Assemblée nationale, tous les membres de l'Assemblée nationale, surtout la population, soient assurés que ce qui s'est fait dans ce projet de loi l'a été dans le but certain d'assurer à l'Assemblée nationale son rôle primordial, c'est-à-dire la protection des intérêts des citoyens, l'utilisation maximale de tous et chacun d'entre nous et, dans un deuxième temps, de voir comment on peut s'organiser pour nous rémunérer d'une façon adéquate, sans abus et en tenant compte de la capacité de payer des citoyens. Dans le moment, la capacité des citoyens nous amène, comme je le disais, à proposer un gel des salaires des députés jusqu'au 1er janvier 1984 ou jusqu'au 31 décembre 1983, à enlever la clause d'indexation du salaire des députés et à réévaluer à l'automne qui vient toute cette question de la rémunération. Il me semble que cette proposition a du bon sens. C'est une proposition qui peut être comprise par la population et qui, surtout, colle à la réalité et permet à la population... parce que nous avons un problème de crédibilité. Ce n'est pas drôle quand on voit les sondages publics qui démontrent que la population, à 17%, 18% ou 19%, accorde une crédibilité aux politiciens. Pourquoi est-ce ainsi, M. le Président? C'est à cause des affaires qui se passent ici. C'est pour cette raison. Si, en même temps qu'on coupe les salaires de 20%, nous, les politiciens, on arrive et on se vote des augmentations, ne nous demandons pas pourquoi on perd notre crédibilité. Il faut réagir. Je fais appel au gouvernement pour qu'il ne continue pas de se faire tort en tant que politicien, parce que ces gens-là font aussi de la politique, et à nous aussi. Essayons de préserver le peu de crédibilité qu'il nous reste. Arrêtons de dire blanc et de faire noir. C'est ainsi que je vois les choses. C'est ainsi que la population les voit et c'est ainsi que la population s'adresse à nous. Il y a encore moyen de réparer, parce qu'il n'y a rien d'irrémédiable de fait. Je voudrais que cela se fasse et que les intentions du gouvernement soient connues le plus tôt possible. (12 h 10)

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Dubuc.

M. Hubert Desbiens

M. Desbiens: Merci, M. le Président. Le pouvoir n'existe pas, il ne fait ce qu'il veut que parce qu'une multitude de sous-hommes lâches et soumis le servent et lui laissent le champ libre. Le projet de loi no 90, M. le Président, me rappelle l'électrochoc de Raymond Lévesque. Encore aujourd'hui, les simples députés, les députés d'arrière-ban, comme on nous désigne en régime parlementaire britannique, sont très souvent, trop souvent mis dans le coup à peine plus tôt que les journalistes, quand ce n'est pas après eux. Parmi les ministériels, il y a, aujourd'hui comme hier, deux classes de députés: les ministres et les autres. Pourtant, nous sommes ici 120 hommes et femmes du Québec choisis par leurs concitoyens et concitoyennes pour transformer en réalités leurs volontés, leurs aspirations, pour répondre à leur demande de faire de notre société québécoise une société où il fait bon vivre. Ici même, en cette enceinte, nous représentons les 6 500 000 Québécois et Québécoises. Aucun des 120 députés ici présents n'est plus député qu'un autre. Je dis bien 120 et non pas 122, car il s'en trouve deux, comme vous le savez, dont les électeurs savaient dès le 13 avril 1981, en les choisissant, qu'ils deviendraient plus que de simples députés, soit le député de Taillon qui est devenu premier ministre et le député d'Argenteuil, à l'époque, chef de l'Opposition. Le premier ministre, parmi les députés de son parti, en a choisi quelques-uns pour administrer un secteur particulier de l'activité gouvernementale. C'est dans son ministère que chacun de ces appelés joue un rôle différent. Quand il est ici à l'Assemblée nationale, il redevient notre égal, un peu plus égal, bien sûr, mais notre égal.

Chacun d'entre nous a entendu ou exprimé lui-même des remarques - j'en ai fait moi-même aussi - sur les grands dossiers de l'heure. On a dit, par exemple: La question constitutionnelle relève des stratégies gouvernementales. Le Parlement sert tout simplement de chambre d'enregistrement des votes; des arrêtés ministériels et la législation déléguée nous enlèvent l'essentiel de nos prérogatives. On cuisine les lois à une allure essoufflante. L'Assemblée nationale sert tout simplement de façade démocratique. Autant de remarques que nous avons entendues ou que nous avons exprimées nous-mêmes. Elles ne viennent pas uniquement des députés ministériels. Le député de Louis-Hébert parlait, justement, tantôt de cette allure essoufflante avec laquelle nous votons des lois en fin de session. Contrairement à ce qu'il a dit, je ne crois pas que ce soit un piège du PQ, mais c'est plutôt un piège, justement, du système parlementaire tel que nous le vivons.

La grande majorité des membres de cette Assemblée nationale et de tous les partis politiques a manifesté que cette Assemblée nationale ne joue pas un rôle assez important dans l'orientation de la société québécoise. Je citerai des déclarations - ce n'est pas d'aujourd'hui qu'on en parle - comme celle-ci, par exemple: "À cause du contrôle étroit des cabinets de ministres sur les Assemblées législatives où ils sont majoritaires, notre régime parlementaire devient de plus en plus hypocrite, car le Parlement, qui devrait être le chien de garde du gouvernement, est sous la tutelle de ce dernier". C'est une déclaration de notre premier ministre actuel. En voici une autre qu'il nous rappelait - vous vous en souvenez sans doute - peu après l'élection, le 26 novembre, lorsqu'il a présenté son Conseil des ministres: "Nous sommes d'abord et avant tout de simples députés. La première tâche de tous sera donc d'accomplir au maximum leurs fonctions de députés et de participer, avec tous nos autres collègues, à une réforme en profondeur de la vie parlementaire. Cela fait longtemps qu'on en parle, disait-il. " Je pourrais reprendre, comme cela, de nombreuses autres citations de nombreux autres députés ou du premier ministre qui sont passés ici en cette Assemblée nationale, en cette enceinte. Si j'ai choisi quelques-unes des citations du premier ministre actuel, c'est que le projet de loi no 90 que nous présente aujourd'hui, avec une légitime fierté, le député de Vanier et leader du gouvernement répond justement aux propos et à la volonté maintes fois exprimée du chef du gouvernement actuel. Il est un des artisans aujourd'hui de cette réalité qu'on retrouve à l'intérieur du projet de loi no 90. Je ne pourrais pas non plus, au passage, m'empêcher de féliciter quelqu'un, un de nos collègues, qui y a travaillé d'une façon toute particulière, à la demande du premier ministre d'ailleurs, qui a produit un travail exceptionnel, qui a donné la poussée finale, comme le mentionnait tantôt le député de Deux-Montagnes, qui a donné un élan irrésistible à la réforme qu'on nous propose dans le projet de loi no 90. Je me permets de le féliciter parce que sa participation a été déterminante: II s'agit du député de Trois-Rivières.

M. le Président, le projet de loi no 90, c'est un grand pas en avant dans l'établissement d'un meilleur équilibre entre le pouvoir législatif, l'ensemble des députés élus par le peuple, les représentants du peuple, la meilleure voix, je crois, celle que, en tant que députés, on se targue, et avec raison très souvent, d'avoir, de savoir ce qui se passe chez nous et d'être capable d'interpréter les désirs et les volontés de la population beaucoup mieux que ne peuvent le faire certains fonctionnaires et technocrates dans leur tour d'ivoire... Je disais que ce projet de loi permettra d'établir un meilleur équilibre entre le pouvoir législatif et le pouvoir exécutif, celui des ministres. Je mentionne les fonctionnaires et les technocrates, non pas pour leur faire des reproches - chacun est essentiel dans son rôle - mais il faut que chacun joue son rôle et joue uniquement son rôle.

Quant à moi, je qualifie cette réforme parlementaire d'une véritable victoire de la démocratie et, par conséquent, une victoire du peuple québécois. Je ne prétends pas par là qu'on aura atteint la perfection avec le projet de loi no 90, avec tous les importants amendements qui sont apportés à la Loi sur l'Assemblée nationale. Il y manque encore au moins une pièce très importante que le travail en commission de quelques-uns de nos collègues de deux côtés de l'Assemblée nationale va bientôt sans doute ajouter à cette réforme d'ici quelques semaines. Je veux parler évidemment de la législation déléguée, la réglementation. C'est une partie fondamentale, capitale de cette réforme qui doit se compléter, qui doit se poursuivre. C'est celle aussi qui touche le plus directement les citoyens et les citoyennes.

M. le Président, s'il fallait que les règlements qu'on retrouve dans les 11 000 pages, les règlements refondus du Québec -sur mon bureau, ils ont un pied et demi de haut, en petits caractères serrés - si on ajoutait à cela les 50 000 pages de lois qui régissent les Québécois, s'il faut ajouter à cela, parce que les gouvernements aiment bien gouverner, les lois et les règlements qui assujettissent aussi les Québécois et qui relèvent du gouvernement fédéral, si vous ajoutez encore par-dessus tout cela les règlements municipaux, c'est sûrement que les Québécois et les Québécoises sont les gens les plus gouvernés, les mieux réglementés, les plus compartimentés, les plus enrégimentés qu'on peut retrouver n'importe où au monde. C'est presque du masochisme. Est-ce par crainte de faire des erreurs qu'on se donne des réglementations aussi étendues, aussi vastes, aussi complètes? Il y a tellement de règlements auxquels les Québécois et les Québécoises doivent se soumettre. Il y a des règlements qui remontent à mille neuf cent tranquille. S'il fallait que tout cela soit appliqué à la lettre demain matin, je suis convaincu que ce serait la paralysie totale du Québec.

J'aurais aimé avoir le temps de fouiller un peu là-dedans. Je suis à peu près convaincu qu'on en trouverait des vertes et des pas mûres.

M. le Président, le projet de loi no 90 consacre la suprématie du Parlement du Québec, comme le dit d'ailleurs l'objet du projet de loi, comme on le dit dans les notes explicatives. Cela précise les grands principes qui gouvernent l'indépendance de l'Assemblée

nationale, entre autres, par la création -c'est très important - du Bureau de l'Assemblée nationale qui est composé non plus de ministres, mais de députés représentant les principaux partis sous votre direction, M. le Président. (12 h 20)

II est d'autres aspects fondamentaux de ce projet de loi que je ne ferai que mentionner, laissant à d'autres collègues le soin de les commenter. Le premier concerne le contrôle des finances publiques par la mise sur pied, particulièrement, de la commission du Vérificateur général. On sait que cela est réclamé par le vérificateur lui-même et des députés aussi depuis longtemps en cette Assemblée. La commission des finances publiques, la commission des engagements financiers continuera son travail et il y aura une nouvelle formule de débat sur le budget, plus pratique et plus réaliste, je crois.

Un autre aspect que je veux souligner rapidement, également, d'ailleurs à la suite de demandes maintes fois répétées et tout à fait justifiées quant à moi, si on considère l'ampleur que prennent les régies et organismes gouvernementaux, c'est la création, par la modification de la Loi sur la Législature que nous propose le projet de loi no 90, de la commission des organismes autonomes.

Après avoir entendu les porte-parole de l'Opposition s'exprimer hier et ce matin sur cette partie du projet de loi no 90, j'ai cru comprendre qu'ils sont d'accord presque en totalité avec ce qui y est proposé. Nous n'irons pas loin avec cette réforme si elle ne s'accompagne pas d'un changement de mentalité. Ce ne sont pas les structures qui font les hommes; toutefois, ces structures peuvent permettre des modifications. La nouvelle Loi sur l'Assemblée nationale du Québec constitue certainement au moins une invitation, même une incitation, je crois, pour chacun de nous, à modifier certains comportements qui relèvent parfois davantage de vulgaires bagarres de ruelles que d'un travail positif et profitable à l'ensemble du Québec. Je crois que cette loi et cette réforme nous donnent l'occasion de commencer à faire des débats plus raisonnables que résonnants. J'entends m'y mettre immédiatement, M. le Président.

L'Opposition a relevé hier un article du projet de loi - et il y a quelques instants encore c'était le député de Louis-Hébert -sur la nomination des adjoints parlementaires. On essaie de démontrer que, finalement, ce que les députés ministériels cherchent à faire, c'est de se donner des augmentations par la bande en créant des postes rémunérateurs supplémentaires à leurs fonctions.

Pendant que l'Opposition présente ainsi cet article sur la nomination des adjoints parlementaires, je me faisais moi aussi une petite liste - pendant que l'Opposition nous prêtait des intentions - des intentions que j'aurais pu prêter sur le même sujet à nos amis de l'Opposition. Je viens de dire qu'on essaiera de se mettre immédiatement dans l'esprit de la nouvelle réforme, être raisonnables. Je ne me laisserai donc pas aller à vous dresser cette liste. Je ne le ferai pas, je me retiendrai.

Je pourrais au moins souligner que si cet article apparaît, aux yeux des membres de l'Opposition, comme un danger, je pense qu'il y aurait lieu, en commission parlementaire, lorsque nous étudierons ce projet de loi article par article, de proposer peut-être des modifications qui viendraient en préciser la signification.

Il y a un aspect du projet de loi no 90 qui traite d'un sujet, comme le disait ironiquement hier soir le leader de l'Opposition, d'une question plus vulgaire, le salaire et le régime de retraite des députés. Je dirai tout simplement à ce sujet que je n'ai jamais ressenti et que je ne ressens pas aujourd'hui, encore moins, c'est sûr, je crois, de gêne à me présenter, à discuter de mon salaire et de mon régime de retraite avec l'ensemble de mes électeurs. Une fois qu'on s'est assis pour discuter calmement de cette question avec eux, qu'on a expliqué - ils le savent, ils en sont conscients - le nombre d'heures qu'un député qui veut s'acquitter entièrement de sa tâche est obligé de consacrer à son travail de député, il est relativement facile de faire la preuve devant eux en comparant une semaine normale de travail qu'on retrouve un peu partout, 35 ou 40 heures. Un député, finalement, au nombre d'heures par semaine qu'il travaille, gagne un peu plus que le salaire minimum, 5 $ ou 6 $ l'heure.

Je leur fais savoir également que mon salaire a été gelé en 1978, 0% d'augmentation, et qu'il a été augmenté de 6% en 1979 et également de 6% en 1980, en 1981 et en 1982. Ce qui fait que, de 1978 à aujourd'hui, le salaire du député a progressé de 67% alors que, durant cette même période, l'inflation a augmenté de 107%. Dans le projet de loi, je m'engage aussi à ce que mon salaire soit gelé pour trois autres mois, 0%, en 1983, et qu'il soit augmenté de 6% à compter d'avril, pour les neuf prochains mois, ce qui fera, en 1983, une augmentation de 4, 8%, alors que dans les décrets on parle d'une hausse de 5, 8%. Je n'ai pas de gêne, bien sûr. Je me trouve même un peu naïf pour ne pas dire niaiseux, M. le Président.

En ce qui concerne le régime de retraite, M. le Président, évidemment, il va permettre, dès 1983, comme l'a très bien souligné le leader parlementaire du gouvernement hier, une baisse des dépenses de l'État de 2 500 000 $. Je mentionne

également que je m'attaque à mes propres droits acquis en votant pour ce régime de retraite. Encore une fois, je ne suis pas du tout gêné, comme le mentionnait un député de l'Opposition hier. Je ne me sens aucunement gêné.

Il y a un dernier point sur lequel je voudrais attirer l'attention. L'Opposition demande de scinder le projet de loi en deux parties. Personnellement, je ne suis pas d'accord avec cette suggestion. Je me plierai à ce qui sera décidé, mais je ne vois pas pourquoi on scinderait ce projet de loi en deux parties. La Loi sur l'Assemblée nationale du Québec, c'est une seule loi et elle comprend tous ces divers chapitres. Alors, il s'agit, je pense, pour l'Opposition, comme pour nous, de choisir. Nous choisirons de voter pour la loi ou de voter contre la loi. Mais il s'agit pour nous de déterminer ce qui est le plus important dans notre esprit. Est-ce que c'est le contrôle de la législation déléguée, au soulagement de la population, dans certains cas, ou si c'est le salaire et la pension du député? Est-ce que c'est un contrôle efficace des dépenses gouvernementales qui est plus important ou si c'est le salaire et la pension du député? Est-ce que c'est le contrôle des dépenses et des activités des sociétés d'État avec l'argent du peuple qui est important ou si c'est le salaire et la pension du député? Est-ce que c'est le contrôle sévère des finances publiques qui est important ou si c'est le salaire et la pension du député? Est-ce que c'est une participation plus intelligente à la confection de nos lois qui est importante ou si c'est le salaire et la pension d'un député?

L'Opposition choisira ce qu'elle juge le plus important: voter pour ou voter contre le projet de loi no 90, mais, quant à moi, voter globalement. Ce qui donne de l'importance et de la valeur à notre salaire et à notre régime de retraite, je pense que c'est surtout la façon, comme l'a mentionné le député de Trois-Rivières hier, dont nous réagirons à la première partie du projet de loi no 90, cette partie dont il disait justement qu'elle n'a pas de prix si on la remplit bien.

Enfin, M. le Président, je crois que le débat s'est maintenu, jusqu'à maintenant, à un niveau raisonnable et je crois que l'Opposition mérite presque des félicitations. Je comprends la tentation qui doit les assaillir aux souvenirs de 1974. J'ai confiance aussi qu'ils ne se lanceront pas - que le débat se poursuivra sur ce ton - dans un style de débat qu'ils qualifiaient eux-mêmes, hier - ce sont les paroles du leader de l'Opposition - de proprement répugnant et qu'ils voteront avec nous pour le projet de loi no 90, scindé ou non. Merci, M. le Président. (12 h 30)

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Sainte-Anne.

M. Maximilien Polak

M. Polak: Merci, M. le Président. On décrit le projet de loi no 90 comme le projet de la grande réforme parlementaire. On aurait dû aussi le titrer: projet de loi de création de revenus additionnels pour les députés péquistes. On en parle dans plusieurs sections. Je veux analyser un peu cette fameuse réforme parlementaire, ce qu'on nous propose au point de vue des changements de principe. Dans ce projet de loi, il y a un principe qui dit que, désormais, le quorum de l'Assemblée nationale sera de 10%; comme nous avons 122 députés, 12 députés formeront le quorum, y inclus le président. Donc, le président à son siège et 11 députés pour toute l'Assemblée; c'est ça, le quorum. Je trouve que ce n'est pas une réforme parlementaire, c'est scandaleux. On a maintenant un quorum de 30 députés et je me demande même parfois si c'est assez élevé; il ne faut pas oublier que notre travail doit se faire ici, à l'Assemblée même, devant la population. En abaissant le quorum, on peut voir partout dans ce projet de loi qu'on cherche un tout autre modèle. Je vais vous en faire la démonstration. On commence déjà à réduire le quorum à 12 députés.

D'autres changements ne vont pas du tout dans le sens d'améliorer le système, mais bien pour le détériorer. On a une suggestion à faire: qu'une commission ou même une sous-commission de l'Assemblée puisse siéger à tout endroit au Québec conformément au règlement de l'Assemblée. Mais on explique quoi? Rien du tout. Il devra s'agir d'un cas d'exception, selon une règle très stricte. On a très souvent ici deux ou trois commissions qui siègent en même temps. Plusieurs députés sont membres de plusieurs commissions en même temps; qu'est-ce qui arrive si on doit siéger à une commission ici et qu'en même temps il y a une commission qui se tient ailleurs? On aurait pu au moins stipuler que quand l'Assemblée siège il n'y aura jamais une commission parlementaire en dehors de Québec. On aurait peut-être pu dire aussi: Si on veut siéger ailleurs, il faut le faire dans des régions assez lointaines, où les gens ont de la difficulté à venir ici pour nous écouter. Aucune stipulation, aucun détail. Je me demande si c'est un petit truc péquiste pour faire un show. Si, à un moment donné, dans une région ça ne va pas bien, on va former une commission parlementaire, on y va pour le grand show! Le ministre arrive avec son adjoint, avec son personnel, avec tout le monde et on va, devant la population, faire le grand show péquiste. C'est de cela que j'ai peur. Je n'ai aucunement peur d'informer le public, la

population, je n'ai pas peur d'aller en région, mais pour le bénéfice de notre institution et non pas pour le bénéfice d'un parti politique péquiste.

On passe maintenant à un autre principe très dangereux, le fameux principe des adjoints parlementaires qu'on veut maintenant augmenter de 12 à 27. La situation d'un adjoint parlementaire aujourd'hui n'est pas tellement différente de 1974 quand les péquistes siégeaient de ce côté-ci, les six qui étaient dans l'Opposition, qui ont critiqué, qui ont attaqué, qui ont appelé ces adjoints parlementaires: les ouvreurs de portes et les porteurs de valises. C'était un prix de consolation pour les députés qui n'étaient pas nommés ministres. Rien n'est changé. Il y a même des adjoints parlementaires que je ne connais pas. On ne sait même pas de quel ministre ils sont adjoints parlementaires. J'en connais quelques-uns qui font leur tâche sérieusement; il y en a d'autres que je n'ai jamais vus, que je ne connais même pas, mais ils reçoivent 7000 $ de plus par année. On veut maintenant les augmenter pour les faire passer de 12 à 27. On dit ici, dans le projet de loi, qu'un ministre peut avoir plus d'un adjoint parlementaire. Il peut y avoir un ministre bien important, qui pèse beaucoup sur le plan politique, qui peut dire: Moi, j'en ai besoin de deux. Je ne connais rien dans le système, tout ce que je sais, c'est qu'on a fait le calcul et, si on respecte ce qui est édicté dans ce projet de loi, on va trouver des jobs additionnels pour 68 députés péquistes sur 74. Il n'y en aura que 6 qui ne sauront pas où aller, tous les autres auront des augmentations de salaire de 2000 $ à 7000 $ de plus par année, en sus de leur salaire de base.

Je me rappelle très bien, la semaine dernière, le projet de loi no 105. On a été ici jusqu'à samedi soir, 22 heures, quand a eu lieu le vote final, et j'ai été ici samedi, vendredi, jeudi, j'ai écouté les discours des péquistes qui ont parlé au monde syndical. Quand ils ont parlé, il y en avait qui avaient des larmes aux yeux. Il y en avait dont la voix était brisée et leurs discours étaient comme suit: Chers citoyens, chers syndicalistes, chers Québécois et Québécoises, je suis moi-même un ancien syndicaliste. Je comprends votre angoisse. Je souffre avec vous. Je ne veux pas le faire, mais, savez-vous, on n'a pas le choix. Cette pièce de théâtre était fantastique. Là, ils se sont expliqués. Ils ont dit: Nous sommes issus de votre monde. Nous sommes avec vous. J'étais avec vous sur la barricade, maintenant, je suis obligé - et là la voix s'arrêtait, parce qu'elle craquait presque de tristesse - de vous imposer ce projet de loi no 105. Ce n'est pas possible.

Aujourd'hui, deux jours plus tard, on vient ici pour dire: Voici, nous autres, on va se donner une augmentation de salaire. On va se donner l'indexation qu'on a enlevée aux autres. Au cas où cela ne serait pas adopté, on va augmenter le nombre d'adjoints parlementaires de 12 à 27, de sorte qu'il y aura quinze autres députés péquistes qui auront déjà, par le fait même, 7000 $ par année de plus. Savez-vous ce que cela veut dire, 7000 $ par année? Allez demander cela à mes assistés sociaux. J'ai eu l'exemple, la semaine dernière, d'un cas où on a réduit le coût des batteries, l'allocation pour batteries d'un assisté social de mon comté de Sainte-Anne de 3 $ par mois. On lui a dit: Vous, monsieur, coupez donc sur votre batterie, le soir, quand vous êtes dans votre lit. Comme cela, le lendemain, vous recommencez et la batterie durera plus longtemps. Pour 1 $ par mois de différence, savez-vous.

Là on se donne 7000 $ par année d'augmentation. C'est un scandale. J'ai dit à tous ceux qui ont parlé les larmes aux yeux, avec de grands gestes de compréhension du vrai syndicalisme, du monde de l'enseignement, du monde ouvrier, j'ai dit: Gênez-vous collectivement. Je me rappelle en 1974, quand les six péquistes étaient ici, les débats qui ont eu lieu exactement sur le même type de projet de loi et qu'on en a fait du taponnage, du bruitï Ils ont même retenu l'Assemblée, je pense, entre Noël et le jour de l'an. Je rappelle quelques petites citations. Malheureusement, je n'étais pas député à ce moment. Si j'avais été député, je parlerais là-dessus juste en prenant tout ce que vous avez dit en 1974 pour vous frotter le visage, parce que vous le méritez. Le chef de l'Opposition officielle du temps, qui est maintenant le ministre des Affaires intergouvernementales, et qui fait des voyages aux États-Unis, à Paris, à Londres, n'importe où, voici ce qu'il disait: Nous - il parlait des parlementaires - donnons le mauvais exemple à la population. On viendra ensuite dire aux Québécois, serrez-vous la ceinture. C'est lui qui avait dit cela.

C'est lui qui avait dit: À notre avis -c'est un péquiste qui parlait - l'augmentation que cette Chambre s'apprête à se voter est tout à fait déraisonnable par rapport au contexte économique dans lequel nous vivons. Imaginez-vous, c'était en 1974 et le contexte économique était très bon en comparaison avec aujourd'hui. Qu'est-ce qu'il a dit? "Peut-il exister un moment plus mal choisi...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Un instant, M. le député de Sainte-Anne. M. le leader.

M. Bertrand: Je voudrais simplement demander au député s'il me permet de lui poser une question en vertu de l'article 100.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Est-ce que vous permettez, M. le député?

M. Polak: Je me fie à votre jurisprudence. Vous n'êtes pas juriste, mais vous êtes très constant dans vos décisions et j'ai toujours compris cela de vous. Le député posera sa question à la fin de mon intervention, parce que ma population veut que je prenne mes 20 minutes.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Juste un instant, M. le député. Tout simplement, en vertu du règlement, le ministre et leader vous demande s'il peut vous poser une question. Vous pourrez lui répondre oui ou non et, si vous répondez oui, il s'agit de lui dire simplement: À la fin de mon intervention.

M. Polak: Ma réponse est toujours oui à une question. Pas de problème. Je vais revenir sur cette fameuse réforme parlementaire. J'ai cherché dans ce projet de loi un article qui dit, et cela aurait été une vraie réforme: On n'adoptera plus les projets de loi à la vapeur. Dans les deux dernières semaines de la session, on arrêtera de vous présenter un paquet de lois haut comme cela. Vous, MM. les députés, vous êtes censés être prêts à parler là-dessus. Si vous vouliez une vraie réforme, vous auriez dû dire: On va commencer notre session non pas le 9 novembre, mais deux ou trois mois avant. On va être ici. On va étudier chaque semaine deux ou trois projets de loi qu'on connaît d'avance et on va les étudier en détail. Cela aurait été intéressant. Là, on aurait pu dire: On participe à la vie parlementaire. Ce qui n'est pas le cas avec le petit jeu qui a eu lieu depuis que je suis ici. (12 h 40)

Dans les deux dernières semaines de la session, on présente tout en bloc. M. le Président, j'étais ici hier soir et j'ai parlé du projet de loi omnibus du ministre de la Justice. J'ai critiqué celui-ci parce qu'il n'était même pas ici. Après mon intervention, il m'a répondu personnellement en ces mots: Vous n'avez pas compris le jeu parlementaire. Vous n'auriez jamais dû dire cela, parce que c'est insultant. Vous n'êtes pas un bon parlementaire. Vous ne jouez pas au criquet. M. le Président, je refuse de jouer au criquet, que le ministre de la Justice considère comme un bon jeu. Je ne veux rien savoir de cela.

Je continue de dire ce que j'ai dit: Le fait d'avoir tout ce travail à faire dans les deux dernières semaines de la session, est une tâche impossible. Cela veut dire qu'on n'a pas le temps de se préparer; on n'a pas le temps d'étudier les projets de loi. Ce n'est certainement pas une réforme parlementaire qu'on suggère dans le projet de loi. On aurait dû dire: On va l'étudier tranquillement. Comment se fait-il, M. le Président, qu'on reçoive un agenda pour les travaux de la semaine? Depuis que je suis ici, j'ai vu au moins 90% des cas où l'agenda a été changé. On prépare deux ou trois projets de loi et ensuite, on revient à l'Assemblée le lundi ou le mardi et on se découvre qu'on commence avec un autre projet de loi. Pensez-vous que c'est une réforme parlementaire? Pas du tout.

J'ai regardé ce projet de loi et je ne trouve rien qui nous dit qu'on va échelonner cela sur une période plus longue, pour que la population puisse bénéficier d'un vrai travail sérieux, et non pas le petit jeu qui a eu lieu hier soir et qui a toujours lieu dans les deux dernières semaines. Vous vous rappelez, M. le Président, les 80 000 pages de documents sur le projet de loi 105? Ce n'est pas possible! Les gens ont ri de cela. Savez-vous qu'on était censé étudier cela, aller en commission plénière pendant cinq heures et donner ensuite nos commentaires? Pour qui nous prenez-vous? Je n'y comprends plus rien, M. le Président.

Je suis déçu de ce système et je suis déçu que ce soit le Parti québécois, lui qui, en 1974, quand il est venu ici pour la première fois, avait eu le courage de s'opposer à ce système, de l'attaquer, de demander des changements et des amendements. Quand il serait au pouvoir, ce serait différent. Que constate-t-on, M. le Président? On constate la faillite morale totale. Vous n'avez rien fait de positif à ce sujet. Le système est encore le même. En ce qui concerne les augmentations de salaire et la création d'emplois additionnels, c'est scandaleux et honteux. Vous êtes ici pour parler là-dessus, pour donner votre appui à un tel projet de loi avec de telles dispositions. Je ne peux pas le comprendre. Je me demande où est la sincérité.

M. le Président, le député qui a parlé avant moi - j'étais ici et je l'ai écouté - a dit que le premier ministre avait fait une belle déclaration et qu'il avait prononcé de belles paroles. Il a dit: "Le Parlement est le chien de garde du gouvernement". Je suis tout à fait d'accord avec cela. Je trouve que c'est un principe fantastique. Mais on ne le vit pas. On ne le vit pas sur le plan pratique. Vous le savez très bien. Nous ne sommes pas des chiens de garde du tout, parce que, hier soir, quand j'ai essayé d'agir comme chien de garde, on m'a critiqué en me disant: Vous n'avez pas le droit de faire cela. Vous n'avez pas joué le jeu. Et quand je leur dis: Vous autres, quand vous étiez dans l'Opposition? Ils me répondent: Ah! On a fait le... mais vous savez, les temps changent. Cela a été leur réponse. Je leur ai dit: Ce n'est pas croyable de vivre dans un tel système. Moi, au moins, M. le Président, je suis encore assez jeune au point de vue de l'expérience parlementaire pour croire qu'on peut faire de vrais changements, qu'on peut vraiment réformer le système

parlementaire de telle manière que tous les députés qui veulent travailler auront la possibilité de contribuer d'une manière positive à améliorer le projet de loi pour le bénéfice de toute la population, mais pas de la manière qu'on fonctionne maintenant.

Comme j'en ai parlé hier soir - et le leader du gouvernement est ici - j'aimerais lui demander: Combien de députés sont au courant du contenu du projet de loi sur lequel on vote? Soyons très honnêtes. Le projet de loi dont on a discuté hier soir, le fameux bill omnibus du ministre de la Justice, je suis convaincu qu'il y a 90% des députés qui ne savent même pas de quoi il s'agit. Tout de même, il y a un changement là-dedans d'apporté à 32 lois. Et on sera appelé à voter jeudi ou vendredi de cette semaine. S'il vous plaît, levez-vous parce que M. le ministre de la Justice veut avoir son projet de loi. Et tout le monde se lèvera et sera en faveur. Cela ne tient pas debout, ils ne savent même pas ce qui se trouve là-dedans. (12 h 45)

Là, on revient dans nos comtés, à l'été, et les gens nous posent des questions: Comment se fait-il qu'il y a des coquilles? Vous savez que c'est arrivé avec cette fameuse affaire de bouteilles de vin qu'on peut apporter dans les restaurants, cela est une coquille. J'ai trouvé hier soir, dans ce projet de loi omnibus, une coquille. Il n'y a pas de doute que le nouvel acquéreur d'un édifice doit maintenant payer la dette d'Hydro-Québec et du gaz qui est due par l'ancien propriétaire. Il n'aurait peut-être pas fallu le dire, mais cela se trouve dans le texte. C'est le danger du système actuel. On se moque de nous. Nous ne sommes pas du tout des chiens de garde. Même ce matin, le leader a fait de petites remarques quand il a dit: Bon, si l'Opposition donne sa coopération, peut-être qu'on pourrait faire telle et telle chose et scinder le projet de loi, oui, si vous êtes de bons petits gars; si vous jouez le jeu, on le fera. Je vous réponds, quant à moi: Je ne jouerai jamais votre jeu, jamais de la vie. J'ai cru vraiment, entre 1974 et 1976, que vous étiez d'opinion différente, vous vouliez effectuer un changement. Maintenant, vous êtes au pouvoir et il n'y a rien. Ce que vous faites, vous confirmez ce qui existait; vous faites exactement...

Au point de vue de l'augmentation des salaires, vous êtes pires parce que, le Parti libéral, dans le temps, n'a pas fait cette même affaire, pas du tout. Vous avez lutté jusqu'à la mort là-dessus, savez-vous? Et maintenant, vous venez nous présenter un projet de loi qui va beaucoup plus loin, avec la création de postes additionnels, ceux des adjoints parlementaires. Comme je l'ai dit, 68 sur 74 députés ministériels auraient "une belle petite job" variant de 1500 $ à 7000 $ de plus par année.

Savez-vous que cela me fait penser à Idi Amin, vous vous rappelez, dans un des pays d'Afrique. Il y a eu une révolution; il a pris le pouvoir, mais il y avait une petite bande de soldats autour de lui, 74, cela a commencé ainsi. Il a nommé capitaine chacun de ces gars qui était avec lui dans la barraque; quand il a pris le pouvoir, cela a marché vite. Il a pris un poste de radio et soudainement, le contrôle du pays. Les gars sont tout de suite nommés capitaines et les autres sont restés soldats éternellement. Cela me fait penser à cela. Savez-vous que cette promotion soudaine, c'est ce qu'on appelle simplement en anglais les "pay off", pour rester tranquilles et parce que vous êtes du bon bord de la clôture, je vous paie.

Comme le député l'a dit tout à l'heure - et c'est vrai - c'est qu'en même temps vous achetez le silence de ceux qui veulent parler parmi vous.

Une voix: C'est cela.

M. Polak: Cela est grave aussi. Si vous voulez avoir l'indépendance parlementaire, je vais vous donner une petite augmentation de 7000 $ ici et là, ce sera dur pour ce député de dire: Moi, je suis contre le gouvernement parce que je veux voter contre le projet de loi. On va lui enlever "sa petite job" et on va la donner à un des six qui restent. Il reste six chances. On va distribuer les jobs au fur et à mesure que quelqu'un va ouvrir la bouche.

M. le Président, je suis déçu, je suis déçu du système, je suis déçu de l'attitude du Parti québécois. Je n'ai jamais cru tellement en vos idéaux, parce que, sur le plan constitutionnel, je suis totalement en désaccord avec vous depuis que je suis ici au pays. Au moins, j'ai confiance en une sorte d'honnêteté morale politique quelque part. Je me disais: C'est un nouveau groupe, il y a un nouvel élan, ils vont faire quelque chose. Savez-vous ce que je vois? Vous êtes, comme le député de Maskinongé l'a dit - donc, je peux répéter les mots - une bande d'hypocrites. Je dis exactement la même chose, c'est ce que vous êtes. Merci.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Simplement pour répéter, comme il vous reste une minute à votre temps et que vous avez une question à poser, je donne la parole au leader du gouvernement pour poser une question.

M. le leader.

M. Bertrand: M. le Président, j'aurais deux questions à poser, très courtes, très simples. Je voudrais d'abord demander au député, qui a fait allusion au débat de 1974, relativement à la loi que le gouvernement Bourassa voulait faire adopter par

l'Assemblée nationale et qui a été adoptée effectivement en 1974, si le député sait quelle est l'augmentation de salaire qui a été consentie en 1974, pour la seule année 1974, par rapport à 1973. Est-ce que le député connaît le pourcentage d'augmentation?

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Sainte-Anne.

M. Polak: M. le Président, je ne connais rien là-dedans. Je ne connais que ce que j'ai lu dans les critiques. Je cite la critique, les chiffres ne m'intéressent pas.

M. Bertrand: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Ce n'est pas une période des questions. Le député ayant répondu à votre question, je dois donc passer à l'intervenant suivant.

M. le député de Taschereau et leader adjoint du gouvernement, c'est à vous la parole.

M. Guay: M. le Président, c'est la première fois que je vois une suspension de la séance qui est applaudie en cette Chambre. J'allais justement, étant donné qu'il est près de 13 heures, faire une proposition pour que nous suspendions nos débats, tout en remerciant mes collègues d'avoir bien voulu applaudir cette proposition.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion de suspension de nos travaux est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Adopté. Donc, nous reprenons nos travaux à 15 heures cet après-midi.

(Suspension de la séance à 12 h 51)

(Reprise de la séance à 15 h 08)

Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il vous plaîtl

Veuillez vous asseoir.

M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Je crois que c'est le député de Taschereau qui avait demandé l'ajournement du débat, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Reprise du débat sur la motion de deuxième lecture du projet de loi no 90 présenté par le ministre responsable de la réforme parlementaire, Loi sur l'Assemblée nationale du Québec. M. le député de Taschereau.

M. Lalonde: M. le Président, j'ai une demande de directive avant que...

Le Vice-Président (M. Rancourt): Demande de directive, M. le leader de l'Opposition.

M. Lalonde:... le député de Taschereau prenne la parole. À 15 h 08, cet après-midi, il y a une panne d'électricité dans toute la province. Si cette Assemblée peut siéger, c'est grâce à une génératrice spéciale qui nous permet d'avoir non pas la diffusion, mais l'enregistrement de nos débats pour les fins de leur diffusion télévisée plus tard, en différé, et pour les fins de leur transcription.

Nous avons donc convenu avec la présidence, il y a quelques minutes, de continuer nos travaux ici, mais il reste que le parlement commence à geler. La génératrice ne permet pas de chauffer. C'est une espèce de gel comme on aimerait bien l'imposer aux salaires des députés l'an prochain, mais il reste que notre personnel devient de plus en plus inconfortable. On nous dit que la panne serait réparée d'ici une heure ou deux. S'il fallait que cela se prolonge, nous demanderions peut-être, un peu plus tard, de suspendre nos travaux si nous n'avions plus de personnel à notre disposition.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Là-dessus, effectivement, nous avons eu une conférence des leaders avec le président de l'Assemblée nationale. Dans la mesure où la présidence, qui, dans le fond, je pense, doit prendre ce genre de décision, avisera qu'il y a des mesures à prendre pour qu'effectivement tout se déroule dans l'ordre à l'Assemblée nationale, incluant les conditions de travail du personnel de l'Assemblée nationale, évidemment, nous nous rendrons de bonne grâce à cette décision.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le whip de l'Opposition.

M. Pagé: Est-ce que le leader du gouvernement pourrait indiquer à cette Chambre et, par conséquent, aux journalistes, à la presse et au public, la raison de la panne d'électricité? On sait que plusieurs informations circulent et je crois que la population doit en être informée dans les plus brefs délais. Qu'est-ce qui est arrivé?

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement.

M. Bertrand: Pour être très franc avec le député de Portneuf, je n'en ai vraiment aucune idée. Je l'ai appris tout à l'heure et on m'a convoqué au bureau du président de

l'Assemblée nationale. J'y suis allé en vitesse pour apprendre qu'effectivement il y avait une panne, semble-t-il, à l'échelle du Québec, mais je n'en connais nullement la raison.

Une voix: C'est le retour de la grande noirceur au Québec.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Taschereau et leader adjoint du gouvernement.

M. Guay: Peut-être est-ce le premier ministre de Terre-Neuve qui a décidé de mettre ses menaces à exécution et de débrancher Churchill Falls. Il semble, toutefois, que ça ne soit pas le cas.

Des voix: C'est le fédéral! C'est la faute du fédéral!

M. Guay: Le leader de l'Opposition soupçonne que c'est le fédéral. Je tiens à le souligner pour le journal des Débats et pour l'histoire, parce que c'est rare que, de l'autre côté de la Chambre, on soupçonne le fédéral de quoi que ce soit d'inopportun.

M. Lalonde: Question de privilège, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de l'Opposition.

M. Lalonde: Je demanderais au député de Taschereau de me laisser mes soupçons à moi-même, je puis fort bien les exprimer. Dans ce cas-là, je pense que c'est tout à fait provincial.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Richard Guay

M. Guay: C'est avec grand plaisir que je vais laisser au leader parlementaire ses propres soupçons.

Voilà donc que nous sommes en train d'étudier le projet de loi no 90, loi fondamentale pour cette institution et pour cette société, s'il en est une, la Loi sur l'Assemblée nationale. Ce projet de loi contient plusieurs éléments. Je voudrais en aborder deux principalement, avec votre permission. Je voudrais, d'abord, traiter de la réforme parlementaire. Ce projet de loi contient, en effet, on l'a souligné, des aspects extrêmement novateurs qui sont, dans mon esprit, non pas la fin de la réforme parlementaire, non pas l'aboutissement de la réforme parlementaire, mais le début d'une réforme parlementaire en profondeur qui va, je l'espère, à terme, faire de cette institution un Parlement qui jouera véritablement son râle, c'est-à-dire un Parlement qui pourra mieux contrôler les gestes de l'exécutif, qui pourra mieux contrôler les finances publiques puisqu'en définitive c'est bel et bien le rôle d'un Parlement.

Dans ce projet de loi, nous retrouvons quelques éléments qui ne sont, en quelque sorte, que la pointe de l'iceberg de la réforme parlementaire. Par exemple, l'administration de l'Assemblée nationale, au lieu d'être confiée, comme c'est le cas depuis longtemps, à un comité de régie interne, dorénavant, relèvera, comme beaucoup de Parlements au monde, d'un bureau où siégeront des députés de l'Opposition comme des députés de la majorité et, bien sûr, vous-même, M. le Président. Ainsi, avec cette réforme, pour ce qui est de l'administration de leur Parlement, ce sont les parlementaires, et non plus le Conseil exécutif, qui verront à la gestion du Parlement.

Il y a bien d'autres éléments de la réforme parlementaire qui ne paraissent pas dans le projet de loi no 90 et qui font l'objet à l'heure actuelle d'études à une sous-commission de l'Assemblée nationale dont j'ai l'honneur de faire partie. Elles aboutiront à des changements au chapitre des commissions parlementaires pour les rendre plus modernes, plus fonctionnelles, à un règlement qui, je l'espère, sera remanié, clarifié, qui sera plus facile à consulter et, éventuellement, aussi à une nouvelle méthode de contrôle des deniers publics par un nouveau type de débat budgétaire et à un nouveau type de contrôle des crédits gouvernementaux. Tout cela fait que nous entamons avec la loi 90, comme je le soulignais, le début, et non la fin, d'une réforme qui doit aller, je l'espère, aussi loin que possible compte tenu que nous demeurons en système parlementaire britannique avec les contraintes que cela implique.

Je ne vous cacherai pas, pour ma part, que j'ai toujours été plutôt favorable à un type de système présidentiel, qui permet un meilleur équilibre, à mon avis, entre l'exécutif et le législatif. Mais d'ici à ce que nous arrivions à cela, si jamais nous y arrivons, je pense, en tout cas, que nous devons faire le maximum, - c'est ce que nous sommes en train de faire de part et d'autre de la Chambre - pour rendre ce Parlement plus fonctionnel, plus moderne, plus efficace.

Mon prédécesseur, le député de Sainte-Anne, a évoqué quelques éléments que je voudrais reprendre à ce moment-ci. Il a souligné ce qu'il considère comme une lacune - d'ailleurs, le leader de l'Opposition l'avait fait, lui aussi, hier - soit le fait que le quorum, dans la réforme parlementaire qu'apporte le projet de loi no 90, serait limité à 10% des députés en cette Chambre.

Scandale, trouve-t-on, de l'autre côté. C'est épouvantable, un si petit quorum! Prenons exemple sur deux autres Parlements de type britannique. À Ottawa, à la Chambre des communes, le quorum est de 20 députés sur 282, même pas 10%. Personne n'y trouve à redire. Combien pensez-vous qu'il faut de députés à Londres, "the mother of Parliaments", la mère des Parlements britanniques, là d'où coule toute source de sagesse parlementaire britannique? Sur 635 députés à Londres - il y en a beaucoup -combien constituent le quorum? M. le Président, 40 députés sur 635.

On avouera que nous sommes allés puiser à la source de la sagesse de la démocratie parlementaire britannique et que nous avons bonifié notre loi en y mettant un article comme celui qui est dans le projet de loi 90 sur le quorum, d'autant qu'avec la réforme parlementaire les commissions sont appelées à prendre un rôle encore plus considérable, plus autonome, grandissant et à être autant que l'Assemblée, sinon davantage, l'instrument par excellence du contrôle législatif sur l'exécutif.

M. le Président, la panne nous arrive. Il n'y a plus rien.

Des voix: Consentement!

Le Vice-Président (M. Rancourt): Nous avons le consentement pour continuer. Il n'y a plus d'enregistrement, non plus. Je puis suspendre d'office pour quelques instants jusqu'à ce qu'on en trouve la cause. Ah! Voilà!

Donc, M. le député de Taschereau et leader adjoint du gouvernement.

M. Guay: M. le Président, j'espère que, tant bien que mal, vous réussirez à noter ces pannes et ces choses de manière qu'on ne le prenne pas sur mon temps de parole.

Le député de Sainte-Anne a soulevé une question que j'ai trouvée absolument saugrenue. Les commissions parlementaires itinérantes, selon lui, devraient siéger uniquement dans les régions lointaines du Québec comme Schefferville, dont il est question ces temps-ci. Je le veux bien, mais, enfin, pourquoi une commission parlementaire ne pourrait-elle pas siéger à Montréal, où se trouve la moitié de la population du Québec, lorsqu'il s'agit d'une question qui concerne les Montréalais comme la question du transport en commun à Montréal et la question de la Communauté urbaine de Montréal? Ce sont des choses qui pourraient se faire. Je ne comprends pas du tout la logique du député de Sainte-Anne de vouloir faire siéger des commissions parlementaires uniquement dans les régions lointaines du Québec.

Enfin, M. le Président, avant d'aborder l'autre volet... (15 h 20)

Le Vice-Président (M. Rancourt): Encore une fois, le courant. M. le leader adjoint du gouvernement.

Une voix: Suspendez donc!

M. Fréchette: Est-ce que, compte tenu de ce qui s'est passé au tout début de la séance et de ce qui se produit de façon sporadique depuis le début, il n'y aurait pas lieu effectivement de suspendre maintenant nos travaux?

M. Lalonde: Nécessairement, ce que je vais dire ne sera pas enregistré à la caméra...

Le Vice-Président (M. Rancourt): Oui, maintenant oui.

M. Lalonde:... mais je vous ferai une citation: "À cause de ce besoin d'images à la télé, de ce besoin de boucher les trous à la radio, on noie les gens dans une confusion invraisemblable. " Auteur, René Lévesque; magazine Point de mire, 1971. Si le député de Taschereau veut continuer, libre à lui.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Comme le courant est de retour, est-ce que...

M. Guay: Je m'excuse, je soulève une question de privilège.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de privilège. M. le député de Taschereau.

M. Guay: Je veux bien prendre la parole dans cette Chambre, mais je veux le faire dans des conditions normales de fonctionnement de la Chambre. Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'avec deux interruptions en cinq minutes à peu près, on n'a aucune garantie, compte tenu qu'il y a panne dans tout le Québec, que cela ne se reproduise pas encore deux fois dans les cinq prochaines minutes et ainsi de suite. Pour ma part, je souhaite donc qu'on suspende nos travaux jusqu'à ce que le fonctionnement normal soit possible.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader de l'Opposition.

M. Lalonde: M. le Président, sur un ton moins badin, je pense qu'en toute honnêteté pour les orateurs, d'un côté comme de l'autre de la Chambre, on doit leur assurer un service continuel et normal d'exercice de leur droit de parole. Dans ces conditions, si c'est le désir du député de Taschereau, leader adjoint, nous sommes d'accord pour suspendre jusqu'à ce que les conditions normales soient revenues.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Donc, de consentement, il y a suspension jusqu'à une période indéterminée pour l'instant.

(Suspension des travaux à 15 h 22)

(Reprise de la séance à 15 h 32)

Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il vous plaît!

Veuillez prendre place.

Nous allons reprendre le débat en espérant que tout fonctionne maintenant d'une façon normale. M. le député de Taschereau.

M. Guay: M. le Président, le leader parlementaire de l'Opposition n'est pas ici. Il m'avait donné son consentement tantôt, compte tenu de la panne, à savoir que je pourrais reprendre au tout début mon intervention afin de la faire de manière ininterrompue, ce qui n'a pas été le cas tantôt, évidemment.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Est-ce qu'il y a consentement, M. le whip adjoint? Oui, M. le député de Taschereau.

M. Guay: Le député de Maskinongé confirme cette entente. Ce projet de loi no 90, Loi sur l'Assemblée nationale, loi fondamentale pour le Québec, loi fondamentale pour cette institution est, comme nous avons eu l'occasion de le souligner, non pas l'aboutissement, mais le début de la réforme en profondeur de notre Parlement. C'est le début en ce sens que, dans le projet de loi no 90, on retrouve des dispositions comme la création d'un bureau qui fait que, par exemple, dorénavant, la direction des affaires de l'Assemblée, du Parlement sera dans les mains des parlementaires de part et d'autre de l'Assemblée. Vous me direz: Cela va de soi. Ce qui va de soi, malheureusement, n'avait pas encore été fait. Maintenant, ce sera chose faite.

La réforme parlementaire que l'on voit poindre dans le projet de loi no 90 est beaucoup plus complexe et beaucoup plus profonde que celle que l'on retrouve ici. En effet, elle implique non seulement une nouvelle loi de l'Assemblée nationale, mais elle implique un règlement remanié, modifié. Elle implique aussi une entente sur une nouvelle façon de fonctionner, ce sur quoi nous travaillons à l'heure actuelle en sous-commission parlementaire de l'Assemblée nationale. Elle aura pour but de créer de nouvelles commissions parlementaires, probablement d'abolir les anciennes telles que nous les connaissons, bref de faire en sorte que le Parlement puisse dorénavant contrôler beaucoup mieux qu'il ne l'a fait jusqu'à maintenant les gestes de l'exécutif, puisque c'est son rôle premier. Il pourra contrôler et vérifier beaucoup mieux qu'il ne l'a fait jusqu'à maintenant les finances publiques.

En ce sens, la réforme parlementaire, tant celle qui point dans le projet de loi no 90 que celle qui doit venir par la suite sous forme de modifications au règlement, est une chose considérable qui fera de cette institution un Parlement aussi moderne que possible, compte tenu, bien sûr, que nous sommes en régime parlementaire britannique. En régime parlementaire britannique, l'équilibre entre l'exécutif et le législatif n'est pas aussi bien assuré, à mon avis, qu'en régime présidentiel où il y a une distinction des deux pouvoirs, donc un meilleur équilibre.

Enfin, à l'intérieur de cette contrainte, il y a moyen de faire plus, de faire mieux que ce que nous avons fait jusqu'à maintenant et de rendre le Parlement beaucoup plus moderne, beaucoup plus fonctionnel. C'est ce à quoi nous travaillons. En ce sens-là, le projet de loi no 90 marque le premier pas d'un long processus qui va se continuer et qui, d'une certaine manière, ne devra, je l'espère, jamais cesser, puisque ce Parlement sera toujours bonifiable.

À titre d'exemple, le règlement qui nous régit à l'heure actuelle - règlement moderne comparativement à l'ancien - adopté il y a une dizaine d'années et qui, à l'époque, faisait école dans d'autres Parlements, mais qui, aujourd'hui, avec l'usage, commence à manifester lui aussi certains signes de vieillesse, il faudra le revoir, lui aussi, le moderniser, l'améliorer, le bonifier et le changer. Pourtant, il n'a que dix ans. Cela veut dire que la réforme parlementaire, pour peu qu'on cesse d'en parler et qu'on commence à la faire - c'est ce que nous faisons - est un processus qui, au fond, est sans fin.

Le projet de loi no 90 a été discuté par quelques orateurs de l'Opposition, dont le député de Sainte-Anne qui a été l'orateur précédent. Le député de Sainte-Anne a souligné une chose que je voudrais relever quant à la question du quorum. En effet, dans le projet de loi no 90, le quorum est abaissé à 10% des membres de l'Assemblée nationale. Le député de Sainte-Anne et, hier, le leader de l'Opposition, d'ailleurs, trouvent là matière à scandale. C'est obligatoire de l'inscrire dans l'ensemble de la réforme parlementaire. À partir du moment où les commissions parlementaires seront différentes, seront plus dynamiques et assureront, peut-être davantage que l'Assemblée nationale elle-même, ce contrôle du législatif sur l'exécutif et sur les finances publiques, il est évident qu'il faut prévoir un mécanisme de fonctionnement différent.

Mais pour ceux qui s'offusquent de ce quorum réduit, j'attire leur attention sur le fait qu'à Ottawa le quorum est de 20

députés sur 282 sièges. Donc, même moins que 10%. À Londres, la mère des Parlements britanniques, "the mother of Parliaments", le quorum est de 40 députés sur 635. Donc, dans ces Parlements, on a réglé depuis longtemps l'obsession du quorum pour en faire un outil nécessaire, mais fonctionnel qui n'empêche pas le reste de l'institution de fonctionner. C'est ce que nous proposons dans le projet de loi no 90.

Le projet de loi no 90, M. le Président, vous le savez, évoque également un autre volet fort important de notre fonctionnement, soit celui de la rémunération des élus et de leur régime de retraite. Voilà un sujet dont on a beaucoup parlé, qui a fait couler beaucoup d'encre et qui, aujourd'hui, fait aussi l'objet d'une réforme. J'ai lu, comme vous sans doute, dans certains journaux, qu'on nous a dit: Quel mauvais moment pour venir parler des salaires et des pensions des députés! En effet, la semaine dernière, le Parlement adoptait la loi no 105 qui a pour but de décréter les conditions de travail dans les secteurs public et parapublic, avec les conséquences que l'on sait. On a dit: C'est indécent; vous allez parler d'augmentation de salaire des députés dans un contexte comme celui-là?

M. le Président, rectifions les faits. Le projet de loi no 90 n'augmente pas le salaire des députés. Le salaire des députés doit être augmenté le 1er janvier en vertu de la loi existante qui date, d'ailleurs, de l'époque du gouvernement Bourassa, avec les modifications que nous y avons apportées. Ce que le projet de loi no 90 vient faire, c'est reporter pendant trois mois l'augmentation de 6% qui était prévue au 1er janvier. Donc, la première chose à corriger: le projet de loi no 90 n'augmente aucun salaire de député; il reporte, au contraire, l'augmentation à trois mois.

La deuxième chose, M. le Président. Je suis de ceux qui pensent que non seulement il est heureux que ce projet de loi survienne en même temps que la loi no 105, mais que c'est même fondamental parce qu'au moment où la loi no 105 vient dire que, compte tenu de la crise économique, il est normal et naturel que les employés des secteurs public et parapublic, à partir d'un certain revenu, consentent quelques sacrifices puisque le gouvernement n'a pas des moyens illimités, surtout en période de crise, la population a le droit de savoir ce que les parlementaires sont également prêts à consentir compte tenu de la crise. Il est donc tout à fait logique, normal et opportun que les deux se discutent, l'un à la suite de l'autre, car ce que les parlementaires s'apprêtent à consentir, compte tenu de la crise économique, ce n'est pas mince.

Non seulement l'augmentation qui devait avoir lieu le 1er janvier est-elle reportée au 1er avril, mais ce qu'il en coûte à l'État pour un député, c'est-à-dire le salaire, mais aussi la pension... Si on parle de la rémunération globale, c'est, par exemple, pour un fonctionnaire, ce qu'il en coûte à l'État non seulement pour le salaire du fonctionnaire, mais aussi pour les avantages sociaux, c'est-à-dire à peu près 25% de plus que son salaire. Il faut donc envisager le tout dans un ensemble. Avec le projet de loi no 90, la réforme complète du régime de retraite des députés, cela veut dire que dorénavant il coûtera à l'État 20 000 $ de moins par année par député. Donc, non seulement le projet de loi no 90 n'augmente pas les salaires des députés, mais il diffère une augmentation déjà prévue; qui plus est, il diminue de 20 000 $ par député le montant qu'il en coûte à l'État chaque année pour ses députés. Ce n'est pas une petite affaire!

Oh! Si les députés s'étaient gavés jusqu'à maintenant, je dirais: II faut bien qu'ils passent par là, mais on est bien loin de cette situation. Prenons à titre d'exemple le salaire du député au Québec. Regardons-le de nouveau. En 1973, il était de 15 600 $. La loi adoptée par le gouvernement précédent, la même qui fait que le 1er janvier il doit y avoir une augmentation de salaire, faisait qu'au 1er janvier 1977, le député gagnait 27 800 $. Si l'Assemblée nationale, si les députés n'avaient pas touché à cette loi, en d'autres mots, si nous avions laissé la loi du gouvernement précédent continuer, sans faire de débat, sans soulever quoi que ce soit en Chambre, silencieusement, en traitant d'autres choses, aujourd'hui, un député, au 1er janvier 1983, gagnerait 48 100 $.

Or, qu'avons-nous fait? Lorsque nous sommes arrivés au pouvoir, nous avons modifié cette loi pour, d'abord, geler le salaire des députés pendant un an. On le voit ici: 27 800 $ en 1977, 27 800 $ en 1978. Ensuite, nous avons plafonné à 6% par année l'augmentation de salaire des députés, de sorte qu'aujourd'hui un député gagne 35 096 $ par année au lieu des 48 100 $ qu'il aurait gagnés si nous avions gardé l'ancienne loi sans la modifier. Donc, une économie par année de 13 000 $ à l'État et, donc, aux contribuables.

Parce que nous sommes intervenus à l'époque, il en coûte à l'heure actuelle 13 000 $ de moins à l'État par député et parce que nous avons plafonné l'augmentation à 6%, l'État et les contribuables ont donc économisé 13 000 $ par année par député. Vous me direz: Qu'est-ce que cela donne en comparaison avec d'autres secteurs? Pendant que les députés gelaient leurs salaires une année et les plafonnaient à 6% par la suite, prenons le salaire annuel moyen des syndiqués des secteurs public et parapublic, ceux-là même que nous avons effectivement touchés par la loi 105. Il est bon de

comparer les deux et de voir ce qui se fait de part et d'autre.

De 1977 à 1982, l'augmentation des salaires dans ce secteur, le salaire annuel moyen des syndiqués du secteur public, a été de 70%, augmentation moyenne de salaire annuel. Les députés eux, nettement moins que cela, 37%. Donc, déjà, depuis six ans, les députés, parce qu'ils sont conscients que l'économie commençait à donner des signes de balbutiement et qu'il fallait faire attention à la rémunération des élus, s'étaient déjà imposés, s'étaient déjà serré la ceinture. Gel des salaires la première année, augmentation de 6% les années subséquentes, pendant que l'inflation galopait joyeusement en comparaison. Sait-on seulement de combien l'inflation a pu augmenter pendant tout ce temps? C'est au rythme de 10%, 12% par année, alors que les augmentations de salaire des députés étaient plafonnées à 6%.

Déjà, avec ce que nous avons fait, il en coûte 13 000 $ de moins aux contribuables par député chaque année. Avec ce que nous nous apprêtons à faire, il en coûtera un montant additionnel de 20 000 $ en moins par député par année avec la réforme en profondeur du régime de retraite. Je ne dis pas que nous sommes des anges, des surhommes, qui méritons quoi que ce soit; je dis tout simplement: Regardons les faits et, avant de se laisser dire par les gens d'en face qu'il y a une augmentation de salaire dans le projet de loi no 90, qu'ils commencent donc par le lire à la lueur du projet de loi actuel. L'augmentation du 1er janvier est reportée au 1er avril. La pension, on sabre dedans, 20 000 $ de moins par année par député y inclus pour vous autres, y inclus pour le député de Mégantic-Compton. Plus les 13 000 $ qui avaient déjà été consentis en cours de route.

Regardons, à titre de comparaison, qu'est-ce que cela donne être député à Québec et à Ottawa. En janvier 1977, à Québec, les députés gagnaient 28 700 $ - je l'ai évoqué tantôt - et, à Ottawa, un peu moins, 25 500 $. Ne craignez pas. Ils se sont repris. Ici, à Québec, M. le Président, les députés se sont augmentés à 37 200 $ en sept ans, une augmentation de 33%. Et je vous ferai remarquer que l'inflation a été de beaucoup supérieure à cela. À Ottawa, pendant la même période, le salaire est passé de 25 500 $ à 50 350 $, une augmentation de 97%. Pour les députés à Ottawa, non seulement il en coûte plus cher qu'il en aurait coûté comme c'est le cas ici si on n'avait pas modifié la loi, mais il en coûte 97% de plus cher qu'il y a sept ans. Trouve-t-on là matière à scandale? Je n'ai pas encore entendu, en tout cas, nos amis d'en face le dénoncer.

Comparons de nouveau le salaire d'un député avec le salaire d'un fonctionnaire du gouvernement du Québec qui gagnait à peu près la même chose en 1977. En 1977, prenons le salaire d'un agent de recherche socio-économique. Il gagnait 27 717 $. C'est un professionnel syndiqué, 27 717 $ pour 32 heures et demie de travail. N'oublions jamais cela, pour 32 heures et demie de travail, avec la sécurité d'emploi. Au même moment, les députés gagnaient 27 800 $. M. le Président, les députés d'en face comme de ce côté-ci vous diront en toute objectivité que, pour un député, ce sont facilement 60 à 70 heures de travail par semaine. Donc, 27 800 $ non pas pour 32 heures et demie, mais pour le temps qu'il faut et le temps qu'il faut, c'est généralement 60 ou 70 heures par semaine facilement. Aujourd'hui, simplement par la progression des conventions collectives, ce même agent de recherche qui était au même niveau que les députés en 1977 gagne 47 700 $, alors que les députés, eux, s'étant serré la ceinture à 6% d'augmentation au maximum, gagnent 35 096 $. Donc, le salaire était identique en 1977. En 1982, il y a une jolie différence, 12 000 $ en faveur du professionnel pour 32 heures et demie de travail, 12 000 $ de moins pour les députés pour des heures de travail qui ne se comptent pas et, est-il besoin de le dire, M. le Président? sans aucune sécurité d'emploi, on le sait. (15 h 50)

Qu'arrive-t-il avec la loi no 105 pour ce même agent de recherche? Eh bien, effectivement, le 1er janvier, son salaire tombe à 38 433 $, mais avec le report de l'augmentation prévue en janvier pour les députés, ceux-ci demeurent à 35 096 $. Le fonctionnaire en question continue d'avoir une supériorité mathématique, pécuniaire, sur les députés, de 3500 $. Une fois la période de récupération terminée, au 1er avril, au moment où son salaire augmente de nouveau et au moment où l'augmentation prévue au 1er janvier dans la loi actuelle est reportée par la loi no 90, on a 43 000 $ pour le fonctionnaire, 37 000 $ pour le député; une différence encore de 7000 $.

Il a été longtemps question de sabrage dans le régime de retraite. On a dit sur tous les tons que le régime de retraite des députés devait être corrigé. Nous sommes d'accord, nous le corrigeons. Comment le corriger? Et bien, le premier ministre a demandé à trois peronnes éminemment connues dans la société québécoise de se pencher sur la question: M. Fernand Paré, de la compagnie La Solidarité et de la Caisse de dépôt et placement, M. Claude Castonguay, ancien ministre des Affaires sociales et président du Groupe La Laurentienne, ici, à Québec, et M. Alfred Rouleau, ancien président de la

Confédération des caisses populaires Desjardins. Voilà trois personnes, trois sages, pourrait-on dire, d'opinions politiques pouvant

diverger, qui se sont penchés sur la question et qui ont fourni un rapport qui a inspiré la rédaction et la conception du nouveau projet de régime de retraite des députés. Même là, compte tenu de la situation dans laquelle nous vivons, nous avons jugé opportun de ne pas retenir toutes les propositions de ces trois éminentes personnes à qui il faut rendre gré des services qu'elles nous ont rendus dans ce dossier. Nous n'avons pas retenu leurs recommandations intégralement. Ce que le projet le doit no 90 reprend au chapitre du régime de retraite est moins que ce que messieurs Castonguay, Paré et Rouleau proposaient comme nouveau régime de retraite des députés. Avec les résultats que la contribution de l'État, qui est passée de 140% du salaire des députés qu'elle était à la fin du gouvernement Bourassa à 85% du salaire des députés, passera avec le nouveau plan, pour les députés actuels, à 37% du salaire et, pour les députés à venir, à 31% du salaire.

Je pense qu'il est heureux, tout compte fait, que nous ayons discuté de la loi no 105 et du projet de loi no 90 en même temps. Dans la loi no 105, le gouvernement ayant fait le maximum, les syndicats ayant peut-être fait ce qu'ils considéraient aussi être le maximum, il a fallu décréter et demander aux syndiqués des secteurs public et parapublic de consentir, pour ceux d'en haut de 20 000 $, un sacrifice pécuniaire, compte tenu de la crise et de la capacité financière du gouvernement.

Il est bon que le projet de loi no 90 soit discuté en même temps, parce qu'il faut que la population sache que, contrairement à ce qu'un article de la Presse canadienne paru la semaine dernière a dit... Le journaliste ayant pris le projet de loi et l'ayant compris tout croche, à l'envers, il lui a fait dire ce qu'il ne dit pas, le contraire même de ce qu'il dit. Le 1er janvier, il devait y avoir une augmentation de salaire des députés en vertu de la loi actuelle. Elle est reportée au mois d'avril par le projet de loi no 90, de manière que nous soyons solidaires avec les personnes des secteurs public et parapublic qui font l'objet d'une chute de salaire pendant les mois de janvier, février et mars. Cette augmentation demeure une augmentation plafonnée à 6%, nettement en deçà de l'inflation, nettement en deçà... Faisons une dernière comparaison: l'augmentation du salaire des députés a été de 37% de 1977 à 1982. Ce n'est pas beaucoup comparativement à l'inflation qui a été au moins le double de cela. Pour donner un barème, le projet de loi de nos amis d'en face, contre lequel les députés de l'Opposition à l'époque se sont tellement bagarrés, et d'une manière qui peut laisser à désirer effectivement - on le reconnaît maintenant - le projet de loi de 1974 augmentait d'un seul coup le salaire des députés de 34%. Depuis que nous sommes au pouvoir, grâce au plafond que nous avons mis et que nous continuons à mettre, les salaires des députés n'ont augmenté en six ans -c'était d'un seul coup, 34% - que de 37%. Il y a eu un effort de retenue normal de la part des parlementaires, effort de retenue qui se poursuit par le projet de loi no 90 en reportant l'augmentation de salaire prévue le 1er janvier au 1er avril et en sabrant dans les fonds de pension de manière que, pour les contribuables, il en coûte chaque année, par député, 20 000 $ de moins, ce qui est, je pense un sacrifice considérable. Il était normal qu'on le sache au moment où on a étudié le projet de loi no 105, il est normal que le tout se sache en même temps de manière qu'on cesse d'avoir l'impression erronée que les députés se gâtent pendant qu'on coupe ailleurs. Les députés se sont coupés bien davantage et continuent à se couper bien davantage. Je suppose que, d'une certaine manière, ce n'est que normal puisque le Parlement doit donner l'exemple. C'est normal aussi jusqu'à un certain point car il faut craindre, à force de couper et de couper, pour le recrutement des futurs parlementaires.

Quoi qu'il en soit, il fallait le faire. Nous l'avons fait dans le passé. Nous le faisons à nouveau cette fois-ci. Je pense que c'est un projet de loi, avec la réforme des pensions, avec le report de l'augmentation de salaire, en plus de la réforme parlementaire, qui mérite de recevoir l'appui unanime de tous les députés de cette Chambre. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Nelligan.

M. Clifford Lincoln

M. Lincoln: M. le Président, en écoutant le député de Taschereau, j'ai failli pleurer. J'étais tout triste, penaud et chagrin d'entendre comment, nous les députés, souffrons tellement de notre situation actuelle. Les salaires qui ne sont pas indexés au taux d'inflation. Pourtant, si on avait à recommencer, demain matin, les nominations de candidature dans nos comtés, nous tous ici, sans exception aucune, nous nous battrions comme des lions pour devenir candidats pour nos partis respectifs. Je suis sûr, à ce moment-là, que les considérations de salaire, d'augmentation, d'inflation, d'indexation ne valent rien. On oublie tout cela. On se bat parce qu'il me semble qu'on est député pour des considérations qui vont au-delà de la question des salaires. Je pense que nous sommes tous d'accord là-dessus.

Il faut voir le projet de loi no 90 dans deux optiques tout à fait différentes. De notre côté de la Chambre, nous avons demandé, pour plusieurs raisons, je pense,

que l'on considère la question sous deux volets séparés. Une loi scindée en deux pour faire deux projets de loi; d'un côté, l'un examinerait la question de la réforme législative, parlementaire avec laquelle, en principe, nous sommes d'accord à 100%. On peut avoir des différences d'opinions. Par exemple, le député de Sainte-Anne et le député de Taschereau sur la question du quorum. On peut avoir des différences d'opinions sur la façon d'aborder les commissions parlementaires. Est-ce qu'il devrait y en avoir quelques-unes ou plus? Est-ce que la façon d'aborder l'étude des crédits devrait être faite selon les suggestions du projet de loi no 90? On a chacun sa façon de voir. Je suppose que les différences d'opinions sur la question fondamentale de la réforme législative sont tout à fait minimes. Ce sont des questions de détail qui pourraient avoir, après une étude approfondie en commission parlementaire, un consensus très large de l'Assemblée nationale et des deux partis.

Là où il y a une différence fondamentale d'approche, c'est sur la question des salaires et du régime de retraite. En fait, on s'est demandé, de ce côté-ci de la Chambre, comment, le jour même du dépôt de la loi 105 et des 109 décrets qui ont imposé les conditions de travail aux syndicats, comment, le même jour, le gouvernement pouvait avoir ou bien la naïveté ou bien le cynisme ou bien le manque d'astuce de déposer un nouveau projet de loi no 90 qui incorporait les salaires et les régimes de retraite des députés. On sait très bien que c'est une question symbolique, donc, très importante pour la population. La population regarde cela et compare. Dans tous les comtés, dans vos comtés comme dans nos comtés, il y a eu tous les jours, depuis le dépôt du projet de loi no 90, des questions posées par les gens. (16 heures)

Ils ne comprennent pas tous les petits graphiques qu'a montrés notre collègue de Taschereau. Ils ne comprennent pas tous ces petits détails. Pour eux, tout ce qu'ils voient, c'est que le même jour où nous imposions 109 décrets à une partie de la population, d'une façon tout à fait autocratique, d'une façon tout à fait unilatérale, ce même jour, nous déposions par le plus grand cynisme, par le plus grand manque d'astuce, par la plus grande naïveté - je ne peux pas croire que ce gouvernement soit naïf, loin de là, je ne sais pas ce qui s'est passé dans sa tête - un projet de loi qui allait indiquer en chiffres que le salaire des députés allait être augmenté d'un montant à un autre montant. C'est ça que la population retient. C'est le symbolisme. On peut appeler cela une augmentation, une indexation, on peut appeler cela peut-être un petit renvoi de quelques mois, mais le fait brut demeure à savoir que nous, les députés, allons toucher plus d'argent en 1983 que nous n'en touchons actuellement. C'est ce que se demandent les gens dont le salaire a été gelé, dans les poches desquels on est allé chercher trois mois d'augmentation qu'on avait signée de bonne foi avec eux. C'est à cause de cela que tous les éditorialistes, tous les journaux, les gens de nos comtés se posent des questions fondamentales. C'est une question de symbolisme tout à fait importante. Je pense qu'il faudra, d'abord, scinder ce projet de loi en deux projets de loi tout à fait distincts: le premier, la réforme parlementaire avec laquelle nous sommes tout à fait d'accord en principe et le deuxième, la question des salaires et des pensions. On va revenir aux salaires et aux pensions.

Hier, j'ai entendu un ministre, à la télévision, nous dire: Écoutez! Nous, au Québec, on touche moins que les autres parlementaires. Il a dit cela d'une façon globale. Aujourd'hui, le député de Taschereau, par toutes sortes de statistiques, nous compare au Parlement d'Ottawa. Si le Parlement d'Ottawa a versé des salaires trop élevés pour ses députés, dans les circonstances actuelles où on a un déficit budgétaire fédéral de 23 000 000 000 $, c'est un très mauvais exemple à suivre. On ne veut pas suivre la même pente. On ne veut pas se comparer à Ottawa. Mais je vais nous comparer à d'autres provinces canadiennes qui, elles aussi, ont des Parlements provinciaux comme nous. Peut-être qu'on peut dire qu'on siège un peu plus longtemps qu'eux, mais, en même temps, on pourrait dire qu'on siège bien moins longtemps que le Parlement d'Ottawa. J'ai relevé, dans la Revue parlementaire canadienne, la liste de tous les salaires des autres parlementaires dans les autres provinces. En Alberta, un député gagne 22 000 $ et une allocation supplémentaire de 6400 $, c'est-à-dire un total de 28 400 $ contre 42 000 $ au Québec. En Colombie britannique, un député gagne 24 000 $, plus un montant supplémentaire de 12 000 $, pour un total de 36 000 $ contre 42 000 $ au Québec. Au Manitoba, un député gagne au total 27 000 $ contre 42 000 $ au Québec. Au Nouveau-Brunswick, il gagne 30 770 $ contre 42 000 $ au Québec. À Terre-Neuve, c'est 30 700 $; en Nouvelle-Écosse, 23 400 $; en Ontario, 40 000 $ contre 42 000 $ au Québec. À l'Àle-du-Prince-Édouard, c'est 19 000 $; en Saskatchewan, 20 737 $ et, au Yukon, 28 000 $. Nous ne sommes certainement pas défavorisés par rapport aux autres provinces canadiennes.

Le fait est qu'ici, au Québec, nous avons une situation économique critique que tous semblent d'accord à reconnaître. Comment, à l'heure actuelle, nous comme

députés, pouvons-nous donner l'exemple à la population en allant chercher une indexation, une augmentation et une autre indexation pour 1984 en raison du taux d'inflation quand, maintenant, nous demandons aux travailleurs du secteur public de se serrer la ceinture? Comment retirer des augmentations de leurs poches? Demain, même, nous allons poser de tels gestes. On a imposé des coupures budgétaires dans les hôpitaux et dans le secteur de l'éducation. C'est là la chance inespérée pour nous de donner l'exemple à la population plutôt que de penser à nos petits chiffres, à nos pensions, à toutes les choses qui nous concernent personnellement.

D'après le projet de loi no 90, nous aurions, au Québec, une province qui a déjà beaucoup trop de ministères, quand nous pensons que les États-Unis d'Amérique ont treize secrétaires d'État, treize membres du cabinet des États-Unis d'Amérique qui comptent 250 000 000 d'habitants. Nous, on a 27 ministres. La Suisse, qui a 6 000 000 d'habitants comme nous, se gouverne avec sept ministres; nous, on en a 27. D'après votre projet de loi no 90, on aurait 27 ministres, 27 adjoints parlementaires, sept présidents de commission, un président de l'Assemblée, deux vice-présidents de l'Assemblée, un leader parlementaire adjoint, un whip en chef et deux whips adjoints pour un total de 68 députés péquistes sur 75. Beaucoup de chefs, mais bien peu d'Indiens. Il ne reste que sept Indiens sur 75. Comment voulez-vous continuer dans cette affaire? Si on ajoute ce que touche un adjoint parlementaire, si on ajoute ce qu'il touche maintenant, sans compter l'indexation de l'année prochaine, en frais de représentation, et avec l'indemnité additionnelle, on arrive à 50 936 $ de frais actuels pour un adjoint parlementaire.

En fait, un adjoint parlementaire au Québec touche plus que les ministres de beaucoup de provinces canadiennes. Je vais vous donner le taux des salaires des ministres des provinces canadiennes, d'après la Revue parlementaire. En Colombie britannique, un ministre sans portefeuille gagne 24 000 $; un ministre à temps plein gagne 28 000 $; au Manitoba, un ministre gagne 20 600 $; au Nouveau-Brunswick, 22 000 $; à Terre-Neuve, 29 000 $; en Nouvelle-Écosse, 25 000 $; en Ontario, 23 300 $; à l'Île-du-Prince-Édouard, 22 000 $, etc. Il faudrait peut-être un jour nous comparer aux autres provinces et dire:

Si cela existe dans les autres provinces, peut-être qu'il faudrait nous serrer la ceinture et réaliser que le Québec est dans une situation économique critique.

Si on revient à 1974, les gens nous disaient: Là, il y avait des circonstances différentes. Mais oui, il y avait des circonstances différentes. D'abord, il faut vous rappeler qu'il y avait eu un comité tripartite indépendant, composé de M. Jean-Charles Bonenfant, d'un ex-président de la Chambre, M. Lucien Cliche, et de Mme Yvette Rousseau, de la CSN, qui ont siégé dans le cadre d'un comité tripartite indépendant, qui ont recommandé des salaires de 23 000 $. Bref, la suggestion qui vous avait été faite à ce moment-là était pour un salaire de 21 000 $, moins, en fait, que ce que le comité tripartite avait suggéré, et cela n'a pas été accepté. Pourquoi n'avez-vous pas accepté cela? Pour les mêmes raisons que celles que nous vous rappelons maintenant.

Vous n'avez pas accepté cela parce que vous avez dit: Nous donnons le mauvais exemple à la population. On viendra ensuite dire aux Québécois: Serrez-vous la ceinture. Nous n'avons pas accepté cela, parce que vous avez dit que le rôle du député n'est pas de se servir d'abord, nous n'avons pas accepté cela parce que vous avez dit que, comme parlementaires, comme élus de la population, nous n'avons pas seulement des avantages à recueillir, nous avons aussi un exemple à donner. Vous n'avez pas accepté cela parce que vous avez dit: Peut-il exister un moment plus mal choisi pour procéder à une telle hausse de salaire? On n'a pas accepté cela parce que vous nous avez dit qu'on ne peut choisir un moment plus inopportun pour procéder à une telle hausse. On n'a pas accepté cela parce que vous avez dit encore: Si nous voulons demander, exiger des sacrifices des citoyens, il faut que nous donnions l'exemple de la modération.

On n'a pas accepté cela parce que vous avez dit encore: Si nous consentons à nous indexer nous-mêmes, nous devons faire la même démarche à tout le moins pour l'ensemble des citoyens québécois. Aujourd'hui, les circonstances sont tout à fait différentes. Je vous rappelle qu'en 1974, quand vous nous avez servi tous ces boniments, à ce moment-là, le déficit du Québec était de combien, pensez-vous? 250 000 000 $, 8, 5% du déficit actuel, qui est de 3 000 000 000 $. À ce moment-là, il était de 250 000 000 $ et vous nous disiez: II ne faut pas accepter d'augmentation parce que c'est donner un mauvais exemple à la population à laquelle nous demandons de se serrer la ceinture. Si, en 1974, c'était un mauvais exemple à donner, aujourd'hui, en 1982, quand notre déficit est de 3 000 000 000 $ et qu'il a déjà sauté à 3 250 000 000 $ et peut-être encore plus, d'après ce qu'on peut pressentir, comment peut-on accepter aujourd'hui, nous, symboliquement, de dire dans cette loi que nous allons continuer d'accepter nos 6% et qu'en 1984 nous serons indexés sur le taux d'inflation? (16 h 10)

C'est pourquoi nous insistons pour qu'il

y ait un gel des salaires. Qu'on dise aujourd'hui: Bon, si les autres se serrent la ceinture, nous aussi les députés, à beaucoup plus forte raison devons le faire parce que c'est nous-mêmes qui causons les circonstances qui font que ces gens doivent se serrer la ceinture, nous allons nous aussi nous serrer la ceinture. Si on parle uniquement de pension, si on regarde le programme que votre leader a annoncé hier, c'est la chose la plus cynique encore que la loi 90, quand vous pensez que, le 12 avril 1981, vous avez calculé toute votre affaire en prévision peut-être de perdre vos élections, mais nous aussi avions fait aussi notre petit calcul, qui ramenait cela au 15 novembre 1981, par pure coïncidence, cinq ans exactement après la prise du pouvoir par le Parti québécois.

Là c'est une affaire très importante, parce que ce qui arrive, si on remet cela au 15 novembre 1980, cela veut dire qu'une grande majorité des députés du Parti québécois se qualifient à ce moment pour leur pension et cela a un effet double. Ce n'est pas en effet qu'ils se qualifient seulement pour la pension du gouvernement du Québec, de l'Assemblée nationale, ce qui arrive, c'est que la plupart, un grand nombre de ces députés, qui sont des professeurs, qui sont d'anciens membres de la fonction publique, qui appartiennent au RRE ou RREGOP, à ce moment, sont admissibles à une pension additionnelle, c'est-à-dire que ce n'est pas seulement la pension de cinq ans de l'Assemblée nationale, c'est la pension additionnelle que vous allez trouver dans le RRE et le RREGOP. Si cette démarche est une démarche objective, juste, d'équité, à ce moment, nous vous mettons au défi de prendre cette affaire de pension et nous sommes tout à fait d'accord que cette pension devrait être révisée parce qu'on vous a dit en 1976, en 1977, en 1979 que les déficits actuariels augmentaient en flèche.

Si, à ce moment, il faut réviser la pension, nous sommes tout à fait d'accord là-dessus. On vous met au défi de revenir en arrière, d'y revenir avant le jour des élections et de faire cela le 12 avril. Si cela nous affecte nous ici, nous sommes d'accord. Il faudrait que ce soit la même règle pour tous, mais indexer cela et faire un calcul au 15 novembre 1981, comme vous l'avez fait ici, pour que tous ces députés qui étaient de la fonction publique récoltent leur petite pension additionnelle, ce n'est pas en fait une petite pension additionnelle parce que, dans certains cas, ce sont des pensions très significatives. À ce moment, c'est du cynisme qu'on ne peut pas accepter, surtout dans les circonstances actuelles.

Il faudrait vous rappeler qu'on ne peut pas accepter, nous, trois choses: on ne peut pas accepter cette question de pension que vous allez faire sur le dos de la population, en faisant cela pour cinq ans, au 15 novembre, et en ajoutant ces pensions additionnelles que vous n'auriez pas touchées autrement. Deuxièmement, on ne va pas accepter la question des salaires parce que nous disons qu'aujourd'hui, s'il faut donner l'exemple aux membres de la fonction publique, s'il faut donner l'exemple aux gens qui souffrent de coupures, s'il faut donner l'exemple aux chômeurs, s'il faut donner l'exemple aux prestataires de l'aide sociale, cela commence par les députés, cela commence par les ministres, cela commence par nous-mêmes. Troisièmement, on va vous dire qu'on ne peut pas accepter un nombre illimité d'adjoints parlementaires. On ne peut pas avoir ici des adjoints parlementaires presque sans nombre qui vont chacun toucher 50 936 $, même sans compter l'indexation d'avril 1983 et sans compter la nouvelle indexation de l'inflation au 1er janvier 1984 qui, aujourd'hui, touche les adjoints parlementaires.

On peut dire, comme le député de Taschereau, le salaire, après tout, c'est 35 000 $, c'est en dessous du taux d'inflation. Peut-être pourrait-on dire aussi: L'allocation additionnelle des parlementaires, on la dépense. Tout de même, il faut penser qu'on a une allocation additionnelle des parlementaires qui est de 7500 $ et qui n'est pas imposable, qui vaut quelque chose. On ne peut pas l'ignorer et ne pas en parler. Nous vous demandons de revoir toute votre affaire, de scinder le projet de loi en deux projets de loi. On vous demande de repenser à ce que vous disiez vous-mêmes en 1974 et à plus forte raison aujourd'hui, lorsque nous avons des déficits monstres, lorsque nous avons une situation économique qui vous force à faire 109 décrets pour les membres de la fonction publique, on vous demande de faire la même chose, comme vous nous disiez l'autre jour, on vous demande de ne pas donner le mauvais exemple à la population. On vous demande de penser, comme vous le disiez, que le rôle du député n'est pas de se servir d'abord. Enfin, nous vous demandons, comme vous nous le disiez avant, comme parlementaires et comme élus de la population, de ne pas penser seulement aux avantages à recueillir, mais de donner l'exemple.

Des voix: Très bien!

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le ministre du Travail.

M. Raynald Fréchette

M. Fréchette: M. le Président, comme à l'habitude, le député de Nelligan a été volubile, loquace et, ma foi, éloquent à

certains moments. Je n'entreprendrai pas, cependant, de relever une à une les affirmations qu'il a faites et qui, à certains égards, rejoignaient le sophisme, mais vous allez me permettre de relever deux ou trois de ses affirmations. Il y a une chose que j'ai notée. Le député de Nelligan me corrigera si, effectivement, j'avais mal retenu les propos qu'il nous a livrés. Parlant de la démonstration faite par le député de Taschereau, juste avant son intervention, se référant également à l'intervention du leader du gouvernement hier, qui, l'un et l'autre, à l'aide de tableaux, ont démontré la pertinence du projet de loi, le député de Nelligan, me semble-t-il - c'est ce que j'ai noté; on me corrigera encore une fois si je faisais erreur - a dit essentiellement ceci: Cela ne sert à rien de faire de longues démonstrations de cette nature, parce que, dit-il, les gens ne comprennent pas. M. le Président, il me semble qu'une affirmation de cette nature est l'équivalent d'un affront, effectivement, à l'intelligence des citoyens et des citoyennes du Québec qui, dans l'évaluation et l'opinion du député de Nelligan, ne pourraient pas comprendre des choses qui, dans leur essence, sont pourtant fort simples, pas du tout compliquées.

Le député de Nelligan s'est aussi référé à des situations qui existent dans d'autres provinces, tant à l'égard des salaires qu'à l'égard de la fonction même de député. J'aurais souhaité, quant à moi, qu'il pousse sa démonstration jusqu'à la limite, qu'il nous dise, par exemple, par rapport à une province à laquelle il a fait allusion, combien de mois on y siège; qu'il nous dise, par exemple, quelles sont les fonctions qui sont dévolues à un député de l'une ou l'autre des provinces auxquelles il a fait allusion. Il s'est contenté de faire des affirmations d'ordre général, de ne faire que des références sans aller dans ces détails qui auraient été utiles pour juger de la pertinence de ses propos.

Il y a un troisième aspect, M. le Président, - et ce sera le dernier - que je veux relever de l'intervention du député de Nelligan. Avec beaucoup d'assurance, le député de Nelligan nous dit essentiellement ceci: Nous vous avons dit en 1976, nous vous avons répété en 1977, 1978 et 1979 qu'il fallait, de toute évidence et rapidement, procéder à des changements quant au fonds de retraite qui est celui que l'on connaît actuellement et dont certaines gens ont déjà commencé à bénéficier. Je trouve un peu curieux une affirmation de cette nature, puisque cette politique est là depuis beaucoup plus longtemps que 1976. Ces gens qui nous disent maintenant: On vous a informés, on vous a demandé en 1976, 1977 et 1978 de procéder à des changements, ces mêmes gens auraient pu le faire de 1970 à 1976, et je ne sache pas effectivement qu'on ait même manifesté ni l'intention ni la volonté d'y procéder. (16 h 20)

Je veux bien souscrire à certains des propos du député de Nelligan, mais il en est d'autres qui méritent d'être relevés et commentés.

Depuis qu'on a amorcé l'étude de la motion de deuxième lecture, il est clair que beaucoup de choses ont été dites, certaines ont été redites et cela me semble inévitable qu'il en soit ainsi. C'est même souhaitable qu'il en soit ainsi, pour qu'effectivement l'on puisse se rendre compte de l'importance de la loi en discussion.

Je voudrais retenir d'une façon toute particulière la présentation de la loi qui a été faite hier par le leader du gouvernement. Il me semble que le leader du gouvernement a effectivement évalué tous les aspects de la question qui est en discussion. Il a fait le tour à la fois de ce qu'on pourrait convenir d'appeler la réforme strictement parlementaire et la réforme d'ordre monétaire. À un chapitre comme à l'autre, il a été, il me semble, d'une clarté tout à fait évidente.

Pour ceux d'entre nous qui, même de loin, ont suivi les différentes étapes qui ont conduit au dépôt de ce projet de loi, nous savons que beaucoup de gens s'y sont penchés. Des experts du parlementarisme s'y sont penchés et ils l'ont fait depuis un bon moment, depuis plusieurs mois, voire même depuis plusieurs années. Il me semble qu'en qualité ou à titre de députés de cette Chambre, nous devons aujourd'hui être reconnaissants vis-à-vis de ceux et celles d'entre nous qui ont consacré beaucoup de temps, beaucoup d'heures et beaucoup d'énergie à élaborer le projet de loi qui est devant nous, tant du côté de l'Opposition que du côté ministériel.

Il y a au moins une chose sur laquelle tout le monde s'entend, c'est qu'il y a nécessité absolue de procéder maintenant à des amendements de la Loi sur l'Assemblée nationale. Tous me semblent s'accorder là-dessus, sauf, évidemment, sur le chapitre que l'on sait, mais en ce qui concerne strictement la réforme parlementaire, tous semblent s'accorder.

Je ne voudrai, quant à moi, retenir que quelques aspects de la loi qui, en apparence mineurs, démontrent pertinemment bien la nécessité qui existait de procéder à des changements. J'attirerai votre attention sur quelque chose de nouveau qu'il y a dans cette loi, sur lequel personne n'est encore intervenu, enfin à ce que je sache, et qu'il fallait modifier de toute évidence. Je vous réitère que cela peut avoir une allure de choses mineures, mais c'est quand même important au niveau de l'esprit qu'on peut y retrouver.

Dans la loi actuelle, il était indiqué, par exemple, qu'un député de l'Assemblée

nationale n'était pas contraignable devant les cours de justice, 20 jours avant le début d'une session et 20 jours après la fin d'une session, ce qui avait comme conséquence et, dans bien des cas... - Je vois le député de Beauce-Sud qui me regarde: peut-être que dans l'exercice de son mandat de coroner, il a vécu des situations comme celle-là -évidemment, ce n'était pas une règle générale, cela ne se produisait pas régulièrement; mais souvent, on a vu des litiges devant les tribunaux, de quelque juridiction qu'ils soient, qui ont du être reportés de semaine en semaine, de mois en mois quand ce n'était pas d'année en année, parce qu'il y avait dans la Loi de l'Assemblée nationale, une disposition en ce sens qu'un député de cette Chambre n'était pas contraignable vingt jours avant le début d'une session et vingt jours après.

Il y a maintenant une disposition dans la loi qui fait de chacun d'entre nous un témoin comme un autre devant toutes les cours de justice, sauf les périodes pendant lesquelles la Chambre, une commission ou une sous-commission siège. Il me semble que c'est important. Il y a là un principe fondamental aussi qui fait que le député comme n'importe quel autre citoyen doit être à la disposition de la justice.

Il y a aussi dans cette loi un chapitre par dessus lequel on ne peut pas passer. C'est celui qui prévoit la création d'un jurisconsulte. On l'a dit, les intervenants qui m'ont précédé l'ont dit, ils ont même insisté sur cet aspect de la loi, cette espèce de sage à qui les députés de la Chambre pourront s'adresser pour lui demander un avis quant à la possibilité d'un conflit d'intérêts, quant à la possibilité de se retrouver dans une incompatibilité d'exercice de fonction. Or, en vertu de cette nouvelle disposition que l'on retrouve dans la loi, tout député de cette Chambre pourra s'adresser à ce sage, comme on l'a baptisé, pour lui faire part d'une situation dans laquelle il pourrait se trouver et demander à ce jurisconsulte d'émettre un avis effectivement quant à la possibilité, encore une fois, d'un conflit d'intérêts ou d'une incompatibilité dans l'exercice d'une fonction.

L'expérience de même que l'histoire récente de la politique au Québec et ailleurs nous démontrent que si une institution de cette nature avait existé, peut-être bien que des gens qui se sont retrouvés à un moment donné dans des situations difficiles, des situations pénibles, qui les ont même conduits ou bien à des démissions ou alors à des destitutions par les tribunaux, ces gens ne se seraient pas effectivement retrouvés dans ces situations pénibles. Ce même chapitre qui procède à la création de la fonction de jurisconsulte précise d'une façon fort claire que le député qui aura pris la précaution de consulter le jurisconsulte et qui se retrouvera quand même dans une situation ou bien de conflit d'intérêts ou bien d'incompatibilité d'exercice de fonction, mais s'il a pris la précaution de consulter auparavant, malgré le fait qu'il pourrait se retrouver dans l'une ou l'autre des deux situations dont on vient de parler, il pourra bénéficier des dispositions de la loi à cause de la précaution qu'il aura prise de prendre les renseignements qui étaient nécessaires dans les circonstances.

Un autre changement important qui lui aussi est en relation directe avec l'administration de la justice. Nous avons tous été témoins, depuis avril 1981, de quelques incidents qui, à un moment ou l'autre, créaient des situations qui pouvaient devenir embarrassantes lorsque par exemple, dans une commission parlementaire - il est arrivé certains événements que l'on sait, que je n'ai pas besoin de décrire - il est arrivé la situation dans laquelle s'est retrouvé le député de Saint-Jacques par rapport à certaines accusations qui avaient été portées contre lui et qu'on a reproduites par la suite dans les journaux. Le dilemme dans lequel on se trouvait, c'était de savoir s'il faut intervenir vis-à-vis de ceux que l'on croit responsables d'une situation, et si l'on doit prendre la décision d'intervenir, de quelle façon faut-il le faire. Faut-il le faire par la voie de la vieille institution qui prévoyait que les députés étaient à la fois juge et partie? Ou alors, faut-il, par le mécanisme des tribunaux de droit commun, soumettre ceux ou celles qui se seraient rendus coupables ou responsables d'infraction au mécanisme ordinaire des tribunaux de droit commun? (16 h 30)

Tous ceux qui ont eu l'occasion de s'exprimer sur ces situations me semblent avoir manifesté très clairement l'opinion qu'il fallait que les tribunaux de droit commun soient ceux qui aient la juridiction nécessaire pour disposer de situations de cette nature.

Or, il arrive que, par la loi qui est devant nous, lorsque nous nous retrouverons dans des situations comme celles auxquelles je viens de me référer, ce seront les tribunaux de droit commun qui auront la juridiction nécessaire pour disposer de ces situations. En d'autres mots, nous ne serons plus, comme c'est la situation actuellement, juge et partie de situations dans lesquelles nous pouvons être impliqués.

Il me semble, à ces trois égards, que nous venons de faire des pas importants en avant et qu'il s'agissait là de situations qu'il fallait, de toute évidence, changer. Je ne m'en tiendrai qu'à ces aspects concernant la réforme parlementaire proprement dite.

Je ne dirai qu'un mot en terminant sur l'aspect que l'on pourrait convenir d'appeler monétaire du projet de loi, tant au chapitre des salaires qu'au chapitre du régime de

retraite.

Il y a des collègues qui, avant moi, vous ont fait une démonstration très nette de la vraie situation, tant au plan des salaires qu'au plan du régime de retraite. Mais il me semble qu'il est important de revenir peut-être sur la question du régime de retraite. Si l'on prend le temps de regarder un tant soit peu la nature du changement qui intervient dans le régime de retraite, l'on va réaliser qu'il ne s'agit pas d'une chose mineure, mais d'une chose absolument fondamentale.

Si l'on prend des chiffres globaux pour évaluer ce que cela veut dire effectivement en termes de diminution au chapitre du régime de retraite, l'on arrive aux conclusions suivantes: dans la rémunération globale actuelle du député, qui est de 66 395 $, 29 867 $, presque 30 000 $, étaient effectivement consacrés, imputables au seul régime de retraite. Dans les changements proposés, la rémunération globale du député sera diminuée à 47 844 $. Or, vous voyez que c'est un peu au-delà de 20 000 $ que cette diminution se situe. Il me semble qu'il s'agit là d'un exercice très clair, très évident de la volonté du gouvernement du Parti québécois, de rajuster un certain nombre de choses qui devaient l'être.

Bien sûr, on pourra discuter de la question des salaires des députés. Bien sûr, nos collègues de l'Opposition pourront interpréter cela de la façon dont ils voudront. Ils pourront discuter, plaider qu'il s'agit effectivement d'une augmentation du salaire. Or, il me semble qu'à la fois le député de Taschereau et le leader du gouvernement hier ont fait la démonstration très nette que, par rapport à ce qui a été consenti dans la loi 105, ce qu'on retrouve dans la loi 90 est encore en deça du contenu de la loi 105. Au-delà des chiffres, de la bataille ou de la guerre que l'on peut vouloir faire sur les chiffres, il y a quand même des questions de principe importantes dont il faut tenir compte.

On m'a dit, ce midi, que la moyenne d'âge des 122 personnes qui se retrouvent ici est d'environ 43, 44 ans. Il y en a des moins âgés et des plus âgés. Mais une chose est certaine...

Une voix: C'est Hermann qui remonte l'âge.

M. Fréchette:... c'est que, très probablement, les uns et les autres, des deux côtés de la Chambre, on est, me semble-t-il, au coeur d'une carrière. Il n'y en a pas beaucoup d'entre nous qui commencent ici une carrière ou alors qui la terminent. Nous sommes, pour la plupart, au coeur d'une carrière.

M. le Président, il me semble que ceux qui, lorsqu'ils arrivent au coeur d'une carrière, ont le goût de se lancer dans le monde de la politique, doivent compter sur des situations telles qu'ils pourront y venir sans se poser de questions sur ce qui les attend au niveau d'une certaine possibilité de gagner leur vie honorablement et raisonnablement.

M. le Président, pour les motifs que je viens d'indiquer, pour d'autres sur lesquels je n'ai pas le temps d'insister, je vous signale que c'est sans aucune réserve que je donnerai mon appui au projet de loi no 90.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Viau.

M. William Cusano

M. Cusano: Merci, M. le Président. Je me joins à mes collègues dans ce débat de deuxième lecture du projet de loi no 90, Loi sur l'Assemblée nationale du Québec.

Ce qui m'étonne, depuis mon arrivée à l'Assemblée nationale, c'est que ce gouvernement semble avoir le don de mêler les pommes et les oranges et de rendre très complexe, très compliqué, ce qui est très simple. Je dis le don de mêler les pommes et les oranges car ce projet de loi touche, en première partie, le fonctionnement de l'Assemblée nationale - ceci, on peut le souligner, est exigé depuis longtemps des deux côtés de la Chambre - et les changements qui sont présentés dans ce projet de loi sont très acceptables; ils sont louables. Je n'aurai aucune difficulté, en tant que député, à voter pour la première partie de ce projet de loi.

Mais, lorsqu'on arrive à la deuxième partie, plus particulièrement aux chapitres V et VI, c'est une autre paire de manches. Au chapitre V, on parle des conditions de travail des députés, de leurs salaires et de leurs avantages sociaux. Au chapitre VI, on établit un nouveau régime de retraite pour les députés. J'en parlerai plus tard, mais ce nouveau régime de retraite entrera en vigueur le 1er janvier 1983.

Essayer d'augmenter les salaires des députés en passant par la porte d'en arrière, M. le Président, c'est se moquer non seulement de cette institution qu'est l'Assemblée nationale, mais c'est se moquer d'une population qui est en train de traverser une crise sans précédent dans la province de Québec. Il y a au moins 401 000 chômeurs. On a 345 000 assistés sociaux. Nous avons au-delà de 4000 faillites dans les onze premiers mois de l'année 1982 et, maintenant, ce gouvernement nous présente une augmentation de salaire pour les députés.

C'est aussi se moquer de la population que de présenter, en cette Chambre, en même temps, le projet de loi no 90 et la loi no 105 la semaine dernière. Cette

Assemblée, comme vous le savez fort bien, M. le Président, a terminé, samedi soir dernier, un débat marathon sur la loi no 105, une loi injuste, arbitraire et irresponsable. Si le seul but de cette loi avait été de geler les salaires des employés des secteurs public et parapublic, ce que plusieurs syndicats, l'Opposition et l'ensemble de la population auraient accepté, avec une petite réticence, cela aurait été acceptable. Mais nous traversons une crise, M. le Président, plus accentuée au Québec qu'ailleurs, au Canada et dans le monde. Pourquoi en sommes-nous à cette crise? Est-ce à cause de l'obsession de ce gouvernement de vouloir séparer la province de Québec? Est-ce à cause des dépenses folles de ce gouvernement ou même de la mauvaise gestion du ministre des Finances? (16 h 40)

Votre incompétence vous a forcés, vous les ministériels, comme M. Parizeau l'a déjà dit, à tripoter et à voler les salaires des travailleurs et des travailleuses des secteurs public et parapublic. Le dépôt de la loi no 105 la semaine dernière, en cette Chambre, est un geste très arrogant et c'est ajouter du sel sur la plaie. Pendant que vous coupez de 20% pour une période de trois mois les salaires de ces travailleurs et de ces travailleuses, vous nous demandez de voter pour un projet de loi qui tripote les règles du jeu, les règles établies ici, à l'Assemblée nationale.

Couvert d'une propagande induisant la population en erreur, ce gouvernement, par l'entremise de son leader parlementaire, essaie de nous faire croire, à nous et à l'ensemble de la population, que le projet de loi no 90 diminuera les salaires des députés d'à peu près 10 000 $. C'est faux, c'est de l'hypocrisie toute pure, ce n'est pas une diminution de 10 000 $. C'est sûr et certain que si, en l'an 1800, le salaire des députés avait été de 50 000 $, ce serait autre chose.

Ce gouvernement est devenu un grand expert en tripotage.

Des voix: Ah!

M. Cusano: On le voit dans le projet de la restructuration scolaire. C'est du tripotage incroyable. Le ministre est ici, je suis bien heureux qu'il m'écoute. Dans ce projet de loi, on trouve des augmentations détournées et hypocrites. Ce projet de loi, je le précise, prévoit une augmentation de 6% à compter du 1er avril 1983. N'est-ce pas un beau geste? On ne prend pas une augmentation du 1er janvier au 1er avril, mais au 1er avril on se donne une augmentation de 6%. Je dois préciser que ceci va porter le salaire de base d'un député de 35 000 $ a 37 200 $. Cette loi prévoit aussi qu'à compter du 1er janvier 1984 le salaire d'un député est ajusté selon les taux d'augmentation de l'indice des prix à la consommation pour le Canada, tel que déterminé par Statistique Canada. Là, encore, c'est de l'arrogance, c'est de l'hypocrisie; encore une fois, c'est un abus de pouvoir.

Pour satisfaire les machines à voter que vous sortez une fois de temps en temps, sous prétexte de revaloriser le rôle des députés, cette loi permettra que le nombre d'adjoints parlementaires passe de 12 à 27. Pour ceux qui ne le savent pas, il faudrait préciser que l'indemnité accordée à un adjoint parlementaire est égale à 20% du salaire de base, c'est-à-dire à 7000 $ pour un poste qui été qualifié par les gens de l'autre côté de la Chambre, dans le passé, de poste de coupeur de ruban ou de prix coco pour satisfaire les députés d'arrière-ban. Ce n'est pas moi qui le dit, c'est l'actuel vice-premier ministre qui, en 1974, était député du comté de Sauvé, dans le nord de la ville de Montréal. Il disait, lors d'un débat sur la question des salaires: "Nous donnons le mauvais exemple à la population. " Est-ce qu'on donne aujourd'hui le bon exemple à la population, après avoir coupé les salaires des travailleurs et travailleuses des secteurs public et parapublic?

Il continue: "Le rôle du député, ce n'est pas de se servir d'abord. " Je continue. Il y a plusieurs de ses commentaires. II nous dit ici: "Ce qui est bon pour les députés est certainement bon pour l'ensemble de la population". Il aurait dû dire - je crois qu'il n'est pas encore intervenu, j'espère qu'il le dira - que ce qui est bon pour les employés des secteurs public et parapublic devrait certainement être aussi bon pour les députés. C'est vrai, merci. Lorsque j'ai pris la décision de me présenter au mois d'avril 1981, j'ai pris connaissance du salaire et du régime de pension et de tout ce qui est attaché au rôle du député. Je savais dans quoi je m'embarquais et j'y suis allé volontiers. Aujourd'hui, on est ici et on change les règles du jeu tel quel. Vous êtes devenus des experts dans cela, changer les règles du jeu. Vous l'avez fait en reniant votre signature. Vous l'avez fait en imposant des coupures tout à fait brutales aux employés des secteurs public et parapublic. On peut dire que changer les règles du jeu, vous connaissez très bien comment le faire.

Vous, MM. les ministériels, ce qui choque la population, c'est votre propagande. Je ne parlerai pas de l'argent que vous dépensez dans la propagande parce qu'on sait fort bien qu'avant que vous arriviez au pouvoir le budget de propagande du gouvernement était beaucoup moins élevé qu'il l'est aujourd'hui. Le gouvernement du Québec est l'un des plus grands propagandistes au monde. Vous tentez de faire croire à la population que vous imposez des coupures aux salaires des députés de

10 000 $. C'est de la diarrhée intellectuelle. C'est vraiment un abus de pouvoir de faire croire aux gens qu'on va subir une coupure de 10 000 $, quand, en réalité, le projet de loi donne aux députés, à la fin de l'année, une augmentation.

J'ai déjà mentionné les douze adjoints parlementaires qui reçoivent une somme de 7000 $ et maintenant vous remontez le nombre d'adjoints parlementaires à 27. Est-ce que, pour ces gens, ce serait une diminution de salaire? Une autre chose qui est intéressante, c'est que le projet de loi, en ce qui touche les pensions des députés, on s'est organisé de l'autre bord pour attendre. Vous savez, ce n'est pas d'aujourd'hui que l'on parle, de l'autre côté de la Chambre, de changer le système des pensions des députés. Cela fait bien longtemps. On a attendu au-delà du 15 novembre 1982. Je me demande bien pourquoi. Est-ce que c'est pour s'assurer que tous les députés ministériels élus en 1976 puissent bénéficier de l'ancien régime? C'est cela? Je suis content, vous êtes d'accord. Ce régime que vous trouviez très généreux et même scandaleux, tout d'un coup, c'est correct. On s'organise pour s'assurer que la loi entre en vigueur après le 15 novembre 1982.

Une chose qui me vient à la tête, c'est pourquoi s'assurer qu'il y ait un grand nombre de députés de l'autre bord qui puissent se qualifier pour la pension de député? Je n'ai pas tous les faits, mais on me dit, en parlant avec certains des collègues d'en face, que plusieurs d'entre eux, une fois qu'ils sont admissibles au système de pension des députés, ils le seraient aussi au système de pension des enseignants. Combien y a-t-il d'enseignants parmi vous de l'autre bord qui ont contribué au Régime de retraite des enseignants ou certains de la fonction publique, au Régime de retraite des fonctionnaires? Il y a peut-être un article que vous avez oublié là-dedans, et je remarque que le député de Joliette-Montcalm porte beaucoup d'attention, c'est qu'on y trouve un article dans ces régimes qui dit qu'une fois qu'un cotisant du Régime de retraite des enseignants ou du RREGOP ou du RRF est admissible à une pension d'un député il est automatiquement, indépendamment de l'âge, admissible au régime de retraite des enseignants ou des fonctionnaires. (16 h 50)

Savez-vous ce que cela veut dire, M. le Président? Pour quelqu'un qui a contribué pendant quinze ans au régime de retraite des professeurs, cela veut dire qu'il a droit, après quinze ans de service à 2% par année, à 30% de son salaire comme pension à vie, parce qu'il s'est qualifié au régime de député. Est-ce la vraie raison pour amener des changements et s'assurer que ces changements au régime de retraite entrent en vigueur après le 15 novembre? Les ministériels nous accusent souvent, nous de l'Opposition, de ne jamais faire des suggestions, ce qui est faux, ce qui est totalement faux, parce qu'on en fait, mais ils ont l'oreille dure. Ils sont durs de "comprenure".

Aujourd'hui, M. le Président, je les mets au défi. Je fais d'autres propositions. La première, comme mes collègues l'ont dit, est de scinder la loi en deux. On est totalement d'accord avec la première partie; ce sont des changements que tout le monde exige. Ce sont des changements louables. Si on est prêt à scinder la loi on accepte les changements à l'Assemblée nationale. Deuxièmement, on demande aux amis d'en face de maintenir le nombre d'adjoints parlementaires à douze. C'est trop pour les coupeurs de rubans et les prix coco. Je pense que douze, c'est assez. D'accord? Troisièmement, je suggère qu'il y ait un gel des salaires jusqu'au 31 décembre 1983 pour tout le monde ici en cette Chambre. Ce serait un peu conséquent avec la position prise par les ministériels sur la loi 105. Quatrièmement, on suggère le retrait de l'article prévoyant une indexation à compter du 1er janvier 1984. Cinquièmement, que les changements au régime de retraite des députés soient rétroactifs au 12 avril 1981, M. le Président, ceci imposant certains sacrifices, spécialement aux élus de 1976 du côté ministériel, qui ressortent du RRE, du RRF ou du RREGOP. Il me semble que ce n'est pas un trop gros sacrifice après avoir demandé aux travailleurs des secteurs public et parapublic de sacrifier, pendant une période de trois mois, 20% de leur salaire -et pourquoi? - parce que le ministre des Finances n'a pas été capable de gérer et d'administrer ses affaires.

En terminant, je n'ai pas besoin de répéter les recommandations que j'ai faites. Pour ces gens-là, M. le Président, qui nous disent qu'on n'a jamais de propositions à faire, elles sont faites, elles sont enregistrées et je les mets au défi de les accepter, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Groulx.

M. Élie Fallu

M. Fallu: M. le Président, on nous accuse de faire des coupures...

Des voix: Aveugles!

M. Fallu: On vient d'en couper pour 20% et on vient de se couper de 20 000 $. On vient de se couper de 30%!

Des voix: Ah! Ah!

M. Fallu: Le débat d'aujourd'hui fait suite à toute une série de débats qu'on a eus depuis quinze jours en cette Assemblée qui vont exactement dans le même sens et qui sont dans la perspective du message inaugural, d'il y a un an.

Je pense qu'il y a des gens qui ont la mémoire un peu courte en cette Chambre. Il y a une semaine, on débattait du démantèlement de l'Office des autoroutes, 10 000 000 $ annuellement d'épargnés. La semaine dernière, le regroupement des organismes électoraux, 2 500 000 $ par année d'économisés. La loi 105, 406 000 000 $. Aujourd'hui, la loi 90 sur les traitements des membres de l'Assemblée nationale, 2 800 000 $. Que fait-on en cette Assemblée? On protège le pouvoir d'achat des Québécois et des Québécoises. On nous dit que nous nous augmentons. J'aimerais bien voir ce qu'on a fait en 1977, alors qu'on a refusé toute indexation. On s'est coupé de 12, 1%. Qu'est-ce qu'on a fait en 1978, alors que l'indexation était de 12, 6%? On s'est coupé de 6, 6%. Qu'est-ce qu'on a fait en 1980? L'inflation était de 11, 2%, avec une indexation de 6%, on s'est coupé de 7, 9%. Qu'est-ce qu'on fait cette année, pour l'an prochain? Alors qu'on donne 5, 8% à l'ensemble du front commun, on se donne, comme parlementaire sur un an 4, 8%. On se coupe encore de 1%. Coupures par dessus coupures, c'est cela qu'on a fait de notre propre rémunération jusqu'à maintenant, jusqu'à ce que vienne cette réforme, une réforme en profondeur qui, cette fois, casse complètement le régime, soit dit en passant, celui installé sous M. Bourassa.

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre!

M. Fallu: À l'époque, en 1974, en tant que Parti québécois, nous avions combattu cette mesure. Qu'est-ce que ce régime nous aurait donné si nous n'avions pas fait ces rectifications année après année? De 35 000 $ qu'un député gagne présentement, nous aurions gagné, cette année, 48 453 $. Voilà ce qu'aurait donné le régime de 1974 si on l'avait continué. Entre-temps, qu'est-ce qu'il nous aurait valu en rémunération globale? Le régime d'administrateur, classe IV, aurait coûté 58 000 $, alors que celui-ci nous en coûte 66 000 $. Il faut le casser et c'est ce que nous nous apprêtons à faire. Nous le cassons, sachant fort bien que nous créons encore des distorsions épouvantables. Peut-être qu'à partir de 1984, c'est-à-dire dans plus d'un an maintenant, avec une indexation à l'indice des prix à la consommation moins une fraction, le salaire du député finira par se redresser très lentement, mais sans jamais dépasser celui des fonctionnaires de même niveau.

Mais, entre-temps, qu'est-ce qu'il en est? Au-delà de 50 000 fonctionnaires de l'État gagnent plus que le député qui est ici dans cette Chambre. Au-delà de 50 000 fonctionnaires sont-ils plus compétents que nous? Travaillent-ils plus de 32 1/2 heures? Travaillent-ils plus de 35 heures, plus de 38 1/2 heures? Je ne mets pas cela en cause. Sont-ils plus compétents que nous? Ont-ils plus de diplômes? Je ne mets pas cela en cause. Il est un fait brutal et, si je le donne ici en cette Chambre, ce n'est pas pour que nous nous indexions, que nous nous donnions les salaires des sous-ministres, c'est simplement pour constater que le député, au Québec, est sous-payé, il faut appeler les choses par leur nom.

Entre-temps, qu'est-ce qui se passe ailleurs? Regardons ce que nos petits amis d'Ottawa ont fait entre-temps. En 1977, le député en cette Chambre gagnait 27 800 $ et celui d'Ottawa, 25 500 $. Au 1er avril 1983, nous gagnerons 35 202 $ et lui en gagnera 50 350 $, c'est-à-dire plus de 15 000 $ de différence. Et puis, on nous dit: C'est indécent ce que vous faites, puisqu'au moment où vous coupez vos fonctionnaires, vous vous augmentez. Je regrette! Mensonge éhontél

M. Rivest: Ce n'est pas vrai.

M. Fallu: Nous ne nous augmentons pas; nous garderons en janvier, février et mars, le salaire du mois de janvier 1982...

Mme Juneau: C'est cela.

M. Fallu:... en 1983. N'est-ce pas cela une coupure? Et puis, à partir d'avril, nous reprenons nos 6% du 1er janvier 1982. Qu'est-ce à dire? C'est que notre rémunération sera encore, en moyenne, 1% inférieure en augmentation à celle de la fonction publique. Alors, assez, c'est assez. Et ensuite, on a le culot de nous dire: Messieurs les péquistes... Comme si cela ne les regardait pas, eux, qui ont été élus en 1973, pour quelques-uns, en 1970, d'autres qui sont revenus et qui ont racheté leur régime de retraite entre-temps...

Une voix: Ah!

(17 heures)

M. Fallu: Oui, on pourra parler de cela. On vient nous dire comme cela: II faut absolument qu'au 13 avril vous coupiez rétroactivement vos pensions. Je voudrais bien voir. Savez-vous ce qu'on fait par ce geste? 2 800 000 $ qu'on économisera à l'État du Québec l'an prochain. C'est l'équivalent de ce que cela coûte actuellement pour tous les pensionnés de l'Assemblée nationale annuellement. En voilà une économie! De qui est-ce? De M. Bourassa? Oui, M. Garneau et beaucoup d'autres, des veuves et des enfants. Ces

gens, pourquoi ne voulez-vous pas qu'on les coupe rétroactivement jusqu'à ce qu'ils atteignent 60 ans, comme par hasard? Vous allez plaider les droits acquis. Nous mettons les droits acquis. La loi s'appliquera à partir du 1er janvier.

M. le Président, nous sommes un peu déviants en cette Chambre, puisque l'objet principal de la loi n'est pas la rémunération ni les fonds de retraite, c'est accessoire, ce sont des outils que les parlementaires ont pour pouvoir manger, pour pouvoir élever leurs enfants, pour pouvoir se déplacer dans leur circonscription électorale et un peu partout au Québec. La rémunération, c'est une faible gratification pour la vie, pour la nourriture, pour l'essentiel, mais le projet de loi no 90 a toute une autre justification, a tout un autre contenu. Actuellement, les libéraux sont en train de faire oublier à cette Chambre, sont en train de masquer devant l'opinion publique l'objet fondamental du projet de loi no 90, qui est un changement profond de nos institutions: donner à l'Assemblée nationale, au pouvoir législatif, sa véritable indépendance. Qui de nous, comme parlementaire, s'aviserait - cela se passe dans quelque autre Parlement, on le sait - d'appeler un juge au téléphone pour lui demander d'accélérer un peu la sortie de sa sentence? Personne d'entre nous, parce que nous respectons la division des pouvoirs. Nous respectons la division entre le pouvoir législatif et le pouvoir judiciaire. Ce que nous sommes en train de faire dans cette Chambre, c'est la division réelle, organique, du pouvoir législatif, du pouvoir exécutif.

M. le Président, c'est la dignité du Parlement qui va renaître; cette dignité, cette indépendance qui s'est, d'année en année, rapetissée, qui a été contrôlée continuellement, de plus en plus par l'Exécutif, l'Exécutif qui, ici même en cette Chambre, a contrôlé nos ordres du jour, a contrôlé nos travaux, nous a donné des ordres à tous les jours. Nous avons été au service essentiellement de l'Exécutif. D'ailleurs, à l'occasion de l'étude de la loi 105, on l'a souligné avec beaucoup de justesse. C'est le leader en Chambre qui décide de l'ordre du jour de toutes nos commissions. Nous avons supposément un pouvoir d'initiative, comme législateur, mais regardez ce que deviennent ces lois, ces projets de loi privés présentés au nom des députés, quand ils ne sont pas d'affaires municipales ou quand ils ne sont pas de la justice. Ils dorment et ils dorment longtemps au point de s'asphyxier et de mourir au feuilleton. C'est ce qui arrive à l'initiative du parlementaire. Quand donc un parlementaire va-t-il, à travers le mécanisme même qu'est son pouvoir, à travers la Législature, pouvoir proposer à l'ensemble de ses collègues, à l'unanimité sans doute, une réforme majeure? Il n'en a même pas l'outil.

Vous qui êtes là depuis 1867, depuis le début de notre Législature, puisqu'on sait que la présidence est une et est indivisible, quand avez-vous vu, comme président, un député se lever en cette Chambre et dire: M. le Président, je fais motion pour que la commission de l'Assemblée nationale, la commission de la justice, la commission des affaires municipales siège dans telle salle pour m'entendre, moi, législateur, proposer un projet? Jamais!

M. Rivest: Jean-Roch ne veut pas...

M. Fallu: Nous allons transformer notre institution. Nous allons la rendre au service des représentants du peuple. Nous allons la redonner - pas la redonner, pardon, elle ne leur a jamais appartenu - nous allons la donner aux élus. M. le Président, cette réforme est d'une profondeur qu'on n'imagine peut-être pas. Nous avons vécu dans la tradition du parlementarisme britannique. Nous avons vécu donc sous l'égide de l'Exécutif. Nous avons été le bras législatif de l'Exécutif. Il en a toujours été ainsi dans le parlementarisme britannique. Comme société, nous vivons toujours dans cette tradition, et à l'exemple d'ailleurs de ce que nous avons fait, dans les années 1960 à 1973, pour le règlement de l'Assemblée nationale, vivant toujours dans cette institution et de l'esprit de cette institution britannique, nous allons profondément la transformer avec une approche - comme on le dit dans notre jargon parlementaire - à la française, c'est-à-dire au mode des Parlements français, à l'exemple des Parlements français par opposition aux Parlements britanniques.

Nous allons faire la jonction de nos deux cultures en cette Chambre, notre culture britannique et notre culture française. M. le Président, l'Opposition tente de masquer au peuple du Québec le geste que nous sommes en train de poser. Elle le masque sous un faux débat économique, laissant croire aux gens que nous sommes ici une bande d'égoïstes, en train de nous servir, en train d'empocher les deniers publics. Il n'en est rien. Pour le reste, ce que nous faisons, en cette Chambre aujourd'hui, saura marquer l'histoire du parlementarisme au Québec pour les cent prochaines années.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Sainte-Marie.

M. Guy Bisaillon

M. Bisaillon: Je m'excuse auprès de mon collègue, son tour viendra immédiatement après.

M. le Président, ce projet de loi... Est-ce que tout est maintenant réglé, M. le Président? Est-ce que je peux avoir le droit

de parole?

Le Vice-Président (M. Rancourt): Oui, M. le député de Sainte-Marie, je vous ai reconnu.

M. Bisaillon: Merci, M. le Président.

L'intervenant qui m'a précédé a parlé de la dignité du Parlement que l'on était pour retrouver. Je trouve étrange que l'on pense à faire recouvrer la dignité au Parlement seulement maintenant. J'aurais été fier que le député pense à la dignité du Parlement lorsqu'on a siégé, il y a à peine trois jours, au moment où on a voté une loi avec 58 000 ou 80 000 pages de texte, sans les regarder, sans les étudier en profondeur. Cela aussi fait partie de la dignité du Parlement.

Par ailleurs, le projet de loi no 90 qui est devant nous, qui est la Loi sur l'Assemblée nationale du Québec, apporte un certain nombre de modifications à notre fonctionnement actuel qui représentent effectivement des améliorations.

Nous avons tous eu l'occasion, en commission parlementaire, avant la réimpression du projet de loi, de faire un certain nombre de suggestions au leader du gouvernement qui en a plus ou moins, il faut bien le dire, tenu compte dans la réimpression, mais on voit qu'un certain nombre de choses réapparaissent telles qu'elles avaient été placées dans le projet de loi initial.

Je voudrais donc, M. le Président, si vous me le permettez, souligner un certain nombre d'éléments qui sont renfermés dans le projet de loi no 90 et qui pourraient éventuellement faire l'objet d'amendements en commission parlementaire, après la deuxième lecture.

D'abord, toute la question du Bureau de l'Assemblée nationale. On sait que ce qui est proposé dans le projet de loi no 90 est un bureau pour diriger, non seulement les travaux de l'Assemblée nationale, mais aussi les outils de travail pour l'ensemble des députés. C'est une innovation importante. Actuellement, ce rôle est joué par un comité de régie interne qui est surtout dirigé par l'Exécutif, puisque ce sont, d'abord et avant tout, des ministres qui sont majoritairement représentés au comité de régie interne. Ce que nous propose le projet de loi no 90, c'est de former un Bureau de l'Assemblée nationale qui viserait à édicter les normes et les règlements qui devraient s'appliquer quant aux outils de travail des députés. Pour moi, c'est une amélioration. Il n'en demeure pas moins que, dans la façon même dont on procède pour la nomination des membres du bureau, je dis, M. le Président, que c'est changer une piastre pour quatre 0, 25 $.

Si on regarde le fonctionnement qui nous est proposé, qu'est-ce que c'est, à toutes fins utiles? C'est que le gouvernement, le parti gouvernemental, va nommer quatre de ses membres qui ne seront pas des membres de l'Exécutif, mais qui seront des membres du parti gouvernemental, alors que le parti d'Opposition ou les partis d'Opposition verront à nommer les trois autres personnes.

De qui ces personnes vont-elles dépendre? Je continue, M. le Président, à maintenir que tu dépends des gens qui te nomment et que tu rends des comptes aux gens qui t'élisent. Si l'Assemblée nationale doit se doter d'un bureau, il est important, pour ma part, que ce soit l'Assemblée nationale qui vote pour les représentants de l'Assemblée nationale à ce bureau. De cette façon, les sept députés de cette Assemblée seraient vraiment les représentants de l'ensemble des députés. Il ne faudrait pas oublier, M. le Président, qu'on donne un rôle à ce bureau qui n'a rien à voir, mais rien à voir, avec l'activité gouvernementale, qui ne vise en rien à empêcher ou à bloquer l'action partisane du gouvernement non plus que l'action partisane de l'Opposition. C'est vraiment un groupe de députés nommés par leurs pairs pour régler des questions ou statuer sur des questions qui concernent leurs pairs. Pourquoi donc n'aurions-nous pas, quant à l'élection du bureau, un mécanisme, celui que l'on choisit pour notre élection dans notre comté, c'est-à-dire des mises en nomination, en candidature, et un vote par l'ensemble des membres de cette Assemblée en notant, cependant - le projet de loi pourrait le faire - qu'on doit assurer un équilibre entre l'Opposition et le parti gouvernemental? Il me semble que cela nous donnerait au moins l'occasion de voter pour les gens qu'on veut voir nous représenter à ce Bureau de l'Assemblée nationale. Quant à faire des améliorations, arrêtons donc d'améliorer les affaires seulement petit pas à petit pas. Quant à changer complètement notre mode de fonctionnement, changeons donc en même temps la façon d'élire les gens, pour en faire des personnes responsables.

C'est donc un élément important comme toute la question du quorum qui a été combien de fois soulevée. Je maintiens que le rapport Vaugeois, relativement au quorum, avait une bonne orientation et que c'est celle que le projet de loi no 90 devrait retenir, c'est-à-dire un quorum de départ et l'assurance aussi qu'il ne peut y avoir de vote sans l'appel des députés. De cette façon, les députés pourraient participer à davantage de travaux à l'extérieur de cette Chambre et n'auraient pas, comme seul objectif, lorsqu'il y sont, que de participer à la loi du nombre, d'un côté ou de l'autre, de toute façon. Que l'on soit d'un côté ou de l'autre sur les questions qui nous préoccupent, il ne faudrait jamais oublier...

On est placé devant un projet de loi qui devrait nous amener à des débats non partisans parce qu'un jour ou l'autre, de toute façon, on traverse d'un côté ou de l'autre de la Chambre, et on est placé, un jour ou l'autre, à vivre les situations qui ont été vécues par d'autres. Il me semble donc que c'est dans cette perspective qu'il faudrait situer le projet de loi no 90.

De même si on veut redonner un peu de dignité au Parlement, il faudrait commencer par en donner aux parlementaires. Pour en donner aux parlementaires, M. le Président, il me semble illogique de prévoir qu'un député ne puisse pas déposer en cette Chambre un projet de loi qu'il a lui-même préparé, sous prétexte que cela pourrait entraîner, par exemple, des dépenses gouvernementales. On sait que notre procédure parlementaire et telle qu'une fois qu'un projet de loi est déposé à l'Assemblée nationale, à partir du moment où il est inscrit au feuilleton, c'est le leader du gouvernement et lui seul qui peut faire l'appel des projets de loi. Donc, la possibilité pour un député de présenter un projet de loi, même si cela devait faire appel à des dépenses gouvernementales, cela ne met aucunement en danger le gouvernement puisque, par la voie de son leader, le gouvernement est le seul capable de décider si oui ou non un projet va suivre son cours. Évidemment, il y a la possibilité du mercredi, mais cette possibilité, comme le souligne le leader de l'Opposition, pourrait être inscrite dans les restrictions à l'article dont je parle.

Dernier aspect quant à la reconnaissance des parlementaires, toute la question du budget de l'Assemblée nationale. Je trouve, quant à moi, un peu étrange que le Parlement soit l'organisme habilité à voter les crédits et les budgets de l'ensemble des ministères, mais quand on est rendu à voter le nôtre, cela a l'air qu'on n'est plus assez grand garçon ou grande fille pour le faire nous-mêmes. Je trouve étrange que, dans un autre projet de loi qui nous a été présenté, quand on veut "contrôler" les dépenses du Directeur général des élections, on demande que cela soit soumis à l'Assemblée nationale. Autrement dit, on n'est pas allé jusqu'à dire que le Conseil du trésor vérifierait les dépenses mêmes quotidiennes du Directeur général des élections; on a dit: Cela va aller à l'Assemblée nationale. Mais l'Assemblée nationale, elle, quant à son budget, il faudrait qu'elle se soumette aux directives des Finances et du trésor. Il me semble que si c'est ici qu'on doit voter le budget des autres, cela doit nous donner suffisamment de maturité pour voter les outils de travail de l'Assemblée nationale en appliquant à ces budgets les critères qu'on applique aux autres lorsqu'on les vote.

Finalement, vous voyez donc qu'il y a un certain nombre d'amendements que j'annonce immédiatement et que je proposerai en troisième lecture, non pas parce que ce sont pour moi des éléments suffisants pour repousser ce projet de loi qui, comme je l'ai dit, présente des éléments fort positifs, mais il me semble que notre travail est aussi d'amener ce qu'on voudrait avoir comme bonifications au moment où on fera l'étude article par article.

Il reste évidemment toute la question du personnel de l'Assemblée nationale. Je vous rappellerai qu'une commission spéciale, la Commission spéciale sur la fonction publique, qui a été mise sur pied par cette Assemblée en novembre dernier, a déposé son rapport en juin dernier, sur lequel rapport l'Assemblée nationale s'est prononcée en demandant au gouvernement d'en appliquer les principales recommandations. Ce rapport contenait une recommandation selon laquelle il nous faudrait, dans l'avenir, distinguer le personnel de l'Assemblée nationale des autres, sans nécessairement faire perdre des droits acquis aux employés qui sont là, sans leur faire perdre les liens juridiques qui peuvent les unir à la fonction publique. Il nous semblait important, après une étude du fonctionnement d'autres Parlements, de reconnaître le personnel de l'Assemblée nationale comme étant un personnel particulier, qui doit répondre à des exigences particulières, mais qui doit aussi recevoir un traitement particulier parce que son travail s'effectue dans des circonstances différentes de celles des autres employés. J'ai déjà souligné le fait à la commission parlementaire et je ne retrouve rien dans le projet de loi réimprimé qui nous indique une volonté gouvernementale d'appliquer cette recommandation de la Commission spéciale sur la fonction publique.

Il reste finalement deux points mineurs qui ont fait l'objet de combien de discussions à cette Assemblée nationale: toute la question de la rémunération et de la pension. En commission parlementaire comme en sous-commission, à quelques reprises, j'ai demandé au leader du gouvernement de dissocier ces deux questions, de dissocier le fonctionnement et les mécanismes de travail du député, donc, les mécanismes de travail à l'Assemblée nationale même, et la question de la rémunération. Je réitère aujourd'hui cette demande, en espérant que le leader en comprendra l'importance. Que ces deux questions soient dissociées et que l'on puisse adopter nos règles de fonctionnement au moins en se donnant des chances de tenir un discours identique sur ces questions, et qu'on laisse les différences s'exprimer sur les questions de salaires et de régimes de retraite. Il me semble que cela est vital et qu'on devrait en tenir compte. (17 h 20)

Sur la question des salaires, j'aurais pu

recommander des amendements à ce qui est proposé dans le projet de loi. J'aurais pu, par exemple, parler de réduction modulée -quel beau terme - de récupération modulée. Cela veut dire, par exemple, que la récupération modulée aurait pu avoir comme effet, entre le 1er janvier 1983 et le 1er avril qui vient, dans les trois mois de l'année 1983, de demander, non pas parce qu'ils sont trop payés, non pas parce qu'ils sont responsables, non, parce qu'il faut qu'ils fassent leur part, aux plus hauts rémunérés de l'Assemblée nationale d'abandonner une partie de leur paie.

Cela aurait suivi le même mécanisme que celui qu'on vient de voter dans la loi 105. Cela aurait eu comme effet de laisser les plus bas salariés de l'Assemblée nationale sans aucune récupération. Mais cela aurait demandé aux autres, ceux qui ont juste un petit montant additionnel d'avoir une réduction plus légère, et là, de mettre l'ensemble de la réduction, les gros 20%, aux plus hauts rémunérés et dire: Pendant trois mois, les ministres et tous ceux qui ont des fonctions plus rémunérées, eux, ils procéderont par grandeur d'âme, par désir d'améliorer les choses, par désir de faire leur part, ils se feront récupérer 20% de leur salaire. J'aurais pu faire cela. L'occasion aurait été trop belle compte tenu de ce qu'on vient de vivre.

Je ne le ferai pas, parce que cela fait trop longtemps que je dis que ces questions ont entretenu des discours démagogiques à l'Assemblée nationale. Cela fait trop de fois que j'interviens pour dire qu'on n'ose pas ici faire le débat véritable et fondamental sur la question des salaires. Je vais quand même dire et maintenir que compte tenu de ce qu'on vient de vivre, il est indécent que ce gouvernement ne gèle pas les salaires cette année et pour l'an prochain, comme il l'a déjà fait dans le passé. Parce qu'il faut se rendre compte que le gouvernement l'a déjà fait, ce n'est pas nouveau, depuis 1976, le gouvernement a demandé à l'Assemblée nationale et aux députés, aux membres de l'Assemblée nationale, de geler leurs salaires. Ils l'ont fait dans le passé. Ils l'ont fait au moins une fois. Les autres fois, ils ont limité leurs augmentations à 6%.

C'est un geste qui a déjà été posé. Est-ce que dans les circonstances, on ne pourrait pas au moins s'entendre pour dire: Trouvons un mécanisme qui va nous permettre d'éviter que cette question revienne devant nous à tout jamais, mais en même temps, au moins ne poussons pas l'odieux d'ajouter quoi que ce soit à nos salaires pour cette année. J'annonce, si ce n'est pas déjà annoncé, que j'aurai un amendement à cet égard lors de la commission parlementaire. Pour moi, c'est important, comme il est important aussi que ce projet de loi contienne un mécanisme qui fasse en sorte que jamais plus les députés soient obligés d'être dans cette position abjecte d'avoir à décider de leurs propres salaires, avec tout ce que cela peut entraîner de questions démagogiques. Dans le passé, reconnaissons au moins qu'il y avait eu un mécanisme de trouvé. En 1974, le gouvernement, après avoir fait faire une étude par des gens impartiaux, en dehors du parlement, avait trouvé un mécanisme.

Ce mécanisme faisait en sorte que jamais plus les parlementaires auraient eu à se prononcer sur la question de leurs salaires. On a voulu jouer dedans. On a voulu faire les "smarts", et on a fait de la démagogie avec cette question. Maintenant, payons pour la démagogie qu'on a faite dans le passé. Au moins, profitons de l'expérience et plaçons dans la loi un mécanisme qui va faire en sorte que jamais plus les parlementaires n'auront à se pencher sur cette question, ou accordons - ce qui serait plus intéressant - les mêmes droits et les mêmes privilèges à l'ensemble des travailleurs pour qu'ils puissent eux-mêmes décider de leurs salaires, eux aussi. J'espère, M. le Président, que vous m'entendez bien. J'entends, moi aussi.

Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Bisaillon: Merci, M. le Président. Le dernier point dont je voulais traiter, c'est la question du régime de retraite. Toute l'analyse qui pouvait être faite sur le régime de retraite actuel des députés a démontré qu'effectivement ce régime de retraite était devenu assez difficile à défendre. À la décharge de ceux qui l'avaient pensé à l'époque, il faudrait quand même rappeler -ce n'est pas inutile de le faire pour les gens qui nous regardent - dans quelles circonstances ce régime de retraite avait été mis sur pied. Il a été mis sur pied à une époque où l'âge d'entrée dans la vie publique était beaucoup plus élevé qu'il ne l'est aujourd'hui. Cela a aussi été fait à une époque où la durabilité dans la fonction publique était plus longue, parce qu'à l'époque, il faudrait bien qu'on se rappelle que ça ne siégeait pas au rythme de maintenant. C'étaient trois ou quatre mois par année. Ce n'était pas non plus pour discuter de toutes les questions qui sont soumises aujourd'hui au Parlement ou aux parlementaires. Donc, le travail était moins important et moins volumineux par la force des choses, parce qu'il y avait moins de programmes, moins de projets de loi et aussi moins de temps pour légiférer. Mais ces fonctions étaient surtout remplies par des personnes plus âgées qui entraient en politique alors qu'il y avait déjà une bonne partie de leur vie d'exercée dans une autre profession ou dans une autre activité et qui

restaient plus longtemps parce que c'était moins épuisant.

Aujourd'hui, M. le Président, on se rend compte que c'est la situation inverse. De plus en plus, l'âge moyen d'entrée dans la vie publique est relativement bas - 35 ans au moment où on se parle - et dure relativement peu de temps, finalement; quand une personne a maintenant fait dix ou douze ans, c'est à peu près le maximum qu'on peut imposer à quelqu'un. Évidemment, cela dépend des circonstances, mais, de façon générale, c'est ce qu'on remarque actuellement. Il est bien évident, M. le Président, qu'à partir du moment où un fonds de retraite a été pensé pour des gens plus âgés qui restaient plus longtemps, qui gagnaient moins d'argent aussi et qui travaillaient un peu moins et qu'on applique les mêmes normes, les mêmes critères à des gens qui sont plus jeunes et qui restent moins longtemps, c'est évident que les coûts entraînés par le régime sont conséquents et il faut donc apporter dans ce sens des modifications.

Je termine, M. le Président, en disant que, si on doit apporter des modifications, il faudrait quand même tenir compte d'un certain nombre d'éléments qui sont, par exemple, les droits acquis d'un certain nombre d'entre nous qui siégeons depuis un certain temps à l'Assemblée nationale, en acceptant de faire des coupures sur le reste, et aussi en tenant compte d'idées peut-être différentes de celles qu'on est habitué à discuter lorsqu'on parle d'un régime de retraite. J'ai déjà fait des suggestions, M. le Président. Je les ai faites en commission parlementaire. Je les ai faites en sous-commission. Cela n'apparaît pas maintenant.

Je demande encore une fois que cette Assemblée nationale, au moment où elle demandera l'étude de ce projet de loi en commission parlementaire - je termine avec cette phrase, M. le Président - que les membres de la commission puissent examiner d'autres modes: par exemple la possibilité d'un abandon de la pension s'il y avait une intégration dans la fonction publique du Québec comme emploi. C'est une chose qui ne coûterait rien et qui amènerait un peu d'acquis au niveau de la fonction publique, tout en reconnaissant la possibilité d'un placement privilégié à l'intérieur de la fonction publique, pour autant que cela corresponde aux normes de la fonction publique. Il y a une deuxième recommandation que j'avais faite, c'est-à-dire la possibilité pour un député de ne pas participer au régime, de décider lui-même s'il veut ou ne veut pas participer au régime de retraite et qu'on lui verse un montant d'argent en compensation, s'il ne participe pas. Autrement dit, c'est l"'opting out" avec une compensation financière, M. le Président.

M. Vaugeois: M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Sur une question de règlement, M. le député de

Trois-Rivières.

(17 h 30)

M. Vaugeois: En écoutant le député de Sainte-Maire, j'essayais de relire le règlement, entre autres l'article no 70. Comme il a annoncé un amendement pour la commission parlementaire, je voudrais être certain qu'il est conscient que peut-être bien que si son amendement modifie substantiellement ce qui est déjà dans le projet de loi, il ne pourra pas... Je ne voudrais pas qu'on soit privé de sa proposition.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Bisaillon: Juste un instant, M. le Président, sur la question de règlement.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Sur la question de règlement, M. le député de Sainte-Marie.

M. Bisaillon: Oui, sur la question de règlement. J'ai bien compris, quant à moi, que les amendements que je proposais n'étaient pas des amendements qui modifient les principes qui sont dans le projet de loi, de sorte qu'ils sont toujours possibles en commission parlementaire, et même plus loin, il serait possible aussi, après la commission parlementaire, d'en faire devant cette Chambre.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre. Pour l'instant, je crois que, comme le député de Sainte-Marie dit lui-même qu'en commission parlementaire, cela ne modifie pas les principes, pour l'instant, je lui laisse la responsabilité de proposer ses amendements où il le veut. M. le ministre.

M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, tout d'abord, c'est beaucoup plus en tant qu'ex-whip que je voudrais situer mon intervention. J'ai eu la chance pendant au moins trois ans de côtoyer mes collègues et je sais à quel point certains subissent des frustrations et à quel point on se sent, à plusieurs moments, comme ne faisant pas partie intégrante de cette Chambre. Au contraire, plusieurs passent des remarques comme celles-ci: Nous sommes des machines à voter. Nous avons de la difficulté en commission parlementaire, lorsque le ministre pilote une loi, à exprimer nos propres points de vue. Plusieurs nous

disent également: Qu'est-ce que je ferai à l'étude des crédits, comme député? Étudier élément par élément, c'est le "show" du critique de l'Opposition - c'est l'expression qu'on entend - et du ministre impliqué.

Une voix: C'est cela.

M. Chevrette: Que de fois j'ai entendu ces expressions. Si j'ai adhéré assez spontanément à cette partie de la loi, c'est précisément parce qu'on vise à créer des commissions où les députés eux-mêmes pourront jouer un rôle concret, où les députés eux-mêmes pourront questionner l'administration publique, où les députés eux-mêmes pourront faire des suggestions. On sait pertinemment que le cadre légal que nous avons devant nous ne fixe pas le type de commissions; il donne le pouvoir à l'Assemblée nationale de créer divers types de commissions. Mais je pense que tout le monde sait bien dans cette Chambre que nous avons l'intention de créer, par exemple, une commission des finances publiques où tout parlementaire, de quelque côté de la Chambre qu'il soit, pourra questionner régulièrement sur les finances publiques.

Nous avons l'intention de créer des commissions d'initiative parlementaire où un simple député pourra être à l'origine, pourra présenter lui-même certains projets de lois en cette Assemblée nationale, et cela m'apparaît drôlement important. Nous pourrons également, à certaines commissions, questionner des sociétés d'État, questionner des régies d'État, qui viendront s'asseoir, qui viendront expliquer le pourquoi de leurs décisions. On sait fort bien que, dans notre cadre législatif, il y a des sociétés d'État qui ont une autonomie fort grande et qui, malheureusement, ne doivent répondre devant cette Chambre que par l'intermédiaire d'un ministre tuteur. On pourra, si on crée cette commission publique, demander à la Ligue des droits de l'homme, par exemple, de venir se présenter; demander à la Régie des alcools du Québec de venir s'asseoir devant les parlementaires pour être questionnée; demander à tout autre groupe qui a une autorité, une autonomie, en termes de fonctionnement, de venir répondre de ses faits et gestes devant la commission parlementaire. Cette partie m'apparaît extrêmement importante pour les parlementaires et, en particulier, pour ceux du pouvoir. Quel que soit le parti qui sera au pouvoir, je pense que c'est important que tous les parlementaires de cette Chambre se sentent un peu revalorisés et puissent exprimer leur point de vue un peu plus à l'aise, un peu plus dégagés que dans le cadre dans lequel nous sommes présentement.

Il y a également le Bureau de l'Assemblée nationale... J'écoutais le député de Sainte-Marie dire tantôt qu'il serait préférable qu'on élise ici qui on voudra. Bien sûr, c'est bien évident que dans son cas, c'est la seule façon pour lui d'être élu. Mais je me demande ce que les libéraux diraient si on nommait, leurs représentants au Bureau de l'Assemblée nationale. Est-ce que les libéraux aimeraient qu'on les leur impose par l'Assemblée nationale, parce que le côté majoritaire aura toujours raison? Est-ce que la majorité pourrait sélectionner, dans notre régime parlementaire, ceux parmi vous qu'on voudrait voir siéger?

M. le député de Jean-Talon, vous auriez des chances, mais je ne peux pas en dire autant du député de Mégantic-Compton. Donc, à partir de là, il est évident que cela présente un danger. Je suis convaincu que dans le régime de parlementarisme que nous vivons, les formations mêmes de l'Opposition n'accepteraient pas cela. Quant au député indépendant, je le comprends. C'est un choix qu'il a fait. On ne peut pas changer la nature des choses. C'est tout.

Pour ce qui est du quorum de 10%, je suis entièrement d'accord aussi, pas parce que j'ai été whip, pas parce que c'est difficile à certains moments de garder des gens dans une Assemblée, mais combien pourrons-nous avoir de députés intéressés à travailler à des commissions d'initiative parlementaire? On a eu un groupe - le député de Sainte-Marie peut en témoigner -sur la fonction publique, un groupe qui a travaillé passablement; un autre groupe qui a travaillé à la commission pour la protection de la jeunesse, dans une commission spécifique, a travaillé énormément également. Donc, à mon avis, on pourra, avec un quorum peut-être réduit, permettre à des individus de s'absenter sur une base régulière pour préparer des thèses particulières et nous permettre peut-être, comme Parlement, d'avoir le résultat ou les fruits d'une cogitation, d'un travail sérieux fait par un groupe de parlementaires qui se seront donné un objectif précis sur lequel ils étaient intéressés à travailler. Cela me sourit.

M. le Président, en cette Chambre, on a parlé de la dignité du Parlement. Cela a été un peu repris et ridiculisé par notre ami de Sainte-Marie, disant que 80 000 pages, ce n'était pas digne. Le lieu de cette Chambre, c'est un lieu où chaque député est libre de s'exprimer. Il peut se lever, il peut dire ce qu'il veut. On vit dans un régime de parti, c'est un fait. Il y en a qui préfèrent jouer leur rôle de dissidence à l'intérieur de leurs structures. Ce doit sûrement être ainsi à l'intérieur du Parti libéral, comme c'est le cas ici à l'intérieur de la majorité ministérielle. Il y a des gens qui ne sont pas d'accord, mais qui le disent à leur caucus, comme il y a des gens chez nous qui ne sont pas d'accord et qui ne se gênent pas pour le dire à nos caucus. Ils enregistrent leur

dissidence là. Pour certains, cela s'arrête là. Pour d'autres, ils préfèrent exprimer leur dissidence d'une façon plus officielle. Il y en a d'autres qui sentent même le besoin de nous quitter. C'est leur droit le plus fondamental. On vit dans un régime démocratique. Je ne vois pas en quoi cette Chambre ne permet pas à un individu de s'exprimer. Qu'on s'exprime à l'encontre d'un point de vue ou pour un point de vue, cela n'entache en rien la dignité de cette Chambre. Quelqu'un peut être contre un point de vue dans cette Chambre, il n'est pas plus fin pour autant qu'un autre qui est pour. C'est une question d'évaluation, c'est une question d'orientation politique. C'est une question purement et simplement de parti pris à un moment donné pour ou contre un objectif précis ou un geste précis. Donc, je ne vois pas en quoi on puisse parler d'un manque de dignité, quelle que soit la décision que nous avons à prendre.

Quant aux salaires, vous me faites rire un petit peu par vos arguments, MM. de l'Opposition. Vous me faites sourire. Je vais rester exclusivement au niveau des échanges globaux que nous avons. On sait très bien dans le fond qu'il n'y a pas un groupe de salariés au Québec qui a suivi le rythme d'augmentation des parlementaires. Depuis 1977 jusqu'en 1982, les augmentations ont été de l'ordre de 37%. De 1977 à 1982, 37% divisé par 5, cela fait 7%. Dans la fonction publique, 70% d'augmentation, et si on avait suivi la proposition libérale, c'est quelque 80% d'augmentation qu'on aurait eu. On a mis un terme à cela. À tous ceux qui pensent que c'est prohibitif les 37% sur cinq ans, dites-leur que le gouvernement de ce côté-ci est prêt à proposer cela pour les cinq prochaines années à n'importe quel groupe de la fonction publique, quels que soient leur qualité et leur statut. 37% sur cinq ans, voyons! Il y eu de l'exagération à écouter nos amis d'en face. Faut-il être hypocrites un tant soit peu pour oser dire cela? Votre propre proposition, celle de M. Bourassa, pour respecter les termes exacts exigés par le député de Jean-Talon, nous aurait donné quelque 80% d'augmentation. On a limité cela à 37% depuis cinq ans... et c'est trop! C'est trop! (17 h 40)

Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre! À l'ordre!

M. Chevrette: Écoutez, qu'est-ce qu'on se dit quand on se rencontre? On est un groupe de masochistes. Combien de fois ai-je entendu cela dans mes conversations avec vous autres? On est "toto"! Il y a des professionnels qui gagnent 55 000 $ et nous sommes encore à 35 000 $. On travaille 80 heures par semaine et ils travaillent 32 heures et demie ou 35 heures. On se le dit cela, n'est-ce pas, quand on se croise?

Arrêtez donc vos petits discours hypocrites! Écoutez, on est à 35 000 $! Je connais des gens, dans cette Chambre, des deux côtés de la Chambre, qui perdent de l'argent. Il y a des gens qui perdent de l'argent sur le régime de retraite, la longévité.

Je connais quelqu'un de votre côté qui me disait, je ne sais pas quand, que la longévité d'un député au Québec est de 59 ans en moyenne. On a un fonds de retraite applicable à 60 ans, celle que l'on propose, et on exagère? Mon doux qu'on exagère! On est à un an de moins que la longévité normale moyenne des gens du Québec. Voyons! Soyons au moins raisonnables! Je trouve cela effrayant. On peut bien être masochiste et dire qu'il faut donner l'exemple, mais va-t-il falloir attendre, et je pose une question précise... Pardon, M. le Président, j'en fais une question de règlement et je voudrais que mon temps soit suspendu. Si le député de Mégantic-Compton continue à m'interrompre, qu'il aille s'asseoir à sa place, s'il vous plaît. Je n'ai interrompu personne de leur côté.

Le Vice-Président (M. Rancourt): II est évident que quelqu'un qui veut prendre la parole doit être à son siège. Bien sûr! S'il vous plaît! À l'ordre! M. le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche.

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Je disais qu'au plan des salaires on devrait cesser d'être masochiste. Qu'on cesse. Cela n'a pas de bon sens. On aura dans cette Chambre, d'ici quelques années, si on continue à faire ce qu'on fait, deux catégories de gens, pas plus et pas moins. On aura celui qui est millionnaire et qui vient ridiculiser notre petite augmentation. Je comprends, il vit d'autres intérêts. Des gens qui sont assis sur 1 000 000 $, qui ont des intérêts qui entrent à la pochetée, il leur est facile de dire: Qu'est-ce que vous faites avec vos petits 35 000 $? On n'est pas pour s'augmenter... Écoutez donc une minute! C'est facile de dire cela. On peut avoir cette catégorie de gens et on peut avoir aussi une autre catégorie de gens, complètement à l'inverse. Mais on n'aura peut-être pas l'image d'une société complète. Je pense qu'il est important d'y penser. Au-delà de tous nos discours, on se doit de rechercher une formule, à mon sens, qui permette à quelque catégorie de citoyens que ce soit, ou bien non nantis ou bien extrêmement bien nantis, à la classe moyenne et intermédiaire de siéger dans cette Chambre.

Il y a des gens qui perdent jusqu'à 8000 $, 10 000 $, 15 000 $ pour être député. Vous allez me dire, oui, mais... J'écoutais le député de Nelligan, il a dit: Oui, mais ils se représenteraient quand même. Bien sûr! Bien sûr! Mais on connaît

les responsabilités d'ordre social, on connaît les responsabilités familiales que nous avons aussi. Dans bien des cas, cela représente des problèmes extrêmement graves. Si vous n'en savez pas quelque chose, parlez un peu entre vous.

Personnellement, je suis d'accord avec le gel proposé, mais j'espère qu'un jour ou l'autre on va cesser cette forme de masochisme, que nous entretenons collectivement, exclusivement pour des prises de position politiques partisanes. Je vous rappelle, avant de faire un discours enflammé d'analyser les échanges que nous avons.

Pour conclure, de part et d'autre - je ne me gênerai pas pour le dire - comment peut-on purement et simplement, pour des motifs partisans, à l'occasion, faire en sorte que le citoyen ordinaire n'ait même plus un intérêt à se présenter comme député parce qu'il y va d'une perte de traitement? Mais si c'était exclusivement une perte de traitementl De plus, si vous faisiez le calcul horaire, ce serait un déficit épouvantable, vous le savez. Pour un simple enseignant, à quelque seize périodes par semaine, cela donnerait 34 800 $. Pour un député, c'est 35 096 $ pour 80 heures de travail en moyenne. Cela aussi s'évalue pour un peuple. Je n'ai jamais eu honte, personnellement, de dire ce que je gagnais comme député, comme adjoint parlementaire, comme whip ou comme ministre. Je n'ai jamais eu honte de dire ce que je gagnais. J'espère que n'importe qui en cette Chambre n'a pas honte de le dire, compte tenu de la somme de travail exigée. On n'est plus à l'heure où les députés pouvaient mener conjointement deux ouvrages: celui de député et celui de faire du bureau d'avocat ou du bureau de médecin. On n'est plus à cette heure. On exige maintenant des députés de l'Assemblée nationale, de quelque côté qu'ils soient, beaucoup et de plus en plus. On exige de nous d'être présents non seulement durant la semaine, mais de réaliser toute cette dimension sociale de nos programmes de fin de semaine que vous savez tous.

Je pense que nous avons fait des efforts, en 1977, en gelant nos salaires. Nous avons fait des efforts en les augmentant de 6% alors qu'il y avait des propositions. C'est vrai que c'était basé sur un rapport neutre. C'est vrai que cela aurait peut-être pu régler tous les problèmes, à l'époque, si on avait continué à les laisser progresser, conformément au rapport Bonenfant. On serait rendu à 43 000 $, je pense, alors que le salaire de base d'un député est de 35 000 $. Quand les gens nous disent: Oui, mais vous avez des choses de payées. Oui, 7500 $. Il faudrait peut-être les démystifier. 7500 $, non imposables. Combien cela vous coûte-t-il, vous de l'Opposition, si vous avez autant de représentation qu'on en a? Depuis quand cela n'a-t-il pas été indexé? Vous le savez. Arrêtons d'être masochistes.

N'essayons pas de donner à la population l'image qu'on veut se graisser ici. C'est faux. Au contraire, s'il y a un Parlement où, à toutes fins utiles, on a posé des gestes pour diminuer concrètement et régulièrement le pouvoir d'achat, c'est bien le Parlement de Québec où on a même, je pense, une perte de 25% de notre pouvoir d'achat au cours des cinq dernières années. Il n'y a pas un groupe syndiqué au Québec, il n'y a pas un groupe de salariés au Québec qui a subi cette baisse graduelle de son pouvoir d'achat. De grâce, cessons les hypocrisies. Rallions-nous donc à une formule qui tienne compte de la conjoncture. Acceptons un gel, oui, mais ne soyons pas masochistes au point qu'il y aura des répercussions sur la qualité même des hommes et des femmes qui entreront dans cette Chambre plus tard. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Viger.

M. Cosmo Maciocia

M. Maciocia: Merci, M. le Président. Je prends la parole à 17 h 50 et la Chambre suspend ses travaux à 18 heures. Je vais profiter de ces dix minutes seulement pour répondre à certaines questions que le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche vient de poser ici, à l'ensemble de l'Assemblée nationale.

On n'est pas sans savoir que la semaine dernière, dans à peine quelques heures, l'Assemblée nationale a dû adopter le projet de loi no 105, le projet de loi pour couper les salaires des travailleurs et des travailleuses dans les secteurs public et parapublic. Aujourd'hui, à quelques heures à peine de ce débat, qui a été tellement orageux ici, à l'Assemblée nationale, le gouvernement actuel nous propose le projet de loi no 90, projet de loi dans lequel on retrouve une augmentation de salaire pour les députés. Il faut se rappeler des choses.

Le 15 novembre 1981, en cette Chambre, au-delà de 50 députés sont devenus admissibles à un régime de pension du gouvernement du Québec. Deux jours après, deux jours seulement après, on a eu droit, si vous vous le rappelez bien, au projet de loi no 39. On a eu droit, pour la première fois dans l'histoire du Québec, à un deuxième budget financier. M. le Président, vous vous rappelez sans doute que, par ce deuxième budget qui, comme je le disais, a été présenté pour la première fois dans l'histoire du Québec, le gouvernement actuel et le ministre des Finances en particulier allaient chercher dans les poches des contribuables au-delà de 1 200 000 000 $. (17 h 50)

Vous vous rappellerez aussi le projet de loi no 39 dans lequel il y avait une augmentation de la taxe sur l'essence de 100%. Vous vous rappellerez aussi le projet de loi no 16 qu'on a dû adopter l'année dernière et par lequel Hydro-Québec devenait une société du gouvernement et non plus une société du peuple québécois; on a eu droit à une augmentation de 16% sur l'électricité par la même occasion. Comme je le disais, au même moment où on allait chercher dans la poche des contribuables québécois 1 200 000 000 $, ici, je ne dirai pas qu'on s'est voté, mais on était admissible au même moment à une pension qui coûtait aux contribuables québécois au-delà de 600 000 $ ou 700 000 $ par année.

Le projet de loi no 90 n'a aucun bon sens dans la situation actuelle. Il faut dire que le projet de loi ne contient pas seulement une augmentation de salaire de 6%. C'est vrai, c'est seulement à partir du 1er avril et non pas du 1er janvier, mais ça veut dire quoi? C'est une augmentation quand même. Le député de Taschereau, dans son intervention, nous disait: Voyons, il n'y a pas d'augmentation dans le projet de loi no 90! S'il restait tel qu'il l'est actuellement, il y aurait une augmentation à partir du 1er janvier, mais, avec le projet de loi no 90, il n'y a pas d'augmentation. C'est fauxl II y a une augmentation, elle n'est que retardée du 1er janvier au 1er avril 1983.

M. Guay: M. le Président, question de privilège.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de privilège, M. le député de Taschereau et leader adjoint du gouvernement.

M. Guay: Je n'ai pas d'objection à ce que le député développe l'argumentation qu'il veuille, mais, attention, il a dit que ce que j'avais dit était faux et ensuite il a confirmé ce que j'avais dit. Il faudrait qu'il se fasse une idée. Ou bien c'est faux, ou bien c'est vrai. Comme il dit que c'est faux et qu'il confirme par la suite, il y a une certaine incohérence.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Viger.

M. Maciocia: Je dirai quelle hypocrisie, quelle irresponsabilité et quel manque de transparence de la part de ce gouvernement. Comme je le disais, c'est vrai que l'augmentation de 6% débute le 1er avril 1983. Au moment qu'on demande aux citoyens du Québec, au moment qu'on demande à 325 000 employés des secteurs public et parapublic de donner au gouvernement un montant de leurs salaires, je considère que c'est inconcevable, irresponsable de la part de nous tous ici à l'Assemblée nationale de se voter une augmentation de salaire de 6%.

Retournons aussi au régime de retraite. Ces gens qui se disent purs, ces gens se sont fait élire sur la pureté, c'étaient les seuls qui connaissaient la vérité, les seuls qui défendaient la population du Québec. Vous vous rappelez sans doute qu'ils ont parlé de ce régime de retraite. Cela fait 18, 19 mois qu'on siège ici, cela fait 18, 19 mois que j'entends parler de cela qu'il fallait couper dans les régimes de retraite. Pourquoi cela n'a-t-il pas été fait avant? Quelles sont les raisons qui ont poussé ce gouvernement à ne pas agir avant? Pourtant tout le monde le sait que la crise économique, la crise financière du Québec était encore pire en 1981 qu'en 1982. À ce moment, on a vu par toutes sortes de taxes déguisées pénaliser la population du Québec, mais on n'a jamais eu le courage de poser le geste de geler ou disons de couper le régime de retraite des députés à l'Assemblée nationale.

Pourquoi? Je me suis posé cette question: Est-ce qu'ils sont vraiment des purs? La réponse est venue tout de suite après. Ils ont attendu le 15 novembre 1981 pour en parler encore un peu plus fort et, pour ne pas, deux semaines après le 15 novembre, couper ou sabrer dans le régime de retraite des députés, ils ont attendu encore un an avant de proposer un projet de loi qui coupe et qui, à toutes fins utiles, élimine le régime de retraite des députés à l'Assemblée nationale. À partir du 15 avril 1981, au-delà de 50 députés ministériels, au-delà de 50 députés péquistes sont devenus admissibles au régime de retraite du gouvernement du Québec. Est-ce cela, la pureté? Est-ce comme cela qu'on dit aux gens, à la population du Québec: On est dans une situation désastreuse, il faut qu'on coupe et il faut se serrer la ceinture?

M. le Président, ils ont arrangé leurs petites affaires avant, leur bonheur pour demain matin ou le lendemain. Il faut dire, en toute sincérité, qu'à la prochaine élection générale il n'y en aura pas beaucoup, du côté ministériel, de ces députés qui seront réélus. Ils ont arrangé leurs petites affaires et on en a eu la confirmation dans un document qui nous est tombé dans les mains datant du 25 mai 1981. Le cabinet du premier ministre avait déjà demandé, au lendemain de l'élection, de voir qui était admissible au régime de retraite et quel était le montant de la pension de chacun des députés du côté ministériel. Cela c'est vraiment dire à la population du Québec: Nous passons avant tout et on veut absolument que nos affaires soient réglées avant celles qui sont dans l'intérêt de la population du Québec.

M. le Président, il ne faut pas oublier non plus qu'en 1974, quand le gouvernement

du Parti libéral du temps avait proposé, sur la recommandation d'un comité complètement indépendant, d'augmenter le salaire des députés, on avait eu droit à des remarques de la part du côté ministériel, et je cite: "Nous donnons le mauvais exemple à la population". On viendra ensuite dire aux Québécois: Serrez-vous la ceinture. Quelle honte de ne pas tenir compte des besoins de nos concitoyens et d'être les premiers à nous servir à même les fonds dont nous avons la gardei Si nous étions des fiduciaires de l'entreprise privée, si nous avions la garde des fonds privés, on nous appellerait des dilapidateurs. Il y a des peines prévues pour cela dans la loi.

Ce sont ces gens qui disaient cela en 1974. Et pourtant, le contexte économique et la situation économique du Québec étaient de beaucoup meilleurs que ce qu'on vit actuellement en 1982.

À part l'augmentation visible de 6% à laquelle on a droit en vertu de cette loi no 90, il ne faut pas oublier une autre chose, parce que ces gens sont des spécialistes des taxes déguisées et des revenus déguisés. On a vu à un certain moment qu'à part la question salariale, comme je le disais, on a droit actuellement... Qu'est-ce qu'on a à l'Assemblée nationale du Québec? On a 27 ministres. Avec l'ancienne loi, on avait droit seulement à 12 adjoints parlementaires. Actuellement, avec le projet de loi no 90, au lieu de 12, le gouvernement en place peut nommer 27 adjoints parlementaires. Cela veut dire 15 adjoints parlementaires de plus qui coûtent 7000 $ chacun par année...

Une voix: Ah! C'est épouvantable!

M. Maciocia: M. le Président, ce n'est plus 6% d'augmentation de salaire, mais il faut dire que c'est 26%, 27% ou 28% d'augmentation de salaire. Demain matin, au lendemain de l'adoption du projet de loi, ce gouvernement peut nommer 15 autres adjoints parlementaires.

Une voix: C'est épouvantable!

M. Maciocia: Nous ne pourrons absolument rien dire parce que le projet de loi le prévoit. C'est inutile que le côté ministériel vienne nous garantir de ne pas le faire en disant: Mais non! On ne le fera pas, c'est seulement en cas... Vous savez, on connaît la façon d'agir de ce gouvernement.

Vous me faites signe qu'il est 18 heures, M. le Président, et qu'il faut suspendre. Je demande, si vous voulez, la suspension des débats jusqu'à 20 heures.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Vous demandez la suspension des débats, M. le député de Viger. Nos travaux sont supendus jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 01)

(Reprise de la séance à 20 h 03)

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous plaît!

Vous pouvez vous asseoir.

La parole est au député de Viger. Il lui reste neuf minutes.

M. le député de Viger.

M. Maciocia: Merci, M. le Président. Comme je le disais avant la suspension à 18 heures, ces gens sont des spécialistes des taxes déguisées et des spécialistes du salaire déguisé. Je disais tantôt que, dans le projet de loi no 90, à l'article 25, au lieu de douze adjoints parlementaires, il y a dans ce projet de loi, la possibilité d'aller jusqu'à 27 adjoints parlementaires. Je disais aussi que chaque adjoint reçoit un salaire de 7000 $ de plus que le salaire des députés.

M. le Président, ce n'est pas seulement 6%, comme je le disais tantôt, mais c'est 26%, 27% ou 28% d'augmentation de salaire à laquelle auront droit ces gens qui seront nommés adjoints parlementaires. On a fait le petit calcul suivant: parmi les députés ministériels qui sont de l'autre côté, qui sont 75 actuellement ici à l'Assemblée nationale, avec le projet de loi no 90, il y en aura 68 qui auront droit à des cadeaux supplémentaires, de petits cadeaux, des cadeaux déguisés, de l'argent déguisé, de 7000 $, de 4000 $ et d'autre argent d'autre manière. Après cela, ils ont le courage, pour ne pas dire le culot, d'aller chercher dans les poches des travailleurs et travailleuses des secteurs public et parapublic un pourcentage de leur salaire avec la dernière loi 105.

M. le Président, avec le projet de loi no 90, il y a 27 ministres, 27 adjoints parlementaires, 7 présidents de commission, un président de l'Assemblée, deux vice-présidents de l'Assemblée, un leader parlementaire adjoint, un whip en chef, trois whips adjoints, pour un total de 69 personnes sur 75. Cela veut dire qu'il y a 69 personnes, du côté ministériel, sur 75, qui ont un salaire supplémentaire au salaire de député.

M. Bertrand: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Un instant, M. le député de Viger. M. le leader a une question en vertu de l'article 100. Est-ce que le député de Viger accepterait une question de la part du leader?

M. Maciocia: M. le Président, je vais terminer mon discours avant. Vous le savez très bien, c'est la deuxième fois dans mon discours que ces gens d'en face, que j'appellerai, comme le député de Maskinongé les a appelés, des hypocrites, je vais attendre...

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît, M. le député! M. le leader.

M. Bertrand: M. le Président, est-ce que j'ai été respectueux du règlement en me levant et en demandant de me prévaloir de l'article 100?

Le Vice-Président (M. Jolivet): Effectivement, mais M. le député de Viger, peut continuer puisqu'il a demandé à continuer son intervention jusqu'à la fin.

M. Maciocia: Merci beaucoup, M. le Président, d'avoir dit au leader du gouvernement qu'il y a d'autres moyens pour poser des questions.

Je disais que ces gens-là sont tellement hypocrites, tellement masochistes...

Une voix: C'est vrai!

M. Maciocia:... que le 15 novembre 1981, comme je le disais, ils ont soutiré de la poche des contribuables québécois au-delà de 500 000 $ parce qu'ils ont eu droit au régime de retraite après cinq ans ou deux mandats. Comment voulez-vous que la population du Québec ait plus confiance en ces gens-là actuellement? Eux qui se disaient purs, eux qui se sont fait élire sous de fausses représentations? Aujourd'hui on a droit à des cadeaux de Noël. On dit à la population: Non, mais c'est ça, on a augmenté seulement de 37% pendant six ans.

Imaginez-vous quelle hypocrisiel Ils arrivent avec une augmentation de 6% quand les autres employés des secteurs public et parapublic ont eu droit à une diminution de salaire. Ils arrivent avec des augmentations détournées. Un adjoint parlementaire aura 20% de plus en salaire qu'un député. Vous avez droit à 27 adjoints. Il y en a 12, mais selon le projet de loi vous avez droit à 27, ce qui veut dire 15 de plus. C'est ça l'hypocrisie, c'est ça la malhonnêteté, la transparence de ce gouvernement.

Je disais tantôt au député de Joliette -quand il a fait son discours - que c'est lui spécialement qui a bénéficié de cela pendant je ne sais combien d'années, des cadeaux qu'on appelle des cadeaux déguisés, de l'argent déguisé, de la part de la population du Québec. Il se permet lui-même aujourd'hui de dire: Qu'est-ce que c'est 6%? Dans le contexte économique actuel, c'est beaucoup, c'est trop. Ce ne sont pas seulement les 6%, mais ce sont toutes les autres choses qui sont rattachées à ça.

Je répète encore ce que mes collègues du Parti libéral ont demandé et redemandent encore fermement à ces députés, au gouvernement du Parti québécois, à ces gens d'en face, comme on les appelle. On demande d'apporter quatre amendements à ce projet de loi. Le premier, que le nombre d'adjoints parlementaires demeure à 12 au lieu de 27. Deuxièmement, le gel des salaires jusqu'au 31 décembre 1983. C'est là qu'on démontrera vraiment si on a le courage de se priver de la même façon qu'on a privé d'autres citoyens du Québec de leur droit de vivre et de vivre convenablement. (20 h 10)

Également, on demande le retrait de l'article prévoyant une indexation à compter du 1er janvier 1984. Il faut retirer cet article. On discutera de cette indexation le 1er janvier 1984 ou en décembre 1983 pour voir si la situation économique est différente, si on doit vraiment indexer les salaires des députés. Comme je le disais tantôt, ce gouvernement, s'il a vraiment un minimum de conscience, un minimum de bon sens, un minimum de respect envers la population du Québec, devrait consentir à ces amendements. Il devrait dire: On va se priver et se serrer la ceinture de la même façon que les citoyens du Québec et les travailleurs des secteurs public et parapublic seront obligés de le faire durant les trois premiers mois de la prochaine année. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader, est-ce que votre question est toujours appropriée? Il reste deux minutes à l'intervention du député de Viger. Sinon, je reconnaîtrai un autre intervenant.

Une voix: Un autre meilleur.

Le Vice-Président (M. Jolivet): D'accord. Qui veut parler sur la deuxième...

Des voix: Ah!

M. Picotte: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Maskinongé et whip adjoint de l'Opposition.

Une voix: Lui, il est bon. Des voix: Bravo!

M. Picotte: Je vais être obligé de parler plus vite que je pensais.

Une voix: Félicitations pour votre programme.

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!

M. Picotte: Merci, M. le Président.

Des voix:...

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous

plaît! La meilleure façon d'avoir un discours calme, c'est de ne pas provoquer. M. le député de Maskinongé.

M. Yvon Picotte

M. Picotte: Merci, M. le Président. J'aimerais vous dire, au début de cette intervention, que, selon plusieurs, le député de Vanier et leader parlementaire du gouvernement s'est mis les pieds dans les plats lorsqu'il a présenté ce projet de loi no 90. Je ne suis pas tout à fait de cet avis, je prétends plutôt qu'il s'est trouvé un plat pour se mettre les pieds lui-même dedans. Ce n'est pas parce que les principes émis dans cette loi ne font pas l'objet de discussions intéressantes, loin de là, c'est simplement parce que j'estime que le député de Vanier aurait dû normalement, tel que l'a demandé notre collègue le leader de l'Opposition, scinder ce projet de loi en deux pour permettre aux parlementaires de se prononcer différemment à la fois sur l'histoire des pensions, sur l'histoire des salaires et sur la réforme parlementaire. Les trois points que nous avons à traiter présentement sont importants. Je vais souscrire amplement à plusieurs discours des gens d'en face et de ce côté-ci. Je vais souscrire à la comparaison que l'on fait du salaire du député et du travail qu'il a à effectuer, ses nombreuses heures de travail. Tout le monde dans cette Chambre sera d'accord pour dire que chacun des députés fait le maximum et fait son devoir, qu'il soit d'un côté ou de l'autre de la Chambre. Chacun fait son devoir au meilleur de sa connaissance et chacun essaie d'y accorder le nombre d'heures nécessaires pour rendre service à ses commettants, à ses électeurs.

Ce que j'aimerais faire remarquer aux gens d'en face - ils en conviendront eux-mêmes - c'est ceci. Je ne rappellerai pas les discours d'avant 1976, je pense bien que tout le monde dans cette Chambre en a entendu parler. J'ai entendu des citations des gens du gouvernement, mes collègues en ont cité des passages abondamment. En 1974, lorsque, unanimement, les députés ont décidé de confier à un comité indépendant le soin d'étudier la question des salaires des députés - c'était unanime en cette Chambre - tous conviendront que par partisanerie politique il y a des gens qui, en face, ont simplement mal fait leur devoir, ont simplement décidé de faire de cette question importante une question politique. C'est sûr et certain, qu'on soit d'un côté de la Chambre ou de l'autre, qu'il y a une tentation pour chacun des députés de cette Chambre d'en faire une question politique. Mais est-ce que les gens qui sont en face réalisent que, si nous vivons la situation actuelle au moment où on se parle, c'est leur faute à eux. Est-ce que les gens réalisent cela? Je pense que ce n'est pas charrier pour personne de ce côté-ci de dire que, avec les savants tableaux que nous a présentés le leader du gouvernement et qu'a repris le leader adjoint, si cet écart des salaires existe, cela dépend uniquement des gens d'en face et de tous les gens d'en face.

Je vais vous expliquer pourquoi. Premièrement, les six péquistes qui étaient ici ont été des irresponsables, en 1974, alors qu'ils ont eux-mêmes accepté le principe. Il fallait que ce soit étudié par un comité indépendant, ce qui fut fait. Ce qui fut présenté par le leader du gouvernement, à ce moment, le chef intérimaire actuel du Parti libéral, M. Gérard D. Levesque, c'était en deça de ce que proposait aux parlementaires un comité indépendant des politiciens, le comité Bonenfant, et c'est cela qui s'est passé. La première erreur s'est commise là, par partisanerie politique, en 1974. La deuxième erreur, quand on dit et qu'on parle de l'écart qui existe présentement dans les salaires, savez-vous ce que cela veut dire? Qui a décidé tout simplement toujours par partisanerie, toujours pour se faire une belle jambe politique face à la population, qui a décidé en 1977-1978 de changer cette loi? C'est toujours le gouvernement actuel.

Pourtant, à ce moment, il n'y avait pas de crise, car le ministre des Finances se plaît à nous répéter qu'il ne pouvait pas prévoir ces trous, comme il ne pouvait pas prévoir cette crise. Donc, qu'on ne vienne pas nous dire aujourd'hui qu'on pouvait prévoir une crise et que déjà on commençait à vouloir freiner les salaires des députés. Non, tout simplement, encore une fois dans ce parti, par souci de la communication, par souci de plaire au public, on n'a pas regardé de façon responsable ce qui allait être la situation des salaires des députés en 1980 ou en 1982. On a dit: Si on modifiait cette loi, le monde, le public, les gens du Québec trouveraient que nous sommes des parlementaires hors pair. Ils trouveraient qu'on a voulu tout simplement faire de cette question l'idée d'une bonne administration de ce gouvernement.

Évidemment, c'est sûr qu'on ne pouvait pas prévoir qu'en 1982 l'administration du gouvernement allait être pleine de trous, que l'administration du gouvernement allait être déficitaire de beaucoup plus que prévu, mais on a dit: Le souci d'un bon gouvernement est déjà... Et regardez, on modifie le salaire des députés en 1977 et en 1978. Il ne faudrait pas aujourd'hui, mesdames et messieurs - je le regrette et je vous le dis bien sereinement - que vous fassiez ce que vous nous faites présentement comme gadget en face de nous et que vous disiez à la population: Si on se compare aux députés fédéraux... Mais oui, si on se compare aux députés libéraux! Si vous aviez laissé filer la loi comme elle était, vous seriez arrivés au même niveau, et de consentement mutuel,

parce que c'était tout simplement un comité indépendant des politiciens. Personne aujourd'hui ne serait blâmé.

Les raisons que vous invoquez à savoir que notre salaire, qui, je vous l'accorde, ne correspond pas à la tâche que chacun, sans exception, fait, en cette Chambre, ne serait pas aujourd'hui ce qu'il est... Si, par souci politique, par souci de communication, pour tâcher de faire ce qu'on appelle les "smarts" devant la population, si vous n'aviez pas fait cela, messieurs, vous ne seriez pas obligés de faire des comparaisons et, aujourd'hui, vos plaintes à savoir qu'il y a des gens qui ne viendront pas en politique, des gens de valeur, à cause du salaire, seraient justifiées. (20 h 20)

C'est vous qui avez amené le Parlement dans ce cul-de-sac. C'est vous qui avez amené les parlementaires au salaire qu'ils ont présentement. Que se passe-t-il maintenant? Pourquoi nous, de l'Opposition, vous disons-nous, tout en étant d'accord que le député est mal payé... Que vous disons-nous, présentement? Vous avez dit dernièrement, il n'y a pas tellement longtemps, la semaine dernière, lors de l'adoption de la loi 105, et vous l'avez dit à qui voulait l'entendre - on voit les ministres présentement qui se lèvent en Chambre pour nous informer - qu'il y aura des coupures l'année prochaine dans le prochain budget dans plusieurs domaines. On fait des coupures dans les hôpitaux et vous nous dites: On n'a plus d'argent. Si, messieurs - et c'est regrettable de vous dire cela - on n'a plus d'argent pour les secteurs public et parapublic, si on n'a plus d'argent pour garder certaines lois dans les hôpitaux ou certains avantages aux employés et certains services dans les hôpitaux ou dans le domaine de l'éducation; si on n'a plus d'argent pour cela, ne serait-ce que les 100 000 $ ou les 150 000 $ que cela coûte à l'État, décemment, on n'a plus d'argent non plus pour les salaires des députés du Québec. C'est aussi simple que cela.

Des voix: Bravo! Bravo!

M. Picotte: C'est cela que j'ai dit. Le principe est le suivant: On ne dit pas qu'on est surpayé, au contraire, on dit qu'on ne l'est pas assez. Là-dessus, on est tous d'accord, mais, quand il ne reste plus d'argent, il n'en reste plus et pour les députés du Québec et pour tout le monde du Québec. Il n'en reste plus d'argent. C'est ce principe qu'il faut que les gens d'en face comprennent. C'est ce principe qu'il faut défendre et c'est ce principe que, malheureusement, on est appelé à discuter en même temps que la réforme parlementaire.

C'est dans ce domaine que je trouve que le député de Vanier n'a pas été correct. Ce serait bien plus facile encore d'adopter des lois, s'il acceptait de scinder ces deux lois, cela serait adopté probablement beaucoup plus facilement que ce n'est parti pour être fait présentement, d'ici à la fin de la session. Si on le scindait, on pourrait parler de la réforme parlementaire, sur laquelle tout le monde est d'accord. Je rends hommage à mon collègue de Trois-Rivières qui est de ma région, qui a fait de l'excellent travail là-dedans. Je l'écoutais hier soir, il a dit de grandes vérités. On a été sur la même longueur d'onde que lui dans bien des domaines; il y a trop de règlements et trop de choses qui font en sorte que le citoyen est lésé aujourd'hui. Le principe, c'est cela.

Je regrette, mais si aujourd'hui vous avez à faire une bataille là-dessus, si aujourd'hui, c'est pénible - et je sais que c'est pénible - pour un gouvernement de présenter un projet de loi semblable - cela prend beaucoup de courage et cela prend aussi du culot, je dois le dire - il faut beaucoup de courage pour défendre un tel projet de loi. J'ai beaucoup d'estime pour ceux d'en face qui se lèvent et disent que c'est bien mérité, mais le principe, messieurs, ne le perdez pas de vue. Il n'y a plus d'argent dans le fond du tonneau et, quand il n'y en a plus, il n'y en a plus pour personne. C'est cela qu'il faut comprendre.

On a aussi à discuter du régime de retraite. Je pense bien qu'on s'entendra assez rapidement sur cette question de régime de retraite, mais, encore là, il ne faudrait pas être des démagogues. Il faudrait se rappeler que, lorsque le régime de retraite a été mis en vigueur dans ce Parlement, c'était une pension... J'en ai connu plusieurs parlementaires à la retraite, évidemment avant les derniers qui sont arrivés à la retraite. J'en ai connu plusieurs parlementaires élus en 1960, 1962, 1966 qui sont à la retraite et qui ont été obligés de travailler pour l'État, parce qu'ils n'étaient pas capables de manger trois fois par jour avec leur pension de député. Pourquoi? Parce que le salaire des députés était minime dans ce temps.

Il ne faudrait pas charrier et dire: C'est épouvantable ce que les autres gouvernements nous ont légué comme régime de retraite. Vous le savez très bien. S'il y a des gens qui peuvent le comprendre dans cette Chambre, c'est bien le député de Vanier et le député d'Anjou, dont les pères ont été premiers ministres du Québec et à qui j'en profite pour rendre un hommage en passant. S'il y a des gens qui peuvent comprendre que le système de pension était loin d'être exagéré il y a dix ans, ce sont bien ces députés, parce que le salaire du politicien était minable à ce moment et qu'en plus de cela il y avait une pension qui n'en valait à peu près pas la peine quand on prenait sa retraite. On en conviendra, tout le

monde. Il y a une autre chose, c'est que l'âge moyen des députés qui sont élus à cette Assemblée a beaucoup changé depuis une décennie. En 1965, en 1966, on venait à l'Assemblée nationale du Québec, et la moyenne d'âge était beaucoup plus élevée. Depuis une décennie, la moyenne d'âge est beaucoup plus basse. Je comprends, le député de Terrebonne n'est peut-être pas d'accord avec cela, il a été élu un petit peu plus âgé, mais il y en a d'autres dans son parti, je pense à d'autres députés...

Vous conviendrez tout le monde - je pense bien que vous allez me donner raison là-dessus - que depuis une décennie il y a beaucoup plus de jeunes députés qui se font élire à l'Assemblée nationale. Il est exact que des cas comme M. Claude Charron, par exemple, il y a quinze ans, on n'en avait pas. Aujourd'hui, M. Charron a quitté la politique avec une pension qu'il a payée, qu'il a méritée. Je suis heureux qu'il l'ait à part cela, je dois vous dire cela en passant, c'est un droit acquis, je suis heureux qu'il l'ait. On sait très bien que cela va peut-être prendre quelque temps avant qu'il puisse se replacer et trouver un autre emploi. Il y a des libéraux aussi. Il y a des unionistes et il y a des péquistes aussi. C'est ce que vous voulez savoir et c'est ce que je dis. Vous devriez être capables de comprendre cela. Vous comprenez assez bien la langue française pour savoir que c'est ce que cela veut dire. Il y a des députés de tous les partis politiques. C'est bien mérité, c'est à eux et cela leur appartient.

Le Vice-Président (M. Jolivet): À l'ordre:

M. Picotte: M. le Président, ce que je veux vous dire par là, c'est qu'avec cette décennie passée, avec ce groupe de parlementaires qui peuvent en bénéficier plus jeunes, avec les salaires qui ont drôlement fait un bond depuis une dizaine d'années... Je me souviens quand j'ai été élu, je pense qu'on avait 16 000 $ ou 17 000 $ par année. On en est maintenant rendu à 35 000 $ à peu près, le double, en l'espace d'une dizaine d'années tout au plus. C'est sûr que la pension, à ce moment, a considérablement augmenté. Donc, tout le monde dans cette Chambre est d'accord pour dire que le régime de retraite, à cause de ces facteurs, est beaucoup trop élevé. On est d'accord tout le monde. Si le bill était scindé, cela se ferait encore rapidement, parce qu'on est d'accord qu'il faut freiner cela, qu'il faut diminuer cela parce que cela coûte cher à l'État. Il faut que cela prenne plus de temps pour obtenir. On est aussi d'accord avec cela. C'est un autre point important.

Il y a aussi un troisième point où on est encore plus d'accord que vous autres, c'est le point de la réforme parlementaire. C'est sûr qu'il y a des choses qui accrochent. On en a fait part dans des commissions, à quelques endroits. On a parlé de quorum, on peut se poser des questions sur le quorum. Quand on compare le quorum avec Ottawa, je pense qu'il faudrait faire aussi une comparaison de distance.

À part le député d'Ungava et quelques autres députés, je pense que la distance est beaucoup moindre pour nous de venir siéger à Québec que cela peut l'être d'un côté à l'autre du pays, quand on parle du fédéral. On trouve peut-être que le quorum n'est pas assez élevé, ce sont quand même des détails qu'on peut facilement discuter.

Il y a aussi un point sur lequel on pourrait s'entendre. Avec les adjoints parlementaires que vous aurez le droit de nommer, c'est sûr que cela permettra à des gars d'augmenter leur salaire par en arrière, sans être obligés de passer par la loi. On aura une augmentation de salaire par la porte d'en arrière. On trouve ça trop nombreux. Il y aurait peut-être encore moyen de discuter ça intelligemment de part et d'autre de cette Chambre, M. le Président. Je pense que c'est tout ça qu'il faut évaluer.

Vous me permettrez de vous dire ceci en terminant: N'oubliez jamais que la situation que nous sommes appelés à débattre aujourd'hui, qui est odieuse envers la population à cause de la loi 105, que vous venez d'adopter, et de la loi 70 qui, à notre avis, est indécente, parce que, dans le fond du baril, il ne reste plus d'argent, c'est vous-mêmes qui l'avez provoquée et j'espère que vous n'en voudrez à personne, s'il y en a parmi vous qui n'ont pas le goût de voter de la même façon que vous autres, en vous rappelant que, si vous n'aviez pas fait de basse partisanerie politique en 1974 et que si vous n'aviez pas voulu montrer à la population un emballage spécial en 1976 et en 1977 en changeant cette loi, vous ne vous retrouveriez pas dans cette situation aujourd'hui, et c'est tant pis pour vous autres et pour nous autres aussi.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Frontenac.

M. Gilles Grégoire M. Grégoire: M. le Président

Une voix: Emmenez-en des constitutions!

Le Vice-Président (M. Jolivet): S'il vous plaît! De la même façon que j'ai demandé qu'on respecte le député de Maskinongé, je demande qu'on respecte le député de Frontenac.

M. le député de Frontenac.

M. Grégoire: II y a 24 heures que j'écoute les députés de l'Opposition sur le projet de loi no 90, qui traite de la réforme parlementaire, de la réforme du régime de retraite et de l'indexation des salaires et je me demande encore, après 24 heures, s'ils sont pour ou contre ce projet de loi en deuxième lecture.

C'est vrai que ça prend un tour de force pour être en mesure de parler sur un projet de loi pendant 24 heures et qu'ensuite, personne ne sache si celui ou celle qui parle est pour ou contre: 24 heures de discours de la part de l'Opposition et personne n'a pu deviner. Êtes-vous pour ou contre? On ne le sait pas.

Mme Juneau: On ne le sait pas.

M. Grégoire: Cela veut dire parler sans rien dire. En fait, je voudrais savoir, j'aimerais que vous nous disiez si vous êtes pour ou contre le projet de loi en deuxième lecture. Vous ne l'avez pas dit.

Une voix: Ils ne l'ont pas encore lu!

M. Gérgoire: On dit: On voudrait scinder le projet de loi en deux. Tout bon parlementaire sait fort bien qu'immédiatement après la deuxième lecture, le projet de loi s'en va en commission parlementaire et là, il n'est pas scindé en deux, il est scindé autant de fois qu'il y a d'articles dans le projet de loi. Chaque article est étudié séparément. C'est en commission parlementaire que c'est scindé. À ce moment-là, vous pourrez faire le travail le plus sérieux que vous voudrez, article par article. De l'article qui traite de la réforme parlementaire, vous pourrez dire: Nous sommes pour, et voter pour. De l'article qui traite du régime de retraite, vous pourrez dire: Nous sommes pour; nous allons voter pour. De l'article qui traite de l'augmentation des salaires, vous pourrez dire: Nous sommes contre; nous voterons contre. Ce sera scindé à ce moment-là. Mais, à l'heure actuelle, vous ne le dites pas.

Savez-vous pourquoi? Je pense que vous avez la tentation de voter contre le projet de loi. Parce que si vous votez contre, qu'est-ce que cela veut dire? Cela veut dire que vous votez contre la réforme parlementaire. Vous n'en voulez pas de réforme parlementaire. Vous allez vous servir d'un prétexte - on va y revenir tout à l'heure - mais vous voulez voter contre.

Une voix: C'est le monde à l'envers.

M. Grégoire: Vous voulez voter contre les améliorations au régime de retraite. Le gouvernement du Québec, le gouvernement du Parti québécois, propose un nouveau régime de retraite qui va faire économiser 20 000 $ par année par député. Ce sont les députés qui vont retirer cela en moins. Vous n'êtes pas contents. Vous voudriez essayer d'étouffer les changements que nous voulons apporter au régime de retraite. Alors, vous dites: À cause des petits 6% d'augmentation de salaire, on va bloquer tout le projet de loi. Est-ce que c'est cela que vous voulez?

Une voix: Non.

M. Grégoire: Si vous voulez laisser passer la réforme du régime de retraite et la réforme parlementaire, vous n'avez qu'à voter pour le projet de loi en deuxième lecture. En commission parlementaire, chaque article est étudié séparément. Il y aura un vote séparé pour chacun des articles. Lorsqu'il y a deux paragraphes dans un article, cela prend un vote pour chacun des deux paragraphes de l'article. S'il y a cinq paragraphes dans l'article du projet de loi, cela prend cinq votes, soit un vote pour chacun des cinq paragraphes de l'article du projet de loi. Là, vous pourrez vous exprimer sur chacun des points. Aujourd'hui, ce qu'on vous demande d'approuver, c'est un projet de loi concernant l'Assemblée nationale. L'Assemblée nationale comprend différentes choses. Cela comprend la réforme parlementaire. Cela comprend le régime de retraite. Cela comprend les salaires. J'admets que ce sont des choses différentes, mais c'est pour cela qu'il y a autant d'articles. C'est pour cela qu'il y a tous ces articles. Combien y en a-t-il?

Une voix: II y en a beaucoup.

M. Grégoire: II y en a beaucoup. Je vais vous dire le nombre d'articles et vous allez pouvoir voter autant de fois qu'il y a d'articles. Il y a au-delà de 225 articles. Cela va vous permettre de voter 225 fois. Pour chaque article, vous direz ce que vous en pensez.

M. le Président, j'ai entendu l'Opposition nous parler surtout de l'indexation de 6%. Je voudrais faire une comparaison entre le député à Ottawa et le député à Québec. J'ai déjà été à Ottawa et maintenant je suis à Québec. Je suis en mesure de faire la comparaison. À Ottawa, le député gagne 50 000 $ par année. À Québec, le député gagne 35 000 $ donc 15 000 $ de plus pour le député à Ottawa. On parle des 7500 $ de compte de dépenses pour le député de Québec. À Ottawa, c'est 15 000 $, le double. À Ottawa, quand le député est élu, on lui donne, à tous les ans, un petit carton c'est une passe de train du Canadien National ou du Canadien Pacifique. Le gars demeure à Québec et il va se promener à Toronto. Ce n'est pas là qu'il siège, il siège à Ottawa, mais sa petite

passe de train est bonne pour aller a Toronto. Si le gars veut aller se promener à l'Île-du-Prince-Edouard, il prend le train, il prend le traversier, cela ne lui coûte rien, c'est une passe gratuite. S'il veut aller se promener à Vancouver, il sort son petit carton, c'est la passe du député fédéral sur tous les trains du Canada. Partout au Canada, il a sa passe de train gratuite, pour lui, sa femme et ses enfants.

Une voix: Non, non, non?

M. Grégoire: Oui, le député, sa femme et ses enfants. Embarque la famille, la belle-mère, on s'en va à Vancouver! C'est gratuit, c'est le gouvernement fédéral qui paie. C'est gratuit? Embarque la famille, on s'en va pique-niquer à Vancouver. L'année suivante, on s'en va pique-niquer à l'Île-du-Prince-Édouard. Une autre année, on ira pique-niquer à Terre-Neuve. C'est gratuit, même les traversiers.

Une voix: Les avions?

M. Grégoire: L'avion, bien oui. Air Canada, des passes gratuites. Cela se promènel Si ça ne va pas assez vite en train, ils n'ont qu'à prendre leur passe d'avion. Embarquez la famille, on va faire un pique-nique à Vancouver. Gratuit? Pas gratuit, nous, on paie. Ils sont assez bien traités, hein?

Nous autres, les députés d'ici, quand on envoie une lettre de notre bureau de comté, ça coûte un timbre de 0, 30 $ avec la photo de Sa Majesté la reine, mais pas à Ottawa. À Ottawa, quand vous êtes élu, vous ne savez pas ce qu'ils font? Ils disent: Mettez vos initiales ici. Ils prennent nos initiales et ils nous font une estampe en caoutchouc, ils nous donnent la boîte avec l'encre dedans et quand on veut envoyer une lettre, bang! sur l'enveloppe et envoiel gratuitl Aie, la femme, as-tu des cartes de Noël à envoyer, apporte-moi tout cela, bang! bang! bang! avec l'estampe et ça part! Ce n'est pas de valeur, ça ne coûte rien, ce sont nos taxes.

Le salaire est de 15 000 $ de plus, le compte de dépenses est de 15 000 $ de plus...

Des voix: Oh!

M. Grégoire: 7500 $ de plus, excusez-moi. C'est le double, excusez-moi. Je corrige mon erreur. C'est un lapsus linguae, c'est 15 000 $ au lieu de 7500 $ et les timbres, c'est gratuit. Les pique-niques à Vancouver avec la famille, c'est gratuit. L'avion et envoie donc! Mais quel est le rôle du député fédéral? Qu'est-ce qu'il fait, en fait?

Une voix: II écrase le Québec.

M. Grégoire: C'est un fait, mais on n'en parlera pas. Ils s'occupent de quoi, les députés fédéraux? Ce n'est quand même pas eux qui s'occupent des routes; ils ne s'occupent pas des routes. Ce n'est quand même pas eux qui s'occupent des réseaux d'aqueduc et d'égout pour aider les municipalités, non. Les hôpitaux? Ce n'est pas Ottawa. Les écoles, ce n'est pas Ottawa non plus. Les universités? Ce n'est pas Ottawa. Aider à établir des réseaux de protection contre les incendies dans les municipalités? Ce n'est pas Ottawa. Le bien-être social? Ce n'est pas Ottawa.

Une voix: On n'arrive pas? (20 h 40)

M. Grégoire: Attendez un peu, on va arriver à Ottawa, on va y être tantôt. Disons d'abord ce qu'ils ne font pas. On va commencer par ce qu'ils ne font pas avec leurs salaires de 50 000 $, leurs passes de trains et leurs passes d'avions. Commençons par ce qu'ils ne font pas. Ils ne s'occupent tout de même pas de tout ce qu'on a mentionné là. Les richesses naturelles, le développement des pâtes et papiers, les terres et forêts, non, ce n'est pas Ottawa. L'amiante, ce n'est pas Ottawa, ils ont peur de cela les étoiles. Non. Les principaux ministères, quoi. L'agriculture, non seulement ils ne s'en occupent, ils veulent détruire l'agriculture au Québec. Cela est dans leur rôle. Alors, de quoi s'occupent-ils? Qu'est-ce qu'ils font? Là les gars, vous allez vous gratter la tête.

Les dépenses militaires, les canons, les tanks, les avions, les bateaux de guerre et les bombes, cela est Ottawa. Le chômage, cela est Ottawa. Les bureaux de poste, avec les lettres qui arrivent toujours cinq, six, sept, huit jours en retard, c'est Ottawa. À part cela, qu'est-ce qu'ils font à Ottawa? Est-ce qu'il y en a qui peuvent m'aider pour me dire ce qu'ils font à Ottawa? Aidez-moi un peu. Ah, oui, ils adoptent des lois comme la loi S-31 pour essayer de nuire au Québec, essayer d'empêcher la Caisse de dépôt de se développer. C'est vrai, là j'ai oublié le pire. En plus de recevoir 50 000 $ en salaire, 15 000 $ de comptes de dépenses, les billets d'avion, les passes de train, les étampes en caoutchouc pour les timbres, savez-vous où nos députés paient leurs impôts? En Ontario, oui. André Ouellet, le gars qui veut étouffer le Québec avec la loi S-31, il l'a dit dans le journal. Il l'a admis. Il a dit: Écoutez, je ne suis tout de même pas pour demander à ma femme de demeurer à Montréal. Elle demeure à Ottawa et on paie nos impôts à Ottawa, en Ontario. Avez-vous déjà vu plus sans coeur que cela?

Oui, quand on compare le rôle du député fédéral au rôle du député du Québec, il y a une grosse différence. Le député québécois lui, il est proche de la population.

II s'occupe des choses qui touchent le citoyen québécois. Les citoyens québécois viennent nous voir nous à notre bureau. Je vois mon député fédéral, il a une salle d'attente avec deux chaises, elles sont toujours vides. Moi j'ai une salle d'attente avec 60 chaises et c'est toujours plein. Pourquoi? Parce que le rôle du député québécois c'est de s'occuper des intérêts du peuple québécois dans le domaine de l'éducation, dans le domaine de la santé, dans le domaine des habitations à loyer modique, dans le domaine des centres d'accueil, dans le domaine de l'agriculture pour essayer, premièrement, de défaire ce que fait Ottawa de mal, et en plus de cela essayer d'aider nos agriculteurs. Son rôle dans les pêcheries, dans les routes, je vois le ministre des Transports, toute la construction, l'entretien, les réparations des routes, des ponts et tout, c'est le député québécois.

Les loisirs, aider à avoir des investissements dans le domaine des loisirs, que ce soient des terrains de balle molle, des patinoires, des terrains de tennis, des piscines, ce sont toujours les députés québécois. Qui est-ce qui s'occupe de la santé et de la sécurité au travail? Ce n'est pas Ottawa, c'est le député québécois. Qui est-ce qui s'occupe de tout, des richesses naturelles, de développer nos mines d'amiante, de développer nos usines de pâtes et papiers? C'est le député québécois. C'est pour cela que les citoyens viennent voir le député québécois. C'est pour cela que le député québécois ne peut pas siéger plus de trois jours par semaine. C'est pour être avec son monde le restant du temps alors que le député à Ottawa arrive à Ottawa le lundi matin, il repart le vendredi et il se cache. Quand il repart, oui.

Quand on compare les rôles - oui, je l'ai quitté vite à part cela, après trois mandats, j'ai dit: Bonjour la visite. J'ai eu le temps de les connaître. Trois mandats, M. le député de Marguerite-Bourgeoys. Oui, parce que moi, quand je suis arrivé à Ottawa, j'étais un bon fédéraliste comme vous vous l'êtes actuellement. Je suis arrivé à Ottawa avec le drapeau du Canada, "from coast to coast", d'un océan à l'autre. J'étais pour cela, moi. Mais quand je suis arrivé là, par exemple, la première question que j'ai posée, c'était au ministre de l'Agriculture à Ottawa, j'ai demandé: Combien prêtez-vous aux cultivateurs du Canada? Il m'a dit: 200 000 000 $. J'ai dit: Combien en Alberta? 60 000 000 $. Combien en Saskatchewan? 50 000 000 $. Combien à l'Île-du-Prince-Édouard? 2 000 000 $ par année. Combien au Québec? 1 500 000 $.

Des voix: Ah!

M. Grégoire: J'ai dit: Quoi? Écoutez cela, M. le député de Beauce-Sud. J'ai dit: Quoi? Cela n'a pas de sens! Quand je suis arrivé à Ottawa, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, j'étais avec 26 collègues du Québec. Les règlements de la Chambre des communes n'avaient jamais été imprimés en français. Jamais! Jamais cela n'avait été imprimé en français.

M. Mathieu: M. le Président, une question...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le député. Je ne veux pas vous interrompre, mais le député de Beauce-Sud soulève une question de...

M. Mathieu: En vertu de l'article 100, j'aimerais poser une question au député de Frontenac.

M. Grégoire: Je vais répondre après.

Le Vice-Président (M. Jolivet): D'accord. M. le député de Beauce-Sud, le député de Frontenac m'indique qu'il veut répondre à la fin de son intervention.

M. Grégoire: Après, toutes les questions que vous voudrez.

Une voix:...

M. Grégoire: Oui, j'étais pour cela. Quand j'ai posé ma deuxième question à je ne me rappelle plus trop quel ministre, j'ai demandé: Aïe, l'Énergie atomique du Canada, cela a l'air d'une grosse compagnie. Ce sont tous des ingénieurs, des savants et des scientifiques. Comment y en a-t-il qui travaillent là-dedans? 6000. Oh! Et combien y en a-t-il du Québec là, des Québécois? -34. J'ai dit: Wo!

La troisième question était adressée au ministre des Transports à Ottawa. J'ai dit: Combien dépensez-vous, parce qu'il venait juste d'y avoir un accident où un train avait heurté un autobus dans le coin de Dorval, c'était il y a environ 20 ans, j'ai dit: Combien dépensez-vous pour les passages à niveau dans tout le Canada? Il m'a dit: Je pense que c'est 110 000 000 $ cette année. - Combien au Québec? - 2 000 000 $. J'ai dit: Quoi? C'était ainsi sur toute la ligne.

Le fédéraliste qui est arrivé à Ottawa avec le drapeau du Canada "from coast to coast", à chaque question, son drapeau baissait un peu et, à la fin, il était en bas! À la fin, il était rendu en bas, parce que le "coast to coast" avait un point au milieu -le Québec - qui n'était pas dans le "coast to coast". Il était dans le trou. Il a baissé, le drapeau. Je suis parti. Je suis revenu ici, mais je m'aperçois, par exemple, que si un député veut réellement aider son peuple, s'il veut réellement aider les Québécois, c'est

ici, parce que c'est ici que sont réellement les véritables décisions pour tout ce qui touche l'individu. À Ottawa, cela touche les affaires internationales. À Ottawa, cela touche la guerre. Cela touche toutes ces choses. Oui, mais ici, au Québec, quand je vois le résultat... Vous êtes là qui regardez tout cela, le député fédéral a 50 000 $ par année, le député de Québec a 35 000 $, et, avec tous les avantages que j'ai énumérés pour le député fédéral, je vais vous dire une chose, je n'ai aucune gêne à voter pour le projet de loi 90. La réforme parlementaire, vous êtes pour, vous aussi, de même que la réforme du régime de retraite. N'oubliez pas que cela va épargner 20 000 $ par année par député au gouvernement du Québec. Il reste les 6%. Je vais vous dire bien franchement, M. le député de Marguerite-Bourgeoys. Quant à moi, je m'en balance comme dans l'an quarante. Savez-vous ce que cela donne? Le savez-vous ce que cela donne? C'est pour neuf mois. 6%, cela va donner environ 1500 $. Là-dessus, il va partir en impôt environ la moitié, et ce qui me choque le plus d'accepter les 6%, c'est que, là-dessus, je vais être obligé de payer 300 $ de plus en impôt à Ottawa quand je sais ce qu'on y fait avec notre argent. On va acheter des bombes de plus avec nos 300 $.

Je vais vous dire bien franchement que la loi, comme le disait si bien le leader parlementaire du gouvernement et ministre des Communications, la loi qu'on étudie présentement va épargner 3 000 000 $ par année au peuple du Québec, en épargnant sur le régime de retraite. Elle va peut-être coûter 220 000 $ de plus - même pas - avec les 6%. Cela va équivaloir à l'augmentation que la fonction publique va recevoir en moyenne le 1er avril. Et puis? Et puis? Avec la loi que vous avez adoptée en 1974, si on l'avait gardée telle quelle, notre salaire aujourd'hui, au lieu d'être 37 000 $, serait de 48 000 $. Au lieu d'être 48 000 $ au 1er avril, il va être rendu à 37 000 $. Et puis? Si on avait gardé la loi que vous avez adoptée, on garderait encore le régime de retraite tel que vous l'avez voté et notre salaire serait de 48 000 $ au lieu d'être 37 000 $. Et puis? Il va augmenter de 6% pour neuf mois? Et puis? Moi, quand je travaille ici... Et, en fin de semaine, vous l'avez fait comme moi, vous êtes restés vous aussi jusqu'à 2 heures, 3 heures ou 4 heures du matin, toute la semaine dernière et encore hier un peu, dans ce temps-là, demandez-vous du temps double, parce que vous avez fait du temps supplémentaire? Non. Vous le savez, n'est-ce pas? Avez-vous demandé le temps et demi? Allez-vous demander des surplus? Non, on ne demande pas cela, nous autres. On le fait. (20 h 50)

Mais si je compare mon rôle, par exemple, avec celui de nos 74 nouilles à Ottawa, je calcule qu'il n'y a rien là, et ce n'est pas moi qui m'en ferai avec cela. Regardez plutôt les faits tels qu'ils sont. On augmente comme la fonction publique en général, pas plus, pas moins, même qu'on a été beaucoup moins augmenté qu'eux autres au cours des six dernières années, beaucoup moins, la moitié moins qu'eux autres, trois fois moins qu'à Ottawa, où ils ont été augmentés depuis les six dernières années. Alors, ce n'est pas moi qui me ferai des scrupules là-dessus. Étant donné le travail qui est accompli aujourd'hui, surtout celui qu'on doit accomplir dans une période de crise comme celle que nous traversons présentement, où on doit faire encore plus que ce qu'on doit faire en temps de prospérité, eh bien, quant à moi, je vais vous dire bien franchement, je n'ai aucune hésitation à voter pour la loi no 90.

Des voix: Bravo! Bravo!

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Fabien Bélanger

M. Bélanger: Merci, M. le Président. C'est toujours agréable de prendre la parole immédiatement après le député de Frontenac qui nous a fait une démonstration...

Une voix:... éloquente...

M. Bélanger:... vraiment éloquente de tous les avantages qu'il avait à Ottawa. C'est à se demander ce qui a bien pu l'attirer au Québec pour qu'il fasse un retour comme cela. Il y a là-bas des salaires extraordinaires, des avantages pour pique-niquer, comme il l'a si bien dit, à Terre-Neuve, à Vancouver et un peu partout; il y a sûrement quelque chose à Québec qui l'a attiré pour qu'il revienne ici offrir ses services qui, semble-t-il, étaient tout simplement indispensables.

Une voix: II s'est fait battre. Il s'est fait battre.

M. Bélanger: Malheureusement, nous devrons revenir au Québec pour étudier la loi no 90, une loi qui, en quelque sorte, ressemble beaucoup à la politique péquiste. C'est un méli-mélo; tout est mélangé. Il y a d'une part la réorganisation du fonctionnement du pouvoir législatif et, d'autre part, on revoit le salaire et le régime de retraite des députés.

C'est très simple, nous demandons une chose: pourquoi ne pas scinder le projet de loi? Pour que nous puissions discuter de la réforme parlementaire, qui est une chose et, ensuite, discuter du salaire et du régime de

retraite des députés. Quant au salaire des députés, je n'ai aucune hésitation à dire qu'un député qui gagne 35 000 $ par année, cela n'a absolument rien de scandaleux; pas de problème sur cela, on s'entend très bien. Sauf qu'il faut savoir une chose, il faut se rappeler également une chose. C'est qu'il y a à peine quelques heures, dans cette même Assemblée nationale, on adoptait 109 décrets; on adoptait une loi qui avait pour effet d'aller chercher dans la poche des travailleurs et des travailleuses du Québec le déjà-gagné. Cela est un précédent qui ne s'est jamais vu. Nous serions vraiment - je vous le dis sincèrement - mal vus de nous voter une augmentation de salaire, même si elle est reportée du 1er janvier au 1er avril. Bien, mon Dieu! mon Dieu! Trois mois, qu'est-ce que c'est? Comme l'a si bien démontré le député de Frontenac, on paiera un peu moins d'impôt et cela ne paraîtra pas. Ce n'est pas là le problème, absolument pas.

Ce qui m'inquiète le plus, c'est que cette loi no 90 a des effets pour nous, de l'Opposition, qui ne sont pas du tout les mêmes que du côté ministériel. Là, je vais m'expliquer. On veut tout simplement, par cette loi no 90, porter le nombre d'adjoints parlementaires de 12 à 27. Alors, qu'est-ce que cela veut dire? Cela veut dire qu'un adjoint parlementaire gagne actuellement 20% de plus qu'un député, environ 7000 $ de plus par année, et là on veut en avoir autant que de ministres. Si on regarde un peu ce que cela donne pour le parti ministériel, vous verrez que c'est pas mal intéressant, si je peux retrouver ma feuille. On a exactement 27 adjoints parlementaires, 27 ministres; un président, deux vice-présidents, dont vous, qui occupez le fauteuil, M. le Président, je suis fier pour vous, je vous félicite; on a le whip, le whip adjoint, etc. Finalement, 68 membres du côté ministériel peuvent avoir une augmentation de salaire, tout en laissant croire à la population du Québec qu'on a tout simplement gelé les salaires.

J'appelle cela une augmentation de salaire hypocrite. Lorsque mon collègue, le député de Maskinongé, vous a traités de bande d'hypocrites, bien, il n'y avait rien d'extraordinaire dans cela. Il y a là un peu de vérité si vous voulez en convenir avec moi. Vous nous dites: On sabre dans le régime de retraite, on coupe, on épargne de l'argent aux contribuables. Ce n'est pas tout à fait vrai.

Une voix: Bien oui.

M. Bélanger: Vous épargnez de l'argent aux contribuables, mais vous allez en chercher d'une autre façon. Vous allez en chercher en doublant et plus, même, le nombre d'adjoints parlementaires.

M. le Président, encore une fois, c'est vraiment une loi péquiste. Ce n'est pas fini, ce n'est pas tout. En nommant ces 27 adjoints parlementaires, on voit très bien la petite politique qu'on peut faire également avec cela. On envoie un communiqué de presse dans les comtés: Le premier ministre du Québec, à la suite du dévouement du député de tel ou tel comté, a cru bon, a décidé de le nommer adjoint parlementaire. Donc, d'une part, le député reçoit 7000 $ de plus par année et, en même temps, le premier ministre fait de la politique dans les comtés, en démontrant le dévouement, les grandes qualités extraordinaires du député. C'est encore une chose qui est tout simplement inacceptable.

D'ailleurs, je me demande pourquoi on tient aujourd'hui à nommer des adjoints parlementaires alors que, si on lit le journal des Débats de 1974, le chef de l'Opposition, qui était le député de Sauvé, disait que les adjoints parlementaires n'étaient absolument rien, ils étaient des coupeurs de rubans que le ministre envoyait à sa place lorsqu'il n'y avait pas assez de capital politique pour lui. On envoyait l'adjoint parlementaire manier les ciseaux. C'étaient des porteurs de valises. C'étaient des ouvreurs de portes. Pourquoi, aujourd'hui, est-ce devenu si important d'avoir des adjoints parlementaires? Je vous pose la question.

Entre nous, sincèrement, que voulez-vous que fasse l'adjoint parlementaire du ministre qui s'occupe des citoyens? Que voulez-vous que le ministre du Revenu fasse d'un adjoint parlementaire? C'est tout simplement de la petite politicaillerie, c'est encore un gouvernement d'images, qui tente de vendre toujours la même chose, son image, point final. Il tente également de jouer avec la population, en lui disant: On est bon, on a eu le courage de faire cela, les autres gouvernements ne l'ont pas eu. Ce courage, je trouve qu'il est venu très tard. Il est venu un petit peu plus de cinq ans après la prise du pouvoir. Ce même courage, il est arrivé après deux élections et un petit peu plus de cinq ans, ce qui fait que la fameuse réforme qu'on s'apprête à apporter à la pension ne touchera justement pas ceux qui ont deux élections et cinq ans à leur crédit. Pourquoi?

En 1977, on vous disait: Révisez donc le régime de retraite des députés qui est trop généreux. On a expliqué pourquoi. Ce régime de retraite était tout à fait logique au moment où on l'a instauré. La moyenne d'âge des députés était beaucoup plus élevée qu'elle ne l'est en ce moment. On vous le disait, on vous l'a dit. L'ancien député de Chomedey, Jean-Noël Lavoie, vous l'a dit en 1977, vous l'a dit en 1978, vous l'a dit en 1979, vous l'a dit en 1980, mais ce n'était pas le temps. Il fallait attendre d'abord de voir si on gagnerait encore une fois les élections et si la majorité des députés serait

admissible à l'ancien régime de retraite. C'était prioritaire, bien avant les intérêts des Québécois.

Aujourd'hui, on nous arrive avec un projet de loi, comme je l'ai mentionné, rempli de toutes sortes d'implications, de réformes parlementaires et, dans cela, on insère justement le salaire et le régime de retraite des députés. Si ce gouvernement a vraiment un peu de sincérité, s'il lui en reste le moindrement, qu'on scinde le projet de loi. Nous nous prononcerons sur une réforme parlementaire et nous pourrons nous prononcer ensuite sur le salaire et le régime de retraite des députés. Ce n'est pas chinois, ce n'est pas compliqué. Il n'y a absolument rien là, deux projets de loi. Cette session-ci, on n'a pas eu tellement de projets de loi, on pourrait sincèrement faire un projet de loi de plus et cela ne dérangerait absolument rien.

On nous a reproché à nous, de l'Opposition, de ne jamais rien suggérer. On va vous en suggérer des choses. Pourquoi ne pas maintenir le nombre d'adjoints parlementaires actuel? Le gel des salaires jusqu'au 31 décembre 1983, cela ne fera mourir personne. On va passer à travers. Cela va donner l'exemple à la population du Québec. Cela va faire en sorte que ces travailleurs et ces travailleuses qui ont été si durement frappés, si injustement frappés, aient au moins la satisfaction de savoir que ceux-là même qui les ont frappés s'imposent également un petit peu de sacrifices. (21 heures)

On pourra également retirer l'article prévoyant l'indexation à compter du 1er janvier 1984. Le ministre des Finances dit lui-même qu'il a de la difficulté à prévoir quelles seront les rentrées de fonds en 1983. Pourquoi ne pas attendre? En décembre 1983, on regardera ça. Si la situation économique s'est replacée, si les finances du Québec se sont replacées et si, par bonheur, on avait eu la chance de reprendre le pouvoir, peut-être que la situation sera davantage améliorée et, là, on pourrait revoir ça.

C'est aussi simple que ça, il n'y a rien de sorcier, il n'y a rien de chinois, on demande tout simplement un petit peu de logique, un petit peu de bon sens. Comment pouvons-nous honnêtement nous voter, à nous de l'Opposition, une petite augmentation de salaire de 6% et à vous, du côté ministériel, une augmentation, avec vos adjoints parlementaires, qui totalise environ 20%? Comment pouvons-nous faire ça honnêtement, en parlementaires supposément responsables? C'est tout simplement de l'indécence.

Je vois le député de Sauvé qui est là, j'aimerais lui citer...

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de privilège, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Guay: M. le Président, je soulève une question de privilège. Le député de Mégantic-Compton vient d'affirmer que les députés ministériels augmentaient les salaires de 20% alors que le projet de loi prévoit simplement de différer une augmentation déjà prévue de 6%. Il n'a jamais été question de 20% et en ce sens c'est un fait inexact. Le député de Mégantic-Compton induit la Chambre et la population en erreur.

Une voix: Voilà!

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Mégantic-Compton.

M. Bélanger: Si on m'avait écouté, j'ai dit simplement que nous, de l'Opposition, avions 6% à compter du 1er avril 1983 et de l'autre côté, avec la nomination en masse d'adjoints parlementaires, ce qui représente déjà 20% du salaire, plus les 6%, ça fait une moyenne d'environ 23% ou 24%; c'est simplement ça que j'ai dit, c'est la pure vérité et je la maintiens.

M. Guay: Question de privilège.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de privilège, M. le leader adjoint du gouvernement.

S'il vous plaît!

M. Guay: M. le Président, encore une fois le député de Mégantic-Compton rapporte un fait inexact. Le projet de loi...

M. Lalonde: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de règlement, M. le leader de l'Opposition.

M. Lalonde: Je pense que la question de privilège du leader adjoint du gouvernement n'est pas recevable. S'il n'est pas d'accord avec ce que le député de Mégantic-Compton dit, il pourra l'exprimer dans son discours ou à la fin si cela réfère à un discours du leader adjoint. Il me semble que ce que le député de Mégantic-Compton a dit était clair. Par la nomination de 15 adjoints parlementaires de plus, ils auront 20% de salaire de plus, plus les 6% qui viendront en avril 1983. C'est exact, c'est tout à fait conforme au projet de loi que vous voulez faire adopter.

M. Guay: M. le Président, sur la question de règlement.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Sur la question de règlement, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Guay: Le député de Marguerite-

Bourgeoys vient à son tour de répandre une fausseté. Le projet de loi ne prévoit pas nommément la nomination de 27 adjoints parlementaires, contrairement à ce qu'on dit, il ne fait tout simplement pas de limite au nombre d'adjoints parlementaires, ce qui est très différent...

M. Lalonde: Ce n'est pas une question de privilège.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Sur la question de règlement.

M. Lalonde: Ce n'est pas une question de privilège, M. le Président, quand même!

Le Vice-Président (M. Rancourt): C'est une question de règlement.

M. Guay: M. le Président, il ne peut pas y avoir de question de règlement sur la question de règlement.

Le leader parlementaire de l'Opposition a soulevé une question de règlement qui lui a permis de faire un débat quant au fond. Je parle sur sa question de règlement. Ce que dit le député de Mégantic-Compton et ce que répète le leader de l'Opposition, ce n'est pas dans le projet de loi et l'augmentation qui est différée au 1er avril plutôt qu'au 1er janvier, est, pour tout le monde, de 6%.

M. Lalonde: M. le Président...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

M. Lalonde: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de règlement, M. le leader de l'Opposition.

M. Lalonde: Le leader adjoint du gouvernement vient de dire que c'est faux qu'il soit prévu dans le projet de loi no 90 qu'on puisse avoir 15 adjoints parlementaires de plus qu'on a actuellement. Or, le projet de loi no 90 prévoit qu'on ait un nombre d'adjoints parlementaires égal aux ministres, qui sont 27. On a 12 adjoints parlementaires, ce qui fait 15 de plus.

Des voix: C'est ça!

Le Vice-Président (M. Rancourt): Sur la même question de règlement.

M. Guay: Le député de Marguerite-Bourgeoys, qui est avocat, sait aussi bien que moi qu'une disposition "habilitante" dans un projet de loi qui dit qu'il peut y avoir n'implique pas qu'il y aura et c'est bien différent.

Des voix: Ah! Ah! Ah! Une voix: On vous connaît!

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît: S'il vous plaît! M. le député de Mégantic-Compton, vous avez la parole.

M. Bélanger: Merci, M. le Président. Je constate de plus en plus que c'est difficile ici de faire une intervention sans être dérangé par des questions de règlement, etc.

Si je sais bien compter - je pense que je sais bien compter, M. le Président - un adjoint parlementaire reçoit une prime de 20% de son salaire et l'augmentation de 6% prévue au 1er avril 1983. Donc, on parle de 26%. Cela ne s'appliquera pas pour l'ensemble des députés mais une bonne partie des députés ministériels, parce qu'il en restera six qui n'auront pas de bonbon, qui n'auront pas de fonctions d'adjoint parlementaire. Six seulement. 68 sur 74 auront quelque chose. Donc, c'est tout simplement la pure vérité que de dire...

Le Vice-Président (M. Rancourt): Question de privilège, M. le leader...

Une voix:...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! Question de privilège, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Guay: Le député de Mégantic-Compton vient d'affirmer que la grande majorité des députés ministériels vont jouir d'une augmentation de 20%. M. le Président...

M. Lalonde: M. le Président, question de règlement.

M. Guay:... c'est tout à fait inexact.

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! J'ai donné la parole au député de Mégantic-Compton et il peut continuer son allocution.

M. Bélanger: Merci, M. le Président. De toute façon...

Des voix:...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

M. Bélanger:... nous, on a compris et je suis persuadé que la population du Québec va très vite comprendre.

Revenons, M. le Président, à ces fameuses augmentations de salaire qu'on s'apprête à donner. Revenons un peu en arrière, en 1974. Cela me fait plaisir de voir

le député de Sauvé à son siège et je vais lui citer quelques passages de son discours en deuxième lecture sur le projet de loi no 87. Cela va sûrement vous rappeler de merveilleux souvenirs de l'époque où vous étiez vraiment des purs, des gens à l'écoute du peuple, de la population. Qu'est-ce qu'on disait des augmentations de salaire en 1974? Écoutez bien ce que le député de Sauvé disait.

Une voix: C'est qui?

M. Bélanger: Le député de Sauvé, qui est actuellement ministre et vice-premier ministre.

Des voix: Oui?

M. Bélanger: Oui. Il disait à peu près ceci, M. le Président: "Quelle honte de ne pas tenir compte de nos concitoyens et d'être les premiers à nous servir à même les fonds publics. "

Des voix: Ah!

M. Bélanger: C'est pas beau cela? C'est magnifique.

Une voix: Le député de Sauvé?

M. Bélanger: "Si nous étions des fiduciaires de l'entreprise privée, si nous avions la garde des fonds privés...

Une voix: II disait cela, lui.

M. Bélanger:... - il parle des fonds privés. Toujours le même ministre, M. le Président - on nous appellerait des dilapidateurs. Il y a des peines prévues pour cela. " C'est dans l'entreprise privée; heureusement qu'il n'y en a pas dans les fonds publics parce qu'il manquerait plusieurs ministres de l'autre côté, M. le Président. Je vous jure qu'ils nous écouteraient à la télévision et non pas ici de leur siège.

Il en ajoutait toujours, M. le Président: "Nous avons, comme parlementaires écoutez ce que disait le député de Sauvé, c'est magnifique - comme élus de la population, pas seulement des avantages à recueillir. Nous avons aussi un exemple à donner. " C'est cela que nous voulons faire, M. le Président. Nous voulons donner l'exemple après l'adoption de cette loi-matraque, cette loi que nous avons adoptée à toute vapeur, cette loi qui nous a empêchés de remplir notre rôle d'Opposition. Il était impossible d'étudier 80 000 pages de décrets. Même si Mme la députée de Dorion dit que c'est 35 000, je ne sais pas si elle a eu le temps de les compter. Nous, on n'a pas eu le temps de les compter. On les a vues et c'était impossible de faire un travail.

Une voix: On n'a pas fini.

M. Bélanger: Et on n'a pas fini de les compter, d'ailleurs. On est encore à le faire.

C'est cet exemple que nous voulons donner et cet exemple, M. le Président, est très simple. Nous voulons tout simplement scinder ce projet de loi. Nous voulons le gel des salaires des députés pour l'année 1983. En 1984, on verra, si cela va bien au Québec, si l'économie est relancée, si le gouvernement a tout simplement les moyens de nous payer. Dans le moment, il semble qu'il ne les a pas. Je préfère qu'on gèle mon salaire que de fermer des centres d'accueil et de priver de services les malades dans les hôpitaux. C'est aussi simple que cela. C'est une Opposition responsable. Ce n'est pas une question de faire de la démagogie. C'est une question de responsabilité. C'est pour cela, M. le Président, que nous demandons: De grâce, scindez ce projet de loi qu'on puisse, d'une part, voter pour une réforme parlementaire et, d'autre part, être tout simplement raisonnables envers les citoyens du Québec en acceptant, nous aussi, de faire notre part de sacrifices. Merci.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le leader du gouvernement, en vertu de l'article 100.

M. Bertrand: Est-ce que je peux poser une question au député de Mégantic-Compton, en vertu de l'article 100?

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Mégantic-Compton refuse.

M. Bertrand: Merci. On a peur?

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

Une voix: Adopté, M. le Président. (21 h 10)

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Laporte.

M. André Bourbeau

M. Bourbeau: Merci, M. le Président. Nous étudions ce soir, en deuxième lecture, le projet de loi no 90, Loi sur l'Assemblée nationale du Québec. C'est un projet de loi qui apporte une réforme importante à l'Assemblée nationale. Pour citer les notes explicatives: "II consacre la suprématie du Parlement du Québec constitué de l'Assemblée nationale et du lieutenant-gouverneur et affirme solennellement le caractère particulier et les prérogatives de l'Assemblée nationale".

C'est un projet de loi qui rajeunit

l'institution qu'est l'Assemblée nationale. Je crois qu'il était attendu depuis longtemps. Je pense aussi qu'on peut dire qu'il est le bienvenu et qu'il semble, dans ses dispositions principales, recueillir l'adhésion de la plus grande partie des députés. Malheureusement, un bonheur ne vient jamais seul, tout comme un malheur, et le gouvernement a jugé bon d'adjoindre à ce projet de loi des dispositions, un peu comme un genre de piggy-back, accrochées au projet de loi. Après la bonne partie du projet de loi, il y a une partie beaucoup plus discutable, une partie aux termes de laquelle le gouvernement veut augmenter le salaire des députés et modifier également la pension.

Vous comprendrez que cela crée un certain problème de conscience parce que ceux qui parmi nous, ici, de l'Opposition, voudraient voter pour la réforme parlementaire et qui voudraient voter contre les dispositions qui vont majorer le salaire des députés, se demandent quoi faire. Est-ce qu'on devrait voter pour ou contre? Pourtant, le rôle du député, qui est évidemment consacré au travail que nous faisons et qui est rémunéré par un salaire, est important. Je pense qu'on peut dire que le travail qu'accomplissent les députés est considérable. Les députés doivent ici étudier les différentes pièces de législation qui leur sont confiées; nous avons à faire l'étude des projets de loi, nous avons à les critiquer en tant qu'Opposition, nous assistons à de longues séances des commissions parlementaires où nous tentons d'améliorer les projets de loi. Nous avons également beaucoup de travail à faire dans nos circonscriptions. Nous rencontrons les électeurs qui viennent nous voir, nous servons de lien ou de canal entre les électeurs et l'État. Nous servons également de lien entre les organismes de nos comtés, les commissions scolaires, les municipalités et l'appareil gouvernemental. Nous avons à véhiculer quantité d'informations à nos électeurs, sans parler de toutes les activités sociales, les week-ends complets où nous devons assister à des activités dans nos comtés et un peu partout à travers la province. Je pense qu'on peut dire que le député accomplit un travail qui le tient captif.

J'aimerais citer à ce propos des paroles que prononçait en cette Chambre un ancien premier ministre du Québec, M. Jean Lesage, qui disait: "Les députés sont ainsi forcés de délaisser leurs affaires personnelles davantage chaque jour. Les moins fortunés d'entre eux en souffrent énormément et c'est clair; cela les place dans une situation difficile, souvent intenable et les expose à toutes sortes de tentations auxquelles ils peuvent être amenés à succomber à cause de leurs obligations familiales ou autres. " M. Lesage continuait: "C'est un risque, à mon sens, que ne peut pas se permettre de courir la démocratie. D'autre part, plusieurs hommes de valeur qui pourraient être un apport précieux à notre vie politique hésitent ou refusent de se porter candidat parce que, disent-ils, ils n'ont pas les moyens d'être députés. Combien de fois avons-nous entendu dire cela? Dans trop de cas, c'est malheureusement l'exacte vérité. " C'est M. Jean Lesage qui disait cela il y a quelques années.

Un autre premier ministre du Québec, M. Daniel Johnson, disait à ce sujet: "M. le Président, en principe, il faut rechercher une rémunération qui, dans les limites de la décence, dans les limites de l'appréciation la plus objective possible, respecte à la fois la fonction, la qualité de la fonction et constitue une rémunération adéquate pour le travail accompli. "

Je pense donc que la plupart des gens se rendent compte que le député a beaucoup de travail à faire et qu'il doit, en conséquence, être rémunéré d'une façon adéquate. Là n'est pas le problème.

J'écoutais hier le leader du gouvernement qui tentait justement, avec des tableaux et des statistiques, de nous démontrer pourquoi on devrait augmenter le salaire des députés. Je dois avouer que le leader plaidait avec beaucoup de verve et avec beaucoup de conviction. Je dirais même que c'était un peu pathétique de l'entendre parce qu'il s'efforçait de nous convaincre et, en autant que moi j'étais convaincu, on peut dire qu'il prêchait à des convertis parce qu'on n'a pas à nous faire la démonstration qu'actuellement le salaire des députés est peut-être moins important qu'il ne devrait l'être. D'autres députés se sont efforcés de nous prouver qu'au cours des quatre ou cinq dernières années évidemment, le salaire des députés n'a pas augmenté autant qu'il aurait dû. Je pense que la démonstration est facile à faire puisqu'on nous dit qu'en 1977 ce gouvernement avait gelé complètement le salaire des députés et que, dans les années suivantes, on a limité l'augmentation à 6%. C'est bien évident que le salaire a pris un retard et qu'au cours des années dernières, alors que les pourcentages d'augmentation du coût de la vie oscillaient entre 9%, 10% et 11%, le salaire des députés n'augmentait que de 6%.

La conséquence de tout cela, c'est qu'aujourd'hui nous avons des salaires qui, semble-t-il, sont moins importants que ce qu'ils devraient être. Les députés, surtout du côté du gouvernement, s'en plaignent amèrement. Moi, je leur réponds qu'ils n'ont qu'à s'en prendre à eux-mêmes. Si les salaires sont moins élevés aujourd'hui qu'on voudrait qu'ils le soient, qui en sont les responsables? Ce sont ces gens. Ils sont aujourd'hui les victimes de leur propre turpitude. Quand je les entends aujourd'hui

les larmes aux yeux, les mouchoirs à la main venir se plaindre et venir brailler devant la population, je trouve cela ridicule.

Tout à l'heure, on entendait le député de Frontenac nous parler de piastres et de pourcentages, de 100% d'augmentation dans le privé et nous, seulement 30%. Je trouve cela humiliant, à proprement parler, d'avoir à faire un discours semblable pour venir faire la démonstration qu'aujourd'hui ils sont eux-mêmes les victimes de leur propre manque de jugement. C'est cela qui est arrivé. Je dois avouer que, quant à moi, ils ont creusé leur propre fosse. Ils ont fait leur lit et, maintenant, ils sont couchés dedans. Ils ont posé leur propre piège. Ils sont maintenant piégés. Ils sont pris exactement dans le piège qu'ils se sont eux-mêmes tendu.

J'écoutais, hier, le leader du gouvernement et je trouvais cela à la fois pathétique et aussi très drôle parce que dans les heures qui avaient précédé, j'avais pris le temps de lire les propos que nous tenait en 1974 le député de Sauvé, maintenant vice-premier ministre. Je sais que, tout à l'heure, mon collègue de Mégantic-Compton citait ses propos. J'ai cherché un terme qui serait le plus parlementaire possible pour décrire l'attitude qu'avait adoptée à ce moment celui que le journal des Débats appelle M. Jacques-Yvan Morin. Je n'en ai pas trouvé d'autre que le mot hypocrite. Je m'excuse envers le vice-premier ministre. Je ne voudrais pas le traiter d'hypocrite, mais il n'y a pas d'autre façon de décrire l'attitude tout à fait démagogique qu'il a eue, en 1974, lors d'un débat qui se tenait en cette Chambre.

Plaçons-nous un peu, si vous le voulez, dans le temps. En 1974, à la fin de l'année 1974, à la même période que maintenant, le gouvernement libéral du temps tentait d'introduire un projet de loi pour faire en sorte que le salaire des députés soit porté à un montant qui était considéré par un groupe tout à fait indépendant comme étant raisonnable. À ce moment, le député de Sauvé, qui aujourd'hui ne semble pas apprécier particulièrement les reproches qu'on lui fait, s'était levé et avait fait des discours tout à fait démagogiques dans lesquels il disait ceci: Nous vivons - à ce moment, en 1974 - dans une période, disait-il, où l'économie est très mauvaise et c'est scandaleux d'augmenter les salaires, même de penser à augmenter les salaires. Je peux à peine résister, moi aussi, à la tentation de citer quelques-uns de ses propos. Je n'en citerai pas long. D'abord, évidemment, il a lancé cette célèbre phrase: Nous allons identifier qui sont les sangsues des fonds publics. Les sangsues des fonds publics, c'était le gouvernement libéral qui tentait d'augmenter les salaires à un montant considéré comme étant décent.

(21 h 20)

Je vais en passer un peu. "Dans un contexte économique...

Des voix:...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît; M. le député de Laporte.

M. Bourbeau: M. le Président, malheureusement pour le vice-premier ministre et député de Sauvé, on sait que les paroles s'envolent, mais que les écrits demeurent. Or, ses écrits ont demeuré. Alors qu'il jouait les vierges offensées parce qu'on tentait d'augmenter les salaires à une époque où l'économie était dix fois meilleure qu'aujourd'hui, il disait ceci, que cela créait un scandale, un scandale que va créer le geste du gouvernement dans l'opinion publique québécoise. "Le gouvernement a décidé d'augmenter, coûte que coûte, les salaires des députés et cela constitue disait-il - un abus de pouvoir, un abus de confiance. " Il disait un peu plus loin: "Peut-il exister un moment plus mal choisi pour procéder à une telle hausse de salaires?" M. le Président, quand on regarde ce qui se passe aujourd'hui, on constate que la vie a de ces retours, des retours assez surprenants, parce que les paroles du député de Sauvé peuvent être appliquées textuellement aujourd'hui et lui être retournées.

À ce moment-là, le député de Rosemont, je pense bien, enfinl M. Maurice Bellemare avait dit ceci au député de Sauvé, il l'avait traité de sépulcre blanchi. M. le Président, ce n'est pas moi qui l'ai dit. C'est le député Bellemare qui trouvait que c'était la façon dont on devait qualifier le vice-premier ministre.

M. le Président, je ne parlerai pas, comme mon collègue de Mégantic-Compton, de l'expression tout à fait antiparlementaire qu'il employait alors qu'il traitait le gouvernement de sangsue collée aux fonds publics, mais il disait: "Qui sommes-nous? Après tout, sommes-nous des profiteurs? On nous a élus pour diriger, pour participer à la direction des affaires de ce pays. Nous sommes responsables du bien commun, de l'état de notre demeure collective qui est le Québec. " Et un peu plus loin: "Nous devrions être dans cet État, dans ce pays qui est le nôtre, les premiers à servir et non pas les premiers servis. " Et que fait-il aujourd'hui? Dans son projet de loi, il vote des augmentations de salaires aux députés, alors qu'il coupe 20% dans le salaire de ses propres employés. Et un peu plus loin: "Appliquer ces principes à nos modestes personnes. " Évidemment, le député de Sauvé se qualifiait lui-même de modeste. Il disait: "... en nous disant que les autres se débrouilleront comme ils le pourront, mais jamais en ce qui nous concerne. " Les autres,

M. le Président, ce sont les employés du gouvernement qui tentent de se débrouiller aujourd'hui comme ils le peuvent avec leur diminution de salaire pendant que nous, semble-t-il, on va jouir de l'augmentation que nous vote le gouvernement.

Donc, M. le Président, j'entendais hier et aujourd'hui ces gens qui tentaient de nous convaincre que les salaires des députés n'étaient pas assez importants, que les salaires des députés n'avaient pas été indexés depuis quatre ou cinq ans. J'étais parfaitement au courant de tout cela. On ne m'a rien appris. On ne m'a absolument rien appris. Tout ce que je sais, cependant, c'est que, malheureusement pour vous, vous arrivez trop tard. Même si on voulait aujourd'hui donner suite à vos demandes ou à vos réclamations, ce serait, à proprement parler, indécent d'augmenter les salaires au moment où tout le monde voit les siens coupés. Dans le secteur privé, M. le Président, on considère aujourd'hui que c'est une chance que de garder son emploi. On ne demande pas d'augmentation. Un grand nombre de gens dans le secteur privé voient leur salaire réduit et se considèrent encore chanceux de ne pas perdre leur emploi. Dans le secteur public, on voit des employés du gouvernement qui se font couper leur salaire de 20%. Si on arrivait aujourd'hui et qu'on disait, comme on veut le faire: Les députés auront une augmentation de 6% dans quatre mois, une autre augmentation neuf mois plus tard indexée au coût de la vie, je trouverais cela, M. le Président, tout à fait honteux de me présenter devant mes électeurs et leur expliquer comment il se fait qu'on s'est voté des augmentations de salaire dans un contexte semblable. Si j'étais vous, j'aurais honte. Je ne retournerais même pas dans mon comté.

M. le Président, ce qu'il y a de drôle là-dedans - on l'a souligné, mais je voudrais revenir là-dessus - c'est qu'on vote des augmentations de 6% - on l'a dit - et, du côté du gouvernement, il semble qu'on ne trouve pas cela suffisant. Mon collègue expliquait tantôt qu'on a trouvé une façon d'aller ajouter des augmentations additionnelles presque à la majorité des députés du gouvernement du Parti québécois. On a inventé une clause dans le projet de loi qui est ici, aux termes de laquelle on nommera 27 adjoints parlementaires; il y en a 12 présentement; on en augmentera le nombre à 27. Or, vous savez que les ministres ont actuellement des salaires très importants. Maintenant, il y a 27 ministres, on leur adjoindra 27 adjoints parlementaires qui, eux, auront également une surprime importante, on augmentera leur salaire de 20%. Donc, cela ferait 54 députés du Parti québécois qui auront beaucoup plus que le salaire minimum du député. Comme vous savez, il y a en plus que cela; les autres: sept présidents de commission, la présidence, les adjoints du président, les whips, les leaders adjoints etc. Finalement, on a fait le total: sur les 75 députés du Parti québécois, il y en a 68 ou 69 qui auront non pas le salaire d'un simple député, mais des surprimes, des boni, pour faire un travail dont le député de Sauvé disait il y a quelques années qu'il n'était pas très important dans le cas des adjoints parlementaires; il les traitait d'une façon très méprisante de "porteurs de valises", de "coupeurs de rubans". Nous ne souscrivons pas nécessairement à cette définition. Mais, ce qu'on peut dire, c'est que, dans ce parti où la très grande majorité des députés n'auront pas le salaire minimum, on se retrouvera dans cette Chambre avec deux catégories de députés. Il y aura d'une part les députés libéraux qui auront le salaire d'un député et qui feront leur travail consciencieusement, et il y aura d'autre part les députés péquistes qui, eux, auront tous le salaire minimum plus des surprimes, de 3500 $, de 7000 $, de 15 000 $, le montant qu'on voudra.

Quand je regarde cela en face, c'est un peu comme une armée où vous auriez à peu près 95% de colonels et 5% de soldats. C'est ce que vous aurez, à peu près 6 soldats sur 79 ou 76, tous les autres seront des colonels, des généraux, des capitaines. Finalement, il n'y aura à peu près personne qui portera les fusils.

Le moyen n'est même pas gracieux. Vous avez employé une méthode qui, vraiment, ne sent pas bon. Je pense qu'on peut facilement la déceler et les citoyens du Québec vous jugeront, messieurs, à vos actes.

Finalement, sur la question du régime de retraite - je n'ai plus beaucoup de temps, vous me faites signe - il est étrange de remarquer qu'on ait décidé de l'augmenter maintenant et non pas rétroactivement au 1er avril 1981. Si on l'avait fait, la plupart des députés péquistes élus en 1976 n'auraient pas droit à la pension automatique, la grosse pension, etc. Je pense que, lorsqu'on s'est présenté ici, il y avait des règles du jeu. Qu'on les change, très bien. La pension -c'est admis - était beaucoup trop importante et je ne pense pas qu'il était correct de la garder, mais qu'on la change pour tout le monde et rétroactivement au 13 avril 1981 au moment où tout le monde s'est fait élire.

J'aimerais élaborer ma pensée sur le régime de retraite, mais vous me dites que mon temps achève. En résumé, je dirais que le projet de loi no 90, que l'on examine présentement, contient des dispositions heureuses qui devraient permettre de moderniser et d'améliorer l'institution parlementaire très importante que constitue l'Assemblée nationale du Québec. Ce projet est le fruit de longues études et d'un certain consensus à l'égard des principales mesures visant à réformer notre institution

parlementaire. Malheureusement, le gouvernement a jugé bon d'ajouter à ce projet de loi des mesures visant à modifier les conditions de salaire et du régime de retraite des députés. Ce faisant, le gouvernement a décidé de diminuer la pension des députés, geste attendu depuis longtemps et qui s'imposait, mais il a également favorisé un grand nombre de députés péquistes élus en 1976 en s'assurant que tous ces gens se qualifiaient sous l'ancien régime de retraite, avant de l'abolir évidemment. Également, le projet de loi prévoit des augmentations de salaire, après qu'on a coupé de 20% les salaires des fonctionnaires de l'État. De plus, le gouvernement a trouvé le moyen d'augmenter sensiblement les revenus de la presque totalité des députés péquistes en leur trouvant des fonctions additionnelles, des titres honorifiques, qui sont rémunérés en plus du salaire de base. Donc, des augmentations de salaires substantielles par la porte d'en arrière.

En terminant, je dis ceci: nous disons non aux augmentations de salaire directes et camouflées. Nous disons oui à la réforme parlementaire. Nous demandons, comme l'ont dit mes collègues, de scinder le projet de loi en deux de façon qu'on puisse voter pour la réforme parlementaire. Nous demandons une entrée en vigueur du régime de retraite rétroactivement au 13 avril 1981. (21 h 30)

En conclusion, j'aurais aimé citer encore une fois le député de Sauvé, mais je vois que vous ne me donnerez pas de temps, M. le Président, parce qu'il y avait une magnifique conclusion à ajouter qui aurait fait les délices du député de Sauvé.

J'ajouterai cependant et uniquement que la réputation et l'image du député dont parlait en 1974 le député de Sauvé exigent un minimum de décence, exigent que les députés se comportent comme des gens responsables et raisonnables. C'est bien là l'attitude qu'adopte l'Opposition dans ce débat. Je vous remercie.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Rancourt): Mme la députée de Johnson.

Mme Carmen Juneau

Mme Juneau: Merci, M. le Président. Le 10 décembre dernier, durant le débat sur la loi 105, je suis intervenue, exprimant au nom de l'ensemble des gens formant la circonscription électorale de Johnson le pourquoi du geste que j'allais poser en votant pour cette loi 105 qui favorisait les moins bien nantis du Québec.

Aujourd'hui, le 14 décembre, donc quatre jours après, le projet de loi no 90!

Mes collègues et moi nous sommes posés certaines questions. On s'est dit: Est-ce que le "timing" est bon? Est-ce que cela a du sens qu'on pense à se donner 4, 8% d'augmentation à partir du 1er avril? On s'est posé toutes ces questions. On a été hésitants à savoir si cela avait du sens, mais quand on a vu qu'en touchant à nos pensions, on se trouvait à épargner presque 20 000 $ par député, ici au gouvernement du Québec, que cela économiserait 2 800 000 $ à tous les contribuables du Québec, à ce moment, notre décision a été vite prise. Je crois qu'il est important qu'on ait une solidarité chez les membres du parti pour être capables de voter pour le projet de loi no 90 afin d'être justes et équitables envers tous ceux qu'on représente.

Je disais donc que le projet de loi no 90 renferme trois volets: premièrement, sur la réforme parlementaire qui ordonne et précise les dispositions ayant trait à l'organisation du fonctionnement du pouvoir législatif. Je suis sûre que les gens de mon comté ne veulent pas m'entendre parler de ce volet de la loi. Ils veulent savoir quel est mon salaire, quelle est ma pension. Je vais leur faire plaisir encore, je vais leur parler de mon salaire et je vais leur parler de ma pension.

Savez-vous que les journaux - M. le Président, vous suivez cela de près vous aussi - et la radio ont fait grand état en fin de semaine des 6% d'augmentation du salaire des députés. On a glissé fort discrètement, dans cette même publicité, le régime de retraite des députés. Permettez-moi de questionner ceux mêmes qui m'ont élue parce que, comme vous le savez, chacun d'entre nous doit répondre de ses faits et gestes devant ses électeurs.

Je dirai donc à mes électeurs dans Johnson: Croyez-vous que votre députée provinciale, pour son travail, pour son implication dans vos dossiers personnels, pour tout ce dont vous avez besoin, doit obligatoirement être moins bien rémunérée que les députés fédéraux? Dans le comté de Johnson, on a trois députés fédéraux. Mes deux collègues ici les connaissent aussi. On a M. Marcel Ostiguy, de Saint-Hyacinthe, M. Jean Lapierre, de Shefford, et M. Alain Tardif, de Richmond.

En juillet 1981, le gouvernement fédéral est intervenu dans leur salaire, et rétroactivement à juillet 1980, pour leur ajouter de façon substantielle la rémunération de base des députés fédéraux. À compter du 1er janvier 1983, M. Marcel Ostiguy, de Saint-Hyacinthe, M. Jean Lapierre, de Shefford et M. Alain Tardif, de Richmond et tous les autres d'Ottawa gagneront 15 000 $ de plus que nous tous ici, mes chers collègues de l'Assemblée nationale. Je voudrais demander à mon collègue de Saint-Hyacinthe, qui connaît bien

M. Ostiguy, s'il gagne 50 000 $ comme le député d'Ottawa? C'est 50 350 $, je m'excuse, j'avais oublié 350 $. Le député de Shefford connaît Jean Lapierre lui aussi; est-ce que vous gagnez la même chose que Jean Lapierre, M. le député de Shefford, membre de l'Assemblée nationale du Québec?

Une voix: Non.

Mme Juneau: Non, on ne gagne pas la même chose qu'eux, il y a une légère différence de 15 000 $. En deux ans, soit du 1er janvier 1980 au 1er janvier 1982, les députés du Québec ont vu leur salaire augmenter de 12, 4%. Pour la même période, les députés d'Ottawa voyaient leur salaire augmenter de 58, 8%. C'est toute une augmentation, hein?

Si vous voulez, je reculerai encore un petit peu plus loin, soit du 1er janvier 1977 - je vais vous en donner, des chiffres - au 1er avril 1983: les députés du Québec, 33, 8% d'augmentation; les députés d'Ottawa, 97, 5%. Si je vous donne ça en chiffres, MM. les députés de l'Opposition, c'est que le 1er janvier 1977 les députés du Québec gagnaient 27 800 $ et, à la même date, les députés d'Ottawa gagnaient 25 500 $. Le 1er janvier 1982, les députés du Québec, 35 096 $, les députés d'Ottawa - écoutez bien ça, M. le Président! - 50 350 $. C'est tout un bond, hein?

Des voix:...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît:

Mme Juneau: Oui, je comprends.

Nous autres, au Québec, je pense qu'on n'a pas été voraces sur nos salaires. Depuis plusieurs années, on a 5% ou 6% d'augmentation et il y a des années où on n'a rien du tout. C'est pour ça que je pense que c'est important qu'on ait une solidarité et qu'on puisse voter pour le projet de loi no 90 pour nous donner ce tout petit peu d'augmentation, soit de 4, 8%, en nous soustrayant 20 000 $ de notre régime de retraite.

Avec les 4, 8% d'augmentation du 1er avril 1983, notre salaire total - le mien, donc - est de 37 202 $. Si vous calculez cela, on est loin des 50 350 $ du fédéral. Mes collègues et moi n'exigeons pas de recevoir les mêmes traitements que nos égaux du fédéral. Jamais de la vie! Tout ce qu'il y a dans le projet de loi no 90, c'est 4, 8% à partir du 1er avril. Saviez-vous, gens de Johnson, que si le projet de loi no 90 n'était pas adopté, ce n'est pas 4, 8% d'augmentation au 1er avril 1983 que nous aurions, c'est 6% à compter du 1er janvier.

C'est facile pour l'Opposition de s'opposer, de nous traiter d'inconscients, d'irresponsables, d'immatures et j'en passe, je suis polie quand je dis seulement ça. C'est facile aussi de crier à la vierge offensée quand ça ne touche pas notre portefeuille. Vous savez, messieurs et mesdames de l'Opposition...

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

Mme la députée de Johnson.

Mme Juneau: Je disais donc qu'ils savent très bien, eux aussi, que lorsque le projet de loi sera adopté, même s'ils ont parlé contre, ils l'auront pareil. C'est pour ça que ça ne leur fait rien de piailler et de dire toutes sortes de choses.

Des voix:...

Mme Juneau: C'est ça!

Le Vice-Président (M. Rancourt): À l'ordre, s'il vous plaît!

Je vais demander la collaboration de cette Assemblée pour que, quels que soient les députés qui prendront la parole, ils aient au moins l'occasion de le faire en toute quiétude.

Mme la députée de Johnson.

Mme Juneau: Merci, M. le Président. J'ai l'impresion que je les touche quelque part.

Des voix: Ah! Ah! Ah!

Mme Juneau: Je ne sais pas s'ils enverront leur augmentation à Centraide. (21 h 40)

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

Mme Juneau: Allez-vous envoyer votre augmentation à Centraide? Si vous ne voulez pas l'avoir, vous pourriez l'envoyer là.

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît!

Une voix: Consentement pour qu'ils répondent.

Le Vice-Président (M. Rancourt): S'il vous plaît! Mme la députée de Johnson.

Mme Juneau: Merci, M. le Président. Je voudrais m'adresser aux gens du comté de Johnson. Je ne sais pas s'ils sont au courant, M. le Président, qu'il y a 50 000 personnes qui reçoivent un salaire supérieur à celui de leur député. J'ai fait quelques recherches.

Une voix: Dans la fonction publique. Mme Juneau: Dans la fonction publique.

Oui, merci. J'ai fait quelques recherches, M. le Président, et je me suis aperçue que, dans les 330 000 salariés des secteurs public et parapublic, un salarié sur sept est mieux payé que vos députés. Depuis le 1er juillet 1974 au 1er juillet 1982, saviez-vous combien certaines catégories de travailleurs ont eu d'augmentation? Est-ce que vous me permettez d'en nommer quelques-uns? Attendez un peu!

Des voix: Oui.

Mme Juneau: Écoutez bien! Les agents de bureau, classe nominale, échelon 2, 165%. Journaliers, taux horaire, 144, 2%. Infirmières, échelon 5, 142, 5%. Ingénieurs, classe II, 119, 6%. Ce ne sont pas des députés. C'est bien moins que cela. Le salaire industriel moyen, 118, 4%. Enseignants, 17 ans de scolarité, 13 ans d'expérience, 114, 1%. Les députés à Ottawa, 93, 7%. Le salaire minimum au Québec a augmenté de 90, 5%. Nous, les députés du Québec, 67, 1%, les moins bien payés, les moins augmentés. C'est tout simplement cela.

M. le Président, on ne veut pas jouer aux martyrs. Ce n'est pas cela qu'on veut. On veut juste être capables de fonctionner décemment, être capables de rendre les services dont nos citoyens ont besoin. Point à la ligne.

Je ne vous ai pas encore parlé du nombre d'heures. J'ai écouté le député de Maskinongé et je suis certaine qu'il est d'accord parce qu'il l'a dit tout à l'heure. Pour une fois, en tout cas, je peux vous dire qu'il a fait un discours qui était sensé. Quand je l'ai entendu parler sur la loi no 105, j'ai dit: Mon Dieu, s'il faut qu'il reparle, ce ne sera pas un cadeau. Mais, aujourd'hui, il a parlé décemment. Il a mentionné, comme je vais vous le dire, que nos heures ne ressemblent pas du tout aux heures des gens normaux, aux gens qui travaillent dans la fonction publique. Ils font 32, 35 heures par semaine, bien souvent 21 heures quand ce sont des profs. J'évaluerais nos heures de travail à environ 14 heures par jour. Je pense que je ne suis pas trop généreuse. Je calculais cela, cinq jours par semaine. Je ne parle pas de nos fins de semaine où on a trois ou quatre soirées d'inauguration, de ci et de ça. Je vous parle d'une semaine de cinq jours. Cinq jours, cela fait 70 heures. Je ne pense pas que personne dise que ce n'est pas vrai. Les députés travaillent fort et longtemps.

Maintenant, M. le Président, même si les journaux n'ont pas fait grand état des régimes de retraite, laissez-moi quelques minutes pour vous en parler un peu. Pour commencer, je vais vous nommer toute la poutine et après on va en parler. Premièrement, qu'est-ce que cela touche le projet de loi no 90? Le projet de loi no 90 touche les allocations conditionnelles abolies. Se souvient-on que ces allocations auraient assuré une continuité du revenu du député durant deux ans selon un taux de remplacement de 80%, puis de 50%? Deuxièmement, M. le Président, l'allocation de transition est majorée à deux mois de traitement par année de service au lieu d'un mois. Troisièmement, la pension deviendra payable à 60 ans sous réserve que le député ait siégé cinq années, à 61 ans s'il a fait quatre années, à 62 ans s'il en a fait trois, et ainsi de suite. Quatrièmement, l'allocation de transition sera fondée à la fois sur l'indemnité du député et sur l'indemnité additionnelle. Pour finir, l'allocation de transition se calculera soit sur les indemnités des douze derniers mois, soit sur les indemnités des trois meilleures années. Rappelons-nous que, selon une étude actuarielle, au 31 décembre 1981, la contribution annuelle de l'État à l'actuel régime de retraite se chiffrait à 85, 4%. C'est un montant assez astronomique. Avec la loi 90, savez-vous combien ça coûtera à l'État? 31% pour les nouveaux députés. C'est une baisse substantielle; on a baissé de 54, 4% la contribution de l'État. Quand je parle de la contribution de l'État, cela veut dire les taxes et les impôts de nos électeurs et de nos électrices.

Au moment où je vous parle - je veux le redire aux gens de Johnson, ils le savent, je le leur ai dit maintes fois - je gagne 35 096 $. La pension et les autres avantages aujourd'hui, avant la loi 90, me donnaient 31 299 $. Supposons que la loi 90 entre en vigueur ce soir même, j'aurai encore 35 096 $ de salaire, mais ma pension et les autres avantages seront réduits à 12 204 $. Faut-il hésiter avant de voter pour une loi qui va nous permettre d'économiser et de rendre justice à tout le monde? Pour moi seule, c'est 19 095 $, tout près de 20 000 $. Multipliez cela par les 122 députés et cela donne 2 800 000 $ de moins, que les députés du Québec vont coûter aux "payeurs de taxes".

Il me semble qu'on devrait avoir un peu de cohérence. Si, la semaine dernière, en votant pour la loi 105, nous avons demandé à nos employés d'être compréhensifs au nom de l'équité sociale, on ne pourrait jamais accepter de laisser notre fonds de retraite tel qu'il était, on ne pourrait pas non plus accepter une augmentation de façon indécente. Tout ce qu'on demande, dans ce projet de loi no 90, c'est "un tout petit" 4, 8% à partir du 1er avril 1983 et 20 000 $ de moins pour le fonds de retraite. Je pense que c'est important qu'on réalise que 2 800 000 $, dans une économie difficile comme celle que l'on vit présentement, et qu'il ne faut pas hésiter et voter pour le projet de loi no 90. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Hull.

M. Gilles Rocheleau

M. Rocheleau: M. le Président, je trouve absolument épouvantable d'entendre l'équipe qui a été retenue par le côté ministériel, l'équipe de pleureuses et de braillards. Avec les citoyens, ce soir, nous négocions les salaires de l'Assemblée nationale et de nos illustres députés, plus particulièrement ceux du côté ministériel. Nous, de l'Opposition, il est bien évident que nous allons devoir subir cette loi, indépendamment du résultat. On se souviendra que, samedi dernier, ce même gouvernement imposait à sa fonction publique la loi 105 qui contenait 109 décrets où on retrouvait plus de 80 000 feuilles sur nos bureaux. Les feuilles, c'étaient les décrets. (21 h 50)

Ce soir, nous négocions les salaires des députés. Est-ce que cela se peut? J'espère que vous suivez actuellement le débat à l'Assemblée nationale tenant compte du fait que nous sommes à entendre des mensonges épouvantables, grossiers, indécents, des déclarations que ces ministériels ont faites au cours des dernières années, plus particulièrement depuis 1974, et à l'aube de l'année 1983, nous déposent un projet de loi no 90, Loi sur l'Assemblée nationale. Il est bien évident que c'est souhaitable que l'on révise certains articles, de la Loi sur l'Assemblée nationale, que l'on modifie certaines attitudes, certaines approches, que l'on revalorise le rôle du député; tout le monde est pour la vertu.

Ce que je trouve d'absolument inconcevable, moi, je suis un nouveau député, j'ai été élu au mois d'avril 1981 dans la dernière brassée. À ce moment, il est bien évident qu'on examinait les salaires payés à l'Assemblée nationale, 35 000 $ par année, on se disait: Pour le travail d'un député, ce n'est pas un salaire exorbitant tenant compte du travail qu'il y a à faire. Ceux qui veulent bien travailler parce qu'on est libre de faire le travail que l'on veut dans nos comtés et ici même à l'Assemblée nationale. Ce que je trouve malheureux, c'est qu'il est vrai que tout le monde aime cela avoir une augmentation de salaire, tout le monde souhaite voir ses revenus augmenter. C'est normal surtout quand on examine la situation au Québec. Combien il y en a, des 500 000 chômeurs actuellement qui aimeraient cela avoir un job juste pour gagner assez d'argent pour faire vivre leur famille, pour amener un peu de nourriture sur la table! Ceux qui sont encore chômeurs, qui ne sont pas encore décrochés de l'assurance-chômage et qui sont près de devenir des prestataires de l'aide sociale parce qu'il n'y a plus de jobs et que le chômage est pratiquement fini, comment allez-vous faire pour vivre?

Vous nous écoutez ce soir. On parle de salaires de 35 000 $, de 40 000 $ et vous devez avoir l'eau à la bouche. Si vous aviez simplement un salaire de 10 000 $, 12 000 $, 15 000 $ par année. Mais non, vous ne l'avez pas. Nous, on traite de salaires qu'on pourrait prétendre énormes pour certains d'entre vous. On pourrait regarder des salaires comme celui de Guy Lafleur qui a contesté, 300 000 $ à 400 000 $ par année, il n'était pas heureux de son rendement. Il payait un taux d'impôt au Québec et il voulait renégocier ses ententes. Les frères Stastny à Québec, ce sont des gars formidables. On voulait renégocier des salaires parce que quelque 100 000 $ par année, ce n'est rien. Les salaires, c'est difficile à évaluer, ce qui doit être payé à l'un, ce qui doit être payé à l'autre, pour autant que tout le monde a un job.

Moi ce que je trouve de plus écoeurant dans la situation actuelle, c'est qu'on vient à peine de voter une loi, la loi 105, 109 décrets qui enlèvent dans la poche des fonctionnaires provinciaux, des secteurs public et parapublic, 20% de salaire que ces gens gagnaient, salaire selon lequel ces gens s'étaient habitués à vivre et le gouvernement pour camoufler ses trous a décidé - pas d'aller emprunter, pas demander, pas négocier - d'aller voler les employés de la fonction pubique de 20%. Quand on entend les pleurnicheurs de l'autre côté qui nous disent: On fait pénitence. On se serre la ceinture. On reporte notre augmentation qu'on devait avoir le 1er janvier 1983, on reporte cela au mois d'avril, on va avoir seulement 6%. On fait un sacrifice. On coupe nos pensions. Écoutez! J'écoutais le leader du gouvernement, hier soir, qui a commencé avec ses tableaux qui nous démontraient le salaire payé à un député à l'Assemblée nationale du Québec. En 1977, un député gagnait 27 800 $ et du même coup, le leader du gouvernement comparait le salaire d'un agent de recherche qui gagnait, à ce moment-là, 28 700 $, 100 $ de moins qu'un député. Ce même leader du gouvernement disait: Nous, les députés, on fait des sacrifices. On a été raisonnables. On a pris à peine 6% par année. Il y a des années qui ont passé et cela totalise aujourd'hui un salaire de 35 096 $, alors que le même agent de recherche gagne présentement 47 000 $, 12 000 $ de plus que le député en 1982, que le même député et cette même personne en 1977.

On se souvient que le PQ a été élu en 1976. C'est où, le gaspillage? Quand, de notre côté, on a dit à cette Assemblée nationale que le Parti québécois avait gaspillé les fonds publics, effectivement, ils ont négocié des conditions salariales abusives. Ce sont eux qui ont donné à nos employés

de la fonction publique les salaires qu'ils ont aujourd'hui. Ils ont acheté le référendum. Il fallait calmer. Il fallait avoir la paix. Ils essayaient de faire passer le oui et on sait comment cela s'est passé, l'affaire. Ils ont tenté d'acheter toutes sortes de belles choses jusqu'au moment où ce même gouvernement et le ministre des Finances s'aperçoivent qu'on est tout à fait en faillite. Et là, on vient nous dire et on vient pratiquement blâmer nos employés de la fonction publique du salaire qu'ils ont actuellement. J'écoutais tantôt la députée de Johnson qui disait: II s'est payé des augmentations d'au-delà de 162% depuis 1977 à nos infirmières, tant pour cent à nos enseignants, tant pour cent à nos secrétaires, tant pour cent à nos agents de ceci, à nos agents de cela. C'est ce gouvernement qui a accepté ces conventions collectives. Une négociation, cela se fait des deux côtés: du côté patronal et du côté syndical. Si le côté patronal a trop donné, il se trouve dans la situation où il est aujourd'hui. Et là, on vient brailler. On vient mettre cela sur la faute de tout le monde.

On faisait des comparaisons tantôt avec les députés fédéraux: Ils gagnent 50 000 $ par année et on gagne 35 000 $. C'est effrayant! C'est effrayant, les députés fédéraux gagnent 50 000 $ par année et on gagne 35 000 $. Et après? Et après? Nous autres, on se dit une chose: Vous avez mis en déconfiture la situation économique au Québec. Vous nous avez poussé cela dans les reins depuis 1976 et là, vous venez pleurer. Nous, on vous dit: Mesdames et messieurs du côté ministériel, ayez au moins la décence de repousser votre augmentation jusqu'à la fin de décembre 1983 et là, on va voir comment cela va aller. On va voir si on est en mesure de se rajuster. On devrait payer l'Assemblée nationale et ses députés selon leur compétence administrative et selon les résultats positifs. Quand le Québec est la pire province au point de vue financier, économique et même social, on ne se paie pas d'augmentation de salaire.

On va nous dire: On a réduit notre régime de retraite. Mais attendez une minute! La "gang" de péquistes qui ont été élus en 1976, ils ne passent pas au "cash", eux. Ah, non, non, non! Eux, ils se sont organisés la "bean" de façon telle que s'ils se font foutre à la porte à la prochaine élection, ils partent gras dur. On a vu le petit Charron partir l'autre jour. Bon! On part de toutes sortes de façons de l'Assemblée nationale. Mais lui, il part avec 27 900 balles dans ses poches, 34 ans, chômeur, rien à faire. Cela se peut-il? (22 heures)

II y en a d'autres qui sont partis et il y en a sûrement d'autres qui partiront. Mais on a sacrifié dans le projet de loi, 24 députés péquistes élus au mois d'avril 1981; tous les autres pacagent dans les patates quand on part. C'est écoeurant de faire cela, c'est épouvantable. Vous devriez avoir honte. On devrait commencer à siéger seulement la nuit pour adopter des affaires comme cela. Je pense qu'en tant que Québécois, j'ai honte de vous. Je ne suis pas tout seul. Il commence à y en avoir une maudite "gang" en arrière de moi.

Cela ne se peut pas que la population du Québec accepte de se faire leurrer de cette façon et qu'on vient nous brailler dans la face, qu'on vient se péter les babines et qu'on vient nous dire: Est-ce qu'on n'est pas mal poignés? Voyons donc! Ceux qui écoutent les débats à la télévision ce soir, regardez moi cela aller. Gang de picosseux, l'autre bord. Ce sont des grignoteux de "golée", cela grignote ici, cela grignote là, cela grignote partout. Ils ont grignoté dans vos impôts, pour ceux qui ont reçu les avis, vous vous en souvenez? Ils empêchent les gens de travailler avec la carte de classification. Il n'y a rien qu'ils ne font pas pour mettre tout le monde au désespoir au Québec.

Une voix: C'est vrai.

M. Rocheleau: Et là, ils viennent nous parler qu'ils font un sacrifice. Bien, voyons donc! Ce qu'on recommande - poignez cette affaire et essayez-le pour le "fun", embarquez avec les nouveaux, retournez au 13 avril 1981 à la loi rétroactive. Je suis d'accord avec cela 100 milles à l'heure, parce que, pour vous planter, je ferais n'importe quoi. Avez-vous compris? N'importe quoi. N'est-ce pas? Retournez au 13 avril 1981, ayez au moins cette décence; c'est rien que cela qu'on vous demande. Acceptez de geler vos salaires jusqu'au 31 décembre. C'est une façon déguisée... On a 12 adjoints parlementaires, on l'a dit, on l'a répété, on vous le répétera encore: les ministres en veulent chacun un, pour se tenir par la patte - savez-vous? - quand ils s'en vont dehors et quand ils se promènent, pour se faire ouvrir la porte. Peut-être que le chauffeur n'ouvre plus la porte avec la baisse de son salaire. Alors, il faudra un adjoint pour ouvrir la porte du Cadillac -savez-vous? - pour faire entrer M. le ministre. L'adjoint parlementaire nous disait: Est-ce que cela a du bon sens: 35 000 $? Mais lui, il est payé 66 000 $ par année, qu'est-ce qu'il a à se plaindre? Il vient nous faire des petits dessins, des petits portraits, voyons donc! Il est ministre, il prend l'avion et floup! on "fly", et puis la voiture, le service et pratiquement le bar dans l'auto.

Je comprends que les députés péquistes, aie! Cela doit être poigné dans ce caucus, une affaire épouvantable. Oui, ils doivent s'aimer là-dedans. On en a vu un petit échantillon samedi. Là, il n'y a pas grand-monde de l'autre côté, mais en tout cas, ce n'est pas grave, on leur parle puis, cela

entre d'un bord et sort de l'autre. Ce n'est pas tellement grave. Mais j'aimerais vous lire un petit article qui a paru, un moment donné, quand on a parlé d'adjoints parlementaires. Il y en a qui ne pensent pas en mal de vous. Je vais vous lire cela: Au sujet des adjoints parlementaires, évidemment, on n'est pas dans le vestibule pour rien. Les députés qui s'attendaient à devenir ministres et qui ne le sont pas ou qui se font remettre la nomination de mois en mois ou d'année en année en leur disant: "Espère, attends ton tour. Il y aura bien un scandale qui liquidera quelques postes et tu auras bien l'occasion de monter. " N'est-ce pas? C'est l'un des vôtres qui a dit cela; c'est M. Claude Charron; il est parti, il a laissé sa place à un autre; on vous invite peut-être à faire pareil; c'est une façon de sortir n'est-ce pas?

Ah non! Je vous avoue que depuis que je suis ici, je suis bouleversé par l'attitude de ce gouvernement péquiste qui n'a pas assez de coeur et de décence pour dire aux citoyens du Québec dans quelles conditions on est, premièrement, et avoir l'honnêteté et la franchise de dire où on s'en va. Si le gouvernement péquiste veut se payer une augmentation de salaire, qu'il en discute ouvertement, qu'il ne se cache pas en arrière de ceci et en arrière ce cela. Voyons donc!

Dans la situation actuelle, je considère que ce Parlement ne mérite pas d'augmentation de salaire. Que ce soit retardé de trois mois ou de six mois, vous ne méritez pas cela. C'est impensable de nous avoir amenés dans ce pétrin. Vous avez sur la table ce soir un projet de loi pour vous donner des salaires, alors qu'on devrait discuter d'économie, alors qu'on devrait discuter d'emplois, alors qu'on devrait parler de quelle façon on va relancer cette province dans l'action.

Quand on regarde cela, cela va encore plus loin. Ils sont 74 députés péquistes -écoutez bien cela, c'est le "fun" - et, pour avoir une augmentation de salaire déguisée, parce qu'ils refoulent cela dans le temps, ils se donnent tous des jobs. Ils se ramassent 7000 $ ici, 3500 $ là, ils s'accrochent une "job" de vice-présidence. Cela fonctionne comme cela, 68 sur 74 vont avoir des jobs. Les six autres vont être des braillards, ils vont brailler parce qu'ils n'auront rien. La députée de Maisonneuve n'a pas mérité grand-chose dernièrement, elle a voté contre le projet de loi no 105. Le député de Sainte-Marie, c'était un péquiste, et il s'est refoulé en arrière. Un instant! Le député de Deux-Montagnes, la semaine passée, vous n'avez pas suivi votre caucus. Quand le premier ministre a tiré sur la chaîne, la patte ne vous a pas monté! Vous allez y goûter, cela n'a pas de bon sens!

M. le Président, quand on regarde tout cela, c'est de la folie furieuse. À l'Assemblée nationale, on devrait actuellement travailler très fort, tous les députés, des deux côtés de la Chambre, pour essayer de se sortir du trou dans lequel ce gouvernement péquiste nous a plongés. On a demandé l'autre jour de faire des élections, de tester le pouls pour le "fun". Lâchez les sondages et allez-y pour vrai! Ne vous en faites pas, on est prêt. Je vais vous dire pourquoi on est prêt. C'est parce que la population, vous le savez, vous autres, vous ne la suivez plus, vous ne pouvez même plus lui parler. Les associations péquistes de certains comtés revendiquent des choses auprès du premier ministre. Il ne les écoute même plus. Quand je disais qu'on rencontrait des péquistes, il y a du maudit bon monde là-dedans. On en rencontre sur la rue, dans les réunions, un peu partout, mais cela fait des drôles de grimaces aujourd'hui. C'est tout croche. Ils se disent: Est-ce que cela a du bon sens que j'aie voté pour cela! Mourir comme cela, c'est assez pour aller chez le diable! C'est cela qu'on nous dit. Je trouve cela triste un peu, parce que ces mêmes gens se sont fait prendre en 1976. Vous les avez accrochés à nouveau en 1981, avec la "barouette" de promesses de René. Il se promenait partout dans les comtés, 6 000 000 000 $, on promet ici, on promet là et envoie donc! Le lendemain de l'élection, le crash, pouf, dans le trou, "kaputt", fini! On n'a jamais été dans pire situation de notre vie. Voyons donc! Est-ce que cela a du maudit bon sens! Quand on regarde cela, on s'imagine qu'on est à faire de la "fripe". Dans vos salons, restez assis bien tranquilles, on s'en vient. Quand on va arriver, on va dépanner le Québec. Merci.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Mme la députée de L'Acadie.

Mme Thérèse Lavoie-Roux

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, me lever après l'intervention de mon collègue de Hull, j'ai bien l'impression que cela va sembler une intervention extrêmement austère. De toute façon, je ne prendrai la parole que pour quelques minutes pour indiquer quelques points sur lesquels je pense qu'on devrait réfléchir davantage en commission parlementaire. (22 h 10)

En ce qui concerne la première partie du projet de loi no 90, qui porte sur l'Assemblée nationale elle-même, les droits de l'Assemblée nationale, un projet de loi qui veut en quelque sorte rajeunir ce qui nous régit présentement et peut-être prendre une distance un peu plus grande entre les pouvoirs de l'Assemblée nationale et les pouvoirs de l'exécutif, d'autres de mes collègues l'ont signalé avant moi, on aurait souhaité que le gouvernement soit un peu

plus hardi dans cette démarche. Même s'il y a, à l'intérieur de cette première partie du projet de loi, des choses positives, c'est un pas extrêmement hésitant qui donne à peine à l'Assemblée nationale des pouvoirs supplémentaires qui sont bien en deçà de ce qui avait été prévu par le rapport Vaugeois ou dans d'autres réflexions qui avaient été faites sur le fonctionnement de l'Assemblée nationale, que ce soit par notre ancien collègue de Saint-Laurent, M. Forget, même notre ancien collègue, M. Jean-Noël Lavoie ou d'autres personnes qui, d'un côté ou de l'autre de l'Assemblée nationale, comme le signalait hier soir le leader de l'Opposition, ont fait des recommandations qui restent encore lettre morte pour un grand nombre.

Je sais fort bien que le gouvernement a formé un comité pour étudier tout le problème de la délégation de la réglementation qui échappe à l'Assemblée nationale. Nous avons là un comité qui étudiera pendant un an ou davantage, qui reviendra peut-être avec des suggestions à l'Assemblée, mais, avant que le gouvernement ne décide d'agir sur les recommandations que ce comité pourra faire, il coulera encore bien de l'eau sous les ponts.

Il faut regretter qu'en ce sens-là on ne retrouve rien quant aux pouvoirs de l'Assemblée nationale en ce qui touche la réglementation déléguée.

Je voudrais parler simplement sur certains points, peut-être ont-ils été soulevés alors que je n'étais pas en cette Chambre, je m'excuse, si c'est une répétition. Il y a par exemple cette disposition du projet de loi no 90 qui, somme toute, réitère ce qui existe déjà présentement, par exemple, qu'une Législature est d'au plus cinq ans à compter de la publication après une élection générale de l'avis visé à l'article 134 de la Loi électorale, c'est-à-dire que le mandat d'un gouvernement ne doit pas excéder cinq ans.

Il me semble que le gouvernement a laissé de côté une occasion assez intéressante à ce moment-ci de fixer à quatre ans et à une date déterminée le mandat d'un gouvernement. Il y a différentes raisons pour cela. On sait fort bien que l'espèce de suspense qui existe entre ce qu'on reconnaît généralement comme le mandat normal d'un gouvernement, soit quatre ans, et le temps où il décide d'appeler une élection, produit une espèce de vide où tout l'appareil gouvernemental se trouve en quelque sorte immobilisé. On se rappellera, par exemple, que, dans le cas du gouvernement du Parti québécois, dès le printemps, les gens s'attendaient qu'il y ait une élection à l'automne de 1980. À partir de ce moment-là, on a pu assister, par exemple, à un déplacement du personnel des cabinets politiques. Personne n'étant très sûr de ce que serait l'issue de l'élection, le personnel des cabinets politiques se trouvait des tablettes ou des casiers dans la fonction publique parce qu'à ce moment-là il faisait partie de la fonction publique automatiquement. Par la suite, l'élection n'a pas eu lieu, comme normalement prévu en novembre 1980, mais le gouvernement jugeant que ses chances seraient meilleures, a finalement retardé l'élection jusqu'au printemps 1981.

Si bien qu'à ce moment-là vous avez, d'une part, un gouvernement qui, à mon point de vue, et quel que soit le gouvernement en place, est beaucoup moins responsable parce qu'il me semble que son objectif dans ces derniers 18 mois, s'il décide de retarder la date des élections, est davantage fixé sur des calculs électoralistes, sur des gestes qui vont le favoriser dans l'opinion publique plutôt que le défavoriser, sur des calculs qui ne sont pas nécessairement dans l'intérêt de la population mais bien davantage dans l'intérêt d'un parti politique, celui qui est au pouvoir, celui qui doit décider de la date du déclenchement d'une élection.

Aux États-Unis, vous avez ces élections à une date ferme, à une période précise, et je pense que tout le monde a à y gagner. D'abord, la population ne fait pas des hypothèses pendant un an et demi ou même davantage, à savoir si l'élection aura lieu à l'automne, au printemps ou à l'automne suivant. Un fonctionnarisme important n'a pas à se dire: Mon Dieu, les élections commencent à ralentir la machine, parce qu'il y aura peut-être des élections à l'automne et, ensuite, les élections sont retardées. Je le dis non seulement pour le gouvernement qui est en face devant nous -je l'ai vécu avec le gouvernement qui est en face de nous - mais je suis certaine que les mêmes élucubrations et les mêmes échafaudages se sont faits, dans le passé, sous d'autres gouvernements. Je tiens à dire ici, M. le Président, que je regrette que le gouvernement, au moment où il nous présente des modifications au règlement de l'Assemblée nationale et aux règles générales qui nous régissent, n'ait pas - je pense que c'était peut-être une question de courage -eu le courage, dans l'intérêt de la population, de fixer une date fixe et un mandat déterminé pour la durée d'une législation.

Le deuxième point que je voudrais signaler, c'est qu'on prévoit justement, dans cette première partie, que l'Assemblée siège dans la ville de Québec, on s'y attendait un peu, mais qu'elle peut aussi siéger à tout endroit du Québec. J'avoue humblement que j'ignore ce que mes collègues ont dit à ce sujet. Mais il me semble tout à fait incongru que l'on puisse songer que l'Assemblée nationale aille siéger à l'extérieur de la ville de Québec. Ne serait-ce que sur la question

des coûts, vous vous imaginez, déplacer l'Assemblée nationale! Certains me rétorqueront peut-être que c'est en cas de situation d'urgence, le parlement est rasé par les flammes. Écoutez! M. le Président, si le parlement est rasé par les flammes et qu'on est totalement dans l'incapacité de siéger à l'intérieur de ses murs, je pense qu'à ce moment-là, le gouvernement peut invoquer une question d'urgence et faire adopter, d'un commun accord, par l'ensemble de l'Assemblée nationale, qu'un autre endroit, à Québec - je dis qu'il devrait rester à Québec - soit choisi pour nos délibérations et pour prendre nos décisions législatives. Ceci, de toute façon, même si on invoque ce genre de situation d'urgence pour introduire une telle clause - elle n'a jamais existé dans le passé - laisse une porte ouverte. Peut-être que ce n'est pas l'intention du gouvernement de l'utiliser à d'autres fins. Mais n'oubliez pas que, quand on légifère, qu'on ouvre ce genre de porte dans un projet de loi, on l'ouvre pour plusieurs, pour ceux qui sont en place et peut-être davantage pour ceux qui vont suivre. Je m'étonne vraiment de cette disposition.

Quant à la possibilité des commissions itinérantes que l'on prévoit et qui, je pense, sont une bonne initiative, désormais d'autres l'ont expliqué avant moi - on formerait différents types de commissions parlementaires comme on en a déjà eu pour la fonction publique, pour la Loi sur la protection de la jeunesse, on prévoirait même qu'une commission ordinaire de l'Assemblée nationale, que ce soit la commission de l'énergie et des ressources, ou la commission des affaires sociales, aille siéger à l'extérieur du parlement, je pense que ce devrait être utilisé avec beaucoup de circonspection et dans des circonstances exceptionnelles.

Je sais que le leader de l'Opposition a quand même indiqué hier certaines balises à l'application de cette disposition du projet de loi. Je serais peut-être même plus sévère que le leader de l'Opposition à cet égard et il faudrait vraiment parler de conditions exceptionnelles et de conditions vraiment d'urgence dans une région précise ou d'un problème d'urgence dans un endroit précis pour se prévaloir d'une telle disposition. Je l'ai moi-même vécu et n'oubliez pas qu'il s'agissait d'une commission non partisane. Il s'agissait de la commission sur la protection de la jeunesse, qui était une commission non partisane. Je pense que je dois rendre hommage à tous les membres qui siégeaient à cette commission, parce qu'on l'a utilisée d'une façon non partisane au cours de ces tournées qui étaient une première à l'Assemblée nationale, à savoir qu'une commission parlementaire spéciale se déplace dans l'ensemble du Québec ou, enfin, dans quelques régions du Québec. Mais, malgré tout, ce n'est plus le caractère de l'Assemblée nationale. C'est beaucoup plus un type d'audiences publiques où, comme je le disais tout à l'heure, le caractère est tout à fait changé. Je pense même que ceci conditionne en quelque sorte le comportement des élus. (22 h 20)

Je craindrais fort que ces commissions parlementaires itinérantes, si elles devaient être étendues, si on devait leur donner une extension la moindrement importante, détournent le travail des commissions parlementaires de leur fin véritable et leur donnent un caractère électoraliste beaucoup plus grand. Je ne vois vraiment pas ce qu'y gagnerait l'Assemblée nationale. Je serais beaucoup plus favorable, si on veut rendre les commissions parlementaires plus accessibles au public, à utiliser le média de la télévision que nous avons déjà intégré à l'Assemblée nationale. C'est d'ailleurs dans le même sens que je m'étonne qu'on puisse vouloir déplacer le Parlement ailleurs qu'à Québec justement parce qu'on a déjà dépensé des millions à ce sujet. Je pense que les citoyens, d'une façon générale, sont satisfaits que l'Assemblée ait fait cette dépense pour leur ouvrir à l'extérieur de l'enceinte de l'Assemblée nationale le fonctionnement du Parlement. Dans le même sens, je pense qu'on pourrait étendre ce service du côté des commissions parlementaires comme nous l'avons déjà fait plutôt que de penser à des déplacements vers l'extérieur.

Sur cette première partie, il y a un point ou une suggestion qui a été faite par le député de Sainte-Marie, que je voudrais appuyer, et qui, je pense, avait déjà fait l'objet de discussions à la sous-commission qui a étudié ce projet. Elle propose que les membres du Bureau de direction de l'Assemblée nationale, le nouveau bureau qui sera formé, soient élus par l'ensemble des membres de l'Assemblée nationale. Il peut y avoir une certaine crainte de déséquilibre, compte tenu de la majorité du gouvernement, qu'un plus grand nombre de membres de la majorité parlementaire soient nommés, mais si, vraiment, d'un côté comme de l'autre, on veut respecter l'esprit de cette loi, il va de soi que, sans établir de règle formelle, on choisirait des membres qui respecteraient cet équilibre. Il faut quand même faire confiance, dans le fonctionnement de l'Assemblée nationale, aux membres qui la composent. N'est-ce pas là, au point de départ, même si c'est fait d'une façon un peu hésitante, l'esprit de ce projet de loi? C'est une suggestion qui devrait être retenue ou qui mériterait d'être examinée davantage.

En ce qui a trait au quorum, celui qu'on suggère, de 10 membres plus le président, sur 122 députés, me semble extrêmement faible. Si vous ne suivez pas un peu ce qui se passe à l'Assemblée nationale,

ça ne prend pas de temps avant que vous soyez - si je peux utiliser l'expression -débranchés...

Une voix: Déphasés.

Mme Lavoie-Roux:... ou déphasés par rapport à ce qui fait l'objet des débats généraux à l'Assemblée nationale. Par respect pour les gens qui nous élisent pour siéger à l'Assemblée nationale, on doit assurer un minimum convenable comme quorum. Cela me semble essentiel. Dans ce sens, 10 ou 12 députés?

Une voix: 10%.

Mme Lavoie-Roux: 10% de 122, cela fait 12 députés. 12 députés sur un groupe de 122 députés qui, en dehors des sessions parlementaires, ont comme première responsabilité - je mets à part, compte tenu de leurs responsabilités particulières, les ministres - de siéger, le devoir des autres, s'ils ne sont pas en commission parlementaire, normalement, est d'être à l'Assemblée nationale. Ceci m'attirera peut-être des reproches de mon propre whip, car je ne suis peut-être pas aussi fidèle que je devrais l'être à l'Assemblée nationale, mais, entre ce qui peut être nos faiblesses personnelles et ce qui devrait être le principe et l'application réelle d'un principe qui respecterait l'Assemblée nationale et les délégations que les citoyens nous font en nous élisant à l'Assemblée nationale, je pense vraiment que 12 députés pour le quorum ce n'est pas suffisant, M. le Président.

En ce qui a trait à la deuxième partie, je ne serai pas très longue en ce qui touche les salaires et les régimes de retraite. J'ai écouté avec beaucoup d'attention, d'ailleurs, il l'a fait avec un style assez intéressant, le leader du gouvernement hier soir, je pense, ou avant-hier soir, lorsqu'il nous a montré tous ses tableaux pour établir que l'écart allait sans cesse en s'élargissant entre le salaire des députés et le salaire des fonctionnaires de telle classe ou des professionnels. C'était fort intéressant. Je pense que là où le gouvernement, et le leader, à l'occasion, a manqué c'est en établissant ses tableaux pour essayer de justifier une position qui en soi peut-être n'a même pas besoin d'être justifiée; mais il y a introduit un élément biaisé en faisant la comparaison sur ses tableaux uniquement avec les salaires des députés fédéraux alors qu'il aurait dû normalement faire cette comparaison avec une autre province, en l'occurrence l'Ontario qui, comme nombre de députés et importance de la population, se compare beaucoup mieux que le fédéral.

Évidemment, c'était une occasion de plus. Le leader du gouvernement, qui, au point de départ, avait tenté - je le pense sincèrement - d'avoir une approche non partisane, est immédiatement tombé dans ce travers qui est tellement viscéral maintenant chez nos adversaires d'en face que, même lorsqu'on veut prendre une approche non partisane, on ne peut pas l'éviter, si bien que la comparaison s'est faite avec le gouvernement d'Ottawa alors qu'en toute objectivité elle aurait du se faire avec le gouvernement de l'Ontario. Peut-être que le gouvernement fédéral a exagéré dans l'augmentation de ses salaires; qu'il en porte la responsabilité. Mais, quand on veut convaincre la population que nos positions sont bien fondées, je pense qu'on devrait prendre un point de comparaison qui est vraiment comparable. Si l'on regarde ce que l'Ontario gagne, on réalise fort bien qu'on est loin d'être derrière l'Ontario, on est devant l'Ontario.

Deux autres petits points, si vous me le permettez. Cela n'est pas pour jouer les purs. Je pense que c'est vrai que les députés ont des responsabilités familiales, ils ont droit à un salaire décent, mais je pense que ce qui est incompréhensible de la part du gouvernement, c'est que, pendant trois jours, nous nous sommes assis ici à l'Assemblée nationale et que de l'autre côté de la Chambre, en particulier, on a tenté de justifier la récupération des salaires chez les employés de l'État en faisant valoir la crise économique terrible dont tout le monde est conscient pour effectuer cette récupération. Le débat était à peine froid puisqu'il s'était à peine écoulé 24 heures entre le temps de la fin du débat du samedi soir et notre début de discussion hier que déjà ceci était une page tournée du passé. C'était comme si c'était un événement qui s'était passé sur une autre planète, et on vient demander d'indexer nos salaires à partir du mois d'avril. Je pense qu'une simple décence exigerait qu'au moins on donne l'exemple et qu'on n'indexe pas les salaires pour l'année 1983 et qu'on attende en décembre 1983, comme on l'exige pour beaucoup d'autres fonctionnaires dont le salaire sera gelé pour l'époque.

Un dernier mot sur les régimes de retraite. Cela aussi je le reproche au leader du gouvernement, c'est tout à coup la vertu du gouvernement d'avoir modifié le régime de retraite sur lequel il y avait un consensus. Tout le monde était d'accord que ce régime ne pouvait pas continuer, qu'il était trop coûteux, que les facteurs sociologiques, l'âge des députés, etc., avaient changé depuis longtemps et que tout le monde disait: II faut que ce soit changé. Quand on vient nous parler de la vertu du gouvernement alors qu'on s'est bien assuré que tous les députés qui sont arrivés ici avant 1981 ont été bien protégés, il faut bien le dire. La vérité - et moi j'en suis une de 1976, je rentre dans le paquet, M. le

Président - c'est que tous les députés qui sont arrivés en cette Chambre avant 1981 sont protégés. On va peut-être dire, il y a une petite modification, mais par contre on a le dédommagement de la transition qui compense largement ce que moi je pourrais perdre si par hasard je quittais après huit ans. (22 h 30)

La vérité, c'est qu'on ne peut pas faire valoir notre vertu. Il aurait peut-être fallu être plus soucieux de la justice envers tous nos collègues de l'Assemblée nationale, mais moi j'accepte mal - et comme je vous le dis, je me sens tout à fait à l'aise pour le dire parce que je suis du groupe de 1976 -que les seuls qui soient vraiment pénalisés par le nouveau projet de régime de retraite que l'on prévoit pour les députés, soient nos collègues qui sont arrivés ici à l'Assemblée nationale en 1981. Je trouve que c'est une insulte. Ou bien on leur accordait la même protection qu'on nous accorde à nous de 1976, de 1973 ou de 1970, ou les pénalités touchaient d'une façon semblable tous les députés qui sont ici dans cette Chambre. Je pense que là, nous nous retrouverons devant deux poids, deux mesures.

En terminant, je pense qu'on ne peut pas plaider la vertu ou exhiber ce qu'on pourrait appeler une attitude vertueuse vis-à-vis du projet de loi qui est devant nous. La première partie a des aspects extrêmement intéressants. Quant à la deuxième partie, on fait ce que nous devons faire. Personne ne peut prétendre à la vertu parce que c'est lui qui le présente. Le gouvernement aurait dû le présenter avant de toute façon. Je pense surtout qu'il faut se demander - je demande au gouvernement de le réexaminer - s'il est réellement raisonnable à ce moment-ci d'imposer le gel et la récupération salariale à tous les employés des secteurs public et parapublic. Et même dans le secteur privé, il y a aussi beaucoup de gels. On le sait. On se l'est fait dire de l'autre côté. À tous ces citoyens, on a imposé un gel et pour nous, le gel ne vaut que pour trois mois et on recommence, je comprends, dans l'ordre de 6%, nos augmentations de salaires au 1er avril 1983.

M. le Président, je vous remercie et j'espère que le gouvernement, sans démagogie ni d'un côté ni de l'autre, va examiner ce projet de loi un peu plus en profondeur. Je pense que ce sera peut-être une excuse de plus pour troubler la paix sociale que tout le monde souhaite, en dépit des événements qui sont survenus la semaine dernière. Je pense qu'il ne faut pas ajouter de l'huile sur le feu et qu'à cet égard, le gouvernement devrait réfléchir un peu plus et peut-être prévoir ce gel du salaire des députés pour le total de l'année 1983. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Shefford.

M. Roger Paré

M. Paré: M. le Président, je n'ai pas vraiment l'intention d'intervenir très longtemps sur le sujet, parce que quand cela fait déjà 24 heures, ou à peu près, qu'on discute du même sujet, finalement, cela finit par être très répétitif. Je tiens seulement à intervenir pour dire que moi aussi, je vais voter pour le projet de loi 90. Je vais vous dire en partie pourquoi et je vais aussi commenter quelques réflexions que j'ai entendues au cours des interventions précédentes.

Premièrement, je dois féliciter la députée de L'Acadie pour son intervention qui a rattaché cela à un point sur lequel elle s'est attardée un peu, soit le quorum qui est proposé dans le projet de loi no 90 en disant qu'il faudrait qu'on soit plus souvent à l'Assemblée nationale ou en tout cas, le plus possible. Mais en même temps, elle a dit juste avant: Je n'ai pas assisté à toutes les séances, parce que j'étais prise en commission parlementaire ou ailleurs. Donc, je ne sais pas si telle ou telle chose a été dite. Mais je me suis aperçu d'une chose-, c'est qu'elle n'avait pas été ici en permanence à cause d'autres obligations, mais cela ne l'a pas empêchée d'être - en tout cas, de tout ce que j'ai entendu - la députée du côté de l'Opposition qui a fait la meilleure analyse du projet de loi no 90. Donc, ce n'est pas nécessairement vrai que lorsqu'on est toujours ici à écouter des discours qui sont plus souvent politiques, amusants ou quelquefois même démagogiques, cela nous permet d'approfondir davantage un projet de loi.

Je suis d'accord avec le projet de loi en ce qui concerne le point précis du quorum, parce que nos obligations comme parlementaires, mais aussi comme députés, nous obligent à tellement de gestes d'action, à tellement de présence un peu partout que finalement, ce n'est pas ici en passant notre temps le plus souvent possible assis sur notre siège à écouter qu'on peut faire le plus de boulot, et à travailler le plus dans l'intérêt des gens de notre comté et de l'ensemble des citoyens du Québec. Car il ne faut pas oublier qu'en plus d'être ici pour adopter des lois et discuter sur des lois, on doit être en commission parlementaire. On doit aussi siéger aux comités de préparation de lois, en ce qui concerne, en tout cas, le côté ministériel. On doit aussi être dans notre comté. On doit assister à certaines activités qui se passent un peu partout, plus souvent dans notre comté mais assez souvent à Québec. On doit se déplacer pour aller dans les cabinets si on veut que nos dossiers avancent; donc, on doit être mobiles, on doit

se déplacer. On ne peut pas être à l'Assemblée nationale en permanence, quand on siège comme on le fait présentement, 16 ou 18 heures par jour, parce que nos dossiers n'avanceraient pas et on ne serait pas prêts à présenter des projets de loi ou à intervenir en commission parlementaire. Donc, je suis d'accord avec ce qui est proposé pour le quorum. Je pense que la députée de L'Acadie l'a un peu confirmé, même si son intervention était dans le sens que c'est un peu trop petit comme nombre, mais je pense que c'est acceptable quand on sait tout ce que les députés doivent faire quand ils sont à Québec, quelle est leur tâche comme parlementaires, comme députés.

J'interviendrai aussi un peu rapidement sur ce qu'on appelle la réforme parlementaire qui est proposée dans le projet de loi no 90, dont très peu de gens ont parlé malheureusement, du moins du côté de l'Opposition. Je rappellerai juste les grands objectifs qui sont fixés dans le projet de loi no 90: il y a l'indépendance de l'Assemblée nationale, donner plus de pouvoirs aux députés; il y a aussi un meilleur équilibre de nos institutions politiques, un meilleur contrôle du pouvoir exécutif, un meilleur contrôle de l'administration publique, un meilleur contrôle des finances et des dépenses publiques. On nous reproche souvent de ne pas contrôler suffisamment, on nous dit qu'il y a du gaspillage un peu partout, qu'on ne peut pas intervenir rapidement, que l'Assemblée n'a pas assez de pouvoirs sur les sommes importantes qui sont dépensées à divers niveaux de la machine gouvernementale. On est en train de se donner des outils au moyen du projet de loi no 90 pour se fixer des contrôles qui nous permettront de mieux vérifier les dépenses. Il y a aussi la revalorisation du processus législatif et la modernisation du fonctionnement de l'Assemblée nationale et de ses commissions de façon qu'on soit plus productifs. Donc, si on améliore les contrôles, si on permet de donner plus de pouvoirs aux commissions, d'avoir plus de commissions, c'est tout à fait normal, comme je le disais tantôt, qu'on vienne diminuer la présence obligatoire à l'Assemblée nationale. Donc, c'est un projet qui se tient, c'est un projet cohérent.

Il y a aussi une critique qui est faite assez souvent dans la première partie, si on pense à la réforme parlementaire, par les gens de l'Opposition: On dit qu'on veut donner des augmentations aux députés péquistes. On dit qu'on veut leur donner des promotions, que c'est compris dans le projet de loi no 90 qu'on pourra nommer plus d'adjoints parlementaires. C'est normal qu'on mette cela dans le projet de loi parce qu'il est fait pour les années à venir. Il ne faudrait pas qu'on soit toujours à faire des amendements; donc, il faut prévoir les années à venir dans un projet de loi, sauf que si c'est vrai que le passé est garant de l'avenir, il faudrait regarder quelque chose.

À l'heure actuelle, on a, selon la loi qui existe, la possibilité d'avoir douze adjoints parlementaires et on n'en a même pas douze. On n'a même pas utilisé le nombre qui nous est permis présentement. Donc, il ne faudrait pas charrier parce que le projet de loi no 90 permettra d'en nommer davantage. Il ne faudrait pas présumer que parce qu'on en permet plus, il y en aura plus: Présentement, on n'utilise même pas le nombre qui nous est permis. On utilise davantage de chefs d'équipes; je sais de quoi je parle, je suis chef d'équipe pour un ministère. C'est fait sans augmentation de salaire et cela nous permet d'être aussi efficaces. On le fait parce que du côté ministériel le travail ne nous fait pas peur.

Ce qui me surprend aussi, c'est qu'on parle très peu du projet de loi du côté de l'Opposition, alors que ce projet de loi compte exactement 245 articles. On en parle comme s'il n'y avait finalement qu'un article: l'augmentation de 6%. Je vais y venir parce que je n'ai pas peur du tout d'en parler et de voter pour. Il n'y a pas juste cela dans le projet de loi, il ne faudrait pas l'oublier. C'est une réforme pour faire en sorte qu'on soit encore plus efficaces, plus productifs, que l'Assemblée nationale et ses institutions donnent un meilleur service à la population et contrôlent mieux les finances. Je ne m'attarderai pas plus longtemps là-dessus parce qu'il semble qu'on fait pas mal l'unanimité excepté sur quelques points. Je pense que les intervenants du côté ministériel l'on fait et de meilleure façon que je ne pourrais le faire. (22 h 40)

Donc, je viendrai au projet de loi no 90 sur ce qui concerne le salaire des députés, les revenus des députés. Pour moi, c'est plutôt une victoire qu'autre chose, le fait de présenter le projet de loi no 90 et je vous expliquerai pourquoi. Je n'étais pas encore député, j'étais candidat et l'une des choses que je véhiculais déjà, dans les assemblées que je faisais, les discours et les rencontres publiques que j'avais, c'est que je trouvais scandaleux que les députés du Québec se paient des régimes de retraite aussi luxueux. J'utilisais, pour décrire ce régime de retraite, l'expression: "un régime chromé d'aide sociale de luxe pour des gens à l'aise dans bien des cas". Je le disais, je le pensais et je le pense encore. Donc, pour moi, ce soir, de parler sur un projet de loi qui vient enfin arrêter cela, qui vient enfin limiter le régime de retraite, c'est une victoire, je suis tout à fait content qu'on ait le courage de s'imposer cela.

Les gens de l'Opposition disent: Oui, c'est bien facile, ils se pénalisent en ne se pénalisant pas. Personnellement, cela me

pénalise parce que ma pension, je vais l'avoir à 60 ans, pas avant, et de beaucoup diminuée. Ceux qui ont été élus en 1976 et avant se pénalisent aussi, il ne faut pas l'oublier, parce que quand on parle d'une diminution d'à peu près 19 000 $, en chiffres ronds, c'est 19 000 $ par année de moins d'investis dans le régime de retraite. C'est cela que chacun accepte, de notre côté, de recevoir en moins comme régime de retraite. Je pense que cela prend du courage pour le faire. On continue à prouver que ce qu'on a véhiculé, durant la campagne électorale, on est en train de le faire. Si les gens s'attaquent tant aux 6% dans l'Opposition, c'est que cela leur fait mal, au fond, de perdre un régime de retraite aussi chromé, aussi luxueux.

M. le Président, une des choses importantes dans le projet de loi qu'il ne faudrait pas oublier, c'est cela, l'abolition du régime de retraite. C'est fini de voir des anciens députés de 35, 36, 38, 40, 45 et 50 ans partir avec une grosse pension à vie, indexée annuellement, peu importe leur richesse, peu importent leurs revenus, peu importe leur profession, peu importent leurs revenus venant de toutes sources. C'est à 60 ans pour nous, les élus de 1981 et les futurs députés. Donc, on ne viendra plus maintenant ici pour se chercher des grosses pensions, se faire élire pour ensuite partir en disant: Je profite des deniers de l'État avec l'aide sociale de luxe. Non, c'est fini. Maintenant, on va venir parce qu'on a envie de faire quelque chose pour les Québécois et les Québécoises. C'est un des points majeurs qui apparaît dans le projet de loi no 90. Comme je vous le disais tantôt, j'en suis très fier, parce que c'est une chose que j'avais hâte qu'on ait le courage de faire.

Une autre chose qui apparaît là-dedans, qui touche les 6% et qu'il ne faudrait pas oublier, c'est ceci. Je ne sais pas si cela a été suffisamment dit, mais je le répète, ce sera juste un peu plus clair. Si on n'adoptait pas le projet de loi no 90, il ne faudrait pas oublier que la fameuse indexation de 6%, cette augmentation de nos salaires, ce n'est pas le 1er avril 1983 qu'on l'aurait, mais le 1er janvier. Selon la loi qui existe présentement, selon ce qui a déjà été adopté, une augmentation est prévue au 1er janvier qui vient dans quelques semaines. C'est cela, la réalité. Il ne faudrait pas se la cacher et il ne faudrait pas non plus la cacher à la population. On a une augmentation qui, dans la loi actuelle, en fait, légalement, nous est due dans quelques semaines, le 1er janvier. Avec le projet de loi no 90, on impose le gel au 1er janvier et on reporte l'augmentation au 1er avril prochain. On la reporte en avril, en même temps que les employés du secteur public vont aussi aller chercher une certaine récupération. C'est en même temps.

On s'accroche aussi au secteur public en disant que, étant donné qu'en janvier tout le monde est gelé ou coupé, nous aussi, sauf que nous on n'a pas eu d'indexation au cours de l'année 1982, il ne faut pas l'oublier. On gèle nos salaires au 1er janvier 1983 pour aller chercher une indexation au 1er avril 1983, en même temps que le secteur public. Comme l'indexation de 6% s'échelonnera sur une période de neuf mois seulement, ça veut dire une augmentation réelle de 4, 8% pour l'année, ce qui, en réalité, équivaut à une augmentation moins élevée que celle accordée au secteur public.

Donc, je ne pense pas qu'on exagère. Je ne reviendrai pas sur l'ouvrage du député comme tel à savoir si c'est mérité ou pas. Finalement, on a décidé qu'on gelait nos salaires le 1er janvier, qu'on s'accrochait au 1er avril, comme tout le secteur, avec une indexation qui, sur une période de neuf mois, répartie sur l'ensemble de l'année, équivaut à une indexation moindre que celle accordée au secteur public.

Il ne faudrait pas oublier aussi que peu importe ce qui a été dit sur notre horaire, l'ouvrage qu'on a à faire, les déplacements qu'on a à effectuer, ne nous empêchent pas d'être moins payés au kilométrage que nos employés. Cela n'empêche pas aussi qu'à l'intérieur même du secteur public québécois, plus de 50 000 fonctionnaires ont un salaire plus élevé que celui des députés. C'est avec beaucoup moins de sécurité et d'avantages pour nous.

Donc, je ne pense pas que ce soit une honte de venir reporter notre augmentation de 6% en même temps qu'on décide enfin de mettre la hache dans ce fameux régime de retraite chromé qui fait certainement mal aux gens d'en face. Jamais cela ne s'est fait, ils ne l'ont jamais demandé non plus, sauf que nous on l'avait promis et on le réalise même si ça nous touche tous de ce côté-ci.

J'aimerais maintenant rappeler rapidement pour les contribuables ce que ça veut dire le fait qu'on se vote 6% au 1er avril, mais qu'en même temps on mette la hache - je pense que c'est une expression acceptable dans le cas présent - dans nos régimes de retraite. Cela veut dire que notre indexation, globalement, pour l'ensemble de la députation des deux côtés de la Chambre, coûtera aux contribuables pour l'année 1983, 200 000 $. Par contre, pour l'année 1983 seulement, la réduction des coûts par les coupures qu'on effectue dans notre régime de retraite est de 3 000 000 $ qu'on récupérera. C'est 3 000 000 $ de moins que coûteront les 122 députés. Donc, si on prend l'économie de 3 000 000 $ moins la charge de 200 000 $ pour notre indexation, ça veut dire que pour les contribuables québécois, finalement, c'est une diminution des coûts de leurs députés de 2 800 000 $.

Cela veut dire que ça nous donne 2 800 000 $ de plus à injecter dans l'économie, à utiliser à autre chose.

Quand, de l'autre côté, on nous accuse de toujours gaspiller, qu'on nous apporte des exemples de 10 000 $, de 20 000 $, de 40 000 $ et de 50 000 $ ici et là dans le décor, il serait temps, pour une fois, plutôt que de nous accuser et d'essayer de nous salir et de trouver toutes sortes d'arguments négatifs, de nous féliciter d'avoir eu le courage de couper et de faire une économie de 2 800 000 $ qu'on pourra utiliser effectivement pour créer des emplois. On l'a prouvé parce qu'à chaque semaine on annonce des programmes de création d'emplois un peu partout dans chaque secteur, dans chaque ministère pour essayer d'aider ceux qui sont les plus mal pris.

Présentement, c'est sur nos salaires, sur nos régimes de retraite, qu'on va chercher, par le projet de loi no 90, 2 800 000 $. Donc, je pense qu'on n'a pas à avoir honte. On n'a pas à avoir honte surtout si on fait des comparaisons. Pour ma part, je n'ai absolument pas de honte à me comparer à quelqu'un qui est très près de moi, qui est mon député fédérai, dans mon comté. Je pense qu'on a le droit de le faire parce qu'on a un emploi pas mal identique. On est tous les deux des Québécois, tous les deux élus par des électeurs d'une circonscription électorale du même nom, qui devraient normalement travailler dans l'intérêt des gens qui nous ont élus. C'est bien sûr que je ne peux pas prendre le train gratuitement. De toute façon, quand même je voudrais prendre le train, dans ma région, on a enlevé toutes les lignes qui existaient. Il n'y a plus de train. On les voit à la télévision seulement.

On ne peut pas non plus prendre l'avion gratuitement, comme ils le font, pour voyager, ce qui est payé par nos taxes et nos impôts. Mais cela n'est pas calculé sur leurs salaires. En tout cas, on n'en voit pas l'enveloppe globale. On n'a pas de montant équivalent, sauf qu'ils l'ont. Nous, on est obligés de payer les timbres, pas eux. Ce sont des montants très importants. Ce sont des avantages qu'ils ont. Mais je ne reviendrai pas là-dessus, ce sont des avantages que nous n'avons pas. (22 h 50)

C'est quoi la différence, au niveau salarial, entre mon député fédéral, dans mon comté, et moi? On est en train de parler de salaire. C'est plus de 400 $ par semaine. Vous avez bien compris. Le député fédéral, dans mon comté, a un salaire de 400 $ par semaine de plus que le mien. Je pense que je n'ai pas à avoir honte de voter pour un projet de loi qui va faire en sorte qu'on va s'accrocher au 1er avril, comme le secteur public québécois, pour aller chercher 4, 8% d'augmentation pour l'année qui vient, alors que nous, nous sommes limités à une moyenne d'environ 4, 8% depuis 1976. Je pense que c'est tout à fait logique. On n'a pas à avoir honte. C'est la raison pour laquelle non seulement je vous dis que je vais effectivement voter pour le projet de loi no 90, mais je n'ai pas du tout honte de le défendre ici et d'expliquer mon geste.

Pour toutes ces raisons, c'est évident que je vais voter pour le projet de loi no 90, premièrement, parce que cela nous met sur un pied d'égalité avec le secteur public, quant aux dates d'augmentation et parce que cela nous prive également d'une augmentation le 1er janvier 1983. Si on n'adoptait pas le projet de loi no 90, ce serait, à mon avis, tout à fait inacceptable. Cela nous permet aussi d'abolir ce fameux régime de retraite ou, du moins, de l'ajuster de façon qu'il soit plus acceptable par les contribuables québécois, particulièrement en période de crise économique. Cela nous permet aussi de faire en sorte que l'Assemblée nationale et toutes ses institutions finissent de nous permettre à travailler mieux pour l'ensemble des Québécois et des Québécoises.

C'est pourquoi, je vais voter pour le projet de loi en toute conscience et, personnellement, j'ai confiance que la population saura apprécier l'économie qui sera ainsi réalisée par ce projet de loi. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Beauce-Sud.

M. Hermann Mathieu

M. Mathieu: Merci, M. le Président. Nous étudions, en deuxième lecture, le projet de loi no 90 intitulé Loi sur l'Assemblée nationale du Québec. Ce projet de loi comporte deux principes très importants et très différents. Le premier concerne l'organisation et le fonctionnement du pouvoir législatif. Le second concerne l'indemnité des députés et le régime de retraite.

M. le Président, il s'agit là de principes tellement différents que je suis d'avis que le gouvernement devrait scinder en deux ce projet de loi afin de permettre le respect de la liberté de chaque parlementaire qui veut voter pour le principe de la réforme parlementaire et contre le principe de la hausse de salaire des députés.

Concernant le principe de la réforme parlementaire, je crois qu'il est tout à fait souhaitable et normal de mettre à jour le fonctionnement de l'Assemblée nationale. Des sous-commissions de l'Assemblée nationale ont étudié depuis plusieurs années cette réforme qui s'impose et je pense bien qu'outre certains points de discussion, certaines réserves il n'y a pas de

parlementaires qui peuvent s'opposer aL principe de cette réforme.

M. le Président, vous me permettrez de mentionner un article qui, je crois, rendra de grands services à l'avenir et évitera beaucoup d'injustices, l'article où l'on parle de nommer un jurisconsulte qui pourra donner des avis aux membres de l'Assemblée nationale. Ceci permettra d'éviter certains conflits d'intérêts appréhendés ou autres choses. Je crois que c'est souhaitable et que ce sera bénéfique pour les membres de cette Assemblée comme pour la population.

Vous me permettrez cependant d'exprimer certaines réserves au principe de la réforme parlementaire, surtout lorsqu'on parle de la possibilité d'augmenter le nombre d'adjoints parlementaires pour en arriver au nombre actuel des ministres. Tout à l'heure, on disait: Même si le gouvernement le peut, cela ne veut pas dire qu'il va le faire. Le législateur, normalement, ne parle pas pour rien. Lorsque le gouvernement prévoit cette possibilité d'augmenter le nombre d'adjoints parlementaires, je crois que c'est tout à fait discutable et je ne suis pas d'accord avec cet article, avec cette possibilité de réforme qu'on nous présente.

Concernant les adjoints parlementaires, ces personnes qui semblent graviter plus étroitement près d'un ministre, quel est leur rôle ou leur fonction, plus exactement? Je vais rappeler à plusieurs ce que disait en cette Chambre le député de Sauvé et actuel vice-premier ministre en 1974, lors de l'étude du projet de loi no 87. Voici ce que disait le vice-premier ministre: Au sujet des adjoints parlementaires, ils étaient des coupeurs de rubans, ils coupaient les rubans que le ministre ne daignait pas aller couper parce que ce n'était pas rentable électoralement. Il continuait: C'était un prix de consolation pour les députés qui ne sont pas nommés ministres. Plus loin: Les adjoints parlementaires sont des ouvreurs de portes, des porteurs de valises. L'indemnité additionnelle accordée aux adjoints était "un prix coco".

Si c'était cela en 1974, je n'ai pas constaté que leur rôle ait tellement évolué au cours des dernières années. J'aimerais que le vice-premier ministre nous donne son avis aujourd'hui sur ce qu'il disait alors pour savoir s'il parlait à travers son chapeau, d'une façon démagogique, ou s'il était mal renseigné.

Concernant le second principe de ce projet de loi, l'augmentation du salaire des députés, je regrette que ce débat se fasse dans un climat tout à fait peu propice à un véritable débat de fond. On devrait traiter de ce problème au grand jour, prendre le temps nécessaire pour faire un débat public, alors qu'on ne fait ici, la nuit, qu'effleurer le problème. Vous me permettrez de dire que je regrette cette mention au projet de loi.

Je trouve que l'augmentation des salaires de 6% le 1er avril 1983 est une chose tout à fait inopportune surtout après l'adoption de la loi matraque, de la loi 105 la semaine dernière qui, elle, venait, on le sait, imposer environ 109 décrets - on dit de 35 000 à 90 000 pages - et qui venaient récupérer, qui venaient couper les salaires des fonctionnaires de 20% le 1er janvier. Je trouve qu'il s'agit là d'une provocation tout à fait inutile en temps de crise. Nous, de l'Assemblée nationale, nous devrions adopter le même régime que l'on impose aux autres pour ne pas avoir deux poids, deux mesures.

Je mentionnerai que je suis d'accord avec le fait que les députés sont sous-payés et que cela empêche des gens de grande valeur, et parfois de condition modeste, de se présenter pour être députés à l'Assemblée nationale, mais je crois que le temps est mal choisi de parler de cela. Je me demande comment le leader du gouvernement a pu déposer le projet de loi 105, qui venait baisser de 20% le salaire des employés de la fonction publique et parapublique le 1er janvier, et le même jour, le même matin déposer le projet de loi 90 qui vient entre autres augmenter le 1er avril le salaire des députés. M. le Président, je trouve que c'est un paradoxe qui nous est fait par un gouvernement social-démocrate ayant un préjugé soi-disant favorable aux travailleurs.

M. le Président, relativement aux augmentations de salaires, vous savez que ce que l'on dit, ce que l'on écrit reste, et que cela peut incommoder à l'occasion de se le faire rappeler. La semaine dernière, quand nous étudiions le projet de loi 105, les députés du Parti québécois disaient: Cela nous fait mal au coeur. Ce n'est pas drôle d'être obligés de faire ce qu'on fait là avec nos copains, les syndicalistes, les gens qui nous ont élus. Je me demande comment il se fait qu'on puisse changer de mentalité en l'espace de deux ou trois jours. Voyant leur maladie, leur mal de coeur, le leader du gouvernement a-t-il décidé de les guérir avec le projet de loi no 90? (23 heures)

De toute façon, que disaient les députés du Parti québécois en 1974? Je vous mentionne que nous n'étions pas en temps de crise, qu'il n'y avait pas à peu près 500 000 chômeurs et 400 000 assistés sociaux. Nous étions en pleine prospérité économique. Nous verrons ce que disait le suave vice-premier ministre, alors chef de l'Opposition, lors de l'étude du projet de loi no 87. Voici ce qu'il disait: "Nous allons pouvoir identifier les sangsues des fonds publics".

Une voix: Ah!

M. Mathieu: Plus loin: "Nous donnons le mauvais exemple à la population. On viendra ensuite dire aux Québécois: Serrez-vous la

ceinture. " Si c'était de mise en 1974, je crois que c'est beaucoup plus de mise en 1982. Il disait: "Quelle honte de ne pas tenir compte des besoins de nos citoyens et d'être les premiers à nous servir à même les fonds dont nous avons la garde. Si nous étions des fiduciaires dans l'entreprise privée, si nous avions la garde de fonds privés, on nous appellerait des dilapidateurs. Il y a des peines prévues pour cela dans la loi. " Plus loin: "Nous devons exiger de ce gouvernement l'indexation de tous les salaires. " Est-ce cela qu'il a fait la semaine dernière par la loi no 105? Il disait: "Le rôle du député, ce n'est pas de se servir d'abord". Ce sont de belles paroles du temps où il était dans l'Opposition. Il disait: "Peut-il exister un moment plus mal choisi pour procéder à une telle hausse de salaire?" Et je continue: "Au moment où la conjoncture économique se gâte, voulons-nous montrer que nous sommes au service des Québécois, des serviteurs du bien commun ou donner l'impression que nous pensons avant tout à nous-mêmes et passer pour des sangsues collées aux fonds publics?" Ce qui était vrai en 1974 doit être vrai en 1982, alors que le contexte économique s'est considérablement détérioré surtout par les politiques du gouvernement du Parti québécois. Il disait également: "Si nous consentons à nous indexer nous-mêmes, nous devons faire la même démarche pour l'ensemble des citoyens québécois. " Plus loin: "II ne s'agit pas de dire d'abord combien je veux, mais il s'agit de dire est-ce que les autres en ont assez et dans cela est-ce que je peux me servir après avoir servi les autres?" Plus loin: "On verra à ce que les décrets couvrant des conditions salariales d'un grand nombre de Québécois non syndiqués soient rouverts et repensés. "

Je n'ose qualifier ces propos qui étaient tenus alors - je le répète - que la conjoncture économique était tout à fait favorable et beaucoup mieux en point qu'aujourd'hui. Que dire maintenant des augmentations détournées? Tout à l'heure, j'entendais le député de Shefford et, à l'entendre parler, la loi que nous adoptons apporte des économies appréciables. Je conviens que, sur le plan du régime de retraite, il y a une amélioration qui était nécessaire et qui a été demandée par l'ancien président de l'Assemblée nationale, M. Jean-Noël Lavoie, au moment où il occupait votre fauteuil, M. le Président, et également quand il travaillait dans l'Opposition.

Or, ce que je retiens des propos du député de Shefford qui m'a précédé tout à l'heure, c'est que son discours est une parfaite illustration des politiques du gouvernement du Parti québécois. Si on augmente, cela baisse et, si on baisse, cela monte. C'est ce que je retiens de son discours: nos salaires baissent alors qu'ils montent; et les salaires de la fonction publique augmentent alors qu'ils baissent.

Que dire des augmentations détournées? Vous savez qu'il y en a dans le projet de loi no 90. Vous me direz: De quelle manière peut-on détourner des augmentations? C'est bien facile. Tout à l'heure, je vous ai dit que le nombre d'adjoints parlementaires passait de 12 à 27, c'est-à-dire autant d'adjoints qu'il y a de ministres; il y en a 27 présentement. On parle de 7 présidents de commission, d'un président de l'Assemblée nationale, de deux vice-présidents, d'un leader parlementaire adjoint, d'un whip en chef, de deux whips adjoints, pour un total de 68. Cela veut dire que d'une manière ou d'une autre, il y a 68 députés du Parti québécois qui auront des augmentations malgré le projet de loi no 90. Il y en a seulement six qui n'auront pas d'augmentation. M. le Président, je n'oserai pas qualifier cette manière détournée de faire indirectement ce qu'on n'ose pas faire directement.

Je voudrais vous dire quelques mots également du régime de retraite. Je l'ai dit tout à l'heure, le régime de retraite était d'une largesse inacceptable. C'est un régime qui avait été mis à l'essai mais qui méritait depuis longtemps d'être modifié, et nous sommes tous d'accord. On dit qu'il a été mis à l'essai par les libéraux, c'est vrai, mais le gouvernement du Parti québécois a daigné modifier la Loi sur les salaires des députés en 1977. Pourquoi ne pas avoir profité de cette occasion pour modifier également le plantureux régime de retraite qui appartenait aux élus de l'Assemblée nationale?

M. le Président, puisque le temps va me manquer, ce que je retiens de cette modification, qui apporte, semble-t-il, un soulagement considérable à la caisse de l'État, c'est que, malgré la réforme, 45 élus du Parti québécois de 1976 seront admissibles à la pension plantureuse, alors que, si la loi rétroagissait au 13 avril 1981, ils ne le seraient pas. J'aime bien quand on prêche la vertu, mais j'aime quand on la pratique. Je pense que le test d'authenticité n'est pas de prêcher, mais bien de pratiquer la vertu. Pourquoi avoir attendu alors que le Parti québécois a pris le pouvoir en 1976? Il a eu cinq ans jusqu'en 1981 pour modifier ce plantureux fonds de retraite qu'il a dénoncé avec combien de vigueur alors qu'il était dans l'Opposition.

M. le Président, en conclusion, je voudrais mentionner que, sauf les réserves que j'ai exprimées tout à l'heure quant à la possibilité de nommer des adjoints parlementaires à un nombre égal de ministres, je suis d'accord avec le principe de la réforme parlementaire, et je souhaite que ce principe de réforme parlementaire soit accepté à l'unanimité. Les parlementaires ont à vivre dans ce système

et il est bon et nécessaire que tout le monde l'ait accepté. On a plus de chance que le système par la suite soit respecté. Autant je souscris au principe de la réforme parlementaire, autant je ne peux cependant accepter le régime d'augmentation des salaires; régime que je dirais camouflé et hypocrite en ces temps où beaucoup de gens ont de la misère, en ces temps de chômage, en ces temps où le nombre d'assistés sociaux ne cesse de croître.

Alors, je vous dis que, pour moi, ce principe est tout à fait inacceptable. C'est pourquoi je demande et j'espère que le gouvernement acceptera de faire les modifications suivantes, c'est-à-dire, premièrement, de maintenir le nombre d'adjoints parlementaires au nombre actuel, soit douze; deuxièmement, que le gouvernement gèle les salaires, non seulement du 1er janvier 1983 au 1er avril 1983, mais pour toute l'année 1983. Nous pourrons être en mesure à la fin de l'année de réévaluer les conséquences, selon que l'économie permettra ou ne permettra pas un renouvellement ou une indexations. (23 h 10)

Troisièmement, je demande au gouvernement de ne pas indexer le salaire des députés, tel que prévu au projet de loi, le 1er janvier 1984. Comme je l'ai dit tout à l'heure, cette indexation pourra être évaluée en temps et lieu si le contexte économique s'y prête. Donc, je demande au leader du gouvernement de scinder ce projet de loi, d'en faire deux projets de loi. Je trouverais regrettable d'avoir à voter contre le projet de loi sur la réforme parlementaire, mais si les deux principes sont dans la même loi, c'est pour moi un cas de conscience dans le contexte actuel et il me sera impossible d'appuyer ce projet de loi à moins qu'il ne soit scindé.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le ministre des Affaires culturelles, député de Montmorency.

M. Clément Richard

M. Richard: M. le Président, j'avais eu l'occasion, au printemps 1980 - je crois que c'était au mois de juin 1980 - grâce à la collaboration des membres de toutes les formations politiques alors représentées à l'Assemblée nationale, c'est-à-dire la majorité ministérielle actuelle, le Parti libéral et également l'Union Nationale, au moment où j'occupais votre fauteuil, de soumettre à cette Assemblée un avant-projet de loi qui proposait une réforme fondamentale de la Loi sur l'Assemblée nationale. Ce fait a été évoqué par le leader parlementaire du gouvernement et également par le leader parlementaire de l'Opposition et je leur en sait gré.

À la suite du dépôt de cet avant-projet de loi, une sous-commission de l'Assemblée nationale avait été formée, que j'avais l'honneur de présider, pour étudier le projet de réforme qui était proposé. Plusieurs réunions se sont tenues et c'est aujourd'hui qu'est soumise cette réforme extrêmement importante pour le devenir de cette institution fondamentale qu'est le Parlement de Québec. Le Parlement de Québec est la première institution et l'institution indispensable des Québécois et des Québécoises.

Ce que proposait et ce que propose toujours cette réforme, c'est d'abord et avant tout - cela m'apparaît tellement important - de faire en sorte que l'Assemblée nationale ne soit plus administrée en catimini par le président et par trois membres du Conseil des ministres. Quand j'ai occupé votre fauteuil, M. le Président, j'ai eu tôt fait de me rendre compte qu'il y avait là une anomalie inadmissible, puisque le Parlement appartient à tous les Québécois et à toutes les Québécoises. Puisqu'il doit, de toute nécessité, représenter l'ensemble des Québécois et des Québécoises, il n'est pas normal que cette institution soit dirigée exclusivement par des membres émanant de la majorité ministérielle.

Quand le projet de loi no 90 propose la création d'un Bureau de l'Assemblée nationale, il vient corriger cette anomalie et faire en sorte que, désormais, il y ait un véritable exécutif de l'Assemblée nationale et que l'Assemblée soit dirigée en toute transparence, et non plus en catimini, par toutes les formations politiques représentées à l'Assemblée nationale, je sais que la majorité ministérielle, bien sûr, et l'Opposition ont applaudi à cette réforme qui est une entreprise de modernisation qui vient corriger, à mon humble avis, une anomalie qui aurait dû être corrigée depuis longtemps.

Le projet de loi no 90 propose également que les commissions parlementaires soient désormais, et on le verra par les règlements qui forcément devront s'ajouter au projet de loi, plus adaptées aux besoins d'une société moderne, mieux équipées, mieux en mesure de répondre aux besoins de l'ensemble des parlementaires et cela aussi m'apparaît important.

On a évoqué, des deux côtés de la Chambre, la création du poste de jurisconsulte et je me félicite de la création de ce poste, qui m'est apparu, durant les quatre années où j'ai occupé votre fonction, une nécessité. J'ai envie de vous raconter un petit fait pour vous montrer comment ce jurisconsulte qui sera appelé à régler les problèmes de conflit d'intérêts qui peuvent se soulever occasionnellement et même assez souvent parfois pour les membres de

l'Assemblée nationale. J'ai envie de vous raconter une anecdote. Un membre de l'Assemblée nationale bien connu était terrorisé à l'idée de pouvoir être déqualifié comme député, donc de ne plus avoir le droit de siéger en cette Chambre pour l'unique raison qu'il était propriétaire d'une station-service. Et il craignait qu'un jour, ou un soir, ou une nuit, à son insu, quelqu'un, un officier de la Sûreté du Québec s'arrête à sa station-service pour faire le plein d'essence et au regard de la loi que nous sommes appelés à modifier, cela constituait une dérogation qui rendait le député inhabile à siéger en cette Chambre. Voilà pourquoi il était devenu important d'apporter des modifications et pour calmer en quelque sorte, si je peux m'exprimer ainsi, les angoisses de certains membres de l'Assemblée nationale devant les possibilités de conflit d'intérêts. Il devenait donc important de créer ce poste de jurisconsulte. Je voudrais, dans les quelques minutes qui me restent, surtout engager en quelque sorte le dialogue avec Mme la députée de L'Acadie qui a, à mon humble avis, soulevé des questions d'un grand intérêt avec une sobriété qui l'honore, et je voudrais si possible tenter d'apporter quelques réponses aux questions intéressantes qu'elle a soulevées en faisant état de la même sobriété. Mme la députée de L'Acadie est tout à fait d'accord avec la création d'un Bureau de l'Assemblée nationale et elle constate comme tous les membres de l'Assemblée nationale que cela va devenir une institution importante au coeur même de cette autre institution qu'est l'Assemblée nationale elle-même. Sauf qu'elle se pose des questions à savoir si on ne devrait pas plutôt permettre que, parce que là, ce sont les formations politiques qui vont être appelées, représentées au sein de l'Assemblée nationale qui vont être appelées à désigner les membres qui vont siéger au sein de cet exécutif de l'Assemblée nationale, Mme la députée de L'Acadie se pose la question à savoir si ces membres du bureau ne devraient pas être élus par l'ensemble de l'Assemblée nationale. La question est intéressante mais dans l'état actuel de notre parlementarisme, je ne suggérerais pas cette formule parce que ce serait extrêmement périlleux, extrêmement dangereux. On risquerait ainsi - je pense que Mme la députée de L'Acadie va le reconnaître -d'imposer en quelque sorte la tyrannie de la majorité. On ne peut pas permettre que ce soit la majorité ministérielle qui désigne en quelque sorte les membres de l'Opposition, ou d'un tiers parti, au sein du bureau, c'est-à-dire de l'exécutif de l'Assemblée nationale. (23 h 20)

Dans ces conditions, il m'apparaît que le projet de loi no 90 propose la seule solution qui soit réaliste dans l'état actuel de notre parlementarisme. À l'origine du Parlement, je pense que cela eut été possible puisqu'à l'origine du parlementarisme britannique - et vous le savez mieux que quiconque - il n'y avait pas de formation politique, c'est après la naissance même du Parlement que sont nées les formations politiques, que se sont regroupés des hommes et des femmes - je n'oserais pas dire des femmes parce que Mme la députée de L'Acadie me corrigera pour dire qu'à l'époque, il n'y en avait pas - par intérêt, par affinité, pour constituer des formations politiques. Donc, aujourd'hui, nous sommes en présence d'un état de fait, il y a des formations politiques qui, qu'on le veuille ou non, sont en quelque sorte, condamnées à s'affronter et dans de pareilles conditions, laisser à la majorité ministérielle le soin de désigner les membres de l'Opposition au sein du bureau, cela m'apparaîtrait une entreprise périlleuse. J'ai la conviction que Mme la députée de L'Acadie n'aurait pas beaucoup de difficulté à se faire élire par l'actuelle majorité ministérielle, mais je ne pourrais pas en dire autant de bien d'autres membres de l'Opposition.

Et, Mme la députée de L'Acadie, avec raison encore une fois, je crois, pose la question en ce qui a trait au siège de l'Assemblée nationale. Elle a peut-être raison d'être inquiète parce que, pour la première fois, il est dit dans un projet de loi sur l'Assemblée nationale qu'elle pourra siéger ailleurs qu'à Québec. À ma connaissance, il est vrai que c'est aussi la première fois que cela apparaît dans un texte de loi sur l'Assemblée nationale. Je dois vous rappeler que cette question avait été évoquée au cours des discussions que nous avions eues en préparation du projet de loi, en 1980. Si cela apparaît dans le projet de loi, c'est uniquement pour prévoir les cas de force majeure. La Loi sur l'exécutif, si je ne m'abuse, prévoit que l'Exécutif peut, en cas de force majeure, comme un incendie, comme une guerre, par exemple, aller siéger ailleurs qu'à son siège social.

Malheureusement, jusqu'à maintenant, enfin, heureusement, il n'y a pas eu de cataclysmes, il n'y a pas eu de ces cas de force majeure quoique je voudrais rappeler à Mme la députée de L'Acadie que le parlement de Québec a déjà été incendié. Alors c'est uniquement pour prévoir le cas de force majeure, c'est-à-dire un cas d'incendie, de guerre, qui permettrait au président de l'Assemblée nationale de convoquer l'Assemblée nationale ailleurs qu'à son siège social habituel. Autrement, il y aurait risque que la convocation ne soit pas légale et donc, tout ce qui serait adopté par cette Assemblée, illégalement convoquée, pourrait être entaché de nullité.

Mme la députée de L'Acadie regrette

aussi que le projet de loi ne propose pas un terme fixe aux législatures. En d'autres termes, ce que Mme la députée de L'Acadie suggère, c'est que la loi prévoie des élections à dates fixes. Là aussi, il y a une difficulté, et de taille, parce qu'en régime parlementaire britannique, on ne peut pas, à cause du principe même de la responsabilité ministérielle, fixer la date des élections. Tout ce qu'on peut faire, et c'est précisément ce que la loi propose, c'est de fixer l'échéance maximale. Une Législature -la loi le dit clairement - ne peut pas durer plus de cinq ans. Et c'est comme cela dans tous les Parlements de type britannique. Autrement, c'est le principe même de la responsabilité ministérielle qu'on remet en cause.

Qu'on se souvienne qu'en 1973, le premier ministre d'alors, M. Robert Bourassa, avait déclenché des élections seulement trois ans après son élection; la même chose en 1976. C'est une prérogative du premier ministre dans le régime parlementaire britannique, autrement, on tombe dans le régime présidentiel de type américain. Alors là, c'est une remise en cause assez fondamentale. Je suis disposé à discuter des mérites du régime présidentiel américain qui, je pense, est un régime qui n'est pas sans mérite. Mais, tant et aussi longtemps qu'on choisira, et on n'a pas trop le choix, la constitution canadienne étant ce qu'elle est, mais tant qu'on est condamné à vivre, moi, je suis de ceux qui aiment bien le régime parlementaire britannique, tant qu'on doit vivre dans le régime parlementaire britannique, on doit accepter cette prérogative du premier ministre. Alors, modifier la loi en conséquence, ce serait modifier notre régime fondamentalement et je pense que cela n'est pas ce dont il s'agit.

Mme la députée de L'Acadie, et là je suis tenté de lui donner raison toutefois, s'inquiète du fait que les commissions parlementaires pourront désormais siéger en dehors de Québec. Là, je pense que Mme la députée de L'Acadie a parfaitement raison de s'inquiéter de ce fait et de cette disposition dans le projet de loi no 90, à moins que cette disposition ne soit suivie d'une disposition dans le règlement de l'Assemblée nationale qui prévoirait une mécanique pour choisir là où les commissions sont susceptibles de siéger en dehors de Québec. Je pense que, là-dessus, Mme la députée de L'Acadie a parfaitement raison, sauf qu'on imagine mal que la mécanique soit prévue dans le projet de loi no 90 lui-même. Je pense que cette mécanique, normalement, devrait être prévue dans le règlement de l'Assemblée nationale. À cet égard, je pense qu'elle avait raison de s'inquiéter. En somme, c'est une réforme attendue depuis longtemps, une entreprise de modernisation encore sans doute perfectible, mais qui, je pense, apportera des changements intéressants au fonctionnement de l'Assemblée nationale.

M. le Président, toujours en réponse à Mme la députée de L'Acadie, qui a évoqué la question des salaires, je voudrais seulement lui rappeler qu'elle a omis de signaler un fait d'importance. Elle nous dit qu'on aurait dû faire comme nous avons fait pour les autres - ce discours a été repris d'ailleurs par le député de Beauce-Sud - et geler les salaires de l'ensemble des membres de l'Assemblée nationale. Ce qu'on a omis de dire, c'est que ces salaires ont été gelés à partir de 1978.

Une voix: Ah!

M. Richard: En 1978, c'était une modification à une mesure libérale, une mesure trop libérale, qui a été apportée et, en 1978, c'est le gel complet. En 1979, 6%; en 1980, 6%; en 1981, 6%; en 1982, 6% et, pour les trois premiers mois de 1983, 0%.

Une voix: Oh!

(23 h 30)

M. Richard: M. le Président, je vois que le député de Brome-Missisquoi fait encore une fois des pitreries. Je ne l'ai pas interrompu et Dieu que c'était tentant! Alors qu'il me laisse donc finir mon intervention.

M. le Président, c'est une perte du pouvoir d'achat, pour l'ensemble des membres de l'Assemblée nationale, d'au-delà de 25% depuis 1978. Cela doit être dit et je suis en désaccord avec ceux qui souhaiteraient qu'on impose ce même régime aux autres, parce qu'il est impensable pour d'autres. Il pénaliserait beaucoup trop la fonction publique et en cela, je ne suis ni le député de Beauce-Sud, ni Mme la députée de L'Acadie, parce que cela serait inacceptable de faire perdre, durant six ans, 25% à 26% du pouvoir d'achat des employés de la fonction publique. C'est cela que M. le député de Beauce-Sud aurait dû dire.

En ce qui a trait aux pensions - pour terminer, M. le Président - encore une fois, c'est une mesure libérale que nous avons été amenés à corriger; une mesure trop libérale adoptée par l'Opposition, conservée par l'Opposition, entérinée par l'Opposition et dont elle a largement profité. C'est cette mesure que nous venons corriger, parce qu'elle avait engendré trop d'abus. Quand on ne veut pas se livrer à un exercice de démagogie pour camoufler un excellent projet de loi, voilà ce qu'on dit, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Brome-Missisquoi.

M. Pierre-J. Paradis

M. Paradis: M. le Président, j'interviens en deuxième lecture sur le projet de loi no 90, Loi sur l'Assemblée nationale du Québec. Ce projet de loi a, à sa base, deux principes fondamentaux et complètement distincts. Le premier principe se retrouve au premier paragraphe des notes explicatives, premier paragraphe qui se lit comme suit: "Ce projet de loi a pour objet d'ordonner, de préciser et de mettre à jour les dispositions ayant trait à l'organisation et au fonctionnement du pouvoir législatif - donc, de l'Assemblée nationale. Il consacre la suprématie du Parlement du Québec, constitué de l'Assemblée nationale et du lieutenant-gouverneur, et affirme solennellement le caractère particulier et les prérogatives de l'Assemblée nationale. "

Le Parti libéral du Québec en est, M. le Président, et vous assure, au niveau de ce premier principe, toute sa collaboration, toute sa collaboration pour que le rôle du député dans cette institution parlementaire soit mis en valeur davantage. Au lieu d'être de simples étampes approuvant des budgets ou critiquant des budgets, au lieu d'être de simples étampes approuvant des mesures législatives souvent rédigées par des administrateurs de la fonction publique, les membres de l'Assemblée nationale deviennent de véritables législateurs, deviennent, enfin, de véritables administrateurs.

Le deuxième principe se retrouve à la deuxième page des notes explicatives et se lit comme suit: "Le chapitre V du projet édicte certaines conditions de travail des députés, notamment l'indemnité annuelle qui leur est accordée, les indemnités additionnelles conférées à certains titulaires de fonctions parlementaires et l'allocation pour des dépenses encourues dans l'exercice de leurs fonctions. "Le chapitre VI du projet établit un nouveau régime de pension pour les députés qui entreront en fonction... - écoutez bien la date, M. le Président, cela va vous intéresser après le 1er janvier 1983, sans bénéficier d'une pension à cette date, et pour ceux qui opteront d'y être assujettis. "

M. le Président, vous comprendrez aisément que le leader de l'Opposition, député de Marguerite-Bourgeoys, ait insisté, que chacun des députés libéraux qui ont pris la parole dans ce débat ait insisté auprès du gouvernement, plus spécifiquement auprès du leader du gouvernement, député de Vanier, pour que l'on scinde ce projet de loi de façon à permettre aux députés de voter unanimement, si on peut arriver à des ententes, sur la suprématie de l'Assemblée nationale, sur le travail du député. Une telle loi ne peut être adoptée sans l'accord unanime des parlementaires en cette Chambre ou du moins sans l'accord unanime des partis qui y sont représentés.

La deuxième partie du projet de loi, et c'est peut-être la plus délicate, traite de la rémunération des députés en deux phases: la première, le salaire que l'on reçoit comme député; la deuxième, la pension que l'on recevra lorsqu'on aura quitté la vie politique. Derrière la rémunération des députés, se cachent beaucoup de choses et c'est peut-être pour cacher beaucoup de choses que le gouvernement nous les a présentées à l'intérieur de la Loi sur l'Assemblée nationale. C'est peut-être pour se masquer davantage, c'est peut-être pour que cela ne transperce pas. C'est peut-être pour que les gens qui nous écoutent ne comprennent pas la position de ceux qui s'opposent à ce moment, à peine quelques jours après l'adoption de la loi 105, la loi décrétant les conditions de travail des employés de la fonction publique, décrétant ces conditions de travail à la baisse. C'est peut-être pour qu'on ne comprenne pas cela que le gouvernement nous l'a camouflé dans le projet de loi no 90. La semaine passée, ici, on a vécu ce qu'il est permis d'appeler - je pense que d'un côté comme de l'autre de la Chambre on en conviendra - un drame social, un revirement, un aboutissement des politiques "économiques" du Parti québécois; politiques économiques qui ont forcé les membres du gouvernement à décréter à la baisse les conditions de travail de leurs employés. À peine 24 heures après, qu'est-ce que ce gouvernement péquiste fait? Il nous amène un projet de loi dans le but d'augmenter le salaire des députés dans cette Chambre.

M. le Président, on est employeur et on diminue ses employés de 20%, on sait qu'on a une énorme part de responsabilités face aux 25% de la population qui vivent directement des secours de l'État 1 500 000 Québécois dépendent de l'assurance-chômage et de l'aide sociale pour survivre au Québec - on impose des taxes spéciales; je vais en rappeler strictement une qui a touché tous les citoyens, soit par le mode de transport qu'ils utilisent, soit par les biens et services dont ils ont besoin, la taxe sur l'essence augmentée de 100% l'an passé.

On est rendu à couper des services dans les hôpitaux, on est rendu à couper des services dans le domaine de l'éducation, on est rendu à demander à toute la population du Québec de se serrer la ceinture et on a le front de déposer un tel projet de loi à l'Assemblée nationale du Québec. En même temps qu'on prononce ce discours de serrage, qu'on impose ces coupures et qu'on diminue la paie des employés, en même temps, on se dit: Nous autres, comme employeurs, comme responsables, on va augmenter nos salaires.

C'est beau de les entendre pleurer. Ils nous disent: Un député, cela fait à peine

35 096 $ par année. Et là je ne parle pas de l'allocation non imposable de 7500 $ qui s'y ajoute; 35 096 $ par année. Les députés, cela travaille fort, cela fait beaucoup d'heures à l'Assemblée nationale, en commission parlementaire, dans le comté. Pour la majorité, les députés travaillent sept jours par semaine. Ils travaillent en moyenne quatorze heures par jour et, si tu es député rural, c'est parfois pire. Et on essaie de nous faire brailler en disant: 35 000 $, ce n'est pas suffisant. (23 h 40)

Je vais vous surprendre, je vais vous dire que, pour ceux qui font ce travail d'une façon consciencieuse, qui s'imposent des sacrifices au niveau de leur vie personnelle, vous avez probablement raison dans un contexte économique de croissance, dans un contexte économique où on crée de l'emploi, dans un contexte économique où on offre aux plus défavorisés de la société ce dont ils ont besoin, dans un contexte économique où on offre les meilleurs services d'éducation et les meilleurs services sociaux, dans un contexte économique où cela progresse, dans un contexte économique où il y a un autre gouvernement que le vôtre au pouvoir.

Savez-vous ce qui se cache derrière cette petite augmentation de 6%, alors qu'on diminue les employés de 20%? Il se cache autre chose. Il se cache des députés péquistes d'avant-ban et d'arrière-ban qui ne sont pas à 35 096 $ par année, plus indemnité. Il se cache un Parti québécois qui, dans sa quasi-totalité, reçoit des rémunérations qui sont de beaucoup supérieures à ce que je vous dis. Cela est vrai pour la quasi-totalité des députés de l'Opposition qu'ils gagnent 35 000 $. Ce sera vrai, si ce projet de loi est adopté, pour une petite minorité de députés péquistes. On regardera combien gagnent les gens de l'autre côté. Le premier ministre - et, dans chacun des postes, il faut ajouter, l'indemnité additionnelle de 7500 $ non imposable - gagne 80 720 $, les 26 autres ministres qui forment le Conseil des ministres gagnent chacun, sans compter l'indemnité additionnelle, 66 682 $; les 27 adjoints parlementaires que permettra de nommer le projet de loi qu'on nous demande d'adopter gagneront chacun 42 096 $, plus l'indemnité de 7500 $. Les sept présidents de commission parlementaire qu'il y a de l'autre côté gagneront 38 605 $. Le président de l'Assemblée nationale, dont vous occupez le siège présentement sans en retirer tous les avantages, gagne 66 682 $, plus l'indemnité additionnelle de 7500 $. Les deux vice-présidents - je n'ai pas besoin de vous le dire, vous le savez, M. le Vice-Président -gagnent 49 096 $ par année. Un leader parlementaire adjoint gagne 42 096 $, plus l'indemnité additionnelle de 7500 $. Un whip en chef gagne 47 372 $, plus l'indemnité additionnelle de 7500 $. Les trois whip adjoints gagnent 40 361 $, plus l'indemnité additionnelle de 7500 $. Sur les 75 députés péquistes de l'autre côté, en fin de compte, quand on aura fini de donner de petites "jobs" à tous les petits "chums", il en restera cinq ou six. Qui seront ces cinq ou six "tatas"?

Une voix: "Totos".

M. Paradis: M. le Président, il ne pourront pas vivre longtemps dans ce régime. Les cinq ou six qui auront été punis, cela se saura dans leur comté. On sera obligé de les excuser, on sera obligé de leur donner un nanan additionnel, une petite commission spéciale sur la réforme de la jeunesse ou n'importe quoi, mais on leur donnera un petit "candy" et il n'en restera pas un seul. C'est cela qui se cache en arrière de ce projet de loi.

L'Opposition dit: Gelez cela pour un an. Ne donnez pas l'augmentation de 6%; on se reverra l'automne prochain et on regardera quelle sorte de job économique vous avez faite, les gars d'en face. On verra si vous en méritez des augmentations et, si vous en méritez, le Parti libéral ne s'entêtera pas à vous dire non. L'effort, les sacrifices qu'un parlementaire s'impose lui valent une rémunération additionnelle. Mais il y a une condition que vous n'avez pas remplie et que je pense que vous ne pouvez pas remplir, c'est d'être de bons gestionnaires, c'est de relancer l'économie au Québec. Tant que vous ne le ferez pas, vous ne méritez pas d'augmentation. Mais vous vous en foutez éperdument parce que, même si vous accédez à la demande de l'Opposition de geler les 6% pour un an, la liste des chiffres que j'ai cités demeure vraie, sans l'augmentation des 6%. Les plus démunis et les plus pauvres d'entre vous de l'autre côté, quand ce sera fini, cette petite comédie et ce petit scénario, ce seront les sept présidents de commission qui gagneront 38 605 $ par année, plus une indemnité de 7500 $; ce seront les pires d'entre vous. Ce qui restera vrai de ce côté pour la quasi-totalité des députés de l'Opposition, c'est 35 096 $. On vous demande de nous laisser là parce que ce serait indécent, sur le plan social de poser ce geste à ce moment-ci.

Voilà sur les augmentations de salaires. Mais ils ne sont pas plus transparents, et j'oserais quasiment dire et cela me gêne de le dire, vous savez, ils ne sont pas moins hypocrites lorsqu'ils parlent de pension. Qu'ont-ils fait quand ils parlent de pension? Qu'ont-ils fait, quand ils ont repris le pouvoir au lendemain des élections? Le bureau du premier ministre, dans le but de rester fort sur les pensions, s'est fait commander une petite liste de ses députés-ministres auxquels il manquait quelques mois

pour être des pensionnés de l'État à vie. Parce que, pour être un pensionné de l'État à vie, quand tu es député, il y a deux conditions à remplir; il faut que tu aies fait deux élections et il faut que tu aies siégé 60 mois. Mais, cela ne faisait pas 60 mois pour la grande majorité de la "gang" péquiste d'en face. Le 25 mai 1981, notre premier ministre Lévesque a reçu le résultat de son étude et 11 s'est dit: On n'est pas pour amener cela tout de suite; on va attendre à l'automne; on va attendre après le 15 novembre; cela va faire 60 mois pour ma "gang".

M. le Président, aujourd'hui on nous présente un projet de loi et vous savez, dans sa "gang", combien de ministres auxquels il manquait quelques mois pour avoir leurs 60 mois. Je vais vous les nommer ces ministres, les ministres qui ont été les premiers à piloter des projets de loi pour baisser les salaires des employés. Il y a le député de Vanier, le leader du gouvernement, qui, s'il s'en allait demain matin, aurait 12 477, 18 $ par année le reste de sa vie.

Une voix: Indexé.

M. Paradis: Indexé? Non, non, c'est ce qu'il a. Le député de Mantane, cela ne fait pas longtemps qu'il est ministre; il a essayé longtemps, mais cela a pris du temps, le président du Conseil du trésor, aurait 21 572 $...

Une voix: II ne vaut pas cela.

M. Paradis:... par année et indexé. Le député de Lotbinière, ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme, aurait 16 079 $. Je ne parlerai... Oui, je vais en parler. Le député de Joliette, ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, aurait 14 809 $; le député de Drummond, ministre des Transports, aurait 17 357 $; le député de Saint-Maurice, ministre de l'Énergie et des Ressources, aurait 21 572 $; le député de Sherbrooke, ministre du Revenu, aurait 7800 $; le député de Lévis, ministre de l'Agriculture, aurait 21 572 $; le député de Mercier, ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration, aurait 12 260 $; le ministre d'État délégué à l'Aménagement, aurait 17 719 $; le ministre des Affaires sociales, M. le Président, 20 513 $; le ministre au Commerce extérieur, en charge du marasme économique, 21 563 $, pour la "job" qu'il a faite, indexé à vie, M. le Président; le ministre délégué aux Relations avec les citoyens, 21 572 $; la ministre de la Fonction publique, qui a coupé les employés, 15 124 $ pour ne pas travailler le reste de ses jours, garanti à vie; le ministre des Affaires municipales, 21 563 $... Je n'ai pas fini, M. le Président, j'ai commencé à 23 h 32. Le ministre du Revenu, 15 190 $; le ministre de la Sécurité du revenu a la plus belle, 21 534 $, lui en a une sécurité du revenu.

M. le Président, c'est dans ce contexte qu'on nous présente des augmentations de salaire et qu'on nous fait accroire qu'on gèle les pensions. Du côté du PQ, on gèle les pensions des autres; c'est ce qu'on fait. On ne gèle pas les pensions des ministres; on ne gèle pas les pensions des députés d'arrière-ban, parce qu'ils vont tous avoir des jobs additionnels qui vont leur permettre d'avoir des revenus additionnels pour ajouter à leur pension additionnelle. Il n'y a pas tellement longtemps en cette Chambre, lorsque le Parti libéral, en pleine période de croissance économique, avait voulu augmenter le salaire des députés pour compenser pour les sacrifices qu'ils font pour siéger en cette Chambre, le vice-premier ministre déclarait ce qui suit: "Nous allons pouvoir identifier les sangsues des fonds publics". Eh bien, les sangsues des fonds publics sont toutes de l'autre côté, ce soir. Les sangsues des fonds publics ont coupé les employés de l'État la semaine passée et, aujourd'hui, ils ont les mains dans le "cash", parce qu'ils savent ce qui va leur arriver aux prochaines élections. (23 h 50)

C'est ce qu'on vous dit, en tant que députés libéraux, ce que la population de l'ensemble du Québec vous dit, MM. les ministres et MM. les adjoints parlementaires, tout le monde de l'autre côté. Imaginez-vous la situation suivante: Un employé dans une compagnie qui a manqué de coeur à l'ouvrage, qui a manqué d'imagination, qui a tenté de saboter l'industrie se présente devant son "boss" et lui dit: "Boss", augmente-moi. C'est ce que vous faites ce soir, c'est ce que vous faites par le biais du projet de loi no 90. Si vous en voulez des augmentations de salaires, si les parlementaires de cette Chambre en veulent des augmentations de salaire, ils vont être obligés de démontrer à la population qu'ils sont capables de bien gérer les fonds publics du Québec. Ils vont être obligés de démontrer à la population qu'ils sont capables d'assurer la croissance économique. Ils vont être obligés de démontrer à la population qu'ils ne créeront pas des pertes d'emplois, mais qu'ils font de la véritable création d'emplois pour l'ensemble des travailleurs du Québec. Quand les parlementaires de cette Chambre se retrouveront dans une période comme celle-là - je termine là-dessus, M. le Président -dans une période de croissance économique, ils viendront ici en toute dignité, avec tout le mérite qui leur sera reconnu, se voter une augmentation de salaire et, à ce moment-là, cela ne sera pas un Parti québécois qui sera au pouvoir, cela sera un Parti libéral.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Papineau.

M. Mark Assad

M. Assad: M. le Président, la semaine passée, le gouvernement est arrivé avec un projet de loi, le projet de loi no 105. Cela a été très frustrant de voir que ce gouvernement en est arrivé au point que, littéralement, il a fallu qu'il aille reprendre ce qu'il avait donné et que les autres avaient négocié de bonne foi. Ce soir, nous avons devant nous dans cette Chambre le projet de loi no 90, projet de loi qui devrait être scindé en deux pour une très simple raison: parce qu'il traite de trois sujets distincts. La question des salaires des députés et la question des pensions... Logiquement, cela serait plus simple de diviser le projet de loi en deux, de faire deux projets de loi dont on pourrait contribuer à corriger les lacunes. Mais non, c'est compliqué, tellement compliqué que, par bout, dans ce projet de loi no 90, c'est discriminatoire. C'est plutôt un projet de loi piégé, parce que le parti ministériel sait très bien qu'une augmentation de salaire, surtout après avoir coupé les salaires des secteurs public et parapublic, est très impopulaire. Je dirai plutôt que c'est un non-sens dans le contexte actuel. Mais le parti ministériel voudrait qu'on soit complice de cette affaire: en incorporant la question des pensions, on accepte les changements et, par conséquent, l'augmentation des salaires. C'est injuste, c'est malhonnête et c'est hypocrite.

Vous avez démontré encore une fois votre inconscience envers la population en arrivant avec un projet de loi proposant une hausse de salaire quand vous savez que la quasi-totalité de notre population fait des sacrifices et qu'il y en a d'autres qui vivent de chômage quotidiennement. Au lieu d'être le véritable leader de notre société, de donner l'exemple, de démontrer que vous êtes conscients de la situation, qu'au moins vous sympathisez avec les gens qui ont des difficultés, c'est le contraire. Vous êtes complètement aveuglés.

Je voudrais donc que vous puissiez vous voir vraiment comment vous êtes, que vous enleviez ce masque que vous avez, que vous mettiez l'image de côté pour un instant! Demandez-vous si c'est acceptable, si c'est normal par les temps qui courent d'arriver avec un projet de loi qui comporte une augmentation.

Le leader du gouvernement a dit lui-même que la loi actuelle sur la Législature date de 115 ans. Ne pourriez-vous pas attendre un peu plus? Après 115 ans, vous pourriez attendre encore. Est-ce que cela presse autant? Économiquement, c'est très difficile. C'est quasiment aussi difficile que les années trente, même pire pour beaucoup de gens.

En 1974, le Parti québécois parlait d'un régime, du régime de retraite des députés.

En 1974, je me le rappelle très bien, j'étais en cette Chambre. Et, en 1976, le Parti québécois forme le gouvernement. Est-ce que vous allez me faire croire que cela a pris six ans pour changer le régime de retraite? Dès la première session de 1977, vous auriez pu le changer très facilement, ce régime que vous avez dénoncé en 1974. Vous l'avez dénoncé en 1975, en 1976; vous avez dit que c'était une pension scandaleuse, une honte. Vous avez fait des déclarations enflammées, vous étiez indignés. Mais cela vous a pris six ans avant de faire des changements qui auraient pu être faits en deux mois, en 1977. Est-ce que cela n'est pas hypocrite? Vous allez nous faire croire, après six ans, que vous arrivez avec une découverte qui va épargner de l'argent à l'État? Qu'est-ce que vous avez fait? Rien pendant six ans. Ou, plutôt, vous avez pris avantage de ce régime de retraite vous-mêmes. Vous l'avez exploité complètement.

J'ai la liste de tous les ministres qui ont été élus en 1976. Tous les ministres de 1976 qui sont ici aujourd'hui en cette Chambre y gagnent 20 000 $ et plus. Vous allez me faire croire qu'en 1976 ils n'auraient pas pu faire les changements? Ils ne le voulaient pas. C'est un geste d'hypocrisie. Même en 1981, rien n'a été changé. Imaginez-vous, cela faisait déjà cinq ans. Ceux qui avaient dénoncé cette pension disant qu'elle était épouvantable... Cinq ans, imaginez-vous, absolument rien!

Pourquoi? C'est très simple. Les députés qui ont été élus en 1976, comme le député de Brome-Missisquoi l'a mentionné, il fallait qu'ils attendent d'être élus une deuxième fois. Il fallait qu'ils attendent cinq ans, c'est-à-dire soixante mois, avant d'être admissibles à une pension indexée à vie et ils ont pris leur temps pour être certain d'atteindre leur objectif. Et après, découverte! on va changer ces pensions scandaleuses. Six ans pour faire la lumière. Je me demande quelle sorte de conscience sociale vous avez. Après tout cela, vous jouez les purs, les parangons de la vertu et de la transparence. Transparents, oui, parce qu'on voit à travers votre jeu. C'est très évident, votre jeu indigne. Et vous voulez notre complicité dans cette affaire, dans ce projet de loi qui est piégé. C'est typique de votre style de parler des deux côtés de votre bouche. (minuit)

Vous projetez une image, mais les faits en sont loin. Vous avez bien protégé vos intérêts. Si vous aviez pu faire la même chose pour tous les Québécois, au lieu de nous léguer une crise non seulement économique, mais maintenant sociale! Vous êtes tellement cyniques; vous savez très bien que les gens qui sont de bonne foi, par nature, oublient. Vous allez provoquer une autre crise, ici, au Québec. Mais peu à peu,

les gens voient votre vrai visage et non l'image du Parti québécois. Comme l'ancien président des États-Unis, M. Abraham Lincoln, le disait: Vous pouvez tromper une partie de la population tout le temps, mais vous ne pouvez tromper tout le monde tout le temps. Vos jours sont comptés et le plus triste, c'est que vous êtes devenus victimes de votre propre image. Votre image ne correspond pas à la réalité et, d'une certaine façon, c'est votre punition et ce sera la déchéance de votre parti.

M. le Président, ce projet de loi arrive avec des changements qui sont nécessaires, on est d'accord sur cela, mais que dans ce même projet de loi on essaie de faire adopter l'augmentation des salaires des députés, c'est du camouflage. Pourquoi? C'est très simple. Dans la situation économique actuelle, comme le député de Brome-Missisquoi l'a dit, c'est indécent. On ne peut pas se permettre de donner une cenne de plus dans les circonstances. On vient de couper des salaires, on a été chercher de l'argent dans les poches des employés. Comment pourrons-nous aujourd'hui, par un projet de loi, nous donner une augmentation? La situation économique est tellement difficile! Comment pensez-vous que la population puisse accepter cela, quand c'est nous qui devrions donner l'exemple dans cette société? Est-ce qu'on donne l'exemple? Est-ce que vous avez donné l'exemple depuis les quelques dernières années? Vous ne l'avez pas donné. Ne nous demandez pas de ce côté d'être complices de votre jeu! Du tout!

Vous êtes aveuglés. Regardez-vous donc! Vous ne reflétez plus la réalité des choses au Québec. C'est assez difficile parce qu'on a affaire à des gens qui se croient les seuls à posséder la vérité. Cela devient très frustrant pour nous ici. Mais, comme je l'ai mentionné, vos jours sont comptés. Et la meilleure chose qui puisse arriver à la province de Québec, c'est que vos jours soient très courts et qu'on mette le Québec sur la voie du progrès, qu'on se sorte de toute la misère dans laquelle vous nous avez mis depuis les quelques dernières années. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Châteauguay et adjoint parlementaire au ministre de l'Industrie, du Commerce et du Tourisme.

M. Roland Dussault

M. Dussault: Merci, M. le Président. Je suis heureux d'avoir l'occasion ce soir, à cette heure, d'exprimer mon point de vue sur le projet de loi no 90 en deuxième lecture, projet de loi portant sur la réforme parlementaire et celle de la rémunération des députés, c'est-à-dire leur régime de retraite et leur salaire. Cependant, je trouve dommage que le débat ait lieu sous le signe de la vengeance des gens d'en face. C'est un sujet qui se prête à tellement plus de maturité.

Cette réforme, dont l'étude a commencé hier par le discours très à point du leader du gouvernement, peut être qualifiée de majeure, car elle comporte bon nombre de réalignements, dont certains feront l'objet de mon discours. Il y avait longtemps qu'on parlait d'une réforme qui puisse avoir une portée aussi significative. En fait, depuis 1964, certains gestes des gouvernements ont démontré un tel intérêt. Par exemple, en 1963, le premier ministre Jean Lesage confie à Jean-Charles Bonenfant le soin de rédiger un document sur la réforme parlementaire. Le 9 janvier de cette année, M. Bonenfant remet son document La réforme du travail parlementaire au Québec. Le 7 février, un comité spécial est formé pour étudier l'opportunité d'amender le règlement. En février 1965, la création d'un comité spécial pour étudier l'opportunité d'amender le règlement de l'Assemblée législative. En mars de cette année, le leader du gouvernement annonce qu'une entente a été conclue avec l'Opposition, afin de permettre l'étude des crédits budgétaires de certains ministères par des comités spéciaux. Un premier comité est formé le 16 mars.

En février 1966, des amendements sont apportés au règlement en vue de permettre au comité plénier chargé de l'étude des crédits de confier l'examen d'une partie de ses crédits à un comité. En février 1967, il y a une déclaration ministérielle de la part du premier ministre d'alors, M. Johnson, sur l'urgence d'une refonte des règlements. Le 3 août, à cette fin, il y a formation par l'Assemblée d'un comité préliminaire de sept membres, avec le mandat de préparer les grandes lignes d'un plan de travail devant servir de guide au comité qui sera ultérieurement institué pour étudier les moyens d'améliorer le travail de l'Assemblée législative. Un comité préliminaire recommande la refonte complète des règlements, la permission de s'adjoindre des experts et la permission de siéger même lorsque la Chambre ne siège pas. Cela semble rappeler des souvenirs aux gens qui travaillent pour nous à l'Assemblée nationale.

Le 17 décembre 1968, on crée un comité spécial de l'Assemblée législative du Québec, avec pouvoir d'entendre des témoins pour étudier les moyens d'améliorer le travail de l'Assemblée et préparer un nouveau règlement comportant des transformations substantielles. En février 1969, l'Assemblée abandonne la tradition qui consiste à présenter pour la forme, avant le débat sur le discours inaugural, le bill no 1, sur la prestation des serments d'office. C'est sans doute un restant d'un certain régime.

Mais c'est le lendemain qui est plus important; le 26 février, un premier rapport du comité sur la refonte du règlement est déposé. Ses recommandations visent à limiter de façon fort sensible la durée des périodes de questions et les débats de l'Assemblée nationale, de même qu'à accroître le travail des commissions parlementaires et à former la commission de l'Assemblée nationale. Un deuxième rapport est déposé le lendemain, d'ailleurs, et même un troisième au mois de mars, mais qui amende le premier rapport.

Cette refonte donne lieu à quelques petits changements au règlement et à la création en mai de la commission des engagements financiers. En 1970, sous la présidence de M. Fréchette, qui est maintenant un député du Parti québécois, des amendements sessionnels qui avaient été adoptés en mars 1969 sont reconduits pour la session qui commence; donc, on avait expérimenté des règlements. En septembre 1970, un comité ad hoc de la commission permanente de l'Assemblée nationale est constitué en vue de la refonte des règlements. Cela se passait sous la présidence de M. Lavoie.

En 1971, on assiste à un début d'amélioration des services aux députés de même qu'à leurs conditions de travail et de rémunération. Le 27 mars 1972, l'Assemblée adopte unanimement un nouveau règlement de l'Assemblée nationale, à titre de règlement sessionnel. Le 13 mars 1973, il y a adoption d'un nouveau règlement de l'Assemblée, à titre de règlement permanent; ce nouveau règlement contient 169 articles tandis que l'ancien en comptait 812. Cela a dû être tout un soulagement pour tous les membres de l'Assemblée nationale, à ce moment-là.

En 1973, on assiste à des améliorations sur le plan de la rémunération des députés ayant des fonctions additionnelles. Je voudrais ajouter à ceci que plusieurs articles de la Loi sur la Législature sont modifiés afin de tenir compte, pour fins de pension, du fait qu'un député peut être du sexe féminin. C'était un début de compréhension de la condition féminine.

En juillet 1974, la commission de régie interne de l'Assemblée nationale a constitué un comité extra-parlementaire et je cite les mots du mandat d'alors: "Dans le but de faire une évaluation des montants, ainsi que de la nature des indemnités et allocations attribuées aux membres de l'Assemblée nationale et aux titulaires de certaines fonctions reconnues par la loi de la Législature". Alors, ce comité était présidé par Me Jean-Charles Bonenfant. (0 h 10)

En 1975, en janvier précisément, l'indemnité des députés est indexée annuellement. En février de cette année, sous le président Lavoie, un comité de travail est formé avec mandat de faire un relevé de l'état des services de l'Assemblée et proposer un nouveau plan établi selon les principes modernes d'organisation et tenant compte de l'autonomie de l'Assemblée, dont le plan définitif commencera à s'appliquer en décembre 1978, c'est-à-dire plus de deux ans après. En novembre 1976, M. Robert Burns devient ministre d'État à la Réforme électorale et parlementaire. Je pense que c'était la première fois qu'on donnait un rôle très spécifique à un ministre pour assurer une réforme autant sur le plan électoral que sur le plan parlementaire. En 1977, en novembre, l'Assemblée nationale met à l'essai un règlement sessionnel qui comprend l'abolition de la séance du vendredi, une question avec débat, un changement de la procédure des votes, une procédure expéditive pour les projets de loi non contestés et une nouvelle procédure pour les affaires courantes.

En 1978, le 22 février, le règlement sessionnel de 1977 est reconduit, auquel on ajoute la diminution de la durée du débat sur le discours inaugural et sur le discours sur le budget, l'établissement d'un calendrier parlementaire avec ajournement à date fixe et l'entrée en vigueur automatique des règles en fin de session. Ce qui nous permet d'épargner beaucoup de temps et de finir à une date raisonnable.

D'ailleurs le 3 octobre 1978, on a assisté au début de la télédiffusion des débats à l'Assemblée nationale, ce qui nous permet maintenant d'être entendus par nos électeurs. Le 22 décembre de cette année, l'Assemblée nationale limite à 6% l'augmentation annuelle du salaire des députés. L'année suivante, en avril, le ministre d'État à la Réforme électorale et parlementaire confie à un comité la refonte de la Loi sur la Législature. Ce comité était composé de députés ministériels, donc du côté du Parti québécois, MM. Gendron, Guay, Ouellette et Michaud, qui ont été présidents, ainsi que moi-même. Nous nous sommes réunis à huit reprises et nous avons remis notre rapport le 20 juin de la même année.

Ce rapport abordait les sujets suivants: la régie interne, les commissions parlementaires, certaines règles de fonctionnement de l'Assemblée - par exemple l'inscription des intervenants au débat - le quorum, le dépôt de documents d'orientation politique. Cela comprenait aussi les fonctions parlementaires relativement aux adjoints parlementaires, aux présidents et aux vice-présidents, de même que des avis sur les indemnités, les pensions et, enfin, les conflits d'intérêts. Ce rapport a constitué le début d'orientation d'une réforme qui s'est articulée autour d'une réflexion du député de Trois-Rivières nommé, le 1er mai 1981, adjoint parlementaire au ministre délégué aux Affaires parlementaires, après qu'en juin

1980, le président de l'Assemblée nationale du temps ait déposé un avant-projet de loi sur l'Assemblée nationale, avant-projet qui aurait pris plusieurs des recommandations du comité Michaud.

M. le Président, la réforme était attendue si on se fie à tout ce qui s'est passé depuis 1964. Bien que l'essence de la présente réforme parlementaire découle des initiatives les plus récentes de l'actuel gouvernement du Québec et de son équipe ministérielle au sens large, force est d'admettre qu'elle découle, comme je l'ai démontré, d'un élan historique dont chacun des soubresauts doit être apprécié à son mérite. Cependant, force est d'admettre aussi que c'est une tendance récente, très récente même, que les parlementaires cherchent des moyens leur permettant de se distancier du pouvoir exécutif. Ce qui va plus loin que la simple recherche d'un remaniement de règlements.

Dans l'ensemble, cette réforme parlementaire répondra à des besoins plusieurs fois identifiés par de nombreux parlementaires. En satisfaisant ces besoins, cette réforme va changer substantiellement la relation entre le pouvoir législatif, c'est-à-dire celui de l'Assemblée nationale, et les pouvoirs de l'exécutif et de l'administration publique, c'est-à-dire ceux du gouvernement. Cette réforme, en rendant ainsi l'Assemblée nationale plus indépendante du pouvoir exécutif, ce qui est un objectif très important de la réforme, va exiger de tous les parlementaires des adaptations sur le plan des comportements et des attitudes. Ce qui sera un défi qui est dans la nature même des hommes et femmes politiques de vouloir relever. Certains objets d'étude, comme certains de leurs instruments de travail -c'est le cas des commissions parlementaires -sont appelés à évoluer dans le sens d'une revalorisation du processus législatif et d'un meilleur contrôle des finances et des dépenses publiques. De même, cette réforme élargira le champ de surveillance, par l'Assemblée nationale, des actes de l'exécutif et organismes autonomes. M. le Président, grâce à la possibilité qu'offre la réforme de recevoir certains organismes publics dans le cadre d'un nouveau type de commission parlementaire, les parlementaires se verront faciliter l'analyse et la compréhension de l'administration et du fonctionnement de ces organismes. La loi 90 faisant disparaître l'exclusivité des commissions dites permanentes, il restera à faire reconnaître les modalités d'application de ces principes dans le règlement de l'Assemblée nationale.

Je voudrais maintenant aborder un élément qui me tient à coeur, c'est-à-dire le Bureau de l'Assemblée nationale. Il s'agit d'une modification majeure au fonctionnement de l'Assemblée nationale parce qu'elle change profondément les rôles.

Ce bureau, composé du président et des députés de l'Assemblée nationale, exercera des fonctions de contrôle, de réglementation et de gestion, particulièrement à l'égard des allocations versées aux députés et relativement à l'organisation administrative de l'Assemblée nationale.

À ma connaissance, cette nouveauté est apparue pour la première fois comme préoccupation des députés lors des travaux du comité Michaud, créé en avril 1979. Je me rappelle avoir fait, lors des travaux de ce comité, la suggestion d'implanter un tel bureau, après avoir constaté, lors d'une mission d'étude en France auprès du Conseil de l'Europe à Strasbourg précisément, en janvier ou février 1979, l'existence d'un tel bureau à l'Assemblée nationale française. On me corrigera si je me trompe, mais je pense que c'est aussi lors des travaux de ce comité Michaud qu'est apparue, pour la première fois, l'idée d'une indemnité de départ que la présente loi 90 a retenue sous l'appellation d'allocation de transition.

L'idée était de Gilles Michaud, le président. Il ne se doutait pas, à ce moment, à quel point elle lui aurait été utile, cette allocation de transition, si elle avait été en vigueur à la dernière élection. Vous savez le sort qui a été réservé à notre collègue Michaud, de Laprairie. Permettez-moi, M. le Président, de rendre hommage à ce travailleur acharné et à ce député consciencieux qu'a été Gilles Michaud, l'ex-député de Laprairie.

Pour revenir au Bureau de l'Assemblée nationale tel que préconisé par la loi 90, il est intéressant de remarquer que l'Opposition aura sa place au sein de ce bureau. Le temps était venu de remplacer l'actuel Comité de régie interne de l'Assemblée nationale, contrôlé par le gouvernement, puisque trois ministres y siègent, donc coloré politiquement, par un bureau fondamentalement représentatif de tous les membres de l'Assemblée nationale et de leur appartenance politique.

Un autre aspect intéressant à faire ressortir, c'est le pouvoir que la loi accorde au bureau de déroger à l'application de toute loi ou règlement de nature administrative, si l'utilisation de règles particulières permet d'atteindre plus efficacement les objectifs et l'exercice des pouvoirs de l'Assemblée nationale. Cette ouverture de la loi a l'immense avantage de permettre au bureau d'utiliser des approches nouvelles, une possibilité qui s'accommode bien avec des objectifs d'évolution du fonctionnement de l'Assemblée nationale.

Autre aspect non négligeable, c'est la possibilité qu'aura maintenant l'Assemblée nationale, par le biais du Bureau de l'Assemblée, d'être consultée dans la préparation des prévisions budgétaires de l'Assemblée, ce qui m'apparaît aller de soi

dans l'esprit que, dorénavant, cette Assemblée sera complètement maîtresse des dépenses qui la concernent intimement, c'est-à-dire celles qui concernent les services professionnels directement reliés aux fonctions et responsabilités des députés.

Un autre élément de la réforme que je voudrais faire ressortir, c'est celui de la création de la fonction de jurisconsulte. Ce sage conseiller, auquel des députés pourront se référer afin de satisfaire aux exigences nouvelles de la Loi sur l'Assemblée nationale, en termes d'éthique, afin d'éviter qu'ils ne se retrouvent en situation de conflit d'intérêts ou d'incompatibilité de fonctions, trouve sa justification dans l'existence de ce pan complet de la loi 90 qui traite des conflits d'intérêts, justifiant à lui seul une loi d'amendement à la loi actuelle.

Plusieurs autres aspects de la loi, sur le plan de l'Assemblée nationale et de son fonctionnement, mériteraient qu'on s'y attarde. Je voudrais me garder du temps pour aborder la question de la rémunération que l'Opposition ne manque pas de "confusionner", si on me permet l'expression. Dans son deuxième volet, la réforme contenue dans la loi 90 vise à corriger une situation que tous, ou à peu près, qualifient de scandaleuse. Tout le monde considère, tout compte fait, que le salaire des députés, ajouté au coût du régime de retraite et aux autres coûts de fonctionnement répondant aux besoins de la fonction de député, ce qu'on appelle la rémunération globale, atteint un sommet inacceptable de 66 395 $ par député par année; 66 395 $.

Il est moins connu, cependant, que ce sommet inacceptable, cette rémunération globale de 66 395 $ par député, par année, s'explique par la très large part du coût de la pension que l'État québécois est appelé à fournir. Cet apport gouvernemental représente annuellement 85, 4% de la rémunération de base du député, qui est de 35 096 $ actuellement. De ces 66 395 $ que coûte un député au total, 29 867 $ représente la part imputable au régime de retraite, 29 867 $ sur 66 395 $. (0 h 20)

Dans la réforme de la rémunération, la question de la pension ne peut être isolée de la question du salaire. Celui qui ne regarde pas ou qui se refuse à regarder ce qui advient des deux composantes, salaire et pension, dans la réforme de la rémunération globale ne peut pas en comprendre la vraie portée, car cela ne permet pas de placer dans son vrai contexte la minime augmentation de salaire à laquelle les députés auront droit en avril prochain, après un gel de trois mois analogue à celui des travailleurs des secteurs public et parapublic.

C'est l'approche globale qu'a choisie le gouvernement pour corriger la situation actuelle. C'était, d'ailleurs, la seule qui permettait d'obtenir des résultats équitables. Le gouvernement a voulu corriger la situation actuelle en fixant un niveau raisonnable de salaire en fonction d'une rémunération globale en rendant la pension acceptable aux députés et à la population, ce qui fera épargner aux Québécois, à l'État québécois, des sommes considérables dès l'an prochain. Le salaire des députés avait été fixé à 27 800 $ en 1974, au même niveau qu'un fonctionnaire dit admministrateur classe IV. Une série d'événements a fait que celui du député s'est rendu lentement à 35 000 $ tandis que celui de l'administrateur classe IV s'est rendu à 43 000 $, ce qui fait une différence de 6000 $ en faveur de l'administrateur.

La loi 90, en plaçant le salaire du député dans un contexte global - j'y reviendrai - après un gel de trois mois, fait passer son salaire de 35 000 $ à 37 000 $, c'est-à-dire une augmentation de 4, 8%, alors que le front commun, dans la même période, aura obtenu 5, 8%, c'est-à-dire 1% de plus. La part du gouvernement dans le fonds qui servira à payer la pension des députés ayant diminué considérablement, puisqu'elle passera de 84% maintenant à 31% après l'adoption de la loi 90, c'est entre 19 000 $ et 20 000 $ par député que le gouvernement n'aura plus à payer. Au lieu de 66 395 $ que coûte chaque député, tout compris, c'est 48 400 $ qu'il coûtera chaque année dorénavant, ce qui fera épargner aux Québécois des sommes considérables dès l'an prochain. En effet, si on calcule bien, une épargne de 19 000 $ par député par année, multipliée par 122 députés, cela représente 2 300 000 $ épargnés par l'État québécois, que les contribuables n'auront pas à payer. C'est sans doute une contribution très appréciable à l'effort collectif de trouver des fonds nécessaires pour la création d'emplois.

Une comparaison avec les fédéraux permet de saisir la vraie portée de l'économie. Entre janvier 1977 et avril 1983, alors que les députés québécois de l'Assemblée nationale auront vu leurs salaires augmenter de 33, 8%, ceux des députés fédéraux auront augmenté de 97, 5%. De 33, 8% à 97, 5%. Quand le salaire du député de l'Assemblée nationale sera passé de 27 800 $ à 37 200 $, celui des députés fédéraux sera passé de 25 000 $ à 50 300 $.

Je voudrais ajouter une petite information au tableau qu'a fait tout à l'heure le député de Brome-Missisquoi quand il a évoqué la pension à laquelle auront droit certains membres du Parti québécois - et je vais terminer là-dessus - s'ils sortent de la vie politique à la fin du présent mandat. Je voudrais dire que le député Assad, qui a parlé avant moi, aurait une pension de 19 936 $. M. Harry Blank aurait une pension de 42 589 $, M. Lucien Caron aurait une

pension de 30 771 $, M. Ciaccia en aurait une de 25 648 $ - plus celle du fédéral, évidemment, ce n'est pas indiqué ici - M. Lalonde, le leader, aurait 32 877 $, Mme Lavoie-Roux aurait 20 066 $, M. Gérard D. Levesque, le chef, aurait 65 831 $ - c'est plus que notre Lévesque à nous - M. Mailloux aurait 43 022 $, M. Pagé aurait 28 293 $ - je ne sais pas s'il le savait - M. Picotte, l'ineffable M. Picotte, aurait 27 844 $.

Ce que je veux dire par là, c'est qu'il fallait tout simplement tenir compte des droits acquis. Je sais très bien que, si nous avions enlevé ces droits acquis, ils auraient été les premiers - je vous le redirai ensuite, M. le député Pagé - à nous tomber dessus et nous auraient fait une guerre épouvantable, et ils auraient eu le droit de le faire, parce qu'un droit sacré doit être respecté. C'est respecté pour nous, comme c'est respecté pour eux.

Donc, globalement, un tel résultat ne devrait faire que des heureux et, pourtant, les amis d'en face ne sont pas contents. Comme d'habitude, ils critiquent et essaient de mêler les gens; ils n'ont pas de solution de rechange, ils n'ont pas de suggestions et ils voteront, sans doute, contre. Je voterai en faveur parce que c'est le simple bon sens et c'est la recherche du meilleur équilibre. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Rancourt): M. le député de Robert Baldwin.

M. John O'Gallagher

M. O'Gallagher: Merci, M. le Président. Je voudrais faire remarquer que celui qui m'a précédé, le député de Châteauguay, est un adjoint parlementaire qui gagne au-delà de 50 000 $ par année. Nous, de l'Opposition, faisons face à un dilemme dans ce projet de loi, comme tout le monde peut s'en apercevoir. Car il y a deux éléments: la réforme de notre institution parlementaire et l'augmentation des salaires des députés. Nous sommes en faveur de la réforme de notre institution parlementaire, car c'est sain et cela suit une évolution normale, comme dans toute société. Nous sommes en faveur du Bureau de l'Assemblée nationale, en faveur de l'exécutif de l'Assemblée nationale et même pour le jurisconsulte qui pourrait régler quelques problèmes qui affectent non seulement les députés, mais peut-être ceux qui ont affaire à nous.

On aurait peut-être même des recommandations à apporter pour améliorer la réforme parlementaire. Je pense que le député de Trois-Rivières a fait mention dans son discours, hier soir, de la réglementation qui est hors de contrôle dans plusieurs lois. On voit cela. Il a mentionné, entre autres, l'Office de la construction où la réglementation a vraiment dépassé les exigences de notre Assemblée. Ce n'est pas cela qu'on voulait faire, mais on voit aujourd'hui, avec cette réglementation, que nous avons une main-d'oeuvre parallèle clandestine. Ces gens sont obligés de travailler d'une manière clandestine pour nourrir leur famille à cause des règlements de l'Office de la construction. Ce n'est pas correct. On devrait peut-être avoir une espèce de Protecteur du citoyen ou un conseil à l'Assemblée nationale qui pourrait jeter un coup d'oeil, examiner ou vérifier ces règlements qui s'ajoutent à toutes ces lois.

J'ai reçu plusieurs plaintes à mon bureau au sujet de l'Office de la construction et pas seulement pour avoir le droit de travailler. Vu que la loi no 101 dit que des personnes morales seront servies seulement en français, les fonctionnaires prennent cela d'une manière extrêmement zélée. Pour eux, une compagnie, c'est une personne morale; une compagnie limitée, c'est quasiment une multi-nationale. Mais on sait que, dans le Québec, la grande majorité des personnes morales, des compagnies sont de petites boutiques familiales. Il y a des gens de mon comté, des anglophones de tout le Québec qui se voient refuser des services par l'Office de la construction pour de l'information, parce qu'ils portent un nom de compagnie. C'est seulement une petite compagnie, une petite boutique familiale. C'est du zèle dans la réglementation. Nous, de l'Assemblée nationale, je pense qu'on devrait aussi, dans notre réforme éventuelle, avoir une occasion d'examiner cette réglementation.

C'est très bien, nous sommes favorables à une réforme normale, à une réforme saine qui suive l'évolution normale. Nous sommes pour. Mais, quand on vient nous parler d'augmentation de salaire - c'est vrai qu'il va y avoir un petit gel de trois mois pour les ministériels - même une augmentation de 6% n'est pas acceptable. D'ailleurs, le député de Châteauguay a fait l'historique de toute cette réforme sur la question des salaires des députés depuis MM. Lesage et Johnson jusqu'à 1974. Le rapport de la commission Bonenfant a été débattu en cette Chambre avec tellement de démagogie par le Parti québécois. À ce moment, en 1974, rappelez-vous que c'était une période de croissance économique et toutes les projections que cette commission pouvait faire disaient que les députés, aujourd'hui, devraient gagner environ 50 000 $. Il y a même des députés en face qui ont dit que c'était très bien. Mais qui, de cette commission, pouvait savoir qu'il y aurait une crise au Québec en 1982, que notre déficit annuel dépasserait 3 000 000 000 $, que notre déficit accumulé dépasserait 18 000 000 000 $? Y a-t-il des gens de cette commission qui auraient su que nos impôts et nos taxes seraient les plus

élevés de tous les citoyens du Canada, de tous les citoyens en Amérique du Nord? L'essence au Québec, l'assurance automobile, les péages sont tous beaucoup plus élevés que n'importe où au Canada. On paie notre essence, comme vous le savez, 0, 56 $ ou 0, 57 $ le litre; en Ontario, on peut l'avoir pour 0, 37 $. Nous avons le record des faillites dans tout le Canada. On a quasiment 500 000 chômeurs et 500 000 assistés sociaux. On a des fermetures d'usines une par derrière l'autre, des départs de compagnies et on a des coupures imposées par le gouvernement, par le président Conseil du trésor, coupures nécessaires, mais qui touchent les personnes âgées, les malades et les assistés sociaux. C'est une crise et, tout dernièrement, la semaine passée, vous avez voté une coupure de 20% pour les travailleurs de la fonction publique sur une période de trois mois. Cela n'est pas acceptable. Vous voulez vous voter une augmentation de 6%, à partir du 1er avril; cela n'est pas décent.

M. le Président, à l'Assemblée nationale, avec notre salaire de base, nous sommes très bien payés quand on compare cela avec le reste des autres provinces du Canada. Au Québec, on gagne 42 596 $ environ, incluant l'indemnité de 7500 $; en Ontario, le député gagne 40 000 $, un peu plus de 2000 $ de moins; en Colombie britannique, il gagne 36 000 $; au Manitoba, il gagne 27 000 $; en Alberta, il gagne 28 400 $; au Nouveau-Brunswick, il gagne 30 000 $; en Nouvelle-Écosse, il gagne 30 000 $; à Terre-Neuve, il gagne 24 500 $; à l'Île-du-Prince-Édouard, il gagne 19 000 $; en Saskatchewan, il gagne 27 000 $ et, dans les Territoires du Nord-Ouest, il gagne 25 000 $. Alors, nous sommes les plus chèrement payés de tous les députés provinciaux du Canada. C'est vrai que les députés... au niveau fédéral gagnent 50 000 $. Pour les mêmes raisons, ce n'est pas plus décent. Dans une période de crise à travers le pays, ce n'est pas acceptable. Nous, de l'Opposition, on exige qu'il y ait un gel sur les salaires jusqu'à ce que l'économie reprenne. Cela serait normal, c'est à cela que les gens s'attendent. Mais qu'est-ce qu'on trouve aujourd'hui avec votre projet de loi no 90? On trouve qu'une fois que ce sera mis en vigueur, à partir de 1984, 91% des députés en face vont gagner quasiment 50 000 $. Il y a seulement six pauvres petits moutons qui vont recevoir le même salaire qu'un député de l'Opposition. On voit, d'après votre loi - il y a 27 ministres - qu'il va y avoir 27 adjoints parlementaires qui vont gagner 20% de plus qu'un député normal; ils vont augmenter leur salaire à 50 000 $ par année. On va augmenter le nombre d'adjoints de 12 à 27. Il y a 7 présidents de commission, un président de l'Assemblée, 2 vice-présidents de l'Assemblée, un leader parlementaire adjoint, un whip en chef et 2 whips adjoints, donc 68 députés sur 74 qui reçoivent des primes additionnelles. Il ne reste que 6 pauvres petits moutons qui vont recevoir le même salaire que nous de l'Opposition. Je pense que la population pourrait commencer à prendre des paris pour savoir qui vont être ces 6 pauvres petits moutons. Vous dites que ce n'est pas une augmentation? C'est une farce. Vous êtes des hypocrites pour dire cela. Avec cela, il n'y a pas de création d'emplois, c'est un autre gaspillage d'argent. Il y a seulement la création d'une prime pour les députés du gouvernement. Ce n'est pas décent. Vous devriez avoir le courage de geler les salaires au moins pour un an. Au sujet des pensions, c'est aussi... Je cherche un mot parlementaire, M. le Président, pour décrire ma réaction à cette affaire des pensions. On peut tout simplement dire que, semble-t-il, c'est extrêmement drôle que vous adoptiez cette politique de changer les salaires après que la grande majorité des députés, au moins 50, peuvent se qualifier sous l'ancien régime qui était beaucoup plus avantageux. Vous l'avez fait après le 15 novembre dernier, tout simplement. Vous avez attendu quelques semaines pour imposer ce changement. Cela non plus, ce n'est pas acceptable. La population va vous juger.

En terminant, je voudrais simplement citer votre vice-premier ministre, le député de Sauvé: Nous avons en tant que parlementaires, en tant qu'élus de la population, pas seulement des avantages à recueillir, nous avons aussi un exemple à donner. Je pense que cette occasion qui nous est fournie par ce projet de loi est une occasion que ne devraient pas rater les membres de l'Assemblée nationale. Les membres de l'Assemblée nationale ne devraient pas mettre de côté la possibilité de remettre à plus tard cette augmentation de salaire. C'est le vice-premier ministre de la province de Québec qui disait cela, M. Jacques-Yvan Morin. J'appuie cette proposition du député de Sauvé. Merci.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Jeanne-Mance.

M. Michel Bissonnet

M. Bissonnet: M. le Président, je serai le dernier intervenant pour la formation politique que je représente à l'Assemblée nationale. (0 h 40)

Permettez-moi, tout d'abord, de vous dire que, lorsque nous avons reçu le projet de loi no 90, j'ai trouvé que ce projet de loi était "heavy". C'est l'expression que nous avons dans le comté de Jeanne-Mance. Lorsque j'ai reçu, en même temps, le projet de loi no 105, j'ai trouvé que c'était un

projet de loi "heavy", compte tenu de la présentation du projet de loi no 90.

Le leader parlementaire de notre formation politique, dès le départ de cette deuxième lecture du projet de loi 90, a fait des revendications auprès du gouvernement dans le but de scinder ce projet de loi en deux: un projet de loi qui toucherait le salaire des députés et qui traiterait également du régime de retraite et un autre projet de loi distinct qui toucherait la réforme parlementaire. Je demande à ce gouvernement s'il est possible d'amender ce projet de loi pour présenter deux projets de loi distincts. Je pense que cela nous aiderait, nous les parlementaires, à étudier ce projet de loi qui contient des dimensions très distinctes. Évidemment, à la suite...

M. Bertrand: Question de privilège, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Question de privilège de la part du leader.

M. Bertrand: Je voudrais dire au député de Jeanne-Mance qu'il peut arriver que la nuit porte conseil.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le député de Jeanne-Mance.

M. Bissonnet: C'est un voeu que je fais au nom de tous mes collègues qui sont intervenus dans ce dossier et au nom de la formation politique que je représente. Je pense qu'il serait utile pour le débat que nous puissions étudier et adopter ce projet de loi en le divisant en deux.

Lorsque j'ai reçu ce projet de loi no 90, évidemment, j'ai été très surpris, à la suite du dépôt du projet de loi no 105, qu'on présente à ce Parlement un projet de loi pour donner une augmentation de 6% aux parlementaires de cette Assemblée nationale, compte tenu qu'on diminuait le salaire des employés. Évidemment, on ne touchait pas aux cadres de la fonction publique, mais on touchait aux salariés, qu'on diminuait jusqu'à 20%. Donc, j'ai trouvé, au point de vue stratégique, que ce projet de loi n'était pas bienvenu, compte tenu de la situation économique que nous vivons.

Je pense qu'il est important, lorsqu'on parle à l'intérieur de ce projet de loi d'augmenter les salaires des députés de 6% à compter du 1er avril et qu'on parle également d'une indexation des salaires des députés au 1er janvier 1984 de situer la position de notre parti relativement à cela. Nous demandons au gouvernement de geler les salaires des députés et de reconsidérer le tout l'automne prochain, compte tenu de la performance que ce gouvernement péquiste nous apportera dans les dix prochains mois, pour voir si les députés méritent une augmentation de salaire.

Quant au régime de retraite, je me rappelle très bien que - je vais citer cela à titre d'exemple pour les concitoyens qui nous écoutent - qu'un député qui a été élu durant deux mandats et qui a comptabilisé au moins cinq années de service est admissible à une pension qui est indexée au coût de la vie chaque année. Je voudrais vous rappeler que, lorsque nous avons étudié l'offre du gouvernement fédéral, au mois de novembre 1981, vers le 5 ou le 6 novembre, sur la question de la constitution et des négociations qui ont suivi, l'ex-ministre des Affaires intergouvernementales a annoncé son intention de démissionner du gouvernement du Québec vers le 6 novembre, si ma mémoire est fidèle. Il n'a, cependant, transmis sa démission comme membre de cette Assemblée qu'après le 15 novembre, soit vers le 15 décembre et, évidemment, en donnant sa démission le 15 décembre, sa pension a été indexée au coût de la vie le 1er janvier 1982. Donc, l'ex-ministre des Affaires intergouvernementales n'a démissionné que le 15 décembre 1981, malgré le fait qu'il avait indiqué à la presse son intention de démissionner. C'était après ses cinq ans.

La position de notre parti relativement à ce projet de loi, en ce qui a trait au régime de retraite - le député de Brome-Missisquoi nous a présenté une brochette de tous les ministres et députés du Parti québécois et de certains députés du Parti libéral qui sont admissibles à ce régime de retraite depuis le 15 novembre 1981 puisque cela fait plus de cinq ans qu'ils sont députés, parce que cela fait plus de deux mandats -il est bien évident que pour l'Opposition il y a eu un retard indu à agir parce que ce gouvernement avait annoncé bien avant qu'on était pour changer le mécanisme de ce régime de retraite.

Actuellement, les députés sont en très grande majorité des députés du Parti québécois. Pour apporter les réformes qu'on voulait apporter, on a attendu que tous ces députés puissent être admissibles à ce régime de retraite. On a durant le cours de ce débat rappelé l'attitude du Parti québécois, notamment celle du député de Sauvé, l'ex-ministre de l'Éducation - je me permets de le nommer en cette Chambre - M. Jacques-Yvan Morin, qui en 1974 avait dirigé l'Opposition du Parti québécois. On avait parlé amplement du travail des adjoints parlementaires, qui étaient à ce moment-là des libéraux. Je cite M. Morin. On va écouter ce qu'il disait des adjoints parlementaires. Selon lui, ils servaient à couper des rubans, c'était un prix de consolation pour les députés qui n'étaient pas nommés ministres. Pour M. le ministre des Affaires intergouvernementales, ami du ministre du Commerce extérieur, les adjoints

parlementaires étaient des ouvreurs de portes et des porteurs de valises. Pour lui l'indemnité additionnelle qu'on donne à un adjoint parlementaire était un "prix coco". Voilà. Quand je parle de "prix coco", je trouve cela "heavy".

Lorsqu'on regarde ce projet de loi... On a au Parti québécois 74 députés. On a le premier ministre... Je me permets de rappeler en terminant à titre de conclusion ce que disait le député de Brome-Missisquoi: II y a un premier ministre et il y a 26 autres ministres. Actuellement, il y a douze adjoints parlementaires et un adjoint parlementaire, pour ceux qui nous écoutent, c'est un député qui est censé travailler activement à l'intérieur d'un ministère pour aider le ministre. Le fait qu'on nomme un député adjoint parlementaire lui permet d'avoir un "prix coco" - tel que le faisait valoir devant cette Chambre le ministre des Affaires intergouvernementales, l'ex-ministre de l'Éducation - un supplément de salaire de l'ordre de 7000 $.

À ces 27 ministres on ajoute 27 adjoints parlementaires - au lieu de 12 - on ajoute également 7 présidents de commission, un président de l'Assemblée, 2 vice-présidents de l'Assemblée, un leader parlementaire adjoint, un whip en chef et 2 whips adjoints. Ce qui fait 68 députés sur 74. Tous les députés de cette Chambre ont actuellement une indemnité de l'ordre de 35 000 $, plus les frais d'indemnité non imposables de 7500 $. À l'intérieur de cette Chambre, dans le Parti québécois, à la suite de ce nouveau projet de réforme, il y aura 6 députés qui auront un salaire de 35 000 $ sans autre indemnité. (0 h 50)

Évidemment, dans l'Opposition, nous avons le chef, le leader parlementaire et le leader adjoint, et deux whips. Ce qui veut dire qu'il y a quelque 30 députés de ce côté de la Chambre qui ont une indemnité de base de 35 000 $ et cela s'arrête là. Ce n'est pas qu'on soit jaloux, mais nous sommes convaincus... En tout cas, quand je me suis présenté comme député, mon premier objectif était d'aider mes concitoyens, de les représenter à cette Assemblée et de travailler pour eux de façon entière. C'est ce que j'ai fait quand j'étais maire de la ville de Saint-Léonard et c'est ce que je fais actuellement. Les conditions salariales, quant à moi, ne sont pas la priorité. La priorité, c'est d'aider véritablement mes concitoyens, c'est de faire le travail pour lequel on a été mandaté.

Si nous constatons qu'à l'intérieur de ce projet de loi, on accorde une frime, un boni à tous les députés du Parti québécois, sauf à six, comme le disait tantôt le député de Brome-Missisquoi, j'ai l'impression que ces six députés qui n'auront pas de boni, que ce soit comme président de commission ou adjoint parlementaire, ces six députés, comment seront-ils vus par leurs concitoyens dans leurs comtés respectifs? Je pense...

Le Vice-Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le député de Jeanne-Mance, il y a une question de règlement de la part du whip de l'Opposition.

M. Pagé: Je m'excuse auprès de mon collègue. Je comprends que son intervention est très intéressante, mais notre règlement stipule qu'à ce moment nous devons avoir 30 députés en Chambre; on n'a pas quorum.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Effectivement. Qu'on appelle les députés.

À l'ordre, s'il vous plaît! Reprenez vos places, il reste sept minutes au député de Jeanne-Mance. M. le député de Jeanne-Mance.

M. Bissonnet: Si mon collègue le député de Portneuf a demandé l'appel du quorum, c'est parce que, avant de terminer ce débat en deuxième lecture, nous voulons que tous les membres de cette Assemblée connaissent très bien la position du Parti libéral dans ce dossier. Nous avons demandé que ce projet de loi soit scindé en deux projets de loi, un projet de loi qui traitera des salaires et des pensions et un projet de loi qui traitera de la réforme parlementaire à l'intérieur de ce Parlement. Donc, je continue et je voudrais faire un parallèle avec ce que l'ex-ministre de l'Éducation et maintenant ministre des Affaires intergouvernementales, disait en 1974 - ceci a rapport évidemment à l'indexation qu'on veut apporter aux salaires des députés à la fin de l'année 1983 - et je cite donc le député de Sauvé et ministre des Affaires intergouvernementales: "Si nous consentons à nous indexer nous-mêmes, nous devons faire la même démarche à tout le moins pour l'ensemble des citoyens québécois". Ce que je veux vous dire, c'est que, avec mon collègue qui est ici, le député de D'Arcy McGee, que je salue de façon spéciale, qui est un grand juriste au Québec, nous avons fait le débat sur le projet de loi concernant l'aide juridique. Nous avons exposé, lui et moi, notre position parce que, à l'intérieur de ce projet de loi, le gouvernement a décidé de freiner l'indexation à l'aide juridique. Ce qui veut dire que, pour nos citoyens les plus démunis, ceux qui sont célibataires et qui reçoivent 170 $ par semaine et ceux qui sont mariés, qui retirent 185 $ par semaine et ceux qui ont un enfant, qui ont 210 $ par semaine, le gouvernement du Parti québécois, dans ce projet de loi, n'a pas permis qu'une indexation sur les salaires des plus défavorisés soit ajustée pour leur permettre d'être admissibles à l'aide juridique.

Aujourd'hui, M. le Président, on nous

présente un projet de loi à sens inverse où, à l'intérieur d'un projet de loi, on parle d'une augmentation des salaires, par l'indexation au niveau du coût de la vie. Donc, dans ce dossier, le Parti libéral veut que cette réévalution des salaires se fasse à l'automne 1983 parce que, pour nous, pour que ce gouvernement du Parti québécois puisse augmenter les salaires, il faut une crédibilité. Cette crédibilité s'atteint par la performance que vous allez réaliser à l'intérieur de la prochaine administration, car vos performances depuis six ans ne sont pas favorables à une augmentation de vos salaires. (1 heure)

Je n'ai qu'à citer des municipalités du Québec, lorsqu'on parle d'augmentation de salaire. Dans toutes les villes, il y a plus d'un an, pour que les conseillers et les maires de chaque ville puissent augmenter leur salaire, il fallait qu'ils votent un règlement et ce règlement, les citoyens pouvaient s'y opposer. Le gouvernement, compte tenu des difficultés, dans certaines municipalités, d'augmenter les salaires par l'adoption d'un règlement soumis à l'assemblée des électeurs, a changé sa procédure pour permettre au conseil de ville d'adopter des règlements qui ne sont pas soumis à l'approbation des électeurs en ce qui a trait aux augmentations de salaire. Il y a eu deux expériences que je vais vous citer, membres élus du Parti québécois. Nous allons parler de la municipalité de Sherbrooke où, dans un premier pas, les électeurs de la municipalité de Sherbrooke ont demandé, à la suite de l'augmentation du salaire du maire et des conseillers, un référendum.

À l'époque, le règlement devait être approuvé par les électeurs. En fait, 500 électeurs pouvaient s'opposer à l'adoption de ce règlement, ce qui a été fait dans la municipalité de Sherbrooke. Après les changements aux règlements, la municipalité de Sherbrooke a présenté un règlement qui n'était pas soumis à l'adoption des électeurs pour demander un référendum et nous avons évidemment constaté que, à la suite des élections municipales dans la municipalité de Sherbrooke, le maire qui avait parrainé ce projet de règlement avait été défait.

Dans le municipalité de Lachine, le maire Descary, à la suite de l'adoption de cette nouvelle loi a présenté un projet de règlement pour augmenter le salaire du maire et des conseillers. Ce projet de règlement n'était pas soumis aux électeurs de la municipalité de Lachine mais, à l'assemblée subséquente, au moins 300 à 400 personnes se sont présentées pour manifester leur objection à l'adoption dudit règlement qui avait été adopté par le conseil de la ville. La municipalité a jugé opportun de retirer le projet de règlement.

Donc, en terminant, nous avons un projet de loi qui fait mal aux employés des services public et parapublic et, d'autre part, nous avons un projet de loi no 90, dans une situation économique difficile. Je me permets de rappeler les paroles du député de Sauvé qui disait effectivement: "Ce qui est bon pour les députés est certainement bon pour l'ensemble de la population". Nous avons connu un projet de loi matraque qui diminuait les salaires de nos employés. Lorsqu'on fait partie d'un conseil d'administration et que nous n'atteignons pas les performances que nous souhaitons, je pense qu'on ne doit pas pénaliser nos employés. Si on pénalise nos employés, on n'a pas le droit à une récompense. J'espère que ce gouvernement scindera ce projet de loi pour pouvoir l'étudier au niveau du salaire et des pensions et au niveau également de la réforme parlementaire parce que nous avons besoin dans ce gouvernement d'une réforme parlementaire. Nous avons trop de lois, trop de règlements. Comme nul n'est censé ignorer la loi, je pense que nous sommes bien au-delà de constater que tous les citoyens ne peuvent actuellement connaître toutes les lois que nous avons au Québec. Merci.

Le Vice-Président (M. Jolivet): M. le leader du gouvernement, dans votre droit de réplique.

M. Bertrand: M. le Président, je voudrais demander l'ajournement du débat.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adoptée? Adopté.

M. Bertrand: Sur ce, je voudrais faire motion pour que nous ajournions nos travaux; "ajournions" est un mot, à mon avis, probablement inexact dans les circonstances mais que nous reprenions nos travaux aujourd'hui, ce matin à 10 heures.

Le Vice-Président (M. Jolivet): Cette motion est-elle adoptée?

Adopté. Donc, ajournement de nos travaux jusqu'à ce matin 10 heures.

(Fin de la séance à 01 h 05)

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